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Grand Théâtre de Reims - Cndp

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Audrey GAUTHIER<br />

Enseignant relais<br />

03.26.61.91.94<br />

audrey.gauthier@ac-reims.fr<br />

<strong>Grand</strong> <strong>Théâtre</strong> <strong>de</strong> <strong>Reims</strong><br />

Caroline Mora<br />

Service Jeune Public<br />

03 26 50 31 06<br />

caroline-mora@grandtheatre<strong>de</strong>reims.com


LES MAMELLES DE<br />

TIRESIAS<br />

Francis POULENC<br />

LE MEDIUM<br />

Gian Carlo MENOTTI<br />

Audrey GAUTHIER<br />

Enseignant relais<br />

03.26.61.91.94<br />

audrey.gauthier@ac-reims.fr<br />

<strong>Grand</strong> <strong>Théâtre</strong> <strong>de</strong> <strong>Reims</strong><br />

Caroline Mora<br />

Service Jeune Public<br />

03 26 50 31 06<br />

caroline-mora@grandtheatre<strong>de</strong>reims.com


LES MAMELLES DE TIRESIAS<br />

Francis POULENC<br />

LE MEDIUM<br />

Gian Carlo MENOTTI<br />

Ce dossier se compose <strong>de</strong>s fiches suivantes :<br />

LA PRODUCTION<br />

LES BIOGRAPHIES<br />

LES SYNOPSIS<br />

LES PISTES PÉDAGOGIQUES, LES LIENS


La PRODUCTION<br />

Direction musicale : Bruno MEMBREY<br />

Mise en scène : Olivier BENEZECH<br />

Scénographie : Olivier MILAGOU<br />

Orchestre : <strong>Grand</strong> <strong>Théâtre</strong> <strong>de</strong> <strong>Reims</strong><br />

LES MAMELLES DE TIRESIAS<br />

Production :<br />

Opéra <strong>de</strong> Toulon-Provence-Méditerranée.<br />

Diffusion :<br />

La clef <strong>de</strong>s chants et Nord Pas-<strong>de</strong>-Calais.<br />

La Distribution :<br />

THÉRÈSE : Renate Arends<br />

LA MARCHANDE DE JOURNAUX : Magali Paliès<br />

LE MARI : Marc Maullion<br />

Mr LACOUF ET LE JOURNALISTE : Mathieu Cabanès<br />

Mr PRESTO ET LE FILS : Vincent Billier<br />

LE DIRECTEUR ET LE GENDARME : Mathieu Lécroart<br />

LE MEDIUM<br />

Coproduction :<br />

La clef <strong>de</strong>s chants, le <strong>Grand</strong> <strong>Théâtre</strong> <strong>de</strong> Limoges et le <strong>Grand</strong> théâtre <strong>de</strong> <strong>Reims</strong>.<br />

La Distribution :<br />

Mme FLORA : Blandine Folio-Perès<br />

MONICA : Renate Arends<br />

Mrs GOBINEAU : Diana Higbee<br />

Mrs NOLAN : Magali Paliès<br />

Mr GOBINEAU : Vincent Billier


LES BIOGRAPHIES<br />

LES MAMELLES DE TIRESIAS<br />

SA VIE :<br />

POULENC Francis (1899/1963)<br />

« Je crois bien que je préfère cette œuvre à tout ce que j’ai écrit. Si<br />

l’on veut se faire une idée <strong>de</strong> ma complexe personnalité musicale, on<br />

me trouvera très exactement moi-même aussi bien dans les<br />

Mamelles que dans mon Stabat Mater. »<br />

Francis PouIenc naît à Paris, cité qu'il affectionnera toute sa vie pour son élégance et<br />

son énergie ; il y meurt à l'âge <strong>de</strong> soixante-quatre ans. Agé d'à peine sept ans, il<br />

compose <strong>de</strong> courtes pièces et son ambition précoce <strong>de</strong> jouer du piano est encouragée<br />

par sa mère, elle-même musicienne. Il continue ses étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> piano <strong>de</strong> façon plus<br />

sérieuse avec Ricardo Vines qui le présente à Satie, Casella et Auric. Après voir obtenu<br />

son diplôme au Lycée Condorcet et fait son service militaire <strong>de</strong> trois années, Poulenc<br />

étudie avec Koechlin. Ainsi que les autres compositeurs du Groupe <strong>de</strong>s Six (Milhaud,<br />

Auric, Honegger, Durey et Tailleferre), Poulenc rejette le goût contemporain pour le<br />

romantisme et l'impressionnisme et se prononce en faveur du style populaire et plein<br />

d'esprit du music-hall, adoptant Satie et Cocteau comme maîtres esthétiques et<br />

spirituels. Il admire beaucoup la poésie, en particulier celle <strong>de</strong> G. Apollinaire, M. Jacob,<br />

et P. Eluard et accompagne Pierre Bernac lors <strong>de</strong> ses nombreux récitals <strong>de</strong> mélodies sur<br />

ces poèmes, à la fin <strong>de</strong>s années trente. Les compositions <strong>de</strong> Poulenc reflètent un réel<br />

bon honneur et un sens <strong>de</strong> l'invention spontanée ; elles témoignent toujours d'une<br />

gran<strong>de</strong> indépendance d'esprit.<br />

Son père était un <strong>de</strong>s fondateurs <strong>de</strong>s établissements Poulenc Frères, qui <strong>de</strong>vinrent<br />

Rhône-Poulenc. En 1935, <strong>de</strong> passage à Rocamadour et suite à la mort acci<strong>de</strong>ntelle <strong>de</strong> son<br />

ami le compositeur et critique Pierre-Octave Ferroud, il vécut une profon<strong>de</strong> conversion à<br />

la foi catholique <strong>de</strong> son enfance. Il composa ses Litanies à la Vierge noire en 1936. Ses<br />

œuvres religieuses furent par la suite une messe (1937) et un Stabat Mater (1950),<br />

entre autres. Il est enterré au cimetière du Père Lachaise à Paris.<br />

SON OEUVRE:<br />

Des opéras : Les Dialogues <strong>de</strong>s Carmélites en 1957 ; La Voix humaine en 1959.<br />

Des œuvres bouffonnes : Les Mamelles <strong>de</strong> Tirésias, en 1947<br />

Des œuvres religieuses : Litanies à la vierge noire, en 1936, un " gloria pour soprano<br />

solo, chœur mixte et orchestre", un "Stabat mater" pour soprano, choeur mixte et<br />

orchestre.<br />

Des ballets : Les Biches, en 1924<br />

Des pièces pour piano dont le concerto pour piano et orchestre qui était nommé <strong>de</strong> son<br />

vivant le Concerto numéro 1 et qu'il nommait en privé, pour <strong>de</strong>s raisons mal connues, le<br />

Concerto casquette.<br />

Une mise en musique <strong>de</strong> l'histoire <strong>de</strong> Babar l'éléphant pour récitant et piano (plus tard<br />

orchestrée par Jean Françaix)


Un concerto pour orgue, cor<strong>de</strong>s, et timbales, un concerto pour piano, un concerto pour<br />

<strong>de</strong>ux pianos, le "concert champêtre" pour clavecin et orchestre<br />

De la musique <strong>de</strong> chambre, notamment une sonate pour clarinette et piano (1962), une<br />

sonate pour flûte et piano, un sextuor pour piano et instruments à vent<br />

Nombreuses pièces profane et religieuses pour chœur mixte à cappella : "sept chansons"<br />

sur <strong>de</strong>s textes <strong>de</strong> Guillaume Apollinaire et Paul Eluard, " un soir <strong>de</strong> neige", "Chansons<br />

françaises" sur <strong>de</strong>s textes anonymes du Moyen Âge,"Chansons à boire", "quatre petites<br />

prières <strong>de</strong> saint François d'Assise" pour chœur <strong>de</strong> voix d'hommes, "Petites voix" pour<br />

chœur d'enfants, une "messe en sol majeur" et plusieurs motets.<br />

SON OEUVRE:<br />

APOLLINAIRE Guillaume (1880/1918)<br />

D'origine polonaise et <strong>de</strong> son vrai nom Wilhelm <strong>de</strong> Kostrowitzki, est<br />

né à Rome en 1880. Depuis 1903, il publiait <strong>de</strong>s poèmes, parfois<br />

dans ses propres revues. Il est mort à Paris en 1918, après avoir été<br />

grièvement blessé à la guerre sur le front français. «Apollinaire a<br />

trouvé, surtout <strong>de</strong>puis 1945, la place qui lui revient: moins celle d'un<br />

novateur, parce qu'il a eu le tort <strong>de</strong> ne systématiser aucune <strong>de</strong> ses<br />

intuitions, que celle d'un génie lyrique et d'un musicien du langage»<br />

L'Enchanteur pourrissant (1899/1904)<br />

Rhénanes (1901/02)<br />

Les Mamelles <strong>de</strong> Tirésias (1903/18)<br />

Les Mémoires d'un jeune Don Juan (1905)<br />

La Chanson du Mal-Aimé (1909)<br />

La Poésie symboliste (1909)<br />

L'Hérésiarque et Cie (1910)<br />

Le Bestiaire ou Cortège d'Orphée (1911)<br />

Les Peintres cubiste (1913)<br />

Alcools (1913)<br />

Les Méditations esthétique (1913)<br />

L'Antitradition futuriste (1914)<br />

Le Poète assassiné (1916)<br />

L'Esprit nouveau et les Poètes (1917)<br />

Le Flâneur <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux rives (1918)<br />

Calligrammes (1918)<br />

Le Guetteur mélancolique (posth. 1952)<br />

Poèmes à Lou (posth. 1955)<br />

Poèmes retrouvés (posth. 1956)


LE MEDIUM<br />

MENOTTI Gian Carlo (1911)<br />

Menotti commença à écrire ses chansons alors qu'il n'avait que 7<br />

ans. A 11 ans déjà, il écrivait le livret et la musique <strong>de</strong> son<br />

premier opéra : La mort <strong>de</strong> Pierrot. Cependant il ne commença<br />

réellement son activité musicale qu'en 1923 lorsqu'il entra au<br />

Conservatoire Verdi <strong>de</strong> Milan.<br />

Après la mort <strong>de</strong> son père, Menotti et sa mère vinrent s’installer<br />

aux USA en 1928 il entra ensuite au Curtis Institute of Music <strong>de</strong><br />

Phila<strong>de</strong>lphie. Parmi les étudiants <strong>de</strong> cet institut, se trouvaient<br />

également Leonard Bernstein et Samuel Barber qui <strong>de</strong>vinrent<br />

plus tard les partenaires <strong>de</strong> Menotti dans son travail. On peut citer<br />

notamment le plus célèbre opéra <strong>de</strong> Samuel Barber intitulé Vanessa dont le livret est<br />

signé par Menotti. La première <strong>de</strong> cet opéra eut lieu en 1958 au Metropolitan Opera.<br />

Menotti était encore étudiant au Curtis Institute of Music lorsqu’il signa en italien son<br />

premier grand opéra, Amelia al Ballo (Amelia va au Bal, en français). Par la suite, il<br />

n’écrivit en italien que <strong>de</strong>ux autres opéras L’Île <strong>de</strong> Dieu et Le <strong>de</strong>rnier Sauvage. Le reste<br />

<strong>de</strong> son œuvre fut écrite en anglais. Ses travaux les plus important furent composés dans<br />

les années 1940 et 1950. Par la suite, Menotti enseigna également au Curtis Institute of<br />

Music et eut parmi ses étudiants et protégés un compositeur américain du nom <strong>de</strong><br />

Stanley Hollingsworth.<br />

Menotti rédigea les livrets <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux opéras <strong>de</strong> Samuel Barber, Vanessa et A Hand of<br />

Bridge et revisita le <strong>de</strong>rnier - Antony and Cleopatra. Amelia <strong>de</strong> Menotti remporta un tel<br />

succès que NBC en commanda une version audio pour la radio. The Old Maid and the<br />

Thief fut le premier travail <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> ampleur pour Menotti. Il composa ensuite <strong>de</strong>s<br />

ballets, Sebastian en 1944 et un concert pour piano en 1945 avant <strong>de</strong> revenir à son<br />

premier amour, l'opéra, avec The Medium et Le téléphone.<br />

Œuvres Musicales<br />

• Amelia al Ballo (1937)<br />

• The Island of God (1942)<br />

• The Medium (1946)<br />

• The Telephone, or L'Amour à trois (1947)<br />

• The Consul (1950)<br />

• Amahl and the Night Visitors, television opera (1951)<br />

• Labyrinth, television opera (1963)<br />

• The Last Savage, (1963)<br />

• Martin's Lie, (1964)<br />

• Help, Help, the Globolinks!, (1968)<br />

• The Most Important Man, (1971)<br />

• The Egg, (1976)<br />

• The Hero, (1976)<br />

• The Trial of the Gypsy, (1978)<br />

• Chip and his Dog, (1979)<br />

• A Bri<strong>de</strong> from Pluto, (1982)<br />

• The Boy Who Grew Too Fast, (1982)<br />

• Goya, (1986)<br />

• The Wedding (Giorno da Nozze), (1988)<br />

• Goya [rev.], (1991)<br />

• The Singing Child, (1993)


LES SYNOPSIS<br />

LES MAMELLES DE TIRESIAS<br />

SITUATION : Apollinaire avait situé son action théâtrale à une époque imprécise dans<br />

l’île <strong>de</strong> Zanzibar, Poulenc place son opéra en 1912 à Zanzibar, ville<br />

imaginaire près <strong>de</strong> Monte-Carlo, car, comme il l’écrit : « 1912 est l’époque<br />

héroïque d’Apollinaire, celle <strong>de</strong>s premiers combats pour le cubisme, <strong>de</strong> la<br />

publication d’Alcools. J’ai substitué Monte-Carlo à Zanzibar pour éviter<br />

l’exotisme, et parce que Monte-Carlo, que j’adore, et où Apollinaire a passé<br />

les quinze premières années <strong>de</strong> sa vie, est bien assez tropical pour le<br />

Parisien que je suis ».<br />

ACTE I :<br />

Comme dans Paillasse, le ri<strong>de</strong>au se lève sur le directeur <strong>de</strong> la troupe qui va exprimer la<br />

signification ultime <strong>de</strong> la représentation : « faites <strong>de</strong>s enfants, vous qui n’en faisiez<br />

guère ». Poulenc a allégé ce prologue <strong>de</strong> toutes les allusions à la première guerre<br />

mondiale, et aux obus qui éteignent « même les étoiles », superbe métaphore pour<br />

toutes ces vies interrompues, et qu’il convient <strong>de</strong> remplacer aux plus vite. Privé <strong>de</strong> ces<br />

références, l’appel à la repopulation du pays perd une gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong> sa signification.<br />

A la fin du prologue, Thérèse surgit sur scène, clamant son féminisme et son désir<br />

d’indépendance. Des coulisses, son mari lui réclame du lard. Pour exprimer sa libération,<br />

Thérèse fait sortir ses « mamelles » <strong>de</strong> son corsage, ce sont <strong>de</strong>ux ballons, l’un rouge,<br />

l’autre bleu, qui s’envolent, et que Thérèse fait exploser. La barbe se met à lui pousser.<br />

Le mari, qui sort <strong>de</strong> la maison, pense que Thérèse a été assassinée par cet individu<br />

barbu, et veut la venger. Thérèse se fait reconnaître et lui annonce qu ‘elle portera<br />

désormais un nom d’homme : Tirésias. Puis elle retourne au logis et jette les objets du<br />

ménage par la fenêtre : le violon (un pot <strong>de</strong> chambre), le piano (un urinal). Le mari<br />

rentre précipitamment.<br />

A ce moment, Lacouf et Presto sortent du café, ivres et dansant une polka. Ils se<br />

disputent pour savoir s’ils sont à Paris ou à Zanzibar. La querelle s’envenimant, ils se<br />

battent en duel au pistolet et tombent morts tous les <strong>de</strong>ux.<br />

Tirésias sort du logis, habillée en homme, suivie <strong>de</strong> son mari, habillé en femme et les<br />

mains ligotées. Tirésias achète un journal dans lequel elle apprend la mort <strong>de</strong> Lacouf et<br />

Presto. Le peuple <strong>de</strong> Zanzibar enlève les corps, en commentant : « comme il perdait au<br />

zanzibar, monsieur Presto a perdu son pari, puisque nous sommes à Paris. Monsieur<br />

Lacouf n’a rien gagné, puisque la scène se passe à Zanzibar, autant que la Seine passe à<br />

Paris. »<br />

Le mari reste seul sur scène. Entre le gendarme, dans un cheval-jupon, qui, le prenant<br />

pour une femme, commence à lui compter fleurette. Le mari se rend compte que puisque<br />

sa femme est un homme, il est juste que lui soit une femme, et tandis que le peuple<br />

acclame le général et le député Tirésias, déci<strong>de</strong> <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s enfants, pour repeupler<br />

Zanzibar. Le gendarme, la marchan<strong>de</strong> <strong>de</strong> journaux, Lacouf et Presto ressuscités et en<br />

patinette, commentent sa décision, dans un texte aux allusions joyeusement grivoises<br />

(« et fumez la pipe bergère, moi je vous jouerai du pipeau… ».)<br />

Un entracte se déroule <strong>de</strong>vant le ri<strong>de</strong>au fermé, montrant les parents-choristes et le<br />

chœur <strong>de</strong>s nouveaux nés : « vous qui pleurez en voyant la pièce, souhaitez les enfants<br />

vainqueurs ».


ACTE II :<br />

Le mari seul sur scène chante les joies <strong>de</strong> la paternité. Il a fait 40 049 enfants en un seul<br />

jour !<br />

Un journaliste parisien se présente et l’interroge. Le mari explique que ses enfants le<br />

nourrissent déjà : accapareur (une trace <strong>de</strong> la guerre), romancier, artiste…le journaliste<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> au mari <strong>de</strong> lui prêter <strong>de</strong> l’argent, et se fait jeter <strong>de</strong>hors.<br />

Le mari déci<strong>de</strong> <strong>de</strong> créer un enfant journaliste, ce qu’il fait en jetant <strong>de</strong> l’encre, un porteplume,<br />

<strong>de</strong> la colle, <strong>de</strong>s ciseaux et du papier journal dans un berceau. Hélas ce nouvel<br />

enfant n’est pas très réussi, il réunit toutes les tares <strong>de</strong>s mauvais journalistes, et tente<br />

<strong>de</strong> faire chanter son père.<br />

Le gendarme est <strong>de</strong> retour : la population zanzibarienne est affamée par le surcroît <strong>de</strong><br />

bouches à nourrir, et va mourir <strong>de</strong> faim. Le mari connaît la solution : il leur faut <strong>de</strong>s<br />

cartes (<strong>de</strong>s cartes <strong>de</strong> rationnement bien sûr, encore une séquelle <strong>de</strong> la guerre !). Cette<br />

allusion aux cartes fait apparaître la cartomancienne, qui se met à chanter les mérites<br />

<strong>de</strong> la fécondité, et insulte le gendarme qui est stérile. Le gendarme veut arrêter la<br />

cartomancienne, ils se battent tous les <strong>de</strong>ux, la cartomancienne étrangle le gendarme,<br />

puis se débarrasse <strong>de</strong> ses voiles. Le mari reconnaît alors sa Thérèse, qui sans ses<br />

mamelles, est « plate comme une punaise ». Thérèse est d’accord pour reprendre la vie<br />

commune, mais pas pour remettre ses mamelles.<br />

Le gendarme ressuscité, le peuple <strong>de</strong> Zanzibar, la marchan<strong>de</strong> <strong>de</strong> journaux et les <strong>de</strong>ux<br />

époux chantent les joies <strong>de</strong> l’amour et <strong>de</strong> la fécondité.<br />

LE MEDIUM<br />

Acte I :<br />

Madame Flora, médium, assistée par sa fille Monica et par Toby, un adolescent muet<br />

d'origine bohémienne, reçoit trois clients, M. et Mme Gobineau et Mme Nolan, pour<br />

une séance <strong>de</strong> spiritisme. Flora évoque leurs enfants disparus, et les défunts se<br />

manifestent par une apparition, par un rire ; mais la séance est truquée : c'est Toby qui,<br />

à l'ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> fils, fait bouger la table, et c'est Monica qui joue le rôle <strong>de</strong>s disparus. Soudain,<br />

Flora laisse échapper un cri : elle a senti une main glacée étreindre sa gorge, elle renvoie<br />

les clients, et accuse Toby <strong>de</strong> l'avoir volontairement effrayée, mais le jeune muet ne fait<br />

aucun signe, ni d'aveu, ni <strong>de</strong> dénégation. La peur hante désormais Flora.<br />

Acte II :<br />

Quelques jours plus tard. Monica et Toby jouent dans le salon. Survient Flora, qui noie sa<br />

frayeur dans l'alcool. Elle interroge <strong>de</strong> nouveau Toby et, ne pouvant rien tirer <strong>de</strong> lui, le<br />

fouette jusqu'au sang. A ses clients <strong>de</strong> retour, elle annonce qu'il n'y aura plus <strong>de</strong><br />

séances, et tente, en leur dévoilant tous les truquages, <strong>de</strong> les convaincre qu'elle les a<br />

bernés, mais ses victimes ne veulent rien comprendre, et croient à ce qu'on leur faisait<br />

voir et entendre. Flora les chasse, Monica s'enferme dans sa chambre et Toby s'enfuit.<br />

Restée seule, Flora est victime d'hallucinations. Toby revient discrètement et se<br />

dissimule. Sentant une présence insolite, <strong>de</strong>vinant une forme <strong>de</strong>rrière un ri<strong>de</strong>au, Flora<br />

saisit un revolver et tire. Sur le visage <strong>de</strong> l'enfant abattu, elle cherche en vain, avec<br />

désespoir, une réponse qui ne viendra jamais.


LES LIENS / LES PISTES<br />

DE LA LECTURE :<br />

Le mythe <strong>de</strong> Tirésias :<br />

Tirésias, il n’est pas inutile <strong>de</strong> le rappeler, est un personnage mythologique, qui en se<br />

promenant, surprit <strong>de</strong>ux serpents en train <strong>de</strong> s’accoupler et tua la femelle, ce qui eut<br />

pour effet <strong>de</strong> le transformer en femme. Il (elle) se fit prostituée, mais sept ans plus tard,<br />

il (elle) assista <strong>de</strong> nouveau à la même scène au même endroit, et en tuant le mâle,<br />

re<strong>de</strong>vint homme. Survint une querelle entre Jupiter et Junon au sujet <strong>de</strong> qui, <strong>de</strong> l’homme<br />

ou <strong>de</strong> la femme, a le plus <strong>de</strong> plaisir dans l’amour. Jupiter pensait qu’il s’agit <strong>de</strong> la femme,<br />

Junon optait pour l’homme. Ils choisirent tout naturellement Tirésias comme arbitre.<br />

Tirésias se prononça en faveur <strong>de</strong> Jupiter et déclara le plaisir <strong>de</strong> la femme sept fois plus<br />

grand que celui <strong>de</strong> l’homme. Pour le punir, Junon l’aveugla. Tirésias, aveugle, <strong>de</strong>vint<br />

« voyant », c’est à dire <strong>de</strong>vin et entre autres, révéla sa faute à Œdipe.<br />

Selon certaines variantes, Tirésias, née <strong>de</strong> sexe féminin, a, dès l’âge <strong>de</strong> sept ans, inspiré<br />

<strong>de</strong> l’amour à Apollon, avant <strong>de</strong> subir sept changements <strong>de</strong> sexe.<br />

Elle, c’est Thérèse bien sûr, mais c’est aussi sa créatrice Denise Duval. Voici une héroïne<br />

insoumise qui s’insurge contre l’autorité masculine, revendique <strong>de</strong>s droits égaux à ceux<br />

<strong>de</strong> l’homme et quitte le foyer conjugal. Elle aspire à <strong>de</strong>venir soldat, artiste, député,<br />

avocat, sénateur, ministre, prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la chose publique…Elle a décidé qu’aucun <strong>de</strong>s<br />

postes traditionnellement réservés aux hommes ne lui sera interdit.<br />

Et <strong>de</strong> la même façon que ses arrières-petites-filles brûleront leurs soutien-gorges dans<br />

les années 1970, Thérèse fait exploser ses mamelles ! Grâce soit rendue à Apollinaire et<br />

à Poulenc, mais notre chère Thérèse n’est jamais tournée en ridicule, jamais transformée<br />

en amazone hommasse, Thérèse se réalise, tout simplement !<br />

Bien sûr, nous sommes au début du siècle, et pour obtenir le pouvoir social, politique et<br />

militaire, Thérèse adopte une i<strong>de</strong>ntité masculine. Elle doit se transformer en Tirésias,<br />

qu’on ne ressent pas vraiment comme un homme, mais comme un être plus ou moins<br />

androgyne, le charme féminin sous la réussite sociale masculine, si l’on peut dire. Elle<br />

doit aussi neutraliser son mari en le ligotant, et « l’androgyniser » en lui faisant revêtir<br />

<strong>de</strong>s vêtements féminins.<br />

Et Thérèse réussit fort bien sa reconversion : elle est acclamée par le peuple comme<br />

général, comme député !<br />

Il est vraiment incroyable qu’en 1917, Apollinaire ait réussi à créer un personnage si<br />

actuel, que les aspirations <strong>de</strong>s femmes, qui en étaient encore à leurs balbutiements,<br />

aient été si bien comprises, sans jamais être tournées en ridicule. Elles sont si justement<br />

décrites qu’une femme <strong>de</strong> l’an 2001 peut s’y reconnaître. Il faut dire qu’Apollinaire, qui<br />

fut l’amant <strong>de</strong> Marie Laurencin pendant plusieurs années, <strong>de</strong>vait s’y connaître en matière<br />

<strong>de</strong> femmes émancipées !<br />

Bien sûr, cet esprit <strong>de</strong> révolte et ce désir d’indépendance ne seront pas immédiatement<br />

satisfaits. Il faudra une <strong>de</strong>uxième guerre mondiale avant que les femmes obtiennent le<br />

droit <strong>de</strong> vote. Les aspirations <strong>de</strong> l’héroïne sont bien en avance sur son époque.


Les Mamelles <strong>de</strong> Tirésias : du Drame Surréaliste à l'Opéra Bouffe<br />

Les Mamelles <strong>de</strong> Tirésias, drame surréaliste écrit par Guillaume Apollinaire, fut<br />

représenté pour la première fois le 24 juin 1917, au théâtre René-Maubel, à Montmartre,<br />

avec une musique <strong>de</strong> scène d'une " musicienne du dimanche ", Mme Germaine Albert-<br />

Birot, et dans une mise en scène <strong>de</strong> l'acteur Marcel Herrand. Qui aurait put prévoir qu'il<br />

servirait <strong>de</strong> livret, trente ans plus tard, à l'une <strong>de</strong>s œuvres les plus accomplies du théâtre<br />

lyrique français contemporain. Il était cependant tout naturel que le musicien du Bestiaire<br />

et <strong>de</strong> tant <strong>de</strong> poèmes d'Apollinaire, en quête d'un livret d'opéra bouffe, fût séduit par la<br />

loufoquerie, la fantaisie mi-narquoise, mi-sérieuse <strong>de</strong>s Mamelles. Avant lui, Erik Satie et<br />

George Auric, sollicités par le poète, avaient été rebutés par le caractère décousu <strong>de</strong><br />

l'intrigue, ou plus exactement le manque d'intrigue.<br />

On se trouve en présence d'une suite <strong>de</strong> gags plus ou moins réussis, qui n'illustrent que<br />

faiblement le <strong>de</strong>ssein initial du poète : exhorter les Français à faire <strong>de</strong>s enfants. Pour tout<br />

dire, le ressort dramatique, théâtral, <strong>de</strong> la pièce est inexistant : aucune progression,<br />

aucun développement, aucune intrigue. En bref, ce n'est pas là véritablement du théâtre,<br />

mais une " fantaisie poétique ". Comment imaginer qu'un texte aussi peu vertébré pût<br />

jamais servir <strong>de</strong> livret à un opéra-bouffe ?<br />

Il n'y a pas là, pour le musicien, matière à une musique dramatique, en étroite connexion<br />

avec l'action, qui doit la souligner, " coller " absolument avec elle ; mais c'est autant <strong>de</strong><br />

gagné, puisque l'action scénique laisse la musique régner seule. La rançon <strong>de</strong> cette<br />

liberté c'est que le musicien se doit d'être égal à lui-même du début à la fin <strong>de</strong> l'œuvre.<br />

De cette séduisante mais dangereuse liberté, Francis Poulenc a su tirer le maximum.<br />

Toutes les intentions du poème, toutes les actions <strong>de</strong>s personnages, toute leur agitation,<br />

se réalisent en musique. De la première à la <strong>de</strong>rnière note, celle-ci fait entendre sa voix<br />

que rien ne vient empêcher, ni brouiller. A la cocasserie <strong>de</strong>s situations et <strong>de</strong>s mots<br />

correspond la cocasserie <strong>de</strong> la musique ; à la fantaisie du poète, narquoise, irréelle, et<br />

souvent plus humaine qu'il paraît, répon<strong>de</strong>nt la verve et l'invention du musicien : l'accord<br />

<strong>de</strong> l'un avec l'autre est total.<br />

En écoutant les Mamelles <strong>de</strong> Tirésias, il est difficile <strong>de</strong> ne pas songer à une autre œuvre<br />

<strong>de</strong> Poulenc, bien antérieure, puisqu'elle date <strong>de</strong> 1932 : la cantate profane le Bal masqué,<br />

sur <strong>de</strong>s poèmes <strong>de</strong> Max Jacob. Certes l'œuvre est différente, et dans son esprit, et dans<br />

sa conception, et dans sa forme. Mais on y trouve déjà une cocasserie mélodique et<br />

vocale, d'essence quasi théâtrale, dont Poulenc se souviendra lorsqu'il écrira les<br />

Mamelles <strong>de</strong> Tirésias.<br />

L'opéra commence immédiatement par le prologue, que ne précè<strong>de</strong> aucune ouverture.<br />

L'air du directeur <strong>de</strong> la troupe est l'une <strong>de</strong>s plus belles pages <strong>de</strong> la partition. Ample et<br />

solennel, mais sans emphase, ce prologue, d'une gravité singulière, dégage une<br />

indiscutable émotion.<br />

Le ton change quand le ri<strong>de</strong>au se lève sur le Ier acte. Un presto très agité prépare le<br />

changement <strong>de</strong> sexe <strong>de</strong> Thérèse. Et l'envol <strong>de</strong> ses seins, sous la forme <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux ballons<br />

qui montent vers les cintres, donne le départ à une valse ravissante, d'une grâce<br />

sensuelle, qui se déroule avec <strong>de</strong>s modulations exquises. Elle cé<strong>de</strong>ra bientôt la place à la<br />

savoureuse polka qui rythme l'entrée <strong>de</strong> Lacouf et <strong>de</strong> Presto. C'est l'occasion d'un duo<br />

cocasse et tendre, où la ligne mélodique s'infléchit avec une naïveté feinte.<br />

Après le duel, qui se termine par la mort (réversible) <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux pantins, le peuple <strong>de</strong><br />

Zanzibar, conduit par Thérèse, entonne un chœur dont l'accompagnement, d'une gran<strong>de</strong><br />

simplicité, a la beauté poétique d'une vieille chanson du XVIe siècle.


L'entrée du gendarme, qui ne tar<strong>de</strong>ra guère à faire la cour au mari <strong>de</strong> Thérèse habillé en<br />

femme, est l'occasion d'un nouveau duo cocasse et tendre qui s'achève sur une<br />

déclaration du mari : puisqu'à Zanzibar, les femmes ne font plus d'enfant, aux hommes<br />

d'en faire ! Ici le ton re<strong>de</strong>vient grave et quasi-lyrique.<br />

L'acte se termine dans un mouvement endiablé par un chœur général où se mêlent<br />

curieusement la solennité glorieuse d'un pseudo-choral et la vivacité prime sautière d'un<br />

rondo à la française. Un " entracte " sépare le Ier et le IIème acte. Le thème du final du<br />

Ier acte est repris par le chœur, <strong>de</strong>vant le ri<strong>de</strong>au, sur un ton pompeux et solennel, tandis<br />

que l'on entend les voix <strong>de</strong>s nouveau-nés. Il est interrompu par un court air du mari qui<br />

chante les joies <strong>de</strong> la paternité et annonce avec fierté la naissance <strong>de</strong> "49.049 enfants en<br />

un seul jour". Arrive un journaliste <strong>de</strong> Paris. Après cette entrevue, à laquelle le mari met<br />

fin en chassant le visiteur, se déroule une scène exquise: le mari fait venir au mon<strong>de</strong> un<br />

journaliste. Le récit, par ce <strong>de</strong>rnier, <strong>de</strong>s événements du jour passé, est une <strong>de</strong>s pages les<br />

mieux venues <strong>de</strong> la partition, et permet à Poulenc <strong>de</strong> rendre hommage à Picasso.<br />

Le gendarme réapparaît, suivi <strong>de</strong> peu par Thérèse travestie en cartomancienne. Une série<br />

<strong>de</strong> vocalises aériennes, traitées dans un style quasi instrumental, annonce son arrivée.<br />

La réconciliation <strong>de</strong> Thérèse et <strong>de</strong> son mari sert <strong>de</strong> prétexte à une mélodie, d'un charme<br />

poétique, mélancolique et doux.<br />

L'œuvre s'achève dans un véritable tourbillon musical qui prend son départ sur une valse<br />

d'une amoureuse langueur, pendant <strong>de</strong> la valse du Ier acte, pour se terminer en une<br />

sorte d'allègre galop.<br />

Si l'apparente incohérence du texte laissait au musicien une entière liberté, elle n'était<br />

pas sans danger : l'absence d'épine dorsale dans la pièce d'Apollinaire risquait d'inspirer<br />

une partition invertébrée, sans unité réelle, faite d'une juxtaposition d'airs, <strong>de</strong> duos,<br />

d'ensembles, etc., qu'aucune nécessité n'aurait reliés. Cette difficile unité, Poulenc a su la<br />

trouver et l'exprimer musicalement, elle rési<strong>de</strong> principalement dans l'extraordinaire<br />

mouvement qui emporte l'œuvre. Du début à la fin, il n'y a pas <strong>de</strong> temps mort. C'est un<br />

véritable tumulte musical, certes ordonné et dirigé, qui ne s'apaise que pour mieux<br />

repartir. L'unité, l'œuvre la doit aussi au génie mélodique <strong>de</strong> Poulenc qui jaillit ici, sans<br />

jamais se tarir, avec une aisance, un naturel, une spontanéité incomparables. Il porte<br />

l'œuvre sans la moindre défaillance, <strong>de</strong> la première à la <strong>de</strong>rnière note, comme un flux<br />

continu, qu'aucune surcharge, aucun ornement inutile, aucun acci<strong>de</strong>nt ne vient alourdir,<br />

interrompre ou détourner <strong>de</strong> son cours : une fois commencée, la partition va droit son<br />

chemin, avec une rectitu<strong>de</strong> parfaite. Les formes musicales employées par Poulenc sont<br />

celles qu'il affectionne le plus et auxquelles il doit ses réussites les plus éclatantes : la<br />

mélodie, naturellement, le rondo prestement mené, le chant choral, la valse, la polka, et<br />

jusqu'à la forme <strong>de</strong> la pavane ou <strong>de</strong> la gavotte. Toutes ces formes sont employées avec<br />

une adresse extrême, un sens très sûr <strong>de</strong>s contrastes qui met l'œuvre à l'abri <strong>de</strong> tout<br />

soupçon <strong>de</strong> monotonie.<br />

Les registres <strong>de</strong> la sensibilité musicale exploités par le musicien ne sont pas moins variés<br />

: <strong>de</strong> la cocasserie la plus franche à la gravité, les Mamelles <strong>de</strong> Tirésias baignent dans un<br />

lyrisme d'une couleur particulière. Jamais il ne tombe dans la sentimentalité, tout en<br />

<strong>de</strong>meurant tendrement humain. Si les Mamelles <strong>de</strong> Tirésias est un opéra-bouffe, elle<br />

n'est pas une œuvre ironique (comme le Bal masqué par exemple), ni humoristique. Ce<br />

n'est pas qu'elle soit dépourvue d'humour ; mais celui-ci se détache sur un fond<br />

essentiellement poétique. Chaque fois qu'Apollinaire parle <strong>de</strong> Paris ou <strong>de</strong> la Seine, c'est<br />

avec une tendresse et une poésie que le musicien a su respecter et traduire fidèlement.<br />

Les pages <strong>de</strong> la partition <strong>de</strong>s Mamelles <strong>de</strong> Tirésias où apparaissent cette tendresse et<br />

cette poésie sont nombreuses : le chœur " Comme il perdait au zanzibar " (Ier acte),<br />

tous les airs du mari, l'air du fils journaliste (IIème acte), l'air <strong>de</strong> Thérèse : " Qu'importe<br />

viens cueillir la fraise ", etc. Mais, naturellement, ce qui domine dans les Mamelles <strong>de</strong><br />

Tirésias, c'est la cocasserie. Elle semble jaillir naturellement. Il est remarquable qu'elle<br />

ne cè<strong>de</strong> jamais à l'effet. Elle n'est jamais soulignée ou due à <strong>de</strong> gros procédés voyants et


tapageurs (distorsion du rythme ou dissonance <strong>de</strong> l'orchestration). Musique gaie ou<br />

bouffonne ne signifie pas musique humoristique ou pince sans rire. Si paradoxale qu'il<br />

paraisse, la musique <strong>de</strong>s Mamelles <strong>de</strong> Tirésias est sérieuse : elle ne se permet ni<br />

débraillé ni laisser-aller. Poulenc se gar<strong>de</strong> bien <strong>de</strong> souligner musicalement ce que le texte<br />

d'Apollinaire peut avoir d'incongru, <strong>de</strong> loufoque ou même d'inconvenant. Au contraire,<br />

plus les paroles semblent absur<strong>de</strong>s, sans cohérence logique, grotesques même, plus la<br />

musique gar<strong>de</strong> son sérieux. Le comique naît justement <strong>de</strong> l'effet <strong>de</strong> contraste : contraste<br />

entre la gratuité <strong>de</strong>s paroles et le lyrisme <strong>de</strong> la musique. On pourrait en donner <strong>de</strong><br />

multiples exemples. C'est ainsi que tous les airs du mari, sur <strong>de</strong>s paroles souvent<br />

ridicules, ont une beauté grave, mélodieuse et lyrique. Mais l'exemple le plus frappant<br />

est au Ier acte, le choral : Vous qui pleurez en voyant la pièce.<br />

Au sérieux <strong>de</strong> la musique, les Mamelles <strong>de</strong> Tirésias doivent leur caractère humain.<br />

Certes, Thérèse, son mari et les comparses qui les entourent sont <strong>de</strong>s fantoches : mais<br />

ceux-ci, tous fantoches qu'ils soient, ont un cœur dont les battements sont perceptibles.<br />

Roland-Manuel écrit très justement à propos <strong>de</strong> l'Heure espagnole, parlant <strong>de</strong> Ravel et <strong>de</strong><br />

ses personnages : " Casuiste et chirurgien, il règle sèchement l'allure débonnaire ou<br />

salace qui leur convient à chacun, puis leur greffe un cylindre à la place du cœur, les mue<br />

en marionnettes aux réflexes savants ou glacés. " Par une opération inverse, Francis<br />

Poulenc enlève aux marionnettes d'Apollinaire le cylindre qui leur tient lieu <strong>de</strong> cœur et<br />

leur rend ce cœur que le poète leur refusait.<br />

Si les Mamelles semblent avoir été écrites avant tout avec le cœur du musicien, dans une<br />

sorte <strong>de</strong> mouvement instinctif, l'œuvre n'en est pas moins régie par l'intelligence la plus<br />

luci<strong>de</strong>.<br />

C'est elle qui préserve cette musique gaie, d'une verve raffinée et vigoureuse, <strong>de</strong>s<br />

dangers <strong>de</strong> la facilité, <strong>de</strong> la frivolité ou <strong>de</strong> la vulgarité. C'est elle qui donne à cette œuvre<br />

son style. De dimensions restreintes, et parfaitement harmonieuses, elle met en œuvre,<br />

avec le tact et le goût le plus exquis, toutes les ressources musicales <strong>de</strong> Poulenc. Il est<br />

certain qu'il y a là un exemple assez rare d'une complète adéquation du musicien à son<br />

sujet et d'une maîtrise souveraine sur la matière musicale.<br />

Les Mamelles <strong>de</strong> Tirésias s'inscrivent directement à la suite <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux chef-d'œuvres <strong>de</strong><br />

l'opéra français : le Roi malgré lui <strong>de</strong> Chabrier, et l'Heure espagnole <strong>de</strong> Ravel. Du premier<br />

elle a la verve savoureuse et spontanée, du second l'intelligence spirituelle. Oui, les<br />

Mamelles <strong>de</strong> Tirésias allient le cœur et l'intelligence en un équilibre jamais compromis. Ce<br />

même équilibre se trouve dans l'orchestration, qui est un modèle <strong>de</strong> raffinement, <strong>de</strong><br />

sobriété éclatante et <strong>de</strong> clarté.<br />

Ecrites en 1944, les Mamelles <strong>de</strong> Tirésias, dédiées au cher Darius Milhaud pour son<br />

retour d'Amérique, furent représentées pour la première fois le 3 juin 1947, à l'Opéra-<br />

Comique. L'œuvre reçut <strong>de</strong> la critique un accueil très chaleureux. Unanimement, les<br />

Mamelles furent saluées comme l'une <strong>de</strong>s œuvres les plus significatives et les plus<br />

accomplies du compositeur. Le public fut plus réticent. Non le public musicien, mais celui,<br />

particulier, <strong>de</strong> la Salle Favart : ses réactions furent houleuses. Séduit par les grâces <strong>de</strong><br />

Manon et l'exotisme <strong>de</strong> Madame Butterfly, attendri par la mort <strong>de</strong> Mimi, il opposa au<br />

changement <strong>de</strong> sexe <strong>de</strong> Thérèse sa réprobation. Cris et protestation accompagnèrent<br />

chacune <strong>de</strong>s représentations. On peut imaginer qu'ils n'auraient pas déplu au poète, lui<br />

qui écrivait, parlant <strong>de</strong> la fantaisie <strong>de</strong> son " drame ", qu'elle se manifeste " avec un bon<br />

sens où il y a parfois assez <strong>de</strong> nouveauté pour qu'il puisse choquer et indigner, mais qui<br />

apparaîtra aux gens <strong>de</strong> bonne foi ". Ces <strong>de</strong>rniers, aussi nombreux dans la salle que les<br />

détracteurs, et répliquant à leurs protestations par <strong>de</strong> vigoureux applaudissements,<br />

eussent aussi bien préféré que les Mamelles <strong>de</strong> Tirésias fussent accompagnées sur<br />

l'affiche <strong>de</strong> l'Heure espagnole ou d'une Education manquée, plutôt que <strong>de</strong> la Vie <strong>de</strong><br />

Bohème ou <strong>de</strong>s Pêcheurs <strong>de</strong> perles. Ainsi, leur plaisir n'eût pas été troublé par


l'incompréhension d'un public trop habitué à un lyrisme larmoyant et sentimental pour<br />

reconnaître qu'une œuvre désinvolte peut être sérieuse, et qu'une musique gaie conserve<br />

toutes les vertus du style.<br />

Mais la première œuvre lyrique <strong>de</strong> Poulenc contient une dimension supplémentaire,<br />

moins évi<strong>de</strong>nte, qui n'a pas encore été abordée. Bernard Gavoty, dans un article du<br />

Figaro daté du 2 novembre 1964, rappelle une phrase significative <strong>de</strong> l'auteur : " la<br />

musique <strong>de</strong>s Mamelles, affublée d'un texte latin, ferait un très acceptable oratorio. "<br />

Poulenc avouait en effet avoir écrit <strong>de</strong> la même plume les chœurs <strong>de</strong>s Mamelles <strong>de</strong><br />

Tirésias et ceux <strong>de</strong> Stabat mater (1950) et citait volontiers, comme exemple <strong>de</strong><br />

"contrefacture" plausible, le chœur <strong>de</strong> la scène V <strong>de</strong> l'acte I, au moment où Thérèse,<br />

découvrant dans le journal la nouvelle <strong>de</strong> la mort <strong>de</strong> Lacouf et Presto ("Comme il perdait<br />

au Zanzibar..."). Nonobstant le doux balancement ternaire <strong>de</strong> la mesure à 6/8,<br />

l'accompagnement revêt l'allure d'un choral, harmonisé à quatre voix. Plus encore que le<br />

grave Stabat <strong>de</strong> 1950, le Gloria <strong>de</strong> 1959 sera véritable frère spirituel <strong>de</strong>s Mamelles <strong>de</strong><br />

Tirésias : les anges du " Laudamus te " y " tirent la langue " et les guichets du Paradis<br />

clignent <strong>de</strong> l'œil au kiosque <strong>de</strong> Zanzibar.<br />

Contrairement aux apparences, les opéras <strong>de</strong> Francis Poulenc ne sont pas si marginaux<br />

dans le répertoire lyrique du XXème siècle. En fait ce sont avant tout <strong>de</strong>s opéras français.<br />

Le vau<strong>de</strong>ville à la fin <strong>de</strong>s Mamelles <strong>de</strong> Tirésias, et la recherche mélodique très poussée<br />

nous rappelle l'opéra comique du XVIIIème et le grand opéra du XIXème. Mais ces<br />

œuvres sont aussi profondément ancrées dans le XXème, et on peut trouver <strong>de</strong>s<br />

analogies entre d'autres opéras <strong>de</strong> ce siècle et les œuvres <strong>de</strong> Poulenc. Thérèse-Tirésias<br />

est en fait la petite sœur <strong>de</strong> Conception, l'horlogère délurée <strong>de</strong> l'Heure Espagnole <strong>de</strong><br />

Maurice Ravel. Du même Ravel, la valse Théière-Tasse Chinoise dans l'Enfant et les<br />

Sortilèges ressemble fort au ballet tragi-comique Lacouf-Presto. La dimension " Opéra <strong>de</strong><br />

chambre " <strong>de</strong>s Mamelles <strong>de</strong> Tirésias et <strong>de</strong> la Voix humaine fut très utilisée au XXème<br />

siècle, par Ravel et surtout Britten.<br />

Bien que contemporaines à Lulu <strong>de</strong> Berg ou Moise et Aaron <strong>de</strong> Schœnberg, les œuvres <strong>de</strong><br />

Poulenc restent toujours très tonales. Aloys Moose en 1953 qualifia ainsi la musique <strong>de</strong><br />

Poulenc : " Monsieur Francis Poulenc travaille dans le vieux neuf, dans le déjà dit, dans le<br />

lieu commun qu'il exploite avec une sorte d'impu<strong>de</strong>ur dont on serait enclin à juger qu'elle<br />

frise l'inconscience. " Pour les puristes, les a<strong>de</strong>ptes d'un nouveau style, la musique <strong>de</strong><br />

Poulenc dérange. Mais Poulenc a réussi en trois opéras à édifier <strong>de</strong>s œuvres très<br />

différentes dans la forme, mais toutes les trois dans le fond très humaines. C'est pour<br />

cela qu'elles restent <strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong> répertoire, recherchées autant par les interprètes que<br />

par le public.<br />

Extrait d’un mémoire <strong>de</strong> Jean-Christophe HENRY intitulé : Francis POULENC :<br />

Moine ou voyou.<br />

Quelques informations complémentaires sur les Mamelles <strong>de</strong> Tirésias :<br />

Typologie vocale :<br />

Thérèse : -Tessiture : Do 3/Do5. (Soprano léger)<br />

Créatrice du rôle : Denise Duval.<br />

<strong>Grand</strong>es interprètes : Renée Auphan, Nathalie Dessay, Elisabeth Vidal.<br />

Le Mari : -Tessiture : Do 2/Lab 3 (Fa 3 pour la version baryton).<br />

Créateur du rôle : Jean Girau<strong>de</strong>au.<br />

<strong>Grand</strong>s interprètes : Hugues Cuenod, Michel Sénéchal, Jean-Paul Fouchécourd.


Représentations marquantes à la scène :<br />

Première représentation le 3 juin 1947 à l'opéra comique, dans une mise en scène <strong>de</strong><br />

Max <strong>de</strong> Rieux, <strong>de</strong>s décors et costumes <strong>de</strong> Romain Erté.<br />

Reprises ou nouvelles productions à l'opéra comique en 1972, en 1981 puis en mai 1999,<br />

en collaboration avec l'opéra <strong>de</strong> Rennes.<br />

En 1963 à la Piccola Scala <strong>de</strong> Milan puis à l'opéra <strong>de</strong> Marseille, dans une mise en scène<br />

<strong>de</strong> Louis Ducreux.<br />

En février 1981 au Metropolitan opera <strong>de</strong> New York, couplé avec Para<strong>de</strong> et l'enfant et les<br />

sortilèges dans <strong>de</strong>s décors et costumes David Hockney. Cette production fut reprise en<br />

novembre 1991 au Châtelet.<br />

Cette pièce se retrouve sous la forme d’une ban<strong>de</strong> <strong>de</strong>ssinée :<br />

"Le <strong>de</strong>ssinateur Daniel Casanave - né Ar<strong>de</strong>nnais rési<strong>de</strong>nt<br />

rémois - n'en est pas à son coup d'essai avec les belles lettres.<br />

En 2002, son "Ubu Roi", inspiré <strong>de</strong> Jarry, lui avait valu d'être<br />

coiffé sur le poteau par l'immense Tardi, pour l'obtention <strong>de</strong><br />

l'Alphart, palme du festival <strong>de</strong> la BD d'angoulême. On a déjà vu<br />

pire.<br />

Casanave réédite avec Apollinaire et "les mamelles <strong>de</strong><br />

Tirésias", une fantaisie suréaliste écrite par le grand Guillaume<br />

au len<strong>de</strong>main <strong>de</strong> la guerre. Inspiré <strong>de</strong> la mythologie grecque, la<br />

légendaire histoire <strong>de</strong> Tirésias, femme transformée en homme,<br />

se voulait à l'époque une vibrante exortation à la procréation.<br />

Passons sur l'argument, un tantinet déjanté, pour retenir la force<br />

du <strong>de</strong>ssin, ce coup <strong>de</strong> patte tonique, sombre et loufoque<br />

qu'Apollinaire eût aimé…"<br />

http://www.lunion.presse.fr/ 12/2003<br />

L'Union (<strong>Reims</strong>)


Le Surréalisme<br />

Le Surréalisme, est caractérisé par son opposition à toutes conventions sociales, logiques<br />

et morales. C'est un mouvement qui prime le rêve, l'instinct, le désir et la révolte. Autant<br />

littéraire qu'artistique, il provient du Dadaïsme. Certains artistes importants du<br />

Surréalisme proviennent <strong>de</strong> ce premier courant, par exemple: Max Ernst, Man Ray.<br />

Tout comme le Dadaïsme, le Surréalisme est marqué par ses écrivains. En 1924, André<br />

Breton écrit le "Manifeste du Surréalisme". Il était surtout désireux <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r la pureté<br />

originale du mouvement, malgré le fait que les artistes n'auront que d'étroits liens tout<br />

au long <strong>de</strong> l'existence <strong>de</strong> celui-ci. La cohésion du groupe a surtout été marquée par les<br />

nombreuses expositions à Paris. Malgré cette visibilité mondiale importante au sein <strong>de</strong>s<br />

expositions parisiennes, la <strong>de</strong>uxième Guerre Mondiale amène les artistes à New York, où<br />

le mouvement fait quelques a<strong>de</strong>ptes. De retour après la guerre en 1945, le groupe fait<br />

quelques expositions mais se dissout quelques années plus tard en 1959. Il faut<br />

comprendre que les liens entre les surréalistes ont toujours été étroits <strong>de</strong>puis 1929 et ne<br />

tenaient qu'à un fil. C'est à partir <strong>de</strong> cette année là que chacun tentait <strong>de</strong> s'affirmer<br />

indépendamment du groupe, venant à l'encontre du but premier d'André Breton Genèse<br />

<strong>de</strong> l'Art surréaliste<br />

Max Ernst<br />

Brühl, près <strong>de</strong> Cologne, 1891 - Paris, 1976<br />

Max Ernst, Ubu Imperator, 1923<br />

Huile sur toile<br />

81 x 65 cm<br />

Cette œuvre marque d’emblée l’entrée <strong>de</strong> Max Ernst dans le champ du<br />

Surréalisme. Sa force est <strong>de</strong> produire une image unifiée, tout en conservant<br />

la perturbation, introduite dans la vision, par chacun <strong>de</strong>s éléments : pointe<br />

<strong>de</strong> la toupie, carcasse rouge où transparaît une armature <strong>de</strong> fer, mains humaines exprimant<br />

l’étonnement.<br />

Salvador Dali<br />

Figueras, 1904 - Figueras, 1989<br />

Salvador Dali, Lion, Cheval, Dormeuse invisibles, 1930<br />

Huile sur toile<br />

50,20 x 65,20 cm<br />

Cette toile développe pour la première fois le processus<br />

d’apparition <strong>de</strong>s images doubles, triples, et même multiples, qui relèvent <strong>de</strong> l’activité<br />

paranoïaque critique tout juste instituée par Dali: "récemment, au travers d’un processus<br />

nettement paranoïaque, j’ai obtenu l’image d’une femme dont la position, les ombres et la<br />

morphologie, sans altérer ni déformer en rien son aspect réel, sont en même temps un<br />

cheval". Par cette multiplication <strong>de</strong>s images possibles, Dali entend instaurer un doute sur ce<br />

que représente l’image, pour étendre ensuite cette attitu<strong>de</strong> critique à toute la réalité: "on<br />

pose le doute mental <strong>de</strong> savoir si les images mêmes <strong>de</strong> la réalité sont uniquement un produit<br />

<strong>de</strong> notre faculté paranoïaque".


Le glossaire du surréalisme<br />

Cadavre exquis : Le Cadavre exquis est le plus célèbre <strong>de</strong>s jeux surréalistes. Pratiqué à<br />

partir <strong>de</strong> 1925, Ernst consiste à composer <strong>de</strong>s poèmes ou <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ssins à plusieurs, chacun<br />

inscrivant un mot ou un motif sur un papier plié, à l’insu <strong>de</strong>s autres participants. Les œuvres<br />

ainsi obtenues présentent <strong>de</strong>s rapprochements inattendus, comme la phrase "le cadavre<br />

exquis boira le vin nouveau", à laquelle le jeu doit son nom.<br />

Collage : Au sein du Surréalisme, le procédé du collage est surtout employé par Max Ernst.<br />

Dès 1919, il assemble <strong>de</strong>s images issues <strong>de</strong> multiples domaines, dans le but <strong>de</strong> provoquer <strong>de</strong>s<br />

rencontres insolites. À partir <strong>de</strong> 1929, il crée <strong>de</strong>s romans-collages, séries d’images<br />

confectionnées à partir <strong>de</strong> gravures <strong>de</strong> la fin du 19e siècle ou <strong>de</strong> catalogues illustrés, et reliées<br />

entre elles par la simple répétition <strong>de</strong> motifs visuels. À la différence du collage cubiste voué à<br />

la seule recherche plastique, et <strong>de</strong>s photomontages éminemment politiques du dadaïsme<br />

allemand, le collage surréaliste suggère <strong>de</strong> nouvelles associations visuelles, poétiques et<br />

oniriques.<br />

Décalcomanie : Cette technique a été utilisée pour la première fois dans un cadre artistique<br />

par Oscar Dominguez en 1936. L’artiste presse une feuille blanche sur une autre feuille<br />

enduite <strong>de</strong> gouache noire, et répète l’opération, <strong>de</strong> manière à reporter plusieurs fois les<br />

taches <strong>de</strong> peinture. L’image qui en résulte permet à l’artiste <strong>de</strong> libérer son imagination en<br />

interprétant à sa guise les formes obtenues. À la suite d’Oscar Dominguez, Max Ernst applique<br />

le principe <strong>de</strong> la décalcomanie à la peinture à l’huile.<br />

Écriture automatique : Inspirée <strong>de</strong> la psychanalyse, et surtout <strong>de</strong> la poésie d’Arthur<br />

Rimbaud et <strong>de</strong> Lautréamont, l’écriture automatique consiste à écrire si rapi<strong>de</strong>ment que la<br />

raison et les idées préconçues n’ont pas le temps d’exercer leur contrôle. Le premier texte<br />

issu <strong>de</strong> cette métho<strong>de</strong>, Les Champs magnétiques <strong>de</strong> 1919, a été rédigé tour à tour par André<br />

Breton et Philippe Soupault.<br />

Frottage : Équivalent pictural <strong>de</strong> l’écriture automatique, le procédé du frottage a été<br />

découvert par Max Ernst à l’occasion d’un épiso<strong>de</strong> précis <strong>de</strong> sa vie, en 1925. En fixant le<br />

plancher usé d’une auberge où il séjournait en Bretagne, il déci<strong>de</strong> <strong>de</strong> relever l’empreinte <strong>de</strong><br />

cette matière en frottant à la mine <strong>de</strong> plomb un papier posé sur les lattes <strong>de</strong> bois. Il étend<br />

ensuite ce procédé à d’autres textures et publie son premier recueil <strong>de</strong> frottages, Histoire<br />

naturelle, en 1926. Il poursuit cette recherche en utilisant la peinture à l’huile.<br />

Fumage : En 1937, le peintre autrichien Wolfgang Paalen invente le procédé du fumage : il<br />

réalise <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ssins tracés en promenant la flamme d’une bougie sur une feuille <strong>de</strong> papier. Plus<br />

tard, il applique cette technique à la peinture à l’huile. Il annonce ainsi les peintures <strong>de</strong> feu<br />

d’Yves Klein.<br />

Grattage :Inventé par Max Ernst en 1927 comme extension du frottage, le grattage est<br />

surtout pratiqué par Esteban Francès, peintre d’origine espagnol et rallié au Surréalisme en<br />

1937. Cette technique consiste à gratter à la lame <strong>de</strong> rasoir <strong>de</strong>s couches superposées <strong>de</strong><br />

peinture <strong>de</strong> différentes couleurs, afin <strong>de</strong> faire surgir <strong>de</strong>s formes plus ou moins transparentes<br />

et diaprées.<br />

Objet surréaliste :Après les Ready-ma<strong>de</strong> <strong>de</strong> Marcel Duchamp, André Breton suggère au<br />

milieu <strong>de</strong>s années 20 <strong>de</strong> fabriquer "certains <strong>de</strong> ces objets qu’on n’aperçoit qu’en rêve", et<br />

"dont le sort paraît infiniment problématique et troublant". Comme chez Duchamp, il s’agit<br />

d’assembler <strong>de</strong>s objets déjà existants et <strong>de</strong> peu <strong>de</strong> valeur. Mais contrairement à lui, les<br />

surréalistes atten<strong>de</strong>nt du nouvel objet qu’il provoque une réaction affective, voire "une<br />

émotion sexuelle particulière" selon Salvador Dali.<br />

Les plus célèbres <strong>de</strong>s objets surréalistes sont dûs à Alberto Giacometti, Salvador Dali, Joan<br />

Miró, André Breton, Oscar Dominguez ou encore Man Ray.


Paranoïa critique : Développée par Salvador Dali à partir <strong>de</strong> 1929, la théorie <strong>de</strong> la paranoïacritique<br />

consiste en un délire d’interprétation, appliqué non seulement à l’art, mais aussi à la<br />

réalité. Son but est <strong>de</strong> dépasser la perception habituelle jugée trop pauvre, au profit d’une<br />

appréhension du réel démultipliée.<br />

Rayographe : Le procédé du rayographe a été inventé par Man Ray en 1922. Il s’agit <strong>de</strong><br />

réaliser <strong>de</strong>s photographies sans appareils, en plaçant <strong>de</strong>s objets sur une plaque sensible que<br />

l’on expose à la lumière.<br />

Essais sur le Surréalisme<br />

- Pierre Chavot, L’ABCdaire du Surréalisme, Paris, Flammarion, 2001<br />

- Gérard Durozoi, Histoire du mouvement surréaliste, Paris, Hazan, 1997<br />

- Jean-Paul Clébert, Dictionnaire du Surréalisme, Paris, Seuil, 1996<br />

- Gaëtan Picon, Journal du Surréalisme : 1919-1939, Genève, Skira, 1976<br />

Écrits d’artiste<br />

- René Magritte, Les Mots et les images : choix d’écrits, Bruxelles, Labor, 2000<br />

- Man Ray, Autoportrait, Arles, Acte Sud, 1998<br />

- Joan Miró, Ecrits et entretiens, Paris, Daniel Lelong, 1995<br />

- Salvador Dali, Journal d’un génie, Paris, Gallimard, 1994<br />

Filmographie<br />

Man Ray, Retour à la raison, 1922<br />

Man Ray, Emak Bakia, 1926<br />

Man Ray, L’Étoile <strong>de</strong> mer, 1928<br />

Man Ray, Les Mystères du château <strong>de</strong> Dé, 1929<br />

Jean Cocteau, Le Sang d’un poète, 1929<br />

Salvador Dali et Luis Buñuel, Un Chien andalou, 1929<br />

Salvador Dali et Luis Buñuel, L’Âge d’or, 1930<br />

UNE CONFÉRENCE<br />

Une conférence est prévue le 23 mars 2007 à 18h00 à la Caisse d’Epargne <strong>de</strong><br />

Champagne-Ar<strong>de</strong>nne, 12 rue Carnot 51100 <strong>Reims</strong>.<br />

Conférencier : Mr Francis ALBOU<br />

Sujet : Dans l’élan du surréalisme<br />

Entrée libre mais la réservation <strong>de</strong> vos places est conseillée


LE LIVRET DES MAMELLES<br />

Prologue : Devant le ri<strong>de</strong>au baissé, le Directeur <strong>de</strong> la Troupe, en habit, une canne <strong>de</strong><br />

tranchée à la main, sort du trou du souffleur.<br />

Scène unique : Le directeur <strong>de</strong> la troupe<br />

Me voici donc revenu parmi vous<br />

J'ai retrouvé ma troupe ar<strong>de</strong>nte<br />

J'ai trouvé aussi une scène<br />

Mais j'ai retrouvé avec douleur<br />

L'art théâtral sans gran<strong>de</strong>ur sans<br />

vertu<br />

Qui tuait les longs soirs d'avant la<br />

guerre<br />

Art calomniateur et délétère<br />

Qui montrait le péché non le<br />

ré<strong>de</strong>mpteur<br />

Puis le temps est venu le temps <strong>de</strong>s<br />

hommes<br />

J'ai fait la guerre ainsi que tous les<br />

hommes<br />

C'était au temps où j'étais dans<br />

l'artillerie<br />

Je commandais au front du nord ma<br />

batterie<br />

Un soir que dans le ciel le regard <strong>de</strong>s<br />

étoiles<br />

Palpitait comme le regard <strong>de</strong>s<br />

nouveau-nés<br />

Mille fusées issues <strong>de</strong> là tranchée<br />

adverse<br />

Réveillèrent soudain les canons<br />

ennemis<br />

Je m'en souviens comme si cela<br />

s'était passé hier<br />

J'entendais les départs mais non les<br />

arrivées<br />

Lorsque <strong>de</strong> l'observatoire d'artillerie<br />

Le trompette vint à cheval nous<br />

annoncer<br />

Que le maréchal <strong>de</strong>s logis qui pointait<br />

Là-bas sur les lueurs <strong>de</strong>s canons<br />

ennemis<br />

L'alida<strong>de</strong> <strong>de</strong> triangle <strong>de</strong> visée faisait<br />

savoir<br />

Que la portée <strong>de</strong> ces canons étaient<br />

si gran<strong>de</strong><br />

Que l'on n'entendait plus aucun<br />

éclatement<br />

Et tous mes canonniers attentifs à<br />

leurs postes<br />

Annoncèrent que les étoiles<br />

s'éteignaient une à une<br />

Puis l'on entendit <strong>de</strong> grands cris<br />

parmi toute l'armée<br />

ILS ÉTEIGNENT LES ÉTOILES A<br />

COUPS DE CANON<br />

Les étoiles mouraient dans ce beau<br />

ciel d'automne<br />

Comme la mémoire s'éteint dans le<br />

cerveau<br />

De ces pauvres vieillards qui tentent<br />

<strong>de</strong> se souvenir<br />

Nous étions là mourant <strong>de</strong> la mort<br />

<strong>de</strong>s étoiles<br />

Et sur le front ténébreux aux livi<strong>de</strong>s<br />

lueurs<br />

Nous ne savions plus que dire avec<br />

désespoir<br />

ILS ONT MÊME ASSASSINÉ LES<br />

CONSTELLATIONS<br />

Mais une gran<strong>de</strong> voix venue d'un<br />

mégaphone<br />

Dont le pavillon sortait<br />

De je ne sais quel unanime poste <strong>de</strong><br />

comman<strong>de</strong>ment<br />

La voix du capitaine inconnu qui nous<br />

sauve toujours cria<br />

IL EST GRAND TEMPS DE RALLUMER<br />

LES ÉTOILES<br />

Et ce ne fut qu'un cri sur le grand<br />

front français<br />

ÀU COLLIMATEUR A VOLONTÉ<br />

Les servants se hâtèrent<br />

Les pointeurs pointèrent<br />

Les tireurs tirèrent<br />

Et les astres sublimes se rallumèrent<br />

l'un après l'autre<br />

Nos obus enflammaient leur ar<strong>de</strong>ur<br />

éternelle<br />

L'artillerie ennemie se taisait éblouie<br />

Par le scintillement <strong>de</strong> toutes les<br />

étoiles


Voilà, voilà l'histoire <strong>de</strong> toutes les<br />

étoiles<br />

Et <strong>de</strong>puis ce soir-là j'allume aussi l'un<br />

après l'autre<br />

Tous les astres intérieurs que l'on<br />

avait éteints<br />

Me voici donc revenu parmi vous<br />

Ma troupe ne vous impatientez pas<br />

Public atten<strong>de</strong>z sans impatience<br />

Je vous apporte une pièce dont le but<br />

est <strong>de</strong> réformer les mœurs<br />

Il s'agit <strong>de</strong>s enfants dans la famille<br />

C'est un sujet domestique<br />

Et c'est pourquoi il est traité sur un<br />

ton familier<br />

Les acteurs ne prendront pas <strong>de</strong> ton<br />

sinistre<br />

Ils feront appel tout simplement à<br />

votre bon sens<br />

Et se préoccuperont avant tout <strong>de</strong><br />

vous amuser<br />

Afin que bien disposés vous mettiez à<br />

profit<br />

Tous les enseignements contenus<br />

dans la pièce<br />

Et que le sol partout s'étoile <strong>de</strong><br />

regards <strong>de</strong> nouveau-nés<br />

Plus nombreux encore que les<br />

scintillements d'étoiles<br />

Ecoutez ô Français la leçon <strong>de</strong> la<br />

guerre<br />

Et faites <strong>de</strong>s enfants vous qui n'en<br />

faisiez guère<br />

On tente ici d'infuser un esprit<br />

nouveau au théâtre<br />

Une joie une volupté une vertu<br />

Pour remplacer ce pessimisme vieux<br />

<strong>de</strong> plus d'un siècle<br />

Ce qui est bien ancien pour une<br />

chose si ennuyeuse<br />

La pièce a été faite pour une scène<br />

ancienne<br />

Car on ne nous aurait pas construit<br />

<strong>de</strong> théâtre nouveau<br />

Un théâtre rond à <strong>de</strong>ux scènes<br />

Une au centre l'autre formant comme<br />

un anneau<br />

Autour <strong>de</strong>s spectateurs et qui<br />

permettra<br />

Le grand déploiement <strong>de</strong> notre art<br />

mo<strong>de</strong>rne<br />

Mariant souvent sans lien apparent<br />

comme dans la vie<br />

Les sons les gestes les couleurs les<br />

cris les bruits<br />

La musique la danse l'acrobatie la<br />

poésie la peinture<br />

Les chœurs les actions et les décors<br />

multiples<br />

Vous trouverez ici <strong>de</strong>s actions<br />

Qui s'ajoutent au drame principal et<br />

l'ornent<br />

Les changements <strong>de</strong> ton du<br />

pathétique au burlesque<br />

Et l'usage raisonnable <strong>de</strong>s<br />

invraisemblances<br />

Ainsi que <strong>de</strong>s acteurs collectifs ou<br />

non<br />

Qui ne sont pas forcément extraits <strong>de</strong><br />

l'humanité<br />

Mais <strong>de</strong> l'univers entier<br />

Car le théâtre ne doit pas être un art<br />

en trompe-l'œil<br />

Il est juste que le dramaturge se<br />

serve<br />

De tous les mirages qu'il a à sa<br />

disposition<br />

Comme faisait Morgane sur le Mont-<br />

Gibel<br />

Il est juste qu'il fasse parler les<br />

foules les objets inanimés<br />

S'il lui plaît<br />

Et qu'il ne tienne pas plus compte du<br />

temps<br />

Que <strong>de</strong> l'espace<br />

Son univers est sa pièce<br />

À l'intérieur <strong>de</strong> laquelle il est le dieu<br />

créateur<br />

Qui dispose à son gré<br />

Les sons les gestes les démarches les<br />

masses les couleurs<br />

Non pas dans le seul but<br />

De photographier ce que l'on appelle<br />

une tranche <strong>de</strong> vie<br />

Mais pour faire surgir la vie même<br />

dans toute sa vérité<br />

Car la pièce doit être un univers<br />

complet<br />

Avec son créateur<br />

C'est-à-dire la nature même<br />

Et non pas seulement<br />

La représentation d'un petit morceau<br />

De ce qui nous entoure ou <strong>de</strong> ce qui<br />

s'est jadis passé<br />

Pardonnez-moi mes amis ma troupe<br />

Pardonnez-moi cher Public


De vous avoir parlé un peu<br />

longuement<br />

Il y a si longtemps que je m'étais<br />

retrouvé parmi vous<br />

Mais il y a encore là-bas un brasier<br />

Où l'on abat <strong>de</strong>s étoiles toutes<br />

fumantes<br />

Et ceux qui les rallument vous<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt<br />

De vous hausser jusqu'à ces flammes<br />

sublimes<br />

Et <strong>de</strong> flamber aussi<br />

O public<br />

Soyez la torche inextinguible du feu<br />

nouveau<br />

Acte I<br />

La place du marché <strong>de</strong> Zanzibar, le matin. Le décor représente <strong>de</strong>s maisons, une<br />

échappée sur le port et aussi ce qui peut évoquer aux Français l'idée du jeu <strong>de</strong><br />

zanzibar. Un mégaphone enforme <strong>de</strong> cornet à dés et orné <strong>de</strong> dés est sur le<br />

<strong>de</strong>vant <strong>de</strong> la scène. Du côté cour, entrée d'une maison; du côté jardin, un<br />

kiosque <strong>de</strong> journaux avec une nombreuse marchandise étalée et sa marchan<strong>de</strong><br />

figurée dont le bras peut s'animer; il est encore orné d'une glace sur le côté qui<br />

donne sur la scène. Au fond, le personnage collectif et muet qui représente le<br />

peuple <strong>de</strong> Zanzibar est présent dés le lever du ri<strong>de</strong>au. Il est assis sur un banc.<br />

Une table est à sa droite et il a sous la main les instruments qui lui serviront à<br />

mener tel bruit au moment opportun: revolver, musette, grosse caisse,<br />

accordéon, tambour, tonnerre, grelots, castagnettes, trompette d'enfant,<br />

vaisselle cassée. Tous les bruits indiqués comme <strong>de</strong>vant être produits au moyen<br />

d'un instrument, sont menés par le peuple <strong>de</strong> Zanzibar et tout ce qui est indiqué<br />

comme <strong>de</strong>vant être dit au mégaphone doit être crié au public.<br />

Scène première : Le peuple <strong>de</strong><br />

Zanzibar, Thérèse<br />

Thérèse Visage bleu, longue robe bleue<br />

ornée <strong>de</strong> singes et <strong>de</strong> fruits peints. Elle<br />

entre dès que le ri<strong>de</strong>au est levé, mais<br />

dès que le ri<strong>de</strong>au commence à se lever,<br />

elle cherche à dominer le tumulte <strong>de</strong><br />

l'orchestre.<br />

Non Monsieur mon mari<br />

Vous ne me ferez pas faire ce que vous<br />

voulez<br />

Je suis féministe et je ne reconnais pas<br />

l'autorité <strong>de</strong> l'homme<br />

Du reste je veux agir à ma guise<br />

Il y a assez longtemps que les hommes<br />

font ce qui leur plaît<br />

Après tout je veux aussi aller me battre<br />

contre les ennemis<br />

J'ai envie d'être soldat une <strong>de</strong>ux une<br />

<strong>de</strong>ux<br />

Je veux faire la guerre - Tonnerre - et<br />

non pas faire <strong>de</strong>s enfants<br />

Non Monsieur mon mari vous ne me<br />

comman<strong>de</strong>rez plus<br />

Elle se courbe trois fois, <strong>de</strong>rrière au<br />

public<br />

Au mégaphone<br />

Ce n'est pas parce que vous m'avez fait<br />

la cour dans le Connecticut<br />

Que je dois vous faire la cuisine à<br />

Zanzibar<br />

Voix du mari (accent belge) Donnezmoi<br />

du lard je te dis donnez-moi du lard<br />

Vaisselle cassée<br />

Thérèse Vous l'enten<strong>de</strong>z il ne pense<br />

qu'à l'amour<br />

Elle a une crise <strong>de</strong> nerfs<br />

Mais tu ne te doutes pas imbécile<br />

Éternuement<br />

Qu'après avoir été soldat je veux être<br />

artiste<br />

Éternuement<br />

Parfaitement<br />

Éternuement<br />

Je veux être aussi député avocat<br />

sénateur<br />

Deux éternuement<br />

Ministre prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la chose publique<br />

Éternuement<br />

Et je veux mé<strong>de</strong>cin physique ou bien<br />

psychique<br />

Diafoirer à mon gré l'Europe et<br />

l'Amérique<br />

Faire <strong>de</strong>s enfants faire la cuisine non<br />

c'est trop<br />

Elle caquette<br />

Je veux être mathématicienne<br />

philosophe chimiste<br />

Groom dans les restaurants petit<br />

télégraphiste<br />

Et je veux s'il me plaît entretenir à l'an


Cette vieille danseuse qui a tant <strong>de</strong><br />

talent<br />

Éternuement caquetage, après quoi elle<br />

imite le bruit du chemin <strong>de</strong> fer<br />

Voix du mari (accent belge)<br />

Donnez-moi du lard je te dis donnez-moi<br />

du lard<br />

Thérèse Vous l'enten<strong>de</strong>z il ne pense<br />

qu'à l'amour<br />

Petit air <strong>de</strong> musette<br />

Mange-toi les pieds à la Sainte-<br />

Menehould<br />

Grosse caisse<br />

Mais il me semble que la barbe me<br />

pousse<br />

Ma poitrine se détache<br />

Elle pousse un grand cri et entr'ouvre sa<br />

blouse dont il en sort ses mamelles,<br />

l'une rouge, l'autre bleue et, comme elle<br />

les lâche, elles s'envolent, ballons<br />

d'enfants, mais restent retenues par les<br />

fils<br />

Envolez-vous oiseaux <strong>de</strong> ma faiblesse<br />

Et caetera<br />

Comme c'est joli les appas féminins<br />

C'est mignon tout plein<br />

On en mangerait<br />

Elle tire le fil <strong>de</strong>s ballons et les fait<br />

danser<br />

Mais trêve <strong>de</strong> bêtises<br />

Ne nous livrons pas à l'aéronautique<br />

Il y a toujours quelque avantage à<br />

pratiquer la vertu<br />

Le vice est après tout une chose<br />

dangereuse<br />

C'est pourquoi il vaut mieux sacrifier une<br />

beauté<br />

Qui peut être une occasion <strong>de</strong> péché<br />

Débarrassons-nous <strong>de</strong> nos mamelles<br />

Elle allume un briquet et les fait<br />

exploser, puis elle fait une belle grimace<br />

avec double pied <strong>de</strong> nez aux spectateurs<br />

et leur jette <strong>de</strong>s balles qu'elle a dans son<br />

corsage<br />

Qu'est-ce à dire<br />

Non seulement ma barbe pousse mais<br />

ma moustache aussi<br />

Elle caresse sa barbe et retrousse sa<br />

moustache qui ont brusquement poussé<br />

Eh diable<br />

J'ai l'air d'un champ <strong>de</strong> blé qui attend la<br />

moissonneuse mécanique<br />

Au mégaphone<br />

Je me sens viril en diable<br />

Je suis un étalon<br />

De la tête aux talons<br />

Me voilà taureau<br />

Sans mégaphone<br />

Me ferai-je torero<br />

Mais n'étalons<br />

Pas mon avenir au grand jour héros<br />

Cache tes armes<br />

Et toi mari moins viril que moi<br />

Fais tout le vacarme<br />

Que tu voudras<br />

Tout en caquetant, elle va se mirer dans<br />

la glace placée sur le kiosque à journaux<br />

Scène <strong>de</strong>uxième : Le peuple <strong>de</strong><br />

Zanzibar, Thérèse, le mari<br />

Le mari Entre avec un gros bouquet <strong>de</strong><br />

fleurs, voit qu'elle ne le regar<strong>de</strong> pas et<br />

jette les fleurs dans la salle. À partir d'ici<br />

le mari perd l'accent belge. Je veux du<br />

lard je te dis<br />

Thérèse Mange tes pieds à la Sainte-<br />

Menehould<br />

Le mari Pendant qu'il parle Thérèse<br />

hausse le ton <strong>de</strong> ses caquetages. Il<br />

s'approche comme pour la gifler puis en<br />

riant<br />

Ah mais ce n'est pas Thérèse ma femme<br />

Un temps puis sévèrement.<br />

Au mégaphone<br />

Quel malotru a mis ses vêtements<br />

Il va l'examiner et revient. Au<br />

mégaphone<br />

Aucun doute c'est un assessin et il l'a<br />

tuée<br />

Sans mégaphone<br />

Thérèse ma petite Thérèse où es-tu<br />

Il réfléchit la tête dans les mains, puis<br />

campé, les poings sur les hanches<br />

Mais toi vil personnage qui t'es déguisé<br />

en Thérèse je te tuerai<br />

Ils se battent, elle a raison <strong>de</strong> lui<br />

Thérèse Tu as raison je ne suis plus ta<br />

femme<br />

Le mari Par exemple<br />

Thérèse Et cependant c'est moi qui suis<br />

Thérèse<br />

Le mari Par exemple<br />

Thérèse Mais Thérèse qui n'est plus


femme<br />

Le mari C'est trop fort<br />

Thérèse Et comme je suis <strong>de</strong>venu un<br />

beau gars<br />

Le mari Détail que j'ignorais<br />

Thérèse Je porterai désormais un nom<br />

d'homme Tirésias<br />

Le mari les mains jointes. Elle sort<br />

Scène troisième : Le peuple <strong>de</strong><br />

Zanzibar, le mari<br />

Voix <strong>de</strong> Tirésias Je déménage<br />

Le mari Adiousias<br />

Elle jette successivement par la fenêtre<br />

un pot <strong>de</strong> chambre, un bassin et un<br />

urinal. Le mari ramasse le pot <strong>de</strong><br />

chambre<br />

Le piano<br />

Il ramasse l'urinal<br />

Le violon<br />

Il ramasse le bassin<br />

L'assiette au beurre la situation <strong>de</strong>vient<br />

grave<br />

Scène quatrième : Les même, Tirésias,<br />

Lacouf, Presto<br />

Tirésias revient avec <strong>de</strong>s vêtements, une<br />

cor<strong>de</strong>, <strong>de</strong>s objets hétéroclites. Elle jette<br />

tout, se précipite sur le mari. Sur la<br />

<strong>de</strong>rnière réplique du mari, Presto et<br />

Lacouf armés <strong>de</strong> brownings en carton<br />

sont sortis gravement <strong>de</strong> <strong>de</strong>ssous la<br />

scène et s'avancent dans la salle,<br />

cependant que Tirésias maîtrisant son<br />

mari, lui ôte son pantalon, se déshabille,<br />

lui passe sa jupe, le ligote, se<br />

pantalonne, se coupe les cheveux et met<br />

un chapeau haut <strong>de</strong> forme. Ce jeu <strong>de</strong><br />

scène dure jusqu'au premier coup <strong>de</strong><br />

revolver<br />

Presto Avec vous vieux Lacouf j'ai perdu<br />

au zanzi<br />

Tout ce que j'ai voulu<br />

Lacouf<br />

Monsieur Presto je n'ai rien gagné<br />

Et d'abord Zanzibar n'est pas en<br />

question vous êtes à Paris<br />

Presto À Zanzibar<br />

Lacouf À Paris<br />

Presto C'en est trop, Après dix ans<br />

d'amitiéEt tout le mal que je n'ai cessé<br />

<strong>de</strong> dire sur votre compte<br />

Lacouf Tant pis vous ai-je <strong>de</strong>mandé <strong>de</strong><br />

la réclame vous êtes à Paris<br />

Presto À Zanzibar la preuve c'est que<br />

j'ai tout perdu<br />

Lacouf Monsieur Presto il faut nous<br />

battre<br />

Presto Il le faut. Ils montent gravement<br />

sur la scène et se rangent au fond l'un<br />

vis-à-vis <strong>de</strong> l'autre<br />

Lacouf À armes égales<br />

Presto À volonté. Tous les coups sont<br />

dans la nature<br />

Ils se visent. Le peuple <strong>de</strong> Zanzibar tire<br />

<strong>de</strong>ux coups <strong>de</strong> revolver et ils tombent<br />

Tirésias<br />

qui est prêt, tressaille au bruit et s'écrie<br />

Ah chère liberté te voilà enfin conquise<br />

Mais d'abord achetons un journal<br />

Pour savoir ce qui vient <strong>de</strong> se passer<br />

Elle achète un journal et le lit; pendant<br />

ce temps le peuple <strong>de</strong> Zanzibar place<br />

une pancarte <strong>de</strong> chaque côté <strong>de</strong> la scène<br />

PANCARTE POUR PRESTO<br />

COMME IL PERDAIT AU ZANZIBAR<br />

MONSIEUR PRESTO A PERDU SON PARI<br />

PUISQUE NOUS SOMMES À PARIS<br />

PANCARTE POUR LACOUF<br />

MONSIEUR LACOUF N'A RIEN GAGNÉ<br />

PUISQUE LA SCÈNE SE PASSE À<br />

ZANZIBAR<br />

AUTANT QUE LA SEINE PASSE A PARIS<br />

Dès que le peuple <strong>de</strong> Zanzibar est<br />

revenu à son poste, Presto et Lacouf se<br />

redressent, le peuple <strong>de</strong> Zanzibar tire un<br />

coup <strong>de</strong> revolver et les duellistes<br />

retombent. Tirésias étonné jette le


journal<br />

Au mégaphone<br />

Maintenant à moi l'univers<br />

À moi les femmes à moi l'administration<br />

Je vais me faire conseiller municipal<br />

Mais j'entends du bruit<br />

Il vaut peut-être mieux s'en aller<br />

Elle sort en caquetant tandis que le mari<br />

imite le bruit <strong>de</strong> la locomotive en marche<br />

Scène cinquième : Le peuple <strong>de</strong><br />

Zanzibar, le mari, le gendarme<br />

Le gendarme<br />

Tandis que le peuple <strong>de</strong> Zanzibar joue <strong>de</strong><br />

l'accordéon le gendarme à cheval<br />

caracole, tire un mort dans la coulisse <strong>de</strong><br />

façon à ce que ses pieds seuls restent<br />

visibles, fait le tour <strong>de</strong> la scène, agit <strong>de</strong><br />

même avec l'autre mort, fait une<br />

secon<strong>de</strong> fois le tour <strong>de</strong> la scène et<br />

apercevant le mari ficelé sur le <strong>de</strong>vant <strong>de</strong><br />

la scène<br />

Ça sent le crime ici<br />

Le mari Ah! puisque enfin voici un<br />

agent <strong>de</strong> l'autorité<br />

Zanzibarienne<br />

Je vais l'interpeller<br />

Eh Monsieur si c'est une affaire que vous<br />

me cherchez<br />

Ayez donc l'obligeance <strong>de</strong> prendre<br />

Mon livret militaire dans ma poche<br />

gauche<br />

Le gendarme Au mégaphone<br />

La belle fille<br />

Sans mégaphone<br />

Dites ma belle enfant<br />

Qui donc vous a traitée si méchamment<br />

Le mari à part. Il me prend pour une<br />

<strong>de</strong>moiselle<br />

Au gendarme. Si c'est un mariage que<br />

vous me cherchez<br />

Le gendarme met la main sur son cœur<br />

Commencez donc par me détacher<br />

Le gendarme le délie en le<br />

chatouillant, ils rient et le gendarme<br />

répète toujours . Quelle belle fille<br />

Scène sixième : Les mêmes, Presto,<br />

Lacouf<br />

Dès que le gendarme commence à<br />

détacher le mari, Presto et Lacouf<br />

reviennent à l'endroit où ils sont tombés<br />

précé<strong>de</strong>mment<br />

Presto Je commence à en avoir assez<br />

d'être mort<br />

Dire qu'il y a <strong>de</strong>s gens<br />

Qui trouvent qu'il est plus honorable<br />

d'être mort que vif<br />

Lacouf Vous voyez bien que vous<br />

n'étiez pas à Zanzibar<br />

Presto C'est pourtant là que l'on<br />

voudrait vivre<br />

Mais ça me dégoûte <strong>de</strong> nous être battus<br />

en duel<br />

Décidément on regar<strong>de</strong> la mort<br />

D'un œil trop complaisant<br />

Lacouf Que voulez-vous on a trop<br />

bonne opinion<br />

De l'humanité et <strong>de</strong> ses restes<br />

Est-ce que les selles <strong>de</strong>s bijoutiers<br />

Contiennent <strong>de</strong>s perles et <strong>de</strong>s diamants<br />

Presto On a vu <strong>de</strong>s choses plus<br />

extraordinaires<br />

Lacouf Bref Monsieur Presto<br />

Les paris ne nous réussissent pas<br />

Mais vous voyez bien que vous étiez à<br />

Paris<br />

Presto À Zanzibar<br />

Lacouf En joue<br />

Presto Feu<br />

(Le peuple <strong>de</strong> Zanzibar tire un coup <strong>de</strong><br />

revolver et ils tombent. Le gendarme a<br />

fini <strong>de</strong> délier le mari)<br />

Le gendarme Je vous arrête<br />

(Presto et Lacouf se sauvent du côté<br />

opposé d'où ils sont revenus. Accordéon)<br />

Scène septième : Le peuple <strong>de</strong><br />

Zanzibar, le gendarme, le mari habillé en<br />

femme<br />

Le gendarme Les duellistes du paysage<br />

Ne m'empêcheront pas <strong>de</strong> dire que je<br />

vous trouve


Agréable au toucher comme une balle en<br />

caoutchouc<br />

Le mari Atchou<br />

Vaisselle cassée<br />

Le gendarme Un rhume c'est exquis<br />

Le mari Atchi<br />

Tambour. Le mari relève sa jupe qui le<br />

gêne<br />

Le gendarme Femme légère<br />

Il cligne <strong>de</strong> l'œil<br />

Qu'importe puisque c'est une belle fille<br />

Le mari à part. Ma foi il a raison<br />

Puisque ma femme est homme<br />

Il est juste que je sois femme<br />

Au gendarme pudiquement<br />

Je suis une honnête femme-monsieur<br />

Ma femme est un homme-madame<br />

Elle a emporté le piano le violon<br />

l'assiette au beurre<br />

Elle est soldat ministre mer<strong>de</strong>cin<br />

Le gendarmeMère <strong>de</strong>s seins<br />

Le mari lls ont fait explosion mais elle<br />

est plutôt mer<strong>de</strong>cine<br />

Le gendarme Elle est mère <strong>de</strong>s cygnes<br />

Ah! combien chantent qui vont périr<br />

Écoutez<br />

Musette, air triste<br />

Le mari Il s'agit après tout <strong>de</strong> l'art <strong>de</strong><br />

guérir les hommes<br />

La musique s'en chargera<br />

Aussi bien que toute autre panacée<br />

Le gendarme Ça va bien pas <strong>de</strong><br />

rouspétance<br />

Le mari Je me refuse à continuer la<br />

conversation<br />

Au mégaphone<br />

Où est ma femme<br />

Voix <strong>de</strong> femmes dans les coulisses<br />

Vive Tirésias<br />

Plus d'enfants plus d'enfants<br />

Tonnerre et grosse caisse<br />

Le mari fait une grimace aux spectateurs<br />

et met à son oreille une main en cornet<br />

acoustique, tandis que le gendarme,<br />

tirant une pipe <strong>de</strong> sa poche, la lui offre.<br />

Grelots<br />

Le gendarme Eh! Fumez la pipe<br />

bergère<br />

Moi je vous jouerai du pipeau<br />

Le mari Et cependant la Boulangère<br />

Tous les sept ans changeait <strong>de</strong> peau<br />

Le gendarme Tous les sept ans elle<br />

exagère<br />

Le peuple <strong>de</strong> Zanzibar accroche une<br />

pancarte contenant cette ritournelle qui<br />

reste là<br />

EH! FUMEZ LA PIPE BERGÈRE<br />

MOI JE VOUS JOUERAI DU PIPEAU<br />

ET CEPENDANT LA BOULANGÈRE<br />

TOUS LES 7 ANS CHANGEAIT DE PEAU<br />

TOUS LES 7 ANS ELLE EXAGÈRE<br />

Le gendarme Ma<strong>de</strong>moiselle ou<br />

Madame je suis amoureux fou <strong>de</strong> vous.<br />

Et je veux <strong>de</strong>venir votre époux<br />

Le mari Atchou<br />

Mais ne voyez-vous pas que je ne suis<br />

qu'un homme<br />

Le gendarme Nonobstant quoi je<br />

pourrais vous épouser<br />

Par procuration<br />

Le mari Sottises. Vous feriez mieux <strong>de</strong><br />

faire <strong>de</strong>s enfants<br />

Le gendarme Ah! par exemple<br />

Voix d 'hommes dans les coulisses<br />

Vive Tirésias<br />

Vive le général Tirésias<br />

Vive le député Tirésias<br />

L'accordéon joue une marche militaire<br />

Voix <strong>de</strong> femmes dans les coulisses<br />

Plus d'enfants Plus d'enfants<br />

Scène huitième : Les mêmes, le<br />

kiosque<br />

Le kiosque où s'anime le bras <strong>de</strong> la<br />

marchan<strong>de</strong> se déplace lentement vers


l'autre bout <strong>de</strong> la scène<br />

Le mari Fameux représentant <strong>de</strong> toute<br />

autorité<br />

Vous l'enten<strong>de</strong>z c'est dit je crois avec<br />

clarté<br />

La femme à Zanzibar veut <strong>de</strong>s droits<br />

politiques<br />

Et renonce soudain aux amours<br />

prolifiques<br />

Vous l'enten<strong>de</strong>z crier Plus d'enfants Plus<br />

d'enfants<br />

Pour peupler Zanzibar il suffit<br />

d'éléphants<br />

De singes <strong>de</strong> serpents <strong>de</strong> moustiques<br />

d'autruches<br />

Et stériles comme est l'habitante <strong>de</strong>s<br />

ruches<br />

Qui du moins fait la cire et butine le miel<br />

La femme n'est qu'un neutre à la face du<br />

ciel<br />

Et moi je vous le dis cher Monsieur le<br />

gendarme<br />

Au mégaphone<br />

Zanzibar a besoin d'enfants sans<br />

mégaphone donnez l'alarme<br />

Criez au carrefour et sur le boulevard<br />

Qu'il faut refaire <strong>de</strong>s enfants à Zanzibar<br />

La femme n'en fait plus Tant pis Que<br />

l'homme en fasse<br />

Mais oui parfaitement je vous regar<strong>de</strong> en<br />

face<br />

Et j'en ferai moi<br />

Le gendarme et le kiosque<br />

Vous<br />

Le kiosque au mégaphone que lui tend<br />

le mari<br />

Elle sort un bobard<br />

Bien digne qu'on l'enten<strong>de</strong> ailleurs qu'à<br />

Zanzibar<br />

Vous qui pleurez voyant la pièce<br />

Souhaitez les enfants vainqueurs<br />

Voyez l'impondérable ar<strong>de</strong>ur<br />

Naître du changement <strong>de</strong> sexe<br />

Le mari Revenez dès ce soir voir<br />

comment la nature<br />

Me donnera sans femme une progéniture<br />

Le gendarme Je reviendrai ce soir voir<br />

comment la nature<br />

Vous donnera sans femme une<br />

progéniture<br />

Ne faites pas qu'en vain je croque le<br />

marmot<br />

Je reviens dès ce soir et je vous prends<br />

au mot<br />

Le kiosque Comme est ignare le<br />

gendarme<br />

Qui gouverne le Zanzibar<br />

Le music-hall et le grand bar<br />

N'ont-ils pas pour lui plus <strong>de</strong> charmes<br />

Que repeupler le Zanzibar<br />

Scène neuvième : Les mêmes, Presto<br />

Presto<br />

chatouillant le mari<br />

Comment faut-il que tu les nommes<br />

Elles sont tout ce que nous sommes<br />

Et cependant ne sont pas hommes<br />

Le gendarme Je reviendrai ce soir voir<br />

comment la nature<br />

Vous donnera sans femme une<br />

progéniture<br />

Le mari Revenez donc ce soir voir<br />

comment la nature<br />

Me donnera sans femme une progéniture<br />

T o u s<br />

en chœur<br />

Ils dansent, le mari et le gendarme<br />

accouplés, Presto et le kiosque accouplés<br />

et changeant parfois <strong>de</strong> compagnons. Le<br />

peuple <strong>de</strong> Zanzibar danse seul en jouant<br />

<strong>de</strong> l'accordéon<br />

Eh! fumez la pipe Bergère<br />

Moi je vous jouerai du pipeau. Et<br />

cependant la Boulangère<br />

Tous les sept ans changeait <strong>de</strong> peau.<br />

Tous les sept ans elle exagère<br />

Ri<strong>de</strong>au<br />

A c t e I I<br />

Au même endroit, le même jour, au<br />

moment du coucher du soleil. Le<br />

même décor orné <strong>de</strong> nombreux<br />

berceaux où sont les nouveau-nés.<br />

Un berceau est vi<strong>de</strong> auprès d'une<br />

bouteille d'encre énorme, d'un pot à<br />

colle gigantesque, d'un porte-plume<br />

démesuré et d'une paire <strong>de</strong> ciseaux<br />

<strong>de</strong> bonne taille.


Scène première : Le peuple <strong>de</strong><br />

Zanzibar, le mari<br />

Le mari Il tient un enfant dans chaque<br />

bras. Cris continus d'enfants sur la<br />

scène, dans les coulisses et dans la salle<br />

pendant toute la scène ad libitum. On<br />

indique seulement quand, et où ils<br />

redoublent<br />

Ah! C’est fou les joies <strong>de</strong> la paternité,<br />

40049 enfants en un seul jour<br />

Mon bonheur est complet<br />

Silence silence<br />

Cris d'enfants au fond <strong>de</strong> la scène<br />

Le bonheur en famille. Pas <strong>de</strong> femme sur<br />

les bras<br />

Il laisse tomber les enfants<br />

Silence<br />

Cris d'enfants sur le côté gauche <strong>de</strong> la<br />

salle. C'est épatant la musique mo<strong>de</strong>rne<br />

Presque aussi épatant que les décors <strong>de</strong>s<br />

nouveaux peintres<br />

Qui florissent loin <strong>de</strong>s Barbares<br />

À Zanzibar<br />

Pas besoin d'aller aux ballets russes ni<br />

au Vieux Colombier<br />

Silence silence<br />

Cris d'enfants sur le côté droit <strong>de</strong> la salle<br />

Grelots<br />

Il faudrait peut-être les mener à la<br />

baguette. Mais il vaut mieux ne pas<br />

brusquer les choses<br />

Je vais leur acheter <strong>de</strong>s bicyclettes. Et<br />

tous ces virtuoses iront faire <strong>de</strong>s<br />

concerts en plein air<br />

Peu à peu les enfants se taisent, il<br />

applaudit<br />

Bravo bravo bravo<br />

On frappe<br />

Entrez<br />

Scène <strong>de</strong>uxième : Les mêmes, le<br />

journaliste parisien<br />

Le journaliste Sa figure est nue, il n'a<br />

que la bouche. Il entre en dansant<br />

Accordéon<br />

Hands up<br />

Bonjour Monsieur le mari<br />

Je suis correspondant d'un journal <strong>de</strong><br />

Paris<br />

Le mari De Paris<br />

Soyez le bienvenu<br />

Le journaliste fait le tour <strong>de</strong> la scène<br />

en dansant<br />

Les journaux <strong>de</strong> Paris au mégaphone<br />

ville <strong>de</strong> l'Amérique<br />

Sans mégaphone<br />

Hourra<br />

Un coup <strong>de</strong> revolver, le journaliste<br />

déploie le drapeau américain<br />

Ont annoncé que vous avez trouvé<br />

Le moyen pour les hommes<br />

De faire <strong>de</strong>s enfants<br />

Le journaliste replie le drapeau et s'en<br />

fait une ceinture<br />

Le mari Cela est vrai<br />

Le journaliste Et comment ça<br />

Le mari La volonté Monsieur elle nous<br />

mène à tout<br />

Le journaliste Sont-ils nègres ou<br />

comme tout le mon<strong>de</strong><br />

Le mari Tout cela dépend du point <strong>de</strong><br />

vue où l'on se place<br />

Castagnettes<br />

Le journaliste Vous êtes riche sans<br />

doute<br />

Il fait un tour <strong>de</strong> danse<br />

Le mari Point du tout<br />

Le journaliste Comment les élèverezvous?<br />

Le mari Après les avoir nourris au<br />

biberon<br />

J'espère que ce sont eux qui me<br />

nourriront<br />

Le journaliste En somme vous êtes<br />

quelque chose comme une fille-père<br />

Ne serait-ce pas chez vous instinct<br />

paternel maternisé<br />

Le mari Non c'est cher Monsieui tout à<br />

fait intéressé<br />

L'enfant est la richesse <strong>de</strong>s ménages<br />

Bien plus que la monnaie et tous les<br />

héritages<br />

Le journaliste note<br />

Voyez ce tout petit qui dort dans son<br />

berceau<br />

L'enfant crie. Le journaliste va le voir sur<br />

la pointe <strong>de</strong>s pieds<br />

Il se prénomme Arthur et m'a déjà


gagné<br />

Un million comme accapareur <strong>de</strong> lait<br />

caillé<br />

Trompette d'enfant<br />

Le journaliste Avancé pour son âge<br />

Le mari Celui-là Joseph l'enfant crie<br />

est romancier<br />

Le journaliste va voir Joseph<br />

Son <strong>de</strong>rnier roman s'est vendu à 600<br />

000 exemplaires<br />

Permenez que je vous en offre un<br />

Descend un grand livre-pancarte à<br />

plusieurs feuillets sur lesquels on lit au<br />

premier feuillet:<br />

QUELLE CHANCE!<br />

ROMAN<br />

Le mari Lisez-le à votre aise<br />

Le journaliste se couche, le mari tourne<br />

les autres feuillets sur lesquels on lit à<br />

raison d'un mot par feuillet<br />

UNE DAME QUI S'APPELAIT CAMBRON<br />

Le journaliste se relève et au<br />

mégaphone<br />

Une dame qui s'appelait Cambron<br />

Il rit au mégaphone sur les quatre<br />

voyelles: a, é, i, o<br />

Le mari Il y a cependant là une<br />

manière polie <strong>de</strong> s'exprimer<br />

Le journalistesans mégaphone<br />

Ah! ah! ah! ah!<br />

Le mari Une certaine précocité<br />

Le journaliste Eh! eh!<br />

Le mari Qui ne court point les rues<br />

Le journaliste Hands up<br />

Le mari Enfin tel qu'il est<br />

Le roman m'a rapporté<br />

Près <strong>de</strong> 200 000 francs<br />

Plus un prix littéraire<br />

Composé <strong>de</strong> 20 caisses <strong>de</strong> dynamite<br />

Le journaliste se retire à reculons<br />

Au revoir<br />

Le mari<br />

N'ayez pas peur elles sont dans mon<br />

coffre-fort à la banque<br />

Le journaliste All right<br />

Vous n'avez pas <strong>de</strong> fille<br />

Le mari Si fait celle-ci divorcée<br />

Elle crie. Le journaliste va la voir<br />

Du roi <strong>de</strong>s pommes <strong>de</strong> terre<br />

En reçoit une rente <strong>de</strong> 100 000 dollars<br />

Et celle-ci (elle crie) plus artiste que<br />

quiconque à Zanzibar<br />

Le journaliste s'exerce à boxer<br />

Récite <strong>de</strong> beaux vers par les mornes<br />

soirées<br />

Ses feux et ses cachets lui rapportent<br />

chaque an<br />

Ce qu'un poète gagne en cinquante mille<br />

ans<br />

Le journaliste Je vous félicite my <strong>de</strong>ar<br />

Mais vous avez <strong>de</strong> la poussière<br />

Sur votre cache-poussière<br />

Le mari sourit comme pour remercier le<br />

journaliste qui tient le grain <strong>de</strong> poussière<br />

à la main<br />

Puisque vous êtes si riche prêtez-moi<br />

cent sous<br />

Le mari Remettez la poussière<br />

Tous les enfants crient. Le mari chasse le<br />

journaliste à coups <strong>de</strong> pied. Celui-ci sort<br />

en dansant<br />

Scène troisième : Le peuple <strong>de</strong><br />

Zanzibar, le mari<br />

Le mari Eh oui c'est simple comme un<br />

périscope<br />

Plus j'aurai d'enfants<br />

Plus je serai riche et mieux je pourrai me<br />

nourrir<br />

Nous disons que la morue produit assez<br />

d'œufs en un jour<br />

Pour qu'éclos ils suffisent à nourrir <strong>de</strong><br />

branda<strong>de</strong> et d'aïoli<br />

Le mon<strong>de</strong> entier pendant une année<br />

entière<br />

N'est-ce pas que c'est épatant d'avoir<br />

une nombreuse famille<br />

Quels sont donc ces économistes<br />

imbéciles<br />

Qui nous ont fait croire que l'enfant<br />

C'était la pauvreté<br />

Tandis que c'est tout le contraire


Est-ce qu'on a jamais entendu parler <strong>de</strong><br />

morue morte dans la misère<br />

Aussi vais-je continuer à faire <strong>de</strong>s<br />

enfants<br />

Faisons d'abord un journaliste<br />

Comme ça je saurai tout<br />

Je <strong>de</strong>vinerai le surplus<br />

Et j'inventerai le reste<br />

Il se met à déchirer avec la bouche et les<br />

mains <strong>de</strong>s journaux, il trépigne. Son jeu<br />

doit étre très rapi<strong>de</strong><br />

Il faut qu'il soit apte à toutes les<br />

besognes<br />

Et puisse écrire pour tous les partis<br />

Il met les journaux déchirés dans le<br />

berceau vi<strong>de</strong><br />

Quel beau journaliste ce sera<br />

Reportage articles <strong>de</strong> fond<br />

Et cœtera<br />

Il lui faut un sang puisé dans l'encrier<br />

Il prend la bouteille d'encre et la verse<br />

dans le berceau<br />

Il lui faut une épine dorsale<br />

Il met un énorme porte-plume dans le<br />

berceau<br />

De la cervelle pour ne pas penser<br />

Il verse le pot à colle dans le berceau<br />

Une langue pour mieux baver<br />

Il met les ciseaux dans le berceau<br />

Il faut encore qu'il connaisse le chant<br />

Allons chantez<br />

Tonnerre<br />

Scène quatrième : Les mêmes, le fils<br />

Le mari répète: «une, <strong>de</strong>ux!» jusqu'à la<br />

fin du monologue du fils. Cette scène se<br />

passe très rapi<strong>de</strong>ment<br />

Le fils se dressant dans le bercrau<br />

Mon cher papa si vous voulez savoir<br />

enfin<br />

Tout ce qu'ont fait les aigrefins<br />

Faut me donner un petit peu d'argent <strong>de</strong><br />

poche<br />

L'arbre d'imprimerie étend feuilles et<br />

feuilles<br />

Qui vous claquent au vent comme <strong>de</strong>s<br />

étendards<br />

Les journaux ont poussé faut bien que tu<br />

les cueilles<br />

Fais-en <strong>de</strong> la sala<strong>de</strong> à nourrir tes<br />

moutards<br />

Si vous me donnez cinq cents francs<br />

Je ne dis rien <strong>de</strong> vos affaires<br />

Sinon je dis tout je suis franc<br />

Et je compromets père sœurs et frères<br />

J'écrirai que vous avez épousé<br />

Une femme triplement enceinte<br />

Je vous compromettrai je dirai<br />

Que vous avez volé tué donné sonné<br />

barbé<br />

Le mari Bravo voilà un maître chanteur<br />

Le fils sort du berceau<br />

Le fils Mes chers parents en un seul<br />

homme<br />

Si vous voulez savoir ce qui s'est passé<br />

hier soir<br />

Voici<br />

Un grand incendie a détruit les chutes du<br />

Niagara<br />

Le mari Tant pis<br />

Le fils Le beau constructeur Alcindor<br />

Masqué comme les fantassins<br />

Jusqu'à minuit joua du cor<br />

Pour un parterre d'assassins<br />

Et je suis sûr qu'il sonne encore<br />

Le mari Pourvu que ce ne soit pas dans<br />

cette salle<br />

Le fils Mais la Princesse <strong>de</strong> Bergame<br />

Epouse <strong>de</strong>main une dame<br />

Simple rencontre <strong>de</strong> métro<br />

Castagnettes<br />

Le mari Que m'importe est-ce que je<br />

connais ces gens-là<br />

Je veux <strong>de</strong> bonnes informations qui me<br />

parlent <strong>de</strong> mes amis<br />

Le fils Il fait remuer un berceau<br />

On apprend <strong>de</strong> Montrouge<br />

Que Monsieur Picasso<br />

Fait un tableau qui bouge<br />

Ainsi que ce berceau<br />

Le mari Et vive le pinceau<br />

De l'ami Picasso<br />

O mon fils<br />

À une autre fois je connais maintenant<br />

Suffisamment<br />

La journée d'hier<br />

Le fils Je m'en vais afin d'imaginer celle<br />

<strong>de</strong> <strong>de</strong>main<br />

Le mari Bon voyage


Exit le fils<br />

Scène cinquième : Le peuple <strong>de</strong><br />

Zanzibar, le mari<br />

Le mari Celui-ci n'est pas réussi<br />

J'ai envie <strong>de</strong> le déshériter<br />

À ce moment arrivent <strong>de</strong>s radiospancartes<br />

OTTAWA<br />

INCENDIE ÉTABLISSEMENTS J. C. B.<br />

stop 20 000 POÈMES EN PROSE<br />

CONSUMÉS stop PRÉSIDENT ENVOIE<br />

CONDOLÉANCES<br />

ROME<br />

H. NR. M. T. SS. DIRECTEUR VILLA<br />

MÉDICIS ACHÈVE PORTRAIT SS<br />

AVIGNON<br />

GRAND ARTISTE G.. RG. S BRAQUE<br />

VIENT INVENTER PROCÉDÉ CULTURE<br />

INTENSIVE DES PINCEAUX<br />

VANCOUVER RETARDÉ DANS LA<br />

TRANSMISSION<br />

CHIENS MONSIEUR LÉAUT..D EN GRÉVE<br />

Le mari Assez assez<br />

Quelle fichue idée j'ai eue <strong>de</strong> me fier à la<br />

Presse<br />

Je vais être dérangé<br />

Toute la sainte journée<br />

Il faut que ça cesse<br />

Au mégaphone<br />

Allô allô Ma<strong>de</strong>moiselle<br />

Je ne suis plus abonné au téléphone<br />

Je me désabonne<br />

Sans mégaphone<br />

Je change <strong>de</strong> programme pas <strong>de</strong><br />

bouches inutiles<br />

Économisons économisons<br />

Avant tout je vais faire un enfant tailleur<br />

Je pourrai bien vêtu aller en promena<strong>de</strong><br />

Et n'étant pas trop mal <strong>de</strong> ma personne<br />

Plaire à mainte jolie personne<br />

Scène sixième : Les mêmes, le<br />

gendarme<br />

Le gendarme Il paraît que vous en<br />

faites <strong>de</strong> belles<br />

Vous avez tenu parole<br />

40 050 enfants en un jour<br />

Vous secouez le pot-<strong>de</strong>-fleurs<br />

Le mari Je m'enrichis<br />

Le gendarme Mais la population<br />

Zanzibarienne<br />

Affamée par ce surcroît <strong>de</strong> bouches à<br />

nourrir<br />

Est en passe <strong>de</strong> mourir <strong>de</strong> faim<br />

Le mari Donnez-lui <strong>de</strong>s cartes ça<br />

remplace tout<br />

Le gendarme Où se les procure-t-on?<br />

Le mari Chez la cartomancienne<br />

Le gendarme Extra-luci<strong>de</strong><br />

Le mari Parbleu puisqu'il s'agit <strong>de</strong><br />

prévoyance<br />

Scène septième : Les mêmes, la<br />

cartomancienne<br />

La cartomancienne Elle arrive du fond<br />

<strong>de</strong> la salle. Son crâne est éclairé<br />

électriquement<br />

Chastes citoyens <strong>de</strong> Zanzibar me voici<br />

Le mari Encore quelqu'un<br />

Je n'y suis pour personne<br />

La cartomancienne J'ai pensé que<br />

vous ne seriez pas fâchés<br />

De savoir la bonne aventure<br />

Le gendarme Vous n'ignorez pas<br />

Madame<br />

Que vous exercez un métier illicite<br />

C'est étonnant ce que font les gens<br />

Pour ne point travailler<br />

Le mari au gendarme<br />

Pas <strong>de</strong> scandale chez moi<br />

La cartomancienne à un spectateur<br />

Vous Monsieur prochainement<br />

Vous accoucherez <strong>de</strong> trois jumeaux<br />

Le mari DéjÀ la concurrence<br />

Une dame<br />

(spectatrice dans la salle)<br />

Madame la Cartomancienne<br />

Je crois bien qu'il me trompe


Vaisselle cassée<br />

La cartomancienne Conservez-le<br />

dans la marmite norvégienne<br />

Elle monte sur la scène, cris d'enfants,<br />

accordéon<br />

Tiens une couveuse artificielle<br />

Le mari Seriez-vous le coiffeur coupezmoi<br />

les cheveux<br />

La cartomancienne Les <strong>de</strong>moiselles<br />

<strong>de</strong> New-York<br />

Ne cueillent que les mirabelles<br />

Ne mangent que du jambon d'York<br />

C'est là ce qui les rend si belles<br />

Le mari Ma foi les dames <strong>de</strong> Paris<br />

Sont bien plus belles que les autres<br />

Si les chats aiment les souris<br />

Mesdames nous aimons les vôtres<br />

La cartomancienne C'est-à-dire vos<br />

sourires<br />

T o u s en chœur<br />

Et puis chantez matin et soir<br />

Grattez-vous si ça vous démange<br />

Aimez le blanc ou bien le noir<br />

C'est bien plus drôle quand ça change<br />

Suffit <strong>de</strong> s'en apercevoir<br />

Suffit <strong>de</strong> s'en apercevoir<br />

La cartomancienne Chastes citoyens<br />

<strong>de</strong> Zanzibar<br />

Qui ne faites plus d'enfants<br />

Sachez que la fortune et la gloire<br />

Les forêts d'ananas les troupeaux<br />

d'éléphants<br />

Appartiennent <strong>de</strong> droit<br />

Dans un proche avenir<br />

À ceux qui pour les prendre auront fait<br />

<strong>de</strong>s enfants<br />

Tous les enfants se mettent à crier sur la<br />

scène et dans la salle. La<br />

cartomancienne fait les cartes qui<br />

tombent du plafond. Puis les enfants se<br />

taisent<br />

Vous qui êtes si fécond<br />

Le mari e t Le gendarme Fécond<br />

fécond<br />

La cartomancienne au mari<br />

Vous <strong>de</strong>viendrez 10 fois milliardaire<br />

Le mari tombe assis par terre<br />

La cartomancienne au gendarme<br />

Vous qui ne faites pas d'enfants<br />

Vous mourrez dans la plus affreuse <strong>de</strong>s<br />

débines<br />

Le gendarme Vous m'insultez<br />

Au nom <strong>de</strong> Zanzibar je vous arrête<br />

La cartomancienne Toucher une<br />

femme quelle honte<br />

Elle le griffe et l'étrangle. Le mari lui<br />

tend une pipe<br />

Le mari Eh! fumez la pipe Bergère<br />

Moi je vous jouerai du pipeau<br />

Et cependant la Boulangère<br />

Tous les sept ans changeait <strong>de</strong> peau<br />

La cartomancienne Tous les sept ans<br />

elle exagère<br />

Le mari En attendant je vais vous<br />

livrer au commissaire<br />

Assassine<br />

Thérèse se débarrassant <strong>de</strong> ses<br />

oripeaux <strong>de</strong> cartomancienne<br />

Mon cher mari ne me reconnais-tu pas<br />

Le mari Thérèse ou bien Tirésias<br />

Le gendarme ressuscite<br />

Thérèse Tirésias se trouve<br />

officiellement<br />

A la têté <strong>de</strong> l'Armée à la Chambre À<br />

l'Hôtel <strong>de</strong> Ville<br />

Mais sois tranquille<br />

Je ramène dans une voiture <strong>de</strong><br />

déménagement<br />

Le piano le violon l'assiette au beurre<br />

Ainsi que trois dames influentes dont je<br />

suis <strong>de</strong>venu l'amant<br />

Le gendarme Merci d'avoir pensé à moi<br />

Le mari Mon général mon député<br />

Je me trompe Thérèse<br />

Te voilà plate comme une punaise<br />

Thérèse Qu'importe viens cueillir la<br />

fraise<br />

Avec la fleur du bananier<br />

Chassons à la Zanzibaraise<br />

Les éléphants et viens régner<br />

Sur le grand cœur <strong>de</strong> ta Thérèse<br />

Le mari<br />

Thérèse


Thérèse Qu'importe le trône ou la<br />

tombe<br />

Il faut s'aimer ou je succombe<br />

Avant que ce ri<strong>de</strong>au ne tombe<br />

Le mari Chère Thérèse il ne faut plus<br />

Que tu sois plate comme une punaise<br />

Il prend dans la maison un bouquet <strong>de</strong><br />

ballons et un panier <strong>de</strong> balles<br />

En voici tout un stock<br />

Thérèse Nous nous en sommes passés<br />

l'un et l'autre<br />

Continuons<br />

Le mari C'est vrai né compliquons pas<br />

les choses<br />

Allons plutôt tremper la soupe<br />

Thérèse Elle lâche les ballons et lance<br />

les balles aux spectateurs<br />

Envolez-vous oiscaux <strong>de</strong> ma faiblesse<br />

Allez nourrir tous les enfants<br />

De la repopulation<br />

T o u s en chœur<br />

Le peuple <strong>de</strong> Zanzibar danse en secouant<br />

<strong>de</strong>s grelots<br />

Et puis chantez matin et soir<br />

Grattez-vous si ça vous démange<br />

Aimez le blanc ou bien le noir<br />

C'est bien plus drôle quand ça change<br />

Suffit <strong>de</strong> s'en apercevoir<br />

Ri<strong>de</strong>au

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