Projection - Passeurs d'images
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La place<br />
des p u b l i c s<br />
Pour Hors cadre, association<br />
coordinatrice d’“un été au cinécinéville”<br />
en Nord-Pas-de-Ca l a i s ,<br />
tout projet culturel audiovisuel<br />
doit s’élaborer à partir du public<br />
auquel il est destiné.<br />
“Q<br />
N O R D - PAS - D E - C A L A I S<br />
uand on a affaire à de la culture, on<br />
a affaire à la construction des personnes,<br />
à un positionnement de<br />
l’homme par rapport au monde”<br />
déclare Nicolas Huguenin, responsable de Ho r s<br />
cadre. “Pour nous, le développement culturel<br />
consiste à développer un projet en vue d’une<br />
transformation des publics, et partant, de la<br />
société. C’est pourquoi notre premier souci, en<br />
développant un projet audiovisuel, est de<br />
faire en sorte que les individus en soient les<br />
acteurs, non des consommateurs. Cela implique<br />
de calibrer chaque projet spécifiquement en<br />
fonction des publics”.<br />
“ Construire avec”, partir des individus : telle<br />
est la philosophie de cette association qui<br />
pratique le développement culturel selon<br />
plusieurs axes :<br />
- L’élaboration de projets culturels en direction<br />
de publics particuliers ;<br />
- La gestion d’un Pôle de ressources régional<br />
pour les ateliers de pratique artistique et d’action<br />
culturelle de médiation (qui a ouvert l’ a n<br />
dernier) ;<br />
- Une mission de développement culturel en<br />
milieu pénitentiaire ;<br />
- Et, depuis de nombreuses années, la coordination<br />
d’“un été au ciné-cinéville” en No r d - Pa s -<br />
d e - Calais.<br />
Un dispositif autour duquel elle s’est développée<br />
“mais qu’elle n’a jamais mis en œuvre de<br />
façon basique”, souligne Nicolas Hu g u e n i n .<br />
“Il m’est arrivé de proposer des choses vraiment<br />
inhabituelles dans le cadre du dispositif.<br />
Comme en 1997, où une ville m’a contacté<br />
en disant : nous voudrions faire un atelier mais<br />
il n’y a que deux jeunes et ils n’ont pas d’idée.<br />
J’ai répondu : Faisons un atelier exploratoire<br />
sur les ateliers. Nous vous donnerons un intervenant<br />
et nous transmettrons aux jeunes des<br />
3 8 / projections actions cinéma / audiovisuel<br />
fiches de présentation des différents ateliers<br />
existant dans la région. Ils iront les voir et l’ a n<br />
prochain, ils seront porteurs de leur propre<br />
projet d’atelier”.<br />
Le précepte “construire avec” n’est pas seulement<br />
valable pour “un été au ciné”, mais dans<br />
l’élaboration de tous les projets en direction de<br />
publics particuliers, par exemple, les jeunes de<br />
la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ). Le<br />
travail d’élaboration s’effectue alors en partenariat<br />
étroit avec les relais. Il s’agit le plus souvent<br />
d’acteurs de l’ i n s e r t i o n : éducateurs possédant<br />
des diplômes spécialisés, travaillant dans la<br />
Protection judiciaire de la jeunesse, chez les<br />
handicapés, dans les systèmes d’éducateurs de<br />
rue (Clubs de prévention) ou encore en prison<br />
( Conseillers d’insertion et de probation).<br />
“ Tous ces gens ont la gestion d’un public pour<br />
lequel ils construisent des dynamiques”<br />
explique Nicolas Huguenin. “Celles-ci s’appuient<br />
tantôt sur le sport, tantôt sur l’art ou<br />
sur un outil culturel dont les relais, en règle<br />
générale, n’ont pas la maîtrise. Ces relais nous<br />
contactent, avec en tête un projet, du moins<br />
une intention, plus ou moins nourrie : travailler<br />
avec tels jeunes sur telle ou telle question…<br />
Nous discutons beaucoup pour déterminer<br />
une thématique, dans laquelle le jeune doit se<br />
reconnaître. Celle-ci est souvent liée à la construction<br />
de soi : la famille, les relations parentsenfants.<br />
Mais elle ne sera pas forcément<br />
abordée de manière frontale. Plutôt que “La<br />
f a m i l l e”, on proposera l’axe “Mon frère et moi”.<br />
On travaille sur du sensible, de l’humain en<br />
construction, que l’on peut aussi détruire si<br />
l’on n’y prend pas garde”.<br />
Pas question, donc, d’apporter un projet “c l é s<br />
en main”. On réfléchit ensemble à la thématique,<br />
au choix de l’intervenant, et du médium<br />
le plus approprié : la vidéo, mais aussi la photo-<br />
Atelier de réalisation Hénin-Beaumont<br />
graphie, le graphisme, la bande dessinée, le<br />
diaporama…<br />
Hors cadre met à profit son Pôle de ressources<br />
dans la préparation des projets. “Ce Pôle<br />
p o s s è d e une compétence plus affinée en image<br />
que sur d’autres secteurs. Il recèle dix ans de<br />
documentation, et pour ce qui concerne “un<br />
été au ciné”, 120 films. Ceux-ci peuvent aider<br />
nos acteurs locaux à gagner du temps. Si l’ u n<br />
d’eux veut faire un film sur le thème de la différence<br />
avec un public de personnes handicapées,<br />
je peux lui montrer plusieurs exemples<br />
sur ce sujet. Pour le conseiller, mais aussi pour<br />
rendre le projet crédible, réalisable aux yeux<br />
des jeunes”.<br />
Selon Nicolas Huguenin, la prise en compte<br />
des publics se vérifie aussi dans la manière<br />
de mettre en place les actions d’ “un été au<br />
ciné”. Ainsi, depuis 1996, les séances spéciales<br />
avec invités sont préparées avec les jeunes,<br />
qui choisissent les films et réfléchissent au<br />
d é b a t : “ils ne vont plus à une séance spéciale<br />
mais à la restitution d’un atelier de programm<br />
a t i o n”. Même chose avec les séances en plein<br />
a i r, majoritairement programmées par un<br />
groupe d’habitants du quartier qui se réunit et<br />
se positionne sur le choix d’un film.<br />
Nicolas Huguenin évoque enfin la journée régionale<br />
de présentation des films “un été au ciné”,<br />
organisée depuis huit ans. “Il n’a jamais été<br />
question de ne pas associer à sa construction<br />
les jeunes qui avaient fait les ateliers” o b s e r v e -<br />
t-il. “Bien sûr, on pourrait demander à deux<br />
vidéastes d’organiser seuls une restitution intelligente.<br />
Nous tenons à ce que les jeunes s’y<br />
associent. Ils débattent des questions suscitées<br />
par les films, voient quel type d’éclairage on<br />
peut apporter. Le but étant qu’ils trouvent au<br />
sein de ce collectif un second niveau où se<br />
c o n s t r u i r e”. ◗