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Passe Murailles n° 35 : Rester debout au trou - Webnode

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# <strong>35</strong> MAARS//AAVRIL 2012<br />

actualités<br />

UUn déétenu aassemblle ddess ppièccess<br />

pour l'inddustriee a<strong>au</strong>uttomobbiillee<br />

Maaison centrrale dde Pooiisssy<br />

<strong>au</strong> centre de détention de Muret. Dans un atelier permanent,<br />

douze à vingt détenus touchent à la plasturgie, à la<br />

soudure et <strong>au</strong> thermoformage. En dehors, seulement<br />

deux salariés composent l’équipe de cette filiale d’Aluminium.<br />

La comptable, Geneviève Arn<strong>au</strong>d, affirme sans<br />

détour que « si le droit du travail était respecté, les entreprises<br />

ne viendraient plus en prison employer les détenus.<br />

Autant employer des chômeurs ! ». Le travail en prison<br />

pose un certain nombre de contraintes en termes de<br />

logistique, d’horaires et de personnel. « Le faible coût<br />

compense ces désavantages », développe-t-elle. La<br />

société n’hésite pas à fournir son logo pour la plaquette<br />

de l’administration pénitentiaire. Elle le justifie même<br />

<strong>au</strong>près de ses clients en inscrivant sur sa publicité que<br />

l’importance accordée <strong>au</strong> travail des détenus s’explique<br />

par les effets stabilisateurs induit par l’emploi sur cette<br />

population. « On le pense bien sûr, mais mes patrons ne<br />

font pas non plus du mécénat ! Je ne sais pas où est la<br />

moralité car les détenus y gagnent comme nous <strong>au</strong><br />

final », déclare Geneviève Arn<strong>au</strong>d. L’entreprise ne révèle<br />

pas comme MKT Societal son activité en détention <strong>au</strong><br />

grand public. Cependant, elle le dévoile à ses clients et<br />

affiche son soutien à l’administration pénitentiaire.<br />

Une réinsertion d’apparat<br />

Les méthodes de communication diffèrent. Les<br />

raisons de l’implantation des sociétés en milieu carcérale<br />

convergent. L’intérêt économique prime. Sans leur poser<br />

la question, cette motivation n’est affichée nulle part. Le<br />

directeur de Midi Cintre, M. Nembrini, intervenant dans<br />

plusieurs établissements pénitenciers en Midi-Pyrénées,<br />

06<br />

exprime l’opinion de l’ensemble d’entre elles : « Nous<br />

ne sommes pas là pour juger, nous respectons le<br />

cadre de la légalité ».<br />

Serait-ce à l’administration pénitentiaire de<br />

modifier ses conditions ? « On a déjà renvoyé une<br />

entreprise avec qui on était partenaire depuis des<br />

années. Elle engageait de moins en moins de détenus<br />

avec des salaires très faibles », se félicite Guylaine<br />

Hervy-Perre<strong>au</strong>, chef du Département des politiques<br />

d’insertion, de probation et de la prévention de la<br />

récidive à Toulouse. Les partenaires concessionnaires<br />

doivent <strong>au</strong>ssi participer à la réinsertion des détenus.<br />

Dans les faits, elle passe en second plan. Les obliger à<br />

être transparent sur leurs activités en détention, permettrait-il<br />

de sélectionner seulement ceux motivés<br />

pour les réinsérer ? « Nous comprenons leur souhait de<br />

ne pas divulguer ce partenariat par rapport à la concurrence<br />

notamment », déclare-t-elle. Christophe Usanos<br />

ajoute : « Notre objectif est de les inciter à collaborer<br />

avec nous, pas de communiquer. Même celles qui ne<br />

parlent pas participent à l’accompagnement des détenus<br />

vers l’insertion. »<br />

Ne pas communiquer ou le faire en masquant<br />

les avantages économiques, ces choix révèlent l’ambiguïté<br />

de l’emploi de cette main d’œuvre qui n’est pas<br />

liée par un contrat de travail. « L’État a pour responsabilité<br />

de clarifier la situation et de rendre accessible le droit<br />

du travail, car on pourra toujours avoir une fuite des<br />

entreprises pour c<strong>au</strong>se d’image », propose François Bès<br />

membre de l’Observatoire international des prisons 4 .<br />

La communication de MKT Societal <strong>au</strong>rait pu<br />

servir d’exemple et rompre avec les fantasmes <strong>au</strong>tour<br />

des détenus. L’affaire est renvoyée <strong>au</strong> 12 septembre prochain.<br />

Elle a le mérite de faire connaître <strong>au</strong> grand public<br />

les conditions de travail <strong>au</strong> sein des établissements pénitenciers,<br />

<strong>au</strong>-delà des messages positifs renvoyés par les<br />

entreprises et l’administration.<br />

NOTES<br />

1. Aurélien Chartendr<strong>au</strong>lt, Joséfa Lopez et Julien Valente, « Les ouvriers de l’ombre »,<br />

webdocumentaire, L’Express, 1 er juin 2011.<br />

2. Chiffres clés de l’administration pénitentiaire, 1 er janvier 2011.<br />

3. Interview de L<strong>au</strong>re Geradon de Vera, par Ludivine Le Goff, Auféminin.com, 12 mai<br />

2010.<br />

4. Aurélien Chartendr<strong>au</strong>lt, Joséfa Lopez et Julien Valente, « Les ouvriers de l’ombre »,<br />

webdocumentaire, Op. cit.

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