Texte de Manon et Réjean - Syndicat de l'enseignement de l ...
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paroxysme vers <strong>de</strong>s lieux inconnus, je m’endormis…Mon souffle virevoltait lentement autour <strong>de</strong> moi, il<br />
<strong>de</strong>scendait en tournoyant légèrement, puis il s’est arrêté doucement sur le trottoir. Ma vie était en<br />
suspension : ma vie, ce merveilleux prélu<strong>de</strong> à la mort...J’entendis <strong>de</strong>s voix, <strong>de</strong>s murmures d’un autre<br />
mon<strong>de</strong> : « Marie-Anne, Marie-Anne… »<br />
Le reste ne fut que confusion, les lumières s’agitèrent aux vitres teintées noires, <strong>de</strong> grands coups me<br />
ramenaient sur le bord du rivage <strong>et</strong> <strong>de</strong>s hommes tout en blanc, comme <strong>de</strong>s anges, me dénudant :<br />
l’écho lointain d’un paradis promis.<br />
Je repris conscience quelques heures plus tard à l’hôpital, en salle d’observation. Putain, cela me prit<br />
un bon moment à comprendre ce qui m’était arrivé. Il y avait un vieux qui était allongé à ma droite, il<br />
était si pâle que sa peau luisait dans la pénombre. Il ressemblait à un macchabée si menu <strong>et</strong> si fragile,<br />
il avait dû être victime d’une crise cardiaque. Je me dis que j’avais probablement la même allure, nous<br />
partagions c<strong>et</strong>te même fragilité <strong>et</strong> cela me fit pleurer. Des torrents silencieux jaillirent <strong>de</strong> mes<br />
yeux…Douleur mu<strong>et</strong>te <strong>de</strong> tout ce que j’aurais pu perdre, pleurs étouffés <strong>de</strong> douleur, tout mon être<br />
tendait vers un moment extraluci<strong>de</strong> où je réalisais toutes les blessures enfouies en moi…J’étais seule,<br />
seule au mon<strong>de</strong> face à ma mort. Personne ne savait ce qui m’était arrivé. Je venais <strong>de</strong> mourir <strong>et</strong><br />
j’affrontais cela seule… Je me sentais comme un enfant face au mystère <strong>de</strong> la vie…Je renaissais d’un<br />
grand trou noir qui consuma tout souvenir <strong>et</strong>, comme quelques instants avant ma naissance, j’étais<br />
seule, j’avais mal…Je me rendormis. Quelques heures plus tard, je regardai mon voisin <strong>de</strong> chambre à<br />
nouveau, je songeai que, parmi les milliards d’humains sur la Terre, nous étions les <strong>de</strong>ux êtres réunis<br />
en c<strong>et</strong>te chambre en ce moment précis, en ce lieu, <strong>de</strong>ux êtres qui ne se parleraient jamais <strong>et</strong> qui,<br />
pourtant, avaient vécu une <strong>de</strong>s plus gran<strong>de</strong>s expériences <strong>de</strong> leur vie côte à côte : le r<strong>et</strong>our à la vie.<br />
Je partis <strong>de</strong> nouveau quelques semaines plus tard après m’être remise, mais c<strong>et</strong>te fois-ci, vers l’est.<br />
Tout en moi faisait allusion à un nouveau départ <strong>et</strong> je ressentais cela profondément à chaque instant.<br />
Chaque nouvelle pensée, chaque geste, chaque lever <strong>et</strong> chaque coucher <strong>de</strong> soleil, chaque personne<br />
rencontrée, chaque mot écrit <strong>et</strong> chaque nouvelle feuille blanche me donnaient la chance <strong>de</strong> renaître<br />
<strong>de</strong>s milliards <strong>de</strong> fois <strong>et</strong> cela était merveilleux.<br />
<strong>Texte</strong> gagnant<br />
Élève : Mélanie Séguin, 2 e cycle<br />
Centre Élisab<strong>et</strong>h-Bruyère (Rouyn-Noranda), CS <strong>de</strong> Rouyn-Noranda<br />
Enseignantes : Suzie Robichaud, SEUAT<br />
Chantal Dallaire, SEUAT<br />
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