Nous arrivons enfin à M. Courbet 84 ; il est généra<strong>le</strong>ment admis qu’il a de grandes qualités de peintre ; or, il vaudrait peut-être mieux qu’il n’en n’eût pas, ce serait moins embarrassant pour <strong>le</strong> jury d’admission ; mais puisque, pour une raison ou pour une autre, ses œuvres figurent au Salon, s’il est permis de choisir parmi ses tab<strong>le</strong>aux, nous citerons la Chasse au Chevreuil dans <strong>le</strong>s forêts du Grand-Jura 85 , et <strong>le</strong>s bords de la Loue 86 ; ces deux ouvrages n’ont pas un parti pris de forcer l’attention publique ; ils sont à peu près comme il faut, et se tiennent assez convenab<strong>le</strong>ment dans <strong>le</strong> monde où on <strong>le</strong>s a reçus ; mais il n’en est pas ainsi de sa Biche forcée à la neige et de ses Demoisel<strong>le</strong>s des bords de la Seine 87 . Une tache brune sur un immense drap blanc, voilà la biche forcée ; el<strong>le</strong> a même été tel<strong>le</strong>ment pressée par <strong>le</strong>s chiens, el<strong>le</strong> s’est enfuie avec tant de rapidité, qu’el<strong>le</strong> est positivement sortie du cadre ; <strong>le</strong>s chiens eux-mêmes, comme de braves chiens qui n’ont pas peur, se disposent à la suivre ; il ne reste donc sur la toi<strong>le</strong> qu’un grand champ de neige et un buisson de broussail<strong>le</strong>s rousses ; c’est trop ou pas assez. Ce tab<strong>le</strong>au vise à l’effet, et ne se soutient que par <strong>le</strong> contraste ; il est peint avec cette énergie qu’on appel<strong>le</strong> chez M. Courbet, une grande qualité de peintre ; c’est faire un singulier emploi de sa force et de son ta<strong>le</strong>nt ! Pour <strong>le</strong>s demoisel<strong>le</strong>s du bord de la Seine, ce sont effectivement des demoisel<strong>le</strong>s ; el<strong>le</strong>s sont étendues sur l’herbe, l’une sur <strong>le</strong> côté, l’autre à plat ventre ; el<strong>le</strong>s portent des robes de grenadine et des châ<strong>le</strong>s d’été ; el<strong>le</strong>s se rou<strong>le</strong>nt sur toute cette toi<strong>le</strong>tte fripée, qui n’a jamais dû être neuve pour el<strong>le</strong>s ; el<strong>le</strong>s adressent au public des sourires non équivoques. M. Courbet, où donc va-t-il chercher ses modè<strong>le</strong>s ! Voilà donc ce qu’il expose en public ! Des de- 84 Gustave Courbet (1819-1877), chef de fi<strong>le</strong> du courant réaliste. « M. Courbet est un artiste de ta<strong>le</strong>nt, mais d’un ta<strong>le</strong>nt qui réside plus dans la main qu’au cerveau. . . il est temps que M. Courbet devienne plus correct, plus sérieux. . . nous retrouvons toujours et partout dans ses ouvrages <strong>le</strong>s mêmes défauts et <strong>le</strong>s mêmes qualités » (AUVRAY, p. 66-67). « Courbet sait peindre, et il ne faudrait pas croire que ceci soit un mince éloge par <strong>le</strong>s néo-coloristes qui courent. Il n’y a dans sa manière ni procédé ni tricherie. C’est en p<strong>le</strong>ine pâte que travail<strong>le</strong> Courbet : il gâche et plaque hardiment ses tons en épaisseurs, et si la délicatesse et l’exquisivité manquent dans cette peinture-là, au moins est-el<strong>le</strong> de franc et véritab<strong>le</strong> aloi » (NADAR, p. 14). Courbet est présent dans <strong>le</strong> salon de Nemo (seu<strong>le</strong>ment dans <strong>le</strong>s 1 er et 2 d manuscrits). Rappel de 2 e classe au Salon. 85 « The artist stands at the center of his composition, <strong>le</strong>aning back against a tree, lost in thought, with an elusive, perhaps sardonic smi<strong>le</strong> playing across his face. But he is also lost in the shadow of the tree, and it’s almost as if the boy who blows idly on a horn, the two hounds that seem ready for a face-off, and the hanging carcass of a buck whose face is the thing that comes closest to addressing the viewer in this painting » (Barry Schwabsky, « Daring Intransigence », The Nation, 24 mars 2008). « Les mêmes défauts de perspective et de dessin se retrouvent dans son meil<strong>le</strong>ur tab<strong>le</strong>au… <strong>le</strong>s chiens y sont beaucoup trop grands pour <strong>le</strong>s deux hommes, dont l’un, celui qui donne du cor, est petit comme un enfant. Mais ce tab<strong>le</strong>au est d’une cou<strong>le</strong>ur solide et largement touchée » (AU- VRAY, p. 67). 86 Plutôt Le halage, bords de la Loue. 87 « Ridicu<strong>le</strong> [cela] manque de perspectif et <strong>le</strong>s figures sont laides, plates et sans modelé » (AUVRAY, p. 66). Les interprétations des célèbres Demoisel<strong>le</strong>s, qui donnent naissance, par un décalque direct, au notoire Déjeuner sur l’herbe de Manet, varient de la présentation de deux prostituées connues à l’époque (vue partagée, semb<strong>le</strong>-t-il, par Verne) à la démonstration de la décadence de la classe aisée. Nadar pastiche <strong>le</strong>s fil<strong>le</strong>s en marionnettes, soulignant ainsi <strong>le</strong>ur allure statique ; et Cham <strong>le</strong>s caricature en « Femme du monde prise subitement de la colique à la campagne ». 111
moisel<strong>le</strong>s qui ont profité de <strong>le</strong>ur jeudi pour al<strong>le</strong>r se vautrer sur l’herbe. Nous ajouterons que <strong>le</strong> dessin de ce tab<strong>le</strong>au est grossier et incorrect, que la cou<strong>le</strong>ur est d’un jaune désagréab<strong>le</strong>, et que d’après <strong>le</strong>s règ<strong>le</strong>ments de police, ce tab<strong>le</strong>au ne devrait être visib<strong>le</strong> que de huit à onze heures du soir. Figure 110. Courbet, Demoisel<strong>le</strong>s des bords de la Seine Figure 111. Nadar, caricature de Demoisel<strong>le</strong>s des bords de la Seine, signée « Courbet et Nadar » 112
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