ZOOM petites mythologies des lunettes et autres bésicles - Bbgr
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ÉCHANGES<br />
la greFFe De cOrNée<br />
Un don<br />
pour la vie<br />
6 panorama N° 105 avril 2010<br />
Porteuses d’espoir pour de nombreux<br />
malvoyants, les greffes de cornée<br />
sont aujourd’hui <strong>des</strong> interventions<br />
très courantes. Dans quelles conditions<br />
est organisé le don? Quelles sont<br />
les dernières avancées? Explications.<br />
Réalisée depuis plus d’un siècle,<br />
la greffe de cornée est aujourd’hui<br />
l’une <strong>des</strong> greffes les<br />
mieux maîtrisées. elle vise à restaurer l’intégrité<br />
ou la transparence de la cornée, qui<br />
conditionne la vue. chaque année en france,<br />
près de quatre mille personnes malvoyantes<br />
ou aveugles sont greffées, avec de très bons<br />
résultats à la clé, puisque 85 % de ces interventions<br />
sont suivies d’une amélioration de<br />
la vue, notamment dans <strong>des</strong> cas de dystrophie<br />
ou de kératocône.<br />
Nous sommes tous<br />
<strong>des</strong> donneurs présumés<br />
la greffe de cornée n’est que la dernière étape<br />
d’un processus très encadré. en france, elle<br />
est soumise aux mêmes règles de bioéthique<br />
que les transplantations d’organe. le prélèvement<br />
ne peut être pratiqué qu’à l’hôpital ou<br />
dans une clinique habilitée, sur une personne<br />
en état de mort cérébrale ou dans les<br />
quarante-huit heures suivant son décès.<br />
le don <strong>et</strong> le prélèvement sont gratuits, l’anonymat<br />
entre le donneur <strong>et</strong> le receveur est<br />
exigé. « Tout Français est un donneur présumé,<br />
à moins qu’il n’ait manifesté son opposition en<br />
s’inscrivant au registre <strong>des</strong> refus ou en le signalant<br />
à ses proches. Si aucun souhait n’a été<br />
émis du vivant du défunt, il faut malgré tout<br />
recueillir le témoignage <strong>et</strong> le consentement<br />
de la famille avant de procéder à un prélèvement<br />
», rappelle le professeur vincent<br />
borderie, président de l’association européenne<br />
<strong>des</strong> banques d’yeux (eeba).<br />
Transfert à température ambiante<br />
le prélèvement de la cornée est réalisé dans<br />
<strong>des</strong> conditions de stérilité chirurgicale en bloc<br />
ou dans le dépôt mortuaire au sein d’une<br />
salle réservée aux prélèvements. le tissu est<br />
ensuite placé dans un flacon de milieu de<br />
conservation, puis acheminé à température<br />
ambiante, dans les vingt-quatre heures, dans<br />
une banque autorisée (voir ci-<strong>des</strong>sus) pour y<br />
être évalué, puis conservé jusqu’à cinq<br />
semaines comme le veut la législation française.<br />
ce n’est qu’au terme de nombreux<br />
tests que l’on peut utiliser les cornées prélevées.<br />
c’est d’ailleurs l’une <strong>des</strong> raisons pour<br />
lesquelles on n’en greffe que 60 %.<br />
la conservation de cornée en « organo-<br />
BaNqUeS D’yeUX :<br />
UN maillage De l’eNSemBle<br />
DU territOire<br />
Il existe en france une banque d’yeux<br />
par région, excepté l’Ile-de-france,<br />
qui en compte deux. La grande majorité<br />
d’entre elles relèvent de l’Établissement<br />
français du sang (efs), d’où sont issus<br />
50 % de tous les tissus distribués<br />
aux établissements de soins (cornées,<br />
mais aussi vaisseaux sanguins, valves<br />
cardiaques, peau…). Certaines banques<br />
peuvent également avoir un statut<br />
hospitalier, comme celle de Rouen.<br />
une partie <strong>des</strong> cornées est par ailleurs<br />
stockée par la Banque française <strong>des</strong> yeux,<br />
qui possède un statut d’association loi<br />
de 1901. Les banques cultivent <strong>des</strong> liens<br />
étroits avec les ophtalmologistes, à travers<br />
<strong>des</strong> comités techniques <strong>et</strong> de nombreuses<br />
réunions <strong>et</strong> opérations d’information<br />
organisées chaque année. Hors de nos<br />
frontières, en europe, ce sont environ<br />
vingt mille greffes de cornée qui sont<br />
réalisées chaque année. un chiffre<br />
comparable à celui <strong>des</strong> États-unis.<br />
culture » prédomine en france <strong>et</strong> en europe.<br />
son principe? maintenir la viabilité du tissu<br />
cornéen, en particulier l’endothélium, en<br />
stimulant ses activités métaboliques : « C<strong>et</strong>te<br />
conservation, réalisée à une température<br />
physiologique de 31 °C, offre un niveau de sécurité<br />
supérieur à toutes les <strong>autres</strong> techniques.<br />
Les délais de conservation pouvant aller jusqu’à<br />
cinq semaines, il est possible de réaliser tous<br />
les examens <strong>et</strong> sérologies nécessaires <strong>et</strong> de<br />
s’assurer que le greffon est parfaitement<br />
stérile. C<strong>et</strong>te méthode a toutefois un inconvénient<br />
: son coût élevé. » autre possibilité : la<br />
conservation hypothermique à 4 °c, grâce à<br />
laquelle on paralyse métaboliquement la<br />
cornée : « C<strong>et</strong>te méthode, surtout utilisée aux<br />
États-Unis, ne donne la possibilité de conserver<br />
le tissu que quelques jours. Si elle n’offre pas<br />
la thérapie cellUlaire :<br />
UNe révOlUtiON à veNir ?<br />
L’ingénierie cellulaire est l’un <strong>des</strong> grands<br />
défis de demain dans le domaine de<br />
la greffe de cornée. La mise en culture<br />
de cellules souches humaines, rendue<br />
possible à la fin <strong>des</strong> années 1990, laisse<br />
entrevoir de belles perspectives.<br />
Certains patients, pour lesquels une greffe<br />
de cornée classique ne fonctionne pas,<br />
bénéficient d’une thérapie cellulaire.<br />
Aujourd’hui, on ne peut que recréer<br />
artificiellement <strong>des</strong> cornées en laboratoire<br />
avec <strong>des</strong> cellules « immortalisées ».<br />
mais d’ici à quelques années, il devrait<br />
être possible de greffer <strong>des</strong> cornées<br />
fabriquées à partir de cellules de patients.<br />
Les cornées prélevées font l’obj<strong>et</strong> de nombreux<br />
tests afin de s’assurer qu’elles sont saines <strong>et</strong> propices<br />
à une greffe. Ce qui explique que 60 % seulement<br />
d’entre elles soient effectivement greffées.<br />
les mêmes garanties de sécurité que l’organoculture,<br />
elle se révèle, en revanche, beaucoup<br />
moins coûteuse. »<br />
Des greffes au cas par cas<br />
différents types de greffes sont ensuite pratiqués.<br />
de manière classique, les « kératoplasties<br />
transfixiantes » consistent à greffer<br />
toute l’épaisseur de la cornée. mais, ces<br />
dernières années, de grands progrès ont été<br />
réalisés grâce aux greffes « lamellaires », qui<br />
ne se concentrent que sur la couche malade<br />
de la cornée. « Il est aujourd’hui possible de<br />
pratiquer <strong>des</strong> greffes au cas par cas. En réalisant<br />
une “greffe lamellaire postérieure”, on ne<br />
remplace que les cellules mala<strong>des</strong> situées<br />
derrière la cornée. L’incision étant moins<br />
importante, l’œil s’en trouve moins fragilisé, <strong>et</strong><br />
l’on réduit l’astigmatisme postopératoire »,<br />
confirme le professeur borderie.<br />
À l’inverse, on peut aussi pratiquer une « greffe<br />
lamellaire antérieure », en ne conservant que<br />
les cellules endothéliales, qui sont les principales<br />
sources de rej<strong>et</strong>. « C<strong>et</strong>te technique est<br />
complexe, mais présente <strong>des</strong> avantages<br />
évidents, puisqu’elle perm<strong>et</strong> d’améliorer le<br />
devenir à long terme du patient en limitant<br />
considérablement le risque de rej<strong>et</strong>. » ces<br />
avancées scientifiques ne doivent toutefois pas<br />
occulter toute l’importance du travail à mener<br />
pour encourager au don. en france, sept mille<br />
patients malvoyants sont toujours en attente<br />
d’une greffe de cornée.<br />
Sacha Klimek<br />
pOUr eN SavOir plUS<br />
www.europeaneyebanks.org (site en anglais)<br />
panorama N° 105 avril 2010