ST:A:R_26
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Nr. <strong>26</strong>/2010<br />
Buch V - Christian le fou<br />
35<br />
La pyramide de Djoser et ses échaffaudages<br />
Une femme qui compte? Toujours en construction, au Caire Les serpents de Djoser<br />
Au frais dans les jardins de Montazah<br />
« Crois-moi, prends-en, sur ma vie, ça vaut la peine »<br />
Dans la salle de lecture de la bibliothèque d‘Alexandrie<br />
On n‘y a pas coupé...<br />
Sur le chantier de la pyramide de Saqqara<br />
palmeraie: vent frais et huppes.<br />
La suite du programme prévoit la visite du Musée du Caire<br />
mais le car prend la route de Gizeh...sous les bretelles et les<br />
échangeurs, un égout, bordé de monceaux de terre: on peut<br />
le traverser en barge, contre une pièce. Un peu partout, le<br />
long du Nil et de ses bras, des semblants de jardins très<br />
fleuris: ce sont les marchands de plantes et de fleurs.<br />
Nous allons partir de Gizeh, dit Mona, pour que vous<br />
puissiez d‘abord visiter la fabrique de coton. « Ca suffit les<br />
fabriques », dit Christian, « allons au Musée ».<br />
Nous voilà enfin dans un embouteillage du Caire: ça dure...<br />
Comme dans les quartiers populaires de Gizeh, mais plus<br />
clair et plus chatoyant, toutes les femmes portent le voile.<br />
Celles dont on ne voit que les yeux sont plutôt rares (5% au<br />
Caire, 10% à Alexandrie à vue de nez).<br />
Manifestation d‘ouvriers devant un édifice public.<br />
Même sur la place centrale, vaste et belle, le grand hôtel,<br />
« futur Ritz » annonce la pancarte, est en construction/<br />
déconstruction.<br />
Au Musée, Mona nous prévient: elle n‘a pas le droit d‘entrer<br />
dans la plupart des salles. Mais elle n‘a pas songé à profiter<br />
des embouteillages pour nous raconter l‘histoire (comme<br />
les guides le font, à ce que j‘entends dans les couloirs).<br />
Râle, râle...<br />
C‘est un vaste musée du début du XXe siècle: tranquille,<br />
frais, poussiéreux, qui conserve plus qu‘il ne met en<br />
valeur: un musée ancien modèle, comme le Louvre avant<br />
rénovation. Des armoires et des étiquettes.<br />
Mona nous emmène directement au second étage, où<br />
sont censées reposer les reliques les plus intéressantes:<br />
les momies d‘animaux d‘abord, de pharaons ensuite, et le<br />
trésor des sarcophages. Les couleurs et l‘or des sarcophages,<br />
les bijoux, les masques incrustés au visage paisible, tout est<br />
splendide. Mais les momies ! Un cadavre reste un cadavre:<br />
rien qui demande à être vu. « Pas mal comme destin pour<br />
un cadavre », dit Christian, « il fait plus frais au musée que<br />
dans les pyramides. »<br />
Le moindre sarcophage relégué dans une vitrine de couloir<br />
et pas dépoussiéré depuis un demi-siècle, le plus petit vase<br />
d‘albâtre, parmi les alignements de vases d‘albâtre, sont<br />
saisissants. Ce qui m‘impressionne le plus, comme dans les<br />
bas-reliefs du temple de Téti, c‘est l‘aspect neuf des lignes,<br />
de la matière, des couleurs. Qualité de la conservation ? De<br />
la restauration ? Du design et des matériaux choisis ?<br />
Akhenaton et sa famille offrant des fleurs de lotus au dieu<br />
Soleil: une image familière, dit Christian.<br />
Nefertiti, si belle inachevée...<br />
Animaux enbaumés, béliers recouverts de feuille d‘or:<br />
voici donc ce que les Hébreux voulaient retrouver dans le<br />
désert: des dieux animaux, une déité ayant pris une forme<br />
naturelle et familière, honorée dans la mort (et l‘autre qui<br />
leur impose un dieu sans visage, qui ne ressemble à rien).<br />
De quel syncrétisme Moïse les a-t-il de force tirés ?<br />
Je préfère les objets: les lits, hauts et larges, rectangles de<br />
jonc tissé, supportés par deux panthères longues et fines; le<br />
lit pliant, qui devient fauteuil carré, la vaisselle d‘albâtre.<br />
Nous faisons la fermeture, après l‘achat de quelques cartes<br />
postales, destinées à tous ceux de nos amis qui nous ont<br />
offert ce voyage, et l‘acquisition de ce petit carnet sur lequel<br />
j‘écris. Une salle est réservée à l‘explication des disparitions<br />
et des pillages, des vols et des cas de non restitution: les<br />
Français ne sont pas en reste ! Les Allemands, eux, se<br />
conduisent mieux, évidemment.<br />
Mona a bien tenté de nous laisser au bazar du centre ville<br />
et de rentrer avec le chauffeur, mais nous sommes trop<br />
fatigués: dommage...nous rentrons à l‘hôtel. Demain,<br />
départ pour Alexandrie à 7 h.<br />
Nous prenons l‘autoroute, première chaussée à avoir des<br />
files dessinées sur le sol...du moins sur quelques portions,<br />
car nombreux sont les segments tout neufs ou en travaux.<br />
Nous croisons des bouts d‘échangeurs, roulons à côté de<br />
voies en terrassement.<br />
A la sortie de Caire, sur pas mal de km, des villes nouvelles<br />
promettent une vie pleine, heureuse, naturelle, verte –<br />
sinon tout à la fois: elles sont inachevées et en plein désert<br />
pour la plupart. La ville ne s‘est pas encore décentrée.<br />
Personne ne veut aller si loin de l‘eau, dit Mona.<br />
Après un peu plus d‘une heure de route, nous arrivons<br />
à Wadi Natrum, la Vallée du Sel. Les « sorties » de<br />
l‘autoroute ne sont guère fléchées, pas d‘échangeur: il faut<br />
aller jusqu‘au prochain demi-tour puis trouver un passage<br />
accessible hors de la chaussée. Nous voilà sur une piste<br />
de sable. On s‘est un peu trompé. Kheir, le chauffeur,<br />
demande son chemin, on retombe sur la route et sur<br />
un village avec toutes sortes de pièces de rechange pour<br />
voiture, c‘est l‘unique commerce. Quelques scooters-taxis<br />
virevoltent, une poste, et au loin, le monastère de St Bishoy<br />
(qui connaît ce saint ?), que nous allons visiter.<br />
Nous sommes accueillis par le père Joakim, qui nous<br />
voyant Christian, Mona et moi comprend d‘emblée la<br />
situation. Il me fait signe qu‘il est inutile que je couvre<br />
mes épaules, nous donne la carte de visite du Saint, qui est<br />
aussi celle du Monastère et comporte son e-mail, en nous<br />
disant d‘y ajouter la date de la mort de Bishoy, omise dans<br />
le texte: 417. Il nous fait ôter nos chaussures. Nous voici<br />
dans l‘église.<br />
Tout à l‘air en béton récent – sur l‘emplacement de la<br />
chapelle du VIIe siècle...Mais je me trompe peut-être. Je ne<br />
comprends pas bien les explications anglaises du père...et<br />
je commence à être obscurément saisie du mal commun<br />
aux touristes en ces pays.<br />
Mona tente de nous entraîner au fond, loin des prieurs et<br />
des volutes d’encens, pour nous réciter ses descriptions,<br />
mais le père passe sa tête par la porte et nous tire de là en<br />
nous sommant de le suivre. Mona râle mais se plie: il nous<br />
fera lui-même la visite. Trois salles, petites, avec arcades,<br />
en enfilade, des tapis et des portes, qu’on ouvre à mesure<br />
les jours de fête...jusqu’à parvenir au réfectoire où une<br />
immense table basse en pierre et une excellente acoustique<br />
assurent les nourritures spirituelles et et les autres.<br />
Au moment où, aidé par des images et de petits sachets<br />
d’épices suspendus, le père explique la confection de l’huile<br />
sainte selon la recette de Bishoy, je n’y tiens plus. Christian<br />
intercède et le père nous précède pour défaire le cadenas<br />
d’une porte à battants donnant sur six cabinets de toilette<br />
crasseux. Du mal à choisir mais pas le temps. Il nous offre<br />
ensuite un thé dans un salon-parloir et fait appeler le frère<br />
médecin.<br />
Tous ont, attenante à leur robe, une capuche noire cousue<br />
en son sommet par une ligne blanche et brodée de six<br />
étoiles de part et d’autre: les douze apôtres, nous dira<br />
Mona.<br />
Tandis que j’essaie de faire bonne figure et que nous<br />
prenons le thé, le père, affalé dans une chauffeuse,<br />
confesse Mona sans en avoir l’air: à ce que je peux saisir<br />
en arabe, il obtient d’emblée l’information de son divorce<br />
et celle de notre lune de miel. Il parle tranquillement et sa<br />
bienveillance délie Mona. En regardant son visage et ses<br />
façons tandis qu’il discute, je m’aperçois d’où vient notre<br />
sympathie: c’est notre Fernand copte ! Un sosie: même<br />
âge, même douceur, même barbe.<br />
Le médecin, plus jeune, barbe noire et fournie, yeux vifs,<br />
nous entraîne dans son cabinet. Il y traîne un bassinet<br />
pas lavé depuis des lustres, des ventouses et un paravent<br />
avec une table de consultation, un petit bureau et un frigo.<br />
Tout est crasseux, mais c’est un vrai cabinet. Il m’interroge<br />
dans les règles: fièvre ? Traitement en cours ? Avant de<br />
me donner un sachet de riz-amidon goût myrtille qui me<br />
calme assez vite. Puis il sort une boite de médicaments,<br />
en nous demandant si par hasard on connaîtrait l’une des<br />
trois langues des modes d’emploi (il suppose que c’est de<br />
l’allemand) – mais ce sont des langues scandinaves que<br />
nous n’identifions même pas.<br />
Chacun dans une version, nous cherchons la posologie et<br />
l’utilité du médicament...et nous finissons par recoupement<br />
entre langues ignorées par trouver qu’il s’agit d’injections<br />
contre le psoriasis et l’arthrite, à prendre sans danger à 12<br />
h d’intervalle et à conserver sous 8°. Christian promet de<br />
faire parvenir la notice en anglais dès qu’il l’aura trouvée<br />
sur internet. Nos traductions à l’aveugle m’ont tout à fait<br />
guérie. Nous repartons avec une boite échantillon d’antidiarrhée,<br />
le docteur insiste.<br />
Et nous prenons congé: Kheir nous fait savoir qu’il est<br />
temps de reprendre la route d’Alexandrie.<br />
Nous traversons les marécages du lac Mariotis, la<br />
zone commerciale et industrielle commence. Sur fond<br />
d’immense raffinerie, qui peuple l’horizon d’une dentelle<br />
de cheminées et de fûts, les roseaux, et de rares pêcheurs.<br />
Les péages sont des portes: portes de la ville, avec arche et<br />
nom.<br />
Alexandrie ressemble plus aux villes du Moyen-Orient ou<br />
de la Grèce: à ce que nous avons l’habitude d’appeler une<br />
ville et que le Caire déborde et bouleverse. Des avenues,<br />
des allées, des bâtiments d’âges divers, une histoire – et<br />
pas seulement un entassement dans la poussière et la<br />
circulation.<br />
Nous prenons la corniche: une douze voies. L’autoroute<br />
est étroite en comparaison. Mais notre hôtel se trouve à<br />
l’extrêmité, dans les jardins de Montazah, et nous avons<br />
rendez-vous pour visiter la bibliothèque: nous rebroussons<br />
chemin.<br />
La bibliothèque est très belle: à juste titre une attraction<br />
touristique, même si ça fait bizarre de voir des touristes<br />
se faire photographier dans les salles de lecture, contre les<br />
piliers. Très beaux les piliers: élancés et en fleur de lotus.<br />
Il n’y aurait jamais eu telle bibliothèque s’il n’y en avait eu<br />
une célèbre auparavant – bien que l’une soit sans rapport<br />
avec l’autre par son contenu. L’Antiquité continue de<br />
modeler le visage d’une ville. C’est la première fois aussi<br />
que je vois une bibliothèque être visitée par des touristes,<br />
ce qui malgré la beauté du bâtiment n’aurait pas lieu d’être<br />
sans doute si elle se trouvait dans une ville européenne.<br />
La lumière y entre par le côté, de vagues ou d’yeux au<br />
plafond, indirecte et douce, et des vitraux bleus et verts<br />
l’adoucissent encore le long des poutres métalliques.<br />
Sobriété, grâce, douceur, espace, elle réunit toutes les<br />
qualités, cette bibliothèque. Les étudiants y travaillent par<br />
grappes, garçons et filles (voilées) côte à côte.<br />
L’atmosphère sur le parvis est joyeuse, colorée et<br />
virevoltante: toute la bonne société bourgeoise estudiantine<br />
se retrouve là.<br />
Nous prenons un sandwich au fast food hallal Momen: de<br />
longs pains « occidentaux » remplis de chawarma ou de<br />
foie cuisiné. Sur la terrasse, ça pépie en foulard; une dame<br />
plus âgée, assise sans table, lit le Coran, un jeune couple,<br />
elle splendide, atours les plus chers, chevelure noire libre,<br />
s’asseoit à côté de nous: c’est la seule non voilée, mais aussi<br />
la moins sympathique, trop apprêtée et capricieuse.<br />
Parmi les étudiantes, là et dans la bibliothèque, beaucoup de<br />
corps très maigres sous de jolis habits, mais aussi beaucoup<br />
de très belles jeunes filles. Lorsqu’elles traversent le flux<br />
ininterrompu du trafic de la corniche, elles marchent avec<br />
une grâce qui arrêterait la mer.<br />
Nous retrouvons Mona et Kheir.<br />
Mona choisit un café sur la corniche: fauteuils de bois et de<br />
velours, miroirs biseautés, une classe et un luxe d’antan.<br />
Elle nous offre un sahlab tandis qu’elle se commande une<br />
chicha qu’elle tête avidement. Elle en demande une pour<br />
Christian. Kheir rit aux éclats: ils sont arrivés droits et<br />
corrects, tu les débauches, dit-il.<br />
Nous arrivons à l’hôtel El Salamlek, petit palais du roi<br />
Farouk, somptueux et vide. Il ne comporte que des suites,<br />
et deux petites chambres, dont la nôtre. Très belle hauteur<br />
sous plafond, boisé, magnifique salle-de-bains hexagonale<br />
de marbre rose. Bruit de chaufferie et de climatisation: nous<br />
donnons à l’arrière, sur les jardins. L’hôtel, avec quelques<br />
autres bâtiments, palais présidentiel, hôtel moderne,<br />
casino et autres, se trouve à l’intérieur d’un immense<br />
jardin palmeraie très fleuri. L’accès en est bizarrement<br />
régi: très surveillé et très libre à la fois. Notre voiture est<br />
arrêtée à l’entrée du parc chaque fois, notre destination<br />
vérifiée et nos noms sur la liste. « Skabad » sit le chauffeur:<br />
« Escapade, a taste of excellence » est-il écrit sur le bus.<br />
Mona nous raconte que le sultan a construit autrefois<br />
ces jardins pour une Autrichienne, Suzanne, dont il était<br />
éperdûment amoureux, qu’il a épousée...mais qui est<br />
repartie au bout de trois ans. Dépit de Mona.<br />
Dans le jardin, les familles pique-niquent, les gardes sont<br />
affalés sur leur chaise, quelques jardiniers reforment les<br />
plates-bandes. L’ombre est légère et le bruit de la ville bien<br />
loin. Le jardin se prolonge jusqu’à de petites plages, des<br />
ponts d’où l’on pêche, et quelques restaurants. Sur ces<br />
petites routes, les familles contemplent le coucher du soleil<br />
et les mariés, que les jardins clos de l’hôtel accueilleront<br />
dans la soirée, se font photographier sur fond de petites<br />
baies.<br />
Sifflements: ça ferme... Les promeneurs refluent. Nous<br />
remontons nous doucher et nous habiller pour le dîner.<br />
D’un côté du hall, le restaurant du roi Farouk: son ancien<br />
bureau lambrissé, aux fauteuils tendus de vert, aux colonnes<br />
de marbre; de l’autre, celui de la reine Farida (disparue<br />
et remplacée en 1948 sans qu’on ait compris pourquoi:<br />
morte ? Répudiée parce qu’elle n’avait pondu que des filles<br />
?), bleu, plafond kitsch en rosaces, mobilier et toiles cirées,<br />
jazzmen noirs en stuc, écran dans un coin: une cuisine de<br />
luxe. Nous n’y mangeons pas mal, seuls jusqu’à l’arrivée<br />
d’un autre couple. Avec ma petite robe noire et mon châle<br />
de soie, je suis trop chic.<br />
Nous dormons comme des masses et ouvrons un oeil juste<br />
avant midi: le temps de nous faire monter un très décevant<br />
petit-déjeûner et de retrouver Mona et Kheir pour les visites<br />
de l’après-midi.<br />
On est vendredi, les sites ferment tôt.<br />
Nous voyons des catacombes, si l’on a bien compris, lieu<br />
de visite, pique-nique et activités diverses auprès des<br />
morts. Je montre à Mona un bas-relief avec trois femmes:<br />
« c’est Vénus, Aphrodite et Junon, les trois déesses de la<br />
beauté ». Elle enchaîne: « c’est mal entretenu ici, il y a des<br />
toiles d’araignée ». Puis en route pour l’église copte.<br />
Mais en chemin, on a trop faim. Mona nous emmène<br />
chez Sabrina, sur la corniche, « pas un restaurant pour<br />
touristes ». Un car de yéménites, femmes en noirs, seuls<br />
leurs yeux sont visibles, en sort tout juste, les tables sont<br />
jonchées de détritus de poissons. Sous l’escalier, attablée,<br />
en fourrure synthétique et mules noires, filet brodé sur<br />
la tête, Sabrina surveille les opérations. « Une femme<br />
terrible », nous dit Mona.<br />
Nous montons, dans une salle basse de plafond, entourée<br />
de baies vitrées. Ici on mange ce que Sabrina a décidé.<br />
Mezze et un plat de deux poissons, mais de mer, pas du Nil,<br />
c’est plus rare, précise Mona, l’un frit (miam) l’autre grillé,<br />
ornés de quelques crevettes (trop cuites, dit Christian) et<br />
de calamars et accompagnés d’un riz brun comme celui du<br />
sayyadiyé et délicieux. Entre mezze et plat, une soupe de<br />
poisson où nagent crevettes et palourdes. On se régale.<br />
Kheir me défend tout plat du mezze autres que pois chiche<br />
et pomme de terre. Nous mangeons à quatre pour le prix<br />
d’un ailleurs – et encore ils ont dû forcer les prix puisqu’ils<br />
disent avoir « offert » le repas de Kheir.<br />
Nous finissons par trouver l’église, après avoir beaucoup<br />
tourné dans les ruelles: garages de toutes sortes, des<br />
carcasses avant et arrière de voitures traînent dans les<br />
rues. C’est l’heure de la prière: les hommes sont en rang<br />
d’oignon sur le trottoir étroit, ou agenouillés sur des tapis<br />
au milieu du carrefour.<br />
On se demande bien quel est l’intérêt de cette église.<br />
Mona n’explique rien mais prend force photos avec son<br />
téléphone: pour sa doc, dit-elle, car c’est la première fois<br />
qu’elle vient là, bien qu’elle ait beaucoup lu sur cette église<br />
(on ne saura pas quoi). Nous voyons les reliques de Saint<br />
Marc et on nous donne la carte de visite de Saint Georges<br />
(nous les musulmans, on aime St Georges, dit Mona) et<br />
Christian photographie les fleurs de tissu, les ventilateurs<br />
qui scandent le chemin de croix, les mosaïques (pain et<br />
poisson) et la préparation du mariage qui commence là,<br />
tout à l’heure, et des tas de types vont et viennent et se<br />
prennent les pieds dans le tulle et les fils électriques.<br />
Dr. Brigitte Denker-Bercoff est née à Beyrouth, a grandi<br />
à Paris, Bruxelles et Sao Paulo, et vit à Bruxelles. Elle<br />
a épousé Christian Denker le 14 mai 2010 (voir page<br />
précédente), ils ont un petit garçon.<br />
Docteur en littérature française, elle enseigne à<br />
l’Université de Bourgogne à Dijon. Ses domaines<br />
de recherche sont la poésie des XIXe et XXe siècles,<br />
les mythes et leurs images, la théorie littéraire. Elle<br />
travaille actuellement avec ses étudiants sur l‘OuLiPo<br />
(l‘Ouvroir de Litterature Potentielle) à la création de<br />
nouvelles contraintes d‘écriture.<br />
Elle collabore avec le <strong>ST</strong>/A/R depuis 2007.