Paul Sylvestre
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f e c i t<br />
octobre 2015 - 15¤<br />
Dans l’appartement<br />
de <strong>Paul</strong> <strong>Sylvestre</strong><br />
Paroles<br />
d'un collectionneur<br />
La mécanique<br />
Hasslauer<br />
Burl,<br />
pousser les murs
édito<br />
édito<br />
Centre d’art contemporain / Passages<br />
9 rue Jeanne d’Arc | 10 000 Troyes | tél. : 03 25 73 28 27<br />
cac.passages@wanadoo.fr<br />
FECIT<br />
3 Rue Lapie Henrion | 51360 Val de Vesle | Tel : 03 26 40 96 16 | email : fecit.mag@gmail.com<br />
RÉDACTION<br />
Rédactrice en chef : Sophie Hasslauer | Rédactrice en chef adjointe : Éma Voisin<br />
Secrétaires de rédaction : Thibault de la Molle-Piche, Fabrice Boustal<br />
Secrétariat : Aimable Constant | Comptabilité: Sébastien Dix-Doigts<br />
ONT PARTICIPÉ À CE NUMERO<br />
Vincent Dulom, Éric Fournel, François Henri Galland, Quentin Georgelin, Sophie Hasslauer,<br />
Emmanuelle Jamme, Christian Lapie, La 3° narine, Antoine Marchand, Cédric Motard,<br />
Francis Raynaud, Lionel Scoccimaro, Marine Varoquier, Jean-Luc Verna, Damien Wilk<br />
PHOTO DE COUVERTURE<br />
Damien Wilk : « Anarchy in the yucca », 2015 © Sophie Hasslauer<br />
DÉPARTEMENT ARTISTIQUE<br />
Maquette et création graphique: Emmanuelle Jamme<br />
Photographie : Quentin Georgelin assisté de Sophie Hasslauer<br />
Illustration poster central : Hugot<br />
Imprimé en France par Reprocolor, Reims, Marne. Printed in France<br />
La reproduction, même partielle de tout matériel publié dans le magazine est interdite<br />
Dans ce numéro spécial FECIT, nous vous<br />
emmenons à la rencontre de <strong>Paul</strong> <strong>Sylvestre</strong>,<br />
collectionneur entouré de son jeune fils et d’œuvres<br />
tout juste sorties de l’atelier. L’un comme l’autre<br />
collectionnent, mais plutôt que de nous étendre ici<br />
dans un descriptif de la personne, nous allons tout<br />
d’abord laisser le soin à Jean Louis Martinot, un<br />
membre de la famille, de nous le décrire en quelques<br />
mots, pour ensuite vous inviter à une promenade dans<br />
son domicile Troyen, parmi les œuvres qui constituent<br />
une partie de sa collection.<br />
Jean-Louis Martinot :<br />
Je connais <strong>Paul</strong> <strong>Sylvestre</strong> depuis tellement longtemps, je l’ai connu<br />
bien avant qu’il soit ce qu’il est aujourd’hui. Il faut reconnaître que<br />
je ne le connais pas tant que ça en fait, quand je pense que j’approche<br />
de sa vérité, je me rends compte qu’il est encore très loin. C’est comme<br />
les trucs qu’il y a chez lui. Quand tu approches d’un des objets qu’il<br />
achète et chérit tant, tu as le dos qui picote, tu sens la gêne qui t’envahit,<br />
comme chaque fois que tu vas dans une expo (et j’y vais pas souvent) et<br />
que tu ne sais pas si ce que tu vois, ça fait partie des œuvres ou bien de<br />
l’environnement. Je ne sais pas ce qui peut l’attirer dans cette collection<br />
de choses, il s’entoure d’objets qu’il décrit comme des œuvres d’art, mais<br />
moi ce que je vois ce sont des objets de tous les jours. J’ai bien essayé de<br />
comprendre, on m’a dit que le compréhension passait par la description,<br />
mais moi quand je vois une voiture pliée, un carton ou un yucca je vois<br />
une voiture pliée, un carton ou un yucca, sans blague. L’autre jour il m’a<br />
montré cette voiture pliée, puis l’autre, la givrée, les disques il m’a dit<br />
« c’est de la peinture, ça parle de peinture ».<br />
Faut pas me prendre pour un con. Alors je me dis, <strong>Paul</strong> c’est un être<br />
délicieux, si on parlait d’autre chose.<br />
L’autre fois je lui ai dit, « si on parlait d’autre chose » il m’a dit<br />
« si tu veux mais c’est la même chose, le tout c’est de<br />
s’en rendre compte »<br />
photo de couverture ©Sophie Hasslauer<br />
photo ci-contre ©Centre d'Art Contemporain / Passages<br />
FECIT | OCTOBRE 2015 | 2
sommaire<br />
006<br />
Dans<br />
l'appartement<br />
de <strong>Paul</strong> <strong>Sylvestre</strong><br />
006<br />
Frozen landscape<br />
008<br />
Un collectionneur de talent<br />
<strong>Paul</strong> <strong>Sylvestre</strong> nous reçoit dans sa<br />
demeure troyenne et nous parle<br />
de sa collection. Au fil des années<br />
l’homme s’est laissé guider par<br />
sa passion pour l’art, au point<br />
de transmettre le virus à son fils,<br />
Leonard.<br />
010<br />
Regard sur<br />
la collection<br />
010<br />
Donner à voir, à penser<br />
Marine Varoquier rencontre<br />
<strong>Paul</strong> <strong>Sylvestre</strong> : un homme,<br />
une vie, une passion<br />
014<br />
Le projet<br />
artistique<br />
014<br />
Sophie Hasslauer,<br />
la mécanique du réel<br />
où l’on se pose la question de la<br />
différence entre un Picasso et un<br />
Picasso ?<br />
020<br />
La chambre du fils<br />
20 | C. Motard<br />
022<br />
Les autres œuvres<br />
de la collection<br />
22-23 | V.Dulom<br />
24-25 | F.H. Galland<br />
26-27 | Q. Georgelin<br />
28-29 | E. Jamme<br />
30-31 | Hugot<br />
32-33 | Ch. Lapie<br />
34-35 | F. Raynaud<br />
36-37 | L. Scoccimaro<br />
38-39 | D. Wilk<br />
40-41 | Camille Sol<br />
42-43 | J.L. Verna<br />
Commissariat : Sophie Hasslauer<br />
044<br />
La mécanique<br />
Hasslauer<br />
044<br />
La mise en place de la fiction<br />
Pour exister, l'histoire nécessite<br />
un lieu, un écrin<br />
Les plans de l'appartement<br />
Une architecture<br />
au service du projet<br />
048<br />
Éric Fournel interviewé par<br />
<strong>Paul</strong> <strong>Sylvestre</strong><br />
Le Centre d’art contemporain/<br />
Passages n’a eu de cesse, au fil<br />
du temps, d’affirmer sa vocation<br />
de lieu de diffusion et de<br />
promotion de la création artistique<br />
contemporaine en développant un<br />
panel d’activités multiples.<br />
050<br />
Passages par Antoine Marchand<br />
Une volonté de mouvement et<br />
d'ouverture. Passages a su s’imposer<br />
ces dernières années comme un<br />
acteur incontournable sur le<br />
territoire champardennais.<br />
053<br />
BURL concepteur et fabricant d'intérieur /// 41 rue Barrault 75013 PARIS<br />
Melissa Martin +33 612 418 674 /// Quentin Georgelin +33 649 849 407<br />
Backstage<br />
Les coulisses de la création,<br />
pour comprendre le projet<br />
artistique<br />
FECIT | OCTOBRE 2015 | 3
En arrivant chez <strong>Paul</strong> <strong>Sylvestre</strong>,<br />
nous nous retrouvons face à une voiture givrée...<br />
Étonnant ! Il ne fait pourtant pas froid...<br />
Nous nous approchons et découvrons "Frozen<br />
Landscape", une œuvre récente de Sophie Hasslauer.<br />
"Frozen Landscape", 2015, technique mixte, env 400 x 150 x 140 cm ©Sophie Hasslauer
©Sophie Hasslauer<br />
<strong>Paul</strong> <strong>Sylvestre</strong> nous reçoit dans<br />
sa demeure troyenne et nous parle de sa collection.<br />
Au fil des années, l'homme s'est laissé guider par sa passion<br />
pour l'art, au point de transmettre le virus à son fils, Leonard.<br />
Dans l'appartement<br />
de <strong>Paul</strong> <strong>Sylvestre</strong>
la collection<br />
la collection<br />
“DONNER À VOIR,<br />
À PENSER”<br />
Paroles d'un collectionneur,<br />
<strong>Paul</strong> <strong>Sylvestre</strong> pour fecit<br />
©Quentin Georgelin<br />
fecit : Pourquoi ouvrez-vous votre antre<br />
artistique aujourd’hui ?<br />
PS : Je m’interroge depuis ma plus tendre enfance sur<br />
ce qui m’entoure. Mondrian par exemple m’a toujours<br />
fasciné. Comment faire vibrer quelques lignes et<br />
couleurs primaires par un principe d’orthogonalité et<br />
de planéité monochrome ? Lignes fuyantes. J’imaginais<br />
ces lignes ne plus s’arrêter, ces taches se répéter…<br />
Quand j’ai découvert le travail d’un jeune artiste, ayant<br />
appelé une de ses œuvres Mondrian, j’ai beaucoup ri.<br />
Une relecture, une interprétation, une moquerie, un<br />
hommage… Culture artistique, visuelle, mon fils me<br />
fait remarquer qu’il s’agit d’un véritable Mondrian ;<br />
Mondrian parfumé qui plus est. Je sillonne l’allée B.<br />
Cette odeur persiste, comme une image à jamais<br />
gravée. Nouvelle expérience. J’y retourne, échange<br />
quelques mots avec l’artiste. Mon choix est fait ! Je ris<br />
d’autant plus que mon fils est passé juste avant moi<br />
l’acquérir. Nous la partagerons ! C’est à ce moment<br />
précis que j’ai souhaité que le public connaisse cette<br />
rencontre avec l’expérience sensitive et s’interroge. Je<br />
ne vois plus Mondrian, je vois des Mondrian…<br />
6 | OCTOBRE 2015 | FECIT<br />
FECIT | OCTOBRE 2015 | 6
la collection<br />
la collection<br />
fecit : Univers intimiste, nous sommes dans votre<br />
salon, deux œuvres se font face !<br />
PS : Intimiste non, je n’aime pas ce terme ! Épure<br />
volontaire voire imposée. Je m’explique. J’aime être<br />
surpris, d’où mon amour de l’art, je ne pourrais<br />
vivre sans. Donc j’accumule. Chaque acquisition<br />
revêt une histoire, un sentiment, une émotion, une<br />
rencontre qui m’est propre. Avant j’entreposais,<br />
j’accrochais ci et là. Véritable accrochage à l’italienne.<br />
Puis un jour j’ai acquis<br />
cette monumentalité<br />
envoûtante, je fais<br />
référence à l’ellipse que<br />
vous pointez de Sophie<br />
Hasslauer. Cette œuvre<br />
est extraordinaire à mes<br />
yeux. Elle ne dit rien, ne<br />
montre rien et pourtant,<br />
je ne m’en lasse pas. Elle vous répond, répond à vos<br />
questions, vous projette et vous maintient. Je pourrais<br />
m’étendre et évoquer mes souvenirs, mais non ! Je vous<br />
laisse regarder.<br />
Si les artistes se jouent de nous parfois ! Si l’art se<br />
joue de nous ! C’est à mon tour de faire de même.<br />
J’ai souhaité reproduire cela ici. Mettre en évidence<br />
une œuvre. Dire et montrer qu’il s’agit d’art. Mais<br />
pas que ! L’œuvre en contrepoint de Vincent Dulom,<br />
qui vous fera dos ou face n’est donc pas là par hasard.<br />
Essayez ! Soit vous êtes spectateur, soit vous êtes acteur.<br />
Spectateur d’une idée mise en scène où vous vous<br />
positionnez entre ces deux projections picturales. Je<br />
joue l’artiste ! Je vous interroge et vous devenez acteur.<br />
Cette œuvre est extraordinaire<br />
à mes yeux. Elle ne dit rien,<br />
ne montre rien, et pourtant,<br />
je ne m'en lasse pas.<br />
Autant de clés pour découvrir mon antre et surtout<br />
pour vous donner les clés de ce qu’est l’art. Que<br />
ressentez-vous ? Vous avez froid ? Vous frissonnez ?<br />
Cela vous dérange ?<br />
fecit : Vous aimez nous interroger, dites-vous.<br />
Nous faire regarder. Moi par exemple j’ai envie de<br />
toucher l’œuvre que l’on découvre en entrant<br />
dans la cour. De m’installer dans votre deuxième<br />
salon. Mais je ne sais<br />
que faire. M’allonger<br />
peut-être. Est-ce votre<br />
voiture ? Nous passons<br />
sans la voir ou bien au<br />
contraire, nous scrutons<br />
les moindres détails. Le<br />
Givre s’est figé, comment<br />
est-ce possible ? Estce<br />
votre assise quotidienne ! Je ne sais plus que<br />
dire ou que faire ! Tout ici laisse à penser l’art<br />
ou du moins à penser différemment. Essayez-vous<br />
d’orienter notre regard ?<br />
PS : Vous cherchez à me faire dire ce que je ne veux pas<br />
dire. Regardez plutôt.<br />
Voyez ce qui m’entoure…<br />
fecit : Une vue d’ensemble, un point nodal se<br />
profile dans mon esprit. Tout y est sculptural ?<br />
PS : J’aime beaucoup votre analyse.<br />
Effectivement l’ensemble des œuvres et objets visibles<br />
dans mon humble demeure est sculptural. J’aime être<br />
en présence de volume. Mais ! Il y a toujours un mais.<br />
Dans ma quête compulsive, une idée m’est venue. Il se<br />
trouve que l’ensemble de ces œuvres, aussi sculpturales<br />
soient elles, est pictural. « Picasso » par exemple,<br />
une de mes dernières acquisitions, est avant tout une<br />
idée, une réflexion sur l’art, sur l’Histoire de l’art.<br />
Le volume s’est transformé en planéité. Seule la peau<br />
sculpturale est conservée pour devenir une surface.<br />
Le titre, n’en parlons pas, est plus qu’évocateur. Des<br />
terminologies propres à la peinture donc. L’ellipse<br />
se veut « substance », se veut ovale, reprend les codes<br />
de l’antiquité ! Évoque une relation au passé, tout en<br />
ne conservant que la forme. La 204 par exemple est<br />
un travail de surface. L’objet conserve ses formes, son<br />
nom, il est apparenté à une 204, mais n’en est plus<br />
une.<br />
Avez-vous remarqué mes jolis mugs ? Avez-vous<br />
observé ma collection de disques ?<br />
fecit : Justement, non ! Je n’y avais même pas prêté<br />
attention. Ici encore il s’agit de déjouer notre<br />
regard ?<br />
PS : Rentrer en contact avec des objets. Être un objet à<br />
penser, c’est la démarche engendrée par François Henri<br />
Galland ou d’autres artistes de cette génération, teintée<br />
d’humour. Mugs, vase, chaussure, plante verte, cadre<br />
photo, où est le vrai du faux !<br />
fecit : Frontière ou limite ?<br />
PS : Je soulignerai une œuvre pour répondre à votre<br />
question : Brillo.<br />
Brillo est avant tout un objet, un objet signé, dessiné.<br />
Votre regard s’est-il posé sur un carton qui n’en n’est<br />
pas un ? Être au plus près du réel. Représenter le<br />
réel : la peinture par ses textures, la sculpture par<br />
ses volumes, la photographie par ses aplats et ses<br />
profondeurs. Chaque élément représenté est choisi<br />
avec minutie. Choix d’être représenté ou choix de<br />
représenter. Montrer l’i-montrable. Générer un facsimilé.<br />
Ni frontière, ni limites, que des distances…<br />
Visite nonchalante. Expérimentation. Questionnement<br />
dès la porte d’entrée. Autant d’œuvres signées ou non<br />
pour générer une lisibilité. Faire croire, faire dire,<br />
déranger, s’interroger et repartir interloqué.<br />
photos ©Sophie Hasslauer<br />
7 | OCTOBRE 2015 | FECIT FECIT | OCTOBRE 2015 | 7
la mécanique du réel<br />
la mécanique du réel<br />
Sophie Hasslauer<br />
Ça la rend heureuse,<br />
cet homme qui passe sans rien voir<br />
« Brillo » (remake) 2015. Peuplier, graphite. Environ 60 x 60 x 50 cm. Courtesy de l’artiste<br />
©Sophie Hasslauer<br />
Le contour des choses, c’est<br />
peut être pour ça que Sophie<br />
Hasslauer se rend à l’atelier.<br />
Pourquoi ? Parce qu’il est flou,<br />
pas vu, sans consistance, si ce n’est<br />
celle qu’on veut bien lui prêter.<br />
Elle dit, «je fais de la sculpture», on lui<br />
répond de quoi ? du marbre, du<br />
bois, du fer ?, « ……………………,<br />
………………………… ». Non, son<br />
matériau ce sont les mots, l’histoire,<br />
l’histoire de l’art, la théorie. C’est<br />
avec ça qu’elle travaille. Oui, mais<br />
il y a la réalité aussi. C’est quoi la<br />
réalité. Elle dit, «je fais de la peinture».<br />
De quoi ? «de la peinture, je fais ce qui<br />
existe». L’autre jour, il y a cet homme<br />
qui dit qu’il s’y connaît en art,<br />
il déambule dans l’atelier, l’air<br />
inspiré, connaisseur. Il est passé<br />
devant ses œuvres sans les voir. Ça<br />
la rend heureuse, cet homme qui<br />
passe sans rien voir, elle dit que<br />
c’est intéressant.<br />
“<br />
<strong>Paul</strong> ? Je l’ai connu par<br />
l’intermédiaire de ma femme,<br />
qui était la pédiatre de son<br />
fils Léonard. On se connaît<br />
maintenant depuis quelques années et c’est<br />
toujours un plaisir de lui rendre visite et<br />
de découvrir ses dernières acquisitions ….<br />
(et sa cuisine, toujours aussi inventive).<br />
Leonard a grandi et depuis quelques temps il<br />
manifeste lui aussi un intérêt croissant pour<br />
l’art, et c’est quelque chose que j’observe<br />
avec beaucoup de curiosité. On discute<br />
souvent, et tout comme je trouve fascinante<br />
la mise en place de raisonnements chez les<br />
petits enfants, la manière dont ses goûts, ses<br />
choix et son approche intellectuelle de l’art<br />
se mettent en place m’intéresse au plus haut<br />
point. Je crois que son père a évidemment<br />
une certaine influence, mais Leonard est<br />
curieux et semble assez autonome dans ses<br />
choix. Les œuvres acquises par l’un ou par<br />
l’autre trouvent maintenant leur place dans<br />
l’ensemble de la maison et ne se limitent plus<br />
à la « géographie » de leur acquéreur."<br />
8 | OCTOBRE 2015 | FECIT<br />
FECIT | OCTOBRE 2015 | 8
©Quentin Georgelin<br />
"Picasso" (héritage), métal<br />
2009-2015, 450 x 180 x 35 cm<br />
Courtesy de l'artiste
Atelier simple objet<br />
Lampe bricolo 2008<br />
Petit matériel électrique, bois, métal<br />
Courtesy de l'artiste<br />
©Sophie Hasslauer<br />
©Quentin Georgelin<br />
©Quentin Georgelin<br />
©Quentin Georgelin<br />
"Poste restante", 2015, gouache sur papier / acrylique sur papier /<br />
aquarelle sur papier / encre sur papier / graphite sur papier<br />
Courtesy de l'artiste
la chambre du fils<br />
la chambre du fils<br />
Cédric Motard<br />
«Vous en changez souvent ?»<br />
“<br />
J’ai montré deux-trois pièces<br />
lors de la dernière FIAC, et<br />
comme souvent je ne savais pas<br />
quoi faire de mes os, je trainais<br />
un ennui sans limites aussi ai-je été<br />
plutôt réceptif quand ce jeune garçon s’est<br />
approché de moi (ah, ça me fera passer le<br />
temps) et m’a posé des questions sur mon<br />
travail. La composition à la Mondrian<br />
l’amusait, il posait des questions sur<br />
l’odeur du papier, «est-ce que vous en<br />
changez souvent ?»,- «quoi ?», «Ben<br />
le papier, après l’odeur elle s’en va...»,<br />
ça avait l’air de lui poser problème, il<br />
est resté un bon moment sur le stand, il<br />
allait d’une pièce à l’autre et revenait<br />
sans cesse vers moi. «C’est bizarre quand<br />
même ce papier de couleur, quand<br />
on pense…. Remarque finalement là<br />
c’est approprié.», il s’appelle Leonard<br />
<strong>Sylvestre</strong>, il est reparti avec le Mondrian.<br />
Sinon, <strong>Paul</strong> <strong>Sylvestre</strong> je ne le connais pas,<br />
peut-être qu’il est de sa famille, il a le<br />
même nom."<br />
Dans la chambre<br />
de Leonard, le fils,<br />
on retrouve<br />
le Mondrian,<br />
acquis à la FIAC<br />
«Composition with Red, Blue and Yellow», 2015.<br />
Bois, peinture acrylique, papier hygiénique coloré.<br />
Courtesy de l'artiste<br />
© sophie Hasslauer<br />
©Quentin Georgelin<br />
11 | OCTOBRE 2015 | FECIT<br />
FECIT | OCTOBRE 2015 | 11
Vincent Dulom<br />
En quête de sublime, il cherche<br />
une peinture sans limites.<br />
les œuvres<br />
“<br />
Je dois ma rencontre avec<br />
<strong>Paul</strong> <strong>Sylvestre</strong> à Sophie. Il la<br />
collectionnait de longue date et<br />
sa grande peinture noire occupait<br />
déjà le mur sur lequel elle est toujours<br />
accrochée. Sophie a suggéré que ce serait<br />
peut-être une bonne chose de lui présenter<br />
mon travail. Elle en a parlé et ça s’est fait<br />
comme ça. Presque naturellement. Par<br />
son entremise. L’idée de poser l’une de mes<br />
petites peintures cintrées en regard du grand<br />
capiton sur l’autre mur s’est imposée tout de<br />
suite. On ne peut jamais savoir à l’avance si<br />
un collectionneur va apprécier votre travail,<br />
du coup j’ai été heureux d’entrer dans sa<br />
collection et d’y trouver ma place aussi vite.<br />
Pour parler de lui davantage, je voudrais<br />
évoquer un repas.<br />
Je le rapporte de mémoire.<br />
Elle : n’a pas de nom. C’est une création de<br />
toutes pièces.<br />
Lui : me remplace.<br />
Tour de table :<br />
Elle : Cela fait longtemps que tu me<br />
cherches ?<br />
Picasso : Je ne cherche pas, je trouve.<br />
Lui : Il se trouve. Plutôt.<br />
Picasso : Comme on tombe sur un trèfle à<br />
quatre feuilles.<br />
Lui : Dans la vigilance du regard. Il faut<br />
marcher tous les jours.<br />
Elle ; Vous marchez depuis longtemps ?<br />
Lui : Comme un homme. Depuis toujours.<br />
Giotto : N’auriez-vous pas vu des<br />
oiseaux ?<br />
Le temps : Tout arrive à qui sait attendre.<br />
Blanchot : L’attente, l’oubli...<br />
Elle : Oui, mais pour mieux me retrouver.<br />
L’autre : Toujours la même et chaque fois<br />
différente.<br />
Lui : La cheminée est belle ici.<br />
Elle : Oui. J’aime les cheminées.<br />
Lui : Celle-là raconte ton histoire.<br />
<strong>Paul</strong> <strong>Sylvestre</strong> : Ici, c’est l’endroit que je<br />
préfère. Je m’y installe et m’y perd.<br />
Elle : De l’autre côté, c’est Sophie.<br />
Lui : Oui. Le tableau noir.<br />
Hasslauer : Côte à côte, dans la même<br />
espace.<br />
Elle : Je m’y efface aussi. Dans le capiton<br />
de velours.<br />
Lui : Aussi, oui. Ça me fait plaisir.<br />
Elle : Dans les deux, le profond et le<br />
mouvant.<br />
Lui : Oui. Et l’incertain.<br />
Elle : L’incertain, c’est l’objet.<br />
Lui : Sa présence dans l’absence.<br />
Fra Angelico : Et le retrait.<br />
Elle : Dans l’étendue de la couleur.<br />
Lui : Oui. Une étendue sans limites, sous<br />
l’ombre qui vacille et emporte avec elle le<br />
plan à l’espace immaculé qui la reçoit.<br />
Elle : Oui. À l’ouvert. Je suis là. Pour l’éveil<br />
et la vie. ”<br />
V.D. (08 2015)<br />
Né à Bagnères-de-Bigorre<br />
en 1965, il vit et travaille à Paris.<br />
Vincent Dulom se présente comme<br />
un peintre autodidacte. Après des<br />
études en Arts Appliqués, il choisit<br />
de travailler la peinture, seul, loin<br />
du monde de l’art contemporain,<br />
pendant une «période<br />
d’apprentissage» de 16 ans.<br />
En quête de sublime, il cherche<br />
« une peinture sans limites ». Il<br />
refuse l’imagination et la manière<br />
et essaye de maintenir son travail<br />
dans une absence de définition. Il<br />
nie toute composition, supprime<br />
toute trace de sa présence et met<br />
en oeuvre une couleur étale en<br />
limitant son action à une « non -<br />
-intervention systématique ».<br />
Ce retrait le conduira vers des<br />
halos éthérés d’ombres colorées<br />
qui se meuvent au dessus de leur<br />
support en se dérobant au regard.<br />
Cet effacement visible, significatif<br />
de son travail récent, impose en<br />
peinture une pensée du monde<br />
éclairée par le doute et l’incertitude.<br />
Ses dessins, organisés par quelques<br />
traits dans l’espace, le plus souvent<br />
adossés à l’architecture, en forment<br />
aussi des épures.<br />
«Peintre, je suis un passeur de peinture.<br />
Ma peinture, par son effacement, dans le<br />
présent suspendu d’un regard s’effondrant sur<br />
lui-même, est le corps dense d’une béance de la<br />
pensée qui s’étend à l’univers et s’ouvre à l’éveil.<br />
Le regard en peinture me fait entre-voir ce<br />
que je vis.»<br />
Son travail a été montré dans de<br />
nombreuses expositions personnelles<br />
et collectives, en institutions<br />
publiques et privées, en galeries et en<br />
foires. Il est présent dans de grandes<br />
collections en France et à l’étranger.<br />
La Galerie du Jour agnes b (Paris) le<br />
soutient ; les galeries Valerie Lambert<br />
(Bruxelles) et Leonardo Agosti (Sète)<br />
l’ont représenté.<br />
"posée 1311090113110901",<br />
Jet d'encres pigmentaires sur papier Arches<br />
(tirage unique)& planche de contreplaqué peint en<br />
blanc sur la face supérieure<br />
32,7 cm x 21 cm x 29,7 cm<br />
Courtesy de l'artiste<br />
©Vincent Dulom
les œuvres<br />
les œuvres<br />
François-Henri Galland<br />
Un exorcisme, donc.<br />
“<br />
J’ai<br />
rencontré <strong>Paul</strong><br />
<strong>Sylvestre</strong> lors d'un<br />
enterrement de vie<br />
de garçon.”<br />
Ce sont des objets réalisés entre<br />
1997 et 1999.<br />
Le moyen «d'en finir» avec un<br />
long épisode mélancolique fut le<br />
recours à l'humour potache par le<br />
truchement d'objets entièrement<br />
délégués, des photographies à<br />
leur réalisation : du pouvoir des<br />
objets...<br />
Je peux dire sans exagération qu'ils<br />
furent durant ces années les garants<br />
de mes capacités à survivre.<br />
Ils n'ont été montrés à l'époque<br />
qu'une seule fois lors d'une<br />
exposition dont le thème était :<br />
«Faire son deuil»....<br />
Un exorcisme, donc.<br />
"Sans titre" 1997-1999,<br />
impressions sur mugs<br />
Courtesy de l'artiste<br />
©Quentin Georgelin<br />
13 | OCTOBRE 2015 | FECIT<br />
FECIT | OCTOBRE 2015 | 13
les œuvres<br />
les œuvres<br />
Quentin Georgelin<br />
Il questionne l'esthétique du rêve éveillé.<br />
Photographe mais aussi<br />
architecte, Quentin Georgelin<br />
véritable arpenteur, questionne<br />
l’esthétique du rêve éveillé :<br />
De l’ultra réalisme aux<br />
anamorphoses il utilise diverses<br />
techniques argentiques et<br />
numériques pour représenter<br />
l’attachement sentimental que l’on<br />
peut avoir à un lieu, souvenir qui<br />
se délite et dont il recompose les<br />
fragments.<br />
À New York, il navigue sur un<br />
territoire sans limite, entre cette<br />
ville qui se regarde et cette banlieue<br />
qui devient ville. Ici, on ne voit<br />
qu’au présent, tout se bouleverse<br />
continuellement.<br />
“<br />
C’est dans une galerie à<br />
Chelsea que l’on m’a présenté<br />
<strong>Paul</strong>. J’ai vite travaillé pour<br />
lui sur des projets de design.<br />
Comme il me soutenait et participait à<br />
mes expériences photographiques je lui<br />
ai offert certains tirages qui lui tenaient<br />
à cœur."<br />
Window #1 versus Uptown, NYC 2012, 203 x 127 cm impression sur plexi monté en caisson lumineux Courtesy de l'artiste ©Quentin Georgelin<br />
14 | OCTOBRE 2015 | FECIT<br />
FECIT | OCTOBRE 2015 | 14
les œuvres<br />
les œuvres<br />
Emmanuelle Jamme<br />
«Mes tamponades sont à la gravure<br />
ce que la pochade est à la peinture,<br />
des œuvres légères à l’esprit libre.»<br />
La représentation du corps<br />
(nu, habillé, caché, avec attributs...)<br />
est une façon pour Emmanuelle<br />
Jamme de réfléchir sur l’icône,<br />
l’image de la femme (souvent),<br />
de l’homme (parfois). Idéalisée,<br />
réaliste, surréaliste..., l’icône<br />
devient alors grâce à la gravure,<br />
un motif qui peut se reproduire.<br />
Superpositions, juxtapositions,<br />
multiplications…<br />
La pratique régulière du dessin<br />
de nu en atelier lui permet<br />
d’approfondir son travail sur<br />
le corps en choisissant d’autres<br />
mediums que la linogravure<br />
(monotypes, cartes à gratter, encres,<br />
aquarelle, craies…) et à réfléchir sur<br />
le statut du corps, dans ses lignes,<br />
sa masse, son volume… En outre,<br />
ses carnets de bord l’accompagnent<br />
dans cette pratique du dessin quasi<br />
quotidienne ; ils sont publiés sur<br />
son blog depuis 2010.<br />
Emmanuelle Jamme est enseignante en<br />
design graphique à Montpellier.<br />
On retrouve son travail sur :<br />
www.tamponades.com<br />
La série des « Street vue » a<br />
commencé en 2012 à Nîmes, puis à<br />
Montgeron (Art’ifice 2014). Il s’agit<br />
alors de réfléchir à l’idée de la rue,<br />
de l’espace public et de l’intrusion<br />
de Google dans notre vie privée avec<br />
son application Google streetview.<br />
“<br />
La première fois que j’ai vu <strong>Paul</strong><br />
<strong>Sylvestre</strong>, c’était à Nîmes lors<br />
de l’exposition de mon premier<br />
Street vue. J’avais alors travaillé<br />
sur l’idée de la rue en tant qu’espace public<br />
dans laquelle, grâce à Google street, on<br />
pouvait apercevoir des petits bouts d’espaces<br />
privés. J’avais choisi une rue de Nîmes qui<br />
se trouvait être une rue assez intime pour<br />
moi puisque c’était la rue où habitait ma<br />
belle-mère, et je m’amusais à me dire que,<br />
dans une des maisons, c’était un peu mon<br />
intimité que j’exposais au su et au vu de tout<br />
le monde.<br />
<strong>Paul</strong> <strong>Sylvestre</strong> a adoré ce travail et m’a alors<br />
montré des photos de sa maison à Troyes.<br />
L’idée d’un nouveau street vue a germé :<br />
il ne s’agissait plus d’une rue, mais d’une<br />
propriété entourée d’une espace privé.<br />
En effet, dans une rue, on passe en marchant<br />
Parallèlement, une série d’estampes<br />
naît : les « Intimités », petites<br />
narrations graphiques inspirées<br />
pour la plupart des dessins dans<br />
ses carnets de bords. Ce sont des<br />
fragments de ces estampes qui sont<br />
utilisés à l’intérieur des Street vue.<br />
et sans le vouloir on voit, sans chercher à<br />
regarder on aperçoit des bouts d’intimité. Or<br />
dans le cas de la maison de <strong>Paul</strong>, il s’agissait<br />
d’entrer dans la propriété et de faire le tour<br />
de la maison, donc de pénétrer dans un<br />
espace privé. L’intrusion visuelle n’est plus<br />
involontaire ! En entrant dans le jardin, je<br />
vais regarder s’il y a quelqu’un et je vais voir.<br />
L’enjeu n’est plus le même. Que vais-je voir<br />
dans cette maison? Je ne la connais pas, il<br />
m’a juste montré les façades, mais ne m’a<br />
encore rien dit de sa vie. Je sais qu’il est<br />
collectionneur, il doit donc avoir des œuvres<br />
d’art dans sa maison. Mais, cette maison<br />
n’est pas un musée, c’est sa maison, donc<br />
il y vit ! Comment vit un collectionneur ?<br />
Comme tout le monde, comme moi…<br />
Je vais donc mettre ma vie dans la maison de<br />
<strong>Paul</strong> <strong>Sylvestre</strong>. Et c’est lui qui la regardera à<br />
travers les fenêtres découpées.”<br />
"Streetvue"<br />
livre dépliant<br />
100 x 40 x 25 cm<br />
Courtesy de l'artiste<br />
©Emmanuelle Jamme<br />
©Quentin Georgelin<br />
15 | OCTOBRE 2015 | FECIT<br />
FECIT | OCTOBRE 2015 | 15
©Hugot
les œuvres<br />
Christian Lapie<br />
Ces figures sans bras ni visage,<br />
monumentales et puissantes,<br />
interrogent et déstabilisent.<br />
Christian Lapie a fait ses<br />
études à l’École des Beaux Arts<br />
de Reims 1972-1977 et à l’École<br />
Nationale Supérieure des Beaux<br />
Arts de Paris 1977-1979. D’abord<br />
peintre, il travaille à partir de<br />
craie, oxydes, cendres sur de<br />
grossières bâches montées sur des<br />
châssis rudimentaires, le motif de<br />
la fenêtre se transforme en celui<br />
de croix. La forme devient basrelief,<br />
les matériaux évoluent tôles,<br />
ciment, bois calcinés « In Case<br />
of War » 1992 Frac Champagne-<br />
Ardenne ou comme dans la<br />
commande publique «War Game»<br />
ciment, fers à béton peinture,<br />
l’œuvre est censurée en 1995.<br />
Partant de cette brutalité manifeste<br />
et suite à un séjour de création<br />
dans la forêt amazonienne, il<br />
passe directement à une sculpture<br />
monumentale. Ce sont des figures<br />
de bois brut et calciné certaines<br />
voient le jour en Champagne,<br />
terre de combats sanglants lors<br />
de la Première Guerre Mondiale,<br />
pour s’installer à travers le monde<br />
«Fort 61» Parc de Sculpture<br />
d’Echigo Tsumari, Japon, «La<br />
nuit recule» Fondation Salomon,<br />
Alex France, Musée des Beaux<br />
Arts de Reims,France, «The<br />
Crow’s Nest»,Canada. Abbaye de<br />
Saint Jean d’Orbestier, ville de<br />
Mulhouse, des Herbiers, Villiersle-Bel,<br />
Château d’Arsac France, «Le<br />
surgissement des ombres» Château<br />
musée de Gaasbeek, Belgique, en<br />
fonte «Le pupitre des Étoiles» Parc<br />
de Sceaux, France ou en pierre<br />
à Jaipur «In Path of the Sun and<br />
the Moon» et dans de nombreuses<br />
collections privées en Europe et aux<br />
États-Unis. L’œuvre de Christian<br />
Lapie questionne notre mémoire<br />
individuelle et collective. Ses<br />
installations de figures spectrales<br />
naissent de lieux choisis, empreints<br />
d’histoire, quel que soit le<br />
continent ces figures sans bras ni<br />
visage, monumentales et puissantes,<br />
interrogent et déstabilisent.<br />
Et le critique Philippe Piguet de<br />
surenchérir : «Le devoir de mémoire<br />
auquel il est fait allusion est un devoir civique,<br />
tout simplement humain.»<br />
“<br />
La maquette de «La<br />
constellation du fleuve»<br />
est dans la collection de<br />
<strong>Paul</strong> <strong>Sylvestre</strong> et c’est pour<br />
moi un grand mystère et une énigme.<br />
Comment cet outil de travail est-il<br />
entré dans la collection ? Je l’ignore,<br />
car je n’ai jamais vendu, ni même offert<br />
de maquette, car ce sont pour moi des<br />
instruments de travail nécessaires à la<br />
démarche et réalisés à l’échelle. Sur<br />
celle-ci, l’on peut même voir le tracé<br />
au sol qui m’a servi de repères pour le<br />
montage au Domaine de Chaumontsur-Loire<br />
pour l’exposition 2015. Ce<br />
sont aussi des éléments d’archives pour<br />
mes installations éphémères. Il faut que<br />
je demande à Sophie Hasslauer de me<br />
mettre en contact avec <strong>Paul</strong> <strong>Sylvestre</strong>,<br />
j’ai quelques questions à lui poser…"<br />
Christian Lapie maquette pour<br />
"la constellation du fleuve", 2015.<br />
Bois, lasure, colle.<br />
Courtesy de l'artiste<br />
©Christian Lapie<br />
17 | OCTOBRE 2015 | FECIT<br />
FECIT | OCTOBRE 2015 | 17
les œuvres<br />
les œuvres<br />
Francis Raynaud<br />
Une famille improbable d’objets<br />
Les œuvres de Francis<br />
Raynaud composent une<br />
famille improbable d’objets qui<br />
incorporent et combinent des<br />
éléments hétérogènes, souvent<br />
instables, informes, organiques<br />
ou minéraux. Ses sculptures sont<br />
autant de cristallisations — molles,<br />
volontairement approximatives<br />
— des expérimentations menées<br />
quotidiennement dans l’atelier.<br />
Manger, boire, fumer : les traces<br />
que l’artiste en conserve dans ses<br />
sculptures sont la marque du regard<br />
amusé et distancié qu’il porte sur sa<br />
propre condition.<br />
Francis Raynaud est né en 1984 à<br />
Clermont-Ferrand.<br />
Il vit et travaille à Rennes.<br />
francisraynaud.com<br />
“<br />
J’ai rencontré PS lors d’un<br />
trajet Rennes-La Rochelle en<br />
autocar. Je lisais la Tentation<br />
de Saint Antoine. Nous avons<br />
parlé de Flaubert, Bouvard et Pécuchet,<br />
de cuisine italienne, des sculptures de<br />
Baselitz et de la réplique de Stefano Satta<br />
Flores dans "Nous nous sommes tant<br />
aimés" : Spaghetto! Gran consolatore<br />
d’ogni pena.”<br />
©Quentin Georgelin<br />
Francis Raynaud "Les aspirantes" 2013. Éponge de chantier, chêne, verre. 14 X 9 X 6 cm. Courtesy de l'artiste<br />
18 | OCTOBRE 2015 | FECIT<br />
FECIT | OCTOBRE 2015 | 18
Cette phrase de Caspar David<br />
Friedrich « L’art est un jeu, mais c’est un<br />
jeu sérieux », est un des postulats de départ de<br />
ce travail. Afin de conserver sa « liberté »,<br />
l’artiste aime concilier ces deux<br />
termes apparemment antinomiques<br />
«jeu» et «sérieux». «Je prends en fait très<br />
au sérieux la façon dont je m’amuse (…) Le<br />
sérieux s’appliquerait davantage à la manière<br />
dont le travail se pense et se réalise, qu’au sujet<br />
abordé.»<br />
Comme d’autres artistes, Lionel<br />
fait appel à des artisans et des corps<br />
de métier en tout genre, mais il<br />
“<br />
Je connais <strong>Paul</strong> <strong>Sylvestre</strong> depuis plus de 10 ans<br />
maintenant, depuis Octobre 2004 précisément.<br />
Nous nous sommes rencontrés dans des circonstances<br />
particulières que la discrétion m’interdirait de décrire<br />
ici si <strong>Paul</strong> et moi n’avions pas partagé ouvertement notre<br />
penchant pour les clubs libertins aux yeux et aux sus de tous.<br />
J’ai donc rencontré <strong>Paul</strong> dans un club échangiste de la région<br />
parisienne lors d’une partie fine au cours de laquelle nous<br />
avons bu un verre ensemble après avoir baisé les mêmes femmes<br />
à quelques minutes d’intervalle.Ce genre de contexte se prête<br />
bien aux confidences et <strong>Paul</strong> m’a donc rapidement avoué cette<br />
passion pour l’art contemporain qui le poussait à être à Paris<br />
régulièrement et à cette période de l’année en particulier.<br />
Résident en province, il était là pour les foires de l’automne<br />
tout comme moi. Je lui fis donc part de mon métier d’artiste<br />
et le contact passa instantanément fort de plusieurs passions<br />
communes comme l’art et le surf.<br />
Nous nous retrouvâmes dans la semaine pour visiter les foires<br />
ensemble, puis il passa voir mon exposition à la galerie avec<br />
tient à réaliser ses pièces en totale<br />
collaboration avec eux, et à acquérir<br />
au passage une partie de leur savoirfaire.<br />
Depuis plusieurs années,<br />
Lionel Scoccimaro collabore<br />
avec un peintre carrossier, pour<br />
réaliser la série « Custom made »<br />
notamment. «Nous travaillons vraiment<br />
ensemble sur les motifs que je dessine, que nous<br />
masquons ensemble, qu’il peint, qu’il vernit et<br />
que nous polissons de concert.»<br />
Cependant l’artiste mène à bien la<br />
réalisation de nombreuses de ses<br />
œuvres, car les enjeux techniques<br />
et les savoir-faire de sculpteur le<br />
poussent en eux-mêmes à réaliser<br />
des projets dont le plaisir du<br />
rapport à la matière reste le moteur<br />
premier. «La confrontation avec les<br />
matériaux de la sculpture (résines, bois,<br />
plâtres, aluminium, etc…) est, dit-il, un<br />
vecteur de plaisir incontournable. Côtoyer des<br />
artisans enrichit le champ des possibles une fois<br />
de retour à l’atelier. Je me sens d’ailleurs très<br />
archaïque dans mon rapport à l’atelier, aux<br />
outils et au savoir-faire.»<br />
Entretien réalisé par Caroline E<br />
laquelle je travaillais à cette époque. Il acquit une pièce et nous<br />
sommes devenus amis assez rapidement après m’ayant invité à<br />
plusieurs reprises à certaines fêtes et soirées qu’il organisait chez<br />
lui à cette époque.<br />
Depuis cette date il vient régulièrement à l’atelier et visiter mes<br />
expos, il est devenu un de mes plus fidèles collectionneurs.<br />
Très investi dans sa démarche envers l’art, il joue volontiers les<br />
« courtiers » sans jamais réclamer de contre partie financière<br />
et place régulièrement certaines de mes œuvres dans les<br />
collections de ses amis, jouant un rôle de conseiller avec le plus<br />
grand plaisir.<br />
Nous avons gardé une relation de grande confiance mutuelle<br />
et nous continuons à nous voir avec plaisir en dehors du milieu<br />
de l’art aussi bien que lors des manifestations propre à l’art<br />
contemporain qui nous rassemblent plusieurs fois par an mais<br />
hélas bien loin aujourd’hui du milieu libertin dans lequel nous<br />
nous sommes rencontrés.<br />
<strong>Paul</strong> est donc un collectionneur et un ami, un de ceux avec<br />
lesquels une relation construite et durable a pu s’instaurer.”<br />
Lionel Scoccimaro<br />
Hybridation, contre-culture, détournement et<br />
passions personnelles mais également les modes de<br />
fonctionnement du jeu sont les moteurs de Lionel<br />
Scoccimaro.<br />
Descriptif œuvre :<br />
« Vans number one skateboard shoes » est une scultpure,<br />
elle appartient à la série « custom made » commencée<br />
en 2003 avec la série des culbutos.<br />
Dans cette série d’oeuvres certaines d’entre elles<br />
revisitent des objets cultes des contres-cultures anglosaxonnes,<br />
du mythique moteur bi-cylindres de Harley<br />
Davidson à l’Austin Mini 850, chacune de ces œuvres<br />
est passée au crible de la customisation. Il en va de même<br />
pour cette paire de chaussures mythiques de la culture<br />
skate qui est ici répliquée par moulage en résine et<br />
repeinte de façon hyper-réaliste.<br />
Abandonnée dans un coin de l’exposition, elle passe<br />
alors pour une simple paire de chaussures qui aurait été<br />
abandonnée par un passant mais portant les stigmates<br />
de leur utilisation ces objets fonctionnent comme un<br />
leurre et renvoient à la culture de l’errance urbaine et de<br />
la pratique du skateboard.<br />
Véritable objet de mode des années 70’s et 80’s mais<br />
aussi signe de reconnaissance des skaters , cette pièce<br />
se joue du statut même de la sculpture.Objet anodin<br />
au premier abord, on ne la découvre comme sculpture<br />
qu’en lui accordant une attention particulière. C’est le<br />
détail du traitement et l’incongruïté de cette présence<br />
dans le lieu d’exposition qui lui confèrent son statut<br />
d’œuvre d’art.<br />
©Sophie Hasslauer<br />
"Vans number one skateboard shoes" (grises) 2015.<br />
Pièce unique, résine acrystal, peinture, vernis.<br />
Pointure 42.<br />
Courtesy de l’artiste.
entête<br />
les œuvres<br />
Damien Wilk<br />
Anarchy in the Yucca<br />
“<br />
Le lien entre <strong>Paul</strong> et moi ne date<br />
pas d’hier, nos pères étaient frères<br />
de lait, c’est dire. Mon père a été<br />
élevé dans sa famille, si généreuse<br />
bien que peu fortunée. Aujourd’hui nous<br />
perpétuons la tradition en nous réunissant<br />
régulièrement autour de beaux flacons, et<br />
en parlant d’art et de rock, nos passions<br />
communes.<br />
Je ne sais plus depuis quand je fais de l’art,<br />
mais je revois clairement <strong>Paul</strong> tourner<br />
autour de mon matériel, posant des milliers<br />
de questions ou restant muet et immobile<br />
pendant des heures. Nos parents ne<br />
s’intéressaient pas à l’art, mais nous nous<br />
sommes construits autour."<br />
Damien Wilk : « Anarchy in the Yucca » 2015.<br />
Yucca et breloques rock, terre, pot, plateau roulant.<br />
Courtesy de l'artiste<br />
©Sophie Hasslauer<br />
20 | OCTOBRE 2015 | FECIT<br />
FECIT | OCTOBRE 2015 | 20
du rock aussi<br />
Camille Sol<br />
Les nouveaux westerns se jouent<br />
au supermarché du coin<br />
Trois albums, un dvd, une bonne<br />
expérience de la scène, des projets<br />
collaboratifs, Camille Sol présente<br />
un bilan riche.<br />
Fort de ses rencontres, le groupe<br />
a développé un goût pour les<br />
aventures artistiques. Parfois rock<br />
et direct, parfois plus intimiste et<br />
nuancé, leur musique revendique<br />
un droit au mélange. C'est l'ADN<br />
de leur musique, qui allie les<br />
ambiances rock, classiques, électro,<br />
orientales, sans jamais prendre la<br />
pose.<br />
Le groupe naît en 2005, des mains<br />
du bassiste Gilles Marco et du<br />
chanteur Franck Gilet. Puisant<br />
dans leur expérience commune<br />
de la scène, ils mettent ensemble<br />
en oeuvre les textes et musiques<br />
soufflées par Franck, et vite portés<br />
par le violoncelle de Marie, avec<br />
lequel finit par s'installer un<br />
dialogue, et qui continue encore.<br />
Nicolas Michelin se joint au groupe<br />
en 2013, et pose ses batteries<br />
pour le 3° album. Grace à lui, ils<br />
continuent également l'exploration<br />
de formules hybrides et acoustiques<br />
à base de cajon. Camille Sol a<br />
appris à diverses occasions à rendre<br />
sa musique mobile et légère, sans<br />
dénaturer pour autant l'essentiel.<br />
Croisé en 2014, Guillaume Blanc<br />
reprend la basse dans le groupe,<br />
et ensemble ils défendent un<br />
troisième album, "Corbeaux<br />
Blancs", qui propose un double<br />
regard sur leurs mythes, et un<br />
monde en mutation, où les<br />
nouveaux westerns se jouent au<br />
supermarché du coin...<br />
Marie Gisclard, violoncelle<br />
Franck Gilet, voix, guitares<br />
Nicolas Michelin, Batterie, cajon<br />
Guillaume Blanc, basse<br />
www.camillesol.com<br />
http://camillesol.bandcamp.com/<br />
releases<br />
camillesol.music@gmail.com<br />
“<br />
Corbeaux Blancs<br />
Salut, c’est Camille Sol, on va vous raconter l’histoire d’un<br />
petit bonhomme qui s’est cassé la gueule, parcequ’ après<br />
deux ou trois conneries il a perdu la seule chose de valeur<br />
qu’il avait: l’autre. Alors il a pris son baluchon et sa biroute sous le<br />
bras et a essayé de mettre les choses au point cardinal. C’est là qu’il a<br />
attrapé cette drôle de gueule de travers, une peau en plâtre et un gros<br />
nez en guise de tronche.<br />
C’est un bonhomme hommage au court circuit, un rescapé du coup<br />
de foudre, un doigt géant dans une prise de courant qui chante ses<br />
souvenirs d’amoureux électrocuté<br />
ELECTROCUT TANGO<br />
Il s’est trouvé une chambre pourrie dans un hôtel qui accueille les<br />
personnages en plâtre.... eh eh! Y’a comme une petite voix qui<br />
l’appelle doucement, qui caresse son oreille nasale, tout droit du<br />
p’tit écran devant lui - «Ce soir, on a du rêve en Technicolor à lui<br />
vendre...» alors il écoute le boniment...<br />
TICKET GAGNANT<br />
Petite virée en ville «Putain quoi!... on va s’chercher un coin sympa,<br />
hop! premier saloon à droite je tourne, j’suis dedans... Virginité<br />
retrouvée, brelan d’as? On s’refait à neuf...<br />
NEUF<br />
Maintenant faut s’rentrer. Le p’tit bonhomme a peur parcequ ’avec<br />
sa drôle de gueule il a peur d’une rencontre coup de foudre avec une<br />
bande d’ «anti-plâtres»... et puis tout le monde dit que ça craint la<br />
nuit dehors en c’moment... on y mettrait pas un visage pâle...<br />
C’est un coup à finir dans un plastic Bag...<br />
EMMETT TILL<br />
Et le film continue...<br />
"Des rêveurs éveillés ... c'est l’histoire d’un quatuor rock doté d’une<br />
identité sonore et textuelle atypique, entre guitares rock et violoncelle,<br />
oscillant entre Noir Désir et Bashung, aux confins du blues rock,<br />
punk, à l’énergie contagieuse ! Ce sont aussi les errances d’un<br />
bonhomme en plâtre, 2 albums, des concerts avec des grosses affiches,<br />
dont Higelin..."<br />
IDEM, 2013.<br />
©Camille Sol<br />
21 | OCTOBRE 2015 | FECIT<br />
FECIT | OCTOBRE 2015 | 21
les œuvres<br />
les œuvres<br />
Jean-Luc Verna<br />
“<br />
Le<br />
père<br />
collectionnait,<br />
j'étais amoureux<br />
du fils..."<br />
22 | OCTOBRE 2015 | FECIT<br />
©Sophie Hasslauer<br />
C’est à l’adolescence, en été, que j’ai découvert<br />
ma vocation de critique d’art. À cette époque,<br />
j’étais contraint de passer mes vacances dans<br />
notre demeure familiale de Chizé, pour raisons<br />
de santé. Une obésité morbide, doublée d’une<br />
violente acné, m’avait plongé dans les abysses<br />
de la dépression et je m’étais essayé au suicide<br />
à plusieurs reprises en tentant d’avaler mes<br />
chaussettes. Mon grand père se désolait de voir<br />
sa descendance traîner ainsi son vague-à-l’âme.<br />
Il partait, chaque après-midi, pour de longues<br />
parties de pêche en solitaire, histoire de ne plus<br />
avoir sous les yeux ce funeste bibendum à la tête<br />
penchée sur ses bourrelets.<br />
Mais un jour, après le goûter, il m’invita à<br />
l’accompagner. En chemin, il me dit : « ce qu’il<br />
te manque dans la vie, mon garçon, c’est une<br />
passion… », il tira une longue bouffée sur sa<br />
cigarette, puis reprit : « Et pépé Jojo va t’en<br />
trouver une ! ». Quelques mètres plus loin,<br />
il m’ouvrit les portes de son jardin secret : sa<br />
cabane de pêcheur.<br />
Alors qu’il préparait les appâts, je m’arrêtais<br />
devant une série de photos punaisées au mur,<br />
sûrement arrachées d’un magazine. On y voyait<br />
un homme nu, très musclé, le visage un peu<br />
Jean-Luc Verna, Vase Misère (#2), 2013<br />
Grès, émail bronze, peinture 48 x 29 x 44 cm<br />
Unique<br />
Courtesy de l'artiste et Air de Paris, Paris<br />
beaucoup maquillé et le corps entièrement bardé<br />
de tatouages. Dans ses poses il mêlait un fratras<br />
d’influences allant de la peinture classique aux<br />
poses de stars du rock. En bas à gauche, le texte<br />
indiquait Jean-Luc Verna, artiste contemporain.<br />
Je demeurai un long moment immobile devant<br />
ces images inondées de beauté, d’intelligence,<br />
d’audace quand une érection soudaine déforma<br />
mon pantalon. Puis je sentis ma verge se<br />
ramollir et une douce chaleur se répandre dans<br />
mon caleçon. Mon grand-père, qui se tenait<br />
maintenant debout derrière moi, me saisit par<br />
l’épaule et me tendit tendrement son mouchoir.<br />
Aujourd’hui, encore quand j’extirpe le bout<br />
de tissu un peu gras de ma poche et que je le<br />
caresse de la pulpe du pouce, j’étrangle un<br />
sanglot. Car si je sillonne les routes de France,<br />
de foires en biennales, de rétrospectives en<br />
salons. Si je ne m’épargne aucune peine pour<br />
dénicher le meilleur de l’art contemporain, c’est<br />
pour vous, vous qui êtes peut-être le petit gros<br />
que je fus et qui n’avez pas la chance d’avoir un<br />
pépé Jojo dans la vie.<br />
La 3° narine, texte paru dans le Fluide Glacial<br />
du mois d’août 2015<br />
FECIT | OCTOBRE 2015 | 22
la mécanique Hasslauer<br />
la mécanique Hasslauer<br />
La fiction entourant <strong>Paul</strong> <strong>Sylvestre</strong> nécessitait<br />
pour exister, un lieu,un écrin. J'ai rapidement décidé<br />
de ne pas toucher aux "salons de réception" dans<br />
lesquels on entre de prime abord, lorsqu'on pénètre<br />
dans le centre d'art: ils garderaient cette fonction.<br />
Mon attention s'est concentrée sur la grande salle,<br />
où j'ai décidé de poser l'histoire, la vie, l'intimité du<br />
couple père-fils. J'avais une idée très précise de la<br />
partition à créer, en fonction des œuvres à montrer et<br />
de la vie supposée des deux protagonistes. La partition<br />
est arrivée tout naturellement, et j'avais expérimenté à<br />
l'échelle réelle le travail de composition des cloisons<br />
(alternances d'aplats de couleurs, utilisation de<br />
MDF teinté dans la masse, structure bois, plafond<br />
filant...). Lorsque mes choix ont été fixés, mon ami et<br />
collaborateur Quentin Georgelin (entreprise BURL) a<br />
pris en main l'ensemble du projet afin de l'affiner, le<br />
peaufiner: afin de le régler dans les moindres détails.<br />
Notre collaboration s'est installée depuis plusieurs<br />
années, notre complémentarité est un atout qui nous<br />
permet d'avancer de manière cohérente dans nos<br />
projets, de façon naturelle, presque spontanée.<br />
Sophie Hasslauer<br />
LA MISE EN PLACE DE LA FICTION<br />
L'histoire entourant <strong>Paul</strong> <strong>Sylvestre</strong> nécessitait pour exister, un lieu, un écrin.<br />
©Quentin Georgelin / Burl<br />
23 | OCTOBRE 2015 | FECIT<br />
FECIT | OCTOBRE 2015 | 23
la mécanique Hasslauer<br />
la mécanique Hasslauer<br />
LES PLANS DE L'APPARTEMENT<br />
Une architecture au service du projet<br />
De l'objet à l'architecture,<br />
Burl, entreprise de design<br />
conçoit et réalise<br />
ses propres pièces.<br />
En 2014, Quentin Georgelin<br />
architecte diplômé d'État et<br />
Melissa Martin ébéniste s'associent<br />
et mettent leur savoir faire en<br />
commun, créant ainsi une structure<br />
permettant de gérer des projets<br />
dans leur intégralité.<br />
À L'issu d'un baccalauréat littéraire<br />
Histoire des arts, Quentin<br />
Georgelin passe sa licence à<br />
l’école d'Architecture de la Ville<br />
et des Territoires (Paris). C’est<br />
ici, il y a dix ans, qu’il rencontre<br />
Sophie Hasslauer et que tous deux<br />
commencent à collaborer.<br />
Il continue ses études sur le thème<br />
de la grande échelle, étudie un an<br />
le paysage à l’IUAV (Venise, Italie),<br />
part une année de césure à New<br />
York et obtient ensuite son diplôme<br />
en master d'urbanisme à Paris.<br />
Il travaille ensuite dans différents<br />
cabinets d’architecture parisiens<br />
tout en développant parallèlement<br />
sa pratique artistique.<br />
Melissa Martin a fait ses études<br />
à l'école Boulle (Paris). Artisan<br />
indépendante, elle travaille<br />
aussi bien pour des particuliers,<br />
architectes, sculpteurs ou encore<br />
au sein de différentes institutions<br />
culturelles, dont le centre Georges<br />
Pompidou.<br />
En duo, ils définissent la nature<br />
spécifique de chacun de leurs<br />
projets et les développent en<br />
proposant une attitude, une<br />
ergonomie, une façon de s'installer,<br />
travailler ou vivre.<br />
À travers des lignes épurées,<br />
ils mettent en forme les usages<br />
d’aujourd’hui.<br />
©Quentin Georgelin / Burl<br />
24 | OCTOBRE 2015 | FECIT<br />
FECIT | OCTOBRE 2015 | 24
interview<br />
Peux-tu te présenter ?<br />
Diplômé de l’école supérieure d’arts appliqués de Troyes,<br />
je suis graphiste designer de profession et collabore<br />
avec les différents champs de la création. Curateur de<br />
différentes expositions autour du design, du graphisme<br />
et de l’art contemporain. Les médiathèques et les musées<br />
me sollicitent tour à tour pour la réalisation de projets<br />
scénographiques.<br />
Passionné avec ma femme et notre fille d’architecture,<br />
il y a un peu plus de cinq ans, nous avons entrepris<br />
de réaliser un projet personnel et professionnel axé<br />
sur une architecture contemporaine d’habitation et<br />
d’unités d’hébergement sur notre terre d’origine qu’est<br />
le département des Ardennes. Après 18 ans passé dans<br />
l’Aube ; aujourd’hui, je me partage entre l’Aube et les<br />
Ardennes. Ce qui n’est pas sans me déplaire !<br />
Comment es-tu venu à la direction d’un centre<br />
d’art ?<br />
Membre du bureau du Centre d’art contemporain /<br />
Passages depuis près de 15 ans et amateur d’art, c’est donc<br />
tout naturellement que je succède, fin 2008, dans un<br />
premier temps par intérim, à Françoise Gibert avec la<br />
ferme volonté de donner une nouvelle vitesse de croisière<br />
au Centre d’art contemporain / Passages.<br />
Suite à une première réunion avec les partenaires<br />
financiers, le bureau et les membres du Conseil<br />
d’administration du Centre d’art contemporain / Passages<br />
; il m’a été confié la responsabilité administrative et la<br />
gestion de la vie du Centre d’art jusqu’au recrutement<br />
d’une nouvelle direction programmé, à cette époque<br />
début 2010 où j’ai eu l’immense joie de me voir confier la<br />
direction du Centre d’art contemporain / Passages.<br />
L’engagement du Ministère de la culture vers une<br />
démarche de consolidation et de développement de la<br />
cinquantaine de centres d’art en France sont l’occasion<br />
25 | OCTOBRE 2015 | FECIT<br />
Passages<br />
Interview de Eric Fournel<br />
par <strong>Paul</strong> <strong>Sylvestre</strong><br />
***<br />
de proposer un Projet de restructuration du Centre<br />
d’art contemporain / Passages accompagné d’un Projet<br />
artistique et culturel pour les années à venir, qui tout en<br />
conservant ses acquis, offre des possibilités, à la mesure<br />
des enjeux de l’art contemporain en Champagne-<br />
Ardenne avec un rayonnement au-delà de la frontière<br />
régionale.<br />
Peux-tu présenter le Centre d’art contemporain /<br />
Passages ?<br />
Créé en 1982 dans l’effervescence d’une actualité<br />
tant politique qu’artistique qui voulait à tous crins se<br />
décliner sur le mode de la décentralisation, le Centre<br />
d’art contemporain / Passages s’est imposé très tôt en<br />
Champagne-Ardenne comme l’un des relais les plus actifs<br />
de la région.<br />
Installé, tout d’abord, dans les espaces de maison<br />
particulière d’une vieille fabrique de bonneterie. Depuis<br />
1999, outre un système d’aide à la production qui permet<br />
au Centre d’art contemporain / Passages de se situer<br />
en amont de la création, le site Ginkgo sur lequel il se<br />
trouve dispose de 2 résidences et de 10 ateliers d’artistes<br />
l’assurant ainsi d’être au plus près du vivant artistique.<br />
Le Centre d’art contemporain / Passages n’a eu de cesse,<br />
au fil du temps, d’affirmer sa vocation de lieu de diffusion<br />
et de promotion de la création artistique contemporaine<br />
en développant un panel d’activités multiples. Soucieux<br />
de faire valoir la richesse et l’éclectisme d’une production<br />
artistique, il s’est appliqué à proposer tout un programme<br />
d’expositions temporaires dont la seule liste dit son<br />
ouverture d’esprit. S’il peut ainsi se vanter d’avoir montré,<br />
à leurs débuts, des artistes comme Jean-Michel Alberola,<br />
Ange Leccia, Sylvie Blocher, John Coplan ou Éric Aupol,<br />
il n’a pas manqué aussi de présenter des figures plus<br />
chevronnées comme Raymond Hains, Gérard Garouste et<br />
Gina Pane.<br />
Comme l’ensemble des Centres d’art en France, le<br />
Centre d’art contemporain / Passages poursuit sa mission<br />
de service public, par l’accueil d’artistes en résidences,<br />
la programmation d’expositions révélatrices des enjeux<br />
de l’art actuel, dans toute sa diversité de techniques,<br />
d’horizon, sur un plan local comme international, par<br />
l’aide à la création et à la diffusion des œuvres.<br />
On peut cependant parler de « passage » en relais,<br />
dans la mesure où les partenaires institutionnels, l’État,<br />
par la Direction régionale des affaires culturelles, la<br />
Région Champagne-Ardenne ainsi que la Ville de<br />
Troyes ont accepté de signer une Convention avec le<br />
Centre d’art contemporain / Passages pour affirmer<br />
plus solennellement et dans la durée leur soutien au<br />
développement de l’art contemporain.<br />
Quels événements y organisez-vous ?<br />
Outre un programme annuel<br />
de 4 expositions, le Centre d’art<br />
contemporain / Passages accueille<br />
également jusqu’à 3 artistes en<br />
résidence dans et hors les murs.<br />
Pôle structurant, la résidence est un<br />
formidable outil d’intégration du<br />
territoire, un moment vivant, habité,<br />
qui multiplie les occasions d’échanges fructueux, à la<br />
fois pour l’artiste et bien sûr pour le public. De même,<br />
l’existence d’un lieu ressource, une collaboration étroite<br />
avec la médiathèque du Grand Troyes permet aussi, à ceux<br />
qui le souhaitent, de bénéficier d’une documentation sur<br />
l’histoire et l’actualité artistique contemporaine.<br />
Cette mise en réseau des projets artistiques crée des<br />
synergies en faveur de tous les publics, en particulier<br />
le public jeune, pour lui permettre un accès direct à la<br />
connaissance d’œuvres contemporaines, dont certaines<br />
formeront, à n’en pas douter, le patrimoine artistique de<br />
demain. C’est aussi l’occasion de découvrir la diversité et<br />
la pluralité des pratiques culturelles par une médiation<br />
facilitée du fait de la présence des artistes sur les lieux<br />
d’expositions.<br />
Quelle place joue la médiation dans vos actions ?<br />
L’accueil du public est notre quotidien. La médiation<br />
doit s’attacher à le fidéliser et àl’élargir, sans pour<br />
autant remettre en cause la politique d’excellence et<br />
d’expérimentation qui est au cœur de notre mission.<br />
Nous favorisons la meilleure rencontre possible avec<br />
les œuvres et les artistes. À cette fin, le Centre d’art<br />
contemporain / Passages est porteur d’une mission<br />
L’art contemporain<br />
suit de très près<br />
les avancées<br />
technologiques<br />
éducative, qui se traduit par la programmation régulière<br />
d’actions de sensibilisation et de formation, et plus<br />
particulièrement dans le cadre de la coopération avec<br />
l’Éducation nationale et l’Université.<br />
Sous forme expérimentale, car nous nous remettons en<br />
cause en permanence, nous développons l’expression<br />
artistique, la communication orale, les cours et tout ce qui<br />
peut faciliter l’accès aux repères historiques et esthétiques<br />
à partir desquels se développe l’art contemporain.<br />
Avez-vous une politique d’acquisition d’œuvres ?<br />
Non, nous laissons cette mission aux Fonds régionaux<br />
d’art contemporain présents dans chaque région de<br />
France.<br />
Quels rapports entretient le centre d’art<br />
avec les collectionneurs, les<br />
galeries et établissements d’art<br />
contemporain en Région et à<br />
Paris ?<br />
Ils font partie de nos premiers<br />
contacts, bien avant la rencontre avec<br />
l’artiste ou l’œuvre. En effet, en ce<br />
qui me concerne, je suis à leur écoute. Ils me renseignent<br />
énormément et ils me facilitent le travail de veille surtout<br />
pour les artistes émergents.<br />
Quelle est la particularité du territoire troyen<br />
en matière d’art contemporain ?<br />
C’est la seule ville de Champagne-Ardenne à avoir abrité,<br />
en même temps, à leur début, un Fonds régional d’art<br />
contemporain et un Centre d’art contemporain.Je pense<br />
que Troyes peut s’enorgueillir d’avoir, la particularité en<br />
matière d’art contemporain, un lieu où sont rassemblés<br />
un centre d’art contemporain, dix ateliers et deux<br />
résidences d’artistes.<br />
Pour toi, qu’est-ce qui caractérise l’art<br />
contemporain aujourd’hui ?<br />
Un art qui suit de très près les avancées technologiques.<br />
L’artiste s’en sert comme d’un instrument et en invente de<br />
nouveaux. Il se base sur la culture historique et également<br />
les faits d’actualités. Il recherche, expérimente, prend<br />
position. Il se veut démonstratif ou choquant, en tout cas<br />
il cherche la médiatisation.<br />
FECIT | OCTOBRE 2015 | 25
passages<br />
passages<br />
Le Centre d’Art<br />
contemporain / Passages<br />
de Troyes<br />
***<br />
Quel meilleur substantif que celui de “passages”<br />
pour qualifier le centre d’art contemporain<br />
troyen ? Le terme évoque en effet les idées de<br />
circulation et de mouvement permanent qui<br />
irriguent l’ensemble des activités du centre<br />
d’art depuis sa création en 1982. De la relation<br />
aux artistes à l’accompagnement du public, des<br />
expositions aux publications ou aux résidences,<br />
toute l’activité de Passages est mue par une<br />
volonté affirmée de transmission, de mise en<br />
relation d’idées et de personnes, en plaçant<br />
bien évidemment les artistes au cœur du projet.<br />
Créé il y a maintenant plus de trente ans, à l’initiative<br />
d’un groupe d’artistes et agitateurs locaux désireux<br />
de dynamiser leur territoire et d’offrir de nouvelles<br />
propositions artistiques à la population, le centre<br />
d’art contemporain s’est par la suite institutionnalisé<br />
et professionnalisé, jusqu’à devenir aujourd’hui<br />
incontournable dans le paysage culturel régional.<br />
Toutefois, cette évolution logique n’a pas altéré<br />
l’énergie et la dynamique alternative des débuts de<br />
l’institution, puisque chaque nouveau projet envisagé<br />
implique d’acquérir de nouvelles compétences, une<br />
nouvelle manière de travailler… Une remise en<br />
question permanente – voire parfois une mise en<br />
danger – qui empêche l’immobilisme ou la lassitude,<br />
que ce soit dans le choix des artistes invités, dans<br />
les méthodes de médiation envisagées ou dans les<br />
partenariats développés depuis quelques années.<br />
Cette volonté de mouvement et d’ouverture s’incarne<br />
bien évidemment en premier lieu dans les expositions,<br />
où la part belle est donnée à de fiers représentants<br />
de la jeune scène hexagonale – Dominique Blais,<br />
Alexandre Joly, Sarah Fauguet et David Cousinard<br />
– invités à développer des projets inédits. Une<br />
manière d’instaurer un dialogue entre les artistes et<br />
l’équipe du centre d’art, avec la volonté de porter un<br />
projet commun qui s’adresse au plus grand nombre.<br />
Toutefois, loin de se cantonner uniquement à la<br />
présentation de cette scène émergente, l’équipe du<br />
centre d’art mène également un minutieux travail de<br />
prospection auprès d’artistes régionaux fraîchement<br />
diplômés d’écoles d’art, tels Manon Harrois ou Mehryl<br />
Levisse. Une initiative à souligner, car rares sont les<br />
lieux d’exposition de cette envergure à offrir leurs salles<br />
à des artistes si jeunes. L’on peut également noter le<br />
récent projet dédié à Eugène Van Lamsweerde, artiste<br />
néerlandais installé depuis de nombreuses années en<br />
Champagne-Ardenne, et qui n’avait jusqu’ici jamais<br />
fait l’objet d’une exposition rétrospective de cette<br />
envergure. Par ailleurs, faisant fi des barrières entre les<br />
disciplines, la designer Matali Crasset et les graphiste<br />
genevois Gavillet & Rust ont été invités à exposer. Une<br />
invitation qui fait suite à plusieurs projets antérieurs<br />
qui croisaient graphisme, design, art contemporain,<br />
et qui témoigne avant tout de la volonté d’ouverture à<br />
l’œuvre chaque jour dans ce lieu atypique.<br />
Parallèlement à son programme d’expositions, le centre<br />
d’art contemporain a mis en place depuis quelques<br />
années une ambitieuse politique de résidence, qui<br />
offre aux artistes la possibilité de travailler sur site, afin<br />
notamment de s’imprégner de cet endroit si particulier.<br />
Qu’elles donnent lieu à une présentation du travail ou<br />
offrent un temps propice à la réflexion, ces résidences<br />
permettent en tout cas de lier l’activité de production<br />
et d’exposition à la médiation, autre pierre angulaire<br />
du projet troyen. Il est en effet beaucoup plus aisé<br />
d’envisager ce travail de fond une fois l’artiste sur<br />
place : rencontres avec les scolaires, ateliers de pratique<br />
artistique et autres moments d’échange sont autant de<br />
possibilités pour le public d’appréhender différemment<br />
le travail d’un artiste. S’il est aujourd’hui entendu qu’il<br />
n’existe pas un discours unique sur l’œuvre, et que<br />
chacun peut appréhender celle-ci comme il l’entend,<br />
il n’en reste pas moins que les équipes du centre d’art,<br />
amenées à travailler au quotidien avec les artistes,<br />
bénéficient d’une expertise et d’une connaissance<br />
toutes particulières, et sont ainsi les mieux placées pour<br />
se faire le relais entre l’œuvre et le public, aussi divers<br />
soit-il. Cet indispensable travail de mise en relation<br />
et d’accompagnement se poursuivra d’ailleurs dans les<br />
prochains mois avec la création d’une résidence dédiée<br />
aux critiques d’art et aux écrivains. Une nouvelle piste<br />
à explorer pour Passages, afin de nourrir encore cette<br />
dynamique en construction et d’apporter un autre<br />
regard sur les différentes articulations que le centre<br />
d’art cherche à mettre en place depuis quelques années.<br />
Les partenariats, enfin, témoignent de la volonté<br />
d’ouverture affichée par le centre d’art depuis<br />
quelques années. En effet, Passages a su s’imposer ces<br />
dernières années comme un acteur incontournable<br />
sur le territoire champardennais, dans une réelle<br />
volonté de transversalité et de mise en réseau avec un<br />
ensemble de partenaires très divers. Du partenariat<br />
au long cours avec le Frac Champagne-Ardenne<br />
– invité à concevoir chaque année une exposition<br />
dans les murs du centre d’art – au travail régulier<br />
avec les établissements scolaires, en passant par<br />
la volonté de fédérer les différents lieux dédiés à<br />
la culture à Troyes – notamment sa médiathèque<br />
et ses musées –, nombreux sont les exemples qui<br />
permettent aujourd’hui d’affirmer l’inscription de<br />
manière pérenne du centre d’art contemporain dans<br />
la dynamique culturelle régionale. Le dernier de ces<br />
partenariats n’est pas le moins étonnant. Passages<br />
s’est en effet rapproché de l’Agence nationale pour la<br />
gestion des déchets radioactifs (Andra) afin de mettre<br />
en place une résidence d’artistes liée à la mémoire de<br />
ces centres de stockage. Après Veit Stratmann en 2011,<br />
c’est Julien Carreyn qui en 2012 a été retenu pour<br />
poser son regard décalé sur un univers qui lui était<br />
jusqu’alors totalement étranger. Un choix qui, s’il peut<br />
au départ surprendre, témoigne une nouvelle fois de<br />
cette volonté de ne pas céder à la facilité et d’offrir la<br />
possibilité aux artistes de se confronter à des thèmes<br />
ou à des sujets vers lesquels ils n’iraient pas forcément<br />
d’eux-mêmes. C’est cette audace qui donne toute sa<br />
spécificité au Centre d’art contemporain / Passages, et<br />
en fait aujourd’hui un site d’une richesse incroyable,<br />
pour les artistes comme pour le public. Un lieu de «<br />
passages » obligé, en somme !<br />
Antoine Marchand,<br />
chargé des expositions et des éditions<br />
au Frac Champagne-Ardenne<br />
26 | OCTOBRE 2015 | FECIT FECIT | OCTOBRE 2015 | 26
ackstage<br />
Backstage<br />
Les coulisses de la création,<br />
pour comprendre le projet<br />
©Quentin Georgelin<br />
FECIT | OCTOBRE 2015 | 27
ackstage<br />
backstage<br />
28 | OCTOBRE 2015 | FECIT FECIT | OCTOBRE 2015 | 28<br />
photos ©Sophie Hasslauer
ackstage<br />
backstage<br />
29 | OCTOBRE 2015 | FECIT FECIT | OCTOBRE 2015 | 29<br />
photos ©Sophie Hasslauer
EXPOSITION<br />
« SOPHIE HASSLAUER »<br />
Centre d’Art Contemporain /<br />
Passages, 10 000 TROYES<br />
Du 02 Oct au 04 Déc 2015<br />
Mille mercis à mes collaborateurs<br />
« Frozen Landscape » :<br />
- Arno Garnier : conseiller<br />
technique et artistique<br />
- Gérard Taillefert : démontage<br />
- Virgile Hasslauer Cestino :<br />
démontage, remontage, préparation<br />
des supports<br />
« Picasso » (Héritage) » :<br />
- David Thiébaux : logistique<br />
- Nicolas Gombault et la section<br />
carrosserie du Lycée Eiffel, Reims<br />
- Gérard Taillefert : assistant<br />
montage<br />
- Christian Lapie : manutention<br />
« Poste restante » :<br />
- Anatole Hasslauer Cestino :<br />
assistant<br />
Logistique, transport,<br />
manutention :<br />
- Christian Lapie<br />
- François Petit<br />
Montage d’expo :<br />
- François Petit<br />
- Les techniciens de la ville de Troyes<br />
Mille mercis<br />
à mes collègues artistes :<br />
- Vincent Dulom<br />
- François Henri Galland<br />
- Quentin Georgelin<br />
- Emmanuelle Jamme<br />
- Christian Lapie<br />
- Francis Raynaud<br />
- Lionel Scoccimaro<br />
- Jean Luc Verna<br />
Merci à la Galerie Air de Paris<br />
Rubrique rock<br />
- Vassil Asjac<br />
- Camille Sol<br />
Merci à l'Atelier Simple Objet,<br />
Fabrice Boustal, Aimable Constant,<br />
Estelle Delorme, Thibault De<br />
La Molle-Piche, Sébastien Dix-<br />
Doigts, Daphnée Duval, Damien<br />
Wilk, Cédric Motard, Jean Louis<br />
Martinot, Éma Voisin, et <strong>Paul</strong> et<br />
Leonard <strong>Sylvestre</strong>. Ils n’existent pas<br />
…. Quoique…maintenant.<br />
Catalogue FECIT :<br />
- Emmanuelle Jamme :<br />
maquette & création graphique<br />
- Hugot : poster central<br />
- Marine Varoquier : rédaction<br />
- La 3° Narine : rédaction<br />
- L’ensemble des artistes : rédaction<br />
- Antoine Marchand : rédaction<br />
Soutien indéfectible :<br />
- Corine Hasslauer Cestino<br />
Mes hôtes :<br />
- Éric Fournel, directeur du CAC<br />
Passages, Troyes<br />
- Évelyne Gamot, assistante d’Éric<br />
Fournel<br />
L’exposition «Sophie Hasslauer»<br />
a reçu le soutien de la Drac<br />
Champagne Ardenne, du Conseil<br />
Régional Champagne Ardenne,<br />
de l’atelier BURL, la maison de<br />
Champagne Chassenay d’Arce, et de<br />
l’entreprise Mobili.<br />
Sophie Hasslauer<br />
167-169 Route d’Auxerre<br />
10120 Saint André Les Vergers<br />
03 25 82 32 18
A r n a u d g a r n i e r - P e i n t r e A é r o g r a p h i s t e<br />
w w w . m i c r o n 7 . c o m