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PERSPECTIVES D’ESPÉRANCE<br />
POUR LE DIOCÈSE DE<br />
TROIS-RIVIÈRES<br />
Lettre adressée aux fidèles<br />
du diocèse<br />
†<strong>Luc</strong> <strong>Bouchard</strong><br />
Évêque de Trois-Rivières<br />
Pâques 2013
Chers fidèles,<br />
Trois-Rivières<br />
Pâques 2013.<br />
Après une année parmi vous, il est peut-être temps de<br />
prendre la parole et de vous exprimer mon espérance pour<br />
l’avenir du diocèse de Trois-Rivières. Depuis mon arrivée, nous<br />
avons vécu de belles réalisations et ce, grâce à la collaboration<br />
hors pair, à la fois du personnel du Centre diocésain de <strong>pastorale</strong><br />
comme celui de l’Évêché. L’Année de la foi a été accueillie non<br />
seulement au niveau diocésain, mais aussi dans les communautés<br />
paroissiales, à un point tel qu’il serait trop long de tenter<br />
d’énumérer toutes les réalisations.<br />
Pour ma part, l’Année de la foi m’a incité à entreprendre une<br />
visite <strong>pastorale</strong> de tous les coins du diocèse. J’ai d’abord<br />
commencé par rencontrer le personnel des cinq zones <strong>pastorale</strong>s.<br />
Présentement, je rencontre les gens dans les paroisses et<br />
continuerai de visiter les 86 lieux de culte du diocèse répartis dans<br />
les 62 paroisses et 5 dessertes. Cette visite se poursuit toujours.<br />
2
Nombreuses ont été également les visites de sites spéciaux<br />
comme les résidences pour personnes âgées, le port de Trois-<br />
Rivières, le Centre de détention de Trois-Rivières et Le Havre qui<br />
accueille les sans-abris. Il ne faudrait pas oublier les visites dans<br />
les communautés religieuses qui sont non seulement présentes<br />
en grand nombre dans le diocèse, mais aussi toujours très actives<br />
malgré l’âge avancé et la fragilité de plusieurs membres. Et enfin,<br />
nombreuses, pour ne pas dire innombrables, ont été les<br />
rencontres individuelles et personnelles de laïcs engagés,<br />
hommes et femmes, diacres, prêtres, agents et agentes de<br />
<strong>pastorale</strong>.<br />
Tout cela m’a aussi permis de percevoir quelques ombres et<br />
de capter certaines inquiétudes, voire même, quelques craintes<br />
qui existent : «Que nous réserve l’avenir? Y aura-t-il toujours des<br />
paroisses comme nous les avons connues? Y aura-t-il toujours des<br />
prêtres? Qui seront les leaders de demain?»<br />
Je peux dire que même si je n’ai pas réponse à tout, je porte<br />
et j’accueille ces craintes et ces inquiétudes. Mais, ce qui me<br />
semble plus sérieux, c’est le sentiment ressenti d’une perte<br />
d’espérance. Il ne semble pas y avoir dans cette déstabilisation<br />
apparente – surtout des communautés paroissiales – une vision<br />
3
d’avenir qui serait le fil conducteur qui unirait nos actions. Il est<br />
certain que personne ne connaît l’avenir. Nul n’a une boule de<br />
cristal, pas même l’évêque! Toutefois, l’évêque se doit – toujours<br />
avec la grâce de Dieu – d’être signe d’espérance. Et pour moi,<br />
espérance veut dire le Christ :<br />
Que dis-je? Nous nous glorifions encore des tribulations, sachant<br />
bien que la tribulation produit la constance, la constance une vertu<br />
éprouvée, la vertu éprouvée l’espérance. Et l’espérance ne déçoit<br />
point, parce que l’amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par<br />
le Saint-Esprit qui nous fut donné (Rm 5, 3-5; cf. He 6, 18-19).<br />
Lorsque je suis arrivé au diocèse, j’entendais souvent<br />
l’expression «gérer la décroissance». Cette expression, si elle<br />
tentait de décrire le ministère épiscopal qui m’incombait, ne me<br />
plaisait pas beaucoup. Si la situation ecclésiale ne semblait plus<br />
être ce qu’elle fut – lorsque l’on calculait le succès par le nombre<br />
(alors, le constat aboutissait à l’idée de décroissance) – on<br />
gérerait donc la décroissance!<br />
Disons d’abord que telle n’était pas ma vision. Mon<br />
ministère épiscopal ne pouvait et ne peut s’identifier à gérer une<br />
décroissance, mais plutôt à être le témoin de la foi et à stimuler et<br />
encourager la croissance de la foi que Dieu seul peut susciter. En<br />
4
effet, il faut porter un regard d’espérance même dans les<br />
situations qui nous paraissent alarmantes. Je porte donc un<br />
regard d’espérance et je pose les questions suivantes à tous et à<br />
toutes :<br />
- Est-ce que Jésus du haut de la croix, seul et abandonné,<br />
gérait la décroissance (Mc 15, 34)?<br />
- Pour porter du fruit, ne faut-il pas que le grain de blé tombe<br />
en terre et meure? Autrement, il risque de rester seul (Jn 12,<br />
24)!<br />
- Et, en ce qui concerne l’avenir, ne croyons-nous pas que<br />
Jésus nous précède en Galilée (Mt 28,7)? Jésus est au-<br />
devant de nous; il nous y attend. Allons de l’avant!<br />
Pourtant, je veux demeurer réaliste et je ne peux faire fi de<br />
certaines données reçues jusqu’à ce jour. Je vous les partage en<br />
toute transparence :<br />
En ce qui concerne les prêtres diocésains, il est vrai, nos<br />
ressources diminuent. Le diocèse compte 33 prêtres responsables<br />
de paroisses ou dessertes (curé, modérateur, administrateur<br />
paroissial ou desservant) dont l’âge s’échelonne entre 47 et 90<br />
5
ans pour une moyenne de 72 ans. Et il n’y a que 8 prêtres en bas<br />
de 70 ans.<br />
Par ailleurs, il faut noter que le diocèse bénéficie de l’aide de<br />
prêtres membres d’Instituts de vie consacrée, ou de prêtres venus<br />
d’autres diocèses qui ont aussi charge de paroisses ou de<br />
dessertes. Cependant, leur moyenne d’âge est plus élevée (76<br />
ans), sauf pour les jeunes prêtres venus de contrées lointaines.<br />
De plus, et heureusement, les prêtres responsables de<br />
paroisses ou de dessertes peuvent compter sur l’aide de<br />
confrères. Ils sont 35, dont un vicaire, des auxiliaires ou<br />
collaborateurs, à apporter leur concours; mais, il faut se poser la<br />
question, pour combien de temps? Leur moyenne d’âge est aussi<br />
élevée : 76 ans pour les prêtres diocésains, 77 ans pour les prêtres<br />
venus d’ailleurs et, pour les prêtres membres d’Instituts de vie<br />
consacrée, la moyenne est moins élevée, c’est-à-dire, 67 ans.<br />
Il faut reconnaître que ces statistiques sont d’abord un éloge<br />
envers ces prêtres qui tiennent bon au prix de leur santé et même<br />
au-delà des exigences canoniques (cf : can. 538). Ils font preuve<br />
d’une générosité que l’on ne saurait trouver ailleurs dans d’autres<br />
«métiers». Ils n’osent pas lâcher prise par souci des communautés<br />
6
chrétiennes et par crainte d’une infidélité que nul n’oserait<br />
aucunement leur reprocher. En effet, j’en profite pour les<br />
remercier du fond du cœur.<br />
Le diocèse compte aussi 23 agentes et un agent de <strong>pastorale</strong><br />
en paroisse, dont 8 au plan diocésain. N’oublions pas aussi les 32<br />
diacres, plus 2 candidats qui se préparent à l’ordination diaconale.<br />
Mais tant au niveau des agentes et agents de <strong>pastorale</strong> qu’au<br />
niveau des diacres, la relève se fait rare et tous avancent aussi en<br />
âge.<br />
Toutefois, en réponse à ces réalités alarmantes, il y a eu, avant<br />
mon arrivée, de réelles tentatives de solutions dont le succès n’a<br />
pas toujours été celui qu’on attendait. En effet, les paroisses<br />
étaient devenues trop nombreuses par rapport au clergé et aux<br />
différentes ressources locales. Des remodelages ont été effectués<br />
(par exemple : la paroisse Sainte-Marguerite-d’Youville à<br />
Shawinigan). On a même effectué des ventes d’églises (Saint-<br />
François-d’Assise, Sainte-Cécile, Saint-Philippe, etc.). On a aussi<br />
accueilli un clergé venant de l’extérieur du pays pour pallier au<br />
manque d’effectifs.<br />
7
Même si toutes ces solutions n’ont pas eu le succès escompté,<br />
elles ont eu pour avantage de réveiller et de secouer des énergies<br />
dormantes et insoupçonnées, non seulement en ces lieux, mais<br />
aussi ailleurs dans le diocèse. L’espace créé a permis à de<br />
nombreux laïcs de s’engager plus particulièrement dans la vie de<br />
leur paroisse. Ils ont davantage pris conscience de ce qu’ils sont et<br />
de leur contribution en tant que baptisés, c’est-à-dire, en tant que<br />
responsables de la transmission de leur foi. À cet égard, voici ce<br />
qu’écrivait Jean-Paul II :<br />
Le renouveau de l’Église, en Amérique, ne sera pas possible sans la<br />
présence active des laïcs. C’est pourquoi, la responsabilité de l’avenir<br />
de l’Église retombe en grande partie sur eux. 1<br />
Je souligne le travail et l’animation non seulement d’A.D.A.C.E.<br />
par des laïcs, mais aussi la prise en charge de communautés<br />
paroissiales par des laïcs également : il y a eu la nomination des<br />
agentes et agents de <strong>pastorale</strong>, la création d’équipes <strong>pastorale</strong>s et<br />
de trios pastoraux. À cela, il faut ajouter les centaines et centaines<br />
de bénévoles engagés en paroisse particulièrement en catéchèse.<br />
Même si ces nouvelles formes d’animation, permises et<br />
1 Ecclesia in America, (1999) paragraphe 44.<br />
8
encouragées par l’Église (can. 517) n’ont pas été accueillies<br />
partout avec le même enthousiasme, il y a là une réelle prise en<br />
charge de la communauté par des membres de la communauté.<br />
On prend donc conscience que toute la responsabilité d’une<br />
communauté paroissiale n’est pas l’apanage du seul curé.<br />
Mais, malgré tous ces efforts, l’impression de déstabilisation<br />
demeure toujours et l’inquiétude d’un avenir incertain des<br />
paroisses persiste. Comment les vaincre et les surmonter? Y a-t-il<br />
quelque part d’autres solutions? Peut-il y avoir une vision<br />
commune, un point de ralliement et d’ancrage solide pour tous?<br />
En d’autres mots, peut-on «faire paroisse» autrement? Peut-on<br />
trouver dans la Parole de Dieu quelque éclairage? Je vous partage,<br />
encore une fois, quelques questions :<br />
«Comment les premières communautés chrétiennes ont-elles vu<br />
le jour, vécu, voire même survécu?» D’après les Actes des Apôtres,<br />
comment les communautés chrétiennes qui n’avaient pas<br />
d’églises et qui étaient, en plus, persécutées (et qui donc avaient<br />
toutes les raisons pour abandonner leur foi et leur communauté<br />
chrétienne), ont-elles survécu?<br />
Actes 2, 42 décrit leur situation de la façon suivante :<br />
9
- (les communautés) se montraient assidues à<br />
l’enseignement des Apôtres (Parole de Dieu);<br />
- elles étaient fidèles à la communion fraternelle (charité),<br />
- à la fraction du pain (Eucharistie),<br />
- à la prière.<br />
Il faut d’abord dire que, d’après ce passage de l’Écriture, si<br />
nous voulons être fidèles à ce que nous sommes, nous devons<br />
reprendre ce texte et l’actualiser pour nos communautés,<br />
aujourd’hui.<br />
1) Sommes-nous interpelés par la Parole de Dieu (fidèles à<br />
l’enseignement des Apôtres)? Est-ce que la Parole de Dieu<br />
imprègne et éclaire toute notre <strong>pastorale</strong>? Encourageons-<br />
nous les cercles d’études bibliques ou autres dans nos<br />
milieux, ainsi que la formation de nos leaders de demain, la<br />
promotion de la catéchèse à tous les âges et les groupes de<br />
partage d’évangile, etc.?<br />
2) Sommes-nous interpelés à former des communautés<br />
fraternelles (fidèles à la communion fraternelle)? Est-ce que<br />
nous mettons en commun nos ressources qui devraient<br />
10
s’orienter d’abord à la promotion de la personne humaine<br />
et à soulager la pauvreté, soit à l’intérieur ou à l’extérieur<br />
de nos communautés? Les bâtisses que nous possédons ne<br />
doivent-elles pas d’abord et avant tout servir à la charité<br />
fraternelle? Et si elles servent au culte, elles ne doivent pas<br />
épuiser les ressources financières de nos communautés. Ici,<br />
les marguilliers ont une grande responsabilité vis-à-vis les<br />
communautés chrétiennes et je les inviterais, bien<br />
cordialement, à réfléchir à ce problème et à trouver de<br />
nouvelles solutions. Comme me l’a si bien souligné un<br />
marguillier du diocèse : «Nos églises ne doivent pas nous<br />
empêcher d’être "Église". »<br />
3) Nourris par l’Eucharistie (fidèles à la fraction du pain). Le<br />
Concile Vatican II et le dernier synode sur l’Eucharistie nous<br />
ont rappelé très clairement que l’Eucharistie est le centre et<br />
le sommet de nos vies chrétiennes (cf. Lumen Gentium 11,<br />
1964 et Ecclesia de Eucharistia, 2003). Avons-nous bien<br />
conscience que nous sommes «Église de l’Eucharistie»?<br />
Nous ne sommes pas des «congrégationalistes» 2 . Nous<br />
2 «Certaines des Églises issues du puritanisme sont appelées ‘congrégationalistes’ en raison de leur<br />
principe d’organisation selon lequel chaque assemblée (congrégation) doit être autonome» (J.P.B.<br />
KENYON sur : www.thecanadianencyclopedia.com/articles/fr/eglises-congregationalistes).<br />
11
sommes des communautés qui naissent de l’Eucharistie! Les<br />
sacrements et, en particulier, l’Eucharistie font partie de<br />
notre vie chrétienne. Bien sûr, les lieux pour le<br />
rassemblement eucharistique sont importants! Mais,<br />
posons-nous franchement la question : «En faut-il autant?»<br />
Il faudra donc ici faire des choix : en effet, est-ce que<br />
présentement tous les lieux de culte sont nécessaires? Il<br />
faut se rappeler que les «communautés chrétiennes» ont<br />
précédé les «communautés paroissiales»? Et si tel est le cas,<br />
il faut, dans certaines situations et dans certaines régions où<br />
il y a plusieurs églises paroissiales, choisir parmi elles, une<br />
seule qui serait lieu de rassemblement et de célébration.<br />
Si la célébration de l’Eucharistie ne peut avoir lieu au<br />
moins une fois par semaine, le dimanche, qui est le Jour du<br />
Seigneur, faute de prêtre, il est fort recommandable de<br />
célébrer une A.D.A.C.E. comme communauté rassemblée<br />
autour de la Parole de Dieu. Mais si nous reprenons<br />
l’abréviation du mot A.D.A.C.E., cela veut dire Assemblée<br />
dominicale en attente de célébration eucharistique. Notre<br />
visée c’est toujours l’Eucharistie.<br />
12
Il faudra donc promouvoir en tout temps les vocations<br />
sacerdotales dans notre milieu. Ceci peut se faire de<br />
plusieurs façons : par une <strong>pastorale</strong> renouvelée des<br />
vocations, par la promotion active des vocations<br />
sacerdotales, par l’invitation de prêtres internationaux<br />
(quoique ceci puisse comporter de longues attentes), par la<br />
mise sur pied de services vocationnels spéciaux comme nous<br />
tenterons de le faire ici à Trois-Rivières. En effet, nous<br />
désirons, en autant que cela sera possible, mettre sur pied<br />
une maison de cheminement spirituel pour les jeunes gens,<br />
laquelle maison pourrait conduire certains d’entre eux à la<br />
découverte d’une vocation au ministère presbytéral. Notre<br />
Église locale ne peut se dispenser de la présence du prêtre<br />
non seulement pour l’Eucharistie et pour les autres<br />
sacrements, mais aussi pour accompagner et soutenir nos<br />
communautés chrétiennes. Là-dessus, je reviendrai encore<br />
plus loin.<br />
4) Nous ne pouvons rien faire seuls (fidèles à la prière). Tous<br />
nos efforts pour renouveler notre <strong>pastorale</strong> paroissiale<br />
comme notre <strong>pastorale</strong> vocationnelle doit reposer sur la<br />
prière.<br />
13
Pour justifier toutes ces démarches, je voudrais à ce point-ci<br />
faire écho aux paroles de Jésus dans l’Évangile :<br />
1) (Fidèles à la Parole) : «Tu as les paroles de la vie<br />
éternelle» (Jn 6, 68).<br />
2) (Fidèles à la communion fraternelle) : «C’est à ce signe<br />
que l’on reconnaîtra que vous êtes mes disciples à<br />
l’amour que vous aurez les uns pour les autres» (Jn 13,<br />
35).<br />
3) (Fidèles à la fraction du pain) : «À moins de manger ma<br />
chair et de boire mon sang, vous n’avez pas ma vie en<br />
vous. Qui mange ma chair et boit mon sang a la vie<br />
éternelle et moi je le ressusciterai au dernier jour» (Jn 6,<br />
53-54).<br />
4) (Fidèles à la prière) : «Veillez et priez en tout temps» (Lc<br />
21, 36).<br />
Jusqu’à maintenant si notre vision est juste, je crois qu’il<br />
nous faut, en ce qui concerne les paroisses, un changement de<br />
mentalité. La paroisse, qui autrefois se définissait par un curé, un<br />
territoire, une église, doit maintenant se convertir et devenir<br />
davantage «communauté», même «communauté de<br />
14
communautés», c’est-à-dire, une communauté formée de<br />
plusieurs communautés (fidèle à la communion fraternelle, cf : Ac<br />
2, 42).<br />
Si, comme je l’ai dit plus haut, les paroisses sont<br />
importantes, elles ne sont peut-être pas, toutefois, éternelles. Les<br />
défis que rencontre présentement la majorité des diocèses au<br />
Québec, à leur égard, en sont le signe. C’est vrai que les paroisses<br />
n’ont pas toujours existé, les Actes des Apôtres en témoignent. Et<br />
même si les paroisses existent toujours, il est bien connu que<br />
certains en ont prédit la disparition 3 , d’autres, au contraire, en ont<br />
reconnu leur importance pour l’évangélisation 4 et le Code de droit<br />
canonique (no. 515) comme la Loi sur les Fabriques en admettent<br />
toujours la réalité. Personnellement, je préfère croire qu’elles<br />
continueront d’exister si, toutefois, elles osent risquer une<br />
conversion. Comme l’a admis la CECC (Conférence des évêques<br />
catholiques du Canada) dans un texte récent : «La paroisse pour<br />
3 Normand PROVENCHER o.m.i., Trop tard? L’avenir de l’Église d’ici, Novalis, 2002 (cf : Normand<br />
Provencher, «Baissons-nous les bras?», entrevue parue dans la revue de Notre-Dame-du-Cap, janvier<br />
2013, p. 18-20, 10 ans après la parution du livre Trop tard?).<br />
Roch PAGÉ, The Parish : La Paroisse dans cinquante ans, (pro manuscripto) conférence donnée en anglais<br />
au 74 e congrès annuel de la Canon Law Society Of America, tenu à Chicago du 8 au 11 octobre 2012. Le<br />
thème de ce congrès portait sur «La Paroisse, cinquante ans dans l’avenir».<br />
4 La dynamique missionnaire de la paroisse, texte de la Commission de la doctrine de la CECC, 2013.<br />
15
survivre doit devenir communauté 5 », c’est-à-dire, la paroisse doit<br />
devenir non plus «une entité de consommation», mais une entité<br />
qui s’identifie par des personnes et leurs vies chrétiennes plutôt<br />
que par un édifice; par un témoignage de Jésus-Christ et une<br />
mission universelle plutôt que par un territoire.<br />
J’ose établir ici un programme pour les 10 ou 15 prochaines<br />
années. Les paroisses doivent d’abord devenir «communautés»,<br />
communautés qui s’identifient par l’accueil de la Parole, l’accueil<br />
du prochain, l’accueil de l’Eucharistie et l’accueil de la prière.<br />
Est-ce qu’on peut rêver que des paroisses s’unissent pour<br />
devenir une «communauté de communautés» où l’Évangile et les<br />
personnes ont d’abord la priorité sur les «édifices»?<br />
Tout ne se fera pas en un clin d’oeil, mais peut-on penser<br />
qu’il puisse y avoir un ou des projets pilotes qui mettraient en<br />
œuvre ce rêve, lequel deviendrait modèle pour les autres?<br />
Reste à répondre aux questions suivantes : «Que ferait-on<br />
des autres églises même rénovées par les fonds du patrimoine<br />
religieux? Peut-on penser à un moratoire sur la rénovation<br />
d’édifices qui ne serviront plus et qui exigeront entretien et<br />
5 Idem.<br />
16
financement dans l’avenir? Où peut-on être créatif dans la<br />
transformation de ces édifices que l’on ne peut plus soutenir et<br />
dont les communautés ne peuvent plus porter le poids, c’est-à-<br />
dire, vente, transformation, etc.?»<br />
Enfin, je prends, en terminant, un exemple d’ici qui peut<br />
nous servir de modèle : l’expérience des Carmélites de Trois-<br />
Rivières. Malgré toutes les inquiétudes et les tracas que cela leur<br />
a causés, elles ont vendu leur cher Carmel. Mais entendons bien,<br />
l’édifice! La solution qu’elles ont accueillie a été toutefois, on le<br />
voit, guidée par l’Esprit. Grâce à l’Évêque de l’époque et aux Filles<br />
de Jésus d’ici, elles ont trouvé non seulement feu et lieu, mais une<br />
nouvelle façon de faire Carmel. Entendons ici vocation et vie! Cela<br />
a certainement exigé de chacune d’entre elles une conversion et<br />
une grande confiance au travail de l’Esprit.<br />
S’il nous faut prendre leur exemple et être fidèles à ce que<br />
dit l’Esprit à l’Église de Trois-Rivières, il nous faudra aussi une<br />
conversion. Cela exigera des changements. Mais il faut faire<br />
confiance à l’Esprit saint. Seulement, alors, une vie nouvelle<br />
pourra naître.<br />
17
Chers fidèles du diocèse de Trois-Rivières, soyez assurés de<br />
mes prières et de mon appui. Je compte également sur vos prières<br />
et votre soutien. N’ayons pas peur de cheminer ensemble dans<br />
l’espérance vers l’avenir. «Que le Dieu de l’espérance vous donne<br />
en plénitude dans votre acte de foi la joie et la paix» (Rm 15, 13).<br />
Avec ma fraternelle bénédiction,<br />
Ut vitam habeant (Pour qu’ils aient la vie Jn 10, 10)<br />
†<strong>Luc</strong> <strong>Bouchard</strong><br />
Évêque de Trois-Rivières<br />
Pâques 2013.<br />
18