Retour sur la rencontre avec Hubert Ben Kemoun - Jean-Marc Muller

Retour sur la rencontre avec Hubert Ben Kemoun.
Les deux heures de notre incursion privilégiée en littérature de jeunesse sont écoulées
et celui qui fut pour un moment “notre” auteur est reparti. Quelques impressions fusent
entre nous suite à ce moment d'écoute et d'échange :
“Quel talent pour dire son histoire L'oeuf du coq ! J'en avais la chair de poule...”
“Je suis tombée amoureuse !”
“Est-ce que je peux emprunter Ton livre à écrire ?”
“Tu as lu La Gazelle ?”
“Il a tout à fait répondu aux questions qu'on lui a envoyées en vidéo !”
“On n'a pas été à la hauteur pour lui, on ne posait pas assez de questions.”
“Oui mais il est déjà tellement présent et généreux qu'on préfère l'écouter !”
Il faut dire qu'Hubert Ben Kemoun nous parle de nous en même temps que de lui. En
évoquant sa vision et sa pratique de l'écriture, il tisse des liens entre son métier et celui
des enseignants qui sont venus à sa rencontre.
/écrivain et enseignant/
Tout d'abord, à ces enseignants, il rend le titre de “maîtres”, terme qu'il préfère
à celui de “professeurs des écoles”. S'apprêtant à dévoiler au fil de son intervention ce qui
selon lui fait la grandeur de ce métier, il nous offre d'emblée l'image d'Albert Camus qui,
ayant reçu le prix Nobel de littérature, adressa une chaleureuse lettre de remerciement à
son maître d'école.
Précisons ici que celui qui nous parle, écrivain depuis 25 ans, a enseigné lui
aussi, pendant 31 ans et jusqu'à l'an dernier, dans une classe Montessori accueillant des
élèves grands psychotiques. Par ailleurs, il accepte en tant qu'écrivain de nombreuses
invitations à rencontrer son public de jeunes lecteurs dans les classes. Il y a certaines
choses qu'il aime à leur dire : par exemple, que Ben Kemoun veut dire “fils du cumin” à la
fois en arabe et en hébreu, qu'on ne devient pas un écrivain comme on peut devenir une
“star” de nos jours, mais que chaque livre naît d'un très long travail, ou encore qu'être un
auteur en 2008 ne signifie pas seulement écrire des livres, mais que c'est aussi écrire
pour la radio, pour la télévision, pour des troupes de théâtre...
/à l'école du rythme/
En effet, Hubert Ben Kemoun a d'abord écrit pendant dix ans des pièces de
théâtre radiophoniques et ce fut une excellente école, précise-t-il, pour aborder ensuite
l'écriture jeunesse. Il nous explique y avoir appris un certain sens du rythme et y avoir
forgé sa manière de construire des histoires. Il évoque avec humour les mots de son
premier employeur à Radio France lorsque celui-ci le conseilla pour l'écriture des
Dramatiques. Elles devaient durer 20 minutes et comporter 4 à 5 personnages maximum.
Il s'agissait d'écrire pour une personne se rendant à un rendez-vous au volant de sa
voiture, la radio en marche : elle est très en retard mais doit absolument continuer
d'écouter l'histoire, y compris lorsqu'elle aura réussi à se garer : il faut qu'elle soit captivée
jusqu'à la fin !
C'est de là qu'est née la faculté d'Hubert Ben Kemoun à écrire pour les jeunes
lecteurs une littérature qu'il définit comme “sans gras”. A ce propos, il dit encore qu'il ne
s'attache pas à faire de jolies phrases, à employer de belles structures grammaticales,
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mais qu'en revanche, il sait raconter des histoires.
/vivre une transformation/
Le message ? “C'est du rab”. Il peut y avoir parfois des messages plus forts,
comme dans L'Oeuf du coq, mais ce n'est pas ce qui vient en avant. L'essentiel est que
les personnages vivent une transformation. Après les événements rencontrés par eux
dans l'histoire, ce ne sera plus jamais comme avant. Ce profond changement qui affecte
les protagonistes de l'oeuvre littéraire pourrait bien expliquer, nous dit l'auteur, les
émotions très fortes que suscite l'acte de lire : il existe une véritable passion de la lecture,
mais on peut aussi se trouver confronté à la trouille terrible de lire. C'est pour cela
qu'Hubert Ben Kemoun nous suggère d'accompagner réellement les élèves lorsqu'ils se
plongent dans l'univers du livre.
/maîtres nageurs/
Il nous dit que le maître d'école, pour apprendre à lire aux enfants, doit se faire
maître nageur et qu'il ne doit surtout pas s'arrêter en chemin ! Faisant référence à Daniel
Pennac dans Comme un roman, il nous rappelle que l'on perd les adolescents pour la
lecture en cessant de leur lire des histoires dès lors qu'ils savent le faire eux-mêmes.
Ainsi, il nous demande de garder à l'esprit que lire une histoire à quelqu'un, c'est un
moment d'amour.
/devenir un petit peu plus heureux/
Ce qui rassemble à travers la lecture, Hubert Ben Kemoun affirme que c'est
une seule et même quête : tous les personnages, comme chacun d'entre nous, désirent
tout simplement être un petit peu plus heureux ! Et c'est précisément pour cela, ajoute-t-il,
qu'ils empruntent les chemins de “lis tes ratures”, ou “lie tes ratures”, orthographiés à la
manière d'André Breton et de l'OuLiPo, le célèbre Ouvroir de Littérature Potentielle.
Autrement dit, en littérature, il faut que quelque chose ne marche pas afin qu'une évolution
puisse avoir lieu. C'est de l'hésitation des sentiments qu'il est alors question : cette
hésitation est ce que l'auteur s'attache à écrire, comme dans son roman Le jour du
meurtre, qu'il évoque à ce sujet.
Hubert Ben Kemoun met l'accent sur ce qu'il y a d'universel en littérature, audelà
du fait qu'elle doive s'accrocher à certains détails techniques pour que l'histoire
“passe”, comme par exemple la présence ou l'absence de téléphones portables suivant
les époques, ou le langage à travers lequel les événements sont vécus selon qu'on est un
adulte ou un enfant... Pour l'essentiel, nous dit l'auteur, seul le décor change. Les mêmes
sentiments sont partagés par tous : on est toujours à côté de ses pompes quand on
s'apprête à embrasser pour la première fois la personne dont on est amoureux !
/le roman noir/
Lorsqu'on lui demande comment il choisit d'emprunter telle direction d'écriture
plutôt qu'une autre et notamment d'où vient sa prédilection pour les romans noirs souvent
situés dans l'univers du collège, l'auteur répond qu'il aime raconter la vie à travers des
situations difficiles auxquelles il faut réagir. Tous simplement, nous dit-il, l'univers du
collège est dur, les collégiens sont durs entre eux, cela fait partie du monde. Ces
adolescents éprouvent tout à fait les mêmes sentiments que des adultes. Un auteur,
ajoute-t-il, ne peut pas être en dehors du monde : “Pour te le mentir, le monde, il faut que
je le connaisse !”.
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ménager une ouverture/
En ce qui concerne la spécificité d'écrire pour la jeunesse, ayant écrit lui-même,
en dehors des pièces radiophoniques, qui n'ont pas été éditées, un seul livre pour adultes,
il note que la différence d'écriture est fine. Elle tient à la liberté qu'il peut s'octroyer,
lorsqu'il s'adresse à des adultes, de livrer de manière brute des impressions sur la vie qui
s'achèveront éventuellement dans une impasse. En revanche, en littérature jeunesse, cela
doit finir ouvert, nous dit-il. Il faut que quelque chose vive après la fin de l'histoire.
/résister au comment...taire”
Autre point important aux yeux de cet auteur : la pédagogie, c'est du rab ! Ses
livres ne doivent pas “faire pédagogie” ! Et, précise-t-il, nous devons être vigilants afin de
ne pas céder à la tentation de l'omniprésent commentaire qui dit surtout “comment taire” !
A l'opposé d'une telle manie langagière caractéristique de l'univers télévisuel et proposant
un monde préfabriqué où toutes les images sont explicitées, il nous invite à cheminer
ensemble, écrivains, enseignants, à contre-courant : “On ne va pas tout leur prémâcher :
ils ont des dents !“. Il en va ainsi par exemple de son roman Comment ma mère est
devenue célèbre, dans lequel il ne fait pas toute la lumière sur les questions soulevées au
cours du récit : il appartient aux lecteurs de cheminer avec les zones de cette histoire
restées en suspens.
/jouer/
Enfin et surtout, il ne faut pas oublier de jouer, nous rappelle Hubert Ben
Kemoun, lui-même passionné par les jeux de mots. Avions-nous remarqué que Mélimos
est l'anagramme du mot sommeil ? Et pourquoi est-il important de proposer aux enfants
des phrases comme “Pénélope la poule qui perd les pédales ?”. Bien plus que de leur
enseigner absolument ce qu'est un tautogramme, il s'agit de cultiver avec eux le plaisir :
une phrase comme celle-là, ça ne sert à rien, mais c'est beau : c'est musical !
Ainsi, au fil de la rencontre, Hubert Ben Kemoun s'avère singulièrement
imprégné de préoccupations éducatives et on comprend que son attitude face à ses
lecteurs ne se dessine pas au hasard, mais s'enracine au contraire dans des
convictions fortes.
D'autres questions viennent, qui relancent la description qu'il a entamée de
son métier. Concrètement, comment s'y prend-il ? Quand estime-t-il qu'une histoire est
terminée ? Il nous emmène avec lui à la découverte des différentes étapes qui se
succèdent depuis l'idée première jusqu'à la réalisation finale d'un livre.
/du désir et du temps/
Après 145 livres, nous confie-t-il, se trame toujours pour lui le jeu du désir et de
la peur. Il repart de zéro à chaque fois, se demandant s'il va réussir à écrire sa prochaine
histoire. L'élaboration d'un récit commence bien avant de se mettre réellement à écrire. Il y
a l'idée qui prend naissance, il y aussi la pratique de l'écrivain, qui note régulièrement des
phrases à la volée, même si beaucoup de ces écrits du quotidien ne se retrouveront
finalement pas dans ses ouvrages.
Il s'agit, explique-t-il, de savoir laisser de côté son histoire, “comme une pâte à
crêpes”. Il faut pouvoir y revenir et lui dire : “Tu m'as manqué”. Et alors, se relire et
ressentir à nouveau les émotions que l'on a voulu partager au lecteur. Comment en effet
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espérer faire rire les autres si déjà on ne se fait pas rire soi-même ? C'est donc le ressenti
qui est à l'oeuvre ici et l'auteur estime avoir fini son histoire lorsqu'elle lui procure enfin, à
la relire, toute l'émotion qu'il voulait donner : “Je passe mes histoires au tamis de mes
émotions.”, “Je me raconte mes histoires en les écrivant.”. A ce sujet, Il se rappelle son
épuisement à la fin de l'écriture de La gazelle, un roman dont le cours haletant suit le
déroulement des pensées intimes de l'héroïne, marathonienne, au rythme de ses foulées.
Ainsi, de brouillons raturés en relectures de ces manuscrits, s'élabore une
version définitive qui sera tapuscrite et, enfin, envoyée à l'éditeur : à ce stade le récit est
propre, impeccablement présenté : “Avant d'embrasser son amoureuse, on se brosse les
dents !”. C'est alors pour Hubert Ben Kemoun la plus belle histoire du monde. Un
jugement appelé parfois à être révisé postérieurement : il y a une quinzaine de ses
ouvrages qu'il estime finalement moins bons qu'en les écrivant.
/l'éditeur, l'illustrateur/
La naissance d'un livre est un processus long qui met en jeu des interactions
décisives. C'est au bout d'un an et demi en moyenne qu'il paraîtra sous sa forme aboutie
de parallélépipède rectangle et que pourra intervenir pour l'auteur la dernière relecture.
Mais jusqu'à cette étape, le rôle de partenaires tels que l'éditeur et l'illustrateur est
essentiel.
A propos de l'éditeur, Hubert Ben Kemoun dit avoir besoin d'une personne qui
soit capable de proposer des modifications sans toucher à l'essence de ce qu'il veut
écrire. Selon lui, un éditeur apprend à un auteur à le devenir, et réciproquement. Pour ce
qui est de l'illustateur, son appropriation est nécessaire : “Plus il me vole mon histoire, plus
elle est à moi.”.
/auctor/
En regard de ces interventions déterminantes, Hubert Ben Kemoun, qui précise
n'avoir jamais fait d'écriture de commande, insiste sur la liberté essentielle de l'auteur.
L'origine latine de ce nom, comme il nous le rappelle, est “auctor”. Ce terme renvoie non
seulement à la notion d'augmentation, d'accroissement, à la manière dont pousse une
fleur, mais il constitue aussi la racine du mot “autorité”. Ainsi, être auteur, c'est avoir
l'autorité, le pouvoir de décider. Ce qui peut procurer de petits amusements tout
personnels, remarque-t-il avec malice, comme de donner le nom de ses amis à des
boulevards, ou à l'inverse d'attribuer le nom d'une personne que l'on n'apprécie pas dans
la vie à une sinistre impasse dans la fiction...
/étapes de travail/
Mais d'abord, Hubert Ben Kemoun, à partir de son idée, choisit une orientation
d'écriture à même de la rendre au mieux : il pourra s'agir de la donner en dix pages, sans
délayer, ou au contraire de faire plus long, de jouer à perdre un peu le lecteur pour mieux
le reprendre ensuite. Certaines intuitions relatives au rapport entre texte et image
interviennent dès les premiers temps de l'écriture, alors que l'entrée en scène de
l'illustrateur sera plus tardive.
C'est l'éditeur qui propose un illustrateur avec qui collaborer et les échanges
d'intentions et de points de vue se feront toujours par son intermédiaire : jamais en direct
avec l'illustrateur. Dans cette interaction médiatisée entre l'auteur et l'illustrateur se
précisent les choix de chapitrage, de rythme : il s'agira par exemple de s'accorder sur
l'endroit où placer une double page d'illustrations dans le récit. Ces choix, qui naissent de
la rencontre des sensibilités, se basent aussi sur les propositions induites par le texte. En
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effet, si le tapuscrit se déroule “au kilomètre” dans le temps qui précède l'apparition des
images, il comporte déjà des respirations, comme dans l'écriture radiophonique, et se
soucie de préparer un temps de lecture de l'image qui puisse correspondre
harmonieusement au temps de lecture du texte.
/une collaboration réussie/
Hubert Ben Kemoun évoque un exemple de collaboration qu'il estime très
réussie : celle avec Stéphane Girel pour l'histoire de Pénélope la poule de Pâques. Il a
apporté, pour nous les montrer, l'album, ainsi que différentes étapes de travail : ses
brouillons, le tapuscrit, des crayonnés en noir puis en couleur... Il nous explique en quoi
cette mise en images est particulièrement réussie : elle tient compte de la question “Où
es-tu quand tu racontes ?”. L'illustrateur a travaillé en cohérence avec le récit pour le choix
de son support notamment : le bois sur lequel il a créé ses illustrations renforce
l'impression d'une Poule de Pâques qui s'est enterrée dans sa tour d'ivoire. Elle devient
littéralement le bois de l'arbre dans le trou duquel elle s'est si bien cachée. Par ailleurs, le
dessin va à l'essentiel : les jeux de zoom adoptés par Stéphane Girel, lorsque la poule est
sur le point d'être découverte notamment, et que l'on ne voit apparaître sur la page que
quelques détails qui trahissent sa présence, dans l'image en gros plan de l'entrée de sa
cachette, font mouche.
Est-ce que l'écrit vient lorsque l'écrivain vient ?
La fin de la rencontre approche. Comme Hubert Ben Kemoun l'a précisé, il a tenu au
groupe de jeunes enseignants qui lui font face peu ou prou les mêmes propos que
ceux qu'il aurait adressés à un groupe d'élèves.
Alors, quel est l'enjeu de telles rencontres ? Quelle entrée offrent-elles dans l'écrit ?
/ateliers d'écriture : attention/
L'auteur nous met en garde : il est plus difficile de fabriquer de la production
d'écrit que de fabriquer un lecteur. Pouvons-nous décemment proposer aux élèves le
projet d'écrire un roman ? De devenir des écrivains ? Si nous le faisons, ils pourraient bien
nous répondre, à juste titre : “Calme ta joie !”. Les élèves sont conscients des efforts et
des progrès qui leur sont nécessaires pour écrire, et cette conscience doit être respectée.
On pourra peut-être se proposer d'écrire une nouvelle par exemple, ou en tout cas une
forme modeste.
Hubert Ben Kemoun se rappelle combien il avait du mal à écrire, enfant, sur un
sujet libre. Cela lui donnait le vertige. “Mais donnez-moi une contrainte, un bout de phrase,
une accroche, et vous ne pourrez plus m'arrêter.” Il nous offre comme inducteur de
l'imaginaire l'exemple suivant, emprunté à John Le Carré : prenons la phrase “Le chat dort
sur le tapis.”. Elle est grammaticalement correcte, c'est tout. Ajoutons-lui ces deux mots :
“du chien.”. Alors peut naître une histoire ! L'imaginaire de chacun se réveille : on verra un
chat énorme et un chien tout petit, ou une histoire d'amour entre les deux animaux...
Pour ce qui est des ateliers d'écriture, l'auteur précise qu'il ne s'entend pas très
bien lui-même à les animer : faire écrire à plusieurs exige un suivi long et fastidieux, fait de
négociations permanentes pour choisir entre les diverses propositions des enfants. Mais si
l'on s'y lance, nous dit-il, il faut surtout aller au bout. Ne jamais abandonner le projet
d'écriture en chemin, et offrir aux enfants qui s'y sont risqués une mise en forme qui les
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valorise et leur fasse plaisir, même si le travail n'est pas abouti et ne peut qu'être
renéotypé !
/préserver l'intime/
Décidément, Hubert Ben Kemoun est favorable à l'écriture solitaire : pour le
pouvoir de l'auteur, déjà évoqué et qui, insiste-t-il, ne saurait être partagé, mais aussi pour
la plongée dans l'intime que permet cette pratique. C'est pourquoi Ton livre à écrire,
récemment publié et qui suscite un grand intérêt chez les enseignants, est à prendre
comme un livre intime. Nous comprenons avec quelle prudence il nous faudra aborder un
tel ouvrage, regorgeant de situations qui sont autant d'invitations à l'écriture, afin de ne
pas en trahir l'intention, de ne pas en faire un répertoire de recettes.
/avec ce que l'on est/
Alors, est-ce que l'écrit vient, en présence de l'écrivain, et de quelle manière ? Il
est clair que c'est avec l'envie de fabriquer des lecteurs, et non des auteurs, qu'Hubert
Ben Kemoun rencontre des classes et des maîtres. Des moments au cours desquels il se
refuse à révéler des éléments de sa vie privée : “Vous ne saurez rien de mon nombril !”
En revanche, l'auteur évoque ses propres lectures et souligne combien il
importe de se nourrir : on fabrique un lecteur en lisant soi-même. Ainsi, il invite les futurs
professeurs qui lui font face à envisager leur pratique de manière vivante : “On est un
enseignant avec sa propre personne, avec l'être humain que l'on est, qui va au théâtre, lit,
voit des expositions”.
Une exhortation à la curiosité qui fait écho à la vision que cet écrivain dessine
de son métier : évoquant l'image du joueur de flûte de Hammelin, il affirme que les
solutions viennent toujours de l'extérieur. Les auteurs, dit-il, doivent être des joueurs de
flûte. Ils doivent faire regarder leurs lecteurs de tous les côtés, “augmenter le rapporteur
de l'horizon.”.
Deux heures sont passées : c'est un livre à la main qu'Hubert Ben Kemoun
nous propose de conclure cet échange. Nous voici ravis en un instant, embarqués
avec lui dans l'histoire de L'oeuf du coq, qu'il interprète de la voix et du geste et dont il
fait vivre pour nous chaque personnage et chaque élan.
Merci infiniment, monsieur Ben Kemoun ! Merci pour vos livres, pour votre
disponibilité, pour votre engagement, et pour la cerise sur le gâteau que sont vos
talents de conteur !
Prise de notes et rédaction du présent document : Charlotte Guilbert, Janvier 2009.
Merci aux personnes ayant participé à la rencontre de me signaler toute précision ou correction
éventuelle par mail à cette adresse : charlotte.guilbert@alsace.iufm.fr
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