montréal vibre au rythme d'israël - Communauté sépharade unifiée ...
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Sommaire LVS<br />
Commun<strong>au</strong>té ÇA S’EST PASSÉ ICI 9<br />
9<br />
Carnet C’EST VOUS 23<br />
Dossier ISRAËL, 60 ANS APRÈS… 24<br />
42<br />
Portrait D’ICI 46<br />
Point de vue 50<br />
CINÉMA, LIVRE, ARTISTE 56<br />
63<br />
Le musicien Al Maghribi n’est plus<br />
(photo « 1948 » dossier photos Sami)<br />
Israël, 60 ans après…<br />
(photo « 2002 04 17 Rally for Israel 006 »<br />
dans dossier Photo Montréal et Israël)<br />
CD de saison, Yoav, entre Beck et Bjork<br />
(Photo « Yoav 036 » dans dossier CD de<br />
saison)<br />
Humeur PASAGÈRE 66<br />
1, Carré Cummings - Suite 216<br />
Montréal (Quèbec ) Canada H3W 1<br />
M6<br />
Tél.: (514)733-4998<br />
Télécopieur: (514)733-3158<br />
redactionlvs@csuq.org<br />
www.csuq.org<br />
PRÉSIDENT DE LA COMMUNAUTÉ David Bensoussan<br />
DIRECTEUR GÉNÉRAL Robert Abitbol<br />
DIRECTEUR DE LA PUBLICATION Élie Benchetrit<br />
CONSEILLER À LA RÉDACTION Philippe Regnoux<br />
ONT COLLABORÉ À CE NUMÉRO Emmanuelle Assor, Joseph Elfassi,<br />
Victor Malka, Daniel Haik, Hélène<br />
Berrubé, Annette Pacquot, Naim<br />
Kattan, Nelly Roffé, Joseph Gabay,<br />
Arié Lévy, Guy Bouthillier, Sylvain<br />
Dahan, Frédérique Paquin.<br />
PHOTOS Archives du Congrès Juif Canadien<br />
( Région du Québec), Yolande Amzallag,<br />
Joseph Elfassi, Edmond Silber<br />
CONCEPTION GRAPHIQUE Rivka Design 514-574-0999<br />
IMPRESSION MPI Impressions<br />
EXPÉDITION POSTALE Joncas Postes Expert<br />
Le présent numéro de La voix <strong>sépharade</strong> a été tiré à 7000 exemplaires. Le magazine est publié 5 fois par an.<br />
Les exemplaires sont acheminés par voie postale à Québec, en Ontario et dans le reste du Canada, <strong>au</strong>x<br />
Etats-Unis et à l'étranger. Abonnements (1 an - 5 numéros): Québec 26$, Canada et U.S.A. 36$, Outre-Mer<br />
56$. ISSN: 0704-5352. Dépôt légal <strong>au</strong>x bibliothéques nationales du Québec et du Canada. Courrier de 3e<br />
classe-Permis 40011565<br />
Les lettres ou articles doivent être adressés à Élie Benchetrit, La voix <strong>sépharade</strong>, 1 Carré Cummings, bure<strong>au</strong><br />
216, Montréal, Québec H3W 1M6 ou par e-mail: redactionlvs@csuq.org<br />
Sous peine d’être refusés, les articles ou lettres adressés <strong>au</strong> journal doivent mentionner le nom de l’<strong>au</strong>teur,<br />
son adresse complète et son numéro de téléphone. Aucun accusé de réception ne sera envoyé et les articles<br />
ou lettres non publiés ne seront pas retournés. Pour des raisons d’espace et de clarté, les articles ou lettres<br />
pourraient être réduits ou révisés.<br />
CONVENTION DE LA POSTE-PUBLICATIONS NO 40011565<br />
RETOURNER TOUTE CORRESPONDANCE NE POUVANT ÊTRE LIVRÉE AU CANADA AU SERVICE DES PUBLICATIONS 123 RUE<br />
SAINTE-CATHERINE, MONTRÉAL, QC H3Z 2Y7<br />
« Nous reconnaissons l'aide financière accordée par le<br />
Gouvernement du Canada pour nos coûts rédactionnels<br />
par l’entremise du Fonds du Canada pour les magazines. »<br />
Éditorial LVS<br />
L’ÉTAT D’ISRAËL,<br />
FIERTÉ DU PEUPLE JUIF<br />
Il y a soixante ans, le 15 mai 1948, une nation est née sur la terre de ses<br />
ancêtres renouant ainsi avec son histoire plusieurs fois millénaire. Ainsi s’est<br />
accomplie l’espérance d’un peuple qui n’a cessé de répéter dans ses prières,<br />
pendant près de deux mille ans : l’an prochain à Jérusalem.<br />
Si vous le voulez, avait prophétisé Théodor Herzl père du sionisme moderne,<br />
ce ne sera pas une légende. Et nous l’avons voulu et ce furent des hommes et<br />
des femmes, dont des milliers ont payé de leur vie, qui transformèrent le rêve<br />
en vérité et bâti cet État qui nous a rendu notre fierté et surtout renforcé<br />
notre espoir.<br />
Oui, il f<strong>au</strong>t se réjouir et être prêts à célébrer avec nos frères et sœurs d’Israël<br />
ce Yom Ha’atsmaout dans un esprit de solidarité festive. Faisons en sorte que<br />
cette fête de Pessah soit l’occasion de commémorer avec la sortie d’Égypte<br />
de nos ancêtres, la naissance d’une nation.<br />
La Voix Sépharade consacre presque exclusivement ce numéro à cet<br />
anniversaire en donnant la parole <strong>au</strong>x amis d’Israël, juifs et non juifs confondus.<br />
Des universitaires, des journalistes nous proposent des analyses percutantes<br />
quant à la situation actuelle et <strong>au</strong> devenir d’Israël. Nous remercions Annette<br />
Pacquot, Guy Bouthillier, Victor Malka, Daniel Haik pour leur collaboration<br />
spéciale à ce numéro. Mais nous avons demandé également à des jeunes<br />
québécois dont certains ont découvert ce pays il y a à peine quelques mois et<br />
d’<strong>au</strong>tres qui l’ont choisi pour y vivre, de nous livrer leurs impressions. Leur<br />
témoignage nous apporte une note de fraîcheur, d’optimisme et d’espoir. Une<br />
constatation en effet se dégage de leurs dires : Israël est un pays qui mérite<br />
d’être découvert et apprécié pour les valeurs de liberté et de démocratie qu’il<br />
représente dans une région ou souvent la raison du plus fort est toujours la<br />
meilleure. Un pays ou se côtoient <strong>au</strong> quotidien mille et unes cultures qui<br />
s’épanouissent dans le creuset d’une diversité acceptée par chacun, un vrai<br />
désir de vivre ensemble qui transcende les sensibilités politiques ou religieuses.<br />
Des zones d’ombre <strong>au</strong> table<strong>au</strong> ? Pourquoi les nier? des disparités sociales qui<br />
choquent? Sans <strong>au</strong>cun doute, une situation de guerre qui draine une partie<br />
importante des ressources du pays avec pour corollaire le prix du sang à payer<br />
pour une sécurité <strong>au</strong>quel tout citoyen qui se respecte a droit? mais quel<br />
gouvernement, même <strong>au</strong> sein des pays les plus développés de la planète,<br />
pourrait prétendre que tout est parfait chez eux?<br />
Il y a exactement 60 ans le 15 mai 1948, Joseph Kessel membre de l’Académie<br />
française, était correspondant de guerre dans ce pays qui venait à peine de<br />
naître, et il écrivait en parlant de ces hommes et de ces femmes allant <strong>au</strong><br />
combat : «Ils marchaient sous le ciel du printemps , et des chants<br />
accompagnaient cette marche. Chants de Russie. Chants de Pologne. Chants<br />
du Yémen. Et d’Auschwitz. Et de Treblinka. Et du ghetto de Varsovie …. En<br />
les écoutant je me demandais ainsi que tous mes camarades : comment<br />
pourront-ils tenir?Et s’ils ne le peuvent pas, que deviendront les champs, les<br />
vergers, cultivés, avec tant de foi et d’amour? Et qu’adviendra-t-il d’Israël<br />
ressuscité et de tous les hommes, de toutes les femmes qui l’ont rendu à la<br />
vie?» 15 mai 2008, Israël continue d’exister et de fleurir et son hymne national,<br />
l’Hatikva, l’Espoir résonnera toujours dans le cœur de ses citoyens et du<br />
Peuple juif. Hag Saméah à tous nos lecteurs!<br />
Élie Benchetrit<br />
LVS mars 2008 7
SAMY ELMAGHRIBI<br />
Une voix légendaire<br />
disparaît<br />
Le légendaire chanteur Samy Elmaghribi s’est éteint à<br />
Montréal, le 9 mars dernier, à l’âge de 86 ans. Les<br />
témoignages de ceux qui l’ont connu.<br />
En 1948, son premier succès<br />
Loukane Elmlayin le propulse<br />
à Paris où il réalise son<br />
premier enregistrement chez<br />
Pathé Marconi.<br />
LVS mars 2008 9<br />
Commun<strong>au</strong>té ÇA S’EST PASSÉ ICI
Commun<strong>au</strong>té ÇA S’EST PASSÉ ICI<br />
Motsaé chabbat, je me prépare afin de prendre la route tôt<br />
dimanche matin. Samy Elmaghribi et moi-même avons été<br />
engagés par M. Joe Abergel, président de cette synagogue du<br />
New Jersey, afin de diriger les offices de Yamim noraim cette<br />
année là.<br />
Le téléphone sonne; c’est Samy à l’<strong>au</strong>tre bout du fil :<br />
SAMY : Sylvain? Shavouah tov!<br />
MOI: Shavouah tov Samy. Es-tu prêt pour demain?<br />
SAMY : Comment va-tu te rendre à Fort Lee?<br />
MOI: En voiture bien sûr.<br />
SAMY : Tu sais bien que je devais prendre un vol demain<br />
pour New York. Eh bien, le vol est annulé!<br />
En effet, la terrible tragédie du 11 septembre n’était vieille que<br />
de quatre jours et tous les avions étaient cloués <strong>au</strong> sol.<br />
SAMY : Est-ce que je peux voyager avec toi?<br />
MOI: Baroukh Haba Samy!<br />
SAMY : Merci Sylvain, mais il y a <strong>au</strong>ssi mon épouse et les<br />
les bagagges….<br />
MOI: Mais il n’y <strong>au</strong> <strong>au</strong>cun problème Samy; Je vous prends<br />
demain matin à la maison.<br />
« avec Samy, rien<br />
n’était laissé <strong>au</strong> hasard... »<br />
Quelle agréable surprise et quel voyage mémorable! Que de<br />
souvenirs de ces journées passées en sa compagnie et celle de<br />
son épouse Messody (Que D. lui donne Santé et longue vie!),<br />
à le côtoyer, à discuter avec lui de sujets variés, à répéter ces<br />
airs merveilleux de prière afin d’être fin prêt…<br />
Mais <strong>au</strong>-delà de tout cela, je retiens ce privilège qui m’a été<br />
donné de seconder Samy pour la direction de ces offices<br />
religieux; la fierté d’être à ses côtés, de le voir dans cette toge<br />
blanche qu’il portait avant tant de classe et de l’écouter de si<br />
près entonner de façon magistrale, notre belle liturgie<br />
marocaine de Rosh hashana et Kippour. Avec Samy rien n’était<br />
laissé <strong>au</strong> hasard. Ses directives quant <strong>au</strong> déroulement des<br />
prières, ses conseils, la discipline qu’il s’imposait, tout était<br />
matière à apprentissage.<br />
Je me souviens de cette phrase qu’il m’avait dite et qui<br />
<strong>au</strong>jourd’hui encore me revient à l’esprit chaque fois que je<br />
monte à la Téva : “Le chant, les prières, c’est comme un sport;<br />
il f<strong>au</strong>t savoir comment se tenir et comment ménager ses<br />
énergies afin d’aller jusqu’<strong>au</strong> bout!”.<br />
Merci Samy pour tout! Tu as été un Maître, un modèle à suivre,<br />
un père spirituel pour tant de hazzanims, paytanims et<br />
chanteurs partout où tu es passé ! Tu as vécu, tu vis et tu<br />
vivras à jamais dans nos cœurs et nos pensées. C’est à notre<br />
tour de préserver mais surtout de transmettre à nos enfants,<br />
cet immense héritage musical, poétique et liturgique que tu<br />
nous laisses…..<br />
10 mars 2008 LVS<br />
Sylvain Dahan<br />
Samy Elmaghribi reçu<br />
par sa Majesté Sidi<br />
Mohammed V<br />
à St-Germain-en-Laye,<br />
le 6 novembre 1955.
MON CHER SAMY<br />
Comme tu peux le voir, et pour citer un de tes<br />
confrères, « ils sont venus, ils sont –presque- tous là »<br />
dès qu’ils ont appris la triste nouvelle. « Mina’ar véad<br />
zakène », les grands et les petits... Et s’ils n’avaient<br />
qu’une seule chose à te dire ce serait « Samy tu es<br />
notre fierté ».<br />
Je vais donc essayer de parler de toi dans les mots<br />
que tu <strong>au</strong>rais souhaité l’entendre, sans f<strong>au</strong>sse pudeur<br />
et sans craindre de blesser ta modestie.<br />
Chers amis,<br />
Ce n’est pas tous les jours que dans un salon funéraire on<br />
accompagne un « immortel » à sa dernière demeure. Si l’une des<br />
devises de Salomon Amzallag était « être ou ne pas être », on peut <strong>au</strong>ssi<br />
dire de lui « être et ne plus être » : Samy est encore alors que,<br />
malheureusement, il n’est plus. J’ai cité Shakespeare parce que le choix<br />
de Samy a été d’être lui-même, d’optimiser tout son potentiel, de<br />
s’assumer comme individu, comme artiste, comme personnage public,<br />
comme père de famille, comme citoyen marocain, comme juif,<br />
héritier d’une tradition qu’il a profondément respectée et à laquelle il<br />
fait honneur. Samy, tu es notre fierté.<br />
Comme individu, comme personne, Samy a dit de lui-même « Je suis<br />
le plus heureux des hommes parce que je fais ce que j’aime ». Heureux<br />
l’homme qui a sa passion comme métier. Être pleinement ce qu’on<br />
est, vivre de ce qui nous fait <strong>vibre</strong>r, être capable de <strong>vibre</strong>r, c’est cela,<br />
être. Autrement, on n’est pas, on existe. Samy a été et, artiste, il nous<br />
l’a dit à travers ses chansons, car une grande partie de son œuvre est<br />
<strong>au</strong>tobiographique.<br />
Vous vous souvenez certainement de sa chanson Loukane Elmlayin,<br />
Ah! si j’étais millionnaire! « El Baporat Outiyarat Nekte’ Elbhor Ounlali<br />
Fessamouat, Neftech ‘Ala ‘Ghrami Fikoul Lemkan ». Dans cette chanson,<br />
Samy nous livre ses rêves : « les bate<strong>au</strong>x, les avions, traverser les mers et<br />
se balader dans les cieux, rechercher son bonheur où qu’il se trouve... Ah! si<br />
j’étais millionnaire! » Eh bien, lorsque j’ai revu Samy à Montréal, l’une<br />
des premières chansons qu’il a interprétée, c’était New York, chanson<br />
dans laquelle il décrit les « Arba’ houmat Me’rofin, Manhattan, Queens,<br />
Bronks ou Brooklyn » entourées de l’Hudson et de l’East River, la ville<br />
des millionnaires…. Je lui ai demandé si New York représentait la<br />
réalisation de Loukane Elmlayin... et il a souri.<br />
Samy est né à Safi en 1922 et déjà enfant il ramassait les fils de lin dans<br />
l’atelier de son père tailleur, pour en confectionner des mandolines.<br />
Sa voix se révèle très tôt, il chante à la synagogue et dans les fêtes de<br />
famille. En 1948, son premier succès Loukane Elmlayin le propulse à<br />
Paris où il réalise son premier enregistrement chez Pathé Marconi. En<br />
1950, il est de retour <strong>au</strong> Maroc et c’est là que je l’ai connu, avec son<br />
orchestre, Samy’s Boys.<br />
Je faisais partie des privilégiés qui avaient accès à la vedette de<br />
Casablanca : Samy Elmaghribi. En effet, mon oncle comptait parmi ses<br />
intimes et j’adorais lui rendre visite… surtout pour côtoyer l’artiste!<br />
Déjà, à l’époque, Samy avait été très « sympa » avec moi : croyez-le<br />
ou non, il m’emmenait à Radio Maroc pour assister à ses<br />
enregistrements et à ses concerts! Un orchestre imposant, hyper<br />
rodé, définissait le <strong>rythme</strong> sur lequel Samy allait intervenir et… la<br />
magie opérait! D’une voix claire, ch<strong>au</strong>de, posée, structurée, avec une<br />
diction parfaite, Samy égrenait les syllabes sur la musique. Il avait<br />
toujours la même attitude : on ne peut plus sérieuse. Il l’est resté : qu’il<br />
chante l’amour, la nostalgie, l’hommage à sa mère, qu’il vante les<br />
Durant les dernières années de sa vie, Samy Elmaghribi n’a<br />
cessé d’enthousiasmer son public, comme ici en 2005, lors<br />
d’un concert hommage à Israël.<br />
be<strong>au</strong>tés de New York ou qu’il fantasme sur ce qu’il ferait s’il avait des<br />
millions, Samy a toujours le même regard, la même posture : il est<br />
tout entier investi dans ce qu’il fait : il chante. Il ne communique ni par<br />
le regard ni par les expressions du visage, il communique par le chant,<br />
entendez par là paroles et musique. Mais n’allez surtout pas croire<br />
que Samy Elmaghribi est un homme <strong>au</strong>stère! Loin de là : <strong>au</strong>ssitôt son<br />
oûd déposé, il se met à blaguer! Mais là <strong>au</strong>ssi, il s’impose des limites.<br />
En un mot, il chante, il blague et il vit avec classe. Samy est un<br />
aristocrate.<br />
Un aristocrate engagé et si la musique et le chant l’ont détourné d’un<br />
début de carrière politique, il a voulu immortaliser le retour du Roi<br />
Mohammed V après son exil forcé : Alef Hniya Ouhniya, œuvre écrite<br />
à la gloire du Roi Mohammed V et de son pays, consacre Samy<br />
comme artiste national. Il conquiert le palais royal où il est accueilli<br />
comme l’un des chanteurs favoris des regrettés rois Mohammed V et<br />
Hassan II.<br />
Entre 1942 et 1964, Samy compose un répertoire de chansons<br />
populaires connu dans tout le Maghreb; il multiplie les tournées, en<br />
particulier en Algérie, où il se produit avec l’orchestre symphonique<br />
de Radio Alger. Tout comme il a su immortaliser l’événement<br />
politique de 1956, il n’est pas resté indifférent à la catastrophe de<br />
1960, à la suite de laquelle il écrit Agadir.<br />
Mais déjà, il songe à explorer d’<strong>au</strong>tres horizons :<br />
Ma Tebkich Ya Leghrib – Ne pleure pas, étranger, toi qui t’es séparé<br />
des tiens, Dieu est partout où tu vas et Il te réconfortera. Essa’a Elli<br />
N’ta Fiha – Ne regrette pas le passé, attache-toi à l’avenir. Cet avenir<br />
le conduira en Israël, qui lui réserve un accueil triomphal, d’<strong>au</strong>tant qu’il<br />
décide de chanter, devant des salles combles, Enta Oumri, grand<br />
succès de la très populaire Oum Qalsoum.<br />
En 1966, les succès de ses concerts à New York et à Montréal le<br />
persuadent qu’il a <strong>au</strong>ssi des fans en Amérique du Nord. Il décide de<br />
s’installer à Montréal et de mettre son talent <strong>au</strong> service de la<br />
synagogue et de la commun<strong>au</strong>té.<br />
Que de souvenirs! En 1970, la commun<strong>au</strong>té <strong>sépharade</strong> de Montréal<br />
commençait à se structurer. Il fallait la faire connaître. Samy et moi<br />
avions conçu une présentation qui retraçait les différentes étapes de<br />
la vie juive selon le rite <strong>sépharade</strong> : la circoncision, la bar mitzvah, la<br />
cérémonie du henné, le mariage, le chabbat et les fêtes. Je présentais<br />
chacun des thèmes et il l’illustrait en chansons. Le public de la semaine<br />
<strong>sépharade</strong> avait été ravi... mais pas <strong>au</strong>tant que les moines trappistes<br />
d’Oka, qui découvraient que judaïsme, sépharadisme, francophonie<br />
et… grand art, pouvaient faire bon ménage.<br />
Au registre de la liturgie, je garde surtout en mémoire les offices de<br />
jeûnes <strong>au</strong>xquels Samy apportait son concours. C’était à Moinier, vers<br />
la fin des années 50, il était assis en face de moi, à environ deux<br />
mètres. Lorsqu’il chantait en solo, mon livre vibrait littéralement et<br />
Suite page 12<br />
LVS mars 2008 11<br />
Commun<strong>au</strong>té ÇA S’EST PASSÉ ICI
Commun<strong>au</strong>té ÇA S’EST PASSÉ ICI<br />
Le chant de la Havdala par les enfants de l’école Maïmonide,<br />
le 16 février, à la Congrégation Spanish & Portuguese.<br />
L’État d’Israël fête ses soixante ans. Soixante<br />
ans d’existence juridique mais des millénaires<br />
de présence réelle continue.<br />
C’est dans l’esprit de cette continuité<br />
historique que l’Ecole Maïmonide cherche à<br />
transmettre à nos enfants une éducation juive<br />
et <strong>sépharade</strong>. A l’occasion du 60ième<br />
anniversaire de l’État d’Israël, l’Ecole<br />
Maïmonide a organisé une première<br />
manifestation pour célébrer cet événement<br />
marquant. Parents et enfants des grades 5 et<br />
6 des deux campus se sont réunis à la<br />
synagogue Spanish et Portuguèse, le16 février<br />
à 19h30, après la sortie du Chabbat pour une<br />
cérémonie en l’honneur d’Israël.<br />
Le chant de la Havdala<br />
Le programme de liturgie à l’Ecole<br />
Son site internet fait état d'une discographie imposante. On y apprend,<br />
entre <strong>au</strong>tres, que Samy a fait école : « professeur invité à la Yeshiva<br />
University de New York, il a initié des élèves qui sont <strong>au</strong>jourd'hui les<br />
chantres de grandes synagogues en France, <strong>au</strong> Canada et en Israël ». Ce<br />
12 mars 2008 LVS<br />
ISRAEL À 60 ANS<br />
Maïmonide est spécifique à<br />
notre institution et se situe<br />
<strong>au</strong> cœur même de notre<br />
tradition juive et <strong>sépharade</strong>.<br />
Il vise à marquer les<br />
moments religieux les plus<br />
importants de notre vécu du<br />
Judaïsme à la maison et à la<br />
synagogue. Comme<br />
échantillon de cet<br />
enseignement, la soirée a<br />
débuté sur le chant de la<br />
Havdala interprété par les<br />
élèves sous la direction du professeur et<br />
cantor, M. Daniel Lasry.<br />
Les élèves ont été magnifiques dans leur<br />
prestation musicale selon la tradition<br />
<strong>sépharade</strong>.<br />
Quand la Torah approche parents et enfants<br />
La seconde partie de la célébration était<br />
articulée <strong>au</strong>tour du projet Mibéreshit<br />
Suite de la page 11: Cher ami<br />
c’est cette même sensation d’intensité que son kahal ressentait lorsqu’il<br />
officiait en tant que hazan de la Spanish, ou du Rabbinat.<br />
L’identité de vedette de la chanson et celle de hazan peuvent sembler<br />
incompatibles. Samy a tenu à s’en expliquer dans une chanson célèbre<br />
Enghenni Ounselli – Comment pourrais-je servir Dieu mieux qu’avec ce<br />
dont il m’a doté, mon talent? Lorsqu’il officiait, Samy mettait tout son<br />
cœur dans ses prières, comme il a toujours mis son cœur dans tout ce<br />
qu’il entreprenait.<br />
Samy maitrisait et conjuguait harmonieusement quatre genres : la<br />
chanson populaire marocaine ancienne et moderne, le chant classique<br />
andalou et le chant liturgique, qui combine les précédents, et <strong>au</strong>xquels il<br />
intègre des mélodies de Turquie et d’Europe Centrale.<br />
Pour ses quatre-vingts ans, Samy nous a offert un gala <strong>au</strong> cours duquel il<br />
a interprété sa dernière composition, Ana Oueld Tmanine Sana – J’ai<br />
quatre-vingts ans et je suis dans la musique depuis soixante ans.<br />
J’ajouterais, « soixante ans et pour longtemps encore! »<br />
Plus de deux cents parents et enfants se sont<br />
mesurés à un « mini-quiz » sur dix parachiot<br />
du livre de la Genèse.<br />
Dans une atmosphère détendue et joviale,<br />
parents et enfants dialoguaient et s’éclairaient<br />
mutuellement. Tous les élèves ont reçu un<br />
be<strong>au</strong> certificat de participation, appelant sur<br />
eux et leurs parents les bénédictions de la<br />
Torah, et les plus méritants ont été<br />
récompensés. M. Lasry a invité l’assistance à<br />
chanter en chœur des mélodies sur Israël,<br />
faisant ainsi <strong>vibre</strong>r la salle de joie et<br />
d’allégresse.<br />
La parole <strong>au</strong>x invités<br />
« Shalom et Shavoua Tov. J’ai le plaisir de<br />
transmettre mes salutations, <strong>au</strong> nom de l’État<br />
d’Israël à l’assemblée réunie ce soir » Ce sont<br />
là les premiers mots de la lettre de<br />
félicitations et d’encouragement que nous a<br />
adressé Monsieur Yoram Elron, Consul<br />
général d’Israël à Montréal. Nous avons eu le<br />
plaisir d’accueillir Monsieur David<br />
Bensoussan, président de la Commun<strong>au</strong>té<br />
<strong>sépharade</strong> <strong>unifiée</strong> du Québec, accompagné de<br />
son épouse.<br />
Il a ensuite félicité les élèves et les<br />
organisateurs de la soirée pour une si belle<br />
initiative et réitéré le soutien de la C.S.U.Q. à<br />
l’Ecole Maïmonide.<br />
Ce fut une soirée pleine d’émotion et de<br />
Kédoucha. Par leur présence, tous les<br />
participants, ont souligné leur attachement et<br />
leur soutien à l’Ecole Maïmonide, et affirmé le<br />
lien indéfectible qui les unit à l’État d’Israël.<br />
M. Jaime Benabou<br />
Maître de cérémonie<br />
Directeur des Études juives à l’École Maïmonide<br />
que le site ne mentionne pas, c'est que Samy prépare la relève pour les<br />
générations à venir d’une <strong>au</strong>tre façon encore : il a écrit des partitions de<br />
musique marocaine, algérienne, tunisienne et égyptienne, musique qui<br />
jusqu'alors ne s’enseignait qu’oralement, de maître à disciple. En Israël, où<br />
il a passé dix années, il a créé le Merkaz Piyyout Veshira, a formé la<br />
chorale de paytanim et les musiciens de l’Orchestre Andalou d’Israël et<br />
les a dirigés dans une série de concerts et de tournées. Ce souci de la<br />
transmission, ce scrupule pour l'avenir, viennent confirmer l'intuition que<br />
nous avions il y a un demi-siècle : Samy est et restera un Maître.<br />
De lui, sa fille Yolande a dit : « Il nous a appris que l’amour et l’affection<br />
priment tout <strong>au</strong>tre intérêt, qu’<strong>au</strong>cun compromis ne v<strong>au</strong>t l’intégrité et<br />
l’<strong>au</strong>thenticité. Il nous a donné le goût de l’art et de la perfection, l’exemple de<br />
la rigueur et du dépassement de soi ». Quant à nous, nous tenons à<br />
témoigner notre affection et notre fierté à son épouse Messody, ses six<br />
enfants, ses quatorze petits-enfants et ses seize arrière- petits-enfants, en<br />
les remerciant de nous avoir permis de nous approprier leur Samy.<br />
Voilà, Samy, j’ai terminé et je te quitte en te disant que, lorsqu’à travers<br />
les synagogues du monde entier tu entendras la Kédoucha chantée sur<br />
l’air de ‘Omri Ma Nennsek Ya Mama, souviens-toi qu’ici, dans notre<br />
monde, on ne t’oublie pas non plus.<br />
Repose en paix.
PARRAINAGE<br />
Faites une mitzva, donner de la joie et du bonheur à nos<br />
aînés en parrainant une activité que nous organiserons en<br />
votre nom <strong>au</strong>près des personnes âgées <strong>sépharade</strong>s.<br />
Nous remercions sincèrement, Mme Lévy qui grâce à un<br />
don généreux nous a permis de réaliser une superbe<br />
activité à l’hôpital CHSLD juif de Montréal à l’occasion<br />
de la fête de Tou Bishevat.<br />
Contacter Sylvia Serruya <strong>au</strong> 733-4998 ext. 3150 ou<br />
sserruya@csuq.org<br />
BÉNÉVOLAT<br />
EN ACTION SOCIALE<br />
Donner, c’est recevoir !<br />
Nos personnes âgées ont besoin de notre aide, de votre<br />
aide. Faire du bénévolat est une action stimulante et<br />
enrichissante. Nous avons besoin de vous !<br />
Contacter Sylvia <strong>au</strong> 733-4998 ext. 3150<br />
SOIRÉE MIMOUNA<br />
À l’occasion de la soirée de la Mimouna, les services<br />
commun<strong>au</strong>taires de la Commun<strong>au</strong>té Sépharade Unifiée du<br />
Québec invitent les membres de notre commun<strong>au</strong>té à<br />
venir célébrer la fête dans un cadre convivial et musical,<br />
dimanche 27 avril 2008 à partir de 22h30 <strong>au</strong> Centre<br />
Commun<strong>au</strong>taire juif Ben Weider, 5400 Westbury<br />
Contacter Sabine <strong>au</strong> 733-4998 ext. 8230<br />
La sexologue Esther Perel<br />
invitée par la Campagne Sépharade<br />
des Femmes 2008<br />
La conférence « Parent, amant, faire vivre le désir<br />
dans le couple » s’est tenue le 4 mars dernier à la<br />
salle Gelber devant 350 personnes.(de g. à d.)Alicia<br />
Salama Directrice de La Campagne <strong>sépharade</strong>,<br />
Michael Ettinson Président de la Campagne générale,<br />
Cl<strong>au</strong>de Benarroch, Directrice adjointe Campagne<br />
<strong>sépharade</strong>, Rika Bohbot Cohen, Présidente sortante<br />
de la Campagne <strong>sépharade</strong> 2007, Esther Perel,<br />
conférencière, Pascale Hasen, présidente de la<br />
Campagne des femmes 2008, Renée Mahfoda<br />
Azoulay, Présidente de la campagne <strong>sépharade</strong> des<br />
femmes 2008, Camille Cohen et Josie Suissa<br />
Lupovich, coprésidentes Outreach.<br />
Mazal Renford<br />
à la rencontre des femmes Juives francophones<br />
Ce sont environ cent cinquante personnes<br />
qui ont répondu à l'appel des Femmes juives<br />
francophones le 19 février dernier <strong>au</strong><br />
Centre Interculturel de Côte-des-Neiges<br />
pour écouter la grande conférencière,<br />
Mazal Renford, directrice de l'institut Golda<br />
Meir du Mont Carmel en Israël.<br />
« Éducation et leadership : Passeport pour<br />
l'<strong>au</strong>tonomie des femmes », tel était le thème<br />
de la conférence de cette femme de terrain<br />
qui a décrit le travail trop méconnu mené<br />
par Israël <strong>au</strong>près des femmes, sur un plan<br />
humanitaire, et ce partout dans le monde.<br />
La conférencière a ainsi galvanisé un public<br />
largement multiculturel et a porté un<br />
message de Hasbara des plus efficaces.<br />
Le Comité des Femmes<br />
juives francophones entoure<br />
la conférencière Mazal<br />
Renford (3ème en partant<br />
de la g<strong>au</strong>che). On notera la<br />
présence notamment<br />
d’Annie Myara, Directrice<br />
Relations Interculturelles à<br />
la CSUQ (5ème en partant<br />
de la g<strong>au</strong>che), de Maïr<br />
Verthuy, de l’Institut<br />
Simone de Be<strong>au</strong>voir (6ème<br />
en partant de la g<strong>au</strong>che), et<br />
de Suzanne Danino,<br />
Présidente du Comité des<br />
Femmes juives<br />
francophones (2ème en<br />
partant de la droite).<br />
Pour les Femmes juives francophones,<br />
l'événement était un franc succès, d'<strong>au</strong>tant<br />
plus qu'il atteint parfaitement un de leurs objectifs visant une meilleure<br />
compréhension interculturelle.<br />
Voila qui <strong>au</strong>gure bien des événements à venir ce printemps <strong>au</strong>xquels s’est<br />
déjà attelé le comité des Femmes juives francophones. Surveillez-les!<br />
LVS mars 2008 13<br />
Commun<strong>au</strong>té ÇA S’EST PASSÉ ICI
Commun<strong>au</strong>té ÇA S’EST PASSÉ ICI<br />
SERVICES SOCIAUX<br />
DÉFILÉ DE CAFTANS À L’HÔPITAL MAÏMONIDE<br />
Comme chaque année à l’Hôpital Maimonide, a lieu un magnifique<br />
défilé de caftans. Cette année les dames du Centre Sépharade<br />
Francophone ont offert le 24 février dernier un très be<strong>au</strong> spectacle<br />
dans la synagogue de l’Hôpital. La salle était comble, les résidents et<br />
leurs familles sont venus assister à ce défilé, coloré, animé par Rabbin<br />
Chriqui, Sylvia Serruya, coordonnatrice de la CSUQ et Cl<strong>au</strong>de Elbaz,<br />
professionnel du CSF et accompagné par l’orchestre de Daniel<br />
Oiknine.<br />
175 résidents, familles et compagnons ont assisté à ce be<strong>au</strong> défilé de<br />
caftans.<br />
« Un Grand Merci» à Allison Friedman, récréologue de l’Hôpital, Cl<strong>au</strong>de<br />
Elbaz et ses bénévoles ainsi que les bénévoles de la CSUQ qui ont<br />
participé a cette belle activité.<br />
14 mars 2008 LVS<br />
MADY PARLE DE TOUT<br />
ET DE RIENS…<br />
Je m’adresse à tous les surtaxés de rides et d’années.<br />
À nous qu’on dit des plus…( plus quoi?) parce que si nous<br />
sommes des plu, <strong>au</strong>tant faire plus dans notre vie de tous les<br />
jours.<br />
Nous devons donc plus nous amuser, plus profiter de nos<br />
journées, plus penser à nous. Le cercle Sépharade<br />
francophone ( CSF) s’est donné pour mandat d’organiser<br />
très souvent des manifestations où tous les plus et<br />
quelquefois même …les <strong>au</strong>tres dansent , chantent et<br />
s’amusent.<br />
Le comité du CSF se dit que quand on veut on peut et<br />
quand on peut …on doit.<br />
Donc en dehors des soirées , conférences sorties que nous<br />
organisons tous les mois, il existe :<br />
3 fois par semaine des clubs de rencontre à la synagogue<br />
Petah Tikvah les lundis, les mardis <strong>au</strong> Centre Cummings et<br />
les mercredi à la Spanish &Portuguese.<br />
Pour : Jouer <strong>au</strong>x cartes , papoter, se raconter ce qui nous<br />
arrive et arrive <strong>au</strong> monde qui nous entoure en dégustant un<br />
thé, un café et des viennoiseries…<br />
Chaque jour devrait nous apporter des moments de petits<br />
bonheurs, de joies , de rires.<br />
Par-dessus tout, nous devons nous dire que chaque jour qui<br />
passe , et qui passe correctement est un jour de plus et<br />
pour qu’il passe le plus correctement possible, nous devons<br />
sortir ne pas rester seuls. Et si par hasard vous n’avez pas<br />
de transport vous nous passez un coup de fil et on<br />
s’arrange.<br />
Mady Anidjar<br />
LA FÉDÉRATION<br />
SÉPHARADE CANADIENNE<br />
La Fédération Sépharade canadienne est<br />
fière de participer à divers projets de<br />
tsédaka en Israël dont celui dirigé par le<br />
Rabbin Yamin Levy du Maimonides Heritage<br />
Center à Tibériade qui a reçu une aide de<br />
10,000$ pour venir en aide e<strong>au</strong>x enfants<br />
défavorisés de cette ville.<br />
Cinq mille petits déjeuners ont été<br />
également offerts <strong>au</strong>x enfants défavorisés du<br />
Négev et six Bar mitsva ont été offertes à<br />
des enfant éthiopiens en Israel..
COMMUNICATIONS<br />
La CSUQ renforce l’échange commun<strong>au</strong>taire<br />
Depuis novembre dernier, la CSUQ a entamé une<br />
refonte de ses méthodes et outils de communications.<br />
Le lancement de son portail Sépharade sur internet<br />
est une grande étape dans sa démarche d’information<br />
commun<strong>au</strong>taire et interculturelle.<br />
C’est une petite révolution. Le lancement sur internet, <strong>au</strong><br />
début du mois d’avril, du premier portail Sépharade de la<br />
CSUQ marque un tournant indiscutable dans la<br />
communications des informations <strong>au</strong> sein de notre<br />
commun<strong>au</strong>té.<br />
Le www.csuq.org constitue en effet la première initiative qui<br />
consiste à rendre de plus en plus interactif le partage des<br />
informations pratiques ou événementielles entre les Juifs<br />
francophones, toutes générations confondues.<br />
« En pariant sur une réactualisation quasi quotidienne de ses<br />
informations, et en permettant <strong>au</strong>x intern<strong>au</strong>tes d’utiliser des outils<br />
simples et efficaces pour participer et consulter tous les aspects de<br />
la vie commun<strong>au</strong>taire, la CSUQ passe d’une communication<br />
institutionnelle à une communication de rése<strong>au</strong> social », estime<br />
Philippe Régnoux, Consultant en Marketing éditorial pour la<br />
CSUQ. « C’est un véritable bond en avant qui va induire un réel<br />
changement de mentalité à de nombreux nive<strong>au</strong>x. »<br />
Un avis partagé par Alain Bidjerano, Président du comité<br />
Relations Publiques à la CSUQ, selon qui « le site web de notre<br />
commun<strong>au</strong>té était attendu depuis longtemps, il tient maintenant à<br />
nous de le faire vivre et d’en faire un lieu de partage et<br />
d’échanges.»<br />
Célébration de la réception du<br />
premier Sefer Torah <strong>sépharade</strong><br />
<strong>au</strong> Centre gériatrique Maimonides<br />
Plus de 150 invités, dignitaires, bénévoles et membres de l'équipe de<br />
direction du Centre gériatrique Maimonides se sont réunis le 7 février<br />
dernier dans la synagogue du Centre à l'occasion d'une joyeuse<br />
célébration visant à accueillir le premier Sefer Torah <strong>sépharade</strong> de<br />
Maimonides. Commandé en Israël, cette magnifique Torah a été<br />
généreusement donnée par les membres de la famille Assouline en<br />
l'honneur de leur mère, Mme Simy Assouline, résidente de<br />
Maimonides. Entourée de toute sa famille, Mme Assouline, âgée de 93<br />
ans, s'est adressée <strong>au</strong>x invités. Laissons-lui la parole : « C’est avec une<br />
grande joie que je dédie ce sefer Torah à l’hôpital Maimonide en guise<br />
d’appréciation pour les soins qui me sont prodigues. Je tiens à<br />
remercier particulièrement le rabbin Wolf, le rabbin Chriqui et le<br />
comite organisateur de cette merveilleuse soirée. »<br />
La radio : outil complémentaire d’internet<br />
« L’arrivée de l’outil internet ne peut que renforcer le lien<br />
commun<strong>au</strong>taire déjà existant », affirme Elie Benchetrit. Mais, pour le<br />
Directeur des Relations Publiques à la CSUQ, « la commun<strong>au</strong>té<br />
<strong>sépharade</strong> doit <strong>au</strong>ssi exploiter le vecteur que constitue la radio et<br />
poursuivre son effort de solidarité à l’égard de la seule radio Juive<br />
actuellement en onde <strong>au</strong> Québec, Radio Shalom ».<br />
« C’est un tribune idéale pour la commun<strong>au</strong>té, et un complément<br />
parfait à l’interactivité que procure internet », juge Philippe Régnoux,<br />
qui fut <strong>au</strong>ssi Directeur des programmes de Radio Shalom<br />
Montréal. « Pour moi, il est indispensable de créer rapidement un<br />
rendez-vous radiophonique régulier et en direct pour la commun<strong>au</strong>té ».<br />
Un projet d’émission Sépharade a donc été proposé par la CSUQ<br />
à Radio Shalom sur la base d’un partenariat commun<strong>au</strong>taire. Et<br />
même si, pour le moment, ce projet n’a pu se réaliser pour des<br />
raisons budgétaires, la CSUQ ne baisse pas les bras et explore de<br />
nouvelles avenues.<br />
LVS mars 2008 15<br />
Commun<strong>au</strong>té ÇA S’EST PASSÉ ICI
Publi-reportage
LVS mars 2008 17<br />
Publi-reportage
Commun<strong>au</strong>té ÇA S’EST PASSÉ ICI<br />
Le 20 février, un atelier sur le thème du<br />
«sommeil chez les enfants», animé par<br />
Stéphanie Fragman, a été organisé et plus de 30<br />
parents du CPE ont assisté à cette réunion<br />
éducative sur un sujet qui intéresse tous les<br />
parents.<br />
18 mars 2008 LVS<br />
Lors de la Semaine de Relâche,<br />
du 25 <strong>au</strong> 29 février, 45<br />
participants de 6 à 12 ans ont<br />
visité le Cosmodôme, la<br />
Récréathèque, l’Aquadôme, le<br />
Centre des Sciences IMAX <strong>au</strong><br />
Vieux-Montréal. Tout cela s’est<br />
passé quand ils n’étaient pas en<br />
train de profiter des Glissades<br />
<strong>au</strong> Mont Avila dans les<br />
L<strong>au</strong>rentides.<br />
AU DÉPARTEMENT JEUNESSE...<br />
Au Camp d'hiver Kif Kef du<br />
25 décembre 2007 <strong>au</strong> 1<br />
janvier 2008, on a reçu 128<br />
jeunes dont 16 Israéliens de<br />
Beer Sheva, les 26<br />
animateurs (tous bénévoles)<br />
étaient dirigés par Eric<br />
Mechaly, Arielle Ouaknine,<br />
Lorenz Gerlicher et Patrick<br />
Bensoussan. Une semaine<br />
remplie d’activités dont tous<br />
parlent encore : Tubing,<br />
Arbraska; Maccabiades;<br />
Journées Thèmes; Soirées<br />
Disco…<br />
L’École de Ski Chéleg a encore accueilli 53<br />
participants (de 6 à 12 ans), du 20 janvier <strong>au</strong> 2<br />
mars, pendant 7 dimanches consécutifs <strong>au</strong><br />
Chantecler, à Ste-Adèle. Tous ont dévalé les<br />
pentes de ski, <strong>au</strong>tant les parents que les enfants,<br />
qui prenaient la relève quand ceux-ci prenaient<br />
des cours de ski.<br />
ACTIVITÉS DES SERVICES COMMUNAUTAIRES<br />
AUX CPE...<br />
L’hiver bat son plein et on en profite<br />
bien avec toutes sortes d’activités<br />
de saison.<br />
Aux CPE , les enfants de la prématernelle<br />
du CPE ont assisté à<br />
leur premier concert de jazz en<br />
ce début d’année avec le<br />
«Quatuor de Jazz Shulich» <strong>au</strong><br />
Centre Segal, le 21 février 2008.<br />
En plus de découvrir ce qu’est un<br />
groupe de jazz, les enfants ont eu<br />
l’opportunité de se familiariser<br />
avec les différents instruments et<br />
de découvrir tout un univers<br />
musical.<br />
Les 18 et 25 février, les enfants<br />
du CPE ont pris d’ass<strong>au</strong>t le<br />
Banana Zoo, centre de<br />
récréathèque où ils ont joué sur<br />
un xylophone géant.
Au CHSLD juif de Montréal,nous fêtons les 60 ans<br />
de l'Etat d'Israël avec les résidents de l'hopital et<br />
comme toujours avec la collaboration de nos très<br />
chers bénévoles toujours présents et très<br />
dévoués.A g<strong>au</strong>che :Mme Zagury georgie,Amzallag<br />
Cl<strong>au</strong>dine,Arobas P<strong>au</strong>la,David Cohen Et David<br />
Tolédano,en arrière notre chanteur Yaacov<br />
Saassi.<br />
AU DÉPARTEMENT DES BÉNÉVOLES<br />
POUR L’ACTION SOCIALE...<br />
AU DÉPARTEMENT ADULTE...<br />
Le nouve<strong>au</strong> Département Adultes, pour les<br />
45 ans et plus, est heureux d’avoir mis sur<br />
pied un intéressant partenariat avec la<br />
Bibliothèque de Côte St Luc. A l’année<br />
longue des expositions de nos artistes seront<br />
ouvertes <strong>au</strong> grand public qui pourra admirer<br />
les toiles des peintres du Cercle des Artistes.<br />
Au nombre des activités prévues dans ce<br />
nouve<strong>au</strong> lieu convivial, une soirée de<br />
«Contes <strong>au</strong> coin du feu», pour adultes et en<br />
français, par Mme Oro Anahory Librowicz, le<br />
26 mars.<br />
Vernissage de Beryl Deitcher à la Bibliothèque de<br />
Côte St Luc, le 17 février dernier. Près de 30<br />
personnes se sont déplacés pour l’événement, et<br />
ce malgré une pluie verglassante particulièrement<br />
rebutante.<br />
De son côté, le Département des bénévoles pour l’action sociale organise plus d’une activité pour<br />
tisser des liens entre membres de la commun<strong>au</strong>té: M.Bénizri, résident <strong>au</strong> centre gériatrique de<br />
Maïmonide, lors d'une activité organisée par Sylvia Serruya et Cl<strong>au</strong>de Elbaz, en collaboration avec<br />
leurs bénévoles.<br />
Photo de droite: en arrière de M. Benizri,Sylvia Serruya, à ses côtés Mme Esther Lévy, bénévole de la CSUQ<br />
et Mme Dabda Solly; bénévole du CSF, en caftan vert Mlle Allison Friedman;récréologue du Centre Gériatrique<br />
Maïmonide.<br />
Le Rabbin Wolf tenait le drape<strong>au</strong> d'Israel avec Mme Zagury(bénévole de la<br />
CSUQ) lors de notre activité <strong>au</strong> CHSLD Juif de Montréal à l'occasion des "60<br />
ans de la creation de l'Etat d'Israel".<br />
LVS mars 2008 19<br />
Commun<strong>au</strong>té ÇA S’EST PASSÉ ICI
Naissances<br />
Décès<br />
Yossi et Ella Mouyal et Avigael ont<br />
l’immense joie d’annoncer la<br />
naissance de leur fils et petit frère<br />
Elisha Mouyal, le 22 janvier 2008 à<br />
Montréal. Un grand Mazal Tov <strong>au</strong>x<br />
heureux parents et <strong>au</strong>x granfds<br />
parents Ouri et Alice Barr, Jacob et<br />
Esther Mouyal<br />
Nous avons le plaisir d’annoncer la naissance de<br />
Myriam le 26 novembre 2007 dans le foyer de d’Avi<br />
et Sevrine Ben Ami . Un grand mazal tov <strong>au</strong>x parents<br />
et grands parents.<br />
Meir et Samantha Israel ont le<br />
plaisir d’annoncer la naissance<br />
de leur fils Joshua Emmanuel<br />
à Montréal le 13 mars 2008, 6<br />
adar 5768. Nous adressons un<br />
grand Mazal Tov <strong>au</strong>x heureux<br />
parents ainsi qu’<strong>au</strong>x grands parents Isaac et Ofelia<br />
Israel et Victor et Barbara Benedeck.<br />
Départ<br />
Nous avons la tristesse d’annoncer le décès de Mme Esther<br />
Oziel Z.L survenu à Toronto le 20 février 2008. Mme Oziel était<br />
la mère de neuf enfants, dont Monsieur Salomon Oziel ancien<br />
président de la Commun<strong>au</strong>té Sépharade du Québec, ainsi que de<br />
nombreux petits enfants. Nous adressons à sa famille et tout<br />
particulièrement à notre ami Salomon Oziel, l’expression de nos<br />
sincères condoléances.<br />
Avec une grande émotion nous avons appris le décès de Monsieur<br />
Cadosh-Delmar Charles (zl.) le samedi 2 février 2008 <strong>au</strong><br />
CHSLD juif de Montréal. Les bénévoles et professionnels(les) de la<br />
Commun<strong>au</strong>té Sépharade Unifiée du Québec offrent sincèrement<br />
toutes leurs condoléances à toute la famille.<br />
Nous avons l’immense tristesse d’annoncer le décès de Monsieur<br />
Salomon Amzallag Z.L connu sous le nom artistique de Sami el<br />
Maghribi, chantre de la musique traditionnelle arabo andalouse et<br />
hazan émérite, survenu le 9 mars 2008 à Montréal. La<br />
Commun<strong>au</strong>té Sépharade <strong>unifiée</strong> du Québec adresse à sa veuve et<br />
et ses enfants l’expression de ses sincères condoléances.<br />
Nous avons la tristesse d’annoncer le décès de Mme Denise<br />
Zafrani Z.L Survenu à Montréal le 29 janvier 2008, Elle était la<br />
mère de Gilberte, Eva, Marc, David et Nathan Zafrani et grandmère<br />
de 10 petits enfants. Nous adressons à sa famille nos sincères<br />
condoléances.<br />
Photo prise le 23 janvier 2008 de Mme<br />
Zafrani <strong>au</strong> Centre Gériatrique de<br />
Maimonides à l’ occasion de la fête de Tou<br />
Bishevat en compagnie de son très cher<br />
dévoué mari une semaine avant son décès.<br />
Katia Ruelle Malka,<br />
notre sympathique<br />
infographe <strong>au</strong>x Services<br />
Commun<strong>au</strong>taires de la<br />
CSUQ et à La Voix<br />
Sépharade nous quitte<br />
après 6 ans d’excellents<br />
services pour exercer ses<br />
talents dans le privé. Elle<br />
nous laisse un merveilleux<br />
souvenir comme collègue<br />
et comme personne.<br />
Nous lui souhaitons<br />
bonne chance dans sa<br />
nouvelle vie.<br />
Nominations<br />
Nous avons le plaisir d’annoncer la nomination<br />
de M. Gabriel Chetrit comme président de<br />
la Commun<strong>au</strong>té Sépharade de Laval Or<br />
Séfarad. Il succède à ce poste à M. Marc<br />
Serfaty.<br />
Nous avons le plaisir d’annonce la nomination<br />
de M. Gad Elkaim comme Directeur des<br />
finances à la Commun<strong>au</strong>té Sépharade Unifiée<br />
du Québec. M. Elkaim est titulaire d’un MBA<br />
qu’il a obtenu à Paris et il a été en poste<br />
pendant 5 ans à la firme Bombardier Produits<br />
Récréatifs Inc. Il est marié et père de trois<br />
enfants. Nous souhaitons à Gad une excellente<br />
carrière <strong>au</strong>près de nous<br />
Nous avons le plaisir<br />
d’annoncer la<br />
nomination de Karine<br />
Zriel comme adjointe<br />
<strong>au</strong> Département<br />
jeunesse des Services<br />
Commun<strong>au</strong>taires de la<br />
CSUQ.<br />
LVS mars 2008 25<br />
Carnet C’EST VOUS
Dossier<br />
Israël, 60 ans après…<br />
Quand les jeunes Québécois<br />
découvrent la Terre promise<br />
26 mars 2008 LVS<br />
Un reportage photo signé Joseph Elfassi et réalisé dans le cadre d’un<br />
voyage en Israël organisé par Birthright, en décembre dernier. Des<br />
images inoubliables pour les jeunes Québécoises et Québécois qui<br />
ont pu bénéficier de cette magnifique opportunité.
Mon expérience israélienne<br />
Les jeunes Québécois du<br />
programme Birthright découvrent<br />
à dos de chame<strong>au</strong> l’immensité du<br />
désert du Négev. Le silence du lieu:<br />
une émotion indicible…<br />
Négocier les prix dans les rues bondées et actives de Jérusalem<br />
avant le début de Shabat. Errer tranquillement dans les vieilles<br />
rues de Tsfad, où les immeubles sont encore criblés de balles<br />
des guerres passées. S’asseoir à Tel Aviv, à l’endroit même où<br />
Itzhak Rabin a donné son dernier discours, avant d’être<br />
assassiné. Escalader des montages et voir quatre pays.<br />
Traverser une partie de désert à chame<strong>au</strong>. Tout ceci, sans<br />
payer un centime. Voilà ce que m’a permis de faire, comme<br />
d’<strong>au</strong>tres jeunes Juifs venus de partout à travers le monde,<br />
l’organisation Birthright (droit de naissance).<br />
Dans ce voyage, le spirituel et le politique se sont mêlés, se<br />
sont confondus, s’entrechoquèrent. Au Musée Yad Vashem,<br />
nous sommes témoins de l’horreur vécue par les Juifs durant<br />
l’Holoc<strong>au</strong>ste : de simple discrimination à exil, pour ensuite<br />
LVS mars 2008 27<br />
Dossier ISRAËL 60 ANS APRÈS
Dossier ISRAËL 60 ANS APRÈS<br />
aller à l’élimination pure et simple, nous<br />
traversons les difficiles années d’Europe<br />
dans un musée qui devient de plus en plus<br />
étroit à chaque pas. Le musée est<br />
unidirectionnel, il n’y a qu’une porte de<br />
sortie (excepté d’urgence, bien sur), il f<strong>au</strong>t<br />
donc le traverser, revivre les rues<br />
polonaises, les ghettos, les camps, dont<br />
certains vestiges ont été directement<br />
importés <strong>au</strong> musée. Ensuite, direction du<br />
cimetière militaire d’Israël. L’agenda de<br />
cette journée est très claire. Montrer<br />
comment des millions de Juifs sont morts<br />
et ensuite pourquoi des milliers de Juifs<br />
sont prêts à mourir. Une des soldates qui<br />
nous accompagne, dans un moment de<br />
recueillement, pose une pierre sur le<br />
tombe<strong>au</strong> d’Herzl, père fondateur du<br />
sionisme.<br />
Les jeunes sont <strong>au</strong>ssi appelés à vivre des<br />
expériences nouvelles, uniques. Nous<br />
dormons tous dans une tente de bédouin,<br />
nous mangeons par terre, chantons <strong>au</strong>tour<br />
d’un feu dans un désert noir la nuit. Nous<br />
vivons pendant deux jours dans un<br />
kibbutz. Nous traversons des parties de<br />
désert en chame<strong>au</strong>. Nous visitions de<br />
vieilles villes israéliennes, certaines ayant<br />
très peu de contact avec la modernité,<br />
avec l’extérieur. Nous nageons dans la mer<br />
morte, plutôt nous flottons, sans effort<br />
évidemment, dans cette mer trop salée<br />
pour y abriter la vie. Nous forgeons des<br />
amitiés, <strong>au</strong>tant avec des Juifs canadiens<br />
que nous découvrons durant le voyage,<br />
<strong>au</strong>tant avec de jeunes soldats israéliens qui<br />
nous accompagnent, nous émeuvent, nous<br />
font rire.<br />
Comme toute bonne chose a une fin,<br />
après dix jours d’escalade, de baignade, de<br />
tourisme, de voyage, nous repartons,<br />
souvenirs à la main pour nos proches <strong>au</strong><br />
Canada, un peu fatigués d’une expérience<br />
riche en activités mais p<strong>au</strong>vre en sommeil<br />
pour certains. Certains restent pour<br />
davantage visiter, quelques uns s’y<br />
installent, les <strong>au</strong>tres repartent. Pour la<br />
plupart des participants, c’était leur<br />
premier voyage en Israël, ils n’y avaient<br />
jamais mis pieds. Et chose certaine, ce<br />
voyage sera le premier de nombreux.<br />
28 mars 2008 LVS<br />
Joseph Elfassi
Sur la place Yitzhak Rabin, une jeune<br />
Québécoise se souvient d’un certain 4<br />
novembre 1995. Ici, comme elle, des milliers<br />
de témoins directs, et des millions de<br />
téléspectateurs à travers le monde, ont assisté<br />
à l’évanouissement d’un espoir.<br />
LVS mars 2008 29
Dossier ISRAËL 60 ANS APRÈS<br />
L’effort que nécessite<br />
l’escalade d’un mont à<br />
travers le Négev<br />
n’empêche pas le<br />
dialogue. Bien <strong>au</strong><br />
contraire, il le suscite<br />
presque constamment.<br />
30 mars 2008 LVS<br />
Face <strong>au</strong> Mur des<br />
Lamentations, la<br />
prière est<br />
universelle. La<br />
preuve…
Face à la tombe de<br />
Théodore Herzl, le<br />
recueillement devant le<br />
visionnaire.<br />
L’aridité du lieu n’est pas<br />
obstacle à la volonté<br />
d’atteindre le sommet. C’est<br />
la preuve, pour ces jeunes,<br />
que l’esprit guide le corps.<br />
LVS mars 2008 31<br />
Dossier ISRAËL 60 ANS APRÈS
Dossier ISRAËL 60 ANS APRÈS<br />
Je suis arrivée en Israël quelque part dans les années 40. Je<br />
m’attendais de voir défiler fièrement de jeunes membres<br />
enthousiastes du Betar ou du Hashomer Hatzair. Visitant un<br />
kibboutz, je brûlais de me rendre manger dans la salle commune et<br />
de m’entretenir avec son secrétaire général, qui m’accueillerait<br />
sûrement en maillot de corps, sandales et short kaki. Boulevard<br />
Rothschild, dans la modeste maison de stucco du premier maire de<br />
Tel-Aviv, Meir Dizengoff, je m’étais rendue dans l’exiguë pièce où<br />
une foule entassée avait écouté fiévreusement David Ben Gourion<br />
déclarer l’indépendance de l’État d’Israël. Bien qu’entretenant des<br />
sentiments contradictoires à l’égard du nationalisme, mais ne<br />
pouvant chasser de mon esprit l’histoire de mon propre peuple, il<br />
m’était difficile de ne pas céder à l’émotion du moment. Neuf mois<br />
plus tard, l’imaginaire nourri de mes lectures antérieures a cédé le<br />
pas à la réalité contemporaine d’Israël : je suis maintenant bel et bien<br />
en 2008. Pourtant, je n’ai jamais besoin de chercher bien loin pour<br />
trouver ce qui m’avait séduite et poussée à vouloir venir ici.<br />
Dès le tout début, j’ai été accueillie par les Israéliens par leur<br />
singulière chaleur commun<strong>au</strong>taire; en moins de deux mois, j’avais<br />
une famille de substitution et un rése<strong>au</strong> d’amis tel que je n’en avais<br />
jamais eu <strong>au</strong> Québec! Si j’ai pu persévérer et rester ici malgré les<br />
difficultés et les spleens, c’est notamment parce que je savais pouvoir<br />
compter sur mon entourage. Ou alors je sortais m’acheter un sac de<br />
Bamba (des Cheetos…qui goûtent le beurre de peanut –un délice<br />
local!) et restais à discuter avec l’épicier du coin pour une demiheure.<br />
Lors de Hanuka, m’installant rue Sheinkin <strong>au</strong> légendaire Café<br />
Tamar avec mon ordinateur, je n’ai pas eu le plaisir d’observer la<br />
bohème f<strong>au</strong>ne d’artistes bien longtemps que la célèbre propriétaire<br />
des lieux, accompagnée d’Amos Lavi -dont même les années n’ont<br />
pu chasser le charme irrésistible- et sa bande de joyeux lurons<br />
m’entraînaient avec eux pour prendre part activement à la<br />
célébration, m’incitant à prendre un coup et à entonner les airs de<br />
circonstance.<br />
Pourtant, certains de mes amis sont prompts à critiquer l’évolution de<br />
l’individualisme dans le pays et à déclarer mort l’esprit des premières<br />
décennies du pays, où sacrifices personnels et solidarité étaient les<br />
mots d’ordre. Côté institutionnel, il est vrai que l’État a pris un sérieux<br />
virage néo-libéral lors des dernières décennies, mais la solidarité<br />
commun<strong>au</strong>taire me surprend toujours. Lors de mes premiers mois ici,<br />
excitée de pouvoir enfin rencontrer les acteurs de la société civile et<br />
de m’impliquer, je ne savais plus où donner de la tête. « Israël, me<br />
confiait récemment Gershon Baskin, demeure le pays où le nombre<br />
d’organisations de bénévoles per capita est nul part égalé <strong>au</strong> monde<br />
32 mars 2008 LVS<br />
DE L’HISTOIRE<br />
AUX HISTOIRES<br />
». Sur mon chemin, j’ai rencontré comme moi plusieurs jeunes<br />
Allemands, Suédois, Hollandais, Japonais, etc., venus ici pour<br />
s’impliquer ou pour étudier et qui cherchaient par tous les moyens<br />
à pouvoir rester. Et les Israéliens, toujours, nous demandent : « mais<br />
que diable venez-vous chercher ici alors que vous avez tout dans vos<br />
pays idylliques! Vous pourriez faire tellement plus de sous et avoir<br />
une vie facile là-bas, non? ». Bonne question.<br />
Je pourrais répondre en évoquant apprécier la richesse culturelle du<br />
pays: le cinéma israélien cette année par exemple, avec The Band,<br />
Noodles, Medusa, etc., s’est épanoui comme jamais; la scène littéraire,<br />
que je ne cesse de découvrir avec un plaisir sans nom (à ce sujet, les<br />
écrivains israéliens seront les invités d’honneur du Salon du Livre de<br />
Paris en mars, 39 d’entre eux s’y rendront présenter leurs œuvres.<br />
C’est à suivre!) ; la vie artistique et nocturne de Tel-Aviv qui me<br />
détourne trop souvent de mes devoirs d’hébreu le soir, etc. Je<br />
pourrais également répondre en invoquant que le dynamisme du<br />
pays et des plus stimulants : tous ces jeunes entreprenants qui ont<br />
fait d’Israël un géant du Hight Tech, ou encore combien il est<br />
fascinant de constater qu’en si peu de temps, le pari risqué de<br />
développer l’agriculture et de « faire fleurir le désert » a fonctionné et<br />
vous permet notamment d’apprécier chaque jour les délices loc<strong>au</strong>x<br />
et les produits frais, etc. Finalement, un classique, je pourrais <strong>au</strong>ssi<br />
m’appuyer sur sa géographie : la Galilée, <strong>au</strong> nord, avec ses vallées<br />
verdoyantes (précisément en cette période de l’année où le vert<br />
tendre des nouvelles pousses contraste sublimement avec les feuilles<br />
argentées des oliviers et des amandiers) et ses h<strong>au</strong>teurs qui donnent<br />
une p<strong>au</strong>se à vos poumons après des mois de l’air pollué de la ville.<br />
Et, <strong>au</strong> sud, les déserts de Judée et du Néguev, qui, pour une<br />
Québécoise, demeurent toujours une valeur sûre pour le<br />
dépaysement, et j’en passe…<br />
Mais fondamentalement, pourquoi j’aime la vie ici? Car malgré tous<br />
les problèmes qui font les choux gras des cyniques et des détracteurs<br />
d’Israël, j’aime aller dans la vieille ville de Jérusalem et constater<br />
l’intimité particulière que partagent Juifs, Musulmans et Chrétiens.<br />
J’aime me lever le matin et décider qu’<strong>au</strong>jourd’hui, je vais aller goûter<br />
la soupe yéménite dans un petit boui boui près de l’odorant souk<br />
haCarmel. J’aime me perdre en voiture et que, soudainement, mon<br />
copain me dise « ah tu te souviens l’histoire de Samson dans la Bible,<br />
c’est ici que ça commence lorsqu’il…etc. ». J’aime la tradition du<br />
humus le samedi à Jaffa, où Arabes et Juifs israéliens se rendent<br />
communier, en quelque sorte. J’aime savoir que je peux avoir une<br />
vie tout à fait moderne et urbaine à Tel-Aviv et que, si j’en ai marre,<br />
je peux aller me ressourcer dans le silence du couvent de sœurs
cloitrées françaises à Beit Gemal. J’aime les personnages<br />
excentriques que l’on croise dans les rues de Tel-Aviv. J’aime aller<br />
jogger sur la plage et prendre une p<strong>au</strong>se pour observer les surfeurs<br />
faire corps avec les vagues. J’aime flâner sur Rotschild avec une<br />
copine, attendant qu’une nouvelle péripétie nous arrive encore.<br />
J’aime mes amis des moshavim et de Jérusalem qui s’enflamment<br />
contre les Tel-Aviviens et leur vie superficielle mais qui viennent le<br />
week-end apprécier l’un de ses innombrables Yom Huledet party où<br />
une foule enjouée vient célébrer comme nulle part ailleurs<br />
l’anniversaire d’un pur inconnu. J’aime me surprendre à comprendre<br />
LA TERRE PROMISE EST PERMISE<br />
Lorsque j’étais encore étudiant a<br />
l’École Maimonide, je me souviens<br />
d’un cours de Mr Benabou <strong>au</strong> sujet<br />
des Explorateurs du temps de Moise<br />
inspire d’un essai d’Emmanuel Levinas<br />
« La Terre Promise ou Terre Permise ?».<br />
Je me souviens de m’être posé la<br />
question que se pose tout <strong>sépharade</strong><br />
nourri <strong>au</strong> sionisme- mais pourquoi<br />
cette question ? Y a-t-il un doute<br />
quelconque a ce sujet?<br />
Et c’est la, avec le temps que j’ai<br />
découvert que le peuple juif a une<br />
relation très sophistiquée avec sa<br />
Terre depuis toujours. Certains y<br />
habitent comme réfugiés, d’<strong>au</strong>tres par<br />
choix, certains adorent l’association<br />
avec des symboles nation<strong>au</strong>x (le<br />
drape<strong>au</strong>, l’Hatikva, etc.), d’<strong>au</strong>tres<br />
aiment la visiter- tout en<br />
s’interrogeant avec une pointe d’inquiétude : « Et si on lavait le<br />
cerve<strong>au</strong> à mes enfants un jour pour qu’ils aillent y habiter un jour.»<br />
Voila, il y a près de 5 ans, un groupe de jeunes groupés <strong>au</strong>près<br />
du projet Maghsimim- les réalisateurs-, ma femme Ruth, et moimême<br />
avons décidé de faire quelque chose de nouve<strong>au</strong> a<br />
Montréal. De réussir l’accomplissement de notre Aliyah., par la<br />
suite d’<strong>au</strong>tres nous ont suivis.<br />
Et depuis, c’est la question qui revient à chaque fois que je<br />
rencontre un membre de la commun<strong>au</strong>té que soit à Montréal ou<br />
ici : « Alors, ca va? vous êtes contents- <strong>au</strong> moins? Ce n’est pas trop<br />
dur? Vous êtes vraiment courageux… »<br />
Alors, voila- je, j’ai décidé de vous répondre à vous tous de<br />
manière concise et formelle. C’est vrai que je m’exprime en mon<br />
nom, mais je suis convaincu quelque part que la plupart de ceux<br />
et celles qui ont fait ce choix seraient d’accord avec mon propos.<br />
Soyez rassurés, Cela va très très bien. Nous avons plus que réalisé<br />
notre rêve, nous le vivons <strong>au</strong> quotidien. Cela n’a pas été plus dur<br />
que n’importe quel grand changement dans la vie. Nous avons été<br />
entourés par de nombreux soutiens et avons trouvé notre place<br />
tranquillement.<br />
Depuis notre arrivée, Ruth et moi ,mariés depuis seulement deux<br />
mois avant notre départ, avons eu le temps de perfectionner notre<br />
hébreu, de participer <strong>au</strong> service militaire, de nous installer dans<br />
notre petit Yichouv de Metar (15 minutes <strong>au</strong> Nord Est de Beer<br />
les paroles de la chanson d’Ivri Lieder qui joue sur Gal Galaz et les<br />
trouver magnifiques. J’aime m’asseoir avec un vieux professeur de 70<br />
ans et l’écouter me raconter comment c’était ici, <strong>au</strong> tout début. Car<br />
après tout, ce que j’aime le plus ici, <strong>au</strong>-delà de toute l’Histoire qui s’y<br />
trouve, c’est ce réservoir sans fin d’histoires, celles que je vis mais<br />
encore davantage celles des gens que je rencontre. C’est parfois<br />
essoufflant, mais on ne s’ennuie jamais.<br />
Helène Berrubé<br />
Sheva), d’avoirdonné naissance à deux merveilleuses petites filles,<br />
Ayelet et Noa, trouver un boulot et élargir notre cercle d’amis<br />
Israéliens. Bien sûr, ce qui est le plus intéressant par fois dans ce<br />
pays ce sont les petites incidences du quotidien, comme payer<br />
ses impôts, se disputer une place dans le stationnement, se figer <strong>au</strong><br />
garde à vous lorsque la sirène retentit pour la minute de silence<br />
à Yom Hazikaron, participer a un débat politique sur une question<br />
qui ne nous touche guère et, sans oublier la fascination que nous<br />
avons pour la devise américaine qui règne encore en maître dans<br />
notre pays… Bref, la vie normale. si on peut l’appeler ainsi d’un<br />
citoyen quelconque.<br />
En résumé, nous sommes très heureux. Deux choses me manquent<br />
cruellement: la famille (pas de baby-sitters près de chez nous et les<br />
sympathiques disputes pour voir à qui le tour de nous inviter pour<br />
la Daf du Chabat et évidemment…… le hockey. Peut être <strong>au</strong>ssi la<br />
toute première neige (seulement).<br />
Je travaille <strong>au</strong>jourd’hui a représenter la commun<strong>au</strong>té de Montréal<br />
jumelée à la région de Beer Sheva et Bnei Shimon et dans le but<br />
de rapprocher de façon continue les Juifs de la Diaspora et les<br />
Israéliens. Ruth, est Diététiste-clinique dans un hôpital de<br />
convalescence a Beer Sheva.<br />
Nous voulons continuer a jouir de cette immenses satisfaction qui<br />
nous accompagne depuis 2003. Nous aimons habiter dans le<br />
région du Sud d’Israël et espérons de voir cette région se<br />
développer de manière harmonieuse pour le bien du pays.<br />
Personnellement, je crois, qu’après 60 ans, le temps est venu pour<br />
que les Juifs de par le monde, s’interrogent sur leur relation à Israël<br />
et de leur avenir dans la Diaspora. Ceci est d’<strong>au</strong>tant plus important<br />
pour les <strong>sépharade</strong>s, qui depuis toujours ont produit les plus<br />
grandes figures du sionisme bien avant Herzl et Jabotinski : R.<br />
Yehuda Halevi, Maimonide, Nachmanide et tous les <strong>au</strong>tres grandes<br />
figures contemporaines qui n’ont jamais hésité de voir en Israël,<br />
plus qu »un foyer national- mais un summum de la vie juive basée<br />
sur trois piliers : le Peuple d’Israël, selon la Torah d’Israël, sur la<br />
Terre d’Israël.<br />
Je vous invite à tous et à toutes de venir nous visiter en Israël et<br />
tout particulièrement à Beer Sheva a l’occasion de cette année très<br />
spéciale.<br />
Arié Levy<br />
Représentant de la Fédération CJA<br />
de Montréal en Israël<br />
LVS mars 2008 33<br />
Dossier ISRAËL 60 ANS APRÈS
Dossier ISRAËL 60 ANS APRÈS<br />
Dans le cadre d’une mission organisée par le Comité<br />
Québec-Israel un groupe de jeunes québécois s’est<br />
rendu en Israel en décembre dernier, Sylvain Perron et<br />
Sebastien Lemire étaient parmi eux. Ils ont bien voulu<br />
partager leur expérience israélienne lors d’une<br />
rencontre dans nos loc<strong>au</strong>x. Sylvain Perron est attaché<br />
politique du député Pierre Simon Diamond de l’A.D.Q.<br />
Sebastien Lemire est quant à lui Président du Comité<br />
Jeunesse du Parti Québécois.<br />
LVS – Avant votre voyage, quelle était votre perception des juifs<br />
premièrement et d’Israel ensuite?<br />
Sébastien L.- J’ai eu l’occasion de rencontrer et d’apprécier lorsque<br />
je vivais à Rouyn-Noranda, un jeune juif, Joseph Elfassi qui m’a invité<br />
à plusieurs occasions chez lui et c’était il est vrai le premier juif que<br />
je découvrais. Ceci dit je n’avais <strong>au</strong>paravant <strong>au</strong>cun préjugé ni<br />
favorable ni défavorable à l’encontre des juifs tout en ayant été<br />
particulièrement sensible d’un point de vue humain à la tragédie de<br />
la Shoah..<br />
Sylvain Perron - Ce fut pareil pour moi qui suis originaire de<br />
Boucherville une localité où je ne pense pas qu’il y ait des juifs. À<br />
l’instar de Sébastien je peux dire également que je n’avais comme lui<br />
<strong>au</strong>cun préjugé à leur égard.<br />
Sébastien L - Une des grandes forces de ce voyage reste le fait que,<br />
parmi la trentaine de jeunes participants issu des diverses formations<br />
politiques du tant <strong>au</strong> nive<strong>au</strong> provincial que fédéral, il y avait<br />
34 mars 2008 LVS<br />
TÉMOIGNAGES<br />
DEUX JEUNES<br />
QUÉBÉCOIS<br />
REVIENNENT<br />
D’ISRAËL<br />
également des jeunes juifs avec qui nous avons pu échanger de<br />
manière spontanée afin de mieux connaître certains aspects du<br />
judaïsme en général et de la commun<strong>au</strong>té juive <strong>montréal</strong>aise en<br />
particulier. J’ai pu découvrir ainsi que le judaïsme n’est pas seulement<br />
une religion mais <strong>au</strong>ssi et surtout un mode de vie. D’identité.<br />
Sylvain L - l’expérience de la pratique du chabat a été marquante<br />
pour moi, découvrir ainsi des jeunes juifs pratiquants s’apprêter à<br />
célébrer ce jour sacré et puis leur poser des questions afin de mieux<br />
comprendre la signification de cette journée.<br />
Sébastien L - C’est une expérience fascinante que de constater qu’en<br />
2008, des gens arrivent à se détacher de tout cet univers matériel qui<br />
nous entoure et surtout sans consommer de l’énergie. Il f<strong>au</strong>t l’avoir<br />
vécu pour mieux le comprendre et l’apprécier. Un <strong>au</strong>tre élément<br />
fondamental qui m’a be<strong>au</strong>coup frappé lors de mes contacts<br />
préliminaires avec les jeunes juifs qui allaient participer <strong>au</strong> voyage,<br />
ce fut le h<strong>au</strong>t degré de solidarité et d’identification des juifs de la<br />
diaspora avec l’État d’Israel. Cela m’a peut-être permis de mieux<br />
comprendre la perception du statut de minoritaire.<br />
LVS - Quelle a été votre perception générale d’Israël à travers<br />
les endroits que vous avez visités?<br />
Sylvain P – j’ai été surtout frappé par les contrastes , si l’on prend<br />
pour exemple Jérusalem, une ville chargée d’histoire, de vieux<br />
bâtiments de son atmosphère spirituelle et puis Tel Aviv avec ses<br />
tours, son modernisme, ses technologies. Nous sommes loin de<br />
l’uniformité que l’on retrouve en général dans la plupart des villes du<br />
Québec.<br />
J’ai été également frappé par le mur séparant la ville des territoires<br />
palestiniens, quelque chose qu’il serait inconcevable d’imaginer <strong>au</strong>
Québec. Le mur nous ramène brutalement à la réalité du<br />
conflit israèlo-palestinien.<br />
LVS -Avez-vous eu l’impression de vous trouver<br />
justement dans un pays en guerre?<br />
Sylvain P - La seule chose qui me rappelaient la guerre<br />
c’était de voir qu’il y avait des soldats partout. Ceci dit, je ne<br />
me suis jamais senti en danger.<br />
Sébastien L - En visitant Jérusalem, j’ai eu le sentiment<br />
d’avoir visité une des plus belles villes <strong>au</strong> monde. J’ai pu<br />
constater que dans cette ville chaque quartier représente non<br />
seulement une religion mais <strong>au</strong>ssi une façon de vivre.<br />
Pour revenir <strong>au</strong> conflit, J’ai eu comme l’impression que les<br />
israéliens ont appris à vivre et à intérioriser cet état de<br />
tension En ce qui concerne le mur que certains appellent ici<br />
le mur de la honte, je me mets à la place des israéliens pour<br />
me dire que malgré tout ce qu’on a pu dire et écrire, la réalité<br />
est que ce mur permet de prévenir des attentats suicides. Ce<br />
sont des exemples comme ceux-ci qui viennent me<br />
confronter dans mes valeurs établies. C’est la même chose<br />
pour les check points israéliens entre deux villes<br />
palestiniennes. Quand on constate de visu cette réalité on ne<br />
peut que mieux comprendre ce besoin de sécurité<br />
qu’éprouve chaque citoyen d’Israël. Ce voyage m’a permis<br />
de mettre en situation de débat constant avec moi-même.<br />
J’ai été impressionné également par le Musée de la Shoah,<br />
un <strong>au</strong>tre moment fort de ma visite.<br />
Malgré tout ce qu’on peut<br />
dire et écrire, la réalité est<br />
que ce mur permet de<br />
prévenir des attentats<br />
suicides.<br />
Sylvain P – je souscris<br />
totalement à ce que vient<br />
de dire Sébastien en ce qui<br />
concerne le mur. Je suis<br />
convaincu que sans cette<br />
barrière, il y <strong>au</strong>rait encore<br />
des morts à Tel Aviv, à<br />
Jérusalem ou ailleurs <strong>au</strong><br />
pays.<br />
LVS - Quand il s’agit de stigmatiser l’État d’Israël, certains<br />
médias, partis politiques ou organisations dites progressistes n’y<br />
vont pas avec le dos de la cuillère, État raciste, colonialiste,<br />
spoliateur, régime d’Apartheid ….et j’en passe sont devenus les<br />
termes à las mode. Je déduis de vos propos que vous n’avez pas<br />
été influencées par cette prose qui malheureusement influence<br />
be<strong>au</strong>coup de jeunes québécois, qui à mon avis reprennent ces<br />
propos be<strong>au</strong>coup plus par solidarité avec les palestiniens<br />
considérés comme l’underdog, que par haine envers les juifs. Estce<br />
que votre voyage vous <strong>au</strong>rait-il permis de mieux cerner la<br />
réalité?<br />
Sébastien L - Je pense que la plupart des gens ici ont une<br />
méconnaissance du problème. Au nive<strong>au</strong> d’un conflit lui même qui<br />
demeure complexe. Il ne s’agit point de prendre parti pour l’u ou<br />
l’<strong>au</strong>tre des parties. Il y a trop de vies en jeu de part et d’<strong>au</strong>tre pour<br />
que l’on prenne parti pour l’un ou l’<strong>au</strong>tre des adversaires en se<br />
basant uniquement sur des considérations purement idéologiques.<br />
Sylvain P – Ce voyage nous a particulièrement éclairés sur plusieurs<br />
aspects. Je prends pour exemple le cas de la Cour Suprême d’Israël<br />
où une c<strong>au</strong>se peut-être entendue en une seule journée, une<br />
institution qui permet à des particuliers fussent-ils juifs, arabes<br />
israéliens ou palestiniens de contester des décisions émanant du<br />
gouvernement, elle n’a rien à envier à notre Charte des Droits et<br />
Libertés et demeure un exemple vivant de la vitalité de la démocratie<br />
israélienne. De ce point de vue là, je ne me suis jamais senti dépaysé<br />
<strong>au</strong> nive<strong>au</strong> des institutions.<br />
Quand j’ai visité Massada, j’ai pu constater en me référant à l’histoire<br />
qu’à ce même endroit il y a deux mille ans, des gens se sont<br />
retrouvés en situation d’assiégés.<br />
Un québécois ne pourra jamais comprendre la situation d’Israël s’il<br />
ne réalise pas la superficie géographique de ce pays et l’exiguïté de<br />
ses frontières à certains endroits.<br />
LVS- Pourriez-vous me décrire le ou les moments forts de ce<br />
voyages et qui vous ont laissé les souvenirs le plus marquants?<br />
Sylvain P –Pour moi cela a été la visite de la frontière nord d’Israel<br />
avec le Liban.<br />
C’était pour moi l’occasion de voir le conflit dans toute sa géographie<br />
en observant également l’endroit où les deux soldats israéliens furent<br />
kidnappés par le Hezbbollah.<br />
La personne qui nous expliquait la situation n’était <strong>au</strong>tre que le<br />
responsable de la sécurité pour la région nord d’Israël lors de la<br />
guerre contre le Hezbollah en été 2006..<br />
Sébastien L - Ma visite à la Knesseth, le parlement israélien a été<br />
pour moi, militant politique, un moment particulièrement marquant.<br />
J’ai été également impressionné par les rencontres avec les<br />
journalistes qui exprimaient leur point de vue avec une liberté et un<br />
franc parler qui reflétaient encore une fois la vitalité de la liberté de<br />
presse n Israël.<br />
J’ai été particulièrement frappé par les propos tenus par un<br />
journaliste palestinien faisant justement l’éloge de cette liberté de<br />
presse qui n’existait pas dans les territoires sous administration de<br />
l’Autorité Palestinienne.<br />
Évidemment ma visite à Jérusalem découverte sous le prisme de mon<br />
héritage chrétien, le Chemin de Croix de Jésus, le Mont des Oliviers.<br />
Les gens en prières <strong>au</strong> Mur des Lamentations.<br />
Ce fut un voyage tellement riche et complet qu’il me paraît difficile<br />
de répondre à la question.<br />
LVS- un mot peut-être sur le caractère des israéliens?<br />
Sylvain P – Je ne pense pas qu’il y ait de grandes différences avec<br />
les Québécois.<br />
Sébastien L - Là je ne suis pas d’accord, j’ai passé le réveillon de fin<br />
d’année dans une disco à Tel Aviv et j’ai pu découvrir la curiosité,<br />
l’ouverture d’esprit et le dynamisme de la jeunesse israélienne avec<br />
le sens du <strong>rythme</strong> en plus que nous n’avons pas <strong>au</strong> Québec.<br />
Et puis cette confiance en eux –mêmes qui m’a fortement<br />
impressionné.<br />
LVS-Avez-vous un enseignement particulier à tirer de ce<br />
voyage?<br />
Sylvain P –Je pense que notre objectif sera d’informer le plus de<br />
gens de ce qui se passe en Israel. Autrement dit de ce que j’ai vu<br />
réellement et non de ce que l’on nous montre à la télévision ou de<br />
ce que l’on lit dans les journ<strong>au</strong>x, Nous devons exprimer un point de<br />
vue le plus objectif possible. Nous avons le devoir de garder cette<br />
objectivité qui fait tellement déf<strong>au</strong>t <strong>au</strong>x médias québécois.<br />
Sébastien L - Ce concept du voyage nous a permis de découvrir<br />
certaines réalités, il reste selon moi be<strong>au</strong>coup d’éléments qui restent<br />
encore à découvrir et à comprendre. Cependant je pense que nous<br />
avons un rôle d’ambassadeurs à jouer et que j’assume pleinement..<br />
Il s’agit en effet <strong>au</strong>tant que possible d’éliminer les préjugés et pour<br />
inciter d’<strong>au</strong>tre jeunes québécois à vivre cette même expérience et<br />
tout particulièrement d’aller visiter cette belle ville de Jérusalem.<br />
LVS mars 2008 35<br />
Dossier ISRAËL 60 ANS APRÈS
Dossier ISRAËL 60 ANS APRÈS<br />
Il est cinq heures du matin, le 24 décembre, quand je pose<br />
le pied à Jérusalem. La ville s’étend devant moi, toute<br />
blanche, baignée de la lumière orangée d’un soleil déjà<br />
éblouissant. La scène est impressionnante. Israël nous fait un<br />
accueil parfait, du genre qu’on ose à peine imaginer. Et c’est<br />
là que je réalise que je n’avais justement RIEN imaginé! Quel<br />
choc! Si j’avais bien lu sur le conflit, sur l’identité juive et<br />
l’histoire du pays, jamais je n’avais pensé à l’Israël du<br />
quotidien. Je ne m’étais jamais demandé à quoi<br />
ressemblaient les rues, les maisons et les cafés où vont<br />
traîner les gens. Dans l’humidité du petit matin, je me rends<br />
compte que j’avais pris l’avion pour un « État juif », « laïque »<br />
en m’attendant à y rencontrer une « majorité modérée ». Pas<br />
évident à visualiser! Il est vrai que le site du ministère des<br />
Affaires étrangères, s’il m’avait prévenu de faire « preuve<br />
d’une grande prudence », ne m’avait rien dit de la lumière,<br />
des odeurs ou des saveurs du pays. On n’aborde pas Israël<br />
comme l’Italie ou la Guadeloupe, il f<strong>au</strong>t croire que c’est un<br />
sujet trop sérieux!<br />
Mais Israël n’a pas tardé à s’imposer à moi et, il f<strong>au</strong>t le dire,<br />
à me charmer totalement. J’étais bel et bien arrivée dans un<br />
pays réel, vivant et, surtout, imperméable à toute tentative<br />
d’y appliquer les concepts appris dans les livres ou les<br />
journ<strong>au</strong>x! J’avais l’impression d’être dans une véritable<br />
mosaïque où se croisent jeunes filles en mini-jupes, juifs ultra<br />
orthodoxes, arabes en complets et femmes voilées. D’une<br />
rue commerciale où tous les grands noms de la mode ont<br />
pignon sur rue, on débouche sans avertissement dans un<br />
souk moyen-oriental, ce qui, par ailleurs, ne semblait<br />
surprendre que moi.<br />
Plus je marchais dans les rues, plus j’écoutais et discutais<br />
avec les Israéliens et plus j’étais prise de vertiges. Pour<br />
quelqu’un qui ne vit pas quotidiennement avec les<br />
36 mars 2008 LVS<br />
J’ai découvert Israël<br />
L’<strong>au</strong>tomne dernier, j’ai été<br />
invitée par le Comité Québec-<br />
Israël à participer à un voyage<br />
d’information en Israël. J’étais<br />
folle de joie à l’idée de visiter<br />
ce pays mythique, mais mon<br />
enthousiasme se heurtait à<br />
l’incompréhension de mes<br />
amis et collègues. « En Israël?<br />
As-tu consulté le site du<br />
ministère des Affaires<br />
étrangères pour les conseils<br />
<strong>au</strong>x voyageurs ?» Voilà toute<br />
l’émotion que mon entreprise<br />
suscitait chez la plupart de<br />
mes interlocuteurs. Qu’à cela<br />
ne tienne, ils pouvaient garder<br />
leurs inquiétudes, moi j’avais la<br />
conviction intime que j’allais<br />
vivre une expérience<br />
formidable.<br />
nombreuses dualités du pays, les contrastes opposant<br />
tradition et modernité, religion et laïcité, militaire et civil,<br />
peuvent être déroutants. Comment ne pas être saisi en<br />
voyant des jeunes filles aller se recueillir <strong>au</strong> mur des<br />
lamentations avec leurs mitraillettes en bandoulière? Pour<br />
moi qui n’avais jamais vu d’arme à feu ailleurs que dans une<br />
salle de cinéma et qui ai été élevée dans un milieu laïque, le<br />
table<strong>au</strong> était mystifiant et incarnait bien l’image que j’avais<br />
du pays. Je n’arrivais pas à me figurer comment les Israéliens<br />
vivaient dans ce maelström culturel et idéologique. Leur<br />
réalité me paraissait insaisissable, mais j’étais fascinée par sa<br />
richesse.<br />
Chaque rencontre ajoutait à ma confusion. De l’homme<br />
politique à l’étudiante rencontrée <strong>au</strong> Irish Pub de Tel Aviv,<br />
en passant par les journalistes et les ch<strong>au</strong>ffeurs de taxi, en<br />
Israël, tout le monde a son opinion sur les questions<br />
politiques, sa façon de vivre sa foi, sa manière de s’identifier<br />
<strong>au</strong> pays. Et chacun assume pleinement son point de vue. Je<br />
découvrais le vrai visage de la « majorité modérée », visage<br />
multiple et incernable. Très vite je me suis mise à rechercher<br />
ces discussions politiques et identitaires. Je savais que je ne<br />
pourrais jamais embrasser toute la complexité du pays, mais<br />
j’étais avide de chaque parcelle d’information et le temps<br />
m’était compté. Au moment de repartir j’avais l’impression<br />
que la seule certitude que je pouvais mettre dans mes<br />
bagages était que les Israéliens n’ont de typique que le fait<br />
d’être atypiques. Pour le reste ma tête était pleine d’images<br />
fabuleuses, d’échanges stimulants et d’une multitude<br />
d’opinions qui s’y brasseront encore longtemps.<br />
Frédérique Paquin<br />
Étudiante en cinéma à l’UQAM
Dossier ISRAËL 60 ANS APRÈS<br />
« C’est une injustice<br />
que de ne pas voir Israël<br />
en Francophonie »<br />
ENTREVUE AVEC JACQUES SAADA / 14 FÉVRIER 2008<br />
LVS / Jacques Saada, vous êtes quasiment né <strong>au</strong> même<br />
moment que l’État d’Israël. Que représente Israël, pour<br />
vous ?<br />
Jacques Saada / C’était un idéal, et je crois que ça doit<br />
demeurer un idéal. A l’époque, c’était un idéal, parce qu’il y<br />
avait un modèle de construction. C’est un pays qui, <strong>au</strong>ssi<br />
paradoxal que cela puisse paraître, a besoin de rester un pays<br />
d’idéal et qui a besoin de devenir un pays comme un <strong>au</strong>tre.<br />
LVS / Quand on parle d’ « idéal », on parle de quoi ? De<br />
valeurs ? D’héritage ?...<br />
Jacques Saada / Oui, c’était par rapport à l’héritage judaïque,<br />
bien sûr. C’était <strong>au</strong>ssi par rapport à ce besoin de sécurité qu’on<br />
a appris à ressentir très jeune quand nos parents s’intéressaient<br />
à ces questions-là. Israël représente à la fois l’idéal, le refuge,<br />
l’exemple mais <strong>au</strong>ssi, et plus fondamentalement peut-être, le<br />
désir d’une façon d’être : le fait de pouvoir exprimer le<br />
sentiment d’être fier d’être Juif, et que personne n’a le droit de<br />
nous priver de ce droit d’être fier d’être Juif.<br />
LVS / Cet idéal, on peut imaginer qu’il était présent à<br />
votre esprit lorsque, ministre, vous avez proposé de voir<br />
Israël, tout comme l’Autorité Palestinienne, adhérer à<br />
l’Office International de la Francophonie. Le fait que cette<br />
IT / Jacques Saada était ministre Canadien de la<br />
Francophonie lorsque, en 2005, il suggéra l’adhésion<br />
simultanée d’Israël et de l’Autorité Palestinienne à<br />
l’Organisation Internationale de la Francophonie. A<br />
l’heure où l’on célèbre les 60 ans de la naissance d’Israël,<br />
l’état hébreu, qui compte pourtant 500.000 francophones,<br />
ne fait toujours pas partie de cette instance<br />
internationale. Jacques Saada en tire ses propres<br />
conclusions pour LVS. Entrevue.<br />
proposition n’ait pas aboutie vous laisse quelle impression<br />
? Quel sentiment ?<br />
Jacques Saada / Il est clair que la Francophonie comporte un<br />
grand nombre de pays, dont certains sont très<br />
fondamentalement opposés à l’entrée d’Israël <strong>au</strong> sein de cette<br />
instance. Pour des raisons qui n’ont rien à voir avec la<br />
francophonie, mais bien pour des raisons de politique locale<br />
ou régionale.<br />
Il y a une injustice fondamentale dans le fait qu’Israël ne fasse<br />
pas partie de la Francophonie. En fait, les deux seuls pays<br />
vraiment francophones par le nombre sont Israël et l’Algérie.<br />
La différence entre Israël et l’Algérie c’est que cette dernière a<br />
choisi de ne pas adhérer à la Francophonie. Quant à Israël,<br />
elle a joué de prudence en ne faisant jamais acte de<br />
candidature pour ne pas être rejetée. Ce qui, à mon avis, est<br />
une bonne approche.<br />
Mais c’est une injustice que de ne pas voir Israël en<br />
Francophonie. C’est une injustice à plusieurs titres. D’abord,<br />
parce que c’est un pays francophone. Deuxièmement, Israël et<br />
la Francophonie ont be<strong>au</strong>coup de choses en commun : la<br />
Francophonie a une vocation de coopération, d’aide, et Israël<br />
a une forte tradition d’aide en Afrique. Israël a un souci<br />
extrêmement grand du développement culturel. La<br />
Francophonie, <strong>au</strong>ssi. Israël a toujours une perspective<br />
internationaliste des choses. La Francophonie, <strong>au</strong>ssi. Il y a
donc be<strong>au</strong>coup de ressemblances<br />
philosophiques entre les deux.<br />
Et puis la Francophonie peut être un<br />
vecteur de paix. Lorsqu’en 2005, j’ai<br />
proposé un arrangement entre les deux<br />
parties, Autorité Palestinienne et Israël,<br />
j’ai pensé que d’offrir la possibilité <strong>au</strong>x<br />
deux de siéger à une même table, de leur<br />
donner un forum supplémentaire, non<br />
pas pour parler uniquement du conflit, de<br />
ce qui les oppose, mais de ce qu’elles<br />
peuvent faire en commun, constituait une<br />
approche différente des choses.<br />
Israël a joué de prudence<br />
en ne faisant jamais acte<br />
de candidature<br />
pour ne pas être rejetée.<br />
LVS / Du coup, leur non adhésion<br />
constitue pour vous un échec ?<br />
Jacques Saada / C’est un projet de longue haleine, qui<br />
demande be<strong>au</strong>coup d’abnégation.<br />
LVS / Est-ce que, selon vous, le gouvernement actuel<br />
poursuit dans cette voie-là ?<br />
Jacques Saada / S’il l’a fait, c’est dans le plus grand secret.<br />
Car, je n’ai pas entendu parler de ça. Bien sûr, <strong>au</strong>ssi, la<br />
situation a évolué en cours de route, ce qui a compliqué un<br />
peu plus les choses…<br />
LVS / … le conflit <strong>au</strong> Liban, l’échec du processus de paix,…<br />
Jacques Saada / … absolument. Ce qui fait que c’était plus<br />
compliqué. Ce que je veux dire, c’est que c’est un projet qui<br />
ne pouvait pas se finir en quelques mois, mais on pouvait<br />
L’ancien ministre,<br />
Jacques Saada, nous a<br />
accordé un entretien<br />
dans le Vieux-Montréal<br />
permettre à l’Autorité Palestinienne et à Israël de commencer<br />
à intégrer progressivement la Francophonie sans pour <strong>au</strong>tant<br />
qu’elles y adhérent intégralement, en les faisant siéger<br />
ensemble dans certains comités, celui de la Culture, par<br />
exemple.<br />
LVS / Est-ce que Israël <strong>au</strong> sein de la Francophonie ça reste<br />
un doux rêve, un idéal ou bien est-ce une réalité possible?<br />
Jacques Saada / Je pense qu’il f<strong>au</strong>t prendre l’exemple sur<br />
ceux qui croyaient à l’État d’Israël avant la naissance d’Israël.<br />
C’était un obstacle infiniment supérieur à celui de l’entrée<br />
dans la Francophonie, et pourtant ils y ont cru, contre toute<br />
logique pragmatique, et ça a marché. Ils n’ont donnent une<br />
leçon, alors il f<strong>au</strong>t la suivre. Bien sûr, que j’ai confiance.<br />
Dossier ISRAËL 60 ANS APRÈS
Dossier ISRAËL 60 ANS APRÈS<br />
LUCIANO DEL NEGRO,<br />
défenseur des droits de L’HOMME<br />
Né en Belgique de parents italiens immigrés <strong>au</strong> Canada une<br />
première fois en 1956, retournés en Italie puis revenus <strong>au</strong><br />
Canada dans les années 60, non pratiquant mais bouddhiste<br />
à ses heures, Luciano Del Negro n’a pas le profil habituel<br />
des leaders de la commun<strong>au</strong>té juive. Son parcours est<br />
complexe : des études secondaires chez les jésuites, une<br />
maîtrise en sciences politiques à l’UQAM, un certificat en<br />
études ethniques à l’Université de Montréal, une licence en<br />
droit à l’UQAM, voilà un étudiant éternel n’ayant pas peur<br />
des bancs d’école. Pourtant tout l’a mené à devenir<br />
directeur du CQI (Comité Québec-Israël) en 2006.<br />
Depuis plus de 30 ans, cet homme plus<br />
grand que nature entretient des<br />
liens avec la commun<strong>au</strong>té juive,<br />
les premiers liens ayant été<br />
initiés lorsqu’il prenait des<br />
cours de karaté avec des<br />
juifs de son quartier.<br />
Défenseur des droits<br />
de l’homme, Luciano<br />
a longtemps milité<br />
dans les groupes<br />
d’extrême g<strong>au</strong>che<br />
marxistesléninistes<br />
pendant<br />
les années 60 et<br />
70. Secrétaire<br />
international<br />
d’organisations de<br />
g<strong>au</strong>che, il a<br />
toujours été<br />
intéressé par la<br />
question d’Israël<br />
envers qui il<br />
éprouvait une<br />
sympathie profonde.<br />
Impliqué dans plusieurs<br />
mouvements de libération<br />
nationale (contre les Khmers<br />
rouges, la guerre <strong>au</strong> Vietnam et<br />
les Afrikaners en Afrique du Sud),<br />
la c<strong>au</strong>se du peuple juif dont le désir<br />
est de retourner dans sa terre ancestrale<br />
le touche et il pense depuis longtemps<br />
qu’Israël a le droit d’exister en tant qu’État juif dans des<br />
frontières sécuritaires.<br />
Sympathique <strong>au</strong> processus d’Oslo et partisan du<br />
désengagement de Gaza, il a été invité par le Comité<br />
40 mars 2008 LVS<br />
Québec-Israël à visiter Israël en 2004. Mais le coup de<br />
cœur, il l’avait déjà, ce qu’il ne cache pas, bien <strong>au</strong> contraire.<br />
Son mandat actuel : être le porte-parole de la commun<strong>au</strong>té<br />
juive en ce qui concerne Israël; faire évoluer les mentalités<br />
grâce à différents types d’interventions, faire reconnaître<br />
<strong>au</strong>x Québécois la complexité de la situation d’Israël;<br />
organiser des briefings, séminaires et rencontres sur Israël<br />
et le Moyen-Orient; éduquer et informer le grand public sur<br />
ces questions et faire en sorte que les médias offrent une<br />
vision plus complète de ce qui se passe <strong>au</strong> Moyen Orient.<br />
Les enjeux de son poste actuel : contrer l’antisionisme qui<br />
est devenu la nouvelle forme d’antisémitisme<br />
contemporain. Les défis que représentent les 60 ans de<br />
l’État hébreu : rien de plus que ce qui a été déjà fait. «L’an<br />
0 a été l’année charnière, la plus importante depuis sa<br />
création, l’année où Israël est sorti victorieux à peine 3 ans<br />
après l’Holoc<strong>au</strong>ste. Cette épreuve nous a montré que le<br />
peuple juif est indomptable» affirme M. Del Negro.<br />
Son rôle? Répondre à la désinformation et <strong>au</strong>x demi vérités<br />
mais surtout faire parler d’Israël de façon positive, pas<br />
seulement de la guerre et des conflits avec les pays<br />
limitrophes. Le CQI veut faire ressortir des valeurs<br />
partagées, présenter Israël en tant qu’État démocratique et<br />
moderne, faire connaître la situation économique enviable,<br />
le cinéma et la musique comme domaines émergeants et<br />
populaires, exposer les incroyables avancées<br />
technologiques.<br />
A l’avenir, il f<strong>au</strong>dra renforcer les interventions (surtout les<br />
relations gouvernementales <strong>au</strong>près des 3 partis), faire<br />
connaître Israël dans les régions québécoises comme un<br />
État démocratique dont l’existence reste menacée par des<br />
forces obscurantistes et réactionnaires, et enfin, démontrer<br />
le lien qui unit Israël à la commun<strong>au</strong>té juive.<br />
Le bilan établi par Luciano est très positif en ce qui<br />
concerne le Québec malgré certains défis persistants. Les<br />
Québécois partagent les valeurs démocratiques et<br />
reconnaissent la légitimité du peuple juif et d’Israël. La<br />
naïveté des années 70 est révolue et M. Del Negro est plein<br />
d’espoir pour l’avenir. Il espère rester en poste tant qu’il<br />
pourra pour continuer de faire évoluer l’opinion publique<br />
québécoise afin que tous aient une meilleure<br />
compréhension du Moyen Orient.<br />
Emmanuelle Assor
Comme le vent a tourné <strong>au</strong> Comité Québec-Israel! La preuve:<br />
un site web moderne et dynamique, à l’image de la nouvelle<br />
génération de leaders qui dirigent l’organisation.<br />
David Ouellette, directeur des nouve<strong>au</strong>x médias et<br />
recherche, constate qu’il était temps de se renouveler car<br />
l’ancien site était un site de première génération, basique et<br />
statique comme tous les <strong>au</strong>tres sites de l’époque.<br />
A l’heure actuelle, le site du CQI a bien changé et s’est<br />
métamorphosé en site d’information et d’analyse sur tout ce<br />
qui se passe <strong>au</strong> Moyen-Orient. Mais ça ne s’arrête pas là : <strong>au</strong><br />
quotidien, le site est mis à jour par M. Ouellette, qui lit et<br />
décortique pour vous toutes les chroniques et articles de<br />
fond concernant Israel dans la presse internationale. Ensuite,<br />
il en fait une analyse qu’il met en ligne afin d’offrir un point<br />
de vue diversifié et éclairé sur les questions de l’heure. Cette<br />
revue de presse critique, revue qui demande des heures de<br />
travail, est accessible à tous en un seul clic, grâce à internet!<br />
Autre nouve<strong>au</strong>té sur le site, le blogue d’Hélène Bérubé,<br />
jeune étudiante qui était partie en mai dernier pour visiter<br />
Israel avec le groupe des jeunes leaders du Québec et qui<br />
LE SITE WEB DU CQI<br />
FAIT PEAU NEUVE<br />
n’est jamais revenue. Dans sa section, «Chronique d’une<br />
Québécoise en Israel», Hélène nous raconte, comme si on y<br />
était, ses aventures et impressions de ce pays qui l’a tant<br />
charmé.<br />
Dans la section «Perspectives», on retrouve des articles de<br />
fond, d’opinion et des éditori<strong>au</strong>x de la presse française,<br />
britannique, américaine et israélienne traduits en français, ce<br />
qui est denrée rare dans la majorité des sites d’informations<br />
sur Israel. Le rôle du site? Éduquer la société québécoise at<br />
large et faire découvrir les richesses d’un pays dont on parle<br />
trop souvent en mal et en non-connaissance de c<strong>au</strong>se.<br />
«Présenter Israel de façon complète est le défi que nous<br />
tentons de relever tous les jours. Au-delà du conflit, Israel est<br />
un pays d’innovations technologiques, dont le cinéma<br />
s’internationalise et qui produit même des bons vins» confie<br />
M. Ouellette. Pour s’abonner à la lettre d’information<br />
(gratuite) ou simplement pour en savoir plus :<br />
www.qic-cqi.org<br />
Emmanuelle Assor<br />
LVS mars 2008 41<br />
Dossier ISRAËL 60 ANS APRÈS
Dossier ISRAËL 60 ANS APRÈS<br />
MONTRÉAL ET ISRAËL<br />
EN 1948, LA VILLE SE MOBILISE…<br />
Le premier rally Montréalais<br />
en faveur d’Israël est organisé<br />
quelques jours seulement<br />
après la proclamation de<br />
l’Etat hébreu, en mai 1948.<br />
42 mars 2008 LVS
Une des premières<br />
levées de fonds à<br />
Montréal en faveur<br />
d’Israël. De<br />
nombreuses <strong>au</strong>tres<br />
suivront par la<br />
suite…<br />
/ La première diffusion<br />
Canadienne vers Israël fut un<br />
grand moment d’émotion<br />
collective partagé par des<br />
milliers d’<strong>au</strong>diteurs.<br />
LVS mars 2008 43<br />
Dossier ISRAËL 60 ANS APRÈS
Dossier CSUQ ISRAËLEN 60 2008 ANS APRÈS<br />
… AUJOURD’HUI ENCORE,<br />
MONTRÉAL VIBRE AU RYTHME D’ISRAËL<br />
44 mars 2008 LVS<br />
Certaines années la<br />
foule est si dense et les<br />
drape<strong>au</strong>x israéliens si<br />
nombreux que la place<br />
du Canada finit par<br />
n’offrir que deux<br />
couleurs principales : le<br />
blanc et le bleu.
Depuis 2003, chaque année, des milliers de<br />
Montréalais expriment en mai, à l’occasion<br />
de Yom Hahatzmaout, leur amour d’Israël.<br />
Sur les pancartes, outre les messages de<br />
paix, les manifestants tiennent à exprimer<br />
l’attachement du Québec à Israël.<br />
LVS mars 2008 45<br />
Dossier ISRAËL 60 ANS APRÈS
HENRI ELBAZ<br />
Après 32 années de service... Henri Elbaz a décidé<br />
de quitter la direction de l’Hôpital Général Juif .<br />
Une institution qu’il a servi non seulement avec<br />
loy<strong>au</strong>té, mais également avec un doigté, une<br />
efficacité et une expertise à faire pâlir d’envie les<br />
dirigeants des plus grandes entreprises<br />
québécoises.. Malgré un emploi du temps chargé, il<br />
a accepté sans hésitation de nous recevoir pour<br />
nous livrer quelques réflexions sur son parcours.<br />
Entrevue portrait.<br />
LVS-Monsieur Elbaz, alors que par votre formation et vos<br />
fonctions passées <strong>au</strong>x HEC et à la Bourse de Montréal, rien ne<br />
vous destinait à la direction d’une institution hospitalière, vous<br />
avez accepté de diriger pendant 32 ans l’Hôpital Général Juif.<br />
H.E- Disons que c’est sûrement le destin qui a voulu que mon chemin<br />
se croise avec celui de l’Hôpital, un mariage en quelque sorte qui a<br />
été préparé dans le ciel. Un mariage heureux et également passionné<br />
doublé d’un accomplissement spirituel. L’Hôpital, je tiens à le dire,<br />
constitue un environnement privilégié, un lieu ou l’on a à se pencher<br />
sur le cas de centaines de gens à un moment particulièrement<br />
vulnérable de leur vie. C’est là que l’on retrouve ce dénominateur<br />
commun : la fragilité de l’être humain. Ajoutez à cela la dimension<br />
commun<strong>au</strong>taire, puisque l’Hôpital reste l’institution la plus connue de<br />
la commun<strong>au</strong>té juive. Un Hôpital ou se côtoient les gens de tous les<br />
horizons, de toutes les origines , de toutes les religions qui constituent<br />
une famille , une équipe qui travaille ensemble en harmonie dans<br />
l’accomplissement d’un même mission, le bien-être commun. N’estce<br />
pas merveilleux de voir travailler ensemble des médecins Israéliens<br />
avec des confrères d’Arabie Séoudite ou du Koweit?<br />
LVS- Vous aviez déjà depuis votre jeune âge <strong>au</strong> Maroc, ce qu’on<br />
appelle la fibre commun<strong>au</strong>taire.<br />
H E-En effet je peux dire qu’une des grandes réussites du DEJJ, le<br />
Département éducatif de la jeunesse juive fut de nous inculquer des<br />
valeurs commun<strong>au</strong>taires, du bien-être de l’Autre et bien entendu ce<br />
magnifique esprit de fraternité, de camaraderie. Oui de ce côté là, je<br />
peux dire que j’ai été à la bonne école.<br />
LVS- Toute vie <strong>au</strong> sein d’une entreprise ou d’une institution est<br />
émaillée de moments fastes et d’<strong>au</strong>tres plus difficiles, pouvezvous<br />
nous relater quelques uns de ces événements survenus <strong>au</strong><br />
cours de votre carrière.<br />
H E- Il est certain qu’<strong>au</strong> cours de 32 ans de service, nous avons connu<br />
des moments difficiles. Mais je ne dirais jamais que ces moments là<br />
ont été reliés à des crises voire à des plaintes comme celle qui fut<br />
déposée il y a quelques années à l’Office de la langue française. Les<br />
crises quant elles, relèvent plutôt des situations quand nous avons des<br />
patients qui ont besoin d’avoir accès à l’Hôpital et que nous devons<br />
mobiliser toutes les ressources de ce dernier pour répondre à ce<br />
besoin. Les défis par exemple c’est par exemple quand on a du<br />
LVS mars 2008 47<br />
Portrait D’ICI
Portrait D’ICI<br />
« L’INAUGURATION DU PREMIER CENTRE<br />
AMBULATOIRE DU QUÉBEC. NOUS AVONS<br />
ÉTÉ LE PREMIER HÔPITAL À AVOIR CONÇU<br />
ET RÉALISÉ CE CENTRE. C’EST POUR<br />
PERMETTRE JUSTEMENT À PLUS DE GENS<br />
D’AVOIR ACCÈS À UN TRAITEMENT<br />
AMBULATOIRE PLUTÔT QU’HOSPITALIER. »<br />
48 mars 2008 LVS<br />
travailler d’arrache pied pour bâtir un centre du cancer, le premier à<br />
Québec. Nous avons eu quelques plaintes mais sans plus. Nous<br />
sommes reconnus comme un hôpital bilingue. J’ai tenu la plupart des<br />
réunions de mes comités de régie , en français. La plupart du<br />
personnel de l’Hôpital est francophone. Nous avons été<br />
complètement blanchis lors de l’affaire Norman Lester, par l’Office de<br />
la Langue française.<br />
LVS- un moment faste?<br />
H E- Je dirais …l’in<strong>au</strong>guration du premier Centre ambulatoire du<br />
Québec. Nous avons été le premier hôpital à avoir conçu et réalisé ce<br />
centre. C’est pour permettre justement à plus de gens d’avoir accès à<br />
un traitement ambulatoire plutôt qu’hospitalier. C’est un concept<br />
innovateur ici <strong>au</strong> Québec. Quand on le privilège d’assister à cette<br />
in<strong>au</strong>guration et de voir les soins prodigués <strong>au</strong>x premiers patients,<br />
dans la dignité et surtout de la manière la plus professionnelle<br />
possible par des médecins de choisis parmi les meilleurs candidats à<br />
l’échelle canadienne et voire mondiale, oui…je peux affirmer que ce<br />
sont là les meilleurs moments qu’il m’a été donné de vivre dans le<br />
cadre de mes fonctions. Le Centre du Cancer reste un <strong>au</strong>tre exemple<br />
qui m’a rendu fier. Un projet qui a nécessité 25 années de préparation!<br />
Je voudrais ajouter que cette fierté là, je ne l’ai pas vécu en tant<br />
qu’individu mais surtout parce que j’ai fait partie d’une équipe.<br />
LVS-Quelles sont vos préoccupations face <strong>au</strong> débat en cours<br />
concernant l’avenir de notre système en matière de santé?<br />
H E- Je suis et je reste un adepte du service public de santé. J’ai<br />
étudié les différents systèmes dans les pays occident<strong>au</strong>x et je suis<br />
arrivé à la conclusion que le meilleur système de santé pour une<br />
population, non pas pour un élite qui peut payer, c’est le système<br />
public. Il est évident que ceci reste un défi à relever pour les pays tels<br />
que le Canada les États Unis et les pays de l’OCDE.. Les dépenses en<br />
santé <strong>au</strong>gmentent, il ne f<strong>au</strong>t pas l’oublier à un <strong>rythme</strong> be<strong>au</strong>coup plus<br />
élevé que la richesse collective. Avec le vieillissement de la<br />
population le <strong>rythme</strong> va s’accélérer. Mais je ne pense pas que la<br />
solution réside dans le système privé. Nous ne pouvons permettre de<br />
laisser à des cliniques pratiquer des chirurgies ou l’on ne peut pas<br />
contrôler la qualité des<br />
Interventions pratiquées voire même de leur pertinence. On ne peut<br />
pas accepter que des infirmières qualifiées et qui devraient être<br />
affectées à des interventions ou il est question de vie ou de mort,<br />
soient détournées vers le privé pratiquer dans des cliniques orientées<br />
vers la chirurgie esthétique par exemple ou pour injecter du bodox.<br />
Nous sommes dans un système justement ou la pénurie d’infirmières<br />
est flagrante. La même situation est valable pour les médecins.<br />
LVS- Des projets d’avenir pour quelqu’un qui, comme vous, n’a<br />
pas atteint l’âge de la retraite?<br />
Il est certain que je vais continuer à m’intéresser <strong>au</strong> système public de<br />
santé. J’ai L’intention de continuer à animer des conseils de résident<br />
dans l’administration de la santé. Je suis chargé de formation et de<br />
pratique dans la gestion de la santé à l’Université de Montréal. Je<br />
continuerais à animer des séminaires. Je continuerais à étudier les<br />
systèmes de santé et è défendre le système public Il va de soi que je<br />
continuerais à m’impliquer dans la commun<strong>au</strong>té quelle soit juive ou<br />
non juive, c’est à dire à défendre les bonnes c<strong>au</strong>ses et last but not least<br />
je vais être plus disponible pour ma famille.<br />
Entrevue réalisée par Elie Benchetrit
Point de vue<br />
RÉFLEXION<br />
60 ans après<br />
Israël, toujours en quête de normalité et d'identité<br />
Daniel Haïk - journaliste israélien<br />
Les Israéliens célèbrent le 60ème anniversaire de leur état<br />
avec des sentiments mitigés.<br />
Certes, dans de nombreux domaines Israël est, comme l'a<br />
dit le Président français Nicolas Sarkozy l'un des grands<br />
miracles du XXème siècle: en 60 ans, l'Etat d'Israël a réussi<br />
à décupler sa population et intégré des millions<br />
d'immigrants. Son t<strong>au</strong>x de croissance économique annuel<br />
dépasse depuis quatre ans les 5% et son PIB per capita,<br />
les 25.000 $!. Sa monnaie, le shekel, n'a plus <strong>au</strong>cun<br />
complexe face <strong>au</strong> dollar américain en crise. Son industrie<br />
de h<strong>au</strong>te technologie compte parmi les plus performantes<br />
<strong>au</strong> monde. Sa médecine force l'admiration, y compris dans<br />
le monde arabe. Au cours des quatre dernières années,<br />
quatre Israéliens se sont vus décerner des Prix Nobel! La<br />
culture israélienne est en perpétuelle ébullition: ses<br />
écrivains, artistes, chanteurs se distinguent régulièrement<br />
sur la scène internationale. Sur le plan spirituel, Israël<br />
compte plus de 1500 yéchivot soit plus que n'en a jamais<br />
CULTURE<br />
RELIGION<br />
DÉBATS<br />
FAMILLE<br />
Les réalisations d'Israël <strong>au</strong> cours de ces six dernières décennies forcent l'admiration. Pourtant les Israéliens<br />
eux-mêmes semblent avoir pris leurs marques des symboles qui ont fait la légende d'Israël. L'échec de la<br />
seconde guerre du Liban a amplifié un malaise identitaire déjà perçu durant l'Intifada. Cette analyse qui nous<br />
ramène à la création de l'état d'Israël tente d'expliquer comment les Israéliens ont compris que la normalité<br />
de leur état n'était pas encore pour demain.<br />
50 mars 2008 LVS<br />
compté un état ou roy<strong>au</strong>me juif souverain même à l'âge<br />
d'or du roi Salomon!<br />
Pourquoi donc, à l'approche de ces festivités du 60ème<br />
anniversaire, tant d'Israéliens avouent avoir du mal à<br />
festoyer. Pourquoi be<strong>au</strong>coup ressentent un inexplicable<br />
malaise lorsqu'il évoquent l'avenir de leur état voir sur sa<br />
raison d'être?<br />
Pour tenter de répondre à ces questions et de comprendre<br />
les c<strong>au</strong>ses profondes de ce malaise, un rappel historique,<br />
chronologique et quasiment schématique s'impose:<br />
Les 60 années d'existence d'Israël peuvent se diviser en<br />
plusieurs périodes majeures. Les trente premières années<br />
de 1948 a 1977 ont été marquées par l'hégémonie politique<br />
et idéologique de la g<strong>au</strong>che socialiste israélienne. Ce fut<br />
l'époque des pères fondateurs de l'Israël moderne, de<br />
David Ben Gourion, à Itzhak Rabin en passant par Moché<br />
Dayan et Golda Meïr. Ce fut l'époque d'un Israël qui
sachant son existence menacée savait s'unir <strong>au</strong>tour de<br />
l'idéal sioniste pour faire face à l'adversité du monde<br />
arabe. Ce fut l'époque d'un Israël qui, <strong>au</strong> travers de<br />
l'expérience kibboutzique, tendait vers une société<br />
égalitaire et équitable.<br />
Les quinze années suivantes, de 1977 à 1992 ont été<br />
marquées par la domination de l'idéologie de droite<br />
nationaliste, véhiculée par des figures de proue telles que<br />
Menahem Begin et Itzhak Shamir. Sur le plan social, ces<br />
quinze années furent celles d'une refonte capitaliste de<br />
l'état d'Israël, d'une ouverture vers l'extérieur et du début<br />
d'une prospérité occidentale.<br />
Pour la g<strong>au</strong>che idéologique et travailliste du Avoda-Meretz,<br />
Oslo doit conduire Israël vers la Paix. Pour la droite<br />
idéologique et nationaliste du Likoud-PNR, Olso va<br />
conduire Israël vers la Guerre. Ce débat d'idée va torturer,<br />
scinder et même briser une société israélienne qui n'a<br />
jamais su trouver son unité ailleurs que sur les champs de<br />
bataille. Cette polémique sera tellement exacerbée qu'elle<br />
conduira un juif religieux issu des franges radicales du<br />
mouvement nationaliste à prendre une arme pour<br />
assassiner Itzhak Rabin.<br />
Mais le "processus d'Oslo" va également provoquer une<br />
confusion des valeurs qui va déséquilibrer la société<br />
israélienne. Avec la poignée de main "historique" entre<br />
Rabin et Arafat sur les pelouses de la Maison Blanche, le<br />
13 septembre 1993, une partie importante de la population<br />
israélienne va assimiler ce processus de paix à une paix<br />
déjà établie entre Israël et les Palestiniens. Les attentats qui<br />
ont jalonné ce processus d'Oslo ont certes contrarié<br />
l'enthousiasme de certains des pacifistes, mais pour<br />
l'ensemble cette course à la normalité était engagée.<br />
Elle va se traduire concrètement, durant les années d'Oslo<br />
entre septembre1993 et septembre 2000, par la violation de<br />
certains principes jusque là tabou et par de mini<br />
bouleversements dans la<br />
MAIS LE<br />
plupart des instances du<br />
pouvoir en Israël. En voici<br />
"PROCESSUS D'OSLO"<br />
quelques exemples:<br />
VA ÉGALEMENT<br />
Primo, le statut du Président<br />
de l'état: dans la perception<br />
PROVOQUER<br />
des fondateurs d'Israël, le<br />
UNE CONFUSION<br />
Président devait être un<br />
savant d'envergure, véritable<br />
DES VALEURS QUI VA phare de la sagesse juive qui<br />
serait placé <strong>au</strong> dessus de tous<br />
DÉSÉQUILIBRER les clivages politiques. Mais<br />
LA SOCIÉTÉ<br />
en 1993, l'échelon politique<br />
décide de faire mainmise sur<br />
ISRAÉLIENNE<br />
cette prestigieuse fonction.<br />
Elle est ainsi offerte comme<br />
lot de consolation à un<br />
Ezer Weitman frustré de<br />
voir Itzhak Rabin le<br />
devancer <strong>au</strong> poste de<br />
Premier ministre.<br />
Weitzman sera tout <strong>au</strong>ssi<br />
controversé sous son<br />
étiquette présidentielle<br />
que sous celle de<br />
responsable politique.<br />
L'éclat consensuel de la<br />
Présidence s'estompe. Il<br />
finira de se ternir sous le<br />
mandat à scandale du<br />
Président Katzav, <strong>au</strong>tre<br />
politicien controversé et<br />
médiocre, qui avant même<br />
d'humilier son titre, s'avèrera incapable de représenter<br />
l'ensemble de la Nation.<br />
Second exemple: la Cour Suprême: dans sa course à la<br />
normalité, Israël va confier, en 1995, la Présidence de la<br />
Cour Suprême à un brillantissime juriste le Professeur<br />
Aaron Barak. Aaron Barak va, de facto, déstabiliser les<br />
pouvoirs sapant celui du législatif(la Knesset) <strong>au</strong> profit du<br />
juridique. Il va faire de la Cour Suprême un "superpouvoir"<br />
dont les Palestiniens s<strong>au</strong>ront tirer grandement<br />
profit <strong>au</strong> travers de la loi fondamentale sur les droits de<br />
l'homme.<br />
Troisième exemple: l'effritement du pouvoir législatif. C'est<br />
durant cette course à la normalité des "années d'Oslo"que<br />
le système électoral sera modifié: <strong>au</strong> lieu de voter<br />
uniquement pour une liste politique à la proportionnelle,<br />
les Israéliens devront, en 1996, 1999, et 2001, voter <strong>au</strong>ssi<br />
pour l'élection du Premier ministre <strong>au</strong> suffrage universel<br />
direct. Cette réforme se soldera par un cuisant échec. Ce<br />
nouve<strong>au</strong> système accordera un trop-plein de pouvoir <strong>au</strong><br />
Premier ministre <strong>au</strong> détriment d'un Parlement israélien<br />
sévèrement morcelé. Il y <strong>au</strong>ra durant cette période pas<br />
moins de 16 formations politiques représentées dans une<br />
Knesset de 120 députés!<br />
Enfin ultime déstabilisation dans cette course à la normalité<br />
entamée avec le processus d'Oslo: le quatrième pouvoir,<br />
celui des médias.<br />
1993, l'année d'Oslo va voir la création de la nouvelle<br />
chaîne de télévision commerciale, "Aroutz 2". D'emblée<br />
celle-ci va s'imposer comme vecteur culturel d'une<br />
redoutable efficacité s'empressant d'importer de l'étranger<br />
la panoplie d'émissions de real-télévision qui ont envahi<br />
les écrans occident<strong>au</strong>x. Ainsi sous le pouvoir<br />
incontournable de cette chaîne, le héros d'Israël n'est plus<br />
le combattant qui cultive son champ l'arme en bandoulière,<br />
ou l'officier qui mène ses troupes <strong>au</strong> combat mais plutôt la<br />
LVS mars 2008 51
Point de vue<br />
jeune et jolie chanteuse l<strong>au</strong>réate de la Star Ac' israélienne.<br />
Et c'est ainsi que l'état d'Israël est devenu dans la bouche<br />
de nombreux israéliens eux-même, "Medinat Aroutz 2"<br />
l'état de la seconde chaîne".<br />
L'Israël des années 90 se conduit comme s'il était en passe<br />
de devenir un état normatif, alors que, sur le fond, Oslo,<br />
loin de résoudre des problèmes, en a crée de nouve<strong>au</strong>x,<br />
que les attentats se multiplient et que les "victimes de la<br />
paix" tombent dans les carcasses calcinés des <strong>au</strong>tobus<br />
israéliens. Une ultime tentative de régler le conflit,<br />
généreuse mais maladroite, est initiée en juillet 2000 à<br />
Camp David .<br />
Dans sa course à la normalité, Israël a laissé une partie de<br />
son âme et de son idéal.<br />
Au sein de la droite idéologique du Likoud, de plus en<br />
plus de responsables se disent prêts à échanger leurs<br />
valeurs contre le pragmatisme et admettent qu'il ne sera<br />
pas possible de conserver le Grand Israël dans son<br />
intégralité. Ce bloc réaliste rejoint, sur l'échiquier politique,<br />
le centre-droit. A u sein de la g<strong>au</strong>che idéologique et<br />
socialiste, de plus en plus de responsables admettent qu'il<br />
n'y <strong>au</strong>ra pas de "Paix maintenant", que les Palestiniens ne<br />
sont pas murs pour un règlement, qu'ils ne sont pas des<br />
partenaires fiables. Ils optent <strong>au</strong>ssi pour la voie du<br />
pragmatisme et rejoignent le centre-g<strong>au</strong>che.<br />
Le décor est posé pour le grand "Bing Bang" politique.<br />
Ariel Sharon, dernier grand dinos<strong>au</strong>re politique<br />
israélien(avec Shimon Peres) est appelé à la rescousse<br />
pour faire face à l'Intifada.<br />
Mais en 2003, alors que l'Intifada commence à être<br />
maîtrisée, la question de la normalité d'Israël surgit à<br />
nouve<strong>au</strong>. Réélu h<strong>au</strong>t la main, Arik Sharon, le seul homme<br />
politique qui ne fut ni de g<strong>au</strong>che ni de droite, et qui n'eut<br />
52 mars 2008 LVS<br />
jamais d'<strong>au</strong>tre doctrine idéologique que la<br />
Défense d'Israël, reprend à son compte cette<br />
quête de la normalité d'Israël. Israël va cesser<br />
d'être l'otage des Arafat et Abou Maazen en<br />
traçant lui-même, unilatéralement, ces futures<br />
frontières: ce sera d'abord Gaza, <strong>au</strong> sud: pour<br />
Sharon le sacrifice des 8000 résidents du<br />
Goush Katif durant l'été 2005, v<strong>au</strong>t bien cette<br />
aspiration à la normalité. Ce devait être<br />
ensuite les terres historiques de Judée et<br />
Samarie qui seraient scindés par la fameuse<br />
barrière de sécurité dont Sharon avait<br />
finalement accepté la construction. Ainsi<br />
Israël va pouvoir se replier(c'est le terme qui<br />
sera ensuite utilisé par Ehoud Olmert) sur luimême<br />
sans se préoccuper de ce qui se passe à<br />
l'extérieur.<br />
Sachant parfaitement lire la carte politique de<br />
ce nouvel Israël, il va appeler <strong>au</strong> rassemblement des<br />
pragmatiques de centre g<strong>au</strong>che et centre-droit qui s'étaient<br />
détachés des grands courants idéologiques. Et il va créer<br />
une formation dont la raison d'être est d'aller de l'avant,<br />
"Kadima" vers un Israël normal, vers un état comme les<br />
<strong>au</strong>tres.<br />
La maladie va freiner l'élan de Sharon, mais pas celui de<br />
ses disciples. Ehoud Olmert qui reprend le flambe<strong>au</strong> donne<br />
immédiatement le ton: "Nous en avons assez de combattre,<br />
nous en avons assez des guerres" dira-t-il alors.<br />
C'est donc le gouvernement d'un homme qui est fatigué<br />
des guerres, et<br />
d'un homme sans<br />
idéal, qui va se DANS SA COURSE À LA<br />
retrouver plongé,<br />
du jour <strong>au</strong><br />
NORMALITÉ, ISRAËL A LAISSÉ<br />
lendemain dans la UNE PARTIE DE SON ÂME ET<br />
seconde guerre du<br />
Liban. C'est ce<br />
gouvernement de<br />
DE SON IDÉAL<br />
novices, qui va<br />
être agressé par deux fois, le 25 juin 2006, avec la capture<br />
de Guilad Shalit, et le 12 juillet avec celle d'Elda Reguev et<br />
Ehoud Goldwasser. C'est ce gouvernement qui prônait le<br />
repli d'Israël sur lui-même qui va devoir faire face à ceux<br />
qui ouvertement refuse sa reconnaissance et prêchent sa<br />
destruction!<br />
Alors si, <strong>au</strong>-delà des dizaines de commission d'enquête qui<br />
ont suivi cette seconde guerre du Liban, la première guerre<br />
qu'Israël n'ait pas remporté, le malaise demeure, c'est<br />
avant tout parce que les Israéliens ont eu le sentiment de<br />
s'être fait piéger:<br />
Et ils se sont rendus compte qu'ils s'étaient trompés. Ils se<br />
sont rendus compte que ces retraits territori<strong>au</strong>x du Sud<br />
Suite p. 54
29 NOVEMBRE 1947<br />
GUY BOUTHILLIER<br />
Cette nuit-là, on a dansé dans les rues de Jérusalem et de Tel-Aviv.<br />
À Montréal <strong>au</strong>ssi, et partout où les Juifs venaient d’apprendre<br />
qu’enfin eux <strong>au</strong>ssi <strong>au</strong>raient un État à eux.<br />
C’était un samedi, à Lake Success, près de New York, où s’était<br />
réunie l’Assemblée générale des Nations-Unies pour voter la<br />
résolution 181 qui allait déboucher, quelques mois plus tard, sur la<br />
création de l’État d’Israël.<br />
Le OUI l’avait emporté par 33 voix contre 13 et 10 abstentions. Les<br />
deux blocs, menés l’un par l’URSS, l’<strong>au</strong>tre par les Etats-Unis et la<br />
France, s’étaient pour l’occasion mis d’accord. Le Roy<strong>au</strong>me-Uni,<br />
puissance mandataire, s’était abstenu, mais le Canada, l’aîné du<br />
Commonwealth, avait voté pour .<br />
On se doutait bien que, tous les pays arabes ayant dit NON, l’avenir<br />
n’allait pas être facile. Mais ce qu’on célébrait d’abord, c’était la fin<br />
annoncée des brimades et des humiliations subies de père en fils et de fils<br />
en petits-fils dans le silence et la honte impuissante de la diaspora. « Plus<br />
jamais, c’est fini. Pour toujours », raconte Amos Oz, témoin de la<br />
manifestation de joie qui avait éclaté ce soir-là dans les rues de<br />
Kerem Avraham.<br />
Chez nous, cette année, le 29 novembre, on a fêté <strong>au</strong>ssi,<br />
plus discrètement certes, pour saluer le 60e<br />
anniversaire de ce grand jour. Nos médias en ont peu<br />
parlé, mais nos dirigeants à Ottawa et à Québec ont<br />
tenu à saluer l’événement. Certains même s’étaient<br />
déplacés. Sans doute avaient-ils compris qu’avant<br />
d’être matière à débats dans les forums<br />
internation<strong>au</strong>x, cet événement était --et<br />
demeurera à jamais--source d’émotion et de<br />
fierté pour les Juifs partout dans le monde.<br />
Ce soir-là, je m’étais mêlé <strong>au</strong>x jeunes et <strong>au</strong>x<br />
moins jeunes de la synagogue de la rue<br />
Bailey pour partager leur joie, écouter leurs<br />
chants et entendre des soldats venus exprès<br />
nous parler de leur patrie, de leur «home<br />
», et de la fierté de s’être engagé à la<br />
défendre. Mais je n’y suis pas allé sans<br />
d’abord avoir relu Amos Oz et ses<br />
souvenirs de l’époque. À l’heure de<br />
la commission Bouchard-Taylor,<br />
où l’on mesure chaque jour un<br />
peu plus l’importance pour<br />
chacun de chercher à<br />
connaître son<br />
Suite p. 54<br />
LVS mars 2008 53<br />
Point de vue
Point de vue<br />
Suite 60 ans après Suite Bouthillier<br />
Liban(en 2000) et de Gaza(en 2005) qu'ils avaient<br />
pris pour de la générosité politique avaient été<br />
perçus par leurs voisins palestiniens et chiites<br />
comme une immense marque de faiblesse.<br />
Bref, ils ont compris que 60 ans après la création de<br />
leur état, la normalité d'Israël devrait encore<br />
patienter.<br />
Mais <strong>au</strong>-delà, certains Israéliens,- pas tous-, mais<br />
de plus en plus nombreux ont compris, <strong>au</strong> travers<br />
de cet acharnement du Hamas et du Hizbollah à<br />
vouloir les détruire, qu'il était temps, peut-être de<br />
redéfinir la raison d'être d'Israël, de repenser son<br />
identité.<br />
Que dans cette course à l'occidentalisme, à<br />
l'individualisme, à la prospérité factice, Israël avait<br />
perdu les repères qui avaient fait sa légende,<br />
qu'Israël s'était par trop éloigné de ce qu'il devait<br />
être: le porteur de la sagesse juive, le garant de son<br />
patrimoine historique, le vecteur d'un message<br />
identitaire qui lui a permis de survivre et de<br />
surmonter pendant 2000 ans d'exil, les pogroms,<br />
l'Inquisition, la Shoah.. Qu'il devait cesser de<br />
vouloir être une copie plus ou moins pâle des<br />
nations d'Occident pour enfin être lui-même, pour<br />
être enfin, ce que les nations arabes refusent qu'il<br />
soit: un état juif fier de ses racines, proche de sa<br />
tradition.<br />
Que le leadership politique israélien actuel était<br />
plus préoccupé par ses propres intérêts que par<br />
ceux de la Nation et que ce faisant il se démarquait<br />
des pères fondateurs et de leur héritage.<br />
Que, 60 ans plus tard, Israël se devait de retrouver<br />
un idéal suprême qui soit le ciment de sa société.<br />
Un idéal pour lequel ses citoyens et soldats aspirent<br />
certes à vivre mais pour lequel ils sont également<br />
prêts à mourir.<br />
Que 60 ans après sa création, Israël comprenait,<br />
dans cette quête identitaire, qu'il ne sera jamais un<br />
État normal.<br />
60 ans après sa création, Israël doit renaître de son<br />
sein pour être enfin ce que l'on attend qu'il soit: la<br />
Nation du Livre et le Phare des Nations.<br />
54 mars 2008 LVS<br />
Daniel Haïk<br />
Jérusalem, février 2008<br />
voisin, comment en effet pourrais-je mieux comprendre ce que mes<br />
amis, mes voisins juifs ressentent <strong>au</strong> plus profond d’eux-mêmes que<br />
de demander à un écrivain israélien de me faire partager leur<br />
sentiment?<br />
Dans son roman <strong>au</strong>tobiographique Une Histoire d’amour et de<br />
ténèbres, Oz décrit cette nuit du 29 novembre où, jeune encore (il est<br />
né en 1939), il avait participé <strong>au</strong> côté de son père à la formidable<br />
manifestation de joie qui avait alors éclaté dans les rues de son<br />
quartier à Jérusalem, et que son père lui avait fait promettre de ne<br />
jamais oublier ni de laisser oublier par ses enfants et les enfants de<br />
ses enfants : « Regarde bien, mon fils, regarde de tous tes yeux, parce<br />
que tu n’oublieras jamais cette nuit de ta vie ». Puis il raconte ce que<br />
lui a dit son père cette nuit-là.<br />
« Très tard dans la nuit, à une heure où <strong>au</strong>cun enfant n’a le droit de ne<br />
pas être couché depuis belle lurette, peut-être à trois ou quatre heures<br />
du matin, je me mis <strong>au</strong> lit tout habillé dans le noir. Un peu après, mon<br />
père souleva la couverture, non pour me gronder de m’être couché<br />
tout habillé, mais pour s’allonger à côté de moi, sans même ôter ses<br />
vêtements trempés de sueur, comme les miens d’ailleurs (…) Papa<br />
resta allongé près de moi sans rien dire, lui qui, d’ordinaire, détestait<br />
tellement le silence qu’il s’ingéniait à le rompre par tous les moyens.<br />
Mais cette fois il ne troubla pas le silence qui régnait entre nous, mais<br />
il s’y associa et se borna à me caresser la tête. Comme si, dans<br />
l’obscurité, il s’était métamorphosé en ma mère.<br />
Papa resta allongé près de moi sans rien dire, lui qui, d’ordinaire,<br />
détestait tellement le silence qu’il s’ingéniait à le rompre par tous les<br />
moyens. Mais cette fois il ne troubla pas le silence qui régnait entre<br />
nous, mais il s’y associa et se borna à me caresser la tête.<br />
Alors il me raconta à mi-voix(…), ce que des voyous leur avaient fait,<br />
à lui et à son frère David, à Odessa, et ce qu’il avait enduré de la part<br />
de jeunes goys <strong>au</strong> lycée polonais de Vilna -- les filles s’en étaient<br />
mêlées <strong>au</strong>ssi-- et quand son père, grand-père Alexandre, était venu<br />
demander des comptes à l’école, ces v<strong>au</strong>riens n’avaient pas rendu le<br />
pantalon déchiré, mais devant lui ils s’en étaient pris à son père, mon<br />
grand-père, ils l’avaient jeté à terre et lui avaient enlevé son pantalon<br />
<strong>au</strong> milieu de la cour, alors que les filles se moquaient de lui et lui<br />
lançaient des obscénités, que les Juifs étaient ceci et cela, sous les yeux<br />
des professeurs qui observaient la scène sans rien dire, à moins qu’ils<br />
n’aient ri, eux <strong>au</strong>ssi.<br />
Et avec une voix de ténèbres, tandis que sa main s’égarait dans mes<br />
cheveux, (il n’avait pas l’habitude de me caresser), papa déclara sous<br />
ma couverture, à l’<strong>au</strong>be du 30 novembre 1947 : « Tu seras sans doute<br />
en butte à des garnements dans la rue ou à l’école. Peut-être parce que<br />
tu me ressembleras un peu. Mais désormais, du moment que nous<br />
avons un État à nous, on ne te malmènera plus jamais parce que tu es<br />
juif et parce que les Juifs sont comme ceci et comme cela. Plus jamais,<br />
non. À partir de maintenant, c’est fini. Pour toujours. »<br />
À moitié endormi, j’étendis le bras pour toucher son visage, juste <strong>au</strong>dessous<br />
de son h<strong>au</strong>t front, et soudain, à la place de ses lunettes, je<br />
sentis des larmes. De toute ma vie, ni avant ni après cette nuit, pas<br />
même à la mort de ma mère, je n’ai vu mon père pleurer. En fait je ne<br />
l’avais pas vu cette nuit-là non plus. Il faisait trop sombre. Seule ma<br />
main g<strong>au</strong>che l’avait « vu».<br />
Amos OZ, « Une histoire d’amour et de ténèbres », Traduit de l’hébreu<br />
par Sylvie Cohen, Paris, Gallimard, 2004, pp.377-378.
SEUL,<br />
ISRAËL...<br />
Depuis sa création, Israël n’a connu que la guerre, guerre<br />
«classique» des armées arabes et guerre de guérilla des terroristes<br />
palestiniens. Il a perdu des soldats et des civils, tués, blessés,<br />
torturés, dans une proportion inimaginable pour ceux qui,<br />
depuis plus de soixante ans, justement, vivent dans des sociétés<br />
en paix et hyper-protégées. En Israël, les traces de ces guerres<br />
sont, partout, très frappantes : contrôles de sécurité à l’entrée des<br />
rest<strong>au</strong>rants et des cinémas, camions calcinés sur la route de<br />
Jérusalem, arc de la Hurva, vestige de la synagogue détruite en<br />
1948...<br />
Et pourtant, en Israël, l’amour de la vie et le dynamisme<br />
l’emportent : les gens vivent quasi «normalement», travaillent,<br />
s’amusent, font du sport, prient, étudient et mettent leur génie<br />
<strong>au</strong> service du développement intellectuel et matériel de leur<br />
pays. Ils accumulent les réussites : créations culturelles,<br />
découvertes scientifiques, brevets industriels, miracles agricoles<br />
et sylvicoles etc. Où les gens ordinaires sont-ils <strong>au</strong>ssi courageux?<br />
Quel pays peut se vanter de tels progrès en si peu d’années?<br />
Les attentats-suicides ne cessent jamais longtemps, le Hezbollah<br />
ne désarme pas, les roquettes pleuvent sur les maisons de Sderot<br />
et l’Iran ne cache pas ses intentions génocidaires. Et pourtant,<br />
Israël fait preuve d’une retenue trop peu soulignée. Il est le seul<br />
pays à alimenter, à Gaza, ses ennemis déclarés en vivres et en<br />
énergie et, en Cisjordanie, à exposer ses soldats sur le terrain<br />
pour éviter des opérations aériennes massives contre ceux qui<br />
attaquent ses populations civiles. Agressé de la sorte, quel <strong>au</strong>tre<br />
pays ferait preuve d’un tel sang-froid et d’un tel respect de l’<strong>au</strong>tre<br />
dans la défense de ses citoyens? En état de guerre continuel,<br />
quel <strong>au</strong>tre pays maintiendrait <strong>au</strong>ssi longtemps une démocratie<br />
<strong>au</strong>ssi ouverte et <strong>au</strong>ssi effervescente?<br />
Depuis sa naissance, Israël a été délégitimé, dénigré, calomnié<br />
de toutes les façons possibles. Créé par l’ONU et bénéficiant de<br />
ce fait d’une légitimité internationale unique, il n’est toujours pas<br />
reconnu officiellement et explicitement par bon nombre de<br />
pays. D’<strong>au</strong>tres feignent d’ignorer cette non-reconnaissance ou<br />
susurent à demi-mot que réclamer une vraie reconnaissance,<br />
claire et nette, comme condition à des négociations sérieuses<br />
avec ses ennemis est une exigence excessive de sa part. Quel<br />
<strong>au</strong>tre pays est ainsi nié dans son être? À quel <strong>au</strong>tre pays<br />
demande-t-on de faire une concession <strong>au</strong>ssi absurde avant toute<br />
négociation? Et pourtant, Israël mène une diplomatie prudente<br />
et ouverte. Ses politiques de coopération avec les pays en voie<br />
de développementsont particulièrement généreuses et il<br />
s’obstine à rechercher la paix avec ceux qui le nient. Pourquoi<br />
est-il désigné si souvent à la réprobation générale?<br />
On reproche à Israël de protéger ses citoyens des attaques<br />
terroristes par la construction du «mur». Ceux qui sans relâche<br />
dénoncent ce «mur» ont-ils condamné la barrière qui, en Irlande<br />
du Nord, sépara pendant des décennies les protestants des<br />
catholiques? La barrière érigée le long de la frontière entre les<br />
USA et le Mexique les préoccupe-t-elle <strong>au</strong>tant? La «forteresse<br />
Europe», que de nombreux misérables tentent de rallier <strong>au</strong> péril<br />
de leur vie, n'est-elle pas plus barricadée que si elle était<br />
entourée d'un mur? Des dizaines d'Albanais ont péri noyés il y<br />
a quelques années pour avoir voulu y aborder. Plus récemment,<br />
des Africains sont morts <strong>au</strong> Maroc pour avoir tenté de franchir<br />
les barbelés derrière lesquels elle se retranche. Pourquoi n’y a-til<br />
pas de campagne mondiale de mobilisation contre tous ces<br />
dispositifs qui entravent la libre circulation des humains sur<br />
notre planète? Que cache ce désir de dénier <strong>au</strong> seul Israël le<br />
droit de se protéger d’intrusions pourtant bien plus meurtrières?<br />
On impute à Israël le péché capital de la responsabilité du<br />
«problème» des réfugiés. Si les réfugiés palestiniens ne sont pas<br />
intégrés dans les pays arabes où ils se trouvent et vivent depuis<br />
trois générations dans des conditions misérables, ces pays n’en<br />
sont-ils pas responsables? À quel <strong>au</strong>tre pays fait-on grief des<br />
f<strong>au</strong>tes de ses voisins? Israël a, lui, intégré à peu près le même<br />
nombre de réfugiés juifs des pays arabes. Qui salue l’effort que<br />
cela a représenté?<br />
On qualifie Israël d’État pratiquant «l’apartheid» à l’égard de ses<br />
citoyens arabes. L’accusation revient quasi rituellement. Pourtant,<br />
en Israël, les non-juifs<br />
peuvent fréquenter les<br />
mêmes lieux publics,<br />
trains, <strong>au</strong>tobus,<br />
commerces, plages, que<br />
les juifs. Ils ont accès <strong>au</strong>x<br />
mêmes professions et <strong>au</strong>x<br />
mêmes fonctions<br />
administratives et jouissent<br />
des mêmes avantages<br />
soci<strong>au</strong>x que les juifs. Les<br />
Israéliens arabes le savent<br />
si bien que des sondages<br />
montrent que,<br />
majoritairement, ils ne<br />
QUEL AUTRE PAYS EST<br />
AINSI NIÉ DANS SON<br />
ÊTRE? À QUEL AUTRE<br />
PAYS DEMANDE-T-ON DE<br />
FAIRE UNE CONCESSION<br />
AUSSI ABSURDE AVANT<br />
TOUTE NÉGOCIATION?<br />
veulent pas devenir citoyens palestiniens si cet État devait être<br />
créé : ils préfèrent garder leur citoyenneté israélienne. Qui le sait<br />
en Occident?<br />
Soixante ans d’État, soixante ans d’hostilité injuste et soixante<br />
ans d’exemplarité. Israël est bien la création du peuple du livre<br />
et le produit de l’éthique juive. Quand les nations lui rendrontelles<br />
justice? L’honneur d’Israël survivra. Celui des nations est<br />
irrémédiablement compromis par les injustices dont elles se<br />
rendent coupables à son égard.<br />
Annette Paquot<br />
Professeur Université Laval<br />
LVS mars 2008 55<br />
Point de vue
Point de vue<br />
LE LABORATOIRE<br />
du judaïsme de demain<br />
Il y a trente ans, un grand journaliste français, Raymond<br />
Cartier, disait à un jeune journaliste qui l’interrogeait pour<br />
la radio israélienne : « L’Etat d’Israël vient de célébrer son<br />
trentième anniversaire mais trente ans et même un siècle ne<br />
représentent pas grand-chose dans la vie et dans l’histoire<br />
d’une nation. Je crains que le combat d’Israël ne soit encore<br />
bien long avant qu’il puisse asseoir de manière pérenne son<br />
existence dans le concert des nations. Il pourrait, qu’à Dieu<br />
ne plaise ! n’être qu’une parenthèse ». J’étais ce jeune<br />
journaliste et je me souviens que l’observation du directeur<br />
de Paris Match m’avait, ce jour-là, plongé dans de<br />
profondes réflexions et de vives inquiétudes.<br />
Trente ans plus tard, à l’heure où l’Etat d’Israël célèbre son<br />
entrée dans l’âge que le<br />
JE CRAINS QUE LE Traité des Pères considère<br />
comme étant celui de la<br />
COMBAT D’ISRAËL NE<br />
vieillesse (de la maturité et<br />
SOIT ENCORE BIEN de la sagesse), je repense<br />
LONG AVANT QU’IL à la formule de cet<br />
PUISSE ASSEOIR DE éminent journaliste qui<br />
était naturellement, <strong>au</strong><br />
MANIÈRE PÉRENNE SON<br />
sein de la société<br />
EXISTENCE DANS LE française, un des plus<br />
CONCERT DES<br />
grands amis de l’Etat juif.<br />
NATIONS<br />
Déjà soixante ans ? A<br />
peine soixante ans? Quelle<br />
que soit l’adversité des nations, les polémiques et les<br />
attaques <strong>au</strong>xquelles il a encore à faire face <strong>au</strong>jourd’hui, qui<br />
peut contester que le sionisme <strong>au</strong>ra réussi, en l’espace de<br />
quelques décennies, à transformer de fond en comble<br />
l’histoire et la géographie du peuple juif. Il sera parvenu à<br />
ressusciter un peuple et une promesse de nation qui, <strong>au</strong><br />
lendemain de la guerre, étaient en perdition. Sortis de la<br />
guerre, nous avions six millions d’épines dans nos cœurs et<br />
notre âme – collective et individuelle - était totalement<br />
déchiquetée. Les leaders du sionisme, ses théoriciens et ses<br />
amants, en leurs diversités, ont fait flèche de tout bois. Il<br />
fallait ramener les exilés des différents lieux de leur<br />
diaspora, les nourrir et les loger, en faire des constructeurs<br />
et donner sens à leur nouvelle vie. Bâtir une nation. En<br />
même temps, il ne fallait pas relâcher l’effort de sécurité,<br />
l’adapter constamment <strong>au</strong>x plans de destruction ourdis par<br />
les ennemis du nouvel Etat. Israël a décolonisé l’être juif. Et<br />
le sionisme s’est inscrit dans la mappemonde géopolitique<br />
56 mars 2008 LVS<br />
- malgré les oppositions et les pièges des uns et des <strong>au</strong>tres<br />
– comme l’un plus puissants mouvements de libération du<br />
vingtième siècle.<br />
Mais par-dessus tout, le sionisme a ressuscité l’hébreu qui<br />
n’était jusque là que la langue du sacré et de la liturgie et<br />
en a fait – expérience unique dans l’histoire des langues et<br />
des peuples - un idiome moderne qui est <strong>au</strong>jourd’hui <strong>au</strong><br />
service de toutes les technologies, de toutes les sciences et<br />
de toutes les modernités. Voir des dizaines d’écrivains<br />
israéliens <strong>au</strong>jourd’hui traduits en français et invités <strong>au</strong><br />
Salon du livre à Paris est une des joies qui, en vérité,<br />
mériterait le traditionnel « cheheheyanou » que les juifs de<br />
la tradition disent en des circonstances peut-être moins<br />
solennelles.<br />
Soixante ans après, le sionisme a-t-il donc réussi ? La<br />
croissance économique est <strong>au</strong> rendez-vous ; une<br />
démocratie brouillonne, turbulente mais exigeante ; une<br />
société ouverte à tous les vents de la modernité ; des<br />
millions de réfugiés ont été intégrés, un cinéma et une<br />
littérature en plein essor : qui dit mieux ? Sans doute<br />
Gershom Scholem a-t-il eu raison d’écrire qu’il y a dans le<br />
sionisme des dimensions mystiques – oui mystiques – qui<br />
n’ont pas toutes été découvertes. En tout cas, peut-être<br />
peut-on <strong>au</strong> moins convenir, avec Martin Buber cette fois-ci,<br />
que « le sionisme n’a pas échoué ».<br />
Pourquoi être inquiet alors, <strong>au</strong> moment même de la<br />
célébration de ce soixantième anniversaire ? Non, ce ne<br />
sont ni les menaces du Hamas ni celles du Hezbollah qui<br />
nourrissent en profondeur ces inquiétudes. Ce ne sont pas<br />
même les rodomontades des ayatollah de Téhéran et leurs<br />
menaces nucléaires quotidiennes qui inspirent <strong>au</strong> signataire<br />
angoisses et interrogations. Encore qu’il serait sans doute<br />
irresponsable de totalement les ignorer, de passer son<br />
chemin et de faire comme si elles n’existaient pas. Ce qui,<br />
jour après jour, conduit l’observateur à un relatif<br />
pessimisme et à des questions <strong>au</strong>jourd’hui sans réponse ce<br />
sont les ombres et les faiblesses, les difficultés et les<br />
pesanteurs de la société israélienne. Les relations entre les<br />
uns et les <strong>au</strong>tres – religieux et laïcs, séfarades et<br />
ashkénazes, riches et p<strong>au</strong>vres, bref Jérusalem et Tel Aviv -<br />
n’ont jamais été <strong>au</strong>ssi tendues. Il arrive que la lecture<br />
quotidienne de la presse israélienne inspire anxiété,<br />
pessimisme et inquiétude. Aux déclarations excessives des
uns correspondent les prises de position fanatiques des<br />
<strong>au</strong>tres. Il y a, qu’on le veuille ou non, deux extrémismes (<br />
deux intégrismes ) qui se nourrissent l’un l’<strong>au</strong>tre : le laïc<br />
et le religieux. Ainsi deux écrivains – et des plus connus –<br />
viennent l’un et l’<strong>au</strong>tre de s’en prendre sans nuance <strong>au</strong><br />
judaïsme de la tradition. Disons d’abord qu’on peut admirer<br />
les œuvres de M.Amos Oz et de M.Yehoshua sans être<br />
obligé de partager tous leurs points de vue quand,<br />
d’aventure, ils abandonnent le domaine de la fiction pour<br />
s’aventurer dans celui des opinions politiques, culturelles et<br />
a fortiori religieuses.<br />
M.Yehoshua a pris l’habitude depuis quelques années de<br />
considérer les juifs vivant en diaspora comme « des juifs<br />
partiels ». Sans doute n’a-t-il pas tort de penser (et de le<br />
dire) que les juifs d’Israël, en raison même de leur<br />
éducation, de leurs combats quotidiens, des sacrifices qu’ils<br />
consentent et de la culture hébraïque <strong>au</strong> sein de laquelle ils<br />
vivent, assument <strong>au</strong>jourd’hui plus que d’<strong>au</strong>tres toutes les<br />
composantes du destin juif. Mais cela <strong>au</strong>torise-t-il l’écrivain<br />
de parler de juifs complets et de demi- juifs ?<br />
M.Amos Oz va encore plus loin que son distingué collègue.<br />
Dans une récente déclaration qu’il a faite <strong>au</strong> cours d’un<br />
colloque consacré <strong>au</strong> judaïsme laïc, il dit que « le judaïsme<br />
orthodoxe s’est gelé sur place dans l’Europe froide ». Il<br />
ajoute que « la culture juive est passée <strong>au</strong> 21 ème siècle du<br />
monde orthodoxe à celui des laïcs ». M.Oz nous oblige donc<br />
à choisir entre l’une ou l’<strong>au</strong>tre : soit le passé soit l’avenir.<br />
Ou bien on choisit le Talmud, le Midrash, la Kabbale et le<br />
hassidisme ou bien on ne s’intéresse qu’<strong>au</strong>x nouve<strong>au</strong>x<br />
écrivains israéliens qui ont<br />
VEUT-ON DIRE QUE inscrit en pertes et profits<br />
TOUT LE PASSÉ EST À toute l’histoire culturelle<br />
passée du peuple juif ?<br />
ÉLIMINER ? N’Y A –T-IL<br />
Veut-on dire que tout le<br />
VRAIMENT RIEN À Y passé est à éliminer ? N’y a<br />
SAUVER ? FAUT-IL –t-il vraiment rien à y<br />
s<strong>au</strong>ver ? F<strong>au</strong>t-il échanger<br />
ÉCHANGER UN<br />
un Maïmonide et un rabbi<br />
MAÏMONIDE ET UN Akiva contre un Appelfeld<br />
RABBI AKIVA CONTRE et un Grossman ? A en<br />
UN APPELFELD ET UN croire nos deux <strong>au</strong>teurs, il<br />
f<strong>au</strong>drait se résigner à jeter<br />
GROSSMAN ?<br />
<strong>au</strong>x oubliettes cinquante<br />
siècles de productions intellectuelles et d’effervescences<br />
religieuses pour ne saluer<br />
désormais que les <strong>au</strong>teurs<br />
laïcs de l’Israël moderne.<br />
Nos deux <strong>au</strong>teurs répètent<br />
à l’envi que l’Etat d’Israël<br />
doit aspirer à la « normalité<br />
» mais ils ne répondent<br />
rien quand on leur fait<br />
observer que, dans ce cas,<br />
les jeunes préféreront<br />
toujours l’original à une<br />
pâle copie de Los Angeles<br />
ou de Montréal.<br />
M.YEHOSHUA A PRIS<br />
L’HABITUDE DEPUIS<br />
QUELQUES ANNÉES DE<br />
CONSIDÉRER LES JUIFS<br />
VIVANT EN DIASPORA<br />
COMME « DES JUIFS<br />
PARTIELS ».<br />
De l’<strong>au</strong>tre côté de l’échiquier religieux, les choses ne sont<br />
guère plus réjouissantes. Un rabbin israélien vient de<br />
déclarer que la Shoah n’a existé que parce que les juifs<br />
s’étaient éloignés de la pratique religieuse ; un second que<br />
les tremblements de terre sont la conséquence de<br />
l’existence chez les juifs d’un certain nombre<br />
d’homosexuels ; un troisième encore, s’inspirant sans doute<br />
d’on ne sait quel ayatollah de Téhéran, que ceux des<br />
Israéliens qui voteraient pour tel parti iraient <strong>au</strong><br />
paradis…Des rabbins qui savent toujours ce que veut Dieu<br />
et ce qu’il va faire, comme s’ils étaient en contact<br />
permanent avec l’administration du ciel. Et <strong>au</strong> lieu de traiter<br />
des grands problèmes qui se posent <strong>au</strong>x juifs pratiquants<br />
dans le monde moderne, une sommité rabbinique préfère<br />
consacrer sa réflexion halakhique <strong>au</strong> fait de savoir si on a<br />
le droit de s’arracher les poils du nez un jour de<br />
shabbat…Je pense souvent à la formule de l’un de nos plus<br />
éminents penseurs, Isaiah Berlin parce qu’elle constitue un<br />
chant contre l’intolérance : « Peu de choses – écrivait-il –<br />
ont engendré davantage de malheurs que la conviction<br />
d’individus ou de groupes…d’être les seuls dépositaires de<br />
la vérité. C’est une terrible et dangereuse arrogance que de<br />
croire que vous êtes le seul à avoir raison : vous avez un<br />
œil magique qui voit la vérité et les <strong>au</strong>tres ne peuvent donc<br />
avoir raison s’ils sont en désaccord avec vous »<br />
Quel Etat d’Israël veut-on ? Comment réconcilier le passé et<br />
l’avenir ? Etre israélien sans cesser d’être juif ?<br />
Israël est jeune : soixante ans, c’est l’âge d’un homme. Mais<br />
son existence doit être conditionnée par le double héritage<br />
de notre histoire plurimillénaire et des nécessités de la<br />
modernité. Israël est le laboratoire où se façonne le<br />
judaïsme de demain.<br />
La question est : quel Israël allons-nous transmettre <strong>au</strong>x<br />
nouvelles générations ? Et à cette question, le sionisme n’a<br />
pas encore répondu.<br />
Victor Malka<br />
Rédacteur en chef à l’Information juive<br />
LVS mars 2008 57<br />
Point de vue
Point de vue<br />
Rencontres avec des<br />
écrivains israéliens<br />
Naïm Kattan en compagnie de l’écrivain Aharon Appelfeld.<br />
Au cours des années, j’ai eu la chance de connaître<br />
personnellement de nombreux écrivains israéliens. L’an dernier<br />
l’Association des écrivains israéliens a convié à Jérusalem et réuni<br />
pour la première fois des écrivains de nombreux pays ainsi que des<br />
écrivains israéliens qui se considéraient comme juifs <strong>au</strong> même titre<br />
que les <strong>au</strong>tres. Je voudrais ici parler de trois écrivains israéliens.<br />
D’abord Aharon Appelfeld . Un homme admirable de chaleur et<br />
de ferveur. Son œuvre le situe <strong>au</strong> cœur de la littérature universelle<br />
et il s’adresse <strong>au</strong> monde comme écrivain juif et israélien. Je<br />
souhaite faire état de deux de ses livres parus récemment en<br />
français : Histoire d’une vie et L’amour, soudain. Né en 1932 à<br />
Czernovitz en Bucovine, région des Carpates partagée entre<br />
l’Ukraine et la Roumanie, Appelfeld a connu, enfant, toutes les<br />
horreurs que les juifs ont subi pendant la guerre dans ce territoire.<br />
Sa mère fut assassinée par les nazis et son père est mort en<br />
déportation. A dix ans, il se trouvait totalement seul, cerné et<br />
pourchassé par les nazis allemands et leurs acolytes ukrainiens.<br />
Cachant son identité, il a vécu dans la forêt se nourrissant de<br />
plantes et de fruits s<strong>au</strong>vages et a travaillé pour des paysans. A la<br />
fin de la guerre, il a quitté le camp de réfugiés où il fut recueilli<br />
pour se rendre en Israël où il vit <strong>au</strong>jourd’hui.<br />
En Israël, il fréquente l’écrivain Agnon, lui <strong>au</strong>ssi originaire de<br />
Bucovine et il a alors l’occasion de parler le yiddish la langue de<br />
ses grands parents et l’allemand, celle de se parents et cela le<br />
réconcilie avec son passé.<br />
Dans L’amour, soudain (Editions de l’Olivier) un homme de<br />
soixante-dix ans, accablé par la solitude, puis frappé par la<br />
maladie, accueille l’amour d’une femme de trente ans qui l’entoure<br />
et le soigne en silence. Elle l’arrache à l’oubli, à la culpabilité et à<br />
l’interdit, d’une enfance trahie et qui remonte à la surface. Jeune<br />
adolescent, il avait rejoint les communistes, rejetant ses parents et<br />
la religion de ses ancêtres. A l’approche de la mort, l’amour d’une<br />
femme fait resurgir la mémoire de ses grands parents, de ses<br />
parents, des champs et des arbres de son enfance. Il s’efforce de<br />
rejoindre les sources qu’il avait désertées, trahies et réussit à en<br />
inscrire des bribes. Grâce à l’amour, cet écrivain qui n’avait presque<br />
jamais publié ses textes revit ce qui, <strong>au</strong> fond de lui, est le plus<br />
profond et le plus vrai. C’est l’amour qui lui révèle l’éclat des mots<br />
transmis de génération en génération.<br />
Dans ces deux be<strong>au</strong>x livres, Appelfeld nous fait vivement sentir la<br />
résonance d’une mémoire lointaine et vibrante.<br />
58 mars 2008 LVS<br />
Cela fait plus de trente ans que j’ai eu le plaisir de connaître Haïm<br />
Gouri. Nous nous sommes vus à Montréal où il fut l’invité de la<br />
Rencontre québécoise internationale des écrivains et ensuite à<br />
Jérusalem. Poète parmi les plus importants en Israël, Gouri est<br />
également essayiste et journaliste. Il a assisté <strong>au</strong> procès Eichmann<br />
à Jérusalem et en a décrit le déroulement et les péripéties dans un<br />
ouvrage saisissant : La cage de verre. Son seul roman L’Affaire<br />
chocolat, écrit il y a plus de tente ans, fut récemment réédité en<br />
Israël.<br />
Deux hommes, Robi et Mordi se rencontrent à la gare d’une ville<br />
en ruine, de l’Est de l’Europe. Ils sont des Juifs rescapés des camps<br />
de la mort qui s’étaient connus <strong>au</strong>paravant. Ils couchent à la cave<br />
d’un couvent et leur seul repas est celui que leur dispense la soupe<br />
populaire. Ce sont des ombres et, dans leur esprit, la réalité se<br />
confond avec le rêve et les morts avec les vivants. La mémoire est<br />
trop lourde à supporter et <strong>au</strong>cun mot n’indique l’existence des<br />
camps, ne fait mention de l’horreur. Robi recherche une famille<br />
disparue et rêve de fortune,de luxe et de jours heureux alors que<br />
Mordi, prostré, se laisse aller à la mort.<br />
Robi se présente à un docteur Hoffmann dont on devine le passé<br />
criminel et lui propose une affaire qui les doterait l’un et l’<strong>au</strong>tre<br />
d’une fabuleuse fortune. Ce serait sa victoire sur le passé. Les<br />
Américains libérateurs ont apporté une grande quantité de<br />
chocolats. Il s’agirait de répandre la rumeur que ces chocolats<br />
contiennent une matière apaisante qui anéantit la pulsion et<br />
l’énergie sexuelles. Les gens s’en débarrasseraient et Robi et<br />
Hoffmann achèteraient à vil prix ce matériel menaçant et<br />
annonceraient ensuite qu’il s’agissait d’un mensonge. Le prix du<br />
chocolat grimperait et la victime et le bourre<strong>au</strong> feraient fortune.<br />
Tous deux sont alliés dans leur besoin d’oublier le crime et la<br />
catastrophe.<br />
Gouri ne fait pas explicitement mention de la Shoah. Nulle trace de<br />
plainte et encore moins de ressentiment. Sans décrire les années<br />
d’horreur, Gouri nous en fait sentir le poids. Ses deux morts vivants<br />
arrachent à l’indicible les mots d’enfer.<br />
Je voudrais enfin évoquer l’amitié qui me lie à A.B. Yehoshoua. Lui<br />
<strong>au</strong>ssi fut jadis un invité de la Rencontre québécoise internationale<br />
des écrivains. Il y a quelques semaines je l’ai revu à Paris à<br />
l’occasion de la sortie de son dernier roman. Son principal intérêt<br />
est la peinture des rapports humains. Par ailleurs Yohoshoua est un<br />
polémiste et comme de nombreux <strong>au</strong>tres écrivains israéliens, il se<br />
situe à g<strong>au</strong>che. Il provoque des controverses par son attitude<br />
envers les juifs de la diaspora. Il a émis ses opinions <strong>au</strong>ssi bien à<br />
Montréal et New York qu’à Londres et Paris. D’après lui seuls les<br />
juifs israéliens sont des juifs entiers. « C’est en Israël que je paie mes<br />
impôts, que je fais mon service militaire, que je choisis mes<br />
représentants parlementaires. Vous, Français n’êtes qu’à moitié<br />
juifs». Il affirme qu’il ne critique pas ni ne condamne mais, tout<br />
simplement, constate. Il le dit avec le sourire comme si cela<br />
l’amuse. Il y a trois ans, encore à Paris, s’adressant à un <strong>au</strong>ditoire<br />
juif, il avait lancé :» Nous n’avons pas besoin des juifs de la<br />
diaspora». Ce qui peut sembler paradoxal c’est que Yehoshousa<br />
n’est pas poussé par l’orgueil et encore moins par la vantardise. Ses<br />
prises de positions sont contestées en Israël. Cela ne lui déplait pas<br />
car, vivant <strong>au</strong> sein d’une démocratie vivante, el en profite. Il<br />
accepte la contradiction.<br />
Naïm Kattan
PESSAH la longue veillée du dialogue<br />
Ce soir-là, l’histoire des générations d’Israël s’écrit. Chacun,<br />
à là table du Séder, rapporte à l’<strong>au</strong>tre ce qui lui fut transmis.<br />
Ce n’est pas le moindre paradoxe du Séder, la veillée ou les<br />
veillées de Pessah, de signifier ordre cérémonial et de s’opposer<br />
<strong>au</strong>x articles élémentaires de l’étiquette . Si d’aventure, sans qu’on<br />
le lui ait imposé, votre enfant faisait silence à la table du Séder,<br />
prêt à laisser les adultes converser<br />
doctement sur la sortie d’Égypte, thème<br />
essentiel de de la soirée, il vous f<strong>au</strong>drait ,<br />
enjoint la Haggada, ce manuel du savoir –<br />
vivre de la veillée de Pessah, tout<br />
entreprendre pour l’inciter à s’exprimer ,<br />
de manière , à vous poser , toujours et<br />
encore , l’exaspérant c’est quoi?<br />
Alors, le Séder , c’est quoi? La fête des<br />
enfants? Pas exactement. Celle des adultes?<br />
pas non plus vraiment. C’est la grande réunion<br />
des adultes et des enfants, c’est la<br />
longue nuit du dialogue qui va se<br />
poursuivre, comme hier de Pessah à Pessah, pour écrire<br />
l’histoire des générations d’Israël. C’est dire avant d’en revenir à<br />
l’essentiel, que le Séder n’est en <strong>au</strong>cune façon une assemblée de<br />
prières <strong>au</strong> cours de laquelle le récitant lit un texte que<br />
l’assistance comprend peu, prou, ou pas du tout en attendant<br />
que le repas soit servi. Et ce n’est guère non plus une grande<br />
bouffe, quel que puisse être le plaisir de retrouver à l’issue de<br />
la première partie de la Haggada, le fumet des plats propres à<br />
la fête.<br />
Non, l’essentiel c’est le dialogue. Alors <strong>au</strong> besoin servez-vous<br />
de la Haggada seulement comme canevas, et pour les courts<br />
passages qui constituent le rituel (Kidouch, bénédictions…) et<br />
faites le Séder en français. Parlez de Mosché, de sa rencontre<br />
avec les hébreux ses frères et avec Dieu <strong>au</strong> buisson ardent, de<br />
la sortie d’Égypte, des esclaves et de la liberté, de l’Histoire<br />
juive d’hier( notamment de la révolte du ghetto de Varsovie qui<br />
commença le soir de Pessah) et de demain alors que notre<br />
génération a ce privilège , refusé à nos pères pendant vingt<br />
siècles, de pouvoir imiter la conduite des premiers hébreux <strong>au</strong><br />
premier Pessah de l’histoire, quand ils prirent le chemin qui<br />
mène à la terre promise.<br />
Il suffit de parcourir le texte de la Haggada en hébreu, ou dans<br />
l’une des traductions françaises aisément disponibles, pour<br />
découvrir l’importance que les rabbins attachaient <strong>au</strong> dialogue<br />
entre les parents et les enfants.. Ces maîtres de l’antiquité étaient<br />
doués d’un sens pédagogique surprenant. Ils insistaient pour<br />
que les enfants interrogent, qu’on ne se contente pas de leur<br />
soumettre une question afin de donner l’occasion <strong>au</strong>x adultes<br />
d’y répondre. L’ordre suivi pendant la veillée, les objets<br />
disposés sur le plat du Séder ont pour but principal d’éveiller<br />
l’attention et la curiosité des enfants, alors que Pessah, bien<br />
davantage qu’une <strong>au</strong>tre fête ou célébration d’un anniversaire<br />
historique, traduit le rôle essentiel de la mémoire collective<br />
d’Israël, depuis que Dieu intervint dans l’histoire des hommes.<br />
Grâce <strong>au</strong> dialogue des parents-enfants, chaque génération<br />
rapporte à l’<strong>au</strong>tre, depuis lors, par la chaîne interrompue de la<br />
mémoire engagée, le témoignage qui lui fut transmis par le père<br />
et le grand-père à la table du Séder. Au<br />
demeurant, c’est un exercice permanent<br />
qui ne nous occupe pas seulement à<br />
Pessah.<br />
La première instruction du Chéma, ce<br />
crédo du peuple juif après le manifeste de<br />
l’unité de Dieu et l’injonction de prendre<br />
à coeur , est ainsi formulée : Tu<br />
l’enseigneras à ton enfant et tu<br />
t’entretiendras des propos de la Torah.<br />
Pessah n’était que le début de ce<br />
processus –que nous formalisons chaque<br />
année <strong>au</strong> cours de la veillée anniversairedu<br />
dialogue permanent chargé <strong>au</strong>ssi bien d’ouvrir le cœur et<br />
l’intelligence des enfants à l’enseignement des parents et de<br />
l’histoire, que de permettre <strong>au</strong>x parents de découvrir, grâce <strong>au</strong>x<br />
propos de l’enfant, cet espace commun ou les générations sont<br />
conviées à s’unir pour en écrire la suite.<br />
Et en lisant dans le Livre le dernier message du dernier<br />
prophète biblique, Malachie, lequel annonçait le tournant d’une<br />
histoire ou Dieu confiait désormais <strong>au</strong>x hommes la<br />
responsabilité de leur planète, on s’étonnera à peine de<br />
découvrir cette assurance, pour le cas ou ils seraient incapable<br />
de prendre en main leur destin : Voici, dit-il à Israël, je vous<br />
enverrai Élie le prophète , avant que n’arrive Le Jour grand et<br />
redoutable . Il ramènera le cœur des parents à leurs enfants et le<br />
cœur des enfants à leurs parents…<br />
ALORS AU BESOIN SERVEZ-<br />
VOUS DE LA HAGGADA<br />
SEULEMENT COMME CANEVAS,<br />
ET POUR LES COURTS<br />
PASSAGES QUI CONSTITUENT<br />
LE RITUEL (KIDOUCH,<br />
BÉNÉDICTIONS…) ET FAITES<br />
LE SÉDER EN FRANÇAIS.<br />
Yehouda Vardi<br />
NB : Ce texte a été reproduit avec l’aimable <strong>au</strong>torisation de la<br />
direction du magazine l’Arche, le mensuel du judaïsme français<br />
LVS mars 2008 59<br />
Point de vue
Photo: Jean-François Leblanc, Agence Stock Photo<br />
Culture ARTISTE PEINTRE<br />
60 mars 2008 LVS<br />
Court entretien<br />
Esther Trépanier<br />
<strong>au</strong>teur de l’ouvrage<br />
LVS : Avez-vous remarque une<br />
différence entre l`art juif séfarade<br />
et ashkénaze?<br />
Esther Trépanier : Il n`existe pas, en<br />
fait, de grande différence entre les<br />
artistes ashkénazes et les artistes<br />
séfarades de Montréal. La plupart<br />
d`entre eux ne sont pas définis par<br />
leur religion, et ne se rangent pas dans<br />
des cadres religieux, par exemple le<br />
fait qu`il soit impossible de<br />
représenter Dieu dans les synagogues<br />
ou les mosquées.<br />
LVS : Ces artistes étaient-ils<br />
religieux?<br />
ET : La plupart des artistes Juifs dont il<br />
est question se qualifieraient plutôt de<br />
laïcs, ils disent avoir une spiritualité<br />
plutôt large…Ce qui les distingue<br />
particulièrement, c`est leur intérêt<br />
élargi pour la condition humaine. Ce<br />
n`est pas un intérêt qui leur est<br />
exclusif, mais ils sont particulièrement<br />
marqués par ça.<br />
LVS : Qu`est-ce qui unit donc ces<br />
artistes Juifs?<br />
ET : Ce qu`ils ont en commun,<br />
surtout, ce sont des caractéristiques<br />
des années 30, d`artistes modernes<br />
figuratifs qui sont en lien avec leur<br />
milieu, ici, Montréal. Ces artistes ont<br />
en commun la ville, et sont davantage<br />
influencés par cet élément de leur vie.
Avec l’aimable <strong>au</strong>torisation du magazine Information Juive (Paris).<br />
idées<br />
Livres<br />
LA BOMBE IRANIENNE<br />
D'ici à quelques mois.<br />
l'Iran détiendra l'arme atomique.<br />
Il menacera Israël, qu'il dit<br />
vouloir " rayer de la carte ", et<br />
sans doute <strong>au</strong>ssi d'<strong>au</strong>tres pays<br />
voisins. Dès lors, comment ne<br />
pas craindre une " shoah<br />
nucléaire " perpétrée par un pays<br />
dont le président nie le génocide<br />
nazi ? Et comment croire que la<br />
pression internationale suffira à<br />
calmer l'ardeur guerrière des<br />
pasdarans ? Vaste enquête sur ce<br />
bouleversement géostratégique<br />
majeur, ce livre raconte en détail la<br />
façon dont la République islamique s'équipe de l'arme nucléaire, mais<br />
<strong>au</strong>ssi par quels moyens l'État hébreu entend faire face à la menace.<br />
De Téhéran à Jérusalem, d'Istanbul à Gaza, de Bagdad à Riyad en<br />
passant par Washington et Paris, cette enquête nous fait découvrir les<br />
princip<strong>au</strong>x protagonistes, militaires, politiques et religieux de ce dossier<br />
particulièrement inquiétant. Elle met en perspective les événements<br />
majeurs qui déchirent <strong>au</strong>jourd'hui le Proche-Orient, dessinant pour les<br />
crises à venir une toile de fond teintée d'apocalypse.<br />
Elle éclaire la crise internationale qui se noue sous nos yeux.<br />
COUP DE PROJECTEUR PATRICK ANIDJAR<br />
Patrick Anidjar dirige le bure<strong>au</strong> de l’Agence France Presse à<br />
Jérusalem après avoir été en poste en Europe et <strong>au</strong>x Etats-<br />
Unis. Il vient de publier <strong>au</strong>x éditions du seuil La bombe<br />
iranienne, un ouvrage qui est d’abord une vaste enquête sur le<br />
bouleversement géo-stratégique majeur que constitue<br />
l’appropriation par l’Iran de l’arme nucléaire. L’enquête<br />
d’Anidjar analyse les protagonistes et les possibles évolutions<br />
de ce dossier particulièrement inquiétant.<br />
IJ : Dès le début de votre enquête vous envisagez le scénario<br />
catastrophe redouté par l’état-major israélien. Le croyez-vous<br />
possible?<br />
P A : bien sûr, nous savons depuis longtemps que tout est possible dans<br />
cette région h<strong>au</strong>te. en couleurs Cependant, dans ce cas précis. Je crois<br />
qu’il est bon de raison garder. Il est du rôle d’un État-major, surtout<br />
celui de l’armée israélienne, décrié dans un passé récent dans le<br />
contexte libanais de se préparer <strong>au</strong> pire. Ce qu’il fait . Mais cela ne<br />
signifie pas que le scénario va se concrétiser.<br />
IJ : Vous semblez penser qu’on prend Ahmadinejad à la légère<br />
en le considérant comme un pion manipulé par les régime des<br />
mollahs ?<br />
P A : Un président iranien est toujours manipulé par les mollahs. C’est<br />
une règle depuis le retour en Iran de l’Ayatollah Khomeiny. Mais à la<br />
différence de ses prédécesseurs, Ahmadinejad est ouvertement porté<br />
par l’énorme machine des Gardiens de la révolution, les fameux<br />
Pasdaran, qui le soutiennent à tous les nive<strong>au</strong>x du pouvoir et qui ont,<br />
entre <strong>au</strong>tres, la responsabilité du programme nucléaire de leur pays. Ce<br />
sont eux qui lui confèrent la force politique nécessaire, ils l’ont aidé à<br />
se faire élire en 2005, ils sont <strong>au</strong>jourd’hui derrière la répression des<br />
manifestations étudiantes. Ils l’<strong>au</strong>torisent à faire preuve d’une telle<br />
agressivité à l’égard des États-Unis et d’Israël<br />
IJ : On est stupéfait d’apprendre en vous lisant qu’à ce jour<br />
l’Iran ne figure pas dans la liste des États qu’Israel considère<br />
comme hostiles. Comment expliquez-vous ce fait ?<br />
PA : J’ai moi-même posé la question à des responsables israéliens. Il y a<br />
l’aspect négligence. Nous n’avions pas pensé…. Cela laisse<br />
rêveur…..Nous avions d’<strong>au</strong>tres soucis en tête.. m’a-t-on répondu, tout<br />
<strong>au</strong>ssi gentiment. Et puis a surgi l’histoire de ces israéliens nées en Iran<br />
qui retournent régulièrement dans leur pays natal pour rendre visite à<br />
leurs proches. Et avec ces visites sont apparues les craintes que certains<br />
de ces juifs ne soient contactés par les services de renseignements<br />
iraniens et ne deviennent des espions à la solde de Téhéran. Il y a en<br />
déjà eu quelques cas . Et puis il y a <strong>au</strong>ssi l’Histoire. Les relations entre<br />
les deux pays étaient extrêmement proches avant la révolution<br />
islamique. Quelque part , les Israéliens espérent toujours qu’elles se<br />
rétabliront un jour.<br />
Extraits de l’entrevue publiée dans Information Juive de Février 20008.<br />
LVS mars 2008 61<br />
Culture IDÉES LIVRES
Culture IDÉES LIVRES<br />
LA LITTÉRATURE<br />
ISRAÉLIENNE<br />
à l’honneur à la Foire du Livre<br />
de Turin et <strong>au</strong> Salon du Livre de Paris<br />
62 mars 2008 LVS<br />
PERSONNE NE M'AURAIT CRU, ALORS JE ME SUIS TU<br />
Personne ne m'<strong>au</strong>rait cru, alors je me suis tu retrace les pas qu'a franchi involontairement<br />
Sam Br<strong>au</strong>n, jeune français Juif durant la seconde guerre mondiale. En forme de discussion<br />
/entrevue entre un journaliste et un survivant de l'Holoc<strong>au</strong>ste, le livre retrace la cassure<br />
nette entre la vie relativement paisible d'une famille juive française et l'enfer vécu sous le<br />
joug du règne des SS. Particulièrement émouvant grâce <strong>au</strong> pacifisme infaillible de Sam<br />
Br<strong>au</strong>n, le livre est une ode <strong>au</strong> pacifisme, à l'humanisme, et un testament qui tente de<br />
transmettre par la parole ou par l'écrit la culture de la mémoire, pour que ce qui s'est<br />
produit dans le passé n'ait plus lieu dans le futur. Après quarante ans de silence, Sam<br />
Br<strong>au</strong>n s`exprime finalement sur le supplice que sa famille et lui ont vécu, et qui reste<br />
toujours d`une étonnante actualité.<br />
Extrait : Le passeur de mémoire est celui qui poursuit le «travail de mémoire», la réflexion sur<br />
l`homme après Auschwitz. Il doit transmettre sa foi en l`homme et en sa perfectibilité.<br />
Transmettre <strong>au</strong>ssi le respect de l`<strong>au</strong>tre et pas uniquement l`amour de l`<strong>au</strong>tre.<br />
Qui étaient les justes, appelés maintenant «Juste d`entre les Nations»? Des êtres humains qui se<br />
sont tout simplement comportés comme des êtres humains en traitant les Juifs comme des<br />
hommes a part entières, comme des humains parmi les <strong>au</strong>tres humains.<br />
Sam Br<strong>au</strong>n, entretien avec Stephane Guinoise<strong>au</strong>, Personne ne m`<strong>au</strong>rait cru, alors je me<br />
suis tu. Aux Editions Albin Michel, 2008, 263 pages.<br />
La Foire du Livre de Turin (8 <strong>au</strong> 12 mai<br />
2008) et le Salon du Livre de Paris (14 <strong>au</strong><br />
18 mars 2008), ont choisi de célébrer<br />
Israël puisque cela correspond <strong>au</strong>x<br />
soixante ans de la création de cet Etat.<br />
Les appels <strong>au</strong> boycott sont nombreux<br />
.Pierre Assouline réagit dans son blog <strong>au</strong>x<br />
propos tenus par Tarik Ramadan et même<br />
si le poète israélien Aaron Shabtaï affirme<br />
qu’il ne se joindra pas à la délégation de<br />
son pays, Serge Eyrolles, l’organisateur du<br />
Salon, invite trente neufs <strong>au</strong>teurs de fiction<br />
, privilégiant les écrivains de langue<br />
hébraïque traduits et publiés en français et<br />
qui vivent en Israël.<br />
<br />
De fait, ces trente neuf écrivains israéliens<br />
, issus de toutes générations, d’Aharon<br />
Appelfeld à Etgar Keret, sans oublier<br />
quelques grandes figures comme Amos<br />
Oz,David Grosman ou Avraham B.<br />
Yehoshua , seront présents Porte de<br />
Versailles du 14 <strong>au</strong> 19 mars.<br />
Joseph Elfassi<br />
Le 13, l’in<strong>au</strong>guration <strong>au</strong>ra lieu en présence<br />
du Président Nicolas Sarkozy et de son<br />
homologue israélien Shimon Pérès.<br />
Finalement, le L<strong>au</strong>réat du prix francoisraélien<br />
« Raymond Wallier » 2008 est<br />
Eshkol Nevo pour son roman « Quatre<br />
maisons et un exil », kaléidoscope narratif<br />
de destins croisés.<br />
Cette histoire, parue <strong>au</strong>x éditions<br />
Gallimard en juin 2008 décrit un pays<br />
traversé par des failles de plus en plus<br />
profondes.<br />
Mais il dessine <strong>au</strong>ssi une société où l’espoir<br />
et les rêves sont omniprésents dans le<br />
quotidien et où tout reste à faire.<br />
L’<strong>au</strong>teur, né à Jérusalem en 1971 , a passé<br />
son enfance à Détroit et dans plusieurs<br />
villes israéliennes. Son premier roman est<br />
resté sur les listes des meilleures ventes<br />
pendant de longs mois en Israël et sera<br />
publié dans la plupart des pays européens.<br />
Nelly Roffé
Yoav : un nom, un son, un be<strong>au</strong> visage. Né en Israël mais ayant<br />
grandi en Afrique du Sud et <strong>au</strong>jourd’hui résident de Londres, Yoav<br />
est un artiste inclassifiable. Auteur-compositeur-interprète, son<br />
talent est incontesté, plusieurs crient déjà <strong>au</strong> génie mais ce n’est<br />
que depuis quelques mois que l’on entend parler de lui partout.<br />
Celui qui n’était que l’artiste invité à assurer la première partie des<br />
spectacles de Tori Amos l’an dernier, s’est taillé une place <strong>au</strong> sein<br />
du petit groupe d’artistes cools indépendants pop-folk dont on<br />
parle constamment et dont on n’a jamais assez. Certains le<br />
comparent à Radiohead ou à Jack Johnson, le son de sa guitare<br />
s’apparente à celui des premiers jours de U2 ou d’INXS et même<br />
de Ravi Shankar mais l’artiste dit de lui-même que son style est un<br />
croisement entre Beck, Bjork et Jeff Buckley. Et si seulement on<br />
disait que sa musique est unique et que c’est pour cela qu’elle<br />
fascine?<br />
Le cheminement de Yoav est à l’image de sa musique : atypique.<br />
C’est l’histoire d’un enfant né de parents juifs, en Israël, d’un père<br />
Israélien, mais parti à l’âge d’un an à Cape Town, ville natale de sa<br />
mère, et qui ne parle pas l’hébreu (toute sa famille le parle s<strong>au</strong>f<br />
lui). Celui à qui l’on avait interdit d’écouter de la musique pop –<br />
son père rêvait qu’il devienne un pianiste classique - a lentement<br />
mais sûrement frayé son chemin, pour se retrouver à New York<br />
dans les années 90 et y tenter sa chance. Une guitare acoustique à<br />
la main, il a débuté sa carrière en fréquentant les milieux branchés<br />
des boîtes de nuit new-yorkaises. C’est de là qu’est venue l’idée de<br />
marier une infinité d’influences sonores pour traduire le dance<br />
music en musique pour guitare. Trouvaille ou long fruit d’un<br />
amour particulier pour la guitare, le résultat se décline en 11<br />
chansons sur son album «Charmed and Strange» sorti en Amérique<br />
du Nord le 4 mars.<br />
Fraîchement débarqué à Montréal un soir de tempête, le 5 mars<br />
exactement, <strong>au</strong> Cabaret Juste pour Rire, devant une salle comble,<br />
Yoav séduit facilement la foule. Sur scène, son style est surprenant<br />
: les sonorités de batteries et de synthétiseurs sont mystérieusement<br />
générées pas sa guitare acoustique qu’il utilise <strong>au</strong>ssi telles des<br />
percussions. Parfois même, il frappe l’instrument et chante dans sa<br />
caisse de résonance. «Je mixe avec ma guitare comme si c’était une<br />
platine» dit-il simplement, lui qui n’est pas DJ mais qui incorpore<br />
des éléments de hip hop, de musique électronique et de drum n’<br />
bass pour inventer son propre style musical.<br />
En plus d’être le tombeur de ces dames, l’Israélien de 30 ans a une<br />
présence sur scène étonnante. Entre sa voix sensuelle et<br />
mélancolique qui atteint des sommets de féminité telle la voix d’un<br />
Balavoine anglo-saxon, son joli minois et son jean déchiré, Yoav<br />
est l’exemple même de la star qui s’ignore. On n’est pas non plus<br />
surpris d’entendre des sonorités orientales dans sa musique,<br />
trahissant ses origines dont il est fier. Bien qu’il ne soit pas retourné<br />
en Israël depuis les années 90, il avoue être attaché à sa terre<br />
natale, espère y retourner bientôt et y avoir <strong>au</strong>tant de succès qu’en<br />
Angleterre, <strong>au</strong>x Etats-Unis et <strong>au</strong> Canada.<br />
«Charmed and Strange», ses «greatest and only hits» comme il dit<br />
avec humour, est déjà en vente chez tous les bons disquaires mais<br />
on peut entendre ses chansons Club Thing et Adore Adore sur<br />
Internet (www.yoavmusic.com). Sa version planante de «Where is<br />
my mind» des Pixies, a elle seule v<strong>au</strong>t le détour.<br />
Quand à son avenir, il est déjà tracé d’avance même si Yoav va là<br />
où le vente le mène. L’étiquette internationale de disque Universal<br />
a signé l’artiste et nous pouvons déjà parier qu’il ne sera pas long<br />
avant qu’il vienne <strong>au</strong> Festival de Jazz de Montréal nous montrer<br />
que finalement le pop n’a pas besoin de ses lettres de noblesse…<br />
Emmanuelle Assor<br />
ARTISTE DU MOIS<br />
YOAV d’Israël à Montréal,<br />
le cheminement d’une star<br />
LVS mars 2008 63<br />
Culture MUSIQUE
Publi-reportage
Publi-reportage
Humeur PASSAGÈRE<br />
Retour en Terre Banale<br />
Vous ignorez peut-être que, lorsque nous avons quitte la Terre Promise, mon groupe<br />
et moi, pour retourner en Terre Banale, plusieurs d`entre nous étions malades durant<br />
le vol. Avant de paniquer, de m`envoyer des fleurs et des infirmières et de l`argent,<br />
sachez que rien ne m`est arrivé à moi, du moins physiquement. Si certains de mes<br />
camarades nouvellement basanés et quelques peu enkilosés ont vomi dans l`avion,<br />
avaient des m<strong>au</strong>x de têtes et <strong>au</strong>tres malaises qui ont même mené à l`évanouissement<br />
chez une voyageuse en particulier, moi, je me sentais bien.<br />
Encore pire, à notre arrivée en Terre Chrétienne, qui réagirait tellement mal à une<br />
attaque terroriste bio-chimique, les <strong>au</strong>torités aéroportuaires décident spontanément<br />
de nous mettre en quarantaine, après avoir laisse une petite poignée des malades<br />
partir et prendre l`avion pour d`<strong>au</strong>tres grandes villes canadiennes. Donc, une partie<br />
de l`avion possiblement contaminée d`on ne sait quelle maladie est en quarantaine,<br />
l`<strong>au</strong>tre est libre. Et quelle quarantaine! Une quarantaine de minutes passées à l`air<br />
libre, dans la même salle que tous les nouve<strong>au</strong>x arrivants à Toronto. Bref, en contact<br />
quasi direct avec d`<strong>au</strong>tres passagers qui eux <strong>au</strong>ssi se repartiront partout a travers le<br />
Canada. A faire frémir Jack B<strong>au</strong>er!<br />
Heureusement pour les <strong>au</strong>torités médicales canadiennes, ce n`était qu`une gastroentérite!<br />
Ce qui rend la quarantaine encore plus absurde, car après une heure<br />
d`isolement nous avons eu droit a des costumes blancs et des mini masques a gaz,<br />
mais rien pour protéger les mains, qui elles propagent la gastro-entérite.<br />
Entre vous et moi, cependant, nous avons tous attrapé quelque chose en Israël, mes<br />
compagnons de voyage et moi. Oui, nous sommes tous maintenant fous pour ce<br />
pays qui peut nous accueillir à n`importe quel moment! Nous avons la fièvre<br />
lorsque nous entendons qu`un soldat israélien peut être dans une situation<br />
périlleuse. Nous tremblons en entendant le mot Hamas, il nous rend malade,<br />
il nous énerve…Non, je ne suis pas revenu indemne de ce voyage en Terre<br />
Promise, mes amis, je suis revenu avec une bonne dose de sionisme! Tel<br />
le HIV pour un sidéen, le sionisme ne quittera jamais mes<br />
hémoglobines et mes globules rouges. Et malgré que je le cacherai<br />
parfois, et que cette saine maladie se manifestera moins <strong>au</strong><br />
Québec, croyez-moi, oh oui croyez-moi, je suis infecté, et<br />
contagieux, et je ne cesse, depuis mon retour d`Israël la<br />
belle, d`Israël la grande, de transmettre cette maladie a<br />
tous ceux que je touche!<br />
Symptômes? Enthousiasme pour Israël,<br />
solidarité juive, Hébreu latent<br />
Diagnostic : Sionisme aigu!<br />
Comment on le traite? Retour en terre<br />
natale, propagation de son<br />
enthousiasme pour Israël,<br />
contrôle des médias <strong>au</strong> nive<strong>au</strong><br />
international!<br />
Al Fazi<br />
70 mars 2008 LVS