Nouvelle Biographie Nationale - Académie royale de Belgique
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PlÉRARD PlÉRARD<br />
littéraire audacieuse, que ses promoteurs veulent<br />
«transcendante et révolutionnaire». Il y crée la<br />
Chronique <strong>de</strong> la vie populaire dans laquelle il<br />
évoque l'actualité littéraire, artistique et<br />
politique. Il y publie aussi un nouveau recueil,<br />
Images boraines, dédié à Verhaeren, son maître<br />
et son ami. Sa signature côtoie celles <strong>de</strong> Gi<strong>de</strong> et<br />
<strong>de</strong> Giraud. L'éditeur d'Antée en état <strong>de</strong> faillite,<br />
la publication paraît pour la <strong>de</strong>rnière fois en<br />
septembre 1907. Elle est suivie par la <strong>Nouvelle</strong><br />
Revue française, pour laquelle Louis Piérard<br />
assure dorénavant la chronique <strong>de</strong> la prose et<br />
une chronique intitulée La vie du Peuple.<br />
En 1906, grâce à l'appui <strong>de</strong> Maroille, il<br />
entame, pour cent francs par mois, une carrière<br />
<strong>de</strong> journaliste à L'Avenir du Borinage. L'année<br />
suivante, la forêt <strong>de</strong> Colfontaine est menacée <strong>de</strong><br />
déboisement; Piérard réagit, organise un vaste<br />
mouvement <strong>de</strong> protestation et obtient du<br />
gouvernement qu'il rachète le bois. Ecologiste<br />
avant la lettre, il dirige la publication d'Aimons<br />
les arbres. Dans cette anthologie à la louange<br />
<strong>de</strong> la nature sortie <strong>de</strong> presse en 1909, il reprend<br />
notamment Parfum <strong>de</strong>s Bois, <strong>de</strong> Colette. Très<br />
sensible à cette attention, Colette Willy lui<br />
écrit : «Qu'est-ce que j'ai fait, Monsieur, pour<br />
que vous soyez si gentil pour moi? [...]. Et<br />
puis, vous aimez <strong>de</strong> moi les phrases que je<br />
préfère, alors... Il me semble que je <strong>de</strong>vrais<br />
vous connaître [...] ». Une longue amitié<br />
commençait.<br />
Enfin, il épouse Marguerite Fauconnier, celle<br />
qu'il aimait <strong>de</strong>puis l'enfance; il s'installe dans<br />
une petite maison, près du domicile <strong>de</strong> ses<br />
parents, et, le 8 juin 1907, Marianne-Mélisan<strong>de</strong><br />
voit le jour. La même année, il participe au<br />
tirage au sort encore en vigueur pour désigner<br />
ceux qui serviraient sous les drapeaux, choisit<br />
un bon numéro et échappe par conséquent à<br />
toute obligation militaire. D s'installe alors au<br />
boulevard Dolez, à Mons, puis, un an plus tard,<br />
se fixe à Bruxelles.<br />
Fin 1910, Emile Pataud, secrétaire général du<br />
syndicat <strong>de</strong>s électriciens <strong>de</strong> Paris, se réfugie<br />
quelque temps en <strong>Belgique</strong> pour échapper à <strong>de</strong>s<br />
poursuites judiciaires dans son pays. En janvier<br />
1911, Louis Piérard qui lui sert alors <strong>de</strong> cicérone<br />
se fait égratigner par Ysac, employé à l'Hôtel <strong>de</strong><br />
Ville. Ce collaborateur du très libéral Journal <strong>de</strong><br />
Mons, <strong>de</strong> son vrai nom Gustave Casy, le traite <strong>de</strong><br />
«blanc-bec», <strong>de</strong> «djambot» (gamin), <strong>de</strong><br />
«cornac» au service <strong>de</strong>s célébrités du jour<br />
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espérant recueillir un peu <strong>de</strong> leur gloire. Piqué<br />
au vif, Piérard assène trois violents coups <strong>de</strong><br />
canne sur le crâne du malheureux Casy qui,<br />
commotionné, doit rester alité et connaît même<br />
une incapacité <strong>de</strong> travail. Ce geste malheureux<br />
lui vaut d'être traduit en justice. En dépit <strong>de</strong> la<br />
défense assurée par Edmond Picard, il se voit<br />
infliger une amen<strong>de</strong> <strong>de</strong> 160 francs par le tribunal<br />
correctionnel et est condamné à verser un franc<br />
<strong>de</strong> dommages et intérêts à sa victime.<br />
A l'instar <strong>de</strong> Destrée, Louis Piérard rejette le<br />
patriotisme officiel et unitaire qui, souligne-t-il<br />
en septembre 1905, ne peut engendrer qu'un<br />
chauvinisme agressif et il s'affiche ostensiblement<br />
comme «internationaliste». En janvier<br />
1910, il prend clairement position face au<br />
problème linguistique : « Le flamand en<br />
Flandre, le français en Wallonie et, s'il le faut, si<br />
les extravagances flamingantes nous y poussent,<br />
la séparation administrative». En 1911, il rédige<br />
En Wallonie, ouvrage dans lequel il nie l'existence<br />
<strong>de</strong> l'âme belge et affiche ses idées<br />
socialistes et antireligieuses. S'il rejette catégoriquement<br />
l'idée d'une union administrative<br />
avec la France, il appelle <strong>de</strong> ses vœux l'union<br />
<strong>de</strong>s esprits et <strong>de</strong>s cœurs, réalisée, par-<strong>de</strong>ssus la<br />
frontière, par le prestige <strong>de</strong> la langue française.<br />
Depuis plusieurs années déjà, il condamnait la<br />
gallophobie <strong>de</strong> certains flamingants et il<br />
défendait l'influence française en <strong>Belgique</strong>. Il<br />
s'oppose à la propagan<strong>de</strong> pangermaniste, adhère<br />
au Comité constitué en 1908 pour commémorer<br />
la bataille <strong>de</strong> Jemappes et s'efforce <strong>de</strong> susciter<br />
un mouvement francophile. Il collabore<br />
d'ailleurs au Réveil wallon (1907-1908), à La<br />
<strong>Belgique</strong> française (1911 et 1912), puis à la<br />
Revue franco-wallonne (1914).<br />
Maroille veut faire <strong>de</strong> son jeune ami un<br />
homme politique. Il le fait tout d'abord entrer,<br />
comme « poignettiste », à la table du compte<br />
rendu analytique <strong>de</strong> la Chambre <strong>de</strong>s<br />
Représentants. Au printemps 1911, Louis<br />
Piérard se fixe à Saint-Gilles, où sa <strong>de</strong>uxième<br />
fille naît en octobre alors qu'il se fait bâtir, à<br />
tempérament, une maison à Forest, dans l'un <strong>de</strong>s<br />
nouveaux quartiers <strong>de</strong> Bruxelles. Enfin, Le Soir,<br />
pour lequel il collaborait déjà, l'engage en 1912.<br />
Le jeune homme se taille une réputation et<br />
<strong>de</strong>vient l'un <strong>de</strong>s journalistes en vue <strong>de</strong><br />
Bruxelles. Doué d'une puissance <strong>de</strong> travail peu<br />
commune, il collabore au Journal <strong>de</strong> Charleroi<br />
et au Peuple. Π est en outre le correspondant