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henri charlier peintre et sculpteur (1883 – 1975) - Vies et oeuvres d ...

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Quatorze Alfred Boucher renonçait à c<strong>et</strong>te généreuse complaisance. » Les dessins à partir de modèles<br />

vivants qui datent de c<strong>et</strong>te période de la vie de Charlier prouvent ses progrès indiscutables dans le<br />

domaine de la forme. Quelques uns d’entre eux, exécutés au fusain <strong>et</strong> à la craie, sont d’excellente qualité<br />

malgré l’absence du trait : ils rivalisent avec les dessins d’études de Michel-Ange pour les fresques de la<br />

Chapelle Sixtine. Nous en donnons un dans la page Réforme plastique : un homme assis vu de dos, qui<br />

présente une remarquable similitude avec l’un des célèbres Ignudi de Michel-Ange, celui qui est assis<br />

au-dessus de la Sybille de Perse <strong>et</strong> regarde vers la Création d’Adam. Avec ce dessin <strong>et</strong> d’autres<br />

semblables de la même série, Charlier s’élève déjà aux plus hautes régions de l’art.<br />

Mais en l’absence de maîtres, quels sont les événements marquants qui eurent une influence décisive<br />

sur le jeune artiste durant ces années de recherche ? Il y eut d’abord en 1904 l’Exposition des Primitifs<br />

français qui ouvrit ses portes au mois d’avril, au Louvre dans le Pavillon de Marsan, <strong>et</strong> à la Bibliothèque<br />

Nationale. Parmi les œuvres présentées, beaucoup avaient été attribuées depuis la Révolution à des<br />

<strong>peintre</strong>s flamands ou italiens, <strong>et</strong> l’exposition — après des recherches notariales — découvrait la<br />

véritable identité de leurs auteurs. Ce fut là que le public put voir pour la première fois la Pi<strong>et</strong>à<br />

d’Avignon <strong>et</strong> le Couronnement de la Vierge d’Enguerrand Quarton, qui jusqu’alors étaient conservés<br />

dans la chartreuse de Villeneuve-lès-Avignon. C<strong>et</strong>te exposition fut une vraie réussite : la ferm<strong>et</strong>ure ne<br />

put avoir lieu à la date du 14 juill<strong>et</strong> initialement prévue, <strong>et</strong> la Gaz<strong>et</strong>te des Beaux-Arts qui avait assuré<br />

l’édition du catalogue, dut r<strong>et</strong>irer rapidement une deuxième édition, qui fut elle aussi très vite épuisée.<br />

Le choix d’ensemble fut si heureux, les œuvres de qualité si excellente qu’un écrivain comme Péguy,<br />

qui avait l’œil du <strong>peintre</strong>, déclara d’emblée : « Je n’avais pas fait deux pas dans le grand vestibule<br />

d’entrée que j’avais acquis la certitude que c<strong>et</strong>te exposition ferait le cahier de Noël de c<strong>et</strong>te sixième<br />

série. » Ce cahier parut effectivement le 20 décembre 1904, il contenait l’article de Louis Gill<strong>et</strong> paru<br />

dans le Correspondant au moment de l’exposition, <strong>et</strong> trente reproductions de peintures. Dans son<br />

introduction, Péguy présentait ces œuvres comme « les images essentielles devant qui tant de siècles,<br />

tant d’artistes <strong>et</strong> tant d’hommes sont demeurés si longtemps en contemplation. (…) Puissent (les<br />

lecteurs) reporter sur ce cahier <strong>et</strong> par lui sur ses frères les autres cahiers un peu de c<strong>et</strong>te affection que<br />

tous nous avons vouée à ces éternelles images. » Avec raison, Péguy situait donc les Primitifs au<br />

premier rang de l’art universel qui domine aux grandes époques d’art. Après les études désespérantes de<br />

chairs bitumineuses dans l’atelier de Laurens, il n’est pas difficile d’imaginer ce que purent être les<br />

impressions d’Henri Charlier en visitant c<strong>et</strong>te exposition <strong>et</strong> en voyant pour la première fois les couleurs<br />

pures <strong>et</strong> claires de la Pi<strong>et</strong>à d’Avignon <strong>et</strong> du Couronnement de la Vierge. C’était passer de la nuit au jour,<br />

des ténèbres à la lumière. Se posa alors à Charlier la question de la forme <strong>et</strong> de la couleur comme<br />

moyens d’expression plastique.<br />

Deux ans plus tard, en 1906, Cézanne mourut <strong>et</strong> l’année suivante Charlier visita la grande exposition<br />

rétrospective que le Salon d’Automne consacra à ce <strong>peintre</strong>. Ce fut le deuxième événement qui eut une<br />

influence sur l’orientation plastique de Charlier. « Je n’avais jamais vu de ses œuvres, avoue-t-il : je crus<br />

trouver devant moi une fraîcheur d’images analogue à celles de La Fontaine. La même question (que<br />

celle posée par les Primitifs) revenait, c<strong>et</strong>te fois avec un artiste contemporain : comment acquérir ces<br />

qualités par l’étude de la nature ? » Enfin en 1910 Henri Charlier découvrit des toiles de Gauguin chez<br />

un ami de ce dernier, Durrio, avec qui il avait fait connaissance. Durrio possédait en eff<strong>et</strong> plusieurs<br />

œuvres de Gauguin, probablement héritées de lui après sa mort. Charlier n’a rien dit des impressions<br />

que fit sur lui c<strong>et</strong>te découverte, mais nous connaissons le jugement qu’il porta par la suite sur Gauguin :<br />

il le considérait comme « notre plus grand <strong>peintre</strong> depuis la Pi<strong>et</strong>à d’Avignon. »<br />

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