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La perception graphique - Melissa

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Thibaut de Saint Pol<br />

Olivier Monso<br />

ensae<br />

Troisième année<br />

<strong>La</strong> <strong>perception</strong> <strong>graphique</strong><br />

de l’élaboration à l’interprétation<br />

Mémoire d’analyse exploratoire des données<br />

Cours d’Eugène Horber et Michel Grun-Rehomme<br />

2002-2003


Sommaire<br />

Introduction ................................................................................................................................2<br />

I. <strong>La</strong> construction du <strong>graphique</strong> .............................................................................................3<br />

1.) Objectifs et types de <strong>graphique</strong>s.................................................................................3<br />

2.) Le rôle différencié des images : analyse et communication.......................................4<br />

3.) Les codes <strong>graphique</strong>s élémentaires ............................................................................4<br />

II. <strong>La</strong> représentation mentale...................................................................................................5<br />

1.) Le rôle des lecteurs.....................................................................................................5<br />

2.) Différents processus ...................................................................................................6<br />

3.) L’interaction entre codes <strong>graphique</strong>s et jugement du lecteur : Simkin & Hastie……6<br />

III. <strong>La</strong> représentation <strong>graphique</strong> comme produit du conflit entre divers niveaux de<br />

<strong>perception</strong>...................................................................................................................................8<br />

1.) Eléments sémiotiques et éléments sémantiques.........................................................8<br />

2.) Complémentarité et imbrication des niveaux d’analyse du <strong>graphique</strong>.......................8<br />

3.) Le principe de congruence de Kosslyn.......................................................................9<br />

4.) Spécificités des individus dans le traitement des données sémantiques et<br />

sémiotiques : l’exemple du niveau d’études.........................................................................10<br />

Conclusion : vers une application aux sciences de l’éducation .............................................13<br />

Bibliographie ............................................................................................................................14<br />

1


Introduction<br />

Les <strong>graphique</strong>s sont principalement utilisés pour illustrer les résultats obtenus par des<br />

méthodes statistiques classiques et ainsi transmettre au lecteur une information par une image.<br />

Dans les années soixante-dix, Bertin et sa Sémiologie (1967), Tukey et son Exploratory data<br />

analysis (1977), puis Chambers et son Graphical methods for data analysis (1983), ont ouvert<br />

une autre approche de l'usage du graphisme dans les méthodes de traitement de l'information.<br />

<strong>La</strong> visualisation des données sous forme <strong>graphique</strong> permet d’orienter la réflexion de<br />

l'analyste. L’analyse exploratoire confère en effet une place primordiale au <strong>graphique</strong> dans<br />

l’analyse statistique des données et non plus seulement dans leur présentation.<br />

L’étude de la <strong>perception</strong> <strong>graphique</strong> est donc essentielle pour l’analyse exploratoire des<br />

données. Il s’agit de comprendre comment est décodée l’information contenue dans le<br />

<strong>graphique</strong> pour en améliorer l’utilisation. En appréhendant d’une part comment l’information<br />

provenant d’un <strong>graphique</strong> est représentée mentalement et de l’autre quels processus<br />

interviennent entre la vision et l’établissement d’une représentation mentale, l’analyse<br />

cognitive de la <strong>perception</strong> <strong>graphique</strong> cherche à éclairer la construction et l’utilisation de<br />

<strong>graphique</strong>s. Ce sont justement les deux questions que se posent les travaux de Bertin (1977),<br />

de Cleveland et McGill (1984), Follettie (1986) ou encore Pinker (1981). Il s’agit de<br />

déterminer comment construire le meilleur <strong>graphique</strong> possible.<br />

L’analyse de la <strong>perception</strong> <strong>graphique</strong> peut prendre plusieurs formes. Tout d’abord, cette<br />

étude peut porter sur l’objet <strong>graphique</strong> en lui-même : quels types privilégier Quels codes<br />

choisir pour qu’il soit le plus efficace possible Ensuite, nous prolongerons cette réflexion sur<br />

la construction du <strong>graphique</strong> par l'examen des processus mentaux de décodage de l’image :<br />

quels éléments se combinent dans la <strong>perception</strong> du <strong>graphique</strong> par le lecteur pour permettre à<br />

celui-ci de dégager une information Enfin, nous verrons dans quelle mesure les<br />

caractéristiques individuelles (éducation, culture…) induisent une différenciation dans la<br />

façon de lire un <strong>graphique</strong>.<br />

2


I. <strong>La</strong> construction du <strong>graphique</strong><br />

<strong>La</strong> réflexion sur la <strong>perception</strong> <strong>graphique</strong> porte en premier lieu sur l’objet <strong>graphique</strong> en<br />

lui-même. Il s’agit alors de se pencher sur la construction et l’utilisation des <strong>graphique</strong>s. Cette<br />

perspective technique vise à différencier et à classer les <strong>graphique</strong>s en différents groupes pour<br />

saisir leurs particularités et leurs limites.<br />

1.) Objectifs et types de <strong>graphique</strong>s<br />

Le <strong>graphique</strong> est fortement marqué par ce pourquoi il est construit. Selon ce qu’il vise<br />

à transmettre, la <strong>perception</strong> qu’on en a change. Etudier la <strong>perception</strong> <strong>graphique</strong>, c’est se<br />

pencher tout d’abord sur les objectifs du <strong>graphique</strong>. Cette préoccupation débouche sur une<br />

classification des <strong>graphique</strong>s en un certain nombre de types ayant des particularités propres.<br />

C’est la voie qu’emprunte E. Goldenweiser dans un article de 1916. Il y propose de<br />

classifier les utilisations des méthodes<br />

<strong>graphique</strong>s et de faire apparaître les abus<br />

et les risques de leur utilisation. Il<br />

souligne que les <strong>graphique</strong>s ne sont en<br />

général pas là pour traiter les données,<br />

mais pour afficher des résultats. C’est<br />

pourquoi il suggère le regroupement des<br />

<strong>graphique</strong>s statistiques en fonction d’une<br />

part de leur méthode de présentation et<br />

ensuite de leur objectif, comme on peut<br />

l’observer dans le schéma ci-contre.<br />

Les <strong>graphique</strong>s sont certes souvent utilisés pour plus d’un des objectifs mentionnés par<br />

Goldenweiser, mais cette typologie permet déjà à l’auteur de mettre en exergue les écueils<br />

propres à chacun des types qu’il a distingués. Sa typologie constitue un premier pas dans la<br />

compréhension du mode de fonctionnement d’un <strong>graphique</strong>. Ainsi, par exemple, il souligne<br />

que les <strong>graphique</strong>s référentiels (reference graph), qui n’ont pour but que de présenter<br />

autrement une information déjà connue du lecteur car contenue dans une table de données,<br />

doivent être utilisés avec précaution : ils doivent être clairs et simples car leur seul rôle est<br />

d’exposer de manière plus compréhensible une information qu’une table plus compacte.<br />

Un <strong>graphique</strong> illustratif diffère d’un <strong>graphique</strong> référentiel par le fait qu’il ne renvoie<br />

pas à quelque chose. Il sert à fixer un fait important dans l’esprit du lecteur et fait appel à la<br />

mémoire visuelle. Il peut être un peu plus complexe que le précédent dans la mesure où il<br />

illustre le texte en soulignant un point fondamental. Mais l’abus de <strong>graphique</strong>s de ce type<br />

conduit à détourner l’attention du lecteur de la discussion.<br />

Le troisième type est le <strong>graphique</strong> analytique qui montre visuellement une relation que<br />

l’auteur veut appuyer et ce plus facilement que ne l’aurait fait un texte écrit. Enfin, un<br />

<strong>graphique</strong> de recherche a pour but d’aider à établir une relation inconnue. Contrairement aux<br />

types précédents, il ne s’agit ici pas tant de présenter des données que de découvrir une<br />

relation.<br />

<strong>La</strong> typologie de Goldenweiser vise à montrer que ce dont ont le plus besoin les<br />

<strong>graphique</strong>s statistiques ne tient pas dans la portée des représentations mais dans leur qualité.<br />

Les <strong>graphique</strong>s sont utiles pour les statisticiens pour autant qu’ils servent véritablement la<br />

3


présentation de leurs données. Goldenweiser ouvre ainsi la voie à une réflexion plus profonde<br />

sur la nature des <strong>graphique</strong>s et leur spécificité.<br />

2.) Le rôle différencié des images : analyse et communication<br />

L’effort de classification et de différenciation des <strong>graphique</strong>s a été repris plus<br />

récemment par Monique Le Guen (1996). Celle-ci se situe dans la même perspective de<br />

définition des types de <strong>graphique</strong>s lorsqu’elle souligne l’importance de la distinction entre<br />

images d’analyse et images de communications. Les images d’analyse servent à saisir une<br />

situation donnée. « C’est l’objet des <strong>graphique</strong>s comme les courbes, les histogrammes, les<br />

camemberts etc. ». Les images de communication sont utilisées pour mettre en valeur «une<br />

idée, un résumé de données, à frapper l’imagination. » On retrouve la distinction de<br />

Goldenweiser entre <strong>graphique</strong> d’analyse et <strong>graphique</strong> d’illustration. Ainsi, on doit connaître et<br />

respecter des règles pour les images d’analyse (cf. Bertin, 1974). Mais pour les images de<br />

communication, « toute liberté est laissée à l’imagination et à la fantaisie de l’auteur pourvu<br />

qu’il communique son message. » Néanmoins, M. Le Guen reconnaît que la frontière entre les<br />

deux groupes est encore floue et son utilisation pratique est difficile. Elle oriente la <strong>perception</strong><br />

<strong>graphique</strong> dans une perspective plus psychologique.<br />

Elle a également le mérite de souligner le rôle de l’image dans la compréhension et<br />

dans le lien de la <strong>perception</strong> <strong>graphique</strong> à la pédagogie. Elle écrit ainsi en 1996 que « s’il est<br />

passé dans les esprits que l’apprentissage de la statistique ne pouvait se faire sans microordinateur,<br />

il n’est pas encore reconnu par la plupart des gens, que l’image lorsqu’elle est<br />

couplée à un raisonnement, facilite la compréhension, la mémorisation, et diminue le temps<br />

d’apprentissage, même en mathématique. » D’où l’importance d’une réflexion sur la qualité<br />

des <strong>graphique</strong>s et les mécanismes de leur <strong>perception</strong>.<br />

3.) Les codes <strong>graphique</strong>s élémentaires<br />

<strong>La</strong> réflexion sur le <strong>graphique</strong> vise également à comprendre sur quoi repose notre<br />

lecture : à quoi sommes-nous sensibles Sur quoi repose techniquement le message contenu<br />

dans l’image Cleveland et McGill (1984) ont cherché à mettre en exergue les éléments du<br />

<strong>graphique</strong> auxquels nous réagissons. Ils ont ainsi isolé 10 codes <strong>graphique</strong>s élémentaires qui<br />

correspondent aux aspects géométriques et textuels des <strong>graphique</strong>s. Le lecteur juge de ces<br />

aspects pour extraire visuellement de l’information concernant les différentes grandeurs<br />

présentées sur un <strong>graphique</strong>. Nous les présentons ici avec le rang que proposent les auteurs,<br />

fondé sur la justesse avec laquelle ils sont appréciés par les lecteurs.<br />

Rang<br />

Codes <strong>graphique</strong>s élémentaires<br />

1 Position sur une échelle commune<br />

2 Position sur des échelles non alignées<br />

3 Longueur<br />

4 Angle<br />

4-10 Pente<br />

6 Aire<br />

7 Volume<br />

8 Densité (quantité de noir)<br />

4


9 Saturation de la couleur<br />

10 Tonalité de la couleur<br />

Cette mise en exergue des codes élémentaires ouvre la voie à une réflexion sur la<br />

construction des <strong>graphique</strong>s : quels aspects privilégier pour faire passer un message. Quels<br />

codes sont perçus le plus justement par le lecteur Cleveland et McGill se sont penchés sur<br />

l’efficacité de plusieurs de ces codes élémentaires dans un jugement de <strong>perception</strong> <strong>graphique</strong>.<br />

Les deux chercheurs s’intéressent dans leur expérience à un jugement comparatif réalisé sur<br />

un histogramme, un histogramme empilé et un diagramme circulaire. Ils observent que le<br />

code élémentaire majeur est pour l’histogramme simple la position sur une échelle commune.<br />

Pour l’histogramme empilé, il s’agit de la longueur et pour le diagramme circulaire l’angle. Ils<br />

retrouvent alors pour un jugement comparatif (on demande au répondant d’exprimer une<br />

division du <strong>graphique</strong> par rapport à une autre) l’ordre de difficulté qu’ils avaient postulé au<br />

travers du taux d’erreurs des sujets : la position est le code <strong>graphique</strong> le plus performant et<br />

l’angle le moins performant.<br />

II. <strong>La</strong> représentation mentale<br />

Comprendre la <strong>perception</strong> <strong>graphique</strong> amène toutefois à dépasser la seule analyse<br />

technique de l’image qu’est le <strong>graphique</strong>. Il s’agit également de prendre en compte l’être<br />

humain pour qui ce <strong>graphique</strong> est réalisé.<br />

1.) Le rôle des lecteurs<br />

Les chercheurs, comme Cleveland et McGill (1984), ont commencé à mettre l’accent<br />

sur la nature des processus qui ont lieu quand les individus décodent les informations<br />

représentées dans un <strong>graphique</strong>. Il s’agit de considérer non seulement le <strong>graphique</strong> mais aussi<br />

la manière dont le lecteur perçoit l’image et les codes qu’elle porte.<br />

Ainsi, Simkin et Hastie (1987) supposent dans leur expérience que les lecteurs ont des<br />

attentes différentes sur le type d’information qui constituera le message principal selon les<br />

types de <strong>graphique</strong>s. Ils sont donc totalement actifs dans la <strong>perception</strong> du <strong>graphique</strong> puisqu’ils<br />

ont des a priori avant même d’avoir vu les signes qu’il contient.<br />

<strong>La</strong> <strong>perception</strong> de l’information contenue par une image n’est pas étrangère au<br />

fonctionnement de notre cerveau. Monique Le Guen (1999) souligne ainsi l’importance des<br />

informations apportées par le développement récent des neuro-sciences. De manière presque<br />

provocatrice, elle écrit en tête de son article que « l’analyse exploratoire des données est au<br />

cerveau droit ce que l’analyse confirmatoire est au cerveau gauche ». Le traitement de<br />

l’information tient à la communication entre les deux hémisphères. Monique Le Guen met<br />

donc en avant des explications d’ordre psychologique voire biologique. Elle affirme que « si<br />

chacun des deux hémisphères joue sur des registres différents, c’est bien leur complémentarité<br />

qui donne à la pensée toute son efficacité et sa flexibilité. L’un a besoin de l’autre, aucun des<br />

deux ne peut fonctionner seul de manière efficace. » L’image joue donc un rôle très<br />

particulier dans la compréhension.<br />

Monique Le Guen rappelle également le résultat d’expériences menées en psychologie<br />

cognitive qui montrent la supériorité de la reconnaissance visuelle et observent une meilleure<br />

5


mémorisation pour des textes ou des mots à forte valeur d’imagerie (Thon et al., 1993) 1 . Ces<br />

auteurs, Thon, Marquié et Maury, jugent que « l’encodage en mémoire » et « la<br />

reconnaissance d’une image » ne passent pas nécessairement par « un recodage verbal de<br />

l’information perceptive ». <strong>La</strong> reconnaissance d’une image pourrait donc demander moins de<br />

temps que l’utilisation d’un encodage de type verbal.<br />

Ces travaux vont dans le même sens que ceux de Monique Le Guen et confirment « la<br />

nécessité des images, réelles ou mentales, dans la compréhension et la création, en particulier<br />

s’agissant de la chose mathématique et donc statistique ». <strong>La</strong> représentation mentale que se<br />

fait le lecteur du <strong>graphique</strong> joue donc un grand rôle dans l’efficacité du <strong>graphique</strong>. Mais il<br />

reste encore justement à comprendre le processus par lequel le lecteur décode le message.<br />

2.) Différents processus<br />

Pinker (1981) définit quatre classes de processus de <strong>perception</strong> <strong>graphique</strong> qui peuvent<br />

permettre d’écrire un modèle cognitif de <strong>perception</strong> <strong>graphique</strong>.<br />

1) Des processus d’appariement qui déterminent quel type de <strong>graphique</strong> (histogramme,<br />

histogramme empilé, diagramme circulaire) est présenté et qui activent des schémas<br />

de lecture de bas en haut du <strong>graphique</strong>.<br />

2) Des processus d’assemblage du message qui transforment l’information de la vision<br />

première en une image conceptuelle.<br />

3) Des processus d’intégration qui tirent de l’information des données rétiniennes et des<br />

schémas <strong>graphique</strong>s génériques pour faire apparaître les relations et les valeurs qui<br />

manquent à l’image mentale et donner une relation du type « plus petit que », « plus<br />

grand que »,…).<br />

4) Des processus inférentiels qui utilisent l’image mentale et le schéma <strong>graphique</strong><br />

générique pour en dériver de nouvelles relations et valeurs (calculer la proportion<br />

relative d’une division par rapport à une plus grande).<br />

Follettie (1986) 2 distingue la mesure (ie. donner une valeur absolue de la longueur) de la<br />

discrimination (indiquer quelle est la barre la plus longue) ainsi que de l’estimation<br />

comparative (donner le pourcentage représentant la longueur d’une barre par rapport à la<br />

longueur d’une autre). Il met ainsi en avant le rôle actif de la tâche réalisée par le lecteur.<br />

3.) L’interaction entre codes <strong>graphique</strong>s et jugement du lecteur :<br />

Simkin & Hastie<br />

Follettie se concentre plutôt sur le travail de jugement du lecteur alors que Cleveland<br />

et McGill regardaient les codes élémentaires propres aux <strong>graphique</strong>s et à leur construction. Le<br />

contraste entre ces deux approches suggère à Simkin et Hastie (1987) une hypothèse : l’ordre<br />

des codes élémentaires proposé par Cleveland et McGill pourrait dépendre de la tâche<br />

analytique réalisée par le lecteur du <strong>graphique</strong>. Simkin et Hastie vont montrer que le type de<br />

<strong>graphique</strong> et le travail de jugement vont interagir pour déterminer l’efficacité du <strong>graphique</strong>.<br />

1 Thon B., Marquié J.-C., Maury P. (1993). "Le texte, l'image et leurs traitements cognitifs". Actes du Colloque<br />

Interdisciplinaire du CNRS, "Images et langages. Multimodalité et modélisation cognitive", pp. 29-39.<br />

2 Follettie, J.F. (1986) « Real-World Tasks of statistical Graph-Using and Analytic Tasks of Graphics<br />

Research », document non publié présenté au congrès annuel de la National Computer Graphics Association,<br />

Anaheim, CA.<br />

6


Simkin et Hastie évoquent une première expérience simple. Ils ont montré à deux<br />

cents undergraduates 3 des histogrammes, des histogrammes empilés, des diagrammes<br />

circulaires et des courbes et leur ont demandé d’écrire des résumés de l’information contenue<br />

dans les <strong>graphique</strong>s. Quand on leur a présenté des histogrammes, la plupart des répondants<br />

ont spontanément fait des comparaisons entre les longueurs des barres (c’est-à-dire des<br />

jugements comparatifs). A l’opposé, quand on leur a présenté un diagramme circulaire, la<br />

plupart des répondants ont comparé les portions individuellement avec le tout, raisonnant<br />

ainsi en terme de proportion par rapport au tout (jugement proportionnel).<br />

Ainsi, la longueur et la position, codes <strong>graphique</strong>s élémentaires de l’histogramme, auront une<br />

efficacité supérieure dans les jugements de comparaison. Les angles, au contraire, code utilisé<br />

dans les diagrammes circulaires, apportera plus d’efficacité dans les jugements<br />

proportionnels. L’idée de Simkin et Hastie est qu’il y a une interaction entre le code<br />

<strong>graphique</strong> élémentaire et le travail de jugement.<br />

Leur expérience principale repose sur la présentation de 90 <strong>graphique</strong>s qui<br />

comprennent à la fois des histogrammes simples, des histogrammes empilés et des<br />

diagrammes circulaires. Les auteurs testent tout d’abord le jugement discriminatoire par<br />

l’indication de la division la plus grande entre celle présentée à droite et celle présentée à<br />

gauche. Ils s’intéressent ensuite au jugement comparatif en demandant au répondant de<br />

donner le pourcentage que représente le petite division par rapport à la grande. Enfin, le<br />

jugement proportionnel est expérimenté par la demande du pourcentage que représente une<br />

division par rapport au tout.<br />

Ainsi, chacun des trois jugements (discriminatoire, comparatif et proportionnel) est<br />

réalisé pour trois codes <strong>graphique</strong>s élémentaires (position sur une échelle commune, longueur<br />

et angle) qui sont les principaux codes respectivement pour l’histogramme simple,<br />

l’histogramme empilé et le diagramme circulaire.<br />

Leurs résultats font apparaître que le temps de réaction pour le jugement<br />

discriminatoire à partir du code de position est significativement plus rapide que sur les autres<br />

codes. Dans les jugements comparatifs, la position conduit aux résultats les plus justes, suivie<br />

par la longueur et l’angle qui sont moins efficaces. Pour le jugement proportionnel, l’ordre est<br />

différent : la longueur conduit significativement à moins de justesse que les deux autres codes<br />

qui ne différent pas l’un de l’autre.<br />

L’ancrage apparaît ainsi comme le processus-clé pour les jugements comparatifs et<br />

proportionnels. Quand on effectue un jugement proportionnel, les meilleurs ancrages<br />

possibles sont les codes <strong>graphique</strong>s de position et d’angle, qui sont plus efficaces que la<br />

longueur. Bien que percevoir les angles soit plus difficile que percevoir les aspects linéaires,<br />

le jugement sur le diagramme circulaire est particulier dès lors que l’ancrage est un angle<br />

remarquable, plus facile à percevoir, c’est-à-dire un angle de 0°, 90° ou 180°. Quand on fait<br />

un jugement comparatif, le code de position est meilleur que les deux autres. <strong>La</strong> longueur<br />

souffre à nouveau d’un ancrage efficace moindre. Les angles donnent les résultats les moins<br />

bons à cause de leur plus mauvais ancrage quand il ne s’agit pas d’angles remarquables.<br />

Finalement, les auteurs ont montré que le code <strong>graphique</strong> élémentaire et le travail de jugement<br />

interagissent pour déterminer la performance du <strong>graphique</strong>.<br />

3 Les undergraduates sont les étudiants ayant un niveau d’études inférieur au master et/ou à la thèse.<br />

7


III. <strong>La</strong> représentation <strong>graphique</strong> comme produit du conflit entre<br />

divers niveaux de <strong>perception</strong><br />

1.) Eléments sémiotiques et éléments sémantiques<br />

Nous avons vu que la <strong>perception</strong> <strong>graphique</strong> dépendait non seulement du type de<br />

<strong>graphique</strong> mais aussi de la nature du jugement requis de la part de l’observateur<br />

(discriminatoire, comparatif, proportionnel). Entre ces deux aspects de la <strong>perception</strong><br />

<strong>graphique</strong> (type de <strong>graphique</strong> et jugement requis) se situe un troisième aspect, qui tient à la<br />

mobilisation par l’observateur de ses capacités cognitives afin d’extraire de l’information du<br />

<strong>graphique</strong>. Il nous faut maintenant rentrer plus en détail dans le processus de lecture du<br />

<strong>graphique</strong>. Bertin (1977) schématise la prise de contact avec le <strong>graphique</strong> de la façon<br />

suivante : identification externe (on s’intéresse au titre, à la légende, qui sont autant de points<br />

de repère) et identification interne (reconnaissance des variables). L’enchaînement de ces<br />

étapes semble assez intuitif. Dès lors, une fois que l’observateur a « identifié » le <strong>graphique</strong> et<br />

a compris comment celui-ci fonctionnait, il reste à définir les éléments qui vont le guider dans<br />

sa quête de l’information. Ces éléments peuvent être organisés suivant la bipartition opérée<br />

par Benveniste (1966) entre le niveau sémiotique et le niveau sémantique :<br />

- le terme « sémiotique » désigne « l’ensemble des modes de signifiance du signe<br />

indépendamment de ses conditions d'énonciation ». Lorsqu’on constate sur un <strong>graphique</strong> que<br />

« la courbe monte », on se situe sur un plan purement sémiotique.<br />

- le terme « sémantique » renvoie aux « modes de signifiance du signe en discours, en<br />

contexte concret d'énonciation ». Lorsqu’on cherche quelle variable est représentée par le<br />

tracé de la courbe, on se situe sur le plan sémantique.<br />

L’interprétation <strong>graphique</strong> la plus élémentaire (« la variable x augmente au cours du temps»)<br />

est une combinaison d’éléments sémantiques et sémiotiques.<br />

2.) Complémentarité et imbrication des niveaux d’analyse du<br />

<strong>graphique</strong><br />

Qu’en est-il du processus intellectuel qui conduit l’observateur à combiner ces<br />

éléments afin de répondre au problème posé Kosslyn (1985) synthétise la compréhension du<br />

<strong>graphique</strong> suivant trois niveaux d’analyse : un niveau syntaxique (interpréter le mode de<br />

représentation de l’information proposé par le <strong>graphique</strong>), un niveau sémantique (que veulent<br />

dire les variables que cherche-t-on à mesurer ) et enfin, un niveau pragmatique. Alors que<br />

les deux premiers niveau correspondent à peu près à l’identification interne et externe du<br />

<strong>graphique</strong>, le troisième niveau met en jeu la combinaison d’aspects sémiotiques, sémantiques<br />

permettant de répondre à une question. Sur un plan logique, ces trois niveaux d’analyse<br />

semblent devoir s’enchaîner : en réalité, ils peuvent rentrent en conflit et interférer entre eux.<br />

8


En particulier, le niveau pragmatique peut influer sur l’identification du <strong>graphique</strong>, ce qui est<br />

source d’erreurs.<br />

Un très bon exemple est donné par Bell et Janvier (1981) : on donne à des élèves un<br />

<strong>graphique</strong> ayant en ordonnée la distance et en abscisse le temps.<br />

On demande à des élèves de décrire le parcours réalisé par l’individu auquel<br />

s’applique les données contenues dans le <strong>graphique</strong>. Les élèves répondent que cet individu a<br />

monté une colline, puis est descendu, et est remonté. Nous avons là un exemple de confusion<br />

où des éléments sémiotiques (la forme de la courbe) ont « pris le pas » sur les éléments<br />

sémantiques (la signification des variables et, par là-même des points de la courbe). Cette<br />

confusion met également en jeu différents niveaux d’analyse, puisque c’est le niveau<br />

pragmatique (comment peut-on utiliser l’information pour répondre à la question ) qui a pesé<br />

sur le niveau sémantique (que désigne la courbe ). En somme, les différents niveaux<br />

d’analyse, s’ils se complètent, peuvent aussi interférer les uns avec les autres.<br />

3.) Le principe de congruence de Kosslyn<br />

Quelle leçon peut-on en tirer du point de vue de l’ « ergonomie » du <strong>graphique</strong> Bien<br />

sûr, un minimum de pratique permet d’éviter des erreurs d’interprétation telles que celle qui a<br />

été présentée ci-dessus… Toutefois, les <strong>graphique</strong>s peuvent nous demander plus ou moins<br />

d’effort de compréhension, selon la distance se trouvant entre les éléments sémiotiques et les<br />

éléments sémantiques. On peut tirer de ceci une règle de « lisibilité » du <strong>graphique</strong>, qui tient<br />

dans le principe de congruence de Kosslyn (1985), que l’on peut présenter comme suit : les<br />

éléments sémiotiques doivent pouvoir se combiner « intuitivement » aux éléments<br />

sémantiques. Visiblement, dans le <strong>graphique</strong> précédent, le principe de congruence n’était pas<br />

respecté : compte tenu du fait que l’on représentait les variables « distance » et « temps » sur<br />

un même <strong>graphique</strong>, l’intuition des élèves les a conduits en premier lieu à se porter sur une<br />

interprétation « topo<strong>graphique</strong> » de la courbe, pour donner ce que Duval (1993) nomme<br />

<strong>perception</strong> « iconique » du <strong>graphique</strong>, génératrice d’erreurs. Un bel exemple de congruence se<br />

trouve dans le <strong>graphique</strong> cité par Tufte (1982) comme celui qui « pourrait bien être le meilleur<br />

<strong>graphique</strong> statistique jamais dessiné » : le <strong>graphique</strong> de Minard (reproduit ci-dessous)<br />

représentant la campagne de Russie menée par Napoléon entre 1812 et 1813 .<br />

9


Dans ce cas, le aspects sémiotiques, en particulier l’épaisseur du « flux » représentant<br />

l’armée française, sont parfaitement en accord avec les aspects sémantiques (l’épaisseur du<br />

flux, diminuant au fil du trajet, représentant la diminution de l’armée française). Pour Tufte,<br />

« l’excellence <strong>graphique</strong> est celle qui donne à l’observateur le plus grand nombre d’idées en<br />

un temps le plus court possible, avec le moins d’encre et le moins d’espace possible ». On<br />

peut voir dans la première partie de la phrase une reformulation du principe de congruence :<br />

pour donner un maximum d’idées (justes) en un minimum de temps, il faut que les éléments<br />

sémiotiques s’accordent harmonieusement avec les éléments sémantiques.<br />

Carte figurative des pertes successives en hommes de l'Armée Française dans la campagne de Russie<br />

(1812-1813), réalisée par Minard.<br />

4.) Spécificités des individus dans le traitement des données<br />

sémantiques et sémiotiques : l’exemple du niveau d’études.<br />

Qu’est-ce qui, dès lors, va conditionner la réponse de l’individu à une question posée<br />

au sujet du <strong>graphique</strong> Le niveau que Kosslyn dénomme « pragmatique » comprend une<br />

combinaison d’éléments sémantiques et sémiotiques qui peut bien entendu évoluer d’un<br />

individu à l’autre, en fonction de l’expérience des <strong>graphique</strong>s, du niveau scolaire, ou encore<br />

de divers aspects culturels. Afin de mieux apprécier les différents types de réaction face aux<br />

mêmes <strong>graphique</strong>s, Baille et Vallerie (1993) soumettent neuf problèmes à une population de<br />

31 individus, répartis en deux groupes selon leur niveau scolaire (les «haut niveau » et les<br />

« bas niveau »). Parmi les réponses aux questions afférentes au <strong>graphique</strong>, certaines peuvent<br />

être jugées sur le plan strict de la véracité; d’autres relèvent d’une interprétation subjective (il<br />

n’y a pas de réponse « correcte »). Il apparaît que le premier type de questions a un caractère<br />

discriminant entre les « haut niveau » et les « bas niveau » : sans surprise, les diplômés<br />

10


éussissent mieux. Il est intéressant de regarder plus en détail, à titre d’exemple, le premier<br />

item des épreuves.<br />

Il est demandé aux participants de déterminer, sur la base de l’évolution du cours des<br />

actions A,B,C,D, E et F entre 1990 et 1991, quelle est l’action la plus avantageuse (pour une<br />

somme donnée à placer). Cette question requiert un calcul de l’accroissement relatif entre le<br />

cours de l’action en 1990 et le cours de l’action en 1991. Les auteurs observent que les<br />

membres de la population de « bas niveau » (BN) sont plus souvent influencés par des<br />

éléments sémiotiques, comme la pente des courbes ou la disposition verticale (qui conduisent<br />

les sujets BN à sélectionner l’action B comme étant la plus avantageuse). Le niveau d’études<br />

influe non seulement sur la réussite, mais aussi sur la combinaison des éléments sémantiques<br />

et sémiotiques permettant d’extraire de l’information. Ces conclusions se confirment lorsque<br />

le même <strong>graphique</strong> est présenté avec des courbes plus heurtées : les sujets BN semblent plus<br />

sensibles à l’allure des courbes. Toutefois, ce type d’erreurs se retrouve aussi chez les HN : en<br />

particulier, la proportion d’individus qui jugent selon le critère de la « courbe la plus<br />

haute » est identique dans les deux catégories, ce qui amène les auteurs à évoquer la<br />

« prégnance d’un habitus culturel d’ordre topologique liant position et valeur ». Les<br />

connaissances assimilées par l’éducation, et plus globalement l’habitus 4 (ensemble de<br />

4 <strong>La</strong> définition plus précise de l’habitus chez Bourdieu est : « système de dispositions durables et transposables<br />

qui, intégrant toutes les expériences passées, fonctionne à chaque moment comme une matrice de <strong>perception</strong>s,<br />

d'appréciations et d'actions, et rend possible l'accomplissement de tâches infiniment différenciées, grâce aux<br />

transferts analogiques de schèmes permettant de résoudre les problèmes de même forme » (Bourdieu 1972 pp.<br />

178-179).<br />

11


dispositions de penser et d’agir) conditionnent notre approche des <strong>graphique</strong>s. <strong>La</strong> prégnance<br />

de l’habitus se fait voir à travers les arguments d’ordre « contextuel » employés par les<br />

individus (dans les deux groupes) lorsqu’ils sont confrontés à des questions demandant, non<br />

une réponse exacte, mais une appréciation (question ambiguë). Les auteurs observent alors<br />

une tendance à projeter sur le <strong>graphique</strong> des prénotions et de lui faire dire des choses que l’on<br />

suppose a priori… Les arguments contextuels ont également tendance à apparaître lorsque la<br />

complexité du <strong>graphique</strong> s’élève, plus particulièrement dans le deuxième groupe de questions<br />

(où deux variables sont présentées sur le même <strong>graphique</strong> avec des échelles différentes). Les<br />

auteurs notent que « dans leurs comparaisons de représentations <strong>graphique</strong>s, les dilemmes<br />

sont tranchés, non par une recomposition des variables et des échelles, mais par un discours<br />

annexe, congruent à la seule thématique socio-économique ». Enfin, la mobilisation de ces<br />

arguments « contextuels » est d’autant plus forte que le caractère impliquant de la question est<br />

élevé pour le répondant. Ainsi, au sujet d’un <strong>graphique</strong> retraçant l’évolution du nombre<br />

d’inscrits et du nombre d’admis dans une école d’ingénieurs, la question « ce <strong>graphique</strong><br />

donne-t-il envie de s’inscrire dans cette école », les sujets HN sont plus nombreux à<br />

employer des arguments contextuels (« cela dépend des éléments de comparaison avec<br />

l’université ou d’autres écoles », etc.), parce que, de toute évidence, ils se sentent plus<br />

concernés par le sujet.<br />

En résumé, les différences de traitement <strong>graphique</strong> entre les individus ne tiennent pas<br />

seulement à la quantité de savoir applicable à l’analyse d’un <strong>graphique</strong> mais aussi au mode<br />

d’analyse, donnant une part plus ou moins grande aux éléments sémiotiques et aux éléments<br />

contextuels. Ce mode d’analyse est lié à la nature du <strong>graphique</strong>, au contexte de son utilisation<br />

(quelles sont les questions posées Dans quel état d’esprit l’observateur aborde-t-il le<br />

<strong>graphique</strong> ) et de façon plus générale aux liens, conscients ou inconscients, que l’observateur<br />

retrace entre le <strong>graphique</strong> et sa propre expérience.<br />

12


Conclusion : vers une application aux sciences de l’éducation <br />

S’il n’existe pas de mauvais <strong>graphique</strong>, puisque ce dernier est lui-même une bonne<br />

illustration de ce qu’est une mauvaise figure, il est néanmoins possible d’évaluer les<br />

performances des <strong>graphique</strong>s. Cette évaluation tient d’abord à la clarté avec laquelle le<br />

<strong>graphique</strong> fait passer l’idée qu’a voulu y mettre son auteur. Nous avons ainsi insisté sur le lien<br />

ténu existant entre le type de <strong>graphique</strong> et le type de jugement requis de la part de<br />

l’observateur, ainsi que sur l’idée de convergence entre les éléments sémiotiques et<br />

sémantiques donnant un meilleur confort de lecture et diminuant le risque d’erreurs.<br />

De façon plus fondamentale, on peut se demander ce que l’étude des <strong>graphique</strong>s<br />

apporte à notre compréhension de la cognition. Les travaux de Baille et Vallerie soulèvent<br />

l’influence de l’éducation, de la culture et de l’expérience individuelles dans la <strong>perception</strong><br />

<strong>graphique</strong>. En outre, ils viennent s’inscrire dans une ligne de pensée caractérisée par l’idée<br />

que la représentation a un « effet rétroactif » sur la <strong>perception</strong> : l’application de procédés, de<br />

schèmes intériorisés conduit à tirer du <strong>graphique</strong> un certain type d’informations.<br />

Les enseignements pratiques que l’on peut tirer de ces études se situent, entre autres,<br />

dans le domaine de l’ergonomie <strong>graphique</strong> (comment faire des <strong>graphique</strong>s plus lisibles ),<br />

mais ont aussi une application directe du point de vue des sciences de l’éducation, dans la<br />

façon d’apprendre les <strong>graphique</strong>s pour eux-mêmes ou comme outil permettant d’intégrer<br />

d’autres notions (proportionnalité…). Les travaux de Maury, Janvier et Baille (1990)<br />

fournissent un bon exemple d’une telle réflexion, en étudiant chez des collégiens la façon dont<br />

se combinent traitement <strong>graphique</strong> et traitement numérique des données. Il apparaît qu’au fil<br />

de leur scolarité, les élèves accumulent non seulement des automatismes correspondant à des<br />

techniques diverses, mais se rendent aussi capables de combiner les différentes techniques, de<br />

faire des aller-retours entre traitement <strong>graphique</strong> et traitement numérique, de combiner<br />

éléments sémantiques et sémiotiques. Il semble nécessaire d’encourager les élèves, non<br />

seulement à manier des techniques, mais également à pouvoir combiner celles-ci de manière à<br />

s’adapter aux exigences de chaque <strong>graphique</strong>. Les travaux sur la <strong>perception</strong> <strong>graphique</strong> invitent<br />

ainsi à repenser l’utilisation des <strong>graphique</strong>s dans le système éducatif.<br />

13


Bibliographie<br />

Jacques Baille, Bernard Vallerie (1993), « Quelques obstacles cognitifs dans la lecture de<br />

représentations <strong>graphique</strong>s élémentaires », Les sciences de l’éducation pour l’ère nouvelle, 1<br />

(3), pp. 73-104.<br />

Jacques Bertin (1977), <strong>La</strong> <strong>graphique</strong> et le traitement <strong>graphique</strong> de l’information, Flammarion,<br />

Paris.<br />

William Cleveland and Robert McGill (1984), « Graphical Perception: Theory,<br />

Experimentation, and Application to the Development of Graphical Methods », Journal of the<br />

American Statistical Association, 79, pp. 531-554.<br />

Emanuel. A. Goldenweiser (1916), « Classification and Limitations of Statistical Graphics »,<br />

Publications of the American Statistical Association, Volume 15, Issue 114, pp.205-509.<br />

Monique Le Guen (1999), « De l’importance de l’image », in Destandau S., <strong>La</strong>diray D., Le<br />

Guen M. (1999), in « L’Analyse Exploratoire des données et SAS/INSIGHT », Courrier des<br />

Statistiques, n°90, INSEE, pp.3-44.<br />

Monique Le Guen (1995), « Statistique, Imagerie et Sciences Cognitives », Bulletin de<br />

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Sylvette Maury (2002), « A Look at Some Studies on Learning and Processing Graphic<br />

Information, Based on Bertin’s Theory », in Representations and Mathematical Visualization.<br />

Sylvette Maury, Michel Janvier, Jacques Baille (1990), « Diagram Processing Procedures »,<br />

European Journal of Psychology of Education, Vol. 5, n°3, pp. 293-307.<br />

Steven Pinker (1981), « A theory of graph comprehension » (Occasional Paper No. 10),<br />

Massachusetts Institute of Technology, Cambridge (Centre for Cognitive Sciences).<br />

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Perception », Journal of the American Statistical Association, Vol. 82, Iss. 398, Jun., 454-465.<br />

Edward Tufte (1983), The visual Display of Quantitative Information, Graphics Press,<br />

Cheshire, Connecticut.<br />

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