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— Je parlerai à Mathieu Deshamel, commen<strong>ce</strong>-t-il très sérieusement. Je ne tiens pas à <strong>ce</strong> que vous soyez<br />
pénalisée dans vos études.<br />
— Je ne demande <strong>au</strong>cun passe-droit. Je me débrouillerai.<br />
— Ce n’est pas une suggestion, c’est une affirmation, corrige-t-il. Vous devez considérer <strong>ce</strong> travail<br />
comme une réelle expérien<strong>ce</strong> pr<strong>of</strong>essionnelle.<br />
Je n’hésite pas longtemps même si j’éprouve malgré tout quelques scrupules.<br />
— Vous savez Mina, dans <strong>ce</strong>tte école comme dans bien d’<strong>au</strong>tres milieux, vous devez utiliser toutes les<br />
possibilités qui vous sont <strong>of</strong>fertes. C’est un univers d’influen<strong>ce</strong>s, ne refusez jamais une main qui se tend.<br />
Apprenez à naviguer en e<strong>au</strong>x troubles et laissez-moi vous guider un moment.<br />
Mes doigts jouent nerveusement sur les touches du clavier de l’ordinateur.<br />
— Très bien, j’ac<strong>ce</strong>pte, dis-je en éclaircissant ma voix.<br />
— Dans <strong>ce</strong> cas, nous pouvons commen<strong>ce</strong>r à travailler.<br />
Je me redresse, toute à mon affaire et je lui demande d’emblée quel enfant il a été. P<strong>au</strong>l Peyriac rit mais<br />
consent à remonter plus loin que <strong>ce</strong> qu’il avait prévu. Il se lan<strong>ce</strong> alors dans le récit, raconte ses parents,<br />
son admiration pour son père, la be<strong>au</strong>té de sa mère, la naissan<strong>ce</strong> de ses sœurs qui seront, pour le reste de<br />
sa vie, ses meilleures amies. Il ac<strong>ce</strong>pte de faire des recherches dans ses photographies de famille et sort<br />
un vieil album qui n’a pas été ouvert depuis des dizaines d’années. Il s’installe près de moi et, posant le<br />
doigt sur quelques clichés, raconte l’occasion, l’événement, la joie souvent. P<strong>au</strong>l a eu une enfan<strong>ce</strong><br />
heureuse, insouciante.<br />
Je suis emportée dans son récit comme s’il me confiait les clés d’un trésor. J’ai parfois l’impression<br />
d’être de sa famille, de courir les rues de Paris à ses côtés, d’entrer dans l’arrière-cour de l’imprimerie<br />
en cachette. Je suis en 1950 et je m’émerveille de tout.<br />
Je prends de nombreuses notes, mes cours de sténo me sont plus que précieux. Je ne veux rien perdre des<br />
expressions spontanées de mon conteur. Les mots coulent de sa bouche avec tant d’éviden<strong>ce</strong> que leur en<br />
substituer d’<strong>au</strong>tres serait un crime.<br />
Je ne vois pas le temps passer. Ce n’est que lorsque ma tante vient frapper à la porte pour annon<strong>ce</strong>r un<br />
visiteur que nous nous aper<strong>ce</strong>vons <strong>au</strong>ssi étonnés l’un que l’<strong>au</strong>tre qu’il est déjà près de 18 heures 30.<br />
— Je suis désolé, Mina, s’excuse-t-il. Je vous ai retenue plus longtemps que prévu. Je veillerai à me<br />
montrer plus raisonnable la prochaine fois.<br />
— Ça ne fait rien, vraiment, j’ai be<strong>au</strong>coup aimé vous écouter.<br />
Mes paroles semblent le rassurer un peu. Il prend congé de moi avec courtoisie et me donne rendez-vous<br />
le surlendemain à la même heure. Je range promptement mon matériel et je me f<strong>au</strong>file à la cuisine.<br />
— Vous semblez bien vous entendre, constate L<strong>au</strong>ren<strong>ce</strong> devant ma mine réjouie.