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Cahier labiso périodique<br />
n°129<br />
La Maison<br />
d’EMEraudE<br />
à BErtrix<br />
La pédagogie Feuerstein au service<br />
d’un apprentissage diFFérencié
<strong>une</strong> initiative de<br />
en partenariat aveC
5<br />
6<br />
6<br />
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16<br />
17<br />
17<br />
Sommaire<br />
–<br />
IntroductIon<br />
un caIllou pas comme <strong>le</strong>s autres<br />
La pédagogie Feuerstein<br />
mo-tI-ver !<br />
petIte éco<strong>le</strong>, petIts moyens<br />
<strong>le</strong> cursus<br />
Les quatorze cahiers du programme d’enrichissement<br />
instrumental (PEI)<br />
Journal de classe<br />
la méthode<br />
La théorie de la modificabilité cognitive structurel<strong>le</strong><br />
charte et proJet d’établIssement<br />
des résultats<br />
un proJet global<br />
pour en savoIr plus
la maison d’emeraude à bertrix<br />
introduction<br />
La Maison d’Émeraude est <strong>une</strong> petite éco<strong>le</strong>.<br />
Une toute petite éco<strong>le</strong> de six élèves et deux professeurs,<br />
qui <strong>le</strong>ur donnent cours <strong>le</strong> lundi matin,<br />
<strong>le</strong> jeudi et <strong>le</strong> vendredi.<br />
Cette petite asbl est avant tout <strong>le</strong> combat<br />
d’<strong>une</strong> mère. Berthe Colson a trois enfants,<br />
Géraldine, Mathieu, et Pauline. À la naissance<br />
de la dernière en 1988, sa vie a basculé. « À vingttrois<br />
mois, Pauline ne marchait toujours pas, ne<br />
gazouillait pas, se souvient-el<strong>le</strong>. Le médecin de<br />
famil<strong>le</strong> nous a dit de ne pas nous inquiéter, avant<br />
deux ans. Ce n’était qu’un simp<strong>le</strong> retard. Nous ne<br />
nous sommes pas trop inquiétés, mais du coup<br />
nous ne l’avons pas beaucoup stimulée non plus.<br />
On était plutôt <strong>dans</strong> la passivité… »<br />
Les années passant, enfin un diagnostic se<br />
pose. Pauline est dysphasique, un troub<strong>le</strong> du<br />
langage associé à un retard mental. « Le médecin<br />
nous a dit ne rien pouvoir faire médica<strong>le</strong>ment.<br />
C’était quelque chose de nouveau, de peu connu<br />
à l’époque, explique Berthe. C’était dur à encaisser.<br />
Il m’a fallu du temps pour me re<strong>le</strong>ver. Mais<br />
ce que je souhaitais plus que tout au monde,<br />
c’était <strong>le</strong> bonheur de ma fil<strong>le</strong>. Et ce bonheur, c’est<br />
de moi qu’il dépendait. » Pauline est scolarisée<br />
<strong>dans</strong> l’enseignement spécial à Marloie puis à<br />
Barvaux. Bon an mal an, <strong>le</strong>s acquis intel<strong>le</strong>ctuels<br />
succèdent à des phases de stagnation, voire de<br />
régression. Berthe s’interroge sur la pédagogie<br />
de ces établissements. « Pourquoi a-t-on appris<br />
<strong>le</strong>s voyel<strong>le</strong>s à ma fil<strong>le</strong> et pas <strong>le</strong>s consonnes ? ditel<strong>le</strong>.<br />
Les matières de base, français et calcul, sont<br />
vues en primaire mais <strong>dans</strong> <strong>le</strong> secondaire ces<br />
cours laissent place à de la cuisine ou à de l’horticulture.<br />
Pourquoi cesse-t-on de <strong>le</strong>s stimu<strong>le</strong>r ? »<br />
5<br />
Cahier n° 129<br />
Berthe, au départ prof de mathématiques,<br />
travail<strong>le</strong> à ce moment-là comme éducatrice <strong>dans</strong><br />
un centre résidentiel pour adultes handicapés<br />
qui dispose aussi d’un centre de jour. « Il n’y a<br />
pas de hasard », sourit-el<strong>le</strong>. De cette deuxième<br />
vie professionnel<strong>le</strong>, el<strong>le</strong> retirera <strong>une</strong> riche expérience<br />
humaine mais aussi des convictions. Pas<br />
question que sa fil<strong>le</strong> rejoigne un jour ce genre<br />
d’endroit hélas fort fermé et centré sur luimême.<br />
« Je ne dénie pas <strong>le</strong> travail d’accompagnement<br />
qui s’y opère, dit-el<strong>le</strong>, mais j’aspire à autre<br />
chose pour mon enfant… »<br />
Alors qu’el<strong>le</strong> se débat au cœur de ces questions<br />
sur l’avenir de sa fil<strong>le</strong>, un livre lui tombe<br />
<strong>dans</strong> <strong>le</strong>s mains. « Cela s’appelait Le voyage<br />
d’Anton, <strong>le</strong> récit de Mariana Loupan, <strong>une</strong> autre<br />
mère face au handicap de son enfant. Je l’ai lu<br />
de bout en bout en <strong>une</strong> nuit. À chaque page je<br />
me reconnaissais. » L’auteur y par<strong>le</strong> de la pédagogie<br />
Feuerstein, <strong>une</strong> découverte marquante<br />
pour Berthe. El<strong>le</strong> trouvera <strong>dans</strong> cet ouvrage <strong>le</strong><br />
support théorique et l’impulsion qui lui manquaient<br />
pour lancer <strong>le</strong> projet qui germait <strong>dans</strong><br />
un coin de sa tête, celui d’un enseignement hyper<br />
individualisé et stimulant pour donner à ces<br />
je<strong>une</strong>s handicapés des outils pour construire<br />
<strong>le</strong>ur autonomie. « Je me suis dit ouf ! Pauline a<br />
des capacités. Les adultes du service résidentiel<br />
ont aussi un potentiel. D’autres enfants aussi.<br />
Oui, on va ouvrir <strong>une</strong> éco<strong>le</strong> pour poursuivre ces<br />
apprentissages à <strong>le</strong>ur rythme. »<br />
Berthe en par<strong>le</strong> à des connaissances, rencontre<br />
un assistant social récemment à la<br />
retraite, Jacques Frennet, qui lui emboîte <strong>le</strong><br />
pas. « Nous avons créé l’asbl en 2006 et l’éco<strong>le</strong> en<br />
2007. » Ils en sont <strong>le</strong>s deux professeurs. ■<br />
« Si tu ne cherches pas l’inespéré, tu ne <strong>le</strong><br />
trouveras pas. » Héraclite.
la maison d’emeraude à bertrix<br />
un caillou<br />
paS comme <strong>le</strong>S<br />
autreS<br />
Quand son moral était au plus bas, Berthe<br />
s’est fait aider, notamment par la kinésiologie.<br />
El<strong>le</strong> a travaillé l’acceptation du deuil de l’enfant<br />
dont el<strong>le</strong> rêvait et qu’el<strong>le</strong> n’a pas eu et l’acceptation<br />
du handicap de sa fil<strong>le</strong>. « Mais l’accepter ce<br />
n’est pas ne rien faire, dit-el<strong>le</strong>. Je suis passée de<br />
la passivité à l’action. J’accepte ma fil<strong>le</strong> comme<br />
el<strong>le</strong> est et je fais ce que je peux pour qu’el<strong>le</strong> soit<br />
heureuse. Je bouge ! »<br />
Berthe a fait un long chemin, un long travail<br />
sur el<strong>le</strong>-même. « Au départ j’étais <strong>une</strong> personne<br />
très rigide, très prof de math, dit-el<strong>le</strong>. Maintenant<br />
je suis moins carrée, plus ouverte. » Et el<strong>le</strong> ne croit<br />
pas au hasard, celui de ses <strong>le</strong>ctures, de ses choix<br />
professionnels… beaucoup de choses convergent<br />
vers ce qu’el<strong>le</strong> est aujourd’hui. Jusqu’au nom de<br />
son éco<strong>le</strong>. « L’émeraude est la pierre qui symbolise<br />
la paix intérieure, la régénérescence, l’harmonie,<br />
la polarité, l’équilibre », dit-el<strong>le</strong>.<br />
la pédagogie Feuerstein<br />
Selon Reuven Feuerstein, « toute personne<br />
est capab<strong>le</strong> de changement, quels que soient son<br />
âge, son handicap et la gravité de ce handicap.<br />
Les enfants différents ont simp<strong>le</strong>ment besoin<br />
d’un surcroît d’attention et d’investissement<br />
personnel. » Mais pour qu’un changement se<br />
produise, il faut qu’il y ait médiation humaine.<br />
Le médiateur est la personne qui s’interpose<br />
entre l’enfant et <strong>le</strong> monde, qui interprète pour<br />
6<br />
Cahier n° 129<br />
l’enfant ses expériences, qui réordonne, organise,<br />
regroupe, structure <strong>le</strong>s stimuli auxquels<br />
l’enfant est exposé, en <strong>le</strong>s orientant vers un<br />
objectif donné. Et c’est cette médiation qui crée<br />
chez l’enfant la disposition à apprendre.<br />
Au fil des années, Feuerstein définit trois<br />
critères importants : l’intentionnalité, la transcendance<br />
et <strong>le</strong> sens. La médiation doit d’abord<br />
être animée par l’intention. « Si, par exemp<strong>le</strong>,<br />
j’apprends à un enfant certains mots, ce peut être<br />
<strong>dans</strong> l’intention de <strong>le</strong> rendre capab<strong>le</strong> de construire<br />
d’autres mots. La transcendance est la volonté de<br />
dépasser <strong>le</strong>s besoins immédiats de l’enfant pour<br />
en créer de nouveaux. Je peux apprendre à un<br />
enfant à utiliser des couverts pour manger... Si, en<br />
même temps, je lui apprends à se laver <strong>le</strong>s mains<br />
avant <strong>le</strong> repas, j’élargis <strong>le</strong> champ du besoin immédiat<br />
à des comportements qui deviendront des<br />
besoins secondaires. Et enfin, l’enfant doit comprendre<br />
<strong>le</strong> sens des actions du médiateur, quels<br />
buts il poursuit et pourquoi. C’est la médiation de<br />
la signification. »<br />
Selon <strong>le</strong> professeur, c’est la rareté ou <strong>le</strong><br />
manque de médiation humaine qui est à l’origine<br />
d’un développement intel<strong>le</strong>ctuel insuffisant.<br />
« L’attitude traditionnel<strong>le</strong> est de dire : un enfant<br />
trisomique est retardé parce qu’il a trois chromosomes<br />
au lieu de deux, explique son fils, Rafi<br />
Feuerstein, vice-directeur de l’institut. Nous,<br />
nous disons : sa trisomie crée <strong>une</strong> situation qui<br />
bloque <strong>le</strong> passage de la médiation – d’où son<br />
retard. Notre rô<strong>le</strong> est de trouver <strong>le</strong>s interstices<br />
<strong>dans</strong> la murail<strong>le</strong> et d’y faire pénétrer la médiation,<br />
qui entraînera <strong>le</strong> changement. »<br />
Cette théorie du changement et de l’apprentissage<br />
par médiation a donné naissance à deux<br />
applications pratiques, la méthode d’évaluation<br />
dynamique du potentiel d’apprentissage
la maison d’emeraude à bertrix<br />
(LPAD) et <strong>le</strong> programme d’enrichissement instrumental<br />
(PEI). Des outils pédagogiques qui, à<br />
travers la médiation, s’appuient sur <strong>une</strong> attitude<br />
comm<strong>une</strong> : valoriser l’enfant au maximum, en<br />
évitant toujours de <strong>le</strong> mettre en échec, c’est-àdire<br />
en mettant prioritairement en évidence ses<br />
capacités, en lui faisant découvrir son potentiel.<br />
Les difficultés rencontrées sont chaque fois des<br />
occasions pour trouver <strong>le</strong>s solutions et, ainsi, se<br />
dépasser. ■<br />
sources :<br />
www.icelp.org (site officiel de la pédagogie<br />
Feuerstein)<br />
www.handicap.ua.ac.be (site du pr <strong>le</strong>beer avec<br />
l’asbl collabore pour <strong>le</strong> lpad)<br />
www.javance.org/upbraining.htm, site<br />
spécialisé <strong>dans</strong> la méthode d’apprentissage<br />
Feuerstein.<br />
7<br />
mo-ti-ver !<br />
Cahier n° 129<br />
La pédagogie Feuerstein est <strong>une</strong> pédagogie<br />
très optimiste. Handicap ou non, quel que soit<br />
son âge, chacun a la capacité d’apprendre et de<br />
continuer à apprendre. L’élément important<br />
de cet apprentissage, c’est <strong>le</strong> médiateur qui se<br />
situe entre l’apprenant et la matière. Son tout<br />
premier objectif est de faire comprendre à l’élève<br />
qu’il peut avoir confiance en lui, qu’il peut croire<br />
en lui. « À force de notre confiance, <strong>le</strong>s élèves<br />
acquièrent confiance en eux. C’est <strong>le</strong> point de<br />
départ du travail, expliquent <strong>le</strong>s professeurs de<br />
la Maison d’Émeraude. C’est très important et il<br />
faut <strong>le</strong> <strong>le</strong>ur rappe<strong>le</strong>r très souvent car ils n’ont pas<br />
eu l’habitude auparavant de travail<strong>le</strong>r en classe<br />
ni même à la maison parfois. »<br />
Les enfants ont des parcours scolaires très<br />
divers. Certains comme Ophéline et Jérémie<br />
ont passé quelques années <strong>dans</strong> l’enseignement<br />
ordinaire tandis que <strong>le</strong>s autres sont inscrits <strong>dans</strong><br />
l’enseignement spécial depuis <strong>le</strong> début de <strong>le</strong>ur<br />
scolarité. Deux fois par semaine, <strong>le</strong> jeudi et <strong>le</strong><br />
vendredi (ou encore <strong>le</strong> lundi matin pour deux<br />
d’entre eux), ils rejoignent la Maison d’Émeraude<br />
pour y suivre des cours adaptés à <strong>le</strong>urs<br />
difficultés personnel<strong>le</strong>s d’apprentissage. Les<br />
devoirs et <strong>le</strong>s <strong>le</strong>çons, ils connaissaient à peine<br />
avant de rejoindre la Maison d’Émeraude. « La<br />
première année, il a fallu <strong>le</strong>s motiver, <strong>le</strong>ur faire<br />
comprendre pourquoi nous avions envie qu’ils<br />
travail<strong>le</strong>nt et qu’ils apprennent. » Pauline n’avait<br />
jamais appris à lire auparavant mais el<strong>le</strong> a très<br />
envie d’avoir un GSM… « Je crois que c’est l’<strong>une</strong><br />
de ses motivations pour savoir lire, constate sa<br />
mère. Chaque fois qu’el<strong>le</strong> en a marre, qu’el<strong>le</strong>
la maison d’emeraude à bertrix<br />
voudrait laisser tomber, il y a <strong>le</strong> GSM en ligne de<br />
mire… » Ou d’autres choses, car el<strong>le</strong> voit aussi<br />
aujourd’hui l’utilité de savoir lire <strong>dans</strong> la vie de<br />
tous <strong>le</strong>s jours.<br />
Pauline, Laura, Jérémie, Ophéline, Baptiste<br />
et Maximilien ont entre huit et vingt-trois ans.<br />
La limite d’âge pour accéder à l’enseignement<br />
secondaire spécial est aussi un problème. « Leur<br />
rythme d’apprentissage est <strong>le</strong>nt et à vingt-et-un<br />
ans l’éco<strong>le</strong> ne <strong>le</strong>ur est plus accessib<strong>le</strong>, déplore<br />
Berthe Colson. Pour nous, l’apprentissage est <strong>le</strong><br />
terrain de toute <strong>une</strong> vie. C’est aussi pour cela que<br />
nous acceptons des élèves un peu plus âgés. » ■<br />
8<br />
Cahier n° 129<br />
petite éco<strong>le</strong>,<br />
petitS moyenS<br />
La Maison d’Émeraude est <strong>une</strong> éco<strong>le</strong> privée,<br />
sans moyens et sans bâtiment propre. Le premier<br />
cours s’est donné <strong>le</strong> 6 septembre 2007 <strong>dans</strong> <strong>une</strong><br />
sal<strong>le</strong> du couvent des Pères franciscains, au centre<br />
vil<strong>le</strong>. L’équipe pédagogique a eu la chance d’y<br />
être hébergée gracieusement durant quelques<br />
années mais, en juin dernier, el<strong>le</strong> a été contrainte<br />
de trouver un autre toit car la congrégation<br />
religieuse ne compte désormais plus que trois<br />
membres et il lui faut vendre son bien. « Quand<br />
on entrait <strong>dans</strong> <strong>le</strong> hall, il y avait <strong>une</strong> photographie<br />
de Saint-François d’Assise, se souvient Berthe.<br />
Nous sommes restés là pendant quatre ans pour<br />
poser nos assises… c’est très symbolique. »<br />
Après <strong>une</strong> brève transition au Village reine<br />
Fabiola à Bande, la Maison d’Émeraude a<br />
aujourd’hui emménagé <strong>dans</strong> <strong>une</strong> classe de l’institut<br />
technique de Bertrix. Visuel<strong>le</strong>ment, c’est<br />
<strong>une</strong> reconnaissance. « C’est l’endroit idéal, commente<br />
Berthe Colson, nos trois grands sont très<br />
contents. D’<strong>une</strong> part, c’est <strong>une</strong> vraie éco<strong>le</strong>, avec<br />
ses intercours, ses sonneries et ses récrés. Ce cadre<br />
est stimulant pour nos élèves. C’est aussi un beau<br />
projet d’intégration pour <strong>le</strong>s élèves de l’institut. »<br />
Le local se trouve au rez-de-chaussée, <strong>une</strong><br />
situation très pratique pour Laura qui circu<strong>le</strong><br />
en chaise roulante. El<strong>le</strong> vient de Virton, sa mère<br />
l’accompagne en train jusqu’à la gare de Bertrix<br />
où l’équipe de la Maison d’Émeraude vient la<br />
chercher. En province de Luxembourg, <strong>le</strong>s distances<br />
viennent parfois à bout des meil<strong>le</strong>ures<br />
volontés. Lors de l’intermède au village reine<br />
Fabiola à Bande, Laura ne pouvait plus se rendre
la maison d’emeraude à bertrix<br />
au cours. « Et là, je me suis dis qu’on passait<br />
vraiment à côté de nos objectifs, dit Berthe. Cette<br />
je<strong>une</strong> fil<strong>le</strong> est en effet très motivée. »<br />
Qui dit initiative privée dit évidemment<br />
absence de subsides. Les parents s’acquittent<br />
d’un modique droit d’inscription de 70 euros<br />
par trimestre. L’objectif des fondateurs était de<br />
créer <strong>une</strong> éco<strong>le</strong> pour tous, peu importe <strong>le</strong> handicap,<br />
même si <strong>le</strong>s parents n’ont pas d’argent. « On<br />
doit suivre notre ligne. » La Maison d’Émeraude<br />
a été nominée en 2010 et 2011 pour <strong>le</strong> prix du<br />
Godefroid social, un prix qui met en va<strong>le</strong>ur des<br />
associations faisant preuve de dynamisme et<br />
d’esprit d’initiative en province de Luxembourg,<br />
mais cela ne suffit cependant pas à la faire vivre.<br />
« On vit de nos lasagnes ! » lance Berthe. Sans<br />
rire, l’asbl se finance en grande partie grâce aux<br />
repas qu’el<strong>le</strong> prépare, grâce à des associations<br />
qui organisent des événements à son profit,<br />
comme des randonnées équestres, des rassemb<strong>le</strong>ments<br />
cyclistes, des concerts, grâce aux dons<br />
de particuliers, de comm<strong>une</strong>s, de services clubs,<br />
de sociétés ou d’organismes privés. « Nous avons<br />
un statut d’indépendant et nous sommes rémunérés…<br />
quand l’argent rentre, parfois avec un an de<br />
retard », confie-t el<strong>le</strong>.<br />
Plus <strong>le</strong> temps passe, plus el<strong>le</strong> trouve <strong>le</strong> rythme<br />
de l’asbl éprouvant. « On a la vie de l’éco<strong>le</strong>, on<br />
prépare <strong>le</strong>s cours, on va chercher <strong>le</strong>s enfants à<br />
la gare, on gère <strong>le</strong> temps de midi, <strong>le</strong>s récrés et <strong>le</strong><br />
retour… on n’arrête pas. » Et c’est ainsi trois fois<br />
par semaine. « En plus de cela, il y a <strong>le</strong>s manifestations<br />
pour <strong>le</strong>ver des fonds et <strong>le</strong>s réunions d’info<br />
<strong>dans</strong> la région ou à Bruxel<strong>le</strong>s. » Berthe a quitté<br />
son boulot au centre d’hébergement, el<strong>le</strong> est<br />
en congé sans solde. « Mener <strong>le</strong>s deux de front,<br />
c’était trop. Surtout que de part et d’autre on n’est<br />
pas <strong>dans</strong> la même dynamique. » ■<br />
9<br />
<strong>le</strong> curSuS<br />
Cahier n° 129<br />
Les médiateurs-professeurs de la Maison<br />
d’Émeraude ont suivi <strong>une</strong> formation intensive<br />
à la pédagogie Feuerstein à Paris. Des sessions<br />
rassemblant jusqu’à trente nationalités différentes<br />
sont régulièrement organisées en Europe.<br />
Ces cours sont ouverts aux éducateurs, logopèdes,<br />
psychomotriciens, psychologues et autres<br />
spécialistes de l’éducation et de l’enseignement.<br />
La méthode s’articu<strong>le</strong> autour de quatorze<br />
outils, quatorze cahiers différents et progressifs<br />
qui abordent la perception analytique, la comparaison,<br />
la classification, etc.<br />
Ce ne sont pas des manuels différenciés<br />
d’apprentissage du français ou du calcul. Tout<br />
est <strong>dans</strong> tout. L’utilisation de ces outils spécifiques<br />
à la pédagogie Feuerstein permet, en plus<br />
des objectifs précis et progressifs propres à la<br />
méthode, de transposer cette approche <strong>dans</strong><br />
l’apprentissage du français et du calcul et de la<br />
vie quotidienne et socia<strong>le</strong>.<br />
Chaque cahier, chaque outil, est employé<br />
<strong>dans</strong> un ordre déterminé et à respecter. Il poursuit<br />
un ou plusieurs objectifs précis en vue de<br />
corriger progressivement <strong>le</strong>s fonctions cognitives<br />
déficientes de l’apprenant, de développer<br />
son vocabulaire, de créer de bonnes habitudes<br />
de pensée et de <strong>le</strong> motiver <strong>dans</strong> l’apprentissage.
la maison d’emeraude à bertrix<br />
L’utilisation de ces outils implique pour<br />
l’apprenant l’acquisition d’un vocabulaire précis<br />
et d’<strong>une</strong> maîtrise progressive de notions tel<strong>le</strong>s<br />
que la quantité, la forme (géométrique), la tail<strong>le</strong>,<br />
l’orientation et, donc, est en étroite relation avec<br />
l’apprentissage du calcul et du français.<br />
« Le PEI est un long parcours, dit Jacques.<br />
Nous fonctionnons depuis cinq ans à raison<br />
de deux heures par semaine avec <strong>le</strong> groupe des<br />
10<br />
Cahier n° 129<br />
<strong>le</strong>s quatorze cahIers du programme d’enrIchIssement Instrumental (peI)<br />
1. organisation de points : projeter des relations<br />
virtuel<strong>le</strong>s, trouver des modè<strong>le</strong>s spécifiques<br />
<strong>dans</strong> un nuage de points et travail<strong>le</strong>r<br />
avec <strong>une</strong> stratégie.<br />
2. orientation <strong>dans</strong> l’espace (1) : représenter<br />
menta<strong>le</strong>ment des objets <strong>dans</strong> l’espace en<br />
relation <strong>le</strong>s uns avec <strong>le</strong>s autres ; ces relations<br />
changent en fonction de l’autre.<br />
3. comparaison : trouver <strong>le</strong>s similitudes et <strong>le</strong>s<br />
différences, <strong>le</strong>s critères de comparaison et<br />
ranger selon <strong>le</strong> degré de ressemblance.<br />
4. catégorisation : regrouper <strong>le</strong>s objets selon un<br />
critère choisi, en fonction des caractéristiques<br />
en commun ; apprendre à faire des présentations<br />
différentes de classification.<br />
5. Illustrations : analyser des dessins humoristiques<br />
<strong>dans</strong> <strong>le</strong>squels <strong>une</strong> situation de problème<br />
est montrée ; trouver <strong>une</strong> suite logique<br />
<strong>dans</strong> <strong>une</strong> succession d’illustrations.<br />
6. perception analytique : apprendre à distinguer<br />
<strong>le</strong>s parties <strong>dans</strong> un ensemb<strong>le</strong> comp<strong>le</strong>xe ;<br />
regarder la relation entre <strong>le</strong>s parties et reconstruire<br />
l’ensemb<strong>le</strong> à partir de ces ensemb<strong>le</strong>s<br />
(nB : cette approche permet de travail<strong>le</strong>r<br />
en français la décomposition de la phrase,<br />
<strong>le</strong>s fonctions de chaque partie, sujet, verbe,<br />
complément mais éga<strong>le</strong>ment en calcul pour<br />
la décomposition du nombre etc.).<br />
7. relations familia<strong>le</strong>s : apprendre <strong>le</strong>s relations,<br />
<strong>dans</strong> <strong>une</strong> famil<strong>le</strong>, <strong>dans</strong> la société ; apprendre<br />
à utiliser <strong>le</strong>s codes et <strong>le</strong>s schémas.<br />
8. relations temporel<strong>le</strong>s : concepts du temps et<br />
de la vitesse, division du temps, instruments<br />
pour mesurer <strong>le</strong> temps, temps subjectif et<br />
objectif, relations causa<strong>le</strong>s et événements<br />
simultanés.<br />
9. orientation <strong>dans</strong> l’espace (2) : apprendre<br />
à utiliser un système de références spatia<strong>le</strong>s<br />
pour décrire la position et l’orientation<br />
; apprendre à utiliser des coordonnées,<br />
apprendre à utiliser <strong>une</strong> carte, à dessiner un<br />
itinéraire.<br />
10. Instructions : décoder des figures <strong>dans</strong> des<br />
instructions verba<strong>le</strong>s, apprendre à poser <strong>le</strong>s<br />
questions clés : quoi ? où ? quel<strong>le</strong> forme ?<br />
combien ? <strong>dans</strong> quel ordre ?<br />
11. progressions numériques : apprendre « cause<br />
et effet », apprendre <strong>le</strong> concept d’<strong>une</strong> série,<br />
d’<strong>une</strong> règ<strong>le</strong>, d’<strong>une</strong> formu<strong>le</strong> ; concept du probab<strong>le</strong>,<br />
du possib<strong>le</strong>, de l’impossib<strong>le</strong>, du certain ;<br />
découvrir <strong>une</strong> règ<strong>le</strong> afin de pouvoir prédire.<br />
12. syllogismes : explorer <strong>le</strong>s relations logiques<br />
entre ensemb<strong>le</strong>s et <strong>le</strong>urs caractéristiques.<br />
13. relations transitives : déduire <strong>une</strong> conclusion<br />
logique sur <strong>une</strong> relation basée sur <strong>le</strong>s différences<br />
entre des éléments de deux paires de<br />
relations.<br />
14. pochoirs : décomposer de façon représentationnel<strong>le</strong><br />
des dessins comp<strong>le</strong>xes de formes<br />
et cou<strong>le</strong>urs (des pochoirs) <strong>dans</strong> <strong>le</strong>ur composante<br />
de base.<br />
aînés et nous en sommes aux cahiers 3 et 5. Il<br />
est évident que si nous pouvions appliquer ces<br />
outils de manière la plus intensive, cinq jours par<br />
semaine par exemp<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s résultats seraient encore<br />
plus performants. »<br />
Toutefois, pour Berthe et Jacques, ces cahiers<br />
sont des outils de médiation et d’apprentissage<br />
comme <strong>le</strong> sont <strong>le</strong> français et la <strong>le</strong>cture
la maison d’emeraude à bertrix<br />
(apprendre à communiquer) ou encore <strong>le</strong> calcul<br />
en relation avec la vie quotidienne, ses règ<strong>le</strong>s,<br />
son organisation, etc.<br />
« Leur intérêt réside certes <strong>dans</strong> <strong>une</strong> méthode<br />
systématique et progressive de modificabilité du<br />
potentiel d’apprentissage mais aussi <strong>dans</strong> <strong>une</strong><br />
complémentarité riche avec l’apprentissage scolaire,<br />
en créant des ponts avec celui-ci », précisent<br />
<strong>le</strong>s professeurs. En effet, qu’il s’agisse du PEI ou<br />
de l’apprentissage scolaire, c’est la médiation qui<br />
importe, la démarche d’apprendre à apprendre,<br />
la découverte de son potentiel, de la confiance<br />
en soi et en ses possibilités. « Seuls, ces outils,<br />
tout comme l’enseignement de base, n’auraient<br />
qu’un effet limité et insuffisant de développement<br />
cognitif. » ■<br />
11<br />
Journal de<br />
claSSe<br />
Cahier n° 129<br />
Ils sont cinq en classe ce jeudi, répartis en<br />
deux groupes. Les grands : Jérémie, Laura et<br />
Pauline. Les petits : Ophéline et Maximilien.<br />
Le sixième, Baptiste, suit <strong>le</strong>s cours <strong>le</strong> vendredi.<br />
Tous n’ont pas <strong>le</strong>s mêmes difficultés. Jérémie,<br />
Ophéline et Maximilien s’expriment parfaitement<br />
alors que Laura ne pipe pas un mot.<br />
Pauline a du mal à articu<strong>le</strong>r mais el<strong>le</strong> parvient à<br />
se faire comprendre. Ils présentent des retards<br />
plus ou moins prononcés, de l’autisme, de la<br />
dysphasie. À part Laura qui nécessite des soins<br />
personnels, tous <strong>le</strong>s autres sont autonomes<br />
<strong>dans</strong> <strong>le</strong>urs mouvements, <strong>le</strong>s plus je<strong>une</strong>s peinant<br />
plutôt à rester en place.<br />
Berthe et Jacques assurent avec chaque<br />
groupe <strong>le</strong> travail de médiation et d’apprentissage<br />
scolaire. La matinée commence par <strong>une</strong> heure<br />
de programme d’enrichissement instrumental<br />
puis la classe enchaîne avec du calcul et du français.<br />
« J’insiste pour <strong>le</strong> moment sur <strong>le</strong> calcul avec<br />
Jérémie, explique Jacques Frennet, car il doit<br />
assimi<strong>le</strong>r la notion des dizaines. Ça implique pour<br />
lui un travail répétitif et continu. » Deux séances<br />
par semaine, ce n’est pas suffisant. Idéa<strong>le</strong>ment,<br />
il faudrait y consacrer <strong>une</strong> heure tous <strong>le</strong>s jours.<br />
Car il faut répéter, répéter, répéter… Les autres<br />
jours, Jérémie va à l’éco<strong>le</strong> à Bastogne, où il poursuit<br />
sa scolarité <strong>dans</strong> l’enseignement spécialisé.<br />
Il y suit notamment des cours de cuisine <strong>le</strong> lundi<br />
et des cours pratiques d’horticulture <strong>le</strong> mardi et<br />
<strong>le</strong> mercredi matin. « C’est pas la même ambiance<br />
qu’ici, dit-il. À Bastogne il y a des copains… Ici, on<br />
travail<strong>le</strong>, on a des devoirs aussi. »
la maison d’emeraude à bertrix<br />
Les devoirs, c’est nouveau pour eux. « Je<br />
pense que c’est important, c’est aussi <strong>le</strong>s reconnaître.<br />
Ce sont des élèves à part entière, comme<br />
<strong>dans</strong> toutes <strong>le</strong>s éco<strong>le</strong>s », souligne Jacques. Ce<br />
sont des devoirs à faire seul à la maison. « Un<br />
jour Jérémie avait reçu <strong>une</strong> feuil<strong>le</strong> de calculs<br />
du genre 8+7, qui dépassaient <strong>le</strong>s dizaines. Il est<br />
revenu avec des résultats impeccab<strong>le</strong>s ! Mais<br />
quand on <strong>le</strong>s a refaits à l’éco<strong>le</strong> ça ne marchait<br />
plus… », se souvient <strong>le</strong> professeur. Jérémie<br />
savoure déjà la fin de l’anecdote… « Il avait utilisé<br />
<strong>une</strong> calcu<strong>le</strong>tte ! » Mais Jacques Frennet est<br />
confiant <strong>dans</strong> son élève. « Il progresse », dit-il.<br />
Et Jérémie opine.<br />
Pour <strong>le</strong>s autres matières, <strong>le</strong>s deux professeurs<br />
de la Maison d’Émeraude se fondent sur<br />
des manuels existants. Ils <strong>le</strong>s appliquent ou <strong>le</strong><br />
plus souvent <strong>le</strong>s adaptent en fonction de <strong>le</strong>urs<br />
élèves. C’est <strong>une</strong> démarche très individuel<strong>le</strong> sans<br />
12<br />
Cahier n° 129<br />
pendant que Jérémie termine ses exercices,<br />
ses compagnons de classes sont penchés sur <strong>le</strong>s colonnes<br />
du journal local. berthe <strong>le</strong>ur fait la <strong>le</strong>cture d’un artic<strong>le</strong>…<br />
où l’on par<strong>le</strong> d’eux !<br />
laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong> professeur ne verrait pas <strong>le</strong>s erreurs<br />
de raisonnement de chacun. « C’est cela <strong>le</strong> rô<strong>le</strong><br />
du médiateur entre l’apprenant et l’objet de<br />
l’apprentissage », résume Jacques. Les exercices<br />
sont préparés pour chacun en fonction de <strong>le</strong>ur<br />
niveau du moment et de <strong>le</strong>ur rythme d’appren-<br />
Jacques Frennet travail<strong>le</strong> avec Jérémie, pauline et laura à un exercice de perception analytique (pei) :<br />
reconnaître, comparer et reconstruire un ensemb<strong>le</strong>.
la maison d’emeraude à bertrix<br />
tissage. Aujourd’hui, Jacques a préparé pour<br />
Jérémie <strong>une</strong> page sur <strong>le</strong>s additions avec report.<br />
Pour chaque élève, un travail similaire est à faire<br />
et <strong>le</strong>s exercices en PEI sont éga<strong>le</strong>ment adaptés.<br />
« Il m’arrive de préparer quelque chose de plus<br />
simp<strong>le</strong> que ce qui est proposé ou de <strong>le</strong>s refaire<br />
de façon différente tant que la matière n’est<br />
pas bien assimilée », ajoute Berthe. La journée<br />
de travail de ces enseignants ne s’arrête pas en<br />
même temps que la sonnerie...<br />
Les cours se donnent <strong>le</strong> matin, quand la<br />
concentration des élèves est la plus grande.<br />
L’après-midi du jeudi et du vendredi est consacrée<br />
au travail manuel créatif (papier, poterie,<br />
peinture) et à l’équitation, au manège d’Aubysur-Semois,<br />
à dix kilomètres de Bertrix. Ces<br />
activités sont animées par des monitrices initiées<br />
à la pédagogie Feuerstein. Par <strong>le</strong> contact<br />
avec la terre, la nature et <strong>le</strong>s animaux, ces activités<br />
permettent l’ancrage et favorisent <strong>le</strong> développement<br />
de l’équilibre mental et physique des<br />
enfants en alternant détente et concentration.<br />
« Au départ, dit Berthe, c’était impossib<strong>le</strong> de<br />
travail<strong>le</strong>r l’après-midi, car <strong>le</strong>s enfants étaient très<br />
fatigués par tout ce qu’ils donnaient <strong>le</strong> matin. Ils<br />
aiment beaucoup l’aspect créatif des ateliers, et<br />
puis il y a la relation avec <strong>le</strong> cheval. » ■<br />
ophéline se concentre.<br />
13<br />
la métHode<br />
Cahier n° 129<br />
La méthode d’apprentissage s’appuie sur<br />
<strong>le</strong> principe de la modificabilité cognitive<br />
structurel<strong>le</strong>. « On peut modifier <strong>le</strong>s fonctions<br />
cognitives, explique Jacques Frennet. Il y a des<br />
blocages, on ne sait pas pourquoi. Mais par la<br />
stimulation, par la répétition, des connexions<br />
<strong>dans</strong> <strong>le</strong> cerveau se reforment. » Ces fonctions<br />
cognitives se présentent à différents niveaux : au<br />
niveau de l’input (l’observation, la compréhension),<br />
au niveau de l’élaboration et au niveau de<br />
l’output (l’expression).<br />
la théorIe de la modIFIcabIlIté<br />
cognItIve structurel<strong>le</strong><br />
<strong>le</strong>s déficiences cognitives qui résultent<br />
d’un manque d’expériences d’apprentissage<br />
médiatisé sont plutôt périphériques que<br />
centra<strong>le</strong>s. el<strong>le</strong>s reflètent des déficiences<br />
d’attitude et de motivation, un manque<br />
d’habitudes d’apprentissage et de travail<br />
plutôt que des incapacités structurel<strong>le</strong>s et<br />
« élaborationnel<strong>le</strong>s ».<br />
l’évidence de la réversibilité de ces phénomènes<br />
a été prouvée par des recherches<br />
cliniques et expérimenta<strong>le</strong>s en particulier<br />
par <strong>une</strong> évaluation dynamique (lpad, <strong>une</strong><br />
méthode d’évaluation du potentiel d’apprentissage),<br />
qui a permis d’établir un inventaire<br />
des fonctions cognitives affectées ou non<br />
développées. el<strong>le</strong>s sont classées comme suit :<br />
input, élaboration et output.<br />
<strong>le</strong>s fonctions cognitives déficientes au<br />
niveau de l’input comprennent <strong>le</strong>s déficiences<br />
quantitatives et qualitatives d’un objet ou<br />
d’<strong>une</strong> expérience : perception vague et insuf
la maison d’emeraude à bertrix<br />
fisante, comportement impulsif, manque<br />
d’instruments verbaux, manque d’orientation<br />
spatia<strong>le</strong>, d’organisation, manque ou défaut du<br />
concept de temps, incapacité de considérer<br />
deux ou plusieurs sources de données, etc.<br />
un troub<strong>le</strong> sérieux au niveau de l’input peut<br />
aussi affecter la capacité de fonctionnement<br />
au niveau de l’élaboration et de l’output.<br />
<strong>le</strong>s fonctions cognitives déficientes au<br />
niveau de l’élaboration incluent <strong>le</strong>s facteurs<br />
qui entravent l’utilisation efficace des<br />
données existantes : incapacité de percevoir<br />
un problème et de <strong>le</strong> définir, manque de comportement<br />
comparatif spontané, étroitesse<br />
du champ mental, appréhension épisodique<br />
de la réalité, manque d’intériorisation, manque<br />
ou défaut de stratégie, manque de planification,<br />
etc. « penser » est habituel<strong>le</strong>ment lié<br />
à l’élaboration des données. il est possib<strong>le</strong><br />
qu’<strong>une</strong> élaboration soit très origina<strong>le</strong>, créative<br />
et correcte mais que la réponse semb<strong>le</strong><br />
fausse car basée sur des données impropres<br />
ou inadéquates au niveau de l’input.<br />
<strong>le</strong>s fonctions cognitives déficientes au<br />
niveau de l’output comprennent <strong>le</strong>s facteurs<br />
qui mènent à <strong>une</strong> communication insuffisante<br />
de solutions fina<strong>le</strong>s : difficultés de communication<br />
égocentrique, blocage, réponses par<br />
essais et erreurs, manque ou défaut d’instruments<br />
pour communiquer des réponses<br />
correctement élaborées, manque ou défaut<br />
de précision, transfert virtuel insuffisant, comportement<br />
impulsif, etc.<br />
Jacques prend l’exemp<strong>le</strong> d’<strong>une</strong> petite bande<br />
dessinée dont il faut replacer <strong>le</strong>s cases <strong>dans</strong> <strong>le</strong><br />
bon ordre. « L’observation est essentiel<strong>le</strong>. Nous<br />
<strong>le</strong>ur faisons décrire ce qu’ils voient et réfléchir à la<br />
suite logique d’<strong>une</strong> séquence. Cela fait éga<strong>le</strong>ment<br />
travail<strong>le</strong>r <strong>le</strong>ur imagination. » Tous ces points<br />
sont à stimu<strong>le</strong>r <strong>dans</strong> toutes <strong>le</strong>s matières car, en<br />
français comme en calcul, la verbalisation est<br />
importante : <strong>le</strong>ur faire expliquer ce qu’ils n’ont<br />
14<br />
Cahier n° 129<br />
pas compris, pourquoi ils n’ont pas compris.<br />
Au tab<strong>le</strong>au, Jacques a dessiné un carré <strong>dans</strong><br />
un rectang<strong>le</strong>. « Quel<strong>le</strong> est la différence entre <strong>le</strong>s<br />
deux ? Oui, c’est différent mais expliquez-moi<br />
en quoi c’est différent ? » <strong>le</strong>ur demande-t-il. En<br />
travaillant ces fonctions cognitives de manière<br />
répétée, à un moment donné des choses se<br />
passent.<br />
Peu à peu, <strong>le</strong>s enfants s’habituent à la<br />
méthode de travail. « Ici, quand on <strong>le</strong>ur demande<br />
de regarder quelque chose, ils doivent réagir,<br />
montrer ce qu’ils voient. Cela demande beaucoup<br />
de concentration. Avant, on travaillait dix<br />
minutes puis on arrêtait. Les enfants partaient<br />
sur autre chose. Aujourd’hui, ils parviennent à<br />
s’appliquer pendant près d’<strong>une</strong> heure. » ■
la maison d’emeraude à bertrix<br />
cHarte<br />
et proJet<br />
d’étaBliSSement<br />
« L’enfant, <strong>le</strong> je<strong>une</strong>, est au centre du projet. Il<br />
convient de lui donner sa réel<strong>le</strong> place avec tout ce<br />
qu’il peut amener comme état de conscience, non<br />
pas comme un être ‘non ordinaire’ mais comme<br />
‘un être extra ordinaire’. Ainsi, en l’écoutant vraiment,<br />
en lui témoignant notre confiance, l’enfant<br />
va développer son potentiel d’amour, de lumière<br />
ainsi que d’apprentissage et faire grandir son<br />
entourage <strong>dans</strong> un échange de va<strong>le</strong>urs.<br />
En effet, toute personne, je<strong>une</strong>, parent, professionnel,<br />
membre de l’asbl, est un être de liberté, de<br />
lumière et d’amour, ceci <strong>dans</strong> toute la dimension<br />
de son être, physique, mental et spirituel. C’est<br />
ainsi, que toute personne, quel<strong>le</strong> qu’el<strong>le</strong> soit, quel<br />
que soit son âge, son handicap, son évolution<br />
personnel<strong>le</strong>, peut continuer, à son rythme et en<br />
respectant <strong>le</strong> cheminement de chacun, de développer<br />
ses potentialités <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s trois dimensions<br />
de son être.<br />
Dans cette optique, la Maison d’Émeraude<br />
propose un projet de vie qui tient compte de l’être<br />
humain et vise donc <strong>le</strong> développement du potentiel<br />
global de chaque individu. Comme projet<br />
d’éco<strong>le</strong>, pour arriver au développement de ses<br />
élèves <strong>dans</strong> l’entièreté de <strong>le</strong>ur être, el<strong>le</strong> propose<br />
un projet intégral comprenant l’apprentissage<br />
et <strong>le</strong> développement cognitif au travers de la<br />
pédagogie Feuerstein, l’ancrage <strong>dans</strong> la terre par<br />
des activités liées à la nature et l’élévation de la<br />
conscience et de l’esprit.<br />
Ce projet de vie implique donc nécessairement<br />
<strong>une</strong> cohésion et <strong>une</strong> unité de travail à tous <strong>le</strong>s<br />
niveaux, que ce soit au sein des organes de l’asbl,<br />
15<br />
Cahier n° 129<br />
du travail et des professionnels, des je<strong>une</strong>s et de<br />
<strong>le</strong>urs parents. Toutefois et à tout moment, <strong>dans</strong> <strong>le</strong><br />
respect du rythme et du cheminement de chaque<br />
personne, chacun est libre d’adhérer ou non au<br />
projet, de choisir parmi <strong>le</strong>s activités libres et <strong>le</strong>s<br />
thérapies proposées, cel<strong>le</strong>s qui conviennent à<br />
l’enfant.<br />
Les objectifs philosophiques ainsi définis ne<br />
peuvent être atteints que s’ils s’appuient sur des<br />
va<strong>le</strong>urs mora<strong>le</strong>s et spirituel<strong>le</strong>s fortes, tel<strong>le</strong>s que<br />
l’amour, la vérité, l’écoute, la franchise, la sincérité,<br />
l’authenticité, la simplicité, la clarté… »<br />
Cette philosophie et cette pédagogie inspirent<br />
l’action de l’équipe et déterminent <strong>le</strong>s<br />
objectifs de l’association. « Nous aimerions<br />
pouvoir ouvrir notre classe cinq jours par<br />
semaine. Non seu<strong>le</strong>ment pour accueillir davantage<br />
d’élèves mais aussi pour <strong>le</strong>ur permettre<br />
<strong>une</strong> régularité, la répétition qui <strong>le</strong>ur est nécessaire<br />
», explique Jacques Frennet. La collaboration<br />
avec <strong>le</strong>s établissements scolaires ou de<br />
formation professionnel<strong>le</strong> que <strong>le</strong>s élèves de la<br />
Maison d’Émeraude fréquentent par ail<strong>le</strong>urs<br />
est aussi essentiel<strong>le</strong>. El<strong>le</strong> se concrétise par des<br />
réunions d’évaluation comm<strong>une</strong>, par l’échange<br />
d’informations et par <strong>une</strong> volonté de coordination<br />
du projet pédagogique. La collaboration<br />
avec <strong>le</strong>s parents est tout aussi importante, ils<br />
sont acteurs et partenaires <strong>dans</strong> <strong>le</strong> projet pédagogique.<br />
Cette complémentarité renforce <strong>le</strong>s<br />
résultats et implique d’eux un travail au quotidien<br />
en prolongement et en harmonie avec <strong>le</strong><br />
travail réalisé par la Maison d’Émeraude. ■
la maison d’emeraude à bertrix<br />
deS réSultatS<br />
Les membres de la Maison d’Émeraude<br />
croient en <strong>le</strong>ur projet. « Nous voyons chaque jour<br />
nos élèves progresser, apprendre à lire et à par<strong>le</strong>r,<br />
à écrire et à comprendre ce qu’ils apprennent, ce<br />
qu’ils lisent, à apprendre <strong>le</strong> calcul élémentaire. »<br />
En <strong>le</strong>ur apprenant à apprendre, ils développent<br />
<strong>le</strong>ur potentiel d’apprentissage, ils prennent<br />
conscience du sens de <strong>le</strong>ur vie, ils développent<br />
<strong>le</strong>urs connaissances. « Ils acquièrent de plus en<br />
plus d’autonomie et grandissent, au-delà de <strong>le</strong>ur<br />
handicap, <strong>dans</strong> la joie d’être reconnus comme des<br />
êtres capab<strong>le</strong>s et à part entière », ajoutent-ils. Ces<br />
progrès sont réels. Adrien est passé par <strong>le</strong>s bancs<br />
de la Maison il y a trois ans. Autiste, il pouvait à<br />
peine tenir son crayon en main. Au-delà de dix<br />
minutes de concentration, il filait se cacher sous<br />
<strong>une</strong> tab<strong>le</strong> <strong>le</strong> restant du cours. « Nous avons travaillé<br />
avec ces dix minutes dont il disposait », se<br />
souvient Berthe. El<strong>le</strong> n’est pas peu fière de voir<br />
son pupil<strong>le</strong> réussir aujourd’hui sa troisième primaire<br />
<strong>dans</strong> l’enseignement ordinaire avec 85% !<br />
Les résultats sont acquis au rythme et selon<br />
<strong>le</strong>s possibilités de chacun. Les objectifs pour<br />
chaque élève sont déterminés par ses capacités.<br />
« Les résultats seront donc différents mais tous<br />
sont capab<strong>le</strong>s, ont un potentiel d’apprentissage<br />
qu’il faut découvrir, stimu<strong>le</strong>r, développer et<br />
auquel nous croyons. » Des résultats constatés<br />
par l’entourage parental ou médico-thérapeutique<br />
de ces enfants ainsi que par <strong>le</strong> Pr Jo<br />
Lebeer, de l’Université d’Anvers, qui mène <strong>une</strong><br />
recherche sur <strong>le</strong> handicap en lien avec la pédagogie<br />
Feuerstein. « Il a établi <strong>une</strong> évaluation LPAD<br />
de plusieurs de nos élèves et il nous guide <strong>dans</strong><br />
16<br />
Cahier n° 129<br />
notre travail », dit Berthe. C’est aussi avec sa<br />
collaboration que la Maison d’Émeraude a organisé<br />
en 2007 et en 2010 des formations <strong>dans</strong> la<br />
région pour <strong>le</strong>s parents d’enfants handicapés.
la maison d’emeraude à bertrix<br />
un proJet<br />
gloBal<br />
« Notre but est de réintégrer <strong>le</strong> plus grand<br />
nombre de nos élèves <strong>dans</strong> l’enseignement ordinaire,<br />
d’en réinsérer <strong>le</strong> plus grand nombre <strong>dans</strong><br />
<strong>le</strong> monde professionnel. Bien sûr, on n’y arrivera<br />
pas pour tous », reconnaît Berthe. Pour ceux<br />
qui n’y parviendront pas, el<strong>le</strong> rêve de créer un<br />
centre de jour qui <strong>le</strong>ur propose des journées<br />
mixtes faites d’activités extérieures et toujours<br />
d’apprentissage scolaire pour qu’ils continuent à<br />
progresser. Et pour ceux à qui ça ne conviendra<br />
pas, el<strong>le</strong> imagine un service résidentiel toujours<br />
<strong>dans</strong> la ligne de cette pédagogie optimiste. « Nous<br />
ne sommes encore qu’au début ». Encouragée<br />
par son cheminement personnel, el<strong>le</strong> a aussi <strong>le</strong><br />
projet de développer <strong>une</strong> prise en charge plus<br />
globa<strong>le</strong> de la personne. « À coté du pédagogique,<br />
il y a aussi l’éthique, souligne-el<strong>le</strong>. Nous y tendons<br />
déjà avec <strong>le</strong> cognitif <strong>le</strong> matin et <strong>le</strong>s ateliers créatifs<br />
et l’hippothérapie l’après-midi mais j’aimerais y<br />
adjoindre de la psychomotricité, de la kinésithérapie,<br />
de l’ostéopathie, de l’art thérapie notamment<br />
au travers du son. » Pour cela, il faut aussi des<br />
locaux plus vastes, des moyens et du personnel…<br />
La Maison d’Émeraude n’est pas encore<br />
très connue mais la liste d’attente des élèves<br />
s’allonge. C’est <strong>le</strong> bouche-à-oreil<strong>le</strong> qui fait<br />
venir <strong>le</strong>s parents. « Le problème c’est que nous<br />
ne voulons pas accepter plus d’enfants tant que<br />
nous ne sommes pas plus d’adultes à <strong>le</strong>s encadrer.<br />
Nous voulons maintenir l’efficacité <strong>dans</strong><br />
notre travail et, pour cela, c’est cinq enfants au<br />
maximum en même temps. » Mais Berthe Colson<br />
est confiante. « On va y arriver… on y croit ! Le<br />
Godefroid, c’est déjà <strong>une</strong> reconnaissance. » ■<br />
17<br />
pour en<br />
Savoir pluS<br />
• la pédagogie Feuerstein<br />
ou la pédagogie à visage humain,<br />
reuven Feuerstein & antoine spire,<br />
Col<strong>le</strong>ction Clair et net.<br />
• <strong>le</strong> voyage d’anton,<br />
Mariana loupan,<br />
presses de la renaissance.<br />
contacts<br />
asbl la maIson d’émeraude<br />
rue aze-Fosse, 31<br />
6870 arvil<strong>le</strong><br />
tél. : 061 46 07 18 ou 0498 25 39 71<br />
lamaisondemeraude@skynet.be<br />
http://lamaisondemeraude.be<br />
crédit illustrations<br />
© pasca<strong>le</strong> Meunier<br />
Cahier n° 129
la maison d’emeraude à bertrix<br />
la <strong>le</strong>cture de<br />
ce caHier<br />
vouS donne<br />
envie de réagir?<br />
<strong>Labiso</strong>.be est un espace interactif. Sur <strong>le</strong> site<br />
Internet http://www.labiso.be, vous trouverez<br />
un forum qui vous permettra de déposer vos<br />
impressions de <strong>le</strong>cture. Réactions à chaud ?<br />
Avis divergeant sur <strong>une</strong> idée défendue par cette<br />
expérience ? Projets semblab<strong>le</strong>s à mettre éga<strong>le</strong>ment<br />
en évidence ? Liens à faire avec l’actualité ?<br />
Témoignage ?<br />
N’hésitez pas. Le micro vous est ouvert…<br />
<strong>le</strong> laboratoire des innovations socia<strong>le</strong>s<br />
et de santé c’est :<br />
➝ Écrire pour décrire son projet <strong>dans</strong> l’action<br />
socia<strong>le</strong> et la santé<br />
➝ Éditer <strong>dans</strong> <strong>une</strong> col<strong>le</strong>ction de livres<br />
numériques<br />
➝ Échanger pour s’inspirer, décloisonner,<br />
innover<br />
➝ ÉcrirE<br />
Présenter son action au-delà d’un rapport<br />
d’activités, d’un dossier de subvention ou d’<strong>une</strong><br />
prise de paro<strong>le</strong> publique, c’est <strong>une</strong> manière de<br />
se positionner autrement par rapport à l’extérieur,<br />
de décrire ses pratiques professionnel<strong>le</strong>s<br />
sous un autre jour. C’est aussi s’extirper du<br />
quotidien et prendre <strong>le</strong> temps de la réf<strong>le</strong>xion :<br />
qui est-on ?, que fait-on ?, quel sens a l’action ?<br />
L’équipe de journalistes de <strong>Labiso</strong> propose<br />
cette démarche d’écriture de votre projet.<br />
Concrètement, en fonction des attentes et de la<br />
18<br />
Cahier n° 129<br />
disponibilité des équipes, plusieurs scénarios<br />
peuvent naître de la rencontre avec un journaliste<br />
spécialisé.<br />
➝ ÉditEr<br />
Avec <strong>Labiso</strong>, la démarche d’écriture se<br />
prolonge et se matérialise en <strong>une</strong> publication<br />
d’un livre numérique, partie d’<strong>une</strong> col<strong>le</strong>ction<br />
de « cahiers ». Ces petits bouquins, téléchargeab<strong>le</strong>s<br />
gratuitement sur Internet, peuvent<br />
être imprimés, lus à l’écran, compulsés à l’envi.<br />
La Toi<strong>le</strong> vous offre l’avantage d’occuper un<br />
espace d’expression et de visibilité aux possibilités<br />
infinies. Les cahiers numériques sont<br />
recyclab<strong>le</strong>s sur n’importe quel site web et d’<strong>une</strong><br />
formu<strong>le</strong> plus soup<strong>le</strong> que <strong>le</strong>s éditions papiers.<br />
Même si l’accès aux nouvel<strong>le</strong>s technologies<br />
et à Internet n’est pas encore égal pour tous,<br />
investir cet espace d’expression c’est aussi être<br />
au plus près des nouvel<strong>le</strong>s réalités socia<strong>le</strong>s,<br />
des nouveaux besoins, des nouvel<strong>le</strong>s formes<br />
de pauvreté.<br />
➝ ÉchangEr<br />
L’ambition est là : favoriser l’échange sur <strong>le</strong>s<br />
pratiques et <strong>le</strong> décloisonnement entre professionnels,<br />
stimu<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s démarches innovantes.<br />
Une fois sur la Toi<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s effets des « cahiers »<br />
sont entre <strong>le</strong>s mains des équipes et des <strong>le</strong>cteurs.<br />
Si <strong>le</strong>s équipes ont trouvé intérêt à faire <strong>le</strong> point,<br />
ont modifié <strong>le</strong>urs pratiques ou déterminé un<br />
nouveau projet…, <strong>le</strong>s <strong>le</strong>cteurs eux, peuvent<br />
faire des liens entre différents types d’interventions,<br />
s’interroger sur <strong>le</strong>s modè<strong>le</strong>s et, nous<br />
<strong>le</strong> souhaitons, s’interpel<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s uns <strong>le</strong>s autres.<br />
C’est en tout cas loin des codes de « bonnes<br />
pratiques », des grands’ messes institutionnel<strong>le</strong>s,<br />
que <strong>Labiso</strong> propose <strong>le</strong> premier terme de<br />
l’échange.
la maison d’emeraude à bertrix<br />
labiso… pourquoi ?<br />
Certains services, certaines associations ont<br />
fait <strong>le</strong> pari de l’Internet comme outil de visibilité,<br />
de travail en réseau, d’échanges sur <strong>le</strong>s pratiques.<br />
Ils sont conscients des énormes possibilités<br />
que <strong>le</strong>ur offre la Toi<strong>le</strong> : devenir émetteur/<br />
producteur et non plus seu<strong>le</strong>ment consom-<br />
mateur/récepteur.<br />
Le recours aux nouvel<strong>le</strong>s technologies de la<br />
communication est conçu ici comme un outil<br />
au service du travail social et de ses travail<strong>le</strong>urs.<br />
Si la démarche de <strong>Labiso</strong> montre des effets<br />
très positifs, el<strong>le</strong> est aussi de cel<strong>le</strong>s qui nécessitent<br />
<strong>une</strong> adaptation continue, un questionnement<br />
permanent, notamment du fait du support<br />
qui la sous-tend. Un support, l’Internet, <strong>dans</strong><br />
<strong>le</strong>quel il est intéressant que <strong>le</strong>s professionnels<br />
de terrain des secteurs de l’aide aux personnes<br />
investissent pour l’alimenter de contenus pertinents<br />
et mobilisateurs.<br />
<strong>une</strong> col<strong>le</strong>ction de livres numériques<br />
pour échanger et pour innover<br />
Les services d’aide aux personnes constituent<br />
<strong>une</strong> galaxie foisonnante, toujours en mouvement.<br />
De l’aide aux toxicomanes en passant par<br />
<strong>le</strong>s services à domici<strong>le</strong> ou l’hébergement des<br />
personnes handicapées, un nombre impressionnant<br />
d’équipes de professionnels travail<strong>le</strong>nt au<br />
quotidien et mobilisent <strong>une</strong> pa<strong>le</strong>tte de méthodes<br />
éprouvées, et cherche aussi à mettre au point<br />
des innovations et à <strong>le</strong>s perfectionner.<br />
dynamiser <strong>le</strong>s échanges<br />
Les lieux de rencontre qui animent <strong>le</strong>s différents<br />
secteurs de l’action socia<strong>le</strong> et de la santé<br />
en Wallonie sont eux aussi riches et nombreux,<br />
19<br />
Cahier n° 129<br />
mais trop souvent dispersés… Sans par<strong>le</strong>r des<br />
forums consacrés à ces matières de l’action<br />
socia<strong>le</strong> et sanitaire, qui commencent à faire<br />
florès sur Internet. Comment imaginer de nouveaux<br />
espaces d’échanges, complémentaires à<br />
ces journées d’études et autres carrefours ?<br />
Le livre numérique, l’eBook, est un nouveau<br />
support chaque jour plus utilisé. À la fois accessib<strong>le</strong><br />
et convivial, il permet au <strong>le</strong>cteur <strong>une</strong><br />
approche de l’information à la fois sé<strong>le</strong>ctive et<br />
approfondie, selon ses besoins. Décliné sous<br />
forme de col<strong>le</strong>ction thématique mensuel<strong>le</strong>,<br />
<strong>le</strong> livre numérique permet aussi d’envisager<br />
des échanges et de <strong>le</strong>s rendre cumulatifs.<br />
soutenir <strong>le</strong>s innovations<br />
Tel est l’outil que se propose de devenir <strong>le</strong><br />
Laboratoire des innovations socia<strong>le</strong>s, développé<br />
par l’asbl Texto en partenariat avec AlteR&I<br />
et <strong>le</strong> soutien du ministre wallon de l’Action<br />
socia<strong>le</strong> et de la Santé. Il publie deux fois par mois<br />
<strong>une</strong> monographie consacrée à un service, et mise<br />
sur un mode de rédaction professionnel, tout en<br />
gardant <strong>une</strong> place à ce que <strong>le</strong>s équipes ont déjà<br />
produit el<strong>le</strong>s-mêmes à propos de <strong>le</strong>ur travail.<br />
Ou en laissant imaginer des formu<strong>le</strong>s d’écriture<br />
à plusieurs mains.<br />
En somme, un outil vivant et original, au<br />
service de l’innovation socia<strong>le</strong> et de ceux qui la<br />
portent.<br />
contacts labIso :<br />
labiso@texto.be<br />
Tél. : 02 541 85 36
la col<strong>le</strong>ction est <strong>une</strong> initiative de l’asbl texto<br />
en collaboration avec l’agence alter où <strong>le</strong>s<br />
tâches rédactionnel<strong>le</strong>s sont coordonnées par<br />
marinette mormont (agence alter).<br />
ce cahier a été rédigé par pasca<strong>le</strong> meunier avec<br />
l’aide de l’équipe de la maison d’emeraude.<br />
il a été achevé <strong>le</strong> 30 octobre 2011.
Cahier labiso périodique<br />
<strong>une</strong> initiative de<br />
en partenariat aveC<br />
n°129<br />
la maiSon<br />
d’emeraude<br />
à Bertrix<br />
La pédagogie Feuerstein au service<br />
d’un apprentissage différencié<br />
À Bertrix, <strong>une</strong> toute petite éco<strong>le</strong> accueil<strong>le</strong><br />
six enfants porteurs de handicaps divers.<br />
Leurs professeurs tab<strong>le</strong>nt sur la pédagogie<br />
optimiste du professeur Feuerstein selon laquel<strong>le</strong><br />
toute personne est capab<strong>le</strong> d’apprendre,<br />
tout au long de sa vie.