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Anatomie d'un "quartier de gares" : recompositions ... - Urbamet

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sont tracées, elles relient les <strong>quartier</strong>s rési<strong>de</strong>ntiels <strong>de</strong> La Ma<strong>de</strong>leine au centre administratif<br />

(et non, par exemple, les <strong>quartier</strong>s d'habitat social aux équipements culturels ou<br />

commerciaux projetés).<br />

C'est que la réussite du projet est in<strong>de</strong>xée à sa capacité à faire rupture avec le tissu<br />

environnant. Tout se passe comme si le passage à l'ère mo<strong>de</strong>rne se faisait par exclusion ; le<br />

traitement <strong>de</strong> l'espace est symptomatique <strong>de</strong> la distinction opérée avec les <strong>quartier</strong>s<br />

populaires. Le projet est gros consommateur d'espace : son emprise au sol et l'unité qu'il<br />

manifeste même esthétiquement produisent un effet <strong>de</strong> masse en rupture avec les gabarits<br />

<strong>de</strong>s <strong>quartier</strong>s mitoyens. La rupture est voulue, présentée sur le plan esthétique comme un<br />

effet dramatique, et sur le plan urbain comme une condition nécessaire au renouveau : c'est<br />

le thème du salutaire « coup <strong>de</strong> poing dans la ville ». Et pour exalter le nouveau <strong>quartier</strong>,<br />

secon<strong>de</strong> consommation d'espace, le vi<strong>de</strong> s'impose autour <strong>de</strong> lui. Ceci rappelle « la<br />

célébration <strong>de</strong> puissance qui exige l'ex nihilo comme son garant dramaturgique » dont parle<br />

J.S.Bordreuil à propos <strong>de</strong> l'esthétique <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> surface 39 .<br />

Dans la lignée du propos développé par l'architecte, un avis du Cercle <strong>de</strong> qualité<br />

urbaine et architecturale rappelle cette nécessité <strong>de</strong> rupture avec la « banlieue », ou plus<br />

exactement avec les <strong>quartier</strong>s populaires limitrophes. « Il serait souhaitable <strong>de</strong> reconsidérer<br />

le parti proposé pour les franges du projet côté Saint-Maurice et Fives. Il serait judicieux<br />

<strong>de</strong> marquer la limite du tissu existant et du Centre <strong>de</strong>s gares par un vi<strong>de</strong>, qui permettrait<br />

aussi <strong>de</strong> marquer la ceinture verte <strong>de</strong> Lille (…) » précise le Cercle <strong>de</strong> qualité en novembre<br />

1989 40 . Non sans ironie, l'alibi verdoyant est invoqué : on parle <strong>de</strong> ceinture verte, on se<br />

félicite <strong>de</strong> la création <strong>d'un</strong> parc urbain dans une ville qui en compte peu. Mais c'est à une<br />

sorte <strong>de</strong> transfert qu'on assiste : le projet rogne sur le parc <strong>de</strong>s Dondaines, très fréquenté<br />

par les habitants <strong>de</strong> Caulier, plutôt populaire, et suffisamment vaste pour accueillir <strong>de</strong>s<br />

équipements divers : il comprenait entre autres une rampe d'escala<strong>de</strong>, <strong>de</strong> nombreux jeux<br />

pour les enfants, une ferme pédagogique, et logeait même sur son flanc un centre équestre<br />

privé, avec un recrutement social orienté vers les couches plus aisées. Sur l'emprise <strong>de</strong><br />

l'ancien parc seront construits les nouveaux boulevards périphériques 41 , les voies du TGV<br />

passant elles en-<strong>de</strong>ssous, en tunnel. Le nouveau parc est ramené <strong>de</strong> l'autre côté <strong>de</strong> ces<br />

infrastructures viaires, au cœur du nouveau <strong>quartier</strong>, et ne comprend plus aucun jeu.<br />

Présenté comme un gage <strong>de</strong> la qualité urbaine du projet, il correspond davantage à un<br />

transfert d'équipement, <strong>d'un</strong> <strong>quartier</strong> populaire au nouveau <strong>quartier</strong> d'affaires et à ses<br />

« nouveaux habitants ».<br />

Articulation et changement d'échelle<br />

La théorie urbaine qui anime le projet est celle <strong>de</strong> la confrontation intégratrice 42 ;<br />

elle semble directement inspirée du modèle du silex et tient en <strong>de</strong>ux mots : il faut frapper<br />

très fort ces <strong>de</strong>ux éléments antagoniques propres à la ville que sont le centre et la banlieue<br />

et <strong>de</strong> cette confrontation naîtra une entité urbaine <strong>d'un</strong> nouveau genre, relevant <strong>d'un</strong>e autre<br />

39 J.S.Bordreuil, "Changement d'échelle urbaine…", art. cit.<br />

40 L'architecture d'aujourd'hui, n°280, avril 1992, p.122<br />

41 C'est en 1986 que le nouveau tracé du boulevard périphérique est <strong>de</strong>ssiné. La décision n'est pas imputable<br />

au projet Euralille lui-même, mais y est intégrée.<br />

42 « Le projet urbain d’Euralille, conçu par Rem Koolhaas, propose une nouvelle approche <strong>de</strong> la ville. Il<br />

dépasse les attentes fonctionnelles et rationnelles du programme en procédant d’une nouvelle logique : celle<br />

qui consiste à créer un rapport conflictuel avec le tissu environnant » relate I. Menu, architecte qui fut au<br />

sein <strong>de</strong> la SAEM collaboratrice <strong>de</strong> Rem Koolhaas dont elle rappelle un maître-mot : le « Fuck context<br />

syndrom ». I.Menu, Euralille, Poser, Exposer, op. cit. , p 8<br />

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