28.06.2013 Vues

Un Menage litteraire en Berry au XVIe siecle - Bibliothèque ...

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• Ir<br />

- 6 7L<br />

- - - t<br />

UN<br />

ItINAGE. LITTItIIAIRE EN BERRY<br />

-<br />

AU XVI° SIÈCLE<br />

JACQUES THIBOUST ET JEANNE DE LA FONT<br />

PAR<br />

M. Hwp. BOYE1I<br />

CORRESPONDANT DU MINISTÈRE DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE.<br />

a<br />

IMPRIMERIE ET LITHOGRAPHIE DE Vo. JOLLET-SOUCHOIS,<br />

IMPRIMEUR DE LA PRÉFECTURE, DE LA MAIRIE, ETC.<br />

• . -t<br />

Docum<strong>en</strong>t<br />

Il il il Ili illi E 10011111<br />

0000005560356 -- - -<br />

1859.


n<br />

i::<br />

-1


U<br />

LI<br />

Cc sont, à vrai dire, deux illustrations de clocher ces deux personnages<br />

dont nous marions ici , les noms comme rappelant le type d'une<br />

union digne d'étude. Je ne sais même s'il n'y n pas, <strong>en</strong> quelque sorte,<br />

abus de mots à se servir de ce terme d'illustrations,- qui implique une<br />

certaine réputation traditionnelle, pour désigner l'un d'eux resté jusqu'à<br />

ce jour à peu près inconnu. Jeaùne 'de La Font <strong>en</strong> effet n'a guère <strong>en</strong>core<br />

été m<strong>en</strong>tionnée par personne., <strong>au</strong> moins sous sou véritable nom, comme<br />

une femme dont le <strong>Berry</strong> pût s'honorer, et à cet égard nôns avons la<br />

prét<strong>en</strong>tion de 'réhabilitér une de nosgloires, qui , pour n'être pas des plus<br />

brillantes n'a cep<strong>en</strong>dant pas mérité le déni de justice dont le temps s'est<br />

r<strong>en</strong>du coupable <strong>en</strong>vers elle, ni l'effacem<strong>en</strong>t profond dans lequel l'ont<br />

plongée let circonstances qui l'ont jusqu'à prés<strong>en</strong>t caçhée à toutes les<br />

investigations. Quant à Thihoust, il est un peu moins ignoré parmi 'nous.<br />

On trouve sur son compte une notice-assez bi<strong>en</strong> faite dans un recueil de<br />

biographies berruyères <strong>en</strong>trepris <strong>au</strong> siècle dernier par Jacques Robinet<br />

Desgrangiers, avocat du roi <strong>au</strong> baillage et présidial de Bourges et échevin<br />

de cette ville <strong>en</strong> 1787. Ce recueil, qui est resté manuscrit, est, pour ainsi dire<br />

inconnu, et j'<strong>en</strong> dois la communication à notre compatriote M. B. Zévort.•<br />

Thiboijst, possède <strong>en</strong>core son article dans la Biographie , berruyère de


- 4<br />

M. Chevalier, de St-Amand (4). Antérieurem<strong>en</strong>t, et sans que sa r<strong>en</strong>ommée<br />

ait de be<strong>au</strong>coup dépassé les bornes de la localité, il avait été parié de lui<br />

quelquefois comme d'un poète amateur <strong>en</strong> ces jours de réveil qu'on appela<br />

la R<strong>en</strong>aissance; et surtout comme d'un protecteur des g<strong>en</strong>s de lettres, qui<br />

jouait <strong>en</strong> petit sur une scène plus restreirit6 ce rôle de Mécène qu'affec-<br />

tèr<strong>en</strong>t souv<strong>en</strong>t les puissants portés par un goût inné pour les choses de<br />

l'esprit à cultiver la société des g<strong>en</strong>s de lettres. C'est principalem<strong>en</strong>t à ce<br />

titre qu'il n <strong>en</strong>core mérité de figurer dans la galerie de portraits littéraires<br />

que Colletet a-laissée sous le noni de Histoire des poètes françois (2).<br />

Si nous nous attachons d'abord pour apprécier notre homme à la notice<br />

de ce dernier, c'est cri raison de la rareté des docum<strong>en</strong>ts qui nous rest<strong>en</strong>t<br />

sur celui qui <strong>en</strong> fait l'objet, et sur lequel jusqu'à prés<strong>en</strong>t <strong>au</strong>cun <strong>au</strong>tre travail<br />

suivi n'a pu être consulté que les deux biographies de Colletet et de<br />

M. Chevalier, celle, bi<strong>en</strong>, supérieure, de Robinet J)esgrangiers, devant<br />

être considérée comme totalem<strong>en</strong>t inédite.<br />

Mais c'est surtout parce que les Histoires de Colletet jouiss<strong>en</strong>t d'une<br />

notoriété que ne justifie pas toujours leur importance. Pour cc qui regarde<br />

Thiboust notamm<strong>en</strong>t, il n'est pas possible d'<strong>en</strong>trepr<strong>en</strong>dre de retracer la vie<br />

d'un homme; quelqu'il soit, avec <strong>au</strong>ssi peu d'élém<strong>en</strong>ts que ceux que Colletet<br />

avait à sa disposition. Aussi cc qu'on y appr<strong>en</strong>d sur Thihoust se réduit à<br />

la plus simple expression possible. Nous y trouvons pourtant à glaner<br />

deux ou trois détails.<br />

Jacques Thiboust naquit à E6urges, d'honorable homme Thomas Thi-<br />

boust, bourgeois de cette ville, comme s'exprim<strong>en</strong>t plusieurs contrats<br />

passés <strong>au</strong> nom de son fils.<br />

<strong>Un</strong>e note manuscrite dela main de Jacques lui-même permet de rapporter<br />

la date de cette naissance à l'année 1492. Il existe <strong>en</strong> effet <strong>au</strong>x archives<br />

départem<strong>en</strong>tales du Cher (fonds de i'archevêçhé L. 19 bis) ni' règistre dit te<br />

liegistre noir, écrit <strong>en</strong> <strong>en</strong>tier de sa main et cont<strong>en</strong>ant (les pièces de toute<br />

nature sur les affaires qui pouvai<strong>en</strong>t l'intéresser (3) or <strong>au</strong> fo 67 de ce ma-<br />

nuscrit on lit la note suivante<br />

(I) V. cette notice d 'ns le numéro des Annonces berruyères du 2 juillet 1836.<br />

(2) Dibhoth. du Louvre. nus. } 23 1 98 t. vi.<br />

(3) Voici le litre de ce livre dans son intégrité et tel que l'<strong>au</strong>teur a cru devoir le<br />

formuler: e Troisiesine registre noir cont<strong>en</strong>ant les contruets d'acquisitions, quittances,<br />

rceongnoissances , accords et <strong>au</strong>trestraictez, négoce et appoinctem<strong>en</strong>s faiz par le<br />

seigneur de Quantilly, Me Jacques Thiboust, notaire et secrétaire du Bo y, <strong>au</strong>ssi secrétaire<br />

et valet de chambre ordinaire de Mme la duchesse d'Alleuçon et de <strong>Berry</strong> ; Esicu<br />

tour ltd. fakL (des aides et tailles) oudit pays et esiecti<strong>en</strong> de <strong>Berry</strong>, avedques les<br />

personnes et ppur les c<strong>au</strong>ses qui s'<strong>en</strong>suiv<strong>en</strong>t. - Thiboust. (1525-1531.) »


-5-<br />

o ESTAS J4 51 THIBOUSTFIGtJRATA<br />

• AiVNO DNI 1516<br />

/451 THIBOUST BITTURICE»<br />

CUl DUODECIIDE BINA<br />

C'EST POUR MECTRE ETESbR!PRE AU BAS DE Md<br />

POUR TRAICTURE FAICTE APRÈS LE VIF PAR Me JANET<br />

CLOET PAINTRÉ ET VALET DE CHAMBRE ORDINAIRE<br />

DU ROY EN L'AN MIL F e ET SEIZE.<br />

TJEIROUST.— o (1).<br />

Agé de vingt-quatre ans, comme semble le dire cette inscription, il serait<br />

donc né <strong>en</strong> l'an :1192. 3e ne sais sur quoi s'appuie la biographie dellobi-<br />

net pour reporter cette date à l'année 1488.<br />

Son père, qui avait nom Thomas (2), comme nous l'avôns vu, et se<br />

disait seigneur d'Ei'v<strong>au</strong>x, près de Nemours, et de Villemanoche, près de<br />

S<strong>en</strong>s, avait épousé une Jeanne de Itusticat, qui, morte le S août 522, était<br />

Bilé de Guillot de Rusticat, seigneur de Chavannes <strong>en</strong> Bourbonnais , et<br />

lequel mourut le 6 mai 1471. Elle avait pour mère D<strong>en</strong>ise Dumoulin, qui,<br />

décédée le I novembre 1491, fut elle-même fille de Berthommier on<br />

Baribelemy Durnoulin s t. des Trois-Brioux,. lequel était mort le 20 avril<br />

1472. C'est de Catherinot que nous t<strong>en</strong>ons ces détails: il les a consignés<br />

à la p. 22 de son Tombe<strong>au</strong> généalogique.<br />

Les-Itusticat, desquels Tlîibonst desc<strong>en</strong>dait par sa mère, étai<strong>en</strong>t, je le<br />

suppose, une famille origiùaire du midi de la. France, c'est du moins ce<br />

que porte à croire la tortue toute romane de leur nom. Catherinot,'chcz<br />

lequel on trouve tant- de r<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>ts de cette nature, classe ce nom<br />

parmi ceux des prudliommes qui administrèr<strong>en</strong>t la ville de Bourges durant<br />

la période qui va à peu près, de 1413 à 146O; années où, par suite des<br />

(1) Si l'on pouvait espérer retrouver te portrait dont il est ici question on arquerlait<br />

1111e dçs oeuvres les 1,1115 curreuses de la peinture du xvie siècle, car Ou n'<strong>en</strong><br />

connaît pas du peintre <strong>en</strong> question qui remont<strong>en</strong>t à celle date. Grâce <strong>au</strong>x i'eebércl,es<br />

de M. de L:ihorde et à la publicité qu'il leur a donnée dairi son livre de la R<strong>en</strong>aissance<br />

des arts à la catir de France, on connaît <strong>au</strong>jourd'hui trois générations de<br />

Clouet. Le premier, Jean Clouet , dont I,, vie se serait écoulée à Bruxelles <strong>en</strong>tre les<br />

années 14tb-1490, eut pour (ils un <strong>au</strong>tre Jean Clouet, dit Janet qui est le nôtre. On<br />

le Suppose né vers 1485 et mort <strong>en</strong> 1545, mais on n'a pas trouvé dc traces de lui<br />

avant 1523 où il apparalt déjà comme peiutre ci valet de ehafflhrc dit roi- La noie<br />

de 'l'liil,oust 1éiioigne qu'il était déjà depuis/longtclnps à la Lotir • lorsqu'il fit sou<br />

portrait <strong>en</strong> 1516.<br />

(2) Mort le 12 aivril 1497 après Pâques.<br />

M


• lacunes de nos archives municipales, les administrateurs de notre ville<br />

sont restés inconnus (1). Les Rustictrt appart<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t sans nul doute à cette<br />

classe d'opul<strong>en</strong>ts négociants qui jouai<strong>en</strong>t à Bourges le rôle que t<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t<br />

les marchands itali<strong>en</strong>s dans les républiques de la péninsuk, et lui constituai<strong>en</strong>t,<br />

comme à elle, une nouvelle noblesse, qu'<strong>en</strong> a appelée id noblesse<br />

de cloche ét qu'on pourrait tout <strong>au</strong>ssi bi<strong>en</strong> nommer la noblesse de<br />

l'<strong>au</strong>nb (2). L&tr famille dut.s'étdindre à déf<strong>au</strong>t de males vers l'époque<br />

dofit nous nous occupons, car on ne trouve plus alors de ce hom que<br />

des ecclésiastiques ou (les Teanmes alliées à. des maisons commerçantes<br />

du pays<br />

-<br />

Ce que je vi<strong>en</strong>s de dire des Itustical. peut s'appliquer égalem<strong>en</strong>t <strong>au</strong>x<br />

Du Molin eu Dumoulin leurs alliés. Cc nom est commun, et tous ceux qui<br />

l'ont porté <strong>en</strong> Franco sont sans doute loin d'appart<strong>en</strong>ir Ha môme famille.<br />

Quelques indices me port<strong>en</strong>t à p<strong>en</strong>ser que les nôtres peuv<strong>en</strong>t être v<strong>en</strong>us de<br />

la Brie commb les. Thiboust, s'installer <strong>en</strong> Jlerry. Ce serait une branche de<br />

cette famille qui, •établié à Paris, <strong>au</strong>rait produit le jurisconsulte'Charles<br />

Dunioulin, contemporain de Jacques Thihoust. Peut-.être y f<strong>au</strong>drait-il éga-<br />

lein<strong>en</strong>t rattacher l'helléniste Antoine Dumoulin de Mûcon, qui fut valel de<br />

chambre de Marguerite de Navarre, et <strong>au</strong>quel Marot a dédié des poésies.<br />

iUarchands <strong>au</strong>ssi dans l'origine, selon toute probabilité, comme la plupart.<br />

des ersoanaes dont nous <strong>au</strong>rons à parler ici, les Dumoulin de <strong>Berry</strong>,<br />

après avoir été. anoblis par. l'échevinage, <strong>au</strong>ront quitté le négoce pour<br />

les charges et les .office. L'un d'eux, <strong>au</strong> mom<strong>en</strong>t où nous <strong>en</strong> sommes, était<br />

notaire.à Bourges, et ce fut lui qui, comme nous le verrons, dressa le<br />

contrat de mariage de Thiboust; un <strong>au</strong>tre devint soit g<strong>en</strong>dre (3).<br />

- il résulte (le la nature même des alliances des asc<strong>en</strong>dants paternels de<br />

Jacques qu'ils ont dû être, attirés dans le <strong>Berry</strong> par le commerce. D'où<br />

(1) Cath. tes fastes consulaires de Bourges, p. 4.<br />

() Leurs armes étai<strong>en</strong>t chargées de deux perroquets. Cet emblème, si l'on <strong>en</strong> croit<br />

certains écrivains ,fait quelquefois allusion à des voyages d'outre-mer; d'où je pré-<br />

sume que le Rusticat qui l'adopta munit bi<strong>en</strong> . pu erre un des facteurs de Jacques-<br />

Coeur, et <strong>en</strong> cette qualité avoir parcouru Ori<strong>en</strong>t sur les galères de sou patron.<br />

(3)' La maison des flumoulin de la Brie, dont 'les.allianees étai<strong>en</strong>t illustres, <strong>en</strong> avait<br />

contracté <strong>en</strong>tre <strong>au</strong>tres avec les Seuly de Romefort; mais elle avait des armes diltér<strong>en</strong>tes<br />

de celles des Dumoulin de l3erry.,14. Ferdinand deN<strong>au</strong>ssabré, que j'ai consulté<br />

à ce sujet , p<strong>en</strong>se qu'il n'y avait <strong>en</strong>tre eux de commua que le nota. Nous allons 'voir<br />

plus mie desbranches différ<strong>en</strong>tes de la maison Tbiboust, arborant des armes égal<strong>en</strong>i<strong>en</strong>t<br />

diverses. Celles des Ournoulin de <strong>Berry</strong> figur<strong>en</strong>t qclquefois dans le blason de<br />

•Thiboust. Elles sont n d'azur à Vanille de moulin d'arg<strong>en</strong>t <strong>en</strong> abime , cantonné de<br />

quatre croisettes pleines et ansées de nènae; D ou bi<strong>en</strong> « d'arg<strong>en</strong>t à l'anilte de moulin<br />

de sable:» L'anitle est un X de fer destiné ù affermir les meules. Dans le symbolisme<br />

héraldique c'est un emblème de h<strong>au</strong>te justice.<br />

I.<br />

I


-7v<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t-ils?<br />

Nous avons VIL que le père de Jacques Thihotist était tic Brie.<br />

Catherinot peut <strong>en</strong> cette occasion nous fournir <strong>en</strong>core quelques lumières.<br />

A la page 24 de soit Tombe<strong>au</strong> généalogique, <strong>en</strong>'nous r<strong>en</strong>seignant sur ces<br />

asc<strong>en</strong>dants dudit Thiboust, il nous fait connaître qu'ilsétai<strong>en</strong>t alliés <strong>au</strong>x<br />

de ViIleine, famille noble de Neinours. R nomme «-Jeanne de Villemer<br />

marée à Thomas Thiboust (premier du nom), vers 1150, Bile d'Adam de<br />

Villemer, d'Erv<strong>au</strong>x , Barville et de La G<strong>en</strong>evroye desc<strong>en</strong>due de Jean de<br />

Villemer son quadrisayeul, haillif et gouverneur do Nemoux ou Nemours,<br />

sous Charles VI.<br />

Le souv<strong>en</strong>ir dé ces Villemer est <strong>au</strong>jourd'hui totalem<strong>en</strong>t efface dans le<br />

pays où ils faisai<strong>en</strong>t si bonne figure, il y a trois siècles; et il serait impossible<br />

(le retrouver leur véritable nom, celui sous lequel nous les désignons<br />

ayaifl été emprunté par eux à un fief situé à 40 kilom. de Nemours et où<br />

se trouvé <strong>en</strong>core un village nommé Viltemer. Mais, à considérer les dates<br />

dans ce que nous V<strong>en</strong>ons de rapporter d'après. Catherinot, ce Thomas<br />

Thihoust, mai16 à Jeanne de Villemer, dut être père de l'<strong>au</strong>tre Thomas<br />

marié à Jeanne (le Rusiicat, et père lui-même de Jacques Les détails qui<br />

précèd<strong>en</strong>t établiss<strong>en</strong>t surabondamm<strong>en</strong>t que c'est dans le Gâtinais ou la<br />

Brie qu'il f<strong>au</strong>t chercher la première demeure des Thiboust <strong>au</strong>xquels le<br />

nôtre apparti<strong>en</strong>t.<br />

Le nom de Thihoust d'ailleurs a été porté par d'<strong>au</strong>tres familles plus<br />

connues que celles de Bourges, et installées de longue date à PSIs. Catherinot<br />

constate les li<strong>en</strong>s qui unissai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>core JacquesTbiboust avec Louis<br />

Thihoust, seigneur de Bré<strong>au</strong>, de Forest, etc. et conseiller <strong>au</strong> parlem<strong>en</strong>t de<br />

Paris, qui épousa <strong>en</strong> premières noces Perrette Foubert, fille Jean Foubert,<br />

seigneur de la Bér<strong>au</strong>lderie, et dc. Michelle de Rnsticat, dont il eut Thomas<br />

Tluboust, seigneur du Bréan, <strong>au</strong>ssi conseiller <strong>au</strong> même parlem<strong>en</strong>t, et eu<br />

secondes noces Jeanne Aubolin, fille de Guill<strong>au</strong>me. Âuhclin, seigneur de<br />

La Bruyère, mort <strong>en</strong> 1543, et de Françoise Brachet, morte <strong>en</strong> 1570 et<br />

belle-soeur du professeur. Holoman. Ce Louis desc<strong>en</strong>dait de Nicolas Thiboust,<br />

seigneur de Bré<strong>au</strong> et d'<strong>au</strong>tres terres <strong>en</strong> Brie et 1n-ès de Melun, qui<br />

vivait <strong>en</strong> 1450 (4).<br />

y<br />

Par cette dernière par<strong>en</strong>té les Thiboust de <strong>Berry</strong> se rattach<strong>en</strong>t à la<br />

famille des parlem<strong>en</strong>taires du même nom qui a fourni à noire grand corps<br />

judiciaire deux présid<strong>en</strong>ts à mortier et plusieurs conseillers. Cette dernière<br />

famille n'était évidemm<strong>en</strong>t qu'une branche délachéede l'abre généalogique<br />

des Thiboust (lu Gâtinais ou de la Brie, et transplantée de bonne heure à<br />

Paris où de . h<strong>au</strong>tes fonctions non interrompues la fixèr<strong>en</strong>t. - Du reste<br />

cette séparation des deux brénches date de loin, caron remonte jusqu'à<br />

(1) Tombe<strong>au</strong> généal. P. 8 et 24.


-8--<br />

Jean Thihoust (le Paris, mort <strong>en</strong> 1348, et leurs aimes diffèr<strong>en</strong>t total em e<strong>au</strong> -<br />

de celles dès Thiboust restés dans la province (I). Il semble pourtant que<br />

les relations ne se soi<strong>en</strong>t Jamais interrompues, ce que l'on compr<strong>en</strong>d quand<br />

on se rappelle la vivgcité de l'anci<strong>en</strong> esprit de famille <strong>au</strong>jourd'hui si effacé.<br />

• Ces relations nous prouv<strong>en</strong>t <strong>au</strong>ssi que de cette commune origine partici-<br />

pai<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>t d'<strong>au</strong>tres Thiboust de Paris, restés célèbres, mais dans mi<br />

g<strong>en</strong>re différ<strong>en</strong>t. Le Registre noir, à la date de 1525, nous montre Jacques<br />

<strong>en</strong> rapport avec un Nicolas Thiboust, bourgeois et marchand de Paris<br />

établi devant la porte (lu Palais n à l'<strong>en</strong>seigne de l'arbre de Jessé; o Il le,<br />

traite de cousin. Le nom, la dereure, l'<strong>en</strong>seigne, tout t<strong>en</strong>d à faire croire<br />

que ce Nicolas exerçait la profession de libraire et qu'il est l'<strong>au</strong>teur- de la<br />

dynastie des libraires-imprimeurs qui sous le nom de Thibousi, figure<br />

avantagcusem<strong>en</strong>t dans les annales de la typographieparisi<strong>en</strong>ne (2).<br />

En somme. on compr<strong>en</strong>d que ces der mères par<strong>en</strong>tés ont pu de bonne<br />

heure suffisamm<strong>en</strong>t motiver l'<strong>en</strong>train<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t de Jacques Thiboust vers la<br />

capitale, et lui permettre de se mettre bi<strong>en</strong> <strong>en</strong> cour. En 1516 , n'axant<br />

<strong>en</strong>core que vingt-quatre ans, nous l'y voyons installé et déjà pourvu probablem<strong>en</strong>t<br />

d'une charge qui lui donne occasion d'emplo yer le pince<strong>au</strong> du<br />

peintre de la cour Clouet dit Janet. Déjà sans doute il avait titre de notaire<br />

et secrétaire du roi, et de valet de chambre et secrétaire (le Marguerite (le<br />

Valois, soeur de François 1-, et ce fut,, selon toute appar<strong>en</strong>ce, cette<br />

dernière.> dev<strong>en</strong>ue l'année suivante ( - I 517) duchesse de <strong>Berry</strong>, qui ram<strong>en</strong>a<br />

son secrétaire à son lieu de naissance qu'il ne devait plus désormais<br />

quitter.<br />

Le souv<strong>en</strong>ir de cette duchesse du <strong>Berry</strong>, qui devi<strong>en</strong>dra un jouir reine de<br />

Navarre, et donnera à la France Jeanne d'Albret et il<strong>en</strong>ri 1V, c'est-à-dire<br />

l'une des plus vaillantes femmes et l'un des plus illustres rois que notre<br />

patrie ait produits, cesouv<strong>en</strong>ir est un de ceux dont notre province aime à<br />

s'honorer. Femme remarquable <strong>au</strong>tant par le coeur que par l'esprit,- elle<br />

prit à tâche de lui faire tout le bi<strong>en</strong> quelle put. Toutes les branches de<br />

l'administratiôn attirèr<strong>en</strong>t sa sollicitude. 1ndutrie , commerce , justice<br />

instruction publique, elle y <strong>en</strong>couragea tout par d'utiles réformes , proté-<br />

geant , notre clràperie et la navigation de nos rivières, établissant la juridiction<br />

des Grands jours , appelant à l'<strong>Un</strong>iversité de Bourges des professeurs<br />

(t) V. Éloges des premiers présid<strong>en</strong>ts die Parlem<strong>en</strong>t de Paris, par Lhermite Souliers<br />

CL Blanchard, p. 87 et 429. -<br />

V. <strong>au</strong> f' 64 dudit registre le transport d'une créance fait par Jacques <strong>au</strong>dit<br />

Nicolas de Paris. Du reste, je ne sache pas que ce dernier ait jamais été signalé par<br />

personne. Le plus anci<strong>en</strong> de ces Thihoust qu'on trouve m<strong>en</strong>tionné est Guill<strong>au</strong>me<br />

graveur et fondeur <strong>en</strong> caractères, et qui fut imprimeur de l'université <strong>en</strong> '1554. Cc<br />

Guill<strong>au</strong>nie serait donc fils de Nicolas.


-9—<br />

qui <strong>en</strong> fiss<strong>en</strong>t la réputation. Et, quant <strong>au</strong> mouvem<strong>en</strong>t * littéraire qu'elle<br />

détermina à cette époque , il mérite d'être signal6 Arrière 'petite-fille de<br />

Val<strong>en</strong>tine de Milan, elle rappelait son illustre et malheureuse aïeule par la<br />

délicatesse et la culture de son intellig<strong>en</strong>ce. C'est d'elle <strong>en</strong> partie que date<br />

la r<strong>en</strong>aissance pour là <strong>Berry</strong>, r<strong>en</strong>aissance qui devait être poursuivie après<br />

sa mort par une <strong>au</strong>tre Marguerite, sa nièce, <strong>au</strong>ssi charmante, <strong>au</strong>ssi intellig<strong>en</strong>tç<br />

qu'elle, <strong>au</strong>ssi bi<strong>en</strong>faisante pour ses administrék -<br />

Cette r<strong>en</strong>aissance des provinces c<strong>en</strong>trales , qui se trouve être <strong>en</strong> grande<br />

partie l'oeuvre de deux femmes, n'a guère été étudiée. On l'a considérée<br />

sur quelques points les plus importants, mais cc travail de rénovation, qùi<br />

s'est fait alors s<strong>en</strong>tir partout, a passé à peu près inaperçu pour les points<br />

secondaires dans le rayonnem<strong>en</strong>t de la capitale. On <strong>au</strong>raittort de croire<br />

cep<strong>en</strong>dant qu'il y fût alors.tout conc<strong>en</strong>tré. Plus même la province avait à<br />

r-- faire jour se mettre <strong>au</strong> nive<strong>au</strong> du mouvem<strong>en</strong>t de l'époque, plus ses efforts<br />

ont été remarquables ,plus ils sont dignes d'être considérés . Mainte ville,<br />

<strong>au</strong>jourd'hui obscure, eut alors un éclat passager dont il f<strong>au</strong>t garder<br />

mémoire. Mainte réputation dont le pays s'honore <strong>en</strong> estsortie> sous cette<br />

influ<strong>en</strong>ce, qui, <strong>en</strong> s'ét<strong>en</strong>dant, réveillait dans les esprits <strong>en</strong>dormis des étin-<br />

celles que la c<strong>en</strong>tralisation moderne étouffe et comprime (fl. Le <strong>Berry</strong>, pris<br />

dans sa généralité, avait un double c<strong>en</strong>tre, l3ouijes et Issoudun, riv<strong>au</strong>x<br />

d'importance inégale, mais riv<strong>au</strong>x d'industrie, de commerce, et • qui le<br />

devinr<strong>en</strong>t alors dans la culture de l'esprit. <strong>Un</strong>e même émulation semble<br />

les animer. Si Bourges avait pour lui ses écoles, son grand et nombrèux<br />

personnel clérical, administratif et judiciaire, la capitale du bas-<strong>Berry</strong> dans<br />

des proportions réduites tachait de limiter. Il semble d'ailleurs qu'il y ait<br />

eu dans cette pat-tic de la province, plus méridionale et plus accid<strong>en</strong>téeque<br />

la nôtre, quelque chose de plus vif, de plus ard<strong>en</strong>t, de plus animé, comme<br />

il semble <strong>au</strong>ssi que lei traits des phyionon5ies -locales y rappell<strong>en</strong>t-<strong>en</strong><br />

quelque point l'organisme plus ch<strong>au</strong>d du midi (2). Quart à Bourges, il était<br />

loin d'offrir alors le triste et morne séjéur que nous connaissons. Durant<br />

(1) Il est bi<strong>en</strong> <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du que je parle ici du mouvem<strong>en</strong>t litiéraire et philosophique<br />

car quant <strong>au</strong> mouvem<strong>en</strong>t industriel et artistique , il était très important et n iSlutôt<br />

t<strong>en</strong>du depuis tors à baisser qu'à s'accroilre. Je montrerai même plis loin que le s<strong>en</strong>s<br />

littéraire était loin de faire déf<strong>au</strong>t à nos pères avant la r<strong>en</strong>aissance; <strong>en</strong> ce s<strong>en</strong>s celle-t-i<br />

donna peut—être une nouvelle direction plutôt qu'èlle ne fut un réveil. Nais c'est<br />

dans le dernaiue de- l'idée pure , dans -l'élude du droit et des quesjious sociales que<br />

iut'Ia véritable nouve<strong>au</strong>té. -<br />

() Je r<strong>en</strong>vdic pour ce sujet- à lu. Pit-émé, <strong>au</strong>teur d'une excell<strong>en</strong>te notice sur Isso,,don.<br />

Je n'ai pas è ' rcfairc ici son travail,_ <strong>en</strong>treprise qui , <strong>en</strong> la supposant d'ailleurs<br />

justifiée par la nécessité, Serait. plus que téméraire de ma part. Ce qui est bi<strong>en</strong> fait<br />

une fois doit rester tel. - -<br />

D<br />

2 -.


- 10<br />

les trois quarts de cc siècle, il s'offre comme le c<strong>en</strong>tre d'un commerce<br />

actif, héritage de celui de Jacques-Cœur, et (lue les guerres de 'religion<br />

n'avai<strong>en</strong>t pas <strong>en</strong>core détruit. Depuis Àlciat $011 école de droit t<strong>en</strong>ait le<br />

premier rang parmi les plus célèbres, et (les professeurs d'élite y attirai<strong>en</strong>t<br />

(le nombreux <strong>au</strong>diteurs. Noue ville était le r<strong>en</strong>dez-vous de tout esprit jeune<br />

et actif. Les célébrités constatées ou <strong>en</strong> voie de le dev<strong>en</strong>ir y accourai<strong>en</strong>t<br />

(le toute l'Europe. Vers 4530 Rabelais s'y arrètait <strong>en</strong> se r<strong>en</strong>dant ii Mont-<br />

pellier (1). Everard, plus connu sous le nom dé Jean Second, y murmurait<br />

dès '1552 ses premiers Baisers, -lotit <strong>en</strong> pr<strong>en</strong>ant le bonnet de- docteur.<br />

Noël Dufail v<strong>en</strong>ait ' goûter à la vie d'étudiant, et <strong>en</strong> emportait. dans<br />

sa Brtagne de joyeux souv<strong>en</strong>irs dont ses écrits - ont gardé la trace (2).<br />

Scévole de Sainte-Marthe y assistait à des scènes de la 'ie privée où son<br />

imagination' frappée à long intervalle devait puiser des épisodes poétiques<br />

qui rappell<strong>en</strong>t ceux du Décaméron (3). Et quelle liste ne dressdrions-<br />

-nous pis si nous <strong>en</strong>trepr<strong>en</strong>ions d'inscrire, ici tous les noms célèbres<br />

que, de 1.555 à " 4 590, la sci<strong>en</strong>ce et la réputation de Cujas am<strong>en</strong>èr<strong>en</strong>t <strong>au</strong><br />

pied de sa chaire? Ce sont les deux frères Pierre et François Pithou, les<br />

deux Loisci le père et le fils, le présid<strong>en</strong>t Jeannin, le cat 'diaal d'Ossat<br />

le fameux 'théologi<strong>en</strong> François Dujon , le. poète Passerai, le professeur<br />

Jean de La Cosse, l'helléniste Frédéric Morel, le polygraphe Merula, Cl<strong>au</strong>de<br />

Expilly, et tant d'<strong>au</strong>tres d'une célébrité plus restreinte ou dont les noms<br />

sont restés inconnus (4). . .<br />

C'est à l'<strong>au</strong>rore de ce mouvem<strong>en</strong>t de la r<strong>en</strong>aissance que nous trouvons<br />

Jacques Thiboust installé à. liourges dans la situation d'un homme dont<br />

une belle position près de la cour, un emploi financier fort conv<strong>en</strong>able, des<br />

relations ét<strong>en</strong>dues, un goût prononcé pour les lettres, et par-dessus tout<br />

une belle fortune devait faire un personnage d'une certaine importance.<br />

Colletet, pour faire apprécier ce point qu'il <strong>en</strong>visage de même, s'exprime<br />

ainsi : « Il exerça une charge d'élu qui cri ce temps-là n'étoit pas comme<br />

<strong>au</strong>jourd'hui des moins lucratives, ni des moins considérables des 'offices de<br />

(t) Cf. la notice sur Rabelais mise par M. Rathery eu tête de son édition du<br />

l'antagruet, p. xxIv. Le biographe n'y dit rièn précisém<strong>en</strong>t du séjour de Rabelais<br />

dans 'lus murs , mais , le fait de ce séjour étant constant, l'exam<strong>en</strong> des dates ne<br />

permet guère de le placer à du <strong>au</strong>tre mom<strong>en</strong>t de sa vie.<br />

@) V. les Contes d'Euirapet, édition de Guiehard, p 51 et 249.<br />

(3Nous r<strong>en</strong>voyons <strong>au</strong> passage de son poème du ,flUin gène comm<strong>en</strong>çant par ces<br />

vers:<br />

Certes -il tue souvi<strong>en</strong>t lorsque sur mes vingt ans,<br />

Je passols <strong>en</strong> Reréy les joùrs de mon printemps......<br />

'-(4) Berriat Saint-PEix , 111M. de Cujas à 'la suite de l'Histoire du droit rômain,<br />

1821, p. 560 et suivantes.


I -<br />

- 11 • -<br />

finance II fut <strong>en</strong>core notaire et secrétaire du Roi <strong>en</strong> une saison où il n'y <strong>en</strong><br />

avoit pas <strong>Un</strong> si grand nombre,<br />

Cette charge de sccétaire et notaire du roi devait avoir une importance<br />

différ<strong>en</strong>te suivant que celui qui <strong>en</strong> était revêtu suivait la cour où habitait<br />

la province. Dans ce dernier cas elle était on partie honorifique. Pour ceux<br />

- résidant près du grand chancelier, dont ils étai<strong>en</strong>t comme les greffiers,<br />

leur emploi consistait àfaire les expéditions de la chancellerie c'est-à-dire<br />

à rédiger et expédier les édits, ordonnances, chartes royales, s<strong>en</strong>t<strong>en</strong>ces et<br />

arrê t<br />

s du Conseil et des cours souveraines. Ces officiers fur<strong>en</strong>t désignés<br />

primitivem<strong>en</strong>t sous le nom de clercs et notaires du roi. L'habitude étant<br />

v<strong>en</strong>ue d'<strong>en</strong> choisir un certain nombre pour recevoir les commandem<strong>en</strong>ts<br />

du souverain et rester près 'de sa personne; ceux-ci s'appelèr<strong>en</strong>t clercs - du<br />

secret, puis secrétaires, et <strong>en</strong>fin secrétaires (les commandem<strong>en</strong>ts et secrétaires<br />

d'état, ce qui les distingua du reste des secrétaires de la couronne<br />

- <strong>au</strong>xquels fut affecté le nom spécial de secrétaires et notaires du roi. Le<br />

nombre de ces derniers varia souv<strong>en</strong>t. Le roi Jean 'le fixa à cinquant<strong>en</strong>euf,<br />

nombre qui doubla sous Louis Xi. H<strong>en</strong>ri 11 l'<strong>au</strong>gm<strong>en</strong>ta de quatre -<br />

vingts; H<strong>en</strong>ri, III de cinquante-quatre. Enfin il arriva à ètre de trois c<strong>en</strong>t<br />

quarante. Alors que Thiboust était secrétaire il n'y <strong>en</strong> àvait <strong>en</strong>core que<br />

c<strong>en</strong>t vingt , <strong>en</strong> y compr<strong>en</strong>ant le grand chancelier, qui ' était le chef du<br />

corps (4). Colletet pouvait donc dire que le nombre n'<strong>en</strong> était pas si grand<br />

alors que de son temps où il avait triplé et-où la 'cottsidérotiori pour les<br />

secrétaires du roi avait baissé <strong>en</strong> proportion. - - -<br />

En cette qualité Thiboust faisait partie de la maison du roi, lorsque<br />

celui-ci, selon toute appar<strong>en</strong>ce, le céda à sa soeur, qui le choisit pour son<br />

secrétaire et valet dechnibre ordinaire. Je croirais volontiers que cet événern<strong>en</strong>t<br />

fut 'contemporain de la donation par François Pr à Marguerite 'du<br />

duché de li<strong>en</strong>-y (-15-I1) Il est probable qu'elle chercha à-cette époque à<br />

s'<strong>en</strong>tourer de Berrichons. <strong>Un</strong>e fois attaché à la maison de la Duchesse,<br />

'rbiboest, si déjà il n'était <strong>en</strong>tré ( , il avec eux, dut y connaître les<br />

'hommes de lettres qui lui formai<strong>en</strong>t une cour poétiquem<strong>en</strong>t adulatrice, et<br />

<strong>en</strong>tre <strong>au</strong>tres Marot, l'amoureux serviteur de cette- adorable mnitresse, et<br />

qui était de deux ou trois tins plus jeûne (lue Thiboust.<br />

- Cc qui est certain c'est que Colletet signale <strong>en</strong>tre eux des rapports dans<br />

le paragraphe qui termine sa notice,- <strong>en</strong> s'<strong>en</strong> rapportant <strong>au</strong> témoignage du-<br />

'poète ilabert. « Clém<strong>en</strong>t Marot, ditLil, le prince des poètes de son temp,<br />

lui a pareillem<strong>en</strong>t donné de grands éloges <strong>au</strong> rapport du même Hilbert -,<br />

dans une (le ses épîtres qu'il (ni adresse Au mémo i'hibonst de Quainiliy 1-<br />

(I) Cf. F<strong>au</strong>veleL du Toc^ liés!, des Secrétaires d'Rslat.— De Verrière, Inht'oducgjj<br />

à la pratique, y0 .SEcnItrÂcnr nu 1101. - Cnyet. Rép ertoire ac Jurisprud<strong>en</strong>ce. Ibid..


L-. 12 —<br />

Tu es eeluy dont 'e chef des poeles<br />

Marot, passant le vol des alouelles,<br />

A mis le nota <strong>en</strong> tel desguisem<strong>en</strong>t<br />

Qu'à ta nature il touche vivem<strong>en</strong>t, etc.<br />

J'avoue toutefois avoir <strong>en</strong> vain parcouru les oeuvres de Marot sans y<br />

ri<strong>en</strong> r<strong>en</strong>contrer qui parût se rapporter àThiboust même avec le e desgui-<br />

sem<strong>en</strong>t t que signale Habert. J'<strong>au</strong>rai d'ailleurs occasion de rev<strong>en</strong>ir sur ce<br />

fait. Mais ce n'est pus un motif de mettre <strong>en</strong> doute les relations qui ont pu<br />

s'établir <strong>en</strong>tre ces deux hommes, d'un mérite sans doute bi<strong>en</strong> inégal, mais<br />

que pouvait rapprocher un goût commun pour les vers. Probablem<strong>en</strong>t, lors-,<br />

que Thiboust <strong>en</strong>tra <strong>au</strong> service de la Duchesse, il cultivait déjà les muses,<br />

et ri<strong>en</strong> ne déf<strong>en</strong>d de croire que la prinesse se l'est attaché à la recomman-<br />

dation de Marotlui'même et sur le vu (le quelques-unes de ses poésies. -.<br />

Marguerite de Navarre ne séjourna guère jamais dans 0I1 duché de<br />

<strong>Berry</strong>. Thiboust, qui l'y avait probablem<strong>en</strong>t accompagnée quand elle <strong>en</strong><br />

prit possession, y acquit 'alors cette charge d'élu 'qui le retint définitive-<br />

m<strong>en</strong>t dans sou pays natal. -<br />

Tout le monde connait ce qu'étai<strong>en</strong>t les élus. Officiers chargés de lassiette<br />

et de la répartition des aides et taille ainsi que de la garde des d<strong>en</strong>iers destinés<br />

à la solde des troupes, ils étal<strong>en</strong>t juges du degré inférieur, et connaissai<strong>en</strong>t<br />

des contestations civiles et même des actions criminelles qui pouvai<strong>en</strong>t<br />

résulter de cette perception (-i.): Quatre conseillers dans chaque élection, à<br />

l'époque où vécut Thiboust, composai<strong>en</strong>t le tribunal avec le présid<strong>en</strong>t, son<br />

licut<strong>en</strong>aiit.:et l'avocat du roi (2). Thiboust était un des quatre de l'élection<br />

de Bourges. L'office prés<strong>en</strong>tant d'assèz grands avantages pécuniaires, il n'y<br />

a pas lieu à s'étonner de le voir riche (3). C'était là du reste le côté positif<br />

de l'affaire quant à ce qui regarde les dignités il trouvait satisfaction dans<br />

(1) A la suite de tournées, ou, comme on disait, de cheé<strong>au</strong>chées d'inspection, qu'ils<br />

faisai<strong>en</strong>t chacun dans lotir départem<strong>en</strong>t ., et sur le rapport annuel des collecteurs, les<br />

élus répartissai<strong>en</strong>t de concert la taille dont le chiffre avait été fixé <strong>en</strong> bloc pour t<strong>en</strong>té<br />

ta province par- le conseil du roi et leurs rôles de répartition adressés ails trésoriers<br />

génér<strong>au</strong>x des finances, et approuvés par eux, dev<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t les rôles déflnitifsde per-<br />

ception . -<br />

(2) Plus tard il y<strong>en</strong> eut six.<br />

(3) Deux Quittances des honoraires perçus par Thiboust pur ses fonctions d'élu ont<br />

été par lui transcrites à la page 06 du Ecgstre noir. Puite est relative -à de qu'il touchait<br />

comme répartiteur de l'impôt des tailles. Elle via du 4 novembre 1523, date de<br />

son <strong>en</strong>trée <strong>en</strong> fonctions, <strong>au</strong> 7 mai 4527. L'<strong>au</strong>tre qui compr<strong>en</strong>d les années 1525-26 et<br />

27,'est affér<strong>en</strong>te à la partie des aides. Par te premier de ces deux titres on voit (lue<br />

le traitem<strong>en</strong>t de l'élit était annuellem<strong>en</strong>t de 80 livres et de 100 livres par la seconde<br />

soit <strong>en</strong> but 180 livres de traitem<strong>en</strong>t par année.


13<br />

sa qualité de secrétaire du roi, dont le plus be<strong>au</strong> privilége était de conférer<br />

<strong>au</strong> titulaire le droit de noblesse, et par là même, de mettre celui qui <strong>en</strong><br />

était revêtu sur le meilleur pied dans le pays. Aussi voit-on toujours Tlii-<br />

bousttraité de monseigneur (I).<br />

Noble par sa charge, si même il ne l'était avant, T.hihoust avait son blason<br />

que nous allons décrire. Ses armes, <strong>au</strong> dire de La Th<strong>au</strong>massièie (2),<br />

étai<strong>en</strong>t d'arg<strong>en</strong>t à la face de sable, chargé (le trois glands attachés à leurs<br />

coupelles et branchettes d'or, accompagné de trois feuilles de chêne de<br />

sinople; deux <strong>en</strong> chef, une <strong>en</strong> pointe. Par suite de ses alliances ou de celles<br />

de ses antécéd<strong>en</strong>ts, Jacques avait écartelé ses armes de celles des flumoulin<br />

des itusticat et des Villemer. -Alors il portait écartelé <strong>au</strong> 4 et 4 de TU-<br />

boust, ci-dessus décrit, <strong>au</strong> 3° d'arg<strong>en</strong>t à une anille de moulin de sable, qui<br />

était Dumoulin,<strong>au</strong> 4° d'or à deux perroquets adossés de sinople, membrés<br />

et becqués de gueules, qui était de Rusticat, et sur le tout d'azur à une<br />

étoile-côniète d'or, qui lait de Villemer. « !%lais ajoute La Th<strong>au</strong>maSièit,<br />

quelquefois il porte écartelé de Villemer et de Rusticat, sur le tout de Thi-<br />

boust (3). »<br />

Jusqu'à son établisiemeut dans la province Thihoust ne parait pas avoir<br />

songé <strong>au</strong> mariage (4). Les distractions du monde dans lequel il vivait l'<strong>en</strong><br />

empêchai<strong>en</strong>t sans doute. <strong>Un</strong>e fois retiré à Bourges ses idées changèr<strong>en</strong>t à<br />

cet égard, il songea à se marier, et, jeune <strong>en</strong>core, comme il était, il ne lui-<br />

fut pas-difficile de trouver ce qu'il désirait. D'ailleurs bi<strong>en</strong> posé, pourvu<br />

d'un écusson et d'une fortune solide, il . réunissait tout ce qui peut procurer<br />

un bon parti. Â cet égard, il fut, si l'on ajoute foi <strong>au</strong>x témoignages contem-<br />

porains, partagé <strong>au</strong>ssi bi<strong>en</strong> qu'il pouvait le prét<strong>en</strong>dre. S'il f<strong>au</strong>t <strong>en</strong> croire<br />

Robinet des Grangiers, la duchesse de Berri l"eùt bi<strong>en</strong> servi dans soit<br />

ce fut Charles VIII qui par lettres de février 4484 dédira ses secrétaires<br />

nobles. Toutefois, pour qu'il Fût anobli par sa charg, lui et sa postérité, il fallait que<br />

le secrétaire du roi <strong>en</strong> mourût revêtu <strong>en</strong> qu'il ne s'<strong>en</strong> démit qu'après un exercice de<br />

vingt années. II avait rang de chevalier et était considéré comme ayant quatre quartiers<br />

de noblesse. A ce titre il avait droit de franc-flef et nouve<strong>au</strong>x acquets, c'est—à-<br />

(lire pouvait acquérir des bi<strong>en</strong>s nobles sans payer les droits <strong>au</strong>xquels les roturiers<br />

étai<strong>en</strong>t assujettis <strong>en</strong> pareil cas, «était là du reste un privilége que possédai<strong>en</strong>t les<br />

habitants de Bourges, par concession formelle que leur eu fit Charles VI[ <strong>en</strong> 1437.<br />

(2) RIS!., I). 738. -<br />

(3) V. a la pl. 2 Ies'armes figurées sur son Dé Ltbris.<br />

(4) Ou verra plus loin qu'il y <strong>au</strong>rait peut—être quelque motif d'admettre que dès<br />

cette époque il <strong>au</strong>rait épousé une Marie de La Font, sur le compté de laquelle nous<br />

n'avons d'ailleurs <strong>au</strong>cun r<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t qu'une allégation qui licoL être te résultat<br />

d'une erreur. Aussi n'avons—not,s pas trouvé ce mariage suffisamm<strong>en</strong>t justifié pour<br />

qu'il nous fût permis d'<strong>en</strong> parler <strong>au</strong>trem<strong>en</strong>t que comme diane chose qui a seulem<strong>en</strong>t<br />

pu avoir lieu.-


- . 4-4 -.<br />

- nage. Celle princesse, dit-il, « la plus savante de son temps, l'appela à son<br />

service, et Je fit son premier valet de chambré; dans celle position il eut<br />

toute sa confiance, et elle lui procura l'épouse la plus cligne et la plus nié-<br />

w ritante. a Je ne sais ce qu'il f<strong>au</strong>t croire de cette interv<strong>en</strong>tion<br />

de<br />

matrimoniale de<br />

la duchesse , Marguerite <strong>en</strong> faveur de son valet chambre ordinaire quoi<br />

qu'il <strong>en</strong> soit, ceque nous savons de plus certain sur ce point, c'est Catherinot- -<br />

qui nous rappr<strong>en</strong>dra, ou qui nous mettra sur la voie d<strong>en</strong> savoir davantage.<br />

Il nous raconte que Jacques avait épousé antè aras, le 16 janvier -I 520 vieux<br />

-style (1521), Jeanne de La Font, fille -unique de Jean de La Font; s? de<br />

Vesnez sous Lugny, et de Françoise Godard. Le contrat de mariage avait<br />

- été passé le 22 novembre pk56,d<strong>en</strong>t, par Mc Durnoulin, notaire. royal à<br />

Bourges (4). 1)u reste, Catherinot, non plus que La Th<strong>au</strong>massière, <strong>en</strong><br />

dehors du titre que nous v<strong>en</strong>ons de rapporter, n'indiqu<strong>en</strong>t ri<strong>en</strong> sur la pôsi-.<br />

tion de ce La Font. Cep<strong>en</strong>dant le dernier nous appr<strong>en</strong>d qu'il avait- des<br />

armes qu'il décrit ainsi d'azur <strong>au</strong> chevron (Vor,aceomagné de deux<br />

étoiles de six pointes, <strong>au</strong> chef d'or chargé d'un lion léopard de sable. (2).<br />

Ceci parait indiquer que La Font n rempli des fonctions de prudhomrne ou<br />

- d'échevin dans une de ces années où la composition du corps.de ville est<br />

restée inconnue, 'Il mourut, ajoute Catherinot, le 5 juillet -1505, et fut<br />

<strong>en</strong>terré dans l'église Saint-Médard (3). Ainsi il représ<strong>en</strong>tait à l'hôtel-de-.<br />

ville le quartier S3iint-Sulpice. La recherche de la main de sa fille par.Thi- -<br />

(-1)-Tombe<strong>au</strong> généal..p. 21. -- Le Lugny, près duquel était situé le damai ne du<br />

be<strong>au</strong>-père de Thihoust, est Lngny-Bourbonnais ,dans la vallée etc l'Yévrette, h huit<br />

lieues de Bourges. J'avais SUPPOSé que la province du Bourbonnais pourràit bi<strong>en</strong> avoir<br />

été' Forigine des La Font. J'interrogeai h ce Sujet t Chaze<strong>au</strong>, archiviste de Moulins,<br />

qui voulut bi<strong>en</strong> nie donner tes r<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>ts suivants « Je n'ai trouvé qu'un seul<br />

individu portant ce noni de La Fond Ou La Font antérieurem<strong>en</strong>t <strong>au</strong> flje siècle. C'est<br />

Pierre tic La Fond, note , noble, de la paroisse de Thiel, qui fit <strong>en</strong> 1444 ave" ai' dite<br />

de Bourbon pour la haillie de Logerel, qu'il t<strong>en</strong>ait <strong>en</strong> fief roturier dans les paroisses<br />

de TItiel et Chape<strong>au</strong>x, Châtell<strong>en</strong>ies de Moulins, Bessay et Pougny, <strong>au</strong>jourd'hui arrondissem<strong>en</strong>t<br />

de Moulins, canton de Chevagnes et Neuilly-le-ltéal. Je ne doute pas que<br />

nous ne soyons ici sur la trace de la famille de de La Font de Bourges, dont <strong>au</strong> surplus<br />

le nom est un do ceux qui ont toujours été.assez communs et je me demande<br />

si <strong>en</strong> n'est pas de la même souche qu'est sortie une <strong>au</strong>tre ramille de de La Fond, que<br />

m'a signalée M. de M<strong>au</strong>ssabré comme possédant <strong>en</strong> <strong>Berry</strong> La Beuvrière, Saini-Georges,<br />

Laz<strong>en</strong>ay, 'Dion, P<strong>au</strong>dy La Ferté-Giihert, etc. Elle remontait h En<strong>en</strong>ne dé La Fond,<br />

procureur à Rou<strong>en</strong>, et père d'<strong>au</strong>tre Eti<strong>en</strong>ne, <strong>au</strong>diteur des comptes h.ltou<strong>en</strong>, int<strong>en</strong>dant<br />

des meubles de la couronne, mort <strong>en</strong> lOti. liii de ses desc<strong>en</strong>dants, seigneur des terres<br />

nommées plus h<strong>au</strong>t, était vers la fin du même siècle int<strong>en</strong>dant de la Franche-Comté.<br />

Leurs armes sont différ<strong>en</strong>tes de celles des La Fout de Bourges.,<br />

(2) Hist., p.73. -<br />

(3) Tombe<strong>au</strong> généal., p. . -.


I<br />

- 15 -<br />

boust indique assez qu'il devait être <strong>en</strong> bonne situation de fortune: Enfin<br />

une pièce jusqu'à prés<strong>en</strong>t inédite vi<strong>en</strong>t achever de nous r<strong>en</strong>seigner sur<br />

situation de Jean de La Font. C'est la copie de son contrat de mariage<br />

dreSé -le 2 m'ai- 1502 par-devant Me Jean Poitevin, notaire h Bourges .<br />

Il y est dit que le futur époux de Françoise Godard, dont le père !ierre<br />

Godard était un marchand de iloures, exerçait lui-même narchandjse <strong>en</strong><br />

cette ville. Il n'est pas fait m<strong>en</strong>tion expresse du g<strong>en</strong>re de commette qu'il<br />

Professait , ni de sa demeure ; mis on y voit que ledit Godard demeurait<br />

rue de Mont-Chevry, <strong>au</strong>jourd'hui Saint-Sulpice, derrière l'hôte! de Cocher<br />

mois, cet liOlel si be<strong>au</strong>, qu'<strong>au</strong> (lire de Catherinot on nommait alors le Petit<br />

Louvre; et dont il ne reste plus <strong>au</strong>jourd'hui une seule pierre (2), tandis<br />

qu'on sait que Jean de La Font logeait près de là sur la paroisse Saint.<br />

Médard. D'<strong>au</strong>tre part les témoins <strong>au</strong> contrat sont, l'un un drapier, l'<strong>au</strong>tre<br />

un presseur de drps; d'où l'on peut conclure que le be<strong>au</strong>-père comme le<br />

g<strong>en</strong>dre étai<strong>en</strong>t drapiers et qu'ils logeai<strong>en</strong>t dans le voisinage l'un de l'<strong>au</strong>(re,<br />

<strong>au</strong> quartier de la draperie. -C'était celui qui; compr<strong>en</strong>ait le marché de la<br />

Croix-de-Pierre, la place des Auv<strong>en</strong>ts, les rues Saint-Âmhreix, Saint-Sulpies,<br />

et <strong>en</strong> général tout cequi avoisinait les foulonneries et teintureries de -<br />

l'Yévrette. Il ne f<strong>au</strong>t pas oublier qu'à l'époqueoù nous sommes lé corps<br />

de la draperie t<strong>en</strong>ait le h<strong>au</strong>t bout dans notre pays. -Il avait pour -lui la<br />

richesse, et les dignités bourgeoises lui étai<strong>en</strong>t dévolues. La- famille à<br />

laquelle Jean de La Font v<strong>en</strong>ait de s'allier a fourni à notre ville plus d'un<br />

échevin. <strong>Un</strong> frère de sa femme, François Godard, seigneur de la Grêlerie',<br />

fut maire de Bourges <strong>en</strong> 557-58 (3). Ces Godardparaiss<strong>en</strong>t reconnaître<br />

pour <strong>au</strong>teur un clerc d'office ou secrétaire du duc Jean de ce nom qui<br />

(1) Cette grosse d'un contrat, dont l'original est .certainem<strong>en</strong>t Perdu <strong>au</strong>jourd'hui,<br />

fut faite ainsi que t'indique une noie ajoutée à cette pièce, pour servir <strong>au</strong>x soeurs de<br />

(10 La Font après sa mort. -Elle se trouve à la l'illiolhèque impériale (cabinet des<br />

titres), parmi la collection de pièces généalogiques rassemblées <strong>au</strong> xv ite siècle par le<br />

chevalier Gougnon, et qui devinr<strong>en</strong>t propriété du gouvernem<strong>en</strong>t par suite de Iacqui_<br />

silion qu'<strong>en</strong> lit <strong>en</strong> 1765 <strong>au</strong>x héritiers dudit chevalier, l'int<strong>en</strong>dant de <strong>Berry</strong>, M. Dupré<br />

de Saint-M<strong>au</strong>r. On peut lire l'histoire de cette transaction,. aveé l'énumération des<br />

titres que conti<strong>en</strong>t cette collection dans l'Annuaire Vermeil, année 1844, 3' partie,<br />

-P, 97 à 103, -<br />

(2) La maison Godard pourrait bi<strong>en</strong> être ce joli spécim<strong>en</strong> d'architecture <strong>en</strong> bois de<br />

In -r<strong>en</strong>aissance qu'oû nomme <strong>au</strong>jourd'hui la maison de la Reine-Blanche. Cep<strong>en</strong>dant,<br />

je dois dire qu'un écusson récemm<strong>en</strong>tdécouvert sur la cheminée d'une de ses chambres<br />

offre des armes qui ne sont pas celles des Godard. -<br />

(3) ch<strong>en</strong>u, dans sa liste des maires et échevin g de Bourges, -donne expressém<strong>en</strong>t la<br />

qualité de marchand à ce François Godard; <strong>en</strong> quoi il n'a pas-été imité par Catberiaot<br />

ni La Tb<strong>au</strong>massière, qui avai<strong>en</strong>t leurs raisons pour user de discrétion à cet <strong>en</strong>droit,


C<br />

U<br />

L<br />

- 46 -<br />

<strong>au</strong>rait comm<strong>en</strong>cé la maison. Lors de son mariage Jean de La Font n'était<br />

1sûs <strong>en</strong>core possesseur de la terre de Lugny, car il est dit dans son contrat<br />

que ses bi<strong>en</strong>s sont meubles e ou à bi<strong>en</strong> peu Près, comme il convi<strong>en</strong>t-<br />

chez un négodant et faculté lui est accordée de convertir lesdits bi<strong>en</strong>s<br />

• meubles-<strong>en</strong> héritages jusqu'à concurr<strong>en</strong>ce (le 6,000 livres tournois. Lors-<br />

que à peu de distance de cette époque il fit l'acquisition du domaine de<br />

Vesnez, ce ne fut guère probablem<strong>en</strong>t que dans l'int<strong>en</strong>tion d'avoir un fief<br />

dont il pût accoler le nom à son nom patronymique, et non Foui' faire un<br />

placem<strong>en</strong>t de fonds avantageux, le rev<strong>en</strong>u net de cette propr été étant à<br />

peine de tr<strong>en</strong>telivres par an, ainsi que jci'appr<strong>en</strong>ds, d'unc . liève du duché<br />

de <strong>Berry</strong>, conservée <strong>au</strong>x archives du Cher, dans le fonds du Bure<strong>au</strong> des<br />

finances (t: 419), et où se lit cet article o Jehun de La Fout, bourgeois<br />

et marchant demourant à Bourges, ti<strong>en</strong>t <strong>en</strong> fief du conte de Sancerre et <strong>en</strong><br />

arrière-fief du Roy sa mestairie de Vesnez assiz <strong>en</strong> la paroisse de Lugny,<br />

- qui consiste <strong>en</strong> 'maiso n , grange, bergerie, oulches, vcrgiers, prés, boys,<br />

buissons, gar<strong>en</strong>nes, pasturanlx, landes, gasts, es. ail y a tipar<strong>en</strong>ce<br />

que la plus grande part (le sa fortuite vint, du èôté usai de sa femmeS<br />

Cette union du reste fut de courte durée; Jean n'avait <strong>en</strong>core eu qu'une<br />

fille,, alors à peine âgée de deux ans, lorsqu'il mourut le 2juillet 4505 et fut -<br />

<strong>en</strong>terré dans l'église Saint-Médard, sa paroisse (1).<br />

Après sa mort, sa veuve, Françoise Godard , épousa <strong>en</strong> secondes noces<br />

Eti<strong>en</strong>ne J<strong>au</strong>pitre , <strong>au</strong>tre marchand drapier établi sur!a paroisse •de Saint-<br />

Pierre-le-Marché qui 'fut échevin <strong>en</strong> 4519-20. C'est ce double mariage qui<br />

a trompé Catherino et l'a porté dans l'opuscule déjà cité à ' faire deux<br />

personnes de cette Françoise (2). . .<br />

(4) lI<br />

parait qu'on lisait <strong>au</strong>trefois dans l'église Saint-Médard l'épitaphe suivante (lui<br />

décorait-6011 tombe<strong>au</strong> de famille Cy gli .JEIIÀN DE LÀ FONT, <strong>en</strong> son vivant bourgeois<br />

de Bourges, quitrespassa le 2juillet 4505, et r,lÀeIE nE LA FONT, sa soeur, qui ticspassa<br />

le.... . JEANNE DE LA FONT, 111k dudit deffunt, vivante femme de M. JÀcQur.s -<br />

Tnu,ousT, escuyer s . de Quantilly , notaire et secrétaire du Roy, de la couronne<br />

et maison de France, et esl<strong>en</strong> <strong>en</strong> <strong>Berry</strong>, lrespassn <strong>au</strong>dit Qnantilly le 29mo jour d'aoust<br />

l'an 4532,<br />

et est inhumée <strong>en</strong> l'église dudit Quantilly.' - Priez Dieu pour leurs âmes.<br />

<strong>Un</strong> De profundis. - Requiescant itt pace. o<br />

Marie de Li Font, Soeur de Jean, dont il est ici question, mariée à un certain Simm,<br />

Bigonne<strong>au</strong> ,<strong>en</strong> eut un fils nominé François, qui fut notaire de l'official de Bourges.<br />

C'est tdut ce que j'<strong>en</strong> sais et tout ce qu'il importe d'<strong>en</strong> savoir.<br />

(2) Cet Éti<strong>en</strong>ne J<strong>au</strong>pitre demeurait rue des Auv<strong>en</strong>ts, dans une maison joûlant les<br />

places du Poids-le-Roi, <strong>au</strong>trem<strong>en</strong>t les . places de La Bertiiomière, et vis-à-vis l'hôtel<br />

Cneliermois. Il se trouva, par son union, be<strong>au</strong>-père de Thihoust, avec lequel il<br />

parait avoir vécu <strong>en</strong> parfaite concorde: On lit ,' <strong>au</strong> fa 75 (verso ) du ReQistre ttoir,<br />

la transcription' d'un contrat dont le titre est ainsi form ulé : « copie de la recongnoiss<strong>au</strong>ce<br />

que demand<strong>en</strong>t ceulx d'Orléans leur être faicic par mon père, Sr Éti<strong>en</strong>ne


-47--<br />

La jeune file que v<strong>en</strong>ait d'époùser Thiboust <strong>en</strong> 4521 réunissait à tous<br />

les agrém<strong>en</strong>ts du corps toutes les grâces de l'esprit. Aussi, <strong>en</strong> racontant<br />

qu'une dizaine d'années plus tard elle mourut, laissant son mari inconso-<br />

lable dosa perle, celui de qui nous t<strong>en</strong>ons ces détails a-t-il pu dire sans<br />

exagération: « Le décès de cette Jeanne de La Font fut déploré <strong>en</strong> prose<br />

et <strong>en</strong> vers , on grec, <strong>en</strong> latin et <strong>en</strong> français, et <strong>en</strong>tr'dutrès par le fameux<br />

poète de son siècle, Jean Second, natif de La Baye <strong>en</strong> Hollande (I). o<br />

Cette dernière indication m'avait mis- sur la voie d'une découverte que<br />

j'ai été heureux do voir confirmée plus tard par le témoignage de Robinet<br />

des Grangiers, lequel parait avoir été bi<strong>en</strong> r<strong>en</strong>seigné dans le peu qu'il dit<br />

de nos deux époux. Comm<strong>en</strong>t, nous disions-nous, se fqit-il qu'une femme<br />

qui a été chantée par tousles poètes de son <strong>en</strong>tourage comme une mer-<br />

veille nous soit àpeine <strong>au</strong>jourd'hui connue de nom? Sans doute ceux qui<br />

se sont efforcés à déplorer sa mort dans toutes les langues étai<strong>en</strong>t des<br />

poètes de la localité, et il n'y a pas lieu de s'étonner qie la plupart de ces<br />

poésies funéraires soi<strong>en</strong>t perdues, n'ayant jamais été imprimées selon toute<br />

appar<strong>en</strong>ce. Mais parmi ceux qui les composèr<strong>en</strong>t Catherinot <strong>en</strong> cite un<br />

dont la célébrité a valu à ses œuvres d'assez nombreuses réimpressions.<br />

Nous voulons parier de Jean Everard, dit Jean Second, le voluptueux<br />

<strong>au</strong>teur des Baisers, qui étudiait, ctèame on sait, à Bourges vers 453o. La<br />

si<strong>en</strong>ne 86 moins doit se lire <strong>en</strong>core Eù feuilletant ses oeuvres nous avons<br />

<strong>en</strong> effet retrouvé l'épitaphe par lui adressée à cette femme charmante qu'il<br />

avait pu coanhitre, et qui parait avoir fait sur lui une assez vive impression.<br />

Cette pièce n'est pas tellemeht longue que nous ne puissions mettre ici <strong>en</strong><br />

rdgard le texte original et la traduction. -<br />

fohan,w, Ton t<strong>en</strong>ir Epitap/tiwni.<br />

.Hospes, Johannœ ho6 Foulante .habet ossa sepulebrum<br />

Banc V<strong>en</strong>us et Juno fi<strong>en</strong>t si moi et Chantes.<br />

Natroaiale deeus Joue, V<strong>en</strong>us <strong>au</strong>na formant<br />

flhiui extinetam li<strong>en</strong>t Chantes charitem,<br />

Nobilitatein CL opes ah origine duxit avita, - -<br />

%'irlulcm vjriim ,ti<strong>en</strong>s 4<strong>en</strong>eosa dedit.<br />

J<strong>au</strong>itro et mo pour là r<strong>en</strong>te de lad. vigne. Signé: tliiboust. ,Et à là p. 42Ô, dàII<br />

un acte de dotîaLion <strong>en</strong> faveur du même Thiboust phr le ,tême J<strong>au</strong>pitùè, du ôetbre<br />

4527 se r<strong>en</strong>contre cette phrase o Pour l'amour & dilleôtion QI'iI ( Jaoipitrè) à<br />

ef se dit avoir de noble homme Me Jacques Thiboust.... et daine Jehuâne dei<br />

Lafout si femme ,fihle de feue dame Francoyso Godard, jadis femme-duci. J<strong>au</strong>pitre.<br />

Ces derniers mots font voir qu'à l'époque de son mariage la femme de ThihousL 4LaIL<br />

orpheline. -<br />

(I) CatherinoL , Tombe<strong>au</strong> généal., p. 21G & 22<br />

0<br />

3


- 18 -<br />

Spl<strong>en</strong>dida di puree.sLal,ai nomma fouie,<br />

Qui pute Pegaseo dé pede fudit aquam.<br />

Peetorit crysiallo pellueidiora gerehat<br />

Noverai et quicquid Franea poésis liabet.<br />

liocta moles digitis, liquido sou fundere cantu,<br />

Quille canit dulci gulture sertis clos, -<br />

Non ignora jocos, et non ignara etioreas, - - -<br />

Doela loqui blandum, soi] mage dobta fidem:<br />

Moribus lus visa est dignissima conjuge , eujus<br />

• -- Soepé tulit facilem rogia, charta manuel<br />

Nupta oui primo viridantis flore soli<br />

Enixa est sec-ii pignon quinque ton.<br />

Cum quo commuai partita est omnia fate<br />

Forsitan et euperet <strong>au</strong>ne quoque flore sirnul.<br />

- iditiùs ut ferret divisas hie delores,<br />

.-lnconselandos qui modô dat g<strong>en</strong>itus.<br />

AL vos, mortales, quorum non lserat ullum,<br />

Ferle rasas liii qurosa nuper oral.<br />

Cette pièce est la onzième des poésies funéraires de l'<strong>au</strong>teur. La part<br />

faite d'un peu de préciosité et de m<strong>au</strong>vais goût particulier à cette époque,<br />

il f<strong>au</strong>t avouer 'qu'on ne r<strong>en</strong>contre paStous les jours des épitaphes d'un<br />

style <strong>au</strong>ssi pur, ni d'ijii s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t <strong>au</strong>ssi gracieux. Le trait final urtout est<br />

charmant. En voici l'interprétation sous toutes réserves<br />

« Etranger, c'est ici le tombe<strong>au</strong> où repose Jeanne de La Font. Vénus,<br />

Junon et lés Grâces la pleur<strong>en</strong>t de concert. Junon pleure son exquise<br />

distinction, Vénus sa be<strong>au</strong>té, les Grâces sa grâce éanouie. Elle fut noble<br />

et riche de naissance et son coeur généreux réunit toutes les vertus. Elle<br />

tirait sort nom illustre de la fontaine qui jaillit <strong>en</strong> e<strong>au</strong> limpide sous le pied.<br />

de Pégase. Son âme était plus pure que le cristal. Tous les trésors de la<br />

poésie française lui fur<strong>en</strong>t connus. Elle savait faire résonner sous ses doigts<br />

l'instrum<strong>en</strong>t mélodieux; et charmait par la suavité de sa voix : ainsi chante<br />

d'un gosier harmonieux le cygne à ses derniers instants. Elle n'ignorait ni<br />

les jeux pi la danse. Elle savait charmer par ses discours, elle savait <strong>en</strong>core<br />

mieux garder sa foi. Par' a ses moeurs elle. fut digne de son époux dont la<br />

plume habile écrivit fréquemm<strong>en</strong>t les chartes royales (1). Mariée à lui dans<br />

la fleur do sa jeunesse., elle lui reùouvela cinq fois le gage de son amour<br />

conjugal.- Elle partagea constamm<strong>en</strong>t sa fortune; et peut-être ett-elte désiré<br />

mêler <strong>au</strong>jourd'hui ses pleurs <strong>au</strong>x si<strong>en</strong>s, afin qu'ainsi partagée son inconso-<br />

lable douleur lui fùt moins rude. O vous, mortels, qu'elle n'off<strong>en</strong>sa jamais.<br />

donnez des rdses à celle qui fut eJie-même,une rose »<br />

(1) Allusion à ses fonctions de se el ,étnir4 du loi.<br />

D


Remarquons, avant toute chose, la traduction latine <strong>en</strong> rorirAriE du<br />

nom de De La Font, suivant l'absurde habitude du temps, qui r<strong>en</strong>d parfois<br />

] , erreur inévitable lorsqu'on traduit <strong>en</strong>suite ces noms <strong>en</strong> français sans les<br />

connaitre.D'liabiles g<strong>en</strong>s y ont été souv<strong>en</strong>t trompés, et nous <strong>en</strong> trouvons<br />

ici un exemple des plus remarquables. En effet Jeanne de La Font n'a pas<br />

été <strong>au</strong>ssi inconnue dans l'histoire littéraire de noire pays qu'on pourrait le<br />

croire, seulem<strong>en</strong>t jusqu'ici elle n'a pas porté chez c<strong>en</strong>x.qui lesprerniers ont<br />

parlé d'elle son véritable nom. Ouvrons la <strong>Bibliothèque</strong> /rançoisc de<br />

Lacroix du Moine <strong>au</strong> mot Jeanne de Lx FoNTÂirE, nous y -lirons<br />

« JEÂNNE PE LA FONTAINE, native du pays de <strong>Berry</strong> -,Dame très illustre<br />

et fort recommandée (pour son savoir) de plusieurs hominês ' doctes. Elle<br />

a écrit <strong>en</strong> vers fratçois l'histoire des faits deThésée et <strong>au</strong>tres poésies non<br />

imprimées. Jean Second, poète très excell<strong>en</strong>t, natif de JJae (1) <strong>en</strong> Flandres,<br />

appelé <strong>en</strong> latin Joliannes Secundus llogietisis, fuit très honorable m<strong>en</strong>tion<br />

d'elle <strong>en</strong> ses élégies latines - imprimées avec ses BaiseFs , l'an 1560 , ou<br />

<strong>en</strong>viron. » -<br />

Là se borne l'article consacré par le vieux bibliographe à une femme<br />

dont la modestie paraît avoir égalé le mérite. Or Jeanne tic La Font ou<br />

de La Fontaine 'est tout un. Ce qu'il y n d'évid<strong>en</strong>t, à voir l'erreur dans<br />

laquelle tombe Lacroix du Maine <strong>au</strong> sujet de ce nom, c'est qu'il ne l'a<br />

appris que par les poésies latines de Jean Second, etqu'il n'a ri<strong>en</strong> connu de<br />

Plus sur le compte de celle qui le poila, ne s'étant guère saris aoute inquiété<br />

d'<strong>en</strong> savoir davantage. <strong>Un</strong>e telle indiffér<strong>en</strong>ce sur le compte des g<strong>en</strong>s dont<br />

ils parl<strong>en</strong>t n'a ri<strong>en</strong> qui doive surpr<strong>en</strong>dre chez les écrivains Øe cette époque.<br />

Mais ce qu'il y n de plus remarquable, c'est de voir le savant La Mon-<br />

noye dans son comm<strong>en</strong>taire sur la .flibliothè que de Lacroix <strong>au</strong>toriser cette<br />

erreur <strong>en</strong> la reproduisant. -<br />

ii C'est quelque chose d'assez singulier, dit-il c qu'<strong>au</strong> comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t du<br />

seizième siècle il se soit trouvé deux Dames, savoir Aune de Graville (2)<br />

à Paris et Jeanne- de La Fontaine à Bourges, qui instruites tou'tes deux à<br />

la poésie, ai<strong>en</strong>t <strong>en</strong> même temps, quoiqu'à l'insçu et éloignées l'une de<br />

l'<strong>au</strong>tre, (qu'<strong>en</strong> savait-il ?) mis <strong>en</strong> vers français la Théseide de Bocace (3). »<br />

Il semblerait, <strong>au</strong> premier abord et sur une affirmation <strong>au</strong>ssi précise, que.<br />

le docte comm<strong>en</strong>tateur a vu le poème de Jeanne - de La Font, comme il<br />

(t) La Haye, <strong>en</strong> latin Naga condtis.<br />

() Anne , fille de Jacques de Craville amiral de France et femme de Pierre de<br />

• Ilaizac d'Entragues. Soit resté manuscrit , connnq celui de Jeanne de La Font<br />

- avait été composé à la demande de la reine ci<strong>au</strong>de, femme (le François W.<br />

-(3) lJtbUoth. franc, de Lacroix du Maine et de Duverdier deVuepriças, édition du<br />

'RigoIey de Juvigny, t. jr, p. 608.


- '20. —r-<br />

- déclare avoir pris connaissance de celui de ta darne de Graville , mais il<br />

paraît bi<strong>en</strong> quelques lignes plus bas que, lui <strong>au</strong>ssi s'est procuré ses 'r<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>ts<br />

sur notre éompatriote dans les oeuvres latines de Jean Second.<br />

A ]a rigueur il est excusable, car de son temps il ne devait plus rnre facile<br />

de se r<strong>en</strong>seigner sur s<strong>en</strong> compte (1). Au surplus voici comm<strong>en</strong>t il nous<br />

livre lui-même le secret de sa f<strong>au</strong>sse sci<strong>en</strong>ce <strong>en</strong> voulant compléter son<strong>au</strong>teur:<br />

« Il paroit que c'est Jeanne de La Fontaine que Jean Second u désignée.<br />

dans la quinzième élégie de son troisième livre, dont voici le titre In<br />

historiam d-à rebus à Theseo gestis, duoruznque rivaliuni certçnine,<br />

gaUicts numeris ab illustri qudd-am maIreS suavissimè conseriptam. On.<br />

voit qu'il y désigne clairem<strong>en</strong>t .Jeanne de La Fontaine sans, la nommer. Il.<br />

la, nomme <strong>en</strong> deux <strong>au</strong>tres élégies de son livre Funerum, l'une desquelles<br />

comm<strong>en</strong>ce ainsi<br />

Hospes, JoJutnnœ hoc Fontanw icabet ossa Sepulchrunt,<br />

où <strong>en</strong>tre <strong>au</strong>tres vers celui-ci mérite d'etre remarqué<br />

-Movérat et gaie quid franea poôsis liabet. »<br />

-. Cette élégie n'est, comme on le voit, que l'épitaphe ci-dessus rapportée.<br />

Quant <strong>au</strong>x deux <strong>au</strong>tres pièces de Jean Second que désigne ici-La Monnoye,<br />

nous <strong>au</strong>rons occasion de les m<strong>en</strong>tionner plus tard.<br />

• Enfin la sagacité du biographe (les Ânn6nces berruyères a été égalem<strong>en</strong>t<br />

mise <strong>en</strong> déf<strong>au</strong>t par l'indication erronée de Lacroix. Pans l'articlè qu'il a<br />

cru devoir .y consacrer à Jeanne de La Fontaine, M. Chevalier n'a guère<br />

fait que paraphraser La Monnoye (2).<br />

Ce qui me surpr<strong>en</strong>d le plus <strong>en</strong> cette circonstance &est que Catherinot,<br />

fureteur acharné,, et La Th<strong>au</strong>niassière, travailleur'sérieux et érudit, qui<br />

tous deux ont m<strong>en</strong>tionné L'épouse de Jacques Thiboust, et qui connaissai<strong>en</strong>t<br />

certainem<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong> leur Lacroix du Maine et leur Jean Second , no se sont<br />

pas aperçus de l'erreur ou du moins ne l'ont pas relevée.<br />

Quoiqu'il <strong>en</strong> sou, tout concourt 'à la démontrer: la forme latine du nom,<br />

qu'on peut traduire à volonté des deux façons, l'époque à laquelle vécut<br />

cette u matrone e ainsi que, la désigne Jean Second, ses relations à.Bourgcs<br />

avec ce dernier,, qui, dit La Mbnnoye, fil, son épitaphe, qui', dit Cafterindt,<br />

pleura sa mort <strong>en</strong> vers; <strong>en</strong> voilà bi<strong>en</strong> assez pour mettre le fait hors<br />

de doute, quand bi<strong>en</strong> même on n'<strong>au</strong>rait pas la garantie de son biographe<br />

Robinet sur ce point.'<br />

Ainsi à vingt-huit ans, Thiboust épousait une jeune fille, qui, à Ja be<strong>au</strong>té<br />

et à lu fortune, unissait non seulem<strong>en</strong>t l'esprit naturel mais <strong>en</strong>core les<br />

(I) aernard do La ?donnoye, né -i Dijon <strong>en</strong> 1641, mourut à Paris <strong>en</strong> 1727.<br />

(2) V. Annonces bcrr'ryère, n' du 14 février 1839.


-<br />

avantages de l'éducation la plus soignée qu'une femme pût recevoir à cette<br />

époque celle-là même que, ses contemporains ont signalé comme ure<br />

muse et ses amis pleurée comme une Grâce. C'est donc, • sous ce double<br />

aspect qu'il f<strong>au</strong>t pourêtre juste chercher à apprécier cette femme distinguée.<br />

Malheureusem<strong>en</strong>t, dans l'un comme dans l'<strong>au</strong>tre s<strong>en</strong>s, nous ne.<br />

pouvons plus <strong>en</strong> juger (lue par ouï dire , car le temps , qui nous a ravi<br />

cette « rose du <strong>Berry</strong>, » pour nous servir de l'expression du poète , a fait<br />

disparaître <strong>au</strong>ssi ses oeuvres.<br />

Comme femme nous aimons à croire qu'elle réunit toutes les qualités<br />

que lui prête son poétique admirateur, et que l'épitaphe qu'il lui consacra<br />

ne m<strong>en</strong>t pas <strong>en</strong> nous la représ<strong>en</strong>tant comme une dame accomplie de tous<br />

points. Elle était belle, s'il f<strong>au</strong>t l'<strong>en</strong> croire, de toutes les be<strong>au</strong>tés, car elle.<br />

avait la distinction et la grâce jointe à la régularité des traits. Je soupçonne,<br />

f<strong>au</strong>t-il le dire ? notre <strong>en</strong>thousiaste et inftammal4e Hollandais d'avoir éprouvé<br />

la fascination de deux be<strong>au</strong>x yeux. Mais, il y n tout lieu de croire, qu'il ne<br />

dépassa jamais avec: elle les bores de cette galanterie discrète, qui de<br />

bonne heure a fait une des principals distinctions et l'un des plus grands<br />

attraits de la société française: Aussi je m'inquiète plus du mérite de Jeanne<br />

de La Font comme femm'e d'esprit et femme aimable que comme jolie<br />

femme. Tout du moins cela j la complète et finit de la faire aimer, si,<br />

comme il me semble, elle est restée simple et sans pédanterie malgré ses<br />

tal<strong>en</strong>ts variés. Elle cultivait avec succès, nous dit-on, les arts, la danse,<br />

la<br />

. musique vocale et instrum<strong>en</strong>tale, faisait des vers et séduisait par une<br />

conversation <strong>en</strong>traînante, l'éloqu<strong>en</strong>ce de son sexe.<br />

-<br />

On aime à' se représ<strong>en</strong>ter cette gracieuse et spirituellè personne s'<strong>en</strong>tourant<br />

d'un cercle d'hommes choisis parmi ceux que la province lui offrait et<br />

que les relations de son mari lui am<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t , les charmant par les délices<br />

d'une conversation délicate et sérieuse à la fois, et faisant des repas <strong>au</strong>xquels<br />

elle les conviait des banquets de la sci<strong>en</strong>ce et de la poésie. Quel plus<br />

grand charme que celui d'une société oà la femme trône de par son esprit<br />

et sa be<strong>au</strong>té? et Jacques Thihoust devait être; homme d'assez de savoir<br />

vivre pour s'effacer <strong>en</strong> ces occasions derrière Jeanne de La Font.<br />

Ce qui a fait la grande réputation des salons des xvii» et xv,n» siècles<br />

c'est qu'ils ont été présidés par des femmes charmantes et instruites à la<br />

fois. C'est elles cfui ont puissamm<strong>en</strong>t aidé à faire notre nation ce qu'elle<br />

est <strong>en</strong> répandant partout son esprit et ses doctrines. Au comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t du<br />

xvi» siècleon : était trop près du moy<strong>en</strong>-âge, les moeurs avai<strong>en</strong>t<strong>en</strong>éore trop<br />

de rudesse , pour que la femme ait pu jouer le rôle que nous. indiquions.<br />

Son , influènce s'y borna la plupart du temps à, une galanterie qui n'était<br />

pas toujours assez délicate: La douce physionomie de Marguerite de<br />

Nàvarre, avec sou <strong>en</strong>tourage de poètes amoureux, brille alors, mais plutôt<br />

1


-22à<br />

titre d'exception, et <strong>au</strong> moins comme la manifestation d'une t<strong>en</strong>dance <strong>en</strong><br />

,s<strong>en</strong>s contraire , t<strong>en</strong>dance qui ne devait aboutir que plus tard. Il est bi<strong>en</strong><br />

certain <strong>en</strong> effet qu'à partir de ce mom<strong>en</strong>t l'élém<strong>en</strong>t féminin t<strong>en</strong>d à pr<strong>en</strong>dre<br />

une part directrice dans les relations sociales malheureusem<strong>en</strong>t ce siècle<br />

n'a pas pu voir se réaliser <strong>en</strong>tièrem<strong>en</strong>t ces essais de formation d'une société<br />

complètem<strong>en</strong>t polie. Le rapprochem<strong>en</strong>t qui t<strong>en</strong>dait à s'opérer alors <strong>en</strong>tre<br />

les esprits délicats des deux sexes dans un but de jouissancesintellectuelles<br />

qui tranchass<strong>en</strong>t sur fil du temps, cc rapprochem<strong>en</strong>t fut brusquem<strong>en</strong>t<br />

interrompu par les désordres des guerres civiles. Pour que puiss<strong>en</strong>t<br />

se former ces réunions dans lesquelles s'élabor<strong>en</strong>t les élém<strong>en</strong>ts à la fois<br />

l'une société empreinte d'urbanité et d'une littérature nouvelle, il f<strong>au</strong>t<br />

avant tout la sécurité de la paix à l'intérieur. Au cri des luttes et des<br />

batailles intestines l'âme s'effarouche ,. l'esprit se iefermé, une sorte de<br />

férocité native, reste de s<strong>au</strong>yagerie qui semble toujours tapi dans quelque<br />

coin du coeur humain, se réveille et se met à hurler. Que devi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t alors<br />

les chants et les conversations ? Les muses n'ont plus qu'à replier leurs<br />

ailes, les hommes qu'à s'isoler les uns des <strong>au</strong>ties. Ce n'est donc que dans<br />

les mom<strong>en</strong>ts où la Franco a été paisililé, <strong>en</strong>tre les guerres d'Italie et celles<br />

de religion, qu'il y eut une de ces heures de réjiit durant laquelle le xvr<br />

siècle put essayer ce que devait accomplir le suivant par la formation du<br />

cénacle de l'hôtel Rambouillet. Ce mom<strong>en</strong>t s'exprime d'un mot quand on<br />

nomme la femme qui semble à cette époque résumer toute la poésie féminine<br />

de notre nation , et qui désigne le mouvem<strong>en</strong>t artistique et littéraire des<br />

esprits sur èertains points du pays, je veux parler de Louise Labé, la belle<br />

cordière de Lyon Disons toutefois que, si ce nom est <strong>en</strong>core <strong>au</strong>jourd'hui<br />

presque le seul populaire de ceux qu'ont portés les femmes poètes d'alors,<br />

cela li<strong>en</strong>t d'abord à cette méthode inhér<strong>en</strong>t(, à l'esprit humain qui t<strong>en</strong>d<br />

toujours à synthétiser un <strong>en</strong>semble de faits dans un nom de choix, et puis<br />

à ce que la plupart des contemporaines de Louise Labé, et c'est le.cas de<br />

Jeanne de La Font, par une modestie, apanage de leur sexe, ont refusé<br />

les honneurs de l'impression. Il suffit de feuilleter les <strong>Bibliothèque</strong>s de<br />

Lacroix du Maine et de Duverdier pour s'émerveiller de la grande quantité<br />

de noms féminins qu'elles conti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t. De ces muses, il est vrai, nous ne<br />

connaissons la plupart du temps que les noms mais la notoi'iélé de leur<br />

bel esprit constatée par ces deux contemporuiis sert à prouver quelle fut<br />

- la vivacité d'impulsion de cette époque vers le culte des choses intellectuelles.<br />

II est certain qu'il y eut alors peu de villes un peu importantes qui<br />

n'eût sa muse. Autour de Louise Labé à Lyon se groupai<strong>en</strong>t Clém<strong>en</strong>ce de<br />

Bourges, les deux soeurs de Sève, cette Jeanne Gaillarde ou Gaillard avec<br />

laquelle Marot fut <strong>en</strong> correspondance poétiques et dont il nous a conservé<br />

un ronde<strong>au</strong> d'un tour heureux. uni Bourgogne c'est Anne Bégat, fille du


-----25—<br />

J urisconsulte de ce nom, et dont Tabouret - dans ses Biarrures nous fait<br />

connaître un sonnet. Â Paris c'est Aune de Graville, et tant d'<strong>au</strong>tres dont<br />

il serait fastidieux d'étaler ici les noms. La muse do Bourges fut Jeanne<br />

de Lu Fônt. Elle n cet avantage qu'elle a précédé de vingt ou tr<strong>en</strong>te ans<br />

la plupart de celles que nous v<strong>en</strong>ons de citer. La belle cordière v<strong>en</strong>ait<br />

seulem<strong>en</strong>t <strong>au</strong> monde quand Jeanne jouait déjà à Bourges dans des propor<br />

ti<strong>en</strong>s peut être un peu restreintes, le rôle que Louise devait jouer plus<br />

tard à Lyon.<br />

On n quelquefois insisté sur là caractère semi-itali<strong>en</strong> de cette dernière<br />

ville <strong>au</strong> siècle dont nous parlons on n'a jamais dit, que je ache que ce -<br />

caractère Bourges l'avait partagé avec elle seulèm<strong>en</strong>t elle ne le garda pas<br />

<strong>au</strong>ssi longtemps. Le' rapp roc h<br />

em<strong>en</strong>t - que je fais d'ailleurs ici de ces deux<br />

villes , n'a ri<strong>en</strong> de factice; les monum<strong>en</strong>ts les plus anci<strong>en</strong>s de notreprovince<br />

t<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t à démontrer que, depuis le comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t de notre ère jusqu'<strong>au</strong>x<br />

derniers siècles, les relations les plus intimes, relations politiques et com-<br />

merciales, n'ont cessé d'exister <strong>en</strong>tre Bourges et Lyon. Je ne crois pas non<br />

plus exagérer <strong>en</strong> ajoutant qu'<strong>au</strong> temps de Frwiçois J°, par sa situation et<br />

ses rapports-c6mmerci<strong>au</strong>ï et intellectuels, Bourges fut après Lyon la ville<br />

(lui refléta le plus la physionomie de ces petitesrépubliques de la péninsule<br />

italique, doctes,- lettrées, artistes et commerçantes tout <strong>en</strong>semble. A ce<br />

mom<strong>en</strong>t seul on y pu dans notre passé- constater là prés<strong>en</strong>ce d'une femme<br />

poète, l'exist<strong>en</strong>ce d'une sorte de'cercle littéraire. -<br />

Par tout ce- que je vi<strong>en</strong>s de dire je t<strong>en</strong>ds à faii'e compr<strong>en</strong>dre quel pouvait<br />

être chez nous le rôle de Jeanne de La Font eh tant que femme de- let&es.<br />

Quelle fut durant sa courte exist<strong>en</strong>ce son influ<strong>en</strong>ce sur la poésie locale? Je<br />

ne s<strong>au</strong>rais le dire à distance, mais cette influ<strong>en</strong>ce a dû être réelle. J'ai<br />

peine à croire qu'elle ne fut jas pour quelque chose dans la direction que<br />

prit la muse de Jean Second. Il dut être un des comm<strong>en</strong>s<strong>au</strong>x habituels de<br />

sa maison, il l'avait vu mourir et il parait eu avoir emporté dans les brumes<br />

de son pays natalun souv<strong>en</strong>ir att<strong>en</strong>dri (1). Il lie fut pas seul à éprouver<br />

pour cette <strong>au</strong>tre Connue ce s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t d'admiration, les témoignages de<br />

regrets poétiques si nombreux à sa mort <strong>en</strong> font foi ; et, s'il f<strong>au</strong>t les pr<strong>en</strong>-<br />

dre comme l'expression de la vérité, elle pouvait lutter avec les poètes de<br />

son temps. Mais, moins 'heureux que ceux qui vécur<strong>en</strong>t près d'elle, nous<br />

(1) Cette distinction est d'<strong>au</strong>tant , j)IIIS Ibtieuse pour notre .Jeanne qu'elle tranche<br />

-davantage sur l'espèce de réprobation générale dans laquelle m<strong>au</strong>re Jean Second<br />

semble un be<strong>au</strong> jour avoir compris tout le be<strong>au</strong> sèxe herrkbon. Quelle raison cul-il,<br />

ce fils de la. Hollande, pour déclarer ainsi la guerre <strong>au</strong>x filles du ferry? Nous ne<br />

savons mais le fait de son hostilité contre elles est constant, il s pris soin de le<br />

perpétuer lui-même par- une épigramme brutale qu'un mouvem<strong>en</strong>t de colère ne jus-


U -<br />

ne pouvons pas nous prononcer <strong>en</strong> connaissance tic c<strong>au</strong>se sur le mérite de<br />

ses oeuvres. Ri<strong>en</strong> ne nous <strong>en</strong> reste que le titre d'un des poèmes qu'elle<br />

composa. C'est <strong>en</strong>core Jean Second qui, comme on a pu le voir, nous a<br />

conservé ce titre, répété par La Monnoye qui nous appr<strong>en</strong>d que &était une<br />

imitation de la Théseïdc de Bocace. C'est <strong>au</strong>ssi le titre de l'élégie que le<br />

'poète latin a consacré <strong>au</strong> souv<strong>en</strong>ir de celle qu'il avait connue et appréciée<br />

(i). Et, s'il n'y avait pas un privilége d'exagération pour les chanteurs<br />

de louanges, ce serait à se désespérer à jamais de la perte de ce chefd'œuvre,<br />

quand on voit les éloges qu'il lui prodigue.<br />

Écoutons-le plutôt:<br />

Sappho fut <strong>au</strong>trefois la seule qui osa toucher t la lyre sacrée. La première<br />

elle mérita une gloire dônt l'homme s'<strong>en</strong>orgueillit, et put pr<strong>en</strong>dre<br />

plaee <strong>en</strong>tre les Muses là où coule l'onde pégasé<strong>en</strong>ne. Et cep<strong>en</strong>dant elle n'a<br />

chanté que de légères amours, oeuvre délicate proportionnée à la faiblesse<br />

de la femme. Mais celle qui est née dans des siècles plus nouve<strong>au</strong>x, noble<br />

parmi les héroïnes de France, chante à la fois Cypris et le dieu de la guerre.<br />

Oh I que la Franco te lise I elle verra dans ton oeuvre ce que fut la puissance<br />

latine, et 'sous quelles ruines dorm<strong>en</strong>t les spl<strong>en</strong>deurs de la Grèce; elle<br />

appr<strong>en</strong>dra où les traits du Dieu ailé précipit<strong>en</strong>t les misérables mortels, les<br />

vicissitudes do la Fortune et l'inévitable Destin. Elle s<strong>au</strong>ra comm<strong>en</strong>t un<br />

coup rapide trancha les jours du jeune vainqueur qui, nouvellem<strong>en</strong>t uni à<br />

celle qu'il aimait, desc<strong>en</strong>dit <strong>au</strong>x sombres bords avant (le l'avoir possédée,<br />

et dut céder ses droits à son ami vaincu contre lequel il avait tiré son<br />

glaive altéré de sang. - O toi, qui'as su chanter tout cela si délicieusem<strong>en</strong>t<br />

dans la langue de ta patrie, que les bouches savantes redis<strong>en</strong>t éternelle-<br />

tille pas,et que te bon goût <strong>au</strong>tant que les conv<strong>en</strong>ances, euss<strong>en</strong>t dû faire repousser de<br />

ses oeuvres. Le caractère de cette pièce ne nous permet pas de ta reproduire ici in<br />

ext<strong>en</strong>so nous nous cont<strong>en</strong>terons d'<strong>en</strong> donner les premiers vers:<br />

h,<br />

In pudllas bi turic<strong>en</strong>-Ses.<br />

Ilei inihi formosas isto qui qumrlt in orbe,<br />

- ' - Cres'c<strong>en</strong>tem. segetem qurit in Oceano..<br />

• , ' Fontè dun vel trcs 'magna visunlur in orbe<br />

Nobile deformeis quas decus esse vetet.<br />

lis adjunge deeem, (tuas non contemnere possis,<br />

Coetera monstrorum nomine turba 'ç<strong>en</strong>tt ......<br />

Bôile<strong>au</strong>, lui n'aimait pas les femmes, dans ta triste satire qu'il' n péniblem<strong>en</strong>t<br />

édifiée contre elles à emprunté un trait de cette épigramme. L'imitation v<strong>au</strong>t le modèle.<br />

Malberbe fut nsleus inspiré lorsque dans son ode sur la- mort de la fille de Duperrier<br />

il 'parait s'être souv<strong>en</strong>u de la fin dc l'épitaphe de Jeanne de La Font.<br />

(I) Cette élégie est la 15' du 3 livre dÉs élégies de Jean- Second.<br />

-<br />

n<br />

n


-e.<br />

- - -<br />

m<strong>en</strong>t les vers et, puisquè la tombe t'<strong>en</strong>serre avant l'âge, et qu'il n'a<br />

as été donS <strong>au</strong>x l<strong>au</strong>riers de ton front d'orner une chetelure moins jeune,<br />

qu'<strong>au</strong> moins l'arbre de Phébus croisse sur ton tombe<strong>au</strong>, et que Philomèle,<br />

cachée dans son feuillage, <strong>en</strong> exhalant sa longue plainte sur la mort d'ftys,<br />

m êl e <strong>au</strong>x regrets de son cher défunt le regret de ta mort I »<br />

Pour faire compr<strong>en</strong>dre la partie de cette 'élégie relative <strong>au</strong> poème de<br />

J<strong>en</strong>ne de La Font, il convi<strong>en</strong>t le faire connaitre <strong>en</strong> quelques mots le sujet<br />

de l'original itali<strong>en</strong> dont le français n'est que l'imitation. La T)ùiseïde de<br />

Bocace est', un poème <strong>en</strong> douze chants, relatant les exploits de Tbésée; ce<br />

fut le premier dans lequel ait été employé l'octave,- qui- devint depùis la<br />

forme ordinaire des poèmes itali<strong>en</strong>s, espagnols et, portugais. L'épisode<br />

emprunté à ce poème par le poète berrichon trouva, comme les <strong>au</strong>tres<br />

- compositions du poète flor<strong>en</strong>tin de nombreux , imitateurs, <strong>au</strong> premier rang<br />

desquels il f<strong>au</strong>t citer l'anglais Ch<strong>au</strong>cer qui l'a inséré dans ses Cortes de<br />

Cantorbéry, où il li<strong>en</strong>t la place principale (1). De bonne heure une vieille<br />

traduction <strong>en</strong> parut <strong>en</strong> prose française: et ce fut sur celle-ci que Scanne de<br />

La Font et Anne de Graville prir<strong>en</strong>t l'une et l'<strong>au</strong>tre le motif de leur composition.<br />

Ce récit, où la tradition gretque se trouve mêlée d'une manière<br />

bizarre <strong>au</strong>x inv<strong>en</strong>tions du moy<strong>en</strong>-âge, comm<strong>en</strong>ce <strong>au</strong> mom<strong>en</strong>t où Thésée;<br />

duc d'Athènes, <strong>en</strong> rev<strong>en</strong>ain de la guerre contre les Amazones, s'empare d<br />

la ville de Thèbes. Parmi les prisonniers quil y fait et qu'il emmène <strong>en</strong><br />

Attique figur<strong>en</strong>t deux jeunes princes, cousins-germains et desûndants de<br />

Cadmus Ils s'appell<strong>en</strong>t Âreite et Palamon. Ils devi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t tous deux amoureux<br />

d'Emilie, belle-soeur du 'vainqueur. Arcite, préféré par celle qu'il<br />

aime, est par un caprice de Thésée mis seul <strong>en</strong> liberté avec l'injonction -de<br />

s'éloigner d'Athènes pour n'y pas rev<strong>en</strong>ir. Ram<strong>en</strong>é par sa passion il j<br />

r<strong>en</strong>tre 'bi<strong>en</strong>tôt sous un déguisem<strong>en</strong>t, et obti<strong>en</strong>t de servir comme page dans<br />

la maison de sa bi<strong>en</strong>-aimée. Cep<strong>en</strong>dant Palamon, qui est parv<strong>en</strong>u à s'échapper,<br />

r<strong>en</strong>contre son cousin dans le palais d'Emilieoù l'attire son amour.<br />

<strong>Un</strong> . duel s'<strong>en</strong> suit <strong>en</strong>tre les deux riv<strong>au</strong>x-. Il est interrompu par l'arrivée de<br />

Thésée, qui, appr<strong>en</strong>ant l'amour des deux combattants pour sa belle-soeur,<br />

déclare qu'elle apparti<strong>en</strong>dra à celui qui vaincra l'<strong>au</strong>tre dans un tournoi<br />

durit ii ordonne les préparatifs. Arche triomphe de sonadversaire, mais <strong>au</strong><br />

même instant-son cheval s'étant cabré le r<strong>en</strong>verse et tombe sur lui de tout<br />

son poids. On emporte le vainqueur mourant hors -de l'arène. L'amour<br />

d'Emiie se révèle <strong>en</strong> cette circonstance, et Thésée 'touché de sa douleur,<br />

l'unit 'à son amant avant qu'il r<strong>en</strong>de le dernier -soupir. Après avoir laissé<br />

ti) CF. le Geofrey Ch<strong>au</strong>cer de Iii. H. G<strong>au</strong>mont, où ce conte se trouve traduit <strong>en</strong><br />

<strong>en</strong>tier. <strong>Un</strong>e ilote du Lradûeteur reproduit sur Jeanne de Lafon tain e l'erreuir des bibliographes.<br />

' -


4#<br />

-'ze<br />

écouler un temps conv<strong>en</strong>able pour calmer la douleur de l'ami et de l'amante,<br />

tous deux inconsolables de celui qu'ils ont perdu, ' il les sollicite de s'unir<br />

<strong>au</strong> nom même de sa mémoire et l'histoire finit comme un v<strong>au</strong>deville -par -<br />

le -mariage d'Emilio et dei'alamon. -<br />

On sait que les voeux du poète élégiaque sur le sort des oeuvres de<br />

Jeanne n'ont pas été ex<strong>au</strong>cés, et qu'elles fie nous sont pas parv<strong>en</strong>ues. fi-<br />

houst fut-il jaloux de celle qu'il pieutait <strong>au</strong> point de vouloir garder pour lui<br />

tout ce qui v<strong>en</strong>ait d'elle? A-t-il p<strong>en</strong>sé que sa r<strong>en</strong>ommée de prude femme<br />

-n'avait ti<strong>en</strong> t gagner iL la publicité, ou fut-il seulem<strong>en</strong>t trop néglig<strong>en</strong>t de -<br />

sa glôire pour essayer de la perpétuer? - Pans un eus comme dans l'<strong>au</strong>tre il<br />

Cou tort à nos yeux. - -<br />

En somme ce fut une bi<strong>en</strong> délicate et bi<strong>en</strong> modeste gloire que celle dont<br />

put s'honorer notre Jeanne, gloire - qui ne dépassa pas de be<strong>au</strong>coup le cer-<br />

cle de Yintirnité. F<strong>au</strong>t-il s'<strong>en</strong> plaindre et s'<strong>en</strong> étonner? Peut-être non, car<br />

il semble que ce g<strong>en</strong>re de réputation soit celui qui convi<strong>en</strong>ne ,le mieux à<br />

la douce et t<strong>en</strong>dre nature de la femme. Lors même que -leur r<strong>en</strong>ommée<br />

s'ét<strong>en</strong>d, c'est <strong>en</strong>core, - s<strong>au</strong>f de rares exceptions ., avec une sorte de pudeur<br />

qui s'écarte <strong>au</strong>tant que possible de la mêlée du mom<strong>en</strong>t. On peut appliquer<br />

à l'épouse de 'l'hihoust ce que Sainte-Beuve dit avec • grâce de quelques<br />

femmes de léttres de nos jours « Elles ont s<strong>en</strong>ti, elles ont chanté, elles<br />

ont fleuri à leur jour; on ne les trouve que dans leur s<strong>en</strong>tier et sur leur<br />

lige. P Mais <strong>au</strong> moins,- pour suivre la comparaison de l'ingénieux critique,<br />

celles-là on les trouve et nos neveux les retrouveront <strong>au</strong>ssi et pourront<br />

comme nous apprécier les parfums de ces riches et suaves floraisons poéti-<br />

ques. Mais avec Jeanne nous n'avons pas cette ressource la tige sur<br />

laquelle a fleuri la muse berrichonne a été arrachée, etde la fleur disper-<br />

sée <strong>au</strong>x v<strong>en</strong>ts-, pas un pétale -ne nous est arrivé, même pâle et fané: Tout<br />

ce qu'il est permis de supposer sur son tal<strong>en</strong>t, c'est que, née <strong>au</strong> mom<strong>en</strong>t où<br />

l'influ<strong>en</strong>ce itali<strong>en</strong>ne dev<strong>en</strong>ait prépondérante, fàmiliarisée sans doute avec la<br />

langue du be<strong>au</strong> pays a où résonne le si » et dont la connaissance <strong>en</strong>trait<br />

alors -dans la belle éducation, elle <strong>en</strong> a pu marier la grâce et In morbidesse<br />

à la naïveté g<strong>au</strong>loise: 1 -<br />

Jeanne mourut <strong>au</strong> bout de onze ans de mariage et à la suite d'une.courte<br />

maladie <strong>au</strong> mois d'août 1532(1): Elle fut <strong>en</strong>sevelie dans l'église de Quan-<br />

tilly, où son mari lui fit élever une tombe qu'il vint partager plus tard avec -<br />

elle. Mariée <strong>en</strong> 1521, alors qu'elle avait à peu près dix-neuf ans,- Jeanne à<br />

ti) Catherinot, dans son Tombe<strong>au</strong> généal., p. .2, porte cette date <strong>au</strong> 29. La<br />

Th<strong>au</strong>mnassière, <strong>en</strong> tranerivant son épitaptie , dit te 4 L'épitaphe de l'église Saintldédard,<br />

citée plus h<strong>au</strong>t, prouve qu'ici c'est Caiherinot qui a raison. <strong>Un</strong>e fois n'est<br />

pas coutume. -


-<br />

sa mort atteignait la tr<strong>en</strong>taine, c'est - à -dire la seconde jeunesse- de la<br />

femme. -<br />

Celui qui, après avoir chanté son tal<strong>en</strong>t poétique, lui avait consacré<br />

l'épitaphe dont nous avons donné plus h<strong>au</strong>t la traduction, Jean Second<br />

fit <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre sur cette mort un chant funèbre, dernière expression des s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>ts<br />

qu'elle.lui inspira. C'est celui qu'on trouve sous le n° 10 Parmi ses<br />

Funera ; où il précède son épitaphe avec le litre suivant<br />

IN OJIITTIM JOANNL FONTANA? IJITURICEIVSIS, MATRONA?<br />

CLA RJSSJfiLE MF NIA<br />

C'est la morte qui est c<strong>en</strong>sée parler, et voici <strong>en</strong> quels termes elle s'exprime:<br />

.a Vous que nourrit une terre bi<strong>en</strong>faisante, et parmi lesquels naguère<br />

<strong>en</strong>core je comptais, lisez ceci que, muettes candi-es, nous vous faisons dire<br />

par une bouche étrangère., et appr<strong>en</strong>ez à mourir une fois suivant la toi de<br />

ce monde..Be<strong>au</strong>té, fortune, jeunesse, ne vous fiez à ri<strong>en</strong>. J'avais tout cela<br />

pour triompher, et j'ai succotnbé Que par vos seins des cires pesantes<br />

<strong>en</strong>tour<strong>en</strong>t la longueur du temple; que vous sacrifiiez de nombreusesvictimes,<br />

que vous fassiez brùler fréquemm<strong>en</strong>t l'<strong>en</strong>c<strong>en</strong>s sur les <strong>au</strong>tels; que les<br />

Pieux, vous ai<strong>en</strong>t pourvus de mille tal<strong>en</strong>ts ; qu'ils vous ai<strong>en</strong>t doués d'une<br />

éloqu<strong>en</strong>ce capable de fléchir Pluton lui-même; n'espérez pas tromper<br />

pourtant les déesses filandières. Si tout cela pouvait adoucir les soeurs<br />

impitoyables, je presserais <strong>en</strong>core la terre qui inc presse <strong>au</strong>jourd'hui. Je<br />

ne verrais pas inscrit sur un marbre glacé un simple nom si peu digne de<br />

mon anci<strong>en</strong>ne r<strong>en</strong>ommée, cc nom qui ne se prononce plus qu'accompagné<br />

des larmes et des gémissem<strong>en</strong>ts d'un époux privé d'une épouse bi<strong>en</strong>-aimée;<br />

ce nom dans lequel il puisait jadis son bonheur et sa joie, car il était pour<br />

lui plus doux que le miel de l'Hybia. Hélas I je le vois gémir d'une plainte<br />

sans fin, se déchirant la poitrine à deux mains,- les cheveux épars, vêtu<br />

d'habits de deuil et noyé dans (les larmes iutarrissables. O cher époux,<br />

)'arj'êt des Dieux s'est accompli: il n'y â pour tout qu'un chemin qui mène<br />

<strong>au</strong> trépas. Avant toi la mort m'a ravie; c'est la grâce que j'ai souv<strong>en</strong>t implorée<br />

des Dieux. Tu pleures nia perte : réjouis-toi plutôt de voir que mes<br />

douleurs sont finies. Ma mort u été prompte : j'ai moins souffert.. Je n'ai<br />

pas vu la gueule irritée du chi<strong>en</strong> à triple tête ; l'Hydre n'a pas épouvanté<br />

mon regard. Ce n'est pas ici l'<strong>en</strong>ceinte <strong>en</strong>vironnée dune triple muraille que.<br />

le rouge Phlégéton <strong>en</strong>toure de son onde embrasée.- Rocs,- roues, écdeils,<br />

ondes qui fui<strong>en</strong>t, v<strong>au</strong>tours, notre séjour n'a ri<strong>en</strong> de pareil. <strong>Un</strong> doux repos<br />

l'habite, et la Paix, la tête ceinte du feuillage de Patlas.M'ici nous regardons<br />

<strong>en</strong> dédain les frivoles soucis des hommes et leurs f<strong>au</strong>sses joies mêlées


-28de<br />

tande m<strong>au</strong>i. Ici je lourrais rire des vanités de mon tombe<strong>au</strong>, s'il<br />

n'était pas un monum<strong>en</strong>t de votre piété. Tu ne veux pas que nous pourrissions<br />

dans une urne obscure, et tu fais graier ta douleur sur un brillant<br />

sépulcre. Ces soins, qui attest<strong>en</strong>t une flamme si constante, répandront<br />

mon nom dans lés siècles futurs. Que les Dieux t'accord<strong>en</strong>t <strong>en</strong> retour une<br />

longue vie exempte de soucis et de craintes I que ta mort ne redouble pas<br />

le deuil de nos jeunes <strong>en</strong>fants dont toute la charge retombe <strong>au</strong>jourd'hui sur<br />

leur père I mais, quand vi<strong>en</strong>dra le jour fatal qui te délivrera <strong>au</strong>ssi des li<strong>en</strong>s<br />

de la chair, vi<strong>en</strong>s joyeux parcourir avec moi les champs de l'Elysée où les<br />

e<strong>au</strong>x pures sont ombragées de l<strong>au</strong>riers, »<br />

Si Jàcques Thiboust fut-le mari d'une muse, situation que tout le monde<br />

n'<strong>en</strong>vie pas, et qu'il ne parait pas avoir eu lieu de regretter; il atténua ce<br />

que ce poétique , péché pouvait avoir de regrettable chez elle <strong>au</strong>x yeux de<br />

certaines g<strong>en</strong>s S le partageant <strong>au</strong>tant qu'il put. Qui sait même si ce ne fut<br />

pas lui qui communiqua la contagion du vers à sa compagne. Nous ne<br />

dirons pourtant pas qu'il fut poète véritablem<strong>en</strong>t, car il f<strong>au</strong>t, <strong>au</strong>tant que<br />

posible, conserver <strong>au</strong> g mots leur juste Valeur. Mais il rima jusqu'à ses<br />

derniers jours; et, <strong>au</strong> contraire de ce qui advint pour les oeuvres do JSnne,<br />

plusieurs des pièces qu'il mit <strong>au</strong> jour nous ont été conservées, soit par la<br />

voie de l'impression, soit <strong>en</strong> manuscrit.<br />

Il est à peine nécessaire de dire qu'<strong>au</strong>cun recueil n'a jamais été fait des<br />

oeuvres de Thiboust. Vers ou prose, ce qu'on <strong>en</strong> conserve se trouve éparpillé<br />

<strong>en</strong> différ<strong>en</strong>ts <strong>en</strong>droits, tantôt dans* des recueils étrangers, tantôt dans<br />

des collections inédites: Les Vers, pour le dire <strong>en</strong> passant, sont-<strong>en</strong> général,<br />

fort médiocres, et l'on compr<strong>en</strong>d qu'ils n'euss<strong>en</strong>t pas suffi à faire la fortune<br />

de leur <strong>au</strong>teur. Mais il est à noter que ceux qui ont parlé de lui Font signalé<br />

moins comme un lettré distingué que comme un protecteur des lèttres, un<br />

Mécène. 'article biographique de Colletet roule <strong>en</strong>tièrem<strong>en</strong>t sur cette<br />

idée. Catherinot ne le désigne que comme « grand antiquaire de <strong>Berry</strong> <strong>en</strong><br />

son siècle, » terme un peu vague, qui implique un connaisseur, un érudit,<br />

un curieux de raretés littéraires ou <strong>au</strong>tres plutôt qu'on poète.<br />

Cc goût pour la poésie et pour ceux qui l'exerçai<strong>en</strong>t, il l'avait pris <strong>au</strong><br />

contact de la Cour où à partir de Louis XII il fut <strong>en</strong> vogue; et dans son<br />

rôle de protecteur des k<strong>en</strong>s de lettrèson peut trouver un rnpp3rt qu'il eut,<br />

à un degré bi<strong>en</strong> secondafre il est vrai, avec sa royale maltresse la<br />

Marguerite des-marguerites, comme l'appelai<strong>en</strong>t les chanteurs de louanges<br />

qu'elle protégeait. Comme lui elle s'est mois élêrnisée par la valeur de ses<br />

écrits que par la' reconnaissance de son poétique <strong>en</strong>tourage.<br />

Mécène donc, puisque Mécène il ya, fut <strong>en</strong> relation avec des hommes<br />

dont le mérite, supérieur <strong>au</strong> si<strong>en</strong>, a.conservé le nom et les oeuvrés. Au<br />

premier rang il f<strong>au</strong>t nommer. Clém<strong>en</strong>t Marot et Charles Fontaine, puis


Nicolas Bourbon, l'anci<strong>en</strong>, celui-là ftitme qui lit l'éducation de Jeanne<br />

d'Albret; Jean Second, <strong>au</strong>tre poète latin; <strong>en</strong>fin François Habert d'Issoudun.<br />

Puis v<strong>en</strong>ait une <strong>au</strong>tre catégorie de lettrés, espèces d'amateurs de<br />

lettres plutôt que des littérateurs prdprem<strong>en</strong>t dit, des réthoriqucui's, comme<br />

les nomme Habert dans un passage, et que les circonstances ou tin moindre<br />

tal<strong>en</strong>t, ont fait tomber depuis 'dans l'oubli. Tels fur<strong>en</strong>t l'Auvergnat Milon et<br />

l'Angevin Jean Salomon, dont nous <strong>au</strong>i'ôns occasion de reparler. Quelques-.<br />

uns de ces personnages étai<strong>en</strong>t peut-être connus de lui durant- son séjour<br />

à Paris, et, une fois fixé à Bourges, il n'eut plus avec eux que des rapports<br />

lointains. On voit cep<strong>en</strong>dant que ses efforts ont toujours t<strong>en</strong>du à attire<br />

chez lui les g<strong>en</strong>s <strong>en</strong> réputation dans le commerce desquels il pouvait satisfaire<br />

à l'aise ses 'goûts dominants. Autour de lui-même il .a certainem<strong>en</strong>t<br />

trouvé à réunir les élém<strong>en</strong>ts d'un petit cénacle d'esprits cultivés qui lui<br />

rappelai<strong>en</strong>t ses poètes abs<strong>en</strong>ts, et <strong>en</strong> qui il a dû <strong>en</strong>tret<strong>en</strong>ir l'amour et le<br />

culte des chcses de l'esprit.<br />

Cette constitution d'une sorte de cercle littéraire <strong>au</strong>toufdu foyer de Titi- -<br />

boùst est-elle une simple hypothèse de, notre imagibation? Je ne le p<strong>en</strong>se<br />

pas. En f<strong>en</strong>tourant ainsi d'hommes lettrés il ne fit (lue concilier ses propres<br />

goûts avec l'esprit du temps. D'après le courant des idées de l'époque<br />

ce fut un fait quise répéta partout où l'occasion se prés<strong>en</strong>ta favorable. Les<br />

cénacles littéraires dev<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t à la mode. La pléiade de -Ronsard et 'l'essai<br />

d'académie fornié par H<strong>en</strong>ri III, d'après l'inspiration dêBaïf, sont des manifestations<br />

mieux organisées du même esprit. ' - -<br />

C'est une chose curieuse àobserver que ce cons<strong>en</strong>tem<strong>en</strong>t de la plupart<br />

des villes françaises à <strong>en</strong>trer &vcc le siècle dans le mouvem<strong>en</strong>t littéraire et<br />

.artistique <strong>en</strong> se -faisant des c<strong>en</strong>tres de ce mouvem<strong>en</strong>t. Il y a là imitation<br />

évid<strong>en</strong>te des moeurs itali<strong>en</strong>nes v<strong>en</strong>ant se substituer -à noire vieille rudesse.<br />

On y saisit sur le fait la R<strong>en</strong>aissance ' dabs son oeuvre de formation. Dans<br />

toute cité un peu importante se forme une société d'érudits et de be<strong>au</strong>x'<br />

diseurs, un cénacle, une pléiade, pour nous servir du mot qui eut cours.<br />

Ce travail dans le <strong>Berry</strong> nous <strong>en</strong> avons touché quelques mots déjà, mais il<br />

f<strong>au</strong>t bi<strong>en</strong> faire s<strong>en</strong>tir comm<strong>en</strong>t ce rapprochem<strong>en</strong>t des plusbeàux esprits-du<br />

lieu a dû hâter la maturation de ce mouvem<strong>en</strong>t. Jusqu'alors Bourges s'est<br />

à peu près cont<strong>en</strong>té de vivre de commerce et d'industrie sans pr<strong>en</strong>dre 'une<br />

grande part <strong>au</strong> travail ' de l'esprit: Du moins ri<strong>en</strong> n'a survécu qui nous<br />

<strong>au</strong>torise .à pedser que jusqu'à la fin' du 11e siècle: les lettres y ai<strong>en</strong>t - été<br />

l'objet d'un culte spécial. Nous touchons <strong>au</strong> mom<strong>en</strong>t où la prospérité mitériellede<br />

notre pays va s'arrêter, et où une <strong>au</strong>tre voie' va s'ouvrir pàur un<br />

temps à l'activité berruyère. -L'université de Bourges se fonde <strong>en</strong> 4466<br />

pour aider à ée mouvem<strong>en</strong>t, mais p<strong>en</strong>dant.près. d'un- demi siècle,<strong>en</strong>core<br />

elle va dormir. Cep<strong>en</strong>dant la population s'est <strong>en</strong>richie.. Or le résultat et la<br />

-


ta<br />

n<br />

fin de la fortune, c'est moins peut-être la jouissance du bi<strong>en</strong>-Être matériel<br />

qu'elle procure qué la plus grande facilité qu'on y trouve à ét<strong>en</strong>dre la culture<br />

et les plaisirs de l'intellig<strong>en</strong>ce. En s'<strong>en</strong>richissant le pays s'est poli.<br />

- Avec la délicatesse des moeurs les besoins de l'esprit se sont accrus, les<br />

• relations habituelles se sont empreintes d'unvernis de belles manières, <strong>en</strong><br />

même temps qu'elles ont t<strong>en</strong>dance. 'à substituer <strong>au</strong>x préoccupations tputes<br />

matérielles d<strong>au</strong>tres gui soi<strong>en</strong>t plus raffinées et plus élevées. C'est parmi<br />

1 e h<strong>au</strong>ts représ<strong>en</strong>tants de notre commerce que cette t<strong>en</strong>dance se manifeste<br />

d'abord. Les Cucharmois, les Alabat sont .des littérateurs. Sous l'inspiration<br />

du premier un essai de rapprochem<strong>en</strong>t et de contact s'organise :déjà,<br />

mais <strong>en</strong>core empreint des formes du moy<strong>en</strong>4ge. Je veux faire allusion ici<br />

à cette singulière confrérie des chevaliers de Notre-Daine de la Talle-<br />

Ronde, toute composée de marchands qui jou<strong>en</strong>t <strong>au</strong>x grands seignoirs (J)<br />

Par le fait c'est une aberration, mais elle révèle cep<strong>en</strong>dant une t<strong>en</strong>dance à<br />

des moeurs nouvelles dont les instigateurs' se tromp<strong>en</strong>t seulem<strong>en</strong>t dans te<br />

choix de leùr manifestatioti. Vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t les g<strong>en</strong>s' de Cour, comme Tluhoust,<br />

parmi ces marchands qui cherch<strong>en</strong>t à voir plus loin que l'horizon du comptoir,<br />

un parfum de bel esprit passera là-dessus et modifiera cette société.<br />

Thiboust attire à lui tout ce qui est sympathique .à cette manière d'être et<br />

de faire. Autour de lui se group<strong>en</strong>t les poètes et les savants do la localité<br />

on y rime, on y discute sur la giamniaire, l'histoire, etc.<br />

Il dut y avoir, j'imagine, <strong>au</strong> comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t pour ces réunions un grand<br />

attrait dans la prés<strong>en</strong>ce de Jeanne de La Font que son esprit et sa grŒe<br />

r<strong>en</strong>dai<strong>en</strong>t digue de présider ce cénacle.<br />

Il <strong>au</strong>rait manqué quelque chose k Thiboust s'il n'eût pas eu pour recevoir<br />

les hôtes qu'il attirait chez lui un séjour digne de l'amphitryon. Et puis,<br />

de même qu'on disait jadis : pas de seigneur sans titre; de même <strong>au</strong>rait-on<br />

pu dire pas de seigneur sans manoir. Thiboust chercha dans le pays à<br />

acquérir un fief dont le nom <strong>au</strong>gm<strong>en</strong>tât son nom patronymique, et qui fût<br />

un lieu de r<strong>en</strong>dez-vous propre <strong>au</strong>x délassem<strong>en</strong>ts qu'il affectionnait. A cet<br />

effet, il acheta la terre de, Quantilly, située près du village de, Saint-Martind'Auxigny,<br />

et à <strong>en</strong>viron quatre lieues de Bourges.<br />

Cette terre de Qdantilly , était un démembrem<strong>en</strong>t de la seigneurie de<br />

M<strong>en</strong>etou-Salon. Elle-<strong>en</strong> fut séparée <strong>au</strong> comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t du rut 0 siècle <strong>en</strong><br />

laveur des puinés de cette maison, qui joighir<strong>en</strong>t le surnom de Quantilly<br />

à leur propre nom. Robinet de Quantilly, n'ayant pas d'<strong>en</strong>fants, la donna<br />

à Raoul .•de Bonnay vers la fin du jjye siècle. Des Bonnay elle-passa dans<br />

la famille Cœur par l'acquisition qu'<strong>en</strong> fit le célèbre arg<strong>en</strong>tier de Charles VIL<br />

(J) Cr. l'opuscule intitulé Chevaliers de L'ordre dé N.-IL de la Table-Ronde de<br />

bout gos,' par J,-!'. CltevaiWr de Saint-Aniand,


- 34<br />

.Geoffroy Coeur la posséda <strong>en</strong>suite, et ce fut lui qui sans doute la céda;<strong>au</strong>x<br />

Roger de Bourges. Jean Roger le jeune étant mort laissant deux filles<br />

mineures, et UDO basse fille, Jeanne de Morogues, femme d'Amigntn,<br />

avocat à Issdudun, la propriété fut v<strong>en</strong>due, et acquise par Thiboust <strong>au</strong><br />

prix de 5,820 fr., par acte passé pardevant Mes Jean ilagne<strong>au</strong> et André<br />

Gassot, notaires à Bourges, le 21 avril 1 .524 (1).<br />

Située <strong>en</strong> pays de bois et de vignobles et sur un sol propice , <strong>au</strong>x arbres<br />

fruitiers, la propriété que Thiboust v<strong>en</strong>ait d'acquérir pouvait être des plus<br />

agréables, mais il y manquait le point principal je veux dire un manoir<br />

<strong>en</strong> rapport avec l'importance du maître, et qui pût remplir l'usage qu'il-lui<br />

destinait. La maisoi seigneuriale qui n'était peut-ttre qu'une médiocre<br />

h<strong>au</strong>sse, <strong>en</strong> supposant qu'il y <strong>en</strong> eût une, ce qui est douteux, dut déplaire<br />

<strong>au</strong> nouvel acquéreur, qui songea kédifier un châte<strong>au</strong> dans le goût du<br />

jour (2). En même temps il l'etoura d'un pare qui devait prêter à cette<br />

demeure le charme du mystère et l'ombre dc sa verdure, et de vergers,<br />

qui à l'agrém<strong>en</strong>t joigniss<strong>en</strong>t l'utilité. On lit dans le terrier de Quantilly,<br />

déposé <strong>au</strong>x archives dur des notes de la main do Thihoust lui-même<br />

sur les plantations dont nous v<strong>en</strong>ons de parler. Elles témoign<strong>en</strong>t de leur<br />

importance et du soin qu'il y apporta (3). Quant <strong>au</strong> châte<strong>au</strong>, le goût du<br />

constructeur était garant de ce qu'il devait faiteea cette occasion. Aujour-<br />

d'hui, «après avoir passé <strong>en</strong>tre les mains des archevêques de Bourges.<br />

(t) La Tij<strong>au</strong>massière, 1115f., P. 737-38. - Barrai, Notice manuse. sur tes châte<strong>au</strong>x<br />

du départem<strong>en</strong>t du Cher. - Registre noir de Thilioust. -:- Outre QuanLiIly, il poshédait<br />

<strong>en</strong>core les terres dia Chouday et du Puy de Atoulon.<br />

(2) Robinet Desgrangiers dit <strong>en</strong> pfopres termes qu'il le rebâtit; et j'ajouterai à ce<br />

sujet qu'un archéologuede nies amis a cru retrouver dans quelques parties de ce qui<br />

reste, la trace d'une construction antérieure <strong>au</strong> Ivie siècle.<br />

(S) Voici les titres seulem<strong>en</strong>t de ces mémori<strong>au</strong>x qui donneront une idée des embellissem<strong>en</strong>ts<br />

faits par Thibonst - -<br />

n 1° Plant de la cbesuaye du chaste] de Quantilly<br />

2° C'est l'ôrdrc du plant de la vigne dud, chaste[ de Quantitly, plantée ès.anuées<br />

mil cinq c<strong>en</strong>t vingt et cinq et vingt-six <strong>en</strong> suyvant, cont<strong>en</strong>ant tant <strong>en</strong> vigne plantée<br />

tomme <strong>en</strong> allées aing arp<strong>en</strong>t et demy ou <strong>en</strong>viron; partie lad.'vigne <strong>en</strong> quatrequartiers;<br />

» N' Les arbres des alléei de lad. vigne sont tous pommiers de court-p<strong>en</strong>du, , gros<br />

coati, de Pallu<strong>au</strong> et <strong>au</strong>tres bons fruicts de pommes, et les poiriers sont de cham1,-<br />

Vérignat , lieurré, Sarte<strong>au</strong> , Ougtidnnet, Rosat et <strong>au</strong>tres fruiets de poires fort<br />

excell<strong>en</strong>ts<br />

3° c'est l'ordre des arbres aehaptez à Tours <strong>en</strong> dééembre nul cinq c<strong>en</strong>s-vingt et<br />

sept, plantez <strong>en</strong> l'ong des bas quartiers du grant jardin de Quantilly, appelé le quartier<br />

de Touraine , -qui est à main sénestre comme l'on va du tiasteI à l'église dud.<br />

lieu; l'<strong>en</strong>tour et &incture duquel quartier sont tous poiriers de Bon-Chréti<strong>en</strong>,<br />

champ-vêrignnt et, <strong>au</strong>tres bonnes poires. .


- :52 -<br />

• qui lui tir<strong>en</strong>t subir de grandes modifications, il n eu <strong>en</strong>core à souffrir des<br />

néglig<strong>en</strong>ces et des outrages' des révolutions, sa ruine n'a que peu gardé de<br />

sa physionomie primitive. On peut cep<strong>en</strong>dant le reconstruire par 1k p<strong>en</strong>sée<br />

<strong>en</strong> s'aidant de ce qui reste, et <strong>en</strong> y joignant les quelques r<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>ts<br />

: que nous allons ajouter (-I) - - -<br />

Dans un pqcès-verhal de réparations à faire <strong>au</strong>x immeubles dép<strong>en</strong>dants<br />

de !'archevêché, <strong>au</strong>quel Quantilly était alors réuni, <strong>en</strong> 1647, on- lit les<br />

passages -suivants (2) - - -<br />

«La maison dud. Quantilly est -composéede deux bastim<strong>en</strong>s , de trois<br />

tours et d'un pavillon <strong>au</strong>-déssus.de l'<strong>en</strong>trée, et tÏ'un' <strong>au</strong>tre petit basttm<strong>en</strong>t<br />

où est la chapelle. Lcd. chastêai est <strong>en</strong>touré de fossés leSquels sont demy<br />

comblez et remplis d'arbres; buissons et terres. Il y a appar<strong>en</strong>ce qu'il y a<br />

très longtemps qu'ilS sont <strong>en</strong> cet estai.<br />

-» -......fl la cour du los, et <strong>au</strong>devant dud. corps -de logis où est<br />

la chappelle et la cuisine il y a une terrasse et un.escalier par lequel on<br />

monte et passe-sur lad, terrasse pour aller <strong>au</strong> grand bastim<strong>en</strong>tetchappelle,<br />

laquelle terrasse est eslévée à cinq pieds- de h<strong>au</strong>teur de rez-de-ch<strong>au</strong>ssée de<br />

la cour oi est pavée Far le dessus de grandes pierres de taille , et y n un<br />

• balustre le long. de lad: terrasse et escalier du costé de la cour qui est de<br />

h<strong>au</strong>teur de deux pieds huit pouces. -<br />

» Et '<strong>au</strong>dessus de lad; -terrasse <strong>au</strong>devant de lad.chappeile est un petit<br />

-<br />

- pavillon qui couvre le vestibule et <strong>en</strong>trée de lad. chappelle qui est couvert<br />

d'ardoise, dans lequel y n un petit clobeton où il y a -la cloche de la<br />

chappelle. »<br />

Cette description laisse à désirer et l'état actuel de l'anci<strong>en</strong> châte<strong>au</strong> ne<br />

permet qu'assez incomplètem<strong>en</strong>t d'<strong>en</strong> combler les lacunes et les obscurités.<br />

V<strong>en</strong>due comme propriété nationale <strong>en</strong> 1791, la demeure de Thiboust fut <strong>en</strong><br />

partie démolie. Les trois tours désignées plus h<strong>au</strong>t restèr<strong>en</strong>t presque seules<br />

-avec le colombier qui les avoisinait pour conserver le tracé des bâtim<strong>en</strong>ts formant<br />

carré, et <strong>au</strong>x quatre angles. duquel s'élèv<strong>en</strong>t chacune de ces tours (3)1<br />

(1)V.la Pl. nO t. - : - -- - - -<br />

()_Àrcliives départem<strong>en</strong>tales du Cher, fonds de l'Arcbev. L. 68. -<br />

-(5) La terre de Quantilly, appart<strong>en</strong>ants et dép<strong>en</strong>dances, qui était <strong>en</strong>core propriété -<br />

des grclievêqucs de Bourges à la révolution, fut v<strong>en</strong>due, comme bi<strong>en</strong> national, le<br />

14 Juin 1791, pour la sommé de 24,000 In <strong>au</strong>x citoy<strong>en</strong>s Cabard et Rabillon des Mar-<br />

quions. Ce dernier , anci<strong>en</strong> fermier du domaine, garda le -châte<strong>au</strong>-<br />

On voit par le<br />

procès-verbal d'estimation, dréssé le 4mai qui précéda la v<strong>en</strong>te, qu'il compr<strong>en</strong>ait<br />

quatre corps de bâtim<strong>en</strong>ts flanqués de tourelles et <strong>en</strong>tourant la cour; Ce sont ces<br />

bOEtiméats que l'aeqûreur fit abattre <strong>en</strong> - partie, <strong>en</strong> s'attachant surtout -à faire dispanitre<br />

la façade et - la porte d'<strong>en</strong>trée, où le -caractère féodal se retrouvait plus empreint<br />

qui dans le restè des constructions. - - - - - - -


- 33 -<br />

<strong>Un</strong>e façade sans caractère, donnant sûr ce qui fut les jardins, forme <strong>en</strong><br />

dedans l'un des côtés d'une cour de ferme. On croit cette construction<br />

postérieure à l'époque qui vit édifier les tourelles. Elle serait duc sans<br />

doute <strong>au</strong>x archevêques, et parait occuper l'emplacem<strong>en</strong>t de l'anci<strong>en</strong>ne<br />

terrasse dont la h<strong>au</strong>teur primitive est peut être indiquée par un cordon de<br />

pierre qui règne <strong>en</strong>core de ce côté dans la longueur de la muraille. Les<br />

bâtim<strong>en</strong>ts qui compos<strong>en</strong>t les deux <strong>au</strong>tres ailes sont modernes et serv<strong>en</strong>t à<br />

l'exploitàtioh du domaine. La place de l'anci<strong>en</strong> pignon est restée vide, et<br />

c'est par, là qu'on <strong>en</strong>tre dans la cour. Le côté qui lui fait face <strong>au</strong> fond a<br />

conservé ses fossés qui sont tels <strong>au</strong>jourd'hui que le procès-verbal de l'archevêché<br />

nous les montre cr1 1647. Il est certain toutefois qu'ils étai<strong>en</strong>t<br />

jadis remplis d'e<strong>au</strong> par les sgurces v<strong>en</strong>ant des h<strong>au</strong>teurs contre lesquelles<br />

le châte<strong>au</strong> s'appuie par derrière et que couronne la gar<strong>en</strong>ne <strong>en</strong>core<br />

existante; on a retrouvé les conduits de plomb qui y am<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t ces e<strong>au</strong>x,<br />

dont s'alim<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t <strong>au</strong>jourd'hui les bassins du jardin anglais que le propriétaire<br />

actuel n fait dessiner <strong>au</strong>tour du nouve<strong>au</strong> châte<strong>au</strong> de Quantilly.<br />

En adossant sa maison contre l'éles'ation de terrain qui la garantit <strong>au</strong> nord,<br />

et <strong>en</strong> tournant la façade <strong>au</strong> midi; vers le bourg de Quantilly, <strong>en</strong> face<br />

duquel il t<strong>en</strong>ait sans doute à se placer, Thihoust n'a pas su profiter de la<br />

belle vue qui embrasse quand on .est sur la h<strong>au</strong>teur un horizon très vaste<br />

et s'ét<strong>en</strong>d jusqu'à Bourges. Cette considération, jointe à l'état de dégradation<br />

où il trouva l'afici<strong>en</strong> chale<strong>au</strong>, a <strong>en</strong>gagé le dernier propriétaire,<br />

M. Batailler, à choisir la h<strong>au</strong>teur voisine, <strong>au</strong> point d'où l'oeil peut parcourir<br />

à l'aise le paysage, pour y élever ja délicieuse habitation qu'il a fait<br />

construire récemm<strong>en</strong>t.<br />

Le manoir de Thiboust, une fois édifié, fut ouvert à tous ceux qui<br />

partageai<strong>en</strong>t les goûts du maitre; et, comme c'était des langues doréès, ils<br />

payai<strong>en</strong>t leur écot <strong>en</strong> complim<strong>en</strong>ts pour lui et <strong>en</strong> éloges de sa demeure.<br />

On chanta le châte<strong>au</strong> de Tbiboust comme on chantait sa femme.<br />

Nicolas de Bourbon, y ayant été accue!lli' aiosi qd'oh accueillait les g<strong>en</strong>s<br />

deson espèce, composa sur le séjour où il v<strong>en</strong>ait de passer d'agréables<br />

journées les vers suivants que La Th<strong>au</strong>massière rapporte (p. 737) .<br />

Qltnib fitigan<strong>en</strong>eis uates oriunbite ab aria<br />

Jac visa feruir sic cecinisec tata<br />

Vos juga Parfiaesi, f<strong>au</strong>tcaqut 4rticanis n nnra<br />

Cebitc, nàtn noble rat fuit uequè b<strong>au</strong>nu.<br />

£jic Jifluscc, l$c E4ariteo jurant se veut ivaràri,<br />

3uat.itetn putcljra mm preg r pucbraUcnus.<br />

5


- 34 -<br />

aa ipioqnè tntn 1ttapIji6 et putdjrr 2IpotLo nu.pŒiG<br />

fl)ttèritttiit !oetoG Ijk dgitarz e40r06..<br />

Jdix vie iiiiftiutm cujus golcrtia lutrin<br />

- Iunc potuit Millir, cr'iCiiure bornant I<br />

Ce qui peut s'interpréter à peu prèsainsi<br />

Le poète Bourbon, que Langres a vu naître (-I),<br />

Chanta, dit-on, ainsi, quand il eut vu ces lieux!<br />

Assez longtemps eufiui ton nom, fut glorieux,<br />

O Parnaise, ta gloire ici va disparaitre.<br />

Les Muses désormais y fix<strong>en</strong>t four séjour,<br />

Et les Grâces <strong>au</strong>ssi: Vénus y ti<strong>en</strong>t sa cour.<br />

Pan, le bel Apollon, les JVym plies bocagères<br />

Y vont m<strong>en</strong>ant le choeur de leurs danses légères.<br />

Trop heureux le. mortel dont l'art industrieux<br />

Construisit de la sorte un palais pour les Dieux!<br />

Cela ne brille pas d'une jeande poésie, mais titi complim<strong>en</strong>t a toujours<br />

bonne grâce à se montrer et manque rarem<strong>en</strong>t d'être bi<strong>en</strong> accueilli, sur-<br />

tout s'il est <strong>en</strong> vers. Thiboust fut si cont<strong>en</strong>t de celui-ci qu'il le fit, graver<br />

sur une belle pierre qu'on <strong>en</strong>châssa <strong>au</strong> 'pignon du chàte<strong>au</strong>. Pierre et pignon<br />

ont -aUjourd'hui disparu (2).<br />

- -La Th<strong>au</strong>mnssièrc eu contant ce fuit, ajoute « Ce poète seeroit <strong>en</strong>core<br />

efforcé s'il eCIt.\tu cette maison <strong>en</strong> l'état qu'elle est à prés<strong>en</strong>t, par les soins<br />

de messire Anne de Levy de V<strong>en</strong>tadour, archevêque, qui a fait réparer<br />

l'anciefi chàteaU, 'et fait faire presque à fi<strong>en</strong>T un corps de logis qui regarde<br />

• sur les Vergers et sur les jardins nouvellem<strong>en</strong>t plantés <strong>en</strong> ce lieu, qui le<br />

r<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t des plus agréables de la province. »<br />

L'époque où Béurbon vit Quantilly doit remonter <strong>au</strong>x années qui suivir<strong>en</strong>t<br />

d'assez près son acquisition, casses vers témoign<strong>en</strong>t que Jçannede La Font<br />

vivait <strong>en</strong>core. C'est évidemm<strong>en</strong>t pour elle que Vénus et les Grâces y appa-<br />

raiss<strong>en</strong>t. <strong>Un</strong> <strong>au</strong>tre poète, mais un pùèle français celui-là, et de-plus bern-<br />

(1) Bourbon ne naquit pas à Langres même, mais à Vandeuvres, près Bar-sur-Aube,<br />

dans le diocése de Langres. -<br />

(2) lI n'y a, massure-t-on, qu'une vingtaine d'années que cette pierre, qui s'était<br />

conservée jusque-là dans un coin de la cour, s'est perdue, v<strong>en</strong>gée par la gelée et les<br />

pluies. M Batailler a s<strong>au</strong>vé de l'anci<strong>en</strong>ne décoration extérieure de l'édifice deux armai-<br />

-ries sculptées qu'il fait <strong>en</strong>castrer dans des constructions réc<strong>en</strong>tes.


— 35 -<br />

chon, François Ilabert d'lssôudun, y vint à diverses reprises sur l'invitation<br />

de Thiboust. A cette époque -le seigneur de Quantilly se faisait vieux, il<br />

était veuf et à la lète d'une faniille dont son hôte a fait m<strong>en</strong>tion <strong>en</strong> ses<br />

vers. Habert avait peut-être des motifs de reconnaissance tout particuliers<br />

<strong>en</strong>vers lui. Ce poète agréable et facile était, zrons-nous dit, un <strong>en</strong>fant d'lssoudun<br />

fi) Resté orphelin avec des dettes et l'amatir des iues quand il<br />

étudiait <strong>en</strong>core, il goûta de b6nne heure le pain de la misère,. et connut<br />

l'angoisse des m<strong>au</strong>vais jours. Bi<strong>en</strong> des fois, a yant de dev<strong>en</strong>ir poète de cour,<br />

il avait dû! recourir à la commisération rechignée dS protecteurs. Enfin les<br />

jours difficiles cessèr<strong>en</strong>t, et il obtint la faveur de François 1er. Si Thiboust<br />

eût <strong>en</strong>core habité Paris, on pourrait bi<strong>en</strong> croire qu'il <strong>au</strong>rait été son intermédiaire<br />

<strong>en</strong> ces circonstances. Mais Habertn'était pas né probablem<strong>en</strong>t .ù<br />

l'époque où son noble ami vint résider à Bourges (2), et leurs relations ne<br />

paraiss<strong>en</strong>t dater que du temps mime où•Habert comm<strong>en</strong>ça à se faire connaître<br />

grâce à sa nouvelle situation. La première indication nous <strong>en</strong><br />

avons remonte à l'année 1549. L'abbé Goujat, <strong>au</strong> tome 5- de sa Jiibijo-<br />

Èhèque française, raconte comm<strong>en</strong>t la chose se passa. Habert, chargé par<br />

H<strong>en</strong>ri 11 de traduire <strong>en</strong> vers les métamorphoses d'Ovide, reçut un jour l'invitation<br />

de v<strong>en</strong>ir passei les bc<strong>au</strong>xjours à Quantiliy. C'était un délassem<strong>en</strong>t à<br />

ses trav<strong>au</strong>x, il accepta et interronipli sa traduction (3). Mais durant le temps<br />

qu'il passa chez Thiboust, celui-ci lui suggéra Vidée de traduire- les satires<br />

d'Horace et pour faire sa cour à son hôte il <strong>en</strong>treprit ce travail coffcurremm<strong>en</strong>t<br />

avec l'<strong>au</strong>tre. û Hubert, dit Goujet, comm<strong>en</strong>ça par les satyres du poète.<br />

latin dans un séjour qu'il fit chez le sieur de Quantilly; et, lorsqu'il fut rev<strong>en</strong>u<br />

à Paris, il hcheva le premier livre, le fit imprimer et le dédia àson bi<strong>en</strong>faiteur,<br />

dont il voulait, dit-il, faire passer le nom à la postérité. Celui-ci fut<br />

s<strong>en</strong>sible à cette marque d'estime, et faisjnt lui-même un effort poétique, il<br />

<strong>en</strong> remercia l'<strong>au</strong>teur par un quatrain, où r<strong>en</strong>dant à flabert louanges pour<br />

loùanges, il dit <strong>au</strong> lecteur:<br />

Voy ces serinons, et note bi<strong>en</strong> la grâce<br />

Qu'<strong>en</strong> traduisant a lieu le traducteur<br />

- Car il a fait ressusciter Horace,<br />

Pour <strong>en</strong> françois-faire parer '<strong>au</strong>theur.<br />

(1) En 1525 Thiboust était gr<strong>en</strong>etier du gr<strong>en</strong>ier à ëeI dissoudun. C'est un titre de<br />

huis à ajouter à ceux qu'il se Plaît à énumérer à la suite de son nom, c'est sans doute<br />

àcette occasion qu'il dut de-connaltre l'avocat Amiguon, duquel il acheta Quantilly,<br />

et sans doute <strong>au</strong>ssi la famille Rabert, ce qui am<strong>en</strong>a sa liaison avec François.<br />

(2)11 naquit vers 1520, suivant l'opinièn la plus accréditée. D'<strong>au</strong>tres repouss<strong>en</strong>t cette<br />

date jusqu'à 1508. - - -<br />

(3) Cette traduction ne parut complète que dix ans plus lard. <strong>Un</strong>e 2, édition e" fut<br />

faite <strong>en</strong> isis. -


- -<br />

Le preiiei' livre des satyres, Continue le biographe, parut <strong>en</strong> -1 549 et .fùt<br />

téiniprifflé deux ans après le second: C'étoit <strong>en</strong> 4 531. Je ne sais si Jacques<br />

ThibousLétoit mort,, ou si Hubert dégagé de su parole, crut devoir cher-<br />

chét un nouve<strong>au</strong> Mécène. Il dédia ces deux livres à Jean -de 'Bretagne, duc<br />

d'Estampes, comte de P<strong>en</strong>ilhièvrù, gouverneur et lieut<strong>en</strong>ant-général pour le<br />

roi <strong>en</strong> Bretagne. » 1 1- -<br />

La dernière supposition de l'abbé 'Goujet, est la seule vraie. Mais il<br />

convi<strong>en</strong>t dé compléter <strong>au</strong> point de vue de notre sujet ce qu'il dit de la pre-<br />

rnièr édition de l'Horace d'Hubert. 'Ce livre parut in-8- sous le titre suivant<br />

Le premier hure des sermons du sertt<strong>en</strong>tieux poète Horace, traduict<br />

de latin <strong>en</strong> rime franço'sc, par Françoys Habert de Bèrry. Au verso du<br />

litre on lit le quatrain de Thiboust, Au recto de la page comm<strong>en</strong>cé une<br />

•<br />

épitre de l'<strong>au</strong>teur <strong>au</strong> même que nous allons ttanserire. - -<br />

' 4 MONSIEUR JACQUES TIIIBOUST. - -.<br />

Esouyer, notaire de Quattihly, ttotafre et secrétaire dit Boy et son Esteis' <strong>en</strong><br />

- <strong>Berry</strong>, Françoys Haert drnitne sahttt. -<br />

•<br />

Si- les soubbaiots avai<strong>en</strong>t lieu et puissance,<br />

(Très cher seigneur), tu <strong>au</strong>tois coflgnbissance<br />

-' Que je ne veuix mettre <strong>en</strong> ingrat oubli<br />

Ton bon esprit, de vertus <strong>en</strong>nobli<br />

Car tu <strong>au</strong>rais un soubl,aict, que jeunesse<br />

Ùiminuast les ans de ta vieillesse, -<br />

bu que vieillesse, où tort <strong>en</strong>cor es tu, -<br />

Me iléu'x eéifls ans ,fabaisiast 'ta vertu,<br />

A telle fiti gué <strong>Berry</strong>, ta naissu1ôe, f<br />

P&toh esprit èust lon g ue iouyssance.<br />

Mais puisqu'<strong>en</strong> ri<strong>en</strong>' ces soùbhaiets n'ont vigueui',<br />

l'ôtir 'empèseher de la mort la rigueur,<br />

Je te supply, honnorable personne,<br />

Te cont<strong>en</strong>ter de la volunté bonne,<br />

'Qui ri<strong>en</strong>- ne quiert fois que le Créateur<br />

De t& santé soit le eonseruateur.<br />

Car c'est luy seul qui ordonne et compasse<br />

• - Nez derniers ious, sans qu'on les oultrepasse,<br />

Et (qui est plus) sans ses désirs et veux<br />

Ne peuh tOber un poil de nez cheveux.<br />

• Or coùgnoissint que ce recteur eéteste<br />

Oc 'ôbéir,iour eu iour m'admoneste,<br />

Pour ne nourrir ingratitude <strong>en</strong> moy, -<br />

- - Ces jours passez i'ay esté <strong>en</strong> esmoy - - - -<br />

De rédiger d'une meilleure grâce<br />

Qu'<strong>en</strong> ta maison, les satyres d'Horace,<br />

- -


RememOt'ant que je t'<strong>au</strong>o(s Promis<br />

Que soubz ton nom <strong>au</strong> v<strong>en</strong>t seroit mys,<br />

Non seulem<strong>en</strong>t polir ta mémoire espandre,<br />

Et après mort immortelle la r<strong>en</strong>dre,<br />

Mais pour l'espoir, qu'à la postérité<br />

Eu sortira fruict et utilité, -<br />

Pour ce que c'est l'aùtlicur facétieux,<br />

Grave-poysant, et fort sént<strong>en</strong>tieux,<br />

Bi<strong>en</strong>-méritant-totiaflgCS héroïques<br />

Parihy le rang des <strong>au</strong>t!tcurs satyriques.<br />

Donc me voyant à Paris de loysir,<br />

Pour mettre fui <strong>au</strong> ti<strong>en</strong> et mi<strong>en</strong> désir<br />

J'ai achcué d'un esprit à déliure<br />

De ces sermons trrtduietz le premier hure,<br />

L'édifiant de vers polis et meurs, -<br />

A celle fin que les bons imprimeurs<br />

Par ey après le mett<strong>en</strong>t <strong>en</strong> lumière,<br />

A qui micuIx miculx, par façon coustuinière.<br />

Si te supply pr<strong>en</strong>dre le tout <strong>en</strong> gré<br />

Par ton Hubert qui à plus h<strong>au</strong>lt degré<br />

T<strong>en</strong>dre neveult, fors <strong>au</strong>oir temps propice<br />

Pour t'obéir et te faire seruice.<br />

Les Sermons sont suivis d'un ehoix d'épigrammes dont la seconde est<br />

égalem<strong>en</strong>t adressée à ThibousC C'est un <strong>en</strong>voi de l'ouvrage.<br />

0 4 ??ZOflitt9ttCUt de Quantilly (-I)<br />

Très cher seigneur iè vous <strong>en</strong>voie Bernes,.<br />

Limé, peli ,,et <strong>en</strong> lumière mys -<br />

Par l'imprimeur, qui d'une bonne grace<br />

(1) Il est probable qu '<strong>au</strong>-fur et à mesure qu'Habert traduisait les satires dilorace<br />

il les faisait parv<strong>en</strong>ir à Thiboust. On lit l'épigramme suivante parmi celles qui sont<br />

la suite du Temple de Chastelé, <strong>au</strong>tre recueil du rnme <strong>au</strong>teur.<br />

« A M: de Quantillhi <strong>au</strong>quel il'<strong>en</strong>voya un sermon traduic( d'JIôrace<br />

- pour son eslraine (1540),<br />

Très chier scigneur cc premier jour de l'an<br />

Que requiers tu de moy pour ton estraine?<br />

Tu ne veuix pas la duché de Milan,<br />

Ne les trésors de Flor<strong>en</strong>ce mondaine.<br />

En ce perdrait l'un et F<strong>au</strong>tre sa peine,<br />

Noy de promettre, et .toy de requérir.<br />

Puis ton esprit que vertu fait florir<br />

De ton servant grand thrésor fie demande,<br />

Que pourroysrtu de moy -donc aequftir?<br />

C'est ce serinée que je je recommande. o<br />

- -


•<br />

L'a disposé, et n'' a ri<strong>en</strong> oniis<br />

Or <strong>en</strong>stiyuant ce que i'<strong>au</strong>oys promis, -<br />

A Quantitly iray faire .demeure ; -<br />

Mais i'ay grand peur -qte si là je demeure -<br />

Deux ou troys jours, veu le grand passe-temps<br />

De n'<strong>en</strong> sortir iusqu'à ce que je meure,<br />

Ou pour le moins y estre bi<strong>en</strong> long-temps.<br />

II parait que, dans cette première visite à Thiboust, Ilahert était resté à<br />

Bourges et n'avait pas vu Quantilly. Peut-être la saison où il vintn'était-elle<br />

pas propice. En quittant son hôte il crut devoir liii adresser éc poétique<br />

adieu; -<br />

4 M. Jacqua T/tiboust, escuf er, etc.,<br />

• le co1gnoys bi<strong>en</strong> qu'<strong>au</strong> partir de ce lieu<br />

• Il me convi<strong>en</strong>t iscrirc cet adieu -<br />

En Le donnant louange sans me faindre,<br />

Par un désir que Mort ne peut estaindre,<br />

Car quand la Mort vi<strong>en</strong>dra ion bras est<strong>en</strong>dre<br />

Pour ruiner cc corps fragile et t<strong>en</strong>dre,<br />

Dernon escript tu <strong>au</strong>ras les ouvrages<br />

Pour de ton los porter bons tesmoignages.<br />

Doneques adieu le rame<strong>au</strong> florissant<br />

De Quantilly, adieu la fleur yssant<br />

D'un lieu divin qui ne $ult sur terre cstrc,<br />

Puisant <strong>en</strong> tout le Paradis terrestre,<br />

Adieu royal secretaire et seavânt<br />

Qui malgré Mort mettra son bruit avant<br />

Dans tes cscripts et <strong>au</strong> profond des coeurs -<br />

De maint poete et grands rhétoriqueurs.<br />

Adieu celuy doift le chef des poetes,<br />

Marot passant te vol des atouetes,<br />

A mys le nom <strong>en</strong> tel desguisem<strong>en</strong>t,<br />

• Qu'à ta nature il toucha vitveLn<strong>en</strong>t,<br />

Adieu cultejir et porc des letrez,<br />

Bi<strong>en</strong> peu de g<strong>en</strong>ts sont pareila r<strong>en</strong>contrez,<br />

Car Charité est presque toute estaincte.<br />

Si elle vit elle est fardée et fainete. •.<br />

Adieu eeluy qui tiltre. indigne n'as<br />

D'este nommé le second Mec<strong>en</strong>as,<br />

• Que plust à Dieu que sa h<strong>au</strong>lte largesse<br />

R<strong>en</strong>ou yellast tes ans -d'une ieuneise,<br />

Mais sans cela, i'espère que tes ans<br />

Vingt ans trois foyrseront de mal exempts.


De<br />

si ch<strong>au</strong>ds acc<strong>en</strong>ts de reconnaissance et In glorification de I<br />

de Thihoust « charité»<br />

à cet <strong>en</strong>droit prouv<strong>en</strong>t l'él<strong>en</strong>due et la nature des obligations<br />

qu'Babert lui devait. Evidemm<strong>en</strong>t il avait été plus qu'un Convive<br />

et <strong>en</strong> véritable Mécène le protecteur chez<br />

lui,<br />

avait<br />

embarrassé<br />

Ouvert sa - bourse <strong>au</strong> poète<br />

Ce n'est pas la seule fois d 'ailleursque ce dernier signale<br />

formellem<strong>en</strong>t<br />

l'espèce de recohuaisMiice qu'il doit à son Mécène; il ne perd guère l'ôctasion<br />

de la témoigner. Nous <strong>en</strong> citerons Volontiers<br />

<strong>au</strong>tre passage d'une épitre comme exemple cet<br />

•4u'il écrivait dlssoudun à son ami le poète<br />

Nicole Le louvre, Postérieurem<strong>en</strong>t sans doute à cette époque, quoiqu'il y<br />

m<strong>en</strong>tionne sa traduction des Métam satin :<br />

orphoses d'Ovide comme touchant<br />

« Si te supply voir ma prose et ma lettre -<br />

Ou i'ay voulu le reste eserire et mettre<br />

Donnant par toy un (tés humble salut -<br />

A Quantiljy, qui pour rno1,' tant valut -<br />

A qui dc bref sera sur toute chose - -<br />

Faiet ung Prés<strong>en</strong>t de ma Métamorpi,osc -<br />

Quand l 'imprimeur <strong>au</strong> v<strong>en</strong>t la produira, »<br />

Cette épitre a été imprimée à la suite du Temple de Chasteté<br />

Ainsi le financier-poète berrichon travaillait à acqu& qr des droits <strong>au</strong><br />

titre de Mécène qui devait par la suite s'attacher à sa réputation Q fait<br />

que nous v<strong>en</strong>ons de Citer et que la reconn&ssaflce de l'obligé n eonsèrvé<br />

se répéta sans doute plus d'une fois- pour d'<strong>au</strong>tres<br />

qui n'<strong>en</strong> ont ri<strong>en</strong> 'dit. -<br />

La tradition toutefois nous a conservé <strong>en</strong>core le souv<strong>en</strong>ir d'un <strong>au</strong>tre bi<strong>en</strong>fait<br />

dû même g<strong>en</strong>re oii nous retrouvons Thiboustt<strong>en</strong>dant la main <strong>au</strong>x<br />

<strong>en</strong>treprises de lesprit. Ce fut lui qui lit les frais de publication de la<br />

du <strong>Berry</strong> que le prêtre Jean Jofivet, géographe de carte<br />

François fer,<br />

il s'intitulait, publia <strong>en</strong> six planches, l'an combe<br />

1545, et dont la gravure dut être<br />

coÙteuse(j). Cla <strong>au</strong> surplus ne vèutas dire que ce<br />

bi<strong>en</strong>faiteur des lettres<br />

sci<strong>en</strong>ces dans sa province fut pour cela moins avide d'arg<strong>en</strong>t que tous<br />

Nnes de son temps,- seulem<strong>en</strong>t il avait de plus que la plupart<br />

de savoir le dép<strong>en</strong>ser dignem<strong>en</strong>t et d'<strong>en</strong> faire un noble<br />

-<br />

"ous prisons plus, peur notre pah, pie son blason, tout<br />

Nily L'épitre d'Ilabert que nous v<strong>en</strong>ons de citer<br />

r - Nq de vers imprimées à la suite dii Temple de<br />

adj'eùées à Thiboust ou à des<br />

le vray Avarie, p 7.


-40---<br />

personnes àe sa famille (4). Elles y paraiss<strong>en</strong>t rangées par ordre do date,<br />

et èéll&qi est la première qui s'adresse <strong>au</strong> seigneur de Quarilully., d'où<br />

quittantBourges, avant d'avoir<br />

j'induis, que ce<br />

châte<strong>au</strong><br />

fut celle<br />

de<br />

qu'il lui.<strong>en</strong>vOYa <strong>en</strong><br />

été son hôte- Bi<strong>en</strong> qu'il y parle <strong>en</strong> effet de Quantilly,<br />

visiter le<br />

il est certain quït nô l'avait pas vu <strong>en</strong>core, mais il avait promis de rev<strong>en</strong>ir<br />

y faire quelqueSéiOlr, et, comme il tardait à' exécuter cette promesse,<br />

ju'il n'avait faite sans dote que par coucessiQfl et pour flatter le caprice<br />

dù châtelain Thiboust la lui rappela 'à diverses fois, et gomme cela était<br />

cri vers, solficitant ainsi- les<br />

de bongoût de poète àpO&C, -il le faisait<br />

réponses . rimées de son corresoùdait,<br />

qui<br />

s'excuait de son mieux de se<br />

faire tirer ><strong>au</strong>tant l'oreille pour<strong>en</strong>ir. <strong>Un</strong> compatriote d'Haberl, M. Mémé,<br />

i comparé éléanim<strong>en</strong>t 'cet âj3pel réit&é d'un poèt<br />

un <strong>au</strong>tre poète <strong>au</strong>x<br />

regrets dBorace sur l'éloignem<strong>en</strong>t de son cher Virgfle. La compar3iSO'1<br />

est gracieuse, mais s'il y à quelque analogie dans la situation quelle distance<br />

<strong>en</strong>tre les tal<strong>en</strong>ts I (2) Donc ce sont les épitres résultant de cet échange -<br />

d'invitations et de réponses qu'on trouve à la suite de celle que nous v<strong>en</strong>ons<br />

(le citer.<br />

Et d'abord, pour faire sa cour <strong>au</strong> maître, Habert avait jugé à propos tic<br />

faire de confiance ,l'éloge de Quantlly par ce quatrain:<br />

(t) Voici le titre plus <strong>au</strong> long de ce recueil: Le Temple de Chasteté avec plusieurs<br />

épigrammes tant de L'inv<strong>en</strong>tion de l'<strong>au</strong>theur que de la traduction de Martial, etc.<br />

par François Hubert dYssouldun <strong>en</strong> <strong>Berry</strong>.— Paris, 459, in-S°.--C'est parmi lesdites<br />

épigrammes que se trouve la série de pièces dont nous .partops. Nous.navons pas hésité<br />

à les transcrire, d'abord <strong>en</strong> raison de l'intérêt direct dont elles sont pour notre sujet, et<br />

puis pour la rareté du livre d'où elles sont tirées les oeuvres d'Hubert étant <strong>au</strong>lour<br />

-d'bui difficiles à r<strong>en</strong>contrer, même dans les grandes bibliothèques publiques; Qu'il<br />

nous soit donc permis de témoigner ici toutela reconnaissance que nous éprouvons<br />

pour le gracieux procédé de M. de La VilIeille qui, sur une simple demande d€<br />

r<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>ts de notre part, n bi<strong>en</strong> voulu dépouiller à notre int<strong>en</strong>tion quelques-unes<br />

des oeuvres du poète Issoldunois ; ce qui nous permet <strong>au</strong>jourd'tiui d'offrir ces échan-<br />

tillons dela-muse du poète Berrichon,<br />

À@rès la table des matières qui se trouve imprhùée <strong>au</strong> verso du titre du Temple de<br />

Chasteté, on lit le buitain'suivant de Tbiboust, qui recommande le livre<br />

Sage lecteur, qui lis vers et epistres,<br />

Ronde<strong>au</strong>x, dixains des poètes ftouve<strong>au</strong>lx<br />

Voy le dedans plutost que ces grands tiltres<br />

• -. Qui lie font pas les ouvrages plus be<strong>au</strong>lx r<br />

Maints <strong>en</strong> y n qui ne sont que gros yesulx -<br />

Où <strong>en</strong> lisant les tiltres tu t'abuses -<br />

• Mais testuy-cy-'ehfle ses chalume<strong>au</strong>lx<br />

Près d'ltélicèn, e<strong>au</strong> vlfve des neuf muses.<br />

(2) Pérêmé, Recherches hist, et aPchot. sur l à ville d'ftsoudun ,p.


-41-<br />

Si Priapus qui des jardins fat Dieu<br />

De Quantilly oust contemplé la plade,<br />

Il oust donné plus d'honneur à ce lieu<br />

Qu'à Pomona de be<strong>au</strong>lté et de grace. »<br />

CO à quoi le seigneur de Qùantillv répondit ave <strong>au</strong>tant de raison <strong>au</strong><br />

moins que dc poésie par cet <strong>au</strong>tre quatrain -<br />

« D'une chose <strong>en</strong>eores non voue<br />

L'on ne peuit parler hardim<strong>en</strong>t,<br />

Pour ce qu'a toy est ineongnue<br />

Poiit.<strong>en</strong> asseoir sur iugezn<strong>en</strong>t.<br />

Bahert repr<strong>en</strong>d la plume et dès lors la -correspondance continue et ne va<br />

plus s'interrompre de sitôt.<br />

« L'<strong>au</strong>thear <strong>au</strong>diet Qua.ntilly,<br />

Sur Quantilly je n'ay getté mes yeutx<br />

Pour le louer, ce que tu dis estrange<br />

Mais ccclx qui ont "eu ce lieu gracieux<br />

M'ont incité de ]uy donner lou<strong>en</strong>ge.<br />

Et si un icur exj5res mon oeil se range<br />

A contempler ce lieu si .bi<strong>en</strong> pourveu,<br />

l'<strong>au</strong>ray alors la mémoire d'un anÈe<br />

Pour raeompter cc que l'oeil ara vou.<br />

«Lediet Qua ntilly à t'<strong>au</strong>t heur,<br />

Quand promets tu qu'<strong>en</strong> eeste maisonnette<br />

Tu me mc vi<strong>en</strong>dras à Quantilly revoir?<br />

<strong>Un</strong>e fontaine "erras pure et nette,<br />

Et un jardin d'abres plaisants à voir.<br />

Si plus y quiers tu pourrois decevoir,<br />

Alors sera ta demande <strong>en</strong>t<strong>en</strong>due,<br />

Tout pburras bi<strong>en</strong> à l'oeil apparees'ôir,<br />

Car petit lieu n'a pas grand esteudue.<br />

L'<strong>au</strong>thetcr <strong>au</strong>diet Quantitiv<br />

Quand Boreas v<strong>en</strong>t Plein d'<strong>au</strong>stérité<br />

Par Eolus ti<strong>en</strong>dra prison obscure,<br />

Quand Zephirus <strong>au</strong> gracieux esté<br />

Alainera douleern<strong>en</strong>t la verdure,<br />

Ce sera lor, Monseigneur, ie vous lare,<br />

Qu'il sera bon de pr<strong>en</strong>dre esbatem<strong>en</strong>t<br />

A Quantilly, car lôrsque le verd dure<br />

L'esprit <strong>en</strong> a plus de cont<strong>en</strong>tem<strong>en</strong>t. »<br />

6.


Lediet Qicantiliy à I'a.utlieur,<br />

C'est un refus, ou ton coeur n faiIly<br />

D'ainsi vouloir le v<strong>en</strong>t printemps att<strong>en</strong>dre<br />

T1our visiter le lieu de Quantilly<br />

Ou l'on t'asseure <strong>en</strong> deux heures te r<strong>en</strong>dre.<br />

La tu pourras des neuf Muscs appr<strong>en</strong>dre<br />

A t'esiouir <strong>en</strong> dure adversité, - -<br />

Semblablem<strong>en</strong>t plusieurs choses compr<strong>en</strong>dre -<br />

Dont lu <strong>au</strong>ras ioye et fdlicitd.<br />

u L'antheur <strong>au</strong>diot Qua ntiliy,<br />

Giaces te r<strong>en</strong>d de ton offre humblem<strong>en</strong>t'<br />

Me desyrant dedans Quantilly estre, -<br />

Le temps permet d'y pr<strong>en</strong>dre eshatern<strong>en</strong>t,<br />

Le lieu <strong>au</strong>ssi dont tant on prise l'astre,<br />

Mais si e'estoit un Paradis terrestre -<br />

Mal de eoustez qui me c<strong>au</strong>se douleur<br />

Me garderait de rire et eongnoistre<br />

Le passe temps de ce lieu de valeur. û-<br />

Le mal de côté ôtait la dernière excuse qu'<strong>en</strong> désespor de c<strong>au</strong>se et <strong>en</strong><br />

face de l'obstination du vieillard -Uabert meflait <strong>en</strong>core <strong>en</strong> avant pour<br />

gagner du temps. Mais il fallait se r<strong>en</strong>dre et il partit. Ge second voyage à<br />

Bouiges doit être 4de l'année 1550.<br />

Habert a pris soin d'<strong>en</strong> signaler lui-même les détails dans une <strong>au</strong>tre épitre<br />

à Thiboust. C'est collé qu'on lit <strong>en</strong> tète du iscours du voy a ge dc V<strong>en</strong>ise à<br />

Constantinople, par Jacques Gassot, petit-neveu dudit Thiboust.<br />

Jacques Gassot, m du Deffctids, est, il f<strong>au</strong>t l'avoueF, plus connu dans -<br />

notre pays que son oncle •; cela ti<strong>en</strong>t d'une part, à ce qu'il y a rempli des<br />

charges municipales, et <strong>au</strong>ssi à ce que son nom s'est perpétué jusqu'à nos<br />

jours dans ses héritiers. Il desc<strong>en</strong>dait d'une soeur de Thibonst à laquelle<br />

Catherinot donne le prénom de Céleste; La Th<strong>au</strong>massiére; d'accord avec<br />

les titres de la famille, l'appelle Nicole (-I). Elle o pu porter les deux noms.<br />

Elle fut mariée à Aignan Rousse<strong>au</strong>, marchand établi à la porte Gordaine,<br />

qui fut contre-garde de la monnaie. de Bourges et échevin <strong>en</strong> 1190_91.<br />

Elle eut de ce mariage <strong>en</strong>tre <strong>au</strong>tres Pierre -Rousse<strong>au</strong>, qui: s'éleva sous la<br />

tutelle (le Jacques Thiboust, et une fille, Jeanne, qui épousa, <strong>en</strong> 4521 11520<br />

y. st.-), André Gassot, & de Deff<strong>en</strong>d; notaire-à Bourges, lequel devint pins<br />

tard secrétaire du roi, sans doute par l'intermédiaire de -son oncle, et donna -<br />

-(I) cMlierinot. Tombe<strong>au</strong> généal.,. 4. La Tli<strong>au</strong>niassièi'e. Généalogie des Gassot,<br />

h la p. 1006 de son ifiet. de Verry.


- 59<br />

De si ch<strong>au</strong>ds a<strong>en</strong>ts de reconnaissance et la glorification de la « charité<br />

(le 1'hiboust à cet <strong>en</strong>droit prouv<strong>en</strong>t l'ét<strong>en</strong>due et la nature des obligations<br />

qu'&bert lui devait. Evidemm<strong>en</strong>t il avait été plus qu'un convive chez lui,<br />

et <strong>en</strong> véritable. Mécène Je protecteur avait ouvert sa bourse <strong>au</strong> poète<br />

embarrassé. -<br />

Ce n'est pas la seule fois d'ailleurs que ce dernier signale formellem<strong>en</strong>t<br />

l'espèce de reconnaissance qu'il doit à son Mécène; il ne perd guère l'occasion<br />

de la témoigner. Nous <strong>en</strong> citerons volôntiers comme exemple cet<br />

<strong>au</strong>tre passage d'une épitre qu'il écrivait d1ssoudnn à son ami le poète<br />

Nicole Le 1ouvre, postérieurem<strong>en</strong>t sans doute à cette époque, quoiqu'il y<br />

m<strong>en</strong>tionne sa traduction des Métamorphoses d'Ovide comme touchant à<br />

sa fin : - - -<br />

o Si te supply voir ma prose et ma lettre<br />

Ou i'ay voulu le reste escnire et mettre<br />

Donnant par toy un très humble salut<br />

A Quantilly, qui pour moy tant valut<br />

k qui de bref sera sur toute chose<br />

• l'aict ung prés<strong>en</strong>t de ma Métamorphose<br />

Quand . l'imprimeur <strong>au</strong> v<strong>en</strong>t la produira.<br />

Cette épitre n été imprimée à la suite du Temple de Chasteté.<br />

Ainsi le financier-poète berrichon travaillait à acquérir des droits <strong>au</strong><br />

titre de Mécène qui devait par la suite s'attacher àsaréputatiou . Le fait<br />

que nous v<strong>en</strong>ons de citer et que la reconnaissance de l'obligé a consèrvé<br />

- se répéta sans doute plus d'une fois- pour d'<strong>au</strong>tres qui n'<strong>en</strong> ont ri<strong>en</strong> dit.<br />

La tradition toutefois nous a conservé <strong>en</strong>core le souv<strong>en</strong>ir d'un <strong>au</strong>tre bi<strong>en</strong>fait<br />

dù même g<strong>en</strong>re où nous retrouvons Thiboust t<strong>en</strong>dant la main <strong>au</strong>x<br />

<strong>en</strong>treprises de l'esprit. Ce fut lui qui fit les frais de publication de la carie<br />

du <strong>Berry</strong> que le prêtre Jean Jolivet, géographe de François 1er, comme<br />

il s'intitulait; publia <strong>en</strong> six planches, l'an 1545, et dont la gravure dut être<br />

coûteuse (1). Cla <strong>au</strong> surplus ne veut pas dira que S bi<strong>en</strong>faiteurdes lettres<br />

et des sci<strong>en</strong>ces dans sa province fut pour cela moins avide d'arg<strong>en</strong>t que tous<br />

les hommes de son temps, seulem<strong>en</strong>t il avait de plus que la plupart<br />

d'<strong>en</strong>tre eux l'art de savoir le dép<strong>en</strong>ser dignem<strong>en</strong>t et d'<strong>en</strong> faire un noble<br />

usage, ce que nous prisons plus j pour notre part, que son blason, tout<br />

écartelé qu'il fût.<br />

Mais rev<strong>en</strong>ons à Quantilly. L'épitre d'Habert que nous v<strong>en</strong>ons de citer<br />

fait partie dune série de pièces de vers imprimées à la suite dû Temple de<br />

- - Chasteté et dont la plus grande part sont ad 'ressées à Thiboust Ou à des<br />

(t) V; Calherinot,Ansuales fypogr., P. 4, et te -erc y Avarie, p 7,<br />

0<br />

/4


- 40 -<br />

personnes de sa famille(4). Elles y paraiss<strong>en</strong>t rangées par ordre do date,<br />

et èeHe-éi est la première qui s'adresse <strong>au</strong> seigneur de Quantilly, d'où<br />

j'induis, que ce fut celle qu'il lui <strong>en</strong>voya <strong>en</strong> quittant Bourges, avant d'avoir<br />

été.visiter le chàte<strong>au</strong> de son hôte. Bi<strong>en</strong> qu'il y parle <strong>en</strong> effet de Quantilly,<br />

il est certain qu'il iiè l'avait pas vu <strong>en</strong>core, mais il avait promis de rev<strong>en</strong>ir<br />

y faire quelque séjouf, et, comme il tardait à exécuter cette promesse,<br />

jti'Il n'avait faite sans doute que par concession et pour flatter le caprice<br />

du chStelain, Thiboust la lui rappela à diverses fois, et comme cela était<br />

de bongoût de poète à poète, il le faisait <strong>en</strong> vers, sollicitant ainsi les<br />

répotises rimées de son correspondant, qui s'excusait de son mieux de se<br />

faire tirer <strong>au</strong>tant l'oreille pour v<strong>en</strong>ir. <strong>Un</strong> compatriote d'Babert, M. Pérémé,<br />

a comparé éléai4m<strong>en</strong>t 'cet àppel réitéré d'un poètè à un <strong>au</strong>tre poète <strong>au</strong><br />

regrets d'Horace sur l'éloignem<strong>en</strong>t de son cher Virgile. La comparaison<br />

est gracieuse, mais s'il y â quelque analogie dans la situation quelle distance<br />

<strong>en</strong>tre les tal<strong>en</strong>ts 1 (2) floue ce sont les épitres résultant de cet échange.<br />

d'invitations et de réponses qu'on trouve il suite de celle que nous v<strong>en</strong>ons<br />

de citer.<br />

Et d'abord, pour faire sa cour <strong>au</strong> mltre,, Babert avait jugé à-propos de<br />

faire de confiance l'éloge de Quantlly par ce quatrain:<br />

(I) Voici le titre plus <strong>au</strong> long de ce recueil: Le Temple de Chasteté avec plusieurs<br />

épigtanmes(ant de l'inv<strong>en</strong>tion de r<strong>au</strong>theur que de la traduction de Martial, etc.<br />

par F'rioçois Habert d'Yssouldun <strong>en</strong> <strong>Berry</strong>.— Paris, 4549, in-S°.— C'est parmi lesdites<br />

épigrammes que se trouve ta série de pièces dont nous partons. Nous n'avons pas hésité<br />

à les transcrire, d'abord <strong>en</strong> raison de l'intérêt direct dont elles sont Pour notre sujet, et<br />

puis pour la rareté du livre d'oŒ elles sont tirées les oeuvres d'Habert étant <strong>au</strong>jourd'hui<br />

difficiles-à r<strong>en</strong>contrer, mème dans les grandes bibliothèques publlquds. Qu'il<br />

nous soit donc permis de témoigner ici toute la reconnaissance que nous éprouvons<br />

pour le gracieux procédé de M. de La Villegille, qui, sur "ne simple demande de<br />

r<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>ts de notre part, a bi<strong>en</strong> voulu dépouiller à notre int<strong>en</strong>tion quelques-unes<br />

des oeuvres du poète lssolduaois; ce qui nous permet <strong>au</strong>jourihni d'offrir ces échan-<br />

tillons de ta muse du poète Berrichon.<br />

Après la table des matières qui se trouve imprimée <strong>au</strong> verso du titre du Temple de<br />

chdsteté,<br />

on lit le huitain suivant de Thiboust, qui recommande le livre:<br />

-<br />

Sage lecteur, qui lis vers et episLres,<br />

Ronde<strong>au</strong>x, dizains des poètes tiouve<strong>au</strong>lx.<br />

Voy le dedans plutost que ces grands filtres<br />

Qui ne font pas les ouvrages plus -be<strong>au</strong>lx:<br />

Maints <strong>en</strong> ya.qui ne sont.que gros ye<strong>au</strong>lx, -<br />

Où <strong>en</strong> lisant les Libres tu t'abuses<br />

biais èestuy-cy-eutflé .<br />

ses ehalurnè<strong>au</strong>lx<br />

-<br />

Près d'llélieàn , e<strong>au</strong> vitre des neuf muses.<br />

(2) Pérémé , Recherches hist. et archéol, sur fa ville -4'Issouduu , P. 339.


- 43 -<br />

le jour à Jacques dont il est ici question. Nous ne referons pas ici la hiograpbM<br />

de cc dernier, on petit la lire <strong>au</strong> tome XIÉ de la Nouvelle biographie<br />

générale, publiée par M. Firinin' Didot; flous <strong>en</strong> rapporteronsseulem<strong>en</strong>t le<br />

fait principal qui nous intéresse ici, celui dê son voyage <strong>en</strong> Ori<strong>en</strong>t. Envoyé<br />

par H<strong>en</strong>ri Il avec une mission politique secrète <strong>au</strong>près du sultan Suléiman,<br />

il le suivit avec l'ambassade française dans l'expédition que ce piince t<strong>en</strong>ta<br />

<strong>en</strong> 1518 contre le schah de Perse. La relation de ce voyage avait été adres-<br />

sée par lui à Thiboust qui la publia <strong>en</strong> 1550 à l'instigation de Habert sous<br />

le litre que nous avons rapporté plus h<strong>au</strong>t.. <strong>Un</strong>e deuxième. édition avec Je<br />

même litre cii parut <strong>en</strong> 1600. Enfin <strong>en</strong> 1674, JeanToube<strong>au</strong>, imprimeur de<br />

Bourgcs, <strong>en</strong> donnait une troisième de format in-s-, comrne les deux <strong>au</strong>tres,<br />

et qu'il ornait du litre suivant : m Lettre escritte d'A lep <strong>en</strong> Surie par Jacques<br />

Gassot, s': de Deff<strong>en</strong>s, à fac gaies 1'/riboust, s': dé Quantilly, cont<strong>en</strong>ant<br />

soit voyage de V<strong>en</strong>ise à C. P. de là à T<strong>au</strong>ris -<strong>en</strong> Perse, et son retour..a.uu].<br />

Alep. En tête de cette relation figure' Pépites dHabert à Thiboust que<br />

nous avons signalée <strong>en</strong> dèrnier lieu, et que nous allons transcrire <strong>en</strong> partie.<br />

 Monsieur Mainte J. fl.iboust, etc.<br />

Au départir de Bourges (Monseigneur)<br />

Prisle chemin, dont tu fus t'ûnsèigneur.<br />

Je feis séjour six heures seulem<strong>en</strong>t<br />

A Quantilly, <strong>en</strong> tel cont<strong>en</strong>lémnt, - -<br />

Que ma p<strong>en</strong>sée un seul joui' de ma vie<br />

De joyc et d'heur ne fut one tant ravie..<br />

A l'arriver i'appercet) que tes g<strong>en</strong>ts<br />

• A. mon recueil ne fur<strong>en</strong>t néglig<strong>en</strong>ts<br />

Car tout soudain resiouys de ma vefle<br />

Foir<strong>en</strong>t que bi<strong>en</strong> la table fut pourvéùe,<br />

Ce qui pourtant ne inc plaisait le mieux;<br />

• Car je ne fus oneques fort curieux<br />

De grands banquets, dont l'excessive cure<br />

Aux bons esprits ignorande procure.<br />

Bi<strong>en</strong> est-il vray que le vin de ce erdu<br />

East donné vie à tàut homme reoreu,<br />

Car sans m<strong>en</strong>tir il est plein de délices:<br />

Et m'est advis que te ne sors dès lices - -<br />

De vérité, si le yin qu'as téans<br />

J'ay préféré à eelluv d'Orléans (-I).<br />

(1) Aujourd'hui ce n'est plus dans les vins de l'Orléanais qu'on choisit des termes<br />

de comparaison. C'est qu'avec les siècles les goûts chang<strong>en</strong>t. Les vins comme Id reste<br />

subiss<strong>en</strong>t l'empire de la -mode. On s'étonne maint<strong>en</strong>ant qué les Contemporains de


- 44 -<br />

flonequos Les g<strong>en</strong>ts aises (le rua v<strong>en</strong>ue,<br />

<strong>Un</strong> peu avant ta nuiet interv<strong>en</strong>ue<br />

De tes jardins me foir<strong>en</strong>t l'ouvérture,,<br />

Passants Lotis ceux d'anci<strong>en</strong>ne eseripture<br />

Mesmes le lieu que les filles d'Atlas, -<br />

Par un Dragon, qui oneques n'<strong>en</strong> fut las,<br />

Faisai<strong>en</strong>t garder cl n'a mon oeil £ailly<br />

De préférer ce lieu de Quantilly<br />

Aux be<strong>au</strong>x jardins que Pomone la vierge<br />

Sceut cultiver, <strong>au</strong>squels seule e6nciergè<br />

Elle liabitoit, r<strong>en</strong>dant les Dieux confus,<br />

En leur faisant de'su)i amour refus.<br />

Possible n'est que les fructiers ie nombre<br />

Do Quantitly, et que i'arreste un nombre<br />

Desarhrisse<strong>au</strong>x, tant de ceux qui ont fruiet,<br />

Que ceux sur qui le rossignol faiet bruit,<br />

Qui ehesnes sont S grande compagnie, -<br />

- Qui feront honte & ceux de Caonje,<br />

• Lorsque tes hoirs <strong>en</strong> sem<strong>en</strong>ce naïve,<br />

Croistront, ainsi que les rame<strong>au</strong>x d'olive, etc. »<br />

On voit quelle place cette terre' de Quantil]y avait pris dans la vie de<br />

Jacques Thiboust ce n'était pas seulem<strong>en</strong>t son orgueil de chatelain qui<br />

s'y trouvait intéressé; c'était <strong>au</strong>ssi soit de propriétaire, de vigne-<br />

ron, de planteur. Aussi comme le flngorneui' liahert u soin (le flatter tout<br />

cela. D'ailleurs resté veuf après qûelques années de mariage et sans <strong>en</strong>fants<br />

mâles, ç'avait été pour lui un objet de consolation. Il semble qu'<strong>en</strong> créant<br />

ses jardins, il se soit rappelé ceux de SOI) cher Horace. C'était <strong>au</strong>ssi à ses<br />

yeux quelque chose comme les.jatditis d'Âcadémus <strong>au</strong>xquels la sci<strong>en</strong>ce et<br />

]a poésie aimai<strong>en</strong>t à r<strong>en</strong>dre visite. Quand ses occupations le laissai<strong>en</strong>t libi'e<br />

il les y attirait. Lors même qu'il devait sabs<strong>en</strong>ter, les amis étai<strong>en</strong>t toujours<br />

sûrs d'y être -accueillis avec .cet empressem<strong>en</strong>t que r<strong>en</strong>contra UaberL, qui<br />

parait y être v<strong>en</strong>u un jour où le •maitre n'avait pu l'accompagner, appelé<br />

Saint-Louis ai<strong>en</strong>t fort goûté tes produits des vignes de Surènes. Il n'y a pas lieu d'être<br />

<strong>au</strong>ssi surpris <strong>en</strong> voyant ceux de l'Orléanais jouir jusqu'<strong>au</strong> xvii' siècle d'une faveur qui<br />

les faisait préférer <strong>au</strong>x plus'r<strong>en</strong>onimés. Cela t<strong>en</strong>ait, suivant Legrand d'Aussy, surtout<br />

à la fabrication qui était très perfectionnée dans cette contrée comparativem<strong>en</strong>t<br />

<strong>au</strong>x <strong>au</strong>tres. Dire quo les vins de Quantiily valai<strong>en</strong>t mieux que ceux d'Orléans, c'était<br />

le plus grand éloge qu'on <strong>en</strong> fût faire. Ces clos ont gardé chez nous leur réputation.<br />

Du reste , on a vu avec quel soin Thihoust avait fait planter ses vignes, et il est<br />

probable que par son éloge pompeux ilahert savait flatter oit<br />

un faible de propriétaire.<br />

- 1


C D<br />

peut-être qu'il était <strong>au</strong> dehors par ses tournées d'élu. De ce séjour, où il<br />

aimait à se recueillir, sortir<strong>en</strong>t sans douté <strong>au</strong>ssi la plupart des vers qu'il<br />

u produits. - - -<br />

C'est ici le lieu de parier de ce qui nous reste de lui <strong>en</strong> dehos des vers<br />

adressés à ilabert et conservés par ce dernier, pour nous <strong>au</strong>toriser à traiter<br />

Thiboust non seulem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> ami des lettres mais <strong>en</strong> littérateur. Ramassons<br />

ça et là les élém<strong>en</strong>ts épars de cette oeuvre modeste, et, -pour comm<strong>en</strong>cer,<br />

par coque tout le monde connaît, par ce qui u été imprimé, nous allons<br />

parler de la Monstre du mystère de Simon Gréban. -<br />

En -1536, Bourges fut le théâtre d'une grande' solnnité à la fois artistique<br />

et religieuse. C'était <strong>au</strong> mom<strong>en</strong>t où le calvinisme, né précisém<strong>en</strong>t<br />

dans notre ville, y faisait des progrès rapides et qui alarmai<strong>en</strong>t, étrangem<strong>en</strong>t<br />

les fidèles. On songea à contrebalancer l'effet de ses prédications par la<br />

mise <strong>en</strong> scène d'un de ces spectacles propres <strong>au</strong>x populations catholiques<br />

et où la pompe surtout frappe les imaginations. On savait le-peuple plus<br />

s<strong>en</strong>sible à ce qui éblouit l'oeil qu'à ce qui s'adresse purem<strong>en</strong>t à l'esprit, et<br />

c'était pour lui avant tout que cette représ<strong>en</strong>tation était faite. Les princip<strong>au</strong>x<br />

m<strong>en</strong>eur de l'affaire fur<strong>en</strong>t une douzaie de bourgeois de Bourges, la<br />

plupart marchands et membres d'une confrérie où l'idée avait probablem<strong>en</strong>t<br />

pris naissance. Ils se chargèr<strong>en</strong>t de l'organisation et de la dép<strong>en</strong>se.<br />

j'oeuvrg qu'ils cloisir<strong>en</strong>t pour être interprétée à cette occasion fut le Mys-<br />

1ère (les actes des apôtres par le moine Simon Gréban (-I). C'était une de<br />

ces grandes machines dont ri<strong>en</strong> dans notre théâtre moderne ne peut donner<br />

l'idée. il ne fallait pas moins - de quarante jours pour la représ<strong>en</strong>ter<br />

complètem<strong>en</strong>t. Le nombre des personnages et le luxe qu'on y déployait<br />

étai<strong>en</strong>t <strong>en</strong> rapport avec la longueur de la représ<strong>en</strong>tation. Pour suffire à ce<br />

déploiem<strong>en</strong>t de richesses on dut mettre à contribution non seulem<strong>en</strong>t la<br />

garde-robe et la boutique des organisateurs, niais <strong>en</strong>core sans doute les<br />

trésors accumulésdai1s les églises pour lesquels la fête se faisait. Là foule<br />

fut admise à jouir de la vue de ces magnific<strong>en</strong>ces dans un déifié ou<br />

« monstre » de tout le personnel et des machines qui devai<strong>en</strong>t figurer dans<br />

le mystère. Ce long cortége, qui ne cont<strong>en</strong>ait pas moins de 500 personnes,<br />

partit de l'abbaye de Saint-Sulpice, située dans un des f<strong>au</strong>bourgs de la<br />

tille, et dans laquelle le acteurs étai<strong>en</strong>t allés se préparer; puis se r<strong>en</strong>dit<br />

processionnellem<strong>en</strong>t à travers les rues jusqu'à la fosse des Arènes où le<br />

théâtre avait été, élevé. Ce spectaclé dut produire sur les populations une<br />

espèce d'éblouissem<strong>en</strong>t. Il est certain que le ret<strong>en</strong>tissem<strong>en</strong>t de cett.e sol<strong>en</strong>nité<br />

resta longtemps dans les imaginations; et, tandis que, pour <strong>en</strong> éterniser<br />

la mémoire, -le drapier Âlabnt, qui fut l'un des organisateurs; faisait -<br />

(t) Ch<strong>au</strong>rne<strong>au</strong>, Bise. Yi, 7. -.- Raynal. Ilisti, vin, 3.<br />

n<br />

-


-46-imprimer<br />

le drame l),Thiboost, <strong>en</strong>core érnerveiflé de la magiific<strong>en</strong>ce des<br />

décors, et qu'on croit avoir lui-méme participé à cette représ<strong>en</strong>tation, écrivait<br />

une relation du défilé dùnt nous v<strong>en</strong>ons de parler.<br />

Peut-ètrè pourrait-on lui attribuer <strong>au</strong>ssi la cofifec4ion d'un peut livret<br />

qui se conserve <strong>en</strong>core à la bibliothèque publique de lidurges (départem<strong>en</strong>t<br />

dès rhss) et qui conti<strong>en</strong>t tous les détails de la mise eu scène du myst6re.<br />

Pour appuyer cette Prét<strong>en</strong>tion, je m'<strong>au</strong>toriserais <strong>au</strong> besoin des parolesde<br />

M. Raynnl, qui semble avoir eu une p<strong>en</strong>sée analogue lorsqu'il dit <strong>en</strong> le<br />

m<strong>en</strong>tionzant « Ce n'est qu'un mem<strong>en</strong>to de semainier dressé par vii des<br />

ezitreprèneurs, afin d'indiquer tout ce qui était nécessaire pour l'exécution<br />

matériellé du mystère. » Ce mem<strong>en</strong>to est , un petit la-42 <strong>en</strong> parchemin,<br />

relié à l'antique et cont<strong>en</strong>ant H feuillets- non foliotés. Au comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t<br />

on lit <strong>en</strong> cursive du xvtt siècle « C'est la table et sommaire de la représ<strong>en</strong>tation<br />

de la Passation (àie) faicte à la fosse des Amines parles bourgeois<br />

de Bourges<strong>en</strong> l'an 453(6). » Cette écriture bâtée n'est pas de la main<br />

du scribe <strong>au</strong>quel on doit le livret luinieme et dont l'écriture sognée et qui<br />

décèle des habitudes de calligraphie, convi<strong>en</strong>drait plu!ôt, à notre: secrétaire<br />

du roi. L'<strong>au</strong>t'éur de ce litre l'àvait fait précéder de son nom <strong>au</strong>jourd'hui<br />

illisible par suite d'un grattage.. Les derniers feuillets ont été arrachés, ce<br />

qui r<strong>en</strong>d incomplète cette ptïrtie du .manuterit concernant le mystère de<br />

Saint-D<strong>en</strong>ys qu'on ajoutait souv<strong>en</strong>t comme 40e livre <strong>au</strong>x neuf composant<br />

t'oeuvre de Gréban. L'ordre des matières y est le suivant 1° la liste des<br />

personnages figurant dans les deux mystères avec le dénombrem<strong>en</strong>t de tout<br />

le personnel, -qui monte à 491 personnes; 2° « l'extraict des teintes » ou,<br />

comme nous dirions, le détail des décors.. - - -<br />

- Ce curieux petit volume passa des mains de se.s premiers- possesseurs<br />

dans la bibliothèque de l'archevêché, d'où II est arrivé à celle qui le- déti<strong>en</strong>t<br />

maint<strong>en</strong>ant. Thiboust a pu <strong>en</strong> -faire don à Jacques Zeroy, qui - prit possession<br />

du siégé archiépiscopal de Bourges <strong>en</strong> succédant <strong>au</strong> cardinal de Touron<br />

l'année qui suivit celle Île la représ<strong>en</strong>tatièn du mystère et le garda jusqu'<strong>en</strong><br />

1572. Nous verrons un <strong>au</strong>tre exemple de cet usage de ces manuscrits<br />

-fait par le secrétaire de Marguerite de Navarre quand ils pouva!<strong>en</strong>tintéresser<br />

le donataire. - - - - -<br />

Ce inem<strong>en</strong>to, catalogue ou table, comme on voudra l'appeler, a été imprimé<br />

in-8° <strong>en</strong> 18à4 par les soins -de M. de Cirai-dot, qui l'avait étudié<br />

lorsqu'il s'occupa de la confection du catalogue des manuscrits de notre<br />

- bibliothèque, et par ceux de M. Didron alné, qui accompagna cette impres-<br />

(1)-Voir ce que nous <strong>en</strong> avons dit dans noire Hist. des imprimeurs cl libraires de<br />

Bourges, p. 51 et suiv.


- 47 -<br />

sion de ribLes fort intéressantes (1). <strong>Un</strong>e préface de l'éditeur n été mise <strong>en</strong><br />

tête dans Laquelle il rappelle la description d6 la « monstre » faite par Thihoust,<br />

-<br />

Mois si la paierait( du mém<strong>en</strong>to peut- être ihse <strong>en</strong> douté, il n'eut S pas<br />

de même de l'attire opuscule qui lui apparti<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong> évid<strong>en</strong>irn<strong>en</strong>t. Nous <strong>en</strong>'<br />

avons Catherinot pour garant qintnd il imprime datis ses Atinales tejpogSpliiques<br />

4e Jlofrrges: -<br />

1535.—L'ordre de la représ<strong>en</strong>tation des Actes des A6tres'à Bourges,<br />

c'est une relation faite par lacquS Tlubout, sieur de QuStilly, secrétaire<br />

dit o -<br />

Observons que Catierinot ne cite pas ici eiactem<strong>en</strong>t Je titre qui et:<br />

l'ordre de la triomphhnte et magnifique monstre dii mystère des saints<br />

Actes des Apostres faite à berges le dimanche dernier jour d'avril 1536. ,<br />

De plus, suivant une habitude trop fréqu<strong>en</strong>te cheï lui, lia trouvé moy<strong>en</strong><br />

<strong>en</strong> deux ou trois lignes de commettre deux erreurs.. La première Consiste<br />

à avoir écrit 1535 ait de 1536, date de la représ<strong>en</strong>tation dit mystèe; la<br />

seconde à avoir donné comme imprimée éette relation qui-est certainem<strong>en</strong>t<br />

demeurée manuscrite jusqu'à nos Jours. C'est mêrie à ce déf<strong>au</strong>t' d'impression<br />

qu'elle a , dûd'être restée à peu près inconnue durantfrois siècles.<br />

Catherinot <strong>au</strong>ra confondule mystère lui-même avec «la monstre j, de Thihousi,<br />

bi<strong>en</strong> qu'il ait consigné l'<strong>au</strong>tre un peu plus-bas à sa date d'inipesstoh<br />

(1537). . .<br />

Trois c<strong>en</strong>ts, ans, Jour pour jour, après la sol<strong>en</strong>nelle repés<strong>en</strong>tatïon de<br />

ce mystère et le récit de la « monstre, o une main soigneuse de r<strong>en</strong>dre<br />

public ce monum<strong>en</strong>t de Fart dans notre passé, mettait <strong>en</strong>fin cette dernière<br />

hu joui'. La relation de Thiboust parut <strong>en</strong> 1838 in-89 à Bourge,- grâce k<br />

l'initiative de M. Lahouvrie, anci<strong>en</strong> notaire dé cette ville, qui in fit imprimer<br />

chez Mancei'on, <strong>en</strong> complétant le volume de notes et d'extraits de<br />

toutes sortes qu'il avait recueillis sur l'liistoiré de la prévince. L'intérêt<br />

qu'offrait cette publication, quant à -la reproduction du manuscrit de Thiboust,<br />

n'est pas douteux, et nous n'a yons pas besoin d'y insister. Il est à<br />

regretter que le choix pçu judicieux des fragm<strong>en</strong>ts qui compos<strong>en</strong>t le reste<br />

du livre, et le peu Je méthode avec ils y sont classés, annul<strong>en</strong>t<br />

complètem<strong>en</strong>t la valeur que pourrait avoir cette partiede l'ouvrage: Il restera<br />

cep<strong>en</strong>dant parmi les recueils à consulter, principalem<strong>en</strong>t pour les<br />

excell<strong>en</strong>tes lithographies dont l'a décoré le crayon de Hazé, et pour la<br />

relation qui lui s ert d'introduction et de passeport: Cette rejàtion conti<strong>en</strong>t<br />

- (1) .fttyst&e des actes des apôtres représ<strong>en</strong>té à Bourges CM avril e556, et jannblié<br />

d'aprés te nisc. original, par 'e bon A. de Cirordot. Paris , Ver Didron. I854 in-40<br />

de cinq feuilles.


- 48 -<br />

I S pages pleines d'impression in-8°, <strong>en</strong> y compr<strong>en</strong>ant 13 pages dune pré-<br />

fnce dont l'édUeur l'a fait précéder. (I).<br />

La préface dont nous v<strong>en</strong>ons de parler nous appr<strong>en</strong>d que l'éditeur s'est<br />

servi pour soit d'une copie <strong>au</strong>trefois prise par lui sur une <strong>au</strong>tre<br />

copie manuscrite d'nùe écriture cursive et moderne, et qui se trouvait alois<br />

à la suite de l'exemplaire existant à la bibliothèque publique de Bourges du<br />

ryslère de Gréban, édition de 1537. Et il ajoute J'ai appris -que la<br />

copie quittait jointe <strong>au</strong> mystère des frères Gréban était adhirée; » Depuis<br />

lors cet opuscule a été réintégré dans l'ouvrage où Labouvrie l'a connu.<br />

C'est un in-folio <strong>en</strong> belle bâtarde de la fin du jy 11e siècle, cont<strong>en</strong>ant<br />

.l-i pages. La signature Mi<strong>en</strong>ne Gougnon, portée <strong>au</strong> frontispice du volume<br />

<strong>au</strong>quel on l'avait jointe, et quelques notes rharginales de l'é griture bi<strong>en</strong><br />

connue du chevalier Gougnon son desc<strong>en</strong>dant (2), indiqu<strong>en</strong>t que cet exem-<br />

plaire du mystère fut la propriété de cette famille des Ganglion. <strong>Un</strong> <strong>au</strong>tre<br />

de ces propriétaires, F. de Margat, dont les armes sont collées sur la garde,<br />

parait l'avoir acquis <strong>en</strong>suite. Est-ce l'un des susnommés qui n fait exécuter<br />

cette copie sur l'original resté sàas.doute dans la famille de Thiboust, et<br />

qui l'a fait <strong>en</strong>suite relier avec le drame <strong>au</strong>x dép<strong>en</strong>s de la couvertureprimi-<br />

tive, dont lunées plats u été perdu par ce fait? C'est probable, et je<br />

p<strong>en</strong>che pour le chevalier Gougnon, grand annotateur d'histori<strong>en</strong>s loc<strong>au</strong>x, et<br />

- qui, si j'<strong>en</strong> crois certaines indications <strong>au</strong>rait pu mériter de Catherinot<br />

<strong>au</strong>quel il a ressemblé pour certains points,, le titre d'antiquaire <strong>au</strong>ssi bi<strong>en</strong><br />

que Jacques Thiboust. -<br />

(Ij Elle s'ouvre par ce dizain, nouvel échantillon du savoir-faire poétique de Thil,oust,<br />

et dont nous rétablissons l'orthographe originale.<br />

Ne p<strong>en</strong>sez-pas, Am,ahtes lecteurs,<br />

Que de la Monstre icy âpres déduycte<br />

Soit une fable ou que les Directeurs -<br />

Ay<strong>en</strong>t voulu que vérité escripte. -<br />

Il est certain qu'elle n esté réduycte -<br />

•<br />

De peinct <strong>en</strong> poiiict selon la v<strong>en</strong>e d'oeil, -<br />

- Et vouldroys bi<strong>en</strong> que selon le my<strong>en</strong>veuil -<br />

• Dieu tout puissant ],a vous 0151 perù%ys<br />

Lors vous diriez i'<strong>au</strong>eleur de ce recueil<br />

- A plus laissé que d'avantaige mys. » -<br />

() Eti<strong>en</strong>no Gougiion fut échevin <strong>en</strong> 1619, et son fils Sacques Grognon , ordinairèin<strong>en</strong>l<br />

nommé le chevalier, titre dont aimait à s'affubler sa vanité risible, émit avocat<br />

du roi <strong>au</strong> présidial. On peut consulter sur ce dernier, avec la lettré généalogiqueque<br />

lui adresse Calberinot et qu'il a mise <strong>en</strong> tète de sa Dissertation que te Parquet<br />

de Bourges est du corps de l'<strong>Un</strong>iversité • la notice de M. Chevalier sur- l'ordre de<br />

N. V. de ta Table ronde de Bourges, ainsi qu'une courte notice à son nom cont<strong>en</strong>ue<br />

<strong>au</strong> ixle vol. de la Biographie Didol.


- 49<br />

Enfin ladite copie <strong>au</strong>rait passé liai , la suite catie les mains de l'abbé de<br />

()ieé , grand vicaire du 'cardinal de' La Rochefouc<strong>au</strong>ld , archevêque de<br />

'Bourges , et qui eu étaitTdél<strong>en</strong>teur <strong>en</strong> 1754. Par lui clic a pu arriver à la<br />

bibliothèque de Farchevêché et de là à celle où elle est maint<strong>en</strong>ant.<br />

J'appr<strong>en</strong>ds CO dernie r fait du bibliophile Jacoli (M. P<strong>au</strong>l Lacroix) qui l'a<br />

consigné <strong>au</strong> tome 4cr de la <strong>Bibliothèque</strong> Soleinne (p. 401). Ce bibliographe<br />

commet d'ailleurs <strong>en</strong> cet <strong>en</strong>droit une double f<strong>au</strong>te, d'une part <strong>en</strong> attribuant<br />

à Guill<strong>au</strong>me Alabat la paternité de la Relation qui revi<strong>en</strong>t de droit à<br />

Thiboust, de l'<strong>au</strong>tre., <strong>en</strong> avouant qu'il n'<strong>en</strong> couinait pas d'impression.<br />

M. Brunet, mieux r<strong>en</strong>seigné, signale celle de Lubouvrie, à la page 488 du<br />

tome ni de soit (édition de 1847) , . 'Seulem<strong>en</strong>t le nom de Tbibousf.<br />

y est écrit Tïb<strong>au</strong>st, et 'celui de W Labouvrie n'y est pas prononcé.<br />

Pour <strong>en</strong> rev<strong>en</strong>ir à la copie que possédait M. de Soleinne , je p<strong>en</strong>se qu'elle<br />

est la même (lue celle jadis acquise par le duc de Lavallière , et dont monlion<br />

est faite <strong>au</strong> tome ni, p. 422 du catalogue de ce dernier. Cet exemplaire<br />

'y est désigné comme un manuscrit in-folio du xvine siècle cont<strong>en</strong>ant<br />

23 feuillets; cc qui prouve que les copies s'<strong>en</strong> étaiént multipliées. Guill<strong>au</strong>me<br />

Debure, le rédacteur du catalogue Lavallière , croit devoir taxer d'exagéra-<br />

tion la rnagniric<strong>en</strong>ce de cette description, sous le prétexte qu'il eut 'fallu<br />

plusieurs millions pour y subv<strong>en</strong>ir. Il ne s'était pas r<strong>en</strong>du compte de la<br />

manière dont ces sortes de choses s'organisai<strong>en</strong>t dans les circonstances<br />

surtout où ],a de Bourges eût'lieu. -<br />

Dans le chapitre de -soit de <strong>Berry</strong> relatif à la seigneurie do<br />

Quantilly et de ses seigneurs, La Th<strong>au</strong>masière parle des mémoires du<br />

sieur Thiboust. S'il fallait pr<strong>en</strong>dre ce mot dans le s<strong>en</strong>s où on 'l'<strong>en</strong>t<strong>en</strong>d<br />

d'ordinaire, on pourrait croire qu'il <strong>au</strong>rait laissé soit un simple journal de<br />

&t vie, soit de vrais mémoires historiques sur les événem<strong>en</strong>ts de son temps.<br />

Mais <strong>en</strong>v réfléchissant bi<strong>en</strong> 'il nous semble que l'histori<strong>en</strong> n'a voulu dé<br />

gner par là que les collections de litres privés que Thiboust aimait à<br />

collationner et à copier de sa mail); vrais mémori<strong>au</strong>x, qui sont <strong>en</strong> effet de<br />

nature à nous fournir de précieux r<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>ts sur ce qui le concerne<br />

personnellem<strong>en</strong>t ou sur ce qui a pu intéresser sa curiosité. La Relation do<br />

la monstre r<strong>en</strong>tre un peu dans cet ordre de recherches ; mais, Outre ce<br />

manuscrit, il nous restd <strong>en</strong>core de lui trois spe'cim<strong>en</strong>s de ce g<strong>en</strong>re.de<br />

recueils spéci<strong>au</strong>x qu'il affectionnait, et dans lesquels, <strong>au</strong> milieu d'actes pour<br />

la plupart <strong>au</strong>th<strong>en</strong>tiques , soit trouvait moy<strong>en</strong> de glisser les choses<br />

les plus étrangères a'u-reste. Deux de ces recueils sont déposés <strong>au</strong>x archives<br />

départem<strong>en</strong>tales du Cher, le troisième à-la bibliothèque de Bourges (4).<br />

(1) Je m<strong>en</strong>tionnerai <strong>en</strong>core ici p0111' mémoire quelques reghtres de fois et item_<br />

mages du duché de <strong>Berry</strong> dresses sous la di roc Lion de Thiboust, (luise trouv<strong>en</strong>ta LI X<br />

7


- 5 -'.<br />

Le premier est le ,.Registre-noir dont nous nous sommes servi déjà plus<br />

d'une fois pour rétablir des points de la biographie de Thibonst que nous<br />

ne trouvions pas ailleurs. Nous u'a'ons pas fini de mettre ce précieux<br />

volume à contributiott Ce registre dont nous avons reprôduit le titre <strong>en</strong><br />

comm<strong>en</strong>çant, et qui tire son riojn de la couleur de sa reliure, était le<br />

troisième (l'une collection dont il est <strong>au</strong>jourd'hui le seul survivant. Demeuré<br />

probablem<strong>en</strong>t dans le châte<strong>au</strong> de Quantilly avec le reste du mobilier quand<br />

les archevêques de Bourges <strong>en</strong> devinr<strong>en</strong>t propriétaires, ils -dur<strong>en</strong>t l'y<br />

• retrouver et sans doute l'y laisser, jusqu'<strong>au</strong> jour où l'uà d'eux le trans-.<br />

• porta <strong>au</strong> chête<strong>au</strong> de Saint-Palais , <strong>au</strong>tre propriété archiépiscopale , doiit<br />

1e dernier possesseur lé légua à ses héritiers. Ce l'un d'eux qui, à-<br />

• une époque assez réc<strong>en</strong>Ce, <strong>en</strong> n fait don <strong>au</strong>x archives. Ce volume petit<br />

- in-folio à reliuie antique très <strong>en</strong>dommagée u été classé, eu raison de sa<br />

prov<strong>en</strong>ance' dans le fonds de l'archevêché, (L. 19). Il s'y trouve <strong>au</strong>près du<br />

Terrier de Quantilly qui forme le 2e numéro de ce recueil dont nous par-<br />

lons ici. L'un et l'<strong>au</strong>tre, avons-nous dit se compos<strong>en</strong>t presque <strong>en</strong>tièrem<strong>en</strong>t<br />

d'actes notulaires transcrits de la main du seigneur de Quantilly. Mais ces<br />

actes y sont <strong>en</strong>tremêlés (le pièces historiques et littéraires , qui sont tout<br />

étonnés de se trouver là et qui pour nous <strong>en</strong> constitu<strong>en</strong>t souv<strong>en</strong>t la partie<br />

la plus intéressante. Ainsi dans le Registre iwir on lit 1° Le dénombre-<br />

m<strong>en</strong>t des seigneuries relevant de la grosse , tour d'Issoudun et -des offices<br />

du ressort dudit Issoudun; 2° Les privilèges et usages de la foret de H<strong>au</strong>te-.<br />

Brune; 3° L'ordre royal de 4525 sur la g<strong>en</strong>darmerie; 1° Les litres de<br />

fondation de la vicairie de Sainte-Catherine dans l'église Saint-Bonnet de<br />

Bourges pur la famille Fouchor; 5" Les coutumes locales de Bourges,<br />

telles que La Th<strong>au</strong>massière les a reproduites (p.. 33t-334) , mais avec un<br />

chapitre inédit qu'on ne trouvé pès dans ce dernier, etc. Le terrier de<br />

Quantilly conti<strong>en</strong>t les privilèges de Saint-Palais, ceux de lu Forêt., la cou-<br />

tume de Qu<strong>au</strong>tilly, etc. Puis dans l'un et dans l'<strong>au</strong>tre on lit les choses les<br />

• plus étranges <strong>en</strong> vers comme <strong>en</strong> prose; il y n même (les recettes d'ongu<strong>en</strong>t<br />

pour la brûlure de la mère de Tluboust. Le terrier est dans ce g<strong>en</strong>re celui<br />

des deux volumes qui offre peut-être le plus d'intérêt.<br />

archives départem<strong>en</strong>tales du Cher et conti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t quelques piècesde sa main. L'un<br />

d'eux notamm<strong>en</strong>t', celui de 1541, 'mus te montre, <strong>au</strong> mois de septembre de ladite<br />

année, adjoint à titre de notaire et de secrétaire du roi <strong>au</strong>x deux attires commissaires<br />

nommés par la duchesse de <strong>Berry</strong> pour rédiger les dùela?ations des vass<strong>au</strong>x de l'apanage.<br />

Comme tous les <strong>au</strong>tres de même nature, ce registre est classé dans le fonds<br />

dia bure<strong>au</strong> des finances. A part quelques pièces particulières de la main de Tljiboust<br />

on n'y voit guère de lof que ta signature qu'il a apposée <strong>au</strong> bas de chaque déclaration<br />

dont le registre j'<strong>en</strong>ferme les co:ies. . -


- M -<br />

Il semble ai) premier abord qu'un recueil de . cette nature ne<br />

guère à des intercalations poétiques. Avec tout <strong>au</strong>tre qu'avec Thihousi<br />

il <strong>en</strong> eût été ainsi: 'nais pour lui tout livre était prétexte à vers, et<br />

même à image. Pour bi<strong>en</strong> faire compr<strong>en</strong>dre cc qui <strong>en</strong> est quant <strong>au</strong><br />

terrier.<strong>en</strong> question, il f<strong>au</strong>t que nous <strong>en</strong>trions à son sujet dans des détails<br />

assez précis. Entre le titre de ce terrier,, orné des armes imprimées<br />

du maître et d'un dé libris égalem<strong>en</strong>t imprimé et <strong>en</strong>cadré, et qu'on<br />

retrouve égalem<strong>en</strong>t sur le Règistre noir, • <strong>en</strong>tre .ce litre, disons-nous,<br />

et les pièces qui constitu<strong>en</strong>t <strong>en</strong> réalité le terrier, se trouve ou devrait<br />

se trouver d'abord), car i1 a été transposé <strong>au</strong> troisième feuillet), le vrai'<br />

titre avecles armes de Thiboust peintes et <strong>en</strong>luminées. En hadt du recto<br />

(le la première feuille une miniature représ<strong>en</strong>te l'image de Saint-Yves,<br />

patron des hommes de loi, <strong>en</strong> bonnet de juge et robe rouge, t<strong>en</strong>ant<br />

des pièces de procédure et un sac à procès. <strong>Un</strong>e note marginale de<br />

Thibdust nous appr<strong>en</strong>d S que cette curieuse miniature est la copie d'un<br />

table<strong>au</strong> que Jean Salat, lieut<strong>en</strong>ant-géiiéral 'du bailli de <strong>Berry</strong>, avait fàit<br />

mettre <strong>au</strong>-dessus de la porte d'<strong>en</strong>trée de l'<strong>au</strong>ditoire du palais royal de<br />

Bourges. Mi-dessous un habile calligraphe a écrit <strong>en</strong> belle minuscule<br />

gothique le passage suivant<br />

« In controvers lis c<strong>au</strong>sarum corporales inirnicitic ori<strong>en</strong>lur, fit wnissio<br />

exp<strong>en</strong>sarum. Labor ani,ni exercetur. Corpus, quotidiè fatigatur. )Iiu lia et<br />

initonesta crirnina indè consequnnivi. IJona et utilia opera postponuntur.<br />

Et qui soepe credunt obtincr.e frequ<strong>en</strong>tes succumbunt; et si obtin<strong>en</strong>t co;npu-<br />

tatis laboribus et exp<strong>en</strong>sis nichil àcquirunt. Bec Sanctus Yeu. » -<br />

Au verso Thiboust a interprété comme suit le dicton de Saint-Yves<br />

ÉPIGRAMME cont<strong>en</strong>ant ta traduction francoise du dia de Sainct-Yves<br />

estript de l'<strong>au</strong>tre part.<br />

De Procès vi<strong>en</strong>t Haine et Inimitié<br />

Procès consume infhiie Richesse<br />

L'Esprit <strong>en</strong> est travaillé sans Pitié<br />

Et ic Corps lai de piétonner salis çesse<br />

'l'ani de Malheurs s'<strong>en</strong> <strong>en</strong>suyv<strong>en</strong>t apres ce<br />

Tout <strong>au</strong>tre Affaire utile on cri délaisse.<br />

Eneores pis tel Homme souv<strong>en</strong>t croit<br />

Gaingner (lui perd avecques .tôut son Droit.<br />

Ou sy le Gaing luy advi<strong>en</strong>t comme il p<strong>en</strong>se<br />

Aucun Proffit <strong>en</strong> Lou( son Gain,- ne voit<br />

A voir compl& la Paine cl la Oesp<strong>en</strong>se.<br />

o.,


- -<br />

_i1 se trouve que le feuillet suivant contrairem<strong>en</strong>t ixax <strong>au</strong>tres est im-<br />

primé sur le recto seulem<strong>en</strong>t. C'est jusqu'ici la seule (](,.-Ses oeuvres<br />

qu'à notre connaissance Thiboust ait soumise à I'iinpressiôn, mais ce<br />

n'St pas le seul exemplaire qui <strong>en</strong> existe, nous <strong>en</strong> retrouverons un second<br />

plus loin.<br />

Au h<strong>au</strong>t de la page on voit une vignette cnc gdrée, représ<strong>en</strong>tait le S<strong>au</strong>r<br />

veur sur l'arbre de la croix, <strong>au</strong> pied de laquelle sont figurées les saintes<br />

femmes, saint Siméon et quelques-uns des bourre<strong>au</strong>x. Dans l'éther plan<strong>en</strong>t<br />

quatre chérubins. Au bas de la page les armes de Thiboust, telles (lue<br />

noûs les avons signalées <strong>au</strong> titre, mais'ici imprimées à l'aide d'un bois<br />

dont il se servait pour <strong>en</strong> décorer tous les livres de sa bibliothèque (-I).<br />

L'écusson y est surmonté de sa devise LEX ET REGIO (2); et <strong>au</strong>-dessous<br />

on lit son nom anagraminalisé Qui' voyt s'esbjtt. Entre ces deux bois<br />

une paraphrae <strong>en</strong> forme de ballade. Sur ces inils Caro. Mundus.<br />

flemonia.<br />

Vers 1505;0U -1506 les Enfants sans souci avai<strong>en</strong>t représ<strong>en</strong>té une Inora-<br />

lité <strong>au</strong> spectacle de lque1le Thiboust, alors sans doute résidant à Paris,<br />

avait pu assister. Nous <strong>en</strong> , empruntons le titre à l'Histoire du théâtre fa-art-<br />

çois des frères Parfait, qui <strong>en</strong> donne l'analyse . (t. lite, p. -lOB et sq. ).<br />

« Moralité nouvelle de )llnndus, Caro, Dcnzozia., <strong>en</strong> laquelle verrez les durs<br />

ass<strong>au</strong>tz 'et t<strong>en</strong>tations qu'ilz font <strong>au</strong> chevalier chresti<strong>en</strong>, et comme par con-<br />

seil de son bdn esprit, avec la gràce de Dieu les Çainera, et à la fin <strong>au</strong>ra<br />

le Roy<strong>au</strong>me de Paradis. Il est à cinq personnages; c'est assavoir- le che-<br />

(1) 4e retrouve ces armes imprimées non seulem<strong>en</strong>t sur les premiers feuillets du<br />

Registre noir et d'un 3° recueil dont nous parlerons plus bas, mais cocote <strong>au</strong> verso<br />

du titre d'un livre prov<strong>en</strong>ant de la bibliothèque de Tliiboust et qui fait <strong>au</strong>jourd'hui<br />

partie de celle de M. Hiver de Beanvoir, Ce dernier livre est un exeinplaire.de la traduction<br />

des histoires de Josephe, par Guill<strong>au</strong>me Michel de ChMillon-surindre. (Paris.<br />

Le Brel. 1539, in-4e). A la dernière page on lit: t C'est h naoy, -Tltibonst. il Les armes -<br />

<strong>en</strong> question y figur<strong>en</strong>t « estampées e <strong>au</strong> verso du Litre, -à l'aide même du bois qu'il<br />

employait évidemm<strong>en</strong>t à sig ner ainsi tous les titres (le sa librairie-( V. un fac-simile -<br />

de ce bois, pI, 2, f. t).<br />

(2) 3e n'ai pas eu occasion de voir ailleurs la devise de Tliiboust; mais Catherinot<br />

n m<strong>en</strong>tionne dans une de ces bizarres digressions dont il est si prodigue. C'est à la<br />

y. 3• de son l'a-est gratuit, il dit parmi d'<strong>au</strong>tres exemples, <strong>en</strong> parlant de la nature<br />

du rev<strong>en</strong>u (les terres : On peut <strong>en</strong>core rapporter an même sujet cette devise de nôtre<br />

- Thiboust de <strong>Berry</strong>, secrétaire du Roy, et trisay<strong>en</strong>l du célèbre Père de Champ, jésuite<br />

-de, Bourges No5,5 «.i zwpr. Car e'étai(antant NWnUS et Fondus que fAx et Regio.'<br />

li para%l.rait d'après cela que la forme latine (le celte devise, telle que nous la voyons<br />

accompagnant ses armes, n'est que In traduction de sa devise première qui était <strong>en</strong><br />

- grec. , On reconnaît bi<strong>en</strong> dans ce seul fait l'homme qui n vu 'r<strong>en</strong>aître à S cour de<br />

François 1er le culte de la langue d'Homère.


55 -<br />

ulier Chresti<strong>en</strong>, la Chair, l'Esprit, le Monde et le Diable. » Cet argum<strong>en</strong>t<br />

indiqué suffisamm<strong>en</strong>t le sujet (lu pôèmè. C'èSt le récit 4e la lutte de Vàme<br />

chréti<strong>en</strong>ne sout<strong>en</strong>ue par son bon ange contra les attaquesdes trois t<strong>en</strong>ta-<br />

teurs. Tiraillée <strong>en</strong> tous s<strong>en</strong>s, elle pirvi<strong>en</strong>t <strong>en</strong>fin avec sdn aide h triompher<br />

de leurs obsessions et à gagner son salut. M.Brunet-placc <strong>en</strong>tre 1530 et<br />

1536 l'impression du ieul exemplaire original qu'on .connaisse de cette<br />

moralité (1). Qu'il l'ait connu plus tôt ou seulem<strong>en</strong>t à ce mom<strong>en</strong>t, Thi-<br />

houst <strong>en</strong> prit sujet de composer la paraphrase suivante.'<br />

« Oraison à Nostre Seigneur, estant <strong>en</strong> l'arbre de la Croix, surCes nrotz:<br />

CÂR0. Mtirnus. UciloNlA.<br />

'isi.LiiEssn m'a de ses Coleurs paré1<br />

Qui me semond p<strong>en</strong>ser à mon Affitire.<br />

Et quo si i'ay mon Chemin esgard<br />

Pour à Plaisir et Volupté complaire, -<br />

Au droit S<strong>en</strong>tier ie me vueille rctrairè, - -<br />

Pour paru<strong>en</strong>ir <strong>au</strong> Tribunal insigne,<br />

Du Souverain juge qui examine<br />

Nos Cueurs, et scait tous Box Dictz et nez Faleiz.<br />

Aller m'y f<strong>au</strong>lt, p<strong>au</strong>vre Pécheur indigne,<br />

Pour obt<strong>en</strong>ir Pardon de ms meffaicL.<br />

Do Vanitez, je inc suis emparé,<br />

Pour tropL vouloir <strong>au</strong> Monde satisfaire.<br />

Contré la Chair ne me suis remparé,'<br />

Mais laissé vaincre, asservir et attraire;<br />

Puis ce Maling, et dampnablc adversaire, -'<br />

Qui ne quiert fors nous plonger <strong>en</strong> sa Myrte;<br />

1)6 près nous sait si par Gracé divine,<br />

[lors de ses Mains, vray Dirv ne ne dcfltietz.<br />

Autre ie n'ay propice 'Mediine,<br />

Pour obt<strong>en</strong>ir Pardon de mes meffaietz,<br />

le voy ce Bois, de la Croix réparé,<br />

De ton sainet Corps, <strong>au</strong>x Pécheurs salutaire.<br />

Le f<strong>au</strong>lx Serp<strong>en</strong>t, nous <strong>au</strong>oit séparé,<br />

De Diav ton père, et toy tant débonnaire,<br />

Tu tes faiet ri<strong>en</strong>s pour rostre Paix parfaire, -<br />

Ét souffert Mot, qui la Mort extermine. -<br />

s<br />

(1) Alanuet du libraire. Vo MORALITÉ, li a été fait deux réint,ressions modernes<br />

de cette , pièce; l'une <strong>en</strong> 181, chez F. Didot, par Durand de Lançon ; l'<strong>au</strong>tre <strong>en</strong><br />

chez Crapelet, par Silvestre l'une in-8',, l'<strong>au</strong>tre in 4% et toutes les deux <strong>en</strong> caractères<br />

golhiqne'.<br />

j,ît'çu<br />

---r


- 5/F—<br />

O gratide Amour, o Gnlce par trop digné,<br />

• - O Chante excédant tous Bicnsfaictz;<br />

Mon Corps, mon Coeur deuotem<strong>en</strong>t s'<strong>en</strong>eline,<br />

Pour obt<strong>en</strong>ir Pardon de mes meffaietx,<br />

RÉPARATEUR, de l'humaine Ruyne,<br />

Qui sur Péché, et sur la [tiort domine, -<br />

Et as pour nous porté si pesant Faix,<br />

Ta Croix j'adore, où ie voy le vray Signe,<br />

Pour obt<strong>en</strong>ir Pardon de mes meWaictz. »<br />

L'impression de cette ballade est - due •-ans doute à Jean Garnier qui<br />

s'établit à flourges eu 1530. Les vers y sont disposés comme (les distiques<br />

latins, chaque - distique étant séparé par un point et chaque hémistiche par<br />

une virgule. L'orthographe apparti<strong>en</strong>t à une école dont Thibotst était<br />

comme le c<strong>en</strong>tre. -<br />

Ce feuillet, qui a été mal relié, devrait faire face à un <strong>au</strong>tre dont il est<br />

séparé par le titre historié que nous avons ci-dessus m<strong>en</strong>tionné. Cette <strong>au</strong>tre<br />

page offre '<strong>en</strong> petite minuscule gothique le comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t de l'évangile -<br />

selon saint Jean, surmonté d'une grande miniature (lui représ<strong>en</strong>te Jésus eu<br />

croix. Cette .composition, qui est fort bi<strong>en</strong> traitée, et qui évidemm<strong>en</strong>t , a<br />

donné lieu à l'image imprimée qui précède, doit être, si j'<strong>en</strong> crois une<br />

indication de la table, la rerodtfction d'un vitrail du châte<strong>au</strong> de Quântilly.<br />

• (1). Alorselle serait, selon toute appar<strong>en</strong>ce, de la main du peintre verrier<br />

Guill<strong>au</strong>me Augier, qui fit pour Thiboust un vitrail représ<strong>en</strong>tant la Passion,<br />

• et destiné à l'église de Quantilly, ainsi que me l'appr<strong>en</strong>d une quittance du<br />

Registre noir.<br />

Le troisième recueil qui nous reste à m<strong>en</strong>tionner - offre -une importance<br />

historique et littéraire plus-grande que les deux précéd<strong>en</strong>ts. Contrairem<strong>en</strong>t<br />

à ceux-ci il n'est pas -totalem<strong>en</strong>t inconnu, nous avons Sus-même aidé à<br />

le signaler dans des conditions (lue nous allons indiquer..<br />

Ce manuscrit, qui a fait partié des archives communales de Bourges<br />

jusqu'<strong>en</strong> 1855, où il a passé à la bibliothèque de la ville, est un in_fo<br />

carré <strong>en</strong> parchemin, compr<strong>en</strong>ant 50 feuillets paginés, plus trois feuillets<br />

• (t) on lit à cette table pour le feuillet LXXIX, l'indication suivante: La vie et<br />

passion àrê Seigneur ainsi qu'elle est <strong>en</strong> la vietre de la chappellc du ebastcl de<br />

Quantitly. , Le feuillet <strong>en</strong> question manque a soir ainsi que le précéd<strong>en</strong>t, qui<br />

conti<strong>en</strong>t ,d'après la même table: Rond<strong>en</strong>utx de la croix et passion £Te Seigneur. »<br />

Mais ces désignations , sans doute p<strong>en</strong>,cxactes, me sembl<strong>en</strong>t se rapporter <strong>au</strong>x scènes<br />

figurées sur les feuillets que nous d,crivons, et qui non paginés, ont dCi être transposés,<br />

comme'jel'ai dit , par le relieur.


-55--.<br />

d'introduction- sans numéros. Ces pages, rapprochées les unes des <strong>au</strong>tres<br />

•par la fantaisie du copiste, trouv<strong>en</strong>t leur unité dans leur destination, car<br />

elles s'adress<strong>en</strong>t spécialem<strong>en</strong>t <strong>au</strong>x directeurs du collège de Bourges, et<br />

s'occup<strong>en</strong>t de matières d'<strong>en</strong>seignemeht et d'institutions scolaires.<br />

M. Raynal est, à notre connaissanée, de ceux qui, avant nous, ont étudié<br />

cc recueil, le seul qui <strong>en</strong> ait tiré profit. Ille signale indirectem<strong>en</strong>t parmi<br />

les <strong>au</strong>tres manuscrits de l'<strong>au</strong>teur à la p. 315 du 3° vol. de son Histoire.<br />

(Notes). Il n constaté lui-même l'usage qu'il eu avait f4it <strong>en</strong> inscrivant <strong>au</strong><br />

recto resté <strong>en</strong> blanc du premier feuillet de l'introduction lé nom de Thiioust<br />

.et le titre des princigales matières qu'il r<strong>en</strong>ferme. -. -<br />

Cc n'est qu'<strong>au</strong> verso (lu même feuillet, que l'oeuvre de transcription comni<strong>en</strong>ce,<br />

par te que nous avons appelé l'introduction et qui se compose de<br />

deux morce<strong>au</strong>x, l'un <strong>en</strong>vers, l'<strong>au</strong>tre <strong>en</strong> prose. Elle sert à expliquer le don<br />

que l'<strong>au</strong>teur dit <strong>en</strong> fit <strong>au</strong> • collé-e Sainte-Marie de Bourges. Ce<br />

doit motivé par la composition même du recueil.<br />

Vers le comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t du xvit siècle la décad<strong>en</strong>ce dans notre pays des<br />

anci<strong>en</strong>nes écoles ou colléges attachés <strong>au</strong>x clolires' et <strong>au</strong>x é glises, tels que<br />

les colléges de Saint-Éti<strong>en</strong>ne, de Saint-Ursin , de Saint-Michel, de La<br />

Fourch<strong>au</strong>t, etc., avait inspiré à •un èh<strong>au</strong>oine de la: cathédrale ..nommé<br />

François liogier, l'idée de relever l'instruction na fondant à Bourges un<br />

collége nouve<strong>au</strong> mais ses moy<strong>en</strong>s ne répondir<strong>en</strong>t pas à sa généreuse <strong>en</strong>treprise,<br />

et, sur ces <strong>en</strong>trefaites, Jeanne de Valois, -répudiée par Louis XII,<br />

étant v<strong>en</strong>ue résider dansia capitale du <strong>Berry</strong> que s<strong>en</strong> royal époux lui avait<br />

concédé comme apanage, la bonne Duchesse, comme l'appell<strong>en</strong>t les Bernchons<br />

f se fit la protectrice du nouvel établissem<strong>en</strong>t -et dans son adoration<br />

pour la Virge, consolatrice de ses douleurs, elle le mit sous l'invocation<br />

de sacéleste patrone, <strong>en</strong> l'appelant le cellége Sainte-Marie. D'après le<br />

règlem<strong>en</strong>t qu'elle lui.dohna, les princip<strong>au</strong>x dur<strong>en</strong>t <strong>en</strong> être des prêtres, ce<br />

(lui fut observé jusqu'<strong>au</strong> jour où la Révolution détruisit celte institïition,<br />

et' malgré les cbangem<strong>en</strong>ts qui <strong>en</strong> fir<strong>en</strong>t passer successivem<strong>en</strong>t la direction<br />

dans les mains d'ordres divers. Â l'époque où vivait Thiboust,: le principal<br />

et le proviseur étai<strong>en</strong>t deux docteurs ès-arts, -MThougnon et Lamoureux.<br />

Des goMs communs d'érudition et l'amour des lettres <strong>en</strong> même temps que<br />

le voisinage de domicile (J) et la piété l'avai<strong>en</strong>t misn relation avec eux.<br />

- Il Içur donne le titre d'amis dans ses lettres; - et, sur ses vieux<br />

jours, faisaht - la revue de ses papiers jour se mettre <strong>en</strong> règle peut-être<br />

avec les choses de ce monde avant de le quitter, il mit -à part le manus-<br />

(4) Thiboust, comme nous <strong>au</strong>rons occasion de le voir Plus loin, logeait dans la nu,c<br />

Saint-M<strong>au</strong>rice, <strong>au</strong>eurd'liui rue de Paradis, <strong>en</strong> face le collége.


crit <strong>en</strong> question, et le leur adressa comme les intéressant plus que tous<br />

<strong>au</strong>tres (j) . -<br />

La pièce <strong>en</strong> vers qui ouvre le volume se compose de trois stSphes ou<br />

huitains, que l'<strong>au</strong>teur nomme épigrammes, et qui form<strong>en</strong>t une sorte<br />

d'<strong>en</strong>voi.<br />

rA MM. tes Prircip&i et Proviseur du coileige Saincte Marie, IÂQÛES<br />

THIBOflT, salut.<br />

.ÉPIGBAM.ME raois.<br />

• -. Des Bi<strong>en</strong>s que fit Joue anci<strong>en</strong>nem<strong>en</strong>t,<br />

Nostre Duchesse et Princesse très bonne - -<br />

•<br />

A sa Cité, .voiey le Monum<strong>en</strong>t -<br />

Perpétuel (Âmys) 1 que in vous donne.<br />

Digne Trésor de roiaile Personne,<br />

Comme elle estoit, et de. Ires saiuet R<strong>en</strong>om.<br />

- Le Ciel Iuy donne immortelle Coronne,<br />

- Et <strong>en</strong>tre nous est immorte l son Nom.<br />

Voz Enfants donc qu'elle a voulu loger<br />

Chant<strong>en</strong>t les Bi<strong>en</strong>s de si !?<strong>au</strong>lte Princesse<br />

Et l'Entreprise <strong>au</strong> . bon Francois Rogier<br />

Qui nous c<strong>au</strong>sa si heureuse Richesse. -<br />

Puis moy ioieux qu'<strong>en</strong> louable Sagesse<br />

Le Principal Toignon et Lamoureux<br />

Conduis<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong> la reiglée leunesse<br />

En qui noz fils verront un siècle heureux.<br />

Ces Tiltres be<strong>au</strong>x de vos Fondations<br />

l'ay <strong>en</strong> long temps extrait de ma Farrage (2).<br />

Peur mémorer les sainetes Actions -<br />

Des Fondateurs, et garder l'Héritage.<br />

Et pour donner à tous Hommés courage<br />

Ou de le eroistre, ou de le préserver.<br />

Cil qui ne peut <strong>au</strong> bi<strong>en</strong> faire avantage<br />

Fait prou s'il tasehe <strong>au</strong> moins, le conserver.<br />

- QUI VOIT s'csnAT. - (3) -<br />

(I) Voici un <strong>au</strong>tre fait du nréne g<strong>en</strong>re que je saisis l'occasion de m<strong>en</strong>tionner ici<br />

La bibliothèque publique, dé Bourges possède un exemplaire du poème de Baril,.<br />

Ane<strong>au</strong>, intitulé r Suri sprud<strong>en</strong>hia, à primo t! divind Md ortu ail nobilem Biturigum<br />

academiam dedùcia. Lugiluni, 1554, in-40. Cet exemplaire porto SOL' sa couverture<br />

l'indication qu'il provi<strong>en</strong>t d'an don fait <strong>en</strong> 1555 par J. ThibOust de Quantitly h Jean<br />

de B<strong>au</strong>gy, qui était, si je ne me trompe, chanoine de la sainte Chapelle de Bourges.<br />

(2) Fan'ago s Mélange. Macédoine. Collection oti compilation. -<br />

(3) Anagramme dc: JACQUES Tivaoesv.


— 51<br />

Au recto do, feuillet. sùi:vnnt, faShdt face k-cs.vts, Thitousta a inscrit'<br />

la lettre d'<strong>en</strong>voi dans la forme suivante<br />

o 4 .i/èssfewfl j7es 4n(/wine TuouGNoiv:et Charles kMouinut tocteurs;rg<strong>en</strong>s<br />

èJ!Ardiibdr<strong>au</strong>Lt, Principal et Provièeur du C6Ueige ftvre-Mai'ie....... etc.<br />

facqus Tidboust,<br />

SALWF.<br />

Messieurs, revoïant ces jours passez (par rnaniêre depasse-Temps) ma fartage<br />

et librairie i'ay trouvé <strong>en</strong>tre <strong>au</strong>tres choses la preîniôre . lnsùtueiou de vostre<br />

Colleige , fondaciéns et dotations d'iceliuy•, et la Coppie ditTestam<strong>en</strong>t de feu<br />

Madame Jehanne de Franc, nostre bo&nc Duchesse Epitaplies • Eiégie,s latins<br />

es Tradunions françoises d'iceulx , que rah<strong>au</strong>tres . foys prins Plaisir d'y rcddiger<br />

par eseript et collacions rùoy )nesmes <strong>au</strong>x Origin<strong>au</strong>lx, pour y avoir quelque<br />

jour Recours pour ceulx qui <strong>en</strong> <strong>au</strong>roi<strong>en</strong>t affaire, comme ont bi<strong>en</strong> eu Mesdames<br />

les Mère Âncelle et Relligieuses de la Nunciade. de Bourges' que j'<strong>en</strong> ay secourues,<br />

et sachant bi<strong>en</strong> que vous <strong>en</strong> avez quelques viella Tiltres atEnseignem<strong>en</strong>s,<br />

Et non <strong>en</strong> tel ordre que je les ay faiets et dressez <strong>en</strong> ce prés<strong>en</strong>t Gaïer pour<br />

pci-patacHe Souv<strong>en</strong>ance, Mernoire et Amyti6 que le vous doiz eL porteray tdute<br />

ma vye. lequel Caler jeveus prés<strong>en</strong>te etdonne d'<strong>au</strong>ssi bon cueur, Messiburs,<br />

que i'e nie reeomrn<strong>en</strong>de JiumbIem Cul à voz bôhnes prières et shinctes Oroisons.<br />

Suppliant a Dieû, Messieurs; vous mainténir<strong>en</strong> bonne Sbh(é tant et si longuemcùt<br />

qu'il vous dènàe là Gràce de continuer de: bi<strong>en</strong> cn'myeut± nia boti Rdgiïné,<br />

'GoÙveihmeht et .Entet:<strong>en</strong>emeht dc-vostred'- C »ollèige: AAillonneur de.<br />

Dieu, Conservation de sa Saincte Foy. catholique et Reltigioa. chrestiènné. -<br />

 Bourges <strong>en</strong> vostre maison et préz<strong>en</strong>ce. Juin-. «i55.<br />

Voslre bon Voizin anci<strong>en</strong> et humble serviteur<br />

.TuruousT. s, -<br />

Le feuillet suivant, le premier de cèùi qui' Sut paginés, est un double<br />

exemplaire de la ballade imprimée que nous avons reproduite <strong>en</strong> décrivant<br />

le Terrier de Quantilly. Cette poésie, on a pu le voir, est le chant • de, la,<br />

'vieillesse, alors que l'homme qui press<strong>en</strong>t sa'ftn ,, et dés<strong>en</strong>chanté des vanités.<br />

passées; fait un retour sur lui-même; alors que, voyant le vide successive-<br />

m<strong>en</strong>t produit <strong>au</strong>tour de-lui par tout ce qu'il n perdu, femme, <strong>en</strong>fants, amis,<br />

il lève les yeux vers le consolateur suprême pour puiser dans l'image de son<br />

supplice le courage de la mort et l'espérance de l'<strong>au</strong>tre vie. A cet-égard,<br />

elle' flgurii bi<strong>en</strong> dans le dernier recueil, qui est un adieu de Thiboust k<br />

l'araiitié. -<br />

Cep<strong>en</strong>dant nous avons un correctif à faire ici ui' ce dés<strong>en</strong>chantem<strong>en</strong>t<br />

des vanités mondaincs dont son cantique semble être l'explessiofi. Il y a<br />

bi<strong>en</strong> quelque chose qui les rappelle dans ce blason mis par ' l'<strong>au</strong>teur <strong>au</strong> bas<br />

de son oeuvre. Â la riuéur, on pourrait n 'y voir qu 'une sorte de signalai-e;<br />

mais tournons lefuuillet la vanité reparait dans le soin qu 'on: n pris de<br />

-t.-.


-<br />

comm<strong>en</strong>ter <strong>en</strong> tors ce m&ime blason. Voici ce que Thiboust lui-même écrit<br />

sur cette page blanche:<br />

Epiciusam allisdant <strong>au</strong>r Armoyries et Devise de Me Jacques Tlaiboust,<br />

Esculer, Selgnàr de Qttantillij, Notaire et Secrétaire du Roy et Esl<strong>en</strong> <strong>en</strong><br />

<strong>Berry</strong>, et des lectres de son nom et surnom tournées (1).<br />

Qui (studieux) voit les Loix dans maint Livre<br />

- Voit la Nature et les 4stres des Cieux<br />

Cettuy qui peut toutes Régions suyvre<br />

Voit, tultré Mer, les Papegais ioyeux.<br />

• Celluy qui a pour <strong>en</strong>iploïer ses yeux<br />

A tout cela du Glati pour ceste Vie -<br />

Volt, ô Thiboust, et la Terre et les Cieux,<br />

A <strong>au</strong>tre Esbat ne portant point d'Envie.<br />

Qui voit s'esbat. - IAQUC5 TnniousT. »<br />

Ces vers non seulem<strong>en</strong>t sont détestables, ils sont absurdes. Sont-ils de<br />

Thiboust? je ne le crois pas, att<strong>en</strong>du qu'ils lui sont adressés ou paraiss<strong>en</strong>t<br />

i'tre. Le seigneur de Quantiïly a eu <strong>au</strong>tour de lui des poètes d'ordre infé-<br />

rieur bi<strong>en</strong> capables de commettre un pareil forfait littéraire. Nous <strong>en</strong> four-<br />

nirons la preuve tout à l'heure. F<strong>au</strong>t-il le dire? si nous n'avions craint de<br />

faire une injure gratuite à l'un des plus g<strong>en</strong>tils poètes de ce temps, nous<br />

les <strong>au</strong>rions peut-être attribués à Marot. Qu'on se rappelle les quatre , vers<br />

iJ'Habert dans lesquels il dit à Tlnboust:<br />

Tu es eetuy dont le chef des poètes,<br />

Marot, passant le vol des alarmes,<br />

A mis le nom <strong>en</strong> tel desguisem<strong>en</strong>t<br />

Qu'à ta nature il touche vivem<strong>en</strong>t.<br />

• Cela v<strong>en</strong>t-il dire que Marot <strong>en</strong> se jouant u créé l'anagi'amme : qui voit<br />

s'esbat, anagramme <strong>en</strong> rapport avec le caractère <strong>en</strong>joué et av<strong>en</strong>ant de- -<br />

Tlaiboust? c'est une idée qui nie parait très acceplable (2). On pourrait<br />

(I) 'Si son <strong>au</strong>tre titre de secrétaire et valet de chambre de Marguerite de Navarre<br />

ne figure pas ici, c'est qu'à cette époque cette princesse n'existait plus, étant morte<br />

<strong>en</strong> 1549.<br />

(2) Au xvae siècle l'anagramme s fait fureur. C'est la même vogue que celle qui plus<br />

tard accueillit l'énigme, la charade et le calcrnbourg. Tout le monde alors s'<strong>en</strong> mêlait,surtout<br />

les savants et les plus sérieux. Notre Cujas s'<strong>en</strong> est servi comme d'une arme,<br />

les <strong>au</strong>tres <strong>en</strong> faisai<strong>en</strong>t un sujet de délassem<strong>en</strong>t. Les biographes de Marguerite de<br />

Navarre assôr<strong>en</strong>t (lue la soeur, de François tir avait fait l'anagramme (les noms de<br />

tous les g<strong>en</strong>s de sa maison. A leur Lotir et à son imitation 'ceux-ci devai<strong>en</strong>t outre eux<br />

s'amuser à ce jeu. On peut donc sans crainte attribuer, sinon à Naréuerite elle-même,<br />

<strong>au</strong> moins à s<strong>en</strong> peùte favori, Marot, l'anagramme dit nom. de Ttiihoust.


- 59 -<br />

prét<strong>en</strong>dre <strong>au</strong>ssi que Hahert a voulu désigner par là Marot comme l'<strong>au</strong>teur<br />

dotEjigramrne précédemm<strong>en</strong>t citée où Je nom de Thlboust ii est mis ou<br />

desguisem<strong>en</strong>t. D Mais nous repoussons cette idée, la confection du huitain<br />

<strong>en</strong> question conv<strong>en</strong>ant be<strong>au</strong>coup mieux à un gâcheur littéraire comme<br />

l'<strong>au</strong>vergnat Milon ou l'angevin Salomon, qui <strong>en</strong> ont adressé à notre homme<br />

d'<strong>au</strong>treg qui n'étai<strong>en</strong>t pas moins détestables. -<br />

Il est d'ailleurs peu utile, p<strong>en</strong>sons-nous, d'insister sur l'exp)icatidn de ce<br />

pébus <strong>en</strong> vers qui s'interprète de lui-même quand on a les armes de Thibousi<br />

soda les yeux. Loix et Régions s'appliqu<strong>en</strong>t à sa devise, Gland <strong>au</strong>x<br />

armes de Thiboust, Papegais ou perroquets à celles des Rusticat, Etoiles<br />

à celles des Villetner, qui composai<strong>en</strong>t les diver quartiers de son écu.<br />

Au deuxième cahier comm<strong>en</strong>ce une série de pièces relatives à la duchesse<br />

Jeanne. C'est d'abord son épitaphe <strong>en</strong> vers (fo xi), œuvre de Thibousl, et<br />

qui rappelle pâr la facture la pieuse ballade citée plus h<strong>au</strong>t.<br />

Erivans de feue bonne loable et recé,nn<strong>en</strong>ddle *nemoire Madame<br />

lehanne de France fille du Roy Lois- xlme de ce nom Lvmo Boy de France<br />

et. deCharlotte de Savoïe itoijne de France et seur du Boy Charles vtizp'<br />

de ce nom qua.nb elle vivoit Duchesse de <strong>Berry</strong>. -<br />

PAST0RE, hélas I que feront voz Brebis<br />

Que lam<strong>en</strong>ter, dcssoubz ces Arbres vis<br />

Noirs et obscurs de la Fortune amere<br />

Pouures Moutons, Rechargez vos habits.<br />

Hanter f<strong>au</strong>li Dueil, et fuyr bonne ehere.<br />

- Et prier Dieu, pour nostre bonne et chere - -<br />

,Pastorelle, qui luy doint ses deliôtz. -<br />

Malheureux est, qui <strong>en</strong>cores s'ingere<br />

Maseher le mot, et ehascun le digere. - - -<br />

S'estoit le tests de la grand Fleur de lis.<br />

O estes Vous, Fleur de dévotion<br />

O estes Vous, bonne Operation -<br />

O estes Vous les Bi<strong>en</strong>s non eseondictz (cachés)<br />

O estes Vous, Pacification<br />

O estes Vous sans Vindication (raneunel<br />

O estes Vous Bonne <strong>en</strong> faiets & <strong>en</strong> dietz<br />

O estes Vous vraïe Oiletjon<br />

O estes Vous aveeq' les B<strong>en</strong>edietz (bi<strong>en</strong>heureux)<br />

O estes Vous le eroy <strong>en</strong> Paradis<br />

lcsus Vous .pront Vaisse<strong>au</strong> d'Eslection. - - -<br />

Hé pouures Seurs de ceste Rellgion<br />

Des Bi<strong>en</strong>s avez perdu grand Legion<br />

le dis mondains <strong>au</strong>gm<strong>en</strong>tant le Conv<strong>en</strong>t<br />

Elle y <strong>au</strong>oit sa grand Devotion -


n<br />

Qu'Elle mesme <strong>en</strong> prirfl :Profexon<br />

Pour avecq' Vous <strong>au</strong>oir tousiours 9oncIt ,(compagnie<br />

» outre plus Vous la voïex souv<strong>en</strong>t -<br />

Aller v<strong>en</strong>ir et soubz Pluye et soubz V<strong>en</strong>t<br />

Qui Vous estoit grand Consolation.<br />

Consolez Vous <strong>en</strong> Dieu dores<strong>en</strong>n<strong>au</strong>ant,<br />

C'est vostre Chep (I), c'est vostre -Poursuyuant<br />

•Ét Marie tostre. Prelàtion. (Choix).<br />

Garde n'<strong>au</strong>cz, mais que ehascune observe<br />

Son bon Vouloir de tomber Ci main serf'e<br />

Mais suyvez la, car Elle est rostre Exemple<br />

- Et p<strong>en</strong>sez-Vous qu'Elle ne Vous conserve?<br />

Priong lesus, que deMaI Vous préierve<br />

Car Mine SI Dame de vostru Temple 12)<br />

le croi que di, car quand bi<strong>en</strong> le contemple<br />

Son bon Vouloir, si devot $ si ample.<br />

Mérité a <strong>en</strong> seruant qu'on la serue.<br />

Si le fet6s ne dictes qu'elle u'em&e (çmpI,it<br />

Tout vostro Lueur de Vertu "par Exdrnpfe<br />

Mais qui Bi<strong>en</strong> quiert- il fhult qui le dessertis. n<br />

Brisée dans sa plus clièe affection, dans ses s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>ts d'épouse et de<br />

chréti<strong>en</strong>ne par l'abandon d'ut poux. qu'elle aimait t<strong>en</strong>drem<strong>en</strong>t, Jeanne<br />

chercha des consolations dans sa vive -piété. File se voua dans son veuvage<br />

anticipé à l'adoration de la Vierge, t$re de Dieu, dont le colle fut toujours<br />

la religion des coeurs souffrants. Cette adoration de Marie était d'ailleurs<br />

pour elle une tradition de famille (3). Mais ce culte mystique, pur et dou-<br />

cem<strong>en</strong>t exalté ne rappel.iût <strong>en</strong> ri<strong>en</strong> chez elle la dévotiongrossière et cafarde<br />

de son père. Vivem<strong>en</strong>t frappée âr le mystère de l'Annonciation la du'chesse<br />

de <strong>Berry</strong> résolut de fonder eu son honneur un ordre nouve<strong>au</strong>, et le monas-<br />

tère de l'Annonciadc fut établi poor abriter « la Religion dés dix vertus ou<br />

des dix bons plaisirs de Marie, » comme cotte p<strong>au</strong>'vre femme l'appela. Elle<br />

ne fit pourtant pas profession , ainsi kue le dit Thiboust, mais vécut pro-<br />

tectrice de sa nouvelle fondation, et vèill<strong>au</strong>t de près <strong>au</strong> troupe<strong>au</strong> de saintes<br />

flues qu'elle y avait rasserLii&-<br />

Au reste, ce ne fut ps durant de lopguçsnnéç. La consécration du<br />

(1) chef, maltre, de capta. Cc mot est <strong>en</strong>core employé <strong>en</strong> <strong>Berry</strong> dans un s<strong>en</strong>s particulier.<br />

(V. le Glossaire du c<strong>en</strong>tre dé la Frand, p'ar M. iè c'e,hté .l'<strong>au</strong>bcrt. Troisième<br />

édition).<br />

(2) L'église de l'Annunciade ou de l'Annanciation était sous le vocable de Marie,<br />

patrone de l'ordre fondé parla duchesse Jeanne.<br />

(3) V. Raynal, I. ut', p, 21 g. . -


couv<strong>en</strong>t, a\'ait eu lieu ic21 novembre 4504, -et lei O janvier sdivant,,minée<br />

par les douleurs et les '<strong>au</strong>stérités d'une vie asctique, la 'fondatrice r<strong>en</strong>dait<br />

le dernier soupir.<br />

C'est donc, semble-t-il, '.à':éette époque, un dedil sièdie avant sa iran!cription<br />

que la complainte de Thibôust <strong>au</strong>rait été 'éérite par lui. Mais a1dr<br />

il n'était pas àllourges et ne p<strong>en</strong>sait peut-être pas d'evoir y rev<strong>en</strong>ir. On<br />

peut croire toutefois que, pour <strong>en</strong> être abs<strong>en</strong>t , il* ne perdait- pas son pays<br />

de vue, et qu'un événem<strong>en</strong>t <strong>au</strong>ssi important que célui du séjour et de la<br />

mort à Bourges de la duchesse Jeanne a pu le frapper assez vivem<strong>en</strong>t pour<br />

qu'il ait essayé de la chanter, Autrem<strong>en</strong>t cette pièce pourrait dater des<br />

premières années où lui-même revint à Bourges, c'est-à-dire 'à peu près<br />

de -I 520.- Ce qul est certain 'c'est qu'elle est du comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t du siècle.<br />

Lourde T'obscure et embarrassée , c'est- une poésie 'qui rappelle plus le<br />

moy<strong>en</strong>-age qu'elle ne s<strong>en</strong>t la r<strong>en</strong>aissance. Elle est du temps où n'avait pas<br />

non plus <strong>en</strong>core prévalu la règle de l'<strong>en</strong>chevêtrem<strong>en</strong>t alternatif et régulier<br />

des rimes masculines et fénhinines dont elle révèle l'ignorance. A l'exemple<br />

de Marot, Thiboust s'<strong>en</strong> sera corrigé plus tard.<br />

En lui attribuant cette pièce, nous nous sommes fondé d'une part sur la<br />

place qu'elle occupe dans son recueil; de l'<strong>au</strong>tre sur ce qu'elle est anonyme,<br />

le transcripteur ne, paraissant guère avoir admis dans ses collections des<br />

vers <strong>au</strong>tres que les si<strong>en</strong>s <strong>au</strong> moins sans <strong>en</strong> signaler la prov<strong>en</strong>ance. Seronnoûs<br />

<strong>au</strong>ssi <strong>au</strong>torisé à lui faire hônieur des vers latins qui suiv<strong>en</strong>t, et<br />

<strong>au</strong>xquels s'appliqué <strong>en</strong> réalité le tite .d'Epititplze dont il à fait pécder ce<br />

deux morce<strong>au</strong>x? cela est plus ine 'ei'tain. Niais dans le doute, nous allons les<br />

rapporter avec la traduction <strong>en</strong> vers français qu'il <strong>en</strong> fit faire par son hôte<br />

et ami Jean Milan. Dans cette traduction le croisém<strong>en</strong>t des rimes n'est pas<br />

mieux respecté qud dans la pièce précéd<strong>en</strong>te. -<br />

illustrissime Jo/ianne de Francia fuie et soror (i) Reguin Francorw,n L,i-<br />

/ap/iium s<strong>en</strong> eommemoratio.<br />

Vilia, m<strong>en</strong>s vilis, regalia regiatraclat<br />

Si neseis animes édicta fada, probant.<br />

Crislipare quod cemnis opus, quum suspieis eiundS<br />

- Mir<strong>au</strong>dum.. Cireumque quoque cl<strong>au</strong>stra vides<br />

11cc posait el<strong>au</strong>sitque pie g<strong>en</strong>erosa ldhanna -<br />

- Regis prog<strong>en</strong>ies Regis et illa soror<br />

Virtutes d<strong>en</strong>as Christi inclina phana par<strong>en</strong>his,<br />

Vin-Lutes totidem composiLricis 'lidb<strong>en</strong>t<br />

Prud<strong>en</strong>tissima Djcitur bec ?rua<strong>en</strong>s.parta sihi sede superua<br />

Pur-tçsimc, Dieitur infami tota,que .F't&ra, lue<br />

Ifumilirna Fastibn,s Lerieclis patcr hie, et Ifumili-ma. Sancte


- 02 -<br />

Panpertatis et est, maximus Architipus<br />

Pati<strong>en</strong>t jssjmaj f'orl js in advers js Paci<strong>en</strong>s durissima forfis<br />

Dotoros1ssinv, Passio qua glaclii sana Doloris adest<br />

L<strong>au</strong>datjssjma L<strong>au</strong>dibus omnig<strong>en</strong>is lum<strong>en</strong> Memoranda per euutn<br />

Piissinia Est PUs pro populo busque patrona suo<br />

Obedi<strong>en</strong>tjssj,na, Construxit parons suppiex sacra templa Tonantis<br />

V<strong>en</strong>issima Ver4 parons vera retiigionis erat (1)<br />

• Roc nacrito Romana tleeus bis santio lirmat<br />

Hoc et Alexander Juttius bocque be<strong>au</strong><br />

Bitturia <strong>au</strong>spieiis valus bis grata par<strong>en</strong>tis<br />

11cc duce semper erit gloria parla.tibi (2),<br />

Traduction fraizcoise de i'Epitaphe précéd<strong>en</strong>t falote par bijou Milon d'Anle-no<br />

<strong>en</strong> Auice'gne â la requeste -de M° laques Thibousi escuyjer, etc<br />

- Vit Vilité ruïal Iloï<strong>au</strong>tô traicte<br />

L'Euure est tesmoing de l'Emprise secrette.<br />

L'EIFoet cliresti<strong>en</strong>, et Lieu que tu contemples<br />

Est admirable <strong>au</strong>x Cloistres et <strong>au</strong>x Temples<br />

Qu'as mys et clos pour le dévot Usage.<br />

- lotionne rotai de Rois fihlect s<strong>en</strong> t saige.<br />

La sainete et digne eut de dix Scurs Vertus.<br />

Par iésus Crist ses Esprits revestuz.<br />

Douce elle fut, munies de C<strong>en</strong>iture.<br />

Trèsprud<strong>en</strong>te et très pure La Inuit Prud<strong>en</strong>te et d'iniquité pure<br />

Très humble. Sc monstrant es' d'Humilité abjecte. -<br />

Très jiouure. - Et favorable à Pouureté subiecte. -<br />

Très douloureuse. Qui ses Douleurs et sa Fortune adverse<br />

Très paei<strong>en</strong>te. Patièmm<strong>en</strong>t gectoit à la r<strong>en</strong>uerse.<br />

Très loabie. De tous Honneurs à jamais mémorable.<br />

Très bonne. Duchesse bonne à iamais favorable.<br />

(t) Ces qualitésque te poète donne comme propres à Jeanne sont les dix vertus<br />

qu'elle impasait pour règle et modèle à ses religieuses. Elle les désignait elle-mème<br />

SOUS les noms suivants: la prud<strong>en</strong>ce, la pureté, la chasteté, l'humilité, la vérité, la<br />

candabilité, l'obéissance, ta p<strong>au</strong>vreté, la pati<strong>en</strong>ce, la pitié et le glaive de douleur ou<br />

la Lance de compassion , c'est-à-dire l'affliction. Au-dessus de la porte d'<strong>en</strong>trée de<br />

l'église de l'Annoneiade on lit <strong>en</strong>core les initiales de ces vertus ainsi disposées :<br />

P. P. • wV<br />

L.O, P. P.<br />

P. J,.:<br />

(2) Ce passage est relatif à la confirmation de l'ordre de l'Anno,,eiade par les papes<br />

Alexandre VI et Jutês Il, et non, comme ou pourrait te croire, à la canonisation de<br />

la Sainte, c<strong>au</strong>ouisatÎbn qui fut le fait du peuplé et non de l'Eglise.


-63---<br />

Très obéissant;, Àiant construit ce Temple Obéissant;<br />

Très vraie. Au Dieu vivant de Vérité par<strong>en</strong>te,<br />

Qu'a conlirmé le sainot Jionneur Romain<br />

pop Po Alexandrè et kil' demain à main.<br />

- Va Bourges Va plain d'Honneur et Largesse<br />

Qui t'est acquis par .i h<strong>au</strong>lte Duchesse.<br />

Nous nous cont<strong>en</strong>terons maint<strong>en</strong>ant dà m<strong>en</strong>tionner rapidem<strong>en</strong>t et de<br />

façon sommaire le reste du cont<strong>en</strong>u de notre manuscrit. C'est d'abord le<br />

testam<strong>en</strong>t de la Duchesse Jeanne, puis les pièces relati'ves à une_constitu-.<br />

lion de r<strong>en</strong>te faite par Aune de Bé<strong>au</strong>jeu, sa soeur et héritière, et 'la confir-<br />

mation de ladite r<strong>en</strong>te par Charles de Bourbon, fils de cette dernière , et<br />

par François jer, Puis <strong>en</strong>core deux lettres <strong>en</strong> faveur du collège de Sainte-.<br />

Marie, dont une de Thiboust lui-même (1). Enfin les statuts eh latin de<br />

fondation du collège de Navarre à Paris, avec la bulle papale-qui éonflrmc<br />

cette fondation. Cette dernière copie (ut prise, comme le-titre l'indique,<br />

<strong>au</strong> mois de mai 4542, sur les registres de la chambre des comptes à<br />

Paris, et <strong>en</strong> vue de r<strong>en</strong>dre service <strong>au</strong>x administrateurs du collège de<br />

Bourges, avec lesquels il était déjà <strong>en</strong> bon termes.<br />

Terminons cet exam<strong>en</strong> du manuscrit <strong>en</strong> appelant l'att<strong>en</strong>tion sur la<br />

(t) Nous copions lei cette lettré pour compléter nos citations de tout ce qui nous<br />

reste de celui dont nous essayons de reconstruire l'oeuvre; et parce qu'elle est dun<br />

intérêt local assez saisissant<br />

n Autre copple & lectres escriptes par M' Jacquet Thlboust, seigneur de Quantitty,<br />

à monseigneur de ijhetnaye et d'Angé, Chevalier Trésorier de Franc; et<br />

Général de ses finances éstably <strong>en</strong> ta généralité deLanguedoiL'-. Bourges. -<br />

Monseigneur, pour no vous <strong>en</strong>nuyer de longue tertre et, vous taire narré de l'affaire<br />

des Principal et ponurcs Escaliers, Régeus et <strong>au</strong>ltres du collee Saincte Marie<br />

Bourges , le vous e'ivoye une Coppie de la boire que rescrit Monsieur de Sacy à<br />

Monsieur, de La Chapelle Bourdin, son be<strong>au</strong>-titi, pour faire la porsuite de l'expédition<br />

d'une déclaration qui leur fait liesoing <strong>en</strong> un procès qu'ils ont p<strong>en</strong>dant par<br />

douant Monsieur le Conservateur des privilleges roy<strong>au</strong>lx de ceste <strong>Un</strong>iversité de<br />

Bourges , h l'<strong>en</strong>contre de la vefve et héritiers d'un nommé-khan Du Bois, jadis l'un<br />

des boursiers dud. coliege,' qui sollicitant le mandem<strong>en</strong>t de Madame de Bourbon, luy<br />

fit requesie que durant le temps de son estude <strong>en</strong> droiet viril qu'il luy pleust permettre<br />

qu'il derneijrast <strong>en</strong> une chambre Fasse d'une petite maison qu'elle aùoit<br />

act]uise poui eslargir lcd. college fort esiroit <strong>au</strong> regard ,de la grande quantité<br />

d'cscolliers qui y afflu<strong>en</strong>t, et n'y n <strong>en</strong> tout ledict college que quatre chambres, ce que<br />

les diets Principat et Escolliers lui accordèr<strong>en</strong>t volontiers pour l'honneur et révér<strong>en</strong>ce<br />

(le ladicte dame quant <strong>au</strong> bas de lad, petite maison. Et depuis lediet Du Bois après<br />

avoir este lic<strong>en</strong> (eié) s'<strong>en</strong> alla h Paris sollicite.', Cep<strong>en</strong>datit bailla le bas 'de ladiete<br />

maison à louage et' emporte l'adc<strong>en</strong>se de lédicte maison qui esloit de vingt hures


P4<br />

64 -<br />

pot-lion, qui pour n'éti être as li pft cotsidèrhlê, se recffihïdnde par<br />

un intérêt spécial. Il y n deux ans, nôds-adresions ai Comité de la langue,<br />

de l'histoire et des ails de la trénce la copie d'où petit traité grammatical<br />

ayant pour titre Brie/'vc doctriné pour dev.<strong>en</strong>j<strong>en</strong>t escripre -selon la<br />

propriété du laigaige francots, par Jeah Salomon, angevin. Ce Sàlomon<br />

nous était <strong>en</strong>tièrem<strong>en</strong>t inconnu. Il nous âvait paru, sans que nous osions<br />

l'assurer toutefois, que son traité avaitéléjad!s imprimé : 5. et que, quant à<br />

sa compOsitiQn., elle devait remonter àpca près à l'époque où,.Palsgravc<br />

publiait .sq ,grûmmaire, est-à-dire Ù . : . première moitié du xvi siècle,<br />

époque où les trav<strong>au</strong>x de ce g<strong>en</strong>re, qui comm<strong>en</strong>çai<strong>en</strong>t àse répandre, étai<strong>en</strong>t<br />

pourtant -loin d'être : <strong>au</strong>ssi multipliés qu'ils le' devinr<strong>en</strong>t- bi<strong>en</strong>tôt. C'était e<br />

parUGpoÙr éclairer Ces douJcs,- etétahlir, s'il était possible r le degré de<br />

notoriété dont jouissait F<strong>au</strong>teur,- que cette communication avait été faite.<br />

Ce tfaité était la portibn.du manuscrit de ThibouteompriSe <strong>en</strong>tre.le5.folioS<br />

xxvii et xxxii. - Notre coffimuication dohua lieu, à un rapport de<br />

M. Francis Wcy -qùi a été,inéré à. la page 437 du hilletin du Comité<br />

(t. tir). Dans ce travail l'ingénieux et savant <strong>au</strong>teur des I?êvolutiolli du<br />

langage <strong>en</strong> France, s'aidant de quelques r<strong>en</strong>sdigùein<strong>en</strong>ts qu'il puisait dans<br />

notre copié, établit les points suivants La Bric fc'e doctrine reçut deux. fois<br />

les honneurs de l'impressiotf<strong>en</strong> l'année 4533, car la bibliothèque impériale<br />

possède ces deux éditions, qui indiqu<strong>en</strong>t par le rapprochem<strong>en</strong>t de leur date<br />

qù'un'e cèrtaine faveur avait dû accueillir ce livret à son apparition Il se<br />

rattache <strong>en</strong> cd s<strong>en</strong>s <strong>au</strong>x traités d'orthographe assez nombreux âfparteMiit<br />

<strong>au</strong> xvic siècle, et qui pour la plupart ne nous sont pas parv<strong>en</strong>us. Âugnieii-<br />

tourn. chéscun an , et- soubz' otnl,re de la -tollerance du bas de lad, maison qui faict<br />

le coing de la rue de Nirebe<strong>au</strong> et toute l'aisance dud. college asse,, serré pour le grand<br />

hombre d'tscolliers qui y aillû<strong>en</strong>t la s(est voulu approprier si<strong>en</strong>ne. s'est marié assez<br />

iqebem<strong>en</strong>t sul' ces <strong>en</strong>trefaietes, et- sa veufiié <strong>en</strong> sort lieu mainte nan t ponrsiit ceste<br />

niaiheuicûse <strong>en</strong>treprise dubz le nom d'un fermier de lad, maison qui lotir démande<br />

le louge du h<strong>au</strong>lt de lad. maison que let Pddcipl et pouures Escelliers ont t oustours<br />

retitu à etiï.<br />

- Mdnseigieur, je vous supplie que voyant lcd. S&. de La Cbappcild Bourdin l'<strong>en</strong> von-<br />

IÔt pri&. C pôrlcui<br />

Son ltoréa u que bi<strong>en</strong> vous coognoissei veusmonsirera t6lis lès -<br />

etabliSSeméfl dûd. collee s'il vous plaist dé les voit, ( ) que ie trouve forî'<br />

oneieues car leU. Principal qui doit éslro preLre doit dite où faire dife obascdii<br />

- cor une messé hase à laquelté assist<strong>en</strong>t tous les toursles poutres Esobliiers et <strong>au</strong>tres<br />

p<strong>en</strong>sidiunaiùs que l'on veult bi<strong>en</strong> éondieiunner àserir à bi<strong>en</strong> qui se dit <strong>en</strong> l'église<br />

Nostre Daine du- Comte, <strong>au</strong>trem<strong>en</strong>t surnommée dé La Contait, prochaind-duiL cdilege<br />

Ottitrq di<strong>en</strong>t toutes lei lieurâs du jour, sont babillez , iourriz et eétr<strong>en</strong>uz dix PouL<br />

ores EsolliérS, et cl,ascuri iuu ' diént le salut de (oûre Dame h <strong>au</strong>lÉé téix a'ec- Id<br />

braisons acdu1umùe dclrds par le teàiam<strong>en</strong>t de feue rndae-Jehaittié dé Fuanêè<br />

duchesse de i3erry. lé vous laisse h estimer cel&. i<br />

-


-I- -t, -. -<br />

UN<br />

1NAGE LITTÉRAIRE EN BERRY<br />

AU XVI° SIÈCLE.


'4<br />

r -


- 65 -<br />

tée des 2/3 sur celle qui l'avait précédée la 2° édition est moins complète<br />

que la copie de Thihoust , laquelle s'est accrue de quelques alinéas, qui<br />

paraiss<strong>en</strong>t appart<strong>en</strong>ir nn,à Salomon, mais à ce Milon d'Auvergne, <strong>au</strong>quel<br />

nous avons déjà vu Thiboust confier le soin d'une traduction <strong>en</strong> vers de<br />

l'épitaphe latine de Jeanne de Valois (1). La principale originalité de ]'oeuvre<br />

de Salomon c'est d'avoir un des premiers , sinon même le premier, établi<br />

l'usage de l'apostrophe, de la cédille et de l'acc<strong>en</strong>t aigu. Notre ami,<br />

M. Auguste Bernard, <strong>au</strong>quel nous devons une belle étude biographique sur<br />

Tory, de Bourges, ayant pris connaissance du rapport de M. Francis Wey,<br />

rev<strong>en</strong>diqua pour notre vieux compatriote le mérite de la découverte (2).<br />

Les motifs sur lesquels il appuie son opinion sont spécieux, et <strong>en</strong> matière<br />

si délicate il ne nous apparti<strong>en</strong>t de nous prononcer ni pour ni contre. Il<br />

nous semble, comme à.M.- Bernard ,T que Sulomon a fort bi<strong>en</strong> pu être <strong>en</strong><br />

relation avec Tory, et lui emprunter des premiers sa découverte qu'ils<br />

mir<strong>en</strong>t <strong>en</strong> pratique presque concurremm<strong>en</strong>t, l'un dans la Te édition de son<br />

Charpp-Fleurtj, qui est à peu près de 1530, l'<strong>au</strong>tre dans la 2e édition de<br />

sa Bricfvc doctrine, qui parut trois ans plus tard.<br />

Il nous est v<strong>en</strong>u <strong>au</strong> sujet de ces deux éditions du petit traité de Salomon,.exécutées<br />

si rapidem<strong>en</strong>t l'une après l'<strong>au</strong>tre, une idée que MM. Wey.<br />

et Bernard n'ont pas émise c'est qu'elles peuv<strong>en</strong>t, fort bi<strong>en</strong> ne pas éma-<br />

ner durnérnelibraire, mais prov<strong>en</strong>ir l'une de Paris, l'<strong>au</strong>tre de laprovince.<br />

Dans les deux éditions, ainsi que dans celle de Lyon.,l'uvre de Salomon<br />

accompagne un traité mystique •de -Marguerite de Navarre Le miroir<br />

de l'dmc pécheresse. n Ce qui indique qu'il a été mis <strong>au</strong> jour par un des<br />

familiers :de la reine, lequel était <strong>en</strong> mûme temps ami de Salomon. Ces<br />

deux qualités se r<strong>en</strong>contr<strong>en</strong>t chez Thiboust. Or, <strong>en</strong> 1533 il y avait juste<br />

trois lins que le premier imprimeur de Bourges vehait de s'y installer. Jean<br />

Garder, c'était son nom, devait chercher à s'employer, et Thirnust, ama-<br />

leur de tout ce qui se rattachait à l'art des lettres, devait essayer 1'<strong>en</strong>cou-<br />

rager notre imprimerie naissante. Aussi je croirais volontiers que ce fut lui<br />

qui donna à Garnier cette plaquette à imprimer commeà titre d'essai, et<br />

d'après le manuscrit que Salomon pouvait lui avoir communiqué. J'ai des<br />

raisons, comme on le verra plus bas, pour n'être pas de l'avis de M. Wey,<br />

(1) M. Wey a oublié de signaler une 3mo édition imprimée à Lyon par Leprince<br />

- <strong>en</strong> 1538, dans les mêmes conditions que les précéd<strong>en</strong>tes: -Elle est m<strong>en</strong>tionnée dans le<br />

Manuel de Brunet. (Vie. MARGUERITE et EPisTnc). Celle édition conti<strong>en</strong>t peut-être les<br />

additions qui sont dans iotre manuscrit;<br />

() V. dans le Journal de l'instruction publique (juillet t856),'l'art.intit.: o Du<br />

* premier emploi par l'imprimerie et dans la langue française de l'apostrophe, de l'acc<strong>en</strong>t<br />

et de la cédille. -<br />

- 9,


66 -<br />

(lui suppose qu'<strong>en</strong>tre ces deux éditions Jean Salomon pourrait bi<strong>en</strong>ètre<br />

mort. C'est ce qui résulterait, selon lui, de ce qu'<strong>en</strong> tête de la réimpression<br />

on lit les mots s Ex snanuscriptis <strong>au</strong>thoris. » Mais, dans ce cas là même,<br />

il avait-<strong>en</strong> le temps <strong>au</strong>paravant d'<strong>au</strong>gm<strong>en</strong>ter son fascicule de près des deux<br />

lier set Thiboust lui-même, probablem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>core cette fois, s'empressa de<br />

faire réimprimer l'oeuvre flus complète de son ami, mais alors <strong>en</strong> s'adressant<br />

<strong>au</strong> libraire parisi<strong>en</strong> Antoine Augere<strong>au</strong>. Postérieurem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>fin Milon crut<br />

devoir compléter ],a de Salomon, et Thiboust transcrivit précieu-<br />

sem<strong>en</strong>t cette addition.<br />

L'étude à laquellecette partie du manuscrit de Thiboust a donné lieu de<br />

la part de M\1. Wey et Bernard u eu pour résultat de fixer quelques<br />

données sur un personnage on ne pont :pS "înconun, <strong>en</strong> .révélant de -<br />

Jean Salomon, non seulem<strong>en</strong>t sa vraie personnalité et SOU lieu d'origine,<br />

mais <strong>en</strong>core son vrai -nom.' On ne le connaissait <strong>en</strong> effet jusque-là que<br />

sous le pseudonyme, ou plutôt le surnom de Florimond , ou de son<br />

anagramme Mon.t/lory, dont il avait signé deux pièces de vers qui accom-<br />

pagn<strong>en</strong>t son Traité de la Bricfve doctrine, dans les impressions que nous<br />

v<strong>en</strong>ons de m<strong>en</strong>tionner. -<br />

Dans notre manuscrit ce traité est précédé de deux dédicaces <strong>en</strong> vers â<br />

Thiboust, l'une du continuateur Milon, l'<strong>au</strong>tre de Salomon lui-même.<br />

« L'un et l'<strong>au</strong>tre étai<strong>en</strong>t méchants poètes. » dit M. MTey. Cette opinion est<br />

trop conforme à la nôtre pour que nous y veuillions contredire. Mais nous<br />

trouvons le'spirituel rapporteur un peu sévère d'expression quand il ajoute<br />

que la dédicace de Milon est « d'un style affreux. » Que pourrait-il donc<br />

dire de celle de Salomon? Au surplus voici les deux morce<strong>au</strong>x on peut<br />

comparer.<br />

4 Monseigneur Monsieur de Quantilly m.a.istre Jacques T/riboust escuyer<br />

notaire secrétaire du Boy et son Esl<strong>en</strong> <strong>en</strong> <strong>Berry</strong> khan Milon son serviteur<br />

très humble, salut.<br />

SONNET.<br />

Long Temps il .y a que ce petit Sommaire<br />

Ton Serviteur Salômon comm<strong>en</strong>ça,<br />

Et dctem<strong>en</strong>t <strong>au</strong> parfaiet l'advança<br />

Pour tes Aec<strong>en</strong>tz de franeoise Grammaire.<br />

Ne reste plus (Ttiiboust) que la parfaire<br />

De l'orthographe, et des poinetz qu'il laissa<br />

Que le Temps a monstré depuis <strong>en</strong> ça<br />

Combi<strong>en</strong> cela est <strong>en</strong>eor'neeessaire.<br />

l'aelieueray si tu as Connaissance<br />

Que tel Sç<strong>au</strong>oir repose <strong>en</strong> ma Puissance,<br />

Ainsi du Tout seras louable Autheur.


67 -<br />

Le Fondateur est tout <strong>en</strong> 1011 seruice.<br />

Et cil qui veult parfaire l'Ediflce<br />

Est (sil te plait) <strong>au</strong>ssi ton Scr.uileur.<br />

—Seiour, vit jour. - (1). n<br />

Il y a, on petit le dire sans que ce soit un grand complim<strong>en</strong>t 'à faire à<br />

l'<strong>au</strong>teur, plus d'un sonnet (lu inc siècle qui ne v<strong>au</strong>t pas celui-là ; et flj;<br />

Fousi était loin de posséder, quaid il versifiait, la nième facilité d'allure.<br />

Autre chose est de là traduction de l'épitaphe par le mémé, on peut la pro-<br />

clamer exécrable. C'est un peu l'épithète que mérite l'<strong>au</strong>tre poésie de Jean<br />

Salomon.qui suit celle que nous v<strong>en</strong>ons de transcrire.<br />

n A Me Jagues T/ilboust esewjer seigneur de Quantil/y notaire et seciétaire<br />

du Roy de la Couronne et Maison de France et Esleu <strong>en</strong> <strong>Berry</strong> khan<br />

Salomon Angevin le si<strong>en</strong>, très humble et obéissant s<strong>en</strong>,tteur, salut.<br />

ÉPIGRAMME.<br />

l'oui' ce Mous', que des lavostre <strong>en</strong>fance,<br />

Àuez aytn, <strong>au</strong>tant qu'<strong>en</strong>fant de Franee<br />

L'art d'eseripture, et toutes lionnes leetres<br />

De grec, latin, fr<strong>au</strong>çois, proses et metres, -<br />

Extraiet ay foie[, de reigles et figures<br />

Qui moult s<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t, à l'art des Eseriptitres. -<br />

D'apostrophe est. synalepines, syncopes,<br />

Collisions, elid<strong>en</strong>ces, Apocopes,<br />

- De caraetlnôres et séparations,<br />

De Synereses, maintes (boisions,<br />

De masculins, <strong>en</strong>clitiques vocables,; -<br />

De fdminins,'tnaiuseules notables,<br />

D<strong>en</strong>t redigé, ay cy ong petit hure.,<br />

Qu'<strong>en</strong>tre vez mains, -le prés<strong>en</strong>te et delliure.<br />

Lequel , pourrez v<strong>en</strong>ir, à vostre loisir<br />

En m'excusant, si c'est vestre plaisir.<br />

Ce qui nous frappe dans le sonnet de Milon, c'est l'expression dont il se<br />

sert pour indiquer les rapports existant <strong>en</strong>tre Thiboust' et Salomon. « Il<br />

est eut ton service, dit-il <strong>en</strong> parlant de celui-ci à celui-là, ce qui à notre<br />

avis, <strong>en</strong> le signalant comme <strong>en</strong>core vivant à cette époque, veut dire plus<br />

que o il est ton très humble serviteur, » à pr<strong>en</strong>dre le mot dans l'acception<br />

'que lui donn<strong>en</strong>t nos correspondances journalières. Ce dernier s<strong>en</strong>s ne peut<br />

guère se retrouver que dans les vers où il s'offre lui-mezne comme serviteur<br />

(4) séjour un jour, sans doute la devise de Milon, signe une demi douzaine de détestables<br />

strophes à la louange de Ch<strong>au</strong>rnean et qu'<strong>en</strong> lit <strong>en</strong> tête de son histoire de<br />

.<strong>Berry</strong>. Elles serai<strong>en</strong>t donc du mène <strong>au</strong>teur.


-68<br />

de Tbiboust, <strong>en</strong> jouant pour ainsi dire sur les mots. _Salomon <strong>au</strong>rait donc<br />

fait partie de la maison du sr (le Quanlilly? À quel titré?. Est-ce comme<br />

instituteur? Mais celui-ci n'avait pie des filles; à la ri.gueur, cela ne cons-<br />

titue pas une impossibilité. A considérer de près, d'ailleurs, le ton (les deux<br />

dédicaces, on trouve qu'il s'<strong>en</strong> f<strong>au</strong>t qu'il soit le même. il.y a dans celle de<br />

Salomon be<strong>au</strong>coup plus de défér<strong>en</strong>ce que dans l'<strong>au</strong>tre. Il a àôin de donner<br />

du monseigneur .à son protecteur, et s'absti<strong>en</strong>t de le tutoyer, suivant la<br />

lic<strong>en</strong>ce qu'<strong>au</strong>torise parfois le 'er, et que Milon se permet. Enfin ce retour<br />

sur les goûts de l'<strong>en</strong>fance de Tl]ibdhst pourrait faire supposer qu'il l'<strong>au</strong>rait,<br />

connu de longue date; ce qui nous porterait presque à voir <strong>en</strong> lui un<br />

vieux précpteur parlant à son élève, lequel par. reconnaissance de ses bons<br />

servicés lui avait peut-être ouveit sa maisonpour qu'il y ter-<br />

in sa carrière (1). Quant à Jean Milon, ce fut, nous le savons, un<br />

Auvergnat transplanté à-Bourges, où de tout'temps le pays Arverne s'est.<br />

fait représ<strong>en</strong>ter par quelques-dus (le ses <strong>en</strong>fants. La famille Milon se<br />

r<strong>en</strong>contre établie <strong>en</strong> cette ville <strong>au</strong> xvitc tècle clans les'emplois de finance (2).<br />

Il est probable qu'une fonction analogue était remplie par l'amide Thiboust,<br />

et que ce fut un des motifs qui les mit <strong>en</strong> relation. D'élu, comme l'était.<br />

l'un, 'à trésorier général des finances, comme l'âutre pouvait l'être, il n'y<br />

avait alors que l'épaisseur du doigt. Je ne dois pas négliger de dire cep<strong>en</strong>-<br />

dant que les rMes des tailles pour l'année 1556 port<strong>en</strong>t un e Jehan Millon,<br />

cscripvain, » comme detieurant rue Mirebe<strong>au</strong>. Cet écrivain, c'est-à-dire,<br />

je présume, scriM public et non maître d'écriture; serait-il notre homme?<br />

(t) Parmi les noms des intimes de la maison Thiboust , il <strong>en</strong> est un qu'il f<strong>au</strong>t <strong>au</strong><br />

moins nommer ici c'est celui de M<strong>au</strong>rice liullin, receveur des domaines, je suppose,<br />

d'après le Iiti'e.qu'Habert lui donne, et qui faisait partie dc' cénacle dont nous avons<br />

parlé. Voici la pièce qui nous le faiC cdnnattre, et qui a été impriméé à la suite du<br />

Temple de Chasteté -.<br />

« Â 1pfarice Jiultin.<br />

- Puisque tu as ce bonheur r<strong>en</strong>contré<br />

P'aoir trouvé pôAr ton èeignear et inalsire<br />

Ce Quantilty de vertu pnétré,<br />

-<br />

- . . !e n'ay vouloir <strong>en</strong> ouhly de te mettre.<br />

Puis ton esprit me falot bi<strong>en</strong> recongnoistre<br />

Que le seigneur est heureux du servant,<br />

Or i'ay désir d'aller doreseuavant -<br />

- À Qian1illy, preadrè 'résiou3-ssance,<br />

-- Si t supply, receveur bi<strong>en</strong> scavant,<br />

Me recevoir par ceste congnoissanee.<br />

:<br />

'HABItaT.<br />

clans La Th<strong>au</strong>massière (p. 59 et 60), li liste des trésoriers génér<strong>au</strong>x de<br />

France <strong>en</strong> la province de Langnedo'iy, établis à Bourges. -


- 69 -<br />

Peut-être bi<strong>en</strong> <strong>en</strong>core; un calligraphê était , naturell<strong>en</strong>iént appété à fré-<br />

qu<strong>en</strong>ter la maison de ThibousU<br />

Â-ce que nous v<strong>en</strong>ons d'éiiumérer se borné l'oeuvre de ce dernier, ou du<br />

moins ce qu'il nous est iTcrmis d'<strong>en</strong> connaitre, car il est -bi<strong>en</strong> probable que<br />

la plus fot'tc-parLié s'<strong>en</strong> est perdue. C'est là presque toujours le sort de ces<br />

productions d'amateurs, qui, conservées soigneusem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> portef<strong>en</strong>ilie du<br />

vivant de l'<strong>au</strong>teur, pass<strong>en</strong>t après sa tp6rt dans lesmiins d'insoucieux héri-<br />

tiers dônt la moindre préoccu'pation est de les conserver.<br />

Considéré comme littérateur, Thibonst apparti<strong>en</strong>t plutôt <strong>au</strong> xv siècle<br />

qu'éu xvi. Contemporain et ami de ces g<strong>en</strong>tils esprits, Marot et Margue,<br />

rite de Navarre, qui <strong>en</strong> toute liberté et facilité s'occup<strong>en</strong>t des nouve<strong>au</strong>tés,<br />

et se font suspecter d'hérésie, on ne voit ri<strong>en</strong> <strong>en</strong> lui qui participe dc pareilles<br />

t<strong>en</strong>dances. Son attachem<strong>en</strong>t exclusif pour le culte orthcidoxe se manifeste<br />

<strong>en</strong> toutes circonstances. Il pr<strong>en</strong>d part <strong>en</strong> ce Écus h la grande démonstration<br />

du mystère de 1536. on premier soin après l'acquisition de Quantilly est<br />

d'<strong>en</strong> faire réparer et emb&lie l'églisè et de se maniféster h<strong>au</strong>tem<strong>en</strong>t comme<br />

1e bi<strong>en</strong>faiteur de èette même église (4). 11 <strong>en</strong> fait <strong>au</strong>tant pour le couv<strong>en</strong>t des<br />

Carmes, situé dans soit à Bourges (2). !aiimèm<strong>en</strong>( lié avec des<br />

poètes de la génération qui arrive, comme ilabert, de cette école de payons<br />

sous les formes extérieures du catholicisme, il ne leur a pas pris leur<br />

manière, étant v<strong>en</strong>u trop tôt sans doute pour chanier comme eux la volupté<br />

et la poésie des s<strong>en</strong>. Soit même est vieille-et sa forme <strong>au</strong>ssi.<br />

En somme c'est tin homme à la suite; niais son amour de l'art le s<strong>au</strong>ve.<br />

Thiboust décéda, dit Catherinot, le 7 octobre ou le 7 décembre 1555,<br />

peu de temps après avoir fait don <strong>au</strong> tollégé de seinmarniscrit. Il avait été<br />

bi<strong>en</strong> inspiré <strong>en</strong> press<strong>en</strong>tant sa fin prochaine. Soit d'ailleurWne lui per-<br />

mettait guère de s'illusi6nnei à cet égàrd. Né <strong>en</strong> 4492, il était alors dans<br />

sa soixante-troisième année (3). U fut etiterré dans l'église de Quantilly,<br />

sous le tombe<strong>au</strong> qu'il avait fait élever à sa femme. La Th<strong>au</strong>massière nous<br />

a conservé leur épitaphe<br />

- (1) La premièrepièce du flepisfre noir est intitulée r « Pardons etjndulg<strong>en</strong>ces impétrez<br />

par le seigneur de Quantilly des Révér<strong>en</strong>dissimes cardin<strong>au</strong>x de Bourbon et de<br />

Lorraine, tesixiesme jour de juillet mil cinq c<strong>en</strong>t vingt-cinq, par tous les bi<strong>en</strong>ifaicteurs<br />

<strong>en</strong> l'église parrochiale dud. lieu de Quantiltf? »<br />

(2) On lit dans te catalogue des -archives Joursanvanit Paris, Tech<strong>en</strong>èr, (1838). Sous<br />

Je n0 2775. « Titre concernant une donation Faite à l'église Ntre-Dame du Mont-Carmel<br />

(le Bourges, par Jacques Thibonsi et sa femme Jeanne de La Font. - 1500-1531,'<br />

(3) La biographie Robinet, qui le fait naltreeu 1488, le dit à sa mort Allé de 67<br />

Ne serait-ce pas <strong>en</strong> se basant sur ce dernier chiffre inexact que le biographe <strong>au</strong>rait<br />

été am<strong>en</strong>é à fixer une f<strong>au</strong>sse date pour l'époque de sa naissance? Ajoutons qu'il précise<br />

comme date certaine de sa mort le 7 octobre. - -


- 70 -<br />

• « Cg gis<strong>en</strong>t nobles personnes M. J&CQUL's Tuioust, notaire e secrétaire<br />

ordinaire du Roy et de la Reine, de la Maison de Fiance, secrétaire de la<br />

Reine de Navarre, Duchesse d'il l<strong>en</strong>çon et de <strong>Berry</strong>, élcuu ordinaire <strong>en</strong> l'élection<br />

et duché de <strong>Berry</strong>, et dame JEANNE DE LÀ FONT, son épouse, qui<br />

décéda le 4 aofl 4 532 (1).<br />

Des cinq <strong>en</strong>fants que cette dernière lui avait donné, ainsi que nous l'ap-<br />

pr<strong>en</strong>d son épitaphe latine par Jean Second, - trois seuls survécur<strong>en</strong>t, et ce<br />

fur<strong>en</strong>t trois filles Jacqueline, Jeanne et Marie. Hubert qui les avait vues à<br />

Bourges les m<strong>en</strong>tionne dans la fin de l'épître dont nous n'avons rapporté<br />

que le comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t (2).<br />

Lorsque tes hoirs <strong>en</strong> sem<strong>en</strong>ce naître<br />

Croistront, ainsi que les rame<strong>au</strong>x d'olive.<br />

Ce que desia tes trois Nymphes de pris,<br />

(Qui ont le scns 'meur, sage et biea'apris)<br />

Peuv<strong>en</strong>t monstrer, dont laqueline l'une,<br />

Passant on tout la blancheur de la lune,<br />

De s<strong>en</strong> Guieliard plus be<strong>au</strong> qu'il <strong>en</strong> peut estre,<br />

A fait <strong>en</strong> toy ton <strong>en</strong>fance r&iaislre.<br />

Les <strong>au</strong>stres deux de naïfvh doulceur,<br />

Jeanue et Marie, ainsi comme leur sur,<br />

Te produiront plusieurs <strong>en</strong>f<strong>au</strong>s et filles,<br />

Pour démonstrer qu'elles ne s<strong>en</strong>t stériles,<br />

Et pour donner plaisir à tes vieux ans<br />

De tout chagrin et de tristesse exempts,<br />

Et bi<strong>en</strong> souv<strong>en</strong>t qu'à Quantilly seras,<br />

Près des trois seurs tu te reposeras<br />

Font ta première à la voix arg<strong>en</strong>tine<br />

Résonnera plus doux qu'une bueeine,<br />

Pour te donner plaisir et passe-temps .....<br />

(1) On comlarad qu'il serait parfaitem<strong>en</strong>t inutile de rechercher <strong>au</strong>jourd'hui dans<br />

l'église de Quantilly, la sépulture de Thihoust. <strong>Un</strong>e ragede destruction singulière paialt<br />

s'être acharnée, spécialem<strong>en</strong>t sur ce point. La révolution qui abattit la 'moitié de réglise,<br />

comm<strong>en</strong>ça par maltraiter très fort la partie qui nous intéresse. Quelques débris<br />

avai<strong>en</strong>t cep<strong>en</strong>dant échappé <strong>au</strong> vandalisme moderne <strong>en</strong>tre <strong>au</strong>tres ' un des écussons eu<br />

terre cuite et colorié <strong>au</strong>x armes detseigneurs et qui décorai<strong>en</strong>t leur tombe, cet écusson<br />

est <strong>au</strong>jourd'hui <strong>en</strong>tre les mains de M. Bataille et porte le blason de Tl.ihoust,<br />

formé seulem<strong>en</strong>t par l'écartèlem<strong>en</strong>t des armes de Rusti<strong>en</strong>t CL de Vitlemer, .Malheureu.sem<strong>en</strong>t<br />

pour ce qui pouvait <strong>en</strong>core rester du passé on a <strong>en</strong>trepris dans ces dernières<br />

années une rest<strong>au</strong>ration où tout a fini de disparaltre. Il parait que dans les affouillem<strong>en</strong>ts<br />

nécessités par les nouve<strong>au</strong>x trav<strong>au</strong>x, on o remué l'anci<strong>en</strong>ne sépulture, où se sont<br />

retrouvés quelques ossem<strong>en</strong>ts et une tète <strong>en</strong>tière; celle peut-être de la belle Jeanne.<br />

(2) V. Epltre à Thih'oust, <strong>en</strong> tète du Voyage de Gasset.


- 71<br />

Jacqueline Thiboust, qui, à s'<strong>en</strong> rapporter à ces derniers vers, eut hérité:<br />

du tal<strong>en</strong>t musical de sa mère, naquit vers 1524 (il. Elle épousa le 5<br />

décembre 1545, Pierre Sardé, sr de Rozay, de Rousson et des Pôrt<strong>au</strong>x,<br />

d'abord avocat <strong>au</strong> grand conseil, puis substitut du procureur générai et<br />

<strong>en</strong>fin conseiller dudit Conseil. Thiboust lui résigna sa charge de secrétaire<br />

du roi moy<strong>en</strong>nant une somme de 4,000 Ir. Le privilège <strong>au</strong>torisait le ces-<br />

sionnaire à jouir des droits attachés à la charge, même après la cession<br />

quand elle avait lieu <strong>en</strong> faveur d'un fils ou d'un g<strong>en</strong>dre(2). Pierre Sardé<br />

eut de sa femme, qui lui survécut, plusieurs <strong>en</strong>fants, dont l'alné fut Gui-<br />

chard Sardé, qui parait être mort jeune (). Ce lut ce dernier que Rabèrt<br />

vit à Bourges, chez son grand'père, et qu'il rappelle dans les vers transcrits<br />

plus h<strong>au</strong>t. - -<br />

Ledit ilabert, qui joua à peù grès avec Mesdemoisellés Thiboust le rôle<br />

-que Jean Second avait t<strong>en</strong>u à l'égard dé leur mère, parait avoir <strong>en</strong>tret<strong>en</strong>u<br />

avec Jacqueline une correspondance poétique. Il nous reste deux épîtres<br />

qu'il lui adressa, et qu'on lit, avec le rcste,à la suite du T<strong>en</strong>ple de 'Chas-<br />

(eU.<br />

4 Mademoyselle (le Rosa y fille de M. de Quant Fig,<br />

Le souv<strong>en</strong>ir des graces et bi<strong>en</strong>s faicts<br />

Que le seigneur de Qu<strong>au</strong>tilly m'a faicts,<br />

Mc faict avoir ô noble Darnoysclie<br />

En ton <strong>en</strong>droiet d'humilité le zelé<br />

- Yeu que Lu es sa fille bi<strong>en</strong> ayalée<br />

• -, -<br />

Dans le cerve<strong>au</strong> de qui est imprimée<br />

Celle vertu qui faiet l'esprit fiorir<br />

le dy vertu non subieete a -mourir.<br />

(4) On trouve à la page 131 du Registre noir Spie d'une quittance de Louis de<br />

Lhome, Foulon à Bourges, et.Gabrielle, sa femme, d'un reliquat d'une somme à eux<br />

Payée le 8 août 1526, pour frais de nourrice de Jacqueline, fille de Thiboust,<br />

(2) Guyot. Répertoire, 10e. cit.<br />

(3) V. Généalogie de Sardé dans La Th<strong>au</strong>massière, p. 4118-49. Guiehard dut avoir<br />

pour parrain, j'imagine, Guicbard de flou, de l'Orléanais, commissaire des guerres<br />

à Bourges, allié de Thiboust par sa f<strong>en</strong>ime Jacqueline du Molin et son voisin, car il<br />

occupait un des deux hôtels contigus ii l'l,ôtN Jacques-Cœur. Son nom se trouve dans<br />

le supplém<strong>en</strong>t ajouté par Milon à la Iiriefve doctrine, <strong>au</strong> paragraphe où il cite comme<br />

exemples des noms de par<strong>en</strong>ts et de familiers de Thjhousr - Quant à son père,<br />

Pierre Sardé, il parait être mort vers 1553, ainsi qu'on peut l'induire des termes<br />

d'une transaction internue le 2novembre 1566, <strong>en</strong>tre la villé et fltle de Rouzay,<br />

- veuve et agissant <strong>au</strong> nom de ses <strong>en</strong>fants mineurs. Cette pièce se trouve dans le<br />

registre des délibérations de l'hôtel-de-ville pour 4581-85, p 436. lI y a à noter que<br />

Jacqueline Thihousi y est dénommée Catherine, d'après un des <strong>au</strong>tres prénoms qu'elle<br />

joignait sans doute <strong>au</strong> premier.<br />

0


-<br />

Domines recoy ceste humilité grande<br />

D'un qui. sera tousiours•à ta commande<br />

Ne pins ne moins qu'<strong>au</strong>seigneur pore ti<strong>en</strong><br />

Qui de la lette est le vif <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>,<br />

Monstrant à tous que la sage Minerve<br />

Avec les si<strong>en</strong>s partage lui réserve:<br />

Quant est de toy sans avoir voit <strong>en</strong>cor<br />

Ta face bélle et <strong>au</strong>ssi blonde qu'or<br />

Si scay je bi<strong>en</strong> quota grand'excell<strong>en</strong>ee.<br />

- N'a-mérité qu'on la m'ette <strong>en</strong> sil<strong>en</strong>ce<br />

Et de cela suis assez adverti<br />

Par le scavoir que Dieu t'à départi.<br />

Comme ayantveu souv<strong>en</strong>t ton eseripture<br />

Au pere ti<strong>en</strong> transmise Par par .grandcure.<br />

Et <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du par maint homme ;seavant<br />

Combi<strong>en</strong> ton nom se mettoit <strong>en</strong> avant.<br />

Donc Damoyselle illustre de Rozay,<br />

Si cii mes vers quelque pure roze ay<br />

Elle sera cueillie sans demeure<br />

A celle fin que ton nom poinet né meure<br />

En mes eseriptz exposés <strong>en</strong> lumière,<br />

Et toutesfs la louange premiere<br />

T'<strong>en</strong> sera deue, et me sera soulas<br />

De te nommer la faconde Pallas<br />

Qui faiet finir n'a Athènes plus fort<br />

Que toy le, .lieu de Rozayïiohle et fort.<br />

Si finira ceste letre prés<strong>en</strong>te<br />

Que d'Yssouldùn ie t'<strong>en</strong>voys eVprés<strong>en</strong>te,<br />

Priant eeluy qui seul a tout pouvoir,<br />

Tousiours soulas <strong>au</strong> coeur te faire avoir.<br />

'L'<strong>au</strong>tre épitre est une étr<strong>en</strong>ne qu'il lui <strong>en</strong>voya peut être <strong>en</strong> même temps<br />

que celle qu'il adressa à son père<br />

« A Elle <strong>en</strong>cores,<br />

Ce iour de l'an Damoyselle bi<strong>en</strong> née<br />

Par ton Ilabert tu seras estrainée,<br />

Non des arquans forg ez par Vulcanus<br />

Pour honnorr son espouse V<strong>en</strong>us, -<br />

Eneores moins de la vigne dorée<br />

De Daire (1) Royde louange honnorée,<br />

(4) Darius, fils d'llystespe. Pour Site fmeuse vigne d'or qui abritait le trône des<br />

roki Perses et. ilérooLe, Potymztf é, 27.- Pline l'anci<strong>en</strong>, Hist.-na(., xxxui, 47 •Atbé-<br />

née, .Dimosoph. XII, 3.


- 73 -<br />

Mais mon esetipt estraine te sera<br />

Qui désormais ta be<strong>au</strong>lté poulsera<br />

lusqu'<strong>au</strong> plus li<strong>au</strong>li des supernelles nues<br />

Aflin que soi<strong>en</strong>t les graces bi<strong>en</strong> congneues<br />

Api Successeurs, et que postérité<br />

Sache l'honneur qiietu as mérité.<br />

Et ce p<strong>en</strong>dant, 1h gouverneur céleste<br />

Vueille garder toit de tout moleste.<br />

Que ta lignée heureuse tant te face<br />

Que dans c<strong>en</strong>t ans Soit <strong>au</strong>pres de ta face.<br />

Et . que tousicurs <strong>en</strong> laye et <strong>en</strong> santé<br />

De tout tourm<strong>en</strong>t ton corps soit exempté.<br />

Puis quand vi<strong>en</strong>dra le iour de ton trespas<br />

L'esprit aspire a cc divin repas<br />

Qui est promis atoute aine lidele<br />

Qui croit que Dieu est la vie éternelle.<br />

Les deux soeurs (le damé Jacqueline, comme nous allons le voir, demeu-<br />

rai<strong>en</strong>t paroisse du Foeirch<strong>au</strong>rl l'une dans la maison paternelle, l'<strong>au</strong>tre non<br />

loin de là. J'ignore <strong>en</strong> quelle rue se voyait l'hôtel de mademoiselle du<br />

Rozay, seulem<strong>en</strong>t je trouve dans le registre dc délibérations 'de l'llôtel-de-<br />

Ville de 1581-1 585 que le logis devait, être un dès plus be<strong>au</strong>x. Lorsque, <strong>au</strong><br />

mois de juillet 1585, M. dè La Châtre vint pr<strong>en</strong>dre possSsion de la grosse<br />

tour, dont ilavait été nommé capitaine <strong>en</strong> remPlacem<strong>en</strong>t. de M. de Tournon<br />

il logea chez cette dame que la ville avait prié de vouloir bi<strong>en</strong> l'héberger,<br />

pour éviter <strong>au</strong>x dép<strong>en</strong>ses que lui Occasionnerait l'ameublem<strong>en</strong>t. dit<br />

du roi. Elle fut dédommagée par une remise de la taxe h laquelle.les habitants<br />

avai<strong>en</strong>t été imposés lors de la peste qui v<strong>en</strong>ait, dé désoler laville. Je<br />

suis <strong>en</strong>core <strong>au</strong>torisé à p<strong>en</strong>ser que ce logis devait être dans le voisinage de<br />

l'hôtel Jacques-Cœur, police qu'un registre des tailles pour l'année 4552,<br />

et un'rôlc îles <strong>au</strong>mônes pout l'année 4 562 , tous , deux tirés des iiiSès<br />

archives, donn<strong>en</strong>t, .l'tin M. de. Rozay, l'<strong>au</strong>tre Mile duRouzay (sic) comme<br />

demeurant sur la paroisse Saint-Oustrillet (4).<br />

(t) Voici la t<strong>en</strong>eur du premier de ces deux articles . Monsieur de flozay itichil<br />

parce qu'il ne ti<strong>en</strong>t <strong>au</strong>cun feu ne lieu <strong>en</strong> ceste ville. » Il habitait sans doute d'habitude<br />

sa terre de Rozay, près Vierzon, et ce n_est qu'après sa mort que sa veuve sera rev<strong>en</strong>ue<br />

occuper son hôtel <strong>en</strong> ville. Ce dernier événem<strong>en</strong>t se rapporte, suivant toute appar<strong>en</strong>ce,<br />

à l'année 4563, car nous v<strong>en</strong>ons de voir u'elle vivait <strong>en</strong>core <strong>en</strong> 1562, et dans<br />

nu acte d'échange de r<strong>en</strong>tes passé par ladite Jacqueline Tu iboust avec le chapitre de<br />

Saint-Pierr-1e-Pueflier r à la date du. 15 novembre 1583, elle est désignée veuve<br />

de. Pierre Sardé;( V; <strong>au</strong>x archives départem<strong>en</strong>tales-,, Fonds de Saint-pjerre...le._<br />

Pueltier. xiii. 17).<br />

40


-<br />

- 'ii -<br />

Jeanne, la seconde des trois soeurs, eut deux maris. Je lis dans le cata-<br />

logue des archives Joursanv<strong>au</strong>lt, sous le n 0 2, 775, la m<strong>en</strong>tion suivante<br />

« Contrat de mariage de Pierre Roussard et de Jeanne Tbiboust. D La data<br />

de cette pièce est comprise <strong>en</strong>tre les années 1500 et 4532. Cette note est<br />

pour moi le sujet d'un grand embarras. Eu effet je trouve d'<strong>au</strong>tre part que<br />

par acte du 4 s juin 1526 translaté <strong>au</strong> Registre noir (f0 240), Jacques Thi-<br />

boast se fait, lui quatrième, c<strong>au</strong>tion d'une somme de dix mille livres pour<br />

Pierre Roussard, seigneur du Chaillou et de l'Homois, maitrede la monnaie<br />

de Bourges, et commis dé Réné Thiard , trésorier, des guerres dans la<br />

même ville;' c'était cette dernière charge, qu'il v<strong>en</strong>ait évidemm<strong>en</strong>t d'acheter,<br />

qui obligeait Roussird à fournir la c<strong>au</strong>tion pour laquelle Thiboust interi<strong>en</strong>t<br />

ici à titre de be<strong>au</strong>-père. Cc qui prouve qu'il avait déjà cette qualité c'est<br />

que dans la lettre de contre-c<strong>au</strong>tion faite par ledit Roussard <strong>au</strong> profit de<br />

Thiboust, et qui se trouve inscrite à la suite de l'acte que je signale, Jeanne<br />

Tbiboust est dite femme dit<br />

(1). Maint<strong>en</strong>ant il f<strong>au</strong>t bi<strong>en</strong> recon-<br />

naître qu'<strong>en</strong> raison de la date sous laquelle l'acte fut passé (4526), il y n là<br />

une contradiction qui voudrait éfre éclaircie , ce que je me reconnais dans<br />

l'impuissance de faire. Comm<strong>en</strong>t cri effet une fille de Jeanne dé La Font<br />

laquelle se maria <strong>en</strong> 1521, <strong>au</strong>rait-elle pà être elle-même mariée <strong>en</strong> 1526.<br />

Si donc il s'agit ici réellem<strong>en</strong>t d'une fille de Thiboust et non d'une soeur<br />

- peut-être, elle serait d'un premier lit. Je n'ai trouvé nulle parti il est vrai,<br />

l'indication précise de ce premier mariage; mais <strong>au</strong> besoin cela vi<strong>en</strong>drait<br />

justifier un passage de La Th<strong>au</strong>massière déjà signalé, relatif à Marie de<br />

Latour, qui <strong>au</strong>trem<strong>en</strong>t devrait être mis sur le compte d'une erreur typogra-<br />

phique, comme je vais avoir l'occasion de l'exposer plus bas à propos de<br />

Marie Thiboust. - -<br />

Ce qui est bi<strong>en</strong> certain <strong>en</strong> tout cas c'est que Jeanne , fille de Thiboust,<br />

épousa, <strong>en</strong> deuxièmes noces, si elle était veuve déjà de Roussard, un Da<br />

Moulin, qui devait être son par<strong>en</strong>t. 'Le catalogue des archives Joursan-<br />

v<strong>au</strong>lt, sous le n° 2,777 1 et dans l'époque comprise <strong>en</strong>tre 4550 et 1570, note<br />

Cette charge de ntLre de la moiinaie de Bourges qu'avait Pierre Ronsard<br />

(fl<br />

semble avoir été un apanage de sa famille, car dès le xlv' siècle un de ses aydux<br />

Jean Ronsard nous est indiqué avec ce titre et comme fondant une chapelle dans<br />

l'église de Saint_Pierre-le-Marché, sa paroisse, et celle de la commun<strong>au</strong>té des drapiers;<br />

d'où l'on peut induire qu'il exerçait le métier. La fonction de maflie de la monnaie<br />

se donnait «ailleurs d'habitude à un m;.-ch<strong>au</strong>d. Disons <strong>en</strong> passant qu'une fille de ce<br />

Jean Ronsard, Jeanne, veuve <strong>en</strong> prmières noces de jean Coleman, épousa <strong>en</strong> deuxièmes<br />

noces Lambert Leodepart , prétost de Bourges et be<strong>au</strong>-père de Jacques-Cœur,<br />

avec lequel les Ronsard se trouvai<strong>en</strong>t ainsi être alliés. (V. Catit. Tombe<strong>au</strong> généal.,


une donation de Jean du Moulin à Jeanne Thiboust, sa femme.» Hab*ert<br />

.de son côté vi<strong>en</strong>t apporter son témoignage <strong>en</strong> faveur de cette alliance.<br />

En ?1ô56 parut de notre poète un recueil intitulé « llaangve de la<br />

Déesse Astrée sur la réception de if. Jean Blosnier <strong>au</strong> degré de lieut<strong>en</strong>ant<br />

civil. . Ensemble les épigrammes addressez par l'atIzeur àpinsicurs<br />

nobles et, vertueux personnages, portant faveur'el dilection <strong>au</strong>x lettres. o<br />

Paris, Guil!. Thibout et Est. D<strong>en</strong>ise, Iibr. in-8°. - On ylit la pièce<br />

suivante<br />

4 fifgr le Contre,-oi leur JEAN 0V M0LIN, de Bourges,<br />

Jaques Tliihousl de Quantilli Seigneur<br />

Le Mécénas des -Muscs vénérable .<br />

M<strong>au</strong>gré la Mort <strong>en</strong> éternel boueur<br />

Laisse de soy la mémoire durable.<br />

Il vous aioinct par li<strong>en</strong> honorable<br />

Du chaste Hym<strong>en</strong>, à l'une de ses filles<br />

Qui de sçavoir et mainti<strong>en</strong> amiable.<br />

Est mise <strong>au</strong> rang des iieuf Muses g<strong>en</strong>tilles.<br />

Cc Méeénas de vertu et sçavoir<br />

Vit, bi<strong>en</strong> que soit son corps <strong>en</strong> pourriture,<br />

Car sa vertu lin ne peut recevoir,<br />

Vertu n'est-pas subiecte a sepullure.<br />

De vous <strong>au</strong>ssi ioinet à sagéniture<br />

Aux successeurs tel sera le r<strong>en</strong>om<br />

Par les vertus, où pr<strong>en</strong>ez nourriture,<br />

Que Mort ne peut effacer vostre nom.<br />

II est-fort difficile de préciser cc que pouvait être ce fluinoulin avec son<br />

titre assez vague de -contrôleur. Est-ce le contrôleur du gr<strong>en</strong>ier à sel, ou<br />

le contrôleur des aides et tailles qu'Habcrt n voulu désigner? C'est ce<br />

qu'on ne peut deviner <strong>au</strong> juste. Je ne connais dé Jean Durnoulin vers ce<br />

temps que celui que Catherinot indique à la p. 35 de son Inscriptio [on<br />

bituric<strong>en</strong>sis comme commissaire de la navigation de l'Auron <strong>en</strong> 1553 , et<br />

un <strong>au</strong>trè qui fut avocat <strong>au</strong> présidial, et qui est cité comme tel à la p. 3<br />

du même opuscule. Ces deux ne font peut-être qu'un mais il n'est pas dit<br />

-que, malgré la ressemblance des noms, Ce fut celui là qu'épousa Jeanne.<br />

Au reste le plus grand embarras pour cc qui concerne ce flumoulin n'est<br />

pas dans sa profession , mais dans son id<strong>en</strong>tité même. C'est <strong>en</strong> quelque<br />

sorte la répétition de ce que nous avons vu plus h<strong>au</strong>t <strong>au</strong> sujet de sa femme.<br />

flans les deux docum<strong>en</strong>ts que nous v<strong>en</strong>ons de citer il porte le prénom de<br />

-Jean d'<strong>au</strong>tres preuves égalem<strong>en</strong>t dignes de foi le nomm<strong>en</strong>t fi<strong>en</strong>t-i. Des<br />

titres du couv<strong>en</strong>t des Carmes de Bourges rue montr<strong>en</strong>t un g<strong>en</strong>dre de Thi-<br />

boust du nom de H<strong>en</strong>ri Dumoulin, duquel son be<strong>au</strong>-père passa sa charge


76<br />

d'élu <strong>en</strong> <strong>Berry</strong>, et qui occupa après lui sa niaisou devnt l collége (4).<br />

Sans doute Jean et H<strong>en</strong>ri sont les deux. prénoms d'un même ersonnagè<br />

qu'on désignait indifféremm<strong>en</strong>t de l'une et (le l'<strong>au</strong>tre manière; et l'on peut<br />

supposer que cet H<strong>en</strong>ri ))umoulin fut le père d'<strong>au</strong>tre H<strong>en</strong>ri m<strong>en</strong>tionné par<br />

La Th<strong>au</strong>massière (p. 213) comme conseiller <strong>au</strong> présidial et échievin <strong>en</strong><br />

1595 et dont lés armes étai<strong>en</strong>t celles qui figur<strong>en</strong>t. clans le blason de Thi-<br />

boust.. Quant à celui dont nous le supposons issu, l devait être quelqJe<br />

peu cousin de sa femme du fait de D<strong>en</strong>ise Dumoulin, mère de Thiboust.<br />

Le mari de Jeanne mourut probablem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> -I 567, car dans un rôle des<br />

tailles de la ville de Bourges 'pou i- -1568 on litque dans la rue de Paradis<br />

demeurait u Damoiselle Jehanne ThihousL vêfve de feu Me Jehan ])unionlin,<br />

» lequel apparaît <strong>en</strong>core sous son no m dans les rôlesprécéd<strong>en</strong>ts. Dans<br />

un <strong>au</strong>tre rôle de 590 elle est dési gnée sous les noms de « Damoiselle<br />

Jeanne Thiboust, dame de Boisvert. o -<br />

Enfin la généalogie des Bigot dans Lit (p. 4032), nous<br />

appr<strong>en</strong>d que Marie Thibousi. (2) épousa eu premières noces François<br />

Pajounet, contrôleur tIn domaine, -et <strong>en</strong> :secondes noces Mi<strong>en</strong>ne Bigot,<br />

sr des Fontaines, secrétaire dit et échevin de Bourgés <strong>en</strong> -1559. Cc der-<br />

nier, cousin-germain par alliance de .Jacques Gasot, neveu de Thihousi,<br />

fut <strong>en</strong>core Je be<strong>au</strong>-père de sa fille, son fils, Eti<strong>en</strong>ne Bigot, ne dit nom,<br />

ayant épousé Marie Gassot. De cette <strong>au</strong>tre alliance sortit Marie Bigot, qui<br />

épousa Païil Agarcl, sr' 'de Champ et père du jésuite de ce nom. Cet Mi<strong>en</strong>ne<br />

jeune eut pour soeur Marie Bigot, qui épousa Pierre Jl<strong>en</strong> gy, receveur des<br />

aides et tailles <strong>en</strong> Berr y.- éhevin <strong>en</strong> 1601-1602, et frère du professeur de<br />

droit, Antoine, <strong>au</strong>teur de labriinehe des de Puy-Vallée..--<br />

Sur un rôle d'impositions des années 4567 et 1568, MaridThiboust est<br />

dénommée comme veuve de feu Me Eti<strong>en</strong>ue Bigot et comme logeant dans<br />

(I) Areh. dép' e' du Cher, fonds des Carnies , u. 9. - Transaction du 19 juin 1558<br />

<strong>en</strong>tre irit. Dumoulin et les Carmes <strong>au</strong> sujet de la jouissance de deux écuries qui Joûtai<strong>en</strong>t<br />

sa maison ; ces deux écuries fur<strong>en</strong>t plus lard remplacées , j'imagine , par la<br />

maison qu'occupa de nosjours la librairie Vermeil. Pour la résignation par Tinboust<br />

de sa charge à ce g<strong>en</strong>dre, voir <strong>au</strong>x méines archives (fonds du burei des juances),<br />

le registre de vérification, aLtaclieset <strong>au</strong>tres exeéditioôs tic la GA de Languedoil<br />

h Bourges, (1551-5f.) fu 37,. -.<br />

(2) Ce doit être par eretu', comme je l'ai dit, que La Tli<strong>au</strong>masslère signale à cette<br />

occasion Marie Tluhoust comme fille de Marié de La Tour. Nous n'avons vu nulle part<br />

i1uc Tbibôust se soit remarié • et Cailn'rinoi désigne nettem<strong>en</strong>t Marie comme fille de<br />

Jeanne de La Foot. L'erreur peut s'expliquer pour le nom de famille par une f<strong>au</strong>te de<br />

typographie Lathur ayant été lit La Font. Quant <strong>au</strong> prénom de Marie, cletiné à<br />

la mère ainsi qui la fille, il n pu élre porté par les deux, et s'a lliet «liez ia''première<br />

celui de Jeanne, par lequel on la désignit plus liabituellemeut. . t


71 -<br />

la rue, o t<strong>en</strong>dant du coing de Frétisson <strong>au</strong>x Jacobins, » ce qui répond, si<br />

je ne me trompe, à la rue de la Monnaie actuelle;<br />

Ce'fut par Marie Thiboust que la seigneurie deQuantilly <strong>en</strong>tra dans la<br />

maison Bigot et ce fut soit Jean-Jacques Bigot, secrétaire du rôi, qui<br />

par contrat du 28 avril 1648, échangea cette propriété avec l'archevêque<br />

André Frémiet contre sa portion de la terre de Chabris.<br />

Vanité des choses humaines! de châte<strong>au</strong>, amours de son maitre, sortit,<br />

de sa famille dès la troisième génération; Mantille elle-même était tombée <strong>en</strong><br />

qu<strong>en</strong>ouille, <strong>en</strong> sorte que le ti<strong>en</strong>t put se transmettre. Et, comme si une<br />

sorte (le fatalité s'était attachée à cc nom, il disparut avec l'épitaphe qui le<br />

signalait <strong>en</strong>core à l'att<strong>en</strong>tion des rares curi<strong>en</strong>xque le hasard pouvait orn<strong>en</strong>er<br />

dans l'ég]ise de Quantilly. Il a fallu pour qu'il 'ne jiérit pas tout à fait<br />

quelques lignes charitables de La Th<strong>au</strong>rnassière et de Catherinot, et quelques<br />

vers louangeurs du poète Habert. Le livre,-pour la duréè, prév<strong>au</strong>t sur<br />

la pierre et le marbre. -<br />

En somme, à considérer les titres littéraires de Thiboust et de sa femme,<br />

tels que nous v<strong>en</strong>ons de les exposer, on trouvera peut-être que nous avons<br />

un peu trop appuyé sur des figures qui ne méritai<strong>en</strong>t pus- une étude <strong>au</strong>ssi<br />

longue. Mais noire excuse est dans les circonstances du temps même où<br />

vécur<strong>en</strong>t Jacques et Jeanne. Où coi était la littérature <strong>en</strong> France k cette -<br />

époque? Quand mourut Thihoust, la Pléiade naissait, et l'on comm<strong>en</strong>çait<br />

d'imprimer à Lyon les poésies de Louise Labé. Ce tut alors que s'éteignait<br />

l'école poétique de la fin du fle siècle que nos deux personnages ont vécu,<br />

faisant de Bourges à ce mom<strong>en</strong>t, ce qu'il n'est jamais plus redev<strong>en</strong>u, un<br />

c<strong>en</strong>tre littéraire et de bel esprit. Il f<strong>au</strong>t bi<strong>en</strong> l'avouer, ce n'est pas par les<br />

qualités de l'imagination que nous brillons, nous <strong>au</strong>tres g<strong>en</strong>s du <strong>Berry</strong>. On<br />

compr<strong>en</strong>dra que la muse des sci<strong>en</strong>ces vive parmi nous, celle du chant be<strong>au</strong>coup<br />

moins. Si la poésie, tuée <strong>en</strong> France pur les platitudes du réalisme,<br />

qui t<strong>en</strong>d à s'y implanter, y devait disparaître, nos départem<strong>en</strong>ts du C<strong>en</strong>tre<br />

sont (le ceux où l'on s'apercevrait le moins de ce phénomène. La floraison -<br />

qu'ils ont produite <strong>en</strong> ce g<strong>en</strong>re y a été assez clairsemée, et d'un médiocre<br />

parfum (1). Ait que comptons-noùs avant Thiboust? Ri<strong>en</strong> dont la mémoire<br />

se soit transmise. De so it Habert voit le jour dans ]c « Bas-<strong>Berry</strong>; un<br />

(1) En toutes choses il est des exceptions dont il f<strong>au</strong>t savoir t<strong>en</strong>ir compter et ceci,<br />

d'ailleurs, n'est qu'un point de vue d'<strong>en</strong>semble qÙi ne s'arrête pas <strong>au</strong>x détails. Au<br />

surplus, j'ajouterai, pour bi<strong>en</strong> expliquer ma p<strong>en</strong>sée,' que je fais ici abstraction de<br />

l'époque actuelle, où le s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t poétique s'est <strong>au</strong> contraire réveillé soir certains<br />

peints de notre province avec un éclat incontestable, ai qui ne laisse li<strong>en</strong> à <strong>en</strong>vier<br />

<strong>au</strong>x <strong>au</strong>tres. Mon att<strong>en</strong>tion se porte ici principalem<strong>en</strong>t sur tout ce qui a précédé IL<br />

Xix' siècle. -


-. 78<br />

peu plus tard à Bourgès, c'est Motin une des victimes des injustices de<br />

Boile<strong>au</strong>. De ces deux poètes de cour, le premier fut d'une médiocrité incontestable,'<br />

et qui n'eut d'égale que sa trop grande fécondité. Quant à l'<strong>au</strong>tre;<br />

s'il n'a pas mérité l'arrêt plus que sévèS qu'a r<strong>en</strong>du contre lui le législateui<br />

du Parnasse, il ne constitue pas cep<strong>en</strong>dant une personnalité poétique<br />

assez tranchée pour infirmer l'accusation de prosaïsme qui pèse sur le<br />

passé, dé notre pays.<br />

Cette disette de poètes <strong>en</strong> <strong>Berry</strong> sera donc notre excuse. C'est elle qui<br />

nous a <strong>en</strong>gagé à réunir sur le ménage littéraire des Thihoust tous les<br />

docum<strong>en</strong>ts <strong>en</strong>core existants que nous avons pu retrouver. Peut-être nous<br />

sommes-nous exagéré l'intérêt de cette étude. Elle <strong>en</strong> avait be<strong>au</strong>coup pour<br />

nous, elle peut n'<strong>en</strong> avoir que fort Feu pour ceux qui la liront. Nous-ne<br />

pouvons croire cep<strong>en</strong>dant que le sil<strong>en</strong>ce sur ce point ne fût pas regrettable,<br />

et qu'il n'y eût pas conv<strong>en</strong>ance à le rompre <strong>en</strong> éveillant des souv<strong>en</strong>irs qui<br />

dormai<strong>en</strong>t depuis plus de deux siècles. Sans doute le sujet eut gagné à<br />

être traité par une <strong>au</strong>tre plume; mais c'est <strong>en</strong> pareil cas surtout que l'int<strong>en</strong>tion<br />

doit être comptée pour quelque chose, si même elle ne ti<strong>en</strong>t lieu<br />

du tout.<br />

-)--


D<br />

1


-<br />

ùJ4t.<br />

lJè libris et signature deJacq7aes Thilbousi

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