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Ben Ali le ripou - Webvirage

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Ces déclarations, comme cel<strong>le</strong>s qu’a faites en plusieurs occasions son prédécesseur Jacques<br />

Chirac à propos du "mirac<strong>le</strong> tunisien" et des "avancées de la Tunisie sur la voie de la<br />

démocratie", ont beaucoup choqué <strong>le</strong>s militants des droits de l’homme en Tunisie et en<br />

France. Ces derniers savent, en effet, que <strong>le</strong> président <strong>Ben</strong> <strong>Ali</strong> a toujours été réélu avec des<br />

scores à la Soviétique, dépassant toujours <strong>le</strong>s 90% des suffrages. Et qu’il s’est toujours<br />

arrangé, par des amendements successifs de la Constitution, à limiter <strong>le</strong> champ de candidature<br />

à la présidence à quelques personnalités sans envergure. Ils savent aussi que son parti, <strong>le</strong><br />

RCD, a la mainmise sur toutes <strong>le</strong>s institutions de l’Etat : la Chambre des députés, la Chambre<br />

des conseil<strong>le</strong>rs, <strong>le</strong> gouvernement et <strong>le</strong>s grandes organisations nationa<strong>le</strong>s, cel<strong>le</strong>s des patrons,<br />

des femmes, des agriculteurs et, à un degré moindre, des travail<strong>le</strong>urs.<br />

Mais <strong>le</strong>s partenaires occidentaux de <strong>Ben</strong> <strong>Ali</strong> n’ont que faire de toutes ces considérations : la<br />

démocratie ne se décrète pas, disent-ils. C’est un mouvement qui vient de l’intérieur. Et ils<br />

sont d’autant plus disposés à fermer <strong>le</strong>urs yeux sur <strong>le</strong>s écarts de conduite de ce partenaire peu<br />

commode que ce dernier contribue à la guerre contre <strong>le</strong> terrorisme, joue un rô<strong>le</strong> modérateur<br />

dans la région et entretient des relations informel<strong>le</strong>s avec Israël. N’a-t-il pas reçu, en<br />

novembre 2005, à Tunis, l’ancien ministre israélien des Affaires étrangères, Silvan Shalom,<br />

faisant fi des critiques de ses opposants?<br />

Si <strong>le</strong>s bail<strong>le</strong>urs de fonds occidentaux se permettent, ponctuel<strong>le</strong>ment, de critiquer, et souvent à<br />

demi-mot, <strong>le</strong> manque de libertés publiques, <strong>le</strong> harcè<strong>le</strong>ment des défenseurs des droits de<br />

l’homme, <strong>le</strong> verrouillage des médias et l’absence d’indépendance de la justice, ils ne vont pas<br />

jusqu’à exercer des pressions amica<strong>le</strong>s en faveur d’une plus grande libéralisation politique.<br />

Pour eux, <strong>le</strong> régime tunisien est autoritaire et policier, mais il n’a pas démérité sur <strong>le</strong>s plans<br />

économique et social.<br />

En somme, vu d’Occident, <strong>Ben</strong> <strong>Ali</strong> apparaît comme un "bon dictateur", pro-occidental comme<br />

il se doit, et porteur d’un projet de modernisation économique et socia<strong>le</strong>, fut-el<strong>le</strong> en trompe<br />

l’œil. Mieux encore: dans une région où <strong>le</strong>s tensions ne manquent pas, il parvient à maintenir<br />

son pays dans un état de stabilité et de sécurité propice au business. Que cette sécurité soit<br />

sapée par l’arbitraire et la répression qu’au-delà des ennemis affichés (<strong>le</strong>s islamistes), el<strong>le</strong><br />

s’étend aux démocrates, ou que cette stabilité soit assurée autant par des dispositions<br />

économiques et socia<strong>le</strong>s que par une présence policière étouffante (entre 130.000 et 145.000<br />

agents, selon <strong>le</strong>s sources, pour 10,4 millions d’habitants), l’absence de discussions et de<br />

débats, l’inexistence d’une presse digne de ce nom, <strong>le</strong> culte du consensus et de l’unanimisme<br />

autour de la personne du chef de l’Etat et de son clan… tout cela ne semb<strong>le</strong> pas choquer outre<br />

mesure <strong>le</strong>s alliés occidentaux de <strong>Ben</strong> <strong>Ali</strong>.<br />

Certes, la Tunisie fait aujourd’hui l’objet d’une observation régulière de la part de la société<br />

civi<strong>le</strong> internationa<strong>le</strong> et des courants d’action en faveur des droits de l’homme, de la<br />

démocratisation et de l’Etat de droit. El<strong>le</strong> fait aussi l’objet d’une observation tout aussi<br />

régulière de la part des médias européens, y compris (et surtout) <strong>le</strong>s médias français. Mais "<strong>le</strong>s<br />

autorités tunisiennes ont peu à peu entrepris un véritab<strong>le</strong> apprentissage de la pression<br />

extérieure et de sa gestion, et par conséquent un affinement des modalités de répression"<br />

(Hibou), de manière à ce que la répression ne soit pas trop flagrante et n’incommode ses<br />

principaux partenaires occidentaux, comme la France, <strong>le</strong>s Etats-Unis ou l’Union Européenne,<br />

<strong>le</strong>squels, sous la pression des associations de défense des droits de l’homme, sont alors<br />

obligés d’intervenir pour obtenir la libération de tel opposant ou <strong>le</strong> départ de tel autre du pays.<br />

Comme <strong>le</strong> dit si clairement et crûment Mohamed Talbi, "<strong>le</strong>s autorités n’osent plus torturer<br />

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