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Lettre de Jean-Léon Prevost – avec illustrations

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<strong>Jean</strong>-<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong><br />

L E T T R E S<br />

Maison Généralice <strong>de</strong>s Religieux <strong>de</strong> Saint-Vincent <strong>de</strong> Paul<br />

Rome - mars 2007


III


UNE BONNE NOUVELLE R. S. V. !<br />

1935 lettres écrites <strong>de</strong> la main <strong>de</strong> notre Fondateur sont<br />

maintenant sur disque compact. Cette heureuse initiative offre un<br />

nouveau moyen <strong>de</strong> mieux connaître cet admirable apôtre <strong>de</strong>s temps<br />

mo<strong>de</strong>rnes.<br />

En effet <strong>Jean</strong>-<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong> est un vrai porteur <strong>de</strong> lumière<br />

pour nous du XXI e siècle. Sa foi et son espérance en ont fait<br />

l’homme d’une charité audacieuse et inventive auprès <strong>de</strong> la famille<br />

ouvrière, <strong>de</strong>s pauvres et <strong>de</strong> la jeunesse. La lecture <strong>de</strong> ses lettres<br />

permettra <strong>de</strong> le suivre tout au long <strong>de</strong> son cheminement humain et<br />

spirituel : du professeur qu’il fut jusqu’à sa conversion; <strong>de</strong> son<br />

important engagement au sein <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> St-Vincent <strong>de</strong> Paul<br />

<strong>avec</strong> le Bienheureux Ozanam et Emmanuel Bailly, à son mariage <strong>avec</strong><br />

Mme De Lafond; <strong>de</strong> son appel à fon<strong>de</strong>r les Religieux <strong>de</strong> St-Vincent<br />

<strong>de</strong> Paul le 3 mars 1845, jusqu’à sa mort le 30 octobre 1874.<br />

Quel homme tout charité ! « Nombreux sont ceux qui, en<br />

cherchant à découvrir <strong>Jean</strong>-<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong>, se découvriront en<br />

lui… », et y trouveront une douce lumière pour éclairer leur vie, car<br />

ne fut-il pas « un autre Vincent <strong>de</strong> Paul »? « Ceux qui sèment dans la<br />

joie moissonnent en chantant…» dit le psaume 126, 5.<br />

Après les efforts fournis pour transcrire ces <strong>Lettre</strong>s sur<br />

ordinateur, et suite aux diverses utilisations qu’en ont fait la France et<br />

le Canada, voici une copie neuve, qui se lit facilement et se voit<br />

agrémentée d’<strong>illustrations</strong> finement choisies.<br />

V


Rappelons que pour mettre en route la cause <strong>de</strong> béatification <strong>de</strong><br />

notre Fondateur, <strong>de</strong>puis longtemps, ses lettres, celles alors<br />

disponibles, avaient été colligées. Le Père Robert Doury, en 1965, en<br />

fit une première édition. Le 150 e anniversaire <strong>de</strong> fondation <strong>de</strong><br />

l’Institut, célébré en 1995, fournit l’occasion d’accueillir <strong>de</strong>s mains<br />

du Père Richard Corbon, une nouvelle édition <strong>de</strong>s <strong>Lettre</strong>s du P. Le<br />

<strong>Prevost</strong>. Cette remarquable présentation en <strong>de</strong>ux tomes, est le fruit <strong>de</strong><br />

son minutieux travail. Le Frère Gilbert Courtin lui prêta main-forte.<br />

On attendait l’heure où l’on pourrait avoir sur disque compact<br />

ces lettres <strong>de</strong> notre Fondateur. C’est fait! Le Père Corbon, aidé du<br />

Père Roger Laberge, a consacré <strong>de</strong> nombreuses heures <strong>de</strong> travail pour<br />

corriger et présenter ce travail dont nous bénéficions maintenant.<br />

Tous ces artisans, d’hier et d’aujourd’hui ont semé et nous<br />

récoltons. C’est la charité qui vous a poussés et vous a pressés à<br />

mettre à la portée <strong>de</strong> tous, et <strong>de</strong> plusieurs manières, ce trésor <strong>de</strong> notre<br />

famille Religieuse. Soyez remerciés <strong>de</strong> tout cœur! Que ceux du ciel<br />

s’unissent à ceux <strong>de</strong> la terre pour savourer ce joyeux temps <strong>de</strong> la<br />

moisson.<br />

Que la Vierge Marie, la mère <strong>de</strong> la famille, gui<strong>de</strong> lecteurs et<br />

lectrices « jusqu’à cette source jaillissante et débordante que fut le<br />

cœur du Vénérable <strong>Jean</strong>-<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong> ».<br />

Rome, 3 mars 2007<br />

Yvon Laroche, sv<br />

Supérieur général<br />

VII


VIII


AVERTISSEMENT A NOS FRERES LECTEURS<br />

Bien chers frères,<br />

Cette édition 2007 <strong>de</strong>s <strong>Lettre</strong>s <strong>de</strong> notre Fondateur apporte quelques corrections<br />

à celle <strong>de</strong> 1995 : en effet, le père Laberge et moi‐même avons tout relu, dans l’espoir<br />

<strong>de</strong> vous présenter un texte qui soit le plus fidèle à l’original, (comme, par exemple,<br />

« défiance » au lieu <strong>de</strong> « déférence » dans la lettre 967‐1). Pas d’illusion cependant, il<br />

restera toujours <strong>de</strong>s erreurs et <strong>de</strong>s coquilles! Merci <strong>de</strong> nous les signaler.<br />

Innovation : quelques <strong>illustrations</strong> jalonnent le texte <strong>de</strong>s lettres. Nous avons<br />

pensé que cela pourrait, non pas tellement en « agrémenter » la lecture, que d’ai<strong>de</strong>r à<br />

mieux connaître le contexte dans lequel elles ont été écrites, ou mettre un visage sur<br />

un nom connu…frères ou personnages qui ont traversé la vie du Fondateur. Nous<br />

admettons que ce choix est limité et imparfait : soit parce que les albums‐photos <strong>de</strong><br />

nos premières années sont très lacunaires, soit parce que, matériellement, il s’avérait<br />

impossible <strong>de</strong> vouloir mettre une photo par lettre…<br />

La publication numérique <strong>de</strong>s <strong>Lettre</strong>s du Père Le <strong>Prevost</strong> présente, <strong>de</strong> toute<br />

évi<strong>de</strong>nce, bien <strong>de</strong>s avantages par rapport à la version papier. Ceux d’entre vous qui<br />

peuvent disposer d’un ordinateur pourront, par exemple, retrouver, en un clic, un<br />

mot ou une expression, grâce aux fonctions <strong>de</strong> recherche qu’offrent aujourd’hui les<br />

techniques du « numérique ». Rapidité, précision, disponibilité sur <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, tout<br />

cela est un progrès incontestable.<br />

Néanmoins, quiconque utilise un ordinateur sait combien il est facile <strong>de</strong> perdre<br />

un texte sur un écran, ou <strong>de</strong> voir son disque dur irrémédiablement défectueux. De<br />

plus, tous les experts mondiaux en matière <strong>de</strong> sauvegar<strong>de</strong> <strong>de</strong>s données sont formels :<br />

nous ne savons pas combien <strong>de</strong> temps il sera possible <strong>de</strong> lire un texte chargé sur un<br />

CD en 2007. Certes, pour les livres, il faut compter <strong>avec</strong> l’acidité, le feu et les fameux<br />

« vers <strong>de</strong> livres », mais tout ce qui est écrit ou imprimé sur papier n’est pas pour<br />

autant condamné à disparaître. S’il est donc heureux pour nous <strong>de</strong> disposer sur<br />

informatique <strong>de</strong>s <strong>Lettre</strong>s <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong>, (qui s’ajoutent à celles du Frère Myionnet,<br />

et <strong>de</strong>s Pères Bellanger et Planchat), permettez‐nous <strong>de</strong> vous recomman<strong>de</strong>r <strong>de</strong> ne pas<br />

abandonner nos bonnes vieilles habitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> lecture, car lire sur un écran n’est pas et<br />

ne sera jamais l’équivalent <strong>de</strong> lire un livre: la lecture ‐ surtout la lecture spirituelle! ‐<br />

exigera toujours lenteur, profon<strong>de</strong>ur et contexte. Comme nous l’écrit un frère : « Je<br />

crois que les lettres numérisées seront une ai<strong>de</strong> efficace pour <strong>de</strong>s gens qui connaissent<br />

déjà les lettres et en portent déjà la science intérieure par une proximité spirituelle. »<br />

Bref, l’écran et le livre doivent coexister en bonne intelligence dans nos archives,<br />

dans nos bibliothèques <strong>de</strong> communauté et sur nos tables <strong>de</strong> lecteur !<br />

Mais, en définitive, à chacun <strong>de</strong> choisir sa métho<strong>de</strong>, du moment qu’il lit les<br />

<strong>Lettre</strong>s du Fondateur ! En paraphrasant notre <strong>de</strong>vise, nous vous disons donc :<br />

« Omnimodo letterae conditoris Joannes Leo Le <strong>Prevost</strong> legentur ! »<br />

« Que <strong>de</strong> toutes les manières, on lise les lettres du fondateur <strong>Jean</strong>‐<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong> ! »<br />

Pères Corbon et Laberge<br />

IX


T A B L E D E S I L L U S T R A T I O N S<br />

1827 - 1844<br />

« Première » lettre <strong>de</strong> M.L.P. (4 septembre 1827)…………….………. 1<br />

Paris : Révolution <strong>de</strong> 1830. Bataille du pont <strong>de</strong> l’Hôtel <strong>de</strong> Ville.…… 2<br />

Victor Hugo. Les Orientales……………………………………………… 3<br />

Victor Pavie………………………………………………………………. 4<br />

Le Feuilleton d’Angers, article <strong>de</strong> M.L.P………………………………… 5<br />

Sainte‐Beuve. Ballanche………………………………………………… 6<br />

Opéra <strong>de</strong> Paris. Mme Dorval…………………………………………… 9<br />

Maison <strong>de</strong> la famille Hugo……………………………………………… 10<br />

L’Avenir…………………………………………………………………… 11<br />

Le choléra à Paris en 1832………………………………………………… 13<br />

<strong>Jean</strong>‐<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong> à 30 ans, en 1832……………………………….. 14<br />

Mgr Gerbet………………………………………………………………. 15<br />

Eugène Boré. Félicité <strong>de</strong> Lamennais…………………………………… 17<br />

Saint‐Simon………………………………………………………………. 19<br />

Paris : passage du Commerce………………………………………….. 27<br />

Montalembert……………………………………………………………. 28<br />

Eglise Saint‐Roch………………………………………………………… 30<br />

Mme <strong>de</strong> Staël. Père Lacordaire…………………………………………. 31<br />

Mes Prisons (Pellico). ……………………………………………………. 32<br />

Charles Nodier. Une soirée à l’Arsenal. ………………………………… 33<br />

Frédéric Ozanam. La Revue Européenne………………………………… 38<br />

Emmanuel Bailly…………………………………………………………. 41<br />

Le Boulevard <strong>de</strong>s Italiens en 1833…………………………………………. 42<br />

Acte <strong>de</strong> mariage <strong>de</strong> M.L.P. Chapelle <strong>de</strong>s Missions Etrangères……… 46<br />

Rue Saint‐Sulpice et rue <strong>de</strong>s Canettes………………………………….. 49<br />

Mgr <strong>de</strong> Quélen…………………………………………………………… 63<br />

Eglise Saint‐Sulpice……………………………………………………….. 73<br />

Conférence <strong>de</strong> Charité. Sr Rosalie. St‐Etienne‐du‐Mont………………. 77<br />

Anne‐Catherine Emmerich. La douloureuse passion <strong>de</strong> N‐S…………… 79<br />

Un homme <strong>de</strong> bien, le Père <strong>Jean</strong>‐<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong>, (<strong>de</strong> Montrond)………. 80<br />

Angers, Château, Cathédrale St Maurice……………………………… 89<br />

Abbé <strong>de</strong> Malet. Vie <strong>de</strong> S. Vincent <strong>de</strong> Paul, édité par MLP……………… 94<br />

Introduction à la Vie <strong>de</strong> S. Vt <strong>de</strong> Paul. Vie <strong>de</strong> M. Alméras, par MLP…… 95<br />

Ancien Séminaire <strong>de</strong> Saint‐Sulpice……………………………………… 104<br />

Ozanam (jeune)…………………………………………………………… 105<br />

Le Taillandier (Confrère SVP)………………………………………….. 107<br />

N.D. <strong>de</strong>s Victoires. Abbé Desgenettes……………………………......... 110<br />

Portrait <strong>de</strong> S. Vincent <strong>de</strong> Paul……………………………………… ….. 119<br />

S. Andrea‐<strong>de</strong>lle‐Frate. Alphonse <strong>de</strong> Ratisbonne………………………. 127<br />

Docteur‐abbé Ferrand <strong>de</strong> Missol……………………………………….. 131<br />

- 1 -


Maurice Maignen. Le père <strong>de</strong> Ravignan……………………………….. 134<br />

La Vierge Noire <strong>de</strong> Paris (St Thomas <strong>de</strong> Villeneuve)…………………… 140<br />

Le peuple ramené à la foi…………………………………………………….. 147<br />

Jules Gossin (Confrère SVP)………………………………………………. 149<br />

Le Père Millériot……………………………………………………………. 151<br />

Notice sur les Saintes‐Familles……………………………………………….. 152<br />

Clément Myionnet…………………………………………………………... 154<br />

1845 - 1857<br />

Châsse S. Vincent <strong>de</strong> Paul. Vitrail <strong>de</strong> la fondation en 1845………………163<br />

De Lambel. De Melun……………………………………………………… 181<br />

Frère Louis Paillé…………………………………………………………… 194<br />

Théodore <strong>de</strong> Ratisbonne…………………………………………………… 199<br />

Père Henri Planchat. ………………………………………………………. 200<br />

Abbé Ozanam. …………………………………………………………….. 232<br />

Adolphe Baudon (Confrère SVP). ……………………………………… 237<br />

Paul Decaux (Confrère SVP)………………………………….. ………… 238<br />

Révolution <strong>de</strong> 1848. Barrica<strong>de</strong>s à Paris……………………… ………… 251<br />

Mgr Affre. Sœur Rosalie………………………………………………… 253<br />

Trois épiso<strong>de</strong>s…………………………………………………………….. 255<br />

Mgr Gaston <strong>de</strong> Ségur (jeune)…………………………………………….. 261<br />

Père Emile Hello…………………………………………………………… 263<br />

Le Premier Tabernacle……………………………………………………. 264‐5<br />

Assaut <strong>de</strong> Rome en 1849………………………………………………….. 266<br />

Hermann Cohen……………………………………………………………. 270<br />

L’Ami <strong>de</strong> la Religion…………………………………………………………. 273<br />

Florent Caille………………………………………………………………… 291<br />

Père Louis Lantiez………………………………………………………….. 297<br />

Rue <strong>de</strong> l’Arbalète……………………………………………………………. 301<br />

Frère Alphonse Vasseur…………………………………………………….. 309<br />

Frère Jules Marcaire………………………………………………………… 319<br />

Les propriétés <strong>de</strong> l’Institut à Vaugirard…………………………………… 320<br />

Mgr Sibour. Napoléon III…………………………………………………… 326<br />

Chapelle <strong>de</strong>s Saints Cœurs…………………………………………………. 328<br />

Maison <strong>de</strong> Nazareth………………………………………………………… 330<br />

Orphelinat <strong>de</strong> Vaugirard…………………………………………………… 340‐1<br />

Frère <strong>Jean</strong>‐Marie Tourniquet………………………………………………. 348<br />

Abbé Louis Roussel. Frère Eugène Viollat……………………………….. 361<br />

Œuvre d’Auteuil. PP. Petit et Fontaine…………………………………… 362<br />

Pie IX proclame le dogme <strong>de</strong> l’Immaculée Conception (1854)…………. 363<br />

Après l’école ou l’apprentissage, Almanach <strong>de</strong> l’Apprenti et <strong>de</strong> l’écolier…….. 383<br />

L’abbé Henri Halluin ……………………………………………………… 399<br />

La Salette en 1864…………………………………………… …………….. 416<br />

Père Timon‐David………………………………………………………… 445<br />

Père Olivaint………………………………………………………………… 514<br />

- 2 -


L’Univers. L’Ami <strong>de</strong> la Religion (bénédiction <strong>de</strong> ND. Nazareth)………. 540<br />

Fabiola, récit <strong>de</strong>s catacombes (Cardinal Wiseman)………………………… 543<br />

Vie <strong>de</strong> Sœur Rosalie (Vicomte <strong>de</strong> Melun)………………………………… 567<br />

La bataille <strong>de</strong> Malakoff……………………………………………………… 612<br />

Les Martyrs <strong>de</strong> Castelfidardo. Mort <strong>de</strong> Georges Myionnet……………… 623<br />

1856 - 1866<br />

La Communauté <strong>de</strong> Vaugirard en 1858………………………………… 630<br />

Cardinal Morlot…………………………………………………………… 666<br />

Congrès <strong>de</strong>s Directeurs d’œuvres ouvrières. Angers 1858…………… 691<br />

Le Curé d’Ars et M. Le <strong>Prevost</strong>………………………………………… 738<br />

Frère Henri Sadron………………………………………………………. 750<br />

Mgr Dupanloup…………………………………………………………. 758<br />

Frère Emmanuel Gallais………………………………………….……. 761<br />

Bataille <strong>de</strong> Montebello……………………………………………………. 763<br />

Liergues (lieu <strong>de</strong> décès <strong>de</strong> Mme Le <strong>Prevost</strong>)…………………………. 765<br />

Maximin Giraud………………………………………………………… 766<br />

Père <strong>Léon</strong> d’Arbois <strong>de</strong> Jubainville……………………………………. 768<br />

Frère Paul Baffait………………………………………………………… 778<br />

Bataille <strong>de</strong> Castelfidardo…………………………………………………… 784<br />

Abbé Louis Risse………………………………………………………… 815<br />

Ordination sacerdotale <strong>de</strong> MLP………………………………………… 826<br />

Le Jeune Ouvrier…………………………………………………………… 829<br />

Chapelle St‐Sacrement (Arras)………………………………………… 876<br />

Le Pape Pie IX…………………………………………………………… 880<br />

Persigny…………………………………………………………………… 881<br />

Chapelle et patronage N.D. <strong>de</strong> Grâce (Grenelle)……………………… 885<br />

Frère Ernest Philibert……………………………………………………… 886<br />

Abbé Victor Braun………………………………………………………… 893<br />

Frère Edouard Cauroy…………………………………………………… 902<br />

Père Bernard <strong>de</strong> Varax…………………………………………………… 919<br />

Frère Charles‐Abel du Garreau………………………………………….. 922<br />

Le Petit‐St <strong>Jean</strong> (Amiens)………………………………………………… 949<br />

Maison et Noviciat <strong>de</strong> Chaville………………………………………… 954<br />

Père Michel Chaverot…………………………………………………….. 961<br />

Frère René Girard………………………………………………………….. 988<br />

Père Alfred Leclerc………………………………………………………… 991<br />

Le mascaret en Normandie……………………………………………….. 994<br />

Père Urbain Baumert……………………………………………………… 1007<br />

Père Jules Ginet……………………………………………………………. 1038<br />

Pèlerins <strong>de</strong> la Salette……………………………………………………… 1040<br />

Eglise <strong>de</strong> la Salette à Paris (1965)………………………………………… 1045<br />

Frère Eugène Charrin……………………………………………………… 1050<br />

Maison natale <strong>de</strong> MLP. à Cau<strong>de</strong>bec‐en‐Caux, vallée <strong>de</strong> la Seine……… 1062<br />

Père Edouard Lainé………………………………………………………… 1066<br />

Almanach <strong>de</strong> l’Apprenti et <strong>de</strong> l’écolier (1866)………………………………. 1070<br />

- 3 -


1867- 1874<br />

Mgr Angebault…………………………………………………………… 1159<br />

Les ballons du photographe et inventeur Nadar……………………… 1207<br />

Exposition universelle <strong>de</strong> 1867 à Paris………………………................... 1216<br />

Père <strong>Jean</strong>‐Joseph Allemand………………………………………………. 1221<br />

Bataille <strong>de</strong> Mentana………………………………………………………… 1229<br />

Emile Keller. Drapeau <strong>de</strong>s Zouaves Pontificaux……………………… 1248<br />

Palais Mariscotti (Rome)………………………………………………… 1262<br />

Saint Pierre‐Julien Eymard………………………………………………… 1265<br />

Termini et la Villa Strozzi (Rome)………………………………………… 1273<br />

Mélanie Calvat……………………………………………………………… 1286<br />

Général <strong>de</strong> Charrette……………………………………………………… 1287<br />

Villa Torlonia (Rome)……………………………………………………. 1294<br />

Mgr <strong>de</strong> Méro<strong>de</strong>…………………………………………………………… 1356<br />

Père Jules Pialot…………………………………………………………… 1392<br />

Père Hyacinthe Loyson, prédicateur à Notre‐Dame…………………. 1410<br />

Frère Michel Manque……………………………………………………. 1441<br />

Proclamation <strong>de</strong> l’infaillibilité pontificale (1870)……………………… 1496<br />

Camp militaire <strong>de</strong> Châlons……………………………………………… 1502<br />

La 7 e ambulance…………………………………………………………… 1505<br />

Mgr Darboy………………………………………………………………… 1506<br />

Tournay……………………………………………………………………. 1515<br />

Mère Gertru<strong>de</strong>…………………………………………………………… 1518<br />

Porta Pia et sa brèche (Rome)…………………………………………… 1521<br />

Siège <strong>de</strong> Paris……………………………………………………………… 1530<br />

Commune <strong>de</strong> Paris (Butte Montmartre)…………………………………… 1533<br />

Frère Joseph Garault……………………………………………………… 1546<br />

Père Adolphe Imhoff……………………………………………………… 1549<br />

Les Ecuries d’Augias (Daumier)…………………………………………… 1553<br />

La Commune <strong>de</strong> Paris occupant l’Hôtel‐<strong>de</strong>‐Ville…………………………… 1562<br />

Pont et Château Saint‐Ange (Rome)……………………………………. 1566<br />

Prison du Père Henri Planchat…………………………………………… 1569<br />

Exécution <strong>de</strong>s otages ( mai 1871)………………………………………… 1571<br />

Louvre et Tuileries incendiés par la Commune………………………… 1579<br />

Père Pittar…………………………………………………………………… 1611<br />

Frère Augustin Bercé……………………………………………………… 1632<br />

Frère Hodiesne, Pères Lasfargues et Degesne…………………………… 1635<br />

Abbé Bautain………………………………………………………………… 1659<br />

Les Constitutions <strong>de</strong> 1874…………………………………………………. 1681<br />

Chambre mortuaire <strong>de</strong> MLP……………………………………………… 1696<br />

Tombeau <strong>de</strong> MLP. (Chapelle <strong>de</strong> Chaville sanctuaire ND. <strong>de</strong> la Salette) 1697<br />

* * *<br />

- 4 -


1 à M. Gavard 1<br />

Invitation à rencontrer un ami.<br />

4 septembre 1827<br />

Mon cher Monsieur Gavard,<br />

Voulez‐vous profiter dʹune occasion que je vais vous offrir <strong>de</strong> voir quelques instants<br />

M. Letellier? Venez <strong>de</strong>main mercredi matin à 10h. précises chez moi; vous lʹy trouverez<br />

<strong>avec</strong> sa femme. Vous mʹaviez promis hier <strong>de</strong> vous rendre chez moi à 9h. pour visiter lʹex‐<br />

position <strong>de</strong>s Petits Augustins. Ce nouvel arrangement vous permettra <strong>de</strong> rêver une heure<br />

<strong>de</strong> plus. Je ne vous dis pas combien vous me ferez plaisir. M. Letellier veut bien se charger<br />

dʹappuyer ma <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> sa recommandation.<br />

Votre tout dévoué serviteur Le <strong>Prevost</strong><br />

Je soussigné, certifie, sans avoir lu, que M. Le <strong>Prevost</strong> nʹa dit que la vérité, et que si vous ne venez<br />

pas me voir chez lui <strong>de</strong>main matin pour déjeuner <strong>avec</strong> ma femme, nous nous fâchons pour la vie. Voyez, pe‐<br />

sez et déci<strong>de</strong>z. Charles.<br />

1 Charles Gavard, (+1856), d’origine angevine, fonctionnaire au Ministère <strong>de</strong>s finances, puis bijoutier à Paris. Il s’était lié d’amitié<br />

<strong>avec</strong> MLP., qui, en 1827, était rédacteur au Ministère <strong>de</strong>s Affaires Ecclésiastiques. Très instruit, <strong>de</strong> commerce agréable, c’est un<br />

esprit sceptique, doué d’une imagination débordante. C’est grâce à lui que MLP. fera la connaissance <strong>de</strong> Victor Pavie, alors étudiant<br />

en droit à Paris. Gavard aura toujours beaucoup d’admiration pour MLP. En <strong>de</strong>s termes un peu abscons, il écrira à V. Pavie,<br />

dans une lettre du 15 janvier 1833: "Oh, Pavie, nous ne sommes rien près <strong>de</strong> lui, non pas même la trace <strong>de</strong> son pas aux déserts qu’il<br />

parcourt!" En 1850, au même correspondant, il dira ce que lui apporte cette amitié: "Quelle force dans ces relations qui ont pour<br />

base l’espoir moral". Mais l’influence <strong>de</strong> MLP. n’ira pas jusqu’à le sortir d’un vague panthéisme.<br />

1


2 à M. Pavie 2<br />

Impressions <strong>de</strong> MLP. sur les événements <strong>de</strong> 1830. Son besoin <strong>de</strong> perfection. Vie culturelle. Relations d’amitié.<br />

Jugement sur V. Hugo.<br />

Paris, le 17 août 1830<br />

Cette feuille <strong>de</strong> toute façon <strong>de</strong>vait,<br />

mon cher Victor, vous appartenir, elle eût<br />

été lettre initiative si la vôtre eût tardé un<br />

jour <strong>de</strong> plus; elle sera une réponse,<br />

puisquʹil en est autrement. Quʹelle<br />

commence vite par vous remercier <strong>de</strong><br />

lʹintérêt affectueux et tendre que vous me<br />

témoignez. Je ne saurais dire combien je<br />

mʹy trouve sensible, combien les<br />

souvenirs que vous me donnez à travers<br />

ces grands événements 3 me semblent<br />

précieux. Que ne mʹarrêtiez‐vous, mon<br />

ami, au moment où vous courriez vers Babylone, quelque faible et traînant que je fusse, je<br />

vous eusse suivi <strong>de</strong> grand cœur; vous eussiez rompu dʹun coup tous les nœuds que je ne<br />

savais démêler dans ma conscience; votre enthousiasme, gui<strong>de</strong> bien plus sûr pour moi que<br />

ma propre raison, mʹeût entraîné sans peine jusque‐là, je lʹavoue. Approuvant <strong>de</strong>s efforts<br />

justes et généreux, je <strong>de</strong>mandais si les masses émues allaient ensuite se rasseoir paisible‐<br />

ment, si tous ces hommes, héros aujourdʹhui, voudraient reprendre le marteau, tailler à<br />

coups mesurés la pierre, combiner lentement <strong>de</strong>s lettres dans les cases; ce sang qui bouil‐<br />

lonnait dans leurs veines allait‐il si vite se calmer; arrivés au but, ne débor<strong>de</strong>raient‐ils pas<br />

bien loin au‐<strong>de</strong>là. Une noble confiance était bien plus gran<strong>de</strong> et surtout plus juste, mais je<br />

ne la sentais pas; en vous la voyant, mon ami, je lʹaurais partagée. Car, que je vous le dise<br />

ici, rien que pour le dire tout haut à quelquʹun et aussi pour que vous me conserviez ma<br />

belle image sans altérer sa pureté idéale, pour quʹelle reste toujours intacte <strong>de</strong>vant mes<br />

yeux, en preuve que tout ce quʹon rêve parfois <strong>de</strong> noble, <strong>de</strong> généreux, <strong>de</strong> spontané vers le<br />

bien, quelquʹil soit, existe vraiment dans quelque homme <strong>de</strong> notre terre. Je ne saurais plus<br />

achever ce que je voulais dire. Je ne me sens plus assez fort <strong>de</strong> mon intention pour être sûr<br />

quʹelle couvrirait la chose elle‐même, assez donc; pourtant si, à travers tout cela, vous en‐<br />

trevoyez, mon ami, une opinion peut‐être exagérée <strong>de</strong> vous, attribuez‐la seulement à ce<br />

besoin <strong>de</strong> perfection qui nous poursuit, quʹil faut satisfaire nʹimporte sur quoi et qui nous<br />

attache avi<strong>de</strong>ment aux moindres traces que nous rencontrons dʹelle. Ces <strong>de</strong>rniers temps,<br />

du reste, ont pu donner belle pâture à pareille disposition; oh! que je partage bien votre<br />

admiration pour les hommes et les choses! Quand les peuples sʹémeuvent ainsi, que leurs<br />

aspects, leurs groupes, leurs agitations onduleuses sont un imposant spectacle! Quelles<br />

vastes percées pour la raison et la philosophie! Mais ne vous semble‐t‐il pas que la force<br />

2 Victor Pavie (1808-1886). Né à Angers, rue St-Laud, il était monté à Paris pour faire son droit. Poète et écrivain, il avait un joli<br />

brin <strong>de</strong> plume qu’on encourage dans les salons littéraires <strong>de</strong> la capitale, et qu’il entretient dans le petit cercle <strong>de</strong> ses amis angevins.<br />

D’emblée, l’âme <strong>de</strong> MLP. fut conquise: ces <strong>de</strong>ux cœurs généreux et aimants étaient faits pour s’entendre. Confi<strong>de</strong>nt du retour à<br />

Dieu <strong>de</strong> MLP., Pavie subira, à son tour, l’influence <strong>de</strong> son ami re<strong>de</strong>venu chrétien convaincu. Leur correspondance (57 lettres) ne<br />

cessera qu’à la mort <strong>de</strong> MLP., en 1874.<br />

3 MLP. écrit au len<strong>de</strong>main <strong>de</strong>s événements révolutionnaires <strong>de</strong> 1830, à Paris, notamment <strong>de</strong>s 27, 28 et 29 juillet 1830 (Les Trois<br />

Glorieuses). Avec l’abdication <strong>de</strong> Charles X et l’avènement <strong>de</strong> Louis-Philippe, la Monarchie <strong>de</strong> Juillet succè<strong>de</strong> à la Restauration.<br />

2


physique, quand elle arrive à une telle puissance, une telle modération dʹelle‐même, se<br />

fond presque à la force morale et quʹelle est au moment <strong>de</strong> se retirer tout à fait pour lui cé‐<br />

<strong>de</strong>r à tout jamais la place.<br />

Tout se régularise ici, se modifie sans effort, on rentre dans lʹordre habituel; la pré‐<br />

occupation <strong>de</strong>s événements cesse peu à peu, les loisirs reviennent, lʹâme recommence à<br />

quitter ce mon<strong>de</strong> où rien ne la retient plus et retourne à ses rêves; les lettres, les chants, la<br />

poésie, tout cela reparaît, le théâtre est <strong>de</strong> nouveau rempli. Ne semblait‐il pas que cʹen était<br />

fait pour jamais <strong>de</strong> pareilles choses; en vérité, nous sommes comme à ressort, nous plions<br />

un moment sous les circonstances et nous nous redressons ensuite à notre position ordi‐<br />

naire. Moi‐même avant‐hier, jʹétais à lʹOpéra, et le Comte Ory, 4 Nourrit, M me Damoreau,<br />

Taglioni mʹont donné <strong>de</strong>s impressions dʹart plus franches, plus vives que jamais. Vous ne<br />

sauriez, mon ami, avoir une idée <strong>de</strong> la Marseillaise chantée par Nourrit <strong>avec</strong> les chœurs et<br />

lʹorchestre et répétée par lʹassemblée! Sʹil y eut dans tout cela la moindre frénésie ou même<br />

une exaltation trop énergique <strong>de</strong>s souvenirs sanglants passant à la traverse ne mʹeussent<br />

laissé que <strong>de</strong> lʹhorreur et <strong>de</strong> lʹeffroi; mais figurez‐vous au contraire lʹensemble bien et pu‐<br />

rement dans lʹart, sans en sortir ni par le jeu, ni par lʹeffet, ne trouvant dans les sympathies<br />

<strong>de</strong> jour quʹune disposition plus délicate et mieux éclairée, et peut‐être arriverez‐vous, au‐<br />

tant quʹon le peut, aussi froi<strong>de</strong>ment et <strong>de</strong> pensée, à vous en donner quelque aperçu. Jʹau‐<br />

rais été heureux que vous fussiez là près <strong>de</strong> moi. Jʹy ai bien pensé. Ne manquez pas, mon<br />

ami, quand, <strong>de</strong> votre côté, vous trouverez <strong>de</strong> vives impressions dans vos champs ou ail‐<br />

leurs <strong>de</strong> mʹy convier aussi et <strong>de</strong> mʹy faire une part. Oh! soyez sûr <strong>de</strong> toute ma sympathie,<br />

soyez sûr dʹêtre compris par moi, quoique vous fassiez ou disiez, jʹai <strong>de</strong> vous tout à la fois<br />

lʹintelligence et le sentiment.<br />

Cette lettre commence à être si longue que je nʹose plus guère la prolonger;<br />

pourtant encore, mon ami, jʹavais prévu vos désirs. Jʹétais allé voir M.<br />

Hugo 5 à la fin <strong>de</strong> la semaine <strong>de</strong>rnière. Il était sorti, je nʹai trouvé que sa<br />

femme pas encore accouchée, près <strong>de</strong> ses enfants et raccommodant leurs<br />

bas. Tout ce mon<strong>de</strong> va bien. M. Hugo partage les idées du jour, mais est<br />

décidé à nʹaccepter <strong>de</strong> fonction dʹaucune espèce et encore bien plus à ne pas les rechercher.<br />

On parle <strong>de</strong> Marion <strong>de</strong> Lorme, elle sera représentée mais seulement dans le courant <strong>de</strong> lʹhi‐<br />

ver. Vous en serez. Je voyais ces jours passés une petite lettre <strong>de</strong><br />

Henri IV ainsi conçue adressée je ne sais plus à qui: ʺAmi, jʹai<br />

besoin <strong>de</strong> ton bras, arme‐toi, sois tel jour, dans tel lieu, bien <strong>de</strong>s<br />

gens y mourrontʺ. Je me figure, mon ami, que si M. Hugo faisait<br />

représenter en votre absence, il ne manquerait pas <strong>de</strong> vous<br />

appeler par un pareil langage. Je retournerai le voir pour moi<br />

dʹabord, pour vous aussi. Je trouve que lʹon peut bien quand un<br />

ami est là résister à ses désirs, mais non en son absence.<br />

Adieu, mon ami, je vous aime aussi sincèrement que possible, il me faut aussi <strong>de</strong><br />

votre part non pas, entendons‐nous bien, une portion <strong>de</strong> cet intérêt généreux et bon que<br />

vous accor<strong>de</strong>z à tous ceux qui vous entourent, mais bien cette pure et vraie amitié cachée<br />

4 Opéra (1828) du compositeur italien Rossini.<br />

5 Avec ses amis Gavard et Pavie, MLP. fréquente les cercles littéraires <strong>de</strong> Paris, surtout le Cénacle <strong>de</strong>s Romantiques, <strong>avec</strong> son chef,<br />

Victor Hugo. En 1829, le poète a fait paraître Les Orientales, dont MLP. obtiendra un exemplaire dédicacé. Le 25 février 1830 a<br />

marqué <strong>avec</strong> Hernani le début d’une bataille où s’affrontèrent "les classiques" et les "romantiques". Son drame, Marion <strong>de</strong> Lorme,<br />

ne sera représenté qu'au mois d'août <strong>de</strong> l'année suivante.<br />

3


au fond, tout au fond <strong>de</strong> notre âme et dont on ne donne guère et à peu <strong>de</strong> gens. Cela seul,<br />

mon ami, peut me satisfaire et répondre à tous mes sentiments pour vous.<br />

<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong><br />

Faites‐moi votre homme dʹaffaires ici, durant votre absence. Jʹai pour cela tout ce<br />

quʹil faut, capacité et bonne volonté. M. Gavard va bien et son mon<strong>de</strong> <strong>avec</strong> lui; il a dû vous<br />

écrire. On avait enfoncé la porte <strong>de</strong> sa maison quʹil avait abandonnée, pour y chercher <strong>de</strong><br />

malheureux Gar<strong>de</strong>s royaux quʹon y croyait cachés, mais rien nʹa été dérangé chez lui. Il est<br />

au moins à la hauteur <strong>de</strong>s affaires du moment, il est raisonnable pourtant et ne va guère<br />

au <strong>de</strong>là. Nous avons souvent parlé <strong>de</strong> vous, sans préjudice <strong>de</strong> lʹavenir. M. Mazure va‐t‐il<br />

venir? Jʹaurais tant <strong>de</strong> plaisir à le revoir. Jʹavais commencé à lui écrire après les événe‐<br />

ments pour les lui dire et le tranquilliser sur vous et nous tous, mais pas moyen <strong>de</strong><br />

conduire la lettre à bonne fin; elle avait déjà, je crois, plusieurs lignes <strong>de</strong> faites.<br />

M. Trébuchet 6 est resté à sa place et la gar<strong>de</strong>ra, je lʹespère. Est‐ce tout? Les articles 7<br />

Jʹen dépose un <strong>avec</strong> cette lettre. Je lʹai bien raccourci, écourté. Si je mʹen croyais, un trait <strong>de</strong><br />

plume en ferait justice. Si vous le prenez, je tâcherai que la suite soit moins mauvaise. Je la<br />

déposerai plus tard chez votre correspondant. Je prendrai le numéro chez votre Dame.<br />

(<strong>Léon</strong>)<br />

3 à M. Pavie<br />

Commentaire sur les événements révolutionnaires. Contraste <strong>de</strong>s passions humaines. Petite chronique <strong>de</strong> ses re‐<br />

lations amicales. Duel <strong>de</strong> Sainte‐Beuve.<br />

Paris, 29 septembre 1830<br />

Dʹaprès votre <strong>de</strong>rnière lettre à notre ami Gavard je<br />

mʹattendais, mon cher Victor, à en recevoir bientôt une <strong>de</strong> vous,<br />

datée <strong>de</strong> la mer, sentant le varech et la brise, bourdonnant le bruit<br />

<strong>de</strong>s vagues comme une conque marine, mais point, seriez‐vous donc<br />

assez malheureux, mon ami, pour avoir abandonné ce projet? Sʹil en<br />

était ainsi, reprenez‐le vite, jamais, bon Dieu, fut‐il plus nécessaire<br />

<strong>de</strong> se baigner aux joies pures et éthérées <strong>de</strong> la nature quand, <strong>de</strong> toute<br />

part, le matériel <strong>de</strong>s choses nous assaille, nous absorbe. Heureux ceux qui peuvent fuir. Au<br />

moins pour moi que la nécessité y garrotte jʹy ai passé bientôt tout entier. La révolution <strong>de</strong><br />

faits nʹest pas plus gran<strong>de</strong> que ma révolution intérieure. Je lis tous les journaux, je les<br />

épelle et les médite. Je me passionne pour ou contre eux, la contradiction me révolte. Je<br />

suis muet dans toute société sur la politique, par précaution contre lʹirritation que je sens<br />

en moi toute prête à éclater et dès que les entretiens dʹalentour me heurtent, vite mon cha‐<br />

peau et mes gants et me voilà courant à perdre haleine. Ne me condamnez pas, cher ami,<br />

avant dʹavoir vous‐même passé à lʹépreuve. Si après un mois passé ici, toute la violence<br />

réveillée <strong>de</strong>s partis, la niaiserie <strong>de</strong>s uns, les infâmes espérances <strong>de</strong>s autres, la déraison,<br />

lʹégoïsme <strong>de</strong> tous, ne vous poussent pas à bout, ne vous causent pas autant dʹeffroi quʹà<br />

moi, je subirai le jugement. En vérité, dans la vie paisible que nous menions, les hommes<br />

6 me<br />

Cousin <strong>de</strong> M Victor Hugo, née Adèle Foucher, c’est grâce à lui que MLP. fréquentera intimement, jusqu’en 1832, le poète et sa<br />

famille (cf. lettre <strong>de</strong> V. Pavie à M. Maignen, 18 août 1882).<br />

7<br />

Le père <strong>de</strong> V. Pavie était propriétaire d’une imprimerie qui publiait, dans les Affiches d’Angers, une annexe scientifique et littéraire,<br />

le Feuilleton <strong>de</strong> la Quinzaine. A la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> son ami, MLP. collaborait à cette petite feuille littéraire.<br />

4


dormaient. Ce calme, ce repos allaient bien à leur train et voilaient la nullité et la bassesse<br />

<strong>de</strong> lʹâme. Mais les voilà qui sʹéveillent et sur toutes ces faces passent et se formulent<br />

dʹignobles passions pour nous presque inconnues jusque là. Oh! le hi<strong>de</strong>ux spectacle. As‐<br />

sez, nʹest‐ce pas?<br />

Tous mes amis heureusement sont restés beaux. Cela fait un refuge. Avec quel bon‐<br />

heur on sʹen rapproche. Revenez, mon ami, bientôt. Vous nous manquez beaucoup. Nous<br />

avons encore M. Mazure. Je le vois presque tous les jours et presque chaque matin. Nous<br />

causons auprès <strong>de</strong> son feu (il fait déjà du feu). Jʹai rencontré ce matin chez lui Ballanche 8 ,<br />

mais quand je sortais, comme une apparition, il ne mʹen est rien resté<br />

que ses <strong>de</strong>ux yeux que <strong>de</strong>puis un moment je voyais briller à travers<br />

lʹouverture <strong>de</strong> la porte, comme une fascination. Jʹai vu M. Hugo, il y a<br />

huit ou dix jours; il y avait là une espèce <strong>de</strong> paysan du Danube quʹil<br />

semblait ne pas reconnaître ou n’avoir jamais vu; c’était gênant, nous<br />

nʹavons guère dit <strong>de</strong> choses particulières. Un journal rapporte que<br />

Sainte‐Beuve 9 et Dubois du Globe, nommé Inspecteur Général <strong>de</strong>s<br />

Etu<strong>de</strong>s ont eu un duel ensemble. Je nʹai pu encore savoir pourquoi, com‐<br />

ment, ni quelles conséquences; aucune fâcheuse, sans doute. On le saurait.<br />

Sʹils sont, je lʹespère, sans acci<strong>de</strong>nt et meilleurs amis quʹavant, pour <strong>de</strong>s<br />

poètes ce ne sera pas chose perdue et les émotions <strong>de</strong> tout cela seront bé‐<br />

néfice pour lʹâme. A Dieu ne plaise que je donne pareil événement comme<br />

désirable pour eux et pour les autres; ce nʹest pas à vous, mon ami, que jʹai<br />

besoin dʹexpliquer ma pensée.<br />

Je vous envoie un article vaille que vaille, peut‐être faux dʹun bout à lʹautre; à votre<br />

discrétion.<br />

Adieu, mon cher ami, vite une lettre, plusieurs, <strong>de</strong>s vers, <strong>de</strong> la prose, tout, et vous,<br />

surtout, le plus tôt possible.<br />

Votre tout ami,<br />

<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong><br />

4 à M. Pavie<br />

Excuses pour avoir ouvert une lettre <strong>de</strong> V. Pavie à leur ami Mazure. Visite chez les Hugo. La répulsion que lui ins‐<br />

pirent les révolutionnaires. Il craint le retour <strong>de</strong> troubles sanglants. Sainte‐Beuve et l’évolution du Globe.<br />

Le 2 octobre 1830<br />

Au risque, mon ami, <strong>de</strong> multiplier votre ennui par le mien, je vais essayer <strong>de</strong> vous<br />

écrire; aussi bien jʹai à vous répondre pour <strong>de</strong>ux lettres; car, celle que vous adressez chez<br />

moi à M. Mazure, je viens <strong>de</strong> lʹouvrir par erreur et <strong>de</strong> ligne en ligne la faute sʹest consom‐<br />

mée jusquʹau bout. Jʹai lu la lettre tout entière; jʹaurais eu la mine bien attrapée si dans<br />

8<br />

Pierre-Simon Ballanche (1776-1847), était lyonnais. Ami <strong>de</strong> Chateaubriand et d’Ozanam, ce philosophe eut une gran<strong>de</strong> influence<br />

sur l’école romantique.<br />

9<br />

Charles-Augustin Sainte-Beuve (1804-1869), journaliste et célèbre critique littéraire. Par V. Pavie, il avait fait la connaissance <strong>de</strong><br />

MLP., dont il avait subi le charme. Ce sceptique inquiet confessera, dans l’intimité, qu’il se sentait attiré vers les sentiments religieux<br />

<strong>de</strong> MLP. (Vie <strong>de</strong> <strong>Jean</strong>-<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong>, C. Maignen, I, p.12). Il travaillait alors au journal Le Globe, dont Dubois était directeur.<br />

A la suite d’un inci<strong>de</strong>nt à la rédaction, les <strong>de</strong>ux hommes se provoquèrent en un duel qui n’aura pas <strong>de</strong> suites fâcheuses, mais<br />

qui tournera au tragi-comique. Il pleut lorsqu’ils s’affrontent; Sainte-Beuve saisit alors d’une main, son pistolet, et <strong>de</strong> l’autre…son<br />

parapluie: "Je veux bien être tué, mais je ne veux pas être mouillé!".<br />

6


quelque coin, jʹeusse trouvé le châtiment <strong>de</strong> mon indiscrétion; mais vous semblez avoir<br />

prévu lʹaventure; il nʹy est rien que dʹamical et dʹaffectueux. Merci. M. Mazure nʹaura votre<br />

lettre que dans <strong>de</strong>ux ou trois jours, quelque empressement que je mette à la lui envoyer,<br />

car, au moment où je vous parle, du haut <strong>de</strong> la chaire <strong>de</strong> philosophie <strong>de</strong> Poitiers, ensei‐<br />

gnant et dogmatisant, il perd sans doute la terre <strong>de</strong> vue, erre aux nuages <strong>de</strong> lʹobjectif, ou<br />

re<strong>de</strong>scend au subjectif. Je vais mʹarranger pour quʹau retour, il trouve votre lettre sur son<br />

pupitre professoral. Vous nʹavez point parcouru Le Moniteur <strong>de</strong>puis huit jours. Vous y<br />

eussiez vu son exaltation. Je ne suis pas moi‐même encore bien revenu <strong>de</strong> la joie que cela<br />

mʹa donnée: <strong>de</strong>puis tant dʹannées, je le vois traînant sa vie dans une position plus précaire,<br />

nʹosant sʹasseoir nulle part, parce que tout à lʹheure il faudra partir, quʹil me semble mʹar‐<br />

rêter enfin <strong>avec</strong> lui et reprendre haleine après une route harassante <strong>de</strong> tristesse et <strong>de</strong> fati‐<br />

gue. Vous qui lʹaimez comme moi, vous serez bien heureux aussi. Je le vole en vous ap‐<br />

prenant cette bonne nouvelle, mais il vous lʹapprendra une secon<strong>de</strong> fois et ainsi il nʹy per‐<br />

dra rien. M. David 10 a contribué à cet heureux résultat par son instance auprès <strong>de</strong> Cousin.<br />

Jʹai encore dans ce moment une chose qui me met <strong>de</strong> la chaleur et <strong>de</strong> lʹagilité dans<br />

les jambes, pour plusieurs jours. Hier, tout seul, rien quʹ<strong>avec</strong> les canapés, et les chaises, et<br />

les tableaux, et les <strong>de</strong>ssins, et les croquis, jʹai causé <strong>de</strong>ux heures <strong>avec</strong> M. Hugo, joué <strong>avec</strong><br />

les enfants et babillé <strong>avec</strong> Madame, et quand je suis parti, lui mʹa serré la main; elle sʹest<br />

levée et mʹa fait <strong>de</strong> ces naïves et gauches révérences qui mʹenchantent, quʹelle seule et M me<br />

Malibran savent faire comme cela et qui pour moi contiennent toutes les idées, tous les<br />

mon<strong>de</strong>s que Vestris 11 voyait dans les profon<strong>de</strong>urs dʹun pas <strong>de</strong> danse. Mon ami, ne suis‐je<br />

pas heureux?<br />

Jʹaurais honte, mon ami, <strong>de</strong> montrer tant <strong>de</strong> légèreté en face <strong>de</strong> nos graves événe‐<br />

ments, si pour ne pas y laisser un beau jour sa tête, il nʹy avait nécessité <strong>de</strong> la promener <strong>de</strong><br />

temps en temps ailleurs. La promena<strong>de</strong>, il est vrai, je la fais bien loin ici, à <strong>de</strong>s temps <strong>de</strong> li‐<br />

bre insouciance, dʹimpressions capricieuses et qui se per<strong>de</strong>nt à tous les fils dʹaraignées,<br />

mais il sʹest fait chez nous <strong>de</strong>puis quelques jours tant <strong>de</strong> tapage quʹil fallait aller bien loin<br />

aussi pour ne plus entendre ces hurlements dʹégorgeurs, pour ne plus voir à la lueur <strong>de</strong>s<br />

torches ces hi<strong>de</strong>uses figures <strong>avec</strong> leurs bonnets pendants et leurs bras nus retroussés. Tout<br />

cela est passé maintenant et nous voilà tranquilles, sera‐ce long? Cʹest ce quʹil faut voir. Les<br />

quatre hommes misérables qui sont aux Tours <strong>de</strong> Vincennes 12 doivent avoir dʹhorribles<br />

jours. Vous ne vous figurez pas, mon ami, comme ces redoutes sont imposantes en ce<br />

moment, elles ont lʹair gonflées <strong>de</strong> troubles, <strong>de</strong> factions, <strong>de</strong> guerre, <strong>de</strong> vengeance: quand<br />

leur sein sʹouvrira, gare à nous, la France sera leur proie. En attendant, eux, les quatre, tout<br />

le mon<strong>de</strong> les abandonne, tout le mon<strong>de</strong> dit quʹil faut quʹils meurent: oh! si jʹétais éloquent,<br />

si ma pensée savait se faire jour, il me semble quʹils ne mourraient pas, car, quelque chose<br />

me dit bien haut quʹun aveuglement fatal est presque tout leur crime et que la mort pour<br />

lʹerreur, quelque funeste quʹelle soit, cʹest trop <strong>de</strong> tout. Mais je le crains bien, nous aussi,<br />

10 Pierre-<strong>Jean</strong> David, dit David d’Angers, (1788-1856), sculpteur, ami <strong>de</strong> M. Pavie, père. Il s’occupera <strong>de</strong> Victor quand celui-ci fera<br />

ses étu<strong>de</strong>s à Paris. (Parmi ses chefs-d’œuvre: une statue <strong>de</strong> Condé, et un monument à la gloire du général vendéen Bonchamps).<br />

MLP. fait allusion à l’une <strong>de</strong> ses interventions pour un ami commun, professeur <strong>de</strong> philosophie, M. Mazure, auprès <strong>de</strong> Victor Cousin,<br />

grand maître <strong>de</strong> l’Université.<br />

11 Vestris, danseur italien, M me Malibran, dite la Malibran, célèbre cantatrice française, d’origine espagnole, <strong>de</strong>s années 1815-1835.<br />

12 Quatre ministres <strong>de</strong> Charles X, dont Polignac, l’ancien chef du gouvernement, venaient d’être jetés en prison à Vincennes. Par<br />

crainte <strong>de</strong> la vindicte populaire, qui en avait fait les boucs émissaires <strong>de</strong> sa haine contre les Bourbons, ils seront transférés, le 10<br />

décembre, au palais du Luxembourg, rue <strong>de</strong> Vaugirard, pour y être jugés. Ils furent condamnés à <strong>de</strong> lour<strong>de</strong>s peines<br />

d’emprisonnement.<br />

7


comme nos pères, nous aurons <strong>de</strong>s souvenirs sanglants; et ceux qui resteront les conteront<br />

paisibles ou nʹy trouveront quʹune émotion poétique ou littéraire, comme on le faisait tous<br />

les jours pour nous, à même les temps passés; nʹest‐ce pas triste à penser; toujours <strong>de</strong>s<br />

hommes jouant <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s os et <strong>de</strong>s têtes <strong>de</strong> morts; que leur sert? Les morts ne leur disant<br />

rien, ils ne savent pas les faire parler, ou, sʹils parlent, les événements parlent plus haut:<br />

Hamlet a beau errer au cimetière, ne faut‐il pas toujours quʹil tue sa mère et meure après,<br />

lui‐même assassiné. Il y a <strong>de</strong> quoi, nʹest‐ce pas, croire à la fatalité. Il reste, il est vrai, plus<br />

haut que tout cela, un oracle à interroger mais qui donc y songe? Ceux qui le voudraient<br />

parfois comme moi, ne lʹosent plus. Tout cela mʹattriste souvent.<br />

M. Hugo mʹa conté lʹaffaire <strong>de</strong> Sainte‐Beuve et vous, vous la racontez à M. Mazure;<br />

pour dire vrai Le Globe me paraissait bien immodéré en politique <strong>de</strong>puis quelque temps, la<br />

littérature et les arts y sont abandonnés je ne sais à quelles mains; il mʹirritait. Je mʹen étais<br />

détaché; mais <strong>de</strong>puis que je sais que Sainte‐Beuve le dirige, moitié conversion, moitié es‐<br />

poir pour un meilleur avenir, je me reprends à lʹaimer; peut‐être même cette circonstance<br />

petit à petit modifiera mon opinion; je mʹavoue tout cela et le trouve bien ridicule; mais<br />

puisque cela est pourquoi ne pas le dire à vous surtout, mon cher Victor, si généreux, si<br />

indulgent pour vos amis.<br />

Si la pièce <strong>de</strong> M. Paul 13 est présentée avant votre retour, je veux, mon ami, mʹinspi‐<br />

rer <strong>de</strong> tout le dévouement que je vous ai vu montrer autrefois. Jʹécrirai à lʹauteur et je met‐<br />

trai mon zèle ou plutôt le vôtre à sa disposition. Vous pouvez donc sous ce rapport quʹen<br />

tout cas vous y serez vous‐même.<br />

Je vous reverrai <strong>avec</strong> bien <strong>de</strong> la joie et aussi M. Gavard. Quel dommage que notre<br />

ami Mazure nʹy sera plus: trois hommes dévoués pour vous recevoir. Je vous trouve heu‐<br />

reux quelquefois <strong>de</strong> notre amitié, car je pense quʹon nʹa <strong>de</strong>s amis que lorsquʹon mérite dʹen<br />

avoir.<br />

<strong>Léon</strong><br />

5 à M. Pavie<br />

Joie <strong>de</strong> l’amitié. Représentation <strong>de</strong> Marion <strong>de</strong> Lorme. Désir d’écrire un article sur la prière, mais pour le mo‐<br />

ment, sa faible santé le lui interdit.<br />

Vendredi 2 septembre 1831<br />

Votre lettre a bien tardé, mon ami, et toute part faite aux libres ébats en plein air, à<br />

lʹoubli, pour quelques instants <strong>de</strong> tout ce qui nʹest pas maison paternelle, ville natale,<br />

champs alentour, il y avait déjà plusieurs jours que je lʹattendais, mais voilà enfin, quʹelle<br />

soit la bienvenue. Je la parcours à la hâte, et pour ne pas jouir en égoïste <strong>de</strong> ma joie, jʹy<br />

convie par un mot notre ami Gavard qui bien vite est accouru et nous avons parlé <strong>de</strong> vous<br />

comme toujours, car je ne me souviens pas dʹun entretien <strong>avec</strong> lui, où vous absent, ne<br />

soyez bientôt un tiers, non <strong>de</strong> convention ou <strong>de</strong> résolution prise, mais tout naturellement<br />

et parce que <strong>de</strong>ux amis ont vite franchi tous les terrains vagues <strong>de</strong>s conversations généra‐<br />

les et par une pente insensible, comme à leur insu, reviennent aux sujets dʹentretien intime,<br />

<strong>de</strong> confiance, dʹabandon. Alors, sʹil est entre nous quelque léger dissentiment, il arrive ra‐<br />

rement que nous nʹen appelions pas à votre opinion présumée pour juger nos débats; en ce<br />

13 Paul Foucher, beau-frère <strong>de</strong> Victor Hugo.<br />

8


cas, mon triomphe est presque toujours sûr, car toujours jʹai pris en main la cause que<br />

vous‐même eussiez défendue.<br />

Dʹautres fois nous vous regrettons à propos dʹune promena<strong>de</strong>, dʹune admiration à<br />

partager <strong>avec</strong> vous, dʹune émotion dʹart ou autre que votre présence nous eût rendu plus<br />

douce encore et ainsi toujours. Cʹest surtout dans la gran<strong>de</strong> solennité, gran<strong>de</strong> pour vous<br />

surtout, ami dévoué <strong>de</strong> M. Hugo, cʹest surtout à la représentation <strong>de</strong> Marion que vous nous<br />

avez manqué et à bien dʹautres encore, et à lʹauteur, et à sa femme et à la pièce aussi, car<br />

les amis étaient bien disposés, lʹassemblée brillante et nombreuse, lʹœuvre pleine dʹintérêt<br />

et dʹadmirables effets, et pourtant, que vous dirai‐je, un certain froid, une sorte <strong>de</strong> gêne ré‐<br />

gnaient dans la salle; dʹénormes longueurs (superbes assurément en autre lieu) y contri‐<br />

buaient sans doute, mais il manquait dʹailleurs à toutes les bonnes volontés une direction,<br />

une âme, un chef. On applaudissait, mais juste à point, pas <strong>avec</strong> entraînement, moins en‐<br />

core à tort à travers ni dʹenthousiasme. Mais que cela, mon ami, nʹafflige pas votre affec‐<br />

tion, les longueurs ont été supprimées et la pièce y a tellement gagné quʹelle marche main‐<br />

tenant en plein succès, fait chaque soir gran<strong>de</strong> recette, est aujourdʹhui à sa 19 e représenta‐<br />

tion et sans doute en a plus encore dans lʹavenir. Il nʹy avait à la 1 e que peu ou point dʹop‐<br />

position, vers la 5 e ou 6 e sʹen était élevée une <strong>de</strong>s plus malveillantes où <strong>de</strong>s plus grossières.<br />

Les actes étaient interrompus, une fois même on nʹa pu achever la 4 e , mais,<br />

cʹétait si évi<strong>de</strong>mment une œuvre machinée par lʹenvie, que le public a fait<br />

justice. En <strong>de</strong>ux jours, ce fut chose faite. La pièce bien sentie, bien<br />

comprise, applaudie <strong>avec</strong> un véritable élan en bien <strong>de</strong>s endroits, partout<br />

bien écoutée, produit maintenant le plus grand effet. M me Dorval est<br />

superbe, il y a vraiment <strong>de</strong>s révélations continuelles dans ses poses, ses<br />

accents, ses gestes; vous verrez. Vous auriez eu sur tout cela un article<br />

pour votre journal, si M. Gavard nʹeût été paresseux, il en avait commencé<br />

un, il promettait chaque jour <strong>de</strong> lʹachever quand votre lettre est survenue,<br />

mais cʹétait trop peu avancé; lundi <strong>de</strong>rnier, voyant quʹil en fallait dé‐<br />

sespérer, jʹai tenté moi‐même à la hâte dʹen faire un; mais un jour ce nʹétait<br />

pas assez. Je nʹavais quʹun canevas à peine. Je nʹimprovise guère, puis la chaleur extrême<br />

mʹa affaibli au point que ma tête sʹen ressent. je suis las une heure après mon lever, jʹai be‐<br />

soin <strong>de</strong> sommeil; jʹaurais fort risqué dʹentraîner aussi nos lecteurs; il nʹy aura donc rien là‐<br />

<strong>de</strong>ssus, mais pourquoi nʹen feriez‐vous pas sur lʹouvrage imprimé, si vous ne lʹavez pas,<br />

cʹest un vif plaisir qui vous reste avant <strong>de</strong> mourir. Pour moi, je ne pouvais revenir <strong>de</strong> tout<br />

le charme que jʹy trouvais, neuf et frais encore après lʹavoir entendu <strong>de</strong>ux fois. Vos amis<br />

ont eu pour la première représentation chacun une place <strong>de</strong> galerie réservée et numérotée.<br />

Depuis je leur ai fait nouvelle et large distribution <strong>de</strong> billet: jʹai envoyé <strong>de</strong>ux dʹentre eux<br />

(<strong>de</strong>s amis) à M. Hugo <strong>avec</strong> une lettre; enfin pour les satisfaire pleinement jʹen réclamerai<br />

encore; êtes‐vous content <strong>de</strong> moi?<br />

9


Rési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>s Hugo rue N.D. <strong>de</strong>s Champs Je suis allé hier exprès rue<br />

<strong>Jean</strong> Goujon 14 pour voir tout le<br />

mon<strong>de</strong> et vous donner nouvel‐<br />

les fraîches; mais chaque soir M.<br />

Hugo est au théâtre. M me sʹétait<br />

couchée et sa porte était défen‐<br />

due; elle va bien néanmoins et<br />

les petits enfants aussi, et, jus‐<br />

quʹà M. Paul que jʹai vu hier<br />

tout fleuri <strong>de</strong> santé, bien pressé<br />

comme <strong>de</strong> coutume et pour ce<br />

ayant fort négligé sa toilette. Jʹai<br />

reçu <strong>de</strong> notre ami Mazure une<br />

lettre écrite en hâte sans doute<br />

et dans une heure <strong>de</strong> distrac‐<br />

tion, car <strong>de</strong> sa femme, <strong>de</strong> son ménage, <strong>de</strong> tout ce quʹil y a <strong>de</strong> nouveau dans sa position, pas<br />

un mot; excellent homme, il avait oublié tout cela. A propos <strong>de</strong> choses singulières, il est ar‐<br />

rivé encore une sœur chez M. Gavard douce et bonne comme les autres, j’en jugerais mais<br />

<strong>avec</strong> le nez le plus curieux qui se puisse imaginer, il est pointu et se recourbe comme un<br />

cou <strong>de</strong> cygne vers la bouche. Je vous écrirai, mon ami, un autre jour, une lettre moins dé‐<br />

layée et moins vi<strong>de</strong>. Je vous lʹai dit ma tête est fatiguée; dès que je serai remonté un peu, je<br />

veux aussi faire quelque chose pour le petit journal. Jʹaurais eu, ce me semble, aujourdʹhui<br />

encore, mille choses à dire, mais je nʹai pas <strong>de</strong> place et je cause mal. Adieu donc, à une au‐<br />

tre fois. Il faut aimer ses amis même mala<strong>de</strong>s. Aimez‐moi encore plus quʹà lʹordinaire. Il<br />

faut présenter mes souvenirs respectueux à M. votre père et parler <strong>de</strong> moi aussi à votre<br />

frère, puis à M. Cosnier nous sommes amis maintenant.<br />

<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong><br />

Je vais mʹoccuper du tableau.<br />

6 à M. Pavie<br />

MLP. veut se gar<strong>de</strong>r <strong>de</strong> toute fièvre politique. Combien l’amitié est une chose sainte <strong>de</strong>vant Dieu. Nouvelles <strong>de</strong> la<br />

famille Hugo. Le journal L’Avenir. Le procès <strong>de</strong> l’enseignement libre. Les discours <strong>de</strong> Montalembert et <strong>de</strong> Lacor‐<br />

daire lui ren<strong>de</strong>nt toute sa foi. Il se reproche sa façon d’écrire. Comment il juge la vie politique et sociale en Europe.<br />

21 octobre 1831<br />

Où donc êtes vous, mon ami, quʹon ne vous entend plus? au haut dʹun mont <strong>avec</strong><br />

les aigles, ou au fond dʹun val <strong>avec</strong> les taupes? Sʹil en est ainsi, <strong>de</strong>scen<strong>de</strong>z ou remontez un<br />

peu car moi, homme <strong>de</strong> la plaine, je veux causer <strong>avec</strong> vous. Nʹimaginez pas au moins que<br />

je fasse ici une allusion politique. Dieu mʹen préserve. Jʹen suis là au contraire, que jʹajoute‐<br />

rai volontiers aux Litanies cette <strong>de</strong>man<strong>de</strong>: ʺDe furore politicorum, libera nos, Domine!ʺ<br />

comme autrefois on disait au vieux Paris, Normanorum; mes amis et moi sommes convenus<br />

14 Jusqu’en 1830, Hugo habita au n°11 <strong>de</strong> la rue Notre-Dame-<strong>de</strong>s-Champs. Après le triomphe d’Hernani, comme l’appartement ne<br />

désemplissait pas, les propriétaires, gens calmes et sans histoires, ne purent leur renouveler le bail. Les Hugo trouvèrent à se loger<br />

du côté <strong>de</strong>s Champs-Élysées, dans un hôtel qui "se dresse comme un défi au milieu <strong>de</strong>s terrains vagues". A l’époque, les Champs-<br />

Élysées n’étaient pas à la mo<strong>de</strong> et ses riches <strong>de</strong>meures pas encore construites!<br />

10


quʹune si fastidieuse chose ne se mettrait plus entre nous et dans le reste <strong>de</strong> Paris, sans<br />

convention, il en est ainsi à peu près pour tout le mon<strong>de</strong> et cela se croit aisément, nʹest‐ce<br />

pas, plein jusquʹà la gorge, on ne peut plus manger. En province on nʹen est pas là, il para‐<br />

ît: viennent <strong>de</strong> me tomber ici quelques bons Dieppois à moi connus. Cʹest vraiment<br />

curieux <strong>de</strong> les voir dévorer <strong>avec</strong> avidité les mets les plus grossiers en ce genre. Jʹen étais ef‐<br />

frayé. Quel appétit! Et vite, mon ami, vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z: que faites vous maintenant que<br />

vous voilà délivré. Hélas! lʹodieuse politique, voyez‐vous, cʹest une fièvre. Tant quʹelle<br />

dure, on nʹa quʹune vie factice dʹéréthisme et <strong>de</strong> bouffissure; lʹaccès passé, on retombe pâle,<br />

exténué, vi<strong>de</strong>, impuissant, on ne sait pas même vouloir ni regretter, ni avoir un désir. Oh!<br />

heureux homme qui avez échappé à toutes ces phases <strong>de</strong> la maladie, à qui lʹair <strong>de</strong>s champs<br />

a dʹun coup rendu fraîcheur et vie: oh! que je vous vois bien la tête haute, lʹœil animé, ou<br />

plutôt comme on le <strong>de</strong>vient à la longue en présence <strong>de</strong> la nature, face à face <strong>avec</strong> lʹinfini,<br />

calme, posé, revenu pour ainsi dire; les bras croisés et regardant passer. Du moins, mon<br />

ami, pensez‐vous à nous au milieu dʹun pareil bonheur? Avez‐vous un souvenir, un re‐<br />

gret? Vous manquons‐nous? Gavard qui jamais ne jouit en repos <strong>de</strong> rien, <strong>de</strong> temps en<br />

temps me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>: ʺCroyez‐vous que Victor nous aime réellement?ʺ Et moi, invariable‐<br />

ment je réponds: je le crois. Nʹallez pas me faire mentir au moins, à vous en serait la peine<br />

<strong>de</strong>vant Dieu. Oui, <strong>de</strong>vant Dieu, lʹamitié est vraiment sainte. Tout sentiment profond, géné‐<br />

reux, dévoué est un élan vers Dieu et jʹai toujours <strong>de</strong> pareils mouvements en pensant à<br />

vous.<br />

Un autre ami à vous, M. Hugo, est à la campagne comme vous, <strong>de</strong>puis quelque<br />

temps. M. Foucher Paul que jʹai rencontré mʹa dit que sa sœur était à la campagne aussi,<br />

toujours souffrante; elle était bien changée en effet, quand je la vis pour la première fois.<br />

Vous avez connais‐sance sans doute <strong>de</strong> cette vilaine affaire <strong>de</strong> M. Hugo <strong>avec</strong> son libraire 15 ;<br />

les gens <strong>de</strong> bonne foi et <strong>de</strong> sens savent<br />

bien lui rendre justice, mais les sots et<br />

ceux qui parlent par ouï‐dire font<br />

autrement; je nʹy vois pas grand<br />

malheur. Je soupçonne pourtant que M.<br />

Hugo en a du mécontentement et <strong>de</strong><br />

lʹennui. Si vous lisez peu les journaux,<br />

cette misère vous aura échappé peut‐<br />

être; cherchez dans la Gazette <strong>de</strong>s<br />

tribunaux <strong>de</strong> ce mois.<br />

Puisque nous parlons journaux,<br />

LʹAvenir 16 va bien; il a <strong>de</strong>s moyens <strong>de</strong><br />

subsister pour un certain temps. Paraît‐il<br />

15 V. Hugo s’était engagé à livrer à son éditeur Gosselin son roman Notre-Dame <strong>de</strong> Paris le 15 avril 1829. Après un an d’attente,<br />

celui-ci lui réclama son manuscrit, sous peine d’une astreinte <strong>de</strong> 1000f par semaine <strong>de</strong> retard. V.Hugo achèvera son roman-fleuve<br />

en cinq mois!<br />

16 Fondé le 16 octobre 1830 par un groupe <strong>de</strong> jeunes catholiques rassemblés autour <strong>de</strong> Félicité <strong>de</strong> Lamennais, il était le principal organe<br />

du catholicisme libéral; son programme était «Dieu et la liberté». Hostile à la politique d’alliance entre l’Eglise et l’Etat (le<br />

trône et l’autel), il réclamait la pleine liberté <strong>de</strong> conscience et <strong>de</strong> religion, ce qui impliquait la suppression du Concordat. Il fut suspendu<br />

le 15 novembre 1831 et ses thèses condamnées dans Mirari Vos, le 15 août 1832. <strong>–</strong> Félicité <strong>de</strong> Lamennais (1782-1854),<br />

breton (comme Chateaubriand, son contemporain), ordonné prêtre en 1816, <strong>de</strong>vint célèbre pour son Essai sur l’indifférence en matière<br />

<strong>de</strong> religion (1817). Journaliste <strong>de</strong> talent, il est d’abord royaliste et ultramontain, mais il va évoluer vers le catholicisme libéral,<br />

dont il restera l’inspirateur tout au long du 19 e siècle. Après la condamnation <strong>de</strong> son journal, il se retirera dans sa propriété <strong>de</strong> la<br />

Chênaie, en Bretagne. Fin 1833, il cessera toute fonction sacerdotale, et à partir <strong>de</strong> 1835, ne partagera plus la foi catholique.<br />

11


chez vous? Y avez‐vous lu le procès <strong>de</strong> lʹEcole libre 17 <strong>de</strong>vant la chambre <strong>de</strong>s Pairs? Les dis‐<br />

cours <strong>de</strong> MM. Montalembert et Lacordaire, lʹadmirable chose! Cela me rend toute ma foi.<br />

Si cela nʹest pas à Angers, si vous nʹavez pas LʹAvenir, dites‐le moi, je vous enverrai par M.<br />

Leclerc, votre correspondant, le procès <strong>de</strong> lʹEcole libre; il a dû paraître ces jours‐ci en bro‐<br />

chure.<br />

Il est un tout petit peu question <strong>de</strong> mʹenvoyer hors <strong>de</strong> France, mais si vaguement<br />

encore quʹil ne vaut pas la peine <strong>de</strong> vous en parler aujourdʹhui.<br />

Personne ne sait mieux que moi remplir trois pages dʹune lettre sans rien dire. Je me<br />

trouve toujours surpris dʹêtre arrivé au bout quand je suis encore au préambule; mais il<br />

faut en prendre son parti, ce quʹil y a dʹun peu passable en moi, quant aux idées et aux<br />

sentiments est si confus, si loin placé; je dirais presque <strong>de</strong> moi, cʹest un trou noir, sinon<br />

profond; qui sait? au fond peut‐être, il y a quelque chose; seulement au‐<strong>de</strong>ssus, vers le<br />

bord, incessamment sʹélève un petit brouillard <strong>de</strong> babillage, <strong>de</strong> mots flui<strong>de</strong>s, vapeur légère<br />

quʹun seul rayon <strong>de</strong> jour pénètre et dissipe aussitôt. Cela ne ressemble pas mal à une com‐<br />

paraison avantageuse; cʹest quʹici encore je dis mal ce que je prétends dire et ainsi toujours.<br />

Vous ne tiendrez compte <strong>de</strong> tout cela et me ferez, nʹest‐ce pas, une réponse bien compacte,<br />

à lignes bien serrées; il y a bien aussi quelque excuse à moi <strong>de</strong> dire si peu en tant <strong>de</strong> mots,<br />

il y a si chétive vie autour <strong>de</strong> nous; quʹest‐ce donc qui vit autour <strong>de</strong> nous? Quʹest‐ce qui a<br />

une âme? Notre histoire, notre politique, notre littérature, nos arts; non, la vraie vie nʹest à<br />

rien <strong>de</strong> tout cela, mais du moins est‐elle ailleurs? En Allemagne peut‐être, mais pas com‐<br />

plète, pas <strong>de</strong> corps et dʹâme; en Russie, je ne sais pas, il fait trop froid peut‐être, le sang ne<br />

circule pas. En Angleterre, il nʹy a pas non plus force et vigueur. Tout bien considéré donc,<br />

notre pauvre Pologne égorgée 18 , rien ne vit plus en Europe. Vous avez rugi, nʹest‐il pas<br />

vrai, à lʹannonce que Varsovie était morte; il y avait bien <strong>de</strong> quoi: cʹétait le <strong>de</strong>rnier soupir<br />

dʹun ancien mon<strong>de</strong>; un nouveau mon<strong>de</strong> renaîtra sans doute, mais que <strong>de</strong> jours encore pas‐<br />

seront dans les ténèbres, combien <strong>de</strong> peines et <strong>de</strong> sueurs, et peut‐être <strong>de</strong> sang coûtera<br />

lʹœuvre nouvelle. Il me semble que je vous ai déjà dit tout cela; je baisse visiblement. Je<br />

mets ici simplement les noms <strong>de</strong> M. votre Père, <strong>de</strong> votre frère, <strong>de</strong> M. <strong>Léon</strong>. Ce sont <strong>de</strong>s no‐<br />

tes, vous en ferez un chant. Adieu, arrivez vite, au revoir bientôt. Quand? On voulait 8f.<br />

pour emballer votre Bonaparte. Cʹétait trop; <strong>avec</strong> le port cela <strong>de</strong>venait extravagant: vos or‐<br />

dres pour cela.<br />

Votre ami dévoué.<br />

<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong><br />

17 En mai 1831, Lacordaire et Montalembert ouvrent une école libre qui est aussitôt fermée par la police. En septembre, traduits <strong>de</strong>vant<br />

la Chambre <strong>de</strong>s Pairs, où Montalembert vient d’être élu, ils ne sont condamnés qu’à 100f d’amen<strong>de</strong>. <strong>–</strong> Henri Lacordaire<br />

(1802-1861), prêtre et dominicain. Avec Lamennais et Montalembert, un <strong>de</strong>s chefs <strong>de</strong> file du catholicisme libéral. Après la<br />

condamnation <strong>de</strong> L’Avenir, il s’éloigne <strong>de</strong> Lamennais. Grand orateur, il prêchera à Stanislas, à N.D. <strong>de</strong> Paris (1836-1836) et en<br />

1843, restaurera l’ordre dominicain en France. <strong>–</strong> Charles <strong>de</strong> Montalembert (1810-1870) participe au groupe <strong>de</strong>s catholiques libéraux<br />

<strong>de</strong> Lacordaire et <strong>de</strong> Lamennais. Collaborateur à L’Avenir, il se séparera <strong>de</strong> Lamennais en 1832. Membre <strong>de</strong> la Chambre <strong>de</strong>s<br />

Pairs, il fut au cœur <strong>de</strong>s débats sur la liberté religieuse et celle <strong>de</strong> l’enseignement. Il avait ouvert à Paris un brillant salon littéraire.<br />

Il a laissé une importante étu<strong>de</strong> sur les Moines d’Occi<strong>de</strong>nt.<br />

18 Allusion au soulèvement du 14 août à Varsovie qui tentait <strong>de</strong> secouer la domination russe et autrichienne. Les troupes <strong>de</strong> Nicolas<br />

I er avaient pris la ville le 8 septembre. Cet épiso<strong>de</strong> fut l'occasion pour bien <strong>de</strong>s catholiques polonais <strong>de</strong> défendre leur pays contre<br />

l'occupant étranger, comme la fameuse comtesse Emilie <strong>de</strong> Plater, qui servit d'ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> camp à son mari, et qui mérita d'être appelée<br />

la "<strong>Jean</strong>ne d'Arc polonaise". MLP. rencontrera <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> ses frères, César et Ladislas, qui fréquentaient comme lui le salon <strong>de</strong> Montalembert<br />

(cf. lettre 16, du 2 avril 1833).<br />

12


7 à M. Pavie<br />

Décès du père <strong>de</strong> leur ami Gavard. Réflexions sur la mort. Le choléra à Paris.<br />

Mardi 24 avril 1832<br />

Jʹétais tout à lʹheure, mon ami, chez M. Gavard lorsque votre lettre mʹest arrivée,<br />

cʹest moi qui lʹai ouverte et jʹy vais répondre, sans préjudice dʹune épître particulière que<br />

Gavard vous pourra faire un peu plus tard. Mais en ce moment, il nʹaurait guère le calme<br />

nécessaire pour sʹentretenir <strong>avec</strong> vous, la mort a aussi heurté à sa porte et son bon vieux<br />

père vient <strong>de</strong> mourir. Il est décédé hier à 6h. non par suite <strong>de</strong> la maladie régnante 19 ; mais il<br />

nʹimporte par où la mort vient; mourir, cʹest toujours mourir. Notre ami a lʹâme si douce et<br />

si affectueuse et il avait dʹailleurs une tendresse si profon<strong>de</strong> pour son père quʹil est dans<br />

une gran<strong>de</strong> désolation; Jusquʹau <strong>de</strong>rnier instant il a veillé près <strong>de</strong> lui et lʹa vu passer <strong>de</strong> no‐<br />

tre mon<strong>de</strong> à un meilleur. Il a beaucoup pleuré toute la nuit, mais ce matin il est revenu<br />

chez lui ramenant sa mère et je lʹai trouvé calme, bien triste, mais résigné. Oh! que ce <strong>de</strong>r‐<br />

nier mot est amer, quʹil gar<strong>de</strong> <strong>de</strong> douleurs profon<strong>de</strong>s, et combien <strong>de</strong> gens pourtant autour<br />

<strong>de</strong> nous, <strong>de</strong>puis un mois, ont dû se résigner, ployer sous une force indomptable, et, vain‐<br />

cus, après lʹhorrible lutte dire au vainqueur: que votre volonté soit faite: le Vainqueur, cʹest<br />

Dieu, mais que lʹhomme est faible et quʹil résiste peu: cʹest vraiment pitié! Moi aussi, tout<br />

récemment, jʹai vu mourir un bon vieillard, presque mon père ici. Il nous regardait tous et<br />

semblait, ne pouvant plus parler, nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r encore secours, mais pleurant ou mor‐<br />

nes, nous répondions par les pleurs ou le silence. Alors, nʹespérant plus, il a fermé les yeux<br />

et il est mort. 20<br />

Je ne crois pas quʹune créature ayant une âme puisse voir pareille chose sans sentir<br />

à ce moment quʹelle aussi meurt en même temps, que les liens dʹamour qui lʹattachaient à<br />

la terre se relâchent, du moins assez, pour quʹelle aussi se croie libre et prête à sʹenvoler.<br />

Jʹétais naturellement assez disposé déjà à considérer la vie comme un <strong>de</strong>voir, comme une<br />

tâche, mais je lʹoubliais bien encore quelquefois; à présent, il me semble que je ne lʹoublie‐<br />

rai plus.<br />

Votre lettre aussi, mon ami, mʹafflige profondément. Vous aussi vous me quittez<br />

donc? une absence longue, indéfinie. Il y a si peu dʹespérance au bout! Cela ressemble‐t‐il<br />

plus à la vie quʹà la mort, je ne sais, mais cela mʹattriste plus que je ne saurais dire! Vous<br />

étiez mon étoile ici: quand je ne savais plus par où marcher, je regardais en haut et jʹavan‐<br />

çais vers le point que vous occupiez vous‐même. Désormais<br />

il faudra vous placer bien haut pour quʹà si gran<strong>de</strong><br />

distance vos amis puissent vous apercevoir; mais moi,<br />

jʹaurai lʹœil perçant et saurai bien vous distinguer dès<br />

que vous commencerez à poindre. Courage mon ami,<br />

veuillez fortement sortir <strong>de</strong> lʹombre et vous y arriverez<br />

assurément. Non pas, Dieu vous en gar<strong>de</strong>, pour briller<br />

et éblouir, mais pour vivre et respirer dans la lumière, pour<br />

vivre <strong>de</strong> toutes vos facultés, par lʹâme comme par le<br />

cœur.<br />

19 De la fin du mois <strong>de</strong> mars 1832 à octobre <strong>de</strong> la même année, le choléra envahit Paris. Il fera près <strong>de</strong> 22000 morts. MLP. note ici<br />

que, paradoxalement, le père <strong>de</strong> leur ami n'est pas mort <strong>de</strong>s suites <strong>de</strong> l'épidémie.<br />

20 Il s'agit probablement <strong>de</strong> M. Hébert, ami <strong>de</strong> son père, chez qui le jeune Le <strong>Prevost</strong> avait pris pension lors d'un premier séjour à Pa-<br />

ris. (VLP, I, p.7).<br />

13


Interrompu ici, cʹest après <strong>de</strong>ux jours seulement que je clorai ce brouillon. Jʹen suis<br />

presque bien aise, car jʹaurai <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> plus en plus satisfaisantes à vous donner sur<br />

la décroissance du mal qui nous désole; il s’affaiblit <strong>de</strong> jour en jour, et tout à l’heure la<br />

mortalité débordée comme ils disaient, sera rentrée dans son lit. Avant peu, nous aurons la<br />

retraite la plus sûre, le refuge le plus certain, car les mé<strong>de</strong>cins sʹaccor<strong>de</strong>nt à dire que là il<br />

sera le meilleur dʹhabiter, non pas où le mal ne sera pas venu, mais dʹoù déjà il sera parti.<br />

Il sʹest disséminé sur les provinces, mais affaibli et comme en déroute; on ne craint pas<br />

beaucoup ses ravages. Toutefois, mon ami, vous savez combien vivement il nous intéres‐<br />

sera <strong>de</strong> savoir quel effet il aura dans lʹAnjou 21 , et si, tout ce qui vous touche <strong>de</strong> près ou <strong>de</strong><br />

loin est épargné. Point <strong>de</strong> négligence donc et donnez‐nous souvent, mais souvent <strong>de</strong> vos<br />

nouvelles. Notre ami Cosnier peut vous relayer. Il sait bien aussi que nous attendons <strong>avec</strong><br />

impatience vos bulletins. Renvoyez‐le ici. Que fait‐il là‐bas? et M. Nerbonne donc?<br />

Je reçois hier une lettre <strong>de</strong> notre bien affectionné M. Mazure, lui et sa femme et son<br />

petit pépin <strong>de</strong> fille vont bien. Vous aurez les Chateaubriand bientôt. Je les recueille. Adieu,<br />

pensez beaucoup à nous. Ecrivez‐nous. Commercez enfin le plus possible <strong>avec</strong> nous, afin<br />

que nous ne cessions pas dʹentrer dans votre vie, dʹy être mêlé comme élément nécessaire,<br />

car, nous, voyez‐vous, ne saurions désormais vous séparer <strong>de</strong> la nôtre.<br />

Respect, affection pour tous, et pour vous, mon ami, le dévouement le plus absolu.<br />

<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong><br />

8 à M. Pavie<br />

Il annonce à son ami qu’il ʺre<strong>de</strong>vient croyantʺ. Prière à un Dieu ʺsentiʺ. Il cherche un prêtre à qui ʺremettreʺ sa<br />

conscience. Il hésite entre les abbés Gerbet et Lacordaire.<br />

Paris, 9 août 1832<br />

Ecoutez bien, mon cher ami, je voudrais conseil <strong>de</strong> vous<br />

sur une affaire grave que vous comprendrez bien, une af‐<br />

faire <strong>de</strong> conscience enfin. Quelquʹouvert et accessible que<br />

je sois pour vous <strong>de</strong> toutes parts, je me sens quelque répu‐<br />

gnance à vous entretenir par lettre <strong>de</strong> pareille matière qui<br />

ne se touche guère, même entre amis, quʹ<strong>avec</strong> précaution,<br />

à <strong>de</strong>s heures choisies <strong>de</strong> confiance et dʹabandon. Mais que<br />

faire à cela, puisque vous nʹêtes pas là, et quʹautour <strong>de</strong> moi<br />

je nʹai personne que je puisse consulter et dont lʹavis éclai‐<br />

ré me tire <strong>de</strong> mes doutes. Vous mʹavez vu, il vous en sou‐<br />

vient, sur la route du catholicisme, le regardant comme<br />

mon but, mais faisant à peine vers lui quelque pas bien<br />

lents, mʹarrêtant souvent sur le chemin, et <strong>de</strong>meurant en<br />

<strong>de</strong>rnier résultat dans ce triste état mixte qui nʹest ni lu‐<br />

mière ni ténèbres, et qui tantôt me semblait le crépuscule<br />

<strong>de</strong> mon ancienne foi, et tantôt lʹaurore dʹune foi nouvelle. A lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> Dieu, je sors enfin <strong>de</strong><br />

ces brouillards dʹincertitu<strong>de</strong> et <strong>de</strong> doute, je re<strong>de</strong>viens croyant, je sens que mes liens se bri‐<br />

21 Dès que le fléau s'était manifesté à Paris, en mars 1832, V. Pavie s'était empressé <strong>de</strong> regagner sa ville natale. C'est au mois <strong>de</strong> juin<br />

que le département du Maine-et-Loire sera envahi par la terrible maladie.<br />

14


sent et que je remonte à la vérité; ma prière nʹest plus vague, incertaine, au hasard jetée<br />

vers le Dieu inconnu, elle va dʹune pente naturelle au Dieu que je sens, que je vois, que<br />

jʹentends et sous lʹœil <strong>de</strong> qui je suis à cet instant comme à tous les autres. Vous prendrez<br />

part je le sais, mon cher ami, à mon bonheur et je nʹeusse pas manqué <strong>de</strong> vous le dire plus<br />

tôt, si je nʹeusse pas trouvé en moi la répugnance dont je parlais plus haut, sorte <strong>de</strong> pu<strong>de</strong>ur<br />

<strong>de</strong> lʹamour divin qui se renferme et se voile comme les autres amours dont il est le type<br />

éternel.<br />

Mais il ne suffit pas, vous le savez, <strong>de</strong> croire, il faut une forme à sa foi, il faut <strong>de</strong>s<br />

œuvres, il faut remplir les <strong>de</strong>voirs du chrétien. Jʹai dû, dès lors, songer à remettre ma cons‐<br />

cience aux mains dʹun prêtre, à chercher remè<strong>de</strong> pour le passé, ai<strong>de</strong> pour lʹavenir. Un di‐<br />

gne ecclésiastique dont vous mʹavez peut‐être entendu parler, M. lʹabbé Busson, ancien se‐<br />

crétaire général <strong>de</strong> notre Ministère, catéchiste <strong>de</strong> M lle <strong>de</strong> Berry 22 , nʹinspirait cette confiance<br />

tendre et élevée que jʹaimerais porter à un directeur; il était absent. Depuis son retour<br />

dʹHolyrood où il a été donné à M lle sa 1 ère communion, il avait dû quitter Paris, toute car‐<br />

rière lui était désormais close; toutefois, lʹarchevêque, qui a en lui gran<strong>de</strong> confiance, lʹa<br />

nommé récemment chanoine et curé <strong>de</strong> Notre‐Dame; mais déterminé à un oubli absolu,<br />

déconcerté peut‐être aussi par quelques odieuses plaisanteries du Constitutionnel sur sa<br />

nomination il refuse décidément et je me suis assuré à lʹarchevêché que cʹest sans espoir <strong>de</strong><br />

retour.<br />

Maintenant, mon ami, dites‐moi, que faut‐il faire? Faut‐il frapper à la porte du pre‐<br />

mier prêtre <strong>de</strong> paroisse et lui dire: Je viens à vous recevez‐moi; sans doute le plus humble<br />

prêtre me fera, je le sais, entendre la parole <strong>de</strong> Dieu, mais je suis bien faible encore, mes<br />

lumières sont bien incertaines; jʹeusse aimé pour les jours mauvais trouver <strong>de</strong>s enseigne‐<br />

ments, pour tous les jours un gui<strong>de</strong> dans les étu<strong>de</strong>s que je veux entreprendre. Vous com‐<br />

prenez déjà où je vais arriver. M. Gerbet 23 ou M. Lacordaire seraient ceux entre tous dont la<br />

direction me serait la plus précieuse, dont la parole me pénétrerait le mieux.<br />

Mais M. Gerbet ne doit revenir quʹau mois dʹoctobre à Paris où ces Messieurs pa‐<br />

raissent <strong>de</strong>voir se réunir <strong>de</strong> nouveau, et M. Lacordaire que je nʹai jamais vu me donne une<br />

frayeur dʹenfant; puis il me semble que ces MM. ne voudront pas <strong>de</strong> moi, ils ont tant et <strong>de</strong><br />

si graves occupations. Jʹaurais pourtant une gran<strong>de</strong> joie si lʹun ou lʹautre, le premier sur‐<br />

tout, voulait me diriger. Dites, que faire? Faut‐il attendre le retour <strong>de</strong> M. Gerbet? cela sem‐<br />

ble bien long, aller tout <strong>de</strong> suite à M. Lacordaire qui me dira oui ou non, ou au simple prê‐<br />

tre <strong>de</strong> paroisse?<br />

Vous qui me connaissez bien, mon ami, vous comprendrez<br />

mieux que moi, étant <strong>de</strong>puis longtemps en bonne voie, ce qui me<br />

convient le mieux. Réfléchissez un instant et donnez‐moi un bon et<br />

salutaire avis. Je le suivrai; pour vous dire ma pensée tout simple‐<br />

ment, jʹeusse <strong>de</strong> tous aimé le plus le prêtre nommé le premier, lʹab‐<br />

bé Busson; déjà chaque fois que je le voyais, je me retenais pour ne<br />

22 Elle était la sœur du comte <strong>de</strong> Chambord, dont plus tard, en 1871, l'intransigeance sur le fameux drapeau blanc, entre autres raisons,<br />

fit échouer le retour <strong>de</strong>s Bourbons sur le trône. Leur mère, la duchesse <strong>de</strong> Berry, s'illustrait en cette année 1832, en tentant <strong>de</strong><br />

soulever la Provence et la Vendée contre Louis-Philippe.<br />

23 Philippe Gerbet (1798-1864), prêtre en 1822, appartint au groupe <strong>de</strong> Lamennais jusqu'en 1835. Philosophe et historien, théologien,<br />

grand écrivain, il va préciser le système philosophique mennaisien. Il fait paraître en 1829 un maître livre, Considérations sur<br />

le dogme régénérateur <strong>de</strong> la piété catholique, où il rejette le jansénisme et recomman<strong>de</strong> la communion fréquente. A Rome <strong>de</strong> 1839<br />

à 1849, il y travaille à son Esquisse <strong>de</strong> la Rome chrétienne. Il sera nommé évêque <strong>de</strong> Perpignan, en 1854. D'après la lettre <strong>de</strong> MLP.<br />

du 1 er décembre, il semble que l'abbé Gerbet, après l'avoir entendu en confession, l'a confié à un autre prêtre. (cf. infra, lettre 10.)<br />

15


pas lui donner le nom <strong>de</strong> père, tant je me sentais entraîné vers lui <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> tendre<br />

confiance, puis après M. Gerbet, puis M. Lacordaire.<br />

Je cherche dans le mon<strong>de</strong> entier, à moi connu, à qui, excepté vous, mon ami, jʹeusse<br />

osé adresser pareille lettre, à personne assurément; cʹest peut‐être que vous ne ressemblez<br />

à personne, ou pour ne pas vous donner dʹorgueil, peut‐être cʹest que je vous aime mieux<br />

que personne.<br />

<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong><br />

Brûlez cela tout <strong>de</strong> suite, je vous en prie instamment. Répon<strong>de</strong>z‐moi sans retard, je<br />

vous en prie. Cette affaire me préoccupe et jʹy veux une prompte solution.<br />

9 à M. Pavie<br />

Remerciements à son ami car il a compris les besoins <strong>de</strong> son âme. Pèlerinage <strong>de</strong> Lamennais à Rome. Vaines re‐<br />

cherches pour trouver un directeur spirituel. Dieu <strong>de</strong>man<strong>de</strong> un dévouement total. S’engager dans le combat <strong>de</strong> la<br />

doctrine. Il sollicite à nouveau les conseils <strong>de</strong> V. Pavie.<br />

22 août 1832<br />

Quelque confiance que jʹeusse en vous, mon cher Victor, je nʹattendais pas néan‐<br />

moins votre réponse sans quelque inquiétu<strong>de</strong>. Il fallait pour me satisfaire quʹelle réunit<br />

tant <strong>de</strong> qualités presque impossibles, tant dʹindulgence, <strong>de</strong> tendresse, dʹencouragement! Il<br />

me semblait, voyez‐vous, quʹen vous écrivant je mʹétais comme agenouillé <strong>de</strong>vant vous et<br />

dans lʹimmense besoin que jʹavais dʹobtenir grâce pour le passé, espoir pour lʹavenir,<br />

jʹavais versé tout cela en votre âme, attendant humblement que votre main me relevât, que<br />

votre voix me dit <strong>de</strong> consolantes paroles; cʹétait presque un ministère saint que je vous<br />

avais confié; il vous fallait, à la porte du temple, me précé<strong>de</strong>r et mʹen ouvrir lʹaccès.<br />

Si vous nʹaviez pas bien senti tout cela, mon ami, si vous ne lʹaviez pas su démêler à<br />

travers la gêne et lʹembarras <strong>de</strong> ma lettre, si la vôtre ne fût venue comme un saint embras‐<br />

sement mʹétreindre et me réchauffer, jʹaurais souffert amèrement et serais retombé dou‐<br />

loureusement sur moi‐même; mais grâces vous soient rendues, mon ami, vous mʹavez en‐<br />

tendu; grâces soient rendues à votre cœur qui a <strong>de</strong>viné le mien ou plutôt grâce à la charité<br />

chrétienne dont lʹoreille est toujours ouverte, qui recueille <strong>avec</strong> amour la moindre plainte,<br />

le moindre murmure et qui fait quʹune âme sʹentrʹouvrant pour respirer, nʹest pas<br />

contrainte <strong>de</strong> se refermer aussitôt. Merci donc, ô mon frère, comme vous mʹappelez. Votre<br />

lettre mʹa fait grand bien. Vous ne saurez croire <strong>avec</strong> quelle joie, jʹentrevois quʹune intelli‐<br />

gence plus absolue encore nous rapprochera désormais, que tous <strong>de</strong>ux nous aurons le<br />

même chemin, tous <strong>de</strong>ux le même but, et quʹespoir nous sera donné <strong>de</strong> nous y réunir.<br />

Mais je parle <strong>avec</strong> trop dʹassurance peut‐être, la lumière qui mʹéclaire est vacillante<br />

encore et le passé sʹélève encore comme un nuage pour lʹobscurcir.<br />

Jʹai suivi votre avis. En lʹabsence <strong>de</strong> M. Gerbet, jʹai voulu aller voir M. Lacordaire,<br />

mais il venait <strong>de</strong> partir aussi, pour quel que temps mʹa‐t‐on dit, jusquʹà la fin <strong>de</strong> septembre<br />

peut‐être.<br />

Ainsi vers le mois dʹoctobre, il paraît, les trois reviendront, la réunion se formera <strong>de</strong><br />

nouveau.<br />

16


Je tiens ces détails <strong>de</strong> M. Boré 24 resté seul dans lʹimmense<br />

maison <strong>de</strong> la rue <strong>de</strong> Vaugirard. Il mʹa fait en votre nom cordial<br />

accueil; nous avons fait ensemble plusieurs tours <strong>de</strong> jardin,<br />

parlant <strong>de</strong> vous beaucoup, et beaucoup aussi et <strong>avec</strong> effusion<br />

contenue (comme cela a lieu en première entrevue) <strong>de</strong> lʹAvenir et<br />

<strong>de</strong> ses pères. Le pèlerinage à Rome nʹest pas <strong>de</strong>meuré sans<br />

résultat. M. <strong>de</strong> Lamennais revient, sûr que ses doctrines sont or‐<br />

thodoxes et quʹil est bien dans le sein <strong>de</strong> lʹEglise; il nʹa point il est<br />

vrai, obtenu dʹapprobation expresse et éclatante. Cela nʹest point<br />

dans lʹesprit, à ce quʹil me semble, <strong>de</strong> la Cour <strong>de</strong> Rome, mais les<br />

cardinaux, les docteurs en théologie se sont accordés dans leur<br />

jugement favorable. M. Boré mʹa lu un passage dʹune lettre récente <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Lamennais:<br />

ʺUn cardinal, dit‐il en substance, me parlait ainsi: la Cour <strong>de</strong> Rome ne procè<strong>de</strong> point par<br />

voie dʹapprobation, mais par voie <strong>de</strong> censure; son silence est un assentissement tacite à vos<br />

doctrines; si elles eussent contenu quelque chose <strong>de</strong> répréhensible, une bulle dʹadmonition<br />

vous eût été immédiatement adressée. Nous vous y engageons donc; écrivez en toute li‐<br />

berté; reprenez la suite <strong>de</strong> LʹAvenir. Parlez‐y <strong>avec</strong> la même force et <strong>avec</strong> plus dʹénergie en‐<br />

core, puisque le danger est <strong>de</strong>venu plus grand: ainsi faisaient les Pères <strong>de</strong> lʹEglise, quand<br />

la foi leur semblait en dangerʺ.<br />

Jʹai tâché <strong>de</strong> rendre, aussi exactement que je lʹai pu faire <strong>de</strong><br />

mémoire, les termes <strong>de</strong> la lettre; le cardinal interlocuteur y est<br />

nommé, mais <strong>avec</strong> recommandation <strong>de</strong> silence. Il va sans dire que<br />

jʹignore son nom.<br />

Dʹaprès cela M. <strong>de</strong> Lamennais serait, dit M. Boré, en<br />

disposition <strong>de</strong> reprendre LʹAvenir ou tout au moins une publication<br />

périodique dans le même esprit. Ce <strong>de</strong>rnier parti me semblerait bien<br />

moins avantageux. Il y a bien <strong>de</strong>s centaines <strong>de</strong> journaux qui parlent<br />

chaque jour en mal, un seul en bien, contre tous, ne serait pas trop. On espère aussi reprise<br />

à lʹhiver du cours <strong>de</strong> M. Gerbet. Vous aurez beau faire, mon ami, tout cela vous ramènera<br />

parmi nous, à moins pourtant que vous aussi ne receviez votre mission qui vous retienne<br />

là‐bas; que vous ne repreniez la pensée dʹune correspondance, dʹun lien <strong>de</strong> doctrine noué<br />

par vous dans votre pays; alors, je le crois, vous resterez, car vous aurez <strong>de</strong>s <strong>de</strong>voirs di‐<br />

gnes <strong>de</strong> vous, tels que les impose notre temps; car, jʹhésite à le dire <strong>de</strong> peur <strong>de</strong> mauvaise<br />

inspiration, les <strong>de</strong>voirs <strong>de</strong> la vie ordinaire, même chrétienne et pure, ne me semblent pas<br />

les seuls aujourdʹhui imposés au petit nombre dʹhommes fidèles que Dieu se gar<strong>de</strong>. Il veut<br />

dʹeux le dévouement <strong>de</strong> leur vie tout entière, car ils doivent être <strong>de</strong>s instruments dans sa<br />

main. Je ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pas grâce, mon ami, pour un langage que <strong>de</strong> bien longtemps, que<br />

jamais peut‐être je nʹaurai droit <strong>de</strong> tenir. Il nʹimporte par qui la vérité (sʹil y a vérité ici) soit<br />

proclamée. Pourtant, mon ami, ne donnez pas à mes paroles plus <strong>de</strong> valeur quʹelles nʹen<br />

ont réellement et surtout gar<strong>de</strong>z toute confiance pour vos propres aspirations qui valent<br />

bien mieux que les miennes.<br />

24 Eugène Boré (1809-1878), angevin d'origine, d'abord disciple <strong>de</strong> Lamennais, il <strong>de</strong>vint ensuite prêtre <strong>de</strong> la Congrégation <strong>de</strong> la Mission,<br />

(supérieur général en 1874). Son frère <strong>Léon</strong> (1806-1883), lui aussi disciple <strong>de</strong> Lamennais, ami d'Ozanam, fut professeur<br />

d'histoire et <strong>de</strong> littérature. Après la suspension <strong>de</strong> leur journal, les trois "pèlerins <strong>de</strong> la liberté", Lamennais, Lacordaire et Montalembert,<br />

étaient partis pour Rome solliciter l'appui du Pape. Les bâtiments et le jardin sont ceux <strong>de</strong> la Maison <strong>de</strong>s Carmes, 70, rue<br />

<strong>de</strong> Vaugirard, aujourd'hui Institut Catholique <strong>de</strong> Paris.<br />

17


Ce que cʹest que sʹaventurer à dire plus quʹil ne faut! Je ne sais plus comment faire<br />

pour délayer, noyer <strong>de</strong>ux ou trois mots malencontreux. Ils signifient pourtant simplement,<br />

mon ami, que selon moi, si un combat <strong>de</strong> doctrine se renouvelait, sʹétendait, et selon les<br />

temps, pouvait exiger coopération <strong>de</strong> tous les vrais fidèles, vous moins quʹun autre, ne<br />

paraîtriez fait pour rester en paix dans les mo<strong>de</strong>stes <strong>de</strong>voirs dʹune vie douce et intérieure.<br />

Nʹest‐il pas vrai quʹil nʹy a pas mal à parler ainsi?<br />

Pour achever au plus vite cette bien longue lettre, jʹajoute que M. Boré qui a pu<br />

comprendre le but <strong>de</strong> mes questions au sujet <strong>de</strong> MM. Gerbet et Lacordaire mʹa dit quʹà<br />

leur retour lʹun ou lʹautre ou même le père attendu le premier me donneraient <strong>avec</strong> joie<br />

conseils et direction.<br />

Il reste à déci<strong>de</strong>r par vous, mon ami, si attendre vaut le mieux; dans trois semaines,<br />

M. <strong>de</strong> Lamennais doit être ici, les autres dans cinq semaines. M. <strong>de</strong> Lamennais nʹest‐il pas<br />

trop chargé dʹoccupation? Ne faudra‐t‐il pas patienter jusquʹà lʹarrivée <strong>de</strong>s premiers; alors<br />

est‐il sage <strong>de</strong> <strong>de</strong>meurer jusque‐là en si triste position quand la grâce mʹest donnée dʹen<br />

changer? Mais dʹautre part, on exigera <strong>de</strong> ma part retour sur bien <strong>de</strong>s années; ce sera chose<br />

grave pour moi (bien entendu que toute considération humaine est bien loin dʹêtre reçue<br />

par moi) et cependant dans six semaines, il faudra revenir aux mêmes moyens près dʹun<br />

autre qui aura également besoin <strong>de</strong> me connaître <strong>de</strong> loin pour me juger et me conseiller.<br />

Cette itérative nʹaffaiblira‐t‐elle pas lʹeffet dʹune première effusion? Enfin nʹest‐il pas mau‐<br />

vais dans ma position <strong>de</strong> prendre un directeur et <strong>de</strong> le quitter six semaines après? Voilà ce<br />

qui mʹarrête jusquʹici et me fait penser quʹattendre vaut mieux. Mais, peut‐être, à mon in‐<br />

su. quelque pensée humaine me dirige. Vous, mon ami, encore ici, conseillez votre frère en<br />

Dieu, conseillez‐le en chrétien, et votre voix sera entendue. Songez seulement que ce serait<br />

pour moi un grand bonheur dʹavoir pour appui lʹun <strong>de</strong> ces trois hommes et quʹautrement<br />

je nʹaurai accès ni libre, ni confiant près dʹeux. Jʹattends votre réponse.<br />

M. Boré mʹa chargé <strong>de</strong> vous donner <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> son frère; il est arrivé à Berlin<br />

très enchanté, très heureux. M. Boré lui‐même se rappelle à votre souvenir. Moi, mon ami,<br />

je vous embrasse cordialement. Je pense <strong>avec</strong> chagrin que cette lettre vous trouvera absent<br />

peut‐être. Souvenirs affectueux pour tous.<br />

<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong><br />

10 à M. Pavie<br />

Après la joie du retour à Dieu, les épreuves intérieures. MLP. ne sait comment expliquer son découragement.<br />

Tourment <strong>de</strong> ne savoir comment servir Dieu. Sentiment <strong>de</strong> son inutilité. Mariage malheureux <strong>de</strong> sa soeur. L’abbé<br />

Gerbet a confié MLP. à un autre prêtre. Echos <strong>de</strong> la pièce <strong>de</strong> V. Hugo, Le Roi s’amuse.<br />

1 er décembre 1832<br />

Je ne saurais, mon cher Victor, justifier mon long silence; il ne vient ni dʹoubli, je nʹai<br />

pas besoin <strong>de</strong> le dire, ni <strong>de</strong> paresse, je me hâte <strong>de</strong> vous lʹassurer, cʹest un <strong>de</strong> ces faits si fré‐<br />

quents dans notre vie dont nous ne saurions nous rendre compte exact à nous‐même,<br />

quʹon ne peut expliquer parce quʹil resterait après à expliquer lʹexplication elle‐même et<br />

quʹon se trouverait en face <strong>avec</strong> la même difficulté. Dispensez‐moi donc, mon ami, <strong>de</strong> vous<br />

dire quʹun découragement profond mʹanéantit <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s jours, <strong>de</strong>s mois, mʹenvahit <strong>de</strong><br />

plus en plus et me jette dans une phase peut‐être inévitable <strong>de</strong> la vie et quʹil me faut sans<br />

18


doute à mon tour traverser. Cʹest, comme le pourraient dire ces odieux Saint‐Simoniens 25 ,<br />

une époque critique, la transition <strong>de</strong> la jeunesse à lʹâge fait, la résistance du jeune homme<br />

qui nʹa quʹà peine entrevu le mon<strong>de</strong> doré <strong>de</strong>s illusions, <strong>de</strong>s espérances et qui refuse dʹen<br />

sortir si vite. Cʹest mille choses encore quʹon dit mal, quʹon sent confusément, qui ne sup‐<br />

portent pas la confi<strong>de</strong>nce car, à les dire, la bouche baille, à les entendre lʹoreille sʹengour‐<br />

dit. Ne vous en apercevez‐vous pas déjà?<br />

Votre amitié, mon cher Victor, voulait bien cependant sʹenquérir et sʹinquiéter <strong>de</strong><br />

moi. Jʹai lu cela <strong>avec</strong> reconnaissance dans votre <strong>de</strong>rnière lettre à Gavard. Soyez en repos,<br />

mon ami. Jʹai vu dès lʹabord, où portait votre sollicitu<strong>de</strong> amicale,<br />

sur le seul point désormais essentiel et nécessaire pour nous. Je<br />

nʹose pas dire que sur ce point tout est bien pour moi et serait se‐<br />

lon votre cœur, tout est aussi bien du moins que je le puis. Je vis<br />

maintenant dans lʹaire qui me convient et ne conçois pas que<br />

jamais jʹen puisse respirer dʹautre. Cʹétait bien là ma voie. Cʹétait<br />

bien là ma pente; la suivre me semble doux. Si vous cherchez<br />

dʹaprès cela comment je puis être si triste et si découragé, je<br />

reviendrai à mon premier dire, je nʹen sais pas très bien la cause.<br />

Jʹen trouve bien <strong>de</strong>s raisons, bonnes toutes humainement, mais<br />

que la résignation et lʹhumilité chrétiennes <strong>de</strong>vraient neutraliser. Est‐ce quʹil nʹen est pas<br />

absolument ainsi? Est‐ce que je tourne et cherche ma forme définitive ici‐bas, sans bien<br />

trouver comment mʹasseoir? Je ne sais, mais quʹimporte après tout et la place et la forme?<br />

Il nʹy a pas bien longtemps, courbant la tête sous une nécessité quʹil fallait bien accepter,<br />

ouvrant les yeux à une évi<strong>de</strong>nce invincible, je me suis dit: allons, puisque la vie intellec‐<br />

tuelle nʹest décidément pas faite pour moi, essayons un peu <strong>de</strong> la vie active, faisons dans<br />

lʹhumble sphère où je suis placé tout le bien possible. Servons nos semblables, soyons tout<br />

à tous, nʹen rebutons aucun, nous verrons; peut‐être cela ira‐t‐il mieux ainsi pour moi. A<br />

peine avais‐je pensé cela en moi‐même que <strong>de</strong> tous côtés jʹai vu accourir, pousser, surgir<br />

<strong>de</strong>s gens <strong>de</strong> toute sorte, réclamant les uns mes loisirs, et je les leur ai donnés; dʹautres, mon<br />

argent et ils lʹont eu; et en moins <strong>de</strong> rien, je me suis vu sans le sou et chargé pour bien <strong>de</strong>s<br />

mois et plus peut‐être <strong>de</strong>s occupations les plus fastidieuses. Mais après examen, jʹai vu que<br />

mon argent servait à ceux‐là pour vivre plus largement, à ceux‐ci, mes loisirs pour mettre<br />

au bout <strong>de</strong>s leurs et sʹy étendre plus à lʹaise. Cela nʹest pas fort encourageant. Eh bien, sʹil<br />

me faut encore <strong>de</strong>scendre <strong>de</strong> là, où arriverai‐je donc? A ramasser une aiguille tombée, une<br />

pelote <strong>de</strong> fil égarée loin <strong>de</strong> la boîte à ouvrage? Vous voyez bien, mon ami, que jʹai raison<br />

dʹêtre triste.<br />

Je vous plains sincèrement et <strong>de</strong> cœur dʹêtre contraint, (oui, car vous nʹoserez faire<br />

autrement) à lire jusquʹau bout cette vi<strong>de</strong> et insensée épître; mais moi‐même, ami, je lʹécris<br />

bien <strong>avec</strong> certitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> vous lasser, <strong>de</strong> vous communiquer quelque chose <strong>de</strong> ma torpeur.<br />

Ne vous plaignez donc pas. En vérité, sʹil avait dépendu <strong>de</strong> moi <strong>de</strong> ne pas la faire nous au‐<br />

rions attendu <strong>de</strong> meilleurs jours, mais M. Gavard me <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux fois chaque semaine:<br />

ʺAvez‐vous écrit,ʺ un non perpétuel est trop lourd à porter. Demain, je dirai oui et je mʹen<br />

sens tout aise. Pardonnez‐moi donc, mon cher Victor, et oubliez. Surtout écrivez‐moi. Je ne<br />

25 Clau<strong>de</strong>-Henri <strong>de</strong> Saint-Simon (1760-1825), précurseur <strong>de</strong> la philosophie positiviste. Dans son œuvre posthume, le Nouveau<br />

Christianisme, il formulait la morale d'une société fondée sur un "nouveau savoir, un nouveau pouvoir et un nouveau vouloir". Il<br />

faut dépasser la religion, le christianisme en particulier, comme l'homme progresse <strong>de</strong> l'enfance à l'adolescence pour atteindre l'âge<br />

adulte.<br />

19


sais que votre voix qui puisse encore être musicale et harmonieuse pour moi en ce mo‐<br />

ment. Criez bien fort, soyez tam‐tam ou trombone, car en vérité, il me faut une secousse<br />

violente. La flûte ou le hautbois se fondraient <strong>avec</strong> mon <strong>de</strong>rnier soupir. Pourtant, il me<br />

semble bien que jʹai une âme, car je pleure souvent, bien souvent, mais je nʹen sais que<br />

faire ni à qui la donner. Blasphème, direz‐vous. Et Dieu? oui, Dieu sans doute, mais ne<br />

nous faut‐il pas, misérables mortels, une forme pour notre amour. Peut‐il aller droit au<br />

sein <strong>de</strong> Dieu, sans ailes, sans un rayon, sans un nuage pour lʹy porter. Et moi, rayon,<br />

nuage, ailes tout me manque. Je le dis à Dieu, prenez‐moi, me voici humble et soumis. Par‐<br />

lez, jʹobéirai au <strong>de</strong>gré le plus bas, sʹil vous plaît. A la place la plus obscure je veux vous<br />

servir. Mais les jours se passent, ma jeunesse sʹen va, je ne sers à rien, je ne fais <strong>de</strong> bien à<br />

personne. Une seule créature ici‐bas, ma pauvre sœur, a besoin réel <strong>de</strong> moi, et nuit et jour,<br />

il me semble entendre la voix qui appelle; elle se débat aux serres dʹun mari sauvage. In‐<br />

sensé, je lʹai vue il y a un mois. Je suis resté 15 jours près dʹelle, mais jʹen ai rapporté <strong>de</strong> la<br />

colère, <strong>de</strong> la haine et du chagrin pour <strong>de</strong>s années, sans lui donner aucun soulagement; car<br />

elle a signé un contrat <strong>de</strong>vant les hommes, dit oui <strong>de</strong>vant Dieu et <strong>de</strong>ux enfants la lient in‐<br />

vinciblement à la brute quʹelle appelle son mari; et puis ma pauvre mère bien vieille,<br />

bonne comme les anges, pure, candi<strong>de</strong> comme eux, au lieu <strong>de</strong> paix, <strong>de</strong> calme recueilli pour<br />

ses <strong>de</strong>rniers jours, a tout cela sous les yeux. Mais, insensé, pourquoi vous bavar<strong>de</strong>r tout ce‐<br />

la? Le silence me semble aujourdʹhui la seule cor<strong>de</strong> poétique qui me reste et je ne sais pas<br />

la gar<strong>de</strong>r. Je la briserai encore. Non pas!<br />

Savez‐vous bien ce quʹil mʹeût fallu? Quelquʹun <strong>de</strong> meilleur, <strong>de</strong> plus haut que moi,<br />

qui mʹentraînât dans son tourbillon, me soutînt, me dirigeât. La faculté dʹenthousiasme est<br />

réelle en moi et pourrait par élans me porter à toute espèce <strong>de</strong> bien. Dans le mon<strong>de</strong> quʹal‐<br />

lait créer M. <strong>de</strong> Lamennais, je me casais tout naturellement et sans effort 26 . Dites‐moi, sa‐<br />

vez‐vous quʹil est en Bretagne <strong>avec</strong> MM. Gerbet et Lacordaire, vivant en reclus, travaillant,<br />

méditant, priant, résigné à lʹinaction, à lʹobscurité relative du moins? et je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong>s<br />

exemples! Mais aussi comment mesurer ma taille à pareil géant! Autant vaudrait le grain<br />

<strong>de</strong> sable disant à lʹHimalaya: frère, marchons ensemble. M. Gerbet a été bien bon pour moi<br />

et mʹa laissé aux mains dʹun homme doux, excellent, pas précisément idéal comme je lʹen‐<br />

tends, mais quʹimporte, jʹai beaucoup à mʹen louer. Je vois parfois, mais <strong>de</strong> loin en loin,<br />

pour ne pas voler son temps, M. Boré votre ami; il est extrêmement bienveillant pour moi.<br />

Son frère est <strong>de</strong> retour.<br />

Vous remarquerez, mon ami, que pas une ligne <strong>de</strong> tout ce qui précè<strong>de</strong> nʹexige ré‐<br />

ponse et je ne vous en <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rai pas une lettre, si vous nʹaviez quʹà me parler <strong>de</strong> moi;<br />

mais vous, mon bien bon Victor, il faut bien que vous me parliez <strong>de</strong> vous. Il faut bien que<br />

je sache où vous en êtes <strong>de</strong> la vie. Je ne veux pas vous perdre <strong>de</strong> vue jamais. Je vous en<br />

conjure donc, écrivez‐moi vite, dites‐moi vite, dites‐moi mille choses personnelles à vous,<br />

mille choses sur votre bon, vénérable et adorable père; sur vos travaux, votre avenir, vos<br />

espérances, tout ce qui est <strong>de</strong> vous enfin et vous intéresse et vous touche. Cela me fera un<br />

bien extrême et me rendra un peu <strong>de</strong> cœur. Adieu, je vous aime <strong>de</strong> toutes mes forces. Ne<br />

vous rebutez pas et gar<strong>de</strong>z‐moi aussi votre affection, jʹen ai besoin.<br />

<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong><br />

26 Lamennais avait le projet <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>r une association <strong>de</strong> prêtres et <strong>de</strong> laïcs (la Congrégation <strong>de</strong> St-Pierre), consacrée à la défense <strong>de</strong><br />

la religion par la parole et la plume.<br />

20


Vous savez que notre ami, M. Hugo a éprouvé récemment <strong>de</strong> vives contrariétés. Je<br />

nʹétais pas au Roi sʹamuse 27 . Je nʹai osé <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s billets à raison <strong>de</strong> ma négligence près<br />

<strong>de</strong> M. Hugo. Le jeune Trébuchet qui mʹavait promis une place nʹa pu me tenir parole et<br />

tous mes efforts pour mʹintroduire dʹailleurs ont été inutiles. La lettre écrite dans les jour‐<br />

naux nʹa pas produit bon effet. Mais on oublie vite aujourdʹhui. Au premier ouvrage <strong>de</strong> M.<br />

Hugo, on ne se souviendra que <strong>de</strong> son véritable talent <strong>de</strong> poète.<br />

11 à M. Pavie<br />

Projet <strong>de</strong> mariage <strong>de</strong> Victor Pavie. MLP. exalte la vie <strong>de</strong> famille. Jugement sur Le Roi s’amuse.<br />

14 décembre 1832<br />

Il faut répondre sans retard, mon cher Victor, à votre lettre. Je me sens pressé <strong>de</strong><br />

vous dire merci <strong>de</strong> votre confiance; oh merci! en me parlant <strong>de</strong> vous, vous mʹavez fait<br />

grand bien. Que vous ayez traversé le mon<strong>de</strong> qui nous sépare pour mʹapporter votre se‐<br />

cret le plus cher, jʹen ai une joie <strong>de</strong> cœur infinie. Aussi soyez tranquille, mon ami, votre<br />

pensée sera dans mon âme comme en un sanctuaire, ce sera chose sainte quʹil faut entou‐<br />

rer dʹobjets purs et sacrés comme elle. Ne sais‐je pas en effet, ce que serait pour vous une<br />

épouse. Eve elle‐même, sortant <strong>de</strong>s mains <strong>de</strong> Dieu et donnée à Adam, lʹabsorption en<br />

vous‐même <strong>de</strong> tout ce que la nature comprend <strong>de</strong> plus sympathique à vous‐même, élé‐<br />

ments épars dans tous les coins du mon<strong>de</strong> et que la pensée <strong>de</strong> Dieu assembla, dons <strong>de</strong> vie<br />

un jour pour vous, pour vous seul; à tout jamais à vous ici et dans lʹéternité encore.<br />

Ainsi donc, vue seulement, révélée par lʹintuition dʹun regard! Cʹest bien. Oh, oui,<br />

confiez‐vous à Dieu, point à la pru<strong>de</strong>nce humaine, mais, mon ami, que Dieu alors vous<br />

soit bien présent, et permettrez que moi indigne, je vous le dise, prenez bien soin que ce<br />

soit lui, bien lui, pas votre imagination, ni aucune inspiration moins pure ne vous dirige.<br />

Priez ar<strong>de</strong>mment, et moi, votre frère, je prierai aussi <strong>avec</strong> cœur, <strong>avec</strong> amour; mon Dieu,<br />

quʹil mʹest doux dʹêtre lié à vous, mon ami, par un lien si pur, si spirituel que je puisse me<br />

mettre ainsi <strong>avec</strong> vous, sous le regard <strong>de</strong> Dieu et le prier <strong>de</strong> vous bénir! En pareille voie,<br />

vous ne sauriez vous égarer, soutenu surtout par votre vénéré père, si pieux lui‐même, si<br />

digne <strong>de</strong> vous comprendre et <strong>de</strong> vous diriger; assurément si le Ciel prend une voix pour se<br />

faire entendre à vous, ce doit être la sienne.<br />

Je vois bien dʹici la vie <strong>de</strong> famille, telle quʹelle est tracée pour vous. Cʹest le <strong>de</strong>voir<br />

dans sa forme la plus pleine, cʹest le sacerdoce du patriarche, cʹest mieux encore, cʹest la<br />

voie du Christ parcourue par <strong>de</strong>ux époux chrétiens. En est‐il donc désormais dʹautre pos‐<br />

sible pour vous, pour moi, pour tous ceux qui, comme nous, nʹont <strong>de</strong> regard que pour<br />

lʹavenir; <strong>de</strong> vie sociale, <strong>de</strong> vie politique il nʹen est point <strong>de</strong> nos jours; il ne nous reste donc à<br />

nous chrétiens, quʹà nous réfugier là, quʹà rentrer aux <strong>de</strong>voirs primitifs <strong>de</strong> la famille et<br />

dans cet étroit horizon accomplir notre carrière, priant, faisant le bien, résignés durant ce<br />

silence <strong>de</strong> Dieu, attendant sa parole, qui peut‐être longtemps encore contenue nous réjoui‐<br />

ra du moins dans nos tombes.<br />

Ne soyez pas confiant à <strong>de</strong>mi, mon cher Victor, et puisque vous mʹavez fait lire la<br />

première page <strong>de</strong> votre histoire, nʹallez pas fermer subitement le volume, me laissant in‐<br />

27 A l'affiche le 22 novembre, la pièce est interdite dès le len<strong>de</strong>main par la censure, pour cause d'immoralité publique. V. Hugo avait<br />

contre-attaqué en publiant une lettre ouverte dans le Constitutionnel. Un procès s'ensuivit, où V. Hugo fut acquitté. Il obtint un<br />

triomphe populaire. Lui qui rêvait d'être "l'écho sonore" <strong>de</strong> son siècle, il se fera désormais "l'avocat <strong>de</strong> toutes les libertés".<br />

21


quiet et tourmenté sur le reste. Jʹen murmurerai quelques mots à lʹoreille <strong>de</strong> M. Gavard<br />

seulement; pour tous les autres ce sera le livre aux sept sceaux et vous en gar<strong>de</strong>rez la clef.<br />

Je ne vous fais pas <strong>de</strong> question; je ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pas <strong>de</strong> portrait; vous me diriez peut‐<br />

être en riant, comme notre ami Mazure: ʺdouée dʹassez dʹagréments pour que mes amis<br />

puissent me féliciterʺ. Si cʹétait bien assurément celle qui vous est pré<strong>de</strong>stinée, je saurais<br />

bien sans ai<strong>de</strong> me créer son image, mais votre lettre ne me donne pas sur ce point certitu<strong>de</strong><br />

absolue, et vous‐même me semblez attendre quelque révélation nouvelle. Dites‐moi seu‐<br />

lement un mot, mon ami, et je vous tiens quitte après: est‐ce une vierge comme celle <strong>de</strong> la<br />

Bible, ou bien Raphaélique ou bien Lamartinienne? Jʹécrirais dʹavance la réponse. Cʹest<br />

tout cela ensemble, direz‐vous. Je ne vous interroge donc plus. Jʹattendrai les mots quʹil<br />

vous plaira mʹécrire, et <strong>de</strong> mon mieux jʹen tirerai mon image.<br />

A propos <strong>de</strong> M. Mazure, est‐il bien vrai, êtes‐vous sûr quʹil soit venu à Paris <strong>avec</strong> sa<br />

femme? Je ne le saurais croire. Quelle que soit parfois son étrange sauvagerie, nous étions<br />

trop vraiment lʹun à lʹautre pour quʹil retournât en sûreté <strong>de</strong> conscience dans sa maison<br />

sans mʹavoir vu. Peut‐être étais‐je en Normandie? Cela me tourmente, dites mʹen un mot,<br />

si vous pouvez.<br />

Je nʹavais osé vous parlez bien nettement du Roi sʹamuse. Il est <strong>de</strong>s choses quʹon ne<br />

sʹavoue quʹà lʹextrémité; mais il est bien vrai que jʹen pense peu <strong>de</strong> bien, et moins encore <strong>de</strong><br />

la préface, qui ne me paraît pas digne et haute, qui nʹest pas ce cri <strong>de</strong> sainte et juste indi‐<br />

gnation par laquelle M. Hugo <strong>de</strong>vait répondre à une accusation publique dʹimmoralité. At‐<br />

tendons toutefois le plaidoyer. Que nos temps sont funestes au talent. Il faut lui être in‐<br />

dulgent puisque le génie lui‐même ne lutte pas contre eux dʹun succès certain. Je ne déses‐<br />

père pas assurément; mais je lʹavoue je suis inquiet et les tendres et sévères avis <strong>de</strong> Sainte‐<br />

Beuve dans son article sur les Feuilles dʹautomne 28 me semblent aujourdʹhui une voix dʹen<br />

haut, un avertissement solennel quʹil faut, sous peine <strong>de</strong> chute, que M. Hugo se recueille et<br />

médite profondément. Votre parole si fraternelle avait aussi du poids près <strong>de</strong> lui, mon<br />

cher Victor; ne trouverez‐vous donc pas encore quelque inspiration amicale? Elle arrivera,<br />

jʹen suis sûr, au point marqué par vous.<br />

Adieu, écrivez‐moi au plus vite, il le faut, car jʹattends; je voudrais bien, si jʹosais,<br />

embrasser votre bon père; faites‐le pour moi. Il ne saurait sʹoffenser <strong>de</strong> ce témoignage <strong>de</strong><br />

tous mes sentiments <strong>de</strong> vénérations et <strong>de</strong> profond dévouement.<br />

A vous toujours<br />

<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong><br />

12 à M. Pavie<br />

Inquiétu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> V. Pavie à la perspective <strong>de</strong> se marier. MLP. l’encourage: l’amour humain est l’expression du don <strong>de</strong><br />

Dieu. S’appuyer sur Dieu.<br />

Paris, le 27 décembre 1832<br />

Je me sens un peu relevé, un peu moins découragé, mon ami, à mesure que vous<br />

versez votre confiance en moi. Je me réchauffe à lʹar<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> vos sentiments et cette douce<br />

28 Le titre du recueil est inspiré par un vers <strong>de</strong> son ami et disciple Pavie. Sainte-Beuve, qui oscillera entre la critique et l'amitié, avait<br />

apprécié les vers sereins et paisibles, leur trouvant <strong>de</strong> la mesure, <strong>de</strong> la familiarité et <strong>de</strong> la tendresse. "Lorsque l'enfant paraît…".<br />

22


chaleur distend; amollit mes pauvres membres engourdis; heureux que vous êtes, ami,<br />

dʹallumer ainsi votre feu, <strong>de</strong> convier les autres à votre foyer! et vous vous plaignez pour‐<br />

tant. Et vous avez peur <strong>de</strong> brûler! Et vous craignez lʹincendie; allez, allez toujours. Lʹin‐<br />

cendie nʹest‐ce pas <strong>de</strong> la flamme et <strong>de</strong> la lumière encore? Oui, vous aurez <strong>de</strong>s pleurs, <strong>de</strong>s<br />

sanglots; vous serez à la torture; mais tout cela cʹest la vie <strong>de</strong> lʹâme. Cʹest la puissance<br />

dʹétreinte et dʹamour qui se révèle. Ah! mon cher Victor, pleurez‐les lentement ces précieu‐<br />

ses larmes; bénissez leur amertume, et du milieu <strong>de</strong>s tourments qui vous viendront peut‐<br />

être, dites à Dieu: Merci! qui en a laissé jaillir en vous la source. Voyez autour <strong>de</strong> vous, M.<br />

Gavard, moi, bien dʹautres que je sais, dʹautres encore que vous connaissez, pareille faculté<br />

leur a‐t‐elle été donnée? Non. Ils ont aspiré à lʹâge dʹaimer et déjà il était passé quʹils aspi‐<br />

raient encore! Alors voilant tristement leurs fraîches et jeunes espérances, ils ont tendu la<br />

main à une femme. Quʹimportait laquelle? pour vivre près dʹelle doucement, lui donnant<br />

appui, respect, tendresse même, tout hors lʹamour, le vrai et pur amour, car ils nʹen avaient<br />

point à donner. Et vous, mon ami, en serrant vos <strong>de</strong>ux mains sur votre cœur quand il bat<br />

trop vite, vous y sentez bondir lʹamour; et pour vous une jeune fille, la seule peut‐être, gar‐<br />

dée aussi en air plus pur, moins brumeux que celui <strong>de</strong> nos jours, est éclose, pour ainsi dire<br />

a flori, sans quʹaucune pensée encore, sans quʹaucun regard même ait passé sur elle; quoi!<br />

Dieu vous a donné tout cela, et vous vous plaignez. Prenez gar<strong>de</strong>! Quelle que chose qui ar‐<br />

rive donc, mon ami, à mettre même les choses au pis, gar<strong>de</strong>z‐vous dʹune peine trop vio‐<br />

lente ou insensée qui rejetterait à la face du ciel <strong>de</strong>s dons bien rares quʹil vous a faits;<br />

comme le dit un <strong>de</strong> nos maîtres: ʺsi la main du Seigneur vous plie, courbez votre tête et<br />

pleurezʺ mais, moi, jʹen ai la confiance, le Seigneur vous relèvera ensuite et, dussiez‐vous<br />

recevoir cet accablant refus si redouté, si redoutable, je ne vous trouverai pas moins avan‐<br />

cé pour cela; bien plus, je verrais là un pas, un grand pas <strong>de</strong> fait. Jʹai bien peur, en voulant<br />

vous conseiller, <strong>de</strong> parler en insensé; mais vous saurez bien donner à mes paroles lʹin‐<br />

fluence et le poids quʹelles méritent tout juste, et prêter lʹoreille à une voix plus haute et<br />

bien autrement sage que la mienne. Cela dit, il me semble à moi, que si Dieu vous a bien<br />

dit que cette femme était digne <strong>de</strong> vous, que vous étiez fait pour elle, il vous la donne, elle<br />

est bien vôtre et vous pouvez la prendre. Jʹentends que les petits obstacles <strong>de</strong> vanité, les<br />

petits remparts <strong>de</strong> la Société, il faut tout à travers passer là‐<strong>de</strong>ssus et nʹy pas voir <strong>de</strong>s<br />

monts inaccessibles; une volonté ferme et persévérante est plus forte que tout cela. On re‐<br />

fusera, veuillez plus énergiquement. On dira non. Criez, beuglez oui, mille fois oui, à la<br />

<strong>de</strong>rnière; mais vous nʹirez pas jusque‐là. Ce sera chorus, et tout le mon<strong>de</strong> chantera oui <strong>avec</strong><br />

vous. Mais pour cela il faut être bien sûr <strong>de</strong> soi; il ne faut pas marcher seul, il faut avoir<br />

Dieu <strong>avec</strong> soi, lʹinterroger souvent du regard et ne continuer sa route que lorsquʹil aura dit<br />

dʹavancer. Il me semble quʹil en va ainsi jusquʹà ce moment, et pour ce que jʹen sais, les<br />

choses me paraissent telles quʹelles doivent être. Cette mère, le nez au vent, lʹoreille au<br />

guet, elle est dans la nature tout simplement; elle gar<strong>de</strong> sa fille, elle veille sur son enfant,<br />

car à seize ans on a encore besoin <strong>de</strong> sa mère. Deux ans plus tard, elle serait moins mé‐<br />

fiante et se laisserait approcher; ainsi font les animaux eux‐mêmes <strong>avec</strong> leurs petits. Ils<br />

montrent les <strong>de</strong>nts et gron<strong>de</strong>nt aux premiers temps, mais plus tard ils les laissent prendre<br />

et les offrent eux‐mêmes aux caresses et à lʹaffection <strong>de</strong> lʹhomme. Mais tout sentiment vrai<br />

rend clairvoyant telle femme qui eût été dʹailleurs incapable dʹatteindre du regard le front<br />

dʹun homme, vraiment homme comme vous, tout à coup illuminée par son amour <strong>de</strong> mère<br />

lira tout couramment dans une âme mystère, abîme profond jusque là pour elle. Confiez‐<br />

23


vous donc à tout cela, mon ami, à mille choses encore que jʹignore, quʹaucun <strong>de</strong> nous ne<br />

sait, qui nʹexistent pas moins pourtant et, dans une sphère que nous ne pouvons atteindre,<br />

font poids et contrepoids dans la balance <strong>de</strong> nos <strong>de</strong>stinées. Adieu, tenez‐moi au courant,<br />

vous êtes bien sûr <strong>de</strong> ma vive, <strong>de</strong> ma tendre sympathie, et joie ou peine, vous le savez, <strong>de</strong><br />

votre cœur ira droit à mon cœur.<br />

Votre ami et frère,<br />

<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong><br />

Comme toujours respect et tendresse à votre bon père.<br />

13 à M. Pavie<br />

MLP. <strong>de</strong>vine que le projet <strong>de</strong> mariage est contrarié. Son désir <strong>de</strong> partager la souffrance <strong>de</strong> son ami.<br />

Vendredi 11 janvier 1833<br />

Votre silence mʹinquiète, mon cher Victor, vous ne <strong>de</strong>viez pas, après mʹavoir fait<br />

pressentir pour vous une crise violente, un chagrin effrayant, me laisser dans cette incerti‐<br />

tu<strong>de</strong>. Si vous avez <strong>de</strong> la peine, comme je le crains, il ne faut pas vous affliger seul, cela ne<br />

serait pas dʹun ami. Et vous, mon cher Victor, qui savez tout ce que pèse ce mot amitié,<br />

tout ce quʹil impose <strong>de</strong> <strong>de</strong>voirs et donne <strong>de</strong> droits, vous ne voudriez pas manquer ici à la<br />

loi la plus sainte, la plus rigoureuse, celle du partage <strong>de</strong>s peines, <strong>de</strong> lʹeffusion <strong>de</strong> la dou‐<br />

leur. Quoiquʹil vous en doive donc coûter, mon ami, si vous souffrez, il faut me le dire;<br />

écrire en pareil cas, ce me semble, est moins difficile que <strong>de</strong> parler; puis, je vous connais<br />

bien; quelques mots me suffiront, je <strong>de</strong>vinerai le reste. Dieu me gar<strong>de</strong> <strong>de</strong> faire violence à<br />

votre peine qui se voudrait renfermer au plus profond <strong>de</strong> votre âme, y rester secrète et voi‐<br />

lée pour tous, si je nʹavais conviction, si je ne trouvais en moi pleine assurance que vous<br />

me <strong>de</strong>vez confiance, que ce <strong>de</strong>voir rempli, comme tout <strong>de</strong>voir quel quʹil soit, vous sera sa‐<br />

lutaire et vous donnera plus <strong>de</strong> repos.<br />

Ces lignes seront bien insensées si, comme je lʹespère encore, vous nʹaviez point les<br />

peines que je redoute pour vous; mais insensées, quʹimporte? Ce nʹest pas <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s mots<br />

que nous parlons entre nous; il est un autre langage invisible et sans son qui, à la vue sim‐<br />

ple <strong>de</strong> ce papier saura bien se faire entendre <strong>de</strong> vous. Alors, vous penserez, mon ami, que<br />

mon inquiétu<strong>de</strong> fondée ou non est bien triste, quʹil ne faut pas me la laisser en vain, ou<br />

bien quʹil faut la confirmer et me laisser mʹaffliger <strong>avec</strong> vous.<br />

Adieu, mon ami, écrivez‐moi, jʹattends impatiemment.<br />

Tout entier à vous par le cœur.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

14 à M. Pavie<br />

Avec tact et délicatesse, MLP. exprime à son ami sa communion <strong>de</strong> cœur et d’âme. Conseils <strong>de</strong> patience. Avoir re‐<br />

cours à la prière.<br />

Mardi 12 février 1833<br />

Jʹentre aussi avant que possible dans votre peine, mon bien cher Victor. Vous souf‐<br />

frez. Cʹest assez. Je nʹexamine pas si cʹest <strong>avec</strong> raison, quʹimporte cela? La douleur nʹest pas<br />

24


moins vive; oh! oui. Quand vous appuyez sur moi votre tête pour pleurer, la mienne se<br />

penche aussi pour pleurer <strong>avec</strong> vous. Ce sera une fraternité <strong>de</strong> plus entre nous. Dʹautres<br />

vous chercheront <strong>de</strong>s distractions, <strong>de</strong>s motifs <strong>de</strong> consolation; mon rôle à moi, cʹest <strong>de</strong> sen‐<br />

tir comme vous, <strong>de</strong> craindre, dʹespérer, dʹavoir larmes et joies <strong>avec</strong> vous et comme vous,<br />

afin, mon frère, que nos <strong>de</strong>ux âmes, ainsi unies, soient plus fortes contre la peine, ne suc‐<br />

combent pas sous le bonheur. Si toute espérance vient à nous faillir quelque jour, alors,<br />

mon ami, je nʹaurai plus <strong>de</strong> paroles, pas même <strong>de</strong> murmure ou <strong>de</strong> chant pour endormir<br />

votre douleur. Nous aurons seulement <strong>de</strong>s larmes, <strong>de</strong>s larmes sympathiques qui se com‐<br />

prendront, se diront lʹune à lʹautre ce quʹil y a au cœur, dʹoù elles jaillissent, <strong>de</strong> tendresse et<br />

dʹamertume, dʹabîme sans fond quʹon nʹoserait son<strong>de</strong>r. Mais aujourdʹhui, sous vos crain‐<br />

tes, reste encore un peu dʹespoir, un rayon vous luit, pour vous faible et pâle étoile qui<br />

sʹéteint; pour moi, point lumineux dʹavenir et <strong>de</strong> jour qui va naître. Affermissez, sʹil se<br />

peut, votre vie, regar<strong>de</strong>z bien et vous direz comme moi: non, nous ne sommes plus en <strong>de</strong>s<br />

temps où un amour vrai, pur et profond doit sʹétouffer dans lʹâme qui lʹa conçu, à quelque<br />

âme quʹil aille heurter, je le crois fermement, il lui sera ouvert. Quoique vous puissiez<br />

nʹêtre pas à cet égard absolument <strong>de</strong> mon avis, vous conviendrez <strong>avec</strong> moi quʹune affec‐<br />

tion dégagée <strong>de</strong> tout intérêt, <strong>de</strong> toute personnalité, quʹun dévouement exalté, lʹamour en‐<br />

fin, tel que nous lʹentendons, tout en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> soi, sans que rien le rattache au moi et<br />

puisse lʹy ramener, quʹun tel amour, dis‐je, est bien rare, et quʹil nʹest personne, fut‐ce une<br />

brute stupi<strong>de</strong>, qui nʹen sente le prix, qui dʹinstinct, <strong>de</strong> calcul ou <strong>de</strong> sympathie ne sʹem‐<br />

presse <strong>de</strong> le recueillir; car pour les uns, il est lʹespoir du bonheur, pour les autres, nous par<br />

exemple, la vie même, le sine qua non <strong>de</strong> lʹexistence. Eh bien, pourquoi voulez‐vous quʹune<br />

femme qui semble intelligente et dévouée elle‐même par un point, une jeune fille si pure<br />

quʹelle ne peut‐être bien loin du ciel, pourquoi voulez‐vous quʹeux seuls, entre tous, res‐<br />

tent insensibles et <strong>de</strong> glace, sous un rayon qui échauffe et fond tout. Cela ne saurait être,<br />

cela ne sera pas. Vous vouliez, ainsi que cette jeune fille vous a été tout à coup révélée, tout<br />

à coup aussi la faire <strong>de</strong>scendre en vous; il nʹy fallait pas compter; à cet âge on peut épeler,<br />

mais pas lire couramment dans une âme; vous ne tenez pas assez compte <strong>de</strong> ses seize ans.<br />

Il faut que lʹécheveau encore brouillé se démêle peu à peu; il faut enfin ici lʹinitiation lente<br />

et successive, puisque la révélation intuitive serait hors <strong>de</strong> temps. Prenez donc patience,<br />

mon ami, ne brusquez pas ainsi les choses, au risque <strong>de</strong> tout briser; tâchez <strong>de</strong> vous rasseoir<br />

et comme votre ami Cosnier le conseille bien sagement, laissez les paroles déjà versées<br />

<strong>de</strong>scendre et tomber goutte à goutte. Ah! si vous pouviez entendre lʹécho <strong>de</strong> leur chute,<br />

lʹharmonie si ravissante qui sʹélèvera dans la jeune âme, oh! vous seriez trop heureux. Je<br />

vous en conjure, mon ami, soyez plus calme, ne troublez rien et vous lʹentendrez. Votre<br />

image, pensez‐vous, nʹest pas celle <strong>de</strong> son rêve; assurément, car une très jeune fille, jʹen ai<br />

eu récemment un exemple frappant, ne rêve jamais que joues blanches et roses et cheveux<br />

bruns bouclés. Mais laissez faire et vous verrez si la véritable beauté dʹun homme, les re‐<br />

flets dʹune belle âme brillant sur le front, dans la voix, le port, les gestes, si tout cela, <strong>de</strong> soi‐<br />

même, ne fait bientôt fond, <strong>de</strong>ssin, couleurs dans son esprit, nʹachève enfin un portrait<br />

nouveau dont lʹoriginal sera vous. Pour terminer, jʹajoute enfin que jamais au mon<strong>de</strong> il nʹa<br />

existé fille <strong>de</strong> seize ans, qui au premier mot <strong>de</strong> mariage, nʹait rompu net par un refus, <strong>avec</strong><br />

effroi, comme vous les dites, souvent <strong>avec</strong> colère réelle.<br />

Je ne connais pas si bien la mère. Je ne saurais pas aussi sûrement parler dʹelle,<br />

pourtant à sʹen tenir aux généralités, il y a pour moi, toute partialité amicale à part, mille à<br />

25


parier contre un que vous aurez plein succès près dʹelle. Seulement, mon ami, il ne faut<br />

pas vous rebuter et, comme un enfant bou<strong>de</strong>ur dire: je gar<strong>de</strong>rai ma peine pour moi seul;<br />

non, il ne faudrait pas quʹun refus, sʹil venait, (et il peut très bien venir) portât à votre cœur<br />

un coup sourd qui lʹenvenimerait et ne blesserait que vous. Les coups qui résonnent sont<br />

moins dangereux et, frappant lʹoreille <strong>de</strong> qui les donne lʹémeuvent et lui font dire ʺassezʺ.<br />

Ne pourriez‐vous donc voir cette mère seul à seul, et, en vous maîtrisant un peu lui parler:<br />

votre soumission, vos promesses, cet accent <strong>de</strong> vérité quʹil faut subir quoiquʹon fasse, au‐<br />

raient un effet, sinon immédiat, au moins sûr, et qui droit ou par détour, arriverait à son<br />

cœur. Peut‐on refuser un homme qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> place, comme tous, près du foyer, qui dit:<br />

je nʹaurai ni regard, ni parole, je serai ainsi que tous, allant et venant, et si un jour, nʹim‐<br />

porte quand, accoutumé à ma vue, ayant pris foi en moi, vous me dites: restez, eh bien, je<br />

resterai. Sinon, <strong>de</strong>main, après, à toute heure vous ne pourrez dire: Allez et adieu. Prenez<br />

courage, mon ami, ne cherchez pas vainement sʹil peut y avoir quelque cause <strong>de</strong> mauvaise<br />

disposition contre vous, il nʹy en a pas, il ne peut y en avoir, tout au plus quelque illusion<br />

<strong>de</strong> vue, quelque caprice dʹoptique, acci<strong>de</strong>nt passager <strong>de</strong> la lumière, quʹun rayon dissipe en<br />

éclairant mieux. Voilà, jʹen ai confiance tout ce qui se peut trouver dʹobstacle entre vous.<br />

Que <strong>de</strong> premiers refus! Quʹun effroi enfantin nʹait donc pas tant <strong>de</strong> puissance pour vous<br />

troubler. Soyez homme, soyez surtout, mon frère, croyant, espérant en Dieu, qui tient en<br />

ses mains les fils <strong>de</strong> tout cela, priez‐le. Moi, je nʹai pas oublié un seul jour <strong>de</strong> le faire, <strong>de</strong>‐<br />

puis celui où je vous lʹai promis. Adieu, mon ami, écrivez‐moi toutes les fois que vous en<br />

avez la force et nʹatten<strong>de</strong>z pas pour cela <strong>de</strong>s faits décisifs; ce qui se passe en vous, jʹai be‐<br />

soin <strong>de</strong> le connaître aussi et jʹen veux aussi ma part. M. Gavard sait, comme vous lʹavez vu.<br />

Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> vous en expliquer les raisons; elles mʹont semblé <strong>de</strong> conscience et <strong>de</strong><br />

sentiment. Vous les comprendrez <strong>de</strong> reste. Adieu encore. Je vous embrasse tendrement.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

15 à M. Pavie<br />

Réunions chez Montalembert. Prochaine venue à Paris <strong>de</strong> V. Pavie.<br />

Samedi 9 mars 1833<br />

M. Sainte‐Beuve que je rencontrai dimanche <strong>de</strong>rnier au soir, mon cher Victor, chez<br />

M. <strong>de</strong> Montalembert 29 , (je nʹai pas <strong>de</strong>puis quelque temps trouvé place dans mes lettres<br />

pour vous parler <strong>de</strong> ces réunions du dimanche) M. Sainte‐Beuve donc mʹapprit à ma<br />

gran<strong>de</strong> joie que vous alliez arriver, quʹil vous attendait sous peu <strong>de</strong> jours, peut‐être <strong>de</strong>‐<br />

main, ou du moins peu après. Sans perdre <strong>de</strong> temps, je cours, moi, dès le len<strong>de</strong>main, au‐<br />

<strong>de</strong>là <strong>de</strong>s ponts crier la nouvelle à M. Gavard et me féliciter <strong>avec</strong> lui. Puis, je commence une<br />

lettre pour vous, afin <strong>de</strong> vous rappeler quʹà votre choix vous aviez ici <strong>de</strong>meure toujours<br />

prête, ou chez lʹun, ou chez lʹautre. Puis, par réflexion que votre ancien domicile serait pré‐<br />

féré par vous, dans la pensée aussi que ma lettre vous croisera en chemin, je la déchire et<br />

jʹattends. Mais cela dure déjà <strong>de</strong>puis bien <strong>de</strong>s jours. Lʹinquiétu<strong>de</strong> me vient dʹavoir conçu<br />

une joie anticipée et trop hâtive.<br />

29 La rési<strong>de</strong>nce du comte <strong>de</strong> Montalembert était au 18, rue Cassette. MLP. habitait à cette époque au 4 <strong>de</strong> la même rue. Les dimanches<br />

soirs, se réunissaient chez le jeune aristocrate un bon nombre d'écrivains, artistes, philosophes, "les plus illustres champions<br />

<strong>de</strong> l'école catholique", écrivait le jeune Frédéric Ozanam.<br />

26


Hier, je suis allé au passage du Commerce prendre vent 30 ; on vous attend, mais sans<br />

avis positif <strong>de</strong> vous. M. Sainte‐Beuve, par hasard, était<br />

là dans la salle basse. Il sʹétonnait <strong>de</strong> votre silence et me<br />

paraissait moins sûr. Cette longue exposition nʹa<br />

dʹautre but, mon ami, que celui‐ci: cʹest‐à‐dire que tout<br />

cet empressement, cette attente, ces joies <strong>de</strong> vos amis<br />

forment lien et engagement pour vous; que si votre<br />

pensée <strong>de</strong> voyage est indécise encore, ils doivent<br />

lʹentraîner, que si elle était même à naître, tout cela<br />

vous ôte votre liberté et vous oblige à vouloir, malgré<br />

vous. Venez donc, mon ami, lʹexposition ne saurait aller<br />

sans vous, et peut‐être pour cela, ne va pas jusquʹici très<br />

bien. Mais, vous ici, tout sera au mieux. Car tous, nous<br />

aurons dʹautres yeux pour voir, dʹautres cœurs pour<br />

sentir.<br />

Jʹattendais une lettre <strong>de</strong> vous, bien impatient<br />

pour bien <strong>de</strong>s raisons. Si vous tar<strong>de</strong>z quelque peu<br />

encore à venir, écrivez‐moi, je vous en prie. Ma<br />

<strong>de</strong>rnière lettre vous a déplu peut‐être, par excès <strong>de</strong> confiance dans un avenir que vous in‐<br />

terprétez autrement, mais, je ne saurais, quoique je fasse, voir différemment la chose, en<br />

tous sens, sous tous les points examinés et retournés, elle mʹamène toujours la même<br />

conclusion. Il me semble impossible quʹun peu plus tôt, un peu plus tard, ce que nous<br />

voyons nous tous en vous si bien, les autres aveuglés à plaisir le nient et le méconnaissent.<br />

Adieu, mon ami, à bientôt, je lʹespère. M. Sainte‐Beuve nʹétait pas sûr que M. votre père ne<br />

dût pas aussi nous arriver. Ce serait double bonheur, mais si nous nʹen <strong>de</strong>vions pas tout<br />

avoir, que tout au moins ne nous soit pas ôté; je vous le répète, nous vous attendons.<br />

<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong><br />

Si notre maison <strong>de</strong> la rue Cassette était choisie par vous, rappelez‐vous que vous y<br />

jouiriez dʹune entière liberté. Jʹai <strong>de</strong>ux entrées, <strong>de</strong>ux pièces complètement séparées. Vous<br />

seriez maître chez vous. Jʹajoute <strong>avec</strong> parfaite vérité que cela nʹaurait pour moi pas lʹombre<br />

<strong>de</strong> gêne ni <strong>de</strong> dérangement. Voyez cela et faites comme vous voudrez.<br />

16 à M. Pavie<br />

Cœur compatissant <strong>de</strong> MLP. Sanctuaire inviolable <strong>de</strong> lʹâme où Dieu seul pénètre. Exhortations à la confiance.<br />

Réunions chez Montalembert. Le charme quʹopère Montalembert sur ses invités. MLP. regrette lʹabsence <strong>de</strong> La‐<br />

cordaire.<br />

Paris, 2 avril 1833<br />

Il est bien tard pour vous écrire, mon cher Victor, et je cours grand risque, sinon<br />

dʹarriver trop tard, du moins dʹarriver mal à point, puisque vous‐même nous venant il se‐<br />

rait plus simple dʹattendre un peu et <strong>de</strong> ne pas mettre ce prologue à nos entretiens. Jʹécris<br />

pourtant, et, malgré aussi la mauvaise disposition où je me sens, tout cela ne me semble<br />

pas faire obstacle entre nous. Il me semble dʹailleurs quʹil ne faut pas trop longtemps vous<br />

laisser à vous‐même et quʹil est bon que par intervalle une voix amie vous réveille, vous<br />

30 "prendre le vent", jargon <strong>de</strong> chasseur: aller à la rencontre du gibier.<br />

27


amène en ce mon<strong>de</strong> et vous fasse croire encore à lʹavenir. Etes‐vous maintenant, mon ami,<br />

plus rassis, voyant les choses <strong>de</strong> vue plus nette et plus ferme; ou bien, abattu, découragé,<br />

manquant dʹair; tour à tour lʹun et lʹautre sans doute; mais <strong>de</strong> si loin, je nʹen puis que bien<br />

mal suivre les alternatives. Hélas! quelque vive que soit ma sympathie, quelquʹintime que<br />

soit la fusion <strong>de</strong> nos âmes, je sens ici mon impuissance; il est <strong>de</strong>s choses qui ne se peuvent<br />

dire ni même <strong>de</strong>viner, que Dieu seul pénètre, que lʹamour peut‐être aussi peut faire com‐<br />

prendre à lʹamour, mais qui, hors <strong>de</strong> là, reste mystère impénétrable. Cʹest bien sans doute,<br />

que lʹâme ait ainsi <strong>de</strong>s asiles inviolables où seule <strong>avec</strong> Dieu, elle sʹabrite contre tout contact<br />

même le plus ami et le moins irritant; aussi, je nʹaurai gar<strong>de</strong> dʹy vouloir suivre la vôtre,<br />

mais jusquʹau seuil du moins, mon ami, veillant et priant, jusquʹau retour, je voulais une<br />

fois encore ici avant votre arrivée vous dire toute ma tendre compassion, cʹest‐à‐dire (re‐<br />

montant au sens primitif du mot) combien mon âme reçoit vivement contrecoup <strong>de</strong> toutes<br />

les impressions <strong>de</strong> la vôtre. Combien je vis en vous, combien surtout votre confiance en ces<br />

<strong>de</strong>rniers temps mʹavait avant pénétré. Oui, je voulais vous le dire; car, je le sais, il me sem‐<br />

ble parfois que je nʹoserai quʹà peine ici vous parler, <strong>avec</strong> tant dʹeffusion vous interroger;<br />

que la parole me viendra mal et me paraîtra trop ru<strong>de</strong> pour abor<strong>de</strong>r ce point si sensible, si<br />

pudique du cœur et quʹil vous faudra presque toujours <strong>de</strong>viner ce que je ne dirai pas. Mais<br />

est‐ce à vous, mon ami, quʹil est besoin <strong>de</strong> pareil avertissement? Ce nʹest pas, du reste, que<br />

votre situation mʹapparaisse uniquement sous le côté douloureux, tant sʹen faut; mes en‐<br />

tretiens <strong>avec</strong> Cosnier qui sʹest trouvé plus confiant encore que moi, mʹont pleinement<br />

confirmé dans mes espérances. Mais je nʹignore pas que cette confiance, vous ne pouvez<br />

vous‐même lʹavoir quʹà <strong>de</strong> courts instants, et que, le plus souvent, la crainte et le découra‐<br />

gement doivent nous assaillir. Puis, votre bon père, si tendre aussi, sʹest i<strong>de</strong>ntifié si bien<br />

<strong>avec</strong> vous quʹil est <strong>de</strong>venu vous‐même, quʹil a aimé, espéré et tremblé <strong>avec</strong> vous. Cʹest<br />

donc à quelques pas plus loin quʹil vous faut chercher les pronostics <strong>de</strong> lʹavenir, les reflets<br />

moins incertains <strong>de</strong> la réalité; et tout cela, moi, je les vois dans ma confiance intime et<br />

comme surnaturelle, dans celle <strong>de</strong> vos autres amis, dans mille choses qui échappent à<br />

lʹanalyse, mais qui mʹannoncent <strong>de</strong> loin le port pour vous, comme en mer, la terre se révèle<br />

<strong>de</strong> loin par je ne sais quel parfum indicible qui crie à tous ʺterreʺ bien avant la vigie. Ce ne<br />

sont pas là, je le sais, <strong>de</strong>s raisons; mais, quoi <strong>de</strong> plus léger, quoi <strong>de</strong> plus insignifiant que<br />

<strong>de</strong>s raisons: <strong>de</strong>s présages, <strong>de</strong>s rêves, <strong>de</strong>s pressentiments me semblent en vérité et à vous<br />

aussi, je pense, mille fois plus acceptables et plus fidèles. Jʹespère donc et toujours; prenez<br />

aussi confiance, sʹil se peut, mon ami.<br />

Il est vrai, pour ne pas mêler à nos entretiens dʹéléments étrangers, jʹavais négligé<br />

<strong>de</strong> vous parler <strong>de</strong>s réunions Montalembert, en autre temps sujet <strong>de</strong> communications si in‐<br />

téressantes pour vous. En ef‐ fet, ces assemblées <strong>de</strong> frères<br />

quelquefois rêvées par vous, où lʹunité <strong>de</strong> croyances forme aussi<br />

unité pour les cœurs, se trouvent là réalisées. Orgueil, vanité,<br />

timidité irritable et gênante sont là mises <strong>de</strong> côté. On se parle, on<br />

sʹabor<strong>de</strong>, on sʹaime sans savoir les noms <strong>de</strong> ceux <strong>avec</strong> qui lʹont<br />

fait échange <strong>de</strong> paroles et <strong>de</strong> sentiments. Ce nʹest pas que tous, sans<br />

exception, soient catholiques, mais la masse, mais le peuple, si je<br />

puis dire, est essentiellement un, essentiellement catholique. Quant<br />

aux sommités, ce nʹest pas absolument <strong>de</strong> même mais le lieu influence et courbe un peu les<br />

plus inflexibles et M. Lerminier lui‐même y est un peu moins tranchant et téméraire quʹail‐<br />

28


leurs. Sainte‐Beuve, Ballanche, le Baron dʹEckstein, Mickiewicz, le Comte Plater, Liszt,<br />

dʹOrtigues, <strong>de</strong> Coux, dʹAult‐Duménil, Ampère 31 et bien dʹautres remuent dans tout cela<br />

mille idées, cueillent mille sympathies et donnent issue et pâture à ce besoin dʹadmiration<br />

et dʹamour que nous avons tous dans lʹâme et qui vous oppresse tant quand il reste inactif.<br />

Mais je nʹaurais pas <strong>de</strong> mots surtout pour vous dire toute lʹamabilité, toute la séduction en‐<br />

traînante <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Montalembert lui‐même; il parle à tous et si cordialement que dès<br />

lʹabord on se sent à lui pour toujours. Il nʹest coin si obscur qui lui échappe, groupe si ti‐<br />

mi<strong>de</strong> quʹil nʹaille un instant animer <strong>de</strong> son entretien, y jetant quelques mots dont on cause<br />

tout le soir. Du reste, sʹeffaçant tant quʹil peut. Il veut être chez lui le lien <strong>de</strong> tous et non<br />

leur chef; il est dʹune mo<strong>de</strong>stie candi<strong>de</strong>, cè<strong>de</strong> toujours pour la forme, réservant seulement<br />

le fond, se sacrifice enfin, et se montre chrétien dans son salon 32 . comme partout ailleurs,<br />

prouvant à tous quʹil nʹest réellement dʹamabilité, <strong>de</strong> grâce que là, comme <strong>de</strong> vertu, <strong>de</strong><br />

gran<strong>de</strong>ur et <strong>de</strong> force. Je pourrais longtemps continuer sur ce ton, mais jʹaime bien mieux<br />

vous laisser vous‐même en juger. Les réunions dureront encore durant votre séjour ici et<br />

vous y viendrez, il vous connaît et vous désire. Un soir, je ne sais comment, il vint à me<br />

dire: ʺVictor Hugo mʹa lu hier une lettre bien bonne que lui écrit un jeune homme nommé<br />

Pavie, pour lui recomman<strong>de</strong>r un Polonaisʺ. Me voyez‐vous dʹici mʹécrier: Pavie, Victor Pa‐<br />

vie, mais cʹest mon ami, cʹest mon frère. Il viendra vous le verrez. Et Boré <strong>de</strong> mʹappuyer,<br />

que vous étiez un catholique ar<strong>de</strong>nt, lamennaisien, que sais‐je. Si bien que M. <strong>de</strong> Monta‐<br />

lembert vous attend presque comme nous et comme nous vous serrera la main. Vous<br />

pourrez aussi voir à Paris M. Lacordaire, il a quitté la Bretagne; il ne vient pas aux diman‐<br />

ches, je ne sais pas bien pourquoi, peut‐être par scrupule <strong>de</strong> soumission plus absolue à la<br />

volonté du Saint‐Père. Je le regrette bien, jʹeusse été heureux <strong>de</strong> la voir. Il va sans dire que<br />

ses liens <strong>avec</strong> M. <strong>de</strong> Montalembert ne sont point relâchés, quʹils se voient journellement. Je<br />

nʹen sais pas davantage. Tout cela est bien dit au long, mon ami, mais je vous épargne en<br />

nʹallant pas plus loin; vous partagerez, je pense, mes sympathies 33 pour ce foyer <strong>de</strong> com‐<br />

munications, <strong>de</strong> douce effusion, et vous nʹaurez <strong>avec</strong> moi quʹun regret, cʹest quʹon en<br />

31 Ballanche (1776-1847) cf. n. 8, p.6.- Lerminier (1803-1857), publiciste en vogue dans les années 1830-1838. <strong>–</strong> D'Eckstein,<br />

(1790-1861), Danois d'origine, l'un <strong>de</strong>s précurseurs du catholicisme libéral. - Adam Mickiewicz (1798-1855), célèbre poète polonais,<br />

d'ascendance lituanienne. Chef <strong>de</strong> la jeune école romantique polonaise, il s'installa à Paris en 1832 et y publia Le Livre <strong>de</strong> la<br />

nation et <strong>de</strong>s pèlerins polonais. - Comte <strong>de</strong> Plater, cf. supra, note 18. - Franz Liszt (1811-1886), le pianiste hongrois venait d'arriver<br />

à Paris pour y parfaire sa formation artistique et littéraire. - Joseph d'Ortigues, né en 1802, musicographe; il rejoignit<br />

l'équipe <strong>de</strong> L'Avenir. <strong>–</strong> Charles <strong>de</strong> Coux, (1787-1864), économiste, disciple <strong>de</strong> Lamennais, il collabore à L'Avenir, puis à L'Université<br />

Catholique, qui reprendra, <strong>avec</strong> La Revue Européenne, le flambeau <strong>de</strong>s idées mennaisiennes. <strong>–</strong> Georges d'Ault-Dumesnil,<br />

né en 1814; ancien officier, il avait participé à la conquête <strong>de</strong> l'Algérie en 1830, <strong>avec</strong> le maréchal <strong>de</strong> Bourmont. Collaborateur <strong>de</strong><br />

L'Avenir. <strong>–</strong> <strong>Jean</strong>-Jacques Ampère (1800-1864), fils du célèbre physicien, était professeur d'histoire et <strong>de</strong> littérature française au<br />

Collège <strong>de</strong> France.<br />

32 On trouve dans les lettres <strong>de</strong> F. Ozanam une <strong>de</strong>scription <strong>de</strong>s salons <strong>de</strong> Montalembert, qu'il est intéressant <strong>de</strong> comparer à celle <strong>de</strong><br />

MLP. (VLP, I , p.34). "Il respire dans ces réunions un parfum <strong>de</strong> catholicisme et <strong>de</strong> fraternité. M. <strong>de</strong> Montalembert a une figure<br />

angélique et une conversation très instructive. Les points <strong>de</strong> doctrine sur lesquels Rome a <strong>de</strong>mandé le silence ne sont pas remis sur<br />

le tapis; la plus sage discrétion règne à cet égard. Mais l'on s'entretient <strong>de</strong> littérature, d'histoire, <strong>de</strong>s intérêts <strong>de</strong> la classe pauvre, du<br />

progrès <strong>de</strong> la civilisation. On s'anime, on réchauffe son cœur et l'on emporte <strong>avec</strong> soi une douce satisfaction, un plaisir pur, une<br />

âme maîtresse d'elle-même, <strong>de</strong>s résolutions et du courage pour l'avenir." (A Falconnet, 5 janvier 1833). Au même, le 18 mars: "On<br />

a beaucoup parlé <strong>de</strong> la misère du peuple et on en a tiré <strong>de</strong> sinistres présages pour l'avenir. Du reste, on cause très peu <strong>de</strong> politique<br />

et beaucoup <strong>de</strong> science".<br />

33 Sous la plume <strong>de</strong> Maxime <strong>de</strong> Montrond, ami intime <strong>de</strong> MLP., se <strong>de</strong>vine le rayonnement que pouvait avoir MLP. dans <strong>de</strong> telles<br />

réunions. "On pourrait s'étonner <strong>de</strong> trouver MLP. au milieu <strong>de</strong> ce mon<strong>de</strong> brillant, lui si humble, si simple, mais il n'y était nullement<br />

déplacé. Il était bien partout, portant partout ce bon ton, cette bienveillance et cette gaieté même, qui sont l'apanage <strong>de</strong>s esprits<br />

supérieurs. MLP. connaissait cette maxime <strong>de</strong> saint François <strong>de</strong> Sales: "Les saints tristes sont <strong>de</strong> tristes saints" et il la mettait<br />

volontiers en pratique…M. <strong>de</strong> Montalembert, qui estimait MLP. le présentait à ses amis et connaissance comme un artiste, ce qui<br />

l’humiliait quelque peu et le faisait sourire. Imaginez-vous, me disait-il quelquefois, que M. <strong>de</strong> Montalembert me prend pour un artiste.<br />

Certes, moi, artiste, je ne le suis point; amateur, oui peut-être. Oui, j’aime les beaux-arts; mais surtout quand ils sont consacrés<br />

à la gloire <strong>de</strong> Dieu; alors seulement ils méritent le nom <strong>de</strong> beaux, car ils sont un reflet <strong>de</strong> la souveraine beauté." Le beau,<br />

comme le vrai, était l’élément vital <strong>de</strong> notre pieux ami." (VLP, I, p.34).<br />

29


puisse entrevoir la prochaine interruption. M. <strong>de</strong> Montalembert ira, je crois, en Allemagne,<br />

à la saison prochaine.<br />

Adieu, au revoir bientôt. Oh! le plus tôt possible. Gavard vous veut aussi bien ar‐<br />

<strong>de</strong>mment <strong>avec</strong> votre bon, trois fois bon père. Il parait bien décidé à vous accompagner<br />

dans vos voyages et plus sûr pour cette fois <strong>de</strong> sa résolution.<br />

Que je vous sais gré <strong>de</strong> ce que vous me dites pour la chambre offerte chez moi! Que<br />

nous nous entendons bien; que ce mot dévouement une fois bien compris, révèle <strong>de</strong> cho‐<br />

ses! Vous avez bien contribué, mon ami, à me faire <strong>de</strong>scendre plus avant dans le sens in‐<br />

time <strong>de</strong> cette chose et je crois que cʹest là tout le secret <strong>de</strong> ma tendre et si infinie amitié<br />

pour vous.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

17 à M. Pavie<br />

Témoignage dʹamitié. Commentaire dʹun sermon <strong>de</strong> Lacordaire à St‐Roch. Avis sur différentes productions litté‐<br />

raires.<br />

Mardi 28 mai 1833<br />

Il fallait, mon ami, vous laisser un peu respirer après votre retour, vous laisser digé‐<br />

rer un peu <strong>de</strong> paix Paris et nous, trop en hâte peut‐être entassés durant votre court séjour<br />

ici; il fallait enfin laisser lʹabsence se trancher nettement. Je ne vous ai donc pas écrit jus‐<br />

quʹici, malgré le désir qui mʹy a bien <strong>de</strong>s fois porté. Je me disais: il repose, il dort; ne lʹéveil‐<br />

lons pas; mais je vous ai assez longtemps regardé dormir. Vous voilà bien remis. Allons<br />

donc, levez‐vous et parlez‐moi. Dites‐moi bien naïvement comment vous êtes, si votre vie<br />

est <strong>de</strong> nouveau arrangée là‐bas; si vous avez renoué toutes vos harmonies, un moment dé‐<br />

placées. Dites‐moi en quel état est votre esprit, en quel mo<strong>de</strong>, en quel ton. Dites‐moi, mon<br />

ami, ce quʹon vous a dit à votre retour <strong>de</strong>s choses qui vous<br />

intéressent et ce qui est survenu <strong>de</strong>puis. Si jʹépuisais la<br />

série <strong>de</strong> mes questions, elles iraient loin encore et la queue<br />

prolongée en dépasserait bien ce court papier. Cʹest, voyez‐<br />

vous, quʹaccoutumé que jʹétais à vous voir, à vous entendre<br />

tous les jours, jʹai trouvé après bien du vi<strong>de</strong> et du silence et<br />

que quelques mots <strong>de</strong> vous jetés pour combler cela tombe‐<br />

raient au fond, tout au fond <strong>de</strong> mon âme et y feraient un<br />

bien que je ne puis dire. Jʹai honte <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r encore<br />

quand vous avez ici tant donné, ne réservant rien <strong>de</strong> vous,<br />

vous livrant tout entier par le dévouement et à lʹexemple<br />

du Maître, disant: buvez et mangez. Il ne peut y avoir dans<br />

ce rapprochement, je lʹespère, rien <strong>de</strong> mauvais. Je ne<br />

prends point pour divine cette nourriture, je vous aime en Dieu; il le sait, et si parfois<br />

quelquʹexaltation trop terrestre enivre ma tête, je ferme les yeux et cela passe. Oh! oui, je<br />

vous aime en Dieu! Tout sentiment contenu, a dit M me <strong>de</strong> Staël 34 , nʹa guère dʹénergie; elle<br />

34 Fille <strong>de</strong> Necker (ministre <strong>de</strong>s Finances <strong>de</strong> Louis XVI), M me <strong>de</strong> Staël (1766-1817) illustra, par l'exemple d'une vie passionnée et par<br />

ses œuvres littéraires, ce qui sera plus tard l'idéologie romantique. Pour elle, la poésie se doit d'exprimer les tourments <strong>de</strong>s âmes à<br />

la fois inquiètes et mélancoliques. Porté, par sa nature sensible, à épancher ses sentiments, ("quelque exaltation trop terrestre…"),<br />

MLP. saura en maîtriser les manifestations excessives.<br />

30


ne voyait donc pas que lʹamour peut comprimer lʹamour et quʹil y a double force alors et<br />

double énergie, dʹoù résulte la soumission, pour nous manifestation<br />

la plus haute <strong>de</strong> la puissance dʹaimer. Soyez donc en repos, mon<br />

ami, je gar<strong>de</strong>rai le feu, mais je rejetterai la fumée. Il me vient<br />

quelquʹinquiétu<strong>de</strong>, mon ami, que la pensée qui me domine<br />

heureusement aujourdʹhui et pour toujours, je lʹespère, ne revienne<br />

en mes lettres trop inévitablement jusquʹà la monotonie, jusquʹà la<br />

préoccupation maniaque. Sans doute, on peut dire: là où est le<br />

trésor, là est le cœur, ou, <strong>avec</strong> S t Paul: ʺNos stulti propter Christum. Si<br />

insanimus, Deo insanimus.ʺ 35 Sans doute on ne voit pas ce que <strong>de</strong>s<br />

chrétiens sʹentretenant auraient <strong>de</strong> mieux à dire que <strong>de</strong>s choses <strong>de</strong> Dieu ou tendant à Dieu;<br />

mais encore un sentiment divinement inspiré peut sonner mal, traversant la parole hu‐<br />

maine, mais lʹattention nʹest pas toujours piété, il faut lʹattendre et ne pas la lasser. Je sens<br />

cela. Dites‐moi donc, mon ami, si vous avez remarqué dans mes lettres, dans mon entre‐<br />

tien ou mes actes quelque disposition à manquer en tout cela <strong>de</strong> mesure. Je remarque à<br />

cette occasion que vous êtes sobre à lʹexcès <strong>de</strong> conseils. Cʹest mo<strong>de</strong>stie exagérée. On se juge<br />

mal soi‐même. Un avis souvent fait grand bien, et, pour ma part, il mʹest bien <strong>de</strong>s fois arri‐<br />

vé <strong>de</strong> regretter le vôtre. Si vous mʹaimez, jʹallais dire; je me reprends: si vous me voulez<br />

plaire, vous me conseillerez toutes les fois quʹil y aura lieu et plus que moins.<br />

Quelquʹun vous a‐t‐il dit que M. Lacordaire avait prêché. A tout hasard, je vous en<br />

parlerai quelques mots. Le sermon avait lieu à 7h. du soir à S t ‐Roch, un dimanche, par un<br />

temps et soleil superbes, cʹest assez dire que lʹassemblée adorait Dieu <strong>de</strong>hors peut‐être,<br />

mais quʹelle était peu nombreuse autour <strong>de</strong> la chaire. En revanche bien composée, le ban et<br />

lʹarrière‐ban Montalembert, le 18 è siècle y compris et toute la Pologne réfugiée. Mais, si<br />

une intention trop mondaine avait convoqué la plupart, ils ont sur lʹheure reçu leur châti‐<br />

ment: il y a eu pâture pour les chrétiens mais pour eux seulement. Toute la partie humaine<br />

<strong>de</strong> la chose: arrangement, logique, éloquence, tout cela a coulé; il nʹest rien resté à lʹorateur,<br />

soit émotion, soit disposition mauvaise, que le plan et les masses <strong>de</strong> son discours, <strong>avec</strong> sa<br />

ravissante voix si onctueuse et si pénétrante, mais encore manquant ce jour‐là dʹhabile di‐<br />

rection, trop ménagée et plus tard menaçant <strong>de</strong> sʹéteindre tout à fait. M. Lacordaire nʹavait<br />

point écrit son discours, comptant <strong>avec</strong> raison sur sa facilité pour mettre en œuvre sa ma‐<br />

tière et la mieux accommo<strong>de</strong>r, selon lʹinspiration émanée <strong>de</strong> lʹauditoire. Mais cela lui a fail‐<br />

li; pourquoi? Je ne sais, mais partout le développement manquait, <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s pensées<br />

étaient jetées, <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s masses esquissées, mais le<br />

développement, mais la liaison, la fusion harmonieuse nʹont<br />

pu venir, la plus mince intelligence y suppléait; cʹeût été, il<br />

semble travail <strong>de</strong> manœuvre, pourtant faute <strong>de</strong> cela, la chose a<br />

été tout à fait manquée. Je parle ici humainement, il sʹentend,<br />

car, je ne sais si chrétiennement il ne se pourrait dire quʹainsi<br />

dépouillée dʹartifice et même dʹenveloppe, la parole nʹétait pas<br />

encore plus pure, plus chastement introduite dans lʹâme. Il<br />

faut lʹavouer pourtant on se passe malaisément <strong>de</strong> la<br />

participation extérieure et incontestablement cet effet particulier ne pouvait être que fort<br />

restreint. M. Lacordaire est resté sous le coup, non pas découragé, le courage comme lʹes‐<br />

35 Nous sommes fous, nous, à cause du Christ. Si nous sommes fous, nous sommes fous pour Dieu (1Co 4,10).<br />

31


poir lui viennent dʹen haut, mais un peu ému. Cela<br />

<strong>de</strong>vait être, et dans son humilité, bien convaincu<br />

maintenant quʹil faut parler à la jeunesse, à nous, ses<br />

amis et ses frères, mais pas dans une chaire, pas à une<br />

assemblée dʹÉglise. Il eût fallu peut‐être lui affaiblir<br />

lʹeffet <strong>de</strong> cette première tentative; il eût essayé <strong>de</strong><br />

nouveau, et, mieux préparé, eût atteint pleinement sont<br />

but; on ne pèse pas toujours ses paroles. M. <strong>de</strong><br />

Montalembert, comme chrétien, comme ami, sʹest cru<br />

en droit <strong>de</strong> parler net et en a usé largement; dʹautres<br />

encore sans doute et moi‐même qui le vis peu après je<br />

ne dissimulai pas assez peut‐être quʹil nʹy avait pas eu<br />

satisfaction complète, ou du moins je nʹinsistai pas<br />

suffisamment sur ce quʹil y avait <strong>de</strong> grand dans la<br />

chose telle quelle. Une interruption mʹen empêcha dʹail‐<br />

leurs, une visite qui survint. Jʹen eus bien regret après<br />

et si fort que je lui écrivis quelques mots pour com‐<br />

pléter ma pensée. Il mʹa fait une réponse si pleine <strong>de</strong> bonté, <strong>de</strong> touchante humilité que<br />

vous en seriez ravi comme moi. Lʹattrait puissant que Dieu lui a donné pour la jeunesse,<br />

lʹexpérience quʹil a <strong>de</strong> ses sentiments, le besoin quʹil lui sait dʹune âme qui la comprenne,<br />

tout cela dit‐il, lʹentraîne à travailler pour elle. ʺIl faut savoir, ajoute‐t‐il, entendre la volon‐<br />

té <strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce qui ne se manifeste ordinairement à nous que par mille petites choses<br />

qui agissent sur tous les points <strong>de</strong> notre âme et la déci<strong>de</strong>nt déjà avant quʹelle ait réfléchi.<br />

Dans le cas où je me trouve la réflexion est dʹaccord <strong>avec</strong> lʹattrait intime. Du reste les cho‐<br />

ses se font peu à peu, sans bruit, et je ne me presse pas <strong>de</strong> faire, sachant bien que Dieu dis‐<br />

posera tout pour le mieux, pourvu que je mʹabandonne à sa volontéʺ.<br />

Cela ne rappelle‐t‐il pas, mon ami, Fénelon disant: Laissez‐vous aller au souffle <strong>de</strong><br />

la grâce, ne résistez pas à la volonté <strong>de</strong> Dieu, <strong>de</strong>venez comme un bon petit enfant qui se<br />

laisse emporter sans même <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r où on le porte.<br />

Voilà bien <strong>de</strong>s citations, mon ami trop pour une fois peut‐être; <strong>de</strong> peur <strong>de</strong> citer en‐<br />

core je mʹabstiens <strong>de</strong> vous parler <strong>de</strong>s Pèlerins polonais que vous avez lu déjà sans doute;<br />

cʹest encore là un homme selon notre cœur. Trouvez‐vous comme moi que la préface par<br />

M. <strong>de</strong> Montalembert, nʹest pas dʹor aussi pur que lʹouvrage même? 36 Lʹindignation est légi‐<br />

time sans doute; mais la haine en Dieu est encore <strong>de</strong> lʹamour. Cʹest que le malheur met bien<br />

près <strong>de</strong> Dieu. Pellico 37 , Mickiewicz ont trouvé là <strong>de</strong>s révéla‐tions si lumineuses quʹils en<br />

sont revenus <strong>avec</strong> une auréole. Oh! Si à eux aussi comme à un autre poète on disait: ami,<br />

dʹoù nous viens‐tu etc. Oh! quʹelle serait belle leur réponse!<br />

M. Gavard vous a écrit et désire se charger <strong>de</strong> vous renvoyer <strong>avec</strong> son avis vos<br />

compositions. Je nʹai donc pas à vous en parler, cʹest bien assez dʹun; un mot dʹexplication<br />

36 L'ouvrage du poète Mickiewicz venait d'être publié à Paris en 1832. Montalembert en avait fait la traduction.<br />

37 Silvio Pellico, (1789-1854), écrivain italien. Accusé d'appartenir aux carbonari (société secrète qui s'était juré <strong>de</strong> chasser les Autrichiens<br />

d'Italie), il fut emprisonné dix ans dans la forteresse du Spielberg, en Autriche. Libéré en 1830, il publia, <strong>de</strong>ux ans après,<br />

Mes Prisons. Davantage que la <strong>de</strong>scription du régime sévère auquel il fut soumis, l'auteur y raconte son retour à Dieu, son itinéraire<br />

spirituel, à travers les souffrances supportées chrétiennement. Ecrit <strong>avec</strong> l'âme du poète et la douceur du chrétien, le livre déçut<br />

les plus exaltés <strong>de</strong> ses amis. Il n'en eût pas moins un grand retentissement en Europe. On comprend que MLP., lui-même re<strong>de</strong>venu<br />

chrétien <strong>de</strong>puis peu, ait été marqué par un tel témoignage. Dans la lettre 19, du 12 juillet 1833, il dit avoir composé une assez<br />

longue recension <strong>de</strong> Mes Prisons. Mais, malheureusement, ce texte, envoyé à La Revue européenne, fut perdu.<br />

32


seulement: vous avez paru entendre sur LʹOrganiste 38 que cela nʹavait pas été pris au sé‐<br />

rieux par moi; tant sʹen faut. J’ai dit que le style me paraissait parfois trop familier. Jʹen‐<br />

tendais par là que la forme en quelques endroits nʹétait pas suffisamment mo<strong>de</strong>lée, si je<br />

puis dire. La chose nʹétait pas là dans le jour <strong>de</strong> lʹart, mais restait dans le mon<strong>de</strong> où lʹon vit,<br />

où lʹon parle, dans le mon<strong>de</strong> familier. Lʹautre composition, quoique moins haute sans<br />

doute, sous ce rapport est plus irréprochable. Cʹest ainsi seulement que je lʹai compris, en<br />

disant quʹelle était plus faite et pouvait plutôt que lʹautre être immédiatement publiée.<br />

Cette explication nʹimporte guère. Je désirais pourtant vous la donner, si vous avez quel‐<br />

que confiance en ma circonspection et pru<strong>de</strong>nce, vous me renverrez lʹOrganiste après<br />

lʹavoir retouché un peu et je puis, je crois, répondre <strong>de</strong> le placer, ainsi que lʹautre, la jeune<br />

fille ou lacrymae convenablement. Vous nʹoublierez pas, mon ami, que vous avez à moi un<br />

médaillon qui mʹest bien précieux. Jʹai songé <strong>de</strong>puis pourtant que votre bon père désirait<br />

peut‐être le gar<strong>de</strong>r. Consultez‐le et faites pour le mieux. En tous cas, entre mes mains, il<br />

serait un simple dépôt révocable à volonté. Puisquʹun seul exemplaire en reste, il doit ap‐<br />

partenir à tous, et, selon le moment, passer <strong>de</strong> lʹun à lʹautre. Vous jugerez donc et je vous<br />

mets au défi <strong>de</strong> ne pas faire selon mon désir. Car, comme ami, sʹentend, la matière en moi<br />

prête; si vous nʹen faites pas quelque chose, si vous nʹen tirez pas tout le parti possible, ce<br />

sera votre faute. Adieu, mon ami, je serai moins causeur une autre fois, aujourdʹhui il ne<br />

pouvait en être autrement. Embrassez tendrement pour moi votre père.<br />

Tout <strong>de</strong> cœur à vous.<br />

<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong><br />

Vous savez quel sujet occupait nos <strong>de</strong>rnières lettres, cʹest ici une effusion ouverte<br />

qui ne peut pas tarir. Soyez sûr quʹà tout instant, à toute heure mon attention est prête, que<br />

ma sympathie veille toujours. Jʹai lu la Fée 39 , en mémoire <strong>de</strong> vous. Jʹétais digne <strong>de</strong> la lire. Je<br />

lʹai senti au plaisir quʹil mʹa donné. Que Nodier fasse un seul pas encore, quʹil rompe un<br />

<strong>de</strong>rnier lien qui lʹattache aux autres pour se livrer tout à nous et je nʹaimerais personne<br />

plus que lui.<br />

Charles Nodier<br />

Soirée à l’ Arsenal<br />

38<br />

Il s'agit <strong>de</strong> la pièce <strong>de</strong> Victor Hugo, L'Organiste Boyer (cf. Victor Pavie, sa jeunesse, ses relations littéraires, par Théodore Pavie,<br />

1887, p.141).<br />

39<br />

La Fée aux Miettes, (1832), œuvre du poète et écrivain Charles Nodier (1780-1844), dont le salon littéraire parisien, à l'Arsenal,<br />

fut l'un <strong>de</strong>s foyers du mouvement romantique. Dans La Fée, conte fantastique, il cherche à réconcilier le rêve et la réalité.<br />

33


18 à M. Pavie<br />

Condoléances pour le décès <strong>de</strong> la grand‐mère <strong>de</strong> V. Pavie. Hymne à la famille, ʺla société <strong>de</strong> Dieuʺ. Amitié pour ar‐<br />

river ensemble à Dieu.<br />

Paris, 30 mai 1833<br />

Que sans retard je vous sois présent par cette lettre, mon ami, pour mʹassocier à vo‐<br />

tre douleur, pour me placer <strong>avec</strong> vous sous la main du Seigneur quand elle vous frappe et<br />

adorer <strong>avec</strong> vous sa volonté sainte. Quand <strong>de</strong>s frères égarés sʹen vont <strong>de</strong> ce mon<strong>de</strong>, tant <strong>de</strong><br />

crainte se mêle à nos espérances pour eux quʹinvolontairement on se courbe <strong>avec</strong> terreur<br />

<strong>de</strong>vant la Justice <strong>de</strong> Dieu qui passe, mais quand lʹœuvre sʹaccomplit au sein dʹune famille<br />

chrétienne, le cœur ne se serre pas <strong>avec</strong> angoisse, il éclate en pleurs, en gémissements que<br />

le Ciel recueille comme un fruit précieux <strong>de</strong> soumission et dʹamour. Ainsi votre bon père<br />

agenouillé sʹeffondrait tout en larmes, ainsi vous le soutenant et ainsi moi‐même à cette<br />

heure où je mʹi<strong>de</strong>ntifie si pleinement à vous que je souffre et pleure comme vous avez<br />

souffert et pleuré. Mais, à ce moment surtout, mon ami, je le dis encore, crions: gloire et<br />

merci à Dieu! qui nous a faits chrétiens, qui change la douleur en un présent céleste. Dites,<br />

la grâce est‐elle assez sensible et palpable, quand la douleur <strong>de</strong> votre père, remontant<br />

dʹâge en âge, va par échos enchaînés toujours, toujours montant, porter son tribut aux<br />

pieds même du Seigneur? Oh! je le crois, nos yeux ne voient sûrement Dieu quʹà travers<br />

les larmes et cʹest là un mystère qui nous soulève pour arriver jusquʹaux autres.<br />

Non, je nʹai pas vu votre vénérée mère, mais ne le regrettez pas tant; vous ne savez<br />

pas jusquʹà quel point ma tendre affection pour vous me donne par intuition sentiment et<br />

notion <strong>de</strong> tout ce qui vous est cher. Quelques mots <strong>de</strong> votre frère, quelques exclamations<br />

<strong>de</strong> vous mʹavaient ici fait voir <strong>de</strong> la vue <strong>de</strong> lʹâme cette tige vénérable <strong>de</strong> votre famille. Puis,<br />

votre bon père, nʹen est‐il pas une image, puis vous et votre frère nʹen avez‐vous pas aussi<br />

quelques traits? Bien <strong>de</strong>s fois, je vous le proteste, mon esprit fut au milieu <strong>de</strong> vous aux<br />

heures les plus saintes et vit votre famille comme un frère choisi par vous <strong>de</strong>vait la voir.<br />

Désormais, il y a là un grand changement; à votre bon père reviennent toutes les vertus <strong>de</strong><br />

la mère et Dieu sait sʹil en portera noblement le far<strong>de</strong>au! Mais à vous aussi, mon bien cher<br />

Victor, tout le poids <strong>de</strong>s siennes. Mon cœur le dit <strong>avec</strong> joie; vous étiez grand déjà, mais il<br />

vous faut grandir encore. Oh! continuez sans interruption votre famille, grossissez le tré‐<br />

sor <strong>de</strong> ses vertus, gar<strong>de</strong>z‐le <strong>avec</strong> sollicitu<strong>de</strong>, <strong>avec</strong> amour. Gar<strong>de</strong>z vos saintes traditions,<br />

gar<strong>de</strong>z la profession <strong>de</strong> vos ancêtres, gar<strong>de</strong>z leur ville natale et surtout leur foyer. La fa‐<br />

mille, cʹest la société <strong>de</strong> Dieu; quelques familles saintes encore éparses parmi nous je le<br />

crois fermement, conservent seules <strong>avec</strong> lʹÉglise ce type éternel <strong>de</strong> lʹordre selon Dieu et in‐<br />

terposent cette image entre sa colère et le désordre du mon<strong>de</strong>. Cʹest donc une mission,<br />

mon ami, que vous avez, mission <strong>de</strong> paix et <strong>de</strong> conciliation, mission sainte comme celle<br />

<strong>de</strong>s patriarches aux anciens temps et mon cœur me le dit encore, vous nʹy faillirez jamais.<br />

Pour cela votre humilité accueillera tout appui, quelque faible quʹil puisse être. Je vous of‐<br />

fre donc le mien. Je veux tendre à la perfection pour soutenir la vôtre. Vous aussi, vous<br />

mʹai<strong>de</strong>rez et ainsi appuyés lʹun sur lʹautre, nous arriverons mieux à Dieu. 40<br />

40 MLP. ne cherche pas à contrarier le mouvement naturel <strong>de</strong> son cœur qui le porte à aimer son prochain. Mais, la grâce aidant, il<br />

voit <strong>de</strong> plus en plus, en toute amitié, l'occasion <strong>de</strong> se soutenir mutuellement, dans les joies et dans les peines, pour mieux marcher<br />

ensemble vers Dieu. Arriver <strong>de</strong> concert à Dieu, accomplir <strong>de</strong> concert sa sainte volonté, telles sont quelques-unes <strong>de</strong>s expressions<br />

qui viendront spontanément sous sa plume, lorsqu'il faudra encourager ses frères à sauvegar<strong>de</strong>r l'esprit <strong>de</strong> communauté et l'esprit<br />

<strong>de</strong> dévouement. (cf. Règlement <strong>de</strong> 1847).<br />

34


Avec ces sentiments vous pensez, mon ami, si je gar<strong>de</strong>rai mémoire du 18 juin. Si ce<br />

jour‐là, je serai fervent au pied <strong>de</strong>s autels. Tout ce que ma faiblesse pourra donner par la<br />

prière sera tout entier versé au tribut, et jusque là chaque soir je dirai <strong>avec</strong> vous la prière<br />

<strong>de</strong>s morts, prière pour votre aïeule vénérée 41 ; prière, nous lʹespérons, quʹelle pourra re‐<br />

cueillir elle‐même et offrir pour nous en hommage à Dieu.<br />

Votre ami<br />

<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong><br />

Aujourdʹhui même jʹenverrai, si je ne puis la porter, votre lettre à notre ami. Son<br />

union absolue <strong>avec</strong> nous en Dieu est désormais un vœu bien ar<strong>de</strong>nt pour moi. Travaillez‐<br />

y; moi, je me sens si faible agent près <strong>de</strong> lui, si supérieur à moi, que le courage mʹaban‐<br />

donne, si je nʹavais dʹailleurs ma confiance.<br />

Dites à votre père toute ma tendre vénération pour lui; dites‐lui toute ma sincère<br />

douleur et combien je suis vôtre à tous.<br />

19 à M. Pavie<br />

Amitié fondée sur Dieu. Comment souffrir en chrétien. Le chapelet <strong>de</strong> MLP. Circonstances dans lesquelles MLP.<br />

cessa toute pratique religieuse et laissa sa vocation. Il encourage son ami à persévérer dans le choix dʹune épouse.<br />

Nouvelles <strong>de</strong> Gavard, Sainte‐Beuve, Montalembert, Lacordaire. Ozanam et ses amis ont traduit lʹouvrage <strong>de</strong> Pelli‐<br />

co, Mes Prisons, dont MLP. a fait une recension.<br />

12 [juillet] 1833 42<br />

Vos lettres mʹémeuvent si intimement, mon ami, quʹelles font naître en moi le be‐<br />

soin dʹune effusion immédiate, dʹun épanchement immense dont je comprime <strong>avec</strong> peine<br />

lʹimpétuosité et lʹexcès. Mais ce qui me rend avant tout cette émotion précieuse, cʹest que<br />

jʹy vois un don <strong>de</strong> grâce, un encouragement, cʹest que jʹy trouve un parfum céleste qui dit<br />

assez dʹoù il <strong>de</strong>scend; puis, ma joie se double par réaction, car, mon ami, la tendresse infi‐<br />

nie <strong>de</strong> votre lettre ne mʹen laisse pas douter. Moi aussi jʹai quelque puissance sur vous, moi<br />

aussi je vous semble un bienfait <strong>de</strong> Dieu. Oh! que cela me fait <strong>de</strong> bien <strong>de</strong> vous servir à<br />

quelque chose, à vous qui mʹêtes tant à moi‐même, à vous dont lʹaction mʹeût opprimé si je<br />

ne lʹeusse subie <strong>avec</strong> tant dʹamour et si une voix ne mʹeût crié: reçois, reçois toujours, cʹest<br />

Dieu qui donne. Quand une fois on a mis en cette voie toutes ses affections, quʹon a senti<br />

tout ce quʹelles puisent dʹénergie et <strong>de</strong> pureté en sʹharmonisant à lʹamour divin, se peut‐il<br />

quʹon les laisse encore sʹégarer seules. Se peut‐il quʹon préfère mille sons se heurtant et dis‐<br />

cor<strong>de</strong>s au concert céleste dont on fit un instant partie? A cela, je sais bien la réponse. Le so‐<br />

leil luit quand il absorbe et dissipe les nuages, sinon le temps est sombre, lʹair mauvais; on<br />

arrive à la nuit toujours attendant le jour. Aussi en sentant tout mon être qui se renouvelle,<br />

mon âme se refaire, tous mes sentiments primitifs perdus <strong>de</strong>puis et que je croyais éteints,<br />

renaître peu à peu sous le souffle <strong>de</strong> Dieu, en laissant enfin tout ce travail intérieur sʹopé‐<br />

41<br />

Il s'agit bien <strong>de</strong> la grand-mère <strong>de</strong> V. Pavie, et non <strong>de</strong> sa mère, comme pourraient le faire croire certaines phrases <strong>de</strong> la lettre. Par<br />

<strong>de</strong>ux fois, au moins, la biographie <strong>de</strong> V. Pavie par son frère Théodore confirme l'i<strong>de</strong>ntité <strong>de</strong> la défunte: "Lorsqu'elle mourut en<br />

1833, un ami <strong>de</strong> la famille écrivait à Victor: M me Pavie, votre grand-mère, était une sainte"!" (p.24). C'est en 1813 que V. Pavie<br />

avait perdu sa mère: "...Victor avait cinq ans et moi <strong>de</strong>ux mois quand elle disparut d'au milieu <strong>de</strong> nous" (p.31).<br />

42<br />

L'original <strong>de</strong> la lettre porte la date du 12 juin. C'est manifestement une erreur. Dans la lettre précé<strong>de</strong>nte (18, du 30 mai), MLP.<br />

mentionne la date du 18 juin pour une messe célébrée à la mémoire <strong>de</strong> la défunte. Il y fait allusion, <strong>de</strong> nouveau, dans la présente<br />

lettre, en employant le passé: "le 18, une messe a été dite..." Cette date du 18 juin est confirmée par une lettre adressée à V. Pavie<br />

par M me Hugo: "J'irai, Monsieur, à la messe le 18 juin…" (V. Pavie, sa jeunesse…p124). Il convient donc <strong>de</strong> dater cette lettre 19 du<br />

mois <strong>de</strong> juillet.<br />

35


er en moi, je tremble parfois pourtant et je dis: si je bouge, lʹœuvre fragile encore branle et<br />

sʹécroule, alors je lève les yeux en haut, puis je pense à vous et ma confiance revient.<br />

Vous pouvez compter, mon ami, que je serai fidèle à ma promesse: le 18, ce jour si<br />

grand pour vous, je puis dire pour nous, une messe a été dite ici pour mʹassocier à vos<br />

prières, je pensai un moment à y convoquer Boré, Papau, ceux <strong>de</strong> vos amis qui sont nos<br />

frères enfin; mais vous ne mʹaviez rien recommandé à ce sujet, je craignais dʹaller plus loin<br />

que votre volonté. Jʹeusse mieux fait, je crains à présent, <strong>de</strong> suivre cette inspiration.<br />

Je sens bien intimement, mon ami, tout ce que vous me dites <strong>de</strong> votre douleur. Je<br />

conçois bien ainsi une douleur chrétienne qui plie dʹabord en sa faiblesse humaine, mais se<br />

redresse ensuite, se mêle dʹespérance, et fortifiée <strong>de</strong> cet élément divin marche encore sur la<br />

terre, mais en regardant le Ciel. Je conçois bien encore que vos pleurs roulent ensemble<br />

pour votre vénérée mère et pour la peine secrète <strong>de</strong> votre cœur; je sens mieux que je ne le<br />

pourrai dire cette liaison intime, ce rapprochement mystérieux dʹéléments en apparence<br />

opposés et pourtant qui sʹattirent. Gar<strong>de</strong>z à jamais, mon bien cher Victor, tous ces souve‐<br />

nirs, il vous en sera <strong>de</strong>mandé compte; mettez ensemble le chapelet et la boîte, purifiez<br />

complètement lʹun par lʹautre et que ce soit là lʹemblème <strong>de</strong> votre bonheur futur, bonheur<br />

terrestre, mais béni par Dieu. Ne vous semble‐t‐il pas que cette chaîne <strong>de</strong> chapelet dérou‐<br />

lée aux mains du chrétien figure sa prière qui, dʹanneau en anneau, va se rattacher au<br />

tronc du Seigneur; jʹaurai aussi un chapelet, mais je voudrais aussi quʹil me vînt dʹune<br />

main sainte. Jʹen eus un autrefois, aux meilleurs jours <strong>de</strong> ma vie à 20 ans, quand Dieu<br />

mʹavait mis au cœur la pensée sainte <strong>de</strong> me consacrer à lui. Je partis <strong>de</strong> Lisieux où jʹétais<br />

alors 43 pour venir en vacances près <strong>de</strong> ma mère, <strong>avec</strong> un ami bon, généreux, mais bien mal<br />

inspiré, car sa lumière ne venait pas dʹen haut; déjà il avait, bien à mon insu, ébranlé ma<br />

foi. Pourtant, en passant au Havre où nous étions venus en traversant le bras <strong>de</strong> mer, je<br />

mʹagenouillai le soir, lʹautre dormant déjà, et je récitai mon chapelet. Puis, lʹayant fini et<br />

posé sur la table, je ne sais par quelle distraction, je vins à mettre <strong>de</strong>ssus le flambeau. Jʹou‐<br />

bliai le chapelet <strong>de</strong>ssous. Huit jours après, tous mes liens <strong>avec</strong> Dieu étaient rompus; ma<br />

mère et ma sœur prévenues subitement à <strong>de</strong>ssein par lʹami, que jʹallais dans quelques se‐<br />

maines au Séminaire, montrèrent une émotion à laquelle je ne sus pas résister. Je repris à<br />

Dieu ce que je lui avais donné; pourtant aujourdʹhui, me voilà revenu à lui, mais je nʹai<br />

plus à lui rendre ma première jeunesse, ni ma santé dʹautrefois. On laisse quelque chose<br />

aux buissons <strong>de</strong> la route; je servirai donc Dieu, je lʹespère, mais plus dans la troupe dʹélite.<br />

Jʹai perdu mon rang.<br />

Je parlais tout à lʹheure pour vous <strong>de</strong> bonheur futur, obstiné que je suis à voir <strong>de</strong>s<br />

motifs dʹespérer dans tout ce qui vous désespère. En effet je ne puis, mon ami, considérer<br />

autrement les remontrances qui vous sont faites; elles me semblent <strong>de</strong>s marques bien réel‐<br />

les dʹintérêt; on ne crie pas aux gens vous prenez un mauvais chemin quand on désire<br />

quʹils sʹégarent: que votre caractère, vos manières dʹêtre habituelles et particulières ne<br />

soient pas dès lʹabord comprises, cʹest inévitable et ne saurait durer; notre pauvre intelli‐<br />

gence est si bornée que nous commençons tout rapprochement par <strong>de</strong>s malentendus; mais<br />

on sʹexplique peu à peu; lʹœil démêle, à travers lʹobscurité, la réalité <strong>de</strong>s choses et sʹen em‐<br />

pare définitivement. Sʹil en est ainsi entre nous, jeunes gens quʹune éducation, <strong>de</strong>s princi‐<br />

pes, <strong>de</strong>s idées communes ont formulés pour ainsi dire en un même moule, comment y<br />

échapperait‐on dʹhomme à femme, placé en situation si différente dans le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> lʹintel‐<br />

43 De septembre 1823 à février 1825, MLP. enseigna au Collège Royal <strong>de</strong> Lisieux. (Positio, p.26-27).<br />

36


ligence, cela serait effrayant si, pauvres créatures, nous nʹavions pour nous entendre que<br />

lʹintelligence; mais vous le savez mieux quʹun autre, nous avons aussi lʹamour et par là,<br />

vous et une femme vraiment bonne, vraiment femme ne sauriez manquer <strong>de</strong> vous révéler<br />

complètement lʹun à lʹautre. Ne vous découragez donc pas, mon bien cher Victor, ne vous<br />

buttez pas contre les obstacles. Surmontez‐les. Il en est un par exemple dont vous vous ef‐<br />

frayez outre mesure; lʹindifférence, peut‐être pis, <strong>de</strong> M me Ch.. Quoi, cette jeune femme,<br />

mʹavez‐vous dit, est douce et bonne et elle vous fait peur. Elle vous est adverse, je le veux.<br />

Eh bien, gagnez‐la. Priez‐la ar<strong>de</strong>mment, rappelez‐lui quʹautrefois aussi elle aima et que<br />

lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> tous lui fut nécessaire, quʹil vous faut son appui et quʹelle peut tout pour vous.<br />

Qui vous empêcherait, dites‐moi, <strong>de</strong> vous la rendre ainsi dévouée ou au moins engagée <strong>de</strong><br />

délicatesse à neutralité absolue? Un peu <strong>de</strong> timidité, un peu dʹorgueil peut‐être. Oh! mon<br />

ami, on peut acheter sa compagne au prix <strong>de</strong> bien dʹautres sacrifices et ce nʹest pas vous<br />

qui reculerez <strong>de</strong>vant ceux‐là. Il serait bien froid pour tout autre dʹajouter quʹil faut, mon<br />

ami, soumettre enfin tout cela à la volonté <strong>de</strong> Dieu et chercher dans votre confiance en Lui<br />

plus <strong>de</strong> calme et dʹespérance, mais nous nous comprenons. Je nʹai pas peur <strong>de</strong> méprise. Et<br />

puisque vous permettez tout à ma vive affection, oh! mon bien‐aimé Victor, il ne nous est<br />

pas permis à nous autres chrétiens <strong>de</strong> vouloir, <strong>de</strong> chercher ici‐bas un bonheur direct et<br />

pour ce bonheur en lui‐même, ne lʹoubliez pas, il ne doit être pour nous quʹune voie, quʹun<br />

moyen; vous lʹavez dit vous‐même mille fois; mais dans les jours dʹangoisse et dʹar<strong>de</strong>nte<br />

préoccupation où vous êtes, on peut oublier la fin, cʹest pourquoi je vous la rappelle.<br />

Nous parlons ici souvent <strong>de</strong> votre frère; jʹy ai beaucoup pensé, surtout à propos <strong>de</strong><br />

lʹévénement arrivé <strong>de</strong>rnièrement dans votre famille. Lʹéloignement nʹamortit pas le coup,<br />

au contraire. Cʹest comme une pierre qui tombe; plus cʹest <strong>de</strong> haut, plus ru<strong>de</strong> est lʹatteinte.<br />

Continuez <strong>de</strong> nous informer <strong>de</strong> ce qui le concerne. Gavard et moi vous en saurons beau‐<br />

coup <strong>de</strong> gré. Ce pauvre Gavard il se trouva lʹautre jour par nous entre <strong>de</strong>ux feux. Au mo‐<br />

ment où lui arrivait votre lettre, je ne sais quelle circonstance mʹavait donné occasion <strong>de</strong><br />

lui écrire aussi, un peu <strong>de</strong> jalousie, je crois, quʹil avait montrée à propos <strong>de</strong> vous, et tandis<br />

que vos instances amicales le prenaient dʹun côté, les miennes le prenaient <strong>de</strong> lʹautre. Mais,<br />

je le crains, lʹheure <strong>de</strong> Dieu nʹa pas encore sonné pour lui. Son amour du vague va toujours<br />

croissant. Son dogme cʹest la négation, son culte, cʹest lʹattente. Il en vient à croire quʹil<br />

porte en lui quelque gran<strong>de</strong> vérité qui doit éclore un jour. Il <strong>de</strong>man<strong>de</strong> grâce et respect pour<br />

sa gestation, et lʹautre jour, dʹune voix toute émue, il me suppliait <strong>de</strong> nʹy pas toucher. Pau‐<br />

vre ami qui prend un vain nuage flottant vaguement à lʹhorizon pour le bord sacré <strong>de</strong> la<br />

Patrie. Mon Dieu! que nos efforts humains sont faibles; la foi remue les montagnes, mais<br />

tout absolument nous est montagne! Et si la main <strong>de</strong> Dieu ne pousse <strong>avec</strong> nous, la monta‐<br />

gne ne bouge!<br />

Vous avez encore un autre ami, mon cher Victor, qui non seulement nʹavance pas,<br />

mais recule dʹune façon effrayante, cʹest Sainte‐Beuve. Sa collaboration au National le tue<br />

<strong>de</strong> toute façon. Il fait maintenant profession ouverte <strong>de</strong> rationalisme, et ce serait pis encore,<br />

si lʹon en croyait un article sur Casanova 44 du 1 er jour du mois, où il affiche une incroyable<br />

légèreté en morale, concédant à grand‐peine la liberté <strong>de</strong>s actes humains. Le n° du 8<br />

contient un autre travail sur les Pèlerins polonais qui nʹest guère moins malheureux. Jʹatten‐<br />

dais quʹil nous parlerait <strong>de</strong> Pellico, point. Il a laissé ce soin à je ne sais quel plat écrivain<br />

44 Casanova, (1725-1789), aventurier italien, célèbre pour ses Mémoires.<br />

37


qui a si bien défiguré son sujet quʹil nʹen reste rien. Je dénonce tout cela à votre tendre af‐<br />

fection pour lui. Il glisse vraiment. Retenez‐le, si vous pouvez.<br />

Quelques jeunes catholiques, M. Ozanam 45 en tête, viennent <strong>de</strong> réaliser une bonne<br />

et chrétienne pensée. Ils ont fait une traduction <strong>de</strong> Pellico qui sʹimprime et sera donnée à<br />

très bas prix (30 sols au plus). On en veut inon<strong>de</strong>r, sʹil se peut, notre France, et vous pense‐<br />

rez comme moi, sans doute, que meilleure semence ne saurait y<br />

être jetée. Jʹai songé que vous pourriez ai<strong>de</strong>r aussi à l ʹœuvre, en<br />

en recevant un dépôt, lʹannonçant dans votre journal 46 et partout<br />

où vous pourrez pour le répandre. Cela se peut‐il? Jʹavais fait<br />

sur ce livre un petit travail <strong>de</strong>stiné à votre journal; mais il a pris<br />

couleur si tranchée <strong>de</strong> mes sentiments catholiques quʹil a fallu y<br />

renoncer. Il est dʹailleurs beaucoup trop long. Je ne sais ce quʹil<br />

<strong>de</strong>viendra. M. Gavard qui ne doute <strong>de</strong> rien, mʹa fait lʹenvoyer,<br />

dans un moment dʹétour<strong>de</strong>rie, à la Revue Européenne 47 Je vous<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>rais pardon <strong>de</strong> tant dʹorgueil, si je nʹavais dʹavance été<br />

très indifférent à un refus prévu; on ne mʹa fait aucune réponse, je trouve quʹon a bien fait.<br />

Adieu, mon ami, écrivez‐moi quand vous pourrez. M. Gerbet est ici. Je nʹai pu réus‐<br />

sir à le voir encore. M. <strong>de</strong> Montalembert est <strong>avec</strong> vous, je pense, à cette heure. Il me dit<br />

avant son départ quʹil reviendrait par Angers, ajoutant <strong>avec</strong> insistance itérative quʹil re‐<br />

gardait comme un bonheur <strong>de</strong> vous y voir. M. Lacordaire a prêché au Collège Stanislas le<br />

jour <strong>de</strong> S t Pierre sur lʹÉglise; cʹest la plus gran<strong>de</strong> et la plus haute chose que jʹaie jamais en‐<br />

tendue. Merci du souvenir quʹà double reprise vous donnez à ma mère. Merci <strong>de</strong> vos<br />

vœux à ce sujet. Ils me vont droit au cœur et par la voie dʹune affection bien tendre, bien<br />

pure, je lʹespère. Adieu encore. Pardon pour cette lettre extravagante. Je ne le ferai plus.<br />

Jʹai <strong>de</strong>puis hier Lʹhomme <strong>de</strong> désir.<br />

Souvenir et respect, vous savez: à vous, tout ce que<br />

vous voudrez.<br />

<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong><br />

20 à M. Pavie<br />

Savoir goûter le bonheur que Dieu et quʹIl sanctifie. Ne pas précipiter le<br />

mariage. Projet <strong>de</strong> voyage à lʹétranger pour V. Pavie qui tourne court par<br />

lʹindécision <strong>de</strong> Gavard. Petite chronique dʹouvrages littéraires ou religieux qui<br />

viennent <strong>de</strong> paraître. MLP. fait la connaissance <strong>de</strong> Bailly. Il relève quelques<br />

indices <strong>de</strong> reprise <strong>de</strong> la foi catholique.<br />

Mardi 20 août 1833<br />

Vous acceptez le bonheur <strong>avec</strong> gran<strong>de</strong> défiance, mon<br />

cher Victor, et je ne vous blâme pas. Vous craignez les<br />

45<br />

C'est en fréquentant le salon littéraire <strong>de</strong> Montalembert que MLP. avait fait la connaissance <strong>de</strong> Frédéric Ozanam (1813-1853).<br />

Jeune étudiant en droit <strong>de</strong> 20 ans, Ozanam venait <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>r, le 23 avril, <strong>avec</strong> cinq <strong>de</strong> ses amis, la Conférence <strong>de</strong> Charité, sous l'impulsion<br />

d'Emmanuel Bailly et <strong>de</strong> la Sœur Rosalie Rendu, Fille <strong>de</strong> la Charité. Le 4 février 1834, la Conférence prendra le nom <strong>de</strong><br />

Conférence <strong>de</strong> Saint-Vincent-<strong>de</strong>-Paul. La seule lettre connue <strong>de</strong> MLP. à Ozanam est du 11avril 1838 (cf. infra, lettre 75-1).<br />

46<br />

Dès son retour à Angers en 1832, Victor Pavie avait fondé, sur le modèle du cercle littéraire le "Cénacle" animé par V. Hugo, son<br />

propre cénacle. De ce cénacle, sortit La Gerbe, où se publieront chaque année la prose et les vers <strong>de</strong> jeunes écrivains en herbe.<br />

47 Parue <strong>de</strong> 1831 à 1834, elle diffusait les idées <strong>de</strong> Lamennais. Elle s'imprimait chez Emmanuel Bailly.<br />

38


etours dʹune espérance trop facilement accueillie et vous faites bien; puis, vous aviez<br />

peur, avouez‐le, que je ne prenne trop en joie les choses que vous mʹalliez dire; vous avez<br />

donc comprimé tous les sentiments qui vous gonflaient le cœur en laissant à peine exhaler,<br />

à longues haleines, quelques bouffées légères; cʹétait assez, allez, et craintes et joies, jʹai<br />

tout <strong>de</strong>viné par là. Nʹai‐je pas toujours dʹailleurs la main sur votre cœur et ses battements<br />

précipités ne me disaient‐ils pas les luttes qui sʹy passaient. Ne craignez pas, cher ami, je<br />

nʹirai pas trop vite, je ne crierai pas victoire et triomphe avant lʹheure. Oh! je me sentirais<br />

heureux pourtant à déposer <strong>avec</strong> vous, pour un instant seulement, rien quʹun instant,<br />

toute crainte pour lʹavenir; à vous voir confiant vous‐même, vous noyer dans le bonheur et<br />

savourer <strong>avec</strong> plénitu<strong>de</strong> toutes les espérances infinies que peuvent laisser les mille choses<br />

que vous me racontez, les mille pensées entassées dans ces quelques heures, les mille sen‐<br />

timents quʹelles ont dû voir naître! Sʹil est vrai que le bonheur nʹest guère pour nous ici que<br />

dans ces aspirations ar<strong>de</strong>ntes vers tout ce qui lui ressemble, où sera donc le vôtre, mon<br />

ami, si vous vous refusez constamment à ces courts repos, toujours attendant, toujours dé‐<br />

sirant? Pas encore, et toujours traversant les plus belles heures <strong>de</strong> votre vie, courant à dʹau‐<br />

tres que vous outrepasserez encore? Oh! oui, ici jʹaurais voulu une halte pour vous, un peu<br />

<strong>de</strong> repos et <strong>de</strong> fraîcheur, sauf à reprendre après lʹâpre et dur chemin, les courses haletantes<br />

dans le désert brûlant. Dieu ne nous punit pas <strong>de</strong> notre bonheur, quand nous le sanctifions<br />

en lui, quand nous lʹacceptons comme une consolation, une grâce, comme un moyen dʹar‐<br />

river à lui. On peut, en le mettant <strong>de</strong> moitié dans sa joie, sʹy abandonner pleinement, en<br />

toute sécurité et confiance, sans peur pour le len<strong>de</strong>main, car lui encore en sera la mesure et<br />

si elle est dʹamertume et <strong>de</strong> tristesse il ne refusera pas la part que nous lui offrirons. Je le<br />

sens, il est bien facile dans le calme où je suis <strong>de</strong> parler ainsi et je nʹai gar<strong>de</strong> <strong>de</strong> donner ex‐<br />

tension trop gran<strong>de</strong> à mes paroles. Je sais très bien quʹil est telles épreuves dans notre vie<br />

qui nʹadmettent ni repos, ni réflexions, où lʹon roule emporté dans un tourbillon irrésisti‐<br />

ble, nʹentendant plus, ne voyant plus, tendant seulement <strong>de</strong> toutes les puissances vers un<br />

but, vers une fin. Oui, cʹest ainsi quʹest lʹamour et ceux quʹeffraie le tourbillon, qui nʹosent<br />

sʹy lancer, qui veulent prendre une voie moins périlleuse, ceux‐là nʹarrivent jamais,<br />

lʹamour nʹest pas fait pour eux; mais encore faut‐il respirer et crier parfois: Mon Dieu! Or,<br />

pour vous, mon bien cher ami, il nʹexiste ni halte, ni trêve, partout et pour tout, vous vous<br />

jetez au tourbillon, vous ne marchez pas, vous courez toujours. Et combien <strong>de</strong> temps, pen‐<br />

sez‐vous que lʹon puisse aller ainsi, tendu jusquʹà rompre, lancé jusquʹà prendre flamme!<br />

Je voudrais donc, mon ami, quʹun peu <strong>de</strong> cette admirable force revînt sur vous‐même,<br />

pour y porter, par une volonté énergique, un peu <strong>de</strong> repos et <strong>de</strong> calme, parfois même un<br />

peu dʹespoir confiant et <strong>de</strong> tout abandon.<br />

Pourquoi, par exemple, cet effroi effaré <strong>de</strong>vant la distance quʹon mettrait entre vous<br />

et votre bonheur complet; laissez dire, laissez faire, laissez compter sur les doigts <strong>de</strong> la<br />

mère les années, que lʹhorizon reste sans limite pour elle et pour sa fille qui, si jeune en‐<br />

core, sʹeffraierait dʹun avenir plus précisé; puis, quand par votre docilité, votre soumission<br />

dʹenfant, vous aurez obtenu enfin admission, quʹil nʹy aura plus, contre vous si humble et<br />

si résigné, la défiance, à cet instant, dites‐moi, ne serez‐vous pas maître absolu et libre <strong>de</strong><br />

changer les lustres en années, les années en mois? A prendre la chose au pire, dʹaprès vos<br />

vœux mêmes, un délai quelque peu reculé paraîtrait réellement à votre bon père, à vos<br />

vrais amis un bonheur, un temps nécessaire dʹattente et dʹinitiation.<br />

39


Si je parle ainsi, mon bien‐aimé ami, ce nʹest pas, croyez‐le, que mon ar<strong>de</strong>nte sym‐<br />

pathie ne vole <strong>avec</strong> vous au but désiré. Ce nʹest pas que mon cœur reste calme et froid, pe‐<br />

sant à loisir le bien et le mal. Oh! non, vous le savez, moi qui longuement ici vous gron<strong>de</strong>,<br />

je lis tout dʹune haleine vos lettres, ne respirant quʹau bout. Chaque fois que vous souffrez,<br />

il me semble quʹil faut courir à vous et lʹimpossibilité matérielle arrête à peine ma volonté.<br />

Mais, mon ami, il y a encore en moi pour vous autre chose que <strong>de</strong> la sympathie, il y a une<br />

tendresse infinie qui veut votre bonheur au prix <strong>de</strong> tous les sacrifices et brise ou réprime<br />

tous les élans <strong>de</strong> la sympathie quand ils sʹéloignent <strong>de</strong> ce but, au lieu dʹy concourir. Voyez‐<br />

moi ainsi, mon ami, si vous voulez me voir en vérité et donnez quelque poids à mes paro‐<br />

les, car tout ce quʹil y a <strong>de</strong> meilleur en moi les inspire, <strong>de</strong> meilleur, oui car il nʹest point là<br />

<strong>de</strong> réserve, rien qui ne vous appartienne, rien qui ne vous soit donné.<br />

Jʹirai ce soir chez Gavard, je vous dirai au retour, si je puis, mieux que lui du moins,<br />

ce quʹil compte faire.<br />

Ce nʹest pas lʹaffection qui manque à Gavard pour vous suivre, ce nʹest pas non plus<br />

le désir, ce nʹest que la puissance <strong>de</strong> vouloir, puissance que je ne lui ai guère jamais vue et<br />

quʹil nʹeut peut‐être jamais. Que voulez‐vous? Cʹest étrange, mais il nous prouve que cela<br />

retranché <strong>de</strong> lʹhomme, lʹhomme est encore une riche et bonne créature. Puis, dʹailleurs,<br />

cʹest chez lui peut‐être une tendresse <strong>de</strong> cœur trop gran<strong>de</strong> qui le fait se lier <strong>avec</strong> tant<br />

dʹétreinte à tout ce qui lʹentoure que sʹen détacher est impossible. Dès lʹabord, quand je lui<br />

en parlai avant‐hier: oh! me dit‐il, jamais, je ne mʹen sens pas capable; puis votre lettre lue,<br />

cʹétait à elle quʹil était lié, il sʹécria: oh! oui, je le veux, oui, quinze jours cʹest arrêté; puis<br />

nous revenons près <strong>de</strong> sa femme qui feint <strong>de</strong> lʹencourager à partir, parce quʹau fond elle ne<br />

craint rien. Cʹétait alors bien autre chose et si vous aviez vu comme moi lʹimpossibilité<br />

énorme, infranchissable qui, tout à coup sʹest élevée entre votre projet et sa réalisation,<br />

vous auriez souri comme moi, comprenant lʹhomme jusquʹau fond et lui pardonnant aussi,<br />

car, en vérité, ce nʹest pas sa faute à lui; il donne tout ce quʹil a <strong>de</strong> vouloir, <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r plus<br />

serait mal et vous ne le ferez pas, mon ami. Je regrette sincèrement et lui aussi, que cela<br />

tourne ainsi. Je ne voudrais pas, moi, grand chose pour vous en pareil voyage. Je ne vous<br />

ferais pas suffisant contrepoids. A défaut <strong>de</strong> mieux pourtant, je serais déjà en route, scirent<br />

si ignoscere manes 48 , manes signifiant ici administration, ce qui est traduit moins librement<br />

quʹon ne le pourrait croire.<br />

La Suisse paraît calmée et vous pourriez reprendre votre premier <strong>de</strong>ssein, cela vous<br />

irait mieux, il me semble, dʹaller là tout à lʹaise, respirer lʹair que dʹaffleurer un coin <strong>de</strong><br />

lʹItalie. Après tout, pourtant, le Piémont, la Lombardie surtout peuvent bien être détachées<br />

du reste et vus en soi séparément. Gavard penche lui pour les Pyrénées, donneurs dʹavis<br />

que nous sommes, nʹayant rien <strong>de</strong> mieux à donner, mais vous, comme lʹhomme à lʹâne:<br />

nʹen ferai quʹà ma tête, et nous dʹajouter après: il le fit et fit bien.<br />

Tout cela, mon ami, est écrit en désespoir <strong>de</strong> ce que mes trois pages se sont trouvées<br />

inondées, je ne sais <strong>avec</strong> quoi, et que nʹayant plus place en suffisance pour rien mener à<br />

fin, autant vaut ne rien commencer. Nous avons ici M. Gerbet.<br />

Lisez Lelia 49 , beaucoup <strong>de</strong> mal, beaucoup <strong>de</strong> bien; il y a là et dans tout ce qui paraît<br />

aujourdʹhui un insupportable mélange <strong>de</strong>s choses saintes aux profanes. Le mysticisme en‐<br />

48 S'il avait fallu, MLP. aurait su se faire excuser, par son administration, pour partir en voyage <strong>avec</strong> son ami Pavie.<br />

49 Roman (1833) <strong>de</strong> l'écrivain Aurore Dupin, dite George Sand (1804-1876), qui bouscule quelque peu la morale et les préjugés so-<br />

ciaux <strong>de</strong> l'époque.<br />

40


vahit le roman; bientôt ce sera la scène. Nous aurons <strong>de</strong>s Mystères 50 , moins la foi dans lʹau‐<br />

teur, lʹacteur et lʹauditoire. Cela mʹinspire une singulière répugnance, mais lʹépreuve est<br />

inévitable. Un filon découvert, on lʹépuise.<br />

Jʹai remis votre journal au Cabinet <strong>de</strong> Lecture. Il paraît que vous eussiez dû déclarer<br />

à la poste que cʹétait un imprimé: la voleuse mʹa fait payer dix‐huit sous (note pour lʹave‐<br />

nir seulement, je nʹai pas besoin <strong>de</strong> vous le dire, et <strong>de</strong> simple avertissement). Mon petit<br />

travail sur Pellico parait perdu. Si la Revue le<br />

retrouve, je vous lʹenverrai, mon ami. On mʹa<br />

<strong>de</strong>mandé un bulletin dʹannonces pour cette<br />

même revue, <strong>de</strong>s poésies dʹun jeune breton un<br />

peu connu <strong>de</strong> vous Ed. Turquety: Amour et foi.<br />

Cela sera au n° dʹaoût, sauf coupures peut‐être et<br />

ajustement.<br />

Jʹai fait la connaissance <strong>de</strong> M.<br />

Bailly 51 , je mʹen applaudis, comme bien vous le<br />

pensez. Il confie la partie littéraire et<br />

philosophique du journal quʹil dirige, la Tribune<br />

Catholique, à quelques jeunes gens et le<br />

produit <strong>de</strong>s articles faits par eux est versé dans une<br />

caisse pour aumônes que les jeunes gens eux‐<br />

mêmes vont porter à <strong>de</strong> pauvres familles, cʹest une généreuse et pieuse pensée. Jʹaurai la<br />

joie dʹy entrer un peu pour ma part. Il y a en ce moment ici un grand mouvement <strong>de</strong> chari‐<br />

té et <strong>de</strong> foi, mais tout cela dans la sphère isolée <strong>de</strong> lʹhumilité, échappe au mon<strong>de</strong> indiffé‐<br />

rent. Je me trompe bien, ou <strong>de</strong> ces catacombes nouvelles sortira encore une lumière pour le<br />

mon<strong>de</strong>; il nʹimporte, du reste, quelle forme aura le résultat, mais une foule <strong>de</strong> recueils reli‐<br />

gieux qui sʹimpriment ici maintenant à profusion et vont <strong>de</strong> tous côtés porter lʹinstruction<br />

à tous les <strong>de</strong>grés, et dans la mesure <strong>de</strong> toutes les intelligences, révèlent un besoin qui jus‐<br />

quʹici sommeillait ou se montrait bien moins impérieux. Les libraires disent quʹils nʹont<br />

pas souvenir que <strong>de</strong> longues années un livre ait été vendu autant que Pellico. On en fait <strong>de</strong><br />

tous côtés <strong>de</strong>s éditions nouvelles. (La nôtre nʹavance guère.) Dʹun autre côté, M. Gerbet<br />

mʹa donné récemment <strong>de</strong>s détails bien intéressants sur le mouvement dʹascension du ca‐<br />

tholicisme en Angleterre; il mʹa en particulier rapporté un entretien <strong>de</strong> M. Rio, ami <strong>de</strong> M.<br />

<strong>de</strong> Lamennais et maintenant compagnon <strong>de</strong> voyage <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Montalembert <strong>avec</strong> plusieurs<br />

professeurs <strong>de</strong> lʹUniversité <strong>de</strong> Cambridge dʹoù on peut tirer les plus belles espérances. Si<br />

ces détails ne vous ont pas été communiqués, dites‐le, vous les aurez dans ma prochaine<br />

lettre. Jʹai vu récemment <strong>de</strong>s lettres sur les Missions dʹAmérique; elles ont aussi <strong>de</strong> bien<br />

heureux résultats; enfin on prépare ici <strong>de</strong>s Missions pour lʹAfrique qui nʹen avait pas en‐<br />

core.<br />

Jʹavais tracé sur mon papier la ligne <strong>de</strong> nec plus ultra pour laisser place à lʹadresse,<br />

elle nʹa pas été respectée. Je ne sais plus comment faire. Je ne sais pas comme vous dire<br />

50 MLP. fait ici référence au genre dramatique médiéval d'inspiration religieuse qui mettait en scène la Nativité, la Passion, la Résur-<br />

rection et <strong>de</strong>s scènes <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong>s saints.<br />

51 Emmanuel Bailly (1793-1861). Formé à l'école <strong>de</strong> la charité au sein <strong>de</strong>s nombreuses sociétés (S. <strong>de</strong>s Bonnes Oeuvres, <strong>de</strong>s Bonnes<br />

Etu<strong>de</strong>s, <strong>de</strong>s Amis <strong>de</strong> l'Enfance etc.) suscitées, au len<strong>de</strong>main <strong>de</strong> la Révolution Française, par la fameuse Congrégation, il offrit, le<br />

23 avril 1833, à Ozanam et à ses amis étudiants, les bureaux où il imprimait son journal, la Tribune Catholique, rue St-Sulpice. Il<br />

accepta <strong>de</strong> prési<strong>de</strong>r les réunions <strong>de</strong> la Conférence <strong>de</strong> Charité, la future Société <strong>de</strong> Saint-Vincent-<strong>de</strong>-Paul.<br />

41


eaucoup en peu <strong>de</strong> mots. Jʹessaierai. Adieu, mon ami, à bientôt une lettre <strong>de</strong> vous. Nous<br />

avons eu, je dis nous, une lettre <strong>de</strong> Théodore, Gavard vous lʹa dit sans doute, bien bonne,<br />

bien jeune et aimable lettre. Mille choses tendres et respectueuses à votre bon père, il me<br />

semble toujours que je suis <strong>avec</strong> vous <strong>de</strong>ux et que Dieu est au milieu <strong>de</strong> nous. Amen! Jʹau‐<br />

rai bien à répondre sur la date <strong>de</strong> votre <strong>de</strong>rnière lettre, mais nous nous entendons, cʹest as‐<br />

sez répondre et puis en voilà bien long. Adieu, ami.<br />

<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong><br />

Le boulevard <strong>de</strong>s Italiens, aquarelle, Thomas Boys, 1833<br />

21 à M. Pavie<br />

Atteint du choléra, MLP. a frôlé la mort. Lʹépreuve est une occasion <strong>de</strong> progrès spirituel. La situation matrimoniale<br />

<strong>de</strong> V. Pavie toujours incertaine.<br />

16 novembre 1833<br />

Pauvre ami, à vous donc aussi <strong>de</strong>s souffrances, et Dieu le sait, bien autrement cui‐<br />

santes que les miennes. Les miennes étaient près <strong>de</strong> la mort, les vôtres doublent la puis‐<br />

sance <strong>de</strong> votre vie mais pour doubler aussi la peine. Puisque vous le voulez, cher ami, et<br />

aussi pour détourner un instant votre attention, je vous dirai quʹil a plu au Ciel, comme<br />

vous lʹa dit Gavard, <strong>de</strong> mʹenvoyer une épreuve un peu plus ru<strong>de</strong> que d’ordinaire. Une at‐<br />

teinte assez violente <strong>de</strong> choléra a été le commencement <strong>de</strong> ma maladie et, pendant plu‐<br />

sieurs jours <strong>de</strong>s acci<strong>de</strong>nts si effrayants mʹont assailli que bien <strong>de</strong>s fois jʹai attendu lʹheure<br />

<strong>de</strong>rnière; un jour surtout, jʹen ai la ferme certitu<strong>de</strong>, la mort était à la tâche. Je sentais son<br />

travail en moi, les liens les plus intimes étaient brisés un à un. Oh! quʹà ce moment la vue<br />

dʹun prêtre, quʹon était allé chercher en hâte, me fit <strong>de</strong> bien, que Dieu fut bon et tendre<br />

pour moi; sans lui, sans mon titre <strong>de</strong> chrétien je nʹeusse jamais supporté cette terrible an‐<br />

goisse; et <strong>de</strong>puis encore, durant les semaines qui ont suivi, le corps épuisé, lʹesprit abattu,<br />

42


terrifié, poursuivi <strong>de</strong> terreurs, <strong>de</strong> faiblesses nerveuses, dans un profond découragement,<br />

effrayé dès quʹun moment jʹétais seul, comme un enfant dans les ténèbres, mon seul appui<br />

encore, ma seule paix était en Dieu. Je pleurais, je gémissais sous sa main et je me relevais<br />

moins triste, moins découragé. Aujourdʹhui, enfin, je suis loin <strong>de</strong> toute rechute et <strong>de</strong> tout<br />

danger, mais je traîne une convalescence triste et lente. Je suis faible <strong>de</strong> corps et mes fa‐<br />

cultés restent encore tellement ébranlées que tout travail mʹest impossible; mais jʹai quel‐<br />

ques instants doux et consolants toutefois, quand Dieu me fait sentir au cœur quʹil me veut<br />

ainsi, que je lui peux plaire ainsi en langueur et soumission.<br />

Ce remè<strong>de</strong> éternel, dans toutes les phases <strong>de</strong> mon mal, puissiez‐vous aussi, mon<br />

bien‐aimé frère, le prendre, lʹaccepter aussi pour le vôtre. Hélas! je le dois dire, ma foi nʹest<br />

pas telle que la consolation divine recouvrît absolument la plaie, amortît la douleur. Oh,<br />

non, une ru<strong>de</strong> bien ru<strong>de</strong> souffrance restait, peut‐être en sera‐t‐il aussi pour vous, cher ami;<br />

pourtant, il y aura, croyez‐moi, dans le mal ainsi porté, quelque chose dʹineffable et si,<br />

lʹépreuve finie, vous êtes plus près <strong>de</strong> Dieu, faudra‐t‐il vous plaindre dʹune route parcou‐<br />

rue?<br />

Il y aurait dans une autre sphère, dans la réalité <strong>de</strong>s choses, bien dʹautres consola‐<br />

tions à vous offrir. Je ne sais si le manque <strong>de</strong> tous détails dans votre lettre en est cause,<br />

mais je nʹai pu y trouver cette assurance irrévocable dʹune rupture définitive. La situation<br />

est peut‐être bien moins mauvaise que vous ne le pensez: une mère près dʹune enfant ma‐<br />

la<strong>de</strong>, lʹeût‐elle déjà donnée, lʹarrache pour la reprendre en son sein, cʹest pour elle à ce<br />

moment le fruit quʹelle portait, le frêle nourrisson quʹelle allaitait jadis et vous voulez<br />

quʹelle le laisse prendre, que le mal fini, elle laisse, tant loin que ce soit, approcher son en‐<br />

fant: cʹest impossible. Sentez cela, cher ami. Ayez confiance dans le temps ou plutôt en<br />

Dieu qui ne fera pas sʹépandre sur terre ari<strong>de</strong> tous les trésors <strong>de</strong> votre cœur. Là est la pré‐<br />

cieuse semence qui doit perpétuer votre sainte et bonne famille et Dieu la gar<strong>de</strong>ra, croyez‐<br />

moi; puis, là‐haut, tous les ascendants éteints <strong>de</strong> cette famille, vos mères surtout, pour les‐<br />

quelles vous êtes si pieux, prient pour vous, veillent sur vous. Quoiquʹil arrive donc, tout<br />

tournera à bien. Ayez confiance seulement. Espérez en Dieu!<br />

Écrivez‐moi bientôt, jʹattendais <strong>de</strong>puis longtemps votre lettre. Adieu, cher ami, dans<br />

mes heures les plus pénibles votre souvenir mʹétait présent; puisse le mien, <strong>avec</strong> ma ten‐<br />

dre, ma bien tendre affection vous êtes aussi <strong>de</strong> quelque consolation.<br />

Jʹembrasse en fils votre père; vous, en frère.<br />

<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong><br />

22 à M. Pavie<br />

Consolations à son ami dans sa déconvenue sentimentale. Nouvelle orientation <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> MLP.[son mariage <strong>avec</strong><br />

M lle <strong>de</strong> Lafond]. Il suivra les conseils <strong>de</strong> ses amis angevins.<br />

Mercredi 1 er janvier 1834<br />

Je vous écrivais, mon ami, quand votre lettre mʹest venue. Je trouvai quelque joie,<br />

arrivant <strong>de</strong> la messe et après avoir donné à Dieu ma première heure <strong>de</strong> cette année, à vous<br />

donner à vous, ami, la secon<strong>de</strong>; mais ce qui était <strong>de</strong> don pur <strong>de</strong>vient <strong>de</strong>voir. Vous souffrez,<br />

vous souffrez beaucoup. Jʹentrevois confusément votre malheur, je mʹy livre tout entier.<br />

Vous voulez, cher Victor, que je vous parle <strong>de</strong> moi, je le ferai, ami. En autre moment jʹy<br />

eusse trouvé répugnance, mais à cette heure que pourrais‐je vous refuser. Laissez‐moi seu‐<br />

43


lement avant, ô mon frère, répondre à votre étreinte amicale. Laissez‐moi vous dire que je<br />

pleure <strong>avec</strong> vous, que mon âme émue déjà et pressentant votre peine y compatissait dʹune<br />

indicible tristesse et reçoit seulement ici le coup quʹelle attendait. Laissez‐moi vous répon‐<br />

dre, ami (on a besoin dʹêtre aimé quand on souffre) que nul nʹeût jamais dʹamis tendres,<br />

dévoués comme les vôtres, et sʹil plaît au Ciel que pareille joie refusée à tant dʹautres, ait<br />

été couronnée, ne fut‐ce quʹune heure, dʹune joie mille fois plus pure, plus enviable encore,<br />

il faut trouver votre sort bon, votre part bien large et, tout en pleurant, crier encore,<br />

comme vous lʹavez fait: Béni soit Dieu qui donne et reprend. Souvenez‐vous aussi quʹen<br />

reprenant, cʹest alors quʹil donne le plus. Vous avez rêvé, oh! bien heureux vous êtes.<br />

Combien, âmes pauvres et chétives, y sont impuissantes; combien, timi<strong>de</strong>s et découragées<br />

nʹosent accor<strong>de</strong>r à toute leur vie la création dʹun rêve! Vous ne savez pas comme je le sais,<br />

moi, tout ce quʹil y a dʹabattement et <strong>de</strong> tristesse à sentir en soi <strong>de</strong>s puissances accablantes<br />

qui nʹauront jamais dʹemploi; à voir, non dans les songes, mais près <strong>de</strong> soi au mon<strong>de</strong> réel,<br />

lʹâme qui est à vous, dont Dieu vous a dit le nom, qui eût pu vous comprendre, vous ré‐<br />

pondre et pourtant à qui on nʹoserait parler, pas même, je lʹai dit, penser ni rêver, que mille<br />

impossibilités séparent <strong>de</strong> vous à tout jamais et si invinciblement quʹaux heures les plus<br />

confiantes, jamais une lueur dʹespérance nʹapparût pour autoriser plus tard au moins un<br />

regret. De là, re<strong>de</strong>scendant aux possibilités, aux choses que Dieu permet, met sous notre<br />

main, nʹy pouvoir porter ni son cœur, ni sa vie, chercher seulement si <strong>de</strong> cette existence<br />

vi<strong>de</strong> quelquʹun voudrait encore et dire: prenez, cʹest bien peu, mais je ne saurais plus. Me<br />

reconnaissez‐vous en tout ceci, mon bien cher Victor, et nʹaimerez‐vous pas mieux votre<br />

part que la mienne. Ne revenez pas, mais jamais, ami, sur lʹimpossibilité dont je parle!<br />

Lʹaurais‐je tue jusquʹà lʹheure dʹaffliction où vous me remettez votre âme pour lʹassoupir et<br />

lui donner quelque relâche, où alors pour cela, tout au fond <strong>de</strong> moi‐même, je puise aux<br />

<strong>de</strong>rnières ressources <strong>de</strong> lʹintime; lʹaurais‐je tue pour vous, si elle osait arriver à lʹétat dʹes‐<br />

pérance ou même <strong>de</strong> rêve, si elle était quelque chose, sinon un chagrin sans cause, nul<br />

pour créer et pourtant formant obstacle et sʹinterposant parfois <strong>avec</strong> une incroyable autori‐<br />

té.<br />

Oh! sachez‐moi bien gré, mon cher Victor, <strong>de</strong> lʹeffort immense que moi aussi jʹai fait<br />

ici pour vous parler <strong>de</strong> moi, quand mon cœur nʹest plein que <strong>de</strong> vous, ne se sent vivre<br />

quʹen vous et en votre peine; tâchez encore <strong>de</strong> prendre assez sur vous pour mʹécrire <strong>de</strong><br />

nouveau et me dire un peu plus, jusque‐là du moins quʹil vous sera supportable. Je crains<br />

dʹavoir incomplètement rempli la tâche que vous imposiez à mon amitié. Vous me <strong>de</strong>‐<br />

mandiez peut‐être, ami, quelque révélation décisive sur mon sort qui, préoccupant vive‐<br />

ment votre tendre sollicitu<strong>de</strong> pour moi, vous arrachât une heure à vous‐même. Hélas! mon<br />

ami, que vous dire? Si cʹest la vie intérieure que vous voulez elle a été, <strong>de</strong>puis votre lettre,<br />

bien agitée, bien active; et, quelquʹeffort que jʹy fisse, aujourdʹhui je ne saurais vous le dire.<br />

Quant à la vie <strong>de</strong>s faits, elle est presque en arrêt. Jʹattends un peu <strong>de</strong> calme. Jʹattends que la<br />

chose trop longtemps contenue, la forme dʹidée sʹépure, se dégage et remonte au senti‐<br />

ment. Alors, ami, je le pense je vous obéirai. Mes pensées, du moins, sont absolument reti‐<br />

rées <strong>de</strong> lʹautre projet, le détachement était peu pénible, je vous lʹai dit précé<strong>de</strong>mment:<br />

cʹétait là pour moi une forme simple et résignée pour ma vie: dʹélan, en haut et directe‐<br />

ment, je lʹeusse donnée à Dieu, dʹélan encore, mais par une autre voie, vous avez entrevu<br />

comment mon âme lʹeût pu rêver; ces <strong>de</strong>ux chemins fermés, tout autre mʹira, je pense, et<br />

Dieu me sera en ai<strong>de</strong>. Savez‐vous, et je puis à vous tout dire, ce que je regrette ici le plus,<br />

44


cʹest la chasteté reconquise <strong>avec</strong> le secours incessant <strong>de</strong> Dieu qui mʹavait rendu à mes pro‐<br />

pres yeux quelque pureté, quelque poésie, la chasteté quʹil faudra perdre dans un amour<br />

non sanctifié dʹespérance, en un hymen sans fruit. Mais votre ami 52 (jʹentends celui qui est<br />

près <strong>de</strong> vous) y a bien songé sans doute et vous aussi assurément. Je passerai donc outre<br />

probablement à ce scrupule et suivrai votre avis. Tout cela dʹailleurs, toute réflexion, toute<br />

tristesse sʹeffaceront après la détermination prise. Je sais bien quʹune immense distance se<br />

trouve entre le moment où lʹon parle et celui qui précè<strong>de</strong>.<br />

Adieu, mon bien‐aimé frère, parlez‐moi, moi aussi jʹai besoin dʹentendre votre voix.<br />

Que nʹêtes‐vous donc ici, comme vous seriez aimé, comme votre peine serait partagée, vos<br />

pleurs essuyés. Oh! que mon souvenir soit consolant pour vous. Remerciez tendrement<br />

votre ami; portez lui respect et affection <strong>de</strong> ma part.<br />

<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong><br />

23 à M. Maillard 53<br />

Invitation à une soirée dansante.<br />

30 janvier 1834<br />

Ne prenez pas sʹil vous plaît, dʹengagement pour le soir du dimanche gras (9 fé‐<br />

vrier). Une marquise qui habite ma maison vous invite à une soirée dansante quʹelle donne<br />

ce jour‐là. Je désire bien que cela vous soit agréable; je trouverais ainsi quelque plaisir dans<br />

cette réunion à travers celui que vous auriez vous‐même.<br />

Adieu. A vous bien sincèrement.<br />

L. P.<br />

Ne me négligez pas. Victor vous gron<strong>de</strong>rait.<br />

23‐1 à M. Bailly<br />

Annonce <strong>de</strong> son mariage. Ne pas prévenir la Conférence.<br />

18 juin 1834<br />

Monsieur,<br />

Au milieu <strong>de</strong>s mille préoccupations et embarras d’un mariage tout près <strong>de</strong><br />

s’accomplir, je ne veux pas cependant négliger le soin <strong>de</strong> vous l’annoncer plus précisément<br />

que je ne l’avais fait jusqu’ici; je dois trop aux sentiments <strong>de</strong> bienveillance et d’intérêt que<br />

52<br />

L'ami intime <strong>de</strong> V. Pavie est l'abbé Jules Morel (1807-1890), doyen du petit Cénacle. Consulté par MLP., le jeune prêtre se prononça<br />

pour le mariage. "Combien il le regretta plus tard, écrit Maurice Maignen, lorsqu'il en connut bien les circonstances et les<br />

suites". Mais Dieu avait sans doute ses <strong>de</strong>sseins (…). Cf. VLP., I, p.241.<br />

53<br />

Premier billet <strong>de</strong> MLP. à ce jeune angevin, auquel il écrira souvent. (Les ASV. ont la copie <strong>de</strong> 17 lettres ou billets à M. Maillard).<br />

Ce jeune étudiant en droit, -<strong>de</strong> surcroît poète et excellent pianiste- a raconté à M. Maignen l'impression que lui laissa leur première<br />

rencontre: "Lorsqu'un matin, je vois apparaître sur le seuil <strong>de</strong> ma mo<strong>de</strong>ste chambre (…) une figure pleine <strong>de</strong> douceur et <strong>de</strong> bienveillance,<br />

aux traits fins et distingués (…), c'était Le <strong>Prevost</strong> (…). Depuis cette entrevue dont je me souviendrais toute ma vie, je<br />

l'ai fréquenté le plus que j'ai pu, je me suis attaché à lui comme à un être supérieur et bienfaisant, je l'ai suivi dans ses œuvres diverses,<br />

dans l'expansion <strong>de</strong> sa charité inépuisable (…). <strong>Lettre</strong> à Maurice Maignen, 8 juillet 1887, Positio, p582.<br />

45


vous m’avez accordés pour n’être pas assuré que vous prendriez part à un événement si<br />

grave pour moi, si décisif pour mon avenir. 54<br />

Vous avez pu apprendre, indirectement,<br />

je crois, que ce mariage s’écarte en quelques<br />

points <strong>de</strong>s convenances habituellement<br />

recherchées; toutefois, suivant les sentiments<br />

que vous‐même inspirez, je l’ai si sincèrement<br />

mis sous la protection <strong>de</strong> Dieu, j’ai si fort<br />

cherché sa volonté que je dois croire enfin<br />

l’avoir ainsi trouvée et prendre la confiance<br />

qu’Il ne nous abandonnera pas.<br />

Je l’espérerai surtout, Monsieur, si vous<br />

voulez bien m’ai<strong>de</strong>r <strong>de</strong> vos prières, si <strong>de</strong>main,<br />

en particulier, jour <strong>de</strong> mon mariage, vous avez la bonté <strong>de</strong> me recomman<strong>de</strong>r à Dieu.<br />

J’y puis compter, je le sais, et vous en remercie d’avance, vous priant <strong>de</strong> recevoir en<br />

même temps, Monsieur, l’assurance du respectueux attachement <strong>avec</strong> lequel je suis<br />

Votre dévoué serviteur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

54 La cérémonie est prévue pour le len<strong>de</strong>main, 19 juin, à la chapelle <strong>de</strong>s Missions Etrangères, 128, rue du Bac.<br />

46


P. S. Je désirerais que ce fait tout privé ne fut point annoncé particulièrement à la<br />

Conférence, je craindrais que mes rapports <strong>de</strong> fraternité <strong>avec</strong> ses membres n’en fussent, si‐<br />

non altérés, du moins changés; ils me sont doux ainsi, je désire les gar<strong>de</strong>r.<br />

Permettez‐moi votre obligeance pour avertir M. <strong>de</strong> Francheville à son arrivée qu’il<br />

doit s’adresser, pour l’admission dans une institution, d’une jeune fille dont il m’a parlé, à<br />

M lle Bidard, rue du Petit Bourbon, n° 2. Cette dame, qui est prévenue par moi, a le moyen<br />

<strong>de</strong> faire réussir cette affaire, et surtout une charité, qui entraîne tout à bien.<br />

Je serai 3 semaines absent; j’ai laissé une note à M. <strong>de</strong> Flers sur nos familles; il les vi‐<br />

sitera régulièrement.<br />

24 à M. Levassor 55<br />

Projet dʹune maison <strong>de</strong> famille pour jeunes gens. Association <strong>avec</strong> A. Levassor. Pru<strong>de</strong>nces <strong>de</strong> M. Levassor père.<br />

Oeuvres <strong>de</strong>s jeunes détenus. Nouvelles <strong>de</strong>s pauvres visités par son ami.<br />

Paris, 25 août 1834<br />

Ma réponse, mon cher ami, aura tardé plus encore que votre lettre et je ne sais si,<br />

comme vous, jʹen pourrais donner quelque bonne excuse; ce nʹest toutefois négligence ni<br />

paresse, mais bien mon insuffisance pour les occupations momentanées qui me sont ve‐<br />

nues, ou quelque peu <strong>de</strong> manque dʹhabileté dans la distribution <strong>de</strong> mes heures ou dans<br />

lʹordre <strong>de</strong> mes actions. Je vous sais dʹavance un fonds dʹindulgence pour <strong>de</strong> pareils griefs.<br />

Sans plus dʹapologie donc, je passe outre à nos affaires.<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> une satisfaction bien vive que le consentement <strong>de</strong> votre père, base<br />

essentielle et fondamentale <strong>de</strong> notre projet est obtenu, ou plutôt, ce qui est mieux encore,<br />

pleinement et librement accordé. Cette sécurité <strong>de</strong> conscience bien acquise, nous nʹaurons<br />

plus que <strong>de</strong>s obstacles secondaires, et notre volonté ferme y pourra je lʹespère aisément<br />

subvenir. Et dʹabord, mon ami, lʹobjection élevée par M. votre père au sujet <strong>de</strong> lʹassociation<br />

pure et simple entre nous, ne fera point difficulté. Les inquiétu<strong>de</strong>s quʹa manifestées ici M.<br />

Levassor ne mʹoffensent nullement, puisque je nʹai pas lʹhonneur dʹêtre connu <strong>de</strong> lui; dʹail‐<br />

leurs elles ne mʹeussent en aucun cas blessé, je les eusse, comme il est juste, rapportées à sa<br />

tendre sollicitu<strong>de</strong>, à sa pru<strong>de</strong>nce qui doit ai<strong>de</strong>r la vôtre en toute décision importante pour<br />

vous. Je donne donc ici plein consentement aux dispositions que vous me proposez et je<br />

désire que mon empressement à vous faire cette concession puisse paraître à M. votre père<br />

un gage dʹentière sécurité.<br />

Toutefois, mon ami, me permettez‐vous <strong>de</strong> vous faire à ce sujet quelques observa‐<br />

tions en les abandonnant dʹailleurs à votre libre décision. Je vous ai promis que tout ce qui<br />

serait pour moi dʹintérêt personnel serait vite sacrifié et ne saurait faire ombre dʹobstacle<br />

pour le succès <strong>de</strong> notre <strong>de</strong>ssein; il en sera ainsi, je vous le proteste <strong>de</strong> nouveau, et cʹest uni‐<br />

quement dans lʹintérêt <strong>de</strong> notre œuvre elle‐même que jʹinsiste un peu à cette occasion.<br />

Pensez‐vous, mon ami, que le nouvel arrangement proposé par vous ne détruira pas<br />

lʹéquilibre, lʹharmonie désirable dʹune entière égalité entre nous? Croyez‐vous quʹil ne<br />

créera pas supériorité dʹune part, subordination <strong>de</strong> lʹautre? En ce cas, êtes‐vous bien sûr <strong>de</strong><br />

55 Louis-Adolphe Levassor (1880-1899). Jeune avocat, il était entré à la Conférence <strong>de</strong> charité dès novembre 1833, grâce à son ami<br />

Le <strong>Prevost</strong>, lequel venait d'y entrer peu <strong>de</strong> temps auparavant. Après être passé au séminaire <strong>de</strong> Chartres et à celui <strong>de</strong> St-Sulpice, à<br />

Paris, il sera ordonné prêtre le 19 septembre 1840, par Mgr Clausel <strong>de</strong> Montals. Il exercera son ministère à Chartres, où il sera curé<br />

<strong>de</strong> St-Aignan. MLP. écrira souvent à cet ami intime. (aux ASV, copie <strong>de</strong> 60 lettres).<br />

47


ma complète abnégation? Suffira‐t‐elle pour soutenir mon ar<strong>de</strong>ur dans une œuvre quʹen<br />

moi‐même, je nʹaurai plus droit <strong>de</strong> dire mienne? Malgré ma confiance sans borne en votre<br />

délicatesse, en votre générosité même, ne craignez‐vous pas quʹen quelques heures mau‐<br />

vaises cette pensée décourageante ne se glisse en moi: ʺici nulle autorité directe, nul droit<br />

pour toi, <strong>de</strong>main tu pourrais trouver porte close et ce serait bien, ton foyer nʹest pas làʺ.<br />

Gar<strong>de</strong>z‐vous <strong>de</strong> croire, mon ami, que ces réflexions ten<strong>de</strong>nt à vous faire changer<br />

dʹavis; nullement, je désire seulement y tourner un instant votre attention; si vous êtes as‐<br />

sez sûr <strong>de</strong> moi pour quʹelles ne vous préoccupent pas je suis trop fier <strong>de</strong> votre confiance<br />

pour mʹy arrêter moi‐même; autrement si vous pensiez quʹaprès tout il ne faut point trop<br />

présumer <strong>de</strong> ses forces ni <strong>de</strong> celles <strong>de</strong>s autres, sans changer en rien au fond votre proposi‐<br />

tion, peut‐être serait‐il possible que par quelques paroles verbales ou écrites, mais sans<br />

nulle valeur légale, nous puissions rétablir plus dʹéquilibre, créer entre nous quelque obli‐<br />

gation plus précise, moralement du moins et religieusement. Vous me direz à ce sujet vo‐<br />

tre avis définitif, puis il nʹen sera plus parlé.<br />

Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> dire que jʹai vu M. Dufour 56 ; dans une première visite, je le<br />

trouvai absent; jʹy suis retourné et nous avons conféré quelque temps ensemble. Il paraît<br />

absolument dans la même disposition où vous lʹavez vous‐même trouvé, lʹavis <strong>de</strong> son<br />

évêque <strong>de</strong>vait seul régler définitivement sa détermination, quant au moment précis <strong>de</strong> sa<br />

retraite, mais lʹannée qui va commencer en serait, a‐t‐il dit le terme le plus éloigné dans<br />

tout état <strong>de</strong> choses. Je ne dois pas vous dissimuler que cette année, au moins, lui paraissait<br />

désirable pour ses dispositions <strong>de</strong> départ, cela serait subordonné cependant, je lʹentrevois,<br />

aux offres quʹon lui ferait pour un emploi plus ou moins prochain dans son diocèse. Il doit<br />

partir <strong>de</strong>main; dans peu, sʹil tient sa promesse, il <strong>de</strong>vra mʹécrire.<br />

Je nʹomettrai pas <strong>de</strong> vous communiquer poste pour poste sa lettre, afin <strong>de</strong> concerter<br />

<strong>avec</strong> vous la réponse. Son retour ici est fixé au commencement dʹoctobre ou même fin sep‐<br />

tembre. Il repartirait pour visiter quelques unes <strong>de</strong>s familles qui lui confient leurs fils. Il<br />

nʹa pas paru croire que mon ai<strong>de</strong> lui fût nécessaire en son absence; le répétiteur <strong>de</strong> droit<br />

actuel continue provisoirement <strong>de</strong> veiller sur sa maison.<br />

Quant au bail, il a objecté nombre <strong>de</strong> difficultés dans son intérêt et dans le nôtre<br />

pour le prolonger durant 3 ans. Jʹai insisté toutefois, le priant <strong>de</strong> son<strong>de</strong>r au moins le terrain<br />

et <strong>de</strong> sʹassurer précisément quʹil y aurait impossibilité ou désavantage grave à lui donner<br />

une durée moins longue. Je ne sais ce quʹil aura fait et si la promesse que jʹavais pour cela<br />

obtenue <strong>de</strong> lui aura été suivie. Je vous mets toutes ces choses, mon ami, bien sommaire‐<br />

ment et fort en hâte, jʹy reviendrai, le temps et lʹespace me manquent à la fois.<br />

56 L'abbé Dufour est directeur d'une institution <strong>de</strong> jeunes gens que MLP. envisage <strong>de</strong> reprendre.<br />

48


Rue Saint-Sulpice et rue <strong>de</strong>s Cannettes<br />

« …ce mo<strong>de</strong>ste restaurant <strong>de</strong> la rue <strong>de</strong>s Cannettes où nous prenions nos repas <strong>avec</strong> les futurs fondateurs <strong>de</strong> la Société<br />

<strong>de</strong> Saint‐Vincent <strong>de</strong> Paul : Ozanam, Lallier, et les autres » Chanoine Levassor au Père Leclerc, 12.11.1889.<br />

L’admission <strong>de</strong> M. Levassor se situe en novembre 1833. P. <strong>de</strong> La Perrière affirme aussi que MLP. fut admis<br />

en novembre. C’est sans doute à la fin <strong>de</strong> ce mois qu’il commence vraiment à travailler <strong>avec</strong> les jeunes confrères.<br />

Nous sommes installés près <strong>de</strong> nos jeunes prisonniers 57 , je vous entretiendrai dʹeux<br />

plus au long quand jʹaurai mieux vu ce quʹil en faut attendre, au premier abord, jʹen ferais<br />

volontiers autant <strong>de</strong> petits saints: pauvres enfants, tant sʹen faut! Un dʹeux, dʹexcellente<br />

famille, séparé <strong>de</strong>s autres, <strong>avec</strong> lequel je causai hier assez longuement, est enfermé pour<br />

avoir battu son père, il a 19 ans passés, près <strong>de</strong> 20. Cʹest le seul que je connaisse; par lui,<br />

jugez du reste. Plusieurs ne savent pas lire, on leur montre mal ou point, nous allons nous<br />

en occuper. Adieu, mon ami, jʹai visité vos pauvres protégées, tout le mon<strong>de</strong>, là, languit,<br />

vous êtes leur vie, la charité et la grâce y viennent par vous, revenez donc pour elles et<br />

aussi quelque peu pour votre ami dévoué en J.C.<br />

L. Le <strong>Prevost</strong>.<br />

57 Au cours <strong>de</strong> ses visites charitables, MLP. avait eu l'occasion <strong>de</strong> découvrir, près du Panthéon, rue <strong>de</strong>s Grès, aujourd'hui rue Cujas,<br />

une maison <strong>de</strong> correction pour jeunes gens. Il conçut le projet <strong>de</strong> soutenir et <strong>de</strong> catéchiser ces jeunes détenus. Grâce à l'intervention<br />

<strong>de</strong> son ami avocat Levassor, MLP. en obtint la permission le 8 juillet 1834. Avec Ozanam et d'autres confrères, MLP. commença<br />

l'œuvre en août 1834. Les visites se poursuivront jusqu'en 1836. A cette date, les détenus seront transférés à la prison <strong>de</strong> la Roquette,<br />

à l'autre extrémité <strong>de</strong> Paris. La Société <strong>de</strong> Saint-Vincent-<strong>de</strong>-Paul se tournera alors vers les Apprentis-orphelins.<br />

49


25 à M. Levassor<br />

Accord <strong>de</strong> M me Le <strong>Prevost</strong> pour lʹassociation projetée. Confi<strong>de</strong>nces sur les premiers mois <strong>de</strong> son mariage. Détails<br />

pratiques sur lʹorganisation <strong>de</strong> lʹœuvre future. Bien à faire à ces étudiants. Démarches charitables.<br />

Paris, ce 29 août 1834<br />

Je me pique dʹhonneur, mon ami, et pour aujourdʹhui du moins, vous nʹaurez pas à<br />

vous plaindre <strong>de</strong> ma négligence, si tant est quʹune première fois jʹai mérité ce reproche.<br />

Hier, à 9h. du soir, votre cousin mʹapportait votre lettre et ce matin me voilà vous répon‐<br />

dant; jʹeusse pu réclamer son obligeance pour vous remettre ma lettre, mais il était incer‐<br />

tain, sʹil ne serait pas déjà parti au moment où je la lui eusse envoyée; elle ira donc par la<br />

voie commune, ne lʹen traitez pas moins bien, je vous prie. Je réponds dʹabord, mon cher<br />

ami, au point le plus essentiel <strong>de</strong> votre lettre, à celui que M. votre père et vous, <strong>avec</strong> une<br />

délicatesse <strong>de</strong> conscience que jʹapprécie, avez désiré dʹéclaircir nettement, je veux dire lʹas‐<br />

sentiment <strong>de</strong> ma femme à notre projet. Je dois le faire remarquer en premier lieu, mon cher<br />

ami, votre tendre sympathie pour tout ce qui me touchait si vivement ne vous a pas per‐<br />

mis <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r, en ces rapports <strong>de</strong> confiance et dʹeffusion qui se sont établis entre nous, au<br />

sujet <strong>de</strong> mon intérieur, la froi<strong>de</strong> raison, le jugement calme quʹun étranger, par exemple, eût<br />

maintenu en lui; ainsi, quand jʹarrivais vers vous accablé par ma peine pour la verser en<br />

votre sein, ami dévoué, avant tout, vous avez bien plutôt songé à en prendre moitié, quʹà<br />

lʹanalyser rationnellement, à comparer ma situation <strong>avec</strong> dʹautres positions analogues, et à<br />

former <strong>de</strong> tout cela une prévision nette, une espérance précise au moins pour lʹavenir. Au‐<br />

trement, je le crois à présent que je suis un peu rassis moi‐même, vous eussiez pensé peut‐<br />

être que ces premiers troubles survenus au commencement <strong>de</strong> mon mariage étaient un ef‐<br />

fet presque inévitable <strong>de</strong> la position exceptionnelle quʹil comportait. Lʹharmonie et lʹintel‐<br />

ligence ne pouvaient, sans choc et sans froissement, sʹétablir entre gens que tant <strong>de</strong> dis‐<br />

proportion dʹâge, <strong>de</strong> nature, <strong>de</strong> goût séparait, mais après cette première épreuve, après ce<br />

premier heurt si douloureux, on a <strong>de</strong> part et dʹautre cette expérience, cette conviction: cʹest<br />

quʹà tant résister on se brise, cʹest quʹil faut cé<strong>de</strong>r plutôt, fléchir un peu et, quʹà la longue,<br />

on peut ainsi rendre sa vie plus facile et plus douce. Nous en sommes là chez nous et <strong>de</strong>‐<br />

puis les <strong>de</strong>rnières explications faites entre nous et qui, je pense, jetèrent quelque jour salu‐<br />

taire sur notre position, aucune affliction nouvelle nʹest venue nous troubler. Dieu aidant,<br />

je lʹespère, il en sera toujours ainsi, et nous aurons, sinon le bonheur que nous nʹavons ja‐<br />

mais espéré, du moins quelque repos et un peu <strong>de</strong> calme pour marcher dans le bien.<br />

Tout cela est bien long, mon ami, patience, jʹarrive au but. Dʹaprès cette nouvelle<br />

disposition, lʹassentiment <strong>de</strong> ma femme dont je nʹavais jamais douté, <strong>de</strong>venait la chose du<br />

mon<strong>de</strong> la plus simple aussi lʹa‐t‐elle donné, non seulement volontiers, mais <strong>avec</strong> joie et <strong>de</strong><br />

plein cœur. En <strong>de</strong>ux mots, voici comme je lui ai présenté la chose: ʺNotre position est au‐<br />

jourdʹhui, dans le mon<strong>de</strong>, honnête et supportable; nous avons quelque bien, vous vos tra‐<br />

vaux, moi mon emploi. Mais dans quelques années, le temps du repos sera venu pour<br />

vous, puis‐je compter assez sur les chances dʹavancement dans ma carrière pour subvenir<br />

seul aux charges <strong>de</strong> notre maison? Plus tard, si nous désirons lʹun et lʹautre nous retirer en‐<br />

tièrement, aurons‐nous accru suffisamment nos ressources pour nous assurer, même en<br />

province la situation qui vous convient? Il est à craindre que non. Or, une occasion se pré‐<br />

sente dʹoccuper utilement le temps dont je puis disposer, lʹactivité qui me tourmente au‐<br />

jourdʹhui, et dont je ne sais que faire, ne pensez‐vous pas quʹil faut saisir cette occasion?ʺ<br />

50


La réponse <strong>de</strong> toute femme sensée à pareille question ne pouvait être douteuse,<br />

aussi a‐t‐elle pleinement applaudi à notre projet et y a‐t‐elle donné entière adhésion. Pour<br />

ce qui la concerne personnellement, comme une entreprise du genre <strong>de</strong> la nôtre est étran‐<br />

gère à ses goûts, à ses habitu<strong>de</strong>s, incompatible <strong>avec</strong> les arts quʹelle tient à cultiver par <strong>de</strong>s‐<br />

sus tout, il est convenu quʹelle nʹinterviendra en aucune façon dans nos affaires, cette<br />

convention, qui, sans doute, est <strong>de</strong> votre goût est essentiellement aussi nécessaire pour<br />

elle. Seulement nous avons arrêté aussi que pour rendre mes communications <strong>avec</strong> elle<br />

habituelles et même <strong>de</strong> tous les jours, nous rapprocherions autant que possible sa <strong>de</strong>meure<br />

<strong>de</strong> lʹétablissement dirigé par nous. Ainsi, il nʹy aurait entre nous nulle séparation, nulle<br />

cause dʹétonnement pour le <strong>de</strong>hors, mais simple arrangement très habituel et très ordi‐<br />

naire entre époux pour lʹexercice respectif dʹoccupations différentes.<br />

Cette difficulté levée, je passe au reste, bien plus aisé encore à démêler, puisquʹil ne<br />

concerne que nous gens <strong>de</strong> facile accommo<strong>de</strong>ment. Vous désirez, mon ami, que je précise<br />

plus nettement ce que jʹentends par quelque obligation à créer entre nous. Voici ma pen‐<br />

sée. Nous allons, si notre projet sʹexécute, créer un établissement ou le réformer, ce qui est<br />

presque tout un. A cette œuvre nous mettrons notre intelligence, notre jeunesse, notre ac‐<br />

tivité, tout ce qui est en nous enfin, et, je lʹespère, nous aurons plein succès; mais si, dans<br />

<strong>de</strong>ux ou trois ans, grâce à nos efforts réunis, la maison est <strong>de</strong>venue selon nos vœux et plei‐<br />

nement florissante, vous semblerait‐il, mon ami, juste et bon <strong>de</strong> me dire: à cette heure tout<br />

va bien, je puis tout mener seul, adieu?<br />

La maison que nous prendrons est peu étendue et représente une valeur (je parle <strong>de</strong><br />

lʹétablissement) <strong>de</strong> 20.000f. à peine; si, dans six ans, grâce à nos efforts réunis, cette valeur<br />

sʹest considérablement accrue, vous semblerait‐il juste et bon que le fruit <strong>de</strong> nos travaux<br />

<strong>de</strong>meurât le fruit dʹun seul?<br />

Or, mon ami, votre titre <strong>de</strong> propriétaire unique vous donnerait ces droits qui, je le<br />

sais, dʹavance, vous répugneraient trop à exercer. Je <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rai donc que pour établir<br />

plus nettement notre position respective, vous reconnaissiez (mais je le répète, sur simple<br />

parole ou écriture sans valeur légale):‐1° Que notre association quoique non fondée sur<br />

une valeur matérielle <strong>de</strong> ma part, nʹen est pas moins réelle et ne <strong>de</strong>vra être rompue que<br />

fraternellement et à lʹamiable; ‐2° Que la plus‐value <strong>de</strong> lʹétablissement au moment <strong>de</strong> la<br />

rupture <strong>de</strong> lʹassociation ou <strong>de</strong> la cession <strong>de</strong> la maison, cette plus‐value, dis‐je, étant lʹœuvre<br />

<strong>de</strong> tous les <strong>de</strong>ux, serait aussi le profit <strong>de</strong> tous les <strong>de</strong>ux.<br />

Quant au mobilier, jʹinterviendrai dans le prix dʹacquisition pour ce que vous trou‐<br />

verez bon et sʹil sʹaccroît <strong>avec</strong> le temps, jʹy participerai proportionnellement. Du reste tout<br />

cela, mon ami, je le dis encore, tout ce qui est intérêt nʹest que misère, facile, on ne peut<br />

plus facile à arranger entre nous.<br />

Je songe <strong>de</strong> plus en plus <strong>avec</strong> satisfaction, à notre établissement futur, à voir plus<br />

nettement la chose, je me convaincs mieux encore quʹ<strong>avec</strong> <strong>de</strong> la bonne volonté il y a là<br />

beaucoup <strong>de</strong> bien à faire; cʹest vraiment un point critique que ce moment <strong>de</strong> transition<br />

pour les jeunes gens <strong>de</strong>s collèges, à lʹentière liberté et émancipation. Sʹemparer <strong>de</strong> ce mo‐<br />

ment pour les initier, autant quʹil se peut à la science du mon<strong>de</strong> et plus encore à la science<br />

dʹen haut, occuper leur intelligence, leur ar<strong>de</strong>ur, leur montrer un bon emploi <strong>de</strong> ces fa‐<br />

cultés dans lʹétu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la philosophie, <strong>de</strong> la littérature, <strong>de</strong>s arts, préparer toutes ces voies<br />

pour eux, leur ouvrir la vie, en un mot, leur en bien indiquer le vrai chemin; cʹest là une<br />

œuvre vraiment bonne, utile à la société, et selon le cœur <strong>de</strong> Dieu. Si nous en sommes di‐<br />

51


gnes, mon ami, cette œuvre sera notre lot, sinon, je lʹespère, nous le lʹentreprendrons pas.<br />

Je prie chaque jour pour cela <strong>avec</strong> vous.<br />

Jʹai voulu voir M. Gar<strong>de</strong>t, il est à la campagne et ne doit revenir que <strong>de</strong>main; à son<br />

retour je prendrai près <strong>de</strong> lui lʹinformation que vous désirez avoir. Sa jeune sœur, je pense,<br />

va être admise aux Oiseaux; les bonnes D lles Bidard sʹen occupent <strong>avec</strong> lʹactivité que vous<br />

leur connaissez pour tout ce qui est charité. Jʹemploierai, selon vos instructions, les fonds à<br />

moi remis et vous en rendrai compte. Adieu, mon cher ami, écrivez‐moi bientôt, jʹétais si<br />

fort accoutumé à vos visites que jʹai besoin <strong>de</strong> vos lettres pour mʹen tenir lieu.<br />

Puisque me voilà maintenant présenté à M. votre père, veuillez lui offrir mes senti‐<br />

ments bien respectueux; si <strong>de</strong>s relations plus intimes sʹétablissent comme je lʹespère, entre<br />

vous et moi, jʹy trouverai sans doute quelque occasion <strong>de</strong> rapprochement <strong>avec</strong> votre fa‐<br />

mille et jʹen serai vraiment bien flatté.<br />

Adieu, mon ami, à vous <strong>de</strong> cœur bien sincèrement en J‐C.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Recrutez chez vous <strong>de</strong>s jeunes gens dans la supposition dʹune création, nous les<br />

aurions toujours provisoirement, en cas contraire, chez M. Dufour, où vous seriez à même<br />

<strong>de</strong> les diriger, cela nous mettrait dʹailleurs en terrain un peu plus ferme pour traiter <strong>avec</strong><br />

lui, si nous pouvions gar<strong>de</strong>r lʹalternative dʹune fondation par nous mêmes.<br />

Il est dommage que peu <strong>de</strong> temps nous reste, cependant <strong>avec</strong> <strong>de</strong> lʹactivité, on pour‐<br />

rait, je pense, réunir dès cette année quelques sujets et préparer plus <strong>de</strong> moyens pour la<br />

suivante. Examinez et nous déci<strong>de</strong>rons. Je verrai M. Gar<strong>de</strong>t.<br />

26 à M. Levassor<br />

M me Levassor fait obstacle au projet dʹassociation. Lʹéducation quʹil faudrait donner à ces jeunes gens. Place <strong>de</strong>s<br />

institutions privées <strong>de</strong>puis la Révolution. Convictions chrétiennes <strong>de</strong> MLP.<br />

Paris, le 3 septembre 1834<br />

Les peines que vous éprouvez, mon très cher ami, me toucheraient vivement, lors<br />

même quʹelle ne mʹatteindraient pas aussi personnellement par quelque point, ma tendre<br />

et sincère amitié pour vous serait bien suffisante pour mʹy faire prendre part, votre lettre<br />

mʹa donc affligé et je vous écris sans retard pour que cette peine, bien mise en commun,<br />

sʹallège, sʹil se peut, pour lʹun et pour lʹautre. Du reste, quant au fond <strong>de</strong> la chose, je lʹai<br />

dʹavance si complètement abandonné à la volonté <strong>de</strong> Dieu que quelque solution qui ad‐<br />

vienne, je saurai, je lʹespère, mʹy résigner. Je <strong>de</strong>vrais peut‐être, mon cher ami, me borner à<br />

ces assurances <strong>de</strong> sympathies et <strong>de</strong> volonté conforme à la vôtre; vous conseiller dans la si‐<br />

tuation grave où vous êtes me semblerait du moins hasardé et peu pru<strong>de</strong>nt je me bornerai<br />

donc à examiner <strong>avec</strong> vous lʹobstacle que rencontre aujourdʹhui notre projet et les moyens<br />

quʹil pourrait y avoir chrétiennement <strong>de</strong> le faire cesser.<br />

Lʹextrême répugnance que manifeste Madame votre mère pour le genre dʹétablis‐<br />

sement que nous nous proposons dʹentreprendre me paraît tenir à ce quʹelle nʹa pas une<br />

idée assez précise <strong>de</strong> la nature <strong>de</strong> cet établissement, <strong>de</strong>s <strong>de</strong>voirs quʹil impose, <strong>de</strong> la situa‐<br />

tion quʹil donne dans la société, ni avant tout <strong>de</strong>s moyens et facilités quʹoffre Paris pour la<br />

direction dʹune pareille entreprise. Je ne mets pas en doute que suffisamment éclairée sur<br />

ces divers points Madame votre mère ne vous vît en toute sécurité et même <strong>avec</strong> joie sui‐<br />

52


vre la voie qui semblait sʹouvrir si naturellement <strong>de</strong>vant vous. Elle objecte la responsabili‐<br />

té, mais cette responsabilité est bien moindre que celle <strong>de</strong>s instituteurs, puisquʹil ne sʹagit<br />

pas ici dʹenfants, mais <strong>de</strong> jeunes gens ayant déjà force et raison presque suffisante pour se<br />

diriger. Le chef dʹétablissement chez nous nʹest pas père, il est ami, frère, il ne prescrit<br />

plus, mais conseille, un conseil ne donne point responsabilité, ou du moins nʹest une<br />

charge que pour la conscience. Il y a donc peu ici à démêler <strong>avec</strong> les hommes, on traite<br />

<strong>avec</strong> Dieu et le compte est plus facile. Un jeune homme mis sous nos yeux, malgré nos avis<br />

se dérange et sʹégare, mais sa famille en est par nous avertie et prend dès lors toute res‐<br />

ponsabilité, sʹil y en a. Nous ne promettons pas <strong>de</strong> tenir les jeunes gens constamment sous<br />

nos yeux, détenus et surveillés, nous promettons <strong>de</strong> les suivre du regard, autant quʹil se<br />

peut, dʹinformer leurs familles <strong>de</strong> la direction quʹils prennent, <strong>de</strong> leur assiduité et progrès<br />

dans lʹétu<strong>de</strong>, nous promettons affection et conseil; cela fait (et nous le ferions) notre tâche<br />

est remplie, nulle responsabilité ne nous reste. Quant à la maladie, nous ne reculerions ni<br />

vous ni moi <strong>de</strong>vant le <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> soigner un être souffrant, <strong>de</strong> lʹassister, <strong>de</strong> lʹencourager à<br />

lʹheure <strong>de</strong> la mort.<br />

La direction dʹun grand ménage effraie Madame votre mère. Cʹest quʹelle ignore<br />

peut‐être quelle immense différence offre Paris à cet égard sur la province, où il faut tout<br />

voir, tout indiquer, tout suivre, tout faire même au besoin, à tout mettre la main. Ici, rien<br />

<strong>de</strong> pareil, les gens <strong>de</strong> service sont dressés autrement, les facilités pour les productions et<br />

objets <strong>de</strong> consommation sont multipliées <strong>de</strong> telle sorte que tout va, tout marche, sinon<br />

seul, du moins <strong>avec</strong> une simple impulsion, une simple surveillance et direction. Ainsi, un<br />

ecclésiastique ici comme lʹabbé Dufour, par état, par goût, étranger à tout soin du ménage,<br />

mène sans difficulté, sans beaucoup <strong>de</strong> temps ni <strong>de</strong> soins, un intérieur qui effraierait 4 <strong>de</strong>s<br />

meilleurs ménagères <strong>de</strong> province. Mais, je le sais, tout cela se persua<strong>de</strong> difficilement, il le<br />

faut vérifier, il faut lʹavoir vu longtemps et en cent endroits et en cent positions différentes<br />

pour le croire, pour nʹen plus douter. Cʹest aussi vous le savez, une inquiétu<strong>de</strong> bien peu<br />

fondée que celle dʹêtre mis avant, désigné comme carliste et Jésuite. Qui s’occupe ici <strong>de</strong>s<br />

Institutions privées, à peine si, parmi les gens intéressés, lʹéminente et si religieuse maison<br />

<strong>de</strong> M. Poiloup 58 est connue; moi qui <strong>de</strong> tout temps, ai suivi les choses dʹinstructions, il y a<br />

trois mois à peine que je sais son existence. Qui, sous la Restauration, fut plus mêlé aux<br />

choses <strong>de</strong> parti, fut plus mis en avant que M. Bailly, directeur <strong>de</strong>s Bonnes Étu<strong>de</strong>s, âme <strong>de</strong>s<br />

Congrégations. Eh bien! M. Bailly a‐t‐il été inquiété après la Révolution? et nous étrangers<br />

à tout cela, faisant le bien selon nos forces, en quelque humble coin, nous serions signalés,<br />

tourmentés, je ne le saurai croire; et, pour dire vrai, en tous cas, je ne verrai là pour <strong>de</strong>s<br />

hommes, pour <strong>de</strong>s chrétiens, nullement une raison <strong>de</strong> reculer <strong>de</strong>vant une résolution bonne<br />

et prise <strong>de</strong>vant Dieu. Je nʹinsisterai pas sur les mille raisons que je pourrais ajouter, elles<br />

seraient superflues, car vous et moi avions déjà envisagé <strong>de</strong> près tout cela, nous avions vu,<br />

nous avions conversé <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s hommes chargés <strong>de</strong> pareils établissements, qui ne parais‐<br />

saient ni accablés, ni effrayés par la responsabilité, les chances mauvaises, les craintes <strong>de</strong><br />

suspicion; aussi la vraie difficulté nʹest pas en nous, ce nʹest pas nous qui <strong>de</strong>vons être<br />

convaincus, mais bien Madame votre mère, et, je lʹavoue, la convaincre me paraît difficile,<br />

parce que lʹesprit ne prend que peu <strong>de</strong> lumière à la fois, et quʹici sur tous ces points, il en<br />

58 L'abbé Poiloup dirigeait une institution religieuse qui s'installa à Vaugirard en 1830. L'établissement, repris par les Jésuites en<br />

1852, <strong>de</strong>viendra le fameux collège <strong>de</strong> Vaugirard, où le p. Olivaint, futur martyr <strong>de</strong> la Commune <strong>avec</strong> le p. Planchat, fut professeur<br />

et supérieur <strong>de</strong> 1857 à 1865.<br />

53


faudrait par masses, il en faudrait à flots. Que Madame Levassor se relâchât un peu, on<br />

pourrait lʹespérer, mais quʹelle cédât absolument dʹaprès ce que jʹentrevois, il nʹy faut pas<br />

compter. Quant à la décision à prendre définitivement, je pense, mon ami, comme vous<br />

quʹil faut prier beaucoup, ne pas froisser votre mère, lʹéclairer peu à peu, sʹil se peut, sinon<br />

abandonner absolument ce sujet dʹentretien. Madame Levassor, mʹavez‐vous dit, est fort<br />

pieuse, les ecclésiastiques qui lʹapprochent et en qui elle a confiance ne pourraient‐ils la<br />

conseiller utilement, réduire à leur juste valeur à ses yeux les objections quʹelle oppose,<br />

dépouiller enfin sa résistance <strong>de</strong> toute exaltation, <strong>de</strong> toute intervention dans cette résis‐<br />

tance <strong>de</strong>s causes secondaires, étrangères à la raison pure, à la tendresse chrétienne et éclai‐<br />

rés dʹune mère pour son fils. Jʹespère en ces moyens, jʹespère en Dieu surtout, prions‐le et<br />

comptons sur sa grâce. Voyez M. Lecomte 59 ou votre confesseur, le consentement <strong>de</strong> votre<br />

père, <strong>avec</strong> calme et rationnellement donné, me paraît dʹun grand poids.<br />

Adieu, votre ami dévoué.<br />

<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹai vu M. Gar<strong>de</strong>t, il compte toujours sur le jeune homme. Nous allons assez bien<br />

rue <strong>de</strong>s Grès.<br />

27 à M. Levassor<br />

M. Levassor abandonne le projet dʹassociation. Proposition dʹune place <strong>de</strong> greffier. Sʹils <strong>de</strong>vaient se séparer, rester<br />

unis en Jésus, lʹami commun. Espérance <strong>de</strong> voir fructifier lʹœuvre <strong>de</strong>s Jeunes détenus. Dames assistées par la<br />

Conférence.<br />

Paris, le 17 septembre 1834<br />

Je ne pourrais dire <strong>avec</strong> vérité, mon cher ami, que votre lettre ne mʹait donné quel‐<br />

que peu <strong>de</strong> chagrin. Jʹavais mis mes pensées, mes espérances dans ce projet et ce nʹest pas<br />

sans quelque désappointement que je vois dʹun souffle le château renversé; mais, je le<br />

peux dire aussi, je nʹavais désiré la réalisation <strong>de</strong> nos <strong>de</strong>sseins quʹautant quʹils seraient<br />

dans la volonté <strong>de</strong> Dieu et quʹils se concilieraient pleinement <strong>avec</strong> vos propres désirs, <strong>avec</strong><br />

vos <strong>de</strong>voirs, vos intérêts. Si tout cela et avant tout lʹappel <strong>de</strong> Dieu vous entraînent ailleurs,<br />

que sa volonté soit faite, suivez votre voie, mon ami, et soyez assuré que mes vœux bien<br />

ar<strong>de</strong>nts, ma bien vive sympathie vous y accompagneront constamment. Je nʹai point écrit à<br />

M. Dufour dont jʹignore lʹadresse. Jʹai fait <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r chez lui si une lettre nʹétait pas venue<br />

pour moi <strong>de</strong> sa part, mais je ne crois pas bon <strong>de</strong> la provoquer directement dans la plus<br />

quʹincertitu<strong>de</strong> où votre situation met désormais nos arrangements <strong>avec</strong> lui. Sʹil mʹécrit, se‐<br />

lon sa promesse, je concerterais <strong>avec</strong> vous la réponse, si au contraire, ce que je ne présume<br />

pas, son avis a changé, je pense quʹil vaut mieux lui laisser lʹinitiative <strong>de</strong> la rupture.<br />

M. Gar<strong>de</strong>t, venu ces jours‐ci chez moi où il ne mʹa pas rencontré, a laissé quelques<br />

lignes pour me prier <strong>de</strong> vous faire en son nom une communication. Un greffier attaché au<br />

Tribunal <strong>de</strong> 1 ère instance à Paris offre <strong>de</strong> lui faire gagner 600f. et au‐<strong>de</strong>là chaque année pour<br />

un très léger et bien facile travail; cependant M. Gar<strong>de</strong>t, décidé à ne sʹoccuper nullement et<br />

quelque peu que ce soit <strong>de</strong> pratique, va refuser cette proposition, mais il pense quʹelle<br />

pourrait vous agréer, en ce cas, il accepterait, sauf arrangement <strong>avec</strong> vous, pour le partage<br />

du travail, sʹil en peut prendre partie. Dans le cas où vos ouvertures pour Orléans nʹau‐<br />

59 Directeur spirituel <strong>de</strong> M. Levassor.<br />

54


aient pas succès, peut‐être cela serait‐il à votre convenance. Je craindrais seulement, quoi‐<br />

que M. Gar<strong>de</strong>t nʹait rien ajouté sur cela, quʹil nʹy eût inconvénient à trop ajourner la ré‐<br />

ponse à faire au greffier en question.<br />

Merci, mon cher ami, du bon souvenir que vous mʹaccor<strong>de</strong>z dans vos charmantes<br />

excursions, <strong>de</strong> la part que vous mʹy voulez bien souhaiter, ma pensée a <strong>de</strong>s ailes, mais mon<br />

corps a <strong>de</strong>s chaînes. A défaut <strong>de</strong> lʹun, je mets au moins lʹautre à votre suite pour vous faire<br />

fidèle compagnie. Jʹaurai bien <strong>de</strong> la joie à vous revoir à votre passage ici, ce sera pour bien<br />

peu <strong>de</strong> temps, pour une longue absence ensuite, et, qui sait, peut‐être pour toujours. Mon<br />

Dieu! que les liens terrestres durent peu, et quʹil nous faut bien, nʹest‐il pas vrai, mon ami,<br />

faire amitié, établir fraternité <strong>avec</strong> J.C. frère, ami quʹon a toujours là, qui nous suit en tous<br />

lieux et quʹon retrouve encore au mon<strong>de</strong> où nous tendons. Si le temps nous sépare, nous,<br />

mon ami, puissions‐nous là, du moins, nous retrouver entier <strong>avec</strong> cet ami commun.<br />

Votre bien dévoué en J.C.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M me Delatre part ou est partie pour Rouen, vous lʹy trouverez peut‐être. Nos en‐<br />

fants, rue <strong>de</strong>s Grès, vont assez bien, cette œuvre vous intéresserait vivement, vous avez<br />

beaucoup semé <strong>de</strong> ce côté, si nous recueillons un peu, nous <strong>de</strong>vrons vous en rendre grâce.<br />

La bonne M me Meslin 60 ne mʹavait rien dit, mais je tiendrai compte <strong>de</strong> lʹavis.<br />

28 à M. Levassor<br />

Suites <strong>de</strong>s démarches pour lʹemploi proposé à M. Levassor. Activités charitables <strong>de</strong> MLP. Il confie à Dieu son ul‐<br />

time espoir quant à leur association.<br />

Paris, le 3 octobre 1834<br />

Le retard quʹa souffert notre correspondance, mon cher ami, ne tient à aucune rai‐<br />

son <strong>de</strong> négligence, ainsi que votre ingénieuse charité vous lʹa fait dʹavance présumer, mais<br />

simplement à cette persuasion où jʹétais que vous <strong>de</strong>viez passer ici aux <strong>de</strong>rniers jours <strong>de</strong><br />

septembre. Jʹimaginais que cʹétait en allant à Rouen et non à votre retour que vous traver‐<br />

seriez Paris. Si je ne me trompe, votre lettre mʹavait dʹabord présenté ainsi la chose; dès<br />

lors il me paraissait inutile <strong>de</strong> vous écrire à la veille <strong>de</strong> votre arrivée. Je me réservais <strong>de</strong> ré‐<br />

pondre verbalement aux diverses questions que vous mʹaviez adressées et je mʹétais mis<br />

en mesure pour cela. Votre <strong>de</strong>rnière ne me prend donc point en faute ni au dépourvu; si<br />

ma réponse nʹest point partie poste pour poste, afin <strong>de</strong> vous trouver encore à Chartres,<br />

cʹest quʹil mʹa été impossible hier dʹobtenir lʹadresse <strong>de</strong> M me Delatre. M me Pianet mʹa prié <strong>de</strong><br />

retourner pour cela aujourdʹhui chez elle et mʹa mis ainsi en retard obligé dʹun jour.<br />

M. Gar<strong>de</strong>t que jʹai questionné <strong>de</strong> nouveau, selon votre désir, sur la nature <strong>de</strong>s oc‐<br />

cupations quʹil offrait <strong>de</strong> vous procurer, mʹa répondu quʹil nʹavait aucune donnée précise à<br />

cet égard, quʹil présumait seulement, dʹaprès les propres paroles que lui avait transmises<br />

son père, que ces occupations étaient douces et faciles; peut‐être pourrait‐on présumer que<br />

ce sont quelques affaires <strong>de</strong> palais; il attend, du reste, votre réponse impatiemment pour<br />

donner lui‐même décidément la sienne. Il mʹa répété que <strong>de</strong> temps en temps dʹautres affai‐<br />

60 Membre <strong>de</strong> la Conférence, M. Levassor visitait, rapporte M. Maignen, "trois pauvres vieilles femmes [Delatre, Meslin et Dorne]<br />

dont il payait régulièrement le loyer à chaque trimestre. La Conférence venait chaque fois à son ai<strong>de</strong> pour une petite part. Nous appelions<br />

cette œuvre l'œuvre <strong>de</strong>s trois vieilles femmes, et leur histoire a duré longtemps dans la Conférence". M. Maignen ajoute<br />

qu'une fois entré au séminaire, M. Levassor n'en continuait pas moins ses aumônes. Cf. VLP.,I, p.107.<br />

55


es lui étaient offertes encore, quʹil les refusait dʹordinaire à cause <strong>de</strong> sa répugnance pour<br />

la pratique, mais quʹil vous les transmettrait si vous vouliez y donner vous‐même quelque<br />

peu <strong>de</strong> votre temps. Il pourrait vous sembler singulier que M. Gar<strong>de</strong>t nʹeût pas pris <strong>de</strong><br />

renseignements plus précis sur le sujet dont il sʹagit; voilà lʹexplication quʹil mʹa donnée<br />

sur ce point: le greffier qui a fait offre pour lui à son père est un ancien ami <strong>de</strong> sa famille<br />

qui lui a montré à lui personnellement beaucoup <strong>de</strong> bienveillance durant son enfance,<br />

mais dont ses occupations lʹont éloigné <strong>de</strong>puis plusieurs années; or, économe comme il<br />

lʹest <strong>de</strong> son temps, M. Gar<strong>de</strong>t ne voudrait pas renouer <strong>avec</strong> le greffier en question ni re‐<br />

prendre <strong>de</strong>s relations qui lʹobligeraient ensuite à un commerce suivi, si ces relations ne<br />

doivent être profitables à lui ou à vous. Ainsi, si votre réponse est affirmative, il ira voir le<br />

greffier, si elle est négative il le fera remercier obligeamment par son père et se tiendra coi<br />

lui‐même. Tâchez <strong>de</strong> vous contenter <strong>de</strong> cela.<br />

Je nʹavais point négligé non plus lʹaffaire <strong>de</strong>s loyers, bien que je ne comprisse pas<br />

pour quelle raison vous désiriez que le vôtre fut payé si longtemps avant la fin du terme.<br />

Je suis passé chez votre portière pour lui remettre lʹargent, le propriétaire était pour quel‐<br />

ques jours à la campagne et nʹavait point laissé la quittance, à son retour on <strong>de</strong>vait me<br />

lʹapporter et en toucher le montant. On nʹest pas venu, jʹy repasserai.<br />

Je nʹai point vu <strong>de</strong>puis quelques jours M me Meslin, je la verrai aussi avant lʹéchéance<br />

du terme. Il mʹa fallu lui donner jusquʹici 25f pour vivre, mais elle mʹa promis que durant<br />

tout le mois dʹoctobre, grâce à la générosité <strong>de</strong> votre frère, elle nʹaurait point besoin <strong>de</strong> re‐<br />

courir à votre bonté. La bonne M me Dorne me vient voir <strong>de</strong> temps en temps, elle a été bien<br />

<strong>de</strong>s semaines sans travail, mais enfin elle en a maintenant. De plus je lui ai procuré un pe‐<br />

tit ménage <strong>de</strong> 8f par mois qui lʹai<strong>de</strong> un peu. Le jeune artiste ne mʹa point remis jusquʹici les<br />

10f qui doivent subvenir à son loyer. Jʹéprouvais quelque répugnance à lʹaller voir tout ex‐<br />

près pour lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r cet argent, mais si vous le jugez bon jʹirai. Vous me direz cela dans<br />

votre réponse. Il me resterait à répondre à toutes les bonnes et graves choses que contient<br />

votre lettre dʹhier, mais outre que lʹespace me manque, je craindrais quʹune matière aussi<br />

sérieuse ne vînt mal à point au milieu dʹune noce, je me borne donc pour vous tranquilli‐<br />

ser au moins <strong>de</strong> ce côté, à vous dire, mon bien cher ami, que je nʹentendrais nullement que<br />

votre association <strong>avec</strong> moi pût vous priver dʹaucun avantage à venir, encore moins vous<br />

empêchât <strong>de</strong> réaliser quelque résolution sainte, quʹen tous les cas les choses sʹarrangeraient<br />

entre nous <strong>de</strong>vant Dieu, selon la charité et la justice et <strong>avec</strong> dʹautant moins <strong>de</strong> peine, je<br />

lʹespère, que les sentiments si affectueux qui nous unissent rendraient <strong>de</strong> part et dʹautre les<br />

sacrifices doux et faciles. Ayez donc, mon cher Adolphe, lʹesprit en repos pour tout ce qui<br />

me concerne, je désire bien sincèrement en <strong>de</strong>venant votre associé, ne pas cesser dʹêtre en<br />

même temps votre ami et votre frère. Ces titres réunis sauront tout aplanir et concilier en‐<br />

tre nous, jʹen ai la pleine conviction.<br />

Adieu, à bientôt, je vous embrasse cordialement et suis tout à vous en J.C.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

56


29 à M. Levassor<br />

Les tractations pour reprendre lʹinstitution <strong>de</strong> jeunes gens pourraient finalement aboutir. Bonnes dispositions <strong>de</strong><br />

M. Bailly à leur égard.<br />

Paris, mercredi 29 octobre 1834<br />

Je suis assez pressé <strong>de</strong> travaux en ce moment, mon cher ami, je vous dirai donc en<br />

hâte ici, seulement quelques mots.<br />

Jʹai suivi ponctuellement vos instructions, samedi jʹai déposé votre lettre chez M.<br />

Dufour et dimanche je suis passé pour connaître sa réponse. Il adhère à tout et consent à<br />

tout, il doit ou même a dû déjà vous en informer lui‐même par écrit. Ses dispositions<br />

mʹont paru extrêmement favorables; il est évi<strong>de</strong>mment dans un <strong>de</strong> ces moments où les<br />

moyens dʹarrangement doivent être faciles <strong>avec</strong> lui. M. Bailly que jʹai vu hier vous<br />

conseille <strong>de</strong> ne pas tar<strong>de</strong>r <strong>de</strong> saisir vite cette heureuse veine et moi‐même je vous y en‐<br />

gage. Si vous persistez à penser que cette carrière puisse vous convenir. Je vous attends au<br />

plus tôt, mon cher ami, vous savez quel plaisir jʹaurai à vous recevoir ici, à voir votre sé‐<br />

jour sʹy prolonger pour quelques mois au moins.<br />

Venez donc et croyez à la constante affection <strong>de</strong> votre tout dévoué ami en J.C.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Bailly paraît aussi pour nous dans les plus obligeantes dispositions.<br />

30 à M. Levassor<br />

Confirmation <strong>de</strong> lʹaccord <strong>de</strong> lʹabbé Dufour. Patience et prières dans les contrariétés suscitées par cette affaire <strong>de</strong><br />

cession.<br />

Vendredi 31 octobre 1834<br />

Je ne sais, mon cher ami, si ma <strong>de</strong>rnière lettre vous a suffisamment assuré <strong>de</strong>s dis‐<br />

positions <strong>de</strong> M. Dufour, en tout cas pour vous complaire je suis retourné hier chez lui et<br />

lui ai fait connaître lʹincertitu<strong>de</strong> où vous restiez encore et le désir que vous aviez dʹune ad‐<br />

hésion plus complète à vos propositions, afin <strong>de</strong> ne laisser rien dʹindécis dans votre posi‐<br />

tion respective. M. Dufour mʹa répondu: M. Levassor a mal saisi le sens <strong>de</strong> ma lettre elle<br />

donne et je réitère ici adhésion complète à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> qui mʹa été faite, cʹest‐à‐dire que M.<br />

Levassor pourra dès aujourdʹhui établir <strong>avec</strong> moi les conditions <strong>de</strong> la cession, sauf à ne ra‐<br />

tifier définitivement et exécuter ces conditions quʹaprès lʹépreuve <strong>de</strong> 6 mois quʹil désire<br />

faire. Tout ce que contenait dʹailleurs ma lettre dʹexplications et réflexions sʹadressait à<br />

Madame Levassor plutôt quʹà son fils.<br />

M. Dufour a trouvé naturel et juste que toute disposition pour renouvellement <strong>de</strong><br />

bail ou autre vous restât étrangère jusquʹà lʹexpiration <strong>de</strong>s 6 mois. Quant à lʹadmission <strong>de</strong><br />

M. Gar<strong>de</strong>t, il fera, je pense, selon votre désir, cela, du reste, sera à régler amiablement.<br />

M. Dufour vous désire pour le 10 ou 12 au plus tard.<br />

Je prends part, mon ami, aux contrariétés que vous suscite cette affaire; prenez‐les<br />

en patience, priez, je prierai aussi. Dieu est si bon et la vie est si courte.<br />

Tout à vous <strong>de</strong> cœur en J.C.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

57


Je viens <strong>de</strong> chez M. Gar<strong>de</strong>t, il est absent pour tout le jour, je nʹai pu le voir.<br />

A bientôt. Adieu.<br />

31 à M. Pavie<br />

Très sollicité, MLP. nʹa pas eu le temps dʹécrire. Sa vie domestique ne doit pas donner le change. Le fond <strong>de</strong> sa na‐<br />

ture est lʹespérance. Confi<strong>de</strong>nces sur les épreuves <strong>de</strong> sa vie conjugale. Sa force dʹâme pour tenir son engagement.<br />

Paris, le 24 novembre 1834<br />

Je serais bien inquiet en présence <strong>de</strong> tout autre, mon très cher Victor, dʹun silence<br />

aussi bien gardé que le mien; mais <strong>avec</strong> vous jʹarrive aussi confiant et aussi libre que ja‐<br />

mais, parce que ma tendre affection nʹa pas changé et que, jʹen suis profondément sûr, cʹest<br />

tout ce que vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z. Le reste est subjectif, acci<strong>de</strong>ntel et partant excusable ou <strong>de</strong><br />

facile oubli. A défaut <strong>de</strong>s faits vous recourez à lʹintention et lʹintention défaillant elle‐<br />

même quelque chose vous reste qui vous est personnel et propre, cʹest une vue intelligente<br />

et large <strong>de</strong> tout ce qui est humain, une foi implicite aux possibilités vagues, une perception<br />

réelle <strong>de</strong> lʹimperceptible, une vue transcendante <strong>de</strong> lʹinvisible. Il y aurait bien du malheur,<br />

si <strong>avec</strong> tout cela, vous nʹaviez découvert que ces temps <strong>de</strong>rniers je mʹétais, comme à plaisir,<br />

laissé encombrer <strong>de</strong> mille choses jusquʹà en perdre respiration; ma tête passait au‐<strong>de</strong>ssus<br />

un moment, puis, tout aussitôt, jʹétais encore envahi. Vous avez dû, quelquefois aussi,<br />

vous donner pareil amusement. Ne savoir à quoi courir, auquel entendre la fatigue,<br />

lʹétourdissement, puis quand on laisse tout dʹépuisement, voir tout au hasard du Bon<br />

Dieu, nʹen aller que mieux et arriver sans vous au but. Si vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z sur quoi tout cela<br />

opérait, je ne le sais trop, en vérité. Lʹaffaire Levassor et quelques écrivasseries sont ce que<br />

jʹen puis tirer <strong>de</strong> plus clair. Pour vous qui faites dix tours contre moi un, il y aurait eu bien<br />

du loisir et <strong>de</strong> lʹespace, mais, vous le savez, le verre dʹeau a ses tempêtes et la nullité son<br />

infini.<br />

Lʹaffaire Levassor dont je parlais reste provisoirement dans cette heureuse indéci‐<br />

sion qui va si bien à la quiétu<strong>de</strong> <strong>de</strong> notre ami. Il a obtenu <strong>de</strong> sa famille, pour tout résultat,<br />

permission <strong>de</strong> se mettre six mois en pension chez Monsieur Dufour, pour examiner <strong>de</strong><br />

près la chose et sʹassurer quʹelle lui convient. Malgré le ton dont je parle, je trouve cela<br />

sensé et nʹen ai pas ressenti la moindre contrariété. Dʹailleurs moi aussi, à certains mo‐<br />

ments que je tâcherai <strong>de</strong> convertir en jours, puis en années, je vois presque <strong>avec</strong> indiffé‐<br />

rence tout ce qui fait la trame matérielle <strong>de</strong> notre vie. Cʹest découragement et faiblesse bien<br />

souvent, quelquefois résignation, ar<strong>de</strong>nt espoir en Dieu. Ce <strong>de</strong>rnier sentiment est et reste‐<br />

ra, je lʹespère, le fond <strong>de</strong> ma vie, ma note sensible, le reste nʹest que vibration consonante<br />

ou simple accompagnement. Tant que je pourrai parler ainsi, mon ami, ne me plaignez<br />

pas; ma vie extérieure peut‐être bizarre, monotone et triste, il nʹimporte, il est <strong>de</strong>s heures<br />

qui ravivent, qui comblent lʹâme et consolent <strong>de</strong> tout; il est <strong>de</strong>s heures qui rayonnent et qui<br />

chantent, <strong>de</strong>s heures où lʹon entend au loin lʹécho <strong>de</strong> la <strong>de</strong>rnière heure répondant à lʹéterni‐<br />

té.<br />

Nʹallez pas prendre au grand sérieux toutes ces phrases romantiques; cʹest un coin<br />

<strong>de</strong> la chose, mais pas lʹabsolu, je suis dʹailleurs un fort bon vivant, me portant bien, cou‐<br />

rant tout à lʹheure à merveille, mangeant buvant bien, querellant parfois ma femme qui va<br />

58


maintenant beaucoup mieux, enfin votre digne ami [sauf la pipe] 61 et presque aussi tapa‐<br />

geur que vous.<br />

Ma femme, mon cher Victor, sans en vouloir convenir, est beaucoup plus forte et<br />

moins souffrante, elle travaille un peu et marche, je lʹespère, à un mieux définitif. Entre<br />

nous, je ne saurais dire que la santé la ren<strong>de</strong> meilleure, mais je vaux si peu moi‐même que<br />

cʹest chez nous à bon chat bon rat 62 . Nous ne faisons pas pourtant mauvais ménage, si le<br />

Bon Dieu nous ai<strong>de</strong>, nous pourrons arriver à bien. Cʹest une étrange chose, vous verrez,<br />

que le ménage, et rien ne saurait dʹavance en donner une idée. Jʹen ris quelquefois tout<br />

seul ou bien jʹen pleure. Car cʹest également comique et triste; il y a aussi un beau côté.<br />

Jusque‐là on mène sa vie plus ou moins à distance <strong>de</strong>s autres vies; union <strong>de</strong> société, <strong>de</strong> fa‐<br />

mille, union dʹamis, union <strong>de</strong> frères, tout cela va côte à côte, et pourtant pas sans peine; en<br />

ménage, cʹest bien autre affaire; <strong>de</strong>ux vies en une ou bien dualité acharnée, lutte à mort, il<br />

faut choisir. Le beau côté, cʹest quʹà force <strong>de</strong> se combattre soi‐même, on se mâte à la fin<br />

quelquefois et lʹon en sort meilleur. En voie contraire, si lʹon cédait, le mal irait bien vite. Je<br />

ne vois que quatre pas: injure, violence, assassinat, suici<strong>de</strong>. Or, cʹest là, mon ami, une ef‐<br />

frayante idée, il nʹy a que le premier pas qui coûte, on franchirait les autres en moins <strong>de</strong><br />

rien et sans presque y songer. En longeant parfois les abords du chemin, jʹai entrevu à la<br />

dérobée tout cela! Jʹai vite reculé, vous mʹen croirez, car sʹil faut vaincre ou briser pour<br />

mettre ici lʹharmonie, il est plus facile et meilleur <strong>de</strong> briser et dompter en soi quʹen autrui.<br />

Jʹy veux travailler <strong>de</strong> toute mon âme; priez Dieu, mon meilleur ami, <strong>avec</strong> moi, pour quʹil<br />

me soutienne et me conduise au but.<br />

Jʹaurais presque envie <strong>de</strong> vous faire reproche <strong>de</strong> ne mʹavoir pas écrit, mais vous<br />

avez fait aussi pour le mieux sans doute; écrivez‐moi bientôt et à cœur débordant sur tou‐<br />

tes choses et sur la meilleure en particulier. Jʹentends celle que vous avez si courtement<br />

touchée dans votre <strong>de</strong>rnière lettre. Embrassez votre bon père, mon ami Théodore et ceux<br />

qui sont encore là‐bas connus ou à connaître.<br />

Jʹai vu Gavard, pas M. Boré encore; je lʹespère; pas encore le jeune C. Je me suis oc‐<br />

cupé <strong>de</strong> lui. Je suis allé au collège; mais sans le voir; au plus tôt, je le verrai et lʹaimerai<br />

pour vous et pour Dieu. Votre ami et frère,<br />

<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong><br />

Gavard vous a écrit; il va bien.<br />

32 à M. Pavie<br />

Dans lʹépreuve, MLP. sʹabandonne à la volonté <strong>de</strong> Dieu. Il fréquente toujours ses amis. Fidélité indéfectible à Pa‐<br />

vie: tant que son fil dure, il veut quʹil se tisse <strong>avec</strong> le sien.<br />

31 décembre 1834<br />

Bien que je vous doive pour votre excellente lettre mon cher Victor, une longue et<br />

gran<strong>de</strong> réponse, vous êtes homme à vous contenter <strong>de</strong> quelques lignes qui viendront, du<br />

moins au premier jour <strong>de</strong> lʹan, joindre mes tendres affections aux effusions qui pleuvront<br />

sur vous tant aimé et aussi tant aimant. Je marche donc et vite pour arriver à temps.<br />

61 Le texte porte: "à cela près <strong>de</strong> la pipe", c'est-à-dire sauf la pipe : si V. Pavie était grand fumeur, MLP. ne l'était pas du tout.<br />

62 La défense, la réplique, vaut mieux que l'attaque.<br />

59


La première partie <strong>de</strong> votre lettre me contriste vivement et mʹaffligerait plus encore,<br />

si je nʹétais accoutumé à <strong>de</strong>s retours contre toute espérance et si, presque malgré moi, je ne<br />

gardais quelque confiance en lʹavenir. Pour parler vrai, cependant, je ne suis pas bien cer‐<br />

tain quʹune scission définitive me parût un malheur réel; dʹentraînement, <strong>de</strong> dévouement<br />

absolu à tout ce que vous voulez, je me suis livré à corps perdu dans cette idée; mais<br />

cʹétait, je le sentais, en certains moments, par abnégation et foi aveugle, plutôt que par<br />

conviction. Une vie tout entière résumée en un moment, cʹest trop dʹambition peut‐être,<br />

cʹest le martyre et ici, mon ami, serait‐ce bien ici le martyre pour Dieu? Moi, je nʹen sais pas<br />

dʹautre que je puisse approuver et je le sais bien, les heures <strong>de</strong> fièvres passées, vous ne<br />

sauriez vous‐même penser et vouloir différemment. Quoiquʹil en soit la Provi<strong>de</strong>nce est là,<br />

elle a tant fait pour vous sur tout le reste, quʹil y aurait criante injustice à ne pas espérer<br />

aussi en elle pour cette gran<strong>de</strong> affaire. Cʹest ma <strong>de</strong>rnière ressource quand ma pauvre tête<br />

se lasse et ne voit plus clair aux choses. Reposez‐vous aussi là, mon cher Victor, et prenons<br />

confiance que lʹissue, quelle quʹelle soit, sera la meilleure.<br />

Il serait cruel, cher ami, quand vous cherchez à vous reprendre un peu au bonheur<br />

qui me concerne, par compensation <strong>de</strong> ce qui vous en manque, il serait vraiment lâche à<br />

moi <strong>de</strong> mʹy refuser: pourtant cher Victor, ne faites pas trop compte, je vous le dis, sur ce<br />

frêle appui, il pourrait vous manquer. Jamais avenir fut moins assuré que le mien et cet<br />

avenir ne compte pas par années, mais par jour: la veille ne saurait dire où me trouvera le<br />

len<strong>de</strong>main, ici ou bien loin; il en est qui ont une <strong>de</strong>meure, un foyer transmis <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s sou‐<br />

venirs et <strong>de</strong>s espérances, qui sʹy casent et sʹy assoient en disant: je mourrai là; moi, je<br />

mourrai assurément, mais où? Je ne sais. Cette incertitu<strong>de</strong>, qui me tient toujours en alerte,<br />

nʹaurait rien qui répugnât à mes sentiments, si elle provenait <strong>de</strong> simple abandon <strong>de</strong> cœur,<br />

<strong>de</strong> résignation confiante et calme, mais je ne puis dire quʹil en soit ainsi. Lʹaccepter telle<br />

quelle, cʹest peut‐être le mieux. Jʹy tends, jʹy arriverai, je lʹespère, ce sera là mon bonheur.<br />

Je tiens cordialement à tout ce que vous mʹavez donné et nʹen lâcherai miette; Mar‐<br />

ziou et moi nous voyons fidèlement, Gavard aussi, Godard même, puisquʹil est un peu<br />

frotté <strong>de</strong> vous. Soyez tranquille, ami, tout ce que vous avez touché mʹest cher, choses et<br />

gens, rien nʹen sera perdu.<br />

Je vois le petit C. je vais tâcher quʹil vienne aux Rois chez nous. Il sort dʹailleurs tant<br />

quʹil veut, mʹa‐t‐il dit, chez un correspondant. On en est très content au collège. Je lʹai re‐<br />

commandé à lʹabbé Buquet, directeur, que je connais et aussi à son professeur que je me<br />

trouve connaître aussi particulièrement. Ce <strong>de</strong>rnier le regar<strong>de</strong> comme un <strong>de</strong> ses meilleurs<br />

élèves et sʹy intéresse beaucoup. Ce <strong>de</strong>rnier le regar<strong>de</strong> comme un <strong>de</strong> ses meilleurs élèves et<br />

s’y intéresse beaucoup. Etes‐vous content, mon maître?<br />

Adieu, très cher ami, luttez, bataillez le mieux quʹil se pourra cette année <strong>avec</strong> les<br />

jours, <strong>avec</strong> les heures, le temps passe et lʹon arrive au bout. Mêlez‐moi toujours un peu à<br />

tout. Tant que mon fil dure, je veux quʹil se tisse <strong>avec</strong> le vôtre. Quand il cassera, allez tou‐<br />

jours, mais encore aimez‐moi.<br />

<strong>Léon</strong> Le P.<br />

60


33 à M. Pavie<br />

La sphère religieuse est la seule capable <strong>de</strong> procurer le vrai bonheur. Consolations et conseils à son ami. Il est touché<br />

<strong>de</strong> lʹestime que lui porte Edouard Guépin. Difficultés à sʹoccuper dʹun petit pensionnaire. Nouvelles <strong>de</strong>s amis an‐<br />

gevins. V. Pavie sʹest éloigné momentanément <strong>de</strong> la Gerbe. Lacordaire chargé <strong>de</strong>s conférences <strong>de</strong> Carême à Notre‐<br />

Dame <strong>de</strong> Paris.<br />

5 février 1835<br />

Votre précé<strong>de</strong>nte lettre, cher Victor, mʹavait laissé sur votre situation <strong>de</strong>s inquiétu‐<br />

<strong>de</strong>s et jʹen gardais une impression vague <strong>de</strong> tristesse que je parvenais mal à dissiper.<br />

Jʹavais lu vos lettres à Gavard, Marziou, Godard, car, à défaut <strong>de</strong> communications directes<br />

à vous, jʹen quête effrontément par toute voies, mais nulle part je ne trouvais réponse en‐<br />

tière à ma sollicitu<strong>de</strong> sur votre état <strong>de</strong> cœur. Aussi trouvai‐je que vous tardiez bien à<br />

mʹécrire. Je suis maintenant, je ne dirai pas plus tranquille, cela vous effaroucherait, seu‐<br />

lement, cher ami, je suis moins tourmenté. Je me sens, comme vous lʹavez été vous‐même,<br />

soulagé par cette effusion qui vous a été permise, en détour sans doute et non immédiate,<br />

mais qui nʹaura pas été, je mʹen assure, sans quelque écho pour cette jeune âme. Que je re‐<br />

viens vite à tout ce que vous voulez et que cʹest <strong>de</strong> bon gré que je vous livre et mon cœur<br />

et ma tête à tout vent soufflé par vous. Je voudrais tant vous voir heureux que pour vous<br />

au moins je reprends foi au bonheur! Pourtant, soit étroitesse dʹesprit, soit vieillesse <strong>de</strong><br />

cœur, soit, jʹaime mieux le croire, ferme, inébranlable, exclusive conviction, je ne puis voir,<br />

idéalement ou au réel, aucun bonheur, hors la sphère religieuse, et si je ne vous y savais,<br />

cher ami, à tout jamais enfermé, si je ne vous voyais si scrupuleux, si inquiet aux limites,<br />

jʹaurais beau faire, vous auriez mes tendres sympathies, mais <strong>de</strong> confiance en lʹavenir et<br />

repos au présent, impossible. Je ne saurais. Aussi, est‐ce <strong>avec</strong> une joie infinie que <strong>de</strong>puis<br />

longues années déjà je vous ai suivi sur ce point. Je vous ai vu et mʹen souviens, presquʹen‐<br />

fant encore, à force <strong>de</strong> can<strong>de</strong>ur, <strong>de</strong> naïve franchise, à travers lʹart, la poésie et les brillants<br />

rêves <strong>de</strong> nos philosophes, vous démêler, vous faire jour et toujours aller au but. A votre<br />

<strong>de</strong>rnier voyage toutefois, vous me sembliez changé; mais cʹétait transformation simple, je<br />

le vis bientôt; au lieu <strong>de</strong> 19 ans, vous en avez 25, voilà tout. La lutte nʹétait plus toute au<br />

<strong>de</strong>hors, elle se faisait à lʹintérieur, mais là encore vous étiez maître. Votre front essuyé et la<br />

poussière abattue, vous vous retrouviez en face <strong>de</strong> Dieu. Cela dure encore aujourdʹhui,<br />

cher ami, mais je nʹai pas peur. Jʹai lu les premières pages du livre. Jʹen <strong>de</strong>vine et pressens<br />

les <strong>de</strong>rnières. Tout passé attentivement étudié porte indice <strong>de</strong> lʹavenir; le vôtre, cher ami,<br />

est rassurant et bon; il est tout dʹor, disait Marziou, à tels pieds on nʹimpose point tête<br />

dʹargile. Cela mʹexplique, et mon ar<strong>de</strong>ur à suivre tous vos projets et ma confiance sans<br />

bornes à toutes vos vues sur votre propre avenir; vous avez une règle, un point dʹépreuve;<br />

bien certain que vous y rapportez tout par volonté expresse ou dʹirrésistible instinct, que<br />

pourrais‐je craindre et quʹai‐je <strong>de</strong> mieux à faire quʹà vous abandonner aveuglément tout ce<br />

qui est en moi <strong>de</strong> sentiment pour être à votre gré conduit et maîtrisé. Ainsi, en arrive‐t‐il<br />

toujours et je lʹai senti en cette occasion surtout. Ce nʹest pas toutefois que vos affaires me<br />

semblent définitivement amenées à mieux, mais la persévérance, la persistance <strong>de</strong> volonté,<br />

en pareille matière me paraissent presque décisives et si vous voulez opiniâtrement, vous<br />

obtiendrez. Quant à lʹheureuse application <strong>de</strong> ce ferme vouloir, quant au jugement du<br />

choix, je vais <strong>de</strong> foi en vous comme pour tout le reste. Allez donc ami; suivez votre voie et<br />

gar<strong>de</strong>z bien notre loi, à moi si chère, <strong>de</strong> me donner part à toute cette œuvre si intime et si<br />

personnelle pour vous.<br />

61


Ce que vous me dites <strong>de</strong> votre ami Ed. Guépin 63 me touche beaucoup. Je lʹaime ten‐<br />

drement et le voudrais <strong>de</strong> toute mon âme, heureux comme il mʹen semble digne; il me<br />

montre aussi quelque confiance, il y a en nous <strong>de</strong>s points souffrants qui sʹenten<strong>de</strong>nt. Ce se‐<br />

rait une gran<strong>de</strong> joie pour moi que nous puissions arriver à complète sympathie; assurez‐le<br />

encore <strong>de</strong> mon dévouement sans bornes; jʹavais mis au bas <strong>de</strong> ma lettre mon adresse<br />

comme invitation <strong>de</strong> mʹécrire encore. Dites‐lui cela, il a du loisir, et lui, dans les miens,<br />

peut hardiment prendre et choisir les meilleurs.<br />

Vous me remerciez plus quʹil ne faut, cher ami; mon intimité <strong>avec</strong> le jeune C. est<br />

moins avancée que vous ne le pensez et que je ne le voudrais. Lʹabbé Buquet, directeur du<br />

Collège était à la campagne aux Rois, lorsque je me présentai pour faire sortir cet enfant;<br />

les autres chefs me connaissant peu nʹont point dû faire, en ma faveur, exception à cette<br />

règle qui défend <strong>de</strong> confier les élèves à toute personne du <strong>de</strong>hors qui nʹest point autorisée<br />

par les parents directement et en forme. Lʹabbé Buquet a levé lʹobstacle pour lʹavenir, mais<br />

les mercredis (jour <strong>de</strong> sortie) ma femme est au <strong>de</strong>hors tout le jour pour affaires; moi à mon<br />

bureau, comment promener le pauvre enfant? Cela ne se peut. Je le vois, pour <strong>de</strong>s raisons<br />

analogues, très peu à son collège. Je redoublerai <strong>de</strong> volonté pour vous complaire, sʹil y a<br />

lieu, cher ami.<br />

Jʹai rappelé hier à Gavard le projet <strong>de</strong> portrait par M. Ménard. Pour sa femme cʹest<br />

déjà chose jugée impraticable; pour lui, il ne sait; mais du possible au réel, cʹest abîme à<br />

franchir, en lui surtout. Jʹy compte peu. Il voyait hier une occasion <strong>de</strong> faire obtenir un tra‐<br />

vail mince et peu lucratif il est vrai, à notre ami. Jʹy ai poussé cependant ar<strong>de</strong>mment et sa<br />

femme et lui, mais... mais la volonté, je le crains, faillira ici encore. Je verrai Marziou au<br />

plus tôt. Jʹétais absent lorsquʹil mʹa apporté votre lettre. Je suis toujours absent. Je vois<br />

Marziou toujours et lʹaime cordialement. Nous sommes, je lʹespère maintenant pris lʹun à<br />

lʹautre par vous surtout qui nous servez <strong>de</strong> lien. Nʹest‐ce pas ainsi entre tous vos amis?<br />

Nʹest‐ce pas ainsi en tout? Nʹêtes‐vous pas le maître toujours, bien quʹhumble et défiant <strong>de</strong><br />

vous, vous cherchiez en haut vos élèves, quand il les faudrait découvrir en bas. Moi, no‐<br />

tamment, ne subsiste que <strong>de</strong> vos restes. Je me surprends à toute heure vous copiant pâle‐<br />

ment et vis parfois quinze jours sur un mot tombé <strong>de</strong> vous, sur quelque souvenir qui me<br />

revient ou que Dieu me rend plutôt comme aliment et soutien. Nʹenviez donc plus les<br />

prodigues et quelques larmes dont le père les baigne au retour: fili, omnia mea tua sunt 64<br />

cʹest là la part <strong>de</strong>s fils aînés, la vôtre, ami; gar<strong>de</strong>z‐la bien.<br />

Vous prenez mal, ami, et par mauvais côté, votre retraite <strong>de</strong> La Gerbe pour cette an‐<br />

née; ce nʹest pas trahison à vos amis, ce nʹest pas renier lʹâme aimante et vivante en vous;<br />

cʹest, ami, en recueillir un peu sur vous‐même les rayons quʹon ne savait pas chez vous ré‐<br />

fléchir, laissez faire le temps. Ne livrez pas plus <strong>de</strong> vous quʹon en peut comprendre à la<br />

fois; notre maître disait aux siens: jʹaurais bien <strong>de</strong>s choses encore à vous apprendre, mais<br />

lʹheure nʹest pas venue, vous ne sauriez me comprendre 65 , et il se taisait. Lʹheure vint pour‐<br />

63 Ami d'enfance <strong>de</strong> V. Pavie, lui aussi du groupe <strong>de</strong>s Angevins <strong>de</strong> Paris, Edouard Guépin avait subi l'ascendant <strong>de</strong> MLP. En avril<br />

1835, il l'écrira à V. Pavie: "Merci, mille fois merci, pour l'ami que vous m'avez donné en MLP. Quels trésors inépuisables d'amitié<br />

il possè<strong>de</strong>! S'il y avait quelque chose <strong>de</strong> plus sacré que ces noms d'ami et <strong>de</strong> frère, je les lui donnerais, car il est plus que tout<br />

cela, dans l'idée la plus étendue, la plus favorable, qu'ils puissent représenter. Ce n'est pas un homme <strong>de</strong> notre temps, c'est un saint.<br />

Tous les jours, et quoi qu'il fasse pour cacher ce qu'il fait <strong>de</strong> bien et <strong>de</strong> beau, j'apprends sur lui, et quelquefois il me laisse involontairement<br />

<strong>de</strong>viner, <strong>de</strong>s choses à honorer un Fénelon, un Vincent <strong>de</strong> Paul". (VLP., I, p.51). MLP. le ramènera à la foi et le soutiendra<br />

dans l'épreuve <strong>de</strong> sa maladie. (cf. <strong>Lettre</strong> 43).<br />

64 Cf. Lc 15,31.<br />

65 Cf. Jn 16,12.<br />

62


tant. Pour vous aussi, ami, dans lʹhumble sphère <strong>de</strong> votre humanité, lʹheure viendra, ayez<br />

patience, gar<strong>de</strong>z seulement votre âme et votre cœur, gar<strong>de</strong>z votre foi, votre pureté, votre<br />

ar<strong>de</strong>ur, on y puisera largement quelque jour, cʹest le trésor rare et quʹon ne dédaigne point.<br />

Mais si, par impossible, une part intime, la meilleure peut‐être, restait ici‐bas méconnue,<br />

oh! grâces en soient rendues à Dieu qui se la réserve et la gar<strong>de</strong> pour lui cette part. Don‐<br />

nez‐la lui bien vite, n’est‐ce pas là le charme indicible, la secrète joie du mystique disce<br />

nesciri 66 Adieu, ami, je vous aime, vous suis et vous comprends.<br />

Tout à vous <strong>de</strong> toute âme<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Lacordaire est chargé officiellement par lʹArchevêque <strong>de</strong>s<br />

Conférences <strong>de</strong> Notre‐Dame pour le Carême. 67 Nous aurons aussi<br />

lʹabbé Cœur. Dites cela à Ed. Guépin qui me lʹavait <strong>de</strong>mandé. Res‐<br />

pects, souvenirs, amitiés autour <strong>de</strong> vous.<br />

Mgr <strong>de</strong> Quelen<br />

34 à M. Pavie<br />

Exhortation à se tourner vers Dieu. MLP. voudrait lui exprimer plus chaleureusement son amitié, mais ses propres<br />

souffrances nʹy prêtent pas.<br />

3 mars 1835<br />

Que <strong>de</strong> tribulations et <strong>de</strong> peines. Combien je vous plains, cher ami. Votre <strong>de</strong>rnière<br />

lettre mʹétait dʹun meilleur augure et jʹavais contenu, par simple obéissance les empresse‐<br />

ments et la joie que je croyais désormais pleinement justifiés; mais voilà encore un revire‐<br />

ment, ce ne sera pas le <strong>de</strong>rnier, cher ami, espérons‐le. Les antécé<strong>de</strong>nts exigent une autre<br />

fin, et quelle quʹelle soit dʹailleurs, je ne puis penser quʹelle se résume en tout à quelque<br />

conseil pris dʹune glace, à lʹenivrement dʹune valse après un soir <strong>de</strong> bal. Lʹexpérience et<br />

dʹamères révélations, mais quelles quʹelles fussent pour vous, jʹen ai la confiance, la main<br />

<strong>de</strong> Dieu, qui vous fut si douce jusquʹici, saurait encore les adoucir. Elle vous a doué dʹune<br />

imagination riche et dʹun cœur confiant. A <strong>de</strong> pareils dons qui pourraient <strong>de</strong>venir si funes‐<br />

tes, elle a dû joindre un entourage et <strong>de</strong>s points <strong>de</strong> défense; quels ils sont, je ne sais, mais il<br />

vous les faut, ami, et jʹy compte, ils ne vous manqueront pas. Jʹaime à penser dʹailleurs que<br />

votre ar<strong>de</strong>ur trop vive a pu sʹexagérer beaucoup la valeur <strong>de</strong> quelques circonstances expli‐<br />

cables et peu significatives peut‐être en soi. Jʹattends à ce sujet une nouvelle lettre que<br />

vous ferez courte, si votre disposition lʹexige, mais que je désire prompte, vous le croirez<br />

aisément, cher ami.<br />

Prenez courage, cher Victor, ce nʹest peut‐être quʹune épreuve, ou bien, je le croirais<br />

plutôt une leçon. Subissez‐la doucement et tout sʹapaisera. Qui sait ce quʹune ar<strong>de</strong>ur<br />

comme la vôtre pourrait entraîner dʹhumiliation et dʹoubli pour un autre amour qui veut<br />

le <strong>de</strong>ssus toujours et ne souffre point dépression. Je ne crains pas cher ami, à tout hasard,<br />

<strong>de</strong> ramener toujours votre pensée <strong>de</strong> ce côté, parce que je connais profondément votre âme<br />

et quʹen bonheur comme en peine, il ne lui faudrait point dʹautre remè<strong>de</strong>, lʹusage variant<br />

66<br />

Apprends à être ignoré.<br />

67<br />

Ce fut grâce à F. Ozanam que Mgr <strong>de</strong> Quélen offrit à Lacordaire la chaire <strong>de</strong> Notre-Dame <strong>de</strong> Paris. La première conférence aura<br />

lieu le 8 mars 1835.<br />

63


seulement, mais <strong>de</strong>vant à lʹun comme à lʹautre appliquer un calme rafraîchissant et modé‐<br />

rateur.<br />

Je prierai plus ar<strong>de</strong>mment Dieu pour vous, cher ami, durant ces jours <strong>de</strong> tourmente,<br />

quelle que soit votre propre situation, tâchez <strong>de</strong> vous échapper aussi un peu par là. Ce se‐<br />

ra au moins un instant pour reprendre haleine et vous en serez plus fort. Je voudrais, très<br />

cher ami, trouver <strong>de</strong>s accents plus ar<strong>de</strong>nts, plus sympathiques <strong>avec</strong> lʹétat <strong>de</strong> votre âme,<br />

mais ma vie y prête si peu! Pardonnez‐moi, cher Victor, et si vous ne me trouviez pas la<br />

voix assez émue, assez pénétrante, croyez bien, du moins, que cʹest du plus profond <strong>de</strong><br />

mon cœur quʹelle vient pour arriver à vous.<br />

Votre frère et ami.<br />

<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong><br />

35 à M. Maillard<br />

Invitation à une exposition du musée du Louvre.<br />

[12 mars 1835]<br />

Samedi, à 10h. précises, je serai vous attendant à la première salle du musée. Ma<br />

compétence est, cher ami, plus que contestable, ce nʹest donc point comme conseil, mais<br />

bien comme simple compagnon quʹil faut me prendre, autrement vous seriez en mé‐<br />

compte. Adieu, et comme toujours à bientôt.<br />

Votre tout affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jeudi, 6h.<br />

36 à M. Maillard<br />

Changement du jour du ren<strong>de</strong>z‐vous.<br />

[13 mars 1835]<br />

Un billet que vous allez recevoir par la poste vous propose dʹaller <strong>de</strong>main samedi<br />

au Louvre, mais je me rappelle, à lʹheure même, que lʹexposition est fermée le samedi. Si<br />

vous voulez aujourdʹhui même, à 10h., je puis être rendu à la première salle du musée et<br />

vous y attendre. Autrement, il faudrait remettre à mardi, le lundi étant jour réservé.<br />

Vendredi 8h. du matin.<br />

37 à M. Maillard<br />

Heure et lieu du ren<strong>de</strong>z‐vous pour se rendre à lʹexposition.<br />

[13 mars 1835]<br />

On ira définitivement au Gavard ce soir, et pour cela on se trouvera à 6h. précises à<br />

St‐Sulpice, à la chapelle <strong>de</strong> la Vierge, <strong>de</strong>rrière le chœur.<br />

Jusque‐là, on continuera dʹêtre gentil et bon enfant.<br />

Vendredi matin, 10 h.<br />

64


38 à M. Maillard<br />

Invitation à une promena<strong>de</strong> dans les bois. Visite à Edouard Guépin, mala<strong>de</strong>.<br />

[Dimanche 15 mars 1835]<br />

Demain, entre 10h 30 et 11h nous pourrons, si vous voulez, aller prendre un peu<br />

lʹair, sans bruit ni tapage, nous <strong>de</strong>ux seuls, en promena<strong>de</strong> dʹétu<strong>de</strong> et <strong>de</strong> santé.<br />

Je <strong>de</strong>scendrai vous prendre à lʹheure dite, après avoir fait une petite visite à<br />

Edouard.<br />

39 à M. Maillard<br />

La promena<strong>de</strong> en pleine nature est annulée.<br />

[15 mars 1835]<br />

Une circonstance que je nʹavais pas remarquée dʹabord, me privera, mon cher ami,<br />

du plaisir <strong>de</strong> vous accompagner <strong>de</strong>main à Robin <strong>de</strong>s Bois. Excusez‐moi et croyez à tous<br />

mes regrets.<br />

Votre tout aimé<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Dimanche au soir.<br />

40 à M. Levassor<br />

Le projet <strong>de</strong> Maison dʹétudiants fait long feu. MLP. examine <strong>avec</strong> sa femme dʹautres solutions proposées par M.<br />

Levassor. Deux confrères <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> Saint‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul sʹintéressent aussi au projet.<br />

Paris, le 17 mars 1835<br />

Il paraît maintenant bien certain, mon cher ami, que Dieu ne vous veut pas dans la<br />

situation que nous avions désirée, lui qui tient les cœurs en sa main, pouvait aisément<br />

nous rendre favorable celui <strong>de</strong> votre mère, il ne lʹa pas fait, plus tard, peut‐être, il nous<br />

laissera voir pourquoi. Aujourdʹhui, cher ami, ayons confiance et soumettons‐nous en at‐<br />

tendant son heure. Quelque regret que me puisse causer cette issue <strong>de</strong> nos projets, je sens<br />

bien quʹelle vous est ru<strong>de</strong> encore plus quʹà moi; vous lʹaviez moins prévue peut‐être et<br />

dʹailleurs elle dérange plus essentiellement lʹordre <strong>de</strong> votre vie.<br />

Mais quʹimporte cela? Pour tous <strong>de</strong>ux nʹy a‐t‐il pas cette pensée consolante quʹune<br />

vie, réellement et <strong>de</strong> cœur donnée à Dieu, nʹest jamais inutile, quʹil sait bien, lui, en tirer<br />

parti et y donner un noble emploi.<br />

Pour vous, ô mon ami, il vous ferme cette voie, cʹest quʹil vous appelle dans une<br />

meilleure, pour moi, sans doute, cʹest que la tâche quʹil mʹa donnée déjà, suffit à ma fai‐<br />

blesse, si peut‐être elle ne la dépasse. Ainsi quelque affligée et triste que me paraisse votre<br />

âme, je suis en repos sur elle, elle saura ou se plaindre ou se consoler, nʹayez pas trop <strong>de</strong><br />

regret non plus pour moi, cher ami, comme vous je prierai et comme vous, je retrouverai la<br />

paix.<br />

Il va sans dire que je nʹai point omis <strong>de</strong> tenter ou dʹexaminer les différents moyens<br />

que vous mʹindiquiez dans votre lettre, pour empêcher lʹentière <strong>de</strong>struction <strong>de</strong> nos projets.<br />

65


Malgré la gravité <strong>de</strong>s considérations dont je vous ai entretenu plusieurs fois tou‐<br />

chant mes ressources personnelles et les raisons qui mʹempêchent dʹen disposer librement,<br />

jʹai une <strong>de</strong>rnière fois examiné lʹétat <strong>de</strong>s choses et consulté aussi ma femme. Vous savez,<br />

mon ami, comme la maladie nerveuse <strong>de</strong> ma femme la préoccupe douloureusement <strong>de</strong><br />

pensées tristes et <strong>de</strong> craintes heureusement non fondées; mais je dois, vous le savez aussi,<br />

pour son repos, en tenir compte et ne lui donner aucun sujet dʹinquiétu<strong>de</strong>. Mes années,<br />

mʹa‐t‐elle dit, sont comptées, si encore jʹen dois avoir; durant ce peu <strong>de</strong> jours je voudrais<br />

du repos, nʹengagez donc ni vous ni moi dans aucun embarras, je me sens incapable <strong>de</strong><br />

rien soutenir <strong>de</strong> tel. Que tout cela ne fût point fondé en raison, il nʹimporte, nʹest‐il pas vrai<br />

mon cher ami, il est <strong>de</strong> mon <strong>de</strong>voir dʹy donner une valeur absolue et <strong>de</strong> ne point passer<br />

outre. Ma femme trouvait bon toutefois, pour ne pas me refuser tout, que je prisse la res‐<br />

ponsabilité du loyer <strong>de</strong> la maison pendant les <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rnières années du bail et quʹimmé‐<br />

diatement je donnasse 1000f ou 1200f, moitié en meubles pour suppléer à lʹinsuffisance <strong>de</strong><br />

ceux <strong>de</strong> lʹétablissement, moitié en argent pour les autres besoins. Mais cela ne comble rien,<br />

nʹaplanit rien, il faut une somme ron<strong>de</strong>, un peu plus ron<strong>de</strong> même que vous ne le paraissez<br />

croire. Dʹabord 4.000f <strong>avec</strong> vos 2.000f présumés <strong>de</strong> bénéfice en fin dʹannée, pour compléter<br />

le payement à faire à M. Dufour. De plus, pour assurer le loyer <strong>de</strong> la maison durant la pre‐<br />

mière année, 4.000f encore; pour la remise en état du mobilier 1500f., pour premières<br />

avances et dépenses courantes 2.000f. En tout, cela donne 11.500f et nous nʹavons pour y<br />

pourvoir que 1000f, à prélever peut‐être sur votre pension et autant que je puis offrir; reste<br />

toujours, à prendre au mieux les choses, un déficit <strong>de</strong> 8 à 9000f. Vous remarquerez que ce<br />

calcul repose sur la prévision, je lʹavoue peu admissible, dʹun non succès absolu.<br />

Je suis allé voir M. Marziou <strong>avec</strong> lʹintention <strong>de</strong> lui offrir 1/3 dans le bénéfice, sʹil<br />

voulait avancer cette somme, afin quʹune large chance lui fut donnée en avantage, si quel‐<br />

que chance pouvait être à courir en perte. La proportion était basée dʹailleurs, comme nous<br />

lʹavons dit, et sur lʹâge et sur le caractère <strong>de</strong> M. Marziou qui nous obligeait, tout en<br />

contractant un engagement <strong>avec</strong> lui, à lui donner appui et force contre nous‐mêmes. Les<br />

<strong>de</strong>ux autres tiers du bénéfice <strong>de</strong>vaient, dans ma pensée, appartenir, lʹun à vous, lʹautre à<br />

moi, et servir à compléter le payement <strong>de</strong> lʹétablissement.<br />

M. <strong>de</strong> la Noue 68 sʹest trouvé là au moment <strong>de</strong> ma visite à M. Marziou et jʹai pu faire<br />

ma proposition à ce <strong>de</strong>rnier <strong>avec</strong> dʹautant plus dʹassurances quʹil pouvait avoir un conseil<br />

tout naturel dans un ami entièrement désintéressé. Sur simple exposition <strong>de</strong>s faits lʹun et<br />

lʹautre ont pris feu et <strong>de</strong>mandé ar<strong>de</strong>mment la réalisation <strong>de</strong> notre projet, sʹoffrant à lʹenvie<br />

à y concourir comme à chose sainte et utile pour tous nos amis chrétiens. Mais, en <strong>de</strong>rnier<br />

résultat, ni lʹun ni lʹautre nʹont actuellement disponible la somme quʹil nous faudrait et ne<br />

peuvent assurer expressément quʹà temps fixe ils pourraient la présenter. M. Marziou est<br />

appelé en ce moment par sa famille pour reddition <strong>de</strong> comptes, mais cela peut durer un<br />

certain temps; sa majorité dʹailleurs nʹest point encore sonnée, enfin il serait à craindre que<br />

sa famille dans une légitime sollicitu<strong>de</strong> pour la gestion <strong>de</strong> sa fortune nʹen réclame la direc‐<br />

68 Un article du Bulletin <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> St Vt-<strong>de</strong>-P., intitulé Les origines <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> St-Vincent-<strong>de</strong>-Paul, relate l'épiso<strong>de</strong> <strong>de</strong> la<br />

réunion au cours <strong>de</strong> laquelle les membres fondateurs <strong>de</strong> la Société se retrouvèrent pour prendre une grave décision: <strong>de</strong>vait-on, oui<br />

ou non, accueillir au sein du groupe un nouveau membre, en la personne <strong>de</strong> Gustave Colas <strong>de</strong> la Noue? Dès la 3 e ou 4 e réunion,<br />

soit le 7 ou le 14 mai 1833, G. <strong>de</strong> la Noue fut admis dans le petit cercle et considéré comme le 7 e membre, puisque Bailly n'était<br />

pas à proprement parler membre du petit groupe. Un premier tournant est pris ce jour-là, car ce ne fut pas sans hésitation que le petit<br />

noyau fondateur se décida à admettre un membre supplémentaire, craignant, en s'étendant, <strong>de</strong> rompre le charme <strong>de</strong> leur intimité<br />

première. De la Noue fera partie <strong>de</strong>s commissions constituées en décembre 1834 et janvier 1835 pour examiner la proposition<br />

d'Ozanam <strong>de</strong> scin<strong>de</strong>r la Conférence en plusieurs sections (Positio, p.81-82).<br />

66


tion <strong>avec</strong> assez dʹinstance pour lier les mains à notre ami. Il partira donc sous peu et il es‐<br />

père pouvoir nous donner réponse dans un délai assez court; mais vous et moi savons as‐<br />

sez les choses pour ne pas asseoir une détermination et conclure arrangement sur <strong>de</strong>s ba‐<br />

ses aussi peu assurées. Je ne vois dʹautre part aucune voie ouverte, la pensée <strong>de</strong> lʹopposi‐<br />

tion si énergique <strong>de</strong> votre mère mʹafflige dʹailleurs et ne me permet pas <strong>de</strong> rechercher aussi<br />

librement que je lʹeusse voulu les ressources qui pourraient par hasard exister encore. Je<br />

nʹai même pas par volonté expresse tenté celles que vous mʹaviez indiquées, car il vous<br />

appartient et non à moi dʹapprécier le <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> liberté légitime qui vous reste sans man‐<br />

quer au respect et à la soumission que vous <strong>de</strong>vez à votre famille. Je me borne donc et me<br />

bornerai à la simple exécution <strong>de</strong> vos instructions. Il me reste à voir M. Dufour. Je nʹai pu<br />

le rencontrer. Jʹy retournerai ce soir. En tout état <strong>de</strong> cause, jʹoffrirai vous et moi à son choix<br />

pour surveiller la maison gratuitement durant tout le temps quʹil voudrait sʹen absenter.<br />

Ce sera un bien faible dédommagement <strong>de</strong> lʹincertitu<strong>de</strong> où nous lʹavons tenu jusquʹici. Il<br />

ne faut pas dʹailleurs espérer quʹil se prête à aucune conciliation du genre <strong>de</strong> celle que<br />

vous lui aviez déjà proposée, cʹest‐à‐dire <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r la propriété <strong>de</strong> lʹétablissement. Je le<br />

crois donc, mon cher ami, je puis consigner ici, bien assurément, la rupture absolue <strong>de</strong> nos<br />

projets et dire adieu <strong>avec</strong> vous à cet agréable rêve.<br />

Je puis lʹécrire, en toute vérité, ce que jʹen regrette le plus cʹest vous, cʹest lʹappui<br />

chrétien que jʹespérais trouver dans notre association. Dieu y pourvoira et me soutiendra<br />

lui‐même peut‐être, priez‐le pour cela, je vous en conjure, mon ami, restons unis par la<br />

prière au moins, si nous <strong>de</strong>vons autrement être séparés. Mais jʹy songe, abandonnez‐vous<br />

donc Paris? Et pourquoi? On ne peut guère étudier aisément que là! Nʹy passerez‐vous<br />

donc point au moins une partie <strong>de</strong> votre temps? Votre lettre semble dire non, revenez sur<br />

ce sujet dans votre prochaine lettre. Adieu. je vous dirai mon entretien <strong>avec</strong> M. Dufour.<br />

A vous <strong>de</strong> cœur en Jésus‐Christ<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Deman<strong>de</strong>z pour nous <strong>de</strong>ux les prières <strong>de</strong> M. Lecomte.<br />

41 à M. Levassor<br />

Réactions <strong>de</strong> lʹabbé Dufour. Malgré son échec, le projet a accru lʹunion fraternelle <strong>avec</strong> M. Levassor.<br />

Mercredi 18 mars 1835<br />

Comme il était facile <strong>de</strong> le prévoir, mon cher ami, le pauvre M. Dufour a paru bien<br />

mortifié <strong>de</strong> la conclusion <strong>de</strong> notre affaire. Jʹai eu beau faire, préparer la chose, lʹadoucir,<br />

lʹatténuer, le coup était ru<strong>de</strong> et il lʹa vivement ressenti. Je dois ajouter toutefois que cette<br />

impression est <strong>de</strong>meurée personnelle en lui et que, tout en regrettant lʹincertitu<strong>de</strong>, les dé‐<br />

lais fâcheux que tout cela entraînait pour lui, il nʹa montré ni amertume ni aigreur contre<br />

nous. Dieu, il faut lʹespérer, qui pèse et compense toutes choses, acceptera le sacrifice quʹil<br />

a eu ici à lui offrir et lui en rendra le prix. Du reste, aucun arrangement autre que celui dé‐<br />

jà préparé entre vous et lui ne lui a paru acceptable; il veut, <strong>avec</strong> raison, en retournant au<br />

S t Ministère, y vaquer libre <strong>de</strong> tout soin étranger et <strong>de</strong> seule responsabilité en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> ses<br />

<strong>de</strong>voirs ecclésiastiques. Il paraissait désirer votre prompt retour et craignait en particulier<br />

que la conférence <strong>de</strong> droit ne fût encore interrompue vendredi. Vous jugerez bon, sans<br />

doute, mon ami, <strong>de</strong> lui écrire au plus tôt pour vous entendre <strong>avec</strong> lui sur tout point.<br />

67


Voilà tout ce que jʹai à vous dire aujourdʹhui sur cette gran<strong>de</strong> affaire, si longtemps<br />

objet <strong>de</strong> nos entretiens et méditations; il y a peu dʹapparence quʹelle y tienne désormais<br />

une large place; et pourtant, je ne saurais trop dire pourquoi jʹattends toujours, comme sʹil<br />

<strong>de</strong>vait survenir quelque péripétie, quelque retour inattendu; mais jʹai bien soin <strong>de</strong> ne pas<br />

voir là un pressentiment, mais un simple effet <strong>de</strong> lʹhabitu<strong>de</strong>, jusquʹici prise, <strong>de</strong> regar<strong>de</strong>r la<br />

situation comme arrêtée et presque certaine. Dans quelques jours cette <strong>de</strong>rnière impres‐<br />

sion sʹeffacera aussi et il ne restera plus trace en notre vie <strong>de</strong> tout ce beau plan dʹavenir.<br />

Quʹil en reste, cher ami, une union plus intime entre nous, quelques doux souvenirs<br />

dʹépanchement et dʹamitié, une fraternité plus sainte en J.C. et pour ma part ces <strong>de</strong>rniers<br />

mois ne seront pas perdus.<br />

Adieu, écrivez‐moi au plus tôt<br />

Votre ami, frère en J.C.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

42 à M. Pavie<br />

Encouragements, après lʹéchec <strong>de</strong> son projet <strong>de</strong> mariage, à tirer les leçons du passé. Leur ami Gavard a perdu sa<br />

mère. Eloge du jeune Edouard Guépin. Lacordaire à Notre‐Dame. MLP. exhorte son ami à donner à La Gerbe une<br />

note plus catholique.<br />

2 avril 1835<br />

Où en êtes‐vous, mon cher Victor, votre pauvre cœur, si ulcéré, a‐t‐il retrouvé un<br />

peu <strong>de</strong> calme et <strong>de</strong> repos. De toutes vos lettres, la <strong>de</strong>rnière que vous mʹavez écrite est la<br />

plus triste et celle qui mʹa le plus tourmenté. Cependant, le premier moment passé, je nʹai<br />

pu trouver en moi le moindre regret pour le fond <strong>de</strong> cette chose. Votre vie nʹallait pas par<br />

là dans sa véritable voie, tout votre être nʹeût pu ressortir et avoir sa valeur. Les années<br />

dʹar<strong>de</strong>ur et dʹimagination passées, vous ne vous seriez pas, comme il vous le faut, trouvé<br />

au centre dʹune vraie famille <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s <strong>de</strong>voirs tout naturellement déduits dʹune situation<br />

bonne et simple. Gar<strong>de</strong>z la voie commune, allez, mon ami, cʹest la meilleure. Cʹest une<br />

gran<strong>de</strong> audace <strong>de</strong> se faire exception et si les motifs ne sont alors pleinement purs et justi‐<br />

fiés <strong>de</strong>vant Dieu, il en résulte une vie constamment tiraillée <strong>de</strong> droite et <strong>de</strong> gauche, pénible<br />

à suivre et dont la fin reste incertaine. Vous avez <strong>de</strong> pleines et larges facultés, regar<strong>de</strong>z<br />

bien quel meilleur et plus parfait emploi vous en pouvez faire, non pour vous seul, mais<br />

pour tous, et faites‐le pendant que le choix vous reste ouvert et libre. Dieu est venu à votre<br />

ai<strong>de</strong> pour cette fois, il arrache violemment à vos mains dʹenfant un jouet terrible qui pou‐<br />

vait vous briser; mais lʹexpérience mûrit et rend homme. Dieu vous laissera maître peut‐<br />

être désormais, la responsabilité <strong>de</strong> vous‐même vous restera, pensez‐y. La volonté est un<br />

ru<strong>de</strong> far<strong>de</strong>au à porter. Ecrivez‐moi bientôt, mon ami, pour mʹassurer que vous êtes au‐<br />

jourdʹhui plus rassis, que le côté défectueux <strong>de</strong> tout ce passé vous apparaît maintenant<br />

clairement, que vous y renoncez <strong>de</strong> cœur et ne voulez plus laisser désormais à lʹimagina‐<br />

tion part si gran<strong>de</strong> dans lʹordre <strong>de</strong> votre avenir. Pardonnez‐moi <strong>de</strong> prendre si exclusive‐<br />

ment les choses dʹun seul côté. Je nʹétais que trop disposé, vous le savez, à les voir favora‐<br />

blement tant quʹil y eut moyen <strong>de</strong> le faire; la situation me semble aujourdʹhui tranchée du<br />

côté négatif et jʹy appuie dʹautant plus fortement que votre intérêt, comme ma propre in‐<br />

clination, mʹy poussait <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux parts à la fois.<br />

68


Vous avez appris sans doute <strong>de</strong> notre ami Gavard la perte quʹil a faite <strong>de</strong> sa mère. Il<br />

a veillé près dʹelle trois jours et trois nuits pour avoir un <strong>de</strong>rnier regard ou un mot dʹadieu,<br />

mais il nʹy avait plus regard ni parole et notre pauvre ami nʹa rien obtenu. Où va donc<br />

lʹâme, en quel réduit se cache‐t‐elle alors, et par quelle voie secrète passe‐t‐elle <strong>de</strong> ce<br />

mon<strong>de</strong> au mon<strong>de</strong> meilleur? Partir ainsi à la dérobée, cʹest bien triste, et pour qui sʹen va et<br />

pour qui reste, nʹest‐ce pas ami, que vous ne choisiriez pas <strong>de</strong> mourir ainsi?<br />

Jʹai revu notre ami Ed. Guépin, cette âme est, je lʹespère, bien acquise à Dieu. Je nʹai<br />

vu en aucune autre un abandon si naïf, une volonté si simple et si ouverte pour la vérité. Je<br />

crois que Dieu et lui sʹaimeront tendrement.<br />

M. Lacordaire, vous le savez, fait merveille à Notre‐Dame et cela est dʹautant plus<br />

consolant que lʹempressement <strong>de</strong> lʹauditoire dépasse <strong>de</strong> beaucoup le mérite <strong>de</strong> lʹenseigne‐<br />

ment et montre quʹil y a disposition provi<strong>de</strong>ntielle dans les esprits. Il y a ici vraiment bien<br />

<strong>de</strong>s motifs dʹespérance. Jʹespère que cela vous gagne et quʹil est <strong>de</strong> même autour <strong>de</strong> vous.<br />

Vous, ami, foyer, là‐bas, <strong>de</strong> toute union, poussez donc un peu dans cette voie <strong>de</strong> charité<br />

tous ceux dont Dieu vous a fait le chef. Transfigurez votre Gerbe, ami, cela serait beau et<br />

digne <strong>de</strong> vous. Lʹaffaire Levassor aujourdʹhui tuée sans retour. Adieu, mon très cher Vic‐<br />

tor, aimez‐moi, je vous aime tendrement.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

43 à M. Pavie<br />

Maladie dʹEdouard Guépin. Piété et confiance du jeune mala<strong>de</strong>. A son chevet, MLP. a le sentiment <strong>de</strong> la présence<br />

<strong>de</strong> Dieu. Il exprime à V. Pavie sa joie <strong>de</strong> le savoir à nouveau fiancé.<br />

25 mai 1835<br />

Mon cher Victor,<br />

La situation <strong>de</strong> notre pauvre Edouard ne semble pas sʹaméliorer; elle se maintient<br />

seulement. Je ne sais si cʹest avantage, car lʹétat est bien grave; il y a, disent les mé<strong>de</strong>cins,<br />

<strong>de</strong>s cavernes dans le poumon, et en effet <strong>de</strong>s vomissements à peu près périodiques <strong>de</strong> ma‐<br />

tières muqueuses annoncent que ces creux intérieurs se remplissent et se vi<strong>de</strong>nt constam‐<br />

ment. Cʹest à cela quʹon attribue lʹinflammation et la fièvre continue. Les mé<strong>de</strong>cins es‐<br />

sayent <strong>de</strong> cicatriser le mal, mais en tâtonnant et comme doutant dʹeux‐mêmes et <strong>de</strong> leurs<br />

remè<strong>de</strong>s. Béni soit Dieu en qui lʹespérance nous reste, quand tout se trouble et défaille au‐<br />

tour <strong>de</strong> nous. Ainsi pense le pauvre mala<strong>de</strong> dont la piété et la confiance vont croissant en<br />

<strong>de</strong>gré admirable. Voilà, dit‐il, en montrant le Christ, mon seul et véritable mé<strong>de</strong>cin! Aussi<br />

prie‐t‐il presque à toutes les heures <strong>avec</strong> une simplicité, une can<strong>de</strong>ur qui ravissent. Hier, il<br />

a lui‐même <strong>de</strong>mandé à son confesseur que la communion lui fût donnée, et ce matin le S t<br />

Viatique <strong>avec</strong> lʹExtrême‐onction quʹon ne sépare pas, lui ont été conférés. Comment en<br />

pleine connaissance, sans lʹombre <strong>de</strong> soupçon sur le danger <strong>de</strong> sa position, le mala<strong>de</strong> a dé‐<br />

siré ce remè<strong>de</strong> suprême, comment le bon père, que cela terrifiait, ne sʹy est pas opposé?<br />

Comment les gens dʹéglise ont traversé inaperçus, cette maison, ont trouvé près du lit le<br />

père et moi tout seuls, sans amis étrangers et importuns, sans survenue <strong>de</strong> mé<strong>de</strong>cins ni au‐<br />

tres pour interrompre la sainte cérémonie? Comment? Faut‐il le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r? Dieu le vou‐<br />

lait, tout était dit. Cʹest pour moi une gran<strong>de</strong> responsabilité <strong>de</strong> moins, cher ami, que le<br />

pauvre enfant, en ce mon<strong>de</strong>, soit remis aux mains <strong>de</strong> son père, et pour lʹautre, aux mains<br />

<strong>de</strong> Dieu, que ce dépôt regar<strong>de</strong> à cette heure et qui saura bien y veiller. Nous avons <strong>de</strong>s<br />

69


heures bien tristes près <strong>de</strong> ce lit <strong>de</strong> souffrance, mais ce quʹil nʹappartient quʹà Dieu dʹopé‐<br />

rer, il en est <strong>de</strong> bien calmes et <strong>de</strong> bien douces. Celle‐là certes est du nombre. Nous pleu‐<br />

rions mais sans effort et parce que lʹâme pleure en se sentant si près <strong>de</strong> Dieu; quʹil fût là,<br />

aucun doute pour nul <strong>de</strong> nous, car il parlait à chacun <strong>de</strong> nous, au mala<strong>de</strong> surtout qui visi‐<br />

blement sʹentretenait bouche à bouche <strong>avec</strong> lui. Que nʹétiez‐vous là, ami, vous que les<br />

gran<strong>de</strong>s choses touchent si fermement. Que nʹêtes‐vous là encore à dʹautres instants. Lors‐<br />

que nous sommes seuls tous trois, Edouard, son père et moi, et cela se trouve presque cha‐<br />

que soir, à la tombée du jour, le pauvre ami <strong>de</strong>man<strong>de</strong> quʹon lui récite une dizaine <strong>de</strong> cha‐<br />

pelet. Alors lʹun <strong>de</strong> nous commence, lʹautre répond, le mala<strong>de</strong> suit et le Ciel <strong>de</strong>scend sur<br />

nous. Cʹest à ce moment un calme, une paix dont nul, sʹil nʹest chrétien comme vous, ne<br />

saurait comprendre la douceur et tout cela pourtant au lit dʹun mourant, entre père et<br />

frère, près <strong>de</strong> se quitter peut‐être pour toujours. Oh, non, dʹautres nʹont point un Dieu<br />

comme le nôtre et qui traite ainsi ses enfants.<br />

Je passe sans aucune peine <strong>de</strong> ce sujet à un autre qui vous touche personnellement,<br />

cher ami, et moi, par contrecoup, comme il est juste. Les larmes <strong>de</strong> joie et les larmes <strong>de</strong> tris‐<br />

tesse nʹont‐elles pas même source, et quand elles coulent sur notre joue, qui donc pourrait<br />

leur donner un nom? Donc, cher ami, voilà lʹordre et la paix revenus en vous. Je nʹen vou‐<br />

drais dʹautre preuve que votre lettre <strong>de</strong> si doux, <strong>de</strong> si facile épanchement. Jamais, ami, je<br />

nʹen reçus <strong>de</strong> vous qui fut plus simple, plus fraîche, plus naïve. Il y avait émanation et re‐<br />

flet évi<strong>de</strong>nt, il y avait eu déjà communication <strong>avec</strong> la noble et franche nature que vous<br />

aviez approchée et ce seul contact avait déjà son effet. Entouré que vous êtes <strong>de</strong> bons et<br />

sages conseils, guidé dʹailleurs dʹen haut bien sensiblement, vous nʹavez que faire, ami, <strong>de</strong><br />

mon assentiment, mais librement, pleinement pourtant, je vous lʹénonce ici pour ma pro‐<br />

pre joie, cette chose me plaît, me charme sans restriction, elle est dans le vrai, dans lʹordre,<br />

dans le véritable amour. Jʹaime tendrement et en sœur cette jeune fille, et, tenez‐le pour<br />

certain, à notre première rencontre, nous nous tendrons la main et seront amis pour la vie.<br />

Cʹest une contre‐épreuve aussi, qui se trouve en une affection profon<strong>de</strong> et vraie comme la<br />

nôtre; et si, dans un sentiment, il nʹy avait pas accord et sympathie pour tous <strong>de</strong>ux, il y au‐<br />

rait juste doute à prendre sur ce sentiment. Ici pleine unité. Marchez donc vite, ami, et par‐<br />

lez‐moi tout en marchant. Vous me faites vraiment tort dʹailleurs, en supposant que jʹeusse<br />

aimé le sacrifice insensé que vous aviez rêvé. Je nʹentends pas ainsi le sacrifice; rien nʹest<br />

beau à mes yeux <strong>de</strong> ce qui nʹest pas bon, et nʹest pas bon ce qui ne rend lʹâme ni plus belle,<br />

ni meilleure, ni plus fructueuse, qui la remplit <strong>de</strong> vi<strong>de</strong> seulement et la laisse flottante à tout<br />

vent; non, tout sacrifice à mes yeux, doit avoir son principe en <strong>de</strong>hors du moi, et ici, quel‐<br />

que noble et généreux que voulût être le moi, cʹétait le moi toujours, partant point <strong>de</strong> vrai<br />

sacrifice.<br />

Vous <strong>de</strong>vez pensez, la chose prise ainsi, tout ce que votre bonne nouvelle a dʹheu‐<br />

reux et <strong>de</strong> consolant pour moi. Dites mʹen donc beaucoup <strong>de</strong> choses encore, je respire si li‐<br />

brement par là que jʹy prends plaisir.<br />

Adieu, respect et affection à tous. Vous ai‐je chargé <strong>de</strong> dire à Cosnier toute ma joie<br />

<strong>de</strong> son retour à nous; jʹy ai pensé bien <strong>de</strong>s fois et senti mon affection pour lui doublée.<br />

Cʹest peut‐être mal, mais je ne puis me le dissimuler, jʹaime tout le mon<strong>de</strong> autant que je le<br />

puis, mais une irrésistible sympathie mʹentraîne, presque malgré moi, vers tout vrai catho‐<br />

lique. Priez Dieu pour Edouard. Adieu.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

70


44 à M. Pavie<br />

Félicitations pour son mariage. Guépin, leur ami mala<strong>de</strong>, va mieux.<br />

12 juin 1835<br />

Il ne me reste plus cher ami quʹà vous féliciter, puisque la gran<strong>de</strong> chose dont vous<br />

mʹaviez dit le projet touche maintenant à sa réalisation. Cʹest une pleine joie pour moi <strong>de</strong><br />

voir votre vie si bien commencée jusquʹici, se rester fidèle à elle‐même et sʹouvrir un large<br />

passage dans lʹavenir. Mes vœux vous ont suivi dès longtemps pas à pas; ils vous accom‐<br />

pagneront, cher ami, surtout aux jours solennels qui se préparent pour vous 69 . Peu dʹheu‐<br />

res se passeront sans quʹune prière, un souvenir, un muet regard à Dieu nʹappelant sur<br />

vous sa bénédiction sainte, et vous ne courez guère risque <strong>de</strong> mécompte si, à tout instant<br />

heureux ou grave pour vous, vous dites: et lui aussi là‐bas, il pense à nous, il prie pour<br />

nous.<br />

Nʹoubliez pas <strong>de</strong> me dire bientôt le jour et ensuite lʹheure, afin que jʹy sois présent<br />

par lʹâme, et que vous‐même me sentiez près <strong>de</strong> vous.<br />

Je crois, cher ami, que pour don <strong>de</strong> noces Dieu vous accor<strong>de</strong>ra <strong>de</strong> serrer encore la<br />

main à notre Edouard. Depuis quelques jours une apparence <strong>de</strong> mieux nous laissait un<br />

peu dʹespérance. Tout en y donnant confiance moi‐même je nʹosais vous lʹécrire, car être<br />

déçu après est si amer! Mais pourquoi ne pas vous associer à un sentiment si doux quʹil<br />

commence à poindre pour que rien nʹen soit perdu pour vous; espérez donc un peu, ami,<br />

et si jamais vous revoyez le pauvre mala<strong>de</strong>, criez en bien haut grâce à Dieu. Je vous le dis,<br />

moi qui lʹai constamment vu, ni les mé<strong>de</strong>cins, ni les soins ne lʹont guéri. Un mois durant,<br />

les mé<strong>de</strong>cins ont renié leur art, disant: il mourra; mais Dieu, que mille voix à la fois invo‐<br />

quaient chaque jour, répondait: Non, il ne mourra pas. 70 Dieu aura dit vrai. Jʹy compte. Les<br />

mé<strong>de</strong>cins auront menti.<br />

Mais cʹest assez parlé souffrance et mort, à qui <strong>de</strong>vant soi sent tant <strong>de</strong> force et <strong>de</strong><br />

vie; les parts sont bien inégales en ce mon<strong>de</strong>. Faites, ami, que la vôtre soit la meilleure,<br />

quoique la plus douce. Offrez votre bonheur à Dieu pour quʹil lʹépure et quʹil nʹen soit<br />

point jaloux. Comparez votre sort à celui dʹEdouard, ou plutôt, ô mon ami, éloignez tout<br />

ceci. Aimez, aimez ar<strong>de</strong>mment. Vivez en plénitu<strong>de</strong>, mais toujours, toujours bénissez Dieu.<br />

Votre frère et ami Le <strong>Prevost</strong><br />

45 à M. Maillard<br />

Remerciements <strong>de</strong> sa lettre écrite après le mariage <strong>de</strong> V. Pavie. Leur ami Gavard lui a fait, <strong>de</strong> vive voix, le récit <strong>de</strong><br />

lʹinoubliable journée.<br />

12 août 1835<br />

Je vous sais bien bon gré, très cher enfant, <strong>de</strong> mʹavoir si vite donné quelques signes<br />

<strong>de</strong> souvenir, malgré les joies dʹun retour, le tumulte enivrant dʹune fête et les mille affec‐<br />

tions dont on vous entoure; la part que vous mʹavez faite au milieu <strong>de</strong> tout cela mʹen <strong>de</strong>‐<br />

vient plus précieuse; votre chère petite lettre ira <strong>avec</strong> mes mieux aimées, mes plus choisies,<br />

69 C'est le 12 juillet 1835, un mois après, jour pour jour, qu'en l'église <strong>de</strong> Saint-Melaine, près d'Angers, Victor Pavie épousera Louise<br />

Vallée.<br />

70 Car il a reçu le sacrement <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s. L'amélioration <strong>de</strong> sa santé va lui permettre <strong>de</strong> regagner Angers et d'y prolonger sa vie, une<br />

dizaine <strong>de</strong> mois encore, jusqu'en mai 1836.<br />

71


<strong>avec</strong> celles que je nʹai pas besoin <strong>de</strong> relire que je regar<strong>de</strong> seulement parfois parce que les<br />

regar<strong>de</strong>r me satisfait.<br />

Notre ami Gavard nʹa trompé ni votre attente, ni la mienne; dès lʹarrivée il mʹa<br />

conduit sous les arbres au frais et là, mʹayant fait asseoir, sans désemparer trois heures du‐<br />

rant, il mʹa minutieusement raconté faits paroles et gestes. Que notre très cher Victor fût le<br />

sujet presque unique <strong>de</strong> cette longue causerie, cʹétait <strong>de</strong> droit, mais les autres non plus<br />

nʹont été oubliés, vous surtout, cher ami, et votre si bonne famille y avez eu la place qui<br />

vous appartenait, cʹest dire gran<strong>de</strong> et <strong>de</strong> prédilection comme nos sentiments pour vous.<br />

Jʹai su ainsi le succès <strong>de</strong> vos vers; je lʹavais bien prévu, ce sont les meilleurs, les mieux ins‐<br />

pirés que vous ayez jamais faits: que vos larmes soient venues <strong>avec</strong> comme double hom‐<br />

mage à notre bien‐aimé Victor, rien <strong>de</strong> plus simple, le tout venait <strong>de</strong> même source. Il mé‐<br />

rite bien dʹêtre aimé ainsi, et vous, cher ami, le plus jeune, le plus candi<strong>de</strong> <strong>de</strong> tous ses amis<br />

vous étiez bien digne <strong>de</strong> nous servir dʹorgane; votre voix parlait pour nous tous; oh! tel<br />

que je le sais, le cœur <strong>de</strong> notre ami a dû vibrer bien haut à pareille harmonie! le beau, le<br />

ravissant souvenir pour vous, cher enfant, bénissez Dieu, car à <strong>de</strong>s millions dʹautres dans<br />

toute leur vie, il nʹen concè<strong>de</strong> point un pareil! Et savez‐vous, ami, pourquoi à vous plutôt<br />

quʹà eux telle faveur est accordée; cʹest dʹabord parce quʹil vous aime par‐<strong>de</strong>ssus les autres,<br />

car son amour est libre, puis à vingt ans votre cœur est pur encore, cela explique tout, per‐<br />

sévérez, cher enfant, et le présent vous est un gage <strong>de</strong> lʹavenir.<br />

Je vous écris à la fin dʹune longue et fatigante séance <strong>de</strong> bureau, et si mon cœur, à<br />

défaut du reste, ne poussait ma plume, je nʹeusse pas tenté <strong>de</strong> vous écrire. Je tenais à vous<br />

dire au plus vite et par la première occasion, quelques mots au moins en acompte sur les<br />

autres lettres que je pourrai, jʹespère, vous écrire.<br />

Cʹest <strong>Léon</strong> qui sʹen charge: pauvre garçon, <strong>de</strong>puis quelque temps il était un peu dé‐<br />

laissé. Angers sans doute lui gar<strong>de</strong> compensation. Je pense sans cesse à notre Edouard, di‐<br />

tes‐le lui, je voulais lui écrire 71 aussi, mais je ne puis même mener ce billet à fin. Quand je<br />

ne pouvais ici, durant ses souffrances, lui parler <strong>de</strong> peur <strong>de</strong> le fatiguer, je lʹembrassais, em‐<br />

brassez‐le pour moi.<br />

Gavard mʹa fait aimer tendrement votre famille, jʹaimerai ne lui être pas étranger<br />

entièrement; dites en particulier mille choses amicales à votre jeune frère, nous sommes<br />

déjà, vous savez, un peu amis.<br />

Adieu, très cher enfant, à bientôt, tenez‐moi bien près <strong>de</strong> vous, je vous ai moi tou‐<br />

jours ici.<br />

<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong><br />

46 à M. Levassor<br />

Excuses pour avoir trop insisté sur lʹavenir <strong>de</strong> son ami. Nouvelles <strong>de</strong>s pauvres dont sʹoccupait M. Levassor. Voca‐<br />

tions du Séminaire dʹIssy‐les‐Moulineaux. La fête <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> St‐Vt‐<strong>de</strong>‐P., le 19 juillet, a été une belle réussite.<br />

18 août 1835<br />

Mon cher ami,<br />

Vous paraissez bien décidé, mon cher ami, à ne point donner <strong>de</strong> vos nouvelles, ce‐<br />

pendant il me serait bien doux dʹen recevoir. Je crains que lʹar<strong>de</strong>ur, peut‐être indiscrète, <strong>de</strong><br />

71 E. Guépin reparti pour l'Anjou, c'est <strong>Léon</strong> Cosnier qui va porter à Angers cette lettre <strong>de</strong>s tinée à A. Maillard.<br />

72


mes instances au sujet <strong>de</strong> votre avenir, ne vous ait, pour plus <strong>de</strong> sûreté, fait prendre ce rôle<br />

silencieux à mon égard; mais, cher ami, un simple avertissement <strong>de</strong> votre part eût suffi<br />

pour me donner plus <strong>de</strong> réserve, et la présente, en particulier, vous prouvera que je puis,<br />

quelque intérêt que mʹinspire cette question, mʹabstenir entièrement <strong>de</strong> lʹabor<strong>de</strong>r.<br />

Je pense que ce point réglé, vous ne serez pas fâché dʹentendre un peu parler <strong>de</strong><br />

tous ceux que vous laissez ici et dont vous gar<strong>de</strong>z, jʹespère, encore quelque souvenir. Je<br />

puis vous tenir au courant, car, <strong>de</strong>puis peu, jʹai vu à peu près tout votre mon<strong>de</strong>. M me<br />

Courbe, quʹun coup <strong>de</strong> soleil avait, vous savez, rendu<br />

assez sérieusement mala<strong>de</strong>, est pleinement rétablie.<br />

Dimanche jʹy ai passé la soirée, jʹy conduisais un jeune<br />

homme fraîchement débarqué et quʹon désire<br />

maintenir en ses bons principes. Jʹai pensé quʹil<br />

nʹétait pas pour cela <strong>de</strong> plus sûr moyen que <strong>de</strong> le faire ami<br />

<strong>de</strong> notre bon Emile. On fêtait ce jour là M me Courbe<br />

(Marie) toute la famille était réunie à table; ces excellentes<br />

gens ne nous ont pas trouvés <strong>de</strong> trop et nous ont ac‐<br />

cueillis <strong>de</strong> leur mieux, la soirée a été fort joyeuse, et<br />

mon Lyonnais est sorti enchanté. Jʹai promis <strong>de</strong><br />

rappeler à votre souvenir toute cette bonne famille qui<br />

vous aime, mon cher ami, dʹune façon bien rare et bien<br />

digne dʹenvie. Une nouvelle: notre ami Marziou est ici <strong>de</strong>puis quelques jours, il vient faire<br />

ses emplettes pour son mariage qui a lieu dans quinze jours. Pauvre enfant! et vraiment à<br />

le voir fatigué, maigri, changé, je ne puis mʹempêcher <strong>de</strong> croire quʹil a raison <strong>de</strong> bien rem‐<br />

plir sa vie, car elle ne semble guère promettre longue durée. Il avait peur <strong>de</strong> moi; le cher<br />

ami me savait donc bien mal; je lʹai embrassé <strong>avec</strong> toute lʹeffusion possible et lʹai vite ras‐<br />

suré.<br />

Connaissiez‐vous, mon ami, M. lʹabbé Dombrée, vous mʹen aviez du moins entendu<br />

parler souvent: à vingt‐huit ans à peine il vient <strong>de</strong> nous quitter. Le jour <strong>de</strong> lʹAssomption,<br />

nous étions tous à St‐Sulpice autour <strong>de</strong> son cercueil. M. lʹabbé Didon, saint prêtre vous sa‐<br />

vez, suivait à pas lent le convoi, lʹabbé Dombrée était son condisciple: ils se reverront bien‐<br />

tôt, il ne paraît pas possible que cela tar<strong>de</strong> même jusquʹà lʹautomne. Cʹétait, je vous lʹas‐<br />

sure, un triste spectacle, mais Dieu parlait aussi dans tout cela, et plus dʹun dans la foule,<br />

enviait le sort <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux prêtres, du premier surtout qui possè<strong>de</strong> au lieu dʹespérer.<br />

M. Cherruel ajourne son projet <strong>de</strong> Séminaire, M. Roger nʹa pas vu sans joie lʹépoque<br />

<strong>de</strong>s vacances lui ouvrir les portes <strong>de</strong>s beaux jardins dʹIssy. Il en est sorti si vite, si vite que<br />

je crains presque du retard pour sa rentrée. Ainsi donc débâcle <strong>de</strong> tous côtés, heureuse‐<br />

ment il reste toujours à Dieu <strong>de</strong>s paysans, <strong>de</strong>s pêcheurs, ceux là nʹayant à quitter que leurs<br />

filets se détachent plus aisément; je commence à comprendre ce mystère. Ce nʹest pas en<br />

temps mauvais seulement, comme ceux dont nous sortons, que le Seigneur recrute là sa<br />

milice, mais toujours. Oh! mon Dieu, vous lʹavez dit: bienheureux les pauvres. M me Meslin<br />

va bien, nous nous occupons <strong>de</strong> lui faire obtenir les 5f <strong>de</strong>s 74 ans; je ne sais encore si nous<br />

aurons succès. M mes Delatre et Dorne passablement aussi.<br />

Nous avons eu une fête admirable le jour <strong>de</strong> la fête patronale <strong>de</strong> notre petite Société.<br />

Lʹarchevêque officiait, 4 Evêques lʹentouraient, lʹEvêque <strong>de</strong> Moulpen a prêché. Le soir ré‐<br />

73


union <strong>de</strong>s frères chez M. Bailly et joie complète. A lʹéglise comme à la soirée, nous étions<br />

plus <strong>de</strong> 100. Cela a dignement clos lʹannée.<br />

Mon pauvre ami Edouard Guépin se trouve encore en ce mon<strong>de</strong>!<br />

Adieu, cher ami, écrivez‐moi et croyez toujours à lʹaffection toute fraternelle <strong>de</strong> vo‐<br />

tre dévoué<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

47 à M. Maillard<br />

Sʹinquiète <strong>de</strong> la santé dʹEdouard Guépin. Il veut savoir si V. Pavie est vraiment heureux et être au courant <strong>de</strong> ce<br />

que fait et lit son jeune ami Maillard.<br />

17 septembre 1835<br />

Cher ami,<br />

Depuis bien longtemps je nʹai point <strong>de</strong> nouvelles <strong>de</strong> notre ami Edouard: je lui ai<br />

écrit bien <strong>de</strong>s fois sans quʹil lui ait été possible, ainsi que je le pensais bien dʹavance, <strong>de</strong> me<br />

faire aucune réponse; mais, en <strong>de</strong>rnier lieu, je le priais <strong>de</strong> recourir à vous et, par votre in‐<br />

termédiaire <strong>de</strong> me tenir au courant <strong>de</strong> sa situation et <strong>de</strong> tout ce qui peut lʹintéresser. Je ne<br />

reçois rien non plus <strong>de</strong> ce côté. Ce silence mʹinquiéterait si je nʹavais dʹailleurs lʹassurance<br />

que vous mʹinformeriez <strong>de</strong> vous‐même, cher ami, <strong>de</strong> tout inci<strong>de</strong>nt nouveau dans la posi‐<br />

tion <strong>de</strong> notre cher mala<strong>de</strong>; jʹespère donc que son état se soutient, mais à défaut <strong>de</strong> chan‐<br />

gement notable et décisif je ne laisserais pas dʹapprendre <strong>avec</strong> un grand intérêt quelques<br />

détails sur sa vie ordinaire et la disposition <strong>de</strong> son esprit. Mes lettres se ressentaient <strong>de</strong><br />

mon absolue ignorance à cet égard, ne sachant sur quel ton lui parler, je me suis tenu dans<br />

une entière insignifiance. Tirez‐moi <strong>de</strong> peine, cher Adrien, dites‐moi ce que jʹaurai à faire<br />

pour distraire un peu notre ami et lui complaire; je le ferai sans retard.<br />

Edouard nʹest pas le seul dont jʹaimerais avoir <strong>de</strong>s nouvelles; Victor, que <strong>de</strong>vient‐il?<br />

Cʹest à peine sʹil faut le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r, il est heureux, mais toutefois <strong>de</strong> sa nature notre âme est<br />

si inquiète quʹelle veut, même en plein repos, être encore rassurée; dites‐moi donc, très<br />

cher enfant, quʹil est heureux, bien heureux, autant que nous le voulions, autant quʹil faut<br />

pour nous faire envie sur ce point, comme sur tant dʹautres.<br />

Vous, enfin, cher ami, que jʹai gardé pour le <strong>de</strong>rnier, dites‐moi, oh! dites‐moi bien<br />

<strong>avec</strong> cette confiance si gentille et à moi si douce, tout ce que vous êtes à cette heure, corps<br />

et âme, amour et pensée; jʹai sur tout cela <strong>de</strong>s droits dʹami, presque <strong>de</strong> père; vous mʹen <strong>de</strong>‐<br />

vez compte, enfant, contez‐moi bien au long tout ce qui vous occupe et vous plaît, vos loi‐<br />

sirs, vos heures choisies, votre vie enfin, pour que je me mire en cela comme dans un rêve<br />

et retrouve dans ces effusions quelque trace confuse <strong>de</strong> mon passé. Ce que jʹaurai en retour<br />

pour vous, cher ami, hélas! je ne saurais le dire! une tendre sympathie et beaucoup dʹaffec‐<br />

tion, cʹest tout ce qui me reste; vous en prendrez, cher ami, tant quʹil faudra et jusquʹà<br />

compte quitte; jamais je ne dirai: cʹest trop.<br />

Vous êtes‐vous souvenu, cher Adrien, <strong>de</strong> quelques livres que vous <strong>de</strong>viez lire en<br />

mémoire <strong>de</strong> moi: <strong>de</strong> Maistre (Soirées) 72 , Lamennais, ou mieux si vous vous y sentez inspiré.<br />

72 Les Soirées <strong>de</strong> Saint-Pétersbourg (1821), ouvrage posthume <strong>de</strong> Joseph <strong>de</strong> Maistre, (1753-1821), homme politique et philosophe<br />

français, adversaire <strong>de</strong> la Révolution française. Dans les Soirées, ou Entretiens sur le gouvernement temporel <strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce, sa<br />

réflexion porte sur le mystère du mal, "cet écueil <strong>de</strong> la raison humaine", reconnaît la nécessité <strong>de</strong> la réparation par le sacrifice, et<br />

s'achève par la découverte du mystère <strong>de</strong> la Croix. (9 e entretien).<br />

74


Jʹy tiens fort, si ce nʹest fait, hâtez‐vous, cher ami, afin que nous ayons un sujet dʹentretien<br />

<strong>de</strong> plus à votre retour. Jʹeusse tant aimé, mon Dieu! que la belle et gran<strong>de</strong> voie où dʹautres<br />

nʹentrent quʹen détour, sʹouvrît droite <strong>de</strong>vant vous! Mille et mille nʹont presque pas le<br />

choix; quand vingt ans sonnent pour eux, pauvres égarés, ils sont déjà si loin; le passé les<br />

précipite et les pousse; mais vous, votre choix est libre encore; oh! ami, je ne vous souhaite<br />

quʹune chose, cʹest <strong>de</strong> bien regar<strong>de</strong>r avant <strong>de</strong> choisir.<br />

Adieu, cher enfant, pardonnez‐moi ce petit bout dʹoreille qui se montre, quoique<br />

jʹen aie; adieu, aimez‐moi, écrivez‐moi, puis revenez bientôt. Embrassez Victor, Théodore,<br />

Edouard, <strong>Léon</strong>, tous nos amis, Godard, Cosnier, Nerbonne et dʹautres encore, le plus pos‐<br />

sible. Jʹaime là‐bas chez vous beaucoup dʹamis.<br />

Votre dévoué <strong>de</strong> cœur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

48 à M. Levassor<br />

La vocation sacerdotale <strong>de</strong> M. Levassor se <strong>de</strong>ssine. Mariage <strong>de</strong> leur ami Marziou. La santé dʹEd. Guépin décline.<br />

Nouvelles <strong>de</strong>s pauvres visitées par la Conférence St‐Sulpice.<br />

23 septembre 1835<br />

Mon très cher ami,<br />

Vous ne pouviez me causer une joie plus vive quʹen me donnant la nouvelle conte‐<br />

nue dans votre <strong>de</strong>rnière lettre. Vous avez remis votre sort aux mains <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux saints prê‐<br />

tres, cʹest admirable, mon ami, <strong>de</strong> cette sorte le sacrifice est déjà fait; si, contre mon vœu,<br />

Dieu ne lʹacceptait pas, il ne vous en tiendrait pas moins compte et tout votre avenir, jʹen<br />

suis sûr, en serait mieux selon le cœur du Maître. Ce grand pas fait, il en reste un autre en‐<br />

core difficile à franchir, la volonté peut‐être opposante <strong>de</strong> votre famille; mais Dieu encore a<br />

les cœurs en main, je suis en paix, tout sera pour le mieux. Nʹoubliez pas, mon ami, le vif<br />

et tendre intérêt que mʹinspire cette gran<strong>de</strong> affaire et si quelque inci<strong>de</strong>nt plus décisif sur‐<br />

vient, ne manquez pas <strong>de</strong> mʹen informer.<br />

Il y aura <strong>de</strong>main 8 jours que notre ami Marziou a dû sʹengager en <strong>de</strong>s liens bien du‐<br />

rables pour un esprit si mobile, bien forts, pour une âme si tendre. Pauvre enfant! Un beau<br />

rêve dʹamour, <strong>de</strong> douces joies au foyer est passé <strong>de</strong>vant ses yeux, vite il lʹa voulu saisir;<br />

mais le rêve passé ne lui reste‐t‐il nul regret? Dieu lʹaime, ceci me console. Il était en lutte<br />

pourtant durant son séjour ici, concilier lʹar<strong>de</strong>nte piété quʹil avait eue <strong>avec</strong> les joies mon‐<br />

daines lʹembarrassait un peu, la piété avait forcément fléchi, mais il en restait assez pour<br />

donner bonne espérance à ses amis. Deux jours avant son mariage, il mʹécrivait: ʺOh! mon<br />

ami, quʹil y a loin <strong>de</strong> la sublimité <strong>de</strong>s fonctions que jʹavais choisies au misérable état où je<br />

vais entrerʺ. Prions beaucoup pour lui, mon cher ami, il lʹa <strong>de</strong>mandé et il en a besoin. Il y a<br />

quelques mois, il sʹest consacré à la Ste Vierge, en prenant le St Scapulaire, elle le gar<strong>de</strong>ra<br />

comme son enfant; je ne comptais guère ce jour‐là (jʹétais <strong>avec</strong> lui à la chapelle <strong>de</strong>s Carmes)<br />

que sitôt il faudrait invoquer pour lui lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> notre sainte patronne.<br />

Jʹai reçu récemment <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> notre pauvre Ed. Guépin. Il se trouve toujours<br />

faible, maigre, toussant, ne dormant pas; cʹest une ombre, et pourtant, pauvre enfant! il ne<br />

parle que dʹavenir. Il est pieux toujours; Dieu lui payera ses souffrances, je crois que main‐<br />

tenant elles ne peuvent durer longtemps.<br />

75


Je vais mʹoccuper <strong>de</strong> remettre nos petites ressources pour le loyer; mais il manque<br />

toujours 27f et je le dis à regret, mon ami, je ne vois aucun moyen dʹy pourvoir. Avisez.<br />

M me Meslin se rappelle à votre souvenir; elle a fait courageusement toutes les démarches<br />

pour obtenir les 5f du bureau, elle a un certificat dʹâge, mais je ne sais si on voudra lʹad‐<br />

mettre.<br />

Adieu, mon cher ami, je me recomman<strong>de</strong> toujours à vos prières; pas un seul jour<br />

vous nʹêtes oublié dans les miennes; invoquez aussi pour moi le vénérable M. Lecomte.<br />

A vous en J.C.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

48‐1 à M. Bailly<br />

M. Bailly est indisposé. Les Confrères ont chargé MLP. <strong>de</strong> lui écrire. Activités <strong>de</strong> la Conférence.<br />

Paris, le 23 septembre 1835<br />

Monsieur et ami,<br />

Jʹavais appris à votre porte où je me suis présenté plusieurs fois pour avoir <strong>de</strong> vos<br />

nouvelles, lʹacci<strong>de</strong>nt qui vous retient loin <strong>de</strong> nous; ce nʹétait pas sans regret, je vous assure,<br />

quʹà chaque réunion, je me voyais contraint dʹannoncer que, pour cette fois encore, nous<br />

serions sans vous, car, jugeant du cœur <strong>de</strong> tous par le mien, je savais dʹavance leur peine.<br />

Les fronts hier encore se sont rembrunis à cette annonce, aussi me suis‐je hâté, pour les<br />

épanouir, dʹajouter que, mardi sans faute, la Société retrouverait son prési<strong>de</strong>nt. Votre ex‐<br />

cellente lettre a été lue alors presque tout entière pour fortifier cette espérance.<br />

A lʹunanimité on mʹa prié <strong>de</strong> vous écrire, <strong>de</strong> vous remercier dʹun souvenir si aima‐<br />

ble et surtout <strong>de</strong> lʹaffection tendre et vraiment paternelle quʹelle respire pour nous. Tous<br />

ces enfants sentent, je vous jure, ce que vous valez pour eux ils en sont vivement pénétrés,<br />

et ce sentiment ne sera pas sans force pour les gar<strong>de</strong>r bons et dignes <strong>de</strong> vous. Nous avons<br />

pensé que les grâces les meilleures à vous rendre étaient la prière, aussi nʹavons‐nous pas<br />

clos la séance sans recomman<strong>de</strong>r vous et les vôtres à la miséricor<strong>de</strong> du Seigneur. Puisse‐t‐<br />

il sʹen souvenir et vous gar<strong>de</strong>r précieusement.<br />

Nous sommes bien peu nombreux, cela va sans dire; pourtant nous ne laissons pas<br />

<strong>de</strong> visiter encore une soixantaine <strong>de</strong> familles, lʹargent jusquʹici nʹa pas manqué et le zèle<br />

encore moins. MM. Louis et <strong>de</strong> Lalice visitent la prison <strong>avec</strong> beaucoup <strong>de</strong> persévérance<br />

sans préjudice dʹautres œuvres, on les peut compter désormais parmi les membres les plus<br />

fermes <strong>de</strong> la Société. Tout est resté dans les formes accoutumées; jʹai tenté <strong>de</strong> suivre vos er‐<br />

rements, <strong>de</strong> prendre un peu <strong>de</strong> votre douceur et patience, <strong>de</strong> mʹeffacer humblement et <strong>de</strong><br />

laisser part suffisante à tous. Mais tout cela est en bien petite échelle, comme dix à <strong>de</strong>ux<br />

cents, la proportion est ici bien gardée.<br />

Pour satisfaire sur tout point votre sollicitu<strong>de</strong>, jʹajoute que les santés sont bonnes et<br />

que les absents, au moins pour ceux que je sais, prospèrent et sont en bonne voie. M. Le‐<br />

vassor mʹécrit <strong>de</strong> Chartres, ses affaires tournent bien, il a remis la décision à <strong>de</strong>ux saints<br />

prêtres qui le dirigent là‐bas <strong>de</strong>puis <strong>de</strong> longues années; un autre (M. Decaux, dʹAngou‐<br />

lême) me prie <strong>de</strong> voir M. lʹabbé Buquet pour lui, il désirerait faire à Stanislas une première<br />

année <strong>de</strong> théologie, bien secrètement, sa famille est opposante.<br />

76


Adieu, Monsieur et ami, je nʹai pas besoin en finissant <strong>de</strong> me dire tout vôtre, vous<br />

me savez bien, jʹespère, déjà tout acquis. Faites <strong>de</strong> moi ce que vous voudrez, vos vues en<br />

tout sont si pieuses et si bonnes quʹy concourir me semblera toujours aussi heureux que<br />

sûr.<br />

Je présente à M me Bailly mon hommage, à vous les sentiments respectueux et dé‐<br />

voués <strong>de</strong> Votre très humble et très obéissant serviteur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Un petit groupe se réunissait dans une sorte <strong>de</strong> cercle d’étu<strong>de</strong>s appelé « Conférence dʹhistoire ». Les réunions<br />

avaient lieu chez M. Emmanuel Bailly, professeur <strong>de</strong> Philosophie et Directeur du journal « La tribune catholique ». Parmi<br />

les habitués <strong>de</strong> ce cercle, se trouvaient Ozanam, Lamache, Letaillandier, <strong>Léon</strong> Le Prévost, Lallier ... et quelques autres.<br />

Un camara<strong>de</strong> leur lança un jour ce défi : « ... Vous qui vous vantez dʹêtre<br />

catholiques, que faites‐vous? » Cette interpellation fit réfléchir le groupe .. Lʹun<br />

dʹeux proposa : « Fondons une Conférence <strong>de</strong> Charité ». Cette idée plut à tous ;<br />

mais ils avaient besoin dʹun gui<strong>de</strong> M. et Mme Bailly connaissant bien Sœur Rosalie,<br />

les envoient à la rue <strong>de</strong> lʹEpée <strong>de</strong> Bois. Sœur Rosalie leur enseigne à visiter<br />

lʹindigence à domicile. Ils apprennent <strong>avec</strong> elle à voir Notre Seigneur dans les<br />

pauvres. Leur indiquant les familles à visiter, elle leur donne <strong>de</strong>s avis sur la<br />

manière chrétienne <strong>de</strong> les abor<strong>de</strong>r, <strong>de</strong> les respecter, <strong>de</strong> les considérer comme <strong>de</strong>s<br />

frères, riches en humanité.<br />

Fondée à St Étienne du Mont le 23 avril l833, la Conférence <strong>de</strong> Charité<br />

<strong>de</strong>vint, en février 1834, la Conférence <strong>de</strong> Saint Vincent <strong>de</strong> Paul, qui fut choisi<br />

comme maître et modèle. Le nombre <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> la<br />

Conférence augmenta rapi<strong>de</strong>ment. En 1835, Monsieur Le Prévost<br />

proposa <strong>de</strong> la dédoubler pour en créer une à St Sulpice, et dʹautres<br />

suivaient. Il y eut discussion : les avis étaient très partagés !<br />

Lʹunanimité se fit lorsque celui qui lʹavait proposée dit que lʹidée<br />

venait <strong>de</strong> Sœur Rosalie. Les Conférences se multiplièrent<br />

rapi<strong>de</strong>ment à Paris et en province... Frédéric Ozanam rêvait «<br />

dʹenserrer le mon<strong>de</strong> dans un réseau <strong>de</strong> charité. »<br />

(Cf. : www.filles‐<strong>de</strong>‐la‐charite.org)<br />

49 à M. Pavie<br />

MLP. rend grâce pour le bonheur dont jouit son ami. Lui se voit comme un ʺpauvre vase briséʺ. Nouvelles <strong>de</strong><br />

Montalembert et <strong>de</strong> Lacordaire.<br />

8 octobre 1835<br />

Laisser quinze jours entiers sans réponse une lettre aussi tendre, aussi affectueuse<br />

que la vôtre, cher ami, cʹest bien peu mʹen montrer digne; mais il nʹest pas mal en ce sens<br />

que mon insuffisance témoigne ainsi contre les exagérations <strong>de</strong> votre amitié et me ramène<br />

à ma véritable place; nous y gagnerons tous <strong>de</strong>ux, vous en voyant plus juste, moi en étant<br />

prisé comme je vaux. Je fais réserve bien entendu pour votre confiance en mon dévoue‐<br />

ment à vous et aux vôtres; sur ce point, cher Victor, donnez‐leur carrière, il y a <strong>de</strong> lʹespace;<br />

allez toujours et encore, vous nʹaurez point le bout.<br />

Jʹai senti cela surtout en ces <strong>de</strong>rniers temps, à propos du bonheur qui vous est venu<br />

<strong>de</strong> tant <strong>de</strong> côtés à la fois; ce bonheur, je lʹai goûté comme mien. Je lʹai savouré ici en paix et<br />

ce ressentiment 73 <strong>de</strong> votre vie, cette influence <strong>de</strong> votre étoile sur la mienne ne sʹest point<br />

73 Non pas au sens <strong>de</strong> rancune, mais <strong>de</strong> bonne influence, <strong>de</strong> sentiment éprouvé en retour.<br />

77


démentie; puisse ce parallélisme durer jusquʹà la fin, le mystère <strong>de</strong> la réversibilité nʹaura<br />

pas été sans fruits pour moi.<br />

Vous me paraissez bien pénétré, cher ami, du grand don que le Ciel vous a fait.<br />

Grâces lui en soient rendues. Cʹétait mon grand, mon plus cher vœu à cette heure solen‐<br />

nelle, quʹelle fut bénie <strong>de</strong> Dieu et quʹil vous gardât sous sa main; cette épreuve passée, on<br />

peut le dire en confiance, votre vie entière aura été une, vous la rapporterez sans brèche ni<br />

fêlure au Souverain Créateur. La belle œuvre, ami, quʹune vie ainsi remplie; que je vous<br />

lʹenvie, ou plutôt que jʹaime mon Dieu <strong>de</strong> vous lʹavoir ainsi faite! Que les œuvres dʹart et<br />

les merveilles du génie sont pâles et frêles ombres auprès <strong>de</strong> cette radieuse création! Et<br />

vous voulez que je vous conseille, cher ami, moi, pauvre vase brisé, <strong>de</strong> pièces et <strong>de</strong> mor‐<br />

ceaux. Comparez, ami, et tirez vous‐même le conseil. Que la fin répon<strong>de</strong> au commence‐<br />

ment. Tout sera bien, noble et beau! Dieu sera satisfait!<br />

Continuez, très cher Victor, <strong>de</strong> me faire une petite place à votre foyer, <strong>de</strong> mettre<br />

quelquefois mon souvenir entre votre Louise et vous, je me sens si heureux ainsi; vous êtes<br />

riche, soyez hospitalier; comme le pauvre aussi moi, en recevant cette aumône, je dirai:<br />

ʺDieu vous les ren<strong>de</strong>!ʺ Quʹil vous le ren<strong>de</strong>, oui, en douce paix, en amour pour votre<br />

Louise, en amour pour ceux qui naîtront dʹelle, en amour pour tous, et près et loin; cela<br />

seul est nécessaire et bon, cela seul est digne <strong>de</strong> vous. Ne vous effrayez pas trop <strong>de</strong> quel‐<br />

ques petits froissements inévitables dans une union intime et confiante, cela passe. Le fond<br />

reste quand il est bon, les saillies trop accusées sʹeffacent à la longue et le travail même qui<br />

en résulte reçoit son prix.<br />

Je nʹai guère <strong>de</strong> nouvelles à vous donner <strong>de</strong> nos amis. M. <strong>de</strong> Montalembert est en‐<br />

core en voyage jusquʹà lʹhiver. Il songe beaucoup à se marier; il a une gran<strong>de</strong> carrière à<br />

courir, il y subviendra, je lʹespère. La volonté va chez lui un peu trop ar<strong>de</strong>mment, cʹest ri‐<br />

chesse exubérante et je pense quʹil nʹy a rien à redouter.<br />

M. Lacordaire a quitté sa retraite <strong>de</strong> la Visitation pour plus libre étu<strong>de</strong>, dit‐on, je le<br />

regrette. Il y avait tant <strong>de</strong> calme et <strong>de</strong> paix dans ce couvent <strong>de</strong> pauvres religieuses, leur dé‐<br />

tachement était dʹun si bon conseil, mais M. Lacordaire aura fait pour le mieux. Il est tou‐<br />

jours pieux et humble, comme vous le savez. Au carême il reprendra sa chaire. Nous lʹen‐<br />

tendrons <strong>de</strong> nouveau.<br />

Voilà tout ce que je sais: les choses marchent et se font ici; mais provi<strong>de</strong>ntiellement<br />

et sans que les hommes semblent y avoir gran<strong>de</strong> part; ce nʹest que plus beau; seulement,<br />

on le remarque moins. Cʹest comme une sorte <strong>de</strong> parabole vivante, ceux qui ont <strong>de</strong>s oreil‐<br />

les enten<strong>de</strong>nt, les autres, non!<br />

Mille tendresses au pauvre Edouard, je lui ai écrit il y a peu <strong>de</strong> temps. Jʹessayais ti‐<br />

mi<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> tourner ses yeux vers son vrai avenir. Jʹai craint dʹavoir fait trop ou trop peu;<br />

<strong>de</strong> loin et pas présentement ces choses se font mal. Suivez‐le, ami, jusquʹà la fin.<br />

Souvenir aussi à M. Il tourne très bien, sinon immédiatement, au moins en un<br />

temps il sera <strong>de</strong>s nôtres; son affection pour vous lui est dʹun grand appui. Votre nom pro‐<br />

noncé le remonte <strong>de</strong> cent pieds. Jʹespère par là.<br />

Je ne sais quelle expression assez respectueuse et assez tendre trouver pour votre<br />

bien‐aimée femme. Cherchez pour moi, ami, et parlez, je prononce mot à mot après vous.<br />

Adieu, Votre frère et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

78


Votre bon, très bon père et<br />

Théodore aussi, ne mʹoubliez pas<br />

près dʹeux.<br />

Je vous recomman<strong>de</strong> un beau<br />

livre: La douloureuse Passion <strong>de</strong><br />

N.S.J.C. traduit <strong>de</strong> lʹallemand par M.<br />

Cazalès.<br />

50 à M. Pavie<br />

Son amitié pour lui est désintéressée. Discrète ouverture sur ses relations <strong>avec</strong> sa femme. MLP. homme <strong>de</strong> foi et <strong>de</strong><br />

prière. Nouvelles <strong>de</strong> quelques amis <strong>de</strong> Paris.<br />

2 janvier 1836<br />

Que vous êtes bon, cher ami, dʹinterrompre la douce monotonie <strong>de</strong> votre bonheur<br />

pour me le venir conter; toute la part quʹon en pourrait avoir par la sympathie, je lʹai prise<br />

et la prends à toutes les heures, et je vous sais bien gré, cher Victor, <strong>de</strong> nourrir ce foyer<br />

dʹincessantes effusions; il en a toujours été ainsi <strong>de</strong>puis que nous sommes unis, jʹai tou‐<br />

jours reçu, vous avez toujours versé et ce nʹest pas votre faute si, à la fin, le vi<strong>de</strong> en moi nʹa<br />

pas été rempli. Dans cette <strong>de</strong>rnière lettre, par exemple, il y a <strong>de</strong>s joies à combler un abîme,<br />

<strong>de</strong>s joies à enivrer ma tête, à me navrer le cœur, et pourtant rien <strong>de</strong> tout cela, grâce à Dieu.<br />

Une satisfaction vive, tendre et reconnaissante, cʹest tout ce que je me sens, tout pour vous<br />

et à cause <strong>de</strong> vous. Cʹest bien, nʹest‐il pas vrai, en fait dʹamitié, ce quʹon pourrait dire le pur<br />

amour, sans intérêt aucun ni retour à soi‐même, il y a <strong>de</strong>s grâces dʹétat.<br />

Jʹévite dʹordinaire <strong>de</strong> vous parler <strong>de</strong> moi ou plutôt lʹidée ne mʹen vient pas, nʹayant<br />

rien qui mʹémeuve le plus souvent à ce sujet; que ces quelques mots venus par hasard<br />

vous rassurent donc une fois pour toutes; ma vie peu à peu arrive à la pleine et parfaite in‐<br />

signifiance qui <strong>de</strong>vait être ma part. Je nʹen ai nulle amertume, dʹordinaire même peu <strong>de</strong><br />

peine. Dieu mʹai<strong>de</strong>, les jours se passent, ainsi la fin viendra. Une chose pourtant me donne<br />

quelque regret, cʹest que lʹair où je vis est peu respirable pour mes amis; ils nʹy tiennent<br />

guère; ils viennent tard et sʹen vont vite; encore, voyez‐vous, cʹest là faible inconvénient; je<br />

sais bien courir après, les rejoindre et me remettre à leur pas. Ma femme, cʹest par elle que<br />

jʹaurais dû commencer, comme la plus intéressée ici, a gagné beaucoup sur plusieurs<br />

points; sa santé est infiniment meilleure: elle a repris <strong>de</strong> lʹactivité, <strong>de</strong> la vie; son humeur est<br />

moins irritable, sa susceptibilité moins vive; je lui fais le soir habituelle compagnie; cepen‐<br />

dant elle nʹest pas sans ennui; le mon<strong>de</strong> quʹelle suivrait, à défaut <strong>de</strong> mieux, lʹattire peu;<br />

puis, je mʹy sens, moi, trop forte répugnance; elle irait seule; elle reste donc le plus sou‐<br />

vent. Une gran<strong>de</strong> chose pourrait occuper sa pauvre âme, la foi; hélas! elle arrive, peut‐être;<br />

je lʹattends toujours, car nuit et jour je la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>; mais elle nʹest pas là encore. Priez, ami,<br />

priez ar<strong>de</strong>mment pour nous; songez que cʹest là lʹœuvre, la seule, que le ciel ait donné à<br />

votre ami, et que cela même, sa faiblesse nʹa pu lʹaccomplir; priez bien; il me semble que,<br />

cela fait, ma tâche serait finie. Jʹentonnerais: nunc dimittis, le bon Dieu me prendrait.<br />

Savez‐vous bien que vous êtes le seul au mon<strong>de</strong> à qui je parle ainsi: ce sont vos<br />

étrennes. Puis, vos lettres sont si confiantes et si bonnes, jʹai voulu faire pendant et rivali‐<br />

79


ser <strong>avec</strong> vous. Je viens dʹécrire à Edouard avant vous; <strong>avec</strong> lui tout est pressé; mais ma<br />

mère ici ne vient quʹaprès vous. Je ne lui ai pas encore écrit, je vais le faire. Adieu. Aimez<br />

votre femme pour moi. Je ne vois pas autant Théodore que je le voudrais. Je lui vais peu, je<br />

pense; Godard lui réussit mieux. Il étudie beaucoup. Je vois en lui un frère toutefois,<br />

croyez‐le bien. Je serai à lui tant que je pourrai et quʹil y consentira.<br />

Respect et tendresse à votre Père et encore une fois à votre femme.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. <strong>de</strong> Brentano 74 est lʹauteur <strong>de</strong> la Vie <strong>de</strong> Marie Emmerich. Auteur aussi du livre.<br />

51 à M. Levassor<br />

Sa santé se maintient, mais son âme est désorientée. La Conférence St‐Sulpice se languit un peu; une section a été<br />

constituée au Faubourg St‐Germain. Lacordaire a prêché à N.D. <strong>de</strong> Paris pour les orphelins du choléra. Les Jésuites<br />

<strong>de</strong> Place et <strong>de</strong> Ravignan commencent à se faire connaître. La vocation <strong>de</strong> son ami est entre les mains <strong>de</strong> la Provi‐<br />

<strong>de</strong>nce.<br />

6 janvier 1836<br />

Mon bien cher ami, ce nʹest pas, je vous assure, par représailles que ma réponse<br />

vous arrive si tardivement, cʹest par simple et pure insuffisance <strong>de</strong> ma pauvre tête qui, du‐<br />

rant ces jours nébuleux, surtout, ne conçoit et ne produit rien, pas même lʹacte le plus fa‐<br />

cile et le plus doux, quʹ<strong>avec</strong> peine, lentement, et à gran<strong>de</strong>s distances. Je ne souffre pas, ma<br />

santé est même passable, mais ma vie est si chétive, si pauvre, que cʹest pitié; cʹest comme<br />

un tout petit filet dʹeau coulant sur les sables, encore un peu il sʹy perdrait tout à fait. Avec<br />

cela, qui rafraîchir ou désaltérer, un oiseau ou bien une fourmi, mais, gens <strong>de</strong> votre sorte,<br />

ami, ils nʹauraient du tout, pour un seul déjeuner. Je<br />

parle ici, bien entendu, <strong>de</strong> la vie spirituelle et morale;<br />

quant à la vie <strong>de</strong>s jambes rien nʹarrête son activité<br />

triomphante, toujours courant, toujours pressé, il ne me<br />

manque à cet égard quʹune chose, savoir où je vais,<br />

pourquoi je cours, ce qui en revient ou pour moi, ou pour<br />

dʹautres. Voilà mon histoire en quatre mots: corps et âme.<br />

Vous voyez quʹil nʹy avait pas presse à vous la<br />

raconter. Quant au reste, je ne sais si, comme dans la<br />

jaunisse, je vois tout jaune, mais rien autour <strong>de</strong> moi ne<br />

me semble mériter attention, hors un seul fait qui peut‐<br />

être est déjà vieux pour vous. Quelques jours après la<br />

Toussaint, notre ami, M. Estève, nous a fait ses adieux et<br />

est entré au Séminaire dʹIssy; il sʹy trouve à merveille et<br />

nʹen veut sortir que pour rentrer lʹan prochain au grand<br />

Séminaire <strong>de</strong> Paris. Je dois lʹaller voir prochainement<br />

<strong>avec</strong> lʹami <strong>de</strong> Montrond 75 qui semble lui, se diriger définitivement dans une carrière diffé‐<br />

rente. Notre petite société subsiste, mais ne sʹaccroît pas; il y a, en ce moment, un peu dʹhé‐<br />

74<br />

Clemens Brentano, (1778-1842), poète romantique allemand, qui se convertit au catholicisme sous l'influence <strong>de</strong> la visionnaire<br />

Anna Katharina Emmerich, dont il transcrivit et publia les visions, en 1833.<br />

75<br />

Maxime <strong>de</strong> Montrond, premier biographe <strong>de</strong> MLP. Un homme <strong>de</strong> bien, ami <strong>de</strong>s ouvriers, le Père <strong>Jean</strong>-<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong>. Il fréquentait<br />

les soirées Montalembert où il remarqua Ozanam et MLP. Futur membre <strong>de</strong> la Conférence <strong>de</strong> Charité, il écrira dans La<br />

80


sitation; une section sʹest formée au faubourg Saint‐Germain, elle a peine à prendre vie,<br />

nous avons grand besoin <strong>de</strong> lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> Dieu et <strong>de</strong> nos saints patrons, grand besoin aussi <strong>de</strong>s<br />

prières <strong>de</strong> nos amis, priez donc pour nous vous qui nous aimez.<br />

Je suis parvenu à réunir encore pour cette fois quelques fonds pour vos loyers; jʹau‐<br />

rai en tout 38f, il me manquera, par conséquent, 37f dont je ferai lʹavance. M. <strong>de</strong> Persan dé‐<br />

sire ne pas vous payer ici les 15f quʹil vous doit, il mʹa dit avoir écrit à lʹabbé Teissier (je<br />

crois) pour cet argent vous fut remis à Chartres.<br />

Vos pauvres protégées sont toujours en même état, spirituellement très bien, jʹen ai<br />

la confiance, temporellement fort éprouvées par le bon Dieu. Il prend soin, du reste, <strong>de</strong> les<br />

consoler lui‐même; M me Delatre a communié chez elle ces jours <strong>de</strong>rniers.<br />

M. Lacordaire a prêché récemment à N.D. pour les orphelins du choléra; il nʹa pas<br />

été heureux, son discours a paru généralement mauvais; il se relèvera; dʹailleurs, la Provi‐<br />

<strong>de</strong>nce a pris cela comme bon, le but a été atteint, on a recueilli à la quête beaucoup dʹar‐<br />

gent.<br />

Un jeune Jésuite, M. <strong>de</strong> Place, commence à se faire ici une gran<strong>de</strong> réputation que je<br />

trouve pour ma part fort méritée; un autre, M. <strong>de</strong> Ravignan, ancien procureur du Roi, dé‐<br />

bute, dit‐on, <strong>avec</strong> un éclat extraordinaire; au Carême, vous le pourrez entendre; ce <strong>de</strong>rnier<br />

doit prêcher à Saint‐Roch.<br />

Vous laissez, cher ami, votre vocation se prononcer peu à peu et vous faites bien, je<br />

pense, la Provi<strong>de</strong>nce, si vous laissez faire, vous portera où elle veut; je prie pour cela sans<br />

y manquer un seul jour, gar<strong>de</strong>z‐moi, <strong>de</strong> votre côté, un pieux souvenir près <strong>de</strong> notre divin<br />

Maître; ma situation est assez calme, mais, vous le savez, tant que cette paix nʹaura pas<br />

pour base <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux côtés, la foi, la charité, il nʹy faut guère compter.<br />

Je mʹassocierai <strong>de</strong> toute mon âme aux prières pour votre frère; dites‐moi, je vous<br />

prie, lʹadresse du prince <strong>de</strong> Hohenlohe, peut‐être recourrai‐je à lui pour notre pauvre<br />

Guépin dont lʹexistence, toute misérable et languissante quʹelle soit, est un premier mira‐<br />

cle. Jʹai lu récemment un ouvrage du prince <strong>de</strong> Hohenlohe précédé dʹune notice écrite par<br />

lui‐même sur sa vie. Lʹouvrage est nul, mais on y trouve foi, piété fervente, cʹest assez. Tâ‐<br />

chez <strong>de</strong> vous procurer la Douloureuse Passion <strong>de</strong> Jésus‐Christ par Sœur Emmerich, cʹest un<br />

merveilleux ouvrage.<br />

Tout à vous en Jésus‐Christ<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je me recomman<strong>de</strong> instamment aux prière <strong>de</strong> M. Lecomte pour la conversion <strong>de</strong> qui<br />

vous savez, surtout.<br />

Tribune Catholique. Ami intime <strong>de</strong> MLP., il décrira <strong>avec</strong> émotion, la première messe <strong>de</strong> celui qu'il appelle "l'humble serviteur <strong>de</strong><br />

Dieu", "docile instrument aux mains du Seigneur".<br />

81


52 à M. Maillard<br />

Visite à effectuer chez un ami, orateur pour la Sainte‐Famille.<br />

Samedi 23 avril [1836]<br />

Cher enfant,<br />

Il faudrait bien pourtant nʹêtre pas plus longtemps gascon et tenir la promesse que<br />

vous aviez faite <strong>de</strong> visiter M. <strong>de</strong> St Chéron. Demain, à 7h.½, je vous attendrai sans remise et<br />

nous irons. Il a maintenant un piano, et comme il ne sait pas sʹen servir, il aime beaucoup<br />

que quelquʹun le fasse pour lui; du reste, nulle toilette, tout est permis, y compris bas bleus<br />

et cravate jaune; point <strong>de</strong> frais dʹesprit non plus, on est là comme dans sa chambre.<br />

Adieu, enfant, soyez sage et aimez toujours<br />

Votre affectionné Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

53 à M. Maillard<br />

Invitation à dîner.<br />

Mardi [3 mai 1836]<br />

Cher enfant, je reçois <strong>de</strong> Normandie une assez grosse volaille; il faut venir <strong>de</strong>main à<br />

5h. Vous nous ai<strong>de</strong>rez à la manger.<br />

Votre bon vieux père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je nʹose inviter Théodore qui, je le crains, nʹest pas libre. Si pourtant il lʹétait, il serait<br />

bien venu.<br />

54 à M. Maillard<br />

Visite culturelle annulée.<br />

[4 mai 1836] 76<br />

Ne me cherchez pas à la galerie vitrée, mon cher ami; jʹai dû aller hier matin chez M.<br />

Gavard et nʹy puis retourner aujourdʹhui.<br />

Vous mʹavez promis <strong>de</strong> me venir voir ce soir, ne lʹoubliez pas; notre ami Ed. Guépin<br />

vous accompagnera, je lʹespère.<br />

Adieu, à bientôt. Votre tout ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Mercredi matin<br />

76<br />

De toute évi<strong>de</strong>nce, cette lettre doit être datée avant 1836: elle mentionne en effet Ed. Guépin, qui, à cette époque, se meurt en Anjou<br />

(cf. supra lettre 45 et infra lettre 60).<br />

82


55 à M. Maillard<br />

Invitation à dîner <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> la famille Pavie.<br />

[Jeudi 5 mai 1836]<br />

A 5h. très précises, samedi, cher enfant, le bon Père Pavie vient <strong>avec</strong> Théodore dî‐<br />

ner. Venez aussi, nʹest‐ce pas?<br />

A vous <strong>de</strong> cœur et encore<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

56 à M. Théodore Pavie<br />

Invitation à une exposition.<br />

Vendredi [6 mai 1836]<br />

Mon cher ami,<br />

Ma femme a pour <strong>de</strong>main samedi un billet pour la galerie <strong>de</strong> M. du Sommerard,<br />

elle se fait une fête dʹy conduire vous et Maillard. Avertissez aussi, si vous voulez, le bon<br />

Godard qui désirait aussi voir cette galerie.<br />

Il faudrait être à midi ½ précis, Chapelle <strong>de</strong> la Vierge à St ‐Sulpice, on se rejoindra là.<br />

Ma femme avertit Maillard quʹon va là en <strong>de</strong>mi‐toilette; partant, point la grosse cra‐<br />

vate jaune dont un caprice <strong>de</strong> femme lui fait méconnaître le mérite.<br />

Votre ami dévoué<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

57 à M. Maillard<br />

Prêt <strong>de</strong> livres auxquels tient MLP.<br />

Paris, samedi [7 mai 1836]<br />

Lire, communiquer, puis rendre après et pas perdre. Etre toujours bien sage et tou‐<br />

jours aimer ses amis.<br />

58 à M. Maillard<br />

Invitation à rencontrer Maxime <strong>de</strong> Montrond.<br />

Mercredi [11 mai 1836]<br />

Votre ami M. <strong>de</strong> Montrond, que vous nʹavez pas encore vu <strong>de</strong>puis votre retour, me<br />

vient voir ce soir. Tâchez donc <strong>de</strong> venir aussi.<br />

A vous <strong>de</strong> cœur.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

83


59 à M. Maillard<br />

Venu saluer ses amis angevins au passage du Commerce, MLP. nʹa trouvé personne.<br />

16 mai [1836]<br />

Adieu, mon cher Adrien, adieu aussi mon cher Emile; vous nʹétiez pas là hier ni<br />

précé<strong>de</strong>mment, quand je suis venu; mon Dieu, quʹon se voit peu ici‐bas.<br />

Embrassez‐vous lʹun lʹautre en mon intention; je vous aime en frère, ainsi vous ne<br />

recevrez ni lʹun ni lʹautre rien <strong>de</strong> trop.<br />

A vous bien affectueusement.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Ci‐joint un mot pour Beauchesne.<br />

60 à M. Pavie<br />

Amitié réelle, mais sans affinité <strong>avec</strong> Théodore, frère <strong>de</strong> Victor. MLP. pense quʹil nʹa plus ni influence ni action au‐<br />

près <strong>de</strong> ses amis. Mort <strong>de</strong> son ami Guépin; il laisse parler son cœur et sa foi. Comment vont ses amis angevins <strong>de</strong><br />

Paris. Que V. Pavie soit patient <strong>avec</strong> la Provi<strong>de</strong>nce: elle veillera sur son premier enfant.<br />

18 mai 1836<br />

Tout dʹabord, cher ami, et avant même tout remerciement pour votre bonne et fra‐<br />

ternelle lettre, je dois faire justice, disculper Théodore que vous accusez à tort et sur lequel<br />

je me serai aussi exprimé inexactement. Je nʹai nullement à me plaindre <strong>de</strong> lui, tant sʹen<br />

faut. Il mʹa montré en toute occasion pleine confiance et amitié, expansion autant quʹelle<br />

est possible en lui, recherche autant quʹelle se concilie <strong>avec</strong> ses travaux et habitu<strong>de</strong>s. Ce<br />

que jʹai voulu dire, cher ami, et ce que je répète, cʹest que toute influence sur lui <strong>de</strong> ma part<br />

est impossible, par cette raison que lʹaffinité manque non à nos âmes, mais à nos natures;<br />

vous‐même cher, bien cher Victor, <strong>avec</strong> votre vie emportée et tourbillonnante, vous mʹeus‐<br />

siez entièrement laissé hors <strong>de</strong> vous, si je ne sais quel coin faible et tendre en vous ne mʹeût<br />

raccroché et lié intimement à vous. A part cela encore, ne savez‐vous pas, par expérience,<br />

ce quʹil faut <strong>de</strong> puissance corporelle, outre celle du cœur, pour cultiver les affections. Cʹest<br />

à la sueur <strong>de</strong> son front quʹon gagne son pain aussi dans cet ordre <strong>de</strong> sentiment; il faut mille<br />

soins, mille courses, mille assiduités et moi, mes jambes défaillent plus encore que ma cha‐<br />

rité. Je <strong>de</strong>meure loin, la moindre course mʹépuise; <strong>de</strong> découragement, je laisse tout échap‐<br />

per, les liens se relâchent ou manquent à se former, je le sens, je le regrette, mais quʹy faire?<br />

Lʹâme va et le corps reste; alors je ramène lʹâme aussi. Je prie un peu et me console, son‐<br />

geant que la prière est un lien aussi, invisible peut‐être sur terre, mais puissant en haut et<br />

qui nous rattache au sein <strong>de</strong> Dieu. Voilà mon histoire, cher ami; <strong>de</strong> jour en jour, ma place<br />

<strong>de</strong>vient moins gran<strong>de</strong>. Je mʹatténue, je mʹefface dʹinfluence et dʹaction. Je nʹen saurais avoir<br />

aucune. Théodore, Godard, Maillard et nos chers angevins, tout cela vit, court, se répand,<br />

marche au bien, je lʹespère, mais sans que jʹy fasse rien, ni que jʹy puisse rien.<br />

Lʹâme <strong>de</strong> notre pauvre Edouard à <strong>de</strong>mi vacillante, déjà au‐<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> son corps<br />

épuisé, était seule vraiment unie à la mienne, mais ce nʹétait point dʹaffection humaine;<br />

aussi ne lʹai‐je presque point retenu. Je ne <strong>de</strong>mandais <strong>de</strong>s jours encore quʹautant quʹils<br />

compteraient pour le salut. La mesure étant pleine, je bénis Dieu qui lʹa reprise et délivrée.<br />

Jʹavais pleuré Edouard ici, parce que je le voyais beaucoup souffrir et que la partie sensible<br />

en moi sʹen émouvait. Mais ensuite, presque <strong>avec</strong> calme, je regardais <strong>de</strong> loin ce merveil‐<br />

84


leux dégagement <strong>de</strong> lʹesprit qui sʹépure et sʹenvole. Tant quʹil vivait, cʹétait convention en‐<br />

tre nous, nous prions lʹun pour lʹautre, maintenant la convention dure encore, je prie ici,<br />

lui là‐haut.<br />

Je nʹai vu Bruneau quʹune seule fois. Cette surdité me déconcerte plus que je ne sau‐<br />

rais dire. Jérôme que je ne vois point, que je rencontre seulement, est heureux, je pense; lui<br />

et quelques amis vivent en communauté chrétienne, presque monastique. Si cela se sou‐<br />

tient, cela tournera à bien pour eux. Marziou nʹavance point. Godard tourne toujours sur<br />

lui‐même. Gavard imagine et déraisonne. <strong>Léon</strong> argumente et dispute. Maillard se cache et<br />

fuit toujours. Vous, tout seul, mon cher ami, pouviez pétrir tous ces éléments, les fondre,<br />

en faire un ensemble; moi, même séparément, je nʹen saurais manier aucun.<br />

Ce ne peut être sérieusement, cher Victor, que déjà vous grondiez, parce que vous<br />

nʹêtes que <strong>de</strong>ux encore chez vous. Atten<strong>de</strong>z donc un peu, la Provi<strong>de</strong>nce prépare lentement<br />

et <strong>avec</strong> amour lʹâme <strong>de</strong> votre enfant. Ne troublez pas son œuvre par votre impatience.<br />

Priez tous <strong>de</strong>ux doucement, <strong>avec</strong> confiance et volonté résignée. Dieu aime votre famille,<br />

jʹose presque lʹassurer et veut vous bénir encore dans vos enfants. Jʹai une Vie <strong>de</strong> Tobie, pe‐<br />

tite brochure, en allemand, <strong>avec</strong> quelques vignettes. Cette histoire est si touchante, si bien<br />

appropriée à toute famille chrétienne que je vous lʹenvoie, malgré son peu <strong>de</strong> mérite. Je<br />

lʹavais achetée à votre intention, réalisez‐la en songeant à moi; il y a là dʹadmirables et<br />

doux conseils pour votre position.<br />

Votre excellent père est resté ici longtemps, et, pourtant, je ne lʹai presque quʹentre‐<br />

vu. Il était introuvable. Je lʹaime toutefois ainsi; il me rappelle vos courses essoufflées, vos<br />

visites haletantes. Je songeais quʹil courait ainsi pour vous rejoindre plus vite et je le<br />

concevais bien; à sa place, moi, votre frère, je courrais bien aussi.<br />

Adieu, cher ami, causez toujours <strong>de</strong> moi <strong>avec</strong> votre chère petite femme; aimez‐moi<br />

à vous <strong>de</strong>ux. Etre marié, cʹest aimer à <strong>de</strong>ux, au lieu dʹaimer tout seul.<br />

Votre dévoué ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

61 à M. Levassor<br />

MLP. encourage son ami, quelque peu irrésolu, à suivre lʹappel <strong>de</strong> Dieu qui le pousse à quitter le mon<strong>de</strong>; il lui dé‐<br />

peint le bonheur dʹune vie pauvre et détachée <strong>de</strong> tout. Il exprime lʹespoir que son siècle verra en France un grand<br />

mouvement religieux. Détails édifiants sur <strong>de</strong>s réfugiés polonais dont la vie <strong>de</strong> communauté attire fort MLP. Zèle<br />

<strong>de</strong>s confrères <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul.<br />

Paris, 28 juin 1836<br />

Jʹai rendu grâces à Dieu, mon très cher ami, <strong>de</strong>s bonnes et saintes choses que<br />

contient votre <strong>de</strong>rnière lettre: jʹy trouve, sous quelques réserves dʹhumilité et <strong>de</strong> sage dé‐<br />

fiance, une fermeté <strong>de</strong> vouloir que vous nʹaviez pas encore montrée. Peu à peu lʹhorizon<br />

sʹéclaircit et bientôt vous lirez au grand jour dans votre avenir. Je me sens plus fort main‐<br />

tenant pour vous encourager, en voyant le bon M. Lecomte et vos autres conseillers si fer‐<br />

mes dans leur avis; jʹose dire après eux que tout, en cette grave affaire, tournera en bien<br />

pour vous et pour les vôtres, parce que vous nʹavez rien voulu que selon le cœur <strong>de</strong> Dieu<br />

et que son cœur qui vous aime vous veut heureux.<br />

Par ma propre expérience, je puis attester que jamais chose entreprise en intention<br />

pieuse et droite nʹa eu mauvaise fin; si le succès nʹétait pas selon mon espérance cʹest quʹil<br />

85


la dépassait trop pour que ma prévision y eût atteint. Courage donc, mon bien cher ami,<br />

encore un léger effort et lʹœuvre sera consommée; une vie toute dʹabnégation et dʹamour,<br />

toute perdue en Dieu, tel sera ici‐bas votre partage et au bout: Deus meus et omnia! Cela ne<br />

vaut‐il pas un peu dʹincertitu<strong>de</strong>, quelques douleurs <strong>de</strong> cœur, quelques larmes peut‐être,<br />

que la Vierge sainte essuiera en tendre compassion. Je vous en conjure, mon cher Adolphe,<br />

mon cher frère, ne reculez pas, lʹheure est venue, Dieu vous appelle, vous nʹen pouvez<br />

douter, criez donc <strong>de</strong> toute votre force, me voici ecce venio; faites le sacrifice du cœur, pour<br />

le reste, il sʹen charge, il disposera tout; du jour où, en effusion dʹâme, vous lui direz: oui,<br />

je suis vôtre, oui, je suis à vous, prenez‐moi, à lʹheure même il vous emportera.<br />

Je ne sais, je me trompe, mais il me semble que notre temps fera quelque chose <strong>de</strong><br />

grand pour la cause <strong>de</strong> Dieu. Il me semble quʹil y a <strong>de</strong>s signes, que la grâce fait germer une<br />

œuvre <strong>de</strong> régénération; je vois en tant <strong>de</strong> cœurs une ferveur ar<strong>de</strong>nte, une aspiration dʹave‐<br />

nir si gran<strong>de</strong>! Oui, Dieu veut ramener notre France à Lui. Alors que dʹouvriers il <strong>de</strong>man<strong>de</strong>‐<br />

ra pour sa sainte moisson, et vous <strong>de</strong>s premiers, ami, vous serez là sous sa main, détaché<br />

<strong>de</strong> tout, prêt à tout, lʹEsprit vous armera <strong>de</strong> force, vous inspirera divinement. Oh! ne vou‐<br />

driez‐vous pas tout cela? Que <strong>de</strong> regrets vous en auriez!<br />

Vous souvient‐il <strong>de</strong> notre pauvre Marziou, il a voulu le bonheur <strong>de</strong> la terre; il est ri‐<br />

che, marié, à une femme quʹil aime, et pourtant il pleure amèrement les biens quʹil a per‐<br />

dus; ne mʹimitez pas, écrit‐il à notre ami Lambert, allez à Dieu, lui seul est aimable, lui seul<br />

est doux; pour lʹatteindre, prenez la voie la plus courte, les autres sont ru<strong>de</strong>s et pleines<br />

dʹennuis. Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> vous recomman<strong>de</strong>r ici le secret, ceci a été écrit presque<br />

comme confession, le cas seul peut mʹautoriser à vous le révéler.<br />

La Provi<strong>de</strong>nce semble vous ménager un entourage aussi agréable quʹédifiant dans<br />

la retraite où vous <strong>de</strong>vez entrer à la fin <strong>de</strong> cette saison. Outre quelques uns <strong>de</strong> nos amis<br />

que vous savez déjà, jʹen sais dʹautres encore dont lʹintimité vous sera bien douce. De ce<br />

nombre sont quelques jeunes Polonais réfugiés que Dieu appelle à Lui. Pauvres exilés, di‐<br />

sent‐ils, nous nʹavons plus <strong>de</strong> patrie, plus <strong>de</strong> parents ni dʹamis, mais voilà que le Seigneur<br />

veut nous tenir lieu <strong>de</strong> tout, Il nous recueille en sa maison; là sera pour nous le foyer, la<br />

famille, la patrie; oh! nous nʹavons rien perdu! Aussi sont‐ils <strong>de</strong> la plus admirable piété;<br />

<strong>de</strong>main, <strong>de</strong>ux dʹentre eux et bientôt un troisième vont à Stanislas; mais ils passeront <strong>de</strong> là à<br />

St‐Sulpice: vous les y trouverez. Depuis quelque temps réunis à quelques autres <strong>de</strong> leurs<br />

compatriotes, ils vivent en communauté, dirigés par un supérieur pris parmi eux, <strong>avec</strong> une<br />

règle chrétienne rigoureusement observée; ils se servent eux‐mêmes. Du reste, la prière,<br />

lʹétu<strong>de</strong>, les œuvres saintes, surtout la conversion <strong>de</strong> leurs frères exilés, font toute leur vie;<br />

jʹai vu lʹintérieur <strong>de</strong> cette communauté; rien <strong>de</strong> plus édifiant, cʹest toute charité, toute paix<br />

en Dieu. Un crucifix énorme, placé dans la pièce dʹentrée, est là comme pour vous recevoir<br />

et vous avertir <strong>de</strong> lʹair <strong>de</strong> la maison; les gens sont à lʹavenant, chacun vous salue et vous<br />

sourit, cʹest la fraternité <strong>de</strong>s premiers temps. Ils ne sont que 8, je crois, ils ne prennent que<br />

ceux <strong>de</strong> leur pays. Ils sont très pauvres; lʹaumône que leur fait le Gouvernement, 500f à<br />

chacun, est leur seule ressource à peu près, mais ils sont austères et sobres, il reste encore<br />

la part <strong>de</strong>s pauvres. Je nʹembellis rien, cʹest vérité toute simple. Nʹaurez‐vous pas gran<strong>de</strong><br />

joie à compter parmi vos frères <strong>de</strong>ux ou trois <strong>de</strong> ces pauvres réfugiés ? Les <strong>de</strong>ux que je<br />

connais, et dont je parle ici surtout, sont fort instruits et <strong>de</strong> lʹesprit le plus distingué; ils<br />

sont très jeunes (22 ou 24 ans) dʹune figure noble; lʹun est balafré; ce seront <strong>de</strong> magnifiques<br />

prêtres, je vous assure, mais aussi pieux, aussi humbles que beaux; lʹun <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux surtout<br />

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ne cesse <strong>de</strong> prier, même en parlant, en agissant, on sent que son âme voit Dieu toujours et<br />

ne le perd jamais; je sais dʹun pauvre mala<strong>de</strong> quʹil gardait la nuit, que sans cesse il était à<br />

genoux, sʹentretenant <strong>avec</strong> son Dieu, y revenant dès quʹil pouvait; il trouvait ainsi la nuit<br />

courte. Durant cinq semaines aussi, il a veillé à lʹhôpital un <strong>de</strong> ses compatriotes, jeune<br />

étourdi blessé en duel; à force <strong>de</strong> soins il lʹa sauvé, et lʹâme <strong>avec</strong> le corps, il lʹa fait chrétien.<br />

Voilà comme Dieu, mon cher ami, traite <strong>de</strong> pauvres exilés, n’en soyons pas jaloux; tous<br />

aussi ne sommes‐nous pas exilés. Oh! comme eux, nous avons nos droits, nous nʹavons<br />

quʹà les réclamer. Dieu nous sera doux et miséricordieux. Si vous mʹen croyez, nous nous y<br />

mettrons <strong>de</strong> tout cœur, notre misère, notre faiblesse seront nos titres et, peut‐être, <strong>avec</strong> la<br />

grâce, <strong>de</strong>viendrons‐nous fervents et bien aimés du Seigneur.<br />

Adieu, nʹoubliez pas <strong>de</strong> me prêcher dans votre réponse, je ne mʹen fais pas faute ici<br />

à votre égard, prenez votre revanche; je serai docile et bon auditeur.<br />

La conférence se soutient; M. Housset est <strong>de</strong>s plus zélés, non par mon fait; je nʹai pu<br />

l’aller voir, Dieu lʹy aura conduit; il semble aimable et bon. Vos bonnes dames vont comme<br />

toujours. Priez <strong>avec</strong> redoublement pour moi, votre frère en Jésus‐Christ. je nʹy manque ja‐<br />

mais <strong>de</strong> mon côté pour vous.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Souvenirs <strong>de</strong> respect à M. Lecomte, je me recomman<strong>de</strong> à lui.<br />

62 à M. Maillard<br />

Diplôme dʹétu<strong>de</strong>s juridiques <strong>de</strong> son jeune ami. Exhortation à mener une vie droite et chrétienne, ainsi quʹà faire<br />

fructifier les dons quʹil a reçus.<br />

1 er août 1836<br />

La difficulté assez gran<strong>de</strong> pour moi, très cher ami, <strong>de</strong> quitter mon bureau afin <strong>de</strong><br />

remplir votre petite commission, a retardé plus que je ne lʹaurais voulu ma réponse: je suis<br />

en mesure maintenant et jʹaccours. Votre diplôme nʹest plus au Ministère où je suis allé le<br />

chercher, on mʹa renvoyé à la Faculté qui nʹa pas jugé suffisante lʹautorisation que vous<br />

mʹaviez envoyée. Une procuration semblable serait bonne, mais en prenant soin <strong>de</strong> faire<br />

légaliser votre signature par le Maire dʹAngers. Vous aviserez donc aux moyens <strong>de</strong> satis‐<br />

faire Dame Faculté.<br />

Vous savez bien, cher Adrien, si jʹeusse aimé vous gar<strong>de</strong>r ici; jʹavais quelquefois du<br />

remords dʹinsister trop sur cette douce idée qui pouvait nʹêtre pas dans les vues <strong>de</strong> votre<br />

famille, et pourtant, cédant à lʹentraînement, jʹarrangeai <strong>avec</strong> vous tout un avenir bien loin<br />

dʹAngers, auprès <strong>de</strong> nous et sous mes yeux <strong>de</strong> père et dʹami. Que voulez‐vous, le vent<br />

lʹemporte; quoique bien jeune, beaucoup <strong>de</strong> rêves déjà ont passé ainsi pour vous, bien<br />

dʹautres encore passeront; le mieux peut‐être serait <strong>de</strong> nʹen plus faire, mais vous nʹen êtes<br />

pas là, cher enfant, et vous pleurerez souvent encore vos douces chimères envolées.<br />

Tout bien calculé, si vous <strong>de</strong>vez être avoué, mieux vaut Angers pour vous y prépa‐<br />

rer que Paris. Ici vous eussiez assurément pris cette carrière en dégoût; vos yeux sʹouvrant<br />

<strong>de</strong> plus en plus vous eussent montré les graves difficultés dʹune voie si généralement mal<br />

hantée: chez vous cela doit être moins mauvais; <strong>avec</strong> une ferme volonté, on y peut, je le<br />

crois, gar<strong>de</strong>r encore honneur, délicatesse, conscience, et concilier tout cela <strong>avec</strong> un bénéfice<br />

raisonnable et <strong>de</strong> légitimes prétentions. On ne saurait rester dans les nues, force nous est<br />

87


<strong>de</strong> prendre pied; si cʹest en place nette, pays et lieux nʹimportent guère. Malgré ma tendre<br />

affection pour vous, je tiendrai comme secondaires ces acci<strong>de</strong>nts si divers, si lʹessentiel, si<br />

lʹunique nécessaire, la droiture, la sainte honnêteté <strong>de</strong> votre cœur peuvent <strong>de</strong>meurer saines<br />

et sauves.<br />

Ces conseils <strong>de</strong> morale sans principe et sans but me vont bien mal, cher ami, je suis<br />

bien gauche à les articuler. Jʹaimerais vous parler un langage plus vrai et plus haut, mais<br />

lʹentendriez‐vous, ne vous lasserait‐il pas, ne viendrait‐il pas à contre temps? Combien <strong>de</strong><br />

fois cette crainte mʹa retenu ici, quand voyant en vous mille facultés nobles et précieuses,<br />

je disais en moi‐même: tous ces trésors pourtant, on les pourrait assurer pour lʹavenir!<br />

Dieu qui les a faites ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pour les accroître et les grandir quʹun seul regard <strong>de</strong><br />

confiance et dʹamour; ce regard, Il le sollicite et lʹattend; oh! ne lui sera‐t‐il donc pas donné!<br />

Quʹune parole religieuse et croyante mʹeût réjoui le cœur alors, si vous lʹeussiez laissée<br />

tomber, cher ami, mais enfant, vous nʹy songiez pas, lʹheure passait et je partais.<br />

Vous voilà loin maintenant, vous <strong>de</strong>venez homme, vous aurez la volonté plus ferme<br />

et moins flexible, le cœur moins tendre, lʹinspiration moins facile, cela fait bien <strong>de</strong>s raisons<br />

dʹinquiétu<strong>de</strong> et <strong>de</strong> doute sur vous; et cependant, cher enfant, jʹespère toujours: toute votre<br />

vie est libre encore; nul engagement <strong>avec</strong> le mal, nul tiraillement du passé ne compromet<br />

votre avenir; il est encore à vous, bien à vous; mais lʹheure du choix est venue, les premiers<br />

pas que vous ferez peuvent être décisifs; oh! que nʹai‐je assez dʹar<strong>de</strong>ur et <strong>de</strong> puissance<br />

pour vous bien dire tout ce que cet instant a <strong>de</strong> solennel et dʹimmense pour vous! Un<br />

gui<strong>de</strong> sûr, éclairant pour vous le mon<strong>de</strong>, vous y tracerait les <strong>de</strong>ux routes, vous dirait les<br />

peines, tourments et ennuis <strong>de</strong> lʹune, la paix, la sûreté, la gran<strong>de</strong> fin <strong>de</strong> lʹautre, entraînerait<br />

votre volonté, vous pousserait bon gré mal gré dans la vraie voie, et vous forcerait à y<br />

marcher: je nʹai, moi, ni force, ni mission pour cela, je nʹai que mes vœux les plus tendres,<br />

mes prières les plus ferventes; vous les aurez, cher ami, je vous en assure: puissent‐ils,<br />

comme un souffle heureux, tourner vos voiles au meilleur avenir. De ce côté encore, est<br />

votre seul refuge pour gar<strong>de</strong>r votre poésie si chère, votre amour <strong>de</strong> lʹart, vos étu<strong>de</strong>s les<br />

plus aimées; à Angers surtout, loin du foyer qui ranime et soutient tout, vous aurez bien<br />

vite épuisé vos ressources, le mon<strong>de</strong> du beau se fermera pour vous; si Victor a gardé sa<br />

haute vue, sa noble et généreuse pensée, cʹest à la foi quʹil le doit; interrogez‐le, il vous le<br />

dira; sans elle, son esprit comme son cœur fussent <strong>de</strong>venus ari<strong>de</strong>s, la foi même en ce sens,<br />

la foi seule lʹa sauvé. Mettez donc en cet abri les précieux dons <strong>de</strong> votre âme; ailleurs, tout<br />

est perdu, tout se gar<strong>de</strong> par là.<br />

Adieu, cher enfant, lʹautomne mʹalourdit, cette lettre vous en fera foi, mais laissez la<br />

forme, prenez seulement le fond, cʹest‐à‐dire, ma tendre et vive sollicitu<strong>de</strong> pour vous, <strong>avec</strong><br />

mes plus affectueux sentiments.<br />

Embrassez Victor, je lui dois une lettre, et Théodore et Cosnier, Beauchesne. Souve‐<br />

nir à notre cher Emile.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

88


63 à M. Maillard<br />

MLP. se résigne à le voir quitter définitivement Paris pour Angers. Loi du détachement quotidien <strong>de</strong> ce que lʹon<br />

aime. Ce que le temps use et détruit, la charité le répare. Il <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> ses amis dont lʹabsence lui<br />

coûte.<br />

30 septembre 1836<br />

Vous mʹaccusez bien, cher enfant, tout bas, peut‐être même tout haut, <strong>de</strong> négliger<br />

vos affaires; je nʹai pourtant pas mis votre commission en oubli: jʹai votre diplôme <strong>de</strong>puis<br />

assez longtemps déjà; je guettais quelque occasion <strong>de</strong> vous le faire parvenir, mais cette sai‐<br />

son nʹen fournit guère, je lʹenvoie donc, comme vous lʹaviez <strong>de</strong>mandé, par la poste tout<br />

simplement.<br />

Je me flattais encore un peu que la décision nʹétait pas irrévocable quant à votre sé‐<br />

jour définitif à Angers: votre <strong>de</strong>rnière lettre ne laisse plus <strong>de</strong> doutes à cet égard: cʹest donc<br />

un nouvel article pour le chapitre <strong>de</strong>s résignations. Jʹen ai beaucoup en ce genre <strong>de</strong>puis<br />

quelque temps: <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> mes plus chers amis 77 vont au Séminaire: Dieu les <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, je ne<br />

puis les lui refuser; dʹautres, et vous êtes <strong>de</strong> ce nombre, sont réclamés par les exigences <strong>de</strong><br />

carrière et position dans le mon<strong>de</strong>: ceux‐là, je les perds encore plus, il me semble; les pre‐<br />

miers prieront pour moi et ainsi me gar<strong>de</strong>ront bon souvenir, mais les seconds, combien <strong>de</strong><br />

temps compterai‐je pour eux, combien <strong>de</strong> temps le mon<strong>de</strong> et ses mille soins, soucis, vœux<br />

tourbillonnants, laissera‐t‐il place pour moi dans leur pensée et quelque affection dans<br />

leur cœur? Je nʹose guère y songer. Cʹest une <strong>de</strong>s plus tristes choses <strong>de</strong> notre nature que<br />

cette impuissance <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r empreintes en nous <strong>de</strong>s images toujours vives, <strong>de</strong>s souvenirs,<br />

<strong>de</strong>s sentiments toujours frais. Commençons donc, cher enfant, cʹest la loi, commençons dès<br />

ce moment à nous oublier chaque jour un peu, jusquʹà épuisement entier du trésor; je ne<br />

sais qui me dit que le mien aura plus longue durée, que je le gar<strong>de</strong>rai mieux et, qui sait, si<br />

ma vie nʹest pas trop longue, jusquʹà <strong>de</strong>rnière fin? Ce nʹest pas en moi confiance présomp‐<br />

tueuse, voici ma raison: votre nom, <strong>de</strong>puis longtemps, est inscrit tout au long dans ma<br />

prière, il y restera; <strong>de</strong> la sorte, si le temps use et détruit, la charité réparera; chaque jour,<br />

sans se lasser, elle refera la trace, et tant quʹelle‐même subsistera, ne laissera point lʹoubli<br />

prévaloir. Tâchez, <strong>de</strong> votre côté, <strong>de</strong> trouver quelque biais ou industrie pour suppléer à<br />

cette ressource, si mieux vous nʹaimez lʹadopter aussi vous‐même; ce serait le plus cher <strong>de</strong><br />

77 Ses amis Levassor et Lambert, tous <strong>de</strong>ux Confrères <strong>de</strong> Saint-Vincent-<strong>de</strong>-Paul.<br />

89


mes vœux et désormais je serai sans crainte sur la durée et lʹavenir <strong>de</strong> notre intime affec‐<br />

tion.<br />

Dites bien encore à notre cher Victor que je vais lui écrire au plus tôt; je suis <strong>de</strong>puis<br />

quelque temps dans <strong>de</strong>s lan<strong>de</strong>s si tristes, si désolées, que je ne me sens propre à rien: cʹest<br />

effet dʹautomne, sans doute, jʹen sortirai et je payerai mes <strong>de</strong>ttes arriérées. Si jusque‐là Vic‐<br />

tor ou quelque autre âme dévouée mʹécrivait, je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> en grâce <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> M.<br />

Bruneau qui a quitté Paris mala<strong>de</strong> et dans un état qui me semble inquiétant. Je lʹai vu <strong>de</strong>ux<br />

jours avant son départ, et cette <strong>de</strong>rnière entrevue nous a enfin faits amis.<br />

Parlez <strong>de</strong> moi à Théodore, à Cosnier et à Beauchesne et à lʹami Godard: lʹabsence <strong>de</strong><br />

tout ce mon<strong>de</strong> à la fois mʹest dure, jointe encore à la vôtre, cher enfant, cela mʹexplique<br />

mon abattement: exils du cœur, dit le petit livre que je vous ai donné, et que vous ne lisez<br />

pas, indocile enfant!<br />

Adieu, respect comme toujours à votre bon père et souvenir amical à Emile.<br />

Votre tout affectionné.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

64 à M. Levassor<br />

MLP. le stimule dans sa vocation. Il voit dans les épreuves et les obstacles quʹelle rencontre une marque <strong>de</strong> bénédic‐<br />

tions divine; la vocation est ʺbienheureux échangeʺ.Tristesse <strong>de</strong> leur ami Lambert qui entre au séminaire. Pour sa<br />

future incardination, que son ami sʹabandonne à la Provi<strong>de</strong>nce.<br />

Paris, 7 octobre 1836<br />

Je nʹai point été jusquʹà la fin <strong>de</strong> votre lettre, mon cher ami, sans remercier Dieu,<br />

dans toute lʹeffusion <strong>de</strong> mon âme, <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s grâces quʹil vous a faites. Que vous lui ap‐<br />

partenez bien et quʹil vous voulait fortement! Sa conduite à votre égard est divinement<br />

provi<strong>de</strong>ntielle, pleine dʹune économie merveilleuse et dʹune miséricor<strong>de</strong> toute aimable. Les<br />

ru<strong>de</strong>s épreuves que vous venez <strong>de</strong> traverser sont le plus sûr témoignage <strong>de</strong> votre vocation;<br />

je nʹen ai point vu, dans tout ce qui mʹentoure, <strong>de</strong> réelle et bien certaine, qui nʹait été aussi<br />

fortement éprouvée; cʹest le van du Seigneur, bienheureux ceux qui, comme vous mon<br />

ami, <strong>de</strong>meurent parmi le bon grain! Ne prenez dʹailleurs nulle inquiétu<strong>de</strong> <strong>de</strong> votre trouble,<br />

<strong>de</strong> votre émotion, du <strong>de</strong>rnier regard que vous jetez sur le mon<strong>de</strong>; quand on va le quitter,<br />

quelque misérable quʹil soit, on le trouve beau, on oublie le mal quʹil nous a fait et celui<br />

quʹil nous voudrait faire encore; cela est naturel et inévitable, jʹose même dire que cela est<br />

dans lʹordre <strong>de</strong> Dieu et selon son cœur. Comme Il a éprouvé votre fermeté, votre foi par les<br />

difficultés, Il éprouve votre amour et votre désir par les sacrifices que vous semblez lui<br />

faire; que vous semblez, oh! oui, simple apparence du sacrifice, car vous échangez le néant<br />

contre la vie, lʹerreur contre la vérité, les passions vaines contre lʹamour; bienheureux<br />

échange, mon ami, dont Dieu permet quʹà cette heure tout le prix vous échappe, afin que<br />

vous ayez le mérite <strong>de</strong> donner quand cʹest lui qui réellement vous donne. Que Dieu est<br />

bon, mon ami, et quʹil vous a aimé, cela me revient encore et je lʹen veux remercier encore<br />

pour vous! Jʹen suis ému jusquʹaux larmes, tant je vois <strong>de</strong> douceur dans ses procédés, tant<br />

je vois aussi <strong>de</strong> promesses pour lʹavenir dans ses bienfaits présents. Oui, Il a <strong>de</strong> grands<br />

<strong>de</strong>sseins sur vous, sinon pour faire aux yeux du mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s œuvres (ceci est son<br />

secret), au moins pour vous sanctifier hautement, si vous persévérez dans lʹhumilité et la<br />

douceur, dons quʹIl vous a faits et quʹIl vous laisse à cultiver. Je dois oublier au milieu <strong>de</strong><br />

90


ces graves événements le chagrin que me cause humainement votre perte. Jʹavais compté<br />

sur votre séjour ici et, je vous le dirai, jʹai été durement frappé en apprenant que Dieu vou‐<br />

lait autrement.<br />

Le soir <strong>de</strong> votre venue ici, jʹallais en hâte chez M me Delatre qui mʹapprit la décision.<br />

Que la sainte volonté du Seigneur soit faite, à chacun sa part <strong>de</strong> sacrifice. Il y a eu aussi un<br />

peu en ceci pour notre ami M. Lambert récemment revenu et qui, entrant lundi à St‐<br />

Sulpice, espérait marcher côte à côte <strong>avec</strong> vous.<br />

Pauvre enfant, malgré la fermeté <strong>de</strong> sa vocation, à ce <strong>de</strong>rnier moment il est, comme<br />

vous, un peu triste et abattu; sa douce vie, sa liberté, ses amis, tout cela lui arrachait hier<br />

quelques larmes, la main <strong>de</strong> Dieu les essuiera, Il paiera tout ce quʹIl prend et au centuple,<br />

Il lʹa promis et sa parole ne trompe point. A moi aussi, mon cher ami, il faudra quʹIl me<br />

paye ces <strong>de</strong>ux âmes bien‐aimées quʹIl m’avait données comme appui et consolation et qu’Il<br />

me re<strong>de</strong>man<strong>de</strong> maintenant; je ne les ai point refusées, Il le sait, priez‐le pour quʹIl sʹen<br />

souvienne et que son amour mʹen récompense!<br />

Jʹai vu votre ami Courbe, comme vous le désiriez, et sans aucun retard; vous avez sa<br />

réponse et toutes vos malles et paquets sont partis, je nʹai donc rien à ajouter sur ce point.<br />

M. <strong>de</strong> Mollevaux veut que vous vous donniez sans restriction au diocèse <strong>de</strong> Chartres et<br />

surtout que vous jetiez au sein <strong>de</strong> Dieu toute préoccupation et tout souci dʹavenir; il af‐<br />

firme que le Seigneur qui vous a si provi<strong>de</strong>ntiellement mené, fera encore <strong>de</strong> même désor‐<br />

mais, et que sʹil vous désirait en autre lieu vos liens <strong>avec</strong> le diocèse <strong>de</strong> Chartres nʹauraient<br />

nulle force contre sa main. Allez donc en paix, mon bien cher frère, où Dieu vous mène,<br />

que sa grâce vous gui<strong>de</strong>, que sa lumière vous éclaire et quʹIl vous réchauffe en son amour,<br />

cʹest ce que chaque jour mes vœux et mes prières vont lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r pour vous.<br />

Votre frère en J.C.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹarrangerai lʹaffaire <strong>de</strong>s loyers, nous aurons lacune encore <strong>de</strong> la conférence absente<br />

en ce moment, jʹy pourvoirai pour cette fois. Je verrai M. Aniche et je vous rendrai compte<br />

du résultat.<br />

65 à M. <strong>de</strong> Montrond<br />

Sevré dʹamitié, MLP. se réjouit du retour <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Montrond. Vocations <strong>de</strong> Levassor, Lambert, Estève.<br />

Paris, ce 15 octobre 1836<br />

Mon cher ami,<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> une vive satisfaction que vous <strong>de</strong>vez habiter bientôt notre voisi‐<br />

nage. Nous étions au temps passé bien isolés: tous nos amis nous avaient quittés. Leur ab‐<br />

sence et la vôtre en particulier, mon cher ami, nous laissaient un grand vi<strong>de</strong>. Hâtez‐vous<br />

<strong>de</strong> revenir et restez <strong>de</strong>s nôtres le plus longtemps quʹil se pourra.<br />

Notre ami Levassor a consommé son sacrifice, malgré les nombreux obstacles que<br />

lʹennemi lui a suscités, surtout au <strong>de</strong>rnier moment; sa fermeté a été admirable ou plutôt,<br />

Dieu, dans sa bonté, lʹa soutenu et lʹa rendu fort. Mais ce nʹest point ici quʹil doit rester; par<br />

concession aux vœux <strong>de</strong> sa famille, il doit rester au séminaire <strong>de</strong> Chartres. Ses Supérieurs<br />

ont été unanimement dʹavis quʹil <strong>de</strong>vait accor<strong>de</strong>r à ses parents cette consolation. Priez<br />

pour lui: je crois que Dieu lʹappelle à une gran<strong>de</strong> perfection, car il est doux et humble. Je le<br />

91


egrette vivement, mais Dieu le saura mieux gar<strong>de</strong>r et mieux aimer que moi qui le lui<br />

abandonne, quoiquʹil mʹen coûte. Puisse‐t‐il le tenir bien près <strong>de</strong> lui!<br />

M. Lambert est aussi hors du mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>puis lundi <strong>de</strong>rnier; il est à St‐Sulpice <strong>avec</strong><br />

notre ami M. Estève. Nous les retrouverons là lʹun et lʹautre.<br />

Adieu, mon cher ami, revenez bientôt. Je me sens un grand besoin dʹêtre <strong>de</strong> nou‐<br />

veau entouré <strong>de</strong> quelques âmes bonnes et aimantes. Le cercle sʹest tant éclairci autour <strong>de</strong><br />

moi que jʹen suis parfois un peu découragé. Vous me relèverez, vous mʹédifierez comme<br />

toujours par vos paroles et vos exemples. Jʹen ai, en ce moment, un pressant et grand be‐<br />

soin.<br />

A bientôt. Votre tout dévoué ami et frère en J.C.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

66 à M. Pavie<br />

Son état <strong>de</strong> santé, toujours inférieur à la tâche que son zèle voudrait entreprendre. Devant le bien à faire, la pensée<br />

<strong>de</strong> son insuffisance le poursuit: ʺJe ne suis pas en proportion juste <strong>avec</strong> cette énorme villeʺ.<br />

17 novembre 1836<br />

Mort, mala<strong>de</strong> ou endormi, en tout état <strong>de</strong> cause, vous désespérez <strong>de</strong> moi sans<br />

doute, mon bien cher Victor; votre indulgente amitié nʹaura pu y tenir pour cette fois, vous<br />

aurez été démonté; il y a <strong>de</strong> quoi, je lʹavoue. Pourtant, je veillais, je pensais à vous et je<br />

vous aimais toujours. Pourquoi cet obstiné silence? Je ne saurais le dire au juste. Je suis<br />

souvent si mal disposé, quant au corps, que lʹesprit manque dʹinstrument. Cʹest guerre et<br />

lutte perpétuelle entre lʹun et lʹautre; au milieu <strong>de</strong> tout cela, ma vie sʹuse et sʹécoule sans<br />

profit ni résultat pour moi, non plus que pour les autres. La soumission passive est le seul<br />

mérite possible et je ne lʹai pas toujours. Pardonnez‐moi donc, mon très cher ami, en vérité,<br />

mon cœur nʹa nul tort. Je suis toujours vôtre, toujours disciple et frère pour vous. Si je le<br />

dis à Dieu plus quʹà vous, cʹest quʹil est là tout près et que vous, vous êtes loin. Puisse‐t‐il<br />

vous le redire et me gar<strong>de</strong>r en union <strong>avec</strong> vous.<br />

A mʹentendre, vous me croiriez impotent, roulant dans un fauteuil, cacochyme et<br />

crachotant; point, ce nʹest pas cela. Je suis faible seulement <strong>de</strong> corps et dʹesprit, je ne suis<br />

pas en proportion juste <strong>avec</strong> cette énorme ville, <strong>avec</strong> cette prodigieuse activité, cette ani‐<br />

mation puissante quʹelle exige pourtant. Je suis toujours en retard, toujours à court <strong>de</strong><br />

temps, dʹhaleine, <strong>de</strong> pensée, <strong>de</strong> vie en un mot. Jʹen ai une étincelle quand il faudrait un<br />

grand foyer. Conclusion: indulgence et pardon, mon frère Victor, amitié quand même et<br />

paix constante entre nous.<br />

Je songe parfois que nous eussions dû changer, vous et moi, <strong>de</strong> lieu; cela vous allait<br />

si bien à vous, <strong>avec</strong> vos infatigables jambes et votre ar<strong>de</strong>ur éternelle, dʹarpenter nos pavés,<br />

<strong>de</strong> servir cent <strong>de</strong>voirs et cent amis à la fois, suffisant à tout, rendant à tout raison; et moi, la<br />

vie routinière et monotone dʹune petite ville serait mon fait! Mais, jʹy pense aussi, on peut<br />

se reposer sur vous pour remuer tout, faire danser la routine et mettre les gens à votre pas.<br />

Cela est‐il ainsi, mon cher ami, avez‐vous fait là‐bas votre vie à votre guise, ou bien vous<br />

a‐t‐on un peu rompu et dompté? Une lettre que mʹa montrée Gavard fait déjà réponse.<br />

Vous êtes le Victor dʹautrefois sans rien <strong>de</strong> moins. Tant mieux, ami, car le cœur aussi est le<br />

même assurément. Tout est bien tant qu’il en est ainsi.<br />

92


Cela me fera grand bien dʹavoir une lettre <strong>de</strong> vous à moi adressée toute fraîche et <strong>de</strong><br />

nouvelle date. Par ma faute, je nʹen ai plus que dʹanciennes et bien que toutes elles soient<br />

gardées <strong>avec</strong> respect, je ne les relis point. Vous mʹavez donné là‐<strong>de</strong>ssus vos répugnances.<br />

Je nʹaime guère à prendre la vie à reculons. Faites‐moi donc bientôt une épître où je vous<br />

retrouve, cela me rajeunira et me remettra sur pied. Nʹoubliez pas dʹy faire gran<strong>de</strong> part à<br />

votre bien‐aimée femme; il me semble quʹelle était autrefois implicitement en vous, et que<br />

par là elle est pour moi connue et aimée, comme sʹil nʹeût jamais été autrement. Théodore,<br />

que fait‐il, ne vous revient‐il pas bientôt? Je ne sais ce que lui veut ma femme, elle me le<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> tous les jours. Pressez‐le un peu <strong>de</strong> partir. Le Chaldéen, le Syriaque et lʹArmé‐<br />

nien, et je ne sais combien dʹautres, le réclament aussi et moi <strong>avec</strong>, quoiquʹindigne et infé‐<br />

rieur. Affections à lui, à Maillard, Cosnier et tous, car tout angevin, voyez‐vous, <strong>de</strong> près ou<br />

<strong>de</strong> loin, mʹest toujours un peu parent.<br />

Adieu, mon cher Victor, par‐<strong>de</strong>ssus tout, respect à votre bon père et vive affection à<br />

votre chère femme.<br />

Tout à vous <strong>de</strong> cœur.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

67 à M. Levassor<br />

MLP. encourage son ami à répondre à lʹappel du Seigneur. Il lui transmet les conseils <strong>de</strong> son propre directeur spiri‐<br />

tuel, lʹabbé <strong>de</strong> Malet. La Conférence <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul se développe. Nomination <strong>de</strong> MLP. comme prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong><br />

la section St‐Sulpice. La petite maison <strong>de</strong>s orphelins. Deman<strong>de</strong> <strong>de</strong> prières pour sa femme.<br />

Paris, 24 décembre 1836<br />

Votre bonne et longue lettre, mon cher ami, mʹa consolé <strong>de</strong> lʹattente, trop prolongée<br />

à mon gré, qui lʹavait précédée; je nʹétais pas il est vrai, absolument sans nouvelle sur votre<br />

situation; <strong>de</strong> divers côtés, jʹavais recueilli, ici quelques mots, là quelques autres, et lʹen‐<br />

semble suffisait pour me tranquilliser, mais jʹavais besoin <strong>de</strong> communications plus directes<br />

pour pénétrer dans ce qui vous touche, aussi intimement que mon cœur le veut. Votre let‐<br />

tre remplit pleinement ce vœu, vous y avez mis votre âme tout entière et jʹai pu y lire en<br />

liberté. Je me hâte <strong>de</strong> vous le dire, mon cher ami, lʹimpression qui mʹen reste, livre fermé,<br />

est <strong>de</strong> satisfaction et <strong>de</strong> joie parfaite. Dieu continue son œuvre en vous <strong>avec</strong> la même bonté<br />

et la même miséricor<strong>de</strong>, <strong>de</strong> votre côté, vous le laissez faire sans résistance, tout est bien; Il<br />

vous dépouille, Il vous prend une à une toutes les choses que vous croyez vôtres; bénissez‐<br />

le, ce voleur sublime, comme lʹose appeler Bossuet; quand Il aura tout pris, que vous serez<br />

bien à sa merci, du fond <strong>de</strong> votre dénuement, vous le verrez revenir les mains pleines,<br />

rapportant tout, mais changé, purifié, sanctifié: foi, amour, espérance, ferveur, force et lu‐<br />

mière, votre âme en sera comblée et criera: Seigneur, cʹest assez.<br />

Si donc lʹépreuve continue, si votre misère sʹaccroît encore, soyez en paix, souriez<br />

doucement en vous‐même et dites: mon Dieu, je vous comprends, vous vous cachez en<br />

vain, je le sais bien, vous nʹêtes pas loin.<br />

93


Ces paroles rassurantes, ce nʹest pas moi, mon cher frère, qui<br />

vous les donne, cʹest un pieux et savant ecclésiastique 78 consommé<br />

dans lʹétu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s consciences, qui me les remet pour vous. Lʹépreuve,<br />

vous dit‐il expressément, est la mesure <strong>de</strong>s grâces que Dieu veut<br />

faire après, et lʹindice aussi <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> ses <strong>de</strong>sseins sur une<br />

âme; quand un arbre doit pousser haut et étendre au loin ses bran‐<br />

ches, le vent lʹébranle en tous sens pour que les racines prennent<br />

profondément la terre; cʹest la marque <strong>de</strong> pré<strong>de</strong>stination, les saints<br />

ont tous passé par là. Votre lettre que jʹai communiquée à cet homme<br />

vénérable, lʹa confirmé dans sa pensée, il veut que vous suiviez tranquillement votre route<br />

comme si tout ce qui se passe en vous ne vous regardait pas. Si les secousses <strong>de</strong>venaient<br />

trop fortes, il vous conseillerait le recours aux Sacrés Cœurs, si vénérés par vous, et à S t Jo‐<br />

seph tout‐puissant contre les peines intérieures. Les litanies <strong>de</strong> ce Saint pendant neuf jours<br />

si cela se peut seulement et vous convient, car, je le répète, quant à présent, tout lui plaît et<br />

lui semble parfait. Je nʹai rien à ajouter à ces excellents conseils, moi, pauvre ignorant, sans<br />

titre, ni mission, je ne pourrais que vous fourvoyer. Je nʹai que mes prières à vous offrir, et,<br />

pas un seul jour, je ne manque dʹen adresser quelquʹune au Seigneur pour vous; puisse‐t‐il<br />

mʹentendre et vous gar<strong>de</strong>r toujours parmi ses enfants les<br />

plus aimés!<br />

Je vais être contraint, mon cher ami, <strong>de</strong> tourner<br />

court ici, mes travaux me pressent dans cette saison dont<br />

les jours sont si courts; jʹajoute seulement un mot en<br />

réponse à vos questions. Nos amis Estève, Lambert, L.<br />

sont à St‐Sulpice heureux et satisfaits; la santé <strong>de</strong> M.<br />

Lambert souffre un peu, cʹest là son épreuve à lui; M. <strong>de</strong><br />

Galambert chez les Jésuites, heureux aussi; M. <strong>de</strong><br />

Montrond marié, heureux dans sa voie, les épreuves<br />

viendront, il y peut compter. Le catéchisme <strong>de</strong> Mannat<br />

prospère. Notre petite conférence vit toujours et compte 5<br />

sections, on parle dʹune sixième pour St‐Roch. Elle tend à<br />

<strong>de</strong>venir <strong>de</strong> plus en plus paroissiale, et restant laïque, à se<br />

mettre <strong>de</strong> plus en plus sous la main <strong>de</strong>s Curés. Le Roule<br />

et Bonne‐Nouvelle sʹassemblent au presbytère, St‐Merry<br />

à la sacristie, St‐Sulpice dans un local dépendant <strong>de</strong><br />

lʹéglise, locale commo<strong>de</strong> et définitivement acquis que nous a concédé le Curé. La prési‐<br />

<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> cette <strong>de</strong>rnière section 79 mʹest échue après essais pour faire mieux qui nʹont pas<br />

78 "Vers 1835-1836, une lecture attentive <strong>de</strong> la correspondance <strong>de</strong> MLP. signale un changement notable dans le style <strong>de</strong> ses lettres: il<br />

semble que la religiosité s'efface pour faire place à la doctrine spirituelle la plus soli<strong>de</strong>". (M. Maignen). MLP. avait trouvé un gui<strong>de</strong><br />

expérimenté dans les épreuves <strong>de</strong> la vie et éclairé sur la conduite <strong>de</strong>s âmes: l'abbé comte <strong>de</strong> Malet. Officier sous Napoléon, blessé<br />

en 1807 dans un engagement <strong>avec</strong> les Cosaques qui le blessèrent au visage (MLP. parlait souvent <strong>de</strong> la "balafre glorieuse" <strong>de</strong> son<br />

directeur spirituel), il se maria, mais peu après, perdit et sa femme et son unique enfant (1816). Ordonné prêtre, il fonda une communauté<br />

<strong>de</strong> religieuses, les Sœurs <strong>de</strong> Ste-Marie-<strong>de</strong>-Lorette, qu'il installa à Paris, au 16 <strong>de</strong> la rue du Regard. Grand connaisseur <strong>de</strong><br />

la spiritualité salésienne, ce fut lui qui fit goûter à MLP. les écrits <strong>de</strong> saint François <strong>de</strong> Sales. MLP. savait ce qui lui <strong>de</strong>vait: "C'est<br />

lui qui m'a fixé dans la voie <strong>de</strong> la confiance en Dieu". Il meurt le 16 août 1843, avant la fondation <strong>de</strong> l'Institut.<br />

79 A l'assemblée du 8 décembre 1835, les Sections <strong>de</strong>vinrent <strong>de</strong>s Conférences: St-Etienne-du-Mont (présidée par Ozanam), St-<br />

Sulpice (par Chaurand). Et pour la première fois dans les procès-verbaux, on parle <strong>de</strong> la "Société <strong>de</strong> Saint-Vincent-<strong>de</strong>-Paul, dont<br />

Bailly est prési<strong>de</strong>nt et MLP. vice-prési<strong>de</strong>nt (du 8.12.1835, jusqu'au moins en 1839). Mais il était difficile aux Conférences <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r<br />

longtemps leurs prési<strong>de</strong>nts: leurs étu<strong>de</strong>s terminées, ces jeunes universitaires retournaient dans leur ville d'origine. Le 11 décembre<br />

1836, il est donc décidé que MLP. assumera la prési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> St-Sulpice. Il y restera jusqu'au 24 avril 1849.<br />

94


éussi; légère pour bien dʹautres, cette tâche mʹest far<strong>de</strong>au; je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> expressément<br />

<strong>de</strong> prier pour que jʹy trouve occasion <strong>de</strong> faire quelque bien à nos frères et à moi et que cela<br />

tourne à la gloire <strong>de</strong> Dieu. Notre petite maison va bien, grâce au dévouement <strong>de</strong> M. <strong>de</strong><br />

Kerguelen 80 , et il y a 12 et tout à lʹheure 13 enfants.<br />

Vos pauvres femmes vont passablement, mes confrères et moi nous visitons quel‐<br />

quefois M me Delatre. Les loyers vont éprouver déficit et je ne vois aucun moyen <strong>de</strong> le com‐<br />

bler. M me Delatre désire quʹon ne recoure pas à Manille, elle craint que les légers secours<br />

quʹil lui obtient ne tournant au loyer, nʹaccroissent dʹautant sa misère déjà si gran<strong>de</strong> et si<br />

dure à porter. Dʹautre côté, M. Daubigny va quitter Paris; il va dans le midi, à lʹextrémité<br />

<strong>de</strong> la France; je lʹai vu, à partir du prochain terme il ne faudra plus compter sur lui. Pour<br />

cette fois, jʹaurai encore en tout 33f, mais au prochain terme il ne restera que 18f. Je regrette<br />

vivement que vos charges sʹaccroissent ainsi, malheureusement, je ne vois pas comment<br />

les alléger.<br />

Jʹai vu hier la famille Courbe en votre nom; Emile nʹy était pas; on fait beaucoup <strong>de</strong><br />

démarches dont on attend le résultat; M. Bailly mʹa promis <strong>de</strong> faire tout ce qui serait en lui<br />

près <strong>de</strong>s gens quʹil connaît; cependant le succès reste douteux. Adieu, mon bien cher frère,<br />

gar<strong>de</strong>z‐moi souvenir <strong>de</strong>vant Dieu et écrivez‐moi quelquefois, voilà désormais les seules<br />

ressources dont puisse disposer notre amitié, elles sont gran<strong>de</strong>s encore, si nous en usons<br />

bien et souvent.<br />

Votre frère en J.C. Le <strong>Prevost</strong><br />

80 Arsène <strong>de</strong> Kerguelen (1804-1887), membre <strong>de</strong> la Conférence en 1834, petit-fils <strong>de</strong> l'amiral qui donna son nom aux îles qu'il avait<br />

découvertes dans les mers australes. Ce confrère avait été chargé d'enseigner l'arithmétique à quelques apprentis-orphelins pris en<br />

charge par la Société <strong>de</strong> St-Vt-<strong>de</strong>-Paul en 1836. L'Œuvre s'installa rue Copeau, (aujourd'hui rue Lacépè<strong>de</strong>), près <strong>de</strong> St-Etienne-du-<br />

Mont. MLP. prêta son concours à cette petite Œuvre. Il rédigeait les procès-verbaux du Conseil <strong>de</strong> l'Œuvre, rendait visite aux orphelins<br />

tous les soirs, malgré sa fatigue et ses infirmités, et surtout il s'en occupait spirituellement. M. <strong>de</strong> Kerguelen <strong>de</strong>vant rentrer<br />

en Bretagne à la fin <strong>de</strong> 1838, MLP. accepta <strong>de</strong> le remplacer. Au cours <strong>de</strong> son mandat, MLP. annonça, non sans fierté, à l'assemblée<br />

générale <strong>de</strong> juillet 1839, la réalisation d'un projet qui lui tenait à cœur, la parution <strong>de</strong> la Vie <strong>de</strong> Saint Vincent <strong>de</strong> Paul par Abelly,<br />

dont l'impression (6000 ex.) fut confiée aux orphelins-apprentis. En 1841, l'Œuvre fut confiée aux Frères <strong>de</strong>s Ecoles Chrétiennes,<br />

qui s'en occuperont jusqu'en 1845. La Société <strong>de</strong> St-Vt-<strong>de</strong>-Paul conservant encore le patronage externe <strong>de</strong>s apprentis, c'est à continuer<br />

cette petite Œuvre <strong>de</strong>s orphelins-apprentis que l'Institut allait donner ses premiers soins (cf. in fine P.V. du Conseil <strong>de</strong>s orphelins-apprentis,<br />

le 1 er mars 1845.)<br />

95


Mardi, je termine une neuvaine commencée à lʹintention <strong>de</strong> ma femme. Cette lettre<br />

vous arrivera assez à temps pour que vous unissiez au moins une fois vos vœux aux<br />

miens, vous savez combien la grâce que je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> me serait précieuse, priez donc avi‐<br />

<strong>de</strong>ment pour nous.<br />

68 à M. Levassor<br />

MLP. réconforte son ami dans lʹépreuve qui touche sa famille. Exhortation à lʹespérance. ʺDieu nʹefface que pour<br />

écrire et ne reprend que pour donner encore plus.ʺ Communion <strong>de</strong>s saints.<br />

Paris, 10 mars 1837<br />

Mon bien cher ami,<br />

Jʹapprends par notre ami Emile Courbe, quʹun grand sujet dʹinquiétu<strong>de</strong> et <strong>de</strong> peine<br />

est donné à votre famille, quʹune perte douloureuse vous menace et que les soins et les<br />

vœux <strong>de</strong> vos amis vous sont désirables. Je veux être <strong>de</strong>s plus empressés et vous témoigner<br />

sans nul retard la vive et tendre sympathie que je me sens pour cette nouvelle affliction.<br />

Peut‐être nʹest‐ce encore quʹun avertissement, un appel envoyé par la divine miséricor<strong>de</strong><br />

pour se concilier décidément un cœur qui, sans cela, languirait encore longtemps dans sa<br />

triste incertitu<strong>de</strong>; vous le savez, mon cher ami, ce moyen est familier à notre Père Céleste,<br />

Il frappe, et bien fort parfois, lʹhomme est renversé et se croit perdu, mais dès quʹil crie<br />

grâce la main du Seigneur le relève, lui accor<strong>de</strong> <strong>de</strong>s jours et conduit à perfection lʹœuvre<br />

<strong>de</strong> sa conversion.<br />

Je me plais à penser que telle est en ce moment lʹépreuve subie par votre bon père,<br />

et que la consolation <strong>de</strong> le possé<strong>de</strong>r vous sera encore laissée; mais sʹil en était autrement, je<br />

gar<strong>de</strong>rai néanmoins vive et ferme confiance; le bon M. Lecomte vous a promis que votre<br />

sacrifice serait bénédiction pour votre maison; cʹétait au nom <strong>de</strong> Dieu quʹil parlait Dieu ne<br />

le démentira point; quelque chose qui advienne, la grâce du salut me semble acquise à vo‐<br />

tre bon père, et, sʹil plaisait au Maître dʹabréger les temps, jʹose espérer <strong>de</strong> son amour infini<br />

quʹil nʹy aurait point préjudice pour lʹâme <strong>de</strong> son serviteur, Il accumulerait les grâces, Il les<br />

verserait à mains pleines, et, dans un instant peut‐être, ferait lʹœuvre <strong>de</strong> beaucoup dʹan‐<br />

nées. Tâchez, mon cher ami, <strong>de</strong> mettre profondément en votre cœur cette espérance; outre<br />

quʹelle vous consolera à tout événement, elle sera, si jʹose le dire, une obligation <strong>de</strong> plus<br />

pour notre bon Maître dʹy donner satisfaction; Il ne voudrait point, pour la détruire, déchi‐<br />

rer une âme si confiante en sa bonté, Il vous fera selon que vous aurez cru, et votre foi<br />

exercera violence sur sa volonté divine. En repassant dans mon souvenir ce que je sais <strong>de</strong><br />

votre famille, je me dis que ce nʹest point sans <strong>de</strong>s vues <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong> que le Seigneur lʹa<br />

frappée déjà douloureusement; votre pauvre père nʹa‐t‐il pas déjà pleuré <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> ses fils<br />

qui lui ont été pris, lʹun pour le ciel, lʹautre pour la maison <strong>de</strong> Dieu? Nʹest‐il pas aussi lan‐<br />

guissant, privé <strong>de</strong> santé, <strong>de</strong> repos, <strong>de</strong> joie, <strong>de</strong>puis bien <strong>de</strong>s années! Il y aura pour cela com‐<br />

pensation dans les justices éternelles, Dieu nʹefface que pour écrire et ne reprend aussi que<br />

pour donner encore plus. Prions néanmoins, ainsi que vous le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z, mon cher ami,<br />

prions instamment; nos prières, quoique imparfaites et misérables, doivent avoir poids<br />

dans sa balance, heureux si nous contribuons à lʹentraîner vers la miséricor<strong>de</strong>. Un jour<br />

aussi cela nous sera rendu; dʹautres, à leur tour, <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ront grâce pour nous; car, cʹest<br />

ainsi que tout se lie et sʹenchaîne dans la sainte communion <strong>de</strong>s âmes!<br />

96


Je serai fort empressé dʹapprendre la suite <strong>de</strong> lʹépreuve où vous êtes engagé en ce<br />

moment, vous et ceux qui vous sont chers; tâchez <strong>de</strong> mʹen tenir informé, si quelque loisir<br />

vous reste; disposez dʹailleurs <strong>de</strong> moi pour tout ce que vous croiriez <strong>de</strong>voir entreprendre<br />

<strong>de</strong>vant Dieu. Je coopérerai, selon ma faiblesse, à vos prières et à vos œuvres afin dʹêtre<br />

vraiment, comme je me plais à me dire<br />

Votre frère en J.C.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

68‐1 à M. Bailly<br />

Lʹabbé T. Combalot, prédicateur <strong>de</strong> renom, vient visiter la Conférence Saint‐Sulpice. La présence <strong>de</strong> M. Bailly est<br />

souhaitée.<br />

Dimanche 26 mars 1837<br />

Monsieur et ami,<br />

M. Combalot a promis <strong>de</strong> venir visiter la section St‐Sulpice mardi au soir; nous se‐<br />

rions bien heureux si vous vouliez y venir vous‐même afin <strong>de</strong> le recevoir. Tous nos amis<br />

vous en auraient une sincère reconnaissance et en particulier celui qui vous renouvelle ici<br />

les assurances <strong>de</strong> son respectueux dévouement.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

69 à M. Levassor<br />

Décès <strong>de</strong> M. Levassor père. Comment son ami, ʺélu du Seigneurʺ, doit supporter cette épreuve. Visite <strong>de</strong>s pauvres.<br />

Persévérance <strong>de</strong>s séminaristes.<br />

12 avril 1837<br />

Mon bien cher ami,<br />

La part aussi gran<strong>de</strong> que sincère que jʹai prise à vos peines vous était si assurément<br />

acquise quʹil nʹétait guère besoin <strong>de</strong> vous le dire par écrit; je nʹy eusse pas manqué, toute‐<br />

fois, si quelques occupations et embarras ne se fussent mis à la traverse. On aime, dans ces<br />

tristes circonstances, à sʹentendre répéter ce quʹon sait déjà; il est doux aussi et consolant<br />

dʹêtre alors entouré <strong>de</strong> toutes les affections qui restent, afin <strong>de</strong> moins sentir le vi<strong>de</strong> <strong>de</strong> cel‐<br />

les quʹon vient <strong>de</strong> perdre. Aussi étais‐je <strong>de</strong> cœur auprès <strong>de</strong> vous, croyez‐le bien, mon cher<br />

frère; par la pensée je suivais tous vos pas; je voyais les scènes douloureuses quʹil vous fal‐<br />

lait traverser, les soins, les <strong>de</strong>voirs qui vous <strong>de</strong>vaient accabler; je vous plaignais et je priais<br />

pour vous. Mais je nʹoubliais pas en même temps que vous êtes élu du Seigneur, lʹenfant<br />

bien‐aimé <strong>de</strong> la Mère <strong>de</strong> Dieu; lʹun et lʹautre le gar<strong>de</strong>ront, me disais‐je, ils adouciront sa<br />

peine et porteront <strong>avec</strong> lui le far<strong>de</strong>au. Hâtez‐vous, je vous en conjure, <strong>de</strong> mʹassurer que je<br />

ne me suis point trompé; que vous avez, dans ces jours dʹamertume, reçu la visite du Sei‐<br />

gneur, que son ai<strong>de</strong> vous a été présente ainsi quʹaux vôtres, et que ces douloureuses<br />

épreuves ont été pour sa divine miséricor<strong>de</strong> comme un prétexte à <strong>de</strong> nouvelle grâces, à <strong>de</strong>s<br />

dons plus abondants. Il est aussi dʹautres détails quʹil me sera précieux <strong>de</strong> connaître sur les<br />

<strong>de</strong>rniers jours et la fin <strong>de</strong> votre bien‐aimé père. Je me plais à me figurer dʹavance toutes<br />

choses dans le sens le plus heureux, mais jʹaimerais pourtant, mon cher ami, que vous<br />

confirmiez mes espérances. Je nʹai point épargné mes faibles prières, et avant, pour obtenir<br />

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que sa fin fût sanctifiée, et <strong>de</strong>puis, pour que le but <strong>de</strong> notre vie entière reçut ici accomplis‐<br />

sement, cʹest‐à‐dire pour que la paix, le repos, lʹunion éternelle <strong>avec</strong> Dieu fût acquise à<br />

lʹâme qui vous fut ici‐bas si chère.<br />

Enfin, mon bien cher ami, je désire ar<strong>de</strong>mment apprendre que ce douloureux évé‐<br />

nement nʹaura rien <strong>de</strong> contrariant pour votre carrière, que vous la voulez suivre comme<br />

Dieu aussi le veut, je pense, sans que les événements humains, quelque graves quʹils soient<br />

dʹailleurs, puissent vous en détourner. Ne tar<strong>de</strong>z pas, je vous en prie encore, mon cher<br />

ami, à satisfaire sur tous ces points ma sollicitu<strong>de</strong> dʹami et <strong>de</strong> frère, je vous en serai vrai‐<br />

ment reconnaissant.<br />

Je ne veux pas finir sans vous dire quelques mots <strong>de</strong> vos bonnes dames. Cʹest tou‐<br />

jours même position, mêmes souffrances, mêmes besoins, et même instance aussi à votre<br />

charité. On attend <strong>avec</strong> impatience une lettre <strong>de</strong> vous. Nos amis sont aussi à peu près tels<br />

que vous les avez laissés; notre petite société se soutient assez bien; priez pour elle, tou‐<br />

jours elle vous gar<strong>de</strong> bon souvenir. Ceux du Séminaire persévèrent et correspon<strong>de</strong>nt aux<br />

grâces <strong>de</strong> Dieu; faites comme eux, mon cher frère, cʹest le vœu le plus cher <strong>de</strong><br />

Votre tout dévoué ami en J.C.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

70 81 à M. Levassor<br />

70‐1 au Ministre <strong>de</strong>s Cultes<br />

Deman<strong>de</strong> <strong>de</strong> congé temporaire au Ministère <strong>de</strong> la Justice et <strong>de</strong>s Cultes (Division du Culte catholique‐2 e Bureau 82 )<br />

afin <strong>de</strong> se rendre à Duclair, auprès <strong>de</strong> sa sœur, M me Salva, très éprouvée dans son mariage.<br />

Paris, le 23 mai 1837<br />

Monsieur le Ministre,<br />

Une affaire qui intéresse gravement ma famille rend ma présence nécessaire pour<br />

quelque temps en Normandie.<br />

Je viens en conséquence solliciter <strong>de</strong> votre bienveillance un congé <strong>de</strong> trois semaines.<br />

Lʹassiduité que je mʹefforce dʹapporter à mes travaux, la bienveillance <strong>de</strong> mes chefs<br />

et surtout, Monsieur le Ministre, vos dispositions favorables pour les employés placés sous<br />

vos ordres, sont les titres dont sʹappuie ma <strong>de</strong>man<strong>de</strong> et les motifs sur lesquels jʹose me<br />

fon<strong>de</strong>r pour en attendre le succès.<br />

Je suis <strong>avec</strong> respect, Monsieur le Ministre,<br />

Votre très humble et très obéissant serviteur<br />

Le <strong>Prevost</strong>, rédacteur.<br />

81 Se reporter, infra, à la lettre 75-3.<br />

La lettre 70, adressée à M. Levassor et portant la date reconstituée <strong>de</strong> mai 1837, contient une allusion à un événement qui doit la<br />

faire déplacer d'une année. MLP. annonce à M. Levassor le mariage d'Auguste Le Taillandier, l'un <strong>de</strong>s premiers confrères <strong>de</strong> St-<br />

Vt-<strong>de</strong>-Paul. "à la fin du mois". Or, Le Taillandier se marie le 7 juin 1838, à Rouen (cf. S. Grandais, Biographie <strong>de</strong> MLP., p.53).<br />

c’est manifestement en mai 1838 et non en mai 1837 que MLP. écrit cette lettre à M. Levassor.<br />

82 La permission ne fut accordée que pour 15 jours. On lit en effet dans la marge :<br />

1° - Du chef du 2 e Bureau: la multiplicité et l'urgence <strong>de</strong>s affaires qui restent à traiter actuellement dans le 2 e Bureau exigent la présence<br />

presque continue <strong>de</strong>s employés qui le composent. Je suis donc d'avis <strong>de</strong> limiter à quinze jours seulement, le congé <strong>de</strong>mandé<br />

par M. Le <strong>Prevost</strong>, congé qui ne lui serait encore accordé qu'à raison <strong>de</strong> l'assiduité et du zèle <strong>avec</strong> lesquels il remplit ses <strong>de</strong>voirs.<br />

2° - Du M. <strong>de</strong>s Requêtes, Chef <strong>de</strong> la Section du Culte catholique: proposé à Monsieur le Gar<strong>de</strong> <strong>de</strong>s Sceaux d'accor<strong>de</strong>r le congé <strong>de</strong><br />

15 jours sans retenue, vu sa brièveté, mais sous condition que la retenue sera imposée en cas <strong>de</strong> prolongation d'absence non justifiée.<br />

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71 à M. Pavie<br />

Effusions <strong>de</strong> son cœur. Nouvelles <strong>de</strong> sa mère, et <strong>de</strong> sa sœur dont le mariage est un échec. MLP. dresse un bilan <strong>de</strong><br />

son propre mariage: <strong>de</strong>puis trois ans, malgré une estime réciproque, ʺcʹest une marche pénibleʺ. Dieu toujours pré‐<br />

sent dans lʹépreuve.<br />

17 juillet 1837<br />

Que votre amitié, mon cher Victor, est généreuse et fidèle, quʹelle fait honte à ma<br />

négligence et à ma lâcheté. Vous aviez trop bien présumé <strong>de</strong> moi; non, Théodore nʹempor‐<br />

tait rien pour vous que lʹhumble confession dʹune torpeur stupi<strong>de</strong> dont on ne peut rien ar‐<br />

racher. Il y avait, <strong>avec</strong>, pourtant, force tendresses et affections, car jʹaime quand même,<br />

dormant ou éveillé, mais cʹétait tout. Point <strong>de</strong> reproches, ils seraient retombés sur son nez,<br />

point dʹexcuses, je nʹétais pas en droit <strong>de</strong> pardonner. Vous, mon aimé ami, dont la fécondi‐<br />

té ne se lasse point et dont le cœur nʹa point <strong>de</strong> repos en ses effusions, vous prenez lʹinitia‐<br />

tive, vous me parlez le premier <strong>de</strong> cette douce joie quʹil mʹa fallu retrouver pour quelques<br />

instants, aux rayons <strong>de</strong> votre chaleureuse affection. Vous me parlez <strong>de</strong>s bénignes influen‐<br />

ces dʹune affection plus suave encore peut‐être, <strong>de</strong> la douce intervention <strong>de</strong> votre femme,<br />

blanche clarté <strong>de</strong> nuit après les splen<strong>de</strong>urs du jour. Que cela est bien à vous, ami, <strong>de</strong> pro‐<br />

voquer mon âme et dʹy remuer ces tendres souvenirs, je mʹen sens tout rafraîchi, cʹest une<br />

rosée sur lʹherbe ari<strong>de</strong>, béni en soyez‐vous. Il est vrai, cher ami, que cette douce âme, <strong>de</strong>‐<br />

venue moitié <strong>de</strong> votre âme, mʹa naïvement et fortement entraîné. Jʹallais à elle par pente et<br />

attrait, sans nulle réflexion ni pensée, comme autrefois je mʹétais laissé aller à vous; cʹétait<br />

floraison nouvelle <strong>de</strong> notre vieille affection. Je vois cela en cette heure, mais je nʹavais<br />

gar<strong>de</strong> dʹy penser alors, et je me sens tout surpris dʹimpression si naïve, vieux que je suis<br />

déjà et si accoutumé aux analyses. Dites‐lui, cher ami, que mon cœur est tendrement re‐<br />

connaissant du bien quʹil a reçu; que par là, nous <strong>de</strong>meurons attachés, elle, pour mʹavoir<br />

été si aimable, moi pour lʹavoir dignement aimée!<br />

Théodore vous a dit, à cette heure sans doute, quʹau jour où il me vit un bouquet en<br />

main, cʹétait double fête pour moi; le matin, je suivais le père qui est aux cieux; le soir jʹal‐<br />

lais retrouver la mère quʹil mʹa laissée sur la terre. Je lʹai revue, mon ami, meilleure encore<br />

et plus sainte; ces trois ans lʹont bien grandie et, cʹest merveille divine vraiment, quʹen pays<br />

si mauvais, si dépourvu <strong>de</strong> toute ressource pour la culture <strong>de</strong>s âmes, la sienne, par ri‐<br />

chesse propre du fonds, par soins directs <strong>de</strong> la grâce, ait ainsi cru dans le bien et mûrisse<br />

pour les greniers du Seigneur; dʹelle‐même, elle me conduisait chez ses pauvres pour les‐<br />

quels elle travaille aujourdʹhui presque uniquement, puis, quand le matin, revenant <strong>de</strong> la<br />

messe <strong>avec</strong> elle, elle sʹappuyait sur moi, elle pressait mon bras, me disant: ʺOh! que nous<br />

nous entendons bien!ʺ Elle a 73 ans, elle marche bien encore, mais un appui lui plaît. Je lui<br />

en servais. Quʹil me serait doux quʹil en fût ainsi jusquʹà la fin! Mais non, nous voilà sépa‐<br />

rés. Elle est bien loin, et serai‐je là quand Dieu la reprendra? Oh! que ne mʹest‐il donné<br />

plutôt, pour comble <strong>de</strong> tous mes vœux, dès aujourdʹhui <strong>de</strong> courir à lʹavance, là‐haut, à<br />

lʹombre <strong>de</strong> la sainte <strong>de</strong>meure, lʹattendre, ami, et quelques autres encore. Voilà <strong>de</strong> bonne et<br />

douces pensées, mais ne croyez pas quʹil mʹait été donné <strong>de</strong> mʹy livrer en paix là‐bas.<br />

Cʹétaient là fleurs croissant sur le fumier <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s afflictions! Ma pauvre sœur plie sous<br />

un far<strong>de</strong>au <strong>de</strong> peines toujours plus accablant, sans quʹaucun allégement semble possible<br />

par voie conciliante et paisible; dix ans <strong>de</strong> ménage nʹont pu faire encore <strong>de</strong> sa vie et <strong>de</strong><br />

celle <strong>de</strong> son mari une seule vie, et humainement, la fusion semble impraticable, à cause <strong>de</strong>s<br />

éléments vraiment dissociables <strong>de</strong> lʹune <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parties, quelque explosion peut sʹatten‐<br />

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dre dʹheure en heure. Je nʹai donc point eu <strong>de</strong> repos là‐bas, pas un jour dʹépanouissement.<br />

Jʹai rapporté le cœur triste et fermé que jʹavais au départ, <strong>avec</strong> inquiétu<strong>de</strong> <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> ce cô‐<br />

té. Union, paix, charité, indulgence tendre et miséricordieuse, vertus absentes autour <strong>de</strong><br />

moi, où donc cela se trouve‐t‐il? chez vous, je lʹespère, cher ami, car, <strong>avec</strong> les mots, Dieu<br />

nous donne ici‐bas aussi quelque peu <strong>de</strong>s choses.<br />

Pourquoi me presser encore, ami, pour nʹavoir que <strong>de</strong>s redites? Les trois ans qui<br />

viennent <strong>de</strong> passer nʹont été quʹune suite dʹamertumes, <strong>de</strong> froissements douloureux, et<br />

parfois dʹangoisses désespérées; tout cela, jʹy compte fermement, a été mesuré pour la vie<br />

meilleure; mais le temps y a été pleinement sacrifié. Jʹai lutté autant que cela était en moi,<br />

par affection et douceur, par volonté et empire, mais tout cela, dans la proportion insuffi‐<br />

sante <strong>de</strong> mes forces, <strong>de</strong>meurait inférieur à la position. Je me flatte quʹà lʹheure quʹil est une<br />

phase est accomplie <strong>de</strong> cette marche pénible. Tout semble inoffensif et, en un certain point,<br />

bienveillant entre nous. Qui sait ce que ménage lʹavenir? Dieu est là, dʹailleurs, après nous<br />

avoir bien convaincus <strong>de</strong> notre impuissance, peut‐être interviendra‐t‐Il? ou plutôt, Il nʹa<br />

jamais cessé dʹintervenir. Je lʹai senti dans les plus mauvais jours, comme soutien et conso‐<br />

lation, ou bien comme aiguillon et frein, me pourchassant à lʹœuvre, malgré mes plaintes<br />

et mes cris; sans lui, je nʹeusse point été jusquʹici; <strong>avec</strong> lui, je poursuivrai, ignorant <strong>de</strong>s<br />

moyens qui me restent cachés, mais confiant dans la fin. Cʹest une merveille quʹen pareil<br />

naufrage quelque chose ait échappé. Lʹestime mutuelle a surnagé pourtant. Priez ar<strong>de</strong>m‐<br />

ment, mon cher frère, quʹ<strong>avec</strong> ce mince appui, la charité revienne aussi sur lʹeau.<br />

Adieu, mille affections aux vôtres qui sont miens aussi, à votre femme bien‐aimée<br />

surtout, puis le père et votre frère Théodore. Adrien à qui je veux écrire et à qui je le dois<br />

bien et les autres aussi. Je verrai Gavard, mais il est fortement prévenu; je ne crois pas quʹil<br />

y ait faute volontaire <strong>de</strong> ma part; jʹy ferai <strong>de</strong> mon mieux. Adieu.<br />

Votre ami et frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

72 à M. Pavie<br />

Un ami commun, Ménard, sʹen retourne à Angers. Désir <strong>de</strong> recevoir <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> son ami. Avec M me Le Pre‐<br />

vost, cʹest ʺpaix et toléranceʺ, plutôt que sympathie et affection. Peines ici‐bas, repos là‐haut.<br />

27 novembre 1837<br />

Mon cher Victor,<br />

Nous vous renvoyons votre petit Ménard; il faut que vous le couviez encore un peu<br />

avant <strong>de</strong> le laisser sʹenvoler; il nʹa guère <strong>de</strong> plumes encore, le nid lui convient pour un<br />

temps; nous le reprendrons lʹan prochain. Sérieusement, je suis bien aise quʹil retourne à<br />

vous; on ne saurait voir sans inquiétu<strong>de</strong> une chère petite âme si fraîche, si gentille, sʹaven‐<br />

turer dans notre immense mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> Paris, sans gui<strong>de</strong> et sans appui. Plus il est enthou‐<br />

siaste, confiant, illusionné, plus il serait aisément trompé ou séduit. Lʹexpérience lui don‐<br />

nerait bien quelque ru<strong>de</strong> leçon, mais cʹest un triste moyen, quand il vient sans gradation et<br />

trop brusquement. Je nʹai, du reste, vu cet enfant que <strong>de</strong>ux fois, sans autre expansion <strong>de</strong><br />

part et dʹautre que dans lʹordre <strong>de</strong> généralités banales, mais il nʹest pas difficile à pénétrer,<br />

il me semble; je lʹaimerai bien aisément. Je crois seulement que je ne lui suffirais pas et que<br />

dʹautres auraient bien plus <strong>de</strong> prise que moi sur lui.<br />

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Vous mʹavez promis une lettre, cher ami, je lʹattends. Depuis bien longtemps, nʹest‐<br />

il pas vrai, rien dʹintime ne sʹest écoulé <strong>de</strong> vous à moi; quoiquʹen dise Gavard, lʹimplicite<br />

ne suffit pas, la forme est essentielle aussi; nous ne saurions ici‐bas nous en passer. Vous<br />

avez <strong>de</strong>s ennuis sans doute. Quelques mots me sont arrivés en lʹair là‐<strong>de</strong>ssus, assez pour‐<br />

tant pour me faire comprendre quʹune âme faite comme la vôtre a dû être péniblement<br />

froissée. Cʹest un anneau <strong>de</strong> plus à la chaîne que tous il nous faut traîner, cher ami, et qui<br />

sʹallonge à chacun <strong>de</strong> nos jours. Que cela doit être lourd à la fin, et que le repos doit sem‐<br />

bler doux quand on lʹa déposée. Vous nʹavez guère souvent pensé ainsi, ne vous plaignez<br />

donc pas trop. Dieu, en somme, a été tendre pour vous. Que je me gar<strong>de</strong> bien aussi <strong>de</strong> me<br />

plaindre pour ma part; tant dʹautres méritaient plus et ont bien moins obtenu.<br />

Jʹai à peine entrevu Théodore <strong>de</strong>puis son retour, quoique nous ayons été assez lon‐<br />

guement réunis; les occasions <strong>de</strong> se parler autrement quʹen phrases ayant cours sont rares<br />

ici. On gagne pourtant quelque chose à sʹentendre dʹun peu plus près, quand <strong>de</strong> part et<br />

dʹautre, on a quelque droiture et bonne intention.<br />

Dites‐moi, mon cher Victor, bien <strong>de</strong>s choses <strong>de</strong> votre intérieur, <strong>de</strong> votre chère petite<br />

femme surtout; je désire bien gar<strong>de</strong>r toujours ma petite place au coin <strong>de</strong> votre feu, bien<br />

que je ne puisse guère vous promettre la pareille, nʹayant, à vrai dire, presque ni maison,<br />

ni feu. Je dois vous dire pourtant, cher ami, à vous qui prenez si tendre intérêt à nous, que<br />

la paix règne <strong>de</strong>puis un long temps chez nous. Paix <strong>de</strong> tolérance, il est vrai, plus que <strong>de</strong><br />

sympathie et dʹaffection; mais nʹest‐ce pas beaucoup déjà. On espère si aisément que par‐<br />

fois je me surprends à y chercher quelques indices dʹun mieux bien établi pour lʹavenir. La<br />

main <strong>de</strong> Dieu est nécessaire pour cela; ne vous lassez donc pas, cher Victor, <strong>de</strong> Le prier<br />

<strong>avec</strong> moi. Ce lien, et <strong>de</strong> foi et <strong>de</strong> prières, nʹest‐il pas dʹailleurs entre nous le plus sûr gage<br />

<strong>de</strong> la durée <strong>de</strong> notre fraternelle affection.<br />

Votre dévoué frère et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

73 à M. Levassor<br />

Dévouement et zèle <strong>de</strong> MLP. auprès <strong>de</strong>s pauvres. Une bienfaitrice est mala<strong>de</strong>, acceptation chrétienne <strong>de</strong> la maladie.<br />

Deman<strong>de</strong> instante <strong>de</strong> prières pour sa femme, quʹil a convaincue <strong>de</strong> porter une petite médaille.<br />

Paris, le 29 décembre 1837<br />

Mon bien cher ami et frère en J.C.,<br />

Jʹai reçu votre lettre <strong>avec</strong> les 30f pour le loyer <strong>de</strong> vos pauvres femmes; je tâcherai <strong>de</strong><br />

réunir le reste et jʹespère que la Provi<strong>de</strong>nce y pourvoira pour cette fois comme par le passé.<br />

Je suis, à lʹoccasion <strong>de</strong> ces pauvres dames, chargé dʹune commission pour vous <strong>de</strong> la<br />

part <strong>de</strong> M me Houdan. Elle vous avertit quʹelle nʹa plus possibilité désormais <strong>de</strong> gérer les<br />

petits intérêts que vous lui aviez confiés et quʹelle sera remplacée dans ce soin par M elle<br />

Montvoisin (actuellement <strong>de</strong>meurant <strong>avec</strong> M elle Dumay) à qui vous ferez bien dʹenvoyer<br />

<strong>de</strong>s fonds, attendu que les ressources laissées par vous sont entièrement épuisées.<br />

Vous savez peut‐être déjà, mon cher ami, pourquoi la bonne M me Houdan vous<br />

donne cet avertissement; cʹest parce que sa santé est tellement altérée <strong>de</strong>puis plusieurs<br />

mois que toute occupation extérieure lui <strong>de</strong>vient impossible. Jʹignorais le triste état <strong>de</strong> cette<br />

excellente dame et jʹai été douloureusement frappé <strong>de</strong> sa position; elle est telle, mon cher<br />

ami, que quelques semaines semblent le terme <strong>de</strong> sa carrière. Depuis un certain temps, sa<br />

101


poitrine sʹest affectée <strong>de</strong> la manière la plus grave, et les soins et la science ont échoué pour<br />

y porter remè<strong>de</strong>. Sa résignation et sa patience sont telles quʹon les pourrait attendre dʹune<br />

âme si généreusement donnée à Dieu, et Dieu, à son tour, lʹen récompense par <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s<br />

consolations spirituelles. M gr <strong>de</strong> Nancy lui vient dire la S te Messe fréquemment dans son<br />

appartement et tous les cinq jours la S te Communion lui est donnée par autorisation <strong>de</strong> M gr<br />

lʹArchevêque <strong>de</strong> Paris.<br />

Jʹajoute, mon cher ami, et cʹest un point essentiel, que du 3 au 12 janvier, le Prince<br />

Hohenlohe doit faire une neuvaine à son intention. La mala<strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong> le suffrage <strong>de</strong> vos<br />

prières les plus ferventes; les pratiques sont laissées au choix <strong>avec</strong> simple recommandation<br />

<strong>de</strong> dévotion et souvenir aux Sacrés Cœurs <strong>de</strong> Jésus et <strong>de</strong> Marie.<br />

M me Houdan espère beaucoup <strong>de</strong> cette pieuse intercession et attend par là son réta‐<br />

blissement. Sans cela, mon cher ami, cʹest‐à‐dire hors le cas <strong>de</strong> miracle, la guérison est im‐<br />

possible. Du reste, le sacrifice est consommé par la pauvre mala<strong>de</strong>. Vous aimez Dieu assez,<br />

lui disais‐je, pour le bénir encore, si au lieu <strong>de</strong> la santé, Il vous accor<strong>de</strong> surcroît <strong>de</strong> grâces<br />

spirituelles. Oh! oui; a‐t‐elle répondu, sa très sainte volonté soit faite! Assurément, mon<br />

cher ami, on ne peut se défendre dʹémotion en la voyant si faible, si épuisée; mais pourtant<br />

nous ne saurions la plaindre, nʹest‐il pas vrai? Mourir ainsi est un sort bien digne dʹenvie<br />

et puisse le Seigneur accor<strong>de</strong>r à nos vœux une telle mort, fût‐elle bien prompte, fût‐elle<br />

aussi pénible et douloureuse.<br />

Adieu, mon cher ami, cʹest tout ce que jʹai le temps <strong>de</strong> vous dire aujourdʹhui, je vous<br />

enverrai bientôt <strong>de</strong>s renseignements sur les cours <strong>de</strong> St‐Sulpice.<br />

Votre frère en J.C.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

(priez pour moi)<br />

P.S. Ma femme a consenti à prendre une petite médaille, priez pour moi, cher frère,<br />

bien instamment pour elle.<br />

74 à M. Levassor<br />

Renseignements sur les cours du Séminaire St‐Sulpice. Activités <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> St‐Vt‐<strong>de</strong>‐Paul et <strong>de</strong> lʹœuvre <strong>de</strong>s<br />

Apprentis. Décès <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux confrères, dont G. <strong>de</strong> la Noue. La conférence St‐Sulpice essaime à St‐François‐Xavier‐<br />

<strong>de</strong>s‐Missions.<br />

Paris, le 19 février 1838<br />

Mon bien cher ami et frère,<br />

Il est grand temps <strong>de</strong> tenir la promesse que jʹavais faite <strong>de</strong> vous écrire; peut‐être<br />

même jugez‐vous quʹil nʹest plus temps et que pour arrêter une détermination sur le point<br />

dont vous mʹaviez parlé, il vous fallait plus à lʹavance avoir <strong>de</strong>s renseignements. Les voilà,<br />

mon cher ami, il vous restera encore tout le saint temps du Carême pour y réfléchir et pour<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r conseil au bon Dieu. St‐Sulpice étudiera après Pâques le dogme <strong>de</strong> la Grâce, en<br />

morale, les Contrats. On ne saurait trouver plus importante matière et jʹespère bien que<br />

vous voudrez venir ici la travailler. Vos confrères Estève, Lambert, <strong>de</strong> Goy et autres en ont<br />

aussi un sincère désir; tâchez <strong>de</strong> les satisfaire, si cʹest dʹailleurs la volonté du Maître su‐<br />

prême à qui vous appartenez.<br />

102


Je ne sais si vous avez eu <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> notre pauvre M me Houdan; elle languit<br />

encore toujours sʹaffaiblissant et déclinant <strong>de</strong> jour en jour. Le Seigneur accomplit en elle<br />

lʹœuvre dʹune purification entière; espérons quʹaprès tant <strong>de</strong> souffrances, Il la jugera digne<br />

du ciel. Son fils aîné est arrivé et se trouve près dʹelle. Il sera là pour lui fermer les yeux; il<br />

est bien jeune, mais cʹest une leçon bien gran<strong>de</strong> aussi et bien solennelle que celle <strong>de</strong> la mort<br />

dʹune mère et d’une mère si chrétienne. Le souvenir lui en restera et influera sans doute<br />

utilement sur son avenir. Puisque nous parlons <strong>de</strong> sujet si grave, je dois vous dire que<br />

nous avons, ces jours passés, perdu notre cher confrère Gustave <strong>de</strong> la Noue, le poète,<br />

lʹécrivain! Il est mort dans les sentiments les plus touchants <strong>de</strong> piété et <strong>de</strong> résignation. Un<br />

autre membre aussi <strong>de</strong> notre section St‐Sulpice est mort le même jour et a été enterré à la<br />

même heure. Il a été enlevé en 24 heures par une fièvre cérébrale, et si inopinément quʹau‐<br />

cun secours religieux nʹa pu lui être donné; heureusement, il vivait en saint. Jʹespère que la<br />

mort ne lʹaura point surpris.<br />

Notre petite Société qui vous intéresse toujours va jusquʹici assez bien. Outre plu‐<br />

sieurs sections nouvelles qui se forment en province, trois sʹétablissent en ce moment à Pa‐<br />

ris; à St‐Nicolas , à St‐Germain‐<strong>de</strong>s‐Prés et aux Missions. Cette <strong>de</strong>rnière est une colonie <strong>de</strong><br />

St‐Sulpice. Elle sʹassemble chez les Lazaristes, près <strong>de</strong>s reliques <strong>de</strong> notre bienheureux pa‐<br />

tron saint Vincent <strong>de</strong> Paul. Nous espérons que cela lui portera bonheur et que lʹesprit <strong>de</strong><br />

charité sera au milieu dʹelle. Je la recomman<strong>de</strong> ainsi que toutes les autres, à vos prières.<br />

Nos apprentis vont bien, nous en avons 15; le bon M. <strong>de</strong> Kerguelen ne les a point encore<br />

quittés. Une loterie est en action pour soutenir et agrandir cette petite œuvre. On parle<br />

aussi d’un sermon. Si tout cela va bien, nous essayerons dʹavoir une nouvelle série dʹap‐<br />

prentis qui seraient ciseleurs en bronzes. Priez bien pour que Dieu nous bénisse et que tout<br />

cela soit purement pour sa gloire.<br />

Vos bonnes femmes vont passablement. Le bon M. Urvoy 83 ici pour quelque peu <strong>de</strong><br />

temps, sʹoccupe <strong>de</strong> la chère M me Delatre. La fille <strong>de</strong> cette pauvre dame languit tristement et<br />

marche, je crois, à une fin peu éloignée. Que <strong>de</strong> morts et <strong>de</strong> mourants! mon cher ami, cette<br />

courte lettre en est toute pleine; mais, jʹen parle sans tristesse et vous mʹécouterez <strong>de</strong><br />

même, car tous meurent dans le Seigneur et nous ne pouvons quʹenvier leur sort. Adieu,<br />

mon bien cher frère, je vous attends bientôt, votre présence me fera du bien et mʹencoura‐<br />

gera à aimer Dieu que je sers <strong>avec</strong> un certain mouvement, mais je le crains, sans beaucoup<br />

avancer... Adieu, je prie toujours pour vous, priez constamment pour moi.<br />

Votre dévoué frère en J.C.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

83 Olivier Urvoy <strong>de</strong> Saint-Bedan (1812-1861), né près <strong>de</strong> Nantes, avait étudié à Paris et connut MLP. à la Conférence <strong>de</strong> St-Sulpice.<br />

Son père s'étend opposé à sa vocation religieuse, ce n'est qu'en 1859, à plus <strong>de</strong> 46 ans, qu'il sera reçu dans l'Institut. "Par le désir, il<br />

est le premier <strong>de</strong> tous nos Frères, à avoir voulu, bien avant 1845, s'unir à notre Fondateur pour se dévouer aux œuvres charitables."<br />

(G. Courtin, Nos premiers frères autour <strong>de</strong> leur père, 1974, ASV). MLP. écrira qu'il "était le plus saint parmi nous; il pratiquait les<br />

vertus religieuses à un <strong>de</strong>gré bien rare <strong>de</strong> notre temps", (lettre 747).<br />

103


75 à M. Levassor<br />

A cause dʹun surcroît dʹoccupations, retard dans la correspondance. Cours du Séminaire St‐Sulpice. M. Levassor<br />

<strong>de</strong>vra y prolonger, <strong>de</strong> six mois, ses étu<strong>de</strong>s.<br />

[mars 1838]<br />

Mon bien cher ami,<br />

La loterie que nous avons faite ces jours<br />

<strong>de</strong>rniers pour nos petits orphelins a pris, et au‐<br />

<strong>de</strong>là, tout le temps dont je pouvais disposer;<br />

littéralement, je nʹai pas trouvé une minute<br />

pour vous écrire; maintenant je suis en retard<br />

sur tout, et en particulier, pour mes travaux<br />

dʹadministration; je vous dirai donc seulement<br />

<strong>de</strong>ux mots en hâte.<br />

Le premier: jusquʹà la fin <strong>de</strong> lʹannée,<br />

comme je vous lʹai déjà dit, on doit voir dans<br />

les cours du Séminaire les Contrats et la Grâce;<br />

lʹan prochain, les Sacrements en général et en<br />

particulier, lʹEucharistie, la Pénitence, lʹOrdre<br />

et le Mariage.<br />

Ce nʹest pas tout néanmoins, car, à moins <strong>de</strong> volonté expresse <strong>de</strong> votre Evêque,<br />

vous <strong>de</strong>vriez, si vous veniez ici, éprouver un retard <strong>de</strong> 6 mois pour votre ordination, et<br />

prolonger ainsi <strong>de</strong> 6 mois votre séjour à St‐Sulpice. Ces 6 mois, me dit M. Lambert, seraient<br />

employés à <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s très utiles et très attachantes; je ne saurais trop vous en donner le<br />

détail; il me semble, entre autres, quʹil a parlé dʹun cours <strong>de</strong> diaconat. Cette <strong>de</strong>rnière partie<br />

<strong>de</strong>s renseignements (pour les 6 mois) mʹest venue par intermédiaire et nʹest pas, quant au<br />

détail, suffisamment précise pour moi; si vous y teniez spécialement, je reviendrais moi‐<br />

même et directement à la charge près <strong>de</strong> nos frères Estève et Lambert.<br />

M. Urvoy sʹest chargé, à mon défaut, <strong>de</strong> voir Emile Courbe. Il avait fait votre com‐<br />

mission; mais sans donner pourtant au prisonnier <strong>de</strong> secours d’argent que sa santé ni son<br />

état ne paraissaient exiger.<br />

Ceci, mon bien cher ami, ne compte pas pour une lettre; j’espère mieux agir pro‐<br />

chainement et mʹentretenir plus à loisir <strong>avec</strong> vous; en attendant écrivez‐moi et si vous avez<br />

besoin <strong>de</strong> nouveaux renseignements, <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z et vous recevrez.<br />

Votre ami et frère en J.C.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

104


75‐1 à M. Ozanam 84<br />

Sollicite un accueil fraternel pour un membre <strong>de</strong> la Conférence St‐Sulpice.<br />

11 avril 1838<br />

Mon bien cher ami et frère,<br />

Je nʹai que le temps <strong>de</strong> vous écrire <strong>de</strong>ux mots pour vous <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>r accueil favorable <strong>de</strong> votre part et <strong>de</strong> celle <strong>de</strong> nos amis <strong>de</strong><br />

Lyon, pour M. Cauvain, membre très fervent <strong>de</strong> la section <strong>de</strong> St‐<br />

Sulpice. Bien quʹil ne soit que <strong>de</strong>puis peu au milieu <strong>de</strong> nous, je lʹai as‐<br />

sez vu pour vous assurer quʹil est plein <strong>de</strong> zèle, fort pieux et très ami<br />

<strong>de</strong>s pauvres. Avec cela il ne saurait manquer <strong>de</strong> se trouver à lʹaise près<br />

<strong>de</strong> nos amis <strong>de</strong> Lyon qui ne le cè<strong>de</strong>nt à personne sur tous ces points.<br />

Je me rappelle instamment à leur souvenir et en particulier à celui <strong>de</strong> mon bien cher M.<br />

Chaurand, <strong>de</strong> M. La Peyrière et autres tous, car en vérité je me sens pour tous un cœur <strong>de</strong><br />

frère.<br />

Nous allons bien ici, nous espérons Mgr <strong>de</strong> Paris à notre prochaine réunion générale;<br />

soyez par la pensée au milieu <strong>de</strong> nous.<br />

Je me recomman<strong>de</strong> à vos excellentes prières et suis <strong>avec</strong> une tendre affection<br />

Votre dévoué confrère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

75‐2 à M. Bailly<br />

Démarches effectuées pour mieux loger lʹOeuvre <strong>de</strong>s orphelins‐apprentis. MLP. cherche un successeur à M. <strong>de</strong><br />

Kerguelen, lʹactuel directeur.<br />

1838<br />

Monsieur et ami,<br />

Ma femme a visité hier lʹappartement <strong>de</strong> la Rue dʹEnfer; elle ne peut sʹaccoutumer à<br />

lʹidée dʹaller là, et comme il nous faut marcher ensemble, je nʹy pourrai moi‐même prendre<br />

<strong>de</strong>meure. Du reste, en quelque lieu que soit lʹétablissement, jʹoffre volontiers dʹy aller 3 fois<br />

par semaine si nos amis jugeaient que cela fut <strong>de</strong> quelque utilité.<br />

Il me paraît que si lʹon pouvait simplifier les moyens, cela nʹen serait que mieux. Si,<br />

par exemple, après nouveaux renseignements on jugeait M. Corman réellement propre à<br />

remplacer M. <strong>de</strong> Kerguelen, trouver un local <strong>de</strong> 12 à 1500f pour les enfants seulement et<br />

pour lui, serait peut‐être <strong>de</strong> plus facile exécution.<br />

Dʹautre part, jʹai visité la maison Poiloup, elle conviendrait, à certains égards, très<br />

bien. Deux petits bâtiments <strong>avec</strong> une cour séparée, situés au fond <strong>de</strong> la cour principale suf‐<br />

firaient parfaitement pour les enfants. Le corps <strong>de</strong> bâtiment sur la rue pourrait être mis en<br />

84 C'est la seule lettre connue <strong>de</strong> MLP. à F. Ozanam. Ce <strong>de</strong>rnier cite plusieurs fois MLP. dans sa volumineuse correspondance. La<br />

lettre 505 du 27 juillet 1843 à son cousin Henri Pessonneaux témoigne <strong>de</strong> la confiance qu'il avait en lui: "…je remettrai l'affaire<br />

aux mains <strong>de</strong> M. Leprevost, c'est assez dire qu'elle sera mieux placée que dans les tiennes". Mais l'estime réciproque n'empêchait<br />

pas les différences <strong>de</strong> points <strong>de</strong> vue. Dans une lettre du 27 avril 1840 à Joseph Artaud, Ozanam, précisant les activités <strong>de</strong> la Société,<br />

écrit : "Il y a ensuite beaucoup <strong>de</strong> réunions sous les toits <strong>de</strong>s sacristies; mais cette disposition cléricale s'efface un peu, en même<br />

temps que diminue l'influence <strong>de</strong> MLP. On a obtenu la démission <strong>de</strong> son titre <strong>de</strong> vice-prési<strong>de</strong>nt général, ce qui est beaucoup, car ce<br />

fonctionnaire est presque désigné pour succé<strong>de</strong>r au prési<strong>de</strong>nt." En fait, MLP. resta vice-prési<strong>de</strong>nt jusqu'en mai 1844, où il fut remplacé<br />

par Cornu<strong>de</strong>t (cf. Foucault, La Société <strong>de</strong> Saint-Vincent-<strong>de</strong>-Paul, 1932 p.76).<br />

105


location dʹappartements bourgeois et se prêterait à telles dispositions quʹon lui voudrait<br />

donner. On voudrait <strong>de</strong> tout cela (par adjudication) 3000f.<br />

Si vous jugiez à propos <strong>de</strong> prendre renseignement sur M. Corman, il a été présenté<br />

par M. Bouvier.<br />

Je clos en hâte ce brouillon presque aussi, jʹallais dire, mal écrit que vos propres let‐<br />

tres; puisse‐t‐il nonobstant être, comme elles le sont toujours, favorablement accueilli.<br />

Je suis, <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s sentiments respectueux<br />

Votre dévoué serviteur et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Vendredi matin<br />

75‐3 à M. Levassor<br />

Se séparer du mon<strong>de</strong> nʹentraîne pas la rupture <strong>de</strong>s liens <strong>de</strong> charité. Félicitations à son ami pour la fidélité à sa<br />

vocation, malgré les épreuves. Obstacles que lʹon rencontre dans le mon<strong>de</strong>. Affirmer <strong>avec</strong> saint François <strong>de</strong> Sa‐<br />

les:ʺNos imperfections sont instruments <strong>de</strong> salutʺ. Mariage dʹun confrère <strong>de</strong> St‐Vt‐<strong>de</strong>‐Paul, Le Taillandier.<br />

[mai 1838]<br />

Mon cher ami et frère en J.C.,<br />

Je suis dʹautant plus sensible aux reproches <strong>de</strong> votre amitié que je ne saurais trouver<br />

refuge dans ma conscience, jʹy rencontrerais un juge encore plus sévère pour gourman<strong>de</strong>r<br />

ma paresse et ma négligence. Je fais donc humblement mon mea culpa et mʹen remets à<br />

votre indulgente charité pour me trouver quelque bonne excuse. Jʹaurais bien toutefois ceci<br />

à alléguer que vous êtes désormais en si saint lieu, sous si bonne gar<strong>de</strong>, que mon affection<br />

rassurée peut déposer toute sollicitu<strong>de</strong>; mais cela ne fait point excuse: est‐il si saint asile<br />

que notre faiblesse ne sʹy laisse surprendre, gar<strong>de</strong> si vigilante que le démon, complice <strong>avec</strong><br />

nous, ne sache lʹélu<strong>de</strong>r? Dʹailleurs, pour être hors du mon<strong>de</strong>, vous nʹavez point rompu<br />

<strong>avec</strong> lui les liens <strong>de</strong> charité; comme les saints continuent <strong>de</strong> chérir dans le ciel ceux quʹils<br />

ont aimé sur la terre, dans votre pieuse retraite vous avez encore souvenir <strong>de</strong> nous, vous<br />

priez pour nous, vous nous désirez en bonne voie, vous pleurez <strong>de</strong> nos peines et vous<br />

vous réjouissez <strong>de</strong> nos joies. Oh! que je me gar<strong>de</strong> bien, mon cher ami, dʹinterrompre <strong>de</strong>s<br />

relations si précieuses; jʹen ai trop grand besoin, et si jamais ma mollesse les négligeait, re‐<br />

prenez et gron<strong>de</strong>z, la charité le veut, entrez en sainte colère et Dieu vous en bénira.<br />

Jʹai été singulièrement édifié, mon cher ami, <strong>de</strong> la noble fermeté <strong>avec</strong> laquelle vous<br />

mʹavez répondu quand jʹémettais quelques craintes sur les suites, pour votre vocation, <strong>de</strong>s<br />

événements survenus dans votre famille, le sacrifice nʹa point été fait à <strong>de</strong>mi; Dieu vous a<br />

paru définitivement la meilleure part, vous lʹavez choisie et vous ne la laisserez point re‐<br />

prendre; ainsi se confirme, à lʹépreuve et par les faits, et <strong>de</strong> plus en plus, votre vocation.<br />

Oh! oui, Dieu est la meilleure part, et bienheureux ceux qui peuvent lʹembrasser unique‐<br />

ment! Dans le mon<strong>de</strong>, quoi quʹon fasse, en tendant les bras au Seigneur, on étreint avant<br />

Lui ce qui se trouve à la traverse, et si, dans une ar<strong>de</strong>ur sainte, on veut écarter ces obstacles<br />

importuns, on nʹen a pas le droit, tous crient et réclament, par la chair, par le sang, le sen‐<br />

timent, la convenance, tous ont propriété sur vous; il faut plier, se soumettre, ce nʹest quʹà<br />

travers cela quʹon peut à <strong>de</strong> rares moments, et bien imparfaitement, pénétrer jusquʹà Dieu.<br />

Ainsi, cher ami, en est‐il pour moi; dʹautres font mieux, je le sais, et je mʹen réjouis pour la<br />

106


gloire <strong>de</strong> notre divin Maître; mais le grand nombre est comme moi, le mon<strong>de</strong> les oppresse,<br />

ils ne sauraient le vaincre ni sʹen dépêtrer.<br />

Cʹest triste chose, cher ami, <strong>de</strong> marcher toujours sans avancer jamais, et en sʹaperce‐<br />

vant souvent quʹaprès bien <strong>de</strong>s jours on a reculé, on est plus loin du but! Mais à qui donc<br />

vais‐je faire pareille doléances, ne le savez‐vous pas aussi, cher ami, nʹavez‐vous point tra‐<br />

versé ces épreuves autrefois, et même aujourdʹhui, pourquoi ne lʹavouerais‐je pas: nʹavez‐<br />

vous pas vos luttes aussi? Oh! oui; en vain je feins que le parfait repos est pour ceux qui<br />

vous ressemblent, le parfait repos nʹest quʹau ciel. Partout, lʹEsprit‐Saint lʹa dit,. la vie <strong>de</strong><br />

lʹhomme est mauvaise, partout, excepté au sein du Seigneur, du Père qui est dans les<br />

cieux, du Maître divin qui veut tous là‐haut nous recueillir sous ses ailes. Oh! sʹalléger<br />

pour y courir plus vite, cʹest beaucoup déjà, cʹest tout ce qui nous est permis, cʹest ce que<br />

vous avez fait, cʹest ce que je nʹai pas eu le courage <strong>de</strong> faire; cʹest pourquoi je vous envie et<br />

vous dis bienheureux. Cʹest pourquoi, quand vous vous plaignez, je vous trouve injuste et<br />

je dis: Dieu nʹa donc point quelques créatures sans plaintes ni gémissements, le bénissant<br />

toujours, contentes <strong>de</strong> la part quʹil leur a faite. Je murmure ici et mʹafflige <strong>de</strong> ma misère;<br />

ailleurs, cʹest même chose: les plus saints seulement compriment leur douleur et gémissent<br />

dans le cœur <strong>de</strong> Jésus! Armons‐nous <strong>de</strong> courage, mon ami, gardons nos faiblesses, tour‐<br />

nons‐les même à profit, en nous humiliant, en acceptant notre abjection et disons <strong>avec</strong><br />

saint François <strong>de</strong> Sales: ʺOh! bienheureuses et chères imperfections, vous me serez instru‐<br />

ments <strong>de</strong> salutʺ.<br />

Vos comptes, cher ami, sont faciles à régler pour le passé et pour le présent. Sur les<br />

60f que jʹai reçus il y a trois mois, jʹai donné 30f à M me Houdan et 30f à moi; quant aux 60f<br />

que votre lettre mʹannonce, je nʹai vu encore ni eux, ni le parent qui les <strong>de</strong>vait apporter.<br />

Tout ici comme toujours, les saints persévèrent, dʹautres lan‐<br />

guissent et je suis <strong>de</strong> ceux‐là; nos petites œuvres se soutiennent.<br />

Notre ami Le Taillandier se marie à la fin du mois 85 ; il va au Mans et<br />

prend un établissement industriel (fabrique <strong>de</strong> sucre).<br />

Jʹoublie peut‐ être dʹautres pareilles nouvelles, mais sʹil en est<br />

ainsi, vous rectifierez le compte à votre passage ici. Tâchez que ce<br />

soit au plus tôt. Adieu, mon bien cher frère, priez pour nous, pauvres<br />

pécheurs, priez notre Mère bien aimée et son divin Fils; je les prierai<br />

<strong>de</strong> mon mieux aussi pour vous.<br />

Souvenir <strong>de</strong> vénération au bon M. Lecomte et à vous, tendre affection.<br />

Votre frère en J.C.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹoubliais <strong>de</strong> vous dire pour M. Lecomte que le début <strong>de</strong> M. Joseph <strong>de</strong> Mirebeau,<br />

son élève, a été très brillant. Il nʹa point prêché (je mʹexplique) au <strong>de</strong>hors, mais seulement<br />

<strong>de</strong>vant sa Communauté. Les juges sévères qui lʹentouraient ont été émerveillés. Du reste,<br />

sa régularité, sa piété fervente sont également édifiantes, on le regar<strong>de</strong> comme un homme<br />

<strong>de</strong> gran<strong>de</strong> espérance.<br />

85<br />

Le mariage aura lieu le 7 juin. Ce qui nécessite <strong>de</strong> retar<strong>de</strong>r d'un an la lettre 70 (cf. supra note 81), datée initialement du mois <strong>de</strong><br />

mai 1837.<br />

107


76 à M. Pavie<br />

Vivre et aimer, cʹest tout un. MLP. se plaint dʹavoir trop dʹactivités; cependant, ce quʹil fait, il le fait pour Dieu.<br />

Sa vraie vie est toute entière à Dieu. Marcher ferme malgré les obstacles du chemin.<br />

Paris, 1 er juin 1838<br />

Savez‐vous bien, mon très cher Victor, quʹà force <strong>de</strong> compter lʹun sur lʹautre, nous<br />

finissons par nous endormir; ce sommeil, oh non! ne serait pas la mort, loin <strong>de</strong> nous une<br />

pareille pensée, mais il suffit que cela en ait lʹimage pour que cela semble bien triste; ré‐<br />

veillons‐nous, cher ami, et que nos cœurs battent bien fort pour témoigner que nous vi‐<br />

vons ou que nous aimons, car cʹest tout un. Jʹai sous les yeux votre <strong>de</strong>rnière lettre qui date<br />

<strong>de</strong> cinq grands mois, et qui pourtant après si long espace est encore si chau<strong>de</strong> dʹexpansion<br />

quʹà ce moment je mʹen sens tout ravivé. Je vous en conjure bien, mon cher Victor, soyez<br />

comme toujours le plus généreux et le plus fidèle <strong>de</strong> mes amis; écrivez‐moi quand même<br />

et jamais, jamais ne cessez <strong>de</strong> compter sur moi <strong>avec</strong> cette assurance qui mʹhonore et me re‐<br />

lève un peu aux heures dʹabattement. Il faut bien vous dire, pourtant, cher ami, que mon<br />

silence ne provient pas, comme vous le semblez croire, dʹune disposition trop contempla‐<br />

tive, ni <strong>de</strong> lʹenvahissement toujours croissant <strong>de</strong>s exercices pieux, tant sʹen faut. Ce serait<br />

une belle excuse près dʹun cœur aussi chrétien que le vôtre, je le sais; mais je ne puis me<br />

lʹapproprier; il y a, au contraire, cher Victor, trop <strong>de</strong> menus actes dans ma vie, trop dʹacti‐<br />

vité extérieure, trop <strong>de</strong> concessions aux choses du moment; chaque jour en ramène un<br />

nombre plus que suffisant pour remplir toutes les heures. Chaque matin une mesure nou‐<br />

velle se présente, jʹy satisfais tant bien que mal, mais cela nʹa point <strong>de</strong> bout. Est‐ce le résul‐<br />

tat du trop plein <strong>de</strong> cette ville monstrueuse où nous sommes? Est‐ce faiblesse et insuffi‐<br />

sance en moi? Je ne sais, mais cʹest ainsi et je dis vrai. Il sʹen suit, très cher ami, que tout ce<br />

qui ne crie pas autour <strong>de</strong> moi <strong>avec</strong> autant dʹactualité, tout ce qui nʹest quʹau fond du cœur<br />

intime, tendre, doucement remuant: Dieu, ma mère et vous, est négligé trop souvent et ne<br />

se fait pas entendre. Pourtant, tout mon amour est là, toute ma vie, tous mes vœux.<br />

Jʹélance çà et là quelques regrets ar<strong>de</strong>nts vers ces objets délaissés, vers Dieu surtout; lui qui<br />

son<strong>de</strong> les reins, il sait bien quʹau fond je donne aux exigences quotidiennes mes pas, mes<br />

actions, mes pensées même et mes préoccupations, mais que ma vie, ma vraie vie, celle qui<br />

est à moi et que le mon<strong>de</strong> extérieur ne me prend pas, elle est à lui, toute entière à lui. Vous,<br />

mon bien‐aimé Victor, dont lʹindulgence, dont la pénétration confiante a toujours ressem‐<br />

blé envers moi à celle <strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce, imitez‐là. Sous ce mouvement machinal, cet en‐<br />

traînement <strong>de</strong>s choses, sachez <strong>avec</strong> votre œil <strong>de</strong> frère démêler votre part. En vérité, elle y<br />

est, je la sens et cʹest la meilleure, je vous lʹassure. Que jʹaimerais à persua<strong>de</strong>r en ce sens<br />

tous ceux, à leur <strong>de</strong>gré, qui ont droit aussi <strong>de</strong> ma part à une affection manifestée, incarnée,<br />

comme vous le dites. Oh! je ne nie point la <strong>de</strong>tte, <strong>avec</strong> le temps peut‐être je paierai tout,<br />

quʹil aient seulement patience; puis, si cette vie nʹy suffit, nʹen aurons‐nous pas une autre<br />

où aimer, aimer tous et toujours, sera lʹunique affaire; là, je paierai <strong>avec</strong> usure. Je crains<br />

bien, toutefois, <strong>de</strong> nʹobtenir merci <strong>avec</strong> <strong>de</strong> pareilles raisons que <strong>de</strong> vous seul, mais cʹest dé‐<br />

jà beaucoup.<br />

Et vous, mon cher Victor, passons à vous, cela vaut mieux, et vous, à quel point<br />

êtes‐vous <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> échelle où nous grimpons tous, si lestement les uns, si lour<strong>de</strong>ment<br />

les autres, si ridiculement ceux‐ci, si noblement ceux‐là? Vous êtes dans ces <strong>de</strong>rniers, je<br />

suis sûr, vous poursuivez comme vous avez commencé, vous ren<strong>de</strong>z heureuse la chère et<br />

bonne petite âme que Dieu a unie à la vôtre, vous encouragez et maintenez dans le bien<br />

108


vos amis et dʹautres encore: travail, étu<strong>de</strong>, amour saint, prière, voilà tel que je vous vois,<br />

cher ami, le fond <strong>de</strong> votre vie; voilà comme je vous veux et comme je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à<br />

Dieu chaque jour.<br />

Cʹest une gran<strong>de</strong> tâche assurément <strong>de</strong> marcher ferme en pareille ligne, malgré les<br />

obstacles, les circonstances <strong>de</strong> lieux, <strong>de</strong> temps et <strong>de</strong> tout ce qui fait scandale à nos pieds,<br />

mais cʹétait la seule chose qui vous convînt et, jʹai bonne confiance, vous la tiendrez inva‐<br />

riable jusquʹau bout. A ce plan général que je sais déjà, ne manquez pas, cher ami, dans<br />

une toute prochaine lettre, dʹajouter quelques détails et indications plus précises qui me<br />

permettent, <strong>avec</strong> cette familiarité affectueuse que vous mʹavez toujours concédée, <strong>de</strong> sui‐<br />

vre jusquʹaux plus petits sentiers cette vie qui mʹest si chère.<br />

Je nʹai point vu Théodore <strong>de</strong>puis quelque temps, il était sorti quand je lʹai cherché<br />

<strong>de</strong>rnièrement. A une visite précé<strong>de</strong>nte, jʹai trouvé chez lui Nerbonne, mais je ne lʹai guère<br />

entrevu. Gavard aussi y était, et cʹétait fête pour nous <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> nous revoir après si longue<br />

absence. Nous en sommes là, malgré la volonté très cordiale, je le crois, <strong>de</strong> part et dʹautre,<br />

<strong>de</strong> nous rapprocher, nous nʹy arrivons quʹà <strong>de</strong>s temps qui font date et époque. Autour <strong>de</strong><br />

vous, cher ami, cela doit être plus mouvant, on se voit tous les jours presque. Notre cher<br />

Adrien et quelques autres encore que je vous sais, vous sont si assidus que vous avez<br />

peine à ne nous pas prendre en pitié, ici, nous qui courons toujours sans jamais arriver.<br />

A propos <strong>de</strong> visites trop rares et bien souhaitées, à quand la vôtre, cher ami; voilà<br />

une gran<strong>de</strong> année passée et point <strong>de</strong> Victor; venez, sʹil se peut, vous serez comme jadis no‐<br />

tre point dʹunion, et, pour quelque temps les beaux jours reviendront, sans compter encore<br />

le bon souvenir que cela laisse et tous les relâchements que cela renoue! Cʹest vraiment une<br />

œuvre morale, sinon mieux encore, qui vous appartient là. Jʹai quelque envie <strong>de</strong> dire que<br />

cʹest un <strong>de</strong>voir et vous viendriez, car jamais en vain le mot a‐t‐il frappé lʹoreille <strong>de</strong> notre<br />

Victor?<br />

Adieu, bien cher ami, mille amitiés et <strong>de</strong>s meilleures à votre chère âme, à tous ceux<br />

que vous aimez.<br />

Votre ami et frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je dois une lettre à Adrien. En attendant embrassez‐le pour moi.<br />

77 à M. Levassor<br />

Démarches pour <strong>de</strong>s livres. A Notre‐Dame‐<strong>de</strong>s‐Victoires, MLP. fait prier pour sa femme.<br />

Jeudi 6 septembre 1838<br />

Mon cher frère,<br />

Dʹaprès les renseignements que je me suis procurés, il paraît que vous pourrez avoir<br />

dans les prix fixés dans votre esprit les ouvrages <strong>de</strong> saint François <strong>de</strong> Sales et la Bible. Je‐<br />

nʹai point vu seulement le premier <strong>de</strong> ces livres relié en <strong>de</strong>ux volumes. Il existe sans doute<br />

en dʹautres magasins que ceux où mes indications ont été puisées. Adieu, mon bien cher<br />

frère, je me recomman<strong>de</strong> toujours à votre bon souvenir <strong>de</strong>vant Dieu.<br />

109


Jʹai fait recomman<strong>de</strong>r aux prières <strong>de</strong> la pieuse confrérie du Saint Cœur <strong>de</strong> Marie, à<br />

la paroisse <strong>de</strong>s Petits Pères 86 , une personne que vous savez et dont la conversion me ren‐<br />

drait bien heureux. Joignez vos vœux aux nôtres, mon cher ami; le Seigneur est si bon! Il<br />

nous exaucera enfin. Allez‐y donc <strong>de</strong> tout cœur, je vous en conjure, en vous adressant au<br />

Saint Cœur <strong>de</strong> notre Mère.<br />

Je nʹoublierai pas <strong>de</strong> prier pour votre frère.<br />

Votre dévoué frère en J.C.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

78 à M. <strong>de</strong> Montrond<br />

A son ami qui rentre dʹun séjour en Suisse, MLP. avoue que, cette année, la vie sé<strong>de</strong>ntaire lui a pesé. Mais la pré‐<br />

sence <strong>de</strong> Dieu ne lui a pas fait défaut. M. Levassor sʹapprête à venir à Paris.<br />

Paris, 20 octobre 1838<br />

Mon cher ami,<br />

Jʹai été vraiment heureux, après votre si longue absence, <strong>de</strong> recevoir <strong>de</strong> vous une<br />

lettre qui mʹapportait directement <strong>de</strong> vos nouvelles. Quand on laisse, comme vous un peu<br />

<strong>de</strong> son âme dans tout ce quʹon écrit, on est bien sûr <strong>de</strong> réjouir le cœur dʹun ami, en sʹentre‐<br />

86 C'est la paroisse <strong>de</strong> la Basilique Notre-Dame-<strong>de</strong>s-Victoires, place <strong>de</strong>s Petits-Pères. Le 3 décembre 1836, l'abbé Desgenettes avait<br />

consacré sa paroisse au Très Saint et Immaculé Cœur <strong>de</strong> Marie, refuge <strong>de</strong>s pécheurs. Ce fut l'une <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s dévotions mariales<br />

<strong>de</strong> MLP. et il y emmenait régulièrement son "cher troupeau <strong>de</strong> la Sainte-Famille". Une fois l'Institut fondé, la communauté ira<br />

souvent en pèlerinage à Notre-Dame-<strong>de</strong>s-Victoires remercier la Vierge pour toutes les grâces reçues, mais surtout la prier pour obtenir<br />

les vocations dont elle avait un urgent besoin.<br />

110


tenant <strong>avec</strong> lui, même à distance, et par lʹintermédiaire dʹune lettre, quelquʹinsuffisant que<br />

soit dʹordinaire ce moyen.<br />

Je vous en remercie donc beaucoup, mon très cher ami, et viens vous répondre <strong>avec</strong><br />

un empressement qui vous prouve combien me sont précieux les témoignages <strong>de</strong> votre af‐<br />

fection. Nous nʹavons point chez nous, comme vous, la joie dʹaller un peu respirer le grand<br />

air <strong>de</strong>s montagnes, pas même celui <strong>de</strong>s bois, ni <strong>de</strong>s champs. Nous avons gardé le logis<br />

toute cette saison, non sans gémir parfois à travers les barreaux <strong>de</strong> la cage, non sans se‐<br />

couer aussi la chaîne qui nous semblait, dans ces <strong>de</strong>rniers jours surtout, bien lour<strong>de</strong> à traî‐<br />

ner. Tout le mon<strong>de</strong>, <strong>de</strong> tout étage et condition, les saints comme les mondains, les riches et<br />

ceux qui voudraient lʹêtre, tous sʹenvolaient, cʹétait une vraie désertion.<br />

Heureusement, Dieu est partout et <strong>de</strong>meure <strong>avec</strong> ceux qui restent, en même temps<br />

quʹil est <strong>avec</strong> ceux qui sʹen vont. Nous ne pouvions donc pas nous plaindre ni nous dire<br />

délaissés. Là où est Dieu, tout est bien, puisquʹIl était <strong>avec</strong> nous, le lieu nʹimportait plus.<br />

Malheureusement, cʹétait nous peut‐être qui nʹétions pas <strong>avec</strong> Lui! Vous quʹIl aime et quʹIl<br />

écoute, nʹoubliez pas, mon cher frère, <strong>de</strong> lʹinvoquer souvent pour nous.<br />

Vous apprendrez <strong>avec</strong> joie, jʹen suis assuré, que notre bon ami Levassor sera bientôt<br />

dans notre voisinage. Il doit, me dit‐on, arriver ici prochainement, pour achever son Sémi‐<br />

naire. Il a, ces jours <strong>de</strong>rniers, marié son frère en Normandie, à la satisfaction <strong>de</strong> tous.<br />

Jʹai fait votre commission, pour le tableau, selon votre désir, etc. etc.<br />

Adieu, mon bon ami, ne mʹoubliez pas <strong>de</strong>vant Dieu, et croyez à la cordiale affection<br />

<strong>de</strong> votre ami et frère.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

79 à M. Pavie<br />

Il se réjouit <strong>de</strong> la future naissance chez les Pavie. Lʹenfant, don <strong>de</strong> Dieu. MLP nʹa pas eu ce bonheur familial. Ac‐<br />

ceptation <strong>de</strong> ce sacrifice. Il cherche du travail pour ses petits orphelins.<br />

Paris, 12 novembre 1838<br />

Mon bien cher Victor,<br />

Vous serez père; jʹen ai béni Dieu du plus profond <strong>de</strong> mon âme. Oui, Dieu <strong>de</strong>vait à<br />

sa divine bonté <strong>de</strong> ne point laisser votre bonheur imparfait. Il se <strong>de</strong>vait dʹajouter une <strong>de</strong>r‐<br />

nière faveur à toutes celles quʹil vous a déjà faites, afin que vous ne puissiez dire que <strong>de</strong><br />

tous les dons que sa main <strong>de</strong> père peut verser, il vous en ait manqué un seul. Maison,<br />

foyer, famille, cercle nombreux dʹamis, santé, riche aisance, dons dʹesprit, dons du cœur et<br />

par <strong>de</strong>ssous tout, don <strong>de</strong> la foi, joie <strong>de</strong> connaître lʹauteur <strong>de</strong> tant <strong>de</strong> biens, <strong>de</strong> lʹaimer dʹun<br />

cordial amour, <strong>de</strong> lui rapporter tout, <strong>de</strong> lui faire hommage <strong>de</strong> tout, oui <strong>de</strong> tout, <strong>de</strong> vous‐<br />

même et plus que vous‐même, <strong>de</strong> votre bien aimée femme et <strong>de</strong> lʹenfant quʹelle a conçu.<br />

Oh! oui, vous serez heureux, mon très cher Victor, et Dieu est immensément bon, et je<br />

veux que vous et moi nous lʹaimions à cause <strong>de</strong> tout cela encore davantage. Voyez aussi<br />

quelle grâce tout aimable il a mis en son procédé envers vous. Il vous a laissé souhaiter<br />

pour un temps cette faveur pour quʹelle fut mieux appréciée, mieux <strong>de</strong>mandée aussi par<br />

vous. Il vous a ainsi procuré le bonheur <strong>de</strong> prier, <strong>de</strong> prier ensemble et <strong>avec</strong> larmes, dʹobte‐<br />

nir enfin par <strong>de</strong>s vœux, <strong>de</strong>s pèlerinages, <strong>de</strong> saintes promesses faites à vous <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>vant<br />

lui, votre Père, <strong>de</strong>vant la Vierge sainte, votre Mère, dʹobtenir par tout cela ce que vous<br />

étiez venu à considérer comme le plus grand bien du mon<strong>de</strong>. Autrement, cet enfant nais‐<br />

111


sant naturellement, vous lʹeussiez pris comme votre œuvre. Mais Dieu vous a permis <strong>de</strong><br />

voir que cʹétait Lui qui donnait la vie et non pas vous, et Il grave aussi profondément dans<br />

votre esprit cette sainte vérité que cet enfant lui appartient, que du jour <strong>de</strong> sa naissance, il<br />

doit être consacré et offert non seulement comme votre premier‐né, mais encore comme<br />

lʹenfant Dieu‐donné, fruit <strong>de</strong>s entrailles <strong>de</strong> la divine miséricor<strong>de</strong>.<br />

Je nʹai pas, mon très cher Victor, lʹintention, croyez‐le bien, <strong>de</strong> vous rappeler tout ce‐<br />

la; mon cœur me dit que tout cela était dans le vôtre, et jʹabon<strong>de</strong> en ce sens par cette tendre<br />

et intime sympathie qui me fait entrer en vous, comme vous entrez en moi. Ainsi votre<br />

joie, je vous le dis, est ici bien comprise, bien partagée. Je goûte par ma vive affection le<br />

bonheur quʹil nʹa pas plu à Dieu <strong>de</strong> me donner directement. Cʹest une sorte dʹadoption<br />

pour lʹenfant qui naîtra: Rachel, dans lʹancienne loi, était tenue comme mère <strong>de</strong>s enfants<br />

nés dʹune femme <strong>de</strong> son choix; quʹil en soit ainsi entre nous. Jʹaurai par là une prospérité et<br />

ma stérilité sera consolée. Jʹai admiré, du reste, votre délicate bonté, qui vous fait presque<br />

me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r pardon dʹun bonheur qui accroît encore votre supériorité sur moi. Soyez en<br />

paix, cher ami, mon âme nʹa pas été un seul instant troublée, ma joie a été sans mélange,<br />

sans retour intéressé sur moi‐même. Quand le Seigneur exige un sacrifice, il ai<strong>de</strong> aussi à le<br />

consommer; il mʹa donné la force dʹaimer et dʹadorer sa sainte volonté.<br />

Je nʹai point encore vu Théodore, sans doute il nʹest point encore ici; je lʹattends <strong>avec</strong><br />

double impatience, et pour lui que jʹaime cordialement et parce quʹil mʹapportera <strong>de</strong> vos<br />

nouvelles à tous. Jusque là adieu, mon bien cher ami, mille affections bien dévoués à votre<br />

chère amie, à votre père et à tous, Adrien en particulier.<br />

Votre ami et frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je vous remercie <strong>de</strong> votre zèle à placer les lithographies pour nos petites orphelins.<br />

Je ne sais si on vous a dit quʹune partie dʹentre eux sont occupés à fondre <strong>de</strong>s caractères<br />

dans lʹimprimerie <strong>de</strong> M. Bailly: ils manquent quelquefois <strong>de</strong> travail, cʹest un chagrin pour<br />

nous. Je désirerais donc que vous prissiez, si cela se peut, sans préjudice dʹaucun arrange‐<br />

ment, vos caractères à cette fon<strong>de</strong>rie; si cela vous semble praticable, dites‐le. Je vous ferais<br />

parvenir le spécimen <strong>de</strong> tous les caractères que nous pourrions vous fournir. Je nʹai pas<br />

besoin <strong>de</strong> dire que ces enfants ne sont que les ai<strong>de</strong>s dʹhabiles ouvriers et que les produits<br />

ont toute la perfection quʹon peut souhaiter.<br />

79‐1 à M me Bailly<br />

Invitation à la promena<strong>de</strong> <strong>de</strong>s orphelins à Meudon.<br />

Vendredi 26 juillet 1839<br />

Madame,<br />

Nos petits enfants, que nous <strong>de</strong>vons conduire à la campagne dimanche prochain,<br />

seraient doublement heureux si M. Bailly et sa famille étaient <strong>de</strong> la partie et voulaient bien<br />

se joindre à nous pour cette petite fête87 ; je viens donc solliciter en leur nom cette faveur et<br />

87 L'un <strong>de</strong>s fils <strong>de</strong> M. Bailly, Vincent <strong>de</strong> Paul, plus tard Assomptionniste et fondateur du journal la Croix, se rappelait avoir vu MLP.<br />

<strong>avec</strong> les orphelins-apprentis. "Le premier souvenir que nous avons conservé <strong>de</strong> MLP. nous reporte vers 1838; il était au milieu d'un<br />

petit peuple d'apprentis, les premiers qui aient formé une œuvre à Paris, place <strong>de</strong> l'Estrapa<strong>de</strong>. Dans quel abandon était l'enfance ouvrière<br />

alors"! Vt-<strong>de</strong>-P. Bailly, Pieux souvenirs, in Bulletin <strong>de</strong> l'Union, 7.11.1874, cf. Boissinot, Un autre saint Vincent <strong>de</strong> Paul,<br />

1991, p.112.<br />

112


vous prie dʹemployer votre crédit près <strong>de</strong> M. Bailly que mes instances nʹont pas entière‐<br />

ment déterminé.<br />

Nos enfants, qui ont la mémoire <strong>de</strong> leur âge, ont dʹailleurs le souvenir encore tout<br />

frais dʹun pâté très appétissant dont vous leur avez fait don, il y a <strong>de</strong>ux ans, pour pareille<br />

fête; ils nʹoseraient assurément <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r la même grâce pour cette fois mais moi, je serai<br />

moins honteux et je parlerai pour eux, sachant, Madame, lʹintérêt si bienveillant que vous<br />

portez à nos orphelins et lʹempressement que vous mettez en toute occasion à vous rendre<br />

à leurs vœux.<br />

Le but <strong>de</strong> notre promena<strong>de</strong> sera Meudon <strong>avec</strong> retour par St‐Cloud; le bateau à va‐<br />

peur aura place pour nous, je lʹespère; il nʹy aurait donc point trop <strong>de</strong> fatigue pour vous si<br />

vous consentiez à faire cette petite excursion.<br />

Agréez, Madame, lʹhommage du sentiment respectueux <strong>avec</strong> lequel je suis<br />

Votre très humble et très dévoué serviteur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

80 à M. Pavie<br />

Joies <strong>de</strong> la paternité. Encouragement à développer la Conférence St‐Vt‐<strong>de</strong>‐Paul dʹAngers. Esprit dʹhumilité dans<br />

les œuvres: ʺDieu ne trouve pas dignes <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s choses ceux qui se trouvent trop haut pour les petitesʺ. Diffu‐<br />

sion du livre édité par ses soins , Vie <strong>de</strong> saint Vincent <strong>de</strong> Paul<br />

1er septembre 1839<br />

Mon cher Victor,<br />

Vous avez maintenant tant et <strong>de</strong> si chers objets pour occuper vos affections que<br />

vous seriez peut‐être excusable <strong>de</strong> nous oublier un peu, nous qui sommes loin et moi sur‐<br />

tout qui vaux si peu. Jʹatteste pourtant quʹil nʹen est rien; nous nous sommes promis autre‐<br />

fois que rien ne prévaudrait contre notre affection et ce nʹest pas vous assurément qui<br />

manqueriez le premier <strong>de</strong> fidélité. Je voudrais seulement que vous mʹécriviez un peu plus<br />

souvent, je vous répondrais et jʹen aurais le cœur plus satisfait.<br />

Jʹai eu <strong>de</strong> vos nouvelles toutes fraîches ces jours <strong>de</strong>rniers: jʹai rencontré Théodore,<br />

que je ne savais pas revenu et qui mʹa parlé <strong>de</strong> vous tous, y compris le neveu dont, contre<br />

sa propre attente, il est fort enchanté. Cʹest une merveilleuse chose que le sang et lʹaffinité<br />

quʹil met entre nous a bien <strong>de</strong>s secrets que notre courte vue ne pénètre pas. Je me plais à<br />

mʹimaginer, quelquefois autant que je puis et en procédant du connu à lʹinconnu, quelles<br />

doivent être à vous vos joies paternelles, à vous que les sentiments naturels entraînent si<br />

ar<strong>de</strong>mment, à vous qui saviez déjà si bien aimer le reste; comment donc aimez‐vous cet<br />

enfant qui marche, qui parle, qui vous appelle et vous serre <strong>avec</strong> ses petits bras, je crois<br />

bien que je nʹai quʹune faible idée <strong>de</strong> tout cela; en Dieu pourtant toute affection doit se<br />

comprendre. Si je savais au moins <strong>de</strong> ce côté fermement me rattacher, je resterais au ni‐<br />

veau <strong>de</strong> tout. Jʹy tâcherai, ne fût‐ce que pour rester uni à vos affections les plus intimes et<br />

comme toujours en prendre ma part.<br />

Je suis allé pour voir votre bon père quʹon mʹa dit être ici. Je nʹai pu le rencontrer, il<br />

est constamment en course, arrangeant tout, veillant à tout <strong>avec</strong> sa provi<strong>de</strong>nce paternelle.<br />

Il aplanit les chemins pour son fils Théodore et tâche sans doute que rien ne puisse heurter<br />

son pied dans cette longue course quʹil va fournir. Tant <strong>de</strong> sollicitu<strong>de</strong> et <strong>de</strong> soins sont bien<br />

113


touchants; cela console et rend heureux <strong>de</strong> voir cela. On aime mieux lʹespèce humaine en<br />

la trouvant capable dʹun dévouement si généreux.<br />

Jʹespère que vos travaux ne vous auront pas empêché <strong>de</strong> prêter assistance à la petite<br />

Société <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul qui sʹest formée chez vous 88 ; ne vous découragez point, je<br />

vous en conjure, si cela est bien petit et dʹune simplicité un peu enfantine dans son com‐<br />

mencement, je crois que les œuvres <strong>de</strong> Dieu se produisent ainsi pour lʹordinaire, afin <strong>de</strong><br />

servir dʹépreuve à lʹhumilité. Dieu ne trouve pas dignes <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s choses ceux qui se<br />

trouvent trop haut pour les petites. Cette Société a fait ici et en beaucoup <strong>de</strong> lieux encore,<br />

un bien très réel. Jʹaurais une joie véritable à ce quʹelle prît racine tout à fait chez vous, et je<br />

vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> votre coopération cordiale pour y parvenir. Vous verrez que la récompense<br />

ne vous manquera pas dans la suite.<br />

Je fais mettre chez M. Th. Leclerc un ballot <strong>de</strong> 25 exemplaires <strong>de</strong> notre Vie <strong>de</strong> saint<br />

Vincent (2 vol. in‐8) Le prix <strong>de</strong> librairie est <strong>de</strong> 7f 50; mais vendus par nous, ils ne se payent<br />

que 6f sur lesquels 1f. est encore retenue par la Conférence <strong>de</strong> Paris ou <strong>de</strong> la Province qui<br />

fait les placements, <strong>de</strong> sorte quʹon nʹa à nous tenir compte que <strong>de</strong> 5f pour chaque exem‐<br />

plaire. Sur les 25 que je vous envoie, 12 (les couvertures pâles) ont <strong>de</strong>s portraits un peu<br />

plus soignés que les autres. Vous les donnerez à qui vous voudrez. Du reste, au premier<br />

envoi que vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rez après celui‐ci, toutes les gravures seront également bon‐<br />

nes. Tâchez <strong>de</strong> pousser un peu cette petite affaire, qui nʹest pas sans intérêts pour la Socié‐<br />

té.<br />

Adieu, mon bien cher Victor, cʹest lʹami Hubert qui vous remettra cette lettre. Cʹest<br />

un honnête garçon.<br />

Mille souvenirs affectueux pour votre chère femme et aussi mille tendresses pour<br />

son cher petit enfant.<br />

Votre dévoué ami et frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Gar<strong>de</strong>z‐vous bien <strong>de</strong> mʹoublier près <strong>de</strong> mes bons amis Adrien et son frère. Gavard,<br />

Bruneau, Nerbonne, <strong>Léon</strong>.<br />

81 à M. Pavie<br />

La foi et ses richesses. Les petites œuvres <strong>de</strong> charité ne rebutent pas V. Pavie. Mérite <strong>de</strong> ces humbles et petites œu‐<br />

vres. Lʹamitié selon lʹexemple du Christ.<br />

6 janvier 1840<br />

Mon cher Victor,<br />

Vous mʹécriviez au jour <strong>de</strong> Noël, je vous réponds au jour <strong>de</strong> lʹEpiphanie, nous<br />

sommes quittes. Car, si Noël est la fleur, lʹEpiphanie est le fruit. Quʹil mʹest doux, mon cher<br />

Victor, que toutes ces bonnes et pieuses pensées, inspirées à votre excellente âme par le<br />

grand mystère <strong>de</strong> notre foi, sʹépanchent tout naturellement vers moi; non pas que jʹen<br />

prenne <strong>de</strong> lʹorgueil et que je mʹen croie digne, mais parce que cela me prouve toujours <strong>de</strong><br />

plus en plus que lʹunion <strong>de</strong> nos cœurs fondée sur une pareille base est à tout jamais assu‐<br />

88 Elle avait été fondée vers la fin <strong>de</strong> l'année 1838 par Florestan Hébert qui, pendant ses étu<strong>de</strong>s à Rennes, avait participé à la conférence<br />

qui venait <strong>de</strong> s'y fon<strong>de</strong>r. C'est rue St-Laud, chez V. Pavie, que la Conférence angevine se réunit. Autour <strong>de</strong> Hébert, il y a<br />

Paul Beauchesne, Joseph d'Andigné, Victor Godard, J.B. Renier et Clément Myionnet, futur Frère <strong>de</strong> St-Vt-<strong>de</strong>-Paul. Le 1 er décembre<br />

1839, V. Pavie en <strong>de</strong>viendra le trésorier. (Cf. Positio, p. 131-132)<br />

114


ée, tant que la base elle‐même nʹaura pas branlé. Or, qui <strong>de</strong> nous nʹespère, malgré sa fai‐<br />

blesse permanente, rester jusquʹau bout sur cette pierre <strong>de</strong> la foi; nous lui <strong>de</strong>vons nos plus<br />

pures joies et nous savons que, hors <strong>de</strong> là, il nʹy en aurait plus pour nous <strong>de</strong> véritables dé‐<br />

sormais, parce que qui a goûté celles‐là a le cœur trop grand pour les autres. Je me réjouis<br />

aussi bien vivement à cause <strong>de</strong> vous en particulier. Vos <strong>de</strong>rnières lettres sont pleines dʹune<br />

ar<strong>de</strong>ur fervente qui me prouve que votre âme va sʹexaltant <strong>de</strong> plus en plus; que ni les af‐<br />

faires <strong>de</strong> ce mon<strong>de</strong>, ni les joies du ménage, causes trop ordinaires <strong>de</strong> lʹaffaiblissement <strong>de</strong>s<br />

nobles inspirations, nʹont <strong>de</strong> prise sur vous, la flamme tend en haut et surmonte tout obs‐<br />

tacle; ainsi fait lʹélan sublime <strong>de</strong> votre cœur. Jʹen bénis Dieu et lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> quʹil me fasse<br />

pareille grâce pour que nous marchions côte à côte et gagnions ensemble le but. Nos peti‐<br />

tes œuvres <strong>de</strong> charité ne seront pas sans influence pour nous y ai<strong>de</strong>r réciproquement; mon<br />

cœur a bondi <strong>de</strong> joie, je vous lʹavoue, quand jʹai reconnu que la simplicité <strong>de</strong> ces petits tra‐<br />

vaux ne vous rebutait pas. Dieu mʹa montré quʹil a dʹimmenses grâces pour ceux qui, en<br />

son nom, acceptent dʹhumbles et petites entreprises et les trouvent gran<strong>de</strong>s, parce quʹelles<br />

se font à cause <strong>de</strong> Lui.<br />

Persévérez, mon bien cher ami, notre affection déjà gran<strong>de</strong> par là sʹen accroîtra en‐<br />

core et ce ne sera point le moindre <strong>de</strong>s heureux fruits qui en viendront. Non, certes, notre<br />

bien‐aimé Maître nʹa point proscrit les doux et tendres sentiments pour les âmes qui sont<br />

siennes: Il usait <strong>de</strong> caresses pour les petits enfants, <strong>de</strong> vives effusions pour ses amis et <strong>de</strong><br />

prédilections intimes pour quelques‐uns. Il veut que nous lʹaimions avant tout et cʹest <strong>de</strong><br />

droit, mais quʹà cause <strong>de</strong> lui nous aimions aussi tous les autres, non uniformément, mais<br />

en ordre et <strong>de</strong>grés, selon lʹaffinité <strong>de</strong> nos âmes. Celles‐là doivent nous être les plus chères<br />

qui nous attirent le plus 89 Dieu a mis en elles ce quʹil nous faut, ce qui doit nous soutenir,<br />

nous élever au‐<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> nous‐mêmes et doubler nos forces pour avancer vers lui. Ceci, je<br />

lʹai trouvé en vous dès lʹabord, cher ami, et à cette heure, je lʹy trouve encore. Saint <strong>Jean</strong><br />

sʹappuyait ainsi sur le sein du Maître bien‐aimé; que je vous sais gré <strong>de</strong> rappeler cet aima‐<br />

ble souvenir. Saint <strong>Jean</strong> est mon patron. Que <strong>de</strong> fois lʹai‐je prié <strong>de</strong> mʹenhardir et <strong>de</strong> me<br />

conduire lui‐même jusquʹau cœur <strong>de</strong> notre divin ami! Je lisais dans une Vie <strong>de</strong> S te Thérèse<br />

(par M. Leboucher, curé <strong>de</strong> St‐Merry que vous lirez tout <strong>de</strong> suite, si vous mʹen croyez, <strong>avec</strong><br />

une autre vie plus rare du même auteur, la Vie <strong>de</strong> la Bienheureuse Marie <strong>de</strong> lʹIncarnation,<br />

fondatrice du Carmel en France) je lisais ceci: elle priait pour une âme droite, mais égarée<br />

pourtant, et, dans un élan <strong>de</strong> sublime familiarité, elle disait: ʺAttirez‐le à vous, ô mon Jé‐<br />

sus, vous le voyez, il serait digne dʹêtre <strong>de</strong> nos amis!ʺ Cʹest ainsi que nous <strong>de</strong>vons traiter<br />

<strong>avec</strong> lui et par retour, aussi, <strong>avec</strong> ceux quʹil nous a donnés. Allons en cette voie, cher ami,<br />

jʹy marcherai à grands pas, je vous assure, car je croirais suivre ainsi lʹexemple et la volonté<br />

<strong>de</strong> notre Dieu.<br />

Dites bien à votre douce amie quʹelle sera <strong>de</strong> moitié en tout cela. Je la crois aussi,<br />

comme vous, bien chère à Dieu et bien digne <strong>de</strong> lui.<br />

Mille choses affectueuses à tous nos amis, à Bruneau en particulier qui mʹaccuse, je<br />

le crains, <strong>de</strong> négligence, quoiquʹil nʹy ait vraiment rien <strong>de</strong> tel en moi à son égard. Affection<br />

aussi à tous les autres, à Adrien, à Godard et à ceux encore qui veulent bien se souvenir <strong>de</strong><br />

moi.<br />

Merci <strong>de</strong> votre zèle pour le débit <strong>de</strong> S t ‐Vincent, je vous serai obligé <strong>de</strong> me faire tou‐<br />

cher aussitôt quʹil se pourra lʹargent reçu. (5f par exemplaire seulement).<br />

89 MLP. parle ici d'un attrait tout surnaturel et spirituel. Ce qui suit précise et complète sa pensée sur l'amitié chrétienne.<br />

115


Adieu encore, cher ami, unissons nos prières, nos actes et toute notre vie; les meil‐<br />

leurs comme vous paieront pour les autres et tous ensemble arriverons au but.<br />

Votre dévoué frère en J.C.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Tendre respect à votre bon père.<br />

81‐1 à un Confrère <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul.<br />

Rapport sur la Conférence St‐Sulpice.<br />

29 avril 1840<br />

Mon cher confrère,<br />

Jʹai lʹhonneur <strong>de</strong> vous adresser ci‐joint les notes qui mʹont été remises par le secré‐<br />

taire et le trésorier <strong>de</strong> la Conférence <strong>de</strong> St‐Sulpice.<br />

Je nʹai rien à y ajouter, la situation <strong>de</strong> cette Conférence étant à peu près la même en<br />

ce moment quʹelle était lors <strong>de</strong> notre <strong>de</strong>rnière assemblée générale.<br />

Je suis, <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s sentiments bien affectueux<br />

Votre tout dévoué confrère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

RAPPORT SUR LA CONFERENCE DE ST‐SULPICE 90<br />

15 décembre 1835 M. Chaurand Prési<strong>de</strong>nt<br />

M. Le <strong>Prevost</strong> i<strong>de</strong>m<br />

Section <strong>de</strong> St‐Sulpice <strong>de</strong> 1836 à 1840<br />

7 avril 1840<br />

Lʹorigine <strong>de</strong> la Conférence St‐Sulpice se confond <strong>avec</strong> celle <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> S t ‐Vincent. Elle a eu une<br />

existence séparée dès que le nombre <strong>de</strong>s associés a été assez considérable pour exiger leur répartition entre<br />

plusieurs sections différentes. Les séances régulières <strong>de</strong> la section <strong>de</strong> St‐Sulpice ont commencé le 15 décem‐<br />

bre 1835, sous la prési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> M. Chaurand, qui a été remplacé par M. Le <strong>Prevost</strong>, prési<strong>de</strong>nt actuel <strong>de</strong> la<br />

Conférence.<br />

ŒUVRES DE LA CONFERENCE ‐ Conformément au bien général <strong>de</strong> la Société, la section <strong>de</strong> St‐<br />

Sulpice sʹest proposé la visite et le soulagement <strong>de</strong>s familles pauvres <strong>de</strong> la paroisse, dont chacun <strong>de</strong>s mem‐<br />

bres visite régulièrement quelques‐unes. Afin dʹen rendre compte, non seulement <strong>de</strong> lʹétat matériel, mais<br />

aussi <strong>de</strong> lʹétat moral et religieux <strong>de</strong> ces pauvres, la Conférence avait coutume, dans lʹorigine, <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à<br />

chacun <strong>de</strong>s membres un rapport spécial et détaillé sur chacune <strong>de</strong> ces familles. Cette mesure qui produisit<br />

dʹabord les meilleurs résultats, dut cependant être abandonnée quand le grand nombre <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> la<br />

Conférence permit dʹaugmenter considérablement celui <strong>de</strong>s familles; on chargea alors, une fois par an, un<br />

certain nombre <strong>de</strong> membres <strong>de</strong> faire une inspection <strong>de</strong> toutes les familles <strong>de</strong> la paroisse et <strong>de</strong> rendre à la<br />

Conférence un compte général <strong>de</strong> leur situation. Cette mesure nouvelle nʹa pas encore paru suffire pour<br />

donner à la Conférence entière, aux membres, au prési<strong>de</strong>nt et au secrétaire, une connaissance habituelle et<br />

approfondie <strong>de</strong>s besoins <strong>de</strong>s pauvres, et la Conférence a décidé, en 1840, que 10 membres seraient chargés<br />

dʹune manière permanente, <strong>de</strong> la surveillance dʹune section <strong>de</strong> la paroisse pour obtenir, aperçus dans lʹocca‐<br />

sion, tous les renseignements nécessaires sur les familles visitées.<br />

La Conférence <strong>de</strong> St‐Sulpice nʹa jamais mis dʹinterruption complète dans ses séances ni dans la visite<br />

<strong>de</strong>s pauvres. Seulement la première année, lʹextrême diminution <strong>de</strong> ses membres lʹa obligée <strong>de</strong> recourir pour<br />

quelques semaines à la section <strong>de</strong> St‐Jacques. Durant les vacances suivantes, les membres restant à Paris se<br />

sont efforcés <strong>de</strong> remplacer leurs Confrères en redoublant dʹassiduité; on nʹa abandonné, momentanément,<br />

que les familles les moins nécessiteuses.<br />

90 Ce document joint n'est pas <strong>de</strong> la main <strong>de</strong> MLP.<br />

116


La Conférence, sans se borner absolument à la visite <strong>de</strong>s pauvres, sʹest occupée activement <strong>de</strong> procu‐<br />

rer <strong>de</strong>s places ou du travail aux personnes <strong>de</strong> la classe ouvrière qui lui ont été recommandées, jusquʹà lʹéta‐<br />

blissement <strong>de</strong> la Commission du placement qui sʹoccupe maintenant <strong>de</strong> satisfaire aux <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s adressées<br />

<strong>de</strong> toutes les sections.<br />

La Conférence <strong>de</strong> St‐Sulpice, surtout <strong>de</strong>puis quʹelle est présidée par M. Le <strong>Prevost</strong>, a toujours eu sous<br />

son patronage direct la Maison <strong>de</strong>s Orphelins; cʹest elle qui, la première, a organisé la loterie qui se tire an‐<br />

nuellement au profit <strong>de</strong>s jeunes apprentis.<br />

Dans ses différents travaux, la Conférence a toujours trouvé un grand secours dans la bienveillance<br />

<strong>de</strong> M. le Curé <strong>de</strong> St‐Sulpice qui vient <strong>de</strong> temps à autre visiter et prési<strong>de</strong>r ses séances.<br />

PERSONNEL ‐ La section <strong>de</strong> St‐Sulpice a toujours été, à peu près, lʹune <strong>de</strong>s plus nombreuses <strong>de</strong> la<br />

Société <strong>de</strong> St‐Vincent. Formée dʹenviron quarante membres au commencement <strong>de</strong> 1836, elle en comptait plus<br />

<strong>de</strong> cent à la fin <strong>de</strong> cette année ‐ cent cinquante au moins étaient inscrits sur ses registres en 1837, 1838. Mais<br />

la formation <strong>de</strong> plusieurs Conférences voisines, que celle <strong>de</strong> St‐Sulpice a dû soutenir, à leur naissance, en<br />

leur envoyant un certain nombre <strong>de</strong> ses membres, a peu à peu diminué son personnel; elle est composée, en<br />

1840, dʹenviron cent vingt membres dont quatre vingts ou quatre vingt dix sʹoccupent activement <strong>de</strong> la visite<br />

<strong>de</strong>s familles. Le nombre <strong>de</strong>s familles visitées a suivi les variations du nombre <strong>de</strong>s membres; il est, en 1840, <strong>de</strong><br />

210 à 220.<br />

NATURE DES SECOURS ‐ Les secours qui sont distribués aux familles consistent en bons <strong>de</strong> pain,<br />

<strong>de</strong> bouillon, <strong>de</strong> vian<strong>de</strong> ou <strong>de</strong> pommes <strong>de</strong> terre. Des secours extraordinaires en argent sont accordés pour les<br />

besoins urgents.<br />

Le vestiaire fournit un assez grand nombre dʹobjets dʹhabillement <strong>de</strong> tous genres, aux pauvres. Enfin<br />

<strong>de</strong>s draps et <strong>de</strong>s couvertures acquises par la Conférence sont prêtées aux pauvres pendant leurs maladies ou<br />

pendant les froids <strong>de</strong> lʹhiver.<br />

RESSOURCES ‐ Pour subvenir à toutes ces différentes dépenses, la Conférence nʹa aucune ressource<br />

régulière: aucun sermon <strong>de</strong> charité, aucune loterie particulière nʹa rempli sa caisse pour quelque temps à<br />

lʹavance. Une seule fois, un legs <strong>de</strong> lʹun <strong>de</strong> ses membres lʹa mise à même <strong>de</strong> faire une distribution générale <strong>de</strong><br />

secours pécuniaire aux pauvres les plus nécessiteux. Ses revenus consistent dans le produit <strong>de</strong>s quêtes faites<br />

à chaque séance, ou les dons faits, <strong>de</strong> temps à autre, par M. le Curé ou quelques personnes étrangères.<br />

Elle a cherché à y joindre quelques accessoires comme le placement <strong>de</strong> billets <strong>de</strong> souscriptions, soit<br />

perpétuelles, soit bornées à la durée <strong>de</strong> lʹhiver, ou mieux <strong>de</strong> billets payables en une seule fois, sans engage‐<br />

ment ultérieur. La vente <strong>de</strong>s exemplaires <strong>de</strong> la Vie <strong>de</strong> S t Vincent, sur laquelle chaque Conférence avait un petit<br />

bénéfice, lui a fourni pendant quelque temps un supplément <strong>de</strong> revenus. Quelquefois, elle a eu recours à la<br />

vente <strong>de</strong> quelques objets donnés par <strong>de</strong>s membres. Mais la régularité <strong>de</strong> ses faibles ressources lʹoblige à vivre<br />

au jour le jour, sans avoir même <strong>de</strong> caisse remplie pour les besoins du len<strong>de</strong>main, ou plutôt à se fier entière‐<br />

ment dans la bonté <strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce qui jusquʹà présent ne lui a pas manqué. 91<br />

RECETTES ET DEPENSES ‐ Chaque année a amené une augmentation dans le chiffre <strong>de</strong>s recettes et,<br />

par conséquent, a permis dʹétendre les dépenses.<br />

Recettes Dépenses<br />

1836 1 569,50 1 495,55<br />

1837 2 218,60 2 112,60<br />

1838 3 429 3 509<br />

1839 4 302,80 4 234<br />

7 avril 1840 1 115,25 1 153,95<br />

12 635,15 12 505,10<br />

La Conférence ne sʹest pas bornée à procurer aux pauvres un soulagement matériel; les exhortations<br />

<strong>de</strong> son prési<strong>de</strong>nt, celles <strong>de</strong> M. le Curé <strong>de</strong> St‐Sulpice et <strong>de</strong> tous les ecclésiastiques qui, <strong>de</strong> temps en temps, sont<br />

venus la visiter, ont eu pour objet constant <strong>de</strong> graver dans lʹesprit <strong>de</strong>s jeunes gens la nécessité dʹexercer une<br />

action morale sur les indigents, <strong>de</strong> les ramener à la religion à lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> la charité, ‐ et, au grand nombre <strong>de</strong>s<br />

membres <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> St‐Vincent, quʹils sʹétaient fait à eux‐mêmes un bien spirituel ineffable en travail‐<br />

lant au salut <strong>de</strong> lʹâme comme au salut du corps <strong>de</strong> ceux qui leur sont confiés.<br />

91 Le prési<strong>de</strong>nt n'aime guère voir la caisse pleine. "Jamais nous n'y laissons amasser <strong>de</strong> l'argent, notre habitu<strong>de</strong> est d'aller au jour le<br />

jour. Nous attribuons fréquemment <strong>de</strong>s secours en argent; il y a telle misère qu'on ne peut secourir par <strong>de</strong>s bons. Mais la plupart du<br />

temps, la Conférence vote <strong>de</strong>s secours sur les fonds qu'elle n'a pas encore; la Provi<strong>de</strong>nce y pourvoit." Assemblées générales <strong>de</strong> la<br />

SSVP., 21 juillet 1839, f.45.<br />

117


SEANCES ‐ Les séances <strong>de</strong> la section <strong>de</strong> St‐Sulpice se tiennent, <strong>de</strong>puis le 13 décembre 1836 dans une<br />

salle attenant à lʹéglise même. Les séances sʹouvrent <strong>avec</strong> une lecture pieuse qui <strong>de</strong>puis 1838, se fait dans la<br />

Vie <strong>de</strong> S t Vincent: il a semblé que nulle part on ne trouvera <strong>de</strong>s exemples plus beaux et plus pratiques <strong>de</strong> cha‐<br />

rité que dans la vie <strong>de</strong> ce grand patron <strong>de</strong> toutes les bonnes œuvres, qui est aussi le Patron <strong>de</strong> notre Société<br />

entière. 92<br />

La distribution <strong>de</strong>s secours en nature, les propositions et les <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s <strong>de</strong> places occupent la plus<br />

gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong> la séance qui se termine par la prière, ainsi quʹelle a commencé.<br />

82 à M. Pavie<br />

V. Pavie, âme <strong>de</strong> la Conférence dʹAngers. Ce zèle vient <strong>de</strong> Dieu. Vie <strong>de</strong>s Conférences: conseil dʹordre pratique. Ce<br />

quʹévoque le prénom <strong>de</strong> Joseph, que son ami a donné à son fils aîné.<br />

18 mai 1840<br />

Mon bien cher Victor,<br />

Que je vous sais gré <strong>de</strong> me prendre ainsi pour intermédiaire <strong>de</strong> vos communica‐<br />

tions <strong>avec</strong> notre petite Société centrale. Jʹy gagne <strong>de</strong>s lettres plus fréquentes <strong>de</strong> vous et aus‐<br />

si la joie <strong>de</strong> me trouver en participation directe <strong>avec</strong> ce que nos amis dʹAngers et vous sur‐<br />

tout, mon cher frère, faites <strong>de</strong> bon et <strong>de</strong> charitable pour nos pauvres protégés. Je me<br />

rappelle maintenant <strong>avec</strong> quelque honte que je nʹosais, durant le temps que vous habitiez<br />

encore ici, vous parler <strong>de</strong> cette Société, ni vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r dʹen faire partie. Je craignais<br />

quʹelle ne fût trop petite pour vous; je vous faisais grand tort <strong>de</strong> vous croire si peu humble.<br />

Et dʹailleurs, tout ce qui regar<strong>de</strong> Dieu et la charité est grand, et quoique rapetissé trop sou‐<br />

vent par nos faibles mains, <strong>de</strong>meure assurément bien plus haut et plus digne dʹun cœur<br />

généreux que les grands intérêts et les soins prétendus tels qui nous occupent si générale‐<br />

ment. Vous êtes lʹâme, me dit‐on, <strong>de</strong> la Société dʹAngers, jʹen bénis Dieu <strong>de</strong> bien bon cœur,<br />

mais sans aucun éloge pour vous, car lʹar<strong>de</strong>ur pure et sainte qui est en votre âme, pour<br />

tout ce qui est noble et bon, ce nʹest pas vous qui lʹy avez mise, ni conservée, ni épurée <strong>de</strong><br />

plus en plus <strong>avec</strong> lʹâge. Il ne faut donc louer que Dieu qui vous aime et à qui seulement<br />

vous le ren<strong>de</strong>z <strong>de</strong> votre mieux.<br />

Le Conseil (pardon dʹun si gros mot) ne sʹest réuni quʹhier. Je lui ai soumis votre<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>. Par une répugnance peut‐être exagérée <strong>de</strong> tout ce qui ressemble aux signes <strong>de</strong><br />

ralliement et tendraient à nous produire au <strong>de</strong>hors comme une société se posant, ayant ses<br />

insignes et ses moyens dʹaffiliation, la majorité <strong>de</strong>s membres assemblés a pensé que mieux<br />

valait peut‐être sʹabstenir <strong>de</strong> délivrer parmi nous <strong>de</strong>s diplômes, titres ou cartes dʹadmis‐<br />

sion, que pour nous, du moins, nous nʹen sentions pas ici le besoin et que si chez vous,<br />

comme à Nancy ou ailleurs, on trouvait ce moyen utile, on <strong>de</strong>vrait y pourvoir sans que la<br />

Société centrale y intervint aucunement. On mʹa chargé expressément, toutefois, <strong>de</strong> vous<br />

dire que cette opinion ne comportait aucun blâme <strong>de</strong> votre projet et que liberté tout entière<br />

vous restait dʹy donner telle suite que le besoin <strong>de</strong> votre action locale vous paraîtrait ré‐<br />

clamer. Après cela, jʹajoute que le portrait placé en tête <strong>de</strong> notre Vie <strong>de</strong> St Vincent est la pro‐<br />

92 Dans une lettre à son ami intime, François Lallier, F. Ozanam écrivait <strong>de</strong> Lyon, le 17 mai 1838, à propos <strong>de</strong>s réunions <strong>de</strong> la Conférence<br />

<strong>de</strong> Lyon : "…nous lisons maintenant, au lieu <strong>de</strong> l'Imitation, la Vie <strong>de</strong> saint Vincent <strong>de</strong> Paul, pour mieux nous pénétrer <strong>de</strong> ses<br />

exemples et <strong>de</strong> ses traditions. Un saint patron n'est pas en effet une enseigne banale pour une Société comme un saint Denys ou un<br />

saint Nicolas pour un cabaret. Ce n'est même pas un nom honorable sous lequel on puisse faire bonne contenance dans le mon<strong>de</strong><br />

religieux: c'est un type qu'il faut s'efforcer <strong>de</strong> réaliser, comme lui-même a réalisé le type divin <strong>de</strong> Jésus Christ. C'est une vie qu'il<br />

faut continuer, un cœur auquel il faut réchauffer son cœur, une intelligence où il faut chercher <strong>de</strong>s lumières; c'est un modèle sur la<br />

terre et un protecteur au ciel; un double culte lui est dû; d'imitation et d'invocation." (L. 175, t.1, p.309).<br />

118


priété <strong>de</strong> lʹœuvre <strong>de</strong> nos apprentis et que, sʹil vous convenait pour vos cartes projetées, en<br />

pourrait en tirer telle quantité que vous en désireriez sur <strong>de</strong>s feuilles que vous imprime‐<br />

riez ensuite à votre gré. Ces gravures vous seraient données à 15f le cent sur papier grand<br />

in‐8° ou petit in‐4°.<br />

Des règlements vont aussi vous êtes<br />

envoyés. Assez <strong>de</strong> Société. Dites‐moi vite<br />

maintenant quelques nouvelles <strong>de</strong> vous et<br />

<strong>de</strong>s vôtres. Votre chère petite amie est <strong>de</strong><br />

moitié au moins dans tout ce que vous<br />

faites, jʹen suis sûr, et Joseph y mettra aussi<br />

un peu la main. Jʹaime ce cher enfant rien<br />

quʹà cause <strong>de</strong> son nom. Cʹest un nom qui<br />

signifie simplicité, humilité, obéissance, âme<br />

droite, naïve, patiente, courageuse, âme<br />

intérieure et saintement recueillie.<br />

Que votre Joseph sera aimable, cher à<br />

Dieu, à Jésus, à Marie et aux Anges, sʹil est<br />

beau et bon comme son nom! En attendant,<br />

je suis sûr quʹil crie et pleure, <strong>de</strong> la manière<br />

la moins angélique possible. Je lʹaime pour‐<br />

tant, cher ami, pour toutes sortes <strong>de</strong> raisons;<br />

je nʹai pas besoin nʹest‐ce pas, <strong>de</strong> vous les<br />

expliquer toutes?<br />

Adieu, mille affections autour <strong>de</strong><br />

vous, au cercle intime et ensuite plus loin, en<br />

allant toujours grandissant.<br />

Votre ami et frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

83 à M. Pavie<br />

Nouvelles <strong>de</strong>s familles Pavie et Salva. MLP. résume sa vie. Son amitié <strong>avec</strong> Gavard.<br />

Paris, 28 septembre 1840<br />

Très cher Victor,<br />

Je profite du départ pour Angers du confrère Macé pour vous griffonner en hâte<br />

quelques lignes. Je comptais vous écrire pour votre bon père, mais suivant la louable habi‐<br />

tu<strong>de</strong> <strong>de</strong> mes jambes boiteuses, elles sont arrivées chez Mme Ladame93 , tout juste au moment<br />

où M. Pavie venait <strong>de</strong> monter en voiture: faites‐lui, je vous prie, mes excuses et dites‐lui<br />

bien aussi tous mes regrets. Je nʹai vu personne <strong>de</strong>puis quelque temps qui vous approche.<br />

Jʹignore donc si votre chère amie a donné une petite sœur au petit Joseph, sœur ou frère,<br />

pourtant, car il nʹimporte, Dieu ne laissant pas le choix, fait la place <strong>de</strong> lʹune ou bien <strong>de</strong><br />

lʹautre en ce mon<strong>de</strong> et dans le cœur <strong>de</strong> ceux qui <strong>de</strong>vront accueillir le petit être nouveau‐né.<br />

93<br />

Propriétaire <strong>de</strong> la pension du même nom, sise au Quartier Latin, passage du Commerce, 1, rue St-André-<strong>de</strong>s-Arts, où logent ses<br />

amis angevins.<br />

119


Ma sœur bien‐aimée est enceinte aussi en ce moment et bien près dʹaccoucher. Jʹaurai donc<br />

à faire <strong>de</strong>s vœux pour les <strong>de</strong>ux chères créatures ensemble; puisse le bon Dieu les bénir<br />

lʹune et lʹautre et les accueillir <strong>avec</strong> un tendre amour.<br />

Je voudrais avoir bien <strong>de</strong>s choses à vous dire sur mon compte, car je sais, cher ami,<br />

combien vous intéresse tout ce qui me regar<strong>de</strong>; mais, en vérité, il nʹy a point dʹhistoire<br />

moins curieuse que la mienne; par suite <strong>de</strong> mes goûts paisibles et <strong>de</strong> mes habitu<strong>de</strong>s routi‐<br />

nières, je tourne toujours et toujours dans le même rond, sans faire le moindre zigzag, ni à<br />

droite, ni à gauche. Cʹest peut‐être bon en quelque sens; mais pour le récit, cela nʹy prête<br />

pas le moins du mon<strong>de</strong>. Il faut donc, cher Victor, que vous vous contentiez <strong>de</strong> ce som‐<br />

maire général. Rien <strong>de</strong> très bon, rien <strong>de</strong> très mauvais, santés médiocres, fortune aussi,<br />

cœurs assez paisibles, désir du ciel et confiance en Dieu. Voilà tout.<br />

Votre vie à vous, cher ami, est moins insignifiante, vous vous gar<strong>de</strong>rez donc bien<br />

dans votre réponse <strong>de</strong> nʹinscrire ainsi que <strong>de</strong>s têtes <strong>de</strong> chapitre; dʹailleurs, jʹai, vous le sa‐<br />

vez, lʹesprit un peu lent, je ne développe rien, je prends tout et sans plus, comme on le<br />

donne; comptez là‐<strong>de</strong>ssus et détaillez bien. Cʹest ce quʹil me faut; ceux que jʹaime à mon<br />

gré ne sont jamais trop longs.<br />

Il y a un temps considérable que je nʹai vu Gavard. Il me semblait quʹil avait si peu<br />

dʹempressement à me rechercher que cela mʹa ôté la confiance <strong>de</strong> le poursuivre moi‐même.<br />

Il est pourtant toujours aimable et bon quand nous nous voyons; mais, à tort ou à raison, il<br />

me regar<strong>de</strong> comme un être dont la puissance est bien bornée et ne peut étreindre que ce<br />

qui est tout près <strong>de</strong> lui. Cela est vrai, au fond, je lʹavoue; seulement, je crois quʹil nʹavait<br />

pas cessé dʹêtre près <strong>de</strong> moi et quʹil entrait bien dans la sphère quʹil mʹest donné dʹembras‐<br />

ser. Cela ne veut pas dire, cher ami, que je me reconnais comme un esprit exclusif. Jʹespère<br />

quʹil nʹen est rien. Jʹaime assurément par le cœur tout ce que mes facultés si restreintes ne<br />

peuvent atteindre, jʹadmets seulement, quant aux effets, que je nʹatteins pas bien loin. Vous<br />

mʹacceptez ainsi, vous, mon cher Victor, mais tous ne sont pas si généreux et si indulgents.<br />

Adieu, mille amitiés à tous nos amis autour <strong>de</strong> vous; ce nʹest pas ma faute, si je nʹai<br />

pas vu Adrien Maillard lors <strong>de</strong> son <strong>de</strong>rnier voyage. Dès que je le sus à Paris, je courus chez<br />

M me Ladame, mais elle lʹavait à peine vu et ne connaissait point son adresse. M. Sainte‐<br />

Beuve mʹa donné <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> Théodore mais un peu vieilles déjà. Jʹen aimerais bien<br />

<strong>de</strong> plus fraîches. Je suis <strong>de</strong> cœur au milieu <strong>de</strong> votre petit cercle intérieur et me dis comme<br />

toujours en vous embrassant, cher Victor,<br />

Votre ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

84 à M. Levassor<br />

Excuses pour nʹêtre pas allé à son ordination sacerdotale. ʺPauvre laïc très indigneʺ, MLP. a gardé <strong>de</strong> la nostal‐<br />

gie pour cet état <strong>de</strong> vie auquel il nʹa pu accé<strong>de</strong>r.<br />

9 octobre 1840<br />

Mon bien cher frère,<br />

Jʹai regretté infiniment <strong>de</strong> ne mʹêtre pas trouvé à la maison lors <strong>de</strong> votre rapi<strong>de</strong> pas‐<br />

sage à Paris, regretté aussi <strong>de</strong> nʹavoir pu au moins vous voir à la voiture, regretté enfin<br />

surtout <strong>de</strong> ne mʹêtre pas rendu à Chartres, comme je lʹaurais tant désiré, pour votre ordi‐<br />

nation. Jʹai prié du moins mal quʹil était en moi dans la chapelle du bon saint Vincent à qui<br />

120


vous êtes si cher et à qui vous allez, jʹen suis sûr, <strong>de</strong> plus en plus ressembler. Cela a été ma<br />

seule consolation et cʹest aussi ma ressource ordinaire dans toutes mes impuissances dʹes‐<br />

prit, <strong>de</strong> volonté et <strong>de</strong> jambes tout ensemble.<br />

Jʹattendais <strong>avec</strong> une vive impatience une lettre cœur à cœur, où vous me direz, cher<br />

ami, autant que Dieu vous le permettra, tout ce que ce divin Père a fait pour vous dans ce<br />

grand jour <strong>de</strong> votre consécration définitive, et aussi dans ce très adorable sacrifice quʹil<br />

vous a été donné dʹoffrir <strong>avec</strong> notre Sauveur. Oh! vous ne me direz pas tout, je le sens<br />

bien; qui pourrait tout dire, en pareil cas? Mais jʹen verrai assez pour que mon âme soit<br />

édifiée et mon cœur rempli <strong>de</strong> joie à cause <strong>de</strong> votre bonheur.<br />

Dites‐moi aussi, cher abbé, que vous avez prié pour moi, pauvre laïc très indigne, et<br />

que vous mʹavez mis dans le sein <strong>de</strong> notre Dieu <strong>avec</strong> tous ceux qui vous sont chers et que<br />

vous aviez droit, ce jour‐là surtout, <strong>de</strong> recomman<strong>de</strong>r à son amour.<br />

Il faut que je finisse vite cette lettre, cher ami, bien quʹil me fût si doux <strong>de</strong> la prolon‐<br />

ger. Je vous lʹécris particulièrement pour vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r ce que vous voulez faire désor‐<br />

mais pour le loyer <strong>de</strong> vos pauvres protégées. Le terme est échu, elles crient misère; que<br />

vais‐je faire? Dites‐moi cela, bien promptement, je vous prie.<br />

Mille tendres sentiments en N.S.<br />

Votre frère dévoué<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

85 à M. Levassor<br />

Deman<strong>de</strong> <strong>de</strong>s instructions pour ses trois pauvres protégées. Le mon<strong>de</strong> et Dieu.<br />

Paris, 28 octobre 1840<br />

Mon cher ami,<br />

Votre silence prolongé mʹinquiéterait un peu si je ne songeais quʹau milieu dʹune si‐<br />

tuation nouvelle, vous avez dû vous trouver bien à court <strong>de</strong> temps. Je me borne donc à ré‐<br />

clamer le premier instant <strong>de</strong> loisir que vous pourrez me consacrer et vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> seu‐<br />

lement, en attendant, quelque souvenir <strong>de</strong>vant Dieu, car cela ne prend guère <strong>de</strong> temps et<br />

coûte bien peu; Dieu pourtant sʹen contente et nous en tient grand compte. Je voudrais<br />

bien aussi <strong>de</strong>ux lignes, <strong>de</strong>ux seulement, si vous nʹen pouvez mettre trois, pour me dire vos<br />

intentions au sujet <strong>de</strong> vos bonnes protégées. Notre Conférence étant obérée nʹa pu rien<br />

faire ce trimestre, tout ce que jʹai pu réunir sʹest réduit à 10f. Je les ai donnés à Mme Meslin<br />

et jʹen ai fait autant pour Mme Delatre, mais lʹune et lʹautre sont désespérées dʹune pareille<br />

réduction, Mme Delatre surtout. M. Hanicle qui lʹaidait un peu, vient dʹêtre appelé à la cure<br />

<strong>de</strong> St‐Séverin et ne pourra plus lʹai<strong>de</strong>r, tout lui manque à la fois. Voyez, mon cher ami, si<br />

avant <strong>de</strong> prendre là‐bas <strong>de</strong> nouveaux engagements, le bon Dieu ne préférerait pas que<br />

vous continuiiez à faire ici un peu du bien quʹil vous a conseillé <strong>de</strong> faire durant tant dʹan‐<br />

nées.<br />

Tout va ici passablement pour notre petite Société. Le mon<strong>de</strong> autour <strong>de</strong> nous nʹest<br />

pas beau, mais Dieu nous gar<strong>de</strong>, nous nous remettons entre ses mains.<br />

Votre ami affectionné et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

121


85 bis à un Confrère <strong>de</strong> St‐Vt‐<strong>de</strong>‐Paul<br />

Comptes <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong>s Orphelins‐apprentis.<br />

Le 22 juin 1841<br />

Mon cher confrère,<br />

Je vous envoie la note que vous désiriez sur les dépenses et recettes <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong><br />

nos Apprentis; elle suffira, je lʹespère, pour remplir votre but.<br />

Jʹai examiné si je pouvais vous donner <strong>de</strong>s détails plus explicites et je me suis assuré<br />

que sans un travail très long pour le dépouillement du registre, mois par mois, <strong>de</strong>puis plus<br />

<strong>de</strong> cinq années, cela ne saurait être exact.<br />

Croyez à mes bien affectueux sentiments.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

86 à M. dʹAssonville94 Félicitations pour la naissance <strong>de</strong> son fils. La piété mariale dans les familles. Dieu et son amour, fin <strong>de</strong> toute exis‐<br />

tence humaine. Confrérie <strong>de</strong>s artistes. Dieu et lʹart.<br />

[23 juillet 1841]<br />

Mon bien cher confrère,<br />

Que vous êtes aimable <strong>de</strong> nous avoir fait part au plus tôt <strong>de</strong> lʹheureux événement<br />

qui est venu réjouir votre famille et porter surtout la joie dans votre cœur si tendre et si<br />

aimant. Croyez bien cher ami, que si je suis un peu tardif à vous répondre, je nʹen ai pas<br />

moins pris une vive part à votre bonheur. Tous nos confrères ont ensemble prié pour lʹen‐<br />

fant nouveau‐né, et <strong>de</strong> mon côté, je lʹai recommandé à Dieu, particulièrement au temps<br />

que vous mʹaviez marqué.<br />

Votre tendre piété envers Marie vous sera bien payée assurément, elle adoptera cet<br />

enfant que vous lui avez donné, elle veillera sur lui et le gar<strong>de</strong>ra pour le Seigneur. Si dans<br />

chaque famille <strong>de</strong> si saintes coutumes étaient en usage, le mon<strong>de</strong> changerait <strong>de</strong> face, il re‐<br />

<strong>de</strong>viendrait chrétien et, <strong>avec</strong> le bonheur <strong>de</strong> la génération présente, il assurerait encore celui<br />

<strong>de</strong>s générations à venir.<br />

Ayez la bonté, cher ami, <strong>de</strong> faire agréer mes félicitations à Mme dʹAssonville et <strong>de</strong> me<br />

rappeler au souvenir <strong>de</strong> votre bon père dont je partage également toute la joie.<br />

Nous avons reçu ces jours‐ci <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Cantricaut qui nous annonce,<br />

<strong>de</strong> son côté, quʹun enfant lui est né. Cʹest une fille; Dieu partage ses dons; peut‐être ces<br />

<strong>de</strong>ux chers enfants se rencontreront un jour dans le mon<strong>de</strong> comme leurs pères sʹy sont<br />

rencontrés; puisse leur voie, quelle quʹelle soit, et leur part en ce mon<strong>de</strong> être bonne et me‐<br />

ner bien droit à la fin <strong>de</strong> toute existence humaine: Dieu et son amour. Cʹest votre vœu pour<br />

votre fils, cher ami, et je mʹy associe bien cordialement.<br />

Nos petites associations vont toujours assez bien; la Confrérie <strong>de</strong>s Artistes qui vous<br />

intéresse en particulier se soutient et progresse; quelle joie si quelquʹheureuse réaction se<br />

pouvait faire dans les arts; si les artistes remontaient enfin à lʹunique source du beau,<br />

comprenaient le but véritable <strong>de</strong> lʹart, la gran<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> leur mission et lʹobligation quʹa tout<br />

94<br />

Pierre d'Assonville, Confrère <strong>de</strong> St-Vt-<strong>de</strong>-Paul, était artiste-peintre. Il ajoute sur la lettre : "arrivée à Metz ce 24 juillet 1841." La<br />

date, manquante, est le 23 juillet, au plus tard.<br />

122


homme doué <strong>de</strong> génie ou <strong>de</strong> talent <strong>de</strong> les faire servir à glorifier lʹauteur <strong>de</strong> ces dons, à<br />

grandir son âme et à élever lʹâme <strong>de</strong> ses frères!<br />

Nous sommes bien loin <strong>de</strong> là aujourdʹhui, nous y viendrons peut‐être un jour. Si vo‐<br />

tre petit enfant peint comme vous un jour, oh! comme je suis bien sûr que vous soufflerez<br />

en son âme <strong>de</strong> saintes inspirations pour spiritualiser ses œuvres et leur donner la valeur<br />

dʹactes moraux, qui pèsent <strong>de</strong>vant Dieu et méritent seuls aussi la gloire et lʹestime <strong>de</strong>s<br />

hommes.<br />

Adieu, cher ami, tenez‐nous au courant <strong>de</strong>s choses qui vous intéressent, et croyez<br />

au tendre attachement <strong>de</strong><br />

Votre dévoué frère en J.C.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

86‐1 à M. Bailly<br />

Présentation dʹun confrère au Conseil Général <strong>de</strong> Paris.<br />

23 juillet 1841<br />

Monsieur et cher Prési<strong>de</strong>nt,<br />

Jʹai lʹhonneur <strong>de</strong> vous proposer, pour représenter la Conférence St‐Sulpice dans le<br />

Conseil <strong>de</strong> Paris, M. Dufresne95 qui remplacera, durant quelques semaines, M. <strong>de</strong> Gui‐<br />

naumont, absent pour le temps <strong>de</strong>s vacances. Je nʹai pas cru indispensable, pour ce court<br />

intérim, que M. Dufresne eût le titre <strong>de</strong> vice‐prési<strong>de</strong>nt. Si pourtant vous en jugiez autre‐<br />

ment, jʹaurais lʹhonneur <strong>de</strong> mʹen entendre <strong>avec</strong> vous.<br />

Je regrette beaucoup <strong>de</strong> ne pouvoir assister moi‐même aux séances du Conseil, mais<br />

lʹheure <strong>de</strong>s réunions jointe à lʹéloignement où je suis du lieu où elles se tiennent, ne me<br />

permettra dʹy paraître que bien rarement. Jʹaccepte dʹailleurs tout ce que nos confrères unis<br />

à vous trouveront utile pour nos petites œuvres et je ne ferai en aucun cas difficulté à mʹy<br />

conformer.<br />

Agréez, Monsieur et cher Prési<strong>de</strong>nt, lʹassurance <strong>de</strong> mes sentiments respectueux.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

87 à M. Levassor<br />

Un jeune homme pourra ai<strong>de</strong>r M. Levassor. ʺPauvre comme un serviteur <strong>de</strong> J.C..ʺ<br />

10 août 1841<br />

Mon très cher frère,<br />

Jʹai cherché pour vous, dʹaprès la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> Mme Delatre, un jeune homme qui pût<br />

à la fois faire votre ménage et vous ai<strong>de</strong>r dans vos catéchismes. Cela nʹétait pas facile à<br />

trouver, mais je crois enfin être sur la voie. Le Supérieur <strong>de</strong>s Frères mʹa adressé, <strong>avec</strong> re‐<br />

commandation, un homme <strong>de</strong> 32 ans, fort et <strong>de</strong> figure prévenante et douce, qui a été autre‐<br />

fois maître dʹécole et <strong>de</strong>puis Frère à St‐Nicolas chez M. Bervanger. Il nʹen est sorti que <strong>de</strong><br />

95 Secrétaire <strong>de</strong> la Conférence St-Sulpice, il en fut l'un <strong>de</strong>s membres les plus dévoués. Lorsque MLP. aura démissionné <strong>de</strong> son poste<br />

<strong>de</strong> prési<strong>de</strong>nt, Dufresne résumera: "La Conférence <strong>de</strong> St-Sulpice, c'était M. Le <strong>Prevost</strong>". (Edouard Dufresne, M. Le <strong>Prevost</strong>, dans le<br />

feuilleton du Mon<strong>de</strong>, Paris, 25 août 1890). Eloge qui rejoint la maxime <strong>de</strong> Jules Gossin, second Prési<strong>de</strong>nt général <strong>de</strong> la Société:<br />

"Tant vaut le prési<strong>de</strong>nt, tant vaut la Conférence".<br />

123


sa propre volonté, à cause du tracas excessif que lui donnaient les 400 enfants <strong>de</strong> cette mai‐<br />

son; tous ses certificats vantent sa piété et ses bons sentiments.<br />

Si vous pensez quʹil vous convienne, écrivez‐moi, je vous prie, vos conditions et je<br />

vous lʹenverrai. Il faudra lui payer le voyage, car il est pauvre comme un serviteur <strong>de</strong> J.C.<br />

Je désire que votre réponse me vienne poste par poste, cet excellent homme ne pouvant at‐<br />

tendre et ayant reçu <strong>de</strong> moi promesse que vous nʹy mettriez point <strong>de</strong> retard.<br />

Adieu, bien cher frère, je vous aime tendrement dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> Jésus et<br />

<strong>de</strong> Marie.<br />

A vous cordialement.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

88 à M. Pavie<br />

Compassion à lʹoccasion <strong>de</strong> la mort du petit Joseph Pavie. Prière par Marie. Mystère et fécondité <strong>de</strong> la souffrance.<br />

ʺLes heures dʹaffliction sont choisies pour lire plus gran<strong>de</strong>ment aux choses <strong>de</strong> Dieuʺ. Sa propre famille, elle aus‐<br />

si, est éprouvée.<br />

Paris, 19 novembre 1841<br />

Cher Victor,<br />

Je ne sais quel instinct <strong>de</strong> tendre affection me préoccupait <strong>de</strong> vous ces jours‐ci et<br />

semblait mʹavertir que votre âme peinée appelait à elle ceux qui lui sont dévoués. Je ne<br />

sentais rien <strong>de</strong> précis pourtant, sinon le besoin <strong>de</strong> vous écrire, et je lʹeusse fait, cher ami,<br />

quand même votre lettre ne serait pas venue <strong>avec</strong> ses tristes révélations; mais que dire à<br />

pareilles peines! Comment empêcher les entrailles <strong>de</strong> gémir? Comment tarir tant <strong>de</strong> gra‐<br />

cieux et amers souvenirs qui reviennent sans cesse et qui remplacent les douces illusions<br />

<strong>de</strong> lʹavenir? Je crains, cher ami, <strong>de</strong> ne pas savoir, même à lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> ma tendre sympathie<br />

pour vous, entrer assez avant dans ces profon<strong>de</strong>urs. Il y a dans votre lettre <strong>de</strong>s expressions<br />

touchantes qui me sont comme une lumière sur ces puissances aimantes et douloureuses<br />

<strong>de</strong> lʹâme; mais je sens que je ne suis pas, votre chère femme et vous, jusquʹà lʹextrême fin:<br />

un cœur <strong>de</strong> mère a <strong>de</strong>s abîmes que Dieu seul peut son<strong>de</strong>r.<br />

Oh! puisse le Seigneur <strong>de</strong>scendre bien intimement dans vos <strong>de</strong>ux âmes quʹil a faites<br />

et rachetées et les toucher <strong>de</strong> sa main divine pour les consoler et les guérir. Oui, cher ami,<br />

je lui ai fait cette prière et comme aujourdʹhui est un jour <strong>de</strong> Marie, veille dʹun autre jour<br />

dédié aussi à sa mémoire, jʹai prié par Marie, mère aussi, que le glaive qui vous perce ma‐<br />

nifestât au Seigneur tout lʹamour, toute la résignation <strong>de</strong> votre sacrifice et le rendit pré‐<br />

cieux <strong>de</strong>vant lui. Dans les heures <strong>de</strong> pieuses effusions vous avez dit souvent: ʺO Dieu, que<br />

vous rendrons‐nous, quʹy a‐t‐il en nous <strong>de</strong> cher et dʹintime, fût‐ce au fond <strong>de</strong> nos entrail‐<br />

les, que nous ne vous offrionsʺ et le Seigneur a tendu la main, il a pris le don offert. Ne le<br />

regrettez pas, cher ami, il lʹa pris pour lui, cʹest‐à‐dire pour lʹéternel bonheur. Que ne peut‐<br />

il prendre encore tout ce que nous sommes et tout ce que nous avons, car la vie est en lui et<br />

nous cherchons la vie, car il est lʹamour et nos âmes ne soupirent quʹaprès lʹamour. Le<br />

doux ange le sait maintenant: quʹil le révèle à ceux quʹil a quittés, quʹil plane sur vous et<br />

soit comme lʹange gardien <strong>de</strong> votre foyer, quʹil le ren<strong>de</strong> encore plus saint et vous fasse as‐<br />

pirer au ciel qui est sa <strong>de</strong>meure à lui et où ses douces caresses vous atten<strong>de</strong>nt.<br />

Cʹest ainsi que vous prenez, je le vois bien, cet acte <strong>de</strong> la volonté divine; cʹest un pas<br />

<strong>de</strong> plus, dites‐vous; oui, toute souffrance, toute douleur est un pas. On se traîne, on ne<br />

124


marche pas autrement. Mais dans cette voie, après quelques <strong>de</strong>grés franchis, lʹœil sʹouvre<br />

et plonge dans lʹimmense vérité, le mystère <strong>de</strong> la croix révèle sa sublimité et lʹâme entre en<br />

possession du bonheur promis. ʺBienheureux ceux qui pleurentʺ, oui, bienheureux <strong>de</strong> la<br />

joie du sacrifice, <strong>de</strong> la joie du dépouillement, <strong>de</strong> lʹamour soumis et dévoué qui sʹimmole à<br />

ce quʹil aime et le glorifie en abîmant tout en lui.<br />

Les heures dʹaffliction sont bien choisies pour lire plus gran<strong>de</strong>ment aux choses <strong>de</strong><br />

Dieu. Permettez‐moi, cher ami, <strong>de</strong> vous conseiller pour lecture intime un livre qui mʹa été<br />

enseigné à moi‐même par un homme grave et saint, et dont, je crois, la substance vous ira<br />

bien. Cʹest lʹIntérieur <strong>de</strong> Jésus et <strong>de</strong> Marie par le P. Grou. Ce titre nʹest guère attrayant, mais<br />

ne vous y arrêtez pas. Je vous connais mal, ou cette pure et sainte contemplation <strong>de</strong> lʹâme<br />

du divin Maître vous conviendra. Pour abréger, je vais passer chez le libraire et le charger<br />

<strong>de</strong> remettre un exemplaire <strong>de</strong> cet ouvrage chez M. Leclerc, <strong>avec</strong> prière <strong>de</strong> vous le faire<br />

parvenir. Acceptez, cher ami, ce mince don <strong>de</strong> votre frère affectionné.<br />

Vous avez tant <strong>de</strong> peines, cher ami, faut‐il vous dire aussi les miennes. Ma bonne et<br />

vénérée mère, âgée <strong>de</strong> près <strong>de</strong> quatre‐vingts ans, est languissante; elle se remet pénible‐<br />

ment dʹune maladie et commence à se lever un peu chaque jour. Le mari <strong>de</strong> ma sœur, alité<br />

<strong>de</strong>puis quatre mois, est atteint dʹune affection au cœur qui présente les caractères les plus<br />

alarmants. Ma sœur entre ma mère et son mari, faible et grêle quʹelle est, ne se couchait<br />

plus ces temps <strong>de</strong>rniers. Elle veillait sur un fauteuil, allant <strong>de</strong> lʹun à lʹautre. En tout état <strong>de</strong><br />

cause, une si longue interruption fait un tort irréparable à mon beau‐frère, pour sa car‐<br />

rière, et la gêne se met dans ses affaires. Lʹéducation <strong>de</strong>s enfants réclame <strong>de</strong>s sacrifices; jʹy<br />

ai<strong>de</strong>rai un peu, mais je nʹai guère moi‐même <strong>de</strong> fortune et <strong>de</strong> santé.<br />

A mon tour, cher ami, je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> vos prières pour ma famille et celles aussi <strong>de</strong> vo‐<br />

tre chère amie. Ce tendre échange <strong>de</strong> prières grandira la charité entre nous et nous rappro‐<br />

chera <strong>de</strong> Dieu en resserrant encore nos liens. Ma femme prend une tendre part à vos pei‐<br />

nes, à celles <strong>de</strong> M me Pavie surtout. Que ne puis‐je aussi vous promettre ses prières. Oh!<br />

cher ami, je vous en conjure, <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z pour elle cette grâce qui nous pousse à prier. Res‐<br />

pectueux souvenir à votre père, et à vous <strong>de</strong>ux mes plus chères amitiés.<br />

Votre frère en J.C.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

88‐1 à M me Bailly<br />

Paiement <strong>de</strong> la Vie <strong>de</strong> saint Vincent <strong>de</strong> Paul.<br />

21 novembre 1841<br />

Madame,<br />

Les intérêts <strong>de</strong> la somme <strong>de</strong> 3 000f appartenant à nos orphelins, étant échus <strong>de</strong>puis<br />

assez longtemps déjà, jʹai lʹhonneur <strong>de</strong> vous proposer <strong>de</strong> les appliquer, comme lʹan <strong>de</strong>r‐<br />

nier, au payement <strong>de</strong>s frais dʹimpression <strong>de</strong> la Vie <strong>de</strong> St Vincent <strong>de</strong> Paul. Je vous prie donc,<br />

Madame, dʹavoir la bonté <strong>de</strong> remettre au porteur <strong>de</strong> ce mot un reçu <strong>de</strong> 150f à valoir sur ce<br />

qui reste à payer.<br />

Agréez, Madame, la nouvelle assurance du respect <strong>avec</strong> lequel je suis<br />

Votre très humble et très obéissant serviteur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

125


88‐2 96 à un Confrère <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul<br />

Bref rapport sur lʹétat et les œuvres <strong>de</strong> la Conférence <strong>de</strong> St‐Sulpice.<br />

Paris, 1er décembre 1841<br />

Mon cher confrère,<br />

Jʹai lʹhonneur <strong>de</strong> vous envoyer la note <strong>de</strong>s membres admis dans la Conférence <strong>de</strong> St‐<br />

Sulpice <strong>de</strong>puis la <strong>de</strong>rnière assemblée générale. M. Bion, avoué, notre trésorier, vous enver‐<br />

ra au plus tôt sa note <strong>de</strong> ses recettes et dépenses.<br />

Jʹaurais voulu joindre à ces chiffres quelques détails plus intéressants, mais à ce<br />

moment <strong>de</strong> lʹannée surtout où nous commençons à peine à nous rassembler, nous nʹavons<br />

guère <strong>de</strong> faits dignes dʹêtre remarqués. Tous nos membres ne sont pas encore réunis, nous<br />

nʹen comptons guère que 80 au lieu <strong>de</strong> 120 que nous avions avant les vacances; mais cʹest à<br />

lʹépoque peu avancée <strong>de</strong> la saison seulement que cette diminution doit, je pense, être attri‐<br />

buée; le même zèle et la même ar<strong>de</strong>ur que par le passé semblent animer tous nos confrères<br />

<strong>de</strong> St‐Sulpice et jʹai la confiance que nos pauvres nʹauront quʹà se louer <strong>de</strong>s efforts <strong>de</strong> leur<br />

charité.<br />

Nous avons présentement 170 familles sous notre patronage, et une liste <strong>de</strong> 200 au‐<br />

tres qui aspirent à être adoptées successivement.<br />

La surveillance dans lʹécole <strong>de</strong>s Frères <strong>de</strong>s enfants appartenant à nos familles, est<br />

organisée dans notre Conférence et sʹexercera régulièrement pour le plus grand bien <strong>de</strong> ces<br />

enfants.<br />

Agréez, mon cher confrère, lʹassurance <strong>de</strong> tous mes sentiments bien dévoués.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

88‐3 à M. <strong>de</strong> Baudicour 97<br />

Fondation <strong>de</strong> la ʺconférence <strong>de</strong>s étrangersʺ à Rome.<br />

Paris, 2 mars 1842<br />

Mon cher confrère,<br />

M. l’abbé Véron, notre confrère, qui rési<strong>de</strong> présentement à Rome, m’écrit qu’à la<br />

suite <strong>de</strong>s merveilleux événements qui viennent <strong>de</strong> se passer en cette ville et qui ont remué<br />

toutes les âmes98 , le Père <strong>de</strong> Villefort a eu l’heureuse pensée <strong>de</strong> reformer une Conférence<br />

<strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul, en la composant <strong>de</strong> telle sorte qu’elle n’ait pas à craindre, comme la<br />

première fois, une dissolution.<br />

M. le Baron <strong>de</strong> Bock, allemand protestant converti, a été choisi pour prési<strong>de</strong>nt et le<br />

Prince Borghèse, trésorier. Des fonds considérables ont déjà été réunis et <strong>de</strong>s premiers tra‐<br />

vaux, commencés. Je vous remettrai vendredi, à la Conférence <strong>de</strong>s Missions, la lettre <strong>de</strong><br />

M.Véron qui contient <strong>de</strong>s détails d’un intérêt général pour notre Société. En attendant, je<br />

vous prie <strong>de</strong> préparer l’envoi qu’il réclame, <strong>de</strong> plusieurs douzaines <strong>de</strong> Règlements, ainsi<br />

96<br />

Elle portait le n° 88-1 bis dans les tomes IX et X <strong>de</strong> la précé<strong>de</strong>nte édition <strong>de</strong>s <strong>Lettre</strong>s.<br />

97<br />

Cette lettre du 2 mars 1842, découverte à l'occasion <strong>de</strong> l'annotation <strong>de</strong>s <strong>Lettre</strong>s <strong>de</strong> F. Ozanam, vient se placer avant celle du 16<br />

avril et celle du 15 mai. Les anciennes 88-2 et 88-3 du tome IX, <strong>de</strong>viennent 88-4 et 88-5. Louis Collette <strong>de</strong> Baudicour (1815-<br />

1883), avocat, était <strong>de</strong>puis 1838, secrétaire du Conseil <strong>de</strong> direction (puis Conseil général à partir <strong>de</strong> 1840), <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> St-Vt<strong>de</strong>-Paul,<br />

où il avait remplacé François Lallier. Il restera à ce poste jusqu'en 1853.<br />

98 MLP. fait allusion à la conversion <strong>de</strong> Marie-Alphonse <strong>de</strong> Ratisbonne, fils d'un banquier juif, le 20 janvier 1842, à l'église S. Andrea-<strong>de</strong>lle-Fratte,<br />

suivie <strong>de</strong> son baptême le 31 janvier à l'église du Gesù.<br />

126


qu’une lettre qui ouvrira les rapports entre cette nouvelle Conférence et le Conseil Géné‐<br />

ral.<br />

Voici l’adresse: M. l’abbé Véron (Dietro la Tribuna di Tor <strong>de</strong>’Specchi, 13) ROME.<br />

Adieu, mon cher confrère; je vous prie <strong>de</strong> joindre la lettre ci‐contre à votre envoi.<br />

Votre tout dévoué confrère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je ne sais si vous avez eu la bonté <strong>de</strong> répondre à M. <strong>de</strong> Guizeuil, Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong><br />

Besançon.<br />

Autel <strong>de</strong> l’apparition miraculeuse, à S. Andrea-<strong>de</strong>lle-Frate<br />

88‐4 à M. Bailly<br />

Diffusion <strong>de</strong> la Vie <strong>de</strong> St Vt‐<strong>de</strong>‐Paul.<br />

Marie-Alphonse <strong>de</strong> Ratisbonne<br />

Samedi 16 avril 1842<br />

Monsieur et ami,<br />

M. Olivier ne sʹest pas trouvé en mesure <strong>de</strong> payer sa <strong>de</strong>tte pour la Vie <strong>de</strong> St Vincent <strong>de</strong><br />

Paul, mais il mʹa promis quʹil aurait bientôt <strong>de</strong>s rentrées <strong>de</strong> fonds.<br />

Il se plaint beaucoup quʹon offre <strong>de</strong> divers côtés lʹouvrage à 3f 50 et un libraire à qui<br />

il en avait remis, les lui a rapportés en disant quʹil ne pouvait plus les placer après un pa‐<br />

reil rabais.<br />

Je pense quʹon ferait grand tort à cette édition si on agissait ainsi; jʹai écrit à M. This<br />

pour le conjurer dʹy mettre <strong>de</strong> la pru<strong>de</strong>nce car je suppose que cela vient <strong>de</strong> lui. Peut‐être<br />

lʹimprimerie ferait‐elle bien <strong>de</strong> ne pas lui délivrer <strong>de</strong> nouveaux exemplaires. Si lʹon pouvait<br />

amener quelques conclusions, cela serait le mieux car tant <strong>de</strong> mains employées à lʹœuvre y<br />

gâteront, je le crains, quelque chose.<br />

Sentiments respectueux et dévoués <strong>de</strong><br />

Votre très humble serviteur et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

127


88‐5 à M. Bailly<br />

Présentation dʹun confrère pour représenter MLP. à la réunion <strong>de</strong>s prési<strong>de</strong>nts.<br />

Paris, le 15 mai 1842<br />

Monsieur et cher Prési<strong>de</strong>nt,<br />

M. Dufresne qui me remplaçait à la réunion <strong>de</strong>s prési<strong>de</strong>nts en sera désormais em‐<br />

pêché; jʹai lʹhonneur <strong>de</strong> vous présenter, au nom <strong>de</strong> la Conférence <strong>de</strong> St‐Sulpice, M. Deslan‐<br />

dres, lʹun <strong>de</strong> nos membres les plus assidus et les plus zélés; il remettra régulièrement à<br />

lʹassemblée les notes que nous aurons à transmettre et recevra, en échange, celles quʹon<br />

voudra bien nous adresser.<br />

Agréez, Monsieur et cher Prési<strong>de</strong>nt, la nouvelle assurance <strong>de</strong> mes sentiments res‐<br />

pectueux et dévoués.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

89 à M. Levassor<br />

Dispositions chrétiennes <strong>de</strong> la famille Levassor. Prières à N.D. <strong>de</strong> Chartres pour lui et sa propre famille. Fête <strong>de</strong><br />

saint Vincent <strong>de</strong> Paul. Décès <strong>de</strong> lʹune <strong>de</strong> ses protégées.<br />

Paris, 21 juillet 1842<br />

Mon bien cher ami,<br />

Dans la pensée que votre frère était chargé par vous, comme à lʹordinaire, <strong>de</strong> la pe‐<br />

tite somme que vous accor<strong>de</strong>z pour le loyer <strong>de</strong>s pauvres Dames et pour M me Meslin, je lui<br />

avais écrit à ce sujet; il me répond quʹil pense bien que les 75f sont à ma disposition, selon<br />

lʹusage, mais que pourtant il nʹa pas encore reçu <strong>de</strong> lettre <strong>de</strong> vous sur cet objet. Je vous prie<br />

donc, mon bien cher frère, <strong>de</strong> mʹécrire un mot sur ce que je dois faire.<br />

Votre excellent frère mʹexplique <strong>avec</strong> beaucoup <strong>de</strong> douceur et <strong>de</strong> bonté les raisons<br />

qui lʹempêchent encore pour un temps <strong>de</strong> sʹassocier à nos confrères <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul<br />

et quelque regret que jʹen aie, je ne puis mʹempêcher <strong>de</strong> les trouver excellentes. Lʹesprit le<br />

plus chrétien règne dans cette lettre et je me réjouis bien, très cher ami, <strong>de</strong> vous voir un<br />

frère si tendrement dévoué, <strong>avec</strong> tous les siens, à notre divin Seigneur. Un commerçant<br />

bien et vraiment pieux est extrêmement rare, à Rouen surtout, et cʹest une marque toute<br />

spéciale <strong>de</strong> la bonté <strong>de</strong> N.S. que cette heureuse exception tombe sur votre famille. Cette<br />

pensée doit vous consoler dans les aridités et travaux ru<strong>de</strong>s du saint Ministère. Vos prières<br />

ne sont pas sans fruit, puisquʹelles obtiennent ou concourent à obtenir <strong>de</strong> si précieux résul‐<br />

tats. Jʹen réclame toujours quelque petite part pour moi, indigne chrétien, et pour ma pau‐<br />

vre femme qui en a toujours grand besoin. N.D. <strong>de</strong> Chartres, si vous la priiez un peu ten‐<br />

drement, mʹobtiendrait aussi pour ma maison une bénédiction comme celle qui favorise<br />

votre famille. Deman<strong>de</strong>z‐la, je vous en conjure, vous qui êtes prêtre du Seigneur, homme<br />

<strong>de</strong> prière et notre interprète auprès <strong>de</strong> Lui.<br />

Nos petites œuvres vont toujours assez bien. Avant‐hier, notre Saint Patron nous<br />

avait réunis un grand nombre à sa chapelle, lʹassemblée était, comme à lʹordinaire, très édi‐<br />

fiante et pleine <strong>de</strong> consolation. Quatre prélats réunis, les bonnes filles <strong>de</strong> Saint Vincent, les<br />

prêtres Lazaristes et tous leurs séminaristes, martyrs aspirants, et nous enfin qui aimons<br />

un peu aussi notre divin Maître, tout cela nʹavait quʹun cœur et quʹune âme; assurément<br />

Dieu était au milieu <strong>de</strong> nous.<br />

128


Adieu, mon cher ami, votre pauvre M me Dorne est morte bien pieusement; cʹest le<br />

fruit <strong>de</strong> sa pauvreté qui rachète les faiblesses <strong>de</strong> la nature et aussi la récompense <strong>de</strong> votre<br />

pieuse charité.<br />

Je suis dans les Saints Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre frère dévoué<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

89‐1 à M. Bailly<br />

Vente <strong>de</strong> la Vie <strong>de</strong> St Vincent <strong>de</strong> Paul.<br />

Paris 16 août 1842<br />

Monsieur et ami,<br />

Il me revient <strong>de</strong> tous côtés que la Vie <strong>de</strong> St Vincent est donnée par M. Debécourt, par<br />

Lebigre et autres libraires qui la tiennent <strong>de</strong> vous, à 2f 50 et même au‐<strong>de</strong>ssous. Un pareil<br />

rabais perd complètement cette édition et excite la vive réclamation <strong>de</strong>s libraires qui en ont<br />

reçu <strong>de</strong> nous à un prix plus élevé et qui ne pourront sʹen défaire quʹà perte. Cependant,<br />

nous étions convenus formellement quʹen partageant le reste <strong>de</strong> lʹédition, nous nʹabaisse‐<br />

rions que <strong>de</strong> concert entre la Société et vous le prix gardé jusque là. Je regrette dʹautant<br />

plus que cette promesse ait été oubliée par vous que la Société va se trouver dans lʹimpos‐<br />

sibilité <strong>de</strong> rentrer dans lʹavance <strong>de</strong> 4.500f quʹelle a faite; les 1500 exemplaires formant sa<br />

part ne pouvant plus représenter maintenant cette somme.<br />

Mon <strong>de</strong>rnier vœu était quʹau moins il nʹy eût <strong>de</strong> perte pour aucune <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux par‐<br />

ties; il y faut aussi renoncer; jʹen ai un vif chagrin car je suis assuré quʹen abaissant seule‐<br />

ment un peu et <strong>de</strong> concert le prix <strong>de</strong> lʹouvrage, on eût pu en tirer bon parti.<br />

Jʹai reçu ces jours <strong>de</strong>rniers une petite somme <strong>de</strong> 125f environ pour <strong>de</strong>s livres <strong>de</strong> la<br />

librairie Périsse; je mʹempresserai <strong>de</strong> vous la remettre aussitôt que vous le désirerez, <strong>avec</strong><br />

la note <strong>de</strong> ce qui reste encore dû par cette maison; je crains seulement quʹelle ne renouvelle<br />

<strong>de</strong>s réclamations au sujet du rabais et ne refuse pour le reste <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r les conventions<br />

adoptées entre elle et moi.<br />

M. Olivier a aussi réclamé très vivement; mais ses payements sont maintenant<br />

achevés; il resterait à voir si lʹéquité ne veut pas quʹon fasse quelque retour à son égard.<br />

Agréez, Monsieur et ami, les assurances <strong>de</strong> mon sincère et respectueux dévoue‐<br />

ment.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Il me reste chez moi et chez lʹancien surveillant <strong>de</strong> nos enfants, une trentaine<br />

dʹexemplaires que je gar<strong>de</strong>rai, si vous voulez bien, à compter sur les 1500 à revenir à la So‐<br />

ciété; on mʹen <strong>de</strong>man<strong>de</strong> quelques volumes, mais je ne sais plus à quel prix les vendre; nous<br />

avions proposé 4f pour les Conférences et 5f pour le <strong>de</strong>hors; quel taux suivre maintenant?<br />

Dites‐moi un mot, je vous prie, <strong>de</strong> conseil à ce sujet.<br />

90 à M. Pavie<br />

Souci pour un jeune horloger chrétien. Eloge <strong>de</strong> la famille, ʺlʹune <strong>de</strong>s œuvres les plus belles, les plus saintes <strong>de</strong><br />

notre mon<strong>de</strong>ʺ. A sa femme, il manque encore ʺlʹunique nécessaireʺ.<br />

129


Paris, 1er septembre 1842<br />

Très cher Victor,<br />

M. lʹabbé L. qui mʹétait venu voir au nom <strong>de</strong> lʹami M. va repartir. Quoiquʹil soit un<br />

peu tard maintenant pour lui donner une lettre, comme je lʹaurais voulu, je griffonne au<br />

moins ces <strong>de</strong>ux mots <strong>de</strong> souvenir, afin dʹinterrompre un silence que vous avez la bonté, je<br />

lʹespère, <strong>de</strong> trouver long ainsi que moi.<br />

Votre jeune horloger en est un peu cause; il a déposé votre lettre chez moi en mon<br />

absence. Je lʹattendais, je lʹattends encore. Je lʹai regretté. Jʹavais parlé <strong>de</strong> lui à <strong>de</strong>ux confrè‐<br />

res horlogers. Sans doute, il aura trouvé vite une case et sʹy sera placé. Jʹespère que ce sera<br />

bien, puisque cet excellent jeune homme est chrétien et sous la gar<strong>de</strong> <strong>de</strong> Dieu. Gavard, que<br />

jʹentrevois à travers les colonnes <strong>de</strong> la rue <strong>de</strong> Rivoli, mʹa donné par‐ci par‐là <strong>de</strong> vos nouvel‐<br />

les et <strong>de</strong> celles <strong>de</strong> la famille. Tout est au mieux, mʹassure‐t‐il. Jʹen ai une joie extrême. Vous<br />

méritez si bien tous <strong>de</strong> former une bonne, nombreuse et exemplaire famille, gardant les<br />

traditions, sans mépris du présent. Il y en a peu ainsi. Cʹest, je crois, une <strong>de</strong>s œuvres les<br />

plus belles, les plus saintes <strong>de</strong> notre mon<strong>de</strong>. Veillez bien, cher ami, à ce que rien ne la gâte<br />

chez vous, afin <strong>de</strong> lʹoffrir complète au Seigneur!<br />

Mon pauvre petit ménage à moi est tout dispersé: ma femme est à la campagne <strong>de</strong>‐<br />

puis quinze jours et doit y rester jusquʹà la mi‐octobre. Elle va bien maintenant ou presque<br />

bien; maintenant, elle est plus forte que moi qui traîne bien souvent. Nous sommes dʹail‐<br />

leurs assez bons enfants, tendres lʹun pour lʹautre. Une seule chose manque encore, mal‐<br />

heureusement, cʹest lʹunique nécessaire et Dieu seul le donne tôt ou tard; nʹest‐il pas vrai,<br />

cher ami, il le donnera.<br />

Je voudrais vous dire quelques mots <strong>de</strong>s conférences qui prospèrent et font vrai‐<br />

ment un peu <strong>de</strong> bien, mais il faut finir. A quelque prochain courrier le reste.<br />

Ici encore pourtant les plus tendres affections pour vous et votre chère Louise et ses<br />

chers petits, <strong>avec</strong> beaucoup dʹamitié dévouée aussi pour votre bon frère Théodore et tous<br />

nos amis.<br />

A vous <strong>de</strong> tout cœur.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

91 à M. Levassor<br />

Arrangements financiers concernant la Conférence. Nouvelles <strong>de</strong> sa santé et <strong>de</strong> ses œuvres <strong>de</strong> charité.<br />

Paris, 16 septembre 1842<br />

Mon bien cher ami et frère,<br />

Votre silence, après ma <strong>de</strong>rnière lettre, mʹa laissé incertain sur les moyens que vous<br />

vouliez prendre pour me faire parvenir lʹargent <strong>de</strong>stiné à vos pauvres Dames; je me suis<br />

borné en conséquence à faire lʹavance pure et simple <strong>de</strong>s 30f nécessaires aux loyers et je<br />

nʹai rien fait toucher chez Monsieur votre frère, quoique je lui eusse écrit pour lui donner<br />

un avis contraire.<br />

Je vais avoir ces jours‐ci à réclamer <strong>de</strong> nouveau son entremise obligeante pour faire<br />

parvenir une petite somme en Normandie; je vous prie donc, très cher ami, <strong>de</strong> mʹécrire au<br />

plus tôt pour me dire dans quels termes je dois poser ma <strong>de</strong>man<strong>de</strong>. Savoir si, dʹabord, il<br />

faudra déduire, sur lʹargent quʹil aura la bonté <strong>de</strong> faire rendre en retour ici chez moi, les<br />

130


30f que jʹai avancés pour le trimestre <strong>de</strong>rnier et, quant au trimestre qui va échoir, sʹil faut<br />

aussi en faire déduction.<br />

Je vous aurai une sincère obligation, cher ami, si vous mʹécrivez tout <strong>de</strong> suite, car le<br />

petit arrangement que jʹai à prendre, <strong>de</strong> mon côté, pour la Normandie, va se trouver assez<br />

pressé.<br />

Je suis tout aise que cette occasion vous oblige à me donner <strong>de</strong> vos nouvelles, car<br />

vous mʹen laissez beaucoup jeûner. Vous répan<strong>de</strong>z à flots les conseils et les paroles édi‐<br />

fiantes sur tous ceux qui vous entourent et sur dʹautres encore, sans doute, par votre cor‐<br />

respondance; cette sainte pâture mʹirait assurément bien aussi et si, par sobriété spirituelle,<br />

je ne la sollicite pas trop ar<strong>de</strong>mment, croyez, cher ami, quʹelle me réconforterait pourtant<br />

bien merveilleusement. Je suis presque toujours souffrant et si faible <strong>de</strong> jambes et dʹesprit,<br />

que je ne fais presque plus rien en œuvre <strong>de</strong> charité. Lʹinutilité <strong>de</strong> ma vie me pèse parfois<br />

et jʹai besoin <strong>de</strong> me souvenir que nous <strong>de</strong>vons être comme le veut notre divin Maître, et<br />

non comme il nous plairait à nous‐mêmes.<br />

Pour vous, cher ami, vous travaillez courageusement au soin <strong>de</strong>s âmes et comptez<br />

parmi les ouvriers <strong>de</strong> la vigne sainte; jʹen bénis cordialement notre bien‐aimé Seigneur et le<br />

prie, comme votre frère et tendre ami, <strong>de</strong> me donner une petite part à vos mérites.<br />

Adieu, cher ami, je suis dans les divins Cœurs <strong>de</strong> J. et M.<br />

Votre frère dévoué<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

91‐1 à M. Bailly<br />

Propose un confrère comme possible prési<strong>de</strong>nt dʹune <strong>de</strong>s Conférences.<br />

Paris, 24 septembre 1842<br />

Monsieur et ami,<br />

Vous nʹavez pas répondu à ma <strong>de</strong>rnière lettre, mais, sans rancune, je vous en<br />

adresse une secon<strong>de</strong>, quʹau besoin même je ferai suivre<br />

dʹune troisième.<br />

Celle‐ci est pour vous dire quʹun <strong>de</strong> nos confrères<br />

<strong>de</strong> la Conférence <strong>de</strong>s Missions, M. Bourlez, a quitté ce<br />

quartier pour aller <strong>de</strong>meurer Place du Panthéon n° 1, ce<br />

qui lʹobligera à sʹattacher à lʹune <strong>de</strong>s Conférences du<br />

quartier St‐Jacques.<br />

M. Bourlez est un homme <strong>de</strong> 40 ans, instruit et <strong>de</strong><br />

manières fort aimables; il était précepteur <strong>de</strong>s enfants <strong>de</strong><br />

la famille <strong>de</strong> Villequier qui lʹa vu partir <strong>avec</strong> un extrême<br />

regret au moment <strong>de</strong> son mariage; il a présidé<br />

quelquefois la Conférence <strong>de</strong>s Missions en lʹabsence <strong>de</strong><br />

M. Ferrand, 99 et lʹa fait <strong>de</strong> manière à prouver quʹil pour‐<br />

rait le faire à merveille pour son propre compte.<br />

99 Amédée Ferrand <strong>de</strong> Missol, (1805-1882), docteur en mé<strong>de</strong>cine en 1828, ordonné prêtre en 1856, entra en relation <strong>avec</strong> MLP. vers<br />

1839. Il venait d'être désigné comme prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la Conférence St-F.Xavier-<strong>de</strong>s-Missions. Devenu veuf, il donne tout son temps<br />

libre à la visite <strong>de</strong>s pauvres et <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s. Il entend un jour MLP. lui confier son désir <strong>de</strong> voir surgir une congrégation pour continuer<br />

les œuvres fondées par la Société <strong>de</strong> St-Vt-<strong>de</strong>-Paul. Il accepte <strong>de</strong> réunir chez lui, rue St-Sulpice, n°18, quelques confrères afin<br />

131


Si, comme on me le dit, St‐Médard et St‐Jacques‐du‐Haut‐Pas vont se trouver sans<br />

Prési<strong>de</strong>nt, vous jugeriez peut‐être utile <strong>de</strong> jeter les yeux sur lui pour lʹune ou lʹautre place.<br />

Je ne donne ici dʹailleurs quʹun simple renseignement, dont vous ferez tel usage que<br />

vous trouverez bon.<br />

Je suis comme toujours <strong>avec</strong> un sincère dévouement<br />

Votre respectueux serviteur et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

92 à M. Levassor<br />

Envoi dʹune statue <strong>de</strong> la Vierge. Choix dʹun prédicateur. Mise au point <strong>de</strong>s comptes pour les pauvres visitées.<br />

Un confrère <strong>de</strong> St‐Sulpice se fait missionnaire.<br />

Paris, le 17 janvier 1843<br />

Mon bien cher frère,<br />

Je me suis fait un double plaisir <strong>de</strong> mʹacquitter <strong>de</strong> vos commissions, parce quʹelles<br />

regar<strong>de</strong>nt la gloire <strong>de</strong> Dieu dʹabord, et ensuite, parce que je trouvais lʹoccasion <strong>de</strong> vous<br />

être utile. M. Dubucoy, que jʹai vu hier, mʹa dit quʹil ne <strong>de</strong>mandait pas mieux que <strong>de</strong> vous<br />

faire lʹenvoi du groupe <strong>de</strong> Notre‐Dame <strong>de</strong>s Sept Douleurs, mais quʹil avait besoin avant<br />

tout, <strong>de</strong> savoir si la chapelle où il <strong>de</strong>vait être placé était prête et surtout <strong>de</strong> connaître les<br />

dimensions dʹune manière précise, en largeur et hauteur, <strong>de</strong> la place quʹon lui <strong>de</strong>stine, afin<br />

<strong>de</strong> sʹassurer sʹil pourra convenablement y être adapté. Il me semble un peu que vous lui<br />

aviez déjà envoyé ces renseignements; mais, comme il semble lʹavoir entièrement oublié, il<br />

faudrait, en ce cas, cher ami, se résigner à recommencer.<br />

M. Duquesnay, <strong>de</strong> son côté, est très disposé à faire les sermons que vous désirez,<br />

mais il craint que son supérieur, M. lʹabbé <strong>de</strong> Rauzan, à qui on doit sʹadresser, ne refuse.<br />

Pour parer ce coup, il croit pru<strong>de</strong>nt que la lettre écrite à son Supérieur lui fut envoyée à<br />

lui‐même. (M. Duquesnay, rue <strong>de</strong> la Planche, 15) sous enveloppe, afin quʹil pût la remettre<br />

personnellement à M. <strong>de</strong> Rauzan, en lʹaccompagnant <strong>de</strong> quelques explications qui aplani‐<br />

raient peut‐être les difficultés. Le premier dimanche <strong>de</strong> février est pris pour Versailles,<br />

mais les <strong>de</strong>ux suivants sont encore libres. Hâtez‐vous donc, cher ami, <strong>de</strong> vous mettre en<br />

mesure. Jʹai été ici bien payé <strong>de</strong> ma peine, en faisant connaissance <strong>avec</strong> M. Duquesnay qui<br />

est un homme <strong>de</strong> vrai talent et en même temps un <strong>de</strong>s plus aimables et <strong>de</strong>s plus dévoués<br />

prêtres que je connaisse et qui se puisse voir.<br />

Je nʹai pu encore régler entièrement vos petits comptes pour les bonnes Dames,<br />

parce que je ne sais pas encore ce qui pouvait être dû pour Mme Meslin. Mais jʹai remis à<br />

Melle Montvoisin 33f, savoir: 18f pour avances quʹelle avait faites, selon ses anciennes habi‐<br />

tu<strong>de</strong>s, avant la réception <strong>de</strong> votre lettre et 15f pour le trimestre, selon vos <strong>de</strong>rnières ins‐<br />

tructions. Pour le loyer <strong>de</strong> Mme Delatre, qui nʹest pas <strong>de</strong> 22f50 mais à 27f50, il sera néces‐<br />

saire, cher ami, que vous donniez désormais 16f et non 15, afin que nous puissions, <strong>de</strong> no‐<br />

tre côté, faire une petite diminution proportionnelle. Si vous le voulez bien, nous réglerons<br />

la chose ainsi désormais. Pour cette fois, je suis plus quʹen mesure, votre frère mʹayant re‐<br />

mis 75f sur lesquels je nʹai encore remis que 49f à Melle Montvoisin, dont 33f pour elle‐<br />

d'étudier ensemble un tel projet. Ce fut l'origine <strong>de</strong> la "Réunion intime", dont fit partie le futur père Olivaint. Elle finira par se disperser<br />

(cf. VLP. I, p.137; Positio, p.131).<br />

132


même et 16fpour le loyer <strong>de</strong> M me Delatre. Il me resterait donc en avoir 26f, sʹil nʹest rien dû<br />

pour M me Meslin. Je dirai cela au juste à votre frère, en lui écrivant lors du prochain terme.<br />

Adieu, bien cher ami, je termine en réclamant toujours une part dans vos prières<br />

pour moi et pour ce qui me touche particulièrement. Je désirerais bien arriver à aimer Dieu<br />

<strong>de</strong> cœur et en véritable simplicité; <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z‐lui cette grâce, tout misérable que je sois; je<br />

prie aussi pour vous.<br />

Votre frère en J.C.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Notre frère Estève vient dʹentrer chez les Jésuites pour <strong>de</strong>venir missionnaire.<br />

92‐1 à M. Bailly<br />

Annonce du décès dʹun confrère.<br />

Paris, 3 février 1843<br />

Monsieur et ami,<br />

La Conférence St‐Sulpice vient <strong>de</strong> perdre un <strong>de</strong> ses membres M. Laurent architecte;<br />

il a succombé hier à une fièvre typhoï<strong>de</strong>. Il était fort bien disposé spirituellement. Son<br />

convoi aura lieu <strong>de</strong>main samedi à 8h très précises, à la Chapelle <strong>de</strong> lʹhospice Necker.<br />

Pressés par le temps, nous ne pouvons avertir que les membres <strong>de</strong> notre Confé‐<br />

rence.<br />

Sentiments respectueux et dévoués.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

93 à M. Maignen100 Ren<strong>de</strong>z‐vous pour une conférence du Père <strong>de</strong> Ravignan.<br />

[12 avril 1843]<br />

On mʹassure, mon cher confrère, que lʹinstruction <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Ravignan 101 commence à<br />

7h.½ et que la foule y est fort gran<strong>de</strong>; je pense donc quʹil conviendra <strong>de</strong>main <strong>de</strong> partir un<br />

peu plus tôt quʹil nʹétait convenu. Je me rendrai à 7h. moins un quart à lʹéglise <strong>de</strong>s Lazaris‐<br />

tes qui est plus directement sur votre chemin 102 et je vous y attendrai, si vous nʹy êtes déjà<br />

vous‐même.<br />

A vous bien cordialement<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Mercredi 5h.<br />

100 e<br />

Maurice Maignen (1822-1890), le 3 Frère <strong>de</strong> St-Vt-<strong>de</strong>-Paul, après MLP. et C. Myionnet. Il était né à Paris, dans le quartier <strong>de</strong>s<br />

Halles. Artiste, il est contraint <strong>de</strong> gagner péniblement la vie <strong>de</strong>s siens. Il avait fini par trouver une place dans l'administration, lorsqu'il<br />

fit la connaissance <strong>de</strong> MLP., en avril 1843. Subjugué par la personnalité <strong>de</strong> MLP., il va retrouver la foi à son contact. Enthousiaste,<br />

inventif et généreux, celui que MLP. appellera "son fils spirituel", mettra toute sa foi et sa charité au service <strong>de</strong>s apprentis et<br />

ouvriers. Dès 1858, il introduira la "question sociale" au sein du mouvement <strong>de</strong>s œuvres pour la jeunesse ouvrière, estimant que<br />

ces œuvres ne doivent pas se contenter <strong>de</strong> faire "prier et jouer les apprentis, mais aussi <strong>de</strong> les "patronner par l'assistance professionnelle".<br />

En 1871, il inspirera à La Tour du Pin et à A. <strong>de</strong> Mun <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>r l'Œuvre <strong>de</strong>s Cercles Catholiques d'Ouvriers.<br />

101<br />

Gustave-Xavier <strong>de</strong> Ravignan (1793-1858), avocat, puis jésuite en 1822, successeur <strong>de</strong> Lacordaire aux Conférences <strong>de</strong> Carême à<br />

Notre-Dame <strong>de</strong> Paris, <strong>de</strong> 1837 à 1846. Il apportera volontiers son concours aux œuvres <strong>de</strong> l'Institut, à la Sainte-Famille par exemple.<br />

Il prêchera, le 4 mai 1855, à l'œuvre <strong>de</strong> Nazareth, l'un <strong>de</strong> ses <strong>de</strong>rniers sermons <strong>de</strong> charité.<br />

102<br />

Sur l'enveloppe, l'adresse indiquée est 155 rue <strong>de</strong> Sèvres; Paris. M. Maignen y habite "dans un ancien hôtel morcelé en une multitu<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong> petits logements et d'ateliers". MLP. lui, rési<strong>de</strong> à quelques pas, au 98, rue du Cherche-Midi.<br />

133


94 à M. Maignen<br />

Pressante 103 invitation à venir le rencontrer pour dissiper un malentendu.<br />

Cher confrère,<br />

Vous mʹavez tenu gran<strong>de</strong> rigueur tous ces jours‐ci;<br />

lʹinquiétu<strong>de</strong> mʹa pris plusieurs fois que vous vous ne<br />

fussiez <strong>de</strong> nouveau indisposé. Venez, je vous prie, après<br />

votre dîner, mʹassurer quʹil nʹen est rien; nous règlerons<br />

ensemble nos petites dispositions.<br />

A vous <strong>de</strong> cœur bien sincèrement<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Le Père <strong>de</strong> Ravignan<br />

95 à M. Maignen<br />

Réunion <strong>de</strong>s ouvriers à St‐Sulpice.<br />

[1843]<br />

Paris, samedi matin<br />

20 mai 1843<br />

M. Le <strong>Prevost</strong> se rappelant que Monsieur Maignen a témoigné le désir dʹassister à la<br />

réunion <strong>de</strong>s ouvriers 104 , lʹinforme quʹelle aura lieu dimanche à St‐Sulpice et sʹoffre pour lʹy<br />

accompagner.<br />

Dans le cas où Monsieur Maignen accepterait cette proposition, il faudrait quʹil eût<br />

la bonté dʹêtre rue du Cherche Midi, 98, à 7h. moins un quart, le soir.<br />

M. Le <strong>Prevost</strong> renouvelle à son cher confrère lʹassurance <strong>de</strong> ses sentiments dévoués.<br />

95‐1 à M. Bailly<br />

Sollicité pour prendre sa succession, MLP. ne peut accepter.<br />

103 Sur le coin gauche <strong>de</strong> la lettre, on peut lire: pressée, à remettre dans la matinée.<br />

Paris, 20 mai 1843<br />

104 Il s'agit <strong>de</strong> la réunion <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> St-François-Xavier, créée en 1840 pour le bien spirituel <strong>de</strong>s ouvriers. Armand <strong>de</strong> Melun et<br />

le Vicomte <strong>de</strong> Lambel en furent les principaux artisans. Elle prendra <strong>de</strong> plus en plus le caractère d'une société <strong>de</strong> secours mutuels<br />

et d'éducation populaire. Le principal <strong>de</strong> ses animateurs fut François Ledreuille.<br />

134


Monsieur et ami,<br />

Vous avez cherché parmi nous un membre qui fît preuve <strong>de</strong> dévouement pour no‐<br />

tre chère œuvre <strong>de</strong> St‐Vincent et, en vous souvenant que déjà nous avons passé ensemble<br />

bien <strong>de</strong>s jours tant bons que mauvais, vous avez jeté les yeux sur moi. 105<br />

Votre confiance mʹa vivement touché, et si je nʹécoutais quʹun premier élan du cœur,<br />

jʹaccepterais sans hésiter la tâche que vous vouliez me donner; mais ici, la volonté ne suffit<br />

pas, il faut <strong>de</strong>s moyens qui répon<strong>de</strong>nt à lʹimportance <strong>de</strong> lʹœuvre et ces moyens me man‐<br />

quent. Vous savez que ma santé est débile 106 ; elle lʹest vraiment plus que cela ne paraît en‐<br />

core; vous connaissez aussi quelques‐unes <strong>de</strong>s charges imposées à ma faiblesse, mais je ne<br />

vous les ai pas toutes dites. Je tenterais la Provi<strong>de</strong>nce si jʹallais au‐<strong>de</strong>là, et je compromet‐<br />

trais lʹœuvre si excellente dont jʹaccepterais la responsabilité.<br />

Je suis sincèrement attristé du moment dʹembarras que ce refus vous peut causer,<br />

jʹirai vous voir au plus tôt afin <strong>de</strong> chercher <strong>avec</strong> vous, si vous y consentez, les moyens<br />

meilleurs qui peuvent être sous votre main; mais jʹai gran<strong>de</strong> confiance du reste dans la<br />

protection divine qui ne nous a jamais manqué et qui <strong>de</strong>puis 10 ans nous a soutenus et dé‐<br />

veloppés. Nous désirons le bien et nous nous offrons à Dieu pour lʹaccomplir; Dieu ne<br />

nous rejettera pas: nous lʹen prierons dʹailleurs, et moi surtout, qui puis si peu autrement,<br />

je donnerai par cette voie, tout ce qui me reste et dʹar<strong>de</strong>ur et <strong>de</strong> forces.<br />

Agréez, Monsieur et ami, les assurances accoutumées <strong>de</strong> tout mon respectueux at‐<br />

tachement.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

96 à M. Maignen<br />

Réunion <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> St‐F.‐Xavier pour les ouvriers, à lʹéglise St‐Sulpice.<br />

21 mai 1843<br />

M. Ferrand mʹécrit que si nous voulons venir à 6h. à la salle <strong>de</strong>s ouvriers, il nous fe‐<br />

ra entrer <strong>de</strong> ce côté, autrement la foule sera si gran<strong>de</strong> par lʹentrée commune, rue Palatine,<br />

quʹon nʹarrivera à la nef quʹ<strong>avec</strong> difficulté. Jʹaimerais mieux accepter cette proposition,<br />

mais peut‐être ne pourrez‐vous être libre à temps; en ce cas, nous courrons les chances <strong>de</strong><br />

lʹautre côté.<br />

Dimanche, 4 h.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

97 à M. Pavie<br />

Naissance chez les Pavie. La famille <strong>de</strong> MLP. Ces amitiés et affections familiales, il les vit en Dieu; il veille à ce<br />

quʹelles ʺsʹépurent en Luiʺ. Simplicité et humilité <strong>de</strong>s petites œuvres <strong>de</strong> St‐Vt‐<strong>de</strong>‐Paul qui sont bien ʺdans lʹes‐<br />

prit chrétienʺ.<br />

Paris, 23 mai 1843<br />

105<br />

Dès 1840, E. Bailly avait envisagé <strong>de</strong> démissionner mais il remettait à plus tard sa décision. Elle interviendra, un an après cette<br />

lettre, le 9 mai 1844.<br />

106<br />

Davantage que les raisons <strong>de</strong> santé invoquées, M. Maignen rapporte qu'à cette époque "MLP. méditait déjà la création d'un institut<br />

religieux."<br />

135


Mon bien cher Victor,<br />

Jʹapprends par Gavard quʹune nouvelle joie est accordée à votre maison et que vous<br />

êtes maintenant père <strong>de</strong> trois petits enfants. (me pardonne le grand Maurice 107 <strong>de</strong> parler <strong>de</strong><br />

lui <strong>de</strong> si libre façon). Je nʹai pas besoin, cher ami, <strong>de</strong> vous dire combien je suis heureux <strong>de</strong><br />

votre bonheur. Je nʹai pas perdu lʹhabitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> me mêler à tout ce qui vous intéresse et aus‐<br />

si avant que votre tendre intimité me le permet. Jʹavais presque envie <strong>de</strong> vous gron<strong>de</strong>r un<br />

peu <strong>de</strong> ne mʹavoir point écrit vous‐même; mais, cher ami, je me repose sur vous pour me<br />

faire la part qui me doit revenir. Nʹoubliez pas, quand vous me répondrez, <strong>de</strong> me dire que<br />

votre chère femme va bien, quʹ<strong>avec</strong> son entourage elle est encore plus aimable, sʹil se peut,<br />

et plus aimée pour vous.<br />

Vous voulez, cher Victor, quʹen compensation <strong>de</strong> vos effusions, je vous parle aussi<br />

<strong>de</strong> ce qui me touche. Je ne suis pas si riche que vous. La Provi<strong>de</strong>nce qui mesure ses dons,<br />

selon sa sagesses, mʹa tracé une voie que je dois suivre en la bénissant dʹavoir déjà tant fait<br />

pour moi qui mérite moins. Ma femme va assez bien, quoique souffrant un peu chaque<br />

jour. Elle peint et travaille <strong>avec</strong> goût. Bientôt elle ira se reposer quelque temps à la campa‐<br />

gne qui, <strong>de</strong>puis quelques années, lui réussit à merveille.<br />

Je ne sais si vous savez que jʹai été ce Carême <strong>de</strong>rnier en Normandie pour chercher<br />

ma nièce qui est en pension <strong>de</strong>puis ce moment, chez les Dames <strong>de</strong> Saint‐Maur, dans mon<br />

voisinage. Cʹest une gran<strong>de</strong> jeune fille <strong>de</strong> 16 ans, douce et docile comme un agneau, très<br />

bien élevée par sa mère et assez instruite, eu égard aux ressources quʹon avait sous la<br />

main. Ici elle travaille <strong>avec</strong> ar<strong>de</strong>ur et contente tout le mon<strong>de</strong>; ce sera, je lʹespère, une excel‐<br />

lente personne; elle est pieuse et pure comme un ange. Son frère a 13 ans; il est dans une<br />

institution ecclésiastique à Yvetot. Il va également très bien. Ma bonne mère que vous ché‐<br />

rissez est admirable; elle se porte à merveille. Elle ne vit que pour le bon Dieu, pour les<br />

pauvres et pour ses enfants. Ma sœur est près dʹelle et la gar<strong>de</strong> comme un trésor. Puisse le<br />

Seigneur ne pas nous la ravir encore. Nous ne sommes pas assez forts pour nous passer <strong>de</strong><br />

cet appui. Cʹest notre lien le plus cher au mon<strong>de</strong>; sʹil était brisé, notre vie serait trop dure.<br />

Dieu, qui le sait, y pourvoira.<br />

Voilà ce quʹil y a en moi, cher ami, quant au reste vous le savez déjà. Je vis aussi un<br />

peu en Dieu et je serais heureux que ce fût chaque jour davantage, afin que toutes mes<br />

pensées et mes affections allassent sʹépurer en lui. Je suis toujours un peu nos petites œu‐<br />

vres <strong>de</strong> S t Vincent, sachant bien quʹelles sont humbles, décousues, souvent peu apprécia‐<br />

bles, mais reconnaissant en même temps que par cela même elles sont mieux peut‐être<br />

dans lʹesprit chrétien. Adieu, cher ami, je me mets par la pensée dans quelque aimable<br />

scène <strong>de</strong> famille, comme il sʹen fait autour <strong>de</strong> vous chaque jour, et je mʹunis aux pures joies<br />

<strong>de</strong> votre cœur <strong>de</strong> fils, <strong>de</strong> mari et <strong>de</strong> père, et aussi <strong>de</strong> bon et fidèle ami. Adieu encore à<br />

vous, béni tendrement comme toujours.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Mille souvenirs à votre chère amie et au bon père. Un baiser pour les petits.<br />

107<br />

V. Pavie aura six enfants. Les trois aînés, Joseph, Maurice et Elisabeth moururent en bas âge. Leur survécurent, Louise, Eusèbe et<br />

Georges.<br />

136


98 à M. Levassor<br />

Démarches auprès dʹun statuaire. Retraite pascale à N.D. par le père <strong>de</strong> Ravignan. Espérance <strong>de</strong> voir se réveiller<br />

la foi chez les ouvriers.<br />

Paris, 24 mai 1843<br />

Mon bien cher frère,<br />

Mon silence vous peut faire croire que jʹai négligé votre recommandation relative‐<br />

ment au groupe <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong>s Douleurs; il nʹen est rien pourtant; je suis allé, je ne saurais<br />

dire combien <strong>de</strong> fois, mais quatre au moins, chez M. Dubucoy à ce sujet; comme chaque<br />

fois il oubliait les dimensions, jʹai pris le parti <strong>de</strong> lui rédiger une note détaillée, contenant<br />

tous les renseignements que vous mʹaviez transmis. Il en avait paru pleinement satisfait et<br />

mʹavait promis solennellement que dans huit jours lʹenvoi serait fait. Cependant, jʹy suis<br />

retourné <strong>de</strong>puis, à plusieurs reprises, nouvelle promesse, nouveau délai, allégation dʹaffai‐<br />

res, dʹembarras multipliés, cʹest tout ce que je puis obtenir. Jʹen désespère un peu, pour<br />

vous dire la vérité, car je vois que cet excellent M. Dubucoy nʹarrive à rien et justifie ce qui<br />

mʹavait été dit: quʹil est fatigué et quelque peu vieilli. Dites‐moi, cher ami, ce que je dois<br />

faire et je me rendrai à vos instructions.<br />

Je pense que le Carême nʹa pas été pour vous sans <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s fatigues; je ne vous en<br />

plains pas si votre santé est assez robuste pour les supporter. Je serai bien aise dʹavoir un<br />

mot à ce sujet dans votre prochaine lettre. Mme Delatre avait entendu dire vaguement que<br />

vous aviez un peu souffert; cela nous a donné quelque inquiétu<strong>de</strong>, vous la dissiperez, je<br />

lʹespère, entièrement, en mʹapprenant que vous êtes remis et disponible comme toujours<br />

pour les œuvres <strong>de</strong> Dieu.<br />

Notre divin Maître est servi ici aussi <strong>avec</strong> un zèle et une charité bien édifiants eu<br />

égard, au moins, au long oubli dont on se plaignait, il y a peu dʹannées encore, <strong>avec</strong> tant<br />

<strong>de</strong> raison. La retraite <strong>de</strong> Notre‐Dame, suivie par un nombre immense dʹhommes <strong>de</strong> tout<br />

âge et <strong>de</strong> conditions diverses, a été couronnée par une communion générale, à laquelle<br />

près <strong>de</strong> trois mille hommes ont eu le bonheur <strong>de</strong> prendre part. Les ouvriers ont eu leur<br />

tour; à Ste‐Marguerite, cela était, assure‐t‐on, admirable; hier, à St‐Sulpice, je lʹai vu <strong>de</strong> mes<br />

propres yeux, six cents ouvriers environ remplissaient la nef, ils se sont approchés <strong>de</strong> la<br />

sainte Table <strong>avec</strong> un recueillement et une piété qui vous eussent, cher ami, bien vivement<br />

attendri.<br />

Le soir, ils étaient huit cents ou mille au local <strong>de</strong> leur assemblée; la réunion a été<br />

pleine dʹintérêt, elle sʹest terminée par un salut solennel. Si cette bonne œuvre se répand<br />

dans tous les quartiers, Paris et après lui la France entière seront sauvés; priez bien, cher<br />

ami, pour que le Seigneur bénisse cet heureux commencement.<br />

Je vous aime toujours bien tendrement dans le cœur <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

98‐1 à M. Houssard108 Communication dʹune <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> ren<strong>de</strong>z‐vous.<br />

108 Vicaire et économe du Séminaire.<br />

137<br />

Paris, 3 juillet 1843


Monsieur lʹ abbé,<br />

M lle Mignon, que jʹai eu lʹhonneur <strong>de</strong> voir hier, ne mʹa pas paru éloignée <strong>de</strong> donner<br />

assentiment à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> que je lui ai faite relativement à M. Laigrètes; cependant elle<br />

avait besoin <strong>de</strong> quelque réflexion et elle a manifesté lʹintention <strong>de</strong> vous aller voir <strong>de</strong>main<br />

mardi, ou en votre absence, M. lʹabbé Carbon, pour vous donner une réponse définitive.<br />

Je souhaite bien, Monsieur lʹabbé, quʹelle soit telle que vous la désirez, et je saisis<br />

cette occasion pour vous renouveler lʹassurance <strong>de</strong>s sentiments bien respectueux <strong>avec</strong> les‐<br />

quels je suis<br />

Votre très humble et très dévoué serviteur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

99 à M. Maignen<br />

Visites <strong>de</strong>s pauvres. Un discours du comte <strong>de</strong> Molé.<br />

Paris, 20 juillet 1843<br />

Je vous remets ci‐joint, mon cher confrère, une lettre pour votre pauvre Stiénon et<br />

aussi <strong>de</strong>ux cartes, afin que vous nʹayez pas le chagrin <strong>de</strong> lʹaller voir les mains vi<strong>de</strong>s. Vous<br />

ferez bien, en passant, <strong>de</strong> voir chez le portier <strong>de</strong> M. Gibert quelles sont les heures où on le<br />

trouve sûrement, afin <strong>de</strong> le dire à Stiénon.<br />

Si, pendant que vous serez dans ce quartier, vous voulez bien entrer rue Neuve<br />

Guillemin, 23, (au 3 e , petite porte à gauche), chez la pauvre famille Césard dont je vous<br />

parlais hier au soir, jʹaurais un renseignement à prendre en ce qui la concerne: cʹest <strong>de</strong> sa‐<br />

voir si une place <strong>de</strong> jardinier que je lui avais proposée a pu convenir à ces braves gens. Ce‐<br />

la vous donnera occasion <strong>de</strong> voir leur intérieur et <strong>de</strong> juger si vos visites pourraient leur<br />

faire un peu <strong>de</strong> bien. Dans ce cas, nous pourrions, pour ne pas trop vous charger, confier à<br />

quelquʹautre membre lʹune <strong>de</strong> vos familles.<br />

A vous bien cordialement<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je mets aussi sous cette enveloppe le discours <strong>de</strong> M. Molé 109 , je serai bien aise quʹil<br />

ne se per<strong>de</strong> pas, bien quʹon peut, après tout, le remplacer aisément.<br />

99‐1 à M. Bailly<br />

Deman<strong>de</strong> quʹil lui prête la Vie <strong>de</strong> saint Vincent <strong>de</strong> Paul, par Abelly , en abrégé.<br />

Paris 28 juillet 1843<br />

Monsieur et ami,<br />

La Vie <strong>de</strong> St Vincent par Abelly, toute excellente quʹelle soit, ayant <strong>de</strong>s longueurs qui<br />

en ren<strong>de</strong>nt la lecture difficile dans nos Conférences, nous aurions le désir, à St‐Sulpice, <strong>de</strong><br />

noter sur un exemplaire les passages ou parties qui peuvent sans inconvénient être omis.<br />

Lʹabrégé fait par Abelly lui‐même, et dont vous avez un exemplaire assez rare, pouvant<br />

109 Louis, comte <strong>de</strong> Molé, (1781-1855), homme politique français. Premier ministre <strong>de</strong> 1836 à 1839. Lorsqu'en 1845, A. <strong>de</strong> Melun<br />

lancera sa revue intitulée Les Annales <strong>de</strong> la Charité, <strong>de</strong>stinée à "éclairer le zèle <strong>de</strong> tous les hommes charitables <strong>de</strong> France", le<br />

comte <strong>de</strong> Molé en sera l'un <strong>de</strong>s membres fondateurs.<br />

138


eaucoup nous servir pour ce petit travail, je vous prie dʹavoir la bonté <strong>de</strong> nous le prêter<br />

pour quelques jours.<br />

Lʹun <strong>de</strong> nos confrères qui remet ce mot chez vous reviendra dans la journée pour<br />

prendre le volume chez votre portier, si vous avez la bonté <strong>de</strong> nous le confier.<br />

Je vous en remercie dʹavance et vous exprime, comme toujours, mes sentiments<br />

respectueux et dévoués.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

100 à M. Levassor<br />

Démarches pour une statue commandée à Paris. Placement dʹun jeune apprenti‐tailleur chez un patron. De‐<br />

man<strong>de</strong> dʹai<strong>de</strong> pour un jeune pharmacien.<br />

Paris, le 14 août 1843<br />

Mon bien cher frère,<br />

Jʹaurais été heureux en vous écrivant la veille <strong>de</strong> la fête <strong>de</strong> notre très aimée Marie,<br />

<strong>de</strong> vous annoncer que le groupe, si longtemps désiré, est enfin en chemin pour sa <strong>de</strong>stina‐<br />

tion, mais je nʹai rien <strong>de</strong> pareil à vous apprendre et cʹest à mon grand regret, comme vous<br />

pouvez croire. M. Dubucoy est toujours dans la même disposition, mais sans quʹaucun ré‐<br />

sultat sʹen suive; la <strong>de</strong>rnière fois que je suis allé pour le voir il était parti pour Eu; il nʹen<br />

doit revenir que dans six semaines, et, à son retour, je ferai une nouvelle tentative.<br />

Je me suis occupé aussi, cher ami, dʹun autre objet que vous mʹaviez recommandé<br />

par votre <strong>de</strong>rnière lettre qui mʹa été remise, comme vous ne lʹavez pas oublié, sans doute,<br />

par un jeune frère sorti pour cause <strong>de</strong> santé <strong>de</strong> sa Communauté et qui désirait se placer ici<br />

pour se perfectionner dans lʹétat <strong>de</strong> tailleur. Je suis parvenu à le faire entrer chez un excel‐<br />

lent maître, bon chrétien, qui appartient à la Conférence St‐Sulpice. Mais, le pauvre enfant,<br />

malgré sa bonne volonté, va si peu vite et est encore si mal habile quʹil ne peut gagner que<br />

25 sous par jour. Cʹest trop peu pour vivre ici, vous le savez; se loger, nourrir, blanchir, et<br />

vêtir exigent, même pour le pauvre enfant, plus que cela. Le pauvre jeune homme souffre<br />

donc beaucoup dans ces premiers temps. Nous lʹavons aidé quelque peu et nous continue‐<br />

rons à le faire, mais nos ressources sont modiques, vous le savez. Il serait donc bien essen‐<br />

tiel que vous puissiez obtenir autour <strong>de</strong> vous, <strong>de</strong> ceux qui sʹintéressent à lui, quelques peti‐<br />

tes ressources qui lui permettraient dʹattendre le moment, dʹailleurs assez prochain, (3 ou 4<br />

mois peut‐être) où il pourra entièrement subvenir à ses besoins. Il paraît bon et pieux, son<br />

patron en est content; ce serait vraiment une bonne œuvre que <strong>de</strong> lʹai<strong>de</strong>r à franchir le mau‐<br />

vais pas.<br />

Un bon jeune homme nommé Mélion, qui appartient à la Conférence St‐Sulpice,<br />

vient <strong>de</strong> se rendre à Chartres où il doit diriger prochainement une pharmacie; jʹaurais aimé<br />

à vous le recomman<strong>de</strong>r, mais je nʹai pas sous les yeux le nom du pharmacien quʹil va sup‐<br />

pléer. Ce bon enfant est chrétien, cela va sans dire et il aime les pauvres, il concourrait <strong>avec</strong><br />

plaisir dans la Société <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul <strong>de</strong> Chartres; je vous prie <strong>de</strong> le mettre en rap‐<br />

port <strong>avec</strong> nos amis et aussi <strong>de</strong> veiller un peu sur lui spirituellement.<br />

Bien quʹil soit bon pratiquant, je ne sais pas absolument si les préoccupations dʹune<br />

position assez pénible ne lui auraient pas, ces temps <strong>de</strong>rniers, fait un peu négliger ses <strong>de</strong>‐<br />

voirs essentiels. Un pareil soin va bien à votre zèle, cher ami, une pauvre chère âme à en‐<br />

courager, à réchauffer un peu, cʹest votre œuvre <strong>de</strong> tous les jours; en mʹécrivant, ne man‐<br />

139


quez pas <strong>de</strong> mʹen dire quelques mots; faites aussi<br />

<strong>de</strong> votre mieux pour le jeune tailleur, enfin priez<br />

un peu pour votre affectionné frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. M me Delatre va assez bien relativement.<br />

Le nom <strong>de</strong> ce pharmacien est Gilbert Barrière;<br />

vous auriez, cher ami, la bonté dʹécrire un mot à<br />

M. Mélion pour lʹavertir que vous le recevriez vo‐<br />

lontiers, si cela ne vous dérange pas trop.<br />

101 à M. <strong>de</strong> Montrond<br />

A son ami qui vient <strong>de</strong> perdre son enfant, il exprime sa compassion<br />

en <strong>de</strong>s termes empreints dʹélévation chrétienne et dʹaffectueuse dé‐<br />

licatesse. Dévotion à la Vierge Noire, consolatrice <strong>de</strong>s affligés.<br />

Paris, 9 septembre 1843<br />

Mon bien cher frère et ami,<br />

Ce nʹest pas pour vous consoler que je vous<br />

écris, mais pour entrer <strong>de</strong> toute mon âme dans<br />

votre peine et vous dire combien nous en sommes tous ici profondément pénétrés.<br />

Je nʹai pas souvenir quʹaucun événement mʹait plus ému et affligé que celui‐ci 110 car,<br />

vous connaissant si intimement, vous et votre chère femme, je suis <strong>de</strong>scendu, à l’instant,<br />

dans votre cœur et jʹai vu combien sa plaie <strong>de</strong>vait être douloureuse.<br />

Que vous dire donc, bien cher ami, et quelle parole trouver? Aucune, sinon que<br />

Dieu est bon, quʹil vous aime, quʹil lʹa voulu ainsi, quʹil faut bénir son saint nom. Plus tard<br />

il vous dira pourquoi. Maintenant, cʹest lʹheure <strong>de</strong> souffrir; inclinez donc votre tête et pleu‐<br />

rez sans murmurer.<br />

Cʹest hier, jour <strong>de</strong> la Nativité <strong>de</strong> Notre‐Dame, que cette triste nouvelle mʹa été don‐<br />

née; tout aussitôt je suis allé à la chapelle <strong>de</strong> St‐Thomas‐<strong>de</strong>‐Villeneuve 111 et là, jʹai supplié<br />

<strong>avec</strong> instance la consolatrice <strong>de</strong>s affligés <strong>de</strong> ne pas vous abandonner dans une si gran<strong>de</strong><br />

angoisse. Elle seule, cher ami, connaissant par elle‐même une pareille douleur, pourra<br />

vous consoler et toucher votre pauvre cœur, sans le froisser. Souvenez‐vous, en ce mo‐<br />

ment, <strong>de</strong> votre tendre confiance pour Elle et abandonnez‐vous lʹun et lʹautre entre ses<br />

mains. Oh! si sa bonté vous entrʹouvrant le ciel, vous faisait voir les régions <strong>de</strong> délices où<br />

repose la chère âme envolée, peut‐être, cher ami, nʹauriez‐vous pas le courage <strong>de</strong> la rappe‐<br />

ler à notre triste exil! Aspirez donc plutôt à lʹheure où vous la rejoindrez vous‐même; cʹest<br />

au plus heureux à tirer les autres à soi.<br />

110 M. <strong>de</strong> Montrond vient <strong>de</strong> perdre son premier enfant. Coïnci<strong>de</strong>nce dans le malheur: c'est aussi à cette époque que, le 4 septembre<br />

1843, en Normandie, la barque qui transporte, entre Villequier et Cau<strong>de</strong>bec-en-Caux, la fille <strong>de</strong> V. Hugo, Léopoldine et son mari,<br />

chavire brusquement, noyant les <strong>de</strong>ux jeunes gens. Hugo apprend la nouvelle le 9, jour où MLP. écrit sa belle lettre à M. <strong>de</strong> Montrond.<br />

111 Le couvent <strong>de</strong> la Communauté <strong>de</strong>s Filles <strong>de</strong> St-Thomas-<strong>de</strong> Villeneuve (aujourd'hui à Neuilly-sur-Seine) était situé alors aux 25-27<br />

<strong>de</strong> la rue <strong>de</strong> Sèvres, près <strong>de</strong> la rue du Cherche-Midi. La chapelle <strong>de</strong> ce couvent était le sanctuaire privilégié <strong>de</strong> MLP. Il aimait à<br />

prier <strong>de</strong>vant la célèbre Vierge Noire, qui, on le sait, avait accordé à saint François <strong>de</strong> Sales une grâce qui lui fit retrouver la paix du<br />

cœur.<br />

140


Sa part est la meilleure: il va vous préparer la vôtre parmi les Anges et les Saints. Sʹil<br />

fut allé plus avant dans la vie, il en eût connu les amertumes et aussi les fautes, et mainte‐<br />

nant quʹil vous est ravi, vous nʹoseriez penser à lui sans inquiétu<strong>de</strong>. Mais il est resté dans<br />

lʹinnocence du Baptême: doux et pur esprit, il est <strong>avec</strong> les Vierges à la suite <strong>de</strong> lʹAgneau:<br />

vous pouvez le contempler par la foi, lʹinvoquer et unir votre âme à la sienne dans le sein<br />

du divin amour.<br />

Oh! tenez ainsi vos yeux en haut, cher ami, et vous ne pleurerez plus; allez où cette<br />

douce voix vous appelle et vous oublierez les douleurs <strong>de</strong> la terre.<br />

Les voies du Seigneur sont merveilleuses. Les pères, ici‐bas, soutiennent les pas <strong>de</strong><br />

leurs enfants nouveau‐nés; mais, dans le ciel, où lʹinnocence est la seule puissance, les en‐<br />

fants gui<strong>de</strong>nt leurs pères et leur ouvrent le chemin. Votre âme si pieuse et si tendrement<br />

aimante, cher ami, allait souvent vers les choses dʹen haut. Maintenant je me figure que<br />

toutes vos pensées et vos aspirations se tourneront par là; et si cet état <strong>de</strong>vient habituel, si<br />

votre vie sʹécoule ainsi <strong>avec</strong> Dieu et <strong>avec</strong> les anges, pourriez‐vous vous plaindre encore,<br />

puisque votre cher ange à vous est là aussi, et que vous ne le quitterez point!<br />

Ce sont là les vœux que mon cœur <strong>de</strong> frère et dʹami forme pour vous, et cʹest ce que<br />

je vais <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r tous les jours à J. et M., fils et mère aussi, qui se sont séparés ici‐bas aussi,<br />

mais dont les âmes sont restées incessamment unies au sein <strong>de</strong> Dieu.<br />

Adieu, bien cher ami, je vous embrasse bien tendrement.<br />

Votre bien dévoué en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

101‐1 à M. Bailly<br />

Deman<strong>de</strong> dʹai<strong>de</strong> pour un ancien confrère <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> St‐Vt‐<strong>de</strong>‐Paul.<br />

Paris 14 septembre 1843<br />

Monsieur et ami,<br />

M. Cahen dʹIngevillers, qui a appartenu à la Conférence St‐Thomas‐dʹAquin, se<br />

trouve présentement dans une position si pénible quʹun peu dʹai<strong>de</strong> immédiat lui serait,<br />

dit‐il, indispensable. M. <strong>de</strong> Maisonneuve, député, promet, à ce quʹil paraît, <strong>de</strong> le faire en‐<br />

trer au mois <strong>de</strong> novembre, au Ministère du Commerce, mais jusque là, il manque du né‐<br />

cessaire.<br />

Je nʹai pas lʹhonneur <strong>de</strong> connaître particulièrement M. dʹIngevillers mais il me paraît<br />

dans une si gran<strong>de</strong> affliction que je ne puis me refuser à vous le recomman<strong>de</strong>r en vous<br />

priant dʹexaminer si notre Société, en pareil cas, nʹa pas quelque moyen dʹêtre utile à ceux<br />

qui lui ont appartenu.<br />

Agréez, Monsieur et ami, lʹexpression accoutumée <strong>de</strong> mon dévouement respec‐<br />

tueux.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

102 à M. Levassor<br />

Neuvaine au Cœur <strong>de</strong> Marie pour une conversion.<br />

141<br />

Paris, 23 septembre 1843


Cher frère et ami,<br />

Je commence aujourdʹhui une neuvaine au Saint Cœur <strong>de</strong> Marie pour obtenir une<br />

conversion <strong>de</strong>puis longtemps sollicitée par votre ami.<br />

Ayez la charité dʹunir vos prières aux nôtres. Marie à qui, dès longtemps, jʹai confié<br />

cette chère âme, nous obtiendra enfin son retour. Je compte beaucoup, cher ami, sur vos<br />

saints sacrifices, daignez y faire une part à cette intention; les prières <strong>de</strong> la neuvaine sont<br />

seulement: Ave Maria et Memorare.<br />

A vous dans les dévoués cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

103 à M. Maignen<br />

Sʹenquiert dʹune démarche confiée à M. Maignen.<br />

Paris, samedi 11 octobre 1843<br />

Mon cher confrère,<br />

Ma femme me prie <strong>de</strong> vous dire que si vous nʹavez point encore proposé Melle Ca‐<br />

pron chez M. Guip ou si lʹon fait difficulté dʹattendre son retour, elle se déterminera à se<br />

présenter elle‐même.<br />

A vous bien cordialement<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

104 à M. Levassor<br />

Recommandation dʹun jeune homme susceptible dʹai<strong>de</strong>r M. lʹabbé Levassor.<br />

Paris, 12 octobre 1843<br />

Mon bien cher frère,<br />

Voici112 un bon jeune homme qui, je crois, vous conviendrait; il est pieux, <strong>de</strong> bon ca‐<br />

ractère et assez instruit pour remplir les fonctions que vous lui <strong>de</strong>stineriez. Il nʹest pas par‐<br />

faitement décidé à quitter Paris; mais je pense que, voyant comme vous êtes bon, il désire‐<br />

ra vous accompagner.<br />

Votre frère dévoué en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹirai vous voir au plus tôt.<br />

105 à M. Pavie<br />

Leur amitié sʹentretient par la correspondance. MLP. ne peut guère se déplacer. Nouvelles <strong>de</strong> Th. Pavie et <strong>de</strong> Ga‐<br />

vard. Nostalgie <strong>de</strong>s rencontres dʹautrefois.<br />

Paris, 28 octobre 1843<br />

Cher ami,<br />

Adrien, qui repart pour votre ville dʹAngers, veut bien se charger <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux lignes<br />

que je vous fais en hâte, afin <strong>de</strong> ne pas perdre cette bonne occasion. Vous aurez ainsi <strong>de</strong><br />

112 Le jeune homme s'est présenté lui-même, muni <strong>de</strong> la lettre <strong>de</strong> MLP. à M. Levassor qui rési<strong>de</strong> au Séminaire St-Sulpice, 9, place <strong>de</strong><br />

l'église du même nom. C'est là que MLP. se propose d'aller rendre visite à son ami.<br />

142


mes nouvelles et ma lettre sollicitera <strong>de</strong> vous une réponse qui me sera bien précieuse, cher<br />

ami. Car, <strong>de</strong>puis longtemps vous ne mʹavez rien dit; après un si grand silence, il me sem‐<br />

ble quʹil ne faut lʹinterrompre que pour un cas important et lʹon attend toujours. Je vous en<br />

prie, cher Victor, nʹatten<strong>de</strong>z pas du tout; les choses les plus simples seront dʹun haut inté‐<br />

rêt pour moi si elles vous touchent et mʹentretiennent <strong>de</strong> vous et <strong>de</strong> votre cher entourage.<br />

Jʹai gardé sur ma table votre <strong>de</strong>rnière lettre, parce quʹelle contient les noms <strong>de</strong> vos trois pe‐<br />

tits enfants <strong>avec</strong> quelques mots <strong>de</strong> détail sur chacun. Quand ma mémoire fait défaut, jʹy<br />

recours et retrouve la petite généalogie. Cela me charme, cher ami, et me représente ces<br />

trois petits anges <strong>avec</strong> leur mère et vous; jʹen fais un tableau délicieux et jʹai soin <strong>de</strong> mʹy<br />

ménager à moi aussi, dans un coin, quelque place.<br />

Il me semble quʹà la fin, <strong>de</strong>s moments favorables viendront où je pourrai mʹéchap‐<br />

per moins difficilement et vous aller voir un peu à loisir. Jusquʹici rien nʹy paraît, car je suis<br />

tellement enchaîné et ma bonne mère elle‐même mʹappelle chaque année, sans que je<br />

puisse accourir comme mon cœur le voudrait. En attendant, vous qui avez le pied plus<br />

leste, moins dʹentraves aussi, venez, cher Victor. On vous espère, me dit‐on, pour janvier.<br />

Ce sera un beau commencement dʹannée et je me réjouirai bien, dans ce temps, dʹembras‐<br />

ser, <strong>de</strong> serrer fort et cordialement un frère tendrement aimé.<br />

Je nʹai point revu Théodore <strong>de</strong>puis son retour; les occasions <strong>de</strong> rapprochement<br />

manquent entre nous. Mais, je me sens la même affection pour lui, sans en rien laisser, ni<br />

au temps, ni au chemin. Je compte sur lui aussi et je me tiens ainsi le cœur en état. Jʹen<br />

pourrais dire autant pour notre bon et toujours bon Gavard. Je lʹaperçois, plutôt que je ne<br />

le vois; nous nous serrons la main à en crier sous les arca<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Rivoli, parfois même nous<br />

traversons ensemble les Tuileries, mais les belles promena<strong>de</strong>s dʹautrefois, taillées en plein<br />

dans <strong>de</strong> longues journées, elles ne reviennent plus, il nʹen reste quʹun bon souvenir.<br />

Cher ami, parlez‐moi <strong>de</strong> tout cela <strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> regret. Jʹaime à penser que vous<br />

les repassez aussi dans votre mémoire et que vos vieux amis <strong>de</strong> ce temps‐là vous man‐<br />

quent comme à nous quelquefois.<br />

Faites mille tendresses respectueuses à votre bon père, <strong>de</strong>s affections bien dévouées<br />

à votre chère amie et quelques caresses aux petits. Tout cela pour moi qui aime ce cher<br />

mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> tout mon cœur.<br />

Votre frère et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Sans oublier les S t Vincent.<br />

105‐1 à M. Bailly<br />

Le Docteur Courtois, confrère, cherche un remplaçant.<br />

[1843]<br />

Monsieur et ami,<br />

M. Courtois, ancien membre <strong>de</strong> la Conférence St‐Etienne‐du‐Mont, maintenant éta‐<br />

bli à Yvetot où il sʹest fait, je crois, une assez bonne clientèle comme mé<strong>de</strong>cin, mʹécrit que<br />

sa santé sʹest altérée et quʹon lʹoblige à quitter la Normandie pour se rendre dans un climat<br />

plus doux. Il désirerait quʹun jeune mé<strong>de</strong>cin, un membre <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul sʹil se peut,<br />

mais au moins un homme religieux, veuille le remplacer à Yvetot.<br />

143


Il lui cé<strong>de</strong>rait clientèle, mobilier, maison, etc., aux conditions les plus favorables et<br />

se réduirait même, je crois, pour toute in<strong>de</strong>mnité à <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r un prix très modique <strong>de</strong> ce<br />

quʹil livrerait en nature, nʹexigeant rien pour la clientèle. On pourrait, du reste, sʹentendre<br />

à cet égard plus précisément <strong>avec</strong> lʹabbé Courtois, son frère, rue S t Guillaume, 24, mais il<br />

recomman<strong>de</strong> expressément que son nom et celui <strong>de</strong> la localité quʹil habite, ne soient indi‐<br />

qués quʹaprès <strong>de</strong> premières et favorables ouvertures laissant entrevoir une conclusion.<br />

En vous écrivant à ce sujet, je remplis le vœu <strong>de</strong> M. Courtois qui se rappelle bien<br />

particulièrement à votre bon souvenir.<br />

Croyez, je vous prie, Monsieur et ami, à tous les sentiments <strong>de</strong> mon sincère et res‐<br />

pectueux attachement.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

105‐2 à M. Bailly<br />

Deman<strong>de</strong>, <strong>avec</strong> dʹautres Prési<strong>de</strong>nts, pour changer <strong>de</strong> salle dʹassemblée générale.<br />

Paris 5 décembre 1843<br />

Monsieur et ami,<br />

Un nombre considérable <strong>de</strong> nos confrères mʹexpriment un vif regret sur le choix qui<br />

a été fait du local <strong>de</strong> lʹInstitut pour notre réunion générale; ils font observer, <strong>avec</strong> raison,<br />

que cette première assemblée est ordinairement la plus solennelle et la plus nombreuse <strong>de</strong><br />

toutes, quʹil y a grave inconvénient à priver les <strong>de</strong>ux tiers <strong>de</strong> la Société dʹy assister et <strong>de</strong><br />

convoquer 1200 personnes dans un local qui nʹen peut recevoir que 250.<br />

Trois prési<strong>de</strong>nts se joignent à moi pour appuyer cette remarque, et <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt <strong>avec</strong><br />

instance quʹon choisisse <strong>de</strong> préférence la salle <strong>de</strong>s ouvriers à St‐Sulpice si lʹon ne peut<br />

trouver ailleurs un lieu dʹassemblée également commo<strong>de</strong> et convenable.<br />

Cette salle parfaitement décente et <strong>de</strong> tout point disposée pour une semblable ré‐<br />

union, contient 800 personnes; quoiquʹelle touche à lʹéglise, elle nʹa rien dʹune chapelle, ni<br />

par sa forme, ni par son usage habituel; enfin elle est dès ce moment à notre disposition et,<br />

sans aucune dépense, nous pourrions lʹobtenir et nous y assembler.<br />

Des raisons <strong>de</strong> délicatesse mal entendue mʹont empêché, dans la séance <strong>de</strong>rnière du<br />

Conseil, dʹinsister sur cette proposition, mais cʹétait là une considération sans valeur que<br />

jʹeusse dû sacrifier et que je sacrifie ici sans peine en mʹunissant à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> nos<br />

confrères.<br />

Nos amis <strong>de</strong> lʹInstitut catholique ne sauraient mal prendre, je le pense, ce change‐<br />

ment <strong>de</strong> résolution; les raisons qui le détermineraient sont trop évi<strong>de</strong>ntes pour ne les pas<br />

frapper les premiers et je ne mets pas en doute que sans aucun froissement ni dʹune part ni<br />

d’une autre, ils nʹentrassent dans nos vues et ne nous gardassent leur bonne volonté pour<br />

toute autre occasion où elle pourrait mieux nous servir.<br />

Je désire bien, Monsieur et ami, que cette réclamation ne soit pas trop tardive, elle<br />

prouve que nos confrères attachent une véritable importance à nos assemblées générales et<br />

je crois que, sur ce point, nous <strong>de</strong>vons partager leur sentiment.<br />

Veuillez croire, Monsieur et ami, aux assurances accoutumées <strong>de</strong> mon respectueux<br />

dévouement.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

144


105‐3 à M. Bailly<br />

MLP. lʹincite à quitter la prési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> la Société. Malaise dans la Société.<br />

Paris 5 janvier [1844]<br />

Monsieur et ami,<br />

Je nʹai pu prendre sur moi, hier au soir, <strong>de</strong> parler, par manque <strong>de</strong> force peut‐être,<br />

mais surtout dans la crainte dʹaggraver ce que la situation pouvait avoir <strong>de</strong> pénible pour<br />

vous. Cependant, dans lʹintérêt <strong>de</strong> notre chère Société, et dans le vôtre, que je nʹen sépare<br />

point, je me crois obligé <strong>de</strong> vous dire que mon avis ne diffère pas <strong>de</strong> celui <strong>de</strong> tous les au‐<br />

tres membres du Conseil. Nous sommes dans un état <strong>de</strong> malaise, <strong>de</strong> défiance, <strong>de</strong> découra‐<br />

gement qui affaiblit les liens déjà si frêles <strong>de</strong> notre unité et qui ne peut manquer dʹamener<br />

bientôt <strong>de</strong> tristes déchirements.<br />

Ne serait‐il pas bien regrettable, quʹà tort ou à raison, une pareille affliction pût<br />

vous être imputée et ne serait‐ce pas compromettre tout le bien que vous avez fait?<br />

En quittant à temps la direction <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul, vous emporte‐<br />

rez maintenant le regret <strong>de</strong> tous ses membres et la conscience <strong>de</strong> lʹavoir généreusement<br />

servie; plus tard, après quelques débats fâcheux quʹon doit craindre, on méconnaîtra peut‐<br />

être les mérites bien réels dʹune longue carrière <strong>de</strong> bonnes œuvres et vous‐même viendrez<br />

à les mettre en doute. Jʹose vous conjurer, Monsieur et ami, <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r intact un bien si chè‐<br />

rement acquis, et <strong>de</strong> rester, aux yeux <strong>de</strong> Dieu et à ceux <strong>de</strong>s hommes, le bienfaiteur <strong>de</strong> notre<br />

Société.<br />

En déposant un far<strong>de</strong>au qui ne fait quʹajouter à vos peines, vous acquérrez dʹail‐<br />

leurs plus <strong>de</strong> liberté <strong>de</strong> cœur et dʹesprit; vos affaires auront alors tous vos soins et votre<br />

persévérance si courageuse rendra à votre famille, <strong>avec</strong> le repos, lʹétat meilleur que vous<br />

ambitionniez pour elle.<br />

Je désire bien ar<strong>de</strong>mment, Monsieur et ami, que ces quelques mots nʹaient rien qui<br />

vous afflige et que vous voyiez dans mes instances ce quʹelles sont réellement: un nouveau<br />

témoignage <strong>de</strong> mon attachement sincère et <strong>de</strong> mon respectueux dévouement.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

106 à M. Maignen<br />

Soin <strong>de</strong>s pauvres. Remerciements pour sa charité.<br />

Mercredi matin [24 janvier 1844]<br />

Mon cher confrère,<br />

Si vous aviez, par grand hasard, la pensée <strong>de</strong> venir au <strong>de</strong>vant <strong>de</strong> moi aujourdʹhui, je<br />

vous prie <strong>de</strong> ne pas prendre cette peine, je serai obligé <strong>de</strong> quitter mon bureau avant lʹheure<br />

ordinaire.<br />

Comme le temps commence à nous gagner et que je craignais <strong>de</strong> vous fatiguer après<br />

votre indisposition, je suis allé hier au quai pour lʹachat <strong>de</strong>s médailles et je vais tâcher <strong>de</strong><br />

conclure aujourdʹhui le marché, je vous serais donc obligé <strong>de</strong> ne pas vous en occuper <strong>de</strong><br />

votre côté.<br />

Je compte toujours sur votre bonne volonté pour la préparation <strong>de</strong>s billets et je joins<br />

ici les cartes qui nous ont été rendues après la séance. Je pense quʹil sera bon <strong>de</strong> les recom‐<br />

pléter et dʹen faire un cent <strong>de</strong> plus, afin <strong>de</strong> contenter tous nos pauvres gens.<br />

145


Je vous remercie <strong>de</strong> nouveau, en leur nom, <strong>de</strong>s peines que vous avez la charité <strong>de</strong><br />

prendre pour eux, et souhaite <strong>de</strong> toute mon âme que Dieu vous les paye au centuple.<br />

A vous comme toujours, bien cordialement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

107 à M. Maignen<br />

Il fixe un ren<strong>de</strong>z‐vous pour parler <strong>de</strong> la réunion <strong>de</strong>s pauvres.<br />

Mercredi [24 janvier 1844]<br />

Demain jeudi, à 4h. ¼ , venez si vous pouvez à St‐Thomas‐dʹAquin, en sortant <strong>de</strong><br />

votre bureau 113 , nous causerons <strong>de</strong> la réunion <strong>de</strong>s pauvres. Ne vous dérangez nullement,<br />

dʹailleurs, si vous ne pouvez venir; je vous verrai dans un autre moment.<br />

A vous<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

108 à M. Maignen<br />

Un <strong>de</strong> leurs ren<strong>de</strong>z‐vous doit être avancé.<br />

Vendredi matin [26 janvier 1844]<br />

Cher confrère,<br />

Jʹavais oublié que <strong>de</strong>main samedi, jʹaurai un ren<strong>de</strong>z‐vous au faubourg St‐Germain à<br />

4h. 1/2 . Cʹest donc aujourdʹhui même que jʹirai chez M. Falandry, et non pas <strong>de</strong>main. Jʹai, du<br />

reste, un véritable remords <strong>de</strong> vous faire courir si loin, sans utilité bien réelle pour nos<br />

œuvres, je crois donc quʹil vaut mieux que je renonce à cette satisfaction. Ne venez pas, je<br />

vous en prie, pour peu que vous ayez <strong>de</strong> fatigue ou dʹoccupation, je ne vous en saurai pas<br />

moins gré <strong>de</strong> votre bonne volonté.<br />

Passé 4h.25, je ne vous attendrai plus et partirai <strong>de</strong> la place Vendôme.<br />

A vous toujours en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

109 à M. Maignen<br />

Invitation à une distribution <strong>de</strong> médailles à St‐Sulpice. Envoi dʹun livre quʹil lui recomman<strong>de</strong> <strong>de</strong> lire ʺen bonne<br />

et simple dispositionʺ.<br />

Paris, 26 janvier 1844<br />

Mon cher confrère,<br />

Si vous désirez assister dimanche prochain à la gran<strong>de</strong> réunion <strong>de</strong> la distribution<br />

<strong>de</strong>s médailles à St‐Sulpice, je ferai en sorte <strong>de</strong> vous avoir un billet pour les places réser‐<br />

vées; mais il faudra me venir prendre <strong>de</strong> bonne heure (à 6h.½ ) car il y aura presse.<br />

113 Après avoir travaillé dans l'administration <strong>de</strong>s chemins <strong>de</strong> fer <strong>de</strong> Rouen, M. Maignen était entré alors au ministère <strong>de</strong> la Guerre,<br />

rue St-Dominique. L'Eglise St-Thomas-d'Aquin en était tout proche.<br />

146


Je vous envoie le livre dont je vous ai parlé; je serais bien surpris si vous ne goûtiez<br />

pas tout 114 ce quʹil a dʹaimable et <strong>de</strong> soli<strong>de</strong> à la fois. Vous remarquerez, en quelques chapi‐<br />

tres, une certaine naïveté <strong>de</strong> langage que nos mœurs ne comportent plus; mais, vous avez<br />

un trop bon esprit pour quʹil puisse vous en rester aucune mau‐<br />

vaise impression. Lisez‐le, cher ami, en bonne et simple disposi‐<br />

tion et vous en tirerez, jʹen suis sûr, beaucoup <strong>de</strong> fruit.<br />

Adieu, à vous bien cordialement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

110 à M. Maignen<br />

Ren<strong>de</strong>z‐vous à la messe paroissiale aux Missions Etrangères.<br />

Samedi matin [Carême 1844]<br />

Mon cher confrère,<br />

La première messe paroissiale115 aux Missions sera <strong>de</strong>main à 7h., à cause du Ca‐<br />

rême; ceux qui voudront sʹy trouver <strong>de</strong>vront donc sʹéveiller un peu matin et surtout se le‐<br />

ver dès quʹils seront éveillés. Je ferai en sorte dʹêtre <strong>de</strong> ce nombre; tâchez <strong>de</strong> venir égale‐<br />

ment.<br />

A vous bien affectueusement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je vous serai obligé <strong>de</strong> rendre bientôt à M. <strong>de</strong> Montrond les feuilletons <strong>de</strong> Charité<br />

mène à Dieu.<br />

111 à M. Maignen<br />

Communication dʹouvrages dʹapologie. Ne pas lire celui sur saint François dʹAssise. Dieu gui<strong>de</strong> lui‐même les<br />

âmes.<br />

Paris, 19 avril 1844<br />

Je vous remets ci‐joint <strong>de</strong>ux petits ouvrages <strong>de</strong> doctrine qui, je lʹespère, vous agrée‐<br />

ront. Cʹest toutefois <strong>de</strong> lʹapologie plutôt que <strong>de</strong> la doctrine proprement dite; si cʹétait en ce<br />

114 "…Un <strong>de</strong> ces petits ouvrages, très dédaignés dans le mon<strong>de</strong> sous le nom <strong>de</strong> bons livres, dont le mauvais style et l'ennui m'avait<br />

toujours inspiré un profond dégoût (…) je me décidai à le parcourir; mais quand j'eus commencé sa lecture, je la continuai et allai<br />

jusqu'au bout. C'était en effet un <strong>de</strong>s meilleurs ouvrages <strong>de</strong> réfutation populaire qui existassent à l'époque". VLP., I, p.98.<br />

115 "Connaissant mon inconstance, MLP. me proposa d'assister à la messe dite le premier dimanche du mois pour la Conférence <strong>de</strong><br />

St-Vt-<strong>de</strong>-Paul à l'église <strong>de</strong>s Missions et d'y faire ensemble la sainte communion. C'était le meilleur moyen d'assurer ma régularité<br />

dans l'accomplissement <strong>de</strong> mes <strong>de</strong>voirs <strong>de</strong> piété." Notes <strong>de</strong> M. Maignen, VLP, p.116. en ce Carême 1844, comme l'année précé<strong>de</strong>nte,<br />

il y aura foule à N.D. <strong>de</strong> Paris, (cf. lettre 98 à M. Levassor, et lettre d'Ozanam, 8 avril 1844, 535 à M me Haraten<strong>de</strong>r, t. II., p.<br />

528).<br />

147


<strong>de</strong>rnier sens plus spécialement que vous vous sentiez incliné à porter votre étu<strong>de</strong>, je pour‐<br />

rais aussi vous satisfaire.<br />

Ne tenez aucun compte, je vous prie, <strong>de</strong> mes observations dʹhier sur saint François<br />

dʹAssise; vous avez déjà remarqué que, plus quʹun autre, jʹaime à voir mes sympathies<br />

partagées et quʹà tort, souvent, je cherche à les inspirer aux autres. Laissez donc ce livre<br />

qui pourrait ne vous causer que <strong>de</strong> lʹennui et suivez votre penchant qui nʹest assurément<br />

pas un mauvais gui<strong>de</strong> en cette occasion. Cʹest surtout dʹinstruction soli<strong>de</strong> que vous avez<br />

besoin et vous ne la trouveriez que sous une forme peu accessible dans saint François<br />

dʹAssise.<br />

Le plus ordinairement Dieu gui<strong>de</strong> lui‐même les âmes pour les éclairer en leur don‐<br />

nant <strong>de</strong> lʹattrait pour les choses qui leur sont le plus essentielles; je crois donc quʹil faut al‐<br />

ler par où il vous pousse: lui seul pénètre bien nos cœurs; lui seul sait les manier et les ins‐<br />

truire, abandonnez‐vous à lui.<br />

Adieu, je nʹirai pas ce soir à lʹexercice <strong>de</strong> la retraite; <strong>de</strong>main, vendredi, peut‐être<br />

vous y trouverai‐je.<br />

A vous bien cordialement in X to .<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

112 à M. Pavie<br />

Sollicitu<strong>de</strong> pour les enfants <strong>de</strong> son ami. Nouvelles <strong>de</strong> sa mère, née Rosalie Duchatard. Difficulté à obtenir un<br />

congé. Il renonce à son voyage à Angers. Décline la proposition dʹêtre parrain.<br />

Paris, le 10 mai 1844<br />

Cher Victor,<br />

Vous avez mille fois raison; personne ne vous aime plus sincèrement que moi et<br />

après votre femme, ne vous est plus proche et plus intimement uni. Tout ce qui ajouterait<br />

quelque sanction nouvelle à ce lien <strong>de</strong> tendre fraternité me serait donc bien doux et répon‐<br />

drait aux plus chers vœux <strong>de</strong> mon cœur. Jʹai vu naître en vous le sentiment qui vous atta‐<br />

che à votre bien‐aimée femme. Jʹai vu votre union se former puis, après avoir partagé votre<br />

attente, jʹai pris part à vos joies, à la naissance <strong>de</strong> vos enfants. Je ne compte pas mʹarrêter<br />

là, je les suivrai <strong>de</strong> lʹœil quand ils vont grandir et, sʹils sʹabattent ici, où tout vient au moins<br />

pour un temps, la surveillance paternelle et maternelle au besoin leur sera rendue, jʹose<br />

vous lʹassurer, dans ma tendre sollicitu<strong>de</strong> pour eux. Jusque là tout va bien et nous sommes<br />

dʹaccord. Quant au reste, nous le sommes encore par le désir commun, mais je ne puis<br />

vous suivre plus loin. Je ne partage pas, en effet, votre confiance dans les bons vouloirs<br />

administratifs et je puis même répondre que toutes ces délicieuses harmonies, suscitées si<br />

profondément au fond <strong>de</strong> mon cœur par votre bonne et amicale lettre seraient ici inenten‐<br />

dues et sans aucun écho.<br />

Il y a <strong>de</strong>ux ans que je nʹai vu ma vieille mère et, quand, au nom <strong>de</strong> ses 82 ans, je <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>rai huit jours pour l’aller voir, à tout hasard, <strong>de</strong> peur que le temps me manque plus<br />

tard pour lʹembrasser une <strong>de</strong>rnière fois, il me faudra <strong>de</strong> longues luttes et <strong>de</strong>s instances per‐<br />

sévérantes, si je veux les obtenir.<br />

Donc, cher ami, à mon grand regret, au grand regret aussi <strong>de</strong> ma femme, à laquelle<br />

ce voyage, <strong>avec</strong> un but si aimable, a souri dès lʹabord, il nʹy faut pas compter. Quand on<br />

me ferait promesse maintenant dʹun congé, je nʹy <strong>de</strong>vrais pas croire davantage. Au mo‐<br />

148


ment <strong>de</strong> lʹexécution, mille raisons péremptoires surgissent, je le sais trop par expérience et,<br />

<strong>de</strong> délai en délai, on mʹamènerai jusquʹen plein hiver, où dʹautres difficultés viennent forti‐<br />

fier les précé<strong>de</strong>ntes.<br />

Le parrainage étant déjà une substitution, je crois que la<br />

transmettre à un remplaçant est en affaiblir encore la puissance et lui<br />

faire perdre presque toute sa valeur. Il faut donc, cher Victor, nous<br />

résigner présentement et attendre un meilleur temps. Le cercle<br />

sʹagrandira encore autour <strong>de</strong> vous et, plus libre alors peut‐être,<br />

jʹaccourrai à votre appel.<br />

Faites partager, je vous prie, à votre chère femme, toutes nos<br />

tendres affections et ne manquez pas dʹapprendre mon nom à vos<br />

petits enfants.<br />

Je les embrasse et vous <strong>avec</strong> eux.<br />

Tout à vous <strong>de</strong> cœur.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Le jeune homme que je vous avais recommandé est placé ici assez convenablement<br />

et marche très bien, comme jʹen avais la confiance. Soyez en paix, cher ami, jʹai pris votre<br />

refus comme il <strong>de</strong>vait être pris. Je vous ai promis <strong>de</strong> ne jamais douter <strong>de</strong> vous, je tiendrai<br />

parole, toujours.<br />

112‐1 au Vice‐Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> S t ‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul 116<br />

M. Gossin remplace M. Bailly à la prési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> la Société.<br />

Paris, 16 juillet 1844<br />

Monsieur et bien cher Vice‐Prési<strong>de</strong>nt,<br />

La Conférence St‐Sulpice tout entière a applaudi au choix qu’a fait le Conseil général <strong>de</strong><br />

M. Gossin pour remplacer M. Bailly en qualité <strong>de</strong> Prési<strong>de</strong>nt général <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> St‐<br />

Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul.<br />

Nous voyons dans cet acte si intéressant pour notre Œuvre un témoignage <strong>de</strong> plus<br />

<strong>de</strong> cette protection manifeste que la Provi<strong>de</strong>nce a constamment accordée à notre Œuvre et<br />

nous y trouvons aussi lʹespérance <strong>de</strong> nouvelles bénédictions pour lʹavenir.<br />

Nous avons prié fidèlement dans toutes nos séances, conformément à lʹinvitation<br />

que vous nous aviez adressée; nos prières ne cesseront quʹau moment où lʹélection <strong>de</strong> no‐<br />

tre nouveau Prési<strong>de</strong>nt sera définitivement consommée.<br />

Veuillez agréer, Monsieur et bien cher Vice‐Prési<strong>de</strong>nt, les nouvelles assurances <strong>de</strong>s<br />

sentiments affectueux <strong>avec</strong> lesquels je suis<br />

Votre très dévoué confrère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la Conférence St‐Sulpice<br />

116 Il pourrait s'agir <strong>de</strong> <strong>Léon</strong> Cornu<strong>de</strong>t (1808-1876), magistrat, ami <strong>de</strong> Montalembert, il avait été nommé vice-prési<strong>de</strong>nt, <strong>avec</strong> F.<br />

Ozanam, le 9 mai 1844. Le nom <strong>de</strong> Jules Gossin (1789-1855), ancien magistrat, fondateur <strong>de</strong> l'œuvre <strong>de</strong> St-François-Régis pour la<br />

régularisation du mariage <strong>de</strong>s pauvres, avait été suggéré par MLP., son confrère à la Conf. St-Sulpice. Prési<strong>de</strong>nt du 23 juillet 1844<br />

au 8 novembre 1847, il sera remplacé par Adolphe Baudon.<br />

149


113 à M. Maignen<br />

Encouragements et témoignages dʹaffection. Discrètement, MLP. exprime lʹespoir <strong>de</strong> le voir consacrer sa vie à<br />

Dieu. Il fortifie son zèle pour lʹœuvre <strong>de</strong> la Sainte‐Famille, quʹil aime ʺparce quʹelle console et édifie les pau‐<br />

vres.ʺ<br />

Duclair, 4 septembre 1844<br />

Cher ami,<br />

Vous ne mʹavez point <strong>de</strong>mandé <strong>de</strong> réponse et je ne vous en ai point promis; pour‐<br />

tant, si jʹen juge par la joie que mʹa causé votre petite épître, quelques lignes <strong>de</strong> souvenir<br />

<strong>de</strong> votre ami absent seront bien accueillies par vous; je vous les écris donc, en hâte, sur<br />

mes genoux, et <strong>avec</strong> grand risque dʹêtre interrompu, car jʹappartiens en ce moment si plei‐<br />

nement à ma famille que ce nʹest quʹà lʹéchappée que je puis dérober un moment.<br />

La lecture <strong>de</strong> votre lettre mʹa pris hier toute ma matinée, un peu parce quʹelle est<br />

griffonnée çà et là, comme à lʹusage, un peu aussi pour une autre raison que je vous laisse<br />

à <strong>de</strong>viner. Lʹimpression qui mʹen reste, cher ami, est douce, consolante, heureuse; je me<br />

sens plus confiant dans le présent, plus rassuré pour lʹavenir. Jʹavais besoin, grand besoin<br />

<strong>de</strong>puis longtemps, <strong>de</strong> quelques détails intimes sur vos dispositions intérieures à lʹégard <strong>de</strong><br />

ceux qui vous aiment; je souffrais souvent et nʹosais guère me plaindre, <strong>de</strong> peur dʹêtre mal<br />

compris; maintenant je serai plus tranquille, car je crois pouvoir répondre <strong>de</strong> vous; je ne<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> pas que vous en répondiez vous‐même, je vous connais bien, vous le savez, et je<br />

ne suis pas aisé à satisfaire en affections; si donc je suis content et me montre sûr <strong>de</strong> lʹave‐<br />

nir, pourquoi ne le seriez‐vous pas aussi? Quant à moi, cher ami, quant à ce quʹil y a dans<br />

lʹintimité <strong>de</strong> mon âme pour vous, je ne vous en dis rien du tout; mes paroles vous font<br />

peur, dites‐vous, mon silence vous persua<strong>de</strong>ra mieux et le temps aussi travaillera pour<br />

moi.<br />

Jʹaurais ici bien <strong>de</strong>s choses à dire, je les refoule et les renfonce au lieu dʹoù elles<br />

voudraient sortir. Vous parlez, cher ami, <strong>de</strong> la fraîcheur, <strong>de</strong> la vivacité <strong>de</strong>s premières affec‐<br />

tions; essayez, par la pensée, <strong>de</strong> comprendre celles quʹon regar<strong>de</strong> comme les <strong>de</strong>rnières;<br />

quand parvenu au sommet <strong>de</strong> la route et les pieds déjà sur le déclin, on jette un coup dʹœil<br />

en arrière. Ah! ne voyez‐vous pas quʹà ce moment dʹadieu et <strong>de</strong> regret, on peut crier à<br />

Dieu, grâce, mon Dieu! encore une douce affection, une seule pour charmer mes <strong>de</strong>rniers<br />

jours, pour que lʹexil soit moins dur et lʹattente plus supportable. Si Dieu nous exauce dans<br />

son indulgente bonté, sʹil nous envoie quelque âme douce, tendre, simple, qui sʹépanche<br />

naïvement en nous et reçoive aussi nos effusions nʹest‐ce pas comme une fleur dʹautomne,<br />

plus suave, plus parfumée que celle du printemps, nʹest‐ce pas tout près du cœur quʹon la<br />

place, dʹautant plus chère et précieuse que lʹhiver vient et que rien ne fleurira plus.<br />

Je nʹinsiste pas, puisque jʹai promis <strong>de</strong> ne rien dire; cʹest du reste à moi plutôt quʹà<br />

vous que je parle ici; je justifie à mes propres yeux un sentiment que jʹai jugé souvent ex‐<br />

cessif et qui le serait, sans doute, sʹil nʹétait offert à Dieu dʹoù il vient, jʹen ai la confiance, et<br />

à qui je le rapporterai tout entier. Que les affections ainsi élevées, cher ami, <strong>de</strong>viennent pu‐<br />

res, saintes, malgré leur force et leur ar<strong>de</strong>ur. Je relisais tout à lʹheure, dans un volume <strong>de</strong><br />

saint Bernard que mʹa prêté mon bon curé, une lettre du saint abbé à Robert, son jeune pa‐<br />

rent qui lʹavait abandonné; jʹai compris un peu et senti aussi ce que vaut et jusquʹoù va en<br />

tendresse, en dévouement, une affection chrétienne. Une pensée consolante aussi mʹest<br />

venue: cʹest que ces tendresses immenses ne sont quʹun faible écoulement <strong>de</strong> lʹinfini amour<br />

<strong>de</strong> notre Dieu qui forme ses disciples et leur apprend à aimer <strong>de</strong> la même façon, sinon au‐<br />

150


tant quʹil aime lui‐même. Si donc nous sentons nos cœurs tiè<strong>de</strong>s et trop peu fervents en<br />

amour, approchons‐nous <strong>de</strong> lui, il sera notre maître et nous saurons aimer.<br />

Voilà trois fois quʹon mʹinterrompt et, comme je lʹavais bien prévu, je ne pourrai<br />

causer intimement ici <strong>avec</strong> vous; je mʹen dédommage bien à certaines heures du jour où je<br />

vais faire <strong>de</strong> longues et solitaires promena<strong>de</strong>s; dès quʹun point <strong>de</strong> vue me plaît, quʹune val‐<br />

lée, un bois, quelque acci<strong>de</strong>nt naturel me semble pittoresque et beau, jʹappelle quelquʹun à<br />

mon ai<strong>de</strong> pour le mieux admirer et pour en jouir <strong>avec</strong> moi; cherchez bien qui cela peut‐<br />

être et nʹallez pas trop loin, cher ami, vous le trouverez sûrement; sinon à quelque pro‐<br />

chaine excursion <strong>avec</strong> vous, un dimanche, je vous le dirai mieux; mais vous ne le croirez<br />

pas, peut‐être, car vous êtes dur à croire, à votre place je croirais tout <strong>de</strong> suite et déjà.<br />

Il faut bien avant <strong>de</strong> finir que je vous remercie <strong>de</strong>s détails si précis et si intéressants<br />

<strong>de</strong> votre lettre sur notre S te ‐Famille 117 ; tout était bien, nos pauvres gens étaient heureux,<br />

que le bon Dieu, notre Père, en soit béni. Vous auriez tort, du reste, <strong>de</strong> penser que cela sʹest<br />

fait sans moi; tous les jours fidèlement, je priais pour cette famille bien aimée; samedi, tout<br />

le jour, jʹai suivi en esprit, vous, cher ami, et tous nos amis dans les courses multipliées que<br />

vous aviez à faire; dimanche, dès le matin, jʹai offert la Messe et la S te Communion pour<br />

cette petite œuvre; enfin, à 2h. 1/4 , à lʹheure où se clôt<br />

la séance, jʹai dit <strong>avec</strong> toute la ferveur <strong>de</strong> mon âme, la<br />

prière <strong>de</strong> la S te ‐Famille pour être <strong>de</strong> coeur <strong>avec</strong> vous.<br />

Vous voyez que je ne restais pas oisif et quʹune petite<br />

part me revient du bien qui sʹest fait. Jʹaime cette<br />

petite œuvre du fond <strong>de</strong> mes entrailles, non pas parce<br />

quʹelle est nôtre, non pas non plus parce que je lui rêve<br />

comme vous <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s <strong>de</strong>stinées, mais parce<br />

quʹelle me semble bien dans lʹesprit chrétien, et parce<br />

quʹelle console et édifie les pauvres auxquels jʹai dès<br />

longtemps et ar<strong>de</strong>mment souhaité <strong>de</strong> consacrer<br />

mon souffle <strong>de</strong> vie. Prions bien pour que Dieu sou‐<br />

tienne, purifie notre zèle et ne laisse pas nos efforts<br />

sans fruits.<br />

Mêlez‐moi un peu à vos prières et bonnes œuvres, cher ami, je le mérite, car vous<br />

avez toujours gran<strong>de</strong> part à mes plus chères pensées; je charge mon bon ange <strong>de</strong> messages<br />

fréquents pour vous et, si vous lʹécoutez bien, sa voix doit aller avant dans votre cœur.<br />

Lundi, comme je vous lʹavais promis, jʹai <strong>de</strong>mandé la messe à lʹintention <strong>de</strong> votre pauvre<br />

père 118 et jʹy ai assisté <strong>avec</strong> toute la ferveur dont jʹétais capable.<br />

117 "Un chef d'œuvre <strong>de</strong> la charité parisienne", (abbé Mullois). MLP. avait remarqué que parmi les œuvres <strong>de</strong> charité existantes, il en<br />

manquait une adonnée aux familles. La Sainte-Famille (d'abord appelée œuvre <strong>de</strong> la Consolation <strong>de</strong>s pauvres) cherchera donc à réunir<br />

"les familles <strong>de</strong> la classe indigente et ouvrière" pour les "relever et les ramener à Dieu et à l'Eglise". Elle naquit dans la paroisse<br />

St-Sulpice au début <strong>de</strong> 1844. Elle réunissait 1200 associés, assistait 300 mala<strong>de</strong>s par an. Un prêtre est attaché exclusivement<br />

aux pauvres <strong>de</strong> la Ste-Famille, le jésuite Louis Millériot, (1800-1881), qui sera pendant 32 ans prêtre-prédicateur. Œuvre <strong>de</strong> prédilection<br />

<strong>de</strong> MLP., elle reflétait bien son esprit et sa charité. On y chantait le fameux cantique <strong>de</strong> Claudius Hébrard: "Oh, qu'il est<br />

doux sur cette terre <strong>de</strong> voir <strong>de</strong>s cœurs unis entre eux…" Une <strong>de</strong>s plus belles pages sorties <strong>de</strong> la plume <strong>de</strong> M. Maignen décrit la<br />

première séance, mémorable, <strong>de</strong> la Sainte-Famille. (VLP., I, p;.126.). De Montrond, Pavie et d'autres sauront raconter en termes<br />

colorés le charme <strong>de</strong> ses réunions (cf. Positio, p.75).<br />

118 Le père <strong>de</strong> Maurice Maignen était mort le 3 septembre <strong>de</strong> l'année précé<strong>de</strong>nte.<br />

151


Adieu, cher, aimez‐moi tant bien que vous pourrez, je nʹen <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pas plus; ne<br />

soyez pas jaloux, car je vous aime <strong>de</strong> préférence, plus et autrement que les autres; ne soyez<br />

pas envieux, car, eu égard à votre âge, vous êtes loin dʹavoir rien à envier à personne; re‐<br />

merciez Dieu <strong>de</strong>s quelques dons précieux quʹil vous a faits, laissez‐les croître et grandir<br />

aux rayons <strong>de</strong> sa grâce, mais surtout offrez‐les lui, priez‐le ar<strong>de</strong>mment <strong>de</strong> les prendre pour<br />

son service plutôt que <strong>de</strong> les laisser au mon<strong>de</strong>; <strong>avec</strong> cela, je répondrai pour vous d’un bon<br />

et utile avenir; <strong>avec</strong> cela, vous aurez son amour qui vaut plus que tout, et par surcroît, la<br />

tendre, bien tendre, toujours plus tendre affection <strong>de</strong><br />

Votre dévoué ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

(à lundi)<br />

114 à M. Levassor<br />

Mort <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> ses ʺtrois vieilles femmesʺ. MLP. sʹenquiert <strong>de</strong>s œuvres sociales lancées à Chartres par son ami.<br />

Description <strong>de</strong> la Sainte‐Famille <strong>de</strong> St‐Sulpice.<br />

Paris, le 18 septembre 1844<br />

Mon bien cher frère,<br />

Je voulais <strong>de</strong>puis longtemps vous écrire pour mʹentretenir un peu <strong>avec</strong> vous, conso‐<br />

lation qui mʹest trop rarement donnée; puis aussi, vous parler <strong>de</strong>s petites affaires dont le<br />

soin mʹest resté relativement aux pauvres Dames.<br />

152


La mort <strong>de</strong> M me Dorne et celle <strong>de</strong> M me Meslin que vous avez apprises, ne vous laisse<br />

plus que la pauvre M me Delatre pour unique objet <strong>de</strong> vos dispositions charitables. Je lui ai<br />

remis, comme <strong>de</strong> coutume, lʹargent nécessaire pour son <strong>de</strong>rnier terme, et je mʹapprête à lui<br />

remettre aussi le montant <strong>de</strong> celui qui va expirer. Je suis allé chez M elle Montvoisin pour lui<br />

donner les 9f quʹelle avait lʹobligeance <strong>de</strong> lui porter <strong>de</strong> son côté, chaque trimestre, en votre<br />

nom, mais elle est mala<strong>de</strong> au <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> Paris et nʹen reviendra pas <strong>de</strong> sitôt, si toutefois sa<br />

santé, quʹon dit fort épuisée, se remet.<br />

Pour ne pas laisser la pauvre M me Delatre trop en souffrance, je vais lui donner moi‐<br />

même cette petite somme et je la lui remettrai aussi pour le trimestre qui sʹachève <strong>avec</strong> la<br />

fin du présent mois. Ce sera donc, cher frère, 50f dont vous me serez re<strong>de</strong>vable, savoir: 16f<br />

pour chaque trimestre <strong>de</strong> loyer et 9f pour chaque trimestre aussi <strong>de</strong> la rétribution men‐<br />

suelle.<br />

Je ne puis, vous le savez, toucher cet argent, comme précé<strong>de</strong>mment chez Monsieur<br />

votre frère à Rouen; je laisse donc à votre sagesse le choix du moyen que vous croirez le<br />

meilleur pour y suppléer.<br />

Ne manquez pas, cher ami, <strong>de</strong> me donner <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> ce bon frère; est‐ce donc<br />

à cause <strong>de</strong> sa santé quʹil a quitté notre Normandie; il mʹavait pourtant paru très bien por‐<br />

tant; répon<strong>de</strong>z‐moi sur ce point intéressant et rappelez‐moi au souvenir <strong>de</strong> ce pieux et ex‐<br />

cellent homme que jʹaime bien sincèrement, et pour lui et aussi à cause <strong>de</strong> vous.<br />

Je serai aussi bien heureux si vous me dites quelques mots <strong>de</strong>s œuvres chrétiennes<br />

que notre divin Seigneur vous a confiées. Le règlement si simple et si bien conçu que vous<br />

mʹavez envoyé mʹa donné la meilleure pensée <strong>de</strong> vos réunions dʹenfants, et jʹai la confiance<br />

quʹ<strong>avec</strong> la persévérance, vos soins porteront <strong>de</strong> bien précieux fruits.<br />

Nous avons essayé pour nous, à St‐Sulpice, une œuvre que nous appelons la S te ‐<br />

Famille et qui consiste à rassembler tous nos pauvres gens, hommes et femmes, chaque<br />

quinzaine, le dimanche, à une messe qui est dite pour eux et où ils reçoivent <strong>de</strong>s instruc‐<br />

tions spéciales. Quelques exercices <strong>de</strong> formes attachantes que nous avons joints à ce fonds<br />

essentiel ont pleinement réussi à gagner le cœur <strong>de</strong> nos braves gens; chaque jour <strong>de</strong> ré‐<br />

union est une fête pour eux, et, dans les occasions solennelles, la Pentecôte (qui avait été<br />

par nos soins précédée dʹune retraite particulière pour eux) et lʹAssomption, nous avons<br />

eu la joie <strong>de</strong> voir quatre cents dʹentre eux, chaque fois, sʹapprocher <strong>avec</strong> nous <strong>de</strong> la Sainte<br />

Table. Ces réunions ont lieu dans la chapelle basse <strong>de</strong> S t ‐François‐Xavier 119 .<br />

La Messe se dit à midi ½, nos Messieurs y font un peu <strong>de</strong> musique dans la première<br />

partie; durant le reste du Saint Sacrifice, on lit à haute voix les prières <strong>de</strong> la messe dans La<br />

journée du chrétien. Sur cette œuvre très simple, facile à appliquer et qui, <strong>de</strong>puis six mois<br />

dépasse toutes nos espérances, je vous donnerai <strong>de</strong> plus amples détails, afin <strong>de</strong> vous met‐<br />

tre à même dʹen faire aussi lʹessai.<br />

Adieu, mon bien cher frère, je me recomman<strong>de</strong> à vos pieux souvenirs et vous <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong> aussi quelques mémentos au Saint Sacrifice, surtout pour ma femme qui, selon son<br />

habitu<strong>de</strong>, à cette époque <strong>de</strong> lʹannée, est en ce moment à la campagne.<br />

A vous tendrement en J. et M..<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

119 Il s'agit d'une <strong>de</strong>s chapelles souterraines <strong>de</strong> l'église St-Sulpice.<br />

153


115 à M. Myionnet 120<br />

Après leur rencontre provi<strong>de</strong>ntielle, MLP. lui expose les moyens dont il dispose pour fon<strong>de</strong>r une congrégation au<br />

service <strong>de</strong>s pauvres. Il le presse à se déci<strong>de</strong>r, lui qui est libre <strong>de</strong> ses mouvements. Attendre lʹheure <strong>de</strong> Dieu, dans<br />

ʺlʹoraison et la pratique <strong>de</strong>s œuvres saintesʺ.<br />

Paris, 15 octobre 1844<br />

Mon bien cher confrère,<br />

Jʹattendais <strong>avec</strong> une vive impatience votre bonne<br />

et affectueuse lettre du 8 <strong>de</strong> ce mois121 ; mais je comptais<br />

sur votre parole et jʹétais sûr quʹelle mʹarriverait, dès<br />

que le retour <strong>de</strong> Mgr dʹAngers vous mettrait à même <strong>de</strong><br />

la faire. Je suis entré vite en intimité <strong>avec</strong> vous et peut‐<br />

être en aurez‐vous été un peu surpris; mais en certaines<br />

dispositions <strong>de</strong> cœur on se comprend et se pénètre<br />

pleinement en peu <strong>de</strong> temps; il mʹa semblé, mon cher<br />

frère, quand nous nous sommes rencontrés au sortir <strong>de</strong><br />

lʹéglise <strong>de</strong>s Lazaristes, que nos âmes étaient ainsi<br />

ouvertes, je me suis laissé aller en toute confiance <strong>avec</strong><br />

vous; pour votre part, vous mʹavez parlé aussi sans<br />

réserve, et notre union sʹest formée: je me trompe bien<br />

si ce nʹest <strong>avec</strong> lʹagrément <strong>de</strong> notre divin Seigneur et<br />

dans les prévisions <strong>de</strong> son amour.<br />

Jʹai reçu ces jours <strong>de</strong>rniers <strong>de</strong> Mgr lʹEvêque<br />

dʹAngers, une lettre trop courte à mon gré, mais pleine <strong>de</strong> choses excellentes et <strong>de</strong> vues<br />

parfaites sur notre chère œuvre. Je ne doute pas, non plus que vous, que sa charité et son<br />

expérience ne pussent nous être dʹun grand secours, et cette pensée redouble, mon cher<br />

frère, mon désir <strong>de</strong> vous voir parmi nous. Car, en même temps que vous uniriez vos priè‐<br />

res et vos efforts aux nôtres pour préparer la réalisation <strong>de</strong> nos projets, vous seriez notre<br />

intermédiaire naturel entre Mgr et nous; vous le tiendriez au courant <strong>de</strong> nos espérances, <strong>de</strong><br />

nos vœux; vous le consulteriez sur nos moindres démarches et nous transmettriez ses avis,<br />

et, je lʹespère aussi, ses bénédictions. Si Mgr , à qui je viens <strong>de</strong> répondre en toute simplicité<br />

<strong>de</strong> cœur et après avoir beaucoup prié, comme il me lʹavait recommandé, croit pouvoir<br />

vous ouvrir la porte, venez‐nous, mon bien cher Confrère, et tar<strong>de</strong>z le moins quʹil se pour‐<br />

ra.<br />

Je vous ai déjà dit en quel état et à quel point nous en sommes; je veux vous le répé‐<br />

ter, afin que vous ne vous exagériez ni nos moyens, ni notre valeur. Notre petit cénacle se<br />

compose <strong>de</strong> 9 personnes en vous comptant; 4 seraient libres dès ce moment et se donne‐<br />

raient à Dieu dès quʹil voudrait bien les prendre; trois autres sont retenues encore par <strong>de</strong>s<br />

120 Clément Myionnet (1812-1886), la première "pierre" <strong>de</strong> l'Institut. Né à Angers, dans une famille aisée, il se déci<strong>de</strong>, vers 1838, à<br />

visiter les pauvres. Ayant rencontré, peu après, Florestan Hébert, il l'incite à fon<strong>de</strong>r dans leur ville natale la première conférence <strong>de</strong><br />

St-Vt-<strong>de</strong>-Paul. Attiré par la vie religieuse dans une "congrégation qui fût parmi les hommes ce que sont parmi les femmes les<br />

Sœurs <strong>de</strong> St-Vt-<strong>de</strong>-Paul", il est encouragé par son évêque, Mgr Angebault, à mûrir son projet et à se chercher <strong>de</strong>s compagnons. M.<br />

Myionnet ayant "l'intime conviction" que c'est à Paris qu'il trouvera celui qui a la même pensée que lui, quitte Angers le 6 août<br />

1844. C'est le 11 septembre qu'a lieu, rue du Cherche-Midi, la rencontre provi<strong>de</strong>ntielle <strong>avec</strong> MLP. De retour à Angers, M. Myionnet<br />

écrit le 6 octobre à MLP. sa réponse affirmative et définitive. Avec cet homme <strong>de</strong> Dieu, qui veut la vie religieuse dans toutes<br />

ses exigences, la nouvelle famille sera soli<strong>de</strong>ment fondée.<br />

121 La première lettre <strong>de</strong> M. Myionnet à MLP. est datée du 6 octobre 1844, un dimanche. MLP. en y répondant le mardi 15, dit avoir<br />

reçu la lettre du 8 octobre. Comme M. Myionnet n'a pas écrit une secon<strong>de</strong> lettre 2 jours après, MLP. a pu lire distraitement la date<br />

et confondre 8 et 6 pourtant clairement écrit.<br />

154


obligations qui, pour lʹun dʹeux au moins, ne pourraient être écartées; les <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rniers,<br />

quoique libres, tiennent encore par un fil qui se briserait vite si quelque commencement<br />

était donné à lʹœuvre; cʹest un peu dʹincertitu<strong>de</strong> et <strong>de</strong> timidité dans la volonté. Du reste,<br />

sans témérité, je crois pouvoir dire que les sujets ne manqueraient pas à lʹœuvre si elle<br />

sʹétablissait. Le grand point, cʹest quʹelle commence.<br />

Mais ici, mon cher confrère, lʹobscurité est gran<strong>de</strong> pour nous. Dieu est jaloux dans<br />

lʹexécution <strong>de</strong> ses <strong>de</strong>sseins et nʹentend pas quʹon le <strong>de</strong>vance, aussi, pour lʹordinaire, ne<br />

montre‐t‐il ses vues que comme une lueur à peine sensible et ne donne‐t‐il le plein jour<br />

que graduellement et quand lʹheure est venue. Pour nous, en ce moment, lʹaurore com‐<br />

mence à poindre et nous attendons le jour 122 . Voyez bien, cher frère, si cette attente nʹaura<br />

pour vous rien <strong>de</strong> trop pénible; nous ne sommes maîtres <strong>de</strong> rien, nous sommes comme le<br />

vaisseau qui attend le vent dans le port pour mettre à la voile; lʹimpatience ne sert <strong>de</strong> rien,<br />

tant que la brise ne souffle pas, il faut prendre patience et rester. Le temps, dʹailleurs, ne<br />

serait pas perdu ici pour vous; <strong>avec</strong> les conseils <strong>de</strong> M gr et ceux dʹun sage directeur, vous<br />

formerez en vous lʹhomme intérieur mo<strong>de</strong>lé sur lʹexemplaire divin; vous amasserez dans<br />

lʹoraison et la pratique <strong>de</strong>s œuvres saintes, lʹar<strong>de</strong>ur, les forces et le dévouement dont on a<br />

si grand besoin quand on veut creuser les fon<strong>de</strong>ments dʹune institution charitable. Voilà<br />

ma pensée, mon cher frère, voilà mes vœux; puissent‐ils être conformes aux vôtres et à<br />

ceux <strong>de</strong> M gr ; alors une toute prochaine lettre mʹannoncerait votre arrivée. En tout cas, écri‐<br />

vez‐moi bientôt; il me sera doux <strong>de</strong> mʹentretenir <strong>avec</strong> vous et jʹespère que nos relations<br />

serviront à notre édification réciproque.<br />

Le temps me manque aujourdʹhui pour écrire à M. Renier. 123 Remerciez‐le <strong>avec</strong> une<br />

vive effusion <strong>de</strong> sa lettre qui mʹa fait un grand bien; je partage pour lui les sentiments <strong>de</strong><br />

confiance et dʹaffection que vous lui avez voués et je compte sur lʹavenir pour nous rap‐<br />

procher <strong>de</strong> plus en plus intimement.<br />

Adieu, mon bien cher frère; priez beaucoup pour nous tous les jours je prie <strong>de</strong> mon<br />

côté pour vous.<br />

A vous <strong>de</strong> cœur en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

116 à M. Myionnet<br />

Pour assurer la solidité <strong>de</strong> lʹœuvre naissante, ce qui importe dʹabord, ce nʹest pas le nombre, mais lʹesprit <strong>de</strong> sa‐<br />

crifice et <strong>de</strong> renoncement, qui, seul, peut rend capable <strong>de</strong> se donner à Dieu sans retour. Impatience contenue du<br />

cœur <strong>de</strong> MLP.<br />

Paris, 14 novembre 1844<br />

Mon bien cher frère,<br />

Nous attendions, il est vrai, votre lettre <strong>avec</strong> une vive impatience, car si votre cœur<br />

se porte vers nous, le nôtre va bien, je vous assure, à la rencontre et fait gran<strong>de</strong>ment la<br />

122 "…Cette lettre montre admirablement le double trait <strong>de</strong> l'esprit <strong>de</strong> MLP. et la manière dont il entreprenait les oeuvres; on y voit<br />

cette ar<strong>de</strong>ur contenue, cette flamme intérieure qui le presse <strong>de</strong> mettre aussitôt la main au travail et cette science toute surnaturelle<br />

<strong>de</strong> la conduite <strong>de</strong> Dieu qui lui fait considérer <strong>avec</strong> patience et détachement héroïque les délais que la Provi<strong>de</strong>nce elle-même apporte<br />

à l'exécution <strong>de</strong> ses <strong>de</strong>sseins." (VLP. I, p.168).<br />

123 <strong>Jean</strong>-Baptiste Renier, (1813-1889), mé<strong>de</strong>cin, secrétaire <strong>de</strong> la Conférence d'Angers, ami intime <strong>de</strong> M. Myionnet. Il était monté à<br />

Paris et en avait profité pour avertir le conseil <strong>de</strong> Paris <strong>de</strong> la Société qu'à Angers on avait l'intention <strong>de</strong> "fon<strong>de</strong>r un ordre religieux<br />

<strong>de</strong>stiné à s'occuper <strong>de</strong>s enfants, <strong>de</strong>s écoliers, <strong>de</strong>s apprentis et enfin <strong>de</strong>s ouvriers". MLP. présent exceptionnellement à ce conseil, et<br />

<strong>de</strong> Baudicour, manifestèrent un grand intérêt à cet exposé. (Positio, p.135)<br />

155


moitié du chemin. Puisse le Seigneur, mon bien cher frère, aplanir bientôt les obstacles et<br />

nous réunir pour sa gloire et la sanctification <strong>de</strong> nos âmes. Je viens dʹécrire à M gr lʹEvêque<br />

dʹAngers pour le remercier <strong>de</strong> nouveau <strong>de</strong> lʹintérêt si bienveillant quʹil a daigné nous ac‐<br />

cor<strong>de</strong>r et lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r plus particulièrement le secours <strong>de</strong> ses lumières pour lʹexécution<br />

<strong>de</strong> notre cher projet. Si ce vénérable Prélat consent à nous gui<strong>de</strong>r par les conseils <strong>de</strong> son<br />

expérience, nous promettre surtout ses prières et ses bénédictions, nous nous sentirons<br />

plus forts et peut‐être aurons‐nous les moyens <strong>de</strong> faire les premiers pas.<br />

Lʹimportant nʹest pas, du reste, dʹêtre bien nombreux pour commencer; <strong>de</strong>ux ou<br />

trois âmes vraiment soli<strong>de</strong>s et dévouées suffiraient, si elles sentaient en elles la voix inté‐<br />

rieure qui appelle, et à laquelle on ne résiste pas; si elles étaient animées <strong>de</strong> lʹesprit <strong>de</strong> sa‐<br />

crifice et <strong>de</strong> renoncement pour tout quitter et se livrer à Jésus‐Christ sans regret, sans in‐<br />

quiétu<strong>de</strong>, <strong>avec</strong> amour et entier abandon. Si ceux qui prendront lʹinitiative sont pleinement<br />

unis <strong>de</strong> cœur et dʹâme dans une pareille pensée, ils seront forts, ils auront la vie, non seu‐<br />

lement pour subsister mais pour sʹassimiler aussi tous les éléments semblables qui se trou‐<br />

veront autour dʹeux. La perte <strong>de</strong> notre chère œuvre dès ses premiers pas, serait un zèle<br />

moyen, une volonté timi<strong>de</strong>, qui se donne à moitié, fait ses réserves et nʹose se confier en<br />

Dieu; je ne sais, cher confrère, si je me trompe, mais il me semble quʹon ne fon<strong>de</strong> rien <strong>avec</strong><br />

si peu <strong>de</strong> générosité et <strong>de</strong> flamme; quʹen quittant le mon<strong>de</strong>, on doit le quitter absolument;<br />

quʹen embrassant Dieu, il faut tout lâcher pour lʹétreindre et se perdre uniquement en lui.<br />

Jʹose espérer que quelques âmes <strong>de</strong> cette trempe sont au milieu <strong>de</strong> nous et pourraient <strong>de</strong>‐<br />

venir dans la main <strong>de</strong> Dieu <strong>de</strong>s instruments forts et dociles tout ensemble, pour lʹexécution<br />

<strong>de</strong> ses <strong>de</strong>sseins.<br />

Continuons donc à prier, mon bien cher frère, en attendant le signal; si notre bon<br />

Seigneur dʹAngers, que la Provi<strong>de</strong>nce semble nous indiquer comme premier gui<strong>de</strong> et<br />

comme appui <strong>de</strong> notre faiblesse, consent à nous prêter assistance, nous en aurons une pro‐<br />

fon<strong>de</strong> gratitu<strong>de</strong> et nous montrerons envers lui autant <strong>de</strong> déférence que <strong>de</strong> tendre respect.<br />

Deman<strong>de</strong>z‐lui, cher frère, <strong>avec</strong> nous toute sa bienveillance et vous aurez dès lʹabord<br />

gran<strong>de</strong>ment mérité <strong>de</strong> notre petite œuvre.<br />

Votre <strong>de</strong>rnière lettre mʹavait laissé espérer que votre départ ne serait guère retardé<br />

et que bientôt nous vous verrions ici, mais jʹentre pleinement dans les sages motifs qui<br />

vous retiennent. M gr lʹEvêque dʹAngers, touché <strong>de</strong> votre soumission et y voyant un nouvel<br />

indice <strong>de</strong> votre vocation, vous laissera libre bientôt peut‐être <strong>de</strong> nous rejoindre; sinon, tout<br />

sera bien encore, puisque sa voix doit vous conduire et que le Seigneur vous a confié à lui.<br />

Ne me faites pas, je vous prie, cher frère, trop attendre votre réponse; nos cœurs ont<br />

commencé à sʹentendre et chacune <strong>de</strong> vos lettres me fait mieux espérer pour lʹavenir <strong>de</strong><br />

notre œuvre; accor<strong>de</strong>z‐nous aussi quelques bons souvenirs <strong>de</strong>vant Dieu; vous nous serez<br />

aussi présent, croyez‐le bien, et nos âmes se rencontreront en lui.<br />

Votre tout dévoué frère en N. S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

156


117 à M. Myionnet 124<br />

Une Œuvre dʹapprentis est prise en charge par la Société <strong>de</strong> St‐Vt‐<strong>de</strong>‐Paul. Cʹest un signe provi<strong>de</strong>ntiel pour<br />

ceux qui, tel M. Myionnet, veulent se consacrer à Dieu.<br />

Paris, 14 décembre 1844<br />

Mon bien cher confrère,<br />

Jʹai retardé à <strong>de</strong>ssein ma réponse à votre <strong>de</strong>rnière lettre dans lʹattente dʹune solution<br />

touchant quelques objets intéressants dont sʹoccupe en ce moment notre Société à Paris, et<br />

qui sembleraient nous ouvrir une voie pour commencer dans lʹombre notre œuvre tant dé‐<br />

sirée; mais comme tous les arrangements ne sont pas encore réglés, jʹaime mieux vous<br />

écrire quelques mots sans plus attendre, sauf à vous parler bientôt plus explicitement <strong>de</strong><br />

cette affaire.<br />

La Société <strong>de</strong> St ‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul avait jusquʹici, <strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong>s Frères <strong>de</strong>s écoles<br />

chrétiennes, organisé une œuvre dʹapprentissage pour les jeunes ouvriers que lʹon place<br />

chez <strong>de</strong>s maîtres honnêtes où on les surveille, et les meilleurs résultats peuvent en être at‐<br />

tendus. Mais malheureusement, ou provi<strong>de</strong>ntiellement peut‐être, le Supérieur Général <strong>de</strong>s<br />

Frères juge que cette œuvre est en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> lʹInstitut <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> la Salle et, bien à regret, re‐<br />

fuse dʹautoriser ses frères à la diriger. La Société <strong>de</strong> St ‐Vincent cherche quelques hommes<br />

<strong>de</strong> dévouement pour sʹen charger, et nous pensons ici que cela peut convenir à ceux <strong>de</strong> nos<br />

amis qui désirent se consacrer entièrement à Dieu. Ils y trouveraient, en effet, une occasion<br />

et un prétexte <strong>de</strong> se réunir sans étonner personne; dʹailleurs, lʹœuvre <strong>de</strong>s apprentissages<br />

est assez peu absorbante pour laisser beaucoup <strong>de</strong> temps à ceux qui sʹen occuperaient, et<br />

nos chers frères auraient tout le loisir dont ils auraient besoin pour se préparer dans le re‐<br />

cueillement et la retraite aux saintes choses que le Seigneur peut <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r dʹeux ultérieu‐<br />

rement. Leur position serait, dʹailleurs, entièrement indépendante, et nulle gêne ne leur se‐<br />

rait imposée; la vie quʹils mèneraient à lʹintérieur resterait toute cachée, puisque les enfants<br />

ne reviennent à la maison centrale que les dimanches.<br />

Je nʹinsiste pas, du reste, ici sur le détail <strong>de</strong> ces dispositions, jʹy reviendrai bientôt si<br />

tout se conclut comme nous le pensons. Même en vous comptant, cher frère, le noyau pré‐<br />

cieux qui serait comme la semence <strong>de</strong> lʹœuvre serait, comme le sénevé <strong>de</strong> lʹEvangile, la<br />

plus petite <strong>de</strong> toutes les graines, mais nous nous en réjouissons, bien persuadés que toute<br />

œuvre <strong>de</strong> Dieu commence ainsi. Nous avons la confiance que notre bon Seigneur dʹAngers<br />

ne refusera pas <strong>de</strong> vous autoriser à vous unir à nous, car, bien faibles en rassemblant nos<br />

forces, nous le serions vraiment trop en les partageant.<br />

Je ne puis mʹexpliquer comment ma lettre à Mgr ne lui est pas parvenue, elle est par‐<br />

tie en même temps que celle dont vous mʹaccusez <strong>de</strong> votre côté réception et je mʹépuise en<br />

conjectures sur les causes qui ont pu la détourner <strong>de</strong> sa fin. Je réparerai cet acci<strong>de</strong>nt en<br />

écrivant prochainement à votre vénérable Prélat, dont les conseils et lʹappui nous <strong>de</strong>vien‐<br />

dront plus que jamais indispensables.<br />

Je ne passe pas un seul jour, cher frère, sans vous mettre bien intimement dans les<br />

Cœurs <strong>de</strong> J. et M. Jʹespère que <strong>de</strong> votre côté vous avez quelques bons souvenirs pour nous.<br />

Pardonnez‐moi la précipitation qui se montre trop en ces quelques lignes. Jʹai désiré<br />

quʹelles vous parvinssent sans plus tar<strong>de</strong>r.<br />

124 Cette lettre, ainsi que les <strong>de</strong>ux suivantes, est adressée à M. Renier, rue Hanneloup, Angers, pour M. Myionnet. Dans les débuts, le<br />

bon docteur servira <strong>de</strong> "boîte à lettres" pour M .Myionnet, afin <strong>de</strong> ne pas éveiller les soupçons <strong>de</strong> la famille <strong>de</strong> Clément Myionnet<br />

sur sa vocation religieuse.<br />

157


A vous bien affectueusement en N.S.<br />

Souvenirs bien dévoués à M. Renier.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

118 à M. Myionnet<br />

Il lʹexhorte à se déci<strong>de</strong>r: peu importe le premier travail, il faut se lancer. Avantages <strong>de</strong> son installation immédiate<br />

au Patronage <strong>de</strong>s apprentis. MLP. pose les principes <strong>de</strong> son apostolat: ‐ʺse prêter à toutes les œuvres <strong>de</strong> miséri‐<br />

cor<strong>de</strong>, ‐faire <strong>de</strong>s choses petites et que le mon<strong>de</strong> apprécie peu, ‐la forme et la matière ne sauraient manquer au dé‐<br />

vouement.<br />

Paris, 27 décembre 1844<br />

Mon bien cher frère,<br />

Je nʹai que le temps <strong>de</strong> vous écrire <strong>de</strong>ux mots pour vous dire que je viens, comme je<br />

vous lʹai annoncé il y a quelques jours, (par une lettre qui sʹest croisée <strong>avec</strong> la vôtre) <strong>de</strong><br />

mʹadresser à Mgr lʹÉvêque dʹAngers pour solliciter plus directement son appui et ses<br />

conseils et pour le conjurer aussi <strong>de</strong> vous envoyer au milieu <strong>de</strong> nous. Nous sommes si peu<br />

forts et lʹœuvre quʹil sʹagit dʹentreprendre est si haute, quʹil nous faut absolument réunir<br />

nos moyens sous peine <strong>de</strong> rester en chemin sans atteindre le but désiré. Je vous ai dit, dans<br />

ma <strong>de</strong>rnière lettre, quelle serait la première occupation donnée au zèle <strong>de</strong> nos frères, mais<br />

vous aurez compris comme moi quʹil importait peu au fond <strong>de</strong> quelle nature serait le pre‐<br />

mier travail quʹils <strong>de</strong>vraient entreprendre. Si Dieu daigne les bénir, ils <strong>de</strong>vront successi‐<br />

vement en sʹaccroissant en nombre, se prêter à toutes les œuvres <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong> qui pour‐<br />

ront leur convenir; or, commencer par les enfants est prendre la chose par la base et satis‐<br />

fera dʹailleurs le vœu <strong>de</strong> leur humilité, savoir: <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s choses petites et que le mon<strong>de</strong><br />

apprécie peu. Si vous, ou quelque autre occupé dʹabord à ce soin y a peu <strong>de</strong> disposition, il<br />

n’importe; il pourra plus tard avoir une autre voie et les formes et la matière ne sauraient<br />

manquer au dévouement.<br />

Ce quʹil vous faut aujourdʹhui, cʹest un asile qui nʹattire pas les yeux, cʹest un pré‐<br />

texte pour <strong>de</strong>ux, trois ou quatre <strong>de</strong> vous <strong>de</strong> se réunir et <strong>de</strong> vivre ensemble; or, lʹoffre que<br />

fait la Société <strong>de</strong> Saint‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul semble <strong>de</strong> tout point favorable et provi<strong>de</strong>ntielle;<br />

elle ne sʹinquiète et ne se doute <strong>de</strong> rien, elle ne vous interroge point sur vos vues ultérieu‐<br />

res et trouve tout simple que quelques‐uns <strong>de</strong> ses membres se dévouent plus particulière‐<br />

ment à lʹune <strong>de</strong> ses œuvres. Vous pourrez donc en paix former et étudier vos cœurs, en‐<br />

tendre la parole intérieure et vous livrer à ses inspirations. Nous prions bien instamment<br />

ici pour que notre bon Seigneur dʹAngers vous envoie à nous; notre chère œuvre, si long‐<br />

temps arrêtée dans ses premiers actes, souffrirait, je le crains, 125 <strong>de</strong> nouveaux délais, si<br />

nous nʹavions votre coopération. Nous remettons tout aux mains du divin Seigneur; puisse<br />

sa charité qui nous a rapprochés, je le crois fermement, nous réunir pour sa plus gran<strong>de</strong><br />

gloire.<br />

Rappelez‐moi au bon souvenir <strong>de</strong> notre frère, M. Renier et donnez‐moi vous‐même<br />

quelque part à vos prières; les miennes vous seront fidèlement rendues à lʹun et à lʹautre.<br />

125<br />

L'insistance <strong>de</strong> MLP. s'explique moins par les hésitations <strong>de</strong> M. Myionnet que du fait <strong>de</strong> Mgr Angebault : celui-ci ne voyait pas<br />

sans regret l'Institut se fon<strong>de</strong>r hors <strong>de</strong> son diocèse.<br />

158


A vous dans les Cœurs <strong>de</strong> J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Le Prési<strong>de</strong>nt Général <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> Saint‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul sait seul votre <strong>de</strong>s‐<br />

sein et celui <strong>de</strong> nos amis; il lʹa appris <strong>avec</strong> bonheur. Il a promis <strong>de</strong> le favoriser <strong>de</strong> tous ses<br />

moyens.<br />

119 à M. Myionnet<br />

MLP. se prépare à le recevoir et lui facilite les moyens <strong>de</strong> quitter sa famille.<br />

Paris, 10 janvier 1845<br />

Mon bien cher frère,<br />

Votre lettre si impatiemment attendue par nous, nous a remplis <strong>de</strong> joie; <strong>de</strong>puis le<br />

jour où je vous ai vu, où nos âmes se sont si bien comprises <strong>de</strong>vant le Seigneur, je mʹétais<br />

toujours persuadé que vous seriez ici <strong>de</strong>s nôtres et que rien ne commencerait sans vous;<br />

cette douce espérance sera réalisée, et le Divin Maître qui savait nos vœux a daigné les en‐<br />

tendre; quʹil en soit béni mille fois, cher frère, et puissent les liens quʹil a formés se resser‐<br />

rer toujours et ne se briser jamais. Que votre cœur ne cè<strong>de</strong> pas trop, cher ami, aux mouve‐<br />

ments <strong>de</strong> la nature et, sʹil ne peut les arrêter, quʹil les domine au moins et en reste le maî‐<br />

tre. Dieu, notre Père, ne vous délaissera pas et si, comme le Patriarche, vous quittez votre<br />

pays et votre famille, comme lui aussi, dans une patrie nouvelle, vous trouverez <strong>de</strong>s frères<br />

et <strong>de</strong>viendrez lʹauteur dʹune postérité nombreuse. Jʹen ai la confiance, après quelques mo‐<br />

ments dʹennui inévitables peut‐être, vous trouverez ici le calme et la paix. Dès ce moment,<br />

ou <strong>de</strong>puis longtemps déjà, nos amis sont en union <strong>de</strong> prières <strong>avec</strong> vous et vous sentirez, je<br />

lʹespère, lʹeffet <strong>de</strong> leurs fraternelles invocations.<br />

Jʹécris aujourdʹhui même la lettre que vous mʹavez <strong>de</strong>mandée et elle <strong>de</strong>vra vous<br />

parvenir à votre adresse directement. Je me suis tenu en <strong>de</strong>s termes assez généraux pour<br />

ne pas sortir <strong>de</strong> la vérité que nous ne <strong>de</strong>vons froisser en rien et vous pourrez aisément, ce<br />

me semble, cher ami, rester dans les mêmes limites. Quant au voyage dʹItalie126 , je nʹen ai<br />

touché quʹun mot, ne trouvant pas également possible <strong>de</strong> mʹétendre par là, mais ce mot<br />

suffira pour détourner lʹattention <strong>de</strong>s vôtres et les disposer plus favorablement à vous lais‐<br />

ser partir.<br />

Venez bientôt, cher frère, le plus tôt sera le mieux; moins vous mettrez <strong>de</strong> délais,<br />

moins vous aurez <strong>de</strong> combat.<br />

Remerciez pour moi, je vous prie, Mgr l’Evêque dʹAngers <strong>de</strong> sa lettre si paternelle, si<br />

sage, si pleine dʹencouragement; je la gar<strong>de</strong> comme un trésor précieux et les excellentes<br />

pensées quʹelle contient seront mises à la base <strong>de</strong> notre petite œuvre comme un souvenir<br />

<strong>de</strong> grâce et <strong>de</strong> bénédiction.<br />

Embrassez pour moi notre frère Renier qui restera aussi <strong>de</strong> notre famille et pour le‐<br />

quel désormais je me sens la plus tendre affection.<br />

Jʹattendrai <strong>de</strong> vous une nouvelle lettre bientôt, ce sera la <strong>de</strong>rnière. Adieu.<br />

A vous <strong>de</strong> cœur en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

126 Pour ne pas inquiéter sa famille et préparer ses frères, chez qui il travaillait, à son absence, M. Myionnet leur avait parlé, <strong>de</strong> manière<br />

vague, d'un projet <strong>de</strong> voyage en Italie et les avait prévenus <strong>de</strong> lui trouver un remplaçant.<br />

159


120 à M. Myionnet 127<br />

Appel à venir secon<strong>de</strong>r les œuvres <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> St‐Vt‐<strong>de</strong>‐Paul à Paris.<br />

Paris, 10 janvier 1845<br />

Mon cher confrère,<br />

Nos entrevues ont été rapi<strong>de</strong>s lors <strong>de</strong> votre court séjour ici que je nʹai pu saisir dans<br />

leur ensemble les détails que vous mʹavez communiqués sur vos œuvres dʹAngers. Je nʹai<br />

gardé, en particulier, quʹun souvenir confus <strong>de</strong>s essais infructueux, je crois, que vous aviez<br />

faits dans la maison <strong>de</strong> Mille‐Pieds128 , et <strong>de</strong>s projets que nos amis auraient pour utiliser<br />

cette acquisition. Je le regrette dʹautant plus que notre Société sʹoccupe à Paris tout particu‐<br />

lièrement <strong>de</strong>s enfants et apprentis et que peut‐être nos efforts unis aux vôtres pourraient<br />

amener quelque utile résultat. La colonie <strong>de</strong> Mettray, celle <strong>de</strong> St‐Firmin129 qui commence<br />

aussi à prospérer gran<strong>de</strong>ment sont <strong>de</strong>s exemples bien frappants du bien quʹon peut faire<br />

<strong>avec</strong> <strong>de</strong>s ressources moindres peut‐être que celles dont nous pouvons disposer. Pourquoi,<br />

mon cher confrère, une sainte émulation ne nous saisirait‐elle pas aussi et pourquoi, <strong>avec</strong><br />

lʹai<strong>de</strong> du Seigneur, <strong>de</strong>s tentatives mieux mûries et mieux préparées nʹauraient‐elles pas un<br />

heureux succès? Mais pour un pareil <strong>de</strong>ssein nos conférences isolées sont trop peu fortes,<br />

plusieurs dʹentre elles, sinon toutes, <strong>de</strong>vraient sʹunir et se concerter pour prévenir <strong>de</strong> nou‐<br />

veaux mécomptes et assurer le bien moral quʹelles voudraient produire. Dans ce cas que<br />

pourriez‐vous faire vous et les vôtres, cher confrère, quelle coopération, quelle sympathie<br />

pourrions‐nous espérer <strong>de</strong> votre côté; quels moyens auriez‐vous si les choses tendaient à<br />

sʹagrandir et à se porter hors <strong>de</strong> Paris, pour ai<strong>de</strong>r plus tard à la création dʹun établisse‐<br />

ment? Ces questions, je le sens bien, sont graves et ne peuvent guère être résolues <strong>avec</strong><br />

précision par lettres. Aussi, cher confrère, ne croirais‐je pas trop présumer <strong>de</strong> votre zèle en<br />

vous priant, si vos affaires sont maintenant moins pressantes, comme vous lʹaviez espéré,<br />

<strong>de</strong> nous accor<strong>de</strong>r une entrevue qui, telle courte quʹelle pût être, éclaircirait les choses plus<br />

quʹun volume <strong>de</strong> correspondance. Jʹai laissé entrevoir à notre Prési<strong>de</strong>nt Général que nos<br />

amis dʹAngers et vous en particulier, seriez disposé à nous secon<strong>de</strong>r activement; il en a<br />

montré une vive satisfaction et ne doute pas quʹun concert si désirable ne fût pour nos<br />

conférences le commencement dʹune ère nouvelle dans la carrière <strong>de</strong> nos œuvres.<br />

Pesez ces choses mûrement, cher confrère, voyez ce que votre position vous permet<br />

<strong>de</strong> faire et si vous cé<strong>de</strong>z à nos vœux, faites en sorte que votre arrivée ne tar<strong>de</strong> guère; nos<br />

amis désireraient se concerter définitivement avant la fin <strong>de</strong> janvier.<br />

Jʹattends votre réponse pour la leur communiquer.<br />

A vous bien affectueusement en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Quʹest <strong>de</strong>venu votre projet <strong>de</strong> voyage en Italie? Nous en reparlerions ici, sʹil y<br />

avait lieu.<br />

127 Adressée directement à M. Myionnet, négociant, rue Beaurepaire, Angers. M. Myionnet avait suggéré à MLP. <strong>de</strong> lui écrire une<br />

lettre qu'il pût communiquer à sa famille et qui servirait <strong>de</strong> prétexte à un voyage à Paris.<br />

128 Domaine qui se trouvait sur la route <strong>de</strong> Saumur, près d'Angers. Vaste propriété achetée en partie <strong>avec</strong> l'argent <strong>de</strong> M. Myionnet,<br />

elle était <strong>de</strong>stinée à accueillir une communauté <strong>de</strong> jeunes gens venus d'Orléans se dévouer aux œuvres <strong>de</strong> charité à Angers. L'essai<br />

ne fut pas concluant.<br />

129 Entre 1825 et 1860, on pensa porter remè<strong>de</strong> aux maux du paupérisme en créant <strong>de</strong>s colonies agricoles. Le célèbre économiste Villeneuve-Bargemont,<br />

précurseur du catholicisme social, les encouragea beaucoup. Elles n'eurent pas l'efficacité sociale qu'on<br />

croyait. Elles disparurent apèrs 1860. Il y avait les colonies agricoles "d'éducation correctionnelle", pour les jeunes détenus, dont la<br />

plus connue était celle <strong>de</strong> Mettray, près <strong>de</strong> Tours. D'autres colonies regroupaient, comme en un orphelinat, <strong>de</strong>s enfants pauvres ou<br />

abandonnés: celle du Mesnil-St-Firmin, dans l'Oise, était <strong>de</strong> ce nombre. A. <strong>de</strong> Melun s'en occupa activement pendant plusieurs années.<br />

160


[120‐1] 130<br />

ETAT du PERSONNEL au 31/12/1844:<br />

RAPPORT SUR LA CONFERENCE ST‐SULPICE<br />

MEMBRES du BUREAU :<br />

Prési<strong>de</strong>nt M. le <strong>Prevost</strong> rue du Cherche‐Midi 98<br />

Vice‐Prési<strong>de</strong>nt M. <strong>de</strong> Montault ʺ Lille 83<br />

Secrétaires M. Robin ʺ Belle‐Chasse 100<br />

M. Dufresne ʺ <strong>de</strong> Madame 8<br />

Trésorier M. Cuvinot ʺ <strong>de</strong> Madame 8<br />

MEMBRES qui ont quitté la Conférence pour aller habiter dans les lieux où la Société nʹest<br />

pas établie:<br />

Nom ; Profession ; Lieu du domicile ; Arrondissement : Néant<br />

1° ‐ STATISTIQUE <strong>de</strong>s<br />

Membres actifs :140<br />

ʺ honoraires<br />

aspirants<br />

Nombre <strong>de</strong>s Bienfaiteurs :<br />

<strong>de</strong>s Souscriptions :<br />

Nombre <strong>de</strong>s membres entrés cette année<br />

dans lʹétat ecclésiastique : 1<br />

2° ‐ NOMBRE DES FAMILLES visitées :300<br />

<strong>de</strong>s mariages réalisés :<br />

enfants légitimés :<br />

enfants recueillis en salle dʹasile :<br />

enfants patronnés : 20<br />

apprentis patronnés :<br />

ouvriers instruits :<br />

militaires instruits :<br />

Savoyards instruits :<br />

mala<strong>de</strong>s visités :<br />

prisonniers visités :<br />

20 premières communions. — 2 protestants ont abjuré. — La conversion dʹune femme a<br />

entraîné celle <strong>de</strong> ses 10 enfants. — 3 baptêmes.<br />

130 Ce rapport n'est pas <strong>de</strong> la main <strong>de</strong> MLP.<br />

161


COMPTES <strong>de</strong> lʹannée 1844 ‐ du 1 er Janvier au 31 Décembre <strong>–</strong><br />

RECETTES<br />

Quêtes <strong>de</strong>s séances ordinaires 3 105,05<br />

Quêtes extraordinaires<br />

Souscriptions 455,00<br />

Dons particuliers 848,10<br />

Loteries 1 200,00<br />

Sermons <strong>de</strong> charité 3 640,65<br />

Recettes diverses 97,75<br />

Don <strong>de</strong> la Caisse centrale ________<br />

TOTAL 9 346,55<br />

Reliquat <strong>de</strong> lʹannée précé<strong>de</strong>nte 993,05<br />

‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐<br />

TOTAL 10 339,60<br />

DEPENSES<br />

ŒUVRE DE LA VISITE DES PAUVRES<br />

Pour 12 855 Kilogrammes <strong>de</strong> pain 4 400,55<br />

Pour 2 270 Litres <strong>de</strong> bouillon et 740 Kg <strong>de</strong> vian<strong>de</strong> 1 208,50<br />

Pour 1050 Kilogrammes <strong>de</strong> riz 515,45<br />

Combustibles 389,30<br />

Vêtements 260,00<br />

Divers autres secours en nature<br />

Secours en argent 662,50<br />

ŒUVRE DU PATRONAGE DES ENFANTS ET APPRENTIS<br />

ŒUVRES DIVERSES 1636,00<br />

DEPENSES DIVERSES 324,55<br />

SOMME VERSEE A LA CAISSE DU CONSEIL GENERAL 300,00<br />

‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐<br />

TOTAL 9 696,85<br />

BALANCE<br />

Recettes 10 339,60<br />

Dépenses ‐ 9 696,85<br />

Différence 642,75<br />

162


La fondation <strong>de</strong>s Frères<br />

<strong>de</strong> Saint-Vincent <strong>de</strong> Paul,<br />

le 3 mars 1845<br />

121 à M. Levassor<br />

Nouvelles <strong>de</strong>s Conférences <strong>de</strong> Paris et <strong>de</strong><br />

Chartres. Indulgences pontificales. La<br />

Sainte‐Famille se développe en province.<br />

Châsse <strong>de</strong> saint Vincent <strong>de</strong> Paul<br />

Paris, le 12 mars 1845<br />

Mon bien cher frère,<br />

Depuis sept ans M. Michelet a<br />

cessé dʹêtre maître <strong>de</strong> conférence à<br />

lʹEcole Normale et les élèves <strong>de</strong> cet<br />

établissement nʹassistent point ordi‐<br />

nairement à ses cours au Collège <strong>de</strong><br />

France. Durant les <strong>de</strong>ux premières<br />

années <strong>de</strong> leurs étu<strong>de</strong>s à lʹEcole, ils ne peuvent sous aucun prétexte, fréquenter <strong>de</strong>s cours<br />

extérieurs et durant la troisième, ils nʹont pour sʹy rendre que <strong>de</strong>s permissions rares et ex‐<br />

ceptionnelles. Ces renseignements, que je nʹai pu obtenir quʹhier au soir seulement, me<br />

viennent <strong>de</strong> sources certaines et vous pouvez être assuré <strong>de</strong> leur exactitu<strong>de</strong>.<br />

Je vous remercie pour notre pauvre M me Delatre <strong>de</strong>s mesures que vous voulez bien<br />

prendre relativement aux secours que vous lui accor<strong>de</strong>z si fidèlement. Si jʹai besoin <strong>de</strong>s 50f<br />

prochainement, je les ferai prendre chez Madame votre tante, ainsi que vous me le permet‐<br />

tez; sinon jʹattendrai la bonne visite que vous me promettez qui me sera bien précieuse,<br />

ainsi que vous le pouvez penser. M me Delatre a plus que jamais besoin <strong>de</strong> lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> ses an‐<br />

163


ciens amis, presque tous ceux qui sʹintéressaient à elle sont morts ou dispersés. Sa santé est<br />

dʹailleurs moins bonne chaque jour. Elle a eu <strong>de</strong>rnièrement une hémorragie <strong>de</strong> poitrine<br />

considérable et qui avait donné <strong>de</strong>s inquiétu<strong>de</strong>s, mais elle sʹest <strong>de</strong>puis assez bien remise;<br />

gar<strong>de</strong>z‐lui, mon bien cher frère, votre charitable appui et menez jusquʹà la fin cette bonne<br />

œuvre, une <strong>de</strong>s meilleures et <strong>de</strong>s plus soutenues <strong>de</strong> votre vie chrétienne.<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> regret que notre conférence <strong>de</strong> Chartres a changé <strong>de</strong> direction, elle<br />

était en mains parfaites et je ne saisis pas dʹici les raisons dʹune pareille révolution. Je<br />

pense toutefois quʹil sʹagit seulement dʹune modification opérée amiablement, puisque<br />

vous gar<strong>de</strong>z toujours à nos amis votre précieuse et si utile coopération. Nous continuons<br />

pour nous à marcher ici assez bien, notre vénérable Prési<strong>de</strong>nt général sʹoccupe <strong>de</strong> tout<br />

dans nos œuvres <strong>avec</strong> une ar<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> jeune homme, mais en y joignant toute la pru<strong>de</strong>nce<br />

propre à son âge et à sa longue expérience.<br />

Jʹai la confiance que son passage parmi nous sera signalé par une consolidation du<br />

bien commencé et le développement <strong>de</strong> toutes nos œuvres.<br />

Vous savez déjà la profusion généreuse du St Père à notre égard dans les indulgen‐<br />

ces multipliées quʹil vient <strong>de</strong> nous accor<strong>de</strong>r. Il a daigné reconnaître la Société <strong>de</strong> Saint‐<br />

Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul telle quʹelle est instituée et lʹa comblée <strong>de</strong> grâces spirituelles extraordinai‐<br />

res. Vous avez déjà sans doute reçu copie du Bref <strong>de</strong> Sa Sainteté et vous en aurez bien loué<br />

Dieu <strong>avec</strong> vous.<br />

Je vous suis bien reconnaissant du bon souvenir que vous accor<strong>de</strong>z à notre Sainte‐<br />

Famille qui se soutient toujours et <strong>de</strong>vient <strong>de</strong> plus en plus nombreuse. On vient dʹen éta‐<br />

blir une à Tours; on en prépare une à Orléans; peut‐être après votre voyage à Paris, juge‐<br />

rez‐vous possible dʹen avoir une chez vous. Cette œuvre est souple et peu dispendieuse et,<br />

par conséquent, <strong>de</strong> facile accès. Si vous aviez la pensée <strong>de</strong> vous trouver à l’une <strong>de</strong> nos<br />

séances, elles ont lieu les 2 ème et 4 ème dimanches <strong>de</strong> chaque mois, jʹen serais tout particuliè‐<br />

rement consolé.<br />

Jʹaurais encore dʹautres détails à vous donner sur lʹœuvre <strong>de</strong>s enfants qui sʹorganise<br />

sur <strong>de</strong> nouvelles bases ou plutôt qui se développe seulement <strong>avec</strong> quelques améliorations,<br />

mais le chapitre serait trop long; jʹajourne les explications à quelque prochaine occasion.<br />

Adieu, mon bien cher frère, jʹai en ce moment besoin tout particulièrement <strong>de</strong> vos<br />

prières pour moi et pour ma pauvre maison; pensez à nous au Très Saint Sacrifice et <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>z que le Seigneur daigne manier nos cœurs à son gré.<br />

A vous dans les Cœurs <strong>de</strong> J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

121‐1 à M gr Angebault<br />

Confiance en Dieu. La vocation <strong>de</strong> MLP. est <strong>de</strong> rejoindre M. Myionnet, moyennant consentement <strong>de</strong> sa femme.<br />

Que Dieu lui obtienne ʺlumière et bénédictionʺ.<br />

Paris, [avril] 1845<br />

Monseigneur,<br />

Que <strong>de</strong> grâces nous <strong>de</strong>vons rendre au Seigneur dont la bonté a daigné ménager à<br />

notre petite œuvre naissante la protection, les conseils, la sage direction <strong>de</strong> lʹun <strong>de</strong> ses Pon‐<br />

tifes, et donner à un si petit commencement une si gran<strong>de</strong> bénédiction!<br />

164


Sans votre appui, Monseigneur, nous aurions perdu courage peut‐être après les<br />

épreuves qui, coup sur coup, nous ont atteints; mais en voyant Votre Gran<strong>de</strong>ur si pleine<br />

<strong>de</strong> confiance dans lʹavenir <strong>de</strong> la pauvre Communauté, en recevant ses paroles si ar<strong>de</strong>ntes<br />

et si affectueuses tout ensemble, nous avons senti que le divin Maître nʹétait pas loin et<br />

nous sommes restés fermes dans notre espérance. De temps en temps encore, quand nous<br />

mesurons la gran<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> la tâche et la faiblesse <strong>de</strong> nos moyens, nous sentons un peu dʹef‐<br />

froi, mais ces défaillances durent peu, nous nous souvenons que les voies <strong>de</strong> Dieu sont<br />

mystérieuses et ses fins toujours sans proportions <strong>avec</strong> nos moyens, nous nous rappelons<br />

surtout ses bienfaits et les grâces quʹil nous a faites et nous nous abandonnons en paix à sa<br />

conduite et à son amour.<br />

Je dis nous, et Votre Gran<strong>de</strong>ur me le pardonnera je lʹespère, non que jʹenten<strong>de</strong> ainsi<br />

mʹassocier entièrement aux mérites du f. Myionnet, mais parce quʹune vive sympathie et la<br />

plus tendre charité mʹunissent à ses travaux et à ses efforts. Je me suis attaché aussi à par‐<br />

tager ses exercices autant que mes autres obligations me le permettent afin <strong>de</strong> suppléer<br />

ceux qui manquent et <strong>de</strong> lui donner au moins lʹombre <strong>de</strong> la vie commune en attendant la<br />

réalité. Tous nos confrères <strong>de</strong> St‐Vincent lui montrent <strong>de</strong> leur côté, une sincère bienveil‐<br />

lance et se sont empressés, sur notre appel, <strong>de</strong> lui prêter secours pour lʹœuvre <strong>de</strong>s appren‐<br />

tissages. Les commencements se <strong>de</strong>ssinent bien, on peut déjà<br />

constater quelques progrès et selon toute apparence il aura<br />

bientôt gagné le coeur <strong>de</strong> tous ses enfants. Ce bon frère est,<br />

quant à lui, paisible et confiant et ne doute pas que le Divin<br />

Seigneur ne lui envoie plus tard <strong>de</strong>s frères dévoués pour le<br />

secon<strong>de</strong>r.<br />

Je gar<strong>de</strong> à ce sujet, Monseigneur, le sentiment que jʹai<br />

mis <strong>avec</strong> tant <strong>de</strong> bonheur dans votre sein le jour <strong>de</strong> votre<br />

départ et si Dieu daigne me donner vocation, je répondrai, je<br />

lʹespère, à son appel. Jʹai pris lʹavis <strong>de</strong> M. Beaussier 131 ainsi<br />

que Votre Gran<strong>de</strong>ur lʹavait jugé nécessaire et je lʹai trouvé<br />

ainsi que vous, favorablement disposé. Il a jugé seulement,<br />

<strong>avec</strong> Votre Gran<strong>de</strong>ur, quʹun consentement bien précis et<br />

bien net <strong>de</strong>vait mʹêtre donné pour me dégager du lien qui mʹattache encore, quelque fai‐<br />

blement que ce soit.<br />

Jʹai déjà préparé un peu les voies à cet égard et je nʹai rien aperçu qui me présage<br />

une résistance. Toutefois je ne saurais prévoir la fin tant que lʹépreuve définitive nʹa pas<br />

été faite. Si vous lʹaviez pour agréable, Monseigneur, après avoir bien prié et mʹêtre bien<br />

remis aux mains <strong>de</strong> Dieu, je franchirais le pas décisif. En admettant que, dès lʹabord, jʹob‐<br />

tinsse un consentement entier et parfait, il me resterait encore pour régulariser ma position<br />

sous dʹautres rapports, beaucoup <strong>de</strong> démarches et <strong>de</strong> soins qui me conduiraient sans<br />

doute au <strong>de</strong>là du délai <strong>de</strong> trois mois que Votre Gran<strong>de</strong>ur mʹa prescrit; je <strong>de</strong>meurerai donc<br />

fidèlement dans la limite quʹelle mʹa tracée. Si vous donniez votre assentiment, Monsei‐<br />

gneur, à cette disposition, jʹoserais solliciter une gran<strong>de</strong> grâce: ce serait que le jour où je<br />

131 A la mort <strong>de</strong> l'abbé <strong>de</strong> Malet, son gui<strong>de</strong> spirituel, (en août 1843), MLP. s'était adressé à son successeur comme aumônier <strong>de</strong>s<br />

Sœurs <strong>de</strong> Ste-Marie-<strong>de</strong>-Lorette, rue du Regard. <strong>Jean</strong>-Baptiste Beaussier (1802-1871), né en Eure-et-Loir (diocèse <strong>de</strong> Chartres) fut<br />

ordonné prêtre à Paris en 1826. Son nom reviendra souvent sous la plume <strong>de</strong> MLP. : il fut pour lui un conseiller averti, notamment<br />

dans les choix les plus difficiles: fondation <strong>de</strong> l'Institut, démarches en vue <strong>de</strong> la séparation d'<strong>avec</strong> son épouse, cheminement vers le<br />

sacerdoce.<br />

165


<strong>de</strong>vrai parler me fut désigné à lʹavance par vous et que ce jour‐même vous eussiez lʹex‐<br />

trême charité <strong>de</strong> dire la S te messe pour mʹobtenir <strong>de</strong> Dieu lumière et bénédiction. Quelque<br />

chose qui advînt ensuite, je me sentirai paisible, bien assuré que je suis selon le bon plaisir<br />

divin. Jʹattendrai donc, Monseigneur, la réponse <strong>de</strong> Votre Gran<strong>de</strong>ur et je nʹirai pas plus<br />

loin sans avoir reçu dʹelle avis et direction.<br />

Jʹai cru jusquʹici ne <strong>de</strong>voir rien dire au bon M. Myionnet, dans la crainte dʹavoir en‐<br />

suite à retirer mes paroles si jʹéprouvais quelquʹobstacle insurmontable; il mʹa paru bon<br />

dʹailleurs quʹil pût me voir <strong>de</strong> près et bien intimement pour juger en connaissance <strong>de</strong> cause<br />

sʹil peut vraiment trouver en moi un compagnon et un frère qui partage ses travaux et<br />

sʹunisse à lui dans le Cœur <strong>de</strong> Jésus‐Christ.<br />

Je gar<strong>de</strong>, en attendant, le souvenir <strong>de</strong> vos conseils paternels, Monseigneur, je relis<br />

les légen<strong>de</strong>s <strong>de</strong> vos chères images, je les goûte et les médite, tachant dʹen bien prendre<br />

lʹesprit. Confiance en Marie, humilité, esprit intérieur, voilà ce que vous mʹavez conseillé;<br />

jʹy viserai <strong>de</strong> toutes mes forces; mais ma vie sera trop courte pour une fin si haute à moins<br />

que vos prières nʹaplanissent et nʹabrègent le chemin. Je les sollicite donc bien ar<strong>de</strong>mment<br />

et jʹoserai, pauvre que je suis, offrir en retour au Seigneur lʹexpression <strong>de</strong> ma tendre grati‐<br />

tu<strong>de</strong> et <strong>de</strong> mes vœux bien ar<strong>de</strong>nts pour vous.<br />

Veuillez en être assuré, Monseigneur, et agréer lʹhumble respect <strong>avec</strong> lequel je suis<br />

Votre très obéissant et très dévoué serviteur en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

122 à M. Levassor<br />

Deman<strong>de</strong> <strong>de</strong> prières pour obtenir la grâce que sa femme consente à la séparation.<br />

Paris, 24 avril 1845<br />

Mon bien cher frère,<br />

Je viens une fois encore solliciter lʹaumône <strong>de</strong> vos prières afin dʹobtenir quelques<br />

grâces particulières que je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> en ce moment à Dieu.<br />

Jʹai commencé avant‐hier une neuvaine qui finira le 30 avril; si vous voulez bien<br />

jusque là dire à cette intention le Memorare, je vous en serais fort reconnaissant.<br />

Je désirerais gran<strong>de</strong>ment aussi que vous pussiez, à la fin <strong>de</strong> la neuvaine, dire la Ste Messe dans la même pensée; cʹest trop <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r, je le crains peut‐être et vous ne serez pas<br />

libre dʹaccé<strong>de</strong>r à mon vœu sous ce rapport. Vous en jugerez, mon bien cher frère, je ne<br />

saurais mieux faire que dʹabandonner la chose à votre tendre charité pour votre affection‐<br />

né frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Si le <strong>de</strong>rnier jour <strong>de</strong> la neuvaine nʹétait pas disponible pour vous, un autre se‐<br />

rait toujours bien précieux pour moi.<br />

122‐1 à M me Le <strong>Prevost</strong> (née <strong>de</strong> Lafond) 132<br />

Deman<strong>de</strong> <strong>de</strong> séparation. Il désire un consentement net et précis.<br />

132<br />

Des billets ou <strong>de</strong>s lettres envoyés à sa femme par MLP., les ASV. ne possè<strong>de</strong>nt que <strong>de</strong>s copies ou <strong>de</strong>s brouillons (au nombre <strong>de</strong> 9),<br />

mais les originaux <strong>de</strong>s réponses y sont répertoriés.<br />

166


30 avril 1845<br />

Chère amie,<br />

Le surcroît <strong>de</strong> mes travaux, lʹépuisement toujours plus grand <strong>de</strong> ma santé qui<br />

mʹoblige à suivre un autre régime <strong>de</strong> vie, enfin le besoin <strong>de</strong> définir plus nettement ma po‐<br />

sition trop partagée entre <strong>de</strong>s obligations diverses me déterminent définitivement à quitter<br />

lʹadministration et à prendre ma retraite. Je ne me suis point arrêté à ce parti sans <strong>de</strong> mû‐<br />

res réflexions. Jʹai bien examiné pour vous comme pour moi, quelles en seraient les consé‐<br />

quences et je me suis convaincu que, sans préjudice aucun pour vous, je mʹassurerais ainsi<br />

un peu <strong>de</strong> repos dont je sentais le plus pressant besoin.<br />

Lʹindépendance <strong>de</strong> vos ressources propres, lʹinsuffisance <strong>de</strong>s miennes pour rien<br />

ajouter <strong>de</strong> favorable à votre existence, la différence <strong>de</strong> nos habitu<strong>de</strong>s, la rareté <strong>de</strong> nos rap‐<br />

ports, tout me persua<strong>de</strong> que ma détermination ne changera, à vrai dire, rien à votre situa‐<br />

tion que je ne voudrais pour rien au mon<strong>de</strong> ni empirer ni troubler. La modicité <strong>de</strong> ma pen‐<br />

sion <strong>de</strong> retraite ne me laissera que le choix <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux moyens: vivre à la campagne, ou me<br />

retirer dans une communauté. Le premier nʹirait guère <strong>avec</strong> mes habitu<strong>de</strong>s et à mes be‐<br />

soins, je nʹy recourrais que forcément, si ma santé sʹaltérait <strong>de</strong> plus en plus. Le second seul<br />

me semble praticable et je mʹy suis arrêté définitivement. Mais jʹai besoin pour cela, chère<br />

amie, <strong>de</strong> votre assentiment et je lʹattends <strong>de</strong> votre bonne volonté comme <strong>de</strong> votre affection<br />

pour moi.<br />

Jʹai encore, ce me semble, quelque peu <strong>de</strong> bien à faire. Cʹest mon seul partage en ce<br />

mon<strong>de</strong> et ce sera aussi mon unique héritage. Ce qui me reste <strong>de</strong> forces et <strong>de</strong> jours y suffira<br />

peut‐être, je ne voudrais pas mʹy refuser. Pensez‐y je vous en prie, chère amie, un jour ou<br />

<strong>de</strong>ux, et faites‐moi quelques lignes <strong>de</strong> réponse bien nette et bien positive. Ce nʹest pas un<br />

consentement arraché et contraint que je <strong>de</strong>man<strong>de</strong>; il équivaudrait pour moi à un refus et<br />

je ne pourrais ni ne voudrais en faire usage; cʹest un assentiment libre, simple et cordial<br />

qui me mette lʹesprit en paix et nous laisse à lʹégard lʹun <strong>de</strong> lʹautre en union vraie et en<br />

bonne disposition <strong>de</strong> cœur.<br />

Si vous croyez, chère amie, pouvoir me donner un pareil assentiment je le recevrais<br />

<strong>avec</strong> reconnaissance; sʹil en était autrement, je nʹinsisterais pas, décidé par avance et quel‐<br />

les quʹen soient les conséquences, je porterais jusquʹau bout toutes les obligations qui me<br />

sont imposées.<br />

[L.P.]<br />

122‐2 à M me Le <strong>Prevost</strong> (née <strong>de</strong> Lafond)<br />

Sa réponse à sa <strong>de</strong>man<strong>de</strong> ne lʹa pas rassuré. MLP. veut quʹelle se prononce plus nettement.<br />

4 mai 1845<br />

Votre réponse, 133 chère amie, ne me tranquillise point. Je vous lʹai dit, je ne veux pas<br />

que ma détermination vous nuise en rien; si elle trouble votre repos, jʹy renoncerai.<br />

Je vous prie seulement dʹy bien réfléchir; si vous examinez les choses doucement et<br />

<strong>avec</strong> calme, je suis persuadé que vous partagerez mon avis.<br />

L. P.<br />

133<br />

"La manière dont vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z mon consentement ne permet pas <strong>de</strong> vous le refuser; ainsi faites donc selon vos désirs".<br />

A[ure] Le <strong>Prevost</strong>.<br />

167


122‐3 à M me Le <strong>Prevost</strong> (née <strong>de</strong> Lafond)<br />

Devant le silence <strong>de</strong> sa femme, MLP. sʹinquiète mais il insiste à nouveau.<br />

6 mai 1845<br />

Votre silence me fait penser, chère amie, que vous désapprouvez mon <strong>de</strong>ssein. Sʹil<br />

vous tourmente, nʹy pensons plus; nous chercherons dʹautres moyens.<br />

Vous paraissiez croire quʹen abandonnant mes occupations <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul,<br />

je pourrais retrouver <strong>de</strong>s forces et <strong>de</strong> la santé. Je crois bien ce moyen fort insuffisant, mais<br />

sʹil paraît définitivement nécessaire, je mʹy déci<strong>de</strong>rai. Encore une fois ne prenez, je vous<br />

prie, nulle inquiétu<strong>de</strong>, je ne changerai rien sans votre plein et entier assentiment. Le parti<br />

que je prendrais quelquʹil fût, sʹil <strong>de</strong>vait vous contrister, cesserait <strong>de</strong> me donner le repos et<br />

la tranquillité.<br />

L. P.<br />

122‐4 à M gr Angebault<br />

MLP. attend une réponse <strong>de</strong> sa femme. Ce sera selon le ʺbon plaisir <strong>de</strong> Dieuʺ. Zèle <strong>de</strong> M. Myionnet. Jalons<br />

pour lʹétablissement dʹune Sainte‐Famille à Angers.<br />

Paris, 20 mai 1845<br />

Monseigneur,<br />

Jʹai tardé à répondre à la lettre que Votre Gran<strong>de</strong>ur a bien voulu mʹadresser le 15 du<br />

mois <strong>de</strong>rnier, dans la pensée que je pourrais obtenir une solution relativement à ma posi‐<br />

tion et prendre <strong>de</strong> nouveau vos conseils paternels; mais jusquʹici je reste dans le doute, au‐<br />

cune décision précise ne mʹayant été donnée. Je ne brusquerai rien et jʹattendrai le bon<br />

plaisir <strong>de</strong> Dieu, sans mʹavancer témérairement sʹil ne veut pas mʹouvrir la voie, mais aussi,<br />

je lʹespère, sans reculer sʹil daignait y entrer <strong>avec</strong> moi.<br />

Notre bien cher f. Myionnet marche toujours courageusement dans lʹœuvre qui lui<br />

est confiée; le nombre <strong>de</strong> ses jeunes apprentis augmente, il sait sʹen faire aimer et respecter<br />

tout ensemble; tout fait présager un heureux résultat.<br />

Je joins ici, Monseigneur, une petite note que nous avons imprimée sur notre œuvre<br />

<strong>de</strong> la Ste‐Famille et je prie Votre Gran<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> vouloir bien y jeter les yeux. Nous serions<br />

heureux si cette petite association formée entre les familles pauvres ou <strong>de</strong> la classe ou‐<br />

vrière et qui commence à produire ici <strong>de</strong> si bons fruits, pouvait sous votre patronage bien‐<br />

veillant se former aussi à Angers. M. Myionnet pense quʹelle ne se répandra gran<strong>de</strong>ment<br />

quʹau moment où les frères seront en nombre suffisant pour la soutenir; je partage son avis<br />

car elle ne peut recevoir son complet développement quʹà lʹai<strong>de</strong> dʹhommes dévoués qui y<br />

consacrent une gran<strong>de</strong> part <strong>de</strong> leur vie et <strong>de</strong> leurs affections; mais sans arriver dès lʹabord<br />

à sa perfection, elle peut recevoir un commencement dʹexécution qui ne laisserait pas <strong>de</strong><br />

faire beaucoup <strong>de</strong> bien et aux pauvres ouvriers et à ceux qui leur donneraient <strong>de</strong>s soins.<br />

Votre Gran<strong>de</strong>ur jugera si, sauf les modifications que peuvent exiger les circonstances et les<br />

lieux, elle peut autoriser nos amis dʹAngers à diriger leurs efforts vers ce but.<br />

Jʹose, Monseigneur, réclamer toujours quelque part dans vos prières et vous prie<br />

dʹagréer lʹhommage du tendre et profond respect <strong>avec</strong> lequel je suis en N.S.<br />

Votre très humble et très obéissant serviteur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

168


122‐5 à M me Le <strong>Prevost</strong> (née <strong>de</strong> Lafond)<br />

MLP. se fait suppliant auprès <strong>de</strong> sa femme. Quʹelle lui communique sa décision, quelle quʹelle soit.<br />

1845<br />

Nous ne pouvons, chère amie, <strong>de</strong>meurer ainsi indéfiniment; dans notre intérêt à<br />

tous <strong>de</strong>ux, il est désirable que nous arrivions à une solution. Si, comme je le pense, je ne<br />

vous suis guère utile; si je puis sans désavantage pour vous chercher quelque repos et dis‐<br />

poser <strong>de</strong>s jours qui me restent, consentez‐y franchement, <strong>avec</strong> bienveillance et en me gar‐<br />

dant votre affection; sʹil en est autrement, déclarez‐le aussi nettement. Dès lors jʹabandon‐<br />

nerai, quoique à regret, une pensée que je crois, bonne, mais qui cesserait <strong>de</strong> lʹêtre si elle<br />

nʹavait votre entier assentiment.<br />

L.P.<br />

123 à M. Levassor<br />

Décès <strong>de</strong> Mme Delatre, la <strong>de</strong>rnière <strong>de</strong>s ʺtrois vieilles femmesʺ.<br />

Paris, 26 juin 1845<br />

Mon bien cher frère,<br />

Jʹai <strong>de</strong> tristes nouvelles à vous donner <strong>de</strong> notre bonne Mme Delatre. Avant‐hier au<br />

soir, on est venu mʹavertir quʹon lʹavait trouvée dans sa chambre sans connaissance, bien<br />

que respirant encore. Les voisins ne voyant rien <strong>de</strong> mieux à faire pour lui procurer <strong>de</strong><br />

prompts secours, lʹont fait conduire à lʹhospice <strong>de</strong> la Charité où elle a été immédiatement<br />

reçue. Je me suis empressé, dès hier, <strong>de</strong> mʹy rendre pour voir cette pauvre dame et lui as‐<br />

surer tous les soins que pouvait réclamer sa position; mais jʹai appris quʹelle était décédée<br />

sans avoir repris sa connaissance. On lui a donné lʹextrême‐onction, sans pouvoir rien faire<br />

<strong>de</strong> plus à cause <strong>de</strong> lʹétat où elle se trouvait.<br />

La droiture habituelle <strong>de</strong> son cœur, ses longues souffrances, sa résignation et lʹhabi‐<br />

tu<strong>de</strong> quʹelle avait <strong>de</strong>s choses saintes nous laissent pleins dʹespérance quʹelle trouvera près<br />

du Seigneur la paix et le bonheur dont elle a peu joui sur la terre.<br />

Nous avons pris les mesures nécessaires pour que cette pauvre femme soit mise en<br />

terre chrétiennement; son enterrement aura lieu <strong>de</strong>main, vendredi, à 8h.½ du matin. Je me<br />

hâte, mon bien cher frère, <strong>de</strong> vous donner ces détails, bien assuré du tendre et charitable<br />

intérêt que vous y prendrez. Je ne vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pas dʹoffrir le Très Saint Sacrifice pour le<br />

repos <strong>de</strong> son âme, sachant bien que votre première pensée se tournera <strong>de</strong> ce côté.<br />

Jʹai toujours pensée que votre conduite si dévoué et si charitable pour cette pauvre<br />

dame avait été une <strong>de</strong>s sources <strong>de</strong>s bénédictions que le Seigneur a versées sur vous et que<br />

<strong>de</strong> là peut‐être aussi était découlée la vocation sainte qui vous a fait le ministre du Sei‐<br />

gneur. Puisse la pauvre âme que vous avez tant <strong>de</strong> fois consolée intervenir à son tour près<br />

du Maître <strong>de</strong> toute consolation et vous obtenir ses plus chères bénédictions.<br />

Je me recomman<strong>de</strong> à vos bonnes prières et suis dans la charité <strong>de</strong> N.S.<br />

Votre bien affectionné frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

169


123‐1 à M gr Angebault<br />

Développement <strong>de</strong> la Communauté. M. Maignen a le désir dʹy entrer. M. Myionnet supporte seul le poids <strong>de</strong>s<br />

œuvres. Solidité <strong>de</strong> sa vocation. MLP. veut dissiper le doute sur le consentement donné par sa femme. Il<br />

sʹabandonne à Dieu, mais il vit ce temps <strong>de</strong>s commencements comme une douloureuse épreuve.<br />

Paris, 8 juillet 1845<br />

Monseigneur,<br />

M. lʹabbé Choyer134 nous ayant <strong>de</strong>puis assez longtemps déjà annoncé son prochain<br />

retour à Angers, nous avions différé jusque là lʹenvoi <strong>de</strong> nos réponses aux lettres que Votre<br />

Gran<strong>de</strong>ur a bien voulu nous écrire sous la même date, à M. Myionnet et à moi; mais les dé‐<br />

lais se prolongeant au‐<strong>de</strong>là <strong>de</strong> notre attente, nous ne voulons pas laisser plus longtemps<br />

interrompue une correspondance si douce et si précieuse pour nous.<br />

Jʹaimerais, Monseigneur, à vous donner ici quelques nouvelles bien décisives sur la<br />

constitution <strong>de</strong> notre chère œuvre, sur ses développements et son avenir, mais il plaît jus‐<br />

quʹici au Divin Seigneur, <strong>de</strong> laisser ses <strong>de</strong>sseins dans lʹombre et <strong>de</strong> nous exercer dans lʹat‐<br />

tente et la patience. Un excellent jeune homme dont la piété, le bon esprit, le caractère<br />

agréent beaucoup au bon f. Myionnet et à moi se présente pour le noviciat, mais il nʹest<br />

pas encore absolument libre et quelques liens <strong>de</strong> famille le retiennent encore pour un peu<br />

<strong>de</strong> temps. M. lʹabbé Beaussier qui le dirige et lui porte un tendre intérêt jugera sa vocation<br />

et indiquera le moment opportun dʹy répondre sʹil y a lieu.<br />

Pour ce qui me regar<strong>de</strong>, Monseigneur, rien encore nʹest bien précisé non plus; jʹai<br />

obtenu par écrit un oui que vous jugiez <strong>avec</strong> M. Beaussier <strong>de</strong> première nécessité, mais il ne<br />

mʹa pas paru certain que ce consentement fut donné sans mécontentement; jʹattends que<br />

les faits viennent lever toute espèce <strong>de</strong> doute à ce sujet; les prévisions sont favorables, et<br />

les déterminations le seront également selon toute apparence. Je me recomman<strong>de</strong> donc, <strong>de</strong><br />

nouveau, Monseigneur, à vos prières afin que Dieu daigne me manifester sa sainte Volon‐<br />

té.<br />

Quant à lʹexcellent Myionnet, première pierre posée par vous, Monseigneur, à notre<br />

édifice, il <strong>de</strong>meure jusquʹici ferme et soli<strong>de</strong> sur son assise; il prie, médite, étudie et travaille<br />

tour à tour, dans <strong>de</strong>s proportions assez heureuses, ce me semble, pour chaque exercice; il<br />

se plaint seulement un peu que lʹœuvre dont la charge lui est imposée ne soit pas, dès ce<br />

moment, embrassée par un ou <strong>de</strong>ux frères qui allégeraient son far<strong>de</strong>au. Bon nombre <strong>de</strong><br />

membres <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul lui prêtent, il est vrai, un concours plein <strong>de</strong><br />

zèle et <strong>de</strong> bienveillance mais ils ne peuvent être assez exacts et assez assidus à leurs offices<br />

respectifs pour que le bon frère nʹen gar<strong>de</strong> pas quelque sollicitu<strong>de</strong>; cela nuit, dit‐il, à son<br />

recueillement à lʹétu<strong>de</strong> et dans lʹoraison, bien quʹil consacre à lʹune et lʹautre le temps que<br />

votre sagesse avait marqué. Jʹespère bien que cet inconvénient ne sera que passager et que<br />

bientôt, dʹun côté ou dʹun autre, lʹai<strong>de</strong> dont il sent le besoin lui sera donné.<br />

Nous nʹavons gar<strong>de</strong> dʹailleurs, Monseigneur, <strong>de</strong> voir comme un but déjà atteint<br />

dans les commencements heureux du patronage; nous ne saurions nous arrêter là et y voir<br />

le terme <strong>de</strong> nos efforts; cette œuvre comme tous les autres travaux qui nous pourraient<br />

advenir ne sera, je lʹespère, quʹun moyen pour réaliser la pensée bien autrement haute et<br />

sérieuse qui remplit nos cœurs; mais nous faisons tous les jours lʹépreuve quʹen pareille<br />

134 Directeur <strong>de</strong>s ateliers St-Joseph à Angers, il fournira en 1855 la statue <strong>de</strong> la Vierge <strong>de</strong>stinée au sanctuaire <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette.<br />

Grand ami <strong>de</strong> l'Institut, il aura le désir d'y rattacher son œuvre mais le projet n'aboutira pas. Il participera au Congrès <strong>de</strong>s Œuvres<br />

qui se tiendra à Angers en août 1858.<br />

170


voie le Dieu jaloux laisse peu dʹaction propre à ceux quʹil daigne y introduire, nous mar‐<br />

chons pas à pas, comme il nous mène, sans quʹil dépen<strong>de</strong> <strong>de</strong> nous dʹaller plus vite et <strong>de</strong><br />

maîtriser les choses. En cherchant bien, en examinant scrupuleusement le passé, nous ne<br />

trouvons rien dʹomis, rien <strong>de</strong> négligé volontairement, rien que nous <strong>de</strong>vions regretter<br />

comme échappé par notre faute et par manque <strong>de</strong> vigilance; peut‐être le Seigneur veut‐Il<br />

nous montrer jusquʹici notre faiblesse et notre impuissance, et se réserve‐t‐Il, après en<br />

avoir reçu lʹaveu, <strong>de</strong> nous prêter sa force et dʹopérer <strong>avec</strong> nous.<br />

Vous Monseigneur, quʹIl a dès longtemps rendu puissant en oeuvres, quʹIl a mis<br />

parmi ses pontifes et les élus du sanctuaire, vous qui avez grâce et mission pour conseiller,<br />

exhorter et soutenir, daignez nous continuer vos précieux avis, nous encourager par votre<br />

charité, et nous accor<strong>de</strong>r surtout vos prières; <strong>avec</strong> un pareil appui, nous ne défaillirons<br />

point, nous <strong>de</strong>meurerons dans la sainte confiance <strong>de</strong>s apôtres au Cénacle et à quelquʹheure<br />

que lʹEsprit <strong>de</strong>scen<strong>de</strong>, nos âmes seront ouvertes pour le recevoir.<br />

Veuillez agréer, Monseigneur, lʹhommage du respect et <strong>de</strong> la profon<strong>de</strong> reconnais‐<br />

sance <strong>avec</strong> lesquels je suis<br />

Votre très humble et très obéissant serviteur et fils en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

124 à M. Levassor<br />

Obsèques <strong>de</strong> Mme Delatre.<br />

Paris, 11 juillet 1845<br />

Mon bien cher frère,<br />

Les <strong>de</strong>rniers <strong>de</strong>voirs ont été rendus chrétiennement et <strong>avec</strong> toute convenance à vo‐<br />

tre pauvre Mme Delatre. Lʹisolement <strong>de</strong> cette malheureuse femme sʹest du reste gran<strong>de</strong>‐<br />

ment fait sentir dans cette triste circonstance; peu à peu, presque tous ceux qui lʹavaient<br />

connue, ayant quitté ou ce mon<strong>de</strong> ou Paris, il ne sʹest trouvé à la messe <strong>de</strong> son enterrement<br />

que la belle‐sœur <strong>de</strong> M. Pianet, un bon jeune homme qui la visitait pour la Société <strong>de</strong> St‐<br />

Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul et moi. Après la messe, jʹai dû forcément me rendre à mon ministère, le<br />

bon jeune homme a donc été chargé dʹescorter le convoi. Seul et chapeau bas, il a suivi à<br />

pied le char et a présidé à tous les détails <strong>de</strong> la cérémonie.<br />

Par ses soins un petit grillage <strong>avec</strong> une croix marquera la place où la pauvre dame<br />

est établie jusquʹau <strong>de</strong>rnier jour; ses enfants et vous, cher frère, qui étiez plus quʹun fils<br />

pour elle saurez donc où la retrouver.<br />

Je ne sais où est présentement son fils; si vous connaissez sa rési<strong>de</strong>nce, ce serait une<br />

bonne action <strong>de</strong> lʹinformer du décès <strong>de</strong> sa mère. Elle a laissé un petit mobilier dont la va‐<br />

leur sera absorbée par les frais, si les ayant‐droit tar<strong>de</strong>nt trop à se présenter.<br />

Nous nʹavons pu dʹailleurs obtenir le remboursement dʹaucune <strong>de</strong> nos avances pour<br />

les frais <strong>de</strong> lʹenterrement etc. qui se sont élevés à 55f.<br />

Si vous le trouvez bon, cher frère, vous prendrez votre part, une somme équivalente<br />

à celle que vous étiez au moment <strong>de</strong> mʹenvoyer, cʹest‐à‐dire 25f. Nous répartirons le reste<br />

<strong>de</strong> notre mieux.<br />

Jʹai bien regretté <strong>de</strong> vous avoir vu si brièvement lors <strong>de</strong> votre <strong>de</strong>rnier voyage, à<br />

peine avons‐nous pu échanger quelques paroles dʹaffection; suppléons, cher ami, à tout ce<br />

qui nous a manqué, <strong>de</strong> ce côté, en priant lʹun pour lʹautre. Durant la neuvaine qui sʹouvrira<br />

171


la veille <strong>de</strong> la fête <strong>de</strong> saint Vincent <strong>de</strong> Paul, jʹaurai particulièrement besoin <strong>de</strong> vos pieux<br />

souvenirs <strong>de</strong>vant Dieu; je les sollicite <strong>avec</strong> une vive instance et vous promets, <strong>de</strong> mon côté,<br />

<strong>de</strong> ne pas vous mettre en oubli.<br />

A vous tendrement en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

124‐1 à M. Bailly<br />

Vente <strong>de</strong> livres (Vie <strong>de</strong> saint Vincent <strong>de</strong> Paul) distribués par la librairie Périsse.<br />

14 juillet 1845<br />

M. Le <strong>Prevost</strong> a lʹhonneur dʹoffrir à M. Bailly ses sentiments respectueux et dévoués<br />

et lui remet 107f.50 provenant <strong>de</strong>s livres Périsse. Il ne reste plus à percevoir <strong>de</strong> ce côté<br />

quʹune quarantaine <strong>de</strong> francs, que M. Le <strong>Prevost</strong> espère toucher aussi, successivement,<br />

afin <strong>de</strong> mener lʹopération à sa conclusion.<br />

125 à M. Demuison 135<br />

Sollicite son ai<strong>de</strong> pour les chants <strong>de</strong> la Sainte‐Famille.<br />

Paris, 13 septembre 1845<br />

Monsieur et cher confrère,<br />

Je rappelle à votre souvenir lʹaimable promesse que vous mʹavez faite dʹaccompa‐<br />

gner les chants <strong>de</strong> notre Sainte‐Famille à la réunion <strong>de</strong> <strong>de</strong>main et je vous remercie dʹavance<br />

<strong>de</strong> ce nouveau témoignage dʹintérêt pour cette petite œuvre. Je me ferais scrupule toute‐<br />

fois <strong>de</strong> ne pas vous dire que notre confrère, M. Van<strong>de</strong>nbrule, notre accompagnateur ordi‐<br />

naire, a renoncé à son voyage à Versailles et quʹil ne serait pas impossible dʹobtenir son as‐<br />

sistance si vous le trouviez désirable pour votre convenance personnelle; autrement, il ne<br />

sera pas fâché dʹavoir un jour <strong>de</strong> congé et vous saura gré dʹavoir bien voulu le remplacer.<br />

Veuillez croire, mon cher confrère, à tous mes sentiments les plus dévoués.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

125‐1 à M me Le <strong>Prevost</strong> (née <strong>de</strong> Lafond)<br />

Remerciements pour avoir donné son accord à leur séparation.<br />

15 septembre 1845<br />

Je nʹespère pas être heureux ainsi que vous le dites, chère amie, mais ma santé si<br />

fort affaiblie <strong>de</strong>puis une année, ne pouvant me promettre désormais une bien longue car‐<br />

rière, jʹai désiré consacrer le peu <strong>de</strong> temps qui me reste à la prière et aux œuvres <strong>de</strong> charité.<br />

Vous voulez bien me le permettre 136 , je vous en remercie cordialement car je nʹeusse<br />

jamais pris sur moi <strong>de</strong> franchir ce pas sans un sincère assentiment <strong>de</strong> votre part.<br />

135 Confrère <strong>de</strong> St-Vt-<strong>de</strong>-Paul.<br />

136 La réponse <strong>de</strong> M me Le <strong>Prevost</strong> était enfin arrivée le 9 septembre 1845. "Monsieur, je ne m'oppose point à la séparation que vous<br />

me proposez, puisque ce parti est le seul qui paraisse pouvoir vous rendre heureux et vous permettre <strong>de</strong> continuer les œuvres auxquelles<br />

vous vous êtes consacré. Je consens donc à cette séparation. (…)".<br />

172


Les choses dʹintérêt ne sauraient faire <strong>de</strong> difficulté entre nous, je vous rendrai vos<br />

inscriptions et, dès que le moment du remboursement sera venu, je prendrai les mesures<br />

que vous jugerez convenables relativement aux 15 000f placés.<br />

L. P.<br />

125‐2 à M gr Angebault<br />

MLP. a obtenu le consentement formel <strong>de</strong> sa femme. ʺSans rien brusquerʺ, il se prépare à toucher au but espé‐<br />

ré: se donner tout à Dieu et aux œuvres <strong>de</strong> charité.<br />

Paris, 17 septembre 1845<br />

Monseigneur,<br />

Les affaires <strong>de</strong> notre pauvre petite œuvre si lentes jusquʹici dans leurs progrès,<br />

viennent, nous le pensons, <strong>de</strong> faire un pas. Jʹai obtenu le consentement formel que je dési‐<br />

rais et je puis maintenant <strong>avec</strong> sécurité <strong>de</strong> cœur préparer mon renoncement au mon<strong>de</strong><br />

pour partager les exercices et les travaux <strong>de</strong> lʹexcellent M. Myionnet. M. lʹabbé Beaussier<br />

dont je suis exactement les conseils désire que mon entrée dans lʹœuvre se ménage dou‐<br />

cement et sans rien brusquer; je vais donc aviser <strong>avec</strong> ménagement aux moyens <strong>de</strong> faire li‐<br />

qui<strong>de</strong>r ma retraite et, ce point obtenu, je me rapprocherai peu à peu <strong>de</strong> mon but définitif.<br />

Permettez‐moi, Monseigneur, <strong>de</strong> solliciter encore le précieux concours <strong>de</strong> vos priè‐<br />

res dont jʹai plus que jamais besoin en ce moment; je semble toucher au sacrifice que jʹai<br />

souhaité <strong>de</strong>puis tant dʹannées et jʹespère en la grâce <strong>de</strong> Dieu pour le consommer <strong>avec</strong> joie.<br />

Toutefois un si grand changement dans la vie ne se fait pas sans émotion et tremblement;<br />

on a toujours <strong>de</strong>s liens à briser, on craint <strong>de</strong>s froissements; on a <strong>de</strong> nouveaux engagements<br />

à prendre, <strong>de</strong> grands <strong>de</strong>voirs à embrasser, on a peur <strong>de</strong> sa faiblesse et <strong>de</strong> son insuffisance.<br />

Daigne le divin Seigneur que vous prierez, Monseigneur, pour un <strong>de</strong> vos enfants, mʹac‐<br />

cor<strong>de</strong>r sa lumière, sa force et son amour.<br />

Veuillez agréer, Monseigneur, la nouvelle expression du profond respect et <strong>de</strong> la<br />

tendre reconnaissance <strong>avec</strong> lesquels je suis<br />

Votre très humble et très obéissant serviteur en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

125‐3 à M me Le <strong>Prevost</strong> (née <strong>de</strong> Lafond)<br />

MLP. est prêt à renoncer à son projet <strong>de</strong> séparation, si sa femme le lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>.<br />

[1845]<br />

M me Rullier me dit, chère amie, que vous rendant visite, elle vous a trouvée fort<br />

triste et que vous sembliez considérer le parti que nous avons pris comme fâcheux pour<br />

vous et pour moi. Je ne mʹy suis déterminé quʹen me croyant entièrement inutile pour<br />

vous et dans la conviction que séparer nos <strong>de</strong>meures ne serait, à vrai dire, presque rien<br />

changer à nos relations.<br />

Une épreuve <strong>de</strong> presque douze années nous a prouvé, ce me semble, que la diffé‐<br />

rence absolue <strong>de</strong> nos sentiments, <strong>de</strong> nos vues et <strong>de</strong> nos habitu<strong>de</strong>s ne pouvait nous promet‐<br />

tre cette intimité douce et constante, cette intelligence <strong>de</strong>s cœurs qui rend seule la vie<br />

commune possible et désirable. Jʹai donc pensé que, sans briser, sans détriment pour lʹun<br />

173


ni pour lʹautre, nous pourrions vivre séparément et que nous replacerions même ainsi no‐<br />

tre existence dans les simples rapports dʹestime, <strong>de</strong> confiance et dʹaffection qui faisaient<br />

primitivement notre seul lien et dont nous nʹeussions peut‐être jamais dû sortir.<br />

Toutefois, comme je puis me tromper et que je ne suis pas seul juge dans cette cause<br />

qui nous est commune, je vous abandonne absolument la décision. Si la vie <strong>de</strong> bienveil‐<br />

lance et <strong>de</strong> tolérance réciproque que nous menions vous semble préférable à votre état ac‐<br />

tuel, je suis encore disposé, quelques raisons que jʹaie <strong>de</strong> prendre ma retraite, à renoncer à<br />

ce projet et à me conformer <strong>de</strong> tout point à vos vœux.<br />

125‐4 à M me Le <strong>Prevost</strong> (née <strong>de</strong> Lafond)<br />

Dispositions concernant le partage <strong>de</strong> leurs biens.<br />

2 octobre 1845<br />

Chère amie,<br />

Jʹai touché encore vos rentes pour cette fois. Jʹen remets la somme dans la bibliothè‐<br />

que <strong>avec</strong> les inscriptions; jʹy place aussi la clef du secrétaire afin que vous puissiez prendre<br />

ce que vous désirez dʹargenterie. Je nʹen ai pour ma part nul besoin et je désire que vous<br />

usiez <strong>de</strong> tout ce qui peut vous être commo<strong>de</strong>. Il en est <strong>de</strong> même du reste <strong>de</strong>s meubles; jʹen<br />

aurai toujours trop; ne craignez donc pas <strong>de</strong> me laisser au dépourvu et enlevez sans hési‐<br />

ter ce que vous trouverez à votre convenance.<br />

L. P<br />

126 à M. Levassor<br />

Vaines recherches pour lui trouver <strong>de</strong> lʹai<strong>de</strong>. MLP. écrira à Sœur Rosalie Rendu. Succession <strong>de</strong> la défunte M me<br />

Delatre .La mère <strong>de</strong> MLP. (née Duchatard), est atteinte dʹhémiplégie.<br />

Paris, 3 novembre 1845<br />

Très cher ami et frère,<br />

Jʹai fait <strong>de</strong>s recherches multipliées chez M. Dupanloup, Ledreuille, 137 chez les Frères,<br />

au Séminaire du St‐Esprit, aux Missions Etrangères, chez les Lazaristes, en un mot partout<br />

où jʹai vu quelque chance <strong>de</strong> succès; je nʹai réussi nulle part. Jʹen suis désolé, cher ami, car<br />

je comprends votre embarras: je continuerai mes perquisitions; mais la chose me semble <strong>de</strong><br />

plus en plus difficile et je crains <strong>de</strong> ne pas rencontrer juste ce quʹil faut, au moins dans un<br />

court délai. Avec du temps, un sujet convenable peut se rencontrer, bien que pourtant la<br />

position soit comme une sorte <strong>de</strong> transition qui convient à un nombre assez restreint <strong>de</strong><br />

sujets. Je vais prier <strong>de</strong> mon mieux la Sainte Vierge qui vous a toujours visiblement aidé <strong>de</strong><br />

venir encore en cette circonstance à votre ai<strong>de</strong>, afin <strong>de</strong> ne pas laisser en souffrance votre<br />

œuvre et toutes les jeunes âmes quʹelle intéresse si gran<strong>de</strong>ment.<br />

Je nʹai pas vu, cher ami, le fils <strong>de</strong> la pauvre Dame Delatre, je sais seulement quʹil est<br />

venu ici pour la succession <strong>de</strong> sa mère; jʹai appris aussi quʹon a encore retrouvé cachés et<br />

empaquetés dans la chambre <strong>de</strong> cette pauvre femme 1.300f en or dont lʹorigine remontait<br />

137 L'abbé Félix Dupanloup (1802-1878), supérieur du petit séminaire <strong>de</strong> St-Nicolas-du-Chardonnet, un <strong>de</strong>s chefs du catholicisme<br />

libéral. Evêque d'Orléans en 1849. Auteur d'ouvrages pédagogiques et catéchétiques. <strong>–</strong> François Ledreuille (1797-1860), principal<br />

orateur <strong>de</strong> l'Œuvre <strong>de</strong> St-François-Xavier. Ordonné prêtre le 17 mai 1845.<br />

174


évi<strong>de</strong>mment bien loin, au temps sans doute où elle était dans le commerce et faisait déjà<br />

<strong>de</strong>s réserves à lʹinsu <strong>de</strong> son mari. Le défaut <strong>de</strong> confiance dans la Provi<strong>de</strong>nce a toujours été<br />

la misère <strong>de</strong> notre pauvre protégée; lʹextrême faiblesse <strong>de</strong> sa santé, son isolement, son im‐<br />

puissance à se créer <strong>de</strong>s ressources lui font une sorte dʹexcuse que votre charité, mon bien<br />

cher frère, nʹaura gar<strong>de</strong> <strong>de</strong> méconnaître.<br />

Adieu, mon bien cher ami, et frère, jʹai bien besoin <strong>de</strong> vos prières, accor<strong>de</strong>z‐les moi<br />

généreusement.<br />

Je suis dans les Cœurs <strong>de</strong> Jésus et <strong>de</strong> Marie<br />

Votre tout dévoué frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je vais écrire à la Sœur Rosalie à laquelle je nʹavais pas songé pour notre jeune<br />

homme, elle aura peut‐être quelque sujet précieux.<br />

Je suis toujours dans le désir dʹaller faire une petite retraite près <strong>de</strong> vous, au com‐<br />

mencement <strong>de</strong> lʹannée, si jʹen ai la possibilité.<br />

Je recomman<strong>de</strong> vivement à vos prières ma bonne mère âgée <strong>de</strong> 83 ans qui vient su‐<br />

bitement dʹêtre frappée <strong>de</strong> paralysie <strong>de</strong> tout un côté du corps; cet acci<strong>de</strong>nt me donne <strong>de</strong><br />

gran<strong>de</strong>s inquiétu<strong>de</strong>s.<br />

126‐1 à M me Le <strong>Prevost</strong> (née <strong>de</strong> Lafond)<br />

Reconnaissance pour sa générosité à lui laisser du mobilier.<br />

3 novembre 1845<br />

Je vous remercie beaucoup, chère amie, dʹavoir laissé pour mon usage plusieurs <strong>de</strong><br />

vos meubles; cela me prouve que vous veillez toujours <strong>avec</strong> intérêt à ce qui peut mʹêtre<br />

utile et jʹen suis bien reconnaissant. Je ne voudrais pas cependant que vous en éprouviez<br />

aucune privation car les armoires qui sont dans lʹappartement suffiraient pleinement à<br />

tous mes besoins sans le secours <strong>de</strong>s autres meubles.<br />

La bibliothèque en particulier pourrait vous être utile, bien plus quʹà moi. Je serais<br />

bien aise que vous la prissiez, mes livres que jʹavais mis en <strong>de</strong>hors pouvant se placer dans<br />

les armoires. Jʹavais laissé sur les tablettes ceux <strong>de</strong>s ouvrages qui me paraissaient pouvoir<br />

vous convenir, le Chateaubriand en particulier que vous goûtez plus que les autres. Je re‐<br />

grette bien que vous ne les ayez pas enlevés et je vous prie <strong>de</strong> me dire si vous voulez que<br />

je vous les fasse porter.<br />

Je vous envoie dès ce moment le sucrier et quelques petits objets dʹargenterie qui ne<br />

me seraient dʹaucun usage. Jʹespère que vous ne refuserez pas <strong>de</strong> vous en servir puisque<br />

moi‐même jʹuserai, au moins jusquʹà mon déménagement, <strong>de</strong> plusieurs objets vous appar‐<br />

tenant.<br />

Jʹaurai à vous remettre ces jours‐ci les 2 000f <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Flers; son avoué mʹa écrit quʹil<br />

allait être en mesure <strong>de</strong> rembourser cette somme.<br />

Adieu, chère amie, gar<strong>de</strong>z‐moi votre bienveillance, jʹai beaucoup désiré cette conso‐<br />

lation, jʹespère quʹelle ne me sera point refusée. A vous bien cordialement.<br />

L. P.<br />

175


P.S. Je viens dʹapprendre que ma pauvre mère a été frappée ces jours‐ci <strong>de</strong> paralysie<br />

<strong>de</strong> tout un côté du corps; un pareil acci<strong>de</strong>nt à son âge me tourmente beaucoup. Si son état<br />

empirait, je partirais sur‐le‐champ. Elle se rappelle à votre souvenir.<br />

L. P.<br />

127 à M. Myionnet<br />

Nouvelles <strong>de</strong> sa mère. MLP. réaffirme son désir <strong>de</strong> vie commune.<br />

Duclair, 11 novembre 1845<br />

Mon bien cher frère,<br />

La tendre affection que vous avez la charité <strong>de</strong> mʹaccor<strong>de</strong>r vous fait désirer, jʹen suis<br />

assuré, <strong>de</strong> recevoir quelques lignes qui vous associent à mon espérance ou à mon afflic‐<br />

tion. Lʹétat où jʹai trouvé ma pauvre mère est bien grave et bien inquiétant; cependant la<br />

fièvre a été, <strong>de</strong>puis hier, un peu moins forte et la nuit a été plus calme; ses membres sont<br />

toujours dans un état <strong>de</strong> paralysie absolue et elle ne prend absolument rien que quelques<br />

cuillerées dʹeau <strong>de</strong> groseille et quelques grains <strong>de</strong> raisin. A son âge un pareil régime ne<br />

saurait durer longtemps sans <strong>de</strong> graves acci<strong>de</strong>nts. Nous sommes donc en gran<strong>de</strong> inquié‐<br />

tu<strong>de</strong> et craignons beaucoup un funeste événement. Du reste notre chère mala<strong>de</strong> a toute sa<br />

présence dʹesprit, jʹai pu tout à lʹheure lui faire une lecture pieuse quʹelle a écoutée et sui‐<br />

vie <strong>avec</strong> beaucoup dʹattention, cela me laisse encore quelque confiance quʹelle pourrait re‐<br />

prendre <strong>de</strong>s forces et nous être encore conservée un peu <strong>de</strong> temps; que la très sainte volon‐<br />

té du Seigneur sʹaccomplisse, lui seul sait le secret <strong>de</strong> nos âmes et discerne quand elles sont<br />

mûres pour le Ciel.<br />

Ma journée se passe en soins <strong>de</strong> tous les instants et je nʹai et nʹaurai sans doute du‐<br />

rant mon séjour ici que peu <strong>de</strong> recueillement, priez donc pour moi, mon bien cher frère,<br />

vous qui faites <strong>avec</strong> moi cause tellement commune que nos cœurs et nos âmes sont soli‐<br />

daires; priez aussi pour ma bien‐aimée mère, afin que tout événement quel quʹil soit,<br />

tourne à son avantage et soit un pas vers le Ciel.<br />

Je vous prie, mon bon frère, en écrivant à notre cher Seigneur dʹAngers <strong>de</strong> mʹexcu‐<br />

ser près <strong>de</strong> lui et <strong>de</strong> lui offrir mon respect, en lʹassurant que je vous reste toujours attaché<br />

et bien décidé à mʹunir à vous si Dieu daigne agréer mon sacrifice.<br />

Jʹécrirai à M. Maignen <strong>de</strong>main, je lʹespère, assurez‐le en attendant <strong>de</strong> ma tendre et<br />

chrétienne affection. Donnez aussi <strong>de</strong> mes nouvelles à ceux <strong>de</strong> nos amis qui sont près <strong>de</strong><br />

vous et recomman<strong>de</strong>z ma bonne mère à leurs prières.<br />

Adieu, mon bon frère, je me mets <strong>avec</strong> vous dans le coeur <strong>de</strong> notre divin Seigneur,<br />

afin dʹadoucir le regret bien sincère et bien vrai que me cause votre éloignement.<br />

A vous en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je vous prie, mon cher frère, <strong>de</strong> retirer <strong>de</strong> la salle <strong>de</strong> la bibliothèque <strong>de</strong> la Sainte‐<br />

Famille une sorte <strong>de</strong> petit portefeuille ouvert que vous connaissez. Il est près <strong>de</strong> la statue<br />

<strong>de</strong> la Sainte Vierge, <strong>de</strong>rrière une lampe; il contient quelques papiers qui me sont person‐<br />

nels et que je crois à propos <strong>de</strong> ne laisser quʹentre vos mains.<br />

176


128 à M. Maignen<br />

MLP. souffre <strong>de</strong> voir sa mère à toute extrémité, elle dont ʺla vie ne fut que travaux, sacrifices et dévouementʺ. Il<br />

reste uni à ses frères <strong>de</strong> Paris.<br />

Duclair, 12 novembre 1845<br />

Mon bien cher confrère,<br />

Mon départ a été si précipité que je nʹai pu avertir personne, sauf le f. Myionnet et<br />

M. Dufresne à qui jʹai écrit <strong>de</strong>ux mots, en hâte, pour lui remettre la conduite <strong>de</strong> nos petites<br />

œuvres. Il en était dʹautres encore, vous le savez bien, que jʹeusse aimé à prévenir, mais le<br />

temps mʹa manqué, je ne pouvais, dʹaprès la lettre que jʹavais reçue, mettre aucun retard.<br />

Le mé<strong>de</strong>cin qui nʹavait dʹabord pas vu <strong>de</strong> danger imminent dans lʹétat <strong>de</strong> ma pauvre mère<br />

et qui avait promis dʹavertir si la situation empirait avait, dimanche, déclaré que la fièvre<br />

était violente, que tous les symptômes <strong>de</strong>venaient plus graves et quʹil était temps <strong>de</strong> mʹap‐<br />

peler; ma sœur mʹécrivait donc que si je voulais revoir notre bonne mère, il fallait accourir;<br />

vous comprenez, cher confrère, quelle diligence jʹai dû mettre à mes dispositions <strong>de</strong> dé‐<br />

part; <strong>de</strong>ux heures après la réception <strong>de</strong> la lettre, jʹétais sur le chemin et le soir, à 6h.½,<br />

jʹétais près <strong>de</strong> ma mère. A mon arrivée la fièvre avait diminué, et jʹai pu en mʹapprochant<br />

doucement, voir notre pauvre mala<strong>de</strong> qui reposait assez paisiblement. Depuis lors elle est<br />

restée dans le même état, sans quʹon ose espérer, mais sans que tout semble non plus<br />

consommé. Bien quʹelle ait été saignée après lʹacci<strong>de</strong>nt, elle a encore <strong>de</strong>s forces, tant, pour<br />

son âge, sa constitution est vigoureuse; mais la paralysie <strong>de</strong> ses membres est sans amélio‐<br />

ration et si on ne parvient à lui faire prendre quelque peu <strong>de</strong> nourriture, elle va sʹépuiser<br />

entièrement. Jusquʹà présent elle nʹa <strong>de</strong> goût à rien, et, cʹest à grand peine si, à lʹai<strong>de</strong> dʹun<br />

chalumeau, on fait passer dans son gosier quelques gouttes <strong>de</strong> boissons rafraîchissantes. Je<br />

ne la quitte presque pas et je partage <strong>avec</strong> ma sœur et sa fille les soins continuels quʹun état<br />

si pénible <strong>de</strong>man<strong>de</strong>. Vous avez fait dans votre maison une trop longue épreuve dʹune af‐<br />

fliction presque semblable pour que jʹaie rien, cher ami, à vous apprendre à ce sujet, je ne<br />

mʹen faisais pas pour moi une idée assez exacte et jʹapprécie mieux encore maintenant les<br />

soins et le dévouement dont vous avez entouré votre pauvre père.<br />

Une gran<strong>de</strong> consolation toutefois nous est laissée, cʹest que notre chère mala<strong>de</strong> a<br />

gardé toute se présence dʹesprit et que son cœur nʹa point souffert <strong>de</strong> lʹaffaiblissement du<br />

corps. Le matin, elle me fait mettre à genoux près <strong>de</strong> son lit et, pendant que je récite la<br />

prière à haute voix elle la suit et la répète même <strong>avec</strong> moi; le soir, je remplis le même <strong>de</strong>‐<br />

voir <strong>avec</strong> une gran<strong>de</strong> douceur pour elle. Dans la journée je lui fais une lecture <strong>de</strong> piété<br />

quʹelle entend et goûte <strong>avec</strong> le même intérêt; <strong>de</strong> temps en temps, elle prie tout haut et <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong> à Dieu <strong>de</strong> prendre ses souffrances patiemment et en esprit <strong>de</strong> pénitence. Je nʹai pas<br />

besoin <strong>de</strong> vous dire cher ami, combien <strong>de</strong> pareils dispositions mʹédifient et me consolent;<br />

elles sont le fruit dʹune longue vie <strong>de</strong> travaux, <strong>de</strong> sacrifices et <strong>de</strong> continuels dévouements;<br />

ma bonne mère ne sʹest jamais recherchée en rien, elle ne pensait quʹà faire le bien, à être<br />

utile aux autres, à employer son temps pour quelque bonne fin, et surtout à glorifier Dieu<br />

quʹelle servait <strong>avec</strong> une admiration simplicité.<br />

Je ne saurais vous dire si mon absence se prolongera beaucoup; cela dépend entiè‐<br />

rement <strong>de</strong> la marche que va suivre la maladie <strong>de</strong> notre bonne mère; sʹil plaît à Dieu <strong>de</strong> la<br />

rappeler à Lui, je ne voudrais pas la laisser ni abandonner ma sœur dans un pareil mo‐<br />

ment; si, au contraire, la bonne constitution <strong>de</strong> notre chère mala<strong>de</strong> prolonge encore son<br />

177


existence, je voudrais avant mon départ la voir un peu remise et hors <strong>de</strong> danger. Jʹattends,<br />

et remets toutes choses aux mains sages et paternelles <strong>de</strong> notre divin Seigneur.<br />

Au milieu <strong>de</strong> mes peines et <strong>de</strong> mes inquiétu<strong>de</strong>s, cher ami, je ne laisse pas dʹavoir <strong>de</strong><br />

tendres souvenirs pour ceux que jʹai quittés et pour vous plus que pour les autres; je pense<br />

à vous le matin à la S te Messe et en beaucoup dʹautres temps encore; pensez aussi à moi, à<br />

ma pauvre mère surtout et gar<strong>de</strong>z‐moi cette douce et tendre affection que vous me savez<br />

si nécessaire. Ecrivez‐moi bientôt donnez‐moi <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> nos amis et <strong>de</strong> nos petites<br />

œuvres qui ne resteront pas en souffrance, je lʹespère, soutenues quʹelles seront par le zèle<br />

et la charité <strong>de</strong> nos confrères. Veillez‐y en particulier, voyez <strong>avec</strong> MM. Boutron, Dufresne<br />

et Taillandier 138 si tout va bien, si nos mala<strong>de</strong>s en particulier et les catéchismes du soir ne<br />

sont pas abandonnés. Allez voir aussi le f. Myionnet qui se trouve délaissé et que je re‐<br />

comman<strong>de</strong> à votre fraternelle affection.<br />

Adieu, cher ami, je mʹunis à vous dans les Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Présentez mon respect à votre bonne mère.<br />

129 à M. Levassor<br />

Nouvelles <strong>de</strong> la santé déclinante <strong>de</strong> sa mère. Comment éprouver la vocation et les aptitu<strong>de</strong>s intellectuelles <strong>de</strong>s fu‐<br />

turs membres <strong>de</strong> son Institut.<br />

Duclair, 13 novembre 1845<br />

Mon bien cher frère,<br />

Je nʹai pu répondre moi‐même à votre lettre; <strong>de</strong> tristes nouvelles que jʹai reçues <strong>de</strong><br />

Normandie mʹont obligé à partir précipitamment pour soigner ma pauvre mère qui vient<br />

dʹêtre frappée <strong>de</strong> paralysie <strong>de</strong> tout un côté du corps; on mʹavertissait que le mé<strong>de</strong>cin, après<br />

avoir déclaré dʹabord quʹil nʹy avait pas <strong>de</strong> danger immédiat, avait récemment reconnu<br />

que les acci<strong>de</strong>nts <strong>de</strong>venaient plus graves et quʹil nʹy avait pas <strong>de</strong> temps à perdre pour me<br />

faire venir. Vous jugez, cher ami, <strong>avec</strong> quelle hâte je suis parti, <strong>de</strong>ux heures après la récep‐<br />

tion <strong>de</strong> la lettre, jʹétais sur le chemin et le soir à 6h. 1/2 , jʹarrivais près <strong>de</strong> notre chère mala<strong>de</strong>.<br />

Je lʹai trouvée un peu soulagée, ou du moins <strong>avec</strong> une fièvre moins violente, mais toujours<br />

dans le même état <strong>de</strong> paralysie, et sans aucun effort <strong>de</strong> la nature, une énergie intérieure<br />

qui pourrait nous rassurer. Depuis 20 jours, ma pauvre mère âgée, vous le savez, <strong>de</strong> 83<br />

ans, nʹa rien pris absolument que quelques cuillerées <strong>de</strong> boisson rafraîchissante qui pas‐<br />

sent bien difficilement et sans aucun goût. Le mé<strong>de</strong>cin ne me dissimule pas que cet état ne<br />

saurait se prolonger sans épuiser le peu <strong>de</strong> forces qui restent à la mala<strong>de</strong> et je vois bien<br />

moi‐même que la situation est grave, mais je remets tout aux mains du Seigneur qui nous<br />

envoie et nous rappelle à son gré pour sa gloire et notre bonheur. Ma bonne mère a du<br />

reste gardé toute sa présence dʹesprit; le matin elle me fait mettre à genoux près <strong>de</strong> son lit<br />

pour lui dire à haute voix une petite prière quʹelle suit et quʹelle répète même <strong>avec</strong> moi; le<br />

soir, je remplis le même <strong>de</strong>voir <strong>avec</strong> une gran<strong>de</strong> consolation pour elle et dans la journée je<br />

lui fais une lecture pieuse quʹelle goûte aussi beaucoup. Ces dispositions et la vie labo‐<br />

138 Confrères <strong>de</strong> St-Vt-<strong>de</strong>-Paul. - Henri Taillandier (1821-1889), alors membre <strong>de</strong> la conférence St-Sulpice, plus tard prêtre et curé<br />

<strong>de</strong> Saint-Augustin à Paris, resta toute sa vie un grand ami <strong>de</strong> MLP. Se remémorant l'année 1845-46 <strong>avec</strong> MLP., il écrira : "Cette<br />

année passée auprès <strong>de</strong> ce doux et évangélique docteur qui me servait <strong>de</strong> gui<strong>de</strong> en toutes choses, peut équivaloir au gra<strong>de</strong> <strong>de</strong> bachelier<br />

en bonnes oeuvres". (Un homme <strong>de</strong> bien, M. <strong>de</strong> Montrond, p.42). Ses parents furent parmi les insignes bienfaiteurs <strong>de</strong> la<br />

Communauté naissante.<br />

178


ieuse et chrétienne <strong>de</strong> mon excellente mère me remplissent dʹespérance, sinon pour le<br />

temps, du moins pour lʹéternité. Je recomman<strong>de</strong>, cher ami, tout particulièrement cette<br />

chère mala<strong>de</strong> à vos prières et je suis bien assuré quʹelles ne sauraient lui manquer.<br />

M. <strong>de</strong> Messey, cher ami, a dû vous écrire <strong>de</strong> nouveau pour vous donner tous les dé‐<br />

tails que vous pouvez désirer sur le sujet quʹil vous a proposé. Je lʹen ai prié, au moins par<br />

un mot que je lui ai écrit en hâte avant mon départ. Le p. Milleriot, jésuite, 139 qui connaît ce<br />

jeune homme, pense quʹil y a chez lui <strong>de</strong>s indices dʹune vocation non encore bien définie et<br />

quʹil pourrait passer utilement près <strong>de</strong> vous un an ou <strong>de</strong>ux pour sʹéclairer plus complète‐<br />

ment. Un jeune ecclésiastique, que sa santé empêche <strong>de</strong> rester au Séminaire du St‐Esprit<br />

où il était entré, mʹ a écrit aussi la veille <strong>de</strong> mon départ quʹil se déci<strong>de</strong>rait à se rendre près<br />

<strong>de</strong> vous, si vous vouliez lʹagréer. Je ne le connais pas, mais il mʹa été présenté par un prêtre<br />

respectable; jʹai répondu que vous aviez dʹautres propositions dont il fallait attendre lʹis‐<br />

sue; enfin jʹai fait la même réponse à un jeune laïc que mʹa envoyé M. lʹabbé Ledreuille. Je<br />

manque entièrement <strong>de</strong> renseignements sur lui et ce serait une affaire à instruire attenti‐<br />

vement sur les lieux; son extérieur a lʹair assez satisfaisant. Sa figure est fatiguée, je ne sais<br />

si cʹest à la maladie, aux privations ou à quelque autre cause quʹil faut lʹattribuer, je nʹai pu<br />

lʹinterroger assez pour en juger. Durant mon absence, je ne semble guère propre, à mon<br />

grand regret, cher ami, à suivre cette affaire, pourtant je serais disposé à faire par corres‐<br />

pondance tout ce que vous croiriez utile.<br />

M. <strong>de</strong> Messey (le C te Henri <strong>de</strong> Messey, 82 rue <strong>de</strong> Grenelle) fera ce que vous lui direz,<br />

cher ami, du petit novice que la Provi<strong>de</strong>nce vous a envoyé pour notre maison; je vous re‐<br />

mercie <strong>de</strong> la tendre sollicitu<strong>de</strong> que vous montrez à ce sujet et jʹaugure bien dʹun frère qui<br />

nous arrivera par vos mains. Je crois, cher ami, quʹil est désirable que ce bon petit enfant<br />

cultivé un an ou <strong>de</strong>ux par vous achève dʹéprouver sa vocation. Je trouve dʹailleurs que<br />

cʹest une bonne pensée que <strong>de</strong> lui faire continuer ses étu<strong>de</strong>s, sʹil a quelque aptitu<strong>de</strong> pour<br />

cela; la science est un instrument précieux qui sert gran<strong>de</strong>ment à faire le bien, jamais les<br />

nôtres nʹen auront trop, sʹils sont humbles en même temps quʹéclairés; tâchez, cher ami,<br />

que votre petit novice soit lʹun et lʹautre à la fois et nous lʹaccueillerons plus tard à bras<br />

ouverts.<br />

Nous nʹavons rien <strong>de</strong> nouveau pour cette œuvre, cher ami, sinon quʹelle a sa vie<br />

dans nos cœurs et, je le crois aussi, en plusieurs autres âmes; mais cela marchera lentement<br />

<strong>avec</strong> épreuve et peine, nous nous y attendons, et nous aurons, je lʹespère, <strong>de</strong>s grâces en<br />

proportion <strong>de</strong>s difficultés. Deman<strong>de</strong>z‐le à Dieu, cher frère, au sein duquel nous avons re‐<br />

mis cette pensée <strong>avec</strong> un ar<strong>de</strong>nt désir <strong>de</strong> la voir tourner à sa gloire.<br />

A vous bien tendrement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

130 à M. Maignen<br />

Détails sur l’état <strong>de</strong> santé <strong>de</strong> sa mère mourante. Affection paternelle pour son fils <strong>de</strong> prédilection. Conseils sur les<br />

oeuvres à faire pendant son absence. Voir à bien ʺconcerterʺ les dispositions <strong>de</strong>s uns et <strong>de</strong>s autres.<br />

Duclair, 17 novembre 1845<br />

Laissez‐moi, très cher ami, vous parlez un peu <strong>de</strong> ma pauvre mère et puis après je<br />

vous gron<strong>de</strong>rai tendrement tant bien que mal, car notre chère mala<strong>de</strong>, dix fois par minute,<br />

139 Apôtre infatigable <strong>de</strong> l'Œuvre <strong>de</strong> la Sainte-Famille et <strong>de</strong> la Société St-F.-Xavier.<br />

179


mʹappelle et réclame mes soins. Cette bonne mère, cher ami, nʹest pas du tout en état meil‐<br />

leur, tant sʹen faut, ses forces sʹéteignent, elle use les restes dʹune constitution vigoureuse,<br />

mais sans que rien n’alimente le foyer <strong>de</strong> vie, puisquʹelle repousse toute nourriture <strong>avec</strong><br />

répugnance et dégoût. Hier, elle se sentait si épuisée, si abattue quʹelle ne pouvait rester<br />

un moment sans appui, il fallait que tour à tour et souvent tous les <strong>de</strong>ux à la fois ma sœur<br />

et moi <strong>de</strong>meurions près dʹelle pour la soutenir; elle appuyait, comme vous le faites, cher<br />

enfant, votre tête sur mon épaule, puis elle serrait nos mains dʹune façon si triste que jʹen<br />

avais le cœur navré, jʹai pleuré une partie du jour, voyant bien clairement que tout espoir<br />

dʹun rétablissement était vain et ne pouvant me résigner à une trop douloureuse sépara‐<br />

tion. Cette nuit elle a été plus calme et je la trouve ce matin un peu moins découragée. Ses<br />

dispositions <strong>de</strong> coeur <strong>de</strong>meurent toujours excellentes; <strong>de</strong> temps en temps, elle appelle<br />

Dieu et la S te Vierge à son secours et offre ses souffrances en expiation dʹune vie pourtant<br />

bien bonne, bien laborieuse et dʹune droiture constante bien rare aujourdʹhui. Ne vous las‐<br />

sez pas, cher enfant <strong>de</strong> prier <strong>avec</strong> le bon f. Myionnet pour cette pauvre créature que le Sei‐<br />

gneur soumet, je le pense, aux <strong>de</strong>rnières épreuves. Jʹaimais votre bon père, jʹaime votre<br />

mère, ayez vous aussi un peu <strong>de</strong> tendre charité pour mon excellente mère.<br />

Vous êtes un peu contristé, cher enfant, <strong>de</strong> nʹavoir pas eu les premières lignes que<br />

jʹai faites ici et vous me lʹavouez naïvement, ne sachant trop si cʹest contre vous que vous<br />

êtes fâché ou bien contre moi. Je vous sais gré, pauvre enfant, <strong>de</strong> votre franchise qui me<br />

charme toujours, vous le savez, et qui sauvera notre affection <strong>de</strong> tout malentendu fâcheux.<br />

Parlez en toute occasion, <strong>avec</strong> le même abandon, laissez votre vieux père mettre la main<br />

sur la blessure et soyez sûr quʹil ne manquera jamais <strong>de</strong> la guérir. Vous vous êtes affligé<br />

sans raison, cher enfant, le f. Myionnet a eu ma première lettre mais vous avez eu ma pre‐<br />

mière pensée, mes premiers, mes plus chers souvenirs. Voudriez‐vous changer votre part<br />

contre la sienne? Reposez‐vous sur moi, ami, du soin <strong>de</strong> vous faire votre lot dans mon af‐<br />

fection et si vous mʹaimez vraiment comme je le crois, veillez à ce que ma tendresse pour<br />

vous, trop facilement partiale et exclusive, reste dans une sage mesure qui nʹoffense ni<br />

Dieu, ni les hommes, ni mes <strong>de</strong>voirs. Jʹy travaille pour ma part constamment, mais je sens<br />

bien que lʹinclination naturelle et la pente du cœur mʹemportent encore trop souvent; cher<br />

enfant, soyez généreux et loin <strong>de</strong> mʹentraîner dans le sens mauvais, ai<strong>de</strong>z‐moi à <strong>de</strong>meurer<br />

ferme dans le bon. Ce nʹest quʹà ce prix que ma tendre prédilection pour vous vous restera<br />

fidèle et <strong>de</strong>meurera, pour vous comme pour moi, une douce, intime et précieuse consola‐<br />

tion. Quand je suis trop douloureusement affligé, ici qui croyez‐vous que jʹappelle au fond<br />

du cœur pour me consoler et adoucir mes peines?<br />

Jʹai reçu ici plusieurs lettres, laquelle pensez‐vous, enfant, que jʹattendisse <strong>avec</strong> le<br />

plus dʹimpatience? Quelle est celle aussi dont chaque mot, chaque pensée est tombée<br />

goutte à goutte comme une fraîche rosée au fond <strong>de</strong> mon cœur? Quelle est celle enfin que<br />

je nʹai voulu lire quʹune fois pour sacrifier à Dieu la joie trop douce que jʹeusse trouvée à la<br />

relire? Comment, cher enfant, ne savez‐vous pas tout cela? Comment le pauvre père est‐il<br />

obligé <strong>de</strong> vous lʹapprendre, honteux un peu <strong>de</strong> sa faiblesse et triste aussi <strong>de</strong> nʹêtre pas<br />

mieux <strong>de</strong>viné. Reprenez, cher enfant, votre sérénité; votre douce figure nʹest pas bien<br />

quand elle sʹentoure dʹun nuage dʹennui et <strong>de</strong> tristesse; le vieux père vous a dit un peu, un<br />

peu seulement <strong>de</strong> toutes ses tendresses pour vous, mettez cela sur votre mal et soyez gué‐<br />

ri.<br />

180


Jʹécris <strong>de</strong>ux mots que je mets sous ce pli pour M. Dufresne. Je nʹai pas <strong>de</strong> recom‐<br />

mandations à vous faire ni pour la conférence, ni pour la Sainte‐Famille, vous avez tous<br />

trop à cœur le maintien <strong>de</strong> ces chères œuvres pour ne pas réunir tous vos efforts pour les<br />

soutenir et les faire marcher. Je vous prie seulement <strong>de</strong> ne pas vous reposer les uns sur les<br />

autres <strong>de</strong>s soins à prendre; vous feriez bien <strong>de</strong> vous voir, <strong>de</strong> bien concerter les dispositions<br />

que vous croirez les meilleures et <strong>de</strong> mettre ensuite la main à lʹœuvre, chacun pour la part<br />

quʹil aura acceptée; jʹaurais bien du chagrin si le petit édifice que nous avons bâti si lente‐<br />

ment sʹébranlait pour un simple changement si peu notable dans sa construction; il nʹen<br />

sera rien, vous, cher enfant, et tous <strong>avec</strong> vous travaillerez <strong>de</strong> votre mieux et le Seigneur à<br />

qui vous offrirez vos soins daignera les secon<strong>de</strong>r et les bénir. Je désirerais que M. Roudé<br />

vît le p. Milleriot pour lʹavertir <strong>de</strong> mon absence et lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r ses prières; il serait bon<br />

aussi que M. Taillandier eût la bonté <strong>de</strong> prévenir M. le Curé que la réunion <strong>de</strong> la Sainte‐<br />

Famille aura lieu dimanche et lui offrir en même temps mes souvenirs respectueux; je sol‐<br />

licite aussi pour ma mère les prières <strong>de</strong> notre bien‐aimé Pasteur. Pour la séance, M. Lama‐<br />

che, je lʹespère, ne refusera pas <strong>de</strong> parler; à son défaut, M. <strong>de</strong> Saint‐Chéron, si on lui écri‐<br />

vait sans retard, le ferait volontiers; ce <strong>de</strong>rnier prési<strong>de</strong>rait bien la séance si, contre mon dé‐<br />

sir, M. Dufresne ou quelque autre ne voulait pas sʹen charger; M elle Barbe, a, mʹa‐t‐elle dit,<br />

une lettre intéressante dʹun missionnaire; on pourrait la lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r et voir sʹil y a lieu <strong>de</strong><br />

la lire. M. le Curé <strong>de</strong> St‐Merry avait promis <strong>de</strong> parler, on y pourrait songer pour cette fois<br />

ou pour une autre. M. <strong>de</strong> Lambel 140 , nʹest pas, je crois, à Paris. En résumé, vous avez <strong>de</strong>s<br />

éléments pour faire une bonne séance, vous ne manquez ni <strong>de</strong> zèle ni <strong>de</strong> volonté, vous<br />

mènerez donc tout à bien, jʹen ai la confiance; mardi, à lʹheure <strong>de</strong> la séance, je me suis mis<br />

<strong>de</strong>vant Dieu en union <strong>de</strong> coeur <strong>avec</strong> vous, dimanche je le ferai <strong>de</strong> toute mon âme égale‐<br />

ment. Embrassez le f. Myionnet <strong>de</strong> tout cœur pour moi; il mʹa écrit une bonne lettre dont je<br />

le remercierai moi‐même prochainement. Je le prie <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s bons et <strong>de</strong> visiter<br />

pour moi mes familles <strong>de</strong>s Missions: Louise Brunet, 12, rue Traverse, qui priera bien pour<br />

ma mère (1 pain, 1 vian<strong>de</strong>), la V ve Lecœur, 16, rue Traverse (2 pains et 20 sols que je ren‐<br />

drai au frère). Stalberger, 9, St‐Placi<strong>de</strong>, 3 pains tous les quinze jours; il faut le voir bientôt.<br />

Il me reste à vous recomman<strong>de</strong>r, cher enfant, la distribution <strong>de</strong>s livres, le mercredi<br />

soir, aux hommes à la bibliothèque; veillez à ce quʹelle se fasse bien exactement; cʹest es‐<br />

sentiel; M. Taillandier donnera la note pour les mala<strong>de</strong>s à recomman<strong>de</strong>r et enverra à<br />

temps ses lettres dʹinvitation.<br />

Recomman<strong>de</strong>z à M. Tulasne<br />

le jeune Laurent qui se prépare pour<br />

sa Première Communion à Noël.<br />

Adieu, cher enfant, je vous<br />

presse fort, bien fort contre mon<br />

cœur et suis tendrement votre vieux<br />

et affectionné père.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

140 Le comte Alexandre <strong>de</strong> Lambel (1814-1903) était l'ami le plus proche d'Armand <strong>de</strong> Melun et l'assista dans ses nombreuses initiatives<br />

charitables. Entré en en 1835 dans la Société <strong>de</strong> St-Vt-<strong>de</strong>-Paul, il fonda en 1838 le patronage St-<strong>Jean</strong>-du-Gros-Caillou et<br />

<strong>de</strong>vint membre du conseil <strong>de</strong> la Sainte-Famille. Ami et dévoué collaborateur <strong>de</strong> MLP., il en écrira une biographie "<strong>de</strong>stinée aux<br />

ouvriers": Vie <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong>, Paris-Auteuil. 1900.<br />

181


131 à M. Myionnet<br />

Comment la mère <strong>de</strong> MLP. se prépare à la mort. Il lui est impossible <strong>de</strong> la quitter pour revenir à Paris. Fête <strong>de</strong> la<br />

Présentation <strong>de</strong> Marie, à la rue du Regard, cet ʺasile béni que le Seigneur nous a donné pour abriter et mûrir un<br />

<strong>de</strong>ssein formé pour sa gloireʺ.<br />

Duclair, 21 novembre 1845<br />

Mon bien cher frère,<br />

Je mʹétais proposé <strong>de</strong> répondre plus tôt à votre bonne et aimable lettre dont la ten‐<br />

dre bienveillance mʹa beaucoup encouragé et soutenu dans la douloureuse épreuve que je<br />

supporte présentement; mon temps est si absorbé par les soins incessants quʹexige notre<br />

chère mala<strong>de</strong> que jʹai grand peine quand je commence une lettre interrompue et reprise<br />

vingt fois à la mener à fin.<br />

Ma pauvre mère, cher ami, nʹéprouve aucune amélioration dans son état, au<br />

contraire, elle sʹaffaiblit <strong>de</strong> jour en jour, ne prenant absolument aucune nourriture et nʹest<br />

soutenue que par les restes dʹune bonne et vigoureuse constitution. Jusquʹici, son esprit est<br />

parfaitement libre et ses dispositions <strong>de</strong> cœur excellentes; elle a <strong>de</strong>mandé hier <strong>avec</strong> tant<br />

dʹinstance que le sacrement dʹextrême‐onction lui fut donné que le bon curé <strong>de</strong> la paroisse,<br />

pour satisfaire à son pieux désir et vu sa gran<strong>de</strong> faiblesse qui laisse toujours craindre quel‐<br />

que acci<strong>de</strong>nt, a cru <strong>de</strong>voir lui conférer cette <strong>de</strong>rnière faveur <strong>de</strong> lʹEglise.<br />

Vous eussiez été édifié, cher ami, <strong>de</strong> la piété et <strong>de</strong> la résignation <strong>de</strong> notre pauvre<br />

mala<strong>de</strong>; dès le matin, elle mʹa appelé près dʹelle pour me dire en quelle intention elle allait<br />

recevoir le sacrement après lequel elle soupirait, elle voulait sʹoffrir à Dieu pour mourir ou<br />

pour vivre, selon sa très sainte volonté. Elle a répondu aux prières autant quʹelle a pu, du‐<br />

rant la cérémonie et sʹest remise ensuite <strong>de</strong> tout son cœur aux mains du Seigneur. Jʹoublie,<br />

en présence dʹune pensée si consolante, les angoisses <strong>de</strong> tous les instants que nous causent<br />

ses souffrances et son dépérissement. Je viens <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r encore au mé<strong>de</strong>cin, sʹil ne<br />

voyait nul espoir <strong>de</strong> rétablissement; aucun, dit‐il, je vous tromperais en parlant autrement;<br />

mais, ai‐je ajouté, cet état <strong>de</strong> langueur ne peut‐il se prolonger assez pour que je puisse re‐<br />

tourner à Paris au moins pour un peu <strong>de</strong> temps? Ce serait, répondit‐il, risquer <strong>de</strong> ne plus<br />

retrouver votre mère, une faiblesse peut survenir dʹun instant à lʹautre et nous lʹenlever<br />

subitement.<br />

Mon <strong>de</strong>voir ne me paraît pas douteux, dans une situation si critique je ne puis quit‐<br />

ter ma pauvre mère qui dʹailleurs me conjure à tout moment <strong>de</strong> ne pas lʹabandonner. Je<br />

crains seulement que mon administration que jʹai avertie en hâte du grave motif <strong>de</strong> mon<br />

départ précipité ne trouve mon absence trop longue. Invitez, je vous prie, cher ami, notre<br />

petit f. Maignen à voir à la sortie <strong>de</strong> son bureau M. Carré141 quʹil connaît bien, pour lui<br />

donner <strong>de</strong> mes nouvelles, lui dire lʹétat <strong>de</strong> danger permanent <strong>de</strong> ma pauvre mère et le<br />

prier <strong>de</strong> répondre à une lettre que je lui ai écrite, il y a déjà plusieurs jours.<br />

Deman<strong>de</strong>z encore au cher f. Maignen <strong>de</strong> passer chez mon portier pour y réclamer<br />

toutes mes lettres; il voudrait bien les ouvrir <strong>avec</strong> vous et vous jugeriez ensemble sʹil en est<br />

qui aient besoin <strong>de</strong> mʹêtre envoyées dʹurgence, afin que jʹy répondisse. Celles‐là M. Mai‐<br />

gnen les remettrait à M. Carré pour me les faire parvenir sous le couvert du Curé <strong>de</strong> Du‐<br />

clair. Les autres pourraient être remises à la Sainte‐Famille ou à la Conférence si elles<br />

141 Ami et collègue <strong>de</strong> MLP. au Ministère <strong>de</strong>s Cultes. M. Maignen, qui allait souvent chercher MLP. à la sortie <strong>de</strong> son bureau, avait<br />

fait ainsi sa connaissance.<br />

182


concernent lʹune ou lʹautre. Je joins ici un mot pour réclamer mes lettres chez mon portier,<br />

à qui M. Maignen donnera en même temps <strong>de</strong> mes nouvelles.<br />

Vous voulez bien, excellent frère, mʹassurer que mon absence vous cause quelque<br />

regret, je vous en remercie tendrement et vous assure que <strong>de</strong> mon côté je tourne bien <strong>de</strong>s<br />

fois par jour mon cœur et ma pensée vers notre petite maison <strong>de</strong> la rue du Regard; elle me<br />

semble comme un asile béni que le Seigneur nous a donné pour abriter et mûrir un <strong>de</strong>ssein<br />

formé pour sa gloire. Puissent nos cœurs correspondre assez à sa grâce pour écarter bien‐<br />

tôt tout obstacle à la réalisation définitive <strong>de</strong> notre projet. Je me tiens <strong>de</strong> cœur uni à vous et<br />

à lʹautre petit frère, autant quʹil dépend <strong>de</strong> moi, le matin, je vais à 7h. à la Sainte Messe, me<br />

souvenant <strong>avec</strong> gran<strong>de</strong> consolation quʹà la même heure vous êtes prosterné <strong>de</strong>vant Dieu à<br />

la chapelle <strong>de</strong> notre bien‐aimé patron. Aujourdʹhui surtout, fête <strong>de</strong> la Présentation <strong>de</strong> la<br />

Sainte Vierge, jʹai offert vous, le jeune frère, le brave Girard 142 et moi au Seigneur pour être<br />

tous dévoués au service du Seigneur <strong>avec</strong> le même abandon et le même amour que la<br />

Vierge Marie; si, comme je le pense bien, cher ami, vous avez fait, vous autres, la même of‐<br />

fran<strong>de</strong>, le Seigneur nous aura regardés <strong>avec</strong> miséricor<strong>de</strong> et daignera abréger le temps <strong>de</strong><br />

nos épreuves. Adieu, très cher ami, ce me sera une douce joie <strong>de</strong> vous revoir et <strong>de</strong> prier<br />

encore <strong>avec</strong> vous.<br />

A vous tendrement dans les Cœurs <strong>de</strong> J. et M. (Rappelez‐moi tout particulièrement<br />

au souvenir du bon Girard).<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Renvoyez, je vous prie, le jeune abbé qui vous est venu trouver à M. Henry <strong>de</strong> Mes‐<br />

sey n°82 rue Grenelle, qui correspond en mon absence <strong>avec</strong> M. Levassor, ou à M. Levassor<br />

lui‐même à Chartres.<br />

132 à M. Maignen<br />

Au chevet <strong>de</strong> sa mère qui se meurt. Dans son accablement, la pensée <strong>de</strong> M. Maignen le réconforte. Paternelles<br />

remontrances à son jeune frère trop sensible.<br />

Duclair, 28 novembre 1845<br />

Je vous écris encore, bien cher enfant, sans avoir rien <strong>de</strong> nouveau à vous dire sur<br />

lʹétat <strong>de</strong> ma pauvre mère; durant <strong>de</strong>ux jours, elle avait un peu moins souffert et nous<br />

avions presque espéré un peu, mais elle est retombée <strong>de</strong>puis dans une faiblesse encore<br />

plus gran<strong>de</strong> que précé<strong>de</strong>mment et sa douloureuse agonie recommence. Elle a <strong>de</strong>mandé<br />

que lʹextrême‐onction lui fût administrée et elle a reçu ce sacrement <strong>avec</strong> la piété et la rési‐<br />

gnation les plus édifiantes. Jusquʹici, elle gar<strong>de</strong> habituellement sa présence dʹesprit et peut<br />

élever encore son cœur à Dieu; mais, du reste, sa faiblesse et son épuisement sont tels<br />

quʹelle <strong>de</strong>meure indifférente à tout ce qui se fait autour dʹelle; elle ne se montre plus sensi‐<br />

ble à nos témoignages dʹaffection et nʹaspire plus quʹau repos, le sommeil suspendant un<br />

moment ses souffrances. Elle nʹaspire pas moins toutefois au grand et éternel sommeil qui<br />

mettra enfin le terme à ses maux; <strong>de</strong>puis hier, elle mʹa <strong>de</strong>mandé plusieurs fois <strong>de</strong> lui dire<br />

les prières <strong>de</strong>s agonisants; je lʹen ai dissuadée, ne voyant rien encore qui annonce lʹappro‐<br />

che assurée du <strong>de</strong>rnier jour, je lui ai récité seulement les litanies <strong>de</strong> la S te Vierge, salut <strong>de</strong>s<br />

infirmes et consolatrice <strong>de</strong>s affligés. Cependant le reste <strong>de</strong> ses forces sʹépuise visiblement,<br />

142 Jeune membre <strong>de</strong>s Œuvres qui, sans faire partie <strong>de</strong> la Communauté, aidait M. Myionnet à la rue du Regard.<br />

183


les quelques cuillerées <strong>de</strong> rafraîchissement quʹelle acceptait encore lui <strong>de</strong>viennent insup‐<br />

portables, elle ne prend plus rien quʹ<strong>avec</strong> dégoût et presque forcément. Voilà, cher enfant,<br />

la situation <strong>de</strong> ma pauvre mère; elle est comme, vous le voyez, bien triste, bien doulou‐<br />

reuse pour ceux qui lʹaiment si tendrement. Je ne quitte presque pas notre pauvre mala<strong>de</strong>,<br />

mais vous pouvez, cher enfant, être sans inquiétu<strong>de</strong> pour ma santé; hors quelques instants<br />

plus pénibles dans le service <strong>de</strong> notre bonne mère, ce quʹil lui faut ce sont <strong>de</strong>s soins assidus<br />

plutôt que fatigants, et si la vie trop renfermée que je suis contraint <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r ne me don‐<br />

nait un peu dʹinflammation, je nʹaurais presque aucune souffrance. Quant aux nuits, ma<br />

sœur se couche près du lit <strong>de</strong> notre mère et la sert quand il est besoin, je nʹai pu la déci<strong>de</strong>r<br />

à me cé<strong>de</strong>r sa place, bien quʹelle soit très fatiguée, parce quʹen beaucoup <strong>de</strong> soins je ne puis<br />

la suppléer.<br />

Si vous mʹinterrogez pour lʹesprit comme pour le corps, je vous avouerai, cher en‐<br />

fant, que je me sens <strong>de</strong>puis quelques jours triste et abattu, je prie <strong>de</strong> mon mieux et fais<br />

quelques bonnes lectures, mais la tribulation obsè<strong>de</strong> mon misérable cœur et dans ces lon‐<br />

gues heures passées au chevet <strong>de</strong> ma pauvre mère, les soucis déjà pesants <strong>de</strong> ma vie me<br />

reviennent encore plus accablants. Priez pour votre vieux père, mon bien‐aimé enfant, afin<br />

que ses croix lui <strong>de</strong>viennent salutaires et quʹil les porte en union <strong>avec</strong> lʹadorable croix du<br />

Sauveur.<br />

Au milieu <strong>de</strong> mes peines, votre douce et consolante affection, très cher enfant, me<br />

calme et met un peu <strong>de</strong> baume sur mes blessures. Aussi, je mʹen sens bien touché et vous<br />

fais une gran<strong>de</strong> part dans mes plus tendres pensées. Aux premiers jours <strong>de</strong> mon arrivée,<br />

ma bonne mère, moins absorbée quʹaujourdʹhui, me forçait dʹelle‐même à la quitter quel‐<br />

ques instants pour prendre un peu lʹair du <strong>de</strong>hors; quand je montais sur nos côtes et que<br />

dominant au loin la Seine et ses détours, je contemplais les paysages, si beaux encore à<br />

cette fin dʹautomne, un certain épanouissement se faisait en moi et me dilatait le cœur;<br />

comme lʹimage <strong>de</strong> lʹenfant me revenait vite alors et que jʹeusse voulu lʹavoir là pour jouir<br />

<strong>avec</strong> moi dʹun si beau spectacle! Jʹen détournais mes yeux, nʹy trouvant plus <strong>de</strong> charme,<br />

parce que jʹétais seul et que je ne sais plus rien goûter sans lui.<br />

Dans mes lectures aussi, je ne manque jamais <strong>de</strong> lui faire sa part; je note les meil‐<br />

leurs passages pour les lui montrer plus tard et lʹassocier aux bonnes pensées quʹelles me<br />

suggèrent; enfin dans mes prières, à lʹéglise et partout lʹenfant me suit et se mêle au plus<br />

intime <strong>de</strong> ma vie. Pourquoi se plaint‐il donc et cherche‐t‐il dans les expressions simples et<br />

vraies <strong>de</strong> mon affection <strong>de</strong>s subtilités qui nʹy sont pas? Je ne lui ai pas écrit en partant<br />

quoique jʹaie bien songé à le faire, parce que je nʹen ai pas eu le temps. Sʹil voulait se mettre<br />

à ma place, se représenter lʹétat <strong>de</strong> bouleversement où me mit la triste nouvelle qui me fût<br />

apportée, la précipitation <strong>de</strong> mon départ qui fut effectué à lʹheure même sans préparation,<br />

sans adieux même dans ma maison, <strong>avec</strong> la pensée constante quʹun instant <strong>de</strong> retard me<br />

priverait dʹembrasser encore une fois ma pauvre mère, je crois quʹil me saurait gré du ten‐<br />

dre souvenir que jʹeus pour lui‐même à ce moment et quʹil nʹen <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rait pas davan‐<br />

tage. Jʹécrivis <strong>de</strong>ux lettres en hâte, lʹune à mon administration, lʹautre à M. Dufresne, parce<br />

que <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux côtés il y avait <strong>de</strong>voir absolu, je nʹaccordai rien aux affections, parce quʹà dé‐<br />

faut dʹactes extérieurs, elles peuvent toujours au fond du cœur trouver la part qui les dé‐<br />

dommage. Que lʹenfant sʹaccoutume donc à mieux lire dans le mien, il verra que nul autre<br />

ne lui fait tort et quʹil nʹa pas à se plaindre. Jʹéviterai, mon doux enfant, toutes les occasions<br />

<strong>de</strong> vous contrister, mais <strong>avec</strong> un peu plus <strong>de</strong> confiance vous trouverez que vous‐même<br />

184


pouvez vous épargner ces petites blessures qui troublent souvent la paix <strong>de</strong> votre cœur et<br />

la sérénité <strong>de</strong> votre front.<br />

Je fais effort, cher enfant, pour vous écrire ces lignes que jʹai interrompues hier, tant<br />

jʹétais douloureusement ému <strong>de</strong> lʹétat <strong>de</strong> ma pauvre mère; elle ne prend plus absolument<br />

rien et sʹaffaiblit à vue dʹœil; si quelque réaction ne sʹopère, il est impossible quʹelle sub‐<br />

siste au <strong>de</strong>là <strong>de</strong> quelques jours. Nous allons essayer la glace comme <strong>de</strong>rnier moyen <strong>de</strong><br />

rendre aux organes un peu dʹénergie, mais le mé<strong>de</strong>cin déclare que lʹeffet, fût‐il heureux, ne<br />

peut durer que quelques moments seulement. Priez toujours, cher enfant, <strong>avec</strong> le frère,<br />

afin que le Seigneur assiste notre pauvre mère et nous dans ces <strong>de</strong>rnières épreuves. Em‐<br />

brassez tendrement le frère pour moi, je ne lʹoublie jamais, aux meilleurs temps surtout.<br />

Priez, je vous prie, M. Roudé <strong>de</strong> passer chez M me Carlier (rue du Bac, 97) qui mʹa<br />

écrit, afin <strong>de</strong> lʹavertir <strong>de</strong> mon absence et voir si ce quʹelle désirait <strong>de</strong> moi est urgent.<br />

Remettre le mot ci‐joint chez mon portier. Je suis bien tendrement, cher enfant, dans<br />

les Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre dévoué père et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Dites‐moi le résultat <strong>de</strong> votre examen et votre position dans votre administration.<br />

133 à M. Maignen<br />

Les <strong>de</strong>rniers instants <strong>de</strong> la mère <strong>de</strong> MLP. Il rassure M. Maignen sur l’avenir <strong>de</strong> la petite communauté naissante.<br />

Il lui annonce le décès <strong>de</strong> sa mère, survenu le 6 décembre.<br />

Duclair, 5 décembre 1845<br />

Je trouvais déjà, bien cher enfant, que votre petite épître tardait beaucoup à venir; la<br />

poste arrivant le matin, je mʹinforme chaque jour, à mon retour <strong>de</strong> la messe, sʹil nʹest rien<br />

venu pour moi et quand jʹattends une lettre <strong>de</strong> lʹenfant chéri, cʹest <strong>avec</strong> un empressement<br />

tout particulier que je mʹoccupe <strong>de</strong> ce soin. Les douces paroles <strong>de</strong> mon fils bien‐aimé sont,<br />

en effet, après la consolation que Dieu donne directement, mon plus précieux rafraîchis‐<br />

sement. Cette diversion, cher ami, continue <strong>de</strong> mʹêtre bien nécessaire, car, la situation <strong>de</strong><br />

ma pauvre mère sʹest comme établie <strong>de</strong>puis huit jours en un point où il ne semble pas<br />

dʹordinaire possible <strong>de</strong> sʹarrêter, cʹest‐à‐dire lʹextrême et presque imperceptible limite qui<br />

sépare la vie <strong>de</strong> la mort.<br />

Durant tout ce temps elle nʹa rien pris absolument, ce quʹon peut faire passer dʹeau<br />

sucrée entre ses lèvres nʹéquivalant pas à quelques gouttes par jour; elle reste presque<br />

constamment assoupie ce qui, sans doute, empêche le reste <strong>de</strong> substance qui est en elle <strong>de</strong><br />

se consumer trop vite et prolonge, contre toute attente, son existence. Il y a déjà 5 jours que<br />

le mé<strong>de</strong>cin avait jugé quʹil ne lui restait pas 24h. à vivre; cependant Dieu qui mesure le<br />

temps et le souffle à ses créatures nʹa pas ratifié cette sentence dʹune bouche humaine,<br />

lʹâme reste attachée à ce pauvre corps épuisé et amaigri et semble ne pouvoir sʹen séparer.<br />

Ainsi sont aussi nos affections, à force <strong>de</strong> soins, <strong>de</strong> vigilance, nous empêchons cette fragile<br />

enveloppe <strong>de</strong> se briser et nous ne trouvons pas le courage <strong>de</strong> la rendre à la terre qui doit la<br />

régénérer et nous la rendre belle et transfigurée au grand jour <strong>de</strong> la résurrection. Voilà 5<br />

nuits que nous passons ensemble, ma sœur et moi, près <strong>de</strong> notre pauvre mère, nous repo‐<br />

sant un peu tour à tour, mais à vrai dire, presque toujours en veille et en attente <strong>de</strong> quel‐<br />

185


que triste événement; après ces cinq jours et ces cinq nuits passés, nous nʹapercevons pas<br />

<strong>de</strong> changement bien notable dans lʹétat <strong>de</strong> notre pauvre mala<strong>de</strong> et parfois une lueur dʹes‐<br />

pérance traverse notre esprit; mais cʹest par illusion, sans doute, à moins dʹune sorte <strong>de</strong><br />

miracle, la santé, la vigueur, la vie (cʹest tout dire) ne pourraient être rendus à ce corps<br />

épuisé. Durant les premiers jours qui ont suivi mon arrivée, notre chère mala<strong>de</strong> ayant<br />

éprouvé un mieux assez sensible disait <strong>avec</strong> bonheur: je me sens revenir, ce sont les prières<br />

<strong>de</strong> mon fils qui me ressuscitent; pauvre mère, elle a bientôt perdu sa confiance, elle sʹest<br />

résignée <strong>de</strong> nouveau, elle a vu que si les prières si ar<strong>de</strong>ntes que jʹai faites pour elle <strong>de</strong>‐<br />

vaient, comme je lʹespère, lui servir, ce nʹétait pas pour le temps, mais pour lʹéternité. Que<br />

la sainte volonté du Seigneur sʹaccomplisse, je nʹai pas dit autre chose, cʹest une parole à<br />

double fin que le divin maître appliquera en un sens ou en un autre, selon que le voudra<br />

sa sagesse.<br />

Je vous tiendrais tout un jour, si je nʹy prenais gar<strong>de</strong>, cher enfant, à ce triste chevet<br />

<strong>de</strong> notre pauvre mala<strong>de</strong>, mais cher ami, ce serait abuser <strong>de</strong> votre tendre compassion, vous<br />

qui venez si aimablement à moi, vous associant à mes pensées, à mes douleurs, vous méri‐<br />

tez bien que je fasse quelque effort pour aller aussi à vous et me replacer dans le mon<strong>de</strong><br />

actif et vivant où vous respirez.<br />

Je nʹai pas, cher enfant, les inquiétu<strong>de</strong>s que vous me supposez sur nos petites œu‐<br />

vres, je les sais en bonnes mains, je les crois protégées et soutenues par Dieu surtout qui a<br />

daigné les susciter et je nʹai pas <strong>de</strong> sollicitu<strong>de</strong> pénible pour ce qui les touche. Prévoyant<br />

seulement quʹun triste événement pourrait, pour quelque temps, en éloigner mon esprit,<br />

jʹai cru à propos <strong>de</strong> rappeler en <strong>de</strong>ux mots à notre cher Dufresne, ce qui était à faire dès ce<br />

moment, en lʹinvitant à ne pas attendre mon retour pour mettre la main à lʹœuvre, voilà<br />

tout le motif <strong>de</strong> ma lettre. Vous trouvez, ami, que votre vieux père ajourne bien loin lʹépo‐<br />

que probable <strong>de</strong> sa réunion <strong>avec</strong> ses amis; il ne pouvait, vous le comprenez, rien dire <strong>de</strong><br />

précis à cet égard, mais il lui était facile <strong>de</strong> voir quʹen tout état <strong>de</strong> cause, quand même il<br />

reviendrait, comme il est à penser, assez prochainement à Paris, il ne pourrait néanmoins,<br />

<strong>avec</strong> convenance et liberté <strong>de</strong> cœur, se remettre si vite à lʹactivité <strong>de</strong>s œuvres charitables.<br />

Comme le père verse sans réserve ses moindres pensées dans le cœur <strong>de</strong> son enfant, il<br />

ajoute, pour lui tout seul, quʹil désire se ménager quelques jours <strong>de</strong> recueillement, afin<br />

dʹexaminer <strong>avec</strong> M. Beaussier quelle position il doit prendre définitivement dans le<br />

mon<strong>de</strong>, à quel parti il doit sʹarrêter pour son avenir. Le départ précipité qui mʹa éloigné <strong>de</strong><br />

Paris, mon bien‐aimé enfant, est venu tout provi<strong>de</strong>ntiellement pour me mettre à même <strong>de</strong><br />

suivre lʹavis <strong>de</strong> M. Beaussier qui mʹavait dit: atten<strong>de</strong>z et priez; <strong>de</strong>puis mon arrivée ici, me<br />

sentant fort tourmenté à ce sujet, jʹai écrit une longue lettre à cet excellent Père pour lui<br />

remettre sous les yeux le détail <strong>de</strong> ma situation et le prier dʹexaminer à loisir <strong>de</strong>vant Dieu<br />

quelle voie jʹaurais à suivre, lʹassurant que voyant dans sa décision lʹordre du Seigneur lui‐<br />

même, je lʹadopterais aveuglément. De ce moment les prières du bon Père et celles <strong>de</strong> mon<br />

cher enfant, je le crois aussi, ont été entendues sans doute, car, jʹai retrouvé <strong>de</strong> ce côté un<br />

calme et un abandon parfait.<br />

Cette lettre interrompue <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux jours, nʹest reprise, cher enfant, quʹ<strong>avec</strong> un re‐<br />

doublement <strong>de</strong> douleurs; le sacrifice si douloureux que nous <strong>de</strong>mandait le Seigneur est en‐<br />

fin consommé, ma pauvre mère a cessé dʹexister hier à 10h. 1/4 du soir. Je nʹai pas la force<br />

<strong>de</strong> vous en dire maintenant davantage; quand je serai un peu remis dʹune si dure épreuve,<br />

je vous écrirai plus paisiblement, si je le puis; aujourdʹhui je ne sais que pleurer et vous<br />

186


dire: aimez‐moi, cher enfant, priez pour elle et pour moi. Je reviendrai je pense vers la fin<br />

<strong>de</strong> la semaine; je vous le dirai plus précisément afin <strong>de</strong> vous voir plus‐tôt; jʹaurai grand be‐<br />

soin <strong>de</strong> votre cœur, qui déjà mʹa été si tendre et si aimable <strong>de</strong>puis mon départ et qui fera<br />

encore mon repos et ma consolation.<br />

Votre père et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Deman<strong>de</strong>r pour ma pauvre mère les prières <strong>de</strong> la Conférence. Cacheter la lettre<br />

<strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Montrond (83, rue <strong>de</strong> Sèvres) et la remettre à son adresse. Remettre aussi celle du<br />

f. Myionnet.<br />

134 à M. <strong>de</strong> Montrond<br />

Prier pour sa mère à qui il doit ʺmille fois plus que la vie...la foi et l’amour <strong>de</strong> ce qui mène à Dieu.ʺ<br />

Duclair, 7 décembre 1845<br />

Mon bien cher ami et frère,<br />

Jʹai voulu, mais sans en trouver le moment, vous dire, <strong>de</strong>puis que je suis ici, la ma‐<br />

ladie et la fin imminente <strong>de</strong> ma pauvre mère, bonne, pieuse et sainte âme, à laquelle je dois<br />

mille fois plus que la vie...la foi et lʹamour <strong>de</strong> ce qui mène à Dieu. Aujourdʹhui je ne vous<br />

en parle que pour vous annoncer quʹelle a cessé dʹexister et que, pour lʹaimer encore, ses<br />

enfants doivent la suivre par le cœur et par la pensée dans un mon<strong>de</strong> meilleur. Jʹoublie<br />

toute lʹaffliction qui brise, en ce moment, mon triste cœur pour ne me souvenir que dʹune<br />

chose, procurer à ma bonne mère les prières <strong>de</strong> mes amis. Vous, bien cher ami, à ce titre<br />

plus que tout autre me <strong>de</strong>vez les vôtres; accor<strong>de</strong>z‐les moi donc et obtenez‐moi aussi celles<br />

<strong>de</strong> votre bien chère femme.<br />

Tout à vous tendrement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

135 à M. Myionnet<br />

Prier et faire célébrer une messe pour le repos <strong>de</strong> l’âme <strong>de</strong> sa mère.<br />

Duclair, 7 décembre 1845<br />

Mon bien cher frère,<br />

Ma pauvre mère a cessé <strong>de</strong> souffrir sur cette terre; elle nous a quittés hier au soir à<br />

10h.¼ pour aller à Dieu et recevoir <strong>de</strong> lui, je lʹespère, la récompense <strong>de</strong> sa sainte et ver‐<br />

tueuse vie.<br />

Cette pensée toute consolante quʹelle soit ne mʹempêche pas dʹêtre bien douloureu‐<br />

sement frappé par un si triste événement. Priez donc pour moi, cher ami, et pour ma pau‐<br />

vre mère.<br />

Je désire que vous fassiez dire à son intention une messe à notre chère chapelle <strong>de</strong><br />

St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul et que vous y assistiez <strong>avec</strong> le jeune f. Maignen.<br />

Adieu, cher ami, je vous reverrai sans doute dans quelques jours. Aimez‐moi tou‐<br />

jours comme je vous aime fraternellement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

187


136 à M. Maignen<br />

Remerciements pour l’affection qu’il lui a témoignée à l’occasion du décès <strong>de</strong> sa mère. S’abandonner à la volonté<br />

<strong>de</strong> Dieu pour le présent et pour l’avenir.<br />

Duclair, 11 décembre 1845<br />

Cher, très‐cher enfant, votre voix douce et tendre arrive à moi <strong>avec</strong> chacune <strong>de</strong> vos<br />

paroles et va droit au fond du cœur <strong>de</strong> votre vieux père pour le consoler et rendre la séré‐<br />

nité à son âme. Je vous remercie encore une fois, cher ami, <strong>de</strong> tout ce que votre bon petit<br />

cœur dʹenfant a trouvé dʹingénieux et dʹaimable durant ce long mois <strong>de</strong> souffrance pour<br />

mʹen adoucir lʹamertume; jʹen rends grâces à Dieu surtout qui, ayant formé ce cœur si<br />

complaisamment, a daigné me le donner comme compensation <strong>de</strong> tant dʹautres douceurs<br />

dont ma vie est dépourvue. Jʹestime assez ce doux trésor, cher enfant, pour ne pas me<br />

plaindre <strong>de</strong> la part qui mʹest faite et je ne me sens à cette heure que <strong>de</strong>s sentiments<br />

dʹamour et <strong>de</strong> reconnaissance. Vous avez raison, cher enfant, vos lettres sont bien meilleu‐<br />

res que les miennes, mais que pouvais‐je tirer dʹun pauvre cœur où le Seigneur ne versait<br />

jour et nuit quʹafflictions et douleur; tout ce que jʹeusse su faire eût été <strong>de</strong> vous associer<br />

plus intimement à mes tristesses, mais je ne sais si cette disposition mʹest particulière ou<br />

bien si je la partage <strong>avec</strong> tous, il mʹest impossible <strong>de</strong> trouver dʹexpansion dans un chagrin<br />

vif et profond, il me semble que cʹest une chose grave et sacrée qui ne supporte pas le ma‐<br />

niement <strong>de</strong>s paroles; peu à peu les tristes images sʹaffaibliront, les impressions et souve‐<br />

nirs seront moins vifs et le calme habituel reviendra; mais il faut laisser cette œuvre au<br />

temps et nʹy pas trop toucher en attendant. Lundi il mʹa fallu conduire seul, <strong>avec</strong> quelques<br />

amis <strong>de</strong> ma sœur, à moi bien peu connus, ma bien‐aimée mère à sa <strong>de</strong>rnière <strong>de</strong>meure; <strong>de</strong>‐<br />

puis, je me suis occupé dʹen faire bien remarquer la place, <strong>de</strong> lʹenclore et <strong>de</strong> lʹorner un peu;<br />

<strong>de</strong>main, je tâcherai <strong>de</strong> terminer quelques affaires qui intéressent ma sœur et ses enfants, et<br />

après‐<strong>de</strong>main samedi, quitte <strong>de</strong> ces grands <strong>de</strong>voirs, je partirai pour me réunir à vous, cher<br />

enfant, au frère et à nos amis. Ce mois que je viens <strong>de</strong> passer a été bien plein <strong>de</strong> peines et<br />

<strong>de</strong> soins douloureux, mais mêlé aussi constamment <strong>de</strong> paix et <strong>de</strong> consolation intérieure,<br />

parce que je voyais sensiblement que jʹétais où me voulait le bon plaisir du Seigneur, que je<br />

marchais en sa présence, accomplissant les choses pour lesquelles il mʹavait appelé. Mon<br />

unique désir serait que le reste <strong>de</strong> ma vie fût ainsi et si jʹai quelque inquiétu<strong>de</strong> <strong>de</strong> lʹavenir,<br />

elle provient uniquement <strong>de</strong> la crainte <strong>de</strong> ne pas voir assez nettement ce que le Seigneur<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> à son pauvre serviteur. Mais cette crainte est mauvaise et annonce un cœur trop<br />

défiant <strong>de</strong>s miséricor<strong>de</strong>s et du tendre amour <strong>de</strong> Dieu; il ne plaît pas au divin Père <strong>de</strong> dire,<br />

si longtemps à lʹavance, à ses enfants ce quʹil entend leur prescrire, mais, sʹils veulent<br />

sʹabandonner à sa conduite, au jour le jour, il leur dispense <strong>avec</strong> le pain qui les nourrit, la<br />

lumière qui les éclaire et les conduits; je me remets entre ses mains, sans rien vouloir, sans<br />

penser, sans prévoir, le souffle <strong>de</strong> mon Dieu me poussera au lieu qui me sera le meilleur.<br />

Je nʹai pas du tout lʹintention, cher enfant, <strong>de</strong> commencer une retraite à mon arrivée, ni<br />

surtout dʹéloigner mon fils chéri dont je me sens au contraire, un grand besoin; jʹemploie‐<br />

rai à prier et à chercher <strong>avec</strong> M. Beaussier la volonté <strong>de</strong> Dieu quelques jours après mon ar‐<br />

rivée, et je mʹabstiendrai <strong>de</strong> reprendre part jusquʹà la fin du mois à nos travaux charitables,<br />

mais jʹajournerai la retraite proprement dite à un autre temps qui serait déterminé <strong>de</strong><br />

concert <strong>avec</strong> le f. Myionnet, sʹil plaisait à Dieu.<br />

Samedi, cher enfant, je mʹarrêterai à Rouen pour voir mon neveu à sa pension et je<br />

nʹarriverai à Paris, par le chemin <strong>de</strong> fer, que sur les 6h. du soir. Jʹavais bien pensé à vous<br />

188


dire quʹil fallait mʹy venir trouver; mais par réflexion et pour diverses raisons que je vous<br />

expliquerai, jʹaime mieux que vous me veniez retrouver sur les 8h. à la maison pour passer<br />

<strong>avec</strong> moi le reste <strong>de</strong> la soirée. Ayez la bonté, cher enfant, <strong>de</strong> vous débarrasser <strong>de</strong> vos affai‐<br />

res <strong>de</strong> la loterie, afin <strong>de</strong> mʹappartenir librement. Vous ferez bien peut‐être <strong>de</strong> ne dire mon<br />

arrivée quʹau frère seulement; sur les 9h. 1/2 nous irons le voir et dire <strong>avec</strong> lui la prière; ce<br />

sera bien recommencer notre vie. Je voudrais bien aussi que vous priiez mon portier<br />

dʹavertir M me Malenie <strong>de</strong> mon retour, afin quʹelle me prépare à dîner pour 7h.<br />

Adieu, cher enfant, continuez <strong>de</strong> prier pour ma bonne mère, je vous sais gré, ainsi<br />

quʹau frère et à nos amis <strong>de</strong> votre empressement à faire dire une messe, mettons ainsi tou‐<br />

jours en commun nos affections, cher enfant, tristes ou heureuses, elles sont trop lour<strong>de</strong>s<br />

pour un seul cœur; Dieu lʹa prévu, quand il envoie aux pauvres âmes <strong>de</strong>s charges si acca‐<br />

blantes, il les mesure, non pour une seule, mais pour plusieurs liées ensemble et tendre‐<br />

ment unies; mon doux enfant, que la vôtre et la mienne nʹen fassent quʹune et que dʹautres<br />

encore <strong>avec</strong> nous se fon<strong>de</strong>nt en une sainte et pure union <strong>avec</strong> Dieu, par Dieu et pour Dieu.<br />

A vous tendrement en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

136‐1 à M gr Angebault<br />

Temps <strong>de</strong> réflexion et <strong>de</strong> prière chez les Frères <strong>de</strong> St <strong>Jean</strong>‐<strong>de</strong>‐Dieu.<br />

Paris, 2 janvier 1846<br />

Monseigneur,<br />

Jʹai pris ma part <strong>de</strong>s excellents conseils que vous avez bien voulu adresser en mon<br />

absence à M. Myionnet et dont il mʹa donné connaissance à mon retour; chacune <strong>de</strong> vos<br />

lettres contient pour nous <strong>de</strong> précieux enseignements que nous nʹaurons gar<strong>de</strong> <strong>de</strong> négli‐<br />

ger, et dont nous avons dès ce moment une bien vive reconnaissance.<br />

A notre grand regret du reste, nous nʹen pouvons encore faire une application pra‐<br />

tique puisque nous vivons encore séparés, et ne voyons pas jusquʹà présent le temps précis<br />

où nous pourrons nous réunir. Mes affaires personnelles arrangées sur un premier point<br />

essentiel restent encore indécises sur un autre, celui <strong>de</strong> ma retraite. En attendant que cet<br />

obstacle soit levé, jʹai pris un asile chez les frères <strong>de</strong> St <strong>Jean</strong>‐<strong>de</strong>‐Dieu dont lʹétablissement,<br />

qui existe déjà <strong>de</strong>puis trois ans ici, sʹaffermit <strong>de</strong> jour en jour et semble généralement esti‐<br />

mé.<br />

M. Beaussier a jugé que je ne pouvais trouver une rési<strong>de</strong>nce plus convenable et qui<br />

me mît mieux en position <strong>de</strong> voir <strong>de</strong> près, et dʹétudier attentivement la vie religieuse. Je<br />

suis, en effet, à tous les moments où mes <strong>de</strong>voirs ne mʹappellent pas au <strong>de</strong>hors, les exerci‐<br />

ces <strong>de</strong>s bons frères; je mʹinforme exactement <strong>de</strong> toutes les circonstances <strong>de</strong> leur vie; je<br />

prendrai connaissance <strong>de</strong> leurs règles, sʹils consentent à me les communiquer, et je tâcherai<br />

dʹen pénétrer lʹesprit. Une pareille étu<strong>de</strong> ne saurait que mʹêtre profitable, et lʹexemple sur‐<br />

tout <strong>de</strong>s habitu<strong>de</strong>s simples, laborieuses, pauvres et pleines <strong>de</strong> soumission <strong>de</strong> ces bons frè‐<br />

res me sera un grand moyen dʹédification.<br />

M. Myionnet désire bien venir me rejoindre et passer aussi quelque temps dans<br />

cette maison afin <strong>de</strong> jouir <strong>de</strong>s mêmes avantages, mais en ce moment lʹétablissement qui re‐<br />

çoit <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s est au grand complet, et nous sommes forcés dʹattendre un peu; nous<br />

189


craignons dʹailleurs dʹappeler trop tôt lʹattention sur nous et <strong>de</strong> trancher trop nettement<br />

notre position qui exige encore <strong>de</strong> grands ménagements. Ce temps dʹattente et <strong>de</strong> patience<br />

est long sans doute mais il entre dans les <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> Dieu qui ne veut pas que la porte soit<br />

ouverte avant quʹon y ait plusieurs fois heurté; sa bonté daignera enfin nous admettre,<br />

nous lʹespérons, et cette grâce tant désirée nʹen sera que plus précieuse à nos yeux.<br />

Lʹannée qui vient <strong>de</strong> finir me laisse un triste et douloureux souvenir car jʹai perdu<br />

tout récemment la plus tendre et la meilleure <strong>de</strong>s mères; mais je ne dois pas oublier dʹune<br />

autre part que la bonté divine a daigné mʹaccor<strong>de</strong>r <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s et puissantes consolations;<br />

je mets au premier rang, Monseigneur, les circonstances heureuses qui mʹont permis dʹap‐<br />

procher <strong>de</strong> Votre Gran<strong>de</strong>ur, <strong>de</strong> recevoir ses excellents conseils <strong>avec</strong> le témoignage dʹune<br />

bienveillance toute paternelle. Jʹen remercie du fond du cœur le Père <strong>de</strong>s miséricor<strong>de</strong>s et le<br />

prie, Monseigneur, <strong>de</strong> vous rendre, au centuple, le bien que vous faites à nous et à tout ce<br />

qui vous entoure.<br />

M. Beaussier dont lʹesprit <strong>de</strong>meure toujours uni au vôtre, Monseigneur, me charge<br />

<strong>de</strong> vous offrir aussi lʹexpression <strong>de</strong> ses vœux les plus sincères. Daignez‐les agréer, Monsei‐<br />

gneur, et croire au profond respect <strong>avec</strong> lequel je suis en N.S.<br />

Votre très humble serviteur et fils<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

136‐2 à un Confrère <strong>de</strong> S t ‐V t ‐<strong>de</strong>‐Paul<br />

Communication d’une note sur la Caisse <strong>de</strong>s Loyers.<br />

Paris, 9 février 1846<br />

Mon bien cher confrère,<br />

Je vous envoie après un trop long retard, une petite note sur notre Caisse <strong>de</strong>s<br />

Loyers; je regrette bien <strong>de</strong> vous lʹavoir fait tant attendre.<br />

Je nʹai pu faire mieux, je vous prie dʹen être bien assuré.<br />

Demain, je vous enverrai une note sur les recettes et dépenses <strong>de</strong> la Conférence, que<br />

vous mʹavez aussi <strong>de</strong>mandée.<br />

Croyez, je vous prie, à tous mes sentiments bien dévoués.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

137 à M r le Curé <strong>de</strong> St‐Sulpice<br />

Excuses pour une modification d’horaire <strong>de</strong> la Sainte‐Famille. Deman<strong>de</strong> <strong>de</strong> soutien pour l’Oeuvre <strong>de</strong>s Loyers.<br />

Paris, 10 avril 1846<br />

Monsieur le Curé,<br />

Je suis profondément peiné du contretemps qui est arrivé dimanche <strong>de</strong>rnier à St‐<br />

Sulpice; nous nʹavons changé le jour <strong>de</strong> notre assemblée que pour laisser nos braves gens<br />

libres le saint jour <strong>de</strong> Pâques, mais à lʹavenir nous ne ferons, sous aucun prétexte, <strong>de</strong> modi‐<br />

fication semblable sans nous être concertés <strong>avec</strong> vous, Monsieur le Curé, ou <strong>avec</strong> M. Gou‐<br />

jon; nous envoyons dʹailleurs à M. Mas Ar<strong>de</strong>t une carte indicative <strong>de</strong>s jours <strong>de</strong> réunion.<br />

190


Je joins ici, Monsieur le Curé, une petite note que nous avons préparée pour notre<br />

œuvre <strong>de</strong>s loyers, jʹespère quʹelle aura votre approbation et nous conciliera lʹappui <strong>de</strong>s<br />

personnes qui veulent bien nous accor<strong>de</strong>r quelque intérêt.<br />

Veuillez agréer, Monsieur le Curé, lʹexpression accoutumée du profond respect <strong>avec</strong><br />

lequel je suis<br />

Votre très humble et très obéissant serviteur en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

138 à M r le Curé <strong>de</strong> St‐Sulpice<br />

Reconnaissance pour l’intérêt qu’il porte à l’Oeuvre <strong>de</strong>s Loyers.<br />

Paris, 20 avril 1846<br />

Monsieur le Curé,<br />

Lʹappui que vous voulez bien prêter si généreusement à lʹœuvre <strong>de</strong>s loyers en assu‐<br />

rera le succès, nous en avons la confiance, et attirera sur elle la bénédiction <strong>de</strong> Dieu. Je<br />

vous prie, Monsieur le Curé, <strong>de</strong> recevoir lʹexpression <strong>de</strong> notre vive reconnaissance, et pour<br />

la souscription que vous nous avez envoyée, et pour le soin que vous avez bien voulu<br />

prendre <strong>de</strong> répandre nos petites notes.<br />

Jʹen joins ici quelques exemplaires qui pourraient vous être <strong>de</strong>mandés ou que peut‐<br />

être, à lʹoccasion, vous désireriez vous‐même, Monsieur le Curé, remettre aux personnes<br />

que cette bonne œuvre saurait intéresser.<br />

Veuillez croire, Monsieur le Curé, aux sentiments bien respectueux <strong>avec</strong> lesquels je<br />

suis<br />

Votre très humble et très dévoué serviteur en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Jʹapprendrais <strong>avec</strong> bonheur que le malheureux prêtre auquel vous avez montré<br />

tant <strong>de</strong> bonté en eût été touché; sʹil restait pour ce qui me regar<strong>de</strong> quelques démarches à<br />

faire, je suis ici comme en toute occasion pleinement à votre disposition.<br />

138‐1 à M. Houssard<br />

L’Oeuvre <strong>de</strong> la Caisse <strong>de</strong>s Loyers a besoin d’encouragements.<br />

Paris, 28 avril 1846<br />

Monsieur lʹabbé,<br />

Vous êtes si bon et si aimable pour nous que la pensée me vient dès lʹabord <strong>de</strong> re‐<br />

courir à vous quand nos œuvres ont besoin dʹun peu dʹappui extraordinaire.<br />

En ce moment, nous créons pour les pauvres du quartier St‐Sulpice une Caisse<br />

dʹéconomie où ils viendront chaque semaine déposer leurs petites épargnes ou réserves,<br />

afin dʹamasser peu à peu le montant <strong>de</strong> leurs loyers; à la fin <strong>de</strong> chaque trimestre, nous leur<br />

accor<strong>de</strong>rons une prime dʹencouragement proportionnée à la quotité <strong>de</strong> leurs dépôts et cal‐<br />

culée à raison <strong>de</strong> 15 ou 20%.<br />

M. le Curé <strong>de</strong> St‐Sulpice sʹintéresse tout particulièrement à cette œuvre dont il a ac‐<br />

cepté la prési<strong>de</strong>nce honoraire et il en espère les plus heureux résultats, non seulement<br />

191


pour soulager les pauvres dans la plus dure <strong>de</strong> leurs misères, mais encore pour réveiller<br />

en eux <strong>de</strong>s habitu<strong>de</strong>s dʹordre et <strong>de</strong> prévoyance dont le défaut cause trop souvent leur dé‐<br />

tresse.<br />

Jʹose espérer, Monsieur lʹabbé, que vous aurez la bonté <strong>de</strong> recomman<strong>de</strong>r notre en‐<br />

treprise à quelques‐uns <strong>de</strong>s saints jeunes gens <strong>de</strong> votre Maison et <strong>de</strong> recueillir parmi eux<br />

quelques aumônes pour encourager nos efforts.<br />

Veuillez agréer, Monsieur lʹabbé, <strong>avec</strong> lʹexpression anticipée <strong>de</strong> ma vive reconnais‐<br />

sance, le profond respect <strong>de</strong><br />

Votre très humble et très dévoué serviteur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je joins ici quelques notes explicatives sur notre œuvre.<br />

138‐2 à M. Houssard<br />

Démarche pour un curé <strong>de</strong> Bretagne. Gratitu<strong>de</strong> pour l’ai<strong>de</strong> qu’il apporte à la Caisse <strong>de</strong>s Loyers.<br />

Paris, 6 mai 1846<br />

Monsieur lʹabbé,<br />

Le bon curé du diocèse <strong>de</strong> Rennes qui mʹest venu voir en votre nom a dû sʹassurer<br />

par lui‐même mardi <strong>de</strong> lʹétat <strong>de</strong> lʹaffaire qui lʹintéresse; je suis allé toutefois hier dans nos<br />

bureaux et jʹai pris <strong>de</strong> mon côté <strong>de</strong>s renseignements. Il en résulte que les pièces <strong>de</strong> présen‐<br />

tation envoyées par Mgr lʹEvêque pour la création <strong>de</strong> nouveaux vicariats, ont été renvoyées<br />

par le Ministre à M. le Préfet dʹIlle‐et‐Vilaine pour avoir son avis; tant que ces documents<br />

ne nous auront pas été renvoyés, nous ne pourrons rien faire. Je suivrai, du reste, cette af‐<br />

faire <strong>avec</strong> toute lʹattention possible, puisque le bon curé quʹelle concerne semble être <strong>de</strong><br />

vos amis.<br />

Veuillez croire, Monsieur lʹabbé, les nouvelles assurances du respectueux dévoue‐<br />

ment <strong>avec</strong> lequel je suis<br />

Votre très humble et très obéissant serviteur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je vous remercie mille fois, tant au nom <strong>de</strong> M. le Curé quʹau nôtre propre, <strong>de</strong><br />

lʹintérêt que vous accor<strong>de</strong>z à notre œuvre <strong>de</strong>s loyers; nous en pouvons attendre <strong>de</strong> grands<br />

fruits si nous sommes un peu encouragés; je suis heureux que le Séminaire, qui accor<strong>de</strong><br />

sympathie à tout ce qui intéresse les pauvres, nous prête encore en cette circonstance son<br />

charitable concours.<br />

139 à M. Demuison<br />

Les chants exécutés aux réunions <strong>de</strong> la Sainte‐Famille. Qualités exigées par MLP.<br />

Paris, 12 mai 1846<br />

Monsieur et cher Confrère,<br />

La musique <strong>de</strong> la Sainte‐Famille à laquelle, à mon grand regret, vous ne pouvez que<br />

rarement prendre part, ne soutient passablement quant aux morceaux exécutés par nos<br />

Confrères, mais nous manquons <strong>de</strong> chants ou cantiques que nous puissions faire chanter à<br />

192


lʹunisson à nos braves gens. Ceux que nous avons imprimés dans notre livret sont telle‐<br />

ment usés et connus dans les catéchismes, dans les retraites <strong>de</strong>s églises et partout quʹils fa‐<br />

tiguent par leur vulgarité.<br />

Ne pourriez‐vous, cher confrère, mʹen indiquer quelques‐uns, simples et bien chan‐<br />

tants, dont nous puissions faire lʹessai? Personne nʹest mieux à même que vous <strong>de</strong> diriger<br />

notre choix à cet égard et personne aussi, jʹen suis assuré, ne nous rendra ce service <strong>avec</strong><br />

plus dʹobligeance et <strong>de</strong> charité.<br />

Veuillez croire, mon cher Confrère, à tous les sentiments dévoués <strong>avec</strong> lesquels je<br />

suis<br />

Votre très affectionné Confrère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Rue du Regard, 16<br />

140 à M. Myionnet<br />

Dans la vie commune, ce ne sont pas les joies humaines qu’on trouve, mais une vie sérieuse, faite <strong>de</strong> prière et<br />

d’abnégation. MLP. encourage son ʺunique frèreʺ en lui confiant ses propres épreuves: il est lui‐même privé <strong>de</strong><br />

toute consolation intérieure et <strong>de</strong> tout attrait pour la piété. Mais il a conscience que c’est là un progrès spirituel.<br />

Description <strong>de</strong> la vie qu’il mène en Normandie.<br />

Saint‐Valéry, 19 juin 1846<br />

Mon bien cher frère,<br />

Vous mʹavez promis <strong>de</strong> vous ennuyer un peu <strong>de</strong> mon absence; jʹespère que vous<br />

mʹaurez tenu parole et que la privation <strong>de</strong> lʹunique frère que le bon Dieu vous ait encore<br />

donné se sera fait en quelques moments sentir à vous. Je lʹespère à cause <strong>de</strong> votre charité,<br />

plutôt que par tout autre cause, car, dans lʹétat <strong>de</strong> langueur corporelle et spirituelle où je<br />

me sens réduit, je vois bien que je ne puis guère servir ni à vous édifier, ni à vous consoler.<br />

Cette disposition, cher ami, dont nous avons à souffrir lʹun et lʹautre, est, je le crois, toute<br />

provi<strong>de</strong>ntielle. Il nʹa pas plu au Seigneur quʹà notre entrée dans la vie commune nous fus‐<br />

sions soutenus par aucun attrait sensible, afin <strong>de</strong> nous faire comprendre que ce nʹest pas<br />

une carrière douce et commo<strong>de</strong> que nous embrassons, quʹil nʹy faut chercher ni les appuis<br />

<strong>de</strong>s sympathies humaines, ni les joies <strong>de</strong> sentiment, mais une habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> vie grave et sé‐<br />

rieuse, une voie <strong>de</strong> travail, <strong>de</strong> prière et dʹabnégation. Je lʹaccepte, pour ma part, en telles<br />

conditions et, bien quʹelle semble un peu ari<strong>de</strong> et un peu dure, je la crois vraiment dans<br />

lʹesprit <strong>de</strong> Dieu. Depuis vingt ans, je soupire après la vie dʹentier sacrifice à Dieu en union<br />

<strong>avec</strong> quelques âmes animées aussi du besoin <strong>de</strong> lui tout abandonner; et, maintenant que jʹy<br />

touche enfin, que jʹentre en possession <strong>de</strong> ce bien tant désiré, les joies spirituelles qui me<br />

faisaient pleurer par avance, les délices <strong>de</strong> lʹoraison et <strong>de</strong> la contemplation, le recueille‐<br />

ment, la présence <strong>de</strong> Dieu, les saintes ar<strong>de</strong>urs <strong>de</strong>s âmes édifiées et réchauffées lʹune par<br />

lʹautre, tout cela sʹest évanoui; je me trouve, comme dit lʹEcriture, dans une terre ari<strong>de</strong> et<br />

sans eau, épuisé <strong>de</strong> corps, sans vie dans le cœur, sans lumière dans lʹesprit. Quelques<br />

plaintes, cher ami, que je vous entends faire me laissent penser que Dieu vous éprouve à<br />

peu près <strong>de</strong> la même façon et que votre chemin est ru<strong>de</strong> et âpre comme le mien. Ne nous<br />

en affligeons pas, cher frère, et laissons‐nous conduire par la main toute sage et toute pa‐<br />

ternelle <strong>de</strong> notre Dieu. Je me souviens quʹautrefois mes oraisons se résumaient dans leurs<br />

douces ferveurs à mʹoffrir tout à Dieu pour son service et pour toutes les œuvres quʹil lui<br />

193


plairait <strong>de</strong> me confier. Aujourdʹhui, elles ne sont guère quʹun consentement passif à lʹac‐<br />

tion mortifiante quʹil exerce en tout mon être, je consens à le laisser faire et à me sentir suc‐<br />

cessivement et dans les points les plus intimes frappé <strong>de</strong> stérilité et <strong>de</strong> mort; jʹose espérer<br />

que cet état est meilleur que le premier et renferme un progrès spirituel; jʹy trouve donc en<br />

certaine manière une certaine joie sévère et calme qui nʹest pas sans confiance et sans dou‐<br />

ceur. Puissiez‐vous, cher ami, incliner aussi votre esprit en ce sens; alors, je me trouverai<br />

encore plus paisible et plus résigné en pensant que vous voulez bien me prendre tel que le<br />

Seigneur me fait, vous en remettant à son amour pour tirer <strong>de</strong> moi plus <strong>de</strong> service et <strong>de</strong><br />

consolation quand le moment en sera venu.<br />

Je nʹai que bien peu <strong>de</strong> choses à vous dire <strong>de</strong> mon voyage qui sʹest passé à mer‐<br />

veille, sans trop <strong>de</strong> chaleur ni <strong>de</strong> poussière. Le pays où nous 143 sommes est charmant <strong>de</strong><br />

tous points, la mer y est admirable, le ciel superbe et les campagnes délicieuses. Les habi‐<br />

tants participent à ces dons heureux <strong>de</strong> la nature. Ils sont pieux, simples, bienveillants,<br />

nullement curieux et ne font attention à nous que pour nous rendre service quand nous<br />

avons besoin dʹeux. Jʹai pris déjà quatre bains, un chaque jour, lʹeau est parfaitement bonne<br />

et agréable, seulement ces <strong>de</strong>ux jours <strong>de</strong>rniers les vagues étaient si puissantes quʹelles<br />

mʹont, faible et débile comme je suis, battu trop fortement; jʹétais moulu et tellement brisé<br />

que jʹavais peine à me soulever; la nuit, mes nerfs trop ébranlés étaient en continuelle agi‐<br />

tation; je voyais sans cesse ces énormes montagnes dʹeau sʹélever en mugissant et sʹécrou‐<br />

ler sur moi <strong>avec</strong> fracas; lʹépreuve était trop ru<strong>de</strong> pour ma faiblesse et nʹeût pas été, je crois,<br />

salutaire. Aujourdʹhui, en changeant dʹheure, nous avons trouvé la mer douce et clémente,<br />

je pense quʹen la prenant ainsi, jʹen éprouverai quelque bien. Tous les jours, avant dʹaller<br />

au bain, jʹentre dans une petite chapelle qui est à notre porte et presque sur le rivage, jʹy<br />

récite lʹAve maris stella et jʹoffre à Dieu pour guérir, souffrir ou mourir, selon quʹil sera dans<br />

sa sagesse et son amour.<br />

Rappelez‐moi, cher ami, au souvenir <strong>de</strong> tous nos<br />

bons amis, ces MM. Deslan<strong>de</strong>s, Boutron, Roudé en<br />

particulier, puis <strong>de</strong> lʹexcellent M. Fossin dont la famille a<br />

été pleine dʹobligeance et <strong>de</strong> bonté pour nous; puis du f.<br />

Paillé 144 qui viendra, jʹespère, nous rejoindre vers la fin<br />

du mois au plus tard, puis M. Nimier, M. Georges [<strong>de</strong><br />

Larochefoucauld] et tous les autres si bons, si dévoués<br />

qui fréquentent journellement la maison. Jʹécris un mot à<br />

M. Maignen, pas assez aimable pour nous <strong>de</strong>puis<br />

quelque temps, mais qui pourtant mʹest bien cher<br />

toujours. Adieu, bien cher frère, je prie tous les jours<br />

pour vous à la Sainte Messe et en autre temps encore,<br />

souvenez‐vous aussi <strong>de</strong> moi et tâchez que vos prières me<br />

ren<strong>de</strong>nt tel que votre charité et votre tendre affection me<br />

peuvent désirer.<br />

143 MLP. est accompagné <strong>de</strong> son jeune confrère <strong>de</strong> St-Vt-<strong>de</strong>-Paul, Henri Taillandier.<br />

144 Louis Paillé (1816-1874)), est un avocat <strong>de</strong> 32 ans, membre <strong>de</strong> la conférence St-Sulpice et ami <strong>de</strong> MLP. Sa délicatesse en fera<br />

l'infirmier et le confi<strong>de</strong>nt du Fondateur, lors <strong>de</strong>s longues absences <strong>de</strong> repos en Normandie ou dans le Midi. Il entre en Communauté<br />

le 10 juin 1848, y persévérant sans jamais se déci<strong>de</strong>r à prononcer <strong>de</strong>s vœux perpétuels. Ce quatrième frère <strong>de</strong> la Congrégation<br />

meurt <strong>de</strong>ux mois avant MLP., le 2 septembre 1874.<br />

194


Je vous embrasse bien cordialement et suis pour la vie en N.S.<br />

Votre frère dévoué<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Taillandier, dont lʹassistance mʹest bien secourable et la charité bien douce, se<br />

rappelle à votre bon souvenir; il vous prie aussi <strong>de</strong> le mentionner près <strong>de</strong> tous nos amis.<br />

A S t Valéry‐en‐Caux, au G d Hôtel <strong>de</strong>s Bains<br />

141 à M. Maignen<br />

MLP. est affligé d’avoir reçu <strong>de</strong> lui une lettre ʺdure et décourageanteʺ. Mais il n’a pas à se justifier <strong>de</strong>s reproches<br />

qu’elle contient. Comment l’humeur vive et impressionnable <strong>de</strong> M. Maignen doit se corriger. Chercher à éviter<br />

tout froissement.<br />

St Valéry‐en‐Caux, 25 juin 1846<br />

Mon cher enfant,<br />

Votre lettre me fait tant <strong>de</strong> peine que jʹy veux répondre tout <strong>de</strong> suite, bien quʹen at‐<br />

tendant à <strong>de</strong>main au plus tard, jʹeusse plus dʹespérance <strong>de</strong> le faire <strong>avec</strong> calme et à propos;<br />

ce me sera un soulagement sinon une consolation.<br />

Il faut en effet, cher ami, quʹà mon insu et bien contre mon gré, je vous aie bien pro‐<br />

fondément irrité pour mʹattirer une lettre aussi dure et aussi décourageante que la vôtre; je<br />

nʹai pas souvenir dʹen avoir écrit <strong>de</strong> pareille à personne, et malgré la connaissance que jʹai<br />

<strong>de</strong> mes fâcheuses imperfections, je ne puis mʹempêcher <strong>de</strong> croire quʹun peu moins <strong>de</strong> sévé‐<br />

rité vous eût tenu plus près <strong>de</strong> la vérité. Je passe volontiers, du reste, par tout ce que vous<br />

énoncez sur mon caractère et les excès <strong>de</strong> ma volonté, je sais que vos reproches ne sont pas<br />

sans fon<strong>de</strong>ment; si quelques restrictions sont à faire pour les atténuer, ce nʹest pas à moi à<br />

les mettre en avant, je laisse à votre cœur dʹami à les trouver, sinon maintenant, du moins<br />

à quelque autre temps où votre esprit sera moins défavorablement prévenu contre moi.<br />

Mais je nʹaccepte rien, mon cher enfant, <strong>de</strong> tout ce que vous mʹimputez dʹoublis ou dʹim‐<br />

puissance <strong>de</strong> cœur à votre égard, et dans mes rapports <strong>avec</strong> mes autres amis. Jʹai quelques<br />

affections bien sincères et bien dévouées que je cultive fidèlement <strong>de</strong>puis <strong>de</strong> longues an‐<br />

nées et que je gar<strong>de</strong>rai, je lʹespère, jusquʹau bout; jʹévite il est vrai, dʹen accroître le nombre<br />

et, sous ce rapport, il serait, je crois, exact <strong>de</strong> dire que je fuis les amitiés <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> intimité<br />

plutôt que dʹavancer, comme vous le faites, quʹelles se retirent <strong>de</strong> moi. Je me fais une<br />

gran<strong>de</strong> idée <strong>de</strong>s obligations quʹun lien <strong>de</strong> cœur impose et, me sentant si faible, je recule<br />

<strong>de</strong>vant une charge dont je connais le poids.<br />

Quant à vous, mon cher enfant, que vous dire, sinon que je vous ai aimé dans toute<br />

la naïveté, dans toute la simplicité dʹun cœur qui, dans tous les autres cas, ne sʹétait livré<br />

quʹ<strong>avec</strong> réserve, et <strong>avec</strong> vous seulement sʹabandonnait pleinement et tout entier. Jʹavais<br />

rêvé toujours une affection si dévouée, si généreuse, si pure, quʹelle fût la fusion réelle <strong>de</strong>s<br />

âmes et leur vie en une seule; jʹavais pensé que Dieu intervenant sans cesse pour sanctifier<br />

et maintenir cette union sainte, elle pourrait durer, se préserver <strong>de</strong> toute atteinte, soutenir<br />

et consoler dans le chemin <strong>de</strong> lʹexil les pauvres cœurs qui ten<strong>de</strong>nt à la patrie. Une pareille<br />

union est pour les anges et non pour nous, y aspirer est trop <strong>de</strong> présomption; du moins,<br />

les saints tout seuls en peuvent approcher; et moi, je <strong>de</strong>vais trop le savoir, je ne suis pas un<br />

saint. Donc, cher ami, mon affection, se fiant trop sur la puissance et lʹintensité intérieure<br />

quʹelle sentait en elle‐même, se montrait exigeante, et, dans son illusion, voyait en cette<br />

195


exigence même une preuve <strong>de</strong> sollicitu<strong>de</strong> et <strong>de</strong> dévouement. Je ne cherche pas si vous eus‐<br />

siez dû comprendre cette disposition <strong>de</strong> cœur, lʹexcuser, ou du moins, sans laisser grossir<br />

en vous tant <strong>de</strong> mécontentement, mʹavertir plus nettement et plus tôt que votre âme<br />

nʹavait pas ainsi assez dʹespace et <strong>de</strong> libre essor. La faute est à moi, sans doute, qui eusse<br />

dû mʹen apercevoir, prévenir vos plaintes et <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r moins à votre affection. Mais vous<br />

êtes bien injuste, cher ami, quand vous parlez <strong>de</strong> mépris, <strong>de</strong> supériorités hautaines, <strong>de</strong> mé‐<br />

connaissance <strong>de</strong> ce qui peut être <strong>de</strong> bon pour vous. Il nʹest que <strong>de</strong>ux choses dont nous<br />

ayons droit <strong>de</strong> nous montrer jaloux, cʹest notre intelligence et notre cœur; sous ce double<br />

rapport, jʹose vous défier <strong>de</strong> trouver un seul fait ni une seule parole dans mes rapports si<br />

intimes et si habituels <strong>avec</strong> vous, que vous puissiez, <strong>avec</strong> quelque apparence <strong>de</strong> raison,<br />

prendre pour une négation <strong>de</strong> vos qualités dʹesprit et <strong>de</strong> cœur. Jʹai, en toute occasion, cher‐<br />

ché vos avis et bien fréquemment suivi vos inspirations, et, quant à votre cœur, cent fois je<br />

vous ai déclaré que la raison unique ou première, au moins, <strong>de</strong> mes préférences affectueu‐<br />

ses pour vous nʹétait autre que la délicatesse et lʹélévation <strong>de</strong> vos sentiments. Pourquoi<br />

mʹobligez‐vous à vous répéter ici crûment <strong>de</strong>s choses quʹon aime mieux <strong>de</strong>viner quʹenten‐<br />

dre dire trop directement? En quelques courts instants dʹirritation, excusables peut‐être<br />

dans mon état <strong>de</strong> santé et pour bien dʹautres causes encore, jʹai seulement blâmé en vous<br />

quelques petits défauts <strong>de</strong> caractère; mais nʹest‐ce pas en gar<strong>de</strong>r <strong>de</strong> trop vifs ressentiments<br />

que dʹentrer sur vous‐même en <strong>de</strong>s défiances exagérées, dʹexalter votre esprit en mille<br />

imaginations tristes et décourageantes, et <strong>de</strong> mʹécraser ensuite du contrecoup <strong>de</strong> ces luttes<br />

intérieures? Pour une faute si légère, je vous ai sur lʹheure et toujours <strong>de</strong>mandé grâce et ce<br />

tendre retour dʹaffection eût dû guérir aussitôt <strong>de</strong> pareilles égratignures. Il nʹen est pas<br />

ainsi, cher ami, là est la seule cause <strong>de</strong> nos froissements, il ne la faut pas chercher ailleurs;<br />

en bien <strong>de</strong>s cas, jʹeusse pu montrer une semblable susceptibilité, mais je fais un effort alors<br />

que vous refusez <strong>de</strong> faire, je remonte à lʹintention, jʹapprécie la portée du coup et jʹarrache<br />

lʹépine sans y plus penser. Si vous aviez fait subir cette épreuve aux légères piqûres qui<br />

vous sont venues <strong>de</strong> moi, je mets la main sur ma conscience, et je déclare que pas une ne<br />

partait du cœur et nʹallait au cœur, pas une ne portait atteinte à votre esprit et à vos senti‐<br />

ments, pas une ne décelait <strong>de</strong> ma part le défaut dʹestime, ni lʹamoindrissement <strong>de</strong> mon af‐<br />

fection. Jʹose vous conjurer, cher ami, sinon pour moi, au moins pour vous, dʹessayer cette<br />

métho<strong>de</strong> à lʹavenir, elle épargnera bien <strong>de</strong>s soucis à vous, bien <strong>de</strong>s peines à vos amis.<br />

Vous ne méconnaissez pas moins ma pensée et mes sentiments, cher ami, quand<br />

vous me reprochez <strong>de</strong> nʹavoir pas provoqué <strong>de</strong> vous une explication. Votre conduite en‐<br />

vers moi me semblait si blessante et si inconcevable que je ne la pouvais attribuer quʹà lʹin‐<br />

constance ou à la lassitu<strong>de</strong> du cœur; <strong>de</strong>vant une pareille cause, je ne pouvais que gémir<br />

péniblement sur vous et sur moi; je lʹai fait <strong>avec</strong> plus <strong>de</strong> trouble et <strong>de</strong> douleur quʹil nʹeût<br />

fallu sans doute, mais je nʹai rien dit, ayant lʹhabitu<strong>de</strong>, non pas dʹêtre impitoyable comme<br />

vous le dites, mais <strong>de</strong> souffrir en silence et <strong>de</strong> prier quand je suis profondément blessé. Il<br />

me semble alors que Dieu tout seul peut mʹentendre et me guérir et je me tourne vers Lui;<br />

cʹest là une gran<strong>de</strong> ressource dans mes découragements et ces malentendus si fréquents où<br />

<strong>de</strong> pauvres cœurs comme les nôtres ont bon vouloir, se parlent, se lamentent pour se faire<br />

comprendre et nʹy peuvent parvenir. Ici même, dans cette petite ville où je suis, jʹai retrou‐<br />

vé une vieille dame amie et parente <strong>de</strong> ma pauvre mère. Jugeant que je ne la visitais pas<br />

assez vite, elle mʹest venue trouver elle‐même, malgré ses 80 ans, mʹa emmené chez elle et<br />

mʹa comblé <strong>de</strong> bienveillance. Mais elle est sour<strong>de</strong> à ne pouvoir entendre le plus petit mot;<br />

196


à tout ce que je pouvais dire pour lui exprimer ma vive gratitu<strong>de</strong>, elle me criait: ʺCʹest inu‐<br />

tile, je nʹentends rien.ʺ Alors jʹai pris sa main et lʹai serrée affectueusement en regardant au<br />

ciel; elle mʹa compris ainsi et mʹa souri doucement. Tournons‐nous <strong>de</strong> ce côté, cher ami, et,<br />

comme nous lʹavons fait si souvent, nous saurons encore nous entendre et rapprocher nos<br />

cœurs.<br />

Vous trouverez, je le crains, encore que cette lettre est plus triste que tendre; vous<br />

vous tromperez <strong>de</strong> nouveau, elle est lʹun et lʹautre tout ensemble; ma première lettre était<br />

pleine <strong>de</strong> bienveillance et <strong>de</strong> douce conciliation, jʹai désiré que celle‐ci fût dans le même<br />

sentiment; je ne sais si vous mʹen saurez gré. Comment ne serai‐je pas triste: épuisé <strong>de</strong><br />

corps et dʹesprit, brisé par le cœur tant <strong>de</strong> fois, jʹavais cru trouver en vous un peu <strong>de</strong> repos<br />

et <strong>de</strong> consolation et vous mʹaffligez plus que les autres, les mouvements continuels <strong>de</strong> vo‐<br />

tre esprit qui ne se peut tenir à la sainte monotonie dʹune affection paisible me troublent et<br />

mʹinquiètent perpétuellement; ici même, où je cherche, en vain sans doute, un peu <strong>de</strong> force<br />

et quelque répit à ma souffrance, vous mʹaccablez <strong>de</strong> durs reproches, sans un mot du cœur<br />

pour en adoucir lʹamertume. Si cette plainte, faite bien bas pourtant et mise au Cœur <strong>de</strong><br />

Dieu encore plus quʹau vôtre, vous irrite encore, si, malgré tout ce que jʹai pu faire et sou‐<br />

haiter, si malgré les bons désirs qui sont en vous aussi et que je ne mets pas en doute, nous<br />

restons sans nous entendre, il faut, cher enfant, courber notre tête et laisser faire le bon<br />

Dieu; il a rapproché nos cœurs et les maintiendra dans la vraie charité; sans Lui, comme la<br />

pauvre dame sour<strong>de</strong>, nous ne saurons que dire: Tout est inutile, je nʹentends rien.<br />

Adieu, mon enfant chéri, une fois encore et pour la <strong>de</strong>rnière je vous donne <strong>avec</strong><br />

larmes ce nom dont vous ne voulez plus et auquel ma tendre affection avait attaché tant<br />

<strong>de</strong> sollicitu<strong>de</strong> et dʹar<strong>de</strong>nt dévouement; il me restera désormais heureusement encore à me<br />

dire pour vous, comme aujourdʹhui<br />

Votre dévoué frère et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Ma santé nʹa pas reçu encore dʹamélioration bien sensible; le grand air, la mer,<br />

une vie <strong>de</strong> grand repos me donnent un peu <strong>de</strong> soulagement, mais je nʹy trouve pas ces re‐<br />

tours <strong>de</strong> force et <strong>de</strong> vie que comporte la convalescence. Tout sera bien du reste, car tout<br />

viendra <strong>de</strong> Dieu, et ne sera pas, je lʹespère, placé dans un cœur ingrat. Ecrivez‐moi après la<br />

séance <strong>de</strong> dimanche et dites‐moi si tout est bien à la Sainte‐Famille et à la Conférence. Fai‐<br />

tes pour le mieux quant à la statue, nʹoubliez pas le <strong>de</strong>ssin.<br />

Priez pour moi, dites à nos amis mille choses cordiales pour moi.<br />

142 à M. Myionnet<br />

Rôle <strong>de</strong> la sécheresse spirituelle dans la vie intérieure: Dieu la permet pour que nous percevions notre misère; no‐<br />

tre travail est <strong>de</strong> nous laisser faire. Démarches charitables. Légen<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’évêque bâtisseur. Inébranlable constance:<br />

ʺgar<strong>de</strong>r la lettre <strong>de</strong> notre règlement, l’esprit reviendraʺ.<br />

27 juin [1846]‐ S t Valéry‐en‐Caux<br />

Grand Hôtel <strong>de</strong>s Bains<br />

Mon bien cher frère,<br />

Vous me paraissez beaucoup trop sévère pour vous et vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z trop vite, ce<br />

me semble, à votre pauvre âme dʹarriver à la perfection à laquelle elle aspire. Nʹest‐ce pas<br />

197


trop grossir les choses aussi que <strong>de</strong> voir dans votre vie toute consacrée à la prière et aux<br />

œuvres saintes <strong>de</strong>s fautes graves qui peuvent alarmer votre cœur? Sʹil en était ainsi, cher<br />

ami, jʹen aurais vu quelque chose, moi qui, <strong>de</strong>puis votre arrivée ici, ne vous ai guère quitté<br />

et qui partage maintenant votre <strong>de</strong>meure et marche côte à côte <strong>avec</strong> vous. Rassurez‐vous,<br />

cher frère, je nʹai rien vu en vous que <strong>de</strong> simple, <strong>de</strong> droit et <strong>de</strong> bon, et jʹai pour moi la<br />

conviction que, loin dʹavoir reculé dans la bonne voie, vous vous y êtes avancé courageu‐<br />

sement et dʹun pas soutenu. Notre erreur sur nos dispositions vient ordinairement, cher<br />

ami, <strong>de</strong> ce que nous ne tenons pas un compte suffisant <strong>de</strong>s circonstances différentes où<br />

nous nous trouvons; en certains temps, nous avons été pleins dʹar<strong>de</strong>ur, fermes dans les rè‐<br />

gles que nous nous étions imposées, prêts à tout souffrir, à tout entreprendre pour le ser‐<br />

vice du Seigneur. Cet état heureux ravit notre cœur, nous remplit dʹespérance et nous<br />

semble la voie <strong>de</strong> perfection. Je pense toutefois quʹil nʹen est rien, quʹon est là seulement<br />

aux premiers pas <strong>de</strong> la carrière et au traitement <strong>de</strong> lʹenfance. En avançant, Dieu dont lʹar‐<br />

<strong>de</strong>ur nous soutenait se retire; sa lumière nʹéclaire plus notre esprit, nous nous trouvons en<br />

présence <strong>de</strong> nos faiblesses, <strong>de</strong> notre impuissance et <strong>de</strong> toutes les misères <strong>de</strong> notre nature;<br />

nous sommes tiè<strong>de</strong>s et presque mauvais; lʹamour‐propre se mêle à nos intentions, et lʹal‐<br />

liage gâte aussi la pureté <strong>de</strong> nos affections, nous prions sans goût et <strong>avec</strong> ennui; nous<br />

nʹavons à lʹoraison ni pensées, ni sentiments, ni ar<strong>de</strong>ur pour les résolutions; enfin nos œu‐<br />

vres aussi sont tiè<strong>de</strong>s et sans vie, infructueuses pour les autres, vi<strong>de</strong>s et fatigantes pour<br />

nous. En êtes‐vous là, mon bien cher frère? Si vous nʹy êtes pas encore, je suis en avance<br />

sur vous et puis vous tendre la main pour me rejoindre, car vous y viendrez; si vous êtes<br />

plus abattu, plus triste et plus débile encore, cʹest à vous à mʹattirer, car vous avez <strong>de</strong><br />

lʹavance sur moi. Oui, cher ami, je suis convaincu quʹil faut passer par ce triste chemin,<br />

sentir par nos défaillances, nos faux pas, nos chutes peut‐être, notre misère, notre néant.<br />

Mais je suis assuré en même temps que cet état <strong>de</strong> désolation et dʹimpuissance est meilleur<br />

que le premier où nous étions fermes, fervents, généreux par le cœur et féconds par les<br />

œuvres. Dieu était en nous alors, animait notre esprit, guidait nos pas, soutenait notre<br />

main; aujourdʹhui, il nous regar<strong>de</strong> faire, comme une mère suit les premiers pas <strong>de</strong> son en‐<br />

fant, voit sa faiblesse, prévoit ses chutes, mais le laisse faire pour quʹil apprenne à marcher.<br />

Quand, il y a quelques mois, avant notre petite retraite, vous sembliez triste et parliez dʹal‐<br />

ler vous recueillir à Angers: M. Beaussier sourit seulement et me dit: ʺVous et lui en verrez<br />

bien dʹautres.ʺ M. <strong>de</strong> Malet, mon pieux et saint directeur dʹautrefois, mʹen avait aussi aver‐<br />

ti, me disant: ʺVous avez quelque peu <strong>de</strong> science, <strong>de</strong> foi, <strong>de</strong> charité, <strong>de</strong> dévouement, sachez<br />

bien que lʹheure viendra où vous nʹaurez plus rien; la tié<strong>de</strong>ur, la sécheresse, les ténèbres et<br />

les chutes seront votre lot, vous serez seul au lieu dʹêtre à <strong>de</strong>ux comme aujourdʹhui, Dieu<br />

et vous; il nʹy aura plus que vous, et vous comprendrez alors ce que cʹest que vousʺ. Cette<br />

heure semble arrivée, cher ami, tenons‐nous donc bien, serrons‐nous lʹun contre lʹautre,<br />

gardons la lettre <strong>de</strong> nos pratiques et <strong>de</strong> notre petit règlement; lʹesprit reviendra, la lumière<br />

éclairera encore notre pensée, notre cœur sentira encore la douce charité à laquelle il sʹest<br />

voué et tout entier consacré. Voilà mon espérance, cher ami, acceptez‐la vous‐même ne<br />

prenez pas votre isolement pour la déca<strong>de</strong>nce, quelques relâchements, mollesses et dé‐<br />

goûts pour <strong>de</strong>s fautes graves, ni même quelques fautes pour <strong>de</strong>s signes <strong>de</strong> défection; en cet<br />

état, Dieu nous traite <strong>avec</strong> une immense indulgence; si nous trébuchons, il nʹy prend gar<strong>de</strong><br />

et si nous tombons, il nous relève, essuie la poussière et la boue et nous remet sur le che‐<br />

min. Voilà tout. Cʹest moi aujourdʹhui, cher frère, qui semble résolu et parais ne douter <strong>de</strong><br />

198


ien; <strong>de</strong>main ce sera votre tour, car, vingt fois le jour, jʹai aussi mes défaillances et mes dé‐<br />

couragements. Mais appuyés lʹun sur lʹautre, nous soutenant alternativement, priant en‐<br />

semble ou gémissant ensemble, nous gagnerons du terrain, et nous nous trouverons, je<br />

lʹespère, sur un sol plus ferme et dans un air plus libre.<br />

Quand je serai <strong>de</strong> retour, cher frère, si le bon Dieu me rend un peu <strong>de</strong> santé, je mʹef‐<br />

forcerai <strong>de</strong> vous édifier mieux. Je comprends bien que lʹétat où vous me voyez <strong>de</strong> corps et<br />

dʹesprit ne contribue pas peu à votre découragement, mais, mon bien cher frère, vous<br />

nʹaurez pas manqué, <strong>avec</strong> une indulgente compassion, <strong>de</strong> penser que jʹen souffre encore<br />

plus que vous, ayant à la fois le poids et lʹhumiliation accablante <strong>de</strong> ces infirmités. Je les<br />

regar<strong>de</strong>, du reste, comme une <strong>de</strong>s ru<strong>de</strong>s épreuves auxquelles nous <strong>de</strong>vions nous attendre<br />

et je me plais à y voir un témoignage <strong>de</strong> la présence et <strong>de</strong> lʹaction <strong>de</strong> Dieu dans notre œu‐<br />

vre. Jʹai lu ces jours‐ci une petite légen<strong>de</strong> portant que le Seigneur ordonna à un pieux Evê‐<br />

que, je ne sais plus lequel, <strong>de</strong> lui élever une église magnifique en un lieu marqué. LʹEvêque<br />

se mit à lʹœuvre et bâtit à grands frais lʹédifice, mais il nʹétait pas encore achevé que les<br />

murs sʹécroulèrent; on les releva, ils tombèrent encore; mais le saint ayant persévéré, il édi‐<br />

fia enfin un temple admirable où le Seigneur se plut à verser sur tous ses bénédictions.<br />

Ce sera là, je lʹespère, cher ami, notre histoire, mais il faut persévérer opiniâtrement<br />

dans notre <strong>de</strong>ssein, ne nous décourager ni <strong>de</strong>s difficultés, ni surtout <strong>de</strong> nos imperfections;<br />

nous sommes les instruments <strong>de</strong> Dieu, sʹIl ne nous trouve pas tels quʹIl nous veut, quʹIl<br />

nous taille, nous martèle et nous redresse à son gré, jʹose dire que cʹest son affaire, la nôtre<br />

est <strong>de</strong> nous laisser faire, dʹêtre dociles et <strong>de</strong> ne cé<strong>de</strong>r que si, bien évi<strong>de</strong>mment, bien assu‐<br />

rément, Il nous rejette et refuse <strong>de</strong> se servir <strong>de</strong> nous. Voilà ma pensée, cher ami, elle sera<br />

aussi la vôtre puisquʹelle ne comporte que la défiance en nous‐mêmes <strong>avec</strong> lʹabsolue<br />

confiance aux miséricor<strong>de</strong>s et à lʹamour <strong>de</strong> notre Dieu.<br />

Jʹai reçu, comme vous le dites, une lettre <strong>de</strong> M. Maignen, mais il ne me parle point<br />

<strong>de</strong> la Conférence, ni du patronage pas davantage. Sa lettre nʹest quʹune longue plainte<br />

contre moi, contre mes exigences excessives et lʹexagération <strong>de</strong> mes conseils à son égard. Je<br />

mérite en partie ces reproches, bien que mon intention ait été bonne; mon affection pour<br />

lui toute chrétienne quʹelle fût, était excessive et par là <strong>de</strong>vait avoir son châtiment; je nʹai<br />

pas dʹailleurs assez tenu compte <strong>de</strong> ses inclinations naturelles et, en essayant <strong>de</strong> mettre un<br />

peu <strong>de</strong> régularité dans ses habitu<strong>de</strong>s, jʹai appuyé trop ru<strong>de</strong>ment la main sur un point faible<br />

qui voulait être ménagé. Jʹespère néanmoins que cette irritation est passagère et que son<br />

cœur nous restera. Je vous prie, cher ami, <strong>de</strong> ne lui point parler <strong>de</strong> ces petits démêlés, le<br />

bon Dieu, mieux que nous, les arrangera <strong>avec</strong> sa douce et insinuante charité.<br />

Jʹécris une lettre, que je joins ici, pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à M. lʹabbé Duquesnay dʹaller à<br />

Angers pour le 19 juillet. Il fau‐ drait, cher ami, par amour pour<br />

votre Conférence dʹAngers, que vous portiez cette lettre vous‐<br />

même à M. Duquesnay, quʹon trouve le matin avant midi. Vous<br />

le rencontrerez, je pense, en y allant tout <strong>de</strong> suite après la messe,<br />

le matin. Si vous obteniez une réponse favorable, vous <strong>de</strong>vriez,<br />

cher frère, en écrire immé‐ diatement à Pavie qui concerterait<br />

<strong>avec</strong> vous le départ <strong>de</strong> M. Duquesnay. En cas contraire, la<br />

charge vous reviendrait encore, mon pauvre frère, <strong>de</strong> voir M.<br />

Ratisbonne 145 , M. Lacarrière dont on vous dira lʹadresse aux<br />

145 Converti du judaïsme comme son frère Alphonse, Théodore Ratisbonne, prêtait son talent d'orateur à la Conférence St-Sulpice.<br />

199


Carmes, enfin les Jésuites qui peut‐être donneraient le p. Humphry ou le p. Marquet. Je<br />

crois quʹils ne conviendraient pas pleinement à Angers, mais ils ont assurément un talent<br />

incontestable. Le plus convenable serait, je crois, M. Duquesnay, travaillez donc <strong>de</strong> votre<br />

mieux pour lʹavoir.<br />

Je vais écrire à Victor pour lui dire que mon absence laisse en gran<strong>de</strong> partie reposer<br />

cette affaire sur vous. Si vous réussissez, avertissez‐moi vite, je pourrais écrire à M. Levas‐<br />

sor pour lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r comment il sʹest arrangé <strong>de</strong>rnièrement en cas semblable <strong>avec</strong> M.<br />

Duquesnay pour les frais <strong>de</strong> voyage ou autres; peut‐être aussi pourrait‐on tout simple‐<br />

ment prendre lʹavis <strong>de</strong> M. lʹabbé Goujon à la sacristie <strong>de</strong> St‐Sulpice.<br />

Je nʹavais pas pris soin <strong>de</strong> vous dire dʹouvrir mes lettres, puisque nous avons tout<br />

mis en commun, la recommandation était inutile. Je vous prie <strong>de</strong> prélever sur les 200f re‐<br />

çus le prix du port, plus 115f que vous verserez à la Caisse <strong>de</strong> notre Communauté et <strong>de</strong> ré‐<br />

server le reste qui nʹest pas à moi.<br />

Rappelez‐moi <strong>de</strong> nouveau au souvenir <strong>de</strong> nos bien chers Confrères, en particulier<br />

ceux qui veulent bien prendre sur eux mon travail <strong>avec</strong> le leur: MM. Deslan<strong>de</strong>s, Boutron,<br />

Roudé, Granger; je désire aussi que vous fassiez un petit mémento particulier à M. <strong>de</strong> Ma‐<br />

lartic dont la bonté et lʹinépuisable bonne volonté font ma joie et mon édification tout en‐<br />

semble. Nʹoubliez pas enfin dʹautres qui me sont également chers: MM. Nimier, Georges,<br />

Planchat, Leleu 146 , tous, je ne sais pas mʹarrêter, car je les ai tous dans mon affection. Jʹap‐<br />

porterai à lʹexcellent M. Fossin <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> sa famille; jʹai écrit à M. Paillé, je pense<br />

quʹil va nous arriver bien prochainement. Enfin dites un mot au bon Odulphe que je re‐<br />

comman<strong>de</strong> aussi au bon Dieu dans mes prières.<br />

Jʹaugmente vos travaux, cher ami, en vous donnant un pareil volume à lire, mais je<br />

nʹai pu faire autrement. Ma santé est peu robuste encore, mais si elle ne revient pas, elle<br />

exercera votre patience, cher ami, se sera peut‐être là le <strong>de</strong>ssein <strong>de</strong> Dieu. Je vous embrasse<br />

tendrement, cher frère, dans le Cœur <strong>de</strong> ce divin Maître qui nous a rapprochés lʹun <strong>de</strong> lʹau‐<br />

tre et qui nous unira dans son amour.<br />

A vous en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

143 à M. Myionnet<br />

La persévérance dans la prière apporte à l’âme confiante lumière et<br />

paix.<br />

2 juillet 1846<br />

St Valéry‐en‐Caux<br />

Mon bien cher frère,<br />

M. Taillandier retournant à Paris, je le charge <strong>de</strong><br />

ces <strong>de</strong>ux mots pour vous, afin <strong>de</strong> vous donner signe <strong>de</strong><br />

vie et <strong>de</strong> me rappeler à votre bon souvenir. Le petit pays<br />

où je suis est si calme et si paisible que la vie sʹy passe<br />

tous les jours <strong>de</strong> la même façon, je nʹai donc rien <strong>de</strong><br />

146 Confrères <strong>de</strong> St-Vt-<strong>de</strong>-Paul. <strong>–</strong> Henri Planchat (1823-1871), premier prêtre <strong>de</strong> l'Institut. Etudiant en droit, il était, dès 1843, membre<br />

<strong>de</strong> la Conférence St-Sulpice. Surnommé "L'apôtre <strong>de</strong>s faubourgs", il sera fusillé le 26 mai 1871 par les Communards.<br />

200


nouveau à vous apprendre. Les bains me font peut‐être un peu <strong>de</strong> bien quelque très insen‐<br />

siblement; je marche un peu moins mal et le bon air, joint à un exercice modéré, me sou‐<br />

tient au moins pour le moment, je ne sais ce quʹil me pourra rester <strong>de</strong> cette amélioration<br />

pour lʹavenir; je crains bien d’en rapporter peu <strong>de</strong> chose à Paris.<br />

Le temps nʹayant pas toujours été favorable, je nʹai pu régulièrement prendre <strong>de</strong>s<br />

bains tous les jours et il mʹen reste encore 10 à prendre, cela mʹobligera à rester ici jusquʹau<br />

13 et à différer mon retour au 20 <strong>de</strong> ce mois environ. Alors, cher frère, je reviendrai oc‐<br />

cuper ma petite chambre près <strong>de</strong> vous, partager vos exercices et vous faire attendre plus<br />

patiemment, si je puis, le temps où <strong>de</strong>s frères plus vigoureux que moi <strong>de</strong> corps et dʹesprit<br />

vous seront envoyés par le bon Dieu.<br />

Tâchez, cher frère, <strong>de</strong> trouver un moment pour me répondre, cela vous reposera un<br />

peu <strong>de</strong> vos travaux et vous donnera quelque épanchement <strong>de</strong> cœur <strong>avec</strong> votre frère ab‐<br />

sent.<br />

Je joins ici une petite lettre que je vous prie <strong>de</strong> faire remettre près <strong>de</strong> chez nous à son<br />

adresse. Elle est pour un <strong>de</strong> mes camara<strong>de</strong>s <strong>de</strong> bureau à qui jʹécris pour savoir si mes affai‐<br />

res sont terminées au Ministère.<br />

Adieu, mon bien cher frère, priez toujours beaucoup pour moi qui en ai grand be‐<br />

soin en ce moment. Je tâche, malgré mes dispositions mauvaises, <strong>de</strong> ne pas trop négliger<br />

les habitu<strong>de</strong>s prises en meilleur temps; je vais plusieurs fois chaque jour à la chapelle et,<br />

bien que je ne dise pas grand chose au Seigneur et quʹIl <strong>de</strong>meure aussi silencieux <strong>avec</strong> moi,<br />

je ne laisse pas <strong>de</strong> penser quʹil y a profit pour moi et hommage pour Lui dans cet humble<br />

effort <strong>de</strong> ma volonté. Jʹai la confiance, cher ami, que si nous persistons vous et moi, malgré<br />

nos misères, malgré nos défaillances, dans cette voie obscure et ari<strong>de</strong>, elle nous conduira à<br />

quelque lieu <strong>de</strong> douce lumière et <strong>de</strong> bienfaisant repos.<br />

A vous bien affectueusement dans les Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je pense que lʹargent qui me revient du Ministère pour le mois <strong>de</strong>rnier aura dû vous<br />

être apporté, je vous dirai la part qui doit en être distraite pour la pension <strong>de</strong> mon ne‐<br />

veu. 147<br />

144 à M. Maignen<br />

MLP. lui démontre l’intérêt et la nécessité d’avoir une Conférence structurée. Démarches pour divers objets, notamment la sta‐<br />

tue <strong>de</strong>stinée à la Sainte‐Famille.<br />

[8 juillet 1846]<br />

S t Valéry‐en‐Caux<br />

Vous nʹêtes pas vous‐même en ce moment, mon cher ami, je ne sais quel esprit vous<br />

exalte et vous pousse hors <strong>de</strong> la voie <strong>de</strong> douceur et <strong>de</strong> bonté qui vous est naturelle et qui<br />

147 En tête <strong>de</strong> la lettre on peut lire ceci: "Cette lettre, écrite avant l'arrivée <strong>de</strong> M. Paillé, se trouve presque sans objet".<br />

Après le premier alinéa, il y a, effacé: "Nous n'avons pas vu jusqu'ici M. Paillé, que nous attendions au commencement <strong>de</strong> cette<br />

semaine; s'il n'était pas encore parti et qu'il vous parût avoir quelque hésitation, il faudrait l'engager à ne pas venir; le pays est très<br />

aimable à voir, mais ne suffirait pas peut-être pour lui rendre son voyage agréable, s'il ne sentait d'ailleurs le besoin <strong>de</strong> se remuer<br />

un peu, comme cela lui est arrivé souvent; <strong>de</strong> mon côté, j'aurais bien regret qu'il fît pour moi seul ce déplacement, puisque mon<br />

état <strong>de</strong> santé n'est pas tel que j'aie besoin <strong>de</strong> le réclamer <strong>de</strong> sa généreuse affection"<br />

Il y a enfin, rayé, ce post-scriptum: " N'oubliez pas <strong>de</strong> me dire ce que vous avez fait pour la Conférence d'Angers. Rappelez-moi, je<br />

vous prie, au bon souvenir <strong>de</strong> nos chers amis".<br />

201


seule vous réussira. Laissons, croyez‐moi, reposer nos cœurs, afin <strong>de</strong> retrouver plus tard<br />

une affection commencée sous dʹheureux auspices et qui doit nous être chère à tous <strong>de</strong>ux.<br />

Jusque là, réfugions‐nous dans la charité qui du moins nous laissera la bienveillance réci‐<br />

proque, le respect lʹun <strong>de</strong> lʹautre et lʹindulgence chrétienne dont nous avons également be‐<br />

soin 148 .<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> vos observations au sujet <strong>de</strong> la Conférence et <strong>de</strong> la Sainte‐<br />

Famille; quelle quʹen soit la forme, je tâcherai <strong>de</strong> tirer parti <strong>de</strong> ce quʹelles peuvent avoir<br />

dʹutile. Je sais toutes les bonnes et aimables qualités <strong>de</strong> M. Deslan<strong>de</strong>s, bien quʹil soit déjà<br />

Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> St‐Gervais, chargé <strong>de</strong> représenter notre Conférence au Conseil <strong>de</strong> Paris et<br />

quʹil ait eu la plus importante <strong>de</strong> nos sections, je chercherai toutes les occasions <strong>de</strong> faire<br />

profiter notre assemblée <strong>de</strong> son zèle et <strong>de</strong> son dévouement.<br />

Les chefs <strong>de</strong> section, dont vous ne paraissez pas apprécier assez lʹaction et lʹin‐<br />

fluence dans notre Conférence, ont autant dʹinitiative quʹon le peut désirer et pourront<br />

successivement tirer, je lʹespère, <strong>de</strong> cette division en sections, les avantages que jʹai cher‐<br />

chés et qui nʹétaient autres quʹune part faite à lʹinitiative et au mouvement propre <strong>de</strong> cha‐<br />

cun. Le nombre considérable <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> notre réunion met plus dʹobstacles que vous<br />

ne le pensez à cette action particulière <strong>de</strong>s Confrères, et jʹai bien souvent pensé que plu‐<br />

sieurs pouvaient en souffrir en nʹayant pas une sphère assez ouverte pour leur bonne vo‐<br />

lonté; cʹest pourquoi jʹai longtemps tenté <strong>de</strong> reporter une part <strong>de</strong> lʹaction générale <strong>de</strong> nos<br />

œuvres dans les réunions <strong>de</strong>s sections, je nʹy suis parvenu quʹimparfaitement. Sʹil existe<br />

dʹautres moyens, je serai très disposé à les mettre en usage, quand ils seront proposés.<br />

Pour ce qui concerne le Conseil <strong>de</strong> la Sainte‐Famille, il a dû, dans le premier mo‐<br />

ment, être nécessairement composé <strong>de</strong> tous les hommes qui avaient encouragé lʹœuvre et<br />

pouvaient la protéger à son début; <strong>de</strong>puis, il vient dʹêtre réorganisé avant mon départ et<br />

ne renferme que <strong>de</strong>s hommes dont vous ne méconnaîtrez ni le zèle, ni lʹactive bonne vo‐<br />

lonté; ce sont MM. Milleriot, <strong>de</strong> Lambel, Deslan<strong>de</strong>s, <strong>de</strong> Montaud, Taillandier, <strong>de</strong> Malartic,<br />

Boutron, vous, M. Tardif, M. Tuslane comme représentant <strong>de</strong>s Missions et un membre <strong>de</strong>s<br />

plus zélés <strong>de</strong> Stanislas pour représenter cette Conférence. Dans lʹassemblée qui a eu lieu<br />

avant mon départ, ce Conseil a montré les meilleures dispositions et je crois quʹon pourra<br />

le réunir utilement en toute occasion.<br />

Je vous suis très obligé du soin que vous avez pris pour le <strong>de</strong>ssin; je crois quʹil faut<br />

en presser lʹachèvement, afin dʹen pouvoir disposer pour le moment <strong>de</strong> la retraite. M. Bel‐<br />

liard est tout prêt; (rue <strong>de</strong> Sèvres, n° 2) et M. Imlé, je pense, a déjà fini sa part <strong>de</strong> travail. M.<br />

Duplessy avait promis <strong>de</strong> prendre <strong>de</strong>s informations sur les cadres en frappé <strong>de</strong> cuivre; je<br />

vous prie <strong>de</strong> vous en occuper <strong>avec</strong> lui.<br />

Je pense que vous aurez eu la bonté <strong>de</strong> vous occuper aussi <strong>de</strong> la statue, car si le p.<br />

Jehan 149 doit tar<strong>de</strong>r à revenir, nous nous trouverions au dépourvu.<br />

Ma santé continue dʹêtre assez languissante et je doute que je tire un bien grand<br />

profit <strong>de</strong>s bains <strong>de</strong> mer.<br />

Je quitterai St‐Valéry lundi pour me rendre chez ma sœur où je resterai sans doute<br />

une huitaine <strong>de</strong> jours. Croyez‐moi toujours bien cordialement à vous en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

148 Dans un premier mouvement, MLP. avait arrêté sa lettre ici, et ce 1 er paragraphe n'était suivi que <strong>de</strong> la formule <strong>de</strong> politesse finale<br />

et <strong>de</strong> sa signature. Se ravisant, MLP. a préféré répondre longuement et promettre <strong>de</strong> tirer profit <strong>de</strong>s critiques que lui adresse M.<br />

Maignen.<br />

149 Le père Jehan est moine, sculpteur, <strong>de</strong> l'abbaye bénédictine <strong>de</strong> Solesmes.<br />

202


145 à M. Maignen<br />

MLP. s’évertue à démontrer à ce coeur sensible toute la réalité <strong>de</strong> son affection pour lui. Que M. Maignen tienne<br />

davantage compte <strong>de</strong> sa droiture d’intention. Qu’il faut mêler à l’amitié humaine l’esprit <strong>de</strong> la sainte charité. Il<br />

lui recomman<strong>de</strong> <strong>de</strong> prendre soin <strong>de</strong> M. Myionnet ʺil est bien facile <strong>de</strong> l’aimerʺ.<br />

Jeudi 9 juillet 1846<br />

S t Valéry‐en‐Caux<br />

Ma lettre sʹest croisée <strong>avec</strong> la vôtre, cher ami, vous lʹavez vite compris, et vous<br />

voyez à mon empressement quʹ<strong>avec</strong> vous le silence me coûte plus que lʹeffusion. Comme<br />

vous lʹavez pensé, vos <strong>de</strong>ux lettres mʹavaient semblé dures et outrageuses, blessantes à<br />

<strong>de</strong>ssein, sans la moindre parole qui sentît lʹaffection et qui adoucît lʹamertume <strong>de</strong> vos re‐<br />

proches; jʹy trouvais un oubli complet et une méconnaissance cruelle <strong>de</strong> la plus tendre af‐<br />

fection que vous ayez rencontrée; mon premier mouvement eût pu trop se faire sentir dans<br />

ma réponse. Jʹai attendu, jʹai prié un peu Dieu, comme je tâche <strong>de</strong> le faire ordinairement,<br />

pour savoir si je <strong>de</strong>vais me taire ou parler encore; je me suis senti lʹespérance que tout<br />

nʹétait pas fini, quʹaprès un temps <strong>de</strong> tristes malentendus nous nous retrouverions cœur à<br />

cœur, et je vous ai fait une petite lettre qui vous aura paru sévère quoiquʹelle fût encore un<br />

appel à votre affection. Vous avez pris les <strong>de</strong>vants, cher enfant, jʹen suis heureux; il nʹen<br />

fallait pas tant pour vous rouvrir les bras et tout le cœur <strong>de</strong> votre pauvre ami; quoi que<br />

vous fassiez, quoi que je concè<strong>de</strong> dans les formes extérieures, ma tendresse pour vous aura<br />

toujours un fond <strong>de</strong> paternité qui ne sʹeffacera pas; or, vous le savez, vous si bien partagé<br />

dans la famille, les pauvres parents ont beau être maltraités, au moindre signe <strong>de</strong> retour, il<br />

nʹont pas <strong>de</strong> résistance et ne savent que pleurer et aimer; donc, mon cher enfant, je vous<br />

aime tout à mon aise, je vous serre bien contre ce cœur mala<strong>de</strong> que vous aviez tant froissé,<br />

afin quʹil nʹy ait plus trace <strong>de</strong> la blessure. Ah! que cʹest facile à guérir, cher ami, et que je<br />

fais bon marché <strong>de</strong> cet orgueil que vous dites si intraitable, puisquʹaprès tout, il nʹy a que<br />

lui à immoler.<br />

Mais il faut bien vous dire que pour le reste, je ne suis pas du tout converti à votre<br />

avis. Oui, vous vous trompez mille et mille fois quand vous dites que jʹai manqué dʹestime<br />

pour vous; je nʹai pas cessé un seul instant <strong>de</strong> rendre justice hautement et <strong>avec</strong> tous aux<br />

qualités que jʹétais heureux <strong>de</strong> reconnaître en vous; je ne tenais quʹun faible compte <strong>de</strong><br />

quelques mécontentements manifestés <strong>de</strong> temps en temps par vous, parce que nʹy sentant<br />

aucun fon<strong>de</strong>ment réel et, dans toute la sincérité <strong>de</strong> mon âme, nʹy voyant quʹun effet dʹima‐<br />

gination <strong>de</strong> votre part, je ne pouvais croire quʹils laissassent aucune impression pénible en<br />

vous. Presque toujours, je tombais <strong>de</strong>s nues quand vous vous montriez irrité contre moi et<br />

je souffrais cruellement dʹune susceptibilité qui me paraissait si exagérée et si contraire à la<br />

douceur naturelle <strong>de</strong> votre caractère. En répondant alors <strong>avec</strong> calme et bienveillance, je<br />

faisais un effort que vous nʹavez pas aperçu et qui mʹa pourtant coûté beaucoup. Vous<br />

vous trompez mille fois plus encore quand vous vous plaignez <strong>de</strong> nʹavoir pas été assez<br />

aimé; ma tendresse pour vous dominait tout et, dans les heures les plus douloureuses <strong>de</strong><br />

ma vie, a su gar<strong>de</strong>r sa place dans mon cœur. Quand après un mois dʹangoisses <strong>de</strong> tous les<br />

instants, jʹai perdu ma bien‐aimée mère, tant chérie, tant vénérée, je vous ai écrit que vos<br />

paroles mʹétaient si douces quʹelles affaiblissaient, au moins pour une heure, la douleur<br />

par la consolation. Si jamais, ce quʹà Dieu ne plaise, votre bonne et trois fois bonne mère<br />

vous était enlevée et que vous puissiez écrire une pareille parole à un ami, vous sentiriez<br />

jusquʹoù va pour lui votre affection. La mienne pour vous nʹa pas été gran<strong>de</strong>, elle a été ex‐<br />

203


cessive, trop mêlée <strong>de</strong> tendresse, trop préoccupante, trop exclusive, elle a nui à mon repos,<br />

elle eût troublé ma conscience, sans une constante surveillance, ou pour mieux dire et<br />

pour être franc, elle lʹa souvent troublée comme empiétant sur un cœur que jʹavais tout<br />

voué à Dieu. Je lʹai toujours considérée comme punissable par ce point et quand, pour <strong>de</strong>s<br />

raisons que vous jugez énormes et qui paraissaient à moi <strong>de</strong>s inégalités dʹhumeur effaça‐<br />

bles par un serrement <strong>de</strong> main, vous mʹavez tout à coup délaissé et presque repoussé, je<br />

me suis dit: Voilà lʹheure <strong>de</strong> souffrir par où jʹai péché, et lʹheure aussi <strong>de</strong> rendre à Dieu ce<br />

que je lui ai dérobé. En souffrant douloureusement <strong>de</strong> votre abandon, je bénissais le Sei‐<br />

gneur qui, <strong>de</strong> sa main, frappait un coup que la mienne nʹeût jamais trouvé le courage <strong>de</strong><br />

porter.<br />

Je ne crois pas, mon cher ami, que ces explications, en tant quʹexplications, vous sa‐<br />

tisfassent, je vous les ai déjà données plusieurs fois, en substance au moins, sans que votre<br />

opinion en ait paru changée en rien; je vois bien aussi par votre lettre que, sur dʹautres<br />

points encore, nous nʹavons pas absolument le même sentiment, mais quʹimporte au fond,<br />

si nos cœurs sont contents et se reposent en sécurité lʹun sur lʹautre; il faut bien que nous le<br />

reconnaissions, les pauvres hommes, <strong>avec</strong> toute la bonne volonté et tous les désirs possi‐<br />

bles, ne sauraient toujours sʹentendre, mais si le cœur sʹinterpose, il peut combler lʹabîme<br />

et tenir les âmes tendrement unies.<br />

Vous ne me semblez pas, en particulier, tenir assez compte <strong>de</strong> la droiture dʹinten‐<br />

tion. En faisant cette réserve, vous eussiez enlevé à vos <strong>de</strong>ux lettres lʹexpression <strong>de</strong> ru<strong>de</strong>sse<br />

presque haineuse qui me les rendait si pénibles et vous eussiez été juste en même temps;<br />

car je puis, trop souvent, me tromper, manquer <strong>de</strong> lumière, <strong>de</strong> force et <strong>de</strong> bonne inspira‐<br />

tion, mais jʹose assurer que jʹai toujours cherché cordialement et sincèrement ce qui était le<br />

mieux pour la gloire <strong>de</strong> Dieu, pour lʹavantage <strong>de</strong> tous nos Confrères et le plus grand bien<br />

<strong>de</strong> nos pauvres familles. Il est bien rare que les gens qui sont un peu vraiment à Dieu ne<br />

marchent pas dans cette voie <strong>de</strong> droiture; en les prenant <strong>de</strong> ce côté, il est impossible quʹon<br />

ne soit pas incliné à lʹindulgence à leur égard et porté à les éclairer et à prier pour eux plu‐<br />

tôt quʹà les maltraiter.<br />

Je crois encore, cher ami, que vous avez tort <strong>de</strong> me reprocher dʹavoir trop <strong>de</strong> mesure<br />

et <strong>de</strong> faire <strong>de</strong> la seule petite vertu que je puis avoir une dignité orgueilleuse et une triste<br />

sécheresse <strong>de</strong> cœur. Un peu dʹempire sur soi‐même est le seul acquit que nous laissent les<br />

années à la place <strong>de</strong> tout ce quʹelles enlèvent, mais croyez bien que sous cette force appa‐<br />

rente qui contient la saillie excessive <strong>de</strong>s sentiments, le pauvre cœur nʹy perd rien, il aime<br />

et souffre quelquefois doublement, faute <strong>de</strong> se pouvoir élargir et épancher, comme il en<br />

aurait tant besoin. Je nʹai, du reste, que trop souvent manqué à cette convenance mesurée<br />

pour ce qui vous touche et plus tard, loin <strong>de</strong> penser comme aujourdʹhui, vous serez tenté<br />

peut‐être <strong>de</strong> me faire un reproche contraire.<br />

Je ne vous écris pas comme je voudrais, je ne suis presque jamais seul et je ne puis<br />

me recueillir intimement <strong>avec</strong> vous, mais je sens au fond du cœur un certain repos, une<br />

douce et tendre confiance qui mʹannoncent que tout est remis en son lieu entre nous et<br />

quelque chose doit en transpirer dans cette lettre. Oh! oui, nos cœurs sont faits pour la<br />

confiance, lʹabandon, la sainte assurance <strong>avec</strong> nos amis comme <strong>avec</strong> le divin Père lui‐<br />

même. Il faut, pour que nos affections soient douces, quʹelles participent un peu à la cons‐<br />

tance et à lʹimmuabilité du divin amour. Efforçons‐nous, bien cher ami, <strong>de</strong> donner cette<br />

consistance à la nôtre, et pour cela mêlons‐y encore plus que par le passé lʹesprit <strong>de</strong> sainte<br />

204


charité; tâchons que le Seigneur soit toujours en tiers <strong>avec</strong> nous, alors nos plus doux entre‐<br />

tiens seront encore une bonne œuvre, nos cœurs conduits, inspirés par Lui nʹauront plus<br />

que <strong>de</strong>s mouvements dʹaffectueuses indulgence et tireront tout le fruit possible que la ten‐<br />

dre amitié dont Il nous fait don.<br />

Adieu, mon bien‐aimé ami, je serai une huitaine <strong>de</strong> jours chez ma sœur, vous mʹy<br />

écrirez encore et puis vous tâcherez <strong>de</strong> venir au‐<strong>de</strong>vant <strong>de</strong> moi, afin que je vous voie le<br />

premier <strong>de</strong> tous, que je vous presse un peu contre mon cœur comme autrefois et que<br />

lʹavenir soit tout <strong>de</strong> douce joie pour nous.<br />

Je vais écrire dès mon arrivée au f. Myionnet pour le gron<strong>de</strong>r <strong>de</strong> ne mʹavoir pas dit<br />

quʹil était souffrant, soignez‐le bien, cʹest une espèce dʹoncle pour vous, puisquʹil est le<br />

frère <strong>de</strong> votre père, il est dʹailleurs bien facile <strong>de</strong> lʹaimer. Je suis un peu moins mal, mais<br />

lʹair <strong>de</strong> nos falaises est si bon quʹil nʹen saurait être autrement, à Paris, cela sera bien chan‐<br />

gé; je suis rouge et tout hâlé par le soleil, cʹest un plaisir <strong>de</strong> me voir, mais, dès lʹautomne, je<br />

serai blême à faire pitié; il me faudrait rester aux champs six mois; sans la retraite, jʹaurais<br />

prolongé mon absence <strong>de</strong> quelques semaines, mais sans mʹy croire bien utile, puisquʹà ma<br />

gran<strong>de</strong> satisfaction tout se soutient très bien, je désire profiter <strong>de</strong>s grâces que le bon Dieu y<br />

répandra, je lʹespère. Deman<strong>de</strong>z à M. Tardif sʹil prépare le recueil <strong>de</strong> cantiques. Tout est<br />

bien pour la statue; voici un mot pour M Lafon quant au <strong>de</strong>ssin; poussez la chose un peu,<br />

il serait utile <strong>de</strong> lʹavoir pour la retraite.<br />

Adieu, ami et frère<br />

L. Le <strong>Prevost</strong><br />

146 à M. Myionnet<br />

A M. Myionnet tenté <strong>de</strong> pratiquer les vertus les plus sévères, MLP. recomman<strong>de</strong> d’abord la charité et l’union<br />

fraternelle. Dès son retour, il compte bien préciser les exercices <strong>de</strong> communauté. Que M. Myionnet sache se faire<br />

remplacer dans les Oeuvres. MLP. lui confie <strong>de</strong>s démarches charitables et diverses commissions.<br />

Duclair, 15 juillet 1846<br />

Mon bien cher frère,<br />

Je suis bien consolé dʹapprendre que votre petite maladie nʹa aucune suite; si jʹeusse<br />

su plus tôt quʹune indisposition un peu grave vous eût atteint, je nʹeusse pu vous laisser<br />

seul et je serais revenu près <strong>de</strong> vous.<br />

Nous ne sommes que <strong>de</strong>ux encore dans notre petite Communauté, cher frère, nous<br />

avons donc plus dʹobligations lʹun à lʹégard <strong>de</strong> lʹautre quʹon nʹen peut avoir ailleurs et<br />

nous ne saurions nous passer longtemps <strong>de</strong> notre assistance réciproque. Vous dites <strong>avec</strong><br />

raison que nous <strong>de</strong>vons reproduire au milieu du mon<strong>de</strong> les vertus dont le Divin Maître<br />

nous a donné lʹexemple, je crois que la tendre charité et lʹunion bien fraternelle qui nous<br />

attachera lʹun à lʹautre ne sera ni la moins aimable, ni la moins édifiante <strong>de</strong> ces vertus;<br />

celle‐là au moins, cher frère, ne sera pas ru<strong>de</strong> à pratiquer et nous sera comme un encoura‐<br />

gement, je lʹespère, pour lʹexercice <strong>de</strong>s autres moins faciles. Soignez‐vous bien et surtout<br />

ne vous remettez pas trop tôt au travail; vous pouvez vous ménager un peu puisque nos<br />

amis vous remplacent bien le dimanche et vous suppléeront aussi au besoin durant la se‐<br />

maine. Cette petite épreuve aura eu son bon côté en vous démontrant quʹune absence<br />

momentanée <strong>de</strong> votre part ne saurait être dʹun préjudice réel pour vos œuvres, et pourra à<br />

lʹoccasion se renouveler sans inquiétu<strong>de</strong> pour vous. Je pense quʹaprès mon retour, vous fe‐<br />

205


ez bien dʹaller prendre quelques jours <strong>de</strong> repos à la campagne; les plus vigoureuses cons‐<br />

titutions sʹépuisent quand le travail est trop continu et, pour le service même <strong>de</strong> Dieu, il<br />

est essentiel dʹavoir quelque délassement, sauf à le chercher encore en Lui.<br />

Jʹespérais trouver ici plus <strong>de</strong> temps pour vous écrire à loisir et mʹentretenir <strong>avec</strong><br />

vous <strong>de</strong> tout ce qui nous intéresse, mais <strong>de</strong>puis mon arrivée, jʹai été constamment dérangé.<br />

Je ferai, dʹaprès votre avis, mais comme simple passe‐temps, le relevé <strong>de</strong>s heures <strong>de</strong> notre<br />

journée et <strong>de</strong> lʹemploi que nous pourrions leur donner. Vous aviez déjà fait pour le même<br />

objet un petit règlement que nous suivons maintenant; pour être en état satisfaisant, il<br />

nous suffirait peut‐être <strong>de</strong> lʹobserver exactement. Cependant, comme vous le pensez vous‐<br />

même, il peut être utile <strong>de</strong> mieux préciser la nature <strong>de</strong> quelques‐uns <strong>de</strong> nos exercices.<br />

Nous examinerons <strong>de</strong> concert ce qui peut être mieux selon le Cœur <strong>de</strong> Dieu et nous ferons<br />

en sorte <strong>de</strong> nous y assujettir régulièrement. Malheureusement, tout cela, pour moi, restera<br />

subordonné à ma pauvre santé qui me réduit souvent à lʹimpossibilité <strong>de</strong> rien faire <strong>de</strong> ce<br />

que ma volonté <strong>de</strong>man<strong>de</strong>. En plein air, au soleil, à la campagne, comme je mʹy trouve en ce<br />

moment, mes jours se passent sans trop <strong>de</strong> souffrance; mais je sens bien que mes forces ne<br />

sont pas revenues et que dans <strong>de</strong>s conditions <strong>de</strong> température et lieux moins favorables, je<br />

ne dois guère trouver dʹamélioration notable à mon état ordinaire; cependant, le bon Dieu<br />

peut en disposer autrement sʹil lui plaît; reposons‐nous donc, cher ami, sur sa bonté pater‐<br />

nelle qui nous conduira <strong>avec</strong> sagesse et amour.<br />

Je désirerais, cher frère, que, pour me tranquilliser entièrement sur votre état, vous<br />

mʹécrivissiez tout <strong>de</strong> suite pour me dire comment vous vous trouvez et si votre convales‐<br />

cence a bien suivi son cours, comme vous lʹespériez. Jʹaurais besoin, dʹune autre part, que<br />

vous voulussiez bien mʹenvoyer la pension <strong>de</strong> mon neveu, puis, pour moi, quelque argent<br />

que le prolongement <strong>de</strong> mon séjour en province me rend nécessaire. Jʹai laissé, vous le sa‐<br />

vez, dans mon secrétaire, 70f acompte sur le trimestre <strong>de</strong> la pension <strong>de</strong> mon neveu, lequel<br />

est <strong>de</strong> 105f, ce serait donc 35f à ajouter. Vous auriez la bonté, cher ami, <strong>de</strong> les prendre sur<br />

lʹargent quʹon a dû vous remettre <strong>de</strong> mon Ministère pour mon traitement du mois <strong>de</strong> juin.<br />

Pour moi, je désirerais 65f qui, joints aux 105f <strong>de</strong>stinés à mon neveu, porteraient à 170f la<br />

somme que je vous prierais <strong>de</strong> mʹenvoyer au plus tôt. Il suffirait <strong>de</strong> faire déposer cette<br />

somme en mon nom par Odulphe ou par quelquʹun <strong>de</strong> nos Confrères qui passerait <strong>de</strong> ce<br />

côté, chez M me Laurent, rue Neuve‐St‐Eustache, et dʹen prendre un reçu que vous auriez la<br />

bonté <strong>de</strong> mʹenvoyer dans votre lettre; <strong>avec</strong> ce reçu, je ferai toucher les fonds à Rouen chez<br />

la sœur <strong>de</strong> M me Laurent. Jʹoublie le n° <strong>de</strong> M me Laurent rue Neuve‐St‐Eustache, mais on<br />

passe, pour arriver à sa <strong>de</strong>meure actuelle, <strong>de</strong>vant son ancienne maison, rue Montmartre,<br />

n° 113; on aurait la bonté <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r là ce numéro, si vous nʹen avez pas <strong>de</strong> votre côté<br />

souvenir.<br />

Pour les impositions, cher ami, je crois quʹOdulphe doit refuser les papiers en di‐<br />

sant: M. Le <strong>Prevost</strong> nʹest pas à Paris et nʹa plus <strong>de</strong> domicile à Paris; après mon retour, si<br />

lʹon persiste, nous paierons une part <strong>de</strong> la somme <strong>de</strong>mandée et nous réclamerons.<br />

Si M lle Blanchard, <strong>de</strong> la barrière <strong>de</strong> lʹEtoile, <strong>de</strong>man<strong>de</strong> encore le payement <strong>de</strong> sa rente,<br />

vous auriez la bonté <strong>de</strong> lui dire par un mot <strong>de</strong> lettre que je vais arriver.<br />

Je suis bien contrarié <strong>de</strong> vous lasser <strong>de</strong> tous ces détails quand dʹautres entretiens se‐<br />

raient plus doux pour nous, mais je ne puis vous sauver <strong>de</strong> cet ennui.<br />

Jʹattends <strong>de</strong> vous, cher frère, une prompte réponse; puis après nous serons bientôt<br />

réunis.<br />

206


Jusque là, croyez‐moi toujours, dans les Cœurs <strong>de</strong> J. et M.<br />

Votre frère affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Souvenir à tous.<br />

147 à M. Levassor<br />

Conditions d’accueil à la Maison <strong>de</strong> la rue du Regard. Retraite <strong>de</strong> la Sainte‐Famille à l’église <strong>de</strong>s Carmes.<br />

Paris, 1er août 1846<br />

Mon bien cher frère,<br />

Votre chère lettre me trouve presquʹau débotté dʹun voyage que je viens <strong>de</strong> faire<br />

pour prendre les bains <strong>de</strong> mer, et au moment dʹen recommencer un autre, afin <strong>de</strong> confir‐<br />

mer la très mince amélioration apportée à ma santé par les bains. A mon grand regret,<br />

mon très cher frère, notre petite Communauté nʹest pas en mesure dʹexercer lʹhospitalité<br />

envers lʹexcellent frère que le bon Dieu a daigné nous donner dans votre maison. Je nʹai<br />

pas encore pris position ostensiblement rue du Regard, et je désire que mon séjour nʹy soit<br />

connu quʹaprès lʹarrangement assez prochain maintenant <strong>de</strong> mes affaires, je suis donc<br />

obligé <strong>de</strong> me tenir dans lʹombre et <strong>de</strong> nʹappeler en aucune façon lʹattention <strong>de</strong> nos Confrè‐<br />

res sur notre pauvre petit ménage. Plus tard, je lʹespère, notre situation <strong>de</strong>viendra plus in‐<br />

dépendante et nous permettra dʹadmettre près <strong>de</strong> nous ceux que le cœur nous associe déjà<br />

si intimement.<br />

Pour répondre au désir que vous me témoignez dʹavoir pour votre jeune frère un<br />

asile convenable dʹun prix modéré, jʹai <strong>de</strong>mandé à M. Bourlez si, prenant en considération<br />

le dévouement <strong>de</strong> ce bon jeune homme à une œuvre <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul, il ne pourrait<br />

le recevoir chez lui à un prix aussi réduit que possible. Il mʹa répondu que, pour concourir<br />

à vos vues et aux nôtres, il lʹadmettrait moyennant 3f par jour pour la nourriture et le lo‐<br />

gement, je trouve que cʹest bien cher encore, mais je ne vois rien <strong>de</strong> mieux; peut‐être pour‐<br />

rai‐je dʹici à lʹarrivée <strong>de</strong> M. Mayer trouver quelque parti meilleur.<br />

Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> vous dire dʹailleurs, cher ami, que cet excellent jeune homme<br />

dont les sentiments sont si bien en accord <strong>avec</strong> les nôtres sera accueilli <strong>avec</strong> toute lʹaffec‐<br />

tion possible par nous; je regrettais pour ma part <strong>de</strong> nʹavoir pas eu lʹoccasion <strong>de</strong> le connaî‐<br />

tre avant son départ pour Chartres et je suis charmé quʹune circonstance favorable le ra‐<br />

mène pour quelque temps à Paris.<br />

Je recomman<strong>de</strong> tout particulièrement à vos prières la retraite <strong>de</strong> notre Sainte‐<br />

Famille, qui va sʹouvrir le 9 <strong>de</strong> ce mois pour se clore au jour <strong>de</strong> lʹAssomption par une<br />

communion générale. Elle aura lieu à lʹéglise <strong>de</strong>s Carmes et sera donnée par M. lʹabbé<br />

Vernois, prêtre <strong>de</strong> la Miséricor<strong>de</strong> qui a une assez gran<strong>de</strong> réputation pour ce genre dʹexer‐<br />

cices. Croyez, mon bien cher frère aux sentiments <strong>de</strong> tendre dévouement <strong>avec</strong> lequel je<br />

suis en N.S.<br />

Votre tout dévoué frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Le f. Myionnet se rappelle aussi à vos bons souvenirs <strong>de</strong>vant Dieu.<br />

207


147‐1 à M. Bailly<br />

Recommandation pour placer un ouvrier à l’imprimerie <strong>de</strong> M. Bailly.<br />

4 août 1846<br />

Monsieur et cher ami,<br />

Je prends la liberté <strong>de</strong> recomman<strong>de</strong>r à votre bienveillance le nommé Gardin qui<br />

mʹest <strong>de</strong>puis longtemps connu et dont la Société <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul sʹoccupe <strong>avec</strong> un<br />

grand intérêt. Sʹétant formé la main à lʹassemblage et à la brochure, cʹest à ce titre quʹil dé‐<br />

sirerait être employé dans vos ateliers.<br />

Sʹil vous est possible, Monsieur, <strong>de</strong> donner <strong>de</strong> lʹoccupation à ce brave et digne<br />

homme, je vous en serai bien reconnaissant.<br />

Recevez, Monsieur et ami, lʹexpression <strong>de</strong> mes sentiments les plus dévoués et <strong>de</strong><br />

mon sincère attachement.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

148 à M. Myionnet<br />

MLP. aspire à la vie <strong>de</strong> prière et <strong>de</strong> charité qu’offre toute communauté religieuse. Ne pas cé<strong>de</strong>r au découragement<br />

malgré la lenteur <strong>de</strong>s commencements. Ne pas tenir compte <strong>de</strong> ses goûts, mais avancer ensemble dans la nuit <strong>de</strong><br />

la foi.<br />

Duclair, 23 août 1846<br />

Mon bien cher frère,<br />

Me voilà encore une fois loin <strong>de</strong> vous, pour la <strong>de</strong>rnière, je lʹespère; cette concession<br />

faite à ma mauvaise santé, il faudra, bon gré mal gré, quʹelle sʹarrange <strong>de</strong> Paris; je suis dé‐<br />

cidé à y supporter tout ce quʹil plaira au bon Dieu <strong>de</strong> mʹy envoyer sans plus <strong>de</strong> courses et<br />

<strong>de</strong> déplacements. Tant <strong>de</strong> mouvement et <strong>de</strong> distraction va mal au recueillement et si, le<br />

corps y trouve quelque petit avantage, lʹesprit nʹy saurait rien gagner; or, nous nʹavons à<br />

prendre soin du corps que pour le service <strong>de</strong> lʹâme et nous ne pouvons oublier celle‐ci<br />

pour ne songer quʹà lʹautre. Jʹai fait <strong>de</strong>puis quelque temps, il est vrai, la triste épreuve <strong>de</strong><br />

lʹimpuissance <strong>de</strong> lʹesprit quand les organes sont affectés, mais il reste néanmoins quelque<br />

ressort à la volonté pour acquiescer à la souffrance et se résigner aux humiliations quʹelle<br />

entraîne, jʹespère que le Seigneur ne me délaissera point et me fera trouver <strong>de</strong>s forces dans<br />

mon infirmité même. Une chose mʹempêche dʹailleurs, mon bien cher frère, <strong>de</strong> respirer en<br />

paix lʹair <strong>de</strong>s champs, cʹest la pensée que vous‐même auriez besoin <strong>de</strong> repos et que mon<br />

absence vous empêche <strong>de</strong> le prendre; je songe aussi que vous êtes seul, que nos petits<br />

exercices, faible commencement dʹun ordre régulier dans notre chère Communauté, sont<br />

interrompus et que vous en souffrez comme moi. Ce lien si faible en apparence est déjà<br />

puissant pour moi, je sens ici quʹil me manque, et je mʹattriste un peu <strong>de</strong> voir tant et si<br />

souvent ajournés nos plans <strong>de</strong> vie commune, rêves <strong>de</strong> votre cœur et du mien. En verrons‐<br />

nous enfin la réalisation, cher ami; nous sera‐t‐il donné à lʹun et à lʹautre <strong>de</strong> contempler au‐<br />

tour <strong>de</strong> nous quelque image <strong>de</strong> cette vie <strong>de</strong> prière, <strong>de</strong> sainte union, <strong>de</strong> paix et <strong>de</strong> charité<br />

quʹon goûte dans les Communautés régulières et qui semble la plus haute harmonie, lʹexé‐<br />

cution la moins imparfaite <strong>de</strong>s <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> Dieu sur la terre? Je nʹose presque lʹespérer, à<br />

voir les difficultés <strong>de</strong> nos commencements; mais je crois volontiers que nos efforts pour‐<br />

ront donner le signal à dʹautres, leur préparer la voie et les éclairer sur leur vocation. Cette<br />

208


mission, si Dieu daigne nous la donner, est gran<strong>de</strong> encore; nous défricherons le sol, dʹau‐<br />

tres y sèmeront et recueilleront <strong>de</strong>s fruits. Il serait plus doux pour vous, qui goûtez si bien<br />

lʹordre et le recueillement <strong>de</strong> la vie monastique, <strong>de</strong> chercher une existence paisible et<br />

pieuse dans quelque Maison bien établie, affermie dans la discipline et gardant les anti‐<br />

ques traditions; il serait meilleur aussi pour moi, dont la vie a été triste et troublée, <strong>de</strong><br />

mʹabriter dans quelque asile moins rapproché du mon<strong>de</strong> pour y trouver les douceurs <strong>de</strong> la<br />

retraite; mais nous nʹavons pas à consulter nos convenances et nos goûts, nous pouvons<br />

servir Dieu plus utilement, je le crois, dans le chemin épineux et ru<strong>de</strong> où sa sagesse nous a<br />

placés, il y faut rester <strong>avec</strong> constance, nous reposant sur Lui pour la conduite et lʹavance‐<br />

ment <strong>de</strong> nos âmes.<br />

A mon arrivée ici, jʹai averti ma sœur que mon séjour près dʹelle serait plus ou<br />

moins prolongé, suivant les dépêches que je recevrais <strong>de</strong> Paris et qui détermineraient le<br />

moment <strong>de</strong> mon départ; je resterais donc libre <strong>de</strong> vous accompagner, mon cher frère, si<br />

vous le jugiez bon, dans le petit voyage que vous vous proposez <strong>de</strong> faire pour vous repo‐<br />

ser et que sans doute vous ne <strong>de</strong>vrez pas trop différer, afin dʹéviter la mauvaise saison. La<br />

campagne est encore très belle ici, mais jʹen ai peu joui <strong>de</strong>puis mon arrivée, la pluie ayant<br />

tombé tous les jours; aujourdʹhui, le temps semble meilleur, mais le soleil est brûlant et je<br />

mʹen plaindrais aussi bien que <strong>de</strong> la pluie si nous nʹétions convenus quʹil faut prendre le<br />

temps comme Dieu le fait.<br />

Je vais attendre <strong>avec</strong> impatience une lettre <strong>de</strong> vous, vous étiez un peu fatigué lors<br />

<strong>de</strong> mon départ, je désire être bien assuré que vous êtes mieux présentement. Assurez tous<br />

nos amis <strong>de</strong> mes tendres affections, lʹexcellent M. Deslan<strong>de</strong>s en particulier, à qui je voulais<br />

écrire ces jours‐ci et qui, peut‐être déjà parti, ne pourra recevoir même ces quelques mots<br />

<strong>de</strong> bon souvenir. Je vous prie, cher frère, dʹécrire un mot à M. Foulon, afin quʹil hâte notre<br />

affaire <strong>de</strong> contributions; cʹest le moment favorable, en mon absence, dʹen finir; autrement,<br />

me trouvant toujours là, les agents <strong>de</strong>s contributions prendront lʹenvie <strong>de</strong> me taxer <strong>de</strong><br />

nouveau rue du Regard.<br />

Cʹest à peine si jʹai repris ici mes habitu<strong>de</strong>s, il faut quelques jours à chaque dépla‐<br />

cement pour se remettre et trouver le temps convenable <strong>de</strong> chaque exercice; sauf lʹoffice<br />

que je dis bien fidèlement et la Sainte Messe que je ne manque point, je prie assez mal et ne<br />

me sens pas suffisamment recueilli; après mon retour près <strong>de</strong> vous, je ramasserai toutes<br />

mes forces pour me faire la vie la plus régulière quʹil se pourra et me remettre plus cons‐<br />

tamment en la présence <strong>de</strong> Dieu. Vous mʹy ai<strong>de</strong>rez, cher frère, et pour ma part aussi je tâ‐<br />

cherai <strong>de</strong> vous édifier un peu. Ainsi étayés lʹun par lʹautre et soutenus surtout par la grâce<br />

<strong>de</strong> Dieu, nous suivrons notre voie et gagnerons la fin.<br />

Jʹoubliais <strong>de</strong> vous dire que ma santé est à peu près dans le même état; le bon air me<br />

fait quelque bien, mais je suis faible toujours et fort énervé; il faut prendre patience et vi‐<br />

vre ainsi.<br />

Adieu, mon bien cher frère, je prie tous les jours fidèlement pour vous, priez aussi<br />

pour moi et croyez au tendre dévouement <strong>avec</strong> lequel je suis, dans les Cœurs <strong>de</strong> J. et M.<br />

Votre frère affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Parlez <strong>de</strong> moi à notre excellent M. Beaussier et assurez‐le <strong>de</strong> mon bien respectueux<br />

attachement. Nʹoubliez pas non plus <strong>de</strong> dire quelques mots pour moi à Odulphe, notre<br />

frère servant. Adieu encore.<br />

209


149 à M. Maignen<br />

Ce que représente pour MLP. une véritable amitié fraternelle. Que M. Maignen ʺprenne sa volonté à <strong>de</strong>ux<br />

mainsʺ et fasse preuve <strong>de</strong> simplicité et <strong>de</strong> confiance.<br />

Duclair, 23 août 1846<br />

Jʹécris aujourdʹhui pour la première fois <strong>de</strong>puis mon arrivée ici; jʹai été toujours<br />

souffreteux; il pleuvait, le ciel était gris et mon esprit aussi. Voilà le soleil aujourdʹhui, cʹest<br />

pourquoi je vous fais cette petite lettre, me proposant <strong>de</strong> vous en faire une plus gran<strong>de</strong><br />

quand je vais être un peu mieux remis. En attendant, écrivez‐moi bien vite, jʹai besoin <strong>de</strong><br />

recevoir une lettre <strong>de</strong> vous; il me semble aussi que vous avez besoin <strong>de</strong> mʹécrire; cherchez<br />

bien vous verrez, cher ami, que je ne me trompe pas; il y a dans votre cœur toutes sortes<br />

<strong>de</strong> plis et <strong>de</strong> recoins où je suis encore, vous nʹy sauriez rentrer sans mʹy trouver <strong>de</strong> tous cô‐<br />

tés. Prenez votre volonté à <strong>de</strong>ux mains, cher ami, surmontez les difficultés inévitables dans<br />

toute affection et après un peu <strong>de</strong> temps, vous reposant sur un ami tendre et fidèle, vous<br />

vous applaudirez <strong>de</strong> vos efforts et jouirez <strong>de</strong> la soli<strong>de</strong> affection que vous vous serez di‐<br />

gnement acquise. Je parle ainsi, cher ami, parce quʹen dépit <strong>de</strong> votre douce bonté pour<br />

moi, je sentais encore un peu <strong>de</strong> lutte et <strong>de</strong> contrainte dans vos rapports <strong>avec</strong> moi; effacez<br />

ces <strong>de</strong>rnières impressions, re<strong>de</strong>venez simple, confiant, abandonné; vous ne serez en paix<br />

<strong>avec</strong> vous‐même quʹà cette condition; il nʹy a pas <strong>de</strong> <strong>de</strong>mi‐affection possible entre nous;<br />

nous lʹavons dès lʹabord conçue comme lʹun et lʹautre nous la pouvons comprendre, en‐<br />

tière, absolue, sans réserve; il y aura souffrance pour tous <strong>de</strong>ux tant quʹelle ne sera pas<br />

dans cette heureuse plénitu<strong>de</strong>. Telle que je la voudrais, cher ami, elle serait, il me semble,<br />

une louange pour Dieu, une édification réciproque, un appui, une consolation, un encou‐<br />

ragement, une douce paix pour le cœur, un stimulant pour lʹesprit, tout ce quʹil y a <strong>de</strong><br />

mieux en ce mon<strong>de</strong>, en un mot, après lʹamour <strong>de</strong> Dieu, lʹamour dʹun frère et dʹun véritable<br />

ami. Cela ne vaut‐il pas la peine quʹon sʹy évertue un peu, cher enfant? Ne peut‐on pour<br />

lʹobtenir passer quelques mauvais jours et supporter sans se rebuter quelques légers en‐<br />

nuis? Moi aussi quelquefois, fléchissant sous la peine et lʹaffliction qui mʹadvenaient par<br />

vous, je perdais courage et désespérais <strong>de</strong> lʹavenir, mais ces moments étaient courts, je me<br />

relevais et reprenais confiance; et maintenant encore je me retrouve <strong>de</strong>bout, ferme, dé‐<br />

voué, aimant, comptant sur vous et me livrant aussi à vous.<br />

Tous les livres que jʹouvre, LʹImitation en particulier, me conseillent toujours <strong>de</strong> re‐<br />

noncer à toute créature pour nʹêtre occupé que <strong>de</strong> Dieu; je ne sais si je me fais illusion,<br />

mais jʹai toujours la persuasion que Dieu entre assez dans une affection telle que je la sou‐<br />

haite entre nous pour nʹen être point jaloux et ne la pas exclure <strong>de</strong>s cœurs quʹIl se veut ré‐<br />

server. Puisse‐t‐il être toujours en tiers au milieu <strong>de</strong> nous, cher enfant, nous éclairer, nous<br />

conduire et, lʹun par lʹautre, nous attacher entièrement à Lui.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, je vous le répète, écrivez‐moi vite. Tâchez dʹamener à<br />

fin lʹaffaire du <strong>de</strong>ssin, M. Belliard veut commencer le 1 er septembre et promet dʹy mettre 8<br />

jours pleins sans désemparer. M. Lafon consent et <strong>de</strong>man<strong>de</strong> seulement à sʹentendre <strong>avec</strong><br />

M. Belliard; il sʹagit <strong>de</strong> les rapprocher. Adieu, ami, je vous embrasse bien tendrement.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

210


150 à M. H. Taillandier<br />

Joie <strong>de</strong> MLP. <strong>de</strong> travailler aux Oeuvres <strong>de</strong> charité.<br />

Duclair, 23 août 1846<br />

Cher Confrère et ami,<br />

Je ne veux pas que mon premier courrier parte dʹici sans emporter pour vous quel‐<br />

ques lignes; si je nʹai rien <strong>de</strong> très particulier à vous man<strong>de</strong>r, jʹai besoin au moins <strong>de</strong> me<br />

rappeler à votre souvenir et <strong>de</strong> vous assurer <strong>de</strong> nouveau <strong>de</strong> ma tendre affection.<br />

Je me suis enfui en hâte tout <strong>de</strong> suite après notre retraite, vous laissant bien <strong>de</strong>s<br />

soins à prendre et <strong>de</strong>s affaires à régler, mais je lʹai fait sans crainte, sachant bien mieux que<br />

personne vous pouvez pourvoir à tout et que le prévu comme lʹimprévu sera parfaitement<br />

traité par votre zèle si intelligent et si charitable. Jʹai pensé aussi, cher ami, que vous excu‐<br />

seriez <strong>avec</strong> bienveillance mon départ un peu précipité. Mieux quʹun autre, vous avez vu<br />

<strong>de</strong> près combien mon pauvre esprit est harassé et combien mon corps épuisé a besoin <strong>de</strong><br />

se refaire. Jʹai désiré employer ces <strong>de</strong>rniers beaux jours à reprendre un peu <strong>de</strong> forces, bien<br />

résolu à ne pas les ménager à mon retour, sʹil plaît au Seigneur <strong>de</strong> me rendre quelque vi‐<br />

gueur.<br />

La joie que jʹai <strong>de</strong> voir entre vos mains tous les intérêts si chers <strong>de</strong> nos pauvres, la<br />

Conférence, la Sainte‐Famille, les Loyers, ces moyens divers que le bon Dieu nous donne<br />

pour opérer un peu <strong>de</strong> bien, ma joie, dis‐je, nʹest pas sans mélange; je songe que lʹappui si<br />

fidèle, je puis le dire, cher ami, le plus constant, le plus dévoué que jʹaie encore rencontré,<br />

peut mʹêtre retiré dʹun moment à lʹautre, en partie au moins, tout entier peut‐être; mais je<br />

me repose sur la divine bonté qui vous avait accordé à ma faiblesse et qui ne délaissera<br />

pas, je lʹespère, les quelques petites œuvres que son amour a fait naître.<br />

Je prie toujours pour vous, cher ami, je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> au Seigneur <strong>de</strong> vous éclairer, <strong>de</strong><br />

vous conduire, <strong>de</strong> vous porter sʹil le faut entre ses bras au lieu où sa sagesse vous veut. Ne<br />

manquez pas <strong>de</strong> me tenir au courant <strong>de</strong> tout ce qui vous touche, rien ne mʹest plus cher et<br />

ne mʹintéresse à un aussi haut point. Ecrivez‐moi bien vite; jʹai besoin dʹavoir <strong>de</strong> vos nou‐<br />

velles et <strong>de</strong> celles <strong>de</strong> tous nos bons amis dont je vois encore dʹici toutes les douces et excel‐<br />

lentes figures, aimantes, ouvertes et toujours accueillantes; je ne les nomme pas, dites à<br />

tous ces frères dévoués mille tendres affections pour moi; je nʹécris pas au frère Deslan<strong>de</strong>s,<br />

le croyant parti; jʹécrirai une petite à M. <strong>de</strong> Marcilly sʹil est bien sage et sʹil travaille comme<br />

il me lʹa promis. Jʹai vu le frère Paillé avant mon départ, il croyait que quelque autre chose<br />

était déjà commencée; sʹil y a lieu, il sʹentendra <strong>avec</strong> vous. Offrez mon respect à vos excel‐<br />

lents parents.<br />

Adieu, cher ami, je vous embrasse tendrement; priez un peu pour moi, frère, ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Faites‐moi le plaisir <strong>de</strong> me dire si M. Cornu<strong>de</strong>t, 7 rue Madame, est à Paris; sinon,<br />

donnez‐moi son adresse en province, sʹil nʹest pas attendu tout prochainement.<br />

211


151 à M. H. Taillandier<br />

Conditions pour faire vendre la statue <strong>de</strong> la Sainte‐Famille. Rappel <strong>de</strong>s bienfaits spirituels <strong>de</strong> leurs entretiens à St<br />

Valéry‐en‐Caux.<br />

Duclair, 28 août 1846<br />

Très cher Confrère et ami,<br />

Votre petite lettre datée du 21 août, remise par vous à M. Laurençot, a été sans<br />

doute oubliée au Ministère, car elle ne me parvient quʹaujourdʹhui 28. Je me hâte <strong>de</strong> vous<br />

donner le renseignement que vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z.<br />

Nous avons la propriété <strong>de</strong> la statue <strong>de</strong> la Sainte Vierge; elle a été faite exprès pour<br />

la Sainte‐Famille par le p. Jehan et donnée par lui à lʹœuvre; nous pouvons donc en vendre<br />

les exemplaires selon notre volonté. Je ne saisis pas bien la nature <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> qui a été<br />

faite à Micheli. Les marchands qui veulent <strong>de</strong>s exemplaires <strong>de</strong> notre statue désirent‐ils pu‐<br />

rement et simplement les acheter? En ce cas, je ne vois aucun inconvénient à leur en ven‐<br />

dre au prix que Micheli et M. Froget conseilleraient <strong>de</strong> déterminer, mais que je ne pense‐<br />

rais pas <strong>de</strong>voir être moindre que 5f puisque M. Micheli, <strong>de</strong> la rue Guenégaud, les vendait<br />

10 et que les marchands auraient ainsi un bénéfice notable. Sʹils <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt seulement à<br />

prendre cette statue en dépôt, je ne sais sʹil y aurait grand avantage, surtout sʹils ne pren‐<br />

nent pas la responsabilité <strong>de</strong>s acci<strong>de</strong>nts dans leurs envois en province. Du reste, M. Mai‐<br />

gnen qui sʹest beaucoup occupé <strong>de</strong> cette statue et qui sʹentend en arrangements <strong>de</strong> ce genre<br />

pourrait <strong>avec</strong> vous déci<strong>de</strong>r ce quʹil convient <strong>de</strong> faire.<br />

Vous avez dû recevoir, mardi ou mercredi, une petite lettre <strong>de</strong> moi et vous aurez été<br />

surpris <strong>de</strong> nʹy rien trouver sur ce sujet. Vous en voyez maintenant la raison, cʹest que votre<br />

propre épître sʹest attardée en chemin. Vous mʹécrirez bientôt <strong>de</strong> nouveau, je lʹespère, pour<br />

me parler plus en détail <strong>de</strong> nos amis, <strong>de</strong> nos petits travaux, <strong>de</strong> vous surtout, cher Confrère,<br />

dont je suis heureux <strong>de</strong> pénétrer intimement, vous le savez, la pensée et le cœur. Ce nʹest<br />

pas seulement une douce consolation pour les amis chrétiens <strong>de</strong> sʹépancher affectueuse‐<br />

ment lʹun <strong>avec</strong> lʹautre, cʹest aussi un précieux moyen <strong>de</strong> sʹéclairer réciproquement et <strong>de</strong><br />

sʹencourager au bien. Je me suis senti souvent en meilleure disposition en suite <strong>de</strong> mes en‐<br />

tretiens <strong>avec</strong> vous, et je gar<strong>de</strong>rai un perpétuel souvenir <strong>de</strong>s aimables causeries <strong>de</strong> notre<br />

voyage à St‐Valéry. Je revois souvent en esprit les lieux où nous allions journellement en‐<br />

semble, je refais par la mémoire nos conversations, nos dialogues spirituels, jʹentends en‐<br />

core votre voix et lʹimpression qui me reste <strong>de</strong> tout cela est pleine <strong>de</strong> charme et <strong>de</strong> douce<br />

paix; cʹest vraiment un aimable repos que le bon Dieu nous a ménagé pendant ces quel‐<br />

ques semaines, il a plus que tout le reste contribué à lʹamélioration telle quelle <strong>de</strong> ma pau‐<br />

vre santé; cʹest que le calme <strong>de</strong> lʹesprit et du cœur, quand ils se tiennent sans effort unis en<br />

Dieu et dans une sainte charité, est un baume puissant pour toutes les douleurs.<br />

Adieu, très cher Confrère, je vous embrasse tendrement et suis en N.S.<br />

Votre tout dévoué frère et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Offrez mes sentiments respectueux à vos chers parents, mes bons et dévoués sou‐<br />

venirs à nos amis.<br />

212


152 à M. Maignen<br />

Nouvelles <strong>de</strong> sa soeur, Mme Salva, et <strong>de</strong> ses enfants. La mauvaise santé <strong>de</strong> MLP. est une lour<strong>de</strong> épreuve. Son zèle<br />

ne peut donner toute sa mesure. Fécondité <strong>de</strong> cette croix que le Seigneur lui impose. Il comprend mieux que<br />

l’union à Dieu permet la fécondité apostolique. Les désirs d’action sociale <strong>de</strong> M. Maignen ne manquent pas<br />

d’idéal, mais MLP. lui en montre les limites et les illusions. Pour porter remè<strong>de</strong> aux misères du temps, il y faut<br />

un plus grand réalisme et surtout être remplis, comme les Apôtres au Cénacle, <strong>de</strong> l’Esprit <strong>de</strong> lumière et <strong>de</strong> force.<br />

Duclair, 30 août 1846<br />

Je vous remercie, bien cher ami, <strong>de</strong> lʹaimable sollicitu<strong>de</strong> <strong>avec</strong> laquelle vous étudiez<br />

mes dispositions intérieures, afin <strong>de</strong> porter remè<strong>de</strong> à ce qui vous paraît en souffrance; cette<br />

attention dʹun cœur sur un autre est un <strong>de</strong>s plus touchants offices dʹune véritable affection.<br />

Je ne suis pas néanmoins aussi triste que vous le pensez, cher ami. Je vois <strong>avec</strong> bonheur<br />

que notre petit foyer <strong>de</strong> famille, que je croyais pour longtemps renversé par la mort <strong>de</strong> ma<br />

bien‐aimée mère, se reforme un peu et ne sera pas tout à fait détruit. Jʹai retrouvé en ma<br />

sœur ces sentiments si tendres et si dévoués qui nous ont invariablement attachés lʹun à<br />

lʹautre <strong>de</strong>puis notre enfance et que jamais le moindre nuage nʹa troublés. Ses enfants ont<br />

grandi et prennent <strong>de</strong> lʹaplomb; son fils en particulier, est bien avantageusement changé, il<br />

est studieux et posé; à 17 ans à peine, il a déjà la taille dʹhomme, et tout, dans sa voix, dans<br />

son regard, dans ses actes, décèle ces premiers rayons <strong>de</strong> lʹintelligence qui prend connais‐<br />

sance dʹelle‐même et <strong>de</strong> lʹéveil du cœur au souffle du sentiment. Cet instant est décisif<br />

dans la vie et ne passe pas sans vif intérêt dans le sein dʹune famille. Malheureusement,<br />

réunis pour quelques instants seulement, nous allons nous séparer bientôt; et moi qui, tout<br />

débile que je sois, <strong>de</strong>vrais être le point dʹunion <strong>de</strong> cette petite société, je vais mʹen éloigner<br />

pour longtemps peut‐être. Souvent ma sœur sʹarrête à la pensée que je pourrais me fixer<br />

près dʹelle et lui donner, sinon un grand appui, au moins les consolations dʹune vie intime<br />

et commune, mais moi je sais bien les obstacles invincibles qui sʹopposent à notre réunion,<br />

je me tais donc et mʹabstiens dʹencourager un projet qui ne peut concor<strong>de</strong>r <strong>avec</strong> dʹautres<br />

obligations.<br />

Ne vous alarmez pas, cher enfant, <strong>de</strong> lʹabattement trop ordinaire <strong>de</strong> mon corps et <strong>de</strong><br />

mon esprit, tant <strong>de</strong> coups mʹont frappé à la fois en cette terrible année que jʹai fléchi sous le<br />

choc; mais, sʹil plaît au Seigneur que je vive encore un peu <strong>de</strong> temps et travaille, selon ma<br />

portée, à son oeuvre, il me rendra quelque force <strong>avec</strong> les dons que sa sagesse me voudra<br />

départir. Plier sous sa main, quand elle nous frappe, nʹest pas faiblesse, mais soumission;<br />

alors lʹactivité et les élans <strong>de</strong> vie sont hors <strong>de</strong> temps et superflus, il faut languir et attendre.<br />

Si lʹheure vient <strong>de</strong> se relever, il soufflera <strong>de</strong> nouveau au cœur lʹinspiration, la force et<br />

lʹamour. Je vais revenir bien frêle encore <strong>de</strong> corps, mais décidé à faire tout ce qui ne me se‐<br />

ra pas impossible et à compenser ma faiblesse par ma bonne volonté. Je ne cherche pas si<br />

un séjour prolongé ici me pourrait être salutaire; lʹapproche <strong>de</strong> lʹhiver ôtera aux champs<br />

beaucoup <strong>de</strong> leurs avantages; dʹailleurs, <strong>de</strong> graves raisons que vous savez me rappellent à<br />

Paris; jʹirai donc au plus tard vers le milieu <strong>de</strong> septembre, plus tôt, si le f. Myionnet, dont<br />

jʹattends une lettre, le juge à propos.<br />

Vous vous étonnez, cher enfant, que le pas franchi par moi nʹait pas été le moment<br />

dʹune transformation lumineuse qui ait agrandi mon être et doublé en moi les puissances<br />

dʹaction et <strong>de</strong> dévouement. Je ne saurais pénétrer les secrets du Seigneur ni lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r<br />

compte <strong>de</strong> ses conduites à lʹégard <strong>de</strong> ses serviteurs. Jʹai désiré dès longtemps me donner<br />

tout à Lui, jʹai fait ce qui dépendait <strong>de</strong> moi pour lui appartenir sans réserve; a‐t‐il agréé le<br />

213


sacrifice? Intérieurement, je le crois, quoiquʹen apparence il me traite <strong>avec</strong> sévérité. Qui<br />

sait, cher ami, si les amertumes qui ont plu sur moi ne sont pas les gouttes précieuses du<br />

divin calice, les premiers pas dans la voie royale <strong>de</strong> la croix, le sceau <strong>de</strong> lʹalliance plus in‐<br />

time <strong>avec</strong> le Céleste Epoux. Une voix secrète et consolante lʹa murmuré au fond <strong>de</strong> mon<br />

cœur, durant ces jours dʹabattement et <strong>de</strong> tristesse, et jʹai quelquefois goûté la douceur en‐<br />

core inconnue <strong>de</strong> la croix; à ce signe, jʹai cru reconnaître mon Maître et je lʹai béni <strong>de</strong><br />

nʹavoir pas dédaigné ma misère. Que les pensées <strong>de</strong> Dieu sont autres que les nôtres et que<br />

nous avons <strong>de</strong> peine à entrer dans son esprit! Je nʹavais rêvé comme vous que dévoue‐<br />

ment, travaux, ar<strong>de</strong>ntes charités, et, quand vient enfin le jour du sacrifice, mon corps<br />

sʹabat, mes facultés sʹengourdissent, mon élan tombe, lʹaction extérieure mʹest presque in‐<br />

terdite; mais, en revanche, je supporte en moi lʹopération intérieure du Seigneur, heureux,<br />

cher enfant, si je me souviens maintenant <strong>de</strong> cette parole que vous écrivîtes pour moi, vous<br />

le savez, sur une image perdue: Sustinuit te dilectus, sustine tu dilectum. 150<br />

Ce qui sʹest déjà passé en moi en ce sens, cher ami, me porte à penser, entre autres<br />

raisons, que les idées contenues dans votre lettre ne sont pas entièrement justes. Je ne crois<br />

pas que nous soyons en souffrance, M. Myionnet et moi, parce que nous donnons trop à<br />

lʹoraison, à la méditation, à la lecture <strong>de</strong>s vieux livres et que nous négligeons dʹétudier les<br />

besoins, les misères profon<strong>de</strong>s <strong>de</strong> notre temps, soit en nous mêlant à toutes les douleurs<br />

morales et physiques <strong>de</strong> ceux qui souffrent, soit, au moins, en les contemplant dans les li‐<br />

vres qui, selon vous, les retracent. Cʹest un fait incontestable et non contesté, même par<br />

vous, quʹon ne connaît Dieu et soi‐même et le mon<strong>de</strong> que par lʹoraison; en Dieu on<br />

contemple le type infini <strong>de</strong> toute beauté, <strong>de</strong> toute perfection morale, <strong>de</strong> toute vertu; en soi‐<br />

même, on retrouve le germe et commencement <strong>de</strong> toutes les erreurs, <strong>de</strong> tous les vices, <strong>de</strong><br />

tous les crimes. Qui nʹa pas longtemps étudié dans ce double livre, qui nʹy revient pas<br />

souvent ne comprendra jamais bien le mon<strong>de</strong>, nʹaura jamais force et lumière supérieure<br />

pour influer sur lui. La condition essentielle et première <strong>de</strong> toute action extérieure est donc<br />

là, pour les mystiques comme pour les hommes <strong>de</strong> dévouement; cʹest une loi invariable<br />

quʹont suivie nos <strong>de</strong>vanciers, que suivent aujourdʹhui les serviteurs <strong>de</strong> Dieu dans les plus<br />

hauts <strong>de</strong>grés <strong>de</strong> la sainte hiérarchie et que suivront encore ceux qui voudront comme eux<br />

glorifier Dieu et servir leurs frères. Vous ne niez pas ce point, mais vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z quʹen‐<br />

tre lʹEvangile, lʹImitation et les autres livres ascétiques, nous trouvions place pour les œu‐<br />

vres dʹimagination du temps, afin dʹy voir les plaies hi<strong>de</strong>uses <strong>de</strong> lʹhumanité dégradée, <strong>de</strong><br />

nous animer pour elle dʹune vive compassion et nous porter <strong>avec</strong> plus dʹar<strong>de</strong>ur et <strong>de</strong> lu‐<br />

mière à son secours. Je ne crois nullement, cher ami, que les rêves dʹune imagination en<br />

délire, les conceptions monstrueuses ou fantastiques dʹesprits dépravés, en <strong>de</strong>hors du vrai<br />

quand ils aspirent au beau, également exagérés et faux dans leurs idéalisations du mal,<br />

non, je ne crois pas quʹils soient les sources choisies où se doive étudier le mon<strong>de</strong> en ses<br />

misères, comme en son beau côté. Sʹil faut sortir <strong>de</strong> lʹétu<strong>de</strong> contemplative et vérifier dans<br />

les applications réelles les révélations <strong>de</strong> la spéculation intérieure, cʹest dans les récits qui<br />

courent les rues, cʹest dans les tribunaux, cʹest dans les tristes repaires du vice et du crime<br />

quʹon peut faire dʹutiles et profitables observations, car là est, non plus la fiction, ni les fan‐<br />

taisies bizarres <strong>de</strong> lʹesprit, mais le fait et le réel <strong>de</strong> la vie. Du reste, du jour où il plairait au<br />

Seigneur <strong>de</strong> grossir notre nombre, dʹagrandir notre tâche et <strong>de</strong> nous envoyer aux malheu‐<br />

reux pécheurs comme instruments <strong>de</strong> sa miséricor<strong>de</strong>, Il ouvrirait nos yeux au contact <strong>de</strong> la<br />

150 Le Seigneur bien-aimé t'a pris en charge, à ton tour <strong>de</strong> "supporter" le bien-aimé.<br />

214


matière confiée à nos labeurs; Il donnerait à nos cœurs la compassion immense qui se<br />

prend dʹamour pour les âmes noyées dans la fange; alors, croyez‐moi, les prétendues révé‐<br />

lations <strong>de</strong> vos auteurs seraient bien misérables <strong>de</strong>vant les clartés du réel et les illumina‐<br />

tions <strong>de</strong> la grâce, et nous regretterions bien lʹattention, peut‐être dangereuse, que nous leur<br />

aurions accordée. Pour aujourdʹhui dʹailleurs, et revenant à la sphère <strong>de</strong> notre vie actuelle,<br />

quʹavons‐nous à faire <strong>de</strong> vues ambitieuses sur un avenir dont Dieu seul a le secret; qui <strong>de</strong><br />

nous sait ce à quoi Il nous <strong>de</strong>stine et qui peut prévoir <strong>avec</strong> quelque précision ses vues sur<br />

nous? Je nʹaurais gar<strong>de</strong> <strong>de</strong> blâmer, cher ami, votre pensée, si saisissant nettement un but<br />

pour les âmes <strong>de</strong> zèle et <strong>de</strong> dévouement, vous croyiez <strong>de</strong>voir le leur marquer <strong>avec</strong> les si‐<br />

gnes qui manifestent la vérité et font reconnaître lʹesprit <strong>de</strong> Dieu. Quant à présent, je ne<br />

saurais voir encore dans votre opinion quʹun pressentiment lointain, un désir, une aspira‐<br />

tion du cœur vers une amélioration vague et indéfinie <strong>de</strong> lʹétat social; telle quʹelle soit<br />

néanmoins, je lʹai accueillie <strong>avec</strong> sympathie, comme un témoignage <strong>de</strong> la préoccupation <strong>de</strong><br />

votre esprit pour tout ce qui tend au bien; jʹy vois aussi cette douce habitu<strong>de</strong> que nous<br />

nous sommes faite lʹun et lʹautre dʹouvrir simplement notre cœur pour y laisser lire à lʹami<br />

ce qui sʹy passe; faites toujours ainsi, cher enfant, et soyez sûr que vous serez toujours<br />

compris. Aujourdʹhui, le f. Myionnet et moi nʹavons quʹà faire humblement les œuvres<br />

mo<strong>de</strong>stes et déjà lour<strong>de</strong>s pour nous que le Seigneur nous a confiées; sʹIl daigne nous prêter<br />

vie, nous agréger quelques amis, nous nous efforcerons dʹétablir au milieu <strong>de</strong> nous un vé‐<br />

ritable esprit dʹunion, <strong>de</strong> zèle et <strong>de</strong> dévouement et <strong>de</strong> cimenter le lien <strong>de</strong> vie qui assurera<br />

notre avenir; alors, alors seulement, pour ceux qui verront cette heure, le moment sera ve‐<br />

nu dʹaller, comme les Apôtres sortant du Cénacle, aux diverses missions que le divin Maî‐<br />

tre ouvrira <strong>de</strong>vant eux; car, vous le savez, cher ami, au Cénacle seulement fut donné aux<br />

disciples du Seigneur la lumière, la flamme intérieure et lʹinvincible courage; nous aussi<br />

nous <strong>de</strong>vons passer par ce saint lieu.<br />

Que cette lettre est longue et sérieuse, cher ami; jʹaurais voulu la terminer par un<br />

peu <strong>de</strong> doux épanchement pour que vous retrouviez le cœur <strong>de</strong> votre ami près du vôtre et<br />

sentiez un peu cette affection dont vous et moi avons besoin; mais je suis bien fatigué et<br />

<strong>de</strong>main, dès le matin, je pars pour passer tout le jour à la campagne <strong>avec</strong> les miens. Car,<br />

gar<strong>de</strong>z‐vous <strong>de</strong> croire, après avoir lu cette grave épître, que je sois austère à faire peur,<br />

toujours méditant, priant, lisant; nullement, je fais peu <strong>de</strong> chose sinon <strong>de</strong>s promena<strong>de</strong>s et<br />

<strong>de</strong>s entretiens joyeux <strong>avec</strong> ma sœur et ses enfants, nous parlons parfois un peu raison ou<br />

tendresse, le plus souvent nous conversons en passe‐temps, nous chantons <strong>de</strong>s cantiques,<br />

celui <strong>de</strong> la Sainte‐Famille en particulier qui fait fureur ici, ou bien nous lisons <strong>de</strong>s livres <strong>de</strong><br />

délassement; le soir, nous jouons quelque partie et nous allons dormir. Vous le voyez, cher<br />

enfant, jʹai repris vite la vie <strong>de</strong> famille et, à voir comme les jours coulent, je sens bien que<br />

cʹest la plus commune, la plus facile, celle <strong>de</strong> tous; jʹose pourtant aspirer à une autre plus<br />

austère et plus haute; jʹespère que Dieu ne mʹen repoussera pas. Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> dire<br />

que sa part est réservée dans ces journées que je vous esquisse ici un peu incomplètement;<br />

les miens, dʹailleurs, à ma gran<strong>de</strong> joie, nʹoublient pas non plus ce qui appartient au Sei‐<br />

gneur.<br />

Adieu, ami, enfant aussi, car je ne puis si vite oublier ce nom, je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pour cela<br />

un peu <strong>de</strong> temps.<br />

215


Adieu, très cher enfant, je prie toujours et beaucoup pour vous, priez aussi pour<br />

moi, cʹest une si douce manière <strong>de</strong> se ressouvenir <strong>de</strong> ses amis et <strong>de</strong> raviver sans cesse notre<br />

affection pour eux.<br />

Je vous embrasse tendrement et suis en J. et M.<br />

Votre affectionné frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

153 à M. Myionnet<br />

M. Maignen a quitté brusquement sa famille et son emploi et se trouve auprès <strong>de</strong> MLP. Que M. Myionnet aille<br />

rencontrer l’abbé Beaussier pour prendre conseil. MLP. a pris sur lui d’envoyer M. Maignen à Chartres chez M.<br />

Levassor et espère que M. Myionnet approuve son initiative. Souliers à envoyer à M. Maignen.<br />

Duclair, 3 septembre 1846<br />

Mon bon frère,<br />

Vous <strong>de</strong>vinez le sujet <strong>de</strong> cette lettre, M. Maignen est près <strong>de</strong> moi <strong>de</strong>puis quelques<br />

heures; il a donné sa démission <strong>de</strong> son emploi au Ministère <strong>de</strong> la Guerre, il a brisé ses liens<br />

et se croit libre <strong>de</strong> sʹunir à nous.<br />

Je me sens trop ému dʹun événement si grave et si inattendu pour avoir une idée<br />

bien nette, dans ce premier moment, sur ce quʹil conviendrait <strong>de</strong> faire. Dʹailleurs, je nʹai<br />

pas seul à émettre mon avis. Jʹai répondu à notre cher frère quʹil fallait consulter M. Beaus‐<br />

sier et vous‐même et prendre surtout les inspirations <strong>de</strong> Dieu par un peu <strong>de</strong> prière et <strong>de</strong><br />

réflexion.<br />

Jʹécris aujourdʹhui même à M. Beaussier. Je vous prie <strong>de</strong> le voir afin <strong>de</strong> conférer <strong>avec</strong><br />

lui et <strong>de</strong> mʹécrire ensuite ce que vous trouvez à propos lʹun et lʹautre <strong>de</strong> déci<strong>de</strong>r. Priez M.<br />

Beaussier <strong>de</strong> vous lire ma lettre qui est un peu plus détaillée que celle‐ci.<br />

En attendant, comme M. Maignen, en restant près <strong>de</strong> moi, pourrait être inquiété par<br />

les siens et quʹil convient quʹil réfléchisse en liberté, je lʹengage à se rendre près <strong>de</strong> M. Le‐<br />

vassor qui lʹaccueillera, jʹen suis sûr, tendrement et à passer chez lui quelques jours.<br />

Jʹespère, cher ami, que cette disposition aura votre approbation. Ecrivez‐moi vite et<br />

directement. M. Maignen me dit que vous avez remis pour moi une lettre à mon Ministère,<br />

elle ne mʹest pas encore parvenue.<br />

Adieu, cher frère, je vous embrasse cordialement et suis en N.S.<br />

Votre tout dévoué frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Maignen est parti si fort en hâte quʹil nʹa pas même pris le temps <strong>de</strong> mettre à ses<br />

pieds <strong>de</strong>s chaussures <strong>de</strong> voyage; ses souliers sont presquʹen pièces, il en a commandé, chez<br />

notre cordonnier, rue Mazarine, une paire qui doit être prête <strong>de</strong>main vendredi; il faudrait,<br />

cher ami, que vous ayez la bonté <strong>de</strong> les prendre et <strong>de</strong> les lui envoyer le plus tôt possible à<br />

Chartres.<br />

154 à M. Levassor<br />

MLP. <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à M. Levassor, son ami intime, d’accueillir M. Maignen. Il pourra l’ai<strong>de</strong>r à réfléchir sur son désir<br />

<strong>de</strong> vocation.<br />

216


Duclair, 3 septembre 1846<br />

Cher frère,<br />

Je viens réclamer un témoignage <strong>de</strong> ce généreux dévouement que jʹai trouvé sans<br />

bornes jusquʹici et sur lequel je compte aussi sans limites.<br />

Le bon et pieux jeune homme dont je vous ai parlé jadis et qui désire se dévouer<br />

<strong>avec</strong> nous au service du bon Dieu, vient <strong>de</strong> sʹéchapper en brisant sa chaîne et <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à<br />

prendre place dans notre petite Communauté.<br />

Sa détermination a été si brusque et si inattendue quʹelle semble <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong> sa<br />

part et <strong>de</strong> la nôtre un peu <strong>de</strong> réflexion et surtout un peu <strong>de</strong> prière, afin <strong>de</strong> connaître mieux<br />

la volonté <strong>de</strong> Dieu. Il importe dʹailleurs quʹil sʹéloigne un peu <strong>de</strong> Paris pour nʹêtre pas in‐<br />

quiété par les siens dans ce premier moment. Il est venu me rejoindre ici, mais toute sa fa‐<br />

mille sait bien lʹintime union qui existe entre nous, et cʹest ici avant tout quʹon aurait la<br />

pensée <strong>de</strong> le chercher. Il faut donc, cher ami et frère, que pour quelques jours vous accueil‐<br />

liez cet enfant, que vous le conseilliez, lʹencouragiez, lʹaimiez surtout, ce qui ne vous sera<br />

pas difficile, et à cause <strong>de</strong> lui‐même, et à cause <strong>de</strong> vos propres dispositions.<br />

Cʹest vers vous, mon cher frère, que ma pensée sʹest dʹabord tournée, quand jʹai<br />

cherché où jʹaurais un autre moi‐même pour recueillir cette chère âme et lʹabriter pour<br />

quelques jours; je suis assuré, cher ami, que cʹest à notre divin Maître et à sa Sainte Mère<br />

que je dois cette inspiration; je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> donc, en leur nom, un bon et paternel ac‐<br />

cueil pour mon jeune ami.<br />

Tout à vous <strong>de</strong> cœur en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

155 à M. Levassor<br />

MLP. fait suivre du courrier pour M. Maignen, présentement chez M. Levassor.<br />

Duclair, 4 septembre 1846<br />

Mon bien cher frère,<br />

Je vous ai adressé hier un bon jeune homme <strong>de</strong> ma connaissance, nommé Maurice<br />

Maignen, et dont je vous avais déjà parlé autrefois comme aspirant à se réunir à nous.<br />

Je suppose quʹil est près <strong>de</strong> vous en ce moment, je vous renvoie donc, en vous<br />

priant <strong>de</strong> la lui remettre, une lettre quʹon lui a adressée chez ma sœur, en supposant quʹil<br />

pouvait être auprès <strong>de</strong> moi.<br />

Croyez, mon bien cher frère, à tous mes sentiments bien tendrement dévoués en<br />

N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

156 à M. Maignen<br />

Il en a coûté à MLP. <strong>de</strong> l’avoir laissé partir pour Chartres, mais c’était nécessaire. Ce séjour forcé doit permettre à<br />

M. Maignen d’étudier son projet <strong>de</strong> vocation.<br />

Duclair, 4 septembre 1846<br />

Très cher ami,<br />

Je vous renvoie une petite lettre que votre famille, je suppose, vous croyant auprès<br />

<strong>de</strong> moi, a eu la pensée <strong>de</strong> vous adresser ici. Elle est arrivée ce matin sous mon couvert; je<br />

217


mʹempresse <strong>de</strong> vous la faire parvenir. Si vous avez à répondre et que vous désiriez cacher<br />

pour quelques jours votre retraite, vous pouvez, ce me semble, envoyer vos lettres à M.<br />

Myionnet qui les fera arriver à leur adresse.<br />

Ce nʹest pas sans un grand serrement <strong>de</strong> cœur que je me suis séparé <strong>de</strong> vous si vite<br />

hier, cher ami; je sentais tant le besoin dʹêtre un peu <strong>avec</strong> vous dans un moment où mon<br />

affection vous était si nécessaire; il mʹeût été si doux aussi <strong>de</strong> goûter un peu en société <strong>avec</strong><br />

vous le repos <strong>de</strong> nos belles campagnes, <strong>de</strong> vous faire voir leurs ruines et tout ce que le<br />

pays offre dʹintéressant. Mais un autre parti semblait plus raisonnable dans notre position,<br />

il a fallu sʹy arrêter; jʹespère que le bon Dieu agréera ce sacrifice. On peut prévoir, cher en‐<br />

fant, que dans quelque sens que nous nous tournions, ce ne sera pas le <strong>de</strong>rnier, mais notre<br />

dévouement à la cause du Seigneur sʹaccroîtra en proportion du zèle et <strong>de</strong> la charité que<br />

nous aurons montrés.<br />

Mettez à profit les quelques jours <strong>de</strong> calme qui vont vous être donnés pour réfléchir<br />

<strong>de</strong>vant Dieu et en union <strong>avec</strong> Marie à la décision que vous <strong>de</strong>vez prendre et soyez assuré,<br />

cher enfant, que quelle quʹelle soit, nous saurons en comprendre les motifs et donner notre<br />

sympathie aux sentiments <strong>de</strong> votre cœur. Je vous écrirai <strong>de</strong> nouveau dès que jʹaurai quel‐<br />

que réponse <strong>de</strong> Paris; écrivez‐moi vite vous‐même, je suis dans une vive impatience<br />

dʹavoir <strong>de</strong> vos nouvelles.<br />

Jʹai compris votre désir quand, me donnant <strong>de</strong> la voiture un <strong>de</strong>rnier adieu, vous<br />

mʹavez regardé en joignant vos mains; je prierai pour vous plus quʹà lʹordinaire, priez aus‐<br />

si pour nous, le frère et moi, nous en avons grand besoin.<br />

Je vous embrasse tendrement en N.S. et suis bien, cher ami,<br />

Votre frère et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

157 à M. H. Taillandier<br />

Activités <strong>de</strong> la Conférence St‐Sulpice. Coopération <strong>avec</strong> le patronage St‐<strong>Jean</strong> au quartier du Gros‐Caillou à Paris<br />

dans le VII e arrondissement. MLP. se soucie <strong>de</strong> l’enseignement du catéchisme à donner aux enfants.<br />

Duclair, 4 septembre 1846<br />

Mon bien cher Confrère,<br />

Voici encore une lettre <strong>de</strong> Duclair; vous allez penser quʹétant accoutumé à faire<br />

chaque matin à Paris un certain nombre dʹépîtres, jʹai résolu dʹen conserver ici lʹhabitu<strong>de</strong>,<br />

afin <strong>de</strong> ne pas trop me gâter la main; ce motif ne suffirait pas pour vaincre ma nonchalance<br />

et jʹai, cher Confrère, <strong>de</strong> meilleures causes dʹinspiration en mʹentretenant <strong>avec</strong> vous. Je<br />

voulais, avant tout, vous remercier dʹavoir surmonté vos répugnances et dʹavoir pris, à dé‐<br />

faut <strong>de</strong> M. Deslan<strong>de</strong>s, la prési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> notre Conférence. Personne plus que vous ne pou‐<br />

vait le faire <strong>avec</strong> zèle et intelligence, aussi nʹai‐je pas été surpris dʹapprendre que vous<br />

aviez eu un plein succès. Un <strong>de</strong> nos amis, qui a bien voulu me rendre compte <strong>de</strong> ce pre‐<br />

mier essai <strong>de</strong> votre administration, mʹen a paru fort satisfait et mʹa assuré quʹil ne faisait<br />

quʹexprimer le sentiment général <strong>de</strong> la Conférence; continuez donc, cher ami, à prendre,<br />

<strong>avec</strong> votre part ordinaire dans nos travaux, ce surcroît <strong>de</strong> peine et soyez bien assuré que la<br />

vive sympathie <strong>de</strong> nos amis vous est tout acquise.<br />

Si je ne craignais <strong>de</strong> vous accabler, je vous rappellerais la promesse que vous mʹavez<br />

faite <strong>de</strong> rendre une petite visite le dimanche matin aux enfants <strong>de</strong> St‐<strong>Jean</strong>, œuvre si inté‐<br />

218


essante dirigée par notre excellent confrère M. <strong>de</strong> Lambel 151 . Nous nʹavons jamais man‐<br />

qué, chaque année, <strong>de</strong> le remplacer le dimanche durant mon absence, en allant faire une<br />

petite visite à ses enfants à 10h. le matin. Ils sont réunis à cette heure‐là chez les frères du<br />

Gros‐Caillou, dont la maison touche à lʹéglise <strong>de</strong> St‐Pierre. On adresse aux petits <strong>de</strong> St‐<strong>Jean</strong><br />

une courte exhortation <strong>de</strong> vingt minutes sur le sujet quʹon croit <strong>de</strong>voir choisir, vie <strong>de</strong> saint,<br />

fête, messe, morale, prière, évangile, tout est bien on est entièrement libre. Vous jugerez<br />

tout <strong>de</strong> suite que cette œuvre serait très conforme à vos dispositions particulières, puis‐<br />

quʹen faisant du bien à ces enfants, vous auriez ainsi un exercice très profitable pour vous‐<br />

même. On fait aussi quelques questions aux enfants, comme on le juge à propos, on chante<br />

un cantique si lʹon veut <strong>avec</strong> eux et <strong>avec</strong> un bon et très bon frère qui les gar<strong>de</strong>, et cela se<br />

termine ainsi. Cette petite promena<strong>de</strong> au Gros‐Caillou me semblait à moi un aimable em‐<br />

ploi du matin du dimanche et jʹen revenais toujours content. Si vous ne pouvez y aller<br />

chaque dimanche, et cela semble en effet impossible à cause <strong>de</strong> la Sainte‐Famille, tâchez <strong>de</strong><br />

trouver quelque confrère qui vous supplée et visite ces enfants tout à tout <strong>avec</strong> vous. Nous<br />

<strong>de</strong>vons, pour mille raisons, porter un vif intérêt à lʹœuvre <strong>de</strong> St‐<strong>Jean</strong>, particulièrement à<br />

cause <strong>de</strong> notre bien cher confrère M. <strong>de</strong> Lambel, qui montre pour nous et pour nos œuvres<br />

un dévouement et une charité que nous ne saurions jamais assez reconnaître; je recom‐<br />

man<strong>de</strong> donc, cher ami, ce souvenir à toute votre attention.<br />

Je me gar<strong>de</strong> bien <strong>de</strong> mʹoccuper <strong>de</strong> loin <strong>de</strong> la séance prochaine <strong>de</strong> la Sainte‐Famille;<br />

vous avez, mieux que moi, lʹhabitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> pourvoir à tout: la Sainte Messe, lʹorateur, le lec‐<br />

teur, la musique, etc. Vous aurez aussi à vous occuper à lʹavance <strong>de</strong> la loterie, je crois que<br />

M. Maignen, qui est absent en ce moment <strong>de</strong> Paris et qui fait une retraite <strong>de</strong> quelques<br />

jours, ne sera pas revenu pour remplir selon lʹusage ce petit office; il y faudra songer; je lui<br />

écrirai pour lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s renseignements à ce sujet.<br />

M. lʹabbé Vernois avait témoigné le désir <strong>de</strong> faire une visite à nos braves gens et <strong>de</strong><br />

leur adresser quelques mots à lʹune <strong>de</strong> nos prochaines séances, ce serait peut‐être le mo‐<br />

ment dʹy songer, vous en parleriez <strong>avec</strong> le p. Milleriot qui probablement renoncerait à faire<br />

lʹinstruction religieuse; sʹil voulait se prêter à raconter la vie <strong>de</strong> quelque saint ou quelques<br />

faits édifiants, ce serait parfait.<br />

Je pense <strong>avec</strong> chagrin que le <strong>de</strong>ssin que nous préparions pour le titre dʹhonneur <strong>de</strong><br />

notre Sainte‐Famille nʹavance point. Avant mon départ, jʹavais levé toute difficulté; M. La‐<br />

fon consentait à ce que la Sainte‐Famille <strong>de</strong> son tableau servît pour remplir le médaillon<br />

du milieu, il avait seulement le désir <strong>de</strong> sʹentendre <strong>avec</strong> M. Belliard (rue <strong>de</strong> Sèvres, 2) qui<br />

doit charitablement lithographier ce sujet. M. Belliard sʹétait engagé à se mettre à lʹœuvre<br />

au 1 er septembre et à travailler sans interruption pendant huit jours, temps quʹil consent à<br />

donner à cette bonne œuvre. Plus tard, dʹautres occupations viendront mettre obstacle à sa<br />

bonne volonté; il est donc essentiel <strong>de</strong> ne pas négliger cette petite affaire; il faudrait revoir<br />

M. Lafon et le déterminer à remettre à M. Belliard le <strong>de</strong>ssin en daguerréotype quʹa fait<br />

admirablement M. Choisetat; seulement, il promettra <strong>de</strong> voir M. Belliard et nʹen fera rien,<br />

et les choses traîneront ainsi en longueur; là est la seule difficulté, surmontez‐la cher ami,<br />

en forçant un peu la volonté <strong>de</strong> M. Lafon qui, <strong>de</strong> son aveu propre, a besoin, en général,<br />

dʹêtre un peu poussé. La pierre est chez M. Bion jeune. Je suppose que vous avez reçu une<br />

151 M. <strong>de</strong> Lambel (cf. supra lettre 130), avait organisé, <strong>avec</strong> A. <strong>de</strong> Melun, sur la paroisse St-<strong>Jean</strong>-du-Gros-Caillou, le premier patronage<br />

d'apprentis externes, dont il confiera la direction aux Frères <strong>de</strong> St-Vt-<strong>de</strong>-Paul, le 1 er mai 1863.<br />

219


douzaine <strong>de</strong> statues; tâchez dʹen vendre assez pour quʹà mon retour nous puissions payer<br />

le mouleur.<br />

Les lettres que vous mʹenvoyez par le Ministère sont toujours un peu lentes à me<br />

parvenir, priez M. Laurençot <strong>de</strong> les recomman<strong>de</strong>r sous ce rapport à M. Carré en les lui<br />

portant.<br />

Ma santé est toujours débile, un peu moins à certains jours, mais <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s rechutes<br />

incessantes qui ne montrent rien <strong>de</strong> soli<strong>de</strong>.<br />

Adieu, mon bien cher Confrère, faites toujours pour moi, je vous en conjure, quel‐<br />

ques‐unes <strong>de</strong> ces bonnes et douces prières que vous savez faire et que le bon Dieu ac‐<br />

cueille, jʹen suis sûr, bien paternellement. Embrassez pour moi tous ces chers Confrères<br />

que jʹembrasserai moi‐même si fort à mon retour et assurez‐les <strong>de</strong> mon tendre souvenir.<br />

Jʹoffre aussi par votre intermédiaire mes respectueux sentiments à votre chère famille.<br />

Votre affectionné frère et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

158 à M. Maignen<br />

Réaction <strong>de</strong> la famille Maignen à la suite du départ brutal du jeune Maurice. MLP. l’invite à se confier à Notre‐<br />

Dame <strong>de</strong> Chartres.<br />

Duclair, 6 septembre 1846 ‐ Dimanche<br />

Pour ne pas grossir démesurément ce paquet, déjà fort volumineux qui vous était<br />

adressé à Duclair, mon bien cher ami, je me borne à y glisser ce petit mot. Jʹai reçu du f.<br />

Myionnet une lettre qui sʹest croisée <strong>avec</strong> la mienne et qui, conséquemment, nʹy fait pas<br />

une réponse directe. Il me dit que votre frère et Madame votre mère sont venus lui <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>r où vous étiez et quelles étaient vos vues; il a répondu quʹil vous croyait auprès <strong>de</strong><br />

moi; que notre intention était <strong>de</strong> vivre en commun pour nous consacrer aux œuvres <strong>de</strong><br />

Dieu, mais sans rien changer, quant à présent, à nos habitu<strong>de</strong>s extérieures. Votre frère a<br />

paru assez satisfait <strong>de</strong> cette explication, mais Madame votre mère ne sʹest pas montrée si<br />

facile à apaiser; elle a dit quʹelle ne vous pardonnerait point dʹavoir manqué <strong>de</strong> confiance<br />

en elle et dʹêtre parti sans lʹen prévenir à lʹavance. Quant à ce qui vous concerne directe‐<br />

ment, M. Myionnet, vous croyant <strong>avec</strong> moi, mʹinvite à examiner <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> vous vos<br />

dispositions intérieures et la solidité <strong>de</strong> votre résolution.<br />

Nous sommes entrés, cher ami, dans cette pensée, vous et moi, en prenant un<br />

moyen qui vous assure toute facilité pour réfléchir <strong>de</strong>vant Dieu <strong>avec</strong> calme et attention, et<br />

<strong>de</strong> prendre, après cette mûre délibération, le parti qui vous semblera définitivement le<br />

meilleur et le plus sage.<br />

Jʹattends bien impatiemment <strong>de</strong> vos nouvelles, jʹai besoin <strong>de</strong> savoir comment vous<br />

vous trouvez et en quel état est votre esprit; croyez‐moi, cher ami, presque constamment<br />

auprès <strong>de</strong> vous par le cœur et par la pensée, et vous ne vous tromperez point.<br />

Offrez, cher enfant, mes prières <strong>avec</strong> les vôtres à N.D. <strong>de</strong> Chartres; cʹest là, comme<br />

ailleurs, un pieux sanctuaire cher à la Mère <strong>de</strong> Dieu, un lieu où elle se complaît, ou elle<br />

converse volontiers <strong>avec</strong> ses enfants et volontiers aussi exauce leurs vœux. Remettez‐lui<br />

bien naïvement votre cœur, avouant votre impuissance à vouloir et à vous conduire tout<br />

seul, elle vous prendra, cher enfant, et vous portera entre ses bras au lieu où Dieu vous<br />

220


veut. Mille choses tendres pour moi à M. Levassor et à son jeune frère et tout mon cœur<br />

pour vous en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

159 à M. Myionnet<br />

Rappel <strong>de</strong>s événements qui ont poussé M. Maignen à quitter brutalement sa famille. Pru<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> MLP. Pour‐<br />

quoi il l’a envoyé chez M. Levassor et non chez Mgr Angebault. Projet <strong>de</strong> retraite <strong>de</strong>s frères Myionnet et Mai‐<br />

gnen à La Trappe.<br />

Duclair, 7 septembre 1846<br />

Mon bien cher frère,<br />

Je pensais déjà que nous ne pouvions repousser notre cher f. Maignen, sʹil est bien<br />

déterminé à se joindre à nous, mais je désirais voir mon avis confirmé par celui <strong>de</strong> M.<br />

Beaussier et par le vôtre; la seule chose que nous ayons, ce me semble, à examiner <strong>avec</strong> no‐<br />

tre jeune ami, cʹest la fermeté <strong>de</strong> sa résolution. Depuis longtemps, mʹa‐t‐il dit, il était tout à<br />

fait décidé à briser tous les obstacles pour se donner entièrement à Dieu et il nʹattendait<br />

quʹune occasion favorable, mais il se défiait <strong>de</strong> ses forces et craignait <strong>de</strong> faiblir <strong>avec</strong> sa fa‐<br />

mille au moment <strong>de</strong> lʹépreuve. Mercredi <strong>de</strong>rnier, en suite dʹune très minime contrariété<br />

quʹil avait eue dans sa maison, il sʹest senti inspiré <strong>de</strong> profiter <strong>de</strong> lʹespèce dʹexcitation quʹil<br />

y puisait pour franchir le pas et il a, en effet, consommé son sacrifice. Il mʹa assuré quʹil ne<br />

sʹétait pas un seul instant exagéré le motif <strong>de</strong> son mécontentement quʹil traitait lui‐même<br />

dʹenfantillage, mais que volontairement et <strong>avec</strong> réflexion, il avait saisi ce prétexte pour<br />

prendre son élan. En effet, il a passé le jour à arranger ses affaires, au moins provisoire‐<br />

ment, il est parti le soir pour Rouen, où il a couché, et le len<strong>de</strong>main jeudi il est arrivé près<br />

<strong>de</strong> moi. Jʹai craint quʹil ne fût tourmenté par son frère, dont on pouvait penser quʹil serait<br />

suivi, je lʹai donc invité à se rendre immédiatement auprès <strong>de</strong> M. Levassor; il nʹest resté<br />

<strong>avec</strong> moi que quelques heures; à 5h. du soir il est reparti pour Rouen, il a dû y coucher et<br />

partir vendredi dans la journée pour Chartres où il nʹaura pas, apparemment trouvé M.<br />

Levassor. Ma lettre à M. Beaussier contenait en substance ces détails, mais vous ne parais‐<br />

sez pas, mon cher frère, en avoir eu connaissance, car vous semblez penser que notre ami<br />

est encore <strong>avec</strong> moi. Jʹattendais <strong>de</strong> lui une lettre aujourdʹhui, je pense quʹelle ne peut man‐<br />

quer <strong>de</strong> mʹarriver <strong>de</strong>main.<br />

Mon but principal et, à vrai dire, unique en envoyant notre ami chez M. Levassor<br />

était <strong>de</strong> le laisser entièrement indépendant et libre pour la réflexion comme pour lʹaction,<br />

durant les quelques jours qui pouvaient sʹécouler jusquʹau moment où sa démission, quʹil<br />

était encore maître <strong>de</strong> retirer, serait <strong>de</strong>venue irrévocable. Je lui avais fait toutes les observa‐<br />

tions possibles, pour bien éclairer son esprit sur les inconvénients <strong>de</strong> sa résolution subite et<br />

sur les avantages quʹil eût trouvés à choisir plus sagement son temps; il a persisté dans sa<br />

volonté. Il me semble que si, après quelques jours écoulés et le temps <strong>de</strong> retirer sa démis‐<br />

sion étant passé, il reste ferme dans sa volonté, nous ne pourrons douter <strong>de</strong> sa résolution<br />

et ne <strong>de</strong>vrons pas non plus lui refuser <strong>de</strong> lʹadmettre parmi nous. Alors je ne verrais pas<br />

lʹutilité du grand voyage que vous proposeriez <strong>de</strong> lui faire entreprendre à Angers, voyage<br />

assez dispendieux et pour lequel il aurait, je crois, beaucoup <strong>de</strong> répugnance. Il se montrait<br />

déjà bien triste <strong>de</strong> sʹen aller loin <strong>de</strong> nous, à Chartres, <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s étrangers, au moment où no‐<br />

tre présence et lʹappui <strong>de</strong> notre affection fraternelle lui eussent été si nécessaires; je pense<br />

221


quʹil aurait encore plus <strong>de</strong> regret <strong>de</strong> se remettre en route et dʹaller à une si gran<strong>de</strong> distance.<br />

Je verrais à ce voyage un inconvénient plus grave, celui <strong>de</strong> conduire peut‐être M gr à re‐<br />

prendre envers nous les vues dʹautorité absolue quʹil avait adoptées dʹabord et qui eussent<br />

pu, sans la réserve que nous y avons mise, nous créer <strong>de</strong> sérieux embarras; enfin nous<br />

avons pu nous convaincre, en plusieurs circonstances, que ce vénérable prélat, dont je sais<br />

dʹailleurs lʹexpérience et la haute piété, nʹavait pas entièrement compris notre pensée ni<br />

saisi exactement les circonstances <strong>de</strong> notre position; je doute donc quʹil eût grâce spéciale<br />

pour diriger notre cher frère, surtout ne connaissant pas <strong>de</strong> longue main son caractère, ses<br />

habitu<strong>de</strong>s ni ses dispositions.<br />

Voilà, mon cher frère, ma pensée sur le moyen que vous proposez; je la livre à<br />

lʹexamen <strong>de</strong> M. Beaussier et au vôtre en toute simplicité et bien résolu dʹavance <strong>de</strong> me ran‐<br />

ger à votre avis si le mien ne vous paraît pas le meilleur. Si, au contraire, vous jugiez bon<br />

<strong>de</strong> lʹadopter, je crois quʹon pourrait maintenir pour quelques jours notre ami à Chartres ou<br />

ailleurs jusquʹau moment <strong>de</strong> votre départ; alors vous lʹemmèneriez <strong>avec</strong> vous au lieu où<br />

vous <strong>de</strong>vez aller pour prendre quelque repos et vous feriez ensemble une absence dʹune<br />

quinzaine <strong>de</strong> jours; cela me semblerait suffisant pour remettre toutes choses en leur lieu. Je<br />

comptais partir pour vous retrouver au commencement <strong>de</strong> la semaine prochaine; si vous<br />

croyez que, pour faciliter votre départ et celui <strong>de</strong> M. Maignen, je doive hâter mon retour,<br />

ne manquez pas <strong>de</strong> me le dire sans nulle hésitation.<br />

Adieu, mon bien cher frère, je vous embrasse tendrement ainsi que notre excellent<br />

p. Beaussier et suis en N.S.<br />

Votre frère dévoué<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

160 à M. Maignen<br />

MLP. cherche à rassurer M. Maignen: s’il est bien décidé à se donner, il sera reçu en communauté. MLP. règle<br />

quelques dispositions pratiques vis‐à‐vis <strong>de</strong> la famille Maignen. Projet <strong>de</strong> retraite <strong>avec</strong> le frère Myionnet.<br />

Duclair, 7 septembre 1846<br />

Très cher ami,<br />

Je réponds sans retard à votre lettre datée <strong>de</strong> Dreux qui vient <strong>de</strong> mʹêtre remise tout<br />

à lʹheure. Jʹen ai reçu une autre aujourdʹhui même <strong>de</strong> M. Myionnet qui mʹannonce que M.<br />

lʹabbé Levassor, notre ami, est passé par Paris se rendant dans le Midi, ainsi vous ne lʹau‐<br />

rez pas rencontré à Chartres. Jʹespère au moins que vous aurez trouvé le jeune frère qui le<br />

secon<strong>de</strong> dans son œuvre du patronage <strong>de</strong>s enfants et que cela vous aura été une consola‐<br />

tion. Je crois, cher ami, que dans cet état <strong>de</strong> choses, ce quʹil y a <strong>de</strong> mieux à faire, cʹest dʹat‐<br />

tendre quelques jours à Chartres jusquʹà ce que M. Myionnet et moi ayons pu nous enten‐<br />

dre sur le parti à prendre; je lui ai écrit aujourdʹhui à ce sujet, je ne puis tar<strong>de</strong>r à recevoir sa<br />

réponse. Quant à la question principale, M. Beaussier et lui désirent, comme moi, que vous<br />

réfléchissiez, pendant quʹil en est encore temps, sur les suites <strong>de</strong> votre détermination, mais<br />

ils pensent aussi que si définitivement vous vous offrez, vous <strong>de</strong>vez être reçu par vos<br />

amis.<br />

Jʹai adressé pour vous chez M. Levassor <strong>de</strong>ux lettres à votre adresse qui avaient été<br />

envoyées chez ma sœur à Duclair et jʹai joint à chacune dʹelles un petit mot <strong>de</strong> moi. Le<br />

premier envoi avait été mis par moi dans une lettre à M. Levassor, lettre insignifiante et <strong>de</strong><br />

222


pure transmission, il faudrait la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r chez lui, lʹouvrir et prendre <strong>de</strong>dans ce qui est<br />

pour vous; le jeune frère ne refuserait pas au besoin, <strong>de</strong> lʹouvrir après cette explication.<br />

Vous verrez dans un petit mot <strong>de</strong> moi joint au second paquet (qui est à votre adresse chez<br />

M. Levassor) que votre famille, préparée dès longtemps à ce qui est arrivé, a pris assez<br />

paisiblement les choses. Madame votre mère et votre frère, comme je vous lʹai dit, sont al‐<br />

lés voir M. Myionnet dont les explications ont paru à peu près les satisfaire, au moins<br />

quant à votre frère; Madame votre mère vous accusait seulement dʹêtre parti sans lʹen pré‐<br />

venir et dʹavoir manquer <strong>de</strong> confiance en elle. Je ne verrais nul inconvénient, cher ami, à ce<br />

que, conformément au vœu <strong>de</strong> votre cœur, vous leur écrivissiez, comme vous lʹentendrez;<br />

je pense seulement quʹil pourrait être à propos dʹenvoyer votre lettre à M. Myionnet pour<br />

quʹil la fît parvenir. En vous voyant changer successivement <strong>de</strong> lieux sans raisons apparen‐<br />

tes, les vôtres trouveraient <strong>de</strong>s apparences <strong>de</strong> mystère à ces allées et venues et sʹinquiète‐<br />

raient sans motif. Voyez toutefois, tout paraissant assez paisible, comme le laisse entrevoir<br />

M. Myionnet, si vous ne <strong>de</strong>vez pas vous défier <strong>de</strong>s effusions excessives dʹune correspon‐<br />

dance trop tendre; je crois que vous <strong>de</strong>vez vous borner à ce que le bien <strong>de</strong>s vôtres exigera.<br />

Examinez, cher ami, si vous avez assez <strong>de</strong> fonds pour attendre que M. Myionnet<br />

vous en ait envoyé, et, dans ce cas, écrivez‐lui <strong>de</strong> vous faire parvenir la somme dont vous<br />

croyez avoir besoin pour attendre quelques jours à Chartres. Autrement, si vous étiez tout<br />

à fait au dépourvu et que le jeune assistant <strong>de</strong> M. Levassor ne pût vous avancer ce qui<br />

vous serait nécessaire, vous pourriez voir le frère <strong>de</strong> M. lʹabbé Levassor qui <strong>de</strong>meure à la<br />

campagne tout près <strong>de</strong> Chartres. Je le connais tout particulièrement et, durant le temps <strong>de</strong><br />

son séjour à Rouen, jʹai eu souvent recours à son obligeance; il se ferait un plaisir, jʹen suis<br />

assuré, sur la présentation <strong>de</strong> cette lettre, <strong>de</strong> vous remettre 25f que nous lui rendrions sous<br />

peu <strong>de</strong> jours et qui vous suffiraient, je pense, pour attendre lʹenvoi <strong>de</strong> M. Myionnet.<br />

Je suppose que vous pourrez aller tout prochainement <strong>avec</strong> ce bon frère faire une<br />

petite retraite et prendre un peu <strong>de</strong> repos; il nʹavait pas, ces jours‐ci, encore fait choix du<br />

lieu où il <strong>de</strong>vait aller et il attendait mon retour pour se déci<strong>de</strong>r; je ne prolongerai pas mon<br />

séjour ici au‐<strong>de</strong>là <strong>de</strong> la présente semaine, je partirai même plus tôt, si la réponse que jʹat‐<br />

tends <strong>de</strong> M. Myionnet entre à cet égard dans mes vues.<br />

Je nʹajoute rien à cette lettre, sinon, cher ami, lʹassurance nouvelle <strong>de</strong>s tendres pré‐<br />

occupations <strong>de</strong> mon cœur et <strong>de</strong> mon esprit à votre sujet; je prie Dieu autant que je le puis<br />

pour vous; <strong>de</strong>main surtout je vous mettrai bien intimement au cœur <strong>de</strong> Marie; priez‐la<br />

aussi pour ceux qui vous sont si sincèrement attachés.<br />

Ecrivez‐moi poste pour poste pour me dire si vous avez reçu cette lettre; ainsi que<br />

les <strong>de</strong>ux premières, comment vous vous trouvez et si vous espérez trouver à Chartres,<br />

comme à Rouen, quelques douces consolations. Il y a à Chartres une Société <strong>de</strong> St‐Vincent‐<br />

<strong>de</strong>‐Paul. M. lʹabbé Levassor mʹa souvent parlé dʹun saint prêtre, curé <strong>de</strong> la cathédrale, M.<br />

lʹabbé Lecomte, vous pourriez le voir; il savait autrefois mon nom, M. Levassor lui parlait<br />

<strong>de</strong> moi, mais il lʹaura oublié.<br />

Votre frère et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

223


161 à M. Maignen<br />

MLP. accueille M. Maignen dans la Communauté. Comment il va lʹai<strong>de</strong>r dans ses rapports <strong>avec</strong> sa famille. Que<br />

M. Maignen ne se soucie pas du jugement du mon<strong>de</strong> ʺsans mot dire, quittons tout et suivons le Seigneurʺ. Ex‐<br />

hortations à prier spécialement la Vierge Marie. Faire diversion par le travail.<br />

Duclair, mercredi matin, 9 septembre 1846<br />

Très cher frère, très aimé enfant, quand votre excellent cœur nʹaurait produit que les<br />

sentiments si tendres et si dévoués exprimés dans votre <strong>de</strong>rnière lettre, je nʹen voudrais<br />

pas davantage pour vous donner toute mon estime, toute ma vive et profon<strong>de</strong> affection. Je<br />

vous retrouve là tout entier, comme je vous avais vu et compris en dʹautres jours, quand<br />

jʹai uni mon âme <strong>avec</strong> la vôtre dʹun lien si fort et en même temps si doux. Que ne nous est‐<br />

il donné <strong>de</strong> nous entendre toujours ainsi? Que nous serions forts pour le bien, courageux<br />

dans nos peines, hauts dans nos pensées, ar<strong>de</strong>nts dans notre dévouement, si nos cœurs<br />

battaient ainsi à lʹunisson, palpitants dʹune sainte et pure charité, aspirants dʹun même<br />

élan vers Dieu! Cher enfant, je nʹai plus aucun doute, je regar<strong>de</strong> votre sacrifice comme<br />

consommé, et, par la pensée, je vous ouvre mes bras pour vous donner le baiser <strong>de</strong> frère,<br />

lʹétreinte décisive <strong>de</strong> lʹadoption. Le bon f. Myionnet et notre excellent p. Beaussier sont,<br />

croyez‐le, dans les mêmes sentiments; lʹun et lʹautre ont vu dans votre détermination la<br />

conduite du Seigneur qui vous appelle et vous envoie à nous. Quʹil mʹen a coûté, cher ami,<br />

dʹêtre si réservé <strong>avec</strong> vous durant les quelques instants que vous avez passés <strong>avec</strong> moi et<br />

<strong>de</strong> tenir tout en doute quand jʹaurais tant voulu vous attirer à moi et vous dire que, péné‐<br />

trant votre cœur, jʹen approuvais tous les mouvements! Mais je <strong>de</strong>vais mʹassurer <strong>de</strong> lʹas‐<br />

sentiment <strong>de</strong> M. Beaussier qui a grâce pour vous conduire, du consentement du f. Myion‐<br />

net, et surtout vous laisser quelques jours <strong>de</strong> réflexion pour avoir une certitu<strong>de</strong> plus<br />

gran<strong>de</strong> encore que lʹheure du Seigneur était venue. Aujourdʹhui, lʹépreuve me semble suf‐<br />

fisante; vous avez persévéré, vous avez supporté le choc que jʹai volontairement laissé<br />

tomber sur vous <strong>de</strong>s regrets <strong>de</strong> votre famille, je crois donc quʹ<strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> Dieu vous<br />

parviendrez à surmonter les obstacles et difficultés <strong>de</strong> la position. Je pense toutefois <strong>avec</strong><br />

vous quʹil sera pru<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> ne pas vous laisser trop énerver par <strong>de</strong>s correspondances néces‐<br />

sairement bien douloureuses pour vous et qui ne feraient aussi quʹexalter lʹaffliction <strong>de</strong> vo‐<br />

tre famille. Je nʹaurais pas pris sur moi dʹouvrir les lettres qui vous sont adressées, mais,<br />

dʹaprès votre <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, je le ferai désormais, je vous en transmettrai fidèlement la subs‐<br />

tance en mʹinterposant seulement, cher enfant, pour affaiblir le coup; croyez bien, cher<br />

ami, quʹil portera sur moi avant dʹaller à vous, car, ce qui vous frappe ne me blesse‐t‐il pas<br />

aussi et pouvez‐vous souffrir sans que je souffre <strong>avec</strong> vous? Jʹapprouve votre lettre à votre<br />

famille; jʹapprouve aussi celle que vous avez faite pour le Général 152 ; si elle nʹest pas entiè‐<br />

rement comprise, elle satisfera au moins au <strong>de</strong>voir que vous aviez à remplir <strong>de</strong> ce côté. Ne<br />

vous préoccupez guère, cher ami, du blâme que le mon<strong>de</strong> peut prononcer contre vous, au<br />

milieu <strong>de</strong> ses murmures vous goûterez la douceur <strong>de</strong> la voix divine qui vous parlera au<br />

fond du coeur et vous absoudra <strong>avec</strong> cette autorité suprême qui domine les vues <strong>de</strong> la rai‐<br />

son, les émotions du sentiment, les souvenirs du passé, les craintes <strong>de</strong> lʹavenir. Relisez, au<br />

chap. 10 <strong>de</strong> S t Matthieu, les instructions du Seigneur à ses apôtres et rappelez‐vous <strong>avec</strong><br />

quelle énergie Il a séparé <strong>de</strong> tout ceux dont Il a fait choix pour travailler à son œuvre; cette<br />

œuvre, cʹest la nôtre, à nous aussi Il a dit: laissez là vos barques et vos filets et suivez‐moi;<br />

152 Cf. infra, lettre 166, du 25 .09. 1846. Le Général Pelet, supérieur hiérarchique <strong>de</strong> M. Maignen au Ministère <strong>de</strong> la guerre.<br />

224


comme les Apôtres, sans mot dire, quittons tout et suivons‐Le. Croyez bien dʹailleurs que<br />

le premier coup, le plus douloureux, étant maintenant déjà un peu amorti, il ne faut plus<br />

que du temps et <strong>de</strong> la pru<strong>de</strong>nce pour guérir la blessure. Vous vous souvenez <strong>de</strong> la douleur<br />

<strong>de</strong> votre bonne mère quand votre frère partit; eh bien, <strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> patience, lʹaffliction<br />

sʹest calmée, la paix est revenue; combien mieux en sera‐t‐il ainsi aujourdʹhui, puisque le<br />

Seigneur opérant <strong>avec</strong> vous adoucira Lui‐même le coup porté pour son amour. Priez‐Le<br />

beaucoup, très cher ami, et aussi sa très aimée Mère; cette affaire, plus que tout autre, est<br />

<strong>de</strong> son ressort, il sʹagit <strong>de</strong>s rapports <strong>de</strong> mère à fils, qui mieux quʹelle peut interposer sa<br />

douce main? Oh! oui, cher ami, priez tendrement cette Mère par excellence et si, dans vo‐<br />

tre ar<strong>de</strong>nte prière, vous vous sentez pénétré pour elle dʹune plus vive confiance, bénissez‐<br />

en Dieu comme dʹune précieuse faveur, comme dʹun signe infaillible du progrès que vous<br />

aurez fait dans le divin amour.<br />

Je vous écris bien en hâte, ne voulant pas que vous attendiez en vain quelques mots<br />

<strong>de</strong> moi. Nos lettres se croisent et ne prennent pas le temps <strong>de</strong> se mettre en accord. Ah! cʹest<br />

quʹen ce moment, cher enfant, il faudrait, pour répondre aux mouvements <strong>de</strong> nos cœurs,<br />

que nous fussions lʹun près <strong>de</strong> lʹautre; les postes ont beau courir, notre ar<strong>de</strong>ur va plus vite<br />

encore. Reportons‐nous, ami, au sein <strong>de</strong> Dieu où se calme toute émotion, où se purifie tout<br />

sentiment; reposons‐nous en paix, en confiance, en amour dans ce Cœur qui est notre lieu,<br />

notre asile; il me semble, cher enfant, que jʹy suis en ce moment <strong>avec</strong> vous, tant je me sens<br />

sûr <strong>de</strong> vous, tant jʹespère en lʹavenir, tant je désire tout selon la très sainte volonté <strong>de</strong> Dieu.<br />

Ne vous livrez pas trop exclusivement, dans ces premiers moments, à vos pensées;<br />

quand elles sont tristes, secouez‐les; prenez quelque part, si vous pouvez, aux travaux du<br />

jeune frère; en étudiant <strong>de</strong> près son œuvre, vous recueillerez par la comparaison dʹutiles<br />

observations et <strong>de</strong> nouvelles lumières. Remerciez‐le du tendre accueil quʹil vous a fait en<br />

notre nom. M. Beaussier donne une retraite, ce qui lʹa empêché <strong>de</strong> vous écrire, le f. Myion‐<br />

net va le faire <strong>de</strong> son côté. Vous aurez vu que jʹai reçu votre lettre <strong>de</strong> Dreux à laquelle jʹai<br />

répondu poste pour poste; ne tar<strong>de</strong>z pas à mʹécrire, vous avez besoin dʹeffusion et, comme<br />

vous lʹavez dit, après le Cœur <strong>de</strong> Dieu, vous ne pouvez vous répandre quʹau cœur <strong>de</strong> vo‐<br />

tre Père.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Merci <strong>de</strong> votre note à M. Taillandier sur la loterie; a‐t‐il la clef <strong>de</strong> l’armoire?<br />

162 à M. Myionnet<br />

Précisions sur son prochain retour à Paris. Ses dispositions intérieures: servir Dieu le moins mal possible. Pour<br />

le Frère Maignen, ne rien précipiter.<br />

Duclair, 13 septembre 1846<br />

Très cher frère,<br />

Je reste encore ici un jour ou <strong>de</strong>ux, puisque vous le trouvez bon, et nʹen éprouverez<br />

point <strong>de</strong> surcroît dʹembarras. Je vous arriverai mercredi vers 5h., pas bien fort encore, mais<br />

un peu moins abattu pourtant et désirant sincèrement servir <strong>avec</strong> vous le bon Dieu le<br />

moins mal que je pourrai. Je goûte beaucoup votre pensée sur notre jeune frère et crois<br />

<strong>avec</strong> vous quʹon ne doit rien précipiter.<br />

225


Je me réjouis bien, très cher ami, <strong>de</strong> lʹespoir <strong>de</strong> vous embrasser mercredi; aimez‐moi<br />

comme je vous aime moi‐même bien tendrement en N.S. et priez pour moi qui prie cons‐<br />

tamment pour vous.<br />

Votre frère en J.C.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

163 à M. Maignen<br />

MLP. a la certitu<strong>de</strong> que Dieu appelle M. Maignen. La vie <strong>de</strong> communauté ne se bâtit pas <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s affections hu‐<br />

maines; il y faut <strong>de</strong>s vues surnaturelles, la prière et la sainte charité. Ne pas sʹalarmer <strong>de</strong> lʹhumilité <strong>de</strong>s commen‐<br />

cements; il sʹagit <strong>de</strong> bien mettre les fon<strong>de</strong>ments en terre. Appel à lʹamour fraternel: voir dans ʺla tendre charité<br />

<strong>de</strong> son frère, un don <strong>de</strong> Dieu.ʺ<br />

Duclair, 13 septembre 1846<br />

Je mʹattendais presque à recevoir <strong>de</strong> vous une petite lettre aujourdʹhui, très cher<br />

frère, bien quʹil y eût peu dʹapparence que vous dussiez mʹécrire, puisque vous pouviez<br />

me croire en route pour retourner à Paris. Je nʹespérais donc, à vrai dire, que parce que<br />

jʹavais le besoin dʹavoir quelques lignes <strong>de</strong> vous et quʹ<strong>avec</strong> un certain nombre <strong>de</strong> supposi‐<br />

tions, on trouve toujours moyen <strong>de</strong> se faire une espérance. Je suis encore ici pour <strong>de</strong>ux ou<br />

trois jours; M. Myionnet, qui goûte beaucoup la pensée <strong>de</strong> vous emmener <strong>avec</strong> lui dans la<br />

petite excursion ou retraite quʹil a projetée, nʹayant pris ses dispositions que pour le cou‐<br />

rant <strong>de</strong> la semaine au plus tôt, mʹa invité à ne pas hâter sans nécessité mon retour. Je ne se‐<br />

rai donc à Paris que mercredi 16 dans la journée; je pense que jʹy trouverai une lettre <strong>de</strong><br />

vous. Jusque là, je nʹaurai pas sans doute <strong>de</strong> vos nouvelles. Je souffrirais bien <strong>de</strong> ce retard,<br />

cher ami, si votre <strong>de</strong>rnière lettre ne mʹeût tranquillisé sur votre position et surtout sur lʹétat<br />

<strong>de</strong> votre esprit. Jʹy ai trouvé, au milieu <strong>de</strong>s préoccupations toutes naturelles <strong>de</strong> votre cœur,<br />

un certain calme, une sorte dʹassurance qui mʹa semblé lʹindice <strong>de</strong> lʹopération <strong>de</strong> Dieu en<br />

vous. Or, cʹest là ce que nous cherchons, cher ami, vous et nous qui vous aimons, cʹest la<br />

certitu<strong>de</strong> que le Seigneur vous appelle et vous veut <strong>avec</strong> nous. Cette conviction une fois<br />

bien acquise, nous pourrons souffrir sans doute <strong>de</strong>s sacrifices quʹune gran<strong>de</strong> résolution<br />

impose, mais en gémissant, et <strong>de</strong> notre propre peine et <strong>de</strong> celle <strong>de</strong>s autres, nous aurons la<br />

paix au fond <strong>de</strong> lʹâme, parce que nous y reconnaîtrons la volonté toujours tendre et tou‐<br />

jours sage <strong>de</strong> notre Dieu. Sans cela, nous ne saurions trouver aucune sécurité ni repos <strong>de</strong><br />

cœur. Nous savons par expérience que les plus tendres sympathies ne suffisent pas pour<br />

assurer la durée <strong>de</strong>s affections, quʹelles ont au moins <strong>de</strong>s inconstances ou fluctuations qui<br />

mêlent le trouble à leurs plus douces joies et font redouter lʹavenir. Mais si, comme tout<br />

me le laisse maintenant espérer, cher ami, cʹest vraiment une pure et sainte charité qui<br />

nous rassemble, si cʹest lʹesprit <strong>de</strong> zèle et <strong>de</strong> dévouement, le besoin <strong>de</strong> nous livrer à Dieu<br />

sans mesure, dʹunir pour sa louange nos cœurs et nos voix, pour son service nos travaux,<br />

pour lʹutilité <strong>de</strong> nos frères notre ar<strong>de</strong>ur et nos efforts, oh! assurément notre existence est<br />

bien fondée, lʹunion se consommera en nous et sʹaffermira par la durée, car le Seigneur ha‐<br />

bitera parmi nous. Sʹil est vrai <strong>de</strong> dire quʹun fidèle, un homme en paix <strong>avec</strong> son Dieu offre<br />

lʹunion dʹun corps, dʹune âme et du divin Esprit, il est également certain quʹune assemblée<br />

<strong>de</strong> véritables frères est aussi un corps et une âme unis intimement et divinement à lʹEsprit;<br />

quelle merveille <strong>de</strong> charité, très cher ami, quel moyen puissant dʹédification, quelle œuvre<br />

glorieuse et chère à Dieu. Cʹest à cela que son amour nous appelle; agrandissons nos<br />

226


cœurs, élevons nos esprits pour répondre dignement à une si gran<strong>de</strong> vocation. Il nʹimporte<br />

guère que nos commencements soient petits, que notre vêtement, nos habitu<strong>de</strong>s extérieu‐<br />

res restent ceux du mon<strong>de</strong>, que nos exercices nʹaient pas une régularité absolue, nos œu‐<br />

vres une gran<strong>de</strong> portée, si, <strong>avec</strong> un cœur droit et pur, nous mettons à la base <strong>de</strong> notre<br />

chère institution lʹamour, le dévouement, le désir ar<strong>de</strong>nt et vrai <strong>de</strong> reproduire en nous le<br />

divin Modèle que nous aurons maintenant seul sous nos yeux, nous nʹaurons pas travaillé<br />

en vain, tôt ou tard, notre œuvre sortira <strong>de</strong> terre, elle aura, comme celles que Dieu a bénies<br />

dans le passé, sa place, son avenir et sa mission.<br />

Les heures <strong>de</strong> découragement où vous mʹavez vu souvent, cher frère, sʹexpliquent<br />

par le sentiment profond <strong>de</strong> notre indignité pour une telle entreprise; mais, si Dieu daigne<br />

nous prêter appui, ce serait trop <strong>de</strong> faiblesse <strong>de</strong> ne pas marcher <strong>avec</strong> Lui. Nous nʹavons<br />

pas à travailler seuls, <strong>avec</strong> nos forces, <strong>avec</strong> nos mains, mais bien sous sa conduite, <strong>avec</strong> les<br />

moyens, les ressources, les lumières, les grâces <strong>de</strong> toutes sortes que sa Provi<strong>de</strong>nce fournira;<br />

nous nʹavons pas enfin à bâtir nous‐mêmes lʹédifice tout entier, mais uniquement, sans<br />

doute, à déblayer le sol, à mettre sous terre peut‐être les assises oubliées qui ne verront<br />

guère le jour et nʹauront <strong>de</strong> valeur que pour lʹarchitecte divin. Cette tâche bien comprise<br />

doit gran<strong>de</strong>ment sourire à <strong>de</strong>s âmes que le Seigneur aura touchées; une vie dʹune beauté<br />

toute intérieure, une œuvre obscure et presque inaperçue, méprisée peut‐être ou traver‐<br />

sée 153 ; pour seul appui la confiance au Dieu <strong>de</strong> charité et une vague lueur dʹespérance et<br />

dʹavenir. Oui, cette tâche est noble et belle, digne <strong>de</strong> cœurs fermes et mus par un grand<br />

amour, mais aussi quelle assurance ne veut‐elle pas dans ceux qui lʹacceptent que Dieu les<br />

agrée et reposera en eux. Mais encore une fois aussi, ne doutons pas trop <strong>de</strong> nous‐mêmes<br />

quand, après un sérieux examen <strong>de</strong> notre cœur, vous, le frère et moi, nous aurons franchi<br />

le pas; sachons bien que lʹœuvre <strong>de</strong> notre édification intérieure, lʹamen<strong>de</strong>ment, la perfec‐<br />

tion <strong>de</strong> notre cœur ne seront pas le travail d’un jour, pas plus que l’oeuvre <strong>de</strong> nos mains,<br />

notre chère institution elle‐même. Lʹimpatience, les désirs trop empressés gâteraient lʹune<br />

et lʹautre entreprise; lʹhumble prière <strong>de</strong> chaque jour, le travail sagement soutenu, lʹattente<br />

patiente et tendrement confiante <strong>de</strong>vront être notre voie et seuls nous conduiront à notre<br />

fin.<br />

Vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rez, très cher ami, si cʹest vous que jʹentends exhorter par ces<br />

pensées énoncées ici dans <strong>de</strong>s prévisions que le Seigneur peut bien ne pas ratifier; non,<br />

mon bien cher enfant, ce nʹest pas précisément pour vous conseiller, vous nʹavez pas be‐<br />

soin <strong>de</strong> mes conseils, le bon Dieu parlera lui‐même à votre cœur bien autrement que je ne<br />

le saurais faire; mais, en vous écrivant, il me semble que je cause tout simplement <strong>avec</strong><br />

vous, comme nous lʹavons fait si souvent dans ces longues promena<strong>de</strong>s dont nous ne per‐<br />

drons pas le souvenir; jʹessaie <strong>de</strong> me rendre compte <strong>de</strong> notre position, <strong>de</strong>s vues du Sei‐<br />

gneur sur nous, <strong>de</strong> ce que nous <strong>de</strong>vrons faire pour y répondre, et je le dis à vous, cher ami,<br />

sans y attacher dʹautre importance, sachant bien que les prévoyances servent peu à ceux<br />

qui se sont abandonnés aux conduites du Seigneur et qui vont, jour par jour, où son souf‐<br />

fle les pousse. Ce me sera, croyez‐le, cher ami, une douce consolation, un puissant encou‐<br />

ragement <strong>de</strong> marcher dans ce chemin, côte à côte <strong>avec</strong> vous; mieux que jamais, nous nous<br />

soutiendrons et nous relèverons tour à tour, plus que jamais nous nous aimerons et nous<br />

nous donnerons lʹun à lʹautre, car chacun <strong>de</strong> nous verra dans la tendre charité <strong>de</strong> son frère<br />

un don <strong>de</strong> Dieu, une grâce pour se donner tout à Lui.<br />

153 "traversée", ancien français : contredite, contrariée, qu'on empêche d'agir.<br />

227


Je suis bien affectueusement en J. et M.<br />

Votre frère dévoué<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Ne manquez pas <strong>de</strong> remercier encore le jeune frère pour nous et <strong>de</strong> lʹassurer <strong>de</strong><br />

notre sincère affection. Dites‐moi quelle est votre position et si elle peut être gardée encore<br />

quelques jours. Priez pour nous, je ne dis pas si je prie pour mon bien cher enfant. Je vous<br />

écrirai à mon arrivée à Paris ou du moins dès que vous mʹaurez écrit vous‐même.<br />

164 à M. Maignen<br />

Incompréhension <strong>de</strong> la famille Maignen: Dieu et les pauvres nʹont besoin ni dʹor, ni dʹargent, mais <strong>de</strong> ʺvotre<br />

cœur, <strong>de</strong> votre volonté, <strong>de</strong> vous‐mêmeʺ. Pourquoi MLP. lui conseille <strong>de</strong> renoncer au sacerdoce. Entrer dans lʹes‐<br />

prit <strong>de</strong> patience et dʹattente <strong>de</strong> saint Vincent <strong>de</strong> Paul.<br />

Paris, 18 septembre 1846<br />

Je suis arrivé ici, très cher frère, mercredi comme je vous lʹavais annoncé; je nʹai pas<br />

besoin <strong>de</strong> vous dire que jʹai revu <strong>avec</strong> bonheur notre excellent f. Myionnet;vous savez<br />

quels sentiments nous unissent l’un à l’autre et combien notre petite famille, jusquʹici si<br />

peu nombreuse, sent le besoin <strong>de</strong> se fortifier dans lʹexercice <strong>de</strong> la vie commune; ce bon<br />

frère a bien voulu mʹaccueillir aussi comme si je valais quelque chose pour lui, tant il est<br />

vrai que ce ne sont ni les gran<strong>de</strong>s qualités, ni les avantages dʹaucune sorte qui attachent les<br />

hommes lʹun à lʹautre, mais bien la droiture du cœur, lʹaccord <strong>de</strong>s volontés et par‐<strong>de</strong>ssus<br />

tout lʹinspiration divine <strong>de</strong> la charité.<br />

Vous comprenez sans peine, cher enfant, que vous êtes bien vite trouvé en tiers <strong>avec</strong><br />

nous et que vous étiez trop présent à notre pensée pour que notre premier mouvement<br />

nʹait pas été tourné vers vous; le jeune frère a donc été dès lʹabord lʹobjet <strong>de</strong> nos tendres<br />

préoccupations et <strong>de</strong> notre plus chère sollicitu<strong>de</strong>; nous avons parlé bien longtemps <strong>de</strong> ce<br />

qui le touche et nous avons aussi prié bien ar<strong>de</strong>mment pour lui. Il nʹétait pas difficile <strong>de</strong><br />

nous entendre sur le point principal, vous êtes trop affectionné par nous, cher ami, et vos<br />

sentiments ont trop <strong>de</strong> sympathie <strong>avec</strong> les nôtres pour que notre cœur ne sʹouvrît pas tout<br />

entier quand vous y <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z une place plus gran<strong>de</strong> et plus intime encore que par le pas‐<br />

sé. Nous <strong>de</strong>vions chercher seulement ce que nous avions à faire dans lʹétat <strong>de</strong>s choses,<br />

pour concilier à la fois votre intérêt particulier, celui <strong>de</strong> notre œuvre et aussi celui <strong>de</strong> votre<br />

chère famille. Je pense comme vous quʹà vrai dire, tous ces intérêts nʹen font quʹun et que<br />

tôt ou tard chacun le reconnaîtra; mais cette heure nʹest pas venue et nous avons, en atten‐<br />

dant, bien <strong>de</strong>s ménagements à gar<strong>de</strong>r. La douceur et la persuasion jointes à une ferme vo‐<br />

lonté sont les seuls moyens quʹil convienne à vous et à nous dʹemployer; il faut les mettre<br />

en usage, comme vous lʹavez fait déjà, afin <strong>de</strong> mieux éclairer, sʹil se peut, lʹopinion <strong>de</strong> vos<br />

parents. Ne jugeant rien quʹau point <strong>de</strong> vue humain, tenant pour rêverie et désolante illu‐<br />

sion les sentiments dʹabnégation et <strong>de</strong> dévouement qui vous font agir, ils sont surtout irri‐<br />

tés <strong>de</strong> ce que vous nʹaspirez pas au moins au sacerdoce qui vous assurerait encore une po‐<br />

sition respectable; ils sont blessés plus encore <strong>de</strong> ce que, vivant en commun et nʹayant plus<br />

rien qui nous soit propre, nous ne recevions <strong>de</strong> vous que votre jeunesse, votre travail, le<br />

sacrifice <strong>de</strong> vous‐même, <strong>de</strong> votre famille et <strong>de</strong> votre position; aveuglés par un amour‐<br />

propre qui ne sait plus rien apprécier justement, ils trouveraient la condition meilleure si,<br />

au lieu <strong>de</strong> tout cela, vous aviez à offrir un peu dʹargent; ils ne comprennent pas quʹà nos<br />

yeux lʹargent est <strong>de</strong> nulle valeur, puisque nous ne ferions rien <strong>avec</strong> lui; mais que ce quʹil<br />

228


nous faut à nous, avant tout et presque exclusivement, cʹest ce que vous apportez, cher en‐<br />

fant, noblement et généreusement, non un peu dʹor, quelques vêtements ou ustensiles,<br />

mais votre cœur, votre volonté, vos soins, votre pensée, vous‐même en un mot, cʹest <strong>de</strong> ce‐<br />

la que Dieu et les pauvres ont besoin, cʹest aussi ce que nous cherchons, nous autres, qui<br />

aspirons à les servir. Il ne faut guère espérer, cher ami, que les vues <strong>de</strong> votre famille puis‐<br />

sent être changées sur ce point, mais vous pourriez, ce me semble, même en entrant dans<br />

ses idées, lui offrir quelques motifs qui ne seraient pas sans valeur. Dʹabord, M. Myionnet<br />

sʹengage, pour donner satisfaction aux susceptiblités dʹamour‐propre, à obtenir pour la<br />

Maison <strong>de</strong>s enfants un titre <strong>de</strong> sous‐Directeur ou autre auquel seraient attachés, par la So‐<br />

ciété, <strong>de</strong>s honoraires <strong>de</strong> sept ou huit cents francs au moins; votre position serait donc par‐<br />

mi nous très indépendante et humainement inattaquable. Dʹune autre part, en ce qui tou‐<br />

che le choix que vous faites entre les divers chemins qui sʹoffraient à vous, votre famille ne<br />

fait pas assez attention que le parti auquel vous vous arrêtez est pour elle le meilleur et le<br />

plus satisfaisant <strong>de</strong> tous. Sans parler <strong>de</strong>s difficultés, pour ne pas dire <strong>de</strong>s impossibilités<br />

quʹil y aurait pour vous à commencer à votre âge <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s, à suivre ensuite les années <strong>de</strong><br />

théologie, sans moyens pour votre subsistance et votre entretien, durant une pério<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

cinq ou six ans tout au moins, quels regrets nʹauraient pas les vôtres si, plus tard, vous<br />

nʹalliez pas persévérer; si vous arriviez, après avoir pris place au séminaire, après avoir re‐<br />

vêtu lʹhabit ecclésiastique, à vous rebuter <strong>de</strong>s difficultés, à changer <strong>de</strong> vues au moins et à<br />

rentrer dans le mon<strong>de</strong>, vous nʹy trouveriez quʹembarras et découragement.<br />

Avec nous, au contraire, une épreuve dʹune année nʹentraîne aucune conséquence<br />

pour votre avenir, ne fait aucun éclat, ne vous sépare du mon<strong>de</strong> par aucune distinction<br />

apparente et décisive. Enfin vos parents ne songent pas non plus que, voulant décidément<br />

vous consacrer à Dieu, vous pourriez, comme vous me lʹavez déclaré à moi‐même, mettre<br />

entre les vôtres et vous une barrière infranchissable en entrant à St‐<strong>Jean</strong>‐<strong>de</strong>‐Dieu, chez les<br />

Franciscains, chez les Jésuites ou ailleurs. Représentez tous ces motifs à votre famille, cher<br />

ami, <strong>avec</strong> affection et fermeté tout ensemble, et vous ferez, je lʹespère, quelque impression<br />

sur leurs esprits. La chose serait simple et toute probable, si vous nʹaviez affaire quʹà votre<br />

excellente mère et à votre frère; éclairés par lʹinstinct dʹune tendre affection ils compren‐<br />

draient vite quʹil y a là quelque chose <strong>de</strong> juste et <strong>de</strong> vrai et que ceux qui vous aiment <strong>de</strong>‐<br />

vraient sʹestimer heureux <strong>de</strong> la décision sage et toute transitoire que vous prenez. Mais,<br />

vous le comprenez, les conseils quʹils reçoivent les exaltent et les irritent, ils ont le contre‐<br />

coup <strong>de</strong>s passions que les choses religieuses soulèvent en certains cœurs et ils agissent<br />

sous une inspiration qui ne leur est pas propre. Néanmoins <strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> temps et <strong>de</strong> pa‐<br />

tience, le calme reviendra, je le crois, dans leurs âmes, lʹaffection prendra le <strong>de</strong>ssus et votre<br />

cause sera gagnée. Votre frère est venu à la maison le jour même <strong>de</strong> lʹarrivée <strong>de</strong> votre let‐<br />

tre; M. Myionnet ne lui a pas caché que vous étiez à Chartres, sans lui donner pourtant<br />

précisément votre adresse quʹil nʹa pas <strong>de</strong>mandée; Madame votre mère (ceci est un secret<br />

que vous ne <strong>de</strong>vez point sembler connaître) est allée voir M. Beaussier et nʹa pas absolu‐<br />

ment rejeté ses raisons, sans pourtant nʹen montrer entièrement frappée. Les renseigne‐<br />

ments que nous avons eus ainsi constamment sur les dispositions <strong>de</strong> votre famille ont ren‐<br />

du inutile la visite que vous aviez <strong>de</strong>mandée pour MM. Turqui et Desquibes. M. Beaussier<br />

pense que vous ferez sagement <strong>de</strong> ne guère le mêler à lʹaffaire, on ignore chez vous quʹil<br />

soit le Directeur <strong>de</strong> la Maison; tant quʹon ne le croit que votre confesseur, sa position est<br />

meilleure. Il désire aussi que votre famille soit bien convaincue que vous avez agi en <strong>de</strong>‐<br />

229


hors <strong>de</strong> toute inspiration extérieure et que nul <strong>de</strong> nous ne vous a conseillé, même indirec‐<br />

tement. On mʹassure que toutes les colères portent sur moi, je mʹen réjouis dans la pensée<br />

que personne plus que moi nʹest disposé à souffrir au besoin quelque chose pour vous, très<br />

cher enfant; mais je crois que, le premier moment <strong>de</strong> surprise et <strong>de</strong> douleur passé, on est<br />

aujourdʹhui mieux disposé. Jʹaurais aimé voir votre bonne mère et votre frère, jʹespère que<br />

mes explications les auraient peut‐être un peu éclairés, mais je ne puis songer à les aller<br />

voir; je les accueillerai aussi bien que je pourrai, sʹils croient <strong>de</strong>voir me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r. Voilà,<br />

cher ami, lʹétat <strong>de</strong>s choses, jʹaurais pu mʹabstenir <strong>de</strong> ces longs détails, car M. Myionnet par‐<br />

tira pour Chartres lundi ou mardi, afin <strong>de</strong> vous voir et dʹexaminer <strong>avec</strong> vous si vous pou‐<br />

vez faire ensemble un peu <strong>de</strong> retraite. Tout cela gagnera du temps et servira à vos affaires.<br />

MM. Beaussier et Myionnet ont pensé quʹil y avait à cela un grand avantage, les cœurs ne<br />

pouvant que se calmer <strong>de</strong> plus en plus <strong>avec</strong> le temps et arriver à <strong>de</strong>s pensées <strong>de</strong> concilia‐<br />

tion. Nous entrons dʹailleurs ainsi, dès lʹabord, dans lʹesprit <strong>de</strong> patience et <strong>de</strong> douce attente<br />

<strong>de</strong> notre Saint Patron qui ne voulut jamais rien précipiter. Plus votre décision aura été li‐<br />

bre, réfléchie, ferme à surmonter les obstacles, plus elle aura <strong>de</strong> valeur <strong>de</strong>vant Dieu et à<br />

vos propres yeux.<br />

M. Myionnet sʹest occupé <strong>avec</strong> beaucoup dʹintérêt <strong>de</strong> votre pauvre Gabriel; il vous<br />

en entretiendra.<br />

Dites‐moi, cher ami, je vous prie, lʹadresse <strong>de</strong> M. Levassor à qui jʹaurai besoin<br />

dʹécrire; lʹattend‐on prochainement?<br />

Voilà mon papier, mon temps et aussi mes forces usés à vous donner, cher ami, tous<br />

ces détails sérieux et nécessaires et je nʹai plus moyen <strong>de</strong> répondre aux douces effusions,<br />

aux tendres épanchements <strong>de</strong> votre <strong>de</strong>rnière lettre. Je nʹen suis pas moins touché, cher en‐<br />

fant, continuez ainsi à répandre tout votre cœur dans le mien et soyez sûr que rien ne<br />

mʹéchappe et ne mʹest indifférent; vous savez bien que dès longtemps nous avions lʹun<br />

pour lʹautre enlevé les portes <strong>de</strong> nos âmes, la mienne reste ouverte pour vous, entrez‐y à<br />

toute heure pour peu ou pour beaucoup, il nʹimporte, vous serez toujours le bienvenu.<br />

Adieu, cher enfant; hier, MM. Myionnet, Nimier et moi, nous avons récité ensemble<br />

<strong>de</strong>ux dizaines <strong>de</strong> chapelet, lʹune a été expressément dites pour vous. Notre très sainte<br />

Mère aura vu les tendres désirs <strong>de</strong> nos cœurs et, les purifiant dans le sien, elle les aura, jʹen<br />

ai la confiance, déposés aux pieds du Seigneur. Nous vous embrassons tendrement et moi<br />

un peu plus fort que les autres.<br />

Votre frère et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Bons et affectueux souvenirs à M. Mayer.<br />

165 à M. Maignen<br />

MLP. lui communique <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> sa famille. Raisons pour lesquelles il a dû observer une certaine réserve,<br />

eu égard aux obligations <strong>de</strong> son rôle <strong>de</strong> fondateur.<br />

Paris, 20 septembre 1846<br />

Mon bien cher enfant,<br />

Je nʹai plus rien à vous dire, puisque vous avez maintenant votre frère Myionnet qui<br />

vaut bien mieux que toutes les lettres du mon<strong>de</strong>; sa présence près <strong>de</strong> vous répondra, cher<br />

230


ami, à vos sollicitu<strong>de</strong>s et sera pour vous un doux repos 154 .<br />

Dʹun autre côté encore, jʹai <strong>de</strong>s causes <strong>de</strong> consolation à vous offrir. Madame votre<br />

mère mʹest venue voir ce matin, et je lʹai trouvée bien plus calme et bien mieux disposée<br />

que je ne lʹavais pensé. Ainsi que je lʹavais pressenti, lʹirritation quʹon avait dʹabord mani‐<br />

festée dans votre maison était inspirée par le <strong>de</strong>hors; encore un peu <strong>de</strong> votre temps et tout<br />

reviendra à son point naturel. Lʹannonce que vous auriez le titre <strong>de</strong> sous‐Directeur <strong>de</strong> la<br />

Maison <strong>de</strong> patronage <strong>avec</strong> un traitement modique, mais fixe et indépendant, a produit sur<br />

lʹesprit <strong>de</strong> votre bonne mère un effet merveilleux; cʹétait là, il paraît, lʹépine la plus doulou‐<br />

reuse; la pensée que son enfant serait à lʹégard <strong>de</strong>s autres en état dʹinfériorité lui était in‐<br />

supportable; puisquʹil ne <strong>de</strong>vra rien à personne et tirera tout <strong>de</strong> son travail, elle se résigne‐<br />

ra. Telles étaient ses dispositions en me quittant, cher ami; mais on ne saurait penser que<br />

ce sera là le <strong>de</strong>rnier mot; son inspiration propre est en ce sens, mais les autres la poussent<br />

dʹun côté différent. Toutefois les autres, moins intéressés, cé<strong>de</strong>ront bientôt et se lasseront;<br />

lʹaffection seule <strong>de</strong> votre mère et <strong>de</strong> votre frère restera ferme et prévaudra. Madame votre<br />

mère vous a écrit ces jours <strong>de</strong>rniers une petite lettre, presquʹà lʹinsu <strong>de</strong>s autres et quʹelle<br />

me dit être bienveillante, je pense que vous lʹaurez reçue; elle était adressée à Duclair, mais<br />

jʹavais donné en partant votre adresse au facteur <strong>de</strong> la poste pour que vos lettres vous fus‐<br />

sent renvoyées à Chartres; je pense que celle dont il sʹagit vous sera parvenue.<br />

Madame Maignen mʹa dit que ce matin un employé <strong>de</strong> votre Ministère lʹétait venu<br />

voir pour lui dire quʹon désirait avoir <strong>de</strong>s pièces que vous <strong>de</strong>viez remettre pour le travail;<br />

elle pense que vous <strong>de</strong>vriez vous mettre en mesure <strong>de</strong> les fournir bientôt. Jʹai vu dans les<br />

détails quʹelle mʹa donnés à ce sujet (et qui ne sont peut‐être en réalité que le prétexte <strong>de</strong> la<br />

visite quʹelle voulait faire à M. Myionnet ou à moi aujourdʹhui), jʹai vu quʹelle nʹavait pas<br />

perdu entièrement lʹespoir que, par un retour dʹidées, vous ne voulussiez reprendre votre<br />

position dans lʹadministration.<br />

Si vous aviez effectivement besoin <strong>de</strong> remettre ces pièces, ne pourriez‐vous envoyer<br />

votre clef à votre vieil ami du bureau (je ne sais pas son nom), en le priant, <strong>de</strong> confiance,<br />

<strong>de</strong> faire dʹabord un lot <strong>de</strong> tous les papiers qui vous sont personnels et <strong>de</strong> livrer le reste à<br />

vos collègues?<br />

Vous avez dû recevoir hier samedi une lettre <strong>de</strong> moi qui vous aura un peu consolé,<br />

cher enfant, et vous aura montré que vous étiez trop prompt à douter <strong>de</strong> notre tendre atta‐<br />

chement. Dimanche <strong>de</strong>rnier 13, je vous ai écrit, étant encore à Duclair, une longue lettre<br />

qui a dû vous parvenir mardi 15; vous semblez nʹavoir pas reçu cette lettre du 13, diman‐<br />

che, <strong>de</strong>vant arriver le mardi 15; tirez‐moi <strong>de</strong> peine à ce sujet. Datez vos lettres, vous le fai‐<br />

tes rarement, cher ami, la <strong>de</strong>rnière était dans une enveloppe non cachetée. Arrivé ici le<br />

mercredi au soir, jʹai vu jeudi MM. Beaussier et Myionnet pour conférer <strong>avec</strong> eux, et le<br />

len<strong>de</strong>main vendredi, sans plus attendre, je vous ai <strong>de</strong> nouveau écrit une interminable épî‐<br />

tre. Après ces longues lettres, je fais chaque fois une petite maladie, parce quʹelles excè<strong>de</strong>nt<br />

mes forces et me tiennent trop longtemps occupé; je ne vous en écris pas moins parce que,<br />

faible presque autant que vous, je ne résiste pas à la pensée que vous êtes inquiet et tour‐<br />

menté. Ne vous plaignez plus, mon cher enfant, vous nʹavez nulle raison <strong>de</strong> le faire, je<br />

vous aime aussi tendrement que vous le pouvez désirer et je lʹexprime peut‐être plus fort<br />

que les circonstances ne le voudraient. Il nʹy a pas seulement en moi, dans la situation où<br />

154 M. Myionnet partira rejoindre M. Maignen à Chartres, soit le lundi 21, soit le len<strong>de</strong>main, mardi 22. De là, les <strong>de</strong>ux frères prendront<br />

la route pour la Gran<strong>de</strong> Trappe, en Normandie, où ils resteront pour huit jours <strong>de</strong> retraite.<br />

231


nous sommes, lʹami qui vous affectionne, comme vous le savez bien, il y a aussi lʹhomme<br />

qui sʹest associé <strong>avec</strong> M. Myionnet pour vivre en commun et faire le bien <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong><br />

lui. Or, cet homme, dans le cas présent, <strong>de</strong>vait respecter votre indépendance, sʹabstenir <strong>de</strong><br />

tout conseil, et vous laisser prendre votre parti en toute liberté. Il a joué le moins mal pos‐<br />

sible son rôle, mais, pour peu que vous y ayez regardé, lʹami, le frère, le père se montrait<br />

partout; détestez, si vous voulez, lʹhomme <strong>de</strong> la rue du Regard, mais aimez, comme il y a<br />

droit, le vieil et fidèle ami.<br />

Adieu, cher enfant, vous comprenez combien il mʹen coûte <strong>de</strong> rester seul dans cette<br />

maison et <strong>de</strong> ne pas vous aller embrasser <strong>avec</strong> le f. Myionnet, je serai <strong>avec</strong> vous <strong>de</strong>ux cons‐<br />

tamment; vous, pour qui sera la consolation, faites‐moi une petite part dans votre tendre<br />

souvenir, priez pour moi surtout; en priant, on se souvient, et, pour quʹils soient plus du‐<br />

rables, on confie à Dieu ses souvenirs. Dites aussi quelques douces choses pour moi à N.D.<br />

<strong>de</strong> Chartres; jʹai bien souvent souhaité dʹaller lʹinvoquer dans ce lieu béni; jʹirai peut‐être<br />

avant dʹaller dans le temple plus magnifique encore où ceux qui lʹaiment ici‐bas doivent<br />

un jour lʹaimer encore et toujours.<br />

Votre vieil ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Jʹavais été voir <strong>de</strong>rnièrement M. lʹabbé Ozanam 155 ,<br />

maintenant Directeur du Moyen Collège à Stanislas, pour lui<br />

recomman<strong>de</strong>r votre frère; il vient <strong>de</strong> mʹécrire quʹil espère le<br />

faire entrer dans lʹétablissement (je ne sais à quel titre) et me<br />

prie <strong>de</strong> le lui envoyer <strong>de</strong>main. Je ne puis paraître<br />

ostensiblement ici, je vais voir si M. Richardière peut prendre<br />

la chose sur lui. Adieu ami.<br />

Que ce magnifique titre <strong>de</strong> sous‐Directeur ne vous<br />

trouble pas l’esprit. C’est un arrangement amiable que M.<br />

Myionnet répond <strong>de</strong> régler <strong>avec</strong> M. Bourlez et qui ne diminue<br />

en rien le mérite <strong>de</strong> votre dévouement ainsi que vous le fera<br />

comprendre M. Myionnet.<br />

166 à MM. Maignen et Myionnet 156<br />

MLP. espère que leur retraite spirituelle les fera croître dans lʹesprit religieux. Suites <strong>de</strong> la démission <strong>de</strong> Maurice<br />

Maignen <strong>de</strong> son emploi au Ministère <strong>de</strong> la Guerre.<br />

Paris, 25 septembre 1846<br />

Chers amis,<br />

Je me réjouis beaucoup dans cette pensée quʹà lʹheure où je vous écris vous êtes<br />

dans un lieu saint où tout édifie, porte au recueillement et ramène le cœur et lʹesprit vers<br />

leur divine fin; notre f. Myionnet trouvera là un peu <strong>de</strong> ce doux repos dont il était si fort<br />

altéré, et lʹautre jeune frère un peu <strong>de</strong> ce calme salutaire que <strong>de</strong> trop vives émotions lui ont<br />

rendu si nécessaire; puissiez‐vous, très chers frères, en vous plongeant bien profondément<br />

155 Charles-Alphonse Ozanam (1804-1888), frère aîné <strong>de</strong> Frédéric, docteur en mé<strong>de</strong>cine et ordonné prêtre en 1831, comme son autre<br />

frère Charles. Depuis la rentrée scolaire <strong>de</strong> 1846, il était préfet du moyen collège à Stanislas. Il sera ensuite vicaire à St-Merry<br />

et à St-Germain-<strong>de</strong>s-Prés.<br />

156 Adressée à: M. Clément Myionnet, à la Trappe, près Mortagne (Orne).<br />

232


en Dieu, goûter le rafraîchissement et la paix dont vous avez également besoin. Jʹose espé‐<br />

rer quʹen vous communiquant <strong>avec</strong> abondance tous les dons quʹIl réserve à la retraite, Il<br />

daignera gar<strong>de</strong>r une petite part pour le frère que vous avez laissé <strong>de</strong>rrière vous; à votre re‐<br />

tour, vous répandrez autour <strong>de</strong> vous le parfum <strong>de</strong> sainteté quʹon respire là où vous êtes et<br />

vous me transmettrez ce que vous aurez reçu; vous tempérerez nos habitu<strong>de</strong>s trop exté‐<br />

rieures et trop mouvantes par les retours intérieurs et la sainte présence <strong>de</strong> notre Dieu; en‐<br />

fin, chers frères, vous rapporterez pour vous et pour moi les grands principes, les saintes<br />

traditions <strong>de</strong> la vie religieuse, lʹesprit, en un mot, qui nous séparera du mon<strong>de</strong> et nous<br />

fon<strong>de</strong>ra dans lʹétat si haut auquel nous osons aspirer.<br />

Je mʹefforce, <strong>de</strong> mon côté, <strong>de</strong> me recueillir, autant que le permettent mes occupa‐<br />

tions, et je médite <strong>de</strong> mon mieux les obligations <strong>de</strong> notre nouvelle condition. Je suis <strong>avec</strong><br />

un vif intérêt la retraite du p. Bourdaloue, que le f. Myionnet a lue et étudiée lui‐même; je<br />

tâcherai, <strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> du Seigneur, dʹen retirer quelque fruit.<br />

Il ne sʹest rien passé qui mérite votre attention au siège <strong>de</strong> notre petite Communau‐<br />

té.<br />

M. Nimier est allé hier au dépôt <strong>de</strong> la Guerre <strong>avec</strong> la clef du f. Maignen et la petite<br />

lettre pour M. <strong>de</strong> Glaizal. Celui‐ci a déclaré quʹil nʹavait besoin dʹaucune pièce, que le bu‐<br />

reau avait toutes celles qui lui étaient nécessaires et que M. Frosté étant venu pour diriger<br />

le travail, la présence au Ministère <strong>de</strong> M. Maignen ne serait pas nécessaire comme on<br />

lʹavait présumé dʹabord. Le Général Pelet, auquel on a cru <strong>de</strong>voir <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r permission<br />

d’enlever les quelques papiers qui pouvaient appartenir à notre cher frère, a répondu quʹil<br />

nʹy mettrait pas obstacle, mais quʹil jugeait à propos que M. Maignen lui en fît directement<br />

la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>. Une lettre rédigée par ordre du Général, dans le premier moment qui a suivi<br />

la démission définitive <strong>de</strong> notre cher frère, et qui était restée dans les bureaux, faute dʹin‐<br />

dication pour la faire parvenir, a été remise à M. Nimier. Je ne la joins pas ici, à cause <strong>de</strong> sa<br />

forme administrative qui en rend le volume un peu trop lourd, mais il sera facile à notre<br />

ami dʹen comprendre le sens, dʹaprès quelques mots que jʹénoncerai ici. Elle est assez ru<strong>de</strong>,<br />

ainsi quʹil sʹy était attendu. Le Général se montre surtout mécontent du brusque départ <strong>de</strong><br />

M. Maignen, et plus mal satisfait encore quʹil ait paru tant désirer un emploi quʹil avait ré‐<br />

solu <strong>de</strong>puis longtemps <strong>de</strong> quitter; il <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à quoi bon alors tant <strong>de</strong> démarches et dʹins‐<br />

tances, puisque le résultat <strong>de</strong>vait durer si peu; il voit là une sorte <strong>de</strong> déloyauté et invite son<br />

employé à reparaître au plus tôt dans ses bureaux, sʹil veut lui prouver quʹil nʹa pas oublié<br />

les sentiments dʹhonneur et <strong>de</strong> probité. Ce <strong>de</strong>rnier mot, dʹune exagération évi<strong>de</strong>nte, a fait<br />

sourire un peu le bureau, a‐t‐on dit à M. Nimier. Du reste, le Général, en traitant <strong>de</strong> fou<br />

notre jeune frère, nʹavait pas paru mécontent <strong>de</strong> la première partie <strong>de</strong> sa lettre, mais il a<br />

montré <strong>de</strong> lʹirritation, à ce mot: détermination <strong>de</strong>puis longtemps arrêtée, et cʹest sous cette<br />

inspiration quʹa été dictée sa lettre. Il serait facile <strong>de</strong> faire remarquer au Général que le dé‐<br />

part <strong>de</strong> M. Maignen a été brusque, parce quʹil ne pouvait en aucun cas sʹopérer autrement;<br />

à son âge, on ne combine pas à froid une séparation <strong>de</strong> tous ceux que lʹon aime, un brise‐<br />

ment <strong>de</strong> tous ses liens <strong>de</strong> cœur; dans un moment où lʹon se sent fort, on quitte tout, sa‐<br />

chant bien que le moment dʹaprès on nʹaurait plus assez dʹélan. Il ne sʹen suivait pas non<br />

plus <strong>de</strong> la détermination intimement arrêtée dans la pensée <strong>de</strong> notre ami qu’il dût <strong>de</strong>meu‐<br />

rer constamment dans une position précaire et pleine dʹincertitu<strong>de</strong>; <strong>de</strong>puis trois ans, il était<br />

décidé à se donner à Dieu, sans que les circonstances lui eussent permis <strong>de</strong> suivre sa voca‐<br />

tion; trois autres années pouvaient se passer dans la même attente; fallait‐il donc quʹil <strong>de</strong>‐<br />

233


meurât inactif, sans rien faire pour assurer sa subsistance et pour suivre sa carrière? Enfin<br />

il ne saurait y avoir improbité ni défaut dʹhonneur à quitter un <strong>de</strong>voir pour un autre quʹon<br />

juge plus impérieux, quand dʹailleurs on ne compromet ni lʹexistence, ni les intérêts <strong>de</strong> qui<br />

que ce soit. Peut‐être notre cher frère jugera‐t‐il à propos <strong>de</strong> répondre un peu dans ce sens<br />

au Général, en y mettant toute la déférence et toute la mesure que ses obligations envers<br />

son chef lui imposent, mais en montrant aussi le calme et lʹassurance qui conviennent à ses<br />

sentiments. Il saura, mieux que tout autre dʹailleurs, en quels termes il doit répondre,<br />

puisque nul ne connaît aussi bien la nature <strong>de</strong> ses rapports <strong>avec</strong> son chef et le langage quʹil<br />

peut prendre <strong>avec</strong> lui. Une chose qu’il est essentiel que notre cher frère sache, cʹest quʹà la<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> sa mère, son remplacement a été jusquʹici suspendu et quʹil serait probable‐<br />

ment encore libre, à lʹheure quʹil est, <strong>de</strong> reprendre son emploi. Rien ne me donne lieu <strong>de</strong><br />

croire quʹil en puisse être ainsi, mais si, contre mon attente, le sérieux examen quʹil va faire<br />

<strong>de</strong> lui‐même <strong>de</strong>vant Dieu, durant sa retraite, changeait sa résolution, il aurait les moyens<br />

<strong>de</strong> rentrer dans sa première condition.<br />

Jʹhésitais à jeter ces pensées humaines au milieu du recueillement que vous établis‐<br />

sez dans vos âmes, chers amis, mais quelques‐uns <strong>de</strong>s faits rapportés ici, le <strong>de</strong>rnier en par‐<br />

ticulier, doivent peut‐être entrer dans la balance <strong>de</strong>s sentiments <strong>de</strong> notre jeune frère; le f.<br />

Myionnet, sous lʹadresse <strong>de</strong> qui je mets cette lettre, jugera si elle doit être lue en tout ou en<br />

partie seulement au f. Maignen durant les jours <strong>de</strong> la retraite. Un ajournement jusquʹà sa<br />

conclusion nʹaurait, je pense, quʹun mince inconvénient, le Général partant <strong>de</strong>main pour<br />

lʹItalie, où on ne lui enverra, sans doute, ses correspondances quʹà <strong>de</strong> certains intervalles. Il<br />

sera bon que notre jeune frère ne néglige point le recouvrement <strong>de</strong>s quelques papiers qui<br />

lui appartiennent. Tous ses anciens camara<strong>de</strong>s <strong>de</strong> bureau lʹassurent <strong>de</strong> leurs amitiés.<br />

Jʹespère que le f. Myionnet, qui ne mʹa point écrit, mʹadressera une lettre après la re‐<br />

traite. Je me recomman<strong>de</strong> bien instamment à ses prières et à celles <strong>de</strong> mon cher jeune ami;<br />

je me tiendrai aussi près dʹeux quʹil me sera possible dans les divins Cœurs <strong>de</strong> J. et M.<br />

Je vous embrasse bien tendrement lʹun et lʹautre, très chers amis, et suis<br />

Votre affectionné frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

167 à M. Levassor<br />

Remerciements pour lʹhospitalité donnée au jeune Maignen. Incertitu<strong>de</strong> quant au futur logement <strong>de</strong> la petite<br />

Communauté, qui est dans ʺla main <strong>de</strong> Dieuʺ.<br />

Paris, 8 octobre 1846<br />

Mon bien cher frère,<br />

Comment vous remercier assez <strong>de</strong> lʹaimable accueil que notre jeune frère a reçu<br />

dans votre maison; si vous eussiez été présent, rien <strong>de</strong> mieux, je sais jusquʹà quel point<br />

vous êtes dévoué pour vos amis et pour votre frère indigne en particulier, je nʹeusse trouvé<br />

rien que dʹattendu dans votre généreuse hospitalité. Mais quʹen votre absence lʹexcellent<br />

M. Mayer ait pu présumer assez <strong>de</strong> votre bonté pour recevoir notre ami, le traiter en frère<br />

et se faire votre remplaçant près <strong>de</strong> lui, cʹest là ce qui me charme, cher ami, et accroît, sʹil se<br />

peut, ma tendre affection pour vous. Une pareille confiance, en effet, montre tout ce quʹil y<br />

a en vous <strong>de</strong> vraie charité, et combien ceux qui vous entourent savent lʹapprécier. Notre<br />

jeune f. Maignen, dont M. Mayer vous aura dit, je pense, un peu <strong>de</strong> bien, est très touché,<br />

234


<strong>de</strong> son côté, <strong>de</strong>s témoignages <strong>de</strong> bienveillance quʹil a reçus chez vous et aussi <strong>de</strong> la part <strong>de</strong><br />

votre famille; il veut exprimer lui‐même sa sincère gratitu<strong>de</strong>.<br />

Les difficultés que rencontrait la vocation <strong>de</strong> notre ami se sont aplanies; sa famille,<br />

voyant sa ferme détermination, a fini par accepter le fait consommé. Il est déjà en plein<br />

exercice <strong>de</strong> ses fonctions dans lʹœuvre du Patronage où il secon<strong>de</strong> lʹexcellent M. Myionnet.<br />

Jʹespère que le bon Dieu que vous prierez pour nous, jʹen suis assuré, bénira notre petite<br />

famille naissante et maintiendra parmi nous lʹunion et la sainte charité.<br />

Nous aurons grand plaisir, cher frère, quand vous viendrez ici, à vous voir au mi‐<br />

lieu <strong>de</strong> nous et nous tâcherons, à notre tour, <strong>de</strong> vous accueillir autant bien que nous pour‐<br />

rons. Jusquʹici, nous sommes campés plutôt quʹinstallés dans la maison où nous nous<br />

trouvons; elle doit nous rester pour <strong>de</strong>ux mois à peine et nous nʹosons y rien disposer; à<br />

lʹheure quʹil est, nous ignorons encore où nous irons; le patronage nʹa pas <strong>de</strong> local en vue;<br />

aurons‐nous un asile près du siège <strong>de</strong> lʹœuvre ou nous en tiendrons‐nous séparés, nous<br />

nʹen savons absolument rien; cette incertitu<strong>de</strong> est singulière, mais elle convient bien aux<br />

œuvres qui sont dans la main <strong>de</strong> Dieu.<br />

Adieu, très cher frère, je recomman<strong>de</strong> notre petite Communauté à vos bonnes et<br />

ferventes prières, vous <strong>de</strong>mandant, à titre <strong>de</strong> vieil ami, un souvenir particulier pour<br />

Votre frère dévoué en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

16, rue du Regard<br />

Mille affections dévoués au bon M. Mayer.<br />

168 à M. Levassor<br />

Démarches pour un prédicateur. Traits <strong>de</strong> caractère <strong>de</strong> MLP.<br />

Paris, 30 octobre 1846<br />

Très cher ami et frère,<br />

Je nʹavais pas perdu <strong>de</strong> vue lʹintéressante mission que vous mʹaviez donnée et<br />

jʹavais déjà fait quelques démarches qui nʹavaient point eu <strong>de</strong> succès. Il paraît, dʹun autre<br />

côté, que M. Dupanloup nʹest pas encore à Paris. jʹai vu aujourdʹhui les Pères Jésuites et je<br />

leur ai <strong>de</strong>mandé pour vous le p. Lefebvre ou le p. Humphry; ni lʹun ni lʹautre ne sont libres<br />

immédiatement. Mais le p. Guidée, Supérieur, à qui je me suis adressé, mʹa fort conseillé<br />

<strong>de</strong> vous indiquer le p. Chervotz <strong>de</strong> la même Congrégation, qui vient dʹarriver à Chartres<br />

pour y prêcher lʹAvent et dont il assure que vous seriez infiniment satisfait. Il a ajouté que<br />

si, contre son attente, ce Père ne pouvait prêcher pour vous, il ferait en sorte <strong>de</strong> répondre à<br />

votre désir <strong>de</strong> quelque autre façon, si vous vouliez bien mʹavertir immédiatement.<br />

Soyez assuré, cher ami, que je ne mettrai aucun retard à mʹoccuper <strong>de</strong> cette affaire,<br />

trop heureux <strong>de</strong> concourir aux travaux <strong>de</strong> nos Confrères <strong>de</strong> Chartres et aux vôtres en par‐<br />

ticulier qui mʹintéressent, vous le savez, au plus haut <strong>de</strong>gré.<br />

Notre petite Communauté vous offre ses bons et tendres souvenirs ainsi quʹau cher<br />

f. Mayer. Assurez‐le tout spécialement <strong>de</strong> ma tendre charité et dites‐lui que jʹapprécie son<br />

zèle, son dévouement et ses excellentes qualités; jʹespère quʹen me connaissant mieux il<br />

mʹaimera sans me craindre; mon flegme normand contraste un peu <strong>avec</strong> lʹexpansion méri‐<br />

235


dionale, mais la divine charité du Seigneur confond toutes ces petites nuances en nous ré‐<br />

unissant dans un même cœur et dans un même esprit.<br />

Priez pour nous, bien chers amis, et croyez quʹici nos vœux les plus sincères sʹoffri‐<br />

ront aussi à Dieu pour vous.<br />

Votre dévoué frère et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

169 à M. Demuison<br />

Appel à venir ai<strong>de</strong>r la chorale <strong>de</strong> la Sainte‐Famille.<br />

Paris, 19 décembre 1846<br />

Mon bien cher Confrère,<br />

Je voulais vous aller voir aujourdʹhui pour vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r un peu dʹai<strong>de</strong> en faveur<br />

<strong>de</strong> notre musique <strong>de</strong> la Sainte‐Famille, qui est en ce moment fort amaigrie et qui, pour le<br />

jour <strong>de</strong> Noël surtout, a un besoin absolu dʹêtre réconfortée. Nous sommes en particulier<br />

très dépourvus <strong>de</strong> voix soprano et <strong>de</strong> ténor. Ce que jʹattendrais, cher Confrère, <strong>de</strong> votre<br />

charité déjà si bien éprouvée, ce serait <strong>de</strong> venir vous‐même, sʹil se peut, mercredi prochain,<br />

7h.½ ou 8h. moins ¼ rue du Regard,16, pour une petite répétition <strong>de</strong> nos chants, et dʹame‐<br />

ner <strong>avec</strong> vous ou <strong>de</strong> convoquer les voix dʹenfants ou autres dont vous pouvez disposer.<br />

La messe du jour <strong>de</strong> Noël sera dite à 9h. du matin, au local accoutumé.<br />

Je sais comme vous êtes heureux, cher Confrère, <strong>de</strong> concourir à tout ce qui intéresse<br />

la gloire <strong>de</strong> Dieu et la consolation <strong>de</strong>s pauvres; je mʹabandonne donc à votre bonne volonté<br />

sans insister davantage, bien sûr que tout ce que vous pourrez faire pour nous nous sera<br />

généreusement accordé.<br />

Croyez, cher Confrère, à tous mes sentiments les plus dévoués.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

170 à M. Levassor<br />

Démarches pour un jeune protégé <strong>de</strong> M. Levassor.<br />

Paris, 21 janvier 1847<br />

Mon bien cher ami,<br />

Jʹai accueilli <strong>de</strong> mon mieux M. Dujouquoy et son fils, votre cher élève; jʹai fait im‐<br />

médiatement <strong>avec</strong> mes <strong>de</strong>ux bons frères toutes les démarches possibles pour placer lʹen‐<br />

fant et rassurer le bon père qui se désolait <strong>de</strong> ne pas réussir dès le premier moment. La So‐<br />

ciété <strong>de</strong> Saint‐François‐Xavier, en effet, à qui nous nous sommes adressés dʹabord et plu‐<br />

sieurs maîtres auxquels nous avons offert notre jeune homme nʹont pu nous procurer une<br />

place qui lui convienne. Il est assez difficile à caser, parce que son père voudrait quʹil pût<br />

gagner, outre sa nourriture et son logement, <strong>de</strong> quoi pourvoir à son entretien.<br />

La chose paraissant <strong>de</strong>voir <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r quelques jours <strong>de</strong> recherches, jʹai offert à M.<br />

Dujouquoy <strong>de</strong> donner à son fils un asile momentané dans notre maison; mais lʹenfant a<br />

paru si ému <strong>de</strong> cette pensée <strong>de</strong> <strong>de</strong>meurer inoccupé et dans lʹennui <strong>de</strong> lʹisolement pendant<br />

ces quelques jours que le père se déci<strong>de</strong> à le ramener à Chartres, jusquʹà ce que nous puis‐<br />

sions lui indiquer quelque position qui convienne à son fils.<br />

236


Sʹil est impossible <strong>de</strong> trouver son entretien pour la première année, ne pourrez‐vous<br />

à Chartres lʹai<strong>de</strong>r un peu?<br />

Adieu, cher ami, je vous écris, comme vous le voyez, bien en hâte, M. Dujouquoy<br />

voulant partir à midi.<br />

Adieu, embrassez pour nous tous le bon M. Mayer.<br />

A vous pour la vie en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

171 à M. Levassor<br />

Démarches infructueuses pour placer le jeune protégé <strong>de</strong> son ami. Encouragements à implanter les œuvres à<br />

Chartres.<br />

Paris, le 7 février 1847<br />

Bien cher ami,<br />

La lettre ci‐jointe vous rendra compte <strong>de</strong>s démarches multipliées que nous avons<br />

faites constamment tous les trois pour placer votre cher enfant. Jʹai vu, pour ma part, et en‐<br />

tretenu tous ceux que je croyais propres à nous être utiles pour cette fin, mais on me ré‐<br />

pond que dans ce temps <strong>de</strong> morte saison, on a peu <strong>de</strong> chance <strong>de</strong> réussir, que cʹest seule‐<br />

ment vers la fin <strong>de</strong> mars que la chapellerie reprend son activité pour les fournitures dʹété.<br />

M. Ledreuille nous a promis en <strong>de</strong>rnier lieu <strong>de</strong> mettre tous ses facteurs sur pied, afin <strong>de</strong><br />

découvrir quelque chose; sʹils y parviennent et que la condition puisse convenir à vos<br />

vues, soyez bien assuré, cher frère, que nous ne mettrons aucun retard à vous en informer.<br />

Nous marchons toujours paisiblement ici et jʹespère que la grâce du Seigneur est<br />

<strong>avec</strong> nous; priez‐Le souvent, bien cher ami, pour quʹIl daigne bénir nos humbles travaux et<br />

nous remplir toujours <strong>de</strong> son divin Esprit. Nous sommes unis <strong>de</strong> coeur à tous vos efforts,<br />

et nous souhaitons ar<strong>de</strong>mment quʹ<strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> notre cher f. Mayer vous parveniez à im‐<br />

planter, à lʹombre <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Chartres, quelques bonnes et pieuses institutions.<br />

Je vous embrasse, cher ami, ainsi que le cher f. Mayer, et suis <strong>avec</strong> vous en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

172 à M. Baudon157 Rapport sur les activités <strong>de</strong> la Conférence St‐Sulpice.<br />

Paris, le 19 février 1847<br />

Mon bien cher Confrère,<br />

Je vous envoie les notes que vous mʹavez<br />

<strong>de</strong>mandées sur les travaux <strong>de</strong> notre Conférence. Si<br />

elles ne renfermaient pas tous les renseignements qui<br />

vous seraient nécessaires, je mʹempresserai <strong>de</strong> vous<br />

les communiquer aussitôt que vous voudrez bien me<br />

157 Adolphe Baudon (1819-1888), vice-prési<strong>de</strong>nt puis 3 e prési<strong>de</strong>nt général <strong>de</strong>s Conférences <strong>de</strong> St-Vt-<strong>de</strong>-Paul, le 14 février 1848, en<br />

remplacement <strong>de</strong> Jules Gossin. Il restera à la tête <strong>de</strong> la Société jusqu'en 1886. Un malentendu surgira entre lui et la Congrégation à<br />

propos <strong>de</strong>s Œuvres <strong>de</strong> Nazareth et <strong>de</strong> Grenelle. Le 19 février 1861, une messe célébrée par MLP. (prêtre en 1860) au pied <strong>de</strong> la<br />

châsse <strong>de</strong> saint Vincent, ainsi qu'une rencontre chez M. Baudon lui-même, contribueront à dénouer la crise "dans un esprit <strong>de</strong><br />

conciliation et <strong>de</strong> charité".<br />

237


le faire savoir.<br />

Recevez, cher Confrère, la nouvelle expression <strong>de</strong> tous mes sentiments affectueux et<br />

dévoués.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

173 à M. Levassor<br />

Placement dʹun jeune apprenti: difficultés à cause du travail du dimanche. MLP. et ses frères ne ménagent pas<br />

leur peine pour effectuer les démarches <strong>de</strong>mandées.<br />

Paris, 27 mars 1847<br />

Mon bien cher frère,<br />

Jʹai enfin lʹespoir fondé <strong>de</strong> placer votre protégé et, sʹil peut arriver ici bientôt, je crois<br />

quʹil trouvera à se caser. La partie nʹest pas favorable ici pour ceux qui, comme le jeune<br />

Dujouquoy, ont été élevés chrétiennement et désirent remplir leurs premiers <strong>de</strong>voirs. Par‐<br />

tout, la simple condition dʹavoir une <strong>de</strong>mi‐heure le dimanche matin pour aller à la Sainte<br />

Messe faisait une difficulté grave, parce que tous les chapeliers ont lʹhabitu<strong>de</strong> dʹouvrir<br />

leurs magasins dès 6h. du matin et <strong>de</strong> vendre jusquʹà 6h. du soir.<br />

Nous avons enfin obtenu cette précieuse <strong>de</strong>mi‐heure, mais rien <strong>de</strong> plus. Cʹest une<br />

chose grave sans doute et que vous aurez, cher ami, à examiner.<br />

Vous avez trouvé sans doute que nous tardions beaucoup à vous indiquer les<br />

moyens <strong>de</strong> placer votre cher enfant, mais je vous assure, cher frère, que nos recherches et<br />

démarches ont été actives et incessantes, que tous les trois nous étions en quête <strong>de</strong>s occa‐<br />

sions, et que moi‐même jʹai couru tous les magasins où je pouvais espérer <strong>de</strong> rencontrer<br />

une place. Nous avons trop à cœur, cher ami, <strong>de</strong> vous témoigner notre bonne volonté pour<br />

rien négliger, et vous savez trop aussi ma tendre sympathie pour vos œuvres pour en<br />

avoir pu douter.<br />

Faites nos bien affectueux compliments à votre bon petit f. Mayer et croyez vous‐<br />

même, cher ami, à notre cordial dévouement.<br />

Votre affectionné frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

174 à M. Decaux158 Lʹesprit <strong>de</strong> saint Vincent <strong>de</strong> Paul pousse les différentes Œuvres à<br />

sʹentrai<strong>de</strong>r.<br />

Paris, 29 mars 1847<br />

Mon bien cher Confrère,<br />

Le don <strong>de</strong> 150f que la Conférence St‐Stanislas a bien<br />

voulu faire à notre Sainte‐Famille, a été accueilli par nous <strong>avec</strong><br />

une vive reconnaissance et comme secours très utile pour lʹal‐<br />

lègement <strong>de</strong> nos charges, et surtout comme témoignage dʹin‐<br />

térêt et <strong>de</strong> confraternité bienveillante <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> nos chers<br />

amis. Cette union <strong>de</strong> nos Conférences dans une œuvre com‐<br />

158 Confrère <strong>de</strong> St-Vt-<strong>de</strong>-Paul, ami intime <strong>de</strong> la Communauté. Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>s Patronages <strong>de</strong> la Société, Paul Decaux entretiendra une<br />

abondante correspondance <strong>avec</strong> M. Maignen et MLP; (cent lettres adressées à celui-ci);<br />

238


mune nʹest pas le moindre avantage <strong>de</strong> notre entreprise et nʹest pas non plus la moins<br />

douce <strong>de</strong> nos consolations.<br />

Nous avons pris à cœur <strong>de</strong> traiter vos pauvres gens en toute occasion <strong>avec</strong> le même<br />

zèle et la même affection que ceux dont nous sommes nous‐mêmes chargés, et vous, <strong>de</strong><br />

votre côté, en toute circonstance, vous avez prêté à nos efforts votre concours et votre gé‐<br />

néreuse assistance.<br />

Permettez‐moi <strong>de</strong> remarquer, cher Confrère, que nul nʹa mieux compris que vous<br />

combien cette association <strong>de</strong> nos travaux est charitable et bonne, et nʹa contribué plus effi‐<br />

cacement à lʹétablir.<br />

Je vous en ai, cher Confrère, une reconnaissance toute personnelle, et je veux en par‐<br />

ticulier gar<strong>de</strong>r votre bonne et aimable lettre comme témoignage <strong>de</strong> lʹexcellent esprit que<br />

saint Vincent <strong>de</strong> Paul fait régner parmi nous.<br />

Veuillez croire, mon bien cher Confrère, aux sentiments <strong>de</strong> cordiale affection <strong>de</strong><br />

Votre tout dévoué Confrère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

175 à M. Maignen<br />

MLP. cherche à prévenir toute occasion <strong>de</strong> froissement. Situation <strong>de</strong> la Congrégation naissante.<br />

14 avril [1847]<br />

Vous sembliez hier soir, cher ami, vouloir me dire quelque chose que vous ne<br />

mʹavez pas dit; prenez confiance, je vous en prie, et parlez‐ moi <strong>avec</strong> lʹabandon que jʹai<br />

droit dʹattendre <strong>de</strong> vous. Sʹil est quelque chose dans ma conduite qui vous paraisse mau‐<br />

vais, dites‐le moi en toute simplicité, jʹexaminerai <strong>de</strong>vant Dieu ce qui peut être à faire et je<br />

corrigerai s’il y a lieu ce qui peut être répréhensible.<br />

Le moment ne peut être loin maintenant où nous aurons à régler notre situation, jʹai<br />

besoin <strong>de</strong> connaître votre pensée tout entière; écrivez‐la moi si vous ne trouvez pas lʹinspi‐<br />

ration <strong>de</strong> me la dire <strong>de</strong> vive voix. Croyez que jʹen tiendrai bon compte; je désire le bien <strong>de</strong><br />

notre petite œuvre, je ne voudrais causer <strong>de</strong> tort ni <strong>de</strong> peine à personne, à vous surtout,<br />

tous les sacrifices que je croirai possibles, je les ferai à lʹintérêt commun et pour la gloire <strong>de</strong><br />

Dieu avant tout, puisque nous <strong>de</strong>vons la chercher uniquement.<br />

Priez un peu avant <strong>de</strong> me répondre.<br />

A vous en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

175‐1 à M. Baudon<br />

Statistiques <strong>de</strong> la Conférence St‐Sulpice.<br />

Paris, 25 mai 1847<br />

Mon bien cher Confrère,<br />

Le secrétaire <strong>de</strong> la Conférence St‐Sulpice fera remettre au plus tôt au Secrétariat gé‐<br />

néral la liste <strong>de</strong>s membres admis <strong>de</strong>puis lʹépoque indiquée par vous.<br />

La Conférence, en 1846, se composait <strong>de</strong> 150 membres, elle visitait 400 familles.<br />

En 1847, elle compte 140 membres visitant 360 familles.<br />

239


M. Desains ayant bien voulu définitivement se résigner à prendre une vice‐<br />

prési<strong>de</strong>nce, je vous serai très reconnaissant si vous voulez bien mʹécrire un mot pour quʹil<br />

soit présenté, officiellement, à la conférence <strong>avec</strong> son nouveau titre.<br />

Croyez, je vous prie, cher Confrère, à tous mes sentiments bien dévoués.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

176 à M. Levassor<br />

Le jeune Mayer, qui ai<strong>de</strong> M. Levassor, est passé à la Communauté; sa conduite peu obligeante envers elle. MLP.<br />

a obtenu la maison <strong>de</strong> Grenelle, en vue dʹoffrir à sa communauté un havre <strong>de</strong> paix et <strong>de</strong> recueillement . Il sʹavère<br />

impossible pour le jeune apprenti Dujouquoy <strong>de</strong> se libérer le dimanche.<br />

Paris, 11 juin 1847<br />

Très cher frère,<br />

Je nʹai pu répondre à votre bonne et affectueuse lettre par M. Mayer que nous avons<br />

vu un seul instant, je vous écris donc ici par la voie commune et ordinaire.<br />

Nous avons été fort surpris tous les trois <strong>de</strong> la brusque disparition <strong>de</strong> M. Mayer, et<br />

nous sommes encore à cette heure à nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r comment nous avons pu nous attirer<br />

un pareil procédé. Nous lʹavons accueilli cordialement et <strong>avec</strong> une sincère bienveillance,<br />

quoiquʹen regrettant la résolution quʹil paraissait prendre <strong>de</strong> quitter les œuvres <strong>de</strong> charité;<br />

nous nous sommes occupés <strong>avec</strong> une sollicitu<strong>de</strong> réelle <strong>de</strong> ses intérêts et nous nous sommes<br />

offerts <strong>de</strong> nous mettre en quête <strong>de</strong>s emplois qui pourraient lui convenir; je lui ai parlé moi‐<br />

même <strong>avec</strong> un intérêt véritable et quʹil était aisé <strong>de</strong> sentir. Comment donc a‐t‐il pu agir<br />

<strong>avec</strong> nous dʹune façon si peu obligeante? Cʹest un mardi que nous lʹavons vu; après dîner,<br />

je suis monté un instant à ma chambre pour préparer ma conférence <strong>de</strong> St‐Sulpice qui se<br />

tient, vous le savez, ce jour‐là. Pendant ce moment, M. Mayer a disparu sans me voir, sans<br />

me laisser le temps <strong>de</strong> savoir <strong>de</strong> lui où il était <strong>de</strong>scendu et sʹil ne pouvait prendre asile<br />

chez nous; nous ne lʹavons pas revu; est‐il retourné près <strong>de</strong> vous? est‐il resté ici? Nous<br />

lʹignorons.<br />

Cher ami, nous ne gardons aucun mécontentement contre ce jeune homme, mais<br />

nous ne pouvons nous empêcher <strong>de</strong> dire que sa conduite envers nous se peut difficilement<br />

expliquer. Pour lui, dans lequel nous avions cru reconnaître <strong>de</strong> bonnes qualités et qui<br />

sʹétait dʹailleurs montré bienveillant pour notre jeune f. Maignen, pour vous surtout, cher<br />

ami, qui nous tenez <strong>de</strong> si près, nous avions à cœur <strong>de</strong> le traiter fraternellement et je vous<br />

assure que cela était dans notre intention à tous les trois. Ne manquez pas, cher ami, <strong>de</strong><br />

mʹécrire quelques mots pour nous expliquer le procédé <strong>de</strong> M. Mayer et nous assurer dʹail‐<br />

leurs quʹil ne lui est rien arrivé <strong>de</strong> fâcheux. Quels que soient ses motifs, nous lʹexcusons<br />

dʹavance et gardons à son égard une pleine et vraie charité.<br />

Vous nʹapprendrez pas sans intérêt, cher frère, que pour donner à notre petite<br />

Communauté une existence plus libre et aussi un local où elle puisse sʹétablir plus com‐<br />

modément que dans la Maison du Regard, nous avons pris pour nous, à Grenelle, une pe‐<br />

tite maison entière où nous sommes maintenant installés 159 . Nous aurons ainsi un asile où<br />

159 Au mois d'avril 1847, une pieuse laïque vint faire une offre à MLP. Celle qu'on allait surnommer la "Sœur Geray", mettait à la<br />

disposition <strong>de</strong>s Frères une maison sise à Grenelle (rue du Commerce, XV e arrondissement) en plein quartier populaire. Le 1 er mai,<br />

tout est réglé, pour une pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> dix ans, à charge <strong>de</strong> l'utiliser pour "la gloire <strong>de</strong> Dieu et le service <strong>de</strong>s pauvres". L'Institut laissera<br />

son "petit monastère <strong>de</strong> Grenelle" en avril 1857.<br />

240


nous pourrons nous caser et nous recueillir un peu. La distance <strong>de</strong> notre Maison à la rue<br />

du Regard nʹest que <strong>de</strong> 30 minutes environ, nous pouvons donc venir à nos œuvres tous<br />

les jours sans difficultés; tour à tour seulement, nous restons ici au logis pour nous recueil‐<br />

lir un peu et nous éloigner <strong>de</strong> lʹactivité excessive <strong>de</strong> nos travaux.<br />

Un jeune frère se présente pour sʹadjoindre à nous; il semble bon et dans dʹheureu‐<br />

ses dispositions, mais il nʹa pas encore 20 ans; sa famille lui oppose quelques difficultés; je<br />

ne sais sʹil les pourra surmonter.<br />

Je ne me suis pas occupé <strong>avec</strong> suite <strong>de</strong> vous trouver un ai<strong>de</strong> pour vos œuvres, igno‐<br />

rant si M. Mayer est ou non retourné près <strong>de</strong> vous et sʹil doit ou non vous rester; je tiendrai<br />

lʹœil ouvert néanmoins pour le cas où vous seriez obligé <strong>de</strong> le remplacer.<br />

Le jeune Dujouquoy mʹest venu voir dimanche pour la première fois et mʹa promis<br />

<strong>de</strong> me visiter <strong>de</strong> temps à autre; malheureusement, il est retenu toute la journée du diman‐<br />

che, sauf quelques instants le soir et un trop court moment le matin; cʹest une fâcheuse<br />

condition <strong>de</strong> son état.<br />

Adieu, cher ami, écrivez‐moi bientôt, jʹai besoin dʹêtre assuré quʹau milieu <strong>de</strong>s ma‐<br />

lentendus qui peuvent se jeter entre nous, vous gar<strong>de</strong>z foi en notre vieille amitié et comp‐<br />

tez sur mon tendre dévouement, comme je suis moi‐même certain du vôtre.<br />

Votre frère affectionné en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Les ff. Myionnet et Maignen vous assurent <strong>de</strong> leur respectueux attachement.<br />

176‐1 à M. Gossin<br />

Détails sur la toute nouvelle Conférence <strong>de</strong> Grenelle. A une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> dʹadmission, MLP. joint une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

fonds pour ai<strong>de</strong>r la Conférence naissante.<br />

Paris, 31 juillet 1847<br />

Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt,<br />

M. le Marquis <strong>de</strong> Raincourt, notre confrère, a bien voulu mʹassocier aux tentatives<br />

quʹil a faites pour créer au village <strong>de</strong> Grenelle, près Paris, une Conférence <strong>de</strong> St‐Vincent‐<br />

<strong>de</strong>‐Paul et mʹa laissé le soin en partant <strong>de</strong> faire connaître au Conseil général le résultat <strong>de</strong><br />

nos efforts.<br />

La plus gran<strong>de</strong> difficulté à surmonter ici, comme en beaucoup dʹautres lieux, était<br />

<strong>de</strong> réunir quelques éléments pour la composition <strong>de</strong> la Conférence.<br />

Sur quatre hommes en effet, que M. le Curé <strong>de</strong> Grenelle nous avait désignés, après<br />

<strong>de</strong> longues recherches, comme réunissant les qualités essentielles, lʹun refusait obstiné‐<br />

ment <strong>de</strong> nous prêter son concours, <strong>de</strong>ux autres <strong>de</strong>mandaient un ajournement <strong>de</strong> plusieurs<br />

mois, le <strong>de</strong>rnier enfin partait pour un voyage assez long. Toutefois nous nʹavons pas perdu<br />

courage et nous sommes parvenus, à force <strong>de</strong> visites et dʹinstances, à rassembler sept<br />

membres indigènes. MM. Myionnet, Maignen et moi, qui avons un pied‐à‐terre à Grenelle<br />

et y revenons tous les soirs, nous pourrons nous adjoindre à eux. Nous avons, en outre,<br />

obtenu le concours <strong>de</strong> MM. <strong>de</strong> Verseil et Planchat, membres <strong>de</strong> la Conférence <strong>de</strong> Vaugi‐<br />

rard; enfin plusieurs confrères <strong>de</strong> St‐Sulpice veulent bien aussi, pour les commencements,<br />

nous prêter leur charitable assistance. Avec tous ces moyens réunis, la Conférence nais‐<br />

241


sante <strong>de</strong> Grenelle comptera 20 ou 22 membres actifs dont je remettrai lundi prochain la<br />

liste à M. le Secrétaire du Conseil général.<br />

La Conférence a déjà eu plusieurs séances et sʹest constituée provisoirement dans<br />

les formes que nos usages ont consacrées. Tous ses membres ont déclaré dʹailleurs adopter<br />

<strong>de</strong> plein cœur lʹesprit et les dispositions du règlement <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul.<br />

La seule œuvre dont on pourra sʹoccuper dans les commencements est la visite <strong>de</strong>s<br />

pauvres. Vingt‐cinq familles ont été adoptées, et ont déjà reçu <strong>de</strong>s premiers secours en<br />

pain, vian<strong>de</strong> et vêtements. Du reste, la matière ne manquera pas au zèle <strong>de</strong>s associés; le<br />

pays qui compte 8000 âmes, se compose presque uniquement <strong>de</strong> familles ouvrières, toutes<br />

pauvres, toutes chargées dʹenfants, et malheureusement aussi presque toutes vivant dans<br />

une indifférence complète pour les choses religieuses, dans un oubli absolu <strong>de</strong> leurs pre‐<br />

miers <strong>de</strong>voirs. Une <strong>de</strong>mi‐douzaine dʹhommes, quelques femmes, <strong>de</strong>s enfants jusquʹà la<br />

première Communion et quelques pensions composent tout le troupeau du Curé qui, <strong>de</strong>‐<br />

puis 7 ans, épuise tous les efforts <strong>de</strong> son zèle pour ramener au moins quelques brebis au<br />

bercail; ses tentatives ont été presque sans fruit; il semble profondément découragé.<br />

Notre présence lui a rendu quelquʹespérance; accueillis dʹabord par lui <strong>avec</strong> une ex‐<br />

trême défiance, nous sommes enfin parvenus à nous faire bien comprendre <strong>de</strong> lui et nous<br />

avons acquis sa bienveillance et son appui.<br />

Tout nous laissant espérer, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt, que la Conférence <strong>de</strong> Grenelle<br />

sʹasseoira définitivement et pourra produire quelque bien dans ce malheureux pays, nous<br />

venons solliciter son admission dans la Famille <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul.<br />

Nous <strong>de</strong>mandons en même temps les prières du Conseil général et les vôtres tout<br />

particulièrement, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt, pour que cette semence jetée sur une terre si ari<strong>de</strong><br />

soit bénie du Seigneur et reçoive lʹaccroissement.<br />

Déjà pour notre part, nous avons adopté ici les prières <strong>de</strong> la Société et nous avons<br />

mis en union <strong>avec</strong> elle nos vœux comme nos œuvres naissantes; notre association a donc<br />

déjà commencé par le fait, elle nʹattend plus pour se réaliser entièrement quʹune reconnais‐<br />

sance officielle et la sanction <strong>de</strong> nos premiers actes.<br />

Veuillez agréer, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt, les sentiments respectueux <strong>avec</strong> lesquels je<br />

suis<br />

Votre très humble et très dévoué serviteur et confrère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> St‐Sulpice<br />

P.S. Jʹaurais quelque scrupule à <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s secours pour la Conférence <strong>de</strong> Gre‐<br />

nelle en même temps que je sollicite son agrégation, si M. <strong>de</strong> Raincourt, prenant les <strong>de</strong>‐<br />

vants, nʹavait déjà porté la requête au Conseil <strong>de</strong> Paris.<br />

Les ressources dont nous pourrons disposer quant à présent sont extrêmement res‐<br />

treintes et resteront telles jusquʹà ce que la Conférence, mieux posée et plus connue dans le<br />

pays, sʹy soit créé quelques appuis. Le concours momentané <strong>de</strong> nos Confrères <strong>de</strong> St‐<br />

Sulpice nous a permis <strong>de</strong> réaliser dans notre caisse une somme <strong>de</strong> 100 et quelques f., mais<br />

elle est déjà en partie absorbée par nos dépenses qui excè<strong>de</strong>nt constamment les recettes<br />

courantes.<br />

Nous vous prions donc, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt, <strong>de</strong> mettre notre <strong>de</strong>man<strong>de</strong> sous les<br />

yeux du Conseil <strong>de</strong> Paris et <strong>de</strong> lʹappuyer <strong>de</strong> votre avis bienveillant.<br />

L. P.<br />

242


177 à MM. Myionnet et Maignen<br />

MLP. dresse un bilan <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> communauté et cherche à communiquer à ses frères son zèle missionnaire, qui<br />

débor<strong>de</strong> dʹun cœur qui ne fait quʹun <strong>avec</strong> Dieu.<br />

‐ la vie <strong>de</strong> famille et lʹunion fraternelle ont à sʹaffermir davantage sur lʹamour <strong>de</strong> Dieu: avoir le courage <strong>de</strong> sʹai‐<br />

mer et <strong>de</strong> se supporter comme Dieu nous supporte. Suivre le ʺpas <strong>de</strong> Dieuʺ, et entrer dans son mouvement, sans<br />

hâte ni mollesse.ʺ<br />

‐ MLP. apparaît comme saisi <strong>de</strong> ʺlʹesprit du Cénacleʺ: le désir et lʹespérance sont le signe et la force <strong>de</strong> leur mis‐<br />

sion; ne pas désespérer <strong>de</strong> son temps, <strong>de</strong> ses frères…<br />

‐ ʺHymne à la charitéʺ : lʹar<strong>de</strong>ur spirituelle qui anime MLP. dans son amour pour Dieu et ses frères: ʺcʹest la<br />

charité qui nous pousse et nous presse…ʺ.<br />

Duclair, 26 août 1847<br />

Très chers et bien‐aimés frères,<br />

Quelques jours se sont écoulés déjà <strong>de</strong>puis mon départ et vous atten<strong>de</strong>z sans doute<br />

une lettre qui me rapproche quelques moments <strong>de</strong> vous. Je vous lʹeusse déjà écrite, chers<br />

amis, si, <strong>de</strong>puis mon arrivée, je nʹeusse été constamment souffrant. A peine débarqué, jʹai<br />

été pris <strong>de</strong> vomissements et <strong>de</strong>puis ce moment je suis resté très languissant; je gar<strong>de</strong> la<br />

diète et <strong>de</strong>meure cloué au coin du feu. Oui, du feu; il a constamment plu <strong>de</strong>puis mon arri‐<br />

vée; la température sʹest tellement refroidie que sur le bord <strong>de</strong> la rivière où nous sommes,<br />

on sent une fraîcheur excessive et quʹon a besoin, au moins quand on reste comme moi<br />

inactif, <strong>de</strong> se réchauffer un peu. Si cela dure ainsi, mon séjour à la campagne ne me sera<br />

guère profitable, car, même en reprenant, comme je lʹespère, plus <strong>de</strong> forces, je ne pourrai<br />

mettre les pieds <strong>de</strong>hors. La campagne nʹest pas tenable pour nous, pauvres Parisiens, dans<br />

les jours <strong>de</strong> pluie. Les chemins sont détrempés et si boueux quʹon nʹa pas le courage <strong>de</strong> sʹy<br />

engager. Je suis quelque peu abattu <strong>de</strong> ces contretemps qui mʹempêchent <strong>de</strong> fêter, comme<br />

je le voudrais, mon entourage et <strong>de</strong> prendre le repos dont je croyais avoir besoin; mais je<br />

prends, au fond, les choses comme elles doivent être prises et je trouve bon et parfait tout<br />

ce que le Seigneur a réglé.<br />

Bien <strong>de</strong>s fois par jour, chers amis, je me reporte au milieu <strong>de</strong> vous; en suivant le<br />

moins mal quʹil mʹest possible mes exercices, je les fais en union <strong>avec</strong> vous; je parcours par<br />

la pensée notre petit monastère <strong>de</strong> Grenelle et je vous accompagne dans vos travaux ac‐<br />

coutumés. En sentant au fond du cœur une douce et pure joie <strong>de</strong> tous ces souvenirs, je bé‐<br />

nis Dieu qui daigne former déjà en nous lʹesprit <strong>de</strong> famille et consoli<strong>de</strong>r <strong>de</strong> jour en jour no‐<br />

tre union. A distance et momentanément séparé <strong>de</strong> vous, je puis mieux juger notre situa‐<br />

tion; je la trouve bonne, provi<strong>de</strong>ntielle et telle que nous la pouvions souhaiter. Jʹy vois les<br />

éléments dʹun bon avenir, si nous savons nous accommo<strong>de</strong>r en tout <strong>de</strong> nos petits com‐<br />

mencements, temporiser et ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r ni à nos œuvres, ni à notre constitution, ni à<br />

nous‐mêmes ce quʹun développement successif <strong>de</strong>vra seul apporter. Il dépendrait, sans<br />

doute, du Seigneur qui a mis en nous un germe <strong>de</strong> vie, <strong>de</strong> le faire croître et fleurir tout<br />

dʹun coup, il pourrait consoli<strong>de</strong>r nos œuvres, augmenter nos forces, nous pousser plus<br />

sensiblement dans la perfection, mais il ne lui plaît pas <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r ainsi; Il a mis, dès le<br />

commencement, six jours à façonner le mon<strong>de</strong> et <strong>de</strong>puis, il nʹy opère rien dʹordinaire<br />

quʹ<strong>avec</strong> un travail lent, mesuré, qui avance, mais quʹon ne voit pas marcher. Entrons dans<br />

ce mouvement, chers amis, sans hâte comme sans mollesse, suivant le pas <strong>de</strong> Dieu; <strong>avec</strong><br />

Lui, nous irons sûrement et nous atteindrons notre fin. Ne sentez‐vous pas comme moi<br />

dans votre cœur une certaine puissance, une sorte dʹaspiration dʹavenir, un grand désir,<br />

une gran<strong>de</strong> espérance? Eh bien, le signe et la force <strong>de</strong> notre mission est là; Dieu a mis en<br />

243


nous le désir pour que nous priions, lʹespérance, pour que nous agissions; prions <strong>de</strong> tout le<br />

souffle <strong>de</strong> notre âme, travaillons <strong>avec</strong> un saint courage, et marchons en confiance, car nous<br />

sommes dans la voie; chaque pas nous porte au but. Nous nʹavons pas désespéré <strong>de</strong> notre<br />

temps, <strong>de</strong> notre pays, <strong>de</strong> nos frères, nous avons pensé que dans ce mouvement, vague et<br />

faible encore, du peuple vers la foi, il y avait quelque élan, quelque promesse fécon<strong>de</strong>,<br />

nous ne serons pas trompés. Cʹest la charité qui suscite tout autour <strong>de</strong> nous; c’est elle qui<br />

réveille les âmes, les pousse et les rallie; cʹest elle aussi qui nous emporte et nous enve‐<br />

loppe dans son action; la charité ne faillit pas et ne reste pas en chemin, une fois allumée, il<br />

faut quʹelle sʹéten<strong>de</strong>, brille et porte au loin sa chaleur. Tout aussi lui sert dʹaliment.<br />

Nʹayons donc pas peur, chers amis, ne regardons pas trop à notre indignité qui nous arrête<br />

souvent et nous rend timi<strong>de</strong>s; la charité, comme la flamme, consume et purifie; par elle,<br />

nous serons pénétrés, vivifiés, par elle nous serons transfigurés. Oh! que cette pensée nous<br />

anime et nous console. Cʹest la charité qui nous pousse et nous presse, nous sommes mus<br />

par elle; par elle si ar<strong>de</strong>nte, si puissante; par elle force, volonté, amour, amour infini,<br />

amour <strong>de</strong> Dieu!<br />

Arrivé là, comme on se repose et comme on se confie! Quʹimporte notre faiblesse et<br />

notre pauvreté; amour <strong>de</strong> mon Dieu, vous êtes riche et fort pour nous <strong>de</strong>ux; faites, ô mon<br />

Seigneur, que votre volonté sainte soit accomplie; notre âme vous embrasse, puisque vous<br />

lʹavez choisie; elle ne tremble plus, car votre Cœur est contre son cœur. Je <strong>de</strong>meure dans<br />

cette pensée qui me fortifie, me ranime et me tient, chers amis, si étroitement uni à vous. Je<br />

prie tous les jours pour vous, pour les petites âmes que vous cultivez, pour lʹœuvre sainte<br />

que nous avons entreprise ensemble; et vous aussi vous priez pour moi; Dieu nous entend<br />

et nous aime ainsi.<br />

Adieu, chers amis, écrivez‐moi bientôt tous les <strong>de</strong>ux, <strong>avec</strong> simplicité et abandon et<br />

comme nous causons ensemble dans nos meilleurs jours; le Seigneur nous ayant bien défi‐<br />

nitivement donnés les uns aux autres, nous ne saurions mieux entrer dans ses vues quʹen<br />

nous adoptant bien tendrement, bien fraternellement; je suis assuré que si nous avons le<br />

courage <strong>de</strong> nous aimer et <strong>de</strong> nous supporter les uns les autres <strong>avec</strong> charité, Dieu aussi<br />

nous supportera, nous aimera, nous confirmera dans notre mission, quelques qualités qui<br />

puissent nous manquer dʹailleurs; il me semble, pour ma part, bien chers amis, que jʹy ar‐<br />

riverai sans peine, tâchez <strong>de</strong> faire aussi votre moitié.<br />

Rappelez‐moi, si vous en avez lʹoccasion, au souvenir <strong>de</strong> notre bien bon M. Beaus‐<br />

sier et à celui <strong>de</strong> tous nos amis; je remercie M. Lecoin <strong>de</strong> son assistance si précieuse pour<br />

moi, ainsi que M. Leleu, Mézière et tous nos zélés coopérateurs, tant au patronage quʹà la<br />

Sainte‐Famille.<br />

Dites aussi <strong>de</strong>ux mots <strong>de</strong> souvenir à Louis qui, jʹespère, ne vous donne que satisfac‐<br />

tion.<br />

Votre ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

178 à M. Maignen<br />

Rappel du jour où M. Maignen, quittant tout, le rejoignit à Duclair: MLP. lʹexhorte à renouveler <strong>de</strong>vant Dieu<br />

lʹoffran<strong>de</strong> <strong>de</strong> lui‐même. Avec délicatesse et fermeté, conseils pour que M. Maignen domine les ar<strong>de</strong>urs <strong>de</strong> son âme<br />

et sa vive sensibilité. MLP. veillera lui aussi à contrôler tout élan dʹaffection trop naturel. Confiance en Dieu<br />

dans les moments <strong>de</strong> découragement. Goûter la splen<strong>de</strong>ur liturgique <strong>de</strong>s Psaumes, ʺla voix du mon<strong>de</strong> chrétienʺ.<br />

244


Duclair, 3 septembre 1847<br />

Je vous ai écrit une première fois, cher ami et frère, une lettre commune pour vous<br />

et pour M. Myionnet; aujourdʹhui, je mʹentretiens particulièrement <strong>avec</strong> lʹun et lʹautre, me<br />

proposant <strong>de</strong> remplacer ainsi notre petite conversation du lundi au soir, et <strong>de</strong> provoquer<br />

aussi une lettre personnelle <strong>de</strong> chacun <strong>de</strong> vous.<br />

Je sentais le besoin, cher enfant <strong>de</strong> vous parler un peu seul à seul et <strong>de</strong> savoir, mieux<br />

que ne me lʹa dit votre lettre, en quelles dispositions vous êtes. Je ne suis pas accoutumé à<br />

correspondre <strong>avec</strong> vous dʹune manière si vague et si extérieure; jʹai éprouvé un sentiment<br />

pénible en lisant votre lettre et je nʹai pu mʹempêcher <strong>de</strong> penser que la mienne méritait une<br />

autre réponse. Il est vrai, cher ami, que vous étiez bien fatigué et que vous mʹavez promis<br />

<strong>de</strong> me dédommager prochainement; je ne me plains donc pas; jʹétouffe un premier mou‐<br />

vement <strong>de</strong> peine et jʹattends quelque plus aimable entretien <strong>de</strong> votre part.<br />

En me trouvant aux lieux où je vous ai vu lʹan <strong>de</strong>rnier, jʹai senti se réveiller les im‐<br />

pressions qui mʹont si vivement ému à pareille époque et jʹai regretté <strong>de</strong> ne vous avoir pas<br />

près <strong>de</strong> moi pour repasser ensemble ces courtes heures dont jʹai gardé un si profond et si<br />

doux souvenir. Cette pensée ne vous est‐elle pas venue aussi et nʹavez‐vous pas refait en<br />

esprit ce voyage qui a si fort influé sur votre vie? Je me plais à le croire, cher ami, et jʹai la<br />

confiance que vous vous êtes trouvé dans le même sentiment, dans la même résolution où<br />

vous étiez alors. Il nʹy a pas longtemps, vous me disiez: ʺLoin <strong>de</strong> regretter la décision que<br />

jʹai prise, je serais disposé à la prendre encore, si jʹavais à le faire, et je me confirme chaque<br />

jour dans la conviction que je suis où Dieu voulait que je fusse.ʺ Si, comme je le crois, cher<br />

ami, vous avez en ce moment la même inspiration, ne laissez pas passer cet anniversaire<br />

sans renouveler <strong>de</strong>vant Dieu lʹoffran<strong>de</strong> que vous lui avez faite <strong>de</strong> vous‐même. Lʹannée qui<br />

vient <strong>de</strong> sʹécouler nʹa pas été sans travaux et sans quelques épreuves, mais elle nʹa pas été<br />

pour vous sans joie et sans consolation. Remercions ensemble le Seigneur qui nous a si vi‐<br />

siblement protégés, et bénissons‐Le surtout <strong>de</strong> nous avoir appelés et choisis dans cette<br />

nombreuse élite <strong>de</strong> chrétiens qui nous entoure, pour opérer lʹœuvre excellente dont il nous<br />

a chargés. Je mʹunis, cher enfant, aux sentiments dont je sais votre cœur animé, jʹoffre à<br />

Dieu vos efforts, vos travaux, vos œuvres <strong>de</strong> cette année et je Le prie <strong>de</strong> les agréer comme<br />

les prémices <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> sacrifice et <strong>de</strong> dévouement que vous avez embrassée. Pour ma<br />

part aussi, très cher enfant, je me renouvelle dans les sentiments dont jʹétais rempli à pa‐<br />

reille époque, lʹan <strong>de</strong>rnier, jʹouvre bien fort mes <strong>de</strong>ux bras et tout mon cœur pour vous ac‐<br />

cueillir encore au milieu <strong>de</strong> nous et vous assure une fois <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> toute ma tendresse <strong>de</strong><br />

père, <strong>de</strong> frère et dʹami. Je vois lʹavenir <strong>avec</strong> confiance, jʹai la conviction que tout ce qui est<br />

bon en nous se confirmera et que lʹimparfait ira sʹatténuant; que la sphère chrétienne où<br />

nous respirons ira sʹélargissant et que nos œuvres et nous‐mêmes ensemble grandirons en<br />

proportion; tout est calculé aujourdʹhui lʹun pour lʹautre, tout <strong>de</strong>meurera dans une même<br />

et heureuse proportion. Laissons faire le Seigneur dont le souffle nous a donné la vie et<br />

dont lʹesprit nous donnera la force et lʹaccroissement. Ayez bonne espérance, cher ami,<br />

croyez en votre œuvre, parce quʹelle est <strong>de</strong> Dieu, en vos amis, parce quʹIl soutiendra leur<br />

faiblesse, en vous‐même, parce que vous Lui avez livré votre cœur. Trop aisément, à la<br />

moindre épreuve, au moindre insuccès, au plus léger signe dʹimprobation, je surprends en<br />

vous le doute sur mes sentiments, sur les vôtres et sur tout; chassez ces suggestions décou‐<br />

rageantes, surmontez <strong>de</strong>s impressions quʹon ne peut empêcher, mais dont on se rend maî‐<br />

tre <strong>avec</strong> un cœur ferme et confiant. Pensez à tout ce que le bon Dieu a fait pour nous et di‐<br />

245


tes‐vous: sʹil a été tant accordé à nos petits commencements, que ne nous sera‐t‐il pas don‐<br />

né dans le progrès et le développement <strong>de</strong> notre œuvre!<br />

Je reste ici fidèle à nos exercices ordinaires et cʹest une joie pour moi <strong>de</strong> penser que<br />

<strong>de</strong> votre côté, vous êtes uni à moi par ces pieuses et salutaires pratiques; elles me soutien‐<br />

nent dans mon changement dʹhabitu<strong>de</strong>s et <strong>de</strong> vie et me rattachent à vous malgré notre sé‐<br />

paration. Lʹoffice mʹest particulièrement un grand appui. Tant quʹon reste dans la vie ordi‐<br />

naire et privée, on a assez <strong>de</strong> la prière particulière et individuelle, mais si lʹon franchit les<br />

<strong>de</strong>grés pour entrer dans une vie plus haute où lʹon ne sʹappartient plus, où lʹon renonce à<br />

son existence propre pour embrasser la vie universelle, le <strong>de</strong>voir change, on prend en<br />

main la cause <strong>de</strong> tous, délégué pour ainsi dire par le mon<strong>de</strong>, à un moindre <strong>de</strong>gré que le<br />

prêtre, mais dans le même sens, pour adorer et glorifier Dieu. Alors les psaumes, ce chant<br />

si puissant, si immense, prêtent leur voix pour louer le Seigneur sur un mo<strong>de</strong> qui répon<strong>de</strong><br />

à cette gran<strong>de</strong> mission. Les psaumes sont aux autres prières ce que lʹorgue est au reste <strong>de</strong>s<br />

instruments, ils sont la voix du mon<strong>de</strong> chrétien, lʹhommage <strong>de</strong>s fidèles assemblés, la prière<br />

du religieux et du prêtre, en tant quʹils sont les organes <strong>de</strong> lʹEglise et du peuple. Nʹest‐il<br />

pas beau et glorieux pour nous, cher ami, dʹêtre <strong>de</strong> ceux qui, tous les jours, ont à faire<br />

monter <strong>de</strong>vant Dieu cet hommage solennel dʹadoration et dʹamour. Dʹoù nous vient cet<br />

honneur et comment lʹavions‐nous mérité? Répondons‐y du moins par notre reconnais‐<br />

sance et notre fidélité.<br />

Jʹai fait, en union <strong>avec</strong> vous, la commémoration du 3 septembre. Aujourdʹhui, jʹai<br />

<strong>de</strong>mandé la messe <strong>de</strong> mon bon Curé qui lʹa dite à lʹintention <strong>de</strong> votre père 160 . Vous savez,<br />

bien cher ami, que je ne perds aucune occasion <strong>de</strong> mʹassocier à vos sentiments et à vos af‐<br />

fections.<br />

Jʹaurais encore beaucoup à vous dire, car, vous le savez, je me sens aisément en ef‐<br />

fusion <strong>avec</strong> vous; mais jʹai à écrire aussi au f. Myionnet, et aussi quelques lignes pour M.<br />

Lecoin. Je termine donc cette lettre, du reste déjà bien longue. Faut‐il vous dire, cher en‐<br />

fant, ne le verrez‐vous pas, que si elle nʹest pas plus affectueuse encore, cʹest que je ne lʹai<br />

pas voulu, cʹest que jʹai détourné ma plume, quand je la sentais sʹamollir et tourner à quel‐<br />

que sentiment trop tendre. Vous nʹavez pas cessé, bien cher ami, dʹêtre mon fils bien‐aimé,<br />

choisi entre tous, uni à moi par <strong>de</strong> tendres sympathies, comme par mille dispositions que<br />

le Seigneur lui‐même a préparées; mais, vous le savez, dans la vie commune que nous<br />

avons embrassée, il a fallu refouler, sinon le sentiment intérieur, au moins lʹexpression<br />

trop sensible <strong>de</strong> cet attachement du cœur. Jʹen souffre souvent, parce quʹil est dans ma na‐<br />

ture dʹexprimer ce que je sens; jʹen souffre surtout quand je vois entre nous quelques petits<br />

malaises ou malentendus quʹun serrement <strong>de</strong> main aurait vite dissipés; néanmoins, il faut,<br />

je le vois bien, quʹil en soit ainsi; en cas semblables, je prie un peu pour que mon bon ange<br />

aille vous dire au cœur ce que je nʹexprime pas moi‐même. Je le conjure en cet instant, cher<br />

ami, <strong>de</strong> veiller tendrement sur vous, <strong>de</strong> diriger vos affections, vos prières, <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r votre<br />

cœur comme un trésor afin <strong>de</strong> lʹoffrir bon, pur, aimant et généreux à lʹamour <strong>de</strong> notre di‐<br />

vin Seigneur.<br />

Je ne serai pas encore <strong>de</strong> retour près <strong>de</strong> vous au 8 septembre, ne mʹoubliez pas ce<br />

jour‐là et priez ensemble, le frère et vous, notre bien‐aimée Mère; nous lui sommes, nous et<br />

nos œuvres, tout particulièrement consacrés.<br />

160 Anniversaire <strong>de</strong> la mort <strong>de</strong> M. Maignen père, en 1843.<br />

246


Je reviendrai, comme je vous lʹavais dit, vendredi prochain 10, par le convoi qui ar‐<br />

rive à Paris à 4h.10; je serai donc pour dîner <strong>avec</strong> vous à Grenelle. Si vos travaux ne vous<br />

amènent pas, cher enfant, dans le quartier St‐Lazare vers 4h., je ne voudrais pas que vous<br />

fissiez exprès ce long trajet; si vous y étiez, au contraire, vous savez bien quelle joie jʹaurai<br />

à vous embrasser; je regar<strong>de</strong>rai un peu à droite et à gauche avant <strong>de</strong> monter dans le ca‐<br />

briolet que je prends pour me rendre à la barrière <strong>de</strong> lʹEcole 161 . Adieu, ami, je vous aime et<br />

vous embrasse tendrement.<br />

Votre ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Ne vous fiez pas sans réserve aux manifestations <strong>de</strong> M me Lafond; jʹai <strong>de</strong> fortes rai‐<br />

sons <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r beaucoup <strong>de</strong> mesure à son égard.<br />

179 à M. Myionnet<br />

MLP. réconforte M. Myionnet inquiet <strong>de</strong>s difficultés <strong>de</strong> sa vie spirituelle. Cʹest sur la conscience que nous avons<br />

<strong>de</strong> notre faiblesse que Dieu construit notre sanctuaire intérieur. Détails matériels concernant les soins du mé‐<br />

nage à Grenelle.<br />

Duclair, 3 septembre 1847<br />

Mon bien cher frère,<br />

Je vous écris séparément pour causer un peu <strong>avec</strong> vous comme nous le faisons le<br />

lundi au soir, et jʹécris aussi au f. Maignen sous ce même pli. Votre lettre, mon bon ami,<br />

mʹa fait grand plaisir, elle est bonne, ouverte et confiante et me montre bien vos excellentes<br />

dispositions; elle me rassurerait plus, sʹil était besoin, sur lʹétat <strong>de</strong> notre œuvre que tous les<br />

raisonnements du mon<strong>de</strong>, car là où est le bon esprit, la droiture dʹintention, le sincère<br />

amour du bien, là est la grâce du Seigneur et son tout puissant appui.<br />

Ne vous tourmentez pas pour vous‐même, cher ami; vous savez que si nous ne<br />

nous jugeons pas sûrement nous‐mêmes, nous nous trompons bien moins sur les autres;<br />

jʹoserais vous dire que ma sollicitu<strong>de</strong> fraternelle nʹest pas en défaut à votre égard et que je<br />

vois sainement en ce qui touche vos dispositions. J’aperçois bien çà et là quelques impres‐<br />

sions <strong>de</strong> la nature mauvaise, mais je vous vois en même temps les combattre et les répri‐<br />

mer. Tant quʹil en est ainsi, cher frère, on peut être en paix, on est dans le bon chemin, et le<br />

Seigneur est près <strong>de</strong> nous. Ce qui vous alarme, ce qui me trouble parfois pour moi‐même,<br />

cʹest que ces luttes contre la nature rebelle sont plus fréquentes pour nous et plus achar‐<br />

nées quʹen autre temps; quʹau lieu dʹavancer, nous semblons quelquefois reculer, et,<br />

comme vous le dites, débâtir ce que le Seigneur a édifié. Cʹest fausse apparence, jʹen suis<br />

convaincu, cher frère, vous ne valiez pas mieux autrefois, mais vous voyiez moins votre<br />

misère, Dieu la contenait lui‐même à cause <strong>de</strong> votre faiblesse et vous preniez sa force pour<br />

la vôtre propre; aujourdʹhui, plus confiant en vous, Il sʹest retiré, vous voyez où vous en<br />

êtes et vous avez peur; je puis dire nous avons peur; mais je sens moi, au fond du cœur,<br />

que notre divin Maître ne nous a pas délaissés, quʹIl nous laisse combattre et résister, afin<br />

que nous soyons courageux et humbles tout ensemble, mais quʹIl lutte <strong>avec</strong> nous et nous<br />

fera triompher <strong>avec</strong> Lui. Avançons donc toujours, ne regardons pas trop à nos pieds, lʹim‐<br />

161 A cette époque, Grenelle n'était pas encore compris dans l'enceinte <strong>de</strong>s murs <strong>de</strong> Paris, ce qui arrivera en 1860. MLP., par esprit <strong>de</strong><br />

pauvreté, se faisait conduire seulement jusqu'à la barrière <strong>de</strong> l'Ecole Militaire, située à l'emplacement actuel <strong>de</strong> la statue <strong>de</strong> Garibaldi.<br />

247


portant pour nous est <strong>de</strong> persévérer et <strong>de</strong> marcher, car, je le répète, nous sommes dans le<br />

bon chemin, si nous allons, nous arriverons. Je souffre comme vous beaucoup <strong>de</strong> ce dé‐<br />

pouillement qui met à nu nos faiblesses pour nous, pour les autres quelquefois, mais cette<br />

impression humiliante et pénible est le signe <strong>de</strong> lʹaction salutaire du Seigneur et doit ré‐<br />

jouir un cœur dévoué comme le vôtre; dans mes moments choisis, je prends ainsi<br />

lʹépreuve, jʹen goûte lʹamertume et me contente <strong>de</strong> dire: Tout est bien, mon Dieu, jʹaccepte<br />

tout, pourvu que vous soyez glorifié; après cela, je suis tranquille et me sens consolé.<br />

Soyez dans cette disposition, cher ami, et croyez bien que si je vous voyais fléchir, je ne<br />

manquerais pas <strong>de</strong> vous avertir; à lʹoccasion, faites <strong>de</strong> même pour moi; ainsi, nous ferons<br />

la gar<strong>de</strong> lʹun pour lʹautre et nous servirons réciproquement dʹappui.<br />

Je reviendrai près <strong>de</strong> vous, cher ami, vendredi prochain 10, et je pourrai me trouver,<br />

je lʹespère, à Grenelle pour dîner <strong>avec</strong> vous.<br />

Surveillez <strong>de</strong> votre mieux notre petit intérieur domestique, afin que nous évitions,<br />

sʹil se peut, les tristes épreuves quʹil nous a fallu accepter autrefois. Occupez Louis beau‐<br />

coup, cʹest le meilleur moyen dʹéviter lʹoisiveté et ses funestes conséquences. Dites‐lui, je<br />

vous prie, que je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> expressément quʹil ait nettoyé à fond pour mon arrivée la bou‐<br />

tique que nous aurons sans doute à employer pour la bibliothèque. Il faut aussi quʹil net‐<br />

toie minutieusement la chambre à alcôve dont lʹescalier donne dans le jardin. Cʹest là que<br />

je voudrais mettre M. Gautier sʹil vient faire une retraite à Grenelle. Cʹest aussi là que nous<br />

irons tour à tour, lorsque nous serons en retraite, afin <strong>de</strong> nous mieux recueillir en étant<br />

plus séparés <strong>de</strong>s autres. Il est nécessaire que les vitres soient lavées, le carreau frotté, les<br />

cabinets bien balayés, le tout <strong>avec</strong> un soin parfait; recomman<strong>de</strong>z‐lui cela expressément.<br />

Pendant que je suis au ménage, jʹajoute quʹil faut couvrir les confitures qui sont restées ex‐<br />

posées à la poussière. Les pots qui sont sur les <strong>de</strong>ux marches inférieures <strong>de</strong> lʹescalier doi‐<br />

vent être distingués <strong>de</strong>s autres; ils se conserveront mieux étant plus sucrés et mieux cuits;<br />

si la feuillette <strong>de</strong> vin que jʹai <strong>de</strong>mandée arrivait, elle <strong>de</strong>vrait être mise dans notre cave inté‐<br />

rieure où elle pourra entrer.<br />

Je regrette dʹabsorber le peu dʹespace qui me restait par ces détails, mais le corps<br />

veut aussi sa place sur cette terre; il faut la lui faire, toute petite quʹelle soit.<br />

Adieu, cher ami, je serais heureux <strong>de</strong> me retrouver au milieu <strong>de</strong> vous; cette petite<br />

absence mʹa bien fait sentir où nous en étions; nous sommes en bonne voie. Mon Curé mʹa<br />

prêté ici les Méditations <strong>de</strong> Boissieu sur lʹEvangile, cela nous ira je crois, nous en essaierons<br />

à mon retour. Ma santé est un peu moins mauvaise.<br />

Je vous embrasse tendrement en N.S.<br />

Votre frère et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Affections à tous nos amis.<br />

180 à M. Levassor<br />

MLP. l’informe <strong>de</strong> plusieurs démarches <strong>de</strong>mandées. Le malentendu <strong>avec</strong> M. Mayer est oublié. ʺLes vrais dé‐<br />

vouements aux oeuvres <strong>de</strong> Dieu sont raresʺ.<br />

Paris, 11 octobre 1847<br />

Très cher ami,<br />

Jʹai vu le jeune ouvrier que vous mʹavez envoyé; je lui ai donné toutes les indica‐<br />

tions qui mʹont semblé pouvoir lui être utiles et je lui ai remis une lettre pour M. Ledreuille<br />

248


afin quʹil obtienne, sʹil se peut, <strong>de</strong>s travaux. Il est convenu quʹil me viendra voir dès quʹil<br />

en aura trouvé, afin que je puisse le faire admettre à la Société <strong>de</strong> St‐François‐Xavier, dans<br />

le quartier où il aura pris sa <strong>de</strong>meure.<br />

Quant au billet <strong>de</strong> 50f contenu dans votre première lettre, on nʹavait pu dʹabord dé‐<br />

couvrir la personne désignée pour le paiement, mais dans une secon<strong>de</strong> visite on a été plus<br />

heureux, sans être toutefois plus avancé. M. Sellière a répondu, en effet, quʹil avait déjà re‐<br />

çu <strong>de</strong>ux billets semblables à celui dont vous avez été nanti, plus une lettre qui lʹavertissait<br />

<strong>de</strong> ne payer sur la présentation dʹaucun <strong>de</strong>s trois, que conséquemment il ne donnerait pas<br />

les fonds avant quʹune lettre spéciale ne lʹeût autorisé à le faire en faveur <strong>de</strong> lʹun <strong>de</strong>s trois<br />

prétendants.<br />

Cette réponse mʹa paru rendre bien suspecte la valeur <strong>de</strong> votre titre; je vous le ren‐<br />

voie néanmoins, cher ami, afin que vous avisiez à en tirer le meilleur parti possible.<br />

Jʹai cherché <strong>de</strong> tous côtés un jeune homme qui vous convînt pour vos œuvres <strong>de</strong><br />

Chartres, je ne vois rien jusquʹici, les vrais dévouements sont bien rares et les œuvres <strong>de</strong><br />

Dieu ne peuvent marcher sans ce ressort. Jʹai toujours un ancien professeur sans leçons (et<br />

sans brevet, dʹune cinquantaine dʹannées, un peu moins, je crois), dont vous pourriez tirer<br />

parti, si vous aviez quelque autre sujet <strong>avec</strong> lui. Il est bon chrétien, se tient bien, réussit<br />

bien <strong>avec</strong> les enfants et enseigne bien. M. le Curé <strong>de</strong> St‐Sulpice le connaît et lui porte inté‐<br />

rêt. Voyez, cher ami, ce que vous en pensez. Quant au jeune homme <strong>de</strong> lʹEcole Normale, il<br />

ne peut se donner ni à vous, ni à nous, il a pris <strong>avec</strong> lʹUniversité un engagement <strong>de</strong> 10 an‐<br />

nées quʹil doit nécessairement gar<strong>de</strong>r.<br />

Assurez M. Mayer <strong>de</strong> notre bonne et sincère affection, nos petites malentendus ont<br />

si peu <strong>de</strong> fond et sont dʹailleurs déjà si vieux quʹen vérité il nʹy a rien à en faire, sinon à les<br />

effacer par un bon et cordial serrement <strong>de</strong> main; cʹest ce que nous faisons, comptant, bien<br />

quʹà son prochain voyage à Paris, notre jeune Confrère viendra nous assurer quʹil nous<br />

gar<strong>de</strong> toujours bienveillance et affection.<br />

Adieu, bien cher ami, priez toujours pour nous; notre ermitage <strong>de</strong> Grenelle nous<br />

ménage un peu <strong>de</strong> recueillement et <strong>de</strong> paix; mais notre vie est encore si mouvante que la<br />

prière <strong>de</strong> nos bons amis nous est bien nécessaire; nous prions <strong>de</strong> notre côté, pour vous et<br />

pour le succès <strong>de</strong> vos entreprises charitables. Le mon<strong>de</strong> a besoin <strong>de</strong> pareil secours.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

N.B. Nonobstant le défaut <strong>de</strong>s fonds à revenir du billet que je vous renvoie, je paye‐<br />

rai les Annales et votre Revue, si vous le désirez, cela va sans dire; un mot dans votre ré‐<br />

ponse sur ce sujet.<br />

181 à M. Decaux<br />

Remerciement pour lʹai<strong>de</strong> spirituelle et matérielle que la Conférence Stanislas apporte à la Sainte‐Famille.<br />

Paris, 2 mars 1848<br />

Très cher Confrère,<br />

Les événements162 qui nous ont tous si gran<strong>de</strong>ment occupés se sont jetés à la tra‐<br />

verse dʹune lettre que je voulais vous écrire pour remercier vous et nos chers amis <strong>de</strong> Sta‐<br />

162 La Révolution <strong>de</strong> 1848 à Paris: la Monarchie <strong>de</strong> Juillet s'est écroulée le 24 février précé<strong>de</strong>nt, jour <strong>de</strong> l'abdication du roi Louis-<br />

Philippe. L'effervescence politique et sociale du moment n'interrompt pas les activités <strong>de</strong> MLP. Jugeant plus pru<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> ne pas<br />

249


nislas du constant intérêt que vous accor<strong>de</strong>z à notre Sainte‐Famille. Votre généreuse assis‐<br />

tance nous est doublement précieuse: matériellement, elle allège nos charges; spirituelle‐<br />

ment, elle nous fait bénir Dieu qui accor<strong>de</strong> à nos efforts une si douce récompense.<br />

Exprimez <strong>de</strong> nouveau à nos chers Confrères <strong>de</strong> Stanislas les fraternelles sympathies<br />

<strong>de</strong> toute notre Conférence, et croyez vous‐même au tendre attachement en N.S. <strong>de</strong><br />

Votre tout dévoué Confrère et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Ci‐joint une lettre <strong>de</strong> M. Agasse, à vous bien connu, qui recomman<strong>de</strong> à vos<br />

soins une pauvre famille.<br />

182 à M. Levassor<br />

Explication concernant le manteau <strong>de</strong> M. Levassor. MLP. propose un jeune homme qui semble capable dʹai<strong>de</strong>r<br />

son ami.<br />

Paris, 23 mars 1848<br />

Mon bien cher frère,<br />

Je regrette que vous nʹayez pas reçu la lettre que nous avons écrite, M. Myionnet et<br />

moi, en <strong>de</strong>rnier lieu. M. Myionnet vous donnait <strong>de</strong>s explications au sujet <strong>de</strong> votre manteau<br />

et moi‐même, je mʹentretenais <strong>avec</strong> vous, dans la <strong>de</strong>rnière page <strong>de</strong> la lettre, <strong>de</strong> nos œuvres<br />

communes. Cʹest probablement par quelque désordre dans le service <strong>de</strong> la poste que cette<br />

lettre sera restée en chemin.<br />

M. Myionnet a fait toutes les enquêtes imaginables au sujet <strong>de</strong> votre manteau; il est<br />

allé à différentes reprises à votre hôtel et ensuite à M. Mayer. Celui‐ci a formellement, et<br />

<strong>de</strong> la manière la plus explicite, déclaré quʹil avait remis le manteau au concierge <strong>de</strong> lʹhôtel,<br />

et celui‐ci affirme quʹil nʹen a point dʹautre que celui qui vous a été remis; il nous est im‐<br />

possible <strong>de</strong> sortir <strong>de</strong> ce dédale et, à moins dʹune poursuite judiciaire, on ne peut en tirer<br />

rien <strong>de</strong> plus.<br />

M. Myionnet a transmis à M. Mayer le compte que vous lui adressez, il attend sa<br />

réponse pour vous lʹenvoyer.<br />

Jusquʹici, tout se soutient autour <strong>de</strong> nous, quoique un peu péniblement.<br />

Je puis vous proposer, pour vous secon<strong>de</strong>r dans vos œuvres, un bon jeune homme,<br />

plus simple, plus droit, plus sûr que M. Mayer et dont vous auriez, je crois, toute satisfac‐<br />

tion. Il appartient à dʹhonnêtes parents que divers malheurs ont ruinés; il a 20 ans passés,<br />

du courage, lʹamour du travail, quelque éducation, <strong>de</strong>s formes aimables et dʹexcellentes<br />

qualités <strong>de</strong> cœur et dʹesprit.<br />

laisser son église ouvert, le curé <strong>de</strong> St-Sulpice a <strong>de</strong>mandé à la Conférence <strong>de</strong> se trouver un autre local. Les Confrères se rassemblent<br />

donc au Patronage <strong>de</strong> la rue du Regard, le 19 février. A ses amis agités ou divisés par les événements, le prési<strong>de</strong>nt lance un<br />

vibrant appel à l'union <strong>de</strong>s cœurs.<br />

250


23 juin 1848, prise <strong>de</strong> la barrica<strong>de</strong> du Petit-Pont, Bonhomé, Lithographie, Musée d’art et d’histoire, Saint-Denis.<br />

« Dans cette même journée, il y eût d’autres héroïsmes. Entre tous, il faut citer le nouveau Prési<strong>de</strong>nt<br />

<strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul : élu à 27 ans, quelques jours avant l’explosion <strong>de</strong> la révolution, M. Adol‐<br />

phe Baudon, fidèle à l’appel du <strong>de</strong>voir, allait prendre place dans les rangs <strong>de</strong> la gar<strong>de</strong> nationale et offrir sa<br />

vie, obscurément, pour le salut <strong>de</strong> l’ordre social. Il fut blessé grièvement à la prise du Petit‐Pont, près <strong>de</strong><br />

l’Hôtel‐Dieu. Ce pont démoli aujourd’hui, rapporte le P. Bailly, et remplacé par un autre beaucoup plus<br />

large, avait non seulement <strong>de</strong>s barrica<strong>de</strong>s <strong>de</strong> pavés à ses <strong>de</strong>ux extrémités, mais <strong>de</strong>ux barrrica<strong>de</strong>s sur les trot‐<br />

toirs, dans toute sa longueur ; en sorte que, la première barrica<strong>de</strong> enlevée, ce qui arriva quatre fois, on se<br />

trouvait entre trois feux pour courir à l’autre extrémité. C’est dans un <strong>de</strong> ces assauts que le jeune Prési<strong>de</strong>nt<br />

<strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> Saint‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul, avi<strong>de</strong> <strong>de</strong> sacrifice, avait eu la jambe fracassée et donnait son sang<br />

quelques heures avant l’archevêque ».<br />

Vie <strong>de</strong> <strong>Jean</strong>‐<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong>, par Ch. Maignen, I, 327.<br />

251


Nous avions songé à le prendre <strong>avec</strong> nous, mais nous avons vu quelque inconvé‐<br />

nient à le laisser trop près <strong>de</strong> sa famille qui, étant parfois dans le malaise, eût pu <strong>de</strong>venir<br />

une charge pour nous.<br />

Si vous pouviez lui donner seulement, <strong>avec</strong> le logement et la nourriture, 300f, il sʹen<br />

contenterait et pourrait rendre beaucoup <strong>de</strong> services à votre œuvre. Il faudrait aussi payer<br />

ses petits frais <strong>de</strong> voyage, dʹailleurs peu considérables.<br />

Je désirerais une très prompte réponse sur ce sujet, cher frère, notre jeune homme<br />

étant disposé, si la carrière <strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong> charité lui était fermée, à prendre immédiate‐<br />

ment quelque engagement qui ne le laisserait plus libre <strong>de</strong> disposer <strong>de</strong> lui.<br />

Il le regrette, nous en serions nous‐mêmes affligés; voyez ce que le bon Dieu vous<br />

conseillera sur ce point et répon<strong>de</strong>z‐moi vite, sʹil se peut.<br />

Votre bien affectionné frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Mes chers frères vous saluent en N.S.<br />

183 à M. Decaux<br />

Invitation à la retraite <strong>de</strong> la Sainte‐Famille.<br />

Paris, 3 août 1848<br />

Mon bien cher Confrère,<br />

La retraite <strong>de</strong> notre Sainte‐Famille commencera le mardi 8 à 7h.½, en lʹéglise <strong>de</strong>s<br />

Carmes, 70 rue Vaugirard.<br />

Je vous prie dʹen avertir les membres <strong>de</strong> votre Conférence, afin quʹils puissent y<br />

convoquer leurs pauvres familles et y venir eux‐mêmes. Je compte particulièrement, cher<br />

Confrère, sur votre présence, qui ne saurait nous manquer en cette intéressante occasion.<br />

Veuillez croire à mes sentiments accoutumés <strong>de</strong> bien cordial dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

184 à MM. Maignen, Myionnet et Paillé 163<br />

Parti se reposer en Normandie, MLP. entretient ses frères <strong>de</strong> son séjour en famille. Considérations que lui inspire<br />

le contraste entre les populations <strong>de</strong>s campagnes et celles <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s villes. pourquoi lʹindustrie a engendré une<br />

misère dʹun type nouveau. Ne pas sʹeffrayer <strong>de</strong>vant lʹimmensité du mal. Le remè<strong>de</strong>: christianiser le travail <strong>de</strong><br />

lʹouvrier. Le premier fon<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> lʹaction apostolique: la prière. ʺla prière est la seule gran<strong>de</strong> puissance du<br />

mon<strong>de</strong>…nos Œuvres sont <strong>de</strong> futiles jeux dʹenfants si la prière ne les secon<strong>de</strong> et nʹagrandit leur actionʺ.<br />

Duclair, 26 août 1848<br />

Chez M me Salva<br />

Vous nʹenviez pas mon sort, car votre charitable affection a bien voulu mʹaccor<strong>de</strong>r<br />

les jours <strong>de</strong> repos qui paraissaient mʹêtre nécessaires; mais, au moins, vous vous faites les<br />

plus aimables idées <strong>de</strong> mes promena<strong>de</strong>s et loisirs dans mon beau pays <strong>de</strong> Normandie; il ne<br />

163 Cette lettre est écrite après les journées <strong>de</strong> 1848. Les réflexions qu'elle contient sont évi<strong>de</strong>mment inspirées à MLP. par la Révolution<br />

sanglante <strong>de</strong>s journées <strong>de</strong> juin, dont il venait d'être le témoin à Paris (l'insurrection a fait <strong>de</strong>s milliers <strong>de</strong> victimes, dont l'archevêque<br />

Mgr Affre). MLP. fit aménager la maison du Regard en ambulance d'une trentaine <strong>de</strong> lits. Mais aucun blessé n'y fut apporté.<br />

Il autorisa ses frères à se rendre à l'Hôtel-Dieu où, <strong>de</strong>ux jours durant, ils soignèrent, consolèrent et assistèrent les blessés (cf. récit<br />

<strong>de</strong> M. Maignen, in Légen<strong>de</strong>s <strong>de</strong> l'atelier).<br />

252


manque quʹune chose pour<br />

que vos imaginations soient<br />

vraies, cʹest un peu <strong>de</strong> soleil<br />

et <strong>de</strong> beau temps. Depuis<br />

mon arrivée ici, en effet, la<br />

pluie nʹa pas cessé <strong>de</strong> nous<br />

inon<strong>de</strong>r; les chemins sont<br />

détrempés à nʹy pouvoir<br />

mettre le pied et je suis<br />

claquemuré du matin au soir<br />

dans ma chambre, où mon<br />

seul passe‐temps champêtre<br />

est <strong>de</strong> voir sous ma fenêtre<br />

couler lʹeau <strong>de</strong> la Seine, qui<br />

coule, coule toujours et<br />

toujours <strong>avec</strong> la plus imper‐<br />

turbable monotonie.<br />

Je ne mʹennuie pas<br />

toutefois, je mʹoccupe tour à<br />

tour <strong>de</strong>s affaires <strong>de</strong> ma<br />

famille et <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> mes<br />

<strong>de</strong>ux grands enfants, je lis<br />

un peu et je prie au milieu<br />

<strong>de</strong> tout cela. Jʹai accompagné<br />

ma nièce à Rouen pour son<br />

examen dont elle sʹest très<br />

bien tirée; je crois quʹaidée<br />

<strong>de</strong> sa mère, elle pourra<br />

recevoir quelques pension‐<br />

naires et les bien diriger;<br />

elles sont lʹune et lʹautre<br />

bonnes, intelligentes et<br />

pieuses surtout; <strong>avec</strong> ces<br />

qualités, on peut exercer une<br />

utile influence dans lʹédu‐<br />

cation <strong>de</strong>s jeunes filles.<br />

Mon neveu reviendra définitivement, après les vacances, pour étudier à Paris et sʹy<br />

préparer aux examens <strong>de</strong> St‐Cyr; il nʹa jusquʹici aucune inclination mauvaise; je pense<br />

donc quʹ<strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> surveillance on pourra le maintenir en bon chemin.<br />

Je me laisse aller à ces détails, chers amis, sans contrainte et en toute simplicité, sa‐<br />

chant bien que notre chère Communauté adopte <strong>de</strong> cœur les <strong>de</strong>voirs et les affections <strong>de</strong><br />

chacun <strong>de</strong> ses membres, en prenant soin seulement <strong>de</strong> tout élever et purifier en Dieu.<br />

Je ne trouverais guère, du reste, dʹinspirations dans ce qui mʹentoure pour vous en‐<br />

tretenir <strong>de</strong> sujets dʹun intérêt plus général. Les provinces, au moins dans les petites locali‐<br />

tés comme celle où je me trouve, ne fournissent pas, comme Paris et les gran<strong>de</strong>s villes, <strong>de</strong>s<br />

253


occasions continuelles <strong>de</strong> bonnes œuvres; il nʹy a presque pas <strong>de</strong> pauvres ici, sauf quelques<br />

vieillards que lʹassistance <strong>de</strong> tous nourrit; ils sont si peu malheureux dʹailleurs quʹils ne<br />

veulent pas changer leur condition; on a essayé <strong>de</strong> créer un petit hospice, mais, à lʹexcep‐<br />

tion <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux ou trois vieilles femmes tout à fait impotentes et <strong>de</strong> tête affaiblie, on nʹa pu y<br />

attirer personne. La misère nʹexiste réellement que là où fleurit lʹindustrie, non pas que le<br />

travail <strong>de</strong> lʹhomme soit maudit dans cette forme plus que dans une autre, mais parce que<br />

lʹouvrier est placé dans <strong>de</strong>s conditions qui lui font oublier Dieu et quʹil ne revient pas à Lui<br />

par la prière; parce quʹil nʹest plus en présence <strong>de</strong>s grands aspects <strong>de</strong> la nature, parce que<br />

son œuvre lui est exclusivement propre et nʹest pas, comme dans les travaux <strong>de</strong>s champs,<br />

faite en association <strong>avec</strong> le Créateur; parce quʹenfin le prix <strong>de</strong> son labeur nʹest pas la mois‐<br />

son, les vendanges, tous les admirables fruits <strong>de</strong> la terre, mais lʹargent qui ne représente<br />

pour lui quʹun moyen dʹéchange ou la satisfaction <strong>de</strong>s besoins matériels. Il semble quʹil<br />

manque à la gloire du christianisme dʹavoir spiritualisé et ennobli lʹindustrie mo<strong>de</strong>rne,<br />

comme il a vivifié et relevé le travail dans tous les temps. Serait‐ce que lʹindustrie, telle<br />

quʹelle est aujourdʹhui constituée, produit dʹune concurrence jalouse, <strong>de</strong>s prétentions<br />

égoïstes <strong>de</strong>s uns, <strong>de</strong>s exigences injustes <strong>de</strong>s autres, <strong>de</strong> la cupidité <strong>de</strong> tous, est radicalement<br />

perverse et rebelle à tout amen<strong>de</strong>ment? Je ne sais, mais à voir lʹimmensité du mal, on sʹen<br />

effraie et lʹon est tenté <strong>de</strong> le croire sans remè<strong>de</strong>. Nous continuerons pourtant, nous autres,<br />

très chers amis, à travailler à cette tâche par nos toutes petites œuvres et dans la mesure <strong>de</strong><br />

nos forces; nous patronnerons nos apprentis, nous moraliserons quelques pauvres ou‐<br />

vriers, sans nous étonner <strong>de</strong>s difficultés, sans nous décourager <strong>de</strong> nos minces résultats;<br />

tout labeur a son fruit et son mérite <strong>de</strong>vant Dieu; si nos œuvres ne sont pas comme les<br />

fleuves qui arrosent les provinces, elles seront comme le ruisseau qui baigne les prairies,<br />

fécon<strong>de</strong> un champ et fait éclore quelques fleurs. Puissent ces fleurs <strong>de</strong> vertu et <strong>de</strong> dé‐<br />

vouement sʹépanouir parmi nous, cʹest le charme <strong>de</strong> la terre et le parfum du ciel. Je croi‐<br />

rais, pour moi, notre petite Communauté utile et chère aux yeux du Seigneur si chacun <strong>de</strong><br />

nous, en sa voie, faisait fleurir quelque vertu. Je me plais, par la pensée, chers amis, à noter<br />

celles qui me semblent propres à chacun <strong>de</strong> vous et jʹai la douce confiance quʹelles croî‐<br />

tront <strong>de</strong> jour en jour. Je tâche, dans mon éloignement, <strong>de</strong> ne pas être entièrement inutile à<br />

notre petite famille <strong>de</strong> frères, je prie chaque jour longuement pour notre œuvre et pour<br />

vous tous, je vous mets tour à tour dans les Cœurs <strong>de</strong> Jésus et <strong>de</strong> Marie, jʹéprouve toujours<br />

après ces prières une douce consolation, je me rapproche ainsi <strong>de</strong> vous, je concours au bien<br />

que vous faites et je resserre le lien qui nous unit. Que nous serons heureux, chers frères, et<br />

que nous serons forts si nous sommes bien convaincus un jour que la prière est la seule<br />

gran<strong>de</strong> puissance du mon<strong>de</strong>, que cʹest la plus noble et la plus haute <strong>de</strong>s œuvres, et que<br />

toute action; tout travail est méritoire et saint si la prière le relève et le sanctifie. Chers<br />

amis, au jour où vous recevrez ce mot <strong>de</strong> lettre, priez un peu plus que <strong>de</strong> coutume, priez<br />

plus ar<strong>de</strong>mment et <strong>avec</strong> plus <strong>de</strong> tendresse; je le ferai pour ma part aussi et cette légère<br />

feuille sur laquelle jʹécris pèsera comme un vrai mérite <strong>de</strong>vant le Seigneur.<br />

Prions beaucoup, chers amis, et nous soulèverons par la prière ces masses corrom‐<br />

pues par le souffle <strong>de</strong> lʹindustrie, prions ar<strong>de</strong>mment et nous réchaufferons ces millions<br />

dʹâmes engourdies dans lʹindifférence et toutes absorbées dans les préoccupations <strong>de</strong> la<br />

terre. Nos œuvres sont <strong>de</strong> futiles jeux dʹenfants sans proportion <strong>avec</strong> leur fin, si la prière<br />

ne les secon<strong>de</strong> et nʹagrandit leur action. Notre seule force est là, <strong>avec</strong> notre paix aussi et<br />

lʹunique douceur <strong>de</strong> notre vie.<br />

254


Adieu, très chers amis,<br />

sachez bien que vous êtes ma<br />

vraie famille, ma famille selon<br />

le cœur et selon lʹesprit; je me<br />

tiens sans cesse uni à vous et jʹai<br />

lʹintime confiance que le bon<br />

Dieu nous unira un jour en Lui<br />

dʹune ineffable et éternelle<br />

union. Je vous embrasse tous, y<br />

compris notre cher Adrien qui,<br />

je lʹespère, correspond aux<br />

grâces <strong>de</strong> Dieu et <strong>de</strong>viendra<br />

lʹédification <strong>de</strong> notre petite<br />

Congrégation.<br />

Offrez tous mes<br />

souvenirs affectueux à nos amis<br />

et remerciez‐les pour moi du<br />

surcroît <strong>de</strong> soins quʹils ont à<br />

prendre en mon absence.<br />

Souvenir aussi aux bons Féline.<br />

Ecrivez‐moi bientôt; je me porte<br />

médiocrement.<br />

Votre frère en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je prie mon bien<br />

cher f. Maignen dʹaller voir M me<br />

Rullier, 24 rue Cassette, pour<br />

lʹassurer <strong>de</strong> mon souvenir<br />

respectueux; jʹai vu M me <strong>de</strong> la<br />

Bouillerie, je rendrai compte à<br />

M me Rullier <strong>de</strong> ma visite à mon<br />

arrivée.<br />

185 à MM. Maignen, Myionnet et Paillé<br />

Le F. Maignen doit se reposer. Quʹil vienne sans délai à Duclair. Exhortation à lʹunion et à la charité fraternel‐<br />

les.<br />

Duclair, samedi 2 septembre 1848<br />

Mes bien‐aimés frères,<br />

Je suis profondément touché <strong>de</strong> la tendre affection que vous me témoignez tous les<br />

trois; la pensée que vous avez eue <strong>de</strong> mʹécrire, chacun <strong>de</strong> votre côté, une petite lettre est<br />

très aimable et mʹa causé une véritable satisfaction; chacun, en effet, a mis un peu <strong>de</strong> soi<br />

dans ce petit mot et sʹest ainsi rendu présent au frère qui est loin <strong>de</strong> ses amis.<br />

255


Je remercie tendrement le f. Paillé <strong>de</strong> tout ce quʹil me dit dʹencourageant sur la<br />

Sainte‐Famille, et je suis assuré quʹon doit attribuer le succès <strong>de</strong> la séance à ses soins chari‐<br />

tables et prévoyants.<br />

Ce que vous me dites, cher f. Myionnet, <strong>de</strong> la fatigue <strong>de</strong> notre f. Maignen mʹavait<br />

déjà frappé; vos observations me confirment dans la pensée quʹun peu <strong>de</strong> repos et <strong>de</strong> dis‐<br />

traction lui sont nécessaires. Aussi, après y avoir réfléchi, je me déci<strong>de</strong> à le faire venir ici<br />

pour passer <strong>avec</strong> moi en Normandie la semaine prochaine. Si, par une réserve louable et<br />

dans la crainte <strong>de</strong> prendre un repos que vous ne partagez pas, il faisait quelque difficulté,<br />

dites‐lui que je lʹai réglé ainsi dans lʹintérêt commun et quʹil faut se conformer à cette dis‐<br />

position. Je viens <strong>de</strong> lui arrêter une petite chambre près <strong>de</strong> moi, ne pouvant le loger chez<br />

ma sœur, et jʹarrangerai les choses assez économiquement pour que son séjour ici ne coûte<br />

guère plus cher que sʹil restait à Paris.<br />

Lʹétat <strong>de</strong> sa gar<strong>de</strong>‐robe, un peu négligée en ce moment, pourrait lui faire une diffi‐<br />

culté, mais, ici comme toujours, la Communauté nous tirera dʹaffaire; il y a dans ma com‐<br />

mo<strong>de</strong>, à Paris, un gilet <strong>de</strong> soie noire encore assez propre, quʹil le prenne; le f. Paillé peut lui<br />

prêter une redingote ou son habit dʹété; arrangez‐vous enfin pour le mieux ensemble, vous<br />

êtes frères, aucun <strong>de</strong> vous nʹa rien à soi. Si le f. Maignen sʹaccommodait <strong>de</strong> lʹhabit dʹété,<br />

quʹil ait soin néanmoins <strong>de</strong> prendre sa redingote; les matins et soirs sont très froids ici, il<br />

ne serait pas assez vêtu <strong>avec</strong> un vêtement dʹété. Du reste, pourvu quʹil soit propre grosso<br />

modo, cela suffit; il sera à la campagne et en famille. Il aura assez <strong>de</strong> 25f pour son voyage; le<br />

f. Myionnet les lui donnera.<br />

Je prie M. Maignen <strong>de</strong> faire diligence, car je désirerais ne passer plus quʹune se‐<br />

maine ici. Vous recevrez cette lettre <strong>de</strong>main dimanche; rien nʹempêche que notre cher frère<br />

ne parte après‐<strong>de</strong>main lundi; une si courte absence nʹa besoin ni dʹapprêts, ni <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s<br />

dispositions; cʹest dʹailleurs sʹaccoutumer à tout quitter sur lʹheure, quand les circonstances<br />

le veulent, et prendre un bon pli pour lʹavenir.<br />

Il peut, comme je lʹai fait, partir par le convoi <strong>de</strong> 10h. Il prendra sa place jusquʹà Ba‐<br />

rentin; là une petite voiture, sorte dʹomnibus, le prendra tout <strong>de</strong> suite et lʹamènera à Du‐<br />

clair, où il sera avant 4h. Je désire quʹil parte lundi, sʹil nʹy a pas dʹobstacle absolu; je lʹat‐<br />

tendrai à lʹarrivée <strong>de</strong> la voiture.<br />

Je voudrais, chers frères, mʹentretenir un peu à loisir <strong>avec</strong> vous, mais je suis un peu<br />

en hâte et aussi un peu souffrant; lʹair plus vif <strong>de</strong> ce pays me saisit et me cause ces inflam‐<br />

mations dont nous parlons souvent à Grenelle et qui dureront autant que moi; il est donc<br />

inutile dʹinsister, le sujet reviendra bien dʹautres fois.<br />

Je répondrai particulièrement à vos petites épîtres dans le cours <strong>de</strong> la semaine et<br />

vous annoncerait en même temps le jour précis <strong>de</strong> notre retour. En attendant, je prie <strong>de</strong><br />

toute mon âme pour vous; tous les jours, je reste <strong>de</strong> 7h. à 8h.½ en présence <strong>de</strong> Dieu dans<br />

lʹéglise; votre souvenir, très chers frères, ne me quitte pas un instant; aimez beaucoup le<br />

bon Dieu, notre Père, notre Ami; aimez‐vous beaucoup les uns les autres, soyez frères en<br />

J.C. comme le divin Seigneur était le frère <strong>de</strong> saint <strong>Jean</strong>, lʹapôtre bien‐aimé; cʹest là ce que je<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> tous les jours, cʹest là ce que nous obtiendrons du Cœur si tendre <strong>de</strong> notre Dieu.<br />

Je vous recomman<strong>de</strong> tous à sa charité et à celle <strong>de</strong> Marie, notre Mère, au bon saint Vincent,<br />

notre Patron et protecteur, et à vos saints anges gardiens. Je vous embrasse tous affectueu‐<br />

sement, en particulier notre cher Adrien dont je suis content; jʹaugure bien <strong>de</strong> son avenir,<br />

quʹil prie un peu pour moi. Souvenir <strong>de</strong> tendre respect à M. Beaussier, bonne amitié à nos<br />

256


Féline. Souvenir à M. le Curé <strong>de</strong> Grenelle, sʹil y a lieu, et affection à tous nos amis. Jʹécrirais<br />

quelques mots au f. Lecoin<br />

[Le <strong>Prevost</strong>]<br />

186 à MM. Myionnet ou Paillé<br />

Se détacher <strong>de</strong>s beautés <strong>de</strong> ce mon<strong>de</strong>. Revoir <strong>avec</strong> joie ʺnotre pauvre petite <strong>de</strong>meure <strong>de</strong> Grenelleʺ. MLP. exalte la<br />

tâche et la mission <strong>de</strong>s Frères <strong>de</strong> St‐Vt‐<strong>de</strong>‐Paul.<br />

Duclair, 7 septembre 1848<br />

Très cher frère,<br />

Je vous ai dit que je vous écrirais quelques mots avant mon retour, pour vous mar‐<br />

quer plus précisément le jour <strong>de</strong> notre arrivée. Nous partirons dʹici mardi dans la matinée<br />

et nous serons à temps à Paris pour dîner <strong>avec</strong> vous.<br />

Jʹai trouvé, comme vous me lʹaviez dit, notre f. Maignen très fatigué; il a peine à<br />

marcher; quoique souffrant moi‐même et bien épuisé, je suis encore plus fort que lui. Le<br />

bon air <strong>de</strong> ce pays lui fait grand bien et surtout la beauté <strong>de</strong> nos bois, <strong>de</strong> nos vallées le<br />

charme et le repose, mais il faudra vite quitter tout cela; nous autres, serviteurs <strong>de</strong> Dieu, il<br />

ne nous est pas donné <strong>de</strong> prendre possession <strong>de</strong>s choses et dʹen jouir comme d’un bien<br />

propre; nous les prenons en hâte et en aperçu, comme <strong>de</strong>s voyageurs qui contemplent un<br />

moment <strong>de</strong> riches domaines ou <strong>de</strong> beaux paysages et qui passent outre, pressés dʹarriver à<br />

leur but. Nous vous reviendrons donc, chers amis, non seulement sans regret, mais <strong>avec</strong><br />

plaisir; nous reverrons <strong>avec</strong> joie notre pauvre petite <strong>de</strong>meure <strong>de</strong> Grenelle dont lʹaspect<br />

nʹest guère champêtre, dont les horizons sont bien bornés, mais où le calme et la paix se<br />

trouvent dans le recueillement, dans la prière commune et dans la tendre affection <strong>de</strong>s frè‐<br />

res.<br />

Vous prendrez à votre tour un peu <strong>de</strong> repos, et après nous nous efforcerons tous<br />

ensemble <strong>de</strong> remplir la tâche si belle et si sanctifiante que le Divin Maître nous a donnée;<br />

prier, édifier nos frères, les assister dans leurs peines, relever leur cœur trop incliné aux<br />

choses dʹen bas, quel plus noble emploi <strong>de</strong> notre vie! Je ne sais, quand jʹy pense, comment<br />

bénir le Seigneur qui, <strong>de</strong> préférence à tant dʹautres, daigne nous admettre à <strong>de</strong> si grands<br />

services. Soyons dignes dʹun pareil choix, prenons une haute idée, non <strong>de</strong> nous‐mêmes,<br />

mais <strong>de</strong> notre mission, et tout nous paraîtra beau dans nos humbles travaux, et tout nous<br />

paraîtra doux dans nos chers exercices. Cʹest dans ces pensées que je mʹentretiens loin <strong>de</strong><br />

vous; je tâche que, même mes jours <strong>de</strong> repos concourent à notre œuvre, et je reprends <strong>de</strong>s<br />

forces pour le corps, <strong>de</strong> la résolution pour le cœur, afin <strong>de</strong> secon<strong>de</strong>r mieux les efforts <strong>de</strong><br />

votre charité.<br />

Adieu, bien cher ami et frère; je mʹunis tendrement à vous dans les Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong><br />

M. et suis pour toujours<br />

Votre frère dévoué<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

257


187 à M. Levassor<br />

Décès <strong>de</strong> M. Mayer, qui avait apporté son ai<strong>de</strong> à M. Levassor. Création <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> retraite <strong>de</strong> Nazareth.<br />

Paris, 13 septembre 1848<br />

Mon bien cher frère,<br />

En arrivant (hier au soir) <strong>de</strong> Normandie où jʹétais allé prendre quelques jours <strong>de</strong> re‐<br />

pos, je trouve votre lettre et je mʹempresse, comme vous le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z, <strong>de</strong> vous renvoyer<br />

votre malle; elle vient dʹêtre portée à la diligence <strong>de</strong> Chartres, rue <strong>de</strong>s Deux Ecus, je pense<br />

quʹelle vous arrivera promptement. Nos amis ne vous lʹavaient pas renvoyée en mon ab‐<br />

sence, dans la pensée que Monsieur votre frère nʹavait pas encore quitté Paris et quʹil<br />

pourrait lʹemporter lui‐même. On nʹavait pas, à mon regret, remarqué, au moment où elle<br />

fut renvoyée par le pauvre M. Mayer, quʹil nʹy avait pas joint la clef; ce sera donc encore un<br />

petit ennui pour vous à mettre <strong>avec</strong> tous les autres. Vous ne me <strong>de</strong>viez du reste que 13f 50.<br />

Jʹaurai donc à vous tenir compte <strong>de</strong> 1f 50, ayant fait porter la malle par notre portier sans<br />

employer <strong>de</strong> commissionnaire.<br />

Jʹignorais la mort du malheureux M. Mayer; je ne sais, en prenant bien les choses, si<br />

cet événement est à regretter, puisquʹil est mort en bonnes et chrétiennes dispositions,<br />

lʹavenir nʹeût pas été peut‐être meilleur pour lui que le passé, et lʹexaltation <strong>de</strong> son esprit<br />

eût été pour lui un péril continuel; je bénis Dieu qui lʹa traité dans sa miséricor<strong>de</strong>, ayant<br />

égard aux bons désirs <strong>de</strong> son cœur plutôt quʹaux inspirations <strong>de</strong> sa tête. Nous passerons<br />

au Val‐<strong>de</strong>‐Grâce.<br />

Je suis heureux dʹapprendre, cher ami, que malgré les difficultés <strong>de</strong>s temps, vos<br />

œuvres ont souffert seulement sans être compromises quant à leur existence; le précieux<br />

appui qui vous arrive vous sera dʹun grand secours et vous permettra <strong>de</strong> réaliser vos bon‐<br />

nes pensées <strong>de</strong> charité. Nous languissons un peu nous‐mêmes, mais nous ne mourons pas<br />

non plus, tout ce que vous connaissez <strong>de</strong> nos essais subsiste et sʹest même accru cette an‐<br />

née par la création <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> retraite <strong>de</strong> Nazareth qui donne asile à 20 <strong>de</strong>s plus vieux<br />

ménages <strong>de</strong> la Sainte‐Famille. Le premier numéro du Bulletin <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> Saint‐Vincent‐<br />

<strong>de</strong>‐Paul vous aura donné sur cette œuvre quelques détails qui vous auront peut‐être inté‐<br />

ressé. Elle est facile à imiter, je pense quʹelle le sera prochainement dans divers lieux.<br />

Notre petite association fraternelle, à laquelle vous voulez bien vous intéresser par‐<br />

ticulièrement, sʹest aussi un peu augmentée. Nous sommes 4, plus un jeune postulant. Il y<br />

a loin encore <strong>de</strong> là au temps où nous pourrons vous envoyer quelque colonie pour prendre<br />

racine, sʹil se peut, sur votre sol, mais il faut que nous nous façonnions nous‐mêmes avant<br />

<strong>de</strong> vouloir former les autres. Le Seigneur daigne nous conduire par la main et nous mon‐<br />

trer sensiblement son appui; bénissez‐le <strong>avec</strong> nous, cher frère, et priez‐le pour que nous<br />

soyons dignes <strong>de</strong> sa bonté paternelle.<br />

Recevez les affections respectueuses <strong>de</strong> mes chers frères, et croyez‐moi bien uni à<br />

vous en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

258


188 à MM. Myionnet, Maignen et Paillé 164<br />

La permission <strong>de</strong> conserver le Saint‐Sacrement à Grenelle est accordée 165 . MLP. exprime sa reconnaissance. Ar‐<br />

<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> sa foi et <strong>de</strong> son amour pour Dieu. Hymne à la Croix. Recommandations pratiques pour aménager digne‐<br />

ment les lieux.<br />

Duclair, 4 septembre 1849<br />

Très chers frères,<br />

Je me sens pressé <strong>de</strong> bénir le Seigneur <strong>avec</strong> vous <strong>de</strong> son extrême con<strong>de</strong>scendance<br />

pour ses pauvres et indignes serviteurs; je lʹeusse fait hier déjà si nous nʹeussions été ab‐<br />

sents tout le jour; mais combien <strong>de</strong> fois durant la journée cette douce pensée mʹest venue et<br />

comme mon cœur était heureux et reconnaissant. Dès les premières lignes <strong>de</strong> la lettre <strong>de</strong><br />

M. Beaussier, ouverte avant les autres, jʹai compris, et par un mouvement irrésistible, je<br />

suis tombé à genoux, les larmes aux yeux et, me frappant la poitrine, comme je le faisais<br />

<strong>de</strong>puis quelque temps, je me suis écrié: Domine, non sum dignus; jʹai dit ensuite <strong>de</strong> toute<br />

lʹar<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> mon âme le Te Deum et aussi le Magnificat pour associer notre bien‐aimée Mère<br />

à ce grand événement que ses tendres instances auront certainement préparé. Que nous<br />

faut‐il <strong>de</strong> plus et que nous restera‐t‐il à désirer désormais? Dieu a tant aimé le mon<strong>de</strong> quʹil<br />

lui a donné son Fils unique 166 , et nous aussi, Il a tant aimé notre faiblesse et notre misère<br />

quʹIl va <strong>de</strong>scendre parmi nous, dans notre pauvre maison, pour <strong>de</strong>meurer <strong>avec</strong> nous sous<br />

le même toit, prési<strong>de</strong>r nos petits exercices, nous conseiller, nous diriger en toutes choses,<br />

travailler, prier, aimer <strong>avec</strong> nous et en nous; cʹest sur terre la félicité suprême; cʹest le pain<br />

<strong>de</strong>s anges donné, non plus à chacun <strong>de</strong> nous en particulier, mais à la petite Communauté<br />

entière que le bon Maître adopte et se consacre ainsi définitivement. Oh! encore une fois,<br />

que nous reste‐t‐il à souhaiter en ce mon<strong>de</strong>? Rien, sinon <strong>de</strong> répondre à tant <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong><br />

et dʹamour. Cʹest lʹheure <strong>de</strong> nous rappeler cette parole profon<strong>de</strong> que nous citions un jour<br />

entre nous: Point dʹamour sans conformité, point <strong>de</strong> conformité sans croix. Le Bien‐Aimé,<br />

en entrant sous notre toit, y viendra <strong>avec</strong> la croix; cʹest son seul trésor, cʹest tout ce quʹIl<br />

possè<strong>de</strong> et apporte à ses hôtes, cʹest son livre, cʹest sa science pour les enseigner, cʹest sa<br />

force pour les aguerrir et les former; quʹIl soit le bienvenu et sa croix <strong>avec</strong> Lui; déjà sa ve‐<br />

nue sʹétait fait pressentir par quelques petites atteintes et mouvements intérieurs qui nous<br />

poussaient à nous humilier, à reconnaître notre néant <strong>de</strong>vant Lui, à souhaiter ou à accepter<br />

au moins notre petitesse et notre abjection; à ces signes, nous aurions pu <strong>de</strong>viner son ap‐<br />

proche si nous eussions été mieux éclairés; maintenant, Il prendra soin lui‐même <strong>de</strong> nous<br />

dresser à son école, préparons donc nos cœurs et rendons‐les dociles, car lʹheure <strong>de</strong> <strong>de</strong>ve‐<br />

nir humbles, pauvres et mortifiés est enfin arrivée; mon Dieu, vos enfants se presseront<br />

autour <strong>de</strong> Vous pour Vous entendre et pour Vous contempler, ils seront bien faibles et<br />

bien inhabiles, mais ils auront le bon désir, lʹar<strong>de</strong>ur dʹapprendre et une tendre confiance en<br />

Vous!<br />

164 Cette belle lettre du 4 septembre est la première <strong>de</strong> l'année 1849. Près d'une année d'interruption (356 jours!) dans les lettres re-<br />

trouvées.<br />

165 "Il y avait alors à Paris, rue Cassette, (au 32), une Communauté <strong>de</strong> jeunes prêtres, aussi éminents par leur piété et leur zèle que<br />

distingués par le talent et la naissance : MM. les abbés <strong>de</strong> Ségur, <strong>de</strong> Conny; Gay, Gibert, Le Rebours, etc. Cette petite Communauté<br />

entretenait <strong>avec</strong> la Communauté laïque <strong>de</strong> MLP. les relations d'œuvres et d'amitié les plus intimes. L'abbé <strong>de</strong> Ségur prêchait les<br />

retraites d'apprentis à la rue du Regard, l'abbé Gibert s'occupait <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Nazareth…c'est par l'entremise <strong>de</strong> ces ecclésiastiques<br />

que MLP. avait fait <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à l'archevêché <strong>de</strong> Paris l'autorisation d'une messe par semaine en son oratoire <strong>de</strong> Grenelle. Ces<br />

excellents prêtres avaient joint, <strong>de</strong> leur propre chef, à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> MLP., celle <strong>de</strong> conserver la sainte réserve." (VLP., I, p.356)<br />

166 Jn 3,16.<br />

259


Je désire, très chers amis, que vous vous occupiez, dès ce moment, <strong>de</strong> faire préparer<br />

les lieux pour recevoir lʹHôte divin; la simplicité et la pauvreté ne lui déplairont pas, cʹest à<br />

cela que nous <strong>de</strong>vons nous en tenir, propreté et simple convenance, voilà les termes dans<br />

lesquels nous <strong>de</strong>vons rester. Pour commencer, et en attendant mon arrivée, vous pouvez<br />

faire exécuter tous les ouvrages <strong>de</strong> réparation et assainissement dans les trois pièces, et,<br />

pour cela, vous <strong>de</strong>vriez, je crois, transporter provisoirement lʹoratoire dans la chambre qui<br />

est entre celle du f. Paillé et la mienne; cʹest là que nous serons le plus tranquilles. Je crois<br />

quʹon fera bien dʹemployer, contre lʹhumidité <strong>de</strong>s murs, le moyen si simple conseillé par<br />

M. Dufflon; on pourrait, pour essayer, le faire pratiquer par son ouvrier aux murs du par‐<br />

loir qui sont fort humi<strong>de</strong>s du côté du jardin; après avoir bien vu ainsi comment il colle et<br />

dispose les feuilles <strong>de</strong> plomb et avoir expérimenté ses prix, vous verriez si nous aurions<br />

une économie un peu réelle à employer, pour nos autres travaux, un ouvrier <strong>de</strong> la Sainte‐<br />

Famille nommé Tessier, rue St‐Placi<strong>de</strong>, je crois, fort brave homme et qui a fort bien ac‐<br />

commodé ma chambre à Paris; je crois que ce moyen serait le meilleur. Je désire aussi que<br />

mon f. Maignen voie M. Bion, <strong>de</strong> ma part, pour sʹassurer si, en faisant la Ste‐Anne, il ne<br />

pourrait faire réduire par son élève, obligeamment ou à prix bien modique, notre statue <strong>de</strong><br />

la Sainte Vierge. Il importe que nos travaux commencent sans retard et pendant quʹil reste<br />

encore un peu <strong>de</strong> belle saison; dès que les jours sont courts et humi<strong>de</strong>s, les ouvrages sont<br />

mauvais et nʹavancent pas; je vous recomman<strong>de</strong> donc, chers amis, la diligence; après les<br />

réparations, nous ferons le reste; on peut aussi sʹenquérir <strong>de</strong> toutes les choses nécessaires<br />

et <strong>de</strong>s moyens <strong>de</strong> les obtenir; je crois que ces détails sont assez multipliés et voudront<br />

quelque soin.<br />

Je suis vraiment touché, très chers frères, <strong>de</strong> votre affectueuse sollicitu<strong>de</strong> pour ma<br />

santé, M. Beaussier en est aussi fort édifié et en conçoit <strong>de</strong> bonnes espérances pour notre<br />

avenir. Pour vous complaire, chers amis, et surtout pour obéir à notre bon Père qui me le<br />

prescrit expressément, je suis disposé à me rendre aux bains; je prends seulement la<br />

confiance <strong>de</strong> soumettre avant à M. Beaussier quelques observations qui, je le crois, change‐<br />

ront son avis; sʹil en était autrement, je mʹempresserais <strong>de</strong> me conformer à sa décision. Il<br />

est bien tard pour les bains, les alternatives <strong>de</strong> froid et <strong>de</strong> chaud auxquelles je suis très sen‐<br />

sible sont plus pénibles déjà que dans lʹété; je ne puis aller aux bains en famille, ma sœur<br />

est obligée <strong>de</strong> rester chez elle en ce moment. Je ne pourrais mʹy rendre quʹ<strong>avec</strong> ma nièce,<br />

mais je crois quʹune si jeune personne ne passerait guère, sans un grand ennui, trois se‐<br />

maines <strong>avec</strong> moi, dans un pays qui nʹoffre aucun moyen <strong>de</strong> distraction; enfin, il me faut au<br />

moins huit jours pour mʹacclimater dans un lieu nouveau, je commence à me trouver<br />

mieux ici, faut‐il aller ailleurs faire un nouvel essai, moins heureux peut‐être? Ici, on met<br />

tout en œuvre pour me bien soigner, je nʹaurai rien <strong>de</strong> pareil aux bains; lʹair est excellent,<br />

les promena<strong>de</strong>s à ma portée et la tranquillité parfaite, cela ne vaut‐il pas mieux que les<br />

courses et voyages? Je crois quʹen passant ici trois semaines, au lieu <strong>de</strong> 15 jours précé‐<br />

<strong>de</strong>mment déterminés, je ferais tout ce qui peut être <strong>de</strong> plus favorable à ma santé et <strong>de</strong> plus<br />

praticable à tous égards; en même temps, et ceci est dʹun grand poids, je fais un bien réel à<br />

ma famille qui avait besoin <strong>de</strong> moi pour se réconforter et se remettre. Voilà mes raisons,<br />

chers frères, je crois quʹelles sont bonnes et dans les vues <strong>de</strong> Dieu; je me soumettrai pour‐<br />

tant sans hésiter à lʹavis <strong>de</strong> M. Beaussier, aimant mieux obéir que raisonner.<br />

Je prie mes ff. Maignen et Paillé <strong>de</strong> faire en sorte que la séance <strong>de</strong> dimanche <strong>de</strong> la<br />

Sainte‐Famille marche bien, cʹest essentiel, après la retraite surtout; lʹorateur est le grand<br />

260


moyen. Si M. Ratisbonne est là, il viendra volontiers, M. Cassan <strong>de</strong> Florac et beaucoup<br />

dʹautres, laïcs ou prêtres, seront aussi, je lʹespère, bien disposés.<br />

Je vous écrirai bientôt à chacun en particulier; je suis heureux dʹapprendre que les<br />

exercices se soutiennent bien et remercie le f. Myionnet <strong>de</strong>s détails quʹil me donne à ce su‐<br />

jet, mais je ne crois pas quʹil convienne que la petite direction du lundi soit partagée, la<br />

Communauté est trop peu nombreuse pour cela; cet exercice doit donc être réservé jusquʹà<br />

mon retour.<br />

Adieu, mes bien‐aimés frères, je vous embrasse tous dans<br />

les Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M. et jʹy <strong>de</strong>meure <strong>avec</strong> vous.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je viens dʹécrire à MM. Beaussier et Gibert.<br />

Il serait bon aussi que mon cher f. Maignen concertât <strong>avec</strong><br />

M. <strong>de</strong> Ségur 167 le petit tableau lorsquʹil sera un peu sûr <strong>de</strong> ses<br />

dimensions.<br />

189 à M. Levassor<br />

Joie dʹavoir le Saint‐Sacrement à Grenelle. Qualités exigées pour un jeune employé. Importance dʹun recrute‐<br />

ment soli<strong>de</strong>.<br />

Duclair, 5 septembre 1849<br />

Mon bien cher frère,<br />

Permettez‐moi, avant toutes choses, <strong>de</strong> vous faire partager la joie que jʹéprouve en<br />

ce moment. Venu ici pour quelques jours, à cause <strong>de</strong> la santé <strong>de</strong> ma sœur et <strong>de</strong> celle <strong>de</strong> sa<br />

fille, lʹune et lʹautre très fatiguées, je viens <strong>de</strong> recevoir <strong>de</strong> mes frères une lettre par laquelle<br />

ils mʹannoncent que Mgr lʹArchevêque accor<strong>de</strong> à notre petite Communauté, non seulement<br />

la permission <strong>de</strong> faire dire la Sainte Messe comme nous lʹespérions, mais la faveur insigne<br />

<strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r le Très Saint‐Sacrement. Une pareille grâce nous comble <strong>de</strong> joie et <strong>de</strong> confusion;<br />

je me sens le besoin, très cher ami, <strong>de</strong> lʹépancher <strong>avec</strong> vous et surtout <strong>de</strong> vous conjurer <strong>de</strong><br />

rendre grâces au Seigneur <strong>de</strong> tant <strong>de</strong> con<strong>de</strong>scendance et <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong> pour ses indignes<br />

serviteurs; sʹil ne vous est pas impossible <strong>de</strong> nous accor<strong>de</strong>r une messe dʹaction <strong>de</strong> grâces à<br />

cette intention, vous me causerez une vive satisfaction; nous avons prié beaucoup pour ob‐<br />

tenir cette faveur; je désire que notre reconnaissance soit aussi fervente que nos <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s.<br />

Mon éloignement <strong>de</strong> Paris en cet instant ne me permet pas <strong>de</strong> vous dire par qui sera<br />

donnée la retraite ecclésiastique à Paris; mais, si vous désirez le savoir, vous pouvez écrire<br />

à M. Myionnet qui le remplace et qui sʹenquerra <strong>de</strong> cette intéressante affaire; je nʹai pas be‐<br />

soin <strong>de</strong> vous dire, très cher ami, que si vous vous déci<strong>de</strong>z à venir et que notre pauvre re‐<br />

fuge <strong>de</strong> Grenelle soit à votre gré, malgré son éloignement, vous en pourrez disposer; vous<br />

trouveriez au besoin une chambre rue du Regard, 16, mais une chambre seulement, aucun<br />

vestige <strong>de</strong> ménage ne nous restant <strong>de</strong> ce côté et le bonhomme portier étant absolument<br />

impropre au service intérieur.<br />

Le livre <strong>de</strong> méditation dont nous faisons usage en ce moment est dʹAvancin, Jésuite<br />

flamand, je crois, qui a écrit ce livre en latin; la traduction que nous avons est abrégée et<br />

bien inférieure à lʹoriginal. Pour lʹaccommo<strong>de</strong>r aux besoins <strong>de</strong>s gens du mon<strong>de</strong>, on y a re‐<br />

167<br />

"L'abbé Gaston <strong>de</strong> Ségur s'était engagé à peindre <strong>de</strong> ses mains un tableau pour l'autel et l'abbé Gibert avait donné un bel ornement<br />

blanc et rouge et un grand missel fort riche".<br />

261


tranché tout ce qui concerne les prêtres et les religieux; lʹoriginal, que vous préférerez sans<br />

doute, se vend chez Périsse, rue Petit‐Bourbon, 18; la traduction sʹy trouve également ‐ 2<br />

volumes in‐18.<br />

Je vous remercie infiniment, très cher frère, du soin que vous avez pris <strong>de</strong> nous as‐<br />

surer un jeune frère servant; votre réponse ayant tardé à venir, jʹavais pensé que vous<br />

aviez perdu la chose <strong>de</strong> vue et jʹavais arrangé dʹautres dispositions; un jeune apprenti <strong>de</strong><br />

notre patronage, âgé <strong>de</strong> 17 ans, sortant <strong>de</strong> la condition commune par son éducation<br />

comme par sa piété et ses sentiments, nous a paru pouvoir nous convenir à beaucoup<br />

dʹégards et nous lʹavons admis parmi nous; toutefois, comme il est infirme et peu propre<br />

aux soins domestiques, il nous sera plus utile pour les détails <strong>de</strong> nos œuvres que pour la<br />

maison; je ne serais donc pas éloigné dʹen prendre un autre, sʹil sʹen présentait un qui eût<br />

les aptitu<strong>de</strong>s convenables. Croyez‐vous, cher frère, que votre enfant soit dans ce cas et<br />

quʹil soit, par exemple, assez rassis, assez persévérant surtout pour faire, après un peu<br />

dʹapprentissage, notre cuisine, simple entre toutes, mais cuisine pourtant, cuisine <strong>de</strong> tous<br />

les jours, et pour un temps que je ne puis préciser, puisquʹune fois dans un emploi, on nʹen<br />

sort que pour <strong>de</strong> bonnes raisons et pour le plus grand bien <strong>de</strong> nos œuvres. Cela nʹest‐il pas<br />

bien sérieux pour un homme <strong>de</strong> 16 ans? Il lui resterait sans doute beaucoup <strong>de</strong> temps et<br />

une partie serait employée à étudier et à le former à la piété; mais une fois encore, le plaisir<br />

<strong>de</strong> la nouveauté passé, trouverait‐on dans ce cher enfant, traité dʹailleurs <strong>avec</strong> toute la<br />

douceur et toute lʹindulgence possibles, la persévérance et la bonne volonté désirables? Je<br />

vous fais juge <strong>de</strong> ces questions, très cher ami; prenez en main la cause <strong>de</strong> notre œuvre<br />

naissante qui a besoin <strong>de</strong> se recruter soli<strong>de</strong>ment, dans ses commencements surtout, voyez<br />

<strong>de</strong>vant Dieu si on pourrait espérer, <strong>avec</strong> <strong>de</strong> la culture et du temps, faire <strong>de</strong> votre bon petit<br />

enfant un frère pieux, capable en un office quelconque, dévoué, persévérant, et ayez la<br />

bonté <strong>de</strong> me dire votre avis définitif; alors je prendrais, en mʹentendant <strong>avec</strong> vous, les me‐<br />

sures que le cas exigerait; rien nʹest <strong>de</strong> petite importance pour une œuvre si humble que la<br />

nôtre; je prierai donc le Seigneur <strong>de</strong> nous diriger pour le plus grand bien <strong>de</strong> cette chère<br />

âme et aussi pour celui <strong>de</strong> notre Communauté; je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, très cher frère, <strong>de</strong> prier à<br />

la même intention.<br />

Votre dévoué frère et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je resterai encore une douzaine <strong>de</strong> jours, chez M me Salva, à Duclair (Seine Inférieure).<br />

190 à M. Hello 168<br />

Félicitations pour avoir fondé lʹœuvre <strong>de</strong> la Sainte‐Famille en Bretagne. Conseils pour lʹapostolat adapté à cette<br />

nouvelle œuvre. Appel à <strong>de</strong>s vocations bretonnes.<br />

Duclair, 15 septembre 1849<br />

Très cher Confrère et ami,<br />

Votre petite lettre vient me chercher en Normandie où je suis venu pour prendre<br />

quelques jours <strong>de</strong> repos dans ma famille; quʹelle soit la bienvenue, elle augmente les dou‐<br />

168 Emile Hello (1825-1900). Né à Lorient dans une famille <strong>de</strong> magistrats, il est le frère du philosophe et écrivain Ernest Hello. Venu<br />

à Paris étudier le droit, il entre, après la mort <strong>de</strong> son père, au Séminaire St-Sulpice. Avant d'être ordonné prêtre en 1853 et <strong>de</strong> rejoindre<br />

l'Institut <strong>de</strong>s F. <strong>de</strong> St-Vt-<strong>de</strong>-Paul en 1854, il avait été le secrétaire <strong>de</strong> la Conférence St-Sulpice. Il collaborait étroitement<br />

<strong>avec</strong> MLP. à la Ste-Famille dont il décrivait ainsi le rayonnement :"La parole si vive du p. Milleriot, d'un côté, la parole si douce et<br />

si attirante <strong>de</strong> MLP. <strong>de</strong> l'autre, donnaient aux réunions un charme très grand, presque irrésistible." (C. Maignen, Le P. Hello, p.8).<br />

262


ces impressions quʹon retrouve toujours au milieu <strong>de</strong>s siens et dans son pays natal. Vous<br />

êtes un <strong>de</strong>s miens vous aussi, très cher ami, car vous voulez bien avoir quelque charité<br />

pour moi et mʹaccor<strong>de</strong>r cette indulgence si rare dans le mon<strong>de</strong> et quʹon ne trouve guère<br />

que dans la famille ou parmi les vrais enfants <strong>de</strong> Dieu. Je prie le Seigneur quʹIl vous en ré‐<br />

compense en vous gardant longtemps lʹentourage si affectueux et si bon quʹIl vous a don‐<br />

né et en affermissant vos pas dans la carrière qui commence à sʹouvrir <strong>de</strong>vant vous.<br />

Que vous êtes heureux, très cher frère, dʹavoir pu utiliser le temps <strong>de</strong>s vacances en<br />

favorisant la création dʹune nouvelle œuvre pour la gloire <strong>de</strong> Dieu. Jʹai bonne espérance<br />

pour lʹavenir <strong>de</strong> cette petite association qui va naître sur le sol béni <strong>de</strong> la Bretagne, sous<br />

vos yeux et grâce à vos soins; jʹy concourrai aussi <strong>de</strong> mon mieux par mes faibles prières; la<br />

Sainte‐Famille <strong>de</strong> St‐Sulpice tout entière sʹest également associée à vos efforts et a <strong>de</strong>man‐<br />

dé toutes les bénédictions du Seigneur pour la nouvelle sœur qui lui était donnée; je nʹétais<br />

pas présent à la réunion où cette recommandation a été faite, mais notre cher f. Paillé, qui<br />

mʹest arrivé ici <strong>de</strong>puis quelques jours, mʹa assuré que<br />

tous nos bons amis avaient cordialement répondu à<br />

lʹappel du p. Milleriot en priant <strong>avec</strong> ferveur pour la<br />

jeune Famille <strong>de</strong> Lorient.<br />

Je ne crois pas que, dans votre pays, la Sainte<br />

Messe soit un élément indispensable <strong>de</strong>s réunions <strong>de</strong><br />

la Sainte‐Famille parce que les ouvriers ne manquent<br />

guère dʹy aller; ce nʹest pas, comme ici, la foi qui fait<br />

défaut, mais une certaine vie plus ar<strong>de</strong>nte et plus<br />

active qui tire les âmes dʹune pratique purement<br />

routinière <strong>de</strong>s choses saintes pour leur en redonner<br />

lʹintelligence et lʹamour. Les instructions bien<br />

appropriées aux besoins <strong>de</strong>s esprits et prises dans les<br />

habitu<strong>de</strong>s, les mœurs, les dispositions <strong>de</strong> vos<br />

membres sont le véritable moyen dʹinfluer sur eux et<br />

<strong>de</strong> leur faire un grand bien; si vous avez un prêtre<br />

dévoué qui prenne à cœur lʹédification <strong>de</strong> son petit<br />

troupeau, qui ten<strong>de</strong> à unir ensemble les associés et à en faire vraiment une famille <strong>de</strong> frè‐<br />

res, si vous obtenez dʹune autre part lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> quelques laïcs qui secon<strong>de</strong> lʹaction du direc‐<br />

teur spirituel par tous les moyens en usage ici et par tous ceux que leur propre expérience<br />

<strong>de</strong>s lieux leur suggérera, vous réussirez, jʹen suis assuré, selon vos vœux. Donner aux pau‐<br />

vres ouvriers la vraie lumière qui leur manque, les unir entre eux par les liens <strong>de</strong> la charité,<br />

afin dʹadoucir leur peine et <strong>de</strong> diminuer leur faiblesse, nʹest‐ce pas un besoin à Lorient<br />

comme à Paris, comme à Lille, à Tours, et partout? Ayons donc confiance, cher ami,<br />

prions, faisons <strong>de</strong> notre mieux et attendons le succès <strong>de</strong> la bonté <strong>de</strong> Dieu. Ne pourrait‐on<br />

terminer les réunions par un petit salut <strong>avec</strong> la bénédiction du Saint Sacrement? Vous sa‐<br />

vez combien cette partie <strong>de</strong> lʹoffice du soir favorise la piété et combien il touche les cœurs<br />

les moins fervents. Faites visiter les mala<strong>de</strong>s, montrez beaucoup dʹaffection et <strong>de</strong> bienveil‐<br />

lance aux membres <strong>de</strong> la Sainte‐Famille, faites quʹune tendre charité soit vraiment lʹesprit<br />

<strong>de</strong> lʹœuvre et vous aurez fondé définitivement la petite société.<br />

Remerciez le Divin Maître <strong>avec</strong> nous, très cher ami; par une faveur que notre indi‐<br />

gnité nʹosait espérer, Il veut bien habiter notre pauvre petite maison <strong>de</strong> Grenelle; M gr lʹAr‐<br />

263


chevêque vient <strong>de</strong> nous accor<strong>de</strong>r la permission dʹavoir la Sainte Messe et <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r le Très<br />

Saint Sacrement, nous ne pouvons croire encore à tant <strong>de</strong> bonheur. Quand vous revien‐<br />

drez, vous le partagerez <strong>avec</strong> nous, car vous vous associez à tout ce qui touche notre petite<br />

Communauté. Adieu, très cher ami, ne voyez‐vous pas autour <strong>de</strong><br />

vous quelque âme chère à Dieu et à qui notre œuvre conviendrait?<br />

Jʹaimerais avoir un frère <strong>de</strong> notre Bretagne, et jʹen augurerais bien,<br />

car jʹaime et vénère ce cher pays comme sʹil était le mien.<br />

Adieu encore, très cher ami, je vous embrasse tendrement<br />

dans les Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre frère et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je repars le 20 <strong>de</strong> ce mois pour Paris.<br />

191 à M. Maignen<br />

Rappel <strong>de</strong> la visite <strong>de</strong> M. Maignen à Duclair en 1846. Joie et espérance causées par le Premier Tabernacle.<br />

Contempler Jésus est non seulement notre part en ce mon<strong>de</strong>, mais cʹest ʺbien la meilleure partʺ.<br />

Duclair, 18 septembre 1849<br />

Très cher enfant en N.S.<br />

Je nʹai pas oublié les quelques jours que vous avez passés ici <strong>avec</strong> moi; je me sou‐<br />

viens <strong>de</strong> votre première apparition; jʹai visité la petite grange qui nous a abrités à votre ar‐<br />

rivée: elle est pour moi comme un lieu <strong>de</strong> pèlerinage où je vais chaque fois <strong>avec</strong> un senti‐<br />

ment doux et tendre pour vous, confiant et reconnaissant pour le Seigneur qui nous a ré‐<br />

unis sous cet humble chaume et y a, je lʹespère, associé nos âmes pour le temps et pour<br />

lʹéternité. Jʹai cette confiance, non en me reposant sur nous‐mêmes, car parfois, pour lʹun<br />

un peu dʹinconsistance, pour lʹautre un peu trop <strong>de</strong> rai<strong>de</strong>ur peuvent amener quelques<br />

froissements; mais, comme tout cela se fond vite et se perd dans la divine charité du Sei‐<br />

gneur! Puis maintenant, y aura‐t‐il jamais parmi notre petite famille <strong>de</strong> nuage durable;<br />

quel est le cœur qui ne retrouvera sa sérénité aux pieds du doux Maître qui va prendre<br />

asile au milieu <strong>de</strong> nous? Nous irons à Lui comme saint Liguori et nous dirons: ʺMaître,<br />

nous savons que vous êtes là, donnez à notre âme ce dont elle a besoin!ʺ Il me semble, très<br />

cher enfant, que ce sera pour nous une vie toute nouvelle et quʹun plus grand amour se<br />

manifestera parmi nous; jusquʹici, nous étions encore sous la loi <strong>de</strong> la nature, la loi <strong>de</strong><br />

grâce nous régira désormais, car le Verbe fait chair <strong>de</strong>scendra au milieu <strong>de</strong> notre petite<br />

famille comme il vint jadis dans la gran<strong>de</strong> famille humaine.<br />

Continuez, très cher ami, à prendre les soins nécessaires pour que notre oratoire soit<br />

bientôt disposé169 , je ne tar<strong>de</strong>rai pas à vous rejoindre; lundi, je serai près <strong>de</strong> vous et je vous<br />

ai<strong>de</strong>rai <strong>de</strong> grand cœur dans ces travaux. Nous rendrons les trois pièces saines, propres,<br />

convenables, mais <strong>avec</strong> une extrême simplicité, et nous réserverons la plus gran<strong>de</strong> part <strong>de</strong>s<br />

169 Pour la cérémonie du premier Tabernacle. Le 15 octobre 1849 restera à jamais gravé dans la mémoire <strong>de</strong>s frères. L'abbé Gibert,<br />

qui célèbre la première messe dans le petit oratoire aménagé et embelli <strong>avec</strong> soin, prend pour thème <strong>de</strong> son homélie une pensée <strong>de</strong><br />

Thérèse d'Avila dont c'est précisément la fête. "Oh, si l'on savait quel grand événement c'est pour le mon<strong>de</strong> qu'un tabernacle <strong>de</strong><br />

plus sur la terre".<br />

On peut relever au Journal <strong>de</strong> Communauté du 15 octobre : "Jour à jamais mémorable pour la petite famille. Par une faveur aussi<br />

inespérée que peu méritée, Mgr l'archevêque <strong>de</strong> Paris daigne nous accor<strong>de</strong>r la permission <strong>de</strong> faire dire la messe dans notre pauvre<br />

maison et d'y conserver le T.S.Sacrement. La chapelle est dédiée aux Saints Cœurs <strong>de</strong> Jésus et <strong>de</strong> Marie".<br />

264


quelques cents francs dont nous pouvons disposer pour lʹautel, les vases sacrés et les vê‐<br />

tements sacerdotaux. Où en êtes‐vous pour la réduction <strong>de</strong> la Sainte Vierge et pour le ta‐<br />

bleau <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Ségur? Ce bon abbé a une petite composition qui peut‐être nous irait: le<br />

Cœur <strong>de</strong> Jésus épanche toutes les grâces dans le cœur <strong>de</strong> Marie, et celui‐ci les déverse sur<br />

nos pauvres cœurs.<br />

Le f. Paillé me précé<strong>de</strong>ra <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux jours, il arrivera vendredi au soir, ce sera déjà un<br />

peu tard pour quelques‐uns <strong>de</strong>s soins relatifs à la réunion <strong>de</strong> la Sainte‐Famille <strong>de</strong> St‐<br />

Sulpice; ayez donc la charité, cher enfant, <strong>de</strong> vous assurer précisément <strong>de</strong> M. Lamache que<br />

le f. Paillé me dit être disposé à nous venir, et dʹavertir <strong>de</strong> mon absence encore pour cette<br />

fois le bon p. Milleriot et M. Guillemin; je présente à lʹun et à lʹautre mon tendre et respec‐<br />

tueux attachement. M. Paillé pourra, à son arrivée, concerter la loterie <strong>avec</strong> M. Leharivel;<br />

prédisposez quelques lots, sʹil se peut.<br />

Je suis heureux, cher enfant, <strong>de</strong> ce que vous me dites sur vos dispositions intérieu‐<br />

res. Contemplons sans cesse le doux Jésus dans ses états divers, cʹest notre part en ce<br />

mon<strong>de</strong>, ce sera notre éternelle joie en lʹautre. Oh! que nous avons bien la meilleure part;<br />

goûter le divin Jésus, converser <strong>avec</strong> Lui, nous essayer à Le suivre et à Lʹimiter, puis tâcher<br />

après <strong>de</strong> faire partager à quelques âmes un pareil bonheur; quʹy a‐t‐il <strong>de</strong> plus doux et <strong>de</strong><br />

plus beau en ce mon<strong>de</strong>; cʹest la suprême fin<br />

<strong>de</strong> lʹhomme, cʹest lʹexistence prise à son<br />

point le plus haut, cʹest le <strong>de</strong>rnier <strong>de</strong>gré <strong>de</strong><br />

la terre jusquʹau Ciel. Béni soit le Seigneur<br />

qui nous a donné une telle vocation et<br />

daigne son amour nous ai<strong>de</strong>r à y<br />

correspondre! Nous y travaillerons <strong>de</strong> notre<br />

mieux; je vous ai vu <strong>avec</strong> joie, <strong>de</strong>puis<br />

quelque temps surtout, vous armer <strong>de</strong><br />

résolution et envisager plus fermement le<br />

but vers lequel nous tendons; vous poursui‐<br />

vrez, cher enfant, et le bon Dieu, qui nʹaime<br />

rien tant que cette ar<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> nos âmes,<br />

vous soutiendra et vous enflammera Lui‐<br />

même <strong>de</strong> son amour. Priez toujours<br />

ensemble pour les absents; ils prient aussi<br />

bien tendrement pour vous. Je vous<br />

embrasse en N.S. et suis comme toujours<br />

votre père et frère.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je vous recomman<strong>de</strong>, comme au f.<br />

Myionnet, notre petit f. Tavernier, cultivons cette chère petite âme, afin quʹelle apprenne à<br />

goûter Dieu; nous aurons fait une belle œuvre; notre exemple avant tout y contribuera<br />

beaucoup.<br />

Ma sœur vous assure <strong>de</strong> ses bons souvenirs.<br />

265


192 à M. Levassor<br />

Retraite ecclésiastique à Paris. Le projet dʹembauche dʹun employé est ajourné. Dans nos travaux, voir ʺle Sau‐<br />

veur lui‐même dans la personne <strong>de</strong>s pauvresʺ.<br />

Paris, 27 septembre 1849<br />

Mon bien cher frère,<br />

Je ne suis <strong>de</strong> retour ici que <strong>de</strong>puis avant‐hier; je me hâte <strong>de</strong> vous écrire ces <strong>de</strong>ux<br />

mots pour vous donner le renseignement que vous désirez sur la retraite ecclésiastique. M.<br />

lʹabbé Houssard, que je suis allé voir hier exprès au Séminaire, mʹa dit quʹelle serait don‐<br />

née par le p. Chaignon, Jésuite; mais aujourdʹhui M. lʹabbé Beaussier, notre Directeur, me<br />

dit que cela pourrait avoir été changé, car on lui a assuré que ce serait un p. Lavalette, sur<br />

lequel il nʹa pas dʹindications précises; il est maintenant trop tard pour que je retourne au<br />

Séminaire avant le départ <strong>de</strong> cette lettre, je suis donc contraint <strong>de</strong> mʹen tenir à ces <strong>de</strong>ux<br />

versions qui ne seraient dʹailleurs mauvaises ni lʹune ni lʹautre, puisque ces bons Pères<br />

doivent avoir lʹexpérience <strong>de</strong>s retraites ecclésiastiques.<br />

Quant au cher enfant dont nous nous étions entretenus, je crains quʹil ne soit trop<br />

jeune définitivement pour la tâche que nous voulions lui imposer, dʹautant quʹelle se com‐<br />

pliquera encore <strong>de</strong> la surveillance <strong>de</strong> notre fourneau <strong>de</strong>s pauvres à Grenelle. Il faudrait,<br />

pour prendre à cœur ces travaux assez ru<strong>de</strong>s, les envisager comme intéressant le Sauveur<br />

lui‐même dans la personne <strong>de</strong>s pauvres, et la vocation semble seule pouvoir donner une<br />

pareille vue. Je crois donc, cher frère, quʹà moins dʹun changement <strong>de</strong> dispositions quʹon<br />

ne peut guère attendre que du temps, notre cher enfant ne pourrait prendre place parmi<br />

nous. Je vous remercie bien cordialement, très cher ami, <strong>de</strong>s soins que vous avez pris à ce<br />

sujet et je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> au divin Seigneur <strong>de</strong> vous en récompenser.<br />

Nous nʹavons pas manqué dʹêtre en union <strong>avec</strong> vous par une double raison au 21<br />

septembre, fête <strong>de</strong> saint Matthieu.<br />

Priez toujours pour vos frères <strong>de</strong> Paris et croyez à leur sincère et respectueux dé‐<br />

vouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> réitérer lʹoffre dʹun pauvre asile dans notre petite maison<br />

<strong>de</strong> Grenelle, si vous ne le jugez pas trop loin <strong>de</strong> St‐Sulpice; vous savez que nous vous<br />

sommes tout acquis.<br />

266


193 à M. Pavie<br />

Décès dʹun <strong>de</strong> leurs amis, H. Nerbonne. V. Pavie prenant la direction <strong>de</strong> la conférence dʹAngers, MLP. lui pré‐<br />

cise la mission quʹil doit remplir. Bénir Dieu <strong>de</strong> consacrer ses forces à la charité plutôt quʹà <strong>de</strong>s intérêts pure‐<br />

ment humains.<br />

Paris, 2 octobre, fête <strong>de</strong>s Sts Anges 1849<br />

Très cher ami,<br />

Je trouve, à mon arrivée dʹun voyage que je viens <strong>de</strong> faire pour voir ma sœur qui<br />

avait été mala<strong>de</strong> durant quelque temps aussi bien que sa fille, la lettre douloureuse que<br />

vous mʹavez adressée. Vous nʹen pouviez douter, cher Victor, vos désirs ont été aussitôt<br />

remplis, jʹai prié pour notre pauvre ami Nerbonne et jʹai <strong>de</strong>mandé pour lui les prières <strong>de</strong><br />

tous les amis qui mʹentourent; cʹest une <strong>de</strong>tte quʹon est heureux ou au moins consolé dʹac‐<br />

quitter envers ceux pour lesquels on ne saurait plus rien faire. Depuis bien <strong>de</strong>s années dé‐<br />

jà, il ne mʹavait plus été donné dʹentretenir <strong>de</strong> rapports <strong>avec</strong> notre cher Henry, mais ceux<br />

que jʹavais eus dans un autre temps se rattachaient à trop <strong>de</strong> souvenirs pour nʹêtre pas pro‐<br />

fondément gravés en moi. Jʹai donc pu apprécier, cher Victor, tout ce que vous me dites à<br />

son sujet <strong>de</strong> profond et <strong>de</strong> touchant. Je sympathise vivement <strong>avec</strong> votre peine, et je sens à<br />

combien <strong>de</strong> titres elle est fondée. Mais le <strong>de</strong>rnier <strong>de</strong> tous, la conformité <strong>de</strong> foi, lʹunion <strong>de</strong><br />

nos âmes en Dieu, porte en lui‐même la consolation pour toutes les afflictions dont cette<br />

séparation vient vous frapper; comment se plaindre au Seigneur quand son amour a com‐<br />

blé le plus cher <strong>de</strong>s nos vœux, quand Il a orné, embelli, illuminé sous nos yeux lʹâme quʹIl<br />

méditait <strong>de</strong> rappeler à Lui? Ici les longues préparations nʹétaient pas nécessaires, ou plutôt<br />

elles étaient faites <strong>de</strong> longue main par les déceptions, les dégoûts <strong>de</strong> ce mon<strong>de</strong>, les souf‐<br />

frances du cœur, les langueurs habituelles. Plus quʹun autre, en effet, notre ami semblait<br />

exilé ici‐bas; il nʹy avait rien bâti <strong>avec</strong> joie ni confiance en lʹavenir; il nʹavait rien trouvé qui<br />

lʹeût rassuré même pour un temps, il ne sʹétait pris à rien et nʹattendait que lʹheure du dé‐<br />

part. Elle est venue, sans le surprendre et sans lʹattrister sans doute. Ne nous contristons<br />

donc pas trop nous‐mêmes, cher ami, aimons‐le par le souvenir et surtout par le désir <strong>de</strong><br />

nos cœurs déposé au Cœur paternel <strong>de</strong> Dieu.<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> une sincère satisfaction que la direction <strong>de</strong> la Conférence dʹAngers<br />

vous est confiée, elle vous revenait <strong>de</strong> droit et jʹai pleine confiance quʹelle ne sera pas sans<br />

résultat entre vos mains. Cʹest une belle mission, cher ami, que <strong>de</strong> stimuler les âmes au<br />

bien et <strong>de</strong> leur crier incessamment: Dieu le veut, aimons nos frères, consolons‐les, secou‐<br />

rons‐les, portons‐leur la lumière que nous avons reçue nous‐mêmes et que nous pouvons<br />

toujours répandre en eux sans nous appauvrir jamais. Les années que jʹai passées à <strong>de</strong> pa‐<br />

reils soins sont les plus chères <strong>de</strong> ma chétive vie. Jʹai lʹassurance quʹun jour aussi vous bé‐<br />

nirez Dieu <strong>de</strong> vous avoir permis <strong>de</strong> consacrer à la charité plutôt quʹà <strong>de</strong>s intérêts humains<br />

vos facultés et puissances dans toute leur force et leur maturité.<br />

Adieu, très cher ami, souvenez‐vous toujours que vous avez ici plus que <strong>de</strong>s amis,<br />

<strong>de</strong> vrais frères. Aimez‐les, priez pour eux.<br />

[Le <strong>Prevost</strong>]<br />

Jʹoffre mon affectueux respect à votre chère femme. Jʹembrasse vous et vos petits en‐<br />

fants et lʹexcellent père. Souvenir à Gavard pour moi à lʹoccasion.<br />

267


194 à M. Decaux<br />

La Sainte‐Famille est une œuvre commune pour les pauvres qui doit resserrer les liens <strong>de</strong> la charité.<br />

Paris, 27 février 1850<br />

Mon bien cher Confrère,<br />

M. Courmevieux a bien voulu mʹapporter <strong>de</strong> votre part une somme <strong>de</strong> cent francs,<br />

votée par votre Conférence en faveur <strong>de</strong> lʹœuvre <strong>de</strong> la Sainte‐Famille.<br />

Quelque utile que nous soit ce secours pour le soutien <strong>de</strong> notre Œuvre, il nous est<br />

bien plus précieux encore comme témoignage du constant intérêt que la Conférence Stani‐<br />

slas a toujours accordé à notre œuvre. Nous nʹoublions pas, <strong>de</strong> notre côté, ce quʹune telle<br />

bienveillance exige <strong>de</strong> nous en retour, nous nous plaisons à considérer la Sainte‐Famille<br />

comme une œuvre commune <strong>de</strong>stinée à unir nos efforts pour le bien <strong>de</strong>s pauvres et à res‐<br />

serrer entre nous les liens <strong>de</strong> la charité. Nous continuerons donc comme par le passé à ac‐<br />

cueillir vos pauvres familles <strong>avec</strong> le même empressement que les nôtres, et nous serons<br />

heureux aussi quand nos Confrères <strong>de</strong> Stanislas voudront bien assister <strong>avec</strong> nous aux<br />

séances et nous y prêter leur concours.<br />

Jʹespère que pour votre part, cher Confrère, vous nous viendrez aussi en ai<strong>de</strong> en<br />

adressant <strong>de</strong> temps en temps à nos braves gens quelques bonnes paroles comme votre<br />

cœur sait vous les inspirer; M. <strong>de</strong> Bioncourt qui vous a vu <strong>de</strong>rnièrement mʹen a donné lʹas‐<br />

surance, je nʹaurai gar<strong>de</strong> <strong>de</strong> lʹoublier. M. <strong>de</strong> Rosmalen ayant laissé inachevée une narra‐<br />

tion, à la <strong>de</strong>rnière séance, doit lʹachever à la réunion prochaine; mais pour celle qui suivra,<br />

le 24 mars, jʹespère que vous voudrez bien nous venir et entretenir quelques instants notre<br />

assemblée.<br />

Croyez bien, cher Confrère, à notre sincère reconnaissance, comme aux sentiments<br />

affectueux <strong>de</strong><br />

Votre dévoué Confrère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

195 à M. Decaux<br />

Remerciements pour être venu parler à la Sainte‐Famille. ʺles éloges <strong>de</strong>s pauvres ne sont pas inquiétants pour<br />

lʹhumilité et ils sont doux au cœur chrétien qui nʹaspire quʹà donner la lumière et la consolation.ʺ<br />

Paris, 28 mars 1850<br />

Mon bien cher Confrère,<br />

Notre Sainte‐Famille a éprouvé une véritable satisfaction à vous entendre et <strong>de</strong> di‐<br />

vers côtés lʹexpression mʹen est revenue.<br />

Je ne vous transmettrais pas <strong>de</strong> semblables témoignages sʹils venaient <strong>de</strong> bien haut,<br />

mais les éloges <strong>de</strong>s pauvres ne sont pas inquiétants pour lʹhumilité et ils sont doux au<br />

cœur chrétien qui nʹaspire quʹà donner la lumière et la consolation.<br />

Notre bon p. Milleriot se joint à moi pour vous remercier, et nous vous <strong>de</strong>mandons<br />

bien instamment tous les <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> revenir aussi souvent que vous le pourrez édifier vos<br />

pauvres familles et les nôtres.<br />

En voyant <strong>avec</strong> quelle facilité et agrément <strong>de</strong> forme vous avez raconté votre his‐<br />

toire, jʹai eu la pensée que vous pourriez tirer un grand parti <strong>de</strong>s vies <strong>de</strong> Saints; lʹexpé‐<br />

268


ience nous a montré quʹelles étaient fort goûtées <strong>de</strong> notre auditoire, quʹelles intéressent et<br />

instruisent tout ensemble.<br />

Croyez bien, très cher Confrère, à tous mes sentiments bien dévoués en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

195‐1 à Mgr Angebault<br />

Gratitu<strong>de</strong> pour sa visite à Grenelle. Bienfaits <strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce.<br />

Paris, 2 mai 1850<br />

Monseigneur,<br />

Nous avons été profondément touchés du témoignage dʹextrême bienveillance que<br />

vous avez accordé à notre petite communauté, et le souvenir en restera gravé au plus in‐<br />

time <strong>de</strong> notre cœur.<br />

Si nous nʹavions déjà un livre <strong>de</strong> chronique où sont inscrits tous les faits offrant<br />

quelque intérêt pour notre œuvre, nous eussions senti la nécessité dʹen créer un pour y<br />

laisser la trace <strong>de</strong> votre douce et paternelle visite; elle y est mentionnée et elle restera, si le<br />

Seigneur daigne nous accor<strong>de</strong>r quelquʹavenir, comme une preuve <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> la bonté du<br />

Père Céleste pour ses moindres enfants.<br />

Cʹest dʹaprès votre conseil, si je ne me trompe, Monseigneur, que nous avons, dans<br />

le temps, commencé ces notes sur les actes <strong>de</strong> la petite communauté; nous serons, encore<br />

plus exacts que par le passé à les continuer, encouragés que nous serons par vos précieux<br />

avis; dʹailleurs à chaque fait que nous inscrivons se trouve mêlé quelque bienfait <strong>de</strong> la<br />

Provi<strong>de</strong>nce et quelque nouveau sujet <strong>de</strong> confiance et dʹespoir pour nous.<br />

Je remarque <strong>avec</strong> une vive reconnaissance que votre nom vénéré inscrit dès la pre‐<br />

mière page se retrouve <strong>de</strong> temps en temps dans les autres et semble comme essentielle‐<br />

ment tissé dans la trame <strong>de</strong> notre œuvre. Veuillez être assuré, Monseigneur, que nous y<br />

voyons un signe <strong>de</strong> la protection du Seigneur et un gage <strong>de</strong>s bienfaits que son amour veut<br />

bien encore nous réserver.<br />

Le petit troupeau se met tout entier à vos pieds et sollicite humblement votre béné‐<br />

diction paternelle.<br />

Je suis, dans <strong>de</strong>s sentiments <strong>de</strong> bien respectueux attachement, Monseigneur,<br />

Votre très humble serviteur et dévoué fils en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

196 à M. Pavie<br />

LʹAdoration Nocturne à Grenelle. Joie <strong>de</strong> MLP. à lʹoccasion <strong>de</strong> cette ʺveille bénieʺ. Bonheur <strong>de</strong> vivre dans la dé‐<br />

pendance <strong>de</strong> Dieu et dʹavoir été choisi comme ses instruments. Il prie pour que leur ami Gavard retrouve la foi.<br />

Paris, 4 juin 1850<br />

Très cher Victor,<br />

Depuis plusieurs semaines déjà, je porte sur moi, à lʹintention dʹy répondre, une ex‐<br />

cellente lettre que vous mʹavez écrite et qui mʹa beaucoup touché. Je vous y ai retrouvé<br />

tout entier <strong>avec</strong> vos dévouements si généreux et si fidèles, <strong>avec</strong> votre zèle fervent pour<br />

tout bien, votre ar<strong>de</strong>ur pour les œuvres qui intéressent Dieu et tous les hommes dont vous<br />

269


êtes si sincèrement le frère; je <strong>de</strong>vais donc avoir à cœur <strong>de</strong> vous répondre au plus tôt; mon<br />

insuffisance ordinaire mʹa mis en défaut.<br />

Pour vous, cher ami, votre activité redouble <strong>avec</strong> les années. Cʹest une gran<strong>de</strong> joie<br />

pour moi <strong>de</strong> la voir se porter sur <strong>de</strong> si nobles objets et dʹapprendre <strong>de</strong> vous les précieux ré‐<br />

sultats que vous avez obtenus. Il nʹen pouvait être autrement, cher ami; et pour ceux qui<br />

comme moi ont vu toutes les aspirations hautes, les instincts dévoués <strong>de</strong> vos jeunes an‐<br />

nées, il était facile <strong>de</strong> prévoir que la consécration <strong>de</strong> tout vous‐même pourrait seule vous<br />

satisfaire et serait tôt ou tard votre vie. Cʹest bien, en effet, la meilleure part. Jʹose dire, cher<br />

Victor, quʹelle vous appartient et quʹelle ne vous sera point ôtée.<br />

Je me sens une sympathie dʹautant plus vive pour les œuvres dont vous vous oc‐<br />

cupez quʹelles sont aussi les nôtres et remplissent ici nos journées. Je pourrais dire encore<br />

nos nuits, puisquʹà votre exemple, nous avons le bonheur <strong>de</strong> prendre part à la gran<strong>de</strong> œu‐<br />

vre <strong>de</strong> lʹAdoration Nocturne 170 . Vous croirez à peine que cʹest dans notre maison même,<br />

dans notre pauvre petit ermitage <strong>de</strong> Grenelle quʹil nous est donné <strong>de</strong> rendre cet hommage<br />

au divin Seigneur. Rien nʹest plus vrai pourtant et lʹindignité <strong>de</strong>s lieux et <strong>de</strong>s hommes nʹa<br />

pas fait obstacle pour le Dieu que lʹétable <strong>de</strong> Bethléem nʹavait pas rebuté. Par un privilège<br />

tout immérité, la permission <strong>de</strong> conserver le Très Saint‐Sacrement dans notre petit oratoire<br />

nous a été accordée par notre Archevêque et, par un autre privilège, la grâce dʹy faire une<br />

fois par mois lʹadoration nocturne nous a été aussi faite. Ainsi, très cher ami, nous nous<br />

rattachons encore à vous par ce lien qui se joint à tous les autres, plus forts sans doute, à<br />

lui seul; que tous ensemble. Demain, jeudi, vigile <strong>de</strong> la fête du Sacré‐Cœur, quelques amis<br />

viendront se réunir à nous et, à 9h., commencera notre veille bénie. Nous ne manquerons<br />

pas dʹy prier pour vous et vos associés; ren<strong>de</strong>z‐nous la pareille à votre prochaine réunion.<br />

De semblables échanges réjouissent les anges et glorifient Dieu.<br />

Nos autres œuvres se soutiennent et vivent malgré les influences mauvaises <strong>de</strong>s<br />

temps. Notre petit troupeau nʹa pas augmenté; nous sommes cinq, comme vous nous avez<br />

vus, je crois, à votre <strong>de</strong>rnier voyage. Mais nous avons à fortifier lʹintérieur et à le fon<strong>de</strong>r so‐<br />

li<strong>de</strong>ment avant <strong>de</strong> nous étendre au <strong>de</strong>hors. Nous ne pouvons donc que bénir la divine Sa‐<br />

gesse qui nous conduit à sa mo<strong>de</strong> et non à la nôtre. Nous sommes heureux <strong>de</strong> nous sentir<br />

dans une entière dépendance <strong>de</strong> son adorable conduite. Votre vénérable Evêque nʹa pas<br />

dédaigné <strong>de</strong> nous rendre visite à son <strong>de</strong>rnier voyage à Paris. Il nous a dit la Sainte Messe<br />

et nous a exhortés dans les termes les plus paternels.<br />

Combien nous serions joyeux, cher ami, si, <strong>de</strong>venus un peu<br />

plus forts, nous pouvions quelque jour détacher quelques‐<br />

uns <strong>de</strong>s nôtres pour aller secon<strong>de</strong>r vos œuvres et mettre<br />

leur zèle sous votre main.<br />

Priez un peu pour que le grand Maître, nous ayant<br />

assouplis et façonnés, daigne ainsi nous agréer comme<br />

dʹhumbles instruments dans les <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> sa charité.<br />

Remerciez bien pour moi notre cher Gavard, assu‐<br />

rez‐le <strong>de</strong> mes affectueux souvenirs. Je prie Dieu souvent<br />

170 Un vif sentiment <strong>de</strong> réparation, né au len<strong>de</strong>main <strong>de</strong>s tragiques événements <strong>de</strong> la Révolution <strong>de</strong> 1848, fut à l'origine <strong>de</strong> cette œuvre<br />

<strong>de</strong> l'Adoration Nocturne. Le promoteur <strong>de</strong> ce mouvement fut le célèbre pianiste Hermann Cohen converti du judaïsme, <strong>de</strong>venu en<br />

religion le Père Augustin-Marie du T.S.Sacrement, carme déchaussé. La pratique avait commencé à N.D. <strong>de</strong>s Victoires le 6 décembre<br />

1848, au moment même où Pie IX se réfugiait à Gaète, <strong>avec</strong> la collaboration du vicaire général, l'abbé <strong>de</strong> La Bouillerie, et<br />

d'un jeune protégé <strong>de</strong> l'abbé Desgenettes, le séminariste Louis Roussel, qui entrera dans l'Institut cinq ans plus tard, en décembre<br />

1853.<br />

270


pour quʹIl lui donne la santé, chose qui lui manque, une foi ferme et profon<strong>de</strong> qui serait le<br />

contrepoids <strong>de</strong>s dons aujourdʹhui presque surabondants <strong>de</strong> son cœur et <strong>de</strong> son esprit. La<br />

foi en ferait un homme complet et dʹun grand poids pour le bien. Demandons pour lui<br />

cette perle précieuse, dût‐il tout perdre pour lʹacquérir.<br />

Adieu, très cher ami, assurez <strong>de</strong> mes respectueux souvenirs votre cher entourage et<br />

croyez vous‐même au tendre attachement <strong>de</strong> votre ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

197 à M. Decaux<br />

Gratitu<strong>de</strong> pour sa générosité envers la Ste‐Famille. Activités <strong>de</strong> la Conférence.<br />

Paris, 9 juin 1850<br />

Très cher Confrère,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong>s quelques mots si pleins <strong>de</strong> charité et <strong>de</strong> bienveillance que vous<br />

mʹavez envoyés au sujet <strong>de</strong> notre Sainte‐Famille, et je vous rends grâces aussi <strong>de</strong>s sacrifices<br />

si généreux que votre Conférence fait pour le soutien <strong>de</strong> cette œuvre.<br />

Je pense quʹaux approches <strong>de</strong> la retraite nous <strong>de</strong>vrons nous concerter pour que tou‐<br />

tes nos pauvres familles en puissent suivre les exercices; nos chers Confrères <strong>de</strong> Stanislas,<br />

si zélés ainsi que vous pour le bien spirituel <strong>de</strong> ces chères âmes, ne manqueront pas <strong>de</strong><br />

nous accor<strong>de</strong>r leur concours accoutumé.<br />

Remettez bien vite, très cher Confrère, votre santé si précieuse à vos amis et aux<br />

pauvres, et nʹoubliez pas que nous sommes, pour nous, doublement intéressés à ce que<br />

vos forces reviennent au plus tôt, puisque la Sainte‐Famille doit vous entendre dans sa<br />

première séance <strong>de</strong> juillet.<br />

Je regrette bien que vous soyez presque introuvable, jʹirais vous voir et vous serrer<br />

cordialement la main. Je mʹen dédommage en priant <strong>de</strong> toute mon âme pour vous, et je<br />

vous assure comme toujours <strong>de</strong> mes sentiments les plus dévoués en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

198 à M. Myionnet<br />

MLP. est en cure à St‐Valéry‐en‐Caux <strong>avec</strong> le frère Paillé. Pauvreté <strong>de</strong> leur logement. Union <strong>de</strong>s âmes par la<br />

prière : ʺmutuelle charité qui réjouit le cœur <strong>de</strong> notre Dieuʺ.<br />

St‐Valéry‐en‐Caux, 13 juillet 1850<br />

(chez M. Bonâtre, aubergiste,<br />

Gran<strong>de</strong> route dʹAmont)<br />

Très chers frères en N.S.,<br />

Nous avons tardé un peu à vous donner <strong>de</strong> nos nouvelles, afin <strong>de</strong> vous dire préci‐<br />

sément où nous avions élu notre domicile et comment nous nous trouvions <strong>de</strong> nos premiè‐<br />

res immersions dans la mer. Tout est bien jusquʹici et nous nʹavons quʹà remercier le Sei‐<br />

gneur qui semble avoir tout disposé pour notre plus grand avantage.<br />

Nous avons pris notre <strong>de</strong>meure en <strong>de</strong>hors du bourg, au bord <strong>de</strong> la campagne, à peu<br />

<strong>de</strong> distance <strong>de</strong>s bains cependant, et à distance égale <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux églises du pays que nous<br />

pouvons ainsi visiter tour à tour. Nous ne pouvions rencontrer une situation plus heu‐<br />

271


euse et, pour comble <strong>de</strong> satisfaction, notre présence dans la maison où nous sommes y est<br />

un véritable bienfait. Cʹest une petite auberge commençante, tenue par <strong>de</strong> pauvres jeunes<br />

gens, assez au dépourvu, je crois, qui nʹont absolument que nous en ce moment et que<br />

nous allons faire vivre tant que durera notre séjour ici. Cʹest bien tomber pour <strong>de</strong>s gens qui<br />

cherchent partout la charité; enfin nous eussions pu parcourir tout le pays inutilement<br />

pour trouver <strong>de</strong>s conditions aussi peu dispendieuses que celles dont nous sommes conve‐<br />

nus. Il est vrai, et nous reconnaissons encore ici les attentions vigilantes <strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce,<br />

que notre pauvreté ne saurait être plus gran<strong>de</strong> quʹelle lʹest. Notre chambre (le f. Paillé et<br />

moi faisons chambre commune) nʹa, outre <strong>de</strong>ux mauvais lits très durs et fort défoncés,<br />

quʹune petite table et trois tabourets. Tout cela nʹest‐il pas fait exprès pour nous? Mais le<br />

plus merveilleux <strong>de</strong> la chose, cʹest que notre ami M. Daro<strong>de</strong>, qui sʹest trouvé fidèlement au<br />

départ et que <strong>de</strong>s motifs sérieux avaient retenu loin <strong>de</strong> nous les jours précé<strong>de</strong>nts, sʹac‐<br />

commo<strong>de</strong> parfaitement dʹune pareille situation et la déclare telle quʹil lʹeût voulu choisir.<br />

Remerciez donc <strong>avec</strong> nous, chers frères, le bon Maître qui a daigné traité si doucement ses<br />

serviteurs.<br />

La mer nous réussit jusquʹà présent très bien, le temps est fort beau, le vent paisible,<br />

nous avons pris <strong>de</strong>s bains tous les jours, sauf le premier où les conditions nʹétaient pas<br />

bonnes pour moi.<br />

Nous nʹavons pu jusquʹici faire aucune démarche pour la fondation dʹune Confé‐<br />

rence, le f. Paillé prétend pourtant quʹune visite quʹil a faite, par une heureuse circons‐<br />

tance, dans une pauvre famille et lʹaumône quʹil lui a donnée dʹune pièce <strong>de</strong> vingt sous<br />

sont les premiers indices dʹune Conférence encore à naître; je souhaite <strong>de</strong> tout mon cœur<br />

quʹil ait prophétisé. Il dormait, ce bon frère, sur lʹangle <strong>de</strong> la table où je vous écris; il vient<br />

<strong>de</strong> se réveiller et, entre <strong>de</strong>ux sommes, il me charge <strong>de</strong> vous assurer <strong>de</strong> ses tendres souve‐<br />

nirs. M. Daro<strong>de</strong> veut aussi que je dise quelques mots pour lui. Nous nʹavons quʹà nous<br />

louer <strong>de</strong> lʹaimable caractère et <strong>de</strong>s habitu<strong>de</strong>s éminemment sociables <strong>de</strong> cet excellent jeune<br />

homme. Il aime sincèrement le bon Dieu et est fort attaché à sa foi; jʹai la confiance quʹil<br />

restera en bonne voie, quelque direction quʹil prenne. Priez bien pour lui, il est fort préoc‐<br />

cupé <strong>de</strong> son avenir.<br />

Nous suivons <strong>de</strong> notre mieux tous les exercices <strong>de</strong> notre règlement; ceux du matin<br />

surtout sont invariablement observés; nous allons trois fois par jour au moins à lʹéglise et<br />

nous nous tenons souvent en présence du divin Seigneur. Est‐il besoin <strong>de</strong> dire, très chers<br />

amis et frères, que nous vous mêlons à tous ces actes et que notre âme est toujours unie à<br />

la vôtre; il nous est doux <strong>de</strong> songer que, <strong>de</strong> votre côté, vous priez aussi pour nous et que<br />

cette mutuelle charité réjouit le cœur <strong>de</strong> notre Dieu.<br />

Ecrivez‐nous, chers frères, sans aucun retard, nous avons hâte <strong>de</strong> recevoir <strong>de</strong> vos<br />

nouvelles; je vous saurai gré <strong>de</strong> nous répondre au plus vite. Assurez bien notre bon p.<br />

Beaussier <strong>de</strong>s respectueux sentiments <strong>de</strong> ses <strong>de</strong>ux fils absents, nous regrettons bien <strong>de</strong> ne<br />

lʹavoir pas <strong>avec</strong> nous; la mer lui eût été très douce, jʹen suis très persuadé.<br />

Jʹembrasse mes bien bons amis MM. <strong>de</strong> Malartic et Hello, sans oublier nos amis si<br />

dévoués MM. Lecoin, Boutron, etc.<br />

Je prie le f. Myionnet <strong>de</strong> me dire quelques mots du petit soldat et <strong>de</strong> mon pauvre<br />

pénitent <strong>de</strong> Necker.<br />

272


Adieu, très chers amis, je vous mets tous ensemble et séparément aussi dans les<br />

Cœurs divins du Sauveur et <strong>de</strong> la T.S te Vierge Marie, notre Mère, et je mʹy unis à vous dans<br />

un saint embrassement.<br />

Votre affectionné Père et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Si M. Beaussier est absent, ne pourriez‐vous nous en‐<br />

voyer, après que vous les aurez vus, les numéros <strong>de</strong> lʹAmi <strong>de</strong> la<br />

Religion? La poste <strong>de</strong> la petite rue du Bac fait ces envois pour 3 ou<br />

5 centimes.<br />

Je recomman<strong>de</strong> à notre cher enfant Gabriel dʹêtre bien fi‐<br />

dèle à tous ses exercices et <strong>de</strong> se faire corriger, comme je le lui ai<br />

dit, par mon autre fils Maignen; je les embrasse tendrement lʹun<br />

et lʹautre.<br />

Je nʹai pas encore fini mon rapport et jʹai toujours le travail<br />

pénible.<br />

199 à M. Maignen<br />

La beauté du lieu où il se soigne ne dissipe pas la nostalgie <strong>de</strong> la communauté <strong>de</strong> Grenelle. Souhait <strong>de</strong> voir se di‐<br />

versifier les types dʹœuvres, pour que <strong>de</strong>s âmes dévouées et généreuses puissent sʹadonner à la même vie <strong>de</strong> prière<br />

et <strong>de</strong> charité. Puiser lʹamour <strong>de</strong> Dieu et du prochain dans les Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M. Désir du don dʹoraison conti‐<br />

nuelle.<br />

St‐Valéry‐en‐Caux, 24 juillet 1850<br />

Très cher fils en N.S.,<br />

Il ne se passera pas maintenant un grand nombre <strong>de</strong> jours sans que nous allions<br />

vous retrouver; nous comptons partir le vendredi 2 août, cʹest‐à‐dire dans huit jours main‐<br />

tenant; nous aurons pris alors 22 ou 23 bains, cʹest assez pour produire un bon effet et,<br />

comme la saison a été parfaite, jʹai la confiance que nos santés en éprouveront réellement<br />

quelque amélioration. Malgré les belles campagnes, le plein air sous les grands arbres, les<br />

magnifiques aspects <strong>de</strong> la mer, nous ne pouvons nous empêcher <strong>de</strong> regretter notre pauvre<br />

maisonnette <strong>de</strong> Grenelle, notre petit jardin si étroit et si resserré; là est notre vie; là est le<br />

divin Maître qui nous conduit et dont la tendre bonté nous attire; là sont nos bien‐aimés<br />

enfants et frères dont la douce charité fait la paix <strong>de</strong> nos jours. On se prend bien à désirer<br />

que tout ce cher entourage pût se transporter dans ces champs si vastes, si libres, si isolés<br />

du mon<strong>de</strong> et du bruit, où on ne sent que Dieu manifesté dans ses œuvres. Mais on trouve<br />

que pour une pareille existence il faut une plénitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> vie, une application habituelle à<br />

Dieu, une puissance dʹattrait vers Lui qui domine tout lʹêtre et lʹabsorbe en Lui. Autre‐<br />

ment, et dans un état <strong>de</strong> grâce inférieur, on ne sentirait pas sa fin remplie, on aurait du<br />

vi<strong>de</strong> et lʹon croirait ses jours mal occupés; tant il est vrai que la sagesse divine a tout calcu‐<br />

lé pour les besoins divers <strong>de</strong>s âmes, comme elle a fait lʹeau pour les poissons, lʹair pour<br />

lʹoiseau et la terre pour les autres créatures.<br />

Pour nous, cher enfant, notre vie cʹest Dieu en Lui‐même et dans la charité, cʹest<br />

pourquoi nous avons hâte <strong>de</strong> retourner près <strong>de</strong> vous pour y retrouver cette atmosphère<br />

que la bonté du Seigneur a préparée pour nous.<br />

273


Je nʹai pas la pensée, très cher ami, <strong>de</strong> rien changer aux choses que la Provi<strong>de</strong>nce<br />

divine a visiblement accommodées à nos aptitu<strong>de</strong>s et à nos forces, jʹaime comme vous nos<br />

chères petites œuvres, et jʹespère bien mourir en leur donnant jusquʹau <strong>de</strong>rnier jour mes<br />

soins. Je pense seulement que leur cercle actuel est un peu restreint et ne peut convenir<br />

quʹà un certain nombre dʹâmes; quʹun peu plus <strong>de</strong> largeur serait mieux, afin que chacun<br />

pût trouver près <strong>de</strong> nous sa place et quʹon ne sʹéloignât pas <strong>de</strong> nous faute dʹœuvre pour<br />

sʹemployer. Or évi<strong>de</strong>mment, les patronages et les Saintes‐Familles, tout excellents quʹils<br />

soient, ne sauraient occuper beaucoup dʹâmes, appelées comme nous à la vie <strong>de</strong> prière et<br />

<strong>de</strong> charité, mais qui nʹauraient pas les mêmes aptitu<strong>de</strong>s ou dispositions dʹesprit. Voilà<br />

toute ma pensée, elle est partagée par M. Myionnet et ne sʹéloigne pas, je crois, <strong>de</strong> la vôtre<br />

propre.<br />

Demain, jeudi, aura lieu ici la première communion <strong>de</strong>s enfants; je me fais une fête<br />

<strong>de</strong> participer à cette touchante solennité; je songe en pareils instants que, parmi toutes ces<br />

jeunes âmes, il y en a beaucoup <strong>de</strong> pures et <strong>de</strong> candi<strong>de</strong>s qui sʹunissent au bon Jésus dʹun<br />

cœur vraiment aimant et que le Cœur du doux Seigneur tressaille dʹune gran<strong>de</strong> allégresse;<br />

jʹenvie leur sainte ar<strong>de</strong>ur et je mʹunis à elles pour glorifier mieux mon Dieu. Dans ce pays<br />

<strong>de</strong> foi surtout, les enfants sont bons, ce doit être entre eux et le divin Père une fête tout ai‐<br />

mable et sans trouble ni regret aucun.<br />

Nous avons eu aussi dimanche, par surcroît <strong>de</strong> grâce, la fête du Sacré‐Cœur qui se<br />

célèbre tardivement dans ce diocèse et que nous avons eu ainsi la joie <strong>de</strong> solenniser une<br />

secon<strong>de</strong> fois. Je regar<strong>de</strong> lʹattrait qui nous pousse tous à cette dévotion aux Cœurs tant ai‐<br />

mants <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M., comme un <strong>de</strong>s témoignages les plus grands <strong>de</strong> la prédilection du Sei‐<br />

gneur pour notre famille. Si vous me faites ma place, très cher enfant, au Saint Sacrifice,<br />

pour moi, en revanche, je vous mets cent fois le jour dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> Jésus et <strong>de</strong><br />

sa Sainte Mère, <strong>de</strong>mandant que vous y preniez une conformité entière à leurs adorables<br />

dispositions, savoir, comme vous lʹavez si bien indiqué dans votre lettre, lʹamour <strong>de</strong> Dieu,<br />

le zèle <strong>de</strong>s âmes, la charité indulgente et compatissante, lʹamour du mépris, <strong>de</strong> la pauvreté,<br />

<strong>de</strong> la croix. On ne trouve rien autre chose dans ces <strong>de</strong>ux livres divins et, y lût‐on toute sa<br />

vie, on nʹy apprendrait jamais autre chose; que cela est court et que cette science serait vite<br />

en nos âmes si elles nʹétaient si insensées et si rebelles; travaillons, cher enfant, <strong>de</strong> toutes<br />

nos forces à lʹacquérir, notre vie sera bien employée si, au <strong>de</strong>rnier jour, le bon Maître<br />

trouve que ses écoliers savent assez bien leur leçon.<br />

Je suis heureux, cher enfant, et je bénis Dieu du bon esprit que vous montrez dans<br />

votre lettre, cʹest <strong>de</strong> la confiance naïve et du désir simple <strong>de</strong> se donner tout au Seigneur;<br />

<strong>avec</strong> cela, et en persévérant dans la prière et lʹhumilité, on arrive sûrement au but.<br />

Je prie cent fois par jour pour vous tous, mais ce nʹest pas assez encore, ni en nom‐<br />

bre, ni en ar<strong>de</strong>ur; mon <strong>de</strong>voir serait, comme vous le dites, dʹappeler incessamment sur<br />

vous les grâces du Seigneur, afin quʹIl supplée Lui‐même à mon insuffisance. Deman<strong>de</strong>z<br />

donc pour votre pauvre Père le don <strong>de</strong> lʹoraison constante et habituelle, et nous <strong>de</strong>vien‐<br />

drons tous riches, car il ne cessera <strong>de</strong> puiser aux trésors du divin amour pour verser à flots<br />

sur nous.<br />

Adieu, très cher enfant, je vous embrasse dans les Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M. <strong>avec</strong> leur<br />

propre charité.<br />

Votre dévoué Père et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

274


Je vous prie, cher enfant, <strong>de</strong> chercher <strong>avec</strong> M. Lecoin, dans un petit registre bleu où<br />

jʹinscris <strong>de</strong>s adresses, une note <strong>avec</strong> une petite lettre <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Bioncourt indiquant les<br />

noms <strong>de</strong>s orateurs qui ont promis <strong>de</strong> parler à la Sainte‐Famille pour toutes les séances jus‐<br />

quʹau mois <strong>de</strong> septembre.<br />

Je songe maintenant, en écrivant ceci, que M. <strong>de</strong> Malartic a dû classer cette note aux<br />

pièces diverses dans un carton. Il faudrait voir lʹorateur désigné et bien sʹassurer quʹil ne<br />

manquera pas <strong>de</strong> venir dimanche. Ecrivez‐moi, aussitôt que vous le saurez, la décision du<br />

p. <strong>de</strong> Ravignan.<br />

Je voulais faire quelques lignes pour notre cher Gabriel mais il est trop tard au‐<br />

jourd’hui; je prierai en dédommagement un peu plus encore pour lui.<br />

200 171 à M. Maignen<br />

Organisation <strong>de</strong> la retraite pour la Sainte‐Famille.<br />

St‐Valéry‐en‐Caux, [26 juillet 1850]<br />

Très cher fils,<br />

Je reçois une lettre <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Malartic qui mʹannonce que probablement nous aurons<br />

lʹéglise <strong>de</strong>s Carmes pour la retraite, le <strong>de</strong>rnier jour excepté. Il serait bien essentiel dʹavoir<br />

au plus tôt une assurance positive à ce sujet, car le moment est venu <strong>de</strong> faire imprimer<br />

sans retard les lettres dʹinvitation et dʹen préparer lʹenvoi. Je vous prie donc, cher enfant,<br />

<strong>de</strong> savoir au plus juste ce que nous pouvons espérer. Nous ne pouvons compter sur<br />

lʹéglise <strong>de</strong> St‐Sulpice, M. le Curé mʹa écrit une lettre toute bonne assurément, mais dans la‐<br />

quelle il mʹexplique les motifs graves qui lʹobligent à la réserver uniquement pour les ser‐<br />

vices paroissiaux proprement dits. Il faudrait en prévenir le p. Milleriot et savoir si le p. <strong>de</strong><br />

Ravignan nous est définitivement acquis; jʹespérais que hier jeudi vous auriez pu voir no‐<br />

tre p. Milleriot et me dire pour aujourdʹhui sa réponse. Je vous prie, en tout état <strong>de</strong> cause,<br />

cher ami, <strong>de</strong> régler toutes choses <strong>avec</strong> le Père pour le lieu <strong>de</strong> la retraite et le jour où elle<br />

commencera, et <strong>de</strong> faire imprimer les lettres dʹinvitation; vous en trouverez <strong>de</strong>s modèles<br />

<strong>de</strong> lʹan <strong>de</strong>rnier dans le bas <strong>de</strong> lʹarmoire <strong>de</strong> la Sainte‐Famille (<strong>de</strong>s lettres vertes).<br />

Si lʹéglise <strong>de</strong>s Carmes ne nous était pas accordée dans <strong>de</strong> bonnes conditions, mieux<br />

vaudrait se réfugier dans notre chapelle ordinaire <strong>de</strong>s séances; alors, il faudrait voir M.<br />

Icard pour sʹassurer que les catéchismes ne nous feraient pas obstacle le matin du jour <strong>de</strong><br />

lʹAssomption pour la messe <strong>de</strong> clôture. Vous penserez sans doute, comme moi, que mieux<br />

vaudrait encore rester dans cette chapelle que dʹaller aux Carmes la semaine qui suivra<br />

lʹAssomption. Je laisse toutefois le p. Milleriot et le p. <strong>de</strong> Ravignan tout déci<strong>de</strong>r.<br />

Voyez aussi M. Tardif, je vous en prie, pour le prier <strong>de</strong> réunir tous éléments possi‐<br />

bles <strong>de</strong> notre musique; je mʹen remets à son zèle si dévoué.<br />

Je joins ordinairement aux lettres dʹinvitation une petite lettre autographe <strong>de</strong> moi<br />

pour inviter nos hommes à venir exactement à la retraite, à distribuer <strong>de</strong>s lettres à leurs<br />

amis et à les amener <strong>avec</strong> eux. Je crois que M. <strong>de</strong> Malartic pourrait écrire cette lettre que<br />

171 L'adresse porte 14 rue du Regard, ce 26 juillet 1850. Le numéro n'avait pas été modifié encore sur la précé<strong>de</strong>nte adresse (lettre<br />

166) qui n'était que du 8 septembre 1848.<br />

275


vous prépareriez <strong>avec</strong> lui et quʹon pourrait imiter ma signature que je vais faire ci‐contre<br />

aussi belle que possible.<br />

Lʹimportant serait <strong>de</strong> préparer les adresses <strong>de</strong>s lettres dʹinvitation, cʹest un travail<br />

assez long; on nʹen envoie quʹaux hommes, à tous ceux qui ont renouvelé leurs cartes au<br />

moins dans lʹintervalle dʹune année ou à peu près.<br />

Il serait bien nécessaire que le p. Milleriot dît bien précisément toutes les disposi‐<br />

tions <strong>de</strong> la retraite à la séance <strong>de</strong> dimanche, car je ne serai pas là pour les annoncer.<br />

Le nombre <strong>de</strong>s lettres à imprimer <strong>de</strong>vra être proportionné au local; pour les Car‐<br />

mes, jʹen faisais ordinairement mille vertes pour les hommes, trois cents blanches pour les<br />

femmes; celles‐ci nʹétaient pas envoyées, mais données <strong>avec</strong> réserve à la bibliothèque.<br />

Adieu, très cher fils, je vous embrasse <strong>avec</strong> N.S. et vous charge dʹembrasser mes au‐<br />

tres bien‐aimés enfants. Lʹheure me presse.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Nous arriverons, selon toute apparence, vendredi 2 août, à 6h ¾.<br />

201 à M. Lecoin 172<br />

Témoignage dʹamitié et <strong>de</strong> communion dans la charité. Gratitu<strong>de</strong> pour lʹavoir remplacé durant son absence.<br />

St‐Valéry‐en‐Caux, 27 juillet [1850]<br />

Très cher Confrère et bien bon ami,<br />

Jʹattendais <strong>de</strong> jour en jour pour vous écrire quelques lignes que jʹeusse reçu quel‐<br />

ques renseignements attendus par moi touchant la retraite <strong>de</strong> la Sainte‐Famille, afin dʹen<br />

causer <strong>avec</strong> vous en même temps que je me rappellerais à votre bon souvenir. Mais divers<br />

embarras retardant lʹarrivée <strong>de</strong>s solutions que je désirais, je ne veux donc pas différer da‐<br />

vantage à vous adresser ces quelques lignes <strong>de</strong> bonne et fraternelle affection. Les absences<br />

momentanées ne sont pas sans profit pour les vraies et soli<strong>de</strong>s amitiés, on sent mieux alors<br />

le prix <strong>de</strong>s ces âmes fidèles et dévouées que le Seigneur a unies à nous pour nous rendre<br />

moins dur et moins fatigant le chemin <strong>de</strong> la vie; on repasse plus à loisir tous les témoigna‐<br />

ges quʹon a reçus <strong>de</strong> leur bienveillante et généreuse bonté et lʹon sent sʹaccroître pour elles<br />

et sa reconnaissance et son attachement. Cʹest précisément ce que je sens ici, très cher ami,<br />

pour les bons et affectionnés Confrères qui mʹaccor<strong>de</strong>nt une indulgente amitié, et pour<br />

vous tout particulièrement qui nʹêtes ni le moins fidèle, ni le moins dévoué. Les années ont<br />

déjà passé sur notre affection et lʹont consacrée; jʹose dire aussi quʹelles lʹont affermie et ac‐<br />

crue; les vieilles amitiés sont comme les vieux vins toujours plus généreux à mesure quʹils<br />

ont plus <strong>de</strong> temps. Jʹai donc la bonne confiance, très cher Confrère et ami, que le <strong>de</strong>rnier<br />

jour nous surprendra travaillant encore à nos petites œuvres et pour tous ces pauvres gens<br />

auxquels nous attachent la charité et le désir <strong>de</strong> leur faire quelque bien.<br />

Je vous remercie mille fois, très cher ami, <strong>de</strong>s soins si assidus que vous accor<strong>de</strong>z à<br />

nos petites affaires et du zèle si chrétien qui vous a fait prendre en mon absence une<br />

gran<strong>de</strong> part <strong>de</strong> mes charges <strong>avec</strong> les vôtres; jʹespère que le bon Maître vous récompensera<br />

comme un vrai et fidèle serviteur; je le prie tous les jours pour vous afin quʹIl vous bénisse,<br />

et en vous‐même et en tous ceux qui vous sont chers.<br />

172 Confrère <strong>de</strong> St-Vt-<strong>de</strong>-Paul.<br />

276


Je ne vais pas tar<strong>de</strong>r, du reste, à vous rejoindre et je ferai tous mes efforts pour allé‐<br />

ger à mon tour votre far<strong>de</strong>au en prenant toute la part possible à nos petits travaux.<br />

Jʹai écrit hier à M. Maignen et lui ai donné quelques indications quʹil vous commu‐<br />

niquera au sujet <strong>de</strong> la retraite. Je serai le samedi 3 août à mon poste, rue du Regard, si Dieu<br />

me prête vie et forme.<br />

Jusque là, ayez, cher ami, quelques bons souvenirs pour moi et croyez à tous mes<br />

sentiments <strong>de</strong> tendre attachement.<br />

Votre dévoué ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Souvenir affectueux à tous nos amis.<br />

M. Paillé vous remercie et vous serre cordialement la main.<br />

202 à M. Decaux<br />

La Ste‐Famille <strong>de</strong> la place Dupleix change <strong>de</strong> local. MLP. sollicite la présence <strong>de</strong> son confrère pour remplacer le<br />

père Milleriot le jour <strong>de</strong> lʹinauguration.<br />

Paris, 3 août 1850<br />

Très cher Confrère,<br />

La Sainte‐Famille <strong>de</strong> la place Dupleix sʹinstalle <strong>de</strong>main dimanche, 4 août, dans sa<br />

nouvelle chapelle; jʹaurais eu le désir dʹavoir pour cette solennité la présence <strong>de</strong> notre bon<br />

p. Milleriot; à mon grand regret, il sera retenu à la Sainte‐Famille <strong>de</strong> St‐Médard dont le<br />

Père spirituel est absent.<br />

Au défaut du p. Milleriot, un <strong>de</strong> ses enfants nous conviendrait parfaitement; cʹest<br />

pourquoi, très cher ami, je recours à votre charité, vous conjurant <strong>de</strong> dire quelques mots à<br />

ces pauvres, très pauvres gens. Ne mʹobjectez pas que je vous avertis trop tard, je suis arri‐<br />

vé hier au soir <strong>de</strong>s bains <strong>de</strong> mer où on mʹavait envoyé; dʹailleurs une <strong>de</strong>s narrations que<br />

vous avez si bien faites à St‐Sulpice ira à merveille. La messe est à midi, ce serait à midi ½<br />

ou midi ¾ au plus tard que vous parleriez, vous pourriez très aisément être revenu pour la<br />

distribution <strong>de</strong>s enfants du patronage qui ne commence quʹà 2h.<br />

La béarnaise, place St‐Sulpice, va aux Invali<strong>de</strong>s et la place Dupleix nʹest quʹà quel‐<br />

ques minutes <strong>de</strong> là, en traversant le Champ‐<strong>de</strong>‐Mars <strong>de</strong>vant lʹEcole Militaire. Il suffirait,<br />

pour nous trouver, <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r la nouvelle chapelle.<br />

Jʹinsiste bien vivement, très cher Confrère, pour obtenir <strong>de</strong> vous cet acte <strong>de</strong> con<strong>de</strong>s‐<br />

cendance et <strong>de</strong> vraie charité: vous rendrez service au p. Milleriot qui était peiné <strong>de</strong> me voir<br />

en embarras, et vous serez agréable au bon Dieu en servant les plus pauvres parmi ses<br />

pauvres.<br />

Croyez bien dʹavance à toute ma reconnaissance comme aux sentiments dévoués<br />

<strong>avec</strong> lesquels je suis<br />

Votre tout affectionné Confrère et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Notre retraite commence vendredi au soir. Je compte bien sur vous et sur tous nos<br />

amis <strong>de</strong> Stanislas.<br />

277


203 à M. Levassor<br />

Des bienfaitrices <strong>de</strong> MLP. vont se rendre à Chartres. Les rencontrer serait d’un grand profit à M. Levassor.<br />

MLP. déconseille à un jeune homme <strong>de</strong> chercher un emploi <strong>de</strong> domestique à Paris.<br />

Paris, 8 août 1850<br />

Très cher ami et frère en N.S.,<br />

Mlles Lesueur, qui ont déjà passé quelque temps lʹan <strong>de</strong>rnier dans votre ville, sʹy<br />

ren<strong>de</strong>nt encore présentement et y resteront un mois ou <strong>de</strong>ux. Je serais charmé pour elles et<br />

pour vous que vous puissiez vous rencontrer; elles sont aussi bonnes que pieuses et chari‐<br />

tables; je suis assuré que vous vous entendrez fort bien; je mʹhonore, <strong>de</strong> mon côté, dʹêtre<br />

un peu lʹami <strong>de</strong> ces excellentes dames et je ne les vois jamais sans une véritable édification.<br />

Mes amis, en mon absence, ont reçu votre petit protégé, ils ont fait pour lui ce que<br />

vous <strong>de</strong>mandiez, si jʹai bien compris.<br />

Jʹexhorte beaucoup le bon jeune homme <strong>de</strong> St‐François‐Xavier, qui veut être domes‐<br />

tique à Paris, à se placer plutôt à Chartres ou en quelque autre lieu; Paris est bien mauvais,<br />

pour les domestiques surtout; si toutefois je rencontrais quelque bonne occasion, en mai‐<br />

son sûre, je ne manquerais pas <strong>de</strong> vous en avertir.<br />

Adieu, très cher ami, je me recomman<strong>de</strong> bien instamment à vos prières, aussi bien<br />

que mes frères qui vous sont, vous le savez, tout dévoués.<br />

Croyez aussi, très cher frère, à mes sentiments <strong>de</strong> tendre affection en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

tion.<br />

Priez pour notre retraite <strong>de</strong> la Sainte‐Famille qui se clôt au beau jour <strong>de</strong> lʹAssomp‐<br />

Jʹarrive <strong>de</strong>s bains <strong>de</strong> mer quʹon mʹavait recommandés pour ma faible santé.<br />

204 à M. Decaux<br />

Nouvelles <strong>de</strong>s Saintes‐Familles. MLP. rend grâces pour le bien que font ses petites oeuvres.<br />

Samedi 17 août [1850]<br />

Très cher Confrère,<br />

Demain, nous comptons sur vous à la Place Dupleix à 1h. moins un quart: notre au‐<br />

ditoire tiendra ses oreilles prêtes.<br />

Je ne sais si vous avez pu assister à la clôture <strong>de</strong> notre retraite, mais on vous aura<br />

dit, si vous avez été empêché, quʹelle avait été pleine <strong>de</strong> consolation.<br />

Nous en bénirons ensemble, cher Confrère, le Maître <strong>de</strong>s cœurs qui a donné quel‐<br />

ques douces joies à ces pauvres âmes, et nous poursuivrons nos petites œuvres puisque,<br />

dans leur faiblesse, elles produisent pourtant tant <strong>de</strong> bien.<br />

Tout à vous bien affectueusement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

278


205 à M. Levassor<br />

Recommandation d’un jeune homme pour ai<strong>de</strong>r son ami aux oeuvres <strong>de</strong> charité.<br />

Paris, 10 septembre 1850<br />

Très cher ami et frère en N.S.,<br />

Vous mʹexprimiez, dans votre <strong>de</strong>rnière lettre, le désir dʹavoir un jeune homme qui<br />

pût vous ai<strong>de</strong>r dans vos œuvres <strong>de</strong> charité; jʹen ai un à vous offrir qui me paraîtrait réunir<br />

toutes les qualités désirables. Il est dʹune honnête famille <strong>de</strong> Normandie, a un extérieur<br />

très aimable, <strong>de</strong> bonnes manières, beaucoup dʹintelligence, lʹesprit ouvert et surtout une<br />

piété vraie, un caractère ferme et un soli<strong>de</strong> amour du bien. Il est âgé <strong>de</strong> 23 ans seulement.<br />

Depuis plusieurs années, il a le désir <strong>de</strong> compléter ses étu<strong>de</strong>s quʹil nʹa poussées que jusquʹà<br />

la 4ème , afin dʹentrer plus tard au Séminaire, mais son père a opposé une résistance cons‐<br />

tante à ses vœux. Placé ici dans une maison <strong>de</strong> nouveautés, il y est resté sage; chrétien et<br />

exemplaire, mais sans que sa volonté ait en rien changé. Le p. <strong>de</strong> Ponlevoy, Jésuite excel‐<br />

lent qui le dirige, lui conseillait <strong>de</strong> <strong>de</strong>scendre dʹun <strong>de</strong>gré et <strong>de</strong> se consacrer <strong>avec</strong> nous aux<br />

œuvres <strong>de</strong> charité, il ne peut se résigner à renoncer à ses espérances pour le sacerdoce.<br />

Il me semble que ce bon jeune homme, que jʹai vu à lʹœuvre et dont on peut tirer un<br />

grand parti, vous serait très utile et quʹil pourrait, <strong>de</strong> son côté, si vous lui donniez quelques<br />

conseils, continuer sous vos yeux, à certaines heures du jour, ses étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> latinité. Il sʹen‐<br />

gagerait à rester près <strong>de</strong> vous au moins tout le temps quʹelles dureraient; peut‐être ensuite<br />

le bon Maître lui inspirerait‐il <strong>de</strong> se consacrer <strong>avec</strong> vous à la sanctification <strong>de</strong>s âmes.<br />

Voyez, je vous prie, très cher ami, ce que vous pensez <strong>de</strong> cette position; les qualités <strong>de</strong> ce<br />

jeune homme me font penser que vous en auriez gran<strong>de</strong> satisfaction. Il faudrait nécessai‐<br />

rement pourvoir à son petit entretien, car son père sʹobstine à ne lui rien envoyer et sa<br />

mère, fort pieuse, ne peut rien contre les défenses <strong>de</strong> son mari.<br />

Jʹattends <strong>de</strong> vous, très cher ami, une prompte réponse. Ne manquez pas, en même<br />

temps, <strong>de</strong> me dire si vous ne nous rendrez pas bientôt une petite visite.<br />

Votre frère bien affectionné en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Union <strong>de</strong> prières, je vous en conjure bien instamment.<br />

206 à M. Decaux<br />

MLP. fait <strong>de</strong> nouveau appel à lui pour une réunion <strong>de</strong> la Sainte‐Famille.<br />

Paris, 18 septembre 1850<br />

Très cher Confrère,<br />

Les exercices <strong>de</strong> la retraite <strong>de</strong> la Sainte‐Famille nous ont privés une fois <strong>de</strong> vous en‐<br />

tendre, car M. <strong>de</strong> Bioncourt avait reçu votre promesse pour la séance du 11 août, jour où<br />

nous nʹavons point eu <strong>de</strong> réunion; mais jʹai toujours gardé au fond du cœur lʹespérance<br />

que nous ne perdrions rien pour avoir un peu attendu. Je vous prie bien instamment, très<br />

cher Confrère, <strong>de</strong> réaliser cette espérance dimanche prochain à St‐Sulpice, où le p. Mille‐<br />

riot vous voit toujours, comme nous, <strong>avec</strong> une si vive satisfaction.<br />

Je serai heureux <strong>de</strong> <strong>de</strong>voir encore à votre charité cette marque dʹintérêt qui accroî‐<br />

tra, sʹil est possible, et ma reconnaissance et celle <strong>de</strong> tous nos pauvres amis. Croyez aussi,<br />

très cher Confrère, à tous mes sentiments les plus dévoués en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

279


207 à M. Planchat 173<br />

208 à M. Levassor<br />

Importance <strong>de</strong> l’élément sacerdotal dans l’Institut pour que les Oeuvres atteignent leur fin. L’oeuvre suressen‐<br />

tielle pour MLP.: une communauté d’hommes consacrés à Dieu dans la vie religieuse et voués à l’apostolat au‐<br />

près <strong>de</strong>s ouvriers et <strong>de</strong>s pauvres.<br />

Paris, 19 septembre 1850<br />

Très cher ami et frère en N.S.,<br />

Votre bonne lettre sʹest croisée <strong>avec</strong> une petite épître que je viens dʹécrire à Mlles Le‐<br />

sueur pour les prier <strong>de</strong> hâter votre réponse; elle nʹa été différée, comme je lʹavais un peu<br />

présumé, que par votre absence et les excursions charitables que vous venez dʹentrepren‐<br />

dre.<br />

Je serai tout heureux dʹoffrir personnellement mon respect à votre vénérable Curé,<br />

et je le remercie bien dʹavance <strong>de</strong> la visite quʹil a promis <strong>de</strong> me faire. Je suis à Grenelle, rue<br />

du Commerce, 75, les mardis et vendredis toute la journée; aux autres jours, à Paris, rue du<br />

Regard (le dimanche excepté), <strong>de</strong> midi à une heure et souvent toute la matinée.<br />

Le bon jeune homme dont je vous ai parlé consentirait difficilement à sʹengager<br />

pour lʹavenir, mais, pour alléger votre charge, il pourrait pourvoir à lʹentretien <strong>de</strong> son vê‐<br />

tement, au moyen <strong>de</strong> quelques petites sommes que sa mère trouve la possibilité <strong>de</strong> lui<br />

faire parvenir.<br />

Offrez bien souvent au bon Dieu, je vous prie, car elle me paraîtrait venir <strong>de</strong> Lui, la<br />

bonne pensée qui vous presse parfois <strong>de</strong> vous unir à nous. Nous sommes bien petits, bien<br />

faibles et pourtant le bon Dieu nous soutient, bénit nos humbles travaux et dit à notre<br />

Cœur quʹIl agrée notre entreprise. Dans toutes nos œuvres, nous tendons au bien <strong>de</strong>s<br />

âmes, notre unique fin est <strong>de</strong> les amener à Dieu; mais quand nous les avons gagnées, à qui<br />

les conduire? Les prêtres, zélés tous et bienveillants, sans doute, sont occupés et chargés<br />

<strong>de</strong> mille soins, ils ne peuvent nous donner que <strong>de</strong>s moments, au lieu dʹappuyer nos œu‐<br />

vres et <strong>de</strong> les développer <strong>avec</strong> suite; notre petite association ne trouvera donc son com‐<br />

plément que dans son union intime <strong>avec</strong> quelques saints prêtres qui voudront bien, dans<br />

la charité et lʹhumilité du Seigneur Jésus, nous accepter pour frères et pour amis. Ce nʹest<br />

pas d’aujourdʹhui, très cher ami, il vous en souvient, quʹil sʹagit pour nous dʹassocier nos<br />

efforts; dès nos débuts dans lʹexercice <strong>de</strong> la charité, nous y avions songé sérieusement.<br />

Mais, pour réaliser <strong>de</strong> mon vivant une si désirable union il ne faudrait pas la reculer dans<br />

un lointain indéfini; je suis toujours maladif, je nʹai que <strong>de</strong>s jours <strong>de</strong> grâce et ne puis comp‐<br />

ter sur un long avenir; pensez à cela, cher ami et frère en N.S. et <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z au divin Père<br />

ses saintes inspirations.<br />

Nous avons, en ce moment, un besoin plus quʹordinaire du secours <strong>de</strong> vos prières,<br />

diverses choses se remuent autour <strong>de</strong> nous qui pourraient influer sur notre petite Com‐<br />

munauté (quant à ses <strong>de</strong>stinées); plusieurs sujets se présentent et semblent en bonne dis‐<br />

position; faibliront‐ils comme tant dʹautres qui nous sont apparus, cʹest le secret <strong>de</strong> Dieu,<br />

nous sommes entre ses mains. Dʹune autre part, <strong>de</strong>ux ou trois <strong>de</strong> nos amis en Province au‐<br />

raient <strong>de</strong>ssein dʹunir leurs œuvres aux nôtres. Ils sentent quʹune fusion intime, absolue se‐<br />

173 Se reporter à la lettre 221. La lettre initialement datée du 18 septembre 1850 est du 18 sept. 1851 et a donc été classée comme 221.<br />

280


ait le meilleur moyen, mais ils y trouvent quelques difficultés: viendront‐ils à nous, alors<br />

ils délaissent pour un temps leurs œuvres commencées; irons‐nous nous‐mêmes à eux,<br />

mais nos sommes encore trop peu nombreux et déjà trop chargés pour nous séparer en‐<br />

core; là est le point à trancher. Il me semble que les œuvres ont une importance accessoire,<br />

elles naissent par centaines tous les ans et marchent autant bien quʹelles le peuvent dans<br />

lʹétat <strong>de</strong>s choses; mais, lʹœuvre suressentielle et première serait <strong>de</strong> former et dʹunir en une<br />

association forte et stable <strong>de</strong>s ouvriers dévoués qui soutiennent et activent toutes ces oeu‐<br />

vres actuellement languissantes, parce quʹelles manquent dʹappuis stables, dʹhommes dé‐<br />

gagés <strong>de</strong>s soins et <strong>de</strong>s intérêts du mon<strong>de</strong>, qui puissent, non se prêter, mais se donner, se<br />

livrer tout entiers. Là est notre pensée, le terme <strong>de</strong> nos aspirations. Vous, très cher ami,<br />

quʹune si tendre charité unit à nous, <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z tous les jours, je vous en conjure, au Sei‐<br />

gneur quʹIl soit <strong>avec</strong> nous et puisse‐t‐Il aussi, comme marque <strong>de</strong> son amour, incliner tout à<br />

fait votre cœur vers notre humble entreprise.<br />

Croyez‐moi bien, dans les Cœurs divins <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.,<br />

Votre ami et frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

209 à M. Decaux<br />

Remerciement pour son dévouement.<br />

Paris, 27 septembre 1850<br />

Très cher Confrère,<br />

Je vous rends grâce pour votre aimable refus; il vaut mieux pour moi quʹun assen‐<br />

timent, car, au lieu dʹune faveur, vous en accor<strong>de</strong>z <strong>de</strong>ux; cʹest ainsi que fait notre Père Cé‐<br />

leste, et vous très cher ami, qui voulez être parfait, comme Il est parfait, vous prenez à tâ‐<br />

che dʹimiter sa divine charité.<br />

Jʹapprécie bien aussi le sentiment <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong> qui vous fait préférer à tout autre<br />

notre Sainte‐Famille <strong>de</strong> la place Dupleix et jʹentre <strong>de</strong> plein cœur dans votre pensée géné‐<br />

reuse en acceptant votre offre, sans préjudice toutefois du droit <strong>de</strong> notre Sainte‐Famille<br />

commune: celle <strong>de</strong> St‐Sulpice qui plus tard aura aussi son tour.<br />

Je nʹai, mon bien cher Confrère, absolument aucun conseil à vous donner; vos entre‐<br />

tiens sont parfaitement dans la convenance, et vous êtes aussi dans la meilleure voie pour<br />

produire un grand bien parmi les ouvriers et les pauvres.<br />

Jʹespère bien que le bon Maître voyant lʹusage que vous faites <strong>de</strong> vos forces vous en<br />

rendra la pleine disposition pour sa plus gran<strong>de</strong> gloire et la consolation <strong>de</strong> ses enfants.<br />

Croyez bien, comme toujours, très cher Confrère, à mes sentiments les plus affec‐<br />

tueux comme à ma bien vive reconnaissance.<br />

Votre dévoué ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Cʹest aux dimanches 6 et 20 octobre que nous vous attendrons à la chapelle <strong>de</strong> la<br />

place Dupleix.<br />

281


210 à M. Levassor<br />

MLP. ne pense plus pouvoir recomman<strong>de</strong>r le jeune homme pressenti pour ai<strong>de</strong>r M. Levassor.<br />

Paris, 30 septembre 1850<br />

Très cher ami et frère en N.S.,<br />

Jʹai vu votre vénérable Curé et jʹai été heureux <strong>de</strong> faire sa connaissance; je vous re‐<br />

mercie <strong>de</strong> mʹavoir mis en rapport <strong>avec</strong> une âme si bonne et si chère à Dieu. Il a vu notre<br />

jeune homme et a paru en prendre une opinion favorable; je nʹai pas moi‐même aujour‐<br />

dʹhui à contredire les bons renseignements que je vous ai donnés; pourtant, très cher ami,<br />

sans avoir rien <strong>de</strong> précis que je puisse alléguer contre lui, je ne me sens pas aussi certain<br />

que je lʹétais précé<strong>de</strong>mment quʹil puisse vous convenir <strong>de</strong> tous points, surtout dans les re‐<br />

lations si intimes et si personnelles que votre charité lui aurait accordées. Je retire donc la<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> que je vous avais faite à son sujet, vous priant bien <strong>de</strong> nʹen prendre néanmoins<br />

aucune impression fâcheuse, puisque très véritablement je nʹai aucun grief que je puisse<br />

imputer à ce jeune homme.<br />

Vous me rendriez bien service, très cher ami, si vous vouliez bien mʹécrire tout <strong>de</strong><br />

suite une petite lettre dans laquelle vous me diriez que, toutes circonstances bien exami‐<br />

nées, vous ne pouvez, quant à présent, prendre <strong>de</strong> nouvelles charges et accueillir consé‐<br />

quemment mon jeune recommandé. Jʹaurai ainsi un moyen plus simple et moins froissant<br />

que tout autre <strong>de</strong> me dégager <strong>avec</strong> lui.<br />

Je regrette bien, quant à vous personnellement, très cher ami, <strong>de</strong> vous donner ainsi<br />

quelque embarras si déjà, comptant sur lui, vous aviez préparé quelques combinaisons;<br />

mais il nʹa pas dépendu <strong>de</strong> moi <strong>de</strong> vous épargner cette contrariété; si je voyais quelque<br />

moyen bien avantageux et bien sûr <strong>de</strong> le remplacer, je vous en écrirais bien assurément.<br />

Croyez‐moi, comme toujours, très cher frère, dans la charité <strong>de</strong>s divins Cœurs <strong>de</strong> J.<br />

et <strong>de</strong> M.,<br />

Votre affectionné ami et frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

211 à M. Levassor<br />

Démarches qu’il a effectuées pour trouver le prédicateur <strong>de</strong>mandé.<br />

Paris, 6 novembre 1850<br />

Très cher ami,<br />

Je me suis occupé <strong>avec</strong> empressement <strong>de</strong> la mission que vous mʹavez donnée, aussi‐<br />

tôt après mon retour dʹun petit voyage que jʹai été obligé <strong>de</strong> faire la semaine <strong>de</strong>rnière. Les<br />

prédicateurs dont vous me donnez les noms ne sont pas, pour la plupart, présentement à<br />

Paris: M. Combalot est du côté <strong>de</strong> Lyon; M. <strong>de</strong> Place ne sera, je crois, ici que pour lʹAvent.<br />

Il ne restait plus que le r.p. <strong>de</strong> Ravignan; il mʹa répondu quʹil lui serait <strong>de</strong> toute impossibi‐<br />

lité <strong>de</strong> quitter sa maison et <strong>de</strong> se rendre à Chartres. Mais il pense que le r.p. Lefebvre, qui<br />

est en ce moment chez vous et qui doit y retourner dans 15 jours, précisément à lʹépoque<br />

où doit avoir lieu votre sermon, serait <strong>de</strong> tout point lʹorateur qui vous convient. Personne,<br />

en effet, ne réussit mieux que cet excellent Père dans les sermons <strong>de</strong> charité; il parle <strong>avec</strong><br />

beaucoup dʹonction et a un talent admirable pour délier les cordons <strong>de</strong>s bourses. On re‐<br />

gar<strong>de</strong> ici comme un bonheur <strong>de</strong> lʹavoir pour orateur et aucun prédicateur nʹattire plus<br />

282


constamment la foule. Je crois donc, très cher ami, que vous feriez une très bonne chose si<br />

vous obteniez sa promesse.<br />

Un <strong>de</strong> mes amis a fait <strong>de</strong>s démarches pour vous procurer le concours <strong>de</strong> M. Alexis<br />

Dupont, quoique la chose souffre beaucoup <strong>de</strong> difficultés, mais il nʹest pas encore <strong>de</strong> re‐<br />

tour <strong>de</strong> la campagne et nʹest attendu que pour lʹhiver. Comme il ne <strong>de</strong>meure pas fort loin,<br />

je ferai en sorte quʹon le poursuive jusquʹà la campagne, quoique jʹaie peu <strong>de</strong> chance <strong>de</strong><br />

succès.<br />

A son défaut, je tenterai <strong>de</strong> vous obtenir le concours dʹun chanteur admirable <strong>de</strong><br />

lʹAbbaye‐aux‐Bois qui aurait assurément un grand succès à Chartres, mais il faudrait sans<br />

doute une rétribution pour lui et aussi pour son accompagnateur dont il aurait besoin, à<br />

moins que vous nʹen ayez un bien habile à Chartres, et enfin les frais <strong>de</strong> voyage et <strong>de</strong> sé‐<br />

jour; ce serait en ensemble une somme assez ron<strong>de</strong>; ayez la bonté <strong>de</strong> me dire avant tout,<br />

cher ami, ce que coûterait le voyage aller et retour, et ce que vous croiriez pouvoir ajouter<br />

pour les frais et rémunération. Je verrai, dʹaprès ce renseignement, sʹil y a moyen <strong>de</strong> faire<br />

quelque ouverture.<br />

Je vous remercie, cher ami, <strong>de</strong> la promesses que vous mʹavez faite <strong>de</strong> mʹenvoyez vo‐<br />

tre discours <strong>de</strong> distribution, vous savez combien tout ce qui vient <strong>de</strong> vous mʹest cher et<br />

combien aussi je mʹintéresse à toutes vos œuvres.<br />

Je nʹai pas encore vu le jeune Martellier. Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> vous dire aussi <strong>avec</strong><br />

quelle satisfaction jʹapprends que vos efforts ont obtenu succès et que bientôt le divin Maî‐<br />

tre viendra Lui‐même dans votre propre maison bénir et encourager vos travaux; nous Le<br />

prierons <strong>de</strong> grand cœur ici, afin quʹIl se serve <strong>de</strong> vous pour se faire aimer et glorifier. Je se‐<br />

rais bien heureux <strong>de</strong> vous rendre une petite visite, mais je suis si fort à lʹattache ici; pour‐<br />

tant, si vous établissiez une Sainte‐Famille, je ferais un effort héroïque pour aller vous voir.<br />

Jʹespère bien que vous êtes tout consolé <strong>de</strong> nʹavoir pas le jeune homme que je vous<br />

avais proposé pour vous secon<strong>de</strong>r; jʹavais tout lieu <strong>de</strong> le croire bon, puisquʹil avait été mis<br />

près <strong>de</strong> nous par le p. <strong>de</strong> Ponlevoy <strong>avec</strong> gran<strong>de</strong> recommandation. Je me suis aperçu, heu‐<br />

reusement à temps, que je ne <strong>de</strong>vais pas le mettre dans votre maison. Jʹai la presque certi‐<br />

tu<strong>de</strong> quʹil nʹeût pas répondu à votre confiance et quʹil ne la méritait pas.<br />

Adieu, très cher ami et frère; reparlez‐moi quelquefois du projet dʹunir nos travaux;<br />

cette pensée mʹest bien douce et je serais heureux que le bon Maître et sa saint Mère favo‐<br />

risassent sa réalisation.<br />

Je vous embrasse <strong>avec</strong> une tendre charité et suis, dans les divins Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong><br />

M.,<br />

Votre frère et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Trois nouveaux frères entrent chez nous; priez bien pour eux et pour nous.<br />

Mes souvenirs bien respectueux à votre bon Curé. Mes frères vous saluent bien cor‐<br />

dialement et en sincère dévouement.<br />

283


212 à M. Planchat 174<br />

L’entrée <strong>de</strong> M. Planchat en communauté est imminente. ʺL’humble ministère <strong>de</strong>s pauvresʺ, tel est l’apostolat qui<br />

attend M. Planchat.<br />

Paris, 10 décembre 1850<br />

Très cher ami et frère en N.S.,<br />

Pendant que vous mʹécriviez la bonne et pieuse lettre que M. lʹabbé Gentil a bien<br />

voulu apporter à Grenelle, jʹécrivais moi‐même, en datant <strong>de</strong> lʹaimable fête <strong>de</strong> lʹImmaculée‐<br />

Conception, une note que jʹenvoyais à M. lʹabbé Icard afin dʹaplanir les voies, suivant ses<br />

conseils, et <strong>de</strong> préparer votre entrée au milieu <strong>de</strong> nous. Que le Seigneur est bon, très cher<br />

ami, <strong>de</strong> nous indiquer si clairement son adorable volonté et <strong>de</strong> préciser si nettement votre<br />

vocation. A lʹinspiration <strong>de</strong> nos cœurs, en effet, se joignent les assentiments unanimes <strong>de</strong><br />

votre Directeur, <strong>de</strong> MM. Carbon et Icard, vos Supérieurs, enfin <strong>de</strong> M. lʹabbé Buquet que je<br />

suis allé voir et qui, en donnant pleine adhésion à notre projet, mʹa promis <strong>de</strong> régler lʹaf‐<br />

faire à lʹArchevêché.<br />

Nous serons forts <strong>avec</strong> <strong>de</strong> telles autorisations et, bien sûrs que Dieu nous envoie,<br />

nous travaillerons <strong>avec</strong> un dévouement absolu à le servir, à le faire connaître et aimer.<br />

Ai‐je besoin <strong>de</strong> dire, très cher frère, que nous prions beaucoup pour vous, que nous<br />

prierons plus encore à mesure que le beau jour <strong>de</strong> votre ordination sera plus proche? De‐<br />

man<strong>de</strong>r pour vous, cʹest <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r pour notre petite famille, pour nos enfants, pour nos<br />

pauvres que vous édifierez plus tard <strong>avec</strong> la grâce et sous lʹinspiration <strong>de</strong> Dieu.<br />

Jʹirai voir le vénérable M. Caduc jeudi, je lʹespère, et je serai tout heureux <strong>de</strong> prendre<br />

ses conseils, <strong>de</strong> mʹéclairer <strong>de</strong> ses lumières; en attendant, M. Myionnet vous porte ce mot<br />

pour vous dire, au nom <strong>de</strong> tous, combien votre venue prochaine réjouit nos cœurs; je lui<br />

eusse disputé cette satisfaction ou plutôt je lʹeusse partagée <strong>avec</strong> lui, si je nʹétais retenu le<br />

mardi à Grenelle.<br />

Notre joie sera double si votre bon ami, M. Gentil, se croit aussi appelé à concourir à<br />

nos petites œuvres; dès longtemps, M. Myionnet, qui le connaissait, mʹavait communiqué<br />

le désir quʹil éprouvait <strong>de</strong> le voir, à votre exemple, prendre lʹhumble ministère <strong>de</strong>s pau‐<br />

vres, ministère si beau, si fructueux, si rempli <strong>de</strong> saintes consolations. Assurez donc cet ex‐<br />

cellent ami quʹil sera compris dans nos prières comme il lʹest déjà dans la tendre et frater‐<br />

nelle affection que nous vous avons vouée.<br />

Je suis dans les Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre dévoué ami et frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rai aussi pour vous les prières <strong>de</strong>s Saintes‐Familles; samedi <strong>de</strong>rnier,<br />

jʹavais déjà écrit à la même intention à N.D.‐<strong>de</strong>s‐Victoires; vous voyez que vos désirs<br />

étaient prévenus et que nous nous entendons déjà.<br />

174 Diacre <strong>de</strong>puis le 22 décembre 1849, Henri-Matthieu Planchat sera ordonné prêtre par Mgr Sibour, archevêque <strong>de</strong> Paris, le 21<br />

décembre 1850 et dès le 24, entre à Grenelle. MLP. note dans son journal : "le <strong>de</strong>rnier admis est un jeune ecclésiastique, M. l'abbé<br />

Planchat, qui a voulu se donner tout entier à nos œuvres dès qu'il a pu le faire, après son ordination. C'est un fait grave que l'admission<br />

parmi nous <strong>de</strong> sujets appartenant au clergé (…) mais la Provi<strong>de</strong>nce à laquelle nous avons entièrement remis la conduite <strong>de</strong> notre<br />

petite œuvre semble avoir disposé toutes choses pour que ses voies fussent aplanies et que l'union <strong>de</strong> ces jeunes prêtres <strong>avec</strong><br />

nous fut consommée." Né le 2 novembre 1823, à la Roche-sur-Yon, en Vendée, il vint à Paris pour étudier le droit. Il se dévoue au<br />

patronage <strong>de</strong> la rue du Regard. Ce "chasseur d'âmes" exercera son ministère <strong>de</strong> charité auprès <strong>de</strong>s enfants et <strong>de</strong>s pauvres dans le<br />

quartier <strong>de</strong> Grenelle, puis surtout au Patronage St Anne à Charonne. Arrêté le Jeudi Saint 6 avril 1871, sous la Commune, il sera<br />

fusillé <strong>avec</strong> d'autres otages, rue Haxo, le 26 mai 1871.<br />

284


213 à M. Decaux<br />

MLP. se rendra à la première messe du frère <strong>de</strong> M. Decaux.<br />

21 décembre 1850<br />

Très cher Confrère,<br />

Je ne manquerai pas <strong>de</strong> me trouver <strong>de</strong>main à la première messe <strong>de</strong> votre cher frère.<br />

Je serai très heureux <strong>de</strong> mʹunir à vous dans une circonstance si grave et si intéressante tout<br />

ensemble.<br />

Je prierai <strong>de</strong> tout mon cœur pour votre frère, pour vous, pour toute lʹEglise qui est<br />

en fête dans une pareille solennité.<br />

Croyez‐moi bien, comme toujours, <strong>avec</strong> un cordial dévouement.<br />

Votre très affectionné Confrère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

214 à M. Decaux<br />

Générosité <strong>de</strong> la Conférence envers la Sainte‐Famille.<br />

28 avril 1851<br />

Très cher Confrère,<br />

Jʹai reçu, <strong>avec</strong> votre aimable petite épître, les 200f que votre Conférence veut bien<br />

accor<strong>de</strong>r à lʹœuvre <strong>de</strong> la Sainte‐Famille.<br />

Je remercie bien cordialement le Seigneur qui inspire à vous et à vos chers Confrè‐<br />

res une si constante et si généreuse charité, et je Le prie bien <strong>de</strong> vous en récompenser en<br />

bénissant tout ce que vous faites <strong>de</strong> votre côté pour la consolation et le soulagement <strong>de</strong> ses<br />

pauvres.<br />

Mes vœux, du reste, ont déjà leur accomplissement sur ce point, car votre Confé‐<br />

rence est florissante et fait un grand bien; tous nos pauvres gens du quartier Montparnasse<br />

se louent <strong>de</strong> leurs visiteurs et se montrent animés dʹune gran<strong>de</strong> reconnaissance envers eux.<br />

Recevez, très cher ami et frère, mes sentiments les plus affectueux en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

215 à M. Decaux<br />

MLP. sollicite son Confrère pour venir parler à la Sainte‐Famille <strong>de</strong> la place Dupleix.<br />

Paris, 30 mai 1851<br />

Très cher Confrère et ami,<br />

Jʹavais espéré obtenir votre présence à la <strong>de</strong>rnière réunion <strong>de</strong> la Sainte‐Famille <strong>de</strong> la<br />

place Dupleix, mais ayant rencontré M. <strong>de</strong> Saudrans désespéré <strong>de</strong> nʹavoir pu trouver<br />

dʹorateur, jʹai eu la générosité <strong>de</strong> renoncer à mes prétentions et <strong>de</strong> lui indiquer votre <strong>de</strong>‐<br />

meure.<br />

Aujourdʹhui je viens chercher la récompense <strong>de</strong> mon abnégation et vous prie bien<br />

instamment <strong>de</strong> venir nous dédommager dimanche prochain; jʹai dʹautant plus besoin <strong>de</strong><br />

votre fidèle concours que la belle saison nous enlève M. <strong>de</strong> Lambel et presque tous les ap‐<br />

285


puis <strong>de</strong> cette pauvre petite association, si utile pourtant et si nécessaire à ce quartier aban‐<br />

donné.<br />

Je compte donc, très cher Confrère, sur votre visite pour dimanche, et je serai dou‐<br />

blement heureux si cette visite est double comme vous me lʹavez accordé déjà quelquefois.<br />

Croyez bien à tous mes sentiments les plus dévoués en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

215‐1 à M. Decaux<br />

Remerciement pour avoir accepté <strong>de</strong> venir place Dupleix.<br />

4 juin 1851<br />

Très cher Confrère,<br />

Ai‐je besoin <strong>de</strong> dire que jʹaccepte <strong>avec</strong> une vive reconnaissance la bonne promesse<br />

que vous me faites <strong>de</strong> venir à nos <strong>de</strong>ux prochaines réunions <strong>de</strong> la place Dupleix, les 15 juin<br />

et 6 juillet; votre présence parmi nous est toujours un véritable bienfait. Nos pauvres gens<br />

vous aiment et se montrent sensiblement reconnaissants. Je suis sûr que le Bon Maître<br />

vous sait gré aussi dʹune œuvre dʹautant plus méritoire à ses yeux quʹelle est plus cachée et<br />

moins brillante parmi les hommes.<br />

Croyez bien, très cher Confrère, à tous mes sentiments <strong>de</strong> reconnaissance et <strong>de</strong> fra‐<br />

ternel dévouement.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

216 à M. Decaux<br />

Rappel d’une séance <strong>de</strong> la Sainte‐Famille.<br />

14 juin 1851<br />

Très cher Confrère et bon ami,<br />

Nous compterons sur vous pour <strong>de</strong>main à la Sainte‐Famille du Gros‐Caillou, à la<br />

place Dupleix. Je fais injure à votre mémoire que jʹai trouvée toujours si fidèle, mais vous<br />

me le pardonnerez sachant bien que je ne saurais en aucun cas mettre en doute votre zèle<br />

et votre obligeante affection.<br />

Croyez bien, très cher Confrère, à tous mes sentiments les plus dévoués en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

217 à M. Decaux<br />

MLP. compte sur sa présence à la retraite <strong>de</strong> la Sainte‐Famille.<br />

Paris, 4 août 1851<br />

Très cher Confrère et bon ami,<br />

La retraite <strong>de</strong> notre Sainte‐Famille commencera samedi 9, à 7h.½, à lʹéglise <strong>de</strong>s<br />

Carmes. Je vous prie, ainsi que nos Confrères <strong>de</strong> Stanislas, <strong>de</strong> le rappeler à vos pauvres<br />

familles; elles y seront admises en présentant leurs cartes.<br />

286


Je compte bien aussi que vous vous joindrez à nous; les exercices <strong>de</strong> la retraite se‐<br />

ront donnés par M. Duquesnay qui saura les rendre intéressants, mais surtout vous y re‐<br />

trouverez vos pauvres gens; ce motif sera le plus décisif pour vous, et vous nous accor<strong>de</strong>‐<br />

rez votre présence, jʹen suis sûr, toutes les fois que vous nʹen serez pas empêché.<br />

Croyez bien, je vous prie, très cher Confrère et ami, à tous mes sentiments <strong>de</strong> vraie<br />

et cordiale affection en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

218 à M. Planchat<br />

Instructions pour le bon rétablissement <strong>de</strong> la santé du père Planchat. Encouragement à l’abandon et à la<br />

confiance en Dieu.<br />

Paris, 2 septembre 1851<br />

Très cher fils et ami en N.S.,<br />

Notre cher M. Maignen vous écrit une petite lettre que je vous envoie; il a tardé un<br />

peu à sʹentretenir <strong>avec</strong> vous à cause <strong>de</strong>s nombreuses occupations dont il a été chargé du‐<br />

rant ces temps <strong>de</strong>rniers; aujourdʹhui encore, pour vous écrire, il se dérobe aux prépara‐<br />

tions laborieuses et un peu attardées <strong>de</strong> son Almanach <strong>de</strong> lʹApprenti.<br />

Nous bénissons mille fois le Seigneur, très cher ami, qui dissipe les nuages dont vo‐<br />

tre esprit se sentait entouré; il fera luire <strong>de</strong> nouveau à votre âme lʹespérance et la douce<br />

consolation; vous reviendrez fort, actif, zélé comme par le passé pour le service du bon<br />

Maître, pour le soin et lʹédification <strong>de</strong>s âmes175 ; mais toutes vos puissances ne vous seront<br />

rendues quʹen temps opportun et quand le Seigneur en aura besoin; jusque là, abandon‐<br />

nez‐vous à Lui, marchez en confiance sans souci <strong>de</strong> lʹavenir. Si jʹosais trouver quelque pe‐<br />

tite chose à reprendre dans vos dispositions durant cette épreuve, ce serait un peu le dé‐<br />

faut dʹabandon et <strong>de</strong> confiance; peut‐être, au reste, plaisait‐il au Seigneur <strong>de</strong> vous tenir<br />

ainsi afin <strong>de</strong> mieux briser et purifier ce cœur dont Il voulait se rendre le maître absolu.<br />

Le vénérable M. Caduc a eu lʹextrême charité <strong>de</strong> nous venir voir pour nous com‐<br />

muniquer les bonnes nouvelles quʹil avait reçues <strong>de</strong> vous et nous dire toutes les bonnes<br />

espérances quʹil en avait conçues; il nous a promis <strong>de</strong> revenir et <strong>de</strong> passer quelques ins‐<br />

tants <strong>avec</strong> nous. Je nʹai pas jusquʹici <strong>de</strong> nouvelles <strong>de</strong> notre cher M. Gentil, mais tout me<br />

porte à penser quʹil va bien. On lui avait parlé avant son départ <strong>de</strong> la place dʹaumônier <strong>de</strong><br />

la prison Mazas, il a rejeté vite la proposition, voulant rester à lʹœuvre <strong>de</strong>s enfants et <strong>de</strong>s<br />

pauvres et partager nos humbles travaux.<br />

Je crois quʹil serait bien, très cher fils, que vous écrivissiez quelques petits mots à<br />

notre bon p. Beaussier qui vous aime tendrement et nous parle constamment <strong>de</strong> vous <strong>avec</strong><br />

la plus affectueuse sollicitu<strong>de</strong>.<br />

M. Caduc pense <strong>avec</strong> nous que vous <strong>de</strong>vez achever votre saison <strong>de</strong> bains là où vous<br />

êtes; lorsquʹelle sera finie, vous examinerez <strong>de</strong> quel côté il vous serait bon <strong>de</strong> vous diriger<br />

pour passer encore quelque temps en repos et distraction; je crois que vous ne <strong>de</strong>vez son‐<br />

ger à revenir quʹen octobre et quand la saison <strong>de</strong>viendra mauvaise à la campagne, il faut<br />

175 M. Planchat est en repos en Normandie, à la Maladrerie Ste Marie, près <strong>de</strong> Caen. Il partira pour un pèlerinage en Italie au mois <strong>de</strong><br />

novembre.<br />

287


que vous soyez radicalement guéri, le service <strong>de</strong> Dieu comme votre intérêt, comme aussi<br />

notre tendre affection le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt.<br />

Adieu, très cher ami et fils en N.S., votre famille naturelle va bien, la petite famille<br />

spirituelle est aussi en assez bon état; tous vous reverrons <strong>avec</strong> joie, et vos pauvres, et vos<br />

enfants, et nous‐mêmes; priez bien pour nous, car nous vous aimons et nous prions aussi<br />

pour vous <strong>de</strong> tout notre cœur.<br />

Votre dévoué Père et ami en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

219 à M. Planchat<br />

Fermes recommandations pour que le père Planchat prenne bien soin <strong>de</strong> sa santé. Importance <strong>de</strong>s obligations <strong>de</strong><br />

la vie religieuse. Elles sont toujours à vivifier par l’esprit <strong>de</strong> foi et <strong>de</strong> charité. Exhortation à la confiance en<br />

l’amour <strong>de</strong> Dieu et en sa divine miséricor<strong>de</strong>. Scène <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> famille à Grenelle.<br />

Paris, 4 septembre 1851<br />

Très cher fils en N.S.,<br />

Vous trouverez à lʹétablissement <strong>de</strong> S te ‐Marie une première lettre que je vous y avais<br />

adressée, vous y croyant encore logé; elle vous dira ce que je vous répète ici sans hésita‐<br />

tion, que je vous invite instamment <strong>avec</strong> le bon M. Caduc à prolonger vos excursions,<br />

après avoir complété votre saison <strong>de</strong> bains. Il faut ne rien négliger pour fortifier votre san‐<br />

té avant la mauvaise saison; votre repos et aussi le bien que vous êtes appelé à faire en dé‐<br />

pen<strong>de</strong>nt. Je pense que le séjour à Bayeux vous serait agréable, cette ville est belle, fort bien<br />

située, et, ce qui est mieux, lʹesprit <strong>de</strong> foi y règne encore; on y sent la vie <strong>de</strong>s anciens<br />

temps. On mʹa dit que le séminaire, le collège et tous les grands établissements étaient très<br />

beaux.<br />

Notre cher M. Gentil est à Compiègne et y prolongera son séjour jusquʹà la fin <strong>de</strong> la<br />

semaine prochaine; il <strong>de</strong>vait revenir pour samedi 6, afin <strong>de</strong> célébrer <strong>avec</strong> nous la fête <strong>de</strong> la<br />

Nativité; mais, comme jʹai vu la possibilité <strong>de</strong> lui laisser quelques jours encore <strong>de</strong> repos, je<br />

lʹai invité à ne revenir que pour le 13 septembre. Le 14, nous nous enfermerons tous à Gre‐<br />

nelle pour faire une petite retraite <strong>de</strong> 4 jours, sous la conduite du r.p. Lefebvre qui a<br />

consenti à prendre près <strong>de</strong> nous sa <strong>de</strong>meure pendant ce temps <strong>de</strong> bénédictions. Vous vous<br />

unirez à nous <strong>de</strong> cœur, très cher ami, et vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rez au divin Seigneur, par sa très<br />

aimée Mère, quʹIl remplisse nos âmes <strong>de</strong> lʹesprit <strong>de</strong> notre vocation. Cʹest sur les obligations<br />

<strong>de</strong> la vie religieuse, en effet, que la retraite nous sera donnée; nous sommes <strong>de</strong> plus en plus<br />

pénétrés <strong>de</strong> cette conviction quʹon ne supporte point les difficultés et les travaux <strong>de</strong> la vie<br />

que nous avons embrassée sans <strong>de</strong>s appuis forts et toujours persistants que la vie reli‐<br />

gieuse peut seule donner; mais la vie commune, la règle et tous les exercices ne sont eux‐<br />

mêmes que les formes qui doivent être vivifiées par lʹesprit <strong>de</strong> foi, <strong>de</strong> charité, dʹabnégation,<br />

dʹabandon et <strong>de</strong> sainte confiance en Dieu; cʹest cet esprit <strong>de</strong> vie que puiseront, je lʹespère,<br />

nos âmes retrempées par la retraite, le recueillement et les pieuses exhortations <strong>de</strong> notre<br />

bon p. Lefebvre.<br />

Adieu, très cher ami et fils en N.S., ayez confiance, Dieu vous aime, vous êtes son<br />

enfant, Il veille sur vous, Il pèse lʹépreuve quʹIl vous fait subir et ne la rendra pas lour<strong>de</strong><br />

au‐<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> vos forces. Quand vous vous défiez <strong>de</strong> vous‐même, espérez en la divine Mi‐<br />

séricor<strong>de</strong>, abîme si profond que nos misères y sont englouties. ʺVous qui avez créée, faites‐<br />

288


moi miséricor<strong>de</strong>!ʺ Cette petite prière a sanctifié sainte Thaïs; elle fera <strong>de</strong> vous aussi un<br />

grand saint, si vous avez confiance et simplicité.<br />

M. Maignen vous a écrit une petite lettre, vous la trouverez à S te ‐Marie. Le f. Paillé a,<br />

<strong>de</strong>puis quelques jours un refroidissement dans les reins qui le courbe en <strong>de</strong>ux et le fait<br />

marcher <strong>avec</strong> un bâton; comme il souffre peu et que son mal nʹoffre aucun danger, nous ne<br />

pouvons nous empêcher <strong>de</strong> rire un peu <strong>de</strong> sa tournure, et nous le faisons rire <strong>avec</strong> nous.<br />

Toute la petite famille va bien du reste; tout le mon<strong>de</strong> vous aime et prie pour vous:<br />

Père, frères, pauvres et petits enfants; priez aussi beaucoup pour tous.<br />

Tout à vous dans les Cœurs <strong>de</strong> J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Ci‐joint un mandat <strong>de</strong> 100f.<br />

220 à M. Decaux<br />

Appel pour une visite <strong>de</strong> famille.<br />

Paris, 8 septembre 1851<br />

Très cher Confrère et bon ami,<br />

Je mets sous vos yeux la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> ci‐jointe dʹun pauvre ménage appartenant à la<br />

Sainte‐Famille et dont la situation paraît très digne dʹintérêt.<br />

Je vous serai bien reconnaissant, très cher Confrère, si vous pouvez faire visiter ces<br />

pauvres gens ou au moins leur donner quelque espérance quʹils seront visités à la fin <strong>de</strong>s<br />

vacances; cette pensée les consolera et leur fera porter plus patiemment leur souffrance.<br />

Je profite <strong>de</strong> lʹoccasion pour vous remercier <strong>de</strong> votre bonne visite dʹhier et <strong>de</strong> tout le<br />

bien que vous faites à ces pauvres âmes délaissées.<br />

Tout à vous en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

221 à M. Planchat<br />

M. Planchat doit prendre tout le repos nécessaire avant <strong>de</strong> rentrer à Paris.<br />

Grenelle, 18 septembre 1851<br />

Très cher fils en N.S.,<br />

Il me semble sage <strong>de</strong> prolonger votre promena<strong>de</strong> autant que vous nʹy trouverez pas<br />

<strong>de</strong> lassitu<strong>de</strong> et dʹennui; cʹest un indice que la nature peut exiger encore cette concession, et,<br />

puisque vous vous étiez donné la tâche <strong>de</strong> la remettre en tel état quʹelle nʹeût plus rien à<br />

dire, il vaut mieux en finir <strong>avec</strong> elle une bonne fois pour toutes. Je crois donc, très cher<br />

ami, que vous ferez bien <strong>de</strong> suivre le petit plan <strong>de</strong> route que vous mʹavez communiqué et<br />

<strong>de</strong> revenir à Paris quand cette excursion sera terminée, si, comme je lʹespère bien, votre<br />

santé vous paraît tout à fait satisfaisante.<br />

Jʹenvoie aujourdʹhui même votre petite lettre à M. Caduc, afin quʹil vous adresse ce<br />

que vous lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z. M. Beaussier a dû vous écrire à Bayeux.<br />

Adieu, très cher fils et ami en N.S.; je résiste à la tentation <strong>de</strong> converser un peu plus<br />

longtemps <strong>avec</strong> vous; notre retraite se clôt <strong>de</strong>main, nous prions beaucoup pour vous; sou‐<br />

289


venez‐vous aussi <strong>de</strong> nous qui vous sommes tendrement unis dans la charité du divin Sau‐<br />

veur.<br />

Votre dévoué Père et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

222 à M. Pavie<br />

Décès du père <strong>de</strong> Victor Pavie. MLP. laisse parler son cœur <strong>de</strong> chrétien et d’ami. Conseils pour la diffusion <strong>de</strong><br />

bons livres.<br />

Paris, 21 septembre 1851<br />

Mon bien cher Victor,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> me donner ma part dans la douloureuse épreuve quʹil a plu au<br />

Seigneur <strong>de</strong> vous envoyer; vous ne nous oubliez pas, malgré nos longs silences, notre<br />

cœur vous reste aussi bien fidèle.<br />

Nous avons prié, mes amis et moi, et notre cher Clément en particulier, pour votre<br />

bon père, pour sa fille, pour vous tous qui êtes frappés comme également, tant votre affec‐<br />

tion était pleine et commune. Si le chrétien se pouvait séparer du fils, <strong>de</strong> lʹami, je vous di‐<br />

rais: mourir plein <strong>de</strong> nobles travaux, dʹattachements soutenus, <strong>de</strong> services rendus; mourir<br />

après une carrière si dignement accomplie en la couronnant par une mort chrétienne,<br />

quelle belle fin! Honneurs, regrets, tendres entourages, saintes espérances, quel beau cor‐<br />

tège pour la mort! A ce prix, qui ne lʹaimerait et ne la désirerait? Consolez‐vous par cette<br />

pensée, cher ami, et que votre amitié, toujours si désintéressée, soit assez généreuse ici<br />

pour accepter tout le bien qui est advenu à cette chère âme au prix <strong>de</strong>s douleurs que vous<br />

laisse une séparation. Cʹest là le terme <strong>de</strong> toutes les gran<strong>de</strong>s affections, nourries par le sa‐<br />

crifice, elles se consomment dans le <strong>de</strong>rnier, le plus complet <strong>de</strong> tous, la mort. Aimons jus‐<br />

que là les êtres les plus chers, <strong>de</strong> les cé<strong>de</strong>r à Dieu, à la condition quʹils soient heureux.<br />

Vous, dʹailleurs, cher ami, si puissant par la ténacité <strong>de</strong> vos attachements, vous pouvez<br />

mieux quʹun autre vous soutenir par les souvenirs, vous rendre présents ceux qui ne sont<br />

plus par les vives impressions <strong>de</strong> votre cœur. Tous vos amis passés sont là, réunis ou sur‐<br />

vivants, et font comme un mon<strong>de</strong> à vous où vous perpétuez la vie en continuant dʹaimer.<br />

Assurez bien votre chère femme que je recomman<strong>de</strong> à elle et le cher enfant quʹelle<br />

doit vous donner aux tendres sollicitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> la Très Sainte Vierge, notre Mère. Jʹespère<br />

bien quʹelle les couvrira tous les <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> sa puissante protection.<br />

Je ne sais rien sur la propagan<strong>de</strong> <strong>de</strong>s bons livres, ne mʹétant pas occupé particuliè‐<br />

rement <strong>de</strong> cette œuvre si utile. Je crois seulement que vous <strong>de</strong>vez être exclusif et ne répan‐<br />

dre que ce qui est vrai; le pur seul peut faire du bien . On prête à regret et <strong>avec</strong> discrétion<br />

et en sachant à quelles mains, quelques livres <strong>de</strong> moyenne valeur comme en contiennent<br />

nos bibliothèques. Mais les éditer, les répandre, les abandonner, jusquʹà extinction, à une<br />

circulation illimitée et sans frein, cʹest une responsabilité <strong>de</strong> conscience que je ne vous<br />

conseille pas dʹassumer.<br />

Adieu, bien cher, prions bien les uns pour les autres, et, comme le veut saint Fran‐<br />

çois <strong>de</strong> Sales, aimons‐nous déjà sur la terre comme nous nous aimerons au Ciel.<br />

Votre dévoué ami et frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

290


223 à M. Caille 176<br />

MLP. fait un rapi<strong>de</strong> exposé <strong>de</strong> la structure financière <strong>de</strong> l’oeuvre du Patronage à Paris. Désir <strong>de</strong> voir à Amiens<br />

les bonnes volontés se regrouper dans l’intérêt <strong>de</strong>s oeuvres.<br />

Paris, 7 janvier 1852<br />

Monsieur et bien cher frère en N.S.,<br />

Je réponds poste pour poste à votre lettre, afin <strong>de</strong> vous<br />

donner les renseignements que vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z et que<br />

vous désirer avoir sans retard.<br />

LʹŒuvre du patronage est ici dans la main du Conseil<br />

<strong>de</strong> Paris qui en règle les dépenses annuellement; on fait à<br />

lʹœuvre un budget dont tous les articles sont déterminés et on<br />

ne permet pas aux directeurs dʹemployer les sommes affectées<br />

à un article à <strong>de</strong>s dépenses afférentes à un autre; les comptes<br />

sont révisés très régulièrement.<br />

Les vêtements ou encouragements ne sont donnés<br />

quʹen échange <strong>de</strong>s bons points; si un enfant, nʹayant pas cette<br />

monnaie entre les mains, a un besoin pressant <strong>de</strong> vêtements,<br />

on recourt à la Conférence qui lʹa présenté au Patronage et qui<br />

ne refuse guère <strong>de</strong> donner quelque secours.<br />

En règle, tous les enfants admis au Patronage doivent être présentés par les Confé‐<br />

rences; elles se montrent du reste très disposées à recevoir tous ceux quʹon leur recom‐<br />

man<strong>de</strong>.<br />

Il semble désirable, en général, que le directeur du Patronage nʹait pas à sʹoccuper<br />

<strong>de</strong> créer <strong>de</strong>s ressources, mais quʹil laisse ce soin aux Conférences et ne réserve pour lui que<br />

la conduite et direction <strong>de</strong>s enfants.<br />

Lorsque les familles visitées nʹenvoient pas régulièrement leurs enfants au Patro‐<br />

nage, on leur fait <strong>de</strong>s représentations, on peut y ajouter même la menace <strong>de</strong> supprimer les<br />

secours, mais je ne sache pas quʹon ait jamais exécuté cette menace.<br />

Telles sont les règles suivies à Paris pour le Patronage; mais il va sans dire que cha‐<br />

que localité peut les modifier en quelques points, selon ses besoins et convenances.<br />

Jʹai vu aujourdʹhui M. <strong>de</strong> Renneville que jʹavais déjà eu occasion <strong>de</strong> rencontrer, nous<br />

nous sommes entretenus longuement et en parfaite intelligence; le résultat <strong>de</strong> cet entretien<br />

a été quʹil serait bon dʹétablir à Amiens un petit centre où se grouperaient quelques hom‐<br />

mes <strong>de</strong> bonne volonté, afin dʹunir leurs forces dans lʹintérêt <strong>de</strong>s œuvres, et quʹon tâcherait<br />

ensuite dʹétablir <strong>de</strong>s rapports aussi intimes que cela paraîtrait possible entre cette institu‐<br />

tion et la colonie <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Renneville.<br />

Je continuerai, très cher Confrère et frère en N.S., à mettre vous et vos œuvres dans<br />

les Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M. Jʹai la confiance que nos vœux seront entendus et que jʹaurai quel‐<br />

que jour la consolation <strong>de</strong> travailler en union <strong>avec</strong> vous.<br />

Votre dévoué Confrère et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

176 A la tête d'une importance maison <strong>de</strong> commerce à Amiens, Florent Caille, confrère <strong>de</strong> St-Vt-<strong>de</strong>-Paul, avait fondé et dirigeait <strong>de</strong>s<br />

œuvres ouvrières florissante. Il voulut s'associer à l'Institut. MLP. accepta ce confrère engagé dans le mon<strong>de</strong>: le 14 mai 1852, M.<br />

Caille prononcera <strong>de</strong>s vœux temporaires et retournera à son commerce dont les revenus servent à maintenir son Patronage. Après<br />

la mort <strong>de</strong> MLP. en 1874, il quittera l'Institut (+ 1887). Sa correspondance <strong>avec</strong> MLP. (262 lettres) aura duré plus <strong>de</strong> 21 ans.<br />

291


223‐1 à un Vicaire Général<br />

Exposé <strong>de</strong>s objectifs <strong>de</strong> la Communauté <strong>de</strong>s Frères <strong>de</strong> Saint Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul. Historique. Intuition du fondateur.<br />

Union <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux éléments laïc et ecclésiastique. Nécessité <strong>de</strong> l’élément ecclésiastique. MLP. souhaite recevoir<br />

l’ordination sacerdotale pour continuer à diriger sa Communauté. Témoignage favorable <strong>de</strong> l’abbé Beaussier.<br />

17 mars 1852<br />

Le soussigné appartenant à la petite Communauté <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul, déjà ho‐<br />

norée à diverses reprises <strong>de</strong>s bienveillants encouragements <strong>de</strong> M gr lʹArchevêque <strong>de</strong> Paris,<br />

prend la respectueuse confiance <strong>de</strong> soumettre à M. le Vicaire Général un court exposé sur<br />

la constitution <strong>de</strong> cette œuvre et dʹappeler en même temps son attention sur quelques<br />

questions concernant sa situation présente.<br />

Il y a maintenant sept ans que lʹexposant et <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> ses amis, vivement frappés <strong>de</strong><br />

la haute importance que la Provi<strong>de</strong>nce semble assigner, <strong>de</strong> notre temps, aux œuvres <strong>de</strong><br />

charité, résolurent dʹy consacrer leur vie, prenant tout ensemble pour fin dʹy chercher leur<br />

propre sanctification et <strong>de</strong> prêter aux œuvres un concours plus stable et plus consistant<br />

que ne peuvent le donner dʹordinaire les gens du mon<strong>de</strong>.<br />

Ils mesurèrent bien, du reste, lʹétendue <strong>de</strong> leur sacrifice; ils comprirent dès lʹabord<br />

que, sʹils voulaient se donner à Dieu, il fallait pour Lui renoncer à tout et que, sʹils aspi‐<br />

raient à vivre ensemble, à puiser dans la vie commune la force que donne lʹunité, il fallait<br />

quʹils fondissent leurs esprits en un et fissent abnégation dʹeux‐mêmes. Eclairés et soute‐<br />

nus par les conseils dʹun saint Evêque (M gr dʹAngers) qui dirigeait lʹun dʹentrʹeux et qui se<br />

trouvait <strong>de</strong> passage à Paris, ils sʹoffrirent sans réserve et acceptèrent toutes les conditions<br />

<strong>de</strong> la vie religieuse, le vêtement excepté, lʹhabit laïc leur paraissant plus propice au mou‐<br />

vement extérieur <strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong> charité.<br />

Les nouveaux frères nʹeurent gar<strong>de</strong> dʹailleurs dʹomettre les soumissions quʹils <strong>de</strong>‐<br />

vaient à leur propre Pontife. Ils communiquèrent, dès le principe, leur projet à M gr Affre<br />

qui leur donna ses avis <strong>avec</strong> sa bénédiction paternelle en les assurant <strong>de</strong> sa constante pro‐<br />

tection. Il leur eût même, dès ce moment, ouvert un asile dans la Maison <strong>de</strong>s Carmes sʹils<br />

nʹeussent fait observer à Sa Gran<strong>de</strong>ur quʹil convenait mieux à leurs petits commencements<br />

<strong>de</strong> se façonner dans lʹombre et dʹétudier mûrement les <strong>de</strong>sseins du Seigneur.<br />

Il est à remarquer que lʹun <strong>de</strong>s trois associés était marié mais dans <strong>de</strong>s conditions<br />

tout exceptionnelles qui rendaient possible une séparation amiable. Elle se fit dʹun com‐<br />

mun accord, après une année dʹépreuve, et sous la direction <strong>de</strong> M gr dʹAngers auquel le cas<br />

avait déféré.<br />

Plusieurs années sʹécoulèrent durant lesquelles la petite Communauté se constitua,<br />

prit <strong>de</strong>s exercices et <strong>de</strong>s formes régulières, sʹattachant avant tout à donner à ses membres<br />

lʹesprit intérieur et le goût <strong>de</strong>s vertus chères à saint Vincent <strong>de</strong> Paul et à saint François <strong>de</strong><br />

Sales, la simplicité, lʹhumilité, le zèle et la charité. Ses membres, au nombre <strong>de</strong> cinq pen‐<br />

dant plusieurs années, sʹélevèrent plus tard à 12, puis à 14, nombre actuel <strong>de</strong> son person‐<br />

nel. Parmi eux, sont trois jeunes ecclésiastiques auxquels Monseigneur a bien voulu don‐<br />

ner <strong>de</strong>s pouvoirs pour se livrer aux œuvres <strong>de</strong> charité en union <strong>avec</strong> la petite Communau‐<br />

té.<br />

Le travail <strong>de</strong> constitution et dʹinformation intérieure nʹabsorba pas tellement les frè‐<br />

res quʹils ne donnassent aussi leurs soins à quelques œuvres du <strong>de</strong>hors. Lʹœuvre <strong>de</strong> la<br />

Sainte‐Famille, maintenant établie en sept paroisses <strong>de</strong> Paris et en plusieurs villes <strong>de</strong> pro‐<br />

vince, les fourneaux pour les pauvres, les caisses pour les loyers, <strong>de</strong>s bibliothèques popu‐<br />

292


laires, les maisons <strong>de</strong> patronage <strong>de</strong>s apprentis et <strong>de</strong>s jeunes ouvriers, lʹasile pour les vieil‐<br />

lards, désigné sous le nom <strong>de</strong> Maison <strong>de</strong> Nazareth, enfin la maison <strong>de</strong>s orphelins <strong>de</strong> la rue<br />

<strong>de</strong> lʹArbalète, placée sous le patronage <strong>de</strong> M gr lʹArchevêque <strong>de</strong> Paris, ont été fondées ou<br />

<strong>de</strong>sservies par eux. Ces œuvres, quoique bien imparfaites encore, laissent néanmoins espé‐<br />

rer que, dans lʹavenir, la petite Communauté en se développant, pourrait mettre, dans les<br />

œuvres, un élément <strong>de</strong> consistance et <strong>de</strong> stabilité qui leur manque et surtout (cʹest là sa<br />

première fin) y maintenir lʹesprit <strong>de</strong> foi et <strong>de</strong> vraie charité.<br />

On trouverait encore un aperçu assez exact <strong>de</strong> lʹaction quʹelle pourrait exercer, dans<br />

les faits qui se sont passés à Grenelle où quelques‐uns <strong>de</strong> ses membres sont établis.<br />

M. le Vicaire Général sait déjà quʹà leur arrivée ils trouvèrent le vénérable curé <strong>de</strong><br />

cette paroisse, abattu, découragé par 9 années dʹefforts et <strong>de</strong> travaux en apparence sans<br />

fruit, pasteur sans troupeau ainsi quʹil le disait tristement lui‐même. Bientôt une Confé‐<br />

rence <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul réunit, groupa les hommes chrétiens puis successivement, la<br />

visite <strong>de</strong>s pauvres, une bibliothèques populaire, <strong>de</strong>s fourneaux, un patronage dʹapprentis<br />

et <strong>de</strong> jeunes ouvriers, <strong>de</strong>s catéchismes quotidiens aux adultes, aux enfants <strong>de</strong>s manufactu‐<br />

res, enfin <strong>de</strong>s rapports journaliers <strong>avec</strong> les moribonds, produisirent un mouvement géné‐<br />

ral dans la population et peu à peu la rapprochèrent <strong>de</strong> lʹEglise. Aujourdʹhui Grenelle, as‐<br />

sure‐t‐on, est sous le rapport religieux, une <strong>de</strong>s meilleures paroisses <strong>de</strong> la banlieue: les of‐<br />

fices, le Carême, le mois <strong>de</strong> Marie, lʹAdoration y sont suivis par un peuple assez nombreux<br />

et <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s consolations sont données au cœur du vénérable curé.<br />

Sans exagérer la faible part que le Seigneur leur a permis dʹavoir à cet heureux<br />

changement, les frères pensent néanmoins quʹelle indique assez bien le rôle que prendrait<br />

<strong>avec</strong> le temps la petite Communauté, comme préparation et assistance <strong>de</strong> lʹaction du cler‐<br />

gé.<br />

Il est facile <strong>de</strong> comprendre combien, dans une association pareille, la présence <strong>de</strong><br />

quelques ecclésiastiques est utile et combien les <strong>de</strong>ux éléments ecclésiastique et laïc étroi‐<br />

tement unis par un même esprit <strong>de</strong> zèle et <strong>de</strong> charité peuvent se prêter <strong>de</strong> force lʹun à lʹau‐<br />

tre. Hors <strong>de</strong> cette combinaison, ou la plupart <strong>de</strong>s œuvres sont impossibles, ou sans portée,<br />

le clergé <strong>de</strong>s paroisses, trop occupé par le ministère, ne pouvant sʹen détourner pour satis‐<br />

faire aux soins et services multipliés <strong>de</strong>s oeuvres. Aussi le soussigné se plaît‐il à reconnaî‐<br />

tre que le bien spirituel sʹest accru sensiblement dans les travaux que la petite Communau‐<br />

té <strong>de</strong>puis que le concours <strong>de</strong> quelques jeunes ecclésiastiques lui a été accordé et quʹelle ne<br />

sʹest cru complète dans sa constitution que du moment où leur union <strong>avec</strong> elle a paru as‐<br />

surée.<br />

Mais plus cet accord semble désirable et peut produire dʹheureux fruits, plus il im‐<br />

porte <strong>de</strong> le rendre durable et <strong>de</strong> prévenir les embarras qui pourraient lʹaltérer. Il est donc<br />

bien essentiel dʹen poser dès à présent les bases <strong>de</strong> telle sorte quʹelles puissent subsister et<br />

se maintenir.<br />

Lorsque les jeunes ecclésiastiques désignés ici entrèrent dans la Communauté <strong>de</strong> St‐<br />

Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul, elle existait déjà <strong>de</strong>puis plusieurs années, ils la trouvèrent constituée,<br />

ayant son règlement, ses exercices, sa vie en un mot. Ils lʹacceptèrent humblement telle<br />

quʹelle était et reconnurent aussi lʹautorité qui la conduisait, toutes réserves faites <strong>de</strong><br />

lʹhonneur <strong>de</strong> leur caractère et <strong>de</strong>s latitu<strong>de</strong>s nécessaires à leur ministère. Lʹordre et la paix<br />

existent jusquʹà présent en ces conditions. Il y a néanmoins dans la pratique quelques em‐<br />

barras, et il y aurait peut‐être à la longue quelques difficultés dans une pareille disposition.<br />

293


Un laïc, sans lʹhabit religieux surtout, ne peut guère <strong>avec</strong> convenance distribuer les em‐<br />

plois, régler les exercices et les actes dʹun ecclésiastique (sauf certains cas et en vue dʹhono‐<br />

rer les états soumis et dépendants du Sauveur). Les choses seraient mieux dans lʹordre et<br />

satisferaient davantage le cœur <strong>de</strong> tous si le chef <strong>de</strong> la Communauté était ecclésiastique.<br />

Or là est le point difficile; lʹheure ne serait point venue pour ceux du <strong>de</strong>dans, trop jeunes et<br />

trop peu expérimentés encore; en prendre au <strong>de</strong>hors ne serait pas plus acceptable, les œu‐<br />

vres se façonnent dʹordinaire par les mains <strong>de</strong> ceux qui les ont suscitées; <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts et<br />

<strong>de</strong> lʹavis <strong>de</strong>s hommes les plus graves, il y aurait <strong>de</strong>s inconvénients sérieux et péremptoires.<br />

En cet état, que resterait‐il donc sinon que celui qui conduit présentement la<br />

Congrégation, qui en a conçu la pensée, en a réuni les éléments et dirigé les premiers<br />

commencements <strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> visible <strong>de</strong> Dieu fut confirmé dans sa position <strong>avec</strong> le caractère<br />

et les grâces qui la rendraient plus sainte et plus vraie. Ainsi mieux autorisé, il pourrait ré‐<br />

gulièrement déterminer les emplois et les places <strong>de</strong> chacun, équilibrer les <strong>de</strong>ux éléments<br />

<strong>de</strong> lʹœuvre et lui donner une assiette ferme et définitive qui assurerait son avenir. Il a osé<br />

espérer que cette considération pèserait assez près <strong>de</strong> M gr lʹArchevêque pour que Sa Gran‐<br />

<strong>de</strong>ur daignât examiner sʹil ne pourrait pas être admis dans les ordres sacrés.<br />

En confessant son insuffisance et son indignité, il allèguerait pour la couvrir dʹune<br />

part vingt années employées aux travaux <strong>de</strong> zèle, <strong>de</strong> charité et aux enseignements reli‐<br />

gieux, <strong>de</strong> lʹautre lʹappel intérieur <strong>de</strong> Dieu qui <strong>de</strong>puis lʹâge <strong>de</strong> 20 ans (il en a maintenant 48)<br />

nʹa cessé <strong>de</strong> le poursuivre <strong>de</strong> la conviction intime, profon<strong>de</strong>, quʹun jour il entrerait dans la<br />

milice sainte. Des empêchements <strong>de</strong> famille, <strong>de</strong> santé et autres ont, à diverses époques <strong>de</strong><br />

sa vie, rendu ses tentatives vaines, mais le désir a persisté et lʹespérance <strong>avec</strong> lui.<br />

Aujourdʹhui, un obstacle se présente encore; il a été marié, ainsi quʹil a été dit pré‐<br />

cé<strong>de</strong>mment, et nʹa sa liberté quʹen vertu du consentement formel et régulier à lui donné<br />

par qui <strong>de</strong> droit. Cet empêchement est‐il décisif et absolu, il ne le pense pas et conjure<br />

Monsieur le Vicaire Général dʹexaminer les raisons quʹil a <strong>de</strong> juger ainsi.<br />

1° ‐ Il déclare, dans la vérité la plus entière, quʹil ne renonça à sa liberté quʹaprès<br />

sʹêtre assuré une fois encore que sa santé sʹopposait à son admission au séminaire; quʹen<br />

second lieu, il ne prit cet engagement par aucun motif dʹintérêt ou <strong>de</strong> passion, mais uni‐<br />

quement par un sentiment <strong>de</strong> générosité, exagérée peut‐être, et pour donner appui à une<br />

personne qui lui inspirait une estime et une affection méritées, et que lʹisolement et lʹennui<br />

avaient jetée dans un état <strong>de</strong> marasme et dʹhypocondrie qui menaçaient sa raison et sa vie.<br />

Cette personne avait 17 ans <strong>de</strong> plus que le soussigné; il fut convenu expressément que les<br />

rapports entre eux ne changeraient pas et quʹils <strong>de</strong>meureraient comme frère et sœur. Cette<br />

convention a été exactement gardée.<br />

2° ‐ Dès le principe, la séparation <strong>de</strong> biens eut lieu comme la séparation <strong>de</strong> corps.<br />

3° ‐ Après quelques années, cette personne étant rentrée dans <strong>de</strong>s dispositions dʹes‐<br />

prit meilleures, ayant repris ses relations et le mouvement <strong>de</strong> la vie ordinaire, le soussigné<br />

crut que sa tâche était remplie, il <strong>de</strong>manda et obtint le consentement dont il avait besoin<br />

pour entrer en communauté et se consacrer à la vie religieuse.<br />

4° ‐ Il nʹusa toutefois <strong>de</strong> ce consentement quʹau bout dʹune année dʹépreuve et après<br />

sʹêtre assuré quʹil était définitif. Cette affaire fut suivie et réglée par un saint Prélat (M gr<br />

lʹEvêque dʹAngers) qui avait bien voulu lʹexaminer. Cette séparation dès longtemps prépa‐<br />

rée nʹexcita ni curiosité, ni surprise.<br />

294


5°‐ Depuis lors (cʹest‐à‐dire 7 années) les <strong>de</strong>ux parties, en restant respectivement<br />

dans les sentiments dʹestime et <strong>de</strong> bienveillance, ne se sont point revues, lʹune étant fixée à<br />

Paris, lʹautre ayant presque constamment <strong>de</strong>meuré dans le diocèse <strong>de</strong> Lyon où elle avait<br />

pris rési<strong>de</strong>nce durant ces <strong>de</strong>rnières années, y vivant dans <strong>de</strong>s habitu<strong>de</strong>s chrétiennes et une<br />

réserve <strong>de</strong> conduite conforme à toute sa vie.<br />

6°‐ Elle a présentement 65 ans; elle jouit dʹune fortune suffisante et entièrement in‐<br />

dépendante.<br />

On pourrait il est vrai, objecter quʹen rigueur les règles <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt que la partie res‐<br />

tante entre en communauté, mais un cas si exceptionnel, une réunion <strong>de</strong> circonstances si<br />

rare ne pourraient‐ils justifier une mesure particulière, telle que lʹEglise lʹa souvent ad‐<br />

mise?<br />

Le vénérable ecclésiastique qui dirige lʹexposant <strong>de</strong>puis dix ans, M. lʹabbé Beaussier,<br />

donne dʹailleurs un plein assentiment à ces vues et joint ses instances aux siennes. De son<br />

côté, M. le Vicaire Général qui, <strong>de</strong>puis tant dʹannées, ne lʹa jamais perdu <strong>de</strong> vue, lui refuse‐<br />

rait‐il son témoignage et ne consentirait‐il pas à répondre au besoin que, par une docilité<br />

profon<strong>de</strong>, une circonspection constante, il donnerait entière garantie à lʹautorité et que sa<br />

vie toute renfermée au petit cercle <strong>de</strong> ses œuvres, resterait aussi obscure, aussi cachée que<br />

par le passé?<br />

Telles sont les considérations que le soussigné soumet à la bienveillante apprécia‐<br />

tion <strong>de</strong> M. le Vicaire Général. Il ose espérer que dʹune part dans lʹintérêt dʹune œuvre visi‐<br />

blement bénie <strong>de</strong> Dieu, qui a déjà fait quelque bien et qui en promet plus encore si sa mar‐<br />

che nʹest pas entravée; et <strong>de</strong> lʹautre par miséricor<strong>de</strong> pour une âme longtemps brisée et<br />

contrariée dans ses vœux les plus chers, il prendra en mains sa requête et lui ménagera un<br />

accueil favorable <strong>de</strong> M gr lʹArchevêque.<br />

Profondément reconnaissant dʹune grâce toute imméritée, il prendrait lʹengagement<br />

formel dʹen gar<strong>de</strong>r le souvenir jusquʹà son <strong>de</strong>rnier instant et <strong>de</strong> placer en toutes ses prières<br />

et sacrifices une intention particulière et spéciale pour le Premier Pasteur du Diocèse et<br />

pour le troupeau quʹil conduit.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

(TEMOIGNAGE DE M. LʹABBE BEAUSSIER)<br />

Chargé dès le commencement <strong>de</strong> diriger les membres <strong>de</strong> la petite Communauté <strong>de</strong><br />

St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul, je crois pouvoir assurer quʹelle est dans <strong>de</strong> bonnes conditions pour se<br />

fon<strong>de</strong>r dans lʹesprit intérieur, objet principal <strong>de</strong> lʹœuvre, et, dans les limites <strong>de</strong> lʹobéis‐<br />

sance, opérer un grand bien à lʹextérieur dans les œuvres <strong>de</strong> zèle et <strong>de</strong> charité.<br />

Je pense, en outre, quʹil serait essentiel, pour mettre cette Communauté dans une<br />

assiette régulière et définitive, quelle fut conduite par un Supérieur ecclésiastique lequel, à<br />

mon avis, ne pourrait, sans <strong>de</strong> graves difficultés, être pris en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> lʹœuvre. Telle<br />

quʹelle est conçue, elle me paraît ouvrir une carrière aux jeunes ecclésiastiques qui vou‐<br />

draient se consacrer aux œuvres <strong>de</strong> charité et je trouverais bon que cette voie fût suivie.<br />

Enfin, quant au vœu particulier émis par M. Le <strong>Prevost</strong>, en ce qui le concerne, non<br />

seulement jʹy donne mon entier assentiment, mais jʹaime à joindre ma démarche à la<br />

sienne dans la pensée que Dieu lʹappelle à compléter lʹœuvre quʹIl lui a donné <strong>de</strong> com‐<br />

mencer.<br />

J.B. Beaussier ‐ Prêtre<br />

17 mars 1852<br />

295


224 à M. Decaux<br />

La présence <strong>de</strong> M. Decaux est vivement souhaitée à la Sainte‐Famille <strong>de</strong> la place Dupleix, comme à l’oeuvre du<br />

frère Maignen à Grenelle.<br />

Paris, 29 avril 1852<br />

Très cher ami et frère en N.S.,<br />

Votre <strong>de</strong>rnière apparition dans nos Saintes‐Familles se perd presque dans la nuit du<br />

temps; nos braves gens <strong>de</strong> la place Dupleix, en particulier, commencent à en murmurer; il<br />

faudrait donc que pour faire ma paix <strong>avec</strong> eux, vous ayez la charité <strong>de</strong> nous venir diman‐<br />

che prochain; jʹen serais bien reconnaissant et eux aussi, car ils sentent vraiment le bien<br />

quʹon leur fait; plus délaissés que les autres, ils apprécient mieux un témoignage dʹintérêt<br />

et <strong>de</strong> sincère bienveillance.<br />

Jʹespère, très cher Confrère, que rien ne vous empêchera <strong>de</strong> vous rendre à nos vœux<br />

et quʹil me sera donné <strong>de</strong> vous rencontrer quelques instants.<br />

Veuillez être bien assuré <strong>de</strong> mon affectueux dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. M. Maignen me dit quʹil serait bien heureux, <strong>de</strong> son côté, si vous pouviez prési‐<br />

<strong>de</strong>r sa distribution trimestrielle à Grenelle; le tout irait ainsi à merveille, la place Dupleix<br />

vous servirait dʹétape pour arriver à Grenelle, et, le soir, vous pourriez rendre grâces à<br />

Dieu dʹune journée si bien employée.<br />

A dimanche donc, cher Confrère, nous comptons sur votre bonne volonté si cons‐<br />

tante.<br />

225 à M. Decaux<br />

Gratitu<strong>de</strong> pour sa bienveillance et celle <strong>de</strong> ses Confrères.<br />

Paris, 12 mai 1852<br />

Très cher Confrère et ami,<br />

Vous communiquez à votre Conférence lʹesprit <strong>de</strong> confiance et <strong>de</strong> générosité qui<br />

vous anime, et vous donnez largement, même quand le Seigneur semble serrer sa main;<br />

puisse‐t‐Il, très cher ami, touché <strong>de</strong> votre abandon filial, vous envoyer au jour le jour tout<br />

ce que vous lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rez pour vos pauvres. Remerciez bien, pour notre Sainte‐Famille,<br />

vos chers Confrères qui lui sont si bienveillants et qui gar<strong>de</strong>nt si fidèlement la tradition<br />

quʹils ont reçue <strong>de</strong> leurs <strong>de</strong>vanciers. Pour nous, nous tenons à honneur <strong>de</strong> notre côté, dʹêtre<br />

aussi reconnaissants que vous êtes dévoués pour notre œuvre, et nous gardons un souve‐<br />

nir ineffaçable <strong>de</strong> tout le bien que vous nous avez fait.<br />

Adieu, très cher ami, je ferai ce que vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z, je prierai <strong>de</strong> tout mon cœur<br />

pour vous; je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> quelque retour pour nous.<br />

A vous <strong>de</strong> cœur et à toujours en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je vous remercie dʹavoir choisi un si aimable messager pour nous remettre les<br />

200f votés par votre Conférence.<br />

296


226 à M. Decaux<br />

Invitation à parler à la Sainte‐Famille <strong>de</strong> la place Dupleix.<br />

Paris, 19 juin 1852<br />

Très cher ami et Confrère,<br />

Demain, les pauvres gens <strong>de</strong> la place Dupleix auront lʹoreille ouverte pour entendre<br />

quelquʹun <strong>de</strong> vos bons et aimables entretiens; jʹécoute comme eux et le soir je raconte à<br />

mes amis les choses que vous nous avez dites; vous voyez que tout cela produit quelque<br />

bien; nʹoubliez donc pas <strong>de</strong> nous venir, et, toutes les fois que vous nʹêtes pas retenu ail‐<br />

leurs, sachez bien que parmi nous vous êtes toujours attendu.<br />

Votre tout affectionné ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

227 à M. Decaux<br />

Invitation pour une réunion <strong>de</strong> la Sainte‐Famille qui n’a pu se tenir comme prévu. Nouvelle invitation pour le<br />

mois <strong>de</strong> juillet.<br />

Paris, 23 juin 1852<br />

Très cher Confrère et ami,<br />

Jʹai eu la contrariété dimanche <strong>de</strong> me heurter contre la porte close <strong>de</strong> la Sainte‐<br />

Famille <strong>de</strong> la place Dupleix, mais jʹai été surtout contrarié par la pensée que, <strong>de</strong> votre côté,<br />

vous auriez perdu vos pas et votre temps par ma faute et par mon défaut <strong>de</strong> mémoire.<br />

M. Baptifolier avait bien expliqué quʹau jour <strong>de</strong> la Fête‐Dieu il nʹy aurait point <strong>de</strong><br />

messe à la place Dupleix; je nʹai pas compris que ce serait <strong>de</strong> même pour le jour <strong>de</strong> lʹOc‐<br />

tave.<br />

Soyez indulgent pour cette maladresse, très cher ami, et nʹen punissez pas nos bra‐<br />

ves gens, qui comptent vous entendre au premier dimanche <strong>de</strong> juillet; je serai, pour ma<br />

part, bien touché <strong>de</strong> ce nouveau témoignage <strong>de</strong> votre gran<strong>de</strong> charité.<br />

Votre tout affectionné frère et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

228 <strong>de</strong> M. Lantiez 177 à M. Planchat<br />

P.S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Union dans les Coeurs <strong>de</strong> Jésus et <strong>de</strong> Marie. La famille s’affermit.<br />

22 juillet 1852<br />

Bien cher frère,<br />

Ne mʹen voulez pas dʹavoir tant tardé à vous répondre et à pro‐<br />

fiter <strong>de</strong> votre séjour à Vallombreuse pour vous remercier <strong>de</strong>s<br />

démarches que vous avez faites pour les privilèges. Et pour finir<br />

dʹabord ces affaires, je vous dirai que je nʹai pas envie <strong>de</strong> dépenser mon argent ni celui <strong>de</strong> la Com‐<br />

177 Ancien élève architecte, Louis Lantiez (1825-1916) était au Séminaire St-Sulpice, lorsque l'abbé Gentil, qui aidait aux œuvres <strong>de</strong><br />

la Communauté, avait amené son ancien condisciple à MLP. M. Lantiez entre en Communauté le 10 janvier 1852. Il sera aumônier<br />

<strong>de</strong> l'orphelinat <strong>de</strong> Vaugirard et l'apôtre zélé <strong>de</strong>s milieux populaires. Elu supérieur général à la mort <strong>de</strong> MLP., il restera dix ans à la<br />

tête <strong>de</strong> la Congrégation, avant <strong>de</strong> laisser sa charge au Père Leclerc, le 20 août 1884.<br />

297


munauté pour cela. Que cependant si vous pouviez mʹen obtenir quelques‐uns, surtout pour la ré‐<br />

citation du bréviaire, cela me ferait plaisir. Faites ce que vous pourrez, et advienne que pourra.<br />

Quant à mes occupations et dispositions, les voici: Il y a trois jours; je faisais la classe à nos petits<br />

enfants, en remplacement <strong>de</strong> M. Bonnat, ces Messieurs étant sur les <strong>de</strong>nts. Et cʹest lʹoccupation qui<br />

mʹavait empêché <strong>de</strong> vous répondre; <strong>de</strong>puis, on mène les enfants à une école, ça mʹa débarrassé, jʹen<br />

profite pour vous répondre. Je suis maintenant rarement à Grenelle, le samedi et le dimanche soir<br />

seulement et le lundi toute la journée. Les autres jours, je les passe rue <strong>de</strong> lʹArbalète. Il est assez dif‐<br />

ficile <strong>de</strong> vous donner une idée <strong>de</strong> mes occupations; en entrant, il y a 7 mois, je mʹétais presque ex‐<br />

clusivement attaché à Grenelle, sauf quelques enfants que je confessais dans une école <strong>de</strong> la rue du<br />

Fossé St‐Jacques, je ne faisais rien à Paris. M. Gentil parti, il a fallu changer mes plans. Jʹai donc été<br />

dans un changement continuel <strong>de</strong> règlement, maintenant jʹespère être plus stable. Dieu sait si<br />

quelque bonne petite tribulation, que sa bonté paternelle nous enverra, ne me remettra pas encore<br />

en mouvement. En attendant, je jouis <strong>de</strong> mon repos, comptant dépenser mon temps entre lʹEcole<br />

Communale <strong>de</strong> Grenelle, les enfants <strong>de</strong> la rue <strong>de</strong> lʹArbalète, le catéchisme du soir à Grenelle et à<br />

Paris et la préparation <strong>de</strong> mes examens. Il y a bien quelques autres travaux qui ont lʹair dʹarriver,<br />

mais auxquels je nʹose pas penser, tant ils me font peur.<br />

Quant à mes dispositions intérieures, sauf quelques nuages fugaces qui ornent assez agréa‐<br />

blement lʹhorizon et rompent la monotonie, il fait toujours beau au soleil dans mon cœur. Lʹespoir<br />

<strong>de</strong> vous revoir, et celui <strong>de</strong> possé<strong>de</strong>r bientôt M. Hello viennent encore agréablement me soutenir.<br />

Du reste, la ferveur et lʹamitié <strong>de</strong> nos bons amis en N.S. suffisent pour me rendre la vie douce et<br />

tranquille et pour faire <strong>de</strong> moi un second Meunier Sans‐Souci. Du reste, je vous avouerai franche‐<br />

ment que je suis loin <strong>de</strong> faire un parfait religieux; je ne sais pas si çà viendra, mais çà ne vient<br />

guère. Notre bon Père, M. Le <strong>Prevost</strong>, dit toujours que le principal, cʹest le cœur, et quʹil lui semble<br />

que je lʹai. Çà ne me console quʹà moitié, sachant le proverbe: que la forme emporte souvent le<br />

fond. Venez mʹédifier, mʹai<strong>de</strong>r, surtout guérissez‐vous pour <strong>de</strong> bon. Priez bien le grand saint Be‐<br />

noît quʹil mʹobtienne un peu lʹamour du recueillement et <strong>de</strong> la retraite, je suis un peu volage, léger<br />

et dissipé, pour ne pas dire beaucoup. Jʹaurais besoin dʹun peu <strong>de</strong> plomb dans la tête, dʹun peu<br />

plus <strong>de</strong> constance dans mes œuvres. Je ne sais pas poursuivre longtemps le bien quand il y a quel‐<br />

ques difficultés sur la route; ainsi votre pauvre négresse, qui est gravement mala<strong>de</strong> <strong>de</strong>puis quel‐<br />

ques semaines, ne mʹa pas vu <strong>de</strong>puis longtemps; ma négligence et ma lâcheté mʹont éloigné <strong>de</strong> son<br />

grabat. etc., etc. On pense encore à vous à Grenelle; on mʹa longtemps appelé M. Planchat, mainte‐<br />

nant encore çà arrive, ou on mʹappelle votre frère, etc. Bref, si vous pouviez revenir servir le bon<br />

Dieu <strong>avec</strong> nous, çà ne ferait pas <strong>de</strong> mal, si le bon Dieu vous le permet toutefois, car avant tout, Sa<br />

volonté. La Communauté ne va pas mal en ce moment, on a fait bien <strong>de</strong>s pertes réparées en partie<br />

pour le service <strong>de</strong>s œuvres par les <strong>de</strong>rnières mesures. Néanmoins, notre personnel est resté moins<br />

nombreux: Pauci, sed boni. Dieu veuille quʹon puisse le dire. Vous voyez que je ne fais quʹeffleurer<br />

les choses, mais cʹest que, pour entrer dans les détails, il me faudrait griffonner pendant long‐<br />

temps, ce qui me gênerait beaucoup, 1° ‐ parce que je nʹaime pas écrire, sauf à mes bons amis<br />

comme vous; 2° ‐ parce que jʹai 30 sermons à préparer, exhortations ou catéchismes et que, <strong>de</strong>puis<br />

que je suis dans le ministère, je nʹai pas pu encore en préparer un en entier. Je ne travaille que par<br />

pièces et morceaux. Je vous quitte donc à regret pour préparer à mes petits la nourriture délicate<br />

que réclame la faiblesse <strong>de</strong> leur estomac. Je ne leur ai que trop donné du gros pain. Au revoir donc,<br />

cher frère en saint Vincent <strong>de</strong> Paul; soyons toujours unis dans lʹamour <strong>de</strong> N.S., <strong>de</strong> sa Sainte Mère,<br />

<strong>de</strong> saint Joseph et <strong>de</strong>s Pauvres. Prions les uns pour les autres.<br />

Votre tout dévoué et affectionné en N.S.<br />

L. Lantiez ‐ prêtre<br />

Pour ne pas retar<strong>de</strong>r cette lettre, très cher fils et ami en N.S., je nʹy mets que ces<br />

<strong>de</strong>ux mots pour vous assurer <strong>de</strong> nos tendres souvenirs, <strong>de</strong> notre union constante à vous<br />

dans les divins Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M. Je vous écrirai prochainement plus au long; nous al‐<br />

298


lons bien, priez toujours pour que nous allions mieux encore; la petite famille sʹaffermit,<br />

augmente sinon son nombre, au moins son union et son bon esprit; puisse le Seigneur<br />

nous confirmer dans sa divine charité.<br />

Je vous embrasse tendrement en Lui et en sa très Sainte Mère.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

229 à M. Paillé<br />

Dieu veut l’unité <strong>de</strong> la Communauté naissante et l’édification mutuelle. Un candidat à la vie religieuse s’éloigne<br />

<strong>de</strong> la Communauté. MLP. pense refaire sa santé en Normandie. Ce qui enrichit la vie commune, ce sont ʺles<br />

prières et les oeuvres <strong>de</strong> chacun versées ensemble et offertes pour tousʺ, le Christ y ajoutant ses mérites infinis.<br />

Paris 15 août [1852]<br />

Fête <strong>de</strong> lʹAssomption<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

La divine Provi<strong>de</strong>nce, dont la conduite est toujours si tendre pour nous, mʹa ména‐<br />

gé cette année et mʹa rendu facile, plus que <strong>de</strong> coutume, la préparation <strong>de</strong> la retraite <strong>de</strong> la<br />

Sainte‐Famille à laquelle plusieurs éléments ont concouru; cependant, je suis si fatigué que<br />

le travail a été encore bien lourd pour ma faiblesse; il mʹa donc fallu, chemin faisant, laisser<br />

en arrière la plupart <strong>de</strong> mes autres affaires et en particulier, très cher ami, la réponse que<br />

jʹeusse aimé faire, sans aucun retard, à votre bonne petite lettre. Aujourdʹhui que la retraite<br />

touche à sa fin, je me hâte <strong>de</strong> vous écrire <strong>de</strong>ux lignes pour vous tranquilliser sur lʹétat <strong>de</strong><br />

tous nos chers frères et sur lʹensemble <strong>de</strong>s choses que le bon Maître nous a confiées. Tout<br />

va bien, grâces au Seigneur et à sa T. Sainte Mère; nos frères sont en santé, nos enfants aus‐<br />

si, nos œuvres ne souffrent pas trop et commencent à se relever dans les points où elles<br />

languissaient; jʹai donc bonne espérance pour lʹavenir. Je compte aussi, parmi mes motifs<br />

<strong>de</strong> consolation et <strong>de</strong> joie, les pieuses dispositions que vous mʹexprimez et les résolutions<br />

courageuses dans lesquelles vous vous entretenez. Je nʹai pas douté un seul instant, très<br />

cher enfant, <strong>de</strong> votre cœur et <strong>de</strong>s bonnes inspirations que le Seigneur lui donnera. Sa di‐<br />

vine Sagesse a eu ses <strong>de</strong>sseins en nous réunissant et, quelles que soient ses vues sur lʹave‐<br />

nir <strong>de</strong> nos œuvres, je suis intimement convaincu que sa volonté est que les éléments pre‐<br />

miers <strong>de</strong> notre petite famille restent invariablement unis, vivent et meurent ensemble, se<br />

soutenant, sʹédifiant lʹun lʹautre. Je ne vois pas un seul dʹentre nous qui ne soit dans ces<br />

sentiments; gardons‐les fidèlement, ce sera notre force et une source <strong>de</strong> vraies consolations<br />

pour nous.<br />

Notre bon ami, M. Bonnat, ne paraît pas <strong>de</strong>voir être <strong>de</strong> ce nombre; il se sent cons‐<br />

tamment le besoin dʹappartenir à un ordre religieux définitivement constitué, qui ait un<br />

habit et <strong>de</strong>s vœux, il a écrit en ce sens à notre p. Beaussier qui consent à ce quʹil cherche<br />

son repos dans une autre voie. Jʹavais moi‐même <strong>de</strong>s doutes sérieux sur sa vocation, et je<br />

ne puis que donner plein assentiment au désir <strong>de</strong> notre ami. Je lui envoie, dans la lettre ci‐<br />

jointe, un mandat <strong>de</strong> 70f qui lui suffira pour rejoindre sa tante ou se rendre à la <strong>de</strong>stination<br />

quʹil aura choisie. Nous prierons pour lui et jʹai la confiance que nous <strong>de</strong>meurerons unis<br />

dans la divine charité.<br />

Ainsi que je vous le disais en commençant, très cher ami, je me sens une gran<strong>de</strong> fa‐<br />

tigue et je suis un peu épuisé; je crois que, pour suivre utilement nos travaux cet hiver, jʹai<br />

besoin <strong>de</strong> refaire mes forces par quelque repos; mais je suis bien incertain sur le moyen à<br />

299


prendre; les bains <strong>de</strong> mer sont bons peut‐être, même dans la saison tardive, pour les per‐<br />

sonnes plus fortes que moi, mais je me souviens que, par les temps frais, les bains me fai‐<br />

saient tousser et mʹirritaient fortement la poitrine. Comme vous êtes sur les lieux, vous se‐<br />

rez meilleur juge, cher ami, <strong>de</strong> ce qui convient et peut être utile: jʹattendrai pour me déci‐<br />

<strong>de</strong>r que vous mʹayez écrit <strong>de</strong> nouveau. Peut‐être quinze jours passés près <strong>de</strong> ma sœur, au<br />

bon air <strong>de</strong> Normandie, me feraient tout lʹeffet nécessaire et me remettraient sur pied; jʹat‐<br />

tends donc votre lettre pour prendre un parti sur lʹun ou lʹautre moyen.<br />

Notre retraite <strong>de</strong> la Sainte‐Famille a été très bien, quoique moins nombreuse que<br />

lʹan <strong>de</strong>rnier; la fête et le feu dʹartifice nous ont fait quelque tort pour le salut <strong>de</strong> lʹAssomp‐<br />

tion; mais en ensemble, cʹest une bonne et sainte entreprise que le bon Maître a bénie et<br />

dont il sera gran<strong>de</strong>ment glorifié, jʹen ai lʹespérance; notre cher ami, M. Hello, en a suivi les<br />

<strong>de</strong>rniers exercices et a passé ici <strong>de</strong>ux jours <strong>avec</strong> nous; il a été parfaitement édifié <strong>de</strong>s dispo‐<br />

sitions <strong>de</strong> nos bons ouvriers.<br />

Je suis heureux <strong>de</strong> penser, très cher ami, que la Provi<strong>de</strong>nce sʹest un peu mêlée <strong>de</strong><br />

vous donner à St‐Valéry les conditions les meilleures pour vous reposer et vous refaire; je<br />

vous suis par la pensée dans vos petits pèlerinages et jʹai la confiance que votre âme gagne<br />

autant que votre corps à ces paisibles délassements; profitez‐en en toute paix et faites‐nous<br />

une part dans vos prières et sacrifices; cʹest ainsi que sʹalimente la vie commune par les<br />

prières et les œuvres <strong>de</strong> chacun versées ensemble et offertes pour tous; le divin Maître y<br />

joint aussi sa mise, cʹest‐à‐dire ses mérites infinis, son sang et tout son amour. Heureuses<br />

les familles chrétiennes qui savent se faire un pareil trésor!<br />

Adieu, bien cher enfant, je serai heureux <strong>de</strong> vous revoir; jusque là je vous embrasse<br />

dans les divins Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

230 à M. Myionnet 178<br />

Regret <strong>de</strong> MLP. d’être éloigné <strong>de</strong> ses frères. L’heure semble être arrivée <strong>de</strong> se consacrer à Dieu par les trois vœux :<br />

ʺnous n’avons jamais eu d’autre penséeʺ. Malgré les épreuves, bonheur d’être appelé à la vie religieuse.<br />

Valéry‐en‐Caux, 23 août 1852<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Si jʹen avais cru mon désir, je vous aurais écrit dès le len<strong>de</strong>main <strong>de</strong> mon arrivée, car<br />

il me semblait déjà que je vous avais quitté <strong>de</strong>puis longtemps ainsi que nos chers frères et<br />

nos petits enfants; je ne suis dʹailleurs guère loin <strong>de</strong> vous par la pensée car, le f. Paillé et<br />

moi, nous parlons <strong>de</strong> vous ou nous prions pour vous, double manière <strong>de</strong> rendre présents<br />

les amis absents. Les quelques lignes que je vous écris ici seront à peine lisibles, car jʹécris<br />

en plein air, <strong>avec</strong> un simple caillou pour marchepied.<br />

178 La lettre est adressée à M. Myionnet, rue <strong>de</strong> l'Arbalète. Après celle <strong>de</strong> 1832, une nouvelle et grave épidémie <strong>de</strong> choléra s'était<br />

abattue sur Paris en 1849, faisant un grand nombre d'orphelins. MLP. avait eu l'idée d'en recueillir une cinquanaine, dans le cadre<br />

<strong>de</strong>s Conférences. Désireux d'élargir le cercle <strong>de</strong> ses œuvres, il trouve à louer une maison pour son propre Orphelinat. Le 2 février<br />

1851, il s'installe au 39 <strong>de</strong> la rue <strong>de</strong> l'Arbalète, dans le quartier <strong>de</strong> la rue Mouffetard. Le frère Myionnet en est le premier directeur<br />

et M. Lantiez le premier aumônier.<br />

300


Je nʹai pas encore beaucoup avancé ma saison <strong>de</strong> bains, car je nʹen ai pris encore que<br />

<strong>de</strong>ux, la mer ayant été houleuse <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux jours; aujourdʹhui même les lames étaient si<br />

ru<strong>de</strong>s quʹelles mʹont renversé <strong>de</strong>ux fois <strong>avec</strong> mon f. Paillé qui voulait me soutenir et qui<br />

simplement tombait <strong>avec</strong> moi;<br />

Rue <strong>de</strong> l’Arbalète vue <strong>de</strong> la rue Mouffetard<br />

Quel que soit le temps, favorable ou non, je ne<br />

compte pas beaucoup prolonger beaucoup<br />

mon séjour ici; lundi, je pense, je partirai pour<br />

rendre à ma sœur la visite sur laquelle elle<br />

compte et que je ne saurais lui refuser; après<br />

un court repos près dʹelle, je vous reviendrai<br />

un peu plus fort, je lʹespère, bien résolu en tout<br />

cas à travailler <strong>de</strong> mon mieux <strong>avec</strong> vous pour<br />

la gloire <strong>de</strong> Dieu et pour le soutien <strong>de</strong> nos œu‐<br />

vres qui nʹont pas dʹautre fin. Je tâche ici même<br />

<strong>de</strong> ne pas <strong>de</strong>meurer entièrement inutile; je<br />

viens dʹécrire longuement à notre p. Beaussier,<br />

afin quʹil prie ar<strong>de</strong>mment pour nous <strong>avec</strong> les<br />

saintes âmes qui lʹentourent; je lui communi‐<br />

que en même temps les quelques pensées qui<br />

nous sont venues et je lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> son avis<br />

sur divers points qui nous intéressent. La ré‐<br />

301<br />

Rue <strong>de</strong> l’Arbalète vers la rue Lhomond


flexion nʹa fait que me confirmer dans le sentiment que le divin Maître nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

faire un pas <strong>de</strong> plus à son service, <strong>de</strong> nous attacher à Lui par un lien plus fort et <strong>de</strong> nous<br />

unir en même temps les uns aux autres plus fermement que par le passé; les dispositions<br />

<strong>de</strong> chaque membre <strong>de</strong> la Communauté pris séparément sont parfaites: esprit, cœur, forces,<br />

tout est à Dieu et pour Dieu; il faut unir et fondre ensemble ces éléments précieux, en faire<br />

une force commune, un amour commun et employer ce puissant moyen pour glorifier le<br />

Seigneur, nous sanctifier nous‐mêmes et ai<strong>de</strong>r au salut <strong>de</strong> nos frères.<br />

Avons‐nous eu jamais une autre pensée et nʹavons‐nous pas tout attendu <strong>de</strong> Dieu?<br />

Comment donc nous rejetterait‐il, Lui qui cherche ceux qui le fuient et qui heurte à la porte<br />

quʹon a fermée <strong>de</strong>vant Lui? Je me sens plein dʹespérance; veniens veniet, nous répète sou‐<br />

vent notre bon p. Beaussier; le Seigneur vient, son jour arrivera; patientons et persévérons,<br />

par là déjà nous mériterons bien <strong>de</strong> notre Dieu. Car la patience nous unit au Cœur <strong>de</strong> Jé‐<br />

sus, la persévérance est un signe <strong>de</strong> la confiance et <strong>de</strong> lʹamour.<br />

Je voudrais pouvoir écrire ici quelques lignes particulières pour chacun; mais, en<br />

<strong>de</strong>venant si générale, ma lettre nʹatteindrait plus personne. Je me borne à recomman<strong>de</strong>r à<br />

nos chers frères dʹoublier les quelques difficultés et peines <strong>de</strong> chaque jour pour songer à<br />

lʹimmense grâce que Dieu leur a faite en les confirmant dans la foi, en leur donnant tant <strong>de</strong><br />

moyens <strong>de</strong> préservation et <strong>de</strong> salut; jʹai à peine un pied hors <strong>de</strong> notre Communauté et je<br />

nʹaperçois que par échappée quelques scènes du mon<strong>de</strong>; oh! combien elles me font chérir<br />

lʹétat saint où nous sommes placés, combien elles me montrent les difficultés du salut dans<br />

une pareille atmosphère; quʹils sont heureux ceux que Dieu a mis à lʹabri dans un air plus<br />

pur et quʹIl fait marcher sous ses yeux, au son <strong>de</strong> sa voix paternelle! Daigne le Seigneur<br />

nous gar<strong>de</strong>r tous ainsi jusquʹà notre <strong>de</strong>rnier jour.<br />

Je serai charmé <strong>de</strong> recevoir un petit mot particulier <strong>de</strong> chacun <strong>de</strong>s frères qui auront<br />

un moment <strong>de</strong> loisir à me consacrer, je leur répondrai aussi et cela tiendra lieu du petit en‐<br />

tretien que nous avons chaque semaine ensemble. Je ne recomman<strong>de</strong> point à notre cher<br />

abbé Lantiez son petit noviciat et lʹâme <strong>de</strong> ses petits enfants; il les a tous dans son cœur et<br />

les couve comme une poule qui a ses petits sous son aile; il imite ainsi notre bien‐aimé Jé‐<br />

sus qui sʹest offert à nous sous cette douce image. Mon fils Maignen peut acheter définiti‐<br />

vement le Christ <strong>de</strong> Fiesole; nous avons résolu, mon f. Paillé et moi, que nous vendrions la<br />

Ste Barbe qui est rue du Regard pour couvrir une partie <strong>de</strong> la dépense. Je le prie <strong>de</strong> voir le<br />

p. Bourard et <strong>de</strong> lui dire que jʹirai lui rendre visite à mon arrivée; je paraîtrais autrement<br />

incivil <strong>avec</strong> lui. Je vous embrasse tous bien tendrement, très chers enfants, mon éloigne‐<br />

ment me fait sentir encore plus vivement combien vous mʹêtes chers; unissons‐nous dans<br />

les Cœurs divins <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M. pour traverser ce mon<strong>de</strong> et atteindre lʹéternelle union qui<br />

nous attend en Dieu.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

231 à M. Myionnet<br />

Précisions sur son adresse à Saint‐Valéry et concernant son courrier. La S t Louis.<br />

St‐Valéry‐en‐Caux, 24 août [1852]<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je mʹaperçois que jʹai omis dans ma lettre dʹhier <strong>de</strong> vous donner notre adresse pré‐<br />

cise; jusquʹà lundi prochain, nous serons à St‐Valéry‐en‐Caux, chez Mme Gagnerelle, route<br />

302


<strong>de</strong> Dieppe. Le f. Maignen le savait, mais il a pu lʹoublier.<br />

Sʹil arrivait pour le f. Paillé une lettre dʹEsternay, je vous prie <strong>de</strong> nous lʹenvoyer.<br />

Vous pouvez ouvrir mes lettres afin que, sʹil y avait quelque affaire un peu urgente, je<br />

puisse répondre sans retard.<br />

Cʹest <strong>de</strong>main la S t Louis, fête <strong>de</strong> nos ff. Lantiez et Paillé, nous <strong>de</strong>vrons beaucoup<br />

prier pour eux; <strong>de</strong> leur côté, ils nous recomman<strong>de</strong>ront à leur saint Patron.<br />

Adieu, très cher ami, je vous embrasse cordialement et suis <strong>avec</strong> affection en N.S.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Le f. Paillé reviendra probablement lundi.<br />

232 à M. Myionnet<br />

Esprit <strong>de</strong> famille pendant le séjour à Saint‐Valéry. La Communauté a souffert d’un manque <strong>de</strong> lien entre ses<br />

membres: il faut donc envisager une consécration plus solennelle <strong>de</strong> leur don total. L’abbé Beaussier donne son<br />

accord. Recommandations diverses sur la vie <strong>de</strong> communauté et sur les oeuvres.<br />

St‐Valéry‐en‐Caux, 29 août 1852<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu hier toutes vos lettres à la fois; elles ont été, pour le f. Paillé et pour moi,<br />

une vraie joie et ont fait comme revivre la Communauté autour <strong>de</strong> nous, et, pour complé‐<br />

ter lʹensemble, je recevais par le même courrier une longue lettre <strong>de</strong> notre bon p. Beaussier.<br />

Je sais bien bon gré à nos chers frères <strong>de</strong> lʹaimable empressement quʹils ont mis à mʹécrire.<br />

Chacune <strong>de</strong> leurs petites lettres mʹa fait un grand plaisir; elles respiraient toutes la simpli‐<br />

cité, le bon désir du cœur et la volonté sincère <strong>de</strong> glorifier Dieu; je répondrai à chacun, si je<br />

le puis; le f. Paillé, qui vous rejoindra bientôt, portera ces lettres, quelques‐unes au moins,<br />

sinon toutes, car lʹheure irrégulière <strong>de</strong>s bains et la difficulté que jʹéprouve à écrire immé‐<br />

diatement après les repas coupent mal mon temps et ne me permettent pas <strong>de</strong> faire tout ce<br />

que je voudrais. Je ne suis pas, dʹailleurs, tout à fait mon maître, le f. Paillé, comme phar‐<br />

macien et par concomitance un peu mé<strong>de</strong>cin <strong>de</strong> la Communauté, me gouverne ici <strong>de</strong>spoti‐<br />

quement; ainsi, il a réglé dans sa science doctorale que dix bains <strong>de</strong> mer mʹétaient indis‐<br />

pensables, je suis donc forcé <strong>de</strong> rester ici jusquʹà mercredi, afin dʹatteindre ce nombre dé‐<br />

terminé <strong>de</strong> dix; par la même raison, il y restera aussi et ne vous arrivera que mercredi dans<br />

lʹaprès‐midi.<br />

Assurez bien tous nos chers frères que cette petite absence ne sert quʹà me montrer<br />

combien ils me sont chers et combien le lien qui mʹattache à eux est fort et puissant.<br />

Notre p. Beaussier entre pleinement dans nos vues relativement aux dispositions<br />

que nous avons projetées, elles répon<strong>de</strong>nt aux vues quʹil avait <strong>de</strong> son côté; il était frappé<br />

comme nous <strong>de</strong> la nécessité <strong>de</strong> nous relier plus fermement ensemble et <strong>de</strong> rendre le corps<br />

<strong>de</strong> la Communauté plus compact et plus un; le f. Paillé semblait nʹattendre quʹun mot à ce<br />

sujet, son cœur était prêt et, comme le nôtre, déjà travaillé par Dieu. Réjouissons‐nous,<br />

cher ami, dans cette bonne pensée <strong>de</strong> nous immoler à Dieu, non plus que nous ne lʹavions<br />

fait déjà intérieurement, mais <strong>de</strong> nous donner par une consécration plus solennelle et plus<br />

sainte qui sera pour nous la source <strong>de</strong> grâces nouvelles et plus abondantes. Je nʹai pas en‐<br />

core communiqué à M. Carment notre pensée à laquelle il adhérera, jʹen suis convaincu, <strong>de</strong><br />

303


ien grand cœur; je lui en parlerai dans la lettre que je vais lui écrire; vous pourriez lʹy<br />

préparer peut‐être en lui faisant sentir, en général, que le malaise dont nous avons tous<br />

souffert cette année provenait en partie du défaut <strong>de</strong> liaison intime entre nous et que le<br />

moment semble venu <strong>de</strong> nous unir plus fermement.<br />

Dites à mon fils Bretonnier que je lui écrirai; quʹil soit tranquille, il est éprouvé, mais<br />

cela ne doit point lʹétonner; le démon réunit tous ses efforts pour le détourner <strong>de</strong> son che‐<br />

min, il nʹy réussira pas, Dieu sera le plus fort et restera le maître <strong>de</strong> la place. Ce bon enfant<br />

se trompe, je ne lui ai pas refusé la permission <strong>de</strong> voir le bon p. Jésuite quʹil avait connu à<br />

Strasbourg; je lui avais dit, au contraire, quʹil pourrait sʹentendre pour cela <strong>avec</strong> vous; vous<br />

pourrez donc régler cela <strong>avec</strong> lui pour lʹheure et le jour.<br />

Je ne serai pas fâché que vous en finissiez <strong>avec</strong> M. Bourbonnet; je ne crois pas quʹil<br />

nous convienne; il vaut mieux que cela ne traîne pas. Pour la cuisinière, nous verrons à<br />

mon retour; jʹai cherché ici, mais les femmes <strong>de</strong> ce pays ne peuvent quitter leur clocher et<br />

sʹaccoutumer à dʹautres lieux, il nʹy faut pas penser. Prions le bon Maître et la Sainte<br />

Vierge, afin quʹils nous ai<strong>de</strong>nt à faire <strong>de</strong> notre maison un intérieur comme celui <strong>de</strong> Naza‐<br />

reth.<br />

Cʹest une bonne pensée quʹa eue notre bon abbé Lantiez <strong>de</strong> nous préparer à la Nati‐<br />

vité par une neuvaine; nous pourrons dire tous les jours lʹAve maris stella <strong>avec</strong> lʹoraison <strong>de</strong><br />

Tierce Deus qui salutis etc. Mais surtout nous appliquerons à cette intention nos pensées,<br />

nos prières, nos intentions que nous mettrons toutes en union <strong>avec</strong> celles <strong>de</strong> la Très Sainte<br />

Vierge, afin dʹêtre tous dʹun seul cœur <strong>avec</strong> son cœur au jour <strong>de</strong> sa bienheureuse nais‐<br />

sance. Nous nous préparons aussi <strong>de</strong> loin à la retraite que nous <strong>de</strong>vons avoir à cœur <strong>de</strong><br />

faire en bonne et parfaite disposition.<br />

Je ne trouve rien pour le travail <strong>de</strong>s enfants à vous indiquer; le bon Dieu nous inspi‐<br />

rera.<br />

Quant à leur récréation du soir, on peut la laisser sous la gar<strong>de</strong> <strong>de</strong> M. Polvêche et<br />

aussi <strong>de</strong> quelquʹun dʹentre nous qui sʹy adjoindra; jouer soit au fond du jardin, tant que ce‐<br />

la se pourra, soit quand il pleuvra, dans leur salle dʹétu<strong>de</strong>, à divers jeux que lʹon réussira; à<br />

8h.¼, ils peuvent aller se coucher tous ensemble sous la conduite dʹYves [Larivière] quʹon<br />

chargera spécialement <strong>de</strong> la surveillance et qui en sera honoré; à la condition que lʹun <strong>de</strong><br />

nous monte chercher leur lumière 10 minutes après et sʹassure que tout est en ordre. Je<br />

crois que tout serait en sûreté ainsi. M. Polvêche, plus âgé, achèverait la récréation <strong>avec</strong><br />

nous ou plutôt la commencerait, car elle ne commence en réalité quʹà ce moment.<br />

Il importe <strong>de</strong> bien régler, dès lʹabord, le temps du jeune Polvêche quʹon dit labo‐<br />

rieux et qui doit gar<strong>de</strong>r ses bonnes habitu<strong>de</strong>s.<br />

Jʹai oublié <strong>de</strong>ux ou trois petites recommandations avant <strong>de</strong> partir, je les marque ici:<br />

1° ‐ envoyer au plus tôt à M me Michelin, qui me lʹa <strong>de</strong>mandé plusieurs fois <strong>avec</strong> ins‐<br />

tance, la note <strong>de</strong> tout ce quʹon a avancé pour Emile à la première communion ou autre‐<br />

ment.<br />

2° ‐ faire prendre <strong>de</strong>ux matelas et un traversin qui appartiennent à François; M lle<br />

Gauthier y tient; jʹai trop tardé. François dira lʹadresse et pourra y aller <strong>avec</strong> quelquʹun.<br />

3° ‐ prier M. Maignen <strong>de</strong> faire remettre sans plus tar<strong>de</strong>r au Séminaire du St‐Esprit<br />

les livraisons <strong>de</strong>s Petites Lectures pour M. Caille, il y a <strong>de</strong>ux mois que ce pauvre ami attend<br />

<strong>de</strong> nous ce petit service.<br />

304


Voilà, je crois, tout ce que jʹai <strong>de</strong> plus pressé en ce moment à vous dire; sʹil me re‐<br />

vient quelque chose, je lʹécrirai par le f. Paillé.<br />

Ayez confiance pour votre distribution, elle se passera bien; le bon Dieu veille sur<br />

nos enfants et sur nous, et le bon saint Vincent aussi vous inspirera la simplicité et ce pur<br />

amour <strong>de</strong> Dieu qui sont les plus sûrs moyens <strong>de</strong> bien faire; tout pour Dieu et sous le re‐<br />

gard <strong>de</strong> Dieu.<br />

Jʹembrasse et vous, et tous nos frères, y compris notre bon Casimir [Larivière] qui ne<br />

mʹa point écrit, mais dont je sais les bons sentiments.<br />

Adieu, mon bon vieil ami.<br />

Votre Père et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Veillez à ce que le f. Maignen ne se fatigue pas trop, je lui recomman<strong>de</strong> dʹêtre docile<br />

sur ce point en particulier.<br />

233 à M. Myionnet<br />

Démarches pour le personnel domestique. Dévotion mariale: Marie est source <strong>de</strong> grâces pour la communauté. M.<br />

Caille s’apprête à prononcer ses voeux.<br />

Duclair, 6 septembre 1852<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je me proposais <strong>de</strong> vous revenir <strong>de</strong>main mardi, car jʹai hâte <strong>de</strong> mettre fin à un repos<br />

qui mʹéloigne <strong>de</strong> notre chère Communauté et <strong>de</strong> nos travaux; mais on mʹa indiqué une<br />

femme <strong>de</strong> service qui paraîtrait pouvoir nous convenir pour notre maison179 ; je crois <strong>de</strong>voir<br />

retar<strong>de</strong>r dʹun jour ou <strong>de</strong>ux mon retour, afin <strong>de</strong> mʹassurer si nous trouverions en elle ce<br />

quʹil nous faut. Cʹest une ancienne domestique <strong>de</strong> ma sœur, qui sʹétait mariée et qui est<br />

<strong>de</strong>venue veuve; elle a <strong>de</strong>ux petits garçons, lʹun <strong>de</strong> 7 ans, lʹautre au‐<strong>de</strong>ssous; ma sœur pense<br />

quʹelle prendrait volontiers notre service, si nous voulions quʹelle fût accompagnée <strong>de</strong> ses<br />

<strong>de</strong>ux petits orphelins. Cʹest une femme soli<strong>de</strong>, laborieuse et sûre que je connais beaucoup,<br />

lʹayant vue durant quinze ans environ chez ma sœur; je crois que ce serait une bonne ac‐<br />

quisition; ses <strong>de</strong>ux petits garçons, qui sont très gentils, ne nous gêneraient pas, lʹaîné sui‐<br />

vrait les exercices <strong>de</strong>s nôtres, le plus jeune pourrait passer ses journées à lʹasile qui est dans<br />

notre voisinage; je ne vois pas dʹinconvénient grave à cet arrangement, mais je ne sais en‐<br />

core si cette femme se déci<strong>de</strong>ra à venir à Paris; ma sœur se rend exprès à Rouen pour la<br />

voir et lui proposer cette condition. A mon arrivée, je vous dirai si cette combinaison est<br />

ou non praticable; je partirai dʹici vendredi matin et je vous arriverai dans lʹaprès‐midi.<br />

Je regrette bien <strong>de</strong> ne pouvoir ainsi solenniser <strong>avec</strong> vous lʹaimable fête <strong>de</strong> la Nativité<br />

et faire <strong>avec</strong> vous lʹadoration <strong>de</strong> la nuit qui doit la clore; je serai en union <strong>avec</strong> vous dʹici,<br />

dans tous les moments <strong>de</strong> la journée, et je partagerai <strong>de</strong> cœur tous vos exercices. Ayez bien<br />

soin, cher ami, que tous nos frères se préparent <strong>de</strong> leur mieux d’avance à bien célébrer la<br />

naissance <strong>de</strong> notre bien‐aimée Mère, la Très Sainte Vierge, se souvenant que cʹest à elle,<br />

après Jésus notre divin Sauveur, quʹils doivent toutes les grâces générales et particulières<br />

quʹils ont reçues. Je crois que, la veille surtout, on <strong>de</strong>vrait diriger les lectures, entretiens et<br />

179 Mme His, et ses enfants, Félix et Albert.<br />

305


occupations dʹesprit sur ce sujet; les fêtes bien préparées apportent à lʹâme <strong>de</strong>s bénédic‐<br />

tions très abondantes.<br />

Notre f. Caille viendra pour la clôture <strong>de</strong> notre retraite, afin <strong>de</strong> prendre ses enga‐<br />

gements <strong>avec</strong> nous; il est seulement contristé <strong>de</strong> cette limite trop restreinte <strong>de</strong> trois années<br />

et craignait que nous nʹeussions quelque doute sur lʹavenir, puisque nous étions si peu<br />

hardis à en disposer; je lui ai expliqué quʹau fond du cœur lʹengagement serait perpétuel,<br />

mais que, pour rester fidèle aux usages et aux règles <strong>de</strong> la pru<strong>de</strong>nce, il fallait prendre <strong>de</strong>s<br />

attachements temporels, avant <strong>de</strong> se lier irrévocablement. Je vais, à mon retour, revoir le<br />

r.p. <strong>de</strong> Ponlevoy pour notre retraite; jʹaimerais que vous puissiez prendre huit ou dix jours<br />

<strong>de</strong> repos durant lesquels vous recueilleriez votre âme et feriez votre retraite, car il me<br />

semble impossible, ou bien difficile au moins, que nous laissions tous ensemble la maison;<br />

vous viendriez vous réunir à nous <strong>avec</strong> M. Caille pour la clôture; nous verrons dʹailleurs<br />

sʹil y a quelque meilleure combinaison.<br />

Adieu, mon bien cher ami, dans trois jours, si le Seigneur le permet, je serai au mi‐<br />

lieu <strong>de</strong> vous. Assurez tous nos frères <strong>de</strong> mon tendre attachement et recevez vous‐même<br />

lʹaffectueux embrassement <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Priez le f. Paillé <strong>de</strong> sʹentendre <strong>avec</strong> M. Muffang pour préparer la réunion <strong>de</strong> la<br />

Sainte‐Famille; on doit particulièrement songer au prêtre pour la messe, à lʹautel quʹil faut<br />

faire monter, à lʹorateur, à lʹorganiste dont M. Maldiney a dû sʹoccuper <strong>avec</strong> M. Derennes,<br />

organiste <strong>de</strong> St‐Sulpice, en lʹabsence <strong>de</strong> M. Tardif.<br />

Jʹaurais aimé que nous pussions avoir notre nouvelle chapelle 180 pour la fin <strong>de</strong> la re‐<br />

traite, afin dʹy faire nos exercices à partir <strong>de</strong> ce moment; notre f. Maignen ne peut‐il avan‐<br />

cer un peu les travaux? Simplicité, piété, cela suffit; a‐t‐on la permission <strong>de</strong> M. Eglée?<br />

234 à M. Planchat<br />

Pour le rétablissement <strong>de</strong> la santé du père Planchat, son mé<strong>de</strong>cin lui prescrit la Messe et un peu <strong>de</strong> travail ma‐<br />

nuel. Démarches pour son futur ministère.<br />

Paris, 17 septembre 1852<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai vu <strong>avec</strong> peine, par la lettre que vous avez écrite à notre f. Maignen, que vous<br />

aviez éprouvé quelque contrariété relativement à lʹavis quʹa donné M. Fauville sur le ré‐<br />

gime qui semblerait le meilleur pour vous présentement, et aussi à cause <strong>de</strong> la concision<br />

<strong>de</strong> ma lettre qui ne vous aurait pas indiqué cet avis <strong>avec</strong> assez <strong>de</strong> particularités.<br />

Vous ne mʹen voudrez plus, je lʹespère, cher ami, quand vous saurez, dʹune part,<br />

que je nʹai fait moi‐même quʹaccepter en cette occasion la décision <strong>de</strong> M. Fauville, et <strong>de</strong><br />

lʹautre, que cet excellent Monsieur mʹavait promis <strong>de</strong> vous écrire et <strong>de</strong> vous expliquer plus<br />

en détail son opinion; ses occupations lʹayant empêché dʹexécuter cette promesse et ma let‐<br />

tre sʹétant trouvée ainsi seule pour vous transmettre les renseignements que vous atten‐<br />

diez, vous avez pu, <strong>avec</strong> juste raison, la trouver trop peu explicite.<br />

180 La chapelle <strong>de</strong> la rue <strong>de</strong> l'Arbalète, dont la maison, plus vaste que celle <strong>de</strong> Grenelle, était <strong>de</strong>venue le siège <strong>de</strong> la Communauté.<br />

306


M. Fauville, en prenant la peine <strong>de</strong> me venir voir pour mʹentretenir au sujet <strong>de</strong> la<br />

lettre que vous lui aviez écrite, avait son opinion arrêtée. Selon lui, il est essentiel, pour<br />

confirmer le mieux si sensible que vous éprouvez et qui sʹaccroîtra encore après lʹautomne,<br />

que vous vous borniez, pour quelque temps encore, à dire la Sainte Messe et que vous<br />

vous attachiez à fortifier votre corps par quelque travail manuel. Votre bon mé<strong>de</strong>cin, en<br />

me venant voir, nʹavait dʹautre but que <strong>de</strong> sʹenquérir <strong>de</strong>s moyens que nous pourrions avoir<br />

<strong>de</strong> vous donner en ce sens une occupation; lʹoffre que nous lui avons faite <strong>de</strong> la culture du<br />

jardin et <strong>de</strong> quelques ouvrages dans la maison ne lʹa pas satisfait, il a pensé que vous ne<br />

persévéreriez pas longtemps à prendre ces soins qui, dans notre maison, ne seraient pas<br />

ceux qui vous conviendraient proprement, tandis que, dans un institut agricole, loin <strong>de</strong><br />

vous trouver en exception en vous livrant au travail <strong>de</strong>s mains, vous ne feriez que suivre<br />

le mouvement général, dont lʹentraînement vous soutiendrait et vous permettrait <strong>de</strong> per‐<br />

sévérer durant un temps suffisant pour achever votre guérison. M. Caduc, à qui jʹai com‐<br />

muniqué cet avis, a insisté vivement pour quʹil fût suivi exactement; et nous, très cher ami,<br />

nous avons dû nous y conformer, quelque regret que nous eussions <strong>de</strong> voir ainsi notre ré‐<br />

union à vous quelque peu ajournée.<br />

Je pensais quʹaprès la réception <strong>de</strong> la lettre promise par M. Fauville, vous nous écri‐<br />

riez pour nous dire vos vues ou bien à Madame votre mère, afin que nous sachions <strong>de</strong><br />

quel côté vous penseriez à chercher entrée dans un Institut agricole; vous nous direz, cher<br />

ami, si vous désirez que nous prenions quelques renseignements à ce sujet, ou si vous pré‐<br />

férez ne vous occuper que plus tard <strong>de</strong> ce soin. Jʹespère, très cher ami, quʹaprès ces explica‐<br />

tions, vous serez bien convaincu quʹen cette occasion, comme en toute autre, nous nʹavons<br />

voulu que ce qui semblait vous être le plus avantageux et que nous avons suivi les avis <strong>de</strong>s<br />

hommes si éclairés et si sages qui sʹintéressent à vous, plutôt que le nôtre propre.<br />

Il y a quelque temps, M. lʹabbé Millot a écrit à M. Paillé et, entre autres choses, il lui<br />

disait que, si vous vous sentiez quelque inclination pour lui donner ai<strong>de</strong> dans lʹinstitution<br />

quʹil a formée dans le diocèse <strong>de</strong> Langres, il serait heureux <strong>de</strong> vous y recevoir. Nous avons<br />

communiqué cette offre à M. Fauville, mais il lʹa rejetée absolument parce quʹà son avis un<br />

institut dʹenseignement et dʹéducation ordinaire nʹétait nullement ce qui vous convenait.<br />

Notre f. Maignen, en ce moment chargé du patronage <strong>de</strong> la rue du Regard, obligé<br />

<strong>de</strong> surveiller encore un peu celui <strong>de</strong> Grenelle, et ayant en outre à préparer lʹadoration <strong>de</strong>s<br />

Quarante heures <strong>de</strong> Grenelle, enfin à disposer les éléments <strong>de</strong> son Almanach, ne peut vous<br />

répondre immédiatement; il le fera <strong>avec</strong> empressement dès quʹil sera un peu déchargé.<br />

Notre bon abbé Lantiez vous a écrit ces jours‐ci. Nous prions tous les jours bien fidèlement<br />

pour vous et nous restons tendrement unis à vous. La cordiale affection qui remplit vos<br />

lettres nous touche profondément et répond à celle que nous ressentons pour vous. Soyez<br />

bien assuré que votre absence nʹa rien changé à nos sentiments et que vous nous retrouve‐<br />

rez tels que vous nous avez laissés, vos amis, vos frères tout dévoués en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

235 à M. Decaux<br />

Bons offices <strong>de</strong> MLP. pour le projet <strong>de</strong> mariage <strong>de</strong> son ami. Il l’exhorte à se donner à Dieu et aux oeuvres. Paix et<br />

joie du don total.<br />

Paris, 3 octobre 1852<br />

Très cher ami et frère en N.S., M. Givelet était sorti, je nʹai rencontré que M me Give‐<br />

let; elle est à votre égard dans toutes les dispositions que nous lui pouvions désirer pour s’<br />

307


occuper <strong>avec</strong> un zèle ar<strong>de</strong>nt et sincère <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> affaire dont vous mʹavez entretenu;<br />

elle fera tout ce que vous désirerez en cette occasion, et, si la chose dépendait dʹelle, elle se‐<br />

rait déjà réglée. Elle mʹa paru craindre néanmoins que ces dames ne fussent un peu plus<br />

mondaines que vous ne le croyez et pas à la hauteur <strong>de</strong> pensées, peut‐être, qui leur ferait<br />

mettre par‐<strong>de</strong>ssus tout les seuls avantages qui méritent dʹêtre estimés: le cœur, lʹesprit, une<br />

noble énergie <strong>de</strong> la volonté. Elle ne perd pas pour cela courage et, au passage <strong>de</strong> ces dames<br />

à Paris, elle entamera lʹaffaire. Je suis convenu <strong>avec</strong> elle, sauf votre avis, quʹelle prendrait<br />

comme dʹelle‐même lʹinitiative sans vous mettre en avant, afin <strong>de</strong> son<strong>de</strong>r les dispositions<br />

et <strong>de</strong> voir comment la pensée en elle‐même se présenterait à lʹesprit <strong>de</strong> ces dames; elle au‐<br />

rait lʹintention à cette fin, comme on ne manque jamais <strong>de</strong> lui rendre compte <strong>de</strong>s visites<br />

quʹon a reçues à la campagne, <strong>de</strong> faire remarquer que les vôtres sont assez fréquentes et <strong>de</strong><br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si on ne croit pas quʹelles cachent quelque secrète pensée. Elle croit quʹainsi elle<br />

verra quel accueil une proposition directe pourrait recevoir.<br />

Mettez bien tout cela, cher ami, aux mains <strong>de</strong> Dieu, afin quʹIl dispose <strong>de</strong> vous selon<br />

sa sainte volonté.<br />

Il mʹest revenu dans lʹesprit, après votre départ, que vous hésitiez encore un peu en‐<br />

tre Dieu seul et Dieu <strong>avec</strong> le mon<strong>de</strong>; oh! sʹil en était ainsi, si je ne mʹétais pas trompé, cher<br />

ami, Dieu, Dieu seul, Dieu pour unique partage est bien sûrement le meilleur et, pendant<br />

quʹil en est temps encore, pendant que vous avez un sacrifice probable à lui offrir, soyez<br />

courageux, choisissez Dieu; Lui seul, jʹen suis convaincu, peut donner la paix et le rassa‐<br />

siement à une âme aimante et généreuse comme la vôtre; Lui seul épargnera à votre cœur<br />

impressionnable et tendre les mille déceptions que les affections terrestres lui ménagent.<br />

La Provi<strong>de</strong>nce semble vous préparer les voies en vous déchargeant <strong>de</strong> la tâche que vous<br />

avez si longtemps remplie; votre <strong>de</strong>tte semble acquittée, et libre <strong>de</strong> vous‐même, vous pou‐<br />

vez offrir au Seigneur les dons quʹIl vous a départis et qui peuvent si gran<strong>de</strong>ment être em‐<br />

ployés à son service. Une fois engagé dans une autre voie, croyez‐le bien, vous serez for‐<br />

cément enlevé aux œuvres, aux pauvres, à vos chers patronnés; quʹil serait beau, et quʹil<br />

serait bon pour vous aussi <strong>de</strong> les préférer à tout, <strong>de</strong> leur consacrer votre vie; croyez‐vous<br />

que Dieu se jetant tout dans votre cœur, ne saurait pas vous payer et remplacer les pau‐<br />

vres petits biens que vous lui auriez immolés?<br />

Je nʹinsiste pas; le divin Maître en aura bien plus dit à votre âme sur ce point que je<br />

ne vous en pourrais dire; jʹai pensé seulement que notre expérience ne <strong>de</strong>vait pas être per‐<br />

due pour vous, et que, séparés du mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>puis plusieurs années, nous <strong>de</strong>vions vous<br />

avertir que la paix et la joie ne commencent pour lʹâme quʹau jour où, quittant tout, elle se<br />

perd toute au sein <strong>de</strong> Dieu.<br />

Que je serais heureux, bien affectueux ami, si cette parole jetée au hasard répondait<br />

à votre cœur; combien jʹaimerais à <strong>de</strong>venir <strong>de</strong> votre ami votre frère, et à mʹunir à vous<br />

pleinement en Dieu et dans sa divine charité!<br />

Croyez‐moi, quoi quʹil arrive, bien cordialement à vous.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Si vous aviez quelques instructions à me donner, je serai jusquʹà 9h.½ rue <strong>de</strong><br />

lʹArbalète <strong>de</strong>main matin; <strong>de</strong> là, jʹirai rue du Regard, et, après le Conseil général, je me ren‐<br />

drai à Grenelle pour préparer ma retraite qui commence mardi matin.<br />

308


236 à M. Decaux<br />

Invitation à venir parler à la Sainte‐Famille.<br />

[Lundi] 4 octobre [1852]<br />

Bien cher ami,<br />

Je sortirai <strong>de</strong> retraite samedi; je nʹaurai certainement pas le temps <strong>de</strong> trouver un ora‐<br />

teur pour St‐Sulpice le len<strong>de</strong>main; serait‐ce abuser <strong>de</strong> votre bonté que <strong>de</strong> vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r<br />

<strong>de</strong> venir encore visiter nos braves gens? Ils ne trouvent pas, pour eux, que ce soit jamais<br />

assez souvent. Vous êtes dʹailleurs presque le seul à Paris en ce moment; pardonnez‐moi<br />

<strong>de</strong> vous accabler ainsi; je tâcherai dʹêtre plus réservé à lʹavenir.<br />

Votre ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

237 à M. Vasseur 181<br />

MLP. se prépare à accueillir ce nouveau frère. Il l’exhorte paternellement à tirer profit d’une contrariété.<br />

Paris, 8 octobre 1852182 Très cher fils en N.S.,<br />

Je vous donne par avance ce nom que mon affection<br />

et vos bonnes dispositions mʹinspirent <strong>de</strong> vous donner, et jʹai<br />

la confiance que le divin Seigneur ratifie cette adoption et<br />

lʹagrée dans sa tendre charité.<br />

Nous avons regretté tous ici lʹinci<strong>de</strong>nt qui a retardé<br />

un peu votre voyage, mais cette petite épreuve aura son<br />

avantage; elle fortifiera votre volonté, elle accroîtra la<br />

ferveur <strong>de</strong> votre désir et elle vous rendra encore plus propre<br />

au service <strong>de</strong> Dieu. Dʹune autre part, nous prierons<br />

beaucoup les uns pour les autres durant le court intervalle<br />

qui doit encore nous tenir séparés; nous correspondrons<br />

quelquefois, et <strong>de</strong> cette sorte nous préparerons le jour <strong>de</strong><br />

notre réunion définitive.<br />

Nous commençons dès ce jour, très cher ami et fils en<br />

N.S., à vous considérer comme membre <strong>de</strong> la famille et, dès<br />

que vous <strong>de</strong>viendrez libre, vous trouverez votre place toute<br />

prête parmi nous.<br />

Jusque là, restez bien docile aux avis <strong>de</strong> notre cher f. Caille et voyez dans son affec‐<br />

tion une image <strong>de</strong> notre propre dilection.<br />

Je prie Dieu, très cher fils, <strong>de</strong> vous combler <strong>de</strong> ses grâces et je suis en J. et M.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

181 Alphonse Vasseur (1833-1889), était membre du Patronage <strong>de</strong> M. Caille à Amiens. Ce jeune ouvrier cordonnier entrera en Communauté<br />

à 19 ans, le 4 février 1853. Il dirigera le Patronage <strong>de</strong> Nazareth pendant 24 ans.<br />

182 Jour <strong>de</strong>s premiers vœux émis dans la Congrégation, rue du Commerce, à Grenelle. Vœux privés, puisque l'Institut n'était pas encore<br />

érigé canoniquement. (vœux perpétuels : MLP., Myionnet, Maignen, Lantiez; vœux temporaires : Paillé, Carment, Caille).<br />

309


238 <strong>de</strong> M. Carment à M. Caille<br />

P.S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Démarches charitables <strong>de</strong>s frères. MLP. transmet <strong>de</strong>s remerciements <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> M. Maignen. Nouvelles <strong>de</strong> la<br />

Communauté.<br />

[21 octobre 1852]<br />

Très cher frère,<br />

Ce matin, sur un reçu laissé par moi à M. Caron, ce <strong>de</strong>rnier mʹa remis 35f que je vais tout‐à‐<br />

lʹheure porter à M. Perrolet, rue Cassette 22 bis, comme propriétaire <strong>de</strong> la maison où reste M. Du‐<br />

petit père.<br />

Jʹai vu M. Dupetit hier, qui allait justement écrire à son fils relativement à la pénurie <strong>de</strong> sa<br />

position. Il paraît que lui et sa femme se donnent beaucoup <strong>de</strong> mal pour ne rien gagner. ʺIls travail‐<br />

lent pendant toute la nuit sans rien prendre.ʺ Ils disent que parfois ils ne mangent pas ce que <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong> leur appétit. Lui souffre beaucoup <strong>de</strong> ses blessures. Quant à M. Caron, il ignore ce que sont<br />

les 35f que vous dites lui avoir laissés; cependant, il me les a remis immédiatement. Je lui ai dit que<br />

vous lui en donneriez, dans votre première lettre, lʹexplication.<br />

M. Dupetit, ou plutôt sa femme, mʹa appris quʹenfin le fiancé <strong>de</strong> la nièce était décidé à se<br />

marier très prochainement.<br />

Je <strong>de</strong>meure en J. et M.<br />

Votre bien dévoué frère<br />

E. Carment<br />

P.S. Jʹai payé le terme 35f au propriétaire <strong>de</strong> M. Dupetit et jʹen ai le reçu, que je vous enver‐<br />

rai si vous le désirez.<br />

Amitiés à M. Dupetit, me recomman<strong>de</strong>r à ses prières.<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous transmets les remerciements du f. Maignen pour les renseignements que<br />

vous lui avez envoyés; il en fera bon usage.<br />

Toute notre petite famille va bien et <strong>de</strong>meure <strong>avec</strong> vous en union <strong>de</strong> prières et<br />

dʹœuvres.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Vos montres vous seront envoyées dès quʹelles seront prêtes.<br />

239 à M. Decaux<br />

Il y a peu d’espoir pour que le projet <strong>de</strong> mariage puisse aboutir. Un meilleur parti semble se présenter pour M.<br />

Decaux.<br />

Paris, 25 octobre 1852<br />

Très cher ami,<br />

Ce nʹest ni oui ni non, car M. et M me Givelet ont traité lʹaffaire en question <strong>avec</strong> assez<br />

<strong>de</strong> discrétion pour que votre position <strong>de</strong>meure intacte dans la famille; mais ils se sont<br />

néanmoins assurés <strong>de</strong> la manière la plus positive quʹil nʹy avait pas lieu <strong>de</strong> concevoir le<br />

moindre espoir; ces dames ont, sous le rapport <strong>de</strong> la fortune, <strong>de</strong>s vues arrêtées qui ne peu‐<br />

vent être changées par aucune considération personnelle <strong>de</strong> qualités, <strong>de</strong> mérite et <strong>de</strong> sen‐<br />

timents; cʹest ainsi que voit le mon<strong>de</strong>; il nʹy a point à sʹen étonner.<br />

310


Je regrette <strong>avec</strong> M. et M me Givelet que lʹissue <strong>de</strong> cette négociation puisse vous<br />

contrister, mais ils sont si convaincus que vous nʹeussiez pas trouvé <strong>de</strong> ce côté ce que vous<br />

avez droit dʹattendre que je ne puis mʹaffliger, au fond, du résultat.<br />

M me Givelet mʹa parlé dʹune personne quʹelle croirait <strong>de</strong> tous points bien mieux<br />

vous convenir; je vous invite, cher ami, à voir cette excellente dame qui paraît pleine dʹes‐<br />

time et dʹaffection pour vous. Son mari et elle se sont montrés parfaits pour vous en cette<br />

occasion.<br />

Croyez bien, très cher ami, à tous mes sentiments <strong>de</strong> bien cordial dévouement.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je mʹaperçois trop tard que mon papier est déchiré; pardonnez‐moi <strong>de</strong> vous<br />

écrire ainsi.<br />

240 à M. Pavie<br />

Les Pères Capucins ne pourront venir prêcher à Angers pour la Conférence.<br />

Paris, 30 décembre 1852<br />

Mon cher Victor,<br />

Je me suis empressé <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r aux Capucins, ainsi que vous le désiriez, un <strong>de</strong><br />

leurs Pères pour votre sermon dʹAngers, soit au 16 janvier, soit au dimanche suivant. Mal‐<br />

heureusement, ils sont dans lʹimpuissance <strong>de</strong> répondre à vos vues. Ces bons Pères ont en‐<br />

trepris dans le Midi <strong>de</strong>s missions qui ont le plus grand succès. Ils vont les poursuivre pen‐<br />

dant plusieurs semaines et ne reviendront quʹaprès lʹœuvre achevée, rejoindre leur Supé‐<br />

rieur qui est présentement seul à Paris.<br />

Si vous avez quelque autre moyen, indiquez‐le moi, cher ami, je ferai en sorte <strong>de</strong> se‐<br />

con<strong>de</strong>r vos intentions. Je vois, je lʹavoue, peu <strong>de</strong> chances favorables en ce moment; le ca‐<br />

rême est à nos portes et tous les prédicateurs songent à sʹy préparer. On vous a dit que jʹai<br />

cru un moment quʹil me serait donné <strong>de</strong> vous aller voir à Angers, mais le bon Dieu en a<br />

décidé autrement. Et vous, cher ami, qui avez <strong>de</strong> meilleures jambes que moi, ne viendrez‐<br />

vous pas bientôt ici? Voilà déjà longtemps que nous ne vous y avons vu.<br />

Offrez mes respectueux souvenirs à votre cher entourage, et croyez‐moi comme<br />

toujours<br />

Votre dévoué ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

240‐1 à M gr Angebault<br />

La vie intérieure et les oeuvres <strong>de</strong> charité, tel est le but voulu par MLP. pour sa Communauté. Il remercie<br />

l’évêque d’Angers pour l’annotation ajoutée au Règlement <strong>de</strong> 1852.<br />

Paris, 30 décembre 1852<br />

Monseigneur,<br />

Notre f. Myionnet nous a rapporté à son retour lʹexcellente et paternelle lettre que<br />

vous avez daigné nous écrire. Je lʹai lue à tous nos frères rassemblés et je puis donner lʹas‐<br />

surance à Votre Gran<strong>de</strong>ur que pas un mot nʹest tombé à terre; tous les cœurs se sont ou‐<br />

311


verts pour recevoir les conseils que vous ont dictés et votre haute expérience et le bienveil‐<br />

lant intérêt que vous nous accor<strong>de</strong>z. Aussi jʹai la confiance que plus que jamais nous reste‐<br />

rons fidèles à lʹobservance <strong>de</strong> notre règlement qui se trouve comme confirmé par lʹappro‐<br />

bation quʹil a reçue <strong>de</strong> vous. La vie intérieure unie à lʹexercice <strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong> charité, telle a<br />

été notre fin au moment où sous vos yeux nous nous sommes offerts au Seigneur; nous y<br />

avons constamment tendu, malgré les difficultés <strong>de</strong> la route et nous continuerons, <strong>avec</strong><br />

lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> Dieu et vos sages assistances, à nous y former <strong>de</strong> plus en plus. Nous avons quel‐<br />

quefois douté <strong>de</strong> nous‐mêmes dans les heures d’épreuves, mais jamais <strong>de</strong> lʹexcellence et <strong>de</strong><br />

lʹutilité <strong>de</strong> notre œuvre. Nous espérons que, malgré notre indignité, le bon Maître nous<br />

gar<strong>de</strong>ra à son service et nous permettra <strong>de</strong> continuer ce que nous avons commencé pour sa<br />

gloire.<br />

Je me plais à redire à Votre Gran<strong>de</strong>ur que le voyage du f. Clément est loin <strong>de</strong> nous<br />

paraître inutile puisquʹil nous a rendu le secours <strong>de</strong> vos directions et conseils dont nous<br />

étions <strong>de</strong>puis trop longtemps privés. Nous ferons en sorte quʹils ne nous manquent plus<br />

désormais par notre faute et nous serons très empressés à les solliciter.<br />

Je nʹai pas encore vu le petit appendice ou annotation que Votre Gran<strong>de</strong>ur a daigné<br />

ajouter à notre règlement 183 . M. lʹabbé dʹAndigné ayant désiré jeter un coup dʹœil sur cette<br />

pièce et lʹayant encore entre les mains. Dès quʹil mʹaura été renvoyé je tirerai grand profit<br />

<strong>de</strong>s observations que vous avez bien voulu nous communiquer, Monseigneur, et tous nos<br />

bons frères auront, jʹose vous en donner lʹassurance, une profon<strong>de</strong> déférence pour vos<br />

avis.<br />

Je ne finirai pas sans offrir à Votre Gran<strong>de</strong>ur les hommages <strong>de</strong> notre petite famille à<br />

lʹoccasion du nouvel an; daigne le Seigneur exaucer les vœux que nous lui adressons du<br />

fond du cœur pour vous et pour votre cher troupeau.<br />

Nous remercions aussi Votre Gran<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> la charmante image quʹelle a envoyée à<br />

chacun <strong>de</strong> nous; notre bon p. Beaussier, en particulier, est profondément touché <strong>de</strong> ce pré‐<br />

cieux souvenir et me charge <strong>de</strong> mettre à vos pieds sa vive reconnaissance.<br />

Nous nous y tenons tous <strong>de</strong> même, Monseigneur, pour y recevoir votre bénédiction.<br />

De Votre Gran<strong>de</strong>ur<br />

Lʹhumble serviteur et fils respectueux en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

241 à M. Vasseur<br />

MLP. se réjouit <strong>de</strong> la toute prochaine entrée <strong>de</strong> M. Vasseur en communauté. Beauté <strong>de</strong> la vocation religieuse: no‐<br />

tre apparent sacrifice constitue, en réalité, la meilleure part.<br />

Paris, 6 janvier 1853<br />

Très cher fils en N.S.,<br />

Je reçois toujours <strong>avec</strong> une vive satisfaction vos petites lettres, parce quʹelles sont<br />

bonnes et simples et quʹelles expriment, jʹen suis convaincu, les vrais sentiments <strong>de</strong> votre<br />

cœur. La <strong>de</strong>rnière mʹest particulièrement agréable en ce quʹelle mʹannonce votre prochaine<br />

arrivée; nous attendons tous votre venue, cher enfant, car vous êtes dès longtemps pour<br />

183 Il concernait les frères ecclésiastiques et le rôle du supérieur.<br />

312


nous un ami, un frère, et pour moi un fils chéri que je serai heureux dʹaccueillir et dʹem‐<br />

brasser tendrement.<br />

Jusque là, je ne cesserai <strong>de</strong> prier pour vous le divin Seigneur et la Très Sainte Vierge,<br />

notre Mère, <strong>de</strong> vous protéger, <strong>de</strong> veiller sur vous et <strong>de</strong> confirmer votre volonté, afin que<br />

vous consommiez généreusement votre sacrifice. Je me sers à <strong>de</strong>ssein <strong>de</strong> ce mot, cher ami,<br />

pour vous rappeler toute la beauté, toute la sainteté <strong>de</strong> notre vocation. Plus heureux que<br />

les gens du mon<strong>de</strong>, nous nʹappliquons pas notre esprit, notre cœur aux biens misérables<br />

<strong>de</strong> la terre, mais à Dieu et aux choses du Ciel; nous mettons sous nos pieds tout ce qui est<br />

périssable pour nous élever à ce qui est éternel. Notre pauvre nature, toujours inclinée aux<br />

joies terrestres, murmure parfois et se révolte et cʹest en cela que consiste notre apparent<br />

sacrifice; mais nous sommes si généreusement récompensés par lʹamour <strong>de</strong> notre Dieu,<br />

par les satisfactions intérieures <strong>de</strong> la conscience, par le goût intime et profond <strong>de</strong>s délices<br />

<strong>de</strong> la maison du Seigneur quʹil ne nous reste quʹà Le bénir <strong>de</strong> nous avoir choisis entre mille<br />

pour nous approcher tout près <strong>de</strong> Lui et nous donner la meilleure part.<br />

Réjouissez‐vous donc, cher enfant, à lʹapproche du jour où vous pourrez enfin vous<br />

donner tout entier à un si bon Maître, et disposez votre cœur, afin quʹil se consacre bien<br />

amoureusement à Lui.<br />

Lorsque vous serez prêt à partir, vous mʹécrirez un mot afin <strong>de</strong> mʹavertir. Ce ne sera<br />

jamais trop tôt à notre gré.<br />

En attendant, croyez‐moi bien sincèrement, très cher fils,<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

242 à M. Decaux<br />

Invitation à participer au Conseil <strong>de</strong> la Sainte‐Famille.<br />

Mercredi 2 février [1853]<br />

Cher bon ami,<br />

Notre Conseil <strong>de</strong> la Sainte‐Famille sʹassemblera <strong>de</strong>main jeudi, à 4h., rue Garancière,<br />

6. Votre présence y sera bien désirée; venez donc, cher ami, si vos occupations nʹy font<br />

empêchement.<br />

A vous <strong>de</strong> cœur en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

243 à M. Caille<br />

La charité et la prière sont les gardiennes <strong>de</strong> l’affection fraternelle. MLP. l’invite à venir à la retraite <strong>de</strong> Commu‐<br />

nauté. Nouvelles <strong>de</strong>s frères et <strong>de</strong>s oeuvres.<br />

Paris, 19 avril 1853<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je ne vous ai point écrit <strong>de</strong>puis quelque temps, je vous savais très occupé <strong>de</strong> votre<br />

loterie et je pensais quʹil était hors <strong>de</strong> propos <strong>de</strong> vous donner <strong>de</strong>s distractions. Je suppose<br />

quʹelle est maintenant tirée, ou du moins quʹelle va lʹêtre, et que vous allez retrouver un<br />

peu <strong>de</strong> liberté; je vous écris donc ces quelques lignes, afin que nous ne restions pas trop<br />

313


longtemps éloignés <strong>de</strong> votre souvenir; écrivez‐nous <strong>de</strong> votre côté, dès que vous serez dé‐<br />

gagé <strong>de</strong> vos travaux extraordinaires. Un proverbe arabe dit: ʺQuand les chemins <strong>de</strong> lʹami‐<br />

tié ne sont pas fréquentés, ils se couvrent <strong>de</strong> ronces.ʺ Cʹest <strong>avec</strong> raison, les impressions sʹef‐<br />

facent vite <strong>de</strong> nos âmes mobiles et oublieuses; heureusement pour nous, la charité les<br />

conserve et la prière les ravive; restons donc bien fidèles, cher ami, à la charité et à la<br />

prière; elles seront les gardiennes <strong>de</strong> la sainte affection qui nous unit.<br />

Je vous donne avis, mais sans gran<strong>de</strong> espérance que vous en puissiez profiter, que<br />

notre première retraite va bientôt commencer. Elle sʹouvrira lundi prochain 25 <strong>de</strong> ce mois<br />

et durera jusquʹau jeudi inclusivement. Elle nous sera donnée par le r.p. <strong>de</strong> Ponlevoy, Su‐<br />

périeur <strong>de</strong> la Maison <strong>de</strong>s Jésuites <strong>de</strong> la rue <strong>de</strong> Sèvres, homme dʹune haute piété et dʹun<br />

mérite éminent. Si vos affaires vous amenaient ici dans cet intervalle, peut‐être pourriez‐<br />

vous participer au moins à quelquʹun <strong>de</strong>s exercices; sinon, vous vous unirez à nous dʹin‐<br />

tention et <strong>de</strong> cœur, en attendant les temps où le bon Maître, vous affranchissant dʹune par‐<br />

tie <strong>de</strong> vos charges, laissera un peu plus dʹespace <strong>de</strong>vant nous.<br />

Notre petite famille va bien; elle parle souvent du bon frère dʹAmiens et regrette<br />

bien <strong>de</strong> ne lʹavoir pas vu <strong>de</strong>puis longtemps; les <strong>de</strong>rniers venus souhaitent vivement <strong>de</strong><br />

faire sa connaissance.<br />

Jʹen étais là <strong>de</strong> ma lettre quand notre bon Confrère dʹAmiens nous est arrivé <strong>avec</strong><br />

votre lettre; vous pensez bien quʹil a été accueilli <strong>avec</strong> joie, car il nous apportait <strong>de</strong> vos<br />

nouvelles et <strong>de</strong> plus lʹassurance que vous nous arrivez au commencement <strong>de</strong> la semaine,<br />

tout juste à point pour prendre au moins une petite part aux exercices <strong>de</strong> la retraite; cela<br />

vous fera quelques heures <strong>de</strong> repos dont vous avez grand besoin après les fatigues exces‐<br />

sives que vous avez eues. Je bénis le Seigneur du succès quʹil a donné à vos efforts et je Le<br />

prie <strong>de</strong> le faire tourner à sa gloire.<br />

M. Vasseur va bien, il sera dans une gran<strong>de</strong> joie <strong>de</strong> vous voir. Nous recevrions <strong>avec</strong><br />

plaisir un jeune frère tailleur, sʹil avait les qualités que <strong>de</strong>man<strong>de</strong> notre genre <strong>de</strong> vie; vous<br />

êtes bon juge en ce sens, je mʹen rapporte pleinement à votre examen.<br />

Nous refusons tous les jours plusieurs enfants, notre maison étant déjà extrême‐<br />

ment chargée; nous examinerons plus tard <strong>avec</strong> vous, lorsque vous serez ici, ce que le bon<br />

Dieu <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> nous sur ce point.<br />

Tous nos frères vous embrassent tendrement et moi je suis, dans les Cœurs <strong>de</strong> J. et<br />

<strong>de</strong> M., bien affectueusement.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

244 <strong>de</strong> M. Maignen à M. Caille<br />

P.S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Première communion <strong>de</strong>s enfants à Grenelle. Un jeune apprenti attend <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> M. Caille sur la possibi‐<br />

lité <strong>de</strong> trouver du travail à Amiens.<br />

Paris, 13 mai 1853<br />

Bien cher frère en N.S.,<br />

Jʹespérais que vous ne gar<strong>de</strong>riez quʹun jour le règlement du Patronage, M. Bourlez le ré‐<br />

clame <strong>avec</strong> les plus vives instances pour le donner immédiatement à lʹimpression. M. Baudon veut<br />

le distribuer aux membres du Congrès charitable qui va se séparer. Je nʹinsiste pas davantage et je<br />

314


vous prie <strong>de</strong> me le renvoyer courrier par courrier, afin dʹépargner au bon M. Bourlez <strong>de</strong>s reproches<br />

quʹil ne mérite pas.<br />

Je nʹai que le temps <strong>de</strong> vous embrasser et <strong>de</strong> recomman<strong>de</strong>r à vos prières nos petits enfants<br />

qui ont fait hier leur première communion. Ils sont bien heureux. Priez pour leur persévérance.<br />

Votre bien affectionné frère dans les Saints Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Maurice Maignen<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je joins <strong>de</strong>ux lignes dʹaffection à la petite lettre <strong>de</strong> notre f. Maignen. Nous allons<br />

bien ici nos enfants, préparés <strong>avec</strong> un zèle parfait par nos frères, MM. Lantiez et Planchat,<br />

assistés encore dʹun autre ecclésiastique, ont fait leur première communion hier dans les<br />

meilleures dispositions; remerciez bien <strong>avec</strong> nous le Seigneur qui sʹest montré si tendre et<br />

pour eux et pour nous. Jules Sausset mʹa annoncé quʹil allait arriver <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> conva‐<br />

lescence où il est. Je crois quʹil vaudra mieux quʹil retourne tout <strong>de</strong> suite à Amiens, au lieu<br />

dʹattendre ici votre prochain voyage; nous nʹavons ici aucune occupation qui lui convienne<br />

et il serait bien mauvais pour lui dʹêtre dans le désœuvrement.<br />

Le jeune homme que nous avons présenté ici et à qui vous avez promis <strong>de</strong> trouver à<br />

Amiens du travail comme tapissier attend <strong>avec</strong> impatience un avis <strong>de</strong> vous pour son dé‐<br />

part; il nʹa pu chercher dʹoccupation ici dans la prévision <strong>de</strong> son changement <strong>de</strong> lieu; il est<br />

donc sans emploi présentement. Il est bien désirable que cette situation ne dure guère, je<br />

vous prie donc instamment, cher ami, <strong>de</strong> nous dire si vous avez pu, comme nous lʹespé‐<br />

rons, lui trouver du travail sous vos yeux. Je crois que, bien conduit, ce bon enfant peut<br />

tourner très bien. Ses parents sont excellents et son frère nous donne toute satisfaction.<br />

Je joins ici la petite lettre que je <strong>de</strong>vais vous remettre pour le r.p. Mallet.<br />

Je vous embrasse tendrement en J. et M. et suis dans les divins Cœurs<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

245 à M. Caille<br />

Voyage <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux jeunes gens à Amiens; quelles sont leurs dispositions. Union par la pensée et par la prière. De‐<br />

man<strong>de</strong> d’étoffe pour les vêtements <strong>de</strong> ses frères; esprit <strong>de</strong> pauvreté <strong>de</strong> MLP.<br />

Paris, 20 mai 1853<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je nʹai pu vous avertir comme je lʹaurais voulu, quelques jours à lʹavance, du départ<br />

du jeune Marcaire184 et <strong>de</strong> Jules Sausset. Le premier nʹétait pas sûr lui‐même du moment<br />

où sa famille aurait réglé toutes les petites dispositions relatives à son voyage. Les voilà<br />

tous les <strong>de</strong>ux à lʹimproviste; jʹespère que leur arrivée ne vous causera pas néanmoins<br />

dʹembarras.<br />

Jules ne me semble point mieux quʹavant son séjour à la campagne, sa langueur est<br />

toujours la même; cependant, il désirait tant retourner à Amiens et comptait tant sur lʹair<br />

natal pour se remettre que je nʹai pas voulu le priver <strong>de</strong> cette satisfaction; je regretterais<br />

bien que sa faible santé <strong>de</strong>vînt une difficulté pour vous; je crains quʹil ne se rétablisse<br />

184 Albert Marcaire, frère <strong>de</strong> Jules Marcaire, rsv. (cf. infra, lettre 248).<br />

315


quʹimparfaitement; cependant, à son âge, la nature a <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s ressources et peut pren‐<br />

dre le <strong>de</strong>ssus.<br />

Notre jeune Marcaire part dans <strong>de</strong> très bonnes dispositions; jʹai la confiance que,<br />

sous vos yeux, il achèvera <strong>de</strong> se développer et <strong>de</strong>viendra un sujet exemplaire dans telle<br />

carrière quʹil plaira au Seigneur <strong>de</strong> lui ouvrir.<br />

Jʹaurais aimé, bien cher ami, à prolonger un peu mon entretien <strong>avec</strong> vous, je ne le<br />

puis en ce moment étant contraint <strong>de</strong> sortir. Notre f. Maignen prépare vos petits envois qui<br />

partiront <strong>avec</strong> cette lettre.<br />

Croyez bien que notre cœur est toujours <strong>avec</strong> vous; je vous recomman<strong>de</strong> tous les<br />

jours au Seigneur <strong>avec</strong> une vive instance, notre f. Lantiez nʹoublie jamais <strong>de</strong> vous com‐<br />

prendre nommément au Memento <strong>de</strong> la Sainte Messe. Je suis aussi par la pensée vos œu‐<br />

vres et vos travaux; je crois donc cher ami, que nos âmes sont vraiment unies en Dieu et<br />

que les liens qui nous attachent les uns aux autres sont bénis par Lui.<br />

Je vous embrasse tendrement en son divin Cœur et au Cœur immaculé <strong>de</strong> Marie.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Quand vous aurez une occasion <strong>de</strong> mʹenvoyer un coupon dʹétoffe pour gilets,<br />

vous me ferez plaisir <strong>de</strong> le faire, plusieurs <strong>de</strong> ces Messieurs en ont besoin; vous pourriez<br />

mʹen envoyer pour 6 gilets noirs, soli<strong>de</strong>s, pas à trop haut prix, la simplicité est nécessaire<br />

chez nous pour toutes raisons.<br />

246 à M. Caille<br />

Importance d’une correspondance régulière. Activités <strong>de</strong>s Oeuvres <strong>de</strong> Paris. Rôle <strong>de</strong> la prière chrétienne: que<br />

Dieu ʺdaigne tout faire Lui‐mêmeʺ, car nous sommes <strong>de</strong>s serviteurs inutiles. Dévotion au Sacré‐Coeur.<br />

Paris, 15 juin 1853<br />

Jʹattendais <strong>de</strong>puis quelque temps déjà <strong>de</strong> vos nouvelles, car voilà bien longtemps<br />

que vous ne nous avez écrit; nous désirions dʹailleurs savoir comment va Jules Sausset<br />

dont la santé était encore bien frêle lorsquʹil nous a quittés; enfin, la famille du jeune Mar‐<br />

caire souhaitait vivement dʹapprendre que vous étiez content <strong>de</strong> lui et que vous en conce‐<br />

viez quelque bonne espérance. Je vous prie, très cher ami et fils, <strong>de</strong> nous rassurer sur ces<br />

différents points et <strong>de</strong> nous dire aussi tout ce qui intéresse vous et vos enfants et vos œu‐<br />

vres; tout cela nous est commun <strong>avec</strong> vous, il ne faut pas que nous le perdions <strong>de</strong> vue trop<br />

longtemps, afin que notre attention comme notre affection en soit toujours occupée.<br />

M. Vasseur me dit que peut‐être votre inventaire, qui se fait annuellement à cette<br />

époque, a pu vous empêcher <strong>de</strong> nous donner signe <strong>de</strong> souvenir; sʹil en était ainsi, bien cher<br />

ami, vous pourriez, sans faire une longue correspondance, nous écrire seulement quelques<br />

lignes qui nous tranquillisent sur vous et sur les vôtres.<br />

Nous allons ici comme <strong>de</strong> coutume, assez bien et <strong>avec</strong> les bonnes dispositions <strong>de</strong><br />

tous. Le bon Maître est toujours plein <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong> pour nous, ses indignes serviteurs, et<br />

daigne bénir notre petite famille et ses humbles travaux. Nous nʹavons point <strong>de</strong> faits nou‐<br />

veaux méritant mention; <strong>de</strong>ux nouvelles Saintes‐Familles établies, lʹune à Grenelle, lʹautre<br />

aux Gobelins, dans le voisinage <strong>de</strong> la rue <strong>de</strong> lʹArbalète, fonctionnent bien et semblent<br />

promettre une heureuse action. Notre f. Maignen travaille toujours <strong>avec</strong> ar<strong>de</strong>ur à son Pa‐<br />

tronage qui sʹaccroît et marche bien; il sʹy fatigue beaucoup; il a maintenant un surcroît <strong>de</strong><br />

316


travail durant quelques jours; il réunit tout le jour rue du Regard les enfants <strong>de</strong> la paroisse<br />

qui sont en retraite pour la première communion. De cette façon, les enfants sont moins<br />

dissipés, ne courent pas les rues et se préparent mieux à la gran<strong>de</strong> action quʹils vont faire;<br />

on les occupe dʹailleurs <strong>de</strong> quelques pieux exercices durant la journée. Je crois quʹil sortira<br />

quelque bien <strong>de</strong>s peines quʹon prend pour cette bonne œuvre.<br />

Votre cher enfant, M. Vasseur, va jusquʹici très bien parmi nous, il commence à<br />

prendre lʹintelligence et le goût <strong>de</strong>s choses spirituelles, sans perdre en aucune façon<br />

lʹamour <strong>de</strong> son travail; jʹai bonne espérance pour son avenir. Mais si peu <strong>de</strong> chose suffit à<br />

cet âge pour mettre lʹesprit hors <strong>de</strong> sa voie, qu’il faut incessamment veiller et prier. Priez<br />

donc beaucoup, cher ami, pour ce cher enfant qui vous doit déjà tant et qui vous <strong>de</strong>vra<br />

plus encore si vous assurez sa persévérance et sa confirmation dans le bien.<br />

Notre f. Maignen prépare un règlement pour son patronage, il vous le communi‐<br />

quera; il a aussi un rapport bien fait sur la maison <strong>de</strong> Patronage <strong>de</strong> la rue St‐Quentin 185 , il<br />

vous le communiquera, si cela vous est agréable.<br />

Adieu, bien cher ami et fils, priez toujours beaucoup pour nous et pour toutes les<br />

âmes que le bon Maître nous permet <strong>de</strong> soutenir un peu; cʹest une si gran<strong>de</strong> tâche et nous<br />

sommes si insuffisants; que le Seigneur daigne tout faire Lui‐même, car nous ne sommes<br />

propres à rien <strong>de</strong> bon et <strong>de</strong> saint.<br />

Je vous embrasse tendrement dans les Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je vous recomman<strong>de</strong> le petit livre du Mois du Sacré‐Cœur; tâchez que ce beau mois<br />

ne passe pas inaperçu.<br />

247 à M. Caille<br />

Conduite à tenir envers une jeune vocation. Ne pas hésiter à s’en séparer si la pru<strong>de</strong>nce l’exige. Une ai<strong>de</strong> serait<br />

nécessaire pour tenir l’Œuvre d’Amiens.<br />

Paris, 20 juin 1853<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous écris sans délai pour vous remercier <strong>de</strong> la conduite tout à la fois bienveil‐<br />

lante et ferme que vous avez tenue à lʹégard du jeune Albert Marcaire; je ne désespère pas<br />

quʹ<strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> persévérance vous ne puissiez le mettre en bon chemin; il a le cœur bon<br />

et, sʹil est maintenu, il surmontera les difficultés quʹil trouvera sur son chemin. Toutefois,<br />

bien cher ami, si ce jeune homme ne suivait pas docilement vos conseils, sʹil pouvait être<br />

dʹun mauvais exemple pour les autres et <strong>de</strong>venait un sujet dʹinquiétu<strong>de</strong> pour vous, nʹhési‐<br />

tez pas à prendre à son égard le parti que la pru<strong>de</strong>nce chrétienne vous suggérerait; vous<br />

ne pouvez admettre près <strong>de</strong> vous que <strong>de</strong>s jeunes gens animés <strong>de</strong> bonnes dispositions, sen‐<br />

tant le bienfait <strong>de</strong> votre appui si charitable et si paternel et y répondant par leur soumis‐<br />

sion et leur reconnaissance. Un seul sujet qui ne serait pas dans ces sentiments pourrait dé‐<br />

tourner les autres <strong>de</strong> leur voie et vous susciter <strong>de</strong> grands ennuis; il nʹy aurait donc pas à<br />

balancer si, après quelques épreuves, vous nʹarriviez pas à un résultat satisfaisant.<br />

185<br />

Le Patronage St-Charles, rue St-Quentin, près <strong>de</strong> l'église St-Vt-<strong>de</strong>-Paul, dans le X° arrondissement. L'Institut en prit la direction<br />

en 1855, <strong>avec</strong> les frères Tourniquet et Vasseur.<br />

317


Je partage entièrement votre avis relativement à la fondation <strong>de</strong> votre maison à<br />

Amiens; il faut que les esprits y soient disposés et que vous sentiez un concours autour <strong>de</strong><br />

vous pour cette bonne œuvre; autrement, la charge en retomberait trop lour<strong>de</strong>ment sur<br />

vous et votre isolement pourrait en compromettre le succès; continuons donc, bien cher<br />

ami, à prier, et tenons‐nous sous la main du Seigneur qui nous emploiera comme Il lui<br />

plaira dans sa vigne; nous sommes <strong>de</strong> pauvres ouvriers quʹIl prend à son service, la sou‐<br />

mission, la confiance en sa bonté sont les qualités qui nous conviennent.<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> plaisir que Jules Sausset se trouve mieux; je crois que lʹair <strong>de</strong> la<br />

campagne sera salutaire pour lui et quʹil est, dans la colonie <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Renneville, aussi<br />

bien placé quʹon le pourrait désirer.<br />

Notre cher M. Vasseur voulait vous écrire quelques lignes, je ne sais sʹil en aura<br />

trouvé le moment; il va bien et nous donne toujours satisfaction. Jʹai vu, par la petite lettre<br />

que lui a envoyée le jeune Thuillier, que ce jeune homme a aussi le désir <strong>de</strong> se consacrer au<br />

service <strong>de</strong> Dieu et pense un peu à entrer parmi nous; je vous laisse entièrement le soin,<br />

bien cher ami, dʹétudier ses dispositions et <strong>de</strong> juger, quand il en sera temps, du parti quʹil<br />

y aurait à prendre à son égard.<br />

Nous sommes bien heureux <strong>de</strong> penser que vos affaires pourraient vous amener<br />

prochainement à Paris; les quelques instants que vous passez au milieu <strong>de</strong> nous resserrent<br />

nos liens et nous unissent toujours <strong>de</strong> plus en plus intimement.<br />

Jʹai fait une petite excursion dʹaffaires dans votre voisinage il y a quelques jours; je<br />

suis allé jusquʹà Clermont. Cʹest sur la route dʹAmiens; jʹavais quelque tentation dʹaller<br />

jusque là et <strong>de</strong> vous surprendre par une petite visite inattendue; mais jʹétais pressé <strong>de</strong> re‐<br />

venir et je pensais dʹailleurs quʹil valait mieux attendre quelque occasion que la Provi<strong>de</strong>nce<br />

ménagera dʹelle‐même pour vous aller voir; soyons patients, son heure viendra.<br />

Tous nos frères vont bien, notre petite famille est présentement en bonne disposi‐<br />

tion, jʹai la confiance que le divin Seigneur est au milieu <strong>de</strong> nous. Puisse‐t‐Il être aussi tou‐<br />

jours <strong>avec</strong> vous, bien cher ami, et <strong>avec</strong> vos enfants; nous lui <strong>de</strong>mandons pour vous ses<br />

plus abondantes bénédictions.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Notre f. Maignen nʹa reçu aucune lettre <strong>de</strong> vous.<br />

248 à M. Caille<br />

Les petites Communautés permettent <strong>de</strong>s liens plus étroits. On ne peut donc relâcher ces liens sans qu’elles en<br />

souffrent. Comment vont les jeunes vocations. MLP. lui annonce l’acquisition du terrain et <strong>de</strong>s bâtiments <strong>de</strong><br />

Vaugirard.<br />

Paris, 12 juillet 1853<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je nʹai pas eu la satisfaction <strong>de</strong> voir les excellents MM. qui mʹont apporté votre let‐<br />

tre, je lʹai beaucoup regretté et jʹespère quʹune autre occasion me sera plus favorable. M.<br />

Vasseur, qui les a vus, a appris par eux que nous pouvions espérer vous voir pour diman‐<br />

che prochain; nous en aurions tous une gran<strong>de</strong> joie, et moi, en particulier, bien cher ami,<br />

qui éprouve souvent une sorte <strong>de</strong> peine <strong>de</strong> vous voir si rarement. Quand les Communau‐<br />

318


tés sont fort nombreuses, elles font <strong>de</strong>s colonies et nécessairement les frères sont éloignés<br />

les uns <strong>de</strong>s autres; mais, quand elles ne forment encore quʹune petite famille, les liens sont<br />

si étroits quʹon ne peut les relâcher sans souffrance. Jʹaccepte toutefois, cher ami, en cela<br />

comme en tout, la sainte volonté <strong>de</strong> Dieu, et je le bénis toutes les fois quʹIl nous permet <strong>de</strong><br />

nous rapprocher pour quelques instants.<br />

Jʹavais fait avertir la lingère <strong>de</strong> tenir prêt le petit paquet <strong>de</strong> Jules Sausset, mais elle<br />

ne sʹest pas trouvée à la maison quand nos jeunes Confrères sont venus; on vous remettra<br />

donc les objets réclamés lorsque vous viendrez.<br />

Je suis tout heureux dʹapprendre que le jeune Marcaire va un peu mieux; je crois<br />

quʹil a beaucoup <strong>de</strong> respect et dʹaffection pour vous et quʹil se corrigera peu à peu <strong>de</strong> ses<br />

mauvaises habitu<strong>de</strong>s, si vous continuez à lui donner vos bons avis. Il a écrit à ses parents<br />

une petite lettre qui les a enchantés; il disait quʹil commençait à comprendre sous votre di‐<br />

rection ce que cʹétait que le bon chemin et quʹil se sentait un vrai désir dʹy marcher. Vous<br />

ne souhaitez non plus rien autre, cher ami, que <strong>de</strong> voir ces pauvres enfants aller dans la<br />

voie droite;jʹespère que celui‐ci vous <strong>de</strong>vra son salut.<br />

Son frère 186 va toujours bien parmi nous; il vous prie dʹassurer Albert quʹil pense à<br />

lui bien souvent <strong>de</strong>vant Dieu. Je serai bien satisfait, si vous venez ici, dʹêtre présenté par<br />

vous à M. lʹabbé Cacheleux, tout ce que lʹon mʹa dit <strong>de</strong> son zèle et <strong>de</strong> ses vertus me fait<br />

souhaiter <strong>de</strong> le connaître; il est dʹailleurs si bon pour vous et pour vos œuvres quʹil doit<br />

mʹêtre cher à ce titre qui lui mérite toute notre reconnaissance.<br />

Nous avons été plus vite que vous dans notre œuvre dʹorphelins; jʹespère que cʹest<br />

par la volonté <strong>de</strong> Dieu et non par notre inspiration propre. Poussés par la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> dʹune<br />

augmentation considérable que nous faisait notre propriétaire pour notre loyer, et voyant<br />

dʹune autre part que nous ne pourrions nous établir complètement dans ce local sans <strong>de</strong>s<br />

frais assez grands, nous avons pris un parti décisif; malgré notre pauvreté, nous avons ac‐<br />

quis à Vaugirard 187 un emplacement assez vaste <strong>avec</strong><br />

quelques bâtiments qui, bien appropriés, pourront recevoir<br />

nos enfants et nous. Cʹest un acte un peu hardi dans notre<br />

position, mais nous avons bien prié avant dʹagir, nous<br />

avons aussi pris <strong>de</strong> sages conseils, nous espérons donc que<br />

le Seigneur sera <strong>avec</strong> nous. Unissez vos prières aux nôtres,<br />

bien cher ami, pour que nous amenions cette entreprise à<br />

bonne fin.<br />

Adieu, bien cher ami, tous nos frères vous reverront<br />

<strong>avec</strong> joie et vous atten<strong>de</strong>nt impatiemment; jusque là, je<br />

vous embrasse tendrement en N.S.<br />

Votre affectionné et dévoué ami et Père en J.C.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹoubliais <strong>de</strong> dire que notre f. Casimir Michel, très<br />

bien remis <strong>de</strong> sa maladie, est revenu au milieu <strong>de</strong> nous<br />

<strong>de</strong>puis quelques jours.<br />

186 Jules Marcaire (1832-1918); originaire <strong>de</strong> Lille, était entré en Communauté le 2 avril précé<strong>de</strong>nt; nommé à l'Orphelinat <strong>de</strong> la rue<br />

<strong>de</strong> l'Arbalète, il ira ensuite à Vaugirard et Amiens. Modèle <strong>de</strong> vie religieuse et <strong>de</strong> simplicité.<br />

187 La Communauté se trouva rapi<strong>de</strong>ment à l'étroit rue <strong>de</strong> l'Arbalète. Des bienfaiteurs se présentèrent. MLP. trouva du côté <strong>de</strong> Vaugirard,<br />

au sud-ouest <strong>de</strong> Paris, à l'angle <strong>de</strong> la rue du Moulin et <strong>de</strong> la rue <strong>de</strong>s Vignes, (aujourd'hui Dombasle et Dantzig), une vaste<br />

propriété. Le contrat est signé le 15 juillet 1853: c'est le 8 février 1854 que la Communauté et l'Orphelinat s'y installèrent.<br />

319


249 à M. Caille<br />

Projets <strong>de</strong> déplacements à Amiens et en Normandie. Travaux à la maison <strong>de</strong> Vaugirard. Se communiquer les dé‐<br />

tails <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> famille maintient l’union <strong>de</strong>s communautés.<br />

Paris, 25 août 1853<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je suis toujours touché <strong>de</strong> lʹaimable esprit <strong>de</strong> vos lettres qui respirent la cordiale af‐<br />

fection et lʹouverture <strong>de</strong> cœur quʹil est si désirable <strong>de</strong> faire régner parmi nous; jʹen bénis<br />

Dieu qui entretient visiblement ces bonnes dispositions entre nous et nous manifeste ainsi<br />

<strong>de</strong> plus en plus sa volonté <strong>de</strong> nous unir et <strong>de</strong> faire <strong>de</strong> nous tous un même cœur, une seule<br />

âme, pour sa gloire et notre salut.<br />

Je vous remercie particulièrement <strong>de</strong> lʹobligeante instance que vous me faites pour<br />

lʹenvoi à Amiens <strong>de</strong> quelquʹun <strong>de</strong> nos frères qui prendrait près <strong>de</strong> vous quelques vacances.<br />

Jʹavais résolu que cette satisfaction serait accordée à notre f. Maignen qui vous aime beau‐<br />

coup et sʹintéresse tout particulièrement à vos œuvres, je dois dire à nos œuvres dʹAmiens;<br />

mais il sʹest trouvé si fatigué que jʹai dû lui faire prendre un peu lʹair <strong>de</strong> la campagne; je<br />

crois que, sans cette précaution, il nʹeût pu soutenir les travaux <strong>de</strong> lʹhiver.<br />

Je vais, <strong>de</strong> mon côté, faire une courte absence; ma sœur mʹappelle pour quelques<br />

jours près dʹelle, ayant quelques affaires à régler; ce sera dʹailleurs un repos dont jʹavais<br />

besoin, lʹété ayant mis mes forces en épuisement; jʹai été contraint <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r la chambre<br />

pendant <strong>de</strong>ux jours, mais je me suis remis sur pied, un peu <strong>de</strong> repos achèvera <strong>de</strong> me re‐<br />

faire.<br />

320


A mon retour, je compte bien vous aller voir un jour ou <strong>de</strong>ux, nonobstant les oc‐<br />

cupations que surajoutent à nos charges ordinaires les travaux <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Vaugirard.<br />

Tout va bien, du reste, parmi nous, grâce à lʹappui <strong>de</strong> notre divin Seigneur. Notre f.<br />

Casimir [Michel] était ces temps‐ci un peu moins soli<strong>de</strong> que <strong>de</strong> coutume, les gran<strong>de</strong>s cha‐<br />

leurs le fatiguent un peu, mais cela ne semble pas grave ni inquiétant; je le trouve, en en‐<br />

semble, bien remis.<br />

Tous ces détails <strong>de</strong> famille ne vous lassent pas, bien cher ami, car tout cela vous<br />

touche et vous intéresse, votre cœur nous est donné et prend part à tout ce qui nous tou‐<br />

che. Par réciprocité, nous nous intéressons à tout ce que vous faites, à tout ce qui vous re‐<br />

gar<strong>de</strong>. Nous allons prier pour votre distribution, à laquelle nous ne serons présents quʹen<br />

esprit, mais pour laquelle nous <strong>de</strong>mandons les grâces <strong>de</strong> Dieu; vos enfants, je lʹespère, en<br />

emporteront <strong>de</strong> bonnes impressions qui les disposeront à répondre à vos soins charitables<br />

et dévoués.<br />

Adieu, bien cher ami, je vous embrasse dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Nʹoubliez pas <strong>de</strong> dire le prix <strong>de</strong> lʹétoffe que vous mʹavez apportée.<br />

250 à M. Planchat<br />

MLP. ne peut autoriser M. Planchat à organiser le patronage <strong>de</strong>s vacances pour les écoliers. L’insuffisance en<br />

personnel oblige à renoncer à bien <strong>de</strong>s oeuvres utiles. Confier au Christ tous ses désirs inexaucés.<br />

Duclair, 30 août 1853<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je réponds poste pour poste à votre petite épître, et cependant ma réponse arrivera<br />

trop tard encore à votre gré puisque notre bon abbé Lantiez nʹen aura pas connaissance<br />

avant <strong>de</strong> se rendre à Grenelle. Mais je ne pense pas quʹil y ait à le regretter. Lʹarrangement<br />

que vous proposez est bon sans doute et serait utile aux écoliers, cependant, il serait peu<br />

praticable en ce moment; il vous donnerait un surcroît <strong>de</strong> charge que vous <strong>de</strong>vez éviter<br />

après les fatigues <strong>de</strong> lʹété; il augmenterait les préoccupations du f. Carment qui, aux ap‐<br />

proches <strong>de</strong> sa distribution surtout, a besoin <strong>de</strong> liberté dʹesprit; il supposerait <strong>de</strong> la part <strong>de</strong><br />

M. Bénard une coopération quʹil ne pourrait certainement vous donner dʹune manière ré‐<br />

gulière. Telle est la pensée <strong>de</strong> notre f. Maignen et aussi la mienne; il faut donc, bien cher<br />

ami, remettre au bon Dieu le soin <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r vos chers enfants; il vous tiendra compte <strong>de</strong><br />

votre bon désir et exaucera les prières que vous lui adresserez pour eux. Invoquez leurs<br />

anges gardiens, ils les protégeront et vous les ramèneront bien disposés après les vacances.<br />

Vous le savez, notre insuffisance nous impose, en ce genre, <strong>de</strong>s sacrifices continuels et<br />

nous oblige à renoncer à beaucoup dʹœuvres dont nous sentons lʹutilité; <strong>de</strong>s temps meil‐<br />

leurs viendront sans doute où plus <strong>de</strong> forces et <strong>de</strong> moyens nous seront donnés; jusque là,<br />

réfugions‐nous dans le Cœur <strong>de</strong> Jésus et confions‐Lui nos regrets, nos désirs impuissants,<br />

ipse opus perficiet, Il se chargera <strong>de</strong> tout ce que nous nʹaurons pu faire.<br />

Je clos cette lettre pour nʹen pas retar<strong>de</strong>r le départ, embrassez tendrement tous nos<br />

frères; je ne me console dʹêtre éloigné dʹeux quʹen redoublant mes prières pour eux et en<br />

particulier pour vous, bien cher ami, que jʹembrasse étroitement dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong><br />

J. et <strong>de</strong> M.<br />

321


Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Priez le f. Myionnet dʹouvrir mes lettres et <strong>de</strong> mʹenvoyer celles quʹil lui paraîtrait<br />

utile <strong>de</strong> me faire parvenir.<br />

251 à M. Vasseur<br />

MLP. le félicite <strong>de</strong> sa simplicité et <strong>de</strong> son ouverture <strong>de</strong> coeur. Il l’encourage à persévérer dans la lutte contre soi‐<br />

même.<br />

Duclair, 3 septembre 1853<br />

Très cher enfant,<br />

Vous mʹavez adressé une petite lettre naïve et bonne, comme le bon Maître vous a<br />

appris à les faire; aussi mʹa‐t‐elle causé une douce satisfaction, comme si jʹeusse conversé<br />

<strong>avec</strong> vous‐même; cʹest là le mérite <strong>de</strong> la simplicité, elle parle au cœur parce quʹelle vient<br />

aussi du cœur; laissez toujours sʹépancher le vôtre, cher enfant, en toute can<strong>de</strong>ur et vérité,<br />

et soyez sûr quʹainsi vous serez agréable à tous et surtout à Dieu.<br />

Je nʹai guère passé dʹinstants ici sans penser à vous, sans prier pour vous, je vais re‐<br />

doubler dʹar<strong>de</strong>ur à le faire, cher enfant, puisque vous en sentez particulièrement le besoin<br />

en ce moment. Jʹai la confiance que le Seigneur vous exaucera et que je vous retrouverai à<br />

mon retour comme je vous ai laissé, ferme contre la tentation et digne serviteur <strong>de</strong> Jésus et<br />

<strong>de</strong> Marie. Vous avez fait un grand pas dans le bien, vous avez surmonté la nature mau‐<br />

vaise, vous ne voudrez pas vous assujettir <strong>de</strong> nouveau à son joug honteux et flétrissant;<br />

mais surtout vous ne voudrez pas contrister le cœur du Dieu qui vous aime et vous a choi‐<br />

si, affliger la T. Ste Vierge votre Mère, enfin mʹattrister aussi profondément, moi qui suis<br />

<strong>avec</strong> tant <strong>de</strong> joie vos progrès dans le bien et qui vous vois jusquʹici si bien répondre à lʹap‐<br />

pel du Seigneur. Courage, mon cher enfant, la victoire est certaine pour qui résiste et invo‐<br />

que le nom du Seigneur; cachez‐vous dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M., le démon ne<br />

saurait vous y atteindre. Cʹest là que je veux vous retrouver, et, à mon retour, vous vien‐<br />

drez à moi plein <strong>de</strong> joie, car vous aurez le calme dʹune conscience pure, la paix dʹun cœur<br />

tout au Seigneur.<br />

Je vous embrasse tendrement et suis pour la vie<br />

Votre affectionné Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

252 à M. Vince 188<br />

A ce jeune frère qui éprouvait <strong>de</strong>s difficultés dans son cheminement, MLP. conseille <strong>de</strong> suivre son attrait pour la<br />

dévotion au Sacré‐Coeur; qu’il bénisse son épreuve, l’accueillant comme un moyen <strong>de</strong> sanctification; qu’il ne<br />

laisse entrer dans son coeur que <strong>de</strong>s sentiments <strong>de</strong> charité et <strong>de</strong> bonté.<br />

Duclair, 3 septembre 1853<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹavais besoin, quoique mon absence ne doive guère être longue, <strong>de</strong> recevoir quel‐<br />

que marque <strong>de</strong> souvenir <strong>de</strong> mes enfants et frères éloignés; vous avez compris, cher ami, ce<br />

188 Le frère Joseph Vince (1824-1856) originaire <strong>de</strong> La Flèche (Sarthe), était entré en Communauté le 21 février <strong>de</strong> cette même an<br />

née 1853; à 29 ans. De faible santé, il mourut après trois ans <strong>de</strong> vie religieuse, à 32 ans. Il a laissé le témoignage d'une âme ar<strong>de</strong>nte<br />

et généreuse : "Mon seul regret en quittant cette vie, c'est <strong>de</strong> laisser les pauvres, car travailler pour eux, c'était ma joie".<br />

322


esoin <strong>de</strong> mon cœur et vous mʹavez écrit quelques lignes qui venaient du fond du vôtre,<br />

bonnes, affectueuses, comme le Dieu <strong>de</strong> Charité les inspire à ses enfants chéris. Oh! suivez<br />

bien lʹattrait qui vous pousse contre le divin Cœur <strong>de</strong> Jésus; je crois, cher enfant, en étu‐<br />

diant votre voie, que cʹest par là que vous êtes incliné; laissez le doux Maître vous attirer, Il<br />

vous instruira comme le disciple bien‐aimé en vous faisant reposer sur son Cœur, en vous<br />

révélant ces secrets <strong>de</strong> la sainte dilection que tant dʹâmes ignorent et qui sont pourtant le<br />

don <strong>de</strong> Dieu par excellence, le souverain bien.<br />

Ne vous tourmentez point <strong>de</strong> vos tristesses, elles viennent, ou <strong>de</strong> la saison et <strong>de</strong> vo‐<br />

tre faible santé et alors elles dureront peu, ou bien elles sont envoyées <strong>de</strong> Dieu comme<br />

épreuve et moyen <strong>de</strong> sanctification, alors elles sont un bienfait, une purification, un moyen<br />

<strong>de</strong> <strong>de</strong>venir humble, détaché <strong>de</strong> soi‐même, plus digne dʹêtre en union <strong>avec</strong> Jésus. Bénissons<br />

donc cette bienheureuse épreuve qui aura <strong>de</strong> si précieux fruits. Cher enfant, je vous aime<br />

tendrement; tous vos frères vous affectionnent aussi beaucoup, chassez <strong>de</strong> votre cœur<br />

toute acrimonie, nʹy laissez place quʹà la bienveillance pour tous, à la compassion pour les<br />

pauvres, au zèle pour le salut <strong>de</strong>s âmes, à lʹar<strong>de</strong>ur pour la gloire <strong>de</strong> Dieu; cʹest pour cela<br />

que votre cœur bon, tendre, aimant a été fait, quʹil remplisse sa fin car Dieu le veut ainsi et<br />

lʹexaminera dʹaprès les dons quʹIl lui a faits.<br />

Adieu, cher enfant, je nʹai pas besoin <strong>de</strong> vous en dire plus, nous serons bientôt ré‐<br />

unis. Je vous serre étroitement dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre Père et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

253 à M. Caille<br />

Projet <strong>de</strong> voyage à Amiens.<br />

Paris, 19 septembre 1853<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je suis <strong>de</strong> retour ici <strong>de</strong>puis plus <strong>de</strong> dix jours. Je serais allé vous voir déjà, si une af‐<br />

faire ne mʹeût arrêté ces temps <strong>de</strong>rniers; maintenant, je suis plus libre et je puis vous ren‐<br />

dre une petite visite. Je me propose <strong>de</strong> partir mercredi ou jeudi dans la matinée, et jʹarrive‐<br />

rai dans lʹaprès‐midi sans doute chez vous; je passerai un jour <strong>avec</strong> vous et reviendrai le<br />

len<strong>de</strong>main, ne pouvant en ce moment faire une plus longue absence et ne voulant pas<br />

dʹailleurs déranger en rien vos occupations ordinaires.<br />

Si quelque raison vous faisait penser que mon départ pourrait être différé, il vous<br />

resterait encore le temps, en mʹécrivant poste pour poste, <strong>de</strong> mʹavertir du jour où vous ai‐<br />

meriez mieux quʹil fût fixé.<br />

Tous nos frères vont bien et vous embrassent cordialement.<br />

Votre tout affectionné Père et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

254 à M. Caille<br />

Remerciements pour l’accueil reçu à Amiens. L’entourage <strong>de</strong> M. Caille et son Œuvre augurent bien <strong>de</strong> l’avenir,<br />

tel que le souhaite MLP.<br />

Paris, 27 septembre 1853<br />

Bien cher ami et fils en N.S., Je vous renvoie sans retard le projet <strong>de</strong> pétition que<br />

vous mʹavez <strong>de</strong>mandé; il a été fait en hâte et a grand besoin dʹêtre amendé; vous lʹarrange‐<br />

rez pour le mieux.<br />

323


Je vous remercie bien <strong>de</strong>s fois, cher ami, ainsi que votre excellente sœur, <strong>de</strong> lʹaffectueux ac‐<br />

cueil que vous mʹavez fait, jʹen suis revenu tout ému et tout reconnaissant, non que je ne<br />

susse bien déjà quel était votre cœur, mais parce que je ne puis mʹempêcher dʹêtre touché<br />

<strong>de</strong>s marques dʹune sincère affection. Jʹai trouvé aussi bien bons, bien aimables vos jeunes<br />

amis, MM. Giraud et Demarsy; jʹai rencontré peu <strong>de</strong> jeunes gens aussi édifiants et dʹabord<br />

si prévenant; je bénis Dieu qui vous les a donnés pour amis et jʹai la conviction quʹen quel‐<br />

que voie quʹils soient appelés, ils y feront le bien et serviront dʹexemple aux autres. Enfin,<br />

vos petits enfants mʹont aussi bien contenté; il y a, dans tout cet entourage que le Seigneur<br />

vous a fait, <strong>de</strong> bonnes espérances et un commencement du bien que nous souhaitons.<br />

Assurez M. Dupetit <strong>de</strong> mes regrets pour lʹinci<strong>de</strong>nt qui mʹa empêché <strong>de</strong> le revoir; à<br />

un autre voyage, je compte bien mʹen dédommager. Je nʹai pu revoir non plus M. Masson<br />

que jʹaurais voulu connaître moins à la hâte, jʹespère quʹil nous viendra voir à Paris.<br />

Jʹapprouve bien le parti que vous avez pris pour votre frère; il est assurément le<br />

plus sage et le meilleur pour lui.<br />

Adieu, bien cher ami, assurez Madame votre sœur <strong>de</strong> mon respect et rappelez‐moi<br />

au souvenir <strong>de</strong> vos amis. Dites quelques mots aussi particuliers à nos petits amis Thuillier<br />

et Crestel; je prie tous les jours pour eux; M. Vasseur les embrasse affectueusement.<br />

Nous ne manquerons pas <strong>de</strong> suivre la neuvaine <strong>avec</strong> vous.<br />

A vous <strong>de</strong> cœur en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Maignen vous embrasse et vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> lui envoyer vos prix dʹhonneur et<br />

tous les autres renseignements intéressants pour lʹAlmanach; il en est assez pressé, on va<br />

imprimer.<br />

255 à M. Caille<br />

MLP. décline l’invitation qui lui est faite <strong>de</strong> se rendre à Amiens.<br />

11 octobre 1853<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie ces <strong>de</strong>ux mots pour vous remercier <strong>de</strong>s instances affectueuses <strong>avec</strong><br />

lesquelles vous nous avez invités à nous rendre à votre belle solennité; nous regardons vo‐<br />

tre maison comme nôtre et réciproquement, vous serez chez vous en notre maison; nous<br />

aurions donc accepté <strong>avec</strong> joie votre offre si nous nʹétions bien occupés et bien retenus en<br />

ce moment. Notre retraite commence aujourdʹhui et ne finira que samedi matin. Nous in‐<br />

voquerons <strong>avec</strong> vous sainte Théodosie. De votre côté, rentrez souvent dans votre cœur<br />

pour vous y trouver aux pieds <strong>de</strong> notre divin Seigneur; <strong>de</strong> cette sorte, nous serons unis<br />

durant ce temps <strong>de</strong> grâce et <strong>de</strong> bénédiction.<br />

Affection <strong>de</strong> tous nos frères et tendre embrassement en J. et M. <strong>de</strong><br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

324


256 à M. Caille<br />

Il y a une sainte intelligence entre les coeurs qui rapproche les âmes dans le dévouement et la charité. M. Vasseur<br />

admis à faire ses promesses. Diverses nouvelles <strong>de</strong> la Communauté.<br />

Paris, 21 novembre 1853<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous trouvions que vous tardiez bien à nous donner <strong>de</strong> vos nouvelles, et nous<br />

nʹétions consolés <strong>de</strong> votre long silence que par la pensée que vous alliez arriver bientôt. Je<br />

vous remercie <strong>de</strong>s assurances que vous nous donnez <strong>de</strong> votre tendre attachement; il ré‐<br />

pond au nôtre que ni lʹéloignement, ni lʹabsence ne sauraient altérer; loin <strong>de</strong> là, la<br />

confiance réciproque sʹaccroît et la volonté <strong>de</strong> <strong>de</strong>meurer unis en Dieu et pour sa gloire<br />

semble désormais assurée. Nous ne saurions méconnaître la grâce <strong>de</strong> Dieu en ces disposi‐<br />

tions, car Lui seul rapproche ainsi les âmes dans le dévouement et la charité; puisse cette<br />

sainte intelligence <strong>de</strong> nos cœurs produire <strong>de</strong> bons fruits pour nos frères et pour nous.<br />

Notre cher Alphonse répond lui‐même à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> que vous me faisiez, sʹil conti‐<br />

nuait à nous donner satisfaction. Vous voyez comme il a fait justice <strong>de</strong> quelques tentations<br />

que lui suggérait parfois le démon, comme cʹest lʹordinaire dans lʹannée <strong>de</strong> noviciat. Il<br />

mʹavait plusieurs fois pressenti sur la possibilité <strong>de</strong> faire ses promesses prochainement;<br />

jʹavais ajourné la chose à notre retraite <strong>de</strong> Pâques prochaine, mais le voyant ces jours <strong>de</strong>r‐<br />

niers un peu inquiet, quoique sans gran<strong>de</strong> raison, <strong>de</strong>s imaginations que le mauvais esprit<br />

lui représentait, jʹai pensé quʹil pourrait sʹen débarrasser en prenant son parti bravement; je<br />

ne doute pas que ce moyen, dont nous avons déjà éprouvé le bon résultat, ne lui réussisse<br />

parfaitement. Il eût aimé que son p. Caille fût présent à cette intéressante action <strong>de</strong> sa vie,<br />

mais il a pensé que son bon ange vous inspirerait <strong>de</strong> prier pour lui.<br />

Quant aux jeunes Thuillier et Crestel, je vous laisse entièrement juge <strong>de</strong> leurs dispo‐<br />

sitions et <strong>de</strong>s directions quʹil convient <strong>de</strong> leur donner; je prie souvent pour eux, comme<br />

pour tout cet aimable et chrétien entourage que le bon Dieu vous a donné; assurez‐les <strong>de</strong><br />

mon affection et <strong>de</strong> mon bon souvenir. Jʹembrasse aussi le pauvre Sausset, nous prions<br />

pour lui <strong>avec</strong> nos enfants. Tous nos frères vont bien et vous atten<strong>de</strong>nt; quand vous tar<strong>de</strong>z<br />

trop à nous venir voir ou à nous écrire, ce sont <strong>de</strong>s réclamations générales. Nous nʹavons<br />

rien <strong>de</strong> nouveau; un bon jeune homme semble <strong>de</strong>voir entrer <strong>avec</strong> nous, il appartient à la<br />

Conférence St‐Sulpice, je lui crois les qualités désirables, seulement il est si petit <strong>de</strong> taille<br />

que le plus petit <strong>de</strong> nos frères est grand auprès <strong>de</strong> lui. Si, comme je lʹespère, son cœur est<br />

large et haut, sa taille <strong>de</strong> nain ne sera pas un obstacle à nos yeux.<br />

Jʹexhorte bien M. Albert à vous donner satisfaction, et jʹespère toujours que le temps<br />

mûrira sa raison.<br />

Adieu, cher bon ami, je vous embrasse tendrement en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

256‐1 à M gr Sibour<br />

Rapport sur la situation <strong>de</strong> l’Orphelinat. MLP. <strong>de</strong>man<strong>de</strong> l’autorisation d’ouvrir une souscription et sollicite<br />

l’agrément <strong>de</strong> l’Archevêque <strong>de</strong> Paris.<br />

[fin 1853]<br />

Monseigneur,<br />

Lʹœuvre <strong>de</strong>s Orphelins <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul, dont la pensée et le but sont expli‐<br />

qués dans la note ci‐jointe, a été bénie <strong>de</strong> Dieu et sʹest développée dans un excellent esprit.<br />

325


Elle compte présentement 80 enfants, 72 à lʹécole et 8 placés, ou <strong>de</strong>vant lʹêtre, en apprentis‐<br />

sage.<br />

On comprend toutefois que, créée <strong>de</strong>puis moins <strong>de</strong> 3 ans, elle appelle encore à bien<br />

<strong>de</strong>s égards <strong>de</strong>s améliorations nécessaires. Au point <strong>de</strong> vue matériel en particulier, elle<br />

éprouvait <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s difficultés pour sʹasseoir définitivement dans le local quʹelle occupe<br />

présentement et dont le loyer <strong>de</strong> 4000f par an nʹétait payé<br />

quʹ<strong>avec</strong> <strong>de</strong>s secours précaires. Dʹailleurs, divers services<br />

essentiels étaient à approprier ou manquaient absolument, tels<br />

que lingerie, infirmerie, classe, salle <strong>de</strong> récréation, et eussent<br />

exigé <strong>de</strong>s dépenses considérables en pure perte pour lʹœuvre<br />

qui eût bâti sur un sol étranger.<br />

Ces considérations ont déterminé les directeurs <strong>de</strong><br />

lʹœuvre à acquérir à Vaugirard, rue <strong>de</strong>s Vignes, 44, un grand<br />

terrain <strong>avec</strong> quelques bâtiments susceptibles dʹêtre appropriés<br />

pour un établissement dʹéducation. Mais cette acquisition,<br />

jointe aux travaux à effectuer ne sʹélèvera pas à moins <strong>de</strong> 80<br />

000f, somme qui excè<strong>de</strong> <strong>de</strong> près <strong>de</strong> moitié les ressources dont<br />

lʹœuvre pourrait disposer.<br />

Elle resterait donc pour bien <strong>de</strong>s années en souffrance, embarrassée dans sa marche<br />

si elle ne <strong>de</strong>vait compter sur lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> la divine Provi<strong>de</strong>nce et sur lʹapport <strong>de</strong>s amis charita‐<br />

bles.<br />

Pour obtenir cette <strong>de</strong>rnière assistance, les directeurs <strong>de</strong> lʹœuvre désireraient ouvrir<br />

une souscription sans aucun chiffre déterminé, à laquelle chacun pourrait prendre part<br />

dans la mesure qui lui paraîtrait possible et convenable.<br />

Ils espèrent que ce moyen, dont le mon<strong>de</strong> charitable ne serait guère chargé, obtien‐<br />

dra lʹagrément <strong>de</strong> M gr lʹArchevêque <strong>de</strong> Paris 189 et quʹil daignera, en lʹautorisant, accor<strong>de</strong>r à<br />

la Maison <strong>de</strong>s Orphelins, placée sous son haut patronage, un nouveau témoignage <strong>de</strong> son<br />

paternel intérêt.<br />

256‐2 à Napoléon III 190<br />

A la recherche <strong>de</strong> bienfaiteurs pour son Orphelinat, MLP. adresse une supplique à l’Empereur. (Elle n’aura<br />

pas le succès escompté, cf. infra, lettre 257‐1, mars 1854).<br />

Sire,<br />

Le suppliant soussigné a lʹhonneur dʹexposer à Votre Majesté que,<br />

vivement touché <strong>de</strong> lʹétat <strong>de</strong> souffrance et dʹabandon où se trouvent les<br />

enfants <strong>de</strong> la classe ouvrière ou indigente lorsquʹils sont privés <strong>de</strong> leur<br />

père ou <strong>de</strong> leur mère, il a ouvert il y a 3 ans, <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> quelques<br />

amis consacrés entièrement, comme lui, aux œuvres <strong>de</strong> charité, une<br />

maison pour lʹéducation <strong>de</strong> jeunes garçons orphelins, rue <strong>de</strong> lʹArbalète<br />

39 bis.<br />

[fin 1853]<br />

189 MLP. a écrit le brouillon <strong>de</strong> cette lettre ainsi que celui <strong>de</strong> la 256-2 (à l'empereur) et la 257-1 (au contrôleur <strong>de</strong> l'enregistrement) et<br />

les fera calligraphier par un copiste.<br />

190 Il faut trouver <strong>de</strong>s fonds pour l'Orphelinat qui, tous comptes faits, coûtera 115.000f. MLP. aura recours non seulement à l'Empereur,<br />

mais aussi au Ministre <strong>de</strong> l'Intérieur et au Préfet <strong>de</strong> Paris, le baron Haussmann.<br />

326


Lʹétu<strong>de</strong> que lʹexposant a pu faire <strong>de</strong>puis plusieurs années <strong>de</strong>s besoins <strong>de</strong>s pauvres,<br />

lʹa convaincu quʹil convient en général <strong>de</strong> laisser leurs enfants suivre sous leurs yeux les<br />

écoles publiques et les placer plus tard <strong>avec</strong> quelque direction dans les ateliers pour y ap‐<br />

prendre un état; mais cette marche, naturelle et sage dans les cas ordinaires, <strong>de</strong>vient im‐<br />

praticable lorsque le lien <strong>de</strong> la famille est brisé par la mort du père ou <strong>de</strong> la mère. Lʹouvrier<br />

<strong>de</strong>venu veuf, délaisse au logis ses enfants, quʹil ne peut surveiller; la femme privée <strong>de</strong> son<br />

mari est obligée elle‐même <strong>de</strong> travailler au <strong>de</strong>hors. Dans lʹun et lʹautre cas, il est nécessaire<br />

que la charité intervienne et recueille les enfants sous peine <strong>de</strong> les voir tomber dans le dé‐<br />

sordre et le vagabondage.<br />

Cependant, Sire, un seul établissement existait jusquʹà ces <strong>de</strong>rniers temps dans le<br />

département <strong>de</strong> la Seine pour les jeunes garçons pauvres; encore nʹétait‐il pas réservé aux<br />

seuls orphelins et se trouvait‐il, conséquemment, encombré.<br />

Cʹest pour satisfaire à un besoin si pressant et malheureusement si commun quʹ a<br />

été formée, sous le patronage <strong>de</strong> Monseigneur lʹArchevêque <strong>de</strong> Paris, la Maison <strong>de</strong>s Or‐<br />

phelins <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul.<br />

Elle a reçu <strong>de</strong>puis trois ans 120 enfants dont 75 sont encore dans lʹétablissement et<br />

les autres, après leur éducation finie, ont été placés en apprentissage. De plus, 500 autres<br />

ont été présentés, <strong>avec</strong> toutes les conditions nécessaires pour être admis, et eussent dû y<br />

trouver place, si lʹétablissement, fondé sur <strong>de</strong>s ressources trop modiques, eût été en me‐<br />

sure <strong>de</strong> les recevoir.<br />

Cette épreuve ne laissant plus <strong>de</strong> doute sur lʹutilité <strong>de</strong> lʹinstitution et le moment pa‐<br />

raissant venu <strong>de</strong> lui assurer une assiette définitive, qui suffira aux besoins actuels et per‐<br />

mettra plus tard quelques développements, le soussigné a cru <strong>de</strong>voir acquérir à Vaugirard<br />

une propriété vaste et bien située, mais où presque tout est à faire pour lʹappropriation et<br />

lʹinstallation.<br />

A cet instant si décisif pour lʹavenir <strong>de</strong> lʹœuvre, ceux qui lʹont fondée ont osé espé‐<br />

rer, Sire, que Votre Majesté daignerait les assister <strong>de</strong> son généreux appui pour subvenir<br />

aux charges dʹune acquisition qui, jointe aux frais dʹappropriation, dépasse 100 000f, et<br />

donner ainsi une consistance assurée à un établissement vraiment nécessaire pour les clas‐<br />

ses ouvrières et indigentes.<br />

Ils sollicitent <strong>de</strong> Votre Munificence Impériale un secours <strong>de</strong> 3000f à titre dʹencoura‐<br />

gement pour les frais dʹinstallation, et la fondation <strong>de</strong> quelques <strong>de</strong>mi‐bourses aux prix <strong>de</strong><br />

3000f qui seraient à la disposition <strong>de</strong> Sa Majesté pour les enfants pauvres quʹElle voudrait<br />

favoriser.<br />

Grâce à cette appui opportun, lʹœuvre définitivement fondée poursuivrait ses déve‐<br />

loppements et témoignerait <strong>avec</strong> tant dʹautres <strong>de</strong>s paternelles sollicitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Votre Majesté<br />

pour les classes pauvres et souffrantes. Grâce à cette marque <strong>de</strong> Votre Munificence Impé‐<br />

riale, nos orphelins seraient garantis contre <strong>de</strong>s privations et incommodités trop dures, et<br />

lʹœuvre suivrait sa marche sans entraves.<br />

257 à M. et M me Taillandier 191<br />

Détails sur l’installation à Vaugirard. Gratitu<strong>de</strong> envers ces insignes bienfaiteurs. Inauguration <strong>de</strong> la chapelle.<br />

Grâces <strong>de</strong> leur séjour à Rome. Nouvelles <strong>de</strong>s oeuvres <strong>de</strong> l’Institut.<br />

191 Parents d'Henri Taillandier, confrère <strong>de</strong> la Conférence St-Sulpice.<br />

327


Vaugirard, 28 mars 1854<br />

Monsieur et bien bon ami,<br />

Madame et bien bonne amie,<br />

Comment se peut‐il que votre chère lettre soit restée si longtemps sans réponse et<br />

quʹun si aimable témoignage <strong>de</strong> votre bon et affectueux souvenir nʹait pas trouvé un retour<br />

plus empressé? Je ne saurais le croire moi‐même si le fait nʹétait là sous mes yeux; car votre<br />

lettre ne mʹa pas quitté un instant, et pas un jour ne sʹest passé sans quʹelle ait éveillé en<br />

moi un souvenir mêlé <strong>de</strong> regret. Mais peut‐être aussi <strong>de</strong> votre côté, bien cher Monsieur et<br />

très chère Madame, vous feriez‐vous difficilement une idée <strong>de</strong>s embarras et travaux quʹen<br />

la ru<strong>de</strong> saison dʹhiver nous ont causé lʹachèvement <strong>de</strong> nos ouvrages, notre déménagement<br />

et notre installation à Vaugirard; les occupations multipliées que me donnait en particulier<br />

notre souscription, enfin les soins quʹa aussi entraînés la cérémonie <strong>de</strong> la bénédiction <strong>de</strong><br />

notre chapelle192 . Aujourdʹhui, nous voilà à peu près sortis, <strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> Dieu, <strong>de</strong> cette<br />

difficile épreuve, mon premier moment <strong>de</strong> liberté est pour vous, comme le premier mou‐<br />

vement <strong>de</strong> mon cœur se porte aussi vers vous. Le Seigneur a disposé les âmes favorable‐<br />

ment pour nous et nous nʹavons trouvé, en général, que bon vouloir et sympathie bienveil‐<br />

lante; mais rien ne nous dédommageait <strong>de</strong> votre absence, nul ami ne remplaçait pour nous<br />

les amis absents, car nul ami ne pouvait avoir leur cœur si pieux, si généreux, si noblement<br />

dévoué. Je suis, pour ma part, si accoutumé à sentir tout près <strong>de</strong> moi votre assistance dans<br />

toutes nos œuvres, jʹai si bien<br />

pris le pli dʹaller à la bonne<br />

Madame Taillandier pour lui<br />

dire toutes mes petites<br />

combinaisons, mes difficultés,<br />

mes réussites que jʹai, durant tout<br />

lʹhiver, senti un grand vi<strong>de</strong>.<br />

Jʹavais besoin <strong>de</strong> cette pensée: ces<br />

bons amis ne sont pas bien loin;<br />

ils prennent un peu <strong>de</strong> repos, ils<br />

affermissent cette existence si<br />

précieuse pour tous ceux qui les<br />

aiment, et surtout ils sont dans la<br />

Ville Sainte, aux pieds <strong>de</strong>s Saints<br />

Apôtres, ils prient, ils méritent,<br />

par leur ferveur et leurs pieuses<br />

instances, les bénédictions que le<br />

Seigneur prépare à nos travaux.<br />

Pourtant, quand est venu le jour,<br />

bien solennel pour nous, <strong>de</strong> la<br />

bénédiction <strong>de</strong> notre chapelle, ce<br />

nʹa pas été sans quelque<br />

serrement <strong>de</strong> cœur que, dans<br />

cette assemblée nombreuse ré‐<br />

192 Elle fut inaugurée en la fête <strong>de</strong> saint Joseph, qui tombait cette année-là le 20 mars. Elle fut dédiée au Sacré-Cœur et <strong>de</strong>viendra en<br />

1880 la chapelle <strong>de</strong>s Saints-Cœurs.<br />

328


unie pour offrir au Seigneur cette pauvre petite <strong>de</strong>meure que nous lui avons consacrée, il<br />

mʹa fallu chercher en vain ceux qui lʹont vraiment édifiée. Mais, je me trompe, notre bien<br />

cher M. Henry était là, vous représentant et dédiant au divin Maître lʹœuvre <strong>de</strong> ses bien‐<br />

aimés parents. Je me suis complu, en effet, dans cette pensée que votre aumône généreuse<br />

avait, à elle seule, bâti notre petite chapelle et parce que ce don si aimablement offert<br />

mʹétait plus doux que le reste, jʹai aimé, par mon désir, à lʹappliquer à cette pieuse <strong>de</strong>stina‐<br />

tion.<br />

Votre bonne lettre est toute pleine <strong>de</strong>s impressions <strong>de</strong> tout ce qui vous entoure et<br />

montre assez que le séjour <strong>de</strong> Rome est pour vous comme un moyen puissant dʹédifica‐<br />

tion, comme une pénétration plus profon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s choses saintes par les monuments, les<br />

images, les lieux; cʹest bien ainsi que les vrais chrétiens comprennent les voyages, ils sont<br />

pour eux quelques pas <strong>de</strong> plus vers Dieu, non une divagation et une occasion <strong>de</strong> dissiper<br />

le cœur et lʹesprit. Il me semble quʹà Rome, dans ses magnifiques églises, dans ses cou‐<br />

vents, dans les traces quʹelle gar<strong>de</strong> précieusement <strong>de</strong> ses apôtres, <strong>de</strong> ses martyrs, on doit<br />

trouver <strong>de</strong>s émotions douces et reposantes qui calment lʹâme et lʹélèvent tout ensemble. Je<br />

suis heureux <strong>de</strong> penser que ces pures joies sont données à vos âmes si bien faites pour les<br />

goûter.<br />

Que pourrais‐je vous dire pour ma part, en retour <strong>de</strong> vos récits si aimables? Les su‐<br />

jets ne me manqueraient pas, car vous donnez intérêt à tout ce qui se fait <strong>de</strong> bien, où la<br />

charité est loin <strong>de</strong> rester inactive, mais lʹespace me manque pour vous parler <strong>avec</strong> quelque<br />

détail <strong>de</strong>s œuvres et <strong>de</strong> leurs travaux. M gr lʹArchevêque, se proposant <strong>de</strong> se rendre à Rome<br />

dans le cours <strong>de</strong> cette année, recueille <strong>de</strong>s éléments pour soumettre au Saint Père un rap‐<br />

port détaillé sur toutes les œuvres <strong>de</strong> son diocèse 193 ; ce sera chose bien intéressante et qui<br />

réjouira sans doute le cœur paternel <strong>de</strong> Sa Sainteté. Déjà <strong>de</strong>s <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s <strong>de</strong> renseignements<br />

nous ont été adressées directement par M gr sur les diverses œuvres confiées à nos soins.<br />

Votre sollicitu<strong>de</strong> bienveillante me <strong>de</strong>man<strong>de</strong> surtout, je le pense où en est la reconstitution<br />

<strong>de</strong> notre maison <strong>de</strong> Nazareth, si les pauvres ont été soulagés efficacement durant cet hiver<br />

si pénible pour eux, enfin si nous sortirons sans encombre <strong>de</strong> notre fondation <strong>de</strong>s orphe‐<br />

lins. La pauvre petite maison <strong>de</strong> Nazareth est toujours dispersée; nos Conférences se sont<br />

prêtées à tout, ont accepté toutes les combinaisons quelque dispendieuses quʹelles eussent<br />

pu être, mais rien nʹa pu se réaliser; du côté <strong>de</strong>s Capucins 194 , nous sommes toujours arrêtés<br />

par M. le Curé <strong>de</strong> lʹAbbaye‐aux‐Bois. Je ne désespère pas cependant <strong>de</strong> le fléchir; je compte<br />

tenter encore un effort près <strong>de</strong> lui, le jour <strong>de</strong> la Compassion <strong>de</strong> la Sainte Vierge, comptant<br />

sur son appui pour conserver cette petite chapelle qui lui est consacrée. Deman<strong>de</strong>z‐lui, je<br />

vous en prie, sa puissante assistance; nos pauvres vieillards souffrent beaucoup <strong>de</strong> leur<br />

isolement. Les Conférences ont secouru activement les pauvres cet hiver; toutes les œuvres<br />

ont montré un zèle redoublé; les fourneaux ont eu aussi un grand mouvement. Si le bon<br />

Maître daigne donner une année meilleure que celle <strong>de</strong> lʹan <strong>de</strong>rnier, on sortira encore <strong>de</strong><br />

cette épreuve que la miséricor<strong>de</strong> du Seigneur a bien adoucie.<br />

193 Cf. infra, lettres 288 et 309. Mgr Sibour avait <strong>de</strong>mandé qu'on le renseignât sur les Œuvres <strong>de</strong> la Congrégation. La correspondance<br />

échangée à cette occasion contribua à resserrer les liens <strong>de</strong> l'Institut <strong>avec</strong> l'autorité diocésaine.<br />

194 Le bail <strong>de</strong> la maison du Regard allait expirer et le propriétaire refusait <strong>de</strong> le renouveler. MLP. désirait acquérir, pour la Maison <strong>de</strong>s<br />

Vieillards (<strong>de</strong> Nazareth) et la Maison-Mère, un vaste terrain situé sur le boulevard Montparnasse, appartenant au curé <strong>de</strong> l'Abbayeaux-Bois.<br />

On y avait commencé à construire une chapelle pour les pères Capucins <strong>de</strong>vant accompagner les convois <strong>de</strong>s pauvres au<br />

cimetière Montparnasse. Mais le gouvernement impérial ayant institué <strong>de</strong>s aumôniers <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rnières prières avait rendu sans objet<br />

l'établissement projeté. Il restait à obtenir du curé Hamelin, la cession, à prix modique, <strong>de</strong> la chapelle et du terrain.<br />

329


Nos orphelins sont<br />

maintenant au nombre <strong>de</strong> 90; les<br />

voilà à peu près complètement<br />

installés à Vaugirard; contraints<br />

dʹemménager beaucoup trop tôt<br />

et avant lʹachèvement <strong>de</strong>s<br />

ouvrages. Il nous a fallu pendant<br />

six semaines vivre au milieu <strong>de</strong>s<br />

ouvriers plus maîtres que nous <strong>de</strong><br />

la maison et ne nous laissant<br />

souvent pas une seule pièce où<br />

nous retirer; les locaux propres à<br />

nos enfants avaient été préparés<br />

avant tout, ils étaient donc les<br />

moins incommodés; nos douleurs<br />

touchent à leur terme, les ouvriers sont presque entièrement renvoyés, aujourdʹhui ils vont<br />

déguerpir; il resterait bien <strong>de</strong>s choses à faire, mais nous nous contentons <strong>de</strong> notre pauvreté<br />

qui convient à notre œuvre et à<br />

nous. Quant aux dépenses, toutes<br />

strictes quʹelles aient été en<br />

économie, elles resteront lour<strong>de</strong>s<br />

pour nous, mais le bon Seigneur,<br />

nous lʹespérons, ne délaissera point<br />

ses serviteurs; <strong>avec</strong> du temps et du<br />

courage, nous arriverons à notre<br />

but.<br />

La bonne M me Lalan<strong>de</strong> est<br />

toujours contente chez nous; elle<br />

est pleine <strong>de</strong> bonne volonté, se<br />

prête à tout et nous est fort utile. Elle vous aime profondément et vous offre ses respects.<br />

Je vais écrire à M gr <strong>de</strong> Ségur aujourdʹhui même pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r, par son intermé‐<br />

diaire, le saint corps dʹun jeune martyr. Je vous serai bien reconnaissant si vous voulez<br />

bien joindre vos efforts aux siens.<br />

Je suis contraint <strong>de</strong> clore cette lettre<br />

et pourtant jʹaurais encore mille choses à<br />

vous dire; les lettres sont bien insuffisantes,<br />

quand on est ainsi longtemps séparé <strong>de</strong><br />

ceux quʹon aime et vénère. Aussi, je compte<br />

les moments qui restent encore jusquʹà<br />

votre retour; mais jʹoublierai ce que cette<br />

absence peut me coûter si elle fortifie vos<br />

chères santés, repose vos esprits et donne<br />

quelques douces consolations à votre piété.<br />

Veuillez bien, très aimés Monsieur et<br />

Madame, me gar<strong>de</strong>r, ainsi quʹà mes bons<br />

330


amis qui vous aiment comme je le fais moi‐même, un bon souvenir <strong>de</strong>vant le Seigneur et<br />

me croire pour la vie, en J. et M.,<br />

Votre respectueux serviteur et dévoué ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Pour ne pas retar<strong>de</strong>r cette lettre trop ajournée, je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> permission, pour<br />

cette fois, <strong>de</strong> la jeter simplement à la poste, sauf à employer, en autre occasion, quelque<br />

moyen moins dispendieux. Lʹenfant recommandé par M. Labbé est au nombre <strong>de</strong> nos or‐<br />

phelins.<br />

257‐1 au Contrôleur <strong>de</strong> l’Enregistrement<br />

(Bureaux d’Enregistrement à Sceaux)<br />

Menacé <strong>de</strong> voir augmentés les droits <strong>de</strong> vente, MLP. fournit à l’Administration les renseignements sur la valeur<br />

réelle et sur l’état <strong>de</strong> la propriété acquise à Vaugirard.<br />

[Mars 1854]<br />

Monsieur le Contrôleur,<br />

Quelques acci<strong>de</strong>nts survenus dans un corps <strong>de</strong> bâtiment nouvellement construit à<br />

notre maison dʹorphelins <strong>de</strong> la rue <strong>de</strong>s Vignes 44 à Vaugirard, mʹempêchent <strong>de</strong> me rendre<br />

personnellement à Sceaux pour reconnaître, dʹaprès votre avertissement du 7 courant, une<br />

insuffisance <strong>de</strong> 20 439,20f qui aurait été préjugée dans le prix <strong>de</strong> la vente qui nous a été<br />

faite <strong>de</strong> cette maison par M. Bellebille, suivant acte du 15 juillet 1853; mais je puis vous<br />

fournir à ce sujet, Monsieur le Contrôleur, <strong>de</strong>s renseignements assez précis pour quʹil ne<br />

reste plus aucun doute sur la valeur réelle <strong>de</strong> cet immeuble et sur le prix auquel il a été ac‐<br />

quis.<br />

Tant quʹil a été occupé par lʹexploitation industrielle assez importante <strong>de</strong> M. Belle‐<br />

bille, il avait pu figurer au cadastre pour une valeur relative <strong>de</strong> 60 ou 70 000f, mais dès<br />

quʹil a été abandonné par ce propriétaire comme peu propre à sa <strong>de</strong>stination à raison <strong>de</strong><br />

lʹéloignement <strong>de</strong>s matières premières, il est resté non pas seulement ce quʹil était primiti‐<br />

vement, cʹest‐à‐dire une ancienne carrière remblayée, impropre à toute culture, mais un sol<br />

excavé dans toute son étendue par 5 bassins <strong>de</strong> 3 ou 4 m <strong>de</strong> profon<strong>de</strong>ur, et qui lui don‐<br />

naient un aspect <strong>de</strong> dévastation aussi sauvage que repoussant. En cet état, lʹimmeuble <strong>de</strong>‐<br />

meure en vente véritablement abandonné, sans quʹune proposition acceptable fut faite au<br />

propriétaire; et quand, plus tard, profitant <strong>de</strong> lʹélévation extrême <strong>de</strong>s propriétés, il répan‐<br />

dit <strong>de</strong>s annonces multiples pour une mis à prix <strong>de</strong> 65 000f, pas un seul acquéreur ne se<br />

présenta pour courir les chances <strong>de</strong> lʹadjudication.<br />

Cʹest dans ces circonstances que nous avons traité amiablement <strong>avec</strong> M. Bellebille;<br />

elles vous feront comprendre, Monsieur le Contrôleur, comment la valeur <strong>de</strong> 50 000f attri‐<br />

bué à lʹimmeuble a pu être, pour lui comme pour nous, déjà bien considérable.<br />

Nous nʹavons pas, en effet, trouvé une place libre pour asseoir une construction<br />

sans dʹimmenses travaux <strong>de</strong> remblai, pas un pouce <strong>de</strong> terre végétale à moins <strong>de</strong> la faire<br />

rapporter; il ne fallait rien moins quʹun établissement aussi pauvre que le nôtre où tout le<br />

mon<strong>de</strong> travaille et met la main à lʹœuvre, pour prendre les charges dʹune telle acquisition.<br />

Tels sont les faits, Monsieur le Contrôleur; je vous prie instamment <strong>de</strong> les faire véri‐<br />

fier par une enquête: 3 <strong>de</strong>s bassins creusés dans le sol subsistent encore presquʹentière‐<br />

331


ment, leur aspect seul suffira pour édifier vos représentants sur la valeur intrinsèque <strong>de</strong> la<br />

propriété.<br />

Permettez‐moi dʹajouter, Monsieur le Contrôleur, que notre maison dʹorphelins éta‐<br />

blie dans cet emplacement a été créée et entretenue par nous <strong>de</strong>puis près <strong>de</strong> 4 ans <strong>avec</strong> nos<br />

ressources privées et quelques ai<strong>de</strong>s <strong>de</strong> nos amis sans aucun secours ni subvention du<br />

gouvernement, quʹelle élève à vrai dire gratuitement, 100 enfants pauvres et leur prépare<br />

une carrière honnête et laborieuse. Il semble bien que les sacrifices énormes que nous<br />

avons dû nous imposer nous donneraient quelque droit aux encouragements <strong>de</strong> lʹAdmi‐<br />

nistration et nous osions bien lʹespérer. Nous nʹavons donc pas vu sans peine, Monsieur le<br />

Contrôleur, que nous assimilant à un établissement industriel ou commercial, on voulut<br />

prêter à notre local une valeur excessive et en surcharger les droits <strong>de</strong> vente.<br />

Loin <strong>de</strong> pouvoir accepter cette augmentation si inattendue, nous espérons <strong>de</strong> la<br />

bienveillance <strong>de</strong> lʹAdministration quʹelle tiendra compte <strong>de</strong> nos efforts et <strong>de</strong>s services que<br />

peut rendre notre établissement dans la fixation <strong>de</strong>s impôts ordinaires qui doivent peser<br />

sur nous.<br />

Dans cette attente, jʹai lʹhonneur dʹêtre, Monsieur le Contrôleur,<br />

Votre très humble serviteur.<br />

258 à M. Caille<br />

Inquiétu<strong>de</strong>s au sujet <strong>de</strong>s patronages <strong>de</strong> Paris que la Société <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul semble disposée à fermer, faute<br />

<strong>de</strong> personnel dirigeant. Les objections <strong>de</strong> MLP. Il cherche <strong>de</strong>s hommes pour sauver ces patronages. Il impose <strong>de</strong>s<br />

sacrifices à sa Communauté. Appel à M. Caille.<br />

Vaugirard, 13 avril 1854<br />

Cher bon ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai fait votre commission pour le paiement du loyer <strong>de</strong> M. Dupetit et je vous ren‐<br />

drai compte <strong>de</strong> cette petite affaire en vous remettant, à prochaine occasion, le billet que<br />

nous avions à retirer; vous pouvez donc être tranquille sous ce rapport.<br />

Je nʹaurais pas été peut‐être si exact à répondre à votre <strong>de</strong>rnière lettre car, <strong>de</strong> part et<br />

dʹautre, nous sommes assez occupés pour que notre correspondance nʹait pas toujours lʹac‐<br />

tivité que le voudrait notre affection réciproque. Mais je veux recomman<strong>de</strong>r à vos prières<br />

et à votre attention charitable le patronage <strong>de</strong> Paris qui me semble en ce moment sérieu‐<br />

sement menacé.<br />

Depuis assez longtemps, <strong>de</strong>s plaintes sʹélevaient dans les Conférences concernant<br />

les maisons <strong>de</strong> patronage. On leur reprochait, sauf quelque exception, <strong>de</strong> produire peu <strong>de</strong><br />

fruits moraux et religieux, <strong>de</strong> coûter fort cher et dʹimposer aux Conférences la charge<br />

dʹune loterie annuelle qui grevait considérablement le budget. Mais le plus grand grief<br />

était que la généralité <strong>de</strong> ces maisons, aujourdʹhui, je crois, au nombre <strong>de</strong> 10, étaient diri‐<br />

gées par <strong>de</strong>s hommes salariés, sans portée dʹintelligence et <strong>de</strong> cœur, pas assez dévoués<br />

pour donner à la Société <strong>de</strong> soli<strong>de</strong>s garanties et la sécurité dont elle a besoin dans une œu‐<br />

vre <strong>de</strong> cette importance. Ces plaintes sont <strong>de</strong>venues plus vives, plus répétées <strong>de</strong>puis quel‐<br />

ques mois et les Frères <strong>de</strong>s Ecoles, ayant dans ces <strong>de</strong>rniers temps essayé sur un ou <strong>de</strong>ux<br />

points <strong>de</strong> Paris une sorte <strong>de</strong> patronage sur leurs anciens élèves, les mécontents en ont pro‐<br />

fité pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r que les Conférences renonçassent au patronage et lʹabandonnassent<br />

aux Frères qui pourraient, disent‐ils, sʹy consacrer <strong>avec</strong> plus <strong>de</strong> suite et <strong>de</strong> persévérance.<br />

332


A cela, il y a <strong>de</strong> soli<strong>de</strong>s réponses à faire: cʹest que ce patronage <strong>de</strong>s Frères, à peine<br />

né, paraît encore fort chancelant, que réduit à <strong>de</strong>ux ou trois heures <strong>de</strong> la matinée, il semble<br />

peu propre à exercer une gran<strong>de</strong> influence sur les enfants, quʹil ne sʹapplique nullement au<br />

placement <strong>de</strong>s enfants et à leur surveillance dans les ateliers, quʹenfin il nʹatteindrait, en<br />

tout cas, quʹun nombre assez restreint dʹenfants et laisserait en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s multitu<strong>de</strong>s<br />

dʹapprentis élevés par dʹautres maîtres que les Frères, ou non soumis à leur action. La<br />

suppression du patronage <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul nous paraîtrait donc un vrai<br />

malheur pour la charité, pour le soutien et la défense <strong>de</strong>s pauvres enfants jetés par milliers<br />

dans les ateliers, sans contre‐poids aux mauvaises influences quʹils y subissent. Nous espé‐<br />

rons donc encore que le bon Maître, qui veille sur ces pauvres enfants, ne permettra pas<br />

quʹils soient abandonnés. Cependant, les menaces sont pressantes et lʹorage semble diffi‐<br />

cile à détourner. Une assemblée générale <strong>de</strong>s Prési<strong>de</strong>nts <strong>de</strong>s Conférences, prenant en<br />

considération les plaintes et griefs élevés contre le patronage, a nommé une Commission<br />

pour les examiner et soumettre ses propositions. Cette commission sʹest prononcée pour la<br />

suppression <strong>de</strong> 8 maisons <strong>de</strong> patronage, et pour le maintien seulement <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux qui sont<br />

confiées à notre petite Communauté. M. Baudon, à qui M. Maignen est allé <strong>de</strong> ma part<br />

faire <strong>de</strong>s représentations à ce sujet, a répondu, comme il lʹavait déjà fait à moi‐même, que<br />

nous seuls eussions pu sauver le patronage ou au moins quelques‐unes <strong>de</strong> ses maisons (ce<br />

qui serait bien essentiel en ce moment pour ne pas perdre la position quʹavait cette œuvre<br />

dans le mon<strong>de</strong> charitable pour sa loterie et ses autres ressources), quʹil eût fallu que notre<br />

petite Communauté pût donner quelques sujets pour diriger ces maisons.<br />

Je suis en mesure <strong>de</strong> rendre M. Myionnet au patronage, peut‐être même dʹy appli‐<br />

quer un autre frère également soli<strong>de</strong> et dévoué; mais cette mesure, si je la prends pour<br />

<strong>de</strong>ux sujets surtout, va bien diminuer notre maison centrale <strong>de</strong>s orphelins; jʹaurais donc<br />

grand besoin <strong>de</strong> quelque renfort envoyé provi<strong>de</strong>ntiellement. Ne verriez‐vous pas, cher<br />

ami, dans cette sorte <strong>de</strong> petit noviciat dʹhommes dévoués que le bon Maître a groupés au‐<br />

tour <strong>de</strong> vous, quelque sujet généreux qui, touché du péril <strong>de</strong> lʹœuvre si intéressante du pa‐<br />

tronage, se sentirait inspiré <strong>de</strong> franchir le pas et <strong>de</strong> venir à nous pour nous prêter ai<strong>de</strong><br />

dans ce moment difficile?<br />

Examinez cela <strong>de</strong>vant Dieu, parlez‐en à vos amis, priez surtout beaucoup <strong>avec</strong> nous<br />

et peut‐être le Seigneur se rendra‐t‐Il à nos vœux.<br />

Adieu, bien cher ami et fils en N.S.; en me répondant, ne manquez pas <strong>de</strong> me don‐<br />

ner <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> vos chères sœur et nièce, vous ne mʹen avez point parlé dans votre<br />

<strong>de</strong>rnière lettre.<br />

Tous nos frères vous assurent <strong>de</strong> leur tendre affection, et moi je vous embrasse pour<br />

tous dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

259 à M. Caille<br />

MLP. <strong>de</strong>man<strong>de</strong> l’intervention <strong>de</strong> M. Caille pour que le Conseil <strong>de</strong> révision du frère Vasseur puisse avoir lieu à<br />

Paris.<br />

Vaugirard, 20 avril 1854<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je ne vous ai pas laissé le temps <strong>de</strong> répondre à ma <strong>de</strong>rnière lettre, et voilà que je suis<br />

obligé <strong>de</strong> vous écrire <strong>de</strong> nouveau pour un autre objet.<br />

333


Les pièces concernant le tirage <strong>de</strong> la conscription pour les sujets appartenant au dé‐<br />

partement <strong>de</strong> la Somme ne sont pas encore arrivées à la Préfecture <strong>de</strong> la Seine; cependant,<br />

cʹest samedi prochain que commence la révision; ce retard nous donne quelque inquiétu<strong>de</strong><br />

pour notre f. Vasseur, car, pour passer à la révision à Paris, il faut quʹil ait lʹautorisation du<br />

Préfet <strong>de</strong> la Somme et que les pièces le concernant aient, à cet effet, été transmises à la Pré‐<br />

fecture <strong>de</strong> la Seine. Je vous prie donc, bien cher ami, <strong>de</strong> voir immédiatement, <strong>avec</strong> votre<br />

bon ami M. Dupetit, comment il se fait que ces pièces nʹont pas encore été envoyées, si el‐<br />

les doivent lʹêtre prochainement et à quel jour précis, enfin si le nom <strong>de</strong> notre f. Vasseur est<br />

<strong>de</strong> la liste <strong>de</strong> ceux qui sont autorisés à passer leur révision à Paris.<br />

Il serait aussi bien utile <strong>de</strong> savoir quel jour la révision doit se faire à Nampont, pays<br />

<strong>de</strong> notre f. Vasseur, car, si on nʹenvoyait pas à temps les pièces à Paris, il faudrait bien,<br />

quoique nous eussions mieux aimé lʹéviter, quʹil allât dans son pays pour cette révision. Il<br />

paraît maintenant certain quʹil ne sera point exempté par son numéro, le chiffre <strong>de</strong> la levée<br />

ayant été porté <strong>de</strong> 60.000 à 140.000 hommes.<br />

Je nʹajoute rien à ces lignes pour ne point retar<strong>de</strong>r le départ <strong>de</strong> ma lettre; notre f.<br />

Vasseur a fait une petite épître pour vous et pour ses amis dʹAmiens, il va vous lʹenvoyer.<br />

Tous nos frères vous assurent <strong>de</strong> leur tendre attachement; je vous embrasse au nom <strong>de</strong><br />

tous les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

260 à M. Caille<br />

Patronage d’Amiens. Rapport envoyé aux Conférences <strong>de</strong> Paris. Patience pour la fondation projetée à Amiens. Le<br />

Seigneur en donnera les moyens quand Il le voudra. Ne pas brusquer les choses avant d’acquérir une propriété.<br />

Exemption <strong>de</strong> la conscription pour les frères Vasseur et Polvêche.<br />

Vaugirard, 7 mai 1854<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous avons reçu votre envoi <strong>de</strong>s rapports sur le patronage dʹAmiens, et les pieuses<br />

images et surtout lʹaffectueuse lettre qui sʹy trouvait jointe; le tout nous a été un aimable<br />

souvenir <strong>de</strong> notre frère absent et a été reçu <strong>avec</strong> joie par chacun. Jʹai envoyé à M. Bourlez<br />

un exemplaire du rapport et plusieurs à M. Baudon, pour quʹil les fasse distribuer aux pré‐<br />

si<strong>de</strong>nts <strong>de</strong>s Conférences. Je ne lʹai pas encore lu moi‐même, mais je veux le lire, car il mʹin‐<br />

téressera certainement, et en lui‐même, et à cause <strong>de</strong> la part que vous et vos bons amis<br />

prenez à cette excellente œuvre.<br />

Jʹespère quʹen voyant le bien quʹelle produit, non seulement à Paris, mais encore<br />

dans les Provinces, ceux <strong>de</strong> nos prési<strong>de</strong>nts qui lui sont adverses reviendront à dʹautres<br />

sentiments. Jusquʹici rien nʹest décidé sur ce sujet; on a dû faire un rapport <strong>de</strong>vant une<br />

Commission supérieure, mais je nʹen sais pas encore le résultat.<br />

Je gar<strong>de</strong> toujours lʹespérance que nous pourrons vous ai<strong>de</strong>r pour votre fondation<br />

dʹAmiens, lorsque le moment sera venu pour vous <strong>de</strong> la réaliser; quand le Seigneur veut<br />

les choses, Il donne les moyens <strong>de</strong> les faire, et je crois quʹIl veut que nous trouvions force et<br />

secours dans notre union.<br />

Je vous engage à bien peser les conditions et avantages <strong>de</strong> lʹacquisition que vous<br />

projetez, car une opération trop onéreuse ou assise sur une propriété mal convenable vous<br />

334


créerait <strong>de</strong>s difficultés. Quant à la part que vous y pourriez prendre, je ne désapprouverais<br />

pas ce que vous proposez, si vous êtes à même <strong>de</strong> le faire sans dérangement pour vos af‐<br />

faires. Je trouverais bien aussi que lʹachat fût en votre nom, mais pourtant jʹaimerais que<br />

les circonstances indiquassent dʹelles‐mêmes que les choses se doivent faire ainsi sans quʹil<br />

y ait rien <strong>de</strong> forcé, car, ne sachant pas bien encore quelles sont à notre égard les vues <strong>de</strong> la<br />

Provi<strong>de</strong>nce en ce qui touche les possessions <strong>de</strong>s œuvres, nous <strong>de</strong>vons marcher pas à pas et<br />

sans rien brusquer.<br />

Le mot ci‐joint <strong>de</strong> notre f. Vasseur vous apprend quʹil a été exempté tout merveil‐<br />

leusement <strong>de</strong> la conscription; notre f. Polvêche a aussi été réformé; cʹest une double grâce<br />

qui nous a causé une gran<strong>de</strong> joie; vous en remercierez <strong>avec</strong> nous, très cher ami, le bon Sei‐<br />

gneur qui sʹest mêlé <strong>de</strong> cette affaire et en particulier aussi la T. S te Vierge qui nous a visi‐<br />

blement protégés.<br />

Nous commençons ce soir notre retraite qui finira samedi matin; puisse un bon vent<br />

vous amener pendant ces jours <strong>de</strong> grâce; en tout état <strong>de</strong> cause, priez pour tous vos frères<br />

et, <strong>de</strong> notre côté, nous nʹaurons gar<strong>de</strong> <strong>de</strong> vous oublier non plus que tous vos bons et dé‐<br />

voués amis.<br />

Nous vous embrassons tous <strong>de</strong> cœur; au nom <strong>de</strong> la famille, je me charge <strong>de</strong> ce soin<br />

dont je mʹacquitte dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

260‐1 au Ministre <strong>de</strong> lʹIntérieur<br />

Deman<strong>de</strong> <strong>de</strong> subvention pour la maison <strong>de</strong> Vaugirard.<br />

Mai [1854]<br />

Monsieur le Ministre,<br />

Le soussigné a lʹhonneur <strong>de</strong> vous exposer que, consacré <strong>de</strong>puis plusieurs années<br />

aux œuvres <strong>de</strong> charité, il a cru faire une chose utile aux classes ouvrières et indigentes en<br />

fondant il y a 3 ans, un établissement <strong>de</strong>stiné à lʹéducation <strong>de</strong>s jeunes garçons que la mort<br />

a privés <strong>de</strong> leur père ou <strong>de</strong> leur mère.<br />

Dans les conditions ordinaires en effet, les écoles publiques reçoivent tous les en‐<br />

fants du peuple et leur donnent, sous la surveillance <strong>de</strong> leurs familles, les soins, et lʹins‐<br />

truction convenables, mais quand par la mort du père ou <strong>de</strong> la mère le lien <strong>de</strong> la famille est<br />

brisé, les nécessités <strong>de</strong> la vie jetant au <strong>de</strong>hors le mari ou la femme survivant, les enfants<br />

laissés sans surveillance tombent inévitablement dans la dissipation.<br />

Nous avons pensé, Monsieur le Ministre, que la charité <strong>de</strong>vait à ces enfants une pro‐<br />

tection spéciale et <strong>de</strong>s moyens dʹéducation propres à leur situation. Cʹest pour cette fin<br />

que, malgré lʹinsuffisance <strong>de</strong>s ressources privées pour une si gran<strong>de</strong> entreprise, nous<br />

avons <strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> quelques amis et sous le haut patronage <strong>de</strong> Mgr lʹEvêque, fondé la<br />

Maison <strong>de</strong>s Orphelins <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul.<br />

Etablie dʹabord au quartier St‐Marcel, rue <strong>de</strong> lʹArbalète 39 bis, elle a été transférée<br />

<strong>de</strong>puis le mois <strong>de</strong> février <strong>de</strong>rnier à Vaugirard, rue <strong>de</strong>s Vignes 44, dans un local que nous<br />

avons acquis et approprié pour cette <strong>de</strong>stination.<br />

335


Les enfants au nombre <strong>de</strong> 100, sont admis <strong>de</strong> 7 à 12 ans. Ils y reçoivent lʹinstruction<br />

élémentaire, y sont préparés <strong>avec</strong> soin particulier à la première Communion et après cet<br />

acte si important <strong>de</strong> la vie, sont placés en apprentissage par les directeurs <strong>de</strong> lʹœuvre, qui<br />

continuent dʹexercer sur eux une constante et active surveillance.<br />

Nous nʹinsistons pas sur lʹutilité <strong>de</strong> pareilles institutions, dont votre Excellence sait<br />

assez les avantages, mais nous remarquerons que, si elles sont bien peu nombreuses à Pa‐<br />

ris surtout, on doit lʹattribuer aux difficultés quʹelles présentent et aux sacrifices considé‐<br />

rables quʹelles exigent. Les enfants quʹon y reçoit sont pris dans les classes les plus pau‐<br />

vres, <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s commencements dʹéducation presque toujours défectueux; ils exigent <strong>de</strong>s<br />

soins et une vigilance incessante, ils sont souvent faibles et maladifs; on doit donc refaire le<br />

physique et le moral tout ensemble. Dʹune autre part, leur activité est extrême, ils usent et<br />

consomment beaucoup. Enfin les modiques rétributions que peuvent fournir les protec‐<br />

teurs ou parents sont tellement insuffisantes que les directeurs <strong>de</strong> lʹœuvre ont dʹordinaire à<br />

subvenir aux <strong>de</strong>ux tiers <strong>de</strong>s dépenses.<br />

Cependant, Monsieur le Ministre, nous sommes parvenus, <strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> Dieu, à<br />

surmonter ces difficultés; nos cent orphelins marchent et se développent sous nos yeux en<br />

bon esprit dʹaffection, <strong>de</strong> docilité et <strong>de</strong> reconnaissance; leurs mœurs sont pures, leurs dis‐<br />

positions parfaites; ceux qui nous ont quittés déjà pour entrer en apprentissage persévè‐<br />

rent dans leurs bons sentiments, tout nous laisse donc espérer que lʹœuvre est posée dans<br />

<strong>de</strong> bonnes conditions et atteindra son but, savoir <strong>de</strong> remplacer pour les orphelins lʹéduca‐<br />

tion <strong>de</strong> la famille et leur ouvrir une carrière honnête et laborieuse.<br />

Mais, Monsieur le Ministre, la tâche si ru<strong>de</strong> dʹune pareille fondation a épuisé toutes<br />

nos ressources et bien que tous les agents <strong>de</strong> lʹœuvre, maîtres, surveillants, y donnent leurs<br />

soins gratuitement, bien que leurs dépenses soient réglées <strong>avec</strong> une stricte économie, nous<br />

passerions difficilement lʹannée présente sans quelque appui efficace pour alléger nos<br />

charges.<br />

Nous avons osé espérer, Monsieur le Ministre, que votre Excellence, tenant compte<br />

<strong>de</strong> lʹutilité <strong>de</strong> notre œuvre, <strong>de</strong>s sacrifices que nous nous sommes imposés dans lʹintérêt <strong>de</strong>s<br />

enfants <strong>de</strong>s pauvres, daignerait nous accor<strong>de</strong>r son généreux appui et nous attendons un<br />

secours sur les fonds <strong>de</strong> son département.<br />

Ce témoignage dʹintérêt serait pour nous un grand encouragement et nous mettrait<br />

à même <strong>de</strong> compléter lʹœuvre que nous avons entreprise.<br />

Dépenses Recettes<br />

Logement et Mobilier 5 000 Pensions 16 500<br />

Nourriture 16 800 Revenus propres 9 000<br />

Vêtements, lingerie 7 200 Dons annuels 2 500<br />

Service médical, classes 4 800 28 000<br />

Chauffage, Eclairage 1 200 Il reste donc à produire<br />

Dépenses diverses 5 000 chaque année: 12 000<br />

40 000 40 000<br />

336


261 à M. Pavie<br />

MLP. communie à la joie <strong>de</strong> la famille Pavie à l’occasion <strong>de</strong> la première communion du petit Eusèbe. De même à<br />

Paris, joie <strong>de</strong> la même cérémonie pour 30 enfants: la visite du Seigneur est la joie suprême. MLP. a rencontré<br />

Sainte‐Beuve. Il espère que Pavie viendra, un jour prochain, dans la capitale.<br />

6 juin 1854<br />

Je vous remercie, mon bien cher Victor, au nom <strong>de</strong> votre ami Clément et au mien,<br />

<strong>de</strong> la bonne pensée que vous avez eue <strong>de</strong> nous associer à la gran<strong>de</strong> joie que le Seigneur<br />

vous a donné dans la personne <strong>de</strong> votre cher fils Eusèbe.<br />

Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> vous dire que nous avons bien prié pour lui, un appel <strong>de</strong> votre<br />

part ne saurait rester sans réponse <strong>de</strong> la nôtre, et dʹailleurs, mieux que dʹautres, nous<br />

sommes disposés à participer à ces fêtes <strong>de</strong> famille, car nous sommes favorisés aussi <strong>de</strong><br />

notre côté <strong>de</strong> grâces pareilles dans les coeurs <strong>de</strong> tous ces petits enfants que le Seigneur<br />

daigne placer autour <strong>de</strong> nous. Jeudi <strong>de</strong>rnier, trois jours seulement avant la Pentecôte, la<br />

première communion était donnée à 30 enfants que nous regardons comme nôtres dans la<br />

charité <strong>de</strong> notre divin Maître, J.C. Tout émus encore <strong>de</strong>s impressions quʹa laissées en nous<br />

cette touchante solennité, nous avons aisément mis notre cœur à lʹunisson du vôtre et<br />

compris ce que votre chère femme et vous avez dû ressentir en voyant votre bien‐aimé en‐<br />

fant visité par le divin Maître. Que sont toutes les joies en comparaison <strong>de</strong> celle‐là, et quel‐<br />

les pensées ne sʹeffacent pas dans les saintes espérances dont lʹâme se remplit! Si vous ve‐<br />

nez à Paris, cher ami, durant cette saison, comme M. Sainte‐Beuve que jʹai rencontré <strong>de</strong>r‐<br />

nièrement me lʹa fait espérer, ce serait à Vaugirard que vous <strong>de</strong>vrez nous chercher. Cʹest là<br />

que la Provi<strong>de</strong>nce a placé en <strong>de</strong>rnier lieu le siège <strong>de</strong> notre petite Communauté qui abrite<br />

<strong>avec</strong> elle cent petits enfants orphelins. Nous <strong>de</strong>meurons Chemin du Moulin, n° 1, presque<br />

dans les champs et pourtant à 30 minutes <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> la rue du Regard. Priez bien<br />

pour nous, cher ami, car notre tâche est bien lour<strong>de</strong>. Nous prierons <strong>de</strong> notre côté pour<br />

vous et pour votre cher entourage; nous sommes pères <strong>de</strong> famille, <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts nous<br />

nous <strong>de</strong>vons ai<strong>de</strong> réciproque; je suis sûr que vous acceptez cette association.<br />

Adieu, bien cher ami, croyez à notre fidèle affection comme à notre cordial dé‐<br />

vouement en N.S.<br />

Votre ami et frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

262 à M. et M me Taillandier<br />

MLP. est bien occupé par les Oeuvres. Son émotion lors d’une première communion. L’achat <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong><br />

Nazareth est sur le point <strong>de</strong> se conclure. Attente <strong>de</strong>s reliques d’un jeune martyr. Leur fils, M. l’abbé Taillandier,<br />

<strong>de</strong>vrait se ménager.<br />

Vaugirard, 21 juin 1854<br />

Cher Monsieur et bien bon ami,<br />

Chère Madame et amie,<br />

Où êtes‐vous maintenant, où cette lettre vous suivra‐t‐elle? Je ne sais, jʹai perdu<br />

maintenant la trace <strong>de</strong> vos pas et, sans lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> notre bon abbé 195 , je ne saurais où vous re‐<br />

trouver. Je crains que, malgré toute votre charité et votre si gran<strong>de</strong> indulgence, vous ne<br />

195 Leur fils, l'abbé Henri.<br />

337


voyiez difficilement une excuse à mon long silence; jʹen ai pourtant une bien réelle, cʹest<br />

lʹimpuissance absolue où je me sentais <strong>de</strong> vous écrire; jʹy pensais constamment, je le dési‐<br />

rais, je mʹen faisais un repos et une consolation, mais les inci<strong>de</strong>nts <strong>de</strong> chaque jour sont si<br />

multipliés, les moments si hachés menu, quʹun peu dʹespace pour respirer et mʹépancher<br />

<strong>avec</strong> vous ne se pouvait trouver; cette insuffisance poussée à pareil point est, je vous as‐<br />

sure, une gran<strong>de</strong> souffrance quʹon a besoin dʹunir à la croix du Sauveur; elle humilie, elle<br />

contriste, elle laisse en inquiétu<strong>de</strong> sur soi‐même et peut faire douter aussi les autres <strong>de</strong> no‐<br />

tre bon vouloir; telle était ma situation durant toute cette saison et telle est‐elle encore le<br />

plus souvent; ma faiblesse est tout à fait au‐<strong>de</strong>ssous <strong>de</strong> ma tâche et je plie misérablement<br />

sous le far<strong>de</strong>au. Jʹose donc vous prier, bons et généreux amis, <strong>de</strong> me traiter <strong>avec</strong> con<strong>de</strong>s‐<br />

cendance et charité, <strong>de</strong> compatir à mon impuissance, et surtout <strong>de</strong> ne pas douter <strong>de</strong> mes<br />

sentiments <strong>de</strong> profon<strong>de</strong> affection, <strong>de</strong> tendre reconnaissance, dʹintime et constante union<br />

<strong>avec</strong> vous en Dieu. Je nʹai point au moins à me reprocher <strong>de</strong> vous avoir oubliés <strong>de</strong>vant Lui;<br />

chaque jour, et dans les occasions importantes surtout, je vous mêle lʹun et lʹautre à nos<br />

prières et à tout le mouvement <strong>de</strong> notre vie.<br />

Dernièrement, nous avions la première communion <strong>de</strong> nos enfants; 50 dʹentre eux<br />

venaient pour la première fois à la table sainte ou renouvelaient leur communion; remplis<br />

<strong>de</strong> ferveur, préparés par une retraite entraînante, ils étaient comme <strong>de</strong>s anges; pas un ne<br />

nous laissait dʹinquiétu<strong>de</strong> et ne semblait en disposition douteuse; cʹétait un spectacle tou‐<br />

chant, plein <strong>de</strong> douceur et <strong>de</strong> consolation; mais notre joie surabondante eût aimé à se ré‐<br />

pandre dans <strong>de</strong>s cœurs amis; aussi, combien <strong>de</strong> fois vaguement et sans bien mʹen rendre<br />

compte, ai‐je cherché autour <strong>de</strong> moi les bons, les fidèles amis qui étaient absents. Daigne le<br />

Seigneur les ramener bientôt; puisquʹIl nous a si cordialement unis, Il ne veut pas, sans<br />

doute, que nous ne soyons trop longtemps séparés.<br />

Nos affaires aussi semblent ne pouvoir marcher sans vos conseils et vos sympathies<br />

bienveillantes; lʹacquisition du Montparnasse 196 , toujours au moment <strong>de</strong> se conclure,<br />

éprouve <strong>de</strong>s lenteurs sans fin; priez bien, je vous en conjure, bien cher Monsieur et très<br />

chère Madame, pour que tout cela se règle selon la très sainte volonté <strong>de</strong> Dieu; je crois<br />

quʹIl nʹarrête ces arrangements quʹafin <strong>de</strong> nous donner plus <strong>de</strong> temps pour consacrer lʹœu‐<br />

vre par la prière, la patience et la soumission; les choses semblent toutefois sur le point <strong>de</strong><br />

se terminer. Nous pourrons, je lʹespère, faire quelque bien <strong>de</strong> ce côté, mais notre tâche sʹac‐<br />

croîtra dʹautant; lʹai<strong>de</strong> du Seigneur grandira dans la proportion <strong>de</strong>s besoins, cʹest là notre<br />

assurance et notre consolation.<br />

La lenteur que jʹai mise à profiter <strong>de</strong>s ouvertures que vous nous aviez si obligeam‐<br />

ment ménagées pour obtenir les reliques dʹun jeune martyr <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s indulgences doit vous<br />

sembler inexplicable; elle tient, comme les retards <strong>de</strong> ma correspondance, à lʹimpossibilité<br />

où je me suis trouvé <strong>de</strong> satisfaire à toutes les obligations <strong>de</strong> ma position; elle servira aussi à<br />

vous faire excuser mon apparente négligence, puisque vous savez combien jʹattacherais <strong>de</strong><br />

prix à un pareil trésor, ainsi quʹaux indulgences dont nous serions gratifiés. Jʹespère néan‐<br />

moins que ce qui a été différé ne sera pas perdu; jʹai fait <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à lʹArchevêché une<br />

formule pour la supplique au Saint Père; je ferai ma requête à temps, si je le puis, pour que<br />

M gr <strong>de</strong> Ségur, quʹon attend assez prochainement, puisse nous rapporter notre cher saint,<br />

sʹil nous était accordé.<br />

196 Cf. lettre 257. Le contrat définitif sera signé le 26 septembre.<br />

338


Je nʹai vu notre bien bon abbé quʹen passant, <strong>de</strong>puis quelque temps; il nʹa pas ré‐<br />

pondu au désir que nous lui avons témoigné en plusieurs occasions <strong>de</strong> le voir quelques<br />

instants parmi nous, son ministère est très impérieux; il me semble être un peu fatigué,<br />

mais il nʹécoute pas aisément, vous le savez, les conseil qui ten<strong>de</strong>nt à lui procurer un peu<br />

<strong>de</strong> repos et <strong>de</strong> ménagement <strong>de</strong> lui‐même; vous serez plus persuasifs, je lʹespère; il ne pas‐<br />

serait pas impunément lʹété sans un peu <strong>de</strong> relâche, et, dans lʹintérêt même du bien que le<br />

Seigneur fait par lui, il semble tout à fait sage quʹil ait quelque délassement. Notre‐<br />

Seigneur disait: Ma nourriture est <strong>de</strong> faire la volonté <strong>de</strong> mon Père 197 . Notre bon abbé dit<br />

aussi: ʺMon repos, cʹest <strong>de</strong> sauver <strong>de</strong>s âmes.ʺ Je crois que Dieu bénit beaucoup son minis‐<br />

tère; jʹentends dire à tous quʹil est chéri et justement apprécié. Sʹil est vrai, comme il le dit<br />

dans son humilité, que jʹaie concouru quelque peu que ce soit à lʹéclairer sur sa vocation,<br />

jʹen fais pour moi une espérance <strong>de</strong> salut; le Souverain Juge, à cause <strong>de</strong> cet excellent servi‐<br />

teur, sera moins sévère dans ses sentences et me fera miséricor<strong>de</strong>. Jʹespère aussi, cher<br />

Monsieur, chère Madame, quʹil sera la bénédiction <strong>de</strong> toute votre maison, que, par ses<br />

prières et ses mérites, vos vœux si chrétiens seront remplis et quʹun jour, entourés <strong>de</strong> vos<br />

chers enfants, vous ne trouverez en tous quʹun cœur et quʹune âme, quʹun cœur plein<br />

comme le vôtre dʹune tendre charité, quʹune âme aspirant aux vrais biens, aux saintes joies<br />

<strong>de</strong> lʹéternité.<br />

Je mʹunis tendrement à vous dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M. et suis pour tou‐<br />

jours<br />

Votre humble serviteur et dévoué ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

262‐1 au Préfet du Département <strong>de</strong> la Seine<br />

Rapport supplémentaire au Préfet <strong>de</strong> la Seine sur l’Orphelinat <strong>de</strong> Vaugirard.<br />

[Juin 1854]<br />

Monsieur le Préfet,<br />

Vous mʹavez fait lʹhonneur <strong>de</strong> mʹinformer que la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> subvention adressée<br />

par nous à Monsieur le Ministre <strong>de</strong> lʹIntérieur en faveur <strong>de</strong> notre Maison dʹOrphelins vous<br />

a été communiquée et vous mʹavez invité à vous transmettre un compte moral et financier<br />

<strong>de</strong> lʹŒuvre pendant lʹannée 1853, afin que vous puissiez exposer votre avis au sujet <strong>de</strong><br />

cette supplique.<br />

La <strong>de</strong>man<strong>de</strong> elle‐même, Monsieur le Préfet, contient presque tous les détails que je<br />

puis fournir sur lʹétat moral <strong>de</strong> lʹInstitution, tant pour lʹannée <strong>de</strong>rnière que sur le présent<br />

exercice. Notre but étant <strong>de</strong> rendre à nos enfants orphelins lʹéducation <strong>de</strong> la famille, nous<br />

avons dû en limiter le nombre et nʹen recevoir à la fois que 100. Tous nos rapports <strong>avec</strong><br />

eux sont réglés <strong>de</strong> manière à leur faire sentir en tout le dévouement et un tendre intérêt;<br />

nous prenons nos repas <strong>avec</strong> eux, nous partageons leurs exercices et ne cessons à aucun<br />

instant du jour et <strong>de</strong> la nuit <strong>de</strong> veiller sur eux <strong>avec</strong> sollicitu<strong>de</strong>.<br />

Lʹesprit <strong>de</strong> ces enfants est en général excellent, plein <strong>de</strong> confiance, <strong>de</strong> docilité et <strong>de</strong><br />

reconnaissance. La pureté <strong>de</strong> leurs mœurs est aussi une <strong>de</strong> nos joies et le trésor que nous<br />

sommes le plus jaloux <strong>de</strong> conserver.<br />

197 Cf. Jn 4, 34.<br />

339


Lʹenseignement <strong>de</strong>s<br />

enfants comporte à peu près<br />

le même fonds et les mêmes<br />

moyens que celui <strong>de</strong>s écoles<br />

publiques; ses résultats ont<br />

été satisfaisants durant ces<br />

<strong>de</strong>rnières années et pa‐<br />

raissent <strong>de</strong>voir lʹêtre plus<br />

encore à lʹavenir.<br />

Lorsque le moment<br />

est venu pour nos enfants<br />

dʹentrer en apprentissage,<br />

nous les plaçons nous‐mê‐<br />

mes <strong>avec</strong> tout le soin possible et nous les surveillons chez leurs maîtres. Quelques‐uns, en‐<br />

trés orphelins et plus dépourvus dʹappuis, pourront <strong>de</strong>meurer à lʹintérieur et y faire leur<br />

apprentissage; nous avons déjà un petit atelier <strong>de</strong> cordonnerie, un autre va être commencé<br />

pour lʹétat <strong>de</strong> tailleur.<br />

Le personnel <strong>de</strong> la direction se compose dʹun directeur, dʹun sous‐directeur, dʹun<br />

aumônier, 2 professeurs, 3 surveillants, 2 maîtres dʹatelier. Tous donnent leurs soins aux<br />

enfants à titre charitable et sans aucune rétribution.<br />

Quant à lʹétat financier <strong>de</strong> lʹŒuvre, nous en avons donné un aperçu qui se trouve<br />

annexé à notre <strong>de</strong>man<strong>de</strong>. Il nʹa guère varié cette année quʹen proportion du nombre <strong>de</strong> nos<br />

enfants qui était <strong>de</strong> 80 lʹan <strong>de</strong>rnier et qui est présentement <strong>de</strong> 100. Il a donné les résultats<br />

ci‐après:<br />

Exercice 1853<br />

Logement et mobilier 4 500<br />

Nourriture <strong>de</strong>s enfants 14f par mois et par enfant 13 440<br />

Serv.médical, dom.,.classe 4f ʺ ʺ 3 840<br />

Chauffage, éclairage 1f ʺ ʺ 960<br />

Vêtements, lingerie 6,50f ʺ ʺ 6 240<br />

28 980<br />

Divers 3 000<br />

31 980<br />

Il ressort <strong>de</strong> cet exposé, Monsieur le Préfet, que notre Institution nous a imposé lʹan<br />

<strong>de</strong>rnier <strong>de</strong>s charges assez considérables, sans compter celles bien lour<strong>de</strong>s encore que nous<br />

avons dû faire pour lʹachat du matériel <strong>de</strong> lʹétablissement; mais il est facile <strong>de</strong> concevoir<br />

que <strong>de</strong> pareilles dépenses, qui nous laissent un arriéré assez notable, ne pourraient être<br />

constamment laissées à notre charge sans compromettre essentiellement la stabilité <strong>de</strong> no‐<br />

tre Oeuvre, nous avons donc espéré que lʹAdministration apprenant lʹutilité <strong>de</strong> cette Insti‐<br />

tution voudrait bien nous accor<strong>de</strong>r son appui pour la soutenir et en compléter la fonda‐<br />

tion.<br />

340


A cette fin, nous sollicitons, Monsieur le Préfet, votre avis favorable près <strong>de</strong> Mon‐<br />

sieur le Ministre <strong>de</strong> lʹIntérieur, nos osons lʹattendre <strong>de</strong> cette bienveillance éclairée qui favo‐<br />

rise toutes les institutions dʹun intérêt réel.<br />

263 à M. Caille<br />

Par l’intermédiaire <strong>de</strong> M. Caille, inviter M gr Gerbet à prési<strong>de</strong>r l’assemblée générale <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> St Vincent‐<br />

<strong>de</strong>‐Paul. MLP. souhaite rencontrer M. Caille à Paris.<br />

Vaugirard, 4 juillet 1854<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Baudon, notre Prési<strong>de</strong>nt Général, vous prie <strong>de</strong> voir au plus tôt Mgr Gerbet, Evê‐<br />

que <strong>de</strong> Perpignan, pour lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r sʹil doit être à Paris le 19 juillet, fête <strong>de</strong> saint Vincent<br />

<strong>de</strong> Paul, et sʹil voudrait bien prési<strong>de</strong>r lʹassemblée générale <strong>de</strong> toutes les Conférences le soir<br />

<strong>de</strong> ce jour. M. Baudon attache beaucoup <strong>de</strong> prix à cette faveur et serait assuré <strong>de</strong> causer<br />

ainsi une vive satisfaction à toutes nos Conférences.<br />

Veuillez, si vous le jugez possible, profiter <strong>de</strong> cette occasion pour offrir mon respect<br />

profond à Mgr <strong>de</strong> Perpignan et lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r sa bénédiction pour moi et pour tous ceux qui<br />

nous entourent, grands et petits. Jʹespère bien que, sʹil vient à Paris, je le recevrai person‐<br />

nellement.<br />

Nous vous attendons tous les jours, arrivez dès que vous le pourrez; il y a trop<br />

longtemps que nous ne vous avons vu; je vous gâte en vous laissant tant <strong>de</strong> liberté, mais<br />

les enfants bien‐aimés sont presque toujours un peu gâtés.<br />

Adieu, bien cher ami, je vous attends tout prochainement et suis comme toujours,<br />

dans les Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.,<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Nous faisons une neuvaine pour nous préparer à la fête du Sacré Cœur qui est<br />

dimanche prochain. Unissez‐vous à nous.<br />

341


264 <strong>de</strong> M. Vasseur à M. Caille<br />

P.S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Déception que M. Caille ne soit pas venu à Paris pour la Saint‐Vincent <strong>de</strong> Paul. Annonce <strong>de</strong> l’acquisition <strong>de</strong> la<br />

chapelle et du terrain <strong>de</strong> Montparnasse.<br />

Vaugirard, le 29 juillet [18]54<br />

Très cher frère et Père en N.S.,<br />

Vous savez que <strong>de</strong> ma nature jʹai toujours été un peu impatient, et voilà que je croyais que<br />

vous me donneriez <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> mon petit frère, mais je ne vous vois pas arriver. Je ne sais sʹil<br />

est à Amiens ou non, cela mʹinquiète un peu. Dʹun autre côté, vous nous aviez promis <strong>de</strong> venir<br />

pour la fête <strong>de</strong> saint Vincent <strong>de</strong> Paul. Toute notre petite famille vous attendait, on avait préparé vo‐<br />

tre chambre, et elle nʹa pas encore servi. Cela tourmente un peu tous nos frères, je pense même<br />

quʹil y en a plusieurs qui croient que vous nous oubliez. Et puis notre Père M. Le <strong>Prevost</strong>, ne dit<br />

rien, mais il nʹen pense pas moins, car il me semble quʹil a bien aussi quelques doutes à ce sujet.<br />

Enfin, je vous dirai en confi<strong>de</strong>nce que je crois nécessaire <strong>de</strong> mettre fin à tout ceci en apparaissant<br />

lundi au plus tard parmi nous.<br />

Le temps me presse, cʹest le moment <strong>de</strong> la récréation du soir. Je vous embrasse du plus pro‐<br />

fond <strong>de</strong> mon cœur.<br />

Votre enfant tout dévoué<br />

Alphonse Vasseur<br />

Je laisse votre fils Alphonse vous mettre dans sa lettre tout ce qui lui plaît, bien sûr<br />

que vous en prendrez seulement ce qui vous paraîtra raisonnable. Nous vous attendions, il<br />

est vrai, et nous trouvons tous que votre arrivée tar<strong>de</strong> bien plus cette fois que <strong>de</strong> coutume,<br />

mais je suis persuadé, cher ami et fils en N.S., que vous faites tout pour le mieux et que<br />

vous ne manqueriez pas <strong>de</strong> nous accor<strong>de</strong>r quelques instants si vos affaires nʹy mettaient<br />

obstacle; nous attendrons donc que vous régliez cette disposition dans votre pru<strong>de</strong>nce ac‐<br />

coutumée. Si, contre mon attente, vous <strong>de</strong>viez encore différer votre voyage, je vous serais<br />

obligé <strong>de</strong> nous écrire un mot concernant le jeune frère <strong>de</strong> M. Vasseur, afin <strong>de</strong> nous tenir in‐<br />

formés <strong>de</strong> sa situation et <strong>de</strong> ses dispositions.<br />

Vous ne mʹavez point parlé <strong>de</strong> votre projet dʹacquisition <strong>de</strong>puis quelque temps, où<br />

en êtes‐vous sur ce point?<br />

La Provi<strong>de</strong>nce, <strong>de</strong> notre côté, nous a conduits à prendre une charge nouvelle; bien<br />

quʹun peu obérés encore par notre Maison <strong>de</strong> Vaugirard, nous avons cru <strong>de</strong>voir acquérir<br />

ces jours <strong>de</strong>rniers la petite chapelle et le terrain du Montparnasse pour y établir plus sta‐<br />

blement toutes nos œuvres <strong>de</strong> la rue du Regard. Nos amis <strong>de</strong>s Conférences et dʹautres per‐<br />

sonnes nous ai<strong>de</strong>ront par <strong>de</strong>s avances <strong>de</strong> fonds, cela va sans dire, autrement nous nʹau‐<br />

rions pu nous hasar<strong>de</strong>r ainsi sans témérité; mais nous avons dû prendre lʹacquisition sous<br />

notre nom, parce que M. Baudon désirait que la Société <strong>de</strong> Saint‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul nʹen prît<br />

pas la responsabilité; priez bien, afin que le Seigneur nous ai<strong>de</strong> à Le glorifier par là et en<br />

toutes choses.<br />

Votre arrivée rendra tous nos frères bien heureux, les ff. Vasseur et Thuillier sur‐<br />

tout, et moi encore plus; il y a bien longtemps, en effet, cher ami, que nous ne vous avons<br />

vu.<br />

Votre Père et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

342


M. Casimir mʹa écrit, il y a peu <strong>de</strong> temps, pour me prier <strong>de</strong> le placer ici; dites‐lui que<br />

Paris nʹoffre, en cette saison, aucune ressource. Sʹil est dans le besoin, avancez‐lui 5 ou 10f<br />

que je vous remettrai à votre voyage ici. Il me disait que le jeune Crestel allait nous arriver<br />

prochainement; en avez‐vous appris quelque chose ou bien ce pauvre Casimir sʹest‐il mis<br />

cela dans lʹesprit?<br />

265 à M. Caille<br />

M. Maignen ne pourra se rendre à Amiens pour un pèlerinage. Distribution <strong>de</strong>s prix rue du Regard et à Gre‐<br />

nelle. L’union <strong>de</strong>s coeurs prépare l’union <strong>de</strong> fait.<br />

Samedi 19 août 1854<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹavais <strong>de</strong> tout cœur engagé notre f. Maignen à vous aller voir pour faire <strong>de</strong>main le<br />

petit pèlerinage dʹAlbert <strong>avec</strong> vous et vos bons amis, mais il mʹa rappelé ce que jʹavais<br />

perdu <strong>de</strong> vue, que la gran<strong>de</strong> distribution annuelle <strong>de</strong> son patronage <strong>de</strong> la rue du Regard<br />

avait lieu précisément le même jour; toutes les invitations étaient faites et toutes les mesu‐<br />

res arrêtées <strong>de</strong>puis longtemps, il y avait impossibilité absolue <strong>de</strong> changer cette disposition.<br />

Le dimanche suivant, ce sera la distribution <strong>de</strong> Grenelle; jeudi <strong>de</strong>rnier avait lieu<br />

celle <strong>de</strong> notre maison <strong>de</strong> Vaugirard. Cʹest la saison <strong>de</strong> ces solennités, on nʹéchappe à lʹune<br />

que pour retomber en une autre.<br />

Je regrette bien, très cher ami, que ces circonstances aient mis obstacle au bon désir<br />

que vous aviez <strong>de</strong> nous unir et nous rapprocher <strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong> nos bons amis<br />

dʹAmiens; lʹunion <strong>de</strong> cœur est déjà entière <strong>de</strong> notre côté, et je crois que, du leur, ils sont<br />

aussi en disposition très bienveillante pour nous; lʹunion <strong>de</strong> fait ne sera donc pas difficile à<br />

consommer, quand lʹheure marquée par le Seigneur sera venue.<br />

Assurez ces bons amis <strong>de</strong> notre cordiale affection et croyez bien toujours vous‐<br />

même, cher ami et fils, à tous mes sentiments <strong>de</strong> tendre attachement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Nos frères vous embrassent tous; M. Vasseur embrasse aussi son frère et tous ses<br />

amis. M. Thuillier le fait également pour les siens.<br />

266 à M. Paillé<br />

Qualités que MLP. attend chez les candidats à la vie religieuse. Dévouement sans réserve et renoncement total:<br />

ʺceux‐là sont <strong>de</strong>s nôtres: les coeurs généreux, les hommes <strong>de</strong> l’absolu, du vrai et du pur amour...impression péni‐<br />

ble que me fait une <strong>de</strong>mi‐volonté, un <strong>de</strong>mi‐dévouement.ʺ.<br />

Vaugirard, 27 août 1854<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Tous nos frères se sont montrés bien sensibles à votre bon souvenir et particulière‐<br />

ment les Louis <strong>de</strong> la Communauté; vous nʹavez pas non plus été oublié; nos amis ont pen‐<br />

sé à vous et ont <strong>de</strong> tout leur cœur prié le grand saint Louis pour vous; il nous aura enten‐<br />

dus, sans doute, et il obtiendra pour ceux qui lui appartiennent et pour nous tous aussi<br />

quelque part <strong>de</strong> cette magnanimité, <strong>de</strong> ce courage, <strong>de</strong> cette fermeté généreuse dont tous les<br />

serviteurs <strong>de</strong> Dieu doivent être animés, au moins à un certain <strong>de</strong>gré, pour marcher à sa<br />

343


suite. Le bon Maître donne cette gran<strong>de</strong> grâce à ceux qui lʹimplorent, y fussent‐ils peu dis‐<br />

posés naturellement; le jeune homme riche dont parle lʹEvangile trouva dʹabord bien ru<strong>de</strong><br />

le conseil du renoncement et se retira tout contristé; mais la tradition assure quʹil revint<br />

ensuite et se fit généreusement le disciple du Sauveur; elle ne dit pas quʹil avait prié et que<br />

la grâce le fortifia; cʹest quʹelle ne parle quʹaux âmes chrétiennes déjà éclairées, auxquelles<br />

on nʹa pas besoin <strong>de</strong> tout expliquer. Prions donc bien, cher ami, et par nos humbles instan‐<br />

ces, nous arriverons <strong>de</strong> <strong>de</strong>grés en <strong>de</strong>grés à cette vive foi, à cette ferme confiance, à cet<br />

amour généreux qui fait les saints. Jusque là, nous aspirons à la vie, mais elle nʹest pas en‐<br />

core pleinement en nous, nos pieds sʹattachent trop à la terre, nos regards vont encore trop<br />

aux choses dʹen bas, le renoncement nʹest pas assez complet, ni à nous‐même, ni au<br />

mon<strong>de</strong>; appelons le souffle divin qui brisera nos liens et nous poussera tout en Dieu. Je ne<br />

puis voir autrement les choses pour moi, je ne puis les souhaiter autres pour nous, je ne<br />

puis concevoir notre œuvre dans un autre esprit. Dans ma pensée tous ceux‐là sont <strong>de</strong>s nô‐<br />

tres, en quelque condition quʹils soient, dans le mon<strong>de</strong> ou en <strong>de</strong>hors, qui, par le cœur,<br />

donnent tout à Dieu, que <strong>de</strong>s entraves peuvent retenir, mais dont la volonté nʹa nulle ré‐<br />

serve; ce sont les cœurs généreux, les hommes <strong>de</strong> lʹabsolu, du vrai et pur amour; ceux‐là<br />

sʹenten<strong>de</strong>nt par le cœur et se répon<strong>de</strong>nt; ils forment le corps dʹélite et la milice choisie, ils<br />

sont, en un mot, les vrais, les fidèles amis <strong>de</strong> Dieu; Il les trouvera à lʹépreuve, corps et âme,<br />

ils sont tout à Lui. Cʹest à ce vrai et sincère amour que nous <strong>de</strong>vons tendre, cher ami, et, si<br />

nous trouvons quelque chose qui fasse obstacle entre Dieu et nous sans marchan<strong>de</strong>r, il le<br />

faut immoler. Cʹest là lʹesprit <strong>de</strong> notre œuvre, jʹen ai la douce confiance; cʹest ce qui nous a<br />

soutenus et, malgré notre indignité, nous a concilié peut‐être les miséricor<strong>de</strong>s bontés <strong>de</strong><br />

notre Dieu. Restons bien dans cette voie, très cher ami, que nous a frayée notre Maître et<br />

que le grand saint Louis a suivie après Lui. Je vous dis là, je ne sais pourquoi, mon oraison<br />

tout entière sur la fête <strong>de</strong> saint Louis, elle sʹest trouvée au bout <strong>de</strong> ma plume et sʹest ré‐<br />

pandue sans que jʹy aie pensé. Ce ne sera pas un mal si nous nous en édifions tous les<br />

<strong>de</strong>ux. Je ne suis pas éloigné, cher enfant, <strong>de</strong> vous rejoindre pour quelques jours et dʹaller<br />

prendre une <strong>de</strong>mi‐douzaine <strong>de</strong> bains; je crois quʹil ne me serait pas impossible <strong>de</strong> partir<br />

samedi et <strong>de</strong> faire ainsi une courte absence; mais je veux, avant <strong>de</strong> partir, recevoir une let‐<br />

tre <strong>de</strong> vous qui mʹassure que je vous trouverai bien disposé, animé <strong>de</strong> cet esprit <strong>de</strong> vrai<br />

dévouement que jʹindiquais tout à lʹheure, vrai serviteur <strong>de</strong> Dieu par le désir au moins et<br />

par lʹélan du cœur; faible quelquefois <strong>de</strong> corps, faible parfois dʹesprit, mais tout au moins<br />

sauf par le cœur, résolu à ne pas résister à la grâce et à écouter Dieu quand Il parle; recon‐<br />

naissant <strong>de</strong> lʹimmense faveur quʹIl vous a faite par votre vocation et résolu <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r intact<br />

ce précieux trésor. Dites‐moi cela, cher enfant, dans une prompte lettre et je mʹefforcerai <strong>de</strong><br />

vous aller rejoindre; autrement, je ne saurais pas vous dissimuler lʹimpression pénible que<br />

me fait une <strong>de</strong>mi volonté, un <strong>de</strong>mi dévouement. Ces mouvements, quoique momentanés<br />

chez vous et heureusement bientôt remplacés par <strong>de</strong> meilleures dispositions, me causent<br />

toujours un serrement <strong>de</strong> cœur douloureux que je ne puis entièrement maîtriser; jʹaime<br />

mieux alors vous abandonner à la grâce intérieure et prier pour vous que <strong>de</strong> vous parler,<br />

probablement <strong>de</strong> peur <strong>de</strong> gâter lʹœuvre <strong>de</strong> Dieu en y mettant la main. Ainsi, cher enfant, je<br />

vous ai dit ma pensée; écrivez‐moi et jʹirai vous retrouver; sinon, je prierai ici <strong>avec</strong> nos frè‐<br />

res qui vous aiment comme moi tendrement et qui savent tout le bien que vous pouvez<br />

faire si vous voulez rester fidèle aux grâces du Seigneur.<br />

344


Adieu, cher enfant, dans lʹespoir <strong>de</strong> vous voir bientôt, je ne vous dis point les quel‐<br />

ques détails <strong>de</strong> notre maison qui peuvent vous intéresser. Tous vont bien, tous vous em‐<br />

brassent, et moi surtout je vous aime dans le Cœur du Seigneur.<br />

Votre ami et Père en J.C.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

267 à M. Caille<br />

Les distributions <strong>de</strong>s prix dans les Oeuvres <strong>de</strong> Paris et d’Amiens.<br />

Lundi 27 août [1854]<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Notre f. Maignen, invité à une distribution <strong>de</strong> prix, (elles sont, comme je vous le di‐<br />

sais, très multipliées en ce moment) et ne pouvant refuser dʹy faire au moins une appari‐<br />

tion, me prie <strong>de</strong> joindre <strong>de</strong>ux mots à lʹenvoi quʹil vous fait dʹun paquet <strong>de</strong> livres. Cʹest une<br />

bonne occasion <strong>de</strong> vous donner signe <strong>de</strong> souvenir, je ne veux point la négliger.<br />

Votre lettre, quoique bien courte, nous laisse penser que vous allez bien et que le<br />

Seigneur continue aussi à bénir vos travaux. Je lʹen remercie et le conjure <strong>de</strong> vous conti‐<br />

nuer son miséricordieux appui. Tout va bien aussi autour <strong>de</strong> nous; la retraite <strong>de</strong> notre<br />

Sainte‐Famille sʹest admirablement terminée; la distribution <strong>de</strong> M. Maignen a été fort bril‐<br />

lante; celle <strong>de</strong> Grenelle, hier, avait aussi beaucoup dʹintérêt, enfin celle <strong>de</strong> notre maison <strong>de</strong><br />

Vaugirard a laissé peu à désirer.<br />

Jʹen augure bien pour la vôtre qui ne nous touche pas moins, le bon Maître donne<br />

protection évi<strong>de</strong>nte à nos œuvres; nous tâcherons <strong>de</strong> répondre à sa bonté.<br />

Je ne saurais vous répondre présentement pour la présence <strong>de</strong> M. Maignen à votre<br />

distribution, il mʹa remis votre lettre en hâte, en partant pour la réunion à laquelle il est in‐<br />

vité, sans que jʹaie pu mʹentretenir <strong>avec</strong> lui; je vois seulement que votre assemblée se tient<br />

un dimanche, jour peu favorable à notre cher ami.<br />

Il est possible que je sois moi‐même contraint à faire une absence dʹune huitaine <strong>de</strong><br />

jours; le f. Paillé est aussi en voyage momentané. Tous nos frères se rappellent à votre bon<br />

souvenir et vous embrassent affectueusement; croyez‐moi bien toujours, dans les Cœurs<br />

<strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.,<br />

Votre dévoué Père et ami jusquʹà la fin<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

268 à M. Paillé<br />

Projet <strong>de</strong> Conférence à St‐Valéry‐en‐Caux. Le don total existe chez tous les frères, malgré les apparences. M.<br />

Paillé ne se donne pas sans réserve. Pour MLP. la qualité <strong>de</strong> l’engagement religieux se juge au don total: ʺdans<br />

la voie où Dieu vous a mis, on n’est heureux que quand on a tout donnéʺ.<br />

Vaugirard, 30 août 1854<br />

Mon cher enfant,<br />

Vous mʹavez écrit une bonne lettre, dans laquelle vous avez mis toute lʹouverture<br />

possible et tous les bons désirs <strong>de</strong> votre cœur; je vous en remercie et vous en sais un gré<br />

extrême; jʹai dit à nos frères vos affectueux souvenirs, et aussi votre recommandation en<br />

345


faveur <strong>de</strong> la future Conférence <strong>de</strong> St‐Valéry, rien <strong>de</strong> tout cela nʹa été oublié; nous avons<br />

prié pour le succès <strong>de</strong> cette bonne œuvre, nous espérons que le bon Maître la fera réussir,<br />

si elle doit tourner à sa gloire. Je vais tâcher dʹarranger mes affaires pour aller passer quel‐<br />

ques jours <strong>avec</strong> vous, et <strong>de</strong> là faire une visite <strong>de</strong> 3 ou 4 jours à ma sœur. Je ne pense pas du<br />

tout quʹune si courte apparition aux bains puisse le moins du mon<strong>de</strong> mʹêtre utile, mais<br />

jʹirai pour que vous ne soyez pas entièrement isolé pendant votre absence. Je tâcherai <strong>de</strong><br />

partir samedi par le convoi <strong>de</strong> 7h. du matin, ou par celui <strong>de</strong> midi, si je nʹétais pas en me‐<br />

sure <strong>de</strong> si bonne heure. Je ne vois pas dʹinconvénient à ce que vous rendiez visite à lʹami<br />

Folluc. Les suites du projet <strong>de</strong> Conférence me donnent bien quelque inquiétu<strong>de</strong>; il faudra<br />

organiser <strong>de</strong>s quêtes, se donner beaucoup <strong>de</strong> mouvement, entretenir <strong>de</strong>s relations <strong>avec</strong> un<br />

nombre considérable dʹétrangers et dʹhabitants <strong>de</strong> St‐Valéry; ce sera loin <strong>de</strong> la paix que<br />

vous cherchez; pourtant, sʹil en doit résulter un bien réel, si lʹon peut réunir quelques élé‐<br />

ments <strong>de</strong> bon aloi, je pense quʹil faudra passer outre et marcher. Jʹai quelques règlements<br />

et manuels que je vous porterai.<br />

Vous abor<strong>de</strong>z dans votre lettre plusieurs questions que je nʹavais envisagées que<br />

dʹune manière générale, sans faire dʹapplication bien particulière à personne; je voulais<br />

seulement poser ce principe que, sans un dévouement vrai, sans réserve, sans partage, on<br />

ne peut rien établir <strong>de</strong> soli<strong>de</strong> et <strong>de</strong> persistant; que, grâces au Seigneur, cet esprit généreux,<br />

signe bien certain <strong>de</strong> la vocation et <strong>de</strong>s <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> Dieu, vivait dans notre petite famille et<br />

quʹelle <strong>de</strong>vait le gar<strong>de</strong>r comme son plus précieux trésor. Vous mʹobjectez que le sacrifice<br />

absolu, et <strong>de</strong> soi‐même et <strong>de</strong>s choses <strong>de</strong> la terre, nʹest pas pleinement consommé pour plu‐<br />

sieurs, quʹil reste donc douteux si Dieu nous appelle à un dépouillement complet et à une<br />

abnégation entière. Jʹose vous assurer formellement que ce doute nʹexiste pour aucun <strong>de</strong><br />

nous; tous sont dévoués par le cœur sans restriction volontaire et sʹil existe, pour les uns<br />

ou pour les autres, quelque réserve apparente, elle est dans la position, dans les circons‐<br />

tances, non dans la volonté ni dans le cœur; dès lors, le sacrifice est vrai, pur, complet, di‐<br />

gne <strong>de</strong> Dieu, car la victime sʹimmole tout entière et ne se réserve rien. Ce sont ces réserves<br />

<strong>de</strong> la volonté et du cœur qui mʹaffligent et mʹinquiètent, quand je crois les apercevoir, car<br />

elles sont essentiellement contraires à la vraie perfection, à la vraie charité, partant à la vie<br />

religieuse qui aspire à lʹune et à lʹautre. Saint Vincent <strong>de</strong> Paul a toléré que le dépouillement<br />

extérieur <strong>de</strong>s biens ne fût pas absolu, on le tolère aussi en divers lieux <strong>de</strong> notre temps,<br />

mais cʹest pour lʹextérieur seulement, pour ménager lʹesprit antireligieux <strong>de</strong>s familles, pré‐<br />

venir les imputations contre les Communautés et les mettre, autant quʹil se peut, en <strong>de</strong>hors<br />

<strong>de</strong>s intérêts temporels; mais, au fond, le principe reste immuable, le dépouillement indi‐<br />

qué par le Sauveur doit être consommé <strong>de</strong> cœur, franchement et sans détour, et pratiqué<br />

réellement au <strong>de</strong>gré où il est possible sans inconvénient; les règles ont été posées par la<br />

Sagesse éternelle, elles restent immuables et ne fléchissent point; ce qui paraît à lʹœil peut<br />

varier dans la ferme, mais ce qui se fait dans le cœur est toujours le même; le Seigneur a<br />

dit: Mes paroles ne passeront point. 198 Je lʹaffirme dans une conviction profon<strong>de</strong>, ces prin‐<br />

cipes sont ceux <strong>de</strong> tous les membres proprement dits <strong>de</strong> notre petite Communauté et vi‐<br />

vent dans toutes les âmes. Tous pratiquent le détachement absolu par le cœur et le suivent<br />

dans la pratique, sans autre réserve que celle <strong>de</strong>s circonstances auxquelles ils doivent cé‐<br />

<strong>de</strong>r. Tout est bien ainsi, Dieu nʹen <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pas davantage, Il veut le cœur et, quand Il en<br />

est bien sûr, tout le reste est secondaire à ses yeux.<br />

198 Mc 13, 31.<br />

346


Pour lʹabnégation <strong>de</strong> la volonté, le sacrifice <strong>de</strong> la personne, il en est <strong>de</strong> même aussi;<br />

ce nʹest point <strong>avec</strong> restriction, cʹest sans nulle réserve mentale que nos bons frères ont<br />

compris la parole du Sauveur: Quʹil se renonce lui‐même 199 ; franchement, généreusement,<br />

ils se sont jetés tous dans le sein <strong>de</strong> Dieu; ils ont dû, sans doute, accepter les conditions<br />

dʹune œuvre qui se forme et qui nʹa pas encore les privilèges dʹune fondation consommée;<br />

mais, dans la plénitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> leur cœur et dans toute lʹétendue <strong>de</strong> leurs puissances, ils se sont<br />

dédiés et consacrés à toujours; les uns, auxquels on lʹa permis, par une parole formelle, les<br />

autres, au moins intérieurement, par le vœu <strong>de</strong> leur cœur. Si nous nʹavions pas ce fond so‐<br />

li<strong>de</strong>, nous ne serions rien, ni <strong>de</strong>vant Dieu, ni <strong>de</strong>vant les hommes, ni à nos propres yeux;<br />

mais, grâces en soient rendues au Seigneur, sa flamme a lui dans nos âmes et nous a<br />

consommés et unis dans sa divine charité.<br />

Pour vous, cher enfant, vous êtes, plus que vous ne pensez, fondu à cette vie com‐<br />

mune que le Seigneur a suscitée en nous, vos liens sont vrais et sincères aussi, seulement,<br />

par un peu <strong>de</strong> timidité, à vous naturelle, vous tâtonnez parfois et marchan<strong>de</strong>z un peu dans<br />

la pratique. De là, pour vous, la source dʹhésitations, <strong>de</strong> doutes et dʹabattements <strong>de</strong> cœur;<br />

<strong>de</strong> là, <strong>de</strong>s heures pénibles et pleines dʹinquiétu<strong>de</strong>. Avec un peu plus <strong>de</strong> hardiesse, vous se‐<br />

riez affranchi et goûteriez la liberté <strong>de</strong>s enfants <strong>de</strong> Dieu qui vous a manqué jusquʹà ce jour.<br />

Je ne désapprouve point les mesures que vous avez prises quant à votre temporel,<br />

elles sont bonnes au fond mais consommez en vous un détachement plus vrai, ne faites<br />

pas <strong>de</strong>s quelques biens qui vous restent une perspective ou retranchement qui sʹinterpose<br />

entre Dieu et vous; je ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong> rien <strong>de</strong> plus; quant au sacrifice <strong>de</strong> votre personne, à<br />

mon gré vous le <strong>de</strong>vriez à Dieu, à votre repos, à votre paix qui, je le crois sincèrement, est<br />

à ce prix. Sans cela, vous nʹaurez pas le cœur content ni tranquille, parce que, dans la voie<br />

où Dieu vous a mis, on nʹest heureux que quand on a tout donné. Vous hésiterez, vous re‐<br />

culerez, vous voudrez et ne voudrez pas; si vous nʹallez pas là, vous serez sur la route,<br />

mais vous nʹatteindrez jamais la fin. Sainte Thérèse dit: ʺJe ne serais jamais d’avis, quand<br />

Dieu montre quelque bien à faire, quʹon reculât par crainte <strong>de</strong> faillir dans lʹexécution; jʹai<br />

éprouvé par moi et par bien dʹautres que jamais la force ne manque à qui se donne en se<br />

confiant en Dieu.ʺ<br />

Vous mʹaviez ouvert votre cœur, bien cher ami, je vous ai ouvert le mien, je vous ai<br />

dit mon avis sur votre intérieur; je lʹai bien souvent examiné <strong>de</strong>vant Dieu et je crois le bien<br />

connaître; mais, mon cher enfant, si ma persuasion ne passe pas dans votre cœur, croyez<br />

bien que je nʹen aurai nul déplaisir, je continuerai à prier Dieu pour vous, sûr que son<br />

heure viendra; car le cœur est droit chez vous, aidé par la grâce, il triomphera, comme<br />

vous le dites vous‐même, <strong>de</strong>s résistances <strong>de</strong> la nature.<br />

Quoi quʹil en soit, nous vous prendrons toujours tel que vous voudrez être; en nous<br />

unissant à vous, nous avons pensé que cʹétait pour jusquʹau <strong>de</strong>rnier jour, je réponds <strong>de</strong> no‐<br />

tre fidélité comme <strong>de</strong> mon tendre, vrai et paternel amour pour vous.<br />

Votre ami et Père dans les Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

199 Lc 9, 23.<br />

347


269 à M. Caille<br />

Voyage <strong>de</strong> MLP. à St‐Valéry‐en‐Caux. Prochaine arrivée <strong>de</strong> M. Tourniquet.<br />

Vaugirard, 1er septembre 1854<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je bénis le Seigneur et la T. Ste Vierge, notre Mère, qui ont enfin procuré la réalisa‐<br />

tion <strong>de</strong> vos vœux; tout ce qui sʹest fait a été préparé et accompli par la divine Miséricor<strong>de</strong><br />

et jʹai la confiance quʹil en sortira un grand bien pour la gloire du Seigneur.<br />

Je nʹai que le temps <strong>de</strong> vous écrire ces <strong>de</strong>ux mots; il est déjà bien tard ce soir, et, <strong>de</strong>‐<br />

main matin, je pars pour une petite absence <strong>de</strong> huit jours. Le f. Paillé, qui éprouvait un<br />

grand épuisement, prend quelques bains <strong>de</strong> mer à St‐Valéry‐en‐Caux, je vais lui faire une<br />

courte visite <strong>de</strong> cinq ou six jours, jʹen passerai ensuite <strong>de</strong>ux ou trois chez ma sœur et je re‐<br />

viendrai à la maison que je quitte à regret en ce moment.<br />

Je ferai <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> vous, nʹen doutez pas, tout ce qui sera nécessaire pour le<br />

bien; je vous écrirai plus au long <strong>de</strong> St ‐Valéry, sʹil est besoin; si vous mʹy écrivez, je serai<br />

chez Mme Gagnerelle, route dʹAmont.<br />

M. Maignen a envoyé à la voiture vos livres lundi <strong>de</strong>rnier; il ne comprend pas<br />

comment vous ne les avez pas encore reçus, il ira <strong>de</strong>main en enquête à ce sujet.<br />

Tous nos frères vont bien et vous embrassent affectueusement. Jʹapprends <strong>avec</strong> joie<br />

que notre bon ami, M. Tourniquet200 , va nous arriver; invitez‐le à mʹécrire en attendant;<br />

nous recevrons son jeune neveu sʹil le veut. Adieu, bien cher ami, embrassez tous nos amis<br />

dʹAmiens, il me semble que le pas qui vient dʹêtre fait nous rapproche et tend à nous unir<br />

encore plus intimement.<br />

Votre Père et ami en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

270 à M. Decaux<br />

MLP. veille à la bonne organisation d’une réunion <strong>de</strong> la Sainte‐Famille.<br />

St‐Valéry‐en‐Caux, 4 septembre 1854<br />

Très cher Confrère et ami en N.S.,<br />

Jʹai dû, malgré mes répugnances, faire une absence <strong>de</strong> quelques jours et délaisser<br />

nos chères œuvres <strong>de</strong> Paris; je ne serai guère que 8 ou 9 jours<br />

loin <strong>de</strong> vous, et cependant je vois que je vais manquer à la<br />

prochaine réunion <strong>de</strong> la Sainte‐Famille le dimanche 10 sep‐<br />

tembre, ne <strong>de</strong>vant être <strong>de</strong> retour que mardi 12. Je nʹen ai<br />

aucune inquiétu<strong>de</strong>, sachant, bien cher ami, combien je puis<br />

compter sur vous à tous égards comme volonté, comme suffi‐<br />

sance, expérience, etc.; je vous écris donc ces <strong>de</strong>ux mots pour<br />

vous prier <strong>de</strong> vouloir bien me remplacer et prendre quelques<br />

petites dispositions à lʹavance pour lʹordre <strong>de</strong> la réunion.<br />

200 <strong>Jean</strong>-Marie Tourniquet (1832-1871). Né à Amiens, typographe <strong>de</strong> profession, il fréquentait le patronage <strong>de</strong> M. Caille. Dès son<br />

entrée dans l'Institut, en 1854, il se révèlera "parfait <strong>de</strong> cœur, doux, maniable, humble et très détaché" (MLP.) Il mourra <strong>de</strong> la variole<br />

le 7 juin 1871. Successivement chargé du patronage St-Charles à Paris, et à Rome, du Cercle Militaire pour les zouaves pontificaux,<br />

il laissera le souvenir d'un frère exemplaire et d'un homme d'œuvres accompli.<br />

348


En prenant les choses par le plus essentiel, il serait désirable <strong>de</strong> voir notre p. Mille‐<br />

riot qui nʹétait pas bien sûr lui‐même dʹêtre à Paris pour le 10; sʹil <strong>de</strong>vait être absent, il<br />

pourvoirait à son remplacement, mais il serait bon <strong>de</strong> le savoir et dʹen convenir <strong>avec</strong> lui.<br />

M. Quéron, maintenant professeur à lʹInstitution <strong>de</strong> M. Joliclerc à Montrouge, mʹa<br />

promis <strong>de</strong> parler à notre assemblée du 10 septembre; peut‐être ne serait‐il pas mal <strong>de</strong> le lui<br />

rappeler par un mot.<br />

M. Lecoin vous remettrait les numéros <strong>de</strong> la loterie <strong>avec</strong> la liste <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s et <strong>de</strong>s<br />

décédés et vous dirait en même temps les particularités <strong>de</strong> quelque intérêt, sʹil y en a.<br />

M. Tardif, qui accompagne ordinairement les chants <strong>avec</strong> lʹorgue, est absent. Une<br />

femme <strong>de</strong>meurant <strong>avec</strong> son mari rue du Gindre 8 ou 10, M me Ruché, mʹa amené un jeune<br />

organiste qui cherche un emploi et qui s’est offert à tenir l’orgue pendant les vacances; M.<br />

Lecoin, sur votre invitation, pourrait avertir ce jeune organiste et lui confier notre cahier <strong>de</strong><br />

musique qui, <strong>de</strong>puis la retraite, doit être resté aux mains <strong>de</strong> M. Cholet.<br />

Je ne vois pas dʹautre détail à recomman<strong>de</strong>r à vos soins bienveillants; il arrive par‐<br />

fois que durant les vacances, le catéchisme ne se réunissant pas le matin, on oublie <strong>de</strong><br />

monter lʹautel; nous avons été plusieurs fois surpris tristement par cette omission qui pri‐<br />

vait <strong>de</strong> la Sainte Messe tous ceux <strong>de</strong> nos pauvres gens qui nʹy avaient pas déjà assisté. Je<br />

crois donc que M. Lecoin <strong>de</strong>vrait sʹassurer si tout est en ordre sous ce rapport.<br />

Je <strong>de</strong>vrais mʹexcuser, bien cher Confrère, <strong>de</strong> vous causer tant dʹembarras, mais<br />

jʹaime bien mieux bénir le Seigneur qui mʹa donné votre précieuse affection et qui par là<br />

mʹa fait don <strong>de</strong> toutes sortes <strong>de</strong> biens ensemble, et pour moi quʹelle console, anime, édifie,<br />

et pour nos œuvres qui vous trouvent toujours présent quand il y a quelques bons conseils<br />

à donner, quelques chaleureuses paroles à dire, quelque travail à accomplir. Béni soit donc<br />

le Seigneur qui a fait votre cœur et qui a daigné lʹouvrir pour moi; béni soit‐il aussi <strong>de</strong> ce<br />

quʹil a rendu le mien bien vraiment, bien tendrement reconnaissant et dévoué pour vous.<br />

Adieu, bien cher ami, je vous embrasse en frère, en ami dans la charité <strong>de</strong> notre di‐<br />

vin Seigneur.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jusquʹà jeudi inclusivement ici, chez M me Gagnerelle, route dʹAmont. De vendredi à<br />

lundi, chez M me Salva, ma sœur, à Duclair (Seine Inférieure).<br />

Jʹécris en plein vent sur mes genoux.<br />

271 à M. Myionnet<br />

Attachement toujours plus fort à ses frères. Estime croissante <strong>de</strong> la vocation religieuse, ʺla meilleure partʺ. Dé‐<br />

votion à Marie, aux Anges gardiens. Union fraternelle ʺecce quam bonumʺ.<br />

St‐Valéry‐en‐Caux, 5 septembre 1854<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Mon absence doit être si courte que jʹeusse pu me dispenser <strong>de</strong> vous écrire, mais jʹai<br />

une si constante habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> vous voir, ainsi que nos autres frères, et <strong>de</strong> mʹentretenir <strong>avec</strong><br />

vous quʹinstinctivement presque je me mets à vous faire cette lettre. A mesure que nous<br />

avançons, en effet, les liens <strong>de</strong> la famille se resserrent, nous nous unissons plus étroitement<br />

et sentons mieux tout ce que nous sommes les uns aux autres. Aussi, me <strong>de</strong>vient‐il extrê‐<br />

mement pénible <strong>de</strong> mʹéloigner <strong>de</strong> notre chère Communauté, à moins quʹun <strong>de</strong>voir impé‐<br />

349


ieux, une chose intéressant la gloire <strong>de</strong> Dieu et lʹutilité <strong>de</strong> nos œuvres ne le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt<br />

absolument. Comme ces motifs déterminants nʹétaient que vaguement indiqués dans le<br />

cas présent, jʹéprouvais à partir une gran<strong>de</strong> répugnance; mais, à défaut dʹune raison grave<br />

et <strong>de</strong> poids considérable, il y en avait plusieurs ensemble qui, réunies, faisaient masse et<br />

ont dû me déci<strong>de</strong>r. Assurez nos bien‐aimés frères que, plus dégagé ici <strong>de</strong>s nombreux dé‐<br />

tails qui mʹabsorbent trop souvent, je pense plus librement à eux, à leurs intérêts spirituels,<br />

à leurs travaux, à leurs besoins et que je prie ar<strong>de</strong>mment le Seigneur <strong>de</strong> les bénir et <strong>de</strong> les<br />

combler <strong>de</strong> ses grâces. Je me plais à penser que, <strong>de</strong> cette sorte, je ne leur suis point inutile<br />

et quʹéloigné dʹeux, je participe néanmoins à leurs œuvres. A distance aussi, je me pénètre<br />

plus vivement <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> notre condition, <strong>de</strong> ses précieux avantages et <strong>de</strong>s <strong>de</strong>voirs<br />

quʹelle nous impose. Mais surtout en apercevant dans le changement <strong>de</strong> lieux quelques<br />

nouvelles faces du mon<strong>de</strong>, en voyant son éloignement <strong>de</strong> Dieu, son adhérence aveugle aux<br />

créatures, lʹespèce dʹimpuissance où il est <strong>de</strong> sʹélever aux choses dʹen haut, je bénis la bonté<br />

divine qui nous a donné la meilleure part, je me fortifie dans la volonté <strong>de</strong> lʹembrasser <strong>de</strong><br />

plus en plus étroitement et <strong>de</strong> ne chercher en tout que Dieu seul.<br />

Notre f. Paillé, auquel jʹai ainsi rendu une petite visite, me semble animé <strong>de</strong>s mêmes<br />

sentiments; je pense quʹil va se trouver tout réconforté. Nous reviendrons ensemble mardi<br />

prochain 12 septembre. Jʹaurais voulu revenir plus tôt encore, mais ma sœur me fait <strong>de</strong> si<br />

vives instances pour obtenir que je lui donne au moins quelques jours indispensables, as‐<br />

sure‐t‐elle, pour le bien <strong>de</strong> ses affaires, que je ne puis mʹy refuser. Le f. Paillé restera jus‐<br />

quʹà lundi ici et viendra ce même jour me reprendre chez ma sœur. Nous avons trouvé ici<br />

M. le Curé <strong>de</strong> Grenelle <strong>avec</strong> son vicaire prenant quelques bains; ils doivent aussi partir à la<br />

fin <strong>de</strong> la semaine, mais pour suivre leur voyage en divers points <strong>de</strong> la Normandie.<br />

Aujourdʹhui mercredi, le f. Paillé et moi, nous nous sommes unis <strong>de</strong> cœur à votre<br />

pèlerinage à N.D. <strong>de</strong>s Anges. Jʹai prié la Sainte Vierge <strong>de</strong> sʹentourer <strong>de</strong> tous vos anges gar‐<br />

diens et <strong>de</strong> les charger <strong>de</strong> tous ses dons miséricordieux pour vous. Le f. Paillé, ayant eu ce<br />

matin grand appétit, a prétendu que cʹétait un effet du pèlerinage et <strong>de</strong> lʹunion parfaite où<br />

il sʹétait mis <strong>avec</strong> vous. Je suis bien sûr quʹà dʹautres égards encore il aura participé à cette<br />

pieuse excursion, mais ce résultat est au moins fort positif.<br />

Je serai absent dimanche à la réunion <strong>de</strong> la Sainte‐Famille, mais jʹai écrit à M. De‐<br />

caux pour le prier <strong>de</strong> me remplacer et <strong>de</strong> se concerter <strong>avec</strong> M. Lecoin pour les détails <strong>de</strong> la<br />

séance. Je prie mon f. Maignen <strong>de</strong> sʹassurer samedi près <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier si tout a bien été<br />

prévu.<br />

Je regrette bien dʹavoir manqué la visite <strong>de</strong> M. lʹabbé Decaix dont je désire beaucoup<br />

faire la connaissance; jʹespère quʹil ne partira point avant mon retour et que je pourrai le<br />

voir mercredi: M. Caille me dit quʹil ne doit quitter Paris que vers la fin <strong>de</strong> la semaine. As‐<br />

surez‐le <strong>de</strong> mes sentiments <strong>de</strong> sincère dévouement et recomman<strong>de</strong>z‐moi bien à ses prières.<br />

Vous nʹaurez point, je le pense, mon bien cher ami, négligé la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> notre f.<br />

Caille qui recomman<strong>de</strong> instamment à nos prières lʹaffaire importante dont il nous a entre‐<br />

tenus et qui désire une <strong>de</strong>s communions <strong>de</strong>s frères à cette intention.<br />

Je ne vois pas grand chose dʹutile à mentionner <strong>de</strong> plus; je prie M. Maignen <strong>de</strong> <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>r à M. Lecoin lʹadresse <strong>de</strong> Dejuilly, le maçon, fumiste, etc.; je désire me servir <strong>de</strong> lui<br />

pour les portes à percer ou à clore à Grenelle pour lʹinstallation <strong>de</strong> lʹouvroir <strong>de</strong> M lle Del‐<br />

phine. Je suis en retard pour ces travaux que je voulais faire plus tôt; je me propose <strong>de</strong> les<br />

commencer tout <strong>de</strong> suite après mon arrivée.<br />

350


M. Maignen a‐t‐il revu M. Lequeux et a‐t‐il son projet pour les travaux du Mont‐<br />

parnasse; il pourrait certainement le voir et le presser un peu sʹil nʹavait encore rien reçu.<br />

Adieu, bien cher ami, chaque fois que je mʹéloigne <strong>de</strong> notre petite famille, je me<br />

promets bien que cʹest ma <strong>de</strong>rnière sortie, tant je me trouve mal à lʹaise hors du logis et<br />

tant jʹai besoin <strong>de</strong> porter <strong>avec</strong> vous le far<strong>de</strong>au <strong>de</strong> nos travaux; me reposer quand les autres<br />

sont à la peine me pèse sur le cœur et ne me laisse point en paix. Je reviens donc au plus<br />

vite; mardi je vous embrasserai tous et, à moins <strong>de</strong> nécessité gran<strong>de</strong>, je ne vous quitte plus.<br />

Je voudrais nommer ici tous nos frères, les grands, les petits, les moyens; mais cela ferait<br />

toute une litanie, je les réunis tous dans le Cœur sacré du divin Sauveur et je mʹy place<br />

<strong>avec</strong> eux, disant du plus profond <strong>de</strong> lʹâme: Ecce quam bonum et quam jucundum habitare fra‐<br />

tres in unum. Embrassez‐les tous pour moi et recevez vous‐même, cher ami, mes bien ten‐<br />

dres affections.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

272 à M. Caille<br />

MLP. appuie le projet d’achat d’une nouvelle maison à Amiens. Mais il tient à savoir quelles en seront les finali‐<br />

tés. Ne vouloir que ce que Dieu veut.<br />

St‐Valéry‐en‐Caux, 5 septembre 1854<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Notre f. Myionnet mʹenvoie votre <strong>de</strong>rnière lettre à St‐Valéry où je suis venu passer<br />

trois ou quatre jours pour voir le f. Paillé, en me rendant chez ma sœur où je dois rester<br />

jusquʹà mardi. Cette absence, toute courte quʹelle soit, est encore trop longue, car nous ne<br />

pouvons guère nous éloigner <strong>de</strong> la maison sans inconvénient. Je trouve en particulier au‐<br />

jourdʹhui celui dʹavoir manqué la visite <strong>de</strong> M. Decaix que je souhaitais gran<strong>de</strong>ment <strong>de</strong><br />

connaître; mais jʹespère quʹil nʹaura point quitté Paris quand jʹy reviendrai mardi prochain,<br />

12; je sais quel est son zèle pour les œuvres et tout le bien quʹil y peut faire.<br />

Jʹapprouve votre projet pour lʹachat <strong>de</strong> la maison contiguë à celle que vous avez ac‐<br />

quise; je crains seulement que vos recherches <strong>de</strong> souscripteurs ne donnent lʹéveil, nʹattirent<br />

<strong>de</strong>s concurrents et ne fassent, par les enchères, surélever la maison au <strong>de</strong>là <strong>de</strong> sa valeur.<br />

Tâchez dʹagir sans trop <strong>de</strong> bruit, ainsi que vous le faites dʹordinaire, le cas paraît le <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>r.<br />

Je ne doute pas que le f. Myionnet, qui a lu votre lettre avant moi, nʹait <strong>de</strong>mandé les<br />

prières <strong>de</strong> la Communauté à lʹintention <strong>de</strong> ce projet; le f. Paillé et moi nous y joindrons les<br />

nôtres et ferons la S te Communion dans la même pensée; nous ne voulons tous que la<br />

gloire <strong>de</strong> Dieu et sa sainte volonté; je suis bien assuré que vous renoncerez à ce projet sans<br />

nulle peine, sʹil nʹest évi<strong>de</strong>nt que Dieu le veut; nous sommes trop convaincus <strong>de</strong> notre<br />

ignorance en toutes choses et <strong>de</strong> notre impuissance pour ne pas nous laisser gui<strong>de</strong>r pas à<br />

pas par sa divine Sagesse; cʹest lʹabc <strong>de</strong>s serviteurs du Seigneur <strong>de</strong> renoncer à leur volonté,<br />

<strong>de</strong> se défier dʹeux‐mêmes et <strong>de</strong> sʹabandonner tout à Lui.<br />

Je vous avais <strong>de</strong>mandé dans une <strong>de</strong> mes précé<strong>de</strong>ntes lettres, très cher ami, <strong>de</strong> me<br />

dire quelles pensées vous aviez précisément touchant la maison que vous acquériez; <strong>de</strong>‐<br />

vez‐vous en faire un centre <strong>de</strong> diverses œuvres, comme la maison <strong>de</strong> la rue du Regard qui<br />

contient le patronage, la bibliothèque <strong>de</strong> la Sainte‐Famille, les fourneaux pour les pauvres,<br />

351


etc., ou bien pensez‐vous seulement à y loger <strong>de</strong> jeunes ouvriers et à y donner asile à <strong>de</strong>ux<br />

ou trois <strong>de</strong> nos frères qui se porteraient au <strong>de</strong>hors aux diverses œuvres auxquelles on croi‐<br />

rait <strong>de</strong>voir les employer? Je désirerais connaître plus précisément vos vues à ce sujet, si<br />

toutefois elles sont bien arrêtées pour vous‐même. Je concevrais, en effet, que vous nʹeus‐<br />

siez encore rien <strong>de</strong> bien déterminé, et que lʹachat <strong>de</strong> la secon<strong>de</strong> maison, sʹil sʹeffectuait, ap‐<br />

portât quelque modification à vos plans primitifs. Dites‐moi quelques mots sur ce point à<br />

la prochaine occasion, ils mettront plus <strong>de</strong> netteté dans mon esprit. Jusquʹà la fin <strong>de</strong> cette<br />

semaine, si vous mʹécriviez, vous <strong>de</strong>vriez mʹécrire ici; il est incertain si ma sœur, que je <strong>de</strong>‐<br />

vais aller visiter, ne va pas venir elle‐même passer quelques jours ici pour raffermir sa san‐<br />

té qui a été fort ébranlée durant la <strong>de</strong>rnière saison. En tout état <strong>de</strong> cause, le f. Paillé, qui<br />

restera ici jusquʹà la fin <strong>de</strong> la semaine, mʹapporterait votre lettre. Je retournerai le mardi 12<br />

à Paris. Jʹespère que jʹy trouverai encore M. lʹabbé Decaix.<br />

Assurez tous nos bons amis dʹAmiens <strong>de</strong> mes bien affectueux souvenirs; je ne sau‐<br />

rais vous dire combien nous sont précieux les liens qui nous attachent à eux; si, comme<br />

nous le <strong>de</strong>vons penser, la Provi<strong>de</strong>nce appelle notre petite famille à grandir et à sʹétendre<br />

en dʹautres provinces, nous nʹoublierons pas que cʹest dʹAmiens que nous est venue la<br />

première marque <strong>de</strong> sympathie et que <strong>de</strong>s frères nous ont été suscités. Nous comptons<br />

cette grâce parmi les plus chères que le Seigneur nous ait faites et nous lʹen remercions<br />

tous les jours du plus profond <strong>de</strong> notre cœur.<br />

Offrez mon respect à M. lʹabbé Cacheleux dont la bienveillance et les conseils sont<br />

bien heureux pour nous; il me semble que la Provi<strong>de</strong>nce le <strong>de</strong>stinerait à faire pour la mai‐<br />

son dʹAmiens ce que notre p. Beaussier fait ici pour nous.<br />

Adieu, bien cher fils et ami, je vous embrasse au nom <strong>de</strong> tous et je vous assure<br />

comme toujours <strong>de</strong> mes tendres sentiments en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

273 à M. Caille<br />

Les frères Maignen et Vasseur à Amiens. Appel à l’ouverture <strong>de</strong> coeur entre frères.<br />

Paris, 16 septembre 1854<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie, comme vous me lʹavez <strong>de</strong>mandé, <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> nos frères pour assister à<br />

votre distribution; cʹétait une occasion <strong>de</strong> nous réunir à vous et <strong>de</strong> prendre quelque part à<br />

vos œuvres; il y avait donc double satisfaction pour nous. Notre f. Maignen dʹailleurs ne<br />

<strong>de</strong>mandait pas mieux que <strong>de</strong> revoir les bons amis dʹAmiens; quant au f. Vasseur, quand je<br />

lui ai annoncé quʹil accompagnerait M. Maignen, il a été tellement saisi par cette joie ines‐<br />

pérée quʹil ne trouvait plus <strong>de</strong> parole pour lʹexprimer. Je ne lui ai point parlé jusquʹici <strong>de</strong><br />

nos projets pour la maison dʹAmiens, désirant avant tout mʹen entendre plus précisément<br />

<strong>avec</strong> vous; quoique excellent à tous égards, il est encore bien jeune et pourrait se dégoûter<br />

<strong>de</strong> ses travaux, si <strong>de</strong>s pensées prématurées <strong>de</strong> changement se mettaient dans son esprit. Je<br />

crois dʹailleurs que même à Amiens, sʹil y allait, il serait tout à fait désirable quʹil continuât<br />

<strong>de</strong> travailler <strong>de</strong> son état une gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong> la semaine, à moins quʹon eût à lʹoccuper très<br />

utilement dʹune autre façon. La vie quʹil a, mêlée <strong>de</strong> travail, <strong>de</strong> prière et dʹœuvres, est très<br />

édifiante, et cʹest un bon exemple à poser dans nos œuvres, nous serions très heureux quʹil<br />

352


fût suivi par beaucoup dʹautres. Vous pourrez vous ouvrir à M. Maignen sur toutes vos<br />

vues et projets, vous savez quʹil nʹy a quʹun cœur entre nous; je nʹai guère eu le temps, à<br />

votre <strong>de</strong>rnier voyage, <strong>de</strong> causer <strong>avec</strong> vous et vos lettres sont toujours bien abrégées par les<br />

nécessités <strong>de</strong> vos affaires; vous pouvez donc profiter <strong>de</strong> lʹoccasion et mettre en notre f.<br />

Maignen tout ce que vous auriez à me dire.<br />

Adieu, bien cher ami, je vous embrasse dans les Cœurs <strong>de</strong> J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

274 à M. Levassor<br />

Impossibilité d’envoyer <strong>de</strong>s frères à Chartres. Exposé <strong>de</strong>s charges qui pèsent sur la Communauté. Raisons qui ont<br />

déterminé MLP. à envoyer <strong>de</strong>ux frères à Amiens. Qualités exigées pour une vocation.<br />

Vaugirard, 25 septembre 1854<br />

Très cher ami et frère en N.S.,<br />

Jʹai tardé un peu à répondre à votre bonne et affectueuse lettre; jʹaurais voulu à tout<br />

prix vous satisfaire et vous témoigner notre vive sympathie pour vos œuvres; jʹen ai cher‐<br />

ché les moyens du plus profond <strong>de</strong> mon cœur, au nom <strong>de</strong> notre vieille affection que vous<br />

invoquez, mais surtout pour le bien et pour la gloire <strong>de</strong> Dieu que nous voulons <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux<br />

parts; croyez bien que si je nʹentre pas plus complètement dans vos vues, cʹest par impuis‐<br />

sance, non par défaut <strong>de</strong> volonté.<br />

Nous ne pouvons vous envoyer <strong>de</strong> frère immédiatement; la Provi<strong>de</strong>nce, qui a déve‐<br />

loppé si lentement notre petite Communauté, a voulu, pour mieux nous faire sentir notre<br />

faiblesse, que <strong>de</strong>s charges multipliées pesassent en même temps sur nous. Ainsi, nous<br />

avons à la fois, en ce moment, à compléter la fondation <strong>de</strong> notre établissement dʹorphelins<br />

qui a cent enfants à conduire et à entretenir, sans compter les ennuis <strong>de</strong>s bâtisses et cons‐<br />

tructions, la création dʹun asile nouveau pour nos vieillards <strong>de</strong> Nazareth dont les démolis‐<br />

seurs ont renversé la maison, le transport <strong>de</strong> toutes nos œuvres <strong>de</strong> la rue du Regard dans<br />

lʹancien local <strong>de</strong>stiné aux Capucins, local qui a 3 cellules pour <strong>de</strong>s frères, mais aucun bâti‐<br />

ment, sinon une petite chapelle non terminée. Enfin, lʹassiette définitive dʹune petite fon‐<br />

dation dès longtemps ébauchée en province et où nous <strong>de</strong>vons envoyer <strong>de</strong>ux frères. Si le<br />

bon Maître nʹeût pris soin Lui‐même <strong>de</strong> nous faire une pareille situation, nous en serions<br />

justement effrayés, mais nous nʹavons fait quʹobéir, ce nous semble, à ses prescriptions,<br />

nous avons donc confiance et nous marchons. Mais vous comprenez, bien cher ami, que ce<br />

nʹest pas sans peine et sans travaux que notre petit troupeau suffira à sa tâche, bien quʹil se<br />

soit un peu accru <strong>de</strong>puis que vous ne lʹavez vu.<br />

Il semble dur <strong>de</strong> répondre par <strong>de</strong>s excuses à une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> aussi touchante que la<br />

vôtre; il me semble que si je pouvais aller moi‐même vous ai<strong>de</strong>r, à défaut dʹautre, ce serait<br />

ma joie <strong>de</strong> travailler <strong>avec</strong> vous, ce serait aussi ma consolation la plus douce que <strong>de</strong> voir un<br />

rejeton <strong>de</strong> notre petite famille prendre racine près <strong>de</strong> vous, à lʹombre <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Chartres,<br />

mais lʹimpuissance trop réelle, trop invincible est là. Vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rez comment nous<br />

trouvons pourtant moyen <strong>de</strong> détacher ensemble <strong>de</strong>ux frères pour un autre au point <strong>de</strong> la<br />

province. La chose sʹexplique. Depuis plusieurs années, un homme, tout dévoué à la chari‐<br />

té et qui soutenait à lui seul diverses œuvres très intéressantes, a eu lʹhumble pensée <strong>de</strong><br />

sʹunir à nous, <strong>de</strong> sʹassocier à notre petite famille; successivement, il a décidé quelques bons<br />

jeunes gens à venir faire chez nous une sorte <strong>de</strong> noviciat; enfin, quand le moment lui a pa‐<br />

353


u venu dʹétablir près <strong>de</strong> lui une petite colonie <strong>de</strong> notre œuvre, il en a réglé les moyens <strong>de</strong><br />

concert <strong>avec</strong> nous.<br />

Sans renoncer à suivre pour Chartres une pareille voie, il importe néanmoins <strong>de</strong><br />

pourvoir aux besoins présents. Je vous propose cet expédient: Un jeune homme <strong>de</strong> 33 ans,<br />

qui avait secondé pendant plusieurs années à Bor<strong>de</strong>aux M. lʹabbé Lange dans la conduite<br />

dʹune œuvre dʹorphelins qui nʹa pu réussir, malgré les plus louables efforts et un admira‐<br />

ble dévouement, avait <strong>de</strong>mandé à prendre place chez nous et y est en effet resté durant 7<br />

mois. Mais la vie un peu trop sé<strong>de</strong>ntaire que nous lui avions faite lui causait <strong>de</strong>s maux <strong>de</strong><br />

tête fréquents, peut‐être aussi la régularité un peu stricte avait quelques difficultés pour<br />

lui; il a dû retourner près <strong>de</strong> sa sœur résidant en Bretagne pour se remettre et sʹassurer<br />

bien positivement <strong>de</strong> sa vocation; cependant, ce jeune homme a dʹheureuses qualités; il a<br />

lʹexpérience <strong>de</strong>s œuvres; il est sûr et désintéressé; il a le désir du bien et une piété satisfai‐<br />

sante; vous pourriez vous reposer sur lui et trouver en lui un ai<strong>de</strong> très utile. Je viens <strong>de</strong> lui<br />

écrire pour lui parler <strong>de</strong> vos œuvres et du besoin que vous auriez dʹassistance. Jʹai lieu <strong>de</strong><br />

penser que cette position est précisément son fait et, sʹil lʹacceptait, tout me fait penser que<br />

vous en seriez content. Il est actif, ne manque pas <strong>de</strong> savoir‐faire; il se présente bien, a le<br />

ton convenable et poli; seulement son éducation première a été un peu négligée; il parle<br />

<strong>avec</strong> un ton et <strong>de</strong>s expressions provinciales et, quoiquʹil rédige très facilement, il ne le fait<br />

pas sans incorrection ni fautes dʹorthographe. Voilà le fort et le faible; en ensemble, il peut<br />

vous ai<strong>de</strong>r beaucoup <strong>avec</strong> initiative, activité, persévérance, exactitu<strong>de</strong>. Jʹattends sa réponse<br />

qui ne vous engagera à rien. Dès que je lʹaurai reçue, je vous en ferai part et vous jugerez<br />

quel parti sera le meilleur.<br />

Voilà tout ce que votre vieil ami peut faire en ce moment; cʹest beaucoup moins quʹil<br />

nʹeût voulu faire pour vous, pour votre vénérable curé, pour lʹexcellent M. Delorme; mais<br />

il gar<strong>de</strong> bonne espérance pour lʹavenir et vous promet <strong>de</strong> sʹassocier à vos bonnes œuvres<br />

dès que le bon Maître lui en donnera les moyens.<br />

Remerciez M. Delorme <strong>de</strong> son aimable souvenir, assurez‐le <strong>de</strong> notre sincère dé‐<br />

vouement; je nʹai pas oublié la bonne confraternité qui nous unissait ici, et, malgré la dis‐<br />

tance, je suis heureux <strong>de</strong> la continuer et <strong>de</strong> lʹentretenir.<br />

Adieu, bien cher ami et frère, échappez‐vous un moment quand vous venez à Paris<br />

pour nous rendre une petite visite, il nʹy a quʹun cœur entre nous; même après <strong>de</strong> longues<br />

absences, nous nous retrouverons toujours, je lʹespère, amis, frères en J. et M.<br />

Votre tout affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

275 à M. le Curé <strong>de</strong> St‐Pierre‐<strong>de</strong>‐Chartres<br />

MLP. ne peut envisager une fondation à Chartres.<br />

Vaugirard, 27 septembre 1854<br />

Monsieur le Curé,<br />

Combien jʹaurais aimé répondre à votre charitable appel, en essayant <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>r<br />

sous vos yeux, à lʹombre <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Chartres, une petite colonie <strong>de</strong> notre humble Com‐<br />

munauté; combien jʹaurais eu <strong>de</strong> consolation à travailler aussi <strong>avec</strong> vos conseils à <strong>de</strong>s œu‐<br />

vres bénies par vous! Mais cette joie, que le Seigneur me réserve peut‐être pour lʹavenir, ne<br />

354


peut mʹêtre donnée encore présentement. Les charges qui pèsent sur nous sont déjà trop<br />

lour<strong>de</strong>s pour notre faiblesse, nous ne pourrions les accroître sans tenter la Provi<strong>de</strong>nce.<br />

Jʹentretiens toutefois notre bon ami M. Levassor dʹun sujet qui me semble, à beaucoup<br />

dʹégards, vous convenir; je souhaite quʹil vous soit vraiment utile et nous fasse gagner un<br />

peu <strong>de</strong> temps pour préparer les moyens plus stables que je serais heureux <strong>de</strong> remettre plus<br />

tard entre vos mains.<br />

Je suis heureux <strong>de</strong> vous dire que notre cher Jules Dallier continue à bien marcher; il<br />

vient maintenant à nos réunions <strong>de</strong> jeunes ouvriers chrétiens. M. Donnez en est content;<br />

nous avons donc bonne espérance quʹaprès une longue stérilité, nous recueillerons <strong>de</strong><br />

beaux fruits.<br />

Veuillez me croire dans <strong>de</strong>s sentiments <strong>de</strong> respectueuse vénération.<br />

Monsieur le Curé,<br />

Votre humble et dévoué serviteur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

276 à M. Levassor<br />

MLP. transmet la réponse d’un jeune homme susceptible d’ai<strong>de</strong>r M. Levassor.<br />

Paris, 30 septembre 1854<br />

Mon bon ami et frère en N.S.,<br />

Je vous envoie la réponse que je reçois <strong>de</strong> M. Enault, le bon jeune homme dont je<br />

vous ai parlé.<br />

Je souhaite bien sincèrement que vous trouviez en lui un ai<strong>de</strong> dévoué et intelligent;<br />

il a bonne volonté, il est désintéressé; jʹespère beaucoup que vous en aurez toute satisfac‐<br />

tion.<br />

Je me recomman<strong>de</strong> encore à vos bonnes prières et suis en J. et M.<br />

Votre affectionné ami et frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

277 à M. Planchat<br />

Utilité <strong>de</strong> prolonger son repos.<br />

Mercredi 4 octobre 1854<br />

St François dʹAssise<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai à peine le temps <strong>de</strong> vous écrire ces <strong>de</strong>ux lignes en ce moment et si je tar<strong>de</strong> à<br />

vous répondre, ma lettre ne vous arrivera pas à temps. Jʹajourne donc à votre retour les en‐<br />

tretiens et me borne ici au strict nécessaire. Je remercie le doux Seigneur qui vous a prépa‐<br />

ré <strong>avec</strong> tant <strong>de</strong> bonté quelque repos et les moyens <strong>de</strong> délassement dont vous aviez besoin;<br />

je crois entrer dans ses con<strong>de</strong>scendances miséricordieuses en vous laissant vous distraire<br />

jusquʹà la fin <strong>de</strong> la semaine prochaine. Je ne vois pas dʹinconvénient à ce que vous visitiez<br />

votre ancien confrère à Etampes.<br />

355


Adieu, mon bien bon abbé, vous savez le tendre attachement <strong>de</strong> tous vos frères,<br />

priez bien pour eux dans votre aimable retraite et croyez à leur affectueux retour comme<br />

au cordial attachement <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Notre jeune ami, M. Emile Beauvais, est <strong>de</strong>s nôtres <strong>de</strong>puis lundi <strong>de</strong>rnier; priez<br />

bien pour lui.<br />

278 à M. Caille<br />

MLP. donne son accord pour l’acquisition d’une maison. Dispositions à prendre pour envoyer <strong>de</strong>ux frères à<br />

Amiens. M. Caille sera le supérieur <strong>de</strong> la petite communauté.<br />

Vaugirard, 6 octobre 1854<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹentre pleinement dans vos vues et je trouve tout à fait satisfaisantes les explica‐<br />

tions que vous me donnez relativement à votre acquisition; ce que vous avez fait était ce<br />

que les circonstances permettaient <strong>de</strong> mieux et nous pouvons espérer que toutes choses<br />

ont été réglées selon la volonté <strong>de</strong> Dieu. Continuons <strong>de</strong> nous abandonner à Lui, Il nous<br />

inspirera ce que nous aurons à faire pour Lui rendre constamment nos œuvres agréables.<br />

Je suivrai votre désir pour la désignation <strong>de</strong>s frères qui <strong>de</strong>vront partager vos tra‐<br />

vaux à Amiens et, après la retraite, ils se tiendront prêts à se rendre près <strong>de</strong> vous, dès que<br />

vous en sentirez le besoin. Il mʹest venu à ce sujet une pensée que je crois <strong>de</strong>voir vous<br />

communiquer en vous laissant entièrement libre <strong>de</strong> ne pas lʹadopter, si vous ne croyez pas<br />

utile <strong>de</strong> la suivre. Il me semble que lʹintroduction <strong>de</strong>s frères à Amiens, quoique préparée<br />

dès longtemps par vos soins bienveillants, sera toujours une sorte dʹévènement qui sera<br />

diversement jugé et reçu. A mon gré, moins il se ferait <strong>avec</strong> apparat, plus il passerait ina‐<br />

perçu et plus il aurait chance <strong>de</strong> réussir. Ces étrangers qui arriveront là pour sʹinstaller<br />

dans vos œuvres, sans mission bien établie, sans habit pour se faire respecter, seront pour<br />

beaucoup un objet <strong>de</strong> curiosité et <strong>de</strong> défiance plutôt que dʹaffection et <strong>de</strong> sympathie. Je<br />

crois donc que, pour se faire accepter, ils <strong>de</strong>vraient se faire bien humbles, bien petits et en‐<br />

trer pour ainsi dire incognito. Ainsi, au lieu <strong>de</strong> les envoyer ensemble <strong>avec</strong> un ancien frère<br />

qui viendrait les installer <strong>avec</strong> une sorte <strong>de</strong> solennité, je vous proposerais <strong>de</strong> ne vous<br />

adresser dʹabord que le f. Vince tout seul, qui viendrait pour gar<strong>de</strong>r la maison et vous ai‐<br />

<strong>de</strong>r dans vos petits arrangements intérieurs; son arrivée ne ferait aucune sensation et,<br />

comme il est fort sociable et prévenant <strong>avec</strong> tous, quʹil saurait bien se rendre utile, on serait<br />

vite accoutumé à lui, il ne ferait, dans son isolement, ombrage à personne et semblerait<br />

bien, ce que nous voulons quʹil soit en effet, un agent dévoué, un gardien fidèle pour les<br />

œuvres, non une force, une puissance qui vient se poser et donner direction dans vos affai‐<br />

res. Après un peu <strong>de</strong> temps, quand on se serait habitué à le voir, qu’on lui aurait fait sa<br />

place, il en ferait venir un second pour lʹai<strong>de</strong>r et partager ses travaux, ce qui passerait alors<br />

sans difficulté. De prime abord, la chose se présente à moi <strong>de</strong> cette façon bien plus pratica‐<br />

ble et bien plus sûre; cependant, si vous qui connaissez mieux les êtres et pouvez mieux<br />

juger la position, vous croyez que mes défiances sont trop timi<strong>de</strong>s, quʹon peut marcher<br />

plus hardiment et quʹil vaut mieux tout dʹun coup poser nos <strong>de</strong>ux sujets, comme frères <strong>de</strong><br />

356


St Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul envoyés par la maison <strong>de</strong> Paris pour ai<strong>de</strong>r les œuvres dʹAmiens, je<br />

mʹen rapporte à vous et je me conformerai à votre avis. Je vous prie seulement dʹy réfléchir<br />

un peu <strong>de</strong>vant Dieu et <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r ses lumières avant <strong>de</strong> prendre votre détermination.<br />

Il est un autre point qui semble tout indiqué dʹavance et dont il paraîtrait superflu<br />

<strong>de</strong> sʹoccuper, mais que je crois à propos cependant <strong>de</strong> préciser bien nettement. Bien que<br />

vos occupations ne vous permettent pas encore <strong>de</strong> fondre entièrement votre vie <strong>avec</strong> celle<br />

<strong>de</strong>s frères qui vont sʹadjoindre à vous et quʹil ne vous soit possible, sans doute, dʹassister<br />

que bien irrégulièrement à leurs exercices, je crois quʹil sera nécessaire que vous soyez le<br />

Chef et Supérieur constitué <strong>de</strong> la petite communauté; en votre absence, le f. Vince vous<br />

remplacera, mais, vous présent, il ne sera que votre assistant; il est bien nécessaire que les<br />

choses soient nettement posées ainsi, autrement il y aurait malaise, embarras dans la situa‐<br />

tion, la communauté et les œuvres en souffriraient; vous le comprendrez aisément, cher<br />

ami, et je pense que vous entrerez pleinement à cet égard dans mon sentiment. Vous<br />

nʹavez point à redouter que cet arrangement vous soit un embarras dans la position que<br />

vous êtes contraint <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r encore pour une année dans les affaires; les détails <strong>de</strong> votre<br />

intérieur ne regar<strong>de</strong>nt personne et peuvent rester ignorés <strong>de</strong> tous; vous saurez donc tem‐<br />

porairement concilier la part du Seigneur et celle <strong>de</strong> ce mon<strong>de</strong> jusquʹau jour bien heureux<br />

où, tous les liens terrestres étant brisés, vous serez tout entier au service du Seigneur, non<br />

plus seulement <strong>de</strong> cœur comme aujourdʹhui, mais dans tous les moments et actes <strong>de</strong> votre<br />

vie.<br />

Adieu, bien cher ami et fils en N.S., assurez tous nos amis <strong>de</strong> nos cordiales affec‐<br />

tions; je ne sais pas encore le jour précis où commencera notre retraite; jʹen ferai prévenir<br />

notre cher M. Giraud; priez‐le dʹapporter <strong>avec</strong> lui le petit pantalon quʹil avait montré pour<br />

modèle au f. Maignen et quʹil a oublié <strong>de</strong> lui laisser; je serai bien aise <strong>de</strong> voir sʹil convien‐<br />

drait, comme nous le pensons, pour nos enfants. Nous allons attendre dans peu <strong>de</strong> jours<br />

notre bon ami, M. Tourniquet, qui nous a annoncé son arrivée du 12 au 15 <strong>de</strong> ce mois. Je<br />

joins une petite lettre ici en réponse à celle quʹil mʹa écrite.<br />

Assurez notre jeune ami Crestel <strong>de</strong> mon affection bien vraie; je donne toute appro‐<br />

bation à lʹarrangement que vous proposez, en attendant le moment <strong>de</strong> sa conscription, et je<br />

le verrai venir ensuite <strong>avec</strong> joie ici pour continuer son noviciat; dites aussi quelques mots<br />

bien amicaux à notre cher Ernest Vasseur. Sa petite lettre mʹa fait grand plaisir; quʹil per‐<br />

sévère, il sera un vrai serviteur <strong>de</strong> Dieu, comme son frère dont nous sommes toujours<br />

contents.<br />

Vous ne mʹavez point parlé du jeune Mainville qui paraît bien décidé à se joindre à<br />

nous; le bien quʹon mʹa dit <strong>de</strong> lui me fait souhaiter que sa vocation se confirme.<br />

Je ne finirai pas si je voulais mentionner toutes les âmes excellentes dont le Seigneur<br />

vous a entouré; je vous charge pour tous, pour M. Dupetit en particulier, <strong>de</strong> mes sincères<br />

affections et je vous embrasse, cher ami, dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Le f. Vince, qui se console <strong>de</strong> quitter ses frères puisquʹil vous retrouvera pour<br />

lʹaccueillir, vous offre tout particulièrement son respectueux attachement.<br />

357


279 à M. Caille<br />

Retraite d’octobre 1854. Le frère Vince, nouveau profès perpétuel, nommé à Amiens.<br />

[Octobre 1854]<br />

Pour ne pas rouvrir la lettre <strong>de</strong> nos chers frères, je joins seulement ces <strong>de</strong>ux mots:<br />

tout va bien ici, cher ami et fils en N.S., notre retraite est parfaite et tout le mon<strong>de</strong> sʹen<br />

trouve fort édifié. M. Tourniquet va bien. Le f. Vince a obtenu, par exception, permission<br />

<strong>de</strong> prononcer <strong>de</strong>s vœux perpétuels à la fin <strong>de</strong> la retraite [21 octobre 1854]. Ecrivez‐moi à<br />

quelle époque précise vous désirez quʹil se ren<strong>de</strong> à Amiens, il se tiendra disponible. Arrivé<br />

là, il verra <strong>avec</strong> vous, après quelque peu <strong>de</strong> temps, quel sujet vous conviendrait le mieux<br />

pour vous secon<strong>de</strong>r <strong>avec</strong> lui et nous règlerons ainsi mieux les choses parce que, connais‐<br />

sant les sujets et voyant la situation, il pourra donner un avis dont vous ferez tel usage que<br />

vous voudrez. Jʹapprouve vos vues pour les rapports extérieurs, on pourra mettre en avant<br />

le f. Vince mais à lʹintérieur et dans la réalité <strong>de</strong>s choses, vous <strong>de</strong>vrez rester Supérieur bien<br />

nettement posé.<br />

A vous dans le Seigneur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

280 à M. Caille<br />

Charité entre les Œuvres, pas <strong>de</strong> partialité envers certaines. Dévouement <strong>de</strong> M. Vince. Nouvelles <strong>de</strong> Vaugirard et<br />

<strong>de</strong> Nazareth.<br />

Vaugirard, 5 novembre 1854<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Comme vous le pouviez présumer, je recevrai notre jeune Crestel quand vous juge‐<br />

rez à propos <strong>de</strong> lui donner sa feuille <strong>de</strong> route. Ces bons enfants qui vous entourent étant<br />

placés sous votre conduite et surveillance, je vous laisse juge du moment où ils semblent<br />

assez mûrs pour prendre place parmi nous; je trouverais bon même que vous retinssiez tel<br />

ou tel dʹentre eux pour un temps près <strong>de</strong> vous, si vous le croyez nécessaire pour vos œu‐<br />

vres; je désire que tout se fasse toujours entre nous pour le plus grand bien et sans partiali‐<br />

té pour aucune <strong>de</strong> nos entreprises, toutes nous sont chères, puisquʹelles ten<strong>de</strong>nt toutes à la<br />

gloire du Dieu auquel nous nous sommes entièrement consacrés. Que notre jeune Crestel<br />

arrive donc du 11 au 12, nous le recevrons <strong>de</strong> tout notre cœur.<br />

Je vois <strong>avec</strong> peine que vous soyez si fort chargé dʹoccupations et que le nombre <strong>de</strong><br />

vos assistants ne soit pas proportionné à vos travaux. Je vous ai écrit un mot pendant notre<br />

retraite, dans une petite lettre <strong>de</strong>s ff. Thuillier et Tourniquet, afin <strong>de</strong> vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à quel<br />

moment vous désiriez que le f. Vince partît; vous semblez ne lʹavoir point reçu, car vous<br />

ne me répon<strong>de</strong>z point à cet égard. Le f. Vince se tient tout prêt et vous arrivera dès que<br />

vous le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rez. Que la crainte <strong>de</strong> le mal loger ne vous arrête point, il est accoutumé à<br />

mettre son lit partout, ayant été chargé du soin <strong>de</strong> nos enfants mala<strong>de</strong>s; 6 pieds [au] car‐<br />

ré201 suffisent pour son logement. Il désire comme moi que rien ne soit changé aux habitu‐<br />

<strong>de</strong>s <strong>de</strong> pauvreté auxquelles il est accoutumé et qui nous semblent nécessaires dans notre<br />

position. Vous trouverez, je lʹespère, en lui, un ai<strong>de</strong> vraiment utile; il ne se dévoue point à<br />

201 Presque 4 m 2 .<br />

358


<strong>de</strong>mi aux choses dont il est chargé et ne tient compte ni <strong>de</strong> ses fatigues, ni <strong>de</strong> ses peines. Il<br />

a pris <strong>de</strong>s engagements définitifs, à lʹégard <strong>de</strong> la Communauté, on peut donc le regar<strong>de</strong>r<br />

comme un ai<strong>de</strong> aussi soli<strong>de</strong> quʹil sera dévoué.<br />

Tous nos frères vont bien; le f. Tourniquet nʹéprouve aucune difficulté dans sa nou‐<br />

velle condition et semble y avoir été toute sa vie; nous en pensons beaucoup <strong>de</strong> bien et<br />

nous augurons très favorablement <strong>de</strong> son avenir, il se rappelle tout particulièrement à vo‐<br />

tre souvenir ainsi que vos enfants Vasseur et Thuillier.<br />

Nous avons eu ces jours <strong>de</strong>rniers lʹadoration <strong>de</strong>s Quarante Heures dans notre mai‐<br />

son <strong>de</strong> Vaugirard; cʹest une solennité bien édifiante et pleine <strong>de</strong> consolation.<br />

On travaille à notre petite chapelle du Montparnasse, que nous nommons chapelle<br />

<strong>de</strong> Nazareth; je pense que son agrandissement sera terminé pour Noël; elle pourra recevoir<br />

500 personnes.<br />

Je ne vous reproche point <strong>de</strong> nous écrire si brièvement et à si longs intervalles,<br />

puisque vos occupations vous en empêchent; nous en souffrons, car les seuls moyens <strong>de</strong><br />

rendre notre séparation moins dure, cʹest lʹunion <strong>de</strong> nos coeurs dans la prière et les rap‐<br />

ports <strong>de</strong> la charité.<br />

Adieu, bien cher ami et fils en N.S., je vous embrasse pour tous bien tendrement en<br />

N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Mille affections à nos amis, particulièrement à notre cher Ernest Vasseur que nous<br />

regardons déjà comme <strong>de</strong> la famille. Je ne nomme point les autres, mais vous saurez bien<br />

nʹen oublier aucun.<br />

Avez‐vous reçu la statue en bon état? Je vais faire chercher celles que vous me <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>z.<br />

281 à M. Caille<br />

MLP. laisse un jeune postulant retourner à Amiens. Nouvelles <strong>de</strong> la Communauté. Démarches qu’il a effectuées<br />

pour M. Caille.<br />

Vaugirard, 16 novembre 1854<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Notre jeune Crestel nous est arrivé lundi en bonne santé, mais lʹair <strong>de</strong> la Commu‐<br />

nauté ne lui va pas; il regrette ses parents, Amiens, sa position à la Provi<strong>de</strong>nce 202 et me<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> instamment <strong>de</strong> vous écrire, afin que vous tâchiez <strong>de</strong> lui faire retrouver sa place<br />

dans ce collège. Sʹil était moins jeune, je lʹengagerais à persévérer et à surmonter ces im‐<br />

pressions <strong>de</strong>s premiers moments, mais à son âge et <strong>avec</strong> un caractère si peu fait, on ne<br />

donne pas beaucoup <strong>de</strong> prise à la raison; je ne fais donc aucune objection à sa <strong>de</strong>man<strong>de</strong> et<br />

vous la transmets, afin que vous tâchiez <strong>de</strong> la satisfaire. Il est possible que plus tard, ayant<br />

acquis un peu plus dʹexpérience, <strong>de</strong> lumière et <strong>de</strong> fermeté, il revienne, dans une voie ou<br />

dans une autre, au service <strong>de</strong> Dieu, mais je crois que, présentement, il peut être utile <strong>de</strong> le<br />

laisser mûrir ses bonnes dispositions.<br />

Il vous prie <strong>de</strong> vous adresser au r.p. Jardinier qui pourrait arranger la chose <strong>avec</strong> le<br />

r.p. Ministre.<br />

202 Collège tenu par les Pères Jésuites à Amiens.<br />

359


Il dit que sa principale raison pour sʹattrister, cʹest que son père, au moment <strong>de</strong> son<br />

départ, lui a répété quʹil lui donnait son consentement à regret. Je crois, pour moi, quʹil<br />

cè<strong>de</strong> à un moment <strong>de</strong> découragement; ses <strong>de</strong>ux amis, MM. Vasseur et Thuillier, ont été ces<br />

jours‐ci un peu souffrants; le premier, dʹune sorte <strong>de</strong> mouvement <strong>de</strong> sang, lʹautre dʹune pe‐<br />

tite éruption; ils nʹont pu sʹoccuper beaucoup <strong>de</strong> lui; nos exercices aussi, un peu relevés<br />

pour lui, au premier abord, lui ont fait douter <strong>de</strong> lui‐même. Avec un peu <strong>de</strong> patience, il y<br />

eût trouvé sa part, car M. Thuillier, qui nʹest guère plus instruit que lui, a fini par y pren‐<br />

dre beaucoup <strong>de</strong> goût et dʹintérêt; mais il avait une volonté plus ferme et plus consistante.<br />

Le jeune Ernest Vasseur a écrit ces jours‐ci à son frère, par lʹoccasion du voyage <strong>de</strong><br />

M. Crestel, une lettre bien pressante pour obtenir quʹon lui fît enfin sa place parmi nous; je<br />

vous laisse juge <strong>de</strong> ce quʹil convient <strong>de</strong> faire et <strong>de</strong> marquer le temps où son voyage pourra<br />

sʹeffectuer utilement pour lui et pour nous.<br />

Quant à M. Tourniquet, il va très bien, il savait mieux ce quʹil cherchait dans la vie<br />

<strong>de</strong> Communauté; il nʹa point eu <strong>de</strong> mécompte et paraît sʹasseoir soli<strong>de</strong>ment dans sa posi‐<br />

tion.<br />

Nous avons commandé vos quatre lits qui vous seront envoyés en temps opportun.<br />

Nos recherches pour les <strong>de</strong>ux statues <strong>de</strong> S t Joseph et S t Vincent <strong>de</strong> Paul nʹont pas<br />

donné absolument le résultat que vous désiriez, malgré <strong>de</strong>s perquisitions multipliées, nous<br />

nʹavons trouvé quʹun S t Joseph <strong>de</strong> 60 centimètres et un S t Vincent <strong>de</strong> 55, quʹon pourrait por‐<br />

ter à 60, en élevant un peu le pied. Je pense néanmoins que, si ces statuettes sont <strong>de</strong>stinées<br />

à figurer dans <strong>de</strong>s niches, elles iraient bien ensemble et que même autrement, elles seraient<br />

encore dʹun bon effet. Nous attendons votre réponse pour les comman<strong>de</strong>r définitivement.<br />

Adieu, bien cher ami et fils, répon<strong>de</strong>z‐moi bientôt, car votre jeune Crestel est aussi<br />

impatient <strong>de</strong> repartir quʹil lʹétait dʹarriver. Il <strong>de</strong>man<strong>de</strong> vous vous lui envoyiez <strong>de</strong> lʹargent<br />

pour son retour en prenant sur sa caisse. Assurez tous nos amis <strong>de</strong> nos affectueux souve‐<br />

nirs et croyez‐moi toujours, en J. et M.,<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

282 à M. Caille<br />

La Communauté a besoin <strong>de</strong> visages épanouis et ouverts. Les travaux <strong>de</strong> la chapelle <strong>de</strong> Nazareth. Maladie <strong>de</strong><br />

l’abbé Viollat. Arrivée <strong>de</strong> l’abbé Roussel.<br />

Vaugirard, 18 novembre 1854<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Lʹennui <strong>de</strong> votre jeune Crestel ne sʹétant pas dissipé, jʹai pensé quʹil valait mieux le<br />

laisser partir sans plus tar<strong>de</strong>r, comme il le désirait; on est si accoutumé en Communauté à<br />

voir <strong>de</strong>s visages ouverts, <strong>de</strong>s cœurs expansifs, quʹun air triste et contraint met tout le<br />

mon<strong>de</strong> en souffrance. Nous plaignons ce pauvre enfant qui, ayant mal sondé son cœur et<br />

mal étudié aussi les vrais motifs qui lʹattiraient à la vie commune, nʹa trouvé que déception<br />

et affliction dʹesprit. Je nʹai dʹailleurs rien <strong>de</strong> particulier à vous marquer; je nʹai pas voulu<br />

seulement que cette occasion fût perdue pour nos communications et, à défaut dʹautre ma‐<br />

tière, je vous renouvelle au moins lʹassurance du tendre attachement <strong>de</strong> tous vos frères.<br />

Nos travaux <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Nazareth se poussent activement, la chapelle quʹon<br />

achève, vous le savez, sera finie pour Noël; ce sera presque une église, car elle contiendra<br />

360


aisément 500 personnes; ce sera une gran<strong>de</strong> ressource pour les réunions <strong>de</strong> piété et retrai‐<br />

tes <strong>de</strong>s patronages. Située au milieu du quartier si pauvre du Montparnasse, elle servira<br />

aussi parfaitement <strong>de</strong> centre à une Sainte‐Famille; priez bien <strong>avec</strong> nous le Seigneur pour<br />

que ce nouveau moyen quʹIl met entre nos mains ne soit pas mal utilisé et que nous ré‐<br />

pondions bien aux <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> la divine Miséricor<strong>de</strong>.<br />

Je recomman<strong>de</strong> à vos prières le <strong>de</strong>rnier admis <strong>de</strong> nos ff. ecclésiastiques, notre bon<br />

abbé Viollat 203 ; un rhume, quʹil avait déjà négligé au<br />

Séminaire, est revenu <strong>de</strong>puis lʹhiver et le met dans<br />

lʹimpuissance <strong>de</strong> parler et même <strong>de</strong> confesser; il<br />

gar<strong>de</strong> presque constamment la chambre et sa<br />

poitrine, auscultée par le mé<strong>de</strong>cin, ne lʹa pas laissé<br />

sans inquiétu<strong>de</strong>. Nous ne désespérons pas toutefois,<br />

mais il faut beaucoup prier. Nous nous plaisons à<br />

penser que cette inaction et incapacité temporaire<br />

<strong>de</strong> notre ami est provi<strong>de</strong>ntiellement arrangée pour<br />

ménager lʹentrée dʹun autre frère ecclésiastique,<br />

lʹabbé Roussel 204 , qui va être ordonné à Noël et qui<br />

nous est disputé <strong>de</strong> divers côtés assez vivement. Le<br />

malaise où la maladie <strong>de</strong> M. Viollat met nos œuvres<br />

plai<strong>de</strong>ra en notre faveur et nous ai<strong>de</strong>ra, nous<br />

lʹespérons, à obtenir <strong>de</strong> M gr lʹArchevêque un<br />

nouveau témoignage <strong>de</strong> bienveillance et <strong>de</strong> protec‐<br />

tion.<br />

Adieu, bien cher ami,, nous ne nous<br />

soutenons que par la prière; toutes nos œuvres<br />

sont tellement au‐<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> nos forces ou plutôt<br />

<strong>de</strong> notre faiblesse que lʹintervention constante<br />

du secours divin est évi<strong>de</strong>nte pour nous; cʹest ce<br />

qui nous rend forts et confiants, car, moins il y a<br />

<strong>de</strong> lʹhomme dans les œuvres, et plus Dieu sʹy<br />

manifeste et y montre sa puissance et sa bonté.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹattends votre réponse pour le S t ‐Joseph<br />

et le S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul.<br />

203 M. l'abbé Eugène Viollat, né en 1826, ordonné prêtre le 10 juin 1854, était entré en Communauté le 26 juin. Resté novice, il va<br />

mourir quelque dix mois plus tard le 5 mai 1855. Ce sera le premier défunt <strong>de</strong> la Congrégation.<br />

204 Louis Roussel (1825-1897). Prêtre le 23 décembre 1854, ce jeune séminariste, protégé <strong>de</strong> l'abbé Desgenettes, curé <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong>s<br />

Victoires, entre chez les Frères <strong>de</strong> St-Vt-<strong>de</strong>-Paul, une semaine plus tard. Onze ans durant, il va exercer un fructueux ministère à<br />

Grenelle. Mais les démêlés <strong>avec</strong> le curé <strong>de</strong> Grenelle auront raison <strong>de</strong> sa persévérance et il quitte l'Institut le 17 novembre 1865.<br />

Aumônier du collège Stanislas, il fon<strong>de</strong>ra l'Orphelinat d'Auteuil que l'Institut (abbés Fontaine et Blétit) dirigera <strong>de</strong> 1895 à 1914.<br />

361


283 à M. Decaux<br />

Deman<strong>de</strong> pour que soit renouvelée l’ai<strong>de</strong> aux Saintes‐Familles, si bienfaisantes pour les pauvres.<br />

Paris, 11 décembre 1854<br />

Monsieur le Vice‐Prési<strong>de</strong>nt et cher Confrère,<br />

Le Conseil <strong>de</strong> Paris sʹest occupé lʹan <strong>de</strong>rnier <strong>de</strong> lʹœuvre <strong>de</strong> la Sainte‐Famille et il a<br />

bien voulu lui accor<strong>de</strong>r un secours <strong>de</strong> 1.000f pour ai<strong>de</strong>r les réunions pauvres et favoriser<br />

lʹétablissement <strong>de</strong> quelques nouveaux foyers <strong>de</strong> lʹŒuvre.<br />

Cette allocation encourageante a atteint son but; toutes les réunions anciennes se<br />

soutiennent bien et le nombre total <strong>de</strong>s Saintes‐Familles sʹest encore accru; on en compte<br />

maintenant 11 à Paris; enfin, 3 ou 4 autres sont en voie <strong>de</strong> fondation et, selon toute appa‐<br />

rence, verront le jour très prochainement.<br />

Le Conseil <strong>de</strong> Paris et en général aussi toutes nos Conférences apprécient si bien<br />

lʹutilité <strong>de</strong> ces réunions instructives, consolantes pour nos pauvres, si édifiantes pour<br />

nous‐mêmes, quʹil nʹest pas besoin dʹen faire ressortir ici lʹavantage. Cʹest le vœu <strong>de</strong> tous<br />

quʹon puisse successivement dans les divers quartiers ménager aux familles visitées par<br />

nous un moyen si puissant pour les moraliser et les ramener à Dieu. Aussi avons‐nous la<br />

confiance que nos Confrères du Conseil <strong>de</strong> Paris ne refuseront pas plus cette année que<br />

362


lʹan <strong>de</strong>rnier dʹassister lʹœuvre en lui accordant un nouveau secours. Sans cet appui vrai‐<br />

ment nécessaire, les Saintes‐Familles, isolées et sans lien, impuissantes à sʹassister lʹune<br />

lʹautre, languiraient et seraient arrêtées dans leur développement. Une somme relative‐<br />

ment bien modique suffira au contraire pour les soutenir et les stimuler efficacement, elle<br />

sera lʹoccasion dʹun grand bien moral et religieux, en même temps quʹelle témoignera du<br />

zèle du Conseil <strong>de</strong> Paris pour les intérêts spirituels <strong>de</strong> nos pauvres.<br />

Veuillez croire, Monsieur le Vice‐Prési<strong>de</strong>nt et cher Confrère, à tous mes sentiments<br />

les plus dévoués en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

284 à M. Caille<br />

Nouvelles <strong>de</strong>s Frères. Projet <strong>de</strong> voyage à Amiens. Vocation du frère Tourniquet.<br />

Vaugirard, 14 décembre 1854205 Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Aucun signe <strong>de</strong> vie ne nous arrive dʹAmiens; nous supposons toutefois que tout va<br />

bien autour <strong>de</strong> vous, car, si vous aviez quelque peine ou difficulté, vous ne manqueriez<br />

pas, jʹen ai la confiance, <strong>de</strong> nous les faire partager. Nous allons bien ici <strong>de</strong> notre côté, sauf<br />

notre bon abbé Viollat, dont je vous ai déjà dit la maladie. Sa poitrine, très faible, a été re‐<br />

connue par les mé<strong>de</strong>cins attaquée assez gravement pour donner <strong>de</strong> sérieuses inquiétu<strong>de</strong>s;<br />

nous aimons à espérer encore néanmoins que <strong>de</strong>s soins et du temps pourront triompher <strong>de</strong><br />

son mal. Je le recomman<strong>de</strong> bien à vos prières. Je vous les <strong>de</strong>man<strong>de</strong> également pour M.<br />

lʹabbé Roussel, qui va être ordonné définitivement dans huit jours et qui a <strong>de</strong>puis long‐<br />

temps la volonté dʹentrer parmi nous; on paraît aussi disposé à lʹArchevêché à lʹaccor<strong>de</strong>r à<br />

notre petite famille, ce serait une précieuse acquisition, il est fort pieux et dʹun grand zèle.<br />

Jʹattendrai votre avis pour vous envoyer le f. Vince. Je ne refuse pas, quant à moi, <strong>de</strong><br />

lʹaccompagner, si vous le désirez particulièrement, pour assister à la bénédiction <strong>de</strong> votre<br />

maison. Cependant, je crois quʹil serait mieux que je différasse<br />

quelque peu ce voyage. Ma fête ayant lieu le 27 décembre, nos<br />

frères et nos enfants ne me laisseraient pas mʹabsenter pour ce<br />

jour‐là; je serais donc obligé <strong>de</strong> revenir ici le len<strong>de</strong>main <strong>de</strong> Noël,<br />

presque immédiatement après mon arrivée. Dans quelques<br />

semaines, au contraire, quand la maison sera un peu installée,<br />

quʹon commencera à sʹy reconnaître et à asseoir la situation, je<br />

pourrai venir pour une huitaine <strong>de</strong> jours, afin <strong>de</strong> visiter cette<br />

petite famille naissante et lʹencourager dans ses<br />

commencements. Voyez si ce parti nʹest pas le meilleur; je me<br />

rendrai à votre désir quel quʹil soit.<br />

Vos <strong>de</strong>ux statuettes nʹont pu encore vous être envoyées,<br />

parce que le moule du St Vincent était détruit et quʹon a dû le<br />

refaire; elles partiront prochainement <strong>avec</strong> <strong>de</strong>ux Vierges.<br />

205 Au len<strong>de</strong>main <strong>de</strong> cette lettre, vendredi 15 décembre, on lit au Journal <strong>de</strong> la Communauté: "procession <strong>de</strong> joie en l'honneur <strong>de</strong> la<br />

définition <strong>de</strong> l'Immaculée Conception." Et au 8 décembre : "la fête a été célébrée <strong>avec</strong> toute la solennité possible et les cœurs sont<br />

remplis d'une bien douce joie sous l'influence du grand événement qui vient <strong>de</strong> s'accomplir".<br />

363


Vos enfants dʹAmiens vont bien et nous donnent toute satisfaction; le <strong>de</strong>rnier venu,<br />

M. Tourniquet, a une droiture <strong>de</strong> cœur parfaite, sa vocation semble bien prononcée, il a le<br />

désir du bien à un <strong>de</strong>gré vraiment édifiant; tout ce petit mon<strong>de</strong> vous est toujours tendre‐<br />

ment attaché; écrivez‐nous vite, tous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt constamment <strong>de</strong> vos nouvelles.<br />

Adieu, bien cher ami, vous savez aussi quel est mon tendre attachement pour vous,<br />

priez bien pour nous; vous êtes dans toutes nos prières; nous faisons la neuvaine en ce<br />

moment pour lʹordination <strong>de</strong> M. lʹabbé Roussel; unissez‐vous à nous.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

284‐1 206 à Mgr Angebault<br />

Etat <strong>de</strong> la Communauté et <strong>de</strong>s Oeuvres. L’année 1854, année du déménagement à Vaugirard. Beaucoup <strong>de</strong> char‐<br />

ges difficiles à maîtriser.<br />

Vaugirard 15 janvier 1855<br />

Monseigneur,<br />

Le premier mois <strong>de</strong> lʹannée est déjà à <strong>de</strong>mi écoulé et vos enfants <strong>de</strong> Paris ne sont pas<br />

encore venus pour vous offrir leurs hommages et leurs vœux. Dʹoù vient donc tant <strong>de</strong> re‐<br />

tard; ont‐ils donc oublié vos bontés paternelles, vos précieuses directions, la tendre recon‐<br />

naissance quʹils vous ont vouée? Oh non, Monseigneur, tout cela est encore vivant au fond<br />

<strong>de</strong> leurs cœurs et ne sʹen effacera jamais; seulement ils sont faibles et bien peu expérimen‐<br />

tés encore dans la voie sainte où le Seigneur a daigné les faire entrer sous vos auspices, et<br />

les moindres tâches sont pour eux un pesant far<strong>de</strong>au; ils plient donc sous le faix et gémis‐<br />

sent incessamment <strong>de</strong> leur insuffisance. Daignez leur pardonner, Monseigneur, et être<br />

bien assuré que nonobstant leur apparente négligence, jamais ils ne furent remplis pour<br />

vous <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> vénération et <strong>de</strong> gratitu<strong>de</strong>, jamais ils ne firent pour vous et pour votre<br />

peuple <strong>de</strong>s souhaits plus ar<strong>de</strong>nts, jamais enfin ils ne désirèrent plus vivement le bonheur<br />

<strong>de</strong> vous voir, dʹentendre vos douces et affectueuses exhortations, <strong>de</strong> recevoir votre pater‐<br />

nelle bénédiction. Puisse le Seigneur les exaucer, donner succès à vos saintes entreprises et<br />

vous gar<strong>de</strong>r <strong>de</strong> bien longues années à lʹamour <strong>de</strong> votre troupeau. Puisse‐t‐il aussi ménager<br />

dans sa bonté quelquʹoccasion propice qui vous ramène parmi nous et nous donne la joie<br />

<strong>de</strong> vous entourer <strong>de</strong> nos empressements respectueux et toujours dévoués.<br />

Depuis que nous avons eu le bonheur <strong>de</strong> vous voir, Monseigneur, nous avons eu<br />

quelques pas assez ru<strong>de</strong>s à franchir; il nous a fallu transporter en février <strong>de</strong> lʹannée <strong>de</strong>r‐<br />

nière, notre maison dʹorphelins et le siège principal <strong>de</strong> notre petite Communauté à Vaugi‐<br />

rard, sur un terrain acquis par nous et dans <strong>de</strong>s bâtiments construits presquʹentièrement<br />

par nos soins. Le troupeau <strong>de</strong> nos enfants est <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 100, ce nʹétait pas une entreprise<br />

sans difficulté <strong>de</strong> les installer convenablement dans leur nouvelle <strong>de</strong>meure <strong>avec</strong> tout le<br />

personnel <strong>de</strong> ceux qui les dirigent, les instruisent, et veillent nuit et jour sur eux. La divine<br />

bonté du Seigneur a pourvu à tout; nous sommes établis supportablement pour le présent<br />

et dans <strong>de</strong>s conditions parfaites pour lʹavenir.<br />

206 C'est l'ancienne 343-1 (tome IX <strong>de</strong> la précé<strong>de</strong>nte édition <strong>de</strong>s <strong>Lettre</strong>s <strong>de</strong> MLP.)<br />

364


Dʹune autre part, nous avons toujours notre petite maison <strong>de</strong> Grenelle; lʹétablisse‐<br />

ment charitable <strong>de</strong> la rue du Regard à Paris; un autre qui se construit sur lʹemplacement<br />

<strong>de</strong>stiné primitivement aux Capucins, enfin un aussi qui se fon<strong>de</strong> définitivement à Amiens.<br />

Votre Gran<strong>de</strong>ur verra par cette énumération sommaire, combien nous <strong>de</strong>vons nous<br />

trouver chargés par tant dʹœuvres ensemble, <strong>avec</strong> une petite famille qui nʹa guère que 20<br />

membres, ecclésiastiques, laïcs et frères <strong>de</strong> travail compris. Nous nous sommes pourtant<br />

bien souvent répété vos sages avis, Monseigneur, sur les inconvénients <strong>de</strong>s charges trop<br />

multipliées, mais nous cédons à <strong>de</strong>s nécessités impérieuses et quʹil ne dépend pas <strong>de</strong> nous<br />

<strong>de</strong> maîtriser. Nous espérons que le bon Maître auquel nous avons cru obéir continuera <strong>de</strong><br />

nous assister et <strong>de</strong> prêter à notre faiblesse son tout‐puissant appui.<br />

Au milieu <strong>de</strong> nos travaux un peu ru<strong>de</strong>s, <strong>de</strong> notre pauvreté accrue par la disette <strong>de</strong><br />

lʹannée 207 , nous <strong>de</strong>meurons tous fermement attachés à notre petit institut, tendrement unis<br />

entre nous et dévoués sans restriction à nos œuvres. Pas un ne faiblit et ne reste en arrière,<br />

tous marchent ensemble priant, travaillant et bénissant Dieu. Nʹest‐Il pas en effet, bien mi‐<br />

séricordieux pour nous, et nʹa‐t‐Il pas tiré <strong>de</strong> notre nullité bien plus que nous eussions dû<br />

attendre? Soyez assez bon, Monseigneur, pour lʹen remercier <strong>avec</strong> nous et pour lui <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>r la continuation <strong>de</strong> ses tendres et généreuses con<strong>de</strong>scendances.<br />

Nous comptons parmi ses plus précieuses faveurs la protection et l’intérêt paternel<br />

dont vous daignez nous couvrir, nous espérons quʹIl nous conservera un bien si cher pour<br />

nous. A défaut <strong>de</strong> votre présence et <strong>de</strong> vos avis tout directs, votre parole écrite dans lʹex‐<br />

cellent et tout aimable livre que vous nous avez envoyé nous a constamment instruits du‐<br />

rant cette <strong>de</strong>rnière année; nous en faisions notre lecture spirituelle commune <strong>de</strong> chaque<br />

jour et jʹose répondre que pas une phrase, pas un avis, une observation nʹauront été perdus<br />

pour la petite famille. Ainsi me flattai‐je, Monseigneur, quʹen nous visitant vous nous<br />

trouverez encore plus vôtres que par le passé, nous aurons gardé quelque chose <strong>de</strong> votre<br />

saint zèle, <strong>de</strong> votre constance généreuse, en un mot <strong>de</strong> votre esprit qui est celui <strong>de</strong> Jésus<br />

qui vit en vous.<br />

Tous ensemble, notre p. Beaussier <strong>avec</strong> nous, nous nous agenouillons à vos pieds<br />

pour recevoir votre bénédiction dʹEvêque et <strong>de</strong> Père.<br />

Votre très respectueux et soumis fils en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

285 à M. Caille<br />

Les frères Vince et Thuillier sʹapprêtent à partir pour Amiens. MLP. reçoit peu <strong>de</strong> nouvelles <strong>de</strong> M. Caille.<br />

Vaugirard 24 janvier 1855<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Les ff. Vince et Thuillier nʹatten<strong>de</strong>nt pour partir quʹun avis <strong>de</strong> votre part; dites‐moi<br />

quel jour vous désirez quʹils arrivent et ils répondront à votre appel; dites‐moi aussi si<br />

vous pensez que la bénédiction <strong>de</strong> votre chapelle ait lieu définitivement le 2 février, je<br />

mʹarrangerai pour y venir si vous croyez que ce soit utile. Je pensais que vous mʹécririez<br />

pour me donner dʹune façon précise et positive cette indication, vos vues, lorsque vous<br />

207<br />

L'année 1854 s'était signalée en France par une très mauvaise récolte céréalière, <strong>de</strong>rnière crise <strong>de</strong>s subsistances que le pays ait<br />

connue.<br />

365


êtes venu nous voir, ne mʹayant pas paru encore absolument arrêtées; comme je ne reçois<br />

point dʹavis <strong>de</strong> votre côté, je crains que nous ne nous soyons mal entendus.<br />

Tous vont bien ici, sauf notre ami M. Viollat, toujours en même état; nous avons eu<br />

aussi plusieurs enfants mala<strong>de</strong>s et lʹun dʹeux est décédé, nous le menons aujourdʹhui à sa<br />

<strong>de</strong>rnière <strong>de</strong>meure. Cʹétait un bon petit enfant bien préparé, pré<strong>de</strong>stiné, nous le croyons,<br />

par le Seigneur.<br />

Jʹai peine à tenir ma plume, tant le froid est en ce moment saisissant; croyez, cher<br />

ami, à toute notre tendre affection en N.S.<br />

Votre dévoué ami et Père en J.C.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

286 à M. Vince<br />

M. Vince accueilli à Amiens; regret <strong>de</strong> s’en être séparé. Nécessité <strong>de</strong> l’oraison et du recueillement: porter ʺDieu<br />

<strong>avec</strong> vous au fond du coeurʺ. Règlement particulier et esprit intérieur; fixer régulièrement l’heure du lever et du<br />

coucher. L’esprit <strong>de</strong> charité est l’esprit <strong>de</strong> la famille <strong>de</strong> MLP.<br />

Vaugirard, 11 février 1855<br />

Bien cher enfant en N.S.<br />

Votre petite lettre nous a bien consolés, nous avions besoin <strong>de</strong> recevoir <strong>de</strong>s nouvel‐<br />

les dʹAmiens, quoique nous ne dussions pas raisonnablement en attendre si tôt. Cʹest vous<br />

dire, bien cher ami, quʹen acceptant le sacrifice <strong>de</strong> notre séparation, nous ne laissons pas<br />

dʹen sentir la peine; le Seigneur nʹen est point offensé; il nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> seulement <strong>de</strong> faire<br />

passer par <strong>de</strong>ssus ces impressions du cœur sa très sainte volonté, sa gloire, son service;<br />

nous y sommes très disposés, tout donc est dans lʹordre et dans lʹesprit <strong>de</strong> notre divin Sei‐<br />

gneur. Tous nos frères ont été heureux <strong>de</strong>s détails que je leur ai rapportés dʹAmiens208 ; le<br />

bon accueil quʹon vous a fait, les conditions si satisfaisantes <strong>de</strong> votre maison, les appuis<br />

bienveillants que tant <strong>de</strong> Confrères dévoués vous donnent, tout a paru à nos frères consti‐<br />

tuer un ensemble <strong>de</strong> circonstances tout provi<strong>de</strong>ntiel et qui manifeste bien la protection que<br />

Dieu daigne vous accor<strong>de</strong>r. Ayez donc bonne confiance, très cher ami, abandonnez‐vous à<br />

la conduite <strong>de</strong> cet adorable Maître et soyez assuré que si, dans les premiers temps, vous<br />

avez quelque difficulté à concilier <strong>avec</strong> vos travaux <strong>de</strong>s exercices dont vous sentez le be‐<br />

soin, vous en trouverez un peu plus tard les moyens; ayez patience, mettez votre désir aux<br />

pieds du Seigneur, ten<strong>de</strong>z doucement et persévéramment aux fins qui vous paraîtront dé‐<br />

sirables et vous y arriverez en temps opportun. Je pense <strong>avec</strong> vous que nous ne pourrions<br />

nous soutenir sans un peu dʹoraison, <strong>de</strong> recueillement aux pieds du divin Maître, <strong>de</strong> nour‐<br />

riture spirituelle en un mot; mais il nʹest pas mal que vous en soyez momentanément privé<br />

pour en mieux sentir le prix et vous montrer ensuite bien fidèle à en profiter quand ils<br />

vous seront rendus. Nʹoubliez pas dʹailleurs, très cher ami, quʹen toute occupation et situa‐<br />

tion quelconque, vous portez Dieu <strong>avec</strong> vous au fond du cœur; lʹy chercher souvent, lʹy<br />

adorer cœur à cœur, reprendre votre force en Lui est un doux et facile exercice qui repose<br />

et vivifie; <strong>avec</strong> cela, vous ne défaillerez point dans le chemin.<br />

208 Le 2 février, fête <strong>de</strong> la Présentation, avait eu lieu la bénédiction <strong>de</strong> la chapelle <strong>de</strong> l'Œuvre d'Amiens. MLP. y installa la première<br />

communauté <strong>de</strong> province, le patronage ND. du Bon-Secours. En 1868, un second patronage, placé sous le vocable <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong>s<br />

Victoires, ouvrira ses portes à Amiens.<br />

366


Je crois assez bien disposé lʹordre <strong>de</strong> votre journée tel que vous me lʹindiquez; mar‐<br />

chez provisoirement ainsi, peu à peu vous tomberez dans le moule qui vous convient et<br />

vous y prendrez votre forme; pour cela, il faut rester un peu souple et nʹavoir point <strong>de</strong> vo‐<br />

lonté trop arrêtée sur <strong>de</strong>s points <strong>de</strong> détails; gar<strong>de</strong>z seulement et bien précieusement le<br />

fond qui est lʹesprit intérieur, la dépendance constante <strong>de</strong> la grâce, le dévouement sans ré‐<br />

serve à Dieu et aux âmes.<br />

Je crois quʹil est bien essentiel que notre f. Caille et vous avisiez à fixer régulière‐<br />

ment lʹheure du coucher et du lever, sans cela vous nʹaurez rien dʹordonné dans vos jour‐<br />

nées; car, si le commencement et la fin ne sont pas déterminés, comment le milieu le serait‐<br />

il? Puis, vous vous exposeriez ainsi à nʹavoir pas le temps <strong>de</strong> sommeil indispensable. Votre<br />

santé, votre sanctification, vos œuvres en souffriraient également. Sept heures au moins,<br />

pleines et complètes, sont nécessaires; je prie mon bon f. Caille dʹy veiller attentivement.<br />

Je vous recomman<strong>de</strong>, très cher ami, <strong>de</strong> nouveau, dʹêtre bien cordial, bien ouvert<br />

<strong>avec</strong> votre bon f. Caille; il est plus âgé et plus expérimenté que vous, il faut que vous ayez<br />

pour lui une affection respectueuse, déférente et toute douce et confiante en même temps;<br />

il faut aussi que vous soyez bien bon, bien encourageant pour notre cher petit f. Thuillier<br />

qui vous rendra bien aisément charité pour charité. Je vous prends à témoin que cʹest là<br />

lʹesprit <strong>de</strong> notre petite famille à Vaugirard, il faut quʹon le retrouve à Amiens plus fort et<br />

plus parfait encore; autrement, nous dégénérerions dès les premiers pas, ce serait un signe<br />

que nous nʹirions pas bien loin. Je vous dis toutes ces choses, cher ami, en manière dʹépan‐<br />

chement plutôt que <strong>de</strong> conseil, car vous en êtes convaincus comme moi et vous nʹavez pas<br />

moins à cœur que moi <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r la vie <strong>de</strong> notre chère œuvre.<br />

M. Lantiez vous fera un petit coutumier, bien quʹil préten<strong>de</strong> que vous savez autant<br />

que lui lʹordre <strong>de</strong> nos prières et exercices. Faites‐en un petit relevé provisoire, en attendant<br />

quʹil vous prépare celui que vous lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z.<br />

Vos trois lits étaient commandés quand votre lettre est arrivée; je ne pense pas<br />

quʹon les ait faits en autre forme que ceux qui sont ici à lʹinfirmerie; mais M. Myionnet<br />

pense que votre élargissement <strong>de</strong> lʹentourage nʹeût servi quʹà vous faire <strong>de</strong>s lits <strong>de</strong> forme<br />

démesurée sans vous donner un espace suffisant pour nʹêtre pas gêné par les ri<strong>de</strong>aux lors‐<br />

quʹon met ses vêtements.<br />

Le f. Maignen a fait sans retard votre commission pour votre pauvre recommandé;<br />

il a eu quelque petit mérite en cela, car il était ces jours‐ci jusquʹau cou dans les apprêts <strong>de</strong><br />

sa distribution qui a lieu ce soir; nous y allons tous, sauf ceux qui doivent gar<strong>de</strong>r la mai‐<br />

son. On a payé 20f pour le voyage; je les ai avancés. Le petit f. Ernest Vasseur restera aussi.<br />

Il va très bien <strong>de</strong> cœur et dʹesprit et sʹest accoutumé sans nulle difficulté à son nouvel état;<br />

mais, <strong>de</strong>puis trois jours, il a été retenu au lit par une fièvre assez forte; enfin aujourdʹhui<br />

une éruption sʹest manifestée; il a la même indisposition quʹont eue les ff. Hello et Thuil‐<br />

lier; il est bien aujourdʹhui, mais il faudra que cela suive son cours; cʹest un petit tribut<br />

dʹépreuve envoyé par le bon Dieu; le petit frère prend très bien cela, il en sortira meilleur.<br />

Adieu, bien cher ami, tous les frères vous embrassent comme vous savez quʹon le<br />

fait ici, <strong>de</strong> tout cœur et en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

367


Offrez mon respect à M. lʹabbé Cacheleux; il me semble tout dévoué au bien, je crois<br />

que son cœur sera <strong>avec</strong> vous et quʹil vous soutiendra beaucoup. Assurez aussi nos amis <strong>de</strong><br />

notre tendre affection.<br />

287 à M. Caille<br />

Unité spirituelle <strong>de</strong> la Communauté. Conseils <strong>de</strong> régularité et dʹéconomie; travailler <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> la Provi‐<br />

<strong>de</strong>nce.<br />

13 février 1855<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

La lettre ci‐jointe que jʹécris à notre f. Vince nʹest pas moins pour vous que pour lui,<br />

je ne vous écrirai donc pas longuement en particulier, mon affection aime à vous confon‐<br />

dre tous les trois ensemble et à ne voir en vous quʹune unité en N.S., ainsi quʹIl lʹa dit lui‐<br />

même: Quʹils soient un comme nous sommes un209 . Je vous recomman<strong>de</strong> <strong>de</strong> ne pas trop<br />

vous fatiguer et <strong>de</strong> prendre à cette fin le repos et le sommeil dont vous avez besoin; je serai<br />

bien satisfait si vous assignez une heure régulière au lever et au coucher, aux repas et aux<br />

exercices les plus indispensables en piété, la messe, lʹoraison; lʹoffice peut provisoirement<br />

se dire en particulier; quelques instants au moins dʹadoration comme on pourra, quelques<br />

minutes dʹexamen.<br />

Je vous recomman<strong>de</strong> bien aussi dʹadministrer toutes vos dépenses <strong>avec</strong> beaucoup<br />

dʹéconomie; je ne vous vois pas sans peine chargé à la fois <strong>de</strong> faire vivre <strong>de</strong>ux maisons.<br />

Dieu y pourvoira sans doute, mais il faut travailler <strong>avec</strong> Lui, en mesurant les œuvres aux<br />

moyens.<br />

Adieu, bien cher ami, je regrette que nous ne puissions vous ai<strong>de</strong>r autrement que<br />

par nos prières; elles seront au moins ferventes et tirées du fond du cœur.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

288 à M. Caille<br />

Bonnes dispositions <strong>de</strong> la communauté dʹAmiens. Lʹarchevêque <strong>de</strong> Paris charge lʹun <strong>de</strong> ses vicaires généraux <strong>de</strong><br />

le représenter auprès <strong>de</strong> la Congrégation. Reconnaissance diocésaine formelle. importance <strong>de</strong> la correspondance<br />

pour lʹunion <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux communautés.<br />

Vaugirard, 20 février 1855<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je ne vous dirai aujourdʹhui que quelques mots, nʹayant que bien peu <strong>de</strong> temps et<br />

ne voulant pas dʹailleurs consumer le vôtre, qui est précieux, en <strong>de</strong> trop longs entretiens.<br />

Je suis tout heureux <strong>de</strong>s sentiments que vous mʹexprimez; jʹy trouve la confirmation<br />

<strong>de</strong>s bonnes espérances que jʹai conçues sur lʹavenir <strong>de</strong> notre petite communauté dʹAmiens;<br />

jʹy trouve tous les éléments <strong>de</strong> succès que je pouvais souhaiter: dévouement absolu, sim‐<br />

plicité <strong>de</strong> cœur et désir sincère <strong>de</strong> glorifier Dieu; le bon Maître nʹen <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pas davan‐<br />

tage et, quand Il prépare Lui‐même <strong>de</strong> pareils moyens, cʹest quʹIl veut en tirer parti pour<br />

209 Jn 17, 22.<br />

368


sa gloire; ayons donc confiance, cher ami, nous sommes bien petits et bien faibles, mais le<br />

Seigneur est <strong>avec</strong> nous.<br />

Jʹai quelque petit espoir que nos relations <strong>avec</strong> lʹArchevêché, jusquʹici toutes satis‐<br />

faisantes, mais peu fréquentes, vont <strong>de</strong>venir plus habituelles et plus encourageantes en‐<br />

core pour nous. M gr nous a envoyé <strong>de</strong> lui‐même 210 un <strong>de</strong> ses Vicaires Généraux [M. De‐<br />

doue] pour nous apporter <strong>de</strong> sa part lʹassurance <strong>de</strong> son intérêt tout paternel, pour nous vi‐<br />

siter, voir notre intérieur <strong>de</strong> Communauté, nos œuvres, notre règlement. Cet envoyé du<br />

Pontife a été très bon et très affectueux dans sa visite quʹil nous a promis <strong>de</strong> renouveler<br />

souvent. Nous pensons que ces relations pourront amener notre reconnaissance formelle<br />

par lʹautorité diocésaine qui, jusquʹici, ne nous a reconnus que tacitement. Ce serait un pas<br />

en avant pour lʹassiette définitive <strong>de</strong> notre petite Communauté.<br />

Je désire, cher ami, que vous mʹécriviez souvent, ne fût‐ce que quelques mots, et le f.<br />

Vince, moins chargé que vous, achèvera ce que vous nʹaurez pu me dire en détail; il faut<br />

que nous nous sentions vivre ensemble et que nous fassions un peu <strong>de</strong> mouvement et <strong>de</strong><br />

bruit pour ne pas nous laisser oublier les uns aux autres.<br />

Mais surtout ne nous oublions pas <strong>de</strong>vant Dieu, cʹest là que notre union sera gar‐<br />

dée, affermie, et <strong>de</strong>viendra toujours plus intime.<br />

Jʹapprendrais <strong>avec</strong> plaisir que M. <strong>de</strong> Brandt ait consenti à se charger <strong>de</strong> vous; il me<br />

semble que cʹest un homme pieux, intérieur, comme il vous le faut; je prie Dieu <strong>de</strong> lui ins‐<br />

pirer ce qui sera <strong>de</strong> mieux pour vous.<br />

Adieu, bien cher ami, notre petit f. Ernest est rétabli et marche bien, tous sont en<br />

bonne disposition, tous vous aiment et vous embrassent dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong><br />

M.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

289 à M. Vince<br />

Veiller à la pauvreté. Pratiques à suivre pour les pénitences. Qualité fraternelle <strong>de</strong>s rapports en communauté:<br />

union intime, ouverture et confiance entre les frères et envers les Supérieurs.<br />

[20 février 1855]<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z bien <strong>de</strong>s choses, une lettre pour vous, une pour le f. Thuillier,<br />

une pour votre bonne mère; cʹest beaucoup <strong>de</strong> besogne ensemble, vous savez quʹ<strong>avec</strong> les<br />

dérangements multipliés jʹen fais peu chaque jour et je ne puis guère veiller, le sommeil<br />

mʹarrivant toujours trop tôt. Contentez‐vous donc <strong>de</strong> quelques lignes seulement, en sup‐<br />

pléant par les bonnes inspirations <strong>de</strong> votre cœur à tout ce que le mien aimerait à verser<br />

abondamment dans le vôtre.<br />

Nous nʹavons rien <strong>de</strong> nouveau ici, sinon les rigueurs dʹun hiver persistant, neiges,<br />

froid, chemins difficiles, etc., mais néanmoins pas dʹautres mala<strong>de</strong>s que notre Ernest,<br />

maintenant guéri, et Edmond 211 qui sʹest, <strong>de</strong>puis votre départ, toujours affaibli; on lʹa ad‐<br />

210 Mgr Sibour viendra en personne rendre visite à la Communauté, au mois <strong>de</strong> juin 1855. (cf. infra lettre 309).<br />

211 Edmond Azimbeck, petit orphelin <strong>de</strong> Vaugirard, qui s'éteindra le 27 février (cf. infra lettre 293).<br />

369


ministré hier et ce matin il a reçu le Saint Viatique; mais je ne pense pas néanmoins quʹil<br />

soit à lʹextrémité, nous lʹavons vu souvent dans <strong>de</strong>s états pareils.<br />

Nos frères prennent à tout ce qui regar<strong>de</strong> ceux dʹAmiens un tendre et cordial intérêt<br />

qui me charme et me donne la confiance que la séparation nʹaltérera en rien notre union;<br />

contribuez à la conserver en nous écrivant souvent, et surtout en priant souvent et ar‐<br />

<strong>de</strong>mment pour nous. Que <strong>de</strong> forces, que <strong>de</strong> ressources pour nous, pour nos œuvres dans<br />

la prière; oh! prions, cher ami, prions.<br />

Jʹapprouve pleinement la petite chaîne, le Carême surtout, <strong>de</strong>ux ou trois fois la se‐<br />

maine, mais pour une heure ou <strong>de</strong>ux seulement et à <strong>de</strong>s moments où vous nʹavez pas <strong>de</strong><br />

grands mouvements et <strong>de</strong>s travaux manuels; où sera la pénitence, élément indispensable<br />

du salut, sinon dans les communautés? Si celle‐là vous incommodait, il faudrait en cher‐<br />

cher une autre <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> le f. Caille; mettez tout en commun <strong>avec</strong> lui, ayez <strong>avec</strong> lui<br />

lʹouverture, la confiance la plus entière; vos cœurs peuvent sʹentendre, jʹen suis sûr, et il est<br />

si bon <strong>de</strong> se reposer lʹun sur lʹautre! On ne fon<strong>de</strong> les vraies Communautés que par cette in‐<br />

time union; fon<strong>de</strong>z la vôtre ainsi, et vous aurez la paix et la force pour faire le bien.<br />

Où en est lʹaffaire du Directeur, cela mʹintéresse beaucoup.<br />

Soyez bien bon et bien humble <strong>avec</strong> tout le mon<strong>de</strong>, ménagez vos forces, ne négligez<br />

pas vos exercices, rentrez en votre cœur aussi souvent que vous pourrez.<br />

Adieu, cher ami, je vous embrasse tendrement dans les Cœurs Sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je joins ici un billet <strong>de</strong> 100f pour La Flèche; si je le puis, je vais faire quelques lignes<br />

pour votre bonne mère; mais il est bien tard déjà et je voudrais aussi écrire <strong>de</strong>ux mots à<br />

mon fils Thuillier.<br />

Je vous recomman<strong>de</strong> expressément dʹêtre bien économe et <strong>de</strong> ne pousser le f. Caille<br />

à aucune dépense qui ne soit absolument nécessaire; il faut vous en rapporter à mon avis<br />

sur ce point; Dieu veut que nous marchions petitement; je crois pouvoir vous dire quʹau‐<br />

trement vous iriez contre sa volonté.<br />

Le temps me manque aujourdʹhui; je vous enverrai le petit mot pour votre mère<br />

<strong>avec</strong> ma prochaine lettre.<br />

290 à M. Thuillier 212<br />

Importance <strong>de</strong> rester unis dans la prière. Le frère Emile Beauvais est éprouvé dans sa vocation.<br />

[20 février 1855]<br />

Cher petit ami Thuillier,<br />

Je vous fais en hâte quelques lignes pour vous assurer <strong>de</strong> notre tendre affection et<br />

du bon souvenir que tous nos frères vous gar<strong>de</strong>nt. Ils me parlent souvent <strong>de</strong> vous aux ré‐<br />

créations surtout où nous avons un peu dʹépanchement, la même cordialité règne toujours<br />

entre nous; tous sʹenten<strong>de</strong>nt bien et travaillent <strong>de</strong> concert aux œuvres du Seigneur. Je suis<br />

bien sûr aussi que pas un ne vous oublie <strong>de</strong>vant Dieu, tous sont convaincus que cʹest en<br />

212 Firmin Thuillier, profès en 1854, sorti en 1861. F. Emile Beauvais profès en 1855, nommé à Rome en 1869. Chargé du secrétariat<br />

général (sa belle écriture orne une partie <strong>de</strong> nos plus anciens registres), il est surtout le 1 er à faire fonction d'économe général,<br />

<strong>avec</strong> le titre <strong>de</strong> procureur général. Mais ses malversations provoqueront son départ en 1885.<br />

370


cela surtout que consiste notre union et que cela seul peut en assurer la durée. Dites aussi<br />

quelques tendres paroles au Seigneur pour nous; ainsi nos cœurs se trouveront rassemblés<br />

dans son divin Cœur.<br />

M me Lalan<strong>de</strong> va réunir les objets que vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z et nous vous les enverrons<br />

à la première occasion.<br />

Deman<strong>de</strong>z les prières <strong>de</strong> nos ff. dʹAmiens pour le f. Emile qui a quelques peines et<br />

épreuves <strong>de</strong> famille; le seul <strong>de</strong> ses frères qui eût pu soutenir ses parents vient dʹêtre pris<br />

par la conscription; cela pourrait compromettre la vocation <strong>de</strong> notre f. Emile qui tremble<br />

rien quʹà la pensée <strong>de</strong> rentrer dans le mon<strong>de</strong> et <strong>de</strong> quitter le service <strong>de</strong> Dieu; que notre<br />

maison dʹAmiens recomman<strong>de</strong> bien cela au bon Maître, à la S te Vierge, à S t Joseph, à S t Vin‐<br />

cent. Je vous charge <strong>de</strong> le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à notre f. Caille.<br />

Adieu cher enfant, jʹai toujours pour vous la même tendresse et le même dévoue‐<br />

ment en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

291 à M. Decaux<br />

Remerciements pour sa générosité envers les orphelins.<br />

Paris, 24 février 1855<br />

Bien cher ami et frère en N.S.,<br />

Que vous êtes bon <strong>de</strong> faire ainsi <strong>de</strong>s complots charitables <strong>avec</strong> notre excellent M.<br />

Frion pour lʹavantage <strong>de</strong> nos pauvres orphelins; daigne le bon Dieu qui aime tant ceux qui<br />

sont bienveillants et charitables vous récompenser <strong>de</strong> ces aimables et généreuses préve‐<br />

nances. Remerciez bien notre bon ami, M. Frion; je suis allé pour le voir, mais il était ou<br />

sorti ou encore souffrant, je nʹai pu le rencontrer.<br />

Croyez à ma tendre reconnaissance comme à ma vive affection en N.S.<br />

Votre ami et frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

292 à M. Caille<br />

Multiplicité <strong>de</strong>s occupations à Vaugirard. Prière pour les vocations, surtout par saint Joseph. répandre sa dévo‐<br />

tion. MLP. <strong>de</strong>man<strong>de</strong> aussi les lumières divines pour M. Caille lui‐même.<br />

Vaugirard, 8 mars 1855<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai bien tardé à vous écrire, le désir ne me manquait pas, mais je suis si souvent dé‐<br />

rangé quand je veux écrire quʹil pourra mʹarriver quelquefois dʹêtre en retard <strong>avec</strong> vous.<br />

Nʹen prenez aucune peine et gar<strong>de</strong>z‐vous surtout <strong>de</strong> croire à aucun oubli ou négligence <strong>de</strong><br />

cœur; jʹespère que, par là du moins, je ne serai point en faute à votre égard. En ce moment,<br />

les occupations abon<strong>de</strong>nt pour nous; cʹest le temps <strong>de</strong> recueillir quelques ressources pour<br />

nos œuvres et toutes les autres sʹévertuant aussi dans le même moment, cʹest à ne savoir à<br />

qui répondre, tant les mouvements sont hâtés et multipliés.<br />

371


Nous avons en outre nos constructions, cʹest un grand souci et une constante préoc‐<br />

cupation.<br />

Pour votre part aussi, chers amis, vous avez bien aussi vos travaux, je les suis par la<br />

pensée et mʹy associe <strong>de</strong> tout mon cœur. Commencez‐vous à voir clair dans votre situa‐<br />

tion, avez‐vous un peu mesuré vos journées et classé au moins les plus essentiels exerci‐<br />

ces? Le f. Vince mʹavait promis <strong>avec</strong> vous <strong>de</strong> mʹenvoyer un aperçu <strong>de</strong> votre petit règlement<br />

particulier, mais il nʹa point tenu parole; voyez ensemble, cher ami, ce que les circonstan‐<br />

ces où vous êtes ren<strong>de</strong>nt possible et arrangez tout pour le mieux, selon que Dieu vous<br />

lʹinspirera; Il verra votre bon désir et sʹen tiendra satisfait.<br />

Nous allons <strong>de</strong>main matin samedi à N.D. <strong>de</strong>s Victoires pour M. lʹabbé Roussel et<br />

pour notre petit f. Ernest; nous ne manquerons pas <strong>de</strong> prier pour les trois ff. dʹAmiens;<br />

nous aurons, je crois, <strong>de</strong>ux messes: une à lʹautel <strong>de</strong> la S te Vierge, lʹautre à celui <strong>de</strong> S t Joseph,<br />

dont on fait le mois très pieusement à N.D. <strong>de</strong>s Victoires; comme nous invoquerons ce<br />

grand saint, si puissant auprès du divin Jésus! Nous commencerons aussi <strong>de</strong>main la neu‐<br />

vaine qui doit précé<strong>de</strong>r sa fête; je désire bien que vous vous unissiez à nous et que vous<br />

fassiez aussi aimer S t Joseph par votre entourage. Nous allons lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r, en particulier,<br />

quelques ouvrier nouveaux, car nos œuvres en manquent déjà sensiblement et <strong>de</strong> tous cô‐<br />

tés on nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong>s appuis que nous ne pouvons donner, S t Joseph viendra à notre<br />

secours. Je souhaite bien quʹil nous assiste <strong>de</strong> telle sorte que nous puissions aussi fortifier<br />

votre petite communauté, quand il en sera besoin; mettons ces vœux aux pieds du Sei‐<br />

gneur et laissons‐le en déci<strong>de</strong>r selon sa très sage et très adorable volonté.<br />

Jʹai commandé un lit <strong>de</strong> plus <strong>avec</strong> entourage; jʹattends pour les trois autres que vous<br />

mʹayez dit si ce sont <strong>de</strong> grands ou <strong>de</strong> petits lits que vous désirez.<br />

Je nʹoublie pas <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r, comme nous en sommes convenus, la lumière divine<br />

pour bien voir <strong>avec</strong> vous ce que le Seigneur veut touchant votre situation personnelle; jʹai<br />

la confiance quʹIl se chargera lui‐même <strong>de</strong> disposer toutes choses à son gré et nous tracera<br />

par là même la voie que nous <strong>de</strong>vons suivre.<br />

Adieu, mon bien bon ami, bénissons le Seigneur qui a daigné nous unir dans sa<br />

charité et répondons fidèlement à ses <strong>de</strong>sseins sur nous.<br />

Je vous embrasse dans les Cœurs <strong>de</strong> J. <strong>de</strong> M. Tous nos frères se joignent à moi.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

293 à M. Vince<br />

Comment prier. Exercice <strong>de</strong> la présence <strong>de</strong> Dieu. Dévotion à saint Joseph.<br />

8 mars 1855<br />

Très cher enfant,<br />

Je vois dʹici le visage tout sérieux, je pourrais dire mécontent que vous prenez cha‐<br />

que fois que vous pensez ou dites: ʺOn nous oublie à Vaugirard, on ne songe guère à<br />

nous.ʺ Si fait, très cher ami, on pense beaucoup à vous à Vaugirard, on vous aime toujours,<br />

on prie constamment pour vous; seulement celui qui a la mission le plus souvent <strong>de</strong> vous<br />

écrire, étant fort occupé, ne trouve guère le moment <strong>de</strong> cette douce satisfaction. Aujour‐<br />

372


dʹhui, sʹest après la prière du soir quʹil saisit un petit moment luci<strong>de</strong>, bientôt perdu dans le<br />

sommeil, pour vous tracer en hâte quelques lignes.<br />

Il était déjà trop tard, cher ami, quand votre petite lettre est arrivée, notre pauvre<br />

Edmond 213 était déjà <strong>de</strong>vant Dieu qui lʹaura reçu dans sa miséricor<strong>de</strong>, ce pauvre enfant<br />

ayant beaucoup souffert et sʹétant montré doux et patient jusquʹau <strong>de</strong>rnier instant. Priez<br />

pour lui, jʹai la confiance quʹil priera pour nous.<br />

Je ne retrouve point votre lettre sous sa main, je nʹy réponds donc pas bien directe‐<br />

ment, je me souviens seulement que vous vous plaignez <strong>de</strong> peu et mal prier; tâchez dʹai‐<br />

mer et la prière viendra; mais vous dites, cʹest par la prière quʹon obtient la charité et<br />

comment aimer si lʹon ne peut prier? Mettez au moins aux pieds <strong>de</strong> Dieu votre désir dʹai‐<br />

mer et <strong>de</strong> prier, le désir alors est déjà un premier pas vers Dieu et celui qui désire souvent<br />

nʹen reste pas toujours là; adhérez donc à Dieu par la foi, par le désir, par lʹhumble aveu <strong>de</strong><br />

votre impuissance; nʹeussiez‐vous toute votre vie que cela seul à offrir au Seigneur, Il nʹen<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>rait pas davantage et vous trouveriez grâce <strong>de</strong>vant Lui. Ne vous lassez pas <strong>de</strong><br />

vous exercer à la présence <strong>de</strong> Dieu résidant en votre cœur, tâchez dʹy <strong>de</strong>scendre vers Lui<br />

bien <strong>de</strong>s fois chaque jour, jamais vous nʹy viendrez sans lʹy trouvez, ni dʹordinaire sans<br />

lʹentendre; venir à Dieu, lʹécouter, lui répondre, quʹest‐ce donc, sinon cette douce union<br />

tant souhaitée, tant cherchée par vous? Dites‐moi, dans votre prochaine lettre, combien <strong>de</strong><br />

fois par jour vous arrivez à vous retirer ainsi quelque instant au fond <strong>de</strong> votre cœur; jʹes‐<br />

père que ce sera bien souvent.<br />

Tous nos frères vont bien, le petit f. Ernest semble être né dans la Communauté,<br />

tant il y est à lʹaise et en libre mouvement.<br />

Demain matin, (samedi), nous serons à N.D. <strong>de</strong>s Victoires, nous vous porterons<br />

<strong>avec</strong> nous, ainsi que nos ff. Caille et Thuillier, aux pieds <strong>de</strong> la S te Vierge et du bon Père S t<br />

Joseph, nous prierons ar<strong>de</strong>mment pour vous. Nous commençons le même jour la neuvaine<br />

précédant la fête, unissez‐vous à nous; tâchez quʹon aime S t Joseph chez vous et autour <strong>de</strong><br />

vous, il y a tout à gagner à lui être bien affectionné, il peut beaucoup et il est bien bon! Vos<br />

chers Restou sont bien <strong>de</strong> cet avis, ils vous embrassent comme nous le faisons nous‐mêmes<br />

bien affectueusement en N.S., ainsi que mon cher enfant Firmin.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je vous assure que vous aurez ma petite lettre pour votre bonne mère tout prochai‐<br />

nement; en ce moment ma vue se trouble et la plume tombe <strong>de</strong> mes mains.<br />

294 <strong>de</strong> M. Vasseur à M. Vince<br />

P.S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Souhaits <strong>de</strong> bonne fête à lʹoccasion <strong>de</strong> la saint Joseph.<br />

Vaugirard, le 17 mars 1855<br />

Bonjour, cher petit f. Vince, je viens vous faire une petite suavité et vous souhaiter la fête, je<br />

désire que le 19 ème jour du mois soit pour vous comblé <strong>de</strong> grâces et <strong>de</strong> bénédictions. Je prierai le<br />

bon S t Joseph <strong>de</strong> vous couvrir <strong>de</strong> sa protection particulière, je lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rai quʹil vous ren<strong>de</strong> par‐<br />

fait imitateur <strong>de</strong> ses vertus, <strong>de</strong> cette pureté angélique qui lui a mérité dʹavoir pour épouse la plus<br />

213 Cf. supra lettre 289.<br />

373


pure <strong>de</strong>s vierges, <strong>de</strong> son humilité profon<strong>de</strong>, <strong>de</strong> son obéissance aveugle, <strong>de</strong> sa constance aux épreu‐<br />

ves <strong>de</strong> tout genre, et surtout je lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rai quʹil vous obtienne <strong>de</strong> mourir comme lui entre les<br />

bras <strong>de</strong> J. et M.<br />

Le temps me manque, cher bon frère, une autre fois je vous parlerai <strong>de</strong> notre petite Confé‐<br />

rence; je recomman<strong>de</strong> à vos prières Joseph Brugier qui est, en ce moment, assez gravement indis‐<br />

posé.<br />

Adieu, cher petit frère, pensez à moi <strong>de</strong>vant le Seigneur, je ne vous oublie pas.<br />

Tout à vous en Jésus<br />

A. Vasseur<br />

Bien cher enfant,<br />

Je voulais, pour votre fête, vous faire une affectueuse petite lettre; jʹavais bien résolu<br />

aussi dʹy joindre une petite épître pour votre bonne mère, mais le f. Alphonse tient à ce<br />

que son petit grimoire vous arrive aujourdʹhui et ne me laisse pas un moment <strong>de</strong> répit. Je<br />

vous embrasse donc en hâte, mon cher Joseph, mais tendrement, mais en ami, en père qui<br />

vous a adopté pour son enfant et qui vous regar<strong>de</strong>ra comme tel jusquʹau <strong>de</strong>rnier jour.<br />

Nous prierons bien pour vous et pour notre f. Caille et pour notre petit Firmin <strong>de</strong>main,<br />

fête <strong>de</strong> S t Joseph. Oh! ce grand saint sera content, car nous voulons prier, aimer travailler et<br />

obéir comme lui au divin Jésus et faire <strong>de</strong> chacune <strong>de</strong> nos maisons une maison <strong>de</strong> Naza‐<br />

reth.<br />

Adieu encore.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

295 à M. Caille<br />

Observations sur le règlement <strong>de</strong> la maison dʹAmiens. Le Règlement <strong>de</strong> 1855. Union intime entre tous ʺnʹavoir<br />

quʹun cœur et quʹune âmeʺ.<br />

18 mars 1855<br />

Bien cher ami et fils,<br />

Jʹai parcouru votre petit règlement qui me semble bien au premier aspect; observez‐<br />

le <strong>de</strong> votre mieux, nʹy manquez pas par laisser‐aller ou entraînement, ne cé<strong>de</strong>z quʹà une<br />

nécessité réelle, alors le Seigneur sera content et vous tiendra compte <strong>de</strong> ce que vous aurez<br />

pu faire.<br />

Je suis tranquille aussi pour ce qui regar<strong>de</strong> votre avenir, je suis assuré que le bon<br />

Maître en déci<strong>de</strong>ra Lui‐même.<br />

Nous allons bien ici; je mʹoccupe <strong>de</strong> réviser notre règlement214 ; priez bien le divin<br />

Maître afin quʹIl nous éclaire et que nous ne disposions rien que suivant sa sainte volonté.<br />

Offrez bien mon respect à M. lʹabbé Mangot et remerciez‐le bien <strong>de</strong> ma part <strong>de</strong>s<br />

soins quʹil a la bonté <strong>de</strong> vous donner.<br />

Adieu, cher bon ami, nous vous aimons bien tendrement; je suis heureux en voyant<br />

comme nos cœurs sʹenten<strong>de</strong>nt bien dans le Seigneur; jʹai la confiance que la distance ne<br />

nuira en rien à notre union et que nous nʹaurons vraiment quʹun cœur et quʹune âme.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

214 L'autorité diocésaine avait <strong>de</strong>mandé à prendre connaissance du texte <strong>de</strong> nos "Constitutions". Il était urgent pour MLP. <strong>de</strong> le modifier<br />

et <strong>de</strong> le compléter, <strong>de</strong>puis sa <strong>de</strong>rnière rédaction. Dans le courant du mois <strong>de</strong> mai 1855, le "règlement <strong>de</strong> 1855" soumis à M.<br />

Dedoue, Vicaire Général, fut approuvé par lui au nom <strong>de</strong> Mgr Sibour.<br />

374


296 à M. Caille<br />

Observations sur le règlement <strong>de</strong> la communauté: temps <strong>de</strong> repos; nécessité <strong>de</strong> la récréation. Contrôle <strong>de</strong>s dépen‐<br />

ses. Nouvelles <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s. Affaires temporelles.<br />

Vaugirard, 28 mars 1855<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai examiné vos petits règlements provisoires; ils me semblent tels que lʹétat présent<br />

<strong>de</strong>s choses permet <strong>de</strong> les faire et pourront vous soutenir suffisamment, si vous les suivez<br />

aussi bien quʹil vous sera possible. Je remarque seulement que, dans le vôtre, il nʹy a quʹun<br />

quart dʹheure pour dîner, je crois quʹil faudrait un peu plus. Dʹun autre côté, votre lecture<br />

spirituelle en commun, à 2h. 1/2 , étant placée immédiatement après la réception <strong>de</strong>s pauvres<br />

et apprentis, nʹest‐il pas à craindre que, la réception se prolongeant bien souvent, la lecture<br />

ne soit que rarement possible? Enfin, je ne vois pas le plus petit bout <strong>de</strong> récréation com‐<br />

mune; il vous est peut‐être difficile <strong>de</strong> régler les choses autrement, je le reconnais; cʹest<br />

néanmoins une chose regrettable, cet exercice est bien utile en communauté. Nous nʹau‐<br />

rons pas à nous en inquiéter néanmoins si, après examen, vous ne voyez pas <strong>de</strong> place pour<br />

ce moment <strong>de</strong> délassement. Dieu suppléera à tout et remplira Lui‐même tous les vi<strong>de</strong>s<br />

dans nos œuvres et dans notre petite Communauté, ayons donc confiance et reposons‐<br />

nous sur Lui.<br />

Je serai bien satisfait si vous me dites quelques mots <strong>de</strong> temps en temps sur vos dé‐<br />

penses; vous ne pouvez encore guère évaluer, même approximativement, ce que la maison<br />

rue St Jacques vous coûtera annuellement et quelles ressources la Provi<strong>de</strong>nce donnera en<br />

apparence pour y subvenir. Lorsque vous aurez quelque expérience un peu indiquée <strong>de</strong><br />

ces dispositions, je vous prie, cher ami, <strong>de</strong> mʹen faire connaître le résultat. Jʹaurai le cœur<br />

plus content en suivant ainsi vos mouvements dans le temporel comme dans le spirituel,<br />

car nous ne <strong>de</strong>vons sur aucun point <strong>de</strong>meurer étrangers les uns aux autres et nous gagne‐<br />

rons beaucoup à rendre notre union aussi vraie et aussi intime quʹil se pourra.<br />

Nous allons bien ici, sauf quelques indispositions, notre cher abbé Lantiez a une pe‐<br />

tite vérole volante peu marquée, mais qui le retient cependant au lit; cette maladie semble<br />

se cramponner chez nous <strong>de</strong>puis plusieurs mois, et, lʹun après lʹautre, prend tantôt un<br />

frère et tantôt un enfant. Notre pauvre M. Viollat baisse toujours et nous semble atteint<br />

sans remè<strong>de</strong>; il sʹatténue et se réduit à rien. Nʹoubliez pas <strong>de</strong> prier souvent pour lui; cʹest<br />

une belle et pieuse âme qui eût pu faire le bien sur la terre, si le Seigneur ne semblait la<br />

vouloir appeler bientôt au Ciel.<br />

Nos affaires temporelles ne vont pas mal non plus. Lʹhiver a été ru<strong>de</strong> dans notre<br />

maison dʹorphelins, à cause <strong>de</strong> la cherté <strong>de</strong>s <strong>de</strong>nrées, mais nous en voilà sortis sans en‐<br />

combre grâces à Dieu; notre sermon, qui a eu lieu tout récemment, a produit 5.000f, ce sera<br />

un secours utile et dont nous <strong>de</strong>vons remercier le Seigneur.<br />

Notre affaire du Montparnasse marche, un peu lour<strong>de</strong> toujours, mais, là encore,<br />

lʹai<strong>de</strong> du divin Seigneur ne nous fera point défaut.<br />

Adieu, bien cher ami et fils, tous nos frères vous aiment et vous sont tendrement at‐<br />

tachés; faisons tous ensemble une famille bien fermement unie et le Seigneur se complaira<br />

au milieu <strong>de</strong> nous.<br />

Votre ami et Père affectionné en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

375


297 à M. Vince<br />

Règlement et lectures <strong>de</strong> communauté. Rester en dépendance vis‐à‐vis <strong>de</strong> Dieu. Ouverture <strong>avec</strong> les Supérieurs.<br />

Vaugirard, 28 mars 1855<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai lu <strong>avec</strong> un vif intérêt votre petit règlement et celui <strong>de</strong>s ff. Caille et Firmin. Je<br />

crois quʹils sont bien ainsi provisoirement, sauf quelques petites observations que je fais au<br />

f. Caille et qui nʹont peut‐être pas dʹapplication possible en ce moment.<br />

Le titre du petit livre <strong>de</strong> saint François <strong>de</strong> Sales que nous avons lu autrefois est: Les<br />

Entretiens Spirituels; nous lʹavons repris ces temps‐ci et nʹen avons interrompu la lecture<br />

que pour prendre durant ces <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rnières semaines <strong>de</strong> Carême quelque lecture sur la<br />

passion du Seigneur. Nous avons lu aussi en son temps un panégyrique <strong>de</strong> saint Joseph.<br />

Je ne suis pas bien sûr que vous goûtiez beaucoup en lecture commune les Entre‐<br />

tiens <strong>de</strong> saint François <strong>de</strong> Sales; vous pourriez cependant en essayer.<br />

Le f. Paillé vous enverra, à la prochaine occasion, les petits catéchismes, le livre <strong>de</strong><br />

Mgr dʹAngers. Pour le lire <strong>de</strong> nos méditations, il me semble tout à fait semblable à celui que<br />

vous avez à Amiens, je ne comprends pas bien quelle différence vous y trouvez.<br />

Le f. Paillé va vous écrire ces jours‐ci pour vous dire le résultat qu’aura eu la retraite<br />

<strong>de</strong>s Gobelins qui est en ce moment donnée par le p. Capouillet. Elle va assez bien jusqu’ici.<br />

Notre p. Lantiez vous enverra aussi le coutumier; il est en ce moment retenu au lit<br />

par une petite vérole volante assez légère, mais qui veut, vous le savez, <strong>de</strong>s soins durant<br />

quelques jours.<br />

Tous nos frères vous aiment et veulent tous vous écrire, je ne sais si quelquʹun dʹeux<br />

aura fait quelque petit griffonnage pour aujourdʹhui; tous vous embrassent.<br />

Jʹai vu ces jours‐ci nos bons Restou qui mʹont aidé un peu pour mon sermon dont le<br />

résultat a été satisfaisant: 5.000f; ils me donnent aussi quelques conseils pour les construc‐<br />

tions <strong>de</strong> Nazareth; vous le savez, ils sont bons à tout, parce quʹils prennent tout en Dieu.<br />

Faites ainsi, mon cher enfant, recourez pour tout, petites et gran<strong>de</strong>s choses, au bon Maître<br />

qui ne dédaigne rien et prend soin <strong>de</strong> tout, mettez‐vous en dépendance absolue à son<br />

égard, Il vous sera présent en toute occasion et vous ai<strong>de</strong>ra constamment. Travaillez sur‐<br />

tout sous ses yeux à réprimer tout ce qui ne serait pas en vous selon la charité, ayez le<br />

cœur large, généreux, indulgent comme le doux Maître si patient, si indulgent, si con<strong>de</strong>s‐<br />

cendant pour tous. Ayez beaucoup dʹouverture <strong>avec</strong> le f. Caille, causez au moins une fois<br />

par semaine en toute intimité <strong>avec</strong> lui, ne gar<strong>de</strong>z jamais rien sur votre cœur, reconnaissez<br />

bien naïvement vos torts quand vous en avez, enfin maintenez <strong>de</strong> toutes vos forces dans<br />

votre petite maison lʹunion, la paix, cʹest lʹesprit même du divin Seigneur.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

298 à M. Caille<br />

A propos <strong>de</strong> quelques inci<strong>de</strong>nts <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> communauté. Toute vie <strong>de</strong> communauté a ses difficultés, qui, cepen‐<br />

dant, forgent les âmes. Exhortation à la confiance et à la patience. Nouvelles <strong>de</strong> Vaugirard.<br />

Vaugirard, 15 avril 1855<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai laissé passer bien <strong>de</strong>s jours sans répondre à votre bonne lettre du commence‐<br />

ment <strong>de</strong> ce mois; mon excuse est, comme toujours, dans nos travaux fort multipliés et aus‐<br />

376


si dans une certaine impuissance <strong>de</strong> tête que mʹa causée le changement <strong>de</strong> la saison; je se‐<br />

coue <strong>de</strong> mon mieux ces difficultés pour vous écrire quelques mots aujourdʹhui.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> lʹenvoi <strong>de</strong> vos rapports; ils nous ont fort intéressés et nous tien‐<br />

nent au courant <strong>de</strong> vos efforts; cʹest un encouragement pour nous puisque, si nous nʹac‐<br />

complissons ici quʹune petite tâche, elle se trouve agrandie par vos œuvres dont nous par‐<br />

tageons le mérite, comme vous avez aussi participation à nos humbles travaux; cʹest là le<br />

bienfait <strong>de</strong> lʹintime union qui règne entre nous. Je sens toujours plus vivement combien<br />

elle douce et précieuse et jʹespère que le Seigneur daignera lʹaccroître encore et la confir‐<br />

mer <strong>de</strong> plus en plus.<br />

Je vous sais bon gré <strong>de</strong> vos cordiales ouvertures <strong>avec</strong> moi sur les petits inci<strong>de</strong>nts <strong>de</strong><br />

votre vie <strong>de</strong> communauté; ils nʹont aucune gravité, mais ils seraient plus inquiétants du<br />

jour où vous auriez la pensée <strong>de</strong> ne mʹen pas parler, fût‐ce même dans un esprit <strong>de</strong> morti‐<br />

fication et <strong>de</strong> charité, car alors la petite contrariété renfermée se pourrait envenimer, tandis<br />

que, mise à découvert, elle sʹefface et se réduit à rien. Ne prenez, du reste, aucune inquié‐<br />

tu<strong>de</strong> <strong>de</strong> ce petit inci<strong>de</strong>nt, notre f. Vince est impressionnable, comme les hommes <strong>de</strong> frêle et<br />

délicate complexion, il peut cé<strong>de</strong>r à un mouvement <strong>de</strong> peine ou dʹirritation, mais il a un<br />

fond <strong>de</strong> soli<strong>de</strong> raison et surtout un dévouement chrétien à toute épreuve; je vous réponds<br />

<strong>de</strong> son cœur et je vous garantis aussi sa soumission; il reviendra toujours sur un premier<br />

entraînement et ne vous donnera en définitive que satisfaction; ayez toute confiance en lui,<br />

il la méritera et vous secon<strong>de</strong>ra <strong>avec</strong> lʹaffection et le zèle que vous êtes en droit dʹattendre<br />

<strong>de</strong> lui.<br />

Je compatis bien cordialement aux embarras que vous donne votre situation si<br />

compliquée, mais ayons confiance en Dieu et laissons‐le faire, Il nous indiquera bien sû‐<br />

rement la voie que nous <strong>de</strong>vons suivre; quand vous avez quelques lassitu<strong>de</strong>s et difficultés,<br />

mettez‐les dans le Cœur si tendre <strong>de</strong> ce bon Maître en toute simplicité et en <strong>de</strong>mandant<br />

quʹIl vous ai<strong>de</strong>, son secours ne vous manquera pas. Je prierai <strong>avec</strong> vous, ou plutôt nous<br />

prierons tous ensemble, et notre Père Céleste nous entendra.<br />

Nous nʹavons ici rien <strong>de</strong> nouveau; notre bon abbé Lantiez est sur pied et a repris ses<br />

occupations accoutumées; notre pauvre M. Viollat va toujours sʹéteignant, il semble ne te‐<br />

nir quʹà un fil.<br />

Nous avons eu, dans notre petite chapelle, toutes les solennités <strong>de</strong> la Semaine Sainte<br />

et <strong>de</strong>s fêtes <strong>de</strong> Pâques, nous ne vous y avons point oublié. Et vous, entrevoyez‐ vous quel‐<br />

que espoir dʹavoir, dans votre maison, le Saint Sacrement; avez‐vous la messe <strong>de</strong> temps en<br />

temps? M. Cacheleux est‐il toujours, comme je lʹai vu, bon et dévoué pour vous et pour<br />

vos œuvres? Voyez‐vous poindre quelque indice <strong>de</strong> vocation? Nous nʹavons ici rien <strong>de</strong><br />

bien marqué sous ce <strong>de</strong>rnier rapport. Mais nous avons 8 enfants persévérants déjà assez<br />

avancés et qui se sont classés définitivement comme aspirants au service du Seigneur. Si<br />

tous ne vont pas jusquʹau but, quelques‐uns, nous lʹespérons, pourront lʹatteindre.<br />

Vous avez bien et sagement fait <strong>de</strong> raffermir notre petit f. Thuillier contre ses scru‐<br />

pules; il nʹa aucun sujet dʹen avoir, ayant le cœur droit et simple; je crois quʹil ira très bien<br />

et sans détour en son chemin.<br />

Je ne vois point dʹoccasion pour vous envoyer le livre <strong>de</strong> M gr dʹAngers et les caté‐<br />

chismes; si je nʹen trouve point dʹici à quelques jours, je ferai lʹenvoi par le chemin <strong>de</strong> fer.<br />

Adieu, bien cher ami et fils en N.S., ne vous contristez pas <strong>de</strong>s quelques petites dif‐<br />

ficultés que, dans les premiers temps, peut présenter votre assiette en vie commune; elles<br />

377


sont à peu près inévitables jusquʹà ce que les cœurs se soient entendus, que les caractères<br />

se soient un peu façonnés et accommodés et que la position soit faite; nous avons eu, nous<br />

aussi, dans nos commencements, quelques petits froissements; notre p. Beaussier nʹen a<br />

pris aucune inquiétu<strong>de</strong> et, <strong>avec</strong> sa haute expérience, nous a prescrit <strong>de</strong> nʹen avoir nul sou‐<br />

ci; <strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> temps, tout sʹarrange; les petits brisements servent à humilier, à morti‐<br />

fier lʹamour‐propre, et enfin laissent les âmes meilleures après quʹavant. Nʹayez pas non<br />

plus <strong>de</strong> mo<strong>de</strong>stie et défiance excessive <strong>de</strong> vous‐même, Dieu vous a choisi et posé comme<br />

chef <strong>de</strong> la petite famille, Il sera <strong>avec</strong> vous si vous vous appuyez sur Lui; esprit <strong>de</strong> foi, esprit<br />

dʹabandon et <strong>de</strong> confiance, esprit <strong>de</strong> patience et <strong>de</strong> support, toute votre voie est là; <strong>de</strong>meu‐<br />

rez‐y, très cher ami, vous arriverez à bonne fin.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

299 à M. Vince<br />

Difficultés <strong>de</strong> vie commune entre le frère Vince et M. Caille. Ouverture et confiance envers son Supérieur. Lʹes‐<br />

prit <strong>de</strong> foi doit inspirer nos actions: ʺles motifs surnaturels sont une base soli<strong>de</strong>ʺ.<br />

15 avril 1855<br />

Vaugirard, à 3 heures dʹAmiens<br />

sous les yeux <strong>de</strong> Dieu présent partout<br />

Très cher enfant,<br />

Cʹest toute une affaire pour moi <strong>de</strong> trouver assez <strong>de</strong> temps pour vous écrire à tous<br />

les trois à la fois; il en résulte que je vous fais attendre mes réponses plus longtemps que je<br />

ne voudrais; mais je ne mʹen inquiète point, je prie le bon Maître, vos anges gardiens, vos<br />

saints patrons <strong>de</strong> traiter pour moi <strong>avec</strong> vous; ils le font, jʹen suis assuré, et vous nʹy perdrez<br />

rien, tant sʹen faut.<br />

Je nʹai nulle inquiétu<strong>de</strong> <strong>de</strong> vos petits froissements domestiques, jʹy avais compté; ils<br />

étaient à vrai dire inévitables, on nʹy échappe point en pareil cas dans les commencements<br />

dʹune vie commune, à moins dʹêtre déjà arrivé à la perfection, ce quʹon ne peut guère sup‐<br />

poser, puisquʹon vient précisément pour la chercher et la poursuivre. Soyez sans crainte,<br />

cher ami, je réponds <strong>de</strong> vous; vous ferez <strong>de</strong> petites méchancetés, parce que votre naturel<br />

nʹest pas parfaitement mortifié, mais vous nʹen ferez pas <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s, parce que votre cœur<br />

est excellent, tout dévoué à Dieu, à Marie, à St Joseph et quʹils vous gar<strong>de</strong>ront et vous pré‐<br />

serveront <strong>de</strong> fautes notables; confiez‐vous à eux et marchez en paix; réparant au jour le<br />

jour les quelques petits accrocs que vous aurez faits à la patience, à la douceur, à lʹhumili‐<br />

té, et le bon Seigneur, plein <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong>, fera quʹil ne sortira <strong>de</strong> tout cela rien <strong>de</strong> fâcheux<br />

et <strong>de</strong> réellement contraire à la charité. Dʹailleurs, à mesure que vous avancerez, vous vous<br />

accommo<strong>de</strong>rez mieux à la bonne et heureuse nature <strong>de</strong> notre f. Caille, vous pénétrerez<br />

mieux cette âme si dévouée, si détachée dʹelle‐même, si généreuse dans ses sacrifices, si<br />

passionnée pour le bien, et la haute estime que vous en concevrez, ouvrant votre cœur,<br />

vous attachera profondément et tendrement à lui. Donc, encore une fois, ne vous préoccu‐<br />

pez pas <strong>de</strong> quelques misères du présent, je vous réponds dʹun bon avenir <strong>de</strong> paix, dʹintime<br />

union et <strong>de</strong> bonnes œuvres accomplies; croyez‐en mon assurance et confiez‐vous aux bon‐<br />

tés du Seigneur.<br />

378


Nʹoubliez pas <strong>de</strong> mʹécrire bientôt; comment vont vos enfants? Comment le f. Thuil‐<br />

lier emploie‐t‐il sa journée? Avez‐vous toujours <strong>de</strong>s entourages dévoués et amis? M. lʹabbé<br />

Cacheleux est‐il toujours bon pour vous et êtes‐vous dévoués et bien disposés pour ses<br />

œuvres? Vous paraissez vous confesser à M. le Curé et à M. Mangot, cela nʹa‐t‐il pas quel‐<br />

que incommodité? Commencez‐vous à classer vos heures et vos travaux? Votre petite<br />

chapelle a‐t‐elle quelquefois la visite du divin Seigneur? Je pourrais continuer longtemps<br />

ces questions, car tout mʹintéresse tendrement dans votre vie et dans vos œuvres. Nous ne<br />

vous avons pas oublié durant les beaux jours <strong>de</strong> la Semaine Sainte et <strong>de</strong> Pâques, ni à lʹado‐<br />

ration du mois, où la maison et les ff. dʹAmiens étaient dans les recommandations spécia‐<br />

les. Oh! prions bien les uns pour les autres, <strong>avec</strong> cela il nʹy a pas <strong>de</strong> vraie séparation. Jʹes‐<br />

père bien que, dans le cours <strong>de</strong> lʹannée, il y aura quelques allées et venues qui pourront,<br />

soit dʹici, soit <strong>de</strong> chez vous, faire <strong>de</strong>s occasions <strong>de</strong> rapprochement. Il me semble aussi quʹil<br />

ne serait pas impossible que lʹun <strong>de</strong> vous chaque année, plusieurs peut‐être, si vous <strong>de</strong>ve‐<br />

nez plus nombreux, assistassent à la retraite <strong>de</strong> la fin dʹoctobre; mais tout cela est aux<br />

mains <strong>de</strong> Dieu, nous ne pouvons jamais prévoir ses <strong>de</strong>sseins.<br />

Je vous envoie le livre <strong>de</strong> M gr dʹAngers et les petits catéchismes. Nʹoubliez pas <strong>de</strong><br />

me retrouver la petite pièce dont vous me parlez; nous tâcherons ici <strong>de</strong> vous envoyer un<br />

dialogue charmant joué à la <strong>de</strong>rnière distribution <strong>de</strong> la rue du Regard; profitons <strong>de</strong> toutes<br />

les occasions pour nous ai<strong>de</strong>r réciproquement, cʹest une union encore selon la charité.<br />

Adieu, cher enfant, si vous voulez toujours être mon fils Joseph, soyez <strong>avec</strong> notre bon p.<br />

Caille comme vous étiez <strong>avec</strong> moi, patient, déférent, soumis, affectueux, quoique je ne le<br />

méritasse pas toujours; vous le faisiez par amour et obéissance pour Dieu, cʹest le grand et<br />

le plus sûr sentiment qui doive inspirer nos actions. Les raisons, les inclinations sont mobi‐<br />

les, insuffisantes; les motifs surnaturels seuls sont une base soli<strong>de</strong>, cʹest là <strong>de</strong>ssus, très cher<br />

ami et fils, quʹil faut vous poser.<br />

Je vous embrasse <strong>avec</strong> une tendre affection, et je prie le Seigneur <strong>de</strong> bénir vous et<br />

vos enfants et vos travaux.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

300 à M. Caille<br />

Prier et travailler ensemble pour louer ensemble, éternellement, le Seigneur. Une messe est célébrée à Rome pour<br />

lʹInstitut. Nouvelles <strong>de</strong>s Œuvres.<br />

22 avril 1855<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu hier dans lʹaprès‐midi votre lettre <strong>avec</strong> le mandat, le modèle <strong>de</strong> procura‐<br />

tion, etc. Nous ferons tout ce que vous nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z. Je vous écris seulement ces <strong>de</strong>ux<br />

mots comme accusé <strong>de</strong> réception et pour vous dire que, dans le paquet <strong>de</strong> livres que je<br />

vous ai envoyé, plusieurs lettres se trouvaient, ou dans lʹun <strong>de</strong>s catéchismes, ou dans le li‐<br />

vre <strong>de</strong> M gr dʹAngers: une pour vous, une pour le f. Vince, une pour le f. Firmin, <strong>de</strong>ux au‐<br />

tres lettres <strong>de</strong> nos ff. pour le f. Vince. Ou bien vous nʹaurez pas pensé à regar<strong>de</strong>r dans ces<br />

livres, ou bien lʹadministration <strong>de</strong>s Chemins <strong>de</strong> fer, ouvrant le paquet, aura retiré les let‐<br />

tres. Jʹavais pris soin pourtant <strong>de</strong> ne les pas cacheter; je mʹétonnerais aussi quʹon ne les eût<br />

pas au moins jetées à la poste, votre adresse étant, je crois, sur ces lettres.<br />

379


Dites‐moi si vous les avez trouvées ou si elles sont définitivement égarées.<br />

Adieu, bien cher ami; nous allons bien ici; je bénis le Seigneur qui vous donne la<br />

paix et jʹai la confiance que vous travaillez selon ses vues et pour sa gloire. Prions, travail‐<br />

lons ensemble, pour chanter ensemble bientôt les louanges éternelles du Seigneur.<br />

Dimanche prochain, 29 avril, selon convention faite <strong>avec</strong> nous et qui vient <strong>de</strong> nous<br />

être rappelée expressément par une lettre, le r.p. Lalan<strong>de</strong>, Pénitencier <strong>de</strong> lʹOrdre <strong>de</strong>s Fran‐<br />

ciscains au Vatican, à Rome, doit dire la Sainte Messe au tombeau <strong>de</strong>s saints apôtres pour<br />

la prospérité <strong>de</strong> notre petite Communauté; nous nous mettons bien en union <strong>avec</strong> lui ici;<br />

nos 4 ff. ecclésiastiques offriront à la même intention le Saint Sacrifice, afin que nos cœurs,<br />

unis <strong>de</strong>vant Dieu, obtiennent les bénédictions <strong>de</strong> sa miséricor<strong>de</strong>; ne manquez pas, <strong>de</strong> votre<br />

côté, <strong>de</strong> prier aussi du plus profond <strong>de</strong> vos cœurs.<br />

Demain, pèlerinage à la chapelle <strong>de</strong> saint Vincent <strong>de</strong> Paul <strong>avec</strong> nos enfants, à lʹocca‐<br />

sion <strong>de</strong> la neuvaine du St Patron.<br />

Le 4 mai, bénédiction <strong>de</strong> notre chapelle <strong>de</strong> Nazareth. Le r.p. <strong>de</strong> Ravignan 215 .<br />

Le 8 mai, assemblée <strong>de</strong>s Protecteurs et Protectrices <strong>de</strong> notre maison dʹorphelins à<br />

Vaugirard. Le r.p. <strong>de</strong> Ponlevoy, toujours bon pour nous, consent à y faire une petite exhor‐<br />

tation.<br />

Le Bon Maître nʹest‐il pas bien miséricordieux pour nous?<br />

Adieu, bien cher ami, nous vous embrassons vous et vos frères dans les Cœurs <strong>de</strong> J.<br />

et <strong>de</strong> M.<br />

Votre Père et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

301 à M. Caille<br />

Vie <strong>de</strong>s œuvres. De possibles vocations à Angers.<br />

Jeudi 3 mai [1855]<br />

Cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Savary repart si vite que jʹai à peine le temps <strong>de</strong> vous écrire <strong>de</strong>ux lignes. On<br />

vient <strong>de</strong> me remettre le paquet <strong>de</strong> lettres qui avait été joint aux livres dont je vous ai fait<br />

lʹenvoi; on les avait retirées parce quʹon craignait pour nous les amen<strong>de</strong>s dont sont frappés<br />

les envois <strong>de</strong> lettres frauduleux. On aurait pu seulement différer un peu moins la remise<br />

<strong>de</strong> ces lettres; les voici telles quelles, elles viennent assez tard pour nʹavoir plus dʹà‐propos,<br />

mais vous en ferez ce que vous voudrez.<br />

Je vous enverrai les notes <strong>de</strong>s lits dans ma prochaine lettre, M. Myionnet a lʹune <strong>de</strong>s<br />

<strong>de</strong>ux et je ne lʹai pas là en ce moment.<br />

Jʹai payé le loyer <strong>de</strong> M. Dupetit, je vais lui envoyer sa quittance.<br />

Mon f. Paillé va tâcher <strong>de</strong> remettre à M. Savary les livres que vous nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z,<br />

<strong>avec</strong> un petit paquet pour mon petit enfant Firmin Thuillier.<br />

Embrassez‐le pour moi et mon fils Vince aussi, je nʹai pas le temps <strong>de</strong> leur écrire au‐<br />

jourdʹhui, mais je les aime tendrement et je prie fidèlement pour eux. Jʹajouterai 20f aux 50f<br />

promis au f. Vince pour le St Joseph; Mme Restou va le comman<strong>de</strong>r et faire tous ses efforts<br />

pour parfaire la somme nécessaire au payement <strong>de</strong> cette statue.<br />

215<br />

Le célèbre dominicain y donnera l'un <strong>de</strong> ses <strong>de</strong>rniers sermons. La chapelle sera bénie par Mgr <strong>Léon</strong> Sibour, cousin <strong>de</strong> l'archevêque<br />

<strong>de</strong> Paris, et ancien curé <strong>de</strong> St-Thomas d'Aquin.<br />

380


Priez tous ensemble, il se fait un mouvement <strong>de</strong> 3 Confrères dʹAngers qui inclinent<br />

à se donner à la Communauté; cela pourrait <strong>de</strong>venir un heureux commencement, <strong>de</strong>man‐<br />

<strong>de</strong>z à la S te Vierge <strong>de</strong> se charger <strong>de</strong> cette affaire; nous lui laissons le soin <strong>de</strong> tout durant ce<br />

mois béni tout particulièrement. Je la prie <strong>de</strong> vous bénir pour moi indigne et <strong>de</strong> nous ré‐<br />

unir tous en son cœur <strong>de</strong> Mère.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

302 à M. Caille<br />

Mort <strong>de</strong> lʹabbé Viollat.<br />

Paris, 7 mai 1855<br />

Très cher fils et ami en N.S.,<br />

Nous venons <strong>de</strong> conduire à sa <strong>de</strong>rnière <strong>de</strong>meure notre bien‐aimé frère, lʹabbé Viol‐<br />

lat, qui a remis samedi son âme aux mains du Seigneur, <strong>avec</strong> un calme, une paix qui sem‐<br />

blaient un avant‐goût du Ciel. Depuis quelques jours, il était averti que ses heures étaient<br />

comptées, sa sérénité nʹen avait pas été altérée, au contraire, il a recueilli cette nouvelle<br />

comme on reçoit une espérance. Cʹest notre bon p. Beaussier qui a reçu son <strong>de</strong>rnier soupir;<br />

nous tous lʹavons tour à tour visité jusquʹà son <strong>de</strong>rnier moment. Les ff. Lantiez et Roussel<br />

ont passé près <strong>de</strong> lui la nuit <strong>de</strong> samedi à dimanche, et les ff. Polvêche et Vasseur celle <strong>de</strong><br />

dimanche à lundi, aujourdʹhui, nous ne lʹaurons donc pas quitté jusquʹau <strong>de</strong>rnier moment.<br />

Toutes les messes ont été dites chez nous hier pour lui; je désire que vous en fassiez dire<br />

aussi une à Amiens, afin <strong>de</strong> vous unir à notre intention. Je nʹaurais pas besoin <strong>de</strong> vous le<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r, votre cœur préviendrait certainement notre désir.<br />

Sa bonne mère accepte cette épreuve en femme chrétienne et résignée, Dieu lʹa visi‐<br />

blement fortifiée; elle a dʹelle‐même fait inscrire dans les lettres <strong>de</strong> faire‐part quʹil était<br />

membre <strong>de</strong> la Communauté <strong>de</strong>s Orphelins <strong>de</strong> St Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul, et a mis aussi que les in‐<br />

vitations étaient faites au nom <strong>de</strong> la famille et <strong>de</strong> la Communauté.<br />

Adieu, bien cher ami, je suis un peu en hâte; je vous embrasse tous les trois dans les<br />

Cœurs Sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre ami et Père tout affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

303 à M. Caille<br />

Bonheur <strong>de</strong> la paix en communauté. Première communion à Vaugirard. Recommandations hebdomadaires à<br />

N.D.<strong>de</strong>s Victoires pour les vocations. Comment MLP. désire être accueilli à Amiens. Les Dialogues du Patro‐<br />

nage.<br />

Vaugirard, 15 mai 1855<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie, sans plus différer, les factures que vous mʹavez <strong>de</strong>mandées plu‐<br />

sieurs fois concernant les lits en fer envoyés en <strong>de</strong>rnier lieu à Amiens.<br />

Elles sʹélèvent ensemble à.......................... 134,45<br />

Les livres remis à M. Savary..................... 19,00<br />

Payé pour le loyer <strong>de</strong> M. Dupetit.............. 70,00<br />

Total: 223,45<br />

Vous mʹavez envoyé un mandat <strong>de</strong>............... 135,00<br />

Reste: 88,45<br />

381


Jʹapprends <strong>avec</strong> joie votre paix intérieure et le doux accord qui règne entre vous;<br />

cʹest lʹesprit même <strong>de</strong> J.C. qui a dit à ceux quʹil aimait: ʺJe vous donne la paix, je vous laisse<br />

la paix.ʺ Cʹest la plus pure et la plus véritable joie en ce mon<strong>de</strong>; daigne le Seigneur vous la<br />

conserver toujours. Nous jouissons ici du même bien sans aucun mélange, nous nʹavons<br />

vraiment quʹun seul cœur.<br />

Nos enfants <strong>de</strong> la Maison <strong>de</strong> Vaugirard vont faire leur première communion le 24<br />

<strong>de</strong> ce mois; cʹest une gran<strong>de</strong> et importante affaire pour nous, nous commençons à prier<br />

tous les jours pour ces chers enfants; unissez‐vous à nous, je vous le <strong>de</strong>man<strong>de</strong> instamment;<br />

les ff. Vince et Thuillier les connaissent presque tous, mais vous nʹavez pas besoin <strong>de</strong> les<br />

connaître en tout cas pour les aimer, ce sont nos enfants, et surtout ce sont <strong>de</strong> jeunes âmes<br />

dont le salut dépendra sans doute <strong>de</strong> cette si intéressante action. Nous avons 24 premiers<br />

communiants, 23 renouvelants, ensemble 47; ils semblent tous en bonne disposition.<br />

Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> dire quʹils sont recommandés à N.D. <strong>de</strong>s Victoires.<br />

Nous avons établi un service régulier <strong>de</strong> communication entre le sanctuaire <strong>de</strong> N.D.<br />

<strong>de</strong>s Victoires et notre maison. Tous les vendredis, le f. Carment recueille les <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />

recommandation qui ont été déposées pendant la semaine dans un petit sac attaché à la<br />

boîte pour les frères futurs, et il en envoie le dépouillement à N.D. <strong>de</strong>s Victoires. Ainsi,<br />

toutes les fois que vous nous écrirez, vous pourrez nous charger <strong>de</strong> vos recommandations,<br />

elles seront jointes aux nôtres et arriveront exactement.<br />

Nous allons nous efforcer <strong>de</strong> passer dans un recueillement intérieur plus grand que<br />

dans les autres temps les dix jours entre lʹAscension et la Pentecôte, afin <strong>de</strong> nous unir à la<br />

retraite <strong>de</strong>s Apôtres attendant au Cénacle la venue <strong>de</strong> lʹEsprit‐Saint. On trouve une gran<strong>de</strong><br />

force en sʹunissant ainsi aux intentions <strong>de</strong> lʹEglise et lʹon a quelque part à toutes les grâces<br />

que Jésus, le divin Epoux, lui accor<strong>de</strong>.<br />

Jʹirais volontiers vous faire une petite visite dans le cours du mois prochain, si vous<br />

y voyez vraiment un peu dʹutilité, mais je ne sais si aucun <strong>de</strong> nos frères pourrait mʹaccom‐<br />

pagner; ils sont si occupés. Mais il serait entendu, si je passais <strong>de</strong>ux ou trois jours <strong>avec</strong><br />

vous, que vous ne vous dérangeriez en rien <strong>de</strong> vos habitu<strong>de</strong>s; jʹapporterais quelques cor‐<br />

respondances et affaires, comme jʹen ai toujours dʹarriérées, pour mʹoccuper dans les mo‐<br />

ments autres que ceux <strong>de</strong>s exercices.<br />

Le f. Maignen imprime en ce moment un petit volume <strong>de</strong> ses dialogues du patro‐<br />

nage 216 , mais il nʹen a quʹun petit nombre; je prie mon f. Vince <strong>de</strong> rechercher en hâte celui<br />

quʹil mʹavait promis et <strong>de</strong> me lʹenvoyer au plus tôt, <strong>avec</strong> permission <strong>de</strong> le joindre aux au‐<br />

tres.<br />

Adieu, bien chers amis, je sens mon affection pour vous sʹaccroître malgré lʹéloi‐<br />

gnement, ce qui mʹassure <strong>de</strong> plus en plus quʹelle nʹest autre quʹun écoulement <strong>de</strong> la charité<br />

du divin Cœur <strong>de</strong> Jésus. Je me réunis à vous dans le Cœur très immaculé <strong>de</strong> Marie, comme<br />

point <strong>de</strong> départ pour aller au Cœur <strong>de</strong> son divin Fils.<br />

Offrez mes respects à MM. Mangot et Cacheleux, mes affectueux souvenirs à vos<br />

bons et fidèles amis.<br />

Votre ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

216 Depuis 1851, le frère Maignen faisait paraître l'Almanach <strong>de</strong> l'Apprenti et <strong>de</strong> l'écolier. En cette année 1855, il en recueille les<br />

principales anecdotes pour les réunir en un seul volume, ouvrage qui lui vaudra le bel éloge <strong>de</strong> Mgr Sibour: "Je n'aurai pas connu<br />

d'avance votre amour et votre dévouement pour les enfants <strong>de</strong> la classe ouvrière qu'il m'aurait suffi d'ouvrir votre excellent livre<br />

Après l'école ou l'apprentissage, pour y lire à chaque page ce double sentiment. Il serait difficile aussi <strong>de</strong> trouver un langage qui<br />

leur convienne mieux que celui que vous leur parlez, et d'une manière plus variée, plus ingénieuse <strong>de</strong> les intéresser, en même<br />

temps que <strong>de</strong> les instruire."<br />

382


304 à M. Decaux<br />

Avec le p. Hello, MLP. se rendra à une prochaine réunion <strong>de</strong> la Société. Manque <strong>de</strong> personnel pour fournir lʹai<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong>mandée.<br />

Paris, 23 mai [1855]<br />

Très cher Confrère et bien bon ami,<br />

Jʹirai certainement <strong>avec</strong> gran<strong>de</strong> joie voir votre Conférence le vendredi 1er juin, à 7h.<br />

du soir, et je suis sûr dʹavance dʹy passer quelques heureux moments puisque je vous y<br />

trouverai ainsi que lʹexcellent et si bienveillant M. Frion; je ferai en sorte que notre bon ab‐<br />

bé Hello ait la même satisfaction; pour M. Maignen, la chose est moins facile parce que, le<br />

même jour et à la même heure, il prési<strong>de</strong> la Conférence <strong>de</strong> Grenelle.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> la bonne lettre que vous mʹavez écrite dʹautre part relativement<br />

à la maison <strong>de</strong> la rue St‐Quentin; nous avons le plus grand désir dʹêtre un peu utiles à no‐<br />

tre chère Société217 , mais nous ne disposons que <strong>de</strong> forces bien restreintes, déjà bien épar‐<br />

pillées; nous avons quelques espérances dʹaccroissement; quʹest‐ce que <strong>de</strong>s espérances<br />

pour répondre à un besoin actuel et pressant?<br />

Jʹirai néanmoins en conférer <strong>avec</strong> M. Baudon, après avoir encore bien examiné nos<br />

ressources; je le laisserai juge <strong>de</strong> la situation; il est sage et bon tout ensemble, on peut<br />

sʹabandonner à sa décision.<br />

217 A Grenelle, c'est en ce mois <strong>de</strong> mai 1855 que fut fondée une Sainte-Famille.<br />

383


A bientôt, très cher ami, je nʹose penser que vous viendrez <strong>de</strong>main à la première<br />

communion <strong>de</strong> nos enfants; priez au moins pour eux, cʹest un si grand jour pour eux que<br />

celui <strong>de</strong> <strong>de</strong>main!<br />

Croyez‐moi bien, <strong>avec</strong> un affectueux dévouement.<br />

Tout à vous en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

305 à M. Decaux<br />

MLP. sʹexcuse <strong>de</strong> ne pouvoir assister au Conseil <strong>de</strong> la Sainte‐Famille.<br />

Jeudi 31 mai 1855<br />

Cher bon ami,<br />

Le f. Paillé ne mʹayant averti que ce matin <strong>de</strong> la réunion du Conseil <strong>de</strong> la Sainte‐<br />

Famille, je nʹai pu me tirer à temps <strong>de</strong> quelques obligations qui me retiennent aujourdʹhui<br />

à Vaugirard. Heureusement, M. <strong>de</strong> Verneuil, notre excellent Confrère, qui donne à la<br />

Sainte‐Famille St‐Sulpice <strong>de</strong>s soins aussi dévoués quʹintelligents, a pu préparer un rapport<br />

qui contient un état détaillé <strong>de</strong> notre situation. Dʹun autre côté, M. Paillé a, sur diverses<br />

Saintes‐Familles, <strong>de</strong>s renseignements plus précis que je nʹeusse pu les fournir; jʹespère<br />

donc que mon absence ne fera aucune lacune et que vous voudrez bien me la pardonner,<br />

sous la réserve dʹune exactitu<strong>de</strong> scrupuleuse pour les prochaines réunions.<br />

Croyez bien, très cher ami, à tous mes sentiments les plus dévoués en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je nʹoublie pas que je dois <strong>de</strong>main venir rendre une petite visite à Stanislas.<br />

306 à M. Decaux<br />

Retenu à Amiens, MLP. ne pourra être présent à une réunion <strong>de</strong> la Ste‐Famille.<br />

Amiens, 8 juin 1855<br />

Très cher et bien bon ami,<br />

Une petite affaire mʹayant conduit à Amiens, jʹavais pris toutes mes dispositions<br />

pour être <strong>de</strong> retour samedi, afin <strong>de</strong> me trouver à la réunion <strong>de</strong> notre Sainte‐Famille <strong>de</strong> St‐<br />

Sulpice dimanche; mais lʹhomme propose et Dieu dispose, je suis retenu forcément jusquʹà<br />

lundi. je nʹen ai pris nulle inquiétu<strong>de</strong>, bien cher ami, car je sais que la Sainte‐Famille nʹest<br />

jamais plus attachante quʹaux jours où vous la prési<strong>de</strong>z; je crains seulement que cet avis<br />

tardif ne vous trouve <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s arrangements déjà pris ou nʹentrave quelques dispositions<br />

déjà réglées par vous. Vous ferez pour le mieux, bien cher ami, et vous me pardonnerez en<br />

tout cas une faute involontaire et tout à fait imprévue.<br />

Je suis, <strong>de</strong> loin comme <strong>de</strong> près, dans les sentiments <strong>de</strong> la plus vive affection,<br />

Votre dévoué frère et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Jʹai encore toute chau<strong>de</strong> dans le cœur lʹaimable réception que vous nous avez<br />

faite dans votre Conférence. Le f. Paillé a dû sʹoccuper dʹavoir un orateur, il vous fera sa‐<br />

voir le résultat <strong>de</strong> ses démarches.<br />

384


307 à M. Decaux<br />

Don <strong>de</strong> la Conférence à l’Œuvre <strong>de</strong> la Ste‐Famille. Reconnaissance pour lʹaccueil reçu: une telle union est une<br />

force pour le bien.<br />

Vaugirard, 15 juin 1855<br />

Mon bien bon ami,<br />

Jʹai reçu les 200f que votre Conférence a bien voulu voter pour notre Sainte‐Famille.<br />

Jʹai été témoin moi‐même <strong>de</strong> la bienveillance et <strong>de</strong> la vraie charité <strong>avec</strong> laquelle cette au‐<br />

mône a été accordée, je puis donc assurer quʹelle est faite dans les meilleures conditions<br />

pour être agréable à Dieu et méritoire pour ceux auxquels Il lʹa inspirée.<br />

En vous remerciant <strong>avec</strong> tous nos chers Confrères <strong>de</strong> ce nouveau témoignage dʹinté‐<br />

rêt pour notre œuvre, je sens le besoin <strong>de</strong> vous exprimer aussi toute ma reconnaissance<br />

pour lʹaimable et fraternel accueil que vous nous avez fait dans votre avant‐<strong>de</strong>rnière as‐<br />

semblée. Combien nos Conférences gagneraient en union, en force pour le bien si elles<br />

rendaient habituels parmi nous <strong>de</strong> pareils procédés et une si cordiale affection. Merci, mon<br />

bon ami, pour les bons moments que jʹai passés dans votre Conférence, ils resteront pour<br />

moi un précieux et consolant souvenir.<br />

Croyez bien et partagez <strong>avec</strong> vos chers Confrères tous mes sentiments <strong>de</strong> bien affec‐<br />

tueux dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

308 à M. Caille<br />

MLP. se reproche <strong>de</strong> ne pas avoir assez encouragé la communauté dʹAmiens. Les épreuves purifient ceux qui se<br />

confient en Dieu. Hospitalité entre les différentes maisons <strong>de</strong> la Communauté. Raisons qui peuvent légitimer un<br />

voyage <strong>de</strong> M. Vince.<br />

Vaugirard, 28 juin 1855<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je voulais, tous les jours <strong>de</strong> cette semaine, vous écrire; il me semblait que je nʹavais<br />

pas été assez bon pour notre petite famille dʹAmiens; que jʹavais trop insisté, dans nos en‐<br />

tretiens intimes, sur les quelques petites misères qui peuvent être à reprendre et pas assez<br />

encouragé tout le bien qui se fait déjà au milieu <strong>de</strong> vous, tous vos bons sentiments et cette<br />

ar<strong>de</strong>ur si chrétienne dont vous êtes animés pour votre sanctification et pour le salut <strong>de</strong> vos<br />

enfants; je me reprochais, en un mot, dʹavoir mal rempli le but <strong>de</strong> mon voyage qui était <strong>de</strong><br />

vous confirmer dans vos bonnes dispositions et dʹaccroître votre confiance en lʹavenir. Sʹil<br />

en était ainsi, bien cher ami, jʹaurais bien mal rendu les sentiments dont mon cœur était<br />

plein, car, ce que je sentais avant tout au milieu <strong>de</strong> vous, cʹétait une vive et profon<strong>de</strong> re‐<br />

connaissance pour le bon Maître qui a réuni pour la fondation <strong>de</strong> notre première colonie à<br />

Amiens <strong>de</strong>s éléments tout marqués <strong>de</strong> sa sagesse et <strong>de</strong> sa bonté; <strong>de</strong> telle sorte quʹil ne me<br />

restait pas le moindre doute sur lʹexistence et lʹassiette définitive <strong>de</strong> votre petit établisse‐<br />

ment. Les quelques riens qui se rencontrent encore comme difficulté sous vos pas ne sont<br />

autre chose que les exercices laissés à votre charité, à votre humilité, patience et générosité<br />

<strong>de</strong> cœur par la divine Sagesse qui ne laisse <strong>de</strong>s épreuves à ses enfants que pour les épurer<br />

et les perfectionner; soyons donc bien confiants, très cher ami, le Seigneur est <strong>avec</strong> nous;<br />

nous sentirons son ai<strong>de</strong> et nous asseoirons <strong>avec</strong> son secours lʹœuvre <strong>de</strong> salut et <strong>de</strong> miséri‐<br />

385


cor<strong>de</strong> que le Cœur <strong>de</strong> Jésus nous a ménagée. Je vous remercie, mon bien bon ami, <strong>de</strong>s sen‐<br />

timents si pleins <strong>de</strong> charité, <strong>de</strong> soumission et dʹhumble dépendance <strong>de</strong> votre lettre; <strong>avec</strong> un<br />

pareil esprit entretenu <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts, nous sommes bien sûrs <strong>de</strong> consoli<strong>de</strong>r notre union et<br />

<strong>de</strong> la rendre durable. Je vous remercie aussi du trop bon accueil que vous nous avez fait à<br />

Amiens; jʹaimerais que le séjour <strong>de</strong> lʹun <strong>de</strong> nous à la maison dʹAmiens et celui <strong>de</strong>s frères <strong>de</strong><br />

votre maison <strong>de</strong> Vaugirard nʹapportât aucun dérangement au régime et à lʹordre habituels,<br />

<strong>de</strong> façon quʹen allant <strong>de</strong> lʹune à lʹautre maison, on se sentît toujours chez soi, cʹest‐à‐dire<br />

sans aucune cérémonie ni surcharge pour personne. Je suis bien reconnaissant aussi <strong>de</strong> la<br />

généreuse attention que vous avez eue <strong>de</strong> payer notre voyage pour le retour, mais je pense<br />

que vous ne <strong>de</strong>vrez pas faire ainsi à lʹavenir; il suffira que nos maisons nous soient tou‐<br />

jours ouvertes <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts; la véritable hospitalité chrétienne sera ainsi bien et conve‐<br />

nablement observée. Nous savons bien, au fond, que tout est commun entre nous, puisque<br />

nous nʹavons rien qui ne soit à Dieu et pour Dieu, mais il faut maintenir un certain équili‐<br />

bre pour que chaque œuvre subsiste et gar<strong>de</strong> son action.<br />

Je vous laisse tout à fait libre pour le voyage que vous vous proposez <strong>de</strong> faire faire<br />

au f. Vince; je puis toutefois vous assurer que cette consolation ne lui est pas nécessaire et<br />

quʹil marchera fort bien sans cela; je crois donc, comme lui, quʹil ne <strong>de</strong>vrait faire cette ab‐<br />

sence maintenant que si vous prévoyez quʹil ne pourra pas venir à la retraite du mois dʹoc‐<br />

tobre. Il est à penser peut‐être que, si notre bon Mainville ou le f. Thuillier <strong>de</strong>vaient venir à<br />

cette époque, vous pourriez difficilement laisser partir aussi le f. Vince; alors, on pourrait<br />

<strong>de</strong>vancer pour lui le moment <strong>de</strong> sa venue, afin quʹil pût aussi faire un peu <strong>de</strong> retraite.<br />

Mais, je le répète, tout cela est absolument à votre discrétion; il pourrait faire un peu <strong>de</strong> re‐<br />

traite à Amiens aussi bien quʹici, et je vous réponds une fois encore quʹil se soumettra <strong>de</strong><br />

bonne grâce à ce que vous désirez. Les petites résistances intérieures quʹil ressent parfois<br />

ne lʹempêcheront jamais <strong>de</strong> remplir son <strong>de</strong>voir, comptez donc sur lui, et votre confiance ne<br />

sera point trompée.<br />

Je vous remercie pour lʹenvoi que vous voulez me faire <strong>de</strong>s étoffes; si elles ne sont<br />

pas encore parties, je vous prierais dʹen faire un assortiment pour une valeur équivalente<br />

aux 100f que vous proposez <strong>de</strong> me remettre pour compléter les 1.000f.<br />

Jʹaimerais, mon bon ami, ne point vous imposer <strong>de</strong> sacrifice pour ces étoffes, cela<br />

me mettrait mieux à lʹaise pour vous en <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r en toute occasion, si cʹétait considéré<br />

simplement comme affaire regardant votre maison <strong>de</strong> commerce. Parmi ces étoffes, il y en<br />

avait une ou <strong>de</strong>ux pièces imitant assez le drap <strong>de</strong> damas, que vous me disiez spéciales<br />

pour les maisons religieuses; jʹaurais, sauf votre avis, aimé en essayer dʹune dizaine <strong>de</strong> mè‐<br />

tres; je mʹen rapporte toutefois à vos conseils, sachant bien que vous en connaissez les qua‐<br />

lités mieux que moi.<br />

Nous prierons bien pour M. Masson et pour sa fiancée et pour vous tous aussi; nous<br />

vous sommes tendrement attachés et nous nous réjouissons dans la pensée que ce lien du‐<br />

rera pour le temps et pour lʹéternité. Embrassez nos frères pour moi, offrez mes respects à<br />

MM. Mangot et Cacheleux, ainsi que nos bons souvenirs à vos amis.<br />

Votre tout affectionné Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

386


309 à M. Vince<br />

La consolation que serait un voyage à Paris peut être différée. La santé <strong>de</strong> MLP. donne <strong>de</strong>s signes dʹinquiétu<strong>de</strong>.<br />

Mortification <strong>de</strong> la volonté dans lʹobéissance au Supérieur. Mgr Sibour en visite à Vaugirard.<br />

Vaugirard, 29 juin 1855<br />

Cher bon ami et fils en N.S.,<br />

Votre bonne petite lettre mʹa tout réjoui le cœur; je voulais vous écrire tous les jours,<br />

je craignais <strong>de</strong> ne vous avoir point laissé pleinement en paix après mon départ et <strong>de</strong> ne<br />

vous avoir pas assez rassuré touchant les quelques petites peines qui se rencontrent dans<br />

votre vie <strong>de</strong> chaque jour. Je mʹen voulais <strong>de</strong> nʹavoir pas su trouver <strong>de</strong>s paroles assez ten‐<br />

dres pour bannir toute inquiétu<strong>de</strong> <strong>de</strong> votre âme et vous faire comprendre combien jʹétais<br />

moi‐même en sécurité. Je vois <strong>avec</strong> joie que vous avez pris les choses comme je les donnais<br />

et que, grâces au Seigneur, vous êtes dans les meilleures dispositions.<br />

Je suis un peu souffrant <strong>de</strong>puis quelques jours et un mal dʹoreille assez fort me fait<br />

porter <strong>de</strong> telle sorte le sang à la tête que je vous écris presque sans y voir; toutefois, jʹaime<br />

mieux vous envoyer ces lignes aujourdʹhui, toutes courtes quʹelles soient, que dʹajourner<br />

encore <strong>de</strong> peur dʹun plus long retard; on veut me purger <strong>de</strong>main, chose qui ne va pas du<br />

tout à ma constitution, il se peut que cela me tienne tout ébranlé pendant plusieurs jours.<br />

Je ne désapprouve pas votre voyage projeté par le f. Caille; vous savez, cher enfant,<br />

combien vous êtes aimé ici; cependant, comme je sais très bien que vous êtes assez fort<br />

pour marcher sans cette consolation, je vous inviterais à ne venir maintenant que si vous<br />

entrevoyez quʹil ne vous sera pas possible <strong>de</strong> prendre part à notre retraite dʹoctobre; alors,<br />

les quelques jours que vous passeriez ici présentement auraient un but spirituel; mais, se‐<br />

lon moi, ils ne remplaceraient quʹimparfaitement les effets dʹune vraie retraite faite <strong>avec</strong> la<br />

communauté; voyez donc, cher ami, ce qui serait pour le mieux; autrement, ce voyage<br />

semblerait peut‐être à votre entourage dʹAmiens une gâterie <strong>de</strong> notre bon f. Caille et un<br />

petit manque <strong>de</strong> courage <strong>de</strong> votre part.<br />

Notre bon f. Lantiez nʹa pu aller faire sa retraite à Amiens; il a craint les visites quʹil<br />

aurait été contraint <strong>de</strong> faire et <strong>de</strong> recevoir et qui eussent dérangé sa paix <strong>de</strong> retraitant; ce<br />

sera pour quelque autre occasion.<br />

Je vous vois <strong>avec</strong> joie, cher bon ami, tourner vos efforts du côté où ils doivent être<br />

portés; oui, cher enfant, mortifiez votre volonté courageusement, <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s grâces <strong>de</strong><br />

Dieu sont attachées pour vous à ce sacrifice; les résistances que vous éprouvez sont une<br />

tentation, il faut les vaincre; ne cherchez pas à avoir plus <strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nce et <strong>de</strong> vues sages que<br />

notre bon f. Caille; il a bien jusquʹici mené à bonne fin <strong>de</strong>s œuvres lour<strong>de</strong>s, difficiles, le<br />

Seigneur a constamment béni ses travaux; ayez donc confiance au Seigneur qui est <strong>avec</strong> lui<br />

et qui le soutient visiblement. Quand même il nʹaurait pas toutes les qualités si précieuses<br />

dont il est doué en expérience, charité, paix constante, droiture <strong>de</strong> vues, vous <strong>de</strong>vriez en‐<br />

core incliner votre volonté et votre jugement aux siens, parce que le Seigneur lʹa réglé ainsi<br />

et quʹIl fait bien toutes choses <strong>avec</strong> sagesse et amour. Je le répète, cher ami, je suis tout<br />

heureux <strong>de</strong> vous voir abon<strong>de</strong>r dans ce sens, cʹest évi<strong>de</strong>mment par un mouvement intérieur<br />

<strong>de</strong> lʹEsprit‐Saint; vous y serez bien fidèle et le Seigneur vous en récompensera.<br />

Certainement, vous aurez vos <strong>de</strong>ux lampes, je vous les donnerai <strong>de</strong> grand cœur.<br />

Quant aux statues, avez‐vous bien songé à lʹaugmentation notable que le prix subira par<br />

lʹemballage et le port? Je crains <strong>de</strong> ne pas retrouver la notre exacte <strong>de</strong> toutes les statuettes<br />

387


que vous me <strong>de</strong>mandiez; vous ferez bien <strong>de</strong> me la renvoyer, je mettrai à lʹenvoi toute la di‐<br />

ligence que je pourrai.<br />

Rassurez‐vous, cher enfant, je nʹai éprouvé dans mon voyage aucun besoin <strong>de</strong> man‐<br />

ger, vos petites provisions ne mʹont donc pas fait faute.<br />

Jʹavais résolu <strong>de</strong> mettre une petite lettre ici pour le bon M. Giraud, afin <strong>de</strong> mʹexcuser<br />

<strong>de</strong> ne lʹavoir pas visité comme je le voulais; mais jʹétais souffrant en quittant Paris et nʹétais<br />

guère fort durant mon séjour à Amiens, je nʹai fait que la moitié <strong>de</strong> ce que je voulais faire;<br />

dites cela à ce bon ami, jusquʹà ce que je le lui dise moi‐même par quelques lignes; assurez<br />

vos bons jeunes amis <strong>de</strong> mes souvenirs bien affectueux, et MM. Mangot, Cacheleux et De‐<br />

caix, etc., <strong>de</strong> mon sincère et profond respect.<br />

Cher petit Firmin, je voulais vous écrire une lettre particulière, cʹest pour le pro‐<br />

chain courrier; je suis au bout <strong>de</strong> mes forces, ayant la tête toute entourée <strong>de</strong> cataplasmes et<br />

lʹesprit pas bien luci<strong>de</strong>. Assurez mon cher f. Mainville <strong>de</strong> ma tendre affection. Cʹest notre<br />

<strong>de</strong>rnier‐né, il y a tout naturellement un peu <strong>de</strong> faible pour lui; tous nos frères ont appris<br />

<strong>avec</strong> joie son admission dans la Communauté.<br />

Adieu, bien chers amis, il me reste assez <strong>de</strong> vigueur pour vous serrer tendrement<br />

contre mon cœur, je vous y rassemble <strong>avec</strong> délices en union <strong>avec</strong> les Cœurs Sacrés <strong>de</strong> J. et<br />

<strong>de</strong> M.<br />

Votre affectionné Père et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Nous <strong>de</strong>vions avoir M gr <strong>de</strong> Tripoli 218 pour la confirmation <strong>de</strong> nos enfants, M gr<br />

lʹArchevêque <strong>de</strong> Paris nous a fait lʹagréable surprise <strong>de</strong> venir en personne; il a voulu voir<br />

toute la maison, y compris la cuisine, nous a fait une petite exhortation à la salle <strong>de</strong> Com‐<br />

munauté, où il a voulu voir nos frères réunis; enfin rien ne pouvait égaler sa bonté que<br />

nous pouvons dire toute paternelle; gloire à Dieu qui dispose ainsi les cœurs.<br />

310 à M. Caille<br />

Les Quarante Heures à Vaugirard. Le Premier Tabernacle à Amiens.<br />

Vaugirard, 14 juillet 1855<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu votre bonne lettre et, <strong>de</strong>ux jours après, le paquet dʹétoffe que vous nous<br />

avez <strong>de</strong>stiné; je vous remercie <strong>de</strong> lʹun et <strong>de</strong> lʹautre; lʹétoffe est tout à fait propre à faire <strong>de</strong>s<br />

habits <strong>de</strong> saison; vous agissez envers nous comme la Provi<strong>de</strong>nce qui donne chaque chose à<br />

point et selon les besoins du moment.<br />

Je vous aurais écrit plus tôt, mais, durant les jours que nous venons <strong>de</strong> passer, notre<br />

adoration <strong>de</strong>s Quarante Heures, avant, pendant et après, nous a tellement occupés que<br />

nous avions à peine un moment <strong>de</strong> liberté. Notre petite chapelle nʹa presque pas désempli<br />

durant trois jours; <strong>de</strong>ux fois par jour, on y faisait <strong>de</strong>s instructions <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s chants en lʹhon‐<br />

neur du Saint‐Sacrement et les nuits se passaient aussi en adoration; nous avons vu <strong>avec</strong><br />

joie ce concours dʹhommages et <strong>de</strong> respects pour le divin Seigneur. Et voilà que sans re‐<br />

tard Il nous récompense <strong>de</strong> lʹavoir entouré ainsi dʹun peu dʹempressement et dʹamour,<br />

puisquʹIl accor<strong>de</strong> à notre chère maison dʹAmiens le bonheur inestimable <strong>de</strong> le possé<strong>de</strong>r in‐<br />

218 Mgr <strong>Léon</strong> Sibour, cousin <strong>de</strong> l'archevêque <strong>de</strong> Paris.<br />

388


cessamment. Oh! je mʹen réjouis, nous nous en réjouissons bien <strong>avec</strong> vous ici; nous savons<br />

par expérience quelle force et quelle vie vient dans une maison <strong>avec</strong> Celui qui est la charité<br />

et la vie. Vous serez vraiment constitués du jour où le divin Maître viendra comme lʹun <strong>de</strong><br />

vous se faire frère parmi vous, pour vous gouverner, vous soutenir, vous assister en vos<br />

œuvres; nous allons tous le remercier <strong>de</strong> la grâce quʹIl vous accor<strong>de</strong>, nous la partageons<br />

vivement <strong>avec</strong> vous.<br />

Mon f. Vince se tourmente plus quʹil nʹest raisonnable au sujet <strong>de</strong> ma santé; un<br />

mouvement sanguin mʹa donné un mal dʹoreille et, en ensemble, jʹéprouve <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux<br />

mois un peu <strong>de</strong> langueur, mais ces états sont si communs pour moi que je nʹen ai nul sou‐<br />

ci, cela passera comme tant dʹautres malaises qui nʹavaient non plus rien <strong>de</strong> sérieux.<br />

Les divers objets en plâtre que le f. Vince nous avait <strong>de</strong>mandés sont prêts, jʹattends<br />

seulement pour les emballer quʹils soient un peu secs, afin quʹils soient moins facilement<br />

brisés; les lampes seront mises aussi dans la caisse <strong>avec</strong> les catéchismes.<br />

Le f. Paillé a représenté M. Mangot et les autres associés <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> St‐Victor<br />

dans la réunion qui vient <strong>de</strong> se tenir pour lʹexamen <strong>de</strong>s affaires intéressant cette Société. Il<br />

va être adressé un compte‐rendu <strong>de</strong> cette séance; je pense quʹelle ne sera pas sans utilité<br />

pour la prospérité <strong>de</strong> lʹœuvre; je vais du reste écrire quelques lignes à M. Mangot à ce su‐<br />

jet.<br />

Adieu, bien cher ami, vous ne nous parlez plus <strong>de</strong> votre voyage; vous étiez prêt à<br />

partir il y a un mois et nous vous attendons encore; jʹembrasse vous et vos frères dans les<br />

Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je crois que jeudi, fête <strong>de</strong> saint Vincent <strong>de</strong> Paul, nous allons admettre comme<br />

postulant un bon jeune homme qui me paraît animé <strong>de</strong>s meilleures dispositions.<br />

311 à M. Vince<br />

Le Saint‐Sacrement à Amiens. Ne pas trop sʹalarmer <strong>de</strong> la mauvaise santé <strong>de</strong> MLP.<br />

[14 juillet 1855]<br />

[Notre adoration <strong>de</strong>s Quarante Heures s’est déroulée <strong>avec</strong> un grand] concours et <strong>de</strong><br />

la façon la plus édifiante durant les trois jours et les <strong>de</strong>ux nuits. Il nous a semblé que le bon<br />

Maître avait voulu nous récompenser <strong>de</strong>s quelques soins que nous avions pris en se don‐<br />

nant à notre chère communauté dʹAmiens; Il ne pouvait nous faire une plus gran<strong>de</strong> grâce<br />

et mieux aller à notre cœur. Comme vous allez <strong>de</strong>venir bon, cher enfant, dans la société<br />

constante <strong>de</strong> Celui qui est doux et humble <strong>de</strong> cœur, <strong>de</strong> lʹami si tendre, si con<strong>de</strong>scendant,<br />

<strong>de</strong> Celui en un mot qui est lʹamour infini!<br />

Vos lampes sont prêtes, les statues réunies, mais encore un peu trop fraîches pour<br />

lʹemballage, il se fera au milieu <strong>de</strong> la semaine au plus tôt; vous y trouverez les catéchismes,<br />

le livre <strong>de</strong> M. Maignen, et si je puis, la Vie <strong>de</strong> saint François <strong>de</strong> Sales que nous lisons en lec‐<br />

ture spirituelle <strong>avec</strong> bonheur.<br />

Vous vous inquiétez plus quʹil ne faut <strong>de</strong> ma santé qui, à peu <strong>de</strong> chose près, est<br />

comme vous lʹavez toujours vue; jʹai un peu mal à lʹoreille, jʹai peu <strong>de</strong> force et dʹappétit,<br />

389


encore moins dʹesprit, voilà tout; je cours comme <strong>de</strong> coutume et nʹai rien qui doive alarmer<br />

lʹaffectueuse sollicitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> mes trop bons amis.<br />

Combien je regrette <strong>de</strong> ne pas faire une petite lettre particulière pour mes petits ff.<br />

Firmin [Thuillier] et Mainville; je lʹavais résolu, mais il est trop tard aujourdʹhui et je désire<br />

faire partir ces lignes <strong>de</strong>main matin; prenez donc dans votre cœur quelques paroles bien<br />

tendres et dites‐les <strong>de</strong> ma part à ces chers enfants; je les embrasse cordialement et prie le<br />

Seigneur <strong>de</strong> les bénir.<br />

Je vous embrasse aussi, cher enfant, et vous laisse dans le Cœur sacré du divin Sei‐<br />

gneur.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

312 à M. Decaux<br />

MLP. prie son Confrère <strong>de</strong> cé<strong>de</strong>r son tour <strong>de</strong> parole à un autre orateur. Gran<strong>de</strong> fatigue <strong>de</strong> MLP.<br />

Paris, 18 juillet 1855<br />

Très cher ami et frère en N.S.,<br />

M. Gaillardin, que jʹai rencontré lundi en sortant du Conseil Général et <strong>avec</strong> lequel<br />

je mʹentretenais <strong>de</strong>s difficultés croissantes que nous rencontrons pour procurer à nos Sain‐<br />

tes‐Familles <strong>de</strong>s orateurs laïcs, mʹa offert <strong>de</strong> lui‐même <strong>de</strong> venir à celle <strong>de</strong> St‐Sulpice di‐<br />

manche prochain; jʹai quelque peu hésité à répondre, car je me rappelais distinctement la<br />

promesse que vous mʹavez faite dʹentretenir nos bons amis qui ne vous ont pas vu <strong>de</strong>puis<br />

longtemps; mais, en me rappelant que cette œuvre est sous votre protection spéciale, jʹai<br />

cru <strong>de</strong>voir accepter en votre nom une faveur que les occupations <strong>de</strong> M. Gaillardin ne lui<br />

permettent pas <strong>de</strong> nous accor<strong>de</strong>r souvent.<br />

Dites‐moi par un mot, très cher ami, que jʹai bien interprété vos sentiments et que<br />

jʹai fait ce que vous mʹeussiez prescrit <strong>de</strong> faire si vous eussiez été présent; assurez‐moi aus‐<br />

si que nous retrouverons après la retraite les bonnes paroles que vous nous réserviez.<br />

Une chose meilleure serait à faire, ce serait que vous vinssiez prési<strong>de</strong>r notre séance;<br />

je suis en ce moment si mal disposé quʹil mʹest impossible <strong>de</strong> dire quatre mots <strong>de</strong> suite; à<br />

chaque réunion, chacun vient me dire: ʺQue vous paraissiez fatigué!ʺ autrement: ʺComme<br />

vous avez péniblement parlé!ʺ Ne serait‐il pas chrétien <strong>de</strong> mʹépargner pour dimanche un<br />

pareil compliment?<br />

Adieu, bien cher ami, croyez à mes sentiments <strong>de</strong> tendre affection en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

313 à M. Caille<br />

La St‐Vincent <strong>de</strong> Paul à Vaugirard. Autorisation à <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r aux Franciscains dʹétablir le chemin <strong>de</strong> croix à<br />

Vaugirard et à Nazareth.<br />

19 juillet [1855]<br />

Fête <strong>de</strong> saint Vincent <strong>de</strong> Paul<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Lʹexcellent M. Desjardins, qui repart <strong>de</strong>main, veut bien se charger <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux li‐<br />

gnes pour vous. Je nʹai que le temps <strong>de</strong> vous les griffonner en hâte, et <strong>de</strong> vous dire que<br />

390


tout va bien ici. Nous faisons aujourdʹhui à la Communauté la fête <strong>de</strong> saint Vincent <strong>de</strong><br />

Paul, notre Patron; nous nʹavons pas manqué <strong>de</strong> le prier beaucoup pour nos bien‐aimés<br />

amis dʹAmiens; dans ces occasions solennelles, le cœur se sent poussé intérieurement à<br />

prier <strong>avec</strong> plus <strong>de</strong> ferveur pour ceux quʹon aime.<br />

Vos lampes sont parties hier par le chemin <strong>de</strong> fer dans une petite caisse contenant<br />

en outre les catéchismes, le petit volume du f. Maignen et la Vie <strong>de</strong> saint François <strong>de</strong> Sales<br />

qui, je crois, vous conviendra beaucoup pour la lecture spirituelle.<br />

Je vous prie, cher ami, <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r chez les Franciscains, et <strong>de</strong> mʹenvoyer sans re‐<br />

tard au commencement <strong>de</strong> la semaine prochaine, lʹautorisation dʹétablir le chemin <strong>de</strong><br />

croix:<br />

1°‐ dans notre chapelle <strong>de</strong>s orphelins <strong>de</strong> Vaugirard,<br />

2°‐ dans la chapelle <strong>de</strong> Nazareth, rue Stanislas à Paris.<br />

Le f. Vince pourra sʹoccuper <strong>de</strong> cette petite affaire, si vous nʹavez pas le temps vous‐<br />

même, comme je le pense bien.<br />

Adieu, très cher ami, tous nos frères sont réunis aujourdʹhui à cause <strong>de</strong> la fête <strong>de</strong><br />

notre Saint Patron; que ne nous est‐il possible dʹavoir aussi ceux dʹAmiens et combien cette<br />

réunion <strong>de</strong> famille nous serait douce! Au Ciel, cette joie nous sera donnée. Déjà notre f.<br />

Viollat nous y attend; pensez à lui dans vos prières, notre p. Beaussier nous le recom‐<br />

man<strong>de</strong> beaucoup, il veut quʹil y ait un lien entre les frères militants et ceux qui seront déjà<br />

dans le repos; cʹest une pieuse pensée, nous disons le De profundis tous les jours à cette in‐<br />

tention.<br />

Je vous embrasse tous, on mʹappelle pour la loterie <strong>de</strong> la petite Conférence. Adieu.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

314 à M. Decaux<br />

Que M. Decaux veuille bien le suppléer à la Sainte‐Famille.<br />

Paris, 4 août 1855<br />

Mon bien bon ami,<br />

Diverses occupations, et particulièrement les affaires <strong>de</strong> Nazareth, mʹont obligé à<br />

renoncer à mon projet <strong>de</strong> voyage, mais vous nʹen serez pas moins nécessaire aux exercices<br />

<strong>de</strong> la retraite; je ne suis plus guère fort <strong>de</strong> corps et dʹesprit, votre zèle si actif et votre initia‐<br />

tive plus vivace suppléeront à ma faiblesse et à mon insuffisance.<br />

Je crois que le f. Paillé fait, conformément à votre <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, les convocations pour le<br />

Conseil <strong>de</strong> jeudi; je crains seulement que lʹouverture <strong>de</strong> notre retraite, qui a lieu ce même<br />

jour, ne me permette que difficilement dʹassister à la réunion du Conseil.<br />

Jʹespère que je vous rencontrerai <strong>de</strong>main rue du Regard; au revoir donc, cher bon<br />

ami, croyez‐moi bien toujours dans les mêmes sentiments dʹaffection profon<strong>de</strong> et bien dé‐<br />

vouée.<br />

Votre Confrère et ami.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

391


315 à M. Caille<br />

Dispositions à prendre pour soigner au mieux le frère Vince. Esprit <strong>de</strong> simplicité propre aux enfants <strong>de</strong> Dieu.<br />

Vaugirard, 12 août 1855<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> votre empressement à me donner <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> notre f.<br />

Vince, et je suis bien touché aussi <strong>de</strong>s soins que vous prenez <strong>de</strong> lui; il ne manquerait pas,<br />

en cas pareil, <strong>de</strong> vous le rendre, car il a aussi une très gran<strong>de</strong> sollicitu<strong>de</strong> pour les mala<strong>de</strong>s.<br />

Je vous laisse dʹailleurs tout à fait juge du parti qui serait le meilleur à prendre dans<br />

lʹintérêt <strong>de</strong> son prompt rétablissement; je crois que le meilleur parti serait <strong>de</strong> consulter le<br />

mé<strong>de</strong>cin; sʹil pense que notre ami se remettra bientôt, grâce aux soins quʹon prend <strong>de</strong> lui et<br />

en ayant la précaution <strong>de</strong> le bien ménager, je crois quʹil nʹy aurait pas nécessité <strong>de</strong> lui faire<br />

faire un voyage en ce moment; si, au contraire, le docteur croit nécessaire un changement<br />

dʹair et <strong>de</strong> place, je pense quʹen cette saison lʹair <strong>de</strong> notre maison <strong>de</strong> Vaugirard est très bon<br />

et que notre cher frère sʹen trouverait bien; ainsi, à mon avis, il faut sʹen rapporter au mé‐<br />

<strong>de</strong>cin sur la nécessité <strong>de</strong> cette petite disposition.<br />

Je lʹapprouverais encore dans le cas où lʹindisposition <strong>de</strong> notre frère <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rait<br />

beaucoup <strong>de</strong> soins et ajouterait aux surcharges qui pèsent déjà sur vous; en ce cas, il serait<br />

bien plus raisonnable quʹil vînt se remettre ici où nous avons beaucoup plus <strong>de</strong> mon<strong>de</strong> et<br />

<strong>de</strong>s moyens bien plus faciles <strong>de</strong> nous occuper <strong>de</strong> lui sans déranger aucun <strong>de</strong> nos services.<br />

En tout état <strong>de</strong> cause, sʹil <strong>de</strong>vait sʹabsenter <strong>de</strong>ux ou trois semaines, je pourrais vous<br />

envoyer durant ce temps pour le remplacer le f. Marcaire, que nous avons <strong>de</strong>puis quelque<br />

temps en partie déchargé <strong>de</strong> sa classe, à cause dʹun affaiblissement ou fatigue <strong>de</strong>s yeux;<br />

nos enfants vont dʹailleurs avoir pendant quinze jours une petite interruption qui rendrait<br />

encore son absence moins sensible pour nous.<br />

Examinez tout cela, cher ami, non <strong>avec</strong> une délicatesse excessive, comme on lʹa par‐<br />

fois dans le mon<strong>de</strong>, mais <strong>avec</strong> cette simplicité qui appartient aux enfants <strong>de</strong> Dieu. Nos res‐<br />

sources sont communes, il faut les porter ici ou là, selon que le bien <strong>de</strong> nos œuvres peut le<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r. Vous comprenez les choses ainsi, je ne les entends pas autrement; cela dit, jʹat‐<br />

tendrai votre décision. Remerciez bien à lʹoccasion M. <strong>de</strong> Renneville aussi pour nous.<br />

Nous allons comman<strong>de</strong>r <strong>de</strong> suite vos lits <strong>de</strong> fer. Jʹai chargé le f. Tourniquet <strong>de</strong> votre<br />

commission <strong>de</strong> musique. Je verrai aussi <strong>de</strong>main les statues; le f. Vince ne mʹavait pas don‐<br />

né lʹadresse du sculpteur.<br />

Notre distribution aura lieu ici, je crois, le 23 août. Nous sommes en pleine retraite<br />

<strong>de</strong> la Sainte‐Famille à St‐Sulpice.<br />

Nous prions toujours pour votre bonne sœur.<br />

Adieu, cher ami, assurez nos frères <strong>de</strong> notre tendre affection et croyez‐moi en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

316 à M. Vince<br />

MLP. le réconforte dans sa maladie; exhortation à maîtriser sa volonté et à consentir à lʹœuvre <strong>de</strong> Dieu. Les tra‐<br />

vaux <strong>de</strong> Nazareth sont la croix <strong>de</strong> MLP.<br />

[12 août 1855]<br />

Cher enfant, comme vous êtes souffrant, je vous écris ces <strong>de</strong>ux mots <strong>de</strong> tendresse pour<br />

compatir à votre mal et vous donner un peu <strong>de</strong> courage. Dʹabord, nous allons bien prier<br />

392


pour vous et reprendre notre petite invocation: Salus infirmorum, ora pro nobis, que nous<br />

avions fort négligée <strong>de</strong>puis quelque temps. Ensuite, jʹécris à mon f. Caille que si le mé<strong>de</strong>cin<br />

jugeait nécessaire, pour hâter et assurer votre rétablissement, <strong>de</strong> vous faire changer dʹair et<br />

<strong>de</strong> place, je trouverais très bien que vous vinssiez passer ici quelque temps, sauf à prêter<br />

pendant cela à notre maison dʹAmiens le petit f. Marcaire qui est un peu moins chargé<br />

dʹoccupations que <strong>de</strong> coutume en ce moment.<br />

Prenez bien patience dans cette petite épreuve, cher enfant, cʹest lʹheure <strong>de</strong> mériter<br />

<strong>de</strong>vant le Seigneur et dʹobtenir <strong>de</strong> Lui beaucoup <strong>de</strong> grâces. Vous <strong>de</strong>mandiez <strong>avec</strong> ar<strong>de</strong>ur<br />

quʹil vous donnât un peu plus <strong>de</strong> souplesse <strong>de</strong> volonté, un peu plus dʹempire sur vos pre‐<br />

miers mouvements; comme vous béniriez, nʹest‐ce pas, vos misères dʹentrailles et dʹesto‐<br />

mac si elles vous obtenaient ce résultat si désiré par vous et si, en vous remettant sur pied<br />

physiquement, vous vous trouviez aussi débarrassé <strong>de</strong> vos tiraillements et difficultés dʹin‐<br />

térieur; le bon Maître est si sage et si miséricordieux que, nous le pouvons penser, tels sont<br />

ses <strong>de</strong>sseins. Laissons‐le donc faire, très cher ami, et, quoique la nature crie un peu en<br />

nous, consentons à ses opérations pleines <strong>de</strong> science et dʹamour.<br />

Nous allons bien ici; nos enfants, à cause <strong>de</strong> la prochaine distribution fixée au 23 <strong>de</strong><br />

ce mois, sont un peu dissipés; mais ils se remettront après leurs vacances qui sont <strong>de</strong> 15<br />

jours passés, vous le savez, en promena<strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s ou petites, mais toujours très aimables<br />

puisquʹelles remplacent les classes.<br />

Nos bons Restou vont bien; je les ai beaucoup vus <strong>de</strong>puis quelques mois à cause <strong>de</strong><br />

nos travaux <strong>de</strong> Nazareth qui sont pour moi mon épreuve, mon tiraillement, ma croix; aus‐<br />

si, en vous exhortant tout à lʹheure à la patience, je sentais que le sermon mʹallait aussi très<br />

bien et jʹen faisais mon profit.<br />

Adieu, cher Joseph, embrassez tous mes frères tendrement pour moi; je les aime au‐<br />

tant que si jʹétais tous les jours <strong>avec</strong> eux.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

317 à M. Caille<br />

Les santés sont quelque peu ébranlées. Nécessité <strong>de</strong> prendre une Sœur comme gar<strong>de</strong>‐mala<strong>de</strong>. Confiance en la<br />

Provi<strong>de</strong>nce.<br />

3 septembre [1855]<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous écris <strong>de</strong>ux mots seulement, nʹétant quʹà <strong>de</strong>mi délivré <strong>de</strong> lʹindisposition qui<br />

me retient à la chambre et me laisse peu <strong>de</strong> liberté dans les mouvements.<br />

Je nʹai rien du reste <strong>de</strong> notable à vous dire; nous allons bien ici, le f. Vince est un peu<br />

mieux et commence à manger un peu plus régulièrement; il serait en meilleur état encore<br />

sʹil nʹavait pris ces jours‐ci un peu <strong>de</strong> fatigue pour un <strong>de</strong> nos petits enfants gravement ma‐<br />

la<strong>de</strong>; nous avons pris, pour nous donner quelque soulagement, une sœur <strong>de</strong> Bon‐Secours<br />

qui nous ai<strong>de</strong>ra au moins pour les nuits, nos frères ayant successivement veillé près du pe‐<br />

tit mala<strong>de</strong>, non sans quelque souffrance, à cause <strong>de</strong> leurs travaux du jour.<br />

Je suis heureux que notre f. Marcaire vous soit un ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> quelque utilité; nous sou‐<br />

haitons vivement vous assister et rendre vos charges un peu moins lour<strong>de</strong>s, la Provi<strong>de</strong>nce<br />

393


nous éclairera sur les moyens qui seront le mieux selon ses <strong>de</strong>sseins et nous ne manque‐<br />

rons pas <strong>de</strong> nous y conformer.<br />

Adieu, bien cher ami, tenons‐nous étroitement unis dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

318 à M. Caille<br />

Etat <strong>de</strong>s santés. Espoir <strong>de</strong> voir un jeune dʹAmiens entrer en communauté.<br />

Vaugirard, 14 septembre [1855]<br />

Exaltation <strong>de</strong> la Sainte Croix<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous écris <strong>de</strong>ux mots seulement pour vous dire que toute la Communauté prie<br />

pour notre jeune ami M. Allard; mercredi, nous avions adoration pendant la nuit, nous<br />

nʹavons pas manqué <strong>de</strong> faire à cette occasion une recommandation spéciale, espérons que<br />

le divin Maître daignera nous éclairer et nous manifester sa très sainte volonté.<br />

Notre f. Vince vous remercie tous <strong>de</strong> vos bons souvenirs et prières; il <strong>de</strong>vait vous<br />

écrire, mais il a été obligé <strong>de</strong> prendre un peu <strong>de</strong> repos. Il nʹy a point jusquʹici dʹaméliora‐<br />

tion bien sensible dans sa santé, mais hier il a eu une consultation dʹun mé<strong>de</strong>cin habile; il<br />

commence un nouveau régime dont nous attendons <strong>de</strong> bons résultats.<br />

Je suis heureux que mon fils Marcaire vous secon<strong>de</strong> bien et se plaise aussi à<br />

Amiens, je ne désire rien tant que <strong>de</strong> vous voir utilement aidé par notre petite famille.<br />

Lʹépoque <strong>de</strong> notre retraite nʹa pu encore être fixée positivement, le r.p. <strong>de</strong> Ponlevoy<br />

étant absent et ne <strong>de</strong>vant revenir que le 20 <strong>de</strong> ce mois; aussitôt après son arrivée, nous tâ‐<br />

cherons <strong>de</strong> vous écrire ce qui aura été réglé.<br />

Jʹembrasse tous mes chers frères et aussi notre jeune ami, M. Allard, que jʹespère<br />

compter bientôt au nombre <strong>de</strong> mes enfants.<br />

Priez toujours pour nous; nous sommes, pour notre part, toujours unis à vous dans<br />

les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

319 à M. Caille<br />

Union fraternelle dans la communauté dʹAmiens. Les chemins <strong>de</strong> croix installés dans plusieurs chapelles <strong>de</strong> nos<br />

communautés. Prier pour les vocations.<br />

Vaugirard, 18 septembre 1855<br />

Très cher ami et frère en N.S.,<br />

Jʹai à peine le temps <strong>de</strong> vous écrire quelques lignes, mais jʹaime mieux peu que rien;<br />

cʹest toujours un petit souvenir <strong>de</strong> charité fraternelle.<br />

Je remercie Dieu <strong>de</strong> tout ce quʹIl daigne faire pour notre maison dʹAmiens où règne<br />

sa paix et lʹunion <strong>de</strong>s cœurs; ayons bonne confiance, ces petits commencements se fortifie‐<br />

ront et arriveront à quelque œuvre vraiment bonne pour la gloire du Seigneur.<br />

394


Notre f. Vince suit son traitement, il ne peut se remettre que peu à peu; cela <strong>de</strong>man‐<br />

<strong>de</strong>ra encore du temps, mais nous espérons que le mieux sera sensible prochainement.<br />

Je me suis remis aux exercices <strong>de</strong> la Communauté sans être bien fort encore.<br />

Le r.p. <strong>de</strong> Ponlevoy reviendra à la fin <strong>de</strong> cette semaine, nous règlerons définitive‐<br />

ment le moment <strong>de</strong> la retraite et nous vous informerons sans retard.<br />

Le chemin <strong>de</strong> la croix a été installé à notre chapelle <strong>de</strong> Nazareth le même jour, 14<br />

septembre, où vous lʹinstalliez à Amiens; que le Seigneur soit béni <strong>de</strong> cette double faveur,<br />

nos trois chapelles ont maintenant ce précieux privilège; je crois que cela ne sʹest pas fait<br />

sans un <strong>de</strong>ssein <strong>de</strong> Dieu, car les trois chemins <strong>de</strong> croix nous ont été donnés sur les diffé‐<br />

rents points presque au même moment.<br />

Nous apprendrons <strong>avec</strong> joie la résolution <strong>de</strong> notre jeune ami Allard, si elle le tourne<br />

vers nous; je crois que cʹest un bien pieux enfant, cher à Dieu et à Marie.<br />

Je crois que vos vues au sujet <strong>de</strong> M me votre sœur sont toutes dans son intérêt bien<br />

entendu, vous avez assurément tardé autant quʹil se pouvait à prendre ce parti, je crois<br />

quʹil est <strong>de</strong>venu nécessaire.<br />

Tous nos frères vous aiment tendrement, le f. Vince vous a fait une petite lettre.<br />

Adieu, bien cher ami, daigne le Seigneur verser sur vous et sur tous nos jeunes frè‐<br />

res ses plus précieuses bénédictions.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

320 à M. Caille<br />

Prévisions pour la prochaine retraite <strong>de</strong> communauté. Que le frère Marcaire écrive plus souvent. Salutations à<br />

transmettre. La santé du frère Vince est stationnaire.<br />

Vaugirard, 10 octobre 1855<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je ne reçois point <strong>de</strong> lettre <strong>de</strong> vous, peut‐être en atten<strong>de</strong>z‐vous une <strong>de</strong> ma part qui<br />

vous annonce le jour <strong>de</strong> lʹouverture <strong>de</strong> la retraite. Jʹai différé un peu à vous en parler parce<br />

que le retour du r.p. <strong>de</strong> Ponlevoy sʹest fait attendre bien plus que nous le pensions, et<br />

quʹaprès son arrivée il était presque inabordable, à cause <strong>de</strong> la multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s visites quʹil<br />

recevait. Il nʹa pu, malgré notre désir, fixer notre retraite avant le 21 <strong>de</strong> ce mois; cʹest un<br />

peu tard, mais il y avait pour lui impossibilité <strong>de</strong> faire mieux, il fallait se résigner à cela ou<br />

en accepter un autre; nous avons préféré attendre un peu plus que <strong>de</strong> coutume et <strong>de</strong>meu‐<br />

rer sous la conduite <strong>de</strong> cet excellent Père.<br />

Vous verrez, cher ami, quels sont ceux <strong>de</strong> nos frères que vous pourrez envoyer pour<br />

ce moment parmi nous; je mʹen rapporte à votre sagesse qui saura régler tout pour le<br />

mieux.<br />

Nous trouvons que notre f. Marcaire nous écrit trop rarement; il <strong>de</strong>vrait nous faire<br />

au moins quelques lignes tous les quinze jours; ces rapports habituels entretiennent<br />

lʹunion entre tous les frères et empêchent quʹon ne sʹaccoutume à <strong>de</strong>meurer étrangers à<br />

tout ce qui intéresse les uns et les autres.<br />

Je pense que notre cher M. Allard gar<strong>de</strong> ses bonnes dispositions et que nous le ver‐<br />

rons bien prochainement ici; tout ce que jʹai vu <strong>de</strong> lui me persua<strong>de</strong> que sa place est bien<br />

marquée provi<strong>de</strong>ntiellement dans notre petite Congrégation.<br />

395


Assurez <strong>de</strong> nos tendres affections les ff. Thuillier et Mainville; je pense que vous fe‐<br />

rez emporter leurs vêtements à ceux <strong>de</strong> ces bons frères que vous présumerez <strong>de</strong>voir rester<br />

<strong>avec</strong> nous pour un temps.<br />

Nous gardons un très doux souvenir <strong>de</strong> la visite <strong>de</strong> M. lʹabbé Mangot, tous nos frè‐<br />

res lʹaiment et se sont trouvés à lʹaise <strong>avec</strong> lui; notre p. Beaussier a bien regretté <strong>de</strong> ne<br />

lʹavoir point vu, mais il mʹa promis quʹà lʹun <strong>de</strong> mes voyages à Amiens, il mʹaccompagne‐<br />

rait pour lui rendre visite.<br />

Ne manquez pas <strong>de</strong> me donner <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> votre bonne sœur quand vous<br />

mʹécrivez.<br />

Il me paraîtrait à souhaiter que nos frères arrivassent dʹAmiens au moins dimanche<br />

21, dans lʹaprès‐midi ou la soirée, si vous ne pouvez faire mieux. Nous aurons un premier<br />

exercice préparatoire dimanche au soir, il serait bien que nous y fussions tous réunis.<br />

Notre f. Vince, sans être robuste, éprouve néanmoins un peu dʹadoucissement à ses<br />

souffrances <strong>de</strong>puis quelques jours; jʹespère que peu à peu il recouvrera ses forces; sʹil nʹy a<br />

pas <strong>de</strong> rechute, on peut penser quʹil est en voie <strong>de</strong> se remettre, mais il est bien maigre, bien<br />

faible; il lui faudra du temps pour être vraiment sur pied.<br />

Adieu, bien cher ami et fils en N.S., embrassez nos frères et croyez‐moi bien affec‐<br />

tueusement<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

321 à M. Decaux<br />

Invitation à une réunion <strong>de</strong> la Sainte‐Famille.<br />

Mercredi 10 octobre [1855]<br />

Très cher Confrère et ami,<br />

Permettez‐moi dʹespérer que rien ne vous empêchera dimanche prochain <strong>de</strong> venir à<br />

notre Sainte‐Famille <strong>de</strong> St‐Sulpice dont tous les membres, y compris celui qui écrit ici, re‐<br />

grette vivement <strong>de</strong> vous entendre si rarement. Je compte que <strong>de</strong>main vous me donnerez<br />

une bonne réponse à la réunion <strong>de</strong> 4h.¼.<br />

Croyez‐moi toujours, <strong>avec</strong> un bien affectueux dévouement.<br />

Votre humble serviteur et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

322 à M. Caille<br />

Conseils pour aplanir quelques difficultés <strong>de</strong> relation <strong>avec</strong> le clergé dʹAmiens.<br />

Vaugirard, 18 octobre 1855<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Notre cher f. Mainville est arrivé sans encombre au milieu <strong>de</strong> nous et semble y<br />

prendre très bien sa place; jʹespère quʹil nʹaura point <strong>de</strong> peine à prendre les habitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />

communauté et quʹil ressentira quelque bien <strong>de</strong> nos exercices et du régime général <strong>de</strong> la<br />

maison.<br />

396


Les détails que vous mʹavez donnés dans votre <strong>de</strong>rnière lettre mʹont un peu contris‐<br />

té, parce quʹils me font craindre quelque refroidissement ou difficulté dans vos rapports<br />

<strong>avec</strong> M. lʹabbé Cacheleux, et aussi quelque mécontentement contre vous à lʹEvêché. Au<br />

premier aspect, et sans donner à mon avis une gran<strong>de</strong> insistance, puisque je puis ignorer<br />

bien <strong>de</strong>s circonstances en cette affaire, il me semble quʹil eût été bon <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r ici <strong>avec</strong><br />

beaucoup <strong>de</strong> circonspection. Je ne pense pas que la formalité <strong>de</strong> prendre lʹavis <strong>de</strong> M. Man‐<br />

got vous ait beaucoup mis à couvert; vous aviez provoqué vous‐même la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> M.<br />

lʹabbé <strong>de</strong> Brandt en insinuant à diverses reprises à M. Mangot (et notamment une fois à<br />

Vaugirard) que vous verriez cet arrangement <strong>avec</strong> plaisir; lʹavis <strong>de</strong> M. Mangot, ami intime<br />

<strong>de</strong> M. Brandt, ne pouvait guère dʹailleurs être autre quʹil nʹa été et ne pouvait conséquem‐<br />

ment vous bien mettre à lʹabri. M. lʹabbé Ladoue, Vicaire Général, étant dʹune gran<strong>de</strong> bon‐<br />

té pour vous, il mʹeût paru bien plus simple <strong>de</strong> le consulter confi<strong>de</strong>ntiellement; <strong>avec</strong> son<br />

avis, vous pouviez marcher à coup sûr et sans rien craindre; tandis quʹaujourdʹhui, la me‐<br />

sure que vous avez faite, sans prendre aucun avis sérieux, peut sembler suspecte à lʹEvê‐<br />

ché.<br />

M. lʹabbé Cacheleux me semble aussi avoir en ceci quelque sujet <strong>de</strong> plainte; il sʹest<br />

associé à vous pour la création <strong>de</strong> vos œuvres, il en a partagé les dépenses et les soins, il a<br />

droit <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r que vous ne preniez sans son consentement aucune mesure concernant<br />

ces œuvres, surtout si elle a quelque importance. Or, on ne peut nier quʹeu égard à la situa‐<br />

tion <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Brandt envers lʹEvêché, son introduction dans la maison nʹeût une impor‐<br />

tance assez grave.<br />

Il me semble que vous <strong>de</strong>vriez rendre au plus tôt une petite visite à M. Ladoue pour<br />

lui expliquer que vous avez agi <strong>avec</strong> simplicité et dans la vue seule <strong>de</strong> procurer une messe<br />

quotidienne à votre maison, que vous le priez <strong>de</strong> nʹy rien voir <strong>de</strong> plus. Je crois aussi que<br />

vous <strong>de</strong>vriez à M. Cacheleux quelques explications ou même excuses bienveillantes; il a<br />

été bien confiant et bien bon pour nous, nous ne <strong>de</strong>vons point manquer <strong>de</strong> reconnaissance<br />

envers lui.<br />

Le f. Vince ne va point mieux jusquʹici; nous espérons cependant quʹ<strong>avec</strong> <strong>de</strong>s soins<br />

nous le remettrons sur pied, le mé<strong>de</strong>cin nous en donne quelque confiance. Le f. Vince vous<br />

prie <strong>de</strong> lui envoyer par nos ff. Thuillier et Allard ses habits et choses nécessaires.<br />

Je remercie mon petit f. Marcaire <strong>de</strong> sa bonne et affectueuse lettre, nous lʹaimons<br />

toujours beaucoup; nous prions <strong>avec</strong> nos enfants pour son frère Albert.<br />

Nous attendrons nos jeunes frères samedi, on les recevra, cela va sans dire, à bras<br />

ouvert; et vous aussi, cher ami, nous vous accueillerons bien tendrement à la clôture <strong>de</strong> la<br />

retraite, quand vous viendrez pour quelques instants vous réunir à nous. Nous vous em‐<br />

brassons tendrement en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

323 <strong>de</strong> MM. Mainville et Vince à M. Caille<br />

P.S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

MLP. attend M. Caille à Vaugirard avant la retraite <strong>de</strong> Communauté.<br />

Vaugirard, le 22 octobre 1855<br />

Cher Père en N.S.,<br />

Je vous écris ces quelques lignes, cʹest pour vous dire comment je me trouve au milieu <strong>de</strong><br />

ces Messieurs qui sont si bons pour moi, surtout notre digne Père, M. Le <strong>Prevost</strong>, qui ne sait quel‐<br />

397


les caresses nous montrer. Le bon Dieu, en mʹappelant à Lui, mʹa fait sentir les effets <strong>de</strong> toute sa<br />

miséricor<strong>de</strong>; jʹai appris que vous <strong>de</strong>viez venir à la fin <strong>de</strong> la retraite, je me suis empressé <strong>de</strong> vous<br />

écrire pour vous dire que vous mʹapportiez ce qui reste <strong>de</strong> linge à moi; vous nʹoublierez pas ma<br />

casquette, une mauvaise paire <strong>de</strong> bottines et lʹImitation <strong>de</strong> N.S.J.C. qui se trouve dans le tiroir <strong>de</strong> la<br />

table en face <strong>de</strong> M. Dumoulin, ainsi que mon paroissien <strong>de</strong> chant romain, et ce qui est à moi qui<br />

pourrait quelquefois me servir à Vaugirard. Je finis en vous embrassant <strong>de</strong> tout mon cœur, ainsi<br />

que mon cher f. Marcaire qui est si bon, sans oublier les enfants <strong>de</strong> la maison; vous leur direz que<br />

je me recomman<strong>de</strong> à leurs prières. Vous direz bien <strong>de</strong>s choses <strong>de</strong> ma part à tous les Messieurs Di‐<br />

recteurs <strong>de</strong>s patronages.<br />

Séraphin Mainville<br />

Bien cher et bon ami,<br />

Jʹaurais bien <strong>de</strong>s choses à vous dire, quoique toujours souffrant; je suis vraiment bien faible,<br />

je ne ferai donc que <strong>de</strong> vous embrasser, mais c’est <strong>de</strong> tout cœur.<br />

Votre fils tendrement affectionné<br />

J. Vince<br />

M. Le <strong>Prevost</strong> et tout le mon<strong>de</strong> vous attend pour la clôture <strong>de</strong> la retraite qui aura lieu sa‐<br />

medi matin.<br />

Veuillez mʹexcuser auprès <strong>de</strong> M. lʹabbé Decaix si je ne réponds pas à son aimable petite let‐<br />

tre, mais je suis vraiment bien peu fort; je me dédommagerai le plus tôt possible; les ordres sont<br />

donnés pour ce quʹil me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>.<br />

Je crois que notre f. Thuillier serait bien aise que vous lui apportiez ses outils; çà vous para‐<br />

îtra indispensable, je pense.<br />

Je vous embrasse encore et comme tout à lʹheure <strong>de</strong> tout cœur.<br />

J. Vince<br />

Mille bonjours, amitiés et respects à notre f. Marcaire et à tous ces Messieurs, ainsi quʹà nos<br />

jeunes gens et à tous les enfants.<br />

Cher bon ami, la clôture <strong>de</strong> notre retraite se fera samedi matin; il serait donc désira‐<br />

ble que vous arriviez vendredi. Embrassez pour nous le f. Marcaire, il ne manquera que lui<br />

pour la réunion <strong>de</strong> toute la famille; M. Allard va bien.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

324 à M. Caille<br />

Factures à régler. Bonheur <strong>de</strong> voir la paix régner entre tous. Ouvertures pour lʹentrée <strong>de</strong> M. Halluin dans lʹIns‐<br />

titut. Ses forces déclinant, MLP. va <strong>de</strong>voir passer lʹhiver dans le Midi.<br />

Vaugirard, 10 novembre 1855<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹattendais une lettre <strong>de</strong> vous, dans la pensée que, si je vous écrivais moi‐même, nos<br />

épîtres se croiseraient en route; comme je ne reçois rien je prends les <strong>de</strong>vants et vous écrie.<br />

Je pense que vous avez reçu vos trois lits <strong>de</strong> fer. La facture sʹélève à 45f 15, celle <strong>de</strong>s<br />

six <strong>de</strong>rniers était <strong>de</strong> 89f 05. Ensemble: 134f 20.<br />

Je pense que si vous nʹavez pas dʹobservations à faire sur ces <strong>de</strong>ux livraisons, il y<br />

aurait lieu dʹacquitter les factures, dont la première remonte déjà à plusieurs mois.<br />

398


Nous avons payé, dʹun autre côté, 23f pour M. Dupetit; mais, pour notre part, nous<br />

vous <strong>de</strong>vons 31f pour les galoches que vous nous avez envoyées, plus le prix <strong>de</strong>s bois que<br />

le f. Vasseur vous a <strong>de</strong>mandés.<br />

Je ne saurais vous dire combien je suis heureux <strong>de</strong>s détails tout satisfaisants que<br />

vous me donnez sur vos petites affaires intérieures, je ne souhaite rien tant que <strong>de</strong> voir ré‐<br />

gner au milieu <strong>de</strong> vous lʹesprit <strong>de</strong> paix et <strong>de</strong> vraie charité, et je bénis le Seigneur qui sem‐<br />

ble exaucer pleinement nos vœux sous ce rapport. Jʹécrirai ces jours‐ci à mon cher enfant<br />

M. Marcaire, jʹai chargé le f. Vince <strong>de</strong> remplir ses intentions pour les divers objets quʹil<br />

mʹavait signalés dans sa lettre; jʹespère, quoique vous ne me lʹayez pas encore annoncé,<br />

que M. Allard a pu sʹadjoindre à vous et réunir son zèle et ses efforts aux vôtres pour la<br />

gloire <strong>de</strong> notre divin Seigneur.<br />

Le f. Vince continue dʹaller en progressant vers son rétablissement, mais pas à pas et<br />

lentement.<br />

La lettre <strong>de</strong> M. Halluin 219 accroît la bonne opinion<br />

que vous mʹaviez donnée <strong>de</strong> la droiture <strong>de</strong> ses vues et <strong>de</strong><br />

son entier dévouement au service <strong>de</strong> Dieu. je vous invite à<br />

lui répondre <strong>avec</strong> toute lʹaffection et le respect possibles,<br />

lʹassurant que nous regar<strong>de</strong>rions comme une vraie grâce<br />

<strong>de</strong> Dieu <strong>de</strong> nous unir à lui; je pense que vous pourriez lui<br />

communiquer notre règlement, au moins en partie, car son<br />

ensemble pourrait lui donner matière à bien <strong>de</strong>s objections<br />

qui se résoudraient facilement <strong>de</strong> vive voix, tandis quʹelles<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>raient <strong>de</strong>s correspondances interminables.<br />

Jʹentrerai néanmoins bien volontiers en relation <strong>avec</strong> lui<br />

par lettre; sʹil veut bien mʹécrire, je lui répondrai;<br />

autrement, si vous pensez quʹil vaille mieux que je lui<br />

écrive le premier, dites‐le moi, je le ferai sans retard.<br />

Quant à la visite que je lui pourrais faire, elle sera forcément ajournée. Mon indis‐<br />

position <strong>de</strong> poitrine sʹétant un peu aggravée, nos frères et notre p. Beaussier sʹen sont in‐<br />

quiétés et mʹont fait consentir à recevoir la visite dʹun mé<strong>de</strong>cin réputé dont jʹavais promis<br />

que jʹaccepterais la décision. Il a <strong>de</strong>mandé formellement que jʹallasse passer <strong>de</strong>ux mois 220<br />

dans une température plus douce, assurant quʹà ce prix il répondait <strong>de</strong> ma guérison, tan‐<br />

dis quʹun séjour plus prolongé à Paris rendrait le mal irrémédiable. Nos frères lʹont pris au<br />

mot et mʹobligent à prendre ce parti. Mes dispositions sont réglées en ce sens. Je pars lundi<br />

matin 12, accompagné du f. Paillé.<br />

Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> vous dire que tant que le Seigneur me laissera un souffle <strong>de</strong><br />

vie, vous me serez présents, chers amis, au fond du cœur; je vous écrirai souvent si le Sei‐<br />

219 Charles-Henri Halluin est né en 1820 à Wimille (Pas-<strong>de</strong>-Calais). A 25 ans, il est ordonné prêtre par Mgr Affre. Nommé à Arras,<br />

il accueille <strong>de</strong>s orphelins; son œuvre va rapi<strong>de</strong>ment se développer. Désireux d'avoir la visite <strong>de</strong> MLP., ce sera celle <strong>de</strong> C. Myionnet<br />

qu'il aura pour cette première rencontre. Ce sera le début d'une collaboration qui durera 9 ans, jusqu'en avril 1864. Il y aura divergences<br />

<strong>de</strong> vue sur l'éducation et la formation religieuse <strong>de</strong>s enfants. La personnalité affirmée <strong>de</strong> M. Halluin n'entrait pas facilement<br />

dans le cadre d'un règlement et d'une discipline communautaire. En 1869, il prononcera <strong>de</strong>s vœux chez les Assomptionnistes et se<br />

dévouera encore plus <strong>de</strong> 25 ans à son Orphelinat d'Arras, où il meurt en 1895.<br />

220 Deux mois qui se multiplieront par trois, puisque, parti le 12.11. 1855, ce n'est que 6 mois plus tard, le 23 mai 1856, que MLP.<br />

retrouvera sa petite famille religieuse. "Le temps <strong>de</strong> la maladie" durera jusqu'en 1858. A partir <strong>de</strong> cette date, il ne s'absentera plus<br />

pour <strong>de</strong> longues pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong> bains ou <strong>de</strong> repos complet: paradoxalement, plus il avance en âge, plus sa santé s'affermit.<br />

399


gneur me conserve quelque vigueur, et le premier emploi <strong>de</strong> mes forces, si elles me sont<br />

rendues, sera <strong>de</strong> vous aller visiter.<br />

Priez ensemble pour moi, afin quʹen tout état <strong>de</strong> cause je sois bien docile sous la<br />

main du Seigneur et me conforme <strong>avec</strong> amour à sa très adorable volonté.<br />

Je vous embrasse tous tendrement et suis, dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.,<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je viens <strong>de</strong> recevoir votre lettre; je vous en remercie; écrivez‐moi dès que vous<br />

aurez quelque chose <strong>de</strong> précis pour M. Allard.<br />

325 à M. Caille<br />

Détails sur le déroulement <strong>de</strong> son voyage et son installation dans le petit village pyrénéen du Vernet. Comment<br />

MLP. compte tirer profit <strong>de</strong> lʹépreuve <strong>de</strong> lʹéloignement et <strong>de</strong> lʹinaction. Il invite M. Caille à correspondre <strong>avec</strong> le<br />

f. Myionnet pour les affaires <strong>de</strong> lʹInstitut.<br />

Le Vernet, 24 novembre 1855<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

La lettre que je vous ai écrite la veille <strong>de</strong> mon départ <strong>de</strong> Paris vous aura inquiété<br />

peut‐être, à cause <strong>de</strong> la subite détermination que jʹavais dû prendre par lʹordre <strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>‐<br />

cins <strong>de</strong> mʹen aller à si gran<strong>de</strong> distance chercher <strong>de</strong>s moyens <strong>de</strong> guérison. Je ne mets donc<br />

pas <strong>de</strong> retard à vous écrire <strong>de</strong> notre lieu <strong>de</strong> rési<strong>de</strong>nce pour vous rassurer en vous donnant<br />

directement <strong>de</strong> mes nouvelles.<br />

Nous sommes arrivés ici dimanche <strong>de</strong>rnier 18 <strong>de</strong> ce mois, après 7 jours <strong>de</strong> voyage,<br />

parce que mon f. Paillé, que la Communauté a chargé <strong>de</strong> mʹaccompagner, nʹa pas voulu<br />

que je voyage <strong>de</strong> nuit, ce qui a retardé notre marche; les pluies qui sont rares en ce pays,<br />

mais qui ressemblent à un déluge lorsquʹelles tombent, nous ont aussi causé quelques dif‐<br />

ficultés dans les <strong>de</strong>rniers jours. Sauf cela, nous sommes arrivés sans encombre, moins fati‐<br />

gués quʹon nʹeût pu le penser après une si longue route et pour <strong>de</strong>s forces aussi épuisées<br />

que les miennes. Car cʹest là ma principale maladie, une faiblesse extrême, que lʹabsence<br />

dʹappétit et un dégoût absolu <strong>de</strong>s aliments avaient peu à peu amenée jusquʹaux commen‐<br />

cements <strong>de</strong> la phtisie. Il paraît assuré que, si je fusse resté à Paris, je nʹeusse pas trouvé as‐<br />

sez <strong>de</strong> forces pour y supporter lʹhiver, les mé<strong>de</strong>cins le déclaraient formellement; jʹavais<br />

grand‐peine néanmoins à me résoudre à un voyage si lointain et nécessairement assez dis‐<br />

pendieux; mais tous nos frères, notre p. Beaussier en tête, se sont réunis pour le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r;<br />

jʹai cru voir en ses instances et avis la volonté <strong>de</strong> Dieu et je me suis décidé.<br />

Nous sommes ici <strong>de</strong>puis trop peu <strong>de</strong> temps pour que je puisse encore bien prévoir<br />

quels résultats auront les soins qui sont donnés à ma santé; jʹai pourtant <strong>de</strong>s indices favo‐<br />

rables; lʹair si pur quʹon respire mʹa rendu lʹappétit; le soleil qui brille presque tous les<br />

jours me réchauffe et sans doute va me fortifier. Les eaux sulfureuses quʹon vient prendre<br />

ici, la disposition générale <strong>de</strong> la maison qui est constamment à une température égale au<br />

moyen <strong>de</strong> conduites dʹeau chau<strong>de</strong> qui circulent dans toutes les pièces, sont autant <strong>de</strong><br />

moyens qui ten<strong>de</strong>nt à détruire mon mal, cʹest‐à‐dire mon état dʹépuisement et la lésion,<br />

dʹailleurs peu considérable <strong>de</strong> ma poitrine. Je pense donc, très cher ami, quʹil entre dans les<br />

vues <strong>de</strong> Dieu, qui mʹa donné ces divers moyens <strong>de</strong> guérison, quʹils atteignent leur fin et<br />

400


me remettent en état <strong>de</strong> partager encore quelque temps vos travaux et vos œuvres. Je tâche<br />

dʹailleurs <strong>de</strong> <strong>de</strong>meurer en indifférence et <strong>de</strong> mʹabandonner pleinement à sa très adorable<br />

volonté.<br />

Réduit à lʹinutilité, quant à présent, par ma misère corporelle, je mʹefforce <strong>de</strong> com‐<br />

penser un peu par la prière les œuvres actives que je ne puis faire. Notre petite maison<br />

dʹAmiens, croyez‐le bien, a surtout une part à mes souvenirs <strong>de</strong>vant Dieu; je <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />

souvent, tous les jours à ce bon Maître quʹIl daigne la fon<strong>de</strong>r lui‐même comme Il la veut et<br />

en <strong>de</strong> si bonnes dispositions quʹelle puisse servir <strong>de</strong> modèle à celles que nous aurions à<br />

faire dans la suite.<br />

Jʹespère que vous avez maintenant <strong>avec</strong> vous notre cher M. Allard; je nʹai pas reçu<br />

encore à ce sujet dʹassurance positive, nos frères ne mʹayant encore pu écrire quʹun seul<br />

mot en hâte et qui ne contenait aucune sorte <strong>de</strong> détail, parce quʹils nʹavaient pas encore no‐<br />

tre adresse et craignaient que leur lettre ne nous parvînt pas.<br />

Jʹespère que vous allez mʹécrire bientôt et que vous me direz bien précisément<br />

comment vous allez, vous et mon petit f. Marcaire, et vos œuvres, et tout ce qui vous inté‐<br />

resse; vous savez combien tout cela me touche vivement. Si vous aviez besoin <strong>de</strong> conseil<br />

pour quelques affaires, vous pourriez consulter le f. Myionnet qui me remplace <strong>de</strong> tout<br />

point et dont vous savez le bon esprit; pour moi, je suis à trop gran<strong>de</strong> distance et la plu‐<br />

part du temps mes réponses tar<strong>de</strong>raient trop à vous arriver. Je pense aussi que dans quel‐<br />

que temps, quand le f. Myionnet sera bien assis, il pourrait vous rendre une petite visite et<br />

aller voir <strong>avec</strong> vous M. lʹabbé Halluin; vous me direz si je dois écrire à cet excellent Mon‐<br />

sieur; il me semble que je ne ferais mieux et plus convenablement après que lui‐même<br />

nous aurait fait quelque ouverture positive et aurait <strong>de</strong>mandé à examiner <strong>avec</strong> nous sʹil y a<br />

lieu dʹopérer dans nos œuvres quelque utile union; vous me ferez connaître sur ce point<br />

votre avis.<br />

Adieu, bien cher ami, embrassez pour moi mes <strong>de</strong>ux petits ff. Marcaire et Allard; of‐<br />

frez mon respect à MM. lʹabbé Mangot et Cacheleux, nos bons souvenirs à vos amis.<br />

Je suis <strong>avec</strong> une tendre affection, en J. et M.,<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Le f. Paillé assure les ff. dʹAmiens <strong>de</strong> sa fraternelle affection.<br />

326 à M. Maignen<br />

Comptes à régler <strong>avec</strong> les entrepreneurs <strong>de</strong> Nazareth. La prière est indispensable dans les embarras financiers.<br />

Directives pour <strong>de</strong>s démarches charitables. Zèle <strong>de</strong>s frères ecclésiastiques. La vie quotidienne <strong>de</strong> MLP. et du frère<br />

Paillé à Vernet. Privations spirituelles.<br />

Le Vernet, 28 novembre 1855<br />

Très cher enfant en N.S.,<br />

M. Myionnet mʹa fait rédiger hier tout dʹune haleine une longue note pour M. Car‐<br />

boy, je mʹen sens encore tout moulu aujourdʹhui; je ne répondrai donc que bien sommai‐<br />

rement à votre lettre, pourtant si affectueuse, si filiale, mais vous savez dès longtemps que<br />

tout ce que je ne vous dis pas nʹen est pas moins au fond <strong>de</strong> mon cœur.<br />

401


Je mʹoccupe dʹabord <strong>de</strong>s affaires qui, à juste raison, absorbent en ce moment vos<br />

principaux soins.<br />

Il faut examiner quels sont strictement les droits <strong>de</strong> M. Georges dʹaprès les termes<br />

<strong>de</strong> son marché qui est dans le petit tiroir à gauche, dans lʹarmoire <strong>de</strong> ma chambre. (Ne pas<br />

trop brouiller les pièces et reçus qui y sont, <strong>de</strong> peur <strong>de</strong> nʹy plus rien retrouver ensuite).<br />

On doit donner à M. Georges le tiers du montant <strong>de</strong>s travaux après la pose du com‐<br />

ble, et les <strong>de</strong>ux autres tiers dans lʹespace <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux ans, sans termes déterminés pour les<br />

paiements. Mais il me semble que les comptes ne sont pas réglés et que le montant <strong>de</strong>s<br />

mémoires <strong>de</strong> M. Georges pourra être beaucoup réduit par le règlement, surtout si M. Ca‐<br />

baret, que nous trouvons jusquʹici bien mou pour soutenir nos intérêts, met un peu <strong>de</strong><br />

fermeté et <strong>de</strong> bon vouloir. Sʹil faut absolument payer 4.000f à M. Georges, les termes que<br />

propose M. Leblanc me paraissent convenables et M. Georges ne pourrait, ce me semble,<br />

les refuser. Il est ru<strong>de</strong> et peu traitable en apparence, mais je ne le crois pas mauvais. M.<br />

Boutron est en relation dʹaffaires <strong>avec</strong> lui et a sur lui une certaine influence, on peut le faire<br />

intervenir.<br />

Pour M. Cabaret, il peut être juste <strong>de</strong> lui donner un acompte, mais il se pourrait ré‐<br />

duire à 300f et je crois quʹil serait encore très content ainsi; il ne peut en lʹétat <strong>de</strong>s choses<br />

exiger davantage.<br />

Quant aux intérêts à payer, vous avez le petit livre que je vous ai remis, étudiez‐le<br />

<strong>avec</strong> un peu dʹattention et vous verrez les époques <strong>de</strong> paiement. Je crois quʹil est dû à M.<br />

<strong>de</strong> Kergorlay un semestre échu en juillet ou août <strong>de</strong>rnier, dont vous ne faites pas mention.<br />

Pour les intérêts dus à MM. Guillemin et Terray, cʹest une chose moins précise pour moi,<br />

parce que, <strong>de</strong>puis le <strong>de</strong>rnier règlement dʹintérêts que jʹai fait, <strong>avec</strong> le concours <strong>de</strong> M. Bou‐<br />

tron, à M. Guillemin (voir la date <strong>de</strong> ce paiement au petit registre), M. Guillemin a fait <strong>de</strong><br />

nouveaux paiements à M. Terray; il faudrait prier M. Boutron <strong>de</strong> vous ai<strong>de</strong>r à faire nette‐<br />

ment le compte <strong>de</strong> ce qui est dû à M. Terray et à M. Guillemin pour intérêts, vous auriez<br />

peine à faire seul cette petite opération.<br />

Mais ce nʹest pas assez <strong>de</strong> parlez paiement, il faut aussi songer aux moyens <strong>de</strong><br />

payer. Le plus sûr, le plus immanquable, cʹest la prière, cʹest le recours au Cœur du divin<br />

Seigneur, cʹest lʹinvocation <strong>de</strong>s miséricor<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Marie, <strong>de</strong> saint Joseph, <strong>de</strong> saint Vincent <strong>de</strong><br />

Paul. Notre situation est difficile, nous ne pouvons faire face que par une gran<strong>de</strong> et géné‐<br />

reuse confiance dans le Dieu <strong>de</strong> bonté qui ne nous a jamais abandonnés. Donc, cher enfant,<br />

prions; ne faisons rien, ne commençons rien sans élever nos yeux en haut: levavi oculos<br />

meos in montes, un<strong>de</strong> veniet auxilium mihi. 221 Je vous soutiendrai ici <strong>de</strong> mon mieux, nos bons<br />

abbés surtout et tous nos frères vous assisteront et le Dieu Tout‐Puissant vous donnera son<br />

secours.<br />

Quant aux moyens dʹaction, il faut employer grands et petits, tous ceux que vous<br />

pourrez avoir. M. Mullois, le Ministre <strong>de</strong> lʹIntérieur, M. Decaux, sʹil le voulait, pourrait re‐<br />

présenter à M. Baudon lʹimportance <strong>de</strong> notre entreprise et son haut intérêt pour la Société,<br />

les complications et difficultés quʹy ajoute ma maladie et lʹopportunité dʹune aumône gé‐<br />

néreuse <strong>de</strong> sa part. Notre bien dévoué Confrère (M. Decaux) pourrait faire les mêmes ou‐<br />

vertures au Conseil <strong>de</strong> Paris qui, en conscience, <strong>de</strong>vrait aussi nous assister dans une opéra‐<br />

tion si utile pour les œuvres <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> Saint‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul.<br />

221 Ps. 120,1.<br />

402


Je crois que si M. Boutron écrivait à M. <strong>de</strong> Montaud pour lui faire part <strong>de</strong> ma mala‐<br />

die et lui rendre compte <strong>de</strong> la situation <strong>de</strong> lʹœuvre <strong>de</strong> Nazareth, maintenant mise à fin et<br />

présentant <strong>de</strong> si belles ressources pour les pauvres, logements, etc., chapelle, M. <strong>de</strong> Mon‐<br />

taud, quoiquʹil mʹait déjà aidé, enverrait encore 500f.<br />

M. le M is <strong>de</strong> St‐Seine, rue <strong>de</strong> Vaugirard 57, je crois (en face les Sœurs), qui mʹa donné<br />

lʹan <strong>de</strong>rnier 250f, mʹa laissé espérer quʹil en ferait autant cette année.<br />

Si M me <strong>de</strong> Gontaut voulait dire quelques mots à M. Thayer (on prononce Ter) qui<br />

mʹa déjà aidé <strong>de</strong> 500f, assurément il ferait encore quelque pareille aumône.<br />

Jʹai écrit à M. <strong>de</strong> Lambel; à son retour, vous pouvez compter quʹil vous ai<strong>de</strong>ra par<br />

tous les moyens possibles.<br />

On pourrait enfin chercher si quelques Confrères, non encore intéressés dans la<br />

chose, ne pourraient faire le prêt <strong>de</strong> quelques mille francs. M. Leblanc ne pourrait‐il en<br />

parler à M. <strong>de</strong> Verneuil, en lui montrant que lʹimmeuble donne un gage qui met à lʹabri <strong>de</strong><br />

toute inquiétu<strong>de</strong>? M. Guillemin pourrait, <strong>de</strong> son côté, en parler à quelques autres Confrè‐<br />

res. M. Cochin ne pourrait‐il être sondé? M. Guillemin a‐t‐il revu, comme il lʹavait promis,<br />

M me Dufour, veuve <strong>de</strong> lʹhéritier <strong>de</strong> notre ami Bouzani? Il faudrait le presser vivement <strong>de</strong> le<br />

faire: nous avons là 4.500f qui nous feraient grand bien.<br />

Il ne faudrait pas négliger les images, les petites surtout; si vous alliez vous‐même,<br />

tantôt chez une dame, tantôt chez une autre, en vous faisant recomman<strong>de</strong>r, vous auriez<br />

certainement <strong>de</strong>s résultats; cela vous ferait dʹailleurs <strong>de</strong>s connaissances et relations, ce qui<br />

est un point immense dans les œuvres. Et au milieu <strong>de</strong> tout cela, cher enfant, restez calme<br />

autant que possible et revenez souvent à Dieu; priez en chemin, en montant les escaliers,<br />

en sonnant aux portes, les anges gardiens vous introduiront. M. Hello pourrait beaucoup<br />

vous secon<strong>de</strong>r pour les images.<br />

Je suis bien heureux <strong>de</strong> tout ce que vous me dites sur notre petite famille, heureux<br />

du zèle et du bon vouloir <strong>de</strong> chacun, du dévouement <strong>de</strong> nos ff. ecclésiastiques, que nous<br />

trouvons toujours les premiers quand il sʹagit <strong>de</strong> sʹimmoler pour le bien; cʹest un frappant<br />

exemple qui double la vie <strong>de</strong> la Communauté.<br />

Embrassez‐les bien fort tous pour moi, je ne pense jamais à eux sans que les larmes<br />

me viennent aux yeux, car cette pensée vient toujours en même temps: les reverrai‐je en‐<br />

core?<br />

Recomman<strong>de</strong>z bien à mon f. Myionnet <strong>de</strong> veiller sur les santés et aux besoins <strong>de</strong><br />

tous; quoique jʹen eusse sollicitu<strong>de</strong>, ce nʹétait pas encore assez, il faut quʹil fasse plus et<br />

mieux. La chapelle est trop froi<strong>de</strong>, trop livrée aux vents; <strong>avec</strong> un jour ou <strong>de</strong>ux dʹouvrier,<br />

on pourrait calfeutrer toutes les fenêtres. Il ne faut pas non plus quʹon abuse <strong>de</strong> ses forces,<br />

Dieu fera ce que nous nʹaurons pu faire; la confiance en Lui sera notre salut.<br />

Vous voulez quʹen terminant je vous dise <strong>de</strong>ux mots sur nous. Mon f. Paillé va bien<br />

et soutient admirablement le rôle du fidèle et dévoué compagnon que la Communauté lui<br />

a donné à mon égard; on ne saurait mieux remplir sa mission. Pour moi, je crois que l’air,<br />

qui me rend plus d’appétit, me peut fortifier un peu mais ma poitrine est tout aussi ma‐<br />

la<strong>de</strong> et irritée qu’au départ; un petit froid, il y a quelques jours, m’a rendu les acci<strong>de</strong>nts qui<br />

avaient disparu <strong>de</strong>puis un mois; les crachats sanglants sont revenus en abondance; au‐<br />

jourd’hui ils semblent disparaître.<br />

Il ne faut pas vous figurer d’ailleurs notre séjour ici comme une promena<strong>de</strong> et un<br />

aimable délassement; c’est un exil dans la rigueur et la sévérité du mot. Le Vernet est un<br />

403


trou, un pauvre village <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s habitants déguenillés, logés dans <strong>de</strong>s huttes ou perchoirs<br />

à peine habitables. Le pays est beau mais il faudrait avoir force et santé pour le parcourir;<br />

pour les mala<strong>de</strong>s, il n’y a comme promena<strong>de</strong> toujours la même dont on ne s’écarte point<br />

parce qu’elle est abritée et au soleil quand il y en a. L’air est plus pur que doux; quand le<br />

soleil est absent, il faut rester à la maison. Il pleut <strong>de</strong> temps en temps et ce n’est pas pour<br />

un peu. Il neige assez souvent, hier en particulier; il faut gar<strong>de</strong>r la chambre. Durant le jour,<br />

on s’occupe encore et le temps passe vite mais après le dîner, <strong>de</strong> 6 à 8h., il y a <strong>de</strong>ux mortel‐<br />

les heures <strong>de</strong> digestion qui sont ru<strong>de</strong>s à passer; nous nous promenons et nous assoyons al‐<br />

ternativement mon f. Paillé et moi dans une gran<strong>de</strong> salle éclairée par une seule bougie, fort<br />

sombre conséquemment, nous y sommes seuls dʹordinaire; nous faisons <strong>de</strong>s pèlerinages<br />

dans les coins, en les transformant par lʹimagination en la chapelle <strong>de</strong> Vaugirard et en au‐<br />

tres lieux chers à notre piété, et le temps sʹécoule ainsi tous les jours <strong>de</strong> la même sorte; la<br />

conversation est peu animée, parce que parler mʹépuise; ne trouvez‐vous pas que mon f.<br />

Paillé a, en tout cela, un grand mérite? Je suis là, pour moi, forcément, en expiation <strong>de</strong> mes<br />

fautes et subissant les épreuves du Seigneur; mais lui, il y est par dévouement, cʹest géné‐<br />

reux et chrétien assurément. Lʹhiver se fait sentir ici peu <strong>de</strong> temps, du 10 décembre envi‐<br />

ron jusque vers la fin <strong>de</strong> janvier; nous y arrivons, cela mʹeffraie un peu. Mais ce qui mʹest<br />

par <strong>de</strong>ssus tout pénible, cʹest dʹêtre en gran<strong>de</strong> partie sevré <strong>de</strong>s secours spirituels. Jusquʹici,<br />

le mé<strong>de</strong>cin avait toléré que jʹallasse à la messe à une petite chapelle près <strong>de</strong> la maison, mais<br />

un peu grâce aux insinuations et négociations multipliées du f. Paillé, il mʹinterdit absolu‐<br />

ment cette sortie du matin. Je suis donc privé <strong>de</strong> la Sainte Messe et <strong>de</strong> lʹadoration du Saint<br />

Sacrement qui nʹest pas réservé dans la petite chapelle. M. le Curé a eu la bonté, ce matin,<br />

<strong>de</strong> mʹapporter la S te Communion et a promis <strong>de</strong> le faire trois fois par semaine. Cʹest une<br />

gran<strong>de</strong> con<strong>de</strong>scendance du divin Maître, mais la chapelle <strong>de</strong> Vaugirard nous a gâtés.<br />

Adieu, bien cher enfant, je pense bien souvent à vous, ce pays est pittoresque et<br />

vous donnerait bien <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ssins à faire, mais le Seigneur vous veut à dʹautres travaux.<br />

Adieu tendrement.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Ci‐joint une petite légen<strong>de</strong> que jʹai entendu raconter; elle peut servir aux patro‐<br />

nages, Saintes‐Familles, Petites Lectures.<br />

Voici une lettre pour M me Récamier. Informez‐vous chez M me la Comtesse <strong>de</strong> la<br />

Bourdonnaie, 20, rue <strong>de</strong> la Paix et M me <strong>de</strong> Monsaulmin, 12, rue St‐Guillaume; si elles sont<br />

revenues, je vous enverrai alors une lettre pour elles.<br />

327 à M. Myionnet<br />

Créances à payer. Faire payer les pensions arriérées <strong>de</strong>s orphelins. Ne pas se laisser écraser par les soucis: Dieu<br />

est <strong>avec</strong> nous. MLP. sʹinquiète <strong>de</strong> la santé <strong>de</strong> ses frères.<br />

Le Vernet, le 2 décembre 1855<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Vous me parlez <strong>de</strong> tant dʹaffaires ensemble que jʹaurai bien <strong>de</strong> la peine à répondre à<br />

toutes, et surtout quʹil me sera bien difficile dʹajouter encore quelques détails dʹaffection<br />

404


pour nos frères et nos amis, mais je vais toujours commencer et je ferai pour aujourdʹhui ce<br />

que je pourrai, abrégeant dʹailleurs et étant succinct autant que cela sera possible.<br />

Pour les 5.000f <strong>de</strong> M me Tarbé, je vais écrire à son agent dʹaffaires pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r<br />

quʹon ajourne jusquʹà mon retour, que je suppose jusquʹici <strong>de</strong>voir se réaliser; mais cela ne<br />

nous fera quʹun répit <strong>de</strong> quelques mois, il faudra en profiter pour chercher dʹautres<br />

moyens. A‐t‐on payé les intérêts <strong>de</strong> ces 5.000f? Vous avez sur mon petit livre les époques<br />

<strong>de</strong> paiement; tâchez <strong>de</strong> faire ces paiements exactement. Nous avons aussi, pour le mois <strong>de</strong><br />

juillet prochain, à prévoir le paiement <strong>de</strong>s 5.000f restant dûs à M. Bellebille; les intérêts<br />

sont payés jusquʹau mois dʹavril prochain.<br />

Pour M. Laroze, vous aurez à payer immédiatement les 4.000f en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> lʹacte,<br />

mais, pour dʹautres versements, on nʹen fait dʹordinaire quʹau bout <strong>de</strong> 4 mois, à cause <strong>de</strong> la<br />

purge <strong>de</strong>s hypothèques; il y a lieu <strong>de</strong> penser que M. Paillé sera <strong>de</strong> retour pour ce moment;<br />

il ne doit toucher dʹailleurs ses 6.000f quʹau mois dʹavril prochain. Je crois quʹil sera bon <strong>de</strong><br />

ne pas ébruiter cette acquisition, beaucoup <strong>de</strong> gens seraient <strong>de</strong> lʹavis <strong>de</strong> M. Lambert. Vous<br />

nʹoublierez pas que, pour les inscriptions romaines données par M. Houdart (dont vous<br />

avez lʹadresse rue Bonaparte, 82), vous gar<strong>de</strong>z lʹobligation <strong>de</strong> lui en payer la rente pour le<br />

semestre à échoir ce mois courant et pour lʹannée prochaine, cʹest‐à‐dire en juin et en dé‐<br />

cembre 1856.<br />

Vous ferez bien, dʹune autre part, <strong>de</strong> ne pas disposer <strong>de</strong>s 1.100f dus à ma sœur, car<br />

elle vient <strong>de</strong> mʹécrire quʹelle a définitivement fait lʹacquisition <strong>de</strong> sa maison; elle vous écri‐<br />

ra donc bientôt sans doute pour vous re<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r cet argent. Tâchez <strong>de</strong> toucher bientôt<br />

(chez Rothschild) le semestre qui va échoir <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux inscriptions; on coupe seulement le<br />

tout petit fragment qui regar<strong>de</strong> le semestre échu, en prenant gar<strong>de</strong> <strong>de</strong> nʹen pas couper<br />

<strong>de</strong>ux au lieu dʹun.<br />

Je crois que vous pouvez très convenablement, dans les circonstances si ru<strong>de</strong>s où<br />

nous sommes, appliquer à lʹégard <strong>de</strong>s parents et protecteurs <strong>de</strong>s enfants les quelques me‐<br />

sures que vous indiquez; faites‐le seulement <strong>avec</strong> douceur et ménagement; peu à peu<br />

lʹusage sʹen prendra et ce sera un avantage réel obtenu; M. Roussel pourrait voir M. lʹabbé<br />

Dupré, protecteur du petit Baccon, lequel avait un arriéré <strong>de</strong> 5 ou 6 mois au moment où les<br />

Amis <strong>de</strong> lʹEnfance se sont chargés définitivement <strong>de</strong> cet enfant. La sœur Grand doit un<br />

mois pour Brugier. Il est dû 12 mois par la soeur protectrice dʹAmbruster pour ses habits<br />

<strong>de</strong> première communion.<br />

M lle Boucher redoit 110f pour son frère, etc, etc.<br />

Je crois que nous ne pouvons refuser à M. Caille, qui nous est si dévoué, lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

M. Mainville; ce serait dʹailleurs immoler le f. Marcaire qui reste <strong>avec</strong> un far<strong>de</strong>au accablant<br />

et un isolement absolu. Il faudrait dire au f. Mainville quʹon le rappellera bientôt, on lʹes‐<br />

père, et que cʹest un secours temporaire quʹil va donner à Amiens; peut‐être M. Caille<br />

pourra‐t‐il nous envoyer quelque autre frère, ou la Provi<strong>de</strong>nce viendra à notre secours<br />

pour Vaugirard. Elle veillera aussi sur les frères qui sont à Amiens si peu soutenus, nous<br />

sommes entre ses mains. Elle ne nous délaissera point.<br />

Pour M. Mullois, M. Maignen nʹa autre chose quʹà le voir, à le presser instamment et<br />

à lui remettre une note comme souvenir. Si le f. Maignen <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à M. Mullois pour Na‐<br />

zareth, vous <strong>de</strong>vriez agir <strong>de</strong> votre côté pour nos orphelins près <strong>de</strong> M. Bray, protecteur <strong>de</strong><br />

Mélier. M gr lʹEvêque, premier aumônier <strong>de</strong> lʹEmpereur, est, je crois, oncle <strong>de</strong> M. Bray.<br />

405


Pour la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> au Ministre <strong>de</strong> lʹIntérieur, que MM. Maignen et Hello la fassent en<br />

leur nom, comme représentant lʹœuvre <strong>de</strong> Nazareth particulièrement pour le logement <strong>de</strong>s<br />

pauvres, et quʹils la fassent appuyer le mieux quʹil leur sera possible; je ne vois pas dʹautre<br />

voie à suivre.<br />

Vous feriez bien <strong>de</strong> votre côté, <strong>avec</strong> M. Lantiez, <strong>de</strong> faire aussi une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à lʹInté‐<br />

rieur. Cʹest le moment <strong>de</strong> la présenter; M. Cochin lʹappuierait, je lʹespère, comme il le fait<br />

ordinairement, ainsi que M. le Maire <strong>de</strong> Vaugirard.<br />

Je conseille à notre f. Maignen, dans tous ses rapports <strong>avec</strong> nos Confrères relative‐<br />

ment à Nazareth, dʹagir vivement, mais sans airs <strong>de</strong> sollicitu<strong>de</strong> et <strong>de</strong> découragement; les<br />

hommes sont peu disposés, à moins dʹune vertu et dʹune charité bien rares, à prendre à<br />

cœur <strong>de</strong>s affaires quʹon leur présente comme étant en fâcheux état; les nôtres dʹailleurs<br />

sont graves, mais elles ne sont pas laissées à notre faiblesse, Dieu est <strong>avec</strong> nous, ne lʹou‐<br />

blions jamais; <strong>avec</strong> cette assurance, quʹimporte le poids <strong>de</strong>s charges, Il les portera pour<br />

nous, Il payera pour nous; ayons donc confiance, nous arriverons à bonne fin; qui seminant<br />

in lacrimis, in exultatione metent. 222 Je vais tâcher dʹécrire encore une petite feuille pour nos<br />

frères.<br />

Notre p. Beaussier mʹécrit quʹil trouve le f. Hello fatigué, que les vives couleurs <strong>de</strong><br />

ses joues lui semblent un indice <strong>de</strong> la faiblesse <strong>de</strong> sa poitrine; il insiste vivement pour quʹil<br />

se ménage et <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, en particulier, quʹil sʹabstienne <strong>de</strong> son jeûne ordinaire du vendredi;<br />

je suis tout à fait du même avis, je vous invite à vous entendre à ce sujet <strong>avec</strong> notre cher<br />

abbé Hello; je lui en dis un mot dans ma petite lettre ci‐jointe, en lʹavertissant que sans<br />

doute vous lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rez ce sacrifice. Notre p. Beaussier et moi en avons <strong>de</strong> bien plus<br />

durs à accepter.<br />

Veillez à ce que nos bons abbés aient <strong>de</strong>s vêtements chauds; chacun a dans sa petite<br />

bourse une réserve suffisante pour y pourvoir.<br />

[Le <strong>Prevost</strong>]<br />

Je vais écrire directement relativement à la rente <strong>de</strong> M. Proust payée par M. <strong>de</strong><br />

Flers; avertissez‐le, si vous le voyez, et ne vous en occupez pas autrement.<br />

328 <strong>de</strong> M. Paillé à M. Vince<br />

P.S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Incapacité <strong>de</strong> faire un travail sur un livre.<br />

2 décembre 1855, Vernet.<br />

Mon bien cher frère,<br />

Mon cher Supérieur est accablé par la correspondance, elle est incessante; il craint <strong>de</strong> ne<br />

pouvoir vous répondre dʹici à plusieurs jours; il me charge donc <strong>de</strong> le faire pour lui, et <strong>de</strong> vous<br />

transcrire toutes ses idées et sentiments.<br />

Notre bon Père, tout souffrant quʹil est, prend une gran<strong>de</strong> part à vos souffrances; nous par‐<br />

lons souvent <strong>de</strong> vous, nous espérons bien que vous reprendrez petit à petit la santé et que Dieu,<br />

qui ne fait rien que pour le bien <strong>de</strong> ses élus, tournera à votre plus grand profit spirituel toutes ces<br />

épreuves qui vous paraissent si amères en ce moment, qui cependant sont mêlées <strong>de</strong> consolations<br />

sensibles, mais qui plus tard vous paraîtront comme les moyens pour arriver à lʹacquisition <strong>de</strong>s<br />

222 Ps. 125,5.<br />

406


vertus qui vous sont nécessaires. Vous le sentez déjà ainsi, continuez à envisager <strong>de</strong> cette manière<br />

vos souffrances et vous finirez pas y trouver plus <strong>de</strong> consolation que dʹamertume.<br />

Notre bon Père me charge <strong>de</strong> vous remercier <strong>de</strong> tous les bons sentiments que vous trouvez<br />

pour lui au milieu <strong>de</strong> vos accablements et vos ennuis; il pense que, sʹil parvient à recouvrer la san‐<br />

té, il le <strong>de</strong>vra en gran<strong>de</strong> partie aux prières que vous faites pour lui au milieu <strong>de</strong> vos souffrances.<br />

Quant à nous, nous ne passons pas un jour sans prier pour vous <strong>de</strong> tout notre cœur; vous êtes no‐<br />

tre frère, nous souffrons en vous et <strong>avec</strong> vous, nous voudrions partager vos souffrances pour les<br />

alléger. Que lʹunion en Dieu est bonne et fortifiante!<br />

Je ne puis rien vous répondre en ce moment relativement au petit livre <strong>de</strong> S t Joseph. Notre<br />

bon Père en est actuellement incapable, il éprouve <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s lassitu<strong>de</strong>s, <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s fatigues ner‐<br />

veuses qui ne lui permettent <strong>de</strong> faire que lʹindispensable. Son repos <strong>de</strong>vrait être complet, et cepen‐<br />

dant il ne lʹest pas; il est occupé plusieurs heures pendant la journée à faire <strong>de</strong> la correspondance et<br />

il en est beaucoup fatigué. Figurez‐vous notre bon Père écrivant pendant 4 et 5 heures chaque jour<br />

et <strong>avec</strong> les lassitu<strong>de</strong>s que vous lui connaissez; dites‐moi si cela nʹest pas au‐<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> ses forces. En<br />

<strong>de</strong>hors <strong>de</strong> la correspondance, notre bon Père ne fait rien et ne se sent pas <strong>de</strong> forces pour faire quoi<br />

que ce soit. Moi, qui le vois à son travail pénible, je sens que son incapacité est réelle. Notre bon<br />

Père nʹa <strong>de</strong> goût pour aucune lecture tant soit peu appliquante; il a pris bien <strong>de</strong>s fois le volume <strong>de</strong><br />

S t Joseph pour vous faire plaisir, mais il lui a été difficile dʹen parcourir quelques pages.<br />

Devant cette impuissance, M. Le <strong>Prevost</strong> ne veut pas charger M. Planchat dʹun travail qui<br />

serait bien long et dont il ne sait pas à quel moment il pourrait en profiter. Ce qui doit vous satis‐<br />

faire, cʹest que M. Le <strong>Prevost</strong> désire faire ce petit ouvrage et, aussitôt quʹil se sentira assez <strong>de</strong> force<br />

et <strong>de</strong> santé pour lʹentreprendre à loisir, il se mettra à lʹœuvre, mais laissons le temps à son corps et<br />

à ses organes pour se refaire, et prenons patience.<br />

Recevez, mon bien cher frère, lʹexpression <strong>de</strong> nos sentiments affectueux.<br />

Votre dévoué frère en N.S.<br />

Paillé<br />

Très cher ami, je ne perds pas <strong>de</strong> vue votre petit livre, mais le moment nʹest pas en‐<br />

core venu pour moi dʹentreprendre un pareil travail. Je vous aime tendrement, je prie pour<br />

vous, jʹai pleine confiance que vous retrouverez vos forces pour travailler <strong>de</strong> nouveau aux<br />

œuvres du Seigneur. Que ce divin Maître vous bénisse et vous place contre son Cœur.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

329 à M. Decaux<br />

Nouvelles <strong>de</strong> sa santé, toujours languissante. Souffrance dʹêtre éloigné <strong>de</strong> ses frères et <strong>de</strong> ne pouvoir travailler<br />

<strong>avec</strong> eux. MLP. les recomman<strong>de</strong> à son ami. Sollicite son ai<strong>de</strong> pour Nazareth.<br />

Le Vernet, 3 décembre 1855<br />

Très cher Confrère et bien bon ami,<br />

Je pense que mes frères, répondant à mon désir plusieurs fois exprimé, vous auront<br />

déjà donné <strong>de</strong> nos nouvelles; je me donne toutefois la satisfaction <strong>de</strong> vous écrire quelques<br />

lignes, afin <strong>de</strong> vous assurez <strong>de</strong> nos bons souvenirs et <strong>de</strong> notre constante affection.<br />

Lʹéloignement considérable qui nous sépare, le f. Paillé et moi, <strong>de</strong> nos amis, <strong>de</strong> nos<br />

œuvres, du centre ordinaire <strong>de</strong> notre vie, mʹest un peu pénible à porter; mon f. Paillé est en<br />

santé, et dʹailleurs il est ici par dévouement, ma compagnie a été pour lui une œuvre <strong>de</strong><br />

charité; pour moi, languissant et presque impropre à tout, je sens plus vivement les ri‐<br />

407


gueurs <strong>de</strong> lʹexil. Et pourtant, bien cher ami, je dois le dire, le Seigneur est si bon quʹIl me<br />

tient calme et soumis sous sa main, attendant en patience la manifestation <strong>de</strong> son adorable<br />

volonté. Je suis privé presque entièrement <strong>de</strong>s secours spirituels que je trouvais en si<br />

gran<strong>de</strong> abondance dans notre petite communauté <strong>de</strong> Vaugirard, mais je tâche <strong>de</strong> me réfu‐<br />

gier dans le Cœur du divin Maître pour y trouver, comme à la source, les puissances <strong>de</strong><br />

vie qui ne mʹarrivent que goutte à goutte extérieurement. Quant au corps, lʹair <strong>de</strong>s monta‐<br />

gnes si pur en ce pays et la chaleur du soleil qui, jusquʹici brille presque tous les jours,<br />

commencent à me rendre un peu moins faible; mais nous entrons dans les jours les plus<br />

rigoureux <strong>de</strong> la saison; on les sent moins ici quʹailleurs, mais pourtant ils ne passent point<br />

inaperçus. Le mé<strong>de</strong>cin mʹavertit donc que, jusquʹà la fin <strong>de</strong> janvier, il peut empêcher le mal<br />

<strong>de</strong> ma poitrine <strong>de</strong> sʹaggraver, mais quʹil ne saurait avant février me promettre <strong>de</strong> ce côté <strong>de</strong><br />

mieux appréciable; je souffre peu; seulement parler mʹest presque interdit et respirer est<br />

déjà un travail suffisant pour mes poumons lassés. Le fond <strong>de</strong> mon mal est une gran<strong>de</strong> fa‐<br />

tigue <strong>de</strong>s organes et un épuisement général plutôt quʹune lésion bien sensible; je suis ici<br />

dans les meilleures conditions pour ménager le reste <strong>de</strong> vitalité qui est en moi et pour at‐<br />

tendre une réfection <strong>de</strong> mes forces, sʹil plaît à Dieu <strong>de</strong> la donner; tout est donc pour le<br />

mieux, on ne pouvait tirer meilleur parti <strong>de</strong> ma chétive personne.<br />

Voilà un bulletin en règle, très cher ami, mais quʹattendre dʹun mala<strong>de</strong>, sinon <strong>de</strong><br />

complaisantes et minutieuses explications sur son mal; cʹest le droit du métier, jʹen use un<br />

peu trop peut‐être à vos dépens.<br />

Je nʹéchappe pas non plus ici à la préoccupation <strong>de</strong> nos œuvres; jʹavais pour cet hi‐<br />

ver une belle et ru<strong>de</strong> besogne toute taillée, je lʹai laissée tout à mes pauvres frères déjà bien<br />

chargés <strong>de</strong> leur propre tâche; je souffre <strong>de</strong> leur laisser tant <strong>de</strong> peine. Je suis bien assuré,<br />

mon cher ami, que si vous avez quelque occasion <strong>de</strong> leur prêter appui, vous ne leur ferez<br />

pas faute; votre cœur va au‐<strong>de</strong>vant <strong>de</strong> tout bien et, comme par instinct, porte secours à<br />

toute peine; les ru<strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong> mes bons associés pour cette saison vous inspireront<br />

sympathie et vous leur donnerez tout le secours qui sera en votre pouvoir. Vous veillerez<br />

aussi sur nos Saintes‐Familles qui vont se trouver un peu délaissées; mon f. Paillé les visi‐<br />

tait un peu toutes, les encourageant et conseillant <strong>de</strong> son mieux, mais le voilà comme moi<br />

réduit à prier seulement pour elles; heureusement vous restez là, vous suppléerez à tout.<br />

Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> aussi un peu <strong>de</strong> votre sollicitu<strong>de</strong> pour notre œuvre <strong>de</strong> Nazareth; jʹai lais‐<br />

sé ce lourd far<strong>de</strong>au sur le dos <strong>de</strong> mon f. Maignen, mais le pauvre enfant, déjà si chargé par<br />

son patronage, 223 périra à la peine si vous et tous nos bons Confrères ne lui donnez vos en‐<br />

couragements et votre ai<strong>de</strong>.<br />

Je ne sais si notre cher Prési<strong>de</strong>nt Général est <strong>de</strong> retour à Paris; veuillez lui exprimer<br />

le regret que jʹai ressenti <strong>de</strong> mʹéloigner sans prendre congé <strong>de</strong> lui; vous savez en quel état<br />

je suis parti, je me recomman<strong>de</strong> à ses prières si précieuses <strong>de</strong>vant Dieu, à celles aussi <strong>de</strong><br />

tous nos excellents Confrères du Conseil Général, dont les sentiments si nobles et si chari‐<br />

tables ont été ma constante édification. Ne penseriez‐vous pas, mon bon ami, que notre<br />

maison <strong>de</strong> Nazareth, <strong>avec</strong> les proportions quʹelle a prises, <strong>avec</strong> sa chapelle dont on peut ti‐<br />

rer un si grand parti pour le bien, surtout <strong>avec</strong> nos jeunes ecclésiastiques <strong>de</strong> Vaugirard, est<br />

maintenant plus quʹune simple œuvre dʹune Conférence, mais quʹelle pourrait intéresser<br />

223 Le 1 er décembre 1855, le Conseil supérieur du Patronage, présidé par M. Baudon et dont fait partie M. Maignen, déci<strong>de</strong> la fondation<br />

d'une Œuvre pour les jeunes ouvriers. La première séance aura lieu le 23 décembre, rue du Regard. Cette Association donnera<br />

naissance, 10 ans après, en 1865, au Cercle <strong>de</strong>s Jeunes Ouvriers <strong>de</strong> Montparnasse.<br />

408


toute notre Société à Paris, comme exemple peut‐être et surtout par la gravité quʹelle<br />

donne à nos œuvres et par les espérances quʹelle en fait concevoir? A ce titre et au point<br />

dʹavancement, on pourrait dire <strong>de</strong> presque achèvement où elle se trouve, ne vous para‐<br />

îtrait‐il pas possible dʹy intéresser notre cher Prési<strong>de</strong>nt Général, son Conseil, et peut‐être<br />

aussi le Conseil <strong>de</strong> Paris? Si lʹon craignait <strong>de</strong> faire antécé<strong>de</strong>nt, on pourrait alléguer mon<br />

état <strong>de</strong> souffrance et dʹépuisement qui fait un cas dʹexception et qui appelle le secours et<br />

lʹappui charitable <strong>de</strong> notre chère Société. Je livre ces considérations à votre examen; notre<br />

maison <strong>de</strong> Nazareth est, je le crois, une institution bien digne dʹintérêt; jʹespérais la mener<br />

à bonne fin, mais, puisque mes forces me trahissent, ne puis‐je solliciter un peu <strong>de</strong><br />

concours au foyer <strong>de</strong> notre chère Société?<br />

Adieu, mon bien cher Confrère et ami, je nʹose dire encore au revoir; au revoir pour‐<br />

tant puisque, pour les chrétiens, lʹheure <strong>de</strong> la réunion, un peu plus tôt, un peu plus tard,<br />

doit assurément se réaliser. Je suis en J. et M.<br />

Votre dévoué Confrère et affectionné ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

330 à M. Myionnet<br />

MLP. signale les personnes susceptibles dʹai<strong>de</strong>r Nazareth. Ses épreuves: sa mauvaise santé, lʹéloignement, le<br />

manque <strong>de</strong> secours spirituels.<br />

Vernet‐les‐Bains, 8 décembre 1855<br />

Fête <strong>de</strong> lʹImmaculée Conception<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Depuis <strong>de</strong>ux jours, nous attendions <strong>de</strong> vos nouvelles; lʹheure <strong>de</strong> la poste étant en‐<br />

core passée aujourdʹhui sans que rien nous arrive, je me détermine à vous envoyer les<br />

quelques fragments <strong>de</strong> lettres ci‐joints pour quelques‐uns <strong>de</strong> nos frères, sauf à répondre<br />

expressément aux lettres qui vont sans doute nous arriver <strong>de</strong>main. Dans lʹisolement où<br />

nous sommes, vos lettres, qui vous parlent <strong>de</strong> tout ce qui nous intéresse, nous consolent<br />

beaucoup; écrivez‐nous souvent et régulièrement.<br />

Je reçois à lʹinstant une lettre <strong>de</strong> M. et <strong>de</strong> M me Taillandier.<br />

Jʹai écrit à M. Decaux pour lui recomman<strong>de</strong>r les affaires <strong>de</strong> Nazareth, M. Maignen<br />

pourrait en causer <strong>avec</strong> lui.<br />

Je pense quʹil faudrait que notre f. Maignen allât voir le plus tôt possible M. et M me<br />

<strong>de</strong> Monchy et leur <strong>de</strong>mandât que cette excellente dame fût quêteuse pour nous cette an‐<br />

née, soit pour Vaugirard, soit pour Nazareth, selon que vous le trouverez le plus néces‐<br />

saire; elle est très bonne pour nous et ne nous refusera pas; jusquʹà lʹan <strong>de</strong>rnier, où elle<br />

était prise pour saint Vincent <strong>de</strong> Paul, elle quêtait tous les ans pour nos orphelins; M. Mai‐<br />

gnen <strong>de</strong>vrait voir aussi M me Restou pour M me Demadre et autres dames pour le sermon <strong>de</strong><br />

nos orphelins.<br />

On pourrait faire une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> aux Dames du Temple qui ne nous ont point donné<br />

<strong>de</strong>puis longtemps. Si vous trouvez mieux que jʹécrive moi‐même, dites‐le moi, je vous en‐<br />

verrai une lettre que M. Hello ou M. Maignen, ou lʹun <strong>de</strong> vous, porterait lui‐même à M me la<br />

Supérieure.<br />

Je suis <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux ou trois jours plus souffrant, mon estomac sʹest dérangé, je lʹat‐<br />

tribue au vin; nous nʹen trouvons pas du tout ici ni aux environs qui semble convenir. Mon<br />

409


f. Paillé veut absolument que nous vous en <strong>de</strong>mandions <strong>de</strong> Vaugirard; je mʹy suis refusé<br />

jusquʹici; si nous ne voyons pas dʹautre moyen, il faudra bien sʹy résigner. Ce sera après<br />

tout la ressource la moins dispendieuse, mais je voulais vous épargner cet ennui; nous<br />

vous écrirons lundi sʹil y a lieu <strong>de</strong> sʹen occuper.<br />

Voilà presque un mois que nous vous avons quittés; cʹest bien long, cʹest une dure<br />

épreuve qui ne peut encore finir bien vite; le mé<strong>de</strong>cin ne me promet dʹamélioration sensi‐<br />

ble que vers février; jusque là, il me conserve et mʹempêche <strong>de</strong> <strong>de</strong>scendre trop bas, cʹest<br />

tout ce quʹil attend <strong>de</strong> mieux. Que le saint nom du Seigneur soit béni! De toute la semaine,<br />

je nʹai eu ni messe, ni communion, M. le Curé étant souffrant nʹa pu venir mʹapporter cette<br />

consolation si précieuse. Embrassez tous nos frères, dites à ceux qui ne mʹont pas encore<br />

écrit <strong>de</strong> me donner cette satisfaction, je tâcherai aussi <strong>de</strong> leur envoyer quelques lignes.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je suis constamment <strong>avec</strong> vous dans les Cœurs <strong>de</strong> J. et M.<br />

331 à M. Caille<br />

Dangers <strong>de</strong> lʹactivité naturelle. Critères dʹadmission <strong>de</strong>s enfants: le bien moral et spirituel quʹil sera réellement<br />

possible dʹopérer. MLP. a confié à M. Myionnet la direction <strong>de</strong>s affaires <strong>de</strong> la Communauté. Ouverture <strong>de</strong> M.<br />

Halluin pour entrer dans lʹInstitut.<br />

Vernet‐les‐Bains, 11 décembre 1855<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Vous avez trouvé quelques instants, malgré la charge si lour<strong>de</strong> <strong>de</strong> vos occupations,<br />

pour mʹenvoyer dans ma retraite, je pourrais dire mon exil, <strong>de</strong> bonnes et affectueuses pa‐<br />

roles que votre cœur tout dévoué vous a inspirées, afin dʹapporter tout lʹadoucissement<br />

possible aux épreuves quʹil plaît au divin Maître <strong>de</strong> mʹenvoyer. Vous avez joint à cet acte<br />

<strong>de</strong> douce charité un autre témoignage <strong>de</strong> votre tendre sollicitu<strong>de</strong>, un mandat dont le mon‐<br />

tant doit contribuer aux frais <strong>de</strong> ma maladie. Vous oubliez ainsi vos propres besoins, bien<br />

cher ami, pour ne vous occuper que <strong>de</strong>s nôtres; vous vous confiez généreusement au Sei‐<br />

gneur, espérant quʹIl fera vos affaires pendant que vous faites <strong>avec</strong> tant <strong>de</strong> zèle les siennes;<br />

puisse‐t‐Il, bien cher ami, répondre comme Il lʹa fait jusquʹici à votre filial abandon et vous<br />

rendre pour moi tout le bien que vos tendres inspirations mʹapportent en consolation et en<br />

secours efficaces. Je lʹen prierai <strong>avec</strong> toute lʹar<strong>de</strong>ur dont je suis capable et jʹai lʹespérance<br />

quʹIl daignera entendre mes vœux. Vous nʹaurez rien alors à désirer pour votre chère œu‐<br />

vre dʹAmiens et, à toutes les grâces que le Seigneur nous a déjà faites, Il ajoutera encore un<br />

peu dʹaccroissement à la petite Communauté, quelques âmes dévouées pour partager vos<br />

travaux, et ces appuis spirituels que vous aimeriez trouver dans les exercices réguliers <strong>de</strong><br />

la vie commune; ces biens se feront attendre quelque peu peut‐être, afin que vous en sen‐<br />

tiez mieux le prix et les <strong>de</strong>mandiez <strong>avec</strong> plus dʹinstance, mais ils ne vous seront point refu‐<br />

sés, le bon Père les accor<strong>de</strong>ra à votre persévérance et à votre dévouement.<br />

Jʹai écrit à mon f. Myionnet quʹil me semblait quʹon <strong>de</strong>vait vous donner le f. Main‐<br />

ville; je ne sais sʹil lʹaura pu faire; outre que ce jeune frère sent un besoin immense <strong>de</strong> se<br />

former à la maison centrale, nos ff. <strong>de</strong> Vaugirard se trouvent eux‐mêmes dans un extrême<br />

embarras pour le service <strong>de</strong> la maison et je ne sais même, à vrai dire, comment ils y peu‐<br />

vent subvenir en ce moment; croyez bien, mon bon ami, que notre f. Myionnet fera tout<br />

410


pour le mieux, il a la largeur <strong>de</strong> cœur qui convient à un Supérieur, il porte une égale affec‐<br />

tion à toutes les parties <strong>de</strong> notre œuvre et il suivra <strong>de</strong> lʹœil leurs besoins <strong>avec</strong> un constant<br />

intérêt. Je lui ai remis lʹentière direction <strong>de</strong> nos affaires et lʹai fait <strong>avec</strong> une entière sécurité,<br />

connaissant <strong>de</strong> longue main son abnégation et son amour éclairé du bien; le Seigneur lʹas‐<br />

sistera et gouvernera <strong>avec</strong> lui la petite barque <strong>de</strong> notre œuvre. Je suis heureux dʹapprendre<br />

que mon f. Marcaire va bien et se soutient dans toutes ses bonnes dispositions, malgré les<br />

difficultés <strong>de</strong> sa tâche et le défaut dʹentourage religieux, mais Dieu proportionne toujours<br />

ses secours aux besoins; quʹil ait confiance en Lui, quʹil invoque fidèlement la Sainte Vierge<br />

à laquelle il sʹest tout dévoué, il sentira ses forces centuplées et la puissance <strong>de</strong> Dieu sʹajou‐<br />

tera à sa propre faiblesse. Quand vous mʹécrirez, que mon f. Marcaire joigne quelques<br />

mots à votre lettre; il y a bien longtemps quʹil ne mʹa rien dit. Embrassez‐le pour moi ainsi<br />

que notre cher M. Allard que je regar<strong>de</strong> comme un <strong>de</strong>s nôtres, quoique son entrée défini‐<br />

tive parmi nous soit un peu différée. Je me recomman<strong>de</strong> à vos prières et à celles <strong>de</strong> ces<br />

bons frères, et à celles aussi <strong>de</strong> vos enfants qui ont déjà eu la charité <strong>de</strong> se souvenir <strong>de</strong> moi,<br />

ce dont je les remercie beaucoup. Le Seigneur exaucera certainement leurs <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s, si‐<br />

non pour ma guérison, qui paraît bien incertaine, au moins pour mon édification, pour<br />

mon soutien spirituel dans les jours peut‐être difficiles qui me restent à traverser. Sans être<br />

dans un état désespéré, je suis moins bien <strong>de</strong>puis quelques jours; nous sommes dans le<br />

moment le plus défavorable <strong>de</strong> la saison et les mala<strong>de</strong>s en ressentent plus particulièrement<br />

lʹinfluence. Quoi quʹil plaise au Souverain Seigneur <strong>de</strong> déci<strong>de</strong>r, jʹespère quʹ<strong>avec</strong> sa grâce je<br />

serai résigné et tendrement soumis; je voudrais faire plus, aller au <strong>de</strong>vant <strong>de</strong> la souffrance<br />

et <strong>de</strong>s langueurs et les souhaiter comme lʹont fait tant <strong>de</strong> saints, ma faiblesse reste en <strong>de</strong>s‐<br />

sous et nʹatteint pas jusque là.<br />

Je pense <strong>avec</strong> vous que vous ferez sagement <strong>de</strong> ne pas admettre <strong>de</strong> si tôt un plus<br />

grand nombre dʹenfants, tant à cause <strong>de</strong>s dépenses que pour la bonne conduite et compo‐<br />

sition <strong>de</strong> votre œuvre. Jʹinsiste aussi beaucoup pour que vous soyez bien scrupuleux dans<br />

les admissions, examinant bien si les enfants que vous prenez ne pourraient pas se passer<br />

<strong>de</strong> votre maison et ne seraient pas à peu près aussi bien ailleurs que chez vous; car leur<br />

présence vous occasionne <strong>de</strong>s sacrifices et <strong>de</strong>s peines considérables, il faut que cela ré‐<br />

pon<strong>de</strong> à un bien moral et spirituel notable, autrement le fond même <strong>de</strong> lʹœuvre serait dé‐<br />

fectueux. Ainsi recueillir chez vous <strong>de</strong>s enfants auxquels le patronage suffirait et sur les‐<br />

quels vous nʹauriez pas beaucoup plus dʹaction en les ayant à lʹintérieur que sʹils <strong>de</strong>meu‐<br />

raient au <strong>de</strong>hors, ce serait, à mon avis, prendre <strong>de</strong>s peines sans presque aucun résultat. En‐<br />

fin, je vous invite beaucoup à tendre, autant que vous le pourrez, à rendre aux enfants le<br />

séjour dans votre maison vraiment utile, en tâchant quʹils y trouvent quelque instruction,<br />

religieuse surtout, les bons conseils et, <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> leurs camara<strong>de</strong>s, les bons exemples<br />

qui exerceront sur eux une véritable et sérieuse influence. Notre règlement porte que nos<br />

œuvres, en général, doivent tendre à un bien spirituel; nous <strong>de</strong>vons donc tourner particu‐<br />

lièrement nos efforts <strong>de</strong> ce côté et voir si nos moyens sont bien calculés pour atteindre<br />

cette fin. Ce sont là, mon bon ami, <strong>de</strong>s observations générales sans application directe à ce<br />

que vous faites, car je crois sincèrement que cʹest dans cet esprit que vous travaillez; mais<br />

nous avons besoin dʹy revenir <strong>de</strong> temps en temps par la pensée pour <strong>de</strong>meurer fermes<br />

dans notre chemin.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> la communication que vous mʹavez faite <strong>de</strong> la lettre <strong>de</strong> M. lʹab‐<br />

bé Halluin; tout me laisse espérer quʹ<strong>avec</strong> la droiture <strong>de</strong> vues dont il est animé, lʹentente<br />

411


sera bien facile entre nous; nous ne cherchons <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts que la gloire <strong>de</strong> Dieu et le sa‐<br />

lut <strong>de</strong> nos frères, <strong>de</strong>s petits, <strong>de</strong>s pauvres, <strong>de</strong> ceux qui sont les plus délaissés; sur un pareil<br />

terrain, lʹorgueil et lʹesprit propre nʹont point leur place et ne sauraient empêcher les âmes<br />

<strong>de</strong> sʹunir; ayons donc bonne confiance et, à lʹheure que le Seigneur aura marquée, nous<br />

verrons se consommer cette heureuse association.<br />

Adieu, bien cher ami, mon f. Paillé et moi, nous allons quelquefois en pensée faire<br />

notre adoration dans la petite chapelle dʹAmiens; venez aussi, en retour, <strong>avec</strong> le f. Mar‐<br />

caire, visiter les pauvres exilés et prier <strong>avec</strong> eux; il est <strong>de</strong>s heures <strong>de</strong> souffrance et dʹabat‐<br />

tement où ils ont besoin <strong>de</strong> cette douce consolation.<br />

Votre dévoué ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Respect à MM. Mangot et Cacheleux.<br />

12 décembre. Je me trouve moins souffrant aujourdʹhui; le temps était beau, nous<br />

avons pu faire une promena<strong>de</strong>.<br />

332 à M. Vince<br />

MLP. communie aux souffrances <strong>de</strong> son frère mala<strong>de</strong>. Souffrir par amour du Christ est plus méritoire que faire<br />

<strong>de</strong>s œuvres saintes et charitables. Sʹabandonner au Seigneur: ʺne rien <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r, ne rien refuserʺ (saint François<br />

<strong>de</strong> Sales).<br />

[Vernet, 15 décembre 1855]<br />

Cher ami et fils en N.S.,<br />

Mon f. Paillé vous a écrit <strong>de</strong>ux fois en mon nom, mais je ne mʹen réservais pas<br />

moins la satisfaction <strong>de</strong> vous faire quelques lignes moi‐même pour répondre à votre petite<br />

épître et vous remercier <strong>de</strong>s prières que vous adressez pour moi au Seigneur. Je suis assu‐<br />

ré quʹIl les agrée, car son oreille est près <strong>de</strong> celui qui est faible et qui souffre; trop heureux<br />

si, dans son épreuve, il sait profiter dʹun si précieux privilège. Notre bon p. Beaussier, vous<br />

et moi, nous sommes dans cet état <strong>de</strong> choix; à nous trois, nous offrons au Seigneur comme<br />

un bouquet <strong>de</strong> myrrhe, tâchons <strong>de</strong> le présenter <strong>de</strong> bonne grâce, afin quʹil soit agréable à<br />

ses yeux. Prier, communier, faire <strong>de</strong>s œuvres saintes et charitables est parfait, mais souffrir<br />

<strong>avec</strong> amour, en union <strong>avec</strong> le divin Sauveur, est plus parfait et plus méritoire encore. No‐<br />

tre p. Beaussier est pleinement dans ces pieuses et généreuses dispositions; imitons son<br />

exemple, cher ami, et, à nous trois, nous servirons utilement notre petite famille par<br />

lʹexemple et par la bénédiction que nous attirerons sur elle.<br />

Mon f. Paillé vous a dit déjà que jʹétais encore trop faible pour mʹoccuper <strong>de</strong> rien <strong>de</strong><br />

suivi, mais jʹai tendrement à cœur la gloire <strong>de</strong> saint Joseph, notre Père, et, si je suis plus<br />

tard moins incapable, je chercherai, par moi‐même ou autrement, les moyens <strong>de</strong> répondre<br />

à votre désir.<br />

Je vois et je sens par ma propre expérience que votre plus grand tourment, cʹest<br />

dʹêtre constamment ballotté entre un mieux momentané et <strong>de</strong>s rechutes sans fin, <strong>de</strong> telle<br />

sorte quʹentre le rétablissement ou lʹaggravation du mal, entre la vie et la mort, vous <strong>de</strong>‐<br />

meurez incertain, ne sachant ce que le Seigneur veut <strong>de</strong> vous. Oui, cette incertitu<strong>de</strong> est<br />

bien crucifiante, ce dépouillement si absolu dans la disposition <strong>de</strong> notre existence est ru<strong>de</strong><br />

à la nature, mais il me semble que cʹest le sacrifice le plus complet que nous puissions faire<br />

412


à Dieu et quʹIl ne saurait rien <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong> plus à sa créature. Courage donc, mon cher Jo‐<br />

seph, abandonnons‐nous bien aux mains du Seigneur et arrivons, sʹil se peut, comme notre<br />

bon ami saint François <strong>de</strong> Sales à ne rien <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r ni rien refuser.<br />

Je pense bien souvent, <strong>avec</strong> mon f. Paillé, que lʹair et le soleil <strong>de</strong> ce pays feraient<br />

grand bien à notre p. Beaussier et à vous. Si vous pouviez venir lʹun portant lʹautre, ce ne<br />

serait peut‐être pas impossible; mais je crois que notre Père est trop faible et que vous êtes<br />

aussi trop peu sûr <strong>de</strong> vous; laissons donc faire le divin Maître et confions‐nous aux tendres<br />

soins <strong>de</strong> sa Provi<strong>de</strong>nce. Je vous embrasse tendrement en J.M.J.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Offrez mon respect à nos bons amis M. et M me Restou et Tulasne.<br />

333 à M. Guillot 224<br />

Encouragement à la communion fréquente. Ne pas se laisser dominer par lʹactivité extérieure.<br />

[15 décembre 1855]<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Votre petite lettre mʹa fait grand plaisir; ne manquez pas <strong>de</strong> mʹécrire <strong>de</strong> temps en<br />

temps, on a besoin en Communauté <strong>de</strong> ne pas se perdre <strong>de</strong> vue.<br />

Je crois quʹil faut continuer vos communions fréquentes, puisque N.S. vous attire à<br />

Lui en vous faisant trouver là votre consolation et votre repos; les fruits se feront sentir à la<br />

longue, ne vous découragez point <strong>de</strong> la persistance <strong>de</strong> vos misères, humiliez‐vous en, dé‐<br />

sirez toujours <strong>de</strong>venir meilleur et confiez‐vous aux bontés paternelles <strong>de</strong> Dieu.<br />

Ne laissez pas, bien cher ami, lʹactivité pour vos emplois tellement dominer votre<br />

esprit quʹil manque <strong>de</strong> repos dans les exercices <strong>de</strong> piété. Notre divin Seigneur lui‐même<br />

disait à ses disciples après leurs travaux: Retirons‐nous à lʹécart et reposez‐vous un peu. 225<br />

Ces moments <strong>de</strong> relâche sont donc selon Dieu, et nous correspondons à ses intentions<br />

quand nous y mettons notre âme en paix. Jʹespère, cher enfant, que vous entrerez <strong>de</strong> plus<br />

en plus dans cette voie: travailler sans trouble, se reposer aux pieds <strong>de</strong> Dieu dans le calme<br />

et dans la paix.<br />

Je vous embrasse cordialement en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

334 à M. Maignen<br />

MLP. accepte que M. Maignen lui envoie <strong>de</strong>s livres pour se distraire mais il réserve lʹessentiel <strong>de</strong> son temps à la<br />

prière. Renseignements pour lʹorganisation dʹun sermon <strong>de</strong> charité et pour solliciter <strong>de</strong>s bienfaitrices.<br />

Vernet‐les‐Bains, 16 décembre 1855<br />

2 ème Dimanche <strong>de</strong> lʹAvent<br />

224 Il y a cinq mois (le 27 juillet) que le frère Henri Guillot (1827-1890) est entré en Communauté. Originaire du diocèse <strong>de</strong> Grenoble,<br />

il partira pour Rome <strong>avec</strong> l'armée que la France envoie pour la défense du Pape. Sept années <strong>de</strong> service militaire le marqueront<br />

toute sa vie. Les conditions difficiles <strong>de</strong> ses obédiences et les nombreuses années passées en province en <strong>de</strong>s lieux divers feront <strong>de</strong><br />

ce frère laïc, religieux exemplaire, un correspondant privilégié du Fondateur.<br />

225 Mc 6.31.<br />

413


Très cher enfant en N.S.,<br />

Je voulais répondre hier à votre lettre, mais le f. Myionnet mʹa pris tout mon<br />

temps 226 , je nʹai pu en réserver pour vous; non quʹen réalité tout mon loisir ait été employé<br />

à lui écrire, mais parce quʹaprès mes repas et dans les heures <strong>de</strong> la journée où je sens plus<br />

<strong>de</strong> fatigue, je mʹabstiens dʹécrire. Soyez donc en repos sur ce point, vous et tous nos frères;<br />

sauf les cas dʹurgence, je nʹécris pas <strong>de</strong> manière à me fatiguer et mes correspondances <strong>avec</strong><br />

vous sont mon plus doux délassement.<br />

Je laisserai encore au f. Paillé aujourdʹhui le soin <strong>de</strong> vous donner, dans son petit<br />

journal quʹil va continuer ces jours‐ci, les détails qui peuvent vous intéresser sur lʹemploi<br />

<strong>de</strong> nos journées; ils sont, pour ce qui me concerne, fort monotones dans ces <strong>de</strong>rniers<br />

temps, et la pensée que vous avez eue <strong>de</strong> me chercher quelque délassement était bien ins‐<br />

pirée par ces pressentiments que votre cœur dʹenfant aimant et dévoué a toujours eus pour<br />

moi. Jʹaccepte votre proposition, <strong>de</strong> mʹenvoyer quelques livres, si lʹaffranchissement par la<br />

poste est peu coûteux, ce quʹil faudra me dire après votre premier envoi, afin que je juge<br />

sʹil est raisonnable <strong>de</strong> mʹen faire un second. Je désirerais la Vie <strong>de</strong> dom Barthélemy <strong>de</strong>s Mar‐<br />

tyrs, ouvrage excellent qui manque à notre bibliothèque et quʹon pourrait acheter sʹil ne<br />

coûte que peu; notre ami, M. Berthuot, vous dira cela. (A cette occasion, vous lʹassurerez<br />

<strong>de</strong> nos affectueux souvenirs). Si vous nʹavez pas eu la pensée <strong>de</strong> mettre Les légen<strong>de</strong>s intimes<br />

dont vous me parlez dans un panier <strong>de</strong> vin, que le f. Myionnet a dû mʹexpédier ces jours‐<br />

ci, vous pourriez le joindre au premier que je vous ai <strong>de</strong>mandé ci‐avant. Je verrai <strong>avec</strong><br />

vous, après ce premier envoi, ce que nous pourrions trouver encore; je puis consacrer<br />

quelques moments <strong>de</strong> la journée à un peu <strong>de</strong> lecture délassante, surtout dans les jours<br />

froids où je ne puis du tout sortir, mais je ne voudrais pas y donner beaucoup <strong>de</strong> place<br />

dans lʹemploi <strong>de</strong> mes heures; je crois que le Seigneur mʹenvoie dans la retraite pour plu‐<br />

sieurs fins et, en particulier, pour me retrouver plus habituellement <strong>avec</strong> Lui; je croirais<br />

donc ne pas correspondre à ses <strong>de</strong>sseins en cherchant trop dʹoccupation dʹesprit hors <strong>de</strong><br />

Lui; donc, un peu <strong>de</strong> distraction honnête et choisie, mais pas trop et prise <strong>avec</strong> discerne‐<br />

ment.<br />

Vous savez, très cher enfant, <strong>avec</strong> quel facile entraînement je me laisse aller à mʹen‐<br />

tretenir <strong>avec</strong> vous, et combien cette consolation me serait douce; mais vous me parlez <strong>de</strong><br />

diverses affaires sur lesquelles vous atten<strong>de</strong>z quelques mots <strong>de</strong> réponse; je commence par<br />

là; sʹil me reste un peu <strong>de</strong> temps, je mʹépancherai encore un peu <strong>avec</strong> vous.<br />

M. <strong>de</strong> Lambel mʹécrit quʹil revient à Paris dans les <strong>de</strong>rniers jours <strong>de</strong> décembre et<br />

quʹil y sera tout à votre disposition; ne vaudrait‐il pas mieux attendre son retour pour les<br />

visites à M mes <strong>de</strong> Monsaulmin et <strong>de</strong> la Bourdonnaie? Il vous accompagnerait et vous pré‐<br />

senterait à elles; pour M mes <strong>de</strong> Brissac et <strong>de</strong> la Chatre, Madame <strong>de</strong> Gontaut (leur cousine), à<br />

sa <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, vous annoncerait et vous recomman<strong>de</strong>rait. Ce nʹest quʹun retard <strong>de</strong> huit<br />

jours; si pourtant, à cause du peu <strong>de</strong> temps qui reste, vous aimez mieux allez seul vous‐<br />

même, écrivez‐moi <strong>de</strong> suite; écrivez‐moi aussi si vous voulez attendre M. <strong>de</strong> Lambel, parce<br />

que je vous enverrai une petite lettre pour lui recomman<strong>de</strong>r encore lʹaffaire. Si vous mettez<br />

votre sermon à la Ma<strong>de</strong>leine un jeudi <strong>de</strong> janvier, ce qui est bien prochain, prenez au moins<br />

à la fin <strong>de</strong> janvier, car dʹici là, trouver <strong>de</strong>s quêteuses et quʹelles fassent ensuite leur quête,<br />

cʹest beaucoup pour si peu <strong>de</strong> temps. Avez‐vous vu M me Récamier? Si vous la pressez un<br />

peu, vous obtiendrez, elle est très bonne pour nous; M. Massé pourrait, je crois, vous ai<strong>de</strong>r.<br />

226 Cette lettre que MLP. a écrite la veille, 15 décembre, à M. Myionnet, et qui a bien occupé sa journée, est perdue.<br />

414


Pour le sermon <strong>de</strong>s orphelins, avez‐vous vu M. et M me <strong>de</strong> Monchy?<br />

M elle Gauthier peut aussi procurer peut‐être quelque quêteuse.<br />

Suivez bien la sœur S t François et la sœur Emelie (je crois), tante du petit Coul‐<br />

beaux; voyez leurs quêteuses quand vous pourrez.<br />

M me Restou peut beaucoup, elle obtient tout par saint Joseph; M me Bingham et ses<br />

<strong>de</strong>ux filles (M me dʹEpresménil) et X...); M me Cauchy, 12 rue Tournon, qui me donnait tous<br />

les ans ai<strong>de</strong>, conseil et ouvertures <strong>de</strong> toutes sortes. Elle mʹavait mis en rapport <strong>avec</strong> M elle<br />

Lefebvre‐Durufflé, 8 ou 10 rue Férou, qui nʹavait pas réussi lʹan <strong>de</strong>rnier, mais qui est pleine<br />

<strong>de</strong> bonne volonté et qui a <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s relations; elle mʹavait promis <strong>de</strong> ne rien négliger<br />

cette année. M me Chomel, quai Voltaire, protectrice dʹun <strong>de</strong> nos enfants; peut‐être M me <strong>de</strong><br />

Gontaut, qui est très touchée <strong>de</strong> ma maladie et fait faire en ce moment une neuvaine pour<br />

moi; en la voyant <strong>avec</strong> M. <strong>de</strong> Lambel, vous la déci<strong>de</strong>riez, elle ne sait rien refuser. Enfin<br />

M mes <strong>de</strong> Vatry et Hainguertot par M. <strong>de</strong> Girardin.<br />

Voilà le jour qui tombe, je nʹaurai pas le temps <strong>de</strong> vous entretenir <strong>de</strong>s affaires <strong>de</strong><br />

Nazareth aujourdʹhui; je vais vous envoyer ces quelques lignes pour vous faire prendre<br />

patience, puisque vous voulez tout <strong>de</strong> suite une lettre <strong>de</strong> moi, et <strong>de</strong>main je vous adresserai<br />

encore quelques lignes. M. Boutron a‐t‐il consenti à écrire à M. <strong>de</strong> Montaud, ou pense‐t‐il<br />

quʹil vaut mieux attendre au mois <strong>de</strong> janvier pour ne pas <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à notre généreux ami<br />

<strong>de</strong>ux secours pour une même année?<br />

Adieu pour aujourdʹhui, cher enfant; il faut que je fasse un peu dʹexercice spirituel<br />

avant <strong>de</strong> dîner qui va bientôt arriver; à 7h., les lettres partent; adieu donc; je tiens encore à<br />

la vie quand je pense que je pourrais vous revoir, vous mon enfant premier‐né, et tous ces<br />

bien‐aimés amis qui vous entourent et dont la tendre affection me touche si profondément;<br />

mais laissons faire le Seigneur si bon, si sage, si plein <strong>de</strong> tendres miséricor<strong>de</strong>s. Nʹayez pas<br />

trop <strong>de</strong> sollicitu<strong>de</strong>s, cher enfant, ni sur vous, ni sur vos travaux, jetez le tout dans son<br />

Cœur et ayez confiance, jamais Il ne vous a abandonné; vous sentirez sa grâce croître <strong>avec</strong><br />

vos besoins et aussi <strong>avec</strong> vos années, car, comme au Ciel nous le verrons toujours, toujours<br />

davantage, sur la terre déjà Il se montre aussi toujours, toujours plus près <strong>de</strong> nous. Je vous<br />

embrasse tendrement en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

N.B. Les lettres jetées à temps à la poste à Paris nous arrivent ici un jour plus tôt que<br />

celles dont lʹenvoi est fait <strong>de</strong> Vaugirard.<br />

335 à M. Maignen<br />

Rapports officiels <strong>avec</strong> lʹArchevêché <strong>de</strong> Paris. Statue <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette. Comptes détaillés <strong>de</strong> Nazareth.<br />

Vernet‐les‐Bains, 17 décembre 1855<br />

Cher fils en N.S.,<br />

Je tiens à ma parole et viens mʹentretenir encore un peu <strong>avec</strong> vous.<br />

Avant <strong>de</strong> passer aux affaires <strong>de</strong> Nazareth, je vous prie <strong>de</strong> me dire dans votre pro‐<br />

chaine lettre sʹil a été donné quelque suite aux question que mʹavait posées M. le Vic. Gén.<br />

Darboy; la note que je vous avais envoyée sur notre Communauté et ses œuvres lui a‐t‐elle<br />

été remise? lʹa‐t‐on modifiée et retranscrite avant <strong>de</strong> la remettre? Si on lʹa recopiée, je crois<br />

415


quʹil ne serait pas mal <strong>de</strong> conserver la minute qui contient un exposé simple <strong>de</strong>s faits <strong>de</strong><br />

notre petite fondation. Enfin M gr a‐t‐il publié le rapport quʹil <strong>de</strong>vait faire et pour lequel<br />

cette notre nous a été <strong>de</strong>mandée?<br />

La lettre <strong>de</strong> M. Darboy mʹa paru être <strong>de</strong> plus vers une reconnaissance formelle <strong>de</strong><br />

notre petite Communauté; il faut <strong>de</strong> temps en temps, quand on en a lʹoccasion, voir M.<br />

Dedoue; on <strong>de</strong>vra, ce me semble, lui faire une visite (<strong>de</strong>ux ou trois au moins) au jour <strong>de</strong><br />

lʹan, et solliciter à cette occasion une petite visite <strong>de</strong> sa part.<br />

Je désirerais bien que<br />

vous me donniez quelque<br />

petit détail sur le groupe <strong>de</strong><br />

N.D. <strong>de</strong> la Salette donné par<br />

M. Choyer. Quelles en sont<br />

les proportions? A‐t‐il du<br />

mérite comme piété,<br />

sentiments, art? Lʹarrivée si<br />

opportune <strong>de</strong> cette pieuse<br />

image me semble un<br />

encouragement bien direct <strong>de</strong><br />

la T. S te Vierge que nous<br />

désirons honorer et faire<br />

honorer <strong>de</strong> tous. 227<br />

Je vais aujourdʹhui<br />

comme à lʹordinaire; je tousse peu à la condition dʹêtre dans une atmosphère égale et tem‐<br />

pérée, à peu près comme un poisson dans un bocal, mais mon estomac va chétivement.<br />

Cʹest là ce qui rend mes journées,et ordinairement mes nuits, assez pénibles; je pense que<br />

le vin envoyé <strong>de</strong> Vaugirard va me remettre un peu <strong>de</strong> ce côté.<br />

227 La protection <strong>de</strong> la Vierge Réconciliatrice s'était avérée puissante en cette année 1855, puisque la guérison <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux orphelins fut<br />

obtenues par l'invocation à ND. <strong>de</strong> La Salette, (L. Gentil en février, A. Leclerc en mai). Pour lui témoigner la reconnaissance <strong>de</strong><br />

toute la communauté, l'idée vint à MLP. <strong>de</strong> lui élever un mo<strong>de</strong>ste sanctuaire, mais les moyens manquaient. Sur ces entrefaites, il<br />

apprend, au mois <strong>de</strong> juin, que le terrain attenant à la chapelle et à l'orphelinat <strong>de</strong> Vaugirard est sur le point d'être vendu. Il s'adressa<br />

alors à la Vierge Marie en ces termes : "Ma bonne Mère, vous voyez combien il serait fâcheux pour nous d'avoir dans ces champs<br />

quelque voisin désagréable; si vous voulez que je l'achète, donnez-m'en une marque en m'aidant un peu; je vous promets d'y faire<br />

construire un petit sanctuaire sous le vocable <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette". (Vie <strong>de</strong> M. Myionnet, p. 246). On commença une neuvaine et<br />

les secours arrivèrent. Le 11 décembre, on put acheter le terrain <strong>de</strong> M. Laroze. Il fut baptisé "le champ <strong>de</strong> Notre-Dame <strong>de</strong> la Salette.",<br />

et servira <strong>de</strong> fondation au futur sanctuaire.<br />

416


Vous mʹexpliquez beaucoup trop sommairement la manière dont vous établissez<br />

votre état <strong>de</strong> situation pour Nazareth; aussi nʹy ai‐je rien compris du tout. Vous me dites:<br />

Les emprunts et constructions achevées ne dépasseront pas au maximum 127.000<br />

Le revenu en ressources assurées est <strong>de</strong> 7.500<br />

Lʹintérêt <strong>de</strong>s emprunts et <strong>de</strong>tte contractées ne dépassera pas 6.200<br />

Je ne me trouve en accord <strong>avec</strong> vous sur aucun <strong>de</strong> ces points; voici ce que je vois:<br />

Sommes dont on doit servir les intérêts:<br />

Emprunts MM. <strong>de</strong> Fontette .........2.000 115 rue St Dominique<br />

Taillandier .........5.000<br />

<strong>de</strong> Kergorlay 5.000 22 rue St Dominique<br />

Agnel ...... .10.000<br />

Boutron 2.500<br />

<strong>de</strong> Lambel 500<br />

Bresson 1.000<br />

<strong>de</strong> Monchy 5.000<br />

Guillemin 4.000<br />

35.000<br />

Acquisition (à M. Guillemin ou Terray) 65.000<br />

M.le Curé <strong>de</strong> lʹAbbaye‐aux‐Bois 6.000<br />

Emprunt à faire présentement pour travaux<br />

(M.le Curé <strong>de</strong> lʹAbbaye‐aux‐Bois, en <strong>de</strong>hors) 6.000<br />

Vous dites quʹil restera dû aux entrepreneurs, à payer dans <strong>de</strong>ux ans<br />

mais en servant les intérêts suivant conditions du marché) 40.000<br />

Ensemble: 152.000<br />

Voilà donc un capital <strong>de</strong> 152.000f<br />

dont il faut constamment servir les intérêts, non compris les 6.000f <strong>de</strong> M. le Curé Hamelin<br />

qui, je pense, pourraient être payés seulement en partie cette année et se prendre sur les<br />

fonds <strong>de</strong>s aumônes et sermons. Si je ne me trompe, il faudrait les ajouter encore aux<br />

152.000f ci‐contre.<br />

Or, lʹintérêt <strong>de</strong> 152.000f serait annuellement <strong>de</strong>.......... 7.600<br />

Je ne trouve point, comme vous, pour les servir, 7.500f, mais seulement:<br />

Patronage.......................................... 2.000<br />

Sermon à St‐Sulpice ou ailleurs....... 2.000<br />

Location dʹun étage.......................... 1.200<br />

Quête à N.D. <strong>de</strong>s Victoires, à la S te Famille,<br />

quelques dons et souscriptions 1.000<br />

Fourneau et bibliothèque au maximum............. 400<br />

6.600<br />

Je crois trouver la cause <strong>de</strong>s différences <strong>de</strong> nos chiffres en ce que, peut‐être, vous<br />

nʹavez pas compté quʹon payerait les intérêts <strong>de</strong>s sommes restant dues aux entrepreneurs<br />

et payables dans lʹespace <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux ans; mais les conditions <strong>de</strong> leurs marchés le portent ain‐<br />

si.<br />

Je ne comprends pas bien non plus ce que vous me dites: On peut au 1 er janvier<br />

1.000f au patronage pour le 1 er semestre dʹavance. Le patronage nʹaura rien à payer pour la<br />

417


maison <strong>de</strong> la rue Stanislas tant quʹil a celle <strong>de</strong> la rue du Regard; or, vous ne mʹavez pas dit<br />

jusquʹici que celle‐ci dût être remise ou louée pour le 1 er janvier. Y a‐t‐il en effet quelque<br />

mesure prise en ce sens? Je lʹapprendrais <strong>avec</strong> plaisir.<br />

Lʹemprunt au Crédit Foncier serait un moyen <strong>de</strong> simplifier nos affaires, mais M.<br />

Guillemin nʹy consentira certainement pas. Lui en avez‐vous parlé? Je crois être sûr quʹil<br />

sʹy opposera. Il faut alors se réduire à régler la situation présente; mais, avant tout, en<br />

avons‐nous un aperçu bien net? Il est difficile quʹil en soit ainsi tant que les comptes ne<br />

sont pas réglés; on ne peut guère agir que par approximation. Tâchez, cher enfant, <strong>de</strong> ré‐<br />

unir pour cela, <strong>avec</strong> M. Leblanc et M. Cabaret, <strong>de</strong>s éléments aussi exacts que possible pour<br />

nous faire une base dʹaprès laquelle vous pourrez marcher.<br />

Vous avez raison <strong>de</strong> vous défier <strong>de</strong> la mollesse <strong>de</strong> M. Cabaret, que nous avons en<br />

toute circonstance trouvé bien peu ferme pour nos intérêts; priez M. Lequeux <strong>de</strong> lui faire,<br />

pour ses règlements, <strong>de</strong>s recommandations et ne lui laissez pas ignorer que ses vérifica‐<br />

tions seront soumises à examen.<br />

Notre état présent établi, autant bien exactement quʹil se pourra, je crois comme<br />

vous que le meilleur parti à prendre serait dʹaviser à un emprunt, soit <strong>de</strong> 6 ou 8.000f si on<br />

ne payait quʹen partie M. le Curé Hamelin, soit <strong>de</strong> 10 ou 12.000f si on le paye. (Je mets ces<br />

chiffres approximativement).<br />

Pour réaliser cet emprunt, je ne sais quels moyens on pourrait avoir; vous en avez<br />

peut‐être quelques‐uns en vue, il nʹen faut négliger aucun. Jʹentrevois celui‐ci qui peut‐être<br />

réussirait: on pourrait, ce me semble, après le retour <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Lambel, provoquer, chez M.<br />

Guillemin, une réunion <strong>de</strong>s personnes qui portent intérêt à lʹœuvre, savoir: tous ceux que<br />

jʹai inscrits ci‐avant comme ayant déjà assisté lʹœuvre, plus MM. le M is <strong>de</strong> S t Seine, (rue<br />

Vaugirard, en face les Sœurs), Leblanc et autres que vous croiriez disposés à prêter quel‐<br />

que appui. Dans cette assemblée, vous feriez ressortir bien nettement la bonne situation <strong>de</strong><br />

lʹœuvre qui a une belle chapelle, maison, terrain dʹune valeur <strong>de</strong>: 220.000f au moins:<br />

Terrain (à 40f, ce qui est peu) 136.000<br />

Bâtiment (au rabais)..................................... 84.000<br />

220.000<br />

et qui, en <strong>de</strong>rnier compte, nʹa en ce moment, et toutes <strong>de</strong>ttes <strong>de</strong>s constructions comprises,<br />

quʹun passif dʹenviron 140.000f; vous montreriez quʹau moyen <strong>de</strong> la modique somme à<br />

emprunter, toute lʹaffaire serait présentement nette et simplifiée et laisserait lʹœuvre dans<br />

sa libre action.<br />

Vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>riez alors si tous les membres assemblés ne peuvent ensemble pren‐<br />

dre sur eux <strong>de</strong> prêter chacun quelque partie <strong>de</strong> cette somme. Consultez MM. Myionnet et<br />

Lantiez sur ce moyen; peut‐être mettrait‐il bien à nu une situation en réalité bien chargée<br />

et aurait‐il sous ce rapport quelque inconvénient; examinez, et surtout <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z les lu‐<br />

mières et lʹassistance dʹen haut.<br />

Je ne désespère pas que M. Baudon ne puisse nous donner un peu dʹai<strong>de</strong>; M. De‐<br />

caux me conseille <strong>de</strong> lui écrire, je vais le faire. Mais M. Baudon nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ra <strong>de</strong> lui<br />

soumettre une proposition nette et précise. Je crois que nous <strong>de</strong>vrions nous borner à solli‐<br />

citer quelques dons <strong>de</strong> sa part et <strong>de</strong> celle <strong>de</strong> ses entourages et dépendances, et à le prier <strong>de</strong><br />

favoriser et faciliter notre emprunt. Si vous vous déci<strong>de</strong>z à une assemblée et quʹil y veuille<br />

venir, il y ferait beaucoup par sa présence, mais le voudrait‐il? M. Cochin consentirait‐il<br />

418


aussi à y venir? Cʹest douteux. MM. Desains, Delaire et autres, M. Boutron ne pourrait‐il<br />

les son<strong>de</strong>r?<br />

Je crois avoir répondu à toutes vos questions, cher enfant; il sʹen faut que jʹaie pour<br />

cela résolu les difficultés dʹune situation évi<strong>de</strong>mment lour<strong>de</strong> et assez embarrassée. Mais<br />

notre espérance est en Dieu qui a permis que nous la prissions sur nos épaules et sʹest en‐<br />

gagé, jʹen ai la confiance, à la supporter <strong>avec</strong> nous. Tournons‐nous donc vers Lui, <strong>de</strong>man‐<br />

dons‐Lui, par Marie et Joseph, lumière, assistance, et le secours divin arrivera à juste point,<br />

ainsi quʹil nous a toujours été donné par le passé.<br />

Cʹest <strong>avec</strong> la même confiance que nous <strong>de</strong>vons envisager les autres paiements res‐<br />

tant à faire dans lʹespace <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux ans. On aurait dʹailleurs, comme <strong>de</strong>rnière ressource, sans<br />

doute, <strong>de</strong> proposer à M. Guillemin <strong>de</strong> prendre la propriété à son compte, sauf acquit par<br />

lui <strong>de</strong>s paiements à faire, et sauf à nous la cé<strong>de</strong>r <strong>de</strong> nouveau quand nous pourrions en re‐<br />

prendre plus facilement la possession. Aujourdʹhui, cette proposition lʹeffraierait, parce<br />

quʹil a déjà fait <strong>de</strong>s avances considérables, mais plus tard il nʹaurait pas la même répu‐<br />

gnance à sʹy prêter. Cʹest une simple prévision quʹil faut, en tout cas, gar<strong>de</strong>r en nous sans<br />

la mettre au <strong>de</strong>hors en ce moment. Cette lettre contenant quelques renseignements utiles,<br />

vous ferez bien <strong>de</strong> la gar<strong>de</strong>r; si je me suis trompé en quelques points, vous pourriez me les<br />

signaler et, après rectification faite, vous auriez une vue <strong>de</strong> lʹensemble <strong>de</strong> lʹaffaire.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, ce nʹest pas sans un peu <strong>de</strong> regret que je vous vois si<br />

lour<strong>de</strong>ment chargé, mais le bon Maître lʹa voulu ainsi.<br />

Dans votre jeune âge, vous avez dû suppléer votre père naturel pour lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> la<br />

famille, et voilà que, <strong>de</strong>venu homme, il vous faut suppléer votre Père spirituel; vos pre‐<br />

miers travaux vous ont valu votre vocation, les autres vous obtiendrons le Ciel.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Si vous vous décidiez à faire une assemblée, ne pourrait‐on pas proposer à ces<br />

MM. <strong>de</strong> réduire à 4 ou au moins à 4 1/2 l’intérêt <strong>de</strong>s sommes qu’ils ont prêtées? Dejà MM.<br />

Boutron, Taillandier, Bresson ont pris l’initiative pour 4 1/2 . En ce cas, si vous obteniez que<br />

M. Boutron, ou autre, fît la proposition, cela vaudrait mieux. Peut‐être aussi faudrait‐il<br />

alors ne pas convoquer M. Agniel, qu’on ne pourrait peut‐être comprendre dans cette me‐<br />

sure.<br />

Avez‐vous prévu, dans les acomptes à payer, M. Lecœur, M. Restou, le serrurier qui<br />

nʹa reçu, je crois, que 500f (non compris 200f payés à un premier serrurier nommé Paleci‐<br />

que), enfin le peintre?<br />

Qu’avez‐vous l’intention <strong>de</strong> faire pour la fête <strong>de</strong> S t <strong>Jean</strong>? Suivez là <strong>de</strong>ssus vos inspi‐<br />

rations, M. Myionnet ne m’en a point parlé?<br />

336 à M. Decaux<br />

Sollicite son ai<strong>de</strong> pour Nazareth, en situation financière difficile.<br />

Vernet‐les‐Bains, 20 décembre 1855<br />

Très cher ami et frère en N.S.,<br />

Jʹai été touché jusquʹaux larmes <strong>de</strong> tout ce que vous avez tiré du bon trésor <strong>de</strong> votre<br />

cœur pour mʹencourager et me consoler dans ma sévère retraite. Vous avez <strong>de</strong>s accents<br />

419


comme personne ne les a, <strong>de</strong>s paroles que le bon Dieu seul inspire aux cœurs quʹil fait les<br />

agents <strong>de</strong> sa divine charité.<br />

Votre bonne épître est si douce et si précieuse que je la gar<strong>de</strong> et veux lʹenvoyer à nos<br />

frères comme <strong>de</strong>vant rester au foyer <strong>de</strong> notre petite famille parmi nos titres les plus chers.<br />

Gar<strong>de</strong>z toujours à mes frères votre fraternel intérêt. Ai<strong>de</strong>z surtout mon f. Maignen à<br />

se tirer dʹune <strong>de</strong>rnière petite crise pour Nazareth qui, après cette liquidation du moment,<br />

va ensuite marcher régulièrement. Mais il faut ici un peu dʹappui à mon bon ami, M. Mai‐<br />

gnen. Le divin Seigneur, je lʹespère, inspirera aux âmes généreuses la pensée <strong>de</strong> lui venir<br />

en ai<strong>de</strong>. Jʹécris aujourdʹhui, comme vous me lʹavez conseillé, à M. le Prési<strong>de</strong>nt Général<br />

pour recomman<strong>de</strong>r cette affaire à sa bienveillance, et jʹinvite M. Maignen à lʹaller voir. Si<br />

vous croyez le moment convenable pour dire encore à M. Baudon quelques mots favora‐<br />

bles, jʹattends ce bon office <strong>de</strong> votre inépuisable affection.<br />

Tout à vous dans les Cœurs <strong>de</strong> J. et M.<br />

Votre ami et frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

337 à M. Carment<br />

Dans les épreuves, recourir à Marie. Si la Croix est parfois pesante, cʹest elle qui fortifie.<br />

Vernet‐les‐Bains, 26 décembre 1855<br />

Fête <strong>de</strong> St Etienne ‐ Vigile <strong>de</strong> St <strong>Jean</strong><br />

Très cher fils et ami en N.S.,<br />

Vous avez voulu contribuer, comme tous nos frères, à donner quelque consolation<br />

aux pauvres exilés, et vous mʹavez écrit une bonne petite lettre que le divin Seigneur et sa<br />

Très Sainte Mère compteront certainement parmi vos actes <strong>de</strong> charité. Je vous en sais bien<br />

bon gré aussi pour ma part, cher enfant, et jʹai bien senti que toutes vos paroles sortaient<br />

du fond <strong>de</strong> votre coeur, aussi m’ont‐elles été très douces et pleines dʹencouragement. Je<br />

suis particulièrement touché <strong>de</strong> la bonne pensée que vous avez eue dʹune petite offran<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong> chaque jour pour mon rétablissement; cʹest une attention toute filiale que mon cœur <strong>de</strong><br />

père a tendrement sentie.<br />

Je rends grâce à la T. Ste Vierge qui continue <strong>de</strong> veiller si visiblement sur vous et qui<br />

détourne et amortit les mouvements que vous ne pouvez toujours maîtriser; ne délaissez<br />

jamais cette tendre Mère, et vous nʹen serez jamais abandonné. En vain alors, lʹennemi du<br />

salut remuera violemment toutes vos facultés ébranlées, ferme et confiant dans le secours<br />

divin, vous redirez les paroles du psaume: Nisi quia Dominus erat in nobis...cum exsurgerent<br />

homines in nos, forte vivos <strong>de</strong>glutissent nos. 228<br />

Jʹai appris <strong>avec</strong> joie que vous avez pu renouveler vos vœux le jour <strong>de</strong> la Présenta‐<br />

tion: la T. Ste Vierge aura offert votre sacrifice <strong>avec</strong> le sien et lʹaura fait agréer du Seigneur;<br />

ainsi les années passent et, malgré quelques misères que lʹindulgence du divin Maître dai‐<br />

gne oublier, votre vocation se confirme, vos mérites sʹaccroissent et, je le pense aussi, votre<br />

âme se fortifie. Béni soit Dieu par Marie, comme par elle aussi vous avez obtenu <strong>de</strong> pareils<br />

bienfaits.<br />

228 Ps. 123 1-2.<br />

420


Ne vous lassez pas, cher enfant, dans votre voie un peu laborieuse et ru<strong>de</strong>; vos tra‐<br />

vaux sont nombreux, vos forces restreintes, vous trouvez dans votre nature <strong>de</strong>s difficultés<br />

qui vous en suscitent aussi parfois dʹautres au <strong>de</strong>hors; tout cela est lourd à porter, mais<br />

cʹest le lest qui empêche le navire <strong>de</strong> chavirer, cʹest la croix qui pèse et pourtant qui sou‐<br />

tient et vivifie.<br />

Continuez <strong>de</strong> prier pour nous, très cher ami; <strong>de</strong> notre côté, nous faisons ici notre<br />

principale affaire <strong>de</strong> vous ai<strong>de</strong>r par nos aspirations et prières. Quand je traîne péniblement<br />

mon corps souffrant et alangui, il me semble que je suis attelé <strong>avec</strong> vous, à vos œuvres et<br />

que je tire comme vous le far<strong>de</strong>au, tout haletant et lassé; cette pensée me console et me re‐<br />

lève dans les moments les plus difficiles.<br />

Je vous prie dʹoffrir à lʹoccasion mon respect à M. le Curé <strong>de</strong> Grenelle, ainsi quʹà ces<br />

D lles Payen; je me recomman<strong>de</strong> bien à leurs bonnes prières. Bon souvenir <strong>de</strong> ma part à M me<br />

Georges; je suis bien assuré quʹelle prie aussi pour nous.<br />

Je vous embrasse tendrement dans les Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre ami et Père<br />

[Le <strong>Prevost</strong>]<br />

338 à M. Vasseur<br />

Obéissance à M. Myionnet qui le remplace comme Supérieur. Les bons religieux font les bons Supérieurs. Bien‐<br />

faits spirituels dʹune méditation <strong>de</strong>vant la crèche. Reddition <strong>de</strong>s comptes au Supérieur.<br />

Vernet‐les‐Bains, 26 décembre 1855<br />

Fête <strong>de</strong> St Etienne<br />

Très cher enfant en N.S.,<br />

Jʹavais résolu dʹemployer aujourdʹhui ma matinée à écrire à mes bons frères et à ré‐<br />

pondre en particulier, aussi affectueusement que je le pourrai, à votre bonne petite épître;<br />

mais le divin Maître, qui dispose à son gré <strong>de</strong> nous, a permis que <strong>de</strong>puis quelques jours je<br />

sois plus tourmenté que précé<strong>de</strong>mment par mes malaises dʹestomac; il sʹensuit que je nʹai<br />

pas lʹesprit libre et que rien ne se fait pour moi aisément; il faudra donc, cher enfant, que<br />

vous vous contentiez aujourdʹhui <strong>de</strong> quelques lignes tant bien que mal assemblées; car,<br />

vous le savez, cʹest ainsi que sont les pauvres mala<strong>de</strong>s, quand ils veulent sourire, ils font<br />

une grimace; il se trouvera donc peut‐être quʹen désirant vous donner ici un souvenir <strong>de</strong><br />

bonne et tendre affection, je nʹaie fait que noircir et griffonner inutilement mon papier.<br />

Je vous sais bien bon gré, cher ami, <strong>de</strong>s bons sentiments <strong>de</strong> respects et <strong>de</strong> soumis‐<br />

sion affectueuse que vous mʹexprimez à lʹégard <strong>de</strong> notre f. Myionnet; rien ne pouvait<br />

mieux manifester lʹexcellent esprit <strong>de</strong> notre petite famille que cette simplicité cordiale <strong>avec</strong><br />

laquelle chacun a accepté le nouveau représentant <strong>de</strong> lʹautorité parmi nous; cʹest là vérita‐<br />

blement comprendre et pratiquer lʹobéissance religieuse et voir en celui qui dirige Dieu<br />

même qui se sert <strong>de</strong> lui pour nous conduire. Pour récompenser cette humble soumission,<br />

le Seigneur presque toujours communique aux Supérieurs quelque chose <strong>de</strong> sa sagesse et<br />

<strong>de</strong> son amour, afin que leur comman<strong>de</strong>ment soit utile et doux à ceux qui leur obéissent; on<br />

peut donc dire en ce sens que les bons religieux font les bons Supérieurs; continuez, très<br />

cher enfant, <strong>avec</strong> tous nos frères, à répondre aux <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> la divine miséricor<strong>de</strong> et lʹecce<br />

quam bonum et quam jucundum se répétera toujours parmi nous <strong>avec</strong> une sainte et douce al‐<br />

légresse.<br />

421


Persévérez aussi dans vos efforts courageux pour la pratique <strong>de</strong> la pauvreté, allez<br />

souvent auprès <strong>de</strong> la crèche durant ce temps consacré à honorer le Saint Enfant Jésus, et<br />

conversez familièrement <strong>avec</strong> Lui. Vous qui aimez les petits enfants et qui êtes encore un<br />

peu enfant vous‐même, ne saurez‐vous causer tout naïvement <strong>avec</strong> le petit enfant <strong>de</strong> Be‐<br />

thléem? Faites‐Lui <strong>de</strong> petits langages naïfs, tendres, confiants; écoutez ce que sa douce<br />

voix dira au fond <strong>de</strong> votre cœur et tout ensemble vous aurez fait une bonne oraison,<br />

comme vous regrettez dʹen faire trop rarement, et vous aurez reçu quelques bonnes leçons<br />

qui vous feront goûter par le cœur lʹhumiliation, la petitesse et la pauvreté.<br />

Acceptez dans cet esprit la reddition <strong>de</strong> compte que vous avez à faire à notre f.<br />

Myionnet sur vos acquisitions. Vous êtes tout à fait dans lʹerreur, cher enfant, en pensant<br />

quʹon vous traite ainsi comme un étranger; tout Supérieur doit agir ainsi; tout chef <strong>de</strong> fa‐<br />

mille ne peut faire autrement, même à lʹégard <strong>de</strong> son fils, car lʹordre et la bonne adminis‐<br />

tration le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt; cʹest donc tout simplement une tentation que le démon, cet affreux<br />

serpent, a jetée dans votre chemin; sautez à pieds joints, comme vous le savez si bien faire,<br />

et le malheureux restera confondu.<br />

Adieu, cher enfant, je regrette quelquefois que vous ne soyez pas <strong>avec</strong> moi pour me<br />

soigner, comme vous me lʹaviez promis, mais si je reviens, nous en retrouverons bien lʹoc‐<br />

casion. Jusque là, je vous embrasse bien tendrement en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Embrassez pour moi vos chers apprentis persévérants.<br />

339 à M. Guillot<br />

Ne pas sʹattrister <strong>de</strong> ses défauts. Lʹéducation <strong>de</strong>s enfants expose à lʹimpatience, mais produit <strong>de</strong>s fruits spirituels.<br />

Vernet‐les‐Bains, 26 décembre 1855<br />

Très cher enfant en N.S.,<br />

Je suis peu fort aujourdʹhui, je ne répondrai pas longuement à votre bonne petite<br />

lettre, mais <strong>de</strong> cœur déjà jʹy ai bien <strong>de</strong>s fois fait réponse en versant aux pieds du Seigneur<br />

mes plus tendres instances pour votre sanctification et la confirmation <strong>de</strong>s bonnes disposi‐<br />

tions que sa grâce vous a inspirées.<br />

5h. Je viens <strong>de</strong> recevoir à lʹinstant le paquet <strong>de</strong> lettres que mʹenvoie pour ma fête<br />

mon f. Myionnet; jʹy trouve la vôtre et je vous en remercie en particulier.<br />

Ne vous tourmentez pas trop, cher ami, <strong>de</strong>s misères que vous trouvez en vous, <strong>de</strong><br />

vos mouvements, dʹimpatience et <strong>de</strong>s tentations dʹorgueil ou autres qui vous peuvent ob‐<br />

sé<strong>de</strong>r. Le démon, dans le temps du noviciat surtout, ne laisse point en paix les serviteurs<br />

<strong>de</strong> Dieu, il emploie toutes ses ruses et suggestions pour les abattre et les décourager, mais<br />

il nʹen faut tenir compte; votre cœur est à Dieu, votre volonté persévérante est bien <strong>de</strong><br />

vous donner uniquement à Lui; tout est bien; ce bon Maître sera indulgent pour un servi‐<br />

teur encore habile et peu fort, sʹIl trouve en lui un cœur soumis et le désir sincère <strong>de</strong> lui<br />

plaire. Il ne faut pas dʹailleurs sʹétonner si vous êtes plus sujet quʹauparavant aux impa‐<br />

tiences; lʹéducation <strong>de</strong>s enfants est une occasion continuelle <strong>de</strong> sʹexercer au support et à la<br />

con<strong>de</strong>scendance. La déraison <strong>de</strong> ces pauvres petits esprits, leur peu <strong>de</strong> correspondance au<br />

bien quʹon leur veut faire révolte la nature et la pousse à lʹindignation; mais il faut domi‐<br />

422


ner ces mouvements, se reporter à leur âge, se souvenir quʹon ne valait pas mieux quʹeux<br />

et quʹon serait vraiment injuste en leur <strong>de</strong>mandant plus quʹon a donné soi‐même; enfin, il<br />

faut se pénétrer <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> la tâche quʹon accomplit; on forme ces jeunes âmes, on<br />

les façonne pour quʹelles sʹouvrent mieux à la lumière et reçoivent plus aisément les divi‐<br />

nes clartés <strong>de</strong> la foi. Quel bienfait pour elles et quel mérite pour nous, quelle gloire pour<br />

Dieu, quel espoir <strong>de</strong> récompense pour le maître persévérant et fidèle!<br />

Adieu, bien cher enfant, je prie mon saint Patron <strong>de</strong> vous conduire au divin Cœur<br />

<strong>de</strong> Jésus et <strong>de</strong> vous y faire trouver le repos, <strong>de</strong> vous rendre comme lui lʹenfant dévoué <strong>de</strong><br />

Marie et <strong>de</strong> vous soutenir pour aller <strong>avec</strong> lui, sʹil le faut, au pied <strong>de</strong> la croix, et il le faut<br />

toujours, tôt ou tard, pour le vrai chrétien, car il doit suivre Jésus jusquʹau bout sʹil veut en‐<br />

trer <strong>avec</strong> Lui dans lʹéternel bonheur.<br />

Je vous embrasse tendrement en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

340 à M. Maignen<br />

Démarches auprès <strong>de</strong> bienfaitrices <strong>de</strong> Nazareth. Savoir se reposer lʹesprit et le corps.<br />

Vernet‐les‐Bains, 28 décembre 1855<br />

Très cher enfant en N.S.,<br />

Je vous envoie les <strong>de</strong>ux lettres: lʹune pour Mme <strong>de</strong> Vatry à remettre à M. <strong>de</strong> Girardin,<br />

lʹautre pour Melle dʹHinisdal, <strong>de</strong>mandée par notre ami M. Guillemin. Priez M. Girardin <strong>de</strong><br />

ne rien négliger pour bien disposer Mme <strong>de</strong> Vatry et <strong>de</strong> faire aussi tout ce quʹil pourra pour<br />

obtenir lʹappui <strong>de</strong> sa belle‐sœur (Mme <strong>de</strong> Vatry), Mme Hainguertot, fort pieuse, fort bonne et<br />

qui a un enfant chez nous, le petit Joseph Robert.<br />

Vous remarquerez, cher ami, quʹà vrai dire je nʹaurais dû porter que pour mémoire,<br />

dans lʹétat <strong>de</strong>s sommes prêtées pour Nazareth, les 4.000f avancés par M. Guillemin, car ils<br />

seront couverts par les 4.000f que mʹa promis Melle dʹHinisdal et dont elle paye déjà les in‐<br />

térêts. Si, comme cela est possible, elle ne donne pas encore immédiatement le capital, elle<br />

aura soin, on y peut compter, <strong>de</strong> nous envoyer les intérêts exactement. Cʹest une <strong>de</strong>s plus<br />

saintes et plus parfaites personnes que jʹaie rencontrées; elle est la pénitente du p. Mille‐<br />

riot.<br />

Vous ne mʹavez pas dit si M. Guillemin sʹoccupe du legs Bouzani, quoique je vous<br />

lʹaie <strong>de</strong>mandé plusieurs fois.<br />

Je vous recomman<strong>de</strong> <strong>de</strong> ne pas négliger Mme Récamier; elle est bien disposée, mais<br />

ces bonnes volontés en général ont toujours besoin dʹêtre cultivées; ces dames sont pres‐<br />

sées <strong>de</strong> tant <strong>de</strong> côtés quʹelles donnent leur ai<strong>de</strong> aux plus instants. Voyez aussi M. <strong>de</strong> Lam‐<br />

bel, si vous ne lʹavez déjà vu.<br />

Jʹai oublié <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à M. Myionnet sʹil avait fait une lettre ou une démarche<br />

près <strong>de</strong>s Dames du Temple; il obtiendrait certainement quelque chose <strong>de</strong> ce côté.<br />

Je reçois à lʹinstant une lettre <strong>de</strong> M. Baudon pleine <strong>de</strong> bienveillance, il ne promet<br />

rien <strong>de</strong> précis, mais il fait toujours plus quʹil ne promet. Est‐ce que vous ne lʹavez pas vu?<br />

Il <strong>de</strong>vait attendre votre visite après ma lettre.<br />

423


Je nʹai pas reçu jusquʹici les livres que vous mʹaviez promis <strong>de</strong> mʹenvoyer; en serait‐<br />

il donc <strong>de</strong> cet envoi comme du panier <strong>de</strong> vin que nous attendons toujours?<br />

Adieu, cher enfant, je vous remercie <strong>de</strong> votre bonne petite lettre pour ma fête, elle<br />

est tendre et filiale comme toujours. Ne vous tuez pas; ayez toujours un peu <strong>de</strong> répit pour<br />

lʹâme et pour le corps, le bon Maître fera ce que notre insuffisance nʹaura pas fait. Je vous<br />

aime tendrement et suis en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Offrez mon respect à M me votre mère et mes bons souvenirs à votre frère, à lʹocca‐<br />

sion du nouvel an.<br />

341 à M. Caille<br />

Vœux <strong>de</strong> nouvel an. La santé <strong>de</strong> MLP. va en sʹaméliorant. Bénédictions souhaitées à lʹŒuvre dʹAmiens.<br />

Vernet‐les‐Bains, 1 er janvier 1856<br />

Fête <strong>de</strong> la Circoncision<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Vous avez eu la bonne pensée <strong>de</strong> mʹécrire, ainsi que mon f. Marcaire, le jour <strong>de</strong> ma<br />

fête, et moi je ne crois pas pouvoir employer mieux quelques instants du premier jour <strong>de</strong><br />

cette année quʹen mʹentretenant <strong>avec</strong> vous. Dès le matin, le bon Curé <strong>de</strong> ce pays a eu la<br />

charité <strong>de</strong> mʹapporter la Sainte Communion; jʹai <strong>de</strong>mandé particulièrement au divin Sei‐<br />

gneur, qui daignait me visiter, <strong>de</strong> répandre toutes ses bénédictions sur mes chers enfants<br />

dʹAmiens, <strong>de</strong> les confirmer dans la voie si sainte où Il a bien voulu les placer et donner<br />

aussi son secours à leurs œuvres, à leurs enfants, à tous ceux quʹils sʹefforcent dʹédifier et<br />

<strong>de</strong> conduire au Ciel. Hier aussi, dans la soirée, mon f. Paillé et moi, nous supposions, par<br />

la pensée, que nous allions successivement à divers sanctuaires <strong>de</strong> prédilection pour y<br />

terminer lʹannée par quelque acte <strong>de</strong> dévotion ou dʹaction <strong>de</strong> grâces; nous nʹavons pas<br />

manqué <strong>de</strong> nous rendre ainsi mentalement à votre petite chapelle et nous avons remercié<br />

<strong>avec</strong> vous le Seigneur <strong>de</strong> la fondation <strong>de</strong> cette partie si intéressante <strong>de</strong> notre œuvre, nous<br />

lʹavons prié <strong>de</strong> maintenir le bon esprit qui anime votre petite famille, ainsi que lʹunion in‐<br />

time qui nous attache les uns aux autres; enfin, dʹaccroître votre nombre selon les vues <strong>de</strong><br />

sa Sagesse et <strong>de</strong> nous rendre <strong>de</strong> dociles instruments entre ses mains.<br />

Je vous prie, mon bon ami, dʹêtre notre interprète auprès <strong>de</strong> M. lʹabbé Mangot et <strong>de</strong><br />

lui offrir notre respect, nos vœux <strong>de</strong> bonne année et notre reconnaissance pour les soins si<br />

bienveillants quʹil donne à votre chère maison. Vous voudrez bien aussi offrir nos souve‐<br />

nirs respectueux à M. lʹabbé Cacheleux et nos sincères affections à vos amis.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong>s détails que vous me donnez sur les pieuses solennités auxquel‐<br />

les ont participé vos œuvres en ces temps <strong>de</strong>rniers, ils mʹont vivement intéressé; éloigné<br />

forcément <strong>de</strong> tous nos travaux charitables, jʹaime en suivre le mouvement et les progrès; jʹy<br />

trouve une consolation dans mon inaction et je pense <strong>avec</strong> joie quʹune petite part mʹest ac‐<br />

cordée dans tout le bien que fait notre chère Communauté.<br />

Vos vœux charitables et affectueux pour ma santé sont en partie avancés; jʹéprouve<br />

un peu dʹamélioration dans lʹétat <strong>de</strong> ma poitrine, mais je reste si épuisé, si impressionnable<br />

424


et jʹai encore tant <strong>de</strong> misère que je ne sais jusquʹici ce quʹon peut augurer pour lʹavenir; ac‐<br />

cor<strong>de</strong>z‐moi encore, cher bon ami, vos prières persévérantes, afin que je correspon<strong>de</strong> fidè‐<br />

lement au <strong>de</strong>ssein du Souverain Seigneur.<br />

Je suis <strong>avec</strong> une tendre affection, en J. M. J.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Mon f. Paillé vous offre à tous ses plus respectueux souvenirs.<br />

342 à M. Decaux<br />

MLP. prie pour son ami. Sa santé reste faible. Remerciements à la Société <strong>de</strong> St‐Vt‐<strong>de</strong>‐Paul.<br />

Vernet‐les‐Bains, 9 janvier 1856<br />

Très cher ami et frère en N.S.,<br />

Jʹai reçu votre bon petit mot du 31 décembre; il mʹest bien doux dʹavoir eu quelque<br />

souvenir <strong>de</strong> vous, <strong>de</strong>vant Dieu surtout, dans ces <strong>de</strong>rniers instants <strong>de</strong> lʹannée où tant <strong>de</strong><br />

préoccupations et <strong>de</strong> soins remplissent et encombrent lʹesprit. Plus libre ici et nʹayant nul<br />

<strong>de</strong>voir <strong>de</strong> société à satisfaire, je nʹai fait quʹune seule visite cʹétait celle <strong>de</strong> N.S. au T. St ‐<br />

Sacrement, visite que je rendais du reste, puisque lʹindigne serviteur avait été le matin<br />

même prévenu par le Souverain Maître, qui lʹétait venu trouver comme pour lui apporter<br />

les bénédictions dʹune nouvelle année. Je lui ai beaucoup parlé <strong>de</strong> tout ce qui mʹest cher,<br />

<strong>de</strong> vous en particulier, mon bien bon ami, quʹIl nʹa pas mis sans <strong>de</strong>ssein sur ma route en ce<br />

mon<strong>de</strong>; je lʹai prié <strong>de</strong> vous rendre tout le bien que vous faites à moi et aux miens, aux nô‐<br />

tres pour mieux dire, car ils sont vôtres autant que miens.<br />

Je ne sais si je verrai la fin <strong>de</strong> lʹannée dont jʹentreprends le commencement; quelques<br />

probabilités le peuvent faire penser néanmoins, le mé<strong>de</strong>cin trouve lʹétat <strong>de</strong> ma poitrine<br />

sensiblement amélioré, bien que le poumon droit reste encore embarrassé. Je <strong>de</strong>meure<br />

dʹailleurs dʹune faiblesse extrême; un entretien <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux minutes est trop long pour moi,<br />

une marche dʹun quart dʹheure au‐<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> mes forces; mais on mʹassure quʹau prin‐<br />

temps jʹaurai un mieux décisif.<br />

Merci mille fois pour la messe à N.D. <strong>de</strong>s Victoires, jʹen ai ressenti un bien que jʹai<br />

été heureux <strong>de</strong> constater et <strong>de</strong> rapporter aux charitables prières <strong>de</strong> notre chère Société; of‐<br />

frez mes vifs remerciements à M. le Prési<strong>de</strong>nt et aux membres du Conseil; ils ont vraiment<br />

exercé la charité la plus aimable et la plus fraternelle à mon égard.<br />

Je laisse, en finissant, une fois encore mes ff. <strong>de</strong> Vaugirard sous votre affectueuse<br />

protection.<br />

Votre ami et frère tout dévoué en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

343 à M. Vince<br />

Encouragement à la patience dans la maladie. Dévotion à saint Joseph.<br />

Vernet, 14 janvier 1856<br />

A la bonne heure, cher enfant, vous savez encore un peu écrire et, malgré les fai‐<br />

blesses <strong>de</strong> votre pauvre santé, vous mʹavez griffonné une petite épître qui mʹa fait grand<br />

425


plaisir. Continuez ainsi, en se secouant on chasse un peu la maladie, et le cœur se trouve<br />

toujours consolé dʹavoir dit quelques mots à <strong>de</strong> vrais et sincères amis.<br />

Ne vous étonnez point <strong>de</strong> vos débilités extrêmes, nous sommes au plus bas point <strong>de</strong><br />

la saison et vous <strong>de</strong>vez nécessairement vous en ressentir; jʹen suis là aussi, ma poitrine est<br />

un peu moins toussante et crachante, mais je reste dʹune faiblesse à faire pitié. A mesure<br />

que le soleil va remonter, nous remonterons <strong>avec</strong> lui, notre p. Beaussier, vous et moi; tous<br />

les trois, nous re<strong>de</strong>viendrons robustes ensemble et, en nous unissant bien, nous ferons<br />

peut‐être une force assez imposante. Tâchons jusque là <strong>de</strong> supporter nos infirmités <strong>avec</strong><br />

patience et en union <strong>avec</strong> les douleurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre image <strong>de</strong> saint Joseph est charmante, mais nous nʹavons ici aucune porte ou‐<br />

verte pour le commerce; je suis seul dans la maison <strong>avec</strong> mon f. Paillé et les pauvres villa‐<br />

geois du Vernet nʹont, pour la plupart, pas même <strong>de</strong> quoi acheter du pain; nous ne<br />

connaissons que ceux auxquels nous faisons quelques aumônes; je suis sûr toutefois que<br />

notre Père saint Joseph vous sait gré <strong>de</strong> votre bon désir. Adieu, cher ami, je vous embrasse<br />

tendrement. Ecrivez‐nous encore.<br />

Votre Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Nous avons à <strong>de</strong>ux lieues dʹici un pèlerinage très renommé; notre bonne Mère, la T.<br />

S te Vierge, est invoquée sous le nom <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Vie, on y obtient beaucoup <strong>de</strong> grâces, nous<br />

allons y faire dire une messe pour vous.<br />

344 à M. Maignen<br />

Les affaires préoccupantes dont lʹentretient M. Maignen ne lui permettent pas <strong>de</strong> lui écrire comme MLP. le vou‐<br />

drait. Démarches à effectuer pour la vie <strong>de</strong> lʹŒuvre.<br />

Vernet‐les‐Bains, 21 janvier 1856<br />

Très cher enfant en N.S.,<br />

Je regrette bien que mes lettres vous aient en quelque façon contristé, au lieu <strong>de</strong><br />

vous consoler et <strong>de</strong> vous encourager comme il était dans mon cœur <strong>de</strong> le faire. Je suis<br />

convaincu quʹen les relisant et en réfléchissant un peu aux circonstances dans lesquelles el‐<br />

les ont été écrites, vous changerez pleinement <strong>de</strong> sentiment. Vous mʹécriviez dʹordinaire<br />

en hâte pour <strong>de</strong>s affaires pressées, <strong>avec</strong> prière <strong>de</strong> répondre courrier par courrier. Ces affai‐<br />

res lour<strong>de</strong>s, préoccupantes, se jetaient tout dʹabord dans mon esprit quand jʹavais à vous<br />

répondre, et ce nʹétait guère que vers la fin, quʹun peu déchargé du far<strong>de</strong>au quʹelles fai‐<br />

saient peser sur moi, je trouvais quelques paroles tendres et quelque peu dʹeffusion. Mais<br />

ces paroles, si vous les aviez un peu pesées, en disaient assez pour satisfaire votre affec‐<br />

tion; il en est quelques‐unes qui ont été écrites les larmes dans les yeux; soyez tranquille,<br />

cher enfant, je vous aime tendrement; le sérieux <strong>de</strong> notre vie, les difficultés <strong>de</strong> notre situa‐<br />

tion peuvent souvent donner un peu dʹaustérité à mes rapports <strong>avec</strong> vous, mais le cœur<br />

nʹy perd rien; presque toutes mes sollicitu<strong>de</strong>s ici, mes prières les plus habituelles, mes dé‐<br />

marches au <strong>de</strong>hors nʹont été que pour vous. Il y a quelques jours à peine, à lʹheure peut‐<br />

être où vous mʹécriviez les lignes un peu trop inquiètes <strong>de</strong> votre lettre, jʹavouais à notre f.<br />

Paillé, dans un entretien intime, que, si malgré les obligations <strong>de</strong> la vie commune, il me<br />

restait quelque sentiment <strong>de</strong> préférence pour lʹun <strong>de</strong> mes enfants, il était pour vous. Je suis<br />

426


sûr, cher enfant, que vous regrettez un peu cette explication et que vous la trouvez trop<br />

longue, mais, si elle vous met en repos pour le présent et pour lʹavenir, je ne regretterai pas<br />

<strong>de</strong> vous lʹavoir donnée.<br />

Je vous envoie les lettres que vous mʹavez <strong>de</strong>mandées; il faudra les mettre sous en‐<br />

veloppe; celle dont le papier a un petit chien est pour M me <strong>de</strong> la Bourdonnaie.<br />

Je ne puis répondre à tous les points <strong>de</strong> votre lettre aujourdʹhui, je le ferai <strong>de</strong>main;<br />

mais encore une fois, cher enfant, quand je vous écris pour mes affaires, ne vous étonnez<br />

point que je sois concis, bref même, <strong>de</strong> si longues correspondances sont souvent difficiles,<br />

quelquefois impossibles pour moi; je suis loin dʹêtre fort, vous avez vu en quel état <strong>de</strong> lan‐<br />

gueur jʹétais autrefois à S t <strong>Jean</strong>‐<strong>de</strong>‐Dieu, où vous me visitiez si fidèlement; je suis plus fai‐<br />

ble encore aujourdʹhui, car je suis plus vieux et ma poitrine, qui alors était intacte, est<br />

maintenant un vieil instrument usé et sans doute irréparable. Mais je ne veux pas différer<br />

<strong>de</strong> vous dire que vous allez contre ma volonté en veillant aussi tardivement que vous<br />

lʹavez fait pour mʹécrire; je crois que Dieu ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pas cela, il fera ce qui ne sera pas<br />

fait et qui sera hors <strong>de</strong> la limite <strong>de</strong> nos moyens et <strong>de</strong> nos forces.<br />

Je reconnais pourtant que, pour votre gran<strong>de</strong> loterie <strong>avec</strong> M me <strong>de</strong> Vatry, il faut <strong>de</strong> la<br />

promptitu<strong>de</strong>, une affaire <strong>de</strong> telle proportion ne sʹachève pas sans plusieurs mois et lʹhiver<br />

sʹavance; mais néanmoins nʹabusez pas <strong>de</strong> vos forces; Dieu fera, je le répète, ce que nous<br />

nʹaurons pu faire. Je crois quʹil sera sage dʹêtre bien discret sur cette affaire, jusquʹà ce<br />

quʹelle soit autorisée et bien posée; je vous fais, cher enfant, cette recommandation sans<br />

avoir le temps <strong>de</strong> vous expliquer les raisons; cela ne vous empêchera pas, jʹen suis sûr, dʹen<br />

tenir compte.<br />

M. lʹabbé Taillandier mʹavait écrit que le Comité <strong>de</strong>s Œuvres allait accor<strong>de</strong>r un se‐<br />

cours pour Nazareth; vous ne mʹen parlez plus; dites‐en quelques mots à M. <strong>de</strong> Lambel,<br />

etc. et poussez la chose, sʹil y a lieu.<br />

Il me semble que M. Decaux, mieux que personne, pourrait inviter M. Baudon à<br />

faire quelque don pour Nazareth; est‐ce que le projet dʹinhumation <strong>de</strong> son père ne vous a<br />

pas fourni quelque occasion? Je crois que le projet <strong>de</strong>s conseillères à 20f est bon, mais il ne<br />

laissera pas que dʹexiger bien <strong>de</strong>s démarches à cause du nombre quʹil faudrait réunir, mais<br />

ces adhésions une fois acquises feraient un entourage à lʹœuvre.<br />

Il est dʹautant plus à désirer (pour la maison <strong>de</strong> Vaugirard, je mêle un peu trop tou‐<br />

tes ces affaires) que lʹaffaire <strong>de</strong> la loterie se déci<strong>de</strong>; quʹil est urgent, si elle nʹa pas lieu, <strong>de</strong><br />

pousser le sermon. Je crois que M me <strong>de</strong> Gontaut sera bien disposée pour une chose ou pour<br />

une autre; elle nous a toujours bien appuyés jusquʹici; il ne faudrait pas perdre cette année<br />

son concours.<br />

Adieu, cher enfant, le reste à <strong>de</strong>main, si je le puis. Je vous embrasse tendrement en J.<br />

et M.<br />

Votre vieil ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Embrassez tous nos frères, ne fatiguez pas trop mon bon abbé Hello.<br />

427


345 à M. Maignen<br />

M. Maignen organise Nazareth. Difficultés auxquelles il se heurte. Solutions proposées par MLP. Lʹusage <strong>de</strong>s<br />

moyens surnaturels dans les œuvres. La régularité est indispensable pour sauvegar<strong>de</strong>r les trois grands points que<br />

sont lʹesprit <strong>de</strong> piété, lʹesprit <strong>de</strong> famille et lʹesprit <strong>de</strong> zèle.<br />

Vernet‐les‐Bains, 22 janvier 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹajoute quelques lignes à celles que je vous ai écrites hier, afin <strong>de</strong> répondre à tous<br />

les points <strong>de</strong> votre lettre du 15 <strong>de</strong> ce mois; jʹai mal dormi ces jours‐ci, je nʹai pas du tout<br />

dʹesprit, vous vous en apercevrez bien; jʹétais déjà un peu ainsi hier, et avant‐hier en pire<br />

disposition encore, puisquʹayant voulu vous écrire, je fus obligé dʹy renoncer. Prenez‐moi<br />

ainsi aujourdʹhui, je tâcherai dʹêtre mieux une autre fois. Je vous adresse cette lettre rue du<br />

Regard, sachant que la poste fonctionne plus vite pour Paris que pour Vaugirard; dites‐<br />

moi si cʹest rue du Regard ou rue Stanislas quʹil vaut mieux, à lʹoccasion, vous adresser les<br />

lettres.<br />

Vous ne mʹavez plus reparlé <strong>de</strong>s comptes <strong>de</strong> Nazareth; où en est‐on et comment les<br />

règle‐t‐on? M. Leblanc a‐t‐il composé sa Commission <strong>de</strong> vérification?<br />

Jʹapprouve bien votre pensée <strong>de</strong> faire <strong>de</strong> Nazareth une maison commune pour les<br />

Saintes‐Familles; je crains toutefois que celles du quartier puissent seules y loger <strong>de</strong>s pau‐<br />

vres; celles qui sont éloignées ne pourraient guère le faire <strong>avec</strong> avantage, car leurs pauvres<br />

gens, éloignés <strong>de</strong> leur quartier, perdraient toutes leurs ressources ordinaires et ne sau‐<br />

raient plus comment subsister. Voyez pourtant comment la chose serait prise; on pourrait,<br />

en tout cas, se réduire aux Saintes‐Familles <strong>de</strong> la rive gauche et ce serait suffisant; en met‐<br />

tant chaque étage à 1.000f, ce serait leur faire un grand marché, car ce serait nʹestimer les<br />

chambres quʹà 100f, ce qui est bien peu, mais on sʹaccomo<strong>de</strong>rait ainsi. Je pense quʹà raison<br />

<strong>de</strong> notre pauvreté, nous allons laisser ces chambres absolument nues; il en résultera quʹen<br />

y entrant, les pauvres gens nʹy trouvant ni tablettes, ni armoires, y feront toutes sortes <strong>de</strong><br />

dispositions mauvaises ou choquantes pour les yeux; ne pourrait‐on adopter quelque pe‐<br />

tite disposition dʹappropriation pour chaque chambre et imposer à chaque Conférence la<br />

charge <strong>de</strong> cette petite dépense; ce serait peu pour chacune, et ce serait beaucoup, en masse,<br />

pour lʹœuvre? Il faudra veiller aussi à ce que les pauvres gens reprennent tous leurs lits en<br />

fer et à ce que les nouveaux en aient aussi; quand le moment va venir dʹoccuper la maison,<br />

il faudrait quʹune Commission administrative fût nommée pour régler ces questions et les<br />

autres; parlez‐en à MM. Guillemin, Boutron, Leblanc.<br />

Je ne vois pas bien comment on pourrait <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r le r.p. Lavigne pour le sermon<br />

<strong>de</strong> Nazareth, à moins que M. le Curé <strong>de</strong> S t ‐Roch, où il prêche, dites‐vous, ne consentît à<br />

vous donner son église. Ce serait un prétexte; autrement, nous risquerions <strong>de</strong> blesser le<br />

r.p. Lefebvre qui a été dʹune bonté constante pour nous et auquel nous <strong>de</strong>vons beaucoup<br />

<strong>de</strong> reconnaissance. Si vous voyez quelque moyen <strong>de</strong> tourner la difficulté, dites‐le moi, je<br />

ferai ce que vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rez.<br />

Je ne verrais pas, pour ma part, dʹinconvénient à la direction pieuse quʹon imprime<br />

à votre patronage et à vos jeunes ouvriers, si cʹest une marche régulière, constante et qui<br />

ne soit pas seulement <strong>de</strong> circonstance, mais il me semblerait essentiel que la piété fût sou‐<br />

tenue par une instruction soli<strong>de</strong> et quʹon cherchât les moyens <strong>de</strong> la rendre attrayante pour<br />

les apprentis et jeunes ouvriers; ce point nʹest pas sans difficultés. Je crois, en tout cas, quʹil<br />

faut nous souvenir toujours que nous ne sommes en ces œuvres que les représentants <strong>de</strong> la<br />

428


Société <strong>de</strong> S t ‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul; il me paraîtrait donc bien désirable que vous puissiez,<br />

quand vous aurez un moment, voir M. Baudon et, sans lui présenter la question <strong>de</strong> telle<br />

sorte quʹil pût sʹen effrayer, lui rendre compte <strong>de</strong> lʹétat <strong>de</strong>s choses et le consulter; il est as‐<br />

sez pieux pour ne rien contrarier <strong>de</strong> ce qui est réellement bon, et il est trop judicieux pour<br />

ne pas vous tracer sûrement la ligne dans laquelle vous <strong>de</strong>vez marcher. Il me semblerait<br />

aussi bien à désirer que M. Berthuot ne vous abandonnât pas, faites ce que vous pourrez<br />

pour le rattacher; sa retraite vient peut‐être <strong>de</strong> ce quʹil ne se voit pas <strong>de</strong> place suffisante, tâ‐<br />

chez <strong>de</strong> lui en faire une; cʹest un bien bon jeune homme qui se faisait là autant <strong>de</strong> bien à<br />

lui‐même quʹaux enfants;nous <strong>de</strong>vons, dans nos œuvres, tendre toujours à édifier nos<br />

Confrères aussi bien que les pauvres et les ouvriers.<br />

Je pense <strong>avec</strong> vous et <strong>avec</strong> notre cher abbé Hello que le moment approche où il fau‐<br />

dra sʹinstaller à Nazareth, mais il nʹy a pas urgence absolue, tant que la maison nʹest pas<br />

habitée. Cʹest dʹailleurs une affaire si grave quʹil me paraîtrait essentiel <strong>de</strong> la recomman<strong>de</strong>r<br />

avant tout au bon Dieu. Je serais dʹavis que nous fissions une neuvaine à la Sainte‐Famille,<br />

à partir <strong>de</strong> lundi prochain, pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r au Seigneur lumière sur le temps et les moyens<br />

<strong>de</strong> cette occupation. Il faudra aussi, quand on en aura le loisir, préparer <strong>avec</strong> M. Myionnet<br />

un petit projet <strong>de</strong> règlement particulier pour cette maison, et examiner aussi en Conseil qui<br />

pourra y être envoyé, quels moyens on aura dʹy avoir un peu <strong>de</strong> recueillement et <strong>de</strong> vie<br />

commune, comment on pourra quelquefois revenir à Vaugirard et <strong>de</strong>meurer uni à la Mai‐<br />

son‐Mère. Nous avons trois grands points à sauvegar<strong>de</strong>r: lʹesprit <strong>de</strong> piété ou <strong>de</strong> vie inté‐<br />

rieure, lʹesprit <strong>de</strong> famille ou <strong>de</strong> communauté, lʹesprit <strong>de</strong> zèle et <strong>de</strong> dévouement; il faut les<br />

concilier et les maintenir par la régularité; tout cela ensemble présentera à Nazareth bien<br />

<strong>de</strong>s difficultés; cʹest pourquoi il faut commencer par prier, ensuite examiner les choses <strong>de</strong>‐<br />

vant Dieu, et enfin concerter ensemble ce qui semblera <strong>de</strong> mieux à faire. Si lʹon pouvait ne<br />

fixer lʹépoque <strong>de</strong> lʹinstallation que dans les commencements, ou première quinzaine<br />

dʹavril, ce moment serait, sans doute, bien rapproché <strong>de</strong> notre retour, et ce serait un avan‐<br />

tage pour la Communauté qui se trouvera bien amoindrie; quand même, ce qui est proba‐<br />

ble, je ne serais pas encore utile à grand chose, ce serait toujours un <strong>de</strong> plus, le f. Paillé<br />

dʹailleurs serait là comme élément <strong>de</strong> la vieille Communauté. Je ne vois pas bien ce que no‐<br />

tre bon abbé Hello pourrait faire pendant le Carême, sinon dire ou faire dire la messe tous<br />

les jours pendant la <strong>de</strong>rnière quinzaine et peut‐être la prière du soir <strong>avec</strong> quelques mots<br />

dʹexhortation; mais je crois quʹil ne <strong>de</strong>vrait prendre pour lui quʹune petite part <strong>de</strong> tout cela;<br />

Pâques le fatiguera, le Carême aussi; sʹil ne se ménage pas, il ne sera pas dans la pru<strong>de</strong>nce<br />

chrétienne et dans les vues <strong>de</strong> Dieu. Votre vraie prise <strong>de</strong> possession me paraîtrait être le<br />

mois <strong>de</strong> Marie fait simplement, mais pieusement, <strong>de</strong> manière à toucher et gagner beau‐<br />

coup dʹâmes; jʹespère que Dieu vous ménage cette consolation.<br />

Adieu, bien cher enfant, voilà que je nʹai plus <strong>de</strong> place pour faire un peu <strong>de</strong> causerie<br />

intime <strong>avec</strong> vous; mais, dès que vous serez débarrassé du plus gros <strong>de</strong> vos affaires, je vous<br />

promets quelques petites lettres plus tendres et moins sérieuses.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹécrirai bientôt à notre cher abbé Hello, mais je vous prie <strong>de</strong> lui communiquer ce<br />

que je vous écris sur lʹinstallation à Nazareth, principal sujet <strong>de</strong> sa <strong>de</strong>rnière lettre; embras‐<br />

sez‐le pour moi.<br />

429


346 à M. Vince<br />

Exhortation à espérer en la miséricor<strong>de</strong> divine. Esprit dʹabandon;<br />

Vernet, 27 janvier 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je remercie le divin Seigneur <strong>de</strong>s sentiments quʹIl met dans votre cœur pour vous<br />

consoler au milieu <strong>de</strong> vos épreuves et souffrances; vous avez espéré en Lui, Il vous <strong>de</strong>‐<br />

meure fidèle et vous sentez sa douce bonté qui vous soutient et vous encourage; cʹest là le<br />

privilège <strong>de</strong>s serviteurs <strong>de</strong> Dieu; ils eussent pu, peut‐être, avoir dans le mon<strong>de</strong> quelques<br />

avantages temporels ou commodités plus gran<strong>de</strong>s, mais y eussent‐ils trouvé au même <strong>de</strong>‐<br />

gré les consolations spirituelles et les grâces sans nombre dont le Seigneur paie leurs sacri‐<br />

fices? Vous gémirez, vous autres, a‐t‐il dit, ce bon Maître, et le mon<strong>de</strong> se réjouira, mais vo‐<br />

tre tristesse se changera en joie229 . Vous lʹéprouvez maintenant, très cher enfant, et dans la<br />

prévision que peut‐être Il voudrait vous rappeler à Lui, vous nʹen éprouvez ni inquiétu<strong>de</strong>,<br />

ni chagrin, loin <strong>de</strong> là, vous tournez <strong>avec</strong> confiance vos regards vers Lui, espérant en ses<br />

miséricor<strong>de</strong>s, bien plus immenses que vos misères, et en la douce protection <strong>de</strong> Marie et<br />

<strong>de</strong> Joseph qui ne sauraient vous abandonner. Demeurez dans ces sentiments, très cher en‐<br />

fant, ils sont <strong>de</strong> Dieu assurément, car la confiance et lʹamour sont les dons <strong>de</strong> son divin Es‐<br />

prit. Consolez‐vous aussi dans cette pensée que tous vos frères élèvent constamment leurs<br />

cœurs en haut, afin dʹimplorer pour vous la plénitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s grâces célestes. Ici, mon f. Paillé<br />

et moi, nous unissant à nos ff. <strong>de</strong> Vaugirard et dʹAmiens, nous ne cessons <strong>de</strong> prier pour<br />

vous, <strong>de</strong>mandant, non pas que le Seigneur vous gar<strong>de</strong> à notre affection et laisse votre<br />

concours à nos œuvres, Il sait bien que tel est le vœu tout naturel <strong>de</strong> nos âmes, mais, ce qui<br />

est meilleur pour vous, que sa très sainte et très adorable volonté sʹaccomplisse.<br />

Je sens bien quelque regret, très cher enfant, <strong>de</strong> nʹêtre point près <strong>de</strong> vous pour se‐<br />

con<strong>de</strong>r nos frères dans les soins quʹils ont la consolation <strong>de</strong> vous donner, mais mon cœur<br />

est <strong>avec</strong> vous et mon bon ange, je lʹespère, vous portera quelque chose <strong>de</strong>s tendres affec‐<br />

tions qui sʹen écoulent incessamment pour vous. Je le charge, très cher ami, <strong>de</strong> mes plus<br />

ar<strong>de</strong>ntes bénédictions et <strong>de</strong> mon embrassement paternel. Puisse‐t‐il être pour vous lʹan‐<br />

nonce <strong>de</strong> la guérison, sʹil plaît au divin Jésus <strong>de</strong> vous laisser parmi nous, et le baiser <strong>de</strong><br />

paix et dʹespérance sʹIl voulait vous attirer à Lui.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

347 à M. Maignen<br />

MLP. se désole <strong>de</strong> ne pouvoir ai<strong>de</strong>r son jeune frère. Avis sur lʹŒuvre <strong>de</strong> Nazareth. Rôle <strong>de</strong> M. Maignen auprès<br />

<strong>de</strong>s Confrères. Recommandations <strong>de</strong> bien ordonner ses activités.<br />

Vernet‐les‐Bains, 5 février 1856<br />

Très cher enfant et ami en N.S.,<br />

Jʹattendais pour vous répondre la secon<strong>de</strong> partie <strong>de</strong> votre lettre (sans date) que vous<br />

mʹannonciez pour le len<strong>de</strong>main; mais, puisquʹelle nʹarrive pas, je vais mʹoccuper <strong>de</strong>s quel‐<br />

ques points dont vous mʹentretenez dans ce premier envoi. Jʹen ai reçu une impression un<br />

peu pénible; il mʹa semblé que cette lettre portait la trace <strong>de</strong> la précipitation et lʹindice <strong>de</strong> la<br />

229 Jn 16, 20.<br />

430


fatigue que vous donnent les occupations trop multipliées que vous êtes obligé dʹembras‐<br />

ser à la fois. Jʹai gémi <strong>de</strong>vant Dieu <strong>de</strong> vous voir chargé dʹun far<strong>de</strong>au si lourd pour vos jeu‐<br />

nes épaules, et jʹai regretté bien vivement <strong>de</strong> ne pouvoir vous assister plus efficacement;<br />

mais le Seigneur sait en quelle impuissance je suis; jʹespère quʹIl voit aussi vos besoins et<br />

quʹIl ne vous refusera point son appui. Quant à croire que vous cessiez volontairement,<br />

comme vous le dites, cher enfant, <strong>de</strong> mériter cette indispensable assistance, en nʹusant pas<br />

bien <strong>de</strong>s si courts instants <strong>de</strong> la saison <strong>de</strong> charité, en dissipant votre attention et vos forces<br />

en conversations vaines, je ne puis le croire; ce serait manquer à votre position, compro‐<br />

mettre nos œuvres et notre chère Communauté; je suis assuré que la gravité <strong>de</strong> cette pen‐<br />

sée vous soutient et que la crainte surtout <strong>de</strong> mal servir le divin Seigneur vous est un<br />

continuel stimulant; vous craindriez aussi, bien cher ami, <strong>de</strong> mʹaffliger trop profondément<br />

et dʹattrister pour moi la pensée du retour. Je nʹinsiste donc pas, cher enfant, sur cette par‐<br />

tie <strong>de</strong> votre lettre, il me serait trop pénible <strong>de</strong> penser quʹelle contient autre chose que le<br />

scrupule dʹune âme dévouée qui craint toujours <strong>de</strong> nʹen pas faire assez.<br />

La vue <strong>de</strong>s accroissements toujours grandissants <strong>de</strong>s dépenses <strong>de</strong> Nazareth mʹa<br />

aussi un peu serré le cœur, mais comme vous, je me suis relevé par lʹespérance <strong>de</strong>s bontés<br />

du Seigneur; Il grandit nos charges, afin que notre confiance en Lui grandisse <strong>avec</strong> elles et<br />

lui donne un mérite aussi plus étendu; ayons soin seulement, cher enfant, <strong>de</strong> correspondre<br />

par tous nos efforts aux <strong>de</strong>sseins du divin Maître; Il fera sa part, mais à la condition que<br />

nous ferons la nôtre, dans la foi, dans la prière, dans la coopération fidèle <strong>de</strong> notre vigi‐<br />

lance et <strong>de</strong> notre dévouement.<br />

Il me semble, quant à la commission <strong>de</strong> révision <strong>de</strong>s comptes proposée par M. Le‐<br />

blanc, quʹil faudrait tâcher dʹempêcher un règlement désavantageux pour nous, sans pour‐<br />

tant briser ouvertement <strong>avec</strong> lʹarchitecte. M. Leblanc ne pourrait‐il lire à M. Cabaret ma let‐<br />

tre et voir ce quʹil pense <strong>de</strong> ma proposition? Quand même il la rejetterait, ce serait toujours<br />

pour lui une communication et un avertissement. Vous pourriez aussi prier, en mon nom,<br />

M. Lequeux <strong>de</strong> lui faire toutes les recommandations possibles, assurant notre Confrère que<br />

non seulement moi, mais tous ceux qui ont suivi dʹun peu près lʹaffaire, ont trouvé M. Ca‐<br />

baret très mou à soutenir nos intérêts et pas assez soucieux <strong>de</strong> prévenir les accroissements<br />

<strong>de</strong> dépense. Ces mesures suffiraient peut‐être, sans préjudice <strong>de</strong> la contre‐vérification <strong>de</strong>s<br />

règlements faits par M. Cabaret. Nous avons à craindre aussi la non‐acceptation <strong>de</strong>s rè‐<br />

glements par les entrepreneurs et <strong>de</strong>s procès aussi dispendieux que pénibles à suivre.<br />

Voyez <strong>avec</strong> notre bon Confrère M. Leblanc si on ne peut prendre ce moyen terme et faites<br />

<strong>avec</strong> lui pour le mieux.<br />

Il me semble, cher enfant, que vous avez perdu <strong>de</strong> vue le contenu <strong>de</strong> mes <strong>de</strong>rnières<br />

lettres, car je prévenais précisément la proposition que vous me faites <strong>de</strong> désigner une<br />

commission qui sʹoccupât <strong>de</strong> régler tout ce qui concerne la maison <strong>de</strong> vieillards. Elle pour‐<br />

rait veiller aussi aux intérêts <strong>de</strong> la Sainte‐Famille et <strong>de</strong> la Caisse <strong>de</strong>s loyers; il y a déjà pour<br />

cela un noyau tout formé: MM. Guillemin, <strong>de</strong> Monchy, Boutron, Leblanc, <strong>de</strong> Verneuil, De‐<br />

sains, etc. (je ne sais si, pour ce qui regar<strong>de</strong> les vieillards, on pourrait y faire intervenir en<br />

quelque chose MM. <strong>de</strong> Lambel, <strong>de</strong> Kergorlay, etc., ce serait à voir selon que les circonstan‐<br />

ces le permettraient; cela semble peu facile à ajuster). Je crois que vous nʹavez à vous oc‐<br />

cuper particulièrement et officiellement <strong>avec</strong> M. Hello que du patronage pour lequel vous<br />

êtes posé en titre. Quant au reste, il est utile que vous interveniez, mais, autant que possi‐<br />

ble, officieusement, tâchant que nos Confrères prennent fait et cause pour leurs œuvres et<br />

431


sʹoccupent <strong>de</strong> les soutenir. Je ne sais si nous pourrons plus tard leur donner un frère qui<br />

les ai<strong>de</strong>, la chose présentement nʹest pas praticable, mais le fût‐elle, ce frère ne <strong>de</strong>vrait être<br />

que lʹagent et non le conducteur <strong>de</strong> ces œuvres. Provisoirement, M. Boutron sʹoccupe <strong>de</strong> la<br />

Caisse <strong>de</strong>s loyers; <strong>de</strong>puis longtemps déjà, je ne faisais que suivre <strong>de</strong>s yeux sa direction; M.<br />

Leblanc conduit la Sainte‐Famille; quʹil ait la bonté dʹen entretenir souvent M. Guillemin.<br />

Ne pourrait‐il aussi, <strong>de</strong> temps en temps, réunir ceux qui lʹai<strong>de</strong>nt dans cette œuvre pour<br />

conférer <strong>avec</strong> eux <strong>de</strong>s moyens <strong>de</strong> la soutenir et <strong>de</strong> lʹaccroître? Quant aux ressources <strong>de</strong> la<br />

Sainte‐Famille, le fonds principal consiste surtout dans les allocations annuelles <strong>de</strong>s quatre<br />

Conférence: St‐Sulpice, les Carmes, Stanislas et St‐ Germain‐<strong>de</strong>s‐Prés. Elles donnent ordi‐<br />

nairement ce secours à lʹépoque <strong>de</strong> leur sermon. Notre cher Confrère, M. Leblanc, pourrait<br />

suivre ces petits recouvrements en temps utile. Pour tout cela, rappelez, conseillez douce‐<br />

ment, exhortez, mais, autant quʹil se pourra, ne prenez pas plus <strong>de</strong> charges que vous nʹen<br />

pouvez porter; plus nos Confrères prendront part aux œuvres et mieux ce sera; elles sont<br />

faites pour leur sanctification autant et plus que pour le bien quʹelles peuvent produire<br />

dʹailleurs.<br />

Il me semble que, si une Commission sʹorganisait bien pour lʹadministration et<br />

conduite <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong>s vieillards, elle vous ai<strong>de</strong>rait à créer <strong>de</strong>s ressources et, bien ins‐<br />

truite <strong>de</strong> la situation, prendrait sur elle <strong>de</strong> déci<strong>de</strong>r si toutes les chambres doivent ou non<br />

être cédées gratuitement. Il me semble quʹen réservant au moins un étage pour les person‐<br />

nes qui voudraient y loger à leurs frais <strong>de</strong>s pauvres, on ne retirerait rien à lʹœuvre <strong>de</strong> son<br />

caractère charitable et quʹon allégerait un peu la charge <strong>de</strong>s Conférences. Avez‐vous donc<br />

abandonné la pensée <strong>de</strong> cé<strong>de</strong>r quelques chambres à chacune <strong>de</strong>s Saintes‐Familles <strong>de</strong> la<br />

rive gauche, vous ne mʹen parlez plus?<br />

Les ressources <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Nazareth se composaient <strong>de</strong> quelques souscriptions,<br />

<strong>de</strong>s quêtes <strong>de</strong>s séances, <strong>de</strong> la quête à N.D.‐<strong>de</strong>s‐Victoires et dʹune autre quête annuelle ac‐<br />

cordée régulièrement par M. le Curé <strong>de</strong> St‐Sulpice. Le sermon en forme quʹon doit faire à<br />

la Ma<strong>de</strong>leine ne permettrait pas un second sermon à St‐Sulpice, mais il nʹempêcherait nul‐<br />

lement une quête à un dimanche un peu choisi. On quêtait toute la journée, cela donnait<br />

500f. M. Boutron, <strong>avec</strong> la sœur Louise et du consentement <strong>de</strong> M. le Curé, trouvait les quê‐<br />

teuses qui sont presque toutes posées pour ces quêtes à tour <strong>de</strong> rôle. Voyez <strong>avec</strong> M. Bou‐<br />

tron si on ne peut, comme <strong>de</strong> coutume, jouir <strong>de</strong> ce privilège. M. le Curé, à son entrée dans<br />

la paroisse, mʹavait donné une parole formelle, il serait bien regrettable dʹen perdre le<br />

bienfait. De cette sorte, on compléterait, comme nous lʹavons fait jusquʹici tous les ans, les<br />

2.000f que coûtaient les loyers <strong>de</strong> Nazareth.<br />

Il me semble donc, en résumé, que pour bien faire marcher les œuvres qui, indé‐<br />

pendamment du patronage, se rattachent à la maison <strong>de</strong> Nazareth, il faudrait que nos<br />

Confrères formassent <strong>de</strong>ux commissions, lʹune pour lʹadministration et conduite <strong>de</strong> la<br />

maison <strong>de</strong>s vieillards, lʹautre pour la Sainte‐Famille <strong>avec</strong> la Caisse, la Bibliothèque, etc.<br />

Vous et notre bon abbé Hello pourriez, à tour <strong>de</strong> rôle, assister aux réunions <strong>de</strong> ces com‐<br />

missions et les ai<strong>de</strong>r officieusement et charitablement, autant que vous le pourriez; cʹest<br />

ainsi que les choses se présentent à moi.<br />

Je ne regrette pas la longueur <strong>de</strong> ces lettres qui pourtant me fatiguent un peu par‐<br />

fois. Mais il me semble, cher enfant, que vous les lisez en hâte et nʹen tirez peut‐être pas<br />

grand avantage pour vous ai<strong>de</strong>r. Je ne mʹen étonne pas, je comprends combien la multipli‐<br />

cité <strong>de</strong> vos démarches vous laisse peu <strong>de</strong> temps pour combiner vos mouvements; je vous<br />

432


ecomman<strong>de</strong> toutefois <strong>de</strong> faire tout ce que vous pourrez pour bien diriger et ordonner vo‐<br />

tre activité, vous la rendrez plus efficace et moins brisante pour vous.<br />

Vous ne me parlez point du sermon <strong>de</strong> Nazareth, je mʹen inquiète un peu, le temps<br />

nous gagne et cette ressource est bien importante pour nous. M me <strong>de</strong> la Bourdonnaie mʹa<br />

écrit une lettre bien bonne, mais elle ne promet que son aumône personnelle.<br />

Lorsque la loterie <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Vaugirard sera bien assurée, (et le temps nous<br />

gagne aussi par là; 3 mois pour une loterie considérable, cʹest bien peu dʹespace) on pour‐<br />

rait faire tourner pour Nazareth quelques‐unes <strong>de</strong>s quêteuses quʹon espérait pour les or‐<br />

phelins. M me Restou nʹa‐t‐elle rien obtenu <strong>de</strong> M me Demadre et dʹautres côtés? Vous trouve‐<br />

rez, cher enfant, que je suis bien impatient; je sais bien par moi‐même que les choses vont<br />

plus vite par la pensée quʹen action, je nʹentends donc pas vous pousser au‐<strong>de</strong>là <strong>de</strong> vos<br />

forces; je résume seulement <strong>avec</strong> vous la multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> nos obligations, afin quʹensemble<br />

nous conjurions bien ar<strong>de</strong>mment Dieu et la S te Vierge <strong>de</strong> nous assister.<br />

Adieu, bien cher enfant, je suis encore bien faible et bien peu sûr <strong>de</strong> lʹavenir; je<br />

crains <strong>de</strong> vous secon<strong>de</strong>r bien moins que mon cœur ne le voudrait quand je serai <strong>de</strong> retour;<br />

prenez donc dans le cœur du divin Seigneur bien <strong>de</strong>s puissances <strong>de</strong> zèle, <strong>de</strong> fermeté et<br />

dʹar<strong>de</strong>ur sainte, afin <strong>de</strong> suppléer en bon fils à tout ce que votre Père vieux et débile ne<br />

pourra faire. Je vous embrasse bien paternellement, cʹest dire bien tendrement.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Lorsque vos lettres contiennent plus <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux feuilles, mettez <strong>de</strong>ux timbres; jʹai été<br />

obligé <strong>de</strong> payer 40 cent. pour votre <strong>de</strong>rnière lettre; les affranchissements insuffisants sont<br />

considérés comme nuls.<br />

Les souscriptions commencées chez M. <strong>de</strong> Lambel sont bien, mais si cette affaire<br />

nʹest un peu soutenue et suivie par M. <strong>de</strong> Lambel ou quelque autre qui prenne la chose à<br />

cœur, elle produira peu dʹeffet.<br />

Profitez <strong>de</strong> toutes les occasions pour me donner <strong>de</strong>s nouvelles du f. Vince; on ne<br />

mʹen donne pas assez souvent.<br />

348 à M. Caille<br />

Dans toute communauté, nécessité <strong>de</strong> la régularité dʹune vraie vie <strong>de</strong> famille. Espoirs que MLP. met dans la mai‐<br />

son dʹAmiens. M. Halluin ne se manifeste pas. La santé <strong>de</strong> MLP. reste faible. La charité fraternelle doit régner<br />

entre ceux qui se sont donnés aux œuvres <strong>de</strong> charité.<br />

Vernet‐les‐Bains, 5 février 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Cʹest <strong>avec</strong> juste raison que vous me supposez bien souvent occupé <strong>de</strong> notre chère<br />

maison dʹAmiens; mes pensées et mes prières reviennent bien fidèlement vers elle et rien<br />

ne mʹéchappe <strong>de</strong> ce qui peut lʹintéresser. Jʹai donc pris une part bien sincère aux souvenirs<br />

que ramenait tout naturellement lʹanniversaire <strong>de</strong> la bénédiction <strong>de</strong> votre petite chapelle,<br />

et jʹai béni <strong>avec</strong> vous le divin Seigneur qui a daigné y prendre définitivement sa <strong>de</strong>meure.<br />

Je Lʹai remercié aussi <strong>de</strong> la bénédiction si visible quʹIl a donnée à vos œuvres et particuliè‐<br />

rement à la petite communauté qui, peu à peu, se fon<strong>de</strong>, se constitue et sʹasseoit dans une<br />

vie régulière; ces premières grâces seront suivies <strong>de</strong> beaucoup dʹautres, nous pouvons<br />

433


lʹespérer, et notre maison dʹAmiens <strong>de</strong>viendra le modèle <strong>de</strong>s colonies que notre chère fa‐<br />

mille semble appelée à répandre dans les provinces. Je nʹoublierai point, pour ma part, que<br />

la maison dʹAmiens est lʹenfant premier‐né <strong>de</strong> la Maison‐Mère et ce sera pour moi une rai‐<br />

son <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> lui porter le plus tendre et le plus paternel intérêt.<br />

Notre cher frère, M. Allard, nʹa point trompé nos espérances, le voilà maintenant<br />

tout à fait <strong>de</strong>s nôtres, et le bon Maître nʹa voulu différer un peu notre réunion que pour<br />

nous la faire désirer plus vivement. Assurez‐le <strong>de</strong> nouveau que je le regardais déjà comme<br />

un <strong>de</strong> mes enfants et que son entrée parmi nous est un sujet <strong>de</strong> véritable joie pour moi. Les<br />

quelques instants que jʹai passés <strong>avec</strong> lui mʹont suffi pour pénétrer dans son cœur et mʹas‐<br />

surer que Dieu y avait mis la grâce dʹune sincère vocation; jʹai la conviction que cʹest le<br />

Seigneur lui‐même qui lʹenvoie dans notre petite famille et quʹil est appelé à y faire beau‐<br />

coup <strong>de</strong> bien.<br />

Combien je me réjouis, bien cher ami, <strong>de</strong>s assurances que vous me donnez sur la ré‐<br />

gularité <strong>de</strong> vos exercices, sur les soins que vous prenez pour constituer parmi vous un in‐<br />

térieur et une vie <strong>de</strong> famille. On vous reprochait un peu à Vaugirard <strong>de</strong> ne pas sentir assez<br />

la nécessité <strong>de</strong> cette vie <strong>de</strong> communauté et dʹêtre trop exclusivement préoccupé <strong>de</strong>s œu‐<br />

vres; mais jʹétais votre défenseur, jʹassurais que vous cédiez à la nécessité, mais quʹau fond<br />

vous compreniez comme nous lʹexcellence et les mérites <strong>de</strong> la vie religieuse et que vous ne<br />

manqueriez pas dʹy amener peu à peu votre maison. Voilà que vous réalisez mes prévi‐<br />

sions; nos ff. dʹAmiens vont avoir, comme ceux <strong>de</strong> Vaugirard, ces exercices pieux qui font<br />

pénétrer plus intimement dans les choses <strong>de</strong> Dieu et donnent aux âmes lʹaliment dont elles<br />

ont besoin; ils auront aussi cette intimité <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> famille qui est si douce en religion et<br />

qui paie les serviteurs <strong>de</strong> Dieu <strong>de</strong> tous les sacrifices quʹils lui ont faits; cʹest le centuple que<br />

le divin Maître leur a promis, même en ce mon<strong>de</strong>; toute communauté bien réglée doit lʹas‐<br />

surer à ses membres, autrement, la parole <strong>de</strong> Jésus‐Christ nʹaurait pas son accomplisse‐<br />

ment.<br />

Si notre f. Mainville ne vous est guère utile à Amiens, vous pourriez le rendre à<br />

Vaugirard où il aurait plus facilement <strong>de</strong> lʹemploi; sa constitution robuste exige une<br />

gran<strong>de</strong> activité et une vie laborieuse, je crois quʹil serait autrement hors <strong>de</strong> sa voie et quʹil y<br />

aurait souffrance pour lui à tous égards. Je vous laisse juge <strong>de</strong> ce qui peut‐être plus conve‐<br />

nable sous ce rapport.<br />

Notre f. Vince ne va point mieux, le mé<strong>de</strong>cin ne donne aucune espérance, il nʹy a<br />

donc rien à attendre que du côté <strong>de</strong> Dieu; continuons à prier pour que ce cher frère entre<br />

pleinement dans les <strong>de</strong>sseins du Seigneur à son égard; il est jusquʹici admirablement dis‐<br />

posé.<br />

M. Myionnet me parlait dans sa <strong>de</strong>rnière lettre <strong>de</strong> M. Halluin et me <strong>de</strong>mandait sʹil y<br />

avait quelque chose à faire à son sujet. M. Halluin ne mʹa point écrit, je ne sais où nous en<br />

sommes à son égard; si vous pensiez quʹen attendant mon retour, qui sera pour la fin<br />

dʹavril, M. Myionnet dût aller à Arras <strong>avec</strong> vous, vous pourriez vous entendre <strong>avec</strong> M.<br />

Myionnet; autrement, aussitôt après mon arrivée, je pourrais, en vous rendant visite, vous<br />

accompagner à Arras; mais jusque là, il serait bon en tout cas que M. Halluin nous donnât<br />

signe <strong>de</strong> vie; vos œuvres vous donneront peut‐être lʹoccasion <strong>de</strong> lui écrire.<br />

Je reviendrai en meilleur état quʹà mon départ, mais néanmoins pas guéri pleine‐<br />

ment; si ma poitrine doit se remettre complètement, ce ne sera quʹ<strong>avec</strong> longueur <strong>de</strong> temps;<br />

elle reste faible, brisée, douloureuse; je ne puis parler sans une extrême fatigue, le mé<strong>de</strong>cin<br />

434


<strong>de</strong>s bains doute que jʹaie assez <strong>de</strong> force pour passer lʹhiver prochain à Paris; nous irons au<br />

jour le jour; si jʹai vigueur suffisante pour lʹété, nous marcherons durant cette saison et,<br />

quand viendra lʹhiver, nous ferons ce que le Seigneur nous ordonnera.<br />

Adieu, bien cher ami, embrassez tous mes enfants dʹAmiens pour moi; quand vous<br />

mʹécrivez, quʹà tour <strong>de</strong> rôle un dʹeux mʹécrive quelques lignes, il faut que nous soyons bien<br />

unis et que nous nous aimions beaucoup, cʹest la volonté du divin Seigneur qui est Lui‐<br />

même toute charité et qui, nous ayant fondés pour les œuvres <strong>de</strong> charité, veut que tous<br />

nos cœurs soient remplis dʹun immense et ar<strong>de</strong>nt amour.<br />

Je suis, en Lui et en sa T. S te Mère, la S te Vierge Marie,<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Offrez mes bien respectueux souvenirs à MM. les abbés Mangot et Cacheleux.<br />

Je pense que M. Cacheleux est toujours bon pour vous; il y a longtemps que vous ne<br />

mʹavez parlé <strong>de</strong> lui.<br />

349 à M. Vasseur<br />

Ne pas se troubler du manque <strong>de</strong> ferveur sensible. Dévotion mariale: ʺun enfant passe toujours <strong>avec</strong> sa mère sans<br />

difficultéʺ. Se laisser conduire par les Supérieurs. Esprit dʹenfance.<br />

Vernet, 9 février 1856<br />

Cher enfant en N.S.,<br />

Je vois <strong>avec</strong> plaisir que vous et nos bons frères ne mʹavez pas encore oublié; je<br />

nʹétais dit: on mʹécrira pendant les premiers mois, mais peu à peu on sʹaccoutumera à mon<br />

absence, les choses se poseront et sʹarrangeront sans moi, si bien quʹà mon retour je trou‐<br />

verai la place prise et, comme M. <strong>de</strong> la Salle, je serai mis <strong>de</strong>hors230 . Mais il paraît jusquʹà<br />

présent quʹil nʹen est pas ainsi; cependant, comme il ne faut pas vous mettre à trop longue<br />

épreuve, je tâcherai que mon absence ne se prolonge plus beaucoup. Seulement je ne serai<br />

pas encore bien soli<strong>de</strong> quand je reviendrai, et, si vous ne voulez pas me mettre en pièces, il<br />

faudra me prendre <strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> précaution. Je prie toujours beaucoup pour vous, cher<br />

enfant, et jʹai la confiance que la T. Ste Vierge veillera toujours sur vous; quoique vous<br />

puissiez avoir un peu moins <strong>de</strong> ferveur sensible, <strong>de</strong>meurez‐lui fidèle, elle ne cessera point<br />

dʹêtre votre Mère, et vous, mon cher Alphonse, vous ne cesserez point <strong>de</strong> <strong>de</strong>meurer son<br />

bon et sage enfant. Soyez ainsi toute votre vie et, au <strong>de</strong>rnier jour, présentez‐vous à elle en<br />

cette disposition, elle vous prendra par la main et vous entrerez <strong>avec</strong> elle; un enfant passe<br />

toujours <strong>avec</strong> sa mère sans nulle difficulté.<br />

Votre sort, très cher enfant, est entre vos mains; vous avez certainement tout ce quʹil<br />

faut pour <strong>de</strong>venir un bon religieux, veillez et priez, et la persévérance ne vous manquera<br />

point. Il me semble bien quʹil en est ainsi également <strong>de</strong> notre bon petit Ernest; seulement il<br />

ne se défie pas assez <strong>de</strong> son inexpérience; sʹil veut marcher sûrement et en paix, il faut quʹil<br />

se laisse conduire comme un petit enfant par son père Myionnet; un peu plus tard, quand<br />

il sera plus éclairé et plus avancé, il verra combien étaient sages les conseils qui lui ont été<br />

donnés. Vous qui êtes lʹaîné, veillez sur lui, soutenez‐le doucement et affectueusement,<br />

230 Pendant une absence <strong>de</strong> 2 ans (1712-1714) qui avait éloigné <strong>de</strong> Paris le fondateur <strong>de</strong>s Frères <strong>de</strong>s Ecoles Chrétiennes, <strong>de</strong>s intrigants<br />

avaient manœuvré pour l'évincer <strong>de</strong> son poste <strong>de</strong> Supérieur.<br />

435


priez beaucoup pour lui, vos prières lʹont aidé à venir, il faut quʹelle lʹai<strong>de</strong>nt aussi à persé‐<br />

vérer.<br />

Je vous embrasse tendrement.<br />

Votre Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

350 à M. Guillot<br />

Il faut avoir le regret dʹêtre lent sur le chemin <strong>de</strong> la perfection, et simultanément gar<strong>de</strong>r confiance en la miséri‐<br />

cor<strong>de</strong> divine. Combattre bravement comme un vrai soldat du Christ.<br />

Vernet, 9 février 1856<br />

Bien cher fils en N.S.,<br />

Je partage bien votre impatience; si votre bonne affection pour moi vous porte à<br />

souhaiter mon retour, je compte, <strong>de</strong> mon côté, les jours qui me séparent encore <strong>de</strong> celui où<br />

jʹaurai la joie <strong>de</strong> vous revoir tous, et vous en particulier, cher enfant, que jʹai vu trop peu <strong>de</strong><br />

temps puisquʹil mʹa fallu vous quitter quelques mois seulement après votre entrée parmi<br />

nous. Mais cet espace <strong>de</strong> temps mʹa suffi pour mʹassurer que vous étiez bien dans la voie<br />

que le Seigneur vous avait choisie et que vous étiez pleinement acquis à notre petite fa‐<br />

mille. Aussi, cher ami, vous ai‐je voué la même tendresse que jʹaccor<strong>de</strong> à mes plus vieux<br />

enfants et ne fais‐je aucune différence entre eux et vous. Cʹest là le privilège dʹun vrai et<br />

complet dévouement, il unit en Dieu les cœurs en un seul moment et il les attache pour<br />

toujours les uns aux autres. Ne vous contristez pas, cher enfant, <strong>de</strong> ne point assez sentir<br />

votre avancement; on ne voit point marcher les aiguilles dʹune montre, elles marchent ce‐<br />

pendant et bien régulièrement; il en est ainsi pour nous; tant que nous avons un sincère<br />

désir <strong>de</strong> nous approcher <strong>de</strong> Dieu, nous avançons vers Lui; mais comme lʹespace est im‐<br />

mense, il semble que nous soyons toujours au même point. Gar<strong>de</strong>z donc au fond <strong>de</strong> votre<br />

cœur ce regret dʹêtre si lent à courir à la perfection, mais ayez confiance en même temps<br />

dans les miséricor<strong>de</strong>s du Père que nous servons; Il lit dans votre cœur, Il sait vos bons dé‐<br />

sirs, et, sʹIl vous cache en partie lʹaction <strong>de</strong> sa grâce, cʹest pour vous maintenir dans lʹhumi‐<br />

lité et prévenir les tentations <strong>de</strong> relâchement. Poursuivez donc votre route, cher ami, et<br />

soyez en paix, nous vos amis et pères, nous vous assurons que vous êtes en bon chemin,<br />

marchez toujours, soyez en paix, vous arriverez à bonne fin. Regar<strong>de</strong>z dʹailleurs comme<br />

une gran<strong>de</strong> faveur <strong>de</strong> Dieu <strong>de</strong> bien connaître vos défauts; vous avez été soldat, vous savez<br />

que, quand on voit lʹennemi en face et en plein jour, on le combat bien mieux; soldat <strong>de</strong> Jé‐<br />

sus‐Christ, soyez brave à la bataille, le divin Chef vous regar<strong>de</strong>, son amour et son éternelle<br />

gloire seront votre triomphe et votre récompense.<br />

Adieu, cher enfant, je vous embrasse tendrement.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

351 à M. Vince<br />

Accepter la volonté du Père, cʹest vivre en plénitu<strong>de</strong>. Prière fraternelle <strong>de</strong> MLP.<br />

Vernet, 18 février 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Mon f. Myionnet me dit que vous souffrez moins, que vous mangez un peu, mais<br />

que vous digérez toujours bien imparfaitement. Vous êtes donc aussi toujours sur la croix<br />

436


<strong>de</strong>s langueurs et <strong>de</strong>s abattements; cʹest une <strong>de</strong>s plus ru<strong>de</strong>s, car elle humilie par lʹimpuis‐<br />

sance lʹesprit et le corps, mais tant quʹil reste assez <strong>de</strong> force pour dire ou penser: Que votre<br />

volonté soit faite, mon Dieu!, on vit encore par le cœur, par la foi, par la soumission aux<br />

adorables <strong>de</strong>sseins du Seigneur, cʹest vivre véritablement et pleinement. Vous êtes donc<br />

encore plein <strong>de</strong> vie, cher enfant, et cette vie, quoi quʹil arrive, vous ne la perdrez point; elle<br />

se continuera sur la terre, si la santé du corps vous revient, et elle durera éternellement<br />

dans la gloire, si le Seigneur vous attire à Lui. Ayons donc confiance, très cher ami, conti‐<br />

nuons à prier et laissons le bon Père disposer <strong>de</strong> ses enfants à son gré. Tous les jours nous<br />

prions ensemble pour vous, mon f. Paillé et moi, nous nous rendons donc en pensée à lʹau‐<br />

tel <strong>de</strong> votre Père S t Joseph, et nous lʹinvoquons ar<strong>de</strong>mment pour vous. Je dis aussi le cha‐<br />

pelet <strong>de</strong> S t Joseph à la même intention.<br />

Adieu, cher enfant, je vous embrasse tendrement et <strong>de</strong>meure <strong>avec</strong> vous dans les<br />

Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

352 à M. Decaux<br />

Annonce <strong>de</strong> son départ pour Hyères, dans les Alpes‐Maritimes. Des Confrères <strong>de</strong> Pra<strong>de</strong>s sont venus lui rendre<br />

visite. Démarches pour Nazareth, ʺ<strong>de</strong>venue un peu lʹŒuvre communeʺ. Il lui recomman<strong>de</strong> M. Maignen tou‐<br />

jours surchargé <strong>de</strong> travail.<br />

Vernet, 25 février 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹallais vous écrire quand votre chère épître mʹest arrivée, dʹabord parce que je<br />

nʹavais pas eu directement <strong>de</strong> vos nouvelles <strong>de</strong>puis longtemps, et en second lieu pour<br />

vous avertir que, dʹaprès lʹavis du mé<strong>de</strong>cin qui mʹa donné ici ses soins, nous quittons le<br />

Vernet pour nous rendre à Hyères; cʹest <strong>de</strong>main, sans doute, que nous partirons. Les mois<br />

<strong>de</strong> mars et dʹavril sont ici fort instables, pluvieux, souvent même neigeux; on pense quʹil<br />

vaut mieux pour ma poitrine encore si frêle éviter les variations trop fréquentes <strong>de</strong> la tem‐<br />

pérature; nous allons donc, comme les hiron<strong>de</strong>lles, nous garantir <strong>de</strong> la froidure et chercher<br />

un climat plus doux. Je suis bien un peu peiné <strong>de</strong> prendre <strong>de</strong>s soins si tendres <strong>de</strong> ma per‐<br />

sonne, mais quand on est une fois aux mains <strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins, on nʹest plus guère maître <strong>de</strong><br />

soi. Celui qui me gouverne ici paraît enchanté dʹavoir à peu près complètement arrêté ma<br />

toux, il regar<strong>de</strong> cela comme une cure merveilleuse; Dieu sait pourtant quel pauvre instru‐<br />

ment est encore ma poitrine; le moindre froid, le plus petit souffle un peu vif, un entretien<br />

<strong>de</strong> quelques minutes sont une cause <strong>de</strong> souffrance et dʹépuisement. Jʹai fait pourtant lʹessai<br />

<strong>de</strong> mes forces ces jours‐ci au service <strong>de</strong> notre chère Société <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul. Nos<br />

Confrères <strong>de</strong> Pra<strong>de</strong>s ayant su que jʹétais en traitement ici sont venus <strong>avec</strong> leur Prési<strong>de</strong>nt<br />

me faire une visite fraternelle. Je les ai accueillis <strong>de</strong> mon mieux et leur ai donné quelques<br />

détails sur lʹétat <strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong> Paris, sur le Conseil Général, etc., mais, à la fin <strong>de</strong> lʹentre‐<br />

tien, cependant médiocrement long, je me suis trouvé si épuisé que nos Confrères, me<br />

voyant presque sans souffle, ont dû se retirer. Cette visite ne sera pourtant pas, je lʹespère,<br />

sans quelque résultat; nous avons décidé nos Confrères à faire quelques efforts pour créer<br />

quelques Conférences qui fassent rayonnement à la leur; ils ont promis <strong>de</strong> son<strong>de</strong>r le terrain<br />

à Vinça, à Ille et à Olette. Mon f. Paillé a fait exprès <strong>de</strong>ux voyages dans cette <strong>de</strong>rnière loca‐<br />

437


lité pour préparer les esprits: le Curé est très bien disposé, il y a <strong>de</strong> bons éléments, mais ils<br />

sont en division, ce sera lʹaffaire <strong>de</strong> la charité <strong>de</strong> les réunir.<br />

Jʹai été profondément touché en apprenant les marques dʹintérêt que le Conseil Gé‐<br />

néral, celui <strong>de</strong> Paris et nos Conférences ont données à notre œuvre <strong>de</strong> Nazareth. Je suis<br />

tout heureux que la Société confirme et accroisse ses droits sur cette maison; elle eût été<br />

trop celle <strong>de</strong> notre petite Communauté si nous eussions exclusivement travaillé à sa fonda‐<br />

tion; mais, dans lʹétat <strong>de</strong>s choses, elle est <strong>de</strong>venue un peu lʹœuvre commune, tout le mon<strong>de</strong><br />

y ayant apporté sa pierre et son concours <strong>de</strong> charité. Cʹest ainsi quʹon faisait les gran<strong>de</strong>s<br />

entreprises au bon temps <strong>de</strong> la foi, mais nous sommes encore bien peu forts pour faire <strong>de</strong>s<br />

œuvres hardies; je ne sais si, malgré ma confiance assez robuste, jʹeusse osé commencer<br />

celle‐ci <strong>avec</strong> la prévision <strong>de</strong>s proportions quʹelle a prises; mais quelle quʹelle soit, je la crois<br />

sincèrement <strong>de</strong> Dieu et bénie par Lui, et je répète souvent pour mʹaffermir la parole du<br />

cantique: In te Domine speravi, mon confundar in aeternum.<br />

Je vous remercie bien, très cher ami, <strong>de</strong> vos bons vouloirs pour lʹorganisation <strong>de</strong>s<br />

services charitables <strong>de</strong> Nazareth; jʹai écrit ces temps <strong>de</strong>rniers à M. Boutron relativement<br />

aux logements <strong>de</strong>s vieillards; il a, je crois, en vue <strong>de</strong> réunir une Commission composée<br />

dʹun membre <strong>de</strong> chacune <strong>de</strong>s 4 Conférences, afin dʹaviser aux mesures concernant lʹinstal‐<br />

lation et à toutes les dispositions dʹordre et dʹadmission. Je vous serai infiniment recon‐<br />

naissant dʹappuyer et <strong>de</strong> diriger nos Confrères dans tous ces soins, comme dans toutes les<br />

mesures qui regar<strong>de</strong>nt lʹœuvre dans son ensemble; cʹest une chose à constituer, il importe<br />

quʹelle soit bien posée et soli<strong>de</strong>ment assise.<br />

Je vous recomman<strong>de</strong> aussi toujours mes bons frères, que votre cœur si affectueux a<br />

déjà adoptés comme siens; je suis particulièrement en sollicitu<strong>de</strong> pour notre cher f. Mai‐<br />

gnen que jʹai chargé jusquʹà lʹécraser et que son ar<strong>de</strong>ur dévouée met en danger <strong>de</strong> sʹépui‐<br />

ser. Veillez un peu sur lui paternellement,ai<strong>de</strong>z‐le <strong>de</strong> tous vos moyens et empêchez‐le, si<br />

vous le pouvez, dʹexcé<strong>de</strong>r dans le travail la mesure <strong>de</strong> ses forces. Je me sens tout consolé<br />

<strong>de</strong> pouvoir traiter <strong>avec</strong> vous comme en famille <strong>de</strong> ces choses si intimes pour moi, et je bé‐<br />

nis le Seigneur qui a mis entre nous <strong>de</strong> tels liens <strong>de</strong> charité que mes intérêts les plus chers<br />

sont également précieux pour vous.<br />

Adieu, bien cher ami, soyez lʹinterprète <strong>de</strong> mon dévouement et <strong>de</strong> ma reconnais‐<br />

sance près <strong>de</strong> M. Baudon, offrez aussi mes respectueux souvenirs à nos Confrères du<br />

Conseil Général; serrez affectueusement la main <strong>de</strong> notre bon ami, M. Frion, et chargez‐le<br />

<strong>de</strong> mes sentiments <strong>de</strong> respect pour sa chère famille.<br />

Je <strong>de</strong>meure bien cordialement à vous dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre ami et frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je compte toujours revenir vers la fin dʹavril, à moins que la saison ne soit trop<br />

mauvaise à Paris et ne mʹoblige à différer un peu mon arrivée. Priez un peu pour moi qui<br />

prie fidèlement pour vous.<br />

353 à M. Vince<br />

Au frère Vince qui est à toute extrémité (il mourra le 22 mars), MLP. adresse lʹune <strong>de</strong> ses plus belles lettres. Il<br />

lʹencourage à se souvenir que Dieu est un père qui aime. Celui qui, tel le frère Vince, a aimé et servi ici‐bas et ses<br />

frères et les pauvres, sera accueilli au Ciel par lʹamour <strong>de</strong> Dieu. ʺnous qui vivons dans lʹair <strong>de</strong> la charité, lʹamour<br />

nous recevra au <strong>de</strong>rnier jourʺ.<br />

438


Hyères, 5 mars 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹavais hâte dʹêtre arrivé à notre nouvelle <strong>de</strong>stination pour répondre à votre bonne<br />

petite lettre qui nous a bien consolés, mon f. Paillé et moi. Si quelque chose, en effet, peut<br />

nous faire envisager <strong>avec</strong> moins <strong>de</strong> regret la pensée que Dieu veut peut‐être vous rappeler<br />

à Lui bientôt et vous enlever à notre affection, cʹest la confiance quʹIl le fera pour assurer<br />

votre bonheur et vous placer au Ciel près <strong>de</strong> notre bien‐aimé f. Viollat, afin que vous pro‐<br />

tégiez ensemble vos frères restés dans la terre dʹexil. Vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z, très cher enfant,<br />

<strong>de</strong> vous pardonner les peines que vous auriez pu causer à la Communauté et à moi, et les<br />

fautes ou manquements que vous auriez pu commettre; sʹil est besoin <strong>de</strong> quelque pardon,<br />

cher ami, pour quelques fragilités ou imperfections <strong>de</strong> la pauvre nature, je vous le donne<br />

au nom <strong>de</strong> tous et <strong>de</strong> la plénitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> mon cœur. Mais je dois le dire, bien cher ami, il ne<br />

me revient en mémoire rien <strong>de</strong> notable et qui mʹait jamais donné aucun regret sérieux; je<br />

ne me souviens en ce moment que <strong>de</strong> votre affection, <strong>de</strong> vos bons désirs et <strong>de</strong> votre tendre<br />

dévouement à vos frères, à nos œuvres et à moi‐même, tout indigne que jʹen fusse. Cʹest<br />

<strong>avec</strong> une gran<strong>de</strong> joie que je sens en moi cette disposition, car si moi, misérable père, si in‐<br />

capable et si insuffisant, je ne trouve en mon cœur que tendre indulgence et amour compa‐<br />

tissant pour vous, que sera‐ce donc du Père <strong>de</strong>s infinies miséricor<strong>de</strong>s, <strong>de</strong> Marie la plus par‐<br />

faite <strong>de</strong>s mères, <strong>de</strong> Joseph, votre protecteur toujours fidèle! Quelle confiance nous <strong>de</strong>vons<br />

trouver dans cette pensée et quelle douce espérance elle répand dans notre cœur. Oh! oui,<br />

espérons, bien cher ami, car Dieu est notre Père, un Père indulgent qui accueille en pleu‐<br />

rant <strong>de</strong> joie lʹenfant prodigue et qui ne repousse jamais un cœur qui souffre <strong>avec</strong> un peu<br />

dʹabandon et dʹamour. Il me semble que nous qui vivons dans lʹair <strong>de</strong> la charité, nous<br />

nʹavons pas place dans notre cœur pour la crainte; nous avons cherché lʹamour, lʹamour<br />

nous tend les bras et nous recevra au <strong>de</strong>rnier jour.<br />

Je pense <strong>avec</strong> une douce joie, cher enfant, que, si vous nous quittez, nul parmi nous<br />

nʹira plus tôt vous rejoindre que moi, qui vais rester bien frêle et sujet à bien <strong>de</strong>s acci<strong>de</strong>nts.<br />

Jusque là, nous ne serons dʹailleurs guère séparés, les tendres souvenirs, la prière, lʹunion<br />

constante <strong>de</strong> nos cœurs nous tiendrons bien près lʹun <strong>de</strong> lʹautre et nous feront vivre encore<br />

ensemble. Et pourtant, cher enfant, il mʹeût été doux <strong>de</strong> vous embrasser une fois encore: si<br />

cette consolation mʹétait refusée, si votre Père St Joseph vous appelait durant le mois qui<br />

lui est consacré, pensez, bien cher enfant, que je suis auprès <strong>de</strong> vous, que mon cœur ne<br />

vous quitte pas, sinon pour sʹélever à Dieu et lʹinvoquer pour vous.<br />

Je le conjure <strong>de</strong> puiser aux trésors <strong>de</strong> son divin Cœur ses plus tendres, ses plus<br />

amoureuses bénédictions et <strong>de</strong> les répandre sur vous en plénitu<strong>de</strong>.<br />

Je vous embrasse tendrement en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

354 à M. Maignen<br />

Pressenti pour être Supérieur, M. Maignen avait suggéré M. Paillé. MLP. répond à ses objections et lʹinvite à<br />

prier et à se concerter <strong>avec</strong> ses frères. Quʹil modère ses activités: ʺse réfugier en Dieu dès que possible, sacrifier<br />

<strong>de</strong>s démarches utilesʺ…ʺFaire les <strong>de</strong>ux choses ensemble: prier et agirʺ.<br />

439


Hyères, 13 mars 1856<br />

Très cher enfant en N.S.,<br />

Je voulais vous écrire un peu à loisir, je nʹen ai pas encore trouvé la possibilité <strong>de</strong>‐<br />

puis mon arrivée ici; je suis <strong>de</strong>venu si vieux que changer <strong>de</strong> lieux est toute une gran<strong>de</strong> af‐<br />

faire pour moi; mʹacclimater, retrouver mon régime, refaire le classement <strong>de</strong> mes occupa‐<br />

tions dans la journée, tout cela sʹopère lentement, <strong>avec</strong> mille difficultés; être jeune, que cela<br />

est doux et commo<strong>de</strong>! Epargnez un peu votre jeunesse, cher enfant, ne la dépensez pas<br />

sans vraie nécessité, cʹest un précieux trésor, on nʹen sent bien la valeur que lorsquʹil nʹy a<br />

plus rien au fond du sac. Ce nʹest pas que je sois décrépit à faire peur, vous ne me trouve‐<br />

rez pas changé en pis à mon retour, je suis même un peu plus fort sur mes jambes quʹà<br />

mon départ; mais jusquʹici ma poitrine est une pauvre machine, il faut la traiter <strong>avec</strong> toutes<br />

sortes <strong>de</strong> cérémonies et <strong>de</strong> ménagements qui exerceraient la patience dʹun saint et qui sou‐<br />

vent mettent la mienne à toute extrémité.<br />

Je bénis <strong>avec</strong> vous le Seigneur <strong>de</strong> ce que nos affaires, sans être prospères, sont<br />

moins mauvaises que nous ne pouvions le craindre; je remercie bien <strong>avec</strong> vous vos dames<br />

quêteuses pour Nazareth, la bonne et pieuse Mme Récamier en particulier; je chercherai<br />

dans mon esprit <strong>de</strong>s noms pour votre souscription à 20f, mais je mʹétonne que vous son‐<br />

giez pour cela aux dames patronnesses <strong>de</strong> notre orphelinat, ne faut‐il pas les réserver pour<br />

notre loterie? Je suis bien inquiet <strong>de</strong> cette loterie dont M. Myionnet ne me dit pas un mot<br />

dans ses <strong>de</strong>rnières lettres; ce serait une gran<strong>de</strong> affliction si, <strong>avec</strong> les charges énormes qui<br />

restent à notre maison <strong>de</strong> Vaugirard, elle était privée et <strong>de</strong> cette loterie et <strong>de</strong> son sermon<br />

ordinaire; faites <strong>de</strong>s pieds et <strong>de</strong>s mains, cher enfant, pour que lʹaffaire arrive à fin. Jʹindi‐<br />

que à M. Myionnet un moyen <strong>de</strong> lʹavancer peut‐être assez efficacement; usez‐en, sʹil est<br />

nécessaire.<br />

Je suis bien frappé <strong>de</strong>s objections que vous me présentez contre votre supériorité<br />

projetée à Nazareth, et je trouverais bien quelques avantages au parti que vous me propo‐<br />

sez et qui sauverait peut‐être la situation, au moins pour un temps. Notre f. Paillé a très<br />

pieusement passé les quelques mois écoulés <strong>de</strong>puis son départ, jʹai été aussi fort satisfait<br />

<strong>de</strong> son dévouement et <strong>de</strong> son bon esprit; mais il nʹen reste pas moins vrai que, pour tirer<br />

bon parti <strong>de</strong> ses qualités, il faut passer à pieds joints sur <strong>de</strong>s défauts et travers dʹesprit as‐<br />

sez notables. Cʹest un effort <strong>de</strong> vertu bien réel, vous en croyez‐vous capable? Cʹest, très<br />

cher enfant, ce quʹil faut examiner bien attentivement <strong>de</strong>vant Dieu; consultez‐vous au pied<br />

<strong>de</strong> lʹautel, cherchez vraiment ce que le Seigneur veut, et vous me direz ensuite votre pen‐<br />

sée définitive; jʹai écrit à peu près en ce sens à M. Myionnet, causez‐en <strong>avec</strong> lui et <strong>avec</strong> no‐<br />

tre cher abbé Hello, et nous prendrons après cela un parti en un sens ou en un autre; mais<br />

il est bien essentiel <strong>de</strong> prier et <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r les lumières <strong>de</strong> lʹEsprit‐Saint; cʹest une chose<br />

sérieuse que <strong>de</strong> bien asseoir les commencements <strong>de</strong> notre œuvre <strong>de</strong> Nazareth, nous <strong>de</strong>‐<br />

vons avoir à cœur <strong>de</strong> la faire <strong>de</strong> notre mieux pour quʹelle puisse encourager ceux qui en<br />

voudraient faire <strong>de</strong> pareilles, par la Société <strong>de</strong> St ‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul ou autrement.<br />

Je ne puis me résoudre, bien cher enfant, à <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à notre f. Myionnet plus <strong>de</strong><br />

sévérité à votre égard; je sais quelle est la multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> vos occupations et combien elle<br />

doit vous dissiper, jʹen souffre, jʹen gémis, mais je ne puis que prier le Seigneur dʹavoir pi‐<br />

tié <strong>de</strong> vous et <strong>de</strong> vous donner le courage <strong>de</strong> vous tenir en réserve contre tout mouvement<br />

et expansion qui nʹest pas nécessaire. Il me semble parfois que votre corps et votre âme<br />

sont tous les <strong>de</strong>ux dans état habituel <strong>de</strong> surexcitation qui, à la longue, amènerait lʹépuise‐<br />

440


ment. Dès que vous en voyez la possibilité, cher enfant, réfugiez‐vous en Dieu, sacrifiez<br />

même parfois un peu <strong>de</strong>s démarches utiles pour les remplacer par quelque acte auprès <strong>de</strong><br />

Dieu, vous y gagnerez, car cʹest Lui qui fait tout, tenant les cœurs, les ressources et toutes<br />

les puissances dans sa main. Cʹest ce qui me console pour moi <strong>de</strong> mon inutilité obligée;<br />

quand je mʹen sens un peu contristé, je me dis: Que ferais‐tu maintenant? Tel mouvement,<br />

telle instance auprès <strong>de</strong> celui‐ci ou <strong>de</strong> celui‐là; eh bien, fais tes instances et démarches au‐<br />

près <strong>de</strong> Dieu, cʹest plus sûr, cʹest plus court, cʹest bien autrement efficace. Dans votre posi‐<br />

tion, cher enfant, il faut faire les <strong>de</strong>ux choses ensemble: prier et agir. Je sais bien la diffi‐<br />

culté <strong>de</strong> prier <strong>avec</strong> un esprit harassé, plein <strong>de</strong> mille choses confuses et dont on ne dispose<br />

plus; il reste lʹélévation intérieure du cœur, quelques petits retours, si courts quʹils soient,<br />

un désir, un regard, un soupir. Dieu comprend tout cela, cʹest le langage <strong>de</strong>s âmes char‐<br />

gées; le Seigneur ne leur a pas crié en vain: Venez à moi, vous tous qui êtes las. 231 Sʹils<br />

viennent à Lui en hâte, brisés, Il les refait, essuie leur front, et remet en un instant <strong>de</strong>s for‐<br />

ces nouvelles en leur intérieur. Revenez donc le plus souvent possible aux pieds <strong>de</strong> ce bon<br />

Maître pour y trouver quelque repos et, même dans vos fatigues et courses haletantes,<br />

respirez en Lui; Il sera votre rafraîchissement et votre paix.<br />

Adieu, très cher enfant, je prie tous les jours pour vous à la Sainte Messe et à la<br />

Sainte Communion; rien nʹest perdu pour nous tant que ces grands moyens nous restent.<br />

Dieu est <strong>avec</strong> nous, nous ne serons pas confondus: In te Domine speravi, non confundar in ae‐<br />

ternum.<br />

Adieu, très cher enfant, je vous embrasse bien tendrement dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong><br />

J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre vieil ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

355 à M. Halluin<br />

MLP. lʹinvite à prendre une décision ferme. Ce qui a poussé MLP. à fon<strong>de</strong>r lʹInstitut : ʺse placer au centre du<br />

mouvement charitable…ramener les âmes à la foi par la charitéʺ, par une famille religieuse capable <strong>de</strong> donner<br />

stabilité aux œuvres <strong>de</strong> charité, et composée dʹhommes entièrement consacrés à Dieu et aux pauvres: ʹlʹœuvre <strong>de</strong>s<br />

oeuvresʺ. Aux réticences <strong>de</strong> M. Halluin quant au supériorat laïque, MLP. répond que rien nʹest fixé définitive‐<br />

ment. Il suivra les indications <strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce. Le Supérieur nʹest tel que ʺpour aimer et se dévouer plus que les<br />

autresʺ.<br />

Hyères, 16 mars 1856<br />

Monsieur lʹabbé,<br />

Mon f. Myionnet mʹa rendu compte <strong>de</strong> son voyage à Arras et <strong>de</strong>s bonnes impres‐<br />

sions quʹil en a rapportées; votre accueil affectueux, lʹesprit <strong>de</strong> vos frères et <strong>de</strong> vos enfants,<br />

la conduite générale <strong>de</strong> votre œuvre, tout lʹa satisfait et lui a inspiré la plus vive sympathie<br />

pour le bien qui se fait dans votre maison.<br />

Une seule chose lʹa contristé et mʹafflige aussi moi‐même, cʹest lʹindécision où vous<br />

semblez être touchant votre agrégation à notre petite famille. Les lettres <strong>de</strong> notre f. Caille<br />

mʹavaient laissé penser que vous aviez pris à ce sujet <strong>de</strong>s résolutions plus favorables pour<br />

nous, et jʹai vu <strong>avec</strong> regret que vous restiez encore incertain sur ce point. Permettez‐moi <strong>de</strong><br />

vous faire remarquer, Monsieur lʹabbé, que le bien <strong>de</strong> votre œuvre semble exiger un sacri‐<br />

231 Mt 11, 28.<br />

441


fice complet <strong>de</strong> votre part et que, pour assurer son avenir, vous <strong>de</strong>vez <strong>de</strong>meurer parmi<br />

nous, afin <strong>de</strong> veiller encore efficacement sur vos chers enfants. Vous avez été jusquʹici<br />

lʹâme et la vie <strong>de</strong> cette institution; ce nʹest pas en un jour, ni même en une année, que vous<br />

pourriez inspirer à dʹautres agents votre esprit, votre tendre charité; dʹailleurs, pour les<br />

trouver bien dévoués, bien conformes à vos sentiments, il ne suffit pas quʹil soient vos<br />

amis, il faut quʹils soient vos frères, quʹils nʹaient <strong>avec</strong> vous quʹune même pensée, une<br />

même vue, quʹils ne fassent <strong>avec</strong> vous qu’un coeur et qu’une âme. Si vous ne tendiez qu’à<br />

vous décharger <strong>de</strong> votre œuvre, nous la confier pourrait être un moyen dʹempêcher sa<br />

ruine; mais, pour lʹaffermir et lʹaccroître, pour en gar<strong>de</strong>r lʹesprit et tous les fruits, il me<br />

semble essentiel que vous vous associiez cordialement à ceux qui sʹy consacreront.<br />

Tel est aussi le sentiment <strong>de</strong> mon f. Myionnet, dont je ne veux pas rendre ici les pa‐<br />

roles que votre humilité trouverait trop favorables à vous et à votre œuvre, mais il conclut<br />

en exprimant vivement le désir que votre concours fraternel nous soit donné tant pour cet<br />

établissement, si nous avions à nous en occuper, que pour les autres œuvres charitables<br />

que la Provi<strong>de</strong>nce a daigné nous confier.<br />

Je ne sais, Monsieur lʹabbé, si vous avez tourné votre attention sur la fin principale<br />

<strong>de</strong> notre Communauté et si vous avez été frappé comme nous du bien quʹelle pourrait<br />

faire en sʹagrandissant. Nous avons remarqué, comme tant dʹautres, que Dieu semblait<br />

vouloir, <strong>de</strong> notre temps, ramener les âmes à la foi et à la vie chrétienne par la charité; que,<br />

<strong>de</strong> toutes parts, il se faisait en ce sens un grand mouvement, que les uns donnant leur dé‐<br />

vouement et leur activité, dʹautres leurs aumônes, dʹautres leurs prières, on secouait ainsi<br />

la torpeur <strong>de</strong> lʹindifférence et lʹon revenait à lʹordre, à lʹamour du bien, à la vérité. Nous<br />

avons pensé que ce serait entrer dans les vues <strong>de</strong> Dieu que <strong>de</strong> se placer au centre <strong>de</strong> ce<br />

mouvement charitable pour le soutenir et en assurer lʹeffet. Des œuvres sans nombre sont<br />

créées journellement par les élans du zèle pour remédier à toutes les misères temporelles<br />

et spirituelles; mais, dès quʹon veut les asseoir soli<strong>de</strong>ment, leur donner <strong>de</strong>s agents fidèles<br />

et constants, ils font défaut partout; lʹélément le plus essentiel manque: le dévouement ab‐<br />

solu, la consécration entière <strong>de</strong> soi‐même à Dieu et à ses frères. Sans cela pourtant, il nʹest<br />

pas une seule œuvre qui puisse sʹaffermir et subsister. A nos yeux donc, trouver <strong>de</strong>s âmes<br />

généreuses et dévouées, les réunir en faisceau pour en faire un puissant instrument aux<br />

mains du Père <strong>de</strong>s miséricor<strong>de</strong>s, cʹétait la base nécessaire, cʹétait lʹœuvre <strong>de</strong>s œuvres. Nous<br />

nous sommes jetés en avant, <strong>de</strong>s premiers, pour cette noble tâche et nous avons espéré<br />

quʹaprès nous dʹautres âmes encore viendraient travailler à lʹœuvre <strong>de</strong> Dieu et gagner les<br />

cœurs par la charité. Mais qui donc, Monsieur lʹabbé, entendra notre appel et sʹadjoindra à<br />

nous sinon ceux qui, comme vous, ont donné leur temps, leur fortune, toutes leurs sollici‐<br />

tu<strong>de</strong>s et leur affection à <strong>de</strong> pauvres enfants dont lʹâme et le corps eussent été sans eux en<br />

perdition? Si vous nʹêtes pas notre frère, où en trouverons‐nous? Et si rien ne vous attire à<br />

notre œuvre, qui donc aura <strong>de</strong> la sympathie pour nous? Nous marchons dans la même<br />

voie et dʹun même sentiment, nous nʹavons quʹun même désir et une même fin, qui nous<br />

empêcherait <strong>de</strong> nous associer et <strong>de</strong> doubler ainsi nos moyens et nos forces? Cela semble si<br />

simple et si bien selon les vues <strong>de</strong> Dieu quʹil me paraît hors <strong>de</strong> doute que <strong>de</strong>s cœurs sans<br />

volonté propre et uniquement abandonnés à ses divines inspirations arriveront comme<br />

forcément à cette désirable union.<br />

Je sens la difficulté quʹon peut trouver à sʹunir ainsi complètement à une famille<br />

quʹon ne connaît encore quʹimparfaitement et dont on a entrevu à peine quelques mem‐<br />

442


es. Mais, par le cœur et dans lʹordre <strong>de</strong> la charité, on voit bien <strong>de</strong>s choses et lʹon s’entend<br />

aisément. Je crois donc, Monsieur lʹabbé, que quelques rapprochements et entrevues pour‐<br />

ront simplifier beaucoup les empêchements entre nous; aussi me fais‐je une vraie fête <strong>de</strong><br />

me rencontrer <strong>avec</strong> vous au mois <strong>de</strong> mai et gardè‐je une gran<strong>de</strong> espérance que, sous les<br />

auspices <strong>de</strong> la T. S te Vierge et du bon saint Vincent, notre Père, nos cœurs pourront se<br />

comprendre et se fondre intimement.<br />

Il est une autre objection que vous pourriez, comme prêtre, trouver dans la Consti‐<br />

tution <strong>de</strong> notre Communauté conduite présentement par un laïc. Mais jʹose espérer quʹen‐<br />

core sur ce point, toute difficulté sʹaplanira après que vous nous aurez vus <strong>de</strong> près. Lʹau‐<br />

teur <strong>de</strong> lʹImitation lʹa dit: lʹamour est une gran<strong>de</strong> chose, lui seul rend léger tout ce qui est<br />

pesant. Il en est ainsi parmi nous, le Supérieur nʹest tel que pour aimer et se dévouer plus<br />

que les autres; il ne gêne pas plus quʹun père ne gêne dans la famille; et, <strong>de</strong> même que<br />

dans la famille un père gar<strong>de</strong> ses droits sans préjudice aucun <strong>de</strong>s privilèges et du minis‐<br />

tère saint <strong>de</strong> ses fils, sʹils sont prêtres, ainsi, chez nous, nos frères ecclésiastiques sont<br />

membres <strong>de</strong> la famille, sans nul détriment pour lʹindépendance <strong>de</strong> leur saint ministère et<br />

<strong>de</strong> la profon<strong>de</strong> vénération due à leur caractère sacré. Lʹunique secret <strong>de</strong> cette heureuse<br />

conciliation, cʹest la charité; par elle, les choses sʹordonnent et se classent sans choc et sans<br />

embarras, et lʹon sʹétonne journellement <strong>de</strong> ne pas trouver lʹombre dʹune difficulté où lʹon<br />

craignait dʹen rencontrer à chaque pas. Nous nʹavons, du reste, rien constitué systémati‐<br />

quement chez nous, la Provi<strong>de</strong>nce a seule mis la main à lʹœuvre dans notre règlement;<br />

nous pensons que lʹétat actuel <strong>de</strong>s choses est selon ses vues et peut produire <strong>de</strong> grands<br />

avantages, mais nous ne résisterions aucunement à la volonté divine si elle se manifestait<br />

plus tard en un autre sens.<br />

Quant à lʹétat présent, quelques entretiens intimes pouvant, bien mieux que toutes<br />

les correspondances, vous montrer combien il est simple dans la pratique, je pourrais, si<br />

vous le trouviez utile, inviter après Pâques quelquʹun <strong>de</strong> nos ff. ecclésiastiques à se rendre<br />

à Arras et à passer quelques jours <strong>avec</strong> vous; ce serait un membre <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> la famille qui<br />

se rapprocherait <strong>de</strong> vous, et, jʹen suis convaincu, ce serait aussi un pas <strong>de</strong> plus vers le ré‐<br />

sultat que nous désirons, quant à nous, obtenir.<br />

Cette lettre est bien longue, Monsieur lʹabbé; à Paris, je lʹeusse sans doute abrégée<br />

malgré moi, mais ici mon éloignement <strong>de</strong> mes frères et <strong>de</strong> nos œuvres me laisse plus <strong>de</strong><br />

loisir; jʹen aurai fait un bon usage à mon gré, sʹil en résulte un peu dʹouverture <strong>de</strong> cœur en‐<br />

tre nous. Je le <strong>de</strong>man<strong>de</strong> bien instamment à Dieu et je le prie, Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> vous dire<br />

au fond <strong>de</strong> lʹâme combien il est doux à ceux qui le servent <strong>de</strong> nʹêtre pas seuls dans la prière<br />

et dans le travail, mais dʹavoir autour <strong>de</strong> soi <strong>de</strong> vrais amis, <strong>de</strong>s frères sur lesquels on<br />

compte comme sur soi‐même et qui, en partageant les charges, les ren<strong>de</strong>nt plus légères et<br />

plus fructueuses aussi pour la gloire du Seigneur.<br />

Je suis <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s sentiments respectueux et bien dévoués,<br />

Monsieur lʹabbé,<br />

Votre très humble serviteur en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

443


356 à M. Caille<br />

Impressions sur la visite <strong>de</strong> M. Myionnet à Arras. Préserver un frère du découragement. Veiller à ce quʹil y ait<br />

une vraie vie <strong>de</strong> famille à Amiens, il y a <strong>de</strong>s âmes qui ne peuvent sʹen passer. Ne pas accueillir davantage dʹen‐<br />

fants alors quʹon ne peut en supporter la charge.<br />

Hyères, 20 mars 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie quelques petites lettres pour mes enfants dʹAmiens; jʹai tardé à leur<br />

répondre, à cause <strong>de</strong> mon changement <strong>de</strong> lieu. Nous avons quitté Le Vernet, où les mois<br />

<strong>de</strong> mars et dʹavril sont dʹordinaire mauvais, pour nous rendre à Hyères où le mé<strong>de</strong>cin mʹa<br />

conseillé <strong>de</strong> venir, afin <strong>de</strong> confirmer lʹamélioration obtenue dans lʹétat <strong>de</strong> ma poitrine. Je<br />

ne suis pas fort encore, tant sʹen faut, mais je pense que durant les quelques semaines qui<br />

vont sʹécouler jusquʹà mon retour à Vaugirard, je pourrai faire quelques progrès un peu<br />

sensibles. Je me recomman<strong>de</strong> à vos prières qui ne mʹont pas manqué jusquʹici, afin que je<br />

sois bien soumis à la volonté <strong>de</strong> Dieu et que je correspon<strong>de</strong> fidèlement à ses vues à mon<br />

égard.<br />

Notre f. Myionnet mʹa rendu compte <strong>de</strong> son voyage <strong>avec</strong> vous; il en serait satisfait<br />

sʹil nʹavait trouvé M. Halluin moins décidé quʹil ne le pensait à se joindre personnellement<br />

à nous. Il serait bien regrettable, en effet, quʹun homme si dévoué et si bon ne fût pas don‐<br />

né à notre petite famille qui doit tant désirer <strong>de</strong> sʹassocier les âmes vraiment généreuses et<br />

dévouées; mais il mʹa semblé, dʹaprès la lettre <strong>de</strong> M. Myionnet, que M. Halluin nʹavait pas<br />

dit à ce sujet son <strong>de</strong>rnier mot; je viens <strong>de</strong> lui écrire une lettre aussi cordiale que jʹai pu la<br />

faire en lʹinvitant à compléter par un <strong>de</strong>rnier sacrifice le dévouement dont il a fait preuve<br />

pour ses enfants et pour les œuvres <strong>de</strong> charité; je vous communiquerai la réponse que je<br />

recevrai <strong>de</strong> lui, sʹil mʹen fait une, comme je lʹespère; si, <strong>de</strong> votre côté, vous appreniez quel‐<br />

que chose <strong>de</strong> nouveau sur ses dispositions, ayez la bonté, cher ami, <strong>de</strong> mʹen faire part.<br />

Je goûte bien vos observations relativement à notre jeune ami, M. Allard; je crois,<br />

comme vous, quʹil serait bien mieux quʹil fût à Vaugirard, mais nous ne pourrions présen‐<br />

tement le remplacer à Amiens, comme vous lʹa dit M. Myionnet; nous sommes donc<br />

contraints <strong>de</strong> temporiser. Jʹavais remarqué, dans les petites lettres que vous mʹavez en‐<br />

voyées, quelques signes dʹennui et <strong>de</strong> découragement, M. Myionnet a fait la même obser‐<br />

vation; il croit quʹil faudrait tendre <strong>avec</strong> persévérance à établir <strong>de</strong> plus en plus lʹesprit <strong>de</strong><br />

famille et les exercices communs dans notre chère Maison dʹAmiens; malheureusement,<br />

vos occupations vous retenant beaucoup au <strong>de</strong>hors, vous êtes contraint <strong>de</strong> laisser un peu<br />

la conduite habituelle à nos jeunes frères, dont aucun nʹa peut‐être assez <strong>de</strong> mouvement et<br />

dʹinitiative pour soutenir les autres et leur communiquer un peu dʹanimation et <strong>de</strong> vie; fai‐<br />

tes, pour arriver à ce bon résultat, tout ce que vous pourrez; encouragez le f. Marcaire à<br />

faire, <strong>de</strong> son côté, ce que le bon Dieu lui inspirera, ce point est bien essentiel; quand on est<br />

arrivé au <strong>de</strong>gré dʹabnégation et <strong>de</strong> sacrifice où le Seigneur vous a mis, on peut se passer <strong>de</strong><br />

ces consolations et douceurs <strong>de</strong> lʹintimité <strong>de</strong> la famille, et dʹailleurs votre vie active vous<br />

laisse peu le temps <strong>de</strong> vous y arrêter; mais <strong>de</strong>s âmes moins avancées et moins fermes tom‐<br />

beraient facilement dans lʹabattement, si elles nʹavaient ainsi un peu <strong>de</strong> soutien sensible.<br />

Aussi tend‐on, dans toutes les communautés, à rendre les exercices <strong>de</strong> communauté, les<br />

récréations et les réunions <strong>de</strong>s frères entre eux aussi aimables et aussi doux quʹon le peut;<br />

je sais que votre petit nombre et les occupations <strong>de</strong>s frères mettent obstacle à ce quʹon<br />

voudrait faire d’absolument régulier, mais vous ferez pour le mieux; <strong>avec</strong> le temps, votre<br />

444


personnel augmentera et donnera plus <strong>de</strong> ressources, ce sont les commencements qui of‐<br />

frent le plus <strong>de</strong> difficultés.<br />

Je désire bien toujours que vous nʹaccroissiez pas le nombre <strong>de</strong> vos enfants, pour ne<br />

pas accroître les charges <strong>de</strong>s frères et <strong>de</strong> la maison, et aussi dans lʹintérêt même <strong>de</strong>s enfants<br />

qui sont déjà bien entassés présentement; durant les chaleurs, ils pourront en souffrir; que<br />

ferions‐nous si <strong>de</strong>s maladies se déclaraient dans la maison?<br />

Notre f. Myionnet vous aura répondu sur la question du voyage à Rome, nous <strong>de</strong>‐<br />

vons attendre le retour <strong>de</strong> M. lʹabbé Dedoue.<br />

Adieu, mon bien bon ami, je prie constamment pour vous, pour vos œuvres, et aus‐<br />

si pour votre bonne sœur.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

356‐1 à M. l’abbé Timon‐David 232<br />

Nʹayant pu lui rendre visite à Marseille, MLP. compte y envoyer le frère Paillé. Mais il se réjouit déjà <strong>de</strong> la<br />

première rencontre quʹil pourrait avoir <strong>avec</strong> lui.<br />

Hyères, 22 mars 1856<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Jʹavais déjà quitté Le Vernet lorsque votre bonne et obligeante épître du 14 <strong>de</strong> ce<br />

mois y est parvenue; elle vient <strong>de</strong> mʹêtre renvoyée ici où je suis <strong>de</strong>puis le commencement<br />

<strong>de</strong> mars.<br />

Je vous remercie mille fois, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> lʹoffre que vous me faites <strong>de</strong><br />

me donner un abri pour quelques jours dans votre sainte maison, jʹespère bien en profiter<br />

en retournant à Paris à la fin dʹavril ou au commencement <strong>de</strong> mai, selon que la saison le<br />

permettra. Jʹai traversé Marseille en me rendant ici mais sans pouvoir mʹy arrêter; ma san‐<br />

té est dʹailleurs encore imparfaitement remise et je nʹeusse pu mʹentretenir à lʹaise <strong>avec</strong><br />

vous. Je vais employer <strong>de</strong> mon mieux les quelques<br />

semaines qui me restent jusquʹau moment <strong>de</strong> mon départ<br />

afin <strong>de</strong> reprendre quelques forces et <strong>de</strong> remonter un peu<br />

ma poitrine qui était presque entièrement hors <strong>de</strong> service.<br />

Il pourrait se faire que M. Paillé, lʹun <strong>de</strong> nos frères<br />

qui est <strong>avec</strong> moi, allant à Toulon la semaine <strong>de</strong> Quasimo‐<br />

modo, poursuivît sa route jusquʹà Marseille; il vous ren‐<br />

drait alors une petite visite ainsi quʹà un autre <strong>de</strong> nos<br />

amis. Je gar<strong>de</strong> bien soigneusement votre adresse et ce se‐<br />

ra je vous lʹassure, Monsieur lʹabbé, une vraie satisfaction<br />

pour moi <strong>de</strong> mʹentretenir intimement <strong>avec</strong> vous <strong>de</strong>s cho‐<br />

ses qui nous intéressent <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts et dʹétudier en<br />

232 Disciple <strong>de</strong> l'abbé Allemand, il vient <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>r à Marseille une œuvre <strong>de</strong> jeunesse pour la classe ouvrière. En septembre 1853,<br />

l'abbé Timon-David, venu visiter N.D. <strong>de</strong> Nazareth, déclare au f. Maignen :"Vous per<strong>de</strong>z votre temps, vos confrères se tuent pour<br />

rien, ce ne sont pas les savantes organisations qui font les œuvres, c'est la grâce <strong>de</strong> Dieu par la prière et les sacrements". Fort <strong>de</strong><br />

l'expérience <strong>de</strong> M. Myionnet qui avait su élever le niveau spirituel du patronage par les retraites et la petite conférence, M. Maignen,<br />

aidé du père Hello, retiendra la leçon (création <strong>de</strong> congrégations mariales en 1855, etc.). Le 5 janvier 1854, le père Lantiez,<br />

condisciple <strong>de</strong> Timon-David à St-Sulpice, l'invite à correspondre <strong>avec</strong> MLP. Des liens vont se tisser qui iront jusqu'à envisager<br />

l'union <strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong> Marseille <strong>avec</strong> celle <strong>de</strong> l'Institut. Mais Timon-David n'était pas enclin à travailler <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s directeurs laïcs.<br />

Avec l'appui <strong>de</strong> son évêque , Mgr <strong>de</strong> Mazenod, il fon<strong>de</strong>ra, en 1859, la Congrégation du Sacré-Cœur <strong>de</strong> Jésus (Timoniens).<br />

445


même temps <strong>de</strong> tout près lʹœuvre si intéressante du vénérable M. Allemand.<br />

Veuillez agréer, cher Monsieur lʹabbé, les sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> sincère dé‐<br />

vouement <strong>avec</strong> lesquels je suis<br />

Votre humble serviteur en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

357 à M. Halluin<br />

Prochaine visite <strong>de</strong> M. Halluin à Vaugirard. MLP. lui apprend la mort du frère Vince.<br />

Hyères, 28 mars 1856<br />

Monsieur lʹabbé,<br />

Je vois <strong>avec</strong> joie, par votre bonne et charitable lettre du 25 <strong>de</strong> ce mois, quʹil nʹy a pas<br />

dʹobstacle notable à lʹunion que je désire si sincèrement <strong>de</strong> voir sʹétablir entre nous; quand<br />

les cœurs sʹenten<strong>de</strong>nt, il y a gran<strong>de</strong> espérance quʹon pourra marcher <strong>de</strong> compagnie; je me<br />

plais donc à penser que le Seigneur, qui a préparé notre union, daignera consommer son<br />

œuvre et nous associer intimement pour son service. Mais quelle que soit, sous ce rapport,<br />

lʹissue <strong>de</strong> notre entretien, la conformité <strong>de</strong> nos sentiments et <strong>de</strong> nos œuvres met déjà entre<br />

nous un lien <strong>de</strong> fraternité; vous pouvez donc considérer comme vôtre, monsieur lʹabbé,<br />

notre pauvre maison <strong>de</strong> Vaugirard; elle sera tout heureuse <strong>de</strong> vous recevoir, non seule‐<br />

ment pour cette fois, mais aussi souvent que vous voudrez bien y venir. Elle est, dans cette<br />

saison surtout, médiocrement commo<strong>de</strong> et agréable, mais vous savez, par expérience, les<br />

difficultés que rencontrent, <strong>de</strong> notre temps, les fondations, et vous serez plus aisément<br />

quʹun autre disposé à lʹindulgence. Jʹinformerai mon f. Myionnet <strong>de</strong> votre arrivée, mais ce<br />

serait dʹailleurs chose superflue, je suis bien sûr quʹil vous accueillera <strong>avec</strong> bonheur et quʹil<br />

souhaite autant que moi <strong>de</strong> voir en vous plus encore quʹun ami. La lettre quʹil mʹavait<br />

écrite, après son retour dʹArras, dʹailleurs toute remplie dʹestime et <strong>de</strong> sympathie pour<br />

vous et pour votre œuvre, nʹindiquait autre chose, quant à vos dispositions propres,<br />

quʹune réserve sage et pru<strong>de</strong>nte, telle quʹon lʹavait dû attendre <strong>de</strong> votre position; il témoi‐<br />

gnait son vif désir <strong>de</strong> ne pas vous voir délaisser votre œuvre qui, dans sa pensée, souffri‐<br />

rait gran<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> cette séparation et qui pourrait nous effrayer un peu, si nous <strong>de</strong>vions<br />

en prendre seuls toute la conduite et tout le poids.<br />

Je regrette sincèrement <strong>de</strong> nʹêtre pas en ce moment à Paris pour vous recevoir moi‐<br />

même et entrer en relation plus directe <strong>avec</strong> vous; mais ce rapprochement ne sera pas<br />

beaucoup retardé; ma santé, sans être tout à fait remise, sʹest néanmoins améliorée, jʹespère<br />

toujours revenir pour la fin dʹavril ou le commencement <strong>de</strong> mai; alors, je me ferai un plai‐<br />

sir <strong>de</strong> vous rendre la visite que vous voulez bien nous faire aujourdʹhui, et tout me laisse<br />

espérer que ce sera le commencement <strong>de</strong>s rapports habituels et constants qui sʹétabliront<br />

désormais entre nous.<br />

Veuillez recevoir, Monsieur lʹabbé, les sentiments <strong>de</strong> respect et dʹaffection <strong>avec</strong> les‐<br />

quels je suis<br />

Votre humble et dévoué serviteur en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Lʹadresse <strong>de</strong> notre maison à Vaugirard est: maison <strong>de</strong>s orphelins, Chemin du<br />

Moulin n°1.<br />

446


Je prends la confiance <strong>de</strong> recomman<strong>de</strong>r bien particulièrement à vos prières un <strong>de</strong><br />

nos frères que Dieu vient <strong>de</strong> rappeler à Lui, après une longue maladie <strong>de</strong> 9 mois qui, je<br />

lʹespère, lʹaura purifié et préparé à paraître au jugement du Seigneur. Cʹest notre f. Joseph<br />

Vince, dont M. Caille vous aura peut‐être parlé et que nous avions primitivement placé<br />

<strong>avec</strong> lui à Amiens; sa piété, son dévouement sans limites, sa mort résignée et toute édi‐<br />

fiante sont pour nous <strong>de</strong> grands motifs dʹespérance et <strong>de</strong> consolation.<br />

358 à M. Myionnet<br />

A la suite du décès du frère Vince, MLP. estime nécessaire <strong>de</strong> recueillir <strong>de</strong>s notes pour une notice nécrologique.<br />

Dans la vie <strong>de</strong>s œuvres, ne pas ʺfaire <strong>de</strong> la nuit le jour et réciproquementʺ. Espérance <strong>de</strong> voir se réaliser lʹunion<br />

<strong>avec</strong> M. Halluin. Affaire <strong>de</strong> lʹabbé Choyer dʹAngers. Recherche dʹune villégiature proche <strong>de</strong> Vaugirard.<br />

Hyères, 1er avril 1856<br />

Fête <strong>de</strong> St Joseph233 Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je signe et je vous renvoie immédiatement, comme vous me le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z, la pièce<br />

concernant notre enfant Gentil.<br />

Jʹai lu <strong>avec</strong> un profond intérêt les quelques détails que vous me donnez au sujet <strong>de</strong><br />

lʹenterrement <strong>de</strong> notre bien‐aimé f. Joseph, je pense que tout est ainsi selon la volonté <strong>de</strong><br />

Dieu et, bien quʹil mʹen coûte <strong>de</strong> nʹavoir aucune trace sensible <strong>de</strong> son passage parmi nous,<br />

je me résigne à ce que le Seigneur semble avoir disposé. Gardons au moins chèrement sa<br />

mémoire, il nous a donné <strong>de</strong> précieux exemples, que la trace en reste au milieu <strong>de</strong> nous; ne<br />

laissez pas tomber la pensée <strong>de</strong> recueillir quelques notes pour une petite notice, faites en<br />

sorte quʹon sʹen occupe sans délai; le tourbillon <strong>de</strong>s occupations emporte si vite chez nous<br />

les traces <strong>de</strong> la veille quʹon fait sagement <strong>de</strong> ne pas attendre au len<strong>de</strong>main. Je remercie nos<br />

bons ff. Louis [Boursier], Ernest [Vasseur], Alphonse [Vasseur], Edouard [Polvêche], Jo‐<br />

seph Assier qui mʹont écrit, je leur répondrai quelques lignes au plus tôt, ainsi quʹà notre<br />

bon abbé Hello. Veillez à ce quʹil se repose un peu; il apporte dans ses œuvres une ar<strong>de</strong>ur<br />

et un zèle qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> temps en temps un peu <strong>de</strong> calme, sinon il sʹusera en quelques<br />

années; tâchez quʹil prenne un peu <strong>de</strong> repos, je vous le recomman<strong>de</strong>.<br />

Vous ne me dites point quand nos frères désireront sʹinstaller à Nazareth; il me<br />

paraîtrait bien que M. Paillé y fût à ce moment pour tout commencer en ordre. Jʹexamine‐<br />

rai bien attentivement le règlement dès que vous me lʹaurez envoyé. Je crois toujours que<br />

9h.30 serait bien pour la fermeture <strong>de</strong> la maison le soir; la chose est hors <strong>de</strong> doute pour ce<br />

qui regar<strong>de</strong> la communauté; pour les œuvres, ne pourriez‐vous soumettre la question à<br />

MM. Baudon et Decaux, en leur exposant les motifs pour et contre? Je suis convaincu que<br />

nos frères sʹexagèrent les difficultés, et quʹune fois le pli pris, rien ne semblerait plus sim‐<br />

ple. Nʹest‐ce pas un abus <strong>de</strong> faire <strong>de</strong> la nuit le jour et réciproquement; ne <strong>de</strong>vons‐nous pas<br />

tendre à réformer ce qui est en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> lʹordre en toutes choses? Consultez, croyez‐moi,<br />

MM. Baudon et Decaux; si la chose était posée par eux pour toutes leurs œuvres, elle au‐<br />

rait bien plus dʹautorité et <strong>de</strong> consistance.<br />

Je bénis le bon St Joseph, sous les auspices duquel mʹarrive la bonne nouvelle <strong>de</strong><br />

lʹautorisation <strong>de</strong> notre loterie; que notre f. Maignen suive maintenant vivement lʹexécution,<br />

233 On pourrait s'étonner du rapprochement 1 er avril et fête <strong>de</strong> saint Joseph. En 1856, le 19 mars tombant dans la Semaine Sainte, la<br />

Saint-Joseph avait été reportée après l'Octave <strong>de</strong> Pâques.<br />

447


car il est déjà bien tard; quʹon tâche <strong>de</strong> consulter M me <strong>de</strong> Vatry en tout et <strong>de</strong> beaucoup la<br />

laisser faire, <strong>de</strong> nʹagir que sous sa direction, car nous pourrons beaucoup moins faire<br />

quʹelle; ne négligeons pas néanmoins les moyens dont nous pouvons disposer. Je crois<br />

quʹil faut mettre sur les billets, non pas: Maison <strong>de</strong>s Orphelins <strong>de</strong> Vaugirard, mais: Loterie<br />

en faveur <strong>de</strong> la Maison <strong>de</strong>s Orphelins (placée sous le patronage <strong>de</strong> M gr lʹArch. <strong>de</strong> Paris), à<br />

Vaugirard, Chemin etc.; autrement, on pourrait penser quʹil sʹagit <strong>de</strong>s orphelins <strong>de</strong> la ville<br />

<strong>de</strong> Vaugirard seulement. Que notre f. Maignen sʹenten<strong>de</strong> pour tout cela <strong>avec</strong> M me <strong>de</strong> Vatry<br />

et quʹil tâche que les billets soient bien disposés. Je crois que M me <strong>de</strong> Vatry a <strong>de</strong> lʹordre et<br />

déjà une expérience acquise <strong>de</strong> ces opérations charitables.<br />

Je recomman<strong>de</strong> tous les jours, <strong>avec</strong> mon f. Paillé, lʹaffaire dʹArras au bon S t Joseph et<br />

à la S te Famille tout entière. Offrez mes sentiments <strong>de</strong> respects et dʹaffection à M. Halluin,<br />

jʹai gran<strong>de</strong> espérance que le Seigneur nous unira à lui; son âme me semble être <strong>de</strong> la<br />

trempe qui convient à notre famille, son œuvre est pauvre et dépendante <strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce<br />

comme les nôtres; nous sommes dans la même voie, je crois que cʹest la charité du Sei‐<br />

gneur qui nous rapproche les uns <strong>de</strong>s autres.<br />

Je nʹai point entendu parler <strong>de</strong> M. Flour. Voyez si vous croyez quʹil soit à propos<br />

que M. Dauchez, à lʹoccasion, réveille un peu ses bonnes dispositions ou sʹil vaut mieux le<br />

laisser à ses propres inspirations. Vous ne me parlez plus du jeune bijoutier. Nous verrons,<br />

pour les ff. Roussel et Carment, comment nous arranger; sʹil y avait urgence, avisez; sinon,<br />

<strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> patience, le bon Maître nous donnera bientôt peut‐être quelque moyen <strong>de</strong><br />

sortir dʹembarras. Je nʹai rien à dire sur les nouveaux arrangements concernant Grenelle,<br />

ils peuvent aller comme vous indiquez; il faut prendre les choses comme il plaît à la divine<br />

Sagesse <strong>de</strong> les régler pour nous.<br />

Ne manquez pas <strong>de</strong> remercier particulièrement M. le Curé <strong>de</strong> Vaugirard, et dites‐lui<br />

que ses bontés pour nous me sont une bien douce consolation. Il me semble quʹaprès mon<br />

retour, on pourrait faire une petite réunion <strong>de</strong> nos amis et bienfaiteurs qui remplacerait la<br />

fête <strong>de</strong> la S t <strong>Jean</strong>.<br />

Remerciez bien aussi ces dames <strong>de</strong>s Oiseaux, elles sont bien bonnes pour nous;<br />

prions surtout beaucoup pour nos bienfaiteurs, la charité dans laquelle nous vivons doit<br />

lʹinspirer à nos cœurs. Vous ne mʹavez rien dit <strong>de</strong>s Dames du Temple. Je nʹoublierai pas<br />

<strong>de</strong>vant Dieu lʹaffaire <strong>de</strong> M me <strong>de</strong> Montmorency. Je regrette que vous nʹayez pas trouvé M.<br />

Houdard, cette affaire <strong>de</strong>mandait à être traitée <strong>de</strong> vive voix; ne pourriez‐vous lui <strong>de</strong>man‐<br />

<strong>de</strong>r un ren<strong>de</strong>z‐vous pour lui communiquer le plan? Supposeriez‐vous quʹil vous évite vo‐<br />

lontairement?<br />

M gr dʹAngers vient <strong>de</strong> mʹenvoyer ses man<strong>de</strong>ments <strong>avec</strong> une lettre toute pleine <strong>de</strong><br />

bonté, mais pressante plus que jamais pour lʹaffaire <strong>de</strong> M. Choyer; il dit, ce bon évêque,<br />

quʹil veut conclure cette œuvre et la bien asseoir avant <strong>de</strong> mourir; je vais lui répondre <strong>de</strong><br />

mon mieux. 234<br />

Je ne tiens pas à Cachan 235 , jʹy voyais lʹavantage <strong>de</strong> lʹéconomie et aussi celui <strong>de</strong> la<br />

gran<strong>de</strong> proximité; jʹaurais pu ainsi venir journellement à Vaugirard comme promena<strong>de</strong><br />

234 Depuis quelque temps, Mgr Angebault insistait pour que MLP. s'arrangeât <strong>avec</strong> l'abbé Choyer, qui dirigeait à Angers <strong>de</strong>s ateliers<br />

<strong>de</strong> sculpture et d'orfèvrerie et qui était désireux d'agréger son œuvre à la Congrégation.<br />

235 M. Myionnet cherchait une villégiature pour MLP. Il avait d'abord pensé à Cachan, près d'Arcueil, mais finit par trouver à Chaville.<br />

Non pas la maison qui fut achetée plus tard en 1862 et où <strong>de</strong>vait mourir MLP, mais un petit pavillon, situé près <strong>de</strong> la station<br />

du chemin <strong>de</strong> fer <strong>de</strong> la rive gauche, qui fut loué par la Communauté. C'est là que le 18 juin, pour la première fois, les Frères vinrent<br />

conduire MLP. à sa villégiature. (VLP. I, 540).<br />

448


qui mʹest recommandée, et vous‐même bien aisément vous mʹauriez eu sous la main; si<br />

vous pensez quʹil soit mieux <strong>de</strong> faire autrement, cherchez aux environs <strong>de</strong> Clamart ou dʹIs‐<br />

sy, pas bien loin; quand vous aurez trouvé, nous verrons quel parti nous <strong>de</strong>vons prendre.<br />

Adieu, bien cher ami, jʹembrasse tendrement tous mes enfants, grands et petits, et<br />

vous qui êtes le plus gros <strong>de</strong> tous. Si mon fils Maignen nʹa pas le temps <strong>de</strong> mʹécrire, quʹil<br />

prie notre bon abbé Hello <strong>de</strong> me dire ce quʹil croirait utile <strong>de</strong> mʹécrire.<br />

Votre ami et Père en J.M.J.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

359 <strong>de</strong> M. Paillé à M. Maignen<br />

Détails sur la vie <strong>de</strong> MLP. et <strong>de</strong> M. Paillé à Hyères. Traits édifiants sur la vie du frère Vince, en particulier son<br />

amour <strong>de</strong>s pauvres.<br />

[Hyères, 2 avril 1856]<br />

Mon bien cher frère,<br />

Il y a longtemps que je ne vous ai écrit pour vous donner <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> la santé <strong>de</strong> M. Le<br />

<strong>Prevost</strong>. Son état me paraissait à peu près le même; cependant, <strong>de</strong>puis une dizaine <strong>de</strong> jours, il nʹen<br />

est pas ainsi. Lʹhiver à Hyères a été très pluvieux. Lorsque nous sommes arrivés, les pluies ve‐<br />

naient <strong>de</strong> cesser, mais elles ont repris à lʹapproche <strong>de</strong> la Semaine Sainte. M. Le <strong>Prevost</strong> a été 4 jours<br />

sans pouvoir se promener. Depuis quelques jours, les pluies ont cessé, mais le vent est continuel et<br />

dur, M. Le <strong>Prevost</strong> en souffre beaucoup. La toux commence à reparaître, ainsi que quelques cra‐<br />

chats. La poitrine est dʹune gran<strong>de</strong> faiblesse. Les digestions cependant sont assez bonnes.<br />

Nous regrettons beaucoup le séjour du Vernet, son air pur et calme, son soleil resplendis‐<br />

sant, ses bons habitants si simples et si chrétiens. A Hyères, lʹair est un peu plus lourd, les habi‐<br />

tants mous et presque sans foi. Les promena<strong>de</strong>s sont charmantes, beaucoup plus nombreuses et<br />

plus variées quʹau Vernet, mais on nʹy rencontre pas <strong>de</strong>s gens simples et bons.<br />

Notre histoire <strong>de</strong>puis notre départ du Vernet contient peu dʹévènements. Cependant, jʹai<br />

commencé par oublier au Vernet mon portefeuille qui contenait cinq cents francs. Je ne mʹen aper‐<br />

çus quʹà notre arrivée à Perpignan, à 13 heures du Vernet. Il mʹa fallu prendre la voiture <strong>de</strong> 10h. du<br />

soir, gravir la montagne à 5h. du matin, au clair <strong>de</strong> la lune, par un froid très piquant, et frapper à la<br />

porte <strong>de</strong> lʹétablissement Merca<strong>de</strong>r à 6h. du matin, comme un revenant. J’ai retrouvé facilement<br />

mon portefeuille et mʹen suis retourné <strong>de</strong> suite à Pra<strong>de</strong>s, à 11 kilomètres, pedibus cum jambis, heu‐<br />

reux dʹen être quitte à si bon marché. Notre voyage jusquʹà Hyères a eu lieu par un beau temps,<br />

sans trop <strong>de</strong> fatigues. A Hyères, nous avons quitté les grands airs <strong>de</strong> seigneurs que nous avions<br />

eus jusquʹalors; nous avons pris les allures <strong>de</strong> vieux garçons. Nous avons pris un petit logement au<br />

troisième étage, <strong>de</strong> 40f par mois. Nous nous faisons apporter notre dîner. Les restes servent pour le<br />

déjeuner du len<strong>de</strong>main. Cʹest moi qui suis le valet <strong>de</strong> chambre et le gâte‐sauce. Je fais les lits, je ba‐<br />

laye la chambre et le cabinet. Je fais le petit déjeuner. Je réchauffe les vian<strong>de</strong>s, je mʹélève jusquʹà<br />

faire <strong>de</strong>s omelettes et <strong>de</strong>s œufs à la coque, je me distingue enfin. Notre petit logement est situé au<br />

midi; il est toujours à une température <strong>de</strong> 15 à 17 <strong>de</strong>grés. Ce qui déroute M. Le <strong>Prevost</strong>, cʹest le vent<br />

<strong>de</strong> mer qui souffle <strong>de</strong>puis longtemps. Il est à espérer quʹà la nouvelle lune, qui aura lieu vendredi<br />

prochain, le vent changera et quʹalors M. Le <strong>Prevost</strong> ira mieux. Priez toujours pour sa santé, elle<br />

n,ʹest pas encore arrivée au point où nous le désirons.<br />

Notre cher f. Vince est au Ciel, jʹen ai la douce confiance. On doit faire une petite notice sur<br />

lui. Je viens apporter ma petite pierre. Un dimanche, revenant <strong>de</strong> la Sainte‐Famille <strong>de</strong>s Gobelins,<br />

nous causions <strong>de</strong>s pauvres chiffonniers <strong>de</strong> la Cité Dorée. Notre bon frère, dans lʹar<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> son zèle<br />

pour le salut <strong>de</strong> ces pauvres âmes, cherchait tous les moyens <strong>de</strong> les attirer à la Sainte‐Famille, il<br />

449


était désolé <strong>de</strong> voir quʹil ne pouvait y réussir. Enfin, il finit par me dire: ʺMon bon ami, je suis<br />

convaincu que, pour les amener à notre œuvre, il faut les aller chercher chez eux et les amener en<br />

quelque sorte par le bras. Aussi, <strong>de</strong>puis longtemps, jʹai une idée qui me poursuit et que je vous<br />

confierai dans lʹintimité. Je pense que, si je prenais une hotte et un crochet et que jʹallasse me mêler<br />

à eux, jʹen viendrais à bout. En allant fouiller dans les ordures, je leur dirais <strong>de</strong> bonnes paroles, je<br />

les amènerais à se convertir, et alors nous aurions une Sainte‐Famille <strong>de</strong> vrais chiffonniers, bien<br />

florissante.ʺ Je souris beaucoup <strong>de</strong> son idée, je lʹen plaisantai même, mais je ne pus mʹempêcher<br />

dʹadmirer son zèle pour le salut <strong>de</strong>s âmes qui ne trouve rien qui puisse lʹarrêter, pas même lʹigno‐<br />

minieuse hotte. Je dis lʹignominieuse parce que, comme vous le savez, cʹest la dégradation morale<br />

qui conduit à lʹétat <strong>de</strong> chiffonnier.<br />

Ainsi je me plais à me représenter notre bon frère: 1° <strong>avec</strong> sa hotte, cherchant à sauver les<br />

âmes; 2° ayant dans les bras un petit enfant mala<strong>de</strong>, le berçant, le caressant, lʹembrassant pour lui<br />

faire oublier ou au moins alléger ses souffrances, ayant pour les petits mala<strong>de</strong>s la tendresse dʹune<br />

mère; 3° impassible <strong>de</strong>vant lʹidée <strong>de</strong> la mort, comprenant combien il faut être pur pour paraître<br />

<strong>de</strong>vant Dieu, ayant comme prière intérieure: Amplius lava me ab iniquitate mea, se purifiant tous les<br />

jours dans le sang <strong>de</strong> Notre Seigneur par la confession; 4° après tant <strong>de</strong> souffrances et <strong>de</strong> purifica‐<br />

tions intérieures et sacramentelles, je me le figure, après la mort, introduit dans le Ciel par saint Jo‐<br />

seph quʹil a tant aimé et dont il sʹest occupé <strong>de</strong> répandre la dévotion.<br />

Mon bien cher frère, que nous serions heureux si tous les membres <strong>de</strong> notre Communauté<br />

avaient une mort environnée <strong>de</strong> tant <strong>de</strong> grâces, comme celle <strong>de</strong> notre bon frère! Pour moi, je suis<br />

plus porté à chanter un Te Deum quʹà dire le De profundis.<br />

Jʹai appris que vous aviez nommé pour Supérieur <strong>de</strong> Nazareth un singulier frère. Je ne vous<br />

en dirai rien dans cette lettre‐ci; mais, dans la prochaine, jʹespère me venger et vous faire rougir <strong>de</strong><br />

votre choix. En attendant, je baisse la tête sous la charge et me recomman<strong>de</strong> dʹune manière particu‐<br />

lière à vos prières. Dites bien au f. Hello que je me cramponne après lui; quʹil faut quʹil soit mon<br />

soutien à lʹautel, et que, sʹil ne prie pas pour moi dʹune manière particulière, il est perdu et moi<br />

<strong>avec</strong> lui.<br />

Adieu, mon bien cher frère, je vous embrasse <strong>de</strong> tout mon cœur, ainsi que tous nos frères,<br />

dans les saints Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre tout dévoué frère<br />

Paillé<br />

Mon bon ami, M. Le <strong>Prevost</strong> vous rappelle que les poires séchées <strong>de</strong> Grenelle sont dans le<br />

secrétaire du petit parloir du haut en bas. Sauvez <strong>de</strong> la moisissure les habits et autres effets qui<br />

sont dans ma commo<strong>de</strong> et mon armoire.<br />

360 à M. Myionnet<br />

La santé <strong>de</strong> MLP. reste faible. Il ne rentrera pas avant la mi‐mai. Besoins financiers.<br />

4 avril 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie une petite lettre du f. Paillé et <strong>de</strong>ux billets pour <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> nos frères.<br />

Nous allons ici comme <strong>de</strong> coutume; mes jambes sont <strong>de</strong>venues un peu plus fortes,<br />

mais ma poitrine reste et restera encore longtemps, sinon toujours, dʹune faiblesse telle<br />

quʹil y a bien peu <strong>de</strong> service à en attendre. Jʹai vu aujourdʹhui, pour la première fois, un<br />

mé<strong>de</strong>cin à Hyères; il est très rassurant, comme les autres, quant au fond du mal qui ne lui<br />

semble pas menaçant présentement, mais il veut <strong>de</strong>s ménagements extrêmes et tient abso‐<br />

lument le même langage que le mé<strong>de</strong>cin <strong>de</strong> Vernet; il nʹest pas dʹavis que je reste ici passé<br />

450


la fin <strong>de</strong> mai, mais il me conseille <strong>de</strong> mettre une quinzaine pour le retour, afin <strong>de</strong> ne pas<br />

revenir sans transition à Paris et <strong>de</strong> mʹacclimater à la température du Nord après avoir vé‐<br />

cu dans celle du Midi; on mʹavait recommandé la même chose au Vernet. Mon retour ne<br />

serait donc comme vous me le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z si instamment, que pour le 15 mai. Mais mon f.<br />

Paillé se récrie sur lʹinsuffisance <strong>de</strong>s 300f que je vous ai <strong>de</strong>mandés et assure quʹayant bien<br />

fait ses calculs, il se trouvera à sec avant notre arrivée, si nous nous en tenons à ce chiffre.<br />

Il vous prie instamment dʹenvoyer 500f promettant <strong>de</strong> vous rapporter à peu près certai‐<br />

nement 100f, mais aimant mieux avoir cette somme en avance que <strong>de</strong> se trouver en embar‐<br />

ras.<br />

Voyez, mon bon ami, si vous pouvez disposer <strong>de</strong> cette somme. Vous nʹauriez pas <strong>de</strong><br />

meilleur moyen, ce me semble, que <strong>de</strong> lʹenvoyer en billets par lettre chargée; voyez pour‐<br />

tant si quelque autre moyen vous paraît meilleur.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

361 à M. Myionnet<br />

Premier examen du règlement <strong>de</strong> Nazareth. Comment se préparer à entrer en retraite. Démarches pour les Œu‐<br />

vres et la Communauté.<br />

Hyères, 6 avril 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu ce matin lʹenvoi que vous mʹavez fait du règlement provisoire pour nos ff.<br />

<strong>de</strong> Nazareth; je vais lʹexaminer <strong>avec</strong> le f. Paillé. Au premier aspect, lʹesprit et les disposi‐<br />

tions générales me semblent bien, je nʹai pu mʹarrêter encore aux points <strong>de</strong> détail. Vous ne<br />

me dites point sʹil est nécessaire, à votre avis, que le f. Paillé revienne avant moi; il me se‐<br />

rait assurément bien plus commo<strong>de</strong> quʹil restât <strong>avec</strong> moi jusquʹà mon retour au 15 mai,<br />

mais je crois que, rigoureusement, je pourrais aller seul; dites‐moi donc ce qui vous semble<br />

le mieux nous le ferons.<br />

Je prie bien pour votre retraite, nous nous y unirons <strong>de</strong> cœur, mon f. Paillé et moi; je<br />

trouve bien que le f. Marcaire y vienne <strong>avec</strong> le jeune frère futur [Allard]; M. Marcaire fera<br />

bien <strong>de</strong> ne pas trop se dissiper par beaucoup <strong>de</strong> courses avant la retraite, afin <strong>de</strong> nʹy être<br />

pas trop poursuivi par les choses du <strong>de</strong>hors.<br />

Jʹespérais que vous aviez lʹautorisation <strong>de</strong> notre loterie; je ne crois pas quʹil soit pra‐<br />

ticable dʹécrire à Mgr Gerbet pour un pareil objet et à si gran<strong>de</strong> distance <strong>de</strong> lui; si jʹétais près<br />

<strong>de</strong> Perpignan, jʹaurais pu lʹaller voir et, <strong>de</strong> vive voix, on fait bien plus aisément ce quʹon<br />

veut; mais ici nous sommes à 100 lieues et plus <strong>de</strong> lui. La visite <strong>de</strong> Mme <strong>de</strong> Vatry au Préfet<br />

serait décisive, faites tout pour lʹobtenir; notre bon abbé <strong>de</strong> Girardin est mille fois bon, je<br />

veux à mon arrivée le remercier du plus profond <strong>de</strong> mon cœur; il sʹest donné bien <strong>de</strong>s pei‐<br />

nes pour nous, jʹespère que le succès va enfin couronner cette bonne œuvre, mais faîtes ce<br />

qui dépendra <strong>de</strong> vous pour hâter la visite <strong>de</strong> Mme <strong>de</strong> Vatry; le temps nous gagne. Vous ne<br />

mʹavez rien dit <strong>de</strong> la visite <strong>de</strong> M. Maignen à M. Trébuchet, nʹa‐t‐elle donc eu aucun effet?<br />

Il ne faut pas trop pousser lʹaffaire <strong>de</strong> M. Baulez; son notaire, M. Demanche, mʹa dit dʹaller<br />

doucement; nous verrons comment la chose se déci<strong>de</strong>ra; sʹil nʹy a pas urgence, je reverrai<br />

M. Demanche à mon retour.<br />

451


Je nʹai pas le temps dʹen écrire plus long à cause <strong>de</strong> lʹheure <strong>de</strong> la poste. Jʹembrasse vous et<br />

tous nos frères dans les Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

362 à M. Vasseur<br />

MLP. le prépare à sa prochaine retraite: le renoncement est le ʺ<strong>de</strong>rnier mot <strong>de</strong> la vie religieuseʺ. Désir <strong>de</strong> MLP.<br />

<strong>de</strong> sʹunir à ses frères par la charité, dans le Cœur <strong>de</strong> Dieu.<br />

Hyères, 6 avril 1856<br />

Très cher enfant en N.S.,<br />

Je ne vous écris que quelques lignes, ayant à faire plusieurs lettres; mais je me dé‐<br />

dommagerai bien après mon retour qui maintenant sera prochain, je lʹespère; je ne pourrai<br />

pas vous parler beaucoup, car le souffle et la voix me manqueraient bientôt, mais je vous<br />

verrai, je serai près <strong>de</strong> vous et je prierai le Seigneur <strong>de</strong> dire à votre cœur ce que je ne pour‐<br />

rai autrement exprimer.<br />

Je vous ai suivi par la pensée durant les solennités <strong>de</strong> la Semaine Sainte; jʹavais <strong>de</strong>‐<br />

mandé à Dieu pour vous beaucoup <strong>de</strong> grâces pendant ces jours <strong>de</strong> bénédiction; cʹest la<br />

consolation et la douceur après la dureté <strong>de</strong> lʹhiver et les austérités du Carême que ces<br />

pieuses cérémonies <strong>de</strong>s jours saints et <strong>de</strong>s fêtes <strong>de</strong> Pâques. Je vois <strong>avec</strong> joie, par votre let‐<br />

tre, que mes vœux ont été exaucés. Je vais maintenant prier pour votre retraite; puisse‐t‐<br />

elle être bien fructueuse pour vos âmes; préparez‐y bien votre cœur, mon cher Alphonse;<br />

ouvrez‐le pour que le Seigneur y entre et y opère selon les <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> son amour. Jʹai la<br />

confiance quʹaprès ces saints exercices, vous aurez fait quelques pas <strong>de</strong> plus dans la voie<br />

du renoncement, qui est toute la doctrine <strong>de</strong> Jésus‐Christ, le sommaire <strong>de</strong> la perfection et<br />

le <strong>de</strong>rnier mot <strong>de</strong> la vie religieuse. Ces quelques pas faits vers Dieu seront aussi faits pour<br />

votre vieil ami et Père, car qui est‐ce qui pourrait nous séparer sinon ce qui est contraire à<br />

la pure charité, et qui est‐ce qui unira et fondra nos âmes, sinon cette perte <strong>de</strong> nous‐mêmes<br />

en Dieu qui consomme notre union dans son divin Cœur.<br />

Je vous embrasse tendrement.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

363 à M. Myionnet<br />

Explications <strong>de</strong>mandées sur le changement <strong>de</strong> statut <strong>de</strong> la propriété <strong>de</strong> Vaugirard pour autoriser la loterie. Il faut<br />

trouver <strong>de</strong>s ressources pour la Communauté. Un bienfaiteur fait don dʹune maison.<br />

Hyères, 10 avril 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Pour répondre vite et poste pour poste à votre lettre, je vais le faire laconiquement;<br />

ne prenez pas pour <strong>de</strong> la sécheresse, qui nʹest pas dans ma volonté, une brièveté que le dé‐<br />

faut <strong>de</strong> temps comman<strong>de</strong>.<br />

Jʹai reçu vos 500f, je vous en remercie; je regretterais dʹimposer cette dépense à la<br />

Communauté si la bonne Provi<strong>de</strong>nce ne <strong>de</strong>vait sʹen charger; Mlle Gauthier mʹoffre 300f, je<br />

452


lui écris pour les accepter et la prier <strong>de</strong> vous les remettre; déjà, M me Taillandier vous avez<br />

remis 100f pour mon retour; si, sur les 500f, nous en rapportons 100, nous établirons la ba‐<br />

lance; déjà précé<strong>de</strong>mment, cʹest <strong>avec</strong> les dons quʹon mʹavait faits à lʹoccasion <strong>de</strong> mon dé‐<br />

part et <strong>avec</strong> la quote‐part du f. Paillé que nous avons pu pourvoir à nos frais <strong>de</strong>puis mon<br />

éloignement <strong>de</strong> Vaugirard; il sera donc vrai <strong>de</strong> dire que le divin Maître a daigné préparer<br />

lui‐même notre viatique, grâces en soient rendues à sa paternelle bonté.<br />

Vous ne me donnez pas dʹexplication assez claire relativement à votre proposition<br />

dʹabandon aux sœurs <strong>de</strong> Charité <strong>de</strong> la propriété <strong>de</strong> Vaugirard, en cas <strong>de</strong> dissolution <strong>de</strong> no‐<br />

tre Société. Enten<strong>de</strong>z‐vous par ce mot Société les trois acquéreurs <strong>de</strong> la propriété, ou bien<br />

la Communauté elle‐même, ou enfin lʹétablissement <strong>de</strong>s orphelins? Si vous enten<strong>de</strong>z seu‐<br />

lement lʹassociation <strong>de</strong>s acquéreurs, elle sʹéteindra à la mort du <strong>de</strong>rnier <strong>de</strong>s trois tout au<br />

plus tard, et en admettant que légalement on nʹen conteste pas lʹexistence, quand lʹun ou<br />

<strong>de</strong>ux <strong>de</strong>s trois seront décédés; alors cela nʹirait pas bien loin et, après un petit nombre<br />

dʹannées, en vertu <strong>de</strong> lʹacte dʹabandon, la propriété reviendrait aux sœurs <strong>de</strong> Charité, et la<br />

Communauté laissée <strong>de</strong>rrière serait frustrée.<br />

Enten<strong>de</strong>z‐vous la Communauté dans son ensemble? Je serais bien alors <strong>de</strong> votre<br />

avis; elle venant à sʹéteindre, rien <strong>de</strong> mieux à faire que <strong>de</strong> faire passer lʹimmeuble à une<br />

<strong>de</strong>stination charitable. Mais il me semble évi<strong>de</strong>nt que lʹadministration nʹa pas eu en vue la<br />

Communauté, quʹelle ne connaît pas ou qui est nulle à ses yeux, puisquʹelle nʹa pas dʹexis‐<br />

tence légale.<br />

Enfin, voulez‐vous parler seulement <strong>de</strong> lʹinstitution <strong>de</strong>s orphelins, et serait‐ce en cas<br />

<strong>de</strong> dissolution <strong>de</strong> cet établissement que nous <strong>de</strong>vrions déguerpir et abandonner la proprié‐<br />

té à dʹautres? Mais alors ce serait bien nous lier; rien ne nous répond que, dans quelques<br />

années, nous ne trouverons pas à propos <strong>de</strong> remplacer cette œuvre par une autre, ou <strong>de</strong> la<br />

transformer, ou <strong>de</strong> la porter ailleurs; en tous cas, il y aura matière à difficulté ou à un dé‐<br />

triment considérable pour notre Communauté. Si, comme je crois lʹentrevoir, vous dési‐<br />

gnez par ce mot <strong>de</strong> Société lʹespèce <strong>de</strong> tontine ou association constituée entre les trois ac‐<br />

quéreurs et qui laissera propriétaire le <strong>de</strong>rnier survivant, il faudrait être bien positivement<br />

assuré, avant <strong>de</strong> faire lʹacte dʹabandon que vous proposez, non seulement que cette Société<br />

est bien soli<strong>de</strong> et ne peut être contestée après le décès <strong>de</strong> lʹun ou <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>s associés, mais<br />

encore quʹelle peut se continuer en remplaçant par dʹautres les associés qui viendraient à<br />

mourir; or, cʹest là ce qui ne mʹa pas paru certain et qui me semble même assez douteux; il<br />

y aura lieu sans doute à <strong>de</strong>s transmissions par testament ou autres actes qui changeront les<br />

conditions <strong>de</strong> la Société actuelle et pourront la faire considérer comme légalement dis‐<br />

soute; or, en ce cas, lʹimmeuble reviendra aux sœurs <strong>de</strong> Charité. Eclaircissez bien ces<br />

points avant <strong>de</strong> faire la démarche que vous proposez, car elle pourrait en divers cas, ainsi<br />

que je lʹindique, donner lieu à <strong>de</strong> fâcheuses conséquences pour nous.<br />

Lʹabandon proposé constituerait dʹailleurs une véritable donation (en certains cas<br />

prévus) au profit <strong>de</strong>s sœurs <strong>de</strong> Charité; cette donation, pour nʹêtre pas fictive, <strong>de</strong>vrait né‐<br />

cessairement avoir leur consentement ou lʹacceptation <strong>de</strong> leur part; lʹaffaire ainsi posée ne<br />

pourrait être traitée quʹadministrativement, cʹest‐à‐dire quʹelle serait portée à lʹexamen du<br />

Conseil dʹEtat et traînerait inévitablement plusieurs mois, six peut‐être; ce seraient <strong>de</strong> bien<br />

longs retards. Je crois quʹil est essentiel que vous consultiez sur tout cela M. Lambert et<br />

que vous ne fassiez rien sans son avis. Puis, après tant <strong>de</strong> délais et <strong>de</strong> difficultés, la loterie<br />

serait‐elle enfin autorisée? La chose est bien incertaine. Je ne puis vous donner dʹavis plus<br />

453


précis, vos explications ne mʹayant pas suffisamment éclairé; consultez M. Lambert et rap‐<br />

portez‐vous à son avis.<br />

Il est bien essentiel, dans cette situation, <strong>de</strong> ne pas en <strong>de</strong>meurer là, et sans tar<strong>de</strong>r, et<br />

<strong>avec</strong> toutes les diligences possibles, <strong>de</strong> créer quelques ressources pour les besoins du mo‐<br />

ment; jʹaimerais bien mieux un sermon ou quelque autre moyen selon nos vues chrétien‐<br />

nes, mais, si nous nʹavons pas le choix, il faut se résigner à celui que M me <strong>de</strong> Vatry choisira<br />

(une représentation théâtrale ou un bal excepté). Un concert préparé par elle ne peut être<br />

mal composé; son amie, M me <strong>de</strong> Spare, y chanterait sans doute, cʹest une personne bien po‐<br />

sée qui ne se compromettra point dans une assemblée mal convenante.<br />

Pour la location <strong>de</strong>s bâtiments en bas <strong>de</strong> notre maison, je crois quʹil faut les louer à<br />

2.500f pour 9 ans, si on ne peut les louer pour 3, 6 ou 9. Quand même nous serions<br />

contraints plus tard <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s constructions sur le hangar ou autrement pour une di‐<br />

zaine <strong>de</strong> mille francs, ce serait bien moins lourd pour nous et aussi plus commo<strong>de</strong> que <strong>de</strong><br />

porter une partie <strong>de</strong> nos dépendances à une distance énorme du reste <strong>de</strong> la maison.<br />

Jʹenverrai une petite lettre à M. Maignen pour M me Abel Laurent.<br />

Quant à M. Baulez, vous ne mʹexpliquez pas assez nettement lʹaffaire, la clarté est si<br />

nécessaire pour sʹentendre. M. Baulez nous donne‐t‐il définitivement cette maison? Com‐<br />

ment nous la donne‐t‐il? Autrefois, il mʹavait dit quʹil la mettrait en notre nom par un acte<br />

<strong>de</strong> vente, a‐t‐il changé dʹavis? M. Demanche, son notaire, le dissuadait <strong>de</strong> cette donation<br />

ou voulait au moins que certaines difficultés quʹil entrevoyait fussent levées; ne serait‐il<br />

pas mieux <strong>de</strong> le voir? Cette maison sera vendue à vil prix, ne vaudrait‐il pas mieux la lais‐<br />

ser en location? Jʹavais pensé que, si elle nous appartenait définitivement, on pourrait la<br />

badigeonner et replâtrer un peu et la mettre dans notre loterie. Voyez tout cela, je ne puis<br />

répondre sans <strong>de</strong> nouveaux renseignements <strong>de</strong> votre part.<br />

Si vous louez les bâtiments <strong>de</strong> Vaugirard, prenez <strong>de</strong>s renseignements sur les loca‐<br />

taires, stipulez quʹils ne pourraient cé<strong>de</strong>r leur location sans notre permission. Nous exami‐<br />

nerons la question <strong>de</strong> porter à 25f la pension <strong>de</strong>s enfants et nous la déci<strong>de</strong>rons à mon re‐<br />

tour; cette mesure présentement porterait préjudice à lʹappel que nous voulons faire à la<br />

charité par la loterie ou autrement.<br />

Je vous embrasse ainsi que nos frères.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

363‐1 à M. l’abbé Timon‐David<br />

M. Paillé a rendu visite à Timon‐David. Espoir <strong>de</strong> voir se rapprocher les <strong>de</strong>ux Œuvres. MLP. accepte lʹinvita‐<br />

tion <strong>de</strong> passer quelques jours à Marseille.<br />

Hyères, 12 avril 1856<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Je vous remercie mille fois du bon et affectueux accueil que vous avez fait à M. Pail‐<br />

lé et lui‐même vous en exprime <strong>avec</strong> moi toute sa reconnaissance.<br />

Il mʹest revenu très édifié <strong>de</strong> tout ce quʹil a vu <strong>de</strong> votre excellente œuvre et bien dé‐<br />

sireux <strong>de</strong> la voir se répandre gran<strong>de</strong>ment afin dʹétendre le bien quʹelle produit pour la pré‐<br />

servation <strong>de</strong> la jeunesse et la sanctification <strong>de</strong> tous ceux qui sont appelés à y coopérer.<br />

Ce sera pour moi une vraie satisfaction <strong>de</strong> voir à mon tour les résultats si précieux<br />

<strong>de</strong> vos efforts, <strong>de</strong> vos sollicitu<strong>de</strong>s, <strong>de</strong> vos ru<strong>de</strong>s sacrifices. Jʹespère que cette étu<strong>de</strong> dʹune<br />

454


institution si sainte et si vraiment charitable ne sera pas inutile pour nos propres entrepri‐<br />

ses et que je pourrai rapporter à nos frères <strong>de</strong> Paris quelques observations dont ils tireront<br />

parti pour la gloire su Seigneur; enfin jʹespère aussi que ce rapprochement resserrera les<br />

liens dʹaffection qui nous unissent déjà.<br />

Je ne prévois pas que nous quittions Hyères avant les premiers jours <strong>de</strong> mai; jʹac‐<br />

cepte du reste <strong>avec</strong> empressement, pour <strong>de</strong>ux ou trois jours, lʹhospitalité fraternelle que<br />

vous voulez bien mʹoffrir, ma santé étant maintenant assez remise pour que je nʹaie pas à<br />

craindre <strong>de</strong> vous être incommo<strong>de</strong> et <strong>de</strong> rien déranger aux habitu<strong>de</strong>s ni au régime <strong>de</strong> votre<br />

Maison.<br />

Jʹaurai soin <strong>de</strong> vous prévenir dʹavance du jour précis <strong>de</strong> notre arrivée afin que nous<br />

ne courrions pas le risque <strong>de</strong> vous trouver absent.<br />

Veuillez recevoir, cher Monsieur lʹabbé, les sentiments <strong>de</strong> respect et dʹaffection <strong>avec</strong><br />

lesquels je suis<br />

Votre humble et dévoué serviteur en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

364 à M. Myionnet<br />

Corrections à faire au règlement <strong>de</strong> Nazareth. Le poids <strong>de</strong>s soucis matériels incombe au Supérieur. Les sujets ac‐<br />

cueillis en communauté ne doivent pas être une charge pour elle. Ne pas donner un emploi à un débutant avant<br />

dʹavoir éprouvé ses aptitu<strong>de</strong>s.<br />

Hyères, 14 avril 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai examiné attentivement le projet <strong>de</strong> règlement provisoire que vous mʹavez en‐<br />

voyé pour Nazareth. Jʹen trouve, comme je vous lʹai dit, lʹesprit et les dispositions généra‐<br />

les tout à fait convenables. Pour lʹordre <strong>de</strong>s exercices <strong>de</strong> la journée, je crois quʹil y a nécessi‐<br />

té dʹy apporter quelques petites modifications, parce quʹon nʹy avait pas réservé le temps<br />

<strong>de</strong> sommeil indispensable et que, dʹautre part, plusieurs exercices étaient entassés dans <strong>de</strong><br />

si courts espaces quʹil eût été absolument impossible <strong>de</strong> les exécuter tels quʹils étaient indi‐<br />

qués sur le papier. Je suis assuré quʹen revoyant ce projet, en regard duquel jʹai fait consi‐<br />

gner par notre f. Paillé quelques observations, vous partagerez mon avis, et je compte as‐<br />

sez aussi sur le bon esprit <strong>de</strong> nos frères pour être convaincu quʹils se rendront à <strong>de</strong>s avis<br />

que mʹinspire seul le désir <strong>de</strong> les établir dans <strong>de</strong>s conditions qui concilient le bien <strong>de</strong> leurs<br />

âmes, <strong>de</strong> leur santé et aussi celui <strong>de</strong>s œuvres dont ils sont chargés.<br />

Nous nʹoublions pas, mon f. Paillé et moi, que vous commencez ce soir votre re‐<br />

traite; nous prierons pour vous bien ar<strong>de</strong>mment et nous nous tiendrons unis à vous <strong>de</strong><br />

cœur et participerons, je lʹespère, aux bons mouvements que lʹEsprit‐Saint opérera en vous<br />

durant ces pieux exercices.<br />

Je trouve très bonne la pensée que vous avez eue <strong>de</strong> faire prier nos frères et leur<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r un jeûne pour obtenir le secours <strong>de</strong> Dieu dans les besoins <strong>de</strong> la Communauté; je<br />

crois toutefois quʹil ne faut parler aux frères <strong>de</strong> vos embarras <strong>de</strong> finances, quand vous en<br />

avez, quʹ<strong>avec</strong> beaucoup <strong>de</strong> ménagement pour ne pas les alarmer; cʹest dʹailleurs au chef <strong>de</strong><br />

la Communauté à porter cette charge <strong>de</strong>s préoccupations matérielles, les frères doivent,<br />

pour lʹordinaire, en être exempts, ce soin ne les regardant pas; je ne crois pas non plus quʹil<br />

faille trop faire bruit, au‐<strong>de</strong>hors, <strong>de</strong> votre pauvreté; vous accroîtrez les défiances <strong>de</strong>s gens<br />

455


pru<strong>de</strong>nts à lʹégard <strong>de</strong> la Communauté; je pense quʹil faut aller en tout cela <strong>avec</strong> beaucoup<br />

<strong>de</strong> circonspection; agissez activement et surtout appuyez‐vous sur Dieu et, comme vous le<br />

dites bien dans votre <strong>de</strong>rnière lettre, que je reçois à lʹinstant, son secours qui ne nous a ja‐<br />

mais manqué ne nous fera pas défaut.<br />

Jʹavais prié M. Hello <strong>de</strong> vous inviter à désigner celui <strong>de</strong>s frères qui <strong>de</strong>vra réussir les<br />

notes pour la notice <strong>de</strong> notre f. Vince et en faire un ensemble; occupez‐vous en sans retard<br />

après la retraite; vous le savez, chez nous plus quʹailleurs, les choses différées sont mises<br />

en oubli, on nʹobtient <strong>de</strong> résultat quʹen les suivant <strong>avec</strong> fermeté et précision.<br />

Vous ne mʹavez pas dit pourquoi M. Houdard nous abandonnait; lʹavons‐nous<br />

contrarié en quelque chose? Auriez‐vous omis <strong>de</strong> lui payer les arrérages dont nous avions<br />

promis <strong>de</strong> lui tenir compte pour 1856 sur ses inscriptions romaines?<br />

Jʹapprouve bien votre sermon projeté pour la maison <strong>de</strong> Vaugirard, mais il faudra<br />

que cette affaire soit suivie bien activement; si cela traîne, ce sera chose manquée. Ne crai‐<br />

gnez‐vous pas que la Pentecôte soit un délai bien court? Voyez, mais le temps presse, vous<br />

le sentez ainsi que moi.<br />

Il ne faut pas négliger non plus la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> réduite pour la loterie à 10.000f, moins<br />

même, si on vous le conseille comme plus pru<strong>de</strong>nt; mais le plus pressé est le sermon. La<br />

souscription est bien aussi; il faut seulement quʹun moyen ne nuise pas à lʹautre.<br />

Je ne vois pas beaucoup dʹinconvénient à envoyer M. Ernest [Vasseur] à Amiens<br />

temporairement, à la place <strong>de</strong> M. Mainville, si M. Caille le trouve bon, peut‐être M. <strong>de</strong><br />

Renneville en sera bien contrarié; si vous preniez ce parti, vous pourriez le donner à ces<br />

jeunes frères comme un essai momentané dʹun mois ou <strong>de</strong>ux pour le rétablissement <strong>de</strong> la<br />

santé du jeune f. Ernest.<br />

Faites pour M. Assier ce que la pru<strong>de</strong>nce vous suggérera dans lʹintérêt <strong>de</strong> la com‐<br />

munauté. Vous ne pouvez assurément pas le gar<strong>de</strong>r, sʹil a <strong>de</strong>s infirmités incommo<strong>de</strong>s; la<br />

pension <strong>de</strong> 600f que vous avez <strong>de</strong>mandée est, en tout cas, ce me semble, bien insuffisante;<br />

je crois que nous ne pouvons recevoir <strong>de</strong>s frères dont les familles sont dans lʹaisance<br />

quʹ<strong>avec</strong> une pension qui couvre pleinement leurs dépenses, quand ils ne peuvent être à<br />

peu près dʹaucune utilité dans nos œuvres; ils doivent être considérés alors comme pre‐<br />

nant parmi nous un asile pieux que la communauté peut accor<strong>de</strong>r, à la condition quʹil nʹen<br />

résulte pas <strong>de</strong> charges pour elle.<br />

Vos vues au sujet <strong>de</strong> M. Boucault me semblent bonnes, mais vous allez bien vite, je<br />

le crois. Cʹest trop promptement lui donner une lour<strong>de</strong> charge que <strong>de</strong> le mettre dʹemblée<br />

aux classes, dès son arrivée, sans être sûr quʹil y ait aptitu<strong>de</strong> et disposition; à mon avis, si<br />

vous lʹessayez, ce <strong>de</strong>vrait être pour <strong>de</strong>ux heures par jour seulement, jusquʹà ce quʹil sʹy soit<br />

bien accoutumé et que vous soyez bien certain <strong>de</strong> ne le pas rebuter par <strong>de</strong>s occupations<br />

dʹabord trop difficiles et trop préoccupantes; il paraît être ar<strong>de</strong>nt, il prendra peut‐être vi‐<br />

vement la chose, mais il peut aussi bientôt se décourager, allez‐y doucement.<br />

Adieu, mon bien bon ami, je viens <strong>de</strong> recevoir <strong>de</strong> M. Maignen une bonne lettre sur<br />

les travaux et les œuvres <strong>de</strong> Nazareth; jʹespère que ce sera le tour <strong>de</strong> Vaugirard prochai‐<br />

nement et que vos affaires, <strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> Dieu, prendront une meilleure face. Je vous em‐<br />

brasse affectueusement.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

456


Je vous prie, mon bien bon ami, <strong>de</strong> veiller à ce que vos lettres soient bien affran‐<br />

chies; quelquefois elles ne le sont pas du tout, notamment <strong>de</strong>ux ou trois <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rnières;<br />

celle que jʹai reçue aujourdʹhui a été taxée à 80 centimes <strong>de</strong> supplément; il mʹen arrive en ce<br />

moment une <strong>de</strong> M. Maignen <strong>avec</strong> un supplément <strong>de</strong> 60 centimes; il faudrait faire peser vos<br />

lettres à la poste en cas <strong>de</strong> doute; un pèse‐lettres ne coûte que 2f.50<br />

Voici le taux <strong>de</strong>s affranchissements pour les lettres <strong>de</strong> différents poids:<br />

Jusquʹà 7 gram.½ inclus, timbre <strong>de</strong> 20c<br />

Jusquʹà 15 gram. inclus, timbre <strong>de</strong> 40c<br />

De 15 à 100 gram., il faut un timbre <strong>de</strong> 80c<br />

De 100 à 200, un timbre <strong>de</strong> 1f.60<br />

365 à M. Decaux<br />

MLP. sʹextasie <strong>de</strong>vant la beauté <strong>de</strong> la Provence. Etat religieux du pays: ʺil faudrait ici souffler un peu le feu sacré<br />

dans les âmesʺ. Remerciements pour le zèle déployé en faveur <strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong> Nazareth. Projets pour la Sainte‐<br />

Famille.<br />

Hyères, 18 avril 1856<br />

Très cher ami et frère en N.S.,<br />

Je ne vous ai pas encore écrit <strong>de</strong>puis mon arrivée ici, ce nʹest pas faute dʹen avoir eu<br />

souvent lʹintention, mais je suis peu fait pour les changements <strong>de</strong> lieu; à chaque station<br />

nouvelle, il me faut mʹacclimater, refaire <strong>de</strong>s habitu<strong>de</strong>s, classer les emplois <strong>de</strong> la journée,<br />

mʹasseoir en un mot; me voici, sauf nouveau dérangement, à peu près assis, jʹen profite<br />

pour vous écrire quelques lignes.<br />

Je ne vous dirai rien du pays où nous nous trouvons, mon f. Paillé et moi; beaucoup<br />

<strong>de</strong> nos amis y sont venus avant nous et ont pu vous en parler, MM. Legentil et Tulasne en<br />

particulier; cʹest sans doute le plus beau pays <strong>de</strong> France, la contrée la plus riche par ses<br />

productions, le climat le plus doux, le soleil le plus radieux; toutes les plus gran<strong>de</strong>s mer‐<br />

veilles <strong>de</strong> la nature y sont réunies, la mer, <strong>de</strong>s montages, <strong>de</strong>s vallées charmantes, tous les<br />

arbres <strong>de</strong> nos contrées du Nord et tous ceux <strong>de</strong>s climats plus chauds quʹon a su y acclima‐<br />

ter; en certain lieux, on se pourrait croire à lʹombre <strong>de</strong>s palmiers <strong>de</strong> la Syrie; en dʹautres,<br />

dans les bois <strong>de</strong> sapins <strong>de</strong>s régions septentrionales; <strong>de</strong> quelque côté quʹon aille, on a <strong>de</strong>s<br />

vues délicieuses, <strong>de</strong>s horizons à souhait; les mala<strong>de</strong>s y trouvent <strong>de</strong>s promena<strong>de</strong>s sans<br />

nombre toujours variées, sur les hauteurs ou à plat pays, selon leurs goûts et leurs forces.<br />

Pour suppléer à la faiblesse <strong>de</strong> leurs jambes, ils ont <strong>de</strong> pacifiques et patientes montures<br />

très injustement dédaignées chez nous et dont jʹai pu moi‐même, au Vernet et ici, appré‐<br />

cier les soli<strong>de</strong>s qualités; ce nʹest pas très majestueux assurément <strong>de</strong> chevaucher sur un âne,<br />

mais cʹest très sûr et très commo<strong>de</strong>; on peut prier, penser, lire tout en marchant, sans souci<br />

et sans fatigue et, si lʹon vient à tomber, comme je le fis hier sur le varech au bord <strong>de</strong> la<br />

mer, cʹest sans nul risque ni grave contusion. Si jʹétais dans la condition <strong>de</strong>s hommes <strong>de</strong><br />

loisir qui, par état, doivent chercher tout ce qui peut les charmer et les réjouir, je mʹépa‐<br />

nouirais davantage sans doute dans ce merveilleux pays <strong>de</strong> Provence où tout semble fait<br />

pour rendre la vie agréable et douce; mais jʹai pris mon rôle <strong>de</strong> mala<strong>de</strong> au sérieux, je nʹuse<br />

<strong>de</strong> tout que comme médicament; lʹair, le soleil, les promena<strong>de</strong>s, les délassements, je prends<br />

tout cela par ordonnance, je nʹen jouis pas et ne mʹy porte pas par attrait.<br />

457


Jʹadmire les bontés adorables du Seigneur dans les dons si variés quʹIl a faits à ses<br />

créatures, et Il semble ici les avoir prodigués; mais je me sens encore mieux rappelé à Lui<br />

par <strong>de</strong>s beautés dʹun genre plus sévère; les âpres sommets <strong>de</strong>s Pyrénées, les mœurs ru<strong>de</strong>s<br />

et simples <strong>de</strong>s pauvres villageois du Vernet me convenaient mieux et rappelaient mieux, à<br />

mon sens, la voie que la foi trace ici‐bas à lʹhomme déchu et pénitent. Cʹest vous dire, mon<br />

bien bon ami, quʹà part même les tendres affections et les graves soins qui me tournent in‐<br />

cessamment vers vous, je ne suis ici que parce quʹil faut que jʹy sois, parce que la volonté<br />

divine mʹy a porté, et quʹen revenir me sera facile et que mes adieux seront bientôt faits.<br />

Jʹai pourtant trouvé ici, et ce mʹa été une douce consolation, <strong>de</strong> bons Confrères <strong>de</strong><br />

Paris, et aussi une Conférence qui mʹa fait tout un entourage dʹamis. Ceux qui la compo‐<br />

sent me semblent excellents; son Prési<strong>de</strong>nt et les membres du bureau, en particulier, sont<br />

animés du meilleur esprit; leurs œuvres ont peu dʹextension jusquʹici et se bornent presque<br />

à la visite <strong>de</strong> quelques familles pauvres qui pourraient être suffisamment assistées dʹail‐<br />

leurs. Il y aurait beaucoup à faire pour les enfants et les jeunes gens, généralement fort mal<br />

élevés et qui ne semblent pas préparer <strong>de</strong> belles générations pour le pays; mais nos<br />

Confrères sont timi<strong>de</strong>s, peu entreprenants, retenus par leurs habitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> vie douce et<br />

paisible. M. Becquet, ancien Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> S t ‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul, cousin <strong>de</strong> M. Legentil, les<br />

pousse beaucoup et je lʹy ai<strong>de</strong> un peu; je ne sais si nous arriverons à quelque résultat. je<br />

trouve ici bien moins dʹélan et <strong>de</strong> vie que dans la Conférence <strong>de</strong> Pra<strong>de</strong>s qui est vraiment<br />

zélée et semble avoir une vraie intelligence du rôle et <strong>de</strong> lʹaction réservés aux Conférences;<br />

il faudrait ici souffler un peu le feu sacré dans les âmes; malheureusement je nʹai plus<br />

guère <strong>de</strong> souffle <strong>de</strong> vigueur, mes forces trahissent bientôt ma volonté.<br />

Comment ne me sentirais‐je pas attiré vers Paris quand incessamment je reçois <strong>de</strong><br />

nouveaux témoignages <strong>de</strong> la bonté, <strong>de</strong> lʹaffection, du dévouement <strong>de</strong>s amis que jʹy ai lais‐<br />

sés. M. Maignen, dans ses lettres, ne tarit pas en éloges sur le zèle et lʹincomparable charité<br />

<strong>de</strong> nos Confrères qui le couvrent, dit‐il, <strong>de</strong> confusion par les exemples quʹils lui donnent et<br />

les œuvres généreuses quʹils accomplissent pour mener à bonne fin nos entreprises. Je ne<br />

veux pas vous dire, mon bon ami, tout ce quʹil mʹécrit en particulier <strong>de</strong> sa reconnaissance<br />

pour vos assistances sans nombre et les témoignages <strong>de</strong> votre affectueuse bonté. En lisant<br />

<strong>avec</strong> une joie profon<strong>de</strong> ces détails si consolants, je ne puis mʹempêcher <strong>de</strong> trouver bien<br />

bonne et bien opportune cette maladie qui ne mʹa éloigné <strong>de</strong> nos œuvres que pour mieux<br />

mettre au jour le zèle et le dévouement chrétien <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> notre chère Société.<br />

Ayons bonne confiance, mon cher et bien‐aimé ami, les œuvres <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> S t ‐Vincent‐<br />

<strong>de</strong>‐Paul grandissant <strong>avec</strong> elle peuvent opérer une gran<strong>de</strong> action sur les âmes et <strong>de</strong>venir<br />

aux mains <strong>de</strong> Dieu un puissant moyen <strong>de</strong> salut; pour moi, à mesure que jʹavance, je prends<br />

un intérêt toujours plus grand à ses moindres entreprises car jʹy vois <strong>de</strong> précieuses semen‐<br />

ces et <strong>de</strong>s promesses pleines dʹavenir.<br />

M. Maignen mʹa dit en ensemble tout ce que vous faites pour lʹorganisation <strong>de</strong> notre<br />

maison <strong>de</strong> Nazareth; je remercie Dieu incessamment <strong>de</strong> ce quʹIl met dans votre esprit et<br />

dans votre cœur pour lʹachèvement <strong>de</strong> cette bonne œuvre, et jʹy vois un indice <strong>de</strong> ses vues<br />

miséricordieuses à lʹégard <strong>de</strong>s pauvres, <strong>de</strong>s ouvriers, <strong>de</strong>s enfants que nous nous efforçons<br />

<strong>de</strong> ramener à Lui; sa Sagesse proportionne les moyens à la fin quʹelle veut atteindre et,<br />

puisquʹIl nous met aux mains <strong>de</strong>s ressources plus puissantes pour le bien qu’Il ne lʹavait<br />

fait jusquʹici, cʹest quʹIl veut opérer ainsi quelques œuvres notables dʹédification et <strong>de</strong> sa‐<br />

458


lut. Puissions‐nous être <strong>de</strong>s instruments humbles et dociles et correspondre fidèlement à<br />

ses <strong>de</strong>sseins.<br />

Je voulais vous communiquer quelques pensées qui me sont venues au sujet <strong>de</strong> no‐<br />

tre Sainte‐Famille et qui tendraient à rentrer plus directement dans la fin que nous nous<br />

étions proposée primitivement, <strong>de</strong> rendre à nos pauvres gens les sentiments et les mœurs<br />

<strong>de</strong> la famille chrétienne; mais je recule <strong>de</strong>vant les longueurs dʹun exposé écrit, jʹajourne<br />

donc jusquʹà mon retour les détails que jʹaurais à vous donner à ce sujet et qui nʹatteignent<br />

dʹailleurs aucunement le fond <strong>de</strong> lʹŒuvre.<br />

Je ne sais pas encore précisément le jour <strong>de</strong> mon retour, jʹattends une réponse <strong>de</strong> M.<br />

Tessier dont les avis doivent régler mon départ. La belle saison me rend un peu <strong>de</strong> forces<br />

et laisse à mes mouvements un peu plus <strong>de</strong> liberté; mais le point capital, la faiblesse et la<br />

susceptibilité <strong>de</strong> ma poitrine, reste à peu près dans le même état; <strong>avec</strong> la vie <strong>de</strong> repos et <strong>de</strong><br />

soins que je mène, <strong>avec</strong> un climat comme celui dʹHyères, lʹexistence me semble encore<br />

possible pour un temps, mais hors <strong>de</strong> ces conditions je doute quʹil y ait moyen dʹavancer;<br />

lʹété peut‐être me permettra dʹamasser <strong>de</strong>s forces pour lʹhiver; Dieu le sait, je nʹai pas, pour<br />

moi, besoin <strong>de</strong> le savoir, et je nʹai surtout pas à mʹen inquiéter; à chaque jour suffit son mal.<br />

Soyez assez bon, mon cher ami, pour offrir à lʹoccasion mes respectueux sentiments à no‐<br />

tre excellent Prési<strong>de</strong>nt, M. Baudon, ainsi quʹà tous les membres du Conseil qui ont la chari‐<br />

té <strong>de</strong> se souvenir <strong>de</strong> moi; je les remercie une fois encore <strong>de</strong> leurs prières et je les conjure <strong>de</strong><br />

mʹen continuer le bienfait. Ne mʹoubliez pas non plus près <strong>de</strong> tous ces zélés Confrères qui<br />

partagent vos travaux et sollicitu<strong>de</strong>s pour nos œuvres <strong>de</strong> Nazareth.<br />

Adieu, mon bien bon ami, vous comptez parmi les plus douces joies promises à<br />

mon retour; vous revoir et vous embrasser sera pour moi une gran<strong>de</strong> et vraie consolation.<br />

Bon souvenir particulier à M. Frion et à son excellente famille.<br />

Votre tout affectionné ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

366 à M. Maignen<br />

Réponse à plusieurs questions concernant la situation <strong>de</strong> la Communauté. Fidélité dans la prière: ʺle souffle <strong>de</strong><br />

Dieu peut seul mener notre barqueʺ.<br />

Hyères, 23 avril 1856<br />

Très cher enfant en N.S.,<br />

Je regrette bien <strong>de</strong> ne répondre aujourdʹhui que quelques lignes à la bonne et affec‐<br />

tueuse lettre que vous mʹavez envoyée <strong>de</strong>rnièrement; je vous y ai trouvé tout entier, tel<br />

que vous êtes dans vos meilleurs jours; jʹai été tout consolé <strong>de</strong>s détails encourageants que<br />

vous mʹavez donnés sur Nazareth et aussi jʹai été bien touché <strong>de</strong> ce que vous me dites du<br />

zèle, <strong>de</strong> la bienveillance <strong>de</strong> nos Confrères et amis. Jʹai, comme vous le désiriez, écrit à M.<br />

Decaux; aujourdʹhui, je vous envoie une petite lettre pour M. Boutron et une autre pour<br />

nos pauvres gens <strong>de</strong> Nazareth. Je joins aussi à la présente le projet <strong>de</strong> règlement <strong>de</strong> leur<br />

maison <strong>de</strong> retraite, je lʹai un peu modifié, mais en rien dʹessentiel; je vous prie <strong>de</strong> le faire<br />

recopier lisiblement avant <strong>de</strong> le remettre à M. Boutron.<br />

M. Myionnet mʹécrit que vous vous installez provisoirement à Nazareth, en atten‐<br />

dant le f. Paillé; je nʹai pas encore reçu la réponse <strong>de</strong> M. Tessier que jʹai consulté sur lʹépo‐<br />

459


que <strong>de</strong> mon retour; quand je saurai à quoi mʹen tenir à ce sujet, je verrai mieux si je puis,<br />

comme je le désire, vous renvoyer sans plus <strong>de</strong> retard notre f. Paillé.<br />

Si nos affaires <strong>de</strong> Nazareth sont en assez bon chemin, il nʹen est pas <strong>de</strong> même <strong>de</strong> cel‐<br />

les <strong>de</strong> Vaugirard; je souhaite bien que le Seigneur vous inspire pour le choix <strong>de</strong>s meilleurs<br />

moyens et quʹIl dispose favorablement les esprits pour vous amener à un résultat que<br />

lʹépoque <strong>de</strong> la saison et les besoins <strong>de</strong> la maison ren<strong>de</strong>nt bien urgent.<br />

Je ferai successivement <strong>de</strong> petites lettres pour les personnes que vous me désignez;<br />

en attendant, remerciez‐les bien vivement en mon nom.<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> joie le bon succès <strong>de</strong> votre retraite; jʹécrirai aussi à notre cher abbé<br />

Hello, aux ff. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet]et Emile [Beauvais] dès que je le pourrai.<br />

Prions toujours beaucoup, cher enfant, car le souffle <strong>de</strong> Dieu peut seul mener notre<br />

barque à bon port; heureusement, jusquʹici, il ne nous a point manqué; si nous sommes fi‐<br />

dèles, Il le sera <strong>de</strong> son côté.<br />

Le f. Paillé vous embrasse et mʹoblige à venir dîner; cʹest une gran<strong>de</strong> tyrannie, mais<br />

je suis obligé <strong>de</strong> cé<strong>de</strong>r.<br />

Je vous embrasse tous dans votre petit Nazareth et je prie le Seigneur dʹêtre au mi‐<br />

lieu <strong>de</strong> vous.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

367 à M. Carment<br />

Exhortation à la dévotion intérieure. Observations sur <strong>de</strong>s pénitences peu discrètes, employées après la retraite.<br />

Dès son retour, MLP. compte lʹemmener <strong>avec</strong> lui à Amiens.<br />

Hyères, 24 avril 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Vous mʹavez envoyé une belle gran<strong>de</strong> lettre, et je vous fais une toute petite réponse;<br />

cʹest que, pour lʹécrire longue, il faudrait choisir les moments, attendre bien <strong>de</strong>s jours peut‐<br />

être, au lieu quʹun petit billet pas trop long se glisse dans quelque court intervalle et<br />

trouve aisément sa place; jʹaime mieux donc vous envoyer quelques lignes seulement que<br />

<strong>de</strong> courir le risque <strong>de</strong> ne pas vous en envoyer du tout ou <strong>de</strong> vous les faire attendre bien<br />

plus que je nʹen aurais le désir.<br />

Je suis heureux, cher enfant, <strong>de</strong>s bons sentiments que le divin Maître vous inspire,<br />

<strong>de</strong> la cordiale application que vous avez donnée à votre retraite, <strong>de</strong>s résolutions généreu‐<br />

ses que vous avez prises et <strong>de</strong>s liens <strong>de</strong> filial attachement qui vous enchaînent au service<br />

tout particulier <strong>de</strong> votre tout aimée Mère, la S te Vierge Marie. Jʹaimerais toutefois que ces<br />

liens fussent plus intérieurs et spirituels quʹextérieurs et matériels; cette chaîne <strong>de</strong> fer <strong>avec</strong><br />

ses pointes aiguës est‐elle donc une représentation vraie du tendre et amoureux dévoue‐<br />

ment qui nous attache à la plus douce, à la plus miséricordieuse <strong>de</strong>s Mères; il me semble<br />

que notre Patron saint François <strong>de</strong> Sales, tout ami quʹil fût <strong>de</strong> la mortification, nʹeût pas<br />

conseillé celle‐là en lʹhonneur <strong>de</strong> la Mère aimable, clémente et aussi très pru<strong>de</strong>nte . Je ne<br />

crois pas en effet, très cher ami, que ce moyen soit pru<strong>de</strong>nt pour vous; il serait excessif<br />

pour tous jour et nuit <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s travaux comme les vôtres; pour vous surtout, et <strong>avec</strong> un<br />

tempérament nerveux, irascible comme lʹest le vôtre, cette pénitence me semble excessive,<br />

ou mieux tout à fait intolérable. Dieu a permis que momentanément, après la retraite, et<br />

460


comme témoignage <strong>de</strong> vos bons désirs dʹamen<strong>de</strong>ment, vous ayez pu supporter quelques<br />

jours cette mortification, mais je croirais manquer <strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nce et <strong>de</strong> véritable soin <strong>de</strong> votre<br />

sanctification comme <strong>de</strong> votre santé si je vous autorisais à user immesurément <strong>de</strong> ce<br />

moyen; <strong>de</strong>ux ou trois heures par semaine, pris en esprit dʹobéissance et <strong>de</strong> généreux désir<br />

dʹêtre tout à Dieu par Marie, cela suffira, cher enfant; cʹest à cela quʹil faut vous arrêter;<br />

pour tranquilliser votre esprit, faites une petite visite à notre saint p. Beaussier, parlez‐lui<br />

<strong>de</strong> ce sujet, vous le trouverez, jʹen réponds dʹavance, <strong>de</strong> mon avis.<br />

Jʹaimerais à mʹentretenir un peu intimement <strong>avec</strong> vous sur les bons fruits <strong>de</strong> votre<br />

retraite et sur les observations que vous me communiquez pour rendre cet exercice encore<br />

plus salutaire, mais cela me conduirait bien loin et ma feuille serait beaucoup trop étroite;<br />

à mon retour, jʹaurai repris assez <strong>de</strong> forces pour en causer <strong>de</strong> vive voix <strong>avec</strong> vous et je nʹy<br />

manquerai point. Je désire sincèrement, comme vous, que vous puissiez avoir un jour <strong>de</strong><br />

repos chaque semaine pour vous retremper un peu; je vais en dire un mot à notre f.<br />

Myionnet qui fera <strong>avec</strong> vous tout ce quʹil pourra pour arriver à cet arrangement.<br />

Je me propose, à la fin <strong>de</strong> mai, aussitôt après mon retour, dʹaller à Amiens; vous se‐<br />

rez, si vous le voulez, mon compagnon <strong>de</strong> route; il me semble que cela vous soutiendra un<br />

peu là‐bas <strong>de</strong> mʹavoir <strong>avec</strong> vous. Si vous trouviez cette époque trop éloignée, vous pouvez<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r 4 ou 6 jours à notre f. Myionnet et régler <strong>avec</strong> lui le moment <strong>de</strong> ce voyage.<br />

Voyez, cher enfant, lequel <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux partis vous semble le meilleur. Je dis 4 ou 6 jours,<br />

parce que je crois que cela pourrait suffire, mais, si vous ne croyez pas pouvoir mʹattendre,<br />

vous réglerez ce point comme tous les autres <strong>avec</strong> M. Myionnet et pourriez écrire, dans un<br />

sens comme dans un autre, dʹune façon positive à vos parents. Je ne finirais pas là, mon<br />

bien cher enfant, si jʹen croyais ma tendre affection qui me fait trouver courts les instants<br />

que je passe à converser <strong>avec</strong> vous, mais jʹai beaucoup dʹécritures à faire. Je me borne donc<br />

à ces quelques mots que je termine en priant le Seigneur <strong>de</strong> vous donner, par Marie,<br />

lʹabondance <strong>de</strong> ses grâces et <strong>de</strong> ses bénédictions.<br />

Je vous embrasse bien affectueusement.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹécrirai bientôt à M lle Payen. Excusez‐moi près dʹelle. Offrez‐lui mon respect. Sou‐<br />

venir à la mère Georges. Embrassez pour moi mon p. Louis [Boursier].<br />

368 à M. Planchat<br />

Tension à Grenelle. Accepter les humiliations, ʺfaire et ne pas paraîtreʺ, est dans lʹesprit <strong>de</strong> notre famille reli‐<br />

gieuse. Ce qui est dépensé dans lʹactivité extérieure doit être regagné par le recueillement et le retour habituel à<br />

Dieu.<br />

Hyères, 25 avril 1856<br />

Très cher ami et bien‐aimé fils en N.S.,<br />

Si je voulais, en répondant à votre toute bonne et toute affectueuse lettre, propor‐<br />

tionner mes effusions <strong>avec</strong> vous aux douces consolations quʹelle mʹa données, je vous fe‐<br />

rais une bien longue épître car, dʹun bout à lʹautre, votre chère missive mʹa vivement inté‐<br />

ressé et profondément ému; vous y avez répandu votre âme toute aimante et vous avez<br />

trouvé, dans votre bon désir <strong>de</strong> mʹassocier aux soins <strong>de</strong> vos œuvres, les détails les plus ai‐<br />

461


mables et les plus touchants. Je vous en remercie tendrement, très cher ami, et je bénis <strong>avec</strong><br />

vous le Seigneur, premier principe et unique auteur du bien qui sʹest opéré sous vos yeux.<br />

Jʹentre bien dans vos sentiments et votre sécurité sur nos affaires <strong>de</strong> Grenelle; je<br />

crois que le Seigneur ne nous retirera pas <strong>de</strong> ce pays, ou quʹil ne nous en rappellerait que<br />

pour nous faire opérer plus <strong>de</strong> bien ailleurs pour sa gloire; quant au mépris quʹon fait <strong>de</strong><br />

nous, cʹest pain bénit tel que Jésus lʹa toujours rompu à ses vrais disciples; faire et ne pas<br />

paraître est essentiellement dans lʹesprit <strong>de</strong> notre petite famille, <strong>de</strong>meurons donc en paix,<br />

tant quʹil en est ainsi, nous marchons, nous vivons.<br />

Je prends bien part aux peines <strong>de</strong> votre bonne mère et je suis bien touché, comme<br />

vous, <strong>de</strong> son courageux dévouement; Dieu lʹa visiblement soutenue en tant dʹépreuves que<br />

nous lui avons vu subir, ce doit lui être une gran<strong>de</strong> consolation <strong>de</strong> sentir si manifestement<br />

le secours divin; assurez‐la que je prie <strong>avec</strong> vous pour elle et que je mʹassocie à votre res‐<br />

pect, à votre tendre attachement à son égard.<br />

Je suis bien satisfait <strong>de</strong>s détails que vous me donnez sur votre santé, sur vos dispo‐<br />

sitions intérieures qui vous inclinent au calme, au recueillement, au retour habituel à Dieu;<br />

cʹest le seul moyen <strong>de</strong> compenser les gran<strong>de</strong>s dépenses que vous fait faire votre activité, et<br />

cʹest à cette condition seulement quʹelle nʹépuisera pas tout ensemble le fonds et le revenu;<br />

suivez bien cette pente, très cher ami, où le Seigneur vous met bien visiblement et où Il<br />

vous ramène <strong>avec</strong> tant <strong>de</strong> bonté quand vous ten<strong>de</strong>z à vous en éloigner.<br />

Notre f. Myionnet mʹa écrit que votre grand sacrifice était fait, consummatum, il nʹy a<br />

plus à y revenir, nous voilà liés jusquʹau <strong>de</strong>rnier jour 236 ; il me semble bien que, pour moi, je<br />

ne mʹen repentirai point, tâchez pour votre part dʹen prendre aussi votre parti.<br />

Adieu, bien cher ami, je vous charge dʹembrasser tout particulièrement mon p. Lan‐<br />

tiez qui, sans doute, a gardé presque seul son troupeau durant la retraite et qui doit être<br />

bien fatigué; dites‐lui que son bon ange a compté ses peines pour les offrir à Dieu et que<br />

moi je lʹen remercie bien affectueusement.<br />

Votre ami et père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

369 à M. Halluin<br />

MLP. le presse <strong>de</strong> se réunir à lʹInstitut; ʺlʹunion <strong>de</strong>s cœurs est la compensation <strong>de</strong>s travaux et <strong>de</strong>s sacrificesʺ. Il<br />

développe ce quʹil lui a déjà écrit concernant la place et le rôle <strong>de</strong>s prêtres.(l. 355). Avantage <strong>de</strong> lʹunion cordiale<br />

et vraie <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux éléments. La direction laïque nʹa pas été une idée préconçue, mais le fait <strong>de</strong>s circonstances.<br />

Hyères, 29 avril 1856<br />

Monsieur lʹabbé,<br />

Votre bonne et charitable lettre du 23 <strong>de</strong> ce mois mʹa rempli <strong>de</strong> joie et <strong>de</strong> consolation<br />

par les dispositions toutes favorables que vous y manifestez pour notre union projetée; je<br />

suis, <strong>de</strong> plus, convaincu que cette pensée est <strong>de</strong> Dieu; je lui en ai <strong>de</strong>mandé instamment la<br />

réalisation, et jʹai la confiance que cette grâce ne nous sera point refusée. Nʹest‐il pas bien<br />

désirable, en effet, que les hommes <strong>de</strong> cœur et <strong>de</strong> bonne volonté se concertent et sʹunissent<br />

pour le bien; nʹest‐ce pas leur seule ressource pour sʹopposer efficacement au mal? Vous<br />

lʹaurez remarqué comme nous, Monsieur lʹabbé, partout où le zèle sʹapplique <strong>avec</strong> ar<strong>de</strong>ur<br />

236 Le samedi 19 avril, à la fin <strong>de</strong> la retraite <strong>de</strong> Communauté, le père Planchat avait prononcé ses vœux perpétuels.<br />

462


et persévérance, il obtient <strong>de</strong>s résultats inespérés; que les âmes vraiment dévouées se rap‐<br />

prochent donc et sʹenten<strong>de</strong>nt et, malgré le malheur du temps, on opérera <strong>de</strong> véritables<br />

œuvres <strong>de</strong> salut.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong>s bonnes et encourageantes paroles que vous mʹécrivez au sujet<br />

<strong>de</strong> mes frères <strong>de</strong> Vaugirard; cʹest un tout petit troupeau, mais je crois quʹil marche sous les<br />

yeux <strong>de</strong> Dieu, animé <strong>de</strong> lʹesprit <strong>de</strong> sacrifice et <strong>de</strong> vraie charité; je suis heureux, Monsieur<br />

lʹabbé, que votre cœur ait senti pour eux quelque sympathie, jʹen augure bien pour lʹave‐<br />

nir; jʹose bien vous assurer dʹavance quʹau jour où, comme je lʹespère, vous nous accepte‐<br />

rez définitivement pour frères, toutes ces âmes sʹouvriront et vous voueront une sincère,<br />

une inviolable affection. Lʹunion <strong>de</strong>s cœurs est parmi nous la compensation <strong>de</strong>s travaux et<br />

<strong>de</strong>s sacrifices, et nous pouvons dire quʹelle nous récompense déjà en ce mon<strong>de</strong> du peu que<br />

nous faisons pour le bon Maître, car Il fait constamment régner dans la famille la paix la<br />

plus profon<strong>de</strong> et la plus douce intimité. Jʹai la pleine espérance que rien dans lʹavenir ne<br />

troublera cette bonne harmonie, pas même les quelques difficultés que vous paraît présen‐<br />

ter la direction actuelle <strong>de</strong> la Communauté. Dès le commencement, nous nous sommes<br />

laissé conduire par la Provi<strong>de</strong>nce, et nous sommes bien décidés à lui abandonner encore le<br />

gouvernement <strong>de</strong> notre avenir; peut‐on faire fausse route quand on marche sous la<br />

conduite <strong>de</strong> la Sagesse infinie? La direction laïque, ainsi que je vous lʹai indiqué déjà, Mon‐<br />

sieur lʹabbé, nʹa pas été chez nous un parti pris, une chose décidée a priori; notre petite fa‐<br />

mille ayant commencé et ayant été constituée par quelques laïcs dévoués que Dieu avait<br />

attirés à le servir uniquement, a continué à marcher comme elle avait été établie, après<br />

lʹadmission successive <strong>de</strong> quelques ecclésiastiques parmi nous; il nʹen est résulté, jusquʹici,<br />

ni froissement ni malaise, la charité intervenant dans tous nos rapports; nous ne savons ce<br />

que Dieu disposera pour lʹavenir, mais nous sommes unanimes pour nous abandonner à<br />

son action puissante et mesurée tout ensemble. nous croyons fermement que lʹunion cor‐<br />

diale et vraie <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux éléments ecclésiastique et laïc est selon ses vues et peut donner <strong>de</strong><br />

grands avantages que nous éprouvons constamment; mais nous trouvons plus pru<strong>de</strong>nt <strong>de</strong><br />

laisser à sa divine bonté le soin dʹéquilibrer doucement ces <strong>de</strong>ux forces plutôt que <strong>de</strong> met‐<br />

tre, peut‐être maladroitement, la main dans une opération délicate et difficile.<br />

Dans lʹétat actuel, nos ff. ecclésiastiques ont la liberté la plus entière et les facilités<br />

les plus gran<strong>de</strong>s pour lʹexercice <strong>de</strong> leur ministère que préparent et assistent les efforts em‐<br />

pressés et tout dévoués <strong>de</strong>s ff. laïcs. La supériorité inhérente à leur caractère, à leurs fonc‐<br />

tions relevées, à leur instruction plus haute et plus étendue leur font une place digne et<br />

justement influente dans la famille, tout en laissant néanmoins aux laïcs assez dʹinitiative<br />

et <strong>de</strong> libre action pour que leur part dans la vie commune et dans les œuvres <strong>de</strong>meure<br />

utile et réelle; on ne peut se dissimuler dʹailleurs que, quelque combinaison quʹon choi‐<br />

sisse, lʹunion <strong>de</strong>s ecclésiastiques et <strong>de</strong>s laïcs, si elle est fraternelle et vraie, <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ra tou‐<br />

jours <strong>de</strong>s premiers sacrifice <strong>de</strong> généreuse con<strong>de</strong>scendance; quʹils la donnent dʹen haut ou<br />

quʹils la donnent dʹen bas, elle est nécessaire et essentielle; quel parti sera le meilleur? Le<br />

Seigneur en déci<strong>de</strong>ra. Quoi quʹil en soit, nous sommes bien convaincus que si, pour un<br />

plus grand bien, quelque modification semblait plus tard nécessaire dans notre constitu‐<br />

tion, elle sʹopérerait dʹelle‐même, sans aucun choc ni secousse pénible, le désir <strong>de</strong> tous<br />

étant <strong>de</strong> marcher ensemble et <strong>de</strong> sʹaccommo<strong>de</strong>r le plus sûrement possible pour arriver au<br />

but, qui est la gloire <strong>de</strong> Dieu, notre propre sanctification et celle <strong>de</strong> nos frères.<br />

463


Vous entrerez, jʹen ai la confiance, Monsieur lʹabbé, dans cette ligne toute fraternelle<br />

et toute chrétienne, et vous apporterez à notre œuvre une force <strong>de</strong> plus dans la prière,<br />

dans le zèle et dans la charité.<br />

Soyez assez bon pour assurer M. <strong>de</strong> Lauriston 237 <strong>de</strong> nos affectueuses sympathies;<br />

nous prierons pour lui, pour vous et pour vos jeunes frères aspirants. Dieu verra lʹhumble<br />

désir <strong>de</strong> nos cœurs et son appui ne nous sera pas refusé, puisquʹIl a dit par ses anges: Paix<br />

sur la terre aux hommes <strong>de</strong> bonne volonté 238 .<br />

Je serai <strong>de</strong> retour à Paris vers le 15 mai; ce serait donc, au plus tard, dans la <strong>de</strong>rnière<br />

quinzaine <strong>de</strong> ce mois que je vous rendrais visite; je ne manquerai pas dʹailleurs <strong>de</strong> vous en<br />

avertir à lʹavance plus précisément.<br />

Jusque là, <strong>de</strong>meurons, monsieur lʹabbé, en union <strong>de</strong> prières et dʹœuvres, ce sera une<br />

fraternité commencée qui nʹattendra que sa consommation.<br />

Je suis, dans ces sentiments, bien affectueusement<br />

Votre humble et dévoué serviteur en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

369 bis 239 à M. <strong>de</strong> Lauriston<br />

Les œuvres charitables ont besoin dʹun dévouement absolu. M.P. évoque sa propre vocation.<br />

[1856]<br />

Je crois, bien cher Monsieur, que nous <strong>de</strong>vons envisager les œuvres dʹune façon un<br />

peu haute et générale. Depuis 25 ans que jʹy ai complètement consacré ma vie, je me suis<br />

convaincu que les institutions charitables ne pouvaient subsister sans une corporation qui<br />

se dévouât dʹune manière absolue pour leur donner consistance. En ce moment, tous les<br />

patronages sont arrivés à ne pouvoir plus se soutenir ni produire aucun bien réel, faute <strong>de</strong><br />

cet élément <strong>de</strong> force et <strong>de</strong> stabilité. Je suis présentement en rapport <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s fondations es‐<br />

sayées sur tous les points: Marseille, Angers, Cherbourg, Douai, Strasbourg, Chartres, etc.<br />

toutes sont aux abois et nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt secours en déclarant que leurs peines et sacrifices<br />

sont vains, si <strong>de</strong>s institutions comme la nôtre ne viennent au secours <strong>de</strong>s œuvres pour les<br />

sauver.<br />

Si vous considérez dʹune autre part que la charité semble aujourdʹhui le moyen dont<br />

Dieu se sert pour rattacher le mon<strong>de</strong> à la foi, et que les œuvres sans nombre qui se multi‐<br />

plient <strong>de</strong> toutes parts sont le principal moyen <strong>de</strong> salut pour la société, vous arriverez à<br />

penser comme nous quʹon fait un noble emploi <strong>de</strong> sa vie en sʹefforçant <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>r ces insti‐<br />

tutions tutélaires qui doivent vivifier les œuvres, y gar<strong>de</strong>r lʹesprit <strong>de</strong> vraie charité et y por‐<br />

ter en même temps un élément <strong>de</strong> consistance et <strong>de</strong> durée.<br />

237<br />

Né à Nantes, Georges Law <strong>de</strong> Lauriston (1808-1883) s'était préparé au sacerdoce au séminaire d'Issy, mais il y renonça et choisit<br />

une carrière administrative. Percepteur à Arras, il collabore à l'Œuvre <strong>de</strong> l'abbé Halluin, par le truchement duquel il fait connaissance<br />

<strong>de</strong> la Congrégation. Sa véritable vocation lui apparaît alors et il entre en Communauté en 1857, à près <strong>de</strong> 50 ans. C'était "un<br />

gentilhomme d'éducation parfaite, délicat, courtois, et très simple. Son caractère enjoué lui gagnait aisément tous les cœurs. Il fut<br />

un <strong>de</strong>s frères les plus aimés et les plus fidèles, mettant gaieté et entrain dans les récréations et fêtes <strong>de</strong> famille".<br />

238<br />

Cf. Lc 2, 14.<br />

239<br />

Simple note sans aucune date, où MLP. met sa pensée par écrit, suite à une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> ultérieure <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Lauriston. Supplée la lettre<br />

427.<br />

464


Cʹest dans cette pensée que jʹai quitté le mon<strong>de</strong> et que tous mes frères lʹont aussi<br />

abandonné; nul <strong>de</strong> nous ne regrette son sacrifice, tous nous le ferions encore sʹil nʹétait déjà<br />

consommé.<br />

370 <strong>de</strong> M. Paillé à M. Maignen<br />

P.S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Activités à Nazareth. MLP. pense revenir dans une quinzaine <strong>de</strong> jours.<br />

30 avril 1856<br />

Mon cher frère,<br />

M. Le <strong>Prevost</strong> tient grand compte <strong>de</strong> vos observations sur le règlement. Il <strong>de</strong>man<strong>de</strong> si les<br />

choses ne pourraient pas sʹarranger ainsi: lʹexercice religieux <strong>de</strong>s ouvriers serait à 9h.25, le départ à<br />

9h.40. Les frères employés à lʹœuvre <strong>de</strong>s ouvriers diraient la prière en route. A leur retour à Naza‐<br />

reth, ils iraient à la chapelle faire une adoration <strong>de</strong> 3 minutes et se rappeler les points <strong>de</strong> la médita‐<br />

tion, et à 10 heures coucher, lumières éteintes. Lʹheure <strong>de</strong> la prière pour les frères restant à la Mai‐<br />

son serait toujours 9h. 3/4 . M. Le <strong>Prevost</strong> regrette que tous les frères ne soient pas à la prière du soir<br />

et que les œuvres scin<strong>de</strong>nt cet exercice. Avec le temps, il faut espérer que nous arrangerons toutes<br />

ces petites choses.<br />

Adieu, cher frère; ainsi que tous nos autres petits frères, priez pour nous; au 20 mai, au plus<br />

tard.<br />

Votre dévoué frère<br />

Paillé<br />

Le soir, le rappel <strong>de</strong>s points <strong>de</strong> la méditation doit être très court et à peu près ainsi: Sujet <strong>de</strong><br />

la méditation: Ascension <strong>de</strong> N.S. 1er point : N.S. prépare ses apôtres, par la solitu<strong>de</strong>, à recevoir le St Esprit. 2e point: N.S. envoie ses disciples enseigner le mon<strong>de</strong>. 3e point: N.S. monte au Ciel où il est<br />

reçu par son Père. La prière étant sonnée 5 ou 3 minutes avant 9h. ¾, la prière doit commencer à<br />

9h. ¾ ; elle peut durer, <strong>avec</strong> le rappel <strong>de</strong> la méditation, 6 minutes. Restent 7 minutes pour aller à sa<br />

chambre et se coucher.<br />

Je vous envoie, comme vous le voulez, poste pour poste, la lettre pour le r.p. <strong>de</strong><br />

Ponlevoy, ainsi quʹune autre pour M. <strong>de</strong> Girardin; ne négligez pas <strong>de</strong> lʹenvoyer. Je trouve<br />

que le p. <strong>de</strong> Ravignan pourra objecter quʹil a déjà parlé à Nazareth pour la bénédiction <strong>de</strong><br />

la chapelle, et quʹon ne saura trop ce que signifie cette secon<strong>de</strong> exhortation <strong>de</strong> sa part pour<br />

une secon<strong>de</strong> bénédiction; voyez cela, il ne faut pas avoir lʹair dʹobsé<strong>de</strong>r et lui et tout le<br />

mon<strong>de</strong>, vous en déci<strong>de</strong>rez <strong>avec</strong> ces Messieurs <strong>de</strong> la Commission. Je nʹai pas le temps <strong>de</strong><br />

vous en écrire plus long; nous reviendrons du 15 au 20 mai. M. Tessier vient <strong>de</strong> mʹécrire<br />

quʹil mʹengage à revenir pour cette époque; je vous embrasse dʹavance, je crains <strong>de</strong> vous<br />

étouffer, heureusement, je ne serai pas encore bien fort.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

370‐1 à M. lʹabbé Timon‐David<br />

MLP. sʹen vient à Marseille; les <strong>de</strong>ux possibilités quʹil propose pour ce voyage. Il remet leur projet dʹunion entre<br />

les mains <strong>de</strong> Dieu.<br />

Hyères, 1er mai 1856<br />

Monsieur lʹabbé,<br />

Jʹattendais pour répondre à votre <strong>de</strong>rnière lettre, que jʹeusse reçu lʹavis du mé<strong>de</strong>cin<br />

<strong>de</strong> paris dont jʹai dû suivre, durant ces <strong>de</strong>rniers temps, les prescriptions, et qui sʹétait ré‐<br />

servé <strong>de</strong> déterminer le moment où je pourrais revenir sans inconvénient.<br />

465


Il fixe mon retour au 15 mai; je serai donc libre dʹaller vous rendre visite bien pro‐<br />

chainement. Je puis combiner mon voyage <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux façons que je prends la liberté <strong>de</strong> vous<br />

soumettre afin que vous veuillez bien me dire laquelle <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux serait le mieux à votre<br />

convenance.<br />

Je pourrais arriver chez vous, <strong>avec</strong> M. Paillé, pour lequel je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rai aussi<br />

asile, la veille <strong>de</strong> la Pentecôte, samedi 10 mai le soir, uniquement pour gagner ma chambre<br />

et me mettre au lit. Le len<strong>de</strong>main dimanche, et le lundi, je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rais la grâce <strong>de</strong><br />

mʹoublier dʹune manière absolue et <strong>de</strong> ne songer quʹà vos chers enfants dont je verrais la<br />

première Communion et dont je partagerais les saintes joies; mardi, rendu à votre liberté,<br />

vous pourriez vous occuper un peu <strong>de</strong> nous, converser sur nos affaires, et mercredi, nous<br />

nous mettrions en route pour Paris. Le second plan serait <strong>de</strong> différer mon départ <strong>de</strong> 8<br />

jours, <strong>de</strong> ne vous arriver que le samedi soir 17, veille <strong>de</strong> la S te Trinité, <strong>de</strong> voir ce jour‐là vo‐<br />

tre Confirmation, <strong>de</strong> donner le lundi à nos affaires, et <strong>de</strong> partir le mardi 20 mai, pour Paris.<br />

Si vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z, Monsieur lʹabbé, lequel <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux projets me plairait le<br />

mieux, je préférerais le premier parce quʹaprès une absence <strong>de</strong> six mois, jʹai gran<strong>de</strong> hâte,<br />

comme vous le pouvez penser, <strong>de</strong> revoir mes frères bien‐aimés, mes petits enfants, nos<br />

œuvres, notre pauvre maison que je croyais avoir quittée pour toujours. Mais il nʹy a là,<br />

après tout, quʹune chose <strong>de</strong> sentiments et nullement une nécessité. Si donc, Monsieur lʹab‐<br />

bé, quelque raison tant soit peu notable, vous fait pencher pour le second parti, soyez as‐<br />

sez bon pour me le dire, et je nʹhésiterai pas à me conformer à votre avis.<br />

Il me paraît bien douteux que votre vénérable Evêque gardât <strong>de</strong> moi quelque sou‐<br />

venir après lʹentrevue si passagère quʹil me serait donné dʹavoir <strong>avec</strong> lui, je mʹen rapporte<br />

néanmoins à votre jugement et vous laisse entièrement libre dans la décision.<br />

Je mʹengage <strong>de</strong> grand cœur, cher Monsieur lʹabbé, ainsi que vous me le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z, à<br />

examiner <strong>avec</strong> vous lʹaffaire dont nous <strong>de</strong>vons nous occuper en toute franchise et simplici‐<br />

té; cʹest à mes yeux la chose <strong>de</strong> Dieu et non la nôtre, je crois pouvoir vous répondre que je<br />

la traiterai <strong>avec</strong> un entier désintéressement et que jʹen remettrai la solution à sa sagesse et à<br />

sa très sainte volonté.<br />

Je me recomman<strong>de</strong> bien, cher Monsieur lʹabbé, à vos bonnes prières, et je vous ré‐<br />

itère lʹexpression du respectueux attachement <strong>avec</strong> lequel je suis<br />

Votre humble et dévoué serviteur dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

4<br />

P.S. M. Paillé vous prie dʹagréer son respectueux souvenir.<br />

371 à M. Caille<br />

Lʹesprit essentiel à la vocation religieuse. Un jeune postulant se retire. MLP. envisage <strong>de</strong> faire un voyage à Arras<br />

<strong>avec</strong> M. Caille. Exhortation à lʹexercice <strong>de</strong> la présence <strong>de</strong> Dieu.<br />

Hyères, 2 mai 1856<br />

Très cher ami et fils,<br />

Vos lettres me causent toujours une vive satisfaction, parce que jʹy trouve lʹexpres‐<br />

sion <strong>de</strong>s sentiments <strong>de</strong> dévouements entier au Seigneur et <strong>de</strong> désir simple du bien qui sont<br />

le fond véritable <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> consécration absolue où nous sommes engagés; aussi jʹai bien<br />

la confiance que ce divin Maître, voyant ce bon vouloir <strong>de</strong> votre cœur, vous ai<strong>de</strong>ra et vous<br />

466


fera peu à peu surmonter les difficultés que vous créent vos occupations trop multipliées.<br />

Je vous sais bien gré <strong>de</strong> la façon humble et soumise <strong>avec</strong> laquelle vous acceptez mes ob‐<br />

servations, je ne les fais que dans lʹintérêt <strong>de</strong> votre chère maison, <strong>de</strong> vos frères, et dans le<br />

vôtre propre qui se confond <strong>avec</strong> le leur; je suis bien convaincu que vous faites tout ce que<br />

vous pouvez, plus même quʹon ne pourrait lʹattendre, cʹest pourquoi jʹai bonne espérance<br />

en lʹavenir, le Seigneur ne délaisse point les serviteurs <strong>de</strong> bonne volonté.<br />

M. Myionnet, dont je reçois aujourdʹhui une lettre, mʹapprend que notre jeune<br />

Mainville, après examen fait <strong>de</strong> ses dispositions <strong>avec</strong> M. lʹabbé Mangot, ne se trouve pas<br />

<strong>de</strong> vocation sérieuse pour la vie religieuse. Comme la vocation est un don <strong>de</strong> Dieu et que<br />

rien ne peut la suppléer, nous <strong>de</strong>vons, tout en reconnaissant les bonnes qualités <strong>de</strong> ce cher<br />

enfant, le laisser libre <strong>de</strong> reprendre dans le mon<strong>de</strong> la condition qui conviendra à ses apti‐<br />

tu<strong>de</strong>s et à ses dispositions. Assurez‐le <strong>de</strong> ma part que nous lui gardons bonne affection,<br />

que nous nous intéresserons toujours à lui et le verrons surtout <strong>avec</strong> gran<strong>de</strong> consolation<br />

<strong>de</strong>meurer fidèle à Dieu, quoiquʹil ne reste pas attaché à son service particulier.<br />

M. Halluin mʹa écrit et a écrit aussi à M. Myionnet <strong>de</strong>puis son voyage à Vaugirard;<br />

il montre <strong>de</strong> très bonnes dispositions et me dit quʹil incline <strong>de</strong> plus en plus à sʹunir à nous;<br />

il tâche dʹétablir chez lui les exercices en conformité <strong>avec</strong> les nôtres. La direction laïque lui<br />

semble offrir quelque incertitu<strong>de</strong> pour lʹavenir, mais il paraît décidé à passer outre, en sʹen<br />

remettant comme nous à la décision du Seigneur sur ce point <strong>de</strong> notre constitution. Il est<br />

convenu <strong>avec</strong> lui quʹaprès mon retour, je lʹirai voir à Arras et que nous ferons en sorte <strong>de</strong><br />

nous entendre; il me semble quʹil pourra être bien que je vous prenne en passant et que<br />

nous allions ensemble. Je dois revenir à Vaugirard du 15 au 20 mai; je pense donc quʹà la<br />

fin du mois je pourrai aller à Arras, au plus tard. Recommandons bien au Seigneur cette<br />

affaire qui est bien importante et dʹun grand intérêt pour notre petite famille, à bien <strong>de</strong>s<br />

égards.<br />

Je ne puis vous écrire bien longuement aujourdʹhui, ayant plusieurs correspondan‐<br />

ces un peu attardées; mais le moment où je vous verrai nʹest pas éloigné, sʹil plaît au Sei‐<br />

gneur, dans la main duquel je me tiens comme vous en tout abandon. Cette disposition est<br />

bien salutaire et cʹest Lui‐même qui lʹinspire, tâchons <strong>de</strong> la conserver par notre fidélité et<br />

notre humble soumission à ses volontés adorables. Je vous recomman<strong>de</strong>, très cher ami, <strong>de</strong><br />

faire en sorte que le souvenir <strong>de</strong> ce bon Seigneur revienne souvent à votre pensée au mi‐<br />

lieu <strong>de</strong> vos courses, <strong>de</strong> vos travaux, <strong>de</strong> vos œuvres, afin quʹIl sanctifie tout et que tout soit<br />

non seulement pour Lui, mais pour sa plus gran<strong>de</strong> gloire; plus nous aimons, plus nous dé‐<br />

sirons Lui plaire, plus nos moindres actions <strong>de</strong>viennent glorieuses pour Lui et méritoires à<br />

ses yeux.<br />

Offrez mes souvenirs respectueux et reconnaissants à M. lʹabbé Mangot.<br />

Je pense tout particulièrement à vous et à votre maison durant le mois <strong>de</strong> Marie;<br />

nous ne vous avons pas non plus oublié, mon f. Paillé et moi, dans un pèlerinage que nous<br />

avons fait dans une petite chapelle dédiée à la bonne Mère et qui est ici en gran<strong>de</strong> vénéra‐<br />

tion.<br />

Adieu, mon bon ami, je vous embrasse bien affectueusement en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

467


372 à M. Maignen<br />

Conduite à suivre pour les travaux à Nazareth. MLP. aspire à retrouver Grenelle et à y converser <strong>avec</strong> M. Mai‐<br />

gnen. Souvenirs du Premier Tabernacle.<br />

Hyères, 7 mai 1856<br />

Très cher ami et enfant en N.S.,<br />

Je nʹai point répondu à un point assez notable <strong>de</strong> votre <strong>de</strong>rnière lettre, concernant la<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> M. Latruffe, le charpentier <strong>de</strong> vos travaux <strong>de</strong> Nazareth. Je crois très utile <strong>de</strong><br />

vous donner la procuration que vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z, car je me remettrais difficilement au<br />

courant <strong>de</strong>s affaires et vous les avez maintenant mieux en main que moi; vous en gar<strong>de</strong>rez<br />

donc présentement la conduite, sauf à moi à vous ai<strong>de</strong>r autant que je le pourrai. Mon re‐<br />

tour <strong>de</strong>vant être maintenant bien prochain, il semblerait superflu que je fisse dʹici cette<br />

procuration, mais vous pourriez la faire préparer chez notre ami, M. Lambert, afin que je<br />

puisse la signer tout <strong>de</strong> suite après notre arrivée.<br />

Je croyais bien fermement partir dʹHyères samedi prochain, 10, pour vous arriver le<br />

samedi suivant 17, mais le mé<strong>de</strong>cin que je viens <strong>de</strong> voir me conseille fortement, à cause du<br />

mauvais temps, <strong>de</strong> différer <strong>de</strong> huit jours; M. Paillé ira <strong>de</strong>main jeudi à Toulon, et, sʹil peut<br />

changer le jour pour nos places déjà retenues, nous suivrons cet avis; nous nʹarriverions<br />

alors que le 22 ou plutôt le 23, à cause <strong>de</strong> la fête du St Sacrement qui tombe le jeudi 22;<br />

nous aurons soin, du reste, <strong>de</strong> prévenir plus précisément M. Myionnet auquel nous écri‐<br />

rons à Marseille.<br />

Je désirerais bien, cher enfant, que dʹici là vous mʹécriviez un mot pour me dire si<br />

vous avez pu conserver intactes les trois inscriptions romaines que je vous ai confiées en<br />

partant. On nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, vous le savez, impérativement les 5.000f <strong>de</strong> Mme Tarbé, nos<br />

romaines nous seraient pour cela bien utiles; ce me sera donc un repos dʹesprit si vous<br />

pouvez me donner un mot satisfaisant à ce sujet.<br />

M. Taillandier mʹa écrit que votre sermon <strong>de</strong> lʹAscension avait eu bon succès et vous<br />

avait procuré 2.400f, beaucoup plus que vous nʹaviez espéré; jʹen remercie <strong>avec</strong> vous le<br />

Seigneur et sa très aimée Mère, dont nous sommes aussi les enfants.<br />

Je pense que vous pourrez utilement faire circuler une liste pour la souscription <strong>de</strong><br />

Vaugirard chez toutes les anciennes Dames Patronnesses <strong>de</strong> la maison, mais il faudrait se<br />

hâter, vous savez quʹà la fin <strong>de</strong> mai tout Paris commence à disparaître et à se rendre à la<br />

campagne.<br />

Je ne vous parle, cher enfant, quʹargent et affaires; votre pauvre âme pourtant aurait<br />

bien besoin <strong>de</strong> quelques souvenirs <strong>de</strong>s choses spirituelles et votre cœur dʹenfant voudrait<br />

beaucoup aussi un peu <strong>de</strong> tendre affection; nous ferons tout cela à mon retour, bien cher<br />

ami; vous viendrez me voir dans ma cellule <strong>de</strong> Grenelle, lieu <strong>de</strong> notre naissance, où je vais<br />

me réfugier, comme on retourne, dans la maladie, à lʹair natal. Vous retrouverez là quel‐<br />

ques‐unes <strong>de</strong> ces impressions <strong>de</strong> paix et <strong>de</strong> pieux délassement que nous recevions dans<br />

notre petite chapelle aux pieds du divin Maître, hôte encore tout nouveau pour nous et<br />

dont la présence nous enivrait <strong>de</strong> joie. Le bon Maître nʹy est plus, mais il nʹest pas loin <strong>de</strong><br />

là et la trace <strong>de</strong> sa venue nʹest pas encore effacée. Adieu, cher enfant, vous pouvez me ré‐<br />

pondre encore ici, si vous ne tar<strong>de</strong>z pas à le faire, votre lettre mʹy trouvera encore. Adieu,<br />

je vous embrasse tendrement en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

468


372‐1 à M. lʹabbé Timon‐David<br />

MLP. retar<strong>de</strong> <strong>de</strong> huit jours la visite prévue.<br />

Hyères, 8 mai 1856<br />

Monsieur lʹabbé,<br />

La Provi<strong>de</strong>nce semble préférer votre avis au mien car <strong>de</strong> divers côtés mes amis<br />

mʹécrivent que la saison est froi<strong>de</strong> et mauvaise à Paris et me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt <strong>avec</strong> insistance <strong>de</strong><br />

différer mon retour; ici ceux qui mʹentourent mé<strong>de</strong>cins et autres, me tiennent le même lan‐<br />

gage. Je craindrais <strong>de</strong> mettre quelque entêtement dans ma détermination en ne cédant pas<br />

à ces avertissements bienveillants; je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> donc permission, Monsieur lʹabbé,<br />

dʹajourner <strong>de</strong> huit jours la visite que je me fais un plaisir <strong>de</strong> vous faire et <strong>de</strong> nʹarriver à<br />

Marseille que le samedi au soir 17, veille <strong>de</strong> la Ste Trinité. Nous serons encore alors dans<br />

lʹoctave <strong>de</strong> la Pentecôte et sous lʹinfluence <strong>de</strong>s grâces répandues par lʹEsprit‐Saint, nous<br />

nʹaurons donc rien à perdre dans le délai que je crois <strong>de</strong>voir prendre par déférence pour<br />

mes amis.<br />

Veuillez recevoir, Monsieur lʹabbé, la nouvelle expression <strong>de</strong>s sentiments respec‐<br />

tueux et dévoués <strong>avec</strong> lesquels je suis<br />

Votre humble et affectionné serviteur en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Paillé vous prie dʹagréer son respect.<br />

373 à M. Maignen<br />

Aménagement <strong>de</strong> la chapelle <strong>de</strong> Nazareth. Projet <strong>de</strong> repas pour les pauvres.<br />

9 mai 1856 240<br />

Je vous envoie, cher ami et fils en N.S., la petite lettre que vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z pour<br />

M me <strong>de</strong> Vatry; je crains quʹelle ne soit trop brève et trop insignifiante, je ferai mieux une au‐<br />

tre fois, et dʹailleurs je remercierai bientôt, sans doute, cette excellente dame personnelle‐<br />

ment.<br />

Je pense toujours que nous arriverons le vendredi 23; sʹil faisait beau, ce pourrait<br />

être un jour ou <strong>de</strong>ux plus tôt, mais ce que vous me dites <strong>de</strong> la saison ne mʹencourage pas à<br />

hâter mon retour.<br />

Je suis bien heureux, bien consolé <strong>de</strong>s témoignages <strong>de</strong> bonté que daigne nous ac‐<br />

cor<strong>de</strong>r le divin Seigneur; nous tâcherons dʹêtre <strong>de</strong>s serviteurs bien fidèles, afin <strong>de</strong> bien en‐<br />

trer dans ses vues <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong>.<br />

Je suis tout joyeux aussi du pèlerinage à Nazareth; cela fera tradition et remplacera<br />

la visite à N.D. <strong>de</strong>s Victoires. Ne pourrait‐on lui affilier notre petite chapelle et avoir part<br />

aux indulgences, ce serait une bénédiction <strong>de</strong> plus pour nos œuvres? Il me semble quʹil<br />

reste à faire quelques dispositions pour rendre ce sanctuaire tout à fait aimable: 1° Donner<br />

<strong>de</strong> lʹair aisément dans les chaleurs <strong>de</strong> lʹété et dans les réunions nombreuses; 2° Eteindre<br />

240 L'année 1856 sera pour Nazareth une année fertile en événements (nouvelle Sainte-Famille, nouveau prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> l'Œuvre du Patronage<br />

en la personne <strong>de</strong> Paul Decaux, etc.) Suivant l'exemple du patronage <strong>de</strong> l'abbé Le Boucher à Angers, M. Maignen avait lui<br />

aussi établi une nouvelle hiérarchie dans son Œuvre. Avant d'être reçus sociétaires, les nouveaux venus, les aspirants, feront désormais<br />

un stage d'initiation d'au moins <strong>de</strong>ux mois. Les dignitaires formeront la tête du patronage en assumant différentes responsabilités.<br />

469


par <strong>de</strong>s stores le jour fatigant qui lʹinon<strong>de</strong>; 3° Corriger par quelque ornement les angles si<br />

choquants <strong>de</strong>s piliers <strong>de</strong> bois <strong>de</strong> la nef; <strong>avec</strong> ces arrangements peu considérables, on aurait<br />

tout ce quʹil faut extérieurement pour favoriser le bien et la piété dans notre chapelle.<br />

Mon f. Paillé et moi faisons <strong>de</strong>s projets, cela ne coûte rien à ceux qui ne mettent la<br />

main à quoi que ce soit. Il nous est venu en pensée que la maison <strong>de</strong> retraite <strong>de</strong> Nazareth<br />

étant maintenant mieux assise, il serait bien, au jour <strong>de</strong> la fête <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul, <strong>de</strong><br />

faire une petite réjouissance ou festin aux pauvres vieillards. Il nʹest personne qui ne fût<br />

heureux dʹy contribuer. Ce ne serait pas une dépense, tout le mon<strong>de</strong> voudrait les servir, M.<br />

le Curé bénirait la table, ce serait consolant pour les pauvres, édifiant pour les Confrères,<br />

ranimant pour les membres les plus occupés <strong>de</strong> lʹœuvre; pensez à cela, dites‐en un mot à<br />

M. Decaux; il me semble quʹil en sortirait quelque bien et que lʹexécution serait facile.<br />

Adieu, cher enfant, à bientôt.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

374 à M. Caille<br />

Joie <strong>de</strong> MLP. à revenir à Vaugirard. Se tenir prêt à aller où lʹobéissance envoie.<br />

Vaugirard, 26 mai 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong>s bonnes et affectueuses paroles que vous mʹavez écrites dans<br />

votre lettre du 20 <strong>de</strong> ce mois au sujet <strong>de</strong> mon retour. Il sʹest effectué, comme vous le pré‐<br />

sumiez, presque à ce moment; nous sommes arrivés ici, mon f. Paillé et moi, le vendredi<br />

au soir 23241 . Je ne vous dirai pas quelle joie nous a causée notre réunion après une si lon‐<br />

gue séparation que nous avions pu considérer comme définitive; le divin Maître a daigné<br />

faire goûter à nos cœurs combien il est doux <strong>de</strong> sʹaimer en Lui et <strong>de</strong> constituer dans la cha‐<br />

rité une véritable famille chrétienne. Ce moment laissera en nous un souvenir plein <strong>de</strong><br />

consolation et resserrera encore, sʹil est possible, les liens <strong>de</strong> tendre attachement parmi les<br />

membres <strong>de</strong> notre chère Communauté. Vous avez voulu vous joindre à nous pour cette<br />

fête <strong>de</strong> famille, cʹest une bonne et filiale intention dont je vous suis bien reconnaissant.<br />

Je vous renvoie ci‐joint la lettre <strong>de</strong> M. Halluin, pensant que vous pouvez en avoir<br />

besoin pour lui répondre. Pour ce qui concerne le drap <strong>de</strong>stiné à lʹhabillement <strong>de</strong>s frères,<br />

nous achetons dʹordinaire du drap vert russe très foncé, presque noir; nous prenons <strong>de</strong>s<br />

qualités communes, mais soli<strong>de</strong>s; la même qualité ne peut convenir pour les paletots et<br />

pour les pantalons, ceux‐ci <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt une étoffe beaucoup plus forte; nos prix sont <strong>de</strong> 10f<br />

à 15f le mètre. On trouve, pour les pantalons, <strong>de</strong>s draps marengo (noir mêlé dʹun peu <strong>de</strong><br />

blanc) qui sont fort soli<strong>de</strong>s; on y est pourtant quelquefois trompé, les fonds noirs étant su‐<br />

jets à se brûler.<br />

Je ne puis encore préciser le jour où je vous irai voir et vous prendre en même<br />

temps pour aller à Arras; je suis un peu fatigué <strong>de</strong> mon long voyage; jʹai aussi lʹobligation<br />

241 "Arrivée <strong>de</strong> notre bien-aimé Père en J.C. Nous avons été au-<strong>de</strong>vant <strong>de</strong> lui jusque dans le chemin du Moulin. Un Frère s'était mis<br />

en sentinelle au coin <strong>de</strong> la rue <strong>de</strong>s Vignes; et lorsqu'il a aperçu la voiture, il a donné un signal et aussitôt toutes les cloches ont sonné<br />

à la volée…après avoir chanté l'Ecce quam bonum à la chapelle, pour remercier N.S. <strong>de</strong> l'heureux retour, (…) notre bon Père a<br />

pris sa place sur une estra<strong>de</strong> pour recevoir les compliments <strong>de</strong>s enfants (…). Il est parti le soir pour Grenelle afin <strong>de</strong> se reposer."<br />

(Journal <strong>de</strong> Communauté, vendredi 23 mai 1856).<br />

470


<strong>de</strong> régler quelques affaires, mais je présume néanmoins que nous ne tar<strong>de</strong>rons guère; dès<br />

que je verrai un peu nettement le moment disponible pour moi, je vous le proposerai et<br />

vous avertirez M. Halluin, afin que nous sachions si ce jour lui convient. En répondant à<br />

M. Halluin, dites‐lui, je vous prie, que nous ne tar<strong>de</strong>rons pas beaucoup à lui rendre visite.<br />

Je crois que notre jeune Mainville doit bien mûrement réfléchir avant <strong>de</strong> se déci<strong>de</strong>r;<br />

nous verrons, lors <strong>de</strong> mon voyage à Amiens, ce que nous aurons <strong>de</strong> mieux à faire pour son<br />

plus grand bien; mais il est essentiel quʹil soit décidé à se rendre à Vaugirard ou ailleurs,<br />

sans hésiter, dès que ses Supérieurs lʹauront réglé ainsi, cʹest au point essentiel <strong>de</strong> lʹobéis‐<br />

sance religieuse.<br />

M. Myionnet me prie <strong>de</strong> vous dire que le f. Maignen a réglé <strong>avec</strong> notre f. Marcaire le<br />

compte dʹEmile Frey et le paiement <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux statues.<br />

Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S., cʹest une gran<strong>de</strong> joie pour moi <strong>de</strong> penser<br />

que je vous verrai prochainement, vous et nos jeunes ff. dʹAmiens; ce que vous me dites <strong>de</strong><br />

leur zèle et <strong>de</strong> leurs bonnes dispositions me touche beaucoup et mʹest une vraie satisfac‐<br />

tion. Embrassez‐les bien pour moi et recevez vous‐même les sentiments tendres et dé‐<br />

voués <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

375 à M. Caille<br />

Observations sur le règlement et lʹorganisation <strong>de</strong> lʹInstitut. Règles qui ont présidé à sa fondation. Relations<br />

<strong>avec</strong> les autorités ecclésiastiques. Etat du personnel et <strong>de</strong>s œuvres. Le fort et le faible.<br />

Vaugirard, 31 mai 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> lʹintéressante communication que vous mʹavez faite <strong>de</strong> la lettre<br />

du r.p. Mallet242 concernant notre règlement; elle doit doublement fixer notre attention, à<br />

cause <strong>de</strong> la haute expérience <strong>de</strong> ce bon Père, et parce quʹelle nous est un nouveau témoi‐<br />

gnage <strong>de</strong> la bienveillante disposition <strong>de</strong> Mgr lʹEvêque dʹAmiens; jʹespère bien que, durant<br />

le séjour que doit faire prochainement ce vénérable prélat dans notre Paris, il me sera pos‐<br />

sible dʹarriver jusquʹà lui et <strong>de</strong> lui exprimer notre profon<strong>de</strong> reconnaissance.<br />

Toutes les observations du r.p. me semblent fondées et je pense que nous pourrons<br />

en profiter bien utilement à mesure que nous avancerons et quʹil nous sera donné <strong>de</strong> com‐<br />

pléter notre constitution qui nʹest, vous le savez, encore quʹébauchée. Il eût été désirable<br />

peut‐être que le bon p. Mallet sût précisément que notre règlement nʹest réellement quʹun<br />

simple relevé <strong>de</strong> notre situation et que nous ne le considérons point comme un travail<br />

achevé. Reconnaissant dès lʹabord que fon<strong>de</strong>r une société religieuse est une gran<strong>de</strong> chose<br />

et que nous étions incapables par nous‐mêmes <strong>de</strong> la réaliser, nous nous sommes récusés,<br />

pour ainsi dire, et, puisant notre force dans notre insuffisance même, nous avons pris à tâ‐<br />

che <strong>de</strong> ne rien faire par notre inspiration propre et <strong>de</strong> tout laisser à la conduite <strong>de</strong> la divine<br />

Sagesse. Nous avons marché ainsi pas à pas sans nous écarter <strong>de</strong> cette voie, et nous y<br />

avons trouvé notre salut. Vous le savez, en effet, mon bon ami, la paix, lʹunion la plus par‐<br />

faite nʹont jamais cessé <strong>de</strong> régner entre tous les membres <strong>de</strong> notre petite famille; ecclésias‐<br />

242 M. Caille avait soumis le règlement <strong>de</strong> la Congrégation à un Jésuite d'Amiens, le père Mallet.<br />

471


tiques et laïcs, nous avons unanimement vécu dans cette confiance: le Seigneur nous<br />

conduit, notre barque ne fera point naufrage. La grâce divine nous a manifestement soute‐<br />

nus par le passé, elle sera encore lʹappui <strong>de</strong> notre avenir. A mesure que la lumière sʹest<br />

faite pour nous et que les circonstances nous ont paru indiquer les voies <strong>de</strong> Dieu, nous<br />

nous y sommes conformés, ou plutôt nous avons donné assentiment aux dispositions que<br />

sa Provi<strong>de</strong>nce a constamment réglées.<br />

Ces renseignements, sʹils eussent été transmis au r.p. Mallet, eussent été pour lui,<br />

sans doute, lʹexplication <strong>de</strong>s principales lacunes <strong>de</strong> notre règlement et la réponse à plu‐<br />

sieurs <strong>de</strong> ses observations. Nous souhaitons bien ar<strong>de</strong>mment que notre règle soit approu‐<br />

vée par la Cour <strong>de</strong> Rome, mais nous la croyons encore trop imparfaite et trop peu définie<br />

pour oser la lui soumettre; nous ne <strong>de</strong>meurons pas néanmoins en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> lʹautorité,<br />

nous avons constamment marché ici sous les yeux <strong>de</strong> M gr <strong>de</strong> Paris qui nous a, <strong>de</strong> son côté,<br />

traités <strong>avec</strong> une bonté paternelle et a spontanément choisi M. lʹabbé Dedoue, son Vicaire<br />

Général, pour être notre conseiller, notre appui et comme notre représentant auprès <strong>de</strong> lui<br />

et <strong>de</strong> son conseil.<br />

Les <strong>de</strong>ux principales remarques du r.p. portent sur la nomination directe <strong>de</strong>s mem‐<br />

bres du conseil par le Supérieur et sur la position, en apparence secondaire quʹont en ce<br />

moment parmi nous les ff. ecclésiastiques.<br />

Il nous paraît <strong>de</strong> toute sagesse que lʹautorité du Supérieur ait quelque contrepoids;<br />

la parfaite unité <strong>de</strong> vues qui a jusquʹici existé entre nous, nous avait rendu cette nécessité<br />

moins sensible, mais nous tendrons à y pourvoir pour lʹavenir.<br />

Quant à lʹautre question, qui est évi<strong>de</strong>mment la plus grave, nous pensons bien que<br />

lʹétat actuel résultant, vous le savez, <strong>de</strong>s commencements <strong>de</strong> notre œuvre qui a été pure‐<br />

ment laïque à son origine, pourra <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r quelques modifications; mais nous croyons<br />

sage, <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts, <strong>de</strong> laisser à la divine Bonté le soin dʹétablir un équilibre que nous<br />

craindrions dʹasseoir maladroitement; bien sûrs les uns <strong>de</strong>s autres, nous <strong>de</strong>meurons en re‐<br />

pos, confiants en Dieu et dans la charité qui est lʹessence même <strong>de</strong> notre œuvre et qui nous<br />

sauvegar<strong>de</strong>ra, nous lʹespérons.<br />

Je vous rappelle sommairement ces circonstances qui vous sont déjà connues, afin<br />

que vous puissiez prendre plus utilement les avis <strong>de</strong> M gr lʹEvêque dʹAmiens, si vous aviez<br />

encore quelque occasion <strong>de</strong> le consulter relativement à notre petite famille.<br />

Il mʹa été rapporté que M gr <strong>de</strong> Salinis était en doute sur notre avenir parce que,<br />

voyant seulement notre petit troupeau dʹAmiens, encore si imperceptible, il croit notre<br />

personnel peu consistant et <strong>de</strong> médiocre valeur. Cependant, il semble que, si lʹon veut<br />

avoir égard aux temps où nous vivons, à lʹexistence encore récente <strong>de</strong> notre petite famille,<br />

aux défiances quʹinspire notre association naissante, nous sommes bien provi<strong>de</strong>ntielle‐<br />

ment favorisés. Notre Communauté se compose ainsi:<br />

Notre bon abbé Viollat nous ayant été repris par le Ciel, il nous reste seulement<br />

quatre ff. ecclésiastiques [MM. Planchat, Lantiez, Hello et Roussel]; trois dʹentre eux, ap‐<br />

partenant à <strong>de</strong>s familles très honorablement posées, joignent au dévouement le plus abso‐<br />

lu et à dʹheureuses qualités <strong>de</strong> cœur et dʹesprit les avantages dʹune éducation soignée; le<br />

quatrième [M. Roussel], quoique plus jeune et moins expérimenté, est cependant un prêtre<br />

dʹun vrai mérite que plusieurs paroisses nous ont disputé et que M. le Curé <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong>s<br />

Victoires, en particulier, ne nous a cédé quʹà cause <strong>de</strong> son affection pour nous.<br />

472


Les frères laïcs sont au nombre <strong>de</strong> 20, dont six lettrés [MM. Le <strong>Prevost</strong>, Myionnet,<br />

Maignen, Paillé, Carment et Caille], hommes faits, accoutumés aux œuvres; cinq dʹentre<br />

eux pourraient conduire une maison.<br />

Huit jeunes gens [MM. Polvêche, A. Vasseur, Marcaire, E. Beauvais, Tourniquet, R.<br />

Vasseur, Guillot et Boucault] sortis <strong>de</strong> maisons <strong>de</strong> commerce, pieux, intelligents, dévoués,<br />

mais ayant besoin dʹêtre plus complètement formés; il a fallu forcément les mettre à lʹœu‐<br />

vre à cause <strong>de</strong> la multiplicité <strong>de</strong>s besoins, mais ils ne manquent ni <strong>de</strong> conseil, ni <strong>de</strong> direc‐<br />

tion. Enfin, six frères [MM. L. Boursier, Thuillier, Mainville, Bulfay, Allard et Assier] oc‐<br />

cupés aux soins domestiques. Plus <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux tiers <strong>de</strong> la Communauté sont engagés par <strong>de</strong>s<br />

vœux (17 sur 24).<br />

Cette petite société, unie comme elle lʹest, ne laisse pas que <strong>de</strong> fournir quelques for‐<br />

ces pour le service <strong>de</strong> Dieu. Malheureusement les nécessités <strong>de</strong>s œuvres nous contraignent<br />

à éparpiller nos sujets; nous <strong>de</strong>sservons cinq œuvres dont <strong>de</strong>ux, notre Orphelinat et la<br />

maison <strong>de</strong> Nazareth, suffiraient pour nous occuper tous; si nous pouvions nous restrein‐<br />

dre, nous agirions plus fermement; là est notre pierre dʹachoppement, toutes les œuvres<br />

charitables ont besoin <strong>de</strong> sujets et nous nʹavons, pour les ai<strong>de</strong>r, quʹun tout petit troupeau<br />

dont la moitié <strong>de</strong>s membres ne sont quʹà <strong>de</strong>mi formés. Voilà le fort et le faible <strong>de</strong> notre pe‐<br />

tite Communauté; vous ne vous étiez pas pleinement rendu compte, peut‐être, jusquʹici <strong>de</strong><br />

notre situation; vous pourrez, la connaissant mieux, la faire connaître à ceux quʹelle inté‐<br />

resserait et surtout représenter souvent nos besoins au divin Maître, afin quʹIl daigne y<br />

pourvoir selon son adorable volonté.<br />

Assurez bien vos jeunes frères <strong>de</strong> toutes mes affections, jʹespère que je les verrai<br />

bien prochainement; la fatigue <strong>de</strong> mon long voyage étant maintenant disparue, je pense<br />

que nous pourrons, le f. Carment et moi, nous mettre en route pour Amiens dès que le<br />

temps sera un peu moins nébuleux. Je vous prie <strong>de</strong> me dire, dès que vous le pourrez, si<br />

dʹici à une dizaine <strong>de</strong> jours, vous ne voyez pas dʹempêchement qui sʹoppose à ce que vous<br />

mʹaccompagniez à Arras; cet espace me laisserait latitu<strong>de</strong> pour prendre définitivement<br />

mes mesures et pour avertir aussi M. lʹabbé Halluin <strong>de</strong> notre arrivée.<br />

Vous apprendrez <strong>avec</strong> plaisir que nous sommes en voie dʹassociation <strong>avec</strong> une au‐<br />

tre œuvre fort intéressante fondée en province [Marseille] et dont les rapports <strong>avec</strong> nous<br />

pourront influer utilement sur nos entreprises charitables; je vous en entretiendrai plus à<br />

loisir à Amiens.<br />

Tous nos frères se rappellent à vos bons souvenirs et <strong>de</strong>meurent, ainsi que moi,<br />

tendrement unis à vous dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre ami et Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

375‐1 à M. lʹabbé Timon‐David<br />

Après son passage à Marseille, MLP. envisage <strong>avec</strong> confiance lʹentrée <strong>de</strong> lʹabbé Timon‐David dans lʹInstitut.<br />

Modalités qui pourraient contribuer à lʹunion. Il ne lui cache rien du ʺfort et du faibleʺ <strong>de</strong> la Communauté.<br />

Vaugirard, 1er juin 1856<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Je vous aurais écrit dès le len<strong>de</strong>main <strong>de</strong> mon arrivée ici, si jʹavais suivi mon désir,<br />

car jʹavais à cœur <strong>de</strong> vous témoigner toute notre reconnaissance pour le bon et affectueux<br />

473


accueil que vous nous avez fait et pour toutes les marques <strong>de</strong> confiance et <strong>de</strong> cordiale bon‐<br />

té que vous nous avez données; mon f. Paillé sʹunit à moi pour vous en remercier et nous<br />

vous assurons ensemble que nous en gardons une bien douce impression.<br />

Je nʹai pas été moins satisfait <strong>de</strong> tout ce que jʹai vu <strong>de</strong> votre œuvre; les sacrifices <strong>de</strong><br />

toutes sortes que vous y faites, le zèle sincère que vous y apportez, mʹont vraiment touché<br />

aussi bien que les résultats si précieux quʹobtiennent constamment vos efforts. Cʹest vous<br />

dire, cher Monsieur lʹabbé, que nous restons tout disposés à nous associer à <strong>de</strong>s soins si<br />

dévoués et à une œuvre dont le bon et chrétien esprit ne peut quʹinfluer heureusement sur<br />

celles dont la Provi<strong>de</strong>nce a daigné nous charger. Nous attendrons donc <strong>avec</strong> impatience le<br />

moment où vous pourrez vous dérober aux occupations multipliées qui remplissent vos<br />

journées, pour passer <strong>avec</strong> nous quelques jours en vie <strong>de</strong> famille et <strong>de</strong> communauté. Je<br />

nʹinsiste toutefois sur ce point quʹ<strong>avec</strong> mesure, sachant bien que les travaux <strong>de</strong> votre cha‐<br />

pelle redoublent vos préoccupations et vos charges; vous sentez comme nous combien il<br />

serait utile quʹavant <strong>de</strong> vous déci<strong>de</strong>r absolument, vous puissiez nous voir <strong>de</strong> près, exami‐<br />

ner le fort et le faible <strong>de</strong> la Communauté, et asseoir plus sûrement votre détermination.<br />

Vous êtes aussi convaincu quʹil y aurait tout avantage à ce que nous nous trouvions quel‐<br />

ques instants réunis tous ensemble aux pieds <strong>de</strong> Dieu pour nous adopter <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts, et<br />

sceller notre alliance dans une fraternelle charité. Je nʹai donc pas à vous persua<strong>de</strong>r à cet<br />

égard et je suis bien assuré que ce qui sera réellement possible sera fait par vous.<br />

Jʹai parlé du fort et du faible <strong>de</strong> la communauté. Le fort, cʹest lʹunion cordiale et le<br />

sincère dévouement <strong>de</strong> tous; le faible, cʹest la multiplicité <strong>de</strong>s œuvres, le nombre trop res‐<br />

treint <strong>de</strong> nos sujets, lʹaccablement <strong>de</strong> leurs travaux qui ne laisse pas le temps <strong>de</strong> les former,<br />

et nous oblige à les mettre à la tâche sans réserver le loisir suffisant, sinon à la piété dont la<br />

part est à peu près réservée, au moins aux étu<strong>de</strong>s, aux exercices qui les assoieraient soli‐<br />

<strong>de</strong>ment dans la vie chrétienne et dans la vie religieuse. Jʹai été plus fortement frappé <strong>de</strong><br />

cette lacune si regrettable en revenant à la maison après une longue absence, jʹy voudrais<br />

porter remè<strong>de</strong> mais quand on a la charge sur le dos, il faut marcher et attendre que, le Sei‐<br />

gneur nous venant en ai<strong>de</strong>, envoie quelques renforts pour nous donner un peu <strong>de</strong> relâche.<br />

Cʹest là ce que je pressentais et ce qui me rendait timi<strong>de</strong> à répondre à vos charitables avan‐<br />

ces; comment donner ai<strong>de</strong> aux autres quand nous <strong>de</strong>mandons nous‐mêmes à Dieu dʹac‐<br />

croître nos forces, nʹest‐ce pas présomption et assurance téméraire? Jʹespère encore que<br />

non, cher Monsieur lʹabbé, le bon Maître ne nous a jamais manqué dans nos besoins, jʹai la<br />

confiance que son secours ne nous fera point défaut et quʹIl rendra notre union bonne et<br />

utile <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts si, comme je le crois, Il lʹa lui‐même préparée.<br />

En nous concertant, en faisant échange <strong>de</strong> nos moyens, nous pourrons nous ai<strong>de</strong>r<br />

malgré notre faiblesse; en cas <strong>de</strong> nécessités pressantes, nous aurions au moins un recours<br />

assuré, enfin jʹespère parce que le Seigneur est bon et quʹespérer, pour un chrétien, cʹest<br />

croire simplement à la puissance et à lʹamour <strong>de</strong> Dieu.<br />

Lorsque vous nous viendrez 243 , nous examinerons ensemble ce qui est possible,<br />

vous pèserez <strong>avec</strong> nous nos charges et les moyens disponibles pour y subvenir, nous com‐<br />

parerons vos misères <strong>avec</strong> les nôtres et, partageant en frères, nous donnerons ai<strong>de</strong> à qui en<br />

aura le plus besoin.<br />

Vous le voyez, cher Monsieur lʹabbé, je vous dis les choses en toute simplicité et je<br />

suis loin <strong>de</strong> vous présenter lʹalliance <strong>avec</strong> nous comme un parti bien souhaitable, nous vi‐<br />

243 L'abbé Timon-David viendra à Vaugirard le 1 er juillet 1856. (cf. infra, lettre 390-1).<br />

474


vons, nous avons la paix, nos œuvres vont au jour le jour, mais nous sommes peu forts en‐<br />

core et bien peu capables <strong>de</strong> soutenir ceux qui sʹappuieront sur nous.<br />

Je vous prie, cher Monsieur lʹabbé, dʹoffrir nos respectueux souvenirs à M. lʹabbé<br />

Guiol dont la tendre sympathie et lʹaffectueuse bonté nous ont profondément touchés. Je<br />

suis assuré que votre Oeuvre trouvera toujours en lui cet intérêt bienveillant quʹon a tant<br />

besoin <strong>de</strong> sentir autour <strong>de</strong> soi quand on est chargé dʹentreprises charitables; lʹexpansion<br />

alors est comme un élément nécessaire à la vie, cʹest à cette condition surtout quʹon peut<br />

appliquer la parole <strong>de</strong> Dieu: il nʹest pas bon que lʹhomme soit seul 244 .<br />

Je serai heureux, cher Monsieur lʹabbé, que vous veuillez bien me donner quelque<br />

part dans ces épanchements; si vous avez la bonté <strong>de</strong> mʹécrire quelquefois, je serais très<br />

empressé à vous répondre et nous continuerons ainsi les relations qui sont si favorable‐<br />

ment commencé entre nous. Mais les plus précieuses, les plus intimes, les plus avantageu‐<br />

ses seront assurément dans la prière réciproque; jʹose compter sur les vôtres et je vous<br />

promets en retour la continuation <strong>de</strong> celles que mes Frères et moi faisons assidûment pour<br />

vous.<br />

Recevez, cher Monsieur lʹabbé, les sentiments <strong>de</strong> respect et dʹattachement sincère <strong>de</strong><br />

Votre humble et dévoué serviteur en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je crois avoir laissé chez vous un capuchon et une cravate longue, cʹest un in‐<br />

dice que je <strong>de</strong>vrai les aller chercher ou que vous aurez la bonté <strong>de</strong> me les apporter.<br />

376 à M. Halluin<br />

Projet <strong>de</strong> voyage à Arras. MLP. voit déjà lʹunion comme réalisée.<br />

Vaugirard, 7 juin 1856<br />

Monsieur lʹabbé,<br />

Je suis <strong>de</strong> retour à Vaugirard <strong>de</strong>puis 15 jours, mais jusquʹici, les encombrements <strong>de</strong>s<br />

premiers moments <strong>de</strong> lʹarrivée, le mauvais temps et diverses autres circonstances ne<br />

mʹavaient pas permis <strong>de</strong> déterminer le moment précis <strong>de</strong> mon voyage à Amiens et à Arras.<br />

Jʹavais toutefois écrit à notre f. Caille pour lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si, dans un très court délai, il se‐<br />

rait libre <strong>de</strong> mʹaccompagner. Il me répond aujourdʹhui même que rien ne lui fait obstacle<br />

en ce moment et que vous‐même nous recevrez volontiers.<br />

Je ne différerai donc pas davantage cette petite excursion; mardi, je me rendrai à<br />

Amiens et le len<strong>de</strong>main mercredi, 11 <strong>de</strong> ce mois, nous irons vous rendre visite.<br />

Cʹest, je vous lʹassure, Monsieur lʹabbé, une vraie satisfaction pour moi que <strong>de</strong> me<br />

rapprocher <strong>de</strong> vous; je regar<strong>de</strong> déjà notre union comme consommée au fond <strong>de</strong> nos cœurs<br />

et jʹai la confiance que le Seigneur a daigné aussi la ratifier. Je voudrais vous apporter dans<br />

cette alliance beaucoup <strong>de</strong> forces et <strong>de</strong> ressources, mais nous ne sommes guère riches<br />

quʹen bonne volonté et en ferme espérance; cʹest quelque chose encore aux yeux du Maître<br />

que nous servons; jʹespère quʹà son exemple vous voudrez bien Monsieur lʹabbé, nous en<br />

tenir compte aussi.<br />

Veuillez recevoir, Monsieur lʹabbé, les nouvelles assurances du respectueux dé‐<br />

vouement <strong>avec</strong> lequel je suis<br />

Votre humble serviteur en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

244 Gn 2,18.<br />

475


377 à M. Caille<br />

Le voyage à Amiens est décidé. Joie <strong>de</strong> revoir la communauté dʹAmiens. Dévotion envers le Sacré‐Cœur.<br />

Vaugirard, 7 juin 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu aujourdʹhui à la fois vos <strong>de</strong>ux lettres <strong>avec</strong> celle que vous me communiquez.<br />

Je nʹattendais, pour déterminer notre départ, que votre réponse; je ne différerai donc pas<br />

davantage; mardi matin, je partirai pour Amiens <strong>avec</strong> mon f. Carment; je ne sais pas en‐<br />

core précisément par quel convoi. Jʹécris à M. Halluin que nous lui rendrons probablement<br />

visite mercredi.<br />

Jʹai communiqué à M. Carment vos petites recommandations, il fera en sorte <strong>de</strong><br />

vous satisfaire.<br />

Croyez bien, très cher ami, que cʹest une vraie joie pour moi <strong>de</strong> vous revoir après<br />

une si longue absence, ainsi que les bien‐aimés enfants qui composent <strong>avec</strong> vous notre pe‐<br />

tite communauté dʹAmiens.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> lʹobligeante attention que vous avez eue au sujet <strong>de</strong> ma santé;<br />

bien que mon rétablissement ne soit pas parfait, je suis néanmoins assez bien pour nʹavoir<br />

besoin dʹaucun soin particulier. Je vous indique néanmoins, pour répondre à votre désir, le<br />

régime que je suis dʹordinaire, sans quʹil soit pour cela nécessaire que vous en teniez<br />

compte. Je prends, vers 8h. ou 8h.½, un peu <strong>de</strong> bouillon; à 11h. ou 11h.½, une côtelette <strong>de</strong><br />

mouton; le soir, vers 5h.½, un peu <strong>de</strong> beefsteak. Mais je vous assure que je puis mʹécarter<br />

temporairement <strong>de</strong> ces habitu<strong>de</strong>s sans inconvénient; nʹen prenez donc nul souci.<br />

Adieu, mon bien cher ami; embrassez pour moi nos chers frères, je me chargerai<br />

moi‐même <strong>de</strong> ce soin bien prochainement; je vous embrasse vous‐même tout affectueuse‐<br />

ment en J. et M.<br />

Votre ami et Père tout dévoué<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Faites‐vous, durant ce mois, quelque acte <strong>de</strong> piété en lʹhonneur du Cœur Sacré<br />

<strong>de</strong> J.C., notre divin Seigneur? Je vous y engage bien, cʹest un grand appui et un moyen<br />

précieux <strong>de</strong> raviver la ferveur.<br />

378 à M. Halluin<br />

Impressions favorables <strong>de</strong> sa visite à Amiens. Les obligations <strong>de</strong> la vie religieuse ne sont guère pesantes quant le<br />

cœur les accepte <strong>avec</strong> générosité. Union fraternelle entre ceux qui se dévouent aux mêmes Œuvres. Il faut que M.<br />

Halluin écrive.<br />

Amiens, 15 juin 1856<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Je ne veux pas quitter votre voisinage sans vous adresser quelques mots dʹadieu, et<br />

sans vous remercier <strong>de</strong> lʹaccueil affectueux que vous nous avez fait. Je suis revenu le cœur<br />

content; je souhaitais trouver dans votre œuvre le vrai et pur dévouement, je lʹai rencontré;<br />

je souhaitais aussi que si notre union se consommait, elle fût bien cordiale et bien entière;<br />

je crois que mes vœux sont pleinement remplis; si nous allons à vous en toute simplicité et<br />

charité, vous venez aussi à nous dans un sentiment pareil; tout est donc selon Dieu, car la<br />

476


sainte union <strong>de</strong>s âmes pour son service et pour sa gloire est lʹoffran<strong>de</strong> la plus agréable à<br />

ses yeux.<br />

Jʹai la confiance que sa grâce nous assistera pour rendre bientôt notre alliance effec‐<br />

tive; nous y travaillerons <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts <strong>de</strong> tout notre pouvoir. La bonne nouvelle que<br />

vous nous donnez <strong>de</strong>s heureuses dispositions du jeune ecclésiastique [abbé Daviron] qui<br />

partage vos travaux mʹa gran<strong>de</strong>ment réjoui, car nous trouverions dans sa détermination<br />

définitive <strong>de</strong> plus gran<strong>de</strong>s facilités pour préparer une intime fusion <strong>de</strong> nos moyens respec‐<br />

tifs. Tout ce que vous mʹavez dit dʹailleurs <strong>de</strong> ses qualités et aptitu<strong>de</strong>s me laisse penser que<br />

le Seigneur le veut parmi ses serviteurs les plus dévoués; nous prierons bien instamment<br />

pour quʹil se confirme dans ses bonnes résolutions. Que ne peut‐il savoir comme nous, par<br />

expérience, combien il est doux <strong>de</strong> faire au Seigneur le sacrifice absolu <strong>de</strong> soi‐même, et<br />

combien les obligations <strong>de</strong> la vie religieuse sont peu pesantes quand le cœur les accepte<br />

généreusement! Bientôt, je lʹespère, il lʹéprouvera à son tour, et il nous ai<strong>de</strong>ra à secon<strong>de</strong>r<br />

les <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> la divine Provi<strong>de</strong>nce qui veut, <strong>de</strong> notre temps, sauver le mon<strong>de</strong> par la cha‐<br />

rité. Je compte bien aussi sur le fidèle concours <strong>de</strong> votre jeune séminariste [Cousin] et <strong>de</strong><br />

vos <strong>de</strong>ux autres frères [Augustin Bassery et Joseph Loquet]; le court entretien que jʹai eu<br />

<strong>avec</strong> eux mʹa mis aisément en rapport <strong>de</strong> cœur à leur égard; nous nous sommes compris<br />

sans peine, et je crois que nous sommes déjà tous membres <strong>de</strong> la même famille.<br />

Je vous prie <strong>de</strong> les assurer quʹà mon retour je disposerai toutes les âmes à les affec‐<br />

tionner, et quʹils compteront bientôt autant dʹamis dévoués quʹil y a <strong>de</strong> frères parmi nous.<br />

Je mets aussi dans cette intime union M. <strong>de</strong> Lauriston, dont le cœur si affectueux est fait<br />

pour se fondre dans une famille vouée à la charité; nous attendrons impatiemment sa vi‐<br />

site qui sera, dans notre désir, la préparation <strong>de</strong> sa venue définitive.<br />

Je serai heureux, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> recevoir <strong>de</strong> vos nouvelles à tous quand<br />

vous aurez quelques instants <strong>de</strong> loisir; les petites lettres que vous mʹécrivez, ainsi que vos<br />

frères, ne resteront assurément pas sans réponse et achèveront <strong>de</strong> rendre nos relations tou‐<br />

tes familières et toutes faciles.<br />

Veuillez assurez tous vos frères que nous prierons bien assidûment pour eux<br />

comme pour vous, et recevez, cher Monsieur lʹabbé, tous mes sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong><br />

tendre attachement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Notre f. Caille a trouvé une place chez un menuisier pour votre jeune ouvrier.<br />

378‐1 à M. lʹabbé Timon‐David<br />

Ce qui se fait à lʹŒuvre dʹAmiens. MLP. répond à ses objections. Le règlement, encore expérimental, corrigera<br />

une disposition sur la pauvreté selon les indications <strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce. Assurance lui est donnée quant au fonc‐<br />

tionnement <strong>de</strong> lʹœuvre <strong>de</strong> Marseille. ʺen tout et par <strong>de</strong>ssus tout, la charité est notre règle et notre suprême loiʺ.<br />

MLP. lui donne comme exemple lʹunion <strong>avec</strong> M. Halluin. Les imperfections <strong>de</strong> M. Timon‐David ne feront pas<br />

obstacle.<br />

Amiens, 14 juin 1856<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Je nʹai pas sous les yeux votre bonne et si confiante lettre, mais si les mots peuvent<br />

mʹéchapper, lʹesprit et les sentiments en sont restés en moi; je profite donc pour vous ré‐<br />

477


pondre <strong>de</strong> quelques moments <strong>de</strong> liberté qui me sont laissés durant la visite que je suis ve‐<br />

nu faire à notre petite famille dʹAmiens.<br />

Elle se compose en ce moment <strong>de</strong> trois membres seulement qui dirigent un orpheli‐<br />

nat à lʹintérieur et lʹœuvre du patronage au <strong>de</strong>hors; ils parviennent, malgré ces occupations<br />

impérieuses, à faire encore une part pour leurs exercices <strong>de</strong> communauté qui sont suivis<br />

assez régulièrement. Jʹai trouvé tout en bon état: leur maison qui est assez belle et bien<br />

disposée est parfaitement tenue, leurs enfants bien conduits et bien soignés, enfin la com‐<br />

munauté elle‐même est en bonnes dispositions, pieuse, unie et sincèrement dévouée au<br />

service du Seigneur. Il va sans dire que, pour le patronage surtout, qui est fort nombreux,<br />

ils sont gran<strong>de</strong>ment aidés par <strong>de</strong>s personnes du <strong>de</strong>hors, mais ils opèrent encore ainsi une<br />

autre œuvre, celle dʹencourager au bien beaucoup <strong>de</strong> gens qui se sanctifient et qui acquiè‐<br />

rent <strong>de</strong>s mérites par la pratique <strong>de</strong> la charité.<br />

Ces détails ne vous paraîtront pas sans intérêt puisquʹils concernent une partie <strong>de</strong> la<br />

famille à laquelle vous vous associez, et dont tous les membres vous regar<strong>de</strong>nt désormais<br />

comme un frère.<br />

Paris 17 juin 1856. ‐ On ne fait pas à Amiens tout ce quʹon veut. Jʹai bien commencé cette<br />

lettre, mais lʹachever ne mʹa pas été permis; les courses, les visites, les conférences <strong>avec</strong> les<br />

Frères que je <strong>de</strong>vais voir quelques jours à peine, ont absorbé tous mes instants. Ici, jʹarrive<br />

tout juste pour la Confirmation <strong>de</strong> nos orphelins; M gr lʹEvêque dʹAngers, qui nous accor<strong>de</strong><br />

une bienveillance toute particulière, a eu la bonté <strong>de</strong> faire cette intéressante solennité; <strong>de</strong>‐<br />

main, il nous revient pour voir et exhorter spécialement la Communauté; ainsi les jours se<br />

suivent, et je laisse trop longtemps sans réponse votre affectueuse épître.<br />

Je commence en constatant ici, dès les premières lignes, que désormais nous nous<br />

regardons comme liés à vous charitablement membres dʹune même famille <strong>avec</strong> vous.<br />

Toute notre petite communauté a adopté, <strong>de</strong> plein cœur le Frère <strong>de</strong> Marseille <strong>avec</strong> tous ses<br />

chers enfants et lui donnera part à ses prières et à ses œuvres en attendant le même retour<br />

<strong>de</strong> son côté; elle travaillera sincèrement à consommer par lʹeffet cette union en cherchant<br />

sans relâche les moyens <strong>de</strong> faire à Marseille une petite colonie qui se groupera autour du<br />

Frère si dévoué et si persévérant qui forme comme la première assise <strong>de</strong> la fondation. Voi‐<br />

là bien nos sentiments et dispositions, ils correspon<strong>de</strong>nt aux vôtres si je ne me trompe; la<br />

chose me semble donc bien entendue, nous sommes frères et nous marcherons désormais<br />

côte à côte dans le service du divin Seigneur.<br />

Vous ne me faites aujourdʹhui, cher Monsieur lʹabbé, dʹobservation touchant notre<br />

règlement quʹen ce qui concerne pour vous la consommation réelle <strong>de</strong> la pauvreté; en le re‐<br />

lisant, vous y trouverez bien dʹautres remarques à faire, il contient <strong>de</strong>s lacunes et imperfec‐<br />

tions notables, mais nous répondons, en ensemble, aux justes critiques quʹon en peut faire,<br />

en le donnant pour ce quʹil est en effet, cʹest‐à‐dire un simple relevé <strong>de</strong> notre état présent,<br />

et en promettant dʹopérer successivement les amen<strong>de</strong>ments et corrections désirables à me‐<br />

sure que la Provi<strong>de</strong>nce, dont nous suivons pas à pas la conduite, nous fournira les lumiè‐<br />

res dont nous avons besoin.<br />

Quant à lʹarticle concernant la pauvreté, il a dû être, nous le croyons, énoncé dʹune<br />

façon absolue parce que nous avons souhaité nous établir dans le sacrifice généreux et<br />

complet <strong>de</strong> tout et <strong>de</strong> nous‐mêmes; mais lʹexpérience nous montre, par nous‐mêmes et par<br />

les autres Congrégations, que lʹexécution peut en certains cas être assez difficile; cʹest<br />

pourquoi notre règlement autorise le Supérieur à admettre <strong>de</strong>s temporisations quand il les<br />

478


croit vraiment motivées. Je crois que les circonstances où vous êtes, cher Monsieur lʹabbé,<br />

relativement à vos entreprises et acquisitions, constituent bien un cas pareil et que nous<br />

pouvons accepter, quant à présent, votre sacrifice tel que vous lʹenvisagez, savoir <strong>de</strong> ne<br />

disposer et nʹuser <strong>de</strong> rien quʹ<strong>avec</strong> permission. Cʹest là assurément un premier <strong>de</strong>gré <strong>de</strong><br />

pauvreté bien notable et bien méritoire <strong>de</strong>vant Dieu. Nous ne verrions dʹailleurs aucun<br />

avantage à changer <strong>de</strong> nom votre avoir puisque, nʹétant pas légalement autorisés, nous<br />

nʹavons pu nous‐mêmes nous séparer <strong>de</strong> ce qui fait le fonds temporel <strong>de</strong> la Communauté<br />

quʹen constituant une société tontinière sur la tête <strong>de</strong> 3 <strong>de</strong>s plus soli<strong>de</strong>s (en apparence au<br />

moins) dʹentre nous. Mais je vous conjure, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> consommer bien cor‐<br />

dialement en vous‐même le détachement afin quʹintérieurement le principe reste sauf si<br />

lʹeffet <strong>de</strong>meure imparfait.<br />

Il me semble que vous pourriez considérer, pour vous affermir en ce sens, quʹayant<br />

assez <strong>de</strong> confiance en la Communauté pour lui abandonner la disposition <strong>de</strong> vos facultés<br />

et <strong>de</strong> votre personne, vous pourriez bien un jour, si la Provi<strong>de</strong>nce rendait votre situation<br />

plus dégagée, avoir la même confiance pour ce qui regar<strong>de</strong> vos biens temporels. Car si<br />

vous croyez que, marchant en présence <strong>de</strong> Dieu, nous ne disposerions jamais téméraire‐<br />

ment <strong>de</strong> vous et ne compromettrions pas <strong>de</strong> gaieté <strong>de</strong> cœur lʹœuvre si intéressante que<br />

vous dirigez, vous pouvez être, par là‐même, bien certain que nous ne lui enlèverions pas<br />

non plus les ressources qui servent à son soutien. Cʹest là une règle dʹéquité et <strong>de</strong> constante<br />

pratique dans les Congrégations quʹon gar<strong>de</strong> à chaque œuvre les moyens qui ont servi à sa<br />

création et à sa subsistance; les diverses institutions dépendant dʹune même Congrégation<br />

se peuvent ai<strong>de</strong>r fraternellement mais elles ne sʹabsorbent et ne se dévorent jamais les unes<br />

les autres. Ce principe <strong>de</strong> charité restera essentiel parmi nous car, en tout et par <strong>de</strong>ssus<br />

tout, la charité est notre règle et notre suprême loi. Jʹai dit ces quelques mots, cher Mon‐<br />

sieur lʹabbé, pour vous manifester sur ce point nos sentiments afin <strong>de</strong> mettre bien ferme‐<br />

ment votre esprit en paix parfaite.<br />

Nous introduirons volontiers dans la Communauté la pieuse pratique <strong>de</strong>s 15 same‐<br />

dis et nous en commencerons <strong>avec</strong> vous lʹapplication à partir <strong>de</strong> samedi prochain, 21 <strong>de</strong> ce<br />

mois. Il est bien bon <strong>de</strong> ne regar<strong>de</strong>r comme soli<strong>de</strong> que ce que la prière a sanctionné; il est<br />

consolant aussi <strong>de</strong> tenir en réserve pour les gran<strong>de</strong>s occasions quelque moyen puissant qui<br />

fasse un appel plus instant aux miséricordieux secours <strong>de</strong> Dieu. Ce ne sera pas, je lʹespère,<br />

le seul emprunt heureux que nous ferons à votre œuvre; peut‐être aussi aurons‐nous pour<br />

notre part quelque retour à vous faire afin que ces mutuels échanges tournent au profit <strong>de</strong><br />

la charité.<br />

Nous avons, comme je vous lʹavais dʹavance annoncé, cher Monsieur lʹabbé,<br />

consommé notre union <strong>avec</strong> M. lʹabbé Halluin qui dirige à Arras un établissement dʹor‐<br />

phelins, digne du plus grand intérêt. M. Halluin est une <strong>de</strong> ces âmes généreuses qui ne<br />

marchan<strong>de</strong>nt pas non plus les sacrifices, et qui comme vous, ne croient pas quʹon serve<br />

Dieu véritablement si lʹon ne se donne tout à lui. Le Seigneur a béni ses efforts, sa maison<br />

réunit 130 enfants dont lʹâme et le corps eussent été sans lui en perdition. Aussi, cʹest bien<br />

moins lʹimportance <strong>de</strong> son œuvre qui me touche que le zèle généreux et ar<strong>de</strong>nt qui lʹa<br />

poussé à la fon<strong>de</strong>r. Si, comme je lʹespère, quelque circonstance vous rapproche <strong>de</strong> lui dans<br />

la suite, vous nʹaurez pas <strong>de</strong> peine à vous comprendre, la charité est cette langue merveil‐<br />

leuse que parlaient les Apôtres après la <strong>de</strong>scente du Saint‐Esprit, toutes les âmes inspirées<br />

lʹenten<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> quelque contrée quʹelles soient, du nord ou du midi. Jʹattends <strong>de</strong> grands<br />

479


iens pour nos œuvres et pour nous <strong>de</strong>s communications et échanges bienveillants que<br />

nous pourrons opérer entre nous à mesure que notre union <strong>de</strong>viendra plus intime et plus<br />

effective.<br />

Mais je vous entends, cher Monsieur lʹabbé, me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si nous avons pu déjà<br />

préparer pour Marseille en particulier quelques moyens, afin <strong>de</strong> vous donner un peu<br />

dʹai<strong>de</strong> et <strong>de</strong> commencer comme vous le souhaitez votre petit foyer <strong>de</strong> communauté. Jʹes‐<br />

père dʹici à peu <strong>de</strong> temps avoir à ce sujet quelque vue plus précise; nous attendons lʹarri‐<br />

vée dʹun nouveau Frère; M. Halluin, <strong>de</strong> son côté, doit envoyer au noviciat chez nous un <strong>de</strong><br />

ses jeunes gens; il résultera sans doute <strong>de</strong> ces mouvements quelque renfort qui nous don‐<br />

nerait plus <strong>de</strong> facilités; cʹest en tout cas une affaire <strong>de</strong> temporisation seulement, nous<br />

sommes sincèrement résolus à traiter votre œuvre comme nôtre, elle ne sera sacrifiée à au‐<br />

cune autre parce quʹen elle‐même et à cause <strong>de</strong> vous, elle nous <strong>de</strong>vient véritablement<br />

chère.<br />

Nous souhaitons toujours que rien ne sʹoppose à la visite que vous vous étiez pro‐<br />

posé <strong>de</strong> nous faire mais je sens bien quʹelle ne vous serait guère possible avant que les tra‐<br />

vaux <strong>de</strong> votre chapelle soient plus près <strong>de</strong> leur terme. Je ne crains pas du reste comme<br />

vous, cher Monsieur lʹabbé, que vos quelques imperfections empêchent nos Frères <strong>de</strong> vous<br />

aimer et <strong>de</strong> sʹattacher tendrement à vous; je ne sais si le lien qui nous unit me rend déjà un<br />

peu aveugle à votre égard, mais je trouve dans votre apport à la famille que vous adoptez<br />

beaucoup plus <strong>de</strong> bien que <strong>de</strong> mal; le bien, je le tais e nʹen parle quʹà Dieu pour lʹen remer‐<br />

cier; le mal, à votre sens, cʹest quʹà la place du dévouement ar<strong>de</strong>nt et généreux qui me<br />

semble être lʹâme <strong>de</strong> votre vie et <strong>de</strong> votre œuvre, il y aurait une sorte <strong>de</strong> ténacité naturelle<br />

qui se raidit contre lʹobstacle et sʹaffermit par la difficulté. Si telle est en effet votre nature,<br />

elle est heureusement douée et elle offre <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s ressources; pour peu que la grâce la<br />

domine et la conduise, elle atteindra doucement et fortement le but que le divin Maître<br />

vous aura assigné. Mais dites‐vous encore, quand il y aurait force, il nʹy aurait certaine‐<br />

ment pas douceur puisque lʹimpétuosité <strong>de</strong>s premiers mouvements se manifeste surtout<br />

par la brusquerie et la ru<strong>de</strong>sse <strong>de</strong>s paroles. Je nʹai pas eu à remarquer ce défaut qui ne se<br />

révèle à moi que par votre aveu; mais S t François <strong>de</strong> Sales nous est témoin quʹil se peut<br />

corriger; la vie commune aura pour vous y ai<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s appuis que ne vous fournissait pas<br />

votre isolement, puis nous prierons ensemble et le Dieu <strong>de</strong> mansuétu<strong>de</strong> daignera se rendre<br />

à nos vœux.<br />

Cette lettre se ressent <strong>de</strong>s cent interruptions quʹelle a subies; si vous nʹy trouvez pas,<br />

cher Monsieur lʹabbé, lʹaccent <strong>de</strong> tendre affection, <strong>de</strong> cordiale sympathie que jʹavais à cœur<br />

dʹy mettre, cʹest à cela quʹil faut lʹattribuer. Mais ces sentiments eux‐mêmes vont bien pro‐<br />

fondément en moi comme en tous mes Frères; la suite <strong>de</strong> nos rapports vous en sera, je lʹes‐<br />

père, un constant témoignage. Veuillez offrir mes respectueux souvenirs à M. Guiol, je me<br />

sens en parfaite union <strong>de</strong> cœur <strong>avec</strong> lui. Croyez aussi à mon respect et dévouement sincère<br />

en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

379 à M. Halluin<br />

Devant les hésitations <strong>de</strong> lʹabbé Halluin pour franchir les ultimes étapes <strong>de</strong> lʹunion, MLP. lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> sʹou‐<br />

vrir sur ce qui lui paraît encore faire obstacle. Travailler <strong>de</strong> concert ne suffit pas, il faut une confiance réciproque:<br />

480


ien ne doit séparer les cœurs <strong>de</strong>s vrais enfants <strong>de</strong> Dieu. Sa famille religieuse est fondée sur la charité: ʺle cœur y<br />

fait plus que la têteʺ.<br />

Vaugirard, 21 juin 1856<br />

fête <strong>de</strong> St Louis <strong>de</strong> Gonzague<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> votre empressement à mʹécrire; ce nʹest pas une petite chose<br />

pour vous, au milieu <strong>de</strong> vos occupations si multipliées, <strong>de</strong> trouver quelque liberté pour<br />

écrire; cependant, il est bien utile que, dans les premiers temps surtout, nous travaillions à<br />

bien établir nos rapports mutuels et, puisque nous sommes à distance les uns <strong>de</strong>s autres, il<br />

nʹy a pas dʹautres ressources que la correspondance. Un premier point bien essentiel à po‐<br />

ser et qui simplifiera beaucoup les choses entre nous, cʹest que nous ayons <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts<br />

une confiance vraie, cordiale, sans réserve. Je crois pouvoir vous répondre quʹelle existe<br />

ainsi <strong>de</strong> notre côté; nous avons envisagé <strong>de</strong>vant Dieu notre union <strong>avec</strong> vous, nous avons<br />

regardé si lʹesprit qui nous anime était aussi le vôtre et, bien convaincu que nous mar‐<br />

chions sur la même voie, nous avons pris la disposition dʹavoir pour vous les mêmes sen‐<br />

timents que nous avons pour tous les membres <strong>de</strong> notre petite famille. Je désire bien quʹil<br />

en soit <strong>de</strong> même pour vous et pour les vôtres, et que vous comptiez sur nous comme sur<br />

<strong>de</strong> véritables frères, dont les affections et les intérêts ne sont pas autres que les vôtres. Je<br />

vous conjure donc, cher Monsieur lʹabbé, dʹexaminer sʹil est encore en vous quelque incer‐<br />

titu<strong>de</strong>, quelque défaut <strong>de</strong> lumière à notre sujet et <strong>de</strong> mʹen signaler la cause, afin que, tout<br />

éclaircissement et satisfaction vous étant donnés, nous vivions ensuite dans le plein air <strong>de</strong><br />

la confiance et <strong>de</strong> lʹaffection réciproques; il me semble que, <strong>de</strong> même quʹil ne doit rien y<br />

avoir entre le cœur <strong>de</strong> lʹhomme et le cœur <strong>de</strong> son Dieu, il ne doit y avoir rien non plus en‐<br />

tre les cœurs <strong>de</strong>s vrais enfants <strong>de</strong> Dieu. Cʹest là ce qui fait la joie <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> notre petite<br />

famille, cʹest que vraiment toutes les âmes y sont fondues en une. Peut‐être penserez‐vous<br />

quʹil faut du temps pour établir une intelligence et union si parfaites, mais je crois que,<br />

dans la divine charité du Seigneur, cette intime fusion <strong>de</strong>s cœurs se peut faire en un ins‐<br />

tant. Jʹai un peu insisté sur ce point, parce que tel est lʹesprit <strong>de</strong> notre petite famille; elle est<br />

fondée dans la charité, le cœur y fait plus que la tête, la confiance plus que la pru<strong>de</strong>nce,<br />

lʹabandon à Dieu plus que les réserves <strong>de</strong> la sagesse et <strong>de</strong> la raison naturelles.<br />

Je désire bien comme vous, que le jeune ecclésiastique qui conduit <strong>avec</strong> vous votre<br />

maison mʹécrive bientôt; il me semble que nous nʹaurons pas <strong>de</strong> peine à nous entendre si,<br />

comme tout me le fait penser, il ne désire comme nous que se dévouer <strong>de</strong> tout cœur aux<br />

œuvres qui doivent procurer la gloire <strong>de</strong> Dieu. Jʹose lʹassurer que, si lʹinspiration lui en est<br />

donnée intérieurement, il doit la regar<strong>de</strong>r comme une grâce insigne, car le Seigneur sem‐<br />

ble vouloir régir aujourdʹhui le mon<strong>de</strong> par la charité, et ceux qui servent dʹinstruments à<br />

ses divines miséricor<strong>de</strong>s auront part, en ce mon<strong>de</strong> et en lʹautre, à ses plus précieuses fa‐<br />

veurs. Que cet excellent Monsieur ten<strong>de</strong> donc un peu la main vers nous, et la nôtre sʹavan‐<br />

cera vite pour la serrer cordialement. Sa venue parmi nous serait un moyen <strong>de</strong> régler les<br />

petites dispositions que vous croyez désirables dans lʹintérêt <strong>de</strong> vos chers enfants, je dis<br />

bien sincèrement nos chers enfants dʹArras; jʹai à cœur, comme vous, <strong>de</strong> leur assurer tous<br />

les avantages quʹil dépendra <strong>de</strong> nous <strong>de</strong> leur procurer; je ne serai satisfait que lorsquʹils<br />

sentiront, eux aussi, quʹils ont gagné à lʹassociation qui nous unit. Je gar<strong>de</strong> les indications<br />

que vous me donnez sur vos besoins, afin <strong>de</strong> travailler, <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> vous, à y pourvoir.<br />

481


Les offices du S t Sacrement ne vous appellent, si je ne me trompe, quʹune ou <strong>de</strong>ux<br />

fois la semaine; il ne me paraîtrait pas, en ce cas, bien difficile <strong>de</strong> trouver à Arras quelque<br />

prêtre bienveillant qui consentirait ces jours‐là à dire la Sainte Messe à la maison <strong>de</strong>s or‐<br />

phelins. Je crois quʹeu égard au peu dʹétendue <strong>de</strong>s cours <strong>de</strong> cet établissement, il était bien<br />

désirable que vous eussiez un jardin, qui servît aux promena<strong>de</strong>s et aux travaux manuels<br />

<strong>de</strong>s enfants; je regar<strong>de</strong> donc comme très utile lʹacquisition que vous avez faite. Il me sem‐<br />

ble que vous mʹen aviez parlé lors <strong>de</strong> mon voyage à Arras. Je croyais seulement que vous<br />

pensiez alors à une location, et non à un achat; jʹaurai mal compris sans doute; je suis assu‐<br />

ré que vous aurez fait pour le mieux et dans les meilleures intentions.<br />

Je vous prie, cher Monsieur lʹabbé, dʹoffrir mes souvenirs bien affectueux à M. <strong>de</strong><br />

Lauriston, et <strong>de</strong> lui rappeler sa promesse quʹil mʹa faite <strong>de</strong> mʹécrire au plus tard après son<br />

arrivée à la Salette.<br />

Je serai bien satisfait aussi si, à leurs moments <strong>de</strong> loisir, vos bons frères mʹécrivaient<br />

quelques mots; je leur répondrais, et ainsi sʹétabliraient les liens <strong>de</strong> notre intimité. Travail‐<br />

ler ensemble, cʹest une association; mais travailler dʹun même cœur et dʹun même esprit,<br />

cʹest lʹunion en Dieu, et cʹest à ce but si excellent et si saint que nous tendons. Je les em‐<br />

brasse bien affectueusement en N.S. et je nʹattends que votre autorisation pour les appeler<br />

mes enfants; jʹai déjà pour eux les sentiments qui justifieraient pour moi ce nom. Laissez‐<br />

moi ajouter, cher Monsieur lʹabbé, pour vous‐même, que cʹest une joie pour notre petite<br />

famille <strong>de</strong> vous compter parmi ses membres et que, <strong>de</strong> ceux qui la composent, nul ne sʹen<br />

réjouit plus profondément que moi. Je vous embrasse aussi en J. et M., bien cordialement.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

380 à M. Paillé<br />

Préparatifs <strong>de</strong> lʹadoration <strong>de</strong>s Quarante Heures à Vaugirard. Savoir sʹentrai<strong>de</strong>r.<br />

Vaugirard, le 22 juin [1856]<br />

Cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous sommes aux <strong>de</strong>rnières limites du retard pour notre adoration; je vous <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>, au nom <strong>de</strong> notre divin Seigneur, <strong>de</strong> faire, <strong>avec</strong> nos ff. <strong>de</strong> Nazareth, tout ce que<br />

vous pourrez pour nous ai<strong>de</strong>r.<br />

1° Voici une lettre par laquelle je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> au r.p. Petetot <strong>de</strong> faire lʹinstruction <strong>de</strong><br />

clôture ou <strong>de</strong> nous donner le p. Gratry, sʹil ne peut absolument venir lui‐même.<br />

A leur défaut, jʹaimerais avoir, ou le p. <strong>de</strong> Ponlevoy ou M. Le Rebours, ou M. Véron,<br />

ou le p. Lefebvre, ou le p. Olivaint. Pour les <strong>de</strong>ux autres jours, MM. Le Rebours, Taillan‐<br />

dier, Chevojon, et tous ceux que je viens <strong>de</strong> nommer, y compris les pp. Petetot et Gratry,<br />

sʹils ne pouvaient venir le jeudi, jour <strong>de</strong> clôture.<br />

La clôture étant le jeudi, je prie mon f. Maignen dʹobtenir au plus tôt <strong>de</strong> M. Dupai‐<br />

gne quʹil se charge <strong>de</strong> la musique pour ce jour‐là. Le 2e ou le 1er jour, nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rions la<br />

Confrérie <strong>de</strong> Grenelle; il ne resterait quʹà chercher M. Dupart ou un autre, au choix <strong>de</strong> M.<br />

Maignen, pour le jour où la Confrérie ne viendrait point. Je vais tâcher <strong>de</strong> savoir si et<br />

quand elle viendra, le 1er ou le second jour. Il y aurait aussi à chercher <strong>de</strong>s adorateurs pour<br />

les <strong>de</strong>ux nuits.<br />

482


Je crois que ce serait une belle action <strong>de</strong> nous prêter vos lis dʹor pour entourer le S t<br />

Sacrement; je mʹengagerais formellement à les gar<strong>de</strong>r chez moi, à les placer et déplacer<br />

moi‐même, à les renvoyer <strong>avec</strong> les précautions nécessaires. Je sais que, même <strong>avec</strong> ces<br />

conditions, ce sera encore un grand sacrifice pour vous, aussi je ne lʹexige pas du tout; je<br />

crois seulement que ce serait agréable à N.S., et je suis convaincu aussi quʹIl saura bien<br />

nous rendre dʹautres fleurs quand nous aurons usé celles‐là à son service.<br />

Adieu, ami et fils en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

381 à M. Decaux<br />

Invitation à venir le rencontrer à Chaville.<br />

Chaville, 26 juin 1856<br />

Très cher et bien bon ami,<br />

Mes ff. <strong>de</strong> Nazareth mʹassurent que votre bonté pour eux est constante et que vous<br />

leur accor<strong>de</strong>r <strong>de</strong> temps en temps vos visites; jʹen tire les conséquence que votre charité<br />

pourrait sʹétendre <strong>de</strong>s enfants au père et quʹétant, à Nazareth, si près du chemin <strong>de</strong> fer, il<br />

vous serait bien facile <strong>de</strong> vous transporter en quelques minutes à Chaville.<br />

Ce me serait, je vous lʹassure, une douce et aimable consolation. La maisonnette que<br />

jʹoccupe est à une minute <strong>de</strong> la station, au bas du petit monticule où elle est située, rue <strong>de</strong><br />

lʹEglise, n 19. Les convois partent <strong>de</strong> Paris toutes les heures. Voyez donc, cher bon ami, si<br />

vous ne pouvez me donner une <strong>de</strong> vos après‐midi, ou tout au moins une <strong>de</strong> vos soirées:<br />

vous auriez la bonté <strong>de</strong> mʹavertir un jour à lʹavance, afin que ma pitance ordinaire se<br />

trouve double au jour où vous me viendrez voir. Je compte bien que vous mʹaccor<strong>de</strong>rez<br />

cette satisfaction si tant soit peu vous voyez moyen <strong>de</strong> ne pas me la refuser; vous respire‐<br />

rez un peu le bon air <strong>de</strong>s bois <strong>de</strong> Chaville, vous avez tant besoin <strong>de</strong> quelques instants <strong>de</strong><br />

repos!<br />

A bientôt je lʹespère donc, cher bon ami: croyez‐moi en tendre affection<br />

Votre dévoue ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

382 à M. Decaux<br />

Lʹabbé Timon‐David arrivant <strong>de</strong> Marseille, MLP. prie son jeune ami <strong>de</strong> reporter sa visite.<br />

Vaugirard, 30 juin 1856<br />

Très cher ami,<br />

Je viens vous prier <strong>de</strong> changer pour <strong>de</strong>main lʹitinéraire <strong>de</strong> notre petite promena<strong>de</strong> et<br />

<strong>de</strong> la faire pour cette fois, non à Chaville, mais seulement à Vaugirard. M. Timon‐David,<br />

<strong>de</strong> Marseille, qui ne <strong>de</strong>vait nous arriver que le lundi 7 juillet, mʹécrit à lʹinstant quʹil sera<br />

chez nous <strong>de</strong>main à midi; il me serait difficile, ainsi averti, dʹêtre absent au moment <strong>de</strong> son<br />

arrivée. Mais si vous voulez, en cette circonstance, vous montrer bon pour nous comme<br />

toujours, vous me donnerez <strong>de</strong>ux joies au lieu dʹune: celle <strong>de</strong> passer quelques instants <strong>avec</strong><br />

vous à Vaugirard <strong>de</strong>main, 1 er juillet, et celle <strong>de</strong> reprendre, à quelques jours dʹici, notre ex‐<br />

cursion projetée dans le bois <strong>de</strong> Chaville.<br />

483


Ne craignez pas <strong>de</strong> déranger nos entretiens <strong>avec</strong> M. Timon‐David; vous savez que<br />

vous êtes pour nous un frère et que nous mettons tout en commun <strong>avec</strong> vous. M. Timon<br />

restera dʹailleurs plusieurs jours ici; je désire que vous le voyiez, que vous causiez <strong>avec</strong> lui<br />

<strong>de</strong> lʹœuvre <strong>de</strong> M. Allemand, établie <strong>de</strong>puis 60 ans à Marseille, et qui est la plus gran<strong>de</strong><br />

œuvre <strong>de</strong> patronage qui ait encore été faite en France.<br />

Vous mʹappelez souvent votre père; il faut que vous soyez aujourdʹhui un enfant<br />

soumis et que vous vous rendiez à mes instances; je vous attendrai donc à telle heure <strong>de</strong><br />

lʹaprès‐midi que vous voudrez, le plus tôt sera le mieux; surtout que ce soit au plus tard<br />

pour 6h.½.<br />

Adieu, cher bon ami. Que nʹêtes‐vous réellement mon enfant! Je ne vous aimerais<br />

certainement pas davantage, mais notre affection serait comme consacrée et encore mieux<br />

établie.<br />

Votre tout affectionné et dévoué en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

383 à M. Caille<br />

Multiples activités à Vaugirard. Conduite à tenir envers <strong>de</strong>s candidats à la vie religieuse.<br />

Vaugirard, 1er juillet 1856<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Vous avez bien raison <strong>de</strong> vous étonner <strong>de</strong> mon silence; jʹétais revenu dʹAmiens tout<br />

content <strong>de</strong> ce que jʹy avais vu, <strong>de</strong>s bonnes dispositions <strong>de</strong> vos jeunes frères, <strong>de</strong> la soli<strong>de</strong> vo‐<br />

lonté pour le bien <strong>de</strong> notre f. Marcaire, <strong>de</strong>s efforts si courageux que vous faites pour le<br />

maintien <strong>de</strong> vos exercices, enfin <strong>de</strong> bon ordre <strong>de</strong> votre maison; jʹavais à cœur <strong>de</strong> vous le<br />

dire, dʹen remercier <strong>avec</strong> vous le Seigneur qui vous ai<strong>de</strong> si visiblement à surmonter les dif‐<br />

ficultés <strong>de</strong> votre position; mais, en arrivant, jʹai trouvé la Confirmation <strong>de</strong> nos enfants<br />

quʹest venu faire Mgr . lʹEvêque dʹAngers; puis, il a eu la bonté <strong>de</strong> revenir encore exprès<br />

pour la Communauté, afin <strong>de</strong> nous faire une exhortation et <strong>de</strong> passer quelques heures en<br />

intimité <strong>avec</strong> nous; puis, la visite <strong>de</strong> Mgr . le Légat [Cardinal Patrizzi], la distribution <strong>de</strong>s<br />

prix <strong>de</strong> Nazareth, enfin quelques jours <strong>de</strong> fatigue et <strong>de</strong> malaise; le tout ensemble a retardé<br />

la lettre que je voulais vous écrire. Si vous nʹaviez pris les <strong>de</strong>vants, peut‐être tar<strong>de</strong>rais‐je<br />

encore, car M. Timon‐David, notre nouveau f. <strong>de</strong> Marseille, vient dʹarriver pour passer<br />

quelques jours <strong>avec</strong> nous; nous préparons, en outre, lʹadoration <strong>de</strong>s Quarante Heures qui<br />

va avoir lieu durant trois jours: jeudi, vendredi, samedi, dans notre chapelle; avant, pen‐<br />

dant, après, tous nos moments sont presque pris par les exercices et soins <strong>de</strong> lʹadoration, et<br />

plus encore par toutes les visites auxquelles elle donne lʹoccasion <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> personnes<br />

qui sʹy ren<strong>de</strong>nt. Vous le voyez, cher ami, la vie, <strong>de</strong> Vaugirard est un peu comme celle<br />

dʹAmiens; elle est bien remplie et bien occupée.<br />

Je réponds ci‐contre à notre jeune f. dʹArras [Augustin Bassery]; M. Halluin mʹa<br />

écrit; il paraît penser quʹun peu <strong>de</strong> séjour à la Maison‐Mère fera du bien à cet excellent<br />

jeune homme; il est désirable aussi quʹil fasse connaissance <strong>avec</strong> nous et prenne les habi‐<br />

tu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> la Communauté. Nous verrons un peu plus tard, si notre jeune ami, M. Allard,<br />

montrait un peu plus <strong>de</strong> décision, ce qui pourrait être utile pour lui, mais je lʹai trouvé si<br />

peu arrêté dans ses vues que je crois pru<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> le laisser sʹaffermir davantage.<br />

484


Je vous remercie, cher bon ami, <strong>de</strong> lʹenvoi que vous projetez du vêtement dʹété que<br />

vous mʹavez <strong>de</strong>stiné. Je suis confus que vous fassiez pour moi cette dépense et vous prie<br />

<strong>de</strong> ne pas accroître vos dépenses déjà bien lour<strong>de</strong>s.<br />

Notre f. Carment prépare lʹenvoi <strong>de</strong>s objets que vous lui avez <strong>de</strong>mandés; si je puis y<br />

joindre quelque chose qui vous soit utile et agréable, dites‐le moi simplement.<br />

Embrassez mes bons jeunes frères pour moi; assurez <strong>de</strong> mon respect MM. Cache‐<br />

leux, Mangot, <strong>de</strong> Brandt, <strong>de</strong> Gerly, Jardin, et <strong>de</strong> mes affections tous vos bons amis. Bon<br />

souvenir aussi à lʹexcellente personne qui sʹoccupe <strong>de</strong> votre ménage; je la crois bien pieuse<br />

et bien édifiante.<br />

Adieu, bien cher ami et fils, je vous embrasse en J. et M.<br />

Votre ami et Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

384 à M. Halluin<br />

Satisfaction <strong>de</strong> recevoir <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> ses frères. Manque <strong>de</strong> personnel pour les besoins <strong>de</strong>s Œuvres. Adoration<br />

<strong>de</strong>s Quarante Heures. Séjour <strong>de</strong> Timon‐David à Vaugirard.<br />

Vaugirard, 3 juillet 1856<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Jʹai reçu, <strong>avec</strong> votre bonne lettre du 28 juin, les <strong>de</strong>ux petites épîtres que mon écrites<br />

les ff. Joseph [Loquet] et Michel. Le tout ensemble mʹa causé une vraie satisfaction. Lʹécri‐<br />

ture <strong>de</strong> ces bons jeunes gens nʹest pas mauvaise; ils expriment leur pensée assez aisément,<br />

mais surtout ils y montrent une ouverture <strong>de</strong> cœur dont jʹavais déjà été touché dans la vi‐<br />

site que je vous ai faite, et qui me donne <strong>de</strong> très bonnes espérances pour leur avenir spiri‐<br />

tuel. Je puis rendre le même témoignage du jeune Augustin Bassery qui, dʹaprès votre<br />

conseil, mʹa écrit aussi dʹAmiens, et dont la lettre a dépassé beaucoup mon attente. Je ne<br />

sais si notre f. Caille lʹy aurait un peu aidé, mais les sentiments quʹil y exprime, la simplici‐<br />

té tout aimable quʹil y montre mʹont tout à fait gagné le cœur. Je lui ai écrit que, sʹil se<br />

croyait sûr <strong>de</strong> ses bonnes dispositions, il pouvait nous arriver et quʹil serait accueilli par<br />

nous <strong>avec</strong> une cordiale affection. Nous ferons en sorte, sʹil vient, que nos soins et notre sol‐<br />

licitu<strong>de</strong> lui rappellent un peu la bienveillance paternelle qui a veillé sur ses jeunes années<br />

et a mis en lui <strong>de</strong> si précieux germes pour la piété et la vertu.<br />

Sʹil prend pied parmi nous, sa présence nous permettra <strong>de</strong> disposer <strong>de</strong> quelque<br />

frère qui pourrait ai<strong>de</strong>r à la conduite <strong>de</strong> vos enfants; mais pour détacher un sujet plus ex‐<br />

périmenté et sur lequel vous puissiez compter comme sur un remplaçant pour vous‐<br />

même, nous aurions besoin que sa place parmi nous fût à peu près remplie. Jʹavais un peu<br />

compté pour cela sur votre jeune ecclésiastique [Daviron], mais jusquʹici, il ne mʹa pas<br />

écrit, ce qui semble indiquer une gran<strong>de</strong> hésitation et une volonté encore peu arrêtée. La<br />

venue définitive <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Lauriston pourrait aussi nous fournir une ressource pour vous<br />

ai<strong>de</strong>r, non que nous pussions dès lʹabord le mettre à quelque emploi capital qui le charge‐<br />

rait trop et ne lui laisserait pas les loisirs dont il aurait besoin dans les premiers temps<br />

pour se bien asseoir. Mais, associé à quelquʹun <strong>de</strong>s nôtres, il pourrait, sans trop <strong>de</strong> préoc‐<br />

cupation, donner une ai<strong>de</strong> utile et prendre <strong>de</strong>s connaissances pratiques dont il tirerait plus<br />

tard parti. Nous attendons dʹailleurs un nouveau frère qui semble heureusement doué,<br />

mais nous ne lʹavons pas encore.<br />

485


Je ne me contriste pas pour nous‐mêmes <strong>de</strong> notre pénurie et du petit nombre <strong>de</strong> nos<br />

sujets disponibles; marcher pas à pas nous a gran<strong>de</strong>ment réussi, et nous <strong>de</strong>meurons volon‐<br />

tiers dans ce mouvement <strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nte lenteur où nous a maintenus la divine Provi<strong>de</strong>nce;<br />

je souhaiterais seulement <strong>de</strong> ne pas trop tar<strong>de</strong>r à vous donner satisfaction en vous prêtant<br />

lʹappui que <strong>de</strong>man<strong>de</strong> le bien <strong>de</strong> nos chers enfants dʹArras. Jʹy pense constamment; nous<br />

avons recommandé cette intéressante affaire à lʹadoration <strong>de</strong>s Quarante Heures, qui se fait<br />

les 3, 4 et 5 <strong>de</strong> ce mois dans notre chapelle <strong>de</strong> Vaugirard. Durant ces trois jours, et durant<br />

les <strong>de</strong>ux nuits quʹils comportent, le Divin Seigneur reste constamment exposé pour rece‐<br />

voir les adorations <strong>de</strong>s fidèles et les nôtres propres; cʹest un temps <strong>de</strong> bénédiction; jʹespère<br />

que, si nous en faisons bon emploi, le Dieu <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong> daignera nous assister.<br />

Notre nouveau f. <strong>de</strong> Marseille, M. Timon‐David, dont je vous ai parlé, je crois, dans<br />

une <strong>de</strong> mes <strong>de</strong>rnières lettres, est présentement parmi nous; pour se bien fondre à la famille<br />

dont il ne connaissait pas encore tous les membres, il a senti le besoin <strong>de</strong> passer quelques<br />

jours au milieu <strong>de</strong> nous; je crois que la Communauté a fait en sa personne une heureuse<br />

acquisition et quʹil apporte dʹailleurs, <strong>avec</strong> ses qualités propres, les bonnes traditions <strong>de</strong><br />

lʹœuvre <strong>de</strong> M. Allemand, dont peut‐être vous avez déjà entendu parler.<br />

Jʹécris quelques mots seulement à vos <strong>de</strong>ux jeunes frères [Loquet et Michel]: jʹespère<br />

que peu à peu une confiance parfaite sʹétablira entre eux et nous; nous y apporterons pour<br />

notre part les plus sincères et les plus cordiales dispositions.<br />

Soyez assuré, cher Monsieur lʹabbé, que tels sont surtout nos sentiments pour vous<br />

et que nous souhaitons vivement <strong>de</strong> nous unir à vous <strong>avec</strong> une tendre et profon<strong>de</strong> charité.<br />

Votre tout dévoué serviteur et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je recevrai <strong>avec</strong> plaisir <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> votre jeune frère séminariste [Cousin],<br />

dont vos <strong>de</strong>rnières lettres ne me disent rien; jʹespère quʹil reste toujours dans ses bonnes<br />

dispositions; jʹavais été très content <strong>de</strong> lʹentretien que jʹavais eu <strong>avec</strong> lui chez vous.<br />

Les exercices <strong>de</strong> lʹadoration me sont un tel surcroît dʹoccupation que je me vois à<br />

regret dans lʹimpossibilité dʹécrire, comme je le voulais aujourdʹhui, quelques lignes à vos<br />

bons frères; veuillez, cher Monsieur lʹabbé, les assurer que je le ferai tout prochainement.<br />

5h. vendredi 4 juillet. Votre jeune f. Bassery vient <strong>de</strong> nous arriver; puisse‐t‐il être<br />

vraiment conduit par le Seigneur, et trouver par sa grâce lʹesprit <strong>de</strong> dévouement et <strong>de</strong> per‐<br />

sévérance.<br />

385 à M. <strong>de</strong> Lauriston<br />

Se défier <strong>de</strong> toute fausse humilité. Qualités <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Lauriston. La pensée <strong>de</strong> la miséricor<strong>de</strong> divine est un remè<strong>de</strong><br />

au découragement. MLP. lui établit un programme pour son séjour à Paris.<br />

Vaugirard, 10 juillet 1856<br />

Bien cher Monsieur,<br />

Les quelques instants que jʹai passés <strong>avec</strong> vous à Arras mʹavaient déjà mis en rap‐<br />

port <strong>de</strong> cœur <strong>avec</strong> vous, mais votre bonne et si confiante lettre achève lʹentente parfaite<br />

que nos premiers entretiens avaient déjà commencée entre nous.<br />

Je ne veux pas chercher à détruire les humbles sentiments que vous avez <strong>de</strong> vous‐<br />

même, car cʹest le premier et le plus sûr indice du travail intérieur <strong>de</strong> la grâce dans les<br />

486


âmes. Cependant, cher Monsieur, il me semble que nous ne <strong>de</strong>vons pas méconnaître les<br />

dons <strong>de</strong> Dieu, que la reconnaissance nous y oblige et que nous courons risque, autrement,<br />

<strong>de</strong> tomber dans lʹabattement et <strong>de</strong> laisser sans emploi les facultés et moyens dont sa grâce<br />

nous a munis. Or, je ne puis mʹempêcher <strong>de</strong> trouver, après la lecture <strong>de</strong> votre lettre, que<br />

vous cé<strong>de</strong>z trop à quelques tentations <strong>de</strong> découragement, que vous contristez comme à<br />

plaisir votre pauvre cœur par la vue <strong>de</strong> vos imperfections et fragilités; que vous dénaturez<br />

vos actions, même les meilleures en les attribuant à <strong>de</strong>s inspirations purement naturelles;<br />

enfin, que vous détournez les yeux <strong>de</strong> tout ce quʹil y a <strong>de</strong> bon en vous pour scruter et ana‐<br />

lyser minutieusement les points défectueux <strong>de</strong> votre être, les quelques misères <strong>de</strong> votre<br />

vie. Jʹose vous assurer, cher Monsieur, quoique ma science spirituelle soit bien peu pro‐<br />

fon<strong>de</strong>, que vous seriez mieux dans le vrai et trouveriez bien plus <strong>de</strong> paix si, en vous humi‐<br />

liant <strong>de</strong>vant le Seigneur pour les faiblesses ou impuissances que vous pouvez, comme tous<br />

les autres hommes, vous reprocher justement, vous voyiez néanmoins dʹun œil simple et<br />

confiant ce que tout votre entourage voit en vous: un cœur aimant et dévoué, <strong>de</strong>s aspira‐<br />

tions généreuses, une âme sensible et délicate, un esprit attentif et pénétrant, un désir vrai<br />

<strong>de</strong> glorifier Dieu, un zèle sincère pour le salut <strong>de</strong>s âmes. Je nʹinsiste pas sur cette énuméra‐<br />

tion que je pourrais rendre plus longue, pour ne pas trop blesser votre humilité; mais jʹai<br />

dû la faire au moins, en somme, pour rendre à Dieu ce qui lui appartient et constater une<br />

vérité dont vous ne me semblez pas assez frappé: cʹest que vous nʹavez pas été déshérité<br />

en ce mon<strong>de</strong> et que le Seigneur vous a fait une part bien plus large quʹà beaucoup dʹautres,<br />

et quʹenfin, quand même un peu dʹalliage se serait mêlé à vos œuvres <strong>de</strong> piété et <strong>de</strong> chari‐<br />

té, elles restent, nonobstant, méritoires <strong>de</strong>vant le Père <strong>de</strong> toute volonté et <strong>de</strong> toute miséri‐<br />

cor<strong>de</strong>. Ayons, cher Monsieur, une confiance sans bornes en ce divin Maître, puisque son<br />

amour est infini, et, si nous courbons la tête au souvenir <strong>de</strong> nos misères, oh! relevons‐la et<br />

raffermissons notre cœur dans la pensée du tendre, du généreux et immense amour <strong>de</strong> no‐<br />

tre Dieu.<br />

Je souhaite bien, très cher Monsieur et ami, que ce sentiment remplisse votre âme: je<br />

ne doute pas alors que vous ne vous arrêtiez définitivement à la pensée <strong>de</strong> vous donner<br />

tout à Dieu. Peut‐être, en étudiant bien vos facultés et aptitu<strong>de</strong>s, trouveriez‐vous que tou‐<br />

tes vos peines sont venues <strong>de</strong> ce que vous nʹétiez pas fait pour marcher seul, que votre<br />

âme affectueuse avait besoin <strong>de</strong> sʹentendre <strong>avec</strong> dʹautres, que vos forces eussent été agran‐<br />

dies et confirmées par votre association <strong>avec</strong> eux et que cʹest à cette fin que le Seigneur<br />

voulait vous conduire.<br />

Nous allons attendre dès ce moment votre visite; partez bien vite, cher Monsieur, et<br />

soyez sûr que vous serez accueilli par <strong>de</strong>s frères et <strong>de</strong>s amis. Je ne vous offre point dʹexcu‐<br />

ses pour la pauvreté <strong>de</strong> notre maison; je sais que votre cœur chrétien a goûté assez inti‐<br />

mement lʹesprit du divin Sauveur pour nʹêtre point rebuté dʹune condition quʹil a lui‐<br />

même choisie; jʹai la confiance que vous vous trouverez à lʹaise au milieu <strong>de</strong> nous. Je ne me<br />

préoccupe pas non plus pour lʹemploi <strong>de</strong> votre temps; vous examinerez nos œuvres et<br />

vous prendrez une petite part à nos travaux; je souhaiterais que vous vissiez dʹun peu près<br />

les maisons <strong>de</strong> patronage, que vous causiez <strong>avec</strong> ceux qui les dirigent; vous pourriez<br />

mieux ensuite, même <strong>de</strong> loin, si le Bon Maître vous retenait plus tard parmi nous, envoyer<br />

à Arras quelques renseignements et conseils vraiment utiles. Enfin, mes frères, pour ache‐<br />

ver <strong>de</strong> remettre mes forces, mʹont loué un petit pied‐à‐terre à Chaville; vous y viendrez<br />

<strong>avec</strong> moi dans les jours où jʹy puis aller; nous causerons tout à loisir dans cette solitu<strong>de</strong> qui<br />

487


favorise si bien les mouvements intérieurs <strong>de</strong> la grâce divine; Dieu parlera à votre cœur,<br />

vous entendrez sa voix et vous ferez, enfant docile, tout ce quʹIl vous dira.<br />

Adieu, bien cher Monsieur et ami; je prends ce nom parce que jʹen ai les sentiments;<br />

jʹai la confiance que la charité du divin Sauveur sʹaccroîtra encore en nous pour nous unir<br />

en Lui.<br />

Votre bien affectionné ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Nous avons lʹadoration <strong>de</strong>s Quarante Heures à notre maison <strong>de</strong> Nazareth mer‐<br />

credi, jeudi, vendredi; faites en sorte <strong>de</strong> venir pour ce moment afin dʹadorer <strong>avec</strong> nous.<br />

Je vais écrire aujourdʹhui ou <strong>de</strong>main à notre bon abbé Halluin; je crois que nous<br />

nous entendrons bien ensemble. Je suis en retard aussi <strong>avec</strong> les ff. Loquet et Michel; je vais<br />

tâcher <strong>de</strong> faire quelques lignes pour eux.<br />

386 à M. Loquet<br />

Ne pas craindre les quelques sacrifices exigés par la vie religieuse commune. LʹInstitut est une famille. Quʹil<br />

sʹentretienne dans le désir <strong>de</strong> se dévouer à Dieu et au prochain.<br />

Vaugirard, 11 juillet 1856<br />

Mon bon frère Joseph,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> la petite lettre que vous mʹavez écrite et <strong>de</strong> la confiance affec‐<br />

tueuse que vous mʹy témoignez; jʹy réponds bien cordialement, je me suis dès lʹabord<br />

trouvé en accord <strong>avec</strong> vous. Votre ton <strong>de</strong> simplicité et <strong>de</strong> droiture mʹa donné bonne espé‐<br />

rance que nous nous entendrions sans peine et le court entretien que jʹavais eu <strong>avec</strong> vous<br />

chez notre bon ami, M. Halluin, mʹavait laissé une très satisfaisante impression. Votre let‐<br />

tre ne fait que la confirmer, car on sent que vous parlez comme le cœur vous a inspiré, et<br />

cʹest ainsi que les âmes se peuvent bien entendre. Je comprends bien dʹailleurs lʹeffroi que<br />

vous avez eu en apprenant que, par suite <strong>de</strong> notre union <strong>avec</strong> votre maison, il pourrait ar‐<br />

river que les ff. dʹArras vinssent, dans un temps ou dans un autre, faire quelque séjour à<br />

Vaugirard. Quitter le bon M. Halluin, sʹen aller au loin <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s étrangers, être obligé <strong>de</strong><br />

les aimer et <strong>de</strong> les regar<strong>de</strong>r comme <strong>de</strong>s frères, cʹétait en effet bien ru<strong>de</strong> à accepter. Mais<br />

<strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> réflexion, vous avez bientôt compris, cher ami, que ce qui serait dans le<br />

mon<strong>de</strong> dur, impossible, inacceptable, était en religion la chose la plus simple et la plus fa‐<br />

cile parce que, là où le divin Seigneur met la charité, il ôte toute la peine et ne laisse que la<br />

douceur et la paix. Le cœur, au contraire, se porte <strong>avec</strong> bonheur à ces dispositions qui ac‐<br />

croissent les moyens <strong>de</strong> sʹédifier, <strong>de</strong> glorifier Dieu et <strong>de</strong> lui gagner <strong>de</strong>s âmes. Cʹest le sen‐<br />

timent où vous êtes présentement <strong>avec</strong> la grâce du Seigneur. Aussi, sʹil arrivait que, plus<br />

tard, vous dussiez momentanément venir au milieu <strong>de</strong> nous, je suis sûr quʹà part le regret,<br />

bien légitime, dʹêtre un peu éloigné <strong>de</strong> votre bon ami et Père, M. Halluin, vous vous diri‐<br />

geriez sans peine vers une maison qui <strong>de</strong>vient, maintenant, comme un foyer <strong>de</strong> famille<br />

pour vous, et où vous avez autant dʹamis et <strong>de</strong> frères quʹil y a dʹhabitants. Du reste, notre<br />

bon M. Halluin ayant encore besoin <strong>de</strong> vous en ce moment, je ne pense pas que ce soit tout<br />

prochainement que vous <strong>de</strong>viez nous rendre visite; mais je gar<strong>de</strong> lʹespérance que ce qui est<br />

différé se retrouvera plus tard. En attendant, nous resterons bien unis par la prière et par<br />

les bonnes œuvres, nous suivrons, autant quʹil se pourra, les mêmes exercices et surtout<br />

488


nous tâcherons <strong>de</strong> remplir nos cœurs <strong>de</strong> cet esprit <strong>de</strong> charité qui sera notre vie propre et la<br />

force aussi <strong>de</strong> notre Communauté et <strong>de</strong> nos œuvres.<br />

Adieu, mon bon frère Joseph, croyez à tous les sentiments <strong>de</strong> vive et tendre affec‐<br />

tion <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

387 à M. Michel<br />

Avoir connu par expérience les épreuves <strong>de</strong> la vie dʹorphelin est une préparation provi<strong>de</strong>ntielle aux œuvres <strong>de</strong><br />

charité.<br />

Vaugirard, 11 juillet 1856<br />

Mon cher frère Michel,<br />

Jʹai tardé un peu à répondre à votre bonne petite lettre qui mʹa pourtant causé une<br />

gran<strong>de</strong> satisfaction par les sentiments chrétiens et les saints désirs quʹelle exprime; jʹespère<br />

quʹune autre fois, je serais moins empêché et quʹil me sera possible <strong>de</strong> vous écrire plus vite.<br />

Je vois <strong>avec</strong> joie que vous <strong>de</strong>meurez dans les bonnes dispositions que vous mʹaviez mon‐<br />

trées lors <strong>de</strong> la visite que je vous ai rendue à Arras. Bien convaincu, par <strong>de</strong> tristes expé‐<br />

riences, <strong>de</strong>s dangers du mon<strong>de</strong>, <strong>de</strong>s difficultés quʹon y trouve pour faire son salut, vous<br />

persévérerez dans la pensée <strong>de</strong> vous abriter dans la maison du Seigneur pour vous y sanc‐<br />

tifier et servir le divin Maître dans la personne <strong>de</strong>s pauvres orphelins. Vous avez vous‐<br />

même, cher enfant, senti quelle perte immense cʹest pour les orphelins dʹêtre privés <strong>de</strong><br />

leurs appuis naturels, <strong>de</strong> nʹavoir ni les soins, ni les directions, ni lʹamour <strong>de</strong> la famille, et<br />

vous avez compris combien est admirable et saint le dévouement <strong>de</strong> ceux qui se sacrifient<br />

pour leur rendre, par la charité, tous ces biens dont le malheur les a privés. Ce nʹest pas<br />

sans raison, nous le pouvons croire, que le Seigneur vous a fait passer par les pénibles<br />

épreuves que vous avez traversées, elles auront servi à vous éclairer et elles auront aussi<br />

rendu votre cœur plus généreux, plus sensible aux misères <strong>de</strong> vos frères, plus disposé à<br />

quelques généreux sacrifices pour les servir et les sauver. Laissez, cher enfant, ce bon Maî‐<br />

tre achever son œuvre, livrez‐lui votre âme pour quʹil la forme et la façonne à son gré; il y<br />

mettra une horreur <strong>de</strong> plus en plus gran<strong>de</strong> pour le mal, et lʹaspiration pour tout ce qui est<br />

beau, pur et saint. Il vous préparera, en un mot, pour lʹaccomplissement <strong>de</strong> ses <strong>de</strong>sseins, et<br />

vous fera un digne instrument <strong>de</strong> ses miséricor<strong>de</strong>s. Gar<strong>de</strong>z toujours un profond respect à<br />

votre Père, M. Halluin, ayez pour lui une docilité dʹenfant, une tendre et vive reconnais‐<br />

sance; prenez aussi un peu dʹaffection pour nous tous ici qui <strong>de</strong>venons vos amis et vos frè‐<br />

res, et priez en particulier pour celui qui se dit bien cordialement<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

489


388 à M. Halluin<br />

Ce qui est vraiment fait pour Dieu ne reste pas sans effet. Dispositions pour suppléer au manque <strong>de</strong> personnel.<br />

MLP. stimule le dévouement dʹun postulant et affermit une vocation encore fragile.<br />

Vaugirard, 13 juillet 1856<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Cʹétait, aujourdʹhui dimanche, la fête du Sacré‐Cœur <strong>de</strong> Jésus dans le diocèse <strong>de</strong> Pa‐<br />

ris; jʹai fait, à lʹoccasion <strong>de</strong> cette solennité, un appel tout particulier aux tendres miséricor‐<br />

<strong>de</strong>s du Sauveur, afin dʹobtenir <strong>de</strong> Lui les moyens <strong>de</strong> constituer nos œuvres dans <strong>de</strong> bonnes<br />

conditions, qui nous permettent <strong>de</strong> faire tout le bien que nous voudrions réaliser pour sa<br />

gloire. Je sais, par lʹexpérience que nous en faisons trop souvent, combien on souffre,<br />

quand on a un zèle sincère, <strong>de</strong> nʹaccomplir quʹà moitié et tout imparfaitement <strong>de</strong>s choses<br />

quʹon aurait à cœur dʹexécuter consciencieusement et sans rien négliger; cʹest une <strong>de</strong>s croix<br />

<strong>de</strong>s œuvres naissantes; mais nous pouvons considérer, cher Monsieur lʹabbé, quʹ<strong>avec</strong> la<br />

persévérance et le courage, les entreprises qui sont vraiment faites pour Dieu ne <strong>de</strong>meu‐<br />

rent pas indéfiniment dans cet état dʹimperfection. Lʹheure vient où la patience est cou‐<br />

ronnée et où <strong>de</strong>s ressources plus abondantes sont données par la divine bonté; ne nous<br />

lassons donc pas <strong>de</strong> prier et <strong>de</strong> travailler, nos vœux seront entendus, notre labeur aura sa<br />

récompense.<br />

Jʹentrevois, comme je vous lʹai dit, la possibilité <strong>de</strong> vous donner un sujet assez bien<br />

formé [M. Carment], sur lequel vous pourriez vous reposer pour vous remplacer dans la<br />

surveillance générale <strong>de</strong> la maison et concerter <strong>avec</strong> vous toutes les mesures dʹordre et <strong>de</strong><br />

bonne direction qui vous paraîtraient utiles; il y aurait toutefois, et inévitablement, un ap‐<br />

prentissage à faire pendant quelque temps par celui qui partagerait ainsi vos travaux. Ma<br />

seule difficulté, cʹest <strong>de</strong> combiner les choses <strong>de</strong> telle sorte que sa place puisse être à peu<br />

près remplie chez nous; jʹy travaille bien sincèrement. Jʹai aussi un jeune frère cordonnier<br />

[M. Thuillier], sachant bien son état et capable <strong>de</strong> former quelques enfants; il est en ce<br />

moment chargé <strong>de</strong> divers soins dont je tâcherai aussi <strong>de</strong> le dégager; enfin, il ne me paraît<br />

pas impossible quʹun <strong>de</strong> nos plus expérimentés frères [M. Lantiez] aille, durant 15 jours,<br />

installer les <strong>de</strong>ux premiers et régler <strong>avec</strong> vous lʹordre habituel <strong>de</strong> leurs travaux et exerci‐<br />

ces; tout cela est en élaboration; que le Seigneur daigne nous assister et nous arriverons à<br />

nos fins.<br />

Je regrette que votre jeune ecclésiastique [M. Daviron] ne se soit pas courageuse‐<br />

ment décidé, il nous eût mis hors <strong>de</strong> peine; il ne mʹa pas écrit jusquʹici. Ne pensez‐vous<br />

pas, cher Monsieur lʹabbé, que si nous arrivions, dans un temps donné, à exécuter les me‐<br />

sures que nous projetons, ce jeune ecclésiastique serait peut‐être blessé en voyant quʹun<br />

autre, plus nouveau venu dans la maison, jouit <strong>de</strong> votre confiance et semble appelé à lui<br />

succé<strong>de</strong>r dans lʹemploi quʹil avait jusquʹici?<br />

Jʹai reçu une bonne lettre <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Lauriston qui, je crois, va venir nous voir; il y a,<br />

assurément, <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s ressources dans ce cœur vraiment délicat et dans cet esprit si bien<br />

cultivé; sʹil fait un effort généreux et se met simplement à lʹœuvre <strong>avec</strong> nous, ses facultés,<br />

cessant dʹêtre isolées, seront toutes renouvelées et doubleront en puissance. Mais il faut<br />

pour cela un secours <strong>de</strong> la grâce. Unissez‐vous <strong>avec</strong> nous, cher Monsieur lʹabbé, pour lʹob‐<br />

tenir; il me semble que tout lʹavenir <strong>de</strong> cet excellent Monsieur dépend <strong>de</strong> cette divine et<br />

désirable assistance.<br />

490


Le jeune f. Augustin [Bassery] paraît sʹasseoir dans sa position; il vous a écrit hier, je<br />

pense quʹil vous aura dit sa pensée en toute simplicité; je nʹai pas vu sa lettre quʹil avait<br />

montrée à M. Myionnet. Je pense que dans quelque temps, il pourra, sʹil persévère, voir<br />

sans inconvénient les jeunes amis que vous désireriez rapprocher <strong>de</strong> lui, mais il est encore<br />

bien peu affermi, un peu <strong>de</strong> délai me semble très désirable; ces jeunes gens venant du <strong>de</strong>‐<br />

hors lʹentretiendront <strong>de</strong> leurs intérêts, <strong>de</strong> leurs plaisirs, rapprocheront leur situation <strong>de</strong> la<br />

sienne; ce serait gran<strong>de</strong> tentation pour un enfant <strong>de</strong> 19 ans que les rêves et illusions du<br />

mon<strong>de</strong> éblouiraient aisément; en attendant, ces jeunes gens ne pourraient‐ils aller voir à<br />

Nazareth (rue Stanislas, 11, à Paris) nos frères qui sʹoccupent là <strong>de</strong>s jeunes ouvriers et<br />

pourraient leur donner <strong>de</strong> bons entourages. Vous pourriez, cher Monsieur lʹabbé, les<br />

adresser soit à M. Maignen, soit à M. lʹabbé Hello.<br />

Jʹaurais été bien heureux dʹassister à votre fête <strong>de</strong> famille du 21 juillet; ces occasions<br />

sont favorables pour bien unir les membres dʹune association chrétienne, mais je ne pré‐<br />

vois pas que moi ni quelque autre <strong>de</strong> mes frères puissions quitter la Communauté en ce<br />

moment; si pourtant la chose me semblait praticable, je mʹy prêterais <strong>avec</strong> empressement.<br />

Je souhaite sincèrement <strong>de</strong> rendre notre union aussi vraie, aussi cordiale que possible, je<br />

saisirai vivement toutes les occasions dʹy arriver.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, votre <strong>de</strong>rnière lettre mʹa été particulièrement aimable,<br />

on y sent les commencements bien marqués <strong>de</strong> cette confiante affection qui rendra nos<br />

rapports vraiment utiles et vraiment édifiants pour nos âmes.<br />

Votre bien sincèrement dévoué et affectionné serviteur en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

389 à M. Caille<br />

Les charges sont lour<strong>de</strong>s dans les Œuvres <strong>de</strong> Paris. MLP. ne peut soutenir la communauté dʹAmiens comme il le<br />

voudrait. Pru<strong>de</strong>nce et prière doivent gui<strong>de</strong>r M. Caille dans ses démarches.<br />

Vaugirard, 16 juillet 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie le petit mot que je voulais faire pour notre f. Marcaire; tous nos frè‐<br />

res regrettent <strong>de</strong> vous avoir vu si peu et espèrent que quelque occasion vous ramènera<br />

bientôt parmi nous.<br />

Envoyez‐moi les dimensions du tapis nécessaire pour votre chapelle et jʹirai chez<br />

Demy‐Domeau pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r ce quʹil faut dʹétoffe; je désire contribuer à lʹachat pour 25f.<br />

Je regrette <strong>de</strong> ne pouvoir vous promettre pour votre acquisition projetée plus <strong>de</strong> 4<br />

ou 500f, les pauvretés et besoins <strong>de</strong> la maison ici ne me permettent pas <strong>de</strong> faire plus; si je<br />

puis les autres années en faire autant, jʹy serai bien disposé, mais je ne puis rien prévoir<br />

dans lʹétat dʹobérement où nous sommes. Allez pru<strong>de</strong>mment, cʹest‐à‐dire consultez Dieu,<br />

ne faites aucune démarche sans prier, la grâce du Seigneur vous donnera lumière et inspi‐<br />

ration.<br />

Je vous embrasse tendrement.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

491


390 à M. Halluin<br />

Conditions financières exigées pour quʹune communauté puisse acheter un immeuble.<br />

Vaugirard, 19 juillet 1856<br />

Fête <strong>de</strong> St Vincent <strong>de</strong> Paul<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Je réponds sans aucun retard à la partie <strong>de</strong> votre lettre qui semble porter sur un<br />

point très urgent, celui <strong>de</strong> lʹacquisition <strong>de</strong>s immeubles qui avoisinent votre établissement.<br />

Je ne me suis pas rendu compte assez en détail <strong>de</strong> votre situation pour vous donner un<br />

avis bien éclairé; il me semble toutefois que, si on accor<strong>de</strong> <strong>de</strong>s délais pour les payements,<br />

vous pourriez vous confier en la Provi<strong>de</strong>nce et vous assurer <strong>de</strong>s espaces et dépendances<br />

qui vous sont vraiment indispensables. On considère dʹordinaire une acquisition comme<br />

praticable pour une communauté quand elle dispose du tiers <strong>de</strong> la valeur <strong>de</strong> cette acquisi‐<br />

tion; il me semble que vous êtes dans ce cas; vous nʹavez point <strong>de</strong> <strong>de</strong>ttes à proprement par‐<br />

ler, votre situation est meilleure que celle <strong>de</strong> la plupart <strong>de</strong>s œuvres charitables. Il ne sʹagit<br />

pas dʹailleurs ici dʹune chose dʹagrément, mais dʹun agrandissement nécessaire pour la<br />

bonne tenue <strong>de</strong> la maison et même pour la santé <strong>de</strong>s enfants; Dieu ne refuse pas à ses ser‐<br />

viteurs ce qui leur est vraiment nécessaire; je crois donc quʹIl vous assistera dans cette cir‐<br />

constance comme dans les autres et que vous pouvez vous confier à sa bonté.<br />

Nous nous unissons à vos chers enfants pour vous souhaiter, à lʹoccasion <strong>de</strong> votre<br />

fête toutes sortes <strong>de</strong> grâces et <strong>de</strong> bénédictions.<br />

Je suis, cher Monsieur lʹabbé, <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s sentiments <strong>de</strong> respect et dʹaffection.<br />

Votre humble serviteur et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Nous attendons M. <strong>de</strong> Lauriston pour mardi.<br />

390‐1 245 à un correspondant inconnu<br />

Eléments du règlement primitif <strong>de</strong> lʹInstitut. Double fin <strong>de</strong> lʹInstitut : vivre du Christ pour le donner au mon<strong>de</strong>.<br />

Lʹesprit <strong>de</strong> charité, caractéristique <strong>de</strong> lʹInstitut. Etre <strong>de</strong>s hommes <strong>de</strong> dévouement et <strong>de</strong> vraie charité.<br />

22 [juillet 1856]<br />

Cher Monsieur,<br />

Je réponds sans retard à votre lettre du 18 <strong>de</strong> ce mois afin <strong>de</strong> vous témoigner ainsi le<br />

vif intérêt que jʹai pris à la communication qui en est lʹobjet. Lʹespoir <strong>de</strong> compter un frère<br />

<strong>de</strong> plus est toujours une joie pour nous car, bien convaincus que la voie où le Seigneur<br />

nous a placés mène droit à Lui et tend vraiment à sa gloire, nous ne pouvons quʹêtre heu‐<br />

reux en voyant dʹautres âmes y entrer à leur tour et partager <strong>avec</strong> nous les précieux privi‐<br />

lèges <strong>de</strong> notre vocation.<br />

Nʹest‐ce pas en effet, cher Monsieur, une bien gran<strong>de</strong> faveur, par les temps où nous<br />

sommes, dʹêtre choisi entre mille pour se consacrer à Dieu dans la vie religieuse, dʹéchap‐<br />

per aux dangers et aux préoccupations du siècle pour nʹavoir plus quʹun amour unique<br />

dans le cœur et un emploi unique aussi <strong>de</strong> tous ses instants, celui <strong>de</strong> glorifier le divin Sei‐<br />

245 L'original <strong>de</strong> cette lettre se trouve aux Archives <strong>de</strong>s Pères Spiritains. Supposée du 22 janvier 1858, elle fut donc d'abord répertoriée<br />

517-1. Mais le vœu <strong>de</strong> charité, dont parle MLP., ne se trouve jamais aux procès-verbaux du Conseil supérieur, sinon aux 2 réunions<br />

successives <strong>de</strong>s 25 juin et 8 juillet 1856. La lettre doit donc être du 22 juin ou juillet 1856 et replacée en 390-1.<br />

492


gneur et dʹattirer tous les cœurs à le connaître et à lʹaimer. Telle est en effet la double fin <strong>de</strong><br />

notre Institut, nous tâchons <strong>de</strong> nous former à la vie intérieure afin dʹadorer Dieu en esprit<br />

et en vérité, et par les œuvres <strong>de</strong> zèle et <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong> nous travaillons au salut <strong>de</strong> nos<br />

frères. Nos journées se partagent entre ces <strong>de</strong>ux occupations.<br />

Nos principaux exercices <strong>de</strong> piété sont: le matin, lʹoraison, la S te Messe et la pre‐<br />

mière partie <strong>de</strong> lʹOffice <strong>de</strong> la S te Vierge; au milieu du jour, lʹexamen particulier et la 2 e par‐<br />

tie <strong>de</strong> lʹOffice; dans la soirée, la lecture spirituelle, lʹadoration, la 3 e partie <strong>de</strong> lʹOffice et, se‐<br />

lon le jour, quelquʹexercice particulier <strong>de</strong> Communauté.<br />

Les frères font <strong>de</strong>s vœux, après les délais dʹépreuves nécessaires; les premiers vœux<br />

ne se peuvent faire que pour un an seulement, après lʹachèvement du noviciat; ils sont en‐<br />

suite renouvelés pour trois ans, enfin, après 5 années <strong>de</strong> profession, ils peuvent <strong>de</strong>venir<br />

perpétuels. Le noviciat est dʹordinaire dʹune année, mais il peut être prolongé pour ceux<br />

qui resteraient incertains <strong>de</strong> leur vocation.<br />

Les frères ont jusquʹici gardé lʹhabit séculier comme étant plus propice pour les œu‐<br />

vres du <strong>de</strong>hors et, malgré la tentation, si naturel pour les serviteurs <strong>de</strong> Dieu, <strong>de</strong> prendre<br />

les livrées qui les signalent comme étant <strong>de</strong> sa maison, ils ont ajouté ce sacrifice aux autres<br />

pour rester plus disponibles et se porter partout où son ordre les appelle. Lʹétat présent ne<br />

préjuge toutefois rien pour lʹavenir; sur ce point comme sur tous les autres, les frères se<br />

conformeront à la volonté du Seigneur.<br />

Ils nʹont aucune austérité particulière; lʹimmolation intérieure, une vie simple et<br />

pauvre, les travaux <strong>de</strong> chaque jour sont leurs ordinaires mortifications. La nourriture est<br />

simple mais saine et proportionnée à tous les besoins. Il en est <strong>de</strong> même <strong>de</strong>s travaux qui se<br />

mesurent aux aptitu<strong>de</strong>s et forces <strong>de</strong> chacun.<br />

Les principales œuvres <strong>de</strong> la Congrégation sont <strong>de</strong>ux orphelinats et plusieurs mai‐<br />

sons consacrées à servir dʹasile et <strong>de</strong> protection aux jeunes gens <strong>de</strong> la classe ouvrière afin<br />

<strong>de</strong> les maintenir dans le droit chemin; mais pour donner emploi à toutes les facultés et<br />

dispositions, la Communauté a encore quelques œuvres qui concernent particulièrement<br />

le soin et lʹédification <strong>de</strong>s pauvres. Chaque frère peut donc aisément y trouver sa place.<br />

On ne saurait dire quʹil y ait rien <strong>de</strong> réellement pénible dans la Règle sinon peut‐<br />

être lʹheure du lever qui est en toute saison à 5h. Les frères ont 7 heures <strong>de</strong> sommeil; si,<br />

pour cause <strong>de</strong> santé, ils ont réellement besoin <strong>de</strong> plus, on abrège plus volontiers la soirée,<br />

afin <strong>de</strong> laisser intacts le lever et les exercices du matin.<br />

Les frères se servent eux‐mêmes (on le conçoit aisément <strong>de</strong> ceux qui se donnent<br />

comme serviteurs <strong>de</strong>s pauvres), sauf les travaux <strong>de</strong> cuisine qui se concilient trop difficile‐<br />

ment <strong>avec</strong> les exercices spirituels.<br />

Les conditions dʹadmission sont la piété, le dévouement absolu, quelque capacité<br />

dʹesprit et <strong>de</strong> corps. Le défaut <strong>de</strong> ressources temporelles ne fait point obstacle à la vocation<br />

<strong>de</strong>s frères, mais on comprend quʹil est <strong>de</strong> toute justice quʹils ai<strong>de</strong>nt la Communauté lors‐<br />

quʹils en ont les moyens. Le taux <strong>de</strong> leur pension se fixe alors dʹaprès leurs propres ouver‐<br />

tures; sʹil leur reste en outre quelques revenus disponibles chaque année, ils nʹen disposent<br />

pour les œuvres ou autrement quʹ<strong>avec</strong> le consentement du Supérieur.<br />

La plupart <strong>de</strong> ces dispositions nous sont communes <strong>avec</strong> beaucoup <strong>de</strong> Congréga‐<br />

tions; ce que nous tâchons <strong>de</strong> nous rendre propre, ce que nous souhaitons dʹétablir comme<br />

fonds <strong>de</strong> lʹInstitut, cʹest lʹesprit <strong>de</strong> charité; nous voudrions que tous nos membres soient<br />

<strong>de</strong>s hommes <strong>de</strong> cœur, <strong>de</strong>s hommes <strong>de</strong> dévouement, <strong>de</strong>s hommes <strong>de</strong> vraie charité. Aussi<br />

493


désirons‐nous que parmi nous, les frères sʹaiment entre eux encore plus quʹailleurs, quʹils<br />

ouvrent largement leur cœur pour la con<strong>de</strong>scendance et la miséricor<strong>de</strong> envers les pauvres,<br />

par le support et la bienveillance prévenante envers tous, par la disposition ferme <strong>de</strong> tout<br />

faire, <strong>de</strong> tout souffrir pour répandre partout la charité; ignem veni mittere in terram, je suis<br />

venu apporter le feu divin sur la terre, cette parole tombée du Cœur <strong>de</strong> notre Sauveur doit<br />

être leur <strong>de</strong>vise et lʹinspiration <strong>de</strong> tous leurs sentiments et <strong>de</strong> tous leurs actes. Aussi au‐<br />

rions‐nous lʹintention, si lʹautorisation nous en est accordée, dʹajouter un quatrième vœu<br />

aux vœux ordinaires <strong>de</strong> la religion, celui <strong>de</strong> Charité, afin <strong>de</strong> nous engager plus strictement<br />

à la pratique <strong>de</strong> cette vertu et dʹen faire la vie véritable et le caractère propre <strong>de</strong> notre pe‐<br />

tite Congrégation. Nous croyons répondre ainsi aux vues <strong>de</strong> la divine Miséricor<strong>de</strong> qui<br />

semble aujourdʹhui vouloir sauver le mon<strong>de</strong> par la charité et nous espérons quʹElle dai‐<br />

gnera, malgré notre indignité, faire <strong>de</strong> nous <strong>de</strong>s instruments pour soutenir les œuvres <strong>de</strong><br />

charité et concourir ainsi aux <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> son amour.<br />

Tels sont, en ensemble, la fin et les moyens <strong>de</strong> notre Communauté. Je souhaite bien,<br />

cher Monsieur, que ces renseignements correspon<strong>de</strong>nt à vos vœux et vous confirment<br />

dans la pensée généreuse que vous avez <strong>de</strong> vous consacrer au service du Seigneur; la<br />

moisson est gran<strong>de</strong> mais les ouvriers sont peu nombreux; nous prierons <strong>avec</strong> vous, cher<br />

Monsieur, pour que le Seigneur les multiplie et quʹIl vous affermisse en particulier dans<br />

vos bonnes résolutions.<br />

Je suis, <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s sentiments bien dévoués en J. et M.<br />

Votre humble serviteur et frère,<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

390‐2 à M. lʹabbé Timon‐David<br />

Timon‐David a écrit ses réactions à la suite <strong>de</strong> son séjour à Paris, début juillet. Leur projet dʹunion est ajour‐<br />

né. La déception est réciproque. MLP. présente ses excuses pour nʹavoir pas caché son désappointement.<br />

Vaugirard, 27 juillet 1856<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> votre bonne lettre elle mʹexprime bien vos sentiments et ne peut<br />

quʹaccroître encore ma haute estime et nos sympathies sincères pour vous et pour votre<br />

œuvre. Je ne mʹétonne point <strong>de</strong> vos hésitations au moment <strong>de</strong> prendre la grave décision<br />

qui <strong>de</strong>vait vous unir à nous; quand on se donne sans mesure, on désire bien placer son of‐<br />

fran<strong>de</strong>. Dʹautres communautés que la nôtre peuvent être bien plus attrayantes par leur an‐<br />

cienneté, leur nombre, leur composition choisie, la régularité extérieure <strong>de</strong> leurs mouve‐<br />

ments, lʹimportance <strong>de</strong> leurs œuvres; la nôtre nʹa que le dévouement simple et vrai <strong>de</strong> ses<br />

membres, cʹest peu <strong>de</strong>vant les hommes, cela suffira, je lʹespère, <strong>de</strong>vant Dieu pour lui méri‐<br />

ter <strong>de</strong> vivre et dʹopérer un peu <strong>de</strong> bien, nous nʹaspirons quʹà cela, le divin Maître ne nous<br />

le refusera point.<br />

Je regretterais bien dʹavoir contribué par ma faute à empêcher lʹexpansion <strong>de</strong>s mou‐<br />

vements qui se passaient en vous et que vous eussiez voulu me rendre plus complètement;<br />

vous le savez, la profon<strong>de</strong> altération <strong>de</strong> ma santé me laisse impressionnable et facile à<br />

ébranler, cʹest à cette disposition que vous <strong>de</strong>vez attribuer les quelques indices dʹémotion<br />

que vous avez cru remarquer en moi et pour lesquels je raisonne votre indulgence sʹil est,<br />

en effet, besoin. Il est bien vrai dʹailleurs que jʹéprouvais, à ce moment quelque peine;<br />

jʹétais venu vous voir à Marseille dans la persuasion que vous étiez fermement résolu à<br />

vous associer à nous, la chose étant en projet <strong>de</strong>puis trois ans semblait avoir été bien mû‐<br />

494


ie. Je nʹai regardé quʹune chose chez vous: sʹil y avait un esprit vrai <strong>de</strong> sacrifice et <strong>de</strong> dé‐<br />

vouement; jʹai cru le trouver dans votre pauvreté volontaire, dans votre vie dure et labo‐<br />

rieuse, dans votre zèle pour le salut <strong>de</strong> vos enfants et particulièrement dans votre miséri‐<br />

cor<strong>de</strong> pour le pauvre enfant scrofuleux que vous avez recueilli et que vous soignez chez<br />

vous; jʹavais reconnu là les indices <strong>de</strong> cette pure charité dans laquelle nous avons souhaité<br />

asseoir notre œuvre et dans laquelle je crois quʹelle a vécu jusquʹici, <strong>avec</strong> la grâce <strong>de</strong> Dieu.<br />

Mais dès votre arrivée à Vaugirard, vous mʹavez manifesté quelques défiances et<br />

préventions; <strong>de</strong>s conseils <strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nce que je ne blâme point, avaient changé vos disposi‐<br />

tions, vous interrogiez mes frères, les ff. ecclésiastiques en particulier, vous questionniez à<br />

notre sujet tous ceux que vous supposiez au <strong>de</strong>hors pouvoir vous informer, vous agitiez<br />

<strong>avec</strong> eux toutes les questions qui nous pouvaient concerner; je nʹai pu mʹempêcher <strong>de</strong> res‐<br />

sentir quelque peine <strong>de</strong> ces enquêtes qui me semblaient tardives et inopportunes au point<br />

où je vous croyais <strong>avec</strong> nous. Voilà, cher Monsieur lʹabbé, toute ma confession. Elle vous<br />

prouvera une fois <strong>de</strong> plus que lʹimmolation absolue <strong>de</strong> soi et <strong>de</strong> toutes ses affections nʹest<br />

guère commune puisque ceux qui font profession <strong>de</strong> consommer pleinement le sacrifice<br />

restent si sensibles, si sujets aux moindres atteintes.<br />

Jʹose vous assurer toutefois que cette légère piqûre nʹa nullement altéré nos senti‐<br />

ments à votre égard, nous vous restons reconnaissants <strong>de</strong>s bons conseils que vous avez<br />

donnés à nos œuvres, nous souhaitons à la vôtre toutes les bénédictions du Seigneur, enfin<br />

nous gardons <strong>avec</strong> vous lʹespérance que la parfaite entente qui nʹa pu se faire entre nous<br />

dʹun seul coup pourra se consommer plus tard par reprise et que la divine Provi<strong>de</strong>nce<br />

peut avoir eu ses vues dans ce premier rapprochement.<br />

Nous ne manquerons pas surtout, et quoi quʹil arrive, <strong>de</strong> <strong>de</strong>meurer unis à vous par<br />

la prière et les bons offices réciproques, ce sera déjà un <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> charitable et fraternelle<br />

association.<br />

Adieu, bien cher Monsieur lʹabbé, veuillez offrir au bon M. Guiol mes sentiments <strong>de</strong><br />

respectueux attachement et recevez vous‐même tout mon respect et tout mon dévouement<br />

en N.S.<br />

Votre humble serviteur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Votre statue <strong>de</strong> la S te Vierge est commencée chez le mouleur; dès quʹelle sera<br />

faite, nous prendrons soin quʹelle vous soit expédiée sans retard.<br />

Nos Frères sont bien reconnaissants <strong>de</strong> votre bon souvenir; M. Maignen recevra<br />

<strong>avec</strong> gran<strong>de</strong> joie une lettre <strong>de</strong> vous.<br />

391 à M. Halluin<br />

Il faut continuer à correspondre régulièrement. Que M. Halluin fasse preuve <strong>de</strong> discernement dans les affaires<br />

temporelles. Dispositions pour la prochaine retraite. Projet <strong>de</strong> nommer les frères Carment et Thuillier à Arras.<br />

Comment envisager lʹadmission dʹun jeune prêtre peu apte à sʹoccuper <strong>de</strong>s enfants.<br />

Vaugirard, 30 juillet 1856<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Jʹallais vous écrire au moment où je reçois votre lettre; ne craignez pas, comme vous<br />

le disiez dans votre précé<strong>de</strong>nte, <strong>de</strong> rendre vos correspondances trop fréquentes. Dans nos<br />

495


commencements surtout et jusquʹà ce que <strong>de</strong> tous points, nʹayant plus quʹun cœur et<br />

quʹune âme, nous nous entendions à <strong>de</strong>mi‐mot, nous aurons besoin <strong>de</strong> conférer souvent, et<br />

je lʹespère, dʹaprès ce qui a eu lieu jusquʹici, ce sera chaque fois, <strong>avec</strong> une entente <strong>de</strong> plus<br />

en plus cordiale et intime.<br />

Jʹentre pleinement dans vos vues relativement à la maison qui avoisine la vôtre; je<br />

pense quʹelle vous est bien nécessaire et quʹil est fort désirable pour vous <strong>de</strong> lʹacquérir,<br />

mais je crois néanmoins quʹon ne doit pas trop sacrifier à la convenance et la payer beau‐<br />

coup au‐<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> sa valeur réelle. Vous savez mieux que personne ce quʹelle vaut et quel‐<br />

les chances vous pouvez avoir <strong>de</strong> lʹobtenir, soit présentement, soit plus tard, je dois donc<br />

mʹen rapporter pleinement à votre discernement et sage appréciation.<br />

Je goûte beaucoup votre pensée <strong>de</strong> retraite à Amiens, ce serait un peu moins solen‐<br />

nel quʹà la Trappe, mais ce serait bien plus intime et dʹune utilité bien plus directe. Vous<br />

auriez dʹailleurs là <strong>de</strong> précieuses ressources pour cette retraite dans la présence à Amiens<br />

<strong>de</strong>s r.p. Jésuites, <strong>de</strong>s Franciscains, etc. Si un voyage un peu plus long ne vous effrayait pas<br />

pour vos frères et postulants, il serait encore bien mieux quʹils fissent la retraite <strong>avec</strong> nous<br />

à Vaugirard vers la fin <strong>de</strong> septembre. Comme je pense <strong>avec</strong> vous quʹil faut chercher toutes<br />

les occasions <strong>de</strong> nous bien fondre ensemble, je concourrais <strong>de</strong> grand cœur à cette réunion<br />

en partageant <strong>avec</strong> vous, par moitié, les frais <strong>de</strong> voyage <strong>de</strong>s frères et sujets que vous croi‐<br />

riez <strong>de</strong>voir envoyer. Vous jugerez, du reste, si cet arrangement se peut concilier <strong>avec</strong> les<br />

besoins et conduites <strong>de</strong> votre maison.<br />

Jʹespère pouvoir vous envoyer, après lʹAssomption, <strong>de</strong>ux frères; lʹun qui pourrait<br />

vous remplacer dans la surveillance générale [M. Carment], lʹautre jʹespère [M. Thuillier]<br />

qui est cordonnier, pourrait former un petit atelier <strong>de</strong> quelques enfants auxquels il ap‐<br />

prendrait son état. Je pourrais vous envoyer plus tard un troisième, mais seulement quand<br />

les <strong>de</strong>ux premiers seraient déjà accoutumés et bien posés; encore, ce <strong>de</strong>rnier arrangement<br />

ne pourrait‐il se faire quʹautant que vous croiriez <strong>de</strong>voir envoyer à Vaugirard le f. Loquet.<br />

Jʹai lieu dʹespérer que vous pourrez tirer bon parti <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux que je vous <strong>de</strong>stine, chacun<br />

dans son emploi. Il me paraîtrait à souhaiter que le premier, dont vous voudriez faire une<br />

sorte <strong>de</strong> lieutenant pour vous, nʹeût pas <strong>de</strong> classe à faire. Cette sorte dʹemploi irait assez<br />

difficilement à ses habitu<strong>de</strong>s, parce que nous ne lʹy avons ici jamais occupé, et dʹailleurs il<br />

aurait une position bien meilleure pour la conduite générale <strong>de</strong>s enfants sʹil nʹavait pas à<br />

sʹoccuper journellement <strong>de</strong> quelques‐uns dʹentre eux. Il vous serait dʹailleurs ainsi un ai<strong>de</strong><br />

personnel, bien plus disponible et bien plus utile pour vous donner un réel soulagement.<br />

Le troisième frère, que je verrais la possibilité <strong>de</strong> vous envoyer plus tard, pourrait<br />

faire une classe ainsi que le f. Loquet; on peut parfaitement compter sur lui, il a extérieu‐<br />

rement une très bonne tenue, il sait bien surveiller les enfants et prendre ascendant sur<br />

eux.<br />

Je ne perds pas tout espoir, dʹaprès ce que vous me dites, <strong>de</strong> voir votre jeune prêtre<br />

[M. Daviron] se donner <strong>avec</strong> vous aux œuvres <strong>de</strong> charité. Ce que vous avez remarqué rela‐<br />

tivement à son défaut dʹapplication aux détails concernant les enfants <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rait à être<br />

examiné. Si cʹest par manque <strong>de</strong> zèle et dʹesprit <strong>de</strong> dévouement, assurément, il nʹaurait pas<br />

vocation pour le ministère que le Seigneur nous a confié; mais si cʹétait simple inaptitu<strong>de</strong><br />

pour lʹœuvre <strong>de</strong>s orphelins, en particulier, il se pourrait faire quʹemployé à dʹautres œu‐<br />

vres, il réussît mieux et concourût au bien très efficacement. Mais le point est là: y a‐t‐il en<br />

lui vrai dévouement, esprit <strong>de</strong> zèle et <strong>de</strong> sacrifice, amour <strong>de</strong>s petits et <strong>de</strong>s faibles, désir <strong>de</strong><br />

496


se dévouer à leur sanctification? Je vous prie, cher Monsieur lʹabbé, dʹexaminer cela <strong>de</strong>vant<br />

Dieu, afin dʹai<strong>de</strong>r ce bon Monsieur à reconnaître sa vocation et <strong>de</strong> lui donner <strong>de</strong> bons<br />

conseils pour la suivre, en un sens ou en un autre. Sʹil se décidait à venir à Vaugirard <strong>avec</strong><br />

le bon désir <strong>de</strong> choisir comme nous la meilleure part, il pourrait à loisir bien chercher la<br />

volonté <strong>de</strong> Dieu et, au moment <strong>de</strong> notre retraite, il se trouverait en mesure dʹasseoir une<br />

bonne et soli<strong>de</strong> décision.<br />

Le jeune f. Bassery va jusquʹici très bien, il est content et se fait bien sa place, nous<br />

avons bonne espérance et lui‐même croit que Dieu le veut définitivement à son service. Ses<br />

jeunes amis dʹArras sont venus le voir dimanche, mais il était à la promena<strong>de</strong>; ils revien‐<br />

dront tout prochainement.<br />

Je nʹavais jusquʹici aucune connaissance <strong>de</strong> votre <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pour la dame qui désire<br />

une place <strong>de</strong> concierge, cette recommandation ne nous était pas parvenue; si cette dame a<br />

<strong>avec</strong> elle <strong>de</strong> jeunes enfants, il sera à peu près impossible <strong>de</strong> la placer comme concierge; si<br />

vous vouliez bien nous envoyer une note détaillée sur cette dame (âge, talents, entourage<br />

<strong>de</strong> famille, aptitu<strong>de</strong>s, éducation, etc.), nous communiquerions cette <strong>de</strong>man<strong>de</strong> au Conseil<br />

<strong>de</strong>s Conférences où, parfois, on a quelques occasions.<br />

Offrez, je vous prie, mes tendres affections à M. <strong>de</strong> Lauriston qui est pour nous plus<br />

quʹun ami, nous prions pour lui, nous recevrons <strong>avec</strong> joie <strong>de</strong> ses nouvelles.<br />

Je nʹai pas le temps ni la place, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> vous dire que nos senti‐<br />

ments <strong>de</strong> confiance et dʹaffection <strong>avec</strong> vous vont croissant, à mesure que nos rapports sont<br />

plus fréquents; nous sommes convaincus que le Seigneur fait Lui‐même et consomme peu<br />

à peu notre union dans sa divine charité, nous Le laissons faire et nous lui abandonnons<br />

nos cœurs pour cette œuvre en toute bonne volonté. Assurez nos bons frères <strong>de</strong> tout notre<br />

attachement en N.S. et recevez vous‐même, cher Monsieur lʹabbé, tout mon respect et cor‐<br />

dial dévouement.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

392 à M. Caille<br />

Conseils et autorisations sur diverses questions dʹadministration.<br />

Chaville, 30 juillet 1856<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous écris <strong>de</strong>ux mots seulement, parce cʹest <strong>de</strong> Chaville que je fais ces lignes et<br />

que la poste y part dʹune manière très incommo<strong>de</strong>.<br />

Je trouve très bonnes les mesures que vous avez prises, les sentiments <strong>de</strong> détache‐<br />

ment dans lesquels vous agissez sont aussi dans lʹesprit <strong>de</strong> Dieu, enfin vous mettez vos af‐<br />

faires sous la protection <strong>de</strong> la Sainte Vierge, cʹest au mieux; dans ces dispositions, on ne<br />

saurait se tromper; nous prions <strong>avec</strong> vous.<br />

Je verrais <strong>avec</strong> regret que vous fussiez obligé <strong>de</strong> faire acquérir au nom du diocèse,<br />

ce serait bien compliquer les choses et risquer lʹunité dʹaction <strong>de</strong> lʹœuvre dans un temps<br />

plus ou moins prochain; vous êtes déjà, pour votre propre maison, en situation mixte et<br />

peu assurée, ce serait encore pis si une tierce autorité venait sʹadjoindre à vous.<br />

Je crois que vous comptez trop sur le désistement <strong>de</strong> M. lʹabbé Cacheleux; il a en‐<br />

tendu entrer pour sa part dans la fondation <strong>de</strong> votre maison, je ne pense pas quʹil renonce<br />

497


volontiers à ses droits. Il me semble quʹil vaudrait mieux attendre quʹil montrât lui‐même<br />

la disposition <strong>de</strong> le faire que <strong>de</strong> lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>avec</strong> le risque dʹun refus qui lui serait péni‐<br />

ble ainsi quʹà vous.<br />

Jʹapprouve vos procédés <strong>de</strong> souscription pour le payement du capital et <strong>de</strong>s inté‐<br />

rêts.<br />

Adieu, bien cher ami, invitez notre cher f. Marcaire à mʹécrire, il y a bien longtemps<br />

que je nʹai reçu <strong>de</strong> ses nouvelles, embrassez‐le pour moi et dites aussi <strong>de</strong>s choses affec‐<br />

tueuses à M. Allard <strong>de</strong> ma part.<br />

Nos frères sʹunissent à moi pour vous assurer <strong>de</strong> nos tendres affections en N.S.<br />

Votre ami et Père bien dévoué en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

393 à M. Caille<br />

Taux <strong>de</strong> la pension <strong>de</strong>s orphelins à Paris et à Arras.<br />

Chaville, 31 juillet 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Il me semble que vous pourriez proposer à Mgr dʹaffecter les 20.000f <strong>de</strong> Mme Desjar‐<br />

dins à lʹacquisition <strong>de</strong> la maison, à la condition que le diocèse aurait droit dʹentretenir dans<br />

lʹétablissement un certain nombre dʹenfants, <strong>avec</strong> une réduction dans le prix <strong>de</strong> leur pen‐<br />

sion, représentant lʹintérêt <strong>de</strong>s 20.000f à 4 % . Il ne faudrait pas toutefois fixer dʹavance et<br />

dʹune manière invariable le prix <strong>de</strong> cette pension, parce que la cherté <strong>de</strong>s vivres, etc. ne<br />

permet pas <strong>de</strong> la maintenir toujours au même taux. Ainsi, en ce moment M. Myionnet est<br />

contraint chez nous <strong>de</strong> la porter à 25f par mois, ne pouvant plus absolument aller à 20f.<br />

A vous bien tendrement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

394 à M. Halluin<br />

Deman<strong>de</strong> dʹhébergement pour un orphelin.<br />

Vaugirard, 4 août 1856<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Jʹai oublié dans ma <strong>de</strong>rnière lettre <strong>de</strong> vous communiquer la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> dʹun <strong>de</strong> nos<br />

amis qui, ne trouvant pas <strong>de</strong> place dans notre maison <strong>de</strong> Vaugirard pour un enfant <strong>de</strong> 8<br />

ans, orphelin auquel lui et sa famille sʹintéressent beaucoup, mʹa prié <strong>de</strong> vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r<br />

<strong>de</strong> le recevoir chez vous, moyennant 20f par mois ou 240f par an. Je ne sais si vous recevez<br />

<strong>de</strong>s enfants si jeunes ni si vous avez pour celui‐ci une petite place; je vous prie, cher Mon‐<br />

sieur lʹabbé, <strong>de</strong> me dire ce que vous pouvez faire pour lui, afin que je donne réponse sans<br />

plus <strong>de</strong> retard à ses protecteurs.<br />

Rappelez‐nous, je vous prie, au souvenir <strong>de</strong> nos bons frères et aussi à celui <strong>de</strong> M. <strong>de</strong><br />

Lauriston, et croyez, cher Monsieur lʹabbé; à tous nos sentiments accoutumés <strong>de</strong> respect et<br />

<strong>de</strong> sincère attachement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

498


395 à M. Caille<br />

Faire en sorte que lʹacquisition envisagée ne soit pas un embarras supplémentaire. Inconvénients à faire tout re‐<br />

poser sur une seule personne. Il faut viser à ce que les Œuvres vivent par elles‐mêmes. Le frère Marcaire, souf‐<br />

frant du manque <strong>de</strong> vie commune <strong>de</strong> la maison dʹAmiens, doit écrire plus fréquemment.<br />

Vaugirard, 11 août 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je ne reçois point <strong>de</strong> nouvelles <strong>de</strong> vous, sans doute la raison en est que vos affaires<br />

ne pouvant se <strong>de</strong>ssiner si vite en un sens ou en un autre, vous nʹavez rien <strong>de</strong> bien précis<br />

encore à me dire. Je suis bien assuré, dʹaprès les dispositions que vous mʹavez montrées,<br />

que vous ne pousserez pas vos démarches trop ar<strong>de</strong>mment et que vous laisserez faire le<br />

Bon Dieu, nʹagissant que sous son impulsion. Autrement, en effet, nous pourrions nous<br />

trouver plus embarrassés quʹavantagés par lʹacquisition dont nous nous occupons. Ce sera<br />

<strong>de</strong> toutes façons une gran<strong>de</strong> charge <strong>de</strong> plus et nous ne pouvons nous dissimuler que jus‐<br />

quʹici ces charges pèsent presque entièrement sur votre tête; il y a inconvénient à faire re‐<br />

poser tant dʹintérêts sur une seule personne, parce quʹelle venant à manquer, tout se<br />

trouve compromis. Cʹest pourquoi il me semble que vous <strong>de</strong>vriez travailler à constituer<br />

peu à peu votre maison <strong>de</strong> telle sorte quʹelle se suffît à peu près à elle‐même par les res‐<br />

sources que produisent les enfants et les bienfaits <strong>de</strong> la charité; dans lʹétat actuel, on court<br />

risque <strong>de</strong> mal asseoir les choses, parce quʹaprès vous on ne trouverait sans doute personne<br />

qui pût faire en faveur <strong>de</strong> lʹœuvre les sacrifices que vous faites pour elle; cʹest là ce qui me<br />

fait craindre <strong>de</strong> lui donner du développement dans ces conditions, parce que plus elle se‐<br />

rait considérable, plus elle serait lour<strong>de</strong> à soutenir. Pesez ces observations, mon bon ami,<br />

et tenez‐en compte dans la conduite générale <strong>de</strong> votre maison, vous attachant, autant que<br />

vous le pourrez, à la constituer indépendamment <strong>de</strong> vos sacrifices personnels, au moins<br />

pour la subsistance ordinaire.<br />

Je suis un peu inquiet <strong>de</strong> ne point recevoir <strong>de</strong> lettre <strong>de</strong> mon f. Marcaire; en lui en‐<br />

voyant ma <strong>de</strong>rnière lettre je lʹinvitais à mʹécrire, il ne lʹa pas fait jusquʹici, quoique je vous<br />

aie prié, il y a quelque temps, <strong>de</strong> lui rappeler ma recommandation; souvenez‐vous, mon<br />

bon ami, quʹil est peu soutenu par le mouvement <strong>de</strong> la vie commune chez vous, quʹil est<br />

essentiel <strong>de</strong> le fortifier <strong>de</strong> temps en temps par un peu dʹentretien intime; les âmes sont en<br />

général bien moins fortes que vous ne le supposez, on a besoin <strong>de</strong> les raviver par quelques<br />

encouragements pieux et <strong>de</strong> se maintenir en harmonie <strong>avec</strong> elles par quelques ouvertures<br />

<strong>de</strong> cœur.<br />

Adieu, mon bon ami, cherchez surtout votre appui pour vous, pour vos œuvres,<br />

pour vos frères dans la prière, cʹest le plus sûr moyen, car le Seigneur tient dans sa main<br />

les cœurs et toutes les puissances et ressources, et la prière seule peut ouvrir cette main ri‐<br />

che et généreuse.<br />

Je vous embrasse bien affectueusement en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

396 à M. Halluin<br />

Les frères Carment et Thuillier à Arras. Dans les affaires temporelles, gar<strong>de</strong>r toujours simplicité et droiture.<br />

MLP. sollicite <strong>de</strong>s prières pour la vocation <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Lauriston.<br />

499


Vaugirard, 18 août 1856<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Jʹai reçu en son temps votre lettre <strong>avec</strong> la petite note quʹelle contenait sur la dame<br />

que vous nous avez recommandée. En ce moment, Paris est presque désert et les occasions<br />

<strong>de</strong> placement sont rares, mais nous ne perdrons pas <strong>de</strong> vue néanmoins les renseignements<br />

que vous nous avez transmis, et ceux qui nous entourent les gar<strong>de</strong>ront aussi sous leurs<br />

yeux.<br />

Je nʹoublie pas les besoins que vous mʹavez exposés concernant les services divers<br />

<strong>de</strong> votre maison. Nous ne pouvons malheureusement pourvoir à tous à la fois. Mais nous<br />

tâcherons au moins <strong>de</strong> donner un petit commencement à lʹentreprise. Je pense que, dans le<br />

cours <strong>de</strong> la semaine prochaine, <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> nos frères, le f. Carment qui vous secon<strong>de</strong>rait pour<br />

la direction et le f. Thuillier qui pourrait conduire un petit atelier <strong>de</strong> cordonnerie, se ren‐<br />

dront près <strong>de</strong> vous. Notre frère, M. lʹabbé Lantiez pourra, je le pense, les accompagner afin<br />

<strong>de</strong> les installer et <strong>de</strong> régler, <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> vous, les exercices et mouvements <strong>de</strong> la petite<br />

communauté.<br />

Nous avons, après‐<strong>de</strong>main mercredi 20, la distribution dans notre orphelinat <strong>de</strong><br />

Vaugirard, et le dimanche suivant, 24, la même cérémonie aura lieu dans <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> nos mai‐<br />

sons <strong>de</strong> patronage. Tout notre mon<strong>de</strong> est un peu affairé en ce moment; après nous aurons<br />

plus <strong>de</strong> liberté et nous prendrons nos dispositions pour le voyage dʹArras dans le courant<br />

<strong>de</strong> la semaine.<br />

Je pense que lʹenfant que vous avez consenti à recevoir vous sera conduit par nos<br />

frères; je nʹai pas vu cependant <strong>de</strong>puis quelque temps celui <strong>de</strong> nos amis qui le protège.<br />

Je suis tout satisfait <strong>de</strong>s détails consolants que vous me donnez sur votre installa‐<br />

tion à la maison <strong>de</strong> campagne, jʹirai <strong>avec</strong> joie la visiter quand jʹirai vous voir à Arras; le<br />

Seigneur en cette occasion encore vous a traité en enfant gâté. Jʹespère que la simplicité et<br />

droiture dʹintention étant toujours votre partage, le Père céleste agira ainsi constamment<br />

<strong>avec</strong> vous.<br />

M. <strong>de</strong> Lauriston nous a quittés aujourdʹhui dans les meilleures dispositions, sʹétant<br />

trouvé tout à lʹaise et comme en famille au milieu <strong>de</strong> nous ne voyant plus dès lors <strong>de</strong> diffi‐<br />

culté réelle à sa vocation. Mais il va pérégriner pendant un mois, cʹest une épreuve, il en<br />

trouvera encore dans les indécisions <strong>de</strong> son caractère, et dans les brisements assez péni‐<br />

bles, réellement, quʹil aurait à consommer pour abandonner sa position actuelle; il est donc<br />

bien difficile dʹaugurer encore quelle sera sa détermination finale. Mais vous prierez pour<br />

lui, cher Monsieur lʹabbé, et la grâce le rendra fort, vous le soutiendrez et il aura le courage<br />

<strong>de</strong> consommer son sacrifice. Tous nos frères se recomman<strong>de</strong>nt à vos bons souvenirs; le f.<br />

Bassery se soutient bien. Adieu, cher Monsieur lʹabbé, croyez à mes sentiments bien sincè‐<br />

res <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> dévouement en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Priez aussi pour le f. Caille qui est aussi au moment dʹagrandir sa maison.<br />

397 à M. Caille<br />

La charité dans la vie <strong>de</strong> famille. Visite du père Lantiez à Arras. Le manque <strong>de</strong> personnel.<br />

Vaugirard, 25 août 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Votre bonne et affectueuse lettre du 20 <strong>de</strong> ce mois nous est parvenue et nous a don‐<br />

né une vraie satisfaction en nous apprenant que notre f. Marcaire allait mieux et que ses<br />

500


petites indispositions nʹétaient quʹun résultat <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s chaleurs; il éprouvait aussi par‐<br />

fois à Vaugirard <strong>de</strong> pareils malaises, mais <strong>avec</strong> quelques soins il en triomphait et se remet‐<br />

tait sur pied. Je suis bien satisfait <strong>de</strong> la sollicitu<strong>de</strong> toute paternelle <strong>avec</strong> laquelle vous avez<br />

veillé à lui procurer les soulagements dont il avait besoin, la charité est dans lʹessence <strong>de</strong><br />

notre œuvre et cʹest surtout dans la famille quʹelle doit se manifester.<br />

Notre bon abbé Lantiez, qui vous remettra cette lettre, vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ra lʹhospitalité<br />

pour <strong>de</strong>ux ou trois jours; je sais bien dʹavance que vous lʹaccueillerez <strong>avec</strong> affection, sa<br />

présence encouragera notre f. Marcaire et vous fera pour vous‐même une occasion dʹépan‐<br />

chement fraternel. Notre bon abbé désire employer ces <strong>de</strong>ux ou trois jours à faire un peu<br />

<strong>de</strong> retraite, il ne vous dérangera point <strong>de</strong> vos occupations. Je vous recomman<strong>de</strong> particuliè‐<br />

rement <strong>de</strong> ne point faire <strong>de</strong> son séjour une occasion <strong>de</strong> surcharge pour vos travaux, cʹest<br />

un frère qui vient chez vous, il sera à Amiens comme à Vaugirard, en famille donc point<br />

<strong>de</strong> cérémonie et <strong>de</strong> dérangement, la cordiale affection suffit, elle ne lui manquera pas chez<br />

vous.<br />

Je comprends bien lʹisolement <strong>de</strong> notre f. Marcaire, jʹy ai souvent pensé et je vous<br />

aurais déjà proposé <strong>de</strong> vous envoyer un frère pour lʹai<strong>de</strong>r, si nous nʹétions fort resserrés en<br />

ce moment; les ff. Carment et Thuillier vont à Arras; le bon Dieu a permis que notre f. Pol‐<br />

vêche faiblît dans sa vocation, vous comprenez que nous avons bien <strong>de</strong>s vi<strong>de</strong>s à combler,<br />

surtout dans un moment où ma mauvaise santé mʹavait contraint déjà dʹajouter ma propre<br />

charge à celle <strong>de</strong> mes frères. Je gar<strong>de</strong>, soyez‐en assuré, la volonté <strong>de</strong> vous ai<strong>de</strong>r, dès que<br />

nous le pourrons, et Dieu, je lʹespère, nous en donnera les moyens.<br />

Je vois <strong>avec</strong> plaisir la disposition où vous êtes <strong>de</strong> laisser faire la Provi<strong>de</strong>nce et <strong>de</strong><br />

suivre son mouvement dans lʹaffaire <strong>de</strong> lʹacquisition, <strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> Dieu nous serons forts,<br />

sans Lui nous ne ferons rien <strong>de</strong> bien.<br />

Adieu, bien cher ami, nous vous verrons <strong>avec</strong> gran<strong>de</strong> joie, si vous nous ren<strong>de</strong>z vi‐<br />

site prochainement comme vous le pensez; embrassez pour moi le f. Marcaire et assurez<br />

M. Allard <strong>de</strong> nos bons sentiments pour lui.<br />

Croyez, vous‐même, à toute notre tendre affection en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

398 à M. Halluin<br />

Derniers détails du voyage <strong>de</strong>s frères Carment et Thuillier. Ne pas les surcharger <strong>de</strong> besogne dès leur arrivée.<br />

Que M. Halluin sache prendre le repos nécessaire, le Seigneur le lui revaudra.<br />

Vaugirard, 28 août 1856<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Nos <strong>de</strong>ux frères partiront samedi matin <strong>de</strong> Vaugirard et sʹarrêterons quelques ins‐<br />

tants à Amiens, où ils retrouveront notre bon abbé Lantiez qui a pris les <strong>de</strong>vants et est déjà<br />

à la petite communauté dʹAmiens <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux jours. Tous les trois se mettront en route<br />

vers 5h. et vous arriveront vers 6h.½. Jʹespère que leur voyage, place par eux sous la pro‐<br />

tection <strong>de</strong> la S te Vierge, se passera bien et que leurs bons anges les conduiront jusquʹà vous.<br />

Une fois arrivés, je les croirai en sûreté; cʹest vous qui serez leur gardien et votre sollicitu<strong>de</strong><br />

sera pour eux un puissant appui. Jʹaurais désiré quʹils pussent, avant leur départ, se re‐<br />

cueillir un peu et prendre en Dieu <strong>de</strong>s forces pour Le servir <strong>avec</strong> zèle et dévouement dans<br />

501


votre maison. Malheureusement, la multiplicité <strong>de</strong> nos occupations ne leur a pas laissé ce<br />

loisir. Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rai <strong>de</strong> ne pas les mettre en plein, dès le premier jour, dans toutes<br />

leurs fonctions, mais <strong>de</strong> les y faire entrer successivement, afin quʹils sʹy accoutument<br />

mieux et ne soient pas, dès lʹabord, trop étourdis par le changement et le nombre <strong>de</strong> leurs<br />

obligations.<br />

Le f. Carment, celui qui doit vous assister plus particulièrement pour la conduite <strong>de</strong><br />

la maison, vient <strong>de</strong> faire sa distribution au patronage <strong>de</strong> Grenelle, il en a été très fatigué;<br />

on donne forcément beaucoup dʹapparat à ces solennités. Si jʹavais consulté mon désir, je<br />

lui eusse laissé quelques jours <strong>de</strong> paix et <strong>de</strong> recueillement pour se rasseoir. Mais je nʹai pas<br />

voulu différer trop son départ, afin <strong>de</strong> ne point vous laisser en embarras. Le Divin Maître<br />

nous assistera et la S te Vierge, à laquelle il est fort dévoué, lui prêtera son secours pour bien<br />

remplir ses <strong>de</strong>voirs près <strong>de</strong> vous.<br />

Jʹai envoyé un <strong>de</strong> nos frères visiter le jeune Dubus à lʹhospice et lui remettre les 10f<br />

que vous lui avez <strong>de</strong>stinés; il a dû remplir aussi vos intentions en lui offrant dʹaller se re‐<br />

poser un peu près <strong>de</strong> vous, sʹil en sentait le besoin. Ce frère nʹa pu encore me rendre<br />

compte <strong>de</strong> cette petite mission, parce quʹil <strong>de</strong>meure à Paris, à notre maison <strong>de</strong> Nazareth, et<br />

ne revient que toutes les semaines à Vaugirard. Mais je puis être bien assuré quʹil a <strong>de</strong> tous<br />

points suivi vos intentions.<br />

Jʹai écrit à M. Daviron, dont les bonnes dispositions sont pour nous dʹun heureux<br />

augure, quʹil serait accueilli <strong>avec</strong> joie à la retraite, ainsi que ceux <strong>de</strong>s ff. dʹArras que vous<br />

voudrez bien nous envoyer. Que ne pouvez‐vous vous‐même vous réunir à nous et pren‐<br />

dre un peu <strong>de</strong> repos dont vous avez tant besoin. Le bon Maître, que nous servons <strong>de</strong><br />

concert, veille sur vous et saura bien, à lʹheure choisie par Lui, vous ménager les soulage‐<br />

ments que sa bonté vous aura préparés. Je Le prie <strong>de</strong> vous assister et <strong>de</strong> bénir les efforts<br />

<strong>de</strong>s frères que nous envoyons vers vous.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, assurez tous nos ff. dʹArras <strong>de</strong> nos bons souvenirs, et<br />

croyez vous‐même à tous mes sentiments <strong>de</strong> respect et dʹaffection en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

399 à M. Carment<br />

MLP. se réjouit <strong>de</strong>s bonnes dispositions du frère Carment. Paix dans les épreuves. La force et lʹavenir <strong>de</strong> lʹInsti‐<br />

tut rési<strong>de</strong>nt dans la piété. Que M. Carment soit le bon pasteur <strong>de</strong>s enfants qui lui seront confiés.<br />

Vaugirard, 1er septembre 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous sais bon gré <strong>de</strong> mʹavoir écrit quelques lignes tout <strong>de</strong> suite après votre arri‐<br />

vée; jʹavais bonne confiance pour le succès <strong>de</strong> votre voyage que nous avions placé tous en‐<br />

semble sous la protection <strong>de</strong> la T. Ste Vierge, mais il mʹa été bien doux <strong>de</strong> recevoir <strong>de</strong> vous<br />

quelques lignes où jʹai retrouvé votre cœur affectueux et les bons sentiments <strong>de</strong> piété et <strong>de</strong><br />

soumission que je mʹétais accoutumé à voir en vous. Si la multiplicité <strong>de</strong>s occupations et<br />

diverses circonstances que vous nʹavez pu entièrement maîtriser avaient un moment obs‐<br />

curci quelque peu ces bonnes dispositions, elles ont vite repris le <strong>de</strong>ssus et elles vont main‐<br />

tenant faire comme par le passé le fond habituel <strong>de</strong> votre âme. Cʹest ainsi que je vous re‐<br />

connaîtrai, mon cher enfant et que vous vous reconnaîtrez vous‐même en remettant votre<br />

502


cœur dans la paix, dans la confiance en lʹamour du divin Jésus et aux tendres miséricor<strong>de</strong>s<br />

<strong>de</strong> notre très douce et très aimée Mère.<br />

Ne vous effrayez pas dʹavance, cher enfant, <strong>de</strong>s petites épreuves que vous pourriez<br />

rencontrer, si vous invoquez le Seigneur, ne sera‐t‐Il pas près <strong>de</strong> vous et, sʹIl porte le joug<br />

<strong>de</strong> moitié <strong>avec</strong> vous, le joug ne sera‐t‐il pas doux et le far<strong>de</strong>au léger? Encouragez bien no‐<br />

tre f. Thuillier, songez que vous êtes plus âgé, plus instruit que lui, que le Seigneur et la S te<br />

Vierge vous ont fait beaucoup <strong>de</strong> grâces, usez <strong>de</strong> tout cela pour lʹédification <strong>de</strong> ce cher en‐<br />

fant et pour lʹavantage aussi <strong>de</strong> tous ceux qui vous entourent.<br />

Si vous croyez utile dʹavoir quelques renseignements ou <strong>de</strong> faire quelques observa‐<br />

tions, usez pour cela, en cas <strong>de</strong> besoin, <strong>de</strong> lʹentremise <strong>de</strong> notre bon abbé Lantiez, cʹest en<br />

particulier pour vous bien asseoir et vous assister, dans ces premiers moments quʹil vous a<br />

accompagné. Priez‐le, sʹil y a utilité, dʹexpliquer à notre cher M. Halluin que la jambe un<br />

peu faible <strong>de</strong> M. Thuillier peut parfois exiger quelque ménagement et lui rendre difficile<br />

un travail trop soutenu dans la cordonnerie. Je ne vous recomman<strong>de</strong> pas la piété, vous<br />

avez bien senti que toute notre force et tout notre avenir sont là; vous avez, aux pieds du<br />

Seigneur et <strong>de</strong> la S te Vierge, commencé votre ministère à Arras, poursuivez ainsi et les<br />

fruits seront abondants pour vous, pour la Communauté, pour les jeunes enfants dont<br />

vous allez être le Pasteur. Vous nʹavez pas oublié les tendres et douces paroles du Seigneur<br />

sur le bon Pasteur, vous les méditerez et les repasserez dans votre cœur.<br />

Adieu, très cher enfant, tous nos frères vous restent tendrement attachés, ils vous<br />

écriront et prieront fidèlement pour vous. Restez‐nous aussi bien uni par le souvenir et<br />

consommez en même temps une vraie et fraternelle union <strong>avec</strong> nos amis dʹArras, que nous<br />

soyons réellement les enfants du même Père qui est tout amour, et <strong>de</strong> la même Mère qui<br />

est toute con<strong>de</strong>scendance et miséricor<strong>de</strong>. Embrassez pour nous notre bon abbé Halluin et<br />

les ff. dʹArras, et aussi mes <strong>de</strong>ux enfants venus <strong>avec</strong> vous, MM. Lantiez et Thuillier.<br />

A vous dans les cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Notre bon abbé Hello vous remercie et vous écrira.<br />

400 à M. <strong>de</strong> Lauriston<br />

Exhortation à répondre sans tar<strong>de</strong>r à lʹappel du Seigneur. Prochaine inauguration du sanctuaire <strong>de</strong> la Salette, à<br />

Vaugirard.<br />

Vaugirard, 5 septembre 1856<br />

Très cher confrère et bien bon ami,<br />

Votre bonne et désirée lettre sʹest fait un peu attendre, il est vrai; tous nos frères, jʹai<br />

presque dit tous vos frères, me <strong>de</strong>mandaient constamment: ʺEst‐il venu quelques nouvel‐<br />

les <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Lauriston?ʺ, et, sur ma réponse négative, le mon<strong>de</strong>, si souvent anathématisé<br />

par les enfants <strong>de</strong> Dieu, recevait encore quelques apostrophes qui, malheureusement, ne<br />

lui font guère souci; quand je dis ici: le mon<strong>de</strong>, il sʹentend que cʹétait nullement <strong>de</strong> vous<br />

quʹil sʹagissait, mais <strong>de</strong> ce milieu toujours au moins hasar<strong>de</strong>ux où lʹon est jeté dans les<br />

voyages et où nos amis voyaient, <strong>avec</strong> sollicitu<strong>de</strong>, lancée la nacelle qui porte vos bons dé‐<br />

503


sirs, vos hautes espérances et ces saintes aspirations que la grâce du divin Seigneur a mis<br />

dans votre cœur.<br />

Grâces Lui en soient rendues ainsi quʹà Marie, notre bien‐aimée Mère, vous avez<br />

échappé aux dangers du chemin, vous êtes <strong>de</strong>meuré près <strong>de</strong> Dieu et, jouissant en simplici‐<br />

té du délassement qui vous était accordée, vous avez fait la part <strong>de</strong> votre âme en cherchant<br />

partout quelque pâture à son usage. Cʹest bien, très cher confrère et ami, cʹétait tirer <strong>de</strong> vo‐<br />

tre situation le meilleur parti possible; cependant, je ne vous vois pas sans satisfaction re‐<br />

gagner nos contrées moins admirables, quant aux beautés physiques, mais où vous re‐<br />

trouverez plus <strong>de</strong> calme, <strong>de</strong> recueillement et où Dieu vous réserve je lʹespère fermement,<br />

<strong>avec</strong> un asile <strong>de</strong> paix, un saint et noble emploi <strong>de</strong> la <strong>de</strong>rnière part <strong>de</strong> votre vie, un entou‐<br />

rage <strong>de</strong> pures et chrétiennes affections, enfin toutes les grâces et consolations quʹil réserve<br />

à ses plus intimes serviteurs. Cʹest ce que nous <strong>de</strong>mandons constamment pour vous dans<br />

nos prières; tous nos frères, attirés par votre humeur douce et bienveillante et par ces qua‐<br />

lités que Dieu a prédisposées en vous pour la vie <strong>de</strong> famille chrétienne et religieuse, se<br />

sont accoutumés à vous regar<strong>de</strong>r comme un <strong>de</strong>s leurs et atten<strong>de</strong>nt votre retour comme ce‐<br />

lui dʹun ancien ami. Ne trompez pas leur attente, ne trompez pas surtout les attentes du<br />

divin Cœur <strong>de</strong> Jésus qui vous veut tout près <strong>de</strong> Lui et qui vous appelle dans notre solitu<strong>de</strong><br />

pour vous parler au fond du cœur.<br />

Telles sont, très cher confrère et ami, nos pensées et nos sentiments à votre égard; ils<br />

répon<strong>de</strong>nt pleinement à ceux que Dieu vous inspire et que les distractions du voyage nʹont<br />

point effacés. Jʹespère que vous nous écrirez encore <strong>de</strong> Nantes où quelques séductions<br />

vous peuvent être encore proposées par le tentateur qui sera repoussé, jʹen suis sûr, <strong>avec</strong><br />

perte; il sera enfin vaincu à Arras et, délivré par tous ces triomphes, vous viendrez offrir<br />

au Seigneur votre liberté reconquise <strong>avec</strong> toutes les facultés <strong>de</strong> votre être et toutes les puis‐<br />

sances <strong>de</strong> votre cœur; cʹest le vrai don <strong>de</strong> lʹhomme à son Dieu, cʹest lʹunique sacrifice pur et<br />

agréable à ses yeux.<br />

Je vous remercie pour toute la petite famille <strong>de</strong> votre bon souvenir pour elle aux<br />

sanctuaires et pèlerinages <strong>de</strong> la S te Vierge; cʹest à vos prières, plus quʹaux nôtres peut‐être,<br />

que nous <strong>de</strong>vons une grâce bien insigne obtenue ces jours‐ci par son intercession et dont je<br />

vous dirai le détail à lʹoccasion; veuillez la remercier <strong>avec</strong> nous et lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r la conti‐<br />

nuation <strong>de</strong> ses précieux secours.<br />

La première pierre <strong>de</strong> notre petit sanctuaire <strong>de</strong> N. D. <strong>de</strong> la Salette sera posée le 19<br />

septembre 246 ; nous espérons que la construction une fois commencée ne restera pas impar‐<br />

faite et pourra être menée à fin.<br />

Adieu, bien cher Monsieur et bon ami, nous avons hâte <strong>de</strong> vous revoir au milieu <strong>de</strong><br />

nous, votre absence a fait un vi<strong>de</strong> qui marque la place que vous vous y étiez déjà faite, ve‐<br />

nez le remplir bientôt. Les heures sont précieuses quand elles comptent toutes pour la<br />

sanctification et le salut; nʹen per<strong>de</strong>z guère. S t Augustin disait: ʺQue cʹest bien tard, ô mon<br />

Dieu, que je vous ai connu et aimé!ʺ ne vous exposez pas à dire: ʺQue cʹest bien tard, Sei‐<br />

gneur, que je vous ai servi <strong>avec</strong> un vrai et absolu dévouement!ʺ<br />

Croyez, très cher Monsieur et ami, à mes sentiments <strong>de</strong> respects et <strong>de</strong> tendre atta‐<br />

chement en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

246 Cf. infra lettre 422, du 21 novembre 1856.<br />

504


400‐1 à M gr Angebault<br />

MLP. a examiné le projet dʹunion <strong>avec</strong> lʹabbé Choyer. Il <strong>de</strong>man<strong>de</strong> conseil à lʹévêque dʹAngers au sujet du règle‐<br />

ment <strong>de</strong> lʹInstitut.<br />

Vaugirard, 5 septembre 1856<br />

Monseigneur,<br />

Bien <strong>de</strong>s semaines se sont déjà écoulées <strong>de</strong>puis le moment où nous étions réunis au‐<br />

tour <strong>de</strong> vous. Cependant la bonne impression <strong>de</strong> vos pieuses et réchauffantes exhortations<br />

nʹest pas encore effacée; tous les cœurs la gar<strong>de</strong>nt précieusement et y trouvent un appui<br />

pour se soutenir dans la route et pour avancer vers la noble fin que le Seigneur a daigné<br />

nous proposer. Nous espérons bien, Monseigneur, que <strong>de</strong> pareils secours nous seront <strong>de</strong><br />

temps en temps ménagés par sa grâce et que dans nos besoins spirituels votre voix pater‐<br />

nelle se fera entendre un peu plus souvent que par le passé.<br />

Lʹheure viendra dʹailleurs, nous avons besoin <strong>de</strong> le croire, où nous pourrons, en<br />

rapprochant <strong>de</strong> vous quelque branche <strong>de</strong> notre petite famille, recevoir plus habituelle‐<br />

ment, plus heureusement encore, vos conseils, vos instructions, les connaissances <strong>de</strong> votre<br />

sagesse et <strong>de</strong> votre haute expérience.<br />

En attendant ce moment que nous préparons moins vite que ne le voudrait notre<br />

désir mais bien sûrement si je ne me trompe, je viens aujourdʹhui, Monseigneur, soumettre<br />

à votre examen un projet <strong>de</strong> règlement un peu plus précis que ne lʹavait été celui qui nous<br />

servait dʹappui jusquʹici.<br />

Nous commençons à compter les années <strong>de</strong> notre Institut, nous avons pris un peu<br />

<strong>de</strong> consistance et dʹaccroissement, le moment semblerait venu <strong>de</strong> reconnaître la voie dans<br />

laquelle le Seigneur veut que nous marchions. Mgr lʹArchevêque <strong>de</strong> Paris a semblé désirer<br />

dʹailleurs que nous prissions une position plus <strong>de</strong>ssinée et, dans un délai assez prochain,<br />

nous aurons probablement à nous faire approuver formellement par lui. Il nous semble<br />

donc bien essentiel <strong>de</strong> pouvoir, sʹil en était besoin, lui présenter un règlement un peu pré‐<br />

cis et à peu près complet. Le projet que jʹai lʹhonneur <strong>de</strong> vous soumettre ici laisse sans<br />

doute beaucoup à désirer, soit à cause <strong>de</strong> notre inexpérience, soit parce quʹil est un simple<br />

relevé <strong>de</strong> notre situation présente et nʹindique rien sur les points dont nous nʹavons pas été<br />

obligés <strong>de</strong> nous occuper jusquʹici.<br />

Cependant comme les circonstances peuvent amener dʹun jour à lʹautre les cas qui<br />

ne se sont point présentés jusquʹà ce moment, il serait à propos que notre règlement, sur‐<br />

tout sʹil est approuvé, répondît à tout et ne nous laissât pas incertains dans lʹoccasion.<br />

Ainsi, nous nʹavons rien prévu pour nos rapports <strong>avec</strong> lʹOrdinaire, et ignorant ce<br />

que nous aurions à insérer sur ce point dans notre règlement.<br />

Nous avons déjà quatre maisons qui semblent assez bien assises, celle <strong>de</strong> Vaugirard,<br />

celle <strong>de</strong> Nazareth à Paris, et celles dʹAmiens et dʹArras. Cependant nous nʹavons pas osé<br />

déterminer dans le règlement, nos rapports <strong>avec</strong> les trois maisons qui sont sorties <strong>de</strong> la<br />

maison‐mère, bien quʹelles nous restent intimement unies, <strong>de</strong> peur que ce point ne sou‐<br />

lève, avant le temps, la question <strong>de</strong> la supériorité générale pour la conduite <strong>de</strong> toute la fa‐<br />

mille dans son ensemble.<br />

Nous avons toujours pensé que le Supérieur général <strong>de</strong>vait être à vie, nous nʹen<br />

avons pas parlé au règlement par la même raison. Jʹose vous prier, mon bon Seigneur, <strong>de</strong><br />

vous souvenir que vous êtes notre premier Père et <strong>de</strong> nous dire très confi<strong>de</strong>ntiellement vo‐<br />

505


tre avis sur ces points importants; pouvons‐nous les omettre au règlement, et sʹil faut, au<br />

contraire, les y mentionner, en quels termes <strong>de</strong>vons‐nous le faire?<br />

Nous avons laissé la Communauté libre <strong>de</strong> choisir un Supérieur soit ecclésiastique<br />

soit laïc, conformément à votre conseil; nous avons aussi, dʹaprès votre avis, augmenté la<br />

force dʹaction du Conseil <strong>de</strong> la Communauté et nous y avons, dʹaprès le règlement, assuré<br />

la majorité aux ff. laïcs afin que leur position soit garantie et quʹils ne soient pas déprimés<br />

fâcheusement par lʹélément ecclésiastique. Nos ff. ecclésiastiques semblent comme nous<br />

convaincus <strong>de</strong> lʹutilité <strong>de</strong> cette disposition et adhèrent dʹailleurs unanimement à tous les<br />

articles du projet que jʹai lʹhonneur <strong>de</strong> vous envoyer.<br />

Nous avons mis les vœux perpétuels après 5 ans <strong>de</strong> séjour dans la Communauté;<br />

notre p. Beaussier incline à augmenter un peu ce temps; nous serons bien satisfaits, Mon‐<br />

seigneur, dʹavoir aussi votre avis à cet égard.<br />

Enfin au <strong>de</strong>rnier chapitre du règlement concernant la forme à suivre pour lʹélection<br />

du Supérieur, nous faisons intervenir le prêtre Directeur (quoiquʹil soit pris hors <strong>de</strong> la<br />

Communauté et nʹen fasse pas partie), il assiste à lʹélection et même donne son vote <strong>avec</strong><br />

les membres du Conseil. Sa présence à lʹélection ne semble dʹaucun inconvénient assuré‐<br />

ment, mais est‐il à propos quʹil ait son vote comme les membres du Conseil, je suis en<br />

doute sur ce point et je pencherais pour la négative.<br />

Je ne bornerais pas là, Monseigneur, mes questions si je ne comptais sur votre bonté<br />

pour suppléer à notre inexpérience et pour nous ai<strong>de</strong>r à formuler un règlement aussi com‐<br />

plet et aussi mesuré que le comporte notre situation. Ce soin sera une continuation <strong>de</strong>s sa‐<br />

ges et si salutaires directions que vous nous avez données dès nos premiers commence‐<br />

ments et qui nous ont été le gage le plus assuré <strong>de</strong> la protection <strong>de</strong> Dieu.<br />

Toute notre petite famille <strong>de</strong>man<strong>de</strong> humblement, Monseigneur, votre bénédiction et<br />

vous offre son profond respect par lʹintermédiaire <strong>de</strong><br />

Votre humble et soumis serviteur et enfant en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

401 à M. Caille<br />

Le frère Polvêche, après sʹêtre éloigné quelques jours, revient en communauté, à Vaugirard. MLP. y voit lʹinter‐<br />

vention <strong>de</strong> la T.S. Vierge. Joie générale.<br />

Vaugirard, 6 septembre 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Un nouveau témoignage <strong>de</strong> la tendre protection <strong>de</strong> la T. S te Vierge vient dʹêtre ac‐<br />

cordé à notre petite famille.<br />

Vous aviez appris <strong>avec</strong> peine, par notre bon abbé Lantiez, la triste défection <strong>de</strong> no‐<br />

tre f. Polvêche. Nous avions prié instamment la S te Vierge <strong>de</strong> détourner <strong>de</strong> nous cette af‐<br />

fliction et dʹéclairer notre frère sur la gravité <strong>de</strong> la démarche quʹil allait faire; cependant,<br />

après la fin dʹune neuvaine que nous avions faite à cette intention à N. D. <strong>de</strong> la Salette, no‐<br />

tre pauvre ami, persistant dans la fausse vue par laquelle le démon voulait lʹabuser, crut<br />

bien faire en nous délaissant. Mais ce nʹétait là quʹune épreuve temporaire pour lui et pour<br />

la petite famille, Marie avait entendu nos vœux, son cœur maternel en avait été touché,<br />

elle voulait seulement quʹun enseignement utile sortît pour tous <strong>de</strong> cette douleur dʹun<br />

moment. En effet, après six jours seulement dʹabsence, notre frère nous écrivait que, <strong>de</strong>‐<br />

506


puis son départ, il nʹavait pas eu un instant <strong>de</strong> repos, quʹil ne voyait <strong>de</strong> paix pour lui que<br />

dans son retour au milieu <strong>de</strong> nous, que sentant son erreur, il sʹétait adressé à la Mère <strong>de</strong>s<br />

Miséricor<strong>de</strong>s et lui avait promis <strong>de</strong> conserver sa vie à la faire aimer et vénérer, si elle dai‐<br />

gnait procurer sa rentrée dans la famille quʹil avait abandonnée.<br />

Nous avons cru reconnaître dans ces circonstances lʹintervention manifeste <strong>de</strong> la T.<br />

S te Vierge, notre bonne Mère, et, après avoir bien examiné les dispositions <strong>de</strong> notre frère et<br />

nous être assuré que son cœur nʹavait été quʹabusé par une illusion du mauvais esprit,<br />

nous lui avons ouvert les bras et lʹavons fait rentrer au bercail. Je ne saurais vous dire, très<br />

cher ami, la joie <strong>de</strong> nos frères en voyant arrachée au mon<strong>de</strong> et peut‐être au démon une<br />

âme qui nous est si chère et que nous avions crue irrévocablement perdue pour nous. Les<br />

frères, les enfants, et jusquʹaux personnes <strong>de</strong> service étaient émus jusquʹaux larmes. Nous<br />

nʹavons pu nous‐même trouver que du contentement et <strong>de</strong> la reconnaissance et quand no‐<br />

tre frère, faisant amen<strong>de</strong> honorable, nous a <strong>de</strong>mandé ainsi quʹà la Communauté dʹoublier<br />

son erreur, nous lʹavons embrassé <strong>avec</strong> effusion, lui rappelant seulement sa promesse<br />

dʹêtre désormais plein <strong>de</strong> gratitu<strong>de</strong> et <strong>de</strong> tendre dévouement pour Marie. Nos frères ont<br />

tiré <strong>de</strong> là cette leçon que les plus fermes en apparence étaient vite en défaillance, sʹils se re‐<br />

lâchaient tant soit peu et oubliaient <strong>de</strong> prendre leur appui en Dieu; ils ont vu aussi que,<br />

lorsquʹon Lui a sincèrement et <strong>de</strong> cœur appartenu, on ne peut trouver sa paix loin <strong>de</strong> Lui,<br />

que dans les épreuves il ne faut pas perdre courage, mais plier un moment sous la peine<br />

qui nous presse et nous relever ensuite par la confiance et lʹamour pour le Seigneur.<br />

Notre f. Marcaire, qui est particulièrement affectionné au f. Polvêche, son ancien<br />

camara<strong>de</strong> <strong>de</strong> classe, apprendra ces détails, jʹen suis sûr, <strong>avec</strong> une gran<strong>de</strong> joie; il sera heu‐<br />

reux aussi <strong>de</strong> penser que lʹappui <strong>de</strong> la T. S te Vierge ne nous fait jamais défaut, et il redou‐<br />

blera pour elle <strong>de</strong> confiance et <strong>de</strong> filial attachement. Toute la petite famille va bien; nous<br />

avons en ce moment parmi nous un <strong>de</strong> nos Confrères <strong>de</strong> Guingamp, M. Gœury, ancien<br />

membre <strong>de</strong> la Conférence S t ‐Sulpice, qui a le désir <strong>de</strong> sʹagréger à la famille; sa santé nʹest<br />

pas bien vigoureuse, cʹest la seule difficulté; nous espérons néanmoins quʹil nʹy aura pas là<br />

un obstacle réel et quʹil pourra suivre ses bonnes inspirations; nous le recommandons à<br />

vos prières et à celles <strong>de</strong> notre cher f. Marcaire.<br />

Nous vous attendions ces temps <strong>de</strong>rniers, nous espérons que votre voyage à Paris<br />

ne peut tar<strong>de</strong>r à sʹeffectuer; je vous écris néanmoins ces lignes, ne voulant pas rester si<br />

longtemps en silence <strong>avec</strong> vous et désirant dʹailleurs vous communiquer la joie que la mai‐<br />

son <strong>de</strong> Vaugirard a ressentie du retour du f. Polvêche.<br />

Adieu, mon bon ami, continuons à mettre en commun nos joies et nos peines, nos<br />

travaux, nos prières, le Seigneur agréera cette sainte et fraternelle union et daignera, à no‐<br />

tre charité, nous reconnaître pour ses enfants.<br />

Votre affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

402 à M. Myionnet<br />

Recommandations diverses concernant la vie <strong>de</strong> la communauté et <strong>de</strong>s œuvres à Vaugirard. Pour lʹinauguration<br />

<strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> La Salette, il faut organiser la cérémonie et songer à placer les billets dʹinvitation. Deman<strong>de</strong>r lʹesprit<br />

<strong>de</strong> prière, ʺnous aurons tout <strong>avec</strong> luiʺ.<br />

507


Duclair, 9 septembre 1856<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous écris <strong>de</strong>ux lignes, malgré le peu <strong>de</strong> durée <strong>de</strong> mon absence, afin que mon es‐<br />

prit qui <strong>de</strong>meure constamment parmi vous y donne quelque signe <strong>de</strong> vie et <strong>de</strong> bon souve‐<br />

nir.<br />

Jʹai manqué le convoi <strong>de</strong> 9h., la voiture ne mʹayant pas conduit assez vite; il mʹa fal‐<br />

lu attendre jusquʹà 11h.½, ce qui ne mʹa permis dʹarriver à Duclair que dans la soirée; sauf<br />

cet acci<strong>de</strong>nt, je suis parvenu à bon port, mourant <strong>de</strong> faim, car je nʹavais mangé dans toute<br />

le journée quʹun petit pain acheté au moment <strong>de</strong> mon départ.<br />

Ma sœur sʹest bien récriée quand jʹai annoncé que je venais pour trois jours, mais la<br />

gravité <strong>de</strong> ses propres occupations lui donne heureusement un peu lʹintelligence <strong>de</strong>s nô‐<br />

tres; il est donc convenu que je vous reviendrai vendredi; je serais même parti jeudi, si on<br />

ne <strong>de</strong>vait ce jour‐là faire venir dʹassez loin une bonne tante qui ne mʹa pas vu <strong>de</strong>puis 45<br />

ans et qui désire beaucoup voir si je ressemble encore un peu au jeune neveu quʹelle a vu<br />

âgé <strong>de</strong> 7 à 8 ans; je suis sûr quʹelle me trouvera changé, pour moi, je nʹai gardé aucun sou‐<br />

venir <strong>de</strong> sa figure, je ne serai donc surpris <strong>de</strong> rien.<br />

Quand je suis à Vaugirard, je ne vous suis guère utile que pour vous indiquer à<br />

faire mille choses que vous imagineriez bien tout seul, mais que je vous pousse à exécuter<br />

plus promptement. Pour continuer, même <strong>de</strong> loin, ce rôle aiguillonnant qui vous taquine<br />

un peu, quoiquʹil ait son avantage, même pour votre avancement spirituel, je note ici <strong>de</strong>ux<br />

ou trois choses qui me semblent être assez urgentes.<br />

1° Voir le r.p. Olivaint, pour lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r sʹil ne pourrait nous donner quelques<br />

jours <strong>de</strong> retraite immédiatement après notre fameuse fête; nous ne pouvons compter sur le<br />

r.p. <strong>de</strong> Ponlevoy qui est invisible, et que le frère portier assure être empêché absolument<br />

jusquʹà la fin dʹoctobre. Il est bien essentiel que cette retraite soit bonne et soli<strong>de</strong>, nos frères<br />

en ont tous besoin, ceux dʹArras, M. Halluin en tête,comptent en profiter; si le p. Olivaint<br />

ne peut sʹen charger, il vous donnera peut‐être quelque bonne idée; autrement, je tâcherai<br />

en écrivant au p. <strong>de</strong> Ponlevoy dʹavoir par lui quelque solution; mais le moment est venu<br />

<strong>de</strong> sʹen occuper.<br />

2° Deman<strong>de</strong>r à M. Dedoue sʹil veut poser la première pierre <strong>de</strong> notre petit sanc‐<br />

tuaire <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette et examiner entre nous comment se ferait cette solennité, serait‐<br />

ce en présence <strong>de</strong> la Communauté seulement ou en convoquant <strong>de</strong>s étrangers? Comment<br />

les convoquer? M. Boutron aurait pu donner lʹindication <strong>de</strong>s plus zélés membres <strong>de</strong> lʹœu‐<br />

vre du dimanche, mais il est absent et ne reviendra que du 15 au 20 septembre; on pourrait<br />

le faire annoncer par la Semaine Religieuse. Tout cela est à examiner.<br />

3° Envoyer <strong>de</strong>s billets <strong>de</strong> la fête à Mlle Gauthier, 16, rue Ne Ste Geneviève, <strong>avec</strong> une<br />

petite lettre; lui faire observer quʹon aura gran<strong>de</strong> chance <strong>de</strong> succès dans les familles qui ont<br />

<strong>de</strong>s enfants, si lʹon obtient <strong>de</strong> leurs parents quʹils leur permettent <strong>de</strong> se charger du place‐<br />

ment.<br />

4° Il serait très essentiel <strong>de</strong> sʹassurer dans divers quartiers <strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong> dépôts, afin<br />

quʹon puisse les faire annoncer par le Messager <strong>de</strong> la Charité et par quelques journaux reli‐<br />

gieux qui ne sʹy refuseront pas. Je crois que MM. Alcan, Mme Bouasse‐Lebel, Mme Letaille<br />

par M. Roussel, et par nos frères occupés du patronage, dʹautres personnes en divers quar‐<br />

tiers voudraient bien recevoir ces dépôts.<br />

508


On pourrait aussi porter <strong>de</strong>s billets à M. Roussel, peintre‐vitrier, qui a un magasin<br />

dʹobjets religieux rue du Vieux‐Colombier, n° 15 ou 19; il indiquerait volontiers les mem‐<br />

bres <strong>de</strong> S t ‐François‐Xavier auxquels on pourrait proposer <strong>de</strong>s billets et en placerait lui‐<br />

même <strong>avec</strong> sa famille.<br />

Les boulangers <strong>de</strong>s Conférences <strong>de</strong> S t ‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul; M. Picard, 6 rue <strong>de</strong> Sèvres,<br />

fabricant <strong>de</strong> bronzes; M. Froi<strong>de</strong>vaux, papetier à la Croix‐Rouge; lʹhorloger à côté <strong>de</strong> M.<br />

Froi<strong>de</strong>vaux, il fait partie <strong>de</strong> la Conférence <strong>de</strong> lʹAbbaye‐aux‐Bois. Si M. Ratel prenait bien la<br />

chose et quʹon la lui présentât bien, il pourrait donner <strong>de</strong> bonnes indications, presque<br />

toute sa clientèle est chrétienne; M. Chaumont, marchand <strong>de</strong> vins, rue du Four; (M. Paillé);<br />

M me la Baronne dʹOrgerus en placerait aussi; M. Dupleix, marchand <strong>de</strong> vins rue du Bac (M.<br />

Paillé); tous nos fournisseurs; M. Daniel‐Deray, maison <strong>de</strong> lingerie rue du Bac (M. Paillé).<br />

Si chacun <strong>de</strong> nous creuse un peu sa tête <strong>avec</strong> bonne volonté, il trouvera bien <strong>de</strong>s<br />

portes ouvertes et, par lʹun allant à lʹautre, pourra faire bonne recette. Mais le temps est<br />

bien court, cʹest là notre misère, tirons‐en donc bon parti.<br />

Adieu, cher bon ami, assurez tous nos frères <strong>de</strong> ma tendre affection; jʹai fait une pe‐<br />

tite prière, en union <strong>avec</strong> eux, à tous les clochers que jʹai rencontrés sur ma route et jʹen ai<br />

vu beaucoup; pourquoi, comme ces clochers, tout autour <strong>de</strong> nous ne nous est‐il pas une<br />

occasion <strong>de</strong> prier? Demandons lʹesprit <strong>de</strong> prière, et nous aurons tout <strong>avec</strong> lui.<br />

Ma lettre <strong>de</strong>vait partir ce matin, la voilà retardée à ce soir; jʹarriverai presque aussi‐<br />

tôt quʹelle, mais puisquʹelle est faite, je la laisse partir.<br />

Votre dévoué et affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

402‐1 à M. l’abbé Timon‐David<br />

Un moulage <strong>de</strong> la statue <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> La Salette expédiée à Marseille. Pour le moment, MLP. ne peut répondre<br />

favorablement à lʹinvitation qui lui est faite dʹaller séjourner dans le Midi. Le statut <strong>de</strong>s ecclésiastiques dans la<br />

Congrégation.<br />

Vaugirard, 10 septembre 1856<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Jʹai tardé un peu à répondre à la <strong>de</strong>rnière lettre que vous avez bien voulu mʹécrire<br />

désirant vous annoncer définitivement le départ pour Marseille <strong>de</strong> la statue <strong>de</strong> la S te Vierge<br />

que nous sommes heureux dʹoffrir à votre chapelle. nous avons été contraints dʹen différer<br />

un peu lʹenvoi afin quʹelle fût suffisamment sèche et pût supporter sans danger le voyage;<br />

mais aujourdʹhui elle semble être en bonnes conditions, M. Paillé lʹa fait emballer et mettre<br />

au chemin <strong>de</strong> fer; jʹespère donc quʹelle vous arrivera sans acci<strong>de</strong>nt.<br />

Nous sommes heureux <strong>de</strong> penser que nous aurons ainsi une petite part au bien qui<br />

se fait dans votre œuvre et que cette pieuse image bien chère à nos enfants et à nous le <strong>de</strong>‐<br />

viendra aussi à votre bénite maison.<br />

Je vous remercie, bien cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong>s instances obligeantes que vous me<br />

faites pour mon séjour dans le Midi durant lʹhiver; la saison nʹétant pas mauvaise jusquʹici,<br />

je ne suis pas assez soufrant pour être contraint <strong>de</strong> changer encore <strong>de</strong> climat. Si je dois plus<br />

tard subir cette nécessité, je me laisserai conduire par la Provi<strong>de</strong>nce et jʹirai où sa volonté<br />

semblera mʹenvoyer; jusquʹà présent, je me cramponne à tout ce qui mʹentoure et je fais<br />

tous mes efforts pour ne pas partir. Lʹautomne en déci<strong>de</strong>ra et le vent qui fait voler les feuil‐<br />

509


les sèches me poussera aussi peut‐être à droite ou à gauche, il nʹimporte en quel sens, tout<br />

sera bien si je suis sincèrement soumis au bon plaisir <strong>de</strong> Dieu.<br />

Je vous suis aussi reconnaissant <strong>de</strong>s observations que vous voulez bien mʹadresser<br />

relativement à notre petite Communauté et à ses œuvres; nous recevons toujours <strong>avec</strong> gra‐<br />

titu<strong>de</strong> les renseignements et lumières quʹon nous communique, ils peuvent servir à nous<br />

éclairer dans notre voie et nous ne souhaitons rien tant que <strong>de</strong> marcher droit. Vous le sa‐<br />

vez dʹailleurs, cher Monsieur lʹabbé, nos moyens <strong>de</strong> conduite ont été fort simples jusquʹici,<br />

nous avons laissé uniquement au divin Maître le soin <strong>de</strong> gui<strong>de</strong>r nos pas.<br />

Je ne crois pas quʹil y ait gran<strong>de</strong> utilité pour nous à discuter les différents points qui<br />

concernent nos œuvres, je suis convaincu quʹau fond nous sommes parfaitement dʹaccord<br />

puisque nous ne voulons que la gloire <strong>de</strong> Dieu dans lʹordre et selon les lois quʹil a lui‐<br />

même établies. Je reconnais parfaitement <strong>avec</strong> vous que cʹest aux supérieurs ecclésiasti‐<br />

ques quʹil appartient <strong>de</strong> conduire les membres du clergé en tout ce qui concerne leur mi‐<br />

nistère. Aussi est‐ce bien ce que nous prenons soin dʹobserver relativement aux membres<br />

ecclésiastiques <strong>de</strong> notre petite Communauté; ils sont placés près <strong>de</strong> nous par leur Evêque,<br />

conseillés par un Vicaire général que M gr à désigné comme protecteur <strong>de</strong> nos œuvres, et<br />

enfin habituellement dirigés par le prêtre directeur qui conduit spirituellement toute notre<br />

communauté et qui lui sert tout particulièrement <strong>de</strong> conseil et dʹappui. Ce prêtre directeur<br />

est approuvé comme tel par M gr lʹArchevêque; je ne crois pas que cette situation ait rien<br />

dʹirrégulier; M gr en a jugé ainsi puisquʹil nous a autorisés à nous y maintenir lorsque nous<br />

lui en avons rendu compte et lui avons <strong>de</strong>mandé ses avis paternels.<br />

Nos ff. ecclésiastiques ont dans nos œuvres une position parfaitement digne, ils y<br />

ont la meilleure part, toute la direction spirituelle; sʹils nʹen conduisent pas absolument le<br />

mouvement extérieur, ils y influent néanmoins <strong>de</strong> telle sorte que les convenances et be‐<br />

soins <strong>de</strong> leur ministère y ont pleine satisfaction. Il en est <strong>de</strong> même dans la communauté où<br />

chacun les entoure dʹhonneur, <strong>de</strong> déférence et dʹaffection. Enfin, bien quʹil ait plu à la Pro‐<br />

vi<strong>de</strong>nce que la communauté et ses œuvres aient été fondées par <strong>de</strong>s ff. laïcs, le règlement,<br />

<strong>de</strong>rnièrement encore révisé et soumis en ce moment aux autorités les plus graves, laisse<br />

toute latitu<strong>de</strong> pour donner les supériorités et emplois à ceux que le Seigneur semblera in‐<br />

diquer lui‐même, ecclésiastiques ou laïques indistinctement. Je ne pense pas que nous<br />

puissions manifester plus complètement notre entier désintéressement et le désir sincère<br />

que nous avons <strong>de</strong> nous conformer en tout aux <strong>de</strong>sseins du Seigneur.<br />

Tous nos Frères se recomman<strong>de</strong>nt bien à vos bons souvenirs <strong>de</strong>vant Dieu et vous<br />

assurent <strong>de</strong> leur constant et parfait retour. Veuillez aussi croire, cher Monsieur lʹabbé, aux<br />

sentiments bien respectueux <strong>de</strong><br />

Votre humble et dévoué serviteur en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

403 à M. Decaux<br />

Préparation dʹune fête pour la Maison <strong>de</strong>s Orphelins.<br />

Vaugirard, 16 septembre 1856<br />

Mon bien bon ami et frère en N..S.,<br />

Après un travail, il en vient pour nous un autre; cʹest la vie <strong>de</strong>s œuvres charitables,<br />

cʹest tout particulièrement la nôtre. En ce moment, nous préparons pour la Maison <strong>de</strong>s<br />

510


Orphelins, que la dureté <strong>de</strong>s temps et la privation <strong>de</strong> son sermon lʹhiver <strong>de</strong>rnier ont mise<br />

en pénurie, une petite fête <strong>de</strong>s vacances, <strong>avec</strong> courses <strong>de</strong> diverses sortes, chants, tombola,<br />

etc.; nous pensons que ce délassement honnête peut convenir aux familles <strong>de</strong> toutes condi‐<br />

tions, durant les vacances, surtout, et que beaucoup aimerons faire une bonne œuvre ai‐<br />

mable et à bon marché; les billets réservés sont à 1f pour <strong>de</strong>ux personnes, les autres à 50<br />

centimes pour <strong>de</strong>ux personnes aussi; donc pour 25 centimes on peut gagner le ciel et avoir<br />

un agréable passe‐temps.<br />

Jʹai espéré que quelques‐uns <strong>de</strong> nos confrères concourraient volontiers à cette œu‐<br />

vre et que MM. les Prési<strong>de</strong>nts <strong>de</strong> Conférences, réunis aujourdʹhui en Conseil, auraient la<br />

charité <strong>de</strong> prendre quelques billets pour leurs Conférences. Je vous laisse toutefois entiè‐<br />

rement juge, mon bien bon ami, <strong>de</strong> la convenance et <strong>de</strong> lʹopportunité <strong>de</strong> ce moyen; je dé‐<br />

sire le bien <strong>de</strong> nos Conférences plus encore que celui <strong>de</strong> la Maison <strong>de</strong>s Orphelins, et je su‐<br />

bordonne ma <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à votre avis comme au plus grand avantage <strong>de</strong> notre chère Société.<br />

Adieu, bien bon ami, il y a bien longtemps que je ne vous ai vu; samedi prochain,<br />

on pose la première pierre du sanctuaire <strong>de</strong> N. D. <strong>de</strong> la Salette, à 3h., je nʹose espérer que<br />

vous viendrez; nous faisons cette solennité en famille pensant quʹelle attirerait trop peu <strong>de</strong><br />

mon<strong>de</strong>, mais nʹêtes‐vous pas <strong>de</strong> la famille? Vous viendrez, je lʹespère, à nos courses; je<br />

trouve toutes les occasions bonnes pour nous ménager quelques occasions <strong>de</strong> vous voir et<br />

<strong>de</strong> converser <strong>avec</strong> vous.<br />

Adieu, mon bien bon ami et frère, je suis <strong>avec</strong> une tendre affection<br />

Tout à vous en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je compte sur votre bonté pour faire prendre la note <strong>de</strong>s billets distribués, sʹil y<br />

a lieu, et les noms <strong>de</strong>s confrères qui les auraient pris.<br />

404 à M. Halluin<br />

MLP. insiste pour que M. Halluin participe à la retraite <strong>de</strong> communauté, prêchée par le père Olivaint. M. Hal‐<br />

luin a fait lʹacquisition projetée. Confiance en la Provi<strong>de</strong>nce qui se fait ʺlʹéconome <strong>de</strong> ceux qui se dépouillent<br />

pour son amourʺ. La coulpe en communauté. Le 28 septembre, gran<strong>de</strong> fête à Vaugirard.<br />

Vaugirard, 19 septembre 1856<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Depuis bien <strong>de</strong>s jours déjà, je veux répondre aux lettres que vous avez écrites ces<br />

temps <strong>de</strong>rniers à notre bon abbé Lantiez et à moi. Je me suis trouvé moins libre <strong>de</strong> le faire<br />

que <strong>de</strong> coutume, parce quʹayant repris à la maison une partie <strong>de</strong> mes occupations ordinai‐<br />

res; je me suis vu en face <strong>de</strong> beaucoup dʹaffaires arriérées quʹil mʹa fallu mettre à jour. Ce<br />

nʹest pas que ma santé soit bien remise et que je puisse compter positivement quʹil me sera<br />

permis <strong>de</strong> passer lʹhiver au milieu <strong>de</strong> notre chère famille; mais je souffrais <strong>de</strong> voir mes<br />

bons amis et frères accablés <strong>de</strong> travaux, tandis que je restais dans le repos. Je nʹai pu tenir à<br />

la tentation <strong>de</strong> leur donner un peu dʹai<strong>de</strong>, et je suis revenu entièrement à la Communauté.<br />

Jʹai vu <strong>avec</strong> une satisfaction partagée par tous nos frères que vous espériez pouvoir<br />

vous échapper quelques jours, afin <strong>de</strong> suivre la retraite <strong>avec</strong> nous. Ce serait un repos spiri‐<br />

tuel bien bon pour vous et une occasion pour nous tous <strong>de</strong> vivre en famille durant quel‐<br />

ques jours. Je souhaite bien que vous puissiez réaliser ce projet. Je serais bien satisfait aussi<br />

511


que M. Daviron pût venir, surtout si vous lui croyez quelque intention sérieuse dʹétudier<br />

sa vocation et si vous en voyez réellement en lui quelques indices.<br />

Je vois <strong>avec</strong> satisfaction que vous avez pu réaliser lʹacquisition <strong>de</strong> la maison qui est<br />

contiguë à la vôtre. Cʹétait une mesure <strong>de</strong> rigoureuse utilité. Soyez bien assuré, cher Mon‐<br />

sieur lʹabbé, que la Provi<strong>de</strong>nce ne vous manquera pas, elle se fait la trésorière et lʹéconome<br />

<strong>de</strong> ceux qui se dépouillent pour son amour.<br />

M. Lantiez mʹa posé la question relativement à la petite rente du f. Carment. Jʹavais<br />

eu primitivement la pensée <strong>de</strong> la laisser entièrement à la Maison‐Mère, qui est fort à lʹétroit<br />

présentement et qui a, <strong>de</strong> plus que les autres, la charge du Noviciat et plusieurs dépenses<br />

qui lui sont propres. Mais, en tenant compte aussi <strong>de</strong> vos propres besoins, je me suis arrêté<br />

à la pensée dʹun partage fraternel. La moitié vous sera donc attribuée. Jʹoubliais <strong>de</strong> vous<br />

dire que notre retraite commencera le 28 septembre au soir, pour se clore vendredi matin.<br />

Elle nous sera donnée par le r.p. Olivaint, jésuite, homme <strong>de</strong> cœur et <strong>de</strong> talent, qui nous<br />

connaît et nous aime particulièrement. Nous nʹavons pas été libres <strong>de</strong> choisir un autre<br />

moment, ce bon Père étant commandé lui‐même par la rentrée <strong>de</strong>s classes du collège dont<br />

il est Préfet. Nous recevrons <strong>avec</strong> gran<strong>de</strong> joie et vous, cher Monsieur lʹabbé, et tous ceux <strong>de</strong><br />

nos bons frères ou aspirants dʹArras que vous voudrez bien nous amener.<br />

M. Lantiez me dit que vous atten<strong>de</strong>z quelques indications sur la manière dont se<br />

fait la coulpe à Vaugirard. Les indications quʹil vous a données sont exactes et peuvent<br />

vous suffire. Il me semble toutefois quʹon doit insister, en ce qui concerne les manquants<br />

au règlement, sur lʹexactitu<strong>de</strong> dans le lever et le coucher, dans lʹobservation du silence aux<br />

temps indiqués par le règlement et les usages <strong>de</strong> la communauté, enfin sur la bonne tenue<br />

et la mo<strong>de</strong>stie. Il convient aussi dʹindiquer si on a ou non préparé son oraison et pris soin<br />

<strong>de</strong> la bien faire; sauf ces quelques additions, les points signalés par M. Lantiez me sem‐<br />

blent suffire. On doit remarquer toutefois que la matière <strong>de</strong> la coulpe nʹest pas invariable.<br />

Le Supérieur, selon les besoins du moment, peut y introduire pour un temps tels ou tels<br />

points concernant la discipline ou la piété, et varier même sur dʹautres pour prévenir la<br />

monotonie ou la routine.<br />

Je crois, cher Monsieur lʹabbé, avoir répondu aux points essentiels notés par vos<br />

<strong>de</strong>rnières lettres. Si jʹomets quelque chose, ne vous faites pas faute <strong>de</strong> mʹen avertir, soit<br />

personnellement, soit par le f. Carment. Nous ne recevons jamais trop souvent, à notre gré,<br />

<strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> nos ff. dʹArras, et plus les communications entre nous <strong>de</strong>viendront inti‐<br />

mes et familières, plus notre cœur sera satisfait.<br />

Le f. Bassery vous offre particulièrement son respect; il va bien. Il mʹa témoigné plu‐<br />

sieurs fois le désir <strong>de</strong> faire ses premiers vœux après la retraite. Je crois quʹil vaut mieux at‐<br />

tendre lʹexpiration <strong>de</strong> sa première année <strong>de</strong> Noviciat. Je lui ai promis toutefois <strong>de</strong> conférer<br />

à ce sujet <strong>avec</strong> vous, quand vous serez parmi nous.<br />

Jʹembrasse bien affectueusement tous nos ff. dʹArras et vous réitère aussi bien parti‐<br />

culièrement, cher Monsieur lʹabbé, tous mes sentiments <strong>de</strong> respectueux et tendre attache‐<br />

ment en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Nous avons, le 28 septembre dans lʹaprès‐midi, une gran<strong>de</strong> fête à la maison <strong>de</strong><br />

Vaugirard. Ce sont <strong>de</strong>s courses et divers divertissements que nous avons imaginés pour<br />

attirer du <strong>de</strong>hors une nombreuse assemblée et préparer quelques assistances par ce moyen<br />

512


à la maison, les billets dʹentrée étant payants. Je crois que cette fête intéresserait beaucoup<br />

nos ff. dʹArras, sʹils pouvaient arriver à temps pour y assister.<br />

405 <strong>de</strong> M. Vasseur à M. Caille<br />

P.S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Souhaits <strong>de</strong> fête. Détails sur la prochaine retraite.<br />

Vaugirard, 21 septembre 1856<br />

Monsieur et bien cher frère en N.S.,<br />

Cʹest <strong>avec</strong> une bien douce joie que je vous écris ces quelques petits mots à lʹoccasion du jour<br />

<strong>de</strong> votre fête . Je ne trouve rien autre chose à vous dire que ces mots: Je vous aime bien, vous êtes<br />

toujours pour moi un Père tendre, un ami dévoué, et afin <strong>de</strong> vous prouver mon amitié filiale et la<br />

reconnaissance que je vous dois à tant <strong>de</strong> titres, je vais tâcher aujourdʹhui dʹêtre bien sage, <strong>de</strong> bien<br />

travailler au patronage, afin <strong>de</strong> pouvoir <strong>de</strong>main faire la Ste Communion et prier pour vous le bon<br />

Seigneur <strong>de</strong> toute la ferveur <strong>de</strong> mon âme.<br />

Voilà, bien‐aimé frère et père en N.S., ce que je voulais vous dire aujourdʹhui.<br />

Veuillez accueillir <strong>avec</strong> bonté les sentiments respectueux et affectueux <strong>de</strong> votre enfant qui<br />

se recomman<strong>de</strong> à vos prières.<br />

Je vous embrase, comme je vous aime, <strong>de</strong> tout mon cœur.<br />

Alphonse Vasseur<br />

P.S. Notre f. Alphonse Vasseur, comme le plus ancien <strong>de</strong> vos enfants, a désiré nous<br />

<strong>de</strong>vancer tous pour vous souhaiter votre fête, mais nous nous joignons à lui, bien cher ami,<br />

pour faire <strong>de</strong>s vœux pleins dʹar<strong>de</strong>ur au Seigneur, afin quʹIl accroisse <strong>de</strong> jour en jour les<br />

grâces dont Il vous a déjà favorisé si généreusement. Nous le prierons tout particulière‐<br />

ment à cette occasion pour vous, pour vos œuvres, pour tout ce qui vous intéresse et nous<br />

intéresse aussi nous‐mêmes, puisque vos affaires sont les nôtres, vos travaux et tout ce que<br />

vous faites sont, par la sainte fraternité qui nous unit, communs à toute la petite famille.<br />

Notre retraite commencera dimanche au soir, 28 septembre, et finira le vendredi<br />

matin; elle sera donnée par le r.p. Olivaint, jésuite, homme <strong>de</strong> cœur et <strong>de</strong> talent; je nʹose<br />

guère espérer que vous y puissiez venir; cependant ce serait un grand bien pour vous et<br />

un repos spirituel que vous nʹavez pu prendre <strong>de</strong>puis bien longtemps; vous jugerez ce que<br />

vos affaires peuvent vous permettre à ce sujet; si vous aviez quelquʹun <strong>de</strong>s vôtres à y en‐<br />

voyer, vous le pourriez faire et nous lʹaccueillerions bien; M. Halluin compte y venir <strong>avec</strong><br />

plusieurs <strong>de</strong>s ff. dʹArras.<br />

Les ff. Carment et Thuillier vont bien.<br />

Adieu, cher bon ami, embrassez pour moi mon f. Marcaire, je lui écrirai tout pro‐<br />

chainement; mille amitiés à M. Allard.<br />

Toute la Communauté vous embrasse tendrement pour votre fête, et moi plus fort<br />

que tous les autres.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

406 à M. Caille<br />

Succès <strong>de</strong> la retraite prêchée par le père Olivaint. Sa prédication fut soli<strong>de</strong>, chaleureuse et édifiante. Gran<strong>de</strong><br />

union <strong>de</strong>s cœurs. Le frère Guillot ira à Amiens. Sacrifice <strong>de</strong> le voir quitter Vaugirard. Il faut sʹefforcer <strong>de</strong> rendre<br />

513


les enfants vraiment chrétiens. La fête <strong>de</strong>s vacances à Vaugirard a été protégée par la Vierge Marie. En commu‐<br />

nauté, bienfaits <strong>de</strong> la concertation.<br />

Vaugirard, 5 octobre 1856<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Notre retraite, à laquelle jʹavais un peu espéré que vous<br />

prendriez une petite part si vos travaux nʹy mettaient obstacle, mʹa<br />

empêché <strong>de</strong> répondre immédiatement à votre bonne et filiale lettre du<br />

30 septembre. Jʹai dʹautant plus regretté que vous nʹayez pu nous venir<br />

que les exercices donnés par le r.p. Olivaint ont été extrêmement<br />

soli<strong>de</strong>s, chaleureux, édifiants. Tous, je le crois, en ont reçu <strong>de</strong><br />

précieuses et profon<strong>de</strong>s impressions; nos ff. dʹArras, en particulier, en<br />

ont été vivement touchés. A la clôture, lʹabbé Halluin et <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>s siens:<br />

les ff. Joseph [Loquet] et Augustin [Bassery], ont fait leurs premiers vœux; <strong>de</strong> notre mai‐<br />

son, M. lʹabbé Roussel et M. Guillot faisaient aussi leur première consécration; enfin, les ff.<br />

.<strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] et Emile [Beauvais] faisaient leurs seconds vœux. Cette solennité,<br />

où le r. p. Olivaint sʹest surpassé, a été très émouvante, beaucoup dʹentre nous étaient tou‐<br />

chés jusquʹaux larmes, notre bon M. Halluin notamment, dont la piété et les belles et hau‐<br />

tes qualités nous ont tous attachés vivement. Après la cérémonie, nous sommes allés visi‐<br />

ter la chapelle <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Lorette au Séminaire dʹIssy, puis nous avons passé ensemble<br />

tout le reste <strong>de</strong> la jour en promena<strong>de</strong>. A la fin <strong>de</strong> la journée, tous les cœurs nʹen faisaient<br />

plus quʹun et, au moment <strong>de</strong> se séparer, on avait peine à sʹy résoudre; après sʹêtre embras‐<br />

sé, on revenait encore; aller à Arras ou bien <strong>de</strong>meurer à Vaugirard semblait indifférent <strong>de</strong>s<br />

<strong>de</strong>ux parts, la fusion était pleinement consommée dans la charité du Seigneur. Cʹest une<br />

raison dʹespérer quʹelle sera franche, sérieuse et durable; vous en bénirez Dieu <strong>avec</strong> nous,<br />

bien, cher ami, car, plus quʹaucun <strong>de</strong> nous, vous avez souhaité cette association que le Sei‐<br />

gneur a enfin réalisée.<br />

Nous nʹavons eu gar<strong>de</strong>, du reste, <strong>de</strong> vous oublier; tous les jours nous prions ensem‐<br />

ble pour les ff. dʹAmiens; le divin Maître et la T. S te Vierge auront certainement entendu<br />

nos vœux et aurons mis dans vos cœurs les grâces que nous avons <strong>de</strong>mandées pour vous.<br />

Je crois <strong>avec</strong> vous que le moment est venu <strong>de</strong> prendre un parti <strong>avec</strong> M. Allard;<br />

puisquʹil désire se retirer, il faut lui laisser entière liberté <strong>de</strong> le faire et tâcher même que sa<br />

détermination ne soit pas plus longtemps différée. Si, contre notre attente, un bon mou‐<br />

vement le fortifiait définitivement au service <strong>de</strong> Dieu en union <strong>avec</strong> nous, je crois quʹil fau‐<br />

drait lʹavertir quʹil est essentiel quʹil entre à la maison <strong>de</strong> Vaugirard et quʹil doit sʹy rendre<br />

sans retard. Tout nous laisse craindre, du reste, que telle ne soit son intention.<br />

En tout état <strong>de</strong> cause, je sens bien que vous ne pouvez rester au dépourvu et que<br />

notre f. Marcaire a besoin dʹêtre aidé, je vais donc prendre <strong>de</strong>s mesures pour vous en‐<br />

voyer, dès que vous me le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rez, un second frère; je vous <strong>de</strong>stine le f. Guillot qui a<br />

fait récemment ses vœux; son bon esprit, son zèle, sa piété, son amour du <strong>de</strong>voir, sa bonne<br />

tenue me garantissent quʹil peut vous être fort utile, secon<strong>de</strong>r activement notre f. Marcaire<br />

et vous ai<strong>de</strong>r pour lʹœuvre <strong>de</strong>s jeunes ouvriers; cʹest, sans contredit, un <strong>de</strong> nos bons sujets;<br />

cʹest par là même un vrai sacrifice pour nous <strong>de</strong> lʹéloigner <strong>de</strong> la Maison‐Mère, mais jʹai à<br />

cœur <strong>de</strong> ne pas vous laisser en souffrance et <strong>de</strong> vous témoigner notre attachement pour<br />

vous et pour la maison dʹAmiens; vous pouvez donc me le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r quand vous croirez<br />

à propos <strong>de</strong> le faire venir.<br />

514


Je recevrai <strong>avec</strong> plaisir le bon jeune homme dont vous me parlez et qui a été chez les<br />

Frères; je désirerais toutefois que vous me donniez un peu plus <strong>de</strong> renseignements. Pour‐<br />

quoi a‐t‐il quitté les Frères? Quel est son âge, sa piété, son caractère, sa capacité, sa tenue,<br />

son extérieur? Un mot au moins sur ces points essentiels. Si, du reste, la réponse à ces<br />

questions était satisfaisante, je mʹen rapporte à votre bon jugement, vous pouvez, sans<br />

plus attendre, envoyer le jeune homme; si vous avez quelque doute, écrivez‐moi, et nous<br />

verrons ce quʹil convient <strong>de</strong> déci<strong>de</strong>r à son sujet.<br />

Tous nos frères vous remercient <strong>de</strong>s bons et affectueux sentiments que vous leur<br />

exprimez; je suis aussi particulièrement touché <strong>de</strong> vos sollicitu<strong>de</strong>s pour ma santé; jusquʹici,<br />

je ne vais pas mal, mais je redoute lʹhiver et jʹattends ce que le divin Maître voudra déci<strong>de</strong>r<br />

à mon sujet; jʹobéirai à sa sainte volonté en humble soumission, ne souhaitant uniquement<br />

que <strong>de</strong> mʹy conformer.<br />

Je suis tout heureux <strong>de</strong>s détails que vous me donnez sur la retraite <strong>de</strong> vos enfants;<br />

plus vous leur procurerez <strong>de</strong> soli<strong>de</strong>s et religieuses instructions, plus vous établirez ferme‐<br />

ment la foi dans leurs cœurs et plus vous remplirez sûrement le but <strong>de</strong> votre oeuvre; sans<br />

cela, le reste est peu <strong>de</strong> chose ou du moins nʹest quʹun moyen pour arriver à cette fin, ren‐<br />

dre les enfants vraiment chrétiens; nous ne <strong>de</strong>vons jamais perdre <strong>de</strong> vue cette pensée et<br />

tous nos efforts doivent y tendre; quand vous aurez un troisième membre pour votre pe‐<br />

tite communauté, je vous invite bien à vous concerter ensemble chaque semaine, dans un<br />

petit Conseil où vous vous communiquerez vos observations et réglerez vos moyens et<br />

dispositions. Nos ff., ici, à Arras et à Nazareth nʹarrivent à rien <strong>de</strong> bien que par ces mesu‐<br />

res <strong>de</strong> concert et <strong>de</strong> sage prévision.<br />

Je bénis Dieu <strong>de</strong>s bonnes dispositions <strong>de</strong> M gr . dʹAmiens pour la petite communauté<br />

et pour ses œuvres; nous serons, <strong>de</strong> notre côté, pleins <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> reconnaissance pour<br />

ce vénérable Evêque.<br />

Nous avons eu hier à Vaugirard notre fête <strong>de</strong>s courses, tout sʹy est bien passé; vous<br />

pourriez faire à Amiens quelque chose <strong>de</strong> semblable; nos enfants ont eu un aimable délas‐<br />

sement qui rapportera encore à la maison 15 ou 1800f et <strong>de</strong> plus beaucoup <strong>de</strong> témoignages<br />

<strong>de</strong> sympathie et <strong>de</strong> bienveillance. Que le Seigneur en soit béni ainsi que la S te Vierge qui<br />

nous a visiblement assistés; nous avions <strong>de</strong> 3 à 4.000 personnes, pas <strong>de</strong> désordre, pas dʹac‐<br />

ci<strong>de</strong>nt, pas une égratignure; un temps à souhait, rien nʹy manquait. Remerciez <strong>avec</strong> nous la<br />

bonne Mère qui a veillé sur les jeux <strong>de</strong> ses enfants.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

406‐1 à M gr Angebault<br />

Prochain envoi du Règlement, corrigé à sa <strong>de</strong>man<strong>de</strong>.<br />

Vaugirard, 6 octobre 1856<br />

Monseigneur,<br />

Une retraite <strong>de</strong> quelques jours que nous venons <strong>de</strong> faire mʹa empêché <strong>de</strong> profiter<br />

immédiatement <strong>de</strong>s précieuses notes que vous mʹavez fait lʹhonneur <strong>de</strong> mʹenvoyer concer‐<br />

nant la composition <strong>de</strong> notre règlement; mais bien que jʹaie dû me borner jusquʹici à en<br />

prendre lecture, jʹai pu mʹassurer déjà que pas une <strong>de</strong>s lignes si patiemment écrites par vo‐<br />

515


tre main paternelle ne serait perdue pour nous. Je vais réviser <strong>avec</strong> ces lumières nouvelles<br />

notre projet; il sera, je pense, assez notablement modifié pour que jʹaie besoin <strong>de</strong> vous le<br />

soumettre une secon<strong>de</strong> fois, mais jʹespère que votre tendre et indulgente charité ne se re‐<br />

butera point <strong>de</strong> tant dʹimportunités.<br />

Nous avons vu aujourdʹhui le bon abbé Choyer dont les entreprises vont encore<br />

sʹagrandir en suite <strong>de</strong> lʹassociation quʹil vient <strong>de</strong> former; il gar<strong>de</strong> néanmoins le désir <strong>de</strong><br />

nous réserver une part dans son œuvre et nous espérons toujours, <strong>de</strong> notre côté, quʹil nous<br />

sera donné dʹy concourir. Vos bonnes prières, Monseigneur, si vous daignez nous les ac‐<br />

cor<strong>de</strong>r, hâteront la réalisation <strong>de</strong> nos vœux et nous procureront la joie dʹaller sous vos<br />

yeux, fon<strong>de</strong>r la petite colonie quʹatten<strong>de</strong>nt vos conseils, vos appuis et vos bénédictions.<br />

Veuillez agréer, Monseigneur, les sentiments <strong>de</strong> profond respect <strong>avec</strong> lesquels je<br />

suis<br />

Votre humble serviteur et dévoué enfant en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

407 à M. Caille<br />

Un jeune postulant, M. Allard, irait à Vaugirard pour y étudier sa vocation. Mouvement <strong>de</strong> personnel. M. Caille<br />

a renoncé à lʹacquisition <strong>de</strong> la maison attenante à celle <strong>de</strong> sa communauté. MLP. aura à voir son mé<strong>de</strong>cin avant<br />

lʹhiver.<br />

Vaugirard, 10 octobre 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je reçois <strong>avec</strong> une gran<strong>de</strong> joie les nouvelles que mʹapporte votre lettre; nous avions<br />

beaucoup dʹestime et dʹaffection pour notre jeune ami, M. Allard, et cʹétait <strong>avec</strong> gran<strong>de</strong><br />

peine que nous lʹavions vu si indécis sur sa vocation, dʹautant que toutes les personnes ex‐<br />

périmentées étaient persuadées que la volonté <strong>de</strong> Dieu lʹappelait parmi nous. Nous som‐<br />

mes donc tout consolés en voyant que la lumière sʹest faite pleinement pour lui; nous nous<br />

plaisons à trouver dans ce fait comme une extension <strong>de</strong>s grâces <strong>de</strong> notre retraite, et nous<br />

remercions bien tendrement le Seigneur qui établit entre nous une communauté si intime<br />

et si vraie dans les œuvres et dans les biens spirituels, comme dans les affections.<br />

Nous pensons tous ici quʹil y aurait tout avantage pour M. Allard à venir le plus tôt<br />

possible à la maison <strong>de</strong> Vaugirard; je comprends bien que les avis <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Brandt lui<br />

pourraient être utiles, mais, dʹun autre côté, le mouvement régulier et plus puissant ici <strong>de</strong><br />

la communauté le soutiendra davantage, lʹéloignement <strong>de</strong> sa famille, le changement <strong>de</strong><br />

lieux lui seront favorables; enfin, il fera ainsi un petit sacrifice au bon Dieu et se confirmera<br />

par là dans sa vocation. Je désire donc bien, mon bon ami, que vous preniez vos mesures<br />

pour que cette disposition se réalise au plus tôt, bien persuadé que je suis que M. Allard<br />

sʹen trouvera bien. Vous nʹen aurez point non plus, je lʹespère, du détriment, M. Guillot<br />

pouvant secon<strong>de</strong>r bien utilement le f. Marcaire, et ne pouvant manquer <strong>de</strong> sʹentendre par‐<br />

faitement <strong>avec</strong> lui. Autrement, et si M. Allard <strong>de</strong>vait rester à Amiens, je ne verrais guère<br />

<strong>de</strong> raison suffisante <strong>de</strong> vous envoyer M. Guillot, car il me semble que, dans lʹétat actuel<br />

<strong>de</strong>s choses et <strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> du jeune Défosse, vous pourriez marcher ainsi.<br />

Je trouve bien ce que vous me proposez pour le jeune M. Dufour, le voyage <strong>de</strong> M.<br />

lʹabbé Mangot est une occasion favorable; nous attendrons donc ce bon jeune homme lun‐<br />

516


di ou mardi. Il me semble que, si M. Allard veut prend courageusement son parti, rien ne<br />

lʹempêcherait dʹaccompagner aussi M. Mangot.<br />

Veuillez dire, mon bon ami, à ce <strong>de</strong>rnier que, si Vaugirard ne lui paraît pas trop in‐<br />

commo<strong>de</strong> à cause <strong>de</strong> lʹéloignement <strong>de</strong> Paris, nous serons heureux <strong>de</strong> le recevoir dans notre<br />

pauvre maison.<br />

La démarche que vous vous proposez <strong>de</strong> faire près <strong>de</strong> M. lʹabbé Fayer, secrétaire <strong>de</strong><br />

M gr , me semble tout à fait sage; je vous invite bien à ne pas la négliger.<br />

Je présume que vous avez dû renoncer, quant à présent, à lʹacquisition <strong>de</strong> la maison<br />

attenant à la vôtre, puisque vos <strong>de</strong>rnières lettres ne mʹen parlent point; vous aviez résolu<br />

<strong>de</strong> suivre, en cette affaire, les indices donnés par la Provi<strong>de</strong>nce; cʹest la seule voie à suivre<br />

quand on veut, dans les œuvres, marcher en sécurité et en tranquillité <strong>de</strong> cœur; aussi<br />

nʹavais‐je nulle inquiétu<strong>de</strong> et tenais‐je pour certain que les choses tourneraient pour le<br />

mieux, en quelque sens que ce fût.<br />

Je regrette bien que nous ne puissions prendre part aux fêtes <strong>de</strong> vos enfants à lʹocca‐<br />

sion <strong>de</strong> la S t Florent; vous êtes au moins bien assuré, mon bon ami, que tous nos cœurs<br />

sont <strong>avec</strong> vous et ne sʹéloigneront que pour se tourner vers Dieu et lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r dʹaccroî‐<br />

tre encore et toujours les grâces quʹIl a déjà répandues sur vous.<br />

Adieu, mon bien bon ami; croyez à tous nos sentiments <strong>de</strong> tendre affection en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je dois, dans quelques jours, dʹaprès lʹordre <strong>de</strong> notre p. Beaussier, voir mon<br />

mé<strong>de</strong>cin et prendre son avis relativement à mes dispositions pour lʹhiver; ma santé se sou‐<br />

tient passablement jusquʹici. Embrassez pour moi mes <strong>de</strong>ux jeunes frères.<br />

408 à M. Caille<br />

MLP. insiste pour que M. Caille laisse venir le jeune Allard à Vaugirard. Le départ du frère Guillot pour Amiens<br />

est imminent. La santé <strong>de</strong> MLP. lʹobligera sans doute à sʹéloigner quelque temps <strong>de</strong> la Communauté.<br />

Vaugirard, 17 octobre 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous avons reçu <strong>avec</strong> une gran<strong>de</strong> satisfaction le vénérable M. Mangot, dont la pré‐<br />

sence parmi nous a beaucoup édifiés; il a continué son voyage, après sʹêtre arrêté <strong>de</strong>ux<br />

jours à peine à Paris, mais il a promis <strong>de</strong> nous revoir à son passage en retournant à<br />

Amiens; nous espérons que, sʹil nʹest pas trop pressé, il pourra prolonger un peu plus cette<br />

secon<strong>de</strong> visite.<br />

Nous avons accueilli le jeune M. Dufour que vous nous avez envoyé et qui accom‐<br />

pagnait M. Mangot; son extérieur prévient en sa faveur, mais sa gran<strong>de</strong> jeunesse dʹune<br />

part, et <strong>de</strong> lʹautre, le peu <strong>de</strong> temps que nous avons eu jusquʹici pour le connaître, ne nous<br />

permettent encore <strong>de</strong> rien préjuger sur son avenir.<br />

Je ne désapprouve pas, mon bon ami, le parti que vous avez pris <strong>de</strong> suspendre le<br />

départ pour Vaugirard <strong>de</strong> M. Allard; vous lʹavez fait pour le plus grand bien et <strong>avec</strong> <strong>de</strong><br />

justes raisons, puisque M. lʹabbé <strong>de</strong> Brandt, dont la bienveillance pour nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

notre part tant <strong>de</strong> déférence et <strong>de</strong> gratitu<strong>de</strong>, inclinait à cet avis; toutefois, après y avoir bien<br />

pensé <strong>de</strong>vant Dieu, il me semble quʹil serait désirable que notre jeune ami prît courageu‐<br />

sement sa résolution et se rendît parmi nous. Il a si longtemps hésité à se déterminer que<br />

517


la Communauté, après la longanimité dont elle a usé envers lui, à droit <strong>de</strong> lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r<br />

un acte <strong>de</strong> volonté et <strong>de</strong> sacrifice un peu décidé, comme témoignage <strong>de</strong> son ferme désir <strong>de</strong><br />

servir le Seigneur en union <strong>avec</strong> elle. Je crois dʹailleurs quʹil y aura pour lui grâces dʹétat<br />

tout particulièrement dans la Maison‐Mère, et quʹil y retrouvera les appuis dont il a be‐<br />

soin. Jʹespère que M. lʹabbé <strong>de</strong> Brandt ne mʹen voudra point <strong>de</strong> ne pas partager absolu‐<br />

ment son avis; jʹai dû juger un peu les choses au point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> la Communauté, en<br />

même temps que dans lʹintérêt <strong>de</strong> notre jeune frère; je compte sur le bienveillant intérêt <strong>de</strong><br />

M. <strong>de</strong> Brandt pour affermir ce cher enfant, si la mesure que je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> lui était un peu<br />

pénible.<br />

Je ne différerai pas le départ <strong>de</strong> notre f. Guillot, je sens bien quʹil vous est nécessaire;<br />

je vais prendre mes mesures pour quʹil se ren<strong>de</strong> à Amiens dans le commencement <strong>de</strong> la<br />

semaine prochaine; je souhaite bien que la venue <strong>de</strong> M. Allard sʹeffectue dans le même<br />

temps; nous pourrons ainsi faire une sorte <strong>de</strong> compensation pour quelques services que le<br />

départ <strong>de</strong> M. Guillot va laisser ici en souffrance. Si, un peu plus tard, un besoin manifeste<br />

se faisait sentir dʹun nouvel ai<strong>de</strong> chez vous, nous ferions tous nos efforts pour vous donner<br />

assistance. Mais, en ce moment, nous pourrions difficilement vous envoyer <strong>de</strong>ux frères; je<br />

suis encore bien incertain si je ne vais pas être contraint <strong>de</strong> mʹéloigner encore pour quel‐<br />

ques mois; en ce cas, je serais sans doute contraint dʹemmener <strong>avec</strong> moi quelquʹun <strong>de</strong>s nô‐<br />

tres; ce serait un nouveau vi<strong>de</strong> que nous aurions peine à combler.<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> une bien vive satisfaction les marques <strong>de</strong> bonté et <strong>de</strong> protection que<br />

vous a données M gr . dʹAmiens; lʹaccueil si rempli <strong>de</strong> bienveillance quʹil nous avait fait ici<br />

<strong>de</strong>vant nous <strong>de</strong>vant nous faire espérer son appui paternel, nous tâcherons <strong>de</strong> le mériter<br />

par notre zèle, notre soumission et notre dévouement; nous tâcherons surtout, par notre<br />

fidélité à la grâce, <strong>de</strong> nous rendre dignes <strong>de</strong> la protection divine, sans laquelle toutes les<br />

autres assistances ne serviraient <strong>de</strong> rien. Tenez‐moi au courant <strong>de</strong> tout ce qui regar<strong>de</strong> votre<br />

projet dʹacquisition; je nʹai pas bien compris par qui et au nom <strong>de</strong> qui lʹachat serait fait.<br />

Assurez M. Giraud <strong>de</strong> toutes nos sympathies dans lʹaffliction que le Seigneur a vou‐<br />

lu lui envoyer; toute notre Communauté a prié pour sa bonne mère; nous avons la<br />

confiance que le Seigneur a fait miséricor<strong>de</strong> à cette âme simple et pleine <strong>de</strong> foi et <strong>de</strong> piété.<br />

Adieu, mon bien bon ami; offrez mon respect à M. lʹabbé <strong>de</strong> Brandt; embrassez pour<br />

moi les chers ff. Marcaire et Allard.<br />

Votre dévoué Père et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

409 à M. Halluin<br />

Joie quʹa fait naître lʹunion <strong>de</strong> M. Halluin à lʹInstitut. Bonheur et grâces <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> communauté. Ecce quam<br />

bonum. Serviteurs <strong>de</strong>s pauvres, les frères doivent en avoir les vertus, et comme eux, sʹabandonner à la Provi‐<br />

<strong>de</strong>nce. Avant <strong>de</strong> commencer une entreprise nouvelle, examiner si elle est selon la volonté <strong>de</strong> Dieu. Prières pour<br />

les frères absents et pour les bienfaiteurs.<br />

Vaugirard, 18 octobre 1856<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Votre bonne et affectueuse lettre était si remplie <strong>de</strong> cordiale et vraie charité, si em‐<br />

preinte <strong>de</strong>s souvenirs <strong>de</strong> la retraite et <strong>de</strong> la fraternelle union que nous avons pleinement<br />

consommée en la terminant, que jʹai cru <strong>de</strong>voir la lire tout entière à notre chère famille,<br />

518


comme un nouveau témoignage <strong>de</strong>s merveilleux effets <strong>de</strong> la divine charité quand elle se<br />

répand dans les cœurs. Il va sans dire que tous nos frères en ont été profondément touchés<br />

et que, ce jour‐là, lʹecce quam bonum et quam jucundum habitare fratres in unum a été dit en‐<br />

core <strong>avec</strong> plus dʹar<strong>de</strong>ur et dʹeffusion que <strong>de</strong> coutume. Oui, cher Monsieur lʹabbé, nous bé‐<br />

nissons sincèrement le Seigneur qui a fondu nos âmes en son divin Cœur pour les rendre<br />

plus fortes pour son service et plus dévouées au salut <strong>de</strong> nos frères; il nous semble quʹun<br />

accroissement <strong>de</strong> vie sʹest fait dans notre petite famille, et quʹen concertant bien nos<br />

moyens nous pourrons travailler un peu utilement au champ du Père céleste. Je vois <strong>avec</strong><br />

bonheur, cher Monsieur lʹabbé, que vous nʹespérez rien sinon par la prière, que tous vos<br />

appuis sont en Dieu, toute votre confiance en sa Provi<strong>de</strong>nce et en son amour. Allons géné‐<br />

reusement dans cette voie; serviteurs <strong>de</strong>s pauvres, nous <strong>de</strong>vons avoir les vertus <strong>de</strong>s vrais<br />

et bons pauvres, qui se reposent en paix sur les tendres miséricor<strong>de</strong>s du Père céleste et qui<br />

atten<strong>de</strong>nt, au jour le jour, leur subsistance <strong>de</strong> son amour pour leur âme et pour leur corps.<br />

Cette pensée mʹa souvent frappé quʹétant les représentants, et dʹordinaire comme les<br />

agents <strong>de</strong>s pauvres, nous <strong>de</strong>vions avoir leur humilité, leur patience, leur détachement, leur<br />

recours en Dieu; à cette condition, nous aurons aussi, comme eux, notre trésor dans les<br />

prédilections du Sauveur et dans les mérites abondants quʹIl leur a réservés.<br />

Je trouve bien votre projet <strong>de</strong> ron<strong>de</strong> pour la quête <strong>de</strong>s meubles et effets inutiles, si<br />

surtout vous croyez y trouver avantage réel pour votre maison et pour vos enfants; pour<br />

les autres pauvres, je ne sais si le Seigneur vous a donné <strong>de</strong>s facilités <strong>de</strong> temps et <strong>de</strong> res‐<br />

sources pour vous en occuper; vous me ferez plaisir <strong>de</strong> me le dire à lʹoccasion; dʹordinaire,<br />

le Seigneur ne nous donne pas beaucoup <strong>de</strong> choses à faire à la fois; toutefois, ses voies sont<br />

diverses et veulent être étudiées; je tâcherai <strong>avec</strong> vous <strong>de</strong> les reconnaître et <strong>de</strong> les suivre en<br />

toute circonstance.<br />

Jʹaurais bien soin <strong>de</strong> vous instruire <strong>de</strong> tous les faits <strong>de</strong> quelque intérêt concernant la<br />

communauté, afin que vous vous associiez à tous ses mouvements; je vous dirai en parti‐<br />

culier les pratiques ou moyens qui nous paraîtraient propres à nous édifier; vous me<br />

communiquerez en retour vos bonnes inspirations, pour la Communauté et pour les œu‐<br />

vres. Nous avons réglé <strong>de</strong>rnièrement que, après la prière du soir, le Memorare que nous di‐<br />

sons en terminant serait appliqué aux frères absents et aux bienfaiteurs et quʹavant <strong>de</strong> le<br />

réciter, on dirait expressément: Pour nos frères absents et pour nos bienfaiteurs.<br />

Quant aux affaires, je ne vois rien <strong>de</strong> nouveau, sinon celle <strong>de</strong> Grenelle, dont les li‐<br />

gnes ci‐jointes, pour le f. Carment, vous donneront un suffisant détail. Un <strong>de</strong> nos amis <strong>de</strong><br />

Chartres, M. lʹabbé Levassor, nous est venu faire <strong>de</strong>s propositions extrêmement favorables<br />

pour prendre la direction dʹun ensemble dʹœuvres quʹil a fondées en cette ville, dans le<br />

genre <strong>de</strong>s nôtres; nous avons accepté lʹoffre en principe, en convenant quʹun libre espace<br />

dʹun an ou <strong>de</strong>ux nous serait laissé pour lʹexécution.<br />

Je suis bien heureux que M. <strong>de</strong> Lauriston suive chez vous les exercices <strong>de</strong> commu‐<br />

nauté; jʹen augure bien pour la confirmation <strong>de</strong> sa vocation qui me semble <strong>de</strong> plus en plus<br />

manifeste; assurez‐le, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> nos bons souvenirs; nous prions constam‐<br />

ment pour lui, et nous le recommandons chaque semaine à N. D. <strong>de</strong>s Victoires.<br />

Le f. Augustin [Bassery] répondra à votre bonne petite épître; il va bien et se re‐<br />

comman<strong>de</strong> au souvenir <strong>de</strong>s ff. dʹArras.<br />

Et moi aussi, cher Monsieur lʹabbé, je vous prie <strong>de</strong> les assurer <strong>de</strong> ma tendre et toute<br />

paternelle affection; je suis tout confus dʹemployer pour vous‐même ces termes aussi; vo‐<br />

519


tre caractère, et bien dʹautres raisons que je tais, <strong>de</strong>vraient mettre les choses en tout autre<br />

sens; mais, puisquʹil a plu à Dieu, dont les <strong>de</strong>sseins sont si souvent impénétrables pour<br />

nous, <strong>de</strong> mʹinvestir dʹun titre dont je suis si profondément indigne, je mʹincline sous sa vo‐<br />

lonté sainte et je me dis, cher Monsieur lʹabbé, <strong>avec</strong> une respectueuse et inaltérable affec‐<br />

tion,<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Votre statue <strong>de</strong> la S te Vierge doit être moulée dès quʹelle sera suffisamment sè‐<br />

che; elle ira chez vous comme pour nous rappeler que le lien qui nous attache les uns aux<br />

autres est tout <strong>de</strong> tendresse, <strong>de</strong> con<strong>de</strong>scendance réciproque et dʹabsolue charité.<br />

410 à M. Caille<br />

M. Guillot à Amiens, les instructions qui lui sont données. Obole <strong>de</strong> MLP. pour lʹachat dʹune maison. Prochain<br />

départ dans le Midi.<br />

Vaugirard, 21 octobre 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Notre f. Henri Guillot part pour se rendre vers vous, afin <strong>de</strong> vous secon<strong>de</strong>r ainsi<br />

que notre f. Marcaire dans vos travaux et exercices; jʹespère quʹ<strong>avec</strong> la grâce <strong>de</strong> Dieu il<br />

remplira bien cette mission. Ce nʹest pas sans sacrifice que notre maison <strong>de</strong> Vaugirard se<br />

prive <strong>de</strong> ses services; il est, en effet, plus grave et plus soli<strong>de</strong> <strong>de</strong> raison que la plupart <strong>de</strong><br />

nos jeunes frères, et les sujets un peu posés et rassis sont maintenant rares chez nous; mais<br />

vous aviez été longtemps en souffrance, je nʹai pas voulu vous laisser en peine; jʹespère<br />

que le Seigneur, qui sait nos besoins, daignera y pourvoir.<br />

Je vous envoie par cette occasion la petite somme <strong>de</strong> 500f.que jʹai réunie pour<br />

concourir à lʹachat <strong>de</strong> votre maison; cʹest une obole, mais cʹest lʹobole <strong>de</strong> la veuve; je sou‐<br />

haite quʹelle vous porte bonheur et soit lʹannonce <strong>de</strong> nombreuses souscriptions <strong>de</strong> la part<br />

<strong>de</strong> ceux qui sont plus riches que nous.<br />

Jʹai appris aujourdʹhui, non sans quelque regret, que je <strong>de</strong>vais encore mʹéloigner cet<br />

hiver; le mé<strong>de</strong>cin mʹassure que cʹest le <strong>de</strong>rnier sacrifice et que je pourrai certainement res‐<br />

ter ici lʹhiver prochain; nos frères et tous nos amis, notre p. Beaussier surtout, mʹont invité<br />

à mʹy résoudre; jʹai dû me résigner.<br />

Adieu, mon bien bon ami; nous attendons notre cher M. Allard; il va <strong>de</strong>venir ici<br />

bien utile, puisquʹil me faudra sans doute, emmener quelquʹun <strong>de</strong> notre maison <strong>avec</strong> moi.<br />

Je nʹai point donné dʹinstruction particulière à notre f. Guillot, sinon dʹêtre fidèle à<br />

Dieu et à Marie et soumis à vous; il va sans dire que le f. Marcaire gar<strong>de</strong>ra sa position et<br />

que le f. Guillot lui sera subordonné; dans la charité, ces soumissions nʹont rien <strong>de</strong> pénible,<br />

notre f. Guillot est assez avancé pour nʹen souffrir aucunement.<br />

Assurez votre petite famille <strong>de</strong> mon tendre attachement et croyez‐moi, comme tou‐<br />

jours, dans les cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

520


411 à M. Myionnet<br />

Récit du voyage <strong>de</strong> lʹinstallation à Cannes. M. Myionnet est responsable <strong>de</strong> la Communauté pendant lʹabsence<br />

<strong>de</strong> MLP 247 . Etat religieux du pays cannois. Gran<strong>de</strong> fatigue <strong>de</strong> MLP. Il fait le don <strong>de</strong> sa personne à la Communau‐<br />

té: ʺquoiquʹil mʹarrive…tout en moi lui est donné jusquʹà mon <strong>de</strong>rnier jourʺ.<br />

Cannes, le 1 er novembre 1856<br />

Fête <strong>de</strong> la Toussaint<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Que tous les Saints daignent intercé<strong>de</strong>r pour vous et pour tous les membres <strong>de</strong> no‐<br />

tre chère famille!<br />

Nous sommes arrivés hier à bon port à notre <strong>de</strong>stination, vers 2h. <strong>de</strong> lʹaprès‐midi; je<br />

dis <strong>avec</strong> raison à bon port, car nous avons fait, <strong>de</strong> Marseille à Cannes, un voyage <strong>de</strong> 12<br />

heures par mer par un temps, il est vrai, fort calme et qui ne laissait guère craindre <strong>de</strong><br />

tempête, mais le calme et lʹorage sont dans les mains <strong>de</strong> Dieu, et nous <strong>de</strong>vons lui rendre<br />

grâces quand il éloigne <strong>de</strong> nous le danger toujours menaçant.<br />

Mon petit compagnon <strong>de</strong> voyage 248 nʹéprouve jusquʹici ni ennui, ni fatigue; il pense<br />

bien à Vaugirard et prie pour ses frères absents, mais il ne manifeste encore aucun désir <strong>de</strong><br />

les rejoindre; la nouveauté <strong>de</strong>s lieux, la beauté <strong>de</strong>s pays que nous avons traversés lʹoccu‐<br />

pent et lʹémerveillent; jʹespère quʹen employant utilement son temps, et surtout en faisant<br />

une part bien régulière aux exercices <strong>de</strong> piété, il se soutiendra et se préservera <strong>de</strong> lʹennui.<br />

Jʹéprouve aujourdʹhui un peu <strong>de</strong> fatigue et quelques malaises dʹentrailles causés par<br />

les mauvaises cuisines provençales et les vins frelatés quʹil faut subir le long <strong>de</strong> la route; je<br />

vais tâcher <strong>de</strong> me refaire une petite routine <strong>de</strong> vie qui me laisse oublier le plus quʹil se<br />

pourra les soins que <strong>de</strong>man<strong>de</strong> notre misérable corps; ce ne sera pas sans quelques petites<br />

difficultés ici, où on ne trouve pas toujours commodément les choses les plus simples et<br />

les plus communes chez nous. Notre f. Ernest Vasseur va se mettre au courant <strong>de</strong> ses fonc‐<br />

tions dans notre ménage <strong>de</strong> garçons et, quand il sera bien expert, il vous dira le résultat <strong>de</strong><br />

son apprentissage.<br />

Nous avons trouvé, <strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> la S te Vierge que nous posons comme gardienne<br />

et protectrice <strong>de</strong> notre petit intérieur domestique, un logement simple et commo<strong>de</strong> et <strong>de</strong><br />

prix modique; il a vue sur la mer et regar<strong>de</strong> le midi; les propriétaires sont chrétiens et fort<br />

bienveillants; dʹailleurs, la bonne amitié <strong>de</strong> M. lʹabbé Taillandier nous avait ménagé un<br />

appui tout rempli <strong>de</strong> bienveillance et <strong>de</strong> prévenances attentives dans la personne dʹune<br />

pieuse <strong>de</strong>moiselle qui habite Cannes <strong>avec</strong> sa mère, mala<strong>de</strong> <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux ans, et qui a mis<br />

tout en œuvre pour nous établir dans les meilleures et les plus favorables conditions.<br />

Grâce à lʹobligeance <strong>de</strong> cette excellente personne, nous avions déjà, quelques heures après<br />

notre arrivée, visité les <strong>de</strong>ux églises, la chapelle <strong>de</strong> lʹhospice et le cimetière; nous avions été<br />

présentés à M. le curé et à ses trois vicaires, et commencé relation <strong>avec</strong> plusieurs personnes<br />

du pays; il va sans dire que pour les relations, nous en userons bien discrètement; sʹil était<br />

dans les vues <strong>de</strong> Dieu que nous fussions rapprochés du mon<strong>de</strong>, il ne nous eût pas envoyés<br />

à Cannes, où il y a bien peu <strong>de</strong> ressources <strong>de</strong> société; tandis quʹà Hyères, où jʹétais lʹan<br />

<strong>de</strong>rnier, il était si facile <strong>de</strong> se créer <strong>de</strong>s entourages et rapports <strong>de</strong> société; nous répondrons<br />

aux vues du Seigneur en vivant bien retirés, la solitu<strong>de</strong> est si bonne quand on sait y cher‐<br />

247 Paul Decaux viendra saluer son vieil ami avant le départ et il en gar<strong>de</strong>ra un souvenir impérissable :"Adieu à Monsieur le <strong>Prevost</strong><br />

qui part pour Cannes. Après la prière <strong>de</strong> séparation, il daigne me dire que j'ai été une <strong>de</strong> ses joies, une <strong>de</strong>s consolations <strong>de</strong> sa vie.<br />

Cette bénédiction, ô mon Dieu, n'est-elle pas celle d'un saint?" (Mémorial Decaux, ms, 25 octobre 1856, ASV).<br />

248 Ernest Vasseur, frère d'Alphonse, qui l'accompagne comme infirmier.<br />

521


cher Dieu! Ce nʹest que dʹaujourdʹhui que nous avons pu nous installer dans notre petite<br />

<strong>de</strong>meure; hier, à notre arrivée, nous sommes <strong>de</strong>scendus à lʹhôtel Pinchina, où vous aurez,<br />

je pense, adressé le panier que vous <strong>de</strong>vez nous envoyer et qui nʹest pas encore arrivé.<br />

Il a fallu monter aujourdʹhui trois fois à lʹéglise haute perchée, comme cʹest dʹordi‐<br />

naire ici, sur le haut dʹune montagne; je me sens fatigué; le voyage était aussi un peu ru<strong>de</strong><br />

pour mes forces; je ne puis, pour cette raison, vous écrire longuement par ce courrier, je<br />

mʹen dédommagerai prochainement. Je nʹai pas oublié notre bien‐aimée famille dans la<br />

gran<strong>de</strong> solennité dʹaujourdʹhui; je lʹai recommandée à tous les saints, à ceux surtout qui<br />

nous ont précédés dans la voie où le Seigneur a daigné, quoique indignes, nous appeler à<br />

notre tour; puissent‐ils nous obtenir quelque participation <strong>de</strong> leur abnégation, <strong>de</strong> leur zèle,<br />

<strong>de</strong> leur généreux dévouement.<br />

Il y aurait beaucoup <strong>de</strong> bien à faire ici; ce pays est miné par le protestantisme et il<br />

est dépourvu <strong>de</strong> tout moyen <strong>de</strong> défense, sauf une petite association <strong>de</strong> quelques dames<br />

charitables qui visitent un peu les mala<strong>de</strong>s, et dont quelques‐unes ont vraiment lʹesprit <strong>de</strong><br />

zèle et lʹar<strong>de</strong>ur du bien <strong>de</strong>s âmes. Je serais bien consolé sʹil nous était donné dʹapporter<br />

quelque petite pierre à lʹédifice spirituel qui est tout à fait à fon<strong>de</strong>r; cinq ou six hommes<br />

seulement font leurs Pâques, sur une population <strong>de</strong> 4 ou 5.000 habitants. Cependant, si ces<br />

quelques hommes se concertaient, ils pourraient encore exercer quelque influence et inspi‐<br />

rer peut‐être à dʹautres le courage <strong>de</strong> les imiter; il nʹy a point ici <strong>de</strong> Conférence <strong>de</strong> S t ‐<br />

Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul; nous verrons si, <strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> Dieu, on ne pourrait en établir une.<br />

Dès que je serai remis <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> lassitu<strong>de</strong> que jʹéprouve et que je me serai un peu<br />

acclimaté, jʹécrirai à tous nos frères; en attendant, je recevrai <strong>avec</strong> joie leurs petites com‐<br />

munications qui me sont comme un moyen <strong>de</strong> me rapprocher dʹeux; je me réfugie, quant à<br />

présent, dans la prière; cʹest la ressource <strong>de</strong>s serviteurs <strong>de</strong> Jésus‐Christ, ils peuvent tou‐<br />

jours se retrouver dans son divin Cœur. je mʹy tiendrai aussi souvent que possible, et jʹy<br />

donne ren<strong>de</strong>z‐vous à mes bien‐aimés enfants.<br />

Dimanche, 2 novembre. Ma lettre nʹa pu partir hier, je nʹavais pas la force <strong>de</strong> la<br />

clore, tant jʹétais las et mal disposé; jʹéprouve lʹeffet <strong>de</strong> lʹair <strong>de</strong> la mer, bien que la tempéra‐<br />

ture soit jusquʹici parfaitement douce et le temps celui <strong>de</strong>s plus beaux jours dʹété chez<br />

nous; ce sera, je lʹespère, lʹaffaire <strong>de</strong> quelques jours; dès quʹun peu <strong>de</strong> forces me sera rendu,<br />

<strong>avec</strong> quelque disponibilité dʹesprit, tout sera à la discrétion <strong>de</strong> notre chère famille; je ne vis<br />

réellement que pour elle et, quoi quʹil mʹarrive: travail, souffrance et prière, tout en moi lui<br />

est donné jusquʹà mon <strong>de</strong>rnier jour.<br />

Adieu, bien cher ami; jʹembrasse tendrement tous mes biens‐aimés enfants et suis<br />

<strong>avec</strong> la plus tendre affection<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

412 à M. Halluin<br />

Désir dʹaller en pèlerinage à Rome. Prières auprès <strong>de</strong>s moines <strong>de</strong> Lérins, sur lʹîle <strong>de</strong> saint Honorat, pour obtenir<br />

lʹunion habituelle en Dieu. Importance <strong>de</strong> la récréation prise en commun pour que les cœurs sʹouvrent et que se<br />

maintienne lʹesprit <strong>de</strong> famille. ʺProfiterʺ <strong>de</strong> la maladie pour lʹavancement spirituel. Décès <strong>de</strong> M me Taillandier.<br />

Cannes, 7 novembre 1856<br />

Cher M. lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Vous ne croirez plus guère désormais à ma parole, car je mʹétais promis dʹaller vous<br />

rendre visite avant <strong>de</strong> quitter Vaugirard, si jʹétais contraint <strong>de</strong> mʹéloigner encore durant<br />

522


cette saison dʹhiver. Mais jʹavais compté sans mon hôte, cʹest‐à‐dire sans lʹavis du mé<strong>de</strong>cin<br />

qui a refusé <strong>de</strong> me laisser faire lʹessai <strong>de</strong> mes forces au moins durant un mois, comme je le<br />

lui <strong>de</strong>mandais, et qui mʹa obligé <strong>de</strong> partir à lʹimproviste, sans même faire dʹadieux à nos<br />

amis et bienfaiteurs à Paris. Il sʹest engagé à mʹépargner toute nouvelle absence pour<br />

lʹavenir, si je me montrais docile et me résignais encore pour cette année à un si ru<strong>de</strong> sacri‐<br />

fice, tandis quʹil regardait comme compromise lʹamélioration sensible déjà obtenue, si je<br />

courais les risques dʹune saison rigoureuse et <strong>de</strong>s fatigues quʹelle eût causées à ma frêle<br />

santé. Nos frères ont insisté pour que je suivisse cet avis; je mʹy suis résigné, et me voilà<br />

encore fois à 300 lieues <strong>de</strong> vous et <strong>de</strong> nos bien‐aimés frères. Je nʹai pas même eu la consola‐<br />

tion <strong>de</strong> choisir le lieu <strong>de</strong> mon exil. Jʹaurais souhaité dʹaller à Rome, qui eût été au moins un<br />

sujet dʹédification et un pieux pèlerinage. On a pensé que lʹair y est peu sain et convient<br />

médiocrement aux mala<strong>de</strong>s. Je suis ici dans un lieu qui nʹa rien <strong>de</strong> remarquable que la<br />

beauté <strong>de</strong> son site et la douceur <strong>de</strong> son climat. On a pourtant en vue la petite île <strong>de</strong> S t Ho‐<br />

norat, où sont les ruines encore imposantes <strong>de</strong> la célèbre abbaye <strong>de</strong> Lérins 249 . Jʹirai la visi‐<br />

ter, je chercherai sur cette terre quʹont habitée autrefois tant <strong>de</strong> saints religieux quelques<br />

vestiges <strong>de</strong> cette foi profon<strong>de</strong>, <strong>de</strong> cette abnégation absolue qui inspiraient alors les servi‐<br />

teurs <strong>de</strong> Dieu. Je leur <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rai, au lieu même où ils ont tant prié, dʹobtenir pour moi et<br />

pour toute notre petite famille un peu <strong>de</strong> la ferveur qui animait leurs âmes, et <strong>de</strong> cette<br />

union à Dieu où nous avons tant <strong>de</strong> peine à nous maintenir. Que je serais heureux, cher<br />

Monsieur lʹabbé, si mes pauvres prières pouvaient concourir à un si précieux résultat! Je<br />

serais bien consolé <strong>de</strong> mon inaction forcée, et je croirais avoir bien servi notre chère Com‐<br />

munauté. Ce qui me donne bonne espérance pour notre maison dʹArras, cʹest que je vous<br />

vois bien plein <strong>de</strong> cette conviction que nous ne ferons rien sans la grâce, et que nous nʹau‐<br />

rons la grâce quʹen priant incessamment; cʹest que vous avez surtout à cœur <strong>de</strong> porter à<br />

Dieu nos frères et nos enfants; cʹest quʹen un mot, vous comptez peu sur vous‐même et<br />

beaucoup sur lʹamour <strong>de</strong> notre Père céleste, que vous chargez Marie, notre Mère, <strong>de</strong> tous<br />

vos intérêts, et que vous aimez à lui laisser le gouvernement <strong>de</strong> votre maison. Tout ira bien<br />

tant que nous marcherons ainsi; daigne le Seigneur nous maintenir en si bonne voie.<br />

Vos <strong>de</strong>rnières lettres, cher Monsieur lʹabbé, ne me donnaient point <strong>de</strong> nouvelles <strong>de</strong><br />

M. Cousin 250 . Je serai satisfait si vous voulez bien mʹen dire quelques mots dans votre pro‐<br />

chaine. Jʹespère quʹil va mieux. Si vous aviez quelque raison <strong>de</strong> penser que les occupations<br />

quʹil pourrait prendre à Vaugirard et le changement dʹair lui fussent plus favorables que le<br />

séjour dʹArras, vous pourriez en entretenir M. Myionnet et convenir <strong>avec</strong> lui <strong>de</strong> ce quʹil y<br />

aurait à faire pour donner ce soulagement au bon jeune homme. Sʹil a, comme je le crois, le<br />

sincère désir <strong>de</strong> se consacrer au service <strong>de</strong> Dieu, nous <strong>de</strong>vons le traiter comme un frère et<br />

faire pour lui tout ce que nous pourrons.<br />

Je ne sais où en est notre cher M. <strong>de</strong> Lauriston; jʹespérais quʹil mʹécrirait. Jusquʹici, il<br />

reste silencieux <strong>avec</strong> moi. Je continue <strong>de</strong> prier pour lui, et jʹespère quʹil aura la force <strong>de</strong><br />

faire ce que Dieu me semble <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong> lui.<br />

Jʹai oublié <strong>de</strong> vous parler précé<strong>de</strong>mment <strong>de</strong> la cérémonie <strong>de</strong> la rénovation <strong>de</strong>s<br />

vœux, qui se fait ordinairement dans les communautés au jour <strong>de</strong> la fête <strong>de</strong> la Présenta‐<br />

tion, le 21 novembre, et qui est aussi dans nos usages. Je vous ferai parvenir la petite for‐<br />

249 Jadis habitée par <strong>de</strong>s moines et évêques célèbres (saint Césaire d'Arles, saint Loup évêque <strong>de</strong> Troyes, saint Vincent <strong>de</strong> Lérins. Les<br />

Cisterciens <strong>de</strong> Sénanque s'y réinstalleront en 1869.<br />

250 Cf. lettres 378 et 720. Le frère François Cousin (1833-1859) se dévouait à l'orphelinat <strong>de</strong> M. Halluin. Vœux le 18 décembre<br />

1856. Mais sa mauvaise santé se dégra<strong>de</strong> rapi<strong>de</strong>ment et il meurt à 26 ans, le 6 septembre 1859.<br />

523


mule et vous indiquerai dans ma prochaine lettre comment nous faisons, en gran<strong>de</strong> sim‐<br />

plicité, cet acte <strong>de</strong> piété.<br />

Je désire bien, cher Monsieur, que vous gardiez sauve votre récréation du soir, au‐<br />

tant quʹil se pourra. Lʹexpérience nous a convaincus quʹelle est bien nécessaire pour dilater<br />

un peu les cœurs, maintenir lʹunion et lʹesprit <strong>de</strong> famille entre les frères. On insiste dans<br />

toutes les communautés pour que cet exercice soit considéré comme essentiel et ne soit pas<br />

plus négligé que les exercices même <strong>de</strong> piété. Je ne vois à 7h., temps <strong>de</strong> votre récréation,<br />

dʹautre exercice au règlement que le souper et la récréation <strong>de</strong>s écoliers. Il me semble quʹà<br />

tour <strong>de</strong> rôle quelquʹun <strong>de</strong>s frères les surveillant, les autres pourraient prendre leur délas‐<br />

sement en commun. Vous ferez jʹen suis assuré, tout ce que vous pourrez pour y arriver.<br />

Lʹesprit <strong>de</strong> votre œuvre, comme celui <strong>de</strong> la communauté, ne pourront quʹy gagner.<br />

Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> bien instamment, cher Monsieur lʹabbé, ainsi quʹà nos frères, <strong>de</strong> ne<br />

pas mʹoublier dans vos prières. Je suis dans la retraite, il est vrai, et plus libre <strong>de</strong> soins dé‐<br />

taillés que <strong>de</strong> coutume. Mais je suis privé <strong>de</strong>s appuis et édifications <strong>de</strong> la vie commune et,<br />

pour ceux qui sont accoutumés à ce soutien, cʹest un grand secours <strong>de</strong> moins. Je dois dʹail‐<br />

leurs, par cela même que je travaille moins extérieurement, mieux et plus faire dans la vie<br />

dʹoraison et dʹunion à Dieu; cʹest une gran<strong>de</strong> chose et que lʹhomme ne peut faire seul.<br />

Veuillez donc <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r au Seigneur quʹil daigne mʹassister, afin que je correspon<strong>de</strong> à ses<br />

vues adorables.<br />

Je suis, cher Monsieur lʹabbé, <strong>avec</strong> une tendre affection,<br />

Votre tout dévoué ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je recomman<strong>de</strong> bien instamment à votre chère communauté une sainte âme<br />

que Dieu vient <strong>de</strong> rappeler à Lui. Nous perdons en elle 251 notre amie la plus dévouée et la<br />

protectrice la plus affectionnée à notre maison dʹorphelins. Je vous prie <strong>de</strong> vous unir tous à<br />

nous; je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> aussi, cher Monsieur lʹabbé, dʹoffrir pour elle le Saint Sacrifice.<br />

413 à M. Caille<br />

Dieu est le vrai supérieur <strong>de</strong> la Communauté. Besoins spirituels <strong>de</strong> la région <strong>de</strong> Cannes, où MLP. nʹa pas choisi<br />

<strong>de</strong> venir: il y est <strong>de</strong> par la volonté <strong>de</strong> Dieu. Prières pour M me Taillandier. Nouvelles et recommandations pour les<br />

frères.<br />

Cannes, 8 novembre 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai quitté <strong>de</strong> nouveau pour quelque temps notre chère Communauté, les mé<strong>de</strong>cins<br />

ayant jugé définitivement que cette nouvelle absence était nécessaire pour confirmer le<br />

mieux obtenu dans ma santé; jusquʹau <strong>de</strong>rnier moment, jʹai espéré quʹil me serait accordé<br />

<strong>de</strong> faire au moins pendant un mois lʹessai <strong>de</strong> mes forces, mais on sʹy est absolument oppo‐<br />

sé et lʹon mʹa contraint <strong>de</strong> profiter <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rniers jours <strong>de</strong> beau temps pour faire le voyage. Si<br />

mon départ nʹeût été si précipité, jʹaurais bien vivement souhaité <strong>de</strong> tenir ma promesse en<br />

allant dire adieu à votre chère petite communauté et à nos ff. dʹArras, mais cette visite sera<br />

différée jusquʹà mon retour. Heureusement, <strong>de</strong>rrière le Supérieur si frêle <strong>de</strong> corps et<br />

dʹâme, qui semble conduire la petite famille et qui ne peut veiller même <strong>de</strong> tout près sur<br />

251 La mort <strong>de</strong> Madame René Taillandier ne fut pas seulement un <strong>de</strong>uil pour la petite famille <strong>de</strong>s Frères <strong>de</strong> St-Vincent-<strong>de</strong>-Paul, le<br />

mon<strong>de</strong> charitable tout entier ressentit cette perte et les Conférences <strong>de</strong> Paris considérèrent comme un <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> reconnaissance <strong>de</strong><br />

s'unir pour prier à son intention.<br />

524


elle, il en est un autre dont la divine présence ne lui fait jamais défaut, qui ne la perd point<br />

<strong>de</strong> vue et qui veille <strong>avec</strong> une tendre sollicitu<strong>de</strong> à tous ses besoins temporels et spirituels. Je<br />

lʹinvoquerai sans cesse pour vous tous durant mon absence, surtout afin que sa puissante<br />

assistance vous soutienne, vous fortifie et donne succès à vos œuvres.<br />

Au moment <strong>de</strong> mon départ, notre jeune f. Allard allait bien; M. Myionnet mʹécrit<br />

que, <strong>de</strong>puis, il a eu quelques jours dʹennui, mais quʹil a su le surmonter et marche mainte‐<br />

nant <strong>avec</strong> fermeté; jʹespère que le Seigneur ménagera ses épreuves ou daignera lʹai<strong>de</strong>r à les<br />

porter; je crois quʹen sʹéclairant <strong>de</strong> plus en plus, il se fortifiera dans sa vocation.<br />

Jʹai confiance aussi que, <strong>de</strong> son côté, notre f. Guillot remplira bien sa mission près<br />

<strong>de</strong> vous; cʹest un sujet dʹesprit déjà mûr, sur la raison duquel on peut compter, qui agit en<br />

conscience et par le pur motif <strong>de</strong> la gloire <strong>de</strong> Dieu; je pense quʹil peut vous être bien utile,<br />

mais il faut le maintenir dans lʹhumilité, dans la soumission et le détachement <strong>de</strong> lui‐<br />

même; cʹest ainsi seulement que nous serons dans notre voie et maniables à la volonté du<br />

Seigneur.<br />

Je joins ici pour lui une lettre <strong>de</strong> sa sœur, et <strong>de</strong>ux mots pour lui expliquer ce quʹil a à<br />

faire.<br />

Je voudrais écrire à notre cher f. Marcaire, mais pour ne pas différer plus longtemps<br />

lʹenvoi <strong>de</strong> cette lettre, jʹajourne à prochaine occasion la satisfaction <strong>de</strong> mʹentretenir <strong>avec</strong><br />

vos chers ff. dʹAmiens. Assurez le jeune Defosse <strong>de</strong> mes sentiments dʹaffection; jʹai tou‐<br />

jours les yeux sur lui, et jʹespère quʹaprès sʹêtre bien disposé et confirmé dans ses inten‐<br />

tions, il prendra place parmi nous.<br />

Le pays où je suis diffère peu <strong>de</strong> celui où jʹétais lʹan <strong>de</strong>rnier; je ne lʹai point choisi,<br />

cʹest une raison pour moi <strong>de</strong> penser que jʹy suis par la volonté <strong>de</strong> Dieu. Il y aurait ici beau‐<br />

coup <strong>de</strong> bien à faire, car la ville est minée par les Anglais que la beauté du climat y attire,<br />

et qui payent lʹhospitalité que leur donne le pays en faisant tout pour lui ravir sa foi. Nous<br />

allons examiner sʹil est possible dʹy établir une Conférence <strong>de</strong> S t ‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul; priez,<br />

mon bon ami, et <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z aussi les prières <strong>de</strong> nos frères pour que le divin Seigneur dai‐<br />

gne bénir nos efforts, sʹils doivent concourir à sa gloire.<br />

Adieu, mon bon ami, la distance qui nous sépare nʹest rien pour <strong>de</strong>s cœurs chré‐<br />

tiens, car ils savent se retrouver dans le Cœur <strong>de</strong> Dieu; je vais tâcher <strong>de</strong> mʹy tenir bien ha‐<br />

bituellement pour que vous soyez sûr <strong>de</strong> mʹy rencontrer. Je vous y embrasse en ce moment<br />

<strong>de</strong> cœur et bien tendrement.<br />

Votre ami et Père en N.S. et en M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Offrez mes respects à MM. <strong>de</strong> Brandt, Mangot et Cacheleux.<br />

Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> bien instamment <strong>de</strong> prier <strong>avec</strong> nos frères pour M me Taillandier,<br />

lʹamie la plus dévouée <strong>de</strong> notre petite Communauté; le Seigneur vient <strong>de</strong> la rappeler à Lui<br />

pleine <strong>de</strong> mérites et <strong>de</strong> bonnes œuvres. Je désire que vous <strong>de</strong>mandiez la S te Messe et y as‐<br />

sistiez <strong>avec</strong> nos frères. La reconnaissance nous impose envers cette sainte dame <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s<br />

obligations.<br />

414 à M. Guillot<br />

Que le frère Guillot puisse être déchargé dʹune affaire <strong>de</strong> famille. Dévotion mariale. Respect <strong>de</strong> lʹautorité et vie<br />

fraternelle.<br />

525


Cannes, 8 novembre 1856<br />

Cher enfant en N.S.,<br />

Je vous envoie une lettre <strong>de</strong> votre sœur qui consent à lʹarrangement que vous lui<br />

avez proposé.<br />

Vous voudrez bien envoyer, par un mot <strong>de</strong> lettre, à notre f. Paillé, que je vais char‐<br />

ger <strong>de</strong> suivre cette petite affaire, le nom du pays quʹhabite votre sœur et le nom du notaire<br />

(M. Pinson, je crois). Si vous écrivez à votre sœur, vous lui direz quʹil vous sera plus com‐<br />

mo<strong>de</strong> quʹelle vous donne bientôt, et ensemble, les 500f, parce que, autant que possible, la<br />

Communauté désire que les frères, après leurs vœux, nʹaient pas à sʹoccuper dʹaffaires.<br />

Je pense, cher enfant, que vous êtes maintenant bien accoutumé à votre nouvelle<br />

position et que vous vous attachez à faire au jour le jour tout ce que le Seigneur <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong> vous. Cherchez souvent au <strong>de</strong>dans <strong>de</strong> vous ce quʹIl vous dit et, selon la parole <strong>de</strong> la T.<br />

Ste Vierge Marie, notre Mère, faites tout ce quʹIl vous dira. Soyez défiant <strong>de</strong> vous‐même et<br />

gran<strong>de</strong>ment confiant en son divin appui; vivez en soumission à lʹégard <strong>de</strong> notre p. Caille<br />

et en tendre fraternité <strong>avec</strong> le f. Marcaire, qui reste posé après M. Caille dans la maison et<br />

auquel vous <strong>de</strong>vez une fraternelle déférence, comme un frère plus jeune à son frère aîné;<br />

en communauté, ce nʹest point lʹâge qui règle les positions et les offices, ce ne sont pas<br />

même les talents ou capacités, cʹest la décision <strong>de</strong>s Supérieurs que Dieu inspire et qui gou‐<br />

vernent tout selon ses vues.<br />

Adieu, bien cher ami, <strong>de</strong>meurez dans la charité <strong>de</strong> notre divin Sauveur et tout sera<br />

bien pour vous; aimez aussi bien tendrement la T. Ste Vierge, notre protectrice et notre<br />

Mère; si vous avez pour elle un esprit tout filial, vous sentirez son amour maternel veiller<br />

à tout pour vous et vous entourer dʹamour et <strong>de</strong> tendres sollicitu<strong>de</strong>s.<br />

Je suis, en J. et M., votre dévoué Père et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Embrassez mon f. Marcaire et aussi notre petit Defosse, sʹil est toujours bon enfant.<br />

415 à M. Paillé<br />

Conseils au frère Supérieur <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Nazareth: ʺle bien se fera par vous, parce que le Seigneur lui‐même le<br />

fera en vousʺ. Description <strong>de</strong> Cannes, ses ressources spirituelles, la propagan<strong>de</strong> protestante. Il sʹy plaît parce que<br />

la Provi<strong>de</strong>nce lʹy a envoyé. Les <strong>de</strong>ux clochers <strong>de</strong> Vaugirard et <strong>de</strong> Grenelle. Prédilection pour la maison <strong>de</strong> Naza‐<br />

reth.<br />

Cannes, 8 novembre 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai déjà donné <strong>de</strong> nos nouvelles aux ff. <strong>de</strong> Vaugirard; jʹai écrit aussi à ceux<br />

dʹAmiens et dʹArras; il ne reste que nos bien‐aimés enfants <strong>de</strong> Nazareth qui nʹaient point<br />

reçu un témoignage <strong>de</strong> notre constant souvenir. Je ne veux pas les négliger, car ils me sont<br />

chers entre les autres; cʹest pourquoi, bien cher ami, je vous fais ces quelques lignes, <strong>de</strong> ce<br />

pays où, lʹan <strong>de</strong>rnier, votre charité mʹa entouré <strong>de</strong> tant <strong>de</strong> soins affectueux et mʹa rendu<br />

mon exil aussi supportable que possible. Si jʹavais besoin <strong>de</strong>s circonstances extérieures<br />

pour me rappeler toutes les marques dʹamitié et <strong>de</strong> dévouement chrétien que vous mʹavez<br />

données, la vue <strong>de</strong> lieux, à beaucoup dʹégards semblables aux contrées dʹHyères, renou‐<br />

vellerait mes impressions passées et les ferait revivre; la mer et ses îles, car la ville <strong>de</strong> Can‐<br />

nes a aussi les siennes, les montagnes, les oliviers, les figuiers, le beau soleil, les verdures<br />

perpétuelles me rendraient le souvenir <strong>de</strong> ces promena<strong>de</strong>s quotidiennes où vous parliez<br />

526


très peu, souvent même pas du tout, mais où votre vigilance et vos soins ne me faisaient<br />

jamais défaut. Jʹen prends occasion, mon bon ami, pour vous remercier une fois encore et<br />

pour prier le Dieu <strong>de</strong> charité et <strong>de</strong> tendre dilection <strong>de</strong> récompenser ces actes généreux et<br />

bons quʹIl avait lui‐même inspirés. Je remarque que cʹest après cette épreuve que le Sei‐<br />

gneur a jugé bon <strong>de</strong> vous préposer à la conduite <strong>de</strong> notre chère maison <strong>de</strong> Nazareth.<br />

Quand autrefois le divin Maître mit S t Pierre à la tête <strong>de</strong> son Eglise, il lui <strong>de</strong>manda par<br />

trois fois: Pierre, mʹaimez‐vous? Il semble quʹIl ait voulu agir ainsi <strong>avec</strong> vous avant <strong>de</strong><br />

vous confier une <strong>de</strong> ses œuvres bien chères dans lʹordre <strong>de</strong> la charité et <strong>de</strong> la miséricor<strong>de</strong>.<br />

Il mʹa confié à vos soins, mala<strong>de</strong>, impatient, souvent peu reconnaissant <strong>de</strong> votre tendre af‐<br />

fection, et bien sûr, après vous avoir ainsi éprouvé, que vous auriez les longanimités et<br />

con<strong>de</strong>scendances si essentielles à tout gouvernement chrétien, Il vous a chargé <strong>de</strong> veiller<br />

sur vos frères, <strong>de</strong> les aimer, <strong>de</strong> prier, <strong>de</strong> travailler et <strong>de</strong> vous dévouer pour eux. Aussi, très<br />

cher ami, je suis, <strong>de</strong> ce côté, bien tranquille; je sais vos défauts naturels, vos insuffisances à<br />

beaucoup dʹégards pour porter une charge <strong>de</strong> conduite et <strong>de</strong> direction; mais le Seigneur a<br />

paru visiblement vous avoir choisi, il couvrira toutes vos faiblesses, Il suppléera à toutes<br />

vos impuissances, le bien se fera par vous, parce que le Seigneur lui‐même le fera en vous.<br />

Trouvez dans cette pensée, cher ami, votre assurance et votre consolation et dites <strong>avec</strong><br />

lʹapôtre: Je ne suis que faiblesse et que misère, mais je puis tout en Celui qui me fortifie 252 .<br />

Vous voulez, jʹen suis sûr, cher ami, avoir quelques mots <strong>de</strong> détail sur notre situa‐<br />

tion, sur le pays où nous sommes, sur la manière dont nous y sommes établis, sur les re‐<br />

marques quʹau premier aperçu nous aurions pu faire, et les conjectures que nous pour‐<br />

rions former. Nous nʹaurions, en ensemble, que <strong>de</strong>s réponses favorables à faire à ces diver‐<br />

ses questions. Je trouve Cannes moins aimable dʹaspect quʹHyères, les campagnes mʹy<br />

semblent moins riantes, moins accessibles, moins variées dans leurs sites, mais néanmoins,<br />

cʹest un admirable et bien beau pays; le climat y semble presque constamment doux, lʹair<br />

est pur, le soleil radieux, la mer est magnifique; que peut‐on souhaiter <strong>de</strong> mieux? Tout cela<br />

ne vaut pas, pour moi, notre enclos <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette et la vue <strong>de</strong> nos <strong>de</strong>ux clochers <strong>de</strong><br />

Vaugirard et <strong>de</strong> Grenelle; mais je me plais ici parce que Dieu mʹy a envoyé, et je préfère<br />

Cannes à tout autre lieu parce que je ne lʹai pas choisi et quʹon me lʹa désigné.<br />

Nous avons un petit appartement, à peu près comme celui dʹHyères, un peu mieux<br />

disposé et mieux situé, pour un prix à peu près égal; nous y trouvons facilement tout ce<br />

qui nous est nécessaire, les prévenances les plus obligeantes, préparées par les recomman‐<br />

dations du bon abbé Taillandier, ont aplani pour nous toutes les difficultés <strong>de</strong> lʹinexpé‐<br />

rience <strong>de</strong>s gens et <strong>de</strong>s lieux; Dieu nous voulait ici, Il y a fait notre place, que sa bonté misé‐<br />

ricordieuse en soit mille fois bénie.<br />

Nous avons spirituellement aussi, et cʹest ce que jʹaurais dû vous dire tout dʹabord,<br />

toutes les commodités possibles. Nous nʹavons pas ici lʹadmirable église dʹHyères, les<br />

hommes éminents que nous y avons trouvés dans le clergé; mais le curé et ses trois vicai‐<br />

res semblent être <strong>de</strong>s hommes dʹesprit soli<strong>de</strong>, pieux et dévoués. Lʹéglise haute, malheureu‐<br />

sement très loin perchée, est gran<strong>de</strong> et on y officie bien; nous avons en outre, dans la ville<br />

basse, <strong>de</strong>ux chapelles où se dit tous les jours la messe, et dans lʹune <strong>de</strong>squelles se conserve<br />

le S t Sacrement. Comme je suis moins souffrant que lʹan <strong>de</strong>rnier, je puis mieux jouir <strong>de</strong> ces<br />

avantages et jʹespère y refaire un peu mes forces spirituelles, si le Seigneur daigne mʹattirer<br />

un peu à Lui; je mʹen sens aussi le sincère désir.<br />

252 Cf. Ph 4, 13.<br />

527


Ce pays est fort travaillé par le protestantisme. Les Anglais, attirés par la beauté du<br />

climat et <strong>de</strong>s sites, abon<strong>de</strong>nt ici et possè<strong>de</strong>nt tous les châteaux et les maisons <strong>de</strong> plaisance;<br />

plusieurs dʹentre eux sont ar<strong>de</strong>nts en prosélytisme, ils ont bâti trois temples ou chapelles et<br />

y appellent <strong>de</strong>s prédicants renommés parmi eux; ils ont <strong>de</strong>s femmes gagées pour attirer les<br />

pauvres et les paysans; elles se portent partout où est la gêne et la souffrance et font dʹin‐<br />

croyables sacrifices pour acheter <strong>de</strong>s âmes à prix dʹor; jusquʹici, leurs succès décisifs sont<br />

imperceptibles, mais toutes ces menées ébranlent la foi en bien <strong>de</strong>s familles, jettent le<br />

doute et la défiance et préparent, ou <strong>de</strong>s défections, ou une indifférence presque aussi fu‐<br />

neste. Il y a peu <strong>de</strong> résistance parmi les catholiques, la ferveur est presque nulle chez les<br />

hommes, quelques femmes, comme partout, sont plus dévouées et défen<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> leur<br />

mieux le terrain. Une Conférence <strong>de</strong> S t ‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul pourrait, je le crois, concentrer et<br />

affermir les quelques hommes <strong>de</strong> bonne volonté, je ne sais si nous pourrons lʹétablir;<br />

comme on ne fait rien sans prières, dans lʹordre spirituel surtout, je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> instamment<br />

celles <strong>de</strong> votre petite communauté, celles <strong>de</strong> mon bon abbé Hello surtout, que lʹoblation <strong>de</strong><br />

la Victime sainte rend plus puissant que nous. Jʹécrirai successivement à tous mes bien‐<br />

aimés enfants <strong>de</strong> votre maison qui mʹest si particulièrement chère, puisquʹelle me rappelle<br />

les œuvres auxquelles jʹai donné le plus dʹaffection: la S te ‐Famille, les pauvres vieillards et<br />

nos enfants apprentis. Rappelez‐moi au souvenir, et recomman<strong>de</strong>z‐moi aux prières <strong>de</strong> nos<br />

bons vieillards; je les ai peu vus durant mon séjour à Vaugirard, je <strong>de</strong>vais gar<strong>de</strong>r ma posi‐<br />

tion <strong>de</strong> mala<strong>de</strong> et ménager mes forces, mais, si Dieu mʹagrée encore pour mon service, je<br />

reviendrai parmi eux et je tâcherai <strong>de</strong> leur montrer que je les aime toujours.<br />

Mille tendres affections à nos bien bons amis, M. Decaux, à qui jʹécrirai prochaine‐<br />

ment et qui sait bien mon cordial dévouement pour lui; mille bons souvenirs aussi à tous<br />

les autres, aux membres surtout <strong>de</strong> la Commission <strong>de</strong> Nazareth qui se montrent si bien‐<br />

veillants et si charitables pour nous; chargez, je vous prie, le bon M. Leblanc <strong>de</strong> nos res‐<br />

pects pour notre r.p. Milleriot et <strong>de</strong> mes sentiments dʹaffection pour la S te ‐Famille; je suis<br />

tranquille en la sachant aux mains du bon Père et <strong>de</strong> notre ami, M. Leblanc.<br />

Je mʹaperçois que je ne vous ai rien dit <strong>de</strong> ma santé; elle nʹest pas plus mauvaise<br />

quʹà mon départ; le temps, qui est ici admirable, contribue à la soutenir; lʹair <strong>de</strong> la mer,<br />

quoique moins vif, ce me semble, quʹà Hyères, mʹirrite toujours la poitrine, je toussote un<br />

peu le matin à mon lever, mais je pense que ce malaise disparaîtra après que je serai bien<br />

acclimaté. Notre jeune frère, Ernest Vasseur, va bien et se montre très obligeant pour moi,<br />

il me donne toutes les assistances possibles; il ne sʹennuie point; son temps est réglé, pres‐<br />

que comme à Vaugirard, entre le travail et les exercices <strong>de</strong> piété quʹil fait très fidèlement; le<br />

soir, je lui fais un peu dʹinstruction, jʹespère quʹil se soutiendra bien. Jʹai voulu, par ces dé‐<br />

tails bien minutieux, tranquilliser votre sollicitu<strong>de</strong> que je sais pleine <strong>de</strong> tendresse chré‐<br />

tienne pour moi; dites‐les aux affectionnés frères qui vous entourent et qui sont mille fois<br />

trop bons pour mon indignité, je les paie en les aimant et en priant ar<strong>de</strong>mment pour eux;<br />

daigne le Seigneur les bénir et les ai<strong>de</strong>r dans leurs travaux. Embrassez‐les pour moi, mon<br />

bon abbé Hello, mon fils Maurice [Maignen], mon gros Emile [Beauvais] et mon petit <strong>Jean</strong>‐<br />

Marie [Tourniquet].<br />

Adieu encore, cher bon ami; croyez au profond dévouement en J. et M. <strong>de</strong> votre af‐<br />

fectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

528


Je vais écrire à notre bon p. Beaussier; jʹespère quʹil va mieux. Je compte beaucoup<br />

sur ses soins pour soutenir spirituellement notre chère famille.<br />

416 à M. Maignen<br />

Le frère <strong>de</strong> M. Maignen, Louis, passe son doctorat es‐lettres à la Sorbonne. Sciences humaines et science du salut.<br />

MLP. est très affecté par la disparition <strong>de</strong> M me Taillandier. Il faut que lʹInstitut conserve <strong>de</strong>s souvenirs concrets:<br />

ʺils sont essentiellement dans la tendre charité qui est la vie même <strong>de</strong> la Communautéʺ.<br />

Cannes, 10 novembre 1856<br />

Très cher enfant en N.S.,<br />

Je viens, comme vous le désiriez, dʹécrire au r.p. Lavigne; sʹil a la bonté <strong>de</strong> me ré‐<br />

pondre <strong>de</strong> Toulouse, je ne manquerai pas <strong>de</strong> vous en faire part.<br />

Je prierai certainement pour votre frère à lʹoccasion <strong>de</strong> son examen, et je <strong>de</strong>man<strong>de</strong>‐<br />

rai surtout à Dieu quʹ<strong>avec</strong> la science humaine, Il daigne lui donner la science du salut. Si<br />

scires donum Dei253 . Que ne comprend‐il cette parole du divin Seigneur à la Samaritaine! Il<br />

verrait combien est admirable, haute et profon<strong>de</strong> la science que le bon Maître enseigne aux<br />

humbles et aux petits. Et nous, cher enfant, ne nous lassons jamais <strong>de</strong> remercier notre Père<br />

céleste qui nous a fait ce don si gratuitement et <strong>avec</strong> si peu <strong>de</strong> mérites <strong>de</strong> notre part; gar‐<br />

dons‐le fidèlement, accroissons‐le par la prière, par le dévouement et par la charité.<br />

Jʹai été heureux <strong>de</strong> recevoir quelques mots <strong>de</strong> souvenir <strong>de</strong> vous; il ne mʹest encore<br />

rien arrivé <strong>de</strong> notre chère famille, sinon quelques lignes du f. Myionnet mʹannonçant la<br />

triste nouvelle <strong>de</strong> la mort <strong>de</strong> notre amie, Mme Taillandier.<br />

Quelle âme, quelle piété, quelle douce, indulgente et généreuse charité! Que le bon<br />

Dieu a été bon <strong>de</strong> préposer cet ange à la gar<strong>de</strong> <strong>de</strong> notre œuvre naissante! Et maintenant<br />

quʹIl lʹa rappelée à Lui, suivons‐la <strong>de</strong>s yeux au Ciel, où assurément elle continuera <strong>de</strong> veil‐<br />

ler sur nous. Jʹai été, et je reste profondément affligé <strong>de</strong> cette perte; lʹespérance chrétienne<br />

me console sans doute, mais la nature gémit <strong>de</strong> cette douloureuse séparation. Personne ne<br />

mʹavait jamais montré une si affectueuse, une si indulgente sympathie pour nos œuvres;<br />

jʹy voyais un signe <strong>de</strong> la protection <strong>de</strong> Dieu et un appui que sa grâce nous avait suscité. Je<br />

ne me contriste point que ce secours nous soit ôté, car le cœur <strong>de</strong> Père qui nous lʹavait<br />

donné reste toujours ouvert pour nous, mais jʹéprouve une profon<strong>de</strong> peine en pensant quʹà<br />

mon retour je ne retrouverai plus cette amie si dévouée, si tendre et si attentive dans nos<br />

peines, dans nos besoins, comme dans nos satisfactions et dans nos joies. Depuis la perte<br />

<strong>de</strong> ma mère, je nʹen avais point fait dʹautre pareille; que le saint nom <strong>de</strong> Dieu soit béni, et<br />

puisse‐t‐Il nous rendre au Ciel ce quʹIl nous a repris pour un temps sur la terre. Je suis bien<br />

consolé <strong>de</strong> ce que vous me dites sur lʹempressement que tous ont montré pour lʹaccompa‐<br />

gner à son convoi; je fais dire ici <strong>de</strong>s messes pour me mettre en union <strong>avec</strong> vous et donner<br />

à notre amie ce <strong>de</strong>rnier témoignage dʹaffection et <strong>de</strong> reconnaissance. Je désire aussi que<br />

son nom soit inscrit dans la chapelle <strong>de</strong> N. D. <strong>de</strong> la Salette quand elle sera faite; il me sem‐<br />

ble quʹon y <strong>de</strong>vrait mettre <strong>de</strong>ux tableaux: lʹun pour les frères décédés, lʹautre pour les bien‐<br />

faiteurs aussi décédés; les uns et les autres, en effet, concourent ensemble au soutien <strong>de</strong><br />

nos œuvres, les uns au <strong>de</strong>dans, les autres au <strong>de</strong>hors; il faut que notre petite famille, plus<br />

253 Jn 4, 10.<br />

529


quʹaucune autre, ait <strong>de</strong>s souvenirs, parce quʹils sont essentiellement dans la tendre charité<br />

qui est la vie même <strong>de</strong> notre Communauté.<br />

Adieu, cher enfant; je vous parlerai un peu plus tard, si cela vous intéresse, du pays<br />

où je suis; je ne sais si je pourrai faire activement quelque chose; jʹespère au moins que, par<br />

mes prières et mes bons désirs, je payerai lʹhospitalité quʹon mʹy a donnée. Je vous em‐<br />

brasse tendrement ainsi que tous nos frères et suis, en J. et M.,<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

417 à M. <strong>de</strong> Lauriston<br />

Sollicitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> MLP. pour la vocation <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Lauriston. La vie commune développe les aptitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> chacun. ʺLa<br />

première œuvre et lʹessentielle affaire chez nous, cʹest dʹaimer Dieu et <strong>de</strong> le glorifier dans son intérieurʺ. Sans<br />

cesse, se redonner, se donner plus pleinement, sans jamais se reprendre, telle est la joie du don total.<br />

Cannes, 12 novembre 1856<br />

Très cher Monsieur et frère en N.S.,<br />

Votre bonne épître mʹest venue trouver dans le Midi où on mʹa envoyé pour la se‐<br />

con<strong>de</strong> et, je lʹespère, pour la <strong>de</strong>rnière fois. Je regrettais <strong>de</strong> nʹavoir point eu <strong>de</strong>puis long‐<br />

temps déjà, directement <strong>de</strong> vos nouvelles; mais je savais, par nos ff. dʹArras, que vous al‐<br />

liez bien et que votre cœur était toujours en union <strong>avec</strong> nous; jʹétais donc en paix et jʹatten‐<br />

dais lʹheure du Seigneur, bien assuré quʹelle ne saurait tar<strong>de</strong>r beaucoup à venir. Cʹest <strong>avec</strong><br />

une bien gran<strong>de</strong> joie, cher Monsieur, que jʹai lu les détails si touchants que vous me don‐<br />

nez sur vos mouvements intérieurs et sur lʹaction, si visible en vous, <strong>de</strong> la grâce et <strong>de</strong>s mi‐<br />

séricordieuses bontés du Seigneur. Il vous avait attiré à Lui dès le jeune âge, mais, pour<br />

<strong>de</strong>s raisons que sa sagesse divine connaît, Il sʹétait borné alors à vous appeler et à vous<br />

marquer du sceau <strong>de</strong> son élection, se réservant <strong>de</strong> vous reprendre plus tard pour son ser‐<br />

vice; il était dans ses vues peut‐être que lʹexpérience <strong>de</strong>s hommes et <strong>de</strong>s choses mûrît vos<br />

facultés, affermît votre volonté; Il voulait aussi, sans doute, par une longue attente, vous<br />

mieux faire apprécier lʹimmense bienfait <strong>de</strong> la vocation religieuse. Vous aurez correspon‐<br />

du, jʹen suis convaincu, à ses <strong>de</strong>sseins. Aujourdʹhui, en effet, bien assuré <strong>de</strong> la vanité <strong>de</strong>s<br />

choses du mon<strong>de</strong>, bien certain que la paix et le repos <strong>de</strong> notre cœur ne sont quʹen Dieu,<br />

cʹest <strong>de</strong> plein choix et sans hésiter que vous embrassez la meilleure part, ne voulant plus<br />

dʹautre bien ni dʹautre héritage. Je dis sans hésiter, car je ne me préoccupe pas <strong>de</strong>s quel‐<br />

ques moments <strong>de</strong> retour <strong>de</strong> la faiblesse humaine qui, ne voyant que son impuissance, en‐<br />

tre en doute et sent lʹeau fléchir sous ses pieds; cʹest Dieu encore qui permet cette petite<br />

épreuve, mais pour vous tendre amoureusement sa main, en disant: Homme <strong>de</strong> peu <strong>de</strong><br />

foi, pourquoi avez‐vous douté? 254 Oh, oui, cher Monsieur, vous êtes présentement dans un<br />

moment bien précieux pour vous, car la grâce vous régit, lʹappel intérieur vous suscite, et<br />

la parole <strong>de</strong> lʹEpoux bien‐aimé vous encourage et vous attire: Audi, filia, et vi<strong>de</strong> et inclina au‐<br />

rem tuam, et obliviscere populum tuum et domum patris tui; et concupiscet Rex <strong>de</strong>corum tuum,<br />

quoniam ipse est Dominus Deus tuus255 . Quel tendre appel et quʹil est doux <strong>de</strong> lʹentendre au<br />

fond <strong>de</strong> son cœur! Comme bientôt vous lui direz à ce bon Maître, cher Monsieur: ʺQue<br />

254<br />

Mt 8, 26.<br />

255<br />

Ps 44, 11-12. "Ecoute, ma fille, vois et tends l'oreille…"<br />

530


cʹest bien tard, ô mon Dieu, que je Vous ai connu; que cʹest bien tard que je Vous ai aimé et<br />

que je me suis donné à Vous!ʺ 256<br />

Aussi, je crois que vous ne <strong>de</strong>vrez point faire <strong>de</strong> délai par votre faute; quand votre<br />

bon et sage directeur, éclairé par le bon Dieu, aura donné le consentement définitif, que sa<br />

réponse si bienveillante nous fait pressentir, vous <strong>de</strong>vrez, ce me semble, mettre la main<br />

courageusement à lʹœuvre et tout préparer pour accomplir les <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> Dieu à votre<br />

égard. Je ne relève point ce que vous me dites sur cette crainte que la nature vous suggère<br />

quelquefois ou <strong>de</strong> ne pas convenir aux œuvres, ou <strong>de</strong> ne pas persévérer dans votre voca‐<br />

tion; vous conviendrez aux œuvres dans un milieu tout favorable pour vous y soutenir et<br />

y fortifier toutes vos facultés, puisque vous y conveniez déjà malgré votre isolement et les<br />

conditions désavantageuses où vous vous trouvez; dʹailleurs, en règle générale, on sʹac‐<br />

commo<strong>de</strong> en communauté <strong>de</strong> tout homme simple et <strong>de</strong> droite volonté qui se donne fran‐<br />

chement et du fond du cœur; et, <strong>avec</strong> vingt fois moins <strong>de</strong> facultés et <strong>de</strong> talents que vous<br />

nʹen avez reçus <strong>de</strong> Dieu, on tire encore grand parti <strong>de</strong> lui, parce que la vie commune, met‐<br />

tant chacun en plein développement <strong>de</strong> tous ses moyens, double ou plutôt centuple sa<br />

puissance dʹaction.<br />

Enfin, la première œuvre et lʹessentielle affaire chez nous, cʹest dʹaimer Dieu et <strong>de</strong> le<br />

glorifier dans son intérieur; vous ne serez pas, sous ce rapport, dépourvu <strong>de</strong> ressources,<br />

puisque vous avez un cœur aimant, incliné à la piété et qui se complaît à tous les exercices<br />

<strong>de</strong> religion. Cʹest répondre aussi à vos craintes touchant votre persévérance; à vrai dire, en<br />

embrassant définitivement le service <strong>de</strong> Dieu, vous ne ferez que ce que vous faites aujour‐<br />

dʹhui, vous ne changerez pas votre condition, vous la simplifierez seulement et la rendrez<br />

plus régulière en la débarrassant <strong>de</strong> toute entrave, vous la rendrez plus sainte en y ajou‐<br />

tant le mérite <strong>de</strong> lʹoffran<strong>de</strong> absolue et <strong>de</strong> la consécration <strong>de</strong> tout vous‐même à Dieu. Nʹest‐<br />

ce pas un grand attrait, en effet, pour une âme généreuse et tendre, que <strong>de</strong> se donner sans<br />

mesure, et à qui se livrer ainsi tout entier, sinon à Celui qui est tout amour, toute bonté,<br />

toute sainteté, toute perfection. Cʹest une si douce chose que <strong>de</strong> se perdre ainsi dans<br />

lʹamour infini quʹaprès sʹêtre donné, on veut se redonner encore, sans se reprendre, mais<br />

en se donnant plus pleinement. Cʹest pour satisfaire à ce besoin que tous les ans, à la fête<br />

<strong>de</strong> la Présentation, nous faisons le renouvellement <strong>de</strong> nos vœux, nous retrempant ainsi<br />

dans le bonheur <strong>de</strong> notre première consécration.<br />

Ne prenez point, très cher Monsieur, tout le contenu <strong>de</strong> cette lettre pour une exhor‐<br />

tation ou une incitation dont je croirais que vous pourriez avoir besoin; cʹest une simple ef‐<br />

fusion <strong>de</strong> mes convictions et sentiments à votre égard, cʹest une assurance que je vous<br />

donne parce que je lʹai puisée moi‐même en conversant <strong>avec</strong> vous, en étudiant les voies du<br />

Seigneur en ce qui vous touche; cʹest enfin un cri <strong>de</strong> mon cœur qui dit: Heureux ceux que<br />

Dieu appelle; puisque vous enten<strong>de</strong>z sa voix, nʹhésitez pas et répon<strong>de</strong>z: me voici.<br />

Jʹavais espéré que mon départ pour le Midi nʹaurait pas lieu, ou au moins serait as‐<br />

sez différé pour que je fusse à Vaugirard afin <strong>de</strong> vous recevoir à votre arrivée, mais il en<br />

sera sans doute autrement; nos frères vous accueilleront à ma place et, plus tard, ce sera<br />

vous‐même qui me recevrez à mon retour. Jusque‐là, tenons‐nous bien unis dans le Cœur<br />

du divin Seigneur; cʹest un doux moyen <strong>de</strong> se consoler <strong>de</strong> la séparation extérieure et dʹat‐<br />

tendre en paix le moment où lʹon pourra se retrouver, travailler et prier ensemble.<br />

256 Cf. supra, lettre 400.<br />

531


Adieu, bien cher Monsieur et frère en N.S.; nos frères prient pour vous fidèlement à<br />

Vaugirard, le p. Louis 257 , en particulier, en fait son affaire, je lʹen ai chargé, vous pouvez<br />

compter sur son exactitu<strong>de</strong>, et nous ici, dans notre exil, nous pensons constamment à vous.<br />

Assurez notre cher M. Halluin et tous nos frères <strong>de</strong> ma tendre affection.<br />

Je vous embrasse <strong>avec</strong> eux bien cordialement.<br />

Votre ami et frère en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Vous aurez appris la mort <strong>de</strong> la sainte mère <strong>de</strong> notre bon abbé Taillandier; je la<br />

recomman<strong>de</strong> à vos prières.<br />

418 à M. Carment<br />

Favoriser lʹesprit <strong>de</strong> famille, élément essentiel <strong>de</strong> notre vie commune. Invitation à un travail dʹascèse persévérant<br />

pour dominer son impulsivité et son irascibilité. Fête dʹun frère: souhaits et communion sont <strong>de</strong>s usages à bien<br />

établir.<br />

Cannes, 13 novembre 1856<br />

Cher enfant en N.S.,<br />

Le petit almanach <strong>de</strong> M lle Payen, qui se trouve ici sur ma table et qui me sert <strong>de</strong> ca‐<br />

lendrier, mʹavertit que cʹest après‐<strong>de</strong>main la S t ‐Eugène, et me rappelle quʹà Vaugirard nous<br />

avions lʹhabitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> vous embrasser ce jour‐là et <strong>de</strong> beaucoup prier pour vous. Mes bras<br />

ne sont pas assez longs pour vous atteindre, car plus <strong>de</strong> 300 lieues nous séparent et les<br />

puissances dʹaction <strong>de</strong> lʹhomme ne vont pas jusque là; mais il me reste au moins le cœur<br />

pour vous aimer et la prière pour appeler sur vous les miséricor<strong>de</strong>s infinies <strong>de</strong> notre Dieu;<br />

cʹest à ce double recours que je me prends pour vous souhaiter votre fête et en bien faire la<br />

commémoration. Je suis bien sûr quʹà Vaugirard, nos frères ne vous auront point non plus<br />

oublié; à Arras aussi, sans doute, on aura eu quelque bon souvenir pour vous. Notre bon<br />

M. Halluin désire sincèrement <strong>avec</strong> nous que les usages établis dans notre petite famille<br />

soient tous adoptés à la maison dʹArras; si celui <strong>de</strong> donner quelque marque dʹaffection aux<br />

frères le jour <strong>de</strong> leur fête et <strong>de</strong> prier pour eux nʹétait pas encore adopté, priez‐le <strong>de</strong> ma part<br />

<strong>de</strong> lʹintroduire, aussi bien que la pieuse pratique <strong>de</strong> leur appliquer une communion, soit le<br />

jour même si cʹest un jour <strong>de</strong> communion, soit à la plus prochaine communion. Tout ce qui<br />

mettra parmi nous lʹesprit <strong>de</strong> famille et resserrera les liens <strong>de</strong> notre sainte fraternité sera<br />

selon le cœur <strong>de</strong> Dieu, car il et le Dieu <strong>de</strong> la tendre dilection et <strong>de</strong> lʹinfinie charité. Puisse‐t‐<br />

Il, ce bon Maître, vous accor<strong>de</strong>r pour votre fête beaucoup <strong>de</strong> dons et <strong>de</strong> grâces puisés en<br />

son divin Cœur et apportés au vôtre, par la main bénie <strong>de</strong> notre tant aimée Mère, la S te<br />

Vierge Marie. Je ne choisis point parmi ces grâces, Il sait mieux que moi celles qui vous<br />

sont surtout nécessaires; cependant, en <strong>de</strong>mandant lʹhumilité, la douceur, le détachement<br />

<strong>de</strong> soi‐même, <strong>de</strong> sa volonté, <strong>de</strong> son esprit propre, on ne risque jamais rien, car tous en ont<br />

besoin, et ce sont surtout les vertus essentielles aux intimes amis du Seigneur Jésus. Je <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong> donc instamment à sa bonté que ses vertus, commencées en vous, sʹaccroissent <strong>de</strong><br />

jour en jour et arrivant à cette heureuse plénitu<strong>de</strong> qui se produira pour vous en paix et sé‐<br />

rénité intérieure, et se répandra pour les autres en actes <strong>de</strong> bonté constante et dʹaimable<br />

mansuétu<strong>de</strong>.<br />

257 Le frère Louis Boursier (1809-1876). Entré en Communauté le 15 avril 1853, il <strong>de</strong>meurera plus <strong>de</strong> vingt ans au service <strong>de</strong>s enfants<br />

<strong>de</strong> l'Orphelinat <strong>de</strong> Vaugirard. Il laisse à ses frères une réputation <strong>de</strong> sainteté. Son union à Dieu et sa prière étaient continuelles,<br />

au point qu'on recourait souvent à lui pour obtenir une grâce: "Faisons <strong>de</strong> notre petit mieux, et le Seigneur fera le reste." (infra,<br />

<strong>Lettre</strong> 1416).<br />

532


Les lettres que je reçois jusquʹici dʹArras me laissent penser que tout va bien pour<br />

notre cher petit Firmin Thuillier et pour vous; continuez, cher enfant, à faire <strong>de</strong> votre<br />

mieux, vous appuyant sur Dieu en tout et sur la S te Vierge, notre Maîtresse souveraine<br />

après son divin Fils. Dites‐moi plus particulièrement, dans votre prochaine lettre, si vous<br />

êtes bien assis maintenant dans vos fonctions, si vous tâchez bien dʹy gar<strong>de</strong>r la paix, en<br />

vous tenant sous les yeux <strong>de</strong> Dieu et en considérant les exemples <strong>de</strong> notre divin modèle J.<br />

C. Revenez souvent en vous‐même, cher enfant, voir si vous êtes dans son esprit: support,<br />

patience, con<strong>de</strong>scendance, ne rompant pas le roseau brisé, ne faisant pas entendre lʹéclat<br />

<strong>de</strong> sa voix dans la place publique, cʹest‐à‐dire évitant toute contestation, cédant dans les<br />

choses indifférentes, soutenant <strong>avec</strong> calme et douceur les choses essentielles. Le bon Dieu<br />

vous a doué dʹun cœur vraiment droit et même dʹun jugement sain; mais, quand le trouble<br />

se met en vous, la raison sʹobscurcit et le sentiment aveugle peut aisément vous égarer. Le<br />

remè<strong>de</strong> à cette faiblesse organique, cʹest <strong>de</strong> mortifier, cʹest‐à‐dire <strong>de</strong> dominer par la volonté<br />

supérieure la partie inférieure et sensible; et <strong>de</strong> réprimer dès lʹabord les premiers mouve‐<br />

ments <strong>de</strong> lʹirascibilité. La prière, la vigilance, lʹexercice <strong>de</strong> votre volonté pour la rendre<br />

maîtresse <strong>de</strong> vos mouvements, enfin lʹappui <strong>de</strong> la douce Reine <strong>de</strong>s Anges et <strong>de</strong>s Saints<br />

vous mettront hors <strong>de</strong> peine, sinon par un redressement absolu, au moins par <strong>de</strong>s amen‐<br />

<strong>de</strong>ments notables et bien encourageants.<br />

Adieu, bien cher enfant; dites à lʹoccasion à vos bons parents que je ne les oublie<br />

point dans mon éloignement, et que je ne manquerai pas <strong>de</strong> leur rendre visite quand jʹirai<br />

vous voir à mon retour.<br />

Je nʹécris point à mon fils Firmin, ni à nos autres frères aujourdʹhui. Soyez mon in‐<br />

terprète près dʹeux et, comme je les aime tendrement, trouvez en vous quelque bonne effu‐<br />

sion <strong>de</strong> prière et <strong>de</strong> charité qui témoigne que vous me représentez en cette occasion.<br />

Croyez vous‐même, cher enfant, à tout le cordial dévouement <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

419 à M. Caille<br />

Formule et cérémonial pour la rénovation <strong>de</strong>s vœux du 21 novembre. Si lʹEsprit dʹhumilité et <strong>de</strong> zèle anime une<br />

communauté, Dieu vient y habiter. MLP. donne <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> sa santé. Apprendre la science <strong>de</strong> la Croix.<br />

Cannes, 17 novembre 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie ci‐joint la petite formule pour la rénovation <strong>de</strong>s vœux au 21 <strong>de</strong> ce<br />

mois, fête <strong>de</strong> la Présentation. La cérémonie se passe ainsi à Vaugirard: après la Ste Messe, le<br />

prêtre, quʹon a invité à cette fin, fait une instruction analogue à la fête et à lʹacte <strong>de</strong> consé‐<br />

cration que vont faire les frères; puis, tous les frères profès sʹagenouillent au pied <strong>de</strong> lʹautel<br />

et tour à tour prononcent, à haute voix, la formule <strong>de</strong> renouvellement, tenant un cierge à la<br />

main. On entonne ensuite le Magnificat quʹon chante en chœur.<br />

Il est ordinaire quʹaprès la cérémonie, les frères prennent une petite réfection très<br />

simple, mais qui se ressente <strong>de</strong> la fête et la continue par une expansion <strong>de</strong> famille.<br />

Nos ff. dʹArras <strong>de</strong>vant faire, comme ceux <strong>de</strong> Vaugirard, cette petite solennité <strong>de</strong> re‐<br />

nouvellement, toute la petite famille sera en union dans cette pieuse consécration; le jeune<br />

533


f. Ernest et moi, nous la ferons <strong>de</strong> notre côté ici, un peu tristes dʹêtre à si gran<strong>de</strong> distance<br />

<strong>de</strong> la famille.<br />

Je pense que votre affaire pour la maison a fait quelques pas en un sens ou en un<br />

autre; je nʹen ai pas entendu parler <strong>de</strong>puis longtemps, je serai bien aise dʹapprendre où<br />

vous en êtes. Je recevrai aussi <strong>avec</strong> joie <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> vos chers frères qui, je lʹespère,<br />

font <strong>avec</strong> vous une petite famille bien affectueusement unie. Notre f. Marcaire aura trouvé,<br />

dans le f. Guillot, un nouveau moyen <strong>de</strong> se soutenir en piété et un appui pour ses travaux<br />

<strong>de</strong> chaque jour; je souhaite bien que lʹesprit dʹhumilité, dʹoubli <strong>de</strong> soi‐même, <strong>de</strong> zèle saint<br />

pour la gloire <strong>de</strong> Dieu et pour le salut <strong>de</strong>s âmes, soit lʹesprit <strong>de</strong> votre petite maison; Dieu<br />

alors sʹy complaira et y <strong>de</strong>meurera constamment en douce et intime familiarité <strong>avec</strong> vous.<br />

Ma santé nʹest pas mauvaise, sans être forte toutefois; le climat est superbe ici, sans<br />

doute, mais où est la perfection en ce mon<strong>de</strong>? Le voisinage <strong>de</strong>s Alpes donne souvent à lʹair<br />

quelque chose dʹun peu âpre et vif qui va mal à ma poitrine faible, lʹair <strong>de</strong> la mer a aussi<br />

ses inconvénients. Où donc y a‐t‐il place sur cette terre pour ceux qui sont bien faibles? Sur<br />

la croix, où ils peuvent trouver leur repos sʹils savent le chercher et le goûter. Priez, mon<br />

bon ami, pour que jʹapprenne cette science si bonne et si précieuse.<br />

Je vous écrirai plus longuement une autre fois; je termine aujourdʹhui pour que<br />

vous receviez à temps la petite formule, si déjà elle nʹest entre vos mains.<br />

Adieu, bien cher ami; embrassez vos frères pour moi, offrez mes respects à MM.<br />

Mangot, <strong>de</strong> Brandt, Cacheleux, et croyez vous‐même à mon plus tendre dévouement.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

[FORMULE]<br />

Je renouvelle, en présence <strong>de</strong> Dieu et du plus profond <strong>de</strong> mon cœur, le vœu que jʹai fait<br />

<strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r (durant..... ou jusquʹà la fin <strong>de</strong> ma vie) la pauvreté, la chasteté, lʹobéissance.<br />

Je renouvelle aussi le vœu <strong>de</strong> me consacrer durant le même temps (ou jusquʹà mon <strong>de</strong>r‐<br />

nier jour) au service <strong>de</strong>s pauvres dans la Communauté <strong>de</strong>s frères <strong>de</strong> S t ‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul.<br />

Dominus pars haereditatis meae et calicis mei,<br />

tu es qui restitues haereditatem meam mihi.<br />

420 à M. Halluin<br />

Formule et cérémonial <strong>de</strong> la rénovation <strong>de</strong>s vœux. Valeur <strong>de</strong>s usages dans les communautés. Ménager les forces<br />

physiques et morales <strong>de</strong>s frères. La cohabitation <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s étrangers peut gêner lʹintimité <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> famille. Les<br />

Maisons doivent communiquer entre elles.<br />

Cannes, 17 novembre 1856<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je ne vous écris que quelques mots aujourdʹhui, désirant que vous receviez à temps<br />

la petite formule pour la rénovation <strong>de</strong>s vœux. Je la joins ci‐contre. La cérémonie se passe<br />

ainsi à Vaugirard: Après la S te Messe, en fait une exhortation analogue à la fête et à lʹacte<br />

<strong>de</strong> consécration que veut faire les frères. Puis, tous les frères profès sʹagenouillent au pied<br />

<strong>de</strong> lʹautel et tour à tour prononcent, à haute voix, la formule <strong>de</strong> rénovation, tenant un<br />

cierge en main. On entonne ensuite le Magnificat quʹon chante en chœur.<br />

534


Il est ordinaire quʹaprès la cérémonie les frères prennent ensemble une petite réfec‐<br />

tion très simple, mais qui se ressente néanmoins un peu <strong>de</strong> la fête et la continue par une<br />

expansion <strong>de</strong> famille.<br />

Il est possible que jʹomette quelque particularité <strong>de</strong> détail, le cérémonial écrit nʹétant<br />

pas sous mes yeux. Si M. Myionnet me lʹenvoie à temps, je vous lʹadresserai pour peu que<br />

ce soit utile. Il ne sʹagirait, en tout cas, que <strong>de</strong> points peu importants. Nous <strong>de</strong>vons y tenir<br />

toutefois, car les usages ont une gran<strong>de</strong> valeur dans les communautés.<br />

Je donne maintenant un mot <strong>de</strong> réponse bien sommaire à quelques sujets <strong>de</strong> votre<br />

<strong>de</strong>rnière lettre.<br />

Je crois que vous pourrez sans inconvénient permettre au f. Michel <strong>de</strong> faire ses<br />

vœux dʹune année, sʹil continue à montrer les mêmes dispositions. Je lui crois le cœur bon<br />

et sincèrement dévoué. Il sera bien désirable <strong>de</strong> lui donner quelques notions simples, mais<br />

précises, <strong>de</strong> la vie religieuse et <strong>de</strong>s obligations <strong>de</strong>s vœux.<br />

Je me sens bien incliné à donner la même réponse pour le bon M. Cousin, car jʹai<br />

aussi beaucoup dʹestime pour lui; nous y penserons, vous et moi, <strong>de</strong>vant Dieu, et nous fe‐<br />

rons ce quʹIl daignera nous inspirer. Je ne vous ai proposé dʹenvoyer momentanément ce<br />

bon jeune homme à Vaugirard que parce que je le croyais plus mala<strong>de</strong> quʹil ne paraît lʹêtre<br />

en effet. Le f. Carment mʹayant dit dans une <strong>de</strong> ses lettres quʹon lʹavait envoyé à la campa‐<br />

gne à cause <strong>de</strong> sa santé, je suis bien aise quʹil soit moins souffrant que je ne le croyais.<br />

Jʹespère que les ff. Carment et Thuillier continueront à vous satisfaire. Lʹun et lʹautre<br />

peuvent avoir besoin <strong>de</strong> ménagement. Le premier, à cause <strong>de</strong> la susceptibilité nerveuse <strong>de</strong><br />

sa tête; le second, à cause <strong>de</strong> sa jeunesse qui manque encore <strong>de</strong> fermeté et <strong>de</strong> consistance;<br />

mais ils ont vraiment <strong>de</strong> la bonne volonté, votre affection les remontera quand ils en au‐<br />

ront besoin et saura en tirer bon parti. Lʹexpérience vous a déjà appris tout ce quʹon a à<br />

supporter <strong>de</strong>s autres dans la conduite <strong>de</strong>s œuvres; cʹest une <strong>de</strong>s croix, et aussi un <strong>de</strong>s méri‐<br />

tes <strong>de</strong> ceux qui ont lʹautorité.<br />

Le f. Bassery vous reste tendrement attaché. Le changement <strong>de</strong> ses occupations en<br />

ces <strong>de</strong>rniers temps a pu lʹempêcher <strong>de</strong> vous écrire; il a certainement le désir <strong>de</strong> le faire, je<br />

veillerai à ce que le temps lui soit laissé pour cela.<br />

Assurez, je vous prie, notre bon f. Loquet que nous prions pour lui et nous intéres‐<br />

sons affectueusement à sa santé; jʹapprendrai <strong>avec</strong> joie quʹil sʹest bien remis <strong>de</strong> cette indis‐<br />

position. Il faudra que nous priions le bon Maître <strong>de</strong> nous donner une fondation dans<br />

quelque pays plus chaud, où on enverrait les ff. souffrants se refaire.<br />

Nous évitons dʹordinaire dʹadmettre en cohabitation <strong>de</strong>s étrangers chez nous. Lʹin‐<br />

timité <strong>de</strong> la famille en souffre, ils peuvent influer en sens divers sur lʹesprit <strong>de</strong>s frères. M.<br />

Caille peut vous dire quʹil en a fait lʹexpérience. Toutefois, il peut y avoir à toute règle <strong>de</strong>s<br />

exceptions quand elles sont bien motivées. Si vous avez <strong>de</strong> bonnes raisons <strong>de</strong> penser que<br />

la personne dont vous me parlez ne peut guère gêner chez vous, vous pouvez en faire lʹes‐<br />

sai, vous trouveriez toujours quelque moyen pour changer les choses, si elles avaient<br />

quelque notable inconvénient.<br />

Jʹapprouve bien votre pensée pour quelques correspondances régulière entre les di‐<br />

verses sections <strong>de</strong> notre petite famille. On fait à Vaugirard, quotidiennement, le journal <strong>de</strong><br />

tout ce qui se passe dʹun peu intéressant; on pourrait envoyer tous les 15 jours à Amiens et<br />

à Arras un extrait <strong>de</strong> tout ce qui serait le plus notable. Lʹaccusé <strong>de</strong> réception nous enverrait<br />

en retour communication <strong>de</strong> ce qui sʹest passé chez vous. Nous pourrons examiner la<br />

535


question plus sérieusement quand notre cher M. <strong>de</strong> Lauriston sera à Vaugirard. Il pourrait<br />

être chargé <strong>de</strong> ces petites relations que nous régulariserions difficilement aujourdʹhui<br />

dʹune façon tout à fait satisfaisante. En attendant, je recomman<strong>de</strong>rai quʹon vous écrire un<br />

peu souvent <strong>de</strong> Vaugirard, et je le ferai moi‐même toujours <strong>avec</strong> joie et empressement.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé; allons toujours dans notre voie, invoquant Dieu fai‐<br />

sant <strong>de</strong> notre mieux et comptant sur sa paternelle bonté pour nous sanctifier et donner<br />

quelque fruit à nos travaux.<br />

Jʹembrasse tous nos ff. dʹArras et vous‐même bien affectueusement<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

421 à M. Decaux<br />

Remerciements et encouragements à la pratique <strong>de</strong> la charité. Reconnaissance à la mémoire <strong>de</strong> M me Taillandier.<br />

Concours dévoué que M. Decaux prête aux Œuvres <strong>de</strong> lʹInstitut. La santé <strong>de</strong> MLP. sʹaltère quelque peu.<br />

Cannes, 19 novembre 1856<br />

Mon bien bon ami et frère en N.S.,<br />

Si jʹeusse suivi mon inclination, qui me fait trouver tant <strong>de</strong> joie à mʹentretenir inti‐<br />

mement <strong>avec</strong> vous, je vous eusse écrit dès mon arrivée ici; mais il a fallu nous installer,<br />

faire quelques visites indispensables, répondre à un assez bon nombre <strong>de</strong> lettres qui<br />

mʹétaient arrivées; le tout mʹa distrait forcément et a consumé mes journées. Je prends le<br />

premier instant libre, et je le réserve pour vous. Et à qui le donnerais‐je mieux quʹà vous,<br />

mon bon ami, qui vous êtes fait vraiment notre frère par la tendre sympathie que vous<br />

nous avez montrée, par le dévouement si généreux que vous avez témoigné à notre petite<br />

famille et à nos œuvres. Jʹai encore toute vive lʹimpression <strong>de</strong> vos adieux si pleins <strong>de</strong> ten‐<br />

dre cordialité, et jʹai le cœur tout consolé par le souvenir <strong>de</strong>s mille bontés et attentions dé‐<br />

licates dont votre affection mʹa comblé durant mon court séjour au milieu <strong>de</strong> vous. Le bon<br />

Dieu vous a fait un grand don en mettant en vous un chœur si chaleureux et si aimant, et<br />

vous en usez selon ses vues en répandant partout les douces et vives flammes <strong>de</strong> la chari‐<br />

té; cʹest la mission que le Sauveur lui‐même avait choisie: ignem veni mittere in terram258 ,<br />

cʹest celle quʹIl donne aussi à ses plus chers disciples. Marchez ainsi toujours, bien cher<br />

ami, sur les traces <strong>de</strong> notre bien‐aimé Maître, il nʹest pas <strong>de</strong> plus sainte et <strong>de</strong> plus noble<br />

voie, dʹemploi plus excellent <strong>de</strong>s courts instants que nous passons sur la terre; transiit bene<br />

faciendo; 259 Il a passé en aimant et en portant tous les autres à sʹaimer, il a mis la vie du Ciel<br />

sur terre; au Ciel, il lui sera donné en plénitu<strong>de</strong> ce quʹil a déjà tant cherché ici‐bas.<br />

Ces réflexions, qui me viennent tout naturellement en causant <strong>avec</strong> vous, mon bon<br />

ami, me venaient aussi à la pensées ces jours <strong>de</strong>rniers à propos <strong>de</strong> lʹexcellente amie que<br />

nous avons perdue; vous aviez eu, je crois, peu <strong>de</strong> rapports <strong>avec</strong> cette âme si sainte, si<br />

bienveillante, si ar<strong>de</strong>nte en charité; je le regrette bien, car on est heureux et tout encouragé<br />

dʹavoir rencontré sur sa route en ce mon<strong>de</strong> un cœur dʹélite où le Seigneur a mis sa plus<br />

vive ressemblance, et dont le contact seul est déjà un bienfait. Je suis bien touché <strong>de</strong> voir<br />

que tout le cher mon<strong>de</strong> charitable qui vous entoure se soit ému <strong>de</strong> cette perte et que les<br />

258<br />

Lc 12, 49.<br />

259<br />

Ac 10, 38.<br />

536


Conférences <strong>de</strong> S t ‐Germain‐<strong>de</strong>s‐Prés et <strong>de</strong> St‐Sulpice, la S te ‐Famille et beaucoup dʹautres se<br />

réunissent <strong>de</strong> concert pour prier ensemble à lʹintention <strong>de</strong> la bonne M me Taillandier et sʹoc‐<br />

cuper dʹelle qui sʹest tant occupée dʹeux. Aucune <strong>de</strong> nos œuvres qui nʹeût ses sympathies,<br />

aucune pour lesquelles elle nʹeût mille prévenances et ses attentions <strong>de</strong> cœur quʹon réserve<br />

dans le mon<strong>de</strong> pour ceux <strong>de</strong> son sang, mais que les âmes saintement inspirées répan<strong>de</strong>nt<br />

généreusement sur tous. Notre bon abbé Taillandier mʹa envoyé, sur les <strong>de</strong>rniers instants<br />

<strong>de</strong> sa bien‐aimée mère, <strong>de</strong>s détails bien touchants, bien capables dʹédifier les cœurs chré‐<br />

tiens; je ne sais sʹil serait indiscret <strong>de</strong> les communiquer à la S te ‐Famille qui perd en elle une<br />

véritable mère; je vais les relire et sʹil me semble possible <strong>de</strong> le faire, jʹen ferai <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r la<br />

permission à notre bon abbé. Vous savez quʹil est lʹenfant spirituel <strong>de</strong> M. Icard; si jamais,<br />

pour vous ou pour dʹautres, vous avez besoin dʹun prêtre éclairé, dʹune âme délicate, éle‐<br />

vée et généreuse, plein <strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nce et <strong>de</strong> maturité quoi quʹil soit bien jeune encore, vous<br />

pouvez aller à lui, vous trouverez ce quʹil vous faut.<br />

Nos ff. <strong>de</strong> Nazareth mʹécrivent que tout va bien dans leurs affaires, que vous suivez<br />

<strong>avec</strong> ar<strong>de</strong>ur lʹentreprise que le Seigneur semble vous avoir confié dʹachever la fondation<br />

<strong>de</strong> ce foyer <strong>de</strong> bonnes œuvres; cʹest une tâche un peu ru<strong>de</strong>, pour cette année surtout, mais<br />

quand elle sera parvenue à sa fin, ce sera une douce joie pour votre cœur chrétien et chari‐<br />

table <strong>de</strong> voir tout le bien que les âmes <strong>de</strong>s pauvres, <strong>de</strong>s ouvriers, <strong>de</strong>s enfants tireront <strong>de</strong> ce<br />

centre <strong>de</strong> zèle et <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong>. Je ne puis vous ai<strong>de</strong>r quʹen priant et en faisant ici docile‐<br />

ment la volonté <strong>de</strong> Dieu, quelle quʹelle soit; je tâcherai <strong>de</strong> ne point négliger cette part qui<br />

mʹest laissée.<br />

Jʹessaie <strong>de</strong> réunir ici <strong>de</strong>s éléments dʹune Conférence <strong>de</strong> S t ‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul qui pour‐<br />

rait y faire un grand bien; les sujets et la bonne volonté ne manquent pas; il y a toutefois<br />

quelques obstacles que le bon Dieu nous ai<strong>de</strong>ra, je lʹespère, à surmonter; si nous y parve‐<br />

nons, je ne manquerai pas <strong>de</strong> vous en informer.<br />

Ma santé, qui nʹétait pas trop mauvaise jusquʹici sʹest <strong>de</strong> nouveau altérée <strong>de</strong>puis<br />

quelques jours; lʹair extrêmement sec et assez âpre qui vient <strong>de</strong>s Alpes mʹa causé une irri‐<br />

tation <strong>de</strong> poitrine qui a renouvelé quelques acci<strong>de</strong>nts que je croyais nʹavoir plus à redou‐<br />

ter. Que la sainte volonté <strong>de</strong> Dieu soit faite; je ne souhaite que <strong>de</strong> lʹaccomplir en vraie<br />

soumission et nʹai aucun désir <strong>de</strong> lʹincliner, pour ce qui me concerne personnellement, en<br />

un sens ou en un autre; il est si bon <strong>de</strong> se remettre au bon plaisir du Seigneur, et cʹest un si<br />

grand repos! Je souhaite bien trouver là ma paix.<br />

Adieu, mon bien bon ami; je vous prie <strong>de</strong> trouver <strong>de</strong> bonnes et affectueuses paroles<br />

pour tous nos amis, pour les membres <strong>de</strong> notre Commission surtout, auxquels je dois tant<br />

et pour lesquels je me sens une si vive et si profon<strong>de</strong> reconnaissance. Offrez mon respect à<br />

notre cher et vénéré Prési<strong>de</strong>nt Général, et tous mes souvenirs bien dévouées à tous nos<br />

confrères du Conseil qui ont été si bienveillants pour moi; enfin, mon bon ami, gar<strong>de</strong>z<br />

pour vous‐même le meilleur <strong>de</strong> mon cœur, car cʹest dans son fond le plus intime que je<br />

vous suis tendrement uni.<br />

Votre tout affectionné ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

537


422 à M. Halluin<br />

Difficulté dʹaccueillir <strong>de</strong> nouveaux enfants. Agir en vue du bien général <strong>de</strong> lʹœuvre et selon la volonté <strong>de</strong> Dieu.<br />

MLP. répond à une question sur la nature <strong>de</strong> la rénovation <strong>de</strong>s vœux. Bénédiction <strong>de</strong> la chapelle <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la<br />

Salette.<br />

Cannes, 20 novembre 1856<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

La distance où nous sommes mettant déjà <strong>de</strong> longs retards dans nos correspondan‐<br />

ces, je tâcherai <strong>de</strong> ne pas les accroître en différant moi‐même à vous répondre.<br />

Pour ce qui touche la question posée dans votre lettre concernant les enfants <strong>de</strong><br />

lʹhospice, je pense comme vous quʹelle doit être examinée, tout ensemble au point <strong>de</strong> vue<br />

spirituel et moral, et sous le rapport matériel. Lʹadmission en masse <strong>de</strong> 25 enfants, peut‐<br />

être bien mal élevés et bien mal surveillés jusquʹici, ne peut‐elle pas nuire à lʹesprit <strong>de</strong> vo‐<br />

tre maison, vous créer <strong>de</strong>s difficultés et compromettre le résultat <strong>de</strong> vos peines et <strong>de</strong> vos<br />

efforts? Si vous avez raison <strong>de</strong> penser quʹil nʹen sera pas ainsi, cʹest un point bien essentiel<br />

pour préparer votre décision.<br />

Dʹune autre part, ces enfants ne grossiront‐ils pas trop les classes, ne rendront‐ils<br />

pas la surveillance trop difficile, trouveront‐ils bien leur place dans les locaux <strong>de</strong> lʹétablis‐<br />

sement; enfin, nʹajouteront‐ils pas beaucoup au chiffre <strong>de</strong> vos charges et dépenses? Si vous<br />

voyez aussi une réponse satisfaisante à ces questions, il me semblerait possible <strong>de</strong> vous<br />

rendre au désir <strong>de</strong> MM. les Administrateurs <strong>de</strong> lʹhospice. Le bien à faire est incontestable.<br />

Se peut‐il faire sans préjudice <strong>de</strong> lʹœuvre si importante que Dieu a mise entre vis mains?<br />

Là est tout le sujet dʹexamen. Il me semble, cher Monsieur lʹabbé, que vous <strong>de</strong>vriez re‐<br />

comman<strong>de</strong>r tout particulièrement la chose au bon Dieu, par lʹentremise <strong>de</strong> la Ste Vierge, et,<br />

après un quart dʹheure dʹexamen aux pieds du Seigneur, prendre la détermination quʹIl<br />

vous inspirait. Je crois que vous <strong>de</strong>vez, quant à présent, tendre à tenir votre maison dans<br />

<strong>de</strong>s limites restreintes pour la bien organiser et ne pas lui donner un développement trop<br />

hâtif, mais le cas présent a <strong>de</strong>s circonstances particulières qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt considération; je<br />

ne désapprouve pas, pour ma part, une décision affirmative si, après examen <strong>de</strong>vant Dieu<br />

<strong>de</strong>s points que jʹai touchés, vous y trouviez une réponse satisfaisante.<br />

Je ne réponds point à la lettre <strong>de</strong> notre f. Carment aujourdʹhui, pour ne pas retar<strong>de</strong>r<br />

lʹenvoi <strong>de</strong> celle‐ci. La question quʹil me faisait relativement au renouvellement <strong>de</strong>s vœux à<br />

la fête <strong>de</strong> la Présentation aura, je le pense, été résolue par vous aisément. Cette cérémonie<br />

du renouvellement nʹajoute rien à lʹétendue ni à la durée <strong>de</strong>s vœux, elle nʹest quʹune itéra‐<br />

tion260 au fond du cœur et dans lʹexpression extérieure du sentiment qui nous a portés à<br />

nous consacrer à Dieu; cʹest un acte <strong>de</strong> piété, notre cher frère <strong>de</strong>vait donc le faire <strong>avec</strong> tous<br />

les ff. profès.<br />

Je pense que M. Myionnet vous aura satisfait pour les couvertures. Je vais le gron‐<br />

<strong>de</strong>r dʹavoir tant tardé à vous écrire et lʹinviter à le faire plus régulièrement. Même recom‐<br />

mandation sera faite au f. Bassery.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé; je me recomman<strong>de</strong> à vos prières, étant <strong>de</strong>puis quel‐<br />

ques jours plus souffrant, sans être alité toutefois. Je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> les bons souvenirs <strong>de</strong> toute<br />

notre petite famille dʹArras qui mʹest bien chère et que je recomman<strong>de</strong> moi‐même bien<br />

souvent à Dieu.<br />

260 Répétition. On trouve davantage le verbe, réitérer, que le substantif.<br />

538


Croyez, cher Monsieur lʹabbé, à tous mes sentiments <strong>de</strong> tendre affection en J. et M.<br />

Votre ami dévoué et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Dedoue, Vicaire Général, prési<strong>de</strong>ra <strong>de</strong>main 21 novembre le renouvellement <strong>de</strong>s<br />

vœux à Vaugirard; après la Messe; il posera la première pierre <strong>de</strong> la chapelle <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la<br />

Salette. 261<br />

423 à M. Paillé<br />

Conduite à tenir vis‐à‐vis dʹun Confrère. Agir <strong>avec</strong> douceur et charité. Diplômes <strong>de</strong> la Sainte‐Famille à faire ti‐<br />

rer. Lecture <strong>de</strong> lʹAmi <strong>de</strong> la Religion et <strong>de</strong> lʹUnivers. Mauvaises nouvelles <strong>de</strong> sa santé.<br />

Cannes, 20 novembre 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je répondrai seulement quelques lignes aujourdʹhui à votre bonne lettre, me trou‐<br />

vant assez souffrant <strong>de</strong>puis plusieurs jours.<br />

Je ne puis rien dire, ainsi que vous lʹavez présumé, relativement à la chapelle; il<br />

faudrait, pour nous déci<strong>de</strong>r à la louer, un avantage bien notable, car même en faisant ses<br />

réserves, la Communauté et les œuvres souffriraient <strong>de</strong> cette mesure; toutefois, comme elle<br />

serait temporaire, il y aurait lieu dʹexaminer; les conditions proposées règleraient la déci‐<br />

sion à prendre.<br />

Je suis bien aise que vous ayez ajourné toute disposition relativement à notre<br />

confrère, M. Dupaigne, jusquʹà mûr examen <strong>de</strong> notre part; la lettre que vous lui vouliez<br />

écrire lʹeût inévitablement blessé, la position que vous lui avez laissé prendre chez vous est<br />

regrettable, assurément, mais le remè<strong>de</strong> serait pire que le mal; il faudra tolérer cet in‐<br />

convénient, veiller à ce quʹil ne sʹaccroisse pas, profiter <strong>de</strong>s occasions que vous auriez <strong>de</strong><br />

lʹamoindrir sans rien briser, et surtout tâcher que lʹesprit <strong>de</strong> la communauté en souffre le<br />

moins possible; ce sera aussi une leçon dont vous <strong>de</strong>vrez, ainsi que vos frères, profiter<br />

pour lʹavenir. Peut‐être pourriez‐vous, lorsque ce bon jeune homme vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rait<br />

quelque nouvelle séance dans la maison, motiver le refus bien doucement sur ce que la rè‐<br />

gle a déjà été par vous un peu froissée à son égard, et que <strong>de</strong>s observations vous ont été<br />

faites à cet égard; mettez en tout cela pru<strong>de</strong>nce, mais charité aussi; nous sommes surtout<br />

<strong>de</strong>s hommes <strong>de</strong> charité.<br />

La pierre lithographique du titre dʹhonneur <strong>de</strong> la Ste ‐Famille est restée chez le litho‐<br />

graphe dont le nom est au bas <strong>de</strong>s exemplaires; cʹest au bord <strong>de</strong> la rue du Bac, côté <strong>de</strong> la<br />

rue <strong>de</strong> Sèvres, maison <strong>de</strong>s bains, à côté du magasin <strong>de</strong> Nouveautés <strong>de</strong>s Sœurs <strong>de</strong> la Chari‐<br />

té. Le prix du tirage est, je crois, 22f le cent; il en faudrait tirer, ce me semble, un cent ou<br />

plus pour M. Morot et voir si M. Leblanc ne jugerait pas à propos, <strong>de</strong> son côté, <strong>de</strong> faire une<br />

distribution <strong>de</strong> titres pour ramener le zèle et la persévérance <strong>de</strong> ses braves gens.<br />

261 "A la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong>, Supérieur et fondateur <strong>de</strong> la Communauté <strong>de</strong>s Frères <strong>de</strong> St-Vt-<strong>de</strong>-Paul, et celle du Conseil <strong>de</strong><br />

ladite Communauté, pour accomplir une promesse faite par eux à Notre-Dame Réconciliatrice, en reconnaissance <strong>de</strong> plusieurs<br />

bienfaits qu'ils en ont obtenus et dont les plus signalés sont la guérison <strong>de</strong> trois enfants <strong>de</strong> l'Orphelinat, l'acquisition du terrain où<br />

est située la chapelle, une assistance toute particulière dans la position pécuniaire où s'est trouvée ladite communauté pendant l'année<br />

1856, et enfin le rétablissement <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong>; en présence (…) avons béni et posé la première pierre, donnée par les orphelins,<br />

<strong>de</strong> la chapelle dédiée à Notre-Dame Réconciliatrice , érigée dans l'établissement <strong>de</strong>s orphelins <strong>de</strong> St-Vt-<strong>de</strong>-Paul". (extrait du<br />

procès-verbal dressé et signé à Vaugirard le 21.11.1856 par le Chanoine Dedoue, Vicaire général du diocèse <strong>de</strong> Paris).<br />

539


Je recevrai <strong>avec</strong> plaisir lʹAmi <strong>de</strong> la Religion, car<br />

lʹUnivers 262 ne paraît pas nous avoir été ac‐<br />

cordé; il mʹeût convenu davantage pendant<br />

mon absence, parce quʹil paraît tous les jours,<br />

mais il faut prendre ce que Dieu donne, dans<br />

les délassements comme pour le reste. M.<br />

Myionnet ne regrettera‐t‐il pas lʹAmi <strong>de</strong> la<br />

Religion? Depuis un mois, je nʹai pas vu un<br />

journal; je crois quʹil est certaines choses<br />

pourtant quʹil mʹest indispensable <strong>de</strong> connaître; ayez donc la bonté, cher ami, <strong>de</strong> vous en<br />

occuper.<br />

Extrait <strong>de</strong> l’Ami <strong>de</strong> la<br />

Religion, qui rapporte la bénédiction<br />

<strong>de</strong> la chapelle <strong>de</strong> Nazareth en 1850.<br />

Une dame dʹHyères, qui est ici et qui va repartir dans quelques jours, emportera<br />

une petite lettre <strong>de</strong> moi pour notre bon M. Casteil.<br />

Je vous ai dit en commençant, que ma santé ne valait pas grand chose <strong>de</strong>puis quel‐<br />

ques jours; il mʹest revenu, en effet, une nouvelle inflammation <strong>de</strong>s bronches; ma poitrine<br />

est extrêmement irritée et souffrante; je tousse un peu et, ce qui mʹa un peu consterné, il est<br />

revenu <strong>de</strong>ux ou trois fois quelques crachats sanglants. Que la sainte volonté <strong>de</strong> Dieu soit<br />

faite! Jʹattribue cette souffrance à lʹextrême aridité <strong>de</strong> lʹair; il nʹa plu quʹune heure, dʹune<br />

petite pluie imperceptible, <strong>de</strong>puis notre arrivée; il y a beaucoup <strong>de</strong> poussière, lʹair <strong>de</strong>s Al‐<br />

pes est mordant quand il est tombé <strong>de</strong> la neige; enfin le vin <strong>de</strong> ce pays mʹest aussi une as‐<br />

sez ru<strong>de</strong> épreuve. Je suis donc revenu au régime <strong>de</strong>s ménagements et aux allures dʹhomme<br />

souffreteux que jʹavais lʹhiver <strong>de</strong>rnier; la nature en est un peu crucifiée, sans doute, mais si<br />

Dieu en est glorifié, que son saint nom soit béni.<br />

262 L'Ami <strong>de</strong> la Religion, issu <strong>de</strong> la Restauration (1814) était le journal ecclésiastique le plus répandu à l'époque. Il était dirigé par un<br />

laïc, Michel Picot. L'Univers, quotidien catholique fondé en 1833 par l'abbé Migne (éditeur <strong>de</strong> la fameuse Patrologie). Il avait été<br />

dirigé par <strong>de</strong> Coux, disciple <strong>de</strong> Lamennais, avant d'être repris en 1839 par Louis Veuillot.<br />

540


Adieu, cher ami; <strong>de</strong>main, fête <strong>de</strong> la Présentation, nous nous tiendrons bien unis à<br />

notre chère famille pour la solennité du renouvellement <strong>de</strong>s vœux. Je vous embrasse ten‐<br />

drement; embrassez pour moi mes bien‐aimés fils <strong>de</strong> Nazareth.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

424 à M. Maignen<br />

Correspondre aux <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> Dieu. Lʹattachement à la Règle favorise lʹunité et soutient lʹeffort <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong><br />

la communauté. Se pénétrer davantage <strong>de</strong> lʹesprit <strong>de</strong> sacrifice. MLP. se montre exigeant à cause <strong>de</strong> lʹaffection<br />

quʹil porte à ses frères.<br />

Cannes, 26 novembre 1856<br />

Cher enfant en N.S.,<br />

Je prends à <strong>de</strong>ssein, pour vous écrire, un tout petit papier, afin <strong>de</strong> ne pas cé<strong>de</strong>r à la<br />

tentation dʹemployer <strong>avec</strong> vous seul le temps que je désire consacrer aujourdʹhui à plu‐<br />

sieurs <strong>de</strong> mes enfants <strong>de</strong> Nazareth, et me défiant <strong>de</strong> la longue habitu<strong>de</strong> qui existe entre<br />

vous et moi dʹune expansion facile et peut‐être trop complaisante. Je nʹai guère dʹailleurs<br />

quʹà me réjouir <strong>avec</strong> vous et à bénir le Seigneur <strong>de</strong> la bonne assiette quʹIl a donnée à votre<br />

chère maison et <strong>de</strong>s heureuses dispositions <strong>de</strong> tous ceux qui la composent. En même<br />

temps que vous mʹen rendiez témoignage, notre bon p. Beaussier, dont jʹai reçu tout ré‐<br />

cemment une lettre, me disait aussi ses bonnes espérances sur lʹavenir <strong>de</strong> cette petite fon‐<br />

dation. Efforçons‐nous, bien cher enfant, <strong>de</strong> correspondre, chacun pour notre part, aux<br />

<strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> la sagesse et <strong>de</strong> la miséricor<strong>de</strong> divines; Dieu fait beaucoup pour nous, Il a ré‐<br />

uni entre nos mains <strong>de</strong> grands moyens pour notre sanctification et celle <strong>de</strong> plusieurs au‐<br />

tres: une chapelle, un prêtre zélé, une Communauté, une Maison dʹœuvres, un entourage<br />

dʹamis et <strong>de</strong> coopérateurs dévoués; que <strong>de</strong> ressources si nous savions en profiter! que <strong>de</strong><br />

raisons <strong>de</strong> bien espérer en lʹavenir, si nous sommes assez fermes pour le soutenir!<br />

Je vois <strong>avec</strong> joie que vous gar<strong>de</strong>z fidèlement votre règlement; je me convaincs <strong>de</strong><br />

plus en plus <strong>de</strong> la force que donne à une Communauté cette précieuse attache à la règle;<br />

cʹest le lien <strong>de</strong> lʹunité pour tous, cʹest lʹappui <strong>de</strong> lʹinconsistance propre pour chacun; sans<br />

cela, la communauté éparpille ses forces et annule son action, chacun <strong>de</strong> ses membres ten‐<br />

dant à reprendre possession <strong>de</strong> lui‐même par le caprice et lʹarbitraire <strong>de</strong> ses mouvements.<br />

Je crois que vous gagnerez beaucoup, en particulier, cher enfant, en mettant ce frein à vo‐<br />

tre activité et à la soudaineté <strong>de</strong> vos inspirations dans les œuvres. Je ne dis, du reste, ce<br />

mot en passant que pour répondre à votre lettre, sachant bien que vous travaillez sérieu‐<br />

sement à mortifier ce qui peut être à reprendre en vous. Quant à lʹesprit <strong>de</strong> sacrifice, je<br />

pense <strong>avec</strong> vous que vous y arriverez <strong>de</strong> plus en plus en ne vous mettant pas trop au<br />

large, en vous brisant journellement dans les petites choses, enfin en revenant constam‐<br />

ment à ce grand principe: souffrir et être humilié <strong>de</strong> bon cœur, cʹest le résumé <strong>de</strong> la doc‐<br />

trine <strong>de</strong> Jésus‐Christ. Notre petite Communauté tout entière me paraît être jusquʹici entrée<br />

trop peu avant dans cet esprit, sans lequel pourtant il nʹy a pas moyen dʹavancer; daigne<br />

Celui qui a les dons dʹamour, <strong>de</strong> lumière et <strong>de</strong> force les verser bien abondamment sur<br />

nous.<br />

Tout cela est bien sérieux, cher enfant; vous nʹaimez pas mes lettres quand vous nʹy<br />

trouvez pas en quelque coin un brin <strong>de</strong> tendre et vive affection; en cherchant bien, vous le<br />

541


découvririez sous ce que je viens dʹécrire; je nʹai rien tant à cœur que <strong>de</strong> vous voir<br />

consommer en plénitu<strong>de</strong> le généreux sacrifice que vous avez fait à Dieu <strong>de</strong> tout vous‐<br />

même; votre perfection mʹest chère, parce quʹelle glorifie Dieu, mais aussi parce que je<br />

vous aime tendrement, que vous avez pris en moi plus que dʹautres, et quʹil me serait<br />

doux jusquʹà la fin <strong>de</strong> vous donner tout ce que mon indigence pourra produire <strong>de</strong> moins<br />

défectueux. Je nʹoublie pas que la prière y fera plus que toutes les paroles du mon<strong>de</strong>; je<br />

prie constamment pour vous et pour tous mes bien‐aimés enfants, pour leurs œuvres et<br />

pour tous leurs besoins. Je puis dire que cʹest ici ma principale affaire; je mʹefforce <strong>de</strong> me<br />

pénétrer <strong>de</strong> cette conviction quʹon coopère aux œuvres <strong>de</strong> sanctification et <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong><br />

en priant et en se soumettant docilement à la volonté divine; être inactif, quand nous<br />

avons tant à faire; sentir mon impuissance, quand je vous sais tous chargés, cʹest une croix<br />

qui me brise péniblement, mais jʹespère que je vous soulage toutes les fois que je dis: fiat<br />

voluntas tua; je le répète aussi souvent que je puis, même quand je souffre, comme cela<br />

mʹest arrivé tous ces temps‐ci.<br />

Jʹai peine à mʹacclimater, lʹair <strong>de</strong> ces contrées est bien vif pour moi; puis la puissance<br />

du soleil mʹexcite outre mesure, à cause <strong>de</strong> la faiblesse <strong>de</strong> tous mes organes; ma poitrine<br />

sʹest irritée <strong>de</strong> nouveau, mais tout cela est selon Dieu ou plutôt par Dieu. Le temps est su‐<br />

perbe ici, le soleil luit tous les jours ou plutôt resplendit, le pays est magnifique, plus beau<br />

quʹHyères, ce que je croyais presque impossible; que <strong>de</strong> sujets <strong>de</strong> peinture vous trouveriez<br />

ici! tout est tableau, tout semble disposé à plaisir pour donner les plus merveilleux effets;<br />

mais, pour moi, je ne sais pas peindre, jʹadmire et je loue lʹauteur <strong>de</strong> toutes ces merveilles<br />

et je pense quʹil en a mis bien dʹautres dans le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> la grâce, bien dʹautres encore dans<br />

le mon<strong>de</strong> céleste où il daignera, je lʹespère, nous réunir.<br />

Adieu, cher enfant, je vous embrasse <strong>avec</strong> quelque peine, à travers ces lignes entre‐<br />

croisées; je le fais pourtant du plus fort <strong>de</strong> mon cœur.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

425 à M. Paillé<br />

Remerciements pour <strong>de</strong>ux livres quʹon lui a envoyés, La présence <strong>de</strong> Dieu et Fabiola. Appréciation. Il <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong> quʹon lui fasse parvenir un journal.<br />

Cannes, 27 novembre 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie <strong>de</strong>s petites lettres pour trois <strong>de</strong> nos ff. <strong>de</strong> Nazareth; je nʹen ai pas fait<br />

aujourdʹhui pour mon bon abbé Hello, lui ayant écrit déjà et nʹayant plus assez <strong>de</strong> temps<br />

avant le départ <strong>de</strong> la poste. Assurez‐le, je vous prie, que je suis loin néanmoins <strong>de</strong> lʹoublier;<br />

il sait ma tendre et inaltérable affection pour lui, mon vif intérêt pour les œuvres saintes<br />

dont il est chargé, enfin la douce satisfaction que jʹéprouve toujours à mʹentretenir <strong>avec</strong> lui.<br />

Je vous prie, mon bon ami, <strong>de</strong> me renvoyer la lettre <strong>de</strong> notre ami M. Deslan<strong>de</strong>s; je<br />

nʹai pu encore y répondre, faute <strong>de</strong> lʹavoir sous les yeux.<br />

Je compte aussi sur votre obligeance pour faire, en mon nom, une petite visite <strong>de</strong><br />

remerciement à M. Douniol; il a eu la bienveillante pensée <strong>de</strong> mʹenvoyer à Cannes un petit<br />

livre du p. Gonnelieu sur La présence <strong>de</strong> Dieu, quʹil vient <strong>de</strong> publier; jʹai été vivement touché<br />

<strong>de</strong> cette prévenance <strong>de</strong> notre bon confrère, cʹest une attention <strong>de</strong> cœur comme les vrais<br />

542


chrétiens en ont seuls; je tiens beaucoup à ce que vous lui en exprimiez bien vivement ma<br />

reconnaissance. Assurez‐le que je prierai pour lui en me servant <strong>de</strong> son petit livre, dont<br />

jʹuse pour ma lecture spirituelle.<br />

Une autre attention qui mʹa aussi été très agréable, cʹest lʹenvoi <strong>de</strong> Fabiola 263 ; pour<br />

celle‐là, cʹest à vous très certainement que je la dois; quoique je sois accoutumé à vos affec‐<br />

tueuses préoccupations pour moi, je nʹy suis pas moins sensible; je vous embrasse <strong>de</strong> tout<br />

mon cœur, sur vos <strong>de</strong>ux joues, pour cette bonne et fraternelle<br />

pensée. Ce livre, que je viens <strong>de</strong> lire, nʹest pas parfait; il<br />

manque, si je ne me trompe, <strong>de</strong> simplicité et a le tort <strong>de</strong> mêler<br />

une action trop dramatique, pour ne pas dire romanesque, aux<br />

actes admirables <strong>de</strong>s martyrs; mais il renferme, sous <strong>de</strong>s formes<br />

attachantes, beaucoup <strong>de</strong> science chrétienne, <strong>de</strong>s vues très<br />

hautes (quelquefois un peu recherchées) sur la doctrine<br />

<strong>de</strong> J.C., enfin un rapprochement très frappant entre le<br />

paganisme et le christianisme; en ensemble il est bien meilleur<br />

que la plupart <strong>de</strong> nos livres <strong>de</strong> bibliothèques chrétiennes,<br />

mais, <strong>avec</strong> plus <strong>de</strong> goût et <strong>de</strong> simplicité, lʹauteur eût pu lui<br />

donner un mérite bien plus élevé. Je pourrai le prêter ici utilement; il ne sera pas non plus,<br />

je lʹespère, sans quelque bien pour moi; il y a <strong>de</strong>s choses bien touchantes sur les martyrs;<br />

on sent vivement, en le lisant, quelle immense lumière sʹest faite dans le mon<strong>de</strong> quand la<br />

divine Charité y est <strong>de</strong>scendue. Je nʹai, jusquʹici, pas du tout <strong>de</strong> journal; si vous pouvez<br />

faire quʹil mʹen arrive un quelconque, chrétien il sʹentend, je vous en serai bien obligé.<br />

Ma santé est toujours bien pauvre; je ne crache plus le sang, je tousse peu, mais ma<br />

douleur et faiblesse habituelles <strong>de</strong> poitrine ont sensiblement augmenté; je mʹacclimate aus‐<br />

si difficilement quant au reste <strong>de</strong> lʹorganisme; je suis pourtant un peu moins souffrant que<br />

ces <strong>de</strong>rniers jours.<br />

Adieu, bien cher ami; jʹai reçu une bonne lettre <strong>de</strong> notre p. Beaussier, remerciez lʹen<br />

bien; cʹest une gran<strong>de</strong> consolation et un grand repos pour moi <strong>de</strong> savoir quʹil retourne ré‐<br />

gulièrement chez vous et à Vaugirard. On me néglige bien à Vaugirard, je nʹai encore reçu<br />

que quelques lignes <strong>de</strong> M. Myionnet; <strong>de</strong>puis 10 jours, il ne mʹa rien écrit, <strong>de</strong>ux ou trois <strong>de</strong><br />

nos frères seulement mʹont donné marque <strong>de</strong> souvenir.<br />

Adieu, bien cher ami, je suis <strong>avec</strong> une tendre affection<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Le petit f. Vasseur fait mille affections à ses ff. <strong>de</strong> Nazareth; il leur écrira bientôt<br />

une petite lettre. Il suit très bien jusquʹici les bonnes instructions quʹon lui a faites à son<br />

départ et ne mʹa donné que <strong>de</strong>s causes <strong>de</strong> satisfaction.<br />

426 à M. Halluin<br />

Prendre soin <strong>de</strong> la santé <strong>de</strong> ses frères. Un mouvement <strong>de</strong> personnel sʹavère délicat. Inconvénient du climat <strong>de</strong><br />

Cannes. La patience et la miséricor<strong>de</strong> ne sauraient impliquer un manque <strong>de</strong> fermeté sur le principe <strong>de</strong> lʹobéis‐<br />

sance. Encourager et soutenir ses frères.<br />

263 En 1854, le cardinal Wiseman, primat d'Angleterre, avait publié ce roman historique Fabiola, récit <strong>de</strong>s catacombes, au style vif et<br />

coloré, qui avait eu un grand succès. Son compatriote, Henry Newman, converti <strong>de</strong> l'anglicanisme et futur cardinal, écrira en 1856<br />

sur le même thème, Callista, d'expression plus sobre et dépouillée. (Cf. VLP. t.1, p.554).<br />

543


Cannes, 29 novembre 1856<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je prends une part bien vive aux soucis et difficultés que vous cause la maladie du f.<br />

Loquet, et je compatis bien sincèrement aussi à la souffrance <strong>de</strong> ce bon frère. Je chercherai<br />

<strong>de</strong> grand cœur <strong>avec</strong> vous les moyens <strong>de</strong> lʹadoucir. Le premier me semble être <strong>de</strong> lʹexemp‐<br />

ter <strong>de</strong> faire la classe, qui mʹa paru dès lʹabord <strong>de</strong>voir être une <strong>de</strong>s causes principales <strong>de</strong> son<br />

mal, et <strong>de</strong> le préserver <strong>de</strong>s intempéries, autant quʹil se pourra. Je ne me refuserais pas au<br />

moyen que vous proposez <strong>de</strong> lʹenvoyer près <strong>de</strong> moi, mais il me semble quʹon ne <strong>de</strong>vrait y<br />

recourir que si les autres sont définitivement impuissants. Ainsi que vous le dites, la mai‐<br />

son est déjà bien avancée pour faire, seul et souffrant, un voyage <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 300 lieues. La<br />

considération <strong>de</strong>s dépenses est aussi à compter. On ne peut guère faire un voyage, pour<br />

lʹaller et le retour seulement, à moins <strong>de</strong> 250 ou 300f par personne, et, dʹune autre part, la<br />

vie en ces pays est fort chère pour les étrangers. Il nʹest pas certain dʹailleurs que le climat<br />

où je suis convînt à notre cher f. Joseph; jʹai, pour ma part, bien <strong>de</strong> la peine à mʹy accoutu‐<br />

mer, et je suis ici bien plus souffrant que je ne lʹétais à Vaugirard. La mer et le voisinage<br />

<strong>de</strong>s montagnes donnent à lʹair quelque chose <strong>de</strong> mordant qui mʹirrite la poitrine et me<br />

cause une constante inflammation. Dans la journée, le soleil est radieux, la température<br />

sʹélève au <strong>de</strong>là <strong>de</strong> 20 <strong>de</strong>grés, mais le matin et le soir elle baisse à 4 ou 6. Ces variations su‐<br />

bites ont <strong>de</strong> graves inconvénients. Dans une lettre que je reçois aujourdʹhui <strong>de</strong> nos ff. <strong>de</strong><br />

Nazareth, on me dit que le mé<strong>de</strong>cin dont jʹai pris les avis me conseillerait dʹaller plus loin,<br />

en Italie, pour mʹabriter du vent <strong>de</strong>s Alpes. Je suis loin <strong>de</strong> pencher à prendre ce parti, mais<br />

il se pourrait pourtant que je ne pusse définitivement rester à Cannes.<br />

Je crois que ce serait un grand point pour le f. Joseph si vous pouviez lui donner<br />

une chambre exposée au midi, et veiller à ce quʹil respirât le moins possible lʹair froid et<br />

humi<strong>de</strong>. Je ne verrais guère, sʹil fallait absolument le remplacer chez vous, dʹautre moyen à<br />

prendre que <strong>de</strong> vous concerter <strong>avec</strong> le f. Caille, pour quʹil échangeât temporairement <strong>avec</strong><br />

vous le r. Guillot, qui se porte bien et a lʹhabitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s enfants, contre M. Cousin qui a be‐<br />

soin présentement <strong>de</strong> ménagement. Cet arrangement ne <strong>de</strong>vrait, ce me semble, être pris<br />

quʹen cas dʹabsolue nécessité; car M. Guillot commence à se bien installer à Amiens et y à<br />

rendre <strong>de</strong>s services réels à M. Caille. Ce serait pour ce <strong>de</strong>rnier une difficulté assez gran<strong>de</strong><br />

dʹavoir à mettre au fait <strong>de</strong>s affaires et travaux un autre frère. Les personnes du <strong>de</strong>hors qui<br />

concourent à ses œuvres auront aussi peut‐être quelque contrariété <strong>de</strong> changements si fré‐<br />

quents. Si la situation du f. Joseph empirait, nous pourrions, cher Monsieur lʹabbé, aviser à<br />

ce que le cas <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rait.<br />

Je crois que lʹhuile <strong>de</strong> foie <strong>de</strong> morue peut lui être salutaire. Les mé<strong>de</strong>cins conseillent<br />

toutefois <strong>de</strong> faire, après certains temps, quelques interruptions, lʹeffet <strong>de</strong> ce médicament<br />

sʹannulant presque quand on a trop lʹhabitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> le prendre.<br />

Jʹavais bien présumé dʹavance que notre f. Carment vous donnerait parfois quelques<br />

contrariétés; jʹespère toutefois quʹelles ne seront pas assez fréquentes et assez graves pour<br />

entraver le bien dans votre maison et vous être une difficulté réelle. Si, ce quʹà Dieu ne<br />

plaise, il en était ainsi, soyez bien assuré, cher Monsieur lʹabbé, que nous nʹhésiterions pas<br />

un instant à le rappeler à Vaugirard où, mieux accoutumés aux impétuosités mal réglées<br />

<strong>de</strong> son humeur, nous pouvons en souffrir moins. Nous lʹavons choisi pour vous, parmi les<br />

autres, parce quʹil a quelque instruction et éducation, quʹil a au fond <strong>de</strong>s qualités <strong>de</strong> cœur<br />

vraiment précieuses, un sincère désir du bien, une volonté constante <strong>de</strong> se sanctifier et <strong>de</strong><br />

544


<strong>de</strong>venir un vrai religieux, mais la faiblesse <strong>de</strong> sa tête le fourvoie souvent. Il faut, en pre‐<br />

nant son temps, le remettre dans la raison et dans la voie que nous avons à suivre. Il rentre<br />

alors en lui‐même, jusquʹà nouvelle rechute. Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> bien instamment, cher Mon‐<br />

sieur lʹabbé, votre charitable indulgence pour lui, mais je vous prie plus instamment en‐<br />

core <strong>de</strong> ne pas le laisser sʹécarter <strong>de</strong> lʹentière déférence et soumission quʹil vous doit, <strong>de</strong> ne<br />

jamais cé<strong>de</strong>r sur les principes et <strong>de</strong> concilier ainsi envers lui le support miséricordieux<br />

<strong>avec</strong> une constante fermeté. Jamais, à Vaugirard, nous nʹavons fléchi <strong>avec</strong> lui. Nous avons<br />

pu pardonner quelque chose à son irascibilité qui est, à nos yeux, une véritable infirmité,<br />

mais sans préjudice dʹune obéissance entière et absolue dont il ne sʹest jamais écarté. Jʹin‐<br />

siste un peu sur ce point, parce que jʹentrevois dans votre lettre quʹil aurait fait une sorte<br />

<strong>de</strong> résistance à vos dispositions concernant le renouvellement <strong>de</strong>s vœux. Il pouvait vous<br />

fournir <strong>de</strong>s renseignements, vous soumettre <strong>de</strong>s observations, mais cela fait, il <strong>de</strong>vait sʹen<br />

rapporter à votre jugement et déférer pleinement à votre décision. Soyez bien assuré, cher<br />

Monsieur lʹabbé, que votre autorité sera toujours soutenue par nous, à lʹégard <strong>de</strong> tous les<br />

frères, quels quʹils soient; le principe dʹobéissance doit être posé et soutenu vigoureuse‐<br />

ment parmi nous, nous ne le laisserons jamais fléchir par notre faute, jʹen ai, du moins, le<br />

désir et lʹespérance. Pour le jeune Thuillier, il sʹest toujours montré flexible; il a seulement<br />

besoin, comme tous les jeunes gens <strong>de</strong> cet âge et <strong>de</strong> cette condition, dʹêtre soutenu et en‐<br />

couragé.<br />

Je recomman<strong>de</strong>rai bien au divin Seigneur le succès <strong>de</strong> votre retraite, et je <strong>de</strong>man<strong>de</strong>‐<br />

rai aussi à nos frères <strong>de</strong> ne pas oublier vos chers enfants dans leurs prières. Nous nous<br />

souviendrons aussi <strong>de</strong> M. Cousin et <strong>de</strong> notre jeune f. Michel. Je serai bien aise quʹils<br />

mʹécrivent quelques mots après le prononcé <strong>de</strong> leurs vœux. Je trouve bien aussi que nos<br />

jeunes amis Jules et Ramu fassent leur consécration préliminaire. Je vous prie <strong>de</strong> me dire à<br />

lʹoccasion comment elle se fait pour lʹengagement et pour le cérémonial.<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> joie que notre cher M. <strong>de</strong> Lauriston a trouvé, dans les offres qui lui<br />

ont été faites, une nouvelle occasion <strong>de</strong> sacrifice. Tout me laisse à penser que Dieu lʹa<br />

vraiment appelé et choisi, et quʹil saura répondre à cet appel miséricordieux du Seigneur.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, je suis <strong>de</strong> cœur au milieu <strong>de</strong> votre chère maison qui<br />

mʹest aussi chère, soyez‐en bien assuré, que ses sœurs aînées. Jʹembrasse vos frères et<br />

vous‐même bien affectueusement.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

427 264<br />

428 à M. Paillé<br />

MLP. donne <strong>de</strong>s détails sur sa santé et sur le climat <strong>de</strong> Cannes. La mauvaise qualité du vin est une <strong>de</strong>s causes <strong>de</strong><br />

ses misères. La chapelle <strong>de</strong> Nazareth. Abonnement au journal LʹUnivers. Projet <strong>de</strong> Conférence <strong>de</strong> St‐Vt‐<strong>de</strong>‐Paul.<br />

Bien gar<strong>de</strong>r, aux archives, la lettre relatant les <strong>de</strong>rniers instants <strong>de</strong> M me Taillandier.<br />

Cannes, 30 novembre 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> votre affectueuse sollicitu<strong>de</strong> pour ma santé; je vous sais bien<br />

bon gré aussi <strong>de</strong> la pensée que vous avez eue <strong>de</strong> consulter lʹexcellent M. Tessier sur les<br />

264 Cette lettre est reportée à la 369 bis.<br />

545


moyens que mes misères pourraient <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r. Jʹaurais gran<strong>de</strong> répugnance à mʹéloigner<br />

davantage; nos petites dispositions sont prises ici, nous commençons à connaître les êtres;<br />

il faudrait sʹinstaller <strong>de</strong> nouveau ailleurs, <strong>avec</strong> nouveaux frais <strong>de</strong> voyage et embarras aussi<br />

réitérés pour nous asseoir à peu près selon nos besoins; je crois quʹil faut que je patiente et<br />

persévère encore. Jʹéprouve ici ce que jʹavais éprouvé au Vernet et à Hyères; le climat du<br />

Midi est bien puissant et bien surexcitant pour mes faibles organes, une température un<br />

peu plus moite et moins mordante quʹon ne lʹa dans ces contrées mʹirait mieux sans doute,<br />

mais où la trouver? Lʹhumidité froi<strong>de</strong> et brumeuse <strong>de</strong> Paris ne me conviendrait pas, et sur‐<br />

tout mʹempêcherait <strong>de</strong> sortir et <strong>de</strong> prendre lʹair, comme jʹen sens le besoin; ici, le temps est<br />

merveilleusement beau; <strong>de</strong>puis un mois nous avons un soleil radieux et nous nʹavons eu<br />

que quelques heures <strong>de</strong> pluie, mais cette aridité même a ses inconvénients; puis, les varia‐<br />

tions <strong>de</strong> la température sont gran<strong>de</strong>s; ordinairement, nous avons le matin <strong>de</strong> 5 à 7 <strong>de</strong>grés;<br />

dans le jour plus <strong>de</strong> 20, au soleil surtout; le soir, 8 <strong>de</strong>grés, et, dans lʹintérieur <strong>de</strong> lʹapparte‐<br />

ment, habituellement 13 ou 14.<br />

Je crois que lʹindisposition qui mʹest venue une dizaine <strong>de</strong> jours après mon arrivée<br />

pourrait être, autant que je puis le présumer, une sorte <strong>de</strong> pleurésie. Cʹétait un mal dans le<br />

dos et les épaules, <strong>avec</strong> une vive douleur au poumon droit, et une violente inflammation à<br />

la poitrine, allant jusquʹaux entrailles et me causant une ar<strong>de</strong>nte altération. Cʹest à ce mo‐<br />

ment que sont venus, pendant <strong>de</strong>ux jours seulement, quelques crachats <strong>de</strong> sang <strong>avec</strong> un<br />

peu <strong>de</strong> toux douloureuse et irritée. Comme je le fais quand je sens lʹinflammation à lʹinté‐<br />

rieur, jʹai modifié mon régime, diminué lʹusage <strong>de</strong> la vian<strong>de</strong>, réduit celui du vin presque à<br />

rien; lʹinflammation <strong>de</strong> la poitrine a diminué après quelques jours, je ne tousse plus, mais<br />

le système tout entier reste échauffé et toujours prêt à prendre feu, je ne sais comment<br />

trouver <strong>de</strong>s aliments assez doux, mes entrailles ten<strong>de</strong>nt toujours à lʹinflammation, ma poi‐<br />

trine est faible et toujours assez douloureuse; je nʹai pas encore, en un mot, trouvé mon as‐<br />

siette et mis mon organisme en harmonie <strong>avec</strong> le milieu dans lequel je suis.<br />

Vous savez quʹune particularité <strong>de</strong> ma frêle constitution, cʹest que les qualités du<br />

vin que jʹemploie influent singulièrement sur moi; bien que je nʹen boive guère que <strong>de</strong>ux<br />

bouteilles par semaine et que je le trempe toujours <strong>de</strong> beaucoup dʹeau, il mʹest impossible<br />

<strong>de</strong> marcher néanmoins tant que je nʹai pas, sous ce rapport, trouvé la combinaison conve‐<br />

nable. A Vaugirard, jʹy étais parvenu en mêlant à celui que jʹai à la maison un vin <strong>de</strong> Bor‐<br />

<strong>de</strong>aux fort chétif, que me vendait à la bouteille M. Dupuis, rue du Regard. Ici, toutes mes<br />

tentatives ont été inutiles; le vin que jʹai apporté, déjà trop ar<strong>de</strong>nt, lʹest beaucoup moins<br />

que tout ce quʹon trouve ici, même dans les vins <strong>de</strong> Bor<strong>de</strong>aux qui sont fort chers (3f au<br />

moins la bouteille), supérieurs sans doute, en qualité, à celui <strong>de</strong> Paris, mais bien plus capi‐<br />

teux. Ne pouvant me déci<strong>de</strong>r à cet étrange moyen <strong>de</strong> faire venir <strong>de</strong> mauvais vin <strong>de</strong> Paris,<br />

jʹai essayé, <strong>avec</strong> beaucoup dʹeau cela va sans dire, tous les vins du pays, au <strong>de</strong>dans et au<br />

<strong>de</strong>hors <strong>de</strong> Cannes; je nʹai trouvé que <strong>de</strong>s vins chauds, capiteux, irritants, surexcitants. Cʹest<br />

là, je crois, une <strong>de</strong>s principales causes <strong>de</strong> toutes mes misères, parce que je ne puis lutter<br />

contre le principe dʹinflammation que lʹair, le soleil peut‐être, la mer, etc. apportent en<br />

moi.<br />

La pensée mʹest venue que ce serait pour vous un mince embarras et, en soi, une<br />

minime dépense <strong>de</strong> port, <strong>de</strong> faire un essai <strong>avec</strong> 6 ou 8 bouteilles au plus, qui me suffiraient<br />

largement pour faire une épreuve <strong>de</strong> six semaines. Si, durant ce temps, lʹéquilibre se réta‐<br />

blissait dans ma santé, il faudrait, quoique en gémissant, faire concession à <strong>de</strong> pareilles in‐<br />

546


firmités et me faire un envoi <strong>de</strong> Paris dʹune vingtaine <strong>de</strong> bouteilles en plus; sinon, je me ré‐<br />

signerais et prendrais, je lʹespère, en patience un mal dont je ne verrais point le remè<strong>de</strong>.<br />

Si vous ne voyez pas trop dʹinconvénient à cet arrangement, cher, je vous prierais<br />

<strong>de</strong> passer chez M. Dupuis et <strong>de</strong> prendre chez lui, pour me les expédier, 3 ou 4 bouteilles <strong>de</strong><br />

Bor<strong>de</strong>aux à 2f, et 3 ou 4 à 1f. tel quʹil me le vendait; lʹun et lʹautre mʹallaient à peu près éga‐<br />

lement bien.<br />

Je ne crois pas quʹil faille juger du climat du Midi par ce que jʹen éprouve; il vous<br />

souvient quʹà Hyères lʹan <strong>de</strong>rnier, tous les mala<strong>de</strong>s allaient bravement au <strong>de</strong>hors, tandis<br />

que moi, trouvant lʹair trop dur, jʹétais obligé <strong>de</strong> me couvrir la bouche et le visage. Ici, la<br />

peau <strong>de</strong> mes mains est <strong>de</strong>venue ru<strong>de</strong>, comme elle lʹétait dans les grands froids ou aux<br />

vents <strong>de</strong> février à Paris. Je crois quʹentre Hyères, Cannes et Nice, qui se touchent, il y a, à<br />

vrai dire, bien peu <strong>de</strong> différence; ce sont dʹadmirables pays, on y échappe à tout ce que<br />

lʹhiver à <strong>de</strong> triste et <strong>de</strong> rigoureux ailleurs, mais ils ne peuvent être absolument le paradis<br />

terrestre, ils ont leurs difficultés pour <strong>de</strong>s organisations trop tendres et trop débiles. Quant<br />

à Menton, je ne sais pas du tout comment on y est; je prendrai quelques renseignements<br />

pour déférer aux conseils <strong>de</strong> M. Tessier, dans lequel jʹai une entière confiance; ce serait<br />

pourtant un embarras assez grand pour moi <strong>de</strong> me rendre dans un pays où je ne connais<br />

âme qui vive et où jʹaurais, sans aucun ai<strong>de</strong>, à pourvoir à une nouvelle installation. Ici, les<br />

recommandations du bon abbé Taillandier mʹavaient préparé les voies; jʹavais, à mon arri‐<br />

vée, un logement trouvé, toutes sortes dʹassistances bienveillantes mʹont entouré et ont pa‐<br />

ré à mon inexpérience <strong>de</strong>s gens et <strong>de</strong>s lieux; je nʹaurais pas sans doute ailleurs les mêmes<br />

conditions. Je désirerais donc essayer encore un peu si, à lʹai<strong>de</strong> du vin que vous mʹenver‐<br />

riez et en prenant beaucoup <strong>de</strong> précautions, je ne pourrais mʹacclimater; si la souffrance <strong>de</strong><br />

la poitrine et lʹinflammation dʹentrailles persistent, je prendrai <strong>de</strong> nouveau lʹavis du bon<br />

M. Tessier.<br />

Ne croyez pas dʹailleurs que je fasse dʹimpru<strong>de</strong>nce, je ne sors quʹaprès le soleil levé<br />

(il se lève, il est vrai, dʹordinaire vers 8h. du matin) et je rentre quand il se couche; cʹest une<br />

recommandation quʹon fait ici à tous les mala<strong>de</strong>s, les rosées étant très abondantes et froi‐<br />

<strong>de</strong>s.<br />

Jʹarrivais à ce point <strong>de</strong> ma lettre quand on me remet votre <strong>de</strong>rnière, dans laquelle<br />

vous mʹinvitez à écrire directement à M. Tessier; je suis si confus <strong>de</strong> vous en avoir déjà tant<br />

dit dans la présente sur ma santé que je ne puis prendre sur moi dʹen refaire une autre sur<br />

le même sujet. Comme M. Tessier est bien pressé, vous pourriez lui indiquer dans celle‐ci<br />

ce qui le mettrait mieux au courant <strong>de</strong> ma situation.<br />

Je vous exprime encore tout mon regret, mon bon ami, <strong>de</strong>s interminables détails où<br />

je suis entré ici sur ma personne et ma santé; jʹai cru quʹil le fallait, puisque vous aviez<br />

obligeamment pris sur vous <strong>de</strong> consulter à mon sujet M. Tessier. Si vous aviez occasion <strong>de</strong><br />

le revoir, assurez‐le <strong>de</strong> toute ma reconnaissance et <strong>de</strong> tout mon dévouement.<br />

Ce que vous avez fait relativement à la chapelle me paraît bien; il faut attendre<br />

maintenant, et laisser M. le Curé prendre <strong>de</strong> lui‐même telle résolution qui lui conviendra;<br />

nous en parlerions, sʹil y avait lieu. Je ne connais pas du tout M. le Curé <strong>de</strong> S t ‐Philippe‐du‐<br />

Roule, mais je vais vous envoyer la lettre que vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z, sauf à vous à nʹen pas<br />

faire usage si vous trouvez mieux <strong>de</strong> chercher quelque autre voie.<br />

Je vous remercie pour lʹUnivers; ne prenez quʹun abonnement <strong>de</strong> trois mois, cette<br />

dépense me pèse un peu sur la conscience, je pense que nous nous en tiendrons à ce tri‐<br />

547


mestre, je trouverai peut‐être ensuite quelque moyen <strong>de</strong> me pourvoir ici; je nʹai trouvé que<br />

La Presse, jʹen ai lu un numéro, mais cʹétait encore trop.<br />

Lʹaffaire <strong>de</strong> la Conférence ici marche lentement, elle me semble toutefois avancer un<br />

peu; ces délais ont ce bon côté quʹils amènent pour moi quelques relations <strong>avec</strong> ceux qui<br />

<strong>de</strong>vront concourir à lʹœuvre; il <strong>de</strong>viendra dès lors plus facile dʹinfluer un peu sur eux. Ces<br />

délais ne dépen<strong>de</strong>nt pas dʹailleurs <strong>de</strong> moi.<br />

Notre jeune frère Ernest est bien sensible à votre bon souvenir; il va bien jusquʹici et<br />

se soutient dans ses bonnes dispositions.<br />

Jʹai envoyé au f. Myionnet une lettre très touchante que mʹavait écrite notre bon ab‐<br />

bé Taillandier sur les <strong>de</strong>rniers instants <strong>de</strong> sa sainte mère; prenez‐en tous communication et<br />

veillez bien à ce quʹelle ne soit pas perdue; je tiens bien vivement à ce quʹelle soit conser‐<br />

vée dans nos archives.<br />

Adieu, mon bien bon ami; embrassez tous mes enfants <strong>de</strong> Nazareth pour moi, je les<br />

aime tendrement en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je vais voir si un petit pays appelé Le Cannet, à trois quarts <strong>de</strong> lieue <strong>de</strong> Cannes,<br />

mieux abrité et plus éloigné <strong>de</strong> la mer, aurait un asile pour moi. Sʹil fallait absolument<br />

changer, ne pourrais‐je aller à Rome dont lʹair est plus mou et moins âpre quʹici? Le<br />

voyage alors aurait un but, et dʹailleurs jʹy retrouverais <strong>de</strong>s amis. On me dit ici que Menton<br />

est dans un pays montagneux plus froid et peu abrité <strong>de</strong> la mer.<br />

429 à M. Caille<br />

Nouvelles <strong>de</strong>s Œuvres. Pas <strong>de</strong> désirs trop arrêtés, se laisser conduire par la volonté <strong>de</strong> Dieu. Veiller à ne pas mê‐<br />

ler plusieurs intérêts qui sʹaccor<strong>de</strong>raient mal dans lʹavenir. Comment renforcer les liens fraternels entre les œu‐<br />

vres <strong>de</strong> Paris et celles <strong>de</strong> province. Rappel <strong>de</strong> la disparition <strong>de</strong> M me Taillandier.<br />

Cannes, 2 décembre 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> votre bonne et filiale lettre; plus je suis loin <strong>de</strong> mes bien‐aimés<br />

enfants, plus il mʹest doux <strong>de</strong> recevoir quelque marque <strong>de</strong> leur souvenir affectueux. Jʹap‐<br />

prends toujours aussi <strong>avec</strong> joie que notre chère famille, à Amiens comme ailleurs, gar<strong>de</strong><br />

ses bonnes dispositions et tend <strong>de</strong> plus en plus à cette union <strong>avec</strong> Dieu qui met la paix<br />

dans les cœurs et les rend propres aux œuvres <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong> et <strong>de</strong> sanctification. Avancez<br />

toujours dans cette bonne voie, très cher ami, et le Seigneur achèvera la petite fondation<br />

quʹil a commencée chez vous; elle sʹaffirmera et prendra les développements qui seront<br />

conformes aux <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> notre divin Maître; il est bon, il est doux <strong>de</strong> se laisser ainsi<br />

conduire au gré <strong>de</strong> sa volonté, sans vues préconçues ou du moins sans désirs trop arrêtés.<br />

Je mʹunirai à vous, ainsi que notre jeune f. Ernest, pour la neuvaine à la Ste Vierge<br />

Immaculée, à lʹintention <strong>de</strong> votre projet dʹacquisition; si cette affaire se terminait définiti‐<br />

vement, tâchez que la position <strong>de</strong> votre œuvre y soit un peu nette; on prépare quelquefois<br />

<strong>de</strong>s embarras pour lʹavenir en mêlant ensemble plusieurs intérêts qui peuvent plus tard<br />

mal sʹaccor<strong>de</strong>r.<br />

548


Je suis bien touché <strong>de</strong> votre attention à prier pour moi, bien reconnaissant aussi <strong>de</strong><br />

la bonté <strong>de</strong> M. Mangot qui a offert le S t Sacrifice pour moi; je reste encore souffrant, je<br />

mʹacclimate ici assez difficilement, lʹair <strong>de</strong> la mer et le voisinage <strong>de</strong>s montagnes étant <strong>de</strong>ux<br />

forces bien vigoureuses pour mes faibles organes. Mais souffrir est un moyen <strong>de</strong> glorifier<br />

Dieu, <strong>de</strong> se sanctifier et <strong>de</strong> coopérer aux œuvres saintes, si on sait bien accepter sa croix et<br />

lʹunir à celle du divin Sauveur; <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z‐Lui, cher ami, que jʹapprenne cette précieuse<br />

science, dans laquelle on entre si difficilement et à laquelle répugne si fort notre pauvre<br />

nature.<br />

Je ne souffre pas seul en ce moment dans notre petite famille; M. Halluin mʹécrit<br />

que le f. Loquet tousse et crache le sang, que le mé<strong>de</strong>cin dit quʹil faudrait pour un temps<br />

beaucoup ménager sa poitrine et donner du repos au pauvre jeune homme; M. Halluin<br />

voit là quelques difficultés probables pour son service, et il <strong>de</strong>man<strong>de</strong> sʹil nʹy aurait pas lieu<br />

dʹéchanger, en ce cas, un <strong>de</strong> ses frères moins expérimentés contre un frère plus formé;<br />

lʹétat du f. Loquet pouvant encore sʹaméliorer, je suis convenu <strong>avec</strong> notre bon abbé que<br />

nous allions prendre patience provisoirement et prier Dieu <strong>de</strong> nous venir en ai<strong>de</strong>.<br />

Nos ff. <strong>de</strong> Vaugirard et <strong>de</strong> Nazareth vont bien; jʹai reçu <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rniers <strong>de</strong>s lettres tou‐<br />

tes récentes, mais <strong>de</strong>puis une dizaine <strong>de</strong> jours M. Myionnet ne mʹa pas écrit; cʹest bien plus<br />

<strong>de</strong> délai quʹil nʹen met dʹordinairement, mais ceux <strong>de</strong> Nazareth mʹauraient averti sʹil y eût<br />

eu quelque fait notable, je nʹai donc pas dʹinquiétu<strong>de</strong> sérieuse <strong>de</strong> ce retard. La solennité du<br />

renouvellement <strong>de</strong>s vœux, présidée par M. le Vicaire G l Dedoue et notre p. Beaussier,<br />

sʹétait bien passée; M. <strong>de</strong> Lauriston, retournant à Arras après une absence <strong>de</strong> quelques<br />

jours, se trouvait aussi à ce moment à Vaugirard. Il montre toujours la bonne disposition<br />

<strong>de</strong> se consacrer au service <strong>de</strong> Dieu; M. Halluin mʹécrit que, <strong>de</strong>s offres très avantageuses lui<br />

ayant été faites pour un emploi considérable à Nantes où est toute sa famille, il est fort dé‐<br />

cidé à les refuser; continuez, mon bon ami, <strong>avec</strong> vos frères, à prier pour lui, afin que la<br />

grâce lʹassiste dans la consommation <strong>de</strong> son sacrifice.<br />

M. Allard mʹa écrit, ainsi quʹà vous, une petite lettre dont jʹai été très satisfait; jʹes‐<br />

père que ce bon jeune homme va prendre son assiette et se donnera <strong>de</strong> tout cœur au Sei‐<br />

gneur.<br />

M. Halluin se plaignait, dans une <strong>de</strong> ses <strong>de</strong>rnières lettres, que les communications<br />

entre les diverses parties <strong>de</strong> notre petite famille nʹétaient pas assez fréquentes et assez ré‐<br />

gulières, et quʹon ne sentait pas assez intimement la vie commune. Je lʹavais déjà pensé;<br />

nous tâcherons dʹaviser à quelque moyen pour répondre à ce besoin; si vous voyez quel‐<br />

que voie convenable, je vous prie <strong>de</strong> me lʹindiquer. Jʹavais songé à faire prendre tous les<br />

quinze jours un relevé <strong>de</strong> ce que le journal tenu quotidiennement à Vaugirard pourrait<br />

avoir dʹintéressant, et à lʹenvoyer à Arras et à Amiens qui, dans leur accusé <strong>de</strong> réception,<br />

nous diraient à leur tour tout ce qui se serait passé <strong>de</strong> notable chez eux.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong>s détails que vous me donnez sur la mort du jeune Lavernaud et<br />

sur les soins charitables quʹil a reçus <strong>de</strong> vos enfants; cʹest une œuvre méritoire, je lʹespère,<br />

pour tous; jʹen bénis le bon Dieu; nous avons prié ici pour ce pauvre enfant.<br />

Vous savez que nous avons perdu, dans la personne <strong>de</strong> M me Taillandier, une amie<br />

généreuse, bien dévouée à toute notre petite famille; jʹinviterai M. Myionnet à vous en‐<br />

voyer copie <strong>de</strong> la lettre que notre bon abbé Taillandier, son fils, mʹa écrite sur ces <strong>de</strong>rniers<br />

moments; rien nʹest plus édifiant. Vendredi, les <strong>de</strong>ux maisons réunies ont fait à Nazareth<br />

un service solennel; la famille, les Conférences St‐Sulpice et S t ‐Germain‐<strong>de</strong>s‐Prés, la S te ‐<br />

549


Famille, beaucoup <strong>de</strong> pauvres y assistaient; cʹest une <strong>de</strong>tte <strong>de</strong> reconnaissance que nous<br />

avons voulu payer envers cette amie si dévouée. Je la recomman<strong>de</strong> aux prières <strong>de</strong> votre<br />

maison; cʹest une peine <strong>de</strong> cœur pour moi, elle mʹétait comme une sœur.<br />

Adieu, cher bon ami; le bon esprit dʹunion et <strong>de</strong> vrai dévouement règne jusquʹici<br />

parmi nous, travaillons à le maintenir et à lʹaccroître, puisque cʹest vraiment lʹesprit <strong>de</strong><br />

Dieu.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Offrez mon respect, je vous prie, à MM. Mangot, <strong>de</strong> Brandt, Cacheleux.<br />

430 à M. Guillot<br />

Importance <strong>de</strong> la régularité et du bon emploi du temps. Le servage <strong>de</strong> Marie, du père Grignion <strong>de</strong> Montfort.<br />

Comment bien comprendre cette pratique <strong>de</strong> dévotion. Fruits à en attendre.<br />

Cannes, 3 décembre 1856<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Jʹai reçu <strong>avec</strong> plaisir votre bonne petite lettre, et jʹai lu <strong>avec</strong> grand intérêt le détail<br />

que vous me donnez <strong>de</strong> vos occupations; je suis très satisfait <strong>de</strong> voir quʹelles sont à la fois<br />

régulières et suffisantes pour bien remplir vos journées; la régularité et le bon emploi du<br />

temps sont <strong>de</strong>ux moyens excellents pour nous soutenir et nous édifier; Dieu y a attaché <strong>de</strong><br />

très gran<strong>de</strong>s grâces que vous recevrez, je lʹespère, abondamment. Jʹapprouve bien, cher en‐<br />

fant, la pensée que vous avez <strong>de</strong> vous consacrer tout particulièrement à la Ste Vierge et<br />

dʹentrer dans lʹassociation quʹon appelle le Servage <strong>de</strong> Marie265 , consistant à lui dédier sa<br />

personne et toutes ses actions. Vous ne <strong>de</strong>vrez toutefois jamais perdre <strong>de</strong> vue que la T. Ste Vierge nʹest pas la fin <strong>de</strong>rnière <strong>de</strong> notre culte, quʹelle nʹest que notre intermédiaire pour ar‐<br />

river à Jésus, son divin Fils, unique auteur et consommateur <strong>de</strong> notre salut. Sous cette ré‐<br />

serve, je vous permets dʹentrer dans cette pieuse et respectable association. Jʹai la confiance<br />

que ces rapports plus intimes et plus habituels <strong>avec</strong> la Ste Vierge vous donneront quelque<br />

peu <strong>de</strong> vertus et perfections, car on prend dʹordinaire les manières dʹêtre et les dispositions<br />

<strong>de</strong> ceux quʹon fréquente journellement; <strong>de</strong>meurons donc, bien cher ami, dans la société<br />

habituelle <strong>de</strong> J. et M., tâchons <strong>de</strong> pénétrer jusquʹà leurs Cœurs sacrés, et nous reproduirons<br />

en nos sentiments et en nos actes quelque reflet <strong>de</strong> leur admirable sainteté.<br />

Adieu, bien cher ami, notre jeune f. Ernest et moi, nous prions pour vous et vous<br />

embrassons bien affectueusement.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

431 à M. Maignen<br />

Ne pas se laisser entraîner par le mouvement <strong>de</strong>s Œuvres. Les insuccès apparents précè<strong>de</strong>nt dʹordinaire les grâ‐<br />

ces divines. Installation dʹune statue <strong>de</strong> sainte Geneviève.<br />

265 Cette pratique <strong>de</strong> dévotion mariale se rattachait aux écrits <strong>de</strong> saint Louis-Marie Grignion <strong>de</strong> Montfort (1673-1716). Quatorze ans<br />

plus tôt, en 1842, on avait découvert fortuitement, dans un grenier <strong>de</strong> la Maison-Mère <strong>de</strong>s Pères Montfortains, à Saint-Laurent-sur-<br />

Sèvre, le manuscrit du Traité <strong>de</strong> la vraie dévotion à la Sainte Vierge.<br />

550


9 décembre 1856<br />

Cher enfant en N.S.,<br />

Vous ne mʹécrivez plus, je serais bien satisfait pourtant <strong>de</strong> savoir où en sont nos af‐<br />

faires; je pense que lʹinstallation du patronage à Nazareth266 complique encore vos occupa‐<br />

tions; je vous recomman<strong>de</strong> bien, cher enfant, dʹajourner un peu, dans cet emménagement,<br />

tout ce qui nʹest pas dʹurgente nécessité, <strong>de</strong> peur que vos journées ne suffisent pas à tout et<br />

que vous ne négligiez forcément <strong>de</strong>s intérêts bien pressants pour nous; la saison dʹhiver<br />

durera bien peu maintenant, cʹest le seul moment où nous puissions recueillir <strong>de</strong>s ressour‐<br />

ces, il faut donc la bien mettre à profit. Avez‐vous pu payer les intérêts échus à M. <strong>de</strong> Ker‐<br />

gorlay, <strong>de</strong> Fontette, etc.?<br />

Ecrivez‐moi, ne fut‐ce que quelques lignes; je crains parfois que le far<strong>de</strong>au ne vous<br />

accable et que vos forces nʹy suffisent plus. Appuyez‐vous bien sur le divin Seigneur, la Ste Vierge, St Joseph et St Vincent, vous serez fort surnaturellement, cʹest‐à‐dire à miracle,<br />

contre toute espérance. Les difficultés et insuccès apparents sont un gage ordinaire dʹune<br />

réussite prochaine: qui seminant in lacrymis, in exultatione metent267 ; laissez tomber souvent<br />

ces paroles sur votre cœur, car cʹest lʹEsprit Saint lui‐même qui les a écrites pour les servi‐<br />

teurs <strong>de</strong> Dieu.<br />

Je désire que vous mettiez le plus tôt possible la statue <strong>de</strong> Ste Geneviève dans la<br />

chapelle <strong>de</strong> Nazareth; je lʹavais promis à la bonne sainte dans un pèlerinage, il y a trois<br />

ans268 ; je pense que la plus gran<strong>de</strong> console <strong>de</strong> Calvat suffirait pour cela.<br />

Je vous ai dit ma mésaventure pour le livre envoyé <strong>de</strong> chez M. Lecoffre, peut‐être<br />

par notre bon ami M. Berthuot; on ne me lʹa point rapporté, je crains bien <strong>de</strong> ne le point<br />

revoir; il va sans dire que M. Berthuot, si cʹest <strong>de</strong> lui quʹétait lʹenvoi, ne <strong>de</strong>vra rien perdre<br />

en cette affaire. Si vous avez quelque livre à mʹenvoyer, servez‐vous <strong>de</strong> la poste.<br />

Adieu, bien cher enfant, je vous embrasse tendrement en N.S.<br />

Votre vieil ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

432 à M. Planchat<br />

M. Planchat doit dominer son impétuosité naturelle et se laisser conduire par son directeur, le père Beaussier.<br />

Les Conférences ecclésiastiques. Les Frères laïcs ont besoin d’être soutenus. MLP. prie pour la famille Planchat.<br />

Cannes, 10 décembre 1856<br />

dans lʹoctave <strong>de</strong> lʹImmaculée Conception<br />

Très cher abbé et fils en N.S.,<br />

Jʹattendais <strong>de</strong>puis quelque temps la petite lettre que vous mʹavez écrite, car vous<br />

nʹêtes jamais <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rniers quand il sʹagit dʹune prévenance et dʹune attention <strong>de</strong> cœur; jʹy<br />

266<br />

"Nazareth aura vécu <strong>de</strong> beaux moments en cette année 1856…Mgr <strong>de</strong> Ségur était venu prêcher pour les pauvres pendant le Carême…l'Œuvre<br />

du Patronage avait un nouveau prési<strong>de</strong>nt Paul Decaux…M. Maignen avait établi une nouvelle hiérarchie dans son<br />

œuvre, les dignitaires formant la tête du patronage en assumant différentes responsabilités…à la Fête-Dieu, le 25 mai, dans la<br />

gran<strong>de</strong> salle, on inaugure la première exposition <strong>de</strong>s travaux présentés par les apprentis parisiens…" (Cf. Un autre Vincent <strong>de</strong><br />

Paul, G.A. Boissinot, p. 280).<br />

267<br />

Ps 125, 5.<br />

268<br />

"Cette promesse avait trait, sans doute, à la fondation <strong>de</strong> Nazareth. La communauté <strong>de</strong> Nazareth, et la Maison-Mère, ont toujours<br />

conservé l'usage <strong>de</strong> faire chaque année le pèlerinage au tombeau <strong>de</strong> sainte Geneviève, patronne <strong>de</strong> Paris. A cette époque, l'un <strong>de</strong>s<br />

buts <strong>de</strong> promena<strong>de</strong> <strong>de</strong> la Maison-Mère et <strong>de</strong> toute la Communauté, les jours <strong>de</strong> clôture <strong>de</strong>s retraites, était l'église <strong>de</strong> Sainte-<br />

Geneviève à Nanterre". (Vie <strong>de</strong> <strong>Jean</strong>-<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong>, I, p.556).<br />

551


ai été bien sensible et je vous en remercie. Jʹai besoin dʹailleurs <strong>de</strong> rester en communication<br />

intime <strong>avec</strong> tous mes bien‐aimés enfants; je me sens mal à lʹaise quand je ne sais pas au<br />

juste où ils en sont; votre petite épître est venue me rassurer, pour ce qui vous concerne,<br />

puisque vous êtes toujours en bons rapports <strong>avec</strong> Dieu, <strong>avec</strong> vos frères et <strong>avec</strong> vous‐<br />

même; sauf quelques misères quotidiennes qui sont comme la poussière qui vole, que<br />

nous chassons bien quelque peu, mais dont une part inévitablement sʹattache à nous. Cette<br />

poussière, pour vous, bien cher ami, cʹest le défaut <strong>de</strong> règle dans vos mouvements et lʹim‐<br />

pétuosité mal maîtrisée <strong>de</strong> vos saillies naturelles; les réprimer sera sans doute lʹœuvre <strong>de</strong><br />

toute votre vie, mais vous vous y dévouerez <strong>avec</strong> la bonne volonté et la persévérance que<br />

vous mettez dans les œuvres du <strong>de</strong>hors. Il a plu au divin Maître que chacun <strong>de</strong> nous eût<br />

ainsi une double tâche au <strong>de</strong>dans et au <strong>de</strong>hors, lʹune et lʹautre sont également méritoires si<br />

nous y sommes animés par la charité et par le désir <strong>de</strong> glorifier Dieu.<br />

Je me réjouis bien <strong>de</strong> ce que notre p. Beaussier vous apporte <strong>de</strong> nouveau lʹappui <strong>de</strong><br />

ses conseils et <strong>de</strong> ses encouragements, cʹest lʹhomme <strong>de</strong> lʹespérance et <strong>de</strong> la confiance en<br />

Dieu; ceux qui ont ces dons sont puissants pour soutenir les autres. Ne négligez pas, bien<br />

cher ami, <strong>de</strong> profiter <strong>de</strong> ce secours pour vous et, autant que vous le pourrez, tâchez que les<br />

autres en aient aussi le bienfait; veillez en particulier à ce que les petites Conférences qui se<br />

doivent faire tous les quinze jours ne soient pas oubliées, et quʹelles soient aussi assez pré‐<br />

parées pour avoir une réelle utilité 269 .<br />

Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> aussi <strong>de</strong> faire tout ce qui dépendra <strong>de</strong> vous pour édifier les jeunes<br />

ff. laïcs, les préoccupations nombreuses <strong>de</strong> M. Myionnet ne lui laissent pas peut‐être toute<br />

la liberté dʹesprit nécessaire pour que ses soins et sa vigilance ne les négligent jamais; ils<br />

ont besoin <strong>de</strong> beaucoup <strong>de</strong> soutien et, puisquʹil a plu à Dieu que jusquʹici ils nʹeussent pas<br />

<strong>de</strong> maître <strong>de</strong>s novices, il faut que tous les anciens ff., <strong>avec</strong> la mesure et la circonspection<br />

quʹon doit mettre à tout, saisissent toutes les occasions <strong>de</strong> les instruire, <strong>de</strong> les soutenir, <strong>de</strong><br />

les édifier.<br />

Je vais prier à toutes les intentions que vous me recomman<strong>de</strong>z, particulièrement<br />

pour obtenir que lʹappui <strong>de</strong> M. Codant ne manque point à votre S te ‐Famille. Je prierai aussi<br />

pour vos parents que jʹaffectionne sincèrement; Dieu entendra nos vœux pour votre pau‐<br />

vre Eugène 270 , dont la situation est digne dʹintérêt. Je ne crois pas néanmoins quʹon puisse<br />

compter assez sur lui pour le tirer <strong>de</strong> la tutelle salutaire où la Provi<strong>de</strong>nce lʹa mis; je pense<br />

quʹil faut la laisser le conduire, et quʹon risquerait beaucoup en changeant <strong>de</strong> voie.<br />

Adieu, mon bien bon ami; priez <strong>de</strong> votre côté pour moi, la prière est notre vie et le<br />

souffle qui anime nos œuvres, prions donc et ne nous lassons jamais.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

433 à M. Vasseur<br />

La vie nʹest quʹune suite <strong>de</strong> combats. Il faut lutter contre soi‐même sans défaillances. Pour vaincre lʹennemi <strong>de</strong><br />

notre salut, combattre sous lʹétendard du Christ est gage <strong>de</strong> victoire. Créer les occasions <strong>de</strong> sʹentretenir <strong>avec</strong> M.<br />

Myionnet. Il lui donne <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> son frère Ernest.<br />

269<br />

"…dès que nos premiers prêtres furent au nombre <strong>de</strong> quatre, il y avait eu déjà quelques essais <strong>de</strong> conférences ecclésiastiques. (Cf.<br />

VLP. I, p.550).<br />

270 Son jeune frère. C'est à lui que le père Planchat écrira sa <strong>de</strong>rnière lettre avant <strong>de</strong> mourir, le 26 mai 1871.<br />

552


Cannes, 12 décembre 1856<br />

dans lʹoctave <strong>de</strong> lʹImmaculée Conception<br />

Cher enfant en N.S.,<br />

Vous nʹaurez que quelques lignes aujourdʹhui du pays <strong>de</strong> Cannes; je suis <strong>de</strong>puis<br />

quelques jours un peu moins souffrant, mais je suis resté dans une sorte <strong>de</strong> langueur phy‐<br />

sique qui mʹôte le peu dʹesprit dont je pouvais disposer; je ne sais même pas écrire quel‐<br />

ques mots facilement, il faut les tirer lʹun après lʹautre péniblement, comme les seaux dʹeau<br />

dʹun puits. Cʹest pourquoi jʹai tardé à répondre à nos frères, et je nʹenvoie à quelques‐uns<br />

dʹentre eux que <strong>de</strong> petites feuilles trop légères à mon gré pour les édifier comme il me se‐<br />

rait doux <strong>de</strong> le faire. Pour vous, cher enfant, je ne trouve rien autre chose à vous dire, si‐<br />

non quʹil faut gar<strong>de</strong>r vos bonnes dispositions pour lutter au jour le jour <strong>avec</strong> lʹennemi;<br />

vous aurez souvent <strong>de</strong>s batailles; quand la guerre est franchement déclarée, ce ne sont pas<br />

seulement <strong>de</strong>s escarmouches, ce sont <strong>de</strong>s luttes acharnées qui se répètent souvent; il faut<br />

attaquer ou se défendre, monter sur la brèche et tenir tête à lʹennemi; le plus courageux a<br />

la victoire et, quand on a vaincu, on a du temps <strong>de</strong> repos et <strong>de</strong> paix. Cette vie est un peu<br />

ru<strong>de</strong>, mais elle entretient la vigueur et lʹénergie; elle fait <strong>de</strong>s hommes vraiment soli<strong>de</strong>s qui<br />

ne font pas défaut dans lʹoccasion. Ne vous contristez donc pas, cher enfant, si vous avez<br />

souvent à vous prendre corps à corps <strong>avec</strong> lʹennemi <strong>de</strong> votre salut; vous vous souvenez<br />

<strong>de</strong>s paroles du p. Olivaint: Nous ne combattons pas seuls, Jésus est notre chef, et qui com‐<br />

bat sous son étendard est sûr <strong>de</strong> la victoire. Chacune <strong>de</strong> ces luttes grandit vos mérites, ac‐<br />

croît vos forces et vous avance dans la voie du salut.<br />

Je ne mʹinquiète point <strong>de</strong>s quelques difficultés que vous pouvez trouver pour vous<br />

ouvrir en simplicité <strong>avec</strong> notre f. Myionnet; cela ne provient pas dʹun défaut <strong>de</strong> confiance,<br />

mais uniquement <strong>de</strong> ce que, le voyant occupé <strong>de</strong> beaucoup <strong>de</strong> choses, vous nʹavez pas la<br />

disposition que vous auriez autrement pour faire <strong>avec</strong> lui quelques entretiens intimes sur<br />

vos mouvements intérieurs; mais, soyez bien tranquille, pour peu que vous eussiez quel‐<br />

que peine sérieuse, lʹaffection et lʹestime que vous avez pour lui ne manqueraient pas <strong>de</strong><br />

vous porter à une entière confiance envers lui.<br />

Votre petit frère va bien jusquʹici; il reste régulier dans ses exercices <strong>de</strong> piété, bien<br />

attentif dans ses petits travaux; cʹest, en ensemble, un bon f. <strong>de</strong> St ‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul; puisse<br />

le Seigneur le maintenir dans lʹesprit <strong>de</strong> cette sainte vocation et lui donner aussi les<br />

moyens dʹy persévérer en le tirant <strong>de</strong> la conscription; priez pour cela bien fidèlement et<br />

sollicitez aussi autour <strong>de</strong> vous <strong>de</strong>s prières; vous avez autrefois concouru aussi à lʹattirer au<br />

service <strong>de</strong> Dieu, usez du même moyen pour le maintenir.<br />

Adieu, cher enfant; vous savez combien je vous suis tendrement attaché en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

434 à M. Paillé<br />

Le projet <strong>de</strong> Conférence <strong>de</strong> St‐Vt <strong>de</strong> Paul nʹavance guère. Langueur spirituelle du pays cannois. Rôle <strong>de</strong>s œuvres.<br />

Ce qui peut gâter le travail dans le champ du Seigneur: lʹamour‐propre, le manque <strong>de</strong> détachement, dʹintérêt<br />

pour le bien commun, dʹesprit <strong>de</strong> collaboration. Nous mettre hors <strong>de</strong> cause dans nos Œuvres.<br />

Cannes, 14 décembre 1856<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Je pensais quʹune lettre <strong>de</strong> vous mʹarriverait presque en même temps que la petite<br />

caisse <strong>de</strong> vin dont vous mʹavez fait lʹenvoi, cʹest pourquoi je ne vous ai pas jusquʹici accusé<br />

553


éception. Elle mʹest arrivée, je crois, mercredi 10, dans lʹaprès‐midi, en fort bon état et sans<br />

aucun acci<strong>de</strong>nt, grâce au soin quʹon avait pris dʹarranger très attentivement les bouteilles;<br />

je vous en remercie ainsi que ceux <strong>de</strong> nos frères qui ont bien voulu sʹoccuper <strong>de</strong> ces détails.<br />

Lʹadresse nʹétait pas bien exacte; nous ne <strong>de</strong>meurons point à lʹhôtel Pinchina, nous y som‐<br />

mes <strong>de</strong>scendus à notre arrivée, mais nous y sommes restés un jour seulement.<br />

Jʹespère que tout va bien dans votre chère maison ainsi quʹà Vaugirard et dans le<br />

reste <strong>de</strong> notre petite famille; je reçois peu <strong>de</strong> nouvelles; M. Myionnet trop occupé, mʹécrit à<br />

<strong>de</strong> longs intervalles; je dois mʹy résigner, si on ne peut faire mieux.<br />

Notre situation ici est toujours la même; le temps étant <strong>de</strong>venu plus doux après les<br />

pluies, ma poitrine sʹest trouvée moins irritée; il paraît que novembre est un <strong>de</strong>s mois où le<br />

vent souffle particulièrement ici, mais au point <strong>de</strong> la saison où nous sommes, on ne peut<br />

penser que sa rigueur ne se fasse pas encore sentir quelquefois; janvier et février, dit‐on, y<br />

sont fort exposés; nous prendrons le temps tel que le Seigneur le donnera; à brebis tondue,<br />

Dieu mesure le vent; le proverbe sera vrai jusquʹà la fin <strong>de</strong>s temps, car la miséricor<strong>de</strong> di‐<br />

vine ne cessera quʹ<strong>avec</strong> nos misères. Je ne souffre pas beaucoup, mais jʹai ce que mon f.<br />

Beauvais appelle une chétive santé; je vivote, <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s digestions pénibles, un sommeil<br />

agité, un corps faible et impressionnable partout.<br />

Le projet <strong>de</strong> Conférence pour Cannes avance peu ou point du tout; il y a ici malaise<br />

dans les esprits; M. le Curé est peu goûté, quoique ce soit un prêtre méritant et fort régu‐<br />

lier, il sʹentend mal <strong>avec</strong> ses vicaires; il sʹensuit que rien ne va; M. le Curé nʹa personne<br />

sous sa main et ne peut rien entreprendre; les quelques hommes chrétiens qui pourraient<br />

se réunir trouvent les circonstances peu favorables et aiment mieux attendre; dans une<br />

telle disposition <strong>de</strong>s esprits, je ne sais à qui ni à quoi me prendre. On espère quʹau Carême<br />

un Jésuite, qui doit prêcher, pourra produire quelque mouvement; nous verrons ce qui en<br />

adviendra, si nous vivons jusque là; je ne négligerai pas, en attendant, les inci<strong>de</strong>nts favo‐<br />

rables qui pourraient se présenter; ce pays a certainement besoin <strong>de</strong> sortir <strong>de</strong> sa langueur<br />

et <strong>de</strong> son insouciance spirituelle; il reste <strong>de</strong> la foi dans la masse, mais lʹignorance générale<br />

est extrême et les moyens dʹaction sont presque nuls. Cʹest ici quʹon peut voir combien les<br />

œuvres sont utiles pour réveiller lʹattention du peuple et rattacher ses affections aux cho‐<br />

ses religieuses. Cannes nʹa point dʹœuvres, aussi tout y languit et manque <strong>de</strong> vie spirituel‐<br />

lement; M. le Curé le sent, mais il a peur <strong>de</strong> donner par les œuvres trop dʹinfluence à ses<br />

vicaires. Pour centraliser en lui le mouvement et lʹimpulsion, il paralyse tout. Les vicaires<br />

ont du zèle et tout ce quʹil faudrait <strong>de</strong> qualités pour agir utilement, mais ils sont liés et ré‐<br />

duits à une entière nullité; le malaise sʹétend aux laïcs, qui ne sentant <strong>de</strong> correspondance<br />

possible pour eux nulle part, renoncent à toute initiative et à tout effort pour le bien. Quʹil<br />

est triste <strong>de</strong> voir ainsi la misère humaine se mêler à tout et se glisser même dans le champ<br />

du Seigneur. Tâchons, bien cher ami, <strong>de</strong> nous préserver <strong>de</strong> cette contagion; travaillons en<br />

esprit pur et désintéressé, mettons‐nous hors <strong>de</strong> cause dans nos œuvres, faisons les choses<br />

<strong>de</strong> Dieu et non celles <strong>de</strong> notre esprit propre et <strong>de</strong> notre vanité. Quand on suit les choses<br />

<strong>avec</strong> contention et ténacité, on se figure aisément quʹon défend une cause sainte et quʹon<br />

gar<strong>de</strong> la position que Dieu lui‐même a donnée, cʹest presque toujours une gran<strong>de</strong> illusion;<br />

beaucoup concé<strong>de</strong>r, beaucoup accor<strong>de</strong>r à lʹindulgence et à la charité, cʹest lʹesprit <strong>de</strong> J. C. et<br />

cʹest aussi lʹesprit <strong>de</strong> son Eglise; aimons donc et cherchons uniquement Dieu en tout, ai‐<br />

mons‐Le assez pour chercher sa gloire dans les autres et dans les œuvres comme en nous‐<br />

mêmes et dans nos propres travaux.<br />

554


Je pense que M. Myionnet vous aura communiqué la lettre <strong>de</strong> notre bon abbé Tail‐<br />

landier concernant les <strong>de</strong>rniers instants <strong>de</strong> sa sainte et tant regrettée mère. Vous y aurez vu<br />

que notre excellente amie a obtenu <strong>de</strong> son mari quʹil ne réclamât point les 5.000f à nous<br />

prêtés pour Nazareth. Jʹai <strong>de</strong>mandé à M. Myionnet si, <strong>de</strong>puis, M. Taillandier père avait <strong>de</strong><br />

quelque façon manifesté son intention à cet égard, mais je nʹai point reçu <strong>de</strong> réponse; dites‐<br />

moi, mon cher ami, ce que vous savez sur ce point.<br />

5h. du soir. Je reçois à lʹinstant la lettre <strong>de</strong> notre cher abbé Hello et les quelques li‐<br />

gnes que vous y avez jointes. Je vous remercie bien <strong>de</strong>s fois <strong>de</strong>s visites que vous avez faites<br />

pour moi à M. Tessier. Bien que ma poitrine soit moins souffrante, je vais essayer <strong>de</strong>s pe‐<br />

tits paquets que vous mʹenvoyez; je me défie beaucoup <strong>de</strong>s médicaments, étant, jusquʹici<br />

toutefois, impropre à en user utilement, mais je ferai cette épreuve en esprit dʹobéissance.<br />

Je mêle un peu du vin que vous mʹavez envoyé à celui que jʹavais précé<strong>de</strong>mment; jʹespère<br />

quʹaprès quelque temps jʹen éprouverai quelque amélioration.<br />

Je reçois, par le courrier qui mʹapporte votre lettre, une lettre <strong>de</strong> M. Myionnet et une<br />

<strong>de</strong> M. Halluin. Ce <strong>de</strong>rnier me rend compte <strong>de</strong> la retraite qui vient dʹêtre donnée à ses en‐<br />

fants et qui sʹest très bien passée. Il ne mʹentretient en outre que <strong>de</strong> détails dʹintérieur<br />

concernant sa maison. Jʹenverrai du reste sa lettre à M. Myionnet, afin quʹon la lise au<br />

Conseil; il faut que nous tendions à <strong>de</strong>s rapports <strong>de</strong> plus en plus habituels et intimes.<br />

Merci pour lʹUnivers, cela me fait pour la soirée, où je suis toujours un peu engour‐<br />

di, une petite distraction.<br />

Adieu, bien cher ami; nous allons nous préparer ici à la fête <strong>de</strong> Noël en union <strong>avec</strong><br />

vous; nous prierons pour les ordinands, pour M. Faÿ surtout.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

435 à M. Carment<br />

A propos <strong>de</strong> brochures édifiantes. Ecrire et se communiquer <strong>de</strong>s nouvelles favorise la vie <strong>de</strong> communauté. MLP.<br />

lʹencourage dans son combat spirituel.<br />

Cannes, 17 décembre 1856<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Notre f. Myionnet mʹa fait passer <strong>de</strong>ux pièces fort édifiantes que vous avez pris la<br />

peine <strong>de</strong> copier pour les communiquer à nos ff. <strong>de</strong> Vaugirard et à moi: lʹune sur M. Du‐<br />

pont <strong>de</strong> Tours271 , lʹautre concernant la guérison miraculeuse dʹune jeune fille par lʹinterces‐<br />

sion <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette.<br />

Ces <strong>de</strong>ux écrits mʹont profondément touché et auront assurément aussi beaucoup<br />

édifié nos frères; je vous remercie pour eux et pour moi <strong>de</strong> la bonne inspiration que vous<br />

avez eue en cette occasion. On partage dans le mon<strong>de</strong>, en famille, les avantages et plaisirs<br />

temporels; on ne doit pas être moins empressé dans les familles religieuses <strong>de</strong> donner part<br />

à ceux quʹon aime à tous les avantages et biens spirituels dont on dispose.<br />

Notre bon abbé Taillandier mʹa écrit sur les <strong>de</strong>rniers instants <strong>de</strong> sa sainte mère, amie<br />

si dévoué <strong>de</strong> notre Communauté, les détails les plus touchants. En envoyant la lettre à M.<br />

271 <strong>Léon</strong> Dupont (1797-1876), dit le "saint homme <strong>de</strong> Tours". Dans un siècle où il est <strong>de</strong> bon ton d'afficher un certain détachement à<br />

l'égard <strong>de</strong> la religion, il affiche hautement une foi vivante et combative. Pour convaincre et convertir, il multiplie les œuvres pies:<br />

relance <strong>de</strong> pèlerinage, recherche et restauration du tombeau <strong>de</strong> saint Martin, fondation <strong>de</strong> l'Adoration nocturne <strong>de</strong>s hommes, etc.<br />

555


Myionnet, je lui ai recommandé dʹen envoyer une copie à Arras; sʹil ne lʹa pas fait, rappe‐<br />

lez‐le moi.<br />

Il y a longtemps déjà que vous ne mʹaviez écrit; faites‐le quand vous aurez un mo‐<br />

ment; vous mʹaviez annoncé, en particulier, quelques détails sur vos efforts et triomphes<br />

relativement à votre défaut dominant. Ces petites ouvertures mʹintéressent vivement, ne<br />

manquez pas <strong>de</strong> les faire à lʹoccasion. Mon petit fils Firmin Thuillier mʹoublie beaucoup. Je<br />

vais <strong>de</strong>venir jaloux <strong>de</strong> notre bon p. Halluin qui sait si bien gagner le cœur <strong>de</strong> ses enfants;<br />

mais non, bien cher ami, je ne suis pas jaloux; nous ne cherchons tous que la gloire du Sei‐<br />

gneur, elle est dans la sainte union <strong>de</strong>s âmes pour sa gloire et notre salut.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

436 à M. J. Faÿ272 MLP. lʹassure <strong>de</strong> ses prières pour son ordination sacerdotale. Ménagements que le jeune prêtre pourra trouver à<br />

Vaugirard, tant pour lʹâme que pour le corps.<br />

Cannes, 18 décembre 1856<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Je ne sais si le règlement <strong>de</strong> votre retraite permet que vous receviez <strong>de</strong>s lettres du‐<br />

rant les jours si précieux qui précè<strong>de</strong>nt votre ordination; je ferai celle‐ci bien courte pour<br />

quʹelle ne soit, en tout cas, pour vous quʹune distraction dʹun instant. Ce ne sera pas dʹail‐<br />

leurs vous tirer du pieux recueillement où vous sentez le besoin <strong>de</strong> vous tenir à lʹapproche<br />

du grand jour qui doit vous consacrer pleinement au Seigneur que <strong>de</strong> vous dire en un mot:<br />

nous prions <strong>avec</strong> vous, tous les membres <strong>de</strong> notre petite famille, aux différents points où le<br />

Seigneur a daigné lʹenvoyer, sont <strong>avec</strong> vous dans le Cénacle, attendant lʹheure <strong>de</strong> grâce où<br />

lʹEsprit Saint doit <strong>de</strong>scendre sur ses élus. Puisse‐t‐Il se reposer sur vous, cher Monsieur<br />

lʹabbé, illuminer votre esprit <strong>de</strong>s pures lumières <strong>de</strong> la foi, embraser votre cœur <strong>de</strong> ses<br />

flammes divines et vous marquer <strong>de</strong> ce sceau ineffaçable qui <strong>de</strong>vra <strong>de</strong>meurer même dans<br />

lʹéternité.<br />

Cʹest une gran<strong>de</strong> joie pour nous <strong>de</strong> penser que tous ces trésors <strong>de</strong> grâces viendront<br />

grossir les précieuses ressources que le Seigneur a déjà dans notre petite famille pour<br />

concourir à <strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong> et <strong>de</strong> salut. Soyez, du reste, cher Monsieur lʹabbé,<br />

bien en assurance sur lʹusage discret que nous ferons <strong>de</strong>s dons du divin Maître, nous en<br />

savons trop bien la valeur pour ne pas les ménager <strong>avec</strong> un soin jaloux; nous combinerons<br />

<strong>avec</strong> vous nos moyens <strong>de</strong> telle sorte que la plus entière latitu<strong>de</strong> sera laissée à vos étu<strong>de</strong>s,<br />

en même temps que le plus libre espace pour le repos <strong>de</strong> vos facultés <strong>de</strong> corps et dʹesprit.<br />

St <strong>Jean</strong>, mon patron, ne voulait pas que lʹarc fût toujours tendu; je ne dois pas oublier cet<br />

exemple parmi les autres dans sa vie, ce sera ici le temps, tout particulièrement, <strong>de</strong> sʹen<br />

souvenir.<br />

Merci mille fois <strong>de</strong> cette bonne et fraternelle pensée <strong>de</strong> dire la Ste Messe à la petite<br />

communauté <strong>de</strong> Vaugirard le jour <strong>de</strong> la St <strong>Jean</strong>; je nʹy serai pas visiblement, mais la meil‐<br />

leure part <strong>de</strong> mon être, tout mon cœur et toutes mes affections sʹy porteront <strong>avec</strong> ar<strong>de</strong>ur. Je<br />

272 M. Justin Faÿ (1830-1871), prêtre le 20 décembre 1856, au Séminaire St-Sulpice. Ayant abusé <strong>de</strong> sa voix au Séminaire, une maladie<br />

du larynx, doublée d'une fluxion <strong>de</strong> poitrine, retar<strong>de</strong>ra son entrée dans l'Institut (mars 1857). Premier Frère <strong>de</strong> St-Vt-<strong>de</strong>-Paul<br />

maître <strong>de</strong>s novices, en 1864.<br />

556


prierai le Seigneur, par la T. S te Vierge, notre Mère et constante protectrice, <strong>de</strong> nous rap‐<br />

procher tous <strong>de</strong> son divin Cœur et <strong>de</strong> nous y unir dans une tendre et généreuse charité. Il<br />

me semble quʹaprès cela le lien <strong>de</strong> famille sera formé pour nous et quʹil ne restera quʹà at‐<br />

tendre lʹheure désirée <strong>de</strong> notre réunion. Prenez pour cela, très cher Monsieur lʹabbé, tout le<br />

temps qui vous semblera nécessaire; le bon Maître veut que tous les <strong>de</strong>voirs se concilient,<br />

cʹest lʹesprit que désire avoir notre petite famille. Cʹest là proprement à ses yeux la sainte<br />

liberté <strong>de</strong>s enfants <strong>de</strong> Dieu.<br />

Jʹose vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r quelque souvenir particulier, au jour <strong>de</strong> votre ordination, pour<br />

tous ces amis dévoués qui vont <strong>de</strong>venir vos frères, et pour moi notamment que ma faible<br />

santé rend en ce moment un membre presque inutile dans les travaux <strong>de</strong> la famille.<br />

Adieu, bien cher Monsieur lʹabbé; offrez mon respect à vos bons parents, je ne man‐<br />

querai pas <strong>de</strong> les aller voir après mon retour; je veux désormais mʹunir à tous vos senti‐<br />

ments dʹattachement et <strong>de</strong> reconnaissance à leur égard.<br />

Je suis, <strong>avec</strong> une tendre et respectueuse affection,<br />

Votre dévoué serviteur et ami en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

437 à M. <strong>de</strong> Lauriston<br />

Bonheur <strong>de</strong> la vocation. Le sacrifice consenti retombera en bénédiction sur sa famille qui lʹa donnée à Dieu. Sa‐<br />

voir se détacher <strong>de</strong> ses œuvres et surtout <strong>de</strong> soi‐même. Nouvelles <strong>de</strong> la Communauté. Ordination <strong>de</strong> lʹabbé Faÿ<br />

qui sera un ʺvrai serviteur <strong>de</strong>s pauvresʺ.<br />

Cannes, 20 décembre 1856<br />

Bien cher Monsieur et bien bon ami,<br />

Votre chère lettre du 12 <strong>de</strong> ce mois mʹa apporté, comme toutes celles que jʹai reçues<br />

<strong>de</strong> vous, un sentiment <strong>de</strong> joie et une impression toute édifiante. Dieu est admirable dans<br />

ses voies! Cʹétait une pénible épreuve pour vous que dʹinformer votre famille <strong>de</strong> vos réso‐<br />

lutions pour lʹavenir et voilà que la Provi<strong>de</strong>nce, venant à votre secours, vous a fait dʹun<br />

seul élan franchir ce pas difficile; bénissons‐la ensemble du secours si manifeste quʹelle a<br />

daigné vous prêter; remercions‐la aussi <strong>de</strong>s admirables dispositions quʹelle inspire à votre<br />

famille; cʹest pour moi, je vous en assure, une contemplation toute consolante que celle <strong>de</strong>s<br />

préparations et moyens dont le Seigneur daigne user dans votre vocation; jʹy vois un signe<br />

<strong>de</strong> ses complaisances adorables, et pour vous et pour notre petite famille; je me confonds<br />

en reconnaissance <strong>de</strong>vant tant <strong>de</strong> con<strong>de</strong>scendance et <strong>de</strong> bonté.<br />

Je suis bien touché aussi <strong>de</strong> la soumission si chrétienne <strong>de</strong> tous les vôtres, cʹest un<br />

exemple <strong>de</strong> foi et <strong>de</strong> sacrifice chrétien comme le mon<strong>de</strong> en donne aujourdʹhui trop rare‐<br />

ment! Ne plaignez pas trop ces bons parents, bien cher Monsieur, ils font une noble action,<br />

Dieu saura les en récompenser; vous faites aussi à leur endroit un courageux sacrifice, il<br />

leur tournera à bonheur et à bénédiction. Il faut nous élever jusquʹaux vues <strong>de</strong> la foi quand<br />

nous voulons prendre au sérieux la vie chrétienne, et nous trouvons alors, <strong>avec</strong> la fermeté<br />

pour agir, les saintes espérances que nous donnent les promesses du Sauveur. Il a promis<br />

le centuple, en ce mon<strong>de</strong> même, à ceux qui, pour Lui, sacrifieraient leurs plus chères affec‐<br />

tions; et que peut être ici ce centuple, sinon la plénitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s bénédictions sur la famille ob‐<br />

jet <strong>de</strong> vos tendres regrets! Offrez à son intention les brisements <strong>de</strong> votre cœur, les sensibili‐<br />

tés que produit toujours la résistance <strong>de</strong> la nature, et soyez assuré que vous aurez fait mille<br />

557


fois plus pour elle que par toutes les douceurs et consolations extérieures quʹeût pu lui<br />

donner votre présence habituelle. Dans lʹordre où nous place notre vocation, nous ne pou‐<br />

vons plus voir les choses comme elles sʹenvisagent dans le mon<strong>de</strong>, nous les prenons telles<br />

que les a prises le Sauveur lui‐même, telles quʹIl les a précisées pour les siens dans une ab‐<br />

solue et parfaite charité; dans cet esprit, très cher Monsieur, votre sacrifice a été glorieux<br />

pour Dieu, il sera méritoire pour vous et salutaire pour les vôtres; que pouvions‐nous sou‐<br />

haiter <strong>de</strong> plus?<br />

Reste maintenant le second pas à faire: vous détacher du lieu où vous êtes, vous dé‐<br />

prendre <strong>de</strong>s soins, assurément respectables, que vous a donné la charité. Je pense, comme<br />

vous, quʹune temporisation limitée peut être nécessaire pour déférer aux vœux du saint et<br />

éminent Prélat qui conduit le diocèse; mais je nʹhésite pas à dire quʹelle serait bien fâ‐<br />

cheuse pour vous si elle <strong>de</strong>vait vous créer <strong>de</strong> nouveaux obstacles et compromettre par là<br />

même votre vocation. Conjurez donc, cher Monsieur, le vénérable Evêque <strong>de</strong> considérer<br />

que le Seigneur, après vous avoir appelé dans votre jeune âge, vous appelle encore miséri‐<br />

cordieusement à la <strong>de</strong>rnière heure du jour, que les retar<strong>de</strong>ments sembleraient hors <strong>de</strong><br />

place et que votre empressement généreux doit répondre à la voix qui vous convoque. Sʹil<br />

ne sʹagissait uniquement que <strong>de</strong> coopérer à <strong>de</strong>s œuvres, vous seriez déjà à Arras dans vo‐<br />

tre vocation, mais il y a avant tout lʹimmolation <strong>de</strong> vous‐même et la consécration <strong>de</strong> tout ce<br />

que vous êtes dans lʹétat <strong>de</strong> religion; pensons, bien cher Monsieur, que ce premier point est<br />

<strong>de</strong> beaucoup le plus essentiel et que, sʹil ne précè<strong>de</strong> notre action extérieure, nous nʹaurons<br />

quʹune force restreinte. Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> donc, cher Monsieur, <strong>avec</strong> la plus vive instance,<br />

<strong>de</strong> limiter votre séjour à Arras aussi strictement que vous le pourrez, et surtout <strong>de</strong> ne<br />

prendre dans les œuvres aucun rôle actif dont vous ayez peine à vous défaire au moment<br />

<strong>de</strong> votre départ. Je suis bien assuré que telle sera aussi la pensée <strong>de</strong> votre saint directeur<br />

qui a si bien apprécié les indices et lʹimportance <strong>de</strong> votre vocation.<br />

Ces réflexions ne me sont inspirées, croyez‐le bien, cher Monsieur, par aucune dé‐<br />

fiance <strong>de</strong> votre bon vouloir et <strong>de</strong> votre courageuse résolution; je sais que votre sacrifice est<br />

fait et que vous en avez consommé la plus ru<strong>de</strong> part en avertissant nettement <strong>de</strong> vos vues<br />

votre famille, mais lʹexpérience mʹa appris à connaître les adresses merveilleuses du tenta‐<br />

teur; retar<strong>de</strong>r est un peu votre faible; ce nʹest quʹun fil, mais en le tournant et tournant bien<br />

autour <strong>de</strong> vous, il pourrait vous prendre par là; défions‐nous <strong>de</strong> lui.<br />

Tout va bien à Vaugirard et aux autres points où le Seigneur a mis notre petite fa‐<br />

mille; je nʹai jusquʹici que <strong>de</strong>s nouvelles satisfaisantes. Je recomman<strong>de</strong> bien à vos prières et<br />

à celles <strong>de</strong> nos ff. dʹArras M. lʹabbé Faÿ, jeune ecclésiastique pieux et dévoué qui doit être<br />

ordonné la veille <strong>de</strong> Noël, et qui viendra aussitôt après se joindre à nous, du consentement<br />

<strong>de</strong> M gr lʹArchevêque; je crois que ce sera un vrai serviteur <strong>de</strong>s pauvres; il a préféré ce titre à<br />

<strong>de</strong>s emplois plus séduisants qui lui étaient déjà offerts <strong>de</strong> divers côtés; jʹespère que, <strong>de</strong><br />

plus en plus, il se convaincra que la meilleure part lui a été donnée.<br />

Adieu, bien cher ami, jʹose presque dire, bien cher fils en N.S. tant je me sens pour<br />

vous <strong>de</strong> tendre sollicitu<strong>de</strong> et <strong>de</strong> cordial dévouement; restez toujours bien près <strong>de</strong> nos ff.<br />

dʹArras, ce sera dʹavance vous mettre <strong>de</strong> la famille et constituer <strong>avec</strong> nous cette sainte<br />

communion que le Seigneur veut former dans notre sein. Le jeune f. Vasseur et moi, nous<br />

vous suivons ici par la pensée et nous vivons au milieu <strong>de</strong> vous. Assurez nos frères <strong>de</strong> nos<br />

bons souvenirs et croyez vous‐même, cher bon ami, à toute ma tendre affection en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

558


P.S. Ma santé, dont vous voulez quelque mention, sʹest un peu remise du choc <strong>de</strong><br />

lʹacclimatation; je suis moins souffrant <strong>de</strong>puis 15 jours.<br />

438 à M. Paillé<br />

Instructions pour une éventuelle cession <strong>de</strong> la chapelle <strong>de</strong> Nazareth. La réorganisation <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Nazareth<br />

qui sʹensuivrait.<br />

Cannes, 26 décembre [1856]<br />

fête <strong>de</strong> St Etienne<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

La <strong>de</strong>man<strong>de</strong> qui nous est faite <strong>de</strong> la chapelle <strong>de</strong> Nazareth est une question grave<br />

pour nous, il ne faudra pas la résoudre sans consulter Dieu et les saints patrons <strong>de</strong> notre<br />

petite Communauté; je pense bien que vous y avez déjà songé et que notre bon abbé Hello,<br />

en particulier, en aura parlé au divin Maître au T. St Sacrifice.<br />

Il me semble, pour moi, quʹil nous est difficile <strong>de</strong> nous refuser au désir exprimé par<br />

lʹArchevêché273 , dont la bienveillance a toujours été si paternelle pour nous, si nous pou‐<br />

vons favoriser le bien quʹon a en vue, sans nuire essentiellement à lʹœuvre que la Provi‐<br />

<strong>de</strong>nce nous a confiée. Le patronage nʹaurait pas réellement beaucoup à souffrir <strong>de</strong> sa pri‐<br />

vation temporaire <strong>de</strong> la chapelle, la Société <strong>de</strong> St ‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul et la Communauté seu‐<br />

les y perdraient lʹhonneur, si je puis ainsi dire, le relief <strong>de</strong> gravité religieuse que la chapelle<br />

donne à lʹensemble <strong>de</strong> leurs travaux à Nazareth. Cʹest beaucoup, et lʹon doit compter quʹon<br />

aura un peu moins <strong>de</strong> faveur dans les quêtes quʹon aura à faire, ne pouvant plus mettre en<br />

avant les secours spirituels que nous donnions au quartier; je crois néanmoins quʹil faudra<br />

encore passer outre à cette considération, ne reposant que sur Dieu qui saura bien concilier<br />

autrement lʹintérêt à nos œuvres, si nous cherchons sa gloire avant tout.<br />

Un autre point me semblerait à examiner, savoir: comment vous remplacerez, pour<br />

votre propre logement, les petites cellules <strong>de</strong>s Capucins? Le bâtiment <strong>de</strong> la bibliothèque<br />

me semble contenir plus <strong>de</strong> locaux quʹon nʹen a réellement besoin; nos confrères ne pour‐<br />

raient‐ils vous cé<strong>de</strong>r une ou <strong>de</strong>ux pièces <strong>de</strong> ce côté? Ils sont trop raisonnables pour ne pas<br />

comprendre quʹétant déjà si strictement serrés dans votre petit bâtiment <strong>de</strong> communauté,<br />

vous ne pourriez, sans une gêne excessive, être privées <strong>de</strong> vos <strong>de</strong>ux plus gran<strong>de</strong>s cellules,<br />

si on ne vous donne quelque compensation; parlez <strong>de</strong> ce point à notre ami M. Decaux, et<br />

tâchez quʹil lève la difficulté, sʹil y en a; être pauvrement est bien, mais manquer <strong>de</strong> lʹes‐<br />

pace indispensable pour la santé et dʹun pauvre petit local pour les exercices communs, ce<br />

serait trop; jʹinsiste un peu fortement à cet égard, non pour vous personnellement, mais<br />

pour le bien réel <strong>de</strong> nos œuvres qui y est vraiment intéressé.<br />

Ces dispositions réglées, comme on peut lʹespérer, il me paraîtrait tout à fait à sou‐<br />

haiter que notre bon ami M. Decaux assemblât sa commission <strong>de</strong> lʹœuvre <strong>de</strong> Nazareth ou<br />

conseil dʹadministration, je ne me souviens pas bien quel est le nom, tous les bienveillants<br />

confrères, en un mot, qui soutiennent lʹœuvre, et quʹil prît leur avis sur la mesure en ques‐<br />

273 Une nouvelle paroisse venait d'être érigée pour le quartier N.D.-<strong>de</strong>s-Champs, et le curé, n'ayant pas encore d'église, avait jeté les<br />

yeux sur la petite chapelle <strong>de</strong> Nazareth pour y établir provisoirement le service paroissial et il <strong>de</strong>mandait qu'elle lui fût cédée à<br />

loyer pour une pério<strong>de</strong> d'un ou <strong>de</strong>ux ans. (…) Le premier mouvement <strong>de</strong> MLP. fut <strong>de</strong> s'incliner <strong>de</strong>vant une nécessité qu'il croyait<br />

inéluctable. Fort heureusement pour l'Œuvre, une lettre <strong>de</strong> M. Decaux fit voir à MLP. la situation sous un aspect très différent. Le<br />

revirement fut immédiat et complet. (Cf. VLP, I, 558, et infra lettre 440).<br />

559


tion; nous y aurons le double avantage dʹavoir les avis éclairés <strong>de</strong> nos amis et <strong>de</strong> ne pas<br />

mettre trop isolément la communauté en présence <strong>de</strong> M. le Curé et du représentant <strong>de</strong><br />

lʹArchevêché. Je désirerais bien aussi quʹon eût lʹagrément <strong>de</strong> M. Baudon dont les conseils,<br />

nous le savons, sont toujours hautement et sagement inspirés.<br />

Si, comme on peut le penser, vous aviez lʹassentiment <strong>de</strong> votre entourage charitable,<br />

vous pourriez, ce me semble, passer outre à lʹarrangement qui vous est proposé.<br />

Je crois quʹil serait bon <strong>de</strong> faire une réserve pour les assemblées <strong>de</strong> la S te ‐Famille; je<br />

ne sais cependant sʹil serait à propos que ce fût une condition écrite <strong>de</strong> la location, ou sʹil<br />

ne serait pas mieux que ce fût une simple convention amiable, faite <strong>avec</strong> M. le Curé. Il me<br />

semble quʹil est dans lʹesprit <strong>de</strong> la S te ‐Famille et <strong>de</strong> nos œuvres en général, <strong>de</strong> se faire ac‐<br />

cepter et non <strong>de</strong> sʹimposer.<br />

Quant au prix <strong>de</strong> la location, si lʹon considère les dépenses que représentent la cha‐<br />

pelle et le terrain y attenant, lʹimportance quʹelle a pour nous, la part quʹelle a eue dans les<br />

sacrifices énormes que lʹœuvre <strong>de</strong> Nazareth a courageusement acceptés, je croirais que la<br />

somme <strong>de</strong> 6.000f par année ne serait pas excessive. Je la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rais donc, sauf à se rabat‐<br />

tre à 5.000f. Il ne me semble pas quʹon pût raisonnablement aller au‐<strong>de</strong>ssous <strong>de</strong> ce chiffre.<br />

Je mʹen rapporte toutefois au jugement <strong>de</strong> nos amis, ne voulant pas que mon opinion pré‐<br />

vale sur la leur, en ce point pas plus que sur les autres.<br />

Je comprends bien le regret quʹaura notre bon abbé Hello si cet arrangement se<br />

consomme, mais ce sera un sacrifice temporaire que Dieu lui rendra peut‐être, par le fait,<br />

moins lourd quʹil ne le pense et dont le dédommagera, en tout état <strong>de</strong> cause, la pensée que<br />

la gloire du Seigneur semblait le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r.<br />

M. Myionnet ne mʹa point parlé jusquʹici <strong>de</strong> Grenelle, ni <strong>de</strong> son patronage, ni <strong>de</strong><br />

lʹétat <strong>de</strong>s choses relativement à la fondation, je ne sais absolument rien <strong>de</strong> ce côté; je ne fais<br />

donc que répondre à ce que vous me dites touchant la direction du patronage; je pense<br />

que, si quelque mesure était à prendre, M. Myionnet mʹen écrirait. Vous nʹavez pas répon‐<br />

du <strong>de</strong> votre côté, mon cher ami, à la question que je vous ai faite relativement aux 5.000f<br />

prêtés par M. Taillandier pour Nazareth; M. Myionnet, à qui jʹen ai écrit <strong>de</strong>ux fois, ne mʹa<br />

pas non plus répondu; je désirerais que, vous ou lui, mʹécriviez <strong>de</strong>ux mots à ce sujet.<br />

Je tourne ici bien court sans répondre à plusieurs articles <strong>de</strong> votre <strong>de</strong>rnière lettre,<br />

sans vous dire surtout combien je suis reconnaissant et touché <strong>de</strong> vos affectueuses sollici‐<br />

tu<strong>de</strong>s pour ma santé et <strong>de</strong> toutes les bonnes choses que vous me dites au sujet <strong>de</strong> ma fête;<br />

cʹétait ici une lettre dʹaffaires, elle est sèche comme une procuration; si jʹai le temps avant le<br />

départ du courrier, je ferai quelques mots meilleurs pour vous et nos frères; mon grand‐<br />

père était procureur en Normandie, il ne faut pas vous étonner si, sans avoir lʹesprit <strong>de</strong>s af‐<br />

faires, jʹen ai pourtant retenu quelque chose, la sécheresse et la lour<strong>de</strong>ur.<br />

Adieu, bien cher ami, tout nʹest pas encore <strong>de</strong>sséché en moi, je le sens bien à mon af‐<br />

fection pour vous.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

439 à M. Paillé<br />

MLP. accepte lʹinaction et la pénible séparation dʹ<strong>avec</strong> sa communauté. Aimables gron<strong>de</strong>ries aux frères <strong>de</strong> Naza‐<br />

reth, dictées par lʹaffection. Commencer à aimer pour ensuite faire du bien. Patience dans la maladie.<br />

560


26 décembre [1856] St Etienne<br />

Bien cher ami,<br />

Jʹajoute <strong>de</strong>ux mots ici, comme je le voulais, pour laisser <strong>de</strong> côté les affaires, et me<br />

mettre un moment en famille dans votre petit intérieur <strong>de</strong> Nazareth. Dʹabord, je gron<strong>de</strong><br />

bien fort (cʹest sitôt fait <strong>de</strong> gron<strong>de</strong>r) ces frères relâchés qui oublient la réserve dont nous<br />

avons besoin pour nous et pour les autres et qui se laissent aller à <strong>de</strong>s excentricités, dont je<br />

ne veux pas rire, parce que bien réellement je les trouve regrettables. je gron<strong>de</strong>, plus fort<br />

que les autres, mon bon abbé Hello qui sʹexpose au froid le soir, sans nulle nécessité;<br />

moins il est gros et plus je lʹaime, et plus jʹai peur pour lui <strong>de</strong>s acci<strong>de</strong>nts. Je le conjure bien<br />

instamment <strong>de</strong> se ménager; je le conjure aussi <strong>de</strong> se souvenir quʹil a fallu douze ou quinze<br />

ans pour faire <strong>de</strong> lui un homme un peu lettré, cinq ou six ans pour le préparer au sacer‐<br />

doce, et <strong>de</strong>s accumulations <strong>de</strong> grâces pour quʹil <strong>de</strong>vînt un humble serviteur <strong>de</strong>s pauvres; je<br />

sais ce que valent toutes ces richesses acquises, et, au prix cent fois <strong>de</strong> ma vie, je désire les<br />

conserver.<br />

Je ne gar<strong>de</strong>rais pas bien mon sérieux en réprimandant notre f. Maignen pour ses ca‐<br />

ricatures; je lʹengage pourtant à sʹen tenir à cette première livraison; sa petite lettre, jointe à<br />

le vôtre, mʹa certainement bien plus réjoui.<br />

Que dirai‐je à mes <strong>de</strong>ux autres frères? Ils ne mʹont pas encore écrit pour ma fête,<br />

mais Noël était là qui <strong>de</strong>vait bien les occuper. Je leur sais gré <strong>de</strong> penser au salut <strong>de</strong> leurs<br />

enfants avant tout; jʹaurai ma revanche dʹailleurs, et je sais bien que leur cœur si affection‐<br />

né ne me fera rien perdre.<br />

Bien‐aimés amis, comme il me serait dur dʹêtre loin <strong>de</strong> vous en ce moment, pour ces<br />

belles fêtes et pour la fin <strong>de</strong> lʹannée et pour le nouvel an, si je ne pouvais déposer dans le<br />

Cœur du divin Jésus toutes mes tendresses, tous mes profonds dévouements pour vous;<br />

oui, vous embrasser, respirer un peu lʹair <strong>de</strong> la famille me serait bien doux, mais puisque<br />

vous trouver en Jésus est plus sûr, plus profitable, plus chrétien, vive Jésus! Je suis content<br />

ainsi et je veux son adorable volonté. Cʹest là présentement presque toute ma vie, puisque<br />

je vaux si peu par lʹaction, mais notre bon abbé Taillandier ne me lʹécrivait‐il pas lʹan <strong>de</strong>r‐<br />

nier: ʺVous nʹêtes pas sans rien faire, puisque vous faites la volonté <strong>de</strong> Dieuʺ. Je tâche <strong>de</strong><br />

me nourrir <strong>de</strong> ce texte et <strong>de</strong> mʹen pénétrer profondément. Il en est un autre que je voyais<br />

ces jours‐ci et que je goûte bien aussi: Il a plu à Dieu quʹon ne pût faire aucun bien aux<br />

hommes quʹen les aimant; cʹest pourquoi, bien chers amis, je commence toujours par vous<br />

aimer <strong>de</strong> toutes les puissances <strong>de</strong> mon cœur puisque cʹest la première condition <strong>de</strong> tout<br />

bien à faire; jʹy joins, pour la secon<strong>de</strong>, la prière bien fidèle et <strong>de</strong>s recommandations sans<br />

nombre à notre aimée Mère la Ste Vierge, au bon St Joseph, il est si bon! à notre Père St Vin‐<br />

cent, à vos saints anges gardiens, à vos saints patrons et à tous les saints et saintes du Pa‐<br />

radis. Puissiez‐vous, durant toute cette année, vivre en leur douce et intime compagnie, et<br />

puissé‐je moi‐même y trouver une petite place auprès <strong>de</strong> vous.<br />

Adieu, bien chers amis, je vous embrasse fort.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Jʹai proposé <strong>de</strong>ux fois à M. Halluin <strong>de</strong> prendre le f. Loquet près <strong>de</strong> moi; il me dit<br />

quʹil va un peu mieux, je lui en reparlerai <strong>de</strong> nouveau. Hyères et Cannes ne diffèrent<br />

guère; ce nʹest pas le lieu quʹil faudrait changer, mais ma poitrine.<br />

561


440 à M. Decaux<br />

Vœux <strong>de</strong> nouvel an. Remerciement pour lʹai<strong>de</strong> apportée à Nazareth. Après plus ample informé, MLP. déci<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

ne pas se <strong>de</strong>ssaisir <strong>de</strong> la chapelle <strong>de</strong> Nazareth. Projet <strong>de</strong> Conférence St‐Vt‐<strong>de</strong>‐Paul à Cannes. Prosélytisme protes‐<br />

tant.<br />

Cannes, 29 décembre 1856<br />

Mon bien bon ami,<br />

Il y a, dans la fin <strong>de</strong> lʹannée et le commencement <strong>de</strong> celle qui va sʹouvrir, je ne sais<br />

quelle influence qui remue en moi tous mes sentiments dʹaffection et <strong>de</strong> dévouement; cʹest<br />

une vieille impression dʹenfance, à laquelle je cè<strong>de</strong> dʹautant plus volontiers en ce moment<br />

que je me sans re<strong>de</strong>venir enfant à mesure que je suis plus vieux, plus faible, plus près <strong>de</strong><br />

cette autre extrémité <strong>de</strong> la vie qui, tout loin quʹelle soit <strong>de</strong> lʹenfance, lui ressemble pourtant<br />

en quelques points. Cʹest pourquoi, cher ami, je vous souhaite une bonne année, et je sou‐<br />

haite aussi, sinon pour vous, au moins pour ceux qui vous aiment, quʹelle soit suivie <strong>de</strong><br />

beaucoup dʹautres, pleines comme les précé<strong>de</strong>ntes dʹun grand nombre <strong>de</strong> bonnes œuvres<br />

et dʹactes <strong>de</strong> dévouement, et <strong>de</strong> vraie charité; cʹest le meilleur et le plus noble lot sur la<br />

terre; cʹest celui que je désire et que je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à Dieu pour vous. Je ne vous répète point,<br />

mon bon ami, combien je suis consolé dans mon impuissance en voyant que tout ce que<br />

mon cœur voulait réaliser sʹaccomplit par vous mieux, plus vivement et plus fermement<br />

que je ne lʹaurais pu faire. Cʹest évi<strong>de</strong>mment par une inspiration <strong>de</strong> Dieu que cet élan <strong>de</strong><br />

généreuse ar<strong>de</strong>ur vous a été donné, cʹest donc comme une mission; elle vous honore<br />

comme venant <strong>de</strong> Dieu; elle sera, jʹen suis assuré, méritoire à ses yeux et digne <strong>de</strong> récom‐<br />

pense. Je le prie <strong>de</strong> vous assister par sa grâce, <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r sa pureté à votre zèle et dʹen faire<br />

un fleuron bien radieux et bien beau pour votre couronne.<br />

Nos amis mʹont écrit la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> qui nous est faite <strong>de</strong> la chapelle <strong>de</strong> Nazareth;<br />

jʹavais cru, dans le premier moment, que vous regardiez cette location comme une nécessi‐<br />

té, soit parce quʹelle était indispensable à la paroisse, soit parce quʹelle <strong>de</strong>vait produire une<br />

ressource dont lʹœuvre elle‐même ne pouvait se passer. Jʹavais donc, quoiquʹen prévoyant<br />

les inconvénients graves <strong>de</strong> la mesure, cru <strong>de</strong>voir me ranger à ce qui me semblait être vo‐<br />

tre avis; mais je me suis, <strong>avec</strong> un vif empressement, reporté <strong>de</strong> lʹautre côté dès que <strong>de</strong>s ren‐<br />

seignements plus précis mʹont permis <strong>de</strong> voir mieux la situation. Je pense comme vous<br />

pleinement que, la chapelle enlevée, notre œuvre perdrait son principal mérite, sa valeur<br />

et sa signification, quʹelle cesserait dès lors dʹintéresser le mon<strong>de</strong> chrétien et charitable et<br />

nʹarriverait plus à se créer les ressources dont elle a un impérieux besoin. Je vais, dʹici à<br />

peu <strong>de</strong> jours, envoyer à nos amis une note respectueuse pour M gr lʹArchevêque, afin <strong>de</strong> lui<br />

expliquer la situation où nous sommes et les raisons qui nous empêchent dʹadhérer à la<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> M. le Curé.<br />

Vous serez assez bon, je lʹespère, mon bon ami, pour faire agréer à M. Baudon mes<br />

respects et vœux <strong>de</strong> nouvel an, ainsi quʹà tous ceux <strong>de</strong> nos Confrères qui ont lʹextrême cha‐<br />

rité <strong>de</strong> me conserver quelque bon souvenir. Jʹécrirai prochainement à M. Baudon; jʹaime à<br />

lui dire <strong>de</strong> temps en temps la situation <strong>de</strong> notre petite Communauté, afin quʹelle marche<br />

bien en parfaite union <strong>avec</strong> notre chère Société <strong>de</strong> S t ‐Vincent.<br />

Je nʹai pas perdu lʹespérance <strong>de</strong> concourir à la fondation dʹune Conférence à Can‐<br />

nes, mais jʹy ai rencontré jusquʹà présent bien <strong>de</strong>s difficultés; les catholiques ont bien <strong>de</strong> la<br />

peine à sʹentendre, et bien peu <strong>de</strong> ferveur pour soutenir leur foi qui est ici déplorablement<br />

minée par les Anglais protestants que la beauté du pays y a attirés. Déjà, ils ont acheté les<br />

562


âmes dʹun assez bon nombre <strong>de</strong> pauvres ouvriers que lʹignorance et la misère ont mis à<br />

leur merci. Ils viennent ces jours‐ci, malgré le maire et les autorités locales, malgré lʹavis<br />

contraire du préfet du Var, dʹêtre autorisés à ouvrir une école gratuite dont lʹinstituteur,<br />

payé par eux, est, cela va sans dire, protestant. Quarante enfants sont déjà inscrits pour<br />

fréquenter cette école, parce que les autres ne sont pas gratuites. Ne pensez‐vous pas que<br />

si les catholiques, par une souscription ou autrement, ne ren<strong>de</strong>nt pas une <strong>de</strong> leurs écoles<br />

non payantes, ils ne sont pas dignes <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r le don <strong>de</strong> leur foi. Il est trop à craindre<br />

pourtant quʹils ne subissent encore passivement cette audacieuse atteinte à leurs croyances<br />

dans la personne <strong>de</strong> leurs concitoyens pauvres et faibles quʹils <strong>de</strong>vraient soutenir. Prions<br />

bien, mon bon ami, et, selon nos forces, ne négligeons rien pour soutenir notre cause, car il<br />

semble que le démon redouble <strong>de</strong> fureur dans cette attaque.<br />

Croyez, bien bon ami et frère, à tous mes sentiments dʹinaltérable affection en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

441 à M. Caille<br />

Confiance dans les frère anciens, ses ʺfils aînésʺ. Agrandissement <strong>de</strong> la maison dʹAmiens: agir <strong>avec</strong> pru<strong>de</strong>nce et<br />

conseil. Se laisser gui<strong>de</strong>r par la Provi<strong>de</strong>nce.<br />

Cannes, 2 janvier 1857<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> tous vos bons souhaits <strong>de</strong> nouvelle année et <strong>de</strong> fête <strong>de</strong> S t <strong>Jean</strong>; je<br />

sais votre cordiale et sincère affection pour notre petite famille et pour moi en particulier<br />

qui vous le rends bien et qui vous suis dévoué du plus profond <strong>de</strong> mon cœur. Cʹest en<br />

toute vérité que je le puis dire, je vous regar<strong>de</strong> <strong>avec</strong> mes ff. Myionnet, Maignen et Paillé,<br />

comme mes plus vieux compagnons et, bien que tous les autres me soient bien tendrement<br />

chers, il y a néanmoins pour les fils aînés comme une certaine assurance <strong>de</strong> confiance et <strong>de</strong><br />

vieil attachement qui me porte à mʹappuyer sur eux <strong>avec</strong> plénitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> repos et dʹabandon.<br />

Je fais, <strong>de</strong> mon côté, <strong>de</strong>s vœux bien ar<strong>de</strong>nts pour vous, pour notre petite communauté<br />

dʹAmiens, pour ses œuvres et aussi pour tout ce qui vous est cher; je ne cesse jamais <strong>de</strong><br />

prier à toutes ces intentions, pas un seul jour je ne lʹoublie, au temps surtout où je me sens<br />

le plus près <strong>de</strong> Dieu; jʹespère ainsi suppléer à ce que la faiblesse <strong>de</strong> ma santé mʹempêche <strong>de</strong><br />

faire pour témoigner extérieurement à nos chères communautés tout mon bon vouloir et<br />

tout mon dévouement.<br />

Je reste assez frêle et assez impressionnable aux moindres intempéries pour ne<br />

pouvoir guère compter sur un plein rétablissement; je ne vois pas néanmoins dʹindices<br />

dʹun danger immédiat dans ma situation, à moins que <strong>de</strong>s acci<strong>de</strong>nts, auxquels ma faiblesse<br />

mʹexpose, ne ren<strong>de</strong>nt plus graves les altérations <strong>de</strong> ma constitution physique. Je nʹai, du<br />

reste, point dʹautre désir que celui <strong>de</strong> faire la volonté <strong>de</strong> Dieu et dʹentrer <strong>de</strong> cœur et dʹeffet<br />

dans les vues <strong>de</strong> sa miséricor<strong>de</strong> à mon égard.<br />

M. Myionnet mʹavait communiqué la lettre détaillée que vous lui aviez écrite<br />

concernant lʹacquisition <strong>de</strong> la maison du faubourg <strong>de</strong> Noyon; jʹétais donc bien au courant<br />

<strong>de</strong> lʹétat <strong>de</strong> cette affaire. Je pense <strong>avec</strong> vous quʹelle nous a été ménagée par lʹentremise <strong>de</strong><br />

la T. S te Vierge et que nous <strong>de</strong>vons avoir bonne confiance dans les suites dʹune entreprise<br />

commencée sous ses auspices. Vous vous occupez, sans doute, maintenant <strong>de</strong>s réparations<br />

à la nouvelle maison et <strong>de</strong> la vente <strong>de</strong> lʹancienne, sauf à ne lʹévacuer quʹaprès lʹappropria‐<br />

563


tion du nouveau local. Je vous invite à prendre les avis <strong>de</strong> M. lʹabbé Cacheleux pour vos<br />

travaux et dispositions dans la maison, vous savez que vous vous êtes bien trouvé <strong>de</strong> son<br />

ai<strong>de</strong> pour lʹarrangement <strong>de</strong> la maison actuelle.<br />

Je trouve très sage les réserves <strong>de</strong> M. Cacheleux relativement aux fonds quʹil aban‐<br />

donne à lʹœuvre et je suis bien touché en même temps <strong>de</strong> la confiance quʹil a témoignée à<br />

notre Communauté. Veuillez lui en dire toute ma reconnaissance et lʹassurer que nous fe‐<br />

rons tout pour répondre à ses vues charitables en travaillant <strong>de</strong> notre mieux à lʹédification<br />

<strong>de</strong>s enfants, <strong>de</strong>s pauvres et <strong>de</strong>s ouvriers.<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> une bien vive satisfaction les bonnes dispositions <strong>de</strong> lʹabbé Deberly,<br />

tout nous laisse penser quʹil a véritable vocation pour les œuvres <strong>de</strong> charité, et nous pou‐<br />

vons espérer quʹil sentira bientôt quʹen associant pleinement ses efforts aux nôtres par un<br />

entier sacrifice <strong>de</strong> lui‐même à Dieu et aux pauvres, il doublera ses forces et ses mérites.<br />

Assurez‐le que je prierai Dieu à cette intention et que je regar<strong>de</strong>rai comme une grâce pour<br />

nous lʹappel intérieur qui le tournera définitivement vers notre petite famille.<br />

Je vous prie, mon bon ami, <strong>de</strong> ne pas manquer, quand vous aurez lʹoccasion, <strong>de</strong><br />

présenter à M gr dʹAmiens mes profonds respects et lʹexpression <strong>de</strong> ma plus vive reconnais‐<br />

sance pour la protection quʹil donne paternellement à nos œuvres et à notre Communauté.<br />

Je pense souvent aux charges pesantes que vous avez courageusement acceptées et<br />

à tout ce qui vous reste à faire encore pour achever les entreprises charitables commencées<br />

autour <strong>de</strong> vous; mais jʹy songe sans inquiétu<strong>de</strong>, me reposant sur la bonté miséricordieuse<br />

du Seigneur qui sʹest montré si tendre pour nous, et sur la protection si manifeste <strong>de</strong> la S te<br />

Vierge; <strong>de</strong>meurons en dépendance <strong>de</strong> ces appuis divins, allons <strong>avec</strong> confiance et circons‐<br />

pection tout ensemble, sans <strong>de</strong>vancer les <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> Dieu, sans résister à ses inspirations;<br />

nous serons en assurance, puisque nous ne serons plus alors que les dociles instruments<br />

<strong>de</strong> sa sagesse et <strong>de</strong> son amour.<br />

Le temps me manque aujourdʹhui pour répondre longuement aux bonnes petites<br />

épîtres <strong>de</strong> vos frères, je leur dis seulement <strong>de</strong>ux mots, me réservant <strong>de</strong> leur écrire plus à<br />

loisir à quelque prochaine occasion.<br />

Offrez, je vous prie, mes respects et sentiments <strong>de</strong> reconnaissance à M. lʹabbé Man‐<br />

got et à M. lʹabbé <strong>de</strong> Brandt.<br />

Croyez vous‐même, cher ami, à tout mon tendre dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Bon souvenir du petit f. Ernest Vasseur.<br />

442 à M. Paillé<br />

Handicapé par un abcès au poignet droit, MLP; dicte sa lettre. Rapport <strong>avec</strong> les Confrères. Il faut ʺse placer <strong>avec</strong><br />

eux dans la sphère <strong>de</strong> tout ce qui est bien et beauʺ. Ne pas se préoccuper <strong>de</strong> ce que lʹon dit et pense <strong>de</strong> nous.<br />

Cannes, 10 janvier 1857<br />

Très cher ami et fils en N.S.,<br />

Mon petit f. Ernest me sert <strong>de</strong> secrétaire aujourdʹhui parce quʹil mʹest venu au poi‐<br />

gnet droit, <strong>de</strong>puis quelques jours, un abcès qui est arrivé à ce point <strong>de</strong> me rendre tout<br />

mouvement impossible. Jʹen avais eu déjà <strong>de</strong>ux autres beaucoup moins douloureux, puis<br />

surtout moins mal placés. Le mé<strong>de</strong>cin que je me suis déterminé à faire venir pense, comme<br />

moi, que cʹest le résultat <strong>de</strong> la surexcitation produite sur ma constitution par le climat trop<br />

564


sec et trop ar<strong>de</strong>nt pour mes organes; il ne sʹen est point montré inquiet; je mʹen rapporte à<br />

lui, bien que lʹengourdissement et les douleurs nerveuses <strong>de</strong> mon bras soient extrêmes.<br />

Je ne puis répondre en détail aujourdʹhui à la <strong>de</strong>rnière lettre <strong>de</strong> notre cher f. Mai‐<br />

gnen, je me borne à vous recomman<strong>de</strong>r dʹêtre bien remplis dʹaffection et <strong>de</strong> reconnaissance<br />

pour notre ami M. Decaux qui les mérite si bien, <strong>de</strong> ne lui donner jamais aucun signe <strong>de</strong><br />

défiance.<br />

Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> aussi bien instamment dʹéviter tout débat sur la question <strong>de</strong> pro‐<br />

priété; je regrette bien vivement ceux qui ont déjà eu lieu à ce sujet, il me semble quʹ<strong>avec</strong><br />

un peu <strong>de</strong> circonspection, on eût pu les prévenir. Jʹentrerai dans <strong>de</strong> plus longs détails<br />

quand je pourrai vous écrire. Tenez bien vos comptes, si vous en avez à tenir, ai<strong>de</strong>z nos<br />

confrères dans leurs efforts, autant quʹil dépendra <strong>de</strong> vous; en général, soyez <strong>avec</strong> eux<br />

plein <strong>de</strong> prévenance et <strong>de</strong> con<strong>de</strong>scendance, voyez leurs bonnes qualités qui sont si réelles<br />

et fermez les yeux sur leurs imperfections; en général, il est meilleur et plus sage tout en‐<br />

semble <strong>de</strong> montrer aux gens une généreuse confiance, on les porte ainsi à répondre à la<br />

bonne opinion quʹon a dʹeux. On sʹépargne ainsi bien <strong>de</strong>s difficultés, en se plaçant <strong>avec</strong><br />

eux dans la sphère <strong>de</strong> tout ce qui est bien et beau.<br />

Ne vous préoccupez pas <strong>de</strong> ce quʹon dit et pense <strong>de</strong> vous, faites tout le bien que<br />

vous pourrez, Dieu se chargera du reste. A la longue, une conduite noble, dévouée et dé‐<br />

sintéressée a, même sur la terre, sa récompense; elle concilie à ceux qui la tiennent une<br />

haute estime et une influence bien plus certaine quʹon ne lʹaurait par une défense méticu‐<br />

leuse <strong>de</strong> ses privilèges et <strong>de</strong> ses droits. Notre petit f. Ernest trouve que cʹest assez; il veut<br />

que là‐<strong>de</strong>ssus nous vous embrassions lʹun et lʹautre. Jʹai moins souffert pendant que je<br />

mʹentretenais <strong>avec</strong> vous, ce qui me fait penser quʹaprès mon retour, si tant est quʹil soit<br />

dans les <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> Dieu, je me trouverai beaucoup mieux étant auprès <strong>de</strong> vous.<br />

Votre tout affectionné Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. La note est commencée, mais pas finie; ne pourriez‐vous voir en attendant M.<br />

Duchesne, lui expliquer ce retard et lui faire pressentir que nous ne pourrons absolument<br />

pas cé<strong>de</strong>r.<br />

Je nʹai pas <strong>de</strong> nouvelles <strong>de</strong> M lle Gauthier, comment va‐t‐elle?<br />

443 à M. Vasseur<br />

Comment faire <strong>de</strong>s progrès dans la vie spirituelle. Toujours se relever. Etre un bon soldat soutenant <strong>avec</strong> courage<br />

les combats du Seigneur.<br />

[Cannes] 12 janvier 1857<br />

Ne vous étonnez pas, cher enfant, dʹavoir un peu mauvaise tête, puisque les têtes <strong>de</strong><br />

votre pays sont faites ainsi; mais le bon Dieu qui sait <strong>de</strong> quelle argile nous sommes pétris<br />

est bien indulgent pour toutes les misères que comporte notre infirme nature, à la condi‐<br />

tion que notre cœur reste droit, que nous reconnaissions nos fautes et luttions toujours<br />

pour nous en corriger. Cʹest ce que vous faites, mais à force <strong>de</strong> tomber et <strong>de</strong> vous relever,<br />

<strong>de</strong> vous fâcher et <strong>de</strong> vous consoler, au jour le jour, vous avancerez toujours un peu, la rai‐<br />

son grandira, les mouvements impétueux <strong>de</strong> la nature sʹamortiront, les désirs et répu‐<br />

gnances si ar<strong>de</strong>nts chez vous se trouveront maîtrisés, et un beau jour, oh! oui, il sera bien<br />

565


eau, vous vous sentirez calme, soumis, confiant sur le Cœur du divin Jésus, ne voulant<br />

plus, nʹaimant plus que ce quʹIl aime et ce quʹIl veut. Jusque là, soyez un bon soldat, sou‐<br />

tenez les combats du Seigneur, vous souvenant que vous nʹêtes jamais seul, quʹIl combat<br />

aussi Lui‐même près <strong>de</strong> vous et que Marie, notre tendre Mère, essuyant votre front, y po‐<br />

sera <strong>de</strong> sa douce main la couronne.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Votre petit frère vous embrasse; il souhaite bien savoir si vous avez <strong>de</strong>s nouvelles<br />

<strong>de</strong> Nampont et <strong>de</strong> la conscription. Priez pour la communauté <strong>de</strong> Cannes.<br />

444 à M. Paillé<br />

La santé <strong>de</strong> MLP. Dernière bénédiction <strong>de</strong> Mgr Sibour à la Communauté. Toujours lʹaffaire <strong>de</strong> la chapelle <strong>de</strong> Na‐<br />

zareth; rédaction dʹune note pour lʹArchevêché <strong>de</strong> Paris. Remerciements pour lʹenvoi <strong>de</strong> livres.<br />

Cannes, 16 janvier 1857<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je recommence à faire le signe <strong>de</strong> la croix <strong>avec</strong> ma main, lʹabcès du poignet a pres‐<br />

que disparu et lʹirritation <strong>de</strong>s nerfs du bras est aussi fort diminuée. Jʹécris sans peine, jʹai<br />

pu dès lors préparer votre petite note pour la chapelle et, bien quʹelle semble maintenant à<br />

peu près inutile, je vous lʹenvoie pour que vous en fassiez ce que besoin sera. Il faudrait la<br />

copier et y mettre ma signature que M. Maignen saura calquer, si vous jugez quʹon doive<br />

lʹy ajouter <strong>avec</strong> une date quelconque.<br />

Je voudrais bien écrire un peu au long à nos bien‐aimés ff. <strong>de</strong> Nazareth; je me don‐<br />

nerai, je lʹespère, cette satisfaction, mais en ce moment lʹinterruption que mon mal <strong>de</strong> main<br />

a mis dans mes correspondances mʹa causé un encombrement dont je ne sais comment sor‐<br />

tir; je nʹen fais pas long dʹailleurs chaque jour, un malaise, une visite, un rien mʹabsorbent<br />

le peu dʹinstants où mon pauvre esprit ait un peu <strong>de</strong> liberté; je suis loin dʹêtre fort, mon hi‐<br />

ver se passe aussi péniblement que celui <strong>de</strong> lʹan <strong>de</strong>rnier. Le mé<strong>de</strong>cin que jʹai dû faire appe‐<br />

ler ces jours‐ci à cause <strong>de</strong> mon mal <strong>de</strong> bras, a ausculté ma poitrine et ne mʹen a paru guère<br />

satisfait; je croirais bien, en effet, que la souffrance continuelle que me donnait et me<br />

donne encore lʹair trop vif et trop excitant <strong>de</strong> ce pays a augmenté lʹobstruction du poumon;<br />

cette affection sʹétait diminuée cet été, et surtout vers la fin <strong>de</strong> mon séjour à Vaugirard,<br />

mais elle a repris toute son intensité et plus encore sans doute <strong>de</strong>puis mon séjour ici; <strong>avec</strong><br />

<strong>de</strong>s organes si faibles et si altérés, le moindre acci<strong>de</strong>nt suffirait pour en finir, mais je vais<br />

sans mʹen préoccuper, puisque je me suis remis corps et âme aux mains du Père tendre et<br />

miséricordieux auquel jʹai le bonheur dʹappartenir; jʹespère quʹIl fera <strong>de</strong> moi ce qui sera le<br />

mieux pour sa gloire et pour mon salut.<br />

Je viens <strong>de</strong> recevoir une bonne lettre <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Kergorlay qui, entre autres choses,<br />

me dit quʹil a vu notre saint Archevêque quelques jours avant sa mort274 et quʹil a reçu<br />

pour nous, frères <strong>de</strong> St Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul, <strong>de</strong>s paroles toutes bienveillantes et une bénédic‐<br />

tion toute spéciale; nʹest‐ce pas une douce consolation, et ne semble‐t‐il pas que le divin<br />

274 Le 3 janvier, participant à St-Etienne-du-Mont à la neuvaine en l'honneur <strong>de</strong> sainte Geneviève, patronne <strong>de</strong> Paris, l'archevêque <strong>de</strong><br />

Paris est poignardé par un fanatique, Verger, prêtre du diocèse <strong>de</strong> Meaux, qu'en raison <strong>de</strong> sa conduite scandaleuse et <strong>de</strong> sa prédication<br />

contre le dogme <strong>de</strong> l'Immaculée Conception, il avait dû frapper d'interdit.<br />

566


Maître, qui allait le rappeler à Lui, avait mis dans ses <strong>de</strong>rnières inspirations celle dʹencou‐<br />

rager notre petite famille et dʹaccroître son espérance et sa confiance dans lʹavenir. Soyons<br />

donc bien paisibles, très chers amis, nos travaux, nos épreuves sont lʹœuvre <strong>de</strong> Dieu en<br />

nous, ne nous tourmentons pas, nʹempêchons pas lʹopération divine, elle façonne ainsi nos<br />

âmes et, je lʹespère aussi, lʹédifice <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong> et <strong>de</strong> salut quʹelle prépare dans notre pe‐<br />

tite famille. Avec cette confiance, chers amis, vous porterez courageusement le surcroît <strong>de</strong><br />

difficultés et <strong>de</strong> peines que les rigueurs <strong>de</strong> lʹhiver ajoutent à vos travaux, vous traverserez<br />

dans la patience ces jours durs et sombres, puis le printemps reviendra, nous respirerons<br />

un peu, le soleil nous réjouira et, je lʹespère aussi, chers amis, la douce joie <strong>de</strong> nous revoir<br />

épanouira nos cœurs. Je vous recomman<strong>de</strong> à vous en particulier, bien cher f. Paillé, <strong>de</strong> se‐<br />

couer vos humeurs noires, dʹavoir un visage agréable, beaucoup dʹaménité et toutes ces<br />

suavités que vous aviez mises dans vos résolutions à cette mémorable conférence qui vint<br />

un peu après celle <strong>de</strong> lʹâne et du bœuf logés dans votre cœur; nʹoubliez pas quʹil y avait là<br />

aussi un mouton; cʹest une aimable bête, tâchez <strong>de</strong> lui ressembler.<br />

Jʹai bien négligé mes pauvres enfants Emile et <strong>Jean</strong>‐Marie, mais je leur écrirai à<br />

quelques bons moments que le bon Dieu me donnera; quʹils sachent bien, en attendant,<br />

que je les suis <strong>de</strong>s yeux, que je sais tout ce quʹils disent et font, parce que mon cœur est<br />

<strong>avec</strong> eux, que le cœur voit <strong>de</strong> loin quand il aime beaucoup et que le mien leur est tendre‐<br />

ment attaché. Vous voyez bien, chers enfants, que le bon Dieu est <strong>avec</strong> nous puisque sa<br />

charité nous unit si affectueusement et, sʹIl est <strong>avec</strong> nous, que pouvons‐nous craindre? Al‐<br />

lons donc en avant, malgré le froid, le brouillard et la boue; vive le Seigneur, que le froid et<br />

le chaud le bénissent, et que nos cœurs soient toujours pour Lui, quoi quʹil arrive,<br />

confiants, reconnaissants et pleins dʹamour.<br />

Je vous remercie, mon f. Paillé, <strong>de</strong><br />

votre bonne pensée <strong>de</strong> mʹenvoyer la vie <strong>de</strong><br />

la chère sœur Rosalie 275 (je viens <strong>de</strong> le rece‐<br />

voir; lʹautre livre Rio pourra, sʹil y a lieu,<br />

être envoyé <strong>avec</strong> le vin). Je voudrais bien<br />

que vous mʹenvoyiez les Quatre martyrs <strong>de</strong><br />

M. Rio 276 , chez Bray, édition à 2f prix fort,<br />

mais je désirerais avant savoir un peu par<br />

quelquʹun qui lʹaurait lu ce que cʹest que ce<br />

livre et quels sont ces quatre martyrs.<br />

Jʹestime le talent et le bon esprit <strong>de</strong> M. Rio,<br />

mais il est toujours bon <strong>de</strong> sʹinformer un<br />

peu. Je pense bien dʹailleurs que ce nʹest<br />

quʹun livre <strong>de</strong> délassement. Le petit livre<br />

La Présence <strong>de</strong> Dieu <strong>de</strong> Gonnelieu, est une perle; jʹen fais ma nourriture, je remercie Dieu <strong>de</strong><br />

me lʹavoir envoyé. Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rai un peu <strong>de</strong> vin bientôt, sans doute, tant <strong>de</strong> Vaugi‐<br />

rard que <strong>de</strong> celui <strong>de</strong> M. Dupuis; en tout, une vingtaine <strong>de</strong> bouteilles, jʹattends encore un<br />

peu pour bien préciser. Le vin à 1f me va autant que celui à 2f, ce sera une économie. Je<br />

nʹai pas encore besoin dʹargent; jʹespère, à moins dʹacci<strong>de</strong>nts, nʹen avoir besoin que pour<br />

275 L'apôtre du quartier Mouffetard, à Paris, sœur Rosalie Rendu, était décédée le 7 février 1856. Le jour <strong>de</strong> ses obsèques, le vicomte<br />

<strong>de</strong> Melun décidait <strong>de</strong> rédiger sa biographie. Peut-être est-ce ce livre que M. Paillé a fait envoyer à MLP.?<br />

276 Alexis-F. Rio, (cf. lettre 20) appartenait au groupe <strong>de</strong> Lamennais, qu'il accompagna à Rome en 1832. Auteur d'ouvrages d'histoire<br />

<strong>de</strong> l'art chrétien. Son livre Les Quatre martyrs venait <strong>de</strong> paraître en 1856.<br />

567


notre retour; nous vivons aussi économiquement que possible, mais on exploite toujours<br />

un peu les étrangers.<br />

Adieu, mon bien bon ami, tâchez que la petite maison <strong>de</strong> Nazareth soit aimable et<br />

ait bonne o<strong>de</strong>ur, quʹelle fasse aimer les frères <strong>de</strong> S t ‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul, et, pour cela, le moyen<br />

est bien simple, faites‐y régner lʹesprit du divin Enfant Jésus, la douce et miséricordieuse<br />

bonté <strong>de</strong> Marie, la patience et lʹhumble bienveillance <strong>de</strong> notre Père S t Joseph, la généreuse<br />

charité, la confiante espérance <strong>de</strong> notre Père S t Vincent, et tout sera dit; il nʹen faut pas da‐<br />

vantage, rien que cela, Dieu et les hommes seront contents. Je vous embrasse affectueuse‐<br />

ment ainsi que vos quatre frères.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Remerciez pour moi notre bon confrère M. Leblanc <strong>de</strong> son excellente lettre; je<br />

lui écrirai dès que je le pourrai. Remerciez aussi nos bons vieillards <strong>de</strong> Nazareth; je ferai<br />

aussi une petite lettre pour eux. Je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> un peu dʹindulgence pour mes lenteurs invo‐<br />

lontaires.<br />

Note concernant lʹaffectation <strong>de</strong> la Chapelle <strong>de</strong> Nazareth<br />

à lʹétablissement provisoire <strong>de</strong> la paroisse N.D. <strong>de</strong>s Champs.<br />

Une nouvelle paroisse ayant été érigée par décision récente <strong>de</strong> Mgr lʹArchevêque <strong>de</strong><br />

Paris pour le quartier N.D. <strong>de</strong>s Champs, M. lʹabbé Duchesne, Curé <strong>de</strong> cette circonscription,<br />

a jeté les yeux, pour établir provisoirement son église, sur la petite chapelle <strong>de</strong> Nazareth<br />

<strong>de</strong>sservie par la Communauté <strong>de</strong>s Frères <strong>de</strong> St ‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul, et il a <strong>de</strong>mandé quʹelle lui<br />

fût cédée à loyer pour une ou <strong>de</strong>ux années.<br />

Cette chapelle est affectée aujourdʹhui est affectée aujourdʹhui à diverses œuvres<br />

charitables fondées par les quatre Conférences <strong>de</strong> St ‐Germain‐<strong>de</strong>s‐Prés, <strong>de</strong> St ‐Sulpice, <strong>de</strong>s<br />

Carmes et <strong>de</strong> Stanislas, dans lʹintérêt spirituel et temporel <strong>de</strong>s pauvres que quartier St ‐<br />

Germain. Ces œuvres sont notamment: un patronage <strong>de</strong> 200 apprentis, un autre <strong>de</strong> 100<br />

jeunes ouvriers, une Sainte‐Famille, une maison <strong>de</strong> retraite pour 50 vieillards, enfin tout le<br />

mouvement <strong>de</strong>s pauvres et <strong>de</strong>s ouvriers attirés par un fourneau économique, une biblio‐<br />

thèque populaire, etc. La chapelle sert <strong>de</strong> centre à tout cet ensemble <strong>de</strong> moyens qui ten<strong>de</strong>nt<br />

à ramener les âmes à la foi et qui supposent par là même un lieu saint où on les puisse ré‐<br />

unir, un local favorable où le ministre du Seigneur puisse les attirer et les rapprocher <strong>de</strong><br />

Dieu. Sans cette précieuse ressource, toutes les autres seraient à peu près vaines, per‐<br />

draient leur valeur et nʹatteindraient plus leur but. Dans les occasions que les œuvres faci‐<br />

litent et préparent, les enfants, leurs parents, les membres <strong>de</strong>s Conférences se rassemblent<br />

pour <strong>de</strong> pieuses solennités dont lʹeffet est <strong>de</strong> réconcilier aux pratiques religieuses nombre<br />

<strong>de</strong> pauvres gens qui en étaient <strong>de</strong>puis longtemps éloignés. Cʹest ainsi que, <strong>de</strong>rnièrement, à<br />

la fête <strong>de</strong> Noël, plus <strong>de</strong> 300 communions ont été faites à la messe <strong>de</strong> minuit, dans la cha‐<br />

pelle <strong>de</strong> Nazareth, par les enfants apprentis, les jeunes ouvriers et leurs parents; on pour‐<br />

rait presque assurer quʹune trentaine à peine se fussent souvenus <strong>de</strong>s solennités <strong>de</strong> Noël si<br />

les œuvres ne les eussent attirés et peu à peu disposés pour en recueillir les fruits. Ce fait,<br />

568


pris entre beaucoup dʹautres qui se répètent constamment à Nazareth, suffit pour montrer<br />

<strong>de</strong> quel intérêt il est pour lʹœuvre <strong>de</strong> nʹêtre pas privée dʹune chapelle assez vaste, accessi‐<br />

ble et commo<strong>de</strong>, qui répon<strong>de</strong> aux exigences <strong>de</strong> son action.<br />

Cependant, il est à remarquer que tout moyen manque pour suppléer convenable‐<br />

ment celle qui est employée présentement à cet usage et quʹil sʹagirait dʹaffecter à une au‐<br />

tre <strong>de</strong>stination. En supposant, en effet, quʹà lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> cloisons mobiles ou autrement, on<br />

pût établir, un autel dans lʹunique salle réservée aux exercices du Patronage, ce local trop<br />

restreint, inaccessible pour le <strong>de</strong>hors, serait loin <strong>de</strong> satisfaire aux errements 277 et aux be‐<br />

soins <strong>de</strong>s œuvres. Il rendrait impossible cette action simultanée quʹelles ten<strong>de</strong>nt à exercer<br />

sur les enfants et sur leurs parents, afin <strong>de</strong> tourner au bien leurs influences réciproques. Il<br />

ne serait guère non plus un lieu dʹédification pour les enfants et les jeunes ouvriers.<br />

Conviendrait‐il bien, en effet, <strong>de</strong> célébrer les Saints Mystères dans le local qui sert journel‐<br />

lement à tous les jeux et récréations <strong>de</strong>s apprentis? Serait‐ce un moyen dʹinspirer la révé‐<br />

rence pour les choses sacrées à <strong>de</strong>s assemblées dʹenfants ou <strong>de</strong> jeunes gens quʹon tient à<br />

peine attentifs et respectueux dans le lieu saint lui‐même? Enfin, dans lʹimpossibilité où<br />

lʹon serait évi<strong>de</strong>mment <strong>de</strong> laisser la S te Réserve dans <strong>de</strong> telles conditions, ne priverait‐on<br />

pas la Communauté <strong>de</strong>s frères <strong>de</strong> ce précieux privilège, unique allégement <strong>de</strong> leurs tra‐<br />

vaux, indispensable lien <strong>de</strong> leur vie commune, comme il lʹest réellement pour toute famille<br />

religieuse?<br />

Ces raisons quʹon pourrait appuyer <strong>de</strong> plusieurs autres semblent bien dignes dʹat‐<br />

tention, si lʹon considère que tout ensemble la mesure en question tronquerait et annulerait<br />

presque lʹœuvre <strong>de</strong> Nazareth, fruit <strong>de</strong> bien <strong>de</strong>s années <strong>de</strong> peines et <strong>de</strong> sacrifices, quʹelle<br />

nuirait à la paroisse elle‐même si fort intéressée à sʹentourer dʹœuvres qui préparent et se‐<br />

con<strong>de</strong>nt son action; enfin, quʹelle ne lui assurerait, après tout, quʹun édifice insuffisant, mal<br />

situé, sans dépendances et nécessairement gêné par les voisinages bruyants dʹassemblées<br />

dʹenfants et <strong>de</strong> jeunes ouvriers.<br />

Une autre considération, bien que secondaire par sa nature, emprunte aux circons‐<br />

tances une force quʹon oserait dire péremptoire et décisive. Lʹachat du terrain où lʹœuvre<br />

est assise, lʹachèvement <strong>de</strong> sa chapelle, la construction <strong>de</strong> bâtiments considérables, enfin<br />

<strong>de</strong>s frais divers dʹinstallation ont entraîné lʹœuvre dans <strong>de</strong>s dépenses qui ont dépassé toute<br />

prévision et qui ne sʹélèvent pas à moins <strong>de</strong> 220.000f. Sur cette somme, 100.000f restent à<br />

payer et 41.000f sont exigibles par les entrepreneurs pour le 1 er juillet prochain. Toutes ses<br />

ressources propres étant épuisées, lʹœuvre nʹa désormais <strong>de</strong> recours et <strong>de</strong> fonds quʹen la<br />

charité <strong>de</strong>s âmes bienveillantes et dans le zèle dʹune Commission administrative dont les<br />

membres se dévouent à lʹachèvement <strong>de</strong> lʹentreprise. Or, <strong>de</strong> près et <strong>de</strong> loin, un cri unanime<br />

<strong>de</strong> tous les amis <strong>de</strong> lʹœuvre avertit que lui enlever sa chapelle, cʹest la découronner, cʹest<br />

lui retirer son principal attrait pour exciter la charité, cʹest lui créer, en un mot, une diffi‐<br />

culté quʹelle ne pourra surmonter. Tous les membres <strong>de</strong> la Commission sans exception,<br />

partageant ce sentiment ont déclaré quʹils ne voyaient pour eux dans cette hypothèse au‐<br />

cun moyen dʹaccomplir leur tâche et que compromettre lʹœuvre à ce point, cʹétait préparer<br />

un <strong>de</strong> ces tristes échecs si fâcheux dans les œuvres du service <strong>de</strong> Dieu.<br />

On ose espérer que lʹautorité diocésaine daignera tenir compte <strong>de</strong> ces observations,<br />

quʹelle ne voudra pas poursuivre, à pareils risques, une convenance bien contestable pour<br />

la paroisse, et quʹen continuant à lʹœuvre <strong>de</strong> Nazareth la bienveillance si précieuse quʹelle<br />

277 Habitu<strong>de</strong>s, manières d'agir, selon l'acception qui, à l'époque, n'était pas péjorative.<br />

569


lui a témoignée jusquʹici, elle nʹexigera pas <strong>de</strong> ceux qui la soutiennent un sacrifice équiva‐<br />

lant pour eux à sa ruine 278 .<br />

445 à M. Maignen<br />

Rapport <strong>avec</strong> les Confrères <strong>de</strong> St‐Vt‐<strong>de</strong>‐Paul. Lʹaffaire <strong>de</strong> la location <strong>de</strong> la chapelle <strong>de</strong> Nazareth pose la question<br />

<strong>de</strong> la propriété <strong>de</strong>s immeubles. Exhortation à la patience et à une gran<strong>de</strong> réserve. Dévouement et con<strong>de</strong>scendance<br />

renforceront la position <strong>de</strong> lʹInstitut vis‐à‐vis <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> St‐Vt‐<strong>de</strong>‐Paul.<br />

Cannes, 16 janvier 1857<br />

Très cher enfant en N.S.,<br />

Jʹai bien senti dans vos <strong>de</strong>rnières lettres que vous attendiez <strong>de</strong> moi quelques petites<br />

tendresses particulières, quelques mots <strong>de</strong> conseil et dʹaffection; je nʹeusse pas <strong>de</strong>mandé<br />

mieux, jʹy suis bien porté <strong>de</strong> désir et dʹinclination, mais un pauvre cœur <strong>de</strong> mala<strong>de</strong> ne se<br />

dilate pas ainsi quand il veut, quelque chose le serre, lʹoppresse et ne lui permet pas dʹaller<br />

à droite ou à gauche; il faut quʹil reste sous son poids sans bouger le plus souvent, sinon<br />

pour se tourner <strong>avec</strong> soumission vers Dieu. Cʹest ainsi; que je suis presque toujours, me re‐<br />

levant toutefois par cette confiance quʹen priant un peu pour vous en cet état, je vous<br />

donne plus que <strong>de</strong>s caresses ou <strong>de</strong>s paroles dʹaffection, parce que le bon Dieu daigne tour‐<br />

ner cela à bien pour ceux que jʹaime et que je souhaiterais tant dʹassister.<br />

Je nʹai pas perdu <strong>de</strong> vue votre <strong>de</strong>man<strong>de</strong> au sujet <strong>de</strong> votre frère, je nʹai rien trouvé au<br />

premier aperçu; jʹy pense <strong>de</strong>vant Dieu, cʹest une chose si sérieuse; à mon retour, sʹil plaît<br />

au Seigneur que je revienne, je chercherai <strong>avec</strong> vous; jʹen causerai <strong>avec</strong> MM. Guillemin et<br />

Boutron qui connaissent bien notre excellent quartier St‐Sulpice. Il faut pourtant songer<br />

que votre frère porte tout ce quʹil a et tout ce quʹil est sur sa tête, ce qui rend la chose plus<br />

difficile.<br />

Jʹai déjà dit quelques mots dans une précé<strong>de</strong>nte lettre touchant la situation <strong>de</strong> notre<br />

petite Communauté relativement aux rapports <strong>avec</strong> nos confrères. A mon avis, il faut voir<br />

les choses dʹun peu haut dans la condition où le Seigneur a daigné nous placer; je trouve<br />

quʹen général, étant dʹune nature tendre et sensible, vous vous impressionnez trop <strong>de</strong> mi‐<br />

sères quotidiennes quʹil faut avaler comme la poussière <strong>de</strong> lʹair, sans trop y songer; tout ce‐<br />

la passe, les petites blessures, les petites contradictions sont bien peu <strong>de</strong> chose, si on ne les<br />

envenime pas en sʹy arrêtant à loisir; il faut secouer cela <strong>de</strong>vant Dieu ou le fondre dans<br />

cette ar<strong>de</strong>nte charité qui doit animer nos cœurs. Quʹon interprète mal telle ou telle <strong>de</strong> nos<br />

actions, quʹon ne nous ren<strong>de</strong> pas justice en telle ou telle occasion, quʹimporte, Dieu nous<br />

voit, sʹIl est content tout est bien.<br />

Dʹailleurs, voit‐on jamais, à la longue, dans le mon<strong>de</strong> chrétien, ceux qui vont droi‐<br />

tement, fermement dans leur chemin, ne pas trouver en définitive justice, par la confiance<br />

quʹils inspirent, par lʹestime et lʹaffection quʹon leur donne. Voit‐on quʹun corps religieux<br />

surtout, dont lʹesprit est une force puissante, ne se fasse jour et nʹait sa place dans le bien,<br />

si cet esprit est la charité, le zèle et le dévouement? Marchons donc, cher enfant, en simpli‐<br />

cité et confiance, nous serons assez forts, appuyés sur Dieu, pour nʹêtre pas embarrassés<br />

<strong>de</strong>s épines du chemin. Il faut aussi avouer que vous me semblez parfois découvrir <strong>de</strong>s in‐<br />

278 Il n'était pas possible <strong>de</strong> rédiger un plaidoyer à la fois plus doux et plus fort. La cause était gagnée. La vacance du Siège <strong>de</strong> Paris<br />

ne permettait pas <strong>de</strong> poursuivre les débats et quand le cardinal Morlot succè<strong>de</strong>ra à Mgr Sibour le 25 avril 1857, le curé <strong>de</strong> ND.-<strong>de</strong>s-<br />

Champs se pourvoira autrement. (Cf. VLP. I, p.561).<br />

570


tentions autres que les gens ne les ont réellement; je lʹai souvent éprouvé par moi‐même; je<br />

crois que vous vous méprenez en particulier en trouvant dans lʹinci<strong>de</strong>nt du Conseil <strong>de</strong> Pa‐<br />

ris un sujet <strong>de</strong> peine pour nous. Je nʹai jamais vu en M. Baudon que <strong>de</strong>s sentiments nobles<br />

et élevés, il a cru à la sincérité <strong>de</strong> notre désintéressement, jʹespère quʹil ne sʹest pas trompé;<br />

il est, <strong>avec</strong> raison, un peu timi<strong>de</strong> dans la disposition <strong>de</strong>s fonds <strong>de</strong> la Société qui est pauvre<br />

et que Dieu tient aux œuvres petites et humbles, mais il est dʹune générosité vraiment<br />

large et confiante pour ses propres ressources; je vous lʹai dit déjà, cʹest une belle chose;<br />

mais cʹest aussi une marche sage et bien assurée que dʹavoir confiance dans la droiture et<br />

la noblesse <strong>de</strong> cœur <strong>de</strong> ceux qui nous entourent.<br />

Si vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z quelque chose <strong>de</strong> plus précis sur les points qui vous ont mis<br />

en dissentiment, au moins apparent, <strong>avec</strong> notre ami M. Decaux, je vous dirai quʹincontes‐<br />

tablement à mes yeux, le Patronage, lʹasile <strong>de</strong>s vieillards, la S te ‐Famille, le fourneau, etc.<br />

sont <strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> S t ‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul; nous y avons concouru comme<br />

confrères sans doute, mais nous y prenons part surtout comme religieux appelés par la So‐<br />

ciété pour <strong>de</strong>sservir ses œuvres, elle y gar<strong>de</strong> le droit <strong>de</strong> haute direction, elle peut nous en<br />

retirer la gestion. Nous nʹavons pas à craindre que cette position soit trop dépendante; il<br />

peut arriver, tant les hommes sont faibles, quʹon voie le bien autrement que nous, quʹon<br />

nous entrave quelquefois; le plus souvent, cé<strong>de</strong>r pour un temps est le mieux, partout où on<br />

travaille <strong>avec</strong> les hommes, il faut attendre les malentendus et les difficultés, mais si lʹon<br />

quitte ceux‐ci, on retrouvera ceux‐là; mieux vaut donc le support, la patience qui ramè‐<br />

nent, édifient et gar<strong>de</strong>nt le précieux trésor <strong>de</strong> la charité.<br />

Quant à la maison, elle a été mise sous notre nom, à défaut <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> S t ‐<br />

Vincent qui a refusé dʹen accepter la responsabilité; lʹinitiative courageuse que nous avons<br />

prise, les efforts et sacrifices que nous avons faits les premiers constituent pour nous, en<br />

principe, un droit légitime <strong>de</strong> propriété. Il est vrai que la maladie qui mʹa mis <strong>de</strong> côté et<br />

lʹinsuffisance <strong>de</strong> vos relations ont rendu nécessaire lʹappui <strong>de</strong> nos amis; ils lʹont donné jus‐<br />

quʹici <strong>avec</strong> désintéressement, jʹespère quʹils voudront gar<strong>de</strong>r ce rôle <strong>de</strong> bienveillance et <strong>de</strong><br />

charitable secours; cependant, sʹils se posaient nettement <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s prétentions différentes<br />

et <strong>de</strong>mandaient une participation à la propriété, nous aurions à examiner si nous préférons<br />

lʹaccor<strong>de</strong>r ou renoncer à leur appui. Mais qui ne voit combien nous sommes intéressés à ne<br />

pas soulever ou laisser soulever <strong>de</strong> pareilles questions? Cʹest pourquoi jʹai bien vivement<br />

regretté que vous nʹayez pas évité sur ce point quelques contestations où vous pouviez ne<br />

pas entrer; en cas difficiles, rejetez‐vous sur moi; <strong>avec</strong> du temps, on peut réfléchir, consul‐<br />

ter Dieu et prendre un parti sage et éclairé.<br />

Ce nʹest dʹailleurs pas que je visse en général grand avantage à ce que nous ayons la<br />

propriété <strong>de</strong>s maisons dʹœuvres; je crois que plus tard il sera mieux que nous y soyons ap‐<br />

pelés seulement comme religieux <strong>de</strong>sservants, mais provisoirement et jusquʹà ce que les<br />

œuvres qui nous appellent soient mieux et plus fermement constituées, que nous soyons<br />

nous‐mêmes mieux posés et plus consistants, il a plu à la divine Provi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> nous don‐<br />

ner un peu <strong>de</strong> soutien par ce droit <strong>de</strong> propriété. Je nʹy vois rien <strong>de</strong> plus et nʹen fais pas<br />

dʹautre cas. Les œuvres, qui se font à Nazareth ne se peuvent faire par nous seuls, y tra‐<br />

vailler en coopération <strong>avec</strong> nos confrères qui sʹy sanctifient est la vraie et pure charité.<br />

Voilà, cher enfant, bien sommairement, mon avis sur les questions que vous mʹavez<br />

posées; il se résume à ceci: soyons bien bons, bien dévoués, bien con<strong>de</strong>scendants, donnons<br />

571


lʹexemple <strong>de</strong> tout zèle et <strong>de</strong> toute charité, notre position alors sera bien bonne, bien forte,<br />

nous serons appuyés sur Dieu.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

446 à M. Halluin<br />

Explication sur lʹinsuffisance du personnel et lʹimpossibilité <strong>de</strong> fournir à lʹŒuvre dʹArras toute lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong>man‐<br />

dée.<br />

Cannes, 17 janvier 1857<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Une indisposition qui sʹest surajoutée durant ces <strong>de</strong>rniers temps à mes misères habi‐<br />

tuelles, mʹa empêché <strong>de</strong> vous écrire ainsi quʹà notre bon f. Joseph Loquet, à qui jʹaurais<br />

voulu répondre pour lui dire toutes mes affectueuses sympathies pour lʹépreuve que Dieu<br />

lui impose. Il mʹest survenu plusieurs abcès au bras droit, et notamment un assez considé‐<br />

rable au poignet qui a mis une interruption absolue à toutes mes correspondances. Cʹest à<br />

ce moment que, ne voulant pas mettre <strong>de</strong> retard aux mesures qui pouvaient être à prendre<br />

à Vaugirard dans lʹintérêt <strong>de</strong> vos classes, jʹavertis M. Myionnet et que je lʹautorisai à dispo‐<br />

ser pour le mieux dans cette circonstance <strong>de</strong>s ressources bien restreintes <strong>de</strong> notre person‐<br />

nel. Il vous a dit lui‐même, <strong>de</strong>puis lors, quʹà lʹinstant même où il venait dʹarrêter, <strong>avec</strong> M.<br />

Lantiez et notre petit Conseil, le départ pour Arras du f. Polvêche, le f. Bassery, qui <strong>de</strong>vait<br />

prendre quelque petite partie <strong>de</strong> ses travaux, est tombé assez gravement mala<strong>de</strong>. Nous<br />

nous trouvions ainsi nous‐mêmes trop à découvert et force nous a été <strong>de</strong> rester en arrêt.<br />

On mʹécrit que le f. Bassery va mieux, mais il ne peut sortir, sa poitrine est plus que déli‐<br />

cate, et lʹon peut présumer que, même après un rétablissement tel quel, il ne sera pas pro‐<br />

pre <strong>de</strong> sitôt à faire <strong>avec</strong> suite la classe.<br />

Je ne regrette du reste que faiblement la difficulté qui sʹest opposée au départ du f.<br />

Polvêche, et je suis tenté dʹy voir lʹintervention <strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce. Il eût pu vous être utile<br />

pour organiser vos classes, il a <strong>de</strong> précieuses qualités, il est laborieux, capable, flexible et<br />

maniable <strong>de</strong> caractère. Mais il a un flegme tout septentrional, il est ouvert, il aime volon‐<br />

tiers la vie retirée, il eût été peu propre à mettre le mouvement, lʹunion et lʹentrain dans<br />

votre petite communauté. Il a dʹailleurs besoin dʹêtre particulièrement soutenu spirituel‐<br />

lement, son fléchissement momentané a été bien réparé, mais cʹest toujours une sorte <strong>de</strong><br />

blessure qui laisse après elle une cicatrice. Cʹest pourquoi, en consentant à son départ,<br />

jʹavais poussé en moi‐même un grand gémissement, subissant ce qui me semblait une né‐<br />

cessité pour les besoins <strong>de</strong> vos enfants, mais voyant en même temps tous les points défec‐<br />

tueux <strong>de</strong> cette combinaison.<br />

Jʹapprendrai <strong>avec</strong> grand intérêt, cher Monsieur lʹabbé, les moyens que votre zèle in‐<br />

dustrieux vous aura suggérés pour répondre à une situation évi<strong>de</strong>mment bien difficile. Il<br />

nʹa fallu rien <strong>de</strong> moins que nos propres embarras pour nous empêcher <strong>de</strong> vous donner se‐<br />

cours comme notre affection nous y portait si sincèrement. M. Myionnet est lui‐même<br />

tombé mala<strong>de</strong> en même temps que le f. Bassery. Il va mieux, il vient <strong>de</strong> mʹécrire quelques<br />

lignes; mais il reste faible et mal disposé. Il sʹétait beaucoup fatigué dans ces <strong>de</strong>rniers<br />

temps. Notre bon abbé Lantiez, qui précé<strong>de</strong>mment avait été souffrant, sʹest heureusement<br />

trouvé sur pied pour le suppléer, la maison <strong>de</strong> Nazareth a donné aussi un peu <strong>de</strong> secours,<br />

et tout a pu se soutenir. Vous voyez, cher Monsieur lʹabbé, quʹà Vaugirard comme à Arras,<br />

572


les œuvres du service <strong>de</strong> Dieu sont ru<strong>de</strong>s et laborieuses; mais, jʹai la confiance quʹelles sont<br />

par là même agréables à Dieu et quʹIl les bénira à proportion du courage, <strong>de</strong> la générosité<br />

quʹon aura mis à les soutenir.<br />

Je viens <strong>de</strong> recevoir une lettre <strong>de</strong> notre cher f. Caille, tout va bien dans la maison.<br />

Mais que <strong>de</strong> charges aussi sur la tête <strong>de</strong> ce bon frère, et combien nous avons besoin, <strong>de</strong> ce<br />

côté comme <strong>de</strong> tous les autres, du secours du Dieu <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong>!<br />

Ma santé laissant encore beaucoup à désirer, je ne puis, à mon grand regret, écrire<br />

aujourdʹhui à nos ff. dʹArras, au f. Loquet surtout. Je le ferai bientôt si Dieu me donne un<br />

peu <strong>de</strong> forces. Je voulais aussi répondre à notre bon petit f. Thuillier. Embrassez‐le, je vous<br />

prie, pour moi et recomman<strong>de</strong>z‐lui <strong>de</strong> ma part <strong>de</strong> prendre bien à cœur son salut et le bien<br />

que Dieu lui donne à faire. Il a été envoyé à Arras pour consommer lʹunion entre tous les<br />

membres <strong>de</strong> la famille dʹArras et <strong>de</strong> tous ceux du reste <strong>de</strong> la Communauté. Quʹil y ten<strong>de</strong><br />

donc par son bon esprit, par son désir constant <strong>de</strong> se rendre utile et agréable à vous et à ses<br />

frères.<br />

Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> aussi, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> faire pour moi quelques bonnes af‐<br />

fections à notre bon ami M. <strong>de</strong> Lauriston; une <strong>de</strong> mes premières lettres sera pour lui. Je<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> son indulgence et ses bonnes prières, les miennes lui sont assurées pour tous les<br />

jours.<br />

Notre petit f. Vasseur se rappelle à votre souvenir et vous offre son respectueux at‐<br />

tachement.<br />

Recevez aussi le mien, cher Monsieur lʹabbé; je suis en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

447 à M. Caille<br />

Défense formelle dʹaugmenter le nombre <strong>de</strong>s internes à lʹorphelinat dʹAmiens. Mesure <strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nce vis‐à‐vis <strong>de</strong>s<br />

personnes <strong>de</strong> lʹextérieur.<br />

Cannes, 17 janvier 1857<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai beaucoup écrit aujourdʹhui, je me sens fatigué, je réponds donc bien brièvement<br />

à votre bonne et filiale lettre du 13 <strong>de</strong> ce mois.<br />

Je crois quʹil faut envoyer ma lettre au f. Carment en lʹavertissant par un mot quʹelle<br />

est arrivée au moment où il venait <strong>de</strong> partir.<br />

Vous savez combien souvent je vous ai pressé <strong>de</strong> restreindre le nombre <strong>de</strong> vos en‐<br />

fants internes, jʹai tant <strong>de</strong> répugnance à sortir <strong>de</strong> la voie <strong>de</strong>s simples recommandations et<br />

conseils que jʹavais cru <strong>de</strong>voir mʹen tenir à cela; mais cette année, en présence <strong>de</strong>s charges<br />

qui vont peser sur vous, je me vois obligé <strong>de</strong> vous prescrire formellement et comme point<br />

essentiel dʹobéissance <strong>de</strong> ne pas excé<strong>de</strong>r le nombre <strong>de</strong> 34 que vous avez atteint aujour‐<br />

dʹhui; je sais vos bonnes dispositions, mon bon ami, et je mʹassure que vous sentez comme<br />

moi les exigences <strong>de</strong> notre position; vous ne prendrez donc aucune impression pénible <strong>de</strong><br />

cette prescription formelle; elle est pour le bien <strong>de</strong> la communauté, pour lʹavantage <strong>de</strong><br />

lʹorphelinat lui‐même; elle est donc selon Dieu, elle sera selon votre cœur.<br />

Pour ce qui regar<strong>de</strong> votre nièce, je vous recomman<strong>de</strong>, mon bon ami, <strong>de</strong> bien consi‐<br />

dérer ce que <strong>de</strong>man<strong>de</strong> notre position et <strong>de</strong> ne rien faire qui puisse au <strong>de</strong>hors prêter à la cri‐<br />

573


tique et au <strong>de</strong>dans nous susciter <strong>de</strong>s difficultés. Je ne croirais possible <strong>de</strong> tenir dans les bâ‐<br />

timents <strong>de</strong> la communauté une personne si jeune quʹà la condition <strong>de</strong> nʹavoir aucun rap‐<br />

port, communication et rapprochement quelconque, escalier séparé, entrée séparée; quʹelle<br />

fût, en un mot, non dans la maison, mais dans une maison contiguë. Autrement, croyez<br />

bien que ce mélange <strong>de</strong> toutes sortes dʹéléments dans la communauté lui donnera un<br />

mauvais aspect et un mauvais renom. Il ne faut pas oublier que, dʹailleurs, rapprocher <strong>de</strong>s<br />

personnes du sexe <strong>de</strong>s frères est toujours un danger, saint Vincent <strong>de</strong> Paul, à 70 ans, ne<br />

permettait pas quʹune femme lui parlât autrement quʹen présence dʹun frère. Je dois vous<br />

dire que le f. Guillot, quoique parfaitement sage et bien maître <strong>de</strong> lui‐même, est cependant<br />

extrêmement impressionnable sous ce rapport et que vous pouvez, si vous ne tenez bien<br />

compte <strong>de</strong> ces observations, lui créer <strong>de</strong> pénibles épreuves. Je compte, mon bon ami, sur<br />

votre pru<strong>de</strong>nce et sur votre charité. Consultez MM. Cacheleux et Mangot, dites‐leur mes<br />

objections.<br />

Adieu, mon bien bon ami, je vous embrasse ainsi que nos frères bien affectueuse‐<br />

ment.<br />

Votre ami et Père en N.S. et en sa T. S te Mère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

448 à M. <strong>de</strong> Lauriston<br />

Les rapports entre eux sont déjà marqués par la confiance. Raffermir son projet <strong>de</strong> se donner à Dieu. Esprit dʹen‐<br />

fance. Quʹil hâte son union en fréquentant lʹŒuvre dʹArras, cette ʺmaison <strong>de</strong>s pauvresʺ, où le Christ se montre<br />

plus sensiblement quʹailleurs. MLP. abandonné à Dieu ʺsoit pour vivre, soit pour mourirʺ.<br />

Cannes, 24 janvier 1857<br />

Très cher Monsieur et ami,<br />

Je réponds bien tardivement et bien petitement à votre chère épître du nouvel an;<br />

mes misères <strong>de</strong> santé en sont la cause, <strong>de</strong>s abcès qui me sont survenus <strong>de</strong>puis plusieurs<br />

semaines, dont un au poignet droit, mʹayant mis dans lʹimpossibilité dʹécrire. Jʹespère que<br />

nos cœurs sʹenten<strong>de</strong>nt déjà assez bien pour que vous ayez pressenti quelque raison sem‐<br />

blable à mon silence et que vous nʹen ayez pris aucun mécontentement. Pour moi, je me<br />

considère véritablement comme uni à vous, puisque vous nous avez donné généreuse‐<br />

ment <strong>de</strong>s droits sur vous, et je vous traite déjà <strong>avec</strong> cette confiance quʹil est si bon dʹavoir<br />

les uns dans les autres et qui est surtout propre aux familles religieuses. Soyez <strong>de</strong> plus en<br />

plus tranquille sur votre vocation, très cher Monsieur, tranquille aussi sur vos disposi‐<br />

tions, je crois que nous pouvons répondre que le Seigneur et la T. S te Vierge y veillent et<br />

que votre cœur ne faiblira point; nous sommes bien frêles par nous‐mêmes, mais bien forts<br />

quand nous ne nous éloignons point <strong>de</strong> Dieu; or, malgré les fragilités quotidiennes, je vois<br />

que vous restez lʹenfant <strong>de</strong> Dieu, que vous ne songez quʹà sa gloire et à son service. Nous<br />

ne pouvons empêcher le diable <strong>de</strong> jeter <strong>de</strong>s pierres sur notre chemin, soit par lʹamour‐<br />

propre, les abattements ou les langueurs <strong>de</strong> cœur, mais si nous continuons bravement no‐<br />

tre route, ces épreuves que Dieu permet ne feront que hâter notre marche et nous faire ga‐<br />

gner plus sûrement le but.<br />

En attendant lʹheure <strong>de</strong> votre union définitive à notre chère famille, rapprochez‐<br />

vous en toujours, autant que vous le pourrez, en faisant <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> M. Halluin la vô‐<br />

tre; cʹest la maison <strong>de</strong>s pauvres, Jésus‐Christ sʹy montrera plus sensiblement à vous quʹail‐<br />

574


leurs et vous y donnera <strong>de</strong>s grâces particulières. Veillez aussi sur votre cœur qui ne <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong> quʹà se donner généreusement, mais dont il faut régler les élans afin quʹil ne se dé‐<br />

pense pas trop à droite et à gauche, mais se gar<strong>de</strong> surtout pour le grand sacrifice que le<br />

Seigneur veut <strong>de</strong> lui. Je ne suis pas bien sûr, très cher Monsieur et bon ami, que nous nous<br />

retrouvions ensemble à Vaugirard, ma santé qui a été bien traînante cet hiver, sʹest encore<br />

plus dérangée <strong>de</strong>puis quelque temps; mais sʹil plaisait à Dieu <strong>de</strong> me rappeler à Lui, jʹai la<br />

confiance que mon union <strong>avec</strong> notre chère famille ne serait pas finie pour cela, il me sem‐<br />

ble impossible que Dieu sépare ce quʹil a si tendrement rapproché par la charité sur cette<br />

terre. Je me recomman<strong>de</strong> bien à vos prières, afin que je sois bien soumis et bien abandonné<br />

au bon plaisir divin, soit pour vivre, soit pour mourir.<br />

Adieu, bien cher ami et fils en N.S. Croyez à tous mes sentiments <strong>de</strong> tendre affec‐<br />

tion.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

449 à M. Halluin<br />

Union <strong>de</strong>s cœurs. Avantage du manque <strong>de</strong> personnel et <strong>de</strong> ressources: il incite à se confier en Dieu.<br />

Cannes, 25 janvier 1857<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Vous aurez compris que ma <strong>de</strong>rnière lettre sʹétait croisée <strong>avec</strong> la vôtre, quoiquʹelle y<br />

fît dʹavance presque <strong>de</strong> tout point réponse. Nous ne <strong>de</strong>vons point nous en étonner. Quand<br />

les esprits et les cœurs sont bien à lʹunisson, il est tout simple quʹils se rencontrent dans les<br />

mêmes pensées et les mêmes sentiments. Or, nous ne cherchons <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts que la<br />

gloire du Seigneur, le salut <strong>de</strong> ses plus pauvres et plus humbles créatures, nous ne souhai‐<br />

tons que dʹattirer quelques âmes dévouées pour suivre <strong>avec</strong> nous cette voie <strong>de</strong> privilège et<br />

<strong>de</strong> bénédiction; dans cette sphère toute simple et toute bornée, il est facile <strong>de</strong> se retrouver.<br />

Jʹespère <strong>de</strong> plus en plus <strong>avec</strong> vous, cher Monsieur lʹabbé, que le Seigneur nous ai<strong>de</strong>ra <strong>de</strong> sa<br />

grâce et travaillera <strong>avec</strong> nous constamment dans une œuvre qui est si conforme à la sienne<br />

sur la terre, puisquʹil souhaitait surtout dʹévangéliser les pauvres. Gardons donc notre<br />

confiance au milieu <strong>de</strong>s difficultés et <strong>de</strong>s épreuves, et au jour le jour le secours divin nous<br />

viendra. Il a toujours plu à Dieu, <strong>de</strong>puis que notre petite famille est dans la carrière <strong>de</strong>s<br />

œuvres charitables quʹelle y sentît la pauvreté, non seulement par la pénurie <strong>de</strong>s ressour‐<br />

ces, mais aussi par lʹinsuffisance du personnel. Il a ses vues, sans doute, <strong>de</strong> ce côté comme<br />

en tous; le second dénuement peut être aussi méritoire et aussi sanctifiant que lʹautre. Car,<br />

si la pauvreté <strong>de</strong>s biens détache <strong>de</strong> tout, prévient la sensualité et le relâchement, la pauvre‐<br />

té en personnel oblige les frères à sʹévertuer à servir Dieu en sʹimmolant, en un mot, et cʹest<br />

le sacrifice <strong>de</strong> nous‐mêmes que Dieu veut surtout. Jʹespère que vos bons frères compren‐<br />

dront tout cela. Jʹai la confiance, en particulier, que ceux qui vous sont venus <strong>de</strong> Vaugirard<br />

donneront lʹexemple et se prêteront à tout pour le bien <strong>de</strong> lʹœuvre à laquelle ils se sont<br />

donnés.<br />

Je trouve bonnes les dispositions provisoires que vous avez prises pour vos classes;<br />

elles étaient, je crois, les seules à prendre dans la situation et nous permettront dʹattendre<br />

le moment où nous pourrons concerter quelques autres combinaisons.<br />

Je nʹécris pas encore aujourdʹhui à tous nos bons frères, nʹayant que peu <strong>de</strong> force et<br />

nʹétant pas propre à écrire bien longtemps, chaque jour, en ce moment. Jʹenvoie seulement<br />

575


un mot pour notre f. Loquet, pour lʹassurer que je ne lʹoublie point dans son épreuve et<br />

que jʹy compatis bien affectueusement. Je joins aussi ici quelques lignes pour M. <strong>de</strong> Lauris‐<br />

ton que je regar<strong>de</strong> déjà comme un <strong>de</strong>s nôtres, mais que lʹespèce <strong>de</strong> congé où il se trouve<br />

temporairement laisse un peu plus au <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> notre centre que je ne lʹaurais souhaité. Je<br />

compte sur la grâce <strong>de</strong> Dieu et sur son cœur qui est droit et sincèrement dévoué pour lui<br />

faire surmonter cette épreuve.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> vos bonnes dispositions pour le f. Carment. Chez nous, à Vau‐<br />

girard, tous les frères ayant une fois compris que ses bouta<strong>de</strong>s étaient une infirmité, nʹen<br />

prenaient pas beaucoup <strong>de</strong> souci. Jʹespère quʹil ne sera non plus chez vous un grand sujet<br />

<strong>de</strong> contrariété pour personne et que, grâce à vos conseils et paternelles indulgences, il se<br />

sanctifiera en faisant encore un peu <strong>de</strong> bien.<br />

Je me recomman<strong>de</strong> particulièrement à vos prières et à celles <strong>de</strong> tous nos chers ff.<br />

dʹArras, ma santé ressent tant <strong>de</strong> malaises successifs que je ne sais trop comment elle tour‐<br />

nera. Je désire uniquement, en tout état <strong>de</strong> cause, être bien soumis à la volonté divine et<br />

mériter ses miséricor<strong>de</strong>s. Je nʹose penser quʹil pourrait sʹy joindre encore un peu <strong>de</strong> mérite<br />

pour lʹavantage <strong>de</strong> notre chère famille, jʹai tant à payer pour moi‐même quʹil est bien à<br />

craindre quʹil ne reste rien <strong>de</strong> réversible sur ceux mêmes qui me sont le plus chers.<br />

Adieu, bien cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.; croyez à tous mes sentiments <strong>de</strong><br />

respect et <strong>de</strong> tendre affection.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

450 à M. Maignen<br />

M. Paillé sʹen vient à Cannes sʹassurer <strong>de</strong> la santé <strong>de</strong> MLP. Amour <strong>de</strong> MLP. pour sa famille religieuse.<br />

Cannes, 26 janvier 1857<br />

Cher enfant en N.S.,<br />

Je profite <strong>de</strong> lʹenvoi que je fais au f. Beauvais dʹune réponse quʹil attendait <strong>de</strong> moi au<br />

sujet <strong>de</strong> son frère Paul, pour vous dire <strong>de</strong>ux mots dʹaffection et vous donner <strong>de</strong> mes nou‐<br />

velles. Le départ <strong>de</strong> notre f. Paillé mʹindique que vous êtes alarmés <strong>de</strong>s malaises répétés <strong>de</strong><br />

ma santé; ils mʹont paru, en effet, un indice que mon mal avait empiré assez notablement<br />

sous lʹinfluence du climat et <strong>de</strong> la mauvaise saison, mais sauf quelques acci<strong>de</strong>nts qui, <strong>de</strong>‐<br />

puis <strong>de</strong>ux jours, nʹont pas reparu, <strong>de</strong>s frissons nerveux assez pénibles, je ne vois pas en‐<br />

core <strong>de</strong> signe <strong>de</strong> fin immédiate. Ma poitrine est plus oppressée et plus douloureuse, je suis<br />

plus faible, mes digestions se font péniblement, lʹappétit est presque nul, mais pourtant je<br />

vais encore, je sors un peu tous les jours, sauf quand le temps est tout à fait mauvais; je<br />

crois que mon f. Paillé, à son arrivée, va se fâcher contre moi en ne me trouvant pas si mal<br />

quʹil le croyait; je lʹapaiserai <strong>de</strong> mon mieux, je ne pensais pas encore à <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r décidé‐<br />

ment la venue <strong>de</strong> lʹun <strong>de</strong> vous, mais peut‐être le Seigneur, dont lʹœil pénètre lʹavenir, a ju‐<br />

gé que le moment était venu. Si, dʹun autre côté, je dois durer encore un peu, le voyage du<br />

f. Paillé y contribuera; il pourra causer au net <strong>avec</strong> le mé<strong>de</strong>cin qui mʹa paru frappé <strong>de</strong> la<br />

gravité <strong>de</strong> mon état et qui ne mʹa semblé me dire que la moitié <strong>de</strong> sa pensée. Notre cher<br />

frère aussi raffermira mon esprit que lʹisolement, le défaut dʹactivité ont un peu abattu et<br />

lassé. Voilà ce que je me dis pour me consoler du sacrifice que fait notre chère famille et<br />

576


votre petite communauté en particulier. Cʹest dʹailleurs une marque <strong>de</strong> dévouement <strong>de</strong><br />

plus dans les actes intérieurs <strong>de</strong> la famille, et cela fait tradition; enfin, une action généreuse<br />

et charitable ne tourne jamais à détriment, dans le service <strong>de</strong> Dieu. Ce témoignage dʹaffec‐<br />

tion ne peut rien ajouter à mon attachement pour notre chère Communauté, je ne vis que<br />

par elle et pour elle; quand je souffre, je me console en lui consacrant mes souffrances et, si<br />

je meurs, jʹoffrirai encore pour elle ce <strong>de</strong>rnier sacrifice.<br />

Je présume bien que votre filiale affection pour moi vous eût porté à souhaiter <strong>de</strong><br />

venir près <strong>de</strong> moi à la place du f. Paillé; vous pensez bien, <strong>de</strong> votre côté, quʹil mʹeût été<br />

bien doux <strong>de</strong> recevoir vos soins, mais il est mieux au fait <strong>de</strong> mes misères <strong>de</strong> santé, il a plus<br />

lʹhabitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s voyages, et enfin, si ma santé sʹaltère entièrement, il aura aussi plus <strong>de</strong><br />

sang‐froid dans une situation pénible.<br />

Si je nʹétais accoutumé à <strong>de</strong>s alternatives <strong>de</strong> mieux et <strong>de</strong> pire, je me croirais aujour‐<br />

dʹhui en meilleure disposition; il a plu, cʹest toujours une cause <strong>de</strong> soulagement pour moi,<br />

je me sens tranquille et sans malaise bien sensible; mes nuits sont toutefois assez agitées;<br />

attendons en tout abandon la volonté <strong>de</strong> Dieu.<br />

Adieu, bien cher enfant; je recevrai <strong>avec</strong> satisfaction <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> votre chère<br />

maison; je ne puis écrire aujourdʹhui à mon abbé Hello, dites‐lui quʹil nʹy perd rien, quant<br />

à lʹintention, non plus que mon f. <strong>Jean</strong>[‐Marie Tourniquet] que je nʹoublie pas <strong>de</strong>vant Dieu.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

451 à M. <strong>de</strong> Lauriston<br />

MLP. le charge dʹencourager un jeune frère. Précautions à prendre pour ménager lʹautorité du Supérieur local.<br />

Cannes, 6 février 1857<br />

Bien cher Monsieur et fils en N.S.,<br />

Vous mʹavez assuré que vous étiez <strong>de</strong> cœur membre <strong>de</strong> notre petite famille et<br />

mʹavez autorisé à compter sur vous comme je compte sur mes autres frères. Je vous ai pris<br />

au mot et je suis très disposé à vous considérer comme un religieux en mission, qui rentre‐<br />

ra au foyer <strong>de</strong> la Communauté dès que sa tâche extérieure sera remplie. Cʹest à ce titre, très<br />

cher Monsieur, que je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> votre entremise pru<strong>de</strong>nte et charitable pour une petite af‐<br />

faire concernant lʹun <strong>de</strong> nos jeunes frères <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> notre bon abbé Halluin.<br />

Le jeune f. Jules chargé, je crois, <strong>de</strong> la lingerie, se sentant un peu accablé sous le faix<br />

<strong>de</strong> ses travaux incessants et privé presque toujours <strong>de</strong>s exercices pieux qui pourraient le<br />

soutenir, a cru <strong>de</strong>voir mʹécrire, sans le dire à son p. Halluin, une petite lettre dʹailleurs<br />

pleine <strong>de</strong> respect et dʹamour pour lui, mais par laquelle il gémit un peu dʹune tâche trop<br />

lour<strong>de</strong> pour ses jeunes épaules et <strong>de</strong>man<strong>de</strong> si la maison <strong>de</strong> Vaugirard ne serait pas plus fa‐<br />

cile et plus douce pour lui. Cette lettre est bien mesurée, bien soumise, ce nʹest pas du tout<br />

un acte dʹingratitu<strong>de</strong> envers notre bon abbé pour lequel, au contraire, le f. Jules témoigne<br />

toute lʹaffection et toute la reconnaissance possibles; cʹest seulement un épanchement et<br />

une confi<strong>de</strong>nce dʹune peine quʹil nʹa pas osé déclarer à M. Halluin lui‐même, sachant les<br />

difficultés que lui crée déjà la maladie du f. Loquet.<br />

Vous comprenez, bien cher Monsieur, quʹil y a là une situation délicate; je ne dois<br />

pas empêcher les frères <strong>de</strong> sʹouvrir à moi dans leurs peines et difficultés, cʹest une voie qui<br />

doit toujours rester ouverte pour eux et, quelque confiance que lʹon ait dans son Supérieur<br />

ordinaire, il peut advenir en certains cas quʹon sente le besoin <strong>de</strong> consulter le centre <strong>de</strong> la<br />

Communauté. Mais, dʹune autre part, je sais la tendresse <strong>de</strong> M. Halluin pour ses enfants, je<br />

577


crois quʹil aurait au fond du cœur quelque peine en voyant quʹils sont timi<strong>de</strong>s <strong>avec</strong> lui et<br />

nʹosent lui parler <strong>de</strong> leurs petits embarras. Je crois donc que, dans cette circonstance, pour<br />

ne pas le contrister, et aussi pour ne pas manquer à la confiance que le jeune frère a cru<br />

<strong>de</strong>voir me témoigner, il vaut mieux que je gar<strong>de</strong> pour moi sa petite confi<strong>de</strong>nce. Je désire‐<br />

rais, cher Monsieur, que vous fussiez mon intermédiaire charitable pour consoler et en‐<br />

courager le jeune Jules et lui transmettre <strong>de</strong> ma part quelques bonnes paroles <strong>de</strong> sympa‐<br />

thie et <strong>de</strong> tendre affection. Il ne vous sera pas difficile, ce me semble, <strong>de</strong> trouver quelque<br />

occasion <strong>de</strong> le voir en particulier. Vous auriez la bonté, alors, <strong>de</strong> lui dire que je lʹengage<br />

bien à prendre courage, que lʹhiver étant passé, ses charges <strong>de</strong>viendront moins lour<strong>de</strong>s,<br />

quʹil aura plus <strong>de</strong> temps pour ses exercices pieux, que vers la fin dʹavril je retournerai à<br />

Vaugirard et que jʹirai tout <strong>de</strong> suite voir mes enfants dʹAmiens et dʹArras, quʹà ce moment,<br />

sʹil y a quelque mesure à prendre à son sujet, nous pourrons nous en occuper sérieuse‐<br />

ment. Le mieux serait, à mon avis, quʹil eût la confiance, dans ses petites directions <strong>avec</strong><br />

son p. Halluin, <strong>de</strong> lui dire ses peines et difficultés du moment; mais, sʹil nʹose le faire, il<br />

pourrait peut‐être se servir <strong>de</strong> votre entremise. Vous auriez, en ce cas, la bonté <strong>de</strong> dire à<br />

notre bon abbé quʹen voyant le f. Jules un peu abattu ou moins gai que <strong>de</strong> coutume, vous<br />

lʹavez fait causer et avez découvert quʹil a, en effet, quelques petites peines et aurait peut‐<br />

être besoin dʹun peu dʹallègement.<br />

Ces quelques mots, cher Monsieur et bien bon ami, vous suffiront pour bien vous<br />

faire apprécier la situation; il faut consoler ce cher enfant, lui montrer que sa confiance mʹa<br />

touché et que jʹy suis sensible, et toutefois éviter <strong>avec</strong> le plus grand soin <strong>de</strong> laisser croire à<br />

M. Halluin que ses frères sont craintifs <strong>avec</strong> lui qui mérite si pleinement leur tendre et<br />

confiante affection.<br />

Cette occasion, bien cher Monsieur, vous obligera à mʹécrire, à me donner <strong>de</strong> vos<br />

nouvelles, à me dire si vous avez été bien fidèle à mes recommandations, si vous vous êtes<br />

tenu bien libre et bien disponible pour nous arriver à Vaugirard <strong>avec</strong> les premiers soleils<br />

du printemps; si, enfin, vous êtes, autant que possible, exact à voir notre cher M. Halluin et<br />

nos frères, un peu chargés durant cette longue saison dʹhiver; je me félicite donc dʹavoir eu<br />

moi‐même une raison particulière pour vous faire cette lettre. Je nʹaurais, à vrai dire, be‐<br />

soin ni <strong>de</strong> prétexte ni dʹoccasion, la confiance et lʹaffection sont déjà assez bien établies en‐<br />

tre nous pour que je vous écrive sans nulle raison particulière, mais uniquement pour<br />

mʹentretenir <strong>avec</strong> vous et maintenir lʹentente <strong>de</strong> cœur que le divin Seigneur a mise entre<br />

nous. Je recevrai <strong>avec</strong> joie votre réponse, bien cher Monsieur et ami, et je suis sûr dʹavance<br />

quʹelle mʹapportera <strong>de</strong> bonnes assurances, <strong>de</strong>s motifs <strong>de</strong> confiance et <strong>de</strong> consolation.<br />

Notre jeune f. Allard nʹa point persévéré; son indécision naturelle lʹa emporté sur<br />

quelques dispositions <strong>de</strong> grâce qui avaient fait mieux espérer <strong>de</strong> lui; la Provi<strong>de</strong>nce semble<br />

y pourvoir en nous envoyant un aspirant accoutumé aux œuvres dans la Société <strong>de</strong> S t ‐<br />

Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul, et qui paraît animé dʹun zèle véritable.<br />

Ma santé est assez bien remise dʹune sorte <strong>de</strong> crise qui avait semblé faire pencher la<br />

balance vers le déclin définitif; tout semble indiquer que je dois travailler encore un peu<br />

<strong>avec</strong> vous aux œuvres du Seigneur.<br />

Adieu, bien cher ami et fils en N.S.; jʹai hâte <strong>de</strong> vous revoir et <strong>de</strong> prier <strong>avec</strong> vous.<br />

Jusque là, je prie <strong>de</strong> loin ou plutôt <strong>de</strong> tout près <strong>avec</strong> vous dans le Cœur Sacré du divin Jésus.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

578


452 <strong>de</strong> M. Paillé à M. Decaux<br />

P.S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

La santé <strong>de</strong> MLP. sʹaméliore. Désir <strong>de</strong> revoir M. Decaux et <strong>de</strong> travailler <strong>avec</strong> lui.<br />

Cannes, 8 février 1857<br />

Mon bien cher Confrère,<br />

Nos ff. <strong>de</strong> Nazareth nʹauront pas manqué <strong>de</strong> vous faire part <strong>de</strong>s bonnes nouvelles que je<br />

leur ai envoyées <strong>de</strong> la santé <strong>de</strong> notre cher Père. M. Le <strong>Prevost</strong> a eu un moment difficile, une gran<strong>de</strong><br />

inflammation dʹentrailles lʹayant réduit à ne presque plus boire ni manger, une gran<strong>de</strong> prostration<br />

sʹen est suivie; pour une santé aussi frêle, cet état était inquiétant, mais lʹinflammation ayant dispa‐<br />

ru <strong>avec</strong> lʹaridité <strong>de</strong> lʹair, ou plutôt les prières nombreuses ayant obtenu la cessation <strong>de</strong> cet état, M.<br />

Le <strong>Prevost</strong> a pu reprendre <strong>de</strong> la nourriture et les forces sont revenues. Lorsque jʹarrivai, M. Le Pre‐<br />

vost était encore faible, mais <strong>de</strong> jour en jour sa santé sʹest améliorée, en sorte quʹen ce moment elle<br />

est dans son état habituel.<br />

Je ne sais précisément à quelle époque je serai <strong>de</strong> retour à Paris. M. Le <strong>Prevost</strong> pense à me<br />

renvoyer au mois dʹavril. Je regrette beaucoup <strong>de</strong> ne pouvoir <strong>avec</strong> vous et sous votre direction<br />

mʹoccuper <strong>de</strong> notre chère œuvre <strong>de</strong> Nazareth. Nous nous entretenons souvent <strong>de</strong> vous, <strong>de</strong> votre<br />

dévouement si entraînant, et du zèle si bienveillant <strong>de</strong> tous ces Messieurs du Conseil qui concou‐<br />

rent <strong>avec</strong> vous à notre chère œuvre. Retenus au loin et forcément inactifs en ce moment, nous vous<br />

aidons au moins par nos prières et vous payons au fond du cœur par notre bien vive affection.<br />

Jʹespère que vous aurez bientôt à vous occuper <strong>de</strong> la fondation <strong>de</strong> la maison du quartier <strong>de</strong>s<br />

Gobelins; lorsque je suis parti, jʹattendais le retour <strong>de</strong> M. Delaveau; il doit être actuellement à Paris,<br />

je viens <strong>de</strong> lui écrire, il ira sʹentendre <strong>avec</strong> M. Baudon. Prions Dieu pour quʹIl mène cette œuvre à<br />

bonne fin, elle sera peut‐être encore une <strong>de</strong> vos croix, mais ce sont <strong>de</strong>s croix quʹon aime; elles<br />

conduisent au Ciel.<br />

Jʹai oublié <strong>de</strong> vous dire avant mon départ que le ménage, pour lequel on <strong>de</strong>man<strong>de</strong> un lo‐<br />

gement à Nazareth moyennant 1.000f, est très âgé; ils ont lʹun et lʹautre 75 ans. Dans le cas où lʹon<br />

trouverait que 1.000f ne seraient pas assez, on serait disposé à ajouter quelque chose. M. Maignen,<br />

si vous le voulez, négociera cette affaire. Comment trouver une chambre? Cʹest là le difficile; ce‐<br />

pendant 1.000f ou 1.200f ne sont pas à dédaigner dans la position <strong>de</strong> nos affaires.<br />

Rappelez au f. Maignen quʹil faut quʹil obtienne une quêteuse <strong>de</strong> la Sœur St François; jʹes‐<br />

père que vous aurez pu me trouver un remplaçant pour la prière à Nazareth le jeudi. Continuez, je<br />

vous prie, <strong>de</strong> faire prier pour notre cher Père; le moment où lʹon a commencé à prier pour lui dʹune<br />

manière fervente a été celui <strong>de</strong> la résurrection; si nous nous endormons, une nouvelle chute pour‐<br />

rait arriver; mais votre cœur est <strong>de</strong> ceux qui veillent toujours; je suis tranquille.<br />

Recevez, mon bien cher Confrère, lʹexpression <strong>de</strong> mes sentiments affectueux; veuillez pré‐<br />

senter à tous ces Messieurs du Conseil lʹexpression <strong>de</strong> mon respect et <strong>de</strong> ma reconnaissance.<br />

Votre tout dévoué confrère<br />

Paillé<br />

Mon bien bon ami, jʹajoute ici moi‐même <strong>de</strong>ux lignes pour attester <strong>avec</strong> notre cher f.<br />

Paillé que je ne suis pas encore mort; cʹest un sursis, sans doute, qui ne saurait être dʹune<br />

durée bien longue, mais, si jʹen juge par les apparences, il me permettra <strong>de</strong> vous revoir et<br />

peut‐être <strong>de</strong> travailler encore quelque peu <strong>avec</strong> vous au service <strong>de</strong> Dieu et <strong>de</strong> ses œuvres.<br />

En attendant, je prie pour vous et pour nos bons et dévoués amis, et je vous aime et vous<br />

aimerai jusquʹà la fin.<br />

Votre tout affectionné ami et frère en N.S.<br />

9 février 1857 Le <strong>Prevost</strong><br />

579


453 <strong>de</strong> M. Paillé à M. Maignen<br />

P.S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Conseils pour régler les problèmes dʹadmission à la maison <strong>de</strong>s vieillards. MLP. souffre dʹêtre séparé <strong>de</strong> ses frères.<br />

Cannes, 10 février 1857<br />

Mon bien cher frère,<br />

Vous êtes bien chargé. Je vous ai donné par mon départ un surcroît <strong>de</strong> besogne. Nʹen pre‐<br />

nez pas davantage. Faites‐vous en un cas <strong>de</strong> conscience; autrement, vous nʹauriez plus un moment<br />

à donner à votre intérieur et, en travaillant davantage, vous auriez peut‐être moins <strong>de</strong> résultat. La<br />

bonté du travail dépend <strong>de</strong> la valeur <strong>de</strong> lʹouvrier. Nous ouvriers <strong>de</strong>s âmes, nous ne donnons <strong>de</strong> va‐<br />

leur à nos travaux que par notre valeur personnelle. Vous avez besoin <strong>de</strong> vous rappeler souvent<br />

cette vérité. Vous avez entre les mains le petit livre <strong>de</strong> La présence <strong>de</strong> Dieu. Il fait les délices <strong>de</strong> M. Le<br />

<strong>Prevost</strong>; pourriez‐vous le prendre sur vous? y jeter les yeux aux petits instants perdus? Vous y<br />

puiserez une gran<strong>de</strong> force, car rien ne fortifie comme la présence <strong>de</strong> Dieu et vos actions y acquer‐<br />

ront plus <strong>de</strong> mérites.<br />

Lʹordre dans vos comptes me paraît votre affaire la plus pressante. Jʹen ai dit un mot à M.<br />

Le <strong>Prevost</strong>. Il pense quʹau plus vite il faut régulariser cela; que si le désordre <strong>de</strong> vos finances venait<br />

à être connu <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul, vous seriez un homme coulé, ainsi que la Com‐<br />

munauté. Vous gar<strong>de</strong>riez <strong>de</strong> lʹinfluence comme conseil peut‐être, mais aucune comme exécution. Il<br />

faut donc vous hâter <strong>de</strong> mettre un peu dʹordre. M. Le <strong>Prevost</strong> a approuvé le projet que je vous ai<br />

proposé:<br />

1° Composer la Caisse dʹépargne <strong>de</strong>s dépôts <strong>de</strong>s enfants actuellement au Patronage;<br />

2° Charger M. Emile <strong>de</strong> la Caisse dʹépargne. Lui faire prendre un livret <strong>de</strong> Caisse dʹépargne et veil‐<br />

ler à ce quʹil dépose tous les mois lʹargent recueilli;<br />

3° Combler le déficit: a) <strong>avec</strong> le produit <strong>de</strong> lʹAlmanach, b) <strong>avec</strong> un autre moyen que vous imagine‐<br />

rez. Sans cela, la Communauté, qui est si pauvre, serait obligée <strong>de</strong> le faire <strong>de</strong> ses propres <strong>de</strong>niers<br />

pour ne pas perdre sa réputation et son influence.<br />

Quant aux 500f <strong>de</strong> déficit qui vous ont été laissés par M. Myionnet, M. Le <strong>Prevost</strong> me dit<br />

que M. Bourlez avait autorisé M. Myionnet à les prendre pour la dépense du Patronage. Dans ce<br />

cas, il nʹy aurait pas à les combler. Il faudrait seulement tâcher <strong>de</strong> régulariser cela auprès <strong>de</strong> M.<br />

Bourlez et <strong>de</strong> M. Baudon. Lorsque vous aurez fait vos comptes et pris vos dispositions, faites‐nous‐<br />

en connaître le résultat.<br />

La chaire est‐elle commandée? Le règlement <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Nazareth est‐il exposé dans la<br />

salle <strong>de</strong> prière? Avez‐vous obtenu une quêteuse <strong>de</strong> la Sœur S t François? Jʹai écrit à M. Decaux rela‐<br />

tivement au ménage qui nous est proposé par M lle Delmas. Il est très âgé. Ils ont lʹun et lʹautre 75<br />

ans. M lle Delmas ne mʹa pas proposé une augmentation, elle mʹa seulement laissé à entendre que si<br />

lʹon <strong>de</strong>mandait un peu plus <strong>de</strong> 1.000f, elle pourrait peut‐être le faire. Vous vous rappelez quʹau<br />

<strong>de</strong>rnier Conseil jʹai dit quʹon donnerait à ce ménage la première chambre vacante, à quelque étage<br />

que ce fût, sauf à se rattraper par la suite. Le Conseil nʹa pas jugé bon dʹempiéter ainsi sur les<br />

chambres gratuites. M. Le <strong>Prevost</strong> pense cependant que nous avons <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s obligations à ces<br />

Dames: les 15.000f <strong>de</strong> M lle …, les dons nombreux qui sont faits à notre chapelle, quʹil serait fâcheux<br />

<strong>de</strong> ne pas leur rendre le service quʹelles nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt. Les bonnes gens quʹon nous propose<br />

sont les parents dʹune <strong>de</strong>s personnes qui soutiennent lʹorphelinat <strong>de</strong> M lle Delmas; ils sont très pieux<br />

et seront lʹédification <strong>de</strong> la maison. M lle Delmas, qui est si bonne pour nous, nous trouvera encore<br />

quelque bienfaitrice. En <strong>de</strong>rnier lieu, 1.000 ou 1.200f ne sont pas à dédaigner dans lʹétat <strong>de</strong> nos fi‐<br />

nances. Plai<strong>de</strong>z bien cette cause auprès <strong>de</strong> M. Decaux. Il aime tant M. Le <strong>Prevost</strong> quʹil ne pourra<br />

pas résister à son désir. Mettez‐nous au courant, cher ami, <strong>de</strong> ce qui se fait pour lʹœuvre <strong>de</strong> Naza‐<br />

reth. Aurez‐vous dans la chapelle <strong>de</strong>s prédicateurs pendant le Carême? La première séance <strong>de</strong> la<br />

S te ‐Famille aura‐t‐elle bientôt lieu? Nous vivons ici <strong>de</strong> corps, mais notre esprit est au milieu <strong>de</strong><br />

vous. Faites‐nous part <strong>de</strong> vos travaux et <strong>de</strong> vos joies.<br />

580


Recevez, bien cher frère, lʹexpression <strong>de</strong>s sentiments les plus tendres dans les Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

De votre dévoué frère en N.S.<br />

Paillé<br />

Bien cher enfant,<br />

Je ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pas instamment, comme le marque notre f. Paillé, lʹadmission du<br />

ménage proposé par M lle Delmas, il me semble seulement quʹil serait bien <strong>de</strong> la faire, si on<br />

le peut; je désire aussi que, si on ne croit pas pouvoir adhérer à sa <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, on lui donne<br />

<strong>de</strong> bonnes raisons et quʹon adoucisse le refus autant quʹil sera possible.<br />

La présence <strong>de</strong> notre f. Paillé mʹa un peu remonté, jʹétais autant souffrant dʹune trop<br />

gran<strong>de</strong> séparation <strong>de</strong> vous que <strong>de</strong> mes misères <strong>de</strong> santé; je tâcherai toutefois <strong>de</strong> vous le<br />

rendre, dès que je me sentirai un peu raffermi; je ne suis encore guère vigoureux, ce sera<br />

une gran<strong>de</strong> joie pour moi <strong>de</strong> me retrouver encore quelque peu près <strong>de</strong> vous dans notre pe‐<br />

tite maison <strong>de</strong> Nazareth. Jusque là, je parle dʹelle et <strong>de</strong> vous tous <strong>avec</strong> mon f. Paillé, cela<br />

me console et me rend le temps <strong>de</strong> lʹabsence plus supportable. Je vous embrasse tous bien<br />

tendrement.<br />

Votre vieil ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

454 à M. J. Faÿ<br />

Lʹentrée <strong>de</strong> M. Faÿ dans lʹInstitut est retardée à cause <strong>de</strong> sa santé. ʺEvangéliser les pauvres vous a paru la meil‐<br />

leure partʺ. La déchristianisation <strong>de</strong> la société: le peuple, et spécialement les ouvriers, en sont les victimes. Faire<br />

prévaloir la vérité et faire goûter aux âmes la beauté <strong>de</strong> la foi. Servir les pauvres <strong>de</strong>man<strong>de</strong> humilité et charité.<br />

Cannes, 10 février 1857<br />

Bien cher Monsieur lʹabbé,<br />

Jʹai appris dans mon exil <strong>de</strong> Cannes lʹépreuve <strong>de</strong> santé quʹil a plu au divin Seigneur<br />

<strong>de</strong> vous envoyer tout <strong>de</strong> suite après votre ordination, comme pour marquer dʹune croix le<br />

commencement <strong>de</strong> votre carrière, en signe <strong>de</strong> conformité et <strong>de</strong> bénédiction. Jʹai souffert<br />

humainement <strong>de</strong> cette souffrance infligée à un ami déjà bien cher pour moi et quʹun lien<br />

plus intime doit bientôt rapprocher encore du centre <strong>de</strong> mes plus vives affections; mais, en<br />

esprit <strong>de</strong> foi, jʹy ai vu comme une nouvelle consécration que le Sauveur crucifié ajoutait <strong>de</strong><br />

sa main à lʹonction sainte que le Pontife a répandue sur vous dans votre ordination. Vous<br />

me le disiez vous‐même, dans la bonne et pieuse lettre que vous mʹécriviez il y a quelque<br />

temps, ces vues sont au‐<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong>s pensées humaines, mais elles sont <strong>de</strong> claires vérités<br />

pour les yeux illuminés par la foi.<br />

Cʹest dans le même esprit que servir et évangéliser les pauvres vous a paru la meil‐<br />

leure part et quʹentre les diverses carrières ouvertes à votre ministère, vous avez pris la<br />

plus humble, la plus pauvre, parce quʹelle était la plus semblable à celle quʹa choisie le di‐<br />

vin Sauveur lui‐même. Puissions‐nous toujours voir et apprécier les choses <strong>avec</strong> les yeux,<br />

<strong>avec</strong> le cœur <strong>de</strong> notre adoré Maître et Seigneur; nous comprendrons alors <strong>de</strong> plus en plus<br />

combien il est juste et miséricordieux tout ensemble <strong>de</strong> se porter <strong>de</strong> préférence vers les<br />

plus petits et les plus faibles, vers ceux dont la foi est lʹunique appui et lʹunique trésor et<br />

auxquels pourtant tant dʹennemis veulent ravir cette seule joie, cette <strong>de</strong>rnière consolation.<br />

Vous le voyez comme moi, cher Monsieur lʹabbé, le pauvre peuple, les malheureux ou‐<br />

vriers sont obsédés par les menées socialistes, par les fureurs <strong>de</strong>s impies, par les séduc‐<br />

581


tions <strong>de</strong>s protestants, et dʹune autre part lʹignorance, les passions, la misère souvent sʹy<br />

joignent pour les pervertir. Qui donc les défendra, qui aura compassion <strong>de</strong> leurs périls et<br />

<strong>de</strong> leur abandon, sinon les imitateurs du divin Jésus qui courait après la brebis perdue et<br />

qui pleurait sur la ruine prochaine <strong>de</strong> Jérusalem. A voir, hélas! les malheurs <strong>de</strong> notre<br />

temps, lʹaffaiblissement <strong>de</strong> la foi, les terribles menaces <strong>de</strong> la perversité, on pourrait crain‐<br />

dre aussi que quelque gran<strong>de</strong> ruine ne fût imminente pour nos mo<strong>de</strong>rnes sociétés, mais<br />

nous pouvons espérer encore que les prières <strong>de</strong>s âmes saintes, que les généreux sacrifices<br />

du zèle et <strong>de</strong> la charité sauveront le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> ces gran<strong>de</strong>s calamités. Voilà notre voie tra‐<br />

cée, bien cher Monsieur lʹabbé, travailler dans lʹhumilité, la charité et le dévouement à em‐<br />

pêcher le mal, à faire prévaloir la vérité, lutter courageusement contre les doctrines mau‐<br />

vaises, faire goûter aux pauvres âmes quʹon veut égarer les douceurs et les beautés <strong>de</strong> no‐<br />

tre foi, les arracher au démon et les conduire au Dieu <strong>de</strong> tout amour et <strong>de</strong> toute félicité,<br />

nʹest‐ce pas une noble et sainte tâche, nʹest‐elle pas digne <strong>de</strong> nos ambitions et <strong>de</strong> notre dé‐<br />

vouement?<br />

Je bénis le divin Seigneur qui a parlé à votre cœur et lui a conseillé intimement dʹen‐<br />

trer dans cette voie <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> nous; notre affection, notre cordiale union y seront no‐<br />

tre appui réciproque et le bon Maître se réjouira du tendre accord et <strong>de</strong>s généreux efforts<br />

<strong>de</strong> ses enfants.<br />

Jʹai appris par mes ff. <strong>de</strong> Vaugirard et <strong>de</strong> Nazareth que vous alliez <strong>de</strong> mieux en<br />

mieux et que vos forces seraient bientôt pleinement rétablies; je vous engage néanmoins à<br />

user <strong>de</strong> beaucoup <strong>de</strong> ménagements tant que durera la mauvaise saison; les organes restent<br />

longtemps impressionnables après les indispositions du genre <strong>de</strong> la vôtre et <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt<br />

<strong>de</strong>s précautions quʹon ne pourrait impunément négliger. Je parle ainsi pour vous qui <strong>de</strong>‐<br />

vez ménager vos forces dans lʹintérêt du bien, pour vos chers parents dont je sais les ten‐<br />

dres sollicitu<strong>de</strong>s, mais aussi pour nous qui voyons déjà en vous un frère et qui avons vi‐<br />

vement à cœur tout ce qui le regar<strong>de</strong> et lʹintéresse.<br />

Croyez, cher Monsieur lʹabbé, tout particulièrement, aux sentiments <strong>de</strong> cordiales et<br />

respectueuse affection <strong>de</strong><br />

Votre dévoué serviteur et ami en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

455 à M. <strong>de</strong> Lauriston<br />

Mission dʹaller <strong>de</strong> nouveau réconforter le même frère. Exhortation à rompre les <strong>de</strong>rnières amarres. Se jeter une<br />

bonne fois ʺdans les bras <strong>de</strong> Dieuʺ. MLP. a quitté Cannes pour Grasse.<br />

Grasse, 1er mars 1857<br />

Bien cher Monsieur et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> vos bonnes et charitables entremises près du jeune f. Jules; il en<br />

a senti, dès lʹabord, les bons effets; mais il ne semble pas que le démon qui le tente ait<br />

néanmoins tout à fait lâché prise; le f. Jules vient <strong>de</strong> mʹécrire <strong>de</strong> nouveau quʹil éprouve un<br />

grand ennui et un tel dégoût <strong>de</strong> ses occupations quʹil est décidé à chercher une position ou<br />

travail dans le mon<strong>de</strong>, si on ne croit pas possible <strong>de</strong> lʹappeler à Vaugirard.<br />

Je ne puis, à distance, et par les quelques détails que me donne ce pauvre enfant,<br />

bien juger <strong>de</strong> ses dispositions; est‐ce une tentation, est‐ce un signe <strong>de</strong> lʹinsuffisance <strong>de</strong> son<br />

dévouement et conséquemment <strong>de</strong> sa vocation, je ne puis bien mʹen rendre compte. Il me<br />

582


paraîtrait don,c tout à fait utile que le petit f. Jules sʹouvrît en toute simplicité à notre bon<br />

abbé Halluin qui examinera son état et fera pour lui tout ce qui sera <strong>de</strong> mieux. Soyez assez<br />

bon, cher Monsieur, pour voir encore notre jeune ami et pour le déci<strong>de</strong>r à prendre au plus<br />

tôt ce parti; il nʹen est pas éloigné, car il mʹa paru, dans sa lettre, en sentir lui‐même la né‐<br />

cessité, mais sʹil a besoin dʹêtre pour cela un peu poussé et encouragé, votre charité saura<br />

lui inspirer fermeté et résolution définitive. Je ne mʹexcuse point <strong>de</strong> vous donner tant <strong>de</strong><br />

peine; toute œuvre <strong>de</strong> charité vous convient et dʹailleurs, dans cette famille chrétienne que<br />

votre cœur a déjà adoptée, tous les membres, même les plus petits, ont droit à vos sympa‐<br />

thies et con<strong>de</strong>scendances. Vous savez aussi trop bien le prix dʹune vocation pour ne pas<br />

être convaincu comme nous quʹon doit tout faire pour la soutenir, la protéger et lʹamener<br />

aux fins que le Seigneur a daigné lui assigner. Il se peut ici que ce pauvre jeune Jules, sans<br />

avoir trop <strong>de</strong> travail peut‐être, ait une trop gran<strong>de</strong> responsabilité et <strong>de</strong>s préoccupations ex‐<br />

cessives pour son âge et sa fermeté dʹesprit. Il nous arrive souvent, dans nos œuvres, <strong>de</strong><br />

cé<strong>de</strong>r aux besoins du moment et <strong>de</strong> pourvoir aux services sans songer suffisamment aux<br />

forces et capacités <strong>de</strong>s sujets quʹon y place; notre bon abbé Halluin surtout a dû cet hiver<br />

se trouver plus dʹune fois dans cette nécessité; je crois donc quʹil y a lieu <strong>de</strong> faire toute at‐<br />

tention à la souffrance du jeune frère et <strong>de</strong> lui donner les assistances que son état peut ré‐<br />

clamer.<br />

Votre chère lettre mʹa été, dʹune autre part, bien agréable, parce que jʹy ai retrouvé,<br />

<strong>avec</strong> <strong>de</strong>s luttes et tribulations à peu près inévitables pour vous, vos bonnes dispositions et<br />

une résolution <strong>de</strong> plus en plus arrêtée dʹobéir à lʹordre <strong>de</strong> Dieu. Je dis à <strong>de</strong>ssein, lʹordre,<br />

parce quʹil semble bien quʹen vous il nʹy a pas simple invitation et appel, mais intimation<br />

précise et dispositions décisives <strong>de</strong> la part du Souverain Maître. Tâchez, bien cher Mon‐<br />

sieur, <strong>de</strong> cé<strong>de</strong>r <strong>de</strong> bonne grâce et dʹajouter au mérite <strong>de</strong> votre sacrifice par le plein consen‐<br />

tement <strong>de</strong> votre cœur. Mais surtout, bien cher Monsieur, bannissez toute défiance; il me<br />

semble que cʹest le côté par lequel vous êtes le plus visiblement tenté; vous ne comptez pas<br />

assez sur Dieu, vous regar<strong>de</strong>z trop votre misère, pas assez ses miséricor<strong>de</strong>s admirables,<br />

ses con<strong>de</strong>scendances infinies, ses tendresses sans mesure; <strong>de</strong> là vos peines, vos inquiétu‐<br />

<strong>de</strong>s et vos doutes; oh! jetez‐vous une bonne fois dans ses bras, comme le nageur qui se jette<br />

en pleine eau et qui se sent doucement soutenu par les flots; ainsi la grâce du divin Sei‐<br />

gneur vous portera et vous préservera <strong>de</strong> tout péril. Nʹest‐ce pas pour vous que S te Thérèse<br />

a écrit ces mots: ʺSi jʹétais dans le cas <strong>de</strong> donner un conseil à quelquʹun, je ne serais pas<br />

dʹavis que quand Dieu nous porte à faire quelque bonne œuvre et quʹIl le fait à plusieurs<br />

reprises, on manquât <strong>de</strong> lʹentreprendre par la crainte <strong>de</strong> nʹy pas réussir; car, si on lʹentre‐<br />

prend pour son amour, Il est tout‐puissant pour nous ai<strong>de</strong>r à lʹexécuter. Quʹil soit béni à<br />

jamais. Ainsi soit‐il!ʺ Donc, cher Monsieur, défiez‐vous <strong>de</strong> vous‐même, mais croyez à la<br />

parole <strong>de</strong>s saints, confiez‐vous au Dieu bon, tendre et miséricordieux.<br />

Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> bien instamment <strong>de</strong> préciser vos moyens pour votre venue à Vau‐<br />

girard. Nous <strong>de</strong>vons avoir notre retraite tout <strong>de</strong> suite après Pâques, je crois que le bon<br />

Dieu vous veut à ce moment au milieu <strong>de</strong> nous, tout à fait dégagé, sans que rien reste <strong>de</strong>r‐<br />

rière vous pour vous préoccuper et vous rappeler encore au <strong>de</strong>hors. Je vous en prie donc,<br />

au nom du Seigneur, cher Monsieur, tranchez un peu courageusement quelques minimes<br />

obstacles <strong>de</strong> détail dont il ne faut pas tenir compte dans une situation si grave et répon<strong>de</strong>z<br />

dignement à la grâce insigne que vous avez reçue. Je serai moi‐même <strong>de</strong> retour à ce mo‐<br />

ment; je serais bien heureux que nous fussions réunis pour cette retraite qui serait comme<br />

583


la préparation <strong>de</strong> votre nouvelle carrière; faites donc en sorte, bien cher Monsieur, je vous<br />

en conjure, que toutes vos affaires soient bien complètement réglées pour ce moment.<br />

Ma santé, dont vous avez la bonté <strong>de</strong> me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s nouvelles, continue dʹêtre<br />

passable; elle nʹa pas été aussi compromise que je lʹavais pensé un moment; le climat <strong>de</strong><br />

Cannes sʹétant trouvé peu favorable à ma constitution, jʹai éprouvé tout lʹhiver mille ma‐<br />

laises successifs qui mʹavaient fait croire à une aggravation dans mon état, mais ces indis‐<br />

positions étaient nerveuses surtout et ne portaient point atteinte à la constitution qui reste<br />

faible, mais sans accroissement du mal. Je nʹai jamais cessé <strong>de</strong> sortir tous les jours, je nʹai ni<br />

toux, ni fatigues plus gran<strong>de</strong>s <strong>de</strong> la poitrine; en un mot, je ne suis guère soli<strong>de</strong>, mais je puis<br />

encore travailler quelque peu aux œuvres que le Seigneur a daigné nous confier. Je suis<br />

<strong>de</strong>puis quelques jours à Grasse dont lʹair me convient mieux que celui <strong>de</strong> Cannes, sans<br />

doute à cause <strong>de</strong> lʹéloignement <strong>de</strong> la mer qui nʹest plus, comme à Cannes, sous mes fenê‐<br />

tres; jʹeusse sans doute évité beaucoup <strong>de</strong> malaises en venant dès lʹabord ici, mais le Sei‐<br />

gneur, dont les vues sont toutes sages, avait réglé les choses autrement. Je reviendrai à<br />

Cannes au commencement dʹavril pour préparer mon retour à Vaugirard.<br />

Adieu, bien cher Monsieur et fils en N.S. Voici le Carême, voici aussi le mois <strong>de</strong> S t<br />

Joseph, double cause dʹespérance, double motif pour redoubler nos prières et pour en at‐<br />

tendre <strong>de</strong> précieux résultats.<br />

Tout à vous bien affectueusement en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

456 à M. Caille<br />

Tendre à mettre toujours nos travaux, nos sentiments, notre vie en commun, ʺafin que le lien <strong>de</strong> la vraie charité<br />

ne se relâche pas entre nousʺ. MLP. fait part <strong>de</strong>s <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s <strong>de</strong> personnel qui lui parviennent <strong>de</strong> divers côtés, pour<br />

soutenir <strong>de</strong>s œuvres en difficultés.<br />

Grasse, 3 mars 1857<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Voilà bien longtemps que je nʹai reçu <strong>de</strong> nouvelles <strong>de</strong> vous et <strong>de</strong> notre chère maison<br />

dʹAmiens; je pense bien que vos occupations, en ce moment plus lour<strong>de</strong>s que jamais, ont<br />

pu vous rendre les correspondances difficiles; je vous en prie néanmoins, si vous nʹavez<br />

pas la possibilité <strong>de</strong> mʹécrire vous‐même, faites‐moi écrire quelques mots par nos ff. Jules<br />

[Marcaire] ou Henry [Guillot].<br />

Je songe bien souvent <strong>de</strong>vant Dieu à la ru<strong>de</strong> tâche que la charité vous a imposée et<br />

je regrette <strong>de</strong> vous ai<strong>de</strong>r si peu, mais mon éloignement accroît mon impuissance et mes<br />

misères <strong>de</strong> santé, en me retirant <strong>de</strong> lʹactivité ordinaire, mʹôtent les quelques moyens dont<br />

je pouvais disposer.<br />

Jʹapprendrai <strong>avec</strong> satisfaction ce que vous avez fait, les secours que la divine Provi‐<br />

<strong>de</strong>nce vous a données lʹavancement <strong>de</strong> vos travaux et ce qui vous reste à faire. Je ne sou‐<br />

haite pas moins <strong>de</strong> savoir comment vont nos ff. Marcaire et Guillot, je trouve quʹils écri‐<br />

vent trop rarement et sʹisolent ainsi plus quʹil ne faut <strong>de</strong> la maison dʹoù ils sont sortis; nous<br />

<strong>de</strong>vons tendre à mettre toujours nos travaux, nos sentiments, notre vie en commun, afin<br />

que le lien <strong>de</strong> la vraie charité ne se relâche pas entre nous.<br />

Nos frères, à Vaugirard et ailleurs, font le mois <strong>de</strong> S t Joseph; je pense bien quʹà<br />

Amiens vous faites aussi quelques petits exercices en lʹhonneur <strong>de</strong> ce bon et vénéré saint<br />

qui est un <strong>de</strong> nos patrons.<br />

584


Je vous ai fait envoyer la Vie <strong>de</strong> la sœur Rosalie, pensant que votre petite communauté<br />

la lirait <strong>avec</strong> intérêt et édification; je souhaite bien quʹelle vous ait été agréable.<br />

Je ne sais pas si M. Myionnet vous a écrit quelquefois et <strong>de</strong>puis quel temps il lʹa fait;<br />

je lui recomman<strong>de</strong> <strong>de</strong> bien vous tenir informé <strong>de</strong> tout ce qui peut vous intéresser touchant<br />

la situation <strong>de</strong> la Communauté et <strong>de</strong> ses œuvres, mais je pense bien que les travaux multi‐<br />

pliés qui lʹont chargé cet hiver ont pu rendre ces communications moins fréquentes; je<br />

crois que nous aurons quelque chose à régler sur ce point, autrement les relations sʹalan‐<br />

guiraient entre nous et nos rapports perdraient <strong>de</strong> leur intimité et <strong>de</strong> leur avantage tout<br />

ensemble.<br />

Tout va bien, en ensemble, à Arras comme à Vaugirard et à Nazareth; nous avons<br />

eu quelques épreuves <strong>de</strong> santé pour quelques‐uns <strong>de</strong> nos frères, mais sans aucune suite fâ‐<br />

cheuse; le retour <strong>de</strong> la belle saison va remettre tout notre mon<strong>de</strong> en bon état. M. lʹabbé Faÿ<br />

quʹune fluxion <strong>de</strong> poitrine avait arrêté, au moment où il allait entrer à Vaugirard, est bien<br />

remis, il arrivera prochainement; jʹai reçu <strong>de</strong> lui ces jours‐ci une excellente lettre qui me<br />

prouve <strong>de</strong> plus en plus que la Communauté fera en lui une acquisition parfaite. A Arras,<br />

le f. Loquet est <strong>de</strong> mieux en mieux. M. <strong>de</strong> Lauriston est toujours disposé à nous venir après<br />

Pâques, mais le moment décisif est ru<strong>de</strong>, brisant ses liens, ses œuvres ordinaires, son indé‐<br />

pendance, cʹest un vrai sacrifice; priez bien <strong>avec</strong> nos frères pour que le Seigneur lui prête<br />

son appui. Un <strong>de</strong> nos confrères <strong>de</strong>s Conférences <strong>de</strong> Paris a aussi montré quelques bonnes<br />

dispositions, je ne sais si le courage <strong>de</strong> consommer son immolation lui sera donné. Les be‐<br />

soins <strong>de</strong>s œuvres sont <strong>de</strong> plus en plus grands; <strong>de</strong> divers côtés, on nous écrit pour nous<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r du secours en faveur <strong>de</strong> plusieurs institutions charitables qui sʹéteignent, faute<br />

dʹhommes dévoués pour les soutenir. Prions donc bien le Seigneur, mon bon ami; Il voit<br />

combien la moisson est gran<strong>de</strong> et combien peu nombreux sont les ouvriers. Il daignera<br />

nous entendre, si nous lʹinvoquons ar<strong>de</strong>mment et si, par nos efforts généreux, nous méri‐<br />

tons quʹIl daigne nous assister.<br />

Lʹair <strong>de</strong> Cannes sʹétant trouvé mal convenir à ma constitution, jʹai été tourmenté<br />

tout lʹhiver <strong>de</strong> malaises incessants et jʹavais fini par croire que les restes <strong>de</strong> ma santé<br />

étaient épuisés, mais il ne semble pas que ces indispositions aient eu dʹautre effet que <strong>de</strong><br />

me servir dʹépreuve et dʹoccasion <strong>de</strong> me soumettre aux volontés du Seigneur. Je me<br />

trouve, en définitive, comme au moment <strong>de</strong> mon arrivée dans le Midi, ma poitrine ne<br />

souffre que faiblement, je nʹai ni toux ni fatigue; je crois donc quʹà mon retour, qui aura<br />

lieu dans le courant dʹavril, je pourrai reprendre quelque part <strong>de</strong> mes travaux ordinaires et<br />

soulager un peu nos frères. Je suis <strong>de</strong>puis peu <strong>de</strong> temps ici; je mʹy trouve beaucoup mieux<br />

quʹà Cannes, sans doute parce que je suis moins près <strong>de</strong> la mer; lʹair est ici meilleur; mon f.<br />

Paillé, qui mʹétait venu retrouver, avait peine lui‐même à supporter le climat <strong>de</strong> Cannes; le<br />

jeune f. Ernest, après avoir eu <strong>de</strong>s abcès assez fatigants, a maintenant une douleur au ge‐<br />

nou qui lʹempêche <strong>de</strong> marcher; il gar<strong>de</strong> le lit <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux jours; je pense néanmoins<br />

quʹ<strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> repos et <strong>de</strong> soins, il se remettra sur pied.<br />

Assurez bien mes chers enfants Jules et Henry <strong>de</strong> ma tendre affection, et croyez<br />

vous‐même, mon bien bon ami et fils, à tous mes sentiments les plus dévoués en J. et M.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

Souvenir <strong>de</strong> respect à MM. Mangot, <strong>de</strong> Brandt et Cacheleux. Jʹai revu et complété<br />

notre règlement, je vous lʹenverrai prochainement, avant <strong>de</strong> le soumettre <strong>de</strong> nouveau à M gr<br />

lʹEvêque dʹAngers.<br />

585


457 à M. Decaux<br />

Importance dʹune bonne organisation à Nazareth. Etat <strong>de</strong> santé <strong>de</strong> lʹabbé Faÿ.<br />

Grasse, 4 mars 1857<br />

Mon bien bon ami,<br />

Depuis bien longtemps je ne vous ai point donné signe <strong>de</strong> vie; mes jours se sont<br />

passés, durant cette saison, en une suite <strong>de</strong> malaises et infirmités en gran<strong>de</strong> partie causés,<br />

je crois, par le climat <strong>de</strong> Cannes qui sʹest trouvé ne pas du tout convenir à ma constitution;<br />

lʹennui <strong>de</strong> chercher un nouvel asile et quelques raisons dʹéconomie mʹavaient fait persister<br />

à mʹy tenir, nonobstant cet état <strong>de</strong> continuelle souffrance; la venue <strong>de</strong> mon f. Paillé mʹa dé‐<br />

cidé à passer outre; je suis à quatre lieues <strong>de</strong> Cannes, à Grasse, <strong>de</strong>puis huit jours; je mʹy<br />

sens beaucoup mieux et je crois que ma santé, dont le fond nʹavait du reste pas été atteint<br />

sensiblement, va continuer <strong>de</strong> se raffermir, sinon <strong>de</strong> manière à me rendre fort, assez au<br />

moins pour me permettre <strong>de</strong> reprendre, à mon retour, quelques travaux et <strong>de</strong> donner un<br />

peu dʹai<strong>de</strong> à ceux qui mʹentourent.<br />

Jʹai appris toutes les bénédictions que le Seigneur a données à vos efforts, et no‐<br />

tamment, en <strong>de</strong>rnier lieu, le don généreux <strong>de</strong> notre cher Prési<strong>de</strong>nt Général, ainsi que lʹallo‐<br />

cation bienveillante du Conseil <strong>de</strong> Paris; tout laisse espérer que notre entreprise arrivera à<br />

bonne conclusion et préparera <strong>de</strong>s moyens assurés pour constituer une oeuvre sérieuse,<br />

consistante et pleine dʹavenir, pour le bien spirituel et temporel <strong>de</strong>s classes que nous sou‐<br />

haitons dʹédifier et <strong>de</strong> secourir. Je continue, pour ma part, à prier bien instamment pour le<br />

succès <strong>de</strong> votre zèle si dévoué et je ferai, <strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> mes bons frères, tout ce qui dépen‐<br />

dra <strong>de</strong> moi pour que lʹœuvre <strong>de</strong> Nazareth soit comme une première pierre <strong>de</strong>s édifices<br />

charitables que créera successivement notre chère Société.<br />

M. Myionnet mʹa dit le désir que vous lui avez exprimé au sujet <strong>de</strong> la coopération<br />

<strong>de</strong> M. lʹabbé Faÿ au Patronage <strong>de</strong> St ‐Charles. Je souhaite bien cordialement que nous puis‐<br />

sions concourir à donner à cette œuvre les ai<strong>de</strong>s spirituels quʹelle nʹa pu se procurer jus‐<br />

quʹici que si difficilement, mais je ne sais pas quelles ressources nous trouverons présen‐<br />

tement pour cette fin dans notre bon abbé Faÿ. Il sortait du séminaire déjà fort épuisé par<br />

<strong>de</strong>s excès <strong>de</strong> chant qui lui avaient donné une maladie du larynx, quand il a eu, ces temps<br />

<strong>de</strong>rniers, une fluxion <strong>de</strong> poitrine dont il se remet bien lentement. Il mʹavait écrit, il y a<br />

<strong>de</strong>ux mois, avant cette maladie, pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r, au nom <strong>de</strong> sa famille, que la Communau‐<br />

té le ménageât dans les premiers temps et ne lui donnât pas <strong>de</strong> fonctions qui le fissent par‐<br />

ler; je crains quʹil ne puisse encore <strong>de</strong> sitôt prendre bien activement son ministère; je verrai<br />

du reste, à mon retour, en quel état il se trouvera et sʹil est capable <strong>de</strong> rendre quelques ser‐<br />

vices aux œuvres. Nous pouvons bien compter que pareille difficulté se rencontrera sou‐<br />

vent pour nous lorsque nos ff. ecclésiastiques nous viendront directement du séminaire.<br />

Les quatre années dʹétu<strong>de</strong>s, dʹexercices spirituels et <strong>de</strong> vie sé<strong>de</strong>ntaire mettant la plupart <strong>de</strong><br />

ces jeunes lévites dans un état dʹépuisement complet. Vous savez bien, mon bon ami, que<br />

notre petite communauté a été faite pour les œuvres, quʹelle nʹa rien tant à cœur que <strong>de</strong><br />

leur être un peu utile; nous ne nous refuserons donc à rien <strong>de</strong> ce qui sera praticable, je<br />

vous en donne <strong>de</strong> nouveau lʹassurance.<br />

Je compte revenir à Vaugirard dans le courant dʹavril au plus tard; ce me sera une<br />

gran<strong>de</strong> joie <strong>de</strong> vous revoir, dʹautant quʹà certains moments <strong>de</strong> cette saison jʹavais pensé ne<br />

plus retrouver quʹau Ciel les bons amis que jʹai tant affectionnés sur la terre.<br />

586


En attendant, recevez, mon bon ami, et partagez <strong>avec</strong> tous nos dévoués confrères les<br />

assurances <strong>de</strong> mon tendre et inviolable attachement en N.S.<br />

Votre ami et frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Bien respectueux et bien reconnaissant souvenir à M. Baudon auquel je veux écrire<br />

prochainement.<br />

458 <strong>de</strong> M. Paillé à M. Maignen<br />

P.S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Persévérer dans lʹœuvre <strong>de</strong> sa sanctification personnelle. Travailler à améliorer les Œuvres charitables quʹon lui<br />

a confiées. Questions financières.<br />

Grasse, 6 mars 1857<br />

Mon bien cher frère,<br />

Jʹaurais voulu entretenir longtemps; je me hâte, lʹheure du départ <strong>de</strong>s lettres approche.<br />

M. Decaux me fait <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r par M. Planchat les documents pour lʹimpression du Manuel<br />

<strong>de</strong> la Ste ‐Famille. Vous savez que jʹai remis le tout à lʹimprimeur. Dites‐le à ces Messieurs et voyez à<br />

lʹimprimerie où cela en est. Jʹai prié M. Hello <strong>de</strong> vous charger du service à table et <strong>de</strong> vous montrer<br />

<strong>de</strong> la déférence relativement à ce quʹil doit manger.<br />

M. Le <strong>Prevost</strong> désire que vous lui envoyiez la lettre que vous a écrite M. Carment sur lʹœu‐<br />

vre <strong>de</strong> M. lʹabbé Halluin. Je suis bien content que vous ayez hâté lʹacquisition <strong>de</strong> la chaire, que M.<br />

Hello sʹen serve. Jʹaurais désiré avoir par vous connaissance <strong>de</strong> lʹorganisation et du résultat <strong>de</strong>s ré‐<br />

unions du soir, comment vous les faites marcher, sans nuire à vos réunions dʹapprentis.<br />

Je serais bien aise <strong>de</strong> savoir ce que vous avez fait pour vos comptes. M. Emile est‐il chargé<br />

<strong>de</strong> la Caisse dʹépargne? Verse‐t‐il tous les mois? Quel est le total <strong>de</strong> votre déficit? Quelles sont vos<br />

prévisions pour le combler? Tout cela sommairement.<br />

Avant mon départ, vous aviez pris <strong>de</strong> bien bonnes pratiques pour vous maintenir dans<br />

lʹesprit intérieur. Je mʹen réjouissais dans mon cœur et jʹen espérais beaucoup pour votre avance‐<br />

ment spirituel. A lʹadoration <strong>de</strong> 11h. 1/4 , vous <strong>de</strong>viez vous remettre sous les yeux les fruits, résolu‐<br />

tions principales <strong>de</strong> votre retraite, penser à la présence <strong>de</strong> Dieu en vous pour vous sanctifier, vous<br />

remettre <strong>de</strong>vant les yeux la volonté <strong>de</strong> Dieu, relativement aux choses dont vous avez à vous oc‐<br />

cuper, pour échapper à la faiblesse <strong>de</strong> votre volonté qui se laisse aller à ce qui lui plaît au moment;<br />

vous rappeler que les tentations sont <strong>de</strong>s occasions <strong>de</strong> victoires et quʹelles doivent être reçues dans<br />

le calme. Je suis heureux <strong>de</strong> penser que vous êtes fidèle à toutes ces pratiques et je prie le Seigneur<br />

pour vous, frère bien‐aimé.<br />

Je laisse la plume à M. Le <strong>Prevost</strong>; je vous embrasse dans le Cœur <strong>de</strong> N.S.<br />

Paillé<br />

Cher enfant,<br />

Le f. Paillé a si bien fait quʹil ne me reste pas une minute pour clore cette lettre; lʹin‐<br />

disposition du f. Ernest mʹa empêché <strong>de</strong> vous écrire directement et plus au long comme je<br />

lʹavais résolu; soyez bien assuré, cher enfant, que la bonne volonté ne me manque pas et<br />

que je le ferai <strong>de</strong> tout mon cœur aussitôt que je le pourrai. Je vous aime toujours bien ten‐<br />

drement et ne souhaite rien tant que <strong>de</strong> vous voir continuer et perfectionner toujours<br />

lʹœuvre <strong>de</strong> votre sanctification, en même temps que les œuvres charitables dont vous êtes<br />

chargé.<br />

587


Il est bien facile, cher enfant, <strong>de</strong> répondre à la question <strong>de</strong> M. Blon<strong>de</strong>l. Bien que la<br />

maison <strong>de</strong> Vaugirard et celle <strong>de</strong> Nazareth dépen<strong>de</strong>nt dʹune même Communauté, elles ont<br />

néanmoins une comptabilité séparée. La maison <strong>de</strong> Vaugirard ayant prêté 10.000f à Naza‐<br />

reth, jʹai dû lʹindiquer sur mon registre pour noter la provenance <strong>de</strong>s fonds qui ont servi à<br />

couvrir les dépenses; mais comme, en définitive, cʹétait moi qui disposait <strong>de</strong> ces 10.000f<br />

que jʹavais appliqués à Vaugirard, je pouvais les faire tourner à mon gré à lʹusage <strong>de</strong> lʹœu‐<br />

vre <strong>de</strong> Nazareth; cʹest en effet ce qui a eu lieu. Cette explication étant encore trop longue, il<br />

faut dire seulement à M. Blon<strong>de</strong>l quʹinscrivant sur mon livret et les recettes et les dépen‐<br />

ses, jʹai dû marquer pour mémoire sur recettes les 10.000f fournis par moi, afin dʹindiquer<br />

la provenance <strong>de</strong>s fonds qui servaient à couvrir les dépenses.<br />

Adieu, bien cher enfant; je viens <strong>de</strong> recevoir une bien bonne lettre <strong>de</strong> M. Decaux,<br />

elle sʹest croisée <strong>avec</strong> celle que je lui écrivais moi‐même; remerciez‐le <strong>de</strong> sa tendre et fidèle<br />

amitié, <strong>de</strong> son affectueux et chrétien dévouement; jʹirai, je lʹespère, le remercier bientôt; jʹai<br />

pourtant toujours quelques misères quotidiennes <strong>de</strong> santé.<br />

Assurez M. Leblanc que je vais lui écrire; je ne fais presque rien <strong>de</strong> ce que je veux, je<br />

suis en retard pour tout.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

459 à M. Caille<br />

Règles à observer à lʹégard dʹun hôte <strong>de</strong> la communauté. Eviter la trop gran<strong>de</strong> centralisation <strong>de</strong>s différentes sec‐<br />

tions <strong>de</strong> lʹœuvre. Que les frères sʹoccupent <strong>de</strong>s enfants et <strong>de</strong>s ouvriers <strong>avec</strong> un soin tout paternel, pour les gar<strong>de</strong>r<br />

dans le Seigneur.<br />

Grasse, 17 mars 1857<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Votre lettre du 8 <strong>de</strong> ce mois et celles <strong>de</strong> nos ff. Jules et Henry mʹont bien tranquillisé;<br />

je vois <strong>avec</strong> joie que la paix règne toujours dans votre petite famille et que le zèle <strong>de</strong> la<br />

gloire <strong>de</strong> Dieu et du salut <strong>de</strong>s âmes remplit toujours vos cœurs; jʹen bénis le Seigneur et<br />

jʹattends <strong>de</strong> sa bonté quʹIl vous maintiendra dans ces heureuses dispositions.<br />

Je suis bien satisfait aussi dʹapprendre que vos travaux avancent et que les dépenses<br />

dont ils vont vous charger nʹexcé<strong>de</strong>ront guère vos prévisions; ayez bonne confiance, bien<br />

cher ami, le Seigneur vous assistera, mais ayez aussi beaucoup <strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nce et <strong>de</strong>meurez<br />

dans les limites <strong>de</strong>s besoins essentiels. Jʹespère que je pourrai assister à la bénédiction <strong>de</strong><br />

cette nouvelle <strong>de</strong>meure préparée pour la Communauté et pour les œuvres, mon retour à<br />

Vaugirard <strong>de</strong>vant sʹeffectuer dans le courant dʹavril et mon désir étant <strong>de</strong> vous rendre une<br />

petite visite après mon arrivée; ce sera une gran<strong>de</strong> joie pour moi <strong>de</strong> vous revoir ainsi que<br />

mes enfants Jules et Henry. Continuons jusque là <strong>de</strong> faire <strong>de</strong> notre mieux dans le service<br />

<strong>de</strong> Dieu, afin que <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts nous puissions, en nous retrouvant, nous rendre ce té‐<br />

moignage que, si nous nʹavons pas fait <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s choses, nous avons au moins corres‐<br />

pondu aux <strong>de</strong>sseins du Seigneur.<br />

Je crois, comme vous, quʹil faut tendre à laisser la Communauté dans son intimité<br />

<strong>de</strong> famille; la liberté, la régularité et le recueillement <strong>de</strong> ses exercices y gagneront; les mé‐<br />

langes empêchent lʹunité <strong>de</strong> sentiments et dʹaction, on ne peut faire ainsi un corps ferme et<br />

soli<strong>de</strong>ment constitué.<br />

588


Je ne sais pas assez nettement les dispositions <strong>de</strong> M. lʹabbé Deberly et je le connais<br />

personnellement trop peu pour bien voir comment se fera parmi vous sa position; sʹil nʹen‐<br />

tre pas chez vous avant mon voyage à Amiens, nous en pourrons causer plus précisément;<br />

il me semble quʹen tout cas, <strong>avec</strong> <strong>de</strong> la simplicité et <strong>de</strong> la charité, vous pourrez vous en ti‐<br />

rez ainsi que nos frères. Ils auront soin dʹêtre bien respectueux pour M. Deberly, à cause<br />

<strong>de</strong> son caractère saint, mais ils nʹoublieront pas toutefois que, pour tout ce qui regar<strong>de</strong> la<br />

communauté et ses exercices, ils nʹont à sʹentendre quʹ<strong>avec</strong> vous et que, pour la conduite<br />

même <strong>de</strong> leurs œuvres, cʹest vous encore qui <strong>de</strong>vez leur donner direction. Mais, en se te‐<br />

nant dans cette sage réserve, il ne faut pas quʹils le fassent <strong>avec</strong> rai<strong>de</strong>ur ni contention; plus<br />

ils seront aimables et bienveillants, plus ils rendront leurs rapports <strong>avec</strong> M. Deberly faciles<br />

et avantageux pour le bien <strong>de</strong> tous.<br />

On ne mʹa pas bien expliqué quelle partie du patronage doit avoir ses réunions à la<br />

nouvelle maison; je suppose que cʹest le Patronage St‐Jacques. Elle sera, du reste, le point<br />

central et comme le foyer général <strong>de</strong> lʹœuvre, mais vous <strong>de</strong>vrez bien éviter, mon bon ami,<br />

<strong>de</strong> tendre à une trop gran<strong>de</strong> centralisation; réunir <strong>de</strong> loin en loin les patronages pour quel‐<br />

ques fêtes solennelles peut être bien, mais il est très essentiel <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r, à chaque division,<br />

ses agents propres, son local, ses appuis spirituels, autrement vous amoindririez inévita‐<br />

blement le bien moral et spirituel qui se fait dans lʹœuvre et diminueriez aussi beaucoup le<br />

nombre <strong>de</strong> ceux qui se sanctifient en y donnant leur coopération. Jʹespère que la tâche <strong>de</strong><br />

nos chers frères Jules et Henry ne se trouvera pas sensiblement augmentée en suite <strong>de</strong> ces<br />

arrangements; ils savent bien dʹailleurs quʹ<strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> Dieu on réussit au <strong>de</strong>là <strong>de</strong> toute<br />

attente dans les choses qui regar<strong>de</strong>nt son service. Mais, quoi quʹils fassent, quʹils soient<br />

employés aux œuvres <strong>de</strong> lʹorphelinat, <strong>de</strong>s jeunes ouvriers ou du patronage, ils nʹoublieront<br />

pas quʹil sʹagit <strong>de</strong> protéger <strong>de</strong> pauvres jeunes âmes <strong>de</strong>s embûches du démon et que, par<br />

leurs prières, leurs exemples, leurs surveillances, ils doivent tendre à les gar<strong>de</strong>r pour le<br />

Seigneur. Dans leur enfance, eux‐mêmes ont reçu les soins <strong>de</strong> leurs familles, <strong>de</strong> leurs maî‐<br />

tres; il est juste quʹà leur tour ils fassent un peu <strong>de</strong> bien aux petits et aux faibles; quʹils se<br />

regar<strong>de</strong>nt comme les pères, comme les anges gardiens <strong>de</strong> ces enfants et quʹils fassent tout<br />

ce que leur conscience, et surtout tout ce que leur cœur chrétien et dévoué leur inspirera<br />

pour le salut <strong>de</strong> ces chères âmes, prix du sang <strong>de</strong> Jésus‐Christ.<br />

Il me semble que vous <strong>de</strong>vez vous tenir présentement à vos 35 internes; lorsque<br />

jʹirai vous voir, nous verrons sʹil y a lieu dʹaccroître quelque peu ce chiffre; dans le cas où<br />

<strong>de</strong>s nécessités graves se présenteraient, vous pourriez mʹen écrire, mais il ne me semble<br />

guère quʹil y en ait souvent dʹabsolument impérieuses.<br />

Je bénis le bon Dieu du mariage <strong>de</strong> M me votre sœur; je regar<strong>de</strong> cet événement<br />

comme tout heureux pour votre famille; espérons que votre chère mère retrouvera, <strong>de</strong> son<br />

côté, plus <strong>de</strong> force et <strong>de</strong> santé; je ne manquerai pas <strong>de</strong> prier à cette intention comme pour<br />

tout ce qui vous intéresse.<br />

Adieu, mon bien bon ami; nous aurons, à la fin dʹavril ou au commencement <strong>de</strong><br />

mai, après mon retour, notre retraite semestrielle; je nʹespère guère que vous y puissiez<br />

venir, et peut‐être que les occupations <strong>de</strong> vos œuvres empêcheront aussi que lʹun ou lʹau‐<br />

tre <strong>de</strong> vos frères puisse y venir, vous verrez ce que les circonstances vous<br />

paraîtront <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r. Croyez comme toujours à ma tendre et constante affection en J. M. J.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

Offrez mon respect à MM. Mangot, <strong>de</strong> Brandt et Cacheleux.<br />

589


460 à M. Guillot<br />

Combattre lʹhumeur chagrine et les dispositions à la colère. Ses armes <strong>de</strong>vront être la prière et lʹhumilité.<br />

Grasse, 17 mars 1857<br />

Bien cher enfant,<br />

Vous mʹavez écrit, me dites‐vous, presque malgré vous, parce que vous auriez vou‐<br />

lu mʹécrire plus à loisir et plus au long; un petit souvenir dʹaffection, même <strong>de</strong> quelques<br />

mots, réjouit toujours un cœur <strong>de</strong> père, mieux vaut cela que rien, et cela fait attendre<br />

moins difficilement un plus long entretien.<br />

Jʹespère que je pourrai bientôt, en effet, converser tout à lʹaise <strong>avec</strong> vous, mon désir<br />

étant <strong>de</strong> vous rendre visite après mon retour qui ne tar<strong>de</strong>ra plus guère à se réaliser. jusque<br />

là, soyez toujours bien pieux, bien dévoué et bien fidèle, comme je vous ai vu autrefois;<br />

vous savez que je vous ai envoyé à Amiens parce que jʹavais confiance en votre droiture <strong>de</strong><br />

volonté et bon désir <strong>de</strong> glorifier Dieu; répon<strong>de</strong>z bien à mon attente, afin quʹen me revoyant<br />

vous puissiez me dire que, sauf les misères et fragilités <strong>de</strong> notre pauvre nature, vous vous<br />

êtes employé <strong>de</strong> votre mieux au service <strong>de</strong> Dieu. Tâchez <strong>de</strong> surmonter lʹhumeur chagrine<br />

et les dispositions dʹirritation que le démon, me dites‐vous, sʹefforce <strong>de</strong> susciter en vous;<br />

dilatez votre cœur dans la bienveillance, dans la charité, dans lʹindulgence, dans le support<br />

<strong>de</strong>s faiblesses <strong>de</strong>s autres qui ont aussi les vôtres à supporter. Si, du reste, vous nʹy réussis‐<br />

sez pas toujours, ne vous troublez point, humiliez‐vous doucement <strong>de</strong>vant Dieu, excusez‐<br />

vous, sʹil y a lieu, et tâchez <strong>de</strong> mieux faire en toute simplicité et paix. Quelquefois la saison,<br />

le jeûne, etc. contribuent à ces mauvaises dispositions <strong>de</strong> lʹhumeur; <strong>avec</strong> la prière et lʹhu‐<br />

milité, on en vient à bout.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

461 à M. Myionnet279 La Provence est splendi<strong>de</strong> mais ʺla fumée <strong>de</strong> la patrie est plus belle que le feu <strong>de</strong> la terre dʹexilʺ. Le Royaume <strong>de</strong><br />

Dieu est au‐<strong>de</strong>dans <strong>de</strong> nous. La vie religieuse est un trésor quʹil faut protéger, en étant fidèles et appliqués aux<br />

exercices <strong>de</strong> prière, ces appuis <strong>de</strong> la grâce. MLP. se réjouit <strong>de</strong> retrouver bientôt ses frères et la vie <strong>de</strong> communau‐<br />

té. Etre heureux dans le service du Seigneur.<br />

Grasse, 19 mars [1857] fête <strong>de</strong> St Joseph<br />

Très cher enfant en N.S.,<br />

Cʹest aujourdʹhui la fête <strong>de</strong> notre bien‐aimé Père St Joseph; pour me réjouir comme il<br />

convient dans une si aimable solennité, je <strong>de</strong>vance par la pensée le moment, maintenant<br />

assez prochain, où je reprendrai la route <strong>de</strong> Vaugirard et je me transporte au milieu <strong>de</strong><br />

vous, afin <strong>de</strong> passer en douce intimité <strong>de</strong> famille quelques instants au moins <strong>de</strong> cette belle<br />

journée. Jʹai bien quelque mérite à délaisser le pays où je suis pour notre cher Vaugirard,<br />

car, tandis que vous avez sans doute encore du froid, <strong>de</strong>s giboulées, un ciel sévère, <strong>de</strong>s ar‐<br />

bres tristes et dépouillés, nous avons déjà ici <strong>de</strong>s verdures naissantes, les amandiers et<br />

beaucoup dʹautres arbres en fleurs, les jacinthes bleues et <strong>de</strong>s violettes par milliers, <strong>de</strong>s<br />

anémones et narcisses <strong>de</strong>s champs qui feraient envie à vos plus belles fleurs <strong>de</strong>s jardins;<br />

mais rien nʹest beau comme le pays où lʹon a ses affections, et la fumée <strong>de</strong> la patrie est plus<br />

279 MLP. écrit à M. Myionnet, Supérieur par interim, pour tous les Frères <strong>de</strong> la communauté.<br />

590


elle que le feu <strong>de</strong> la terre dʹexil; je nʹaurai pas un regret pour toutes ces richesses naturel‐<br />

les <strong>de</strong> la Provence; ses montagnes et ses vallées, ses oliviers symbole <strong>de</strong> paix et <strong>de</strong> perpé‐<br />

tuelle abondance, ses orangers toujours en fleurs, toujours en fruits, rien ne me retiendra;<br />

notre chère chapelle, notre petite salle <strong>de</strong> communauté, le terrain <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette, est‐<br />

il au mon<strong>de</strong> rien <strong>de</strong> comparable à cela? Si jamais, chers enfants, quelquʹun <strong>de</strong> vous, dans<br />

un jour mauvais, se trouvant triste, lassé, en dégoût, venait à soupirer après ces merveilles<br />

du mon<strong>de</strong> qui sont au <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> la clôture <strong>de</strong> notre chère communauté et à gémir un peu<br />

<strong>de</strong> nʹavoir en partage que la prière, le dévouement, la pauvreté, la paix <strong>de</strong> la conscience,<br />

<strong>avec</strong> une <strong>de</strong>meure bien humble, une famille sans éclat, une vie calme, sans agitations<br />

émouvantes, si quelquʹun <strong>de</strong> vous, en un mot, regrettait la tente <strong>de</strong>s pécheurs et mécon‐<br />

naissait les charmes <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Dieu, je ne lui souhaite pour sa guérison que la petite<br />

et simple épreuve <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux hivers que je viens <strong>de</strong> passer, dans les Pyrénées si réputées, à<br />

Hyères près <strong>de</strong> ces îles charmantes quʹon appelle les îles dʹor, enfin à Cannes tout près <strong>de</strong><br />

lʹItalie, sous le beau ciel et dans les plus riches contrées <strong>de</strong> la Provence. Il comprendrait<br />

une bonne fois pour toutes que tout ce qui est extérieur nʹest rien et ne peut rien pour no‐<br />

tre satisfaction; le royaume <strong>de</strong> Dieu, cʹest‐à‐dire la seule et vraie félicité, est au <strong>de</strong>dans <strong>de</strong><br />

nous, dans notre disposition intérieure; courir, changer les circonstances et les lieux ne<br />

donne ni la paix, ni la joie du cœur, il faut la trouver où elle est uniquement et véritable‐<br />

ment, dans lʹunion <strong>de</strong> toutes nos facultés <strong>de</strong> cœur et dʹesprit à Dieu et aux <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> son<br />

adorable sagesse, dans le bonheur <strong>de</strong> le servir, dans la joie <strong>de</strong> le faire connaître et aimer,<br />

dans lʹespoir <strong>de</strong> le possé<strong>de</strong>r pleinement et sans fin. Ces biens précieux, ces avantages ines‐<br />

timables, vous les avez en partage, chers amis. Ah! gar<strong>de</strong>z‐les bien, serrez fortement votre<br />

trésor, afin que nul ne vous en prive et ne vous le ravisse.<br />

Il est bien hardi à moi <strong>de</strong> vous parler ainsi au moment où, pliant sous les charges, à<br />

peine assez nombreux pour y subvenir, échappant à peine aux rigueurs dʹun hiver dur et<br />

laborieux, vous nʹavez presque senti que les lassitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> la route et peut‐être le déchire‐<br />

ment <strong>de</strong>s ses épines; mais ces épreuves purifiantes et fortifiantes, qui vous laisseront en<br />

définitive plus dévoués et plus fermes, nʹôtent rien à la vérité <strong>de</strong> mes paroles, et, si je les ai<br />

mal exprimées, si je nʹai pas su bien dire ce quʹil fallait pour vous convaincre, Dieu lui‐<br />

même, à quelque occasion prochaine, pénétrant jusquʹà votre cœur, y mettra quelquʹune<br />

<strong>de</strong> ces joies pures, saintes, ineffables qui font tout oublier, les travaux et les peines, comme<br />

les illusions vaines, les gloires et les bonheurs <strong>de</strong> la terre.<br />

Jʹespère, bien chers amis, que la fête <strong>de</strong> notre Père S t Joseph, celle <strong>de</strong> lʹAnnonciation,<br />

les pieuses solennités <strong>de</strong> la Semaine Sainte, ou même vos plus simples et vos plus ordinai‐<br />

res exercices pourront servir <strong>de</strong> voie pour rapprocher ainsi tout intimement vos cœurs du<br />

Cœur <strong>de</strong> notre Dieu. Pour préparer et ménager ces douces et précieuses communications,<br />

ayons bien soin, chers amis, vous là‐bas et nous ici, <strong>de</strong> redoubler dʹattention et <strong>de</strong> cordiale<br />

application à nos exercices, <strong>de</strong> fidélité à nos travaux, dʹélever nos vues et purifier nos in‐<br />

tentions; alors bien assurément les saintes solennités <strong>de</strong> Pâques passeront sur nous comme<br />

un souffle vivifiant <strong>de</strong> rajeunissement et <strong>de</strong> force nouvelle qui réjouira nos âmes et secoue‐<br />

ra bien loin toute trace dé dégoût, <strong>de</strong> peines et <strong>de</strong> lassitu<strong>de</strong>.<br />

Cʹest <strong>avec</strong> juste raison que je parle ici pour moi‐même comme pour vous, car il a plu<br />

à Dieu <strong>de</strong> mʹassocier durant toute cette dure saison à vos travaux et à vos épreuves par les<br />

incessantes misères quʹa subies ma santé; je lʹen bénis du plus profond <strong>de</strong> mon cœur; il<br />

mʹeût été bien plus pénible encore dʹêtre dispos et en sorte <strong>de</strong> délassement quand vous<br />

591


étiez si lour<strong>de</strong>ment chargés; en souffrant ici, je pouvais penser que jʹallégeais votre far‐<br />

<strong>de</strong>au, et ce mʹétait une douce consolation. Maintenant, bien chers enfants, il me semble que<br />

le bon Maître va donner à ses serviteurs un peu dʹélargissement et <strong>de</strong> paix; le printemps<br />

vient, nous allons nous réunir, notre retraite approche, le mois <strong>de</strong> Marie la suivra, quel‐<br />

ques frères nouveaux viendront peut‐être nous donner leur ai<strong>de</strong>, tout paraît donc nous<br />

préparer quelques jours <strong>de</strong> calme et <strong>de</strong> paix intime sous les yeux du Seigneur. Nous en<br />

profiterons pour reprendre haleine et nous disposer à <strong>de</strong> nouveaux travaux, car il en sera<br />

toujours ainsi, nos jours seront entremêlés dʹombre et <strong>de</strong> soleil jusquʹà ce jour éternel qui<br />

nʹaura plus <strong>de</strong> tristesses, <strong>de</strong> travaux ni <strong>de</strong> nuit. Pour ce court passage, tenons‐nous bien<br />

unis, la charité nous rendra fermes et adoucira nos épreuves; puisons surtout notre force<br />

en Dieu par la foi, par la confiance en son amour, par les appuis <strong>de</strong> sa grâce dans la prière,<br />

les Sacrements et tous nos pieux exercices. Alors les choses qui passent seront bien peu<br />

pour nous, car nous aurons déjà quelque pressentiment <strong>de</strong>s biens précieux <strong>de</strong> lʹéternité.<br />

Adieu, bien chers amis; je me réjouis en pensant que je vais bientôt me rapprocher<br />

<strong>de</strong> vous; puissé‐je vous trouver tous paisibles et le cœur épanoui, heureux dʹavoir travaillé<br />

courageusement dans le champ du Seigneur, et prêts encore à Le bien servir; Il est le plus<br />

doux <strong>de</strong>s Maîtres, Il est le plus riche, le plus indulgent, le plus généreux, <strong>de</strong>meurons‐Lui<br />

donc fidèles et tous ensemble, un jour, nous serons à tout jamais unis dans la gran<strong>de</strong>, dans<br />

la merveilleuse Communauté du Ciel.<br />

Je vous embrasse, chers enfants, bien tendrement en J.M.J.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

462 à M. Vasseur<br />

Remerciement pour lui avoir témoigné <strong>de</strong> lʹaffection filiale, à lʹoccasion du départ dʹun frère.<br />

Grasse, 27 mars 1857<br />

Très cher enfant en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> votre petite lettre; vous avez pensé que jʹavais besoin <strong>de</strong> quel‐<br />

que consolation dans la peine que me causerait la défection du pauvre f. Polvêche, et vous<br />

mʹavez fait quelques caresses comme un enfant aimant et bien inspiré. Que le Seigneur<br />

vous les ren<strong>de</strong> et se montre toujours tendre pour vous, sinon par <strong>de</strong>s consolations constan‐<br />

tes qui ne sont pas, vous le savez, les uniques marques <strong>de</strong> son amour, au moins par ses<br />

adorables sollicitu<strong>de</strong>s pour votre culture et votre avancement.<br />

Je nʹai pas le temps <strong>de</strong> mʹentretenir longtemps <strong>avec</strong> vous aujourdʹhui, mais jʹai vou‐<br />

lu vous dire que je vous ai toujours présent dans mon esprit et dans ma tendre affection,<br />

que je prie constamment pour vous et que ce me sera une douce, une intime joie <strong>de</strong> vous<br />

revoir et <strong>de</strong> vous embrasser bientôt.<br />

Votre ami et Père en J.M.J.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

463 à M. Maignen<br />

Questions financières et administratives.<br />

592


Grasse, 4 avril 1857, dimanche <strong>de</strong>s Rameaux<br />

Très cher enfant en N.S.,<br />

Je ne vous écris encore aujourdʹhui que quelques mots dʹaffaires, je suis encore as‐<br />

sez souffrant <strong>de</strong>puis quelques jours, pas <strong>de</strong> telle sorte pourtant, je lʹespère, que je sois obli‐<br />

gé <strong>de</strong> différer mon départ; priez un peu <strong>avec</strong> nos frères pour que le Seigneur nous<br />

conduise et que nos saints Anges nous accompagnent.<br />

Vous pourrez, cher enfant, rassurer nos confrères au sujet <strong>de</strong>s 10.000f figurant sous<br />

mon nom aux prêts faits à Nazareth. Cette somme provenant <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Vaugirard,<br />

jʹavais souhaité dans le principe que lʹœuvre <strong>de</strong> Nazareth, si elle <strong>de</strong>venait riche, fît rapport<br />

<strong>de</strong> cette somme à lʹœuvre <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Vaugirard; mais en voyant les embarras qui ont<br />

compliqué <strong>de</strong>puis la première œuvre, jʹai renoncé à ma pensée et jʹai fait abandon à Naza‐<br />

reth <strong>de</strong>s 10.000f dont la disposition mʹappartenait; je nʹen ai jamais réclamé dʹintérêts et<br />

nʹen réclamerai pas davantage à lʹavenir.<br />

Quant aux 4.000f <strong>de</strong> Mlle dʹHinisdal, voici comme les choses se sont passées. Cette<br />

pieuse et charitable <strong>de</strong>moiselle mʹavait promis 4.000f pour Nazareth, mais, ne pouvant me<br />

les remettre immédiatement, elle sʹétait généreusement engagée elle‐même à mʹen payer<br />

les intérêts jusquʹà ce quʹelle me donnât le capital.<br />

Dans un moment où les payements à faire étaient pressants, M. Guillemin voulut<br />

bien mʹavancer les 4.000f, et je lui déléguai alors en nantissement ma créance sur Mlle dʹHi‐<br />

nisdal qui consentit, sur ma <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, à cette substitution.<br />

Je ne sais si elle a payé les 4.000f à M. Guillemin; en ce cas, les sommes dues à ce<br />

<strong>de</strong>rnier <strong>de</strong>vraient se diminuer dʹautant, et il aurait à nous remettre une reconnaissance que<br />

je lui avais donnée par les mains <strong>de</strong> M. Paillé <strong>de</strong>s 4.000f avancés par lui.<br />

Voilà lʹexposé <strong>de</strong>s faits, voyez ce qui est à faire.<br />

A‐t‐on renoncé entièrement au legs Bouzani; il me semble que Mme Dufour, lʹhéri‐<br />

tière maintenant unique, ne pourrait refuser <strong>de</strong> payer 4.500f (M. Dufour, son mari décédé,<br />

avait donné 500f à‐compte).<br />

Adieu, bien cher enfant; je nʹai point perdu <strong>de</strong> vue vos lettres ni les observations<br />

quʹelles contenaient, je vous en remercie, je mʹen servirai si Dieu me laisse encore travailler<br />

un peu à nos œuvres. Je le prie <strong>de</strong> veiller toujours sur vous et sur nos chers ff. <strong>de</strong> Nazareth,<br />

je leur suis tendrement uni, ainsi quʹà vous, dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre ami et Père tout affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

463‐1 à M. lʹabbé Timon‐David<br />

Sur le chemin du retour vers Paris, MLP. envisage <strong>de</strong> sʹarrêter chez lʹabbé Timon‐David.<br />

Grasse, 9 avril [1857]<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Je suis bien sincèrement touché <strong>de</strong>s aimables et affectueuses paroles que mʹapporte<br />

votre bonne épître du premier jour <strong>de</strong> ce mois et jʹy eusse plus vite répondu si le retour <strong>de</strong><br />

quelques malaises <strong>de</strong> santé ne mʹeût mis en doute sur le moment probable <strong>de</strong> mon départ.<br />

Je présume, néanmoins, que nous pourrons quitter Cannes, comme nous en avons le désir,<br />

le jeudi <strong>de</strong> Pâques et nous trouver à Marseille le vendredi.<br />

593


Nous ne manquerons pas assurément, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> vous rendre visite<br />

et nous accepterons même la fraternelle hospitalité que vous nous offrez si obligeamment,<br />

pour peu que ma misérable santé me laisse un peu <strong>de</strong> liberté dʹaction. Je suis sous ce rap‐<br />

port dans une telle dépendance quʹil mʹest presque impossible <strong>de</strong> jamais prévoir un jour ce<br />

que je ferai le len<strong>de</strong>main. Si jʹétais trop cacochyme, je ne pourrais en conscience, faire <strong>de</strong><br />

votre maison un hôpital et je prendrais nécessairement gîte ailleurs; mais quoi quʹil arrive,<br />

jʹaurai, je lʹespère, la satisfaction <strong>de</strong> vous revoir et <strong>de</strong> vous assurer que mes sentiments<br />

comme ceux <strong>de</strong> tous mes Frères, sont toujours pour vous ceux dʹune haute estime et dʹune<br />

bien sincère affection.<br />

Veuillez agréer, cher Monsieur lʹabbé; lʹexpression anticipée du respect <strong>avec</strong> lequel<br />

je suis en J. et M.<br />

Votre humble et affectionné serviteur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Paillé vous offre <strong>avec</strong> moi ses sentiments bien respectueux.<br />

464 à M. <strong>de</strong> Lauriston<br />

Que M. <strong>de</strong> Lauriston (qui va entrer en communauté le 18 avril) nʹait aucune inquiétu<strong>de</strong>: ʺcelui qui a commencé<br />

lʹœuvre saura la consommerʺ. Danger <strong>de</strong>s obligations extérieures si elles ne sont pas vécues dans la foi et la vraie<br />

charité. La St‐Joseph à Arras. Caractère enjoué et boute‐en‐train <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Lauriston. MLP. aime ses frères<br />

comme ʺle plus précieux <strong>de</strong>s dons <strong>de</strong> Dieuʺ.<br />

Grasse, 11 avril 1857, Samedi Saint<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je nʹai plus quʹun mot à vous dire, puisque bientôt nous allons nous réunir; je viens<br />

à vous du fond <strong>de</strong> notre France, venez aussi à moi, ou plutôt venez à Dieu qui vous ap‐<br />

pelle et qui vous veut pour Le servir dans lʹintime familiarité <strong>de</strong> sa maison, dans les soins<br />

que vous rendrez à sa personne divine dans la personne <strong>de</strong>s humbles et <strong>de</strong>s pauvres. Je ne<br />

sais si vous arriverez avant moi ou si je vous <strong>de</strong>vancerai, mais nous serons en tout cas à<br />

peu <strong>de</strong> distance lʹun <strong>de</strong> lʹautre; jʹouvrirai bien grands mes bras pour vous recevoir et vous<br />

assurer cœur à cœur que <strong>de</strong>vant Dieu je consomme cette union qui nous met dʹune même<br />

famille et qui associera désormais nos prières, nos travaux et, je lʹespère, un jour, la ré‐<br />

compense que le bon Maître donne à ses moindres serviteurs. Je vois <strong>avec</strong> joie que le Sei‐<br />

gneur a confirmé votre cœur et lui a donné la vigueur nécessaire pour lʹheure, toujours un<br />

peu ru<strong>de</strong>, <strong>de</strong>s séparations; mais quand bien même quelques petits brisements se feraient<br />

sentir à vous, nʹayez nulle inquiétu<strong>de</strong>, bien cher ami, la grâce divine vous accompagne, ces<br />

quelques épreuves seront surmontées, votre vocation ne peut maintenant faire nul doute.<br />

Celui qui a commencé lʹœuvre saura la consommer. Et cʹest une belle œuvre, croyez‐le<br />

bien, très cher ami, car, plus les temps sont malheureux, plus sont rares les sacrifices géné‐<br />

reux que lʹon fait <strong>de</strong> soi‐même à Dieu, plus ils sont un merveilleux privilège <strong>de</strong>s bontés di‐<br />

vines, plus ils sont un signe <strong>de</strong>s grâces abondantes réservées au petit troupeau <strong>de</strong>s appe‐<br />

lés, jʹoserais presque dire <strong>de</strong>s élus.<br />

Notre f. Polvêche, comme on vous lʹa dit, a pris quelques indices dʹobligations à<br />

remplir au <strong>de</strong>hors pour un signe que sa tâche était finie parmi nous et quʹune autre lui<br />

était préparée dans le mon<strong>de</strong>. Cʹest une triste illusion dont il eût triomphé en sʹappuyant<br />

mieux sur les principes <strong>de</strong> foi et <strong>de</strong> vraie charité; mais lʹintelligence <strong>de</strong>s choses saintes et<br />

594


<strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s vérités est un don pour les âmes simples qui croient à la parole <strong>de</strong> Dieu, plu‐<br />

tôt quʹaux suggestions <strong>de</strong> leur faible raison; soyons toujours bien simples, très cher ami,<br />

cherchons notre règle dans lʹEvangile, cʹest une lumière qui ne nous trompera point et qui<br />

nous conduira sûrement.<br />

Jʹai lu <strong>avec</strong> joie les détails que vous me donnez sur votre fête <strong>de</strong> St Joseph à la com‐<br />

munauté dʹArras; je vous suivais par la pensée dans tous les exercices et aimables délas‐<br />

sements <strong>de</strong> cette belle journée, et je voyais <strong>avec</strong> joie tous nos frères sʹépanouir dans ces<br />

naïves expansions qui vont si bien aux familles chrétiennes. Mais ce qui mʹa charmé le<br />

plus, cʹest la part franche et cordiale que vous savez prendre à ces humbles ébats dʹune pe‐<br />

tite société dont le seul attrait est la simplicité, la droiture <strong>de</strong> cœur, la volonté <strong>de</strong> tout faire<br />

sous les yeux <strong>de</strong> Dieu et, même dans ses jeux, <strong>de</strong> nʹagir que pour Lui seul. Cette heureuse<br />

disposition <strong>de</strong> votre esprit mʹavait déjà frappé et mʹavait paru une marque bien sûre que<br />

Dieu vous voulait dans un centre pareil; jʹen ai retrouvé ici une nouvelle preuve qui mʹa<br />

bien vivement touché. Ne prenez pas cela pour un éloge, bien cher ami et fils, les vrais en‐<br />

fants <strong>de</strong> Dieu ne se louent point les uns les autres; je me réjouis seulement <strong>avec</strong> vous dʹune<br />

préparation que le Seigneur a faite évi<strong>de</strong>mment et qui est pour moi une manifestation <strong>de</strong><br />

sa volonté divine.<br />

Je compte quitter Grasse mardi ou mercredi, afin <strong>de</strong> prendre jeudi 16, à Cannes, le<br />

bateau à vapeur qui nous conduira à Marseille. Il est probable que je ne serai rendu à Vau‐<br />

girard que dans la journée du lundi 20; si vous arrivez, comme nous le dit notre bon abbé<br />

Halluin, le 18, je vous trouverai à mon arrivée parmi ces bien‐aimés frères que le bon Dieu<br />

mʹa choisis <strong>de</strong> sa main et que je chéris comme le plus précieux <strong>de</strong> ses dons; cʹest vous dire,<br />

bien cher ami, quʹentre eux et vous je ne ferai nulle différence, jʹaurai un frère <strong>de</strong> plus, un<br />

ami, un fils donné par Dieu pour que je lʹaime comme les autres et que je me dévoue à lʹas‐<br />

sister et à le servir. Cʹest dans cette disposition que vous me trouverez à ce moment et, je<br />

lʹespère, jusquʹà mon <strong>de</strong>rnier jour.<br />

Adieu, à bientôt, très cher ami et fils, je vous embrasse bien affectueusement en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

465 à M. Halluin<br />

Pleine confiance réciproque. Sollicitu<strong>de</strong> pour la santé <strong>de</strong> ses frères. Importance <strong>de</strong> fêtes <strong>de</strong> famille et <strong>de</strong>s récréa‐<br />

tions dans la vie <strong>de</strong> communauté.<br />

Grasse, 12 avril 1857, Saint jour <strong>de</strong> Pâques<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je me réjouis bien (la joie va bien en ce saint jour) à la pensée que bien prochaine‐<br />

ment je vais me trouver rapproché <strong>de</strong> vous. Je compte partir <strong>de</strong> Cannes par le bateau à va‐<br />

peur jeudi, afin <strong>de</strong> gagner Marseille, dʹoù jʹarriverai sans doute à Vaugirard le lundi 20,<br />

dans la soirée. Cʹest une douce consolation <strong>de</strong> revoir sa famille après une si longue ab‐<br />

sence. Et, comme toute ma famille nʹest pas réunie sur un seul point, jʹespère bien lʹaller<br />

trouver à Amiens et Arras, après que je me serai un peu remis à la maison <strong>de</strong> Vaugirard. Je<br />

ne fais, je vous assure, nulle différence entre tous mes bien‐aimés enfants et, quand je re‐<br />

çois vos lettres, je suis <strong>avec</strong> un intérêt aussi profond les détails que vous me donnez sur<br />

595


nos ff. dʹArras que sʹil sʹagissait <strong>de</strong> ceux <strong>de</strong> la plus ancienne maison. Cʹest quʹils sont tous<br />

les enfants <strong>de</strong> Dieu et que, pour les aimer, Dieu nous prête un peu <strong>de</strong> sa divine charité.<br />

Il va sans dire que je verrai <strong>avec</strong> joie à la retraite les ff. Carment, Thuillier, Cousin,<br />

Brauque, Jules et tous ceux dont vous pourrez momentanément vous séparer, et aussi M.<br />

Daviron, sʹil a lʹinspiration <strong>de</strong> se recueillir durant quelques jours au milieu <strong>de</strong> nous. Jʹes‐<br />

père que la retraite fera du bien aux ff. Carment et Thuillier; je ne mʹétonne point quʹils ne<br />

soient pas encore tout à fait fondus <strong>avec</strong> lʹensemble <strong>de</strong> lʹœuvre dʹArras, cʹest une affaire <strong>de</strong><br />

temps, mais qui se consommera pleinement si vous continuez à les associer à vos travaux.<br />

Nous gar<strong>de</strong>rons à Vaugirard, après la retraite, ceux que vous croirez utile <strong>de</strong> nous<br />

laisser, et nous nʹen retiendrons aucun que <strong>de</strong> votre plein gré; je me sens la disposition <strong>de</strong><br />

ne rien faire <strong>avec</strong> vous quʹen plein accord <strong>de</strong> sentiment, parce que ma confiance est entière<br />

dans votre désintéressement et que nous nʹavons à cœur <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts que la plus gran<strong>de</strong><br />

gloire <strong>de</strong> Dieu. Je verrai, après mon retour, ce que nous pourrons faire pour lʹéchange <strong>de</strong>s<br />

ff. Augustin [Bassery] et Michel. Pour le jeune Jules, je vous prie <strong>de</strong> son<strong>de</strong>r un peu inti‐<br />

mement son cœur, afin que nous sachions si sincèrement il souhaite bien toujours se don‐<br />

ner à Dieu plutôt quʹau mon<strong>de</strong>. Dans le <strong>de</strong>rnier cas, nous aviserions ensemble à le placer le<br />

moins mal que nous pourrions, soit à Amiens, soit ailleurs, afin dʹépargner aux autres la<br />

peine que donne toujours une volonté défaillante et qui marchan<strong>de</strong> Dieu pour lʹabandon‐<br />

ner définitivement.<br />

Je souhaite bien que le f. Loquet se rétablisse; <strong>avec</strong> son bon esprit, sa piété, son zèle<br />

sincère, il pourrait vous être dʹune gran<strong>de</strong> utilité; si, quand le beau temps sera venu, vous<br />

jugiez quʹun petit séjour ou voyage à Paris lui fût une utile distraction, vous pourriez assu‐<br />

rément nous lʹenvoyer. Il faut que, si notre pénurie <strong>de</strong> moyens ne nous permet pas <strong>de</strong><br />

consommer notre union aussi vite en réalité que nous le voudrions par le désir, au moins<br />

tout ce que nous avons <strong>de</strong> ressources disponibles soit bien et cordialement mis en com‐<br />

mun.<br />

M. <strong>de</strong> Lauriston, quʹon attend à Vaugirard du 18 au 20 <strong>de</strong> ce mois, mʹa écrit ces<br />

jours <strong>de</strong>rniers une bonne et chrétienne lettre qui me donne pleine espérance dʹun avenir<br />

heureux, et pour lui et pour nous. Il mʹa rapporté, en particulier, le détail <strong>de</strong> la fête <strong>de</strong> S t<br />

Joseph quʹil a solennisée <strong>avec</strong> vous et dont il avait reçu une bien bonne impression. Je crois<br />

que ces petites fêtes <strong>de</strong> famille sont dʹun effet excellent pour épanouir les cœurs et faire<br />

goûter à nos frères les joies saintes dʹune famille chrétienne. Le cœur prend là <strong>de</strong>s impres‐<br />

sions à la fois <strong>de</strong> piété et <strong>de</strong> sainte fraternité qui les attachent profondément au service <strong>de</strong><br />

Dieu. Je pense que, dans un sens analogue, les récréations <strong>de</strong> chaque jour sont aussi bien<br />

nécessaires. Je ne sais si vous êtes parvenu à leur trouver une petite place dans la journée.<br />

Je souhaite bien que vous y puissiez parvenir.<br />

Je prie bien toujours pour vos chers enfants, afin que vos soins leur soient profita‐<br />

bles et que tant <strong>de</strong> peine et <strong>de</strong> sacrifices ne soient pas vains. Je nʹoublie point non plus <strong>de</strong><br />

remercier le Seigneur qui vous assiste dans tous vos besoins et dont la divine Provi<strong>de</strong>nce<br />

est comme la mère <strong>de</strong> votre maison. Puissions‐nous, comme vous le dites bien, cher Mon‐<br />

sieur lʹabbé, correspondre à ses divines bontés et remplir assez nos âmes <strong>de</strong> sa charité pour<br />

quʹelle débor<strong>de</strong> autour <strong>de</strong> nous, dans nos sentiments, nos paroles et nos actions.<br />

Jʹembrasse vous et tous nos frères bien affectueusement en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

596


466 à M. Halluin<br />

Mouvement <strong>de</strong> personnel entre les communautés dʹArras et <strong>de</strong> Vaugirard.<br />

Vaugirard, 27 avril 1857<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

M. Daviron se trouvant contraint <strong>de</strong> retourner près <strong>de</strong> vous plus tôt que nous ne le<br />

supposions, je lui remets ces lignes pour vous remercier <strong>de</strong>s bonnes et affectueuses choses<br />

que vous avez la charité <strong>de</strong> mʹécrire à lʹoccasion <strong>de</strong> mon retour. Cʹeût été aussi une gran<strong>de</strong><br />

joie pour moi <strong>de</strong> vous revoir après cette longue absence, et dʹavoir ainsi comme un ensem‐<br />

ble <strong>de</strong> la famille autour <strong>de</strong> moi. Mais je sais les liens qui vous retiennent à Arras et les<br />

charges que le Seigneur vous y a données. Je me porte donc <strong>de</strong> cœur vers vous, en atten‐<br />

dant que la saison meilleure et mes forces un peu remises me permettent <strong>de</strong> vous rendre<br />

visite.<br />

Nos jeunes frères sont arrivés à bon port et font leur retraite en excellentes disposi‐<br />

tions. Le Père qui nous la donne a lʹesprit élevé, beaucoup <strong>de</strong> piété et <strong>de</strong> zèle, jʹespère que<br />

sa parole va vivifier nos cœurs. Le f. <strong>de</strong> Lauriston, que nous appelons le f. Georges, va<br />

bien, jʹai la confiance que le Seigneur daignera consommer lʹœuvre quʹil a commencée en<br />

lui.<br />

Je suis profondément peiné que les ff. Carment et Thuillier vous donnent si peu <strong>de</strong><br />

satisfaction. Je sens bien quʹils sont loin <strong>de</strong> répondre à vos besoins et au vœu <strong>de</strong> nos cœurs<br />

qui serait <strong>de</strong> consommer pleinement notre union par lʹéchange <strong>de</strong>s sujets. Je comprends<br />

aussi, comme vous, quʹil vous eût fallu <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Vaugirard un frère bien formé, ca‐<br />

pable <strong>de</strong> vous secon<strong>de</strong>r et <strong>de</strong> répandre à Arras lʹesprit et les usages <strong>de</strong> la Maison‐Mère.<br />

Mais ce frère nous ne lʹavons pas présentement; je ne pourrais vous lʹenvoyer quʹen met‐<br />

tant en souffrance dʹautres services, non moins impérieux, quʹil faudrait désorganiser. M.<br />

Daviron a vu lui‐même notre bonne volonté et notre défaut <strong>de</strong> ressources. Je ne puis donc,<br />

cher Monsieur lʹabbé, que vous inviter à tirer le meilleur parti possible <strong>de</strong> vos moyens ac‐<br />

tuels, en joignant à votre personnel le f. Bassery que nous dirigerons vers Arras après la re‐<br />

traite. Je le crois maintenant bien assis dans sa vocation; je pense quʹ<strong>avec</strong> le f. Loquet qui, je<br />

lʹespère, va se remettre, le f. Michel qui peut vous rester, si vous le trouvez nécessaire, et<br />

enfin <strong>avec</strong> les ff. Cousin et les autres jeunes frères, vous pourrez organiser vos services<br />

pour cet été. A lʹhiver, nous verrons si nous avons dʹautres moyens.<br />

Nous gar<strong>de</strong>rons ici le f. Thuillier, puisque vous croyez nʹen pouvoir tirer bon parti<br />

pour votre cordonnerie. Quant au f. Carment, je vous prie <strong>de</strong> mʹécrire <strong>de</strong> suite votre sen‐<br />

timent définitif, afin que nous ne le renvoyions point si vous pensez quʹil fasse difficile‐<br />

ment le bien à Arras. Nous ne voulons <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts que le gloire <strong>de</strong> Dieu. Je crois pou‐<br />

voir vous assurer que le parti auquel vous vous arrêterez, quel quʹil soit, ne nous donnera<br />

nulle contrariété et ne changera rien à nos dispositions. Il serait regrettable, sans doute,<br />

que nous retrouvions, à certains égards, presque au point <strong>de</strong> départ; mais, si notre volonté<br />

dʹêtre vraiment unis <strong>de</strong>meure ferme, le bon Maître viendra un peu plus tard à notre ai<strong>de</strong><br />

pour consommer, dans <strong>de</strong> meilleures conditions, ce que nous nʹaurons pu que commencer<br />

présentement. Je prierai Dieu <strong>avec</strong> vous, afin quʹIl vous éclaire dans votre décision, et je<br />

lʹaccepterai, quelle quʹelle soit, comme venant <strong>de</strong> Lui. Je vous prie <strong>de</strong> nouveau <strong>de</strong> me le<br />

dire à temps pour que nous réglions la position du f. Carment, dans lʹun ou lʹautre sens.<br />

597


Tous nos frères prient, durant la retraite, pour leurs frères absents. Jʹespère que<br />

vous aurez pu passer ces jours difficiles sans trop <strong>de</strong> fatigues et jʹapprendrai <strong>avec</strong> joie que<br />

votre santé, déjà un peu fatiguée, nʹen a point souffert. Jʹécrirai, dès que je le pourrai, au f.<br />

Loquet que je remercie affectueusement <strong>de</strong> son bon souvenir.<br />

Adieu, bien cher Monsieur lʹabbé. Croyez bien à tous les sentiments respectueux et<br />

dévoués <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

467 à M. Halluin<br />

La formation religieuse <strong>de</strong>s jeunes frères. MLP. invite M. Halluin à faire preuve, envers ses jeunes religieux, <strong>de</strong><br />

patience, dʹaffection, <strong>de</strong> fermeté et dʹindulgence.<br />

Vaugirard, 1 er mai 1857<br />

Bien cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vous renvoie bien volontiers le f. Carment et jʹespère que la retraite, nos exhorta‐<br />

tions, et surtout la protection <strong>de</strong> la S te Vierge dont il est lʹenfant, le rendront plus maniable<br />

entre vos mains. Sa bonne volonté est sincère, il a pour vous <strong>de</strong>s sentiments <strong>de</strong> respect et<br />

dʹattachement, mais ses premiers mouvements sont si mal dominés quʹil pourra bien en‐<br />

core vous donner quelques instants <strong>de</strong> peine. Jʹai la confiance, néanmoins, quʹils seront ra‐<br />

res et passagers et ne porteront pas <strong>de</strong> préjudice notable à lʹœuvre à laquelle il doit ses af‐<br />

fections et ses soins. Je ne désespère pas quʹ<strong>avec</strong> le temps, il ne vous donne une assistance<br />

plus soutenue et plus utile. La fusion <strong>de</strong> frères venus du <strong>de</strong>hors <strong>avec</strong> lʹensemble <strong>de</strong> lʹœu‐<br />

vre eût été difficile <strong>avec</strong> tous les sujets quels quʹils fussent, mais elle est nécessairement<br />

bien plus lente encore <strong>avec</strong> les défauts du f. Carment. Soyez bien assuré, cher Monsieur<br />

lʹabbé, que je sens vivement les peines <strong>de</strong> votre position et que lʹimpossibilité seule mʹem‐<br />

pêche <strong>de</strong> vous donner un ai<strong>de</strong> plus efficace. Peut‐être le bon Maître nous donnera un peu<br />

plus tard <strong>de</strong> nouveaux moyens. ces durs labeurs <strong>de</strong>s fondations sont, du reste, leur pre‐<br />

mier mérite aux yeux <strong>de</strong> Dieu; elles éprouvent et brisent ses serviteurs et les amènent au<br />

<strong>de</strong>gré <strong>de</strong> patience et dʹabnégation où son amour les veut.<br />

Le f. Bassery vous revient presque complètement remis, les premiers beaux jours<br />

vont achever <strong>de</strong> le fortifier. Cʹest un très bon sujet, doux, pieux, dʹun aimable caractère. Je<br />

souhaite bien quʹil reste ferme dans sa vocation. Il peut rendre <strong>de</strong> vrais services dans nos<br />

œuvres, et son bon naturel le rend très propre à contribuer à lʹunion <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux maisons<br />

quʹil a habitées successivement.<br />

Le f. Carment vous remettra 300f. Cʹest la presque totalité <strong>de</strong> sa petite pension. Je<br />

suis heureux que cette ressource contribue à diminuer quelque peu les charges <strong>de</strong> la mai‐<br />

son dʹArras.<br />

Notre retraite a été bonne et bien édifiante, pas aussi soutenue néanmoins que la<br />

<strong>de</strong>rnière. Le jeune f. Brice avait quelque peine à tirer parti <strong>de</strong>s exercices, quoique jʹeusse<br />

désigné un <strong>de</strong> nos MM. plus avancés pour lʹai<strong>de</strong>r un peu. Il a atteint la fin, je le crois, <strong>avec</strong><br />

un peu <strong>de</strong> satisfaction, bien explicable à son âge. Il peut bien en être <strong>de</strong> même du jeune Ju‐<br />

les, quoiquʹil mʹait assuré nʹavoir pas <strong>de</strong> difficulté à suivre les instructions.<br />

M. <strong>de</strong> Lauriston va, jusquʹici, très bien. Jʹai bonne confiance. Son excellent cœur et sa<br />

piété seront, <strong>avec</strong> la grâce <strong>de</strong> Dieu, ses soutiens durant le temps toujours un peu éprou‐<br />

vant du noviciat.<br />

598


Nous réorganisons quelques exercices que le Carême et les travaux multipliés<br />

avaient contraint les ff. Myionnet et Lantiez à négliger temporairement. En particulier, le<br />

cours <strong>de</strong> religion et lʹexplication quotidienne du règlement. Je souhaiterais bien aussi pou‐<br />

voir charger quelquʹun <strong>de</strong>s frères anciens <strong>de</strong> la conduite habituelle <strong>de</strong>s jeunes frères, afin<br />

quʹils fussent formés régulièrement et <strong>avec</strong> suite. Cʹest une gran<strong>de</strong> affaire que <strong>de</strong> former<br />

<strong>de</strong>s hommes à la perfection chrétienne, dʹen faire <strong>de</strong> vrais religieux, propres à concourir au<br />

salut du prochain. Priez, cher Monsieur lʹabbé, afin que nous arrivions à ce résultat si inté‐<br />

ressant pour toute notre petite famille.<br />

Adieu, bien cher Monsieur lʹabbé; je nʹécris point aujourdʹhui au bon f. Loquet,<br />

ayant un peu <strong>de</strong> fatigue <strong>de</strong> la retraite; je le remercie <strong>de</strong> sa bonne lettre et je compte tou‐<br />

jours sur son zèle et son dévouement. Jʹembrasse toute la chère famille dʹArras, et tout par‐<br />

ticulièrement celui qui la conduit.<br />

A vous bien cordialement en J. et M.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Nous avons regretté <strong>de</strong> départ imprévu <strong>de</strong> M. Daviron, je crois quʹil eût été bien sa‐<br />

tisfait <strong>de</strong> la retraite qui était plus à la portée <strong>de</strong>s hommes déjà un peu avancés que <strong>de</strong>s<br />

commençants.<br />

Le f. Carment est averti que sa chambre a été employée à une autre <strong>de</strong>stination. Je<br />

vous prie du reste, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> joindre <strong>avec</strong> lui la fermeté à lʹindulgence, il<br />

faut bien quʹil sente que vous êtes le maître. Il nʹa pas assez <strong>de</strong> soli<strong>de</strong> et constante raison<br />

pour marcher sans sentir lʹautorité. Le bon Dieu vous inspirera la juste mesure <strong>de</strong> charité<br />

et <strong>de</strong> patience et en même temps dʹénergie quʹil faut gar<strong>de</strong>r <strong>avec</strong> lui.<br />

468 à M. Caille<br />

Nouvelles <strong>de</strong> Vaugirard et <strong>de</strong> la Communauté. Vœux perpétuels du frère Marcaire. Inconvénients quʹil y aurait à<br />

réunir toutes les sections <strong>de</strong> lʹŒuvre dʹAmiens dans les locaux <strong>de</strong> communauté. Prier et prendre conseil avant<br />

dʹagir.<br />

Vaugirard, 1er mai 1857<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous dis seulement <strong>de</strong>ux mots pour vous donner signe <strong>de</strong> mon arrivée et <strong>de</strong> mon<br />

bon souvenir, la retraite mʹayant un peu fatigué et mes forces étant encore peu soli<strong>de</strong>s.<br />

Notre f. Jules [Marcaire] a fait ses vœux perpétuels et appartient maintenant tout<br />

entier à Dieu et à la Communauté; ce sera, je lʹespère, une cause <strong>de</strong> plus pour obtenir les<br />

bénédictions <strong>de</strong> Dieu sur lui et sur les travaux.<br />

Notre retraite a été édifiante et aura, je lʹespère, <strong>de</strong> bons fruits; la Communauté,<br />

dans son ensemble, va bien; nous progressons lentement, mais dʹune façon sensible néan‐<br />

moins, et surtout constante et soli<strong>de</strong>. Lʹesprit est bon aussi, le Seigneur nʹa pas cessé dʹêtre<br />

<strong>avec</strong> nous.<br />

Je pense que tout va bien également à notre chère maison dʹAmiens; je compte tou‐<br />

jours vous aller voir lors <strong>de</strong> la bénédiction <strong>de</strong> la nouvelle maison. Ce me sera une douce<br />

consolation <strong>de</strong> me retrouver au milieu <strong>de</strong> vous et <strong>de</strong> vous embrasser affectueusement.<br />

Je vous invite à examiner bien attentivement <strong>de</strong>vant Dieu votre projet <strong>de</strong> réunir à<br />

votre maison la plus gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong>s apprentis et presque la totalité. Soyez assuré que<br />

599


lʹœuvre sʹamoindrira en nombre, que ceux qui sʹen occupent sʹéloigneront en partie et que<br />

le bien spirituel en souffrira également. Si vous avez <strong>de</strong>s raisons graves <strong>de</strong> vous détermi‐<br />

ner au parti <strong>de</strong> la réunion, je ne veux pas insister pour que vous agissiez autrement, mais<br />

je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> instamment <strong>de</strong> prier, <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r les lumières <strong>de</strong> lʹEsprit Saint et <strong>de</strong><br />

prendre aussi conseil dʹhommes vraiment expérimentés et sages; cette mesure me paraît<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r ces dispositions.<br />

Adieu, mon bien bon ami; embrassez tendrement mon f. Guillot que je serai aussi<br />

bien heureux <strong>de</strong> revoir, et croyez vous‐même à mon bien tendre attachement en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Respects accoutumés à MM. etc.<br />

469 à M. Paillé<br />

Diverses commissions et démarches à effectuer.<br />

17 mai [1857]<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je joins ici un reçu pour une somme <strong>de</strong> 150f que mʹa donnée M. <strong>de</strong> Montaud, et qui<br />

est à toucher chez M. Amédée Dauchez.<br />

Pendant que vous tiendrez cet argent, vous pourriez prélever ce quʹil faut pour<br />

mʹacheter 4 offices, 2 grands et 2 petits. Plus 4 croix <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong>ur au‐<strong>de</strong>ssous <strong>de</strong> celles<br />

que nous portons nous‐mêmes. Elles sont <strong>de</strong>stinées aux persévérants dont quelques‐uns<br />

mʹen <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt.<br />

Enfin, prière <strong>de</strong> faire mettre un cadre en bois <strong>de</strong> 50 sous ou 3f ou 3f.50 à la gravure<br />

ci‐jointe, propre, mais simple. Cʹest pour ma chambre, je désire y mettre cette pieuse<br />

image.<br />

Adieu, cher ami, que la Ste Vierge vous gar<strong>de</strong> tous et vous mène à son divin Fils;<br />

priez bien pour la première communion <strong>de</strong> nos enfants.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je désirerais que le r.p. Hello vît Mme <strong>de</strong> Falaiseau, lui dît le résultat <strong>de</strong> son voyage à<br />

Monfort et lui <strong>de</strong>mandât ce que nous avons à faire.<br />

470 à M. Halluin<br />

Petit courrier <strong>de</strong> la Communauté. Un cœur élevé et généreux, un esprit <strong>de</strong> sacrifice, sont le signe dʹune vocation<br />

religieuse. Régime différent pour les Persévérants, à Arras et à Vaugirard. Nécessité dʹunir toutes les forces <strong>de</strong> la<br />

famille.<br />

Vaugirard, 21 mai [1857] fête <strong>de</strong> lʹAscension<br />

Bien cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie un petit résumé que notre f. Georges (M. <strong>de</strong> Lauriston) a fait sur ce<br />

qui sʹest passé <strong>de</strong> plus notable dans les gestes <strong>de</strong> la petite famille <strong>de</strong> Vaugirard <strong>de</strong>puis le<br />

retour à Arras <strong>de</strong>s frères que vous avez envoyés à la retraite. Ces faits ne seraient pas pour<br />

dʹautres dʹun grand intérêt, mais ils en auront pour votre maison puisque nous mettons<br />

600


tout en commun et que lʹesprit <strong>de</strong> famille tend <strong>de</strong> plus en plus à sʹétablir entre nous. Je tâ‐<br />

cherai quʹun envoi pareil vous soit fait chaque quinzaine, ce sera comme une sorte <strong>de</strong><br />

journal qui vous fera suivre <strong>de</strong>s yeux ce qui se passe ici; si vous pouvez, en nous faisant<br />

lʹaccusé <strong>de</strong> réception, nous dire aussi en masse ce qui touche vous et votre maison, nous<br />

nous sentirons un peu plus les uns auprès <strong>de</strong>s autres.<br />

Notre f. Caille, que nous ferons en sorte <strong>de</strong> tenir aussi au courant <strong>de</strong> nos mouve‐<br />

ments, nous donnera aussi <strong>de</strong>s communications plus fréquentes. Il est venu ces jours‐ci<br />

nous voir à lʹimproviste, mais pour quelques instants seulement; il a été rappelé brusque‐<br />

ment à Amiens par lʹétat fâcheux <strong>de</strong> sa jeune nièce dont la tête paraît se déranger tout à<br />

fait; il a dû la conduire, je crois, dans une maison <strong>de</strong> santé. Je recomman<strong>de</strong> à vos prières<br />

cette pauvre jeune fille, et surtout notre pauvre ami Caille dont la patience et le courage<br />

sont bien ru<strong>de</strong>ment éprouvés par les afflictions <strong>de</strong> sa famille.<br />

Je vois <strong>avec</strong> joie, dʹaprès les détails contenus dans votre lettre, que tous vos services<br />

commencent à sʹorganiser; peu à peu, je lʹespère, tous vos besoins auront satisfaction; le<br />

bon Maître ne nous laisse désirer les choses que pour mieux nous en faire comprendre le<br />

prix; nos vœux et notre confiance toucheront son cœur <strong>de</strong> Père et nous obtiendront, par la<br />

patience, ce que son amour veut nous donner.<br />

Nous nʹallons pas trop mal <strong>de</strong> notre côté, les frères ont un bon esprit <strong>de</strong> piété, <strong>de</strong><br />

zèle et <strong>de</strong> charité; le f. Georges semble avoir été religieux toute sa vie, il va tout droit dans<br />

sa voie et nous édifie bien; son cœur est élevé et généreux, il comprend les sacrifices, il en<br />

sait la valeur <strong>de</strong>vant Dieu; cʹest <strong>avec</strong> ces dispositions quʹon peut goûter la vie religieuse,<br />

nous augurons bien <strong>de</strong> son avenir. Il vous reste bien et plus que jamais attaché, puisque<br />

<strong>de</strong>s liens plus intimes encore que par le passé le rattachement à vous et à tous nos frères.<br />

Le f. Thuillier vous aime bien cordialement; quoique la famille <strong>de</strong> Vaugirard lui soit chère,<br />

il a montré pourtant quelque regret dʹavoir quitté celle dʹArras. Il vous prie <strong>de</strong> faire réunir<br />

par un <strong>de</strong>s frères les quelques objets à son usage et <strong>de</strong> les lui envoyer; il nʹavait absolu‐<br />

ment pour venir ici que les effets dont il était couvert.<br />

Le f. Georges vous prie aussi <strong>de</strong> lui envoyer la liste quʹil avait laissée chez vous <strong>de</strong><br />

ses livres; il vous laissera tous ceux dont il nʹa pas un besoin absolu.<br />

Je regrette quʹon ne vous ait point rapporté les lettres <strong>de</strong> M gr dʹAngers sur la vie re‐<br />

ligieuse; je crois que nous en avons un exemplaire disponible, je ne manquerai pas <strong>de</strong> vous<br />

lʹapporter lors <strong>de</strong> la visite que jʹespère vous faire dans le courant <strong>de</strong> juin; je pense que la<br />

maison dʹAmiens sera bénie vers cette époque, jʹen profiterai pour voir à la fois les ff.<br />

dʹAmiens et ceux <strong>de</strong> votre chère maison.<br />

Le petit f. Jules va assez bien, encore un peu triste quelquefois; il a eu grand peine à<br />

se résigner à prendre place parmi nos persévérants; les jeunes aspirants, chez vous, sont<br />

déjà appelés frères et traités comme tels, il en résulte que leur passage à la maison <strong>de</strong> Vau‐<br />

girard leur paraît ru<strong>de</strong>, parce quʹils nʹy ont pas le même rang; il sera bien désirable que<br />

nous puissions établir lʹuniformité dans cette partie <strong>de</strong> notre œuvre, afin <strong>de</strong> nous épargner<br />

<strong>de</strong>s difficultés dans les échanges <strong>de</strong> sujets. Jules a commencé à vous écrire, je vais le pres‐<br />

ser <strong>de</strong> finir sa lettre si elle ne lʹest déjà; je vous serai obligé <strong>de</strong> lʹencourager à surmonter<br />

courageusement ses petites épreuves, tout le mon<strong>de</strong> lui montre affection, ses occupations<br />

sont mesurées, il a les soins et instructions particulières du bon abbé Lantiez; sa position<br />

est certainement meilleure pour lui quʹelle ne serait parmi les frères; jʹespère quʹil entendra<br />

raison et que le bon Dieu parlera à son cœur.<br />

601


Nous faisons <strong>de</strong> notre mieux le mois <strong>de</strong> Marie, bien assurés que, si la S te Vierge se<br />

charge <strong>de</strong> nous, nos âmes seront bien édifiées et nos affaires ne seront point négligées. Je<br />

recomman<strong>de</strong> à vous et à nos frères et à vos enfants la première communion <strong>de</strong> notre mai‐<br />

son qui se fera jeudi prochain 28 mai; cʹest, vous le savez, une gran<strong>de</strong> et bien importante<br />

solennité pour nous. Aidons‐nous réciproquement par la prière, unissons bien tous nos<br />

moyens, nous serons plus forts et plus agréables au Dieu <strong>de</strong> Charité.<br />

Jʹembrasse bien affectueusement tous nos frères, le f. Bassery en particulier; je serai<br />

bien aise quʹil nous écrive quelquefois, afin dʹentretenir la bonne affection qui lʹunit à<br />

nous.<br />

Votre tout dévoué et bien attaché ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

471 à M. Caille<br />

M. Myionnet va visiter la famille du frère Marcaire dont le père est gravement mala<strong>de</strong>.<br />

3 juin 1857. Vaugirard<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je vous écris seulement <strong>de</strong>ux mots pour vous dire que notre f. Myionnet est allé<br />

immédiatement après le reçu <strong>de</strong> votre lettre visiter la famille <strong>de</strong> notre f. Jules; il a trouvé<br />

son père gravement mala<strong>de</strong>, il est vrai, mais sans aucun indice dʹune fin toute prochaine;<br />

la situation est grave, le mé<strong>de</strong>cin ne le dissimule pas et lʹon peut sʹattendre quʹà moins <strong>de</strong><br />

dispositions toutes provi<strong>de</strong>ntielles la carrière <strong>de</strong> cet excellent homme ne saurait être lon‐<br />

gue. Cependant, la mère <strong>de</strong> notre f. Jules pense quʹil vaut mieux quʹil diffère encore son<br />

voyage; elle promet <strong>de</strong> lui écrire dès quʹelle croira utile quʹil vienne; elle suffit jusquʹici aux<br />

soins que <strong>de</strong>man<strong>de</strong> le cher mala<strong>de</strong>, et elle croit quʹil nʹest pas à propos que son fils vienne<br />

encore à Paris.<br />

Que notre cher frère se tranquillise donc et quʹil prie beaucoup pour son bon père,<br />

afin que Dieu lʹassiste dans cette pénible épreuve, nous prions tous ici <strong>avec</strong> lui.<br />

Nous nʹoublions pas non plus vos autres recommandations, tout ce qui vous touche<br />

nous intéresse et conséquemment est mis par nous dans le Cœur sacré du divin Seigneur.<br />

Votre ami et Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹembrasse mes chers enfants Jules et Henry [Guillot].<br />

Ne négligez pas le mois du Sacré‐Cœur.<br />

472 à M. Marcaire<br />

Secours spirituels à donner à son père mourant.<br />

3 juin [1857].Vaugirard<br />

Mon bien cher enfant Jules,<br />

Votre bon père est bien sérieusement atteint; il peut languir quelque temps encore,<br />

mais il semble bien assuré que le bon Dieu le rappellera à Lui assez prochainement. Je sais<br />

quʹil sʹest confessé il nʹy a pas bien longtemps, mais alors sa position nʹétait pas encore<br />

602


alarmante, on peut craindre que son confesseur, nʹétant pas averti, ne diffère plus ou<br />

moins à lui rendre visite. Il serait sage, je crois, <strong>de</strong> lui écrire pour le prier <strong>de</strong> suivre <strong>de</strong> près<br />

son mala<strong>de</strong> et <strong>de</strong> lui donner tous les secours spirituels que son état <strong>de</strong>man<strong>de</strong>.<br />

Adieu, bien cher enfant; vous savez combien est tendre notre affection pour vous, et<br />

vous <strong>de</strong>vinez bien la part que nous prenons à vos peines <strong>de</strong> famille.<br />

Je vous embrasse tendrement dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

473 à M. Caille<br />

Dispositions envisagées pour ai<strong>de</strong>r la mère du frère Marcaire.<br />

Vaugirard, 14 juin 1857<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Notre cher f. Jules Marcaire nʹa pu jusquʹici retourner près <strong>de</strong> vous; il fallait quʹil<br />

avisât aux moyens <strong>de</strong> régler la position <strong>de</strong> sa mère et la chose nʹest pas sans difficulté.<br />

Après examen <strong>de</strong> la situation, nous nous sommes convaincus que ce bon enfant ne pour‐<br />

rait sʹen tirer sans un peu dʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> la Communauté, et aussi sans un peu <strong>de</strong> con<strong>de</strong>scen‐<br />

dance. Je pense quʹon peut accor<strong>de</strong>r que Madame sa mère <strong>de</strong>meure, sinon dans la maison<br />

<strong>de</strong> la Communauté, au moins dans le voisinage, afin quʹil la voie souvent, la console et<br />

veille sur elle. Je crois aussi quʹil faut que le logement <strong>de</strong> cette bonne dame soit à la charge<br />

<strong>de</strong> la Communauté, parce que ses ressources propres ne suffiraient pas pleinement à ses<br />

besoins; <strong>avec</strong> cet ai<strong>de</strong>, elle peut sʹen tirer.<br />

Nous avons trouvé un moyen <strong>de</strong> tout arranger en lui offrant une chambre dans la<br />

partie <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Nazareth réservée pour le logement <strong>de</strong>s ménages. Mais, en cas que<br />

la chose se déterminât ainsi, il faudrait ramener à Paris le f. Jules et vous envoyer un autre<br />

frère à sa place. Jʹy répugne, parce que je crois que ce sera un détriment pour votre maison<br />

dont le f. Jules a lʹhabitu<strong>de</strong> et quʹil conduit, je crois, à votre satisfaction. Je pense que sa<br />

mère irait à Amiens aussi volontiers quʹà Nazareth, si on pouvait, hors <strong>de</strong> la communauté,<br />

(ce point me semble bien essentiel) lui donner une chambre où elle pût se loger. Il faudrait<br />

que cette chambre eût quelques meubles, parce quʹelle ne peut se déci<strong>de</strong>r à vendre les<br />

siens présentement et jusquʹà ce que sa position soit vraiment assise quelque part. Voyez,<br />

mon bon ami, ce qui vous semblerait faisable et désirable à cet égard; je souhaite ne pas<br />

vous imposer <strong>de</strong> nouvelles charges et je suis tout disposé à remplacer le f. Jules par un au‐<br />

tre frère; mais, si vous teniez à lui particulièrement, il nʹy aurait pas dʹautre moyen <strong>de</strong> le‐<br />

ver la difficulté quʹen procurant, dans le voisinage <strong>de</strong> votre maison, un tout petit asile<br />

pour la mère <strong>de</strong> notre frère. Examinez vite la chose, je vous prie, et dites‐moi le plus tôt<br />

possible votre avis, afin que je voie si les arrangements pourraient être pris dans le sens<br />

qui vous conviendrait le mieux.<br />

Nous allons bien ici, nous vous écrirons prochainement plus en détail.<br />

Embrassez pour moi le f. Henry [Guillot], et croyez vous‐même à ma plus tendre af‐<br />

fection.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

603


Respects à M. lʹabbé Mangot.<br />

Je nʹai pas parlé au f. Jules <strong>de</strong> ma pensée pour Amiens et ne lui ai fait la proposition<br />

que pour Nazareth; il a pensé quʹelle serait bien agréée par sa mère; je pense néanmoins<br />

quʹelle sʹarrangerait aussi <strong>de</strong> lʹautre combinaison, si vous la trouviez préférable: en cas<br />

contraire, je crois que nous vous enverrions le f. Emile [Beauvais].<br />

474 à M. Halluin<br />

Ménagements à avoir envers un jeune frère. Prières pour les défunts. Fondation à Vaugirard dʹun atelier <strong>de</strong> cise‐<br />

lure pour les Persévérants. Révision du Règlement. Dévotions pour le mois du Sacré‐Cœur.<br />

Vaugirard, 14 juin 1857<br />

Bien cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie le petit journal relevé par le f. Georges, cʹest moi uniquement qui en<br />

ai retardé le départ, nʹayant pas trouvé le moment dʹajouter quelques mots que je voulais<br />

écrire pour vous donner signe <strong>de</strong> bon et affectueux souvenir. Je vous adresse aussi une pe‐<br />

tite lettre du jeune f. Jules qui va bien maintenant, comme il vous lʹapprend lui‐même. La<br />

grâce du bon Dieu me paraît lʹavoir évi<strong>de</strong>mment secouru. Pour la secon<strong>de</strong>r, <strong>de</strong> notre part,<br />

nous avons fait à ce cher enfant la vie très douce, le laissant se porter presque uniquement<br />

aux occupations quʹil affectionne, cʹest‐à‐dire les décorations <strong>de</strong> la chapelle et quelques<br />

apprêts <strong>de</strong> fêtes qui se sont succédées ces temps <strong>de</strong>rniers à <strong>de</strong>s temps plus rapprochés que<br />

<strong>de</strong> coutume. Jʹespère que sa bonne volonté se soutiendra et quʹil sera possible <strong>de</strong> lʹattacher<br />

au service <strong>de</strong> Dieu; ces pauvres enfants ont, à cet âge, la raison encore bien peu ferme et<br />

leur conduite <strong>de</strong>man<strong>de</strong> bien <strong>de</strong>s ménagements. Et dʹailleurs, que les esprits sont peu fer‐<br />

mes <strong>de</strong> notre temps, que lʹesprit <strong>de</strong> foi est superficiel et quʹil est difficile <strong>de</strong> trouver <strong>de</strong>s<br />

âmes généreuses et gran<strong>de</strong>s dans le sacrifice. Le f. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] continue <strong>de</strong> bien<br />

marcher, je le crois en très bonne voie et jʹespère bien <strong>de</strong> son avenir comme religieux. Les<br />

autres se soutiennent aussi. Je recomman<strong>de</strong> à vos prières le f. Marcaire qui vient <strong>de</strong> perdre<br />

son père et à qui cette épreuve est doublement douloureuse, parce que sa mère, malheu‐<br />

reusement faiblement chrétienne, au moins dans la haute acceptation <strong>de</strong> ce mot, met sa<br />

vocation à <strong>de</strong> ru<strong>de</strong>s épreuves. Jʹespère bien néanmoins <strong>de</strong> la fermeté <strong>de</strong> notre frère, et sur‐<br />

tout <strong>de</strong> sa piété qui est vraie et fervente. Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> aussi vos prières pour son père<br />

qui est mort en très bonnes dispositions. On dit ici une messe tous les mois pour les ff. dé‐<br />

funts, pour leurs parents et pour les bienfaiteurs aussi décédés. Vous verrez si ce ne serait<br />

pas un bon usage à introduire aussi à Arras. Le bon Dieu aime la reconnaissance et se<br />

complaît aux prières que suscite la charité.<br />

Nous cherchons à établir un petit atelier <strong>de</strong> ciselure et <strong>de</strong> montage en bronzes pour<br />

nos persévérants, afin <strong>de</strong> les occuper. Je vous tiendrai au courant du résultat <strong>de</strong> nos efforts.<br />

Notre règlement est enfin révisé, je vous lʹenverrai prochainement. Je ne me suis pas<br />

pressé en cette affaire, elle ne saurait être trop mûrie.<br />

Nous faisons ici le mois du Sacré‐Cœur. Chacun lit en particulier la petite lecture du<br />

jour; le soir, on lit ensemble lʹacte <strong>de</strong> consécration et, après les principaux exercices, on ré‐<br />

pète: Cor Iesu sacratissimum, Cor Mariæ immaculatum. Cette dévotion ne charge guère, elle<br />

est très réchauffante, elle nous produit toujours un bien sensible.<br />

604


Adieu, cher Monsieur lʹabbé, je compte toujours vous voir, les travaux dʹAmiens<br />

mʹont empêché <strong>de</strong> fixer lʹépoque bien précise <strong>de</strong> mon voyage; sʹils tar<strong>de</strong>nt trop, jʹaviserai<br />

au parti à prendre.<br />

Jʹembrasse bien affectueusement vous et nos ff. dʹArras. Jʹespère que le f. Carment<br />

répond mieux à vos vues et sait mériter votre affection, je le <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à Dieu sincèrement.<br />

A vous en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

475 à M. Caille<br />

Retour du frère Marcaire à Amiens.<br />

Vaugirard, 18 juin 1857<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Le Conseil <strong>de</strong> la Communauté qui sʹest réuni hier mercredi, selon son usage, a pen‐<br />

sé unanimement que le meilleur parti à prendre dans lʹintérêt <strong>de</strong> la maison dʹAmiens était<br />

<strong>de</strong> lui rendre présentement le f. Marcaire, qui peut avoir quelques défauts ou plutôt quel‐<br />

ques insuffisances à certains égards, mais qui, étant pieux, dévoué, exact, avait les qualités<br />

les plus essentielles pour vous ai<strong>de</strong>r utilement. Un autre aurait, pour le <strong>de</strong>hors, plus dʹini‐<br />

tiative, mais irait beaucoup moins bien pour lʹintérieur; tout calcul fait, je suis persuadé<br />

que vous êtes gravement intéressé à gar<strong>de</strong>r, quant à présent, ce cher frère. Je pense quʹil<br />

pourra retourner lundi à Amiens; je lʹattends <strong>de</strong>main et je pense pouvoir régler le moment<br />

<strong>de</strong> son départ assez précisément pour quʹil vous soit annoncé ce même jour.<br />

Je crois que vous pouvez être sans inquiétu<strong>de</strong> sur le voisinage <strong>de</strong> sa mère, il sent ce<br />

quʹil doit à la Communauté et à ses obligations comme religieux; nous réglerons positive‐<br />

ment ce quʹil peut donner dʹinstants à sa mère, et il est très résolu à se tenir strictement<br />

dans cette limite.<br />

Adieu, bien cher ami, je vous écrirai <strong>de</strong> nouveau <strong>de</strong>main, je lʹespère.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Affections au f. Guillot.<br />

476 à M. Caille<br />

Date précise du retour du frère Marcaire à Amiens. Le bien <strong>de</strong> la communauté dʹAmiens exige que dans ses lo‐<br />

caux M. Caille nʹaccueille personne <strong>de</strong> lʹextérieur.<br />

Vaugirard, 20 juin 1857<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Notre f. Jules reviendra définitivement à Amiens lundi prochain; il est en bonnes<br />

dispositions. Sa bonne mère ne se déci<strong>de</strong> point, quant à présent, à se rendre à Amiens, elle<br />

aime mieux rester près <strong>de</strong> sa famille; vous nʹavez donc pas à songer en ce moment à son<br />

logement.<br />

Quant à la question posée dans votre <strong>de</strong>rnière lettre et à laquelle je nʹai pas encore<br />

répondu, il nʹest pas douteux que le bien <strong>de</strong> votre maison <strong>de</strong>man<strong>de</strong> que vous soyez seuls<br />

605


dans votre nouveau local, il me semble aussi bien certain quʹon est <strong>de</strong> cet avis à lʹEvêché.<br />

Cherchez les moyens les plus doux pour ne pas contrister M. <strong>de</strong> Brandt; il me semble<br />

quʹen priant bien le bon Dieu vous arriverez à trouver quelque moyen <strong>de</strong> tout concilier. Je<br />

pense que lʹEvêché ne verrait pas <strong>avec</strong> plaisir un jeune prêtre comme M. Deberly en<br />

contact continuel <strong>avec</strong> M. <strong>de</strong> Brandt, et que nous courrions risque dʹindisposer M gr contre<br />

nous et <strong>de</strong> nous fermer lʹaccès pour avoir plus tard dʹautres sujets ecclésiastiques.<br />

Adieu, bien cher ami; je vous embrasse ainsi que le f. Henry [Guillot].<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

477 à M. Caille<br />

Nouvelles <strong>de</strong>s frères. Le frère Tourniquet visite la famille Marcaire. Pru<strong>de</strong>nce avant <strong>de</strong> sʹengager à accueillir une<br />

nouvelle œuvre. Préparatifs <strong>de</strong> la bénédiction <strong>de</strong> la nouvelle maison à Amiens. bénédiction <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Gre‐<br />

nelle.<br />

Vaugirard, 1er juillet 1857<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> joie que tout se soutient bien dans notre chère maison dʹAmiens,<br />

malgré le poids <strong>de</strong> vos travaux et les préoccupations <strong>de</strong> votre installation. La santé <strong>de</strong> no‐<br />

tre f. Guillot, seule, pourrait nous donner un peu <strong>de</strong> sollicitu<strong>de</strong>; voyez, mon bon ami, sʹil<br />

nʹy aurait pas avantage pour lui et pou votre maison à ce quʹil changeât dʹair pour <strong>de</strong>ux ou<br />

trois semaines; en ce cas, vous pourriez lʹenvoyer à Vaugirard, où nous aurions soin quʹil<br />

eût du repos et peu dʹoccupations, cela suffirait sans doute pour le remettre; il pourrait<br />

aussi aller un peu à la maisonnette <strong>de</strong> Chaville que nous avons encore pour cette année280 .<br />

Je vous enverrais, pendant son absence, le f. Thuillier qui a bonne volonté et qui sʹentend<br />

bien maintenant à la surveillance <strong>de</strong>s enfants. Si vous pensiez quʹil nʹy a pas urgence et<br />

quʹon peut attendre après votre déménagement, je mʹen rapporterais à votre avis.<br />

Jʹai vu <strong>avec</strong> gran<strong>de</strong> joie notre cher f. Marcaire reprendre son aplomb dans le service<br />

<strong>de</strong> Dieu et surmonter les difficultés quʹil avait trouvées ici; le bon Dieu et la Ste Vierge lʹont<br />

visiblement assisté; son cœur nʹavait pas faibli, mais seulement son esprit a été un moment<br />

troublé par la multiplicité <strong>de</strong>s <strong>de</strong>voirs différents quʹil voyait sʹélever autour <strong>de</strong> lui. Assu‐<br />

rez‐le <strong>de</strong> ma part que je ferai rendre visite exactement à sa mère tous les huit jours; le f.<br />

<strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet], qui est très affectueux, est chargé <strong>de</strong> ce soin et mʹen rend compte<br />

exactement; elle va bien présentement; je lui ai envoyé une petite somme pour la soulager<br />

et lui ai fait promettre <strong>de</strong> lʹai<strong>de</strong>r à chaque terme en lui envoyant 30f ou 120f par an; elle se‐<br />

ra ainsi tranquillisée. Jʹécris à M. Baudon pour quʹil recomman<strong>de</strong> à M. Lafond, son beau‐<br />

père, la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> dʹune petite pension par lʹadministration à laquelle M. Marcaire était at‐<br />

taché; donnez‐en détails à notre cher frère qui en sera consolé.<br />

Pour ce qui touche les <strong>de</strong>ux objets particuliers <strong>de</strong> votre lettre, je pense, quant à la<br />

proposition qui vous est faite par le notaire, que vous êtes trop chargé dʹoccupations pour<br />

accepter la gestion du legs quʹon voudrait mettre sur votre tête; ce serait dʹailleurs faire<br />

280 Au Journal <strong>de</strong> Communauté du samedi 6 juin, on lit: "Dans le <strong>de</strong>ssein <strong>de</strong> procurer aux frères fatigués un lieu <strong>de</strong> repos, M. le Supérieur<br />

loue <strong>de</strong> nouveau pour l'été la petite maison <strong>de</strong> Chaville".<br />

606


crier la famille contre vous; une autre personne moins occupée et plus libre pourra pren‐<br />

dre cette charge charitable que vous ne sauriez, ce me semble, accepter.<br />

Pour le local <strong>de</strong>mandé pour S t Régis 281 , je crois quʹil serait bien, en montrant toute<br />

bonne volonté, <strong>de</strong> ne donner réponse quʹaprès votre installation; ce nʹest guère quʹà ce<br />

moment que vous pourrez bien vous rendre compte si lʹadmission <strong>de</strong> cette œuvre dans la<br />

Maison se peut accommo<strong>de</strong>r <strong>avec</strong> la disposition <strong>de</strong>s lieux. Je pense que je vous irai voir<br />

pour la bénédiction <strong>de</strong> la maison; je pourrai examiner <strong>avec</strong> vous ce point <strong>de</strong> détail que<br />

nous résoudrons, je pense, pour le plus grand bien <strong>de</strong>s œuvres.<br />

M. Decaux, Vice‐Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> S t ‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul, serait disposé à venir<br />

à la bénédiction <strong>de</strong> la maison, si elle avait lieu le dimanche 26 juillet; je crois que M. Mai‐<br />

gnen pourrait mʹaccompagner aussi; vous aimeriez mieux, sans doute, quʹelle se fît le di‐<br />

manche 19, fête <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul. Ce serait, en effet, un jour bien choisi et je ne vois<br />

pas <strong>de</strong> raison décisive dʹy renoncer, si tel est votre désir; seulement MM. Decaux et Mai‐<br />

gnen nʹy pourraient assister, la bénédiction <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Grenelle 282 <strong>de</strong>vant se faire le<br />

même jour 19 juillet. Je vous prie <strong>de</strong> me dire un mot à ce sujet.<br />

Adieu, mon bien bon ami; nous nʹallons pas mal ici, jʹai aussi <strong>de</strong> bonnes nouvelles<br />

dʹArras; le bon Maître daigne veiller sur nous et sur nos œuvres; soyons‐Lui bien fidèles<br />

<strong>de</strong> notre côté, et son appui ne nous manquera point.<br />

Où en est M. Deberly? Montre‐t‐il toujours la disposition <strong>de</strong> sʹattacher à la Commu‐<br />

nauté?<br />

Embrassez nos frères pour moi et offrez mes respects accoutumés aux amis qui veu‐<br />

lent bien nous accor<strong>de</strong>r leur charitable intérêt.<br />

Votre ami et Père bien affectionné en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

478 à M. Halluin<br />

MLP. est en retard pour sa correspondance. Bénédiction <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Grenelle. Postulants éconduits. Encou‐<br />

ragements aux frères à fortifier leur vie religieuse. Visite éclair <strong>de</strong> Mgr Angebault à Vaugirard.<br />

Vaugirard, 11 juillet 1857<br />

Bien cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vois, par la petite lettre que vous écrivez à notre f. Georges [<strong>de</strong> Lauriston], que le<br />

retard apporté au voyage projeté par moi vers notre chère communauté dʹArras vous<br />

étonne et vous donne quelque incertitu<strong>de</strong>. Je regrette bien cette indécision involontaire,<br />

elle vient du silence <strong>de</strong> notre f. Caille, absorbé sans doute par les travaux <strong>de</strong> sa nouvelle<br />

maison, et dont je ne puis tirer aucune réponse sur lʹépoque où elle <strong>de</strong>vra être bénite. Jʹau‐<br />

rais souhaité primitivement que ce pût être le 19 <strong>de</strong> ce mois parce que, votre fête ayant lieu<br />

le len<strong>de</strong>main, cʹeût été une joie pour moi <strong>de</strong> me trouver en famille à ce moment <strong>avec</strong> vous.<br />

Mais, on doit bénir le même jour, 19 juillet, la maison <strong>de</strong> Grenelle nouvellement bâtie. Le f.<br />

281 Pour s'acquitter d'un vœu fait sur la tombe <strong>de</strong> saint François-Régis, Jules Gossin, procureur du Roi, et plus tard prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la<br />

SSVP. <strong>de</strong> 1844 à 1847, avait fondé en 1826, une Œuvre consacrée à régulariser les unions illégitimes <strong>de</strong>s milieux ouvriers.<br />

282 Vers la fin du mois d'octobre 1856, l'abbé Mayeux, curé <strong>de</strong> Grenelle, céda à l'Institut, moyennant une rente viagère, un vaste terrain<br />

situé au 29 rue <strong>de</strong> Lourmel, pour y établir un Patronage et une communauté. Il fallut plusieurs années pour que ce vœu du pasteur<br />

soit accompli, mais dès la fin <strong>de</strong> 1856, les apprentis <strong>de</strong> Grenelle commencèrent à jouir du grand terrain offert à leurs jeux. Le<br />

19 juillet 1857, Mgr <strong>de</strong> Charbonnel, évêque <strong>de</strong> Toronto, bénira le Patronage placé sous la protection <strong>de</strong> Notre-Dame <strong>de</strong> Grâce. La<br />

maison <strong>de</strong> M. Caille sera bénie à Amiens le 10 septembre.<br />

607


Maignen, qui doit mʹaccompagner à Arras et à Amiens, est obligé dʹassister à cette solenni‐<br />

té; je ne puis guère me dispenser moi‐même dʹy être. Enfin, M. Decaux, Vice‐Prési<strong>de</strong>nt<br />

Général <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> S t ‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul, qui a lʹintention dʹaller à Amiens pour la bé‐<br />

nédiction <strong>de</strong> la maison nouvelle, doit prési<strong>de</strong>r à la solennité du 19 à Grenelle. Pour toutes<br />

ces raisons, je pensais que mon voyage serait forcément retardé et jʹavais <strong>de</strong>mandé au f.<br />

Caille sʹil lui conviendrait que sa cérémonie se fît le dimanche 26 juillet, le laissant libre,<br />

dʹailleurs, dʹen fixer autrement le jour, sʹil lui était plus convenable <strong>de</strong> le faire ainsi. Je nʹob‐<br />

tiens <strong>de</strong> réponse ni pour lʹune ni pour lʹautre combinaison, bien que, <strong>de</strong>puis quinze jours,<br />

je lui aie écrit et fait écrire plusieurs fois. Voilà la cause, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> mes len‐<br />

teurs. Pour y mettre fin, je vais encore écrire à Amiens, et je vous dirai au plus tôt le résul‐<br />

tat <strong>de</strong> cette correspondance.<br />

Je vois <strong>avec</strong> joie que tout va dans votre chère maison, frères, enfants et le reste, non<br />

sans quelques petites épines quotidiennes, mais <strong>avec</strong> le bon esprit, le zèle et la confiance<br />

en Dieu; cʹest bien ainsi. Le Seigneur ne sʹéloignera pas <strong>de</strong> la petite famille tant quʹIl la<br />

trouvera dans ces dispositions. Ici, nous nʹallons pas mal non plus, les cœurs sont soutenus<br />

intérieurement. Jʹexcepte cependant <strong>de</strong>ux nouvelles recrues que nous avions faites <strong>de</strong>puis<br />

peu et qui ne persévèrent ni lʹun ni lʹautre. Nous ne pouvons le regretter, ou plutôt nous<br />

avons favorisé nous‐même cet arrangement, lʹun <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux postulants nʹayant pas le ca‐<br />

ractère sociable et flexible qui lʹeût rendu propre à la vie <strong>de</strong> Communauté, lʹautre étant si<br />

petit <strong>de</strong> corps et si frêle <strong>de</strong> santé quʹil eût pu difficilement supporter une vie active et labo‐<br />

rieuse.<br />

Notre adoration <strong>de</strong>s Quarante Heures sʹest terminée hier et sʹest faite <strong>avec</strong> gran<strong>de</strong><br />

édification 283 . Lʹadoration ne sʹinterrompt ni le jour ni la nuit. Il va sans dire que les ff.<br />

dʹArras nʹont point été oubliés. Le f. Jules nʹa pas manqué dʹoccupation en ces jours <strong>de</strong>r‐<br />

niers; il sʹen est bien tiré. M. Lantiez en est content. Il est jeune, mais il a <strong>de</strong> la droiture <strong>de</strong><br />

cœur. On peut donc espérer quʹil se soutiendra. Le f. Georges est toujours en bonne dispo‐<br />

sition.<br />

Je souhaite bien que les ff. Loquet et Bassery continuent <strong>de</strong> se fortifier et que le f.<br />

Carment sʹamen<strong>de</strong> <strong>de</strong> plus en plus; il fera, je lʹespère, <strong>de</strong>s efforts courageux et le Seigneur<br />

et la T. S te Vierge lʹassisteront.<br />

M gr lʹEvêque dʹAngers vient <strong>de</strong> traverser Paris. Il a passé une partie <strong>de</strong> lʹaprès‐midi,<br />

hier, <strong>avec</strong> nous, et nous a fait une aimable et pieuse exhortation. Il a reconnu le f. Georges<br />

quʹil a vu enfant et dont il connaît intimement toute la famille. Il regrette vivement, et <strong>avec</strong><br />

instance, <strong>de</strong> nʹavoir pas su plus précisément notre union <strong>avec</strong> vous. Il vous eût été visiter<br />

en traversant Arras, où il est resté <strong>de</strong>ux heures, en revenant ces jours‐ci <strong>de</strong> Cambrai. Il<br />

vous eût tous enchantés par sa bonté toute paternelle et par son aimable esprit qui lui ga‐<br />

gne tous les cœurs. Chaque fois quʹil vient ici, cʹest une fête pour toute la maison. Il a exa‐<br />

miné <strong>de</strong> nouveau notre règlement révisé dʹaprès son avis; il y a donné une entière appro‐<br />

bation 284 . Je vous le porterai pour en conférer <strong>avec</strong> vous en allant vous rendre visite.<br />

Adieu, bien cher Monsieur lʹabbé; je ne suis pas encore bien fort en santé; je ne fais<br />

aucun travail un peu suivi sans une fatigue <strong>de</strong> plusieurs jours. Je me borne presque à sui‐<br />

283 Au Journal <strong>de</strong> Communauté du 9 juillet :"2 e jour d'adoration: exhortation par M. l'abbé Lavigerie, professeur à la faculté <strong>de</strong> théologie".<br />

En 1859, le futur fondateur <strong>de</strong>s Missionnaires d'Afrique siègera au comité consultatif <strong>de</strong>s Oeuvres et institutions charitables<br />

(émanation <strong>de</strong> la Société d'Economie charitable), <strong>avec</strong> Anatole <strong>de</strong> Ségur, A. <strong>de</strong> Melun, les abbés <strong>de</strong> Girardin, Mullois, etc.<br />

284 "…pour <strong>de</strong>vise, je vous donne la sainte pauvreté, l'humilité et la charité. Croissez, chère petite violette, soyez cachée, foulée aux<br />

pieds et répan<strong>de</strong>z vos parfums". (Cf. VLP. I, p.574).<br />

608


vre le mouvement général <strong>de</strong> la Communauté et lʹensemble <strong>de</strong> nos exercices ici en particu‐<br />

lier. Jʹespère que le Seigneur daignera vous assister tous pour que mon rôle si mal rempli<br />

ne cause pas <strong>de</strong> préjudice sensible à notre bien‐aimée famille. Jʹembrasse tous les ff. dʹAr‐<br />

ras et vous, bien cher Monsieur lʹabbé, tout particulièrement.<br />

Votre dévoué ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

479 à M. Halluin<br />

Projet dʹaller à Arras au temps le plus convenable pour lʹœuvre. La St‐Henry. Appel à une union dans la charité<br />

plus étroite, car jusquʹà présent, lʹeffet est plus lent quʹil ne lʹavait souhaité.<br />

Vaugirard, 14 juillet 1857<br />

Bien cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

M. Caille mʹécrit que la bénédiction <strong>de</strong> la maison dʹAmiens ne se pourra faire que le<br />

15 du mois prochain, les travaux <strong>de</strong> la chapelle ne <strong>de</strong>vant guère être terminée avant cette<br />

époque. Il ajoute quʹil serait néanmoins en mesure <strong>de</strong> recevoir, dès ce moment, une visite<br />

<strong>de</strong> nous puisquʹil est déjà installé <strong>avec</strong> ses frères dans le nouveau local, mais je ne verrais<br />

guère dʹutilité à faire <strong>de</strong>ux voyages à Amiens, à distance si rapprochée lʹun <strong>de</strong> lʹautre.<br />

Jʹai remarqué cependant, cher Monsieur lʹabbé, que, dans votre lettre au f. Georges,<br />

vous insistiez pour que notre petite excursion à la maison dʹArras ne fût guère différée, à<br />

cause <strong>de</strong> quelques arrangements que vous souhaitiez <strong>de</strong> régler <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> nous, du‐<br />

rant le séjour que nous pourrions faire près <strong>de</strong> vous. Si ces dispositions étaient absolument<br />

urgentes et vous paraissaient <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r ma présence sans retard, je nʹhésiterais pas à me<br />

rendre à votre désir, car je nʹai rien tant à cœur que le bien <strong>de</strong> nos chères communautés, et<br />

je me prêterai toujours <strong>avec</strong> empressement à tout ce qui pourra leur être <strong>de</strong> quelque utilité.<br />

Autrement, sʹil nʹy avait rien <strong>de</strong> pressant, je ne verrais pas dʹinconvénient à différer mon<br />

voyage jusquʹau moment marqué par le f. Caille, puisque je ne puis assister, à mon grand<br />

regret, à la petite solennité <strong>de</strong> famille qui se fait à lʹoccasion <strong>de</strong> votre fête. Je verrais même<br />

à ce délai un petit avantage, il est vrai bien secondaire et que je négligerais <strong>de</strong> grand cœur<br />

sʹil était besoin, cʹest quʹau 15 août, les gran<strong>de</strong>s chaleurs étant passées, je serai mieux en<br />

force pour supporter les quelques voyages que je dois faire faire <strong>de</strong> votre côté dʹabord, et<br />

ensuite sur un ou <strong>de</strong>ux autres points. Soyez assez bon, cher Monsieur lʹabbé, pour me dire,<br />

en toute simplicité, ce que vous désirez, ce qui vous semble nécessaire ou utile, je me ran‐<br />

gerai à votre sentiment et je tâcherai <strong>de</strong> régler mes dispositions et celles du f. Maignen qui,<br />

sans doute, mʹaccompagnera, afin <strong>de</strong> vous satisfaire.<br />

Jʹavais surtout en vue, en vous écrivant aujourdʹhui, <strong>de</strong> vous dire, bien cher Mon‐<br />

sieur lʹabbé, que toute notre petite famille se souviendra <strong>de</strong> la fête <strong>de</strong> S t Henry. Deux au‐<br />

tres <strong>de</strong> nos frères, M. lʹabbé Planchat et le f. Guillot à Amiens, portent comme vous ce nom<br />

qui nous est ainsi cher à bien <strong>de</strong>s titres. Je vous offre tous les vœux, toutes les tendres af‐<br />

fections <strong>de</strong> nos frères et, en particulier, mes plus tendres sentiments. Nous prierons au‐<br />

jourdʹhui pour vous bien ar<strong>de</strong>mment, et <strong>de</strong>main ceux qui feront la Sainte Communion la<br />

feront à votre intention. Daigne le Seigneur nous entendre, bénir vous et toute la chère fa‐<br />

mille dʹArras, y maintenir, y accroître encore la piété, le zèle, la vive charité, cette unité<br />

sainte qui fera pour le bien et pour la gloire <strong>de</strong> Dieu <strong>de</strong> toutes vos forces une seule force,<br />

<strong>de</strong> tous vos cœurs un seul cœur. Puisse aussi notre union se resserrer <strong>de</strong> jour en jour, <strong>de</strong>‐<br />

609


venir plus ferme, plus efficace pour le bien <strong>de</strong> nos âmes et pour lʹavantage <strong>de</strong> nos œuvres.<br />

Bien <strong>de</strong>s causes en ren<strong>de</strong>nt jusquʹici lʹeffet lent et moins effectif que nous ne lʹeussions vou‐<br />

lu, mais notre bon vouloir et notre constance surmonteront peu à peu les difficultés et fe‐<br />

ront produire à notre association les bons résultats que procure certainement toute union<br />

formée en Dieu, pour une fin vraiment chrétienne et charitable.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.; je me sens bien cordialement <strong>avec</strong> vous<br />

dans le Cœur sacré du divin Sauveur, et jʹy veux <strong>de</strong>meurer bien longtemps au beau jour <strong>de</strong><br />

votre fête.<br />

Jʹembrasse vous et tous nos frères bien affectueusement.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

480 à M. Halluin<br />

MLP. doit ajourner son voyage à Arras. Sa santé reste faible. ʺLà où lʹhomme sʹefface, le Seigneur se montre et<br />

donne toute sa puissante assistanceʺ. Projet <strong>de</strong> règlement pour les Persévérants.<br />

Vaugirard, 25 juillet 1857<br />

Bien cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Jʹai un peu différé à répondre à votre <strong>de</strong>rnière lettre à cause <strong>de</strong> quelques indisposi‐<br />

tions que mʹont occasionnées les gran<strong>de</strong>s chaleurs et <strong>de</strong> lʹincertitu<strong>de</strong> où je me suis trouvé<br />

sur la suffisance <strong>de</strong> mes forces pour le voyage que je suis au moment <strong>de</strong> faire dans votre<br />

cher pays artésien. Une autre raison mʹempêche aussi <strong>de</strong> suivre <strong>de</strong> point en point le petit<br />

plan que vous mʹavez communiqué, et en suite duquel mon départ eût dû sʹeffectuer im‐<br />

médiatement. La distribution <strong>de</strong>s prix se fait à la maison <strong>de</strong> Vaugirard le 5 du mois dʹaoût,<br />

nos frères regretteraient que je fusse absent au moment <strong>de</strong> cette petite solennité, où se ren‐<br />

<strong>de</strong>nt la plupart <strong>de</strong> nos amis et <strong>de</strong>s protecteurs <strong>de</strong> nos enfants. Mais je pense que je pourrai<br />

partir tout <strong>de</strong> suite après cette distribution et vous arriver sans plus <strong>de</strong> retard. Je passerai<br />

alors quelques jours <strong>avec</strong> vous, bien plus pour vous voir ainsi que nos frères et vos chers<br />

enfants que dans lʹespérance <strong>de</strong> vous secon<strong>de</strong>r bien efficacement, car la faiblesse <strong>de</strong> ma<br />

santé a beaucoup amoindri mon activité <strong>de</strong> corps et dʹesprit, et je ne puis guère valoir un<br />

peu quʹà la condition dʹêtre en tout aidé ou plutôt porté par Dieu. Jʹespère que les choses<br />

nʹen iront que mieux, puisque là où lʹhomme sʹefface, le Seigneur se montre et donne sa<br />

toute puissante assistance.<br />

Sans préjuger absolument la solution <strong>de</strong>s questions que vous posez dans votre lettre<br />

relativement aux persévérants, et que nous pourrons examiner ensemble, je pense que ces<br />

enfants pourraient rester dans leur lieu jusque vers 17 ans, et venir à ce moment à Vaugi‐<br />

rard passer un an ou <strong>de</strong>ux comme persévérants <strong>de</strong> 1 ère classe. De là, ils iraient comme pos‐<br />

tulants dans une maison ou dans une autre passer un certain temps, peut‐être aussi une ou<br />

<strong>de</strong>ux années, et ils reviendraient après à la Maison‐Mère pour y faire leur noviciat. Il me<br />

semble que nous formerions ainsi <strong>de</strong>s sujets capables et dévoués. Les Maisons particuliè‐<br />

res ne seraient pas dépourvues dʹai<strong>de</strong> pour leurs services, puisque les sujets leurs reste‐<br />

raient au moins jusquʹà 17 ans et, lorsquʹà cet âge ils iraient pour un temps, comme persé‐<br />

vérants <strong>de</strong> 1 ère classe, à la Maison‐Mère, ils seraient suppléés par les postulants déjà plus<br />

avancés et quʹon enverrait à leur place. Je le répète, bien cher Monsieur lʹabbé, je ne vous<br />

donne ces pensées que comme un aperçu qui nʹa rien dʹarrêté et que nous pourrons modi‐<br />

fier, ou même entièrement changer, après les avoir ensemble examinées.<br />

610


Tout va ici comme <strong>de</strong> coutume et se soutient <strong>avec</strong> la grâce <strong>de</strong> Dieu. Il nous reste<br />

beaucoup à faire pour constituer une œuvre vraiment bien assise et marchant fermement<br />

dans sa voie, mais nous avons les bases essentielles, les signes <strong>de</strong> la vocation du Seigneur<br />

et le sincère désir dʹêtre dociles à son adorable volonté.<br />

Adieu, bien cher Monsieur lʹabbé, assurez tous nos frères <strong>de</strong> mes affectueux senti‐<br />

ments, et croyez vous‐même à mon plus tendre attachement en J. et M.<br />

Votre ami et Père bien dévoué<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je gar<strong>de</strong> toujours <strong>avec</strong> vous quelque bon espoir pour M. Daviron; prions, cʹest<br />

le grand et puissant moyen.<br />

481 à M. Decaux<br />

MLP. sʹexcuse <strong>de</strong> ne pas lʹavoir salué comme il se <strong>de</strong>vait <strong>de</strong> le faire.<br />

Vaugirard, 30 juillet 1857<br />

Mon bien bon ami,<br />

Vous avez bien sévèrement puni hier toute notre petite famille dʹun moment dʹoubli<br />

dont jʹétais seul coupable et dont tous nʹeussent pas dû souffrir <strong>avec</strong> moi. Sous lʹimpres‐<br />

sion <strong>de</strong> plusieurs affaires qui venaient coup sur coup <strong>de</strong> mʹoccuper assez vivement, jʹai<br />

perdu <strong>de</strong> vue un instant votre chère présence à la chapelle, et quand subitement la pensée<br />

mʹen est revenue, vous veniez <strong>de</strong> vous éloigner. Cher bon ami, puisque le Seigneur nous<br />

pardonne lui‐même <strong>de</strong> perdre sa divine présence, nʹeussiez‐vous pas dû excuser ma pau‐<br />

vre tête bien épuisée et bien incapable et pratiquer la miséricor<strong>de</strong> envers moi? Jʹai été triste<br />

toute la soirée et péniblement affecté <strong>de</strong> vous avoir, même involontairement, délaissé; si,<br />

en me grondant <strong>de</strong> mon étour<strong>de</strong>rie, vous fussiez venu à nous, vous mʹeussiez tranquillisé<br />

et rempli <strong>de</strong> reconnaissance. Aujourdʹhui, je nʹai dʹautre moyen que <strong>de</strong> dépêcher notre f.<br />

Paillé vers vous pour quʹil vous offre mes bien vifs regrets et me rapporte votre pardon.<br />

Jʹespère, cher bon ami, que vous ne me le refuserez point et quʹen témoignage <strong>de</strong> votre<br />

cordiale disposition, vous prendrez jour pour nous revenir voir et nous dédommager <strong>de</strong> la<br />

déception si triste dʹhier au soir; jʹai besoin <strong>de</strong> vous voir et <strong>de</strong> vous embrasser pour être en<br />

paix <strong>avec</strong> moi‐même et me retrouver content.<br />

Adieu, mon bien‐aimé ami; par anticipation, je vous serre bien affectueusement la<br />

main et suis pour toujours<br />

Votre ami et frère en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

482 à M. Decaux<br />

Invitation à la fête <strong>de</strong>s vacances à Vaugirard285 . Le bénéfice <strong>de</strong> cette fête va aux Œuvres <strong>de</strong> formation.<br />

285 Au Journal <strong>de</strong> l'Orphelinat, à la date du 23 août : "Fête <strong>de</strong>s vacances. L'affluence est considérable. Le nombre <strong>de</strong>s assistants dépasse<br />

<strong>de</strong> beaucoup celui <strong>de</strong> l'année <strong>de</strong>rnière. La fête est présidée par M. le maire <strong>de</strong> Vaugirard. Le colonel du 91 e <strong>de</strong> ligne envoie la<br />

musique du régiment…course aux drapeaux, courses en sac, course au clocher…les coureurs sont fournis par tous les patronages<br />

<strong>de</strong> Paris qui ont amené tous les enfants…Siège et prise <strong>de</strong> Malakoff: les <strong>de</strong>ux troupes <strong>de</strong> Zouaves et <strong>de</strong> Russes sont composés uniquement<br />

<strong>de</strong>s enfants <strong>de</strong> l'Orphelinat". Cf. VLP. I, p.580.<br />

611


Vaugirard, 3 août 1857<br />

Mon bien bon ami et frère en N.S.,<br />

Je vous enverrai <strong>de</strong>main, comme vous mʹy avez autorisé, un certain nombre <strong>de</strong> bil‐<br />

lets pour notre petite fête <strong>de</strong>s Vacances, particulièrement <strong>de</strong> ceux qui sont à 50 centimes<br />

pour <strong>de</strong>ux personnes.<br />

Lʹan <strong>de</strong>rnier, tous nos confrères ont concouru à cette petite réunion <strong>avec</strong> une bien‐<br />

veillance qui nous a profondément touchés, et ceux dʹentre eux qui y ont assisté <strong>avec</strong> leurs<br />

familles nous ont promis dʹy revenir cette année, trouvant ce moyen heureusement imagi‐<br />

né pour donner aux jeunes gens un aimable délassement <strong>de</strong> vacances et procurer en même<br />

temps quelques ressources à notre maison dʹorphelins.<br />

Je vous prie, mon bon ami, <strong>de</strong> rappeler à nos confrères, si vous le jugez bon, que<br />

cette maison est véritablement une œuvre <strong>de</strong> nos<br />

chères Conférences; la plupart <strong>de</strong>s enfants quʹelle reçoit y sont placés par eux ou par<br />

les Sœurs <strong>de</strong> Charité; tous ceux qui en sont les directeurs et les organes viennent <strong>de</strong>s<br />

Conférences et leur restent attachés. Cʹest là que sont formés les sujets qui doivent <strong>de</strong>sser‐<br />

vir les maisons <strong>de</strong> patronage; 12 dʹentre eux sont déjà consacrés à ces emplois, tant à Paris<br />

quʹà Grenelle et à Amiens.<br />

La maison dʹorphelins a, en outre, un petit noviciat <strong>de</strong> jeunes gens <strong>de</strong> 15 à 18 ans,<br />

quʹelle prépare <strong>de</strong> longue main pour les mêmes services; ils sont au nombre <strong>de</strong> 20 en ce<br />

moment.<br />

La maison dʹArras a aussi une petite phalange quʹelle commence à former et qui<br />

suivra la même voie.<br />

Nos confrères penseront, jʹen ai lʹespérance, que ces efforts doivent être encouragés<br />

et ils ne refuseront pas lʹoccasion que leur donne la fête <strong>de</strong>s Vacances <strong>de</strong> prêter un peu<br />

dʹappui à lʹensemble <strong>de</strong> ces œuvres.<br />

Croyez, mon bien bon ami, à tous mes sentiments <strong>de</strong> constante affection en N.S.<br />

Votre dévoué ami et frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

La bataille <strong>de</strong> Malakoff,<br />

le 8 septembre 1855, en Crimée<br />

612


483 à M. Caille<br />

MLP. insiste pour quʹAmiens lui envoie sans tar<strong>de</strong>r la date <strong>de</strong> la bénédiction <strong>de</strong> sa maison.<br />

Vaugirard, 4 août 1857<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je vous prie <strong>de</strong> mʹécrire ou <strong>de</strong> me faire écrire tout <strong>de</strong> suite si la bénédiction <strong>de</strong> notre<br />

Maison dʹAmiens se fera définitivement le jour <strong>de</strong> lʹAssomption, 15 <strong>de</strong> ce mois. Comme je<br />

vous lʹai dit, M. Decaux, Vice‐Prési<strong>de</strong>nt Général, est toujours dans lʹintention dʹy venir, si<br />

elle se fait ce jour‐là, mais lui et moi avons absolument besoin <strong>de</strong> savoir à quoi nous en te‐<br />

nir. Jʹai promis à M. Halluin que jʹirais à Arras après la distribution <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Vaugi‐<br />

rard qui a lieu <strong>de</strong>main 5. M. Maignen doit venir mʹy rejoindre, mais vous comprenez ai‐<br />

sément que, pour régler nos dispositions, nous avons besoin dʹêtre informés du jour <strong>de</strong> vo‐<br />

tre solennité. Jʹattends donc <strong>de</strong> vous, mon bon ami, un mot <strong>de</strong> réponse précis, poste pour<br />

poste, sʹil vous est possible.<br />

Tout va autour <strong>de</strong> nous comme <strong>de</strong> coutume, le bon Dieu ne nous retire pas sa di‐<br />

vine protection; jʹespère que vous êtes aussi tous en bonne condition; je regrette bien <strong>de</strong> ne<br />

recevoir aucune nouvelle <strong>de</strong> vous; nos <strong>de</strong>ux frères Marcaire et Guillot ne nous donnent<br />

pas signe <strong>de</strong> vie, je crois quʹil serait mieux quʹils nous écrivissent <strong>de</strong> temps et temps.<br />

Jʹespère les voir bientôt ainsi que vous; jusque là, je vous embrasse tous en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Bon souvenir <strong>de</strong> respect et dʹaffection à M. Mangot et à tous nos amis.<br />

484 à M. Paillé286 MLP. lʹinforme <strong>de</strong> son départ pour Amiens et Arras. Démarches à effectuer pendant son absence. Préparation <strong>de</strong><br />

la fête <strong>de</strong>s vacances du dimanche 23 août.<br />

Vaugirard, 7 août 1857<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Je pars seul pour Amiens et Arras; je désire que le f. Maignen vienne, comme cʹest<br />

convenu entre nous, me rejoindre lundi prochain à Arras.<br />

Je vous prie dʹaller <strong>de</strong> nouveau chez Mme Rullier, savoir <strong>de</strong> ma part <strong>de</strong> ses nouvelles<br />

et lui faire connaître que mon voyage mʹempêche seul dʹaller moi‐même la voir, que je le<br />

ferai aussitôt après mon retour.<br />

Jʹemporte <strong>avec</strong> moi le moins <strong>de</strong> bagages que je puis; M. Maignen <strong>de</strong>vra apporter<br />

<strong>avec</strong> lui un paquet <strong>de</strong> cuir que M. Halluin a chargé M. Vasseur <strong>de</strong> lui acheter.<br />

Faites‐moi le plaisir <strong>de</strong> remettre aussi au f. Maignen six petits livres <strong>de</strong> piété un peu<br />

aimables, six ou huit petites croix à 50 centimes pièce, ou à peu près, et quelques jolies<br />

images, si vous les avez sous la main; jʹen ai déjà quelques‐unes; ces divers objets me sont<br />

vraiment nécessaires.<br />

Je vous recomman<strong>de</strong>, comme <strong>de</strong>rnière et bien urgente affaire, <strong>de</strong> donner, si vous le<br />

pouvez, un peu dʹimpulsion au placement <strong>de</strong>s billets pour la fête. Chez nous, personne ne<br />

suit cette entreprise, pourtant dʹun grand intérêt pour nous; voyez sʹil y a quelque chose<br />

286 En haut <strong>de</strong> la lettre, à gauche, figure la mention soulignée: pressé.<br />

613


encore à faire du côté <strong>de</strong>s Conférences, ne négligez rien près <strong>de</strong> nos amis; enfin, tâchez <strong>de</strong><br />

donner un peu <strong>de</strong> flamme à tout le mon<strong>de</strong>.<br />

Jʹembrasse vous et nos frères bien affectueusement; priez ensemble et particulière‐<br />

ment pour que je sois bien dans la main <strong>de</strong> Dieu, durant mon voyage, afin quʹil ne soit pas<br />

sans fruit.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Ci‐joint une recommandation bien instante <strong>de</strong> M. Caille; il faudrait aussi que le<br />

f. Maignen apportât les numéros du bulletin <strong>de</strong>mandé pour M. Desjardins.<br />

485 à M. Halluin<br />

MLP. sʹinquiète <strong>de</strong> la santé <strong>de</strong> M. Halluin. Nouvelles <strong>de</strong>s Œuvres. Il est plein dʹespérance pour lʹavenir <strong>de</strong> lʹIns‐<br />

titut.<br />

Vaugirard, 26 août 1857<br />

Bien cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vois <strong>avec</strong> peine, par votre petite lettre à notre f. Georges, que lʹirritation <strong>de</strong> votre<br />

poitrine persiste, même après les quelques jours <strong>de</strong> repos que vous avez pu prendre à Bou‐<br />

logne. Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> bien instamment <strong>de</strong> faire tout ce qui dépendra <strong>de</strong> vous pour vous<br />

débarrasser au plus tôt <strong>de</strong> ce malaise. Pour vous‐même, vous nʹauriez sans doute guère<br />

dʹinclination à vous soigner, mais vous le ferez pour ménager un instrument <strong>de</strong> notre di‐<br />

vin Maître et aussi un <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> la petite famille à laquelle vous vous êtes cordiale‐<br />

ment attaché. Tous ceux qui la composent vous pressent <strong>avec</strong> moi <strong>de</strong> ne rien négliger pour<br />

lui gar<strong>de</strong>r une santé et <strong>de</strong>s forces qui lui sont précieuses et quʹelle a gran<strong>de</strong>ment à cœur <strong>de</strong><br />

conserver.<br />

Jʹai bien réjoui tous mes frères, à mon retour ici, en leur disant les bonnes impres‐<br />

sions que je rapportais après ma visite à nos chers ff. dʹArras et dʹAmiens; le dévouement<br />

<strong>de</strong> tous a paru sʹen accroître et jʹai vu <strong>avec</strong> joie que, <strong>de</strong> plus en plus, on sʹaccoutumait à<br />

confondre dans une même affection les membres <strong>de</strong> la famille, à quelque maison quʹils<br />

appartiennent.<br />

Nous restons disposés à vous donner pour vos classes <strong>de</strong>ux jeunes postulants, si<br />

vous pensez quʹils vous soient utiles. Notre bon abbé Lantiez pourrait vous les amener<br />

dans les premiers jours <strong>de</strong> septembre, si vous le désirez définitivement. Je crois quʹils se ti‐<br />

reront bien <strong>de</strong> leurs emplois sʹils sont un peu suivis et soutenus. Jʹattendrai votre réponse<br />

avant <strong>de</strong> faire aucune disposition pour leur départ.<br />

Nous nʹavons rien <strong>de</strong> nouveau ici, sinon lʹentrée dʹun nouveau frère <strong>de</strong>stiné aux ate‐<br />

liers ou aux soins dʹintérieur; cʹest, je crois, un bon et soli<strong>de</strong> sujet. Un autre, qui sera propre<br />

aux œuvres, doit entrer aussi après la retraite. Je ne sais pas encore précisément lʹépoque<br />

<strong>de</strong> cette retraite. Jʹaurai soin <strong>de</strong> vous lʹindiquer dès que je pourrai le faire.<br />

Jʹapprendrai volontiers le résultat <strong>de</strong>s réflexions quʹa dû faire M. lʹabbé Daviron; je<br />

pense que votre prochaine lettre mʹen pourra informer.<br />

Adieu, bien cher Monsieur lʹabbé; remercions ensemble le Seigneur qui, à travers<br />

nos travaux et difficultés <strong>de</strong> chaque jour, gouverne notre chère œuvre, la préserve <strong>de</strong>s<br />

dangers et peu à peu la fait progresser vers une assiette ferme et stable. Bien <strong>de</strong>s points <strong>de</strong><br />

614


détail peuvent être encore à régler, mais, ce qui est lʹessentiel <strong>de</strong> tout dans les œuvres <strong>de</strong><br />

Dieu, lʹesprit <strong>de</strong> foi et <strong>de</strong> vrai dévouement se trouve réellement au fond <strong>de</strong> la petite Com‐<br />

munauté et <strong>de</strong> toutes ses entreprises. Ayons donc bonne espérance, le Seigneur est <strong>avec</strong><br />

nous.<br />

Je vous embrasse bien affectueusement ainsi que tous nos frères et je suis <strong>avec</strong> un<br />

entier dévouement, en J. et M.,<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

486 à M. Halluin<br />

Mouvement <strong>de</strong> personnel. En général, la présence dʹune personne étrangère dans une communauté est cause <strong>de</strong><br />

gêne, mais la charité <strong>de</strong>man<strong>de</strong> quelque ménagement.<br />

Vaugirard, 29 août 1857<br />

Bien cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Jʹai bien examiné <strong>avec</strong> nos ff. Myionnet et Lantiez les diverses observations conte‐<br />

nues dans vos <strong>de</strong>ux lettres, et jʹai cherché <strong>avec</strong> eux les moyens les plus sûrs <strong>de</strong> bien pour‐<br />

voir aux services <strong>de</strong> notre chère maison dʹArras. Il mʹa paru, ainsi quʹà eux, que le mieux<br />

était <strong>de</strong> ne pas changer, quant à présent, lʹétat <strong>de</strong>s choses et <strong>de</strong> faire marcher vos classes<br />

<strong>avec</strong> les ff. Loquet, Bassery, Michel et le jeune Fontaine. Les persévérants que nous eus‐<br />

sions pu vous donner eussent valu moins, sans doute, que les personnes dont vous dispo‐<br />

sez présentement et nʹeussent pu se passer, dans les premiers temps surtout, dʹêtre soute‐<br />

nus et dirigés.<br />

Sʹil arrivait que cet hiver, pour cause <strong>de</strong> maladie ou empêchement <strong>de</strong> quelquʹun <strong>de</strong><br />

vos frères, vous fussiez en embarras, nos <strong>de</strong>ux jeunes gens seraient là tout prêts à vous ar‐<br />

river au premier signal, mais présentement, ils ne vous seraient vraiment pas utiles et vous<br />

marcherez mieux sans eux.<br />

Quant à M. Daviron, je suis convaincu, en général, que la présence dʹun étranger<br />

dans une communauté est une cause <strong>de</strong> gêne qui nuit à lʹunité <strong>de</strong> direction et à lʹensemble<br />

régulier <strong>de</strong>s mouvements. Je crois aussi quʹinévitablement M. Daviron verra <strong>de</strong> lui‐même,<br />

dans un temps qui ne peut être fort éloigné, la position fausse quʹil se veut gar<strong>de</strong>r. Mais je<br />

ne me sens pas dans la disposition <strong>de</strong> lʹéloigner contre son gré, et jʹaime mieux attendre<br />

que la force <strong>de</strong>s choses lui fasse prendre une détermination. Jʹespère que le petit malaise<br />

causé par sa présence ne sera pas une difficulté sérieuse pour vous ni pour vos frères, et<br />

que le Dieu <strong>de</strong> charité et <strong>de</strong> mansuétu<strong>de</strong> ne condamnera point les ménagements que nous<br />

croyons <strong>de</strong>voir admettre.<br />

Nous ne voyons pas, tant que nos ateliers ne sont pas organisés, quel emploi nous<br />

donnerions en ce moment au f. Bassery ici; nous craignons aussi que lʹair vif <strong>de</strong> Vaugirard<br />

ne renouvelle lʹirritation <strong>de</strong> poitrine dont il est presque débarrassé. Nous souhaitons donc<br />

temporiser pour son rappel parmi nous; mais, si quelque chose vient à changer dans les<br />

dispositions <strong>de</strong> la maison ou du personnel, nous aurons soin dʹen conférer et dʹy aviser <strong>de</strong><br />

concert <strong>avec</strong> vous.<br />

Lʹajournement <strong>de</strong> lʹenvoi <strong>de</strong>s persévérants nous avait fait penser quʹil nʹy avait plus<br />

guère <strong>de</strong> motif au voyage <strong>de</strong> M. Lantiez à Arras; mais, sʹil peut être chargé <strong>de</strong> représenter<br />

notre maison à la bénédiction <strong>de</strong> la chapelle dʹAmiens, ce pourrait être un moyen <strong>de</strong> tout<br />

615


concilier. Jʹinclinerai dʹautant plus à cet arrangement que vous mʹy faites entrevoir un<br />

moyen <strong>de</strong> vous procurer quelque repos. Je souhaite bien, très cher Monsieur lʹabbé, que<br />

vous puissiez remettre votre santé avant lʹhiver et retrouver les forces dont vous avez be‐<br />

soin. Comptez bien, du reste, quʹau défaut <strong>de</strong>s secours humains lʹassistance divine ne vous<br />

manquera pas. Le Seigneur est <strong>avec</strong> vous, son esprit est visiblement dans votre maison, Il<br />

veillera à tous ses besoins et vous donnera au jour le jour son tout puissant secours. Nous<br />

le prions bien <strong>avec</strong> vous et pour vous. Invoquez‐Le aussi, nous vous le <strong>de</strong>mandons, pour<br />

la famille qui vous est si cordialement unie.<br />

Jʹembrasse affectueusement, dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M., tous nos frères et<br />

vous en particulier.<br />

Votre ami et Père tout dévoué<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

487 à M. Paillé<br />

A Duclair pour quelques jours, MLP. déconseille au père Hello <strong>de</strong> venir lʹy rejoindre.<br />

Duclair, 2 septembre 1857<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Il nʹy aurait nulle difficulté à ce que notre bon abbé Hello nous vînt rejoindre ici où<br />

il serait reçu bien cordialement; mais il me semble que ce nʹest guère la peine <strong>de</strong> faire un si<br />

long voyage pour un si court séjour; il paraît impossible que notre cher abbé arrive avant<br />

jeudi au soir ou vendredi matin; nous repartons lundi matin, ce serait donc à peine trois<br />

jours pleins <strong>de</strong> repos. Voyez ensemble ce que vous en pensez; je trouve pour moi que cʹest<br />

à peine le temps <strong>de</strong> respirer.<br />

Adieu, chers amis; à bientôt.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

488 à M. Paillé<br />

Institution <strong>de</strong> la fête patronale à Nazareth. Ne pas multiplier les fêtes. Faire tout, simplement et sans bouleverser<br />

la communauté et les Œuvres.<br />

Duclair, 3 septembre 1857<br />

Bien cher ami et fils en N. S.,<br />

Jʹapprouve vos bonnes pensées pour la fête <strong>de</strong> la Nativité <strong>de</strong> la T. S te Vierge, notre<br />

Mère. A Dieu ne plaise que je fasse aucune objection contre une manifestation <strong>de</strong> joie à<br />

lʹoccasion <strong>de</strong> ce beau jour, et contre une disposition qui donnerait quelque épanouisse‐<br />

ment aux pauvres vieillards, aux orphelins, aux frères qui se sont dévoués à les servir. Je<br />

crois quʹil est bien que la maison <strong>de</strong> Nazareth ait quelque fête propre, et quʹon nʹen pour‐<br />

rait faire <strong>de</strong> plus aimable quʹen réunissant les frères et confrères, les pauvres et les orphe‐<br />

lins.<br />

La question <strong>de</strong>s exclus ne me semble point une difficulté; le mouvement <strong>de</strong> la mai‐<br />

son ne peut être entravé par eux; on ne doit pas les inviter, à moins que le Conseil ne re‐<br />

vienne sur sa décision; cʹest à lui à en juger.<br />

616


Je ne vois au projet quʹune seule objection, cʹest la multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> fêtes que nous<br />

avons déjà et les dérangements sans nombre quʹelles causent à lʹordre <strong>de</strong> la communauté<br />

et à lʹactivité <strong>de</strong>s œuvres.<br />

Il me semble que la grandʹmesse ne <strong>de</strong>vrait pas avoir lieu plus tard que 8h.<br />

Je crois aussi quʹil faudrait que tout fût simple et sans bouleversement.<br />

Adieu, la poste part.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

489 à M. Caille<br />

MLP. délègue le père Lantiez à la bénédiction <strong>de</strong> la maison dʹAmiens.<br />

Vaugirard, 8 septembre 1857<br />

Fête <strong>de</strong> la Nativité <strong>de</strong> la Ste Vierge<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹarrive hier <strong>de</strong> Normandie, trop fatigué <strong>de</strong> ce voyage pour quʹil me soit possible <strong>de</strong><br />

repartir immédiatement pour Amiens, mais notre bon abbé Lantiez nous représentera à la<br />

bénédiction <strong>de</strong> notre chère maison dʹAmiens et recevra pour la Communauté toutes les<br />

grâces que le bon Maître va répandre en cette occasion sur ses serviteurs et sur leurs œu‐<br />

vres. Nous y assisterons tous par la pensée et nos cœurs prieront <strong>avec</strong> les vôtres pour que<br />

lʹEsprit du Seigneur daigne pénétrer nos âmes et produire en nous et pour nos humbles<br />

travaux dʹabondants fruits <strong>de</strong> salut. Je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> en particulier pour vous, mon bon ami,<br />

les forces et la charité nécessaires pour subvenir à tous les soins dont vous êtes chargé; jʹai<br />

la confiance que le bon Maître, voyant la pesanteur du far<strong>de</strong>au, daignera le porter <strong>avec</strong><br />

vous. Ayons bonne espérance, attendons beaucoup <strong>de</strong> Dieu et, sans témérité comme sans<br />

mollesse, tâchons <strong>de</strong> correspondre à ses adorables <strong>de</strong>sseins.<br />

Je veillerai à ce que les ff. Maignen et <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] sʹoccupent active‐<br />

ment <strong>de</strong> vos commissions et vous donnent prompte réponse.<br />

Jʹécris quelques mots au f. Guillot; son bon esprit et sa foi vraie et soli<strong>de</strong> me donnent<br />

bonne espérance quʹil saura trouver en Dieu son appui.<br />

Adieu, mon bon ami, croyez en ma tendre et profon<strong>de</strong> affection en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je vous serai obligé <strong>de</strong> me faire parvenir lʹétoffe dont jʹai besoin pour une<br />

houppelan<strong>de</strong> pour moi (<strong>de</strong>ssus et doublure) et pour une soutane <strong>de</strong>stinée à M. Roussel.<br />

490 à M. Guillot<br />

Ne se laisser abattre ni par lʹabsence <strong>de</strong> consolations sensibles, ni par lʹisolement: la vie <strong>de</strong> travail, <strong>de</strong> prière et <strong>de</strong><br />

sacrifice nʹen est que plus méritoire aux yeux <strong>de</strong> Dieu. ʺLe vent qui agite la cime <strong>de</strong>s arbres enfonce plus profon‐<br />

dément leurs racinesʺ.<br />

Vaugirard, 8 septembre [1857]<br />

Fête <strong>de</strong> la Nativité<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Je vous écris <strong>de</strong>ux mots seulement; notre bon abbé Lantiez, qui va nous représenter<br />

à la bénédiction <strong>de</strong> la maison dʹAmiens, vous donnera plus au long <strong>de</strong> nos nouvelles et<br />

nous rapportera <strong>de</strong>s vôtres.<br />

617


Le contenu <strong>de</strong> votre lettre ne mʹétonne point, bien cher ami; vous avez parfois quel‐<br />

ques langueurs spirituelles, et <strong>de</strong>s engourdissements dʹesprit qui vous empêchent <strong>de</strong> sen‐<br />

tir le mouvement <strong>de</strong> votre âme vers Dieu et lʹaction du Seigneur en vous. Ces états, bien<br />

cher enfant, nʹont rien dʹalarmant; Dieu les permet pour nous faire sentir notre néant, no‐<br />

tre impuissance à rien faire <strong>de</strong> nous‐mêmes; mais il ne faut ni nous en troubler ni nous en<br />

décourager; nous <strong>de</strong>vons alors nous tourner simplement vers le divin Maître par un acte<br />

<strong>de</strong> confiance en sa bonté miséricordieuse, nous souvenant que le Sauveur Jésus prie et mé‐<br />

rite pour ceux qui ne peuvent prier et mériter par eux‐mêmes, atten<strong>de</strong>nt tout <strong>de</strong> Lui et re‐<br />

mettent leurs intérêts entre ses mains. Ayez donc bonne confiance, cher ami; vous travail‐<br />

lez pour Dieu, vous obéissez à ceux qui Le remplacent près <strong>de</strong> vous, vous veillez en toute<br />

charité sur les pauvres enfants quʹIl vous a confiés, vous <strong>de</strong>meurez fidèle aux vœux par<br />

lesquels vous vous êtes dévoué et consacré à son service, soyez bien assuré (et je vous le<br />

proteste en son nom) que vous ne pouvez quʹêtre ainsi agréable à ses yeux et que, sʹIl ne<br />

vous paie pas en consolations et douceurs sensibles, cʹest quʹIl entend vous récompenser<br />

bien mieux par un accroissement <strong>de</strong> force, <strong>de</strong> zèle et <strong>de</strong> courageux dévouement. Tel sera le<br />

fruit <strong>de</strong>s épreuves pénibles que vous traversez, elles seront comme le vent qui, en agitant<br />

la cime <strong>de</strong>s arbres, enfonce plus profondément leurs racines.<br />

Ne vous contristez point trop non plus si les absences fréquentes et les nombreuses<br />

affaires <strong>de</strong> notre cher f. Caille ne vous laissent pas le loisir nécessaire pour vous épancher<br />

en lui. Vous êtes bien assuré que son cœur sʹentend <strong>avec</strong> le vôtre, quʹil vous aime tendre‐<br />

ment et quʹil apprécie vos soins et votre bon vouloir; atten<strong>de</strong>z donc patiemment <strong>de</strong>s temps<br />

que le Seigneur ménagera certainement plus tard et où plus dʹépanchement et <strong>de</strong> vie in‐<br />

time vous seront permis. Jusque là, épanchez‐vous en Dieu, en Marie, dont les Cœurs sont<br />

toujours ouverts et recèlent tous les trésors <strong>de</strong>s douces effusions et <strong>de</strong>s saintes consola‐<br />

tions.<br />

Je vous annoncerai bientôt le temps <strong>de</strong> la retraite; jʹespère bien que rien ne sʹoppose‐<br />

ra à ce que vous puissiez y participer.<br />

Embrassez pour moi notre cher f. Marcaire et aussi notre bon p. Caille, aimez‐vous<br />

bien tous les trois; quand <strong>de</strong>ux ou trois sont unis au nom <strong>de</strong> Dieu, le divin Jésus est au mi‐<br />

lieu dʹeux.<br />

Je ne vois nul inconvénient à ce que vous ayez toute ouverture <strong>avec</strong> M. Mangot.<br />

Adieu, bien cher enfant, croyez à toute la tendre affection <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Dites à notre f. Jules [Marcaire] que je nʹoublie point sa bonne mère; elle mʹa<br />

écrit ces jours‐ci quʹelle allait me venir voir. Offrez mes respects à MM. Mangot et Deberly.<br />

491 à M. Caille<br />

Avis <strong>de</strong> MLP. sur le groupe <strong>de</strong> ND. <strong>de</strong> la Salette <strong>de</strong>stiné à Vaugirard. Il réitère sa défense dʹaugmenter le nombre<br />

<strong>de</strong>s internes à Amiens. Projet dʹunion <strong>avec</strong> les ateliers <strong>de</strong> lʹabbé Choyer dʹAngers. subsi<strong>de</strong>s à la mère du frère<br />

Marcaire.<br />

Vaugirard, 19 septembre 1857<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹétais un peu contristé dʹêtre resté si longtemps sans nouvelles <strong>de</strong> votre côté, mais<br />

jʹen comprenais bien les raisons, car je savais que vous aviez coup sur coup votre bénédic‐<br />

618


tion <strong>de</strong> maison, lʹexposition, la loterie, etc.; tout cela joint à vos charges ordinaires <strong>de</strong>vait<br />

vous rendre la vie bien ru<strong>de</strong> et ne vous laissait guère le temps <strong>de</strong> correspondre au <strong>de</strong>hors.<br />

Je vous remercie du <strong>de</strong>ssin du groupe <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette; il répond bien à nos<br />

vues; je reste un peu hésitant toutefois sur ce que nous <strong>de</strong>vons faire; lʹimage que nous dé‐<br />

sirerions avoir <strong>de</strong>vant sans doute trouver place dans une chapelle, il semble que le groupe<br />

<strong>avec</strong> les enfants pourrait ne pas convenir pleinement; la statue <strong>de</strong> la S te Vierge versant <strong>de</strong>s<br />

larmes ou N.D. expiatrice, telle quʹon la prépare présentement à Angers, serait sans doute<br />

mieux acceptée. Espérons que la S te Vierge elle‐même nous dirigera et nous fera connaître<br />

ce qui est le mieux, selon les <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> Dieu, et le plus capable <strong>de</strong> bien édifier les hom‐<br />

mes en les portant à réparer les violations <strong>de</strong> la loi divine.<br />

Je vous remercie aussi <strong>de</strong>s étoffes que vous mʹavez envoyées, elles sont bien telles<br />

que je les souhaitais; je vous prie dʹen retenir le prix sur la pension du jeune Normandie et<br />

<strong>de</strong> mʹenvoyer la facture; je tiens beaucoup à ce que cette petite affaire soit réglée ainsi, au‐<br />

trement, nous nʹaurions nulle liberté pour vous faire les <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s nécessaires; dites‐moi<br />

donc simplement, mon bon ami, le prix <strong>de</strong>s étoffes et retenez‐le sur la somme que vous<br />

toucherez pour le jeune Normandie.<br />

Je comprends bien que vous ayez peine à refuser lʹadmission <strong>de</strong> nouveaux enfants<br />

internes chez vous, mais vous savez combien sont graves les raisons qui nous ont décidés<br />

à en limiter le nombre; si, nonobstant ce que nous avons réglé, vous en recevez au‐<strong>de</strong>là du<br />

chiffre marqué, dʹun en un, vous vous trouverez débordé; je crois donc que vous ne <strong>de</strong>vez<br />

pas en recevoir <strong>de</strong> nouveaux; je vous y invite bien instamment.<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> joie que tout va bien dans votre petit intérieur, je ne souhaite rien<br />

tant que dʹy voir la paix et la plus intime charité; les quelques observations que je vous ai<br />

faites à lʹoccasion nʹétaient point un blâme, tant sʹen faut, mais tendaient seulement à vous<br />

rapprocher le plus possible <strong>de</strong> vos frères en ouvrant leur cœur et le vôtre à une mutuelle<br />

confiance et à une parfaite unité <strong>de</strong> vues. Je sais tout ce quʹil y a <strong>de</strong> cordiale volonté en<br />

vous pour tout bien, je suis donc bien tranquille, le Seigneur vous assistera et continuera<br />

<strong>de</strong> bénir vous et tout ce qui vous entoure.<br />

Nous nʹavons rien <strong>de</strong> nouveau ici, tous les frères vont bien, le jeune frère admis à<br />

lʹépoque <strong>de</strong> la retraite, M. Emmanuel Legallais, se soutient bien et est un sujet <strong>de</strong> bonne<br />

espérance.<br />

Ma santé nʹest pas plus mauvaise, je vais essayer <strong>de</strong> traverser lʹhiver ici, on mʹa fait<br />

un petit oratoire pour que jʹaie la messe sans sortir le matin.<br />

Lʹaffaire dʹAngers, dont je vous ai dit quelques mots, a un peu avancé sans être<br />

pleinement terminée. Il sʹagirait <strong>de</strong> faire passer à la communauté les ateliers dʹart religieux<br />

fondés par M. lʹabbé Choyer, et dʹétablir chez nous, à Vaugirard, une petite succursale qui<br />

occuperait nos enfants persévérants. Nous avons commencé ces jours‐ci, à cette fin, un pe‐<br />

tit atelier <strong>de</strong> ciselure qui marche déjà assez bien. Je vous reparlerai <strong>de</strong> tout cela plus au<br />

long, si la chose tourne définitivement à une conclusion affirmative. Jʹespère que nous ar‐<br />

riverions ainsi à soutenir lʹorphelinat et le petit noviciat <strong>de</strong>s persévérants par leurs res‐<br />

sources propres, ce serait un point bien essentiel.<br />

Adieu, mon bien bon ami, mettons cela et tout le reste dans les mains du Seigneur,<br />

sans autre vue que dʹaccomplir son adorable volonté.<br />

Jʹembrasse vous et vos frères bien affectueusement<br />

Votre ami et Père en J. et M. Le <strong>Prevost</strong><br />

619


Je pense que vous ne voyez pas <strong>de</strong> difficulté à ajouter aux 120f que nous accordons<br />

à M me Marcaire 60f pour compléter le prix <strong>de</strong> son logement à Paris; <strong>avec</strong> cela, elle me dit<br />

quʹelle sera contente et à lʹabri du besoin.<br />

Respects à M. lʹabbé Deberly.<br />

492 <strong>de</strong> M. Vasseur à M. Caille<br />

P.S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Vœux <strong>de</strong> fête au frère Florent Caille. Nouvelles <strong>de</strong> M me Marcaire.<br />

Vaugirard, 21 septembre 1857<br />

Monsieur et vénéré frère en N.S.,<br />

Je voudrais bien, pour le jour <strong>de</strong> votre fête, trouver <strong>de</strong>s termes qui exprimassent les senti‐<br />

ments <strong>de</strong> tendre affection et <strong>de</strong> profond respect dont mon cœur est animé pour celui qui a été mon<br />

ange tutélaire dans le temps où jʹétais exposé à la fureur <strong>de</strong>s loups.<br />

Ah! heureux, mille fois heureux <strong>de</strong> vous avoir eu pour gui<strong>de</strong> et pour protecteur; sans vous,<br />

bien‐aimé frère, peut‐être nʹaurais‐je jamais goûté les douces joies dont mon âme est enivrée cha‐<br />

que jour, soyez donc béni à jamais! Mais que vous rendrai‐je pour tant <strong>de</strong> bienfaits? Tout ce que je<br />

puis, cʹest <strong>de</strong> prier pour vous sans cesse, je lʹai fait et je le ferai à lʹavenir <strong>de</strong> tout mon cœur; mais le<br />

jour <strong>de</strong> votre fête, je redoublerai <strong>de</strong> ferveur, afin dʹobtenir <strong>de</strong> votre saint Patron quʹil vous accor<strong>de</strong><br />

toutes les grâces qui vous sont nécessaires. Je lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> aussi une belle couronne pour le ciel, en<br />

récompense <strong>de</strong>s travaux et fatigues innombrables que vous vous imposez chaque jour.<br />

Je vous embrasse bien affectueusement et me dis pour la vie<br />

Votre enfant et frère en N.S.<br />

Alph. Vasseur<br />

Saint Florent, priez pour nous.<br />

Bien cher ami et fils,<br />

Je vous exprime aussi nos vœux pour vous à lʹoccasion <strong>de</strong> votre fête; toute notre pe‐<br />

tite famille, qui vous est profondément dévouée, sʹunit à moi et vous assure quʹelle appel‐<br />

lera sur vous et sur vos travaux les bénédictions <strong>de</strong> Dieu par ses prières les plus ar<strong>de</strong>ntes.<br />

Nous sentons tous combien nous sommes peu forts pour nous assister les uns les autres et,<br />

ne trouvant rien dans nos moyens propres qui répon<strong>de</strong> à nos désirs, nous recourons au<br />

Dieu puissant et miséricordieux afin quʹIl nous prête sa force et les trésors <strong>de</strong> sa divine<br />

charité. Puisse‐t‐Il les répandre selon nos vœux sur vous, sur vos frères et sur vos petits<br />

enfants.<br />

Adieu, mon bien bon ami, je vous embrasse tendrement ainsi que nos frères.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

4<br />

La mère <strong>de</strong> notre f. Marcaire va bien, elle est contente; je lui ai promis que nous lui<br />

donnerions ici 120f annuellement pour son loyer et que vous y ajouteriez 60f pour le par‐<br />

faire; <strong>de</strong> cette sorte, il lui restera chaque année 360f pour vivre, elle répond que cela lui suf‐<br />

fira, elle mʹa paru toute heureuse <strong>de</strong> cet arrangement.<br />

La retraite commencera, je crois, le dimanche 4 octobre.<br />

620


493 à M. Halluin<br />

Retraite <strong>de</strong> communauté et neuvaine préparatoire. MLP. invite M. Halluin et les frères dʹArras à y participer.<br />

Nouvelles <strong>de</strong>s Œuvres. A Vaugirard, il faudra veiller, dans lʹavenir, à moins <strong>de</strong> dérangements.<br />

Vaugirard, 28 septembre 1857<br />

Bien cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Notre retraite commencera définitivement dimanche prochain 4 octobre, le soir, et<br />

se clora le vendredi matin. Elle nous sera donnée par M. lʹabbé Garbominy, homme dʹune<br />

gran<strong>de</strong> charité, très saint prêtre qui a donné sa vie et sa santé pour le service <strong>de</strong> Dieu. Sa<br />

parole respire le zèle et le dévouement. Jʹespère que nous nous préparions par la prière<br />

aux exercices <strong>de</strong> la retraite, et nous a invités à faire à cette intention une neuvaine que nous<br />

avons commencée samedi. Elle se compose du Veni Creator, <strong>avec</strong> les invocations Cor Jesu et<br />

Cor Mariæ, omnes sancti Angeli et Archangeli, omnes sancti et sanctæ cæli, orate etc.<br />

Vous ne pourrez, sans doute, faire suivre entièrement à nos ff. dʹArras cette neu‐<br />

vaine, mais ils en pourront toujours faire une partie, et le bon Dieu verra pour le reste leur<br />

intention.<br />

Je souhaite bien, cher Monsieur lʹabbé que vous puissiez être <strong>de</strong>s nôtres pour cette<br />

retraite; elle vous servira <strong>de</strong> repos et vous rapprochera <strong>de</strong> nous durant quelques instants.<br />

Je vous serai bien reconnaissant <strong>de</strong> me dire combien <strong>de</strong> nos frères pourront vous ac‐<br />

compagner, afin que nous disposions la place <strong>de</strong> chacun.<br />

Nous allons assez bien ici, le bon Maître, sachant notre faiblesse, nous épargne les<br />

gran<strong>de</strong>s épreuves; nous tâchons que le travail nous serve <strong>de</strong> pénitence et <strong>de</strong> mortification.<br />

Nous tendons en ce moment à régler les choses <strong>de</strong> manière que tous aient une vie sérieu‐<br />

sement occupée. Nous avons eu beaucoup <strong>de</strong> dérangements; nous veillerons à ce quʹils<br />

soient moins fréquents à lʹavenir. Nous organisons définitivement un petit atelier <strong>de</strong> cise‐<br />

leurs pour ceux <strong>de</strong> nos persévérants qui pourront convenir dans cette sorte <strong>de</strong> travail.<br />

Adieu, bien cher Monsieur lʹabbé, ce sera une fête pour nous tous <strong>de</strong> vous voir arri‐<br />

ver <strong>avec</strong> les ff. dʹArras; nous dirons <strong>de</strong> plein cœur notre Ecce quam bonum, après votre ve‐<br />

nue.<br />

Le f. Georges vous prie, <strong>avec</strong> instance, <strong>de</strong> lui apporter son Atlas. Je crois quʹil dési‐<br />

rait encore quelque autre chose, je lʹoublie présentement.<br />

Croyez, bien cher Monsieur lʹabbé, à tous mes sentiments dʹaffectueux dévouement.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

494 à M. Caille<br />

La retraite <strong>de</strong> communauté à Vaugirard. Faire prendre une photo (par daguerréotype) dʹune statue <strong>de</strong> ND. <strong>de</strong> la<br />

Salette.<br />

Vaugirard, 28 septembre 1857<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Notre retraite commence définitivement dimanche au soir, 4 octobre, et finira le<br />

vendredi matin. Elle sera donnée par M. lʹabbé Garbominy, que nous avons choisi à cause<br />

<strong>de</strong> son zèle extrême et <strong>de</strong> son ar<strong>de</strong>nt dévouement. Cʹest un très saint prêtre qui parle <strong>avec</strong><br />

son cœur; il a donné à nos enfants la retraite <strong>de</strong> première communion; nous avons été si<br />

621


touchés nous‐mêmes <strong>de</strong> ses exhortations que nous nʹavons pas hésité à lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r<br />

dʹédifier les maîtres après avoir édifié leurs enfants.<br />

Je nʹespère point que vous puissiez prendre part à cette retraite, mais vous pourrez,<br />

je pense, y envoyer le f. Henry [Guillot] à qui elle fera du bien.<br />

Renouvelez à M. Deberly lʹinvitation que je lui ai faite <strong>de</strong> se joindre à nous pour ces<br />

exercices <strong>de</strong> retraite, il nous ferait ainsi une petite visite et son<strong>de</strong>rait ses dispositions pour<br />

lʹavenir.<br />

Nous allons assez bien ici, tout le mon<strong>de</strong> vous assure <strong>de</strong> ses affectueux sentiments<br />

et embrasse vous et vos frères.<br />

Votre affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Nous pensons un peu, et même sérieusement, à nous procurer un groupe <strong>de</strong> N.D.<br />

<strong>de</strong> la Salette pareil au vôtre; ne pourriez‐vous, pour mʹen donner une idée, en faire pren‐<br />

dre une image par le daguerréotype et me lʹenvoyer par le f. Henry, <strong>avec</strong> lʹindication <strong>de</strong> la<br />

hauteur et <strong>de</strong> la largeur du groupe? Ces renseignements serviraient sans doute à nous<br />

déci<strong>de</strong>r positivement.<br />

Envoyez‐moi aussi, par le f. Henry, les étoffes que je vous avais <strong>de</strong>mandées en es‐<br />

caut soli<strong>de</strong> pour une houppelan<strong>de</strong> et pour une soutane. La houppelan<strong>de</strong> serait pour moi, il<br />

faudrait y joindre la doublure nécessaire. Il va sans dire que le f. Henry <strong>de</strong>vrait aussi ap‐<br />

porter la facture.<br />

495 à M. Halluin<br />

Formule <strong>de</strong> testament. Un livre <strong>de</strong> lʹabbé Lequette287 . Nouvelles <strong>de</strong>s communautés, et <strong>de</strong> quelques orphelins. Pro‐<br />

jet dʹunion <strong>avec</strong> lʹabbé Choyer. MLP. compte sur M. Halluin pour entretenir <strong>de</strong>s rapports faits <strong>de</strong> franchise et <strong>de</strong><br />

simplicité, gage dʹune collaboration soli<strong>de</strong> et durable.<br />

Vaugirard, 22 octobre 1857<br />

Bien cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie le modèle <strong>de</strong> testament que vous mʹavez <strong>de</strong>mandé, les formes sont<br />

fort simples et seront bien faciles à suivre.<br />

Jʹai appris par notre f. Caille que le f. Carment était momentanément à Amiens, à<br />

cause <strong>de</strong> la santé <strong>de</strong> son père qui paraît être fort gravement mala<strong>de</strong>. Je pense bien que cette<br />

absence a obtenu votre approbation et quʹelle sʹest faite au moment qui vous a paru<br />

convenable. M. Caille me dit que le f. Carment passe la nuit près <strong>de</strong> son père et quʹon a <strong>de</strong>s<br />

inquiétu<strong>de</strong>s sérieuses sur lʹétat du mala<strong>de</strong>. Il est heureusement dans <strong>de</strong> bonnes disposi‐<br />

tions, chrétiennement.<br />

287 L'abbé J.-B. Lequette, futur évêque d'Arras. Il ordonnera prêtre M. <strong>de</strong> Varax, le 25 novembre 1866. Lorsque ce <strong>de</strong>rnier sera nommé<br />

Vicaire général <strong>de</strong> l’Institut, et qu’il effectuera un voyage à Rome en 1874, il obtiendra plusieurs lettres favorables, dont celle<br />

<strong>de</strong> Mgr Lequette : « Cette congrégation, dont le but est la moralisation <strong>de</strong> la classe ouvrière, est on ne plus adaptée aux besoins <strong>de</strong>s<br />

temps actuels, où cette classe est travaillée par tant <strong>de</strong> mauvaises doctrines. Indépendamment <strong>de</strong>s maisons où les Frères exercent<br />

d’une manière plus directe leur action sur les ouvriers, ils ont eu leur gran<strong>de</strong> part dans le mouvement qui a provoqué en ces <strong>de</strong>rnières<br />

années, les Cercles d’Ouvriers, l’Union Catholique ouvrière, les Congrès où ont été traitées les questions concernant cette<br />

classe <strong>de</strong> la société. Mon diocèse en particulier s’est ressenti <strong>de</strong> cette salutaire influence. (Positio, p.365).<br />

622


M. Anatole <strong>de</strong> Ségur 288 a promis dʹexaminer le livre<br />

<strong>de</strong> M. Lequette, il me paraît le trouver bien sérieux. Il<br />

sʹattache lui‐même, dans le livre quʹil compose pour les<br />

soldats, à y mettre les formes les plus attrayantes. M. Paillé<br />

a été chargé par moi <strong>de</strong> voir M. le Curé <strong>de</strong> S t ‐Sulpice et <strong>de</strong><br />

lui laisser une note qui lui rappelle que M. Lequette a déjà<br />

prêché à S t ‐Sulpice et quʹon pourrait compter sur lui à<br />

lʹoccasion.<br />

Je viens <strong>de</strong> recevoir une petite lettre <strong>de</strong> Monsieur<br />

lʹabbé Deberly mʹannonçant son arrivée parmi nous pour<br />

<strong>de</strong>main samedi. Nous lʹaccueillerons <strong>avec</strong> joie pour tout le<br />

temps quʹil voudra bien nous accor<strong>de</strong>r. Il a <strong>de</strong>s qualités<br />

précieuses qui pourraient être bien utiles dans les œuvres;<br />

je doute cependant un peu quʹil se détermine à sʹy donner<br />

entièrement.<br />

Nous nʹavons point reçu jusquʹici <strong>de</strong> nouvelles <strong>de</strong><br />

notre enfant Paul Piard [Baffait, dit Piard]. Je pense quʹil<br />

sʹest déjà bien accoutumé à sa nouvelle position. Lorsquʹil<br />

est entré chez nous, il y a quelques années, il resta<br />

plusieurs jours sans manger tant sa peine était gran<strong>de</strong>.<br />

Mais, aujourdʹhui quʹil a plus dʹâge et <strong>de</strong> raison, jʹespère quʹil aura pris aisément son<br />

aplomb.<br />

288 Cf. infra, lettre 515. Frère <strong>de</strong> Mgr Gaston <strong>de</strong> Ségur. Membre du Conseil central <strong>de</strong> la SSVP, A. <strong>de</strong> Ségur écrivit plusieurs ouvrages<br />

d'histoire militaire. Dans les Martyrs <strong>de</strong> Castelfidardo, qui fait le récit <strong>de</strong> la défaite <strong>de</strong> l'armée pontificale le 18 septembre<br />

1860, il consacre une notice à l'un <strong>de</strong>s neveux du f. Clément Myionnet, Georges Myionnet, tué au cours <strong>de</strong> la bataille.<br />

623


Ferdinand, dont je joins ici une petite lettre, va bien. Nous avons mêlé sa journée <strong>de</strong><br />

travaux <strong>de</strong> couture et <strong>de</strong> travaux actifs, afin <strong>de</strong> le mettre dans <strong>de</strong> bonnes conditions pour<br />

sa santé. Jules va bien également; il est encore jeune dʹesprit, mais la maturité viendra. M.<br />

Lantiez nʹen est pas mécontent.<br />

Notre petit atelier <strong>de</strong> ciselure est en pleine activité et paraît <strong>de</strong>voir bien marcher; ce‐<br />

lui <strong>de</strong> sculpture prend plus <strong>de</strong> consistance. Ceux <strong>de</strong>s cordonniers et <strong>de</strong>s tailleurs se sou‐<br />

tiennent bien. Jʹespère que nous allons, <strong>de</strong> ce côté, faire un pas en avant et poser les bases<br />

dʹun bon avenir.<br />

Lʹaffaire dʹAngers doit se déci<strong>de</strong>r dans le cours <strong>de</strong> novembre. M. lʹabbé Choyer est<br />

toujours dans les meilleures dispositions. Nous laisserons le bon Dieu nous gui<strong>de</strong>r en cette<br />

circonstance comme toujours. Je vous dirai la suite <strong>de</strong> ce projet qui pourrait intéresser<br />

gran<strong>de</strong>ment la Communauté tout entière.<br />

Les occupations du f. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] ne lui laissent plus le loisir <strong>de</strong> faire ré‐<br />

gulièrement lʹextrait du journal <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Vaugirard et <strong>de</strong> vous lʹenvoyer tous les<br />

quinze jours. Jʹai chargé <strong>de</strong> ce soin le f. Paillé, qui pourra ainsi rendre nos communications<br />

habituelles et plus intimes. Nous avons besoin <strong>de</strong> ces rapports fréquents, dʹautant que,<br />

nʹayant pas eu dans le principe <strong>de</strong> vie commune, nous aurons toujours quelque peine à<br />

opérer entre nous cette fusion parfaite quʹon a naturellement quand on a vécu un certain<br />

temps dans la même maison. La charité <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts y suppléera, je lʹespère. Je vous<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>, cher Monsieur lʹabbé, dʹaller toujours <strong>avec</strong> nous en toute franchise et simplicité,<br />

nous disant ce qui pourrait vous contrister ou vous faire ombrage. M. Beaussier mʹa dit<br />

quelques petits scrupules qui vous sont venus sur un ou <strong>de</strong>ux points du règlement. Ils<br />

portent sur <strong>de</strong>s points <strong>de</strong> détail qui pourront aisément être révisés, sʹil y a lieu, après exa‐<br />

men. Lʹessentiel est quʹil nʹy ait point entre nous <strong>de</strong> malentendu, <strong>de</strong> manque <strong>de</strong> confiance<br />

réciproque. Nous nous sommes, pour notre part, donnés à vous en toute et pleine cordiali‐<br />

té. Jʹai la conviction quʹil en est <strong>de</strong> même <strong>de</strong> votre côté. Cette parfaite assurance nous est<br />

nécessaire <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts, autrement nous ne poserions rien <strong>de</strong> soli<strong>de</strong>, ni pour le présent,<br />

ni pour lʹavenir.<br />

Adieu, bien cher Monsieur lʹabbé, jʹembrasse dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

vous et tous vos frères, et suis <strong>avec</strong> une profon<strong>de</strong> affection.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je voulais faire quelques mots dʹaffection pour le f. François Cousin, à qui je<br />

dois une réponse. Veuillez lʹassurer que je ne lʹoublie pas <strong>de</strong>vant Dieu.<br />

496 à M. Caille<br />

Lʹenvahissement <strong>de</strong>s activités et la complication <strong>de</strong>s Œuvres sont <strong>de</strong>s écueils permanents. ʺfaire <strong>de</strong>s œuvres sé‐<br />

rieuses qui aillent au fond <strong>de</strong>s chosesʺ. Ne pas viser au grand nombre, ni à plaire aux hommes. Lʹunité est néces‐<br />

saire pour la vie <strong>de</strong> communauté. Nouvelles <strong>de</strong>s frères.<br />

Vaugirard, 25 octobre 1857<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

La présence à Vaugirard <strong>de</strong> M. lʹabbé Deberly mʹa déterminé à différer un peu lʹen‐<br />

voi <strong>de</strong> cette lettre quʹil a offert <strong>de</strong> vous porter.<br />

624


Vous avez bien reconnu <strong>avec</strong> moi, mon bon ami, combien il était désirable que votre<br />

internat ne sʹagrandît point; avoir tout ensemble un orphelinat, une maison considérable à<br />

tenir et un patronage <strong>de</strong> près <strong>de</strong> 300 enfants <strong>avec</strong> lʹœuvre <strong>de</strong>s jeunes ouvriers, et nʹavoir<br />

pour ai<strong>de</strong>s constants que vos <strong>de</strong>ux frères, cʹest déjà un tour <strong>de</strong> force, ou plutôt cʹest une as‐<br />

surance que lʹattention et les soins répartis sur tant <strong>de</strong> choses seront nécessairement insuf‐<br />

fisants. Vous remarquez vous‐même que la multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> vos charges vous empêche<br />

dʹexercer sur vos enfants lʹinfluence paternelle et toute pleine <strong>de</strong> sollicitu<strong>de</strong> que vous aviez<br />

autrefois sur eux; plus vous étendrez votre cercle et plus votre action sʹamoindrira. Si nous<br />

faisions les œuvres pour plaire aux hommes, nous tendrions à réunir <strong>de</strong>s masses pour<br />

lʹapparence et la satisfaction <strong>de</strong>s yeux; mais nous travaillons pour Dieu, nous voulons uni‐<br />

quement lui gagner <strong>de</strong>s âmes, nous <strong>de</strong>vons donc faire <strong>de</strong>s œuvres sérieuses qui aillent au<br />

fond <strong>de</strong>s choses. Je persiste à penser que, pour cette année, vous <strong>de</strong>vez vous arrêter au<br />

nombre dʹenfants que vous aviez jugé vous‐même être selon lʹordre et la vraie charité; loin<br />

dʹavoir aucune raison <strong>de</strong> changer dʹavis, je suis <strong>de</strong> plus en plus convaincu que faire autre‐<br />

ment ce serait tenter Dieu. Vous pouvez aisément répondre que les charges <strong>de</strong> lʹœuvre ne<br />

permettent pas <strong>de</strong> prendre plus dʹenfants et que les dispositions actuelles <strong>de</strong>s locaux ne<br />

donnent pas <strong>de</strong> place pour en recevoir un plus grand nombre. Vos lits, en effet, étant un<br />

peu plus espacés, ce qui serait mieux, il ne vous resterait réellement pas <strong>de</strong> place.<br />

Je suis bien aise que le f. Marcaire trouve quelque consolation dans la présence <strong>de</strong><br />

sa bonne mère; je vous invite bien toutefois à ne pas encourager la prolongation <strong>de</strong> ce sé‐<br />

jour au <strong>de</strong>là dʹun temps raisonnable, comme une quinzaine <strong>de</strong> jours par exemple; autre‐<br />

ment la tentation viendrait <strong>de</strong> le rendre indéfini, ce qui est fort à éviter.<br />

Je regrette que le f. Jules nʹait pas, comme je le lui avais dit, pris le r. p. Auber pour<br />

confesseur, lʹunité est si nécessaire en communauté, on y trouve tant <strong>de</strong> force et dʹappui;<br />

jʹen causerai <strong>avec</strong> M. Mangot lorsquʹil repassera par Paris. Je suis persuadé quʹil sera <strong>de</strong> cet<br />

avis.<br />

Jʹai déjà exhorté notre f. Henry [Guillot] à être bien conciliant, sans pourtant exclure<br />

lʹexactitu<strong>de</strong>; il faut prendre une petite mesure <strong>de</strong> précision et dʹindulgence qui peut être<br />

parfois un peu difficile à bien gar<strong>de</strong>r, mais qui est pourtant nécessaire pour faire le bien.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> lʹenvoi <strong>de</strong> la facture et vous pris dʹen retenir le prix sur la pen‐<br />

sion du jeune Normandie lorsquʹon vous lʹaura remise. Je crois que, dʹici à peu, je vous<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>rai 50 mètres <strong>de</strong> la même étoffe, ayant lʹintention <strong>de</strong> faire un surtout uniforme<br />

pour tous les frères pour les exercices <strong>de</strong> la chapelle.<br />

Les occupations du f. Georges [<strong>de</strong> Lauriston], maintenant chargé du patronage <strong>de</strong><br />

Grenelle, ne lui laissant plus la possibilité <strong>de</strong> vous envoyer un extrait du journal <strong>de</strong> la mai‐<br />

son, comme il lʹavait fait ces temps <strong>de</strong>rniers, jʹai chargé <strong>de</strong> ce soin le f. Paillé qui pourra<br />

sʹen acquitter plus aisément; je désire bien que, <strong>de</strong> votre côté, vous nous teniez informés<br />

du mouvement <strong>de</strong> votre petite communauté et <strong>de</strong> ses œuvres, autrement notre action ces‐<br />

serait dʹavoir cet esprit <strong>de</strong> sincère et cordiale union qui nous est si nécessaire.<br />

Je voulais écrire un mot à vos frères, un mot aussi au f. Carment, le temps me man‐<br />

que pour le faire comme je le voudrais; je mets seulement une ligne <strong>de</strong> souvenir au risque<br />

<strong>de</strong> ne pouvoir lʹachever, M. Deberly apprêtant son départ.<br />

Adieu, bien cher ami, je vous embrasse bien affectueusement. Tous nos frères <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>nt quand donc ils vous verront.<br />

Votre ami et Père en J. et M. Le <strong>Prevost</strong><br />

625


497 à M. Guillot<br />

Estime <strong>de</strong> la vocation religieuse. Abandon <strong>de</strong> lʹesprit propre. Si notre cœur est droit, le Seigneur tournera tout en<br />

bien, même nos sujets <strong>de</strong> crainte.<br />

Vaugirard, 28 octobre 1857<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Je nʹai quʹun moment pour remplir cette petite feuille que M. lʹabbé Mangot a la<br />

bonté dʹemporter pour vous. Je veux seulement vous assurer encore que nos cœurs sont<br />

toujours <strong>avec</strong> vous et que nos frères ici vous sont tendrement unis, prient pour vous et<br />

sʹassocient à vos œuvres et à tout ce qui vous concerne. Cette tendre charité est le bienfait<br />

<strong>de</strong> lʹétat saint où Dieu a daigné nous mettre; bénissez‐le toujours <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> grâce quʹIl<br />

vous a faite en vous y appelant et, quand vous avez quelques peines, nʹoubliez pas quʹil<br />

faut les accepter patiemment et amoureusement, vous trouvant heureux <strong>de</strong> souffrir et <strong>de</strong><br />

travailler pour Celui qui a tant souffert et travaillé pour nous. Ne vous tourmentez pas<br />

dʹailleurs plus quʹil ne faut <strong>de</strong> quelques petites difficultés que vos emplois ou occupations<br />

vous peuvent donner, faites <strong>de</strong> votre mieux, suivez aussi bien que vous le pouvez les ins‐<br />

tructions <strong>de</strong> notre bon ami, M. Caille, et après, soyez en paix, le Seigneur fera tourner à<br />

bien les choses même qui vous seraient un sujet dʹinquiétu<strong>de</strong>. Dieu travaille <strong>avec</strong> nous<br />

bien plus que nous le pensons, Il ne permet pas que le mal sʹopère dans nos œuvres quand<br />

nous y allons <strong>avec</strong> une intention droite et un sincère dévouement. Donc, cher ami, soyez<br />

tranquille; ne tenez pas trop à votre manière <strong>de</strong> voir, pliez volontiers et, quand vous êtes<br />

obligé dʹagir par vous‐même, élevez votre cœur vers Dieu, Il vous conduira.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

498 à M. Halluin<br />

Travailler à bien sʹentendre. Sʹoublier soi‐même pour la gloire <strong>de</strong> Dieu.<br />

Vaugirard, 3 novembre 1857<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie, sans y rien ajouter, un petit résumé <strong>de</strong> situation et <strong>de</strong> journal quʹa<br />

fait encore cette semaine le f. Georges pour vous être envoyé. Tout va selon lʹusage, notre<br />

mon<strong>de</strong> est bien occupé, cʹest un bon moyen <strong>de</strong> vivre en paix et dʹattirer les grâces <strong>de</strong> Dieu.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> votre bonne lettre; nous avons besoin <strong>de</strong> temps en temps <strong>de</strong> nous as‐<br />

surer ainsi que nous sommes bien dʹaccord et que nous nous entendons pleinement. Nous<br />

cherchons en tout et toujours et bien uniquement la volonté <strong>de</strong> Dieu, nous nous abandon‐<br />

nons à sa conduite, assurés quʹIl nous mènera à bonne fin; nous ne songeons point à nous‐<br />

mêmes, mais à sa gloire; nous nʹavons point <strong>de</strong> vues propres, mais seulement la docilité<br />

pour obéir à ses <strong>de</strong>sseins. Avec ces dispositions, nous sommes en paix. Je ne comprends<br />

pas quʹon puisse faire autrement les œuvres <strong>de</strong> foi et <strong>de</strong> charité.<br />

Le f. Vasseur sʹoccupe <strong>de</strong> vos souliers. Je reviendrai sur lʹaffaire dʹAngers, si les cir‐<br />

constances semblent nous mener à quelque décision <strong>de</strong> ce côté. Je pense quʹen la connais‐<br />

sant mieux, vous nʹy verrez, comme nous, quʹune œuvre propre à nous assurer du travail.<br />

Du reste, nous irons pas à pas, et non sans consulter le Seigneur.<br />

626


Je vous prie dʹassurer tous nos frères <strong>de</strong> notre cordiale affection et <strong>de</strong> recevoir vous‐<br />

même, cher Monsieur lʹabbé, mes sentiments les plus dévoués en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

499 à M. Carment<br />

Le bien spirituel qui se fait à Nazareth. Observations aux Supérieurs; les faire dans la forme qui convient.<br />

Lʹobéissance <strong>de</strong> cœur et dʹesprit gagne le cœur <strong>de</strong> Dieu.<br />

Vaugirard, 3 novembre 1857<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Jʹai appris <strong>avec</strong> plaisir, par la lettre que vous mʹavez écrite en quittant Amiens, que<br />

votre bon père se trouvait mieux et que vous pouviez retourner à votre poste. Je continue‐<br />

rai à prier <strong>avec</strong> vous pour tous ceux qui vous sont chers, pour votre bon père en particu‐<br />

lier.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong>s quelques détails que vous avez recueillis au sujet <strong>de</strong> la maison<br />

<strong>de</strong> Nazareth; je sais quʹil arrive encore parfois quʹon nʹobtient pas <strong>de</strong>s jeunes gens ou ap‐<br />

prentis absolument tout ce quʹon peut désirer; jʹinviterai nos frères à surveiller la bonne<br />

tenue, surtout dans les exercices <strong>de</strong> la chapelle; les enfants <strong>de</strong> Paris sont plus légers que<br />

dʹautres, on a plus <strong>de</strong> peine à obtenir dʹeux le calme et le recueillement. En ensemble pour‐<br />

tant, il se fait un grand bien dans cette maison; M. lʹabbé Hello sʹen occupe spirituellement,<br />

<strong>avec</strong> beaucoup <strong>de</strong> constance et <strong>de</strong> fruit; presque tous les enfants ou jeunes ouvriers se<br />

confessent au moins tous les mois; 180 ont communié au jour <strong>de</strong> la Toussaint <strong>avec</strong> dʹexcel‐<br />

lentes dispositions. Je nʹai pas pris en mal vos observations, elles étaient présentées dans la<br />

forme quʹil convient dʹemployer quand on a à cœur <strong>de</strong> faire le bien. Soyez assuré que les<br />

Supérieurs ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt pas mieux que dʹêtre avertis, seulement on doit le faire <strong>avec</strong> dé‐<br />

férence et sans avoir lʹair <strong>de</strong> leur faire la leçon ou <strong>de</strong> leur imposer son opinion, car alors<br />

lʹavis sentant lʹorgueil, la présomption, le manque <strong>de</strong> respect ne peut manquer dʹêtre reje‐<br />

té, sinon en lui‐même, au moins dans le ton et lʹexpression quʹon y a mis.<br />

Adieu, mon cher enfant, faites, dans la position où le Seigneur vous a mis, tout le<br />

bien qui vous paraîtra possible, prenez à cœur lʹintérêt <strong>de</strong> votre excellente œuvre, croyez<br />

toujours à lʹavis <strong>de</strong> ceux qui vous conduisent plutôt quʹau vôtre, lʹobéissance gagne le<br />

cœur <strong>de</strong> Dieu, mais lʹobéissance <strong>de</strong> cœur et dʹesprit vraiment soumise et généreuse. Avec<br />

cela, et en veillant bien sur les mouvements souvent prompts <strong>de</strong> votre nature, vous serez<br />

vraiment utile dans votre chère maison dʹArras et vous gagnerez les cœurs <strong>de</strong> vos frères et<br />

<strong>de</strong> vos enfants: Beati mites quia289 etc.<br />

Je vous embrasse bien affectueusement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

500 à M. Decaux<br />

Lʹaffaire <strong>de</strong> la chapelle <strong>de</strong> Nazareth. Les rapports <strong>avec</strong> MM. les curés.<br />

Vaugirard, 9 novembre 1857<br />

Mon bien bon ami,<br />

Je suis tout heureux que nous nous soyons parfaitement entendus hier sur la mar‐<br />

che à suivre relativement à notre chapelle <strong>de</strong> Nazareth. En y réfléchissant, je suis <strong>de</strong> plus<br />

289 Bienheureux les doux parce qu'ils…Mt 5, 4.<br />

627


en plus persuadé que notre démarche à faire auprès <strong>de</strong> M. Surat 290 doit avoir lʹair seule‐<br />

ment dʹun exposé <strong>de</strong> nos motifs plutôt que dʹune opposition formelle; une résistance trop<br />

arrêtée nʹest nullement nécessaire et dépasserait notre but; elle blesserait et offenserait lʹau‐<br />

torité ecclésiastique qui nʹa pas lʹintention <strong>de</strong> passer outre à nos observations et quʹil nous<br />

suffit <strong>de</strong> bien éclairer.<br />

Pour peu que notre résistance laissât trace, on sʹen souviendrait à lʹoccasion; on<br />

pourrait nous entraver pour les sermons <strong>de</strong> charité; pour peu, en effet, quʹon croie lʹautori‐<br />

té supérieure mal disposée pour notre œuvre, il ne se trouvera pas un curé pour autoriser<br />

nos sermons dans une église. Il ne faut pas perdre <strong>de</strong> vue dʹailleurs que notre chapelle,<br />

ouvrant sur rue et gran<strong>de</strong> comme une petite paroisse, fera aisément ombrage au curé, quel<br />

quʹil soit. M. le Curé <strong>de</strong> St‐Sulpice [M. Hamon] mʹa bien <strong>de</strong>s fois averti dʹêtre circonspect et<br />

<strong>de</strong> bien ménager toutes nos démarches, me disant que cette chapelle <strong>de</strong>viendrait, sans cela,<br />

une pierre dʹachoppement pour nous; M. le Curé <strong>de</strong> lʹAbbaye‐aux‐Bois me déclarait aussi<br />

que, sʹil eût été proposé comme curé à ce quartier, nous eussions été pour lui un embarras<br />

et une difficulté.<br />

Ces détails vous confirmeront, je le pense, mon bon ami, dans la disposition où je<br />

vous ai trouvé dʹagir près <strong>de</strong> M. Surat <strong>avec</strong> beaucoup <strong>de</strong> déférence et <strong>de</strong> mesure; je suis sûr<br />

que nous nous en trouverons bien; S t Vincent <strong>de</strong> Paul nʹeût pas fait autrement.<br />

Adieu, mon bon ami; je vous suis, comme toujours, dévoué <strong>de</strong> cœur et dʹâme en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

501 à M. Halluin<br />

Le Saint‐Sacrement à Vaugirard. Appréhensions au sujet <strong>de</strong> la chapelle <strong>de</strong> Nazareth revendiquée pour le service<br />

paroissial. Extraits du journal <strong>de</strong> Communauté <strong>de</strong> Vaugirard et <strong>de</strong> Nazareth.<br />

Vaugirard, 17 novembre 1857<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie les quelques documents ci‐joints, sans y rien ajouter, ne voyant rien<br />

en ce moment <strong>de</strong> bien intéressant à vous communiquer. Nous allons ici comme <strong>de</strong> cou‐<br />

tume, assez bien grâces à Dieu. Jʹai pu jusquʹici suivre le mouvement <strong>de</strong> la communauté.<br />

Depuis quelques jours pourtant, jʹai dû gar<strong>de</strong>r la chambre, le froid ayant extrêmement irri‐<br />

té ma chétive poitrine. Je ferai tout ce que je pourrai pour tenir bon et ne pas mʹéloigner.<br />

Jʹai ici <strong>de</strong> précieuses ressources quand je gar<strong>de</strong> forcément mon quartier; Mgr par grâce insi‐<br />

gne, mʹa permis <strong>de</strong> conserver le St Sacrement dans le petite oratoire qui est auprès <strong>de</strong> ma<br />

chambre et où la messe est dite chaque matin. Je ne suis donc jamais seul. Puissé‐je mʹen<br />

bien souvenir et vivre sous les yeux dʹun Dieu si con<strong>de</strong>scendant et si bon.<br />

Le f. Vasseur a fait quelques paires <strong>de</strong> souliers pour vous, comme il est un peu<br />

poussé dʹailleurs, il nʹest pas, me dit‐il, absolument sûr <strong>de</strong> vous envoyer le tout pour les<br />

premiers jours <strong>de</strong> décembre. Si vous aviez absolument besoin que la totalité vous fût en‐<br />

voyée pour cette époque, il serait bon <strong>de</strong> lui écrire un mot à ce sujet.<br />

Jules et Ferdinand vont assez bien. Jʹai vu ces jours‐ci la mère <strong>de</strong> Paul Piard. Elle a<br />

très bien pris le changement <strong>de</strong> son fils et le recomman<strong>de</strong> à votre bonté paternelle.<br />

290 Vicaire général. Il fera partie du groupe <strong>de</strong>s ecclésiastiques et otages fusillés par les Communards le samedi 27 mai 1871. La démarche<br />

dont il s'agit ici concernait toujours la chapelle <strong>de</strong> Nazareth qu'on voulait affecter provisoirement à l'usage d'une paroisse.<br />

Cf. VLP. I, p. 581.<br />

628


Je nʹai rien entendu dire <strong>de</strong> nouveau pour ce qui concerne M. Lequette. Jʹenverrai<br />

chez M. <strong>de</strong> Ségur pour avoir son avis sur le livre. M. le Curé <strong>de</strong> St‐Sulpice ne mʹa rien fait<br />

dire jusquʹici.<br />

On a fait <strong>de</strong> nouveaux et persistants efforts ces temps‐ci pour affecter provisoire‐<br />

ment notre chapelle <strong>de</strong> Nazareth à lʹusage dʹune nouvelle paroisse quʹon à lʹintention<br />

dʹétablir <strong>de</strong> ce côté. Nous résistons jusquʹici <strong>de</strong> notre mieux, mais si M gr , qui nous en a par‐<br />

lé lui‐même, insiste beaucoup, je ne sais comment nous pourrons nous en tirer. Nous ver‐<br />

rions une gran<strong>de</strong> gêne pour nous dans cet arrangement, nous espérons que Dieu nous<br />

lʹépargnera.<br />

Adieu, bien cher Monsieur lʹabbé, donnez‐nous <strong>de</strong> vos nouvelles et <strong>de</strong> celles <strong>de</strong> nos<br />

frères. Le f. Caille est venu nous voir ces jours‐ci; embrassez, je vous prie, tous nos frères,<br />

et croyez à tous mes sentiments <strong>de</strong> tendre attachement.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

JOURNAL <strong>de</strong> la COMMUNAUTE291 VAUGIRARD<br />

28 octobre. Conférence sur la fête <strong>de</strong> la Toussaint (<strong>de</strong>venir un saint, un grand saint, tout <strong>de</strong><br />

suite).<br />

31 octobre. On va à N.D. <strong>de</strong>s Victoires.<br />

La messe est dite à 7h. par M. lʹabbé Roussel, à lʹintention <strong>de</strong> la Communauté, et<br />

spécialement pour offrir à la Ste Vierge les nouveaux frères, <strong>Jean</strong> Maury et Emma‐<br />

nuel Legallais. Avant <strong>de</strong> sortir <strong>de</strong> lʹéglise, la Communauté sʹagenouille quelques<br />

instants au pied <strong>de</strong> lʹautel <strong>de</strong> St Joseph. Au retour, M. le Supérieur remet aux ff.<br />

Maury et Legallais le crucifix quʹils <strong>de</strong>vront porter sur eux et considérer comme le<br />

signe <strong>de</strong> leur consécration religieuse.<br />

4 novembre. Retraite du mois. Visite <strong>de</strong> la Communauté au cimetière <strong>de</strong> Vaugirard. Elle sʹage‐<br />

nouille au pied <strong>de</strong> la tombe <strong>de</strong> notre f. J. Vince.<br />

5 novembre. M. le Supérieur, accompagné <strong>de</strong>s ff. ecclésiastiques et <strong>de</strong> quelques autres frères, se<br />

rend à lʹArchevêché. Après avoir obtenu audience du Cardinal Morlot, qui fait à la<br />

Communauté lʹaccueil le plus bienveillant, M. le Supérieur dépose entre les mains<br />

<strong>de</strong> Son Eminence une copie <strong>de</strong>s règles <strong>de</strong> la Communauté. 6h., coulpe.<br />

dimanche 8. Tous les enfants sont conduits à lʹéglise <strong>de</strong> Vaugirard pour la cérémonie du bap‐<br />

tême dʹAcha, jeune chinois, enfant <strong>de</strong> la maison; la cérémonie attire un grand<br />

concours <strong>de</strong> fidèles. Le jeune néophyte porte un riche costume chinois, tout en<br />

soie rouge et verte. Le baptême est administré par M. lʹabbé Lamarche, qui pro‐<br />

nonce un discours. Tous les petits enfants <strong>de</strong> la Ste Enfance <strong>de</strong> Vaugirard avaient<br />

été réunis pour la cérémonie.<br />

9 novembre. Les ff. ecclésiastiques passent leurs examens à lʹArchevêché; Dieu aidant, ils le<br />

font <strong>avec</strong> succès.<br />

Le 28 octobre, le Conseil a décidé que les ff. laïcs porteraient un surtout 292 à la S te Messe, à la récita‐<br />

tion <strong>de</strong> lʹOffice et à la coulpe, au prononcé <strong>de</strong>s vœux et à leur renouvellement; on ne le portera<br />

quʹaprès 6 mois <strong>de</strong> postulat. La forme <strong>de</strong> ce surtout nʹest pas invariable; tous les trois ans, le<br />

Conseil examinerait sʹil y a lieu dʹy apporter <strong>de</strong>s changements. Cette disposition restera, quant à<br />

291 Ecriture <strong>de</strong> M. Paillé.<br />

292 Sorte <strong>de</strong> large par<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> couleur sombre, sous lequel disparaissaient les diversités <strong>de</strong> forme et <strong>de</strong> couleur <strong>de</strong> leurs vêtements<br />

ordinaires. (Sur la photographie du 26 mai 1858, prise <strong>de</strong>vant le hangar <strong>de</strong> l'Orphelinat <strong>de</strong> Vaugirard, MLP. porte un costume donnant<br />

l'idée <strong>de</strong> ce vêtement <strong>de</strong> 1857). Cet usage <strong>de</strong> donner aux frères laïques ce qu'on pourrait appeler un costume <strong>de</strong> chœur, <strong>de</strong>meura<br />

en vigueur à la Maison-Mère tant que vécut MLP. Cf. VLP. I, p.576.<br />

629


présent, propre à la Maison‐Mère seulement; elle se fera à titre dʹessai sans rien préjuger pour<br />

lʹavenir 293 .<br />

NAZARETH<br />

1 er novembre: Lʹœuvre <strong>de</strong>s Jeunes Ouvriers a changé <strong>de</strong> maison; <strong>de</strong> la rue du Regard, 14, elle sʹest<br />

transportée Bd Montparnasse 80, vis‐à‐vis la chapelle <strong>de</strong> Nazareth. Ce nouveau local a <strong>de</strong> vastes<br />

salles qui permettent <strong>de</strong> recevoir plus dʹune centaine dʹouvriers; il est plus près <strong>de</strong> la chapelle <strong>de</strong>s<br />

ff. <strong>de</strong> Nazareth, il permet à lʹœuvre plus <strong>de</strong> développement.<strong>–</strong> A 2h., M. le Curé <strong>de</strong> St‐Sulpice vient<br />

bénir la maison. M. Baudon, Prési<strong>de</strong>nt Général, est présent. M. Decaux, Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> lʹŒuvre du<br />

Patronage, présente les jeunes ouvriers à M. le Prési<strong>de</strong>nt Général; il fait un discours très chaleureux<br />

dans lequel il fait ressortir lʹutilité <strong>de</strong> lʹŒuvre et lʹaffection quʹil y porte. M. Baudon répond par <strong>de</strong>s<br />

paroles <strong>de</strong> bienveillance et dʹaffection. On se rend ensuite à la chapelle pour le Salut.<br />

502 à M. Halluin<br />

Les ressources en personnel sont restreintes par rapport aux charges: la Communauté est encore jeune et peu<br />

nombreuse. Si nécessaire, MLP. nʹhésitera pas à faire <strong>de</strong>s changements à Arras. Formule <strong>de</strong> renouvellement mo‐<br />

difiée. Autorisation <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r le Saint‐Sacrement à lʹoratoire <strong>de</strong> MLP.<br />

Vaugirard, 28 novembre 1857<br />

Bien cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Votre bonne lettre du 16 <strong>de</strong> ce mois sʹest croisée <strong>avec</strong> celle que je vous ai écrite dans<br />

le même temps, cʹest ce qui mʹa porté à différer un peu <strong>de</strong> vous répondre. Les détails que<br />

293 Cette <strong>de</strong>rnière phrase est <strong>de</strong> la main <strong>de</strong> MLP.<br />

630


vous me donnez sur lʹintérieur <strong>de</strong> notre chère maison dʹArras mʹont vivement intéressé; ils<br />

formaient comme une revue <strong>de</strong> la situation et mʹont parfaitement mis au fait <strong>de</strong> lʹétat <strong>de</strong>s<br />

choses. Je sens bien les besoins <strong>de</strong> cette situation, et cʹest une peine véritable pour moi <strong>de</strong><br />

nʹy pouvoir donner immédiatement satisfaction; mais vous savez comme moi quʹeu égard<br />

à nos charges, nos ressources sont bien restreintes. Les hommes mûrs, formés, soli<strong>de</strong>s en<br />

vertu et en expérience sont peu nombreux partout. Ils le sont moins quʹailleurs nécessai‐<br />

rement dans une Communauté encore si jeune et si peu nombreuse. Nous avons quelques<br />

bons jeunes gens capables <strong>de</strong> servir utilement les œuvres, mais il faut quelques années<br />

pour quʹils puissent sortir <strong>de</strong>s emplois secondaires. Nous en attendons encore un ou <strong>de</strong>ux<br />

dont lʹentrée chez nous sera prochaine, mais ils sont jeunes aussi et <strong>de</strong>vront être formés.<br />

Cʹest une affaire <strong>de</strong> temps. Nous faisons tout ce que nous pouvons pour mûrir nos sujets et<br />

pour les asseoir soli<strong>de</strong>ment dans la piété et le dévouement, mais la raison et lʹexpérience se<br />

suppléent bien rarement et ne peuvent être remplacées que par <strong>de</strong>s dons <strong>de</strong> grâce que<br />

Dieu nʹaccor<strong>de</strong> quʹà <strong>de</strong>s âmes privilégiées. Attendons le bienfait du temps; il nous appor‐<br />

tera, je lʹespère, quelque force et quelque développement.<br />

Je sais bien, en particulier, les défauts <strong>de</strong> notre pauvre M. Carment, il faut <strong>avec</strong> lui<br />

bien <strong>de</strong> la patience, jʹen ai fait lʹépreuve; le cœur est bon chez lui pourtant, quand je le pre‐<br />

nais par là, jʹarrivais souvent à le ramener à la raison. Il a <strong>de</strong> la foi et, dans lʹessentiel <strong>de</strong>s<br />

choses, lʹesprit dʹobéissance. Je lui rappellerai <strong>de</strong> temps en temps les <strong>de</strong>voirs <strong>de</strong> sa posi‐<br />

tion; peut‐être en éprouvera‐t‐il quelque bien. Il est dans nos habitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> temporiser<br />

beaucoup et dʹattendre les dispositions <strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce plutôt que <strong>de</strong> les <strong>de</strong>vancer. Nous<br />

<strong>de</strong>vrions toutefois voir un indice suffisant <strong>de</strong> ses <strong>de</strong>sseins dans une situation trop tendue<br />

ou trop pénible pour vous ou pour votre maison. Soyez bien assuré que je serai toujours<br />

<strong>de</strong> votre sentiment sur ce point et quʹau moindre désir <strong>de</strong> votre part, je rappellerai M.<br />

Carment. La difficulté pour nous serait <strong>de</strong> le remplacer <strong>avec</strong> utilité pour vous. Le frère<br />

<strong>Jean</strong>‐Marie, lors même quʹil ne serait pas si utile là où il est, nʹaurait pas assez dʹâge, dʹex‐<br />

périence ni dʹinstruction pour servir <strong>de</strong> lien entre les frères, ou au moins pour les soutenir<br />

en votre absence. Il est parfait <strong>de</strong> cœur, doux, maniable, humble et très détaché, mais ces<br />

qualités excellentes ne suffisent pas pour donner <strong>de</strong> lʹascendant sur une famille. Il faudrait<br />

un peu <strong>de</strong> supériorité, dʹinstruction, <strong>de</strong> tenue, dʹautorité. Il nʹa pas cela en mesure suffi‐<br />

sante. Il nʹa dʹailleurs que 25 ans, et ainsi <strong>de</strong>s autres, la jeunesse et le défaut <strong>de</strong> maturité les<br />

ren<strong>de</strong>nt impropres à aucune direction à lʹégard dʹune communauté.<br />

Paul Piard est encore bien jeune; jʹespère néanmoins quʹun peu poussé il marchera<br />

pour sa classe. Quant à son intérieur, il est en effet assez peu ouvert, quelquefois scrupu‐<br />

leux, peu facile à bien diriger, parce quʹon ne le comprend pas toujours. Votre con<strong>de</strong>scen‐<br />

dance paternelle saura gagner son cœur; une fois que vous en serez bien maître, il marche‐<br />

ra à votre gré. Cʹest une œuvre <strong>de</strong> longue attente que <strong>de</strong> former <strong>de</strong> si jeunes sujets pour le<br />

service <strong>de</strong> Dieu et <strong>de</strong>s œuvres. Tout ce quʹon aura semé ne portera pas <strong>de</strong> fruit, mais plu‐<br />

sieurs persévèreront et donneront récompense pour tous.<br />

Je fais bien volontiers lʹabandon pour cette année à notre chère maison dʹArras <strong>de</strong>s<br />

100f que jʹavais réservés sur la petite pension du f. Carment. Je désirerais adopter chez<br />

nous le principe généralement admis que les ressources provenant <strong>de</strong>s frères ne les sui‐<br />

vent pas nécessairement dans la maison où ils sont envoyés. Mais, ce point posé, je serai<br />

toujours disposé à alléger vos charges et, en particulier, à vous rendre le séjour du f. Car‐<br />

ment le plus léger quʹil se pourra.<br />

631


Quelques modifications ont été faites dans lʹexécution, aux formes du renouvelle‐<br />

ment <strong>de</strong>s vœux. Le détail <strong>de</strong> la cérémonie avait été pris sur un ancien coutumier qui a été<br />

<strong>de</strong>puis un peu rectifié pour abréger la série <strong>de</strong> prières et <strong>de</strong> chants qui était trop longue; à<br />

lʹoccasion, je rectifierai cette indication.<br />

Nous allons assez bien tous. Je me soutiens moi‐même jusquʹici, à la condition <strong>de</strong> ne<br />

presque pas sortir <strong>de</strong> mon petit pavillon. Mais M gr lʹArchevêque a eu lʹextrême con<strong>de</strong>scen‐<br />

dance dʹaccor<strong>de</strong>r quʹon gardât le S t Sacrement dans le petit oratoire où on me dit chaque<br />

matin la S te Messe. Cela me sauve <strong>de</strong> tout ennui. Je prie plus souvent pour mes bien‐aimés<br />

enfants dʹArras. Daigne le Seigneur exaucer les vœux que je Lui adresse pour eux.<br />

Adieu, bien cher Monsieur lʹabbé, je vous <strong>de</strong>meure bien uni <strong>de</strong> cœur et suis en J. et M.<br />

Votre ami et Père bien affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Myionnet est bien reconnaissant <strong>de</strong> vos souhaits et prières.<br />

Je crois que le f. Carment pourrait tenir un petit journal <strong>de</strong>s faits intéressants dans la<br />

communauté et dans lʹœuvre, et nous en faire <strong>de</strong> temps en temps un extrait, le tout briè‐<br />

vement. Si vous voyez jour à cela et quʹil nʹy mette pas trop <strong>de</strong> temps, cela lʹintéresserait et<br />

aurait aussi son utilité. Autrement, nous irons comme par le passé.<br />

503 à M. Paillé<br />

Commissions diverses et démarches charitables.<br />

30 novembre 1857<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous prie <strong>de</strong> mʹenvoyer, <strong>avec</strong> le moins <strong>de</strong> retard possible le petit ciboire que<br />

mʹavait prêté M. Germainville. On est obligé <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r ici, à lʹoratoire, la Ste Réserve dans<br />

un corporal, ce que nos ff. ecclésiastiques trouvent mal convenant et dangereux.<br />

Je vous prie aussi <strong>de</strong> mʹenvoyer un exemplaire <strong>de</strong> la Couronne <strong>de</strong> lʹAnnée Chrétienne,<br />

librairie Perisse, prix 1f 65 les <strong>de</strong>ux volumes.<br />

Enfin, je vous serai obligé dʹemprunter pour quelques jours à M. Sarlit <strong>de</strong>ux ouvra‐<br />

ges que je désire examiner:<br />

1° La religieuse instruite et dirigée etc.. par le p. Agricola (2 vol. in‐12).<br />

2° Conférences Spirituelles pour lʹinstruction <strong>de</strong>s religieuses, par le r.p. Miet, Récollet<br />

(1vol.in‐12).<br />

Jʹembrasse tous mes enfants <strong>de</strong> Nazareth.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Portez, je vous prie, la lettre ci‐jointe à M. Lambert. Je lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> M me Lambert<br />

pour nos orphelins, il y a bien longtemps quʹil mʹavait promit quʹelle quêterait pour eux.<br />

Il est peu probable que je gar<strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux ouvrages. On aura bien soin, dites‐le à M.<br />

Sarlit, <strong>de</strong> ne pas les couper.<br />

632


504 à M. Carment<br />

Encouragements à supporter les difficultés <strong>de</strong> la formation <strong>de</strong>s jeunes ouvriers. Discipline et support sont néces‐<br />

saires. Il faut leur inculquer le bon esprit. Soumission aux Supérieurs. Esprit <strong>de</strong> prière et <strong>de</strong> foi. Que dans toutes<br />

nos Œuvres, les frères rayonnent <strong>de</strong> la charité, ʺtrésor <strong>de</strong> notre petite familleʺ.<br />

Vaugirard, 6 décembre 1857<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je prends une vive part aux difficultés et peines quʹil plaît au Seigneur <strong>de</strong> laisser<br />

dans votre voie, et je le conjure bien instamment <strong>de</strong> les faire tourner à votre bien et à votre<br />

sanctification. Elles me paraissent provenir <strong>de</strong> la nature <strong>de</strong> lʹœuvre à laquelle vous avez à<br />

donner vos soins et qui nʹest pas assurément sans aspérités; elles viennent aussi <strong>de</strong>s em‐<br />

barras que vous suscite lʹimpétuosité trop peu maîtrisée <strong>de</strong> votre nature. Je comprends<br />

bien la peine quʹon peut avoir à contenir et surveiller une réunion <strong>de</strong> jeunes ouvriers et<br />

apprentis, légers, grossiers, mal dociles; cʹest une tâche pénible et qui serait rebutante pour<br />

dʹautres que pour <strong>de</strong>s serviteurs <strong>de</strong> Dieu, mais elle est tout à fait dans notre vocation; en<br />

nous consacrant au service <strong>de</strong>s pauvres, <strong>de</strong>s enfants, <strong>de</strong>s ouvriers, nous avons accepté le<br />

support <strong>de</strong> toutes leurs misères physiques, morales et spirituelles; plus elles sont gran<strong>de</strong>s,<br />

plus notre mérite est réel et précieux <strong>de</strong>vant Dieu; vous le savez bien, cher enfant, et je suis<br />

convaincu quʹau fond ce nʹest pas le travail et la ru<strong>de</strong>sse <strong>de</strong> lʹoeuvre qui vous contristent,<br />

mais les complications que les circonstances y ajoutent. Il me semble bien certain quʹen re‐<br />

doublant dʹefforts, en recourant aux moyens <strong>de</strong> foi surtout, la prière, la considération <strong>de</strong><br />

vos <strong>de</strong>voirs dʹétat, les gran<strong>de</strong>s récompenses que le divin Maître y a attachées, vous arrive‐<br />

rez à surmonter les obstacles et vous persévérerez à gar<strong>de</strong>r votre poste tant quʹIl ne vous<br />

appellera pas à un autre. Ailleurs vous trouveriez dʹautres difficultés, et vous auriez peut‐<br />

être <strong>de</strong>s occasions moins heureuses dʹêtre utile. Le point grave et ru<strong>de</strong> <strong>de</strong> lʹoeuvre <strong>de</strong>s ap‐<br />

prentis internes est évi<strong>de</strong>mment dans la discipline et la conduite <strong>de</strong>s grands jeunes gens; si<br />

on obtient cette condition essentielle et quʹon fasse régner un bon esprit parmi eux, tout est<br />

sauvé, lʹœuvre marchera bien. Remarquez, cher enfant, que cʹest à ce point que Dieu vous<br />

a posé et que <strong>de</strong> vos soins dépend, en partie du moins, le succès dʹune œuvre gran<strong>de</strong>,<br />

sainte, agréable à Dieu et pleine <strong>de</strong> fruits <strong>de</strong> salut. Quel motif pour vous encourager! Mais<br />

vous ne <strong>de</strong>vez pas lʹoublier, <strong>avec</strong> la discipline, il faut le bon esprit, cʹest‐à‐dire lʹaffection<br />

<strong>de</strong>s jeunes gens pour la maison, pour leurs maîtres, pour la religion qui les inspire et les<br />

gui<strong>de</strong>; <strong>de</strong> là cette nécessité dont se préoccupe surtout M. Halluin, <strong>de</strong> gagner leur cœur par<br />

la bonté, le dévouement, la patience, le support et la con<strong>de</strong>scendance dans la mesure où<br />

elle est raisonnablement possible. Concilier ces actes <strong>de</strong> charité <strong>avec</strong> lʹordre, la soumission<br />

à obtenir <strong>de</strong>s jeunes gens, la discipline en un mot, cela nʹest pas toujours facile, aussi nʹest‐<br />

il pas étonnant quʹil y ait parfois quelques malentendus et différences dʹappréciations en‐<br />

tre M. Halluin et vous; mais alors, cher enfant, votre recours est encore dans les pensées <strong>de</strong><br />

la foi: les Supérieurs sont posés par Dieu, éclairés particulièrement par Lui; le seul moyen<br />

dʹêtre en repos dans notre condition, cʹest <strong>de</strong> se soumettre pleinement à eux, <strong>de</strong> préférer<br />

leur jugement au nôtre et dʹespérer en Dieu qui récompense toujours lʹobéissance et<br />

lʹhumble abnégation <strong>de</strong> notre esprit propre. Je crois, cher enfant, que lʹune <strong>de</strong> vos plus<br />

gran<strong>de</strong>s difficultés vient <strong>de</strong> là: vous êtes trop attaché à votre sentiment, vous <strong>de</strong>meurez<br />

trop dans ce qui vous semble la raison et vous ne rentrez pas assez dans lʹesprit <strong>de</strong><br />

confiance et <strong>de</strong> soumission religieuse que notre profession <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> nous.<br />

633


Cʹest aussi, bien cher enfant, une chose regrettable et contraire à notre vocation que<br />

ces menaces auxquelles vous vous êtes laissé aller quelquefois: si on ne fait pas telle ou<br />

telle chose qui me semble nécessaire, je mʹen irai. Mettez les choses au pis, supposez<br />

quʹune situation telle vous soit faite, quʹil <strong>de</strong>vienne au‐<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> vos forces <strong>de</strong> la soutenir,<br />

vous nʹauriez autre chose à faire quʹà déclarer humblement que vous ne pouvez plus sou‐<br />

tenir la tâche et vos Supérieurs y aviseraient; <strong>de</strong> la sorte, sans briser votre vocation et peut‐<br />

être votre avenir spirituel par un coup <strong>de</strong> tête que vous regretteriez bien après, vous au‐<br />

riez le soulagement qui vous serait nécessaire. Les Supérieurs sont les pères <strong>de</strong> ceux qui<br />

travaillent <strong>avec</strong> eux, ils ne veulent pas les charger au <strong>de</strong>là <strong>de</strong> leurs forces, mais en est‐il<br />

ainsi pour vous? Vous reconnaissez que vous êtes loin dʹavoir <strong>de</strong>s occupations trop multi‐<br />

pliées, vous voyez que les fonctions dont vous êtes chargé sont utiles et dʹune réelle im‐<br />

portance pour lʹœuvre excellente à laquelle vous êtes attaché; votre seul embarras est dʹar‐<br />

river à dominer les jeunes gens sans trop <strong>de</strong> rigueur et sans aliéner leurs esprits. Je le ré‐<br />

pète, cher ami, en persévérant, en continuant à prier, en voyant dans ces pauvres enfants<br />

Jésus‐Christ lui‐même que vous servez dans leurs personnes, en tâchant <strong>de</strong> combiner heu‐<br />

reusement vos moyens <strong>de</strong> discipline <strong>avec</strong> lʹinfluence quʹexerce M. Halluin, vous pouvez<br />

arriver à <strong>de</strong> bons résultats. Je ne dis pas que le travail sera sans peine, sans quelques<br />

contrariétés crucifiantes, mais, cher enfant, nous sommes les disciples du Dieu crucifié,<br />

nous avons nos fautes à expier, notre amen<strong>de</strong>ment à mériter, et le Ciel à gagner; pensez à<br />

tout cela, cher enfant, dans vos moments <strong>de</strong> peine, recourez à la S te Vierge qui vous gar<strong>de</strong>,<br />

et vous traverserez les épreuves sans encombre.<br />

Voilà, mon cher enfant, ce que je trouve aujourdʹhui pour votre consolation; ne re‐<br />

gar<strong>de</strong>z pas en arrière, ayez gran<strong>de</strong> confiance au Seigneur, Il ne vous délaissera point. Ecri‐<br />

vez‐moi quelquefois, soyez sûr que M. Halluin ne le trouvera pas mauvais; je prierai pour<br />

vous, ne mʹoubliez pas non plus et priez aussi pour que la charité, trésor <strong>de</strong> notre petite<br />

famille, <strong>de</strong>meure toujours parmi nous, à Arras comme à Vaugirard et partout où le Sei‐<br />

gneur nous emploiera à son service.<br />

Je vous embrasse affectueusement.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Embrassez pour moi Paul Piard, encouragez‐le bien. Mille affections aussi à tous<br />

nos frères. Ne vous préoccupez point <strong>de</strong> la position <strong>de</strong> M. Daviron, cʹest un fait isolé, tem‐<br />

poraire; son caractère <strong>de</strong> prêtre suffit, <strong>avec</strong> ses bonnes qualités, pour lui concilier votre<br />

respect et votre affection. Offrez mon respect à vos bons parents.<br />

505 à M. Halluin<br />

Une vraie vocation exige abnégation et don total. Un attrait pour les Œuvres ne suffit pas. Un jeune frère a du<br />

mal à dominer son caractère.<br />

Vaugirard, 8 décembre [1857]<br />

Immaculée Conception<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Aujourdʹhui, fête <strong>de</strong> lʹImmaculée Conception <strong>de</strong> la T. Ste Vierge, nous nous sommes<br />

souvenus que cʹétait la première communion <strong>de</strong> quelques‐uns <strong>de</strong> vos chers enfants. Nous<br />

634


avons tous prié pour eux à la S te Messe. Hier aussi, la communauté les avait recommandés<br />

aux tendres miséricor<strong>de</strong>s <strong>de</strong> notre bien‐aimée Mère. Trois <strong>de</strong> nos enfants ont été admis au<br />

nombre <strong>de</strong>s persévérants. Un jeune frère nouveau faisait aussi son entrée parmi nous. Il<br />

prendra place aux ateliers, sachant déjà assez bien travailler comme cordonnier. Il a 24 ans.<br />

Nous pensons quʹil ira bien, quand il aura fait un temps suffisant <strong>de</strong> noviciat. Nous en at‐<br />

tendons, pour le mois <strong>de</strong> janvier, un autre qui est commis dans une maison <strong>de</strong> commerce,<br />

au Mans. Il nous paraît être animé <strong>de</strong> très bonnes dispositions. Puisse le bon Dieu inspirer<br />

à ceux‐là et à tous <strong>de</strong>s sentiments <strong>de</strong> vraie charité et <strong>de</strong> sincère dévouement. On croit,<br />

parce quʹon a quelque attrait pour les œuvres charitables, quʹon est fait pour le service <strong>de</strong><br />

Dieu, mais il faut, pour y être propre, lʹabnégation et le sacrifice entier <strong>de</strong> soi‐même; plus<br />

dʹun sʹaperçoit que cʹest beaucoup plus quʹil nʹavait pensé. Nous nʹavons dʹailleurs rien <strong>de</strong><br />

nouveau. Lʹaffaire dʹAngers va lentement, nous ne savons encore quelle en sera lʹissue. M.<br />

lʹabbé Choyer souhaite toujours également nous donner son œuvre, mais il nʹest pas en‐<br />

core absolument libre. Il est venu nous voir ces jours <strong>de</strong>rniers. Nous laissons tout cela aux<br />

mains <strong>de</strong> Dieu et nous ferons ce qui nous semblera être sa volonté.<br />

Le f. Carment, comme il lʹannonçait dans la lettre que vous mʹavez envoyée <strong>de</strong> lui,<br />

mʹa écrit particulièrement sur une feuille <strong>de</strong> gros papier pris à lʹun <strong>de</strong> ses cahiers. Je nʹai<br />

pas été mécontent <strong>de</strong> sa lettre, qui nʹest à proprement dire quʹune confession et une justifi‐<br />

cation sur quelques points. Il parle <strong>de</strong> vous <strong>avec</strong> respect, <strong>de</strong> lʹœuvre <strong>avec</strong> une sincère affec‐<br />

tion, je crois quʹil la quitterait <strong>avec</strong> peine. Pourquoi ne peut‐il maîtriser assez son impétuo‐<br />

sité naturelle et se concerter <strong>avec</strong> vous plus simplement en se tenant en docilité sous votre<br />

main. Je regrette bien, cher Monsieur lʹabbé, que cet instrument soit si crucifiant pour<br />

vous. Mais que faire? Peut‐être arriverez‐vous à lʹassouplir davantage; il nʹest pas insensi‐<br />

ble, tant sʹen faut, aux marques <strong>de</strong> confiance et dʹaffection. Je pense que Dieu permet, pour<br />

vous éprouver, toutes ces peines, mais quʹIl ne voudrait point quʹil en sorte aucun mal<br />

pour vous, pour votre petite communauté, ni pour vos enfants.<br />

Soyez sûr que vous me trouverez toujours disposé à prendre toutes les mesures que<br />

vous croiriez utiles. Je mʹen rapporte pleinement à votre charité et à votre pru<strong>de</strong>nce, un<br />

seul mot dʹavertissement me suffirait.<br />

Je joins ici la réponse <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Ségur touchant le livre <strong>de</strong> M. Lequette.<br />

Les souliers faits par lʹatelier <strong>de</strong> nos cordonniers seront à votre disposition la se‐<br />

maine prochaine.<br />

Nous embrassons tous nos ff. dʹArras. Je suis <strong>avec</strong> une tendre et respectueuse affec‐<br />

tion, votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

506 à M. Caille<br />

Un collaborateur <strong>de</strong> M. Caille pourrait entrer en communauté. Nouvelles dʹArras. M. Myionnet est à Angers<br />

pour affaires <strong>de</strong> famille. Au milieu <strong>de</strong>s difficultés, ne pas oublier que le Seigneur veille sur nous.<br />

Vaugirard, 14 décembre 1857<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Votre lettre, comme vous le pensez bien, nous a causé une gran<strong>de</strong> et douce joie;<br />

nous y avons vu, dans les bonnes dispositions <strong>de</strong> M. lʹabbé Deberly, une <strong>de</strong> ces marques<br />

manifestes que le divin Maître sʹest plu constamment à donner <strong>de</strong> sa protection à notre pe‐<br />

635


tite famille et à ses œuvres. Grâce à cette heureuse adjonction, que nous osons regar<strong>de</strong>r dé‐<br />

jà comme assurée, les moyens nous seront donnés <strong>de</strong> mettre notre chère maison dʹAmiens<br />

dans les conditions heureuses que le bon Seigneur a ménagées à nos autres œuvres. Nous<br />

pourrons, en effet, durant le temps que M. Deberly passerait à Vaugirard, le faire rempla‐<br />

cer provisoirement à Amiens. Dieu veuille que ces agréables prévisions se réalisent au<br />

temps marqué par sa sagesse; nous serons prêts à suivre en tout son adorable volonté.<br />

Jʹai lu <strong>avec</strong> joie les détails <strong>de</strong> votre petite fête <strong>de</strong> la Présentation; elle a eu évi<strong>de</strong>m‐<br />

ment un très bon effet sur vos frères; cette impression, jointe à la joie que leur donne la<br />

disposition favorable <strong>de</strong> M. Deberly, a répandu dans leurs petites lettres une expansion<br />

que je nʹy avais pas vue <strong>de</strong>puis longtemps; soyez bien sûr que vous les attacherez à leurs<br />

travaux et les rendrez plus forts en faisant en sorte <strong>de</strong> leur donner <strong>de</strong> temps en temps<br />

quelques ressentiments 294 <strong>de</strong> la vie commune.<br />

Nous allons ici, comme <strong>de</strong> coutume, assez bien, les esprits et les corps semblent en<br />

assez bonne disposition. Il nous est arrivé un frère pour les ateliers, nous les croyons bien<br />

bon sujet, mais il nʹa pas dʹinstruction; un autre, un peu plus avancé <strong>de</strong> ce côté, nous arrive<br />

en janvier, du Mans, où il est commis <strong>de</strong> commerce.<br />

Lʹaffaire dʹAngers a fait quelques pas, sans être encore assez dégagée pour pouvoir<br />

se tourner tout à fait vers nous; nous laissons aller les choses dans le sens quʹil plaira à<br />

Dieu. Le f. Myionnet est en ce moment à Angers jusquʹà la fin <strong>de</strong> cette semaine pour ar‐<br />

ranger quelques affaires <strong>de</strong> famille.<br />

Je nʹai point <strong>de</strong> nouvelles toutes fraîches dʹArras; on allait assez bien, non toutefois<br />

sans quelques petites difficultés pour la surveillance <strong>de</strong>s grands jeunes gens; le f. Carment<br />

la fait bien, mais M. Halluin craint un peu les vivacités <strong>de</strong> ce bon frère et le suit constam‐<br />

ment dans ses surveillances; le f. Carment en est un peu entravé; ces grands jeunes gens ne<br />

sont pas faciles à mener; M. Halluin, comme prêtre et Supérieur, a quelque influence sur<br />

eux; lʹavenir <strong>de</strong> lʹœuvre, augmentée comme elle lʹest en nombre, peut avoir <strong>de</strong>s difficultés,<br />

mais le bon Dieu veille sur ses enfants; ayons bonne espérance pour Arras comme pour<br />

Amiens et tout le reste, car les miséricor<strong>de</strong>s du Seigneur sont gran<strong>de</strong>s et dépassent tou‐<br />

jours les espérances <strong>de</strong> ses serviteurs.<br />

Adieu, mon bon ami, je vous embrasse affectueusement en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

507 à M. Guillot<br />

Conseils pour bien suivre les exercices <strong>de</strong> communauté. Comment lutter contre le découragement.<br />

Vaugirard, 15 décembre 1857<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Nʹayez jamais dʹembarras quand vous avez à mʹécrire; prenez la plume tout sim‐<br />

plement et laissez couler tout ce qui en tombera; <strong>avec</strong> qui serez‐vous à lʹaise, sinon <strong>avec</strong><br />

moi qui vous connais si bien et qui ai pour vous tant <strong>de</strong> dispositions à lʹindulgence et à<br />

lʹaffection?<br />

294 Le terme est pris ici en bonne part, au sens <strong>de</strong> souvenirs reconnaissants.<br />

636


Jʹai vu <strong>avec</strong> une vive satisfaction la bonne impression que vous avez gardée <strong>de</strong> la<br />

petite cérémonie du renouvellement <strong>de</strong>s vœux; jʹespère que cʹest le commencement dʹune<br />

régularité un peu plus gran<strong>de</strong> dans vos exercices; il ne faut pas se faire lʹesclave <strong>de</strong>s prati‐<br />

ques <strong>de</strong> la Communauté, on doit en faire le sacrifice quand la charité lʹexige, mais on doit<br />

aussi y être bien exact toutes les fois quʹon le peut faire sans détriment pour <strong>de</strong>s <strong>de</strong>voirs<br />

vraiment impérieux. La coopération plus intime et plus fraternelle du bon M. Deberly<br />

vous <strong>de</strong>viendra un moyen, je lʹespère, dʹarriver à cette fin, et vous y puiserez <strong>de</strong> nouvelles<br />

forces pour faire le bien à vos chers enfants et travailler à votre propre amen<strong>de</strong>ment. Ne<br />

vous découragez jamais, cher enfant, ni <strong>de</strong>s difficultés <strong>de</strong> vos travaux, car Dieu vous en ré‐<br />

compensera et vous donnera son ai<strong>de</strong>, ni <strong>de</strong> vos défauts qui servent à vous humilier et<br />

vous obligent à <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r souvent le secours dʹEn Haut. Relevez‐vous toujours, <strong>de</strong>man‐<br />

<strong>de</strong>z pardon à Dieu, excusez‐vous si vous voyez quelque manque <strong>de</strong> charité, et puis repre‐<br />

nez votre route comme si <strong>de</strong> rien nʹétait. En faisant ainsi, on avance toujours sans sortir <strong>de</strong><br />

la bonne voie, et, dût‐on tomber jusquʹau <strong>de</strong>rnier jour, on se relèvera dans les bras <strong>de</strong><br />

Dieu.<br />

Je vous embrasse, cher ami, bien affectueusement. Tous nos frères ont aussi pour<br />

vous un tendre attachement et ne vous oublient pas <strong>de</strong>vant Dieu.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

508 à M. Halluin<br />

Embarras pour le remplacement du frère Carment, retenu au chevet <strong>de</strong> son père. Brèves nouvelles <strong>de</strong>s Persévé‐<br />

rants et <strong>de</strong> la communauté <strong>de</strong> Vaugirard.<br />

Vaugirard, 19 décembre 1857<br />

Bien cher Monsieur lʹabbé,<br />

Je voulais répondre immédiatement à votre lettre du 16, jʹen ai été empêché par une<br />

sortie indispensable. De plus, le f. Myionnet est à Angers pour régler une affaire <strong>de</strong> famille<br />

urgente, je me trouve un peu plus chargé. Les quelques mots que je reçois <strong>de</strong> vous aujour‐<br />

dʹhui, <strong>avec</strong> la lettre y jointe du f. Carment, me peinent vivement. Je vois vos embarras et je<br />

ne trouve que <strong>de</strong>s moyens insuffisants pour y remédier. Il me paraît bien difficile <strong>de</strong> rap‐<br />

peler le f. Carment, tant que son père reste en danger <strong>de</strong> mort. Je mets bien volontiers à vo‐<br />

tre disposition, pour vous ai<strong>de</strong>r durant cette semaine, ou le f. Alphonse [Vasseur], ou le f.<br />

Legallais qui sont les plus soli<strong>de</strong>s pour la surveillance; mais je ne me dissimule pas,<br />

comme vous le prévoyez vous‐même, quʹun frère étranger à la maison dʹArras et non<br />

connu <strong>de</strong>s enfants ne peut guère prendre influence dʹemblée sur eux et les diriger utile‐<br />

ment. Je vous laisse juge <strong>de</strong> ce qui sera le mieux et mets ce moyen à votre disposition.<br />

Nous nʹaurions pas hésité, M. Lantiez et moi, à nous priver, pour vous ai<strong>de</strong>r, <strong>de</strong> M.<br />

Myionnet, quelque nécessaire quʹil nous soit aux approches <strong>de</strong> Noël et pour le mouvement<br />

général <strong>de</strong> la maison; mais je lʹattendais aujourdʹhui et je reçois <strong>de</strong> lui, à lʹinstant, une lettre<br />

par laquelle il mʹannonce quʹil ne peut revenir que mardi et plus probablement jeudi.<br />

Je ne réponds que sommairement aux autres points <strong>de</strong> votre lettre, ne voulant pas<br />

retar<strong>de</strong>r lʹenvoi <strong>de</strong> celle‐ci. Nous prions bien cordialement pour votre retraite. Nous tâ‐<br />

chons, au milieu <strong>de</strong> lʹactivité <strong>de</strong> nos œuvres, <strong>de</strong> ne pas oublier que le principal secours est<br />

dans la prière et que, sans la grâce, nous ne pouvons rien. La lettre que mʹavait écrite M.<br />

637


Carment était, comme je vous lʹai dit, bien convenable, mais je ne suis pas satisfait du tout<br />

<strong>de</strong> celle que vous me communiquez. Jʹaurai soin <strong>de</strong> lʹen avertir en temps opportun. Jʹes‐<br />

père que la précipitation et la peine quʹil a <strong>de</strong>s souffrances <strong>de</strong> son père peuvent un peu<br />

diminuer ce quʹil y a <strong>de</strong> répréhensible dans la ru<strong>de</strong>sse <strong>de</strong> ses paroles; mais ce nʹest pas une<br />

excuse suffisante.<br />

Je suis bien aise que Paul Piard soit employé seulement comme ai<strong>de</strong> pour vos clas‐<br />

ses et nʹait pas la direction dʹune division. Ces jeunes sujets ont trop peu dʹaplomb pour<br />

conduire sagement et soutenir les enfants dʹune classe; il faut quʹil soient eux‐mêmes sou‐<br />

tenus et dirigés, on nʹen peut tirer parti quʹà cette condition.<br />

Je recevrai <strong>avec</strong> plaisir <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> Brice. Votre petit mot dʹaujourdʹhui nʹen<br />

parlant point, jʹespère quʹil va mieux. Le f. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] est alité, je ne sais si<br />

son indisposition va prendre <strong>de</strong> la gravité. M. <strong>de</strong> Lauriston a, comme vous le pensez, né‐<br />

gligé ses affaires; il nʹa, <strong>de</strong>puis six mois, pas touché un sol <strong>de</strong> ses petits revenus et ne nous<br />

a remis que les petites sommes quʹil avait disponibles à sa venue chez nous. Dès quʹil rece‐<br />

vra quelque chose, il pensera certainement aux obligations quʹil avait acceptées. Il se dé‐<br />

concerte facilement et, bien que ses occupations ne soient pas énormes, il sʹen laisse faci‐<br />

lement embarrasser.<br />

Les souliers vous seront envoyés au commencement <strong>de</strong> la semaine.<br />

Je clos cette lettre un peu en hâte, cher Monsieur lʹabbé, pour ne pas manquer le<br />

courrier; je souhaite bien quʹelle vous trouve un peu allégé dans vos difficultés; comptez<br />

que nous ferons pour vous ai<strong>de</strong>r, <strong>de</strong> notre côté, tout ce que nous pourrons.<br />

Jʹembrasse vous et tous nos frères en J. et M. et suis, <strong>avec</strong> une respectueuse affec‐<br />

tion.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Jʹécris au f. Carment que je mʹen rapporte à sa conscience pour abréger son ab‐<br />

sence autant quʹil le pourra. Je crois quʹon peut compter quʹil nʹen abusera pas et ne perdra<br />

pas un moment. Ferdinand et Jules vous offrent leurs respects.<br />

509 à M. Carment<br />

Concilier piété filiale et <strong>de</strong>voir dʹétat. Règles pour écrire à son Supérieur, prêtre.<br />

Vaugirard, 19 décembre 1857<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Notre bon abbé Halluin me renvoie la petite lettre que vous lui écrivez pour lui ex‐<br />

poser la difficulté que vous auriez à quitter votre bon père dans lʹétat grave où il se trouve;<br />

il comprend bien cette situation et nʹinsiste pas. Je lui réponds pour mettre à sa disposition<br />

quelquʹun <strong>de</strong> nos frères temporairement, mais je pense, et il semble lui‐même croire, quʹun<br />

frère étranger à la maison dʹArras ne pourra guère prendre dʹemblée gran<strong>de</strong> autorité sur<br />

les enfants. Il faut toujours un certain temps pour établir sur eux quelque influence, ce<br />

moyen ne serait donc pas dʹun grand secours. Je pense comme vous, cher enfant, que vous<br />

<strong>de</strong>vez rester en ce moment près <strong>de</strong> votre bon père, mais vous voyez la gêne où se trouve<br />

M. Halluin. Vous ne prolongerez donc votre séjour à Amiens quʹautant que vous y verrez<br />

une réelle utilité. Je mʹen rapporte bien volontiers sur ce point à votre conscience qui saura<br />

638


concilier ce que vous <strong>de</strong>vez à vos bons parents à ce que vos autres obligations peuvent<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r. Le mé<strong>de</strong>cin vous éclairera pour cela, si lʹétat <strong>de</strong> votre bon père sʹaméliorait sen‐<br />

siblement. En tout état <strong>de</strong> choses, nous prions Dieu <strong>de</strong> donner secours, et à votre cher ma‐<br />

la<strong>de</strong>, et à vos bons parents. Assurez‐les <strong>de</strong> notre vive sympathie et tout particulièrement<br />

<strong>de</strong> ma respectueuse affection. Tous nos frères sʹunissent à moi pour vous embrasser et<br />

vous réitérer lʹexpression <strong>de</strong> leur cordial attachement.<br />

Adieu, mon cher enfant, élevez bien souvent votre cœur en haut, tout secours vient<br />

<strong>de</strong> là; invoquez aussi votre bien‐aimée protectrice, la T. S te Vierge. Jʹai la confiance quʹelle<br />

sera, en vos peines et difficultés, tout près <strong>de</strong> vous.<br />

Votre affectionné ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Jʹai trouvé que le ton général <strong>de</strong> votre lettre à M. Halluin était ru<strong>de</strong> et pas assez<br />

respectueux. Cʹest un prêtre, un homme vénérable par ses vertus et le représentant <strong>de</strong><br />

Dieu pour vous. Appelez‐le dans vos lettres, Monsieur et cher Supérieur, et non Très cher<br />

abbé, ce qui est trop familier et pas assez déférent. M. Halluin ne fait aucune plainte, il<br />

sʹoublie volontiers lui‐même. Ces remarques sont <strong>de</strong> moi seul.<br />

510 à M. Decaux<br />

Vœux fraternels pour la nouvelle année.<br />

Vaugirard, 2 janvier 1858<br />

Bien cher ami,<br />

Je ne vais pas vous voir, vous savez pour quelle raison, mais mon cœur y va tout<br />

seul et se repose contre le vôtre dans la charité du Sauveur. Daigne ce bien‐aimé Maître<br />

vous soutenir dans la voie dʹar<strong>de</strong>ur sainte et <strong>de</strong> généreux dévouement où il vous a mis, et<br />

puissiez‐vous aussi chercher en Lui seul tous vos moyens et tous vos appuis. Ce sont les<br />

vœux bien sincère <strong>de</strong><br />

Votre bien affectionné et bien dévoué ami et frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

511 à M. Caille<br />

Lʹesprit <strong>de</strong> famille et <strong>de</strong> charité dans la Congrégation. Un abbé, proche <strong>de</strong> M. Caille, pense entrer en communau‐<br />

té. Pour MLP., il faudrait quʹil se donne sans tar<strong>de</strong>r ʺ<strong>de</strong> cœur et dʹeffetʺ.<br />

Vaugirard, 3 janvier 1858<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu vos bonnes et affectueuses lettres pour la St <strong>Jean</strong> et le nouvel an, ainsi que<br />

les petites épîtres <strong>de</strong> nos chers frères, et en même temps aussi la lettre <strong>de</strong> notre bon abbé<br />

M. Deberly. Le tout ensemble mʹa causé une douce satisfaction par le bon esprit dʹaffection<br />

et <strong>de</strong> cordiale charité qui y règne; nous vivons dans le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> la charité, et il est bien<br />

naturel que nous en ayons avant tout dans notre petite famille; je le dis <strong>avec</strong> joie, elle nʹen<br />

est pas, grâce à Dieu, dépourvue. Jʹai la confiance quʹelle <strong>de</strong>meurera dans les mêmes sen‐<br />

timents et ne fera, <strong>avec</strong> le temps, que les accroître et les confirmer.<br />

639


Nous allons assez bien ici, sauf quelques petites indispositions qui, je lʹespère, ne<br />

prendront point <strong>de</strong> gravité. Les <strong>de</strong>rnières nouvelles dʹArras nʹétaient pas non plus défavo‐<br />

rables, lʹabsence du f. Carment y cause un peu <strong>de</strong> surcharge pour la maison, espérons que<br />

la santé <strong>de</strong> son père <strong>de</strong>viendra moins inquiétante et lui permettra <strong>de</strong> retourner à son poste.<br />

Les jours que nous traversons nous ont tellement dérangés quʹà peine je trouve un mo‐<br />

ment pour vous écrire ces quelques lignes; je vous écrirai quand le fort du mouvement du<br />

nouvel an sera passé; jʹai voulu seulement vous remercier tous sans tar<strong>de</strong>r davantage <strong>de</strong><br />

vos témoignages <strong>de</strong> bonne affection, et vous dire une fois <strong>de</strong> plus que tous nos sentiments<br />

<strong>de</strong> vif attachement sont et seront jusquʹà la fin bien assurés à notre chère maison dʹAmiens.<br />

Le Seigneur, je lʹespère, daignera suppléer à mon insuffisance et répandra sur vous ses<br />

lumières, ses appuis et ses bénédictions, pour vos âmes comme pour toutes celles que vo‐<br />

tre charité souhaite <strong>de</strong> conduire à Lui.<br />

Jʹai bien regretté dʹavoir trop peu vu M. Deberly dans la courte visite quʹil nous a<br />

faite, le temps nous a manqué pour bien nous entendre; je nʹai pu démêler assez nettement<br />

ses dispositions pour lui donner une solution quelconque; nous nʹavons pas été assez li‐<br />

bres pour nous entretenir bien complètement; jʹespère que, par lettre, nous pourrons<br />

mieux nous entendre. Le fond <strong>de</strong> ma pensée est quʹil <strong>de</strong>vrait se donner dès ce moment <strong>de</strong><br />

cœur et dʹeffet à la Communauté, réserve faite <strong>de</strong> la volonté <strong>de</strong> M gr lʹEvêque dʹAmiens, qui<br />

ne me paraît pas, quant au fond, avoir voulu empêcher cette union, mais avoir <strong>de</strong>mandé<br />

seulement quʹelle se fît graduellement et <strong>avec</strong> cette mesure que nous mettons ordinaire‐<br />

ment dans notre marche. M gr a dû comprendre que M. Deberly lui <strong>de</strong>mandait dʹun seul<br />

coup un exeat et une sorte <strong>de</strong> renoncement absolu à disposer <strong>de</strong> lui; je suis convaincu que,<br />

si M. Deberly se fût borné à dire à M gr quʹayant fait lʹessai <strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong> charité et vu <strong>de</strong><br />

plus près les œuvres <strong>de</strong> la Communauté, il persistait à penser quʹil pourrait faire le bien en<br />

union <strong>avec</strong> elle, notre bon Seigneur eût répondu: “Eh bien! continuez vos épreuves et nous<br />

verrons.” Cʹest, à vrai dire, le sens <strong>de</strong> sa réponse; aussi nʹai‐je pas dʹinquiétu<strong>de</strong> ni <strong>de</strong> pré‐<br />

occupation à ce sujet. Je crois aussi quʹil faut prendre lʹesprit <strong>de</strong> cette réponse pour régler<br />

nos rapports <strong>avec</strong> le bon M. Deberly, le considérer comme un frère et agir <strong>avec</strong> lui en le te‐<br />

nant comme tel. Je souhaite bien que lui‐même se sente une pareille disposition à notre<br />

égard. La seule difficulté me paraît être en ce que M. Deberly ne se croit pas bien <strong>de</strong> la<br />

Communauté tant quʹil nʹa pas fait <strong>de</strong> promesse formelle qui lʹattache à elle religieuse‐<br />

ment. Il me semble que, du jour où on sʹest donné <strong>de</strong> cœur et dʹeffet à un corps <strong>de</strong> tous ses<br />

moyens possibles, on appartient réellement à ce corps; que notre bon abbé fasse ainsi, quʹil<br />

sʹattache à nous pleinement et sans aucune pensée <strong>de</strong> retour, <strong>avec</strong> la réserve seule <strong>de</strong>s vo‐<br />

lontés <strong>de</strong> lʹautorité supérieure ecclésiastique; il sera véritablement <strong>de</strong>s nôtres sans néan‐<br />

moins sʹécarter <strong>de</strong> la soumission quʹil doit à son Evêque. Jʹai dʹailleurs la conviction que,<br />

lors <strong>de</strong> mon premier voyage ou à quelque autre prochaine occasion, le divin Seigneur nous<br />

ménagera les moyens dʹobtenir du vénérable Pontife une décision pleinement favorable.<br />

Prions bien, la prière achèvera lʹœuvre commencée et lui donnera sa perfection.<br />

La protectrice du jeune Normandie nous a écrit quʹelle vous avait remis le prix <strong>de</strong> sa<br />

pension; je vous serai obligé, dans votre prochaine, <strong>de</strong> nous dire le chiffre <strong>de</strong> la somme re‐<br />

çue par vous, afin que nous sachions où nous en sommes dans ce compte.<br />

Adieu, mon bien bon ami, faites bien <strong>de</strong>s affections <strong>de</strong> notre part à tous nos frères.<br />

Je regrette <strong>de</strong> ne pas leur écrire aujourdʹhui; je le ferai certainement plus tard.<br />

640


Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Offrez mon respectueux souvenir à M. lʹabbé Mangot.<br />

512 à M. Halluin<br />

Porter sa croix dans les œuvres. Nouvelles <strong>de</strong>s frères. Bonheur et mérite <strong>de</strong> la vocation religieuse et charitable.<br />

Vaugirard, 5 janvier 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Combien je regrette dʹavoir laissé tant <strong>de</strong> jours sans réponse votre bonne lettre et<br />

celles <strong>de</strong> nos ff. dʹArras et <strong>de</strong> ne vous avoir pas remercié plus vite <strong>de</strong> vos bons souhaits, à<br />

lʹoccasion <strong>de</strong> la St <strong>Jean</strong> et du nouvel an. Ce sont précisément ces <strong>de</strong>ux circonstances qui<br />

mʹont mis en retard par les dérangements dont ils ont été la cause. Je sens vivement, en cas<br />

semblable, combien dans les communautés lʹordre habituel et régulier est nécessaire, et<br />

combien tout ce qui le peut troubler doit être soigneusement évité. Merci mille fois, cher<br />

Monsieur lʹabbé et bien bon ami, <strong>de</strong> toutes vos bonnes et encourageantes paroles, <strong>de</strong> vos<br />

vœux pour moi qui le mérite si peu, <strong>de</strong> votre affection pour notre petite famille <strong>de</strong> Vaugi‐<br />

rard qui le rend bien à celle que le bon Dieu a mise sous votre conduite. Je lui rends grâce<br />

<strong>de</strong> la cordiale union quʹIl établit <strong>de</strong> plus en plus entre nous et du lien <strong>de</strong> pure charité par<br />

lequel Il nous attache entre nous et à Lui‐même. Je dis <strong>de</strong> pure charité parce quʹaucune vue<br />

humaine ne nous a rapprochés les uns <strong>de</strong>s autres et quʹaucun intérêt propre ne nous attire<br />

non plus aux œuvres laborieuses et humbles que nous faisons pour son service. Je sens<br />

bien quelles sont vos croix, cher Monsieur lʹabbé, et jʹen comprends dʹautant mieux le<br />

poids que <strong>de</strong>s épreuves pareilles aux vôtres nous sont ménagées journellement par la main<br />

du divin Seigneur. Jʹavoue pourtant que votre tâche est plus ru<strong>de</strong> encore que la nôtre,<br />

parce que vous êtes moins secondé et que, <strong>de</strong> toutes nos œuvres, la vôtre est peut‐être celle<br />

qui exige le plus <strong>de</strong> sacrifices et dʹabnégation. Mais le bon Dieu le sait bien aussi. Il voit<br />

vos efforts, vos labeurs <strong>de</strong> chaque jour, jʹai la confiance quʹaprès vous avoir laissé asseoir<br />

cette institution aux prix <strong>de</strong> tant <strong>de</strong> peines et <strong>de</strong> fatigues, Il vous donnera les ai<strong>de</strong>s et allé‐<br />

gements que sa sagesse et son amour auront préparés. Allons donc toujours, cher Mon‐<br />

sieur lʹabbé, en abandon et gran<strong>de</strong> assurance, le Père qui nous aime nous suit <strong>de</strong>s yeux,<br />

portons notre croix pour Lui plaire. Il la fera servir à sanctifier et bénir nos travaux. Je fe‐<br />

rai, <strong>de</strong> mon côté, en toute circonstance, ce qui sera possible pour bien associer nos efforts<br />

aux vôtres, et alléger, pour notre bonne union, nos difficultés réciproques.<br />

Jʹai reçu une lettre récente du f. Carment. Son père était toujours dans un état peu<br />

rassurant. Il est bien décidé, dès quʹun mieux un peu plus sensible va se montrer, à ne met‐<br />

tre aucun retard à vous rejoindre. Il me paraît regretter sincèrement <strong>de</strong> ne pas apporter sa<br />

part accoutumée à vos travaux. Jʹespère que son absence ne se prolongera pas beaucoup,<br />

en quelque sens que tournent les choses.<br />

Je pense <strong>avec</strong> vous que le f. Cousin, un peu formé, vous serait dʹun assez bon se‐<br />

cours. Nous le recevrons quand vous croirez utile <strong>de</strong> nous lʹenvoyer. Un ou <strong>de</strong>ux mois le<br />

reposeraient assez peut‐être, mais je ne sais si ce serait un temps suffisant pour le bien<br />

former aux exercices <strong>de</strong> communauté quʹil paraît comprendre et mieux goûter que les au‐<br />

tres.<br />

641


Nous allons assez bien ici, sauf lʹindisposition <strong>de</strong> trois <strong>de</strong> nos frères. Le f. Beauvais,<br />

<strong>de</strong> Nazareth, est absent pour quelques embarras dʹaffaires dans sa famille. Je le recom‐<br />

man<strong>de</strong> à vos prières. Il est fort peiné <strong>de</strong>s soucis <strong>de</strong> son père, excellent homme, mais qui a<br />

laissé un peu ses affaires sʹencombrer. Notre cher enfant est bien jeune pour lʹassister uti‐<br />

lement par ses conseils, il a besoin <strong>de</strong> lʹai<strong>de</strong> du Seigneur. Cʹest un excellent sujet et un <strong>de</strong><br />

nos frères les plus sûrs et les plus dévoués.<br />

Le f. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] a tenu compte <strong>de</strong> vos avis et a fait quelque mouvement<br />

pour régler ses affaires à Arras. Il est toujours bien bon, mais pas dʹune gran<strong>de</strong> force phy‐<br />

sique et se troublant aisément dans lʹaction. Son bon esprit et sa piété le ren<strong>de</strong>nt néan‐<br />

moins bien utile partout où il est placé.<br />

Je voudrais écrire à tous nos ff. dʹArras quelques mots particuliers pour chacun,<br />

mais cela me mènerait trop loin aujourdʹhui et mʹobligerait à retar<strong>de</strong>r encore lʹenvoi <strong>de</strong><br />

cette lettre. Assurez‐les, cher Monsieur lʹabbé, que la plus vraie, la plus sincère affection<br />

nous unit à eux, que nous ne mettons <strong>de</strong>vant Dieu et dans sa charité aucune différence en‐<br />

tre eux et ceux <strong>de</strong> nos frères qui sont constamment sous nos yeux. Nous <strong>de</strong>mandons ar‐<br />

<strong>de</strong>mment pour eux au Seigneur quʹils comprennent toujours <strong>de</strong> mieux en mieux combien<br />

il les a privilégiés en les retirant <strong>de</strong>s dangers du mon<strong>de</strong> et en les attachant à son service.<br />

Nous les assurons quʹà mesure quʹils avanceront et croîtront en expérience et en lumière,<br />

ils verront <strong>de</strong> plus en plus clairement tout ce quʹil y a dʹerreurs, <strong>de</strong> mensonges et <strong>de</strong> misè‐<br />

res dans la société si malheureusement pervertie dont ils se sont éloignés. Y faire son salut<br />

y est chose bien malaisée, tandis que, dans la voie paisible où ils se trouvent, leur sanctifi‐<br />

cation est assurée. Nous leur souhaitons aussi <strong>de</strong> comprendre que sous la croix et les ru<strong>de</strong>s<br />

labeurs <strong>de</strong> la vie, il y a <strong>de</strong>s douceurs cachées et que Dieu les répand sur les amis fidèles qui<br />

le servent <strong>avec</strong> dévouement et persévérance. Puissent ces faveurs célestes tomber sur eux<br />

en abondance et plénitu<strong>de</strong>, puissent leurs cœurs trouver dans la divine charité un secours,<br />

une consolation dans leurs peines, une espérance et un avant‐goût du Ciel. Ce sont les<br />

vœux que je forme pour vous, cher Monsieur lʹabbé, et pour eux tous, jʹespère que notre<br />

Père Céleste daignera les exaucer.<br />

Je me tiens <strong>avec</strong> vous, cher Monsieur lʹabbé, contre le divin Cœur <strong>de</strong> Jésus et je suis<br />

en Lui<br />

Votre ami et Père tout dévoué<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Ci‐joint un petit mot pour Paul Piard. Cet enfant a besoin dʹêtre <strong>de</strong> temps en<br />

temps stimulé spirituellement; il est disposé aux scrupules; je ne sais pas au fond ce qui<br />

lʹéloigne <strong>de</strong> la communion fréquente; je crains quʹil nʹy ait quelques fragilités qui <strong>de</strong>man‐<br />

<strong>de</strong>raient du soutien; je pense quʹil faut lʹexhorter à se confesser souvent.<br />

Ma santé est faible, mais je vais jusquʹici sans acci<strong>de</strong>nts.<br />

513 à M. Halluin<br />

Les jeunes sujets ont besoin dʹêtre constamment soutenus et suivis. ʺcʹest une œuvre <strong>de</strong> longue haleine <strong>de</strong> former<br />

<strong>de</strong>s âmes pour le service <strong>de</strong> Dieuʺ.<br />

8 janvier 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> peine les difficultés qui vous adviennent <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> notre f. Au‐<br />

gustin [Bassery]. Je ne puis en apprécier exactement lʹétendue, la réserve que vous avez dû<br />

642


mettre dans votre lettre ne mʹayant permis que dʹentrevoir, soit la nature <strong>de</strong> vos craintes,<br />

soit la gravité <strong>de</strong>s faits qui les motivent. Mais je suis disposé à faire ce que vous croirez le<br />

plus opportun et le plus charitable, en rappelant toutefois que notre charité ne doit pas<br />

seulement avoir en vue le pauvre jeune homme quʹil sʹagit dʹéloigner dʹune occasion dan‐<br />

gereuse, mais encore les œuvres dans lesquelles il peut être employé, et la communauté à<br />

laquelle il est associé. Si la nature <strong>de</strong>s fautes quʹil se reproche est telle quʹon puisse en<br />

craindre justement le retour, ne serait‐il pas plus simple <strong>de</strong> lʹinviter amicalement à renon‐<br />

cer à une carrière pour laquelle il nʹaurait évi<strong>de</strong>mment ni vertu ni dévouement suffisants?<br />

Je vous invite, cher Monsieur lʹabbé, à examiner cette question <strong>de</strong>vant Dieu. Si, au<br />

contraire, vous pensez quʹil y eût plutôt faiblesse que perversité dans le cas et quʹil y ait<br />

lieu <strong>de</strong> temporiser et <strong>de</strong> le soumettre encore à quelque épreuve, je mʹen rapporte à votre<br />

pru<strong>de</strong>nce et je suis disposé à le recevoir à Nazareth, puisque vous jugez que ce lieu lui<br />

conviendrait mieux quʹun autre.<br />

Je vous laisse juge <strong>de</strong> ce qui sera le plus convenable pour ce qui regar<strong>de</strong> notre jeune<br />

Paul Piard. Si vous ne voyez pas dʹemploi pour lui, nous pourrons lui trouver sa place ici.<br />

Je crois néanmoins quʹen étant un peu conduit et soutenu, comme tous les jeunes gens <strong>de</strong><br />

cet âge en ont besoin, il pourrait vous être dʹun bon emploi dans un sens ou dans un autre.<br />

Jʹaurais bien mal rendu ma pensée si, dans ma <strong>de</strong>rnière lettre, je vous avais inspiré quel‐<br />

que défiance au sujet <strong>de</strong> cet enfant. Il a toujours été chez nous parfaitement réservé, mo‐<br />

<strong>de</strong>ste et régulier, mais porté au scrupule et ayant besoin dʹêtre stimulé spirituellement. A<br />

cet âge, ces jeunes sujets ne peuvent encore marcher seuls et ont besoin dʹavoir quelquʹun<br />

<strong>de</strong>rrière eux. Notre bon abbé Lantiez sʹen occupe <strong>avec</strong> intelligence et un grand dévoue‐<br />

ment, mais cʹest une œuvre <strong>de</strong> longue haleine <strong>de</strong> former <strong>de</strong>s âmes pour le service <strong>de</strong> Dieu.<br />

Tous les soins possibles ne peuvent dʹailleurs les pousser au <strong>de</strong>là <strong>de</strong> leurs aptitu<strong>de</strong>s dʹes‐<br />

prit et <strong>de</strong> leur portée en zèle et abnégation. Cʹest là la part <strong>de</strong> Dieu, on peut la faire valoir<br />

et la mettre en culture, mais en changer le fond aucunement. Prions donc le Seigneur, cher<br />

Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> nous envoyer <strong>de</strong>s âmes nobles et généreuses, prêtes à se donner <strong>avec</strong><br />

cœur et dévouement; hors cela, nos soins, nos efforts nʹauront que <strong>de</strong>s résultats bien im‐<br />

parfaits.<br />

Je vous serai bien reconnaissant <strong>de</strong> profiter <strong>de</strong> la première occasion pour me ren‐<br />

voyer la copie que je vous ai laissée <strong>de</strong> notre règlement. Une petite modification que jʹai<br />

faite, à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> M. Pinaud, est à y introduire. Dʹune autre part, et cʹest ma raison<br />

principale, une partie <strong>de</strong> la minute restée entre mes mains a été perdue par un copiste et,<br />

comme lʹunique copie que jʹen avais a été remise par moi à M gr lʹArchevêque, jʹaurais quel‐<br />

que difficulté à la faire revenir. Je ne manquerai pas <strong>de</strong> vous rendre ce document au plus<br />

tôt et par la première voie qui sʹoffrira.<br />

Nous allons ici comme <strong>de</strong> coutume; quelques frères sont un peu souffrants, <strong>de</strong>ux<br />

même sont alités, mais sans que leurs indispositions aient rien dʹinquiétant.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, portons au jour le jour les travaux et peines que le Sei‐<br />

gneur nous envoie; Il aura égard à nos bons désirs plus quʹà notre suffisance et, malgré no‐<br />

tre indignité, Il daignera tirer sa gloire <strong>de</strong> nos œuvres.<br />

Croyez, cher Monsieur lʹabbé, à tous mes sentiments respectueux et dévoués en J. et<br />

M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

643


514 à M. Carment<br />

MLP. invite le frère Carment à regagner sa communauté.<br />

Vaugirard, 14 janvier 1858<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je mʹétonne et mʹinquiète un peu <strong>de</strong> nʹavoir pas <strong>de</strong> vos nouvelles; votre bon père<br />

est‐il moins bien, ou êtes‐vous vous‐même souffrant? Jʹespère quʹil nʹen est rien; tirez‐moi<br />

<strong>de</strong> peine, cher enfant, en mʹécrivant quelques lignes qui nous rassurent.<br />

Une lettre que je reçois <strong>de</strong> notre cher M. Halluin me laisse craindre que ses embar‐<br />

ras nʹaugmentent encore; le f. Augustin [Bassery] va être obligé <strong>de</strong> sʹabsenter et rendra le<br />

personnel <strong>de</strong> la maison plus restreint, et conséquemment plus chargé. Il me semblerait<br />

donc bien désirable, si lʹétat <strong>de</strong> votre bon père nʹest pas empiré, comme je lʹespère, que<br />

vous puissiez donner un peu <strong>de</strong> soulagement au bon M. Halluin, comme je vous le disais<br />

<strong>de</strong>rnièrement; les communications sont si promptes et si faciles entre Arras et Amiens<br />

quʹon vous aura bien vite averti sʹil y avait quelque raison sérieuse <strong>de</strong> désirer votre pré‐<br />

sence dans votre famille.<br />

Je subordonne pourtant cette observation aux circonstances qui peuvent être assez<br />

impérieuses pour exiger la prolongation <strong>de</strong> votre séjour à Amiens; autrement, je suis assu‐<br />

ré que vous tiendrez compte <strong>de</strong> la gêne extrême où se trouve la maison dʹArras et que<br />

vous ferez tout ce qui dépendra <strong>de</strong> vous pour y donner quelque allégement. Jʹavais propo‐<br />

sé à M. Halluin <strong>de</strong> lui envoyer quelque ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> Vaugirard, mais, comme je le présumais<br />

bien, il a pensé quʹon ne pouvait sans inconvénient changer si souvent les enfants <strong>de</strong> main,<br />

que pour établir autorité sur eux, il fallait un peu <strong>de</strong> temps, et quʹun <strong>de</strong> nous, arrivant à<br />

lʹimproviste ne pouvait <strong>de</strong> suite avoir ascendant sur eux. Nous sommes dʹailleurs ici un<br />

peu éprouvés par quelques malaises. MM. Roussel, Faÿ, Boucault et Thuillier ont été plus<br />

ou moins indisposés; ils se trouvent mieux, mais sont encore imparfaitement remis.<br />

Adieu, mon cher enfant, offrez mon respect à vos bons parents, à votre cher mala<strong>de</strong><br />

particulièrement, et croyez‐moi bien <strong>avec</strong> une tendre affection<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

515 à M. Halluin<br />

La vocation du frère Bassery. Il est avantageux pour les postulants <strong>de</strong> séjourner en‐<strong>de</strong>hors <strong>de</strong> lʹŒuvre dʹorigine.<br />

A propos dʹun livre recensé par le frère <strong>de</strong> Mgr <strong>de</strong> Ségur.<br />

Vaugirard, 15 janvier 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Jʹai tardé un peu à vous répondre parce que la question relative au f. Augustin [Bas‐<br />

sery] voulait <strong>de</strong> la réflexion et ne laissait pas que <strong>de</strong> me préoccuper un peu péniblement. Il<br />

ne dépend pas <strong>de</strong> moi <strong>de</strong> le relever <strong>de</strong> ses vœux; notre Communauté restant soumise à la<br />

juridiction <strong>de</strong> lʹautorité diocésaine partout où elle est établie, les vœux du f. Augustin ne<br />

peuvent être déliés que par M gr lʹEvêque dʹArras. Nous répugnons beaucoup, pour vous<br />

comme pour nous, à cette mesure extrême qui sera nécessairement dʹun effet fâcheux pour<br />

vos frères et pour la Communauté tout entière. Jʹai consulté notre p. Beaussier. Son avis est<br />

quʹon ne doit <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s dispenses <strong>de</strong> vœux quʹen cas dʹabsolue nécessité et quand<br />

644


tous les autres moyens sont impraticables. Il lui paraîtrait donc bien meilleur que le f. Au‐<br />

gustin vînt à Nazareth achever lʹannée <strong>de</strong> ses vœux, si vous nʹy voyez pas <strong>de</strong> danger véri‐<br />

table, soit pour lui‐même, soit pour lʹœuvre à laquelle il serait attaché. La conscription, qui<br />

interviendra, peut dʹailleurs abréger le temps <strong>de</strong> son séjour dans la Communauté, en ap‐<br />

portant un cas <strong>de</strong> force majeure quʹon serait contraint <strong>de</strong> subir. En y réfléchissant, jʹentre<br />

bien dans cet avis, et, sʹil nʹy a pas dʹobstacle décisif, soit dans les dispositions et la volonté<br />

du f. Augustin, soit dans quelque autre raison par vous connue, je crois quʹil faudrait que<br />

ce bon enfant reprît courage et se résolût à marcher <strong>avec</strong> nous encore pour un peu <strong>de</strong><br />

temps. Sa retraite serait dʹautant plus fâcheuse à lʹégard <strong>de</strong>s autres frères quʹil ne nous se‐<br />

rait pas permis dʹen indiquer les causes réelles et quʹon nʹy verrait quʹune inconstance légi‐<br />

timée bien facilement, ce semble, par la dispense <strong>de</strong>s vœux. Lʹexemple <strong>de</strong> M. Polvêche a<br />

profondément contristé nos frères, et la facilité <strong>avec</strong> laquelle lʹArchevêché, mal informé sur<br />

sa situation, a donné la dispense a paru à tous un triste antécé<strong>de</strong>nt. Si nous pouvons en<br />

éviter le retour, ce sera bien préférable. Voilà, cher Monsieur lʹabbé, le résultat <strong>de</strong> notre<br />

examen dans cette affaire. Voyez vous‐même ce que les circonstances, mieux connues <strong>de</strong><br />

vous que <strong>de</strong> nous, permettent <strong>de</strong> faire. Je vous abandonne la décision, sûr que vous la<br />

prendrez <strong>de</strong>vant Dieu et pour le plus grand bien <strong>de</strong> tous. Tout le mon<strong>de</strong> ignore ici cette af‐<br />

faire, sauf MM. Lantiez et Myionnet. La situation du f. Augustin serait donc ce quʹelle était<br />

par le passé et nʹaurait rien ni <strong>de</strong> pénible ni dʹembarrassant pour lui.<br />

Quant à Paul Piard, son retour ne fait nulle difficulté, nous pouvons lʹemployer uti‐<br />

lement ici. Je regrette quʹil nʹait pu vous donner plus <strong>de</strong> secours. Je crois que, pour lui‐<br />

même, ce changement <strong>de</strong> lieu ne lui aura été quʹavantageux. Nos jeunes postulants gagne‐<br />

ront, je pense, à passer ainsi quelque temps hors <strong>de</strong>s lieux où ils auront été élevés.<br />

Je vous serai obligé, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> profiter <strong>de</strong> cette occasion pour me<br />

renvoyer la copie du règlement. Je ne manquerai pas moi‐même <strong>de</strong> vous la transmettre <strong>de</strong><br />

nouveau dès que nous aurons quelque moyen.<br />

Jʹai écrit au f. Carment, dont je nʹai pas reçu <strong>de</strong> nouvelles récentes, que je lʹinvitais, si<br />

lʹétat <strong>de</strong> son père laissait quelque répit, à retourner près <strong>de</strong> vous. Jʹattends une lettre <strong>de</strong> lui<br />

aujourdʹhui.<br />

Je fais, pour lʹaffaire <strong>de</strong> M. Lequette, tout ce que je peux. Ce bon Monsieur a fait<br />

confusion sur un point. Ce nʹest pas M gr <strong>de</strong> Ségur qui sʹoccupe <strong>de</strong> lʹŒuvre <strong>de</strong>s Militaires et<br />

qui a examiné son petit livre, mais bien M. Anatole <strong>de</strong> Ségur, Conseiller dʹEtat, frère du<br />

Prélat, et qui a fait plusieurs ouvrages pour lʹinstruction <strong>de</strong>s soldats auxquels il sʹest voué<br />

<strong>avec</strong> une gran<strong>de</strong> charité. M gr <strong>de</strong> Ségur sʹoccupera néanmoins, <strong>avec</strong> toute la bonne volonté<br />

possible, <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> M. Lequette. Je pense quʹil conviendrait <strong>de</strong> mettre dans la Se‐<br />

maine Religieuse, feuille qui paraît chaque semaine et annonce tous les exercices religieux<br />

du diocèse et <strong>de</strong>s diocèses environnants, un petit avis à peu près ainsi conçu: “Nous som‐<br />

mes informés quʹune station indiquée dans une ville <strong>de</strong> province pour le Carême prochain<br />

se trouvant empêchée par <strong>de</strong>s circonstances locales, un ecclésiastique, missionnaire apos‐<br />

tolique, qui <strong>de</strong>vait donner cette station se trouvera ainsi disponible. Nous croyons que cet<br />

avis peut intéresser vivement MM. les Curés ou chefs <strong>de</strong> communautés.”<br />

Si M. Lequette approuvait cette mesure, je vous prie, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> mʹen<br />

informer. Adieu, cher Monsieur lʹabbé, croyez à tous nos sentiments <strong>de</strong> tendre affection, et<br />

partagez‐les <strong>avec</strong> nos chers ff. dʹArras que nous embrassons, ainsi que vous, en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

645


516 à M. Halluin<br />

Le frère Augustin Bassery fait un essai à Nazareth. Que M. Halluin ménage ses forces dans lʹintérêt <strong>de</strong> ses en‐<br />

fants. Lʹunion <strong>avec</strong> lʹabbé Choyer se conclura ou non: ce sera selon les <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> Dieu.<br />

Vaugirard, 20 janvier 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Nos bons jeunes gens sont arrivés avant‐hier, dans la soirée, à Vaugirard. Tout le<br />

mon<strong>de</strong> les a accueillis, cela va sans dire, <strong>avec</strong> beaucoup dʹaffection. Je nʹai pas encore pu<br />

causer assez à loisir <strong>avec</strong> eux pour bien connaître leurs dispositions, mais jʹaurai soin <strong>de</strong> le<br />

faire au plus tôt. Je me suis entretenu déjà <strong>avec</strong> le f. Augustin [Bassery] qui mʹa parlé <strong>avec</strong><br />

simplicité et ouverture. Jʹai besoin pourtant <strong>de</strong> le revoir encore pour mieux juger <strong>de</strong> son<br />

état. Il mʹa paru décidé à faire ses efforts pour achever le temps <strong>de</strong> ses vœux, mais il eût<br />

bien préféré, mʹa‐t‐il dit, <strong>de</strong> <strong>de</strong>meurer près <strong>de</strong> vous jusquʹà la fin. Je lui ai répondu quʹen<br />

lʹappelant à Nazareth, nous avions cru prendre parti le plus avantageux pour lui, que,<br />

néanmoins, nous nʹavions aucune raison absolue <strong>de</strong> ne pas le laisser à Arras, quʹil essayât<br />

donc, quant à présent, <strong>de</strong> sʹaccoutumer à Nazareth et quʹau moment <strong>de</strong> la conscription,<br />

nous verrions sʹil y avait lieu <strong>de</strong> le remettre à sa place chez vous. Telle était bien, en effet,<br />

ma pensée, et vous lʹaurez sans doute bien comprise ainsi. Je nʹavais aucune répugnance à<br />

le laisser à Arras, je jugeais seulement <strong>avec</strong> notre p. Beaussier quʹon <strong>de</strong>vait faire ce quʹon<br />

pourrait pour lui faire achever le temps <strong>de</strong> ses vœux, en un lieu ou en un autre. Nous al‐<br />

lons donc, si vous nʹy voyez pas <strong>de</strong> difficulté, essayer <strong>de</strong> lʹoccuper à Nazareth. Sʹil ne peut<br />

sʹy accoutumer ou si vous avez réellement besoin <strong>de</strong> lui à Arras, nous agirons selon les né‐<br />

cessités du moment.<br />

Je vous engage bien, cher Monsieur lʹabbé, à prendre quelques instants <strong>de</strong> repos<br />

près <strong>de</strong> vos sœurs dès que vous en verrez la possibilité. Vos forces ont besoin dʹêtre ména‐<br />

gées dans lʹintérêt même <strong>de</strong> vos chers enfants. Faites donc, cher Monsieur lʹabbé, tous vos<br />

efforts pour vous échapper quelques jours.<br />

Jʹespère que le f. Carment va faire <strong>de</strong> son mieux pour vous être utile et que les au‐<br />

tres frères réuniront aussi toutes leurs forces pour vous secon<strong>de</strong>r. Je vous serai obligé <strong>de</strong><br />

me faire donner <strong>de</strong>s nouvelles du f. Cousin. Nous prions bien pour vous et prenons part<br />

cordialement à toutes vos difficultés.<br />

MM. Myionnet, Lantiez et Caille sont à Angers pour voir définitivement quelle est<br />

la volonté <strong>de</strong> Dieu touchant les propositions <strong>de</strong> notre ami, M. lʹabbé Choyer. Je vous dirai<br />

lʹissue <strong>de</strong> cette affaire, que nous suivons en sincère indifférence et sans autre vue que<br />

dʹétudier les <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> Dieu, comme nous lʹavons fait, je crois, en toute circonstance.<br />

Tout va ici comme <strong>de</strong> coutume et <strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> sensible <strong>de</strong> Dieu. M. Caille nous apporte aus‐<br />

si <strong>de</strong>s nouvelles satisfaisantes sur lʹœuvre dʹAmiens. Ayons bonne confiance; chaque<br />

épreuve, je lʹespère, est un pas pour nous affermir et préparer les voies à lʹaction miséri‐<br />

cordieuse du Seigneur.<br />

Adieu, bien cher Monsieur lʹabbé; tous nos frères vous offrent <strong>avec</strong> moi leurs res‐<br />

pects et leur sincère affection.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Jʹapprends <strong>avec</strong> plaisir que M. lʹabbé Lequette a quelque occupation pour son<br />

zèle et son talent. Nous suivrons néanmoins les occasions qui pourraient se présenter pour<br />

dʹautres temps.<br />

646


517 à M. Carment<br />

Exhortation paternelle à se dévouer auprès <strong>de</strong> M. Halluin.<br />

Vaugirard, 20 janvier 1858<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Je vous écris <strong>de</strong>ux lignes seulement, étant très pressé aujourdʹhui, pour vous dire<br />

ma satisfaction <strong>de</strong> vous voir rentré aux saintes occupations <strong>de</strong> votre vocation, saintes<br />

puisque N.S. est véritablement dans la personne <strong>de</strong> tous vos chers enfants. Je prie bien le<br />

Seigneur <strong>de</strong> vous donner beaucoup <strong>de</strong> grâces pour que vous secondiez utilement notre<br />

bon M. Halluin, qui se trouve bien fatigué <strong>de</strong> corps et dʹesprit aussi à cause du grand far‐<br />

<strong>de</strong>au dont il porte plus que les autres les charges et la préoccupation. Je verrai dans tous<br />

les actes <strong>de</strong> dévouement, <strong>de</strong> patience et <strong>de</strong> mansuétu<strong>de</strong> que vous produirez une marque<br />

<strong>de</strong> votre affection filiale pour moi, et le bon Dieu surtout y verra un témoignage <strong>de</strong> votre<br />

amour et <strong>de</strong> votre zèle pour son service.<br />

Quand vous écrirez à vos bons parents, ne manquez pas <strong>de</strong> les assurer <strong>de</strong> mon res‐<br />

pect, et donnez‐moi <strong>de</strong> temps en temps <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> votre bon père. A‐t‐on mis près<br />

<strong>de</strong> lui un gar<strong>de</strong>‐mala<strong>de</strong>? Ce serait assurément bien utile et bien sage.<br />

Assurez tous nos frères <strong>de</strong> ma tendre affection; nous prions pour tous, pour ceux<br />

qui sont mala<strong>de</strong>s particulièrement.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

517‐1 295<br />

518 à M. Caille<br />

Toujours lʹaffaire <strong>de</strong> la chapelle <strong>de</strong> Nazareth. Les tractations <strong>avec</strong> lʹabbé Choyer nʹont pas abouti. Etat <strong>de</strong> santé<br />

<strong>de</strong> M. Caille.<br />

Vaugirard, 25 janvier 1858<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Jʹavais espéré vous entrevoir au moins instant à votre retour dʹAngers, mais vous<br />

avez dû faire le voyage tout dʹune traite, au risque <strong>de</strong> vous fatiguer beaucoup. Je vous re‐<br />

mercie bien, cher ami, au nom <strong>de</strong> toute notre maison <strong>de</strong> Vaugirard, en tant que lʹaffaire<br />

dont nous nous occupions lʹintéresse particulièrement, et pour notre petite Communauté<br />

entière, puisquʹelle est solidaire <strong>de</strong> tout ce qui touche une <strong>de</strong> ses parties. Vous avez pu<br />

vous assurer que votre intervention était bien nécessaire dans cette affaire et quʹil y avait<br />

lieu <strong>de</strong> bien peser nos démarches; le résultat <strong>de</strong> vos examens nous a donné <strong>de</strong> nouvelles<br />

lumières et nous permettra <strong>de</strong> prendre une décision <strong>avec</strong> connaissance <strong>de</strong> cause.<br />

Les choses ne sont pas encore aussi bien définies que vous avez pu le croire en quit‐<br />

tant Angers. M. lʹabbé Choyer mʹa écrit hier quʹayant revu Mgr lʹEvêque, il lʹavait trouvé<br />

très opposé au partage <strong>de</strong> lʹétablissement et aux dispositions qui <strong>de</strong>vaient laisser M. Mois‐<br />

seron à la tête <strong>de</strong> la maison dʹAngers; quʹen conséquence, il fallait revenir au projet <strong>de</strong> tout<br />

transférer chez nous dans 17 mois, époque où le bail <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong>s Carmes doit expirer.<br />

295 Cf. <strong>Lettre</strong> 390-1.<br />

647


Nous répondons que nous ne sommes pas en force pour recevoir en masse une entreprise<br />

dʹune pareille importance, que nous <strong>de</strong>vons donc renoncer à tout projet dʹunion, sʹil ne<br />

peut se réaliser que dans ces conditions. Je crois que les choses en resteront là et que M.<br />

Choyer se bornera à donner du travail à nos petits ateliers; cʹest ce qui peut nous arriver <strong>de</strong><br />

mieux pour le moment, ce sera gagner du temps et laisser à la Provi<strong>de</strong>nce le soin <strong>de</strong> nous<br />

indiquer précisément ses vues. Je vous tiendrai au courant <strong>de</strong> ce qui adviendra.<br />

Jʹai bien compris, mon bon ami, combien ce déplacement pouvait être gênant pour<br />

vos affaires; il vous a, en outre, fatigué dans un moment où vous aviez plutôt besoin <strong>de</strong><br />

repos que dʹactivité; mais le service du bon Dieu a, vous le savez, bien <strong>de</strong>s labeurs; heu‐<br />

reusement, il aura aussi bien <strong>de</strong>s récompenses. Ne manquez pas, mon bon ami, <strong>de</strong> mʹécrire<br />

pour me dire si le petit malaise que vous éprouviez ne sʹest point aggravé et si vous êtes<br />

bien remis <strong>de</strong> vos fatigues. Je dois veiller sur votre santé qui est si utile à notre chère<br />

Communauté, et si nécessaire surtout à nos œuvres dʹAmiens.<br />

Assurez nos frères <strong>de</strong> ma bien tendre affection; je comprends dans ce nombre notre<br />

bon abbé Deberly que je regar<strong>de</strong> comme <strong>de</strong> la famille et qui, je lʹespère, a bien les mêmes<br />

sentiments <strong>de</strong> son côté.<br />

Adieu, mon bon ami; tout le mon<strong>de</strong> fait amitié a vous et à vos frères. Je vous em‐<br />

brasse en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Il me restera à compter <strong>avec</strong> vous pour votre voyage, je ne lʹoublierai point.<br />

519 à M. Halluin<br />

Lʹabbé Choyer est venu à Vaugirard. Nouvelles du frère Bassery à Nazareth. Qualités <strong>de</strong> fermeté et <strong>de</strong> courage<br />

sans lesquelles on ne fait rien <strong>de</strong> bon; les âmes trop faibles ne peuvent sʹaccommo<strong>de</strong>r <strong>de</strong> la vie en communauté. Le<br />

frère <strong>de</strong> Lauriston doit sʹaffermir. Que la communauté dʹArras soit plus unie.<br />

Vaugirard, 4 février 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Jʹai tardé plus que je ne le voulais à vous écrire; la présence ici pendant quelques<br />

jours <strong>de</strong> M. lʹabbé Choyer, dʹAngers, mʹa été lʹoccasion dʹun assez grand dérangement, et<br />

dʹailleurs nous sommes si près <strong>de</strong> Paris quʹon commence à ne pas sʹeffrayer <strong>de</strong> la distance<br />

et que les allants et venants ne laissent pas que dʹêtre aussi une cause dʹinterruption dans<br />

nos affaires. Je voulais aussi laisser passer quelques jours pour que le f. Augustin [Bassery]<br />

pût vous dire un peu sa situation. Il vous écrit aujourdʹhui pour vous rendre compte <strong>de</strong><br />

ses dispositions, son caractère est toujours le même: il est doux, docile, intelligent, mais<br />

sans énergie et sans volonté, regrettant toujours la situation où il nʹest pas et ne sachant<br />

pas sʹasseoir fermement dans celle où il se trouve. Je vous laisse tout à fait juge du parti<br />

quʹil faut prendre à son égard. Si vous croyez pouvoir lʹemployer utilement et sans danger<br />

à Arras, je ne mets aucun obstacle à son retour. Si vous pensez, au contraire, quʹil doive<br />

rester à Nazareth, il faudrait lui écrire nettement que vous ne pouvez le recevoir présen‐<br />

tement et quʹil doit faire un effort pour apprendre un peu la fermeté et le courage sans les‐<br />

quels on nʹest propre à rien, ni pour son salut, ni même pour se soutenir temporellement.<br />

Ce quʹil dit <strong>de</strong> sa santé et <strong>de</strong> sa tristesse est exagéré. Il nʹa pas mauvais visage. On a pour<br />

648


lui <strong>de</strong>s ménagements extrêmes. Si ce pauvre enfant avait lʹombre <strong>de</strong> raison, il compren‐<br />

drait combien il y a <strong>de</strong> patience et <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong> dans la conduite quʹon tient à son égard.<br />

Il se peut que lʹépreuve <strong>de</strong> son changement lui ait servi <strong>de</strong> leçon et quʹil vous donnât satis‐<br />

faction pour un temps, en sʹoccupant plus activement et en veillant mieux sur lui‐même. Je<br />

dis pour un temps, car je crois quʹil lui faudra <strong>de</strong> plus ru<strong>de</strong>s avertissements pour le former<br />

et quʹil ne <strong>de</strong>viendra homme et, je lʹespère, soli<strong>de</strong>ment chrétien quʹaprès avoir goûté <strong>de</strong>s<br />

ru<strong>de</strong>sses et <strong>de</strong>s peines <strong>de</strong> la vie du mon<strong>de</strong>. La vie <strong>de</strong> communauté est trop douce et trop<br />

con<strong>de</strong>scendante pour <strong>de</strong>s âmes si faiblement trempées; lʹair du <strong>de</strong>hors est nécessaire pour<br />

les corriger. Vous jugerez, cher Monsieur lʹabbé, ce que vous croyez <strong>de</strong> meilleur pour lui et<br />

pour votre maison. Sʹil doit <strong>de</strong>meurer près <strong>de</strong> nous, nous serons patients <strong>avec</strong> lui, mais en<br />

usant toutefois <strong>de</strong> la fermeté que sa manière dʹêtre peut exiger.<br />

Notre f. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] me prie <strong>de</strong> lʹexcuser sur les retards quʹil a mis à<br />

sʹacquitter <strong>de</strong>s petites obligations quʹil a prises pour quelques‐uns <strong>de</strong> vos enfants. Il nʹa<br />

jusquʹici reçu aucun fonds <strong>de</strong> chez lui, il attend ses comptes quʹon lui rend ordinairement à<br />

cette époque <strong>de</strong> lʹannée; mais, comme il ne les <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pas, on peut différer encore lʹen‐<br />

voi qui doit lui en être fait. Les questions dʹargent étant toujours délicates, je mʹabstiens <strong>de</strong><br />

le presser beaucoup. Les moindres affaires lʹabsorbent et le troublent, il a besoin <strong>de</strong> nʹavoir<br />

pas trop <strong>de</strong> choses pesant sur lui. Bien quʹen ce moment il ne soit très chargé, il ne trouve<br />

pas une minute pour ses affaires. Son bon cœur, son excellent esprit, sa piété et sa droiture<br />

dʹintention font large compensation à ses imperfections, mais elles nuisent à son action, et<br />

lui créent à lui‐même <strong>de</strong>s difficultés. Je crois que le moment <strong>de</strong> songer pour lui à un dépla‐<br />

cement ne saurait être encore prochain. Il a besoin <strong>de</strong> sʹaffermir dans sa voie et <strong>de</strong> prendre<br />

dans la vie commune <strong>de</strong>s impressions un peu profon<strong>de</strong>s. Jʹespère quʹil en sera ainsi, sa vo‐<br />

lonté étant parfaite et son désir <strong>de</strong> servir Dieu bien cordial et bien constant.<br />

Je recevrai <strong>avec</strong> joie <strong>de</strong> vos nouvelles; je souhaite bien que le Seigneur proportionne<br />

ses grâces à vos besoins, et je le lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> tous les jours <strong>avec</strong> une vive instance. Jʹespère<br />

que, peu à peu, vous arriverez à former autour <strong>de</strong> vous une petite communauté unie, dé‐<br />

vouée et animée <strong>de</strong> votre esprit. Ce sera alors un véritable appui pour vous. Je crois que<br />

vous vous rapprocherez <strong>de</strong> ce but en tendant à lʹunité, que vous ne pourrez jamais consti‐<br />

tuer <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s éléments <strong>de</strong> natures diverses. Cʹest pourquoi je ne puis quʹapprouver la pen‐<br />

sée que vous avez <strong>de</strong> réduire votre personnel, dès que vous le pourrez, aux membres<br />

composant la communauté. Je laisse le bon Dieu vous conduire sur ce point comme sur les<br />

autres, sachant bien quʹIl est <strong>avec</strong> vous et que ses lumières ne vous manqueront pas.<br />

Adieu, bien cher Monsieur lʹabbé; nous allons assez bien ici, nos petits ateliers mar‐<br />

chent. Nous commençons quelques travaux pour la maison dʹAngers <strong>avec</strong> laquelle nos<br />

projets dʹunion sʹélaborent toujours. M gr lʹEvêque dʹAngers nous presse vivement, voulant<br />

nous voir quelque lien <strong>avec</strong> son diocèse. Lui‐même a toujours été un père pour nous. Les<br />

frères se soutiennent bien. Jules et Ferdinand sont peu consistants, mais pas mauvais. Ils<br />

vous offrent leur respect. Mille affections <strong>de</strong> tous, et surtout <strong>de</strong> votre dévoué en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

520 à M. Caille<br />

Zèle <strong>de</strong> M. Caille. MLP. le modère dans ses innovations. Faire attention à ne pas indisposer lʹEvêché. Fortifier la<br />

vie <strong>de</strong> communauté. Projet dʹessaimer à Angers.<br />

649


Vaugirard, 8 février 1858<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> plaisir que vos affaires vous amèneront prochainement à Paris et<br />

nous donneront lʹoccasion <strong>de</strong> nous voir; vivre tous ensemble serait une trop douce conso‐<br />

lation, nous <strong>de</strong>vons bénir le Seigneur qui nous ménage au moins quelques instants <strong>de</strong> ré‐<br />

union pour nous bien entendre et concerter nos moyens <strong>de</strong> le mieux servir.<br />

Jʹai lu <strong>avec</strong> bien <strong>de</strong> lʹintérêt les détails que vous me donnez sur lʹadoration que vous<br />

avez faite pour la première fois dans votre chapelle; je sais que cʹest un moyen bien édi‐<br />

fiant et bien capable <strong>de</strong> plaire à <strong>de</strong>s âmes pieuses; je ne suis pas certain pourtant que je<br />

vous eusse conseillé <strong>de</strong> poser cette pratique sainte dans votre maison, eu égard à vos char‐<br />

ges et à votre personnel si restreint; vous êtes aidés maintenant par quelques amis du <strong>de</strong>‐<br />

hors, mais, en supposant même quʹils persistent fidèlement à vous donner leur concours,<br />

lʹensemble <strong>de</strong> cette réunion et les soins quʹelle entraîne ne laissent pas <strong>de</strong> la rendre fati‐<br />

gante, dans les temps surtout où lʹon a <strong>de</strong>s surcharges ou quelques membres souffrants<br />

dans la famille. Maintenant que vous avez commencé ce pieux exercice, que vous semblez<br />

désirer <strong>de</strong> le continuer, je ne me sens pas la force <strong>de</strong> mʹy opposer, mais je crois bon <strong>de</strong> bor‐<br />

ner cet assentiment à la présente année, me réservant dʹexaminer <strong>avec</strong> vous plus tard si<br />

vous avez réellement <strong>de</strong>s forces suffisantes pour répondre à cette œuvre nouvelle. Je dois<br />

penser que vous avez pris soin <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à lʹEvêché lʹautorisation qui vous était néces‐<br />

saire pour exposer nuitamment le Saint‐Sacrement. Ne craignez‐vous pas quʹà lʹEvêché on<br />

vous voie <strong>avec</strong> quelque inquiétu<strong>de</strong> commencer <strong>de</strong>s exercices non en usage dans le diocèse,<br />

et cela <strong>avec</strong> le concours dʹecclésiastiques que je vénère comme vous mais que lʹautorité<br />

diocésaine semble avoir en suspicion? Je trouve que vous <strong>de</strong>vez être bien circonspect sous<br />

ce rapport; je ne serais pas éloigné <strong>de</strong> penser que lʹaccueil fait par Mgr à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> M.<br />

Deberly a pu être un peu motivé par la présence et lʹinfluence <strong>de</strong> ces ecclésiastiques dans<br />

votre maison. Je remarque, <strong>de</strong> mon côté, que les dispositions spirituelles du f. Marcaire<br />

sont sensiblement influencées par les rapprochements quʹil a <strong>avec</strong> ces ecclésiastiques; je<br />

crois que, sans avoir quant à présent <strong>de</strong> mesure décisive à prendre, vous <strong>de</strong>vez au moins<br />

agir en <strong>de</strong> telles circonstances <strong>avec</strong> beaucoup <strong>de</strong> réserve et <strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nce.<br />

Jʹai reçu une bien bonne et bien affectueuse lettre <strong>de</strong> M. Deberly, remerciez‐le pour<br />

moi, je puis dire pour nous, je lui répondrai tout prochainement. Jʹai reçu aussi <strong>avec</strong> plaisir<br />

la petite épître <strong>de</strong> notre f. Marcaire; assurez‐le, ainsi que le f. Henry [Guillot], <strong>de</strong> ma tendre<br />

affection. Je nʹentends pas, par lʹobservation ci‐<strong>de</strong>ssus, blâmer les sentiments exprimés<br />

dans la lettre du f. Marcaire et je vous prie <strong>de</strong> ne lui rien dire à ce sujet, cette remarque est<br />

pour vous seul et pour vous tenir en attention vigilante.<br />

Nous commençons quelques petits travaux pour Angers; nous avons promis que,<br />

dans 18 mois, à lʹexpiration du bail <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong>s Carmes, nous enverrions à Angers un<br />

petit commencement <strong>de</strong> communauté, si les amis <strong>de</strong> M. Choyer sʹarrangeaient pour ache‐<br />

ter cette maison et nous y installer sans charges <strong>de</strong> loyer, quʹautrement nous transférerions<br />

à Vaugirard lʹœuvre <strong>de</strong> M. Choyer et la soutiendrions <strong>avec</strong> lui dans la mesure <strong>de</strong> nos<br />

moyens. Cet arrangement a obtenu lʹassentiment entier <strong>de</strong> Mgr lʹEvêque dʹAngers qui va, je<br />

crois, favoriser les efforts quʹon va faire pour acquérir la maison <strong>de</strong>s Carmes. Je crois que<br />

ces dispositions sont les meilleures que nous puissions souhaiter.<br />

650


Nous allons assez bien ici spirituellement et corporellement; je traverse moi‐même<br />

lʹhiver jusquʹici sans encombre, me laissant aller à la volonté <strong>de</strong> Dieu et tâchant <strong>de</strong> me tenir<br />

en indifférence sur ses <strong>de</strong>sseins à mon égard.<br />

La coopération constante <strong>de</strong> M. Deberly doit faciliter vos exercices <strong>de</strong> communauté;<br />

faites en sorte <strong>de</strong> les régulariser le plus que vous pourrez, et soyez bien assuré que, plus<br />

vos frères sentiront la vie commune, plus ils seront unis à vous et forts pour servir <strong>avec</strong><br />

vous le divin Seigneur auquel nous nous sommes tous consacrés.<br />

Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S., croyez aux tendres sentiments <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

521 à M. Halluin<br />

Le frère Loquet a quitté brusquement la communauté dʹArras. Il faut le remplacer.<br />

Vaugirard, 11 février 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je partage bien vivement votre affliction au sujet <strong>de</strong> la sortie si inattendue du f. Jo‐<br />

seph [Loquet]. Je ne sais, non plus que vous, à quoi lʹattribuer, nʹayant pas vu ce pauvre<br />

jeune homme <strong>avec</strong> assez <strong>de</strong> suite pour le bien connaître et pénétrer sûrement ses disposi‐<br />

tions. Nous ne lʹavons pas vu jusquʹici et nʹavons aucun indice qui nous fasse penser quʹil<br />

soit à Paris. Je viens dʹenvoyer un mot dʹavis à la maison <strong>de</strong> Nazareth afin que, sʹil y ve‐<br />

nait, on lʹaccueillît bien et on me lʹamenât. Toutes ces épreuves sont bien pénibles pour<br />

nous, pour vous surtout, cher Monsieur lʹabbé, mais les épreuves viennent <strong>de</strong> Dieu qui sait<br />

en tirer avantage pour nous comme pour les œuvres dont nous sommes chargés. Ayons<br />

donc bonne confiance, sa grâce ne nous manquera pas; Il ne peut vouloir le dépérissement<br />

dʹinstitutions charitables quʹIl a lui‐même inspirées et si visiblement soutenues, attendons<br />

beaucoup <strong>de</strong> sa bonté miséricordieuse, tout ce que nous aurons espéré nous sera certaine‐<br />

ment accordé.<br />

Le f. Augustin [Bassery] va un peu mieux, votre <strong>de</strong>rnière lettre lui a fait du bien. Il a<br />

passé la journée dʹhier ici et mʹa semblé en meilleures dispositions. Les <strong>de</strong>rnières lignes <strong>de</strong><br />

votre lettre, où vous lui disiez <strong>de</strong> bien marcher jusquʹà la conscription, lui ont donné lʹes‐<br />

pérance quʹil pourrait être rappelé à ce moment à Arras, cʹest peut‐être ce qui contribue à<br />

le remettre. Ce sera, en tout cas, du temps <strong>de</strong> gagné; <strong>de</strong>s pauvres enfants, aussi peu soli‐<br />

<strong>de</strong>s, ont besoin dʹêtre soutenus et conduits au jour le jour.<br />

Nous attendons les renseignements que vous avez recueillis au sujet du pauvre f.<br />

Joseph. Nous prions <strong>de</strong> tout notre cœur pour lui et pour votre chère maison que cette nou‐<br />

velle difficulté va mettre encore plus en gêne. Je ne vois pas bien nettement, au premier<br />

aspect, comment nous pourrions vous secourir efficacement. Nous avons été obligés dʹad‐<br />

joindre M. Legallais au f. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] qui se trouble aisément dans ses emplois<br />

et a besoin dʹêtre soli<strong>de</strong>ment assisté. Le f. Alphonse Vasseur surveille, <strong>avec</strong> sa cordonnerie,<br />

lʹensemble <strong>de</strong>s ateliers. M. Boucault est le soutien <strong>de</strong> lʹatelier <strong>de</strong> ciselure; il ne reste dʹun<br />

peu soli<strong>de</strong> pour la conduite <strong>de</strong>s enfants que les ff. Thuillier et Ernest Vasseur, dont le pre‐<br />

mier à lʹinfirmerie et le second à la lingerie. Les ff. Louis [Boursier], <strong>Jean</strong> [Maury] et Clau<strong>de</strong><br />

[Bulfay] ne peuvent être sortis <strong>de</strong>s travaux manuels. Nous chercherions pourtant <strong>avec</strong><br />

651


vous quelles combinaisons seraient possibles, si vous étiez en trop gran<strong>de</strong> peine. Soyez<br />

bien assuré, cher Monsieur lʹabbé, que notre cœur est <strong>avec</strong> vous, que nous partageons vos<br />

difficultés, et nous ne mettons nulle différence entre nos intérêts et les nôtres. Prions en‐<br />

semble, Dieu nous donnera <strong>de</strong>s marques nouvelles <strong>de</strong> son amour et <strong>de</strong> sa miséricor<strong>de</strong>. As‐<br />

surez bien tous nos frères que nous leur sommes tendrement unis et que nous avons bien à<br />

cœur lʹaffliction dont ils sont tous frappés <strong>avec</strong> vous.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, jʹattends <strong>de</strong> vos nouvelles bien prochainement.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

522 à M. Halluin<br />

MLP. fera lʹimpossible pour venir en ai<strong>de</strong> à la communauté dʹArras. Lʹesprit <strong>de</strong> prière nécessaire pour persévé‐<br />

rer. La croix supportée chaque jour sauve les âmes et bénit les œuvres.<br />

Vaugirard, 16 février 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je bénis <strong>avec</strong> vous le Seigneur qui a préservé le f. Joseph [Loquet], sinon <strong>de</strong> tout<br />

mal, du moins dʹun mal irréparable. M. Myionnet a passé <strong>de</strong>ux jours en recherches aux<br />

hospices et même ailleurs encore, où vous aviez pensé quʹil était à propos dʹaller. Ces re‐<br />

cherches, dont le résultat infructueux ne mʹa été connu quʹhier au soir, ne mʹont pas per‐<br />

mis <strong>de</strong> vous répondre plus tôt. Sans dire à la communauté le sujet <strong>de</strong> nos peines, nous<br />

avions néanmoins fait commencer une neuvaine à S t Joseph. Nous allons la continuer, afin<br />

que Dieu daigne nous éclairer sur le parti que nous aurons à prendre relativement à ce<br />

pauvre jeune homme. Les termes un peu trop voilés <strong>de</strong> votre lettre ne me laissent pas <strong>de</strong>‐<br />

viner quel malheur lui est arrivé, quelle faute lʹa déterminé à fuir votre maison; je pense<br />

que dans votre prochaine lettre, mieux éclairé et plus sûrement informé <strong>de</strong>s faits, vous<br />

pourrez me donner <strong>de</strong> nouveaux renseignements. Soyez bien assuré, cher Monsieur lʹabbé,<br />

que nous ferons tout ce qui dépendra <strong>de</strong> nous pour alléger vos peines et porter vos char‐<br />

ges <strong>avec</strong> vous. Nos intérêts ne sont pas autres que les vôtres, puisquʹils sont uniquement<br />

ceux <strong>de</strong> la gloire <strong>de</strong> Dieu. Nous ne reculerons donc pas <strong>de</strong>vant un peu <strong>de</strong> gêne dans nos<br />

services pour vous ai<strong>de</strong>r un peu si votre personnel ne peut vous suffire.<br />

M. Chazaud étant venu passer quelques jours à Paris, nous profitons <strong>de</strong> son retour<br />

pour vous envoyer 450f qui doivent être touchés à Arras, 300f pour les enfants que proté‐<br />

geait le f. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] et 150f pour la petite Conférence. Nous réglerons le prix<br />

<strong>de</strong>s souliers au moment <strong>de</strong> la retraite, si nous nʹavons quelque plus prochaine occasion.<br />

Le f. Augustin [Bassery], va, je crois, un peu mieux. Il est fort occupé ces jours‐ci. Le<br />

temps passe ici plus facilement, mais sa piété est faible; tant que nous nʹaurons pas plus <strong>de</strong><br />

soutien <strong>de</strong> ce côté, nous nʹavons pas <strong>de</strong> soli<strong>de</strong> assurance.<br />

Je ne vous écris pas plus longuement pour ne pas différer lʹenvoi <strong>de</strong> cette lettre.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, souvenons‐nous que, marchant à la suite du Sauveur, nous<br />

<strong>de</strong>vons emporter notre croix tous les jours, elle sera lʹinstrument <strong>de</strong> notre salut, elle sera<br />

aussi la bénédiction <strong>de</strong> nos œuvres.<br />

Croyez bien à tous nos sentiments dʹaffection pour vous et pour tous vos chers frères.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

652


523 à M. Carment<br />

Exhortation paternelle à persévérer dans ses bonnes intentions.<br />

Vaugirard, 16 février 1858<br />

Cher enfant en N.S.,<br />

Je nʹai pas assez <strong>de</strong> temps avant le départ du courrier pour répondre comme je le<br />

voudrais à votre petite épître; je me borne à tracer en hâte ces <strong>de</strong>ux mots pour vous assu‐<br />

rer que nos prières et nos affections vous sont bien fidèlement données. Je suis heureux<br />

<strong>de</strong>s bonnes dispositions que vous me manifestez et bien reconnaissant <strong>de</strong> votre cordiale af‐<br />

fection pour moi. Vous avez en ce moment une occasion bien présente <strong>de</strong> me la témoigner;<br />

je suis profondément touché <strong>de</strong>s épreuves <strong>de</strong> notre cher M. Halluin; chargez‐vous <strong>de</strong> lui<br />

montrer notre sincère attachement à son égard, que votre bonne volonté et surtout votre<br />

soumission toute filiale soient sa consolation. Prêtez‐vous aux circonstances et faites en<br />

simplicité tout ce qui sera en vous pour le bien <strong>de</strong> la maison et <strong>de</strong> vos chers enfants. Je sais<br />

bien que votre bon cœur vous y portera, mais il faut que rien nʹarrête lʹélan <strong>de</strong> son bon<br />

vouloir; pour cela, la patience, le renoncement à vos vues propres, lʹobéissance simple<br />

vous seront nécessaires. Cʹest ce que vous aurez, je lʹespère, <strong>de</strong> plus en plus, cher enfant,<br />

<strong>avec</strong> la grâce du Seigneur Jésus et lʹassistance <strong>de</strong> la T. Ste Vierge. Ces recommandations ne<br />

sont motivées par aucun fait présent, tant sʹen faut, je crois quʹen ce moment tout va bien<br />

<strong>de</strong> votre côté; cʹest seulement un souhait bien affectueux <strong>de</strong> ma part pour que vous persé‐<br />

vériez et fassiez tout le bien que le Seigneur attend <strong>de</strong> vous.<br />

Nous prions toujours pour votre chère famille. Je vous embrasse sincèrement.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

524 à M. Halluin<br />

Le frère Loquet est revenu en communauté. Se concerter avant <strong>de</strong> déci<strong>de</strong>r la vente dʹun bien <strong>de</strong> communauté. Sa‐<br />

crifices qui favorisent la vie <strong>de</strong> famille: ʺplus on se donne les uns aux autres, plus on est fermement uniʺ.<br />

Vaugirard, 22 février 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

La démarche du f. Joseph [Loquet] est assurément bien à regretter, et je ne vois pas<br />

en réalité ce qui a pu motiver ce coup <strong>de</strong> tête, mais nous pouvions craindre quelque chose<br />

<strong>de</strong> pis et nous avons à bénir le Seigneur <strong>de</strong> ce quʹil ne lui est rien arrivé <strong>de</strong> plus fâcheux. Il<br />

me semble que, pour sa propre édification et pour celle <strong>de</strong>s autres, il <strong>de</strong>vrait vous <strong>de</strong>man‐<br />

<strong>de</strong>r une pénitence <strong>de</strong> quelques semaines, telle que vous la croiriez praticable chez vous,<br />

sans gêne pour le service. Ses voyages supposent dʹailleurs une dépense dʹune cinquan‐<br />

taine <strong>de</strong> francs. Je ne mʹexplique pas bien où et comment il se la serait procurée. Si cʹétait<br />

par quelque voie irrégulière, sa faute en serait assurément aggravée. Je pense <strong>avec</strong> vous<br />

quʹil convient <strong>de</strong> le laisser provisoirement à Arras et dʹattendre jusquʹà la retraite pour les<br />

changements que vous croiriez utile <strong>de</strong> faire. Si pourtant vous étiez en souffrance et<br />

croyiez à propos dʹavoir avant cette époque le f. Thuillier qui fait bien les surveillances<br />

<strong>avec</strong> intelligence et conscience, nous vous lʹenverrions et prendrions le f. Cousin pour le<br />

mettre un peu en repos aux exercices <strong>de</strong> communauté. Je laisse ce point tout à votre déci‐<br />

sion.<br />

653


Notre petit Conseil a exprimé quelque regret que vous ayez mis Dainville en vente,<br />

sans nous en avoir parlé. Jʹai bien lʹinspiration <strong>de</strong> ne gêner en rien votre action pour le sou‐<br />

tien <strong>de</strong> votre œuvre, bien convaincu que le Seigneur vous conduit et que vous disposez<br />

toujours les choses pour le mieux; mais,en nous concertant, nous serons encore plus sûrs<br />

dʹêtre agréables à Dieu et <strong>de</strong> faire sa volonté. Je crois aussi que nous ne <strong>de</strong>vons pas crain‐<br />

dre les dépendances réciproques résultant <strong>de</strong> notre union; ce sont précisément ces petits<br />

sacrifices qui font le lien <strong>de</strong>s familles, plus on se donne les uns aux autres, plus on est fer‐<br />

mement uni. Le vœu <strong>de</strong> pauvreté entraîne aussi cette obligation pour nous: <strong>de</strong> ne pas<br />

changer lʹessence <strong>de</strong>s choses dépendant <strong>de</strong> la communauté sans nous en être entendu en‐<br />

tre nous. Il va sans dire, cher Monsieur lʹabbé, que, dans les termes <strong>de</strong> confiance absolue<br />

où nous sommes, ces petites prévenances ne sont guère que <strong>de</strong> forme, mais il est mieux, je<br />

crois, <strong>de</strong> ne pas les négliger.<br />

Nous nʹavons rien <strong>de</strong> particulier ici qui me semble digne dʹêtre mentionné. Tout<br />

marche comme <strong>de</strong> coutume. Ce temps <strong>de</strong> lʹannée est ru<strong>de</strong> pour toutes nos œuvres, notre<br />

mon<strong>de</strong> a une tâche assez lour<strong>de</strong>, ceux <strong>de</strong>s œuvres extérieures surtout, mais en ensemble<br />

tout va. Jʹespère que vous traversez aussi cette fin dʹhiver sans trop <strong>de</strong> brisement et que,<br />

malgré vos épreuves, vous sentez toujours que le Seigneur travaille <strong>avec</strong> vous. Le f. Au‐<br />

gustin [Bassery] semble sʹaffermir un peu, mais sans néanmoins se sentir fort pour <strong>de</strong>s dé‐<br />

vouements à venir. Nous nʹavons, pour le présent, quʹà marcher au jour le jour, pour ga‐<br />

gner la fin <strong>de</strong> ses vœux.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, nous vous souhaitons un bon Carême et une ample<br />

participation aux grâces <strong>de</strong> la fête <strong>de</strong> la Résurrection.<br />

Jʹembrasse vous et vos frères dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre ami et Père bien affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je crois quʹil sera bien, quand le f. Joseph sera un peu remis, quʹil mʹécrive une<br />

petite lettre pour sʹexcuser du chagrin et <strong>de</strong>s inquiétu<strong>de</strong>s quʹil nous a causés.<br />

525 à M. Halluin<br />

Mise au point à propos <strong>de</strong> la vente décidée par M. Halluin. Le petit nombre vaut mieux que <strong>de</strong>s sujets peu affer‐<br />

mis dans leur engagement. M. Myionnet songe à établir une boulangerie à Vaugirard. Sʹoccuper du prochain ne<br />

doit pas conduire à sʹoublier soi‐même.<br />

Vaugirard, 25 février 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> votre bonne lettre. Je nʹen avais pas besoin pour savoir combien<br />

vos intentions sont simples et cordiales en tout ce que vous faites dans votre œuvre. Vous<br />

avez bien compris, <strong>de</strong> votre côté, que ma petite observation, relativement à la maison <strong>de</strong><br />

Dainville, était toute dans notre intérêt commun et pour le bien que nous désirons faire<br />

ensemble. Je ne mʹétonne point, du reste, et jʹapprouve bien que vous cherchiez quelque<br />

terrain plus rapproché <strong>de</strong> vous pour occuper vos enfants. Lʹéloignement <strong>de</strong> Dainville est<br />

une difficulté pour <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong> tous les jours. Cʹétait toutefois une ressource pour vous<br />

<strong>de</strong> pouvoir quelquefois faire séjourner là une partie <strong>de</strong> vos enfants, durant lʹété surtout.<br />

654


Mais vous êtes mieux que nous à même dʹapprécier lʹimportance <strong>de</strong> cet avantage, et je<br />

nʹattache aucune valeur réelle à cette remarque.<br />

M. Chazaud a montré au f. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] une gran<strong>de</strong> bonne volonté pour<br />

votre maison; son expérience pourrait souvent nous être utile dans les affaires et son appui<br />

pourra aussi, je lʹespère, vous ai<strong>de</strong>r encore autrement. Je crois que sʹil se trouve un peu <strong>de</strong><br />

votre côté, nous aurons bien à en remercier Dieu.<br />

Je trouve bien tout ce que vous faites pour notre petit Brice. Pauvres enfants! La lu‐<br />

mière manque à leur esprit. Ils ne comprennent pas combien lʹabri <strong>de</strong> votre maison vau‐<br />

drait mieux pour eux que les dangers et les épreuves du mon<strong>de</strong>. Nous prierons pour lui et<br />

pour tous les autres; ne nous affligeons pas <strong>de</strong>s défections <strong>de</strong> ceux qui nʹont pas assez <strong>de</strong><br />

courage pour nous suivre, mieux vaut pour nous être moins nombreux et nʹavoir que <strong>de</strong>s<br />

sujets sûrs et dévoués.<br />

M. Myionnet me prie <strong>de</strong> vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si vous pensez quʹil y eût pour nous avan‐<br />

tage et économie à faire nous‐mêmes notre pain à Vaugirard, en établissant une boulange‐<br />

rie que nous nʹavons pas, et si, dans ce cas, M. votre beau‐frère, qui vous achète ordinai‐<br />

rement <strong>de</strong>s farines, pourrait, sans dérangement pour lui et utilement pour nous, nous en‐<br />

voyer aussi <strong>de</strong>s farines telles quʹil vous les expédie.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, nous faisons ici notre Carême <strong>de</strong> notre mieux, et nous<br />

nous préparons au jubilé. Nos frères sont tellement occupés du prochain quʹils courent<br />

risque quelquefois <strong>de</strong> sʹoublier eux‐mêmes.<br />

Priez pour eux, je vous en conjure, nous prions aussi pour vous.<br />

Nous serons bien heureux <strong>de</strong> vous voir avant la retraite. Toute la famille sʹen réjoui‐<br />

ra, et moi tout particulièrement. Jusque‐là, croyez bien à tous nos sentiments <strong>de</strong> respect et<br />

dʹaffection en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

526 à M. Halluin<br />

La conscription. Projets du frère Bassery pour son service militaire. Sans <strong>de</strong>s âmes ʺhautes et dévouéesʺ, on ne<br />

bâtit rien <strong>de</strong> soli<strong>de</strong> ni rien <strong>de</strong> bon.<br />

Vaugirard, 7 mars 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Nous avons appris <strong>avec</strong> une peine véritable le mauvais résultat <strong>de</strong> la conscription<br />

pour plusieurs <strong>de</strong> vos enfants, en particulier pour le pauvre <strong>Jean</strong>‐Baptiste et le f. Augustin<br />

[Bassery]. Peut‐être restera‐t‐il quelque chance dans la révision. Le f. Augustin se plaint<br />

toujours <strong>de</strong> sa santé dont il a, je crois, une préoccupation excessive. Cependant un mé<strong>de</strong>cin<br />

expérimenté auquel nous lʹavons envoyé nʹa pas trouvé <strong>de</strong> vice <strong>de</strong> santé assez notable en<br />

lui pour penser quʹil soit exempté à la révision. Cet avis a ramené le f. Augustin à la pen‐<br />

sée quʹil avait eue primitivement <strong>de</strong> prendre les <strong>de</strong>vants et <strong>de</strong> sʹengager avant la révision.<br />

Il croit quʹen choisissant, par ce moyen, son arme, il entrerait dans le génie et y serait em‐<br />

ployé comme menuisier, irait dʹabord à Montpellier momentanément et serait ensuite ra‐<br />

mené pour trois ans à Arras. Ce plan lui sourit dʹautant plus que le même mé<strong>de</strong>cin a dé‐<br />

claré que lʹidée <strong>de</strong> se consacrer à lʹenseignement était la plus mauvaise quʹil pût avoir,<br />

quʹun régime tonique <strong>avec</strong> un travail manuel modéré était <strong>de</strong> tous points ce qui lui conve‐<br />

655


nait le mieux. Il craint seulement que sa mère, espérant peut‐être à tort quʹil soit réformé,<br />

ne sʹoppose à ses vues. Si vous croyez, cher Monsieur lʹabbé, quʹil y eût lieu <strong>de</strong> secon<strong>de</strong>r<br />

les pensées du f. Augustin, je vous prierais <strong>de</strong> nous le dire prochainement, la révision ne<br />

<strong>de</strong>vant pas tar<strong>de</strong>r beaucoup. Lʹobstacle <strong>de</strong> ses vœux serait levé sans scandale et aussi sans<br />

difficulté en ce moment, la révision pouvant, dʹune part, servir <strong>de</strong> prétexte à son retour à<br />

Arras, et <strong>de</strong> lʹautre, notre p. Beaussier ayant présentement, à cause du jubilé, <strong>de</strong>s pouvoirs<br />

pour le relever <strong>de</strong> ses vœux. Vous jugerez quel parti est à prendre, nous agirons suivant<br />

votre réponse.<br />

Je vous envoie ci‐joint <strong>de</strong>ux lettres: une du f. Augustin, qui lʹavait écrite avant <strong>de</strong><br />

mʹavoir fait les ouvertures dont je viens <strong>de</strong> vous parlez; lʹautre lettre est <strong>de</strong> Jules; il désire<br />

bien retourner à Arras après le temps <strong>de</strong> la retraite ou prendre un autre parti. Nous nous<br />

prêterons bien à ce quʹil aille à Arras, si vous croyez quʹil puisse vous être utile, mais nous<br />

ne pensons pas quʹil ait les dispositions nécessaires pour se consacrer au service <strong>de</strong> Dieu,<br />

M. Lantiez se plaint <strong>de</strong> son amour‐propre excessif et dʹun certain mauvais esprit qui lui<br />

cause <strong>de</strong>s difficultés et <strong>de</strong>vient pour Ferdinand, dʹailleurs plus simple, une pierre dʹachop‐<br />

pement. Espérons que le Seigneur nous donnera <strong>de</strong>s âmes un peu hautes et dévouées.<br />

Nous ne saurions sans cela bâtir rien <strong>de</strong> soli<strong>de</strong> et <strong>de</strong> bon. Tous ici vous offrent leurs res‐<br />

pects et affections. Croyez bien aussi, cher Monsieur lʹabbé, à tous mes sentiments en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

527 à M. Halluin<br />

Nouvelles <strong>de</strong>s frères. Un postulant manque <strong>de</strong> bonne volonté nécessaire en communauté. Esprit <strong>de</strong> foi et <strong>de</strong> sacri‐<br />

fice. Pru<strong>de</strong>nce avant <strong>de</strong> sʹengager plus loin <strong>avec</strong> lʹabbé Choyer. Confiance car Dieu est notre Père.<br />

Vaugirard, 12 mars 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Le f. Augustin [Bassery], sans nulle invitation <strong>de</strong> notre part, mais <strong>de</strong> son propre<br />

mouvement, persiste à penser quʹil est avantageux pour lui <strong>de</strong> <strong>de</strong>vancer la révision, afin<br />

<strong>de</strong> choisir son corps et <strong>de</strong> sʹassurer une meilleure condition. Nous le laissons suivre cette<br />

voie qui peut être en effet la meilleure pour lui. Il a fait ces jours‐ci son jubilé, a fait une<br />

sorte <strong>de</strong> confession générale à notre p. Beaussier et, usant <strong>de</strong>s privilèges du moment, a été<br />

relevé <strong>de</strong> ses vœux. Cette <strong>de</strong>rnière circonstance reste jusquʹici ignorée <strong>de</strong> la communauté.<br />

Nous attendons pour en parler que son sort soit fixé. Ce nʹest pas sans quelque peine que<br />

nous le voyons se détacher ainsi, bien que les choses se dénouent sans brisement, mais<br />

nous croyons quʹil nʹy a pas présentement en lui une énergie suffisante pour quʹil se sou‐<br />

tienne dans la vie <strong>de</strong> dévouement et <strong>de</strong> sacrifice que nous avons embrassée.<br />

Notre aspirant Jules nous semble être dans le même cas. Vous verrez, cher Mon‐<br />

sieur lʹabbé, par les quelques mots quʹil vous écrit, quelles sont ses dispositions. Il allègue<br />

pour cause dʹennui la prolongation <strong>de</strong> son temps <strong>de</strong> persévérance, mais le moyen <strong>de</strong> le<br />

faire abréger était <strong>de</strong> sʹy montrer docile et assez dévoué pour donner confiance à ceux qui<br />

le conduisent et les porter à lʹattacher plus intimement à la Communauté. Il nʹen a pas été<br />

ainsi. Sans être absolument mauvais, Jules montrait en général peu <strong>de</strong> courage et <strong>de</strong> dé‐<br />

vouement à sa besogne; sa raison est bien peu ferme et son esprit mal éclairé; nous ne<br />

pouvions dans cet état lʹadmettre dans la Communauté et nous avions besoin dʹune<br />

épreuve plus prolongée. Sʹil faisait un effort courageux, nous ne serions pas éloignés <strong>de</strong><br />

656


mettre lui et <strong>de</strong>ux ou trois autres un peu plus près <strong>de</strong> la Communauté, participant à quel‐<br />

ques‐uns <strong>de</strong> ses exercices et en aspirance plus marquée pour sʹadjoindre à nous, mais il<br />

faudrait cette bonne volonté. Lʹaura‐t‐il? Je puis en douter. On pourrait néanmoins faire<br />

lʹessai. Il attend votre avis qui influera, je pense, sur ses dispositions.<br />

Je crois que vos projets pour lʹordonnance <strong>de</strong> vos travaux et installations sont très<br />

bons. Je nʹai pas vu par moi‐même le mauvais état du bâtiment occupé par vos plus jeunes<br />

enfants, mais le f. Georges [<strong>de</strong> Lauriston], qui mʹen parlait <strong>de</strong>rnièrement, pensait, comme<br />

vous, quʹon ne pourrait éviter longtemps <strong>de</strong> le reconstruire. Quant à lʹachat <strong>de</strong> quelques<br />

mesures <strong>de</strong> terre plus rapprochées <strong>de</strong> vous que Dainville, il y a tout avantage puisque les<br />

fonds nécessaires vous seront donnés.<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> joie que le personnel <strong>de</strong> vos frères va assez bien; prions beaucoup le<br />

Seigneur quʹil daigne souffler dans leur cœur cette foi vive si rare <strong>de</strong> nos jours, lʹesprit <strong>de</strong><br />

zèle et surtout cet amour du sacrifice qui est lʹessence <strong>de</strong> la vie religieuse. Nous péchons<br />

tous, parce que nous nous donnons imparfaitement. Puisse le Seigneur nous prendre mal‐<br />

gré nos résistances et vaincre notre lâcheté à force <strong>de</strong> tendresse et dʹar<strong>de</strong>nte charité. Nous<br />

allons ici assez bien, le Carême se passe en bonne disposition, chacun le fait <strong>de</strong> son mieux,<br />

selon ses forces. Nous travaillons un peu aux ateliers à <strong>de</strong>s ouvrages envoyés dʹAngers.<br />

Nous ne savons pas bien encore jusquʹoù ira notre participation à ces travaux. Le projet <strong>de</strong><br />

nous en remettre toute lʹentreprise est toujours en voie dʹexécution, mais nous allons timi‐<br />

<strong>de</strong>ment et pas à pas, <strong>de</strong> peur dʹêtre débordés par une trop lour<strong>de</strong> entreprise. Le Seigneur<br />

semble jusquʹici mesurer au jour le jour la tâche à nos forces.<br />

Je nʹai pas, <strong>de</strong>puis plusieurs semaines, <strong>de</strong> nouvelles dʹAmiens. M. Caille, qui nous<br />

avait annoncé sa visite, nʹest pas venu. Jʹespère que tout va bien. M. Deberly est à nous <strong>de</strong><br />

cœur. Quelques petites difficultés restent, que nous espérons lever; quand le cœur est<br />

donné, le bon Maître se charge du reste. Si votre jeune séminariste sʹadjoignait aussi à<br />

nous, ce serait un grand bien. Je prierai le bon S t Joseph, dont nous faisons le mois <strong>de</strong> notre<br />

mieux, dʹy mettre la main. Il faut encore ne rien ébruiter pour M. Deberly, M gr nʹayant en‐<br />

core donné quʹune <strong>de</strong>mi permission.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, allons toujours humbles et patients, confiants surtout,<br />

car Dieu est notre Père Il voit nos travaux, nos besoins, Il nous donnera à son heure le sou‐<br />

lagement et le secours.<br />

Jʹembrasse vous et tous nos frères; mille affections respectueuses <strong>de</strong> ceux dʹici à<br />

ceux <strong>de</strong> notre chère maison dʹArras.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

528 à M. Caille<br />

Exercices <strong>de</strong> piété pour les enfants <strong>de</strong> Nazareth. Paiement <strong>de</strong> la pension dʹun orphelin.<br />

Vaugirard, 16 mars 1858<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous commençons à nous inquiéter un peu <strong>de</strong> votre silence; nous vous attendions<br />

dans les premiers jours du Carême comme vous nous lʹaviez annoncé, mais vos occupa‐<br />

tions auront sans doute empêché ce voyage, puisque nous nʹavons pas eu la satisfaction <strong>de</strong><br />

vous voir; donnez‐nous <strong>de</strong> vos nouvelles, mon bon ami, afin que nous soyons plus tran‐<br />

657


quilles à votre sujet et sur tout ce qui vous entoure. Nous ne vous avons point écrit <strong>de</strong> no‐<br />

tre côté parce que nous étions toujours dans lʹattente <strong>de</strong> votre arrivée. Nous nʹavons eu<br />

dʹailleurs aucun fait bien notable ces temps <strong>de</strong>rniers; tout marche comme <strong>de</strong> coutume, et<br />

dans la Communauté, et dans les œuvres. Les retraites commencent pour le Carême et re‐<br />

doublent les travaux <strong>de</strong> nos frères. A Nazareth, en particulier, on a essayé un petit Carême<br />

pour les enfants; <strong>de</strong>ux fois par semaine, la chapelle reçoit le soir tous les enfants qui se<br />

présentent et M. lʹabbé Hello leur fait un petit exercice <strong>de</strong> chants <strong>de</strong> cantiques, dʹune ins‐<br />

truction suivie <strong>de</strong> la bénédiction. A lʹune <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux réunions, il y a une petite distribution<br />

au sort <strong>de</strong> médailles, dʹimages pieuses et <strong>de</strong> chapelets. Il y a dʹordinaire 250 ou 300 enfants<br />

à ces réunions; elles serviront à les préparer au Jubilé; tout nous laisse espérer quʹil en ré‐<br />

sultera quelque bien.<br />

Nos ateliers vont assez bien, cependant lʹaffaire dʹAngers reste toujours mal préci‐<br />

sée, parce quʹon reste incertain si lʹétablissement pourra être maintenu à la maison <strong>de</strong>s<br />

Carmes, où il est présentement, ou sʹil <strong>de</strong>vra être transféré chez nous. Nous laissons à la<br />

Provi<strong>de</strong>nce le soin <strong>de</strong> nous conduire à cet égard.<br />

M lle Denis dʹAmiens, protectrice dʹun <strong>de</strong> nos enfants, le jeune Normandie, nous a<br />

écrit <strong>de</strong>rnièrement, en réponse à la réclamation que nous lui faisions <strong>de</strong> divers paiements,<br />

quʹelle les avait faits entre vos mains; nous vous serons obligés <strong>de</strong> nous dire où vous en<br />

êtes à ce sujet. Dʹaprès son compte, elle aurait, dans ses paiements successifs, versé chez<br />

vous 475f, tandis que nous ne trouvons sur nos registres <strong>de</strong> recettes que 325f, ce qui fait<br />

une différence <strong>de</strong> 150f représentant <strong>de</strong>ux trimestres <strong>de</strong> la pension du jeune Normandie. Si<br />

vous pouvez vérifier ces chiffres, vous nous mettrez à même <strong>de</strong> tranquilliser cette bonne<br />

<strong>de</strong>moiselle; nous croyons bien, pour nous, que nos registres sont en règle.<br />

Jʹespère que vos frères vont bien et que notre cher M. Deberly, en particulier, a bien<br />

consommé son union <strong>avec</strong> nous, ses bonnes et affectueuses dispositions mʹont gran<strong>de</strong>ment<br />

consolé et mʹont donné les meilleures espérances pour lʹavenir.<br />

Tous nos frères vous sont toujours tendrement affectionnés et prient bien fidèle‐<br />

ment pour vous tous; priez bien aussi pour nous et tenons‐nous bien près les uns <strong>de</strong>s au‐<br />

tres dans le Cœur divin <strong>de</strong> notre bien‐aimé Seigneur.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Respect à M. lʹabbé Mangot.<br />

Notre atelier <strong>de</strong> tailleurs est faiblement conduit; ceux que nous avons chez nous<br />

sont trop jeunes et trop peu rassis pour bien mener ce petit service; si le bon Dieu, <strong>de</strong> votre<br />

côté, envoyait quelque bon sujet <strong>de</strong> cet état, ce nous serait un grand bien; prions, toute no‐<br />

tre ressource est là.<br />

529 296<br />

530 à M. Carment<br />

Ne pas se permettre <strong>de</strong>s voyages inutiles. Faire <strong>de</strong>s visites dʹateliers, sans craindre les remarques. Donner autant<br />

quʹon espère.<br />

296 Suppléée par la 628 bis.<br />

658


Vaugirard, 22 mars 1858<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Jʹavais appris <strong>avec</strong> regret, par une lettre <strong>de</strong> M. Halluin, que vous étiez enrhumé et<br />

jʹai su <strong>de</strong>puis, par M. Caille, que vous étiez à Amiens pour vous soigner. Comme vous<br />

lʹavez bien pressenti, cher ami, jʹai eu quelque peine en vous voyant revenir si tôt à Amiens<br />

et multiplier vos voyages; il me semblait que cʹétait prendre un mauvais pli que nos frères<br />

nʹavaient pas jusquʹici lʹusage dʹaller si souvent dans leur famille. Nous tâchons aussi<br />

dʹordinaire <strong>de</strong> soigner nos mala<strong>de</strong>s assez bien pour quʹils nʹaient pas besoin <strong>de</strong> sortir <strong>de</strong> la<br />

maison en cas dʹindisposition. A Vaugirard, on nʹépargne pour cela aucun sacrifice, et jʹai<br />

remarqué <strong>avec</strong> plaisir quʹà Arras, pour les ff. Joseph [Loquet] et Augustin [Bassery] en par‐<br />

ticulier, M. Halluin prenait soin <strong>de</strong> tout ce dont ils pouvaient avoir besoin leur fût ample‐<br />

ment donné. Je crois donc, cher ami, quʹil eût été mieux <strong>de</strong> rester là, ou, si vous aviez réel‐<br />

lement nécessité <strong>de</strong> vous éloigner du lieu <strong>de</strong> vos occupations pour avoir plus <strong>de</strong> repos,<br />

concerter <strong>avec</strong> M. Halluin quelque séjour à Vaugirard. Je suis sûr quʹen y pensant bien,<br />

vous auriez été vous‐même <strong>de</strong> cet avis et que cʹest en suite dʹun premier mouvement que<br />

vous aurez songé à vous rendre à Amiens; donc cher ami, je ne vous en fais point <strong>de</strong> re‐<br />

proche, je veux vous faire seulement une observation pour lʹavenir. Dès que vous vous<br />

sentirez assez bien pour retourner auprès <strong>de</strong> notre cher M. Halluin, je crois que ce sera<br />

bien <strong>de</strong> le faire.<br />

Nous nʹavons pas <strong>de</strong> mala<strong>de</strong> ici, grâces à Dieu; nous avons été ménagés cet hiver; je<br />

lʹai moi‐même traversé sans encombre, à la condition seulement <strong>de</strong> ne pas sortir. Tous nos<br />

patronages commencent leur retraite, jʹespère que tout ira bien et donnera dʹheureux<br />

fruits; priez bien et faites aussi prier autour <strong>de</strong> vous pour que la moisson soit précieuse<br />

<strong>de</strong>vant Dieu.<br />

Je vous engage bien, cher ami, à vous prêter aux visites dʹateliers <strong>avec</strong> toute la<br />

bonne volonté et toute la cordiale soumission possibles. Vous vous exagérez lʹeffet <strong>de</strong><br />

quelques criailleries <strong>de</strong>s enfants, cela se réduit, jʹen suis certain, à bien peu dʹattention <strong>de</strong> la<br />

part <strong>de</strong>s maîtres qui savent ce que valent, en général, ces sortes <strong>de</strong> plaintes; les préven‐<br />

tions, sʹil y en a, tomberont dʹailleurs bientôt dès quʹon aura eu quelques rapports <strong>avec</strong><br />

vous qui, en général, aviez bien réussi <strong>avec</strong> les parents et les maîtres <strong>de</strong> vos enfants, quand<br />

vous vous occupiez du patronage. Enfin; et par <strong>de</strong>ssus tout, ayez confiance en Dieu qui ac‐<br />

compagne ses serviteurs quand ils agissent en simplicité, en obéissance et en esprit <strong>de</strong> foi;<br />

tâchez, bien cher ami, <strong>de</strong> vous pénétrer <strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong> ces sentiments, et croyez bien<br />

que le Seigneur sera <strong>avec</strong> vous dans tous vos travaux. La confiance en Lui nʹest pas assez<br />

gran<strong>de</strong> encore dans nos cœurs, et pourtant Il proportionne ses grâces aux espérances <strong>de</strong><br />

nos âmes; dites‐Lui bien souvent cette aimable parole: ʺIn te, Domine, speravi, non confundar<br />

in æternum.ʺ<br />

Adieu, bien cher enfant, je serai bien heureux <strong>de</strong> vous voir à la retraite si M. Halluin<br />

vous y envoie; le moment nʹen est pas encore fixé, préparons‐nous‐y <strong>de</strong> bien loin pour que<br />

lʹeffet en soit plus grand et mieux assuré.<br />

Offrez mon respect à vos bons parents et mes affectueux souvenirs aux ff. dʹAmiens<br />

si vous êtes encore près dʹeux.<br />

Votre affectionné ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

659


531 <strong>de</strong> M. Lantiez à M. Halluin<br />

P.S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Le travail manque à Paris. Difficulté pour placer un jeune ouvrier.<br />

Vaugirard, 29 mars 1858<br />

Mon bien cher frère,<br />

M. le Supérieur a appris <strong>avec</strong> bonheur votre prochaine arrivée, et nous aussi nous nous en<br />

réjouissons. Pour Jules, ce bon ami a bien mal été <strong>de</strong>puis quelque temps. M. le Supérieur lui avait<br />

donné jusquʹà Pâques pour réfléchir, mais voyant quʹil ne tournait pas mieux, nous lui avons dit <strong>de</strong><br />

penser à se placer. Nous pensons vous lʹenvoyer ces jours‐ci, car, outre le chômage actuel quʹil y a<br />

à Paris, lʹouvrage manquant presque partout, il rencontrerait tant <strong>de</strong> dangers pour son salut quʹas‐<br />

surément cʹest un grand service que <strong>de</strong> le placer ailleurs. Je vous envoie une lettre quʹil écrit à Mlle Filly. Il ne sait si elle <strong>de</strong>meure toujours aux Augustines. Ce serait peut‐être un moyen <strong>de</strong> le placer.<br />

Nous avons beaucoup <strong>de</strong> maux <strong>de</strong> gorge en ce moment; cela à part, tout va bien. Comment<br />

vont tous nos chers ff. dʹArras? Jʹai hâte <strong>de</strong> vous voir pour causer au long <strong>de</strong> cette chère maison<br />

dʹArras qui nous intéresse tous au plus haut <strong>de</strong>gré. Quant aux défections, elles nous prouvent la<br />

nécessité <strong>de</strong> nous serrer les uns contre les autres par la charité, nous serons ainsi plus forts.<br />

Présentez bien à mes bien chers frères mes sentiments dévoués, et veuillez me croire tou‐<br />

jours<br />

Votre tout affectionné et dévoué en N.S.<br />

L. Lantiez pr.<br />

Je joins toutes mes affections à celles <strong>de</strong> notre bon abbé Lantiez. Nous avons bien<br />

examiné pour Jules quel serait le meilleur parti pour son intérêt. Il nous a semblé quʹil y<br />

avait bien peu <strong>de</strong> chances favorables pour lui temporellement à Paris, dans ce moment les<br />

industries étant en souffrance. Par <strong>de</strong>ssus tout, nous voyons mille dangers pour son salut.<br />

Il nʹa pas assez <strong>de</strong> simplicité pour sʹassocier présentement aux réunions <strong>de</strong> jeunes ouvriers<br />

qui pourraient le soutenir et lʹentourer chrétiennement. Il vaut donc mieux quʹil retourne<br />

en province jusquʹà ce que sa raison ait un peu mûri. Nous vous lʹenverrons dans le cours<br />

<strong>de</strong> la semaine, espérons que vous pourrez le placer à Lille, selon son désir. Je pensais que<br />

M. Flour aurait pu le placer à Boulogne, et peut‐être le loger dans sa maison. Vous jugerez<br />

si ce moyen est praticable. Le f. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] vous écrira. Il est dans…<br />

532 à M. Halluin<br />

Le frère Carment doit venir à Vaugirard. Lʹorphelinat <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong>s hommes dʹautorité. Conseils empreints <strong>de</strong><br />

sagesse et <strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nce.<br />

Vaugirard, 31 mars 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Nous sommes bien peinés <strong>de</strong>s difficultés que vous rencontrez dans votre œuvre si<br />

utile et si méritoire. Elles sont inhérentes, sans doute, à une pareille tâche, mais Dieu, qui<br />

les permet pour votre sanctification et celle <strong>de</strong> vos enfants, ne voudra pas quʹelles portent<br />

aucune atteinte sérieuse au bien que vous souhaitez <strong>de</strong> faire. Jʹespère quʹaprès quelques<br />

jours <strong>de</strong> calme, vos enfants pourront continuer à recevoir provisoirement les soins du f.<br />

Carment. Il me semble que, pour ne pas donner le <strong>de</strong>ssous à lʹautorité, ni risquer dʹaffaiblir<br />

la discipline, il serait bien quʹil gardât son poste jusquʹà la retraite, si vous voyez quʹil<br />

puisse le faire sans risque <strong>de</strong> quelque nouvel embarras. Autrement, comme vous pouvez<br />

660


mieux, sur les lieux, juger la situation et voir le parti à prendre, je mʹen rapporte pleine‐<br />

ment à votre bon esprit pour régler les choses dans lʹintérêt du bien. Nous recevrons le f.<br />

Carment à quelque moment que vous jugiez bien <strong>de</strong> le renvoyer. Je crois quʹil pourra diffi‐<br />

cilement remplir vos vues. Il nʹa pas assez dʹempire sur lui‐même pour prendre la position<br />

dʹautorité calme et ferme quʹil <strong>de</strong>vrait avoir près <strong>de</strong> vos enfants. Il faut reconnaître dʹail‐<br />

leurs que cette position nʹest pas sans difficultés et quʹelle <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rait un homme doué <strong>de</strong><br />

rares qualités et dʹune soli<strong>de</strong> vertu. Cet homme, le trouverons‐nous? Je ne sais. Nous cher‐<br />

cherons au moins <strong>avec</strong> vous bien sincèrement quelles ressources peut avoir notre petite<br />

Communauté. Nous serons bien satisfaits <strong>de</strong> vous voir à la semaine du Bon Pasteur. Je<br />

pense que notre retraite, sauf les cas imprévus, pourrait se faire la <strong>de</strong>rnière semaine<br />

dʹavril, cʹest‐à‐dire dans trois semaines. Je ne vois pas bien seulement si vous pourrez vous<br />

absenter en sécurité, laissant <strong>de</strong>rrière vous <strong>de</strong>s causes dʹinquiétu<strong>de</strong>s. Si vous trouviez<br />

mieux dʹenvoyer à lʹavance ici le f. Carment, je nʹy verrais pas après tout dʹabsolu inconvé‐<br />

nient; mais, vous absent et lui aussi, les enfants seront‐ils suffisamment tenus et surveillés?<br />

Vous verrez à cet égard ce qui sera <strong>de</strong> mieux à faire.<br />

Nous avons bien examiné si nous avions quelques moyens utiles pour placer Jules à<br />

Paris dans <strong>de</strong> bonnes conditions. Le f. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] sʹen est aussi occupé <strong>avec</strong><br />

nous. Nous sommes dʹaccord à penser que notre ville aurait bien <strong>de</strong>s dangers pour lui.<br />

Nous croyons donc mieux faire <strong>de</strong> le diriger <strong>de</strong> votre côté. Nous ne le croyons pas en ce<br />

moment assez simple <strong>de</strong> cœur et assez oublieux <strong>de</strong> lui‐même pour être propre à la vie <strong>de</strong><br />

communauté. Toutes les exhortations et conseils <strong>de</strong> M. Lantiez, ceux <strong>de</strong> M. Myionnet et les<br />

miens nʹont pu empêcher chez lui lʹesprit propre, le besoin <strong>de</strong> ramener les choses à lui, et<br />

<strong>de</strong>s camara<strong>de</strong>ries qui tendaient constamment à détourner nos enfants <strong>de</strong> leur voie dʹobéis‐<br />

sance et <strong>de</strong> confiance envers nous. Il nous paraît nécessaire quʹil se mûrisse dans la vie ex‐<br />

térieure. Peut‐être fera‐t‐il plus tard <strong>de</strong> sérieuses réflexions. Aujourdʹhui, nous ne croyons<br />

pas quʹon puisse les espérer <strong>de</strong> lui.<br />

Nous recevrons M. Cousin quand vous croirez bon <strong>de</strong> lʹenvoyer et nous tâcherons<br />

<strong>de</strong> lui faire un peu <strong>de</strong> calme et <strong>de</strong> repos, mêlant sa vie dʹoccupations pas trop fatigantes et<br />

dʹexercices <strong>de</strong> communauté. Il nous semblerait à désirer quʹil vînt en habit laïc. Autrement,<br />

ce serait une gêne pour lui donner telles fonctions que le besoin <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ra.<br />

Pour notre petit Brice, je crois quʹil vaut mieux, comme vous le pensez, quʹil ne<br />

vienne pas cette fois à la retraite. Nous verrons plus tard ce que <strong>de</strong>viendront ses disposi‐<br />

tions.<br />

Je ne puis avoir dʹavis bien arrêté sur M. Daviron, parce que je ne saisis pas parfai‐<br />

tement le plus ou moins dʹutilité que peut avoir pour vous son concours. Il y a un in‐<br />

convénient bien réel, pour donner un esprit à une œuvre et à ceux qui la conduisent, à<br />

grouper <strong>de</strong>s éléments <strong>de</strong> diverses natures, car on ne saurait jamais arriver à aucune unité.<br />

Il me paraît aussi que cʹest un exemple peu favorable pour affermir les dispositions du<br />

jeune ecclésiastique qui semble disposé à se dévouer à votre œuvre. Pour ces raisons, je<br />

croirais mieux que vous marchiez sans M. Daviron, mais, je le répète, je ne sais pas assez si<br />

vous pouvez vous passer <strong>de</strong> lui. En cas dʹaffirmative, je nʹhésiterais pas à croire quʹil serait<br />

mieux dʹy aviser, dʹautant quʹaprès le séjour quʹil a fait chez vous, il pourrait être placé<br />

convenablement dans le diocèse. Vous pouvez mieux que moi juger <strong>de</strong> ce qui est faisable<br />

et opportun.<br />

661


Adieu, cher Monsieur lʹabbé, nos peines et nos difficultés ne mʹétonnent ni ne me<br />

découragent. Nous pouvons penser que nos œuvres nʹen seront jamais exemptes. Persévé‐<br />

rons en confiance, à force <strong>de</strong> prières, <strong>de</strong> patience et <strong>de</strong> charité, nous surmonterons les obs‐<br />

tacles et poserons nos travaux sur le sol soli<strong>de</strong> <strong>de</strong> la foi et du dévouement chrétien.<br />

Jʹembrasse vous et tous nos frères bien affectueusement et suis, comme toujours,<br />

<strong>avec</strong> respect et tendre attachement,<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

533 à M. Decaux<br />

Regret <strong>de</strong> ne pas lʹavoir vu à Vaugirard. Aimable manière <strong>de</strong> présenter une réclamation délicate, concernant la<br />

pension dʹun petit orphelin.<br />

Vaugirard, 11 avril 1858<br />

Bien cher ami,<br />

Vous êtes bien décidément un homme cruel pour vos amis; venir chez nous, mon‐<br />

trer un peu votre visage à la porte et vous enfuir, nʹest‐ce pas un raffinement <strong>de</strong> cruauté?<br />

Avant‐hier, je suis sorti, bien décidé à vous aller trouver aux Finances pour vous dire ma<br />

peine, mais le mauvais temps me prit en route et jʹai dû rebrousser chemin, nʹosant guère<br />

encore affronter les intempéries. Jʹai bien regretté que vous nʹayez persévéré dans votre<br />

bonne pensée <strong>de</strong> nous voir mercredi <strong>de</strong>rnier; notre petit Conseil ne dure pas longtemps, et<br />

dʹailleurs vous eussiez pu y assister sans nous gêner, car je ne crois pas que nous ayons<br />

rien <strong>de</strong> secret pour vous, je vous dis tout ce que je sais et tout ce que je pense; donc, cher<br />

ami, regar<strong>de</strong>z‐vous à Vaugirard comme étant chez vous; jʹaimerais que vous y vissiez<br />

comme un lieu <strong>de</strong> repos où vous viendriez chercher un peu <strong>de</strong> calme quand vous êtes fati‐<br />

gué, ce qui doit arriver souvent.<br />

Jʹai une plainte à vous faire sur M. <strong>de</strong> Pellerin, Prési<strong>de</strong>nt dʹune <strong>de</strong> nos Conférences.<br />

Il a placé chez nous, au nom <strong>de</strong> sa Conférence qui <strong>de</strong>vait, disait‐il, payer la pension, un en‐<br />

fant nommé Victor Salzar quʹil paraissait aimer beaucoup; il a payé dʹabord bien inexac‐<br />

tement et <strong>avec</strong> beaucoup <strong>de</strong> réclamations <strong>de</strong> M. Myionnet, puis enfin il a cessé <strong>de</strong>puis 18<br />

mois <strong>de</strong> rien donner; à toutes les instances que M. Myionnet faisait, il répondait quʹon<br />

pouvait être tranquille, que la Conférence était une bonne garantie; en son absence, ses pa‐<br />

rents font la même réponse et assurent quʹon peut compter quʹil satisfera à ses engage‐<br />

ments; mais cela se borne à <strong>de</strong>s paroles sans nul effet: 450f sont maintenant arriérés sur la<br />

pension <strong>de</strong> lʹenfant que M. <strong>de</strong> Pellerin a, bien entendu, tout à fait cessé <strong>de</strong> voir, <strong>de</strong> telle<br />

sorte quʹil nʹa plu ni appui ni répondant. Cette manière dʹagir me semble bien délicate,<br />

pour un Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> Conférence surtout; ne pourriez‐vous, mon bon ami, savoir si cʹest<br />

en effet la Conférence qui répond <strong>de</strong> la pension <strong>de</strong> cet enfant, si elle lʹa payée et à qui <strong>de</strong>‐<br />

puis 18 mois, enfin si elle veut continuer son appui au pauvre enfant orphelin?<br />

Adieu, mon bien bon ami, revenez‐nous bientôt, je nʹaime pas rester si longtemps<br />

sans vous voir. Jʹai écrit à M. Baudon pour le remercier du petit article du bulletin; jʹai bien<br />

reconnu dʹoù venait lʹinspiration; merci aussi à vous qui vous montrez si affectionné pour<br />

nous.<br />

Votre tout dévoué ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

662


534 à M. Caille<br />

Annonce <strong>de</strong> la retraite <strong>de</strong> Communauté. Nouvelles <strong>de</strong>s Œuvres. La collaboration <strong>avec</strong> lʹabbé Choyer réduite à <strong>de</strong>s<br />

proportions raisonnables. MLP. consulte M. Caille sur les avantages <strong>de</strong> lʹunion <strong>avec</strong> lʹŒuvre dʹArras.<br />

Vaugirard, 11 avril 1858<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Jʹattendais toujours, ou votre visite, ou une lettre <strong>de</strong> vous; mais ni lʹune ni lʹautre ne<br />

nous venant, je vous écris <strong>de</strong>ux mots pour vous donner <strong>de</strong> nos nouvelles et vous annoncer<br />

le moment <strong>de</strong> notre retraite qui aura lieu définitivement à la fin du mois; elle commencera<br />

le dimanche au soir, 25 avril, et finira le vendredi matin 30. Elle sera donnée par le r.p. Re‐<br />

naud, Jésuite, ancien Provincial, homme dʹune haute expérience, saint et <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> ins‐<br />

truction. Vous verrez, mon bon ami, si quelquʹun <strong>de</strong> vos frères peut y venir; cʹest une<br />

bonne occasion <strong>de</strong> se retremper spirituellement et <strong>de</strong> prendre un peu <strong>de</strong> calme en sʹéloi‐<br />

gnant momentanément <strong>de</strong> ses occupations accoutumées.<br />

Jʹespère que tout va bien dans notre chère maison <strong>de</strong> la rue <strong>de</strong> Noyon et que votre<br />

retraite du patronage aura donné <strong>de</strong> bons résultats. A Nazareth, à Grenelle et à St ‐Charles,<br />

nos ff. ont eu une gran<strong>de</strong> satisfaction et <strong>de</strong> bien heureux fruits. Nous allons assez bien aus‐<br />

si à Vaugirard; plusieurs <strong>de</strong> nos enfants ont <strong>de</strong>s grippes, maux <strong>de</strong> gorge, fièvres <strong>de</strong> diver‐<br />

ses sortes; il en résulte un peu <strong>de</strong> fatigue pour plusieurs frères. Nos petits ateliers vont as‐<br />

sez heureusement aussi. Lʹaffaire dʹAngers sʹest successivement réduite à <strong>de</strong>s proportions<br />

qui la rendront accessible pour nous et, je lʹespère, sans chances inquiétantes. Le bon Dieu<br />

a, comme toujours, veillé sur nos intérêts pour nous empêcher dʹentreprendre <strong>de</strong>s choses<br />

au‐<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> nos forces. Quʹil est bon dʹêtre entre ses mains et <strong>de</strong> ne vouloir sincèrement<br />

que ce quʹIl veut, sa sagesse alors règle tout et sa puissance et sa bonté viennent en ai<strong>de</strong> à<br />

notre faiblesse et à notre incapacité. Tenons‐nous donc toujours bien, mon bon ami, en<br />

abandon et dépendance <strong>de</strong> sa grâce et <strong>de</strong> son adorable volonté.<br />

Je recevrai <strong>avec</strong> joie <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> nos frères, du f. Henry [Guillot], en particulier,<br />

dont je nʹentends guère parler <strong>de</strong>puis longtemps; le f. Jules [Marcaire] mʹa écrit en <strong>de</strong>rnier<br />

lieu et M. Deberly mʹa aussi donné quelques signes <strong>de</strong> souvenirs. Je pense que ce bon abbé<br />

viendra à la retraite, nous aurons grand plaisir à le recevoir. Et vous, cher ami, ne vous<br />

verrons‐nous pas, dʹune façon ou dʹune autre, un peu tranquillement? Il y a bien long‐<br />

temps que cette satisfaction ne mʹa été donnée.<br />

Jʹai passé lʹhiver sans encombre, à la condition <strong>de</strong> rester toujours à la maison; la vie<br />

sé<strong>de</strong>ntaire mʹa un peu affaibli, mais le soleil va me rendre mes forces. Tous nos frères vous<br />

assurent, ainsi que votre maison, <strong>de</strong> leur tendre affection; jʹy joins aussi toute la mienne et<br />

<strong>de</strong> tout cœur je suis, en J. et M.,<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Il mʹest venu <strong>de</strong>puis quelque temps quelques petits doutes sur les avantages<br />

pour M. Halluin et pour nous <strong>de</strong> son union <strong>avec</strong> la Communauté. Sa maison a besoin <strong>de</strong><br />

beaucoup dʹai<strong>de</strong>, et nous ne pouvons lʹassister que faiblement; nous ne pouvons, <strong>de</strong> notre<br />

côté, attendre que <strong>de</strong>s charges <strong>de</strong> cette association. Cette <strong>de</strong>rnière pensée nʹest pas celle qui<br />

me préoccupe surtout, mais bien la vue <strong>de</strong> lʹinsuffisance <strong>de</strong> notre personnel pour soutenir<br />

convenablement cette œuvre difficile et qui, en ce moment, retombe presque entière sur M.<br />

Halluin. M. Carment y réussit peu, à cause <strong>de</strong> son caractère emporté, nous allons être obli‐<br />

663


gés probablement <strong>de</strong> le changer après la retraite; nous ne le remplacerons pas sans peine,<br />

sans sacrifice pour quelque autre <strong>de</strong> nos œuvres et nous nʹarriverons encore quʹà un résul‐<br />

tat bien imparfait, parce quʹil faudrait à Arras <strong>de</strong>s hommes, ou au moins un homme doué<br />

<strong>de</strong> rares qualités, calme, ferme, dʹun dévouement sans bornes, capables dʹen imposer à 80<br />

jeunes ouvriers presque hommes, que le gouvernement paternel ou plutôt maternel <strong>de</strong> M.<br />

Halluin rend très difficiles à conduire par dʹautres que par lui. M. Halluin dit lui‐même:<br />

“Jʹaime mes enfants comme une mère, jʹaurais besoin <strong>de</strong> quelquʹun qui pût les conduire et<br />

les surveiller comme un pèreʺ. Je pense, et ceux <strong>de</strong> nos frères qui ont vu les choses <strong>de</strong> près<br />

pensent aussi, que la position <strong>de</strong> ce père est bien délicate et bien difficile. M. Halluin a<br />

pensé un peu, je crois, à M. Guillot; je doute quʹil eût le sang‐froid et le calme nécessaire<br />

pour une pareille tâche. Je vous parle <strong>de</strong> tout cela confi<strong>de</strong>ntiellement, dites‐moi votre avis.<br />

535 à M. Halluin<br />

Un Jésuite prêche la retraite <strong>de</strong> Communauté. Neuvaine pour solenniser le transfert <strong>de</strong>s reliques <strong>de</strong> saint Vincent<br />

<strong>de</strong> Paul. Nouvelles <strong>de</strong>s frères.<br />

Vaugirard, 15 avril 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Jʹattendais pour vous écrire que les dispositions <strong>de</strong> notre retraite fussent définitive‐<br />

ment réglées, afin <strong>de</strong> vous les dire dʹune manière exacte. Elle commencera le dimanche au<br />

soir, 25 <strong>de</strong> ce mois, et se clora le vendredi matin, 30. Le r.p. Renaud, ancien Provincial <strong>de</strong>s<br />

Jésuites et Père spirituel <strong>de</strong> tous les Pères du collège, a bien voulu se charger <strong>de</strong> nous<br />

conduire durant cette retraite. On nous assure que cʹest un homme consommé en science<br />

chrétienne et quʹil nous donnera pleine satisfaction. Nous commencerons <strong>de</strong>main vendredi<br />

une neuvaine à S t Vincent <strong>de</strong> Paul, dont la translation <strong>de</strong>s reliques se solennisera diman‐<br />

che, afin dʹobtenir que ce temps <strong>de</strong> recueillement spirituel refasse bien nos âmes.<br />

Le f. Augustin [Bassery] est parti vendredi au soir pour sa <strong>de</strong>stination, bien disposé<br />

à marcher dans le bon chemin. Il mʹa dit que vous aviez un Chef <strong>de</strong> bataillon à qui vous<br />

<strong>de</strong>viez le faire recomman<strong>de</strong>r. Je pourrai, <strong>de</strong> mon côté, le faire appuyer près <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Le‐<br />

dinghem (jʹécris mal son nom), mais je pense que cʹest lui‐même que vous avez en vue et à<br />

qui vous voulez le recomman<strong>de</strong>r.<br />

Ferdinand va présentement assez bien. Il vous reverra <strong>avec</strong> une gran<strong>de</strong> joie. Il est<br />

bien plus à son affaire <strong>de</strong>puis le départ <strong>de</strong> Jules.<br />

Le petit f. Brice mʹécrit pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>avec</strong> instance à venir à la retraite, protestant<br />

quʹil va désormais vous donner pleine satisfaction et vous témoigner tout son attachement<br />

pour lʹœuvre et pour la Communauté. Je lui réponds que je me concerterai <strong>avec</strong> vous à ce<br />

sujet.<br />

M. Caille est momentanément à Paris, mais nous ne lʹavons vu que quelques ins‐<br />

tants; il repart <strong>de</strong>main pour Amiens. Nous ne pouvons pas chercher la consolation sensible<br />

dans nos rapports <strong>de</strong> fraternité, car cʹest à peine si nous pouvons nous rencontrer à <strong>de</strong><br />

courts moments, suivis <strong>de</strong> bien longues absences. Mais la charité forme <strong>de</strong>s liens assez so‐<br />

li<strong>de</strong>s pour quʹils puissent se passer <strong>de</strong> ce secours. Il en est <strong>de</strong> même <strong>avec</strong> vous, cher Mon‐<br />

sieur lʹabbé, mais nous aurons, je lʹespère, lʹéternité pour nous voir et pour nous unir en‐<br />

semble dans le Cœur <strong>de</strong> notre Dieu. En attendant, nous profiterons toujours <strong>de</strong>s quelques<br />

instants que vous nous <strong>de</strong>vez donner la semaine prochaine. Tous nos frères, ainsi que moi,<br />

664


se réjouissent à la pensée <strong>de</strong> votre arrivée; nous regrettons seulement que votre séjour<br />

doive être si court et ne puisse vous donner un véritable et bien nécessaire repos.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, à bientôt. Prions les uns pour les autres et pour toutes<br />

les âmes que nous avons à cœur <strong>de</strong> soutenir et <strong>de</strong> sauver. Je vous embrasse bien affectueu‐<br />

sement ainsi que vos frères, et suis <strong>avec</strong> un respectueux attachement<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

536 à M. Caille<br />

Dispositions pour accueillir les retraitants à Vaugirard.<br />

Vaugirard, 22 avril 1858<br />

Mon bon ami et fils en N.S.,<br />

Je vous écris <strong>de</strong>ux mots seulement pour vous dire que nous allons bien ici; le f.<br />

Henry [Guillot] commence à se remettre; seulement, comme il a été chargé <strong>de</strong> préparer les<br />

chambres, il nʹa pas eu encore beaucoup le temps <strong>de</strong> se reconnaître; pour bien faire, il fau‐<br />

drait quʹil fût un peu tranquille <strong>de</strong>main vendredi, et quʹil partît seulement samedi <strong>de</strong> bon<br />

matin; il arriverait vers 11h. ou 11h.½, ce qui nʹempêcherait pas le f. Jules [Marcaire] <strong>de</strong><br />

partir un peu matin, sʹil le souhaitait, en prenant <strong>avec</strong> vous quelques petits arrangements<br />

qui faciliteront son absence. Après le départ <strong>de</strong>s apprentis, M. Florentin pourrait prendre<br />

les enfants <strong>de</strong> lʹécole jusquʹà lʹentrée en classe, et M. Guillot serait revenu pour le dîner. M.<br />

Guillot me dit que M. lʹabbé Legras semble disposé à venir à la retraite; je vous serais obli‐<br />

gé <strong>de</strong> faire en sorte sans le blesser, quʹil sût que nous sommes absolument dépourvus <strong>de</strong><br />

chambres et même <strong>de</strong> literie; M. lʹabbé Choyer arrive cette semaine et doit rester, il faut<br />

une chambre pour le Père <strong>de</strong> la retraite, <strong>avec</strong> cela, M. Guillot lui‐même vous pourra assu‐<br />

rer que nous aurons disposé <strong>de</strong> toutes nos ressources; je confie cela à votre pru<strong>de</strong>nce en<br />

vous le recommandant bien.<br />

Adieu, mon bien bon ami, M. Halluin est ici et va bien. Je vous embrasse affectueu‐<br />

sement en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

537 à M. Halluin<br />

Pendant la retraite, entretiens <strong>de</strong> MLP. <strong>avec</strong> les jeunes frères dʹArras.<br />

Vaugirard, 1er mai 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Voilà notre retraite finie, vos chers enfants repartent pour retourner vers vous ac‐<br />

compagnés du f. Thuillier qui va, je lʹespère, <strong>avec</strong> le bon désir <strong>de</strong> servir Dieu <strong>de</strong> tout son<br />

cœur <strong>avec</strong> vous. Le f. Michel a <strong>de</strong>mandé à ne pas renouveler ses vœux, désirant, mʹa‐t‐il<br />

dit, <strong>de</strong>venir instituteur afin dʹai<strong>de</strong>r sa famille. Je lui ai fait quelques représentations, mais il<br />

nʹa pas paru goûter et a persisté dans sa pensée. Quant à Brice, il semble avoir grand peur<br />

<strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Vaugirard et mʹa paru bien déconcerté quand je lui ai <strong>de</strong>mandé, en plai‐<br />

santant, sʹil aimerait à y rester. Le f. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] me dit quʹil croit savoir que<br />

665


Jules nʹest pas une bonne relation pour lui. Je nʹattache guère dʹimportance à tous les petits<br />

mouvements en sens divers <strong>de</strong> ces enfants. Je crois pourtant que nous avons à nous défier<br />

pour nous‐mêmes <strong>de</strong>s impressions quʹils peuvent prendre sans lʹombre <strong>de</strong> raison. Ainsi,<br />

jʹai vu <strong>avec</strong> peine une phrase <strong>de</strong> la lettre du f. Augustin [Bassery] qui tendrait à vous faire<br />

penser que je nʹentre pas bien dans vos vues pour la conduite <strong>de</strong> la maison dʹArras et que<br />

je ne tiens pas bien compte <strong>de</strong>s défauts et <strong>de</strong>s torts <strong>de</strong> M. Carment. Rien nʹest moins vrai ni<br />

plus dépourvu <strong>de</strong> tout fon<strong>de</strong>ment. Jʹai dit simplement quelques mots <strong>de</strong> commisération<br />

pour le f. Carment, dont les défauts me semblent en gran<strong>de</strong> partie provenir dʹune vraie in‐<br />

firmité.<br />

M. Tabarie me paraît être bien bon, bien simple, bien droit dans son désir <strong>de</strong> servir<br />

Dieu. Jʹai la confiance quʹil pourra concourir à unir <strong>de</strong> plus en plus les parties <strong>de</strong> notre<br />

œuvre commune. Plus nous serons unis, plus nous serons forts.<br />

Je voudrais, cher Monsieur lʹabbé, mʹentretenir plus longtemps <strong>avec</strong> vous, vous dire<br />

le bon succès <strong>de</strong> la retraite et les belles qualités du vénérable Père qui nous lʹa donnée; nos<br />

chers MM. vous diront ces détails. Je nʹai que le temps <strong>de</strong> vous assurer quʹon nʹy a oublié<br />

ni vous ni votre chère maison, et quʹil en sera toujours ainsi en toute occasion.<br />

Recevez, cher Monsieur lʹabbé, tous mes sentiments <strong>de</strong> respect et dʹaffection en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

538 à M. Halluin<br />

Pratiques <strong>de</strong> piété à Vaugirard et à Nazareth. Visite du cardinal Morlot à Nazareth. Les obstacles à la persévé‐<br />

rance dans la vie religieuse. Le frère Bassery fait son service militaire. Grâces du temps <strong>de</strong> la Pentecôte.<br />

Vaugirard, 18 mai 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Cʹest <strong>de</strong>main [20 mai] que doit avoir lieu ici<br />

la première communion <strong>de</strong> nos enfants. Il en résulte<br />

pour nous un peu <strong>de</strong> dérangement et <strong>de</strong> surcharge,<br />

cʹest ce qui mʹa empêché <strong>de</strong> vous écrire plus tôt.<br />

Vous voyez, cher Monsieur lʹabbé, par la<br />

date <strong>de</strong> cette lettre, que je nʹai pu la continuer au<br />

jour où elle a été commencée. Quoique mes bons et<br />

dévoués frères fassent ici les choses bien plus que<br />

moi, il me suffit dʹen surveiller le mouvement pour<br />

y être absorbé comme eux. Aujourdʹhui, nous<br />

nʹavons quʹà rendre grâces au Seigneur. Nos en‐<br />

fants bien disposés et après une retraite excellente,<br />

ont fait tous, nous lʹespérons, leur première com‐<br />

munion <strong>de</strong> manière à en gar<strong>de</strong>r toujours le souve‐<br />

nir. Au commencement <strong>de</strong> juin, nous aurons la<br />

Confirmation. Nous espérons que S.E. le Cardinal<br />

viendra la donner; il nous montre jusquʹici beau‐<br />

coup <strong>de</strong> bienveillance. Il est allé le jour <strong>de</strong> lʹAscen‐<br />

sion à Nazareth, où sa présence a été pour tous un grand bonheur. Les apprentis, jeunes<br />

666


ouvriers et appuis divers <strong>de</strong> lʹœuvre remplissaient la chapelle. Il y a eu entre 5 et 600<br />

communions. Le bon Archevêque était enchanté. Je crois quʹon ne songera plus jamais à<br />

nous re<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r la chapelle.<br />

Jʹespère que <strong>de</strong> votre côté, cher Monsieur lʹabbé, vous avez quelque satisfaction et<br />

que vos enfants marchent selon vos vœux. Votre personnel nʹest pas nombreux pour sou‐<br />

tenir une si gran<strong>de</strong> maison, mais si les ff. vous secon<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> leur mieux, comme je lʹespère,<br />

vous pourrez aller ainsi pour un temps, en attendant que le Seigneur accroisse nos moyens<br />

et nous ren<strong>de</strong> plus forts. Il nous est entré mardi <strong>de</strong>rnier un nouveau frère [Desouches] qui<br />

a fait <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s et qui a lʹhabitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> lʹenseignement, mais nous le connaissons peu et je<br />

ne puis encore guère augurer sʹil nous conviendra, bien que les apparences soient favora‐<br />

bles.<br />

Les autres ff. vont bien. Nous ne <strong>de</strong>vons pas, cher Monsieur lʹabbé, nous trop<br />

contrister <strong>de</strong> quelques défaillances parmi ces bons jeunes gens. Lʹesprit <strong>de</strong> notre siècle est<br />

si peu ferme en foi, si peu généreux en sacrifice quʹil faut bien nous attendre à marcher<br />

lentement dans la voie dʹabnégation et dʹentier dévouement où le Seigneur nous a placés.<br />

Mais aussi ceux qui se donneront franchement à nos œuvres, nʹayant que Dieu en vue et le<br />

salut <strong>de</strong>s âmes, seront <strong>de</strong>s cœurs dʹélite, <strong>de</strong> vrais ouvriers dans le champ du Père <strong>de</strong> fa‐<br />

mille.<br />

Jʹai reçu une lettre du f. Augustin [Bassery] qui gémit beaucoup sur les dangers et<br />

les misères <strong>de</strong> sa condition. Je pense néanmoins que, sʹil peut rester un peu ferme et sʹas‐<br />

seoir franchement comme chrétien, il peut gagner beaucoup en vigueur et en fermeté,<br />

points par lesquels il laissait trop à désirer. Il me <strong>de</strong>man<strong>de</strong> un peu dʹargent, je lui en enver‐<br />

rai peu à la fois parce que je sais combien, dans sa condition, lʹargent est une terrible tenta‐<br />

tion.<br />

Le f. Cousin va assez bien, sa bonne volonté et sa piété sincère ne semblent laisser<br />

rien à désirer; il nʹest pas bien expéditif, ni bien adroit, le cercle <strong>de</strong> son action est consé‐<br />

quemment assez restreint. Jʹespère néanmoins quʹ<strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> temps, il fera sa position<br />

et nous <strong>de</strong>viendra plus utile.<br />

Nous nous préparons <strong>de</strong> notre mieux à la fête <strong>de</strong> la Pentecôte, espérant que lʹEsprit<br />

divin daignera renouveler nos âmes, leur souffler une foi plus ar<strong>de</strong>nte, une charité plus<br />

vive, un courage plus ferme et plus constant. Puisse‐t‐Il répandre ses dons sur toute notre<br />

petite famille et faire surtout une part bien abondante à toute notre chère maison dʹArras.<br />

Je suis, bien cher Monsieur lʹabbé, dans la divine charité <strong>de</strong>s Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Nos ff. vous offrent leur respectueuse affection, Ferdinand son filial attachement.<br />

539 à M. Carment<br />

MLP. assure le frère Carment <strong>de</strong> sa sympathie pour son père mala<strong>de</strong>; mais son absence cause <strong>de</strong> lʹembarras à la<br />

communauté <strong>de</strong> Vaugirard où il est <strong>de</strong>puis la retraite.<br />

Vaugirard, 22 mai 1858<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Nous ne cessons point <strong>de</strong> prier pour votre bon père et pour vous aussi bien que<br />

pour toute votre famille, dont nous partageons les peines; je ne vous ai pas écrit plus tôt à<br />

667


cause <strong>de</strong> la première communion <strong>de</strong> nos enfants qui a eu lieu avant‐hier et qui nous a<br />

gran<strong>de</strong>ment occupés. Nous avons eu soin <strong>de</strong> leur recomman<strong>de</strong>r votre cher mala<strong>de</strong>, jʹes‐<br />

père que leurs prières auront été entendues et quʹil aura eu quelque soulagement ou un<br />

surcroît <strong>de</strong> grâces pour porter <strong>avec</strong> patience et résignation ses souffrances. Assurez‐le que<br />

nous sympathisons bien aux douleurs quʹil endure et que nous espérons <strong>de</strong> la miséricor<strong>de</strong><br />

divine que ses peines seront pour lui une source <strong>de</strong> mérites et une cause <strong>de</strong> bénédictions<br />

pour tous ceux qui lʹentourent.<br />

Je nʹai point <strong>de</strong> nouvelles dʹArras ni <strong>de</strong> la maison dʹAmiens; ici, tout va comme <strong>de</strong><br />

coutume; M. Choyer arrive ici aujourdʹhui; il sera un peu contristé <strong>de</strong> ne pas vous trouver,<br />

plusieurs choses étant en souffrance par votre absence, mais nous <strong>de</strong>vons penser que cela,<br />

comme tout le reste, est réglé par la Provi<strong>de</strong>nce et nous soumettre à ses sages dispositions.<br />

Je pense que M. Choyer ira ces jours‐ci à Amiens pour quelques travaux quʹil a en vue.<br />

Il nous est arrivé un nouveau frère; je ne puis rien vous en dire, ne le connaissant<br />

que bien peu.<br />

Adieu, mon cher enfant, faites <strong>de</strong> votre mieux lʹœuvre que Dieu vous donne en ce<br />

moment à Amiens, si vous agissez bien sous ses yeux et dans son esprit, votre absence<br />

momentanée sera sans préjudice pour votre âme et laissera intact votre dévouement à<br />

Dieu.<br />

Je suis obligé <strong>de</strong> vous quitter, nʹayant aucune liberté en ce moment. Je vous em‐<br />

brasse bien affectueusement.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

540 à M. Caille<br />

Nouvelles consolantes <strong>de</strong>s Œuvres. Le cardinal Morlot à Nazareth pour lʹAscension. Le travail <strong>de</strong>s ateliers diri‐<br />

gés par lʹabbé Choyer va bon train, mais MLP. nʹen voit pas bien les débouchés. exhortation à lʹentente frater‐<br />

nelle. Le frère Carment toujours au chevet <strong>de</strong> son père.<br />

Vaugirard, 24 mai 1858<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

M. lʹabbé Choyer se rendant à Amiens pour traiter, sʹil y a lieu, dʹun travail dʹart re‐<br />

ligieux concernant votre église S t ‐Jacques, ira sans doute vous faire une petite visite; je lui<br />

remets donc ces quelques mots qui vous porteront <strong>de</strong> nos nouvelles. Nous nʹavons quʹà<br />

bénir le Seigneur, tout va dans dʹassez bonnes conditions chez nous et dans les œuvres qui<br />

nous sont confiées. La première Communion <strong>de</strong> nos enfants <strong>de</strong> Vaugirard sʹest faite jeudi<br />

<strong>de</strong>rnier dʹune façon très édifiante; nous avions 50 enfants, soit renouvelants, soit commu‐<br />

niants pour la première fois. Au commencement <strong>de</strong> juin, nous aurons la Confirmation;<br />

nous espérons que S.E. le Cardinal viendra la donner. Ce bon archevêque a eu la con<strong>de</strong>s‐<br />

cendance <strong>de</strong> venir à Nazareth officier le jour <strong>de</strong> lʹAscension; la solennité a été vraiment<br />

touchante; cinq ou six cents apprentis ou jeunes ouvriers et Confrères <strong>de</strong> S t Vincent‐<strong>de</strong>‐<br />

Paul ont communié <strong>de</strong> la main <strong>de</strong> M gr , qui semblait très heureux en voyant un pareil em‐<br />

pressement et <strong>de</strong>s fruits si heureux <strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong> son diocèse. Il a visité les vieillards dans<br />

leur chambre, a vu les fourneaux, la bibliothèque, et a charmé tout le mon<strong>de</strong> par ses paro‐<br />

les pieuses et paternelles; il a parlé trois ou quatre fois à la chapelle et a administré la<br />

confirmation à quelques enfants et jeunes gens.<br />

668


Nos petits ateliers vont ici assez bien, sans que nous puissions dire encore bien net‐<br />

tement quel avenir leur est réservé; le travail y est établi en <strong>de</strong> bonnes conditions, mais je<br />

ne vois pas encore assez précisément les moyens <strong>de</strong> débouché; cʹest un point <strong>de</strong>s plus es‐<br />

sentiels.<br />

Jʹespère que les saintes solennités <strong>de</strong> lʹAscension et <strong>de</strong> la Pentecôte se seront bien<br />

passés chez vous; jʹapprendrai <strong>avec</strong> joie les détails que vous me donnerez à ce sujet. Je<br />

souhaite bien aussi que vous me disiez si tout va bien <strong>avec</strong> M. Deberly, et si nos frères Ju‐<br />

les [Marcaire] et Henry [Guillot] concertent bien <strong>avec</strong> vous et entre eux tous leurs moyens<br />

dʹaction. Tâchons <strong>de</strong> bien nous entendre et, quoique en petit nombre, nous pourrons en‐<br />

core faire <strong>de</strong>s œuvres agréables à Dieu. Je serai bien aise que nos frères Jules et Henry<br />

mʹécrivent quelques mots pour me dire si leur voyage à Vaugirard leur a fait quelque bien<br />

et sʹils trouvent quʹils en ont tiré quelque amélioration pour la bonne entente dans leurs<br />

travaux.<br />

Notre f. Carment est encore une fois à Amiens pour la santé <strong>de</strong> son père; ces voya‐<br />

ges réitérés nous contristent un peu, mais il nous a paru quʹil nʹy avait guère moyen <strong>de</strong> les<br />

éviter; il ne quitte presque pas le lit <strong>de</strong> son père qui est dans état grave.<br />

Adieu, mon bon ami, je souhaite bien que le Seigneur bénisse vous et votre maison;<br />

nous le prions ici tous pour vous en toute circonstance, à lʹoccasion du mois <strong>de</strong> Marie en<br />

particulier.<br />

Je vous embrasse bien affectueusement ainsi que nos frères. Respects à MM. Man‐<br />

got et Deberly.<br />

Votre ami et Père bien dévoué en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

541 à M. Caille<br />

Du rôle <strong>de</strong>s aumôniers dans les œuvres.<br />

Vaugirard, 3 juin 1858<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je nʹai pas répondu tout <strong>de</strong> suite à votre lettre du 28 mai parce que je nʹavais pas<br />

saisi pleinement la cause <strong>de</strong>s embarras que vous éprouviez dans votre chère œuvre du pa‐<br />

tronage, par rapport à la position qui doit y être faite à lʹaumônier qui lui donne ses soins.<br />

Cette position me paraît, en ensemble, <strong>de</strong>voir être celle quʹont les aumôniers dans toutes<br />

les Institutions quʹils <strong>de</strong>sservent spirituellement. Ils ont le soin du culte dans la chapelle,<br />

ils règlent, <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> les chefs <strong>de</strong>s établissements, la nature et le nombre <strong>de</strong>s exerci‐<br />

ces <strong>de</strong> piété, ils font les instructions religieuses et confessent les enfants ou les membres<br />

composant les œuvres, ouvriers en autres. Je ne vois pas bien, sʹils se renferment dans cette<br />

sphère qui leur est propre, comment les aumôniers pourraient trouver <strong>de</strong>s difficultés en<br />

accomplissant leurs fonctions. M. Cacheleux, aumônier <strong>de</strong> Louvencourt, M. Mangot, an‐<br />

cien aumônier du Sacré‐Cœur, et dʹautres aumôniers pourraient vous dire précisément<br />

quelle part leur est donnée dans ces œuvres diverses et leur réponse pourrait vous servir<br />

<strong>de</strong> base pour régler vos rapports <strong>avec</strong> M. votre aumônier.<br />

Je ne pourrais vous donner comme indice bien sûr ce qui se fait à Vaugirard, à Na‐<br />

zareth et dans les œuvres que nous <strong>de</strong>sservons, parce que nos ff. ecclésiastiques y sont<br />

669


dans une position toute particulière; membres <strong>avec</strong> nous dʹune famille, leur intérêt se<br />

porte sur tout, parce que tout les intéresse et les touche; ils ne préten<strong>de</strong>nt pas, tant sans<br />

faut, dominer dans les choses qui regar<strong>de</strong>nt lʹadministration et la conduite extérieure <strong>de</strong>s<br />

œuvres, mais, par dévouement et bon vouloir <strong>de</strong> cœur, ils portent même <strong>de</strong> ce côté leur<br />

secours, si besoin est, et si ceux qui en ont la charge particulière le désirent; mais cette ai<strong>de</strong><br />

est bénévole; en principe, leur part est renfermée dans le spirituel <strong>de</strong> lʹœuvre, le culte, sʹil y<br />

en a en particulier, les instructions, les confessions, les conseils intimes aux enfants ou ou‐<br />

vriers, enfin les petites congrégations <strong>de</strong> piété, quand il en existe. Je le répète, je ne vois pas<br />

comment il peut y avoir conflit dans ces termes, quand on veut bien sʹy tenir.<br />

Quant à ce qui regar<strong>de</strong> votre petite communauté, il nʹest pas même besoin dʹen par‐<br />

ler; M. lʹAumônier ne faisant pas partie <strong>de</strong> votre petite famille ne peut intervenir en rien <strong>de</strong><br />

ce qui regar<strong>de</strong> votre vie <strong>de</strong> communauté. Il ne peut non plus prendre autorité ni conduite<br />

<strong>de</strong>s choses en votre absence; on lʹentoure <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> déférence comme un hôte qui<br />

honore la maison par sa présence, mais qui nʹest quʹhôte seulement et non chef <strong>de</strong> maison.<br />

Vos frères, en votre absence, peuvent seuls vous remplacer dʹoffice et répondre pour vous.<br />

Je ne sais si ces données générales vous suffiront. Si vous aviez <strong>de</strong>s points particu‐<br />

liers qui vous fissent difficulté, il faudrait me les poser expressément; jʹessayerais dʹy don‐<br />

ner solution dʹaprès tout ce que je vois autour <strong>de</strong> nous. Si vous trouviez ce moyen peu<br />

commo<strong>de</strong> et insuffisant et quʹil vous semblât utile que lʹun <strong>de</strong> nos vieux frères ou moi<br />

nous vous rendissions visite, nous ferions en sorte <strong>de</strong> répondre à votre désir; nous sommes<br />

un peu en gêne présentement, M. Carment étant à Amiens à cause <strong>de</strong> la maladie et du dé‐<br />

cès <strong>de</strong> son père, et M. Myionnet étant au lit <strong>de</strong>puis plusieurs jours sans que nous sachions<br />

bien encore si son indisposition aura <strong>de</strong>s suites; mais nous espérons que ce moment <strong>de</strong><br />

presse ne durera point et quʹun peu plus <strong>de</strong> liberté nous sera rendu.<br />

Jʹapprouve bien ce que vous avez fait relativement à la lettre si insensée et si indis‐<br />

crète <strong>de</strong> M. Polvêche, notre f. Marcaire est trop raisonnable pour ne pas comprendre à lʹoc‐<br />

casion combien les insinuations <strong>de</strong> M. Polvêche sont mal inspirées.<br />

Adieu, mon bon ami; nous allons ici comme <strong>de</strong> coutume; nous avons, <strong>de</strong>puis le 19<br />

mai, un nouveau frère dont nous sommes contents jusquʹici; nous espérons quʹil sʹassoira<br />

définitivement parmi nous; il semble particulièrement propre aux classes; nous lʹy oc‐<br />

cupons en ce moment. Les ateliers vont assez bien, nous donnons pour notre part le tra‐<br />

vail, M. Choyer reste entrepreneur; le prix <strong>de</strong> vente est partagé également entre lui et<br />

nous.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

542 à M. Carment<br />

Condoléances pour la mort <strong>de</strong> son père.<br />

Vaugirard, 3 juin 1858<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Nous étions, comme vous, dans lʹattente du douloureux événement qui vient <strong>de</strong><br />

vous frapper ainsi que tous les vôtres; unis à vous par <strong>de</strong>s liens <strong>de</strong> famille en Dieu et par<br />

adoption spirituelle, nous partageons votre peine profon<strong>de</strong>, comme nous avons pris part à<br />

670


vos sollicitu<strong>de</strong>s et à vos peines durant la maladie <strong>de</strong> votre bon père. Mais, je me hâte <strong>de</strong> le<br />

dire, nous entrons aussi dans les consolations <strong>de</strong> votre cœur <strong>de</strong> fils et <strong>de</strong> chrétien en consi‐<br />

dérant la fin si édifiante <strong>de</strong> celui que vous regrettez; les longues souffrance quʹil a si pa‐<br />

tiemment, si courageusement endurées, et enfin les marques <strong>de</strong> tendre confiance quʹil a<br />

données envers la T. S te Vierge. On nʹa pas vu ici plus quʹen aucun autre moment quʹelle<br />

ait abandonné ceux qui lui appartiennent; vous vous êtes tout particulièrement consacré à<br />

elle, et, dans cette grave circonstance, elle ne vous a rien refusé <strong>de</strong> ce que vous lui avez<br />

<strong>de</strong>mandé pour votre bon père, pas même dʹabréger ses souffrances quand un mouvement<br />

intérieur a averti votre chère sœur et vous que vous pouviez sans témérité faire cette<br />

prière au Dieu <strong>de</strong>s miséricor<strong>de</strong>s. Restez bien, jusquʹà votre <strong>de</strong>rnier jour, lʹhumble serviteur<br />

<strong>de</strong> cette bien‐aimée Maîtresse, et son secours vous accompagnera aussi incessamment. As‐<br />

surez bien votre chère famille <strong>de</strong> nos tendres sympathies pour son affliction et <strong>de</strong> notre<br />

empressement à prier pour votre chère défunt, dont je me rappelle en particulier toute la<br />

bonne amitié pour moi.<br />

Nous sommes un peu en gêne en ce moment; M. Choyer est retourné à Angers et ne<br />

reviendra que dans quelques semaines; M. Myionnet est au lit <strong>de</strong>puis trois jours, son ab‐<br />

sence est bien sentie pour les ateliers, etc.; espérons que le bon Dieu nous viendra en ai<strong>de</strong>.<br />

Nos enfants ont bien prié tous ensemble aujourdʹhui pour votre bon père; la S te<br />

Messe sera dite aussi à la chapelle à son intention, vous pouvez bien le penser dʹavance;<br />

nous acquittons ainsi une <strong>de</strong>tte <strong>de</strong> charité et nous glorifions le bon Maître qui a dit: ʺAi‐<br />

mez‐vous les uns les autresʺ.<br />

Adieu, bien cher enfant, je vous embrasse affectueusement en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

543 à M. Carment<br />

Paroles <strong>de</strong> consolation à lʹoccasion du décès <strong>de</strong> son père. Instances discrètes pour le retour en communauté.<br />

Vaugirard, 6 juin 1858<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> satisfaction que vos bons parents et vous, soutenus par la foi, vous<br />

prenez <strong>avec</strong> soumission la peine profon<strong>de</strong> dont le Seigneur vous a frappés. Les disposi‐<br />

tions si pieuses, si résignées <strong>de</strong> votre bon père et sa fin si édifiante sont en effet un grand<br />

sujet <strong>de</strong> consolation et une cause <strong>de</strong> douce espérance; tournons nos yeux <strong>de</strong> ce côté et nous<br />

y trouverons, <strong>avec</strong> la consolation, un motif <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> nous soutenir dans la voie <strong>de</strong> la pié‐<br />

té et du dévouement, puisque le terme sera la paix et la douce joie <strong>de</strong> nous réunir à ceux<br />

que nous avons tant aimés sur cette terre.<br />

Je sens bien les motifs qui vous font désirer <strong>de</strong> rester encore quelques instants près<br />

<strong>de</strong> votre famille, et je sympathise trop à tout ce qui vous touche pour ne pas entrer dans<br />

vos sentiments à cet égard. Je vous prie toutefois <strong>de</strong> considérer que vous aurez cette année<br />

payé une gran<strong>de</strong> <strong>de</strong>tte aux affections et <strong>de</strong>voirs <strong>de</strong> famille, et quʹil est bien <strong>de</strong> faire aussi la<br />

part <strong>de</strong>s autres obligations que le Seigneur vous a imposées. M. Myionnet se lève et com‐<br />

mence à reprendre un peu <strong>de</strong> force, mais il est loin <strong>de</strong> soutenir la vie active quʹil mène<br />

dʹordinaire, et bien <strong>de</strong>s soins <strong>de</strong> surveillance et dʹordre restent négligés forcément par lui.<br />

671


Il regar<strong>de</strong> bien souvent sur la route pour voir sʹil ne vous apercevra pas venir; tâchez donc,<br />

mon bon ami, <strong>de</strong> retar<strong>de</strong>r le moins que vous pourrez le moment <strong>de</strong> votre retour; jeudi ou<br />

vendredi me semblerait un délai raisonnable; voyez si vos bons parents, que jʹai toujours<br />

trouvés si sages, ne peuvent sʹaccommo<strong>de</strong>r <strong>de</strong> cet arrangement qui me paraîtrait faire à<br />

tout une part équitable.<br />

Nos frères ont pris bien cordialement intérêt à votre affliction et jʹai été satisfait du<br />

sentiment général qui sʹest manifesté parmi eux, comme <strong>de</strong> lʹempressement quʹils ont mis<br />

à prier pour votre bon père, pour vous et pour les vôtres.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, à bientôt; nous vous accueillerons <strong>avec</strong> la joie quʹon a<br />

à revoir un fils et un frère.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

544 à M. Halluin<br />

La santé <strong>de</strong>s frères <strong>de</strong> Vaugirard. Signe <strong>de</strong> non‐vocation chez un jeune postulant dʹArras. Dans quelle mesure<br />

lʹinstruction peut être utile. De la difficulté <strong>de</strong> corriger les défauts <strong>de</strong> caractère. Qualités appréciées par MLP. :<br />

piété, régularité, tenue. M. <strong>de</strong> Lauriston a besoin dʹêtre encouragé.<br />

Vaugirard, 7 juin 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vous écris aujourdʹhui sans avoir aucune particularité bien intéressante à vous<br />

communiquer, mais plutôt pour vous donner <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> notre maison et <strong>de</strong> nos pe‐<br />

tits entourages. Ici, les chaleurs ont saisi quelques‐uns dʹentre nous et ont causé quelques<br />

malaises. M. Myionnet, seul, est assez vivement pris jusquʹici, il a gardé le lit tous ces jours<br />

<strong>de</strong>rniers. Aujourdʹhui, il est un peu mieux, jʹespère quʹil va se remettre. Un autre <strong>de</strong> nos<br />

frères, M. Boucault, est au lit aujourdʹhui, son état ne paraît avoir rien <strong>de</strong> grave.<br />

M. Lantiez avait vu la minute <strong>de</strong> la lettre que vous avait écrite Ferdinand, et il<br />

nʹavait fait aucune difficulté <strong>de</strong> la laisser partir. Depuis ce moment, le pauvre enfant a<br />

cherché à Paris <strong>de</strong> lʹoccupation et, nʹen ayant pas trouvé, il a déclaré quʹil souhaitait rester<br />

définitivement parmi nous. Nous temporisons selon sa <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, mais nous ne faisons au‐<br />

cun fond sur lui. Lʹinconstance <strong>de</strong> sa volonté et le défaut dʹélévation dans les sentiments ne<br />

permettent pas <strong>de</strong> penser quʹil y ait chez lui une sérieuse vocation. Il ne peut se défendre<br />

<strong>de</strong> se faire le camara<strong>de</strong> et lʹami <strong>de</strong>s tout jeunes enfants qui lʹentourent et, loin <strong>de</strong> les soute‐<br />

nir, il se fait enfant et faible comme eux. Ce défaut, dont aucune observation nʹa pu le cor‐<br />

riger, est une cause constante dʹinquiétu<strong>de</strong> pour nous, en même temps quʹil empêche pour<br />

lui tout progrès et tout avancement dans le bien.<br />

Vous aurez appris sans doute, cher Monsieur lʹabbé, la fin édifiante du père <strong>de</strong> M.<br />

Carment. Nous <strong>de</strong>vons bénir Dieu qui a mis un terme à ses longues souffrances et surtout<br />

qui lui a inspiré, dans ces <strong>de</strong>rnières années, <strong>de</strong>s sentiments <strong>de</strong> foi vive et <strong>de</strong> piété sincère.<br />

Une pareille consolation est donnée en général à tous nos frères, dont la consécration à<br />

Dieu est pour leurs familles une source <strong>de</strong> grâces et <strong>de</strong> bénédictions.<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> plaisir que notre jeune frère Thuillier vous donne satisfaction et jʹai<br />

la confiance quʹil continuera ainsi, nous nʹavions ici quʹà nous louer <strong>de</strong> lui. Je serai bien<br />

aise quʹil mʹécrive tous les mois, ou environ, quelques lignes. Cela le soutiendra et lʹexerce‐<br />

ra un peu à écrire; il est sous ce rapport peu avancé, un peu <strong>de</strong> culture lui serait avanta‐<br />

672


geuse et pourrait le rendre plus utile. Je ne lui souhaite pas toutefois <strong>de</strong> science humaine<br />

bien gran<strong>de</strong>, ces pauvres enfants y trouvent souvent une occasion dʹorgueil ou un écueil<br />

pour leur vocation. Nous en avons un exemple dans le f. Michel; je ne sais, cher Monsieur<br />

lʹabbé, si ce nʹest pas un parti dangereux que <strong>de</strong> laisser ce jeune homme se préparer chez<br />

vous à prendre son brevet dʹinstituteur. Si cette voie leur est une fois ouverte, vos enfants<br />

trouveront commo<strong>de</strong> <strong>de</strong> se préparer chez vous une position et compromettront bien la vo‐<br />

cation <strong>de</strong>s jeunes frères que cette pente entraînera comme les autres. Le mieux serait quʹil<br />

allât ailleurs faire ses étu<strong>de</strong>s et prendre telle carrière quʹil voudrait.<br />

Le f. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] va bien comme piété et bon vouloir <strong>de</strong> cœur, mais sa<br />

tête est bien peu forte. Un rien le trouble, la plus petite responsabilité lui pèse. Il doute tou‐<br />

jours <strong>de</strong> lui‐même, et cette timidité presque maladive nuit à son repos comme au succès<br />

<strong>de</strong>s œuvres quʹil conduit; il se soutient néanmoins, mais il faut constamment lʹencourager<br />

et relever sa confiance. Je ne pense pas que cette disposition puisse bien se corriger. Je la<br />

crois inhérente à sa nature et à son organisation physique.<br />

Je souhaite bien comme vous, cher Monsieur lʹabbé, quʹil nous soit possible <strong>de</strong> vous<br />

donner plus tard un peu dʹai<strong>de</strong> plus efficace. Nous y arriverions peut‐être si M. lʹabbé Ta‐<br />

barie se tournait définitivement vers la Communauté par un mouvement <strong>de</strong> généreux dé‐<br />

vouement. Espérons que le Seigneur daignera le lui inspirer. Nous nʹavons pas dʹautre su‐<br />

jet que M. Alphonse Vasseur pour conduire notre service <strong>de</strong> cordonnerie, le jeune homme<br />

qui avait essayé dʹy travailler <strong>avec</strong> lui et <strong>de</strong> se donner au service <strong>de</strong> Dieu nʹa pas persévéré.<br />

Notre nouveau frère continue à nous donner satisfaction, il va très bien aux classes <strong>avec</strong><br />

M. Lantiez, il a une tenue parfaite, une instruction religieuse avancée, une piété et une ré‐<br />

gularité exemplaires. Nous espérons quʹil ira bien. Ses antécé<strong>de</strong>nts étaient très bons. Le f.<br />

Cousin nous donne aussi satisfaction par ses bons sentiments, sa santé se soutient, mais il<br />

est peu expéditif et nʹest pas homme <strong>de</strong> savoir‐faire. A la longue pourtant, il peut <strong>de</strong>venir<br />

plus utile, la bonne volonté est si agréable à Dieu.<br />

Jʹembrasse vous et nos frères, cher Monsieur lʹabbé, et je vous envoie toutes les af‐<br />

fections <strong>de</strong> la famille.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. M. Deberly va faiblement à Amiens; il nʹy a pas à compter sur lui ni pour la<br />

Communauté ni pour une œuvre dʹabnégation.<br />

Nous vous <strong>de</strong>vons le prix <strong>de</strong>s petites bêches apportées par les frères lors <strong>de</strong> la re‐<br />

traite, je nʹen sais pas exactement le prix.<br />

545 à M. Caille<br />

Lʹabbé Deberly ne convient pas aux œuvres dʹAmiens. Que M. Caille agisse envers lui <strong>avec</strong> pru<strong>de</strong>nce et fermeté.<br />

Vaugirard, 10 juin 1858<br />

Mon bien bon ami,<br />

Je partage la peine que vous cause le malaise existant entre lʹaumônier <strong>de</strong> vos œu‐<br />

vres et votre petite communauté; je doute un peu, à vrai dire, que ce malaise cesse, parce<br />

que M. Deberly manque, je crois, dʹexpérience pour bien voir et bien asseoir sa position et<br />

que, dʹune autre part, il ne me semble pas apporter dans les œuvres lʹesprit <strong>de</strong> simplicité et<br />

673


dʹabnégation <strong>de</strong> lui même sans lesquels on ne saurait sʹy plaire et y espérer un bien réel et<br />

soutenu. Je crois donc quʹil faut compter sur une séparation prochaine. Une explication<br />

franche et cordiale pourrait peut‐être amener un peu dʹamélioration momentanée, mais jʹai<br />

cru remarquer que M. Deberly, non par défaut <strong>de</strong> franchise, mais par crainte <strong>de</strong> ne pas<br />

voir son sentiment partagé, dit rarement tout ce quʹil a au fond du cœur. Dʹailleurs, je reste<br />

persuadé que la position indécise prise par lui chez vous est fort difficile et quʹil ne pourra<br />

la soutenir.<br />

Il me semble que vous <strong>de</strong>vez, comme vous en avez lʹinspiration, agir <strong>avec</strong> beaucoup<br />

<strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nce pour ne pas mettre <strong>de</strong> tort <strong>de</strong> votre côté, même en apparence, mais que vous<br />

ne <strong>de</strong>vez faire aucun effort pour retenir M. Deberly, sʹil montre lʹintention <strong>de</strong> se retirer.<br />

Je ne prévois pas que je doive aller en ce moment à Arras; notre f. Myionnet est<br />

souffrant et gar<strong>de</strong> le lit <strong>de</strong>puis plusieurs jours; je ne pourrais donc mʹéloigner dʹici que<br />

pour une raison grave.<br />

Jʹai écrit au f. Carment, comme vous le désiriez, quʹil pouvait rester à Amiens jus‐<br />

quʹà lundi.<br />

Quant au jeune Tourniquet, je mʹen rapporte à votre sagesse pour le parti à prendre;<br />

je ne vois guère à Paris <strong>de</strong> maison où son indisposition puisse être soignée; je nʹen ai en‐<br />

core parlé que dʹune façon générale à son oncle <strong>Jean</strong>‐Marie, mais nous ferons ce qui dé‐<br />

pendra <strong>de</strong> nous si ses oncles dʹAmiens ne voient aucun moyen <strong>de</strong> lui être utiles. Peut‐être<br />

le travail manuel à la campagne lui serait‐il salutaire.<br />

Je nʹécris pas aujourdʹhui à mes ff. Jules [Marcaire] et Henry [Guillot], veuillez les<br />

assurer <strong>de</strong> ma tendre affection; je leur écrirai dès que je pourrai disposer <strong>de</strong> quelques ins‐<br />

tants.<br />

Adieu, mon bien bon ami, je prie Dieu <strong>de</strong> bénir vous et votre chère maison.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

546 à M. Caille<br />

Nécessité <strong>de</strong> poser nettement les questions dans la correspondance. Projet <strong>de</strong> mouvement <strong>de</strong> personnel. Lacunes<br />

<strong>de</strong> lʹŒuvre dʹArras.<br />

Vaugirard, 17 juin 1858<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Le f. Eugène Carment, <strong>de</strong> retour parmi nous <strong>de</strong>puis lundi, me dit que mes réponses<br />

touchant vos petits embarras intérieurs ne vous ont point satisfait; je regrette <strong>de</strong> ne vous<br />

avoir point donné <strong>de</strong> solutions qui vous tranquillisassent, mais les choses nʹétant posées<br />

que dʹune façon fort générale dans vos lettres, je nʹai point trouvé lieu à dʹautres déclara‐<br />

tions que celles qui sont énoncées dans mes réponses. Si vous voulez bien me poser en<br />

particulier les points qui sont pour vous matière à difficulté, jʹessaierai <strong>de</strong> vous dire com‐<br />

ment nous agirions dans les circonstances où nous nous trouvons.<br />

Si les réclamations <strong>de</strong> M. Deberly portent sur les exercices trop multipliés auxquels<br />

il est assujetti le dimanche, je ne serais pas loin <strong>de</strong> partager son avis, parce que jʹai été<br />

frappé moi‐même en ce sens, lors <strong>de</strong> mon voyage à Amiens. Mais, hors cela, je ne vois pas<br />

<strong>de</strong> quel côté peuvent porter ses réclamations. Je le répète, je reste disposé à vous donner<br />

toutes les explications détaillées que vous désirerez, aussitôt que vous mʹaurez posé les<br />

674


points. Enfin, sʹil était réellement urgent que lʹun <strong>de</strong> nous allât à Amiens, nous le ferions<br />

assurément, bien quʹen ce moment nous soyons un peu chargés.<br />

Son Eminence M gr lʹArchevêque <strong>de</strong> Paris vient lundi nous visiter et donner la<br />

Confirmation à nos enfants. Nous avons ensuite lʹadoration <strong>de</strong>s Quarante Heures dans les<br />

premiers jours <strong>de</strong> juillet.<br />

M. Georges <strong>de</strong> Lauriston trouvant le patronage <strong>de</strong> Grenelle par trop lourd pour sa<br />

santé qui nʹest pas très robuste, sans être débile, nous allons, sans doute, le mettre à la<br />

conduite <strong>de</strong>s jeunes ouvriers dépendant <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Nazareth, quoi quʹayant leurs ré‐<br />

unions dans une maison séparée, située en face sur le boulevard. De là, obligation <strong>de</strong> le<br />

remplacer à Grenelle. Nous ne voyons guère <strong>de</strong> sujet formé, sinon le f. Alphonse Vasseur;<br />

cʹest une contrariété pour nous parce que son atelier <strong>de</strong> cordonnerie, qui va bien et qui fait<br />

tout le service <strong>de</strong>s chaussures <strong>de</strong> la maison, va se trouver en souffrance; <strong>de</strong> plus, il était<br />

bien utile à M. Myionnet pour la discipline <strong>de</strong> la maison; enfin, il est encore un peu jeune<br />

dʹesprit et un peu <strong>de</strong> maturité <strong>de</strong> plus eût été un avantage, mais nous ne voyons pas com‐<br />

ment nous pourrions bien pourvoir Grenelle autrement. Je vous donne ces détails confi‐<br />

<strong>de</strong>ntiellement, les choses étant encore à lʹexamen 297 .<br />

M. Myionnet, retenu au lit <strong>de</strong>puis quinze jours, commence à se remettre; jʹespère<br />

que sa convalescence va se confirmer.<br />

Je vous serai obligé <strong>de</strong> me dire si M lle Denis ne vous a pas remis 75f pour un trimes‐<br />

tre <strong>de</strong> la pension du jeune Normandie; M. Carment nous apporte <strong>de</strong> sa part une pareille<br />

somme, mais pour un trimestre en avance, tandis que, dʹaprès nos registres, elle en doit un<br />

qui vient dʹéchoir. Vous savez quʹelle a montré déjà un peu <strong>de</strong> mécontentement que nous<br />

ne fussions pas bien informés <strong>de</strong> ses paiements entre vos mains; je vous saurai gré <strong>de</strong> nous<br />

dire si ce versement vous a été fait.<br />

Je nʹai pas <strong>de</strong> nouvelles récentes dʹArras, les choses y vont comme <strong>de</strong> coutume; je ne<br />

vois guère que la communauté sʹy constitue, nous nʹavons pas <strong>de</strong> secours suffisants à y<br />

envoyer et, <strong>de</strong> son côté, M. Halluin ne tend pas assez à mettre lʹunité dans la composition<br />

<strong>de</strong> son personnel et est trop occupé pour y donner ses soins. Allons néanmoins en patience<br />

et laissons le bon Dieu disposer les choses à son gré.<br />

Le nouveau frère qui nous est arrivé il y a un mois, M. Desouches, continue <strong>de</strong> nous<br />

donner satisfaction; il secon<strong>de</strong> utilement M. Lantiez dans les classes; il est pieux, semble<br />

être très sociable et vraiment propre à la vie religieuse.<br />

Adieu, mon bien bon ami, si vos affaires vous attirent bientôt à Paris, nous en se‐<br />

rons bien heureux; on sʹentend plus vite et plus sûrement par quelques explications verba‐<br />

les que par <strong>de</strong> longues correspondances. mais ayons confiance; en tout cas, cherchons sin‐<br />

cèrement la gloire <strong>de</strong> Dieu et invoquons son appui, nous ne saurions ainsi faire fausse<br />

route et nous éloigner <strong>de</strong> notre fin.<br />

Jʹécrirai mardi, après notre confirmation, aux frères Jules [Marcaire] et Henry [Guil‐<br />

lot], le temps me manque aujourdʹhui. Mille affections <strong>de</strong> tous ici pour vous et pour eux.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

297 Ces projets ne furent pas mis à exécution. M. Vasseur sera nommé à Arras dans un mois et <strong>de</strong>mi. Cf. infra lettre 557.<br />

675


547 à M. Guillot<br />

Dévotion mariale. Comment les épreuves contribuent à notre sanctification.<br />

Vaugirard, 25 juin 1858<br />

Très cher enfant en N.S.,<br />

Vous mʹaccusez, <strong>avec</strong> quelque apparence <strong>de</strong> raison <strong>de</strong> nʹapporter guère dʹempres‐<br />

sement à répondre à votre <strong>de</strong>rnière lettre; jʹexplique à notre f. Jules [Marcaire], qui vous les<br />

dira, les divers empêchements qui me sont survenus ces temps <strong>de</strong>rniers. Jʹavais aussi la<br />

pensée quʹun jour ou lʹautre jʹirais vous voir à Amiens, et que ma réponse portée par moi‐<br />

même serait encore mieux, puisquʹon sʹentend bien plus aisément par entretien cœur à<br />

cœur que par correspondance. Je ne renonce pas à ce projet et jʹai bien lʹintention <strong>de</strong> ne pas<br />

laisser sʹécouler la saison sans vous rendre visite. Jusque là, bien cher enfant, je vous suis<br />

dʹici <strong>de</strong>s yeux <strong>de</strong> lʹesprit; Dieu mʹaccor<strong>de</strong> cette grâce <strong>de</strong> vous avoir habituellement présent,<br />

je songe à vous souvent et surtout je prie pour vous bien fidèlement tous les jours.<br />

Les détails que contenait votre lettre mʹont bien intéressé; jʹai reconnu <strong>avec</strong> vous la<br />

miséricordieuse bonté <strong>de</strong> la T. Ste Vierge qui a récompensé votre confiance filiale envers<br />

elle et vous a ménagé la douce consolation dʹaller prier à son sanctuaire avant dʹaller re‐<br />

prendre vos travaux. Considérez, bien cher enfant, que si sa con<strong>de</strong>scendance sʹétend à ces<br />

petites douceurs, combien elle doit vous être encore plus secourable et présente dans vos<br />

besoins essentiels, dans vos emplois, dans les actes <strong>de</strong> votre vie spirituelle. Ayez donc une<br />

confiance plus ferme et plus constante, et surtout ne prenez pas pour <strong>de</strong>s indices du dé‐<br />

plaisir <strong>de</strong> Dieu vos peines, vos dégoûts, vos aridités. Mettons‐nous bien dans lʹesprit que<br />

ces états <strong>de</strong> lʹâme sont aussi inévitables que le sont, dans lʹordre naturel, la nuit, les om‐<br />

bres, lʹhiver, les intempéries, les maladies, les pertes douloureuses. Tout cela entre dans les<br />

plans <strong>de</strong> Dieu dans notre sanctification; à mesure que les choses ru<strong>de</strong>s, pénibles, brisantes<br />

viennent à passer, elles nous semblent amères et affreuses, mais, vues <strong>de</strong> haut, elles sont<br />

comme les ombres dans un tableau, comme les alternatives du froid et du chaud; lʹun et<br />

lʹautre contribuent à fécon<strong>de</strong>r la terre et à préparer les moissons. Laissez donc le Seigneur<br />

cultiver à son gré la terre <strong>de</strong> votre cœur, rester en paix, reposez‐vous doucement sur sa sa‐<br />

gesse et sur son amour, les fruits viendront en leur temps. Une sainte religieuse, très avan‐<br />

cée dans la voie spirituelle, me disait <strong>de</strong>rnièrement: ʺsi nous voulons être <strong>de</strong>s hommes in‐<br />

térieurs, sachons mener la petite vie, cʹest‐à‐dire nous plaire dans <strong>de</strong>s occupations humbles<br />

et dans les positions cachées; sachons aussi, quelque chose qui arrive, <strong>de</strong>meurer en paix,<br />

heureux et bénissant Dieuʺ. Vos inquiétu<strong>de</strong>s sur vos dispositions, vos craintes sur vos sé‐<br />

cheresses et dégoûts ne sont donc pas fondées; Dieu vous veut ainsi, laissez‐le faire, au‐<br />

trement vous seriez peut‐être tenté dʹorgueil ou obsédé sans mesure dʹautres tentations<br />

non moins pénibles. Encore une fois, remettez‐vous simplement et en tout abandon dans<br />

le Cœur du divin Seigneur, recomman<strong>de</strong>z‐vous au cœur miséricordieux <strong>de</strong> Marie et repo‐<br />

sez en paix.<br />

Adieu, cher ami, tous les cœurs sont ici à lʹunisson <strong>de</strong>s vôtres; aimez bien notre f. Ju‐<br />

les et embrassez‐le pour nous.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

676


548 à M. Halluin<br />

Impossibilité <strong>de</strong> donner plus dʹai<strong>de</strong> à lʹŒuvre dʹArras. Les charges qui pèsent sur chacun <strong>de</strong>s anciens frères.<br />

MLP. consent à ce que M. Halluin fasse appel aux Frères <strong>de</strong>s Ecoles Chrétiennes pour ses classes. Situation ex‐<br />

ceptionnelle et provisoire. Vie <strong>de</strong> la Communauté.<br />

Vaugirard, 28 juin 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Nous recevons toujours <strong>avec</strong> une vive satisfaction <strong>de</strong> vos nouvelles. Votre <strong>de</strong>rnière<br />

lettre, en particulier, mʹest arrivée au moment où jʹallais vous écrire, étant un peu inquiet<br />

<strong>de</strong> nʹavoir point, <strong>de</strong>puis quelque temps, <strong>de</strong> renseignements sur votre santé et sur tout ce<br />

qui vous intéresse à Arras. Si nous nʹétions soutenus par la confiance en Dieu et par la<br />

ferme assurance que sa bonté ne nous délaissera point, nous pourrions nous inquiéter <strong>de</strong><br />

vous voir si chargé et si à bout <strong>de</strong> moyens pour soutenir lʹœuvre sainte que le Seigneur a<br />

remise entre vos mains, mais nous ne pouvons douter que sa bonté qui lʹa fait naître pour<br />

le bien <strong>de</strong>s pauvres enfants ne la soutienne et ne nous donne, dans le temps quʹIl a choisi,<br />

les secours dont nous avons tant besoin.<br />

Toutes les fois que je vois plus vivement par vos lettres la presse où vous vous<br />

trouvez, je fais une nouvelle revue <strong>de</strong> notre petit troupeau <strong>de</strong> frères, je pèse et jʹexamine<br />

<strong>avec</strong> notre Conseil quelles ressources nous pourrions détacher pour vous assister utile‐<br />

ment et toujours jʹarrive à la même conclusion, savoir que le secours vraiment effectif quʹil<br />

vous faudrait ne peut, quant à présent, vous être donné. Nous lʹavons souvent reconnu,<br />

vous et nous, ce qui serait essentiel pour votre maison, ce serait un homme formé, ayant,<br />

<strong>avec</strong> la piété et le dévouement, lʹexpérience et lʹacquit suffisant pour vous remplacer, à la<br />

fois près <strong>de</strong> la communauté et près <strong>de</strong> vos jeunes gens, grands et petits. Or, vous le savez,<br />

cher Monsieur lʹabbé, les anciens frères qui seuls auraient, plus ou moins, lʹaptitu<strong>de</strong> néces‐<br />

saire pour une pareille tâche ont tous leur emploi; et leur nombre si restreint ne suffit<br />

même pas à nos besoins, puisque nous ajournons déjà, <strong>de</strong>puis assez longtemps, la consti‐<br />

tution <strong>de</strong> la communauté <strong>de</strong> Grenelle, faute dʹun homme capable <strong>de</strong> la conduire, si près<br />

quʹelle fût <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Vaugirard et quelque appui quʹelle y pût trouver. A Vaugirard<br />

même, les ff. Myionnet et Lantiez ne peuvent se passer lʹun <strong>de</strong> lʹautre, ayant à la fois lʹor‐<br />

phelinat, les persévérants, les classes, les ateliers et tout le mouvement <strong>de</strong> la maison, à lʹin‐<br />

térieur et à lʹextérieur. Occupé, pour moi, <strong>de</strong> lʹensemble <strong>de</strong> notre petite famille et <strong>de</strong> ses<br />

rapports au <strong>de</strong>hors, je nʹai<strong>de</strong> à lʹœuvre <strong>de</strong> Vaugirard que pour certains points nécessaires.<br />

Si M. Tabarie eût eu la pensée <strong>de</strong> se consacrer définitivement au service <strong>de</strong> Dieu <strong>avec</strong><br />

nous, cʹeût été un moyen <strong>de</strong> vous venir un peu mieux en ai<strong>de</strong> en vous envoyant à sa place<br />

un <strong>de</strong> nos ff. ecclésiastiques; encore même en ce cas, nʹeussiez‐vous pas eu pleine satisfac‐<br />

tion, car, <strong>de</strong> tous nos ff. ecclésiastiques, M. Lantiez est le seul qui ait une véritable aptitu<strong>de</strong><br />

pour mener les enfants et prendre ascendant sur eux. Il est <strong>de</strong> toute raison, cher Monsieur<br />

lʹabbé, que, ne pouvant vous assister comme nous le voudrions, nous ne mettions au<br />

moins obstacle à rien <strong>de</strong> ce que vous croyez utile pour alléger votre far<strong>de</strong>au. Je ne crois pas<br />

quʹil y ait dʹinconvénient à faire venir <strong>de</strong>s Frères <strong>de</strong>s Ecoles pour les classes <strong>de</strong> vos enfants;<br />

ce serait un élément dʹordre et <strong>de</strong> discipline pour eux. Il va sans dire que cela ne concour‐<br />

rait pas à constituer chez vous une petite communauté propre et que cet élément étranger<br />

y serait peu favorable, mais que faire? Puisque les ressources intrinsèques manquent, il<br />

faut bien recourir au <strong>de</strong>hors.<br />

677


Je regrette bien que M. Tabarie sente son courage défaillir. Il a certainement les qua‐<br />

lités les plus propres pour bien faire dans <strong>de</strong>s œuvres comme les nôtres. Il sʹeffraie à tort<br />

<strong>de</strong>s difficultés. Il ne doit pas en juger par lʹétat où se trouve lʹœuvre dʹArras, à cause <strong>de</strong><br />

lʹinsuffisance <strong>de</strong> son personnel. Assurément la position ne serait pas tenable, si elle <strong>de</strong>vait<br />

être constamment ce quʹelle est aujourdʹhui et, si dévoués que fussent <strong>de</strong>s prêtres, on<br />

conçoit quʹils ne pussent accepter une telle nécessité. Mais on peut en répondre, le Sei‐<br />

gneur ne délaissera point cette œuvre ni les autres, il les assoira dans <strong>de</strong>s conditions nor‐<br />

males où chacun, sans excé<strong>de</strong>r ces forces, pourra vaquer à ses emplois et exercer généreu‐<br />

sement mais mesurément aussi, son zèle et sa charité. Le rôle <strong>de</strong>s ff. ecclésiastiques dans<br />

une œuvre pareille sera dʹailleurs bien moins pénible quand ils seront efficacement assistés<br />

par <strong>de</strong>s ff. laïcs pour les surveillances et conduites <strong>de</strong>s enfants, comme pour tous les dé‐<br />

tails du matériel et <strong>de</strong> lʹadministration. Cʹest dʹaprès cette vue que M. Tabarie <strong>de</strong>vrait juger<br />

la position, et non dʹaprès les circonstances transitoires où se trouve momentanément la<br />

maison dʹArras. Dans nos autres œuvres, où le personnel est plus nombreux, il eût trouvé<br />

sa libre assiette et lʹexercice régulier <strong>de</strong> son zèle et <strong>de</strong> sa charité. Je souhaite bien quʹil ne<br />

précipite point sa décision.<br />

Nous ne voyons pas bien lʹemploi que nous donnerions en ce moment à notre petit<br />

f. Brice; peut‐être vaut‐il mieux attendre au mois dʹoctobre. Dʹici là, ses pensées sʹassoiront<br />

définitivement, sans doute, et nous donnerons toute assurance à son sujet. Nous ferons<br />

aussi ce que vous trouverez <strong>de</strong> mieux pour le jeune Lamoury.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, je prie bien instamment le Seigneur dʹaccor<strong>de</strong>r ses bé‐<br />

nédictions et ses grâces à vous et à votre chère maison.<br />

Je vous embrasse bien affectueusement.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Tous nos frères se rappellent à votre bon souvenir et vous offrent leur respectueuse<br />

affection, le f. Cousin tout particulièrement; sa santé commence à se remettre. Ferdinand<br />

ne marche pas mal présentement, mais la consistance lui manque. Son Eminence est venue<br />

le 21 nous visiter et donner la Confirmation à nos enfants. Elle nous a montré beaucoup <strong>de</strong><br />

bonté. Nous avons, dans quelques jours, lʹadoration <strong>de</strong>s Quarante Heures. M. Caille nous<br />

est venu voir ces jours <strong>de</strong>rniers, sa maison va assez bien, M. Deberly faiblement, il nʹira<br />

pas bien loin dans les œuvres, je le crains. Dans les premiers jours <strong>de</strong> juillet, M. Myionnet<br />

ou M. Lantiez ira à Cherbourg visiter un orphelinat sur lequel on nous a <strong>de</strong>mandé un avis,<br />

à défaut dʹautres appuis que nous ne pouvons donner. Après, nous verrons si lʹun <strong>de</strong> nous<br />

ne peut vous rendre une petite visite. Nous le désirons bien sincèrement.<br />

549 <strong>de</strong> M. Hello à M. Decaux<br />

P.S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Vœux pour la St‐Paul. ʺCelui qui aime Dieu ne souhaite rien tant que dʹaimer davantageʺ.<br />

Vaugirard, 3 juillet 1858<br />

Bien cher Prési<strong>de</strong>nt,<br />

Cʹest un vrai chagrin pour moi <strong>de</strong> ne pas me trouver au milieu <strong>de</strong> mes enfants pour vous<br />

souhaiter une bonne fête. Mais, si je ne suis pas <strong>de</strong> corps à Nazareth, jʹy suis <strong>de</strong> cœur. Ainsi mon<br />

678


cœur nʹétant pas mala<strong>de</strong> le moins du mon<strong>de</strong> se trouvera à 11h. 1/2 dans la gran<strong>de</strong> salle <strong>de</strong> Nazareth,<br />

chantera <strong>avec</strong> les enfants, vous entendra <strong>de</strong> ses oreilles, vous embrassera après vous avoir enten‐<br />

du, et partira pour Meudon, sʹil fait beau, à 2h. Mais surtout, il priera beaucoup pour vous, cher<br />

Prési<strong>de</strong>nt, parce quʹil comprend combien vous avez besoin <strong>de</strong> prières dans la mission que Dieu<br />

vous a donnée; il priera donc le matin à la messe et le soir au salut.<br />

Et puis quand le corps, qui est tout à fait en bon train, ira encore mieux, il vous rendra à sa<br />

manière tous les témoignages dʹaffection que le cœur aura déjà donnés <strong>de</strong>puis longtemps.<br />

Donc, bien cher Prési<strong>de</strong>nt, agréez tous mes regrets dʹêtre absent dʹune si belle journée, et<br />

croyez à toute lʹaffection <strong>de</strong> votre dévoué en S.V. <strong>de</strong> Paul<br />

Hello prêtre<br />

Je profite, bien cher ami, <strong>de</strong> la bonne occasion que mʹoffre la petite épître <strong>de</strong> notre<br />

cher abbé, et je mʹunis à lui <strong>de</strong> toute mon âme pour vous souhaiter une heureuse fête. Je<br />

prie le grand S t Paul votre patron, qui vous a déjà obtenu les dons <strong>de</strong> zèle et dʹar<strong>de</strong>nte cha‐<br />

rité, <strong>de</strong> vous y confirmer et <strong>de</strong> vous en procurer la plénitu<strong>de</strong>. Cʹest, jʹen suis assuré, votre<br />

propre désir, puisque celui qui aime en Dieu ne souhaite rien tant que dʹaimer davantage.<br />

Jʹen juge par mon propre cœur qui vous est tout dévoué et qui veut vous aimer encore à<br />

toujours et dans lʹéternité.<br />

Votre ami et frère bien affectionné en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

550 à M. Paillé<br />

Chants à exécuter pendant lʹAdoration <strong>de</strong>s Quarante Heures.<br />

Vaugirard, 3 juillet 1858<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Il me semblerait bien essentiel que nous pussions nous entendre sans aucun retard<br />

<strong>avec</strong> M. Cassetête pour les chants quʹil doit exécuter à notre adoration; je vous prie donc<br />

instamment dʹaviser à ce que M. Faÿ et lui puissent se concerter, soit chez lui, sʹil ne peut<br />

nous venir voir, soit à Vaugirard, sʹil a un moment disponible pour nous venir. Il nous<br />

semble quʹaux <strong>de</strong>ux exercices <strong>de</strong> lundi et mardi soir, on pourrait exécuter <strong>de</strong>ux chants au<br />

S t Sacrement et <strong>de</strong>ux à la S te Vierge; ce ne serait pas trop que quatre morceaux chaque soir,<br />

puisquʹil nʹy a ni oraison, ni bénédiction. Nous pensons que M. Cassetête pourrait, chaque<br />

soir, chanter <strong>de</strong>ux solo, un au S t Sacrement et lʹautre à la S te Vierge, et que nos enfants, <strong>de</strong><br />

leur côté, chanteraient <strong>de</strong>ux petits morceaux dʹensemble. Ils chantent assez bien en parties<br />

Adoro te supplex, Sacris solemnis <strong>de</strong> M. Dupaigne, un Sub tuum et un Ecce panis. Si M. Casse‐<br />

tête pouvait faire choix dʹautres morceaux, ce serait mieux. Il serait bien désirable aussi<br />

quʹil nous communiquât sans retard les morceaux quʹil doit chanter, afin que M. Faÿ étu‐<br />

diât un peu les accompagnements, à moins que M. Cassetête ne compte avoir son accom‐<br />

pagnateur. Vous voyez que, pour tout cela, il semble nécessaire que M. Faÿ et M. Cassetête<br />

sʹentent au plus tôt, autrement les choses mal concertées nʹiront pas.<br />

Je vous prie <strong>de</strong> mʹenvoyer au plus tôt les lis dʹor et le bâton pour le voile du S t Sa‐<br />

crement.<br />

M. Hello va <strong>de</strong> mieux en mieux.<br />

Adieu, bien cher ami, je vous embrasse dans le Cœur <strong>de</strong> N.S.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

679


551 à M. Halluin<br />

Voyages <strong>de</strong> M. Lantiez à Arras et <strong>de</strong> M. Myionnet à Cherbourg. M. <strong>de</strong> Lauriston reprend confiance grâce à sa vie<br />

<strong>de</strong> prière.<br />

Vaugirard, 6 juillet 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Les préparatifs <strong>de</strong> notre adoration <strong>de</strong>s Quarante Heures, qui commence aujour‐<br />

dʹhui, mʹont empêché <strong>de</strong> vous répondre aussi vite que je lʹaurais voulu et mʹobligent à<br />

vous écrire, même aujourdʹhui, un peu en hâte et moins tranquillement que je ne lʹaurais<br />

souhaité. Jʹénonce du reste la chose essentielle sur laquelle jʹavais, avant tout, à vous satis‐<br />

faire, savoir que notre cher abbé Lantiez vous sera donné une semaine avant le 24, afin<br />

dʹexhorter, comme vous le désirez, vos enfants. Je lʹai averti que vous alliez lui envoyer<br />

vos instructions au sujet <strong>de</strong> ce voyage.<br />

M. Myionnet, assez bien rétabli, va être obligé comme je vous lʹai dit, <strong>de</strong> se rendre<br />

pour quelques jours à Cherbourg. Nous avons ici tant <strong>de</strong> choses ensemble quʹà peine pou‐<br />

vons‐nous quitter quelques instants la maison. Je suis bien aise toutefois que notre f. Lan‐<br />

tiez aille près <strong>de</strong> vous quelques jours; cela vous donnera un peu <strong>de</strong> repos et fera, je lʹes‐<br />

père, quelque bien à vos enfants.<br />

Nous allons à peu près bien, le f. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] a souvent <strong>de</strong>s décourage‐<br />

ments, mais le cœur le sauve, il se remonte et va. Quel dommage que son esprit faiblisse<br />

ainsi et se trouble si aisément; la grâce du Seigneur ne lui manquera pas toutefois. Il prie<br />

toujours <strong>avec</strong> ferveur, cʹest le plus sûr moyen <strong>de</strong> nʹêtre point délaissé.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, vous ne serez point oublié vous, ni vos frères, ni vos<br />

enfants durant notre adoration. Puisse le Seigneur nous entendre et nous donner tout ce<br />

qui sera bien pour son service et pour sa gloire.<br />

Jʹembrasse vous, cher Monsieur lʹabbé, et nos frères bien affectueusement, et je suis<br />

<strong>avec</strong> un respectueux attachement<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

552 à M. Halluin<br />

Jour et heure dʹarrivée du père Lantiez à Arras.<br />

Vaugirard, 7 juillet 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vous écris <strong>de</strong>ux mots seulement pour vous dire que notre p. Lantiez vous arrive‐<br />

ra jeudi 9, dans la soirée (mais pas trop tard), <strong>de</strong>vant sʹarrêter un moment à Amiens. Je<br />

souhaite bien que sa présence vous soit un allégement.<br />

Je vous embrasse bien affectueusement en J. et M.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Mille amitiés à nos frères.<br />

680


553 à M. Guillot<br />

Vœux pour la St‐Henri.<br />

Vaugirard, 15 juillet 1858<br />

Cher frère Henry,<br />

Notre bon abbé Lantiez, passant par votre maison, vous embrassera au nom <strong>de</strong><br />

toute notre petite famille et vous dira tous nos vœux à lʹoccasion <strong>de</strong> votre fête; jʹai voulu<br />

toutefois lui donner ces <strong>de</strong>ux mots <strong>de</strong> bon souvenir pour vous assurer <strong>de</strong> notre tendre af‐<br />

fection ainsi que <strong>de</strong> nos souhaits pour votre paix et votre bien spirituels. Nous <strong>de</strong>mandons<br />

cela surtout au Seigneur, bien assuré que le reste vous sera donné par surcroît. M. Lantiez<br />

partant à lʹheure même, je ne puis rien ajouter, je vous embrasse seulement du plus pro‐<br />

fond <strong>de</strong> mon cœur.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

554 à M. Halluin<br />

Vœux pour la St‐Henri. Invitation à prier saint Vincent <strong>de</strong> Paul.<br />

Vaugirard, 15 juillet 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Notre bon abbé Lantiez se rend vers vous comme vous lʹavez désiré, je souhaite<br />

bien que sa présence soit pour vous un soulagement et pour vos enfants un moyen dʹédifi‐<br />

cation. Toute notre petite communauté priera pour associer ses efforts aux vôtres et obte‐<br />

nir du Seigneur une gran<strong>de</strong> effusion <strong>de</strong> grâces sur votre maison. Nous la solliciterons sur‐<br />

tout aussi à lʹoccasion <strong>de</strong> votre fête, et nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rons à votre saint patron <strong>de</strong> redou‐<br />

bler pour vous ses instances auprès du Seigneur et <strong>de</strong> veiller sur vous <strong>avec</strong> une tendre af‐<br />

fection.<br />

Nous faisons ici la neuvaine préparatoire à la fête <strong>de</strong> St Vincent <strong>de</strong> Paul qui a lieu<br />

lundi 19. Je ne sais si, au milieu <strong>de</strong> vos exercices <strong>de</strong> retraite et à la suite <strong>de</strong> la St Henry, vous<br />

pourrez comme nous fêter aussi en famille St Vincent <strong>de</strong> Paul. Cʹest un grand et puissant<br />

protecteur <strong>de</strong>s œuvres charitables. Je crois quʹil est bien à souhaiter que nous ayons son<br />

appui et que nous nous remplissions <strong>de</strong> son esprit. Notre bon abbé Lantiez pouvant vous<br />

donner tout au long <strong>de</strong> nos nouvelles, je nʹai pas besoin <strong>de</strong> mʹétendre beaucoup dans ces<br />

quelques lignes. Je vous quitte donc, cher Monsieur lʹabbé, vous assurant <strong>de</strong> nouveau <strong>de</strong><br />

tous mes sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> tendre affection.<br />

Votre dévoué ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

555 à M. Lantiez<br />

Soutien fraternel dans le service quʹil rend à lʹœuvre dʹArras. Se réjouir dʹavoir saint Vincent <strong>de</strong> Paul pour saint<br />

patron. ʺDieu a été admirable dans ce grand saintʺ.<br />

Vaugirard, 24 juillet [1858]<br />

Mon bon Père Lantiez,<br />

Je bénis le Seigneur <strong>de</strong> tous les travaux quʹIl vous donne pour le bien <strong>de</strong> nos enfants<br />

dʹArras; M. Halluin vous rendra la pareille dans la personne <strong>de</strong> vos enfants, sʹil vient plus<br />

681


tard passer <strong>de</strong>s temps un peu prolongés parmi nous. Tous les jours, nous prions pour vo‐<br />

tre petite mission, Pères et enfants; ce matin, cʹétait au pèlerinage <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul,<br />

jʹespère bien que notre bon Père nous a entendus; félicitons‐nous <strong>de</strong> plus en plus, mon bon<br />

ami, <strong>de</strong> lʹavoir pour Patron, cʹest un bien dont nous nʹestimons pas encore assez le prix;<br />

mais son esprit viendra davantage en nous <strong>avec</strong> les années et nous comprendrons mieux<br />

combien Dieu a été admirable dans ce grand saint.<br />

Je partage, en ensemble, les sentiments exprimés dans votre lettre, jʹinsiste seule‐<br />

ment pour que nous marchions désormais fermement, nous nous consumerions vaine‐<br />

ment en <strong>de</strong>mi‐mesures et en hésitations.<br />

Adieu, mon bien bon ami, jʹembrasse vous et nos ff. dʹArras en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

556 à M. Halluin<br />

Conduite à tenir vis‐à‐vis <strong>de</strong> lʹévêque dʹArras. Activités incessantes <strong>de</strong>s œuvres. Désir <strong>de</strong> voir lʹEsprit‐Saint<br />

sanctifier ʺnos vues, nos sentiments, nos actesʺ. Pèlerinage à la châsse <strong>de</strong> saint Vincent <strong>de</strong> Paul.<br />

Vaugirard, 24 juillet 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je mʹen rapporte pleinement à votre pru<strong>de</strong>nce pour la conduite à tenir à lʹégard <strong>de</strong><br />

votre vénérable Evêque. Je pensais bien quʹil ne comptait pas sur vous pour dʹautres servi‐<br />

ces que celui auquel vous vous êtes consacré; mais je craignais que, dans celui‐là même, il<br />

nʹeût pas la volonté <strong>de</strong> vous laisser disposer <strong>de</strong> votre personne ni <strong>de</strong> votre œuvre, sans son<br />

contrôle et sans sa direction habituelle. Si vous pensez quʹil vous voie faire <strong>de</strong>s absences<br />

réitérées et confier le soin <strong>de</strong> votre œuvre, pour <strong>de</strong>s temps plus ou moins longs à <strong>de</strong>s rem‐<br />

plaçants, quʹil vous voie aussi, sans inquiétu<strong>de</strong>, remplir quelques fonctions près <strong>de</strong> nous<br />

temporairement, je nʹinsiste pas du tout sur ma <strong>de</strong>man<strong>de</strong>. Autrement, il me paraîtra bien<br />

<strong>de</strong> lʹavertir au moins quʹétant extrêmement fatigué, vous avez besoin <strong>de</strong> repos et que vous<br />

vous concertez <strong>avec</strong> nous pour que votre œuvre ne souffre point durant les absences que<br />

votre santé rend réellement nécessaires.<br />

Il me semble bien essentiel que nous nous placions sur un terrain soli<strong>de</strong> et que nous<br />

allons franchement dans notre voie. Autrement, nous nʹarriverons à rien <strong>de</strong> ferme et <strong>de</strong><br />

stable.<br />

Nous allons assez bien ici pour lʹesprit et pour le corps. Le f. Cousin a souvent <strong>de</strong>s<br />

malaises. Je crois que, dans sa santé, il portera sa croix jusquʹà la fin.<br />

Ferdinand se soutient passablement. Nous sommes en ce moment dans les distribu‐<br />

tions <strong>de</strong> prix, on nʹéchappe à lʹune que pour retomber dans une autre. Ainsi en est‐il dans<br />

les œuvres, lʹactivité est incessante. Puisse lʹEsprit du Seigneur <strong>de</strong>meurer toujours <strong>avec</strong><br />

nous et sanctifier nos vues, nos sentiments et nos actes.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, nous prions bien pour vous et pour vos enfants; nous<br />

lʹavons fait surtout ce matin où nous sommes allés <strong>avec</strong> nos enfants en pèlerinage aux reli‐<br />

ques <strong>de</strong> notre Père St Vincent <strong>de</strong> Paul.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

682


557 à M. Halluin<br />

A propos <strong>de</strong>s frères dʹArras. MLP. va envoyer le frère Vasseur. Espérance que Dieu bénira lʹœuvre dʹArras.<br />

Vaugirard, 30 juillet 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Nous prenons bien part aux nouvelles tribulations quʹil a plu au Seigneur <strong>de</strong> vous<br />

envoyer, mais nous avons la confiance que sa bonté miséricordieuse saura en tirer quelque<br />

bien, comme il arrive toujours dans les épreuves quʹIl nous envoie.<br />

Je crois que vos vues, à lʹégard du pauvre f. Joseph [Loquet], sont les seules sages et<br />

admissibles: lʹai<strong>de</strong>r charitablement à entrer en quelque voie, mais ne pas le maintenir dans<br />

une condition pour laquelle il ne paraît pas avoir une force et une vertu suffisantes. Un<br />

moment, jʹai eu la pensée quʹon pourrait, peut‐être, essayer si le séjour <strong>de</strong> Vaugirard, où il<br />

nʹaurait pas lʹoccasion dʹaller seul au <strong>de</strong>hors, ne lui serait pas salutaire; mais, à la réflexion,<br />

jʹai vu que sa faiblesse le suivrait partout, que même à la maison, il trouverait le moyen <strong>de</strong><br />

tromper notre confiance, si la délicatesse et surtout sa foi ne suffisaient pas pour le retenir.<br />

Je crois donc quʹil nʹy a pas lieu <strong>de</strong> sʹarrêter à cette pensée, les épreuves du passé suffisant<br />

pour indiquer ce que serait sans doute lʹavenir.<br />

Pour venir immédiatement à votre ai<strong>de</strong>, je compte vous envoyer, dans le cours <strong>de</strong> la<br />

semaine prochaine, le f. Alphonse [Vasseur] qui a lʹhabitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la discipline et <strong>de</strong> la sur‐<br />

veillance <strong>de</strong>s enfants. Je pense quʹil pourra vous être bien utile, quand il aura peu à peu<br />

pris position et influence près <strong>de</strong>s enfants. Sʹil est à propos que, dans quelque temps, M.<br />

Lantiez aille le voir pour lʹaffermir et pour concerter <strong>avec</strong> vous les moyens <strong>de</strong> bien organi‐<br />

ser vos classes, il pourra vous rendre une visite après lʹAssomption. Enfin, si le f. Cousin<br />

est bien reposé au mois <strong>de</strong> septembre, il serait possible aussi quʹil retournât vers vous.<br />

M. Lantiez mʹa dit que vous aviez réglé <strong>avec</strong> M. Daviron quʹil irait vers le 3 ou 4<br />

août faire une retraite, après laquelle il arrêterait définitivement ses vues, soit pour entrer<br />

dans le ministère, soit pour venir à Vaugirard. je crois ce parti absolument nécessaire,<br />

convaincu que je suis quʹune communauté ne peut, dʹaucune façon, marcher régulière‐<br />

ment <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s étrangers. Je ne pense que du bien <strong>de</strong> M. Daviron et jʹai pour lui une sincère<br />

estime. Cependant, je suis si persuadé <strong>de</strong> la nécessité <strong>de</strong> faire désormais une bonne et nette<br />

situation pour nos frères que jʹattendrai, pour envoyer le f. Alphonse, lʹavis du départ <strong>de</strong><br />

M. Daviron. Je vous serai donc obligé, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> me dire à quelle époque<br />

vous pensez que doit commencer sa retraite.<br />

Le départ du f. Alphonse va déranger quelques services ici, notamment celui <strong>de</strong> la<br />

cordonnerie et <strong>de</strong> la chaussure; nous y pourvoirons <strong>de</strong> notre mieux. M. Lantiez mʹa dit que<br />

Brauque paraissait revenir à la pensée <strong>de</strong> se donner au service <strong>de</strong> Dieu. Sʹil sʹy arrêtait dé‐<br />

finitivement, lʹoccasion serait bonne <strong>de</strong> prendre ici une position agréable pour lui et utile à<br />

lʹœuvre. Vous verrez en temps opportun, cher Monsieur lʹabbé, si ses dispositions sont ré‐<br />

ellement en ce sens.<br />

Je ne suis pas abattu par les difficultés qui nous surviennent, jʹai bonne confiance,<br />

lʹœuvre dʹArras est chère à Dieu et vous‐même, cher Monsieur lʹabbé, vous êtes un <strong>de</strong> ses<br />

enfants bien‐aimés; Il sera miséricordieux pour lʹœuvre et Il bénira vous et vos enfants. Je<br />

me repose dans cette espérance, et je suis assuré quʹelle vit aussi au fond <strong>de</strong> votre cœur.<br />

Je répondrai au petit f. Brice; je ne puis répondre au f. Thuillier qui ne mʹa pas écrit,<br />

je désire bien quʹil mʹenvoie quelques lignes.<br />

683


Adieu, cher Monsieur lʹabbé, tous nos frères vous embrassent <strong>avec</strong> moi et partagent<br />

mes sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> tendre attachement.<br />

Votre dévoué ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

558 à M. Halluin<br />

M. Halluin est seul juge du meilleur parti à prendre concernant le frère Loquet.<br />

Vaugirard, 31 juillet 1858<br />

Je vois, par la lettre que je reçois aujourdʹhui <strong>de</strong> vous, que vous nʹaviez pas, au mo‐<br />

ment où vous lʹécriviez reçu celle que je vous ai adressée <strong>de</strong> mon côté le 29 ou le 30 <strong>de</strong> ce<br />

mois et qui sʹest croisée <strong>avec</strong> la vôtre. Je crois que les mesures indiquées dans ma lettre ré‐<br />

pon<strong>de</strong>nt bien à vos vues et pourront vous donner du soulagement. Je mʹoccuperai donc <strong>de</strong><br />

lʹexécution, dès que jʹaurai reçu votre réponse, ainsi que nous lʹavons dit.<br />

Quant au f. Joseph [Loquet], ma pensée est toujours celle que je vous ai exprimée.<br />

Sʹil y avait eu raison dʹespérer quʹà Vaugirard il eût su se tenir dans lʹordre et à lʹabri<br />

dʹécarts fâcheux, je nʹaurais pas refusé <strong>de</strong> faire encore une nouvelle épreuve, en lui faisant<br />

achever ici le temps <strong>de</strong> ses vœux; mais, si lʹon peut craindre le moins du mon<strong>de</strong> quʹil ne<br />

soit pas plus sage que par le passé, nous ne pouvons nous exposer à <strong>de</strong>s éclats qui seraient<br />

ici dʹun effet désastreux. Vous seul, cher Monsieur lʹabbé, qui connaissez ce pauvre garçon<br />

et lʹavez suivi <strong>de</strong>puis longtemps, pouvez bien juger <strong>de</strong> ce quʹon pourrait attendre <strong>de</strong> lui.<br />

Les termes un peu voilés par la charité dont vous avez usé dans votre lettre ne mʹont pas<br />

bien permis <strong>de</strong> juger la gravité <strong>de</strong> sa <strong>de</strong>rnière faute. A‐t‐il quitté <strong>de</strong> lui‐même la maison,<br />

pour quelle raison précise? Son état dʹivresse a‐t‐il été complet et scandaleux pour les en‐<br />

fants ou pour le <strong>de</strong>hors? Où et comment avait‐il eu <strong>de</strong> lʹargent? Ces renseignements se‐<br />

raient utiles pour bien apprécier le cas. Du reste, cʹest la valeur morale du sujet qui est sur‐<br />

tout à apprécier pour se résoudre touchant son avenir, et, je le répète, vous seul, cher Mon‐<br />

sieur lʹabbé, pouvez bien en juger. En cas <strong>de</strong> doute, il vaudrait bien mieux quʹil allât chez<br />

M. Cotte, à la Compassion, que chez nous, la nature <strong>de</strong> cette œuvre permettant plus <strong>de</strong> la‐<br />

titu<strong>de</strong> pour le choix <strong>de</strong>s sujets quʹil ne nous est permis dʹen avoir chez nous. Jʹattendrai<br />

aussi sur ce point quelques mots <strong>de</strong> réponse <strong>de</strong> votre part avant <strong>de</strong> rien préjuger.<br />

Tout va assez bien ici, tout le mon<strong>de</strong> est <strong>avec</strong> vous en sincère union <strong>de</strong> cœur et prie<br />

bien constamment pour vous et pour votre entourage.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, jʹembrasse vous et nos frères bien cordialement.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

559 à M. Halluin<br />

Le frère Alphonse Vasseur sʹen vient à Arras. Son jour dʹarrivée.<br />

Vaugirard, 2 août 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Le f. Alphonse [Vasseur] partira <strong>de</strong>main mardi. Il sʹarrêtera quelques heures à<br />

Amiens et vous arrivera dans la fin <strong>de</strong> la journée à Arras, si Dieu daigne lʹassister. Je<br />

684


trouve très bien que vous ne lui confiiez dʹabord que vos apprentis moyens. Il importe,<br />

dʹune part, quʹil soit bien posé pour vous et, <strong>de</strong> lʹautre, quʹil aille bien doucement et mar‐<br />

che <strong>avec</strong> une gran<strong>de</strong> circonspection. Je le lui recomman<strong>de</strong>rai bien.<br />

Nous vous embrassons tous bien affectueusement.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

560 à M. Halluin<br />

Le frère Loquet à Vaugirard. Il fait amen<strong>de</strong> honorable. Préparation <strong>de</strong> la fête <strong>de</strong>s Vacances.<br />

Vaugirard, 3 août 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Ce matin, <strong>de</strong>ux heures après le départ du f. Alphonse [Vasseur], le f. Joseph [Lo‐<br />

quet] arrivait à Vaugirard, <strong>de</strong>mandant grâce pour sa faute et promettant <strong>de</strong> mieux faire à<br />

lʹavenir. Jʹétais assez embarrassé pour prendre un parti à son égard, car vous ne mʹaviez<br />

rien répondu sur les questions que je vous avais faites touchant sa <strong>de</strong>rnière escapa<strong>de</strong>. Il<br />

mʹa assuré quʹil nʹavait nullement le défaut <strong>de</strong> boire outre mesure, que cʹétait par défaut<br />

dʹattention quʹil lʹavait fait <strong>de</strong>rnièrement, quʹil ne buvait jamais chez vous hors la maison,<br />

quʹenfin il nʹavait en aucune occasion, pas même en <strong>de</strong>rnier lieu, usé <strong>de</strong> lʹargent quʹon lui<br />

confiait pour boire ou pour aucune chose à son usage. Je vous serai bien obligé, cher Mon‐<br />

sieur lʹabbé, <strong>de</strong> me dire ce que vous pensez <strong>de</strong> ces assertions et quelle confiance vous<br />

croyez que je puisse accor<strong>de</strong>r à ce pauvre garçon que jʹai reçu provisoirement ici, en me ré‐<br />

servant dʹen conférer <strong>avec</strong> vous. Il me proteste quʹil nʹa pas cessé <strong>de</strong> souhaiter <strong>de</strong> rester au<br />

service <strong>de</strong> Dieu, quʹil ne pensait à dʹautres voies quʹen désespoir <strong>de</strong> cause et que, si nous le<br />

souffrons parmi nous, il se montrera sage, soumis et dévoué. Je vous prie <strong>de</strong> nouveau <strong>de</strong><br />

me dire votre avis éclairé sur tout cela et sur le fond quʹil faut faire sur sa fermeté et sa<br />

persistance dans ses bonnes résolutions.<br />

Le f. Alphonse est maintenant près <strong>de</strong> vous; jʹai la confiance quʹil sʹentendra <strong>avec</strong><br />

vous parfaitement. Comme vous le chargerez, sans doute, <strong>de</strong> vous remplacer quand vous<br />

ne serez pas à la maison, je pouvais craindre un peu <strong>de</strong> jalousie du f. Thuillier, parce quʹils<br />

se sont connus presque enfants et ne se sont pas perdus <strong>de</strong> vue. Mais je crois que notre f.<br />

Thuillier est maintenant assez ferme en raison, et en foi surtout, pour bien prendre tout ce<br />

que vous aurez réglé.<br />

Nous sommes ici en préparatifs pour notre distribution qui a lieu le 11, et plus en‐<br />

core pour la fête <strong>de</strong>s Vacances, énorme dérangement pour nous, fixée au 29 <strong>de</strong> ce mois.<br />

Jʹai bonne confiance que vous allez vous retrouver un peu en paix. Vous pourrez,<br />

un peu plus tard, avoir quelque repos près <strong>de</strong> nous et refaire vos forces.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, mille affections respectueuses <strong>de</strong> tous.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

561 à M. Halluin<br />

MLP. prend très à cœur la bonne marche <strong>de</strong> lʹŒuvre dʹArras. Le frère Vasseur <strong>de</strong>vrait apporter à M. Halluin<br />

une ai<strong>de</strong> dévouée et intelligente. Cas du frère Loquet. MLP. veut croire à sa bonne volonté.<br />

685


Vaugirard, 8 août 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Jʹespère que tout va dans votre petite communauté autant bien que possible, eu<br />

égard à vos charges et à lʹinsuffisance <strong>de</strong> votre personnel. Le f. Alphonse [Vasseur] est<br />

dans la sincère disposition <strong>de</strong> vous ai<strong>de</strong>r <strong>de</strong> son mieux. Il est dans sa nature <strong>de</strong> prendre les<br />

choses à cœur et <strong>de</strong> ne les point faire à <strong>de</strong>mi. Il a <strong>de</strong> lʹordre, <strong>de</strong> lʹexactitu<strong>de</strong>, une piété sin‐<br />

cère, beaucoup dʹouverture. Tout me laisse donc penser que vous aurez en lui un appui<br />

dévoué et intelligent sur lequel vous pourrez vous reposer.<br />

Nous allons ici passablement, bien occupés tout ensemble <strong>de</strong> notre distribution et<br />

<strong>de</strong> notre fête <strong>de</strong>s Vacances. Tout le mon<strong>de</strong> est dʹailleurs en assez bonne disposition.<br />

Le f. Joseph [Loquet] semble heureux <strong>de</strong> nʹavoir pas été rejeté dans le mon<strong>de</strong>; il mʹa<br />

protesté que, dans la <strong>de</strong>rnière circonstance, il nʹavait fait aucun abus <strong>de</strong> lʹargent réuni pour<br />

la fête <strong>de</strong>s jeunes menuisiers; que lʹexaltation <strong>de</strong> sa tête venait uniquement <strong>de</strong> ce<br />

quʹéchauffé par le feu <strong>de</strong> la cuisine où il avait travaillé activement, il avait bu <strong>de</strong> la bière<br />

assez forte, sans précaution et trop avi<strong>de</strong>ment.<br />

Il a bien reçu les 25f que vous avez envoyés pour son voyage, mais ils ont été em‐<br />

ployés pour le ramener à Paris, ainsi que 8f provenant <strong>de</strong> la montre quʹil a vendue pour ce<br />

prix en quittant Arras, inquiet quʹil était <strong>de</strong> lʹavenir qui lui était réservé. Il lui restait seu‐<br />

lement 40 centimes. Il est vrai quʹil nʹa pu prendre du mont <strong>de</strong>s Cats à Douai, quʹun train<br />

<strong>de</strong> 2ème classe et quʹil a été contraint, à lʹarrivée, <strong>de</strong> coucher dans une auberge à Vaugirard,<br />

étant venu trop tard pour se présenter à la maison avant lʹheure du coucher. Il ne mʹa pas<br />

paru quʹil y eût eu en tout cela aucun manque <strong>de</strong> sincérité. Nous allons essayer <strong>de</strong> la<br />

bonne volonté quʹil montre en ce moment, en espérant que le Seigneur daignera appuyer<br />

sa faiblesse. Il vous écrira bientôt. Le f. Cousin va toujours bien <strong>de</strong> cœur, pas fortement par<br />

la santé, peu <strong>de</strong> chose le fatigue. Ferdinand se soutient, sans être bien ferme.<br />

Je crois que vous ne pouviez guère éviter <strong>de</strong> vous séparer momentanément <strong>de</strong>s da‐<br />

mes du St Sacrement. Mais ce peut nʹêtre quʹun éloignement temporaire. Le bon Dieu nous<br />

viendra peut‐être en ai<strong>de</strong> plus tard et nous permettra <strong>de</strong> vous secourir un peu plus effica‐<br />

cement.<br />

Adieu, bien cher Monsieur lʹabbé, nous vous assurons tous <strong>de</strong> notre tendre dé‐<br />

vouement en N.S.<br />

Votre affectionné ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

562 à M. Vasseur<br />

User <strong>de</strong> patience et <strong>de</strong> mesure. Aller au pas <strong>de</strong> Dieu. Sʹai<strong>de</strong>r entre frères travaillant à la même Oeuvre.<br />

Vaugirard, 8 août 1858<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Jʹai reçu <strong>avec</strong> joie votre épître, et tous nos frères ont été aussi bien satisfaits en ap‐<br />

prenant que votre voyage était heureusement accompli et que tout semblait indiquer que<br />

vous pourriez utilement secon<strong>de</strong>r notre bon p. Halluin. Nous avons gran<strong>de</strong>ment à cœur<br />

<strong>de</strong> voir son excellente œuvre sʹasseoir <strong>avec</strong> le temps dans <strong>de</strong>s conditions <strong>de</strong> bon avenir,<br />

cʹest là le vœu <strong>de</strong> ce charitable frère tout particulièrement, et son cœur sera bien consolé si<br />

686


vous contribuez à le réaliser. Ne prenez pas toutefois les choses <strong>avec</strong> trop dʹar<strong>de</strong>ur, vous<br />

savez quʹà Amiens notre pauvre f. Vince sʹest tué en voulant trop faire ensemble et en ne<br />

sachant pas mesurer son pas à la marche <strong>de</strong> Dieu qui fait tout <strong>avec</strong> temps, patience et me‐<br />

sure. Laissez notre bon abbé Halluin vous conduire, et surtout aussi comptez beaucoup<br />

plus sur Dieu que sur votre activité.<br />

Ne manquez pas <strong>de</strong> dire quelques mots dʹaffection à nos ff. Thuillier et Brice <strong>de</strong> la<br />

part <strong>de</strong> toute notre petite communauté qui les embrasse, ainsi que vous, bien tendrement<br />

dans les cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et M.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Ecrivez‐moi régulièrement, souvent dans les premiers temps, sauf à ralentir<br />

quand vous serez bien à votre affaire; je vous recomman<strong>de</strong> encore dʹêtre bien habituelle‐<br />

ment sous les yeux <strong>de</strong> Dieu et <strong>de</strong> beaucoup prier. Votre petite lettre, écrite en hâte, avait<br />

plusieurs fautes dʹorthographe; veillez bien à cela, cʹest dans le mon<strong>de</strong> une note fâcheuse<br />

et quʹon regar<strong>de</strong> comme lʹindice dʹune mauvaise ou insuffisante éducation.<br />

563 à M. Hello<br />

M. Hello vient rejoindre MLP. à Duclair.<br />

Duclair, samedi 14 août [1858]<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Tout est ici en si grand mouvement pour préparer la distribution quʹà peine ces<br />

dames ont un moment à me donner; il me semble bien que vous ne vous plairiez guère<br />

dans ce tourbillon; je vous invite donc à ne venir que jeudi.<br />

Départ à 7h.25 <strong>de</strong> la gare, prendre place pour Barentin où, à lʹarrivée, on trouve<br />

lʹomnibus qui, pour 2 sols, est obligé <strong>de</strong> conduire à Duclair. On stationne un quart dʹheure<br />

à Rouen, on peut prendre au buffet un potage ou autre chose; il faut aussi un peu manger,<br />

ou même beaucoup si on peut, le matin avant le départ; à cette fin, et pour nʹêtre pas en re‐<br />

tard, dire la Ste Messe à 5h.<br />

Je vous embrasse tous bien tendrement.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Recomman<strong>de</strong>r à M. Maignen le groupe <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette.<br />

564 à M. Halluin<br />

Juste équilibre entre témérité et timidité. Nécessité dʹune fusion plus complète <strong>avec</strong> la Congrégation et plus dʹin‐<br />

dépendance à lʹégard du diocèse dʹArras. Faiblesse <strong>de</strong>s âmes <strong>de</strong> son temps.<br />

Duclair, 21 août 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

On mʹa renvoyé chez ma sœur, où je suis <strong>de</strong>puis quelques jours et où je me propose<br />

<strong>de</strong> rester encore jusquʹau vendredi 27, la lettre que vous mʹavez écrite le 16 <strong>de</strong> ce mois. Jʹy<br />

ai vu <strong>avec</strong> joie que vous commencez à vous organiser et que vos services vont marcher<br />

687


passablement, en attendant que le bon Dieu daigne nous donner les moyens <strong>de</strong> les asseoir<br />

tout à fait régulièrement. Je crois que vous avez agi pru<strong>de</strong>mment en rassurant ceux qui se<br />

préoccupent, en sens divers, <strong>de</strong> vos mouvements, mais nous nʹavons pas à nous en inquié‐<br />

ter, tout cela tombera <strong>de</strong> soi et tous les bons esprits comprendront, nous pouvons lʹespérer,<br />

que vous réglez vos affaires pour le plus grand bien. Il est sage, sans doute, que nous mar‐<br />

chions <strong>avec</strong> une gran<strong>de</strong> circonspection, et ceux qui ont suivi attentivement la marche <strong>de</strong><br />

notre petite famille peuvent vous dire que rien nʹest mieux dans ses habitu<strong>de</strong>s que la pa‐<br />

tience et la temporisation. Je crois pourtant que nous <strong>de</strong>vons nous tenir en <strong>de</strong> justes limites<br />

entre la témérité et <strong>de</strong>s allures par trop timi<strong>de</strong>s. Que pourraient objecter ceux à qui vous<br />

diriez: ʺJe ne puis, cela va <strong>de</strong> soi, conduire à moi seul une maison <strong>de</strong> 180 personnes. Je me<br />

suis, après mûr examen, déterminé à mʹassocier aux frères <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul qui sʹoc‐<br />

cupent dʹœuvres analogues à la mienne. Mais il est tout simple que cette association me<br />

donne quelques obligations en même temps que quelques avantages, et mʹimpose notam‐<br />

ment la nécessité dʹun échange et réciprocité <strong>de</strong> services. Si les membres <strong>de</strong> la Communau‐<br />

té viennent tour à tour et selon les besoins me prêter assistance, ils ont droit <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r<br />

à leur tour quʹà certains temps je puisse leur donner un peu dʹai<strong>de</strong>. Ne vous étonnez donc<br />

pas si je fais quelques absences, laissez‐moi quelque liberté dans mes mouvements et ayez<br />

la confiance que le Seigneur daignera, comme par le passé, me secourir pour la conduite<br />

<strong>de</strong> mon œuvreʺ.<br />

Ce serait surtout à lʹégard <strong>de</strong> M gr que jʹaurais souhaité que vous prissiez une posi‐<br />

tion plus tranchée. A mon gré, votre confiance en nous a été trop faible jusquʹici; <strong>de</strong> là une<br />

certaine indécision dans nos rapports qui nʹa été bonne ni pour votre œuvre ni pour vous,<br />

puisquʹaprès trois ans dʹunion nous étions guère plus avancés dans notre fusion quʹau<br />

premier jour. Nous commençons à entrer un peu plus franchement dans la voie dʹune<br />

union sérieuse et effective, mais nous nʹy pourrons avancer quʹà la condition dʹune volonté<br />

un peu ferme et dʹune marche plus franchement <strong>de</strong>ssinée. Je mʹen rapporte tout à fait à vo‐<br />

tre pru<strong>de</strong>nce pour examiner le temps où vous pourrez faire quelques absences, plus ou<br />

moins longues. Vous pourrez, cher Monsieur lʹabbé, régler cela <strong>avec</strong> notre bon abbé Lan‐<br />

tiez quand il ira vous voir. Mais je ne saurais trop insister sur la nécessité <strong>de</strong> trancher net‐<br />

tement votre position à lʹégard <strong>de</strong> la Communauté; autrement, tenue comme en cachette<br />

dans une position indécise et mal posée, elle restera impuissante à vous ai<strong>de</strong>r sérieuse‐<br />

ment et, après <strong>de</strong>s sacrifices inutiles, nʹaura que le regret <strong>de</strong> nʹavoir pu secon<strong>de</strong>r une œu‐<br />

vre aussi belle et aussi charitable que la vôtre. En résumé il me semble que vous pourriez<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à M gr , ou quʹil vous donnât <strong>de</strong>s ai<strong>de</strong>s pour soutenir votre œuvre ou quʹil vous<br />

permît dʹen chercher vous‐même, et quʹen ce <strong>de</strong>rnier cas, il acceptât les conditions essen‐<br />

tielles <strong>de</strong> toute association pour vous, savoir: quelque dépendance à lʹégard <strong>de</strong> la Commu‐<br />

nauté, quelque liberté et dégagement à lʹégard du diocèse. Soyez‐en bien assuré, cher<br />

Monsieur lʹabbé, si nous ne nous posons pas ainsi, nous sentirons inévitablement lʹimpos‐<br />

sibilité <strong>de</strong> nous être utiles lʹun à lʹautre; Dieu daignera, je lʹespère, vous faire partager sur<br />

ce point ma conviction profon<strong>de</strong>.<br />

Je souhaite bien vivement que vous puissiez aller prendre quelques jours <strong>de</strong> repos;<br />

je me prêterai à toutes les mesures qui pourront vous donner cette facilité, lʹâme et le corps<br />

ont besoin, chacun à leur manière, <strong>de</strong> certains moments <strong>de</strong> détente et <strong>de</strong> calme pour se<br />

remettre en équilibre et sʹassurer dans leur voie; je souhaite bien, cher Monsieur lʹabbé,<br />

que le bon Dieu vous donne ces moments <strong>de</strong> repos et <strong>de</strong> paix.<br />

688


Nous sommes, à Vaugirard, en grand mouvement pour la fête <strong>de</strong>s Vacances, nous<br />

nʹavons pu lʹéviter cette année, ayant <strong>de</strong>s dépenses à payer pour la petite chapelle <strong>de</strong> la Sa‐<br />

lette, mais je pense que nous nʹaurons plus cette charge bien dérangeante pour lʹavenir.<br />

Je pense <strong>avec</strong> vous quʹil serait bien <strong>de</strong> remplacer Dainville par une autre propriété<br />

beaucoup plus rapprochée <strong>de</strong> vous.<br />

Quant au f. Michel, peut‐être était‐il difficile <strong>de</strong> lui refuser un asile, mais soyez as‐<br />

suré, cher Monsieur lʹabbé, que le rapprochement <strong>de</strong> jeunes gens suivant une carrière au<br />

<strong>de</strong>hors, dans <strong>de</strong>s conditions accessibles pour les frères, sera toujours une tentation et un<br />

grand danger pour eux. Les âmes sont faibles <strong>de</strong> notre temps, nous <strong>de</strong>vons les entourer <strong>de</strong><br />

beaucoup <strong>de</strong> ménagements. Prions beaucoup, la grâce nous est bien nécessaire; mais veil‐<br />

lons aussi, car le Seigneur nous a recommandé lʹun et lʹautre. Le f. Joseph [Loquet] mʹavait<br />

remis, il y a quelque temps déjà, une lettre pour vous. Je lʹai malheureusement oubliée<br />

dans ma poche. Je le regrette bien, ce frère ne vous a pas mis en oubli, cʹest moi qui ai été<br />

négligent ou sans mémoire. M. Hello, qui est <strong>avec</strong> moi ici, se joint à moi pour vous assurer<br />

<strong>de</strong> nos sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> tendre attachement en N.S.<br />

Votre dévoué ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

565 à M. Maignen<br />

MLP. développe son Institut sans esprit <strong>de</strong> système. Ses réserves au sujet <strong>de</strong> lʹutilité <strong>de</strong>s Congrès. Lucidité et<br />

franchise <strong>de</strong> MLP. vis‐à‐vis du frère Maignen. Diversité nécessaire entre les Œuvres. ʺNous suivons notre voie<br />

parce que Dieu nous y a misʺ. Rester discret et réservé quant à la Congrégation. Notre fin <strong>de</strong>rnière: nous porter<br />

à la recherche <strong>de</strong>s âmes pour les amener à Dieu.<br />

Duclair, 26 août 1858<br />

Je vous remercie, bien cher enfant, <strong>de</strong> mʹavoir écrit quelques mots <strong>de</strong> bon souvenir,<br />

cette marque dʹaffection mʹa été douce; vous me manquez ici, car, quelque tendre que soit<br />

mon attachement pour tous mes ff., les plus vieux ont toujours quelque privilège <strong>de</strong> préfé‐<br />

rence, dans les limites que permet la charité; mais je nʹai pas voulu <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r formelle‐<br />

ment que vous veniez, vous laissant examiner <strong>avec</strong> notre f. Paillé ce qui était le mieux pour<br />

votre bien et pour celui <strong>de</strong> vos œuvres.<br />

Je ne mʹoppose pas à votre voyage à Angers 298 ; je nʹen attends pas autant <strong>de</strong> bien<br />

que vous; il se fait dans ces Congrès ordinairement plus <strong>de</strong> discours que <strong>de</strong> vrai et <strong>de</strong> so‐<br />

li<strong>de</strong> fruit pour les œuvres; mais enfin, en parlant peu et en cherchant simplement à recueil‐<br />

lir quelques lumières dans les expériences <strong>de</strong>s autres, vous pouvez rendre peut‐être ce<br />

voyage <strong>de</strong> quelque avantage. Je dis en parlant peu, et jʹy insiste pour plusieurs raisons.<br />

Dʹabord il vous manque, entre plusieurs qualités heureuses dont vous êtes doué, une cer‐<br />

taine netteté et fermeté dʹesprit essentielles pour la discussion et dont lʹabsence fait pour<br />

vous quʹon vous déroute facilement et que vous vous mettez vous‐même souvent hors <strong>de</strong><br />

la question. Dʹune autre part, tous ces Messieurs chefs <strong>de</strong> patronage ont, à tort ou à raison,<br />

<strong>de</strong>s idées fort arrêtées, quelquefois tranchantes, tandis que vous, humble instrument aux<br />

mains <strong>de</strong> Dieu, vous ne savez que ce quʹIl vous a montré jusquʹici, cʹest‐à‐dire encore peu<br />

<strong>de</strong> chose. Je ne cherche pas si cʹest <strong>avec</strong> justice que les autres se peuvent prétendre mieux<br />

298 Il s'agit du 1 er congrès <strong>de</strong>s Directeurs d'œuvres ouvrières qui se tint à Angers du 31 août au 3 septembre 1858. sous l'impulsion <strong>de</strong><br />

M. Maignen, on y précisera l'objectif <strong>de</strong>s Œuvres ouvrières. "Les faire prier et jouer: les patronner par l'assistance professionnelle".<br />

689


éclairés, mais jʹaimerais que pour vous, vous vous tinssiez invariablement dans cette ligne:<br />

nous croyons que, dans les divers systèmes <strong>de</strong> patronage, il peut y en avoir <strong>de</strong> plus parfait<br />

les uns que les autres, mais nous ne croyons pas quʹon puisse uniformément les imposer à<br />

toutes les localités et circonstances; nous croyons que la diversité <strong>de</strong>s moyens est dans les<br />

vues <strong>de</strong> Dieu pour subvenir à <strong>de</strong>s besoins qui ne sont pas partout les mêmes. Dʹailleurs,<br />

les ressources dont le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s œuvres dispose sont trop peu nombreuses pour quʹon<br />

nʹen dédaigne aucune, tels moyens employés utilement, dans les conditions où ils sont<br />

placés, perdraient leur ressort et leur efficacité si on voulait leur imposer <strong>de</strong>s formes pour<br />

lesquelles ils ne sont point faits et auxquelles ils ne sauraient se prêter. Laissons donc<br />

lʹœuvre <strong>de</strong> Dieu se développer dans une certaine variété quʹIl a mise Lui‐même dans tous<br />

ses ouvrages et ne cherchons absolument dʹautre unité que celle <strong>de</strong> la foi commune et du<br />

désir unanime <strong>de</strong> soutenir et dʹassister chrétiennement les apprentis et ouvriers dans la<br />

carrière ru<strong>de</strong> et dangereuse quʹils ont à suivre.<br />

Je vous recomman<strong>de</strong> surtout une sage réserve en ce qui regar<strong>de</strong> la Communauté,<br />

nʹen parlez quʹautant quʹil sera indispensable <strong>de</strong> le faire, nous nʹavons pas besoin quʹon<br />

sʹoccupe <strong>de</strong> nous, nous avons remis à Dieu le soin <strong>de</strong> nous conduire et celui <strong>de</strong> nous pro‐<br />

duire quand et dans la mesure qu’il Lui conviendra. Notre fin <strong>de</strong>rnière, en confondant en<br />

vie commune toutes nos ressources et nos moyens est, quant à la vie extérieure, <strong>de</strong> nous<br />

porter à la recherche <strong>de</strong>s âmes pour les ramener à Dieu. Il semble dans les vues <strong>de</strong> la Pro‐<br />

vi<strong>de</strong>nce dʹunir intimement pour cette fin, dans notre Communauté, les <strong>de</strong>ux éléments ec‐<br />

clésiastique et laïc et <strong>de</strong> nous créer <strong>de</strong>s appuis dans les diverses sociétés charitables; nous<br />

avons marché jusquʹici en paix profon<strong>de</strong> et sans embarras aucun; nous nʹentendons pas<br />

néanmoins dire que toutes nos épreuves soient achevées et que notre constitution soit ar‐<br />

rivée à sa consommation, nous avons été pas à pas sous la conduite <strong>de</strong> Dieu et nous conti‐<br />

nuerons à marcher sous ses yeux docilement; nous nʹentendons pas dès lors nous poser<br />

690


comme les gui<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s autres, car nous sommes dirigés et conduits nous‐mêmes, mais nous<br />

espérons quʹen allant <strong>avec</strong> nous, on va sous la main du Seigneur. Nous croyons bon et<br />

sage tout ce que font les autres, nous ne préférons notre voie à aucune autre, nous la sui‐<br />

vons parce que Dieu nous y a mis et nous espérons, si nous sommes fidèles à ses <strong>de</strong>sseins,<br />

arriver à une heureuse fin. Voilà tout ce que nous savons. Jʹaimerais que vous vous tinssiez<br />

strictement dans ces termes. Je crois aussi que vous ne <strong>de</strong>vez prendre aucun engagement<br />

ni vous prêter à aucune association sans mʹen avoir auparavant entretenu. Jʹaurais désiré<br />

que M. Caille, dont lʹesprit est assez positif et précis, pût aller <strong>avec</strong> vous à cette réunion,<br />

mais je crois quʹil est bien occupé et que toute sa maison est bien chargée en ce moment. Si<br />

vous invoquez fidèlement le Seigneur et sʹIl daigne vous assister, vous nʹaurez besoin <strong>de</strong><br />

personne, Lui présent, Il suffit.<br />

Adieu, cher enfant, à bientôt, jʹembrasse tout le mon<strong>de</strong> bien tendrement.<br />

Votre Père bien affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

566 à M. Caille<br />

Nécessité <strong>de</strong>s exercices <strong>de</strong> communauté pour le soutien et la persévérance <strong>de</strong>s frères, comme pour leur action dans<br />

les Œuvres. Observation sur le prochain Congrès dʹAngers.<br />

Duclair, 26 août 1858<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je suis <strong>de</strong>puis quelques jours chez ma sœur, afin <strong>de</strong> reposer un peu ma poitrine qui<br />

était plus fatiguée que <strong>de</strong> coutume <strong>de</strong>puis quelque temps; je retourne <strong>de</strong>main samedi à<br />

Vaugirard pour notre fête <strong>de</strong>s Vacances qui aura lieu dimanche, si le temps nʹy met empê‐<br />

chement.<br />

Je ne sais si vous mʹavez écrit pendant mon absence, on ne mʹa point envoyé <strong>de</strong> let‐<br />

tre <strong>de</strong> vous; je serai bien aise dʹavoir <strong>de</strong> vos nouvelles, nʹen ayant pas reçu <strong>de</strong>puis quelque<br />

temps. Comment va M. Deberly? Médiocrement, si jʹen dois croire les <strong>de</strong>rniers détails qui<br />

mʹavaient été apportés par notre bon abbé Lantiez. Il me semble quʹil serait bien à souhai‐<br />

ter, si M. Deberly doit continuer à sʹoccuper du patronage, quʹil prît tout à fait sa <strong>de</strong>meure<br />

et sa nourriture dans sa famille, il aurait plus dʹindépendance et, <strong>de</strong> votre côté, vous seriez<br />

<strong>avec</strong> lui dans une position plus simple et mieux définie.<br />

Il mʹest revenu que nos frères, le f. Marcaire particulièrement, souffrent plus que <strong>de</strong><br />

coutume du manque <strong>de</strong> régularité, et souvent même du défaut <strong>de</strong>s exercices <strong>de</strong> commu‐<br />

nauté; tâchez, mon bon ami, <strong>de</strong> pourvoir à cela; les occupations sont bien multipliées et la<br />

vie bien sévère dans notre maison dʹAmiens, les frères auront peine à la porter sʹils nʹont<br />

un peu dʹappui et <strong>de</strong> consolation dans leurs exercices communs. Vous remarquez <strong>avec</strong> rai‐<br />

son quʹil est vraiment parfait <strong>de</strong> savoir se passer souvent dʹexercices quand les œuvres<br />

sont impérieuses et ren<strong>de</strong>nt ces exercices difficiles ou impossibles; je le pense comme vous,<br />

mais il faut nous accommo<strong>de</strong>r à la faiblesse <strong>de</strong> ceux qui sont <strong>avec</strong> nous et marcher à leur<br />

pas tant quʹils ne sont pas assez forts pour aller plus fermement. Voyez donc, mon bon<br />

ami, ce qui est à faire sur ce point; vous nʹavancerez guère si vos frères sont tristes, décou‐<br />

ragés, sans aucun attrait pour leur genre <strong>de</strong> vie; au contraire, vous doublerez leurs forces<br />

si vous proportionnez leurs obligations à leurs dispositions; peut‐être quʹun peu dʹai<strong>de</strong> et<br />

691


<strong>de</strong> soulagement, qui leur permettrait <strong>de</strong> faire quelques exercices communs et <strong>de</strong> se retrou‐<br />

ver ensemble, serait bien utile; nous nʹavons pas en ce moment, je crois, dʹai<strong>de</strong> que nous<br />

puissions vous donner <strong>de</strong> Vaugirard, mais autour <strong>de</strong> vous peut‐être auriez‐vous quelque<br />

peu <strong>de</strong> secours dans M. Florentin ou quelque autre; vous verrez ce que la situation pour‐<br />

rait <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r.<br />

M. Maignen désire aller lundi ou mardi au petit Congrès <strong>de</strong>s Chefs <strong>de</strong> Patronage<br />

qui doit avoir lieu à Angers. Je lʹy vois aller <strong>avec</strong> une médiocre satisfaction; il se fait dans<br />

toutes ces réunions, bien souvent, plus <strong>de</strong> discours que <strong>de</strong> véritable bien pour les œuvres;<br />

dʹailleurs, il manque au f. Maignen, au milieu <strong>de</strong> qualités très heureuses dont il est doué,<br />

une certaine netteté et fermeté dʹesprit qui le rendraient propre à juger précisément <strong>de</strong>s<br />

choses et à donner au besoin un avis mesuré dans les questions qui seront agitées. Jʹaurais<br />

vu <strong>avec</strong> plaisir que vous alliez <strong>de</strong> votre côté à cette réunion, votre présence lʹeût soutenu,<br />

et à <strong>de</strong>ux vous auriez pu mieux juger les choses, mais sans doute vous manquez <strong>de</strong> liberté,<br />

vos affaires vous retiennent et, en votre absence, vos frères déjà chargés le seraient encore<br />

plus. Je laisse donc au bon Maître le soin <strong>de</strong> tirer du voyage du f. Maignen telles suites que<br />

sa sagesse en voudra faire sortir.<br />

Je désire bien aller vous voir avant la fin <strong>de</strong> la saison; je suis pourtant peu en train et<br />

peu propre aux voyages présentement. En tout cas, notre f. Lantiez ira, dans le cours <strong>de</strong><br />

septembre sans doute, à Arras; il pourra sʹarrêter un jour ou <strong>de</strong>ux <strong>avec</strong> vous. Les choses<br />

vont assez bien à Arras; le f. Alphonse [Vasseur] y réussit assez bien; M. Daviron, qui était<br />

un obstacle sérieux au mouvement <strong>de</strong> la communauté, a quitté définitivement la maison.<br />

Rien <strong>de</strong> nouveau que je sache à Vaugirard et à Paris.<br />

Adieu, mon bien bon ami, allons en confiance et persévérance; la voie est ru<strong>de</strong>, mais<br />

elle conduit à Dieu, et plusieurs, nous le pouvons espérer, nous y suivront pour arriver<br />

jusquʹà Lui, félicité <strong>de</strong> nos âmes et fin <strong>de</strong>rnière et tous nos vœux. Je vous embrasse affec‐<br />

tueusement ainsi que nos frères.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

567 à M. Halluin<br />

En ce qui touche à lʹavenir <strong>de</strong> lʹŒuvre dʹArras, nʹalarmer ni les patronnés, ni les bienfaiteurs. Succès <strong>de</strong> la fête<br />

<strong>de</strong>s Vacances à Vaugirard; mais les inconvénients excédant les avantages, il faudra désormais y renoncer.<br />

Vaugirard, 1er septembre 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Un peu <strong>de</strong> fatigue résultant <strong>de</strong> notre fête <strong>de</strong> dimanche <strong>de</strong>rnier et une sortie que<br />

nous avons dû faire hier mʹont empêché <strong>de</strong> répondre plus tôt à la lettre <strong>de</strong> vous que jʹai<br />

trouvée à mon arrivée. Jʹespère que vous aurez pressenti la cause <strong>de</strong> ce retard et ne mʹen<br />

aurez point su mauvais gré. Je ne pourrai, même aujourdʹhui, vous écrire plus longtemps<br />

incertain sur quelques points qui <strong>de</strong>mandaient solution.<br />

Notre bon abbé Lantiez faisant la réouverture <strong>de</strong> ses classes ne peut, avant le milieu<br />

<strong>de</strong> la semaine prochaine, se rendre auprès <strong>de</strong> vous. Il le fera à ce moment <strong>de</strong> grand cœur,<br />

afin que vous puisiez aller quelques jours vous reposer dans votre famille et venir ensuite,<br />

sʹil y a lieu, prendre un peu <strong>de</strong> délassement au milieu <strong>de</strong> nous. Vous jugerez sʹil vous faut<br />

profiter <strong>de</strong> ce moment pour faire un peu <strong>de</strong> retraite, ou si vous <strong>de</strong>vez en choisir un autre.<br />

692


Jʹentre bien dans les vues que vous me communiquez touchant les ménagements à<br />

prendre dans lʹintérêt <strong>de</strong> votre œuvre. Je pense comme vous quʹon ne doit alarmer ni les<br />

enfants, ni les personnes qui sʹintéressent à lʹœuvre. Il nʹest pas dans nos habitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> rien<br />

risquer qui puisse sembler téméraire. Nous irons <strong>avec</strong> mesure et selon les indices que le<br />

Seigneur nous donnera.<br />

Vous examinerez la question <strong>de</strong> vos classes <strong>avec</strong> notre f. Lantiez qui, au retour,<br />

nous dira ce qui lui paraîtrait le mieux.<br />

Je suis bien aise que vous ayez parlé un peu plus nettement à M gr . Je crois que cʹétait<br />

une mesure vraiment désirable.<br />

Nous allons assez bien ici. Notre fête <strong>de</strong>s Vacances, très lour<strong>de</strong> affaire pour nous,<br />

sʹest passée à merveille et <strong>avec</strong> une protection sensible <strong>de</strong> la S te Vierge à qui nous lʹavons<br />

dédiée, en affectant le produit <strong>de</strong>s billets dʹentrée au paiement <strong>de</strong> notre petite chapelle <strong>de</strong><br />

N.D. <strong>de</strong> la Salette. Nous avions <strong>de</strong> 5 à 6.000 personnes. Tout sʹest passé sans acci<strong>de</strong>nt, au<br />

contentement général. Nous sommes néanmoins effrayés nous‐mêmes <strong>de</strong> lʹénormité dʹune<br />

pareille entreprise, <strong>de</strong>s proportions quʹelle a prises, <strong>de</strong>s efforts et travaux quʹelle entraîne,<br />

nous renonçons donc à la faire désormais. Les frais excé<strong>de</strong>ront 1.000f. Le bénéfice net sera<br />

<strong>de</strong> 2.000f environ, mais cʹest peu en comparaison du grand mouvement et <strong>de</strong> la dépense<br />

<strong>de</strong> forces que cela exige. Il y a bien un certain effet moral qui peut être mis en compte,<br />

mais en somme la peine et les travaux excè<strong>de</strong>nt les avantages.<br />

Je suis heureux que votre fête dʹArras se soit aussi passée sans grave peine pour<br />

vous, cʹest une ru<strong>de</strong> épreuve pour vos enfants. Jʹespère que le Seigneur les rendra forts et<br />

les prémunira contre <strong>de</strong> tels dangers. Nous pensons bien aussi à la petite communauté<br />

dʹArras, nous ferons tout ce que nous pourrons pour établir <strong>de</strong> bons et affectueux rapports<br />

<strong>avec</strong> elle. Nous vous embrassons tous bien cordialement.<br />

Votre respectueux ami et Père en N.S. et en M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

568 à M. Paillé<br />

Désordre dans la bibliothèque <strong>de</strong> Vaugirard.<br />

lundi 6 septembre [1858]<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Le désordre <strong>de</strong>vient <strong>de</strong> plus en plus grand dans notre bibliothèque. Une <strong>de</strong>s causes<br />

<strong>de</strong> ce mal, cʹest que nos ff. <strong>de</strong> Nazareth emportent <strong>de</strong>s livres, les gar<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>s temps consi‐<br />

dérables ou même oublient complètement <strong>de</strong> les rendre. Je crois que cet état <strong>de</strong> choses<br />

nʹest pas bon.<br />

Je vous prie instamment <strong>de</strong> me renvoyer plusieurs volumes que vous et M. Mai‐<br />

gnen avez <strong>de</strong>puis longtemps, et <strong>de</strong> mʹapporter la note exacte <strong>de</strong> quelques livres que M.<br />

Hello aurait absolument besoin <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r pour ses étu<strong>de</strong>s. Ne vous contentez pas, je vous<br />

prie, <strong>de</strong> la réponse que chacun fera: Nous nʹavons rien. Cʹest vite dit et cʹest plus facile;<br />

mais, en cherchant, on voit que cela manquait dʹexactitu<strong>de</strong>. Faites donc, je vous prie, une<br />

revue sérieuse dans les chambres et dans les pièces <strong>de</strong> travail, et vous vous assurerez que<br />

cette enquête nʹest pas inutile.<br />

693


Adieu, mon bien bon ami, nous reverrons notre fils Maignen et nous serons heu‐<br />

reux dʹêtre tous réunis mercredi. Nous ferons la retraite du mois. Je tâcherai que le r.p. Re‐<br />

naud nous vienne.<br />

Je vous embrasse bien affectueusement.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

569 à M. Vasseur<br />

Suppression <strong>de</strong> la fête <strong>de</strong>s Vacances à Vaugirard. La croix et les épreuves sont gage <strong>de</strong> succès. Se montrer patient.<br />

Avantage que lʹon trouve à enseigner le catéchisme. Etat <strong>de</strong> santé.<br />

Vaugirard, 8 septembre [1858]<br />

Nativité <strong>de</strong> la Sainte Vierge<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

La retraite du mois, qui se fait aujourdʹhui, mʹempêche <strong>de</strong> mʹentretenir longtemps<br />

<strong>avec</strong> vous; je remets seulement ces <strong>de</strong>ux lignes à notre p. Lantiez, afin <strong>de</strong> vous assurer que<br />

toute la petite famille vous suit toujours <strong>de</strong>s yeux du cœur et se tient bien tendrement unie<br />

à vous <strong>de</strong>vant Dieu. Plusieurs <strong>de</strong>s frères voulaient vous écrire, mais comme ils atten<strong>de</strong>nt<br />

toujours au <strong>de</strong>rnier moment, ce moment leur manquera aujourdʹhui probablement. Nous<br />

allons assez bien, la rentrée <strong>de</strong>s classes sʹest faite hier après <strong>de</strong>s vacances assez bien em‐<br />

ployées et fort amusées surtout par la fête du 29 août qui a parfaitement réussi. Ce sera<br />

cependant la <strong>de</strong>rnière, sans doute, à cause <strong>de</strong>s peines et <strong>de</strong>s travaux quʹelle nécessite. Elle a<br />

dʹailleurs réussi jusquʹici <strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> Dieu, mais tant dʹacci<strong>de</strong>nts pourraient en déranger<br />

le succès, tant dʹabus pourraient sʹy glisser quʹelle était toujours par avance un sujet <strong>de</strong><br />

préoccupation et dʹinquiétu<strong>de</strong>. On va planter le champ et tout sera fini pour la fête.<br />

Je ne mʹétonne point, cher enfant, que vous ayez quelques petites épreuves dans vos<br />

travaux, cʹest la sueur <strong>de</strong> nos fronts qui fécon<strong>de</strong> le champ que nos mains cultivent, cʹest à<br />

ce prix que le Seigneur attache un mérite à nos œuvres, et quʹil en tire aussi <strong>de</strong>s fruits <strong>de</strong><br />

sanctification. Soyez donc courageux, cher enfant, renoncez à la consolation et aux dou‐<br />

ceurs sensibles que vous pourriez attendre dans vos travaux, et le Seigneur les rendra<br />

doublement profitables pour sa gloire et pour votre salut. Vous apprendrez dʹailleurs à la<br />

longue, comme notre p. Halluin, à démêler quelques bons mouvements du cœur sous les<br />

ru<strong>de</strong>sses dʹune nature mal façonnée et que lʹéducation nʹa pas assouplie. Enfin, voyez les<br />

âmes à travers lʹenveloppe grossière qui vous blesse et, dans le désir <strong>de</strong> les sauver, sachez<br />

beaucoup attendre et beaucoup endurer. Si vous avez cet esprit <strong>de</strong> sacrifice, cher enfant,<br />

jʹose vous répondre que vos travaux obtiendront <strong>de</strong>s résultats et quʹun jour vous‐même,<br />

maître enfin <strong>de</strong> lʹestime et <strong>de</strong> lʹaffection <strong>de</strong> vos enfants, vous trouverez quelque joie dans le<br />

bien que vos soins auront préparé. Cʹest une œuvre <strong>de</strong> longanimité et <strong>de</strong> persévérance, le<br />

Seigneur a pris soin <strong>de</strong> vous former avant <strong>de</strong> vous y mettre, répon<strong>de</strong>z à ses vœux, travail‐<br />

lez, patientez et confiez‐vous en Lui.<br />

Nous ne pouvons nous passer ici <strong>de</strong> Lʹhomme religieux qui est livre <strong>de</strong> fond, mais je<br />

vous en fait acheter un exemplaire que je donne <strong>avec</strong> plaisir à la maison dʹArras. Je crois<br />

néanmoins quʹil y a beaucoup <strong>de</strong> bons livres dans la bibliothèque <strong>de</strong> M. Halluin et quʹen<br />

cherchant un peu, vous eussiez pu trouver quelque bonne et édifiante lecture.<br />

694


Je suis bien satisfait que vous fassiez un peu <strong>de</strong> catéchisme, cʹest un exercice bien<br />

utile et bien salutaire; mais, si vous le faites à <strong>de</strong> jeunes enfants, gar<strong>de</strong>z‐vous dʹexcé<strong>de</strong>r la<br />

portée <strong>de</strong> leurs esprits, soyez simple, précis, <strong>de</strong>meurez dans un cercle restreint, le reste<br />

leur viendra en son temps.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> votre attention pour ce qui regar<strong>de</strong> ma santé, elle se soutient à<br />

peu près telle que vous lʹavez vue; jʹai fait un voyage <strong>de</strong> quelques jours en Normandie,<br />

mais trop court pour une constitution si lassée que la mienne; nous nʹavons pas le temps<br />

ici‐bas <strong>de</strong> songer à nos corps, heureux serons‐nous si du moins nous avons soigné nos<br />

âmes.<br />

Adieu, cher enfant, nous vous embrassons tous, vous et les autres bons frères que<br />

nous aimons aussi dʹune vive et tendre charité.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

570 à M me la C tesse <strong>de</strong> Granville<br />

Lʹidée qui a présidé à la naissance <strong>de</strong> lʹInstitut: affermir et stabiliser les Œuvres <strong>de</strong> charité. Rôle complémentaire<br />

<strong>de</strong>s frères et <strong>de</strong>s prêtres: se prêter un appui réciproque dans une cordiale collaboration.<br />

Vaugirard, 16 septembre 1858<br />

Madame la Comtesse,<br />

Jʹai lʹhonneur <strong>de</strong> vous envoyer une petite note qui contient sommairement les indi‐<br />

cations qui vous ont été <strong>de</strong>mandées sur notre Communauté. Elle est bien mal écrite, ayant<br />

été copiée par un <strong>de</strong> nos enfants, mais le bon prêtre qui désire ces renseignements sera in‐<br />

dulgent, je lʹespère, et voudra bien excuser lʹinexpérience du petit secrétaire. Si cette note<br />

ne suffisait pas, je serais très empressé, Madame la Comtesse, à vous donner les éclaircis‐<br />

sements quʹon pourrait souhaiter. Nous ne cachons rien <strong>de</strong> nos affaires parce quʹelles sont<br />

parfaitement simples et ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt aucun mystère. Nous nous sommes, dès lʹabord,<br />

placés sous les yeux et sous la protection <strong>de</strong> lʹautorité supérieure ecclésiastique. M gr Affre,<br />

<strong>de</strong> vénérable mémoire, nous avait gran<strong>de</strong>ment soutenus et encouragés. Il avait même dési‐<br />

ré que nous habitions une partie du Couvent <strong>de</strong>s Carmes qui nʹétait pas alors occupé par<br />

les Dominicains. M gr Sibour ne nous avait pas été moins favorable et sʹétait engagé formel‐<br />

lement à nous donner tous les sujets ecclésiastiques qui auraient la vocation <strong>de</strong> sʹadjoindre<br />

à nous. Enfin, S. Em. le Cardinal Morlot est venue nous voir plusieurs fois, a pris connais‐<br />

sance <strong>de</strong> notre règlement et nous a donné les marques dʹune bienveillance particulière. M gr<br />

lʹEvêque dʹAngers, qui nous a dirigés par ses conseils <strong>de</strong>puis notre origine, qui a préparé<br />

<strong>avec</strong> nous notre règlement, daigne nous regar<strong>de</strong>r et nous traiter comme ses enfants. Nous<br />

rapportons à Dieu seul toutes ces marques dʹindulgence et <strong>de</strong> bonté, et nullement à nos<br />

mérites qui sont assurément bien minces. Mais nous les attribuons aussi au besoin, si gé‐<br />

néralement senti, <strong>de</strong> créer <strong>de</strong>s appuis et <strong>de</strong>s agents dévoués pour les œuvres. Il a plu au<br />

Seigneur quʹelles <strong>de</strong>vinssent <strong>de</strong> notre temps un grand moyen <strong>de</strong> salut, quʹelles servissent à<br />

rattacher le peuple à la foi et stimulassent le zèle et le dévouement <strong>de</strong>s âmes généreuses.<br />

Mais toutes ces œuvres manquent en général <strong>de</strong> fermeté et <strong>de</strong> consistance, faute dʹavoir<br />

quelques éléments dʹunité et <strong>de</strong> stabilité. Nous avons pensé quʹune corporation religieuse<br />

pourrait seule leur apporter cet appui, et nous avons essayé dʹy concourir pour notre part.<br />

Le Seigneur a daigné bénir nos efforts, nous avons surmonté toutes les difficultés dʹune<br />

695


fondation et nous voyons <strong>avec</strong> joie les voies sʹouvrir <strong>de</strong> jour en jour <strong>de</strong>vant nous. Par un<br />

bienfait dont nous sentons constamment le prix, le Seigneur a uni chez nous dans la plus<br />

cordiale coopération les ff. ecclésiastiques et les ff. laïcs qui se prêtent à lʹenvi un appui ré‐<br />

ciproque, les uns préparant et soutenant les œuvres, les autres y donnant la force spiri‐<br />

tuelle et la consommation. La Communauté nʹa encore que six prêtres, mais un certain<br />

nombre, déjà unis à nous <strong>de</strong> cœur, achèvent leurs étu<strong>de</strong>s ecclésiastiques et se préparent à<br />

sʹadjoindre à la petite famille <strong>de</strong> nos frères.<br />

Le désintéressement a toujours été dans lʹessence <strong>de</strong> notre œuvre, nous nʹavons<br />

donc rien fixé <strong>de</strong> précis pour les conditions temporelles <strong>de</strong> lʹadmission parmi nous. Nous<br />

nous en rapportons en général à la délicatesse <strong>de</strong> ceux qui peuvent apporter quelque ap‐<br />

pui à la communauté et nʹexcluons pas ceux qui, nʹayant pas <strong>de</strong> bien, ont les qualités es‐<br />

sentielles <strong>de</strong> piété, <strong>de</strong> capacité et <strong>de</strong> dévouement.<br />

Je souhaite bien, Madame la Comtesse, que ces quelques détails satisfassent le bon<br />

ecclésiastique qui vous les a <strong>de</strong>mandés. Nous avons déjà trois bretons parmi nous [MM.<br />

Hello, <strong>de</strong> Lauriston et Gallais] et leurs bonnes qualités ne peuvent que nous faire désirer<br />

dʹavoir beaucoup <strong>de</strong> sujets <strong>de</strong> votre excellent pays.<br />

Je suis, <strong>avec</strong> un profond respect,<br />

Madame la Comtesse<br />

Votre humble et tout dévoué serviteur en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. La messe que notre Communauté consacre chaque mois à la réparation au T. S t<br />

Sacrement se dit le 2 e jeudi, et non le 2 e mercredi comme je lʹavais indiqué par erreur, notre<br />

adoration nocturne ayant lieu du mercredi soir au jeudi matin, chaque mois.<br />

571 à M. Halluin<br />

Dispositions concernant <strong>de</strong> jeunes persévérants et postulants dʹArras. Invitation à participer à la retraite <strong>de</strong><br />

Communauté.<br />

Vaugirard, 23 septembre 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vous écris seulement <strong>de</strong>ux lignes, ayant déjà, par la lettre ci‐jointe, répondu à di‐<br />

vers points que mʹavait indiqués notre bon abbé Lantiez. Jʹapprends <strong>avec</strong> plaisir que vos<br />

services sʹorganisent et que vous espérez quelques bons services <strong>de</strong> Georges et <strong>de</strong> <strong>Jean</strong>‐<br />

Baptiste. Je ne leur sais aucune mauvaise disposition, mais ils sont peu formés et auront<br />

besoin dʹêtre soutenus. Nous ne renonçons pas à vous cé<strong>de</strong>r le f. <strong>Jean</strong> [Maury], mais M.<br />

Myionnet me <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>avec</strong> instance <strong>de</strong> surseoir un peu à son départ, le moment présent<br />

le trouvant en grand embarras pour la conduite <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong>s enfants.<br />

Je crois que Ferdinand va retourner à Arras. Comme nous laissons entrer au novi‐<br />

ciat <strong>de</strong>ux persévérants <strong>de</strong> son âge [Sadron et Luzier] et quʹil nous paraît absolument im‐<br />

possible <strong>de</strong> lui accor<strong>de</strong>r la même position, il semble décidé à retourner chez sa tante à Ar‐<br />

ras. Il est doux et sans méchanceté, mais sans vertu suffisante pour la vie religieuse telle<br />

quʹelle se doit prendre chez nous.<br />

Vous verrez, cher Monsieur lʹabbé, si vous pouvez sans inconvénient venir à la re‐<br />

traite; je crois quʹelle sera intéressante, le p. Lefebvre étant un homme fort expérimenté. Le<br />

696


p. Renaud, qui nous a donné notre <strong>de</strong>rnière retraite, la donne présentement au Séminaire<br />

S t ‐Sulpice, au clergé du diocèse, cʹest un homme éminent. Nous serions heureux dʹailleurs<br />

<strong>de</strong> vous voir quelques jours parmi nous. Vous jugerez si vos enfants peuvent momenta‐<br />

nément marcher en votre absence.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S., nous vous sommes tendrement unis<br />

dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Nous recevrons <strong>avec</strong> plaisir Brice et les <strong>de</strong>ux persévérants Lamoury et Duranel,<br />

si vous trouvez bien quʹils viennent <strong>avec</strong> nous.<br />

572 à M. Paillé<br />

Mise au point dʹune réunion <strong>de</strong> bienfaitrices.<br />

Vaugirard, 26 septembre 1858<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Myionnet ne voit pas moyen <strong>de</strong> déranger en ce moment la communauté, nous<br />

sommes dʹailleurs incertains si cʹest mardi ou mercredi que M. Lantiez reviendra dʹArras,<br />

il semble donc difficile que nous allions tous mercredi à Chaville. Je pense que vous et moi<br />

nous y resterons jusquʹà mercredi matin dʹabord, sauf à y retourner jeudi matin si nous le<br />

pouvons.<br />

Il faudrait voir aujourdʹhui Mlles Lesueur, si elles peuvent venir mardi; en ce cas,<br />

vous enverriez le mot ci‐joint à Mlle Gauthier par la poste. Si Mlles Lesueur aimaient mieux<br />

jeudi, cela se pourrait encore, mais mieux serait mardi, Mlle Gauthier restant ordinairement<br />

chez elle le jeudi. Je laisse le jour en blanc dans la lettre pour Mlle Gauthier, afin que vous<br />

mettiez mardi ou jeudi, selon que vous en serez convenu <strong>avec</strong> Mlles Lesueur; mieux vau‐<br />

drait mardi. Si vous pensez que cela ne fasse pas, pour un seul jour, trop <strong>de</strong> dames ré‐<br />

unies, vous pouvez inviter aussi votre sœur; autrement, vous pourrez la faire venir jeudi;<br />

mieux serait après tout que ce fût le même jour pour ne pas nous faire trop <strong>de</strong> jours <strong>de</strong> dis‐<br />

sipation.<br />

Il faudrait que vous apportiez pour ces dames une ou <strong>de</strong>ux bouteilles <strong>de</strong> vin, celui<br />

<strong>de</strong> Chaville pouvant leur paraître un peu léger. Vous verrez, nous <strong>de</strong>vons éviter <strong>de</strong> nous<br />

préparer <strong>de</strong> trop grands embarras. Nous aurons du pain, <strong>de</strong>s fruits, la bonne femme pour‐<br />

ra faire un morceau <strong>de</strong> veau froid, ce sera tout. M. Georges peut venir mardi, cʹest enten‐<br />

du.<br />

Adieu, cher bon ami, viendrez‐vous ce soir ou <strong>de</strong>main matin? En tout cas, si vous<br />

arrivez par le convoi <strong>de</strong> 10h. 1/2 ce soir, vous trouverez la porte ouverte; plus tard, je serais<br />

couché.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Si vous jugez <strong>de</strong>voir faire venir mardi quelquʹun <strong>de</strong>s ff. <strong>de</strong> Nazareth, je ne mʹy op‐<br />

pose nullement.<br />

Je crois que M lles Lesueur feraient bien <strong>de</strong> prendre le convoi <strong>de</strong> 10h.<br />

697


Si M lles Lesueur étaient hors Paris ou absolument empêchées pour mardi comme<br />

pour jeudi, on pourrait néanmoins convoquer M lles Gauthier et Paillé. Ne pas oublier <strong>de</strong><br />

marquer le jour sur la lettre ci‐jointe à M lle Gauthier.<br />

573 à M. Caille<br />

Un prêtre pense à entrer dans lʹInstitut. Démarches pour un neveu du frère <strong>Jean</strong>‐Marie Tourniquet. M. Caille<br />

offre un autel à la communauté <strong>de</strong> Vaugirard.<br />

Vaugirard, 2 octobre [1858]<br />

Saints Anges<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Notre bon abbé Lantiez a donné <strong>de</strong> bonnes nouvelles <strong>de</strong> chez vous et nous a dit que<br />

vous et vos frères alliez bien sous les yeux <strong>de</strong> Dieu; que ce divin Maître en soit béni et<br />

puisse‐t‐Il répandre sa douce paix dans vos âmes. M. Lantiez me dit quʹun persévérant<br />

envoyé près <strong>de</strong> vous pourrait vous ai<strong>de</strong>r; si vous y songiez définitivement, dites‐le moi,<br />

afin que nous examinions ce qui est possible. Le jeune serrurier qui pense à nous venir est‐<br />

il toujours dans les mêmes intentions?<br />

M. lʹabbé Legras mʹest venu voir ces jours‐ci pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à faire la retraite <strong>avec</strong><br />

nous, inclinant dit‐il, à la pensée <strong>de</strong> se présenter à la Communauté. Jʹai <strong>de</strong>mandé quelques<br />

renseignements à Versailles, mais je nʹy ai point <strong>de</strong> connaissance dans le clergé, je nʹai<br />

donc eu que <strong>de</strong>s renseignements insignifiants. Jʹai répondu à M. Legras quʹil pourrait faire<br />

sa retraite avant ou après, mais sans doute pas en même temps que nous, la place étant sur<br />

le point <strong>de</strong> nous manquer. Que pensez‐vous <strong>de</strong> son idée <strong>de</strong> sʹassocier à nous, je suppose<br />

que vous ne seriez pas dʹavis que nous lʹacceptions; on mʹa dit toutefois, dans une com‐<br />

munauté à Versailles, quʹon nʹavait jamais rien entendu dire contre lui.<br />

Jʹaccepte <strong>avec</strong> plaisir lʹoffre que vous me faites <strong>de</strong> votre ancien autel, il nous sera<br />

bien utile à N.D. <strong>de</strong> la Salette présentement; si plus tard vous en aviez <strong>de</strong> nouveau besoin,<br />

il serait remis à votre disposition. Je vous prie donc <strong>de</strong> nous lʹenvoyer; je pense quʹen le<br />

mettant bientôt à la petite vitesse, il ne tar<strong>de</strong>rait pas plus dʹune quinzaine <strong>de</strong> jours à nous<br />

arriver. On travaille au groupe qui sera bien, je lʹespère; puisse la S te Vierge être ainsi ho‐<br />

norée et le saint Nom <strong>de</strong> Dieu glorifié!<br />

Pour le jeune Tourniquet, je nʹai pu, malgré <strong>de</strong>s recherches minutieuses, retrouver le<br />

prospectus que jʹavais je crois, remis au f. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet]; il vous prie <strong>de</strong> vous en‐<br />

tendre <strong>avec</strong> son frère pour cette affaire, lʹenfant a le revenu suffisant pour payer sa petite<br />

pension et, en tout cas, on pourrait prendre un peu sur le capital si le revenu ne suffisait<br />

pas; je crois que, si vous menacez le tuteur <strong>de</strong> lui rendre son pupille, il agira et se mettra en<br />

mesure <strong>de</strong> vous secon<strong>de</strong>r. Je ne crois pas que vous mʹayez <strong>de</strong>mandé dʹautres renseigne‐<br />

ments à ce sujet; si je me trompe, ayez la bonté <strong>de</strong> me le dire, je répondrai sans retard.<br />

Adieu, mon bien bon ami, embrassez pour moi vos frères et assurez‐les <strong>de</strong> ma ten‐<br />

dre affection; encouragez‐les beaucoup, ils sont bons, mais ont besoin dʹappui et dʹun peu<br />

<strong>de</strong> vie <strong>de</strong> famille entre vous, je prie le Seigneur <strong>de</strong> vous unir <strong>avec</strong> sa divine charité et <strong>de</strong><br />

vous combler <strong>de</strong> ses bénédictions.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je pense que le f. Henry [Guillot] viendra à la retraite.<br />

698


574 à M. Halluin<br />

LʹŒuvre dʹArras nʹest encore ni bien soli<strong>de</strong>, ni bien assise; mais Dieu achèvera ce quʹIl a lui‐même commencé.<br />

Affaires immobilières. Un jeune postulant est revenu à Arras. Les liens familiaux peuvent être un danger pour<br />

les frères. Le f. Cousin songe au sacerdoce. MLP. y est favorable.<br />

Vaugirard, 2 octobre [1858]<br />

Saints Anges<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Notre cher abbé Lantiez confirme par ses entretiens tout ce que vous me dites <strong>de</strong><br />

consolant sur votre entourage, tant pour les frères que pour les enfants; jʹen bénis le Sei‐<br />

gneur qui daigne se servir dʹinstruments si imparfaits et opérer le bien <strong>avec</strong> <strong>de</strong> si faibles<br />

moyens. Je ne me dissimule pas en effet, cher Monsieur lʹabbé, quʹil reste encore bien à<br />

faire pour constituer notre chère œuvre dʹArras dans une situation vraiment soli<strong>de</strong> et bien<br />

assise; mais nous allons pas à pas, comme il plaît au Seigneur <strong>de</strong> nous faire marcher et<br />

nous usons <strong>de</strong>s moyens quʹIl daigne nous mettre sous la main, espérant <strong>de</strong> sa bonté quʹIl<br />

achèvera les choses quʹIl a commencées.<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> plaisir les arrangements qui vous ont ménagé tout près <strong>de</strong> vous un<br />

terrain pour occuper vos enfants. Je trouve très sage aussi la pensée que vous avez <strong>de</strong> ne<br />

point faire uniquement en votre nom lʹacquisition <strong>de</strong> la maison enclavée dans ce terrain,<br />

une acquisition placée sur <strong>de</strong>ux ou trois têtes en forme <strong>de</strong> tontine, comme nous lʹavons fait<br />

ici pour nos divers immeubles et à Amiens également, est plus sûre pour lʹavenir et servira<br />

aussi à consommer <strong>de</strong> plus en plus notre union. Il ne sera pas nécessaire pour cela quʹau‐<br />

cun <strong>de</strong> nous se dérange, il suffira que M. votre notaire vous donne un petit modèle <strong>de</strong> pro‐<br />

curation que je ferai remplir et signer par un ou plutôt <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> nos frères. Si votre notaire<br />

voulait un modèle <strong>de</strong> la formule <strong>de</strong> tontine que nous avons adoptée, à lʹexemple <strong>de</strong> la plu‐<br />

part <strong>de</strong>s communautés, nous pourrions le lui envoyer.<br />

Notre f. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] été voir M. <strong>de</strong> Bunneville à lʹadresse que vous lui<br />

aviez indiquée, il ne lʹy a plus trouvé; je crois quʹil est allé le voir dans la maison <strong>de</strong> santé,<br />

rue S t Lazare, où ce monsieur sʹest retiré. Comme ce bon frère est sorti en ce moment, je ne<br />

puis répondre bien précisément en quel état il lʹa trouvé; sʹil rentre avant que je close cette<br />

lettre, je le prierai <strong>de</strong> me renseigner plus complètement.<br />

Nous nʹavons pu empêcher Ferdinand <strong>de</strong> se rendre à Arras, une tante quʹil a, brave<br />

femme peut‐être, mais qui a toujours tendu à le faire sortir <strong>de</strong> notre maison, comme elle a<br />

aussi fait tous ses efforts pour faire sortir du couvent sa sœur, cette tante, dis‐je, lʹattirait<br />

<strong>de</strong>puis longtemps, il voulait la rejoindre. Il mʹa écrit en partant une assez bonne lettre,<br />

promettant <strong>de</strong> revenir près <strong>de</strong> nous quand il serait <strong>de</strong>venu un peu plus ferme et mieux as‐<br />

suré dans sa voie. Que Dieu daigne, pauvre enfant, le soutenir et le diriger!<br />

Nous ne désespérons pas <strong>de</strong> vous voir à la retraite, mais, si vous ne voyez pas <strong>de</strong><br />

possibilité dʹy venir, ce nous serait au moins une consolation que vous fussiez à la clôture.<br />

Je ne prévois pas que jʹaille vous voir cette saison, je serai tout heureux si, <strong>de</strong> votre côté,<br />

vous nous faites une petite visite.<br />

Je crois quʹil faut dissua<strong>de</strong>r affectueusement le f. Firmin [Thuillier] <strong>de</strong> sa pensée<br />

dʹaller voir sa famille; cʹest une véritable tentation; il convenait lui‐même quʹà Amiens, le<br />

voisinage <strong>de</strong> sa mère et ses relations <strong>de</strong> famille étaient un danger pour lui; dʹailleurs, nous<br />

<strong>de</strong>vons nous accoutumer à remettre aux mains <strong>de</strong> Dieu le soin <strong>de</strong> nos parents, à moins le<br />

cas où la charité et la nécessité indiquant que nous avons à agir directement.<br />

699


Il me semble quʹil ne faudrait pas retirer au f. Cousin lʹespérance dʹentrer dans le sa‐<br />

cerdoce, si sa santé continue à se remettre, peut‐être pourrait‐on, sʹil passe assez bien lʹhi‐<br />

ver, sʹentendre <strong>avec</strong> ces MM. du Séminaire et obtenir dʹeux quʹils lui fassent au printemps<br />

achever ses étu<strong>de</strong>s doucement, peut‐être même sans quitter la maison. Le cœur <strong>de</strong> ce bon<br />

jeune homme me semble parfait et je croirais volontiers que Dieu lʹa choisi, à cause <strong>de</strong> sa<br />

simplicité et <strong>de</strong> sa pureté dʹintention; quelques mots dʹencouragement dans ce sens lui fe‐<br />

raient grand bien, si vous partagez ce sentiment; il nous serait plus utile comme prêtre que<br />

comme laïc, ayant plutôt <strong>de</strong>s aptitu<strong>de</strong>s dans un sens que dans un autre; Dieu vous inspire‐<br />

ra ce qui est à faire.<br />

Une dame <strong>de</strong>s amies et alliées <strong>de</strong> notre f. Georges, M me la Comtesse <strong>de</strong> Granville,<br />

qui <strong>de</strong>meure à Nantes, dans la même maison que la famille <strong>de</strong> Lauriston, me prie <strong>de</strong> vous<br />

recomman<strong>de</strong>r une œuvre qui lʹintéresse beaucoup et à laquelle elle donne tous ses soins.<br />

Elle consiste à obtenir que les prêtres, et surtout les communautés, sʹengagent à donner<br />

chaque mois, à jour fixe, une messe en réparation <strong>de</strong>s outrages faits à N.S. au T. S t Sacre‐<br />

ment. La plupart <strong>de</strong> MM grs les Evêques donnent approbation à cette œuvre qui est répan‐<br />

due presque dans tous les diocèses, mais pas à Arras, à ce quʹil paraît. M me <strong>de</strong> Granville<br />

espère que, par vous, elle sʹy introduira. Il se dit déjà 500 messes environ par mois à cette<br />

intention; nous avons accepté ici dʹen donner une par mois, trop heureux <strong>de</strong> concourir à<br />

réparer ainsi les indifférences et offenses dont notre divin Maître est lʹobjet.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, jʹespère vous voir bientôt; je vous embrasse ainsi que<br />

nos frères et prie les SS. Anges gardiens <strong>de</strong> veiller tendrement sur vous et sur votre mai‐<br />

son.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Le petit f. <strong>Jean</strong>‐Baptiste me paraît bien jeune pour faire un surveillant <strong>de</strong> dor‐<br />

toir; je crois quʹil sera bien quʹil nʹait cette charge que temporairement.<br />

575 à M. Vasseur<br />

Pour la paix <strong>de</strong> lʹâme, rechercher tout ce qui est pur, noble et bon. En communauté, lʹharmonie <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> fa‐<br />

mille <strong>de</strong>man<strong>de</strong> quʹon ne taquine pas ses frères.<br />

Vaugirard, 2 octobre [1858]<br />

SS. Anges<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Je bénis le Seigneur qui daigne vous assister et suppléer à tout ce qui peut vous<br />

manquer, comme à nous tous, pour travailler à son œuvre. Son appui ne vous fera point<br />

défaut si vous le lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z fidèlement, humblement et <strong>avec</strong> un sincère désir <strong>de</strong> le ser‐<br />

vir et <strong>de</strong> faire glorifier son nom. Hors cela, tout est vanité et ne peut donner la paix à nos<br />

âmes; mais là, cher enfant, cʹest‐à‐dire dans la piété, dans le dévouement, dans la pratique<br />

<strong>de</strong> tout ce qui est pur, noble et bon, se trouve la paix et la consolation <strong>de</strong> nos âmes.<br />

Continuez donc, cher enfant, à marcher sous les yeux du bon Maître en droiture <strong>de</strong><br />

cœur, en simplicité dʹesprit, en douceur, en vraie charité; vos œuvres alors seront bénies,<br />

pleines <strong>de</strong> mérites et abondantes en fruits. Nous prierons bien pour nos ff. dʹArras pen‐<br />

dant la retraite où nous serons sans doute privés cette fois <strong>de</strong> les voir, notre p. Halluin tou‐<br />

tefois sʹéchappera sans doute pour avoir au moins quelque partie <strong>de</strong> ces pieux exercices.<br />

700


Je vous recomman<strong>de</strong> instamment, cher enfant, <strong>de</strong> concourir <strong>de</strong> toutes vos forces à la<br />

paix et à la bonne harmonie entre tous les membres <strong>de</strong> votre petite famille; je vous <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong> surtout <strong>avec</strong> instance dʹéviter à tout prix toute pique ou taquinerie <strong>avec</strong> le f. Firmin<br />

[Thuillier]; je dis à tout prix, parce quʹil peut vous en coûter parfois <strong>de</strong> ne rien répondre à<br />

une agacerie ou à un froissement dʹamour‐propre, mais la vertu est toujours un sacrifice et<br />

si nous ne savons pas nous immoler dans ces petites choses, comment nous montrerons‐<br />

nous dans les gran<strong>de</strong>s? Songez, cher enfant, quʹen vous envoyant à Arras, jʹai compté sur<br />

vous pour donner le bon exemple, répon<strong>de</strong>z à ma confiance, répon<strong>de</strong>z surtout aux vues <strong>de</strong><br />

Dieu qui daigne vous donner lʹoccasion <strong>de</strong> faire un peu <strong>de</strong> bien; piété, charité, humilité,<br />

détachement, voilà votre règle; puisse le bon Maître lʹinsinuer doucement à lʹintime <strong>de</strong> vo‐<br />

tre cœur.<br />

Je vous embrasse tendrement en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Veillez <strong>avec</strong> une tendre sollicitu<strong>de</strong> sur Georges et <strong>Jean</strong>‐Baptiste; ils sont bons,<br />

mais faibles et ne peuvent marcher sans un appui vigilant, patient et doux; soyez cet ap‐<br />

pui, Dieu vous bénira.<br />

Je nʹécris pas aujourdʹhui au f. Cousin, embrassez‐le pour moi, assurez‐le que je<br />

veille à tout ce qui le touche et que je prie le Seigneur <strong>de</strong> diriger tout pour son bien.<br />

Ecrivez au f. Ernest [Vasseur] qui vous a écrit <strong>de</strong>ux fois; il va passablement.<br />

576 à M. Thuillier<br />

Beauté <strong>de</strong> notre vocation. Considérations pour sʹaffermir dans sa vocation <strong>de</strong> frère <strong>de</strong> St‐Vt‐<strong>de</strong>‐Paul et <strong>de</strong> déta‐<br />

cher <strong>de</strong> ses proches. Eviter piques et taquineries.<br />

Vaugirard, 2 octobre [1858]<br />

SS. Anges<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Notre bon abbé Lantiez mʹa bien gran<strong>de</strong>ment réjoui le cœur en mʹapprenant que no‐<br />

tre petite communauté dʹArras marchait dans <strong>de</strong> bonnes conditions et laissait entrevoir un<br />

heureux avenir pour lʹœuvre si sainte, si charitable à laquelle elle est consacrée. Revenez<br />

<strong>de</strong> temps en temps, cher enfant, à cette considération: quoi <strong>de</strong> plus beau, <strong>de</strong> plus généreux<br />

en ce mon<strong>de</strong> que <strong>de</strong> vivre sage, pieux, sous les yeux <strong>de</strong> Dieu, <strong>de</strong> sanctifier <strong>de</strong> plus en plus<br />

son âme et <strong>de</strong> travailler en même temps au bien <strong>de</strong> ses frères? Que seraient tous ces pau‐<br />

vres enfants, tous ces pauvres apprentis et jeunes ouvriers si votre maison ne les abritait,<br />

ne gardait leur foi, leurs mœurs, autant quʹil se peut, et préparant pour eux un avenir<br />

honnête et chrétien, cʹest‐à‐dire la meilleure part pour ce mon<strong>de</strong> et le céleste héritage pour<br />

lʹéternité? Estimez donc gran<strong>de</strong>ment la voie où le Seigneur a daigné vous mettre et où<br />

vous avez tant <strong>de</strong> fois reconnu humblement que sa grâce seule a pu vous faire entrer.<br />

Nous ayons tout particulièrement prié pour vous le jour <strong>de</strong> la St ‐Firmin; jʹespère que votre<br />

saint patron priait <strong>avec</strong> nous et que, du haut du ciel, il vous tendra la main pour aller <strong>de</strong><br />

mieux en mieux et <strong>de</strong> <strong>de</strong>grés en <strong>de</strong>grés à lʹétat <strong>de</strong> bonté, charité et abnégation où lʹamour<br />

<strong>de</strong> notre divin Seigneur vous veut. Mais, cher enfant, si votre vocation est belle et sainte,<br />

elle <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> vous quelques sacrifices. Cʹest pourquoi je vous engage, <strong>avec</strong> une affec‐<br />

701


tion toute paternelle, à renoncer à <strong>de</strong>s démarches qui pourraient dissiper votre cœur, le<br />

remplir dʹimages, dʹaffections et dʹintérêts tout naturels qui vous éloigneraient inévitable‐<br />

ment <strong>de</strong> lʹordre <strong>de</strong> sentiments et <strong>de</strong> pensées où vous <strong>de</strong>vez vous tenir habituellement.<br />

Soyez bien sûr que si, en esprit <strong>de</strong> foi, en véritable désir <strong>de</strong> la gloire <strong>de</strong> Dieu, vous lui of‐<br />

frez vos prières et vos travaux, vous ferez mille fois plus <strong>de</strong> bien à votre famille que par<br />

toutes les tendresses sensibles dont vous pourriez la combler. Tous ceux <strong>de</strong> nos frères qui<br />

ont agi ainsi en esprit <strong>de</strong> foi et <strong>de</strong> sacrifice ont obtenu le salut et lʹévi<strong>de</strong>nte sanctification <strong>de</strong><br />

leurs parents. Cʹest là le grand et lʹessentiel bien quʹil faut leur procurer. Ayons le courage,<br />

cher enfant, <strong>de</strong> le mériter par quelques actes <strong>de</strong> généreuse immolation. Je sais, cher enfant,<br />

que la raison va aisément à votre cœur, je nʹinsiste donc pas sur ce point.<br />

Je termine en vous renouvelant la recommandation formelle dʹéviter <strong>avec</strong> vos frè‐<br />

res, le f. Alphonse [Vasseur] en particulier, toute parole taquine et piquante, M. Lantiez me<br />

dit que quelque chose reste encore à désirer sur ce point; au nom <strong>de</strong> la paix et <strong>de</strong> la charité,<br />

au nom <strong>de</strong> lʹobéissance, sʹil est besoin, je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, cher enfant, <strong>de</strong> vous souvenir <strong>de</strong><br />

mes instantes recommandations à cet égard.<br />

Adieu, cher enfant, je vous embrasse paternellement.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

577 à M. Caille<br />

Habillement <strong>de</strong>s orphelins. Costume pour les frères. Travaux dʹorfèvrerie.<br />

Vaugirard, 5 octobre 1858<br />

Mon bon ami et fils en N.S.,<br />

M. Myionnet me prie <strong>de</strong> vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si vous voyez, dans les étoffes qui se fabri‐<br />

quent à Amiens, quelque velours ou étoffe assez chau<strong>de</strong> et assez épaisse pour convenir au‐<br />

tant que le drap à la confection <strong>de</strong> pantalons dʹhiver pour nos enfants. En ce cas, je vous<br />

prierais <strong>de</strong> nous en envoyer la quantité nécessaire pour faire une centaine <strong>de</strong> pantalons;<br />

nous payerions immédiatement. Nous trouvons ici un drap assez bon, en laine bien four‐<br />

nie, à 5f 40 le mètre; comme il a gran<strong>de</strong> largeur, peut‐être reviendrait‐il à aussi bon prix<br />

que les velours ou étoffes étroites quelles quʹelles soient, et il serait toujours plus avanta‐<br />

geux, sinon pour la durée, au moins pour lʹépaisseur et la chaleur; dites‐moi, je vous prie,<br />

votre avis et faites pour le mieux.<br />

M. lʹabbé Legras mʹest venu <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à faire la retraite <strong>avec</strong> nous; jʹai répondu, ce<br />

qui est vrai, que les chambres nous manquaient; il a ajouté quʹil penchait à se donner à la<br />

Communauté. Que penseriez‐vous quʹil y eût à faire en ce cas? Jʹai pris quelques rensei‐<br />

gnements à Versailles: ils sont assez insignifiants, pas mauvais cependant; dites moi votre<br />

avis.<br />

Adieu, mon bien bon ami, mille affections à tous et <strong>de</strong> tous. Deux nouveaux frères<br />

[MM. Urvoy <strong>de</strong> St Bedan et Parazols] sont entrés ces jours‐ci; un est un ancien ami à moi,<br />

membre <strong>de</strong>s Conférences, fort pieux, fort dévoué, mais <strong>de</strong> 40 ans passés.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je pense toujours à faire un vêtement ample que les frères <strong>de</strong>vraient mettre par<br />

<strong>de</strong>ssus leurs autres habits pour les principaux exercices <strong>de</strong> communauté. Quelle étoffe<br />

702


vous semblerait le mieux convenir pour cet usage? Un drap léger serait sans doute ce quʹil<br />

y aurait <strong>de</strong> mieux, mais ce sera toujours un peu cher; toutefois, la largeur est ici encore à<br />

considérer; quelle est votre pensée?<br />

On nous dit que lʹéglise S t ‐Jacques aurait besoin dʹune garniture <strong>de</strong> beaux chan<strong>de</strong>‐<br />

liers; tâchez que nous soyons chargés <strong>de</strong> les faire; nous pouvons les donner dans toutes les<br />

formes et dans toutes les proportions.<br />

Nous faisons aussi <strong>de</strong> petits bronzes <strong>de</strong> fantaisie pour les loteries.<br />

578 à M. Decaux<br />

Rapports <strong>avec</strong> la Société <strong>de</strong> St‐Vt‐<strong>de</strong>‐Paul.<br />

Vaugirard, 6 octobre 1858<br />

Mon bien bon ami,<br />

M. Maignen me dit que vous souhaitez que nous prenions les mesures nécessaires<br />

pour assurer les droits <strong>de</strong> nos Conférences dans lʹœuvre <strong>de</strong> Nazareth. Je trouve ce désir<br />

très légitime; je vais donc examiner sérieusement et <strong>de</strong>vant Dieu quels seraient les meil‐<br />

leurs moyens à prendre à cet effet. Je ne mets pas en doute que nous nʹarrivions aisément à<br />

nous bien concerter dans ce petit arrangement, puisque nous ne voulons ensemble que le<br />

bien <strong>de</strong> nos œuvres et le maintien <strong>de</strong> la charité sans laquelle nous ne ferions rien <strong>de</strong> vala‐<br />

ble et <strong>de</strong> bon.<br />

Adieu, mon bien bon ami, comptez sur tous mes sentiments <strong>de</strong> cordial dévouement<br />

en N.S.<br />

Votre ami et frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

579 à M. Caille<br />

Importance <strong>de</strong> la régularité dans les exercices <strong>de</strong> communauté. Un manque dʹaptitu<strong>de</strong>s aux œuvres chez un can‐<br />

didat à la vie religieuse. Que M. Caille veille à la vie <strong>de</strong> communauté. Prise en charge du neveu du frère Tourni‐<br />

quet.<br />

Vaugirard, 6 octobre 1858<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> regret les dispositions <strong>de</strong> tristesse habituelle du f. Marcaire; M. Lan‐<br />

tiez nʹy a vu quʹune sorte <strong>de</strong> fatigue et malaise <strong>de</strong> santé joints au regret <strong>de</strong> nʹavoir pas as‐<br />

sez <strong>de</strong> régularité dans les exercices <strong>de</strong> communauté. Je pense que vous feriez bien peut‐<br />

être <strong>de</strong> vous priver vous‐même, pour cette fois, <strong>de</strong> venir à la clôture <strong>de</strong> la retraite et dʹen‐<br />

voyer pour cette fin <strong>de</strong>s exercices notre f. Marcaire; je tâcherais <strong>de</strong> son<strong>de</strong>r un peu à fond ce<br />

petit cœur et <strong>de</strong> voir ce qui pourrait le consoler. Si un repos un peu prolongé était néces‐<br />

saire, peut‐être y aurait‐il moyen <strong>de</strong> vous envoyer à sa place pour quelques mois un <strong>de</strong><br />

nos frères, M. Desouches, qui a plus <strong>de</strong> ron<strong>de</strong>ur dans sa manière dʹêtre et qui, <strong>avec</strong> une<br />

piété soli<strong>de</strong>, sait mieux sʹaccommo<strong>de</strong>r néanmoins aux nécessités <strong>de</strong>s positions. Quoi quʹil<br />

en soit du parti que nous prendrons à ce sujet, je pense que, <strong>de</strong> votre côté, mon bon ami,<br />

vous <strong>de</strong>vrez toujours tendre à mettre un peu <strong>de</strong> vie <strong>de</strong> communauté dans votre maison; à<br />

défaut <strong>de</strong> cela, tous vos sujets, malgré votre bonté et vos soins personnels pour eux, auront<br />

703


toujours, à la longue, un peu dʹabattement et dʹennui, parce quʹils manqueront <strong>de</strong> soutien<br />

et <strong>de</strong> cette effusion <strong>de</strong> pensées et <strong>de</strong> sentiments sans laquelle bien peu dʹhommes savent se<br />

maintenir et marcher.<br />

Je ne pense pas que nous ayons à compter sur M. Legras; il est revenu me voir et a<br />

goûté tout <strong>de</strong> suite les raisons qui nous ont fait déci<strong>de</strong>r que le Noviciat <strong>de</strong>vrait toujours se<br />

faire à la Maison‐Mère, et sʹil sʹy est rendu sans difficulté. Mais il avait pensé, je crois, que<br />

la Communauté pourvoirait à tous ses besoins et quʹil gar<strong>de</strong>rait intact son revenu propre;<br />

cette façon dʹagir serait contraire à lʹesprit <strong>de</strong> détachement et <strong>de</strong> pauvreté <strong>de</strong> notre petite<br />

famille et serait dʹautant moins admissible quʹà son âge, <strong>avec</strong> sa faible santé, M. Legras se‐<br />

rait bien peu utile à nos œuvres. Il ne pourrait, <strong>de</strong> son propre aveu, que dire sa messe,<br />

confesser et faire un peu <strong>de</strong> catéchisme aux plus jeunes enfants. Il lui est impossible <strong>de</strong><br />

parler <strong>de</strong>vant qui que ce soit, à cause dʹune timidité nerveuse provenant <strong>de</strong>s malaises <strong>de</strong> sa<br />

constitution débile. Je ne sais sʹil viendra nous revoir, jʹen doute un peu.<br />

Le f. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] pense que vous <strong>de</strong>vriez vous entendre <strong>avec</strong> son frère<br />

au sujet <strong>de</strong> son jeune neveu; je crois, <strong>de</strong> mon côté, que vous <strong>de</strong>vriez presser un peu vive‐<br />

ment cet oncle et lui représenter que la situation <strong>de</strong> ce pauvre enfant exige quelques sacri‐<br />

fices et quʹil serait bien triste quʹil sʹy refusât. Le f. <strong>Jean</strong>‐Marie ajoute que si, nonobstant ces<br />

représentations, cet oncle ne voulait rien faire, il prendrait lui‐même le parti <strong>de</strong> suppléer,<br />

sur un petit fonds qui lui reste, à lʹinsuffisance du revenu du jeune Tourniquet. Mais il ne<br />

faudrait recourir à ce moyen quʹà défaut <strong>de</strong> tout autre, les ressources du f. <strong>Jean</strong>‐Marie étant<br />

fort modiques et ne pouvant aller loin. Il est aussi dans la disposition dʹaccompagner son<br />

neveu à Tain, si on déci<strong>de</strong> que lʹenfant y doit être envoyé; je crois quʹil vaudrait mieux, en<br />

effet, prendre ce moyen que <strong>de</strong> vous causer un dérangement assez prolongé et qui peut<br />

vous être ainsi épargné. Il faudrait songer aussi aux frais du voyage et en parler au tuteur.<br />

Nos <strong>de</strong>ux nouveaux frères semblent sʹaccoutumer à la maison. Nous allons dʹail‐<br />

leurs assez bien, jʹespère que la retraite nous trouvera tous bien disposés. M. Halluin vien‐<br />

dra pour la clôture.<br />

Adieu, mon bien bon ami, je prie bien constamment et bien cordialement pour vous<br />

et pour vos chères œuvres dʹAmiens; je vous embrasse tous les trois en J. et M..<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je recevrai <strong>avec</strong> plaisir votre réponse pour les étoffes; merci pour lʹenvoi <strong>de</strong><br />

lʹautel.<br />

580 à M. Caille<br />

Placement du jeune neveu du frère Tourniquet. Etoffe pour les surtouts. Un candidat ne donne pas suite à son<br />

projet dʹentrer dans lʹInstitut.<br />

Vaugirard, 12 octobre 1858<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je remettrai au f. Tourniquet, après la retraite, toutes les pièces nécessaires pour la<br />

présentation <strong>de</strong> son jeune neveu à lʹétablissement <strong>de</strong> Tain. Ce pauvre enfant nous inspire<br />

une gran<strong>de</strong> compassion; sa présence nous est peu commo<strong>de</strong> durant la retraite et il nous<br />

eût été plus convenable quʹil ne vînt quʹau <strong>de</strong>rnier jour, mais comment nous plaindrions‐<br />

nous <strong>de</strong> la peine quʹil nous donne, puisque vous avez su la supporter bien plus longtemps<br />

704


que nous; jʹai la confiance quʹun acte <strong>de</strong> patience et <strong>de</strong> charité ne saurait faire un tort réel à<br />

notre retraite.<br />

Merci <strong>de</strong> vos renseignements pour la serge double; nous essayerons <strong>de</strong> cette étoffe,<br />

dʹaprès votre conseil. Selon tout apparence, il nous en faudrait pour une vingtaine <strong>de</strong> sur‐<br />

touts au moins; je ne sais ce quʹil faudra dʹétoffe pour chaque, <strong>de</strong>ux mètres au moins assu‐<br />

rément.<br />

Je nʹai pas du tout entendu parler du f. Louis du Saint Cœur <strong>de</strong> Marie; M. Lantiez<br />

lui avait écrit, tout <strong>de</strong> suite après son retour ici, que je ne voyais pas dʹobstacle à son entrée<br />

chez nous et quʹil pouvait mʹécrire directement pour me manifester son désir; je nʹai reçu<br />

aucune lettre <strong>de</strong> lui et jʹai appris seulement par vous quʹil partait pour aller voir sa famille.<br />

Je suppose quʹil a tourné ses vues dʹun autre côté, vers les Capucins ou Franciscains peut‐<br />

être. Avez‐vous quelques données sur ses intentions, ne vous a‐t‐il rien dit en partant? Je<br />

serai bien aise <strong>de</strong> savoir ce que vous en pouvez connaître.<br />

Pour notre f. Marcaire, je regrette que sa mère ait pris sur elle <strong>de</strong> venir ainsi à la<br />

communauté sans votre autorisation; je le dis doucement à notre frère dans la lettre ci‐<br />

jointe. Si lʹensemble <strong>de</strong> cette lettre ne vous semblait pas tel quʹil doit être, eu égard aux<br />

dispositions <strong>de</strong> ce bon frère que vous pouvez mieux juger que moi, ne la lui remettez point<br />

et écrivez‐moi sans retard dans quel sens vous pensez que je dois lui écrire.<br />

M. Halluin vient dʹarriver pour la retraite; tout le mon<strong>de</strong> me semble en bonne dis‐<br />

position, jʹespère que nous en tirerons quelque fruit <strong>de</strong> sanctification. Si le f. Marcaire ne<br />

doit pas venir à la clôture et que vous croyiez bon pour vous <strong>de</strong> vous échapper pour y as‐<br />

sister, vous savez que cʹest toujours pour nous, pour moi en particulier, une douce joie <strong>de</strong><br />

vous voir quelques instants dans la famille où nous serions si heureux <strong>de</strong> vous avoir cons‐<br />

tamment. Ayons patience et persévérance, cette joie nous sera donnée au Ciel.<br />

Je vous embrasse affectueusement en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

581 à M. Paillé<br />

Achèvement du sanctuaire <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette. Dans la vie <strong>de</strong> Jésus, le progrès a consisté à s’approcher <strong>de</strong> plus<br />

en plus près <strong>de</strong> la Croix.<br />

Vaugirard, 18 octobre 1858<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je rappelle à votre souvenir et à celui <strong>de</strong> notre f. Maignen la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> que je vous<br />

avais faite <strong>de</strong> nous procurer un peintre qui voulût bien peindre à grands traits la niche ou<br />

cintre du groupe <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette dans notre petite chapelle; cette disposition est abso‐<br />

lument urgente; dans quelques jours le groupe sera prêt, on aura à lʹessayer et à le poser<br />

ensuite définitivement; il nʹy aura plus moyen alors <strong>de</strong> peindre librement la niche; je vous<br />

prie, cher ami, dʹy aviser <strong>avec</strong> notre f. Maignen; si chacun <strong>de</strong> nous ne concourt un peu à<br />

lʹachèvement <strong>de</strong> ce petit sanctuaire, nous nʹen verrons jamais la fin. Je compte aussi sur<br />

mon fils Maignen pour voir M. Coffetier, le fabricant <strong>de</strong> vitraux.<br />

Vous ne mʹavez pas dit si vous aviez parlé à votre jeune commis en drap du Grand‐<br />

Colbert, et sʹil pouvait nous donner quelques renseignements utiles pour lʹachat <strong>de</strong> nos<br />

draps.<br />

705


Je vous envoie mon titre <strong>de</strong> pension que vous mʹavez <strong>de</strong>mandé.<br />

Adieu, mon bon ami, tâchons <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r quelques fruits <strong>de</strong> la retraite; le mot qui la<br />

résume pour moi, cʹest celui‐ci: que le progrès dans la vie <strong>de</strong> Jésus‐Christ a été <strong>de</strong> sʹappro‐<br />

cher <strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong> la croix.<br />

Je vous embrasse tous en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

582 à M. Maignen<br />

Démarches pour le groupe <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette. Un changement prévu à Nazareth. Impossibilité <strong>de</strong> recevoir plus<br />

dʹenfants à Vaugirard.<br />

Vaugirard, 18 octobre [1858]<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je crois que le décorateur rue du Bac serait ce quʹil y aurait <strong>de</strong> mieux, puisquʹil ferait<br />

vite et à prix modique, mais vous lui indiqueriez bien mieux que moi ce quʹil conviendrait<br />

<strong>de</strong> faire pour le bon effet du groupe; ce serait bien si vous pouviez trouver quelques ins‐<br />

tants pour accompagner ce décorateur. Que dit M. Coffetier, nous livre‐t‐il enfin nos vi‐<br />

traux?<br />

Je nʹai pas parlé à M. Decaux <strong>de</strong> changement à Nazareth comme <strong>de</strong>vant avoir lieu,<br />

mais seulement pour lui témoigner notre préoccupation constante <strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong> St ‐<br />

Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul, je lui ai dit que vous mʹaviez proposé <strong>de</strong> vous donner M. Desouches pour<br />

pouvoir vous occuper un peu plus <strong>de</strong>s jeunes ouvriers; il ne mʹa pas paru quʹil attachât<br />

gran<strong>de</strong> importance à cet arrangement et je nʹy ai pas insisté, jʹavais cru même quʹil avait<br />

détourné à <strong>de</strong>ssein son attention. La chose paraît difficile en tout cas, M. Marcaire ayant<br />

écrit <strong>de</strong> nouveau quʹil était tranquille et pensait pouvoir gar<strong>de</strong>r sa position. Nous verrons<br />

ce que le Seigneur <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ra; prier est un si bon moyen!<br />

Priez <strong>de</strong> ma part M. Hello dʹinsister doucement près <strong>de</strong> Mgr <strong>de</strong> Ségur pour quʹil ne<br />

mʹoblige pas à prendre un enfant <strong>de</strong> 15 ans, plus que douteux; nous nʹavons dʹailleurs pas<br />

la plus petite place, il y a présentement 123 enfants, cʹest‐à‐dire 3 <strong>de</strong> trop, on est obligé <strong>de</strong><br />

les laisser à lʹinfirmerie.<br />

Votre Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

583 à M. Decaux<br />

Ai<strong>de</strong> au Patronage Ste‐Mélanie, rue <strong>de</strong> lʹEstrapa<strong>de</strong>.<br />

Vaugirard, 12 novembre 1858<br />

Mon bon ami,<br />

Jʹai fait <strong>avec</strong> M. Bailly une neuvaine afin dʹobtenir du Seigneur un moyen quel‐<br />

conque dʹai<strong>de</strong>r un peu la maison <strong>de</strong> Ste ‐Mélanie; nʹayant aucune ressource entièrement<br />

disponible, jʹai pensé quʹau moins un ai<strong>de</strong> régulier pour le dimanche serait déjà dʹun grand<br />

secours pour M. Bailly; je lui ai donc offert, sauf votre agrément, lʹassistance du f. Carment<br />

qui a lʹexpérience du patronage et pourra se concerter utilement <strong>avec</strong> M. Bailly; malheu‐<br />

706


eusement, ses emplois ne lui laissent aucun loisir durant la semaine et, sauf un petit en‐<br />

tretien quʹil pourrait avoir à Vaugirard, ses soins se borneront aux travaux du dimanche.<br />

Si vous ne me donnez, mon bon ami, aucun signe dʹimprobation pour ce moyen provi‐<br />

soire, M. Carment pourra dès dimanche prêter son ai<strong>de</strong> à M. Bailly.<br />

Je crois quʹon ne <strong>de</strong>vrait lui donner aucune position ni installation quelconque,<br />

puisque nous souhaitons tous que sa présence à S te ‐Mélanie soit aussi courte que possible.<br />

Je parle aussi à M. Bailly dʹun jeune ecclésiastique, que M. <strong>de</strong> Thiery, 26 rue <strong>de</strong><br />

lʹUniversité, qui est disposé à donner ses soins à une bonne œuvre.<br />

Votre tout affectionné ami et frère en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Offrez, je vous prie, mon respect à notre cher Prési<strong>de</strong>nt, M. Baudon; jʹirai le voir dès<br />

quʹun temps un peu doux me permettra <strong>de</strong> sortir.<br />

584 à M. Halluin<br />

Nouvelles <strong>de</strong> Vaugirard. M. Myionnet relève <strong>de</strong> maladie. Rénovation <strong>de</strong>s vœux dans les maisons <strong>de</strong> lʹInstitut.<br />

Etablissement <strong>de</strong> statistiques et dʹun rapport annuel sur la situation <strong>de</strong>s Œuvres <strong>de</strong> la Communauté.<br />

Vaugirard, 23 novembre 1858<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Vous avez bien raison <strong>de</strong> vous plaindre <strong>de</strong> mon long silence, je me le reprochais<br />

aussi à moi‐même, mais nous avons été ces temps <strong>de</strong>rniers envahis par un redoublement<br />

dʹoccupations dans nos ateliers, et par beaucoup <strong>de</strong> travaux que nous avons dû faire exé‐<br />

cuter <strong>de</strong> plusieurs côtés dans la maison. Dʹune autre part, M. Myionnet, qui suit dʹordi‐<br />

naire la plupart <strong>de</strong> ces services, est resté alité <strong>de</strong>puis près dʹun mois, sʹétant cassé un ten‐<br />

don dans la jambe; ce mal est sans danger, mais il se guérit lentement. Je pense que, vers la<br />

fin <strong>de</strong> cette semaine, il pourra se lever et marcher assez pour fêter <strong>avec</strong> nous la S t Clément<br />

qui se fera dimanche. Les anciens élèves <strong>de</strong> la maison reviendront ce jour‐là, cʹest une oc‐<br />

casion <strong>de</strong> les réunir et <strong>de</strong> voir où ils en sont. A Paris, on les retrouve moins aisément quʹon<br />

ne peut le faire en province, il en est que nous ne revoyons guère que <strong>de</strong>ux ou trois fois<br />

par an. M. Myionnet vous remercie tendrement, ainsi que nos frères, <strong>de</strong> vos bons souve‐<br />

nirs pour sa fête. Il voulait vous écrire, sʹil lʹa fait, je joindrai sa lettre à celle‐ci.<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> joie que tout se soutient dans notre chère famille dʹArras. Vous êtes<br />

en petit nombre, mais tout le mon<strong>de</strong> ayant bonne volonté et apportant courageusement<br />

son concours, vous marchez fermes et bien unis. Que le Seigneur en soit mille fois béni, et<br />

puisse‐t‐Il vous maintenir dans la paix et dans lʹamour <strong>de</strong> sa divine volonté.<br />

<strong>Jean</strong>‐Baptiste a essayé <strong>de</strong> divers côtés dʹentrer dans <strong>de</strong>s Communautés ou Institu‐<br />

tions, mais il nʹa point réussi. Il nʹest pas mauvais au fond, mais il est présomptueux et peu<br />

intelligent. Je ne crois pas quʹil ait dʹaptitu<strong>de</strong>s pour la vie religieuse.<br />

Jʹai la formule pour lʹacquisition projetée par vous <strong>de</strong> la maison dans le faubourg. Je<br />

vous lʹenverrai <strong>avec</strong> une procuration quand le moment sera venu.<br />

Je me ferai payer par le f. Tourniquet acompte sur la pension <strong>de</strong> son neveu, les 52f<br />

qui restent dus à Vaugirard par la maison dʹArras, savoir:<br />

2 paires <strong>de</strong> souliers 12f<br />

1 id 8f<br />

54 casquettes 32f,40<br />

52f,40<br />

707


Je pense comme vous, cher Monsieur lʹabbé, quʹil y aurait avantage à ce que la rente<br />

<strong>de</strong> 600f à vous léguée par M. <strong>de</strong> Bunneville, fût échangée contre une somme une fois<br />

payée; je crois même que, si cette somme était <strong>de</strong> 7 ou 8.000f, il serait encore bien <strong>de</strong> lʹac‐<br />

cepter.<br />

Je suis bien aise que votre rénovation <strong>de</strong>s vœux se fasse le vendredi; à Amiens, il en<br />

sera ainsi également; enfin, à Vaugirard, nous avions aussi, comme dʹun commun accord,<br />

choisi le vendredi pour cette cérémonie <strong>de</strong> famille; nous serons donc tous ensemble le<br />

même jour nous offrant au Seigneur par les mains <strong>de</strong> Marie. Puissent tous nos cœurs, unis<br />

par la charité, nʹen faire quʹun dans le Cœur du divin Jésus.<br />

Nous avons pensé unanimement ici quʹil serait bien utile que, chaque année, nous<br />

constations entre nous, dans un petit travail dʹensemble, les travaux <strong>de</strong> notre Communau‐<br />

té. Pour cela, il serait désirable que chaque maison mʹenvoyât une note ou rapport un peu<br />

détaillé, portant la nature <strong>de</strong>s œuvres opérées, les résultats spirituels et matériels, le nom‐<br />

bre <strong>de</strong> sujet auxquels ils ont profité, enfin une sorte <strong>de</strong> justification qui pût nous édifier et<br />

nous encourager en nous témoignant que notre petite famille, dans ses différentes parties,<br />

accomplit sa mission <strong>avec</strong> courage et bon désir, sinon bien parfaitement. Je vous serai bien<br />

reconnaissant, cher Monsieur lʹabbé, dʹy songer pour notre chère œuvre dʹArras, qui nʹest<br />

ni la moins utile, ni la moins intéressante parmi celles que le Seigneur nous a confiées.<br />

Embrassez pour nous, je vous prie, tous nos frères et croyez aux sentiments bien af‐<br />

fectueux <strong>de</strong><br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

585 à M. Vasseur<br />

Nouvelles du recrutement. Lʹéducation <strong>de</strong>s enfants est chose ardue et qui donne peu <strong>de</strong> consolations. Il est bon <strong>de</strong><br />

nʹavoir pas sa récompense en ce mon<strong>de</strong> et <strong>de</strong> ne chercher <strong>de</strong> soutien quʹen Dieu.<br />

Vaugirard, 23 novembre 1858<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Mon long silence a pu vous contrister un peu, ainsi que nos autres ff. dʹArras que<br />

jʹai en apparence un peu délaissés <strong>de</strong>puis quelque temps, mais soyez bien assuré, cher ami,<br />

que mon cœur nʹest jamais loin <strong>de</strong> vous; je dors en apparence, mais mon cœur veille et prie<br />

pour vous incessamment. A la suite <strong>de</strong> la retraite, il nous est tombé comme une grêle dʹoc‐<br />

cupations qui ne mʹont guère laissé respirer; puis, M. Myionnet, qui est à bien <strong>de</strong>s choses<br />

ordinairement, gar<strong>de</strong> la chambre et même le lit <strong>de</strong>puis plusieurs semaines, en suite dʹune<br />

rupture dʹun nerf dans la jambe, acci<strong>de</strong>nt sans danger, mais assez long à réparer.<br />

Nous allons, à cela près, assez bien dʹesprit et <strong>de</strong> corps, tout le mon<strong>de</strong> se soutient,<br />

nos ateliers marchent assez activement; il nous arrive mercredi un jeune frère [Victor<br />

Erambert] tailleur habile et qui pourra donner impulsion à nos travaux, si Dieu daigne le<br />

confirmer dans sa vocation. Les <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rniers venus vont bien aussi. Jʹai reçu en outre<br />

quelques <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s <strong>de</strong> renseignements qui pourraient amener quelques résultats dans le<br />

même genre; laissons faire le Seigneur qui dispose seul <strong>de</strong>s cœurs, et prions bien ar<strong>de</strong>m‐<br />

ment pour que ses <strong>de</strong>sseins sur nous sʹaccomplissent.<br />

Pour vous, bien cher enfant, jʹai bien la confiance que vous allez aussi toujours en<br />

bonne et ferme voie; les petits chagrins dont vous mʹentreteniez dans votre <strong>de</strong>rnière lettre<br />

708


ne mʹont pas inquiété, parce que je sais bien quʹil est <strong>de</strong>s moments difficiles dans la<br />

conduite <strong>de</strong>s enfants et quʹon peut bien parfois avoir un peu dʹabattement, mais on se re‐<br />

lève quand on a, comme vous, un sincère dévouement fondé sur la foi et la charité. Nous<br />

ne <strong>de</strong>vons pas attendre <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s consolations dans nos rapports <strong>avec</strong> les enfants, nos<br />

sacrifices pour eux les touchent moins que notre fermeté nécessaire dans la discipline ne<br />

les mécontente; il faut donc travailler <strong>avec</strong> désintéressement et nous souvenir que le Sei‐<br />

gneur enseigne quʹil vaut mieux nʹavoir pas notre récompense en ce mon<strong>de</strong>, que bienheu‐<br />

reux même sont ceux qui souffrent persécution pour la justice, cʹest‐à‐dire quelques pei‐<br />

nes, contrariétés ou dommages dans lʹaccomplissement du <strong>de</strong>voir. Dieu vous aimera sou‐<br />

vent dʹautant plus que vous recevrez moins <strong>de</strong> marques dʹamitié du <strong>de</strong>hors; que son affec‐<br />

tion vous tienne lieu <strong>de</strong> tout, si pourtant on peut ainsi parler, puisque vous avez les ten‐<br />

dres sympathies et les encouragements <strong>de</strong> vos Supérieurs. Embrassez pour moi les ff.<br />

Thuillier et Cousin, je ne puis leur écrire aujourdʹhui, mais je pense à eux bien cordiale‐<br />

ment <strong>de</strong>vant Dieu; je leur écrirai, si je puis, à quelque prochain courrier.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. M. Myionnet a été touché <strong>de</strong> vos bonnes petites lettres, il vous remercie affec‐<br />

tueusement; à lʹoccasion, dites un mot pour le f. Carment dont la fête est le 15 <strong>de</strong> ce mois.<br />

586 à M. Decaux<br />

Etat <strong>de</strong>s santés. M. Myionnet marche <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s béquilles. Invitation à la fête <strong>de</strong> saint <strong>Jean</strong>, ʺapôtre <strong>de</strong> la charitéʺ.<br />

Vaugirard, 23 décembre 1858<br />

Mon bon ami,<br />

Notre maison est ici bien éclopée; M. Myionnet marche, tant bien que mal, <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s<br />

béquilles <strong>de</strong>puis six semaines; M. Lantiez, fatigué et enrhumé, porte comme il le peut le<br />

gros du far<strong>de</strong>au, et moi je fais chétivement <strong>de</strong> mon mieux. Cependant, nos enfants nʹen‐<br />

ten<strong>de</strong>nt pas raison et veulent quʹon fasse un peu la saint <strong>Jean</strong> qui est ma fête, ainsi quʹils y<br />

sont accoutumés tous les ans. Venez donc nous ai<strong>de</strong>r, bien cher ami, à rendre honneur à<br />

mon saint Patron, apôtre <strong>de</strong> la charité que vous désirez non moins que nous. Nous reste‐<br />

rons en famille et en tout petit comité; cʹest une raison <strong>de</strong> plus pour que vous soyez <strong>de</strong>s<br />

nôtres, puisque nous cherchons lʹintimité. Nous aurons: exhortation et salut à 5h., dîner et<br />

petite soirée pas trop longue; à 9h.½au plus tard vous serez dans votre lit où vous dormi‐<br />

rez en paix jusquʹau len<strong>de</strong>main.<br />

Adieu, bien cher ami, à lundi; priez un peu St <strong>Jean</strong>, la Ste Vierge et N.S. pour<br />

Votre tout affectionné serviteur et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

587 à M. Caille<br />

Echanges <strong>de</strong> vœux <strong>de</strong> bonne année. Des lettres se sont égarées. Lʹabbé Leleu entre en Communauté.<br />

Vaugirard, 31 décembre 1858<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je commence par vous remercier, ainsi que nos chers ff. Jules [Marcaire] et Henry<br />

[Guillot], <strong>de</strong> vos bons souhaits à lʹoccasion <strong>de</strong> ma fête et <strong>de</strong> la fin <strong>de</strong> lʹannée; nos vœux sont<br />

709


éciproques, vous en êtes bien persuadé, et, comme ils se traduisent constamment en priè‐<br />

res, ils ne seront pas sans effet pour nous. Jʹespère que le Seigneur daignera répandre sur<br />

vous et sur notre maison ses abondantes bénédictions et quʹIl vous donnera cette paix quʹIl<br />

a promise aux siens, cette paix qui surpasse tout sentiment. Je lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> aussi beaucoup<br />

<strong>de</strong> grâces pour vos chers enfants, objets <strong>de</strong> vos sollicitu<strong>de</strong>s et <strong>de</strong>s efforts <strong>de</strong> votre zèle.<br />

Je suis gran<strong>de</strong>ment étonné, mon bon ami, <strong>de</strong> lʹobservation que vous me faites <strong>de</strong><br />

nouveau sur la rareté <strong>de</strong> mes lettres; je dois présumer, dʹaprès vos réclamations, que mes<br />

<strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rnières ne vous sont point parvenues, je ne puis mʹexpliquer un pareil fait, jamais<br />

jusquʹici nos lettres ne se sont égarées; jʹai répondu à toutes les questions que vous mʹavez<br />

faites, pour lʹadmission dʹun enfant, je vous conseillais <strong>de</strong> promettre à M. Cacheleux la<br />

première place vacante, et pour le drap je me conformais à votre avis et vous priais dʹen<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r 50 mètres à 7f 50; je joignais même dans ma lettre un petit morceau <strong>de</strong> ce drap<br />

portant le numéro <strong>de</strong> la pièce. Je ne trouve aucune explication à la double disparition <strong>de</strong><br />

mes <strong>de</strong>ux lettres; voyez <strong>de</strong> votre côté si elle vous semble pourvoir se comprendre.<br />

M. Myionnet reste toujours fort impotent et ne marche quʹ<strong>avec</strong> <strong>de</strong>s béquilles péni‐<br />

blement, nous sommes conséquemment plus chargés que <strong>de</strong> coutume; ces jours‐ci, je me<br />

suis fatigué, je mʹen ressens présentement et suis contraint <strong>de</strong> rester au repos; je ne vous<br />

écris donc que quelques mots; si, par suite <strong>de</strong> la suppression <strong>de</strong> mes <strong>de</strong>rnières lettres,<br />

quelque point recommandé par vous nʹa pas eu <strong>de</strong> solution, dites‐le moi et jʹy donnerai sa‐<br />

tisfaction.<br />

M gr lʹArchevêque nous a définitivement donné M. lʹabbé Leleu que nous lui avions<br />

<strong>de</strong>mandé; il a dit la messe le jour <strong>de</strong> la S t <strong>Jean</strong> chez nous, il entre parmi nous au commen‐<br />

cement <strong>de</strong> cette semaine, vous en bénirez Dieu <strong>avec</strong> nous, cʹest une heureuse acquisition<br />

pour la Communauté.<br />

Les choses vont assez bien à Arras, M. Halluin se plaint néanmoins toujours <strong>de</strong> lʹin‐<br />

suffisance <strong>de</strong> son personnel, mais sa maison est si lour<strong>de</strong> à soutenir quʹil nous sera difficile<br />

<strong>de</strong> sitôt <strong>de</strong> répondre pleinement à tous ses besoins.<br />

Adieu, mon bien bon ami, je vous embrasse tous les trois bien tendrement à la fin<br />

<strong>de</strong> cette année; il nous serait doux <strong>de</strong> nous trouver un peu réunis et dʹêtre en famille en ces<br />

jours où lʹon aime à se rapprocher <strong>de</strong>s siens, mais nous nous réunirons dans le Cœur <strong>de</strong><br />

notre divin Seigneur et dans le Cœur immaculé <strong>de</strong> la S te Vierge notre Mère, là, nous som‐<br />

mes sûrs <strong>de</strong> nous retrouver en paix, heureux et bénissant Dieu.<br />

Jʹécrirai bientôt à mes ff. Jules et Henry; un peu <strong>de</strong> lassitu<strong>de</strong> mʹempêche <strong>de</strong> le faire<br />

aujourdʹhui.<br />

Votre dévoué ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

588 à M. Halluin<br />

Les vœux exprimés à la St‐<strong>Jean</strong> contribuent à faire croître la charité fraternelle. M. Halluin cherche <strong>de</strong>s religieu‐<br />

ses pour sa communauté. Par manque <strong>de</strong> personnel, MLP. ne peut lui fournir <strong>de</strong> lʹai<strong>de</strong> pour ses classes.<br />

Vaugirard, 1er janvier 1859<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Les fêtes, ma santé toujours frêle, et beaucoup <strong>de</strong> surcharge <strong>de</strong> travaux mʹont empê‐<br />

ché <strong>de</strong> vous répondre plus vite et <strong>de</strong> vous remercier, ainsi que nos bons frères, <strong>de</strong> vos sou‐<br />

710


haits à lʹoccasion <strong>de</strong> la S t ‐<strong>Jean</strong> et du nouvel an, jʹen ai été bien reconnaissant. Ces marques<br />

dʹaffection, lorsquʹelles viennent sincèrement du cœur, ont un rapport direct <strong>avec</strong> la chari‐<br />

té et concourent à lʹentretenir et à lʹaccroître. Je voudrais vous écrire longuement et me dé‐<br />

dommager <strong>de</strong> votre absence et <strong>de</strong> celle <strong>de</strong> nos bien‐aimés frères dans ces jours où lʹon est<br />

si heureux <strong>de</strong> se réunir en famille, mais je nʹai guère le temps <strong>de</strong> me reconnaître tant on<br />

est, en ce moment, pressé dʹobligations multipliées.<br />

Vous atten<strong>de</strong>z au moins quelques réponses aux questions intéressantes que vous<br />

mʹavez posées, mais je ne le ferais guère ici à tête reposée.<br />

La question concernant les Sœurs nʹest pas dʹune urgence absolue, puisque trois<br />

mois vous sont laissés pour y donner solution. Je pense comme vous quʹil sera bien <strong>de</strong><br />

faire tout ce que vous pourrez pour gar<strong>de</strong>r le secours <strong>de</strong> la Congrégation qui vous donnait<br />

ai<strong>de</strong> puisque, ensemble, elle vous assistait bien gran<strong>de</strong>ment. Si, après tentative, vous ne<br />

réussissez pas <strong>de</strong> ce côté, je crois quʹil serait bon dʹessayer dʹun autre. Je ne crois pas que<br />

<strong>de</strong>s séculières, hors <strong>de</strong> rares exceptions, vous donnassent garantie <strong>de</strong> suffisance et <strong>de</strong> stabi‐<br />

lité. Vous pourriez en essayer, si vous avez en vue <strong>de</strong>s sujets dʹun mérite réel et dʹune ca‐<br />

pacité éprouvée; autrement, mieux vaudrait, je crois, recourir à une communauté. Si vous<br />

nʹen connaissez aucune qui vous convînt, nous pourrions ici faire quelques recherches.<br />

Mais il me semblerait tout à fait désirable que les frères nʹeussent aucun rapport <strong>avec</strong> les<br />

Sœurs. Ici, nous avons réglé les choses ainsi, et nous nous en trouvons bien.<br />

Pour ce qui regar<strong>de</strong> vos classes, je comprends vos difficultés, mais je ne vois pas que<br />

nous ayons possibilité <strong>de</strong> vous donner un secours immédiat. En ce moment, M. Myionnet<br />

reste impotent, ne marche péniblement quʹ<strong>avec</strong> <strong>de</strong>s béquilles, et tout nous laisse craindre<br />

quʹil ne <strong>de</strong>meure ainsi encore assez longtemps. M. Lantiez, très fatigué, traîne et semble<br />

menacé <strong>de</strong> quelque maladie; il gar<strong>de</strong> le lit puis se relève et retombe. Prendre secours au<br />

<strong>de</strong>hors a bien <strong>de</strong>s inconvénients <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s Frères <strong>de</strong>s Ecoles surtout, un séculier nʹen<br />

aura guère moins à beaucoup dʹégards. Vous envoyer un nouveau persévérant nʹaurait<br />

aucun avantage, ces enfants soutenus ici par leurs appuis ordinaires vont très bien sous<br />

nos yeux, au loin et isolés, ils faiblissent et servent <strong>de</strong> peu. Il me semble que le meilleur<br />

moyen serait <strong>de</strong> faire faire les classes <strong>de</strong>s écoliers comme celles <strong>de</strong>s apprentis par les ff.<br />

Alphonse [Vasseur] et Cousin assistés, le <strong>de</strong>rnier, par le f. Thuillier, lʹautre par le jeune<br />

Georges. Puisque les classes <strong>de</strong>s apprentis et <strong>de</strong>s écoliers ne sont pas très longues et se font<br />

à <strong>de</strong>s heures différentes, rien nʹempêcherait quʹelles fussent faites par les mêmes maîtres.<br />

Avec un plan dʹétu<strong>de</strong>s que M. Lantiez pourrait dresser, les ff. Vasseur et Cousin, secondés<br />

par les <strong>de</strong>ux autres, pourraient sʹen tirer. Si quelques services matériels en souffraient, il<br />

serait bien plus facile dʹy pourvoir <strong>avec</strong> quelque agent du <strong>de</strong>hors. Je ne vois rien <strong>de</strong> mieux,<br />

cher Monsieur lʹabbé, pour le moment; peut‐être, <strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> patience, le Seigneur<br />

nous donnera‐t‐il dʹautres moyens.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, tous nos frères vous offrent leurs respectueuses affec‐<br />

tions.<br />

Je vous embrasse au nom <strong>de</strong> tous.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

711


589 aux Frères dʹArras<br />

Souhaits <strong>de</strong> nouvel an. Acceptation généreuse <strong>de</strong>s jours dʹépreuve. Avoir le désir du ciel. Exhortation à la prati‐<br />

que <strong>de</strong>s vertus <strong>de</strong> notre état <strong>de</strong> vie. Abnégation au service du Seigneur pour quʹIl nous donne le prix en grâces et<br />

bénédictions Annonce <strong>de</strong> lʹentrée <strong>de</strong> lʹabbé Leleu à Vaugirard.<br />

Vaugirard, 1er janvier 1859<br />

Bien chers enfants en N.S.,<br />

Quoique bien affairé aujourdʹhui et assez souffrant, je coupe à travers tout quelques<br />

instants pour vous dire quelques mots <strong>de</strong> tendre affection à lʹoccasion du nouvel an. Je<br />

vous remercie, chers bons amis, <strong>de</strong> vos souhaits <strong>de</strong> fête <strong>de</strong> St <strong>Jean</strong> et <strong>de</strong> bonne année. A<br />

mesure que je vieillis, je <strong>de</strong>viens plus facile à émouvoir, et je sens <strong>de</strong> plus en plus combien<br />

sont doux les liens <strong>de</strong> la famille chrétienne. Cʹest une vraie privation <strong>de</strong> ne pas vous avoir<br />

tous autour <strong>de</strong> moi en ce moment; et, au milieu <strong>de</strong>s embrassements si tendres <strong>de</strong> tous mes<br />

enfants dʹici, je nʹen cherchais pas moins <strong>de</strong>s yeux tous ceux qui étaient absents. Jʹoffre<br />

cette privation au Seigneur comme un témoignage <strong>de</strong> lʹabnégation que nous <strong>de</strong>vons ap‐<br />

porter à son service et je Le conjure <strong>de</strong> vous donner le prix en grâces et bénédictions, aussi<br />

bien que <strong>de</strong> tout ce quʹIl lui plaira <strong>de</strong> mʹenvoyer <strong>de</strong> travaux, <strong>de</strong> difficultés et <strong>de</strong> peines. Je<br />

souhaite que tout tourne à bien et à faveurs pour vous, bien chers amis. Puissé‐je aussi al‐<br />

léger un peu vos far<strong>de</strong>aux, mais pas trop pourtant, car ne faut‐il pas quʹà lʹexemple du<br />

Sauveur, nous arrivions ainsi à la gloire. Que cette douce et consolante pensée vous sou‐<br />

tienne, bien chers enfants, quand le poids du jour vous semble un peu lourd, quʹelle vous<br />

affermisse dans les heures <strong>de</strong> langueur et <strong>de</strong> tentation. Levons ensemble les yeux au Ciel,<br />

nʹest‐il pas bien beau, bien resplendissant, ne nous sera‐t‐il pas bien doux <strong>de</strong> nous y repo‐<br />

ser ensemble tous aux pieds du divin Seigneur, tout près <strong>de</strong> la T. Ste Vierge notre Mère,<br />

dans la compagnie <strong>de</strong>s anges et <strong>de</strong>s saints? Acceptons donc généreusement quelques jours<br />

dʹépreuve, faisons quelques efforts pour réprimer tout ce qui peut en nous déplaire à Dieu,<br />

gardons à tout prix la charité entre nous, ayons quelque zèle pour protéger, par notre vigi‐<br />

lance et notre dévouement, les pauvres enfants dont nous pouvons sauver les âmes. Si<br />

nous avons une vraie et chrétienne sollicitu<strong>de</strong> pour eux, à cette condition, bien chers amis,<br />

nous serons dignes <strong>de</strong> la noble et sainte vocation que le Seigneur nous a donnée, nous au‐<br />

rons passé cette courte vie en faisant le bien, et nous serons récompensés divinement dans<br />

le sein <strong>de</strong> Dieu.<br />

Notre bon p. Halluin vous a dit, sans doute, que nous avons lʹespoir fondé dʹavoir<br />

un f. ecclésiastique <strong>de</strong> plus, M. lʹabbé Leleu, un <strong>de</strong> nos anciens amis <strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong> charité;<br />

cʹest un prêtre très saint. Il a été ordonné à Noël, il a dit la messe chez nous le jour <strong>de</strong> St <strong>Jean</strong>. Priez pour lui et pour un frère laïc [Charles Petit]que nous attendons pour le com‐<br />

mencement <strong>de</strong> janvier.<br />

Adieu, amis, je vous embrasse tous en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

590 à M. Decaux<br />

Lʹabbé Leleu au Patronage St‐Charles. MLP. ne veut rien refuser aux membres <strong>de</strong> la SSVP.<br />

Vaugirard, 15 janvier 1859<br />

Mon bien bon ami,<br />

Les ff. <strong>de</strong> S t ‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul feraient volontiers un quatrième vœu: celui <strong>de</strong> ne rien<br />

refuser à leurs bons amis et frères <strong>de</strong>s Conférences, hors le cas <strong>de</strong> réelle impossibilité; cʹest<br />

712


dire, en réponse à votre bonne lettre <strong>de</strong> ces jours <strong>de</strong>rniers, que nous donnerons <strong>de</strong> tout no‐<br />

tre cœur le concours <strong>de</strong> M. lʹabbé Leleu à la maison <strong>de</strong> S t ‐Charles. M. Legentil, qui a voulu<br />

me venir voir, mʹa paru disposé à préparer les choses <strong>de</strong> telle sorte que M. Leleu puisse<br />

bientôt prendre part à cette bonne œuvre; dès quʹil mʹavertira que ses mesures sont prises,<br />

M. Leleu ira le voir et se concerter <strong>avec</strong> lui; tout dépend donc présentement <strong>de</strong> ces petits<br />

arrangements qui, je le pense, ne rencontreront aucune difficulté. Il sʹagit, je crois, seule‐<br />

ment <strong>de</strong> se séparer <strong>de</strong> lʹecclésiastique qui sʹoccupait plus ou moins régulièrement <strong>de</strong> lʹŒu‐<br />

vre.<br />

Adieu, mon bien bon ami, mille souhaits pour vous et mille grâces du Seigneur en<br />

cette nouvelle année.<br />

Votre vieil ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

591 à M. Halluin<br />

Conditions nécessaires à toute entrée dans la Congrégation: pas <strong>de</strong> <strong>de</strong>mi‐volonté, ni <strong>de</strong> <strong>de</strong>mi‐dévouement, mais le<br />

don total et la disponibilité. Porter le souci <strong>de</strong>s autres communautés. Equitable répartition <strong>de</strong>s ressources finan‐<br />

cières entre toutes les communautés. Correspondances <strong>avec</strong> le Supérieur. Statistiques à établir.<br />

Vaugirard, 21 janvier 1859<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Nous continuons chacun <strong>de</strong> notre côté, sous les yeux <strong>de</strong> Dieu, lʹœuvre laborieuse <strong>de</strong><br />

nos fondations; cʹest une tâche ru<strong>de</strong> sans doute, mais si pleine dʹespérances quʹau jour le<br />

jour on reprend courage, regardant lʹavenir et comptant sur le secours dʹen haut qui ne<br />

manque jamais dans cette vie <strong>de</strong> sacrifice et <strong>de</strong> dévouement. Le passé aussi doit nous être<br />

une gran<strong>de</strong> assurance, car combien <strong>de</strong> choses déjà faites que notre insuffisance nʹeût pas<br />

accomplies et où la grâce du Seigneur a visiblement opéré <strong>avec</strong> nous et pour nous. Ayons<br />

donc bonne confiance, cher Monsieur lʹabbé, toutes choses viendront à bien <strong>avec</strong> le temps,<br />

donnons seulement ce que le bon Maître nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, la patience et la soumission aux<br />

épreuves que nous envoie son adorable volonté.<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> peine que vous ne réussissez pas du côté <strong>de</strong>s Sœurs et que vous en‐<br />

trevoyez par là quelques difficultés pour vos services. M gr . Bervanger, Directeur <strong>de</strong> la mai‐<br />

son S t ‐Nicolas, mʹa dit autrefois quʹaprès avoir essayé <strong>de</strong>s Congrégations <strong>de</strong> diverses cou‐<br />

leurs, il sʹétait arrêté en <strong>de</strong>rnier lieu à <strong>de</strong>s Sœurs blanches, dites <strong>de</strong> la Présentation, dont la<br />

Maison‐Mère est à Tours, et qui paraissent en effet lui avoir rendu <strong>de</strong> bons et longs servi‐<br />

ces. Je crois quʹelles vous donneraient satisfaction. Si vous vous tourniez <strong>de</strong> ce côté, il se‐<br />

rait bon que M gr dʹArras se joignît à vous pour les <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r, car, en <strong>de</strong>rnier lieu, la mai‐<br />

son <strong>de</strong> S t ‐Nicolas ayant eu quelques désordres, leurs Supérieures ont cru <strong>de</strong>voir les rappe‐<br />

ler. Il faudrait quʹelles sussent bien quʹelles nʹauraient rien à craindre <strong>de</strong> semblable chez<br />

vous.<br />

Je pense <strong>avec</strong> vous que vous avez agi pru<strong>de</strong>mment en transigeant <strong>avec</strong> les héritiers<br />

Bunneville.<br />

Vous pourrez assurément, cher Monsieur lʹabbé, tranquilliser à lʹoccasion ceux qui<br />

voudraient vous faire <strong>de</strong>s donations <strong>avec</strong> affectation spéciale à la maison dʹArras; la<br />

Communauté pourrait refuser ces donations ainsi circonscrites dans leur application, mais,<br />

du moment quʹelle les accepte <strong>avec</strong> les conditions y attachées, les intentions du donateur<br />

713


doivent être respectées et leurs dons rester invariablement affectés à la <strong>de</strong>stination mar‐<br />

quée. Il va sans dire aussi que, dans la pratique, les ressources <strong>de</strong> chaque maison lui res‐<br />

tent affectées, dʹautant quʹelles suffisent rarement à tous les besoins; notre règlement porte<br />

toutefois quʹen principe les ressources doivent être centralisées et je crois cette disposition<br />

fort sage; il pourrait arriver parfois en effet quʹune maison ayant surabondance ne serait<br />

pas assez disposée à secourir celles qui seraient en pénurie, il est bien que la règle le <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong> et entretienne ainsi dans tout le corps cet esprit large et généreux qui aime et favo‐<br />

rise le bien partout, sans exclusion ni préférence étroite pour la petite œuvre à laquelle on<br />

est attaché.<br />

Nous croyons aussi, cher Monsieur lʹabbé, quʹil serait bien regrettable dʹadmettre<br />

<strong>de</strong>s ff. ecclésiastiques ou laïcs qui nʹauraient quʹune <strong>de</strong>mi volonté et un <strong>de</strong>mi dévouement,<br />

consentiraient à travailler à telle œuvre et non à telle autre, ici et non là; nous avons tou‐<br />

jours rejeté <strong>de</strong> pareilles conditions, ceux qui les font sʹappartiennent trop encore et lʹheure<br />

nʹest pas venue pour eux <strong>de</strong> se consacrer à <strong>de</strong>s œuvres qui veulent, comme les nôtres, une<br />

entière abnégation. Ces moyens termes nous ramèneraient inévitablement aux malaises<br />

dont nous avons tant souffert. Lʹexpérience en divers lieux nous a démontré que ces situa‐<br />

tions sont fausses et nʹaboutissent jamais à un bon résultat; posons‐nous sur un sol ferme<br />

et soli<strong>de</strong>, autrement il nʹy a pas dʹavenir pour nous ni pour nos œuvres. Si vous aviez vu<br />

comme nous la multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s sujets qui nous sont venus ainsi tâtonnants, mal décidés et<br />

lʹimpuissance constante <strong>de</strong> tous ces essais, vous seriez convaincus autant que nous quʹil<br />

nʹy a rien à en attendre, sinon la gêne et un embarras pénible pour les communautés.<br />

Je vous envoie ci‐contre la procuration et le modèle pour lʹacte dʹacquisition, en<br />

forme tontinière. Les rr.pp. Jésuites et toutes les communautés suivent aujourdʹhui cette<br />

marche, la seule que la législation laisse libre et assez sûre pour les Congrégations non au‐<br />

torisées.<br />

Je recevrai <strong>avec</strong> plaisir <strong>de</strong>s ff. dʹArras quelques lignes sur leurs dispositions inté‐<br />

rieures. Il y a longtemps quʹils ne mʹont parlé un peu intimement. Il est vrai que je nʹai pu<br />

toujours leur répondre quand ils lʹont fait, mais je prie pour eux, selon leurs besoins,<br />

quand ils me sont connus, cʹest une manière assurée <strong>de</strong> rendre leurs communications uti‐<br />

les.<br />

Les renseignements que contiennent dʹordinaire vos lettres sur lʹétat <strong>de</strong> votre œuvre<br />

et la situation <strong>de</strong> la communauté me satisfont pleinement et me mettent suffisamment en<br />

union <strong>de</strong> mouvements et <strong>de</strong> dispositions. Cependant, pour répondre au désir que jʹaurais<br />

<strong>de</strong> faire, en fin dʹannée, un petit aperçu dʹensemble sur la situation <strong>de</strong> la Communauté et<br />

<strong>de</strong> ses œuvres, quelques détails plus précis me seraient nécessaires. Jʹai posé, sur la petite<br />

feuille ci‐jointe, les questions les plus essentielles. Si vous trouvez un moment pour y ré‐<br />

pondre, je vous en serai reconnaissant. Comme toute formule, celle‐ci peut contenir <strong>de</strong>s<br />

choses qui ne trouvent pas leur application directe, mais le fond <strong>de</strong>s choses sʹy trouve.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, je reçois toujours <strong>avec</strong> joie <strong>de</strong> vos nouvelles, qui inté‐<br />

ressent aussi vivement tous nos frères. Nous allons ici passablement. M. lʹabbé Leleu, notre<br />

nouveau f. ecclésiastique, prend bien. Il va <strong>de</strong>sservir spirituellement le patronage S t ‐<br />

Charles, où est placé le f. Tourniquet. Nous avons aussi un nouveau f. laïc [Charles Petit]<br />

qui nʹest pas sans intelligence. Je ne sais encore comment il ira.<br />

Je vous embrasse respectueusement en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

714


Le f. Tourniquet, dʹaprès votre désir, mʹa payé, sur ce quʹil nous doit pour le pre‐<br />

mier trimestre 1859 <strong>de</strong> la pension <strong>de</strong> son neveu, 52f et 45f pour souliers et casquettes, 16f<br />

90 pour fournitures <strong>de</strong> classe.<br />

592 à M. Vasseur<br />

Les charges <strong>de</strong> la Congrégation à Paris. Nécessité <strong>de</strong> la prière, ʺpour marcher dans la vie <strong>de</strong> lʹimmolation <strong>de</strong> soi,<br />

<strong>de</strong>rnier mot <strong>de</strong> la vie chrétienne et <strong>de</strong> la vie religieuseʺ. Quatre frères sʹinstallent à Vaugirard.<br />

Vaugirard, 25 janvier 1859<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong>s affectueuses sympathies que vous mʹexprimez relativement<br />

aux quelques difficultés que la santé <strong>de</strong> MM. Myionnet et Lantiez nous ont momentané‐<br />

ment causées; elles sont présentement fort diminuées; M. Lantiez est tout à fait remis, M.<br />

Myionnet commence à marcher sans béquilles, mais encore péniblement et pour quelques<br />

mouvements à lʹintérieur seulement; il ne peut sortir quʹen voiture, cʹest‐à‐dire presque<br />

point, puisque les carrosses et nous sommes rarement ensemble; je crois quʹil faudra en‐<br />

core du temps pour affermir la jambe lésée; ayons patience et comptons bien sur le bon<br />

Dieu.<br />

Si vous suivez <strong>avec</strong> sollicitu<strong>de</strong> ce qui se passe ici, nous vous le rendons bien; nous<br />

avons toujours le cœur et les yeux <strong>de</strong> votre côté et nous prenons une part toute fraternelle<br />

à tout ce qui vous touche. Nous sommes vraiment peinés <strong>de</strong> vos privations et <strong>de</strong> lʹinsuffi‐<br />

sance <strong>de</strong> votre personnel; nous comprenons la nécessité dʹy subvenir dès quʹil se pourra,<br />

mais nous <strong>de</strong>vons pour cela implorer le secours du Seigneur et attendre <strong>de</strong> sa bonté les<br />

appuis qui nous sont si nécessaires. Le patronage S t ‐Charles était <strong>de</strong>puis trop longtemps<br />

dans une souffrance profon<strong>de</strong> du côté spirituel, M. lʹabbé Leleu a dû y porter son<br />

concours; M. Roussel a une charge lour<strong>de</strong> dans son patronage <strong>de</strong> Grenelle et M. Planchat<br />

succombe sous le travail que lui donne une population <strong>de</strong> 12.000 ouvriers. Hélas! <strong>de</strong> toutes<br />

parts la moisson est gran<strong>de</strong> et les ouvriers font défaut; nous sommes dʹailleurs ici entre <strong>de</strong>s<br />

besoins divers, <strong>de</strong> votre côté et <strong>de</strong> celui <strong>de</strong>s œuvres qui vous entourent; tandis que vous<br />

gémissez sur votre insuffisance, MM. Baudon et Decaux nous assiègent, nous représentent<br />

les souffrances <strong>de</strong>s maisons <strong>de</strong> patronage où se réunissent <strong>de</strong>s centaines dʹenfants qui ne<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt quʹun peu dʹappui spirituel pour aller à Dieu, et auxquels cet appui est refusé.<br />

Dès les premiers jours à S t ‐Charles, M. Leleu a eu à confesser une multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> pauvres<br />

enfants qui semblaient affamés <strong>de</strong> soutien spirituel et <strong>de</strong> cette grâce qui rend la paix au<br />

cœur et la force pour les épreuves. Que faire en présence <strong>de</strong> tant <strong>de</strong> besoins? Donner tout,<br />

et prier le Seigneur <strong>de</strong> nous rendre ce que nous avons donné. Ainsi, les dimanches, tous<br />

nos frères sont dispersés: le f. Joseph [Loquet] va à S t ‐Charles agrandi par lʹachat du terrain<br />

quʹon convoitait; M. Carment et M. Luzier vont à S te ‐Mélanie, quoique bien fatigués <strong>de</strong>s<br />

travaux <strong>de</strong> la semaine, et ainsi <strong>de</strong>s autres. Il nous est arrivé, il est vrai, un jeune f. tailleur<br />

fort bien disposé et un autre frère qui sera propre aux classes, sʹil persévère, mais lʹun et<br />

lʹautre sont absolument à former comme religieux et hommes dʹabnégation, ils ne tien‐<br />

draient pas quinze jours mis à quelque épreuve un peu ru<strong>de</strong>, il faut quʹils se mûrissent à<br />

loisir et beaucoup <strong>de</strong> prières leur sont nécessaires pour marcher persévéramment dans la<br />

voie <strong>de</strong> lʹimmolation <strong>de</strong> soi, <strong>de</strong>rnier mot <strong>de</strong> la vie chrétienne et <strong>de</strong> la vie religieuse. Donc,<br />

cher enfant, patience et soumission aux adorables volontés du Seigneur, méritons, dans le<br />

715


travail et la souffrance quʹIl nous impose, lʹallégement et la dilatation que son amour nous<br />

réserve.<br />

Je suis tout heureux <strong>de</strong>s détails que vous me donnez sur les bonnes dispositions <strong>de</strong><br />

tous; la bénédiction est sur votre maison, cʹest une douce pensée pleine dʹencouragement,<br />

car, puisque le Seigneur est <strong>avec</strong> vous, Il ne vous abandonnera pas et, au jour marqué par<br />

sa sagesse, Il vous donnera tous les secours dont Il sait que vous avez tant besoin.<br />

Assurez tous nos frères <strong>de</strong> ma tendre et bien paternelle affection, embrassez en par‐<br />

ticulier mon f. Thuillier, jʹespère bien que ses malaises <strong>de</strong> santé sont lʹeffet <strong>de</strong> lʹhiver et<br />

vont passer <strong>avec</strong> lui; cʹest une joie pour moi <strong>de</strong> vous voir en vraie et cordiale charité.<br />

La retraite se fera dans les premiers jours dʹavril et sera donnée par le r.p. Renaud,<br />

sauf événements imprévus; la promesse nous est faite; je ne sais si quelquʹun dʹArras y<br />

pourra venir.<br />

Nous allons bien prier pour la retraite <strong>de</strong> vos enfants; priez bien aussi pour nous;<br />

quand nous prions les uns pour les autres, lʹEsprit dʹamour est au milieu <strong>de</strong> nous.<br />

Offrez ma respectueuse affection à notre p. Halluin, je vous permets <strong>de</strong> lʹembrasser<br />

pour moi.<br />

Votre affectionné ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je remercie bien notre p. Halluin qui veut bien nous envoyer Marchal pour ai<strong>de</strong>r à<br />

la cordonnerie; Auguste [Leduc] et Streicher tenaient courageusement, mais ils tombaient<br />

mala<strong>de</strong>s lʹun après lʹautre, succombant à la peine; si nous étions avertis à temps, nous en‐<br />

verrions au <strong>de</strong>vant <strong>de</strong> Marchal à lʹembarcadère.<br />

Nos ff. Planchat, Roussel, Georges [<strong>de</strong> Lauriston] et Legallais vont sʹinstaller le 2 fé‐<br />

vrier à Grenelle; prière pour que le Seigneur les bénisse.<br />

593 à M. Caille<br />

Nouvelles <strong>de</strong>s frères et mouvement <strong>de</strong>s Œuvres. Les concessions favorisent la vie fraternelle. Rapport dʹensemble<br />

sur la Communauté.<br />

Vaugirard, 28 janvier 1859<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu lʹenvoi qui mʹa été fait par vous <strong>de</strong> la pièce <strong>de</strong> drap zéphyr que vous avez<br />

bien voulu faire venir <strong>de</strong> Sedan; je nʹai point encore fait lʹouverture du paquet, mais les in‐<br />

dications <strong>de</strong> la lettre dʹenvoi me font penser que nous serons satisfaits <strong>de</strong> cet achat. Je vous<br />

remercie <strong>de</strong>s soins obligeants que vous avez pris pour cet objet; ils nous auront été très uti‐<br />

les, car nous nʹaurions pu sans vous faire notre choix sûrement.<br />

Je souhaite bien que la santé <strong>de</strong> notre f. Henry [Guillot] se fortifie; je me repose<br />

pleinement sur vous <strong>de</strong> tout ce qui pourra y contribuer; si le changement dʹair était jugé<br />

nécessaire, nous y aviserions. Jʹespère aussi que nos frères arriveront à sʹentendre pour les<br />

détails <strong>de</strong> la surveillance, il me semble que, sʹils se concertent <strong>de</strong> temps en temps <strong>avec</strong><br />

vous et sʹils ont le bon esprit <strong>de</strong> se faire <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts quelques concessions, ils arriveront<br />

à quelque bon résultat.<br />

Nous allons mieux ici; M. Myionnet commence à marcher sans béquilles, mais il ne<br />

peut faire aucune course hors <strong>de</strong> la maison; M. Lantiez est tout à fait remis. Notre nouveau<br />

716


f. ecclésiastique, M. Leleu, prend très bien sa position parmi nous; un nouveau f. laïc, le f.<br />

Charles [Petit], semble aussi sʹasseoir peu à peu; nous avons aussi un jeune frère tailleur<br />

qui nous donne bonne espérance, il est très habile dans son état; je ne sais pas encore bien<br />

sʹil sʹaccoutumera à notre genre <strong>de</strong> vie. M. Leleu est attaché au patronage <strong>de</strong> M. Tourni‐<br />

quet qui est bien heureux <strong>de</strong> cet appui.<br />

Je vous envoie une petite série <strong>de</strong> questions sur votre maison. Si vous y pouviez ré‐<br />

pondre, au moins dans les choses qui sʹappliquent réellement à votre œuvre, je trouverais<br />

ainsi <strong>de</strong>s éléments pour le petit rapport dʹensemble que je désirerais faire sur la commu‐<br />

nauté et la situation <strong>de</strong> ses œuvres.<br />

Jʹai fait le même envoi à M. Halluin, à Nazareth et à Grenelle.<br />

Chaque fois que je vous écris, je suis bien décidé à faire une petite lettre pour nos<br />

frères et jʹen suis toujours empêché par mille soins divers; jʹai le même regret aujourdʹhui,<br />

mais je trouverai enfin quelques moments bien prochainement.<br />

29 janvier. Jʹoubliais <strong>de</strong> vous dire quʹil me semblerait bien que la traite pour le drap<br />

fût faite sur la maison <strong>de</strong> Vaugirard et non sur vous, puisque cette marche est plus directe<br />

et plus simple; ayez, je vous prie, la bonté dʹen avertir le marchand, M. Jules Varinet, à Se‐<br />

dan; je me tiendrai prêt à payer à lʹépoque indiquée.<br />

Adieu, mon bien bon ami, nous fêtons aujourdʹhui S t François <strong>de</strong> Sales, nous le<br />

prions beaucoup pour vous et pour votre maison; je vous recomman<strong>de</strong> aussi tous les jours<br />

à N.D. <strong>de</strong> la Salette dont le petit sanctuaire, presque achevé, est pour nous un lieu <strong>de</strong> re‐<br />

cueillement et <strong>de</strong> repos spirituel.<br />

Jʹembrasse affectueusement vous et nos frères et suis en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

594 à M. Halluin<br />

Installation dʹune communauté au Patronage <strong>de</strong> Grenelle. Charges <strong>de</strong> la Maison‐Mère. Confiance en la Provi‐<br />

<strong>de</strong>nce. Fête <strong>de</strong> saint François <strong>de</strong> Sales.<br />

Vaugirard, 29 janvier 1859<br />

St François <strong>de</strong> Sales<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Le jeune Marchal nous est arrivé à bon port et semble jusquʹici bien sʹaccoutumer à<br />

lʹair <strong>de</strong> Vaugirard. M. Lantiez me prie <strong>de</strong> vous dire quʹil lui donnera tous les soins qui dé‐<br />

pendront <strong>de</strong> lui. Le jeune Leduc, qui conduit lʹatelier, sait assez bien travailler pour le<br />

conseiller utilement pour les ouvrages. Enfin, comme vous le dites, cher Monsieur lʹabbé,<br />

nous étudierons ses dispositions.<br />

Jʹai remis à M. Carment les 80f que vous me priez <strong>de</strong> lui avancer. Nʹen prenez point<br />

souci, nous retrouverons cette petite somme à lʹoccasion, quand nous réglerons nos comp‐<br />

tes. Le f. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] ne manquera pas <strong>de</strong> vous faire parvenir les petits secours<br />

quʹil a promis dès quʹil touchera quelque argent du côté <strong>de</strong> sa famille. Présentement, il est<br />

fort affairé, à cause <strong>de</strong> son installation à Grenelle, laquelle se fera mercredi 2 février. Il se<br />

recomman<strong>de</strong>, ainsi que les trois autres frères qui prennent possession <strong>de</strong> la maison, à vos<br />

bonnes prières.<br />

717


Je sens, cher Monsieur lʹabbé, tous les besoins <strong>de</strong> votre maison, mais vous savez<br />

comme nous sommes encore peu avancés ici et combien nous avons peu dʹhommes bien<br />

mûrs et bien formés. Espérons quʹ<strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> patience nous obtiendrons du Seigneur<br />

les secours qui nous seraient si nécessaires.<br />

M. Myionnet commence à marcher sans béquilles, mais dans la maison seulement.<br />

M. Lantiez va bien maintenant. Notre maison, <strong>avec</strong> lʹétendue <strong>de</strong> ses terrains, ses travaux,<br />

ses ateliers, ses persévérants et le personnel nombreux <strong>de</strong> la communauté, est fort lour<strong>de</strong> à<br />

porter, en direction comme en dépenses; nous ne voyons pas néanmoins que nous y puis‐<br />

sions rien changer. Nous croyons que nous suivons la marche que nous trace la Provi‐<br />

<strong>de</strong>nce et que nous obéissons au mouvement quʹElle nous imprime. Prions bien tous, cher<br />

Monsieur lʹabbé, enfin <strong>de</strong> correspondre fidèlement à ses <strong>de</strong>sseins adorables et <strong>de</strong> ne rien<br />

faire que selon son bon plaisir.<br />

Nous fêtons aujourdʹhui S t François <strong>de</strong> Sales, sans interruption <strong>de</strong>s travaux. Nous<br />

avions, ce matin, messe <strong>de</strong> communauté et instruction. Ce soir, vêpres et salut <strong>avec</strong> une ré‐<br />

création un peu plus prolongée que <strong>de</strong> coutume. Cʹest plus sans doute encore que vous<br />

nʹen pouvez faire. Avec le temps, un peu <strong>de</strong> dilatation vous sera donnée par le Père <strong>de</strong>s<br />

miséricor<strong>de</strong>s.<br />

Je vous embrasse, <strong>avec</strong> tous nos frères, bien affectueusement en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

595 à M. Caille<br />

Précautions à prendre dans les échanges entre Frères <strong>de</strong> maisons différentes. Le Saint‐Sacrement dans les mai‐<br />

sons <strong>de</strong> lʹInstitut.<br />

Vaugirard, 16 février 1859<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> lʹenvoi que vous mʹavez fait <strong>de</strong> la lettre <strong>de</strong> M. lʹabbé Gragnet;<br />

jʹattendais pour vous répondre quʹil me fût donné quelque signe <strong>de</strong> ce côté; le jeune<br />

homme en question est venu lui‐même nous voir, nous en avons été contents, il est conve‐<br />

nu que dans quelques jours, au commencement <strong>de</strong> mars au plus tard, il viendra faire ses<br />

épreuves parmi nous. Il se trouve que M. Gragnet est un ancien condisciple et ami <strong>de</strong> no‐<br />

tre bon abbé Lantiez, il lui a écrit pour lui recomman<strong>de</strong>r le jeune homme. Il se trouve en‐<br />

core que le receveur chez lequel travaille M. Augustin [Déage] (je ne me souviens pas <strong>de</strong><br />

son nom <strong>de</strong> famille) est un ancien membre <strong>de</strong> nos Conférences très lié <strong>avec</strong> nous, excellent<br />

homme et parfait chrétien; je pense donc que tout cela peut être un indice provi<strong>de</strong>ntiel et<br />

que les choses sʹarrangeront.<br />

Je nʹai aucune objection à faire sur le paiement à Amiens <strong>de</strong> la somme <strong>de</strong> 416f 25,<br />

montant <strong>de</strong> la pièce <strong>de</strong> drap que vous nous avez fait parvenir; je vous avais <strong>de</strong>mandé dʹen<br />

faire toucher ici le montant pour vous épargner tout soin et toute avance à ce sujet, mais,<br />

puisque les choses ont été disposées autrement, je me bornerai à vous faire passer la<br />

somme dès que nous en trouverons lʹoccasion. Le drap me paraît bien, on commence à le<br />

couper.<br />

Jʹapprouve, en principe, la pensée que vous avez dʹenvoyer quelquefois les ff. Jules<br />

[Marcaire] et Henry [Guillot] à Arras et dʹattirer en retour quelques ff. dʹArras à vous ren‐<br />

dre visite; je crois toutefois que vous <strong>de</strong>vrez le faire <strong>avec</strong> précaution; un frère mal disposé<br />

718


pourrait porter ses mécontentements dʹune maison dans lʹautre; je ne pense pas que rien<br />

<strong>de</strong> pareil soit à redouter <strong>de</strong>s frères Jules et Henry, mais je fais lʹobservation en général.<br />

Nous allons bien ici, nos ff. <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Grâce à Grenelle sont installés et sont dans<br />

<strong>de</strong> meilleures conditions pour leurs œuvres, je crois quʹils marcheront; ils ont obtenu, dès<br />

lʹabord, le Saint Sacrement; cʹest une précieuse faveur que le Seigneur nʹa jusquʹici refusée<br />

à aucune <strong>de</strong> nos maisons; je les regar<strong>de</strong> comme constituées quand cette grâce insigne leur<br />

est accordée. On va aussi passablement à Arras, malgré lʹinsuffisance du personnel. Notre<br />

nouveau frère, M. lʹabbé Leleu, prend bonne position parmi nous, cʹest un secours envoyé<br />

<strong>de</strong> Dieu; il est <strong>avec</strong> le f. Tourniquet au patronage <strong>de</strong> S t ‐Charles.<br />

Nos ateliers sʹorganisent toujours, ceux <strong>de</strong>s bronzes marchent, mais sont assez<br />

lourds à soutenir, nous observons les choses pour les engager que dans une limite pru‐<br />

<strong>de</strong>nte.<br />

Adieu, mon bon ami, jʹapprendrai <strong>avec</strong> plaisir que vous continuez à vivre en bonne<br />

et cordiale entente; je prie Dieu <strong>de</strong> répandre sur vous tous et sur vos œuvres ses plus pré‐<br />

cieuses bénédictions.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

596 à MM. Marcaire et Guillot<br />

MLP. se réjouit <strong>de</strong> la bonne entente qui règne entre eux. Il rend grâce pour leur zèle. Prière et humilité agréées<br />

par Dieu. Présence divine au cœur <strong>de</strong> leurs efforts.<br />

Vaugirard, 16 février 1859<br />

Bien chers enfants en N.S.,<br />

Il y a si longtemps que je ne vous ai écrit que vous aurez mis <strong>de</strong> côté tout souvenir<br />

<strong>de</strong> votre vieil ami, si vous nʹavez écouté que la stricte justice; mais, comme la charité lʹem‐<br />

porte sur tout chez nous, jʹespère encore que vous recevrez <strong>avec</strong> bon vouloir ces quelques<br />

lignes toutes tardives quʹelles soient. Vous mʹavez écrit, chers et bien‐aimés enfants, <strong>de</strong><br />

douces petites lettres qui ont produit tout leur effet puisque vous souhaitiez quʹelles me<br />

fussent agréables et mʹassurassent <strong>de</strong> vos affectueux sentiments pour moi et pour toute<br />

notre petite famille. Nous vous rendions bien ici la pareille par le cœur et aux pieds du<br />

Seigneur surtout, à qui nous remettions le soin <strong>de</strong> répandre sur vous tous les biens que<br />

nous vous souhaitions. Jʹapprends <strong>avec</strong> joie que nos vœux nʹont pas été stériles, que la<br />

grâce dʹen haut ne vous a pas manqué, que la paix règne dans vos âmes et le bon accord<br />

dans tous vos rapports. Que le divin Maître en soit béni! Quʹil soit remercié aussi du se‐<br />

cours quʹIl vous donne visiblement dans vos travaux puisque, à travers vos difficultés et<br />

lʹinsuffisance ordinaire <strong>de</strong> vos forces, vous obtenez néanmoins dʹheureux fruits; cʹest que<br />

la prière et lʹhumble aveu <strong>de</strong> notre faiblesse trouvent toujours grâce <strong>de</strong>vant le Seigneur,<br />

qui vient alors dans sa miséricor<strong>de</strong> à notre secours. Humilions‐nous donc toujours, chers<br />

amis, et, si notre impuissance, nos succès trop imparfaits, nos défaillances même ont cet ef‐<br />

fet <strong>de</strong> nous abaisser à nos propres yeux et <strong>de</strong> mettre tout notre recours en Dieu, ne nous af‐<br />

fligeons pas <strong>de</strong> lʹimperfection <strong>de</strong> nos travaux, <strong>de</strong>s ténèbres <strong>de</strong> notre pauvre esprit, <strong>de</strong>s in‐<br />

consistances <strong>de</strong> notre cœur; si tout cela nous abaisse, tout cela est <strong>de</strong> Dieu, cʹest un don,<br />

quʹIl en soit à jamais béni. Cʹest ainsi, chers enfants, que vous vous consolerez dans vos<br />

peines, vous y reconnaîtrez la croix et, à son aspect, vous retrouverez lʹassurance et le re‐<br />

719


pos <strong>de</strong> vos âmes. Je dis ces choses, chers amis, en regardant votre petite maison, car la vé‐<br />

rité <strong>de</strong> cette pensée sʹy réalise bien; vous ne pouvez suffire à rien, tout ce que vous exécu‐<br />

tez ne réalise jamais que la moitié <strong>de</strong> vos vues, vos exercices sont brisés, vos communica‐<br />

tions et conseils toujours hâtifs et trop courts, et pourtant vous restez sur pied, constants<br />

dans votre vocation, appliqués <strong>avec</strong> courage à vos œuvres et sincèrement dévoués au ser‐<br />

vice <strong>de</strong> Dieu; vous nʹêtes pas seuls évi<strong>de</strong>mment, Il est auprès <strong>de</strong> vous, Il opère en vous et<br />

met sa force en ai<strong>de</strong> à vos humbles efforts. Oh! encore une fois, quʹIl en soit béni, et puisse‐<br />

t‐Il ainsi toujours vous gar<strong>de</strong>r dans sa miséricor<strong>de</strong> et dans son amour!<br />

Je vous embrasse, chers amis, bien tendrement et suis en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

597 à M. Caille<br />

Objections <strong>de</strong> MLP. à lʹétablissement dʹune Œuvre nouvelle (une bibliothèque populaire) dans la maison dʹAr‐<br />

ras. ʺUn peu <strong>de</strong> bien soli<strong>de</strong>ment fait vaut mieux quʹune multitu<strong>de</strong> dʹentreprises faibles et sans portée religieuse<br />

et moraleʺ.<br />

Vaugirard, 18 février 1859<br />

Mon bon ami et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie la réponse que je crois <strong>de</strong>voir faire à M. lʹabbé Berton, les objections<br />

que je lui soumets ont, à mes yeux, bien plus <strong>de</strong> force encore que je ne le dis dans ma let‐<br />

tre; tous mes frères du Conseil pensent <strong>avec</strong> moi que lʹintroduction <strong>de</strong> ce nouvel élément<br />

dans votre maison y sera fort préjudiciable à vos frères, à vos enfants, à lʹordre <strong>de</strong> la mai‐<br />

son, à lʹunité <strong>de</strong> vos œuvres; je vous invite donc à peser bien mûrement la chose <strong>de</strong>vant<br />

Dieu et à ne pas cé<strong>de</strong>r trop aisément à lʹattrait que vous avez <strong>de</strong> concilier beaucoup <strong>de</strong> suf‐<br />

frages à votre maison et dʹy établir le plus <strong>de</strong> choses quʹil se pourra.<br />

Un peu <strong>de</strong> bien soli<strong>de</strong>ment fait vaut mieux quʹune multitu<strong>de</strong> dʹentreprises faibles et<br />

sans portée religieuse et morale. Soyez sûr que tous les inconvénients prévus par ma lettre<br />

sont inévitables. Pour ne pas, du reste, trop abon<strong>de</strong>r dans mon sens et me confier plus quʹil<br />

ne faut à mon jugement, je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> particulièrement <strong>de</strong> voir confi<strong>de</strong>ntiellement M.<br />

lʹabbé Cacheleux, dont le bon esprit et le sincère intérêt pour vos œuvres mʹinspirent une<br />

gran<strong>de</strong> confiance, et <strong>de</strong> lui dire mes appréhensions, lʹétat <strong>de</strong> fatigue habituel <strong>de</strong> vos <strong>de</strong>ux<br />

frères et <strong>de</strong> votre fille <strong>de</strong> service, la dissipation inévitable que tous les lecteurs allant et ve‐<br />

nant incessamment donneront à tout le mon<strong>de</strong>, les empêchements quʹils apporteront au<br />

service et aux soins quʹon doit aux enfants; je suis sûr quʹil inclinera, comme moi, à regar‐<br />

<strong>de</strong>r ce nouvel élément <strong>de</strong> mouvement et <strong>de</strong> désordre comme infiniment regrettable. Sʹil en<br />

était autrement, je suis disposé à me rendre à son avis, aimant mieux mʹen rapporter à son<br />

sentiment quʹau mien propre.<br />

Adieu, mon bien bon ami, je ne vous écris point plus longuement pour ne point re‐<br />

tar<strong>de</strong>r ma lettre.<br />

Embrassez nos frères, encouragez‐les <strong>de</strong> ma part, assurez‐les <strong>de</strong> ma tendre affec‐<br />

tion.<br />

Votre ami et Père en N.S.,<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹattendrai les renseignements que vous me promettez pour la fin du mois.<br />

720


598 à M. Halluin<br />

Insuffisance en personnel. Il plaît à Dieu <strong>de</strong> nous faire marcher petitement. Il faut <strong>de</strong>s hommes dʹabnégation.<br />

Nouvelles <strong>de</strong>s frères. Un premier frère allemand.<br />

Vaugirard, 19 février 1859<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Nous avons, bien cordialement et en tout sens, examiné si nous avions présente‐<br />

ment quelques ressources pour assister le personnel <strong>de</strong> vos classes, nous nʹavons rien<br />

trouvé <strong>de</strong> praticable. Les hommes tout formés pour ces sortes dʹemplois ne nous arrivent<br />

guère, et ceux que nous formons nous‐mêmes sont trop jeunes pour que nous puissions<br />

<strong>avec</strong> assurance les éloigner si tôt <strong>de</strong> la maison. Les essais que nous avons faits en ce sens<br />

nʹont point eu <strong>de</strong> succès, comme nous lʹéprouvons encore présentement. Je crois quʹil nʹy a<br />

pas lieu dʹuser davantage <strong>de</strong> ce moyen, quant à ce moment. Je ne vois donc dʹautre res‐<br />

source que <strong>de</strong> faire venir un étranger pour ai<strong>de</strong>r aux classes, si vous ne préférez définiti‐<br />

vement conduire une partie <strong>de</strong> vos enfants chez les Frères, comme le fait M. Caille. Je re‐<br />

grette sincèrement <strong>de</strong> ne pouvoir vous donner un appui plus efficace, mais nous ne sau‐<br />

rions aller plus vite que Dieu ne le veut; il Lui plaît que toutes nos œuvres <strong>de</strong>meurent dans<br />

une absolue dépendance <strong>de</strong> son secours, marchent petitement, se fon<strong>de</strong>nt dans la priva‐<br />

tion et la patience. Acceptons les dispositions <strong>de</strong> sa divine Sagesse et espérons quʹici,<br />

comme toujours, la croix ne sera pour nous quʹun signe <strong>de</strong> grâce et <strong>de</strong> bénédiction.<br />

Il nous était venu, ces temps <strong>de</strong>rniers, un frère [Charles Petit] dʹâge fait, 33 ans, pro‐<br />

pre aux classes, mais il nʹa pas persévéré et nous‐mêmes nʹavions aucun désir <strong>de</strong> le gar<strong>de</strong>r,<br />

ne lui trouvant pas du tout lʹesprit religieux, lʹabnégation et la disposition <strong>de</strong> se prêter à<br />

tout bien, comme on doit lʹavoir chez nous. Nous en attendons <strong>de</strong>ux autres, mais ils sont<br />

jeunes et <strong>de</strong>vront être formés, avant tout, au genre <strong>de</strong> vie que nous suivons. On nous en<br />

annonce un troisième qui doit venir au mois dʹavril <strong>de</strong> Cologne. Il ne sait pas du tout le<br />

français; ce sera les prémices <strong>de</strong>s nations étrangères. Il vient <strong>avec</strong> le désir <strong>de</strong> faire quelque<br />

bien aux pauvres allemands, en si grand nombre à Paris, et pour commencer le lien entre<br />

nous et les âmes dévouées qui se sentent en Allemagne sympathie pour notre œuvre. Il<br />

paraît quʹelle commence à y être un peu connue.<br />

Nous nous appliquons, autant que nous pouvons, à pousser aux étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s classes<br />

ceux qui peuvent y avoir aptitu<strong>de</strong>. Avec un peu <strong>de</strong> temps, nous arriverons à former <strong>de</strong>s<br />

sujets. Mais, hélas! lʹavenir, je le sens bien, ne fait rien pour le présent.<br />

La petite communauté <strong>de</strong> Grenelle se fon<strong>de</strong> bien. Nous allons aussi <strong>de</strong>s autres parts<br />

assez bien. Que ne puis‐je, cher Monsieur lʹabbé, vous donner un peu dʹai<strong>de</strong>, afin que vous<br />

puissiez, vous aussi, dire: ʺTout va bien!ʺ Les renseignements que vous mʹavez envoyés<br />

me suffisent et mʹont bien intéressé, je vous en remercie. Jʹespère quʹen les rapprochant<br />

plus tard <strong>de</strong> ceux que vous mʹenverrez en dʹautres années, ils serviront à constater vos<br />

progrès et les constantes miséricor<strong>de</strong>s du Seigneur.<br />

Jʹembrasse vous et nos frères en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. La lettre du f. Alphonse [Vasseur] me laisse penser que vous gar<strong>de</strong>z Georges<br />

presque à regret; nʹhésitez pas, cher Monsieur lʹabbé, à me le dire si vous souhaitez que<br />

nous le rappelions immédiatement; je pensais que, pour ne pas le décourager entièrement,<br />

il serait mieux dʹattendre jusquʹà la retraite, mais je mʹen rapporte à cet égard tout à fait à<br />

votre jugement.<br />

721


599 à M. Vasseur<br />

Souvent la privation et les souffrances avancent plus nos affaires que <strong>de</strong> voir nos désirs satisfaits. Une lettre nʹa<br />

pas été transmise.<br />

19 février 1859<br />

Cher enfant en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> la lettre que vous mʹavez écrite. Je vois <strong>avec</strong> joie la sollicitu<strong>de</strong><br />

chrétienne <strong>avec</strong> laquelle vous vous occupez du bien <strong>de</strong> vos chers enfants. Malheureuse‐<br />

ment, je ne puis, comme je lʹexplique à notre cher M. Halluin, vous secourir efficacement,<br />

comme je le voudrais en ce moment. Espérons quʹ<strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> patience le bon Maître,<br />

qui sait nos besoins, daignera y subvenir. Souvent la privation et la souffrance avancent<br />

plus nos affaires que ne le ferait la satisfaction <strong>de</strong> nos désirs. Inclinons notre volonté et<br />

conformons‐la aux vues du Seigneur, Il nous en tiendra compte et ne nous délaissera<br />

point.<br />

Jʹai une réparation à faire à votre f. Ernest. La petite lettre ci‐jointe vous a été <strong>de</strong>sti‐<br />

née par lui, au mois <strong>de</strong> janvier, jʹai cru vous lʹavoir envoyée et, à mon grand étonnement, je<br />

lʹai retrouvée il y a quelques jours. Il ne méritait donc pas les reproches que vous lui avez<br />

faits. Il est en ce moment assez bien disposé, malheureusement son esprit est assez mobile<br />

et ne sʹasseoit pas une fois pour toutes dans la voie <strong>de</strong> la charité et du dévouement. Espé‐<br />

rons quʹ<strong>avec</strong> le temps, il finira par sʹy trouver soli<strong>de</strong>ment confirmé et que la grâce du Sei‐<br />

gneur le soutiendra.<br />

Jʹembrasse bien cordialement tous nos frères et je suis, bien cher enfant, tout à vous<br />

en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

600 à M. Halluin<br />

MLP. remet au jugement <strong>de</strong> M. Halluin le cas dʹun jeune postulant. Nouvelles <strong>de</strong> Vaugirard et <strong>de</strong> Grenelle.<br />

Former <strong>de</strong>s maîtres est une œuvre <strong>de</strong> patience.<br />

Vaugirard, 1er mars 1859<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Notre jeune Marchal nous avait donné satisfaction jusquʹici, mais, <strong>de</strong> temps à autre,<br />

il avait quelques indispositions qui lui donnaient un peu dʹinquiétu<strong>de</strong>; dès quʹelles étaient<br />

passées, il reprenait sa tranquillité et sa gaieté. Depuis quelques jours, ses malaises <strong>de</strong> san‐<br />

té sʹétant répétés, il semble tout découragé et voudrait, dit‐il, sʹen retourner dans son pays<br />

où il nʹétait jamais mala<strong>de</strong>. Le mé<strong>de</strong>cin ne voit rien dʹinquiétant dans son état et pense<br />

quʹil y a beaucoup dʹimagination et <strong>de</strong> faiblesse dʹesprit dans son mal. Je ferai, à lʹégard <strong>de</strong><br />

cet enfant, ce que vous croirez le mieux pour lui. Il peut nous être un peu utile, sʹil montre,<br />

comme il lʹavait fait jusquʹici, <strong>de</strong> la bonne volonté; mais, si son esprit se trouble et se bute,<br />

nous nʹen pourrons rien faire. Jʹespérais que cette disposition serait toute passagère. Voilà<br />

trois jours quʹil persiste à <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à retourner en Belgique, disant que là il retrouvera la<br />

santé dont il nʹa jamais joui à Arras, non plus quʹici. Je vous serai reconnaissant, cher Mon‐<br />

sieur lʹabbé, <strong>de</strong> me dire ce qui vous semble à faire au sujet <strong>de</strong> cet enfant. Si vous jugiez,<br />

dʹaprès la connaissance que vous avez <strong>de</strong> son esprit, quʹon peut espérer un retour à <strong>de</strong><br />

meilleures dispositions et quʹil y eût lieu <strong>de</strong> temporiser, je vous serais obligé <strong>de</strong> lui écrire et<br />

722


<strong>de</strong> lʹinviter à attendre jusquʹà la retraite, moment où peut‐être quelquʹun <strong>de</strong> chez vous<br />

viendra et pourrait remettre un peu sa raison facile à ébranler. Je mʹen rapporte pleine‐<br />

ment à votre sagesse et suivrai la marche que vous croirez <strong>de</strong>voir me conseiller. Il assure<br />

quʹil rend du sang par la poitrine et quelquefois par les urines. M. Lantiez dit que, si cela<br />

est arrivé, cʹest à la suite <strong>de</strong> fatigue prise au jeu auquel il se livre parfois un peu ar<strong>de</strong>m‐<br />

ment, ce qui peut lui occasionner <strong>de</strong>s inflammations. En ensemble, il nous semble bon gar‐<br />

çon, mais peu ferme en volonté et peu fort en raison.<br />

Le f. Joseph [Loquet] me prie <strong>de</strong> vous remettre la petite note ci‐jointe, où il vous fait<br />

quelques <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s, particulièrement <strong>de</strong> semences pour le jardin. Il vous prierait dʹen<br />

faire lʹenvoi bientôt, afin que lʹensemencement ne soit point retardé. Vous auriez la bonté<br />

dʹen porter la note au compte <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Vaugirard.<br />

Ce bon frère paraît assez rassis en ce moment. Sans être bien tenace au travail, il<br />

montre assez <strong>de</strong> bonne volonté; le mouvement <strong>de</strong> la communauté le soutien du reste, et<br />

nous nʹen sommes pas mécontents. Georges paraît aussi reprendre un peu <strong>de</strong> bon vouloir,<br />

mais on ne sait jamais bien ce quʹil est, à cause <strong>de</strong> son peu dʹouverture et dʹinitiative. Le<br />

reste va assez bien. Je souhaite, cher Monsieur lʹabbé, que le Seigneur vous assiste et vous<br />

donne secours pour vos classes surtout. Les nôtres laissent à désirer également parce que<br />

nos sujets sont jeunes et que lʹexpérience est un grand point dans lʹenseignement. Nous<br />

travaillons à former <strong>de</strong>s maîtres, mais cʹest une œuvre lente et qui veut bien <strong>de</strong> la patience.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, nous prierons bien le bon S t Joseph, dont nous com‐<br />

mençons le mois aujourdʹhui, <strong>de</strong> protéger tout particulièrement vous, vos frères et vos<br />

chers enfants.<br />

Votre tout respectueux et affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Nos frères vont bien à Grenelle; le bon abbé Leleu sʹaccoutume bien <strong>avec</strong> nous.<br />

Cʹest, je crois, union parfaitement consommée.<br />

601 à M. Halluin<br />

Nouvelles <strong>de</strong> Vaugirard. MLP. juge sa Congrégation ʺune création encore bien nouvelleʺ, dont il mesure la jeu‐<br />

nesse et la faiblesse.<br />

Vaugirard, 5 mars 1859<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Notre jeune Marchal avait déjà changé dʹavis lorsque votre bonne et paternelle let‐<br />

tre lui a été remise. Il était venu la veille tout pleurant, me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r pardon du moment<br />

<strong>de</strong> faiblesse quʹil avait ressenti, lʹattribuant à sa tête qui, disait‐il, avait tourné et lui avait<br />

ôté le sens. Il avait parlé dans le même esprit à M. Lantiez, qui avait promis dʹarranger les<br />

choses <strong>avec</strong> moi. Ce nʹétait pas affaire bien difficile, car nous nʹavions, ni lʹun ni lʹautre,<br />

grand peine à comprendre ce moment <strong>de</strong> défaillance dʹun pauvre enfant qui est encore<br />

bien peu fort et qui a gardé les traces <strong>de</strong> son premier genre <strong>de</strong> vie. Nous allons donc mar‐<br />

cher <strong>de</strong> nouveau, la santé <strong>de</strong> ce bon garçon est meilleure, il recommence un peu son tra‐<br />

vail. Espérons que, le Seigneur aidant, il pourra sʹasseoir définitivement dans le bien.<br />

Nous verrons <strong>avec</strong> joie le f. Thuillier à la retraite. Nous recevrons <strong>avec</strong> plaisir, avant<br />

ou après, le f. [Alphonse] Vasseur, bien que lʹépoque <strong>de</strong> son éloignement soit encore assez<br />

723


approchée. Je crains seulement quʹil nʹait un peu dʹennui durant son séjour ici, nʹayant<br />

nulle occupation bien indiquée. Quand les frères viennent à la retraite, les exercices spiri‐<br />

tuels remplissent leur journée; mais, en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> ce temps, je ne vois pas bien comment<br />

ils pourront sʹoccuper. Cette objection me semble assez frappante pour le f. Alphonse en<br />

particulier, qui est assez actif, et que <strong>de</strong>s jours sans emploi auront bientôt lassé. Il semble<br />

donc que, sʹil ne se propose pas <strong>de</strong> faire lui‐même une petite retraite séparée, il y aurait<br />

lieu, peut‐être, dʹexaminer sʹil ne ferait pas mieux dʹattendre la prochaine retraite. Je laisse<br />

cela, cher Monsieur lʹabbé, tout à fait à votre décision, et je trouverai bien ce que vous au‐<br />

rez cru <strong>de</strong>voir régler.<br />

Marchal et tous vos enfants ont accueilli <strong>avec</strong> joie lʹespoir que vous leur donnez <strong>de</strong><br />

vous voir bientôt, et nous, nous ne vous verrons jamais aussi souvent que nous le désire‐<br />

rions. Je suis heureux dʹapprendre que votre retraite a eu dʹheureux fruits; vos chers en‐<br />

fants, espérons‐le, en gar<strong>de</strong>ront une impression assez vive pour que leur esprit sʹaméliore<br />

encore et vous prépare la récompense <strong>de</strong> vos soins.<br />

Nous allons ici toujours passablement, non sans sentir toujours comme vous lʹinsuf‐<br />

fisance <strong>de</strong> nos moyens. Nous sommes, dans lʹensemble comme dans chaque œuvre parti‐<br />

culière, une création encore bien nouvelle, nous sentons notre jeunesse et la faiblesse<br />

quʹelle comporte.<br />

Ayons patience, les années apporteront les grâces <strong>de</strong> force et <strong>de</strong> confirmation. Nous<br />

vous embrassons tous ainsi que nos frères. Je suis tout particulièrement, <strong>avec</strong> respect et af‐<br />

fection,<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

602 à M me la C tesse <strong>de</strong> Grandville<br />

Gratitu<strong>de</strong> pour la générosité dont elle fait preuve à lʹégard <strong>de</strong> la Communauté.<br />

Vaugirard, 8 mars 1859<br />

Madame,<br />

Le jeune Gauffriau nous est arrivé à bon port le 3 <strong>de</strong> ce mois; il nous paraît être jus‐<br />

quʹici dans les meilleures dispositions. Son air mo<strong>de</strong>ste et sa bonne volonté lui ont gagné<br />

dès lʹabord lʹaffection <strong>de</strong> tous chez nous, je crois donc quʹil y fera sa position et quʹil pourra<br />

nous être vraiment utile. Comme il sait que jʹai lʹhonneur <strong>de</strong> vous écrire, il me prie <strong>de</strong> vous<br />

offrir tous ses remerciements. Jʹy joins aussi moi‐même, Madame, lʹexpression <strong>de</strong> toute ma<br />

reconnaissance pour lʹextrême bienveillance que vous nous témoignez en toute occasion;<br />

jʹy vois une marque particulière <strong>de</strong>s miséricor<strong>de</strong>s du Seigneur à lʹégard <strong>de</strong> notre petite fa‐<br />

mille.<br />

Jʹai eu lʹhonneur <strong>de</strong> voir aujourdʹhui M. Billot qui doit revenir nous voir encore <strong>de</strong>‐<br />

main; je savais déjà, par lʹéloge que mʹavaient fait <strong>de</strong> lui M. le Curé <strong>de</strong> S t ‐Pierre et M. Ur‐<br />

voy lui‐même, combien il était digne dʹune haute estime et dʹune entière confiance; il<br />

pourra vous dire, Madame, combien il mʹa trouvé disposé à le secon<strong>de</strong>r dans tout ce quʹil<br />

croit utile pour le véritable avantage <strong>de</strong> notre cher M. Urvoy; notre Communauté a tou‐<br />

jours aimé à se confier à la Provi<strong>de</strong>nce bien plus quʹaux appuis humains, elle est donc bien<br />

inclinée à tout acte <strong>de</strong> désintéressement; notre conduite le prouvera, je lʹespère, en toute<br />

occasion et en celle‐ci en particulier.<br />

724


Veuillez agréer, Madame, la nouvelle assurance <strong>de</strong>s sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> dé‐<br />

vouement <strong>avec</strong> lesquels je suis<br />

Votre humble et obéissant serviteur en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. M. Georges <strong>de</strong> Lauriston, qui va toujours bien, vous offre ses respectueux sou‐<br />

venirs; il est, <strong>de</strong>puis un mois, installé <strong>avec</strong> une petite colonie <strong>de</strong> nos frères à la maison <strong>de</strong><br />

N.D. <strong>de</strong> Grâce à Grenelle, mais il nous revient ici plusieurs fois par semaine et y passe ré‐<br />

gulièrement la journée du mercredi.<br />

Nous sommes fidèles à acquitter la messe <strong>de</strong> réparation.<br />

603 à M. Caille<br />

M. Halluin a renoncé à établir un cabinet <strong>de</strong> lecture. Union entre les maisons et entre les frères. Productions <strong>de</strong><br />

lʹatelier <strong>de</strong> bronze <strong>de</strong> Vaugirard.<br />

Vaugirard, 11 mars 1859<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

La <strong>de</strong>rnière lettre que vous mʹavez écrite est restée quelques jours à Nazareth avant<br />

<strong>de</strong> me parvenir, jʹai moi‐même un peu tardé à vous répondre; jʹespère que vous nʹen êtes<br />

point contrarié; nos occupations, vous le savez, sont bien multipliées, au jour le jour, il<br />

nous advient mille soins qui, trop souvent, nous absorbent plus que nous ne le voudrions.<br />

Jʹai vu <strong>avec</strong> une vive satisfaction, mon bon ami, que vous ayez pu, sans manquer à<br />

lʹobligeance ni à la charité à lʹégard <strong>de</strong> M. lʹabbé Berton, éviter dʹadmettre un cabinet <strong>de</strong><br />

lecture dans votre maison; je me serais cependant tout à fait rendu à lʹavis <strong>de</strong> M. Cache‐<br />

leux et vôtre, si vous aviez persisté à penser que la chose eût moins dʹinconvénients que je<br />

ne le croyais. Je vous sais aussi bien bon gré dʹavoir si cordialement renoncé à votre senti‐<br />

ment en cette occasion, cet acte <strong>de</strong> détachement sera agréable aux yeux <strong>de</strong> Dieu. Quant à la<br />

proposition qui vous est faite pour les fonctions dʹexécuteur testamentaire, je pense tout à<br />

fait comme vous que nous <strong>de</strong>vons bien éviter <strong>de</strong> rien faire qui puisse mécontenter lʹEvê‐<br />

ché, et quʹil nʹy a pas lieu dʹaccepter la proposition si elle doit avoir cette conséquence;<br />

dʹautant que la personne dont il sʹagit ne manquera pas <strong>de</strong> trouver quelquʹun <strong>de</strong> sûr pour<br />

exécuter ses volontés et quʹil nʹy a conséquemment nul défaut <strong>de</strong> charité à décliner ce soin;<br />

pensez‐y <strong>de</strong> nouveau et faites, après avoir examiné la chose <strong>de</strong>vant Dieu, ce qui vous para‐<br />

îtra, en définitive, préférable, je mʹen rapporte tout à vous pour cette détermination en un<br />

sens ou en un autre.<br />

Lʹéchéance <strong>de</strong> la traite <strong>de</strong> Sedan pour notre drap doit échoir ces jours‐ci; puisque<br />

vous voulez bien la payer, je tiendrai à votre disposition les 416f qui en forment le mon‐<br />

tant, pour être remis soit au moment <strong>de</strong> la retraite, soit avant, si vous avez quelque pro‐<br />

chaine occasion.<br />

La retraite aura lieu le 4 avril et jours suivants; elle sera donnée par le r.p. Renaud,<br />

qui nous lʹa déjà donnée lʹannée <strong>de</strong>rnière et dont nous avons été extrêmement satisfaits;<br />

vous verrez si quelquʹun <strong>de</strong> vos frères peut sʹéchapper pour y prendre part et si vous‐<br />

même trouvez possible dʹy faire quelque apparition, je sais quelles charges pèsent sur vos<br />

épaules et combien vous êtes tous strictement retenus.<br />

725


Je suis heureux dʹapprendre que mon f. Henry [Guillot] va mieux; jʹespère quʹun<br />

peu <strong>de</strong> temps suffira, <strong>avec</strong> vos bons soins si pleins dʹaffectueuse sollicitu<strong>de</strong>, pour achever<br />

<strong>de</strong> le remettre; assurez‐le, ainsi que le f. Marcaire, <strong>de</strong> nos tendres sentiments. Tout le<br />

mon<strong>de</strong> ici reste bien dévoué à votre maison et nʹy fait point <strong>de</strong> différence <strong>avec</strong> celle <strong>de</strong><br />

Vaugirard; cʹest ainsi que le Seigneur nous veut.<br />

Nous avons <strong>de</strong>ux jeunes frères nouveaux qui nous conviennent bien, jʹespère quʹils<br />

sʹaccoutumeront <strong>avec</strong> nous; lʹun dʹeux est M. Augustin Déage <strong>de</strong> Pont‐S t ‐Maxence, il est<br />

venu <strong>avec</strong> nous <strong>de</strong>puis le 5 <strong>de</strong> ce mois, nous espérons bien <strong>de</strong> son avenir parmi nous.<br />

Je vous recomman<strong>de</strong> à lʹoccasion notre magasin <strong>de</strong> bronze; nous faisons mainte‐<br />

nant, aux prix les plus favorables et en <strong>de</strong> bonnes conditions, tous les vases dʹautel et aussi<br />

tous les bronzes: chan<strong>de</strong>lier, croix, lampes, etc. Nous avons aussi une multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> petits<br />

bronzes dʹart pour les loteries, <strong>de</strong>puis 1f jusquʹà 500.<br />

Adieu, mon bien bon ami, nous serons heureux <strong>de</strong> vous revoir, heureux aussi<br />

dʹembrasser nos ff. Henry et Jules [Marcaire].<br />

Votre affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

604 à M. Halluin<br />

Raisons invoquées pour autoriser le frère Vasseur à venir se reposer à la Maison‐Mère. Sʹefforcer <strong>de</strong> ne pas sʹab‐<br />

senter <strong>de</strong>s fêtes <strong>de</strong> communauté. Désir <strong>de</strong> former <strong>de</strong>s apprentis jardiniers à Vaugirard. Constructions pour lʹor‐<br />

phelinat: conditions ordinairement dispendieuses <strong>de</strong> telles fondations.<br />

Vaugirard, 17 mars 1859<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Notre retraite aura lieu définitivement à partir du dimanche au soir, 3 avril, jus‐<br />

quʹau vendredi matin, 8 du même mois. Ces dispositions ont été réglées par notre petit<br />

Conseil, hier. Elle sera donnée par le r.p. Renaud, homme également pieux et expérimenté.<br />

Nous y verrons <strong>avec</strong> plaisir le f. Thuillier que vous vous proposez <strong>de</strong> nous envoyer.<br />

Quand au f. Vasseur, vous jugerez sʹil est bon quʹil vienne, soit avant, soit après, prendre<br />

<strong>de</strong>ux ou trois jours <strong>de</strong> repos et se recueillir un peu. Il nʹy a pas, certainement, nécessité po‐<br />

sitive à ce voyage, mais il peut être considéré comme une <strong>de</strong> ces con<strong>de</strong>scendances pater‐<br />

nelles que la charité peut conseiller, en communauté comme partout. Je laisse la chose tout<br />

à fait à votre décision, cher Monsieur lʹabbé, et trouverai très bien ce que vous croirez <strong>de</strong>‐<br />

voir régler. Je ne croirais pas commo<strong>de</strong> pour vous <strong>de</strong> les envoyer tous les <strong>de</strong>ux ensemble à<br />

la retraite, car ce serait vous dégarnir beaucoup et vous obliger peut‐être à faire venir<br />

quelquʹun du <strong>de</strong>hors pour vous ai<strong>de</strong>r, ce qui a toujours quelque inconvénient. Si vous<br />

étiez définitivement dʹavis dʹenvoyer le f. Vasseur, il pourrait peut‐être venir samedi pro‐<br />

chain, une partie <strong>de</strong> nos frères <strong>de</strong>vant se réunir pour la fête <strong>de</strong> S t Joseph. Si, du reste, cette<br />

fête se fait aussi à Arras et que vous préfériez lʹenvoyer la semaine suivante, tout serait<br />

également bien. Je nʹai, à cet égard, aucune raison précise <strong>de</strong> rien déterminer. Encore une<br />

fois, cher Monsieur lʹabbé, je vous laisse juge <strong>de</strong> ce qui sera le mieux.<br />

Le f. Joseph [Loquet] désire que le f. Thuillier lui apporte 6 petites houlettes <strong>avec</strong> 4<br />

bêches pour faire travailler nos enfants. Plusieurs dʹentre eux commencent à aller passa‐<br />

blement à la culture. Je crois que, si on sʹy mettait sérieusement, on pourrait <strong>de</strong> ce côté,<br />

plus sûrement encore que <strong>de</strong>s autres, tirer quelque résultat du travail. Je pense que vous<br />

726


avez bien fait, <strong>de</strong> votre côté, <strong>de</strong> prendre un jardinier sachant son état et pouvant bien<br />

conduire vos enfants. Nos frères, ici, sont faiblement capables sous ce rapport. Le f. Joseph<br />

y aurait assez <strong>de</strong> goût, mais il nʹest pas assez fort et ne peut apporter aux choses quʹil fait<br />

la suite et lʹactivité que toute entreprise <strong>de</strong>man<strong>de</strong>.<br />

Nous allons être obligés <strong>de</strong> faire un bâtiment au printemps. Cʹest une triste nécessi‐<br />

té car, en ce moment, les constructions sont ruineuses à Paris; mais cʹest là le sort <strong>de</strong>s fon‐<br />

dations, elles se font presque toujours dans <strong>de</strong>s conditions dispendieuses. Nous ne voyons<br />

pas moyen, pour nous, <strong>de</strong> nous y soustraire. De votre côté, vous avez dû beaucoup faire et<br />

refaire, sans arriver pleinement aux résultats satisfaisants que vous auriez en vue. Je crois<br />

que le bon Dieu nous mène ainsi pour nous tenir dans la pauvreté et nous empêcher <strong>de</strong><br />

nous mettre trop à lʹaise. Il veut aussi exercer nos forces dans le travail qui entre essentiel‐<br />

lement dans ses <strong>de</strong>sseins sur nous. Consolons‐nous donc, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> nos<br />

peines, <strong>de</strong> nos soins, <strong>de</strong> nos difficultés; cʹest au milieu <strong>de</strong> tout cela que se consomme lʹœu‐<br />

vre intérieure <strong>de</strong> notre sanctification, et cʹest à ce prix aussi que sʹachètent les fruits <strong>de</strong> sa‐<br />

lut que produisent nos œuvres.<br />

Tous nos frères vous sont tendrement unis en N.S. Je me joins à eux pour vous assu‐<br />

rer <strong>de</strong> notre respectueuse et cordiale affection.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

605 à M. Caille<br />

Joie <strong>de</strong> revoir M. Caille, mais lui, MLP., ne peut se rendre à Amiens.<br />

Vaugirard, 18 mars 1859<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Vous ne pouvez douter quʹune petite visite <strong>de</strong> vous ne nous fasse grand plaisir;<br />

nous ne vous voyons jamais assez souvent à notre gré; nous nʹaurons quʹun regret, cʹest<br />

que votre apparition soit si courte.<br />

Je me rendrais moi‐même <strong>de</strong> grand cœur à lʹinvitation que vous me faites <strong>de</strong> vous<br />

aller voir, mais je crois que la saison est encore trop peu avancée pour que je puisse voya‐<br />

ger sans inconvénient; je ne sors pas jusquʹici <strong>de</strong> Vaugirard et je ne vais même pas à Paris.<br />

Après Pâques, jʹespère que je serai moins timi<strong>de</strong> et que je pourrai faire <strong>de</strong> votre côté une<br />

petite excursion.<br />

Adieu, mon bien bon ami, à bientôt, assurez nos frères <strong>de</strong> ma tendre affection et<br />

croyez‐moi, en J. et M.<br />

Votre tout dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

606 à M. Halluin<br />

La vie religieuse implique le détachement vis‐à‐vis <strong>de</strong> sa famille. Travailler à <strong>de</strong>venir <strong>de</strong> vrais et fidèles serviteurs<br />

du Seigneur. Les Œuvres ont grand besoin dʹêtre soutenues.<br />

Vaugirard, 24 mars 1859<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Les occupations et dérangements se succè<strong>de</strong>nt les uns aux autres mʹont amené à la<br />

fin du jour sans que jʹaie pu, comme je le voulais, vous écrire quelques lignes, et mainte‐<br />

727


nant la lassitu<strong>de</strong> ferme mes yeux et me laisse à peine un reste dʹattention à ce que je fais.<br />

Le f. Vasseur nous quitte <strong>de</strong>main assez matin, content <strong>de</strong> son voyage qui lʹa un peu reposé<br />

et distrait, sans peut‐être avoir dʹautre avantage bien précis. Mais il est bien disposé à re‐<br />

prendre auprès <strong>de</strong> vous son service <strong>avec</strong> ar<strong>de</strong>ur et à vous secon<strong>de</strong>r <strong>de</strong> tout son cœur. Jʹes‐<br />

père quʹil continuera à vous donner satisfaction. Nous verrons <strong>avec</strong> plaisir, après lui, le f.<br />

Thuillier pour la retraite.<br />

Je crois quʹeu égard à lʹétat maladif <strong>de</strong> la mère du f. <strong>Jean</strong> [Maury] et aux arrange‐<br />

ments <strong>de</strong> famille quʹelle désire régler avant sa mort, il serait à propos <strong>de</strong> lui laisser une<br />

semaine ou un peu plus, comme une douzaine <strong>de</strong> jours, dans le cours <strong>de</strong> lʹété, pour aller la<br />

voir. Il me paraîtrait bon toutefois quʹil lui écrivît avant pour lui faire remarquer quʹon sort<br />

bien rarement <strong>de</strong> sa communauté, quand on sʹest donné au service <strong>de</strong> Dieu, quʹelle ferait<br />

donc sagement dʹexaminer sʹil ne serait pas mieux dʹajourner ce voyage à un temps plus<br />

éloigné, parce quʹune fois fait, il ne pourrait se renouveler <strong>de</strong> longtemps.<br />

Tout va autour <strong>de</strong> nous comme <strong>de</strong> coutume; les dispositions <strong>de</strong> tous sont, en en‐<br />

semble, favorables et satisfaisantes; nous espérons une bonne retraite et nous la recom‐<br />

mandons à vos prières. Si nos cœurs sʹunissent bien à Dieu, nous <strong>de</strong>viendrons plus forts<br />

pour solliciter et obtenir ses grâces. Il nous manque bien <strong>de</strong>s choses encore pour être <strong>de</strong><br />

vrais et fidèles serviteurs du Seigneur. Il nous manque aussi bien <strong>de</strong>s moyens pour soute‐<br />

nir nos œuvres; la vôtre, en particulier, a <strong>de</strong>s besoins que je sens. Nous travaillerons cor‐<br />

dialement à y donner satisfaction, mais, sans la grâce, que pourrons‐nous?<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, tous vous embrassent ici, comme moi, <strong>avec</strong> respect et<br />

tendre affection.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

607 à M. Halluin<br />

Un postulant, jeune instituteur, est envoyé à Arras.<br />

Vaugirard, 27 mars 1859<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Jʹai dit au f. Vasseur, au moment <strong>de</strong> son départ, que jʹavais quelque espérance en‐<br />

core vague que je pourrais prochainement vous donner quelquʹun pour ai<strong>de</strong>r à vos classes<br />

et surveillances, cette espérance a pris <strong>de</strong>puis plus <strong>de</strong> consistance. Nous avons admis<br />

comme postulant un instituteur [<strong>Jean</strong>‐Baptiste Hamon] âgé <strong>de</strong> 30 ans, qui nous semble<br />

avoir la piété et le dévouement désirables, <strong>avec</strong> la gravité qui rend propre à imposer le<br />

respect aux enfants. Si, comme tout nous le fait penser, il convient réellement pour votre<br />

maison, nous lʹenverrons après la retraite faire une année <strong>de</strong> postulat près <strong>de</strong> vous. Je sou‐<br />

haite bien que cet arrangement vous soit un soulagement, car nous avons bien à cœur que<br />

vous arriviez peu à peu aux conditions meilleures auxquelles vous aspirez <strong>de</strong> votre côté.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, je vous renouvelle les assurances <strong>de</strong> notre attachement<br />

bien respectueux et bien dévoué en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

728


608 à M. Guillot<br />

Compter sur Dieu et non sur nous‐mêmes. Ouvrir son âme à la confiance en Dieu.<br />

Vaugirard, 28 mars 1859<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Jʹai reçu <strong>avec</strong> satisfaction votre lettre et vos renseignements sur la situation <strong>de</strong> notre<br />

chère œuvre dʹAmiens. Ces notes sont, en ensemble, bien consolantes car, à travers quel‐<br />

ques difficultés inévitables et qui sont peut‐être envisagées comme <strong>de</strong>s croix, la bénédic‐<br />

tion même <strong>de</strong> nos travaux, vos efforts ne sont pas sans fruits, vos enfants traversent les<br />

temps les plus difficiles pour eux, vos apprentis, soutenus par vos soins vigilants, échap‐<br />

pent à bien <strong>de</strong>s dangers, sinon à tous, et gar<strong>de</strong>nt le précieux trésor <strong>de</strong> leur foi. Contentons‐<br />

nous <strong>de</strong>s résultats que le Seigneur donne à nos travaux et, en reconnaissant notre indigni‐<br />

té, reposons‐nous sur ses miséricor<strong>de</strong>s pour suppléer à nos imperfections et à nos insuffi‐<br />

sances. La confiance, lʹimmense espérance en ses infinies con<strong>de</strong>scendances, cʹest ce qui<br />

nous manque trop souvent; <strong>de</strong> là la source <strong>de</strong> nos défaillances, <strong>de</strong> nos troubles et <strong>de</strong> nos<br />

abattements; parce que nous sommes peu forts, nous croyons que tout est perdu, mais<br />

<strong>de</strong>rrière nous est le Dieu <strong>de</strong> toute force et <strong>de</strong> toute puissance qui nous soutient et qui répa‐<br />

rera au besoin tout ce que notre infirmité aura fait <strong>de</strong> défectueux. Je vous exhorte bien,<br />

cher enfant, et notre f. Jules [Marcaire] également, à ouvrir <strong>de</strong> plus en plus votre âme à<br />

cette généreuse confiance, elle vous sera, à lʹun et à lʹautre, une gran<strong>de</strong> et souveraine<br />

consolation.<br />

Jʹai averti notre f. Caille que je croyais utile que vous changiez dʹair pour un temps<br />

et que vous revinssiez près <strong>de</strong> moi remettre votre santé; jʹespère que nos soins, et la grâce<br />

du Seigneur surtout, amèneront cette cure à bonne fin. Pendant la retraite, notre f. Caille<br />

avisera à vous faire ai<strong>de</strong>r pour les soins <strong>de</strong> vos œuvres et, peu <strong>de</strong> jours après la retraite,<br />

vous nous arriverez ici où tout le mon<strong>de</strong>, votre Père surtout, vous accueillera bien tendre‐<br />

ment. Jusque là, adieu, mon cher enfant, daigne le Seigneur vous bénir ainsi que notre f.<br />

Jules et vous combler <strong>de</strong> ses grâces.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

609 à M. Caille<br />

Précieux conseils avant <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r à un remplacement. Achat dʹun orgue.<br />

Vaugirard, 31 mars 1859<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je crois que notre f. Jules [Marcaire] peut différer son départ jusquʹà dimanche ma‐<br />

tin, tâchez quʹil parte assez tôt pour ne manquer que le moins possible <strong>de</strong>s exercices du<br />

lundi, autrement sa retraite en souffrirait. Quant au f. Henry [Guillot] , il me semble quʹil<br />

vaudrait mieux quʹil passât quatre ou cinq jours après la retraite pour mettre au courant<br />

ceux qui le remplaceront; comme il est fort docile, vous pouvez compter que, sʹil a quel‐<br />

ques idées trop arrêtées, soit sur les enfants, soit sur quelque autre point, il sʹabstiendra <strong>de</strong><br />

toute réflexion; comme vous êtes peu à la maison, les frères se trouveraient inexpérimentés<br />

durant les premiers jours; il est cent détails quʹon ne peut prévoir ni donner dʹavance et<br />

pour lesquels on peut se trouver embarrassé, si on nʹa quelquʹun près <strong>de</strong> soi pour se ren‐<br />

seigner.<br />

729


Je nʹai pas dʹavis bien précis à vous donner pour votre orgue. Cependant sʹil <strong>de</strong>vait,<br />

comme chez nous, être manié par beaucoup <strong>de</strong> personnes, servir à <strong>de</strong>s répétitions, etc., je<br />

vous conseillerais dʹy mettre le moins dʹargent possible; pour une si petite chapelle, un très<br />

petit orgue est plus que suffisant; à moins dʹavoir <strong>de</strong>s organistes <strong>de</strong> quelque habileté, on<br />

ne tire pas meilleur parti <strong>de</strong> lʹun que <strong>de</strong> lʹautre. Enfin, je ne puis mʹempêcher <strong>de</strong> trouver<br />

énorme le prix quʹon <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> lʹorgue <strong>de</strong>s Frères; pour 800f, vous auriez un orgue neuf<br />

<strong>de</strong> gran<strong>de</strong> perfection et aussi complet que possible; défiez‐vous <strong>de</strong>s appréciations <strong>de</strong> pro‐<br />

vince et <strong>de</strong>s prétendues occasions. Cet avis, je le répète, ne peut avoir <strong>de</strong> précision entière,<br />

puisque je ne vois les choses que <strong>de</strong> loin et nʹai que <strong>de</strong>s connaissances imparfaites. Nos ff.<br />

<strong>de</strong> Nazareth ont un orgue excellent, <strong>de</strong> composition complète, quʹils ont eu dʹoccasion<br />

pour 500f.<br />

Adieu, mon bon ami, nous prierons bien pour vous durant la retraite, ainsi que<br />

pour toute votre maison. Tous les frères vous embrassent <strong>avec</strong> moi.<br />

Votre affectionné et dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

610 à M. Caille<br />

Mouvement <strong>de</strong> personnel. Le frère Marcaire reste à Amiens.<br />

Vaugirard, 8 avril 1859<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai trouvé notre f. Jules [Marcaire] si bien renouvelé par la retraite, si disposé à faire<br />

tous ses efforts pour bien soutenir notre œuvre dʹAmiens que je nʹai pu me déci<strong>de</strong>r à<br />

tromper son attente en changeant sa <strong>de</strong>stination immédiatement; nous verrons dʹici à la re‐<br />

traite prochaine comment les choses marcheront; <strong>avec</strong> un personnel un peu moins res‐<br />

treint, la vie commune se fera mieux sentir et aura plus <strong>de</strong> consolation; les <strong>de</strong>ux frères qui<br />

lʹaccompagnent: le f. Joseph [Loquet] et le jeune f. Luzier sont doux, flexibles et aimants;<br />

jʹespère que la bonne harmonie règnera entre eux et que vous aurez toute satisfaction.<br />

Vous pourrez, je pense, envoyer immédiatement notre f. Henry [Guillot] dont la<br />

présence nʹest plus indispensable, puisque <strong>de</strong>s forces suffisantes vous arrivent.<br />

Adieu, mon bien bon ami, notre retraite a été pleine <strong>de</strong> consolation; que nʹavez‐vous<br />

pu la partager <strong>avec</strong> nous! Je vous embrasse tendrement en J. et M..<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

611 à M. Caille<br />

M. Guillot est attendu à Vaugirard. Le rapport sur lʹŒuvre dʹAmiens sʹest égaré.<br />

Vaugirard, 13 avril 1859<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹattendais notre f. Guillot lundi, et jʹavais prié les frères Joseph [Loquet] et Luzier<br />

<strong>de</strong> vous le dire; je pense que vous aurez été arrêté par les observations précé<strong>de</strong>mment fai‐<br />

tes dans ma lettre quʹil pourrait être utile quʹil mît au fait <strong>de</strong> leur besogne les frères nouvel‐<br />

lement venus, mais la nécessité nʹest plus la même puisque le f. Jules [Marcaire] reste à<br />

730


Amiens. je vous prie donc, mon bon ami, <strong>de</strong> nous envoyer le f. Henry [Guillot], si vous<br />

nʹavez pas quelque raison grave <strong>de</strong> le retenir; nous le ménagerons ici autant que sa santé le<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>ra, mais sʹil peut, comme vous me lʹavez dit, supporter quelque travail, il nous<br />

sera vraiment utile en ce moment.<br />

Je ne retrouve point le travail que vous mʹaviez remis sur vos œuvres et votre situa‐<br />

tion; si vous lʹavez emporté, il serait bien utile que vous me le renvoyiez, il me fait tout à<br />

fait faute.<br />

Tout va assez bien ici, nous nous soutenons; que la grâce du Seigneur daigne nous<br />

assister ici et partout où notre petite famille sʹefforce <strong>de</strong> travailler à sa gloire.<br />

Je vous embrasse bien affectueusement ainsi que nos frères.<br />

Votre dévoué ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

612 à M. Caille<br />

Pour le bon ordre <strong>de</strong> sa maison, que M. Caille se concerte <strong>avec</strong> le frère Marcaire. Avis <strong>de</strong> MLP. sur la direction<br />

spirituelle donnée par les prêtres du diocèse.<br />

Vaugirard, 15 avril 1859<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai appris <strong>avec</strong> satisfaction, à lʹarrivée <strong>de</strong> notre frère Henry [Guillot], que votre in‐<br />

disposition avait beaucoup diminué et semblait toucher à sa fin; je vous invite, mon bon<br />

ami, à prendre tous les soins désirables, afin <strong>de</strong> vous débarrasser dʹune incommodité qui<br />

nuit à vos travaux.<br />

Jʹapprouve bien toutes les mesures que vous croyez utile <strong>de</strong> prendre pour le bon<br />

ordre <strong>de</strong> votre œuvre, je trouve surtout désirable que vous puissiez chaque jour concerter<br />

<strong>avec</strong> le f. Jules [Marcaire] toutes les dispositions dʹordre, <strong>de</strong> direction et dʹadministration;<br />

tâchez <strong>de</strong> persévérer dans cette vue et surtout <strong>de</strong> vous réserver quelque moment libre<br />

pour son exécution.<br />

Je vous avais dit un mot, lors <strong>de</strong> votre <strong>de</strong>rnier voyage, <strong>de</strong>s difficultés qui semblaient<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r que nos frères restent désormais sous la conduite <strong>de</strong> M. lʹabbé Aubert seul. De‐<br />

puis, il mʹest revenu encore quʹon sʹinquiète en divers lieux, et dans les sociétés <strong>de</strong> charité<br />

en particulier, <strong>de</strong> la direction que la maison paraît recevoir <strong>de</strong> M. Mangot. Nous savons<br />

bien, pour nous, que nous nʹavons jamais eu quʹà nous louer <strong>de</strong> la pru<strong>de</strong>nce et <strong>de</strong> la discré‐<br />

tion du bon abbé qui ne nous a parlé que <strong>de</strong> Dieu et <strong>de</strong> tout ce qui regar<strong>de</strong> son service<br />

dans notre condition; néanmoins, je croirais sage, pour épargner à ces MM. <strong>de</strong> Brandt et<br />

Mangot quelques contrariétés et à nous peut‐être quelques embarras, <strong>de</strong> recevoir la direc‐<br />

tion <strong>de</strong> M. Aubert seulement. Il va sans dire que vous mettriez toujours la chapelle à la<br />

disposition <strong>de</strong> ces MM. pour la messe, et que vous prendriez soin <strong>de</strong> les bien assurer <strong>de</strong><br />

tous nos sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> reconnaissance.<br />

Nous prierons bien pour votre retraite du patronage; vous aurez, <strong>de</strong> votre côté, à<br />

prier aussi pour les nôtres car, <strong>de</strong> tous côtés, elles vont commencer.<br />

Notre frère, M. lʹabbé Hello, ira après Pâques, le 3 ou le 4 mai, à Arras donner la re‐<br />

traite pour la première communion <strong>de</strong>s enfants <strong>de</strong> notre maison; je pense quʹen passant ou<br />

au retour, il pourra sʹarrêter quelques instants à Amiens.<br />

731


Adieu, mon bien bon ami, je recevrai <strong>avec</strong> plaisir <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> nos frères quand<br />

ils seront bien assis dans leurs emplois; le f. Guillot ne va pas mal, sauf un mal <strong>de</strong> jambe,<br />

un clou qui lʹempêche presque <strong>de</strong> marcher et lʹoblige à rester momentanément assis.<br />

Croyez bien, mon bon ami, à tous mes sentiments <strong>de</strong> profon<strong>de</strong> affection en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

613 à M. Caille<br />

Conseils pour le choix <strong>de</strong> directeurs spirituels.<br />

Vaugirard, 21 avril [1859]<br />

Vendredi Saint<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

M. lʹabbé Mangot mʹécrit quʹil est disposé à cesser ses visites <strong>de</strong> direction à nos frè‐<br />

res, mais quʹil aurait besoin dʹêtre déchargé régulièrement <strong>de</strong> ce soin par lʹEvêché, M. lʹab‐<br />

bé <strong>de</strong> Ladoue lui ayant, dans le temps, donné mission <strong>de</strong> diriger notre petite famille. Je<br />

vous prie <strong>de</strong> voir à lʹEvêché ce qui peut être à faire pour donner cette satisfaction à M.<br />

lʹabbé Mangot.<br />

Ce bon abbé croit <strong>de</strong>voir mʹavertir en même temps, dans lʹintérêt <strong>de</strong> nos frères, que<br />

M. Aubert ne lui paraîtrait pas lʹhomme qui leur conviendrait; quʹon le regar<strong>de</strong> justement,<br />

dans les communautés dʹAmiens, comme tout à fait étranger à la vie religieuse et quʹil ne<br />

pourrait utilement soutenir et conseiller nos frères. Je vous prie, mon bon ami, <strong>de</strong> remer‐<br />

cier M. Mangot <strong>de</strong> cet avis obligeant; nous <strong>de</strong>vrons en tenir compte et examiner <strong>de</strong>vant<br />

Dieu ce que le cas peut exiger, sans nous avancer davantage <strong>avec</strong> M. Aubert, nous bornant<br />

provisoirement à la confession ordinaire, sans lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r plus.<br />

On mʹa fait remarquer, dʹun autre côté, quʹil conviendrait peut‐être quʹun autre que<br />

le f. Marcaire, le f. Joseph [Loquet], par exemple, allât chercher et reconduire le r.p. Fran‐<br />

ciscain, afin dʹéviter <strong>de</strong>s intimités qui nous gêneraient, si nous jugeons à propos <strong>de</strong> choisir<br />

définitivement un prêtre quelconque, comme Directeur <strong>de</strong> notre petite maison. Voyez ce<br />

qui peut être à faire en ce sens pour le plus grand bien.<br />

Adieu, mon bon ami, tout va ici selon la coutume, tous nos frères se rappellent à vos<br />

bons souvenirs, je vous embrasse tous les quatre dans le Cœur <strong>de</strong> notre divin Seigneur.<br />

A vous en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je reçois à lʹinstant votre lettre; jʹécris, selon votre désir, un mot <strong>de</strong> réponse à M.<br />

Mangot; ses renseignements relativement à M. Aubert étaient assez précisés pour me lais‐<br />

ser douter quʹen effet nous <strong>de</strong>vions nous avancer beaucoup <strong>de</strong> ce côté; si vous pouvez<br />

suspendre un peu vos instances près <strong>de</strong> M. Aubert et prendre un peu <strong>de</strong> temps <strong>de</strong> ré‐<br />

flexion, ce serait bien; voyez si cela est possible.<br />

614 à M. Vasseur<br />

M. Hello à Arras pour la retraite <strong>de</strong> première communion. Avis pour combattre les tentations <strong>de</strong> découragement.<br />

732


Vaugirard, 26 avril 1859<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Notre bon abbé Hello ira, comme lʹa <strong>de</strong>mandé notre p. Halluin, donner la retraite à<br />

vos enfants <strong>de</strong> première communion; les jours <strong>de</strong> la Semaine Sainte nous ont tenus tous<br />

occupés, chacun <strong>de</strong> notre côté, et je nʹai pu voir nos ff. <strong>de</strong> Nazareth; je ne sais donc pas en‐<br />

core le jour précis du départ <strong>de</strong> notre cher abbé, mais il avertira à temps M. Halluin, vous<br />

pouvez compter sur lui. M. Lantiez et M. Faÿ qui sʹoccupent particulièrement <strong>de</strong> Marcel‐<br />

lin, ne voient pas quʹil y ait convenance à envoyer cet enfant aveugle à Arras; il connaît ici<br />

tous les aîtres299 <strong>de</strong> la maison, il a ses habitu<strong>de</strong>s, ses occupations, sa vie <strong>de</strong> chaque jour,<br />

mais, changé <strong>de</strong> maison, il serait absolument dérouté et, hors les instants si courts où il<br />

pourrait faire un peu <strong>de</strong> musique à la chapelle ou autrement, il aurait nécessairement <strong>de</strong><br />

lʹennui. Je ne vois non plus aucun moyen <strong>de</strong> pourvoir à <strong>de</strong>s frais <strong>de</strong> voyage trop peu moti‐<br />

vés; pour ces diverses raisons, cher enfant, nous <strong>de</strong>vons renoncer au projet <strong>de</strong> lʹadjoindre à<br />

M. Hello.<br />

Je ne mʹinquiète pas, cher enfant, <strong>de</strong>s quelques pensées <strong>de</strong> découragement qui vous<br />

viennent quelquefois; personne nʹen est exempt, et ceux qui, comme vous, sʹimpression‐<br />

nent aisément, y sont plus sujets que dʹautres; mais jʹai toujours vu chez vous que lʹesprit<br />

<strong>de</strong> foi et la raison prenaient le <strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> ces mouvements naturels, il en sera encore ainsi<br />

aujourdʹhui.<br />

Plus vos enfants laissent à désirer sous quelques rapports, plus il est manifeste<br />

quʹils ont besoin <strong>de</strong> vos soins; cʹest à ceux‐là que la charité se sent attirée tout particulière‐<br />

ment. N.S. disait: ʺJe suis venu guérir ceux qui sont mala<strong>de</strong>s et non ceux qui sont sains.ʺ<br />

Les résultats constants <strong>de</strong> votre œuvre sont dʹailleurs une précieuse consolation; vous<br />

voyez quʹ<strong>avec</strong> patience et longueur <strong>de</strong> temps, notre bon abbé Halluin arrive presque tou‐<br />

jours à améliorer notablement la plupart <strong>de</strong> ses jeunes gens et quʹils finissent, après quel‐<br />

ques écarts, par sʹasseoir dans le bon chemin.<br />

Ne vous découragez pas non plus si vous nʹavez pas absolument et en perfection<br />

tout ce que votre position pourrait <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r. Qui donc, parmi nous, peut se vanter dʹêtre<br />

à la hauteur <strong>de</strong> sa position par une suffisance personnelle? Aucun, assurément. Nous<br />

avons tous à gémir sur notre incapacité; mais il y a là un point excellent, cʹest que nous<br />

nous humilions forcément, nous sentons le besoin que nous avons du secours <strong>de</strong> Dieu, et<br />

quand, malgré notre impuissance, il se fait quelque bien, nous sommes contraints <strong>de</strong> le Lui<br />

rapporter; ainsi lʹordre est gardé, et cʹest ce que le Seigneur veut avant tout. Allez donc<br />

toujours, cher enfant, en soumission, en détachement <strong>de</strong> vous‐même en bon désir <strong>de</strong> chari‐<br />

té, et le bon Maître, suppléant à tout ce qui vous manque, donnera sa bénédiction à vos<br />

travaux.<br />

Je suis heureux dʹapprendre que la paix du Seigneur règne parmi vous, embrassez<br />

pour moi nos frères, assurez‐les <strong>de</strong> ma constante affection et <strong>de</strong> mes habituelles instances<br />

près <strong>de</strong> Dieu à leur sujet. Je serai bien aise que le f. <strong>Jean</strong>‐Baptiste [Hamon] mʹécrive un peu<br />

longuement pour me dire ses dispositions, ses travaux, son état <strong>de</strong> cœur; je voudrais aussi<br />

que mon f. Firmin [Thuillier], qui mʹavait promis dʹécrire ses résolutions <strong>de</strong> retraite,<br />

mʹécrivît quʹil les a réellement faites et quʹil y revient quelquefois <strong>de</strong>vant Dieu.<br />

Nous allons ici comme <strong>de</strong> coutume, <strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> du Seigneur; tous nos frères se re‐<br />

comman<strong>de</strong>nt à vos prières et vous assurent <strong>de</strong> leur affection. Nos retraites <strong>de</strong> Pâques ont<br />

299 Mot ancien: disposition <strong>de</strong>s diverses pièces <strong>de</strong> la maison.<br />

733


été partout parfaites et pleines <strong>de</strong> consolation. Votre petit frère ne va pas mal. Je ne me re‐<br />

fuserais pas, à lʹoccasion, à lui donner quelque autre emploi que le sien, quoiquʹà mon gré<br />

il pût y faire beaucoup <strong>de</strong> bien, sʹil y apportait lʹesprit haut et saint que je voudrais voir en<br />

tous nos frères, mais je ne fais jamais que ce que le Seigneur indique lui‐même par les cir‐<br />

constances. Cet enfant est dʹailleurs si peu formé, a le caractère encore si souple, la parole<br />

encore si peu mesurée, lʹexpérience encore si peu avancée quʹil est certainement meilleur<br />

pour lui, comme pour la Communauté, quʹil nous reste sous les yeux. Priez bien pour lui,<br />

cher ami, la grâce du Seigneur peut bien plus, croyez‐le, pour lʹaffermir et lʹamen<strong>de</strong>r que<br />

ne le feraient toutes les dispositions et changements extérieurs; Dieu est lumière et amour,<br />

Lui seul éclaire, échauffe et transforme les cœurs.<br />

Offrez mon respectueux attachement à notre p. Halluin, et croyez, cher enfant, à ma<br />

tendre affection en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. M. Hello partira mardi 3 mai.<br />

615 à M. Halluin<br />

Deman<strong>de</strong> <strong>de</strong> placement en apprentissage dʹun jeune orphelin.<br />

Vaugirard 1er mai 1859<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Lʹun <strong>de</strong> nos enfants, nommé <strong>Léon</strong> Maillard, tout à fait orphelin, est au moment<br />

dʹêtre placé en apprentissage; il a 14 ans. Ses protecteurs désirent quʹil soit mis hors <strong>de</strong> Pa‐<br />

ris, afin dʹéviter quʹil se rapproche habituellement dʹune famille où il a passé sa première<br />

enfance, mais dans laquelle il nʹaurait ni bons exemples, ni appuis pour se bien conduire.<br />

Nous avons pensé vous lʹenvoyer, persuadés que, placé par vous et restant sous vos yeux,<br />

il persévérerait dans ses bons sentiments. Ses protecteurs vous pourraient payer 200f pour<br />

sa pension. Il est vif et un peu pétulant, mais très bon enfant et dʹun cœur excellent; en le<br />

prenant <strong>de</strong> ce côté, on en fait tout ce quʹon veut. M. Lantiez désirerait le gar<strong>de</strong>r comme<br />

persévérant, lʹayant <strong>de</strong>puis longtemps déjà sous sa conduite, et sʹétant fort affectionné à<br />

lui. Mais notre enfant a trop dʹactivité pour se plaire à la vie sé<strong>de</strong>ntaire et renfermée, il dé‐<br />

sire lʹair libre <strong>de</strong>s ateliers. Je ne crois pas quʹil y prenne le mauvais chemin, il y a beaucoup<br />

<strong>de</strong> bon en lui et <strong>de</strong>s sentiments <strong>de</strong> foi sincères. Il a une misère <strong>de</strong> santé assez incommo<strong>de</strong>;<br />

il laisse parfois la nuit aller ses urines. Avec un peu <strong>de</strong> précaution, nous parions à cet in‐<br />

convénient. Les années et la force lui venant dʹailleurs, jʹespère que cette petite infirmité va<br />

diminuer et cesser. Depuis plusieurs jours, je voulais vous écrire à son sujet et vous le pro‐<br />

poser, afin quʹil pût partir <strong>avec</strong> notre bon abbé Hello. Soit oubli, soit presse pour dʹautres<br />

occupations, je me trouve assez en retard pour que votre réponse ne puisse guère nous ar‐<br />

river avant le départ du bon abbé Hello. Je crois néanmoins que je profiterai <strong>de</strong> cette occa‐<br />

sion pour envoyer notre enfant, parce quʹen aucune façon, je ne crois pas que vous ayez à<br />

vous plaindre <strong>de</strong> lui. Nʹayant pas <strong>de</strong> parents, il est très disposé à sʹaffectionner à ceux qui<br />

lui donnent <strong>de</strong>s soins, je crois pouvoir répondre quʹil vous regar<strong>de</strong>ra comme son père et<br />

vous donnera satisfaction par son respect et sa soumission.<br />

Tout marche ici autour <strong>de</strong> nous selon lʹusage, le Seigneur daigne bénir nos humbles<br />

travaux. Les retraites <strong>de</strong> nos patronages et Saintes‐Familles ont été pleines <strong>de</strong> consolation.<br />

Jʹespère que votre première communion sera aussi heureuse et édifiante pour votre chère<br />

maison.<br />

734


Je recevrai <strong>avec</strong> plaisir <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> nos frères, du f. <strong>Jean</strong>‐Baptiste [Hamon] en<br />

particulier. Je désire quʹil mʹécrive un peu au long, quand il aura quelques moments.<br />

Tout le mon<strong>de</strong> ici vous assure <strong>avec</strong> moi <strong>de</strong> ses sentiments <strong>de</strong> respect et dʹaffection<br />

en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

616 à M. Halluin<br />

Impressions du père Hello sur lʹŒuvre dʹArras. Que M. Halluin sache déléguer son autorité. Un frère a du mal<br />

à tenir ses élèves. Les confessions <strong>de</strong>s frères. Départ <strong>de</strong> lʹabbé Leleu. Favoriser la vocation sacerdotale du frère<br />

Cousin.<br />

Vaugirard, 13 mai 1859<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Notre bon abbé Hello nous a rendu un compte tout à fait consolant <strong>de</strong> la première<br />

communion <strong>de</strong> nos chers enfants dʹArras. Tout doit nous donner la confiance quʹils ont ac‐<br />

compli cet acte si décisif pour leur avenir dans dʹheureuses conditions. Cʹest une gran<strong>de</strong><br />

joie pour vous et pour nous‐mêmes qui nous associons à vos joies comme à vos peines. M.<br />

Hello est revenu <strong>avec</strong> <strong>de</strong> très bonnes impressions et convaincu quʹon peut faire dans lʹœu‐<br />

vre dʹArras beaucoup <strong>de</strong> bien aux pauvres enfants. Il ne les croit pas sans défauts, il sʹen<br />

expliqué franchement, mais il pense que votre action sur eux est bien précieuse pour leur<br />

amen<strong>de</strong>ment. Je crois seulement, cher Monsieur lʹabbé, que vous <strong>de</strong>vez tendre, autant que<br />

vous le verrez possible, à faire partager à ceux qui vous entourent lʹautorité et lʹinfluence<br />

sur les enfants, autrement la charge continuera à peser presque exclusivement sur vous, et<br />

elle vous <strong>de</strong>viendra à la longue insupportable.<br />

Je vois <strong>avec</strong> peine que le frère <strong>Jean</strong>‐Baptiste [Hamon] réussit faiblement, pour ne<br />

pas dire plus, dans sa classe. Il a pourtant lʹhabitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> lʹenseignement. Il conduisait seul<br />

une classe <strong>de</strong> cinquante enfants et savait les instruire et sʹen faire respecter. Plusieurs <strong>de</strong><br />

ceux qui sont ici ne mʹont point dissimulé que les enfants dʹArras sont, en général, préve‐<br />

nus contre les maîtres qui viennent du <strong>de</strong>hors et peu disposés à leur donner soumission.<br />

Mais que faire à cela? Assurément, ai<strong>de</strong>r ces maîtres à prendre autorité suffisante, autre‐<br />

ment les enfants, une fois assurés quʹils peuvent, à leur volonté, se débarrasser <strong>de</strong> ceux qui<br />

les conduisent, ne manqueront pas <strong>de</strong> faire tout pour y arriver. Je ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pas mieux<br />

<strong>de</strong> rappeler le f. <strong>Jean</strong>‐Baptiste, mais je crois que si on en vient là, ce sera du plus fâcheux<br />

effet et quʹil <strong>de</strong>viendra bien difficile <strong>de</strong> tenir la place. Je crois donc quʹavant <strong>de</strong> prendre ce<br />

parti extrême, il serait tout à fait à souhaiter quʹon aidât ce frère par <strong>de</strong>s conseils, et en le<br />

soutenant fermement, et en mettant à sa disposition quelques récompenses attrayantes<br />

pour encourager les bons et compenser les sévérités indispensables; en un mot, mettre tout<br />

en usage pour faire sa position et la rendre moins difficile. Si, tout examiné, il semble dé‐<br />

montré quʹil ne peut marcher, nous prendrons le parti que le cas <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ra. Mais, je le<br />

répète, ce ne <strong>de</strong>vrait être quʹà la <strong>de</strong>rnière extrémité, cette mesure <strong>de</strong>vant nécessairement<br />

avoir un fâcheux effet.<br />

M. Hello me dit que le f. <strong>Jean</strong> [Maury] lui a paru avoir besoin dʹun peu dʹencoura‐<br />

gement. Il a le cœur excellent et est fort sensible à quelque marque dʹaffection. Je ne sais sʹil<br />

est toujours question du petit voyage quʹil <strong>de</strong>vait faire près <strong>de</strong> sa mère mala<strong>de</strong>.<br />

Je ne verrais pas dʹinconvénient à ce que les frères, <strong>de</strong> temps en temps surtout, pus‐<br />

sent se confesser à un autre prêtre quʹà vous, quoique à vrai dire le f. Vasseur seul en ait<br />

735


sans doute la pensée. Lui‐même se fait, je crois, une difficulté imaginaire car, dans sa let‐<br />

tre, il dit déjà, à vous comme à moi, les choses qui peuvent lʹinquiéter. Je crois pouvoir ré‐<br />

pondre quʹil nʹa rien <strong>de</strong> plus à dire à un confesseur. Il a raison <strong>de</strong> se défier <strong>de</strong> lui, mais,<br />

<strong>avec</strong> la grâce <strong>de</strong> Dieu, il saura rester maître <strong>de</strong> lui‐même. Ne pourrait‐il se confesser quel‐<br />

quefois à M. Lequette? Voyez, cher Monsieur lʹabbé, ce qui vous semblera le mieux. La di‐<br />

rection vous restant, la confession <strong>de</strong> tel ou tel pourrait <strong>de</strong> temps en temps se faire à quel‐<br />

que autre, quel quʹil soit, désigné par vous.<br />

Nous avons un chagrin; le bon abbé Leleu ne nous restera pas, il trouve la vie <strong>de</strong><br />

communauté trop stricte, il veut être plus large, les vœux surtout sont un épouvantail<br />

pour lui. Sa retraite mettra bien <strong>de</strong>s choses en souffrance, mais nous ferons <strong>de</strong> notre mieux<br />

et Dieu nous ai<strong>de</strong>ra. Nous sommes, du reste, dans les meilleurs termes <strong>avec</strong> lui. Je remet‐<br />

trai à M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] les 20f que vous me priez <strong>de</strong> lui avancer.<br />

Le r.p. Chaignon mʹest venu voir et mʹa remis pour vous 200f pour la pension,je<br />

crois, dʹun <strong>de</strong> vos enfants. Vous aurez la bonté, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> me dire comment<br />

vous souhaitez que je vous les envoie.<br />

Je vous prie dʹassurer, à lʹoccasion, M. Flour <strong>de</strong> nos sentiments dʹaffection; nous<br />

nous intéressons bien à son œuvre et nous serons heureux dʹy concourir plus tard, si la<br />

Provi<strong>de</strong>nce nous y appelle. Présentement, nous tendons plutôt à fortifier nos œuvres quʹà<br />

les étendre.<br />

Je gar<strong>de</strong> bien le désir <strong>de</strong> vous rendre une petite visite. Jʹespère que je pourrai le ré‐<br />

aliser, sans bien prévoir encore le moment. Nous commençons aujourdʹhui une construc‐<br />

tion assez importante. Ce sera un surcroît <strong>de</strong> charge, mais nous allons comme il plaît au<br />

Seigneur <strong>de</strong> nous conduire.<br />

Adieu, bien cher Monsieur lʹabbé, allons toujours en confiance et charité. Comptez<br />

bien sur notre cordiale volonté <strong>de</strong> tout faire pour concourir au bien qui se fait à nos en‐<br />

fants dʹArras et que nous regardons comme une cause <strong>de</strong> bénédiction pour toute notre<br />

Communauté. Croyez aussi à la tendre affection <strong>de</strong> tous, à mes sentiments <strong>de</strong> respect et<br />

dʹattachement en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je verrais <strong>avec</strong> gran<strong>de</strong> joie quʹon pût favoriser les aspirations du f. Cousin au<br />

sacerdoce. Il sera, jʹen ai la confiance, un très bon prêtre. Je crois que sa santé nʹest pas as‐<br />

sez atteinte pour faire obstacle à sa vocation. Je pourrais donner une attestation pour le<br />

temps quʹil a passé ici.<br />

617 à M. Vasseur<br />

Exhortation à ai<strong>de</strong>r un frère dans lʹépreuve. ʺSe mettre à sa placeʺ; chercher <strong>de</strong>vant Dieu, <strong>avec</strong> patience et vraie<br />

charité, comment lʹassister. Choix dʹun confesseur. Confiance en la miséricor<strong>de</strong> divine. Simplicité et bienveil‐<br />

lance fraternelle.<br />

[13 mai 1859]<br />

Très cher enfant en N.S.,<br />

Je ne puis vous écrire quʹun mot, voulant répondre aujourdʹhui à notre bon p. Hal‐<br />

luin. Je veux seulement vous prier <strong>de</strong> nouveau <strong>de</strong> faire charitablement et cordialement<br />

tout ce que vous pourrez pour encourager et soutenir le f. <strong>Jean</strong>‐Baptiste [Hamon]. M. Lan‐<br />

736


tiez et moi avions examiné sérieusement avant son départ sʹil pouvait vous être utile à Ar‐<br />

ras, et nous étions convaincus quʹil avait la science suffisante, lʹhabitu<strong>de</strong> dʹenseigner et <strong>de</strong><br />

conduire <strong>de</strong>s enfants; ses certificats étaient dʹailleurs tels que nous pouvions les souhaiter.<br />

Les enfants, prévenus contre les étrangers, comme ils les appellent, montrent peu <strong>de</strong> bon<br />

vouloir, la situation du maître est difficile; mettez‐vous à sa place et faites en conscience ce<br />

que vous voudriez quʹon fît en pareil cas pour vous; blâmer est vite fait, mais prendre<br />

dans son cœur quelques paroles douces et encourageantes, chercher <strong>de</strong>vant Dieu si on ne<br />

pourrait donner un peu dʹai<strong>de</strong> bienveillant en agissant près <strong>de</strong>s enfants, serait infiniment<br />

mieux dans lʹesprit <strong>de</strong>s enfants <strong>de</strong> S t Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul. Si les choses sont poussées à bout, je<br />

rappellerai le f. <strong>Jean</strong>‐Baptiste [Hamon], mais je nʹai absolument personne pour le rempla‐<br />

cer, vous prendrez un étranger qui aura peut‐être bien plus dʹinconvénients et vous per‐<br />

sua<strong>de</strong>rez aux enfants quʹen se butant contre leurs maîtres, ils peuvent sʹen débarrasser;<br />

après celui‐là viendra le tour dʹun autre, <strong>de</strong> vous peut‐être, alors quelle sera la fin? Avant<br />

<strong>de</strong> prendre <strong>de</strong>s partis extrêmes, il faut, dans la patience, dans la vraie charité, chercher <strong>de</strong>‐<br />

vant Dieu si on peut faire quelque chose pour assister un frère péniblement éprouvé et<br />

quʹun peu <strong>de</strong> bienveillance cordiale peut utilement assister.<br />

Je crois que vous ne manquez pas <strong>de</strong> confiance en notre p. Halluin dans la confes‐<br />

sion, et votre lettre lui dit à peu près, je crois, tout ce que vous pouvez avoir à dire dans<br />

une confession; voyez pourtant <strong>avec</strong> lui si un confesseur autre que lui peut, <strong>de</strong> temps en<br />

temps, vous appuyer utilement. Confiez‐vous surtout aux miséricor<strong>de</strong>s du Seigneur et <strong>de</strong><br />

sa très douce Mère; veillez, priez; jʹai la confiance que vous surmonterez <strong>de</strong>s épreuves un<br />

peu plus vives peut‐être en cette saison quʹen autre temps, comme vous les avez surmon‐<br />

tées par le passé, faites aussi toujours quelques petites mortifications; sans pénitence, lʹâme<br />

domine bien difficilement la partie inférieure <strong>de</strong> notre être.<br />

Je rappellerai à votre frère et à Auguste [Leduc] quʹils doivent vous écrire, tous sont<br />

toujours un peu en hâte.<br />

Adieu, mon cher enfant, croyez à ma tendre affection en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je vous engage, cher enfant, à vous rappeler en toute occasion que vous êtes plus<br />

ancien que dʹautres dans la communauté, que vous <strong>de</strong>vez conséquemment soutenir, édi‐<br />

fier, encourager les autres; si vous le faites simplement, sans amour‐propre, par bienveil‐<br />

lance et vraie charité, vous y trouverez la douce consolation que le Seigneur a attachée à<br />

toute bonne action; un peu soutenus, les frères qui vous entourent iraient très bien, mais<br />

cʹest <strong>de</strong> la vraie charité quʹil faut et cʹest Dieu qui lʹinspire, <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z‐la au Cœur <strong>de</strong> notre<br />

divin Sauveur; un peu <strong>de</strong> sincère et cordiale affection ferait un bien extrême à ceux qui<br />

vous entourent; examinez <strong>de</strong>vant Dieu si, en vous oubliant vous‐même, vous ne pourriez<br />

être encore plus utile à vos frères et à vos enfants; cʹest là le point essentiel où nous <strong>de</strong>vons<br />

tendre: nous oublier pour servir Dieu dans la personne <strong>de</strong> nos frères.<br />

L.P.<br />

617‐1 <strong>de</strong> M. Daniel‐Deray à M. Toccanier 300<br />

Deman<strong>de</strong> <strong>de</strong> ren<strong>de</strong>z‐vous <strong>avec</strong> le Curé dʹArs, pour MLP. dont il fait lʹéloge.<br />

300 M. Daniel-Deray, commerçant établi au 25 <strong>de</strong> la rue du Bac (lettre 402) était l'un <strong>de</strong>s fournisseurs <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Vaugirard.<br />

Connaissant l'abbé Toccanier, vicaire à Ars, <strong>de</strong>puis août 1853, il obtiendra pour MLP. un ren<strong>de</strong>z-vous <strong>avec</strong> le saint curé. La rencontre<br />

aura lieu le mardi 17 mai, à 11h. MLP. désirait être éclairé sur la question <strong>de</strong> la coordination <strong>de</strong>s 2 éléments laïc et ecclésiastique<br />

dans l'Institut.<br />

737


Paris, 13 mai 1859<br />

Monsieur lʹabbé,<br />

Je suis heureux <strong>de</strong> la circonstance qui se présente pour vous donner <strong>de</strong> mes nouvelles et<br />

avoir <strong>de</strong>s vôtres.<br />

M. Le <strong>Prevost</strong>, fondateur <strong>de</strong> la Congrégation <strong>de</strong>s Frères <strong>de</strong> St Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul, va à Ars<br />

pour voir M. le Curé au sujet <strong>de</strong> sa Congrégation, et comme ses instants sont précieux, je nʹai rien<br />

imaginé <strong>de</strong> mieux que <strong>de</strong> vous le recomman<strong>de</strong>r afin que vous ayez la bonté <strong>de</strong> lui ménager une en‐<br />

trevue <strong>avec</strong> le Curé.<br />

Soyez assuré, Monsieur lʹabbé, que votre saint Curé se trouvera en présence dʹun autre<br />

saint, et que je ne doute nullement que leur entrevue sera <strong>de</strong>s plus touchantes et <strong>de</strong>s plus édifian‐<br />

tes.<br />

Enfin, Monsieur lʹabbé, je vous serai très reconnaissant <strong>de</strong> tout ce que vous ferez en faveur<br />

<strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong> et je serai heureux <strong>de</strong> recevoir par lui <strong>de</strong> vos nouvelles.<br />

Agréez, Monsieur lʹabbé, lʹhommage <strong>de</strong> mon profond respect.<br />

Votre très humble serviteur<br />

Daniel‐Deray<br />

618 à M. lʹabbé Toccanier<br />

Remerciements au vicaire du curé dʹArs pour lʹentrevue obtenue par son intermédiaire. Rappel discret <strong>de</strong> lʹen‐<br />

gagement pris par le saint curé <strong>de</strong> prier <strong>avec</strong> eux une neuvaine au Saint‐Esprit.<br />

Vaugirard, 19 mai 1859<br />

Monsieur lʹabbé,<br />

Nous avons eu lʹhonneur <strong>de</strong> nous présenter chez vous avant <strong>de</strong> quitter Ars pour<br />

vous exprimer notre respect et notre reconnaissance; vous nʹétiez pas encore <strong>de</strong> retour à ce<br />

moment. Jʹai senti le besoin <strong>de</strong> vous écrire ces <strong>de</strong>ux mots pour vous dire combien nous<br />

avons été touchés <strong>de</strong> lʹaimable et paternel accueil du saint Curé, <strong>de</strong> la simplicité <strong>de</strong> sa pa‐<br />

role, et <strong>de</strong>s marques visibles <strong>de</strong> lʹaction <strong>de</strong> Dieu en lui et par lui; les choses humaines se<br />

font autrement. Je voulais aussi vous<br />

dire, Monsieur lʹabbé, combien votre<br />

entremise nous a été précieuse, et<br />

combien nous avons senti tout ce<br />

quʹelle avait <strong>de</strong> charitable et <strong>de</strong> bien‐<br />

veillant. Nous allons suivre <strong>de</strong> point en<br />

point les avis du bon Curé; il nous a<br />

conseillé une neuvaine au Saint‐Esprit,<br />

et nous a promis <strong>de</strong> sʹunir à nous. Nous<br />

la commencerons après‐<strong>de</strong>main samedi<br />

21; nous serions bien reconnaissants si<br />

vous vouliez bien aussi nous accor<strong>de</strong>r<br />

le secours <strong>de</strong> vos prières. Je pense quʹil<br />

est superflu <strong>de</strong> rappeler sa promesse à<br />

M. le Curé, qui sans doute met tout et<br />

confie toutes ses intentions au Cœur du<br />

738


divin Seigneur; nous nous bornons donc à remettre ce soin à votre charité, pour que vous<br />

agissiez selon quʹil vous paraîtra utile <strong>de</strong> le faire. Nous savons trop les mille occupations<br />

du vénéré pasteur pour vouloir les accroître sans absolue nécessité.<br />

Veuillez nous compter parmi les admirateurs dévoués <strong>de</strong> la sainte œuvre qui se fait<br />

constamment à Ars, et agréez, Monsieur lʹabbé, les sentiments respectueux <strong>avec</strong> lesquels je<br />

suis<br />

Votre humble et obéissant serviteur en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

<strong>de</strong>s ff. <strong>de</strong> S t ‐V t ‐<strong>de</strong>‐Paul<br />

619 à M. Halluin<br />

Récit du pèlerinage dʹArs. Encouragements du saint curé. Que la communauté dʹArras sʹunisse à la neuvaine<br />

<strong>de</strong>mandée.<br />

Vaugirard, 19 mai 1859<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Depuis longtemps, nous avions entendu parler <strong>de</strong>s merveilles quʹon attribuait au<br />

saint Curé dʹArs, et nous souhaitions vivement dʹêtre en union <strong>de</strong> prière et dʹœuvres <strong>avec</strong><br />

lui. Nous nʹavons pas résisté, M. Lantiez et moi, au désir <strong>de</strong> nous rapprocher <strong>de</strong> lui. Nous<br />

sommes allés lundi lui rendre visite et hier, mercredi matin, nous étions <strong>de</strong> retour, très sa‐<br />

tisfaits <strong>de</strong> la réception que nous a faite le bon Curé, très édifiés <strong>de</strong> tout ce que nous avons<br />

vu <strong>de</strong> lui, très encouragés surtout par les douces et paternelles paroles quʹil nous a dites. Il<br />

nous a assurés que lʹEsprit du Seigneur était <strong>avec</strong> nous, que notre œuvre, bénie par Lui,<br />

réussirait. Il nous a promis <strong>de</strong> prier <strong>avec</strong> nous et nous a conseillé <strong>de</strong> faire ensemble une<br />

neuvaine au Saint‐Esprit, à laquelle il prendrait part. Il en a réglé lui‐même les prières: 5<br />

Pater et 5 Ave <strong>avec</strong> le Veni Creator.<br />

Nous commencerons cette neuvaine samedi 21, pour la mettre sous la protection <strong>de</strong><br />

la Ste Vierge, et nous la terminerons le 29.<br />

Je désire bien, cher Monsieur lʹabbé, que notre petite communauté dʹArras sʹunisse à<br />

nous, tout à la fois pour attirer sur notre Famille spirituelle les grâces abondantes dont<br />

nous avons besoin et pour nous associer aux prières que le saint dʹArs veut bien faire pour<br />

nous.<br />

Tous nos frères vous offrent leurs respectueuses affections. Je suis moi‐même dans<br />

ces sentiments en J. et M.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

620 à M. Caille<br />

Récit du voyage à Ars. Que la communauté dʹAmiens sʹunisse à la neuvaine <strong>de</strong>mandée. Conseils <strong>de</strong> MLP. sur la<br />

nécessité dʹassurer aux frères un directeur spirituel qui puisse les soutenir et les gui<strong>de</strong>r.<br />

Vaugirard, 19 mai 1859<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Depuis longtemps, nous avions entendu parler <strong>de</strong>s merveilles quʹon attribuait au<br />

saint Curé dʹArs, et nous souhaitions vivement dʹêtre en union <strong>de</strong> prières et dʹœuvres <strong>avec</strong><br />

739


lui. Nous nʹavons pas résisté, M. Lantiez et moi, au désir <strong>de</strong> nous rapprocher <strong>de</strong> lui; nous<br />

sommes allés lundi lui rendre une visite et hier mercredi, nous étions <strong>de</strong> retour, très satis‐<br />

faits <strong>de</strong> la réception que nous a faite le bon Curé, très édifiés <strong>de</strong> tout ce que nous avons vu<br />

<strong>de</strong> lui, très encouragés surtout par les choses douces et paternelles paroles quʹil nous a di‐<br />

tes. Il nous a assurés que lʹEsprit du Seigneur était <strong>avec</strong> nous, que notre œuvre, bénie par<br />

Lui réussirait. Il nous a promis <strong>de</strong> prier <strong>avec</strong> nous et nous a conseillé <strong>de</strong> faire ensemble une<br />

neuvaine au Saint‐Esprit, à laquelle il prendrait part; il en a réglé lui‐même les prières: 5<br />

Pater et 5 Ave <strong>avec</strong> le Veni Creator. Nous commencerons cette neuvaine samedi 21, pour la<br />

mettre sous la protection <strong>de</strong> la S te Vierge, et nous la terminerons le 29.<br />

Je désire bien, cher ami, que notre petite communauté dʹAmiens sʹunisse à nous,<br />

tout à la fois pour attirer sur notre famille spirituelle les grâces abondantes dont nous<br />

avons besoin, et pour nous associer aux prières que le saint Curé dʹArs veut bien faire<br />

pour nous.<br />

Tous nos frères vous offrent leurs sincères affections; je suis moi‐même dans ces<br />

sentiments en J. et M..<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Les lignes qui précè<strong>de</strong>nt nʹétant que la copie dʹune lettre que jʹécris aujourdʹhui à<br />

notre bon abbé Halluin, jʹai pu les laisser transcrire par un <strong>de</strong> nos enfants qui mʹai<strong>de</strong> un<br />

peu dans mes écritures; nous avions particulièrement en vue, M. Lantiez et moi, <strong>de</strong> pren‐<br />

dre les avis du bon Curé sur la constitution <strong>de</strong> notre petite famille; il sʹest borné à nous<br />

donner <strong>de</strong>s assurances toutes pleines dʹencouragement et nous a conseillé <strong>de</strong> faire la neu‐<br />

vaine que je vous indique, nous confiant en Dieu pour obtenir les lumières dont nous<br />

avons besoin. Jʹattache un grand prix aux prières <strong>de</strong> ce saint Curé qui a bien promis <strong>de</strong><br />

sʹunir à nous; la prière <strong>de</strong>s saints est toute puissante, et tout nous laisse penser que ce bon<br />

curé est véritablement un saint.<br />

Je trouverais bien que vous consultiez M. Cacheleux, comme vous me lʹavez propo‐<br />

sé, relativement à M. Aubert; je ne doute pas du tout quʹil ne soit un prêtre convenable,<br />

mais M. Mangot a pu penser <strong>avec</strong> raison que la multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> ses occupations lui laisserait<br />

peu <strong>de</strong> liberté dʹesprit pour encourager et soutenir le petit, très petit troupeau <strong>de</strong> vos frè‐<br />

res; il faut beaucoup <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong> et <strong>de</strong> con<strong>de</strong>scendance pour soutenir <strong>de</strong>s frères si jeu‐<br />

nes, souvent si peu forts contre les moindres épreuves, pour leur inspirer un peu sérieu‐<br />

sement lʹesprit <strong>de</strong> sacrifice et <strong>de</strong> vraie piété qui doit les animer; un homme très occupé<br />

supporte difficilement <strong>de</strong> sʹarrêter à <strong>de</strong>s peines ou embarras dʹesprit qui, pour nʹavoir pas<br />

<strong>de</strong> causes bien sérieuses, peuvent néanmoins tourmenter beaucoup et quelquefois dérou‐<br />

ter ceux qui ont à les endurer. Vous verrez, mon bon ami, ce que vous aurez à faire pour le<br />

plus grand bien en suite <strong>de</strong> lʹavis <strong>de</strong> M. Cacheleux.<br />

Adieu, mon bon ami, je suis <strong>avec</strong> vous dans une tendre affection en J. et M.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

621 à M. Decaux<br />

Malgré le peu <strong>de</strong> personnel dont il dispose, MLP. cherche comment ai<strong>de</strong>r les Œuvres <strong>de</strong> St‐Charles et les Jeunes<br />

Ouvriers <strong>de</strong> Nazareth.<br />

740


Vaugirard, 20 mai 1859<br />

Mon bien bon ami,<br />

M. Baudon, qui a eu lʹextrême bonté <strong>de</strong> nous visiter dimanche à Vaugirard, vous<br />

aura dit, sans doute, quʹà notre grand regret nous ne pouvions compter sur le concours <strong>de</strong><br />

M. lʹabbé Leleu qui, après essai prolongé, ne se croit pas appelé aux œuvres <strong>de</strong> charité, ou<br />

plutôt à la vie <strong>de</strong> communauté pour laquelle il ne se sent pas <strong>de</strong> disposition.<br />

Nous avons beaucoup cherché ces jours <strong>de</strong>rniers si nous aurions quelque combinai‐<br />

son pour assurer les secours spirituels aux quelques œuvres auxquelles nous concourons,<br />

notamment St ‐Charles et lʹœuvre <strong>de</strong>s jeunes ouvriers <strong>de</strong> Nazareth que M. Baudon nous re‐<br />

comman<strong>de</strong> <strong>avec</strong> une vive instance. Nous sommes si peu forts et si peu nombreux que nous<br />

ne voyons dans nos ressources aucun moyen bien satisfaisant; quelque arrangement que<br />

nous fassions, <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> vous et <strong>avec</strong> nos Confrères <strong>de</strong>s maisons <strong>de</strong> patronage, nous<br />

laisserons toujours bien <strong>de</strong>s points en souffrance et ne pourvoirons quʹà la moitié <strong>de</strong>s be‐<br />

soins.<br />

Nous pensions, en définitive, vous proposer <strong>de</strong> confier à M. Roussel le spirituel <strong>de</strong>s<br />

jeunes ouvriers <strong>de</strong> Nazareth et celui <strong>de</strong> St ‐Charles, ces <strong>de</strong>ux emplois pouvant plus ou<br />

moins convenablement se concilier et laissant encore un peu <strong>de</strong> liberté dans la semaine<br />

pour donner temporairement quelque assistance au temporel <strong>de</strong> la fondation <strong>de</strong> Grenelle.<br />

Nous prendrions sur nos ressources <strong>de</strong> Vaugirard pour assister Grenelle, cʹest‐à‐dire que<br />

M. Lantiez ou M. Faÿ iraient le dimanche y faire la confession <strong>de</strong>s enfants et les instruc‐<br />

tions. Nous souffririons, nous, à Vaugirard <strong>de</strong> cette combinaison, elle nʹest pas parfaite<br />

tant sʹen faut, mais nous nʹavons su rien imaginer <strong>de</strong> mieux. Si vous le préfériez, on laisse‐<br />

rait toutes choses à Grenelle en lʹétat présent, et M. Lantiez irait le dimanche pour le spiri‐<br />

tuel <strong>de</strong> la maison St ‐Charles; mais les jeunes ouvriers <strong>de</strong> Nazareth resteraient délaissés, et<br />

St ‐Charles lui‐même serait faiblement soutenu, M. Lantiez ayant ici trop <strong>de</strong> charges pour<br />

se donner autant quʹil le faudrait à une œuvre du <strong>de</strong>hors si éloignée <strong>de</strong> nous.<br />

Je vous prie, mon bon ami, dʹexaminer <strong>avec</strong> M. Baudon, et <strong>de</strong>vant Dieu surtout,<br />

quel parti serait le meilleur; nous mettons nos pauvres ressources à votre disposition, <strong>avec</strong><br />

un regret sincère <strong>de</strong> nʹen avoir pas <strong>de</strong> plus abondantes à vous offrir.<br />

Il y a mille ans que nous ne vous avons vu à Vaugirard, ce sera pour nous un jour<br />

<strong>de</strong> fête quand vous y viendrez.<br />

Je vous embrasse affectueusement et suis en N.S.<br />

Votre dévoué Confrère et frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

622 à M. Caille<br />

MLP. promet sa visite à Amiens, mais il ne peut en préciser la date.<br />

Vaugirard, 27 mai 1859<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous sais tout le gré possible <strong>de</strong>s instances aimables que vous me faites pour<br />

mʹengager à me rendre dimanche à Amiens; ce serait une vraie satisfaction pour moi <strong>de</strong><br />

me joindre à vous pour la fête <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Bon‐Secours, mais je ne puis encore prévoir bien<br />

précisément le jour où jʹaurai la joie <strong>de</strong> vous rendre visite; la première communion <strong>de</strong> nos<br />

741


enfants est toute prochaine, et je vois dʹici là quelques dérangements qui ne pourront<br />

guère être évités. Soyez bien assuré toutefois, bien cher ami, que jʹai le désir bien sincère <strong>de</strong><br />

différer le moins quʹil se pourra ce petit voyage dont je me fais une fête, puisquʹil doit me<br />

rapprocher <strong>de</strong> mes bien‐aimés ff. dʹAmiens.<br />

Le f. Carment ira pour lʹanniversaire <strong>de</strong> la mort <strong>de</strong> son bon père, il vous portera <strong>de</strong><br />

nos nouvelles; nous nʹavons rien <strong>de</strong> nouveau, tout marche dans le sentier accoutumé.<br />

Adieu, mon bien bon ami, mille affections à nos frères ainsi quʹà vous <strong>de</strong> la part <strong>de</strong><br />

tous.<br />

Votre dévoué ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

623 à M. Halluin<br />

Petite chronique <strong>de</strong>s communautés dʹArras et <strong>de</strong> Vaugirard.<br />

Vaugirard, 31 mai 1859<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Les détails contenus dans votre lettre nous ont vivement intéressés. Je vois <strong>avec</strong> sa‐<br />

tisfaction la formation <strong>de</strong> vos petites Congrégations ou Conférences. Cʹest partout un<br />

moyen bien éprouvé et bien efficace que dʹemployer les meilleurs pour soutenir et édifier<br />

les plus faibles. Je crois seulement quʹil faudrait faire un choix bien sérieux <strong>de</strong> ceux que<br />

vous feriez participer à la conduite ou surveillance <strong>de</strong>s élèves.<br />

Je suis heureux que notre f. Alphonse [Vasseur] prenne bien à cœur son emploi et<br />

vous ai<strong>de</strong> <strong>avec</strong> dévouement; il peut rendre <strong>de</strong>s services réels dans les œuvres, mais il faut<br />

quʹil se défie <strong>de</strong> lui‐même et cherche constamment sa force en Dieu.<br />

Jʹapprouve bien votre pru<strong>de</strong>nce à lʹégard du f. Cousin; je souhaite quʹil soit jugé ca‐<br />

pable dʹavancer dans les <strong>de</strong>grés dʹordination, parce que je lui crois le cœur excellent, mais<br />

je comprends que sa situation <strong>de</strong>man<strong>de</strong> circonspection. Jʹignorais que sa faiblesse <strong>de</strong> santé<br />

fût commune à plusieurs membres <strong>de</strong> sa famille.<br />

Je pense comme vous que le f. <strong>Jean</strong> [Maury] aura besoin <strong>de</strong> faire un petit voyage<br />

dans sa famille, si sa mère ne va pas mieux, mais en déterminant, sʹil se peut, le temps que<br />

<strong>de</strong>vra durer ce voyage. Jʹai bonne confiance que le f. Thuillier va se remonter, il y a un bon<br />

fond chez lui, il a seulement besoin dʹêtre habituellement soutenu.<br />

Espérons que le f. <strong>Jean</strong>‐Baptiste [Hamon] se fera peu à peu à sa position et saura y<br />

suffire; si, après épreuve patience et charitable, comme il doit lʹattendre <strong>de</strong> nous, il parais‐<br />

sait évi<strong>de</strong>nt quʹil ne peut convenir à cet emploi, je serai très disposé à lʹen tirer, mais je ne<br />

vois malheureusement en ce moment aucun moyen <strong>de</strong> le remplacer.<br />

Je ne vois pas dʹinconvénient réel, quant à présent, à prendre pour confesseur <strong>de</strong> la<br />

Maison un p. <strong>de</strong> la Miséricor<strong>de</strong>; nous sommes obligés <strong>de</strong> nous accommo<strong>de</strong>r aux circons‐<br />

tances. Ces Pères sont‐ils ceux qui ont leur Maison‐Mère à Paris, rue <strong>de</strong> Varennes? Il eût<br />

été désirable <strong>de</strong> connaître un peu ce père confesseur, jʹespère que le bon Maître lui donne‐<br />

ra la grâce nécessaire.<br />

Nos enfants dʹArras: Brice, Duranel et Lamoury vont bien, nous donnent satisfac‐<br />

tion. Marchal a dʹexcellentes qualités <strong>de</strong> cœur, mais cʹest un tout petit enfant pour la rai‐<br />

son, bien <strong>de</strong>s fois nous lʹavons remonté dans ses découragements, mais je crois que nous<br />

742


ne pourrons le maintenir longtemps. Il a écrit à son frère, qui lui écrit toujours <strong>de</strong>s lettres<br />

fort chrétiennes et fort sensées et lui conseille en <strong>de</strong>rnier lieu <strong>de</strong> sʹentendre <strong>avec</strong> vous et<br />

<strong>avec</strong> sa parente sur son avenir. Il me paraît à peu près certain que nous ne pourrons le re‐<br />

tenir et quʹaprès lʹAscension il vous arrivera. Nous le regretterons à beaucoup dʹégards,<br />

car il a vraiment le cœur naïf et bon.<br />

Notre f. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] a eu le chagrin <strong>de</strong> perdre un <strong>de</strong> ses jeunes neveux,<br />

âgés <strong>de</strong> 7 ans½. Les liens dʹaffections sont si tendres dans cette excellente famille que la<br />

peine <strong>de</strong> chacun atteint tous les membres. Priez pour eux, cher Monsieur lʹabbé, je crois<br />

quʹà force <strong>de</strong> développer les sentiments <strong>de</strong> famille, ils accroissent le nombre ou du moins<br />

la pesanteur <strong>de</strong> leurs croix. Daigne le Seigneur assister et régler dans sa charité les mou‐<br />

vements <strong>de</strong> leur cœur.<br />

Tout va ici comme <strong>de</strong> coutume. Notre jeune Verdier est atteint par la conscription,<br />

mais il en a pris courageusement son parti et va sʹéloigner en bonne et chrétienne disposi‐<br />

tion. Nous ne regardons pas cet événement comme malheureux pour lui, cette épreuve<br />

pouvant, nous lʹespérons, fortifier sa volonté et lui donner lʹénergie qui lui manque. Son<br />

tuteur eût pu le faire exempter, mais il ne lʹa pas cru utile pour son bien et a préféré lui<br />

faire subir cette leçon <strong>de</strong> lʹexpérience. Espérons que le Seigneur la rendra toute bonne pour lui.<br />

Adieu, cher Monsieur, lʹabbé, tous ici vous sont cordialement dévoués et suivent<br />

<strong>avec</strong> intérêt tout ce qui concerne votre chère maison. Je suis moi‐même, <strong>avec</strong> une tendre et<br />

respectueuse affection.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

624 à M. Halluin<br />

Un jeune postulant quitte Vaugirard pour sʹen retourner à Arras.<br />

[Vaugirard] 3 juin [1859]<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Notre pauvre Marchal est si pressé <strong>de</strong> partir que jʹai à peine le temps <strong>de</strong> vous écrire<br />

<strong>de</strong>ux mots. Nous avons fait ce que nous avons pu, humainement, pour affermir cette faible<br />

raison; nous sommes contraints <strong>de</strong> con<strong>de</strong>scendre à sa faiblesse, ne pouvant lʹéclairer et lui<br />

donner une suffisante intelligence <strong>de</strong> ce qui est sage et bien. Cʹest un acte <strong>de</strong> patience à<br />

joindre à tous ceux quʹexige une œuvre comme la nôtre.<br />

Nous vous embrassons tous dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

625 à M. Caille<br />

Pratiques <strong>de</strong> dévotions pour le mois du Sacré‐Cœur. Part échue aux frères dʹAmiens.<br />

Vaugirard, 4 juin 1859<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Durant le mois du Sacré Cœur, cʹest‐à‐dire du 1 er juin au 3 juillet, nous faisons le<br />

mois du Sacré Cœur. Ordinairement, pour chaque jour, lʹun <strong>de</strong> nous est chargé au nom <strong>de</strong><br />

tous, dʹoffrir nos hommages, réparations et œuvres. Celui qui est ainsi dʹoffice fait, sʹil se<br />

743


peut, la Sainte Communion à cette intention et y ajoute quelques petites pénitences et<br />

bonnes œuvres.<br />

Les jours échus au sort aux ff. dʹAmiens sont:<br />

08 juin le f. Paul Luzier<br />

10 ʺ le f. Joseph [Loquet]<br />

12 ʺ le f. Caille<br />

32 ʺ[=2.07] le f. Jules [Marcaire]<br />

La communauté ensemble dit les soirs lʹacte <strong>de</strong> consécration au Sacré‐Cœur <strong>avec</strong> les<br />

invocations: Cor Jesu etc. et Cor Mariæ etc.<br />

Nous tâchons aussi <strong>de</strong> faire la petite lecture dans le livre du Mois du Sacré‐Cœur.<br />

Ces pratiques bien simples nous associent aux prières et aux mérites <strong>de</strong> toutes les<br />

personnes et Congrégations dévouées au Sacré Cœur <strong>de</strong> Jésus.<br />

Nous vous recommandons tout particulièrement la première communion <strong>de</strong> nos<br />

enfants fixée au 9 juin; ils entrent en retraite <strong>de</strong>main dimanche.<br />

Adieu, mon bien bon ami, soyez assuré, ainsi que nos ff. dʹAmiens, <strong>de</strong> tous mes<br />

bien affectueux sentiments.<br />

Nos frères vous embrassent cordialement dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je nʹoublie pas que je vous dois une petite visite, je tâcherai <strong>de</strong> la réaliser.<br />

626 à M. Halluin<br />

Pratiques <strong>de</strong> dévotions pour le mois du Sacré‐Cœur. Part échue aux frères dʹArras..<br />

Vaugirard, 4 juin 1859<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Notre petite communauté est dans lʹusage <strong>de</strong> faire chaque année le mois du Sacré<br />

Cœur, du 1er juin au 3 juillet. Je pense quʹà Arras vous avez aussi cette dévotion qui entre<br />

si bien dans lʹesprit <strong>de</strong> notre œuvre. Comme il se fait en beaucoup <strong>de</strong> lieux, et comme nous<br />

lʹavons souvent pratiqué nous‐mêmes, nous avons composé <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> la Commu‐<br />

nauté une petite association dont chaque sujet doit, à son jour, offrir, au nom <strong>de</strong> tous, au<br />

Cœur du divin Seigneur, nos hommages, nos réparations et nos œuvres. Celui qui est ainsi<br />

dʹoffice fait dʹordinaire la Sainte Communion et y ajoute quelque petite pénitence et bonne<br />

œuvre.<br />

Les jours échus au sort aux ff. dʹArras sont:<br />

07 juin le f. Alphonse [Vasseur]<br />

14 ʺ le f. Thuillier<br />

15 ʺ M. lʹabbé Halluin<br />

20 ʺ le f. <strong>Jean</strong> Maury<br />

23 ʺ le f. Cousin<br />

29 ʺ le f. <strong>Jean</strong>‐Baptiste [Hamon]<br />

La communauté ensemble dit tous les soirs lʹacte <strong>de</strong> consécration au Sacré‐Cœur<br />

<strong>avec</strong> lʹinvocation: Cor Jesu etc. Cor Mariæ etc. Chacun en particulier fait, sʹil le peut, la petite<br />

lecture dans le livre: Le Mois du Sacré‐Cœur. Ces pratiques sont assez simples et assez cour‐<br />

744


tes pour ne pas charger nos exercices, et elles nous associent aux prières et aux mérites <strong>de</strong><br />

toutes les personnes ou Congrégations dévouées au Cœur Sacré <strong>de</strong> Jésus.<br />

Nous vous recommandons tout particulièrement la première communion <strong>de</strong> nos<br />

enfants fixée au 9 juin; ils entrent en retraite <strong>de</strong>main, dimanche.<br />

Recevez, cher Monsieur lʹabbé, pour vous et pour tous nos frères, les sentiments <strong>de</strong><br />

respect et dʹaffection <strong>de</strong><br />

Votre dévoué ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

627 à M. Halluin<br />

MLP. cherche à sʹinformer sur une difficulté quʹon lui a signalée à Arras. Nouvelles <strong>de</strong> Vaugirard.<br />

Vaugirard, 22 juin 1859<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Une petite lettre que je reçois du f. Alphonse [Vasseur] me fait craindre que vous<br />

nʹayez quelque difficulté ou peine dans ce moment, soit parmi vos enfants, soit dans le<br />

personnel qui vous entoure. Les termes <strong>de</strong> cette lettre sont si vagues que je nʹai pu com‐<br />

prendre <strong>de</strong> quoi il sʹagissait. Je me plais à espérer, cher Monsieur lʹabbé, quʹil nʹy a rien <strong>de</strong><br />

sérieux et que lʹimagination trop ar<strong>de</strong>nte <strong>de</strong> notre jeune frère se monte pour quelque<br />

cause, sans doute, peu importante. Je vous serai bien reconnaissant, néanmoins, <strong>de</strong> me ti‐<br />

rer dʹinquiétu<strong>de</strong> par quelques mots <strong>de</strong> réponse, aussitôt que vous le pourrez.<br />

Nous venons dʹavoir, à 15 jours <strong>de</strong> distance, la première communion <strong>de</strong> nos enfants<br />

et leur Confirmation, je vais être plus libre. Jʹespère quʹaprès lʹOctave <strong>de</strong> la Fête‐Dieu, je<br />

pourrai mʹéchapper et vous faire une petite visite.<br />

Nous allons passablement ici. Ferdinand nous est venu voir en allant rejoindre, à<br />

Bourges, son régiment. Notre jeune Verdier est pris aussi par la conscription et va à Tours.<br />

Nous sommes en construction présentement, élevant un bâtiment assez considéra‐<br />

ble pour les services <strong>de</strong> nos enfants. Cʹest une préoccupation ajoutée aux autres. Nous<br />

avons toutefois la plus gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong>s fonds nécessaires pour cette dépense; nous espé‐<br />

rons que le Seigneur ne nous délaissera point.<br />

Nous vivons en paix toujours et en disposition <strong>de</strong> travailler <strong>de</strong> notre mieux pour le<br />

service du Seigneur; daigne sa bonté ne pas rejeter notre indignité et nous accor<strong>de</strong>r,<br />

comme par le passé, <strong>de</strong>s marques constantes <strong>de</strong> son divin appui. Croyez, cher Monsieur<br />

lʹabbé, à tous mes sentiments <strong>de</strong> tendre dévouement en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

628 à M. Caille<br />

Projet <strong>de</strong> voyage à Amiens et à Arras. Deman<strong>de</strong> <strong>de</strong> nouvelles. MLP. est dans lʹembarras par le manque <strong>de</strong> per‐<br />

sonnel. Agrandissements <strong>de</strong> lʹorphelinat <strong>de</strong> Vaugirard.<br />

Vaugirard, 25 juin 1859<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

La première communion <strong>de</strong> nos enfants sʹest faite il y a quinze jours, et la Confirma‐<br />

tion a eu lieu mercredi <strong>de</strong>rnier; je vais donc être un peu plus libre et jʹespère que je pourrai<br />

745


vous aller voir prochainement. Si rien ne sʹy oppose, je pourrais partir après lʹOctave <strong>de</strong> la<br />

Fête‐Dieu, dans la première huitaine <strong>de</strong> juillet; il arrive pourtant si souvent que jʹaie <strong>de</strong>s<br />

dérangements pour une affaire ou une autre que je ne saurais préciser absolument le mo‐<br />

ment <strong>de</strong> mon départ. Si les chaleurs <strong>de</strong>venaient trop gran<strong>de</strong>s pour ma chétive santé, je<br />

prierais M. Myionnet <strong>de</strong> me remplacer; je pense que M. lʹabbé Faÿ, qui nʹa point encore vu<br />

votre maison, pourra faire aussi ce petit voyage; je ferai en même temps une petite appari‐<br />

tion à Arras; si cʹest moi qui dois faire cette petite tournée, elle sera courte, car je ne mʹab‐<br />

sente guère longtemps <strong>de</strong> la maison.<br />

Je ne reçois guère <strong>de</strong> nouvelles <strong>de</strong> nos frères, le f. Jules [Marcaire], en particulier, ne<br />

mʹa pas écrit une seule fois <strong>de</strong>puis son retour <strong>de</strong> la retraite, cʹest‐à‐dire <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux mois;<br />

invitez‐le à nous négliger un peu moins, il est bien essentiel en communauté <strong>de</strong> ne pas<br />

laisser sʹaffaiblir les liens <strong>de</strong> lʹaffection réciproque; il peut arriver parfois que je tar<strong>de</strong> un<br />

peu à répondre, mais cʹest que, tandis que chacun nʹécrit guère quʹà moi seul, jʹai pour moi<br />

à écrire à tous et à suivre le mouvement général <strong>de</strong> la Communauté.<br />

Tout va bien ici, nos frères sont, en ensemble, en bonne disposition. Je vous ai dit, je<br />

crois, que le bon abbé Leleu nʹavait pas pu persévérer, ayant trouvé la vie <strong>de</strong> communauté<br />

au‐<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> ses forces ou mal appliquée à ses dispositions. La conscription nous enlève le<br />

jeune Verdier qui part mercredi comme soldat du 5 e Régiment <strong>de</strong> ligne, en ce moment à<br />

Tours; il est bien disposé et jʹespère quʹil restera fidèle à Dieu dans cette nouvelle condi‐<br />

tion. Nous avons dû donner le jeune Ernest Vasseur à Nazareth pour ai<strong>de</strong>r à lʹœuvre <strong>de</strong>s<br />

jeunes ouvriers qui était trop dépourvue pour beaucoup <strong>de</strong> soins <strong>de</strong> détail. Il suit <strong>de</strong> tous<br />

ces arrangements que nous sommes un peu serrés maintenant ici par les charges nom‐<br />

breuses <strong>de</strong> la maison. Heureusement, en été, on peut mieux sʹen tirer. Pour comble <strong>de</strong> pré‐<br />

occupations, nous faisons un bâtiment assez considérable pour établir plus convenable‐<br />

ment plusieurs services <strong>de</strong> lʹorphelinat. Priez bien le bon Dieu, mon bon ami, afin quʹ<strong>avec</strong><br />

son secours nous subvenions à tout et que, par‐<strong>de</strong>ssus toutes choses, nous ne négligions<br />

pas le plus essentiel, le spirituel, auquel tout doit être chez nous rapporté et sacrifié quand<br />

il le faut.<br />

Assurez nos frères <strong>de</strong> ma tendre affection et <strong>de</strong>s bons souvenirs <strong>de</strong> tous; recevez<br />

vous‐même, mon bon ami, mes plus dévoués sentiments en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

628 bis 301 à M. Decaux<br />

Projet dʹune maîtrise au Patronage St‐Charles. Vœux pour la saint Paul.<br />

Vaugirard, 2 juillet [1859]<br />

Visitation<br />

Mon bien bon ami et frère,<br />

Jʹai bien regretté que votre départ avant la fin <strong>de</strong> notre assemblée, jeudi, mʹait privé<br />

<strong>de</strong> la satisfaction <strong>de</strong> vous embrasser encore une fois et <strong>de</strong> vous redire combien vos trop ra‐<br />

res visites nous sont douces et consolantes. Si elles vous reposent un peu, elles sont loin<br />

dʹêtre temps perdu, car vos fatigues sont extrêmes; elles servent dʹailleurs à nous tenir tou‐<br />

301 Supplée la lettre 529.<br />

746


jours en unité parfaite <strong>de</strong> cœur et dʹaction: que <strong>de</strong> raisons pour les rendre un peu plus fré‐<br />

quentes!<br />

Le f. Tourniquet me dit que vous vous proposiez <strong>de</strong> me parler du projet <strong>de</strong> la maî‐<br />

trise à S t ‐Charles. Je crois que les explications que mʹa données sur cette affaire le f. Tour‐<br />

niquet ne mʹont pas assez bien éclairé pour que je puisse avoir un avis motivé; il me sem‐<br />

ble quʹil faut voir sʹil y a en ce moment <strong>de</strong>s inconvénients sérieux pour le patronage et, en<br />

ce cas, faire tout ce quʹon pourra pour lʹempêcher, en prenant soins <strong>de</strong> faire bien compren‐<br />

dre nos raisons à M. le Curé, et même, sʹil y a moyen, aux Frères. Si les inconvénients sont<br />

peu sensibles et sans préjudice réel pour notre œuvre, il serait bien, je crois, dʹaccé<strong>de</strong>r aux<br />

vœux <strong>de</strong> M. le Curé. Le f. Tourniquet voit en cela un pied <strong>de</strong> plus donné dans la maison<br />

aux Frères quʹon y sent déjà plus quʹon ne voudrait bien souvent; il regrette gran<strong>de</strong>ment<br />

quʹon lui prenne pour la maîtrise le local <strong>de</strong> sa bibliothèque, les locaux étant déjà stricte‐<br />

ment mesurés pour les besoins <strong>de</strong>s œuvres, enfin et surtout il dit que le projet avoué <strong>de</strong> M.<br />

le Curé serait <strong>de</strong> faire un nouveau bâtiment dans la nouvelle cour qui en serait ainsi bien<br />

amoindrie. Il me semble que, pour le patronage, le libre espace est un besoin, une nécessité<br />

et quʹil serait bien regrettable que cet avantage si chèrement acheté fût diminué sans profit<br />

réel pour lʹŒuvre; et quel profit compenserait dʹailleurs une telle perte? Voilà tout ce que<br />

jʹaperçois dans cette affaire. Sʹil est réellement à souhaiter que la maîtrise ne vienne pas à<br />

S t ‐Charles, il me semble quʹ<strong>avec</strong> <strong>de</strong>s formes respectueuses et en faisant appel à la haute sa‐<br />

gesse <strong>de</strong> M. le Curé, on arrivera à le persua<strong>de</strong>r; le patronage nʹest point proprement une<br />

œuvre paroissiale, il doit gar<strong>de</strong>r son caractère et faire avant tout le bien si réel pour lequel<br />

il est institué.<br />

Mon bien bon ami, jʹaurais voulu encore vous voir quelques instants <strong>de</strong> plus jeudi,<br />

pour vous dire que la fête <strong>de</strong> S t Paul ne passerait pas inaperçue pour nous. Nous savons<br />

combien, au milieu <strong>de</strong> vos travaux, <strong>de</strong> vos saintes entreprises, le secours <strong>de</strong> Dieu vous est<br />

nécessaire, nous le <strong>de</strong>mandons ar<strong>de</strong>mment par lʹentremise <strong>de</strong> votre grand Patron S t Paul,<br />

si bien choisi pour ceux que la charité du Seigneur consume et presse, et qui trouvent en<br />

lui leur modèle en même temps que leur appui. Puisse‐t‐il vous obtenir <strong>de</strong>s forces toujours<br />

nouvelles pour répondre aux ar<strong>de</strong>urs <strong>de</strong> votre cœur, et assurer à votre âme toutes les dou‐<br />

ces joies du bien purement et saintement accompli.<br />

Croyez, mon bien bon ami, à mon fidèle et tendre attachement en J. et M.<br />

Votre ami et frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

629 à M. Caille<br />

Voyage à Amiens différé. Cʹest M. Myionnet qui se déplacera. Nouvelles <strong>de</strong> Vaugirard.<br />

Vaugirard, 3 juillet 1859<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Votre bonne lettre mʹarrive à temps avant le départ <strong>de</strong> nos frères, M. lʹabbé Faÿ et<br />

M. Myionnet, qui vont vous rendre visite <strong>de</strong>main et qui <strong>de</strong> là se rendront aussi près <strong>de</strong> no‐<br />

tre bon abbé Halluin.<br />

Les termes si affectueux <strong>de</strong> votre lettre me font encore plus vivement regretter <strong>de</strong> ne<br />

pouvoir cette fois vous aller voir moi‐même, mais ce ne sera, je lʹespère, quʹune satisfaction<br />

747


différée. Lʹextrême chaleur serait, je pense au <strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> mes forces pour un voyage entre‐<br />

pris en ce moment et ne me laisserait guère les moyens <strong>de</strong> rendre ma visite un peu utile et<br />

encourageante pour nos frères. Nous avons dʹailleurs surcroît dʹactivité à la maison ces<br />

temps‐ci, à cause dʹune construction assez considérable que nous faisons et dont la surveil‐<br />

lance absorbe beaucoup M. Lantiez.<br />

La lettre <strong>de</strong> notre f. Jules [Marcaire] mʹa beaucoup consolé en ce qui le concerne; je<br />

vois <strong>avec</strong> joie quʹil a tout à fait surmonté ses dispositions mélancoliques, quʹil prend sé‐<br />

rieusement à cœur les intérêts <strong>de</strong> son œuvre et quʹil sʹasseoit plus résolument dans la posi‐<br />

tion quʹil doit prendre comme votre remplaçant. Le long temps qui sʹétait écoulé sans quʹil<br />

mʹécrivît me laissait quelque inquiétu<strong>de</strong> sur son état dʹesprit, je suis tout heureux <strong>de</strong> le<br />

voir en bonne disposition. Sa mère mʹa <strong>de</strong>mandé à lʹaller voir, mais assez faiblement et<br />

sans insistance; si nous pouvons lʹéviter, ce serait bien mieux; je préférerais, si cela sem‐<br />

blait nécessaire, quʹil fît lui‐même dans <strong>de</strong>ux ou trois mois une petite apparition ici, ce se‐<br />

rait moins dérangeant et moins irrégulier. Vous pourrez en causer <strong>avec</strong> M. Myionnet<br />

comme <strong>de</strong> tout le reste; vous savez que ce bon frère est dʹun excellent esprit et que vous<br />

pouvez vous entendre <strong>avec</strong> lui comme <strong>avec</strong> moi‐même, cʹest ce qui me console <strong>de</strong> ne point<br />

vous visiter personnellement. Quant au f. Joseph [Loquet], on en peu tirer plus <strong>de</strong> parti<br />

que vous ne semblez le croire; il faut le prendre par lʹaffection et la confiance, il a besoin<br />

dʹêtre relevé et soutenu, le blâme répété trop souvent le porterait au découragement. Je<br />

pourrais difficilement le remplacer présentement. M. Henry Guillot se trouve définitive‐<br />

ment beaucoup mieux pour sa santé <strong>de</strong> lʹair <strong>de</strong> Vaugirard; dʹailleurs, lʹenvoi <strong>de</strong> M. Ernest<br />

[Vasseur] à Nazareth, la conscription du jeune Verdier, etc. nous ont mis un peu à lʹétroit,<br />

nous nʹavons strictement que le personnel nécessaire pour nos nombreux services à Vaugi‐<br />

rard. Prenons donc un peu <strong>de</strong> patience, cher ami, <strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> Dieu, qui ne nous manque<br />

jamais, nous arriverons à tout asseoir en bonnes conditions.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

630 à M. Halluin<br />

La faible santé <strong>de</strong> MLP. lʹempêche dʹeffectuer, comme prévu, le voyage à Arras.<br />

Vaugirard, 3 juillet 1859<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Lʹextrême chaleur qui dépasse un peu mes forces et les occupations multipliées du<br />

moment me privent <strong>de</strong> la joie <strong>de</strong> vous aller voir. Ce ne sera quʹune satisfaction différée, je<br />

lʹespère bien. MM. Myionnet et Faÿ me remplacent et feront assurément plus <strong>de</strong> bien que<br />

je nʹaurais pu en faire parmi nos frères. M. Myionnet examinera <strong>avec</strong> vous tous les points<br />

qui vous paraîtraient <strong>de</strong> quelque intérêt pour notre chère œuvre dʹArras et pour la petite<br />

communauté. Je sens bien que tout nʹy est pas en assiette parfaite, mais hélas! constituer<br />

une œuvre <strong>de</strong> notre temps est chose si lente et si laborieuse. Cʹest par notre faute, sans<br />

doute, et à cause <strong>de</strong> notre indignité que les progrès sont si lents et les résultats si impar‐<br />

faits. Mais <strong>de</strong> notre insuffisance et <strong>de</strong> notre humiliation sortira, je lʹespère, une source <strong>de</strong><br />

grâces nouvelles, si nous savons rapporter tout bien à Dieu et nʹattendre rien que <strong>de</strong> son<br />

secours.<br />

748


Je <strong>de</strong>meure <strong>avec</strong> tous nos frères bien tendrement uni à vous dans les Cœurs sacrés<br />

<strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M., et suis <strong>avec</strong> une respectueuse affection<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je viens <strong>de</strong> recevoir une lettre <strong>de</strong> faire‐part mʹannonçant la mort <strong>de</strong> la mère <strong>de</strong><br />

M. Flour. Je pense bien que, <strong>de</strong> votre côté, vous aurez été informé <strong>de</strong> lʹaffliction <strong>de</strong> cet ex‐<br />

cellent Monsieur. Nous prierons pour lui assurément et pour sa mère décédée bien chré‐<br />

tiennement.<br />

M. Myionnet vous porte la poudre contre les insectes et règlera tous les petits inté‐<br />

rêts qui seraient à mettre au courant entre votre œuvre et celle <strong>de</strong> Vaugirard. Cʹest, je crois,<br />

bien peu <strong>de</strong> chose. Je ne sais où le f. Tourniquet en est pour la pension du jeune neveu quʹil<br />

a mis chez vous. M. Myionnet vous paiera trois mois pour Maillard.<br />

631 à M. Halluin<br />

Souhaits <strong>de</strong> fête. Pénurie <strong>de</strong> personnel. Pour ai<strong>de</strong>r Arras, MLP. leur enverrait le frère Sadron qui, pourtant, lui<br />

est très utile à Vaugirard.<br />

Vaugirard, 13 juillet 1859<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Les trois enfants que vous avez envoyés parmi nous ont désiré vous écrire pour vo‐<br />

tre fête, ils vous restent très attachés, et je crois pouvoir dire que cʹest du fond du cœur<br />

quʹils vous adressent leurs vœux, en cette occasion. Cette affection dévouée et reconnais‐<br />

sante ne leur est pas propre; du reste, tous ceux que vous avez élevés montrent, en géné‐<br />

ral, les mêmes sentiments. Ce doit vous être une vive consolation, au milieu <strong>de</strong>s soucis et<br />

difficultés si nombreuses <strong>de</strong> votre œuvre, <strong>de</strong> voir quʹelle ne laisse pas <strong>de</strong> produire toujours<br />

ses fruits. Je prierai moi‐même <strong>avec</strong> tous nos frères, bien sincèrement, pour que le Sei‐<br />

gneur daigne répandre sur vous et sur votre maison <strong>de</strong>s grâces <strong>de</strong> plus en plus abondan‐<br />

tes. Je lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rai surtout quʹIl nous donne quelques moyens <strong>de</strong> vous ai<strong>de</strong>r plus effi‐<br />

cacement. Il ne nous est point donné <strong>de</strong> pénétrer les <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> ce bon Maître. Nous <strong>de</strong>‐<br />

vons donc, quoi quʹil nous en coûte, subir lʹépreuve que nous impose la pénurie <strong>de</strong> sujets.<br />

Depuis le retour <strong>de</strong> M. Myionnet tout particulièrement, nous avons examiné ici quelle res‐<br />

source nous pourrions avoir pour vous ai<strong>de</strong>r. Nous avons cherché au <strong>de</strong>hors, et nous<br />

nʹavons pas été plus heureux. De ce <strong>de</strong>rnier côté, en continuant nos recherches, nous au‐<br />

rions chance <strong>de</strong> trouver enfin quelque sujet qui pourrait rendre chez vous quelques servi‐<br />

ces. Mais vous êtes tellement pressé dʹavoir <strong>de</strong> lʹai<strong>de</strong> que la situation ne comporte guère <strong>de</strong><br />

délai. Nous allons néanmoins continuer nos démarches et si nous découvrons quelque<br />

chose, nous nous hâterons <strong>de</strong> vous en avertir, sauf à ne pas donner suite à la proposition,<br />

si vous aviez avisé déjà à quelque autre expédient. Dans un moment <strong>de</strong> gêne pareille où<br />

nous nous sommes trouvés nous‐mêmes, il y a quelques années, nous avons eu recours à<br />

lʹEcole Normale tenue à Beauvais par les Frères <strong>de</strong>s Ecoles. Cette maison nous donna alors<br />

un sujet dont nous eûmes à tous égards pleine satisfaction. Nous prierons bien tous en‐<br />

semble, cher Monsieur lʹabbé, le divin Seigneur, et nous ferons prier nos enfants à la même<br />

intention. Espérons que la miséricor<strong>de</strong> <strong>de</strong> notre Dieu se laissera toucher par nos instances.<br />

Nous vous embrassons tous <strong>avec</strong> respect et affection.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

749


P.S. M. Thuillier, dans sa lettre, me <strong>de</strong>mandait <strong>de</strong> vous envoyer M. Sadron; ce serait<br />

un grand sacrifice pour nous; il nous est ici dʹune utilité extrême<br />

pour la discipline quʹil entend très bien, pour la vigilance, pour<br />

tout le matériel et les notes <strong>de</strong>s classes. Pourtant, si à ce prix<br />

nous <strong>de</strong>vions rendre votre situation supportable, nous nous<br />

résignerions à nous priver <strong>de</strong> son ai<strong>de</strong>. Voyez, cher Monsieur<br />

lʹabbé, si vous en tirerez réellement bon profit. Chez nous, sa<br />

jambe <strong>de</strong> bois nʹest un obstacle à rien, on y est accoutumé. Si vos<br />

enfants <strong>de</strong>vaient y trouver une cause <strong>de</strong> résistance et dʹinsou‐<br />

mission, mieux vaudrait ne pas songer à ce moyen.<br />

632 à M. Caille<br />

Remerciements pour lʹenvoi <strong>de</strong> tissus.<br />

Frère Henri Sadron<br />

Vaugirard, 16 juillet 1859<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu le paquet satin‐laine sèche que vous avez eu lʹobligeance <strong>de</strong> mʹenvoyer; je<br />

vous prie <strong>de</strong> mʹen adresser la facture.<br />

Nos ff. ecclésiastiques atten<strong>de</strong>nt impatiemment le mérinos double pour leurs souta‐<br />

nes; je vous prie <strong>de</strong> faire en sorte quʹil arrive aussitôt quʹil se pourra.<br />

Mille affections en N.S. pour vous et pour vos frères <strong>de</strong> toute votre maison.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

633 à M gr Angebault<br />

Exposé <strong>de</strong>s hésitations et réflexions <strong>de</strong>s fondateurs sur la manière <strong>de</strong> régler la situation respective <strong>de</strong>s frères ecclé‐<br />

siastiques et <strong>de</strong>s frères laïcs dans lʹInstitut.<br />

Vaugirard, 6 août 1859<br />

Monseigneur,<br />

Nous sommes touchés et reconnaissants plus que nous ne pourrions le dire <strong>de</strong> la<br />

sollicitu<strong>de</strong> toute paternelle que vous daignerez accor<strong>de</strong>r à notre petite famille et dont vous<br />

lui donnez si constamment <strong>de</strong>s preuves <strong>de</strong>puis le jour où elle a pris naissance sous vos<br />

yeux, bénie par vous, soutenue par vos conseils, encouragée par les marques <strong>de</strong> votre ten‐<br />

dre charité. Nous ne nous étonnons point <strong>de</strong>s nouveaux témoignages que nous en rece‐<br />

vons tout particulièrement en ce moment, nous étions <strong>de</strong>puis quelque temps plus occupés<br />

que <strong>de</strong> coutume <strong>de</strong> notre situation et <strong>de</strong> notre avenir, nous avions beaucoup prié pour que<br />

le Seigneur daignât nous éclairer et nous montrer plus clairement dans quelle voie nous<br />

<strong>de</strong>vions marcher; votre lettre, Monseigneur, arrivant si à propos, nous semble comme la<br />

réponse que le Seigneur fait à nos instances.<br />

La bénédiction divine nʹa cessé dʹêtre bien sensible parmi nous, nous vivons dans<br />

lʹunion et dans la paix, nos œuvres prospèrent, notre nombre sʹaccroît lentement mais<br />

constamment et sûrement; tout donc, pour le présent, semble bon et satisfaisant, mais la<br />

750


préoccupation <strong>de</strong> lʹavenir tient toujours en éveil ceux dʹentre nous qui conduisent la na‐<br />

celle. La question tout spécialement qui vous a paru <strong>de</strong>voir être soumise à M gr lʹArchevê‐<br />

que <strong>de</strong> Tours [M gr Guibert], concernant lʹunion intime et la coordonnance <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux élé‐<br />

ments ecclésiastique et laïc, attire toute notre attention et nous semble <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r une solu‐<br />

tion. Ma santé est plus que frêle, <strong>de</strong>s acci<strong>de</strong>nts qui se sont renouvelés encore récemment<br />

indiquent quʹun rien pourrait mettre fin à mon existence; en présence dʹune nécessité qui<br />

peut être si prochaine, il nous est impossible <strong>de</strong> ne pas nous dire: ʺQue <strong>de</strong>vrait‐on faire le<br />

cas échéant?ʺ Nous ne voyons pas <strong>de</strong> réponse bien nette. A nʹen juger que par les disposi‐<br />

tions présentes, notre manière dʹêtre actuelle a <strong>de</strong> réels avantages, ecclésiastiques et laïcs<br />

travaillent cordialement à lʹœuvre <strong>de</strong> Dieu sans sʹoccuper dʹeux‐mêmes et <strong>de</strong> leur condi‐<br />

tion. Chacun apporte à la masse commune toutes les facultés personnelles et les ressources<br />

dont il dispose; il en résulte que tous valent tout ce quʹils peuvent valoir, ayant libre es‐<br />

pace pour donner emploi aux dons que le Seigneur leur a faits. Nous laïcs, conduisant les<br />

entreprises, sommes toujours disposés à y faire une place dʹhonneur et une part éminente<br />

aux ecclésiastiques dont nous vénérons le caractère, dont nous appelons et assistons le mi‐<br />

nistère; eux dirigeant les choses seraient‐ils assez con<strong>de</strong>scendants pour nous, assez dispo‐<br />

sés à nous faire la part dont nous avons besoin pour gar<strong>de</strong>r initiative, mouvement, puis‐<br />

sance dʹaction? Cʹest bien douteux; nous inclinerions donc à gar<strong>de</strong>r lʹétat présent <strong>de</strong>s cho‐<br />

ses, il serait je crois aussi accepté au <strong>de</strong>hors, si nous parvenions à en corriger les inconvé‐<br />

nients les plus saillants. On regar<strong>de</strong>, en général, autour <strong>de</strong> nous <strong>avec</strong> défiance et défaveur<br />

une institution qui semble aux yeux <strong>de</strong> plusieurs une expression aussi caractérisée que<br />

possible du laïcisme, puisque, ostensiblement, <strong>de</strong>s laïcs y organisent <strong>de</strong>s œuvres dans les‐<br />

quelles ils ne donnent, en apparence, que la secon<strong>de</strong> place au clergé. Je dis, en apparence,<br />

car par le fait, le but suprême <strong>de</strong> nos œuvres étant spirituel, le principe spirituel <strong>de</strong> la<br />

Communauté, lʹélément qui la représente plus particulièrement, agit et domine réellement<br />

au fond <strong>de</strong> tous nos mouvements, <strong>de</strong> tous nos travaux et <strong>de</strong> toute la vie <strong>de</strong> notre Institut.<br />

On ne veut pas observer non plus quand on nous critique, que la société tout entière est<br />

organisée ainsi <strong>de</strong> notre temps, que la plupart même <strong>de</strong>s institutions chrétiennes sont dans<br />

la même condition, laissant le mouvement extérieur et lʹinitiative apparente à lʹélément ci‐<br />

vil ou séculier et gardant seulement la vie et la puissance spirituelle à lʹélément ecclésiasti‐<br />

que et religieux. Si on suppose surtout lʹélément laïc pieux, dévoué à tout ce qui touche à<br />

la gloire <strong>de</strong> Dieu, déférent, respectueux, soumis à lʹEglise et à toute sa hiérarchie, on ne<br />

voit pas quʹil soit hors <strong>de</strong> raison et <strong>de</strong> convenance <strong>de</strong> constituer <strong>de</strong>s œuvres dans cette<br />

condition. Mais il faudrait donner satisfaction aux défiances quʹon a contre nous en tout ce<br />

quʹelles ont <strong>de</strong> réel ou même <strong>de</strong> spécieux. Il serait à souhaiter que nos ff. ecclésiastiques<br />

eussent pour leur ministère particulièrement une direction plus constante et plus ostensi‐<br />

ble surtout; quʹils reçussent extérieurement, comme par le fait leur mission pour leurs em‐<br />

plois dʹun chef ecclésiastique, quʹils eussent, en un mot, un couvert honorable qui abritât la<br />

dignité <strong>de</strong> leur caractère, et ôtât à leur ministère jusquʹà lʹombre <strong>de</strong> la dépendance à lʹégard<br />

dʹune autorité laïque. Nous avons pensé à poser au sommet <strong>de</strong> notre petite famille un Père<br />

spirituel donnant vie spirituelle à la Communauté et à ses œuvres, dirigeant tout particu‐<br />

lièrement les ff. ecclésiastiques, leur donnant mission dʹaprès les <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s du Conseil et<br />

suivant <strong>de</strong> haut la marche <strong>de</strong> la Congrégation sans se mêler directement ni activement à<br />

ses mouvements. Mais ce Père, où le trouver? Hors <strong>de</strong> la communauté? Mais cʹest bien dif‐<br />

ficile; qui voudra sʹoccuper <strong>de</strong> nous <strong>avec</strong> zèle, la pru<strong>de</strong>nce, la constance, le désintéresse‐<br />

751


ment désirables? Si on en trouve un par impossible, comment, quand il fera défaut, en<br />

trouver un second <strong>avec</strong> les mêmes qualités et le même esprit surtout? Si on le cherche dans<br />

la Congrégation elle‐même, il faut le supposer suffisamment mûr, expérimenté; sʹil est<br />

jeune et encore actif, où portera‐t‐il ses facultés dʹinitiative et dʹaction? Dans les œuvres <strong>de</strong><br />

la Communauté, il sortira <strong>de</strong> son rôle; au <strong>de</strong>hors, il se dépensera sans profit pour elle.<br />

Dans une visite que je fis <strong>de</strong>rnièrement à Son Eminence M gr notre Archevêque<br />

[Card. Morlot], sur quelques mots que jʹessayais <strong>de</strong> lui dire et qui furent, il est vrai, inter‐<br />

rompus par une personne survenant, il me répondit que peut‐être il serait sage pour nous<br />

<strong>de</strong> nous rattacher à quelque Congrégation déjà fondée et dont la consistance pourrait nous<br />

donner appui. Sans prendre ces mots pour un avis, puisque M gr nʹavait pu donner préci‐<br />

sément cette portée à ses paroles, nous avons bien souvent avant et <strong>de</strong>puis examiné si<br />

nous ne trouverions pas avantage à nous unir comme tiers‐ordre à la Congrégation <strong>de</strong> S t ‐<br />

Lazare, par exemple, nous plaçant à son égard à peu près comme le sont les Sœurs <strong>de</strong> Cha‐<br />

rité qui ont leur constitution propre, leur Supérieure commune, et qui sont seulement diri‐<br />

gées et appuyées <strong>de</strong> haut par la Congrégation <strong>de</strong> S t ‐Lazare. Je sais que la situation serait<br />

différente à notre égard; bien <strong>de</strong>s choses seraient à considérer; jusquʹoù irait lʹunion et la<br />

dépendance? Que <strong>de</strong>viendraient nos vœux <strong>de</strong> religion? Pour tout cela, on aurait à se<br />

mieux éclairer en prenant communication <strong>de</strong>s règles <strong>de</strong>s Sœurs <strong>de</strong> S t ‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul, en<br />

ce qui touche leurs rapports <strong>avec</strong> MM. <strong>de</strong> S t ‐Lazare. En supposant, par exemple, que M. le<br />

Général désignât un prêtre <strong>de</strong> sa Congrégation pour nous donner haute direction, on<br />

pourrait craindre, ou quʹil sʹoccupât faiblement <strong>de</strong> nous, ce qui rendrait notre rapproche‐<br />

ment <strong>avec</strong> la Congrégation <strong>de</strong> la Mission à peu près illusoire, ou quʹil intervînt trop effec‐<br />

tivement dans le détail <strong>de</strong> nos affaires et nʹentravât notre mouvement ainsi que la libre di‐<br />

rection du Supérieur <strong>de</strong> la Communauté.<br />

Pardonnez‐moi, mon bon et vénéré Seigneur, <strong>de</strong> vous dire si longuement tous nos<br />

doutes, toutes nos incertitu<strong>de</strong>s, elles peuvent servir à vous éclairer en vous montrant<br />

mieux combien nous sommes peu forts et combien votre appui, les lumières <strong>de</strong> votre<br />

haute expérience nous seront nécessaires.<br />

Nous avons accueilli <strong>avec</strong> bonheur lʹespérance que votre lettre nous permet <strong>de</strong><br />

concevoir dʹune prochaine visite que vous feriez à vos enfants <strong>de</strong> Vaugirard; elle serait<br />

pour nous un véritable bien et jʹose dire, Monseigneur, une véritable bonne œuvre pour<br />

vous. Nous vous préparons, si vous ne la dédaignez pas, une humble cellule; mais je ne<br />

saurais assez insister sur toute lʹindulgence et lʹesprit <strong>de</strong> pauvreté dont vous auriez besoin,<br />

si vous ne croyez pas impossible <strong>de</strong> prendre asile dans notre chétive maison. Nous bâtis‐<br />

sons en ce moment un corps <strong>de</strong> logis considérable, le désordre qui sʹen suit, joint au voisi‐<br />

nage <strong>de</strong> nos ateliers, rend le séjour <strong>de</strong> notre pauvre <strong>de</strong>meure bien peu agréable; si vous<br />

passiez à travers tous ces inconvénients, notre reconnaissance nʹen <strong>de</strong>vrait être que plus<br />

gran<strong>de</strong>. Jʹattendrai <strong>de</strong> votre bonté, Monseigneur, quelques mots dʹavis sur ce que vous<br />

croirez pouvoir déci<strong>de</strong>r à ce sujet.<br />

Lʹaffaire dʹune fondation <strong>de</strong> notre petite communauté à Angers semble, en effet,<br />

souffrir bien <strong>de</strong>s difficultés, comme vous le présumez, Monseigneur; les raisons dʹintérêt<br />

nʹy sont, à vrai dire, entrées pour rien, nous savons quelle place elles doivent avoir quand<br />

les choses que la Provi<strong>de</strong>nce conduit; notre faiblesse, lʹinsuffisance <strong>de</strong> notre personnel, la<br />

pesanteur <strong>de</strong> nos charges présentes ont été les principaux motifs <strong>de</strong> notre décision; il en est<br />

aussi quelques autres inhérentes à lʹœuvre elle‐même que nous aurions eu à prendre et<br />

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aux circonstances où elle nous eût placés. Si nous avons le bonheur <strong>de</strong> vous voir, je pour‐<br />

rai, Monseigneur, vous donner à ce sujet <strong>de</strong>s explications plus détaillées. Je regrette <strong>de</strong> fi‐<br />

nir si bas ma lettre et vous prie, Monseigneur dʹagréer lʹhommage que je vous présente au<br />

nom <strong>de</strong> tous, <strong>de</strong> nos sentiments <strong>de</strong> profond respect et <strong>de</strong> filial dévouement.<br />

Votre humble serviteur et fils en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

634 à M. Halluin<br />

MLP. compatit à la maladie du frère Cousin. Etat <strong>de</strong>s santés à Vaugirard. Mgr Angebault annonce sa visite.<br />

Vaugirard, 7 août 1859<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Nous prenons toute la part possible à la nouvelle épreuve que semble préparer à<br />

notre maison dʹArras la maladie du f. Cousin. Les chaleurs qui continuent si longtemps<br />

leur durée peuvent rendre moins facile la guérison <strong>de</strong> son mal. Nous prions tous pour lui<br />

et pour votre œuvre, nous ne <strong>de</strong>vons donc pas désespérer que le Seigneur ne détourne <strong>de</strong><br />

nous cette affliction. Soyons assurés, en tout cas, quʹIl saura tirer <strong>de</strong>s choses, quelles quʹel‐<br />

les soient, notre plus grand avantage, si nous entrons dans ses <strong>de</strong>sseins <strong>avec</strong> un cœur rési‐<br />

gné et soumis. Dites bien, je vous prie, à notre cher mala<strong>de</strong> que nous compatissons cordia‐<br />

lement à sa souffrance et ne cesserons point dʹinvoquer pour lui le Père <strong>de</strong>s miséricor<strong>de</strong>s<br />

par Marie, salut <strong>de</strong>s infirmes, consolation <strong>de</strong>s affligés.<br />

Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> vous dire, cher Monsieur lʹabbé, que nous vous verrons arriver<br />

<strong>avec</strong> joie, si vous trouvez moyen <strong>de</strong> vous échapper quelques instants pour nous rendre<br />

une petite visite après lʹAssomption. Notre maison ne sʹappelle pas en vain communauté,<br />

cʹest‐à‐dire quʹelle est la maison <strong>de</strong> tous nos frères, quʹils y ont <strong>de</strong> droit leur place au foyer<br />

et quʹils y sont toujours accueillis <strong>avec</strong> bonheur. Nous souhaitons bien que rien ne vous<br />

empêche <strong>de</strong> réaliser cette bonne pensée.<br />

Je comprends bien vos préoccupations pour lʹenseignement <strong>de</strong> vos enfants. Je cher‐<br />

cherai bien attentivement <strong>avec</strong> vous, parmi les moyens quʹon pourrait prendre, quel serait<br />

le plus convenable et le plus avantageux.<br />

Nous allons ici comme <strong>de</strong> coutume; ma santé, <strong>de</strong> nouveau ébranlée par les gran<strong>de</strong>s<br />

chaleurs, reste bien frêle et mʹa contraint <strong>de</strong> me mettre au repos absolu. Je suis <strong>de</strong>puis<br />

quelques jours à Chaville. M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston], un peu souffrant, mʹa été aussi en‐<br />

voyé ici par le mé<strong>de</strong>cin, ainsi que le f. Beauvais, également fort fatigué, et qui a peine à se<br />

remettre. Jʹespère que, Dieu aidant, ils vont reprendre force et santé. Ces chaleurs causent,<br />

à Paris, une gran<strong>de</strong> quantité <strong>de</strong> maladies. Priez Dieu, cher Monsieur lʹabbé, pour que nos<br />

âmes au moins soient saines et sachent trouver en Lui une vie pleine <strong>de</strong> force, <strong>de</strong> zèle et <strong>de</strong><br />

charité.<br />

Nous vous embrassons tous ainsi que vos frères, y compris notre cher mala<strong>de</strong> tout<br />

particulièrement.<br />

Votre dévoué et respectueux ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. M gr lʹEvêque dʹAngers mʹannonce quʹil nous rendra visite bientôt. Nous bâtis‐<br />

sons. Le désordre est grand ici. Je vous serai reconnaissant <strong>de</strong> nous donner bientôt <strong>de</strong>s<br />

nouvelles du f. Cousin.<br />

753


635 à M. Vasseur<br />

Encouragements dans les difficultés <strong>de</strong>s Œuvres. Eloge du frère Cousin.<br />

Chaville, 18 août 1859<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Je prends une vive part à toutes les difficultés et à tous les travaux que votre situa‐<br />

tion présente <strong>de</strong>man<strong>de</strong>; je prie instamment le Seigneur <strong>de</strong> nous donner les moyens <strong>de</strong><br />

vous venir en ai<strong>de</strong>, puisquʹici nous sommes bien au dépourvu et nous ne pouvons guère<br />

vous assister efficacement; espérons que le Seigneur, toujours miséricordieux pour nous,<br />

daignera prendre en pitié notre faiblesse et nos besoins; humilions‐nous bien <strong>de</strong>vant Lui,<br />

cher enfant, reconnaissons notre insuffisance, notre indignité; sa bonté nous relèvera lors<br />

et sa grâce se répandra sur nous. On nʹobtient rien <strong>de</strong> Lui, dans notre condition surtout,<br />

quʹen se tenant ainsi en humble dépendance <strong>de</strong> sa force et <strong>de</strong> son secours.<br />

Nous sommes profondément touchés <strong>de</strong> la souffrance <strong>de</strong> notre pauvre f. Cousin;<br />

tous les soirs, la communauté ensemble prie particulièrement pour lui; <strong>de</strong> mon côté, je le<br />

recomman<strong>de</strong> au Seigneur à chaque instant du jour. Je suis bien cordialement attaché à ce<br />

bon frère dont jʹai pu apprécier les excellentes qualités <strong>de</strong> cœur, la droiture et la simplicité<br />

dʹintention si précieuses aux yeux <strong>de</strong> Dieu et si essentielles pour son service. Soumettons‐<br />

nous aux <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> la divine Sagesse et attendons quʹelle nous manifeste ses vues à<br />

lʹégard <strong>de</strong> ce pauvre ami. Assurez‐le bien <strong>de</strong> ma tendre affection et <strong>de</strong> ma constante sollici‐<br />

tu<strong>de</strong> pour lui. Je ne désespère pas que Dieu ne nous le conserve et que, par un effet <strong>de</strong> sa<br />

miséricor<strong>de</strong>, il ne le ren<strong>de</strong> après cette épreuve que plus dévoué et plus apte à ses œuvres;<br />

nous pouvons tout en Celui qui nous qui nous fortifie.<br />

Adieu, cher enfant, je me recomman<strong>de</strong> <strong>de</strong> mon côté à vos prières; je reste fort souf‐<br />

frant et tellement affaibli à la poitrine que je ne puis ni parler ni marcher cinq minutes <strong>de</strong><br />

suite; que la sainte volonté du Seigneur soit faite et non la nôtre! Je vous embrasse bien af‐<br />

fectueusement. Embrassez pour moi les ff. Thuillier et Maury.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

636 à M. Halluin<br />

Le frère Sadron va à Arras. LʹAcadémie Française accor<strong>de</strong> à M. Halluin un prix <strong>de</strong> vertu.<br />

Chaville, 27 août 1859, samedi<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vois, par la lettre que vous écrivez à M. Carment, que vous atten<strong>de</strong>z tout pro‐<br />

chainement notre jeune f. H. Sadron. Je viens conséquemment <strong>de</strong> mʹentendre pour son dé‐<br />

part <strong>avec</strong> MM. Lantiez et Myionnet.<br />

Ce bon jeune homme quittera Vaugirard lundi ou mardi matin, plus probablement<br />

lundi.<br />

Jʹécris ces lignes le soir, me défendant mal contre le sommeil. Je veux toutefois,<br />

avant <strong>de</strong> finir, me réjouir <strong>avec</strong> vous <strong>de</strong> la faveur qui vient <strong>de</strong> vous être accordée par lʹAca‐<br />

démie. Il y a honneur et avantage; nous ne pouvons ni chercher ni aimer lʹhonneur pour<br />

nous‐mêmes, mais, sʹil sert au bien <strong>de</strong> notre œuvre, quʹil soit pris comme un bienfait <strong>de</strong><br />

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Dieu. Quant au don dʹargent, il nʹy a aucun doute, puisquʹil ai<strong>de</strong>ra à faire vivre vos en‐<br />

fants. Nous remercierons tous le Seigneur <strong>de</strong> cette nouvelle bénédiction.<br />

Jʹembrasse vous, cher Monsieur lʹabbé, tous nos frères, le mala<strong>de</strong> en particulier, et<br />

suis <strong>avec</strong> respect et dévouement<br />

Votre affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Ma santé reste frêle, je crois pourtant quʹelle a gagné quelque peu.<br />

637 à M. Halluin<br />

Mort du frère Cousin. Prières à son intention.<br />

Vaugirard, 9 septembre 1859<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Nous avons appris la mort <strong>de</strong> notre f. Cousin <strong>avec</strong> une vive peine, parce que nous<br />

lui étions très sincèrement attachés, et en même temps <strong>avec</strong> consolation, puisque sa fin a<br />

été telle que nous la pouvions souhaiter. Le Seigneur, à qui il sʹétait donné sans réserve, a<br />

jugé dans sa miséricor<strong>de</strong> que sa tâche était remplie; que son saint nom soit béni! Puissions‐<br />

nous, à notre tour, trouver grâce <strong>de</strong>vant Lui et Lui remettre, en toute soumission, notre<br />

âme quand il daignera la rappeler à Lui.<br />

Nos ff. ecclésiastiques disent chacun <strong>de</strong>ux messes à son intention. Je nʹai pas besoin<br />

<strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si, <strong>de</strong> votre côté, vous lui donnerez une pareille marque dʹaffection. Il sera<br />

dit aussi, mercredi prochain, à Vaugirard, une messe particulière à laquelle nous convo‐<br />

querons tous ceux <strong>de</strong> nos frères qui sont le plus rapprochés <strong>de</strong> nous. Nous pensons quʹune<br />

famille tendrement unie, comme lʹest la nôtre, doit témoigner ainsi son attachement pour<br />

les frères décédés et leur assurer <strong>de</strong>s secours spirituels dans cette <strong>de</strong>rnière <strong>de</strong> toutes les né‐<br />

cessités.<br />

Nous apprenons <strong>avec</strong> joie que notre jeune f. Sadron se met courageusement à sa tâ‐<br />

che, nous y avions bien compté, et nous espérons bien que vous serez constamment satis‐<br />

fait <strong>de</strong> son concours.<br />

Je reste bien frêle jusquʹici; je suis <strong>de</strong> retour <strong>de</strong>puis hier ici, pour acclimater un nou‐<br />

veau frère qui nous est venu, je le recomman<strong>de</strong> à vos prières. Tous vont assez bien. Nous<br />

avons <strong>de</strong>ux enfants mala<strong>de</strong>s dʹune fièvre scarlatine; cʹest malheureusement un mal qui se<br />

communique. Nous comptons sur le secours <strong>de</strong> Dieu qui ne nous fait jamais défaut.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, nous prions bien pour vous et pour les vôtres, donnez‐<br />

nous aussi lʹappui <strong>de</strong> vos prières. Nous serons ainsi doublement agréables aux yeux du<br />

Seigneur. Je suis <strong>avec</strong> un respectueux attachement<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

638 à M. Caille<br />

Annonce <strong>de</strong> la mort du frère Cousin.<br />

Vaugirard, 9 septembre 1859<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je ne sais si M. Halluin vous a écrit que nous venons <strong>de</strong> perdre notre f. Cousin, dé‐<br />

cédé le 6 <strong>de</strong> ce mois, assisté jusquʹà son <strong>de</strong>rnier moment par nos ff. dʹArras et muni <strong>de</strong>s sa‐<br />

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crements <strong>de</strong> lʹEglise quʹil a reçus <strong>avec</strong> une parfaite connaissance. Sa mort a été toute paisi‐<br />

ble et telle que notre affection fraternelle pouvait la souhaiter pour lui. Cʹest le troisième<br />

<strong>de</strong> nos frères que le Seigneur rappelle à Lui; nous trouvons dans leur heureuse fin une<br />

marque particulière <strong>de</strong> la protection du Seigneur sur notre petite famille, et en même<br />

temps une espérance pour nous quand, à notre heure, le bon Maître daignera nous re‐<br />

prendre auprès <strong>de</strong> Lui. Puissions‐nous être toujours prêts, afin que la famille que nous au‐<br />

rons au Ciel puisse continuer à être nôtre et <strong>de</strong>meure constamment unie à nous.<br />

Chacun <strong>de</strong> nos ff. ecclésiastiques dit <strong>de</strong>ux messes à son intention; <strong>de</strong> plus, mercredi<br />

prochain, nous convoquerons à une messe particulière tous ceux <strong>de</strong> nos frères qui sont à<br />

Nazareth et à N.D. <strong>de</strong> Grâce; nous pensons que notre petite famille doit se montrer encore<br />

tendre et dévouée pour ses membres après quʹils ont quitté ce mon<strong>de</strong>; espérons quʹils<br />

pourront, <strong>de</strong> leur côté, continuer à la servir <strong>de</strong>vant Dieu. Je désire que, pour votre part,<br />

vous fassiez aussi dire <strong>de</strong>ux messes.<br />

Nous allons ici passablement, sauf <strong>de</strong>ux enfants atteints dʹune fièvre scarlatine,<br />

mais qui vont mieux. Je reste, pour moi, extrêmement frêle, je suis revenu ici <strong>de</strong>puis hier<br />

pour la fête <strong>de</strong> la Nativité, portant fêtée sans dérangement <strong>de</strong> lʹordre accoutumé et pour<br />

acclimater un nouveau frère qui nous est venu. Je le recomman<strong>de</strong> à vos prières.<br />

Je recevrai <strong>avec</strong> joie <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> votre chère maison; jʹembrasse vous et tous<br />

nos frères bien affectueusement en N.S.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je nʹai pas la note <strong>de</strong> lʹétoffe dʹAmiens que vous mʹavez envoyée, jʹai celle <strong>de</strong><br />

Reims seulement; doit‐on, pour cette <strong>de</strong>rnière, faire toucher ici ou chez vous?<br />

639 à M. Halluin<br />

A propos <strong>de</strong>s frais <strong>de</strong> voyage dʹun frère. Conseils du Curé dʹArs, <strong>de</strong>s Evêques dʹAngers et <strong>de</strong> Tours. Désir dʹatti‐<br />

rer <strong>de</strong>s prêtres dans lʹInstitut mais il faut éviter les situations indécises. Nécessité <strong>de</strong> ne rien brusquer.<br />

Vaugirard, 15 septembre 1859<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Nous recevrons <strong>avec</strong> joie, à la retraite, ceux <strong>de</strong> vos frères dont vous pourrez vous<br />

passez durant quelques jours. Ils vous reviendront après, nous le <strong>de</strong>vons espérer, plus<br />

forts et plus dévoués pour le bien <strong>de</strong> leurs enfants.<br />

Pour le voyage du f. <strong>Jean</strong> [Maury], je crois que vous avez reconnu quʹil était juste‐<br />

ment motivé par lʹétat languissant <strong>de</strong> sa mère et par le désir quʹelle a <strong>de</strong> régler, à tout évé‐<br />

nement, <strong>avec</strong> lui, quelques intérêts <strong>de</strong> famille. En cas pareils, et lorsque les parents sont<br />

gravement mala<strong>de</strong>s, je crois que les voyages ont leur raison, autrement nous les rendons<br />

aussi rares quʹil se peut charitablement. Je ne sais pas ce que coûte le voyage au pays du f.<br />

<strong>Jean</strong>, mais il est délicat et consciencieux, il nʹaura gar<strong>de</strong> <strong>de</strong> rien exagérer. Sa mère paiera<br />

peut‐être son retour. Je ne sais pas, toutefois, si elle est en état <strong>de</strong> le faire. Comme il tra‐<br />

vaille courageusement, il semble que ce petit sacrifice en sa faveur serait dʹailleurs bien<br />

mérité.<br />

Je vois <strong>avec</strong> plaisir que lʹensemble <strong>de</strong> vos services se fait à peu près bien et que les<br />

exercices <strong>de</strong> communauté ont néanmoins leur part. Nous <strong>de</strong>vons tendre, en effet, à faire<br />

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marcher les <strong>de</strong>ux choses ensemble; elles se servent <strong>de</strong> secours et dʹappui mutuel. Je pense<br />

que notre f. Firmin [Thuillier] est revenu bien disposé <strong>de</strong> son pays. Pour le f. Alphonse<br />

[Vasseur], il a ainsi <strong>de</strong> petits nuages <strong>de</strong> temps en temps, mais la raison et lʹesprit <strong>de</strong> foi<br />

prennent toujours le <strong>de</strong>ssus.<br />

Je ne sais trop que vous conseiller relativement à votre jeune ecclésiastique; il peut<br />

vous rendre quelques services, sans doute, mais nʹavez‐vous pas à craindre <strong>de</strong> retomber<br />

dans ces positions mixtes et indécises dont nous avons éprouvé toutes les difficultés dans<br />

le passé et dont nous avons dû sortir à tout prix? Je vous prie <strong>de</strong> bien examiner si pareil in‐<br />

convénient nʹest pas à prévoir aujourdʹhui. Je désire bien, comme vous, attirer <strong>de</strong>s prêtres<br />

parmi nous, et jʹai sincèrement à cœur <strong>de</strong> faire disparaître <strong>de</strong> notre constitution tout ce qui<br />

pourrait les éloigner, mais la chose veut être faite mûrement et <strong>avec</strong> précaution. M gr lʹAr‐<br />

chevêque <strong>de</strong> Paris, consulté plusieurs fois par moi, mʹa conseillé bien fortement <strong>de</strong> ne pas<br />

me hâter et dʹy aller <strong>avec</strong> pru<strong>de</strong>nce. Le Saint Curé dʹArs, que nous sommes allés exprès vi‐<br />

siter, M. Lantiez et moi, nous a invités à suivre lʹavis <strong>de</strong> Son Eminence.<br />

M gr lʹEvêque dʹAngers, <strong>de</strong> son côté, mʹécrit que, ces temps <strong>de</strong>rniers, il a conféré lon‐<br />

guement à notre sujet <strong>avec</strong> M gr lʹArchevêque <strong>de</strong> Tours [M gr Guibert] et que leur sentiment<br />

commun est que nous ne saurions aller <strong>avec</strong> trop <strong>de</strong> maturité et <strong>de</strong> circonspection dans la<br />

solution <strong>de</strong>s questions essentielles concernant notre Institut. Ces autorités sont bien gra‐<br />

ves, et je croirais méconnaître les vues <strong>de</strong> Dieu si je tranchais, sans lumières suffisantes,<br />

<strong>de</strong>s points qui peuvent atteindre le fond même <strong>de</strong> notre existence.<br />

Nous regrettons que notre jeune f. Sadron nʹécrive jusquʹici à personne, je lʹinvite à<br />

mʹécrire bientôt. Sa mère attend aussi quelque souvenir <strong>de</strong> lui et lui recomman<strong>de</strong>, quand il<br />

lui écrira, <strong>de</strong> mettre quelques mots pour sa tante.<br />

Nous ne savons pas encore le moment précis <strong>de</strong> notre retraite, les rr. pp. Jésuites<br />

auxquels nous nous sommes adressés étant tous en missions diverses et le Supérieur nous<br />

ayant rejetés à la première quinzaine dʹoctobre.<br />

M. Caille est ici momentanément. Tout va bien dans la maison dʹAmiens; nous mar‐<br />

chons aussi ici <strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> du Seigneur. Puissions‐nous <strong>de</strong>meurer toujours fidèles à son di‐<br />

vin Esprit et nʹêtre que <strong>de</strong>s instruments dociles entre ses mains!<br />

Recevez, cher Monsieur lʹabbé, tous nos sentiments accoutumés <strong>de</strong> respect et dʹaf‐<br />

fection en J. et M.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je reste bien frêle en santé. Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> quelque souvenir <strong>de</strong>vant Dieu,<br />

afin que je sache bien me conformer à sa sainte volonté dans cet état <strong>de</strong> langueur et dʹim‐<br />

puissance.<br />

639‐1 à Mgr Dupanloup<br />

MLP. appuie une requête adressée par lʹun <strong>de</strong> ses frères à lʹévêque dʹOrléans.<br />

Vaugirard, 23 septembre 1859<br />

Monseigneur,<br />

M. Desouches, attaché <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux ans bientôt à notre petite Communauté <strong>de</strong>s Frè‐<br />

res <strong>de</strong> S t ‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul, me prie <strong>de</strong> joindre un mot à la supplique quʹil a eu la pensée <strong>de</strong><br />

vous adresser. Sans prendre sur moi dʹappuyer une requête peut‐être indiscrète et justifiée<br />

757


seulement par lʹadmiration enthousiaste <strong>de</strong> son auteur, je saisis<br />

cette occasion, Monseigneur, pour me rappeler à votre bienveillant<br />

souvenir et vous offrir tous mes sentiments <strong>de</strong> sincère vénération.<br />

Depuis longtemps je nʹai pas été assez heureux pour me<br />

présenter à Votre Gran<strong>de</strong>ur, mais je sais <strong>de</strong> vieille date quʹElle<br />

nʹoublie rien, quʹElle ne dédaigne rien dans les œuvres du service<br />

du Seigneur, jʹespère donc quʹElle agréera la nouvelle expression<br />

du profond respect <strong>avec</strong> lequel je suis,<br />

Monseigneur,<br />

Votre très humble et très obéissant serviteur,<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

640 à M gr Angebault<br />

Incertitu<strong>de</strong> persistante sur la solution à donner aux rapports entre les <strong>de</strong>ux éléments ecclésiastique et laïc dans<br />

lʹInstitut.<br />

Vaugirard, 24 septembre 1859<br />

Monseigneur,<br />

Nous avions entrevu, dʹaprès la <strong>de</strong>rnière lettre dont vous nous avez honorés,<br />

quʹune occasion prochaine nous serait donnée <strong>de</strong> nous voir réunis ici quelques instants au‐<br />

tour <strong>de</strong> vous, et cette espérance avait été bien douce pour nos cœurs qui vous sont si res‐<br />

pectueusement dévoués. Jʹavais pensé, <strong>de</strong> mon côté, Monseigneur, que si cette chère visite<br />

était un peu différée, vous auriez lʹextrême bonté <strong>de</strong> mʹenvoyer par écrit quelques conseils<br />

touchant les points importants <strong>de</strong> notre Constitution qui ne sont pas encore assez définis.<br />

Mais nous recevons, mon bon Seigneur, ni annonce <strong>de</strong> votre arrivée, ni lettre qui nous<br />

serve <strong>de</strong> consolation. Je prends donc confiance <strong>de</strong> vous écrire pour solliciter quelques pa‐<br />

roles <strong>de</strong> votre affection paternelle, qui nous encouragent et nous assurent que vos yeux<br />

sont toujours sur nous. Nous avons besoin, en effet, <strong>de</strong> vous sentir ainsi présent pour nous<br />

donner confiance, car nous avons beau invoquer le Seigneur afin dʹêtre éclairés sur notre<br />

voie, nous ne recevons jusquʹici aucune lumière et nous <strong>de</strong>meurons dans le vague et lʹin‐<br />

certitu<strong>de</strong>. Si cette situation est selon les <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> Dieu nous lʹacceptons bien cordiale‐<br />

ment, autrement il nous paraîtrait meilleur dʹen sortir. Cette indécision, en effet, rend no‐<br />

tre marche un peu incertaine et arrête aussi nos développements, les sujets ecclésiastiques<br />

ou même laïcs étant éloignés par une condition encore mal assise. Elle nous laisse en outre<br />

dans une sorte <strong>de</strong> sollicitu<strong>de</strong>, relativement à lʹétat imprévu où lʹon se trouverait si lʹobliga‐<br />

tion immédiate <strong>de</strong> prendre un parti venait à se présenter; obligation qui nous frappe en ce<br />

moment dʹautant plus que ma santé est extrêmement affaiblie et peut me contraindre à me<br />

retirer pour préparer les comptes que jʹaurai à rendre à Dieu, ou même à répondre à son<br />

appel.<br />

Aujourdʹhui, M. lʹabbé Halluin homme éminent en vertu et bien connu au moins <strong>de</strong><br />

nom par vous, Monseigneur, mʹécrivait dʹArras où il dirige la maison quʹil a associée à nos<br />

œuvres, pour me représenter que <strong>de</strong>ux ecclésiastiques sʹétaient offerts à lui, mais quʹils<br />

étaient, comme plusieurs autres, arrêtés par les particularités <strong>de</strong> notre Constitution. Il me<br />

proposait <strong>de</strong> consulter M gr dʹArras, une <strong>de</strong>s lumières <strong>de</strong> lʹEglise <strong>de</strong> France. M. Caille, laïc,<br />

<strong>de</strong> son côté, qui dirige la maison dʹAmiens, se préoccupant aussi <strong>de</strong> cette gran<strong>de</strong> affaire,<br />

758


me <strong>de</strong>mandait <strong>de</strong>rnièrement si, par votre entremise paternelle, Monseigneur, nous ne<br />

pourrions obtenir que Nos Seigneurs <strong>de</strong> Paris [Card. Morlot], dʹArras [M gr Parisis],<br />

dʹAmiens [M gr <strong>de</strong> Salinis] et peut‐être aussi <strong>de</strong> Tours [Card. Guibert], se concertassent <strong>avec</strong><br />

vous sur la combinaison qui pourrait le mieux convenir à nos besoins et unir les <strong>de</strong>ux élé‐<br />

ments nécessaires <strong>de</strong> notre communauté. Si ce moyen vous semblait le plus sage, Monsei‐<br />

gneur, je serais très disposé à suivre pour toutes les instructions que vous croiriez <strong>de</strong>voir<br />

me donner pour son exécution.<br />

Si lʹon jugeait que lʹélément ecclésiastique doit nettement et décidément prédomi‐<br />

ner, la chose serait bientôt faite et la hiérarchie bien aisément établie; ce serait sous ce rap‐<br />

port un grand repos pour lʹesprit. Mais on peut objecter que les ff. ecclésiastiques sont au<br />

nombre <strong>de</strong> 6 et les laïcs au nombre <strong>de</strong> 30, que lʹœuvre a été fondée par ces <strong>de</strong>rniers, au<br />

moins dans ses commencements, ainsi que les Etablissements dont elle sʹoccupe, que le<br />

temporel a été presque entièrement fourni par les laïcs, enfin que la nature <strong>de</strong> leurs entre‐<br />

prises <strong>de</strong>man<strong>de</strong> quʹils aient assez dʹinitiative, <strong>de</strong> liberté, dʹinfluence pour opérer utilement<br />

dans les œuvres. Ne pourrait‐on préposer à la tête <strong>de</strong> la communauté un chef suprême ec‐<br />

clésiastique bornant sa juridiction au spirituel seul et à la direction plus particulière <strong>de</strong>s<br />

frères ecclésiastiques. Si sa sphère dʹaction était bien tracée, aurait‐on à craindre <strong>de</strong>s<br />

conflits et une sorte dʹantagonisme entre le chef ecclésiastique et le Directeur laïc?<br />

Si la communauté, comme aujourdʹhui, un Evêque protecteur, on trouverait près <strong>de</strong><br />

lui <strong>de</strong>s conseils, en haut arbitrage pour prévenir les conflits, en même temps quʹon se rat‐<br />

tacherait à lʹEpiscopat par un lien <strong>de</strong> dépendance filiale.<br />

Quand toutes ces questions se posent <strong>de</strong>vant moi et que jʹessaie dʹen suivre les<br />

conséquences dans la pratique, je nʹy vois plus bien clair et je reste dans le doute et lʹindé‐<br />

cision. Daignez prier <strong>avec</strong> nous, Monseigneur, pour que le Père <strong>de</strong>s lumières nous éclaire,<br />

daignez aussi nous dire si vous avez quelques vues sur ces points si intéressants pour no‐<br />

tre avenir et enfin si vous croiriez quʹon peut attendre un bon résultat <strong>de</strong> lʹexamen qui se‐<br />

rait concerté entre vous et MM grs les Evêques indiqués plus haut, touchant les questions<br />

qui nous occupent.<br />

Je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> humblement, Monseigneur, votre bénédiction paternelle et suis en N.S.<br />

Votre humble serviteur et dévoué fils<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

641 à M. Halluin<br />

MLP. manque <strong>de</strong> lumière pour fixer définitivement les rapports <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux éléments dans lʹInstitut. Il va proposer<br />

à Mgr Angebault une consultation <strong>de</strong> plusieurs évêques.<br />

Vaugirard, 25 septembre 1859<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je réponds tout <strong>de</strong> suite, comme vous me le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z, à la lettre que mʹapporte no‐<br />

tre f. <strong>Jean</strong> [Maury]. Je nʹai malheureusement quʹune minute, ayant un ren<strong>de</strong>z‐vous qui<br />

mʹoblige à sortir sans retard.<br />

Jʹai le regret <strong>de</strong> ne pouvoir disposer encore tout <strong>de</strong> suite du f. Guillot. Il a lʹinfirme‐<br />

rie et voilà le temps où nous avons le plus <strong>de</strong> mala<strong>de</strong>s. Soyez sûr toutefois, cher Monsieur<br />

lʹabbé, que je reste bien désireux <strong>de</strong> vous ai<strong>de</strong>r aussitôt que le bon Dieu nous mettra un<br />

peu moins à lʹétroit.<br />

759


Pour ce qui regar<strong>de</strong> notre Constitution, je nʹai aucune arrière‐pensée et ne vous ai<br />

jamais rien caché. Si je nʹai pas précisé absolument tous les points <strong>de</strong> notre règle, cʹest que<br />

je manque <strong>de</strong> lumière jusquʹici pour le bien faire. M. Lantiez et nos ff. du Conseil, qui cher‐<br />

chent <strong>avec</strong> moi la meilleure voie à suivre pour bien poser les <strong>de</strong>ux éléments <strong>de</strong> la Com‐<br />

munauté, prient instamment pour que le Seigneur daigne nous diriger. M. Caille mʹa pro‐<br />

posé un moyen qui me semble bien digne dʹattention: Ce serait que MM grs les Evêques qui<br />

daignent sʹintéresser à nous: MM grs <strong>de</strong> Paris, dʹAngers, dʹArras, dʹAmiens et peut‐être <strong>de</strong><br />

Tours voulussent bien se concerter et chercher <strong>avec</strong> nous ce que le Seigneur veut. Je vais<br />

écrire <strong>de</strong>main à M gr dʹAngers pour lui communiquer cette proposition et prier dʹy donner<br />

suite sʹil lʹagrée. 302<br />

Je ne sais encore au juste le jour <strong>de</strong> lʹouverture <strong>de</strong> la retraite. Je ne manquerai pas <strong>de</strong><br />

vous lʹécrire dès que je le saurai.<br />

Nous vous embrassons tous, cher Monsieur lʹabbé, <strong>avec</strong> respect et dévouement.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

642 à M. Caille<br />

Mouvement <strong>de</strong> personnel. Lʹabbé Mangot, qui ai<strong>de</strong> M. Caille, pense à entrer dans lʹInstitut. Scepticisme <strong>de</strong><br />

MLP.<br />

Vaugirard, 27 septembre 1859<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je tâcherai, pour tenir compte <strong>de</strong> vos observations, <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r ici notre jeune Paul<br />

Luzier après la retraite; je pense que je pourrai le remplacer par le f. Ernest [Vasseur] qui<br />

est <strong>de</strong>venu maintenant un homme (il a 23 ans) et qui, au patronage <strong>de</strong> Nazareth où il est<br />

déjà <strong>de</strong>puis un certain temps, a montré un bon esprit et a rendu <strong>de</strong>s services réels. Il vous<br />

est fort attaché et vous respecte beaucoup, je crois quʹil ira très bien dans son emploi. Il est<br />

dʹune exactitu<strong>de</strong> remarquable à ses exercices comme à tout son règlement; sous ce rapport<br />

aussi, il pourra concourir au bon ordre <strong>de</strong> la maison. Je mettrais alors notre jeune Paul près<br />

<strong>de</strong> nos ff. <strong>de</strong> Nazareth, cette maison est fort régulière, il y sera très bien soutenu par tout<br />

son entourage et suivi <strong>de</strong> plus près dans ses travaux. Tout me laisse espérer quʹil achèvera<br />

<strong>de</strong> sʹy former.<br />

Je verrais <strong>avec</strong> gran<strong>de</strong> joie M. lʹabbé Mangot se rattacher à nous, mais je doute bien<br />

quʹil se tourne vers notre humble Congrégation; remettons la chose aux mains <strong>de</strong> Dieu qui<br />

en disposera selon sa sagesse et sa miséricor<strong>de</strong>. Assurément si M. Mangot nous prêtait son<br />

concours, nous pourrions aviser sérieusement à vous donner <strong>de</strong>s secours spirituels régu‐<br />

liers.<br />

Jʹai trouvé M. Marcaire en <strong>de</strong> très bonnes dispositions, jʹespère que tout ira <strong>de</strong><br />

mieux en mieux en notre chère maison dʹAmiens.<br />

Croyez, bien cher ami, à tous mes sentiments <strong>de</strong> tendre dévouement en N.S.<br />

Votre ami et Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

302<br />

C'est la lettre précé<strong>de</strong>nte 640, du 24 septembre; elle était donc déjà écrite mais elle ne sera pas envoyée avant le 27, jour où le père<br />

Lantiez écrit une lettre qui partira <strong>avec</strong> celle-là.<br />

760


P.S. Jʹattends toujours la note <strong>de</strong> lʹétoffe dʹAmiens. Jʹai écrit à M gr dʹAngers sur nos<br />

affaires <strong>de</strong> Constitution, jʹespère quʹ<strong>avec</strong> son ai<strong>de</strong> et la grâce divine avant tout, nous arri‐<br />

verons à faire une place digne à chacun.<br />

Je vous envoie, mon bon ami, la lettre que vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z pour M. Mangot;<br />

vous jugerez sʹil est bon que vous montriez aussi celle que je vous écris et qui est plus ex‐<br />

plicite 303 .<br />

643 à M. Halluin<br />

Retraite <strong>de</strong> Communauté. Prochaine visite <strong>de</strong> Mgr Angebault à Vaugirard.<br />

Vaugirard, 5 octobre 1859<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Notre retraite sʹouvrira dimanche prochain, à 9h. du soir; elle sera donnée par le r.p.<br />

Petit, Jésuite. Nous recevrons <strong>avec</strong> joie celui ou ceux <strong>de</strong> votre maison que vous croirez<br />

possible dʹenvoyer. Jʹai reçu <strong>de</strong>s nouvelles du f. <strong>Jean</strong> [Maury] qui va bien. Je viens <strong>de</strong> lui<br />

écrire afin quʹil arrive à temps pour lʹouverture <strong>de</strong>s exercices. Nous prierons pour vous et<br />

pour vos enfants. Priez aussi pour nous.<br />

Mgr dʹAngers, à qui jʹavais écrit dans le sens que je vous avais dit, me répond quʹil<br />

viendra passer quelques jours <strong>avec</strong> nous au mois <strong>de</strong> novembre. Je serai bien aise quʹà ce<br />

moment vous tâchiez <strong>de</strong> vous échapper un jour pour le voir et écouter <strong>avec</strong> nous ses pa‐<br />

ternels avis; il est pour nous dʹune bonté admirable. Nous allons ici comme <strong>de</strong> coutume, et<br />

nous vous <strong>de</strong>meurons bien cordialement attachés en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

644 à M. Caille<br />

Après la retraite, les frères rentrent à Amiens. MLP. leur a prodigué conseils et encouragements.<br />

Vaugirard, 14 octobre 1859<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie votre cher mon<strong>de</strong> bien disposé, je le crois; le f. Joseph [Loquet] vous<br />

revient animé <strong>de</strong> la meilleurs volonté, je crois que vous en<br />

aurez satisfaction. M. Ernest [Vasseur] va à Arras; je vous<br />

envoie à sa place M. Brice, plus posé, plus brisé au travail,<br />

plus calme pour les surveillances; je crois que vous en aurez<br />

toute satisfaction. Il nous fera bien défaut, car il tenait<br />

remarquablement notre sacristie qui <strong>de</strong>vient un service<br />

important à Vaugirard; le bon Dieu nous viendra en ai<strong>de</strong>,<br />

nous sommes bien accoutumés à pareils sacrifices. Le f. Joseph<br />

fera <strong>de</strong>s efforts pour bien sʹentendre <strong>avec</strong> le f. Marcaire, la<br />

Provi<strong>de</strong>nce y ai<strong>de</strong>ra et tout ira au mieux.<br />

La retraite sʹest bien passée, lʹeffet général a été tout<br />

à fait satisfaisant. Cinq <strong>de</strong> nos frères faisaient <strong>de</strong>s vœux, lʹun<br />

dʹeux, M. Legallais, pour la première fois. Le frère Emmanuel (Le) Gallais<br />

303 Ce <strong>de</strong>rnier paragraphe est écrit sur un billet à part, cela se comprend!<br />

761


Je vais remettre au f. Joseph pour<br />

étoffe Mérinos <strong>de</strong> Reims 168,25<br />

ʺ dʹAmiens 68,15<br />

Ensemble: 236,40<br />

Adieu, mon bien bon ami, mille affections <strong>de</strong> tous nos frères, croyez surtout au ten‐<br />

dre attachement <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Assurez notre f. Jules [Marcaire] <strong>de</strong> tous mes sentiments pour lui, jʹai été content <strong>de</strong><br />

ses dispositions, <strong>de</strong> son bon accord <strong>avec</strong> vous, <strong>de</strong> son sincère désir <strong>de</strong> tout faire pour le<br />

bien, daigne le Seigneur lui accor<strong>de</strong>r toutes ses bénédictions.<br />

L.P.<br />

645 à M. Caille<br />

MLP. espère lui envoyer bientôt du renfort. Que le frère Marcaire apprenne à tirer parti <strong>de</strong>s gens malgré leurs<br />

défauts.<br />

Vendredi, 14 octobre 1859<br />

Mon bon ami,<br />

Je reçois votre lettre au moment où les frères se préparent au départ; il est trop tard<br />

pour que je puisse rien changer aux dispositions réglées, mais dʹici à bien peu <strong>de</strong> temps,<br />

jʹespère pouvoir vous donner satisfaction; nous sommes très pauvres en sujets; cependant,<br />

un nouveau frère qui nous est arrivé et qui semble avoir quelques qualités pourra nous<br />

donner dʹici à quelque temps un peu plus <strong>de</strong> facilité; patience donc, dʹici à quelques se‐<br />

maines, M. Myionnet ou M. Lantiez iront vous voir, ils tâcheront dʹarranger lʹaffaire à ce<br />

moment. Je voudrais voir en notre f. Jules [Marcaire] un peu plus <strong>de</strong> patience et <strong>de</strong> sup‐<br />

port; il se rendra malheureux et se créera <strong>de</strong>s difficultés en tous ses travaux, sʹil ne sait tirer<br />

parti <strong>de</strong>s gens malgré leurs défauts; cʹest là un grand mérite <strong>de</strong>vant Dieu.<br />

Adieu, mon bon ami, je vous embrasse ainsi que le f. Jules.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

646 à M. Halluin<br />

Insuffisance en personnel. Echos <strong>de</strong> la retraite.<br />

Vaugirard, 14 octobre 1859<br />

Bien cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vous renvoie votre cher mon<strong>de</strong> en bonne disposition, je lʹespère, et prêt à se don‐<br />

ner cordialement à tout ce quʹexige le service <strong>de</strong> Dieu. Nous échangeons, selon votre désir,<br />

le f. <strong>Jean</strong> [Maury] contre un jeune frère, le f. Ernest [Vasseur], accoutumé aux surveillances<br />

et qui pourra se prêter à différents services dans votre maison ou pour les enfants. Ce sera<br />

un soulagement, et cependant je sens bien quʹil vous restera encore beaucoup à désirer<br />

pour le bien <strong>de</strong> vos enfants. Espérons que peu à peu nous <strong>de</strong>viendrons plus riches en sujets<br />

762


et serons conséquemment moins chargés dans nos emplois. Jʹattends quelques sujets, mais<br />

ils seront ou jeunes et inexpérimentés, ou bien ils nʹauront pas les qualités désirables; tra‐<br />

vaillons dans la patience, lʹheure marquée par la divine miséricor<strong>de</strong> pour un état meilleur<br />

viendra enfin: expectans, expectavi.<br />

Notre retraite sʹest bien passée: le r.p. [Petit], moins savant et moins éminent sans<br />

doute que le r.p. Renaud, a pourtant beaucoup <strong>de</strong> science, <strong>de</strong> pensées et <strong>de</strong> piété. Lʹeffet<br />

général a été très satisfaisant, tous nos frères étaient bien soutenus et contents.<br />

Je serais heureux que vous puissiez, à votre tour, prendre au mois <strong>de</strong> novembre<br />

quelques jours <strong>de</strong> repos spirituel. Votre âme, sans doute, est soutenue par son union à<br />

Dieu, mais un peu <strong>de</strong> calme et <strong>de</strong> paix à ses pieds font tant <strong>de</strong> bien.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, jʹai été content <strong>de</strong>s dispositions du f. Alphonse [Vas‐<br />

seur]. Je crois quʹil vous est bien attaché et cordialement dévoué à votre maison.<br />

Croyez bien, je vous prie, à tous mes sentiments <strong>de</strong> respect et dʹaffection en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

647 à M gr Angebault<br />

Préparatifs <strong>de</strong> réception. Remerciements.<br />

Vaugirard, 23 octobre 1859<br />

Monseigneur,<br />

Nous avons reçu <strong>avec</strong> une bien vive reconnaissance lʹexemplaire que vous avez eu<br />

la bonté <strong>de</strong> nous envoyer <strong>de</strong> votre <strong>Lettre</strong> Pastorale <strong>de</strong>mandant <strong>de</strong>s prières pour lʹEglise et<br />

pour le Souverain Pontife. A part même le haut intérêt qui sʹattache à une cause si sainte,<br />

si sympathique à tous les chrétiens, cet écrit, Monseigneur, ne pouvait manquer <strong>de</strong> nous<br />

toucher particulièrement, puisquʹil émane du Père vénéré dont toutes paroles trouvent le<br />

chemin <strong>de</strong> nos cœurs. Nos frères en ont fait la lecture <strong>avec</strong> édification et ont redoublé leurs<br />

prières pour lʹauguste Pontife dont les épreuves sont en ce moment si douloureuses304 .<br />

304 En avril 1859, la guerre avait éclaté entre le Piémont et l'Autriche, (combats <strong>de</strong> Montebello 20 mai; Palestro 31 mai, armistice <strong>de</strong><br />

Villafranca 8 juillet). L'effondrement autrichien, à la suite <strong>de</strong>s batailles <strong>de</strong> Magenta et <strong>de</strong> Solferino, avait provoqué <strong>de</strong>s soulèvements<br />

dans plusieurs provinces <strong>de</strong>s Etats <strong>de</strong> l'Eglise.<br />

763


Jʹai à vous remercier aussi, Monseigneur, <strong>de</strong> lʹaimable et bonne lettre que vous<br />

mʹavez adressée un peu avant pour mʹannoncer que, répondant à nos vœux, vous daigne‐<br />

riez au mois <strong>de</strong> novembre nous rendre une visite et vous arrêter quelque temps dans notre<br />

humble <strong>de</strong>meure. Jʹoublie la crainte que jʹai <strong>de</strong> vous voir bien mal logé, bien mal traité<br />

dans une maison si mal faite pour vous recevoir, je nʹai plus songé quʹaux joies <strong>de</strong> votre<br />

chère présence, aux bénédictions quʹelle attirera sur nous, sur nos œuvres, sur notre pré‐<br />

sent et sur notre avenir.<br />

Nous recevrons <strong>avec</strong> une vive satisfaction quelques mots <strong>de</strong> vous, Monseigneur,<br />

qui nous annonceront le jour <strong>de</strong> votre arrivée, et nous ferons tout ce qui dépendra <strong>de</strong> nous<br />

par notre docilité, notre profon<strong>de</strong> reconnaissance, pour que vous ne regrettiez pas lʹaima‐<br />

ble con<strong>de</strong>scendance dont vous nous donnerez un si manifeste témoignage en cette occasion.<br />

Je suis, Monseigneur, lʹinterprète <strong>de</strong>s sentiments <strong>de</strong> toute notre petite famille et<br />

vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> votre bénédiction paternelle pour elle et pour<br />

Votre humble serviteur et dévoué fils en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

648 à M. Caille<br />

Procédés dʹéclairage à essayer. Souhaits <strong>de</strong> fête et progrès dans la charité. Prochaine visite <strong>de</strong> Mgr Angebault.<br />

Etat <strong>de</strong> santé.<br />

Vaugirard, 28 octobre 1859<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong>s renseignements que vous mʹavez fait parvenir concernant les<br />

procédés à suivre pour produire le gaz; ils peuvent être avantageux au point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong><br />

lʹéconomie, mais je pense <strong>avec</strong> vous que, dans <strong>de</strong>s maisons telles que les nôtres, il pourrait<br />

y avoir <strong>de</strong> graves acci<strong>de</strong>nts à craindre et quʹon aurait à y regar<strong>de</strong>r <strong>de</strong> bien près avant<br />

dʹadopter ce mo<strong>de</strong> dʹétablir et entretenir lʹéclairage. Remerciez aussi pour moi le f. Joseph<br />

[Loquet] <strong>de</strong>s soins quʹil a pris pour cette affaire.<br />

Je voulais vous écrire hier pour vous dire quelques mots dʹaffectueux souvenir à<br />

lʹoccasion <strong>de</strong> votre fête, en mon nom et en celui <strong>de</strong> tous mes frères, jʹai été dérangé tout le<br />

jour, mais mon cœur vous souhaitait intérieurement et <strong>de</strong>vant Dieu tous les biens vérita‐<br />

bles, cʹest‐à‐dire le bonheur <strong>de</strong> vous dévouer à Lui <strong>de</strong> plus en plus, sinon par lʹintention,<br />

puisque votre sacrifice est consommé, au moins par lʹeffet et par lʹunion parfaite <strong>de</strong> votre<br />

cœur à son divin Cœur. Jʹai la confiance, bien cher ami, que nos prières seront exaucées et<br />

que vous sentirez croître <strong>de</strong> jour en jour en vous lʹamour <strong>de</strong> Dieu; cʹest le don par excel‐<br />

lence, cʹétait celui que notre tendre affection <strong>de</strong>vait souhaiter pour vous. Je suis tout heu‐<br />

reux que votre petit intérieur <strong>de</strong> famille soit en <strong>de</strong> bonnes conditions; je crois que vous<br />

continuerez à être satisfait <strong>de</strong> notre jeune Alfred Brice dont nous étions nous‐mêmes très<br />

contents; je souhaite toutefois, dans un temps ou dans un autre, le rapprocher <strong>de</strong> nous,<br />

parce que son instruction est loin dʹêtre suffisante et que le séjour <strong>de</strong> la Maison‐Mère lui<br />

est encore nécessaire; allons au jour le jour, le Seigneur nous donnera, en temps opportun,<br />

les moyens <strong>de</strong> pourvoir à tout; quant à présent, je souhaite quʹil fasse le bien à notre mai‐<br />

son dʹAmiens, il continuera <strong>de</strong> se mûrir et dʹacquérir <strong>de</strong> lʹexpérience.<br />

Nous allons assez bien ici. Nous attendons M gr dʹAngers qui nous a promis <strong>de</strong> venir<br />

passer quelques jours près <strong>de</strong> nous, en novembre, je ne sais pas bien à quel temps précis;<br />

764


lorsque je le saurai, je vous avertirai, afin que vous voyiez sʹil vous est possible <strong>de</strong> vous<br />

échapper un moment pour le venir voir; il désire causer <strong>avec</strong> les principaux membres <strong>de</strong> la<br />

Communauté; il se peut, du reste, quʹil ne vienne que plus tard, il nʹa pas précisé le mo‐<br />

ment.<br />

Je reste plus frêle et moins bien disposé que <strong>de</strong> coutume; je gar<strong>de</strong> déjà la chambre et<br />

ne puis supporter lʹair du <strong>de</strong>hors; un rien irrite violemment ma poitrine; jʹaurai grand be‐<br />

soin du secours <strong>de</strong> Dieu, sʹil est dans ses vues que je traverse encore cet hiver.<br />

Adieu, mon bien bon ami, croyez à nos tendres sentiments, toute la famille vous est<br />

profondément dévouée. Je suis, en particulier, <strong>avec</strong> une vive et cordiale affection,<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

648‐1 à M. Pavie<br />

Décès du père <strong>de</strong> Victor Pavie. MLP. lui apprend la mort <strong>de</strong> sa femme.<br />

Vaugirard, 6 novembre 1859<br />

Mon bien bon ami,<br />

Il a plu à la divine Provi<strong>de</strong>nce que nous fussions frappés tous les <strong>de</strong>ux ensemble:<br />

quelques minutes avant la réception <strong>de</strong> votre lettre, je recevais <strong>de</strong> Lyon une dépêche télé‐<br />

graphique qui mʹannonçait que Mme Le <strong>Prevost</strong> était décédée hier à 2h. chez les amis dé‐<br />

voués près <strong>de</strong>squels elle résidait le plus habituellement305 ; vous prierez donc pour elle,<br />

comme je prierai pour votre bon père et vous partagerez ma peine comme je partage la vô‐<br />

tre.<br />

Je sens bien, cher<br />

ami, toute lʹétendue <strong>de</strong><br />

votre affliction, je sais par<br />

une douloureuse ex‐<br />

périence que lʹâge ne<br />

change rien aux choses et<br />

quʹon ne <strong>de</strong>vient pas<br />

orphelin sans que le cœur<br />

soit brisé dans ses plus<br />

doux souvenirs, dans ses<br />

plus pures et ses plus<br />

tendres affections. Cette<br />

peine commune à tous<br />

vous <strong>de</strong>vient comme particulière à vous qui gar<strong>de</strong>z si chèrement et cultivez si religieuse‐<br />

ment tous les sentiments permis et bénis <strong>de</strong> Dieu. Mais par là même, cher ami, vous goûte‐<br />

rez mieux quʹun autre la consolation, la paix intime que laisse le spectacle dʹune mort chré‐<br />

tienne. Votre père sʹest endormi dans le Seigneur, pleurez‐le mais quʹune sainte confiance,<br />

quʹune sainte espérance tourne vos yeux vers ce repos bien heureux auquel nous aspirons<br />

tous.<br />

305<br />

Mme Le <strong>Prevost</strong>, retirée chez les Sœurs <strong>de</strong> la Sainte-Famille, au lieu-dit du Moulin, à Liergues, près <strong>de</strong> Lyon, était âgée <strong>de</strong><br />

soixante-treize ans.<br />

765


Je nʹai point <strong>de</strong> mon côté encore <strong>de</strong> détail sur la fin <strong>de</strong> lʹamie que jʹai perdue; tout<br />

me laisse espérer quʹelle a été aussi douce et chrétienne. Depuis quelques années, M me Le<br />

<strong>Prevost</strong> était <strong>de</strong>venue fort pieuse; et vraiment occupée <strong>de</strong> son salut. On me mandait à<br />

Lyon en suite <strong>de</strong> ce triste événement, mais je gar<strong>de</strong> la chambre en ce moment et suis hors<br />

dʹétat <strong>de</strong> porter un tel voyage et <strong>de</strong> telles émotions; un <strong>de</strong> mes amis est parti pour suivre à<br />

ma place les dispositions que lʹévénement <strong>de</strong>man<strong>de</strong>.<br />

M. Myionnet prend toute la place possible à votre affliction, et priera <strong>avec</strong> moi pour<br />

votre bon père. Le f. Lambert nʹest plus à Vaugirard, on lʹa envoyé à Marseille à cause <strong>de</strong><br />

sa faible santé.<br />

Offrez, mon bon ami, mon respect à M me Victor et croyez vous‐même à ma sincère et<br />

tendre affection en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

649 à M. Halluin<br />

MLP. ne peut lui fournir lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong>mandée. Maximin Giraud, le jeune voyant <strong>de</strong> La Salette, en visite à Vaugirard.<br />

Mort <strong>de</strong> Mme Le <strong>Prevost</strong>.<br />

Vaugirard, 8 novembre 1859<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Nous avons ici, en ce moment, si peu <strong>de</strong> faits notables que je vous écris seulement<br />

pour vous donner <strong>de</strong> nos nouvelles et vous en <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r sur vous et sur votre chère mai‐<br />

son. Jʹespère que le Seigneur vous gar<strong>de</strong> sous ses ailes et que tout est selon vos vœux, au<br />

moins pour lʹessentiel, sinon pour tous les besoins et détails quotidiens.<br />

Lʹun <strong>de</strong> nos frères, chargé dʹun service important est alité pour quelque temps, à<br />

cause dʹune opération quʹil a dû subir. Nous avons eu, parmi nos enfants, <strong>de</strong>ux ou trois<br />

fièvres scarlatines qui nous en font redouter dʹautres.<br />

Nous ne pourrions immédiatement vous envoyer le f. <strong>Jean</strong> [Maury]. Le f. Louis<br />

[Boursier] est traînant et fatigué, les travaux <strong>de</strong> la maison sont lourds en ce moment. Sʹil<br />

nous vient un peu dʹallégement, nous ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rons pas mieux que <strong>de</strong> vous porter se‐<br />

cours. Un cousin du f. <strong>Jean</strong> que nous attendions ne paraît<br />

pas <strong>de</strong>voir venir. Nous avons reçu un nouveau frère, mais<br />

pas pour les soins domestiques. Les œuvres <strong>de</strong> Paris nous<br />

pressent aussi vivement <strong>de</strong> leur donner un peu dʹai<strong>de</strong>. Le f.<br />

allemand [Emes] qui mʹavait annoncé son arrivée, nʹest pas<br />

venu jusquʹà présent.<br />

Nous avons, ces temps <strong>de</strong>rniers, reçu la visite du<br />

jeune Maximin <strong>de</strong> la Salette. Ses récits nous ont vivement<br />

intéressés et ont un caractère <strong>de</strong> simplicité, <strong>de</strong> vérité sai‐<br />

sissante qui nous a tous très vivement frappés. Notre<br />

confiance en N.D. <strong>de</strong> la Salette sʹen est accrue. Nous avons<br />

regardé aussi cette visite comme une nouvelle marque <strong>de</strong> la<br />

bonté toute particulière <strong>de</strong> la Ste Vierge à notre égard. Je<br />

suis tout heureux <strong>de</strong> penser que cette dévotion est aussi<br />

établie dans notre maison dʹArras.<br />

Maximin Giraud<br />

766


Je nʹai pas encore dʹavis sur le moment <strong>de</strong> lʹarrivée <strong>de</strong> M gr dʹAngers. Je ne manque‐<br />

rai pas <strong>de</strong> vous avertir lorsquʹil nous aura écrit.<br />

Croyez bien, je vous prie, cher Monsieur lʹabbé, à tous mes sentiments bien respec‐<br />

tueux et bien dévoués en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je recomman<strong>de</strong> à vos prières la personne qui portait mon nom et que Dieu a<br />

rappelée à Lui. Elle est décédée dans une communauté près <strong>de</strong> Lyon, dans <strong>de</strong>s sentiments<br />

<strong>de</strong> gran<strong>de</strong> piété. Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> instamment une messe à son intention.<br />

650 à M. Caille<br />

MLP. recomman<strong>de</strong> M me Le <strong>Prevost</strong> aux prières <strong>de</strong> M. Caille.<br />

Vaugirard, 9 novembre 1859<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je recomman<strong>de</strong> à vos prières et sacrifices la personne qui portait mon nom et que<br />

Dieu a rappelée à Lui. Elle est décédée dans une communauté auprès <strong>de</strong> Lyon, dans <strong>de</strong>s<br />

sentiments <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> piété. Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rai une messe à son intention. Je ne crois pas<br />

que vos frères dʹAmiens connussent ma situation sous ce rapport; il me paraîtrait dès lors<br />

inutile <strong>de</strong> leur dire expressément quelle personne leur est recommandée, une personne<br />

bienfaitrice ou appartenant à ma famille, comme vous le jugerez bon.<br />

Nous nʹavons ici rien <strong>de</strong> nouveau, pas encore <strong>de</strong> nouvelle sur lʹarrivée <strong>de</strong> Mgr dʹAn‐<br />

gers.<br />

Adieu, mon bien bon ami, je suis toujours bien frêle, bien abattu.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

651 à M. Maignen<br />

Malentendu à dissiper.<br />

Vaugirard, 17 novembre [1859]<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Je vois <strong>avec</strong> chagrin que vos troubles semblent vous persécuter davantage <strong>de</strong>puis<br />

quelque temps; je crois que lʹimagination sʹy mêle pour vous tourmenter et quʹen voyant<br />

mieux les choses vous seriez bien plus en repos. Je crois aussi que vous avez tort <strong>de</strong> me<br />

fuir; jʹai la disposition bien cordiale <strong>de</strong> tout faire pour vous donner allégement; mais je ne<br />

sais ce qui serait désirable, ignorant quelles sont au juste vos propres vues à ce sujet.<br />

Croyez‐moi, cher enfant, venez me voir un matin, afin <strong>de</strong> nous entendre; vous retrouverez,<br />

soyez‐en sûr, votre vieil ami dʹautrefois et votre Père sincèrement dévoué en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

767


652 à M. Halluin<br />

Ce dont les frères ont besoin dans les communautés. Un jeune Confrère <strong>de</strong> St‐Vt‐<strong>de</strong>‐Paul, M. dʹArbois <strong>de</strong> Ju‐<br />

bainville, entre au noviciat. Charges <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Vaugirard. Approbation <strong>de</strong> lʹadministration ʺéconomiqueʺ<br />

<strong>de</strong> M. Halluin.<br />

Vaugirard, 24 novembre 1859<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Nous avons pris nos dispositions pour que lʹun <strong>de</strong> nos ff. ecclésiastiques aille vous<br />

rendre visite, selon votre désir, un peu avant la fête <strong>de</strong> lʹImmaculée Conception. Il pourra,<br />

selon toute apparence, partir le lundi avant la fête. Je pense que ce sera M. Lantiez. Jʹai pré‐<br />

féré que ce soit lui plutôt quʹun autre parce quʹil pourra, en même temps quʹil exhortera les<br />

enfants, sʹentretenir aussi <strong>avec</strong> les frères et les soutenir par ses conseils. Tout ce cher<br />

mon<strong>de</strong> a bonne volonté, sans doute, mais lʹexpérience, la maturité, la fermeté dans la mar‐<br />

che manquent encore trop souvent et <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt, <strong>de</strong> temps en temps, un peu dʹappui.<br />

Jʹespère que la visite <strong>de</strong> notre bon abbé Lantiez fortifiera et consolera tout le mon<strong>de</strong>, vous<br />

tout le premier, cher Monsieur lʹabbé, qui, sans doute, trouvez en Dieu votre secours, mais<br />

qui pourtant <strong>de</strong>vez parfois plier un peu sous le poids si lourd qui pèse sur vos épaules. Je<br />

ne reçois aucune nouvelle <strong>de</strong> M gr dʹAngers; sʹil nous écrit, je ne manquerai pas <strong>de</strong> vous en<br />

avertir.<br />

Je ne suis pas absolument sûr que M. Lantiez soit libre dʹaller vous voir, on est venu<br />

<strong>de</strong> grand matin aujourdʹhui le chercher pour se rendre près <strong>de</strong> son père gravement ma‐<br />

la<strong>de</strong>. Si cette maladie se prolongeait, il pourrait dif‐<br />

ficilement sʹéloigner <strong>de</strong> Paris. En ce cas, un autre le<br />

remplacerait, à moins dʹempêchement absolu.<br />

Notre frère allemand [Antoine Emes] est arrivé<br />

hier. Il semble en très bonne disposition, mais il nous<br />

sera faiblement utile jusquʹà ce quʹil sache le français.<br />

Un jeune homme <strong>de</strong> nos amis [M. dʹArbois <strong>de</strong> Jubain‐<br />

ville], membre <strong>de</strong>s Conférences <strong>de</strong> S t ‐Vincent‐<strong>de</strong>‐<br />

Paul, sujet fort distingué par sa piété comme par ses<br />

autres qualités, doit aussi entrer samedi au Noviciat.<br />

Mais nous présumons que nous aurons à le mettre<br />

aux étu<strong>de</strong>s théologiques, ainsi quʹun autre <strong>de</strong> nos<br />

jeunes frères [Gauffriau] ayant aussi fait<br />

complètement ses humanités. Cette <strong>de</strong>rnière<br />

communication est recommandée à votre discrétion.<br />

Cʹest une question grave qui veut mûr examen, et<br />

lʹexécution peut aussi dans son mo<strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r<br />

attention. Je recomman<strong>de</strong> la chose à vos prières, elle<br />

est pour la Communauté dʹun sérieux intérêt.<br />

Notre personnel se trouvera ainsi un peu<br />

augmenté, mais sans accroissement sensible, jusquʹà présent, dans nos forces. Tout notre<br />

mon<strong>de</strong>, en effet, presque sans exception, est jeune ou nouvellement dans la famille, tous<br />

ont besoin dʹêtre formés à la vie <strong>de</strong> communauté ou aux œuvres; mais cʹest au moins un<br />

espoir pour lʹavenir. Ayons donc confiance, cher Monsieur lʹabbé, le Seigneur nous vien‐<br />

dra en ai<strong>de</strong> et daignera donner soulagement à ceux dʹentre nous qui sont trop chargés.<br />

768


Notre renouvellement <strong>de</strong>s vœux sʹest fait, selon lʹusage, dʹune façon édifiante. Le<br />

r.p. Manuel, Dominicain, était venu la prési<strong>de</strong>r; il a parlé admirablement. Nous sommes<br />

gâtés à Paris par la facilité <strong>avec</strong> laquelle les secours spirituels nous sont accordés, nous en<br />

<strong>de</strong>vrons compte à Dieu.<br />

Jʹapprouve bien les étu<strong>de</strong>s que vous faites pour arriver à une administration éco‐<br />

nomique. Je serais aise que votre expérience pût nous être sous ce rapport secourable.<br />

Nous avons ici beaucoup à apprendre. La multiplicité <strong>de</strong> nos services, les ateliers, lʹInstitut<br />

<strong>de</strong>s persévérants, le mouvement habituel <strong>de</strong> tous nos ff. du <strong>de</strong>hors et beaucoup dʹautres<br />

causes multiplient nos dépenses et ren<strong>de</strong>nt quelquefois nos charges bien lour<strong>de</strong>s à soute‐<br />

nir. Notre construction aussi est un poids énorme. Je ne vois pas encore bien nettement<br />

quel sera le chiffre <strong>de</strong> la dépense.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, je souhaite à vous et à vos frères et à toute votre mai‐<br />

son tous les biens possibles et je les <strong>de</strong>man<strong>de</strong> instamment aux bontés généreuses <strong>de</strong> notre<br />

divin Seigneur et à lʹintercession <strong>de</strong> la T. S te Vierge, notre Mère.<br />

Je suis <strong>avec</strong> une respectueuse affection en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Ma santé reste faible, mais pas plus mauvaise; tout notre mon<strong>de</strong> est assez bien.<br />

Le père <strong>de</strong> M. Lantiez est mieux ce soir, mais encore gravement mala<strong>de</strong>.<br />

653 à M. Vasseur<br />

Les appuis <strong>de</strong> la grâce (oraison, sacrements, exercices <strong>de</strong> piété) : ʺnotre force est làʺ.<br />

Vaugirard, 24 novembre 1859<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Jʹai vu <strong>avec</strong> joie que vos dispositions <strong>de</strong>meuraient toujours telles que je les pouvais<br />

souhaiter, cʹest‐à‐dire toutes dévouées au bien, toutes conformes à notre sainte vocation<br />

qui nous consacre à Dieu et à nos frères. Il nʹy a point, cher ami, <strong>de</strong> tâche plus noble et plus<br />

sainte, <strong>de</strong>meurons‐y donc bien fermement attachés et tâchons aussi, à lʹexemple <strong>de</strong> St Pierre, <strong>de</strong> confirmer nos frères. Je ne mʹétonne point quʹil vous revienne <strong>de</strong> temps en<br />

temps quelques petits découragements, parce que vous êtes facilement impressionné par<br />

les inci<strong>de</strong>nts ou contrariétés que les circonstances amènent, mais ce trouble nʹest quʹà la<br />

superficie, le fond, qui est réellement soli<strong>de</strong> en foi et en dévouement, reprend vite le <strong>de</strong>s‐<br />

sus et vous montre tel que vous êtes effectivement. Appuyez‐vous toujours bien sur le Sei‐<br />

gneur, cher enfant, par lʹoraison, les sacrements et les pieux exercices, notre force est là. On<br />

dit souvent: je nʹy trouve ni attrait, ni goût, ni presque dʹapplication; comment voulez‐<br />

vous que nous soyons assistés par là? Il faut bien pourtant quʹune force puissante nous<br />

vienne par ce moyen, puisquʹen y restant fidèles, nous ne défaillons ni dans le travail, ni<br />

dans lʹépreuve, ni dans les sacrifices, tandis quʹen le délaissant, nous languissons peu à<br />

peu et nous finissons par nous abattre entièrement. Allez donc fermement dans la pratique<br />

<strong>de</strong> vos exercices, cher enfant, encouragez aussi doucement les autres par votre exemple<br />

surtout à y persévérer fidèlement, vous assurerez tout ensemble et votre salut et celui <strong>de</strong><br />

vos frères. Embrassez‐les tous pour moi <strong>avec</strong> une affectueuse cordialité. M. Myionnet vous<br />

remercie <strong>de</strong> votre bon souvenir. Hier, nous avons fait sa fête, elle a été fort aimable, nos<br />

769


enfants ont été rarement aussi heureux. Notre jeune soldat Verdier, en ce moment à Paris,<br />

était <strong>de</strong>s nôtres; il gémit bien sous son nouvel habit, il espère toujours reprendre bientôt<br />

celui <strong>de</strong>s ff. <strong>de</strong> S t ‐Vincent, mais je ne vois guère jusquʹici dʹexemption bien prochaine.<br />

M. Lantiez ira vous voir bientôt.<br />

Adieu, cher enfant, que le Seigneur daigne vous bénir.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

653‐1 à M gr Jaquemet<br />

Requête adressée à lʹévêque <strong>de</strong> Nantes pour inscrire un frère comme candidat au sacerdoce.<br />

Vaugirard, 11 décembre 1859<br />

Communauté <strong>de</strong>s ff. <strong>de</strong> St ‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul<br />

Monseigneur,<br />

Un jeune homme, nommé <strong>Jean</strong>‐Marie Gauffriau, appartenant à votre diocèse, et qui<br />

avait fait ses humanités, la philosophie comprise, dans le petit séminaire <strong>de</strong> Nantes,<br />

nʹayant pas, lors <strong>de</strong>s examens, fait preuve <strong>de</strong> talents assez éminents pour être admis aux<br />

étu<strong>de</strong>s théologiques, a dû se résigner, au commencement <strong>de</strong> cette année, à quitter le sémi‐<br />

naire et dʹaprès lʹavis <strong>de</strong> ses supérieurs, il est entré dans notre Communauté pour sʹy<br />

consacrer, comme religieux, aux œuvres <strong>de</strong> zèle et <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong>.<br />

Il emportait,du reste, un excellent certificat <strong>de</strong> ses anciens maîtres qui ont aussi ren‐<br />

du <strong>de</strong> lui les meilleurs témoignages à Madame <strong>de</strong> Grandville, protectrice <strong>de</strong> sa famille. Il<br />

nʹétait pas dʹailleurs jugé indigne ni incapable du sacerdoce, mais à cause <strong>de</strong> lʹabondance<br />

<strong>de</strong>s sujets dans le diocèse, à raison aussi <strong>de</strong> la présence dans le petit séminaire dʹun <strong>de</strong> ses<br />

frères, à la charge, comme lui, <strong>de</strong> lʹétablissement, on avait jugé quʹon <strong>de</strong>vait lui préférer<br />

<strong>de</strong>s sujets plus brillants et <strong>de</strong> plus gran<strong>de</strong> espérance.<br />

Une épreuve <strong>de</strong> plus dʹune année, en effet, nous a donné lieu <strong>de</strong> reconnaître quʹaux<br />

qualités <strong>de</strong> cœur et à un caractère doux et docile, il joint un jugement droit, <strong>de</strong>s facultés au<br />

moins ordinaires et surtout, une piété sincère et un zèle vrai pour le salut <strong>de</strong>s âmes.<br />

Ces moyens, insuffisants peut‐être pour les hauts ministères, et dans un diocèse très<br />

favorisé pour les vocations, pouvant être employés utilement dans lʹapostolat <strong>de</strong>s classes<br />

ouvrières qui est notre partage exclusif, nous nʹhésiterions pas à répondre aux vœux ar‐<br />

<strong>de</strong>nts <strong>de</strong> ce jeune homme en lui faisant commencer ses étu<strong>de</strong>s théologiques si vous dai‐<br />

gniez, Monseigneur, nous y autoriser et le maintenir sur la liste <strong>de</strong>s jeunes aspirants au sa‐<br />

cerdoce <strong>de</strong> votre diocèse. Cette <strong>de</strong>rnière formalité serait essentielle pour lui afin quʹil pût<br />

échapper au tirage <strong>de</strong> la conscription prochaine dans laquelle il doit être compris. Nos me‐<br />

sures sont prises pour lui faire suivre ses étu<strong>de</strong>s soit à Paris, soit à Arras où notre commu‐<br />

nauté a un établissement, mais comme vos vues ne sont pas absolument arrêtées et que<br />

nous avons à prendre en même temps nos dispositions pour un autre sujet dont les aspira‐<br />

tions sont les mêmes, nous aurions à craindre que <strong>de</strong> nouveaux délais ne laissassent le<br />

jeune Gauffriau <strong>Jean</strong>‐Marie sans défense contre la conscription. Nous avons espéré, Mon‐<br />

seigneur, que vous ne refuserez pas votre appui à ce bon jeune homme que nous croyons<br />

véritablement digne et à notre petite Congrégation, qui sʹestimera aussi heureuse quʹhono‐<br />

rée <strong>de</strong> cette marque <strong>de</strong> votre bienveillance.<br />

770


Nous nʹavons pas besoin dʹassurer à Votre Gran<strong>de</strong>ur que lʹapproche <strong>de</strong> la conscrip‐<br />

tion nʹest, en aucune façon, le mobile <strong>de</strong> notre décision à lʹégard du jeune Gauffriau, mais<br />

bien une conviction sincère sur sa vocation. Nous nous engageons dʹailleurs, Monsei‐<br />

gneur, à vous tenir informé <strong>de</strong>s mesures que nous aurons prises pour ses étu<strong>de</strong>s et à solli‐<br />

citer alors lʹexeat dont il aura besoin pour sʹattacher définitivement à notre Congrégation.<br />

M gr lʹEvêque dʹAngers, Père et Conseiller <strong>de</strong> notre petite famille <strong>de</strong>puis ses premiers<br />

commencements, daigne prendre en main notre requête; cʹest pour nous comme une assu‐<br />

rance que vous daignerez, Monseigneur, y faire un favorable accueil.<br />

Jʹai lʹhonneur dʹêtre, Monseigneur, <strong>de</strong> Votre Gran<strong>de</strong>ur,<br />

le très humble et très obéissant serviteur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

sup r<br />

654 à M. Decaux<br />

Invitation à dîner, pour la fête <strong>de</strong> la St‐<strong>Jean</strong>.<br />

Vaugirard, 22 décembre 1859<br />

Mon bien bon ami et frère,<br />

Cʹest mardi 27 <strong>de</strong> ce mois que notre petite communauté veut bien faire ma fête (St <strong>Jean</strong> lʹEvangéliste). Jʹai eu lʹaudace dʹinviter M. Baudon à venir une fois au moins dîner<br />

<strong>avec</strong> les frères <strong>de</strong> St ‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul, et, pour lʹy déci<strong>de</strong>r, jʹai pris sur moi <strong>de</strong> lui promettre<br />

que vous lʹaccompagneriez et lui rendriez lʹaccès plus facile. Ne me démentez pas, je vous<br />

prie, et soyez assez bon pour appuyer mon instance auprès <strong>de</strong> notre cher Prési<strong>de</strong>nt. Nous<br />

aurons instruction et salut à 4h.½, mais vous ne pourrez sans doute, à cause du Conseil,<br />

nous venir quʹà 6h.; nous vous attendrons à ce moment; il y a bien longtemps que nous ne<br />

vous avons vu, ce sera une joie pour toute la maison <strong>de</strong> vous retrouver durant quelques<br />

moments.<br />

Adieu, mon bien bon ami, je me recomman<strong>de</strong> à vos prières et suis comme toujours<br />

bien affectueusement<br />

Votre dévoué ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

655 à M. Halluin<br />

Souhaits <strong>de</strong> nouvel an. Détails <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> communauté. MLP. va être admis aux ordres mineurs.<br />

Vaugirard, 30 décembre 1859<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie beaucoup <strong>de</strong> vos bons souhaits, à lʹoccasion <strong>de</strong> ma fête et du nou‐<br />

vel an. Dieu les exaucera, jʹen ai la confiance, parce quʹils viennent dʹun cœur charitable et<br />

dévoué. Je le prie aussi, <strong>de</strong> mon côté, bien instamment pour vous tous; pour vous en parti‐<br />

culier, cher Monsieur lʹabbé, qui avez la plus forte charge et qui avez conséquemment be‐<br />

soin <strong>de</strong> grâces bien abondantes. Le Seigneur ne se lassera point <strong>de</strong> vous assister, car Il voit<br />

combien vous avez besoin <strong>de</strong> secours; Il voit aussi que vous travaillez sincèrement pour<br />

Lui, que vous voulez défendre les âmes <strong>de</strong> vos pauvres enfants contre les atteintes <strong>de</strong> lʹen‐<br />

771


nemi du salut. Il vous <strong>de</strong>meurera présent et fera comme par le passé, <strong>de</strong> votre maison, un<br />

asile <strong>de</strong> paix et <strong>de</strong> bénédiction.<br />

Je souhaite bien que, pour concourir à cet heureux état, nous puissions vous être <strong>de</strong><br />

quelque secours. Jʹai toujours la pensée <strong>de</strong> vous rendre le f. Maury au printemps, au mo‐<br />

ment où recommenceront vos jardinages. Un petit inci<strong>de</strong>nt peut toutefois retar<strong>de</strong>r quelque<br />

peu son départ; son cousin, qui avait lʹintention <strong>de</strong> le venir rejoindre, lui écrit quʹil arrivera<br />

dans un mois. Il aura besoin, sʹil vient en effet, que le f. <strong>Jean</strong> [Maury] <strong>de</strong>meure quelque<br />

temps <strong>avec</strong> lui pour lʹacclimater, les gens <strong>de</strong> ce pays [lʹAuvergne] ayant quelque peine à<br />

sʹaccoutumer à <strong>de</strong> nouveaux lieux. Mais nous ferons en sorte, en tout cas, que ce bon jeune<br />

homme prenne sa position aussi vite quʹil se pourra.<br />

Nous avons vu ces jours‐ci M. Flour, toujours zélé et plein dʹar<strong>de</strong>ur pour le bien. Il<br />

désire faire un noviciat parmi nous, le plus prochainement possible. Il a perdu sa vénéra‐<br />

ble mère; il va installer <strong>de</strong>s sœurs pour le soin <strong>de</strong> ses plus jeunes enfants. Il voudrait en‐<br />

suite établir à part les plus grands. Je ne sais si, <strong>de</strong> longtemps encore, nous serons en état<br />

<strong>de</strong> lʹai<strong>de</strong>r, nous avons tant à faire déjà pour les œuvres dont nous sommes chargés.<br />

Notre fête <strong>de</strong> S t <strong>Jean</strong> sʹest très bien passée. Quelques amis dévoués <strong>de</strong> la communau‐<br />

té sʹétaient réunis à nous à cette occasion. M. Le Rebours, Vicaire Général, a fait le panégy‐<br />

rique du saint Patron.<br />

Bien que je nʹaie dit, dʹaucun côté, mes intentions quant au sacerdoce, le bruit en est<br />

venu à bon nombre <strong>de</strong> personnes, dans le clergé surtout. On accueille cette disposition<br />

<strong>avec</strong> bienveillance. Je crois quʹau commencement du Carême, je serai admis aux ordres<br />

mineurs. Je recomman<strong>de</strong>, cher Monsieur lʹabbé, cette grave affaire à vos bonnes prières. Je<br />

suis profondément pénétré <strong>de</strong> son importance pour la Communauté et pour moi‐même.<br />

Tous nos frères vous offrent leurs vœux <strong>de</strong> nouvel an et vous assurent <strong>de</strong> leur ten‐<br />

dre affection en N.S.<br />

Votre dévoué ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

656 aux Frères dʹArras<br />

Se réjouir dans lʹépreuve et la tribulation. Bonheur dʹêtre à Dieu. Pèlerinage annuel à ND. <strong>de</strong>s Victoires.<br />

Vaugirard, 30 décembre 1859<br />

Bien chers enfants,<br />

La multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s soins qui surviennent surtout en ce temps <strong>de</strong> lʹannée mʹoblige à<br />

vous écrire collectivement, mais je mʹen dédommagerai au premier moment <strong>de</strong> liberté en<br />

mʹentretenant particulièrement <strong>avec</strong> chacun <strong>de</strong> vous. Ce que jʹai, dʹailleurs, à faire aujour‐<br />

dʹhui, sʹapplique à tous en général. Je vous remercie <strong>de</strong> vos bonnes petites lettres, jʹai été<br />

vivement touché <strong>de</strong> vos vœux à lʹoccasion <strong>de</strong> ma fête et du nouvel an. Jʹai offert, <strong>de</strong> mon<br />

côté, chacun <strong>de</strong> vous au Seigneur en le priant <strong>de</strong> vous bénir et <strong>de</strong> récompenser ce que vous<br />

avez fait pour son service. Je vous souhaite aussi, chers enfants, toutes sortes <strong>de</strong> grâces<br />

pour lʹannée qui va sʹouvrir, à chacun celles qui lui sont le plus nécessaire. Jʹai la confiance<br />

que le Seigneur daignera exaucer ces vœux, et répandra sur vous <strong>de</strong>s grâces <strong>de</strong> lumière<br />

pour vous faire <strong>de</strong> plus en plus comprendre combien il est bon, combien il est sûr, com‐<br />

bien aussi il est doux dʹêtre à son service; <strong>de</strong>s grâces <strong>de</strong> force et <strong>de</strong> constance pour porter<br />

772


les travaux et épreuves <strong>de</strong> chaque jour, lesquels sont précisément le mérite et la gran<strong>de</strong>ur<br />

<strong>de</strong> votre tâche et <strong>de</strong>viendront au <strong>de</strong>rnier jour les fleurons <strong>de</strong> votre couronne. Puissent ces<br />

saintes espérances <strong>de</strong> la foi soutenir votre courage et ranimer vos cœurs, sʹils sont quelque‐<br />

fois abattus!<br />

Oh! que les moments <strong>de</strong> lʹépreuve et du labeur sont vite passés, et que la durée <strong>de</strong><br />

lʹéternelle récompense sera douce et consolante! Si nous pensions à cela, chers amis, nous<br />

dirions comme les fidèles serviteurs <strong>de</strong> Dieu dans la tribulation: ʺPlus encore, Seigneur,<br />

plus encore!ʺ Croyez aussi à la parole <strong>de</strong> ceux qui ont traversé dans le mon<strong>de</strong> bien <strong>de</strong>s<br />

phases <strong>de</strong> la vie et qui vous avertissent que ses promesses et ses attraits sont <strong>de</strong> pures illu‐<br />

sions, quʹen y cédant, vous réjouiriez lʹennemi <strong>de</strong> votre salut qui, après vous avoir abusés,<br />

vous délaisserait dans le regret <strong>de</strong>s plus tristes déceptions. Voilà la vérité, chers enfants,<br />

puisse‐t‐elle aller à vos cœurs et les incliner fermement vers Dieu, unique bien véritable,<br />

unique repos, unique rassasiement <strong>de</strong> nos âmes.<br />

Tous nos frères vous font mille bonnes affections et promettent <strong>de</strong> bien prier pour<br />

leurs ff. dʹArras à N.D. <strong>de</strong>s Victoires, en allant y faire leur visite du nouvel an. Les ff. nou‐<br />

veaux, qui ne vous connaissent que dans la charité, se recomman<strong>de</strong>nt comme les autres à<br />

vos bons souvenirs. Le f. <strong>Jean</strong> [Maury] veut que je vous fasse pour lui une mention parti‐<br />

culière.<br />

Je ne sais si notre f. Henri Sadron a écrit à sa mère; je lʹinvite à le faire, si ce nʹest dé‐<br />

jà fait.<br />

Adieu, mes bien‐aimés enfants, il me serait bien doux <strong>de</strong> vous embrasser <strong>de</strong>main<br />

<strong>avec</strong> le reste <strong>de</strong> notre petite famille, je le ferai dans le Cœur du divin Sauveur, je le ferai<br />

surtout à la Sainte Communion.<br />

Croyez au tendre dévouement <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

657 à M. Caille<br />

Souhaits <strong>de</strong> bonne année. Récit <strong>de</strong> la Saint‐<strong>Jean</strong>. Nouvelles <strong>de</strong>s vocations présentes et futures. Annonce <strong>de</strong> lʹen‐<br />

trée <strong>de</strong> M. dʹArbois <strong>de</strong> Jubainville.<br />

Vaugirard, 1 er janvier 1860<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹemploie le premier moment dont je puis disposer pour vous remercier <strong>de</strong> votre<br />

bonne et affectueuse lettre, <strong>de</strong> vos souhaits à lʹoccasion <strong>de</strong> la S t <strong>Jean</strong> et du nouvel an. Je<br />

sais, dès longtemps, mon bien bon ami, la sincérité <strong>de</strong> votre affection pour notre petite fa‐<br />

mille et votre indulgente amitié pour moi; jʹen reçois donc lʹexpression <strong>avec</strong> une vive re‐<br />

connaissance, bénissant Dieu qui vous a donné à la Communauté et à ses œuvres et qui a<br />

aussi incliné votre cœur à la bienveillance pour moi. Nous continuerons <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts à<br />

gar<strong>de</strong>r en nous cette charité qui est un <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> notre condition et qui <strong>de</strong>vient en même<br />

temps une douce consolation dans nos travaux. Nous continuerons surtout à prier les uns<br />

pour les autres, afin que le Seigneur daigne nous maintenir à son service et donner béné‐<br />

diction à nos œuvres. Son assistance miséricordieuse est bien visible jusquʹici parmi nous,<br />

tâchons <strong>de</strong> nous en rendre moins indignes <strong>de</strong> jour en jour par notre piété, notre zèle et no‐<br />

tre dévouement. Ce sont les vœux que je forme au commencement <strong>de</strong> cette année pour<br />

773


vous, pour vos frères et pour nous tous. Jʹai besoin tout particulièrement <strong>de</strong> vos prières<br />

cette année, puisquʹelle semble <strong>de</strong>voir apporter <strong>de</strong> graves changements dans ma position;<br />

puissent‐ils tourner à la gloire <strong>de</strong> Dieu et servir aussi au bien <strong>de</strong> notre chère famille.<br />

Tous nos frères sʹunissent à moi pour vous offrir leurs vœux et affections <strong>de</strong> nouvel<br />

an. Notre fête <strong>de</strong> S t <strong>Jean</strong> sʹest passée à merveille; un certain nombre dʹamis <strong>de</strong> la Commu‐<br />

nauté sʹétaient unis à nous, M. Decaux entre autres; M. Baudon avait été aussi invité et se‐<br />

rait venu, sʹil nʹeût promis avant, <strong>de</strong> dîner chez le Cardinal.<br />

Nous avons vu ces jours‐ci M. Flour; il est toujours décidé à venir faire son noviciat<br />

aussitôt quʹil pourra sʹéchapper, il a obtenu trois Sœurs <strong>de</strong> charité pour conduire ses plus<br />

jeunes enfants; il espère établir séparément les plus grands et voudrait que nous en pris‐<br />

sions soin; mais je nʹai pu lui promettre que nous serions <strong>de</strong> longtemps en mesure <strong>de</strong> lui<br />

donner ce concours; il paraît néanmoins décidé à sʹunir à nous; il a perdu <strong>de</strong>puis quelque<br />

temps sa mère qui était le lien qui le retenait encore dans le mon<strong>de</strong>.<br />

Toute la petite famille va bien, le <strong>de</strong>rnier venu, M. dʹArbois, sʹaccoutume bien; il<br />

doit, <strong>avec</strong> un autre <strong>de</strong> nos jeunes frères, faire ses étu<strong>de</strong>s ecclésiastiques; nous ne sommes<br />

pas encore décidés quant aux moyens que nous prendrons pour les faire arriver au sacer‐<br />

doce; ils ont fait leurs humanités, la philosophie comprise, mais il reste la théologie; je re‐<br />

comman<strong>de</strong> à vos prières cette affaire importante pour nous. Le f. allemand va très bien<br />

jusquʹici; on nous en annonce un autre pour la fin <strong>de</strong> lʹhiver.<br />

Adieu, mon bien bon ami, tâchons que lʹannée 1860 nous voie faire quelque progrès;<br />

nous sommes dans la voie <strong>de</strong> perfection, y avancer toujours est une obligation <strong>de</strong> notre<br />

vocation, puissions‐nous nous y montrer fidèles et correspondre aux <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> la divine<br />

Miséricor<strong>de</strong> à notre égard.<br />

Jʹembrasse vous et nos frères en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

658 aux Frères dʹAmiens<br />

Sollicitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> MLP. pour tous ses frères. Chacun doit contribuer à édifier lʹunion fraternelle: le trésor dʹune<br />

communauté, cʹest lʹunion <strong>de</strong>s frères entre eux.<br />

Vaugirard, 1er janvier 1860<br />

Bien chers enfants en N.S.,<br />

La multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s soins qui surviennent en ces premiers moments <strong>de</strong> lʹannée ne me<br />

permet pas aujourdʹhui <strong>de</strong> vous écrire à tous séparément, mais cʹest bien ainsi au moins<br />

que je vous ai présentés au Seigneur en le conjurant <strong>de</strong> vous bénir, <strong>de</strong> vous combler <strong>de</strong><br />

grâces, <strong>de</strong> remplir vos cœurs <strong>de</strong> ferveur, <strong>de</strong> zèle et <strong>de</strong> charité. Jʹai la confiance, chers en‐<br />

fants, que mes vœux seront exaucés, car ils partaient du fond <strong>de</strong> mon âme et cʹétait <strong>avec</strong><br />

un amour <strong>de</strong> père que je les portais jusquʹaux pieds <strong>de</strong> Dieu. Je vous remercie, chers en‐<br />

fants, <strong>de</strong> vos bonnes petites lettres, je les ai lues <strong>avec</strong> joie et jʹy ai trouvé lʹexpression dʹune<br />

cordiale affection; je mʹen réjouis bien, car cʹest là le trésor dʹune communauté, lʹunion <strong>de</strong>s<br />

ff. entre eux. On ne la gar<strong>de</strong> pas sans peine, je le sais, car chacun ayant ses défauts exerce<br />

la patience <strong>de</strong> ceux qui lʹentourent et il faut une vertu véritable pour que la charité nʹen<br />

souffre pas; mais là précisément est le mérite et le sacrifice agréable à Dieu. Songeons à ce‐<br />

la chacun <strong>de</strong> notre côté, chers enfants; vous êtes tous animés dʹun bon désir et néanmoins<br />

774


il ne se peut que vous ne vous donniez souvent les uns aux autres quelque occasion<br />

dʹexercer le support mutuel; offrez cette mortification au Seigneur, elle sera plus agréable<br />

quʹaucune autre à ses yeux et attirera sur vous et sur vos œuvres dʹabondantes bénédic‐<br />

tions.<br />

Quoique je ne vous écrive pas, chers enfants, aussi souvent que je le voudrais, je ne<br />

cesse pas dʹavoir les yeux sur vous et <strong>de</strong> chercher constamment <strong>de</strong>vant Dieu tout ce qui<br />

me semble pouvoir vous être utile. Je continuerai dʹenvoyer souvent quelquʹun <strong>de</strong> nos an‐<br />

ciens frères vers vous pour vous visiter, vous encourager, et, sʹil en était besoin, pour amé‐<br />

liorer les points qui vous mettraient en souffrance. Si je suis un peu plus fort moi‐même<br />

après la mauvaise saison, je me ferai une joie <strong>de</strong> vous voir au milieu <strong>de</strong> vos travaux et dans<br />

les exercices <strong>de</strong> votre vie <strong>de</strong> chaque jour. Ne vous lassez pas, bien chers enfants, <strong>de</strong><br />

mʹécrire <strong>de</strong> temps en temps et soyez assurés que vos chères lettres me causent toujours<br />

une vraie satisfaction.<br />

Tous nos ff. se rappellent à votre souvenir et vous font mille vœux pour le nouvel<br />

an; ils ont tous communié ce matin, et les ff. dʹAmiens nʹont pas été oubliés par eux, non<br />

plus que par moi.<br />

Adieu, mes bien‐aimés enfants, je vous embrasse cordialement en J. et M., et je prie<br />

le Dieu Père, Fils et Saint‐Esprit <strong>de</strong> vous bénir et <strong>de</strong> vous tenir toujours unis à Lui.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

659 à M. Halluin<br />

MLP. écrit à la suite dʹune lettre <strong>de</strong> M. Bulfay à M. Halluin, auprès duquel il sollicite un emploi à lʹŒuvre<br />

dʹArras.<br />

Vaugirard, 1er janvier 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Je nʹai pas voulu refuser à notre ancien f. Clau<strong>de</strong> [Bulfay] la consolation quʹil me<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> vous écrire ou plutôt faire écrire la lettre ci‐contre. Je ne mʹopposerais pas non<br />

plus à ce que vous le prissiez provisoirement à lʹessai, comme jardinier ou homme <strong>de</strong><br />

peine, sans vous engager à autre chose, à moins quʹil ne vous donnât plus tard une entière<br />

satisfaction. Nous ne lʹavons pas renvoyé, mais comme il a la tête peu soli<strong>de</strong> et que lʹidée<br />

lui revenait souvent dʹessayer dʹune autre Communauté, nous lʹavons pris au mot et avons<br />

favorisé son entrée chez les Lazaristes. Depuis quʹil y est, se sentant là tenu à distance par<br />

ces MM. <strong>de</strong> la Mission, ayant peu dʹexercices religieux et presque pas <strong>de</strong> vie <strong>de</strong> commu‐<br />

nauté, il ne fait que pleurer et mʹa fait <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r vingt fois <strong>de</strong> le reprendre. Je ne crois pas,<br />

pour lʹexemple, <strong>de</strong>voir le réadmettre à Vaugirard. Je crois quʹil vous serait <strong>de</strong> quelque uti‐<br />

lité. Il est assez bon jardinier, sait conduire passablement un jardin et prend intérêt à son<br />

affaire. Cʹest, du reste, un vrai enfant pour le caractère. Il faut le mener, il se laisse<br />

conduire, sachant bien que sa voie est ainsi. Il manque totalement dʹinstruction et dʹéduca‐<br />

tion, nʹa point <strong>de</strong> tenue extérieure et ne concourt point conséquemment au bon aspect<br />

dʹune communauté. Mais il a le cœur simple et droit, une foi sincère, un désir vrai et cons‐<br />

tant <strong>de</strong> se sanctifier hors du mon<strong>de</strong>. Il a <strong>de</strong>s mœurs régulières et lʹempire sur soi‐même;<br />

seulement, comme il est affectueux, il est porté à faire aux enfants <strong>de</strong>s tendresses, innocen‐<br />

tes sans doute, mais toujours défendues dans <strong>de</strong>s maisons comme les nôtres. Cʹest pour<br />

775


cette raison principalement que nous lʹavons vu partir sans regret. On peut penser que<br />

lʹépreuve quʹil vient <strong>de</strong> subir lui aura servi <strong>de</strong> leçon. Je nʹen répondrais pas toutefois, parce<br />

que, ne trouvant pas en lui‐même <strong>de</strong> mauvaise intention à cet égard, il nʹest pas assez vigi‐<br />

lant pour éviter les occasions et se tenir fermement <strong>avec</strong> les enfants. Sous vos yeux, à la<br />

maison, je crois quʹil irait bien; mais, sʹil était habituellement seul au jardin <strong>avec</strong> les en‐<br />

fants, il pourrait retomber en ce défaut que nous lui avons souvent reproché.<br />

Voilà, cher Monsieur lʹabbé, le pour et le contre, voyez si vous trouvez sa place chez<br />

vous sans nul inconvénient. La miséricor<strong>de</strong> mʹa poussé à le laisser vous écrire; mais nous<br />

<strong>de</strong>vons, avant tout, chercher le bien <strong>de</strong> lʹœuvre que Dieu nous a confiée. Je ne sais aussi sʹil<br />

pourrait aisément se tenir en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> la communauté pour les exercices, les ayant suivis<br />

longtemps. Tout cela <strong>de</strong>man<strong>de</strong> attention. Le f. Alphonse [Vasseur] pourrait vous dire son<br />

impression à ce sujet.<br />

Je vous embrasse, cher Monsieur lʹabbé, en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

660 à M. Caille<br />

Le frère Marcaire ébranlé dans sa vocation.<br />

Vaugirard, 4 janvier 1860<br />

Mon bien bon ami,<br />

Ou jʹai bien mal connu et bien mal jugé jusquʹici notre f. Marcaire, ou les disposi‐<br />

tions quʹil montre présentement ne sont quʹune pure tentation. Je ne puis croire, en effet,<br />

<strong>avec</strong> les sentiments affectueux et dévoués que je lui ai toujours vus, quʹil puisse en tran‐<br />

quillité <strong>de</strong> cœur briser en un moment <strong>de</strong>s liens <strong>de</strong> commune affection qui remontent à 8<br />

années et que nous nʹavons pas mérité, pour notre part, <strong>de</strong> voir ainsi se rompre. Je crois<br />

quʹil cè<strong>de</strong> à quelques contrariétés que lui donne son entourage et qui ont pris sur son repos<br />

dʹesprit. Il me semble quʹil eût été mieux <strong>de</strong> porter patiemment une petite épreuve que<br />

jʹavais promis dʹabréger aussitôt que je le pourrais; je vous avais dʹailleurs averti que, si<br />

elle semblait réellement trop ru<strong>de</strong> à notre f. Jules [Marcaire], je tâcherais, malgré la diffi‐<br />

culté du moment, dʹapporter remè<strong>de</strong> à sa peine; il <strong>de</strong>vait donc sʹouvrir à moi ou à vous et<br />

nous dire que la difficulté quʹil rencontrait était trop forte pour lui. Tout en regrettant quʹil<br />

nʹait pas eu en moi la confiance que jʹaurais pu souhaiter, je ne ferai pas difficulté <strong>de</strong> ren‐<br />

dre sa position autre quʹelle nʹest, en un sens ou en un autre, soit en lui donnant quelque<br />

repos ici pour changer ses occupations, soit en prenant quelques mesures pour quʹil soit<br />

mieux secondé à Amiens. Mais je souhaite quʹil rentre en lui‐même et quʹil voie combien,<br />

dʹune part, lʹouverture simple et confiante est nécessaire en Communauté, <strong>de</strong> lʹautre, com‐<br />

bien il compromettrait son avenir en changeant, sans raison soli<strong>de</strong>, la voie où Dieu lʹa pla‐<br />

cé. Car, pour croire quʹil fût mieux à sa place dans lʹInstitut <strong>de</strong>s Frères <strong>de</strong>s Ecoles, quʹil y<br />

pût trouver une vie plus intérieure, moins fatigante, cʹest, <strong>de</strong> lʹavis <strong>de</strong> M. Lantiez qui<br />

connaît bien les choses, une gran<strong>de</strong> illusion; je suis, pour ma part, convaincu quʹil nʹy res‐<br />

terait pas et que le démon se sert <strong>de</strong> ce moyen pour lui faire perdre sa vocation; nous<br />

avons, dans la Communauté, trois frères dʹun mérite véritable qui ont appartenu plusieurs<br />

années à la Congrégation <strong>de</strong>s Frères <strong>de</strong>s Ecoles; tous les trois sʹaccor<strong>de</strong>nt à dire que la part<br />

faite au spirituel et à la vie intérieure chez nous est plus réelle que dans lʹInstitut <strong>de</strong>s Frè‐<br />

776


es. Je regretterais pour nous lʹéloignement <strong>de</strong> notre f. Jules que nous avons toujours affec‐<br />

tionné, mais je le regretterais surtout pour lui, parce quʹà mon avis, il ferait la chose la plus<br />

compromettante pour son avenir. Je ne parle pas <strong>de</strong>s vœux, cʹest la question la plus grave;<br />

je crois que notre f. Jules la pèsera <strong>de</strong>vant Dieu. Je gar<strong>de</strong> bien lʹespérance, mon bon ami,<br />

que ce nuage <strong>de</strong> découragement sʹéloignera <strong>de</strong> notre cher frère et que, lorsquʹil me viendra<br />

<strong>avec</strong> vous lundi, ce sera un enfant qui viendra vers son père pour se consoler <strong>avec</strong> lui et re‐<br />

trouver la paix contre son cœur. Quoiquʹil en soit, mon bon ami, je le recevrai ainsi que<br />

vous bien affectueusement et je tâcherai dʹêtre lʹagent du Seigneur pour le plus grand bien<br />

<strong>de</strong> notre f. Jules et <strong>de</strong>s œuvres qui intéressent la gloire <strong>de</strong> Dieu.<br />

A bientôt, cher ami; je vous embrasse tous affectueusement en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. M. Lantiez a commencé la neuvaine <strong>de</strong> messes pour le f. Jules; prions bien le<br />

Seigneur quʹIl daigne le diriger.<br />

660 bis à M. Halluin306 Mouvement <strong>de</strong> personnel. Ne pas admettre <strong>de</strong>s sujets incertains (abbé Lemaire) et sans volonté.<br />

Vaugirard, 5 janvier 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Nous prenons bien part à lʹacci<strong>de</strong>nt survenu au f. Alphonse [Vasseur] et au surcroît<br />

dʹembarras qui en résulte pour vous; nous cherchons sincèrement les moyens <strong>de</strong> vous sou‐<br />

lager, mais je reçois une lettre <strong>de</strong> M. Caille qui me fait entrevoir la nécessité <strong>de</strong> quelque<br />

changement dans le personnel <strong>de</strong> sa maison; il doit venir pour mʹen parler lundi, jʹai be‐<br />

soin <strong>de</strong> lʹavoir vu avant <strong>de</strong> rien disposer, car je ne sais ce que les besoins <strong>de</strong> sa maison<br />

peuvent exiger impérieusement. Je vous promets dʹexaminer les choses <strong>avec</strong> le cordial dé‐<br />

sir <strong>de</strong> vous donner un peu dʹai<strong>de</strong>. Nous attendons le cousin du f. <strong>Jean</strong> [Maury] au com‐<br />

mencement <strong>de</strong> février. Cʹest, je vous assure, une vraie souffrance pour nous <strong>de</strong> voir le ma‐<br />

laise un peu partout chez nous, faute dʹun personnel qui nous permette <strong>de</strong> donner secours<br />

partout où on nous le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>. En voyant cette situation se prolonger et <strong>de</strong>meurer tou‐<br />

jours la même dans tous les temps, je ne puis mʹempêcher <strong>de</strong> penser quʹelle est dans les<br />

vues <strong>de</strong> Dieu et quʹIl en veut, dans sa miséricor<strong>de</strong>, tirer quelque grand bien.<br />

Nos <strong>de</strong>ux jeunes aspirants au sacerdoce vont, je crois, être admis à suivre les cours<br />

du Séminaire St‐Sulpice comme externes; en ce cas, il faudra quʹils aillent <strong>de</strong>meurer à Na‐<br />

zareth, ce qui nous privera encore <strong>de</strong>s quelques services bien utiles quʹils nous ren<strong>de</strong>nt.<br />

Je ne crois pas que ce fût un bon moyen <strong>de</strong> vous tirer <strong>de</strong> peine que celui dʹadmettre<br />

chez vous, à titre dʹessai, un ecclésiastique [abbé Lemaire]; croyez bien, cher Monsieur<br />

lʹabbé, que tout sujet, ecclésiastique ou laïc, qui nʹaura pas la fermeté <strong>de</strong> dévouement suffi‐<br />

sante pour se porter généreusement, dès lʹabord, à la maison <strong>de</strong> noviciat <strong>de</strong> Vaugirard, ne<br />

vous fera jamais, dans les conditions où nous sommes, quʹun ai<strong>de</strong> sans consistance et sans<br />

avenir. Je sens comme vous combien notre Communauté est faible pour vous bien soute‐<br />

nir, aussi je ne me blesserais pas du tout si, parvenant à trouver quelque Congrégation<br />

plus nombreuse pour vous ai<strong>de</strong>r, vous vous tourniez vers elle, car nous <strong>de</strong>vons chercher la<br />

gloire <strong>de</strong> Dieu avant tout; mais si, tant bien que mal, nous <strong>de</strong>vons, comme je le désire,<br />

306 Supplée la lettre 734.<br />

777


marcher ensemble dans lʹépreuve, la patience et la confiance en Dieu, il faut que nous évi‐<br />

tions les moyens indécis et mal précisés qui mettraient bientôt le malaise dans nos œuvres<br />

et en compromettraient peut‐être lʹavenir. Lʹadmission parmi nous <strong>de</strong> sujets incertains et<br />

sans volonté toute dévouée aurait inévitablement ce résultat; nous en avons fait plusieurs<br />

fois lʹexpérience et nous en avons toujours beaucoup souffert. Portons donc notre croix,<br />

cher Monsieur lʹabbé, <strong>avec</strong> lʹespérance que le Seigneur daignera la rendre moins lour<strong>de</strong> en<br />

nous donnant bientôt quelque soulagement. La venue <strong>de</strong> quelques sujets nous est annon‐<br />

cée, malheureusement ce ne serait pas <strong>de</strong> jeunes gens à peine formés que vous auriez sur‐<br />

tout besoin; la position à gar<strong>de</strong>r chez vous nʹest pas sans difficulté et <strong>de</strong>s hommes, dé‐<br />

voués dʹailleurs et <strong>de</strong> quelque valeur, y sont aisément au‐<strong>de</strong>ssous <strong>de</strong> leur tâche; <strong>de</strong>man‐<br />

dons au Seigneur lumière, force et charité pour faire tout ce que sa Sagesse attend <strong>de</strong> notre<br />

infirmité.<br />

Jʹembrasse vous et nos frères en J. et M. et je suis comme toujours, <strong>avec</strong> une respec‐<br />

tueuse affection.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

661 à M. Maignen<br />

Il faut encourager le frère Carment.<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Vous avez vu vendredi le f. Carment, ses dispositions ne<br />

me semblent point telles que nous les <strong>de</strong>vons <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r pour<br />

quʹil puisse vous ai<strong>de</strong>r utilement. Jʹespère quʹun peu <strong>de</strong><br />

réflexion va le ramener à dʹautres sentiments. Pour aujourdʹhui,<br />

je vous envoie Paul Piard [Baffait] 307 qui pourra faire le timbre,<br />

service que vous mʹavez dit ne pouvoir être fait que par un <strong>de</strong><br />

nous.<br />

Je vous embrasse affectueusement.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

13 janvier [1860]<br />

Le frère Paul Baffait<br />

662 à M. Maignen<br />

MLP. apaise les craintes du frère Maignen à propos dʹun éventuel changement <strong>de</strong> personnel à Nazareth.<br />

14 janvier 1860<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Je nʹai pas eu lʹintention <strong>de</strong> vous retirer lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> M. Carment; mais, malgré les pré‐<br />

cautions que jʹai prises, il mʹa paru si monté que jʹai cru pru<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> lui laisser un moment<br />

pour rentrer en lui‐même; sa tête est bien peu forte, mais le cœur vaut mieux; je tâcherai<br />

que le retard sʹabrège, quʹil soit nul, sʹil se peut. Croyez bien, cher enfant, que mes disposi‐<br />

307 Le frère Baffait a dû se faire appeler quelque temps Piard, nom <strong>de</strong> sa mère.<br />

778


tions pour vous sont, au fond, toujours les mêmes; jʹaime tendrement mon premier enfant,<br />

je suis très dévoué aux œuvres quʹil a entre les mains; je ferai tout ce qui dépendra <strong>de</strong> moi<br />

pour que la paix soit pleinement rendue à votre cœur; je prie tant et si cordialement pour<br />

vous, jʹai entière confiance, cher enfant, tout va <strong>de</strong>venir meilleur entre nous.<br />

Votre ami et Père tout affectionné en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

663 à M. Vasseur<br />

Règles pour la correspondance <strong>de</strong>s frères <strong>avec</strong> MLP. Conduite à tenir vis‐à‐vis dʹun séminariste résidant à la<br />

communauté. Conseils <strong>de</strong> direction. Le combat spirituel est toujour à mener.<br />

Vaugirard, 14 janvier 1860<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Il y avait longtemps que je nʹavais reçu <strong>de</strong> vous une petite lettre écrite à cœur ou‐<br />

vert, jʹai besoin quelquefois que mes chers enfants me parlent ainsi; cʹest pourquoi jʹai invi‐<br />

té notre bon abbé Lantiez à me rapporter quelques mots <strong>de</strong> vous écrits en simplicité et<br />

confiance. Vous avez compris mon désir, cher enfant, et vous y avez bien répondu; votre<br />

lettre mʹa été bien agréable et jʹy ai retrouvé mon fils Alphonse. Je suis convenu <strong>avec</strong> notre<br />

cher M. Halluin que les ff. dʹArras mʹécrivissent <strong>de</strong> temps en temps directement, sans<br />

avoir besoin <strong>de</strong> lui communiquer leurs lettres et que mes réponses leur fussent aussi remi‐<br />

ses cachetées. Jʹai réglé aussi la même chose <strong>avec</strong> M. Caille pour les ff. dʹAmiens. Cʹest un<br />

usage qui existe dans toutes les Congrégations et dont on a reconnu la réelle utilité. Ce<br />

nʹest pas quʹon veuille ainsi encourager les frères à manquer dʹouverture <strong>avec</strong> leur Supé‐<br />

rieur ordinaire; non, mais on veut leur ménager encore un moyen dʹexpansion vers le Su‐<br />

périeur commun, afin quʹil reste bien au courant <strong>de</strong>s dispositions <strong>de</strong> tous ses enfants; on<br />

veut aussi, sʹils ont quelque peine, quʹils puissent lʹépancher en lui; souvent, un petit<br />

conseil, un mot dʹencouragement peut consoler une âme attristée et lui rendre le repos.<br />

Vous userez donc, cher enfant, <strong>de</strong> cette faculté ainsi que nos autres frères, en toute liberté,<br />

sans préjudice <strong>de</strong> la confiance que vous gar<strong>de</strong>rez en votre père Halluin si bon, si capable<br />

<strong>de</strong> vous bien conseiller.<br />

Jʹespère comme vous, cher enfant, que la présence du jeune séminariste qui rési<strong>de</strong><br />

dans la communauté ne dérangera rien aux habitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> la maison; cʹest un essai que nous<br />

allons faire, sʹil ne donnait point les bons résultats que nous attendons pour le soulage‐<br />

ment <strong>de</strong> M. Halluin et le vôtre, nous chercherions dʹautres moyens. Malheureusement,<br />

nous avons plus <strong>de</strong> bonne volonté que <strong>de</strong> force et nous nʹarrivons guère jusquʹici à donner<br />

un appui efficace sur un point, sans mettre quelque autre partie à découvert. Cependant,<br />

notre intention est <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s efforts plus quʹordinaires pour préparer, dʹici au mois <strong>de</strong><br />

septembre, quelque secours vraiment efficace pour votre maison. Espérons que le Seigneur<br />

daignera nous donner à cette fin sa divine assistance.<br />

Vous éviterez, cher enfant, toute susceptibilité à lʹégard du jeune séminariste qui<br />

veut bien vous ai<strong>de</strong>r, vous respecterez les saints ordres auxquels il a déjà été admis, vous<br />

vivrez en charité et bienveillance <strong>avec</strong> lui et, si vous nʹavez, comme cʹest naturel, point<br />

dʹobligation dʹobéissance à son égard, vous tâcherez au moins <strong>de</strong> ne le blesser par aucun<br />

manque dʹobligeance et <strong>de</strong> bon vouloir; je compte sur votre bon esprit pour suivre cette li‐<br />

779


gne pru<strong>de</strong>nte et charitable tout ensemble; vous tâcherez que nos ff. agissent <strong>de</strong> même et<br />

vous nʹaurez ainsi, je lʹespère, quʹà vous louer <strong>de</strong> vos rapports <strong>avec</strong> M. Lemaire.<br />

Je comprends bien, cher ami, que M. Halluin étant fort chargé et préoccupé, ne<br />

puisse avoir la liberté et le loisir <strong>de</strong> vous attirer à lui et <strong>de</strong> vous ménager un peu dʹeffusion<br />

affectueuse dont vous avez besoin; offrez momentanément ce sacrifice au Seigneur et tâ‐<br />

chez <strong>de</strong> retrouver dans une tendre intimité <strong>avec</strong> Lui ce qui vous manque du côté <strong>de</strong>s<br />

hommes; croyez‐le bien, si vous vous tournez <strong>de</strong> ce côté, vous y trouverez bien <strong>de</strong> la force<br />

et <strong>de</strong> la consolation. Dans quelque temps dʹailleurs, M. Myionnet retournera vous voir, je<br />

vous écrirai et enfin jʹespère que, dans un temps peu éloigné, nous arriverons à mieux<br />

vous appuyer. Quant aux tentations qui vous obsè<strong>de</strong>nt, faites comme par le passé; priez,<br />

veillez sur vos sens, humiliez‐vous <strong>de</strong>vant Dieu, faites un peu <strong>de</strong> mortification. Elles sont<br />

pour vous une occasion <strong>de</strong> crier plus souvent vers Dieu pour lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r secours, et<br />

aussi <strong>de</strong> lui prouver que vous lʹaimez. Ce serait une illusion <strong>de</strong> penser que vous pourriez<br />

les mieux éviter en autre condition, le mal nous suit, nous le portons en nous‐mêmes, cʹest<br />

un combat qui dure, mais chaque victoire compte et mérite, cʹest pourquoi Dieu ne veut<br />

pas y mettre fin.<br />

Adieu, cher enfant, tous nos frères vous embrassent, vous et ceux qui sont <strong>avec</strong><br />

vous; nous prions pour vous, nous unissons nos travaux aux vôtres et nos cœurs aussi<br />

sʹunissent à vous dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹai reçu pour vous une petite lettre, pour vous et pour votre frère, <strong>de</strong> votre jeune<br />

neveu Godé; comme elle ne contient absolument que quelques phrases <strong>de</strong> bonne année et<br />

que ma lettre dʹaujourdʹhui est suffisamment chargée, jʹajourne lʹenvoi au prochain cour‐<br />

rier.<br />

664 à M. Halluin<br />

Ne pas accueillir <strong>de</strong>s sujets faibles et sans désir <strong>de</strong> servir Dieu généreusement.<br />

Vaugirard, 16 janvier 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Un jeune homme, nommé André Perret, qui vous avait été envoyé par le r.p. Cœur<br />

dʹAcier, <strong>de</strong> Lille, et qui est resté quelques jours chez vous, mʹest venu aujourdʹhui <strong>de</strong>man‐<br />

<strong>de</strong>r <strong>de</strong> lʹadmettre dans la Communauté. Il a frappé à plusieurs portes avant <strong>de</strong> venir à<br />

nous, espérant quʹon lui ferait continuer ses étu<strong>de</strong>s pour la prêtrise, mais son peu dʹavan‐<br />

cement dans la latinité lʹa fait repousser partout. Il se résigne donc à <strong>de</strong>venir simplement<br />

frère laïc. Extérieurement, ce jeune homme nʹest pas mal; mais il a tant vu <strong>de</strong> pays, essayé<br />

<strong>de</strong> tant <strong>de</strong> conditions que je nʹai nulle confiance dans sa stabilité ni dans sa fermeté dʹes‐<br />

prit. Je lʹai pourtant ajourné à jeudi, voulant ne pas le rejeter sans examen et me réservant<br />

surtout <strong>de</strong> vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r votre avis à son sujet. Quʹen pensait le r. p. Cœur dʹAcier?<br />

Comment lʹavez‐vous jugé vous‐même? Sa piété, ses mœurs, son caractère, ses aptitu<strong>de</strong>s et<br />

sciences, enfin aussi son amour pour le travail, sa disposition à tout faire dans un esprit <strong>de</strong><br />

zèle et <strong>de</strong> dévouement. Il faudrait que jʹeusse sur ces différents points <strong>de</strong>s renseignements<br />

qui me rassurent véritablement. Car je nʹai pas du tout la disposition dʹadmettre <strong>de</strong>s sujets<br />

780


faibles, incertains, sans vertu soli<strong>de</strong>, sans cordiale volonté au moins <strong>de</strong> servir Dieu géné‐<br />

reusement. Comme il doit revenir jeudi, je vous serai reconnaissant si vous voulez bien me<br />

répondre quelques mots sans retard.<br />

Je nʹajoute rien, étant fort en hâte et nʹayant dʹailleurs rien dʹintéressant à vous<br />

communiquer. Je vous renouvelle seulement, cher Monsieur lʹabbé, les affections <strong>de</strong> tous<br />

et les sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> dévouement <strong>avec</strong> lesquels je suis<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

665 à M. Maignen<br />

Remplacement à Nazareth.<br />

16 janvier 1860<br />

Cher enfant en N.S.,<br />

Je me rends à vos observations bienveillantes. Je vous reprends à regret notre cher f.<br />

Emmanuel [Gallais]; je vais régler au plus tôt lʹenvoi dʹun remplaçant provisoire. Je vois<br />

bien que, quelque moyen que je prenne pour le moment, je vous mettrai toujours un peu<br />

en souffrance, mais je vous sais gré du sacrifice et je ferai tout ce qui dépendra <strong>de</strong> moi<br />

pour que vous nʹen pâtissiez pas trop longtemps; le bon Dieu nous viendra en ai<strong>de</strong> et tout<br />

sʹarrangera.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

666 à M. Maignen<br />

MLP. exprime à M. Maignen tout lʹintérêt quʹil porte à lʹŒuvre <strong>de</strong> Nazareth.<br />

Vaugirard, 18 janvier 1860<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Je ne voudrais pas que vous vous couchiez <strong>avec</strong> un sentiment pénible contre moi;<br />

vous aviez été aimable et bon à mon égard, je nʹaurais pas dû lʹoublier; mais, vous le savez,<br />

la mauvaise humeur aveugle, ce nʹa été au moins quʹun éblouissement; tâchez que lʹim‐<br />

pression sʹen aille aussi vite en vous; jʹai prié votre ange gardien <strong>avec</strong> beaucoup <strong>de</strong> révé‐<br />

rence <strong>de</strong> faire ma paix <strong>avec</strong> vous; jʹespère que vous aurez entendu ce quʹil vous aura dit au<br />

fond du cœur. Je vous promets <strong>de</strong> veiller <strong>avec</strong> vous à tout ce qui touchera aux intérêts <strong>de</strong><br />

lʹœuvre <strong>de</strong> Nazareth.<br />

Adieu, cher enfant, je vous embrasse tendrement dans le Cœur du divin Sauveur<br />

Votre vieil ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

667 à M. Caille<br />

Qualités du frère Desouches. Que M. Caille veille à lui trouver lʹemploi qui lui convient.<br />

Vaugirard, 20 janvier 1860<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Votre lettre mʹa beaucoup surpris; jʹavais cru vous donner, dans M. Desouches, un<br />

frère soli<strong>de</strong> et <strong>de</strong> bon secours. Il rendait ici <strong>de</strong>s services essentiels à la maison. Il est vrai<br />

781


quʹil est peu propre aux choses dʹadministration et quʹil se fatigue beaucoup pour le<br />

moindre calcul, sa tête ne sʹy prêtant point; mais, à cela près, il est très propre à soutenir<br />

une œuvre comme la vôtre, il aime beaucoup les enfants, les surveille bien et ne se lasse<br />

jamais dʹêtre <strong>avec</strong> eux, récréations, étu<strong>de</strong>s, promena<strong>de</strong>s, exercices <strong>de</strong> toutes sortes, vigi‐<br />

lance constante; tout ce qui regar<strong>de</strong> la discipline et la conduite <strong>de</strong>s enfants est pleinement<br />

dans ses aptitu<strong>de</strong>s. Il a plus dʹinstruction quʹil nʹest ordinaire chez nos frères, il a fait ses<br />

classes et théologie, il rédige très aisément et parle dʹune façon intéressante. Il a un réper‐<br />

toire inépuisable dʹhistoires et moyens divers pour amuser les enfants; il en était ici fort<br />

aimé et plus quʹaucun autre il exerçait sur eux influence morale et bonne direction. Il suffit<br />

donc <strong>de</strong> le poser convenablement et dans les emplois qui sont le mieux dans ses moyens.<br />

Jʹenvoie le f. Myionnet pour passer quelques jours près <strong>de</strong> vous, afin <strong>de</strong> vous ai<strong>de</strong>r à caser<br />

chacun selon ses facultés, afin que vous tiriez <strong>de</strong> tous le plus grand avantage possible.<br />

Jʹai la confiance, mon bon ami, que, si vous ne vous découragez pas, vous aurez <strong>de</strong><br />

ce côté un ai<strong>de</strong> vraiment utile pour vos œuvres et pour le bien <strong>de</strong> tous.<br />

Je vous embrasse bien affectueusement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

668 à M. Halluin<br />

Réponse à une inquiétu<strong>de</strong> <strong>de</strong> M. Halluin concernant lʹattachement <strong>de</strong> la Congrégation pour son Œuvre. Cons‐<br />

truction du grand bâtiment <strong>de</strong> lʹOrphelinat. La meilleure épreuve pour nous est celle que Dieu nous envoie. Cor‐<br />

respondance directe <strong>de</strong>s frères <strong>avec</strong> MLP.<br />

Vaugirard, 21 janvier 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong>s renseignements que vous avez bien voulu me transmettre sur<br />

le jeune Perret. Ils sont entièrement conformes à lʹopinion que je mʹétais faite <strong>de</strong> ce pauvre<br />

enfant. Je pense, comme vous, que la vie <strong>de</strong> communauté ne lui conviendrait pas et quʹil<br />

serait surtout hors <strong>de</strong> sa place chez nous.<br />

Je me serai bien mal expliqué, cher Monsieur lʹabbé, si jʹai pu vous laisser penser<br />

que la maison dʹArras était une surcharge pour nous. Bien loin <strong>de</strong> là, cette œuvre nous<br />

semble toujours du plus grand intérêt et nous croyons quʹy concourir un peu doit être une<br />

source <strong>de</strong> bénédictions pour nous. Seulement, la pensée que nous nʹy pouvions donner<br />

quʹun ai<strong>de</strong> bien insuffisant a constamment été une peine pour nous. En vous voyant, en<br />

<strong>de</strong>rnier lieu, recourir à un moyen dont jʹavais tenté, à diverses reprises <strong>de</strong> vous dissua<strong>de</strong>r,<br />

comme <strong>de</strong>vant compliquer fâcheusement les éléments <strong>de</strong> votre personnel, jʹai compris, en‐<br />

core plus vivement, combien lʹétat <strong>de</strong> votre œuvre <strong>de</strong>vait comporter <strong>de</strong> malaise et jʹai cru,<br />

<strong>avec</strong> tout notre Conseil, que cʹétait pour nous une obligation <strong>de</strong> conscience dʹaviser défini‐<br />

tivement à vous donner un appui plus efficace ou <strong>de</strong> rechercher <strong>avec</strong> vous dʹautres<br />

moyens moins faibles que les nôtres.<br />

Mais soyez assuré, cher Monsieur lʹabbé, que nous ne nous arrêterions à cette pen‐<br />

sée quʹà la <strong>de</strong>rnière extrémité et que la nécessité <strong>de</strong> séparer nos intérêts <strong>de</strong>s vôtres serait<br />

pour nous une peine profon<strong>de</strong>, un véritable déchirement. Cʹest dire assez que nous espé‐<br />

rons toujours quʹil en pourra être autrement.<br />

Nous allons ici comme <strong>de</strong> coutume, nous terminons peu à peu notre grand bâti‐<br />

ment. Jʹespère que nous couvrirons successivement les dépenses, mais je mʹeffraie <strong>de</strong> lʹins‐<br />

tallation et surtout <strong>de</strong>s nouvelles charges dʹentretien que ce nouveau local entraînera.<br />

782


M. Myionnet est à Amiens jusquʹà lundi matin, pour installer le frère que nous<br />

avons dû envoyer pour remplacer M. Marcaire très épuisé. Cʹest le f. Desouches, nous nʹen<br />

voyons pas dʹautre. Il vous eût, pour vous, été bien insuffisant. Il nʹeût pu que sʹoccuper<br />

<strong>de</strong>s jeunes enfants, nʹayant pas lʹhabitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> traiter <strong>avec</strong> <strong>de</strong> grands jeunes gens. Il a aussi<br />

<strong>de</strong>s défiances <strong>de</strong> lui‐même qui nuisent souvent à son action.<br />

Nous avons bien le désir <strong>de</strong> ramener ici le f. Thuillier, mais, en ce moment, les<br />

moyens <strong>de</strong> le remplacer nous manquent. Nous y tendrons cependant, comprenant quʹil y<br />

aurait avantage à ce que ce mouvement se fît. Soumettons‐nous, cher Monsieur lʹabbé, à la<br />

croix que le Seigneur nous impose dans cette pénurie <strong>de</strong> nos moyens, mieux vaut peut‐être<br />

encore cette souffrance que beaucoup dʹautres. Elle doit, dʹailleurs, nous sembler bonne en<br />

tout cas, puisquʹelle nous est imposée par lʹadorable volonté <strong>de</strong> notre Souverain Maître.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, je vous embrasse bien affectueusement en N.S., et suis<br />

comme toujours<br />

Votre respectueux ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Soyez bien en paix sur les quelques lettres qui pourraient, <strong>de</strong> loin en loin, me<br />

venir directement. Confiez‐vous à la parole que je vous donne quʹelles ne nuiront jamais<br />

au respect et à lʹaffection que vous portent vos frères. Le cousin du f. <strong>Jean</strong> [Maury] ne doit<br />

arriver, nous le croyons, que dans les commencements <strong>de</strong> février.<br />

669 à M. Halluin<br />

Deman<strong>de</strong> <strong>de</strong> statistiques annuelles. Prières pour le Pape et pour lʹEglise.<br />

Vaugirard, 31 janvier 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Voici le moment où, dʹordinaire, je recueille quelques notes pour avoir un aperçu <strong>de</strong><br />

nos travaux durant lʹannée qui vient <strong>de</strong> finir. Je vous serais bien reconnaissant si vous vou‐<br />

liez, comme lʹan <strong>de</strong>rnier, mʹenvoyer quelques renseignements sur votre situation, notam‐<br />

ment le nombre <strong>de</strong> vos enfants, apprentis, écoliers, les ressources recueillies, la part payée<br />

par les enfants et leurs protecteurs et celle que la Provi<strong>de</strong>nce a procurée dʹailleurs, le chif‐<br />

fre <strong>de</strong>s dépenses, les améliorations économiques, enfin et surtout les résultats moraux et<br />

spirituels quʹ<strong>avec</strong> la grâce <strong>de</strong> Dieu vous avez obtenus.<br />

Pour la communauté, je sais déjà, à peu près, combien ses forces sont insuffisantes.<br />

Je recevrai néanmoins les communications que vous me feriez aussi à ce sujet, afin <strong>de</strong> ten‐<br />

dre <strong>avec</strong> vous à quelque amélioration, si le Seigneur daigne nous en donner les moyens.<br />

La vie <strong>de</strong> communauté, lʹexactitu<strong>de</strong> aux exercices, les indices <strong>de</strong> vocations, si vous en<br />

aperceviez <strong>de</strong> quelque côté, seraient aussi <strong>de</strong>s points que je vous serais obligé <strong>de</strong> mention‐<br />

ner.<br />

Je joins ici un mot écrit au f. Vasseur et resté trop longtemps oublié sur mon bureau.<br />

Nous prions ici beaucoup pour le St Père et pour lʹEglise308 . Je ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pas si vo‐<br />

tre petite famille en fait autant. Cʹest un besoin trop vivement senti pour que les âmes fidè‐<br />

les y puissent être indifférentes.<br />

308 En avril 1859, la guerre avait éclaté en Italie, provoquant <strong>de</strong>s soulèvements dans les Etats Pontificaux. Dans son Encyclique Nullus<br />

certi du 19 janvier 1860, Pie IX avait durement stigmatisé les attentats commis contre la souveraineté <strong>de</strong> l’Eglise. Les événe-<br />

783


Adieu, cher Monsieur lʹabbé, ayons bonne confiance, les promesses du divin Sei‐<br />

gneur à son Eglise nous doivent rassurer. Ayons bonne espérance aussi pour nos propres<br />

travaux, car nous sommes une portion <strong>de</strong> lʹEglise, la bénédiction du bon Maître tombera<br />

aussi sur nous.<br />

Tous nos frères vous offrent, <strong>avec</strong> moi, leurs sentiments <strong>de</strong> respect et dʹattachement<br />

en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

670 à M. Vasseur<br />

Nécessité <strong>de</strong> porter sa croix <strong>avec</strong> patience. Pour plaire à Dieu, <strong>de</strong>venir forts, charitables, saints. Donner à lʹEglise<br />

<strong>de</strong>s serviteurs généreux.<br />

31 janvier 1860<br />

Il y a longtemps, cher enfant, que vous ne mʹavez écrit un peu à loisir et <strong>avec</strong> détail<br />

sur vos petites affaires, soit intérieures, soit dʹaction dans lʹœuvre sainte à laquelle vous<br />

travaillez. Puisquʹun petit acci<strong>de</strong>nt vous prive momentanément <strong>de</strong> prendre autant <strong>de</strong> part<br />

que vous le voudriez au travail concernant vos enfants, vous en pouvez profiter pour cor‐<br />

respondre un peu <strong>avec</strong> nous. Nous offrons <strong>avec</strong> vous au Seigneur la petite croix quʹil vous<br />

envoie dans le malaise corporel qui vous est survenu et nous espérons quʹelle sera, comme<br />

toutes les épreuves possibles, salutaire et fortifiante pour vous. Plus jʹavance, plus je vois<br />

que la patience, lʹacceptation courageuse et résignée <strong>de</strong>s croix est la vertu par excellence<br />

pour un chrétien et surtout pour les serviteurs intimes du Seigneur. Toutes nos difficultés,<br />

toutes nos tristesses et nos malaises <strong>de</strong> cœur viennent presque toujours <strong>de</strong> ce que la pa‐<br />

tience, le support calme et soumis <strong>de</strong> la peine, <strong>de</strong>s épreuves et contradictions nous font dé‐<br />

ments allaient se précipiter <strong>avec</strong>, au mois <strong>de</strong> mai, le débarquement en Sicile <strong>de</strong> Garibaldi et le 18 septembre la défaite <strong>de</strong> l’armée<br />

pontificale à Castelfidardo (bataille où fut tué Georges Myionnet, neveu du frère Clément Myionnet).<br />

784


faut. Tâchons, cher enfant (je dis: tâchons, pour moi comme pour vous) <strong>de</strong> correspondre<br />

aux <strong>de</strong>sseins miséricordieux du Seigneur, Il nous envoie les difficultés et les épreuves pour<br />

nous fortifier, nous purifier, nous sanctifier; <strong>de</strong>venons, pour lui plaire, forts, charitables et<br />

saints. Jʹespère que notre petite famille donnera à lʹEglise quelques‐uns <strong>de</strong> ces serviteurs<br />

généreux et dévoués; puissions‐nous, vous et moi, être <strong>de</strong> ce nombre.<br />

Je vous embrasse affectueusement, ren<strong>de</strong>z‐le pour moi à vos frères.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

671 à M. Decaux<br />

Annonce <strong>de</strong> lʹentrée <strong>de</strong> MLP. dans les ordres. Lʹabbé Icard le prépare aux ordres mineurs. MLP. prévient une ob‐<br />

jection. Réponses à quelques plaintes dʹun Confrère.<br />

Vaugirard, 4 février 1860<br />

Mon bien bon ami,<br />

Je vous vois bien trop rarement à mon gré, vos occupations dʹune part, ma mau‐<br />

vaise santé <strong>de</strong> lʹautre nous tiennent bien séparés; je suis donc obligé <strong>de</strong> vous dire par écrit<br />

ce que quelque rumeur vous a déjà appris peut‐être et que jʹeusse aimé vous dire en toute<br />

confiance et <strong>de</strong> vive voix; malgré mon âge, mes infirmités, S. Em. Mgr lʹArchevêque juge<br />

bon que je me prépare aux ordres sacrés et il a bien voulu mʹen rendre le chemin aussi fa‐<br />

cile quʹil se peut; il mʹa remis aux mains <strong>de</strong> M. Icard pour les prédispositions nécessaires<br />

et, dʹaprès lʹavis <strong>de</strong> ce vénérable abbé, je dois recevoir les ordres mineurs au carême pro‐<br />

chain.<br />

Soyez sans inquiétu<strong>de</strong>, mon bon ami, cette disposition, dont vous vous réjouirez<br />

par rapport à moi, sera sans nul préjudice pour la constitution <strong>de</strong> notre petite Communau‐<br />

té; elle lʹasseoira au contraire, nous en sommes persuadés, sur <strong>de</strong>s bases plus fermes et<br />

plus précises, elle assurera la libre action <strong>de</strong>s frères laïcs en nous permettant <strong>de</strong> tracer plus<br />

nettement la part qui doit leur être ménagée dans les œuvres. Jʹespère vous faire partager<br />

notre conviction quand quelque bonne occasion me permettra <strong>de</strong> causer un peu à lʹaise<br />

<strong>avec</strong> vous. Jusque là, priez bien pour nous, je vous le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, pour moi particulièrement<br />

qui en ai si gran<strong>de</strong>ment besoin.<br />

M. Maignen mʹa dit les plaintes <strong>de</strong> M. Blon<strong>de</strong>l sur certaines négligences ou man‐<br />

quements <strong>de</strong>s ff. <strong>de</strong> Grenelle; jʹai fait tout ce que jʹai pu pour y remédier, ils ont bonne vo‐<br />

lonté, mais hélas! que dʹimperfections restent en nous malgré tout notre désir <strong>de</strong> bien faire;<br />

ayez beaucoup dʹindulgence, je prévois quʹ<strong>avec</strong> nous on aura longtemps besoin dʹen avoir<br />

gran<strong>de</strong> provision.<br />

Adieu, mon bon ami, croyez‐moi toujours, <strong>avec</strong> une bien cordiale affection en N.S.<br />

Votre dévoué ami et frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

672 à M. Caille<br />

Nouvelles <strong>de</strong>s frères. Prières pour lʹEglise et pour le Père commun <strong>de</strong>s fidèles. Compte‐rendu <strong>de</strong> la situation mo‐<br />

rale et financière <strong>de</strong> lʹŒuvre. MLP. recevra les ordres mineurs au mois <strong>de</strong> mars.<br />

785


Vaugirard, 8 février 1860<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie une petite lettre du f. Joseph [Loquet], plus une réponse faite par moi<br />

à une lettre du f. Victor Desouches. Jʹespère que tout continue <strong>de</strong> bien marcher, le f.<br />

Myionnet, à son retour, avait la pleine confiance que vous seriez en paix et content; M. De‐<br />

souches aime beaucoup les enfants, il sait causer <strong>avec</strong> eux et prendre influence salutaire<br />

sur eux; je crois quʹen avançant vous vous trouverez bien <strong>de</strong> son concours.<br />

Tout va ici comme <strong>de</strong> coutume, sans fait notable. Jʹapprendrai <strong>avec</strong> plaisir que tout<br />

va bien chez vous; prions, travaillons, souffrons, si Dieu le veut, pour le bien <strong>de</strong> lʹEglise et<br />

pour lʹallégement <strong>de</strong>s peines du Père commun <strong>de</strong>s fidèles.<br />

M. Aubert vient‐il vous voir quelquefois? Arrivez‐vous à donner un peu <strong>de</strong> régula‐<br />

rité à vos exercices <strong>de</strong> communauté?<br />

Je vous serai obligé <strong>de</strong> mʹenvoyer, comme lʹan <strong>de</strong>rnier, un petit compte‐rendu <strong>de</strong><br />

votre situation morale et financière, une sorte <strong>de</strong> statistique qui, jointe aux autres rensei‐<br />

gnements que je recueille, me permettrait dʹavoir une vue dʹensemble sur notre chère œu‐<br />

vre. M. Halluin mʹa déjà transmis sa note.<br />

Adieu, mon bon ami, mille amitiés dévouées <strong>de</strong> tous nos frères pour vous et pour<br />

votre maison; je vous embrasse bien cordialement.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je dois définitivement recevoir les ordres mineurs dans les premiers jours <strong>de</strong><br />

mars, le 3, si je ne me trompe; priez pour moi.<br />

673 à M. Halluin<br />

Supporter les peines résultant <strong>de</strong> lʹinsuffisance <strong>de</strong> personnel. Conduite à tenir à lʹégard <strong>de</strong>s Sœurs attachées au<br />

service <strong>de</strong> lʹŒuvre dʹArras. Il est bon dʹêtre limité par lʹespace et <strong>de</strong> ne pouvoir sʹagrandir indéfiniment.<br />

Vaugirard, 9 février 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie du prompt envoi que vous mʹavez fait <strong>de</strong>s notes sur votre situa‐<br />

tion, ce sont les premières qui me soient parvenues. Jʹespère que nos ff. <strong>de</strong>s autres œuvres<br />

vont suivre votre exemple et me fourniront quelques documents à lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong>squels nous au‐<br />

rons une vue dʹensemble sur la marche <strong>de</strong> la Communauté. Je vois que chez vous lʹœuvre<br />

dont vous vous occupez va, <strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> Dieu, assez fructueusement, mais combien nous<br />

avons encore besoin du secours dʹen haut pour arriver à quelque chose quʹon puisse dire<br />

fondé, puisque les agents <strong>de</strong> lʹœuvre sont si imparfaitement établis. Allons, comme vous le<br />

dites, au jour le jour, en dépendance parfaite <strong>de</strong> la grâce du Seigneur. Cette situation a <strong>de</strong><br />

grands avantages pour fortifier la foi et la confiance, elle peut être dans les vues <strong>de</strong> la Sa‐<br />

gesse divine.<br />

Nous attendons toujours le cousin du f. <strong>Jean</strong> [Maury]. Ne le voyant point arriver, je<br />

lui ai fait écrire par ce frère, afin <strong>de</strong> lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si définitivement il doit venir et quand il<br />

doit venir, afin que nous sachions sur quoi compter. Quant au f. Myionnet, je sais bien<br />

quʹil pourrait mieux quʹun autre vous convenir, nous y avons pensé plusieurs fois, mais<br />

quand nous cherchons les moyens dʹexécution, nous sommes forcés jusquʹici <strong>de</strong> reculer,<br />

786


parce que nous laisserons en souffrance une œuvre pour en soulager une autre. Prions,<br />

sans nous lasser, le Seigneur daignera nous assister.<br />

Je comprends vos difficultés pour faire bien concor<strong>de</strong>r les ff. <strong>avec</strong> vos Sœurs. Je<br />

crois pourtant que vous ne <strong>de</strong>vez pas trop lâcher pied <strong>avec</strong> ces <strong>de</strong>rnières, autrement, elles<br />

finiront par être plus maîtresses que vous. Les femmes ne prennent que lʹautorité quʹon<br />

leur laisse prendre. Je crois quʹil y a toujours danger à les laisser sortir <strong>de</strong> la limite qui leur<br />

convient. Cʹest le mon<strong>de</strong> renversé et une sorte <strong>de</strong> désordre qui, allant toujours croissant,<br />

finit par <strong>de</strong>venir insupportable. Je crois aussi que moins les ff. auront <strong>avec</strong> elles <strong>de</strong> rap‐<br />

ports et mieux ce sera.<br />

Jʹapprouve votre pensée dʹaller <strong>avec</strong> circonspection pour ce qui regar<strong>de</strong> lʹancien Pe‐<br />

tit Séminaire, quoique vous ne mʹayez point dit à quelles conditions il vous serait cédé, ni<br />

quelles dépenses résulteraient pour vous <strong>de</strong> son occupation. Cʹest un bien aussi dʹêtre limi‐<br />

té par les lieux et comme empêché dʹaccroître indéfiniment le nombre <strong>de</strong> vos enfants. Car,<br />

<strong>avec</strong> un personnel si restreint, comment prendre une charge <strong>de</strong> plus en plus lour<strong>de</strong>?<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, je joins ici un mot pour le petit f. Ernest [Vasseur], afin<br />

<strong>de</strong> lʹencourager. Il sʹabat facilement dans la moindre contrariété. Nous pensons toujours au<br />

f. Firmin [Thuillier], mais sans avoir encore bien combiné rien <strong>de</strong> précis pour pouvoir le<br />

remplacer et le rapprocher <strong>de</strong> nous.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, je vous transmets toutes les affections et respects <strong>de</strong><br />

nos frères, y joignant moi‐même tous mes sentiments <strong>de</strong> cordial dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

674 à M. Caille<br />

Deman<strong>de</strong> <strong>de</strong> la statistique annuelle. A Vaugirard, on invoquera Sts Pierre et Paul, ʺpatrons du clergéʺ et Marie,<br />

ʺprotectrice <strong>de</strong>s ministres <strong>de</strong> son divin Filsʺ, à lʹintention <strong>de</strong> MLP. qui va bientôt recevoir les ordres mineurs.<br />

Vaugirard, 23 février 1860<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Il y a déjà longtemps que nous nʹavons reçu <strong>de</strong> vos nouvelles; jʹespère que tout va<br />

bien pour vous, pour nos frères et pour toute la maison; je serai heureux toutefois dʹavoir<br />

quelques lignes <strong>de</strong> vous qui mʹassurent du bon état <strong>de</strong> vos santés et <strong>de</strong> tout ce qui vous<br />

touche. Notre f. Henry [Guillot] ne mʹa pas écrit du tout non plus <strong>de</strong>puis son retour à<br />

Amiens.<br />

Le f. Jules [Marcaire] va bien, il a pris une bonne assiette à Nazareth; je crois quʹil<br />

pourra y faire quelque bien.<br />

Nous nʹavons rien <strong>de</strong> notable dans la Communauté, non plus que dans nos affaires<br />

dʹœuvres; nous allons doucement, <strong>avec</strong> quelques épreuves qui sont le pain quotidien <strong>de</strong><br />

ceux qui se donnent sincèrement à Dieu.<br />

Je vous serai obligé <strong>de</strong> me faire préparer, quand vous le pourrez, la petite note que<br />

je vous ai <strong>de</strong>mandée sur le mouvement <strong>de</strong> vos œuvres en 1860309 , recettes et dépenses, état<br />

moral, principaux fruits, composition du personnel, <strong>de</strong>s enfants, jeunes ouvriers, etc., état<br />

<strong>de</strong> la communauté, régularité <strong>de</strong>s exercices <strong>de</strong> vie commune, etc. rapports <strong>avec</strong> les autori‐<br />

tés et les œuvres du <strong>de</strong>hors, etc.<br />

309 De toute évi<strong>de</strong>nce, c’est 1859 qu’il faut lire.<br />

787


Je me recomman<strong>de</strong>, en finissant, à vos prières et à celles <strong>de</strong> nos frères; jʹespère rece‐<br />

voir les ordres mineurs le 3 mars; nos frères veulent bien ici faire une petite prière à S t<br />

Pierre et à S t Paul, patrons du clergé et chefs <strong>de</strong> lʹEglise, et à la T. S te Vierge, Mère et protec‐<br />

trice <strong>de</strong>s ministres <strong>de</strong> son divin Fils. Je compte sur votre charité pour ne pas mʹoublier non<br />

plus à Amiens.<br />

Adieu, mon bien bon ami, je vous renouvelle tous mes sentiments <strong>de</strong> tendre affec‐<br />

tion en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Affections aussi aux frères et à lʹami Frédéric [Streicher]; M. Myionnet doit aller à<br />

Arras vers le milieu du carême, il pourra vous voir un moment en passant.<br />

675 à M. Halluin<br />

Mois <strong>de</strong> St Joseph. Premiers essais dʹorganisation du noviciat. Réception <strong>de</strong>s ordres mineurs. Neuvaine dite à<br />

cette occasion. Eloge du frère Maury. Se détacher <strong>de</strong> sa famille: les soins <strong>de</strong> parenté, causes <strong>de</strong> dérangement <strong>de</strong> la<br />

vie <strong>de</strong> communauté.<br />

Vaugirard, 26 février 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> vos bons souhaits pour notre maison. Dieu semble les exaucer.<br />

Tous nos ff. commencent leur carême en bonne disposition <strong>de</strong> recueillement, <strong>de</strong> travail et<br />

<strong>de</strong> pénitence. Nous allons entrer aussi dans le mois consacré à St Joseph. Nous ferons cha‐<br />

que jour à cet aimable Père du Sauveur quelques actes <strong>de</strong> dévotion. Nous espérons quʹil<br />

nous le rendra en accroissant en nous lʹesprit intérieur et en nous inspirant un plus grand<br />

zèle pour le bien <strong>de</strong> nos enfants.<br />

Nous faisons nos efforts, en ce moment, pour établir dʹune façon plus régulière les<br />

exercices du noviciat. M. Lantiez en sera chargé. Nous espérons que nos ff., formés plus<br />

systématiquement et <strong>avec</strong> plus <strong>de</strong> suite, prendront plus soli<strong>de</strong>ment la forme et lʹesprit <strong>de</strong><br />

la vie religieuse. Daigne le Seigneur nous prêter sa divine assistance.<br />

Nos <strong>de</strong>ux jeunes aspirants au sacerdoce sont au Séminaire où je les ai conduits jeudi<br />

<strong>de</strong>rnier. Je crois que nous aurons en eux un jour <strong>de</strong>ux véritables serviteurs <strong>de</strong> Dieu.<br />

Je dois, <strong>de</strong> mon côté, recevoir les ordres mineurs le 3 mars, dans la chapelle <strong>de</strong> S.<br />

Em. le Cardinal Archevêque <strong>de</strong> Paris qui veut bien me les conférer. Nos ff. ont la charité<br />

<strong>de</strong> faire à cette occasion une neuvaine à laquelle je vous prie, ainsi que nos ff. <strong>de</strong> votre<br />

maison, <strong>de</strong> vous associer. On applique à cette intention le Veni Creator qui se dit le soir<br />

<strong>avec</strong> les invocations: N.D. <strong>de</strong> la Salette, St Pierre et St Paul, St Tharsice et la petite oraison à<br />

St Joseph: Sanctissimae Genitricis tuae sponsi quœsumus etc.<br />

Nous avons prié, pour notre part, pour votre retraite. Nous apprendrons <strong>avec</strong> plai‐<br />

sir que le Seigneur a daigné y donner bénédiction.<br />

Nous ne recevons point <strong>de</strong> réponse du cousin du f. <strong>Jean</strong> [Maury]. Sʹil tar<strong>de</strong> encore,<br />

nous aviserons, dʹici à peu, à régler le départ <strong>de</strong> ce bon frère, puisque vous pensez toujours<br />

quʹil vous sera bien utile. Ici, il nous rend <strong>de</strong>s services bien essentiels, son esprit dévoué et<br />

consciencieux, sa bonne volonté constante, sa piété sincère en font pour nous un sujet que<br />

nous aimons autant que nous lʹestimons. Vous verrez à ce moment sʹil y a lieu <strong>de</strong> nous<br />

788


envoyer le f. Ernest [Vasseur]. Du reste, M. Myionnet doit aller prochainement faire une<br />

visite à Amiens. Il tâchera <strong>de</strong> sʹéchapper pour vous voir en même temps un moment.<br />

Le f. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet], qui vous a déjà donné un <strong>de</strong> ses neveux, en a un au‐<br />

tre, fils <strong>de</strong> son frère, âgé <strong>de</strong> 9 ans, bon petit enfant quʹil désirerait aussi vous envoyer. Il<br />

paierait comme pour lʹautre. Il croit pouvoir répondre que vous nʹen auriez point <strong>de</strong> désa‐<br />

grément. Jʹaime mieux quʹil ne soit point trop près du f. <strong>Jean</strong>‐Marie, parce que ces soins <strong>de</strong><br />

parenté dérangent trop les ff. Si vous y donnez consentement, M. Myionnet pourrait le<br />

conduire <strong>avec</strong> lui, lorsquʹil passera à Amiens où se trouve lʹenfant.<br />

Je vous prie, cher Monsieur lʹabbé, dʹassurer tous nos ff. <strong>de</strong> ma tendre affection et <strong>de</strong><br />

me croire, <strong>avec</strong> un respectueux attachement,<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

676 à M. Halluin<br />

Compassion pour les embarras <strong>de</strong> M. Halluin. Impuissance à lui apporter <strong>de</strong> lʹai<strong>de</strong>. M. Myionnet ira visiter<br />

Amiens et Arras. Recourir non aux ressources humaines mais aux moyens <strong>de</strong> foi.<br />

Vaugirard, 29 février 1860<br />

Bien cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je suis bien contristé en voyant toutes vos peines et combien lʹinexpérience et le peu<br />

dʹavancement <strong>de</strong> quelques‐uns <strong>de</strong> nos frères vous causent <strong>de</strong> difficultés. Je mʹassocie bien<br />

cordialement à la souffrance que vous en <strong>de</strong>vez éprouver et je prie ar<strong>de</strong>mment le Seigneur<br />

<strong>de</strong> nous donner les moyens dʹy apporter remè<strong>de</strong>. Nous commençons aujourdʹhui le mois<br />

<strong>de</strong> St Joseph. Il me semble que si tous nous réunissions nos efforts pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r par ce<br />

grand saint lʹassistance dont nous avons besoin, le Seigneur ne nous la refuserait point. Es‐<br />

sayons, je vous le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, cher Monsieur lʹabbé, et ayons bonne confiance, tout est pos‐<br />

sible à notre Dieu et ce Dieu est notre Père. Jʹai besoin <strong>de</strong> me réfugier dans les moyens <strong>de</strong><br />

foi, car, pour les ressources humaines, je nʹen vois guère dʹefficaces en ce moment. Le dé‐<br />

part pour le Séminaire <strong>de</strong> nos <strong>de</strong>ux jeunes ff. restreint encore ici notre personnel, aucun <strong>de</strong><br />

ceux qui restent ne semble guère pouvoir être déplacé sans notable inconvénient. Comme<br />

on peut mieux se concerter <strong>de</strong> vive voix que par écrit, je vais avancer <strong>de</strong> quelques jours le<br />

voyage que M. Myionnet doit faire à Amiens, afin quʹil puisse en même temps vous rendre<br />

visite. Je pense que lundi ou mardi prochain il pourra se trouver à Arras. Vous savez son<br />

esprit placi<strong>de</strong> et conciliant; jʹespère que le bon Dieu lʹinspirera pour trouver <strong>avec</strong> vous ce<br />

qui serait <strong>de</strong> mieux dans la situation.<br />

M. lʹabbé Hello me dit quʹil a répondu à votre lettre il y a <strong>de</strong>ux jours. Je pense que sa<br />

réponse vous est maintenant parvenue. Lʹextrême éloignement <strong>de</strong> la rue où il a dû se ren‐<br />

dre a été la seule cause du retard.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong>meurons bien persévérants dans la prière et dans<br />

notre union en Dieu, cʹest là mon seul refuge dans nos difficultés.<br />

Je suis, en J. et M.,<br />

Votre respectueux ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

789


677 à M. Caille<br />

Le frère Myionnet examinera <strong>avec</strong> M. Caille un possible changement <strong>de</strong> personnel.<br />

Vaugirard, 1er mars 1860<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je suis en retraite jusquʹà samedi et ne puis vous écrire que <strong>de</strong>ux mots en réponse à<br />

votre lettre que je reçois à lʹinstant <strong>avec</strong> celle du f. Henry [Guillot].<br />

M. Myionnet, qui doit aller à Arras lundi ou mardi, tâchera, dans le cours <strong>de</strong> la se‐<br />

maine, <strong>de</strong> vous faire une visite et dʹexaminer <strong>avec</strong> vous ce qui peut‐être expédient pour le<br />

bien <strong>de</strong> votre maison.<br />

Je ne sais pas si nous arriverons à rien <strong>de</strong> satisfaisant, tant que vous ne pourrez y<br />

rester habituellement. Avez‐vous bien examiné <strong>de</strong>vant Dieu si vous seriez réellement dans<br />

lʹimpossibilité <strong>de</strong> vous retirer <strong>de</strong>s affaires <strong>de</strong> commerce?<br />

Adieu, mon bien bon ami, je prierai <strong>de</strong> tout mon cœur pour vous et pour votre œuvre.<br />

Votre dévoué ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

678 à M. Maignen<br />

Regrets et inquiétu<strong>de</strong>s au sujet dʹun malentendu.<br />

Vaugirard, 2 mars 1860<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Demain, je recevrai une gran<strong>de</strong> grâce qui sera aussi, je lʹespère, une bénédiction<br />

pour notre petite famille; il mʹest pénible <strong>de</strong> penser que, dans ce temps, vous restez peut‐<br />

être mécontent et mal disposé à mon égard; je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> donc <strong>de</strong> faire effort pour<br />

mettre aux pieds du Seigneur les impressions fâcheuses que vous pouvez conserver. En ne<br />

cherchant, je le crois, que le bien, jʹai pu manquer <strong>de</strong> calme et <strong>de</strong> douceur dans les formes;<br />

je mʹen excuse bien cordialement près <strong>de</strong> vous et je souhaite que la charité du divin Sau‐<br />

veur <strong>de</strong>meure parfaite dans nos âmes. Je me suis promis <strong>de</strong> prier particulièrement St Jo‐<br />

seph pour vous durant ce mois; jʹai la confiance quʹil obtiendra une gran<strong>de</strong> abondance <strong>de</strong><br />

grâces pour vous et pour les œuvres dont vous êtes chargé. Soyez assuré, cher enfant, que<br />

ce me sera une douce consolation <strong>de</strong> voir en vous la paix et les dons les plus précieux <strong>de</strong> la<br />

Miséricor<strong>de</strong>.<br />

Je vous embrasse bien tendrement en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

679 à M. Maignen<br />

MLP. presse M. Maignen <strong>de</strong> ne pas sʹabsenter <strong>de</strong>s réunions du mercredi à Vaugirard et <strong>de</strong> ne pas rester sous<br />

lʹempire <strong>de</strong> la mauvaise impression qui le domine.<br />

Vaugirard, 8 mars 1860<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Vous vous êtes bien gran<strong>de</strong>ment mépris sur mes intentions; loin <strong>de</strong> vous voir <strong>avec</strong><br />

plaisir rester le mercredi à Nazareth, je mʹy suis opposé fermement, jusquʹau moment où<br />

790


notre p. Beaussier mʹayant averti quʹil croyait pru<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> ne pas contrarier vos vues, jʹai<br />

dû cé<strong>de</strong>r en exprimant le désir quʹau moins vos absences, si vous en faisiez, ne fussent pas<br />

telles quʹon pût les remarquer dans la communauté. 310<br />

Hier, nos ff. commençaient à sʹétonner <strong>de</strong> ne pas vous voir, je crois que vous ne<br />

pourriez sans inconvénient <strong>de</strong>meurer encore à Nazareth mercredi. Je vous invite donc,<br />

mon cher enfant, à reprendre vos habitu<strong>de</strong>s ordinaires; nous avons déjà tant dʹépreuves et<br />

<strong>de</strong> difficultés, ne les augmentons pas volontairement, ne sapons pas nous‐mêmes les bases<br />

du pauvre édifice que nous avons si laborieusement essayé <strong>de</strong> bâtir; enfin, si Dieu <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong> <strong>de</strong> nous quelques actes dʹhumilité, dʹabnégation, <strong>de</strong> charité, offrons‐lui généreu‐<br />

sement ce sacrifice.<br />

Adieu, mon cher enfant, jʹai prié tous les jours pour vous et je <strong>de</strong>meure <strong>avec</strong> une<br />

tendre affection<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

680 à M. Maignen<br />

Joie toute paternelle <strong>de</strong> MLP. en voyant dissipé le malentendu dont il souffrait. Encouragement à lʹhumilité et à<br />

la soumission. Lui‐même promet dʹêtre plus patient.<br />

Vaugirard, 11 mars 1860<br />

Mon Dieu! mon cher enfant, que votre petite lettre mʹa causé une douce et pure joie;<br />

il y avait longtemps que je nʹavais eu un moment <strong>de</strong> si vive consolation. Vous voilà donc<br />

retrouvé, vous mon enfant bien‐aimé, préféré peut‐être; comme je vous cherchais, pauvre<br />

ami, <strong>avec</strong> angoisse et que je vous trouvais loin <strong>de</strong> moi; mais que le Seigneur en soit béni, je<br />

vous sens encore contre mon cœur <strong>de</strong> Père, jʹen pleure <strong>de</strong> joie, je vous écris presque aveu‐<br />

glé. Soyez bien sûr quʹun rayon <strong>de</strong> grâce est tombé sur vous; vous êtes dans le vrai, puis‐<br />

que votre cœur est humble, soumis et aimant. Demeurez ainsi, cher enfant, cʹest bien votre<br />

véritable voie; hors <strong>de</strong> là, vous nʹavez pas un moment <strong>de</strong> paix, tandis que vous la retrou‐<br />

vez quand vous restez dans votre nature qui est toute <strong>de</strong> bienveillance et dʹaspiration au<br />

bien.<br />

Je remercie le bon S t Joseph que jʹai constamment invoqué pour vous, je remercie<br />

N.S. que jʹai bien prié aussi ce matin à la Sainte Communion, mais jʹattribue surtout votre<br />

généreux mouvement aux prières <strong>de</strong> notre p. Beaussier; je lui avais écrit hier pour le prier<br />

<strong>de</strong> faire appel aux meilleurs points <strong>de</strong> votre cœur pour vous bien faire comprendre mes<br />

bons désirs à votre égard et vous rendre la paix. La voilà reconquise, cher ami, gar<strong>de</strong>z‐la<br />

bien, afin <strong>de</strong> répondre aux <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> Dieu sur vous; vous avez une si bonne position,<br />

vous avez tant <strong>de</strong> dons pour faire le bien, assurez tout cela par lʹhumilité et le détachement<br />

et la bénédiction sera donnée à tous vos travaux. Je vais tâcher pour ma part, cher ami,<br />

dʹêtre moins imparfait. Jʹai pris <strong>de</strong>vant Dieu la résolution <strong>de</strong> mʹexercer davantage, dans ma<br />

nouvelle condition, à la vertu <strong>de</strong> patience qui me manque trop souvent et dont le défaut se<br />

met en travers <strong>de</strong> mes meilleures intentions; espérons quʹ<strong>avec</strong> cela, la paix bénie que la<br />

310 Il était d’usage que les frères <strong>de</strong>s maisons <strong>de</strong> Paris vinssent tous les mercredis à Vaugirard.<br />

791


main du Seigneur fait <strong>de</strong>scendre entre nous sera inébranlable et tiendra nos cœurs dans la<br />

douce et intime charité qui les unit en ce moment.<br />

Je vous embrasse tendrement en J. M. et J.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

681 à M. Caille<br />

Inconvénients <strong>de</strong>s changements <strong>de</strong> personnel trop fréquents. Certitu<strong>de</strong> quʹa MLP. que son entrée dans les ordres<br />

est bien selon les vues <strong>de</strong> Dieu sur lʹInstitut.<br />

Vaugirard, 11 mars 1860<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Notre f. Myionnet est revenu satisfait <strong>de</strong> son voyage dʹAmiens, ayant trouvé les en‐<br />

fants mieux disciplinés et plus dociles; il espère quʹ<strong>avec</strong> la direction du f. Guillot lʹordre se‐<br />

ra plus ferme et plus régulier. Il mʹa fait part du désir que vous auriez <strong>de</strong> reprendre le f.<br />

Joseph [Loquet]; il fait les classes ici et est bien à son affaire, nous en sommes contents et ce<br />

nʹest pas sans peine que nous le déplacerons; cependant, je ne veux pas me refuser à cet ar‐<br />

rangement, puisquʹil semble vous convenir. Jʹaurais souhaité seulement quʹil fût différé<br />

jusquʹà la retraite, cʹest‐à‐dire quelques semaines à peine. Ce délai bien court rendrait le<br />

changement moins sensible; <strong>de</strong>puis quelque temps, en effet, les mouvements du personnel<br />

ont été chez nous plus répétés que je ne lʹaurais voulu; les œuvres, comme la Communau‐<br />

té, ne peuvent quʹen souffrir.<br />

Examinez donc <strong>de</strong> nouveau, mon bon ami, si le bien <strong>de</strong> votre maison exige absolu‐<br />

ment que la mutation soit immédiate; en ce cas, jʹécrirais au f. Desouches pour lʹavertir <strong>de</strong><br />

son rappel et je conviendrais <strong>avec</strong> vous du jour où lʹun partirait dʹAmiens et lʹautre <strong>de</strong> Pa‐<br />

ris. Autrement, jʹenverrais au f. Desouches une lettre dʹavis et dʹencouragements pour lʹaf‐<br />

fermir et lʹai<strong>de</strong>r à remplir <strong>de</strong> son mieux son emploi jusquʹà la retraite, vers le milieu<br />

dʹavril.<br />

Nous nʹavons rien <strong>de</strong> notable ici; le f. Myionnet vous a dit, sans doute, tout ce qui<br />

pouvait vous intéresser sur la situation <strong>de</strong> la Communauté et <strong>de</strong> ses œuvres; il y a toujours<br />

insuffisance <strong>de</strong> personnel et <strong>de</strong> moyens, mais cet état, dont nous nʹavons jamais pu sortir,<br />

est sans doute selon les vues <strong>de</strong> Dieu; allons donc en patience et en confiance, cette dispo‐<br />

sition me semble <strong>de</strong>voir être habituelle chez nous.<br />

Je recevrai <strong>avec</strong> plaisir les renseignements que je vous ai <strong>de</strong>mandés sur vos œuvres<br />

pour lʹannée 1859.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> vos bonnes prières à lʹoccasion <strong>de</strong> ma première ordination; jʹai<br />

lieu <strong>de</strong> penser que Dieu les a exaucées, tout me confirme dans la conviction que cette<br />

grave mesure était dans les <strong>de</strong>sseins du Seigneur à lʹégard <strong>de</strong> notre petite famille, elle était<br />

désirée et comme attendue partout autour <strong>de</strong> nous.<br />

Je désirerais que vous me donniez confi<strong>de</strong>ntiellement une petite note indicative <strong>de</strong><br />

vos ressources propres, tant présentes quʹà vous revenir si vous liquidiez vos affaires <strong>de</strong><br />

commerce; puis aussi <strong>de</strong>s ressources <strong>de</strong> votre maison, et, en regard, vos charges <strong>de</strong> famille<br />

et les dépenses ordinaires <strong>de</strong> lʹorphelinat. De cette sorte, je me rendrais mieux compte <strong>de</strong><br />

la situation qui nous serait faite si vous vous retiriez <strong>de</strong>s affaires. Sʹil nʹy avait, entre les re‐<br />

cettes et les dépenses, quʹune différence assez peu notable, il me semble que, sans tenter la<br />

792


Provi<strong>de</strong>nce, vous pourriez vous jeter entre ses bras. Cette note serait pour moi seul, vous<br />

pouvez donc me la donner en toute confiance.<br />

Adieu, mon bon ami, tâchons <strong>de</strong> faire une sainte Quarantaine, puisque ce temps est<br />

plus abondant en grâces et plus favorable pour être agréables à Dieu par nos prières et par<br />

nos œuvres.<br />

Jʹembrasse vous et nos frères bien affectueusement en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

682 à M. Halluin<br />

M. Myionnet rentre dʹArras <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s renseignements favorables. Exemption <strong>de</strong> la conscription pour un jeune<br />

frère. Les charges sont lour<strong>de</strong>s mais Dieu ʺprend pour Lui ce que nous ne pouvons pas porterʺ.<br />

Vaugirard, 12 mars 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je nʹai trouvé le moment, au départ du f. <strong>Jean</strong> [Maury], <strong>de</strong> lui donner, comme je le<br />

voulais, quelques lignes pour vous. Je nʹavais, du reste, rien <strong>de</strong> notable à énoncer, sinon la<br />

joie que jʹéprouvais <strong>de</strong>s bons renseignements que nous a rapportés M. Myionnet et qui<br />

nous sont un nouveau témoignage <strong>de</strong> la protection toute spéciale du Seigneur à lʹégard <strong>de</strong><br />

votre maison, puisque, <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s ressources si restreintes en personnel, vous arrivez à sub‐<br />

venir aux besoins essentiels <strong>de</strong> la situation. Espérons donc et marchons toujours en dé‐<br />

fiance <strong>de</strong> notre faiblesse, en confiance dans la bonté toute puissante <strong>de</strong> Dieu.<br />

Le f. <strong>Jean</strong> a emporté un paletot qui exigeait un petit rajustement pour être bien à sa<br />

taille. Cʹest peu <strong>de</strong> chose, mais on y a pensé trop tard. Je vous prie <strong>de</strong> faire approprier pour<br />

lui ce vêtement.<br />

Notre petit Brice est inquiet sur sa mère qui lui a écrit quʹelle se sentait fort abattue.<br />

Il vous prie instamment <strong>de</strong> la voir et <strong>de</strong> lui écrire comment vous la trouvez. Il serait néces‐<br />

saire que cette bonne dame fît les déclarations ordinaires pour exempter son fils <strong>de</strong> la<br />

conscription. Il vous prie aussi <strong>de</strong> lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r ce quʹelle a fait à cet égard.<br />

Lʹensemble <strong>de</strong> notre petite Congrégation et <strong>de</strong> ses œuvres marche. De tous côtés, les<br />

charges sont plus fortes que les hommes nʹont <strong>de</strong> suffisance. Mais le Seigneur prend pour<br />

lui ce que nous ne savons pas porter. Comment pourrions‐nous nous plaindre? Notre mi‐<br />

sère appelle sa miséricor<strong>de</strong>. Cʹest le secret <strong>de</strong> notre existence présente et lʹespoir <strong>de</strong> notre<br />

avenir.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, jʹembrasse vous et nos ff. en J. et M.<br />

Votre respectueux ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. M. Myionnet mʹa donné bonne opinion du jeune ecclésiastique qui vous ai<strong>de</strong>. Il<br />

croit quʹil y a lieu <strong>de</strong> penser que sa vocation le pourrait attacher à notre petite famille.<br />

683 à M. Caille<br />

Remplacement <strong>de</strong> personnel. Désir <strong>de</strong> voir St Joseph honoré dans tout lʹInstitut.<br />

Vaugirard, 15 mars 1860<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Notre petit Conseil, réuni hier comme <strong>de</strong> coutume, a pensé que, nonobstant les in‐<br />

convénients que présentaient les changements un peu trop répétés que nous avons dû<br />

793


faire ces temps <strong>de</strong>rniers, nous <strong>de</strong>vions vous donner le secours que vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z si ins‐<br />

tamment et vous renvoyer le f. Joseph [Loquet]. Il partira mardi matin, 20 <strong>de</strong> ce mois; vous<br />

pourrez faire en sorte que M. Desouches quitte Amiens le même jour, afin quʹils se croisent<br />

en chemin. Ce nʹest pas sans quelque regret que le Conseil sʹest décidé à déplacer le f. Jo‐<br />

seph, parce quʹau poste où il était, aux classes, il marchait très bien, ayant un règlement<br />

précis qui le soutenait bien. Espérons que près <strong>de</strong> vous il pourra aussi vous rendre <strong>de</strong> bons<br />

services et vous donner toute satisfaction; il a, en général, bonne volonté et, pour peu quʹil<br />

soit un peu encouragé et soutenu par quelque surveillance, on nʹa pas à sʹen plaindre.<br />

Tout notre mon<strong>de</strong> va assez bien ici; à Arras, M. Myionnet a trouvé les choses en état<br />

assez satisfaisant; je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> au Seigneur quʹIl bénisse votre maison et agrée vos travaux<br />

et ceux <strong>de</strong> vos frères.<br />

Adieu, bien cher ami, je pense que votre maison fait le mois <strong>de</strong> S t Joseph; nous lui<br />

montrons ici autant <strong>de</strong> dévouement que nous pouvons; je désire bien quʹil soit honoré<br />

dans toutes nos œuvres.<br />

Je vous embrasse affectueusement en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

684 à M. Guillot<br />

Encouragement à persévérer dans son zèle et ses bonnes dispositions.<br />

15 mars [1860]<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Le temps me presse <strong>de</strong> telle sorte que je ne puis vous écrire aujourdʹhui; je mets seu‐<br />

lement ces <strong>de</strong>ux mots pour vous donner signe <strong>de</strong> souvenir et vous assurer que je ne vous<br />

oublie pas surtout <strong>de</strong>vant Dieu. M. Myionnet mʹa dit que vos soins avaient succès, que les<br />

enfants se montraient tout ensemble dociles et affectionnés <strong>avec</strong> vous; continuez, cher en‐<br />

fant, comptez peu sur vous et atten<strong>de</strong>z tout <strong>de</strong> la divine Miséricor<strong>de</strong>.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

685 à <strong>de</strong>ux enfants dʹAmiens<br />

Réponse à <strong>de</strong>ux enfants dʹAmiens, Caille et J. Morel, qui souhaitent le retour du frère Marcaire.<br />

Paris, le 27 mars 1860<br />

Chers enfants,<br />

Jʹai été très sensible aux sentiments exprimés dans votre bonne petite lettre; elle mʹa<br />

montré que vous avez un bon cœur, puisque vous avez tant <strong>de</strong> peine à oublier vos amis et<br />

vos bienfaiteurs. Je suis tout désolé <strong>de</strong> ne pouvoir vous accor<strong>de</strong>r présentement ce que vous<br />

me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z; mais M. Marcaire est en ce moment fatigué et faible <strong>de</strong> santé, je ne pourrai<br />

le renvoyer près <strong>de</strong> vous avant quʹil soit bien remis et bien fortifié, ce qui ne saurait être <strong>de</strong><br />

si tôt. Je vous invite, en attendant, chers enfants, à bien vous affectionner à MM. Henry<br />

[Guillot], Joseph [Loquet] et Frédéric [Streicher] qui vous sont si dévoués et qui ont à<br />

cœur, eux aussi, <strong>de</strong> vous faire tout le bien possible.<br />

794


Soyez bien persuadés, chers amis, que vous ne sauriez donner à M. Marcaire <strong>de</strong><br />

meilleure preuve <strong>de</strong> votre attachement et <strong>de</strong> votre reconnaissance, car il ne désire rien tant<br />

que <strong>de</strong> vous voir sages, pieux et dociles; sʹil apprend que vous progressez en vertu et en<br />

science, il sera gran<strong>de</strong>ment récompensé <strong>de</strong>s soins quʹil a pris <strong>de</strong> vous et il regar<strong>de</strong>ra<br />

comme un jour heureux celui où il pourra vous revoir et vous embrasser.<br />

Il me charge <strong>de</strong> vous dire toute sa tendre affection; je vous assure aussi <strong>de</strong> la<br />

mienne, chers enfants, et je prie le Seigneur <strong>de</strong> vous combler <strong>de</strong> ses plus précieuses béné‐<br />

dictions.<br />

Votre ami bien dévoué en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

686 à M. Caille<br />

MLP. confie à M. Caille le soin <strong>de</strong> transmettre sa lettre aux enfants <strong>de</strong> lʹŒuvre qui lui ont écrit. Départ <strong>de</strong> M.<br />

Desouche.<br />

Vaugirard, 28 mars 1860<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Deux <strong>de</strong> vos enfants, Caille et Jules Morel, ont eu la pensée <strong>de</strong> mʹécrire une petite<br />

lettre pour me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong> renvoyer près dʹeux le f. Marcaire. Vous savez, comme moi,<br />

que la chose ne serait guère praticable présentement; je réponds quelques mots à ces chers<br />

enfants pour leur témoigner ma satisfaction du bon mouvement dʹaffection et <strong>de</strong> recon‐<br />

naissance quʹils ont eu à cette occasion. Je vous prie <strong>de</strong> leur remettre ma lettre, si vous<br />

croyez quʹelle leur fasse quelque bien.<br />

Nous nʹavons ici rien <strong>de</strong> nouveau qui mérite attention; lʹentrée dʹun nouveau frère,<br />

très bon garçon, pieux et dévoué, mais dont nous ne jugeons pas encore pleinement les ap‐<br />

titu<strong>de</strong>s. M. Desouches, suivant le conseil <strong>de</strong> M. Aubert, se retirera <strong>de</strong> la Communauté<br />

après la retraite; jusque là, il va rési<strong>de</strong>r près <strong>de</strong> lʹabbé Gentil, ancien aumônier <strong>de</strong> notre<br />

maison quʹil connaît particulièrement et qui le prendra définitivement pour lʹai<strong>de</strong>r dans<br />

une petite cure où il a été nommé récemment près <strong>de</strong> Paris.<br />

Nous espérons que notre retraite aura lieu du 22 au 26 avril, sans en être bien sûrs,<br />

puisque nous nʹavons pas encore jusquʹici <strong>de</strong> promesse <strong>de</strong> celui qui <strong>de</strong>vra nous la donner.<br />

Adieu, mon bon ami, je souhaite que le saint temps <strong>de</strong> carême soit bien favorable à<br />

vous et à toute votre maison. Je vous embrasse tous bien affectueusement.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Vous nʹoublierez point, nʹest‐ce pas, les renseignements <strong>de</strong>mandés par ma précé‐<br />

<strong>de</strong>nte lettre, quand vous serez un peu libre.<br />

687 à M. lʹabbé Lemaire<br />

MLP. exhorte son correspondant, qui ai<strong>de</strong> M. Halluin à Arras, à bien examiner son projet dʹentrer dans la<br />

Congrégation.<br />

Vaugirard, 2 avril 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Jʹai reçu <strong>avec</strong> une véritable satisfaction la lettre que vous mʹavez fait lʹhonneur <strong>de</strong><br />

mʹécrire le 30 du mois <strong>de</strong>rnier, et dans laquelle vous témoignez quelque désir dʹunir vos<br />

795


efforts aux nôtres dans les œuvres que la divine Provi<strong>de</strong>nce a daigné nous confier. Le bien<br />

que MM. Lantiez, Myionnet et les autres mʹont dit <strong>de</strong> vos heureuses qualités et <strong>de</strong> vos sen‐<br />

timents dévoués mʹest une assurance que votre concours serait un avantage réel pour no‐<br />

tre famille. Vous me trouverez donc tout prêt à rentrer dans vos vues, Monsieur lʹabbé, si,<br />

après sérieux examen, vous vous croyez définitivement appelé à marcher dans la même<br />

voie que nous. La retraite prochaine nous fournira une bonne occasion dʹen conférer en‐<br />

semble. Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> vous dire que nous vous y verrons <strong>avec</strong> plaisir, ce sera un<br />

nouveau moyen <strong>de</strong> nous rapprocher dans la charité du divin Sauveur et jʹespère que ce se‐<br />

ra aussi le point <strong>de</strong> départ <strong>de</strong>s relations toutes intimes qui se <strong>de</strong>vront établir entre nous. Je<br />

pense que cette retraite pourra être placée entre le 22 et le 26 ou 27 <strong>de</strong> ce mois. Je nʹen ai<br />

pourtant pas encore la certitu<strong>de</strong>. Jʹécrirai à M. Halluin, dès que ce point sera définitive‐<br />

ment réglé.<br />

Jʹai lieu <strong>de</strong> croire que les petites difficultés que vous avez acci<strong>de</strong>ntellement ren‐<br />

contrées dans vos rapports <strong>avec</strong> nos ff. ont entièrement cessé. Sʹil survenait quelque em‐<br />

barras <strong>de</strong> ce genre, ayez la bonté dʹen causer en toute simplicité <strong>avec</strong> notre bon p. Halluin<br />

qui mʹen écrirait, et nous ferions en sorte, <strong>de</strong> concert, <strong>de</strong> régler les choses en conciliation et<br />

esprit <strong>de</strong> charité.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, ce me sera une joie <strong>de</strong> vous voir bientôt. Soyez assuré<br />

que vous serez accueilli parmi nous comme un ami et comme un frère. Recevez, je vous<br />

prie, les sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> dévouement <strong>avec</strong> lesquels je suis<br />

Votre humble serviteur en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

688 à M. Halluin<br />

Supporter les difficultés tout en sʹefforçant <strong>de</strong> les faires disparaître. Projet dʹacquisition <strong>de</strong> lʹancien Séminaire<br />

dʹArras. Continuer à travailler alors même quʹon ne voit pas le fruit <strong>de</strong> son labeur.<br />

Vaugirard, 10 avril 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu <strong>avec</strong> une vive satisfaction <strong>de</strong> vos nouvelles et les détails que vous me don‐<br />

nez sur votre situation. Le Conseil mʹavait déjà <strong>de</strong>mandé si nous nʹavions point quelques<br />

lettres dʹArras et si tout allait à votre gré dans votre chère maison.<br />

Tout est assez bien, en ensemble, puisque le bien se fait et que la charité a sa part<br />

dans cette œuvre intéressante. Vos difficultés, vos embarras même, dans les vues <strong>de</strong> la Sa‐<br />

gesse divine, seront une occasion <strong>de</strong> mérite par la patience et le courage quʹils vous don‐<br />

nent lieu <strong>de</strong> manifester. Nous <strong>de</strong>vons chercher toutefois à rendre la situation meilleure,<br />

autant quʹil dépendra <strong>de</strong> nous. Nous ferons à cet égard un nouvel et attentif examen, au<br />

moment <strong>de</strong> la retraite qui aura lieu définitivement du 22 au soir au 27 <strong>de</strong> ce mois. Elle sera<br />

donnée par le r.p. Vézières, jésuite. Je pense, <strong>avec</strong> vous, quʹil sera bien dʹy envoyer le f.<br />

Thuillier qui resterait pour un temps <strong>avec</strong> nous si, comme je le désire, je puis mʹarranger<br />

pour le remplacer convenablement chez vous.<br />

Je verrai sans regret le f. Augustin [Bassery] prendre asile chez vous, eu égard à sa<br />

position et à son caractère qui le ren<strong>de</strong>nt, je crois, inoffensif pour ceux qui lʹentourent;<br />

nous évitons toutefois, ordinairement, <strong>de</strong> ramener chez nous ceux qui en sont sortis volon‐<br />

796


tairement; je crois aussi quʹil sera bon <strong>de</strong> beaucoup restreindre lʹaction quʹil aurait à pren‐<br />

dre près <strong>de</strong>s enfants.<br />

Je vous prie <strong>de</strong> diriger, comme vous le jugerez utile pour le bien, les mouvements<br />

<strong>de</strong> M. lʹabbé Lemaire, en ce qui concerne la retraite et son projet dʹunion à la Communauté.<br />

Jʹai aussi écrit à M. Maufait que je lʹinvitais à converser <strong>avec</strong> vous sur la vocation quʹil croit<br />

avoir pour notre œuvre et je lui ai conseillé <strong>de</strong> suivre <strong>de</strong> tout point vos avis, ajoutant que je<br />

mʹen rapporterais pleinement à ce que vous auriez décidé.<br />

Je nʹai pas <strong>de</strong> vue bien claire relativement aux bâtiments <strong>de</strong> lʹancien Séminaire,<br />

nʹayant point vu ce local. On me dit quʹil nʹa quʹune cour intérieure assez peu propre aux<br />

récréations. Quant au prix dʹacquisition, je ne sais pas non plus quelles seraient les res‐<br />

sources quʹon pourrait espérer. Il faudrait vendre la maison actuelle; y aurait‐il chance <strong>de</strong><br />

le faire sans trop <strong>de</strong> désavantage?<br />

Les fruits du carême ont été ici très heureux dans toutes nos œuvres; jʹespère que<br />

vous aurez eu <strong>de</strong> votre côté une égale satisfaction. On oublie les peines et les sacrifices<br />

quand on voit ainsi le résultat du travail. Mais il faut que nous ayons le courage <strong>de</strong> travail‐<br />

ler et <strong>de</strong> persévérer même quand nous ne voyons pas nos soins récompensés. Cʹest un<br />

temps <strong>de</strong> patience et <strong>de</strong> sacrifice qui souvent mérite davantage et touche mieux le cœur <strong>de</strong><br />

Dieu.<br />

Je vous embrasse, cher Monsieur lʹabbé, ainsi que nos ff. et je suis, <strong>avec</strong> un respec‐<br />

tueux attachement, tout vôtre en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Carment va sʹoccuper <strong>de</strong> votre jeune homme.<br />

Le f. Joseph [Loquet] est à Amiens, je lui dirai <strong>de</strong> vous écrire.<br />

689 à M. Guillot<br />

Longanimité et indulgence dans le support fraternel. Prendre <strong>de</strong> soli<strong>de</strong>s résolutions à cet égard. Ne pas tout voir,<br />

ne pas tout reprendre.<br />

Vaugirard, 15 avril 1860<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai appris <strong>avec</strong> satisfaction que, malgré les pénitences du carême et les travaux as‐<br />

sez ru<strong>de</strong>s que vous avez à supporter chaque jour, votre santé se soutient et suffit à vos<br />

charges. Jʹen bénis <strong>avec</strong> vous la divine Provi<strong>de</strong>nce qui sait les besoins <strong>de</strong> vos enfants et ne<br />

veut les laisser sans surveillance et sans soins. Je ne mʹétonne point que notre petit ami<br />

Frédéric Streicher vous donne parfois quelques contrariétés. Il est bon et a une sincère vo‐<br />

lonté <strong>de</strong> servir Dieu, mais il est bien jeune, sa raison, son caractère sont à former, sa foi à<br />

affermir, son cœur à cultiver. A son âge, lʹéducation nʹest pas finie, nous le savons par no‐<br />

tre propre expérience. Cʹest souvent assez tard quʹun homme <strong>de</strong>vient réellement raisonna‐<br />

ble. Jusque là, il faut que ceux qui lʹentourent aient beaucoup <strong>de</strong> patience, <strong>de</strong> longanimité,<br />

dʹindulgence. Je vous engage bien, cher ami, à vous armer sur ce point et à prendre <strong>de</strong><br />

fermes résolutions; <strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> Dieu, vous réussirez et vous aurez ainsi concouru à for‐<br />

mer un instrument pour les œuvres <strong>de</strong> Dieu. Soyez sûr que vous ne sauriez rien faire qui<br />

lui soit plus agréable, car si déjà cʹest une belle et noble tâche dʹélever <strong>de</strong>s enfants pour les<br />

conditions communes, cʹen est une bien plus intéressante encore <strong>de</strong> diriger et <strong>de</strong> façonner<br />

797


ceux qui doivent sʹattacher au service du Seigneur. Patience donc, cher ami, con<strong>de</strong>scen‐<br />

dance et douceur; il ne faut pas tout voir, tout reprendre; les jeunes gens alors sʹirritent, se<br />

butent et se découragent. Jʹai la confiance, mon bien cher enfant, que si vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z<br />

lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> Dieu et <strong>de</strong> la S te Vierge, vous gagnerez le cœur <strong>de</strong> notre petit Frédéric, vous lʹatti‐<br />

rerez à vous et vous parviendrez à tirer bon parti <strong>de</strong> ses services, tout en lui faisant à lui‐<br />

même beaucoup <strong>de</strong> bien.<br />

Nous nʹallons pas mal ici, tout le mon<strong>de</strong> se rappelle à votre bon souvenir et vous<br />

embrasse cordialement, ainsi que je le fais moi‐même.<br />

Votre affectionné ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

La retraite aura lieu du 22 au soir au 27 au matin. M. Caille pense quʹil sera difficile<br />

que vous puissiez cette fois y assister.<br />

690 à M. Caille<br />

Date <strong>de</strong> la prochaine retraite <strong>de</strong> Communauté.<br />

Vaugirard, 19 avril 1860<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

La retraite commencera définitivement dimanche au soir 22 et finira le vendredi<br />

matin. Vous jugerez qui vous pouvez y envoyer et si vous‐même vous aurez quelque<br />

moyen dʹy prendre part, dans le cas où quelque occasion pour vos affaires coïnci<strong>de</strong>rait<br />

<strong>avec</strong> le temps <strong>de</strong> la retraite.<br />

Je la recomman<strong>de</strong> à vos prières et à celles <strong>de</strong> vos frères.<br />

Mille affections en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

691 à M. Halluin<br />

Retraite <strong>de</strong> Communauté. Mouvement <strong>de</strong> personnel.<br />

Vaugirard, 19 avril 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Notre retraite sʹouvrira définitivement dimanche au soir, 22 <strong>de</strong> ce mois. Elle se<br />

continuera jusquʹau vendredi matin. Vous jugerez, cher Monsieur lʹabbé, quels sont ceux<br />

<strong>de</strong> vos frères qui peuvent nous venir et en suivre <strong>avec</strong> nous les exercices. Je présume que,<br />

pour vous, il vous serait difficile <strong>de</strong> vous absenter; si pourtant vous le trouviez possible, ce<br />

vous serait un repos <strong>de</strong> quelques jours. Je ne sais, non plus, ce que vous jugerez <strong>de</strong> mieux<br />

relativement à votre jeune abbé. Je mʹen rapporte entièrement à vous pour régler les cho‐<br />

ses pour le plus grand bien.<br />

Quant au f. Thuillier, je pense que vous nous lʹenverrez. Nous déci<strong>de</strong>rons, lorsquʹil<br />

sera ici, sʹil doit nous rester, afin <strong>de</strong> se remettre en bon état spirituel, à lʹai<strong>de</strong> dʹun change‐<br />

ment qui peut le tirer <strong>de</strong> sa langueur. Sʹil doit <strong>de</strong>meurer ici, nous tâcherons <strong>de</strong> le remplacer<br />

par le f. François [Le Carpentier] qui est un homme <strong>de</strong> poids, dont lʹinfluence serait heu‐<br />

798


euse à Arras; mais il a la vue basse, ce qui lui nuit extrêmement pour les surveillances.<br />

Prions le Seigneur, cher Monsieur lʹabbé, quʹIl daigne nous éclairer.<br />

Croyez bien à tous mes sentiments respectueux et dévoués en N.S. Mille affections à<br />

nos ff.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

692 à M. Halluin<br />

Satisfaction <strong>de</strong> MLP. après la retraite. Le frère Thuillier <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à sʹengager définitivement dans lʹInstitut.<br />

Vaugirard, 29 avril 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Notre retraite sʹest terminée vendredi matin, comme nous lʹavions projeté. Elle a été<br />

suivie dʹune petite promena<strong>de</strong>, bien que le temps fût assez frais et médiocrement enga‐<br />

geant. La divine Provi<strong>de</strong>nce, toujours si miséricordieuse pour nous, nous avait ménagé un<br />

Père <strong>de</strong> retraite tout à fait distingué. La solidité <strong>de</strong> ses enseignements, la clarté, le charme<br />

entraînant <strong>de</strong> sa parole, le parfait à‐propos <strong>de</strong> tous ses conseils, tout sʹest réuni pour nous<br />

rendre les exercices aussi utiles quʹattachants. Lʹesprit <strong>de</strong> tous les frères semble être tout<br />

ravivé par ce précieux secours. Jʹespère que le Seigneur, qui nous lʹa donné, en fera durer<br />

lʹimpression et les fruits dans nos âmes.<br />

Notre jeune f. Thuillier, dont le cœur reste toujours excellent et dont les imperfec‐<br />

tions sont moins dangereuses quʹen beaucoup dʹautres, parce quʹil a tout à la fois une sage<br />

défiance <strong>de</strong> lui‐même et une gran<strong>de</strong> ouverture <strong>avec</strong> ses supérieurs, sʹest particulièrement<br />

montré touché <strong>de</strong>s instructions <strong>de</strong> la retraite. Il a <strong>de</strong>mandé <strong>avec</strong> instance que, pour mettre<br />

fin à toute hésitation concernant son avenir, on le liât définitivement à la Communauté.<br />

Nous avons pensé, après examen, quʹon pouvait compter sur sa fidélité, sa conduite <strong>de</strong>‐<br />

puis six ans ne nous ayant jamais fourni matière à aucun reproche ayant ombre <strong>de</strong> gravité.<br />

Jʹespère que cette courageuse résolution va le poser sans retour dans la voie du dévoue‐<br />

ment et <strong>de</strong> la charité. Il doit, comme nous en étions convenu, <strong>de</strong>meurer ici, quant à pré‐<br />

sent, pour refaire ses forces spirituelles et sʹinstruire un peu plus, sʹil y a lieu. Nous le rem‐<br />

placerons près <strong>de</strong> vous, ainsi que nous lʹavions présumé, par le f. François [Le Carpentier]<br />

dont le bon esprit et les heureuses qualités porteront, je lʹespère, un poids utile dans votre<br />

petite communauté. Il se rendra à Arras jeudi prochain. Nous nʹavons pu lʹenvoyer plus<br />

tôt, celui <strong>de</strong>s ff. qui doit le remplacer près <strong>de</strong>s persévérants étant retenu jusque là à Naza‐<br />

reth. Si M. Myionnet est libre jeudi, il pourra accompagner le f. François, rpourra le mieux<br />

vous servir. Cʹest un homme dʹune vertu réelle, cherchant purement la gloire <strong>de</strong> Dieu et<br />

sachant sʹoublier lui‐même. Jʹespère que vous vous entendrez bien <strong>avec</strong> lui.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, je vous écris un peu en hâte, la retraite nous a mis en<br />

retard pour bien <strong>de</strong>s choses et nous sommes toujours fort chargés. Arras et Vaugirard et<br />

nos autres œuvres aussi sont, sous ce rapport, en même voie. Daigne le Seigneur y être<br />

toujours présent près <strong>de</strong> nous.<br />

Tous vous assurent <strong>avec</strong> moi <strong>de</strong> leurs sentiments <strong>de</strong> respect et dʹaffection en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

799


693 à M. Halluin<br />

Impressions dʹordination au sous‐diaconat. Nécessité pour lʹŒuvre dʹArras dʹune direction composée dʹélé‐<br />

ments homogènes. Nouvelles <strong>de</strong>s frères Sadron, Myionnet, Roussel. Un apprenti cherche du travail à Arras.<br />

Vaugirard, 3 juin 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie bien cordialement <strong>de</strong>s bonnes et pieuses paroles que vous mʹavez<br />

écrites à lʹoccasion <strong>de</strong> lʹordination dans laquelle jʹai eu le bonheur <strong>de</strong> prendre ma part311 .<br />

Cʹest une gran<strong>de</strong> et sainte solennité dont jʹai conservé une impression profon<strong>de</strong>. Jʹespère<br />

que je gar<strong>de</strong>rai comme un trésor précieux les grâces si imméritées que le Seigneur a daigné<br />

répandre sur moi; je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> remercier <strong>avec</strong> moi la divine<br />

Bonté et <strong>de</strong> solliciter son secours pour les pas décisifs quʹil me reste à faire.<br />

Je suis heureux dʹapprendre que tout va selon vos vœux dans votre chère maison. Je<br />

nʹai pas reçu <strong>de</strong> lettres <strong>de</strong> nos ff. dʹArras <strong>de</strong>puis bien longtemps; je serais satisfait quʹils<br />

mʹécrivissent, les rapports dʹaffection et <strong>de</strong> bonne entente ne peuvent sʹentretenir sans<br />

quelques communications un peu régulières.<br />

Jʹapprouve entièrement, <strong>avec</strong> tout le Conseil <strong>de</strong> la Communauté, la résolution que<br />

vous avez prise <strong>de</strong> ne pas maintenir M. Lemaire dans sa position au <strong>de</strong>là du temps <strong>de</strong> la<br />

première communion. Le refus quʹil fait <strong>de</strong> sʹattacher à notre famille montre assez que<br />

Dieu ne lʹappelle point aux œuvres humbles et dévouées auxquelles nous sommes consa‐<br />

crés. Rien ne nuirait plus à lʹensemble <strong>de</strong> votre action et à lʹunion <strong>de</strong> vos frères quʹune di‐<br />

rection partagée, composée dʹéléments sans homogénéité. Je vous invite donc bien à per‐<br />

sister fermement dans cette pensée et à ne pas faiblir dans lʹexécution.<br />

Nous craignons que les démarches nécessaires nʹaient pas été faites à temps pour<br />

que M. Sadron passe à Arras la révision. On nous a promis, à la mairie <strong>de</strong> Vaugirard, <strong>de</strong><br />

sʹen occuper; nous pensons que ce sera trop tardivement. Assurez, je vous prie, ce cher en‐<br />

fant que nous prenons part tous ici à ses malaises <strong>de</strong> santé. Nous espérons bien quʹils nʹau‐<br />

ront aucune suite. M. Myionnet, ici, est un peu souffrant <strong>de</strong>puis quelques jours. Nous ne<br />

savons encore si le mal <strong>de</strong> gorge qui lʹincommo<strong>de</strong> nʹaura pas les suites assez sérieuses que<br />

ces indispositions ont déjà eues souvent pour lui.<br />

Je vais voir si M. lʹabbé Roussel, qui a lʹhabitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s retraites <strong>de</strong> première commu‐<br />

nion, peut aller à Arras pour lʹédification <strong>de</strong> vos enfants. Je vous donnerai réponse à ce su‐<br />

jet tout prochainement.<br />

Les chan<strong>de</strong>liers ne seront envoyés à Arras quʹà lʹépoque indiquée par vous. Nous<br />

souhaitons bien que Duranel trouve du travail près <strong>de</strong> vous. Nous pensons quʹil a encore<br />

besoin <strong>de</strong> votre surveillance paternelle et quʹun atelier à Arras vaudra mieux pour lui que<br />

ceux <strong>de</strong> Paris. Il est doux et assez bon garçon, mais il a peu dʹélévation dans ses vues et pas<br />

assez <strong>de</strong> piété pour y trouver son appui.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, il y a bien longtemps que nous ne vous avons vu;<br />

mais, je lʹespère, la charité du Seigneur vit en nous et nous unit dans un même esprit et<br />

dans une même et unique aspiration: la gloire <strong>de</strong> Dieu et la sanctification <strong>de</strong>s âmes.<br />

Assurez, je vous prie, tous nos frères <strong>de</strong> nos sentiments <strong>de</strong> vive affection et croyez<br />

vous‐même au respectueux dévouement <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

311 Le 2 juin, à St-Sulpice, au cours d’une ordination générale <strong>de</strong>s Quatre-Temps, le Cardinal Morlot l’avait ordonné sous-diacre.<br />

800


P. S. M. Maufait a écrit <strong>de</strong> nouveau, il y a quelques jours, à M. Myionnet. Nous re‐<br />

mettons toujours à vos soins lʹexamen <strong>de</strong>s dispositions <strong>de</strong> ce jeune homme et nous ne le<br />

recevrons que sur votre proposition.<br />

694 à M. Halluin<br />

Conseil <strong>de</strong> révision pour le frère Sadron. La vie fraternelle à Arras.<br />

Vaugirard, 9 juin 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

On sʹest assuré chez nous que les pièces concernant la révision <strong>de</strong> M. Sadron ont été<br />

envoyées, il y a quelques jours, à Arras. Je pense quʹelles pourront le mettre à même dʹaller<br />

à la révision dans votre voisinage. Sʹil en était autrement, il faudrait quʹil vînt ici pour le 11<br />

<strong>de</strong> ce mois, cʹest‐à‐dire lundi prochain, afin <strong>de</strong> se présenter à la révision, comme il y a été<br />

convoqué, le len<strong>de</strong>main 12.<br />

Jʹai reçu <strong>avec</strong> joie les lettres <strong>de</strong>s ff. François [Le Carpentier] et Alphonse [Vasseur]<br />

qui mʹassurent <strong>de</strong> leurs bonnes dispositions et du parfait accord dans lequel ils vivent.<br />

Jʹespère que leur action, ainsi bien concertée <strong>avec</strong> vous, ai<strong>de</strong>ra efficacement au bien que<br />

vous souhaitez <strong>de</strong> faire. Je répondrai à lʹun et à lʹautre tout prochainement. Dans le désir<br />

<strong>de</strong> ne point retar<strong>de</strong>r cette lettre, je mʹabstiens <strong>de</strong> leur écrire aujourdʹhui.<br />

Nous vous enverrons, au commencement <strong>de</strong> la semaine, le chant <strong>de</strong>mandé par le f.<br />

François et un peu dʹeau <strong>de</strong> la Salette.<br />

Je termine ici en hâte, vous assurant, cher Monsieur lʹabbé, ainsi que nos frères, <strong>de</strong>s<br />

sentiments bien dévoués <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

695 à M. Caille<br />

Quelques nouvelles <strong>de</strong> la Communauté. Petites épreuves quotidiennes; mérite <strong>de</strong> les supporter.<br />

Vaugirard, 11 juin 1860<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Myionnet, qui est souffrant <strong>de</strong>puis quelque temps, nʹa pu répondre à votre <strong>de</strong>r‐<br />

nière lettre; il va mieux maintenant, je pense que dans <strong>de</strong>ux ou trois jours il reprendra ses<br />

occupations accoutumées. Je nʹai pu moi‐même vous écrire les semaines <strong>de</strong>rnières, la re‐<br />

traite <strong>de</strong> lʹordination mʹayant un peu mis en arrière dans mes travaux; je vous remercie<br />

beaucoup, ainsi que nos frères, <strong>de</strong> vos prières pour moi, jʹai la confiance que le Seigneur les<br />

entendra, car il exauce les vœux quʹinspirent la charité et le zèle pour sa gloire.<br />

Nous nʹavons ici rien <strong>de</strong> notable pour ce qui concerne le personnel ou les œuvres <strong>de</strong><br />

la Communauté. M. lʹabbé Roussel est assez gravement souffrant et gar<strong>de</strong> le lit <strong>de</strong>puis<br />

plusieurs jours, mais cette indisposition, qui vient dʹun mouvement sanguin au visage et à<br />

la tête, ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong> jusquʹici que <strong>de</strong> la patience et <strong>de</strong>s soins, sans offrir aucun caractère <strong>de</strong><br />

danger.<br />

Nous nʹavons pas eu, ces temps <strong>de</strong>rniers, <strong>de</strong> nouvelles admissions dans la famille,<br />

sinon un brave garçon [Antonin Evrard], ancien militaire, envoyé par M. Flour <strong>de</strong> Boulo‐<br />

801


gne, et dont nous sommes contents jusquʹici dans les emplois <strong>de</strong> la maison auxquels il est<br />

occupé. Le <strong>de</strong>rnier frère allemand [Boll] qui nous était venu nʹa pas persévéré, lʹennui lʹa<br />

saisi, il est retourné dans son pays; lʹautre persiste [Antoine Emes] et sera, je crois, un sujet<br />

<strong>de</strong> quelque valeur; il entend bien le français maintenant et le parle intelligiblement.<br />

La première communion <strong>de</strong> nos enfants sʹest faite, comme <strong>de</strong> coutume, jeudi <strong>de</strong>r‐<br />

nier, dʹune façon édifiante; vous en remercierez Dieu <strong>avec</strong> nous, car cʹest là le couronne‐<br />

ment <strong>de</strong> notre œuvre à Vaugirard, puisque après ce moment nos enfants, plus tôt ou plus<br />

tard, nous quittent pour lʹapprentissage.<br />

Je reçois aujourdʹhui même <strong>de</strong> bonnes nouvelles dʹArras, M. Halluin est content <strong>de</strong><br />

ses frères et <strong>de</strong> ses enfants. Jʹespère, cher bon ami, quʹil en est <strong>de</strong> même pour vous, à cela<br />

près <strong>de</strong> ces misères quotidiennes sur lesquelles il faut toujours compter puisque la matière<br />

sur laquelle nous travaillons est mobile et peu consistante. Mais là aussi est notre mérite,<br />

puisque là est lʹexercice <strong>de</strong> la patience, du support et <strong>de</strong> la charité; allons donc toujours ré‐<br />

signés dans nos petites épreuves et toujours confiants dans le Seigneur dont la bonté misé‐<br />

ricordieuse ne nous délaisse point.<br />

Adieu, mon bien bon ami, croyez à tous nos sentiments dévoués comme à la tendre<br />

affection <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

696 à M. Vasseur<br />

Nécessité dʹentretenir une correspondance <strong>avec</strong> le Supérieur. Nouvelles <strong>de</strong>s Œuvres. Encouragements à se<br />

confier en la grâce <strong>de</strong> Dieu.<br />

Vaugirard, 13 juin 1860<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Jʹai reçu <strong>avec</strong> joie votre petite lettre dont le bon esprit et les sentiments dévoués sont<br />

tels que je les attendais <strong>de</strong> vous; je nʹétais pas inquiet sur vos dispositions, cher ami, je sais<br />

bien que si parfois quelques petits nuages troublent votre paix, ils sont toujours passagers<br />

et font bientôt place à la raison et surtout à la bonne volonté qui est le fond <strong>de</strong> votre inté‐<br />

rieur; mais ce nʹest pas seulement pour <strong>de</strong>s causes graves que jʹaime à recevoir les lettres<br />

<strong>de</strong> mes enfants, il me semble que, sans ces communications intimes, les liens <strong>de</strong> lʹaffection<br />

se relâchent, la confiance diminue et lʹouverture <strong>de</strong> cœur <strong>de</strong>vient moins facile; il est donc<br />

bien à désirer, cher ami, que vous et nos frères dʹArras ne perdiez pas lʹhabitu<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

mʹécrire <strong>de</strong> temps en temps. Je ne me lasse point <strong>de</strong> recevoir <strong>de</strong>s détails sur vous, sur vos<br />

exercices et votre vie <strong>de</strong> communauté, sur votre œuvre et sur vos enfants; tout cela mʹinté‐<br />

resse vivement et je suis plus à même <strong>de</strong> mʹen occuper utilement quand jʹen puis suivre,<br />

par vos lettres, lʹaction ordinaire et les mouvements.<br />

Ici, nous venons dʹachever la gran<strong>de</strong> tâche <strong>de</strong> la première communion, la confirma‐<br />

tion va venir, puis lʹadoration <strong>de</strong>s Quarante Heures en juillet. Tous nos frères vont bien,<br />

les persévérants se soutiennent aussi, après le départ du f. François [Le Carpentier], ils se<br />

sont trouvés un peu abandonnés, parce que le f. Marcaire, chargé à sa place <strong>de</strong> les surveil‐<br />

ler, nʹa pu que lentement prendre influence sur eux; ils commencent à se remonter; tout, je<br />

lʹespère, ira bien.<br />

802


M. Myionnet vient dʹêtre mala<strong>de</strong> <strong>de</strong>puis une dizaine <strong>de</strong> jours <strong>de</strong> son mal <strong>de</strong> gorge<br />

ordinaire; il est en convalescence. M. Roussel est aussi, <strong>de</strong>puis le même temps, atteint dʹun<br />

érésipèle qui lui a donné une fièvre violente, on le veille encore les nuits, mais cela dimi‐<br />

nue sensiblement; dans quelque temps, il sera sur pied.<br />

Je pense, cher ami, que vous aurez bien prié pour moi à lʹoccasion <strong>de</strong> lʹordination; je<br />

vous envoie une petite image en souvenir <strong>de</strong> cet événement grave pour nous tous. Vous<br />

remarquerez que jʹai choisi cette image <strong>avec</strong> intention, pour vous exciter à la confiance<br />

dans les heures dʹépreuves et <strong>de</strong> tentation. Vous le voyez, dans la gravure, la petite âme<br />

représentée par la colombe est sur une barque presque submergée, mais elle se tourne vers<br />

le divin pilote qui lʹencourage et lui promet son appui. Faites <strong>de</strong> même, bien cher enfant,<br />

criez vers le Dieu <strong>de</strong> toute pureté dans les moments difficiles, il vous assistera; invoquez la<br />

T. S te Vierge, elle sera près <strong>de</strong> vous; puis fuyez les occasions, ayez beaucoup dʹouverture<br />

<strong>avec</strong> votre p. Halluin et votre confesseur; enfin, mortifiez vos sens et la chair par le travail<br />

et un peu <strong>de</strong> pénitence. Avec ce régime, tout chrétien et tout religieux, Dieu, Marie et les<br />

Anges veilleront sur vous et vous préserveront <strong>de</strong> toute atteinte sérieuse. Je prierai <strong>de</strong> mon<br />

côté bien ar<strong>de</strong>mment <strong>avec</strong> vous, cher enfant, mais <strong>avec</strong> confiance, car Dieu est bon, vous<br />

lʹaimez, vous ne voudrez pas le trahir ni compromettre votre salut; bon courage, élevons<br />

nos cœurs en haut.<br />

Adieu, bien cher ami, je nʹai pas le temps aujourdʹhui dʹécrire à nos frères; je vous<br />

charge <strong>de</strong> leur dire toutes mes tendres affections pour eux, je leur écrirai aussi prochaine‐<br />

ment.<br />

Jʹembrasse vous et eux dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

697 à M. Caille<br />

Départ du frère Ernest Vasseur. M. Caille pourrait lui trouver du travail à Amiens.<br />

Vaugirard, [21 juin 1860]<br />

Mon bon ami et fils en N.S.,<br />

Notre jeune f. Ernest [Vasseur], nʹa pas eu la force, à notre grand regret, <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r<br />

jusquʹau bout ses engagements. Il désire se placer à Amiens; voyez, mon bon ami, si vous<br />

pouvez lʹai<strong>de</strong>r à se caser, afin quʹil gagne honnêtement sa vie et reste au moins bon chré‐<br />

tien, sʹil nʹest plus au nombre <strong>de</strong>s serviteurs privilégiés du Seigneur.<br />

Votre affectionné ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

698 à M. Halluin<br />

Prédicateur pour la retraite <strong>de</strong> première communion. Quelques nouvelles <strong>de</strong>s frères.<br />

Vaugirard, 23 juin 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

M. Roussel se rétablit lentement; il se peut quʹil soit encore trop faible pour donner<br />

la retraite <strong>de</strong> première communion à vos enfants, mais nous pourrons, je le pense, le rem‐<br />

803


placer par M. lʹabbé Planchat ou par un autre <strong>de</strong> nos ff. ecclésiastiques. Je ne sais si vous<br />

aviez fait quelques ouvertures à M. Garbominy; alors, il serait bien que vous lui écriviez<br />

pour les lui rappeler, si quelque parole avait été dite <strong>de</strong> ce côté. Je doute un peu quʹil pût<br />

vous convenir; il est extrêmement sourd, ne peut plus confesser. Cʹest un saint prêtre qui a<br />

<strong>de</strong> la piété et beaucoup <strong>de</strong> charité, mais ses forces épuisées le trahissent <strong>de</strong> plus en plus et<br />

paralysent beaucoup son zèle.<br />

Nous allons assez bien ici. M. Myionnet est rétabli. Le jeune f. Ernest [Vasseur] nous<br />

a quittés. Vous nʹen serez point surpris. Nous nous en affligeons pour lui seulement.<br />

Je vous serai reconnaissant <strong>de</strong> me redire précisément le moment <strong>de</strong> votre première<br />

communion. Je ne me le rappelle pas bien exactement.<br />

Lamoury et Brice vont bien et vous offrent leurs sentiments <strong>de</strong> respectueux atta‐<br />

chement. Nos frères sʹunissent à eux ainsi que moi, cher Monsieur lʹabbé, qui <strong>de</strong>meure en<br />

J. et M.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

699 à M. Decaux<br />

La faible santé <strong>de</strong> MLP. lʹempêche <strong>de</strong> se rendre à Nazareth pour fêter la St Paul.<br />

Vaugirard, 29 juin 1860<br />

Mon bien bon ami et frère en N.S.,<br />

La fête <strong>de</strong> St Paul mʹest douce et aimable comme une fête <strong>de</strong> famille; jʹéprouve dʹau‐<br />

tant plus le besoin <strong>de</strong> vous le dire que je ne vous ai pas vu <strong>de</strong>puis bien longtemps et que<br />

toute occasion <strong>de</strong> me rapprocher <strong>de</strong> vous mʹest doublement heureuse. Jʹaurais été <strong>de</strong><br />

grand cœur à Nazareth dimanche pour mʹunir aux sentiments et à la joie <strong>de</strong> nos frères et<br />

<strong>de</strong> nos enfants, mais je suis un peu souffrant et retenu au repos absolu pour quelques<br />

jours. Heureusement le cœur nʹest pas compris dans la consigne, il agira pour tout le reste<br />

et surtout il sʹélèvera vers Dieu bien ar<strong>de</strong>mment, afin <strong>de</strong> lui recomman<strong>de</strong>r lʹami cher et<br />

dévoué dont lʹaffection a été pour moi lʹun <strong>de</strong> ses dons les meilleurs et les plus appréciés.<br />

Croyez, bien cher ami, à tous mes sentiments <strong>de</strong> profond et inaltérable attachement<br />

en N.S.<br />

Votre ami et frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

700 à M. Caille<br />

Les fruits <strong>de</strong> la patience. Notre Œuvre nʹest encore quʹébauchée.<br />

6 juillet 1860<br />

Mon bon ami et fils en N.S.,<br />

Je réponds ci‐joint quelques mots au f. Henry [Guillot] pour lʹencourager et le<br />

consoler <strong>de</strong>s contrariétés que lui cause notre jeune Frédéric [Streicher]; je crois quʹil les<br />

prend trop à cœur et quʹ<strong>avec</strong> un peu plus <strong>de</strong> patience il tirerait meilleur parti <strong>de</strong> cet enfant.<br />

Les jeunes gens <strong>de</strong> cet âge, à moins quʹils ne soient prévenus <strong>de</strong> grâces insignes, ont <strong>de</strong>s<br />

défauts <strong>de</strong> caractère et <strong>de</strong>s insuffisances <strong>de</strong> raison qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt beaucoup dʹindulgence.<br />

M. Planchat, qui est à Arras pour donner à notre maison la retraite <strong>de</strong> première commu‐<br />

804


nion, vous fera ces jours‐ci, au commencement <strong>de</strong> la semaine, une petite visite; je pense<br />

quʹil pourra donner <strong>de</strong> bons conseils au jeune Frédéric et aux autres. Tâchez que ce jeune<br />

homme et les frères cherchent dans la piété le secours dans leurs difficultés, là est le meil‐<br />

leur remè<strong>de</strong>, et sans celui‐là les autres seront vains.<br />

Le f. Joseph [Loquet] mʹavait écrit pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r que M. Halluin vînt chez vous<br />

pour la fête <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul. Si vous désirez quʹil en soit ainsi et que M. Halluin<br />

puisse le faire, vous pouvez aisément régler <strong>avec</strong> lui ce petit arrangement; je trouverai bien<br />

ce que vous ferez <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> lui.<br />

Nous allons assez bien ici. Avez‐vous vu à Amiens notre jeune frère Ernest [Vas‐<br />

seur], qui nous a quittés tristement et qui, désirant se placer à Amiens, mʹavait <strong>de</strong>mandé<br />

pour vous quelques mots que je lui avais donnés?<br />

Adieu, mon bien bon ami, prions beaucoup; notre œuvre, comme vous le dites, nʹest<br />

encore quʹébauchée; il faut, pour la finir, <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s grâces, <strong>de</strong>mandons‐les par Marie au<br />

divin Seigneur qui tient tout entre ses mains.<br />

Je vous embrasse bien affectueusement vous et vos frères et suis, en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je suis <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux jours à Chaville pour me remettre dʹune indisposition;<br />

vous pouvez néanmoins mʹécrire à Vaugirard, on vient tous les jours ici.<br />

701 à M. Guillot<br />

Exhortation à la patience <strong>avec</strong> un jeune persévérant. Recourir à la prière.<br />

Vaugirard, 6 juillet 1860<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je prends bien part à votre peine et aux difficultés que vous cause la conduite <strong>de</strong> no‐<br />

tre jeune Frédéric [Streicher]; je sais par expérience combien la raison est faible à cet âge et<br />

combien on a besoin <strong>de</strong> longanimité et dʹindulgence <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> tous ceux <strong>avec</strong> lesquels<br />

on vit; tâchez, bien cher ami, <strong>de</strong> trouver dans cette épreuve un moyen <strong>de</strong> sanctification<br />

pour vous; souffrez pour lʹamour du Seigneur, offrez votre peine <strong>avec</strong> résignation pour le<br />

bien <strong>de</strong> ce pauvre enfant lui‐même, et soyez sûr que si vous priez, si vous faites acte cou‐<br />

rageux <strong>de</strong> patience et <strong>de</strong> charité, vous amasserez un trésor <strong>de</strong> mérites pour vous comme<br />

pour lui. Faites en sorte aussi, par M. Caille, ou indirectement par M. Aubert, que Frédéric<br />

se tourne sincèrement vers Dieu pour trouver plus <strong>de</strong> force en Lui. Je pense quʹil pourra<br />

être utile quʹil revienne ici à la retraite <strong>de</strong>s persévérants, cʹest maintenant assez prochain,<br />

faites en sorte quʹil sʹy dispose le mieux possible; plus vous serez patient <strong>avec</strong> lui, mieux<br />

vous réussirez. M. Planchat, qui est à Arras, va vous faire une petite visite au commence‐<br />

ment <strong>de</strong> la semaine; il pourra, je lʹespère, vous encourager et vous consoler tous.<br />

Je vous embrasse bien affectueusement en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

805


702 à M. Caille<br />

Nouvelles <strong>de</strong>s frères.<br />

Vaugirard, 21 juillet 1860<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹapprouve entièrement ce que vous avez fait relativement au jeune f. Ernest [Vas‐<br />

seur]; jʹespère que cette épreuve lʹaura éclairé définitivement et quʹil sʹétablira, comme<br />

vous le dites, en toute sincérité dans lʹhumilité, lʹobéissance et lʹesprit <strong>de</strong> foi et <strong>de</strong> piété.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong>s détails sur la solennité dʹArras, tout le mon<strong>de</strong> sʹaccor<strong>de</strong> à dire<br />

que rien ne saurait être plus édifiant et plus beau.<br />

Jʹécris ci‐joint un mot à notre jeune Frédéric Streicher pour lʹavertir que nous lʹat‐<br />

tendons lundi.<br />

Notre f. Maignen, très fatigué, mʹa <strong>de</strong>mandé à prendre quelques jours <strong>de</strong> repos à<br />

Amiens; je pense quʹil partira lundi, je vous serai obligé <strong>de</strong> lui donner le moins <strong>de</strong> mou‐<br />

vement quʹil se pourra; cʹest surtout <strong>de</strong> calme et <strong>de</strong> tranquillité quʹil a besoin.<br />

Adieu, mon bon ami, nous avons jusquʹà <strong>de</strong>main lʹadoration, nous y prierons pour<br />

vous et pour nos ff. dʹAmiens; je les embrasse, ainsi que vous, bien affectueusement en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

703 à M. Halluin<br />

Un postulant dʹAmiens vient dʹarriver à Vaugirard . Soutenir le frère Alphonse Vasseur.<br />

Vaugirard, 24 juillet 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Notre jeune Lamoury nous est arrivé à bon port et bien disposé, je le pense, à <strong>de</strong>‐<br />

meurer dans sa vocation. Il me confirme ce que mʹavait déjà dit M. Planchat que le f. <strong>Jean</strong><br />

[Maury] reste bien languissant et se remet bien lentement. Jʹai pensé quʹil serait bien peut‐<br />

être <strong>de</strong> lʹenvoyer ici passer quinze jours ou trois semaines, pendant lesquelles nous le fe‐<br />

rions <strong>de</strong> notre mieux remplacer. Ce serait une dépense <strong>de</strong> voyages, sans doute, mais si elle<br />

semblait dʹune véritable utilité pour le f. <strong>Jean</strong>, je nʹhésiterais pas à lʹaccepter. Nous esti‐<br />

mons et nous aimons ce bon frère, à cause <strong>de</strong> sa droiture et <strong>de</strong> son sincère dévouement. Je<br />

vous serai reconnaissant <strong>de</strong> me donner réponse à cet égard et <strong>de</strong> me dire en même temps<br />

quelques mots au sujet du f. Alphonse [Vasseur]. Je gar<strong>de</strong> quelque inquiétu<strong>de</strong> <strong>de</strong> ce côté. Il<br />

a le cœur excellent, mais la tête peu ferme et a grand besoin <strong>de</strong> direction. Vous saurez<br />

lʹappuyer et le fortifier dans ses difficultés.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, mille affections et respects pour vous <strong>de</strong> toute notre<br />

maison.<br />

A vous en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

704 A M. Halluin<br />

Sollicitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> MLP. pour le frère Vasseur. Répugnance <strong>de</strong> MLP. à admettre dans lʹInstitut <strong>de</strong>s ʺséculiers, parta‐<br />

gés entre le mon<strong>de</strong> et la Communautéʺ.<br />

806


Vaugirard, 29 juillet 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Jʹenvoie ci‐joint un mot <strong>de</strong> lettre au f. Alphonse. Je pense quʹil nʹy verra quʹun nou‐<br />

veau témoignage <strong>de</strong> ma sollicitu<strong>de</strong> et <strong>de</strong> mon affection pour lui. Je vous prie <strong>de</strong> veiller à ce<br />

quʹil mʹécrive <strong>de</strong> nouveau bientôt. Dans peu <strong>de</strong> temps, M. Myionnet ou M. Lantiez doivent<br />

aller à Amiens; ils pourront faire en même temps une apparition à Arras et verront si la si‐<br />

tuation <strong>de</strong>man<strong>de</strong> quelque mesure relativement au f. Alphonse. Jʹespère, comme vous, quʹil<br />

sera humble et courageux et quʹ<strong>avec</strong> <strong>de</strong> la pru<strong>de</strong>nce il surmontera cette épreuve. Je vous<br />

serai reconnaissant <strong>de</strong> mʹécrire bientôt pour me dire si les choses se présentent sous cet as‐<br />

pect, je le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rai <strong>avec</strong> vous au Seigneur.<br />

Je ne sais si M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] a répondu à M. Grébert, il semble croire que<br />

cette situation indécise, que veut prendre ce bon M., nʹaurait ni avantage ni avenir; une<br />

expérience cent fois tentée a démontré que les séculiers ne peuvent utilement pour eux ni<br />

pour les Communautés sʹétablir dans leur sein; que posés au <strong>de</strong>hors, ils ont souvent les<br />

moyens dʹy chercher lʹédification, en même temps quʹils y peuvent apporter quelque<br />

concours, tandis quʹau <strong>de</strong>dans ils <strong>de</strong>viennent bientôt une gêne et une cause <strong>de</strong> tiraillement;<br />

partagés entre le mon<strong>de</strong> et la communauté, ils ne donnent assez ni à lʹun ni à lʹautre et<br />

nʹarrivent définitivement quʹà une situation mal assise qui ne peut se soutenir. Il semble<br />

que M. Grébert doit avoir étudié déjà sa vocation, puisquʹil a cru entendre lʹappel intérieur<br />

<strong>de</strong> Dieu au moment où M. Georges a quitté Arras. Jʹoserais lui conseiller, <strong>de</strong> mon côté, <strong>de</strong><br />

ne pas prendre <strong>de</strong> <strong>de</strong>mi‐moyens; Dieu ne veut pas <strong>de</strong> <strong>de</strong>mi‐sacrifices. On pourrait admet‐<br />

tre peut‐être, si son désir dʹêtre à Lui était sincère, que quelques concessions fussent faites<br />

aux obligations quʹil croit avoir dans le mon<strong>de</strong>, mais nous répugnons bien vivement à <strong>de</strong>s<br />

partages et incertitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> position qui ne produisent jamais lʹordre pour les communau‐<br />

tés, la paix pour ceux qui ne se donnent quʹà <strong>de</strong>mi. Je suis convaincu quʹen y réfléchissant<br />

ce bon M. entrera dans ce sentiment.<br />

M. Planchat avait conseillé au f. Alphonse quelques bains un peu régulièrement<br />

pris, un par semaine durant quelque temps. Je crois que ce moyen extérieur serait aussi à<br />

pratiquer.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, mille respects et affections <strong>de</strong> toute notre petite famille<br />

à laquelle je mʹunis, cela va sans dire, bien pleinement.<br />

Votre tout affectionné en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

705 à M. Halluin<br />

Prochain voyage <strong>de</strong> M. Lantiez à Arras et à Amiens.<br />

Vaugirard, 17 août 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

M. Lantiez doit se rendre près <strong>de</strong> vous au commencement <strong>de</strong> la semaine prochaine;<br />

mais il doit aussi faire une visite <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux jours à nos amis dʹAmiens et, en définitive, être<br />

<strong>de</strong> retour à Vaugirard pour le samedi 25. Il désirerait savoir sʹil vous paraît mieux quʹil soit<br />

près <strong>de</strong> vous dans les premiers ou dans les <strong>de</strong>rniers jours <strong>de</strong> la semaine. Je pense que, si<br />

vous voulez bien me répondre immédiatement, votre réponse mʹarrivera encore avant son<br />

807


départ. Autrement, il se rendrait lundi à Amiens, et vous pourriez là lʹavertir directement<br />

du jour où vous désireriez quʹil pût vous arriver.<br />

Pour ne point retar<strong>de</strong>r ma lettre, je nʹajoute rien <strong>de</strong> plus. M. Lantiez pourra tout à<br />

loisir sʹentretenir <strong>avec</strong> vous <strong>de</strong> tout ce qui nous intéresse pour le bien <strong>de</strong> votre maison. Je<br />

regrette que M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] nʹait point encore répondu à M. Grébert. Je pense<br />

que ses observations feront comprendre à ce bon Monsieur combien le parti quʹil voudrait<br />

prendre, moitié au mon<strong>de</strong>, moitié à Dieu, serait peu soutenable et durerait peu. Quʹil croie<br />

donc à une expérience qui sʹest constamment retrouvée la même, et qui ne saurait aboutir<br />

à rien <strong>de</strong> bien. Je désire bien que, sans décourager cet excellent Monsieur, dont la pensée<br />

est certainement bonne, on puisse lʹéclairer sur ce point.<br />

M. Thuillier verra si on peut préparer quelques casquettes pour votre maison.<br />

Où en êtes‐vous pour le jeune Maillard? Est‐il encore à votre charge? Est‐il dû quel‐<br />

que chose pour sa pension?<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, mille souvenirs <strong>de</strong> respect et dʹaffection <strong>de</strong> tous nos<br />

frères, auxquels je mʹunis moi‐même bien cordialement.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je verrais <strong>avec</strong> plaisir que vous pussiez prendre un peu <strong>de</strong> repos, soit près <strong>de</strong> votre<br />

famille, soit parmi nous ou autrement. Je crois que plus vous ménagerez vos forces pour<br />

les bien employer, mieux iront les œuvres que Dieu vous a confiées.<br />

706 à M. Caille<br />

Annonce <strong>de</strong> la prochaine visite <strong>de</strong> M. Lantiez à Arras et à Amiens.<br />

Vaugirard, 17 août 1860<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Lantiez ira à Arras la semaine prochaine et sʹarrêtera aussi à Amiens pour vous<br />

faire une visite; je ne sais si ce sera en allant ou au retour, parce que le séjour à Arras est<br />

subordonné aux examens <strong>de</strong>s classes que M. Lantiez doit prési<strong>de</strong>r. Je souhaite bien que sa<br />

présence soit utile à vous tous et aux œuvres que vous faites; en nous concertant, nous<br />

sommes plus sûrs <strong>de</strong> marcher en bon chemin. Je trouve, <strong>de</strong> mon côté, une consolation à re‐<br />

cevoir les détails que nos frères me rapportent au retour <strong>de</strong> leurs voyages et je suis ainsi<br />

mieux <strong>de</strong>s yeux le mouvement <strong>de</strong> notre petite famille.<br />

On nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> en ce moment <strong>de</strong>s frères pour diverses œuvres, mais nous som‐<br />

mes déjà si chargés et si peu nombreux que je ne vois guère moyen <strong>de</strong> satisfaire à <strong>de</strong> nou‐<br />

veaux besoins.<br />

Adieu, cher ami, je regrette bien <strong>de</strong> vous avoir si peu vu à votre <strong>de</strong>rnier voyage;<br />

jʹespère que nous serons plus favorisés à quelque prochaine occasion.<br />

Adieu encore, mille affections <strong>de</strong> tous nos frères croyez aussi à mon tendre dé‐<br />

vouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

707 à M. Halluin<br />

Cruelle pénurie <strong>de</strong> personnel. Recommandations du père Lantiez à son retour dʹArras.<br />

808


Vaugirard, 1er septembre 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je regrette <strong>de</strong> vous avoir mis en incertitu<strong>de</strong> en tardant à vous écrire, après le retour<br />

<strong>de</strong> notre bon abbé Lantiez. Je goûte bien les dispositions que vous avez réglées <strong>de</strong> concert<br />

pour lʹorganisation <strong>de</strong> vos services. Je crois quʹil sera bien <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>ux divisions <strong>de</strong> plus<br />

en plus tranchées parmi vos enfants. M. François [Le Carpentier] étant <strong>avec</strong> M. Sadron et<br />

quelque autre ai<strong>de</strong> que nous tâcherons <strong>de</strong> vous donner, du côté <strong>de</strong>s écoliers, et vous, cher<br />

Monsieur lʹabbé, <strong>avec</strong> le f. Alphonse et M. Houriez, du côté <strong>de</strong>s apprentis.<br />

Nous avons bien cherché qui nous pourrions détacher ici <strong>de</strong> nos services, nous ne le<br />

voyons pas encore nettement. Le f. Thuillier serait celui qui conviendrait le mieux, et pour‐<br />

tant il serait désirable pour son bien quʹil se raffermît un peu à loisir ici, et nous éprouvons<br />

une sorte <strong>de</strong> regret à interrompre une réfection spirituelle qui se fait sensiblement. Ce nʹest<br />

pas que la maison dʹArras ne soit, par bien <strong>de</strong>s côtés, édifiante et bonne pour lui; il sʹy plaît<br />

mieux, quant à lui, quʹà Vaugirard; mais ici, les exercices plus réguliers, les occasions <strong>de</strong><br />

dissipation plus rares le maintiennent plus sûrement et éloignent pour nous <strong>de</strong>s inquiétu‐<br />

<strong>de</strong>s qui reviennent dès quʹil est hors <strong>de</strong> la maison. Je sens toutefois que vous ne pouvez at‐<br />

tendre longtemps lʹai<strong>de</strong> que vous nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z. Aussi, je vais faire en sorte <strong>de</strong> ne pas<br />

tar<strong>de</strong>r au <strong>de</strong>là <strong>de</strong> quelques jours à vous avertir définitivement <strong>de</strong> ce que nous aurons ar‐<br />

rangé. Nous sommes pressés, en même temps, par lʹimpérieuse nécessité dʹai<strong>de</strong>r une mai‐<br />

son <strong>de</strong> patronage à Paris et peut‐être une secon<strong>de</strong> œuvre <strong>de</strong> même genre, quoiquʹen <strong>de</strong>s<br />

conditions un peu différentes. Ces besoins urgents, qui se prononcent ensemble, compli‐<br />

quent un peu nos dispositions et ren<strong>de</strong>nt nos mouvements plus lents. Mais, je le répète,<br />

cher Monsieur lʹabbé, je sens, avant tout, vos difficultés et je vais, dans le plus court délai,<br />

arriver à une solution en ce qui vous concerne.<br />

M. Lantiez est revenu content et édifié du bon esprit <strong>de</strong> la maison dʹArras; il dit<br />

quʹon y sent la vie, une certaine sève chrétienne qui donne satisfaction au cœur; bénissons<br />

donc Dieu qui, à travers nos impuissances et nos misères, daigne encore tirer sa gloire <strong>de</strong><br />

nos faibles efforts. M. Lantiez recomman<strong>de</strong> seulement quʹon veille <strong>de</strong> plus en plus à ce que<br />

les rapports <strong>de</strong>s frères et <strong>de</strong>s apprentis <strong>avec</strong> les Sœurs et leurs ai<strong>de</strong>s soient aussi rares que<br />

possible. Il croit quʹon pourrait encore souhaiter quelque progrès <strong>de</strong> ce côté.<br />

Je vous quitte, cher Monsieur lʹabbé, mais <strong>avec</strong> la pensée <strong>de</strong> vous écrire <strong>de</strong> nouveau<br />

tout prochainement. Recevez pour vous tous nos sentiments <strong>de</strong> respectueux attachement<br />

et nos sincères affections pour tous vos frères.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

707‐1 à un Père du S t Esprit<br />

Ordination au diaconat <strong>de</strong> MLP., non chez les Spiritains mais chez les Lazaristes.<br />

21 septembre 1860<br />

Monsieur lʹabbé,<br />

Je me faisais une fête <strong>de</strong> recevoir dans votre chère maison les saints ordres auxquels<br />

jʹai le bonheur dʹêtre appelé; mais les bons Pères Lazaristes me font avertir à lʹinstant quʹils<br />

ont aussi, eux, une ordination <strong>de</strong>main et ils mʹinvitent à y prendre part. Cʹest une séduc‐<br />

809


tion si gran<strong>de</strong> pour nous, enfants <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul, <strong>de</strong> nous trouver réunis au pied <strong>de</strong><br />

ses saintes reliques en ce moment où elles sont lʹobjet dʹune si gran<strong>de</strong> vénération que nous<br />

nʹavons pas le courage <strong>de</strong> refuser cette invitation.<br />

Je vous prie donc, Monsieur lʹabbé, dʹêtre assez bon <strong>de</strong> mʹexcuser, et <strong>de</strong> ne pas<br />

compter sur moi pour <strong>de</strong>main. Je vous remercie bien sincèrement du bienveillant accueil<br />

que vous me réserviez, et je vous prie dʹagréer lʹassurance du profond respect <strong>avec</strong> lequel<br />

je suis<br />

Votre très humble serviteur,<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

sous‐diacre<br />

708 à M. Halluin<br />

Vie <strong>de</strong> la communauté dʹArras. Viser à lʹunité dʹaction. Conditions pour que <strong>de</strong>s prêtres étrangers puissent vivre<br />

dans nos maisons. Pèlerinage à la chapelle <strong>de</strong> la rue <strong>de</strong> Sèvres.<br />

Vaugirard, 29 septembre 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Jʹai appris <strong>avec</strong> satisfaction votre installation dans votre nouvelle maison. Les cir‐<br />

constances <strong>de</strong> ce changement <strong>de</strong> <strong>de</strong>meure, le temps <strong>de</strong> réflexion quʹon a pu prendre me<br />

font penser que Dieu y est intervenu et que nous nʹavons fait que suivre sa très sainte vo‐<br />

lonté; quʹIl soit donc béni et remercié pour ce nouveau bienfait. M. lʹabbé Brau, à son pas‐<br />

sage à Paris, mʹavait dit déjà quʹil allait reprendre son séjour chez vous. Nous le connais‐<br />

sons <strong>de</strong>puis longtemps. Je crois quʹil est fort discret, quʹil sʹintéresse cordialement à nous et<br />

quʹil saura se borner aux choses que vous atten<strong>de</strong>z <strong>de</strong> sa charité. Pour M. Grébert, je pense<br />

toujours que, malgré ses bonnes qualités, sa présence habituelle chez vous, sans lien qui le<br />

rattache à la Communauté, est une chose regrettable, quʹelle sera <strong>de</strong> peu <strong>de</strong> durée et<br />

nʹamènera en définitive rien <strong>de</strong> bien utile ni pour vous ni pour lui; mais je ne mʹoppose<br />

pas absolument à ce que vous fassiez lʹessai <strong>de</strong> cet arrangement, puisque vous et lui persis‐<br />

tez à y voir <strong>de</strong>s avantages.<br />

Je crois <strong>avec</strong> vous que lʹintroduction dʹun autre ecclésiastique étranger dans votre<br />

maison ferait un poids fâcheux par la difficulté que causent tous ces éléments divers et<br />

lʹobstacle quʹils mettent à lʹunité dʹaction; je ne crois pas quʹon puisse jamais composer un<br />

ensemble ni une communauté unie <strong>avec</strong> tant <strong>de</strong> multiplicité.<br />

Nous sommes allés aujourdʹhui en pèlerinage à la chapelle <strong>de</strong> notre saint Patron, St Vincent <strong>de</strong> Paul, et jeudi nous lʹavons fêté <strong>de</strong> notre mieux ici; jʹespère que sa protection se<br />

fera <strong>de</strong> plus en plus sentir parmi nous. Je lʹai beaucoup prié, en particulier, pour notre<br />

chère maison dʹArras.<br />

Le f. Alphonse [Vasseur] sʹest trouvé, ces temps‐ci, obsédé <strong>de</strong> doutes sur sa voca‐<br />

tion; après y avoir bien pensé <strong>de</strong>vant Dieu, je nʹai vu à cela aucun fon<strong>de</strong>ment soli<strong>de</strong>, je lui<br />

écris pour lʹencourager et lʹaffermir. Je pense quʹil va se trouver dans ses dispositions ordi‐<br />

naires et reprendre sa paix en Dieu.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, je souhaite à vous et aux vôtres mille bénédictions et<br />

vous assure comme toujours <strong>de</strong> mon respectueux attachement en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

810


709 à M. Vasseur<br />

Au frère Alphonse Vasseur peu soutenu du côté spirituel et privé du réconfort <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> communauté, MLP.<br />

donne ses encouragements. Conseils pour combattre les tentations contre la vocation. Dans notre Institut, prê‐<br />

tres et laïques ne peuvent vivre séparés sans détruire notre existence dans son fond.<br />

Vaugirard, 29 septembre 1860<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Nous sommes allés aujourdʹhui en pèlerinage à la chapelle <strong>de</strong> notre saint Patron, S t<br />

Vincent <strong>de</strong> Paul; jʹy ai tout particulièrement prié pour mon fils Alphonse, et je crois pou‐<br />

voir espérer que cʹest <strong>avec</strong> son esprit et sous son inspiration que je réponds à la lettre que<br />

je reçois <strong>de</strong> vous à lʹinstant. Je vous le répète, mon enfant, croyez‐en mon expérience, les<br />

pensées qui vous obsè<strong>de</strong>nt sont une pure tentation; la vie spirituelle a un peu souffert en<br />

vous <strong>de</strong>puis que vous êtes éloigné <strong>de</strong> nous, les dangers <strong>de</strong> votre position vous ont un peu<br />

abattu, le démon en profite pour vous suggérer <strong>de</strong>s imaginations spécieuses pour vous<br />

égarer et vous jeter hors <strong>de</strong> votre voie; gar<strong>de</strong>z‐vous <strong>de</strong> ce piège et puisque le Seigneur,<br />

jʹose le dire, vous avertit par ma voix, écoutez‐le et rejetez les insinuations <strong>de</strong> votre plus<br />

cruel ennemi. Il nʹy aurait, cher enfant, ni religieux ni prêtre si lʹon écoutait toutes les pen‐<br />

sées qui peuvent passer dans les esprits aux heures mauvaises où le démon nous tente et<br />

où la mauvaise nature sʹentend <strong>avec</strong> lui. Vous ne seriez pas resté jusquʹaujourdʹhui sage,<br />

fidèle à vos obligations, au moins par le fond habituel, dévoué au bien, si Dieu ne vous eût<br />

marqué pour son service; vous avez une vocation réelle; vous pourriez la méconnaître et la<br />

briser, mais ce serait à vos risques et périls, en compromettant certainement votre avenir<br />

temporel que Dieu ne bénirait pas et aussi, ce qui est plus terrible, votre avenir éternel.<br />

La position où vous êtes a <strong>de</strong>s dangers particuliers; jʹaurais voulu vous y laisser<br />

moins longtemps, mais je ne fais pas toujours à mon gré; jʹy ai songé plus particulièrement<br />

ces temps <strong>de</strong>rniers, jʹespère arriver à quelque arrangement satisfaisant pour la retraite;<br />

pensez bien à cela <strong>de</strong>vant Dieu pour quʹil nous assiste et, toujours, toujours <strong>de</strong> plus en plus<br />

en ce moment, priez, cher enfant, cherchez votre force et votre secours en Lui; si vous le<br />

faites, si vous recourez à Marie, aux SS. Anges, je réponds <strong>de</strong> vous. Vous me remercierez<br />

plus tard, si vous êtes docile comme jʹen ai la confiance, <strong>de</strong> vous avoir en ce moment tiré<br />

dʹun pas mauvais, et vous bénirez le bon Maître si indulgent, si miséricordieux pour ses<br />

pauvres serviteurs.<br />

Je ne réponds pas ici, ce serait trop long, à votre allusion à la décision que jʹai prise<br />

dʹentrer dans le sacerdoce; vos pensées à ce sujet nʹont pas la plus petite apparence <strong>de</strong> fon‐<br />

<strong>de</strong>ment; je termine ainsi ma carrière parce que jʹen avais eu dès longtemps la vocation et<br />

parce quʹà lʹépreuve, jʹai vu quʹun Supérieur laïc ne pouvait quʹà moitié conduire <strong>de</strong>s ff.<br />

ecclésiastiques; mais je réponds que rien nʹa, par là, été changé à notre constitution; nous<br />

ne pouvons, dans notre Institut, prêtres et laïcs, vivre séparés, la nature <strong>de</strong> nos œuvres<br />

rend lʹaction <strong>de</strong>s laïcs indispensable partout; ce serait nous annuler, détruire notre exis‐<br />

tence dans son fond que <strong>de</strong> porter atteinte à cette condition vitale; M. Lantiez et tous les ff.<br />

qui mʹentourent en sont aussi convaincus que moi; en y réfléchissant, vous nʹaurez pas <strong>de</strong><br />

peine à le comprendre; ayez confiance sur ce point comme sur le reste, abandonnez‐vous à<br />

Dieu, Il vous mènera au port, cʹest‐à‐dire, pour la Communauté, à une constitution vrai‐<br />

ment appropriée aux besoins <strong>de</strong> notre temps, et pour vous en particulier, cher enfant, à<br />

<strong>de</strong>meurer ce quʹIl vous a fait, une <strong>de</strong>s pierres <strong>de</strong> lʹédifice quʹIl veut élever pour sa gloire et<br />

pour le salut <strong>de</strong> plusieurs.<br />

811


Adieu, bien cher enfant, je vous embrasse tendrement; jʹattends <strong>de</strong> vous une lettre<br />

où je retrouve le cœur que la grâce sait souvent bien inspirer et qui sait répondre à une<br />

inspiration chrétienne, généreuse et dévouée.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

710 à M. Caille<br />

Devant la tournure <strong>de</strong>s évènements à Amiens, M. Caille doit venir à Vaugirard.<br />

Vaugirard, 4 octobre 1860<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je pense quʹil est bon, comme vous le proposez, que nous puissions nous mieux<br />

éclairer et nous concerter; si vous pouvez vous échapper un moment, nous examinerons<br />

ensemble ce que les circonstances que vous nous signalez <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt. Prions Dieu pour<br />

que les âmes, dont lʹétat doit ici nous préoccuper avant tout, se relèvent <strong>de</strong> la malheureuse<br />

atteinte quʹelles ont subie.<br />

Je vous embrasse cordialement en N.S. et suis comme toujours<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

711 à M. Vasseur<br />

MLP. se réjouit <strong>de</strong> ce que le frère Vasseur ait surmonté ses difficultés;<br />

Vaugirard, 12 octobre 1860<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Jʹétais bien certain quʹun peu <strong>de</strong> calme et <strong>de</strong> réflexion, lʹinvocation surtout du se‐<br />

cours divin rendraient la paix à votre âme et vous remettraient pleinement dans la voie où<br />

Dieu vous veut certainement. La retraite que nous allons commencer le 22 <strong>de</strong> ce mois, ou<br />

plutôt le 21 au soir, sous la conduite du r.p. <strong>de</strong> Ponlevoy, va achever, cher enfant, lʹœuvre<br />

<strong>de</strong> votre entière réfection spirituelle. Voyez une fois <strong>de</strong> plus, cher ami, que vous avez tort<br />

<strong>de</strong> vous désespérer si vite dans vos épreuves; <strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> patience, la sérénité revient;<br />

pour moi, je réponds bien hardiment <strong>de</strong> votre avenir; pour peu que vous soyez assez sage<br />

pour ne pas faire ce quʹon nomme un coup <strong>de</strong> tête, cʹest‐à‐dire <strong>de</strong> cé<strong>de</strong>r à lʹimpression vive<br />

du moment et <strong>de</strong> prendre en hâte une décision. La tête trop ar<strong>de</strong>nte vous emporte dʹabord,<br />

mais le fond <strong>de</strong> foi et <strong>de</strong> cordial dévouement est vrai chez vous, et il prendra toujours le<br />

<strong>de</strong>ssus tant que vous serez en défiance <strong>de</strong> vous‐même, que vous consulterez et que vous<br />

recourrez à Dieu. Jʹécris à M. Halluin pour lui dire la pensée que nous avons eue <strong>de</strong> vous<br />

changer dʹemploi si cela semblait utile à votre repos, causez‐en <strong>avec</strong> lui, <strong>avec</strong> le bon Maître<br />

surtout.<br />

Adieu, cher enfant, votre frère est présentement dans les meilleures dispositions; jʹai<br />

la confiance que mes <strong>de</strong>ux enfants Vasseur vont être la joie et la consolation <strong>de</strong><br />

Leur ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

812


712 à M. Halluin<br />

Quelques nouvelles <strong>de</strong>s frères.<br />

Vaugirard, 14 octobre 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vous écris seulement <strong>de</strong>ux mots pour vous dire que je trouve bien, en ensemble,<br />

les dispositions diverses que vous me communiquez dans votre lettre du 11, arrivée seu‐<br />

lement hier 13, particulièrement celles qui concernent la retraite. M. Lantiez, allant lundi<br />

15 à Amiens faire lʹinstallation <strong>de</strong> celui qui doit remplacer M. Joseph [Loquet] (ce sera, je<br />

crois, Lamoury), vous fera une visite <strong>de</strong> quelques heures; en conversant <strong>avec</strong> lui, vous ar‐<br />

rangerez mieux toutes choses quʹon ne le peut faire par correspondance.<br />

Nous verrons <strong>avec</strong> plaisir M. Houriez et nous prierons <strong>avec</strong> lui le Seigneur, afin<br />

quʹIl daigne lʹéclairer.<br />

Nous avons <strong>de</strong>puis peu parmi nous un jeune ecclésiastique [Jacques Clément], âgé<br />

<strong>de</strong> 30 ans, que diverses circonstances ont retardé dans sa théologie non achevée. Il est très<br />

bien, nous en espérons <strong>de</strong> bons services, mais il nʹest encore que tonsuré.<br />

M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] a répondu immédiatement à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> renseigne‐<br />

ments qui lui avait été faite; sa lettre vous est assurément arrivée.<br />

Je ne pense pas quʹil y ait lieu <strong>de</strong> remettre au f. Thuillier la lettre étrange que lui fait<br />

écrire sa mère. Je crois quʹil peut être bien dʹécrire au Curé pour lʹinviter à faire quelques<br />

observations à cette brave femme qui agit bien contre lʹintérêt <strong>de</strong> son fils et contre le sien<br />

propre. Je me propose dʹécrire en ce sens.<br />

Je finis, cher Monsieur lʹabbé, vous priant <strong>de</strong> croire comme toujours à nos senti‐<br />

ments respectueux et dévoués en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

713 à M. Maignen<br />

Horaire <strong>de</strong> la messe à Nazareth. Le souvenir du 15 octobre, Premier Tabernacle, est ʺune douce et précieuse<br />

commémorationʺ.<br />

Vaugirard, 14 octobre 1860<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Je trouve très dignes dʹattention vos observations relatives au changement <strong>de</strong><br />

lʹheure <strong>de</strong> la messe à Nazareth, et je souhaite bien que nous puissions régler les choses en<br />

ce sens; toutefois, il sera bon que nous en causions ensemble mercredi, <strong>avec</strong> nos ff. Paillé et<br />

Hello; jʹespère que nous arriverons à donner satisfaction à tous, même à ceux dont lʹavis ne<br />

pourra être suivi, puisque nous chercherons dʹun même cœur à tout faire pour le mieux.<br />

Adieu, cher enfant, cʹest <strong>de</strong>main la fête <strong>de</strong> Ste Thérèse, douce et précieuse commé‐<br />

moration pour nous.<br />

Je vous embrasse cordialement en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je prie toujours les Saints Anges. Nous faisons la neuvaine pour M. <strong>de</strong> Kergorlay.<br />

813


714 à M. Halluin<br />

Costume dʹemprunt pour les frères qui voyagent en chemin <strong>de</strong> fer. Brèves nouvelles.<br />

Vaugirard, 19 octobre 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie les billets <strong>de</strong> réduction que nous avons obtenus pour le chemin <strong>de</strong><br />

fer, mais je crains que vous ne puissiez aisément en faire usage, à cause <strong>de</strong> la condition ex‐<br />

pressément mentionnée sur le billet <strong>de</strong> porter le costume religieux. Vous verrez à lʹadmi‐<br />

nistration du chemin <strong>de</strong> fer à Arras si cette difficulté peut être levée. Il me semble que si,<br />

au Séminaire ou ailleurs, on pouvait vous prêter quatre manteaux à peu près pareils et que<br />

les frères fussent simples dans leur habillement, ils pourraient avoir un air dʹuniformité et<br />

la gravité extérieure <strong>de</strong>s religieux.<br />

Autre difficulté: la mère <strong>de</strong> M. Sadron serait bien heureuse si son fils pouvait arri‐<br />

ver ici le samedi soir, afin dʹaller voir dimanche son père qui est à la maison <strong>de</strong>s Vieillards,<br />

où on nʹest reçu que les jeudis et dimanches. Sʹil partait ainsi avant les autres, il ne pourrait<br />

profiter <strong>de</strong> la diminution du billet ou bien il <strong>de</strong>vrait manquer une partie <strong>de</strong>s exercices jeu‐<br />

di, pour aller voir son père.<br />

Tout ici va comme <strong>de</strong> coutume; jʹespère quʹà Arras aussi vous êtes toujours assistés<br />

par le Seigneur. M. Lantiez est revenu content <strong>de</strong> la courte visite quʹil vous a faite.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, mille affections <strong>de</strong> tous pour vous et pour les vôtres.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

715 à M. Caille<br />

Dates <strong>de</strong> la retraite. Renouvellement <strong>de</strong>s vœux du frère Guillot.<br />

Vaugirard, 24 octobre 1860<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

La clôture <strong>de</strong> la retraite aura lieu vendredi à 7h. du matin; il me semblerait bien dé‐<br />

sirable que notre f. Henry [Guillot] pût venir la veille pour se recueillir un peu et se prépa‐<br />

rer à renouveler ses vœux à la messe vendredi; voyez si vous ne pouvez arranger les cho‐<br />

ses ainsi sans trop dʹinconvénient pour vous.<br />

Mille affections en N.S., nous prions pour vous.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

716 à M. Halluin<br />

La retraite a été édifiante pour les frères dʹArras.<br />

Vaugirard, 26 octobre 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vous renvoie nos frères bien refaits, je lʹespère, par la retraite qui a été aussi édi‐<br />

fiante quʹil se peut. Le r.p. <strong>de</strong> Ponlevoy est admirablement inspiré pour ces sortes dʹexerci‐<br />

ces. M. Houriez en a été très satisfait et je pense quʹil en tirera bien profit. Il était fort atten‐<br />

814


tif à toutes les instructions, mais il mʹa dit nʹêtre pas encore assez mûr pour se donner tout<br />

à Dieu. Espérons que son heure viendra.<br />

Je nʹai pas parfaitement saisi les explications que mʹont données nos ff. sur les be‐<br />

soins présents que vous ressentez pour la marche <strong>de</strong> vos divers services; jʹai pensé que, sur<br />

place, on pourrait mieux juger. Dès que M. Myionnet ou M. Lantiez pourront sʹéchapper<br />

lʹun ou lʹautre, je vous enverrai lʹun <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux pour faire près <strong>de</strong> vous un séjour un peu<br />

prolongé et constater <strong>avec</strong> vous les nécessités et chercher les moyens dʹy pourvoir.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, nous sommes tous bien en hâte après cette retraite, je<br />

nʹai donc que le temps <strong>de</strong> vous assurer comme toujours <strong>de</strong>s sentiments dévoués et respec‐<br />

tueux <strong>avec</strong> lesquels je suis<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

717 à M. Risse312 Ouverture pour lʹunion <strong>de</strong> lʹŒuvre <strong>de</strong> Metz à la Congrégation. Conditions dʹadmission. Prochaine ordination<br />

sacerdotale <strong>de</strong> MLP.<br />

Vaugirard, 27 octobre 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Jʹattendais <strong>de</strong>puis longtemps quelques signes <strong>de</strong> sympathie du côté <strong>de</strong> Metz; jʹavais<br />

pressenti quʹil y avait là un foyer <strong>de</strong> zèle et <strong>de</strong> charité qui <strong>de</strong>vait être dans les voies que<br />

nous cherchons à suivre, et quʹun peu plus tôt, un peu plus tard, la Provi<strong>de</strong>nce nous mé‐<br />

nagerait quelque occasion <strong>de</strong> rapprochement. Je bénis le Seigneur qui semble nous indi‐<br />

quer que le moment sʹapproche où, en concertant nos moyens, nous pourrions travailler<br />

plus efficacement à sa gloire.<br />

Je ne verrais pas <strong>de</strong> difficulté, cher Monsieur lʹabbé, à lʹadmission parmi nous du<br />

bon jeune homme dont vous me parlez, sʹil est vraiment et sincèrement disposé à se consa‐<br />

crer tout à Dieu dans les œuvres que nous avons embrassées. Je verrais là, <strong>avec</strong> vous, une<br />

première préparation pour lʹétablissement à Metz dʹune petite communauté qui, tout en‐<br />

semble, affermirait votre excellente institution <strong>de</strong> jeunes ouvriers et assurerait son avenir.<br />

Notre règlement exige avant tout <strong>de</strong>s sujets qui se présentent: la piété, un entier dé‐<br />

vouement, la capacité <strong>de</strong> corps, la rectitu<strong>de</strong> dʹesprit, mais le défaut <strong>de</strong> ressources tempo‐<br />

relles ne fait point obstacle à leur vocation. Sʹils sont à même, sous ce rapport, <strong>de</strong> donner<br />

quelque ai<strong>de</strong> à la Communauté, elle lʹaccepte volontiers comme un secours vraiment utile,<br />

mais elle nʹen fait pas une condition <strong>de</strong> leur admission. Ces renseignements, je lʹespère,<br />

cher Monsieur lʹabbé, vous mettront tout à lʹaise, tant pour le bon jeune homme désigné<br />

dans votre lettre que pour dʹautres, sʹil sʹen trouvait qui voulussent suivre son exemple.<br />

Quant à un prêtre, sʹil sʹen présentait qui eût aussi la même inspiration, on subor‐<br />

donnerait, autant quʹil se pourrait, les dispositions à prendre pour lʹunir à la Congrégation<br />

aux nécessités <strong>de</strong> sa position.<br />

312 Né à Metz le 12 janvier 1823, Louis Risse est ordonné prêtre en 1846. Il établit bientôt l’Œuvre <strong>de</strong>s jeunes ouvriers <strong>de</strong> Metz. C’est<br />

au Congrès d’Angers en 1858 qu’il connaîtra et appréciera l’Institut. Il prononcera ses premiers vœux le 21 décembre 1861 et <strong>de</strong>vient<br />

profès perpétuel en 1871. L’annexion <strong>de</strong> l’Alsace-Lorraine, après la guerre <strong>de</strong> 1870, rendra difficiles les relations <strong>avec</strong><br />

l’Œuvre <strong>de</strong> Metz. Cette <strong>de</strong>rnière sera même fermée en 1874. Elle rouvrira en 1881, et M. Risse y consacrera ses <strong>de</strong>rnières forces. Il<br />

meurt à 63 ans, le 6 décembre 1885.<br />

815


Dans les conditions ordinaires, un temps <strong>de</strong> noviciat un<br />

peu prolongé a une gran<strong>de</strong> utilité pour prendre lʹesprit<br />

<strong>de</strong> la famille et sʹattacher à elle par la vie commune;<br />

mais les circonstances peuvent rendre parfois difficile<br />

un éloignement trop long <strong>de</strong>s lieux et <strong>de</strong>s choses<br />

auxquelles on est enchaîné. En ce cas, quelques mois<br />

peut‐être, durant lesquels on aviserait à une suppléance<br />

provisoire dans les œuvres quʹon <strong>de</strong>vrait délaisser,<br />

pourraient suffire à la rigueur pour cimenter lʹunion<br />

quʹon voudrait opérer. Jʹai la confiance, cher Monsieur<br />

lʹabbé, que si lʹhypothèse se <strong>de</strong>vait réaliser, pour vous<br />

en particulier, il nous serait facile <strong>de</strong> nous entendre sur<br />

ce point comme sur tout le reste. Je le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rai à<br />

Dieu, et je regar<strong>de</strong>rais cette disposition comme une<br />

marque <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> ses miséricor<strong>de</strong>s pour notre petite<br />

famille.<br />

Vous apprendrez <strong>avec</strong> satisfaction, je le pense,<br />

que, dʹaprès les avis <strong>de</strong> Son Eminence et <strong>de</strong> plusieurs<br />

autres personnes fort éclairées, jʹai cru <strong>de</strong>voir entrer<br />

dans le saint ministère; jʹai été admis déjà aux premiers<br />

ordres, jusquʹau diaconat inclusivement, et je dois être<br />

ordonné prêtre à Noël prochain. Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> bien instamment le secours <strong>de</strong> vos priè‐<br />

res et sacrifices, comptant bien que vous ne me le refuserez point. Je nʹoublierai pas, <strong>de</strong><br />

mon côté, <strong>de</strong>vant Dieu, vous ni vos chers jeunes gens, ni vos œuvres; ce sera un premier<br />

lien, gage dʹune plus entière et plus parfaite union.<br />

Je suis <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s sentiments respectueux et dévoués, en J. et M.,<br />

Votre humble serviteur et frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

718 à M. Halluin<br />

MLP. se félicite <strong>de</strong> la prédication du père <strong>de</strong> Ponlevoy. Il envisage dʹenvoyer M. Myionnet à Arras pour étudier<br />

les besoins <strong>de</strong> lʹŒuvre.<br />

Vaugirard, 1er novembre [1860]<br />

Fête <strong>de</strong> la Toussaint<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je pense que tout votre mon<strong>de</strong> est arrivé sain et sauf près <strong>de</strong> vous, après la retraite<br />

et que les bonnes impressions quʹon y a prises se feront sentir longtemps dans le cœur <strong>de</strong><br />

tous ceux qui ont pu profiter dʹune grâce si précieuse. Nos ff. vous auront dit que le r.p. <strong>de</strong><br />

Ponlevoy, toujours égal à lui‐même, avait répondu à nos espérances et que sa piété, son air<br />

<strong>de</strong> sainte mo<strong>de</strong>stie, comme sa parole pleine dʹautorité et <strong>de</strong> persuasion, nous ont tous pro‐<br />

fondément touchés. Bénissons Dieu qui se montre si tendre et si miséricordieux envers no‐<br />

tre petite famille, prions‐le pour que la divine semence nʹait pas été jetée en vain.<br />

Le f. Alphonse [Vasseur] trop préoccupé les premiers jours <strong>de</strong>s pensées qui regar‐<br />

<strong>de</strong>nt sa position, ses difficultés dans son emploi, lʹincertitu<strong>de</strong> où il restait sur son maintien<br />

816


à Arras ou son rappel ici, a dû peu profiter dʹabord <strong>de</strong>s exercices <strong>de</strong> la retraite. Jʹespère<br />

que, dans les <strong>de</strong>rniers instants, il aura pu recueillir encore quelques fruits heureux. Les au‐<br />

tres, plus paisibles, étaient mieux à leur affaire.<br />

Je vous ai dit, cher Monsieur lʹabbé, que, ne me rendant pas pleinement compte <strong>de</strong>s<br />

besoins <strong>de</strong> vos services, je pensais à envoyer M. Myionnet passer une semaine ou <strong>de</strong>ux<br />

près <strong>de</strong> vous, pour bien se concerter et sʹentendre <strong>avec</strong> vous sur ce qui serait <strong>de</strong> mieux. Je<br />

désirerais toutefois, avant <strong>de</strong> me déci<strong>de</strong>r à ce déplacement, qui ne sera point sans quelque<br />

gêne pour nous, être assuré quʹil peut être utile et quʹil en doit sortir quelque bien. Je vous<br />

prie donc <strong>de</strong> mʹen dire votre avis. Si vous jugez quʹil y ait quelque bien à tirer <strong>de</strong> ce<br />

moyen, je ferais en sorte que M. Myionnet allât vers vous dans le milieu <strong>de</strong> la semaine<br />

prochaine. Jʹattendrai un mot <strong>de</strong> vous pour prendre une détermination.<br />

Tout le mon<strong>de</strong> ici vous assure <strong>de</strong> ses affections et respects; jʹy joins aussi tous mes<br />

sentiments les plus dévoués en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

719 à M. Risse<br />

Lʹunion <strong>avec</strong> lʹŒuvre <strong>de</strong>s Jeunes Ouvriers <strong>de</strong> Metz progresse. Lʹabbé Risse a laissé parler son cœur, sa foi, sa<br />

charité. Sujets <strong>de</strong> méditation alors adoptés; usages <strong>de</strong> la Communauté; nécessité du Noviciat; conditions pour les<br />

candidats au sacerdoce.<br />

Vaugirard, 4 novembre 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vous donne ce nom, puisque vous le voulez bien et que le Seigneur semble agréer<br />

notre union. Combien je vous sais gré <strong>de</strong> votre lettre et comme elle doit réjouir notre Père<br />

St Vincent <strong>de</strong> Paul! On est si peu accoutumé, <strong>de</strong> notre temps, à rencontrer <strong>de</strong>s âmes qui<br />

parlent <strong>avec</strong> leur cœur et laissent <strong>de</strong>rrière elles la raison, quʹon respire un peu à lʹaise<br />

quand un cri <strong>de</strong> foi, <strong>de</strong> confiance et <strong>de</strong> pure charité se fait entendre et rappelle <strong>de</strong>s jours<br />

meilleurs; cher Monsieur lʹabbé, nos âmes sont tout à fait à lʹunisson, nous sentons, nous<br />

aimons, nous pensons comme vous, nos œuvres sont les vôtres, notre voie est la vôtre,<br />

tout, à vrai dire, est déjà commun entre nous; nous nʹavions quʹà nous tendre la main,<br />

lʹheure du Seigneur était venue; quʹIl soit béni, nous sommes frères <strong>de</strong> ce moment, puisque<br />

nos cœurs ne sont quʹun en Lui. Quant aux détails dʹexécution, ils iront <strong>avec</strong> le temps, le<br />

principal est fait. Celui qui commence lʹœuvre y mettra la <strong>de</strong>rnière main; je crois que nous<br />

<strong>de</strong>vons marcher désormais en pleine confiance; votre lettre mʹa mis <strong>avec</strong> vous à lʹaise<br />

comme si nous étions associés <strong>de</strong>puis dix ans.<br />

Ce point bien arrêté, je réponds à quelques questions <strong>de</strong> votre lettre. Je vous enver‐<br />

rai dʹici à peu une copie <strong>de</strong> notre règlement; je nʹen ai pas sous la main <strong>de</strong> bien lisible, il<br />

nʹest pas jusquʹici imprimé.<br />

Nous prenons en ce moment nos sujets <strong>de</strong> méditation dans la Couronne <strong>de</strong> lʹannée<br />

chrétienne, 2 vol. in‐12, par Abelly, ami et biographe <strong>de</strong> notre Patron St Vincent <strong>de</strong> Paul.<br />

Lʹextrême simplicité <strong>de</strong> ce livre, sa clarté dans les divisions, la brièveté <strong>de</strong>s matières nous<br />

le ren<strong>de</strong>nt commo<strong>de</strong> et accessible pour tous. Notre livre <strong>de</strong> lecture spirituelle est habituel‐<br />

lement La Perfection etc. <strong>de</strong> Rodriguez.<br />

817


Nos ff. laïcs disent lʹOffice <strong>de</strong> la S te Vierge, le divisant en trois parties; <strong>de</strong>ux parties à<br />

voix haute en commun, lʹautre partie (vêpres et complies) à voix basse, faute <strong>de</strong> temps suf‐<br />

fisant pour la dire hautement. Vous prendrez, pour vos jeunes gens, ce que vous pourrez<br />

du règlement sans les gêner, puisque la liberté leur manquera sans doute pour embrasser<br />

le tout.<br />

Vous penserez comme moi, je crois, cher Monsieur lʹabbé, que si pour vous qui por‐<br />

tez le poids <strong>de</strong> lʹœuvre <strong>de</strong>s Jeunes Ouvriers, etc., il est difficile dʹexiger un noviciat prolon‐<br />

gé, on <strong>de</strong>vrait, pour vos jeunes gens, <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r une préparation plus longue, à moins<br />

dʹobstacles particuliers pour quelquʹun dʹeux. Il me semblerait aussi fort à souhaiter quʹils<br />

se donnassent assez franchement à la Communauté pour quʹelle pût disposer dʹeux pour<br />

le plus grand bien <strong>de</strong> nos œuvres. Sʹils avaient, en effet, quelque volonté arrêtée <strong>de</strong> retour‐<br />

ner tous à lʹœuvre <strong>de</strong> Metz, ils seraient en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s principes <strong>de</strong> la vie commune et ils<br />

mettraient obstacle à la sincérité comme à lʹefficacité <strong>de</strong> notre union; jamais, en effet, il nʹy<br />

aurait <strong>de</strong> fusion sérieuse entre les membres <strong>de</strong> la famille si chaque pays gardait ses élé‐<br />

ments propres, sans rien emprunter comme sans rien donner au centre <strong>de</strong> la Congréga‐<br />

tion. Dʹaprès cela, je trouverais bien que vous fissiez un petit postulat près <strong>de</strong> vous, mais je<br />

croirais sage que vous détachiez lʹun après lʹautre, pour les envoyer au Noviciat, ceux <strong>de</strong><br />

ces bons jeunes gens qui vous paraîtraient bien résolus à se donner à Dieu. Serions‐nous<br />

bien sûrs ici <strong>de</strong> pouvoir les remplacer immédiatement par <strong>de</strong>s sujets bien formés, je nʹose‐<br />

rais en répondre absolument, nous ferions au moins ce qui dépendrait <strong>de</strong> nous pour vous<br />

ai<strong>de</strong>r.<br />

Quant aux sujets se préparant au sacerdoce, nous avons quelques moyens qui pour‐<br />

raient être utilisés par vous en certains cas. Une personne charitable, voulant favoriser ce<br />

côté <strong>de</strong> notre Communauté, nous fournit les ressources nécessaires pour faire les étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />

quelques jeunes sujets, soit pour les humanités, soit pour la théologie, à la condition quʹils<br />

auront la pensée <strong>de</strong> se consacrer aux œuvres <strong>de</strong> la Communauté. On ne <strong>de</strong>vrait guère<br />

prendre les plus jeunes au‐<strong>de</strong>ssous <strong>de</strong> quinze ans. Si vous aviez quelques vues en ce sens,<br />

soit pour les humanités, soit pour la théologie, vous pourriez tenir compte <strong>de</strong> cet avis, à la<br />

condition que M gr <strong>de</strong> Metz ne mettrait point obstacle à ce que quelques jeunes gens <strong>de</strong> sa<br />

circonscription se tournassent vers les œuvres charitables.<br />

La pensée mʹest venue quʹil serait peut‐être bien que vous pussiez avoir une pro‐<br />

messe <strong>de</strong> vente <strong>de</strong> votre maison, si elle vous paraît avoir les convenances désirables, pro‐<br />

messe réalisable dans un temps donné, 3, 4 ou 5 ans, par exemple. Peut‐être que si le bruit<br />

<strong>de</strong> votre union à nous se répand, un peu plus tard, on <strong>de</strong>viendrait plus exigeant quant au<br />

prix; cʹest toutefois chose à examiner et que je signale seulement à votre attention, sans<br />

vouloir pousser à aucune mesure précipitée.<br />

Jʹai interrompu plusieurs fois cette lettre, ayant été ces jours‐ci fort occupé; je la finis<br />

comme je lʹai commencée, en bénissant Dieu <strong>de</strong> lʹaffectueuse entente quʹIl daigne mettre<br />

entre nous; nous le prierons bien constamment pour vous et pour les vôtres et nous com‐<br />

mencerons ainsi, dans sa divine charité, la douce union qui doit nous consommer tous en<br />

Lui.<br />

Croyez, cher Monsieur lʹabbé, à tous mes sentiments <strong>de</strong> cordial dévouement en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

818


720 à M. Decaux<br />

Relations <strong>avec</strong> la Société <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul. Faute <strong>de</strong> personnel, MLP. interrompt lʹai<strong>de</strong> fournie jusquʹici au<br />

patronage Ste‐Mélanie.<br />

Vaugirard, 5 novembre 1860<br />

Mon bien bon ami,<br />

Notre jeune Brice, ainsi que nous pouvions le prévoir, est au‐<strong>de</strong>ssous <strong>de</strong> la tâche<br />

que nous avions voulu lui donner; M. Myionnet est bien <strong>avec</strong> lui le dimanche, mais il ne<br />

peut diriger assez ses mouvements, soit ce jour‐là, soit dans la semaine, pour que tous ses<br />

actes soient pru<strong>de</strong>nts, mesurés, convenables. M. Aimé et nos autres Confrères, dont nous<br />

avons dʹailleurs beaucoup à nous louer, ont déclaré hier à M. Myionnet quʹils désiraient ne<br />

pas employer ce jeune homme dans leur œuvre et quʹils croyaient, quant à présent, pou‐<br />

voir la conduire seuls. Nous allons dès lors interrompre notre coopération à ce patronage<br />

[Ste Mélanie], mais nous gar<strong>de</strong>rons la bonne volonté dʹy revenir plus tard si nous avons <strong>de</strong>s<br />

sujets plus formés et si notre ai<strong>de</strong> peut produire quelque bien. Je nʹai pas besoin mon bon<br />

ami, <strong>de</strong> vous dire, que nous ne voyons pas en cet inci<strong>de</strong>nt une question dʹamour‐propre;<br />

nous regrettons uniquement <strong>de</strong> ne pouvoir secon<strong>de</strong>r, autant que nous le voudrions, les ef‐<br />

forts <strong>de</strong> votre zèle si généreux et si constant; nous ferons <strong>de</strong>s vœux pour que le Seigneur<br />

nous ren<strong>de</strong> plus nombreux, meilleurs surtout, afin dʹêtre moins indignes <strong>de</strong> travailler à ses<br />

œuvres.<br />

Je vous renouvelle, mon bon ami, les assurances <strong>de</strong> mon profond et affectueux dé‐<br />

vouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

721 à M. Halluin<br />

Quelques nouvelles <strong>de</strong>s frères et <strong>de</strong> jeunes gens dʹArras.<br />

Vaugirard, 8 novembre 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Jʹai lu <strong>avec</strong> une sincère satisfaction, par votre lettre, que tout sʹorganisait pour le<br />

mieux dans votre chère œuvre et que chacun semblait prendre bien à cœur son office.<br />

Dans ces conditions, je crois que les choses pourront marcher. Cependant, si la vue du f.<br />

François [Le Carpentier] se fatigue davantage à Arras quʹici, je crois que nous <strong>de</strong>vrons lui<br />

donner quelque soulagement, en le rappelant au moins pour un temps. Nous avons beau‐<br />

coup dʹestime et dʹaffection pour ce bon frère, nous <strong>de</strong>vons ménager les forces qui lui res‐<br />

tent. Nous patienterons toutefois comme vous le désirez, M. Lantiez ou M. Myionnet <strong>de</strong>‐<br />

vant aller dans une quinzaine à Amiens pour voir comment se pose le jeune Lamoury, ils<br />

pourront, lʹun ou lʹautre, vous faire une visite et voir <strong>avec</strong> vous ce qui est pour le plus<br />

grand bien.<br />

Nous serons tous heureux <strong>de</strong> vous voir ici au mois <strong>de</strong> décembre; cʹest pour moi un<br />

véritable regret <strong>de</strong> me rencontrer si rarement <strong>avec</strong> vous, cher Monsieur lʹabbé.<br />

Nous recevrons <strong>avec</strong> joie le jeune Théron quand vous croirez <strong>de</strong>voir nous lʹenvoyer.<br />

M. Lantiez et M. Myionnet pensent quʹil ira bien parmi nous.<br />

Je bénis Dieu pour les fruits <strong>de</strong> votre retraite; le jeune zouave est venu, M. Lantiez<br />

en a été content. Puissent tous ces bons jeunes gens persévérer et donner dès ici‐bas une<br />

récompense à vos soins.<br />

819


Jʹembrasse tout votre mon<strong>de</strong> et vous tout particulièrement, cher Monsieur lʹabbé,<br />

vous assurant <strong>de</strong> mon cordial et respectueux attachement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

722 à M. Halluin<br />

MLP. se prépare à son ordination sacerdotale. Rénovation <strong>de</strong>s vœux et fête anticipée du frère Myionnet qui doit<br />

aller visiter les maisons dʹAmiens et dʹArras. Joie <strong>de</strong> la consécration religieuse, ʺvoie qui mène droit au Cœur <strong>de</strong><br />

Dieuʺ.<br />

Vaugirard, 21 novembre 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Il mʹa été impossible <strong>de</strong> répondre <strong>de</strong> suite à votre lettre, comme jʹen avais la pensée;<br />

mes occupations ont été très multipliées et continueront <strong>de</strong> lʹêtre jusquʹà lʹordination. Je<br />

me recomman<strong>de</strong> bien à vos prières, car je suis loin dʹêtre aussi libre que la situation le <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>rait.<br />

M. Lantiez ne pouvait sʹabsenter présentement. Nous avons aujourdʹhui le renou‐<br />

vellement <strong>de</strong>s vœux qui, ici, est parmi nos exercices solennels, et en même temps la fête <strong>de</strong><br />

M. Myionnet, St Clément, que nous faisons par anticipation. Ce sera lui, je pense, qui pour‐<br />

ra le plus aisément sʹéchapper pour vous rendre une visite. Il partira lundi; je ne sais pas<br />

encore sʹil sʹarrêtera dʹabord à Amiens ou sʹil ira directement vers vous, la chose me paraît<br />

assez indifférente.<br />

Je me réjouis bien <strong>de</strong> la bonne disposition <strong>de</strong>s esprits chez vous; ayons bien<br />

confiance, le Seigneur, à travers les épreuves, daignera nous assister toujours. Jouissons<br />

aujourdʹhui du bonheur <strong>de</strong> renouveler à ses pieds notre consécration pour le servir dans la<br />

voie parfaite, voie dʹabnégation et <strong>de</strong> sacrifice absolu, mais voie où lʹon trouve la paix et<br />

qui mène droit au Cœur <strong>de</strong> Dieu.<br />

Nous allons chercher encore si nous avons un peu dʹai<strong>de</strong> à vous donner; un <strong>de</strong>s<br />

jeunes ff. <strong>de</strong> Nazareth, Paul Luzier, est languissant et ne peut presque remplir son emploi,<br />

nous sommes obligés <strong>de</strong> le faire suppléer. Nous allons cependant examiner bien attenti‐<br />

vement ce que nous pourrions faire <strong>de</strong> mieux.<br />

Il est bien tard; assurez tous nos frères, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> ma tendre affec‐<br />

tion, et recevez en plus, pour vous, mes sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> dévouement en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

723 à M. Guillot<br />

Conseils contre le découragement : faire <strong>de</strong> son mieux et laisser le succès à Dieu. Prier pour ses frères. Se confier<br />

aux ʺmoyens <strong>de</strong> foiʺ.<br />

Vaugirard, 25 novembre 1860<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Je nʹai pas pris dʹinquiétu<strong>de</strong> <strong>de</strong> votre <strong>de</strong>rnière lettre, parce quʹelle était évi<strong>de</strong>mment<br />

écrite dans un moment <strong>de</strong> découragement et que je vous sais assez bravement donné à<br />

Dieu pour être sûr que vous vous relevez vite après ces courts affaissements. Vous faites<br />

<strong>de</strong> votre mieux, cher ami, laissez le succès à Dieu; si vous ne réussissez pas toujours, humi‐<br />

820


liez‐vous et continuez votre route, la bénédiction du Seigneur viendra réparer ce que vous<br />

avez fait, si vous lʹavez fait en bonne et droite intention.<br />

Si vos jeunes compagnons ou frères ne vous donnent pas toujours contentement,<br />

priez pour eux, invoquez leurs S ts Anges, Marie, S t Vincent, ils les ramèneront à vous. En<br />

général, cher enfant, confiez‐vous beaucoup aux moyens <strong>de</strong> foi, lʹoraison, la S te Commu‐<br />

nion, quelques œuvres <strong>de</strong> pénitence.<br />

Adieu, bien cher ami, il est tard, je ne puis en dire plus, mais jʹachève le reste au<br />

Cœur <strong>de</strong> notre divin Jésus où je <strong>de</strong>meure bien intimement uni à vous.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

724 à M. Risse<br />

Comment, en sauvegardant les principes essentiels <strong>de</strong> la vie commune, MLP. sʹaccomo<strong>de</strong> aux nécessités du mo‐<br />

ment. Avant tout, lʹabnégation <strong>de</strong> soi‐même. Offre dʹenvoyer un visiteur officieux. Ne pas se préoccuper <strong>de</strong>s res‐<br />

sources matérielles.<br />

Vaugirard, 26 novembre 1860<br />

Bien cher Monsieur lʹabbé,<br />

A mesure que nous avançons et que nos communications nous rapprochent davan‐<br />

tage, je me félicite <strong>de</strong> plus en plus du bon mouvement qui vous a tourné <strong>de</strong> notre côté; jʹen<br />

bénis Dieu qui en est le principe et jʹy vois un témoignage <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> ses bontés pour notre<br />

petite famille. Je suis touché, en particulier, <strong>de</strong> votre ouverture <strong>de</strong> cœur, <strong>de</strong> votre bon vou‐<br />

loir si manifeste, <strong>de</strong> la simplicité profondément chrétienne <strong>avec</strong> laquelle vous entrez en<br />

nous. Soyez bien assuré que nous vous payons <strong>de</strong> retour, nous ne serons point en reste<br />

dʹaffection, <strong>de</strong> cordiale franchise et <strong>de</strong> dévouement pour vous et pour votre œuvre que<br />

nous considérons désormais comme nôtre, puisquʹelle est comme une partie <strong>de</strong> vous‐<br />

même. Aussi tout ce que vous pourrez souhaiter dʹesprit conciliant, <strong>de</strong> considération pour<br />

les besoins <strong>de</strong> votre position, vous le trouverez comme vous avez droit <strong>de</strong> vous y attendre;<br />

nous <strong>de</strong>vons sauvegar<strong>de</strong>r les principes essentiels <strong>de</strong> la vie commune, mais, ces principes<br />

admis, nous serons <strong>de</strong> bon accommo<strong>de</strong>ment dans la pratique, autant que le bien <strong>de</strong>s œu‐<br />

vres le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ra. Cʹest dire aussi que nous aurons tous les ménagements possibles pour<br />

les affections <strong>de</strong> famille et les <strong>de</strong>voirs que la Provi<strong>de</strong>nce vous a manifestement imposés. Je<br />

ne vois pas, cher Monsieur lʹabbé, dans tout ce que vous mʹavez écrit, le moindre obstacle<br />

sérieux; une chose domine tout et me donne espoir par‐<strong>de</strong>ssus tout, cʹest votre bon désir et<br />

votre franche abnégation; qui apporte <strong>avec</strong> soi pareille disposition montre quʹil vient au<br />

nom <strong>de</strong> Dieu, les bras se doivent ouvrir pour le recevoir; cʹest ce que je fais à cette heure,<br />

bien cher Monsieur lʹabbé, jʹouvre bien grands mes bras et mon cœur, vous assurant que<br />

tous parmi les nôtres sont unanimes <strong>avec</strong> moi.<br />

Je trouve très bien le règlement <strong>de</strong> vos petits exercices, ce sera le commencement <strong>de</strong><br />

votre entrée en Communauté. Vous serait‐il agréable quʹen attendant le moment encore<br />

éloigné <strong>de</strong> votre voyage à Paris, lʹun <strong>de</strong> mes ff. ecclésiastiques, lʹabbé Lantiez, par exemple,<br />

qui se sent gran<strong>de</strong> sympathie pour vous, allât, sans tapage bien entendu, vous rendre une<br />

petite visite? Il fraterniserait <strong>avec</strong> vous et <strong>avec</strong> votre petit cercle intime, vous donnerait tels<br />

renseignements qui vous sembleraient utiles et peut‐être ramènerait <strong>avec</strong> lui le bon cor‐<br />

donnier que vous offrez <strong>de</strong> nous envoyer. Je crois que cette disposition ne serait pas sans<br />

821


avantage et si, discrètement, on ne donnait à la venue <strong>de</strong> notre frère dʹautre importance ex‐<br />

térieure que celle dʹune visite dʹami et <strong>de</strong> confrère en patronage, elle nʹaurait pas pour vo‐<br />

tre entourage, non intime, <strong>de</strong> signification qui éveillât la curiosité. Voyez toutefois, bien<br />

cher Monsieur lʹabbé, ce quʹil vous semble <strong>de</strong> cette idée qui me passe par lʹesprit tout en<br />

vous écrivant et que jʹénonce sans grand examen. A propos du bon cordonnier, sʹil a <strong>de</strong> la<br />

piété, du dévouement réel et lʹindispensable <strong>de</strong>s qualités pour la vie commune, jʹai bien la<br />

confiance quʹil sʹaccoutumera parmi nous. Nous avons un f. allemand [Emes] qui nous est<br />

venu <strong>de</strong> Cologne, il y a quelques mois, et qui est un excellent sujet, ils parleront allemand<br />

ensemble; nous avons aussi un petit atelier <strong>de</strong> cordonnerie marchant bien, composé <strong>de</strong><br />

quelques enfants bons et dociles, il pourra les diriger.<br />

Je crois, cher Monsieur lʹabbé, que vous nʹavez pas à vous préoccuper beaucoup <strong>de</strong>s<br />

questions matérielles; vous vous accommo<strong>de</strong>rez, quand le moment sera venu pour vous<br />

<strong>de</strong> vivre <strong>avec</strong> quelques frères, <strong>de</strong>s moyens qui seront le mieux sous votre main et peu à<br />

peu la bonne Provi<strong>de</strong>nce, dans le soin <strong>de</strong> laquelle vous vous jetterez, saura vous fournir,<br />

au jour le jour, les éléments qui conviendront le mieux à votre situation. Nʹayez point <strong>de</strong><br />

souci non plus pour les ressources nécessaires à la subsistance <strong>de</strong> la communauté; comptez<br />

bien quʹen temps opportun le bon Maître suscitera tout ce dont vous aurez besoin par <strong>de</strong>s<br />

voies quʹIl sait et que sa bonté paternelle vous montrera. Vous savez ce quʹIl a dit aux apô‐<br />

tres en les envoyant; il parle encore <strong>de</strong> même à tous ceux qui, en son nom, évangélisent les<br />

pauvres et se dévouent, en désintéressement, au salut <strong>de</strong> leurs frères. Les moyens dʹexis‐<br />

tence <strong>de</strong> nos cinq communautés sont divers, mais aucune nʹavait <strong>de</strong> meilleures conditions<br />

que celles où vous vous trouvez et nulle nʹa jamais manqué du nécessaire; allez donc en<br />

confiance et dîtes comme S t François: Nous avons une mère (la Communauté) qui est bien<br />

pauvre, mais nous avons un Père (Dieu) qui est bien riche. Il aura pour vous, comptez‐y<br />

bien fermement, toutes les richesses dont vous aurez besoin, cʹest‐à‐dire le nécessaire et la<br />

joie <strong>de</strong> cœur quʹon trouve à son service.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, croyez à tous mes sentiments <strong>de</strong> tendre affection en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

725 à M. Halluin<br />

Chronique <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> la Communauté. Observations du frère Myionnet lors <strong>de</strong> son voyage à Arras et à Amiens.<br />

Lʹordination sacerdotale <strong>de</strong> MLP. est fixée au 22 décembre.<br />

7 décembre [1860]<br />

Vigile <strong>de</strong> lʹImmaculée Conception<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

M. Myionnet, à son retour, nous apporte, comme il arrive presque toujours dans les<br />

choses humaines, la part du bien et celle du mal dans les observations quʹil a pu faire du‐<br />

rant son court séjour à Arras et à Amiens. Bénissons le Seigneur <strong>de</strong> tout ce quʹIl fait et<br />

permet et comptons bien que sa Sagesse saura tout ramener à lʹavantage <strong>de</strong> ceux qui le<br />

servent. Les dispositions du f. Thuillier me contristent et me donnent <strong>de</strong> sérieuses inquié‐<br />

tu<strong>de</strong>s pour son avenir; cependant je ne désespérerais pas encore <strong>de</strong> lui sʹil avait le bon es‐<br />

prit <strong>de</strong> revenir près <strong>de</strong> nous, sinon à Vaugirard, à Nazareth par exemple, où il changerait<br />

ses occupations, étudierait un peu selon son désir et sentirait davantage lʹinfluence <strong>de</strong> la<br />

822


Communauté. Si vous trouvez encore quelque fond <strong>de</strong> bonne volonté chez lui, je vous prie<br />

<strong>de</strong> lʹincliner à ce parti. Sʹil en est autrement, nous laisserons faire ce que Dieu permet et, ne<br />

pouvant guérir ce pauvre enfant <strong>de</strong> ses illusions, nous le laisserons voir par lui‐même<br />

combien <strong>de</strong> déceptions lʹatten<strong>de</strong>nt dans ce mon<strong>de</strong> quʹil envie.<br />

Le jeune Théron va bien jusquʹici, nous augurons bien <strong>de</strong> lui, il semble simple et<br />

doux; jʹespère quʹil trouvera sa force où seulement on la doit chercher, en Dieu.<br />

M. François [Le Carpentier] a rappelé à M. Myionnet quʹil mʹavait <strong>de</strong>mandé permis‐<br />

sion <strong>de</strong> faire une absence <strong>de</strong> quelques jours seulement dans lʹintérêt <strong>de</strong> sa famille où il<br />

croit sa présence nécessaire; il est persuadé quʹen différant ce voyage, il risque dʹaggraver<br />

quelques difficultés qui pourraient présentement sʹarranger aisément. Je crois quʹon peut<br />

sʹen rapporter à lui et quʹil fera <strong>de</strong> son mieux pour abréger son absence. Je vous serai donc<br />

obligé <strong>de</strong> régler cette petite affaire <strong>avec</strong> lui.<br />

M. Lantiez va <strong>de</strong>main à Metz jusquʹà mercredi, pour visiter M. lʹabbé Risse qui dé‐<br />

sire sʹunir à nous; il dirige une œuvre <strong>de</strong> jeunes ouvriers fort intéressante, cʹest un saint<br />

prêtre et un excellent homme plein <strong>de</strong> zèle et <strong>de</strong> dévouement; il doit venir nous voir vers<br />

Pâques; il a quelques jeunes gens autour <strong>de</strong> lui qui désirent aussi se fondre à la Commu‐<br />

nauté; nous suivrons en tout cela la sainte volonté <strong>de</strong> Dieu, priez‐le <strong>avec</strong> nous, cher Mon‐<br />

sieur lʹabbé, <strong>de</strong> nous gui<strong>de</strong>r selon ses <strong>de</strong>sseins adorables.<br />

Je ne vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pas <strong>de</strong> vous souvenir <strong>de</strong> moi à lʹoccasion <strong>de</strong> lʹordination, vous<br />

en sentirez bien, ainsi que nos ff., la nécessité pour la Communauté comme pour moi. Je<br />

crois que je serais ordonné en particulier le 22, samedi. Le len<strong>de</strong>main, je me propose <strong>de</strong><br />

dire ma première messe à la chapelle <strong>de</strong> Nazareth, la nôtre paraissant être bien éloignée<br />

pour les quelques amis qui pourront désirer dʹy venir. Nous ferons une neuvaine avant<br />

lʹordination, invoquant particulièrement les S ts Patrons <strong>de</strong> notre Communauté, N.D. <strong>de</strong> la<br />

Salette et S t Pierre et S t Paul; je suis assuré que votre maison sʹunira à nous.<br />

M. Myionnet est revenu bien satisfait <strong>de</strong> son voyage; hors le f. Thuillier, il a trouvé<br />

tout le mon<strong>de</strong> bien disposé; il se loue surtout, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> votre sincère désir<br />

du bien et du parfait sacrifice que vous offrez à Dieu pour lʹavantage <strong>de</strong> vos enfants et <strong>de</strong><br />

vos frères. Je remercie sa divine miséricor<strong>de</strong> et le conjure dʹaccroître toujours la grâce en vous.<br />

Je suis, en toute affection et dévouement respectueux,<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

726 à M. Decaux<br />

MLP. se prépare à son ordination sacerdotale et ajourne sa réponse à M. Decaux.<br />

Vaugirard, 13 décembre 1860<br />

Mon bien bon ami,<br />

Quelques jours à peine me restent pour me préparer à lʹordination, cʹest un <strong>de</strong>voir<br />

pour moi <strong>de</strong> les donner tout à Dieu; je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> donc permission <strong>de</strong> mʹoccuper seu‐<br />

lement après cette grave solennité, <strong>de</strong> lʹaffaire dont vous mʹavez entretenu par votre lettre<br />

du 12 <strong>de</strong> ce mois.<br />

Je compte bien, cher ami et frère, sur votre appui <strong>de</strong>vant Dieu en cette circonstance<br />

si importante pour moi et je vous assure que, <strong>de</strong> mon côté, je ne saurais vous oublier.<br />

Croyez bien à tous mes sentiments <strong>de</strong> profon<strong>de</strong> affection en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

823


727 à M. Halluin<br />

Retraite préparatoire au sacerdoce. Question <strong>de</strong> lʹadmission dʹun prêtre étranger à la Communauté.<br />

Vaugirard, 16 décembre 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Jʹentre en retraite ce soir; avant dʹen commencer les exercices, je vous écris <strong>de</strong>ux li‐<br />

gnes pour vous dire que la démarche faite par M. Myionnet près du Supérieur <strong>de</strong>s PP. <strong>de</strong><br />

la Miséricor<strong>de</strong> nʹa point réussi. Si le prêtre qui vous est offert peut vous rendre <strong>de</strong>s servi‐<br />

ces, sans nuire au libre mouvement et à lʹintimité <strong>de</strong> la famille, je crois quʹon pourrait es‐<br />

sayer si son concours peut vous être utile.<br />

Rien <strong>de</strong> notable en ce moment. Mgr dʹAngers toutefois, <strong>de</strong> passage à Paris, nous est<br />

venu voir et a dit la messe chez nous, ce matin; cʹest toujours une joie pour nous <strong>de</strong> le voir.<br />

Je joins <strong>de</strong>ux mots pour le f. Thuillier. Nos ff. prient ici tous les jours pour lʹordina‐<br />

tion. Je compte aussi sur vos bons souvenirs <strong>de</strong>vant Dieu.<br />

Votre tout affectionné en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je vous prie <strong>de</strong> dire au f. Alphonse [Vasseur] que son frère sʹest remis <strong>de</strong> lui‐<br />

même en paix et en meilleure disposition.<br />

728 à M. Decaux<br />

Réponse à la Société <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul au sujet <strong>de</strong> la propriété <strong>de</strong>s immeubles <strong>de</strong> Nazareth et <strong>de</strong> Grenelle.<br />

Vaugirard, 24 décembre 1860<br />

Mon bien bon ami,<br />

Je réponds <strong>avec</strong> le moins <strong>de</strong> retard possible à lʹinvitation que vous mʹavez faite <strong>de</strong><br />

chercher <strong>avec</strong> vous les moyens dʹassurer les droits que peut avoir la Société <strong>de</strong> St ‐Vincent<br />

<strong>de</strong> Paul sur les <strong>de</strong>ux établissements <strong>de</strong> Nazareth et <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Grâce. Jʹai prié Dieu, avant<br />

tout, <strong>de</strong> mʹéclairer, afin <strong>de</strong> ne rien dire qui ne fût selon la charité, selon votre cœur consé‐<br />

quemment. 313<br />

Il me semble tout dʹabord quʹ<strong>avec</strong> le bon vouloir qui nous anime <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts, il<br />

nʹest pas bien difficile <strong>de</strong> trouver, sur le point dont il sʹagit, une solution satisfaisante. Il<br />

suffit pour cela, à mon sens, dʹétudier les conduites <strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce dans la formation <strong>de</strong>s<br />

établissements en question et <strong>de</strong> sʹy conformer en toute simplicité. Et dʹabord, il a plu à sa<br />

divine Sagesse que lʹinitiative et la responsabilité <strong>de</strong> ces établissements fussent acceptées<br />

par moi, au refus <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> St ‐Vincent <strong>de</strong> Paul, et que le fond essentiel <strong>de</strong> la fonda‐<br />

tion fût le résultat <strong>de</strong> mon labeur et <strong>de</strong> mes soins; je crois quʹil convient <strong>de</strong> tenir compte <strong>de</strong><br />

ce premier fait. Par un effet aussi <strong>de</strong> la volonté <strong>de</strong> Dieu, mes forces ayant défailli dans<br />

lʹexécution <strong>de</strong> lʹœuvre <strong>de</strong> Nazareth en particulier, nos amis, et vous à leur tête, mon bien<br />

bon ami et frère, vous êtes venus à mon ai<strong>de</strong> par un pur mouvement <strong>de</strong> générosité et dʹaf‐<br />

fection dans le principe, et plus tard dans lʹintérêt aussi <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> St ‐Vincent <strong>de</strong> Paul<br />

dont vous désiriez favoriser ainsi les œuvres. Jʹaccepte, comme la première, cette secon<strong>de</strong><br />

disposition où je vois encore lʹaction du Dieu <strong>de</strong> charité. Il a voulu, jʹen suis profondément<br />

convaincu, que nos efforts fussent unis et, en surajoutant vos peines et celles <strong>de</strong> nos<br />

Confrères aux miennes, Il a tendu à resserrer les liens qui <strong>de</strong>vaient nous associer dans lʹin‐<br />

térêt du bien. Mais ici, vous observez justement que, si le mouvement premier et les tra‐<br />

313 Les ASV. possè<strong>de</strong>nt un brouillon très travaillé <strong>de</strong> cette lettre.<br />

824


vaux <strong>de</strong> notre Communauté pour la fondation <strong>de</strong>s Maisons en question sont constatés par<br />

les garanties et titres qui restent entre ses mains, le concours donné ensuite par vous et par<br />

nos Confrères <strong>de</strong>meure jusquʹici sans reconnaissance expresse et sans droit formel. Je<br />

pense <strong>avec</strong> vous, mon bon ami, que les hommes les meilleurs et les plus dévoués ont leurs<br />

moments <strong>de</strong> passion ou dʹillusion, que les malentendus adviennent même parmi les servi‐<br />

teurs <strong>de</strong> Dieu, quʹil peut‐être sage, conséquemment, que la Société <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul<br />

sʹassure quelques garanties représentant lʹappui et le concours quʹelle a donnés à ces <strong>de</strong>ux<br />

établissements. A mon avis, elle les aurait avantageusement en prenant sur les <strong>de</strong>ux im‐<br />

meubles une hypothèque proportionnée aux sommes quʹelle a procurées ou quʹelle pour‐<br />

rait encore procurer. Ce moyen, qui sauvegar<strong>de</strong>rait équitablement ses droits, confirmerait<br />

en même temps pour lʹavenir lʹassociation <strong>de</strong> nos travaux et <strong>de</strong> ceux <strong>de</strong> la Société, car les<br />

hypothèques en question représenteraient nécessairement <strong>de</strong>s sommes trop considérables<br />

pour quʹon pût aisément se dégager dʹune part ou dʹune autre.<br />

Je nʹai pas vu, mon cher ami, après mûr examen, <strong>de</strong> moyen plus simple et plus sûr<br />

<strong>de</strong> donner satisfaction à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> que vous mʹavez faite; jʹespère quʹil vous paraîtra,<br />

ainsi quʹà nos Confrères, tel que vous le souhaitiez. Je ne saurais, du reste, assez vous rap‐<br />

peler que vos vues et les nôtres sont absolument i<strong>de</strong>ntiques: procurer à la Société <strong>de</strong> S t ‐<br />

Vincent <strong>de</strong> Paul, comme à notre Communauté qui lui est toute dévouée, un asile pour les<br />

œuvres, faire <strong>de</strong> ces œuvres <strong>de</strong>s occasions <strong>de</strong> sanctification pour ceux qui sʹy emploient et<br />

<strong>de</strong>s moyens <strong>de</strong> salut pour ceux qui en sont lʹobjet; cʹest, pour vous comme pour nous,<br />

lʹunique fin que nous voulons atteindre.<br />

Quelquefois la pensée mʹest venue quʹaccablé <strong>de</strong>s charges multipliées que vos œu‐<br />

vres font peser sur vous, vous me sauriez gré <strong>de</strong> reprendre, au moins momentanément, le<br />

soin <strong>de</strong> chercher les ressources pour amoindrir les <strong>de</strong>ttes qui grèvent encore Nazareth et<br />

N.D. <strong>de</strong> Grâce. Jʹai été arrêté surtout par la crainte <strong>de</strong> nʹy réussir que faiblement dans les<br />

conditions <strong>de</strong> santé et <strong>de</strong> retraite obligée où je me trouve, et <strong>de</strong> reculer ainsi indéfiniment<br />

le moment où nos œuvres jouiront, sans frais <strong>de</strong> loyer, <strong>de</strong>s locaux qui les abritent. Je laisse<br />

toutefois la question à votre appréciation et, si vous trouviez en cela quelque soulagement,<br />

soyez assuré, mon bon ami, que jʹemploierais, tant bien que mal, mon reste <strong>de</strong> forces pour<br />

vous le procurer.<br />

Je <strong>de</strong>meure comme toujours, <strong>avec</strong> une cordiale et inaltérable affection,<br />

Votre tout dévoué ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

729 à M. Decaux<br />

Ordination sacerdotale du Père Fondateur. 314 Invitation à venir fêter la St‐<strong>Jean</strong>.<br />

26 décembre [1860] ‐ Saint Etienne<br />

Mon bien cher ami,<br />

Les préoccupations concernant lʹordination à laquelle je <strong>de</strong>vais prendre part nous<br />

ont tout à fait empêchés <strong>de</strong> songer à la fête <strong>de</strong> St <strong>Jean</strong> que nous solennisons ici ordinairement,<br />

314 La cérémonie a eu lieu le samedi 22 décembre, dans le sanctuaire <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette que MLP. lui-même avait fait élever. C’est<br />

<strong>de</strong>s mains <strong>de</strong> Mgr Salzano, évêque dominicain, titulaire <strong>de</strong> Tanaïs, que MLP. reçoit l’ordination. La cérémonie a commencé à 9h.<br />

et a fini à 10h30, dit le Journal <strong>de</strong> la Maison-Mère. Le len<strong>de</strong>main, le nouveau prêtre dit sa première messe dans la chapelle <strong>de</strong><br />

N.D. <strong>de</strong> Nazareth « au milieu <strong>de</strong> ses nombreux amis, <strong>de</strong> ses confrères <strong>de</strong> St-Vincent-<strong>de</strong>-Paul, <strong>de</strong>s orphelins dont il était le père, <strong>de</strong>s<br />

Sœurs <strong>de</strong> charité et <strong>de</strong>s pieuses dames qui l’ont aidé dans toutes ses bonnes œuvres ». Cf. Maxime <strong>de</strong> Montrond, « Une première<br />

messe à N.D. <strong>de</strong> Nazareth, in Sous la tente d’un casino, 1869.<br />

825


nous la ferons donc cette année tout à fait en famille; cʹest une raison <strong>de</strong> plus, ce me sem‐<br />

ble, pour que vous vous joigniez à nous; si le mauvais temps ne vous effrayait pas trop,<br />

nous serions bien heureux, moi surtout, mon bien cher ami, qui sens le besoin <strong>de</strong> vous<br />

embrasser et, pourquoi ne le dirais‐je pas, <strong>de</strong> vous faire participer aux grâces que le Sei‐<br />

gneur a daigné répandre sur moi. Je vous ai aperçu, non sans émotion, à Nazareth; dites à<br />

M. Baudon que jʹai pensé quʹil nʹy était pas, puisque je ne lʹai point vu à la Communion,<br />

seul moment où jʹai pu distinguer quelques‐uns <strong>de</strong> ceux qui étaient assemblés. Offrez‐lui<br />

mon respect et partagez <strong>avec</strong> lui, mon bon ami, les sentiments dʹaffectueux dévouement<br />

<strong>avec</strong> lesquels je suis<br />

Tout vôtre en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. M. Dupaigne viendra, et je crois<br />

aussi M. Bénard. M. Caille doit aussi venir à<br />

Paris aujourdʹhui, il sera heureux <strong>de</strong> vous voir.<br />

5h. ‐ Petites vêpres, quelques mots et<br />

salut.<br />

6h. ‐ Dîner.<br />

7h. ‐ Petit et très court délassement <strong>de</strong>s<br />

enfants, départ <strong>de</strong> bonne heure.<br />

730 à M. Risse<br />

Unité dʹesprit entre M. Risse et la Congrégation. MLP.lui fait<br />

parvenir le Règlement. Difficultés que peut éprouver un ancien<br />

curé à se plier à la vie commune.<br />

Vaugirard, 29 décembre 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Les préoccupations et solennités si graves<br />

concernant mon ordination, une fête <strong>de</strong> famille<br />

qui sʹest faite après, le 27, et les soins multipliés<br />

<strong>de</strong> nos œuvres ne mʹont pas laissé, ces temps<br />

<strong>de</strong>rniers, une seule minute pour répondre à<br />

votre <strong>de</strong>rnière et affectueuse épître. Cʹest une<br />

gran<strong>de</strong> joie pour moi, comme pour ceux qui<br />

mʹentourent, <strong>de</strong> vous voir si bien comprendre<br />

par le cœur lʹesprit <strong>de</strong> notre petite famille, et<br />

nous sommes pleins dʹespoir que votre union<br />

<strong>avec</strong> nous, déjà consommée intérieurement, sʹeffectuera en réalité sans difficulté aucune,<br />

cordiale, dévouée et bénie <strong>de</strong> Dieu; nous dirons alors ensemble lʹecce quam bonum et quam<br />

jucundum.<br />

Ces quelques lignes ont déjà été interrompues plusieurs fois; comme les embarras<br />

du nouvel an commencent déjà, jʹaime mieux, pour aujourdʹhui, brusquer un peu cette épî‐<br />

tre, afin quʹelle ne soit pas encore renvoyée à un autre jour. Je voulais vous remercier du<br />

bon accueil que vous avez fait à notre f. Lantiez; il est revenu content <strong>de</strong> tous et <strong>de</strong> tout; il<br />

826


sʹest trouvé chez vous et dans votre œuvre dans son air accoutumé, sans changement ap‐<br />

préciable; par le fait, le bon Dieu nous avait faits les uns pour les autres, il ne restait quʹà<br />

nous rapprocher, sa douce Provi<strong>de</strong>nce y a pourvu.<br />

Nous recevrons à bras ouverts vous et vos bons jeunes gens (5, sʹil se peut et plus si<br />

Dieu le veut), quand vous nous viendrez en février. A cette époque, notre <strong>de</strong>meure est en‐<br />

core un peu sauvage, mais, au premier rayon <strong>de</strong> soleil, on se plaît chez nous, à cause du<br />

contraste <strong>de</strong> notre paix <strong>avec</strong> le tapage <strong>de</strong> lʹintérieur <strong>de</strong> Paris. Je recevrai <strong>avec</strong> plaisir une<br />

lettre du jeune ecclésiastique dont vous me parlez, si vous pensez quʹon puisse espérer<br />

quʹil nʹa été inconstant que faute dʹavoir trouvé, dès lʹabord, sa place. Ne craignez‐vous<br />

pas aussi quʹayant été Curé, ayant joui dʹune liberté presque trop gran<strong>de</strong> (car cʹest là la po‐<br />

sition du prêtre à la campagne), il ne trouve lourds et gênants les assujettissements et dé‐<br />

pendances quʹentraîne la vie commune? Voyez, cher Monsieur lʹabbé, si vous connaissez<br />

un peu ce bon ecclésiastique, si vous avez un peu confiance, nous essaierons <strong>de</strong> grand<br />

cœur; les ouvriers évangéliques manquent si fort dans les œuvres quʹun homme <strong>de</strong> cœur<br />

et <strong>de</strong> zèle est un vrai trésor pour nous.<br />

Je vous envoie le règlement; quelques petites retouches <strong>de</strong> détail seraient à faire en<br />

suite <strong>de</strong> la détermination nette qui a été prise <strong>de</strong> choisir exclusivement le chef <strong>de</strong> la famille<br />

parmi les ff. ecclésiastiques; passez outre si quelques détails vous semblent manquer<br />

dʹharmonie <strong>avec</strong> le reste; prenez le fond, cʹest lʹessentiel; les gloses et indications <strong>de</strong> détail<br />

sont commencées, mais non finies, et ne sont point portées sur lʹexemplaire que je vous<br />

envoie.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, je finis lʹannée <strong>avec</strong> vous; le commencement <strong>de</strong> lʹautre<br />

nous trouvera bientôt réunis; puisse cette fusion <strong>de</strong> nos cœurs et <strong>de</strong> tous nos moyens être<br />

pour la gloire <strong>de</strong> Dieu et pour lʹavancement spirituel <strong>de</strong> nos âmes. En suite <strong>de</strong> mon ordina‐<br />

tion, jʹai béni tous mes frères ou fils en N.S., dites à vos bons jeunes gens que je me sens dé‐<br />

jà leur Père et que je les bénis <strong>avec</strong> les autres, et vous‐même, cher Monsieur lʹabbé, je vous<br />

recomman<strong>de</strong> aux tendres miséricor<strong>de</strong>s du Seigneur et le prie <strong>de</strong> vous combler <strong>de</strong> ses dons<br />

les plus précieux.<br />

Je vous embrasse tous et suis bien affectueusement<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

731 à M. Halluin<br />

Fêtes <strong>de</strong> lʹordination sacerdotale et <strong>de</strong> la St‐<strong>Jean</strong>. Avantages <strong>de</strong>s changements <strong>de</strong> lieux pour les persévérants.<br />

Vaugirard, 30 décembre 1860<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Tous nos frères <strong>avec</strong> moi ont été touchés <strong>de</strong> lʹaimable pensée que vous avez eue <strong>de</strong><br />

nous rendre une petite visite à lʹoccasion <strong>de</strong> lʹordination et <strong>de</strong> la St <strong>Jean</strong>; par votre présence<br />

et celle <strong>de</strong> M. Caille, toute la famille se trouvait représentée et nous pouvions <strong>de</strong> cœur ré‐<br />

péter lʹEcce quam jucundum...<br />

Je nʹai point oublié la promesse que je vous avais faite <strong>de</strong> songer à vos affaires. Je<br />

mʹen suis entretenu <strong>de</strong> nouveau <strong>avec</strong> MM. Myionnet et Lantiez. Nous sommes convenus<br />

que nous enverrions notre jeune Mesny pour vous ai<strong>de</strong>r jusquʹà ce que nous ayons pu dé‐<br />

827


gager le sujet que nous vous <strong>de</strong>stinons. Mesny est très bon enfant, doux, maniable, intelli‐<br />

gent, bien instruit et qui peut avoir un bon avenir. Jʹespère que le séjour dʹArras le fortifie‐<br />

ra et ai<strong>de</strong>ra à former son expérience. Nous avons, en général, trouvé <strong>de</strong> bons effets dans<br />

ces changements momentanés <strong>de</strong> lieux et <strong>de</strong> personnes, pour nos jeunes aspirants.<br />

Jʹécris un mot ci‐joint au f. Firmin [Thuillier] pour lʹinviter à nous venir rejoindre ici.<br />

Je vous prie <strong>de</strong> lui dire quʹil me semble inutile quʹil allonge son voyage en sʹarrêtant à<br />

Amiens et quʹil semble mieux quʹil fasse droit chemin.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, je vous offre les vœux <strong>de</strong> tout mon entourage et les<br />

miens propres pour vous, pour votre Communauté et pour vos chers enfants.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

732 à M. Risse<br />

Les difficultés du <strong>de</strong>rnier moment avant le sacrifice <strong>de</strong> lʹunion à lʹInstitut. Modération <strong>avec</strong> laquelle MLP. sou‐<br />

haite lʹextension <strong>de</strong> ses œuvres. Générosité <strong>de</strong> ses attentions pour lʹŒuvre <strong>de</strong> Metz.<br />

Vaugirard, 3 janvier 1861<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Nous accueillerons à cœur ouvert et vous et les bons jeunes gens que vous <strong>de</strong>vez<br />

nous amener le lundi 4 février. Jʹenverrai au <strong>de</strong>vant <strong>de</strong> vous quelquʹun <strong>de</strong> nos MM. qui<br />

vous connaisse, M. Lantiez par exemple, ou M. Maignen, ou quelque autre <strong>de</strong> vous connu.<br />

Nous avions pressenti que vous aviez éprouvé quelques difficultés aux approches<br />

du moment décisif, les moins hardis alors sont dʹordinaire pris dʹun peu <strong>de</strong> tremblement,<br />

mais ils se raffermiront, lʹexemple <strong>de</strong>s autres les entraînera et, au temps marqué par le Sei‐<br />

gneur, ils consommeront aussi leur sacrifice. En y réfléchissant aussi, nous avions conçu<br />

quelque inquiétu<strong>de</strong> sur le vi<strong>de</strong> que ferait pour votre œuvre lʹabsence simultanée <strong>de</strong> quatre<br />

ou cinq <strong>de</strong> vos sujets les plus utiles et les plus dévoués; peut‐être sera‐t‐il mieux quʹils ne<br />

partent quʹà <strong>de</strong>s intervalles assez marqués pour que vous ayez le loisir <strong>de</strong> remplir succes‐<br />

sivement les places quʹils auront laissées vi<strong>de</strong>s. Voilà, cher Monsieur lʹabbé, les pensées<br />

que nous avions eues <strong>de</strong> nous‐mêmes; nous nʹavons donc été ni surpris, ni contrariés dʹun<br />

changement qui peut avoir ses avantages bien réels et que Dieu a sans doute préparé dans<br />

sa tendre miséricor<strong>de</strong>. Je ne saurais assez vous assurer <strong>de</strong> notre sincère désir <strong>de</strong> tout pren‐<br />

dre au point <strong>de</strong> vue du bien <strong>de</strong> votre œuvre; nous ne voulons lʹagrandissement <strong>de</strong> notre<br />

petite famille quʹautant quʹil sera un moyen <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> faire le bien et aux œuvres et aux<br />

membres qui sʹuniront à nous. Nʹayez non plus nul souci, cher Monsieur lʹabbé, relative‐<br />

ment au trousseau <strong>de</strong> vos jeunes gens et nʹimposez pour cela aucun sacrifice à votre caisse,<br />

nos frères se contentent en général du nécessaire seul, il ne faut pas <strong>de</strong> grands frais pour y<br />

pourvoir.<br />

Jʹai tardé à vous écrire à cause <strong>de</strong> la multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s occupations qui nous assiègent;<br />

par la même raison, je tourne ici bien court, mais je me dédommagerai <strong>de</strong> cette nécessité<br />

bien prochainement, puisque le Seigneur me ménage la consolation <strong>de</strong> vous voir dans<br />

quelques jours. La saison est encore bien sévère, mais vos bons jeunes gens apporteront<br />

dans leurs âmes la force, le courage et lʹar<strong>de</strong>nte charité qui fait tout accepter et tout aimer.<br />

Embrassez‐les tendrement tous pour moi, et ceux qui viennent, et ceux qui restent; ils sont<br />

tous mes enfants et je prie le Seigneur <strong>de</strong> les bénir.<br />

828


A vous, cher Monsieur lʹabbé, mille respectueuses affections <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

733 à M. Maignen<br />

M. Maignen peut collaborer au Jeune Ouvrier sous le contrôle <strong>de</strong> MLP. Conseils dʹobéissance.<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Je crains <strong>de</strong> ne vous avoir pas<br />

assez expliqué ma pensée hier au sujet<br />

du petit journal Le Jeune Ouvrier 315 ; je<br />

nʹai pas en vue <strong>de</strong> vous empêcher<br />

entièrement dʹy donner quelque<br />

coopération, mais je crois tout à fait<br />

impossible que vous y preniez<br />

présentement une part influente et très<br />

active. Je désire aussi, comme nous en<br />

sommes convenus, que vous nʹy<br />

Vaugirard, 5 janvier 1861<br />

envoyiez rien sans que je lʹaie vu; <strong>de</strong> cette façon, je<br />

pourrais plus convenablement déterminer la<br />

mesure <strong>de</strong> votre concours à cette bonne œuvre,<br />

louable sans doute, mais qui, pour le moment,<br />

vous chargerait évi<strong>de</strong>mment, si vous ne vous y<br />

engagiez <strong>avec</strong> une extrême réserve.<br />

Jʹavais dit la S te Messe hier pour vous; je ne<br />

manquerai pas <strong>de</strong> me souvenir habituellement <strong>de</strong><br />

vous au S t Sacrifice; jʹespère bien, cher enfant, que<br />

vous retrouverez une paix parfaite; elle sera<br />

assurément pour vous dans un abandon simple et<br />

filial <strong>de</strong> votre cœur et <strong>de</strong> votre esprit aux mains <strong>de</strong><br />

Dieu par une franche et cordiale obéissance.<br />

Adieu, bien cher enfant, je crois que nous<br />

sommes déjà dans cette voie et que la grâce du<br />

Seigneur nous y soutiendra miséricordieusement.<br />

315 Le Jeune Ouvrier, revue mensuelle, publiée à Angers. Ce fut, en France, le premier périodique <strong>de</strong>stiné aux œuvres ouvrières catholiques.<br />

Fondé en 1856 par l’abbé Boucher, il était conçu comme bulletin <strong>de</strong> liaison, organe <strong>de</strong> propagan<strong>de</strong>, journal <strong>de</strong>s directeurs<br />

d’œuvres, et tribune libre où l’on discutait <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s et <strong>de</strong>s principes. Il donnera naissance en 1861 au journal l’Ouvrier,<br />

placé sous le patronage <strong>de</strong> Mgr <strong>de</strong> Ségur.<br />

829


Je vous embrasse <strong>avec</strong> une tendre<br />

affection.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

734 316<br />

735 à M. Baudon317 Question <strong>de</strong> la propriété <strong>de</strong>s immeubles <strong>de</strong><br />

Nazareth et <strong>de</strong> Grenelle.<br />

Vaugirard, 17 janvier 1861<br />

Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt Général,<br />

Je vous remercie bien cordialement <strong>de</strong>s dispositions bienveillantes que vous me<br />

manifestez dans la lettre que vous mʹavez fait lʹhonneur <strong>de</strong> mʹécrire le 7 <strong>de</strong> ce mois, relati‐<br />

vement aux <strong>de</strong>ux maisons <strong>de</strong> Nazareth et <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Grâce. Je souhaite bien ar<strong>de</strong>mment<br />

aussi pour ma part que cette affaire soit réglée à notre satisfaction commune et je nʹen dé‐<br />

sespère pas, puisque <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux côtés nous ne cherchons que la gloire <strong>de</strong> Dieu et le bien <strong>de</strong>s<br />

âmes.<br />

Il me semble toutefois, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt, quʹon nʹarriverait pas à cette fin au<br />

moyen <strong>de</strong> lʹarrangement que vous me proposez et qui comporterait: 1° concession par<br />

nous à la Société <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul <strong>de</strong> lʹusage libre et gratuit <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux immeubles en<br />

question durant 30 ans; 2° lʹengagement par notre Communauté <strong>de</strong> concourir, pendant le<br />

même laps <strong>de</strong> temps aux œuvres que dirige la Société dans ces Maisons; 3° enfin, lʹaccepta‐<br />

tion aussi par nous seuls <strong>de</strong> toutes les dépenses restant à faire pour compléter la fondation<br />

<strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux établissements. Je vous avoue, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt, que le simple énoncé <strong>de</strong><br />

ces conditions me paraît suffire pour montrer combien il nous serait impossible dʹy sous‐<br />

crire. Comment, en effet, une Communauté, fût‐elle sʹil se peut plus humble et moins forte<br />

que la nôtre, consentirait‐elle jamais à se lier en engageant formellement ses services pour<br />

un temps si considérable? Comment renoncerait‐elle bénévolement à tout droit sur <strong>de</strong>s<br />

établissements quʹelle aurait fondés? Comment enfin, dans <strong>de</strong> telles conditions, assume‐<br />

rait‐elle pour elle seule <strong>de</strong>s charges énormes qui seraient encore à prévoir pour leur com‐<br />

plément? Il me semble que, dans cet état <strong>de</strong> choses, lʹune <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parties, entièrement sa‐<br />

crifiée à lʹautre, se trouverait tellement déprimée quʹelle ne saurait se mouvoir et <strong>de</strong>vrait<br />

bientôt quitter la place. Rien dans les faits concernant la fondation <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux établisse‐<br />

ments, ne comman<strong>de</strong> <strong>de</strong> tels sacrifices <strong>de</strong> notre part et je croirais, en les acceptant, trahir<br />

les intérêts <strong>de</strong> notre Communauté. Je ne porterais pas moins préjudice, à mon sens, à ceux<br />

<strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul, car, en détruisant lʹordre que la Provi<strong>de</strong>nce a établi<br />

dans les œuvres en question pour y substituer une combinaison factice, je les engagerais<br />

dans une voie ardue et incertaine où elles ne sauraient <strong>de</strong>meurer en paix. Jʹaccepte <strong>de</strong> plein<br />

316<br />

Suppléée par la lettre 660 bis.<br />

317<br />

Aux ASV., copie et brouillon très soignés <strong>de</strong> cette lettre. Sont aussi répertoriées diverses notes et conventions <strong>de</strong> MLP. concernant<br />

cette affaire.<br />

830


cœur la situation telle que Dieu lʹa faite: la direction par la Société <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul<br />

dans les œuvres bien quʹelles aient été créées principalement par nous, jʹadmets notre<br />

concours dévoué et déférent à ces œuvres, mais sans y joindre la contrainte quʹy mettrait<br />

un engagement en forme. Jʹai toujours souhaité, et je souhaite sincèrement que la Société<br />

<strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul jouisse gratuitement <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux établissements en question, mais il me<br />

semble <strong>de</strong> toute justice, puisque ses œuvres les occupent, quʹelle paie les intérêts <strong>de</strong>s<br />

sommes restant dues ou <strong>de</strong> celles qui y seraient encore engagées tant quʹelles nʹauraient<br />

pas été acquittées par les dons <strong>de</strong> la charité. Il en <strong>de</strong>vrait être <strong>de</strong> même <strong>de</strong>s charges locatives.<br />

On ne saurait, je crois, contester lʹéquité et le bon vouloir <strong>de</strong> ces dispositions. Mais,<br />

comme on peut souhaiter que lʹétat actuel, si sagement pondéré comme tout ce que règle la<br />

Provi<strong>de</strong>nce, ne soit pas défait dʹune part plus que <strong>de</strong> lʹautre, jʹaccepte <strong>avec</strong> une sorte <strong>de</strong> joie<br />

les obstacles quʹElle a mis Elle‐même à sa <strong>de</strong>struction et je les préciserai volontiers, ainsi<br />

que je lʹai déjà proposé, en reconnaissant, par un titre régulier, les charges considérables<br />

qui <strong>de</strong>vraient peser sur nous si nous nous séparions <strong>de</strong> la Société ou si elle se retirait <strong>de</strong><br />

nous. Il me semble, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt, quʹon nʹa pas assez considéré tout ce que cette<br />

confirmation <strong>de</strong> la situation présente, laquelle nous fait vivre dans lʹordre, dans la paix et<br />

la charité, avait <strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nt et dʹavantageux tout ensemble et combien il serait hasar<strong>de</strong>ux<br />

<strong>de</strong> la changer; jʹose <strong>de</strong> nouveau appeler votre attention sur ce point que je crois capital.<br />

Pour moi, je ne crois pas quʹon puisse équitablement rien nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong> plus et, pour<br />

le bien <strong>de</strong>s œuvres comme <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux Sociétés, je me sens obligé <strong>de</strong> rester dans ces termes.<br />

Je ne doute pas, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt, que vous ne soyez pénétré comme moi <strong>de</strong><br />

cette pensée que les liens les plus puissants pour nous attacher <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts sont et se‐<br />

ront toujours ceux <strong>de</strong> lʹaffection, <strong>de</strong> la reconnaissance et <strong>de</strong> la charité; les autres seraient<br />

toujours insuffisants, en effet, si ceux‐là venaient jamais à se briser; il me semble donc que<br />

nous <strong>de</strong>vons prendre à tâche, et maintenant et dans la suite, <strong>de</strong> nʹy porter aucune atteinte,<br />

afin <strong>de</strong> rester forts par lʹintime union <strong>de</strong> nos cœurs comme <strong>de</strong> tous nos moyens; jʹen<br />

prends <strong>de</strong> mon côté lʹengagement bien sincère et jʹespère, <strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> Dieu, ne mʹen<br />

point départir.<br />

Je <strong>de</strong>meure, Monsieur Le Prési<strong>de</strong>nt, dans ces sentiments,<br />

Votre affectionné et respectueux serviteur et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je vous prie dʹexcuser le retard apporté à ma réponse; la rigueur <strong>de</strong> la saison<br />

mʹa, ces jours‐ci, rendu plus souffrant et mʹa contraint dʹinterrompre momentanément tout<br />

travail.<br />

736 à M. Halluin<br />

Inconvénients <strong>de</strong>s changements <strong>de</strong> personnel trop fréquents. Prières pour une vocation ébranlée.<br />

Vaugirard, 20 janvier 1861<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je viens dʹécrire au f. Alphonse [Vasseur] dans le sens <strong>de</strong> votre lettre; je verrais,<br />

comme vous, <strong>avec</strong> une peine véritable que nous fussions encore obligés à quelque chan‐<br />

gement qui, je le crains, serait un détriment pour nos œuvres. Jʹespère quʹil va rentrer en<br />

lui‐même et reconnaître quʹil a eu une mauvaise inspiration. Je vais prier pour lui. Je suis<br />

831


tout heureux <strong>de</strong> trouver dans le S t Sacrifice <strong>de</strong> nouvelles ressources et une force plus<br />

gran<strong>de</strong> pour servir notre petite famille.<br />

Mille affections <strong>de</strong> tous ici pour vous, cher Monsieur lʹabbé, et pour votre maison.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

737 à M. Halluin<br />

Consolation dans les épreuves. Conseils <strong>de</strong> bienveillance et dʹappui à donner aux surveillants.<br />

Vaugirard, 22 janvier 1861<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je partage bien votre peine et je sens <strong>avec</strong> vous le poids <strong>de</strong>s difficultés que vous<br />

rencontrez si souvent pour maintenir votre œuvre dans lʹordre et dans la paix. Dieu seul<br />

peut vous bien consoler, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> toutes ces tribulations que vous avez ac‐<br />

ceptées pour Lui. Je lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> répandre sur vous lʹesprit <strong>de</strong> force, <strong>de</strong> patience et <strong>de</strong><br />

longanimité que veut une situation si éprouvante. Jʹai la confiance quʹIl continuera <strong>de</strong> vous<br />

lʹaccor<strong>de</strong>r et quʹau jour le jour son secours vous sera toujours présent.<br />

Je ne puis absolument apprécier, nʹétant pas sur les lieux, les quelques embarras<br />

quʹéprouve <strong>de</strong> son côté, M. Alphonse [Vasseur], je mʹen rapporte à votre pru<strong>de</strong>nce et à vo‐<br />

tre charité pour lʹappuyer le mieux que vous le pourrez et fortifier son autorité autant que<br />

les circonstances le permettront. La position dʹun surveillant en second est toujours bien<br />

difficile et <strong>de</strong>man<strong>de</strong> bien <strong>de</strong> lʹabnégation. Nous ne <strong>de</strong>vons pas nous étonner si parfois, en<br />

cette condition, on trouve la charge un peu lour<strong>de</strong> et si lʹon est tenté, dans ses peines, <strong>de</strong><br />

sʹen prendre un peu à tout et à tous.<br />

Du reste, pour tâcher <strong>de</strong> bien rasseoir M. Alphonse et remettre le calme dans son<br />

esprit, je vais envoyer M. Myionnet passer quelques jours près <strong>de</strong> vous. Je pense que ses<br />

entretiens <strong>avec</strong> ce jeune frère auront pour résultat <strong>de</strong> le ramener aux sentiments <strong>de</strong> bon<br />

vouloir et <strong>de</strong> droite intention qui reviennent aisément en son cœur.<br />

Je pense que jeudi ou vendredi au plus tard, M. Myionnet pourra vous arriver. Jʹes‐<br />

père quʹ<strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> du Seigneur, dont nous ne cesserons point dʹinvoquer la grâce, nous<br />

sortirons bien <strong>de</strong> cette petite épreuve.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong>meurons bien en union dans la charité du divin<br />

Sauveur et gardons bonne confiance; a‐t‐il jamais abandonné les siens?<br />

Votre tout affectionné ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

738 à M. Vasseur<br />

M. Vasseur est revenu à <strong>de</strong> meilleurs sentiments, mais il reste troublé. M. Myionnet va se rendre à Arras pour<br />

tenter <strong>de</strong> lui faire retrouver la paix du cœur.<br />

[22 janvier 1861]<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Jʹétais bien sûr que vous ne me donneriez pas le chagrin <strong>de</strong> vous voir quitter votre<br />

emploi et le lieu où la sainte obéissance vous a placé, sans lʹadhésion <strong>de</strong> votre Père et Su‐<br />

832


périeur. Je vous sais gré, cher ami, <strong>de</strong> vous être rendu sous ce rapport à mes exhortations.<br />

Mais vous <strong>de</strong>meurez troublé, inquiet, incertain; je sens le besoin, cher enfant, <strong>de</strong> vous ap‐<br />

puyer par quelque influence plus présente que mes conseils écrits; je vais vous envoyer<br />

notre f. Myionnet que vous aimez, dont lʹaffectueuse sympathie vous consolera et dont la<br />

longue expérience pourra vous venir en ai<strong>de</strong> pour trouver, <strong>avec</strong> M. Halluin et <strong>avec</strong> vous,<br />

les moyens les meilleurs que peut réclamer la situation; si je puis prolonger un peu le<br />

temps <strong>de</strong> son séjour, je le ferai volontiers, mais je nʹose en répondre, car nos œuvres <strong>de</strong><br />

tous côtés sont bien lour<strong>de</strong>s, elles grandissent plus vite que la Communauté et nous font<br />

partout <strong>de</strong>s situations difficiles. Efforçons‐nous, cher enfant, <strong>de</strong> nous mettre à la hauteur<br />

<strong>de</strong>s <strong>de</strong>sseins du Seigneur à notre égard; Il nous confie <strong>de</strong> saintes et nobles fonctions dans<br />

le dévouement et la charité, dans la gar<strong>de</strong> et le soin <strong>de</strong>s âmes; ne rejetons pas son appel et,<br />

quoi quʹil nous en coûte, <strong>de</strong>meurons ses serviteurs fidèles, ses amis, ses enfants. Vous êtes<br />

<strong>de</strong> ce nombre, cher ami, ne répudiez pas un si beau titre; oh! que vous le regretteriez amè‐<br />

rement et que vous me reprocheriez <strong>de</strong> ne pas vous avoir soutenu dans les tentations et les<br />

heures mauvaises. Après tout, elles passent, vos impressions trop vives souvent se cal‐<br />

ment, vous vous retrouvez dans la foi, dans la droiture <strong>de</strong> volonté, dans la bienveillance<br />

qui est le fond intime <strong>de</strong> votre nature. Cʹest là que vous êtes dans le vrai, cʹest là que Dieu<br />

vous veut et que sa grâce, mes prières, ma tendre affection sauront vous maintenir.<br />

Je vous embrasse bien tendrement en J. et .M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Myionnet arrivera, je pense, jeudi. Demain jʹoffrirai pour vous le S t Sacrifice.<br />

739 à M. Halluin<br />

Contretemps qui retar<strong>de</strong>nt le voyage <strong>de</strong> M. Myionnet à Arras.<br />

Vaugirard, 24 janvier 1861<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

M. Myionnet est obligé <strong>de</strong> retar<strong>de</strong>r son voyage <strong>de</strong> quelques jours. Quatre <strong>de</strong> nos ff.<br />

sont tombés mala<strong>de</strong>s, en suite <strong>de</strong>s rigueurs <strong>de</strong> la saison, et notamment le f. Augustin<br />

[Déage], presque seul chargé <strong>de</strong> la discipline. M. Myionnet est obligé <strong>de</strong> parer à tout et <strong>de</strong><br />

se multiplier pour que les choses ne soient pas absolument à lʹabandon; mais les indisposi‐<br />

tions <strong>de</strong> nos ff. nʹont aucun caractère <strong>de</strong> danger et un peu <strong>de</strong> repos va suffire pour les re‐<br />

mettre sur pied; la visite <strong>de</strong> M. Myionnet ne sera donc que <strong>de</strong> bien peu retardée. Jusque là,<br />

cher Monsieur lʹabbé, nous sommes <strong>de</strong> cœur près <strong>de</strong> vous et nous prions Dieu <strong>de</strong> donner<br />

le calme et la paix à notre f. Alphonse [Vasseur]. Quʹil soit bien assuré que nous ne per‐<br />

dons pas <strong>de</strong> vue ce qui le touche et que M. Myionnet examinera bien <strong>avec</strong> vous et <strong>avec</strong> lui<br />

ce qui est à faire pour son plus grand bien.<br />

Adieu, bien cher Monsieur lʹabbé, je <strong>de</strong>meure en J. et M.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

833


740 à M. Halluin<br />

Départ <strong>de</strong> M. Myionnet pour Arras. Respect <strong>de</strong> lʹautorité. Inconvénient du changement <strong>de</strong> personnel.<br />

Vaugirard, 28 janvier 1861<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Le jeune M. Houriez nous est arrivé ce matin à bon port, nous lʹavons accueilli <strong>avec</strong><br />

joie. Je crois, dʹaprès votre témoignage et celui <strong>de</strong> plusieurs <strong>de</strong> nos frères qui le connais‐<br />

sent, quʹil pourra faire le bien parmi nous.<br />

M. Myionnet ira, je crois, après‐<strong>de</strong>main mercredi vous faire une petite visite, nos ff.<br />

indisposés vont mieux. Ne craignez pas, cher Monsieur lʹabbé, que M. Myionnet puisse, en<br />

aucune façon, infirmer [lʹautorité], ne fût‐ce que dʹune ombre. Nous savons trop bien com‐<br />

bien lʹautorité est une chose sainte et qui veut être respectée, nous savons aussi quel digne<br />

et noble usage vous en faites; ici, comme toujours, reposez‐vous sur nous. M. Myionnet va<br />

particulièrement pour son<strong>de</strong>r les forces du f. Alphonse [Vasseur] et sʹassurer sʹil lui reste<br />

assez <strong>de</strong> fonds spirituel pour porter sa position, ou sʹil est nécessaire <strong>de</strong> songer à quelque<br />

changement; nous les redoutons beaucoup, on y gagne rarement. M. Myionnet, en tout<br />

cas, encouragera les frères, causera <strong>avec</strong> vous et, je lʹespère, vous consolera un peu. Il est<br />

bon droit, conciliant et ne cherche que Dieu. Vous ne pourriez manquer <strong>de</strong> vous entendre<br />

<strong>avec</strong> lui.<br />

Je vous embrasse, cher Monsieur lʹabbé, en N.S., et suis <strong>avec</strong> respect et affection<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

741 à M. Baudon318 Suite du différend sur la propriété <strong>de</strong>s immeubles <strong>de</strong> Nazareth et <strong>de</strong> Grenelle.<br />

Vaugirard, 30 janvier 1861<br />

Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt Général,<br />

Je me résigne comme vous <strong>avec</strong> un sentiment pénible aux explications quʹexige lʹaf‐<br />

faire <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux maisons <strong>de</strong> Nazareth et <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Grâce. Il est bien difficile, en effet, quʹen<br />

se prolongeant elles nʹentraînent pas quelques froissements qui peuvent refroidir la charité<br />

entre nous et mettre la gêne dans nos rapports. Mais puisque vous jugez, Monsieur le Pré‐<br />

si<strong>de</strong>nt, quʹil faut continuer lʹexamen <strong>de</strong> cette question, je mʹefforcerai <strong>de</strong> nʹy apporter que<br />

les détails strictement nécessaires et <strong>de</strong> ne rien dire qui puisse nuire à lʹunion que nous<br />

avons tant dʹintérêt <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts à ménager.<br />

Je nʹétais pas accoutumé jusquʹici à compter <strong>avec</strong> la Société <strong>de</strong> St ‐Vincent <strong>de</strong> Paul, je<br />

lui étais trop cordialement dévoué pour définir dʹordinaire bien rigi<strong>de</strong>ment ses intérêts et<br />

ceux dont je suis plus directement chargé. Toutefois, lorsque notre ami, M. Decaux, me<br />

parla, il y a <strong>de</strong>ux ans environ, <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Nazareth, en particulier, je répondis quʹil<br />

me semblait juste quʹelle restât sous le nom <strong>de</strong> la Communauté; <strong>de</strong>puis, je nʹy ai plus son‐<br />

gé, mais je nʹai rien dit ni rien écrit dans un sens contraire, ma pensée nʹayant jamais varié<br />

sous ce rapport. Lorsquʹen <strong>de</strong>rnier lieu, à la veille <strong>de</strong> mon ordination, jʹai été averti un peu<br />

318 Une copie <strong>de</strong> cette lettre, comme <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux suivantes à M. Baudon, (745 et 749), se trouve aussi aux ASV. Sur cette copie, MLP.<br />

ajoute <strong>de</strong> sa main, plus tard : « 20 000f ont, <strong>de</strong>puis, été donnés par la Communauté à Nazareth et 30 000 à Grenelle ».<br />

834


usquement que jʹavais à mʹoccuper encore <strong>de</strong> cette affaire et <strong>de</strong> celle <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Grâce,<br />

jʹai cherché <strong>de</strong> nouveau <strong>de</strong>vant Dieu, à qui ces <strong>de</strong>ux établissements avaient été confiés par<br />

le mon<strong>de</strong> charitable, à qui les ouvriers et les pauvres les attribuaient, à qui lʹautorité diocé‐<br />

saine avait entendu confier les chapelles en particulier, à qui enfin M. le Curé <strong>de</strong> Grenelle<br />

avait voulu remettre la fondation quʹil souhaitait dʹétablir sur sa paroisse: il mʹa paru que<br />

cʹétait à nous; ces témoignages mʹont semblé dʹun grand poids, je crois quʹon ne saurait les<br />

récuser.<br />

Vous paraissez persuadé, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt, que notre Communauté a faible‐<br />

ment contribué à la fondation <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Nazareth notamment, et quʹelle nʹa guère à<br />

revendiquer que lʹinitiative et la première pensée <strong>de</strong> cet établissement, et quʹen tout cas la<br />

Société <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul, en lui apportant son secours dans un moment critique, lʹa<br />

sauvé <strong>de</strong> sa ruine et dʹune catastrophe imminente. Je crois que les choses peuvent être en‐<br />

visagées sous un autre aspect. Si, dès le principe, lʹentreprise a été faisable, si elle a pu se<br />

recomman<strong>de</strong>r au <strong>de</strong>hors, si sa place sʹest trouvée préparée, en un mot, elle lʹa dû à mes<br />

travaux, durant 25 ans, et aux œuvres que notre Communauté avait, presque seule, fon‐<br />

dées. Dʹune autre part, lorsquʹau refus <strong>de</strong> la Société, jʹentrai personnellement en arrange‐<br />

ment pour le local <strong>de</strong>s Capucins <strong>avec</strong> M. Hamelin, Curé <strong>de</strong> lʹAbbaye‐aux‐Bois, il me décla‐<br />

ra, fort prévenu alors contre les associations non paroissiales, quʹil nʹentendait traiter<br />

quʹ<strong>avec</strong> moi seul. Ce fut donc à moi uniquement quʹil céda les avantages que sa position<br />

lui permettait <strong>de</strong> faire dans ce marché, savoir: pour 6.000f la chapelle commencée, laquelle<br />

avait coûté 34.000f, et le terrain à 22f le mètre quoiquʹil valût alors 45 ou 50f. Ce fut aussi à<br />

lʹentremise <strong>de</strong> M. Hamelin que je dus dès lors lʹappui <strong>de</strong> MM. <strong>de</strong> Kergorlay et <strong>de</strong> Fontette.<br />

Jʹai payé en ce temps et successivement, <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s dons recueillis par moi, 5.000f pour frais<br />

dʹacquisition, 15.000f restant dus à M. Desgenettes pour lʹœuvre <strong>de</strong>s Capucins, et pour tra‐<br />

vaux <strong>de</strong> la chapelle et autres environ 50.000f; en ensemble, jʹavais réuni, en y comprenant<br />

quelques emprunts, une somme totale <strong>de</strong> 128.000f, sur lesquels 12 ou 13.000f, je crois,<br />

avaient été pris sur les fonds propres <strong>de</strong> la Communauté. Loin <strong>de</strong> moi la pensée dʹamoin‐<br />

drir en rien le prix <strong>de</strong>s bons offices <strong>de</strong> notre ami, M. Decaux; le mouvement généreux qui<br />

lʹa porté à nous venir en ai<strong>de</strong> ne sʹefface point <strong>de</strong> notre souvenir, nous en <strong>de</strong>meurons pro‐<br />

fondément reconnaissants et les détails où je suis contraint dʹentrer ici nʹinfirment aucu‐<br />

nement la valeur <strong>de</strong> sa noble action. Mais il nʹest pas exact que lʹentreprise, commencée<br />

par moi, fût menacée alors dʹune catastrophe ni imminente ni même probable. Lʹopération<br />

<strong>de</strong>venait difficile, sans doute, pour mes frères plus accoutumés aux travaux <strong>de</strong> leurs œu‐<br />

vres quʹà chercher <strong>de</strong>s ressources, mais étaient‐ils à bout <strong>de</strong> moyens et inquiétés par <strong>de</strong>s<br />

besoins pressants? Le payement <strong>de</strong> lʹacquisition était garanti, le premier tiers <strong>de</strong>s travaux,<br />

seul exigible à ce moment, était payé, il restait quelques fonds en caisse et quelques pro‐<br />

messes à échéance prochaine; les marchés passés par moi <strong>avec</strong> les entrepreneurs stipu‐<br />

laient <strong>de</strong> longs délais pour les payements, mes amis nʹavaient pas été tous sollicités et nʹat‐<br />

tendaient quʹune vive impulsion, enfin la Provi<strong>de</strong>nce, et ce sera à vos yeux, Monsieur le<br />

Prési<strong>de</strong>nt, le meilleur argument, eût‐Elle abandonné ceux qui sʹétaient confiés en Elle?<br />

Dans lʹordre <strong>de</strong>s choses positives, jʹajoute que le Conseil <strong>de</strong> la Communauté avait accepté<br />

<strong>avec</strong> moi la responsabilité <strong>de</strong> lʹentreprise et quʹil pouvait et quʹil eût voulu, je le déclare<br />

<strong>avec</strong> lui, en prévenir la ruine; une catastrophe nʹétait donc nullement à craindre, elle nʹétait<br />

même pas possible.<br />

835


Pour ce qui regar<strong>de</strong>, dʹune autre part, N.D. <strong>de</strong> Grâce, vous opposez, Monsieur le<br />

Prési<strong>de</strong>nt, à mes dispositions présentes quelques paroles qui sembleraient y faire contra‐<br />

diction. Les choses ont changé plutôt que ma pensée et mes dispositions. Il était question,<br />

dans le principe, dʹétablir sur le terrain à acquérir <strong>avec</strong> les fonds <strong>de</strong> M. le Curé <strong>de</strong> Grenelle<br />

une maison, en apparence assez considérable, et dont la dépense <strong>de</strong>vait être payée par la<br />

Société <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul; en ces conditions, le doute était possible sur la position res‐<br />

pective. Mais par le fait les choses ont tourné autrement; les fonds <strong>de</strong> M. le Curé ont payé<br />

en partie la construction; la presque totalité <strong>de</strong>s sommes recueillies pour concourir dʹail‐<br />

leurs aux dépenses lʹont été par M. lʹabbé Roussel, en sorte que la Société nʹest guère inter‐<br />

venue dans la charge <strong>de</strong> la fondation que par les dons généreux <strong>de</strong> M. Blon<strong>de</strong>l, lesquels,<br />

sauf je crois 4.000f, ont été affectés par lui au mobilier <strong>de</strong> lʹoratoire, à la gymnastique, etc.<br />

En ce <strong>de</strong>rnier lieu, il sʹagit aujourdʹhui dʹélever une chapelle dont la responsabilité nous est<br />

laissée et dont le prix égalera presque celui <strong>de</strong> la propriété tout entière; ces circonstances<br />

ne modifient‐elles pas la situation? Si vous voulez en outre, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt, vous<br />

rappelant lʹorigine et les développements <strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong> Grenelle, considérer quelle part y<br />

a eue notre Communauté, vous penserez que puisquʹil faut, après tout, à N.D. <strong>de</strong> Grâce<br />

comme à Nazareth <strong>de</strong>s gardiens, nous avons quelque droit à en conserver le titre. Gar‐<br />

diens, en effet; jʹai écrit, dit‐on, ce mot, si je ne lʹai fait, je lʹinscris ici <strong>de</strong> grand cœur. Quel<br />

autre nom nous conviendrait mieux en réalité, celui <strong>de</strong> propriétaire ne serait‐il pas ici une<br />

fiction pure, les seuls et véritables propriétaires <strong>de</strong> ces immeubles ne sont‐ils pas les ou‐<br />

vriers, les enfants et les pauvres? Qui en jouit, après eux, en maîtres sinon les Confrères <strong>de</strong><br />

S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul? Pourrions‐nous aliéner à notre gré ces établissements, pourrions‐nous<br />

même en changer arbitrairement lʹaffectation, où donc sont nos droits <strong>de</strong> propriété? Je le<br />

répète, gardiens et serviteurs, nous ne sommes pas autre chose. Nos frères, dans les œu‐<br />

vres <strong>de</strong> la Société, ont accepté les travaux incessants, la pauvreté et la dépendance; comme<br />

repos et point dʹappui, il leur reste uniquement leur rôle <strong>de</strong> gardiens en titre <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux<br />

institutions, je ne crois pas quʹon doive sagement, je ne crois pas quʹon puisse équitable‐<br />

ment le leur enlever.<br />

Je regrette, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt, dʹavoir eu à parler ainsi <strong>de</strong> droits, <strong>de</strong> services;<br />

tout cela ayant été mis aux pieds <strong>de</strong> Dieu ne voulait point être relevé, mais jʹavais ici à jus‐<br />

tifier mes paroles, mes actes, presque mes intentions; jʹai dû sortir <strong>de</strong> la réserve ordinaire,<br />

jʹy rentre très empressé et très résolu, quoi quʹil arrive, à nʹen plus sortir. Jʹespère aussi que<br />

ce pénible débat touche à son terme; vous trouvez plus admissible, après examen, Mon‐<br />

sieur le Prési<strong>de</strong>nt, lʹaccommo<strong>de</strong>ment proposé par moi, et vous ne refusez pas <strong>de</strong> chercher<br />

les moyens <strong>de</strong> lʹexécuter. Je suis convaincu, pour ma part, que les difficultés <strong>de</strong> réalisation,<br />

sʹil y en a, peuvent être levées par le bon vouloir et lʹesprit <strong>de</strong> conciliation <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts.<br />

Veuillez être assuré, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt, que je <strong>de</strong>meure disposé, ainsi que mes<br />

frères, à tout faire, comme par le passé, pour le bien <strong>de</strong>s œuvres, <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> nos amis<br />

et Confrères <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul. Mon union <strong>avec</strong> eux est <strong>de</strong> date bien ancienne et mʹest<br />

particulièrement chère, je désire ne la briser quʹau jour où Dieu me rappellera à Lui.<br />

Je suis, <strong>avec</strong> une respectueuse affection, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt,<br />

Votre humble serviteur et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

836


742 à M. Caille<br />

Gran<strong>de</strong> confiance en M. Caille. Désir dʹentente cordiale <strong>avec</strong> les Confrères: ʺen sʹisolant, on va mieux à sa fan‐<br />

taisie, mais on est bien moins dans la charitéʺ.<br />

Vaugirard, 31 janvier 1861<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Jʹaurais dû répondre plus tôt à vos bonnes lettres si affectueuses, si cordialement<br />

soumises et qui ne mʹapportent jamais que consolation, au moins pour ce qui regar<strong>de</strong> vos<br />

sentiments et vos dispositions; les travaux multipliés <strong>de</strong> ce temps et les rigueurs <strong>de</strong> la sai‐<br />

son qui ralentissent les mouvements mʹont fort retardé dans mes correspondances, mais<br />

vous savez, mon bon ami, quelle est en vous ma confiance et combien je me repose sur<br />

vous en parfaite union <strong>de</strong> cœur et dʹesprit; je ne pourrais donc, en vous remerciant <strong>de</strong> tous<br />

les témoignages <strong>de</strong> votre bonne affection, que vous assurer <strong>de</strong> nouveau que nous sommes<br />

toujours tout près lʹun <strong>de</strong> lʹautre, que nos vues, nos souhaits ont la même fin, puisque nous<br />

tendons <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts uniquement à Dieu.<br />

Jʹai lu <strong>avec</strong> un vif intérêt les quelques détails contenus dans votre <strong>de</strong>rnière lettre sur<br />

la situation <strong>de</strong> vos œuvres. Je suis bien satisfait, en particulier, <strong>de</strong>s bons rapports qui exis‐<br />

tent entre vous et la Commission du Patronage; je pense, comme vous, que plus les œu‐<br />

vres font participer dʹhommes dévoués au bien, plus elles sont agréables aux yeux <strong>de</strong><br />

Dieu; en sʹisolant, on va mieux à sa fantaisie, sans doute, mais on est assurément bien<br />

moins dans la charité. Je tâche <strong>de</strong> mon mieux <strong>de</strong> rester aussi dans cette voie, jʹespère que<br />

nos petits démêlés <strong>avec</strong> la Société <strong>de</strong> St ‐Vincent <strong>de</strong> Paul vont sʹarranger, rien nʹest pourtant<br />

encore réglé définitivement.<br />

M. Myionnet est présentement à Arras, il vous verra en passant pour son retour<br />

samedi, je pense; il verra <strong>avec</strong> vous ce qui est à faire et encouragera ceux qui vous entou‐<br />

rent <strong>de</strong> son mieux.<br />

Rappelez‐lui, je vous prie, que je désire quʹil fasse une visite à M. Giraud pour le<br />

remercier du précieux envoi <strong>de</strong> reliques quʹil mʹa fait.<br />

Adieu, bien cher ami, mille affections à nos frères ainsi quʹà vous.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Myionnet ferait bien peut‐être dʹacheter un petit livre à Amiens et <strong>de</strong> le donner<br />

<strong>de</strong> ma part à M lle Adélaï<strong>de</strong>.<br />

743 à M. Halluin<br />

A propos dʹun frère qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à quitter Vaugirard pour Arras.<br />

Vaugirard, 4 février 1861<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

M. Houriez, me dit M. Lantiez, vous a écrit hier une lettre, bonne en soi, mais dont<br />

le but nʹest pas le point où il serait le mieux pour lui dʹarriver en ce moment. Il vous <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong> à retourner près <strong>de</strong> vous, ayant beaucoup <strong>de</strong> peine à sʹaccoutumer à Vaugirard. Je<br />

crois quʹil cè<strong>de</strong> trop facilement aux impressions toujours pénibles du changement <strong>de</strong> lieux<br />

et <strong>de</strong> personnes et quʹon lui rendrait un vrai service en gagnant un peu <strong>de</strong> temps. Il me<br />

837


semble quʹil serait bien quʹen accueillant sa <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pour le fond, vous lʹinvitiez à passer<br />

au moins quelques semaines à Vaugirard; après cela, il pourrait retourner près <strong>de</strong> vous,<br />

sans doute, et sʹy trouverait comme membre <strong>de</strong> la famille, tandis quʹen ce moment il nʹy<br />

serait que comme employé, ce qui ne le mènera à rien. Je crois que cʹest un bon et digne<br />

garçon dont on pourrait tirer bon parti pour le bien, sʹil sait prendre assez <strong>de</strong> fermeté pour<br />

surmonter lʹennui <strong>de</strong>s premiers moments.<br />

Encouragez bien, je vous prie, <strong>de</strong> ma part, le f. Alphonse [Vasseur]. Je lui écrirai,<br />

jʹespère que la grâce du Seigneur sera <strong>avec</strong> lui, je prierai constamment pour lui et pour<br />

toute votre chère maison. M. Myionnet est revenu bien satisfait, comme toujours, <strong>de</strong> tout<br />

ce quʹil a vu dʹédifiant et <strong>de</strong> bon.<br />

Mille affections et respects en N. S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

744 à M. Decaux<br />

Relation <strong>avec</strong> la SSVP. Veiller à ce que les Œuvres ne souffrent pas <strong>de</strong> nos différends.<br />

Vaugirard, 7 février 1861<br />

Mon bon ami,<br />

Nous suivons péniblement vous, M. Baudon et moi, la discussion relative aux mai‐<br />

sons <strong>de</strong> Nazareth et <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Grâce; je nʹai point accepté la décision que M. Baudon mʹa<br />

fait connaître avant‐hier, parce quʹelle me semblait ne donner satisfaction ni à lui ni à vous<br />

ni conséquemment à nous‐mêmes qui voudrions la paix et la conciliation. Jʹécris à M. Bau‐<br />

don pour lui dire que je reste disposé <strong>de</strong> nouveau à chercher quelque arrangement qui soit<br />

à son gré comme au vôtre, et je lui propose <strong>de</strong> prier ensemble pour obtenir lʹassistance <strong>de</strong><br />

Dieu.<br />

En attendant, je crois que nous <strong>de</strong>vons veiller à ce que les œuvres ne soient point en<br />

souffrance. Je vous prie <strong>de</strong> prési<strong>de</strong>r toujours la Commission <strong>de</strong> Nazareth où vous avez au‐<br />

torité et la confiance <strong>de</strong> tous; je compte quʹà travers tout, votre vieille amitié me restera fi‐<br />

dèle jusquʹà la fin; comptez bien sur la mienne qui <strong>de</strong>meure, comme toujours, profon<strong>de</strong> et<br />

toute dévouée.<br />

A vous en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

745 à M. Baudon<br />

Désaccord persistant <strong>avec</strong> la SSVP. MLP. va célébrer la messe, à la châsse <strong>de</strong> St‐Vincent <strong>de</strong> Paul, pour rendre<br />

plus facile la solution du démêlé.<br />

Vaugirard, 7 février 1861<br />

Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt Général,<br />

Je suis vivement contristé <strong>de</strong> la peine que vous semblez ressentir au sujet <strong>de</strong>s dispo‐<br />

sitions quʹil sʹagissait <strong>de</strong> régler entre nous concernant les maisons <strong>de</strong> Nazareth et <strong>de</strong> N.D.<br />

<strong>de</strong> Grâce. Je me sens pressé <strong>de</strong> vous dire que je nʹai pas un seul instant méconnu vos inten‐<br />

tions, jʹai été <strong>de</strong> trop près associé à lʹaction <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul pour ignorer<br />

quel noble et droit esprit prési<strong>de</strong> constamment à sa direction; je nʹai donc pas pensé du<br />

838


tout, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt, que la préoccupation dʹavantages matériels fût votre mobile<br />

dans la discussion qui sʹest élevée entre nous; jʹai cru sincèrement, et je crois toujours, que<br />

vous nʹaviez en vue que le bien <strong>de</strong>s œuvres et lʹunion <strong>de</strong> nos forces pour procurer la gloire<br />

<strong>de</strong> Dieu. Mais permettez‐moi <strong>de</strong> vous assurer encore que je suis, <strong>avec</strong> tous mes frères,<br />

dans les mêmes sentiments et que jʹai cru tendre à cette fin dans les propositions que jʹai eu<br />

lʹhonneur <strong>de</strong> vous soumettre. Je ne puis accepter la décision que vous mʹavez notifiée le 4<br />

<strong>de</strong> ce mois, puisquʹelle ne semble pas vous donner satisfaction et quʹelle tend, en effet, à<br />

trancher davantage les positions entre nous loin dʹopérer un plus intime rapprochement.<br />

Je <strong>de</strong>meure donc disposé à chercher <strong>de</strong> nouveau en toute cordialité quelque combinaison<br />

qui puisse mieux rentrer dans vos vues. Je crois, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt, que <strong>de</strong> bien faibles<br />

nuances séparent vos opinions <strong>de</strong>s nôtres. Je ne crois pas que la copropriété entre nous <strong>de</strong>s<br />

immeubles en question soit un moyen heureux, parce quʹelle me semble une cause cons‐<br />

tante dʹembarras, <strong>de</strong> conflits et <strong>de</strong> difficultés, mais je croyais sincèrement en donner lʹéqui‐<br />

valent par ma proposition. Je nʹentends pas la reproduire ici, jʹy renoncerai si vous ne<br />

lʹagréez point définitivement; cependant il me semblait que si la Société <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong><br />

Paul, achevant ce quʹelle avait commencé pour compléter la fondation <strong>de</strong> Nazareth, par<br />

exemple, avait été nantie par nous dʹune reconnaissance régulière constatant quʹelle avait<br />

concouru pour une somme <strong>de</strong> (je suppose 140.000f, nʹayant pas <strong>de</strong> documents précis, mais<br />

seulement approximatifs), elle eût, même sans hypothèque, été réellement copropriétaire<br />

puisque cette somme représente environ la moitié <strong>de</strong> la valeur <strong>de</strong> lʹimmeuble. Elle eût eu<br />

par là même une garantie <strong>de</strong> la constance <strong>de</strong> notre association, car comment une Commu‐<br />

nauté pauvre comme la nôtre pourrait‐elle, sans se réduire à la détresse, rembourser une<br />

pareille somme, ayant encore concurremment à fournir aussi <strong>de</strong>s in<strong>de</strong>mnités pour la mai‐<br />

son <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Grâce?<br />

Lʹassociation ainsi fermement assise et garantie, les intérêts restaient communs sans<br />

quʹil y eût pourtant dans les liens cette contexture absolue qui pourrait effrayer, ce me<br />

semble, les <strong>de</strong>ux parties également. Il restait, il est vrai, dans cet arrangement un petit<br />

avantage <strong>de</strong> position pour la Communauté et cʹest, à vrai dire, le seul motif <strong>de</strong> mon insis‐<br />

tance à ce sujet; mais nʹa‐t‐il pas été préparé par la Provi<strong>de</strong>nce, mais nʹest‐il pas une sorte<br />

<strong>de</strong> balance peut‐être indispensable dans la condition subordonnée et dépendante que nous<br />

avons choisie, enfin, nʹavait‐il pas, en sens contraire, une large compensation dans<br />

lʹénorme créance que nous laissions peser sur nous? Ces observations nʹont pas pour but,<br />

je le répète, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt, <strong>de</strong> reproduire encore la combinaison que jʹavais propo‐<br />

sée, mais <strong>de</strong> montrer, dans un esprit <strong>de</strong> conciliation, combien peu elle sʹéloignait <strong>de</strong> vos<br />

vues ou, pour mieux dire, combien elle pouvait aisément les réaliser.<br />

Jʹose vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt, quels que soient les arrangements à in‐<br />

tervenir définitivement, <strong>de</strong> tenir compte <strong>de</strong>s difficultés <strong>de</strong> notre position. Nous avons,<br />

dans lʹesprit du temps, dans lʹaffaiblissement <strong>de</strong> la foi, dans les défiances du clergé, <strong>de</strong>s<br />

obstacles presque insurmontables; nos charges sont écrasantes: 20 jeunes gens <strong>de</strong> 20 à 30<br />

ans sont au Noviciat à Vaugirard et <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt pour être formés, instruits, brisés aux sa‐<br />

crifices, <strong>de</strong>s soins, <strong>de</strong>s peines, <strong>de</strong>s ressources auxquelles nous ne suffisons quʹimparfaite‐<br />

ment. Ne serait‐il pas bien que la Société <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul, pour laquelle nous avons<br />

souhaité surtout <strong>de</strong> travailler, nous tendît la main, au lieu <strong>de</strong> chercher, bien à tort assuré‐<br />

ment, <strong>de</strong>s garanties contre nous? Jʹespère, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt, que vous inclinerez à cet<br />

avis. Quoi quʹil en soit, je souhaite vivement, je le répète, que nous trouvions à la question<br />

839


entre nous posée une solution satisfaisante pour les <strong>de</strong>ux parts, et je reste tout disposé à la<br />

chercher <strong>de</strong> nouveau <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> vous. Je nʹai point pensé que lʹentrevue proposée par<br />

lʹune <strong>de</strong> vos lettres, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt, fût présentement un moyen bien avantageux,<br />

parce que, en ce qui me concerne, je suis physiquement hors dʹétat <strong>de</strong> soutenir aucune dis‐<br />

cussion, et parce quʹil me semblait bien difficile dʹéviter ainsi <strong>de</strong>s froissements quʹà grand<br />

peine nous avons pu écarter dans une correspondance; mais je sens comme vous, Mon‐<br />

sieur le Prési<strong>de</strong>nt, le besoin <strong>de</strong> rapports plus fréquents entre nous pour concerter notre ac‐<br />

tion dans nos œuvres communes. Je proposerai donc que MM. Myionnet et Lantiez, qui<br />

mʹassistent le plus constamment, eussent tous les mois au moins quelque entretien régu‐<br />

lier <strong>avec</strong> M. Decaux, ou même <strong>avec</strong> vous quand vous le jugeriez possible; je mʹy rendrais<br />

<strong>de</strong> mon côté quand ma santé, toujours plus que faible, nʹy mettrait point empêchement.<br />

Enfin, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt, je proposerais encore quʹà quelque prochain jour, choisi par<br />

vous, nous nous rendions, vous, M. Decaux et ceux <strong>de</strong> nos Confrères que vous croiriez <strong>de</strong>‐<br />

voir, amener à la Chapelle <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul, où quelques‐uns <strong>de</strong> mes frères seraient<br />

également, jʹy offrirais le S t Sacrifice, nous prierions, nous communierions ensemble; je<br />

crois que ce rapprochement dans la charité du Sauveur et sous les yeux <strong>de</strong> notre Père S t<br />

Vincent raviverait, cimenterait notre union et rendrait plus facile, après, la solution <strong>de</strong>s<br />

pénibles démêlés qui nous ont contristés <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts.<br />

Je <strong>de</strong>meure, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt, <strong>avec</strong> une sincère et respectueuse affection,<br />

Votre humble serviteur et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

746 à M. Halluin<br />

A regret, MLP. consent au changement dʹun postulant. Eloge <strong>de</strong> M. Risse. Etat <strong>de</strong>s santés.<br />

Vaugirard, 13 février 1861<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

M. Houriez retourne, <strong>avec</strong> notre autorisation, près <strong>de</strong> vous, afin dʹy faire son postu‐<br />

lat. Il eût été plus courageux, sans doute, sʹil eût, conformément à vos conseils, prolongé<br />

son séjour ici, afin <strong>de</strong> prendre place plus nettement dans la famille. Mais, en tenant compte<br />

<strong>de</strong>s bonnes qualités quʹil a dʹailleurs, jʹai pensé quʹon pouvait accepter ce moyen <strong>de</strong> tempo‐<br />

risation. Je souhaite quʹil le conduise au but quoique, à vrai dire, jʹen doute un peu, puis‐<br />

quʹil y a loin <strong>de</strong> ses dispositions actuelles à cette abnégation <strong>de</strong> soi‐même, à ce renonce‐<br />

ment à sa volonté, sans lesquels on ne saurait être, dans notre condition, un vrai serviteur<br />

<strong>de</strong> Dieu. Espérons et prions, Dieu est le maître souverain <strong>de</strong>s cœurs, Il les incline à son gré.<br />

M. Risse est venu passer quelques jours <strong>avec</strong> nous; nous avons été profondément<br />

édifiés <strong>de</strong> sa piété, <strong>de</strong> son dévouement pour les ouvriers, <strong>de</strong>s vertus soli<strong>de</strong>s que le Sei‐<br />

gneur a mises en lui; nous regardons comme un vrai bien son adjonction à notre petite fa‐<br />

mille. Il nous a amené <strong>de</strong>ux bons jeunes gens simples [<strong>Léon</strong> Guichard et Ferdinand Bos‐<br />

mel] et qui semblent animés <strong>de</strong> sentiments pieux et dévoués.<br />

Je vous envoie 3 Hommes Religieux <strong>de</strong> St ‐Jure; M. Alphonse [Vasseur] a un 4e exem‐<br />

plaire; je pense que cela pourra vous suffire pour le moment.<br />

Jʹécrirai à M. Alphonse dans un jour ou <strong>de</strong>ux. Je suis, en ce moment, souffrant dʹune<br />

sorte <strong>de</strong> grippe qui me tient la tête et mʹôte presque lʹattention.<br />

840


Plusieurs <strong>de</strong> nos ff. sont aussi plus ou moins éprouvés, la longueur <strong>de</strong> lʹhiver a lassé<br />

un peu toutes les constitutions, cʹest une petite croix à mettre en ce saint temps <strong>de</strong> Carême<br />

aux pieds du divin Sauveur.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, assurez tous nos frères <strong>de</strong> ma tendre affection et<br />

croyez vous‐même à mon respectueux dévouement.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

747 à M. Halluin<br />

Mort <strong>de</strong> M. Urvoy <strong>de</strong> St Bedan. MLP. évoque le souvenir <strong>de</strong> ses vertus. Prières à son intention.<br />

Vaugirard, 21 février 1861<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Le Seigneur vient <strong>de</strong> rappeler à Lui lʹun <strong>de</strong> nos ff., M. Olivier Urvoy, après quelques<br />

jours seulement <strong>de</strong> maladie. Sa fin est arrivée si vite, et jʹai été si préoccupé <strong>de</strong>s soins que<br />

nous avons dû lui donner que je nʹai point trouvé le moment <strong>de</strong> le recomman<strong>de</strong>r aux priè‐<br />

res <strong>de</strong> votre maison durant sa courte maladie. Il est mort dʹune phlébite ou stagnation du<br />

sang dans les jambes; son convoi a eu lieu hier, <strong>avec</strong> un nombreux concours <strong>de</strong>s familles<br />

pauvres quʹil édifiait et assistait pour lʹœuvre <strong>de</strong> la Ste ‐Famille. Tous nos ff. sʹaccor<strong>de</strong>nt à<br />

dire quʹil était le plus saint parmi nous; il pratiquait les vertus religieuses à un <strong>de</strong>gré bien<br />

rare <strong>de</strong> notre temps. Plusieurs <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>s grâces en union <strong>avec</strong> lui et ont la confiance<br />

quʹils les obtiendront.<br />

Je désire bien que la messe soit dite chez vous à son intention et que tous les ff. y as‐<br />

sistent. Il faisait beaucoup <strong>de</strong> choses pour le bien, et surtout son exemple était un précieux<br />

appui pour lʹédification <strong>de</strong> la Communauté, elle fait en sa personne une gran<strong>de</strong> perte. Es‐<br />

pérons, nous aussi, quʹil nous servira encore, même après sʹêtre éloigné <strong>de</strong> nous.<br />

Je suis bien affectueusement, cher Monsieur lʹabbé,<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. M. Thuillier se relève un peu; il a visité les jeunes gens recommandés par vous.<br />

748 à M. Risse<br />

Mort <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> St‐Bedan, un modèle <strong>de</strong> religieux. MLP. exprime le désir dʹentrer en relation <strong>avec</strong> lʹévêque <strong>de</strong><br />

Metz. Devant la recru<strong>de</strong>scence du mal, nécessité <strong>de</strong> lʹunion.<br />

Vaugirard, 23 février 1861<br />

Bien cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je suis bien en retard pour vous donner <strong>de</strong> nos nouvelles et pour répondre à votre<br />

bonne lettre du milieu <strong>de</strong> ce mois; jʹai été souffrant pendant une dizaine <strong>de</strong> jours dʹune<br />

sorte <strong>de</strong> grippe qui me rendait presque incapable <strong>de</strong> toute application. Depuis, lʹun <strong>de</strong> nos<br />

frères, le plus saint <strong>de</strong> tous, M. Olivier Urvoy, ancien ami à moi, qui mʹétait, <strong>de</strong>puis trois<br />

ans, venu rejoindre en Communauté, est tombé mala<strong>de</strong> et, après quelques jours <strong>de</strong> mala‐<br />

die seulement, il a été rappelé par le Souverain Maître. Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> vous dire, cher<br />

Monsieur lʹabbé, quelles sollicitu<strong>de</strong>s et quelle affliction nous a causé ce triste événement;<br />

une seule consolation nous reste, cʹest le souvenir <strong>de</strong>s vertus, cʹest la vie sainte et la fin<br />

841


admirable <strong>de</strong> notre frère. Il a poussé si loin, durant son séjour parmi nous, lʹesprit dʹobéis‐<br />

sance, dʹabnégation, <strong>de</strong> pauvreté, dʹamour <strong>de</strong> la règle que nous restons persuadés quʹil est<br />

pour nous un parfait modèle comme religieux; nos frères se sentent inspirés <strong>de</strong> prier en<br />

union <strong>avec</strong> lui et ils espèrent que leurs <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s trouveront mieux ainsi grâce <strong>de</strong>vant<br />

Dieu. Demandons pour nous, cher Monsieur lʹabbé, que sa place ne <strong>de</strong>meure point vi<strong>de</strong> et<br />

que, si un saint nous a été ravi, dʹautres saints se forment et soient envoyés dans la Com‐<br />

munauté.<br />

Vos <strong>de</strong>ux bons jeunes gens vont très bien et nous augurons bien <strong>de</strong> leur avenir; ils<br />

se sont mis cordialement aux exercices <strong>de</strong> communauté, comme aux travaux; ils sont gais,<br />

ouverts et semblent prendre parfaitement pied parmi nous; je crois que le sol <strong>de</strong> Metz sera<br />

très propre à nous préparer <strong>de</strong> bons et dévoués sujets; il me semble que par là on a lʹesprit<br />

soli<strong>de</strong>, quʹon comprend la gran<strong>de</strong>ur et la beauté du service <strong>de</strong> Dieu et quʹon ne recule<br />

point <strong>de</strong>vant un généreux sacrifice pour se donner à Dieu.<br />

Je serais heureux dʹentrer en relation <strong>avec</strong> M gr lʹEvêque <strong>de</strong> Metz et je suis très dispo‐<br />

sé à lui écrire; je ne sais pas bien précisément dans quel sens le faire, parce que je ne vous<br />

ai pas <strong>de</strong>mandé assez particulièrement quels avaient été vos entretiens <strong>avec</strong> lui concernant<br />

la Communauté. Je vais tâcher, néanmoins, dʹécrire quelques mots <strong>de</strong> respect, <strong>de</strong> recon‐<br />

naissance et <strong>de</strong> bonne confiance dans lʹavenir.<br />

Ceux qui appartiennent à Dieu ont besoin <strong>de</strong> sʹunir aujourdʹhui plus intimement<br />

que jamais et <strong>de</strong> confirmer en eux la sainte espérance; les efforts <strong>de</strong> lʹennemi pour arracher<br />

la foi dans les âmes <strong>de</strong>viennent si furieux, si persistants quʹon sentirait une sorte dʹeffroi si<br />

la parole éternelle nʹétait là pour raffermir les cœurs; gardons la confiance, cher Monsieur<br />

lʹabbé, travaillons sans relâche au soutien <strong>de</strong> notre sainte cause, le Dieu fort saura, comme<br />

toujours, tirer sa gloire du zèle <strong>de</strong> ses fidèles serviteurs comme <strong>de</strong> la perversité <strong>de</strong> ses en‐<br />

nemis. Notre rôle à nous, cʹest <strong>de</strong> persévérer dans la prière, dans le travail et lʹespérance.<br />

Nous nʹavons ici rien <strong>de</strong> nouveau, ni à lʹintérieur, ni dans nos œuvres; je ne man‐<br />

querai pas <strong>de</strong> vous tenir informé <strong>de</strong> tout ce qui pourrait offrir quelque intérêt, nos travaux<br />

étant communs désormais, nous <strong>de</strong>vons tâcher <strong>de</strong> nous assister les uns et les autres par la<br />

comparaison <strong>de</strong> nos efforts et <strong>de</strong> nos moyens. Ecrivez‐nous <strong>de</strong> votre côté, cher Monsieur<br />

lʹabbé, ou faites‐nous écrire, donnez‐nous tous les détails qui nous pourront initier à vos<br />

œuvres comme à tout ce qui regar<strong>de</strong> votre cher entourage intime; je souhaite que notre vie<br />

comme nos sentiments ten<strong>de</strong>nt à cette unité que le Seigneur a <strong>de</strong>mandée pour les siens et<br />

qui nʹest autre que son adorable et divine charité.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé; croyez bien que vous avez en nous <strong>de</strong>s amis et <strong>de</strong>s frè‐<br />

res; nous nous entendons <strong>avec</strong> vous comme si nous nʹavions jamais été autrement quʹau‐<br />

jourdʹhui, un même esprit nous anime et nous tendons certainement à la même fin.<br />

Je vous embrasse au nom <strong>de</strong> tous et suis, <strong>avec</strong> une respectueuse affection;<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

749 à M. Baudon<br />

Suite <strong>de</strong> lʹaffaire <strong>de</strong>s immeubles <strong>de</strong> Nazareth et <strong>de</strong> Grenelle. MLP. ne croit pas possible <strong>de</strong> faire plus <strong>de</strong> conces‐<br />

sions quʹil nʹen a fait.<br />

842


Vaugirard, 23 février 1861<br />

Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt Général,<br />

Je nʹai point trouvé, en suite <strong>de</strong> notre réunion à St ‐Lazare, <strong>de</strong> nouvelle combinaison<br />

pour régler les affaires dont nous nous occupions ces temps <strong>de</strong>rniers; peut‐être est‐il bien<br />

difficile dʹen imaginer qui donne satisfaction parfaite aux <strong>de</strong>ux parties. Mais je suis plus<br />

vivement frappé encore quʹauparavant <strong>de</strong> cette pensée quʹil importe par‐<strong>de</strong>ssus tout que<br />

nous gardions la charité si nous ne voulons nous préparer <strong>de</strong>s regrets certains et causer un<br />

préjudice irrémédiable à nos œuvres. Des sentiments <strong>de</strong> réserve et presque <strong>de</strong> défiance se<br />

glissent déjà entre nous, nous nous accusons <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts et nous nʹéchappons pas à <strong>de</strong><br />

pénibles impressions; encore quelques pas, et cette union que nous regardons comme es‐<br />

sentielle au salut <strong>de</strong> beaucoup dʹâmes va être lamentablement brisée. Cet état <strong>de</strong> choses ne<br />

doit‐il pas appeler notre attention? Il me semble que les droits et titres <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> St ‐<br />

Vincent <strong>de</strong> Paul sont si franchement admis et reconnus dans les lettres que jʹai eu lʹhon‐<br />

neur <strong>de</strong> vous écrire quʹon y pourrait trouver surabondamment toutes les garanties désira‐<br />

bles pour lʹavenir; je suis dʹailleurs disposé toujours à y ajouter celles que jʹai offertes pré‐<br />

cé<strong>de</strong>mment. Mais, cela fait, ne pensez‐vous pas <strong>avec</strong> moi, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt, que nous<br />

<strong>de</strong>vons au plus vite effacer jusquʹà la moindre trace dʹun triste dissentiment et rechercher<br />

dans la confiance et lʹaffection réciproques les moyens <strong>de</strong> faire prospérer nos œuvres? Il<br />

me semble aussi que, loin <strong>de</strong> compter respectivement si nous ne faisons pas plus que notre<br />

part, nous serions agréables à Dieu en rivalisant à qui en ferait davantage. Je ne suis plus<br />

guère posé pour recueillir <strong>de</strong>s ressources au <strong>de</strong>hors et je nʹy réussirais, sans doute, que<br />

dans une limite assez bornée, mais quelques restes <strong>de</strong> patrimoine mʹétant revenus <strong>de</strong>rniè‐<br />

rement, je nʹhésiterai pas à en sacrifier la meilleure part pour alléger un peu les charges <strong>de</strong><br />

nos œuvres; je reste aussi toujours prêt à donner le concours <strong>de</strong> notre personnel à la Socié‐<br />

té, comme par le passé, autant que nos forces restreintes et le peu dʹacquis <strong>de</strong> nos jeunes<br />

gens mʹen laisseront la possibilité. Je nʹai jamais eu dʹautres vues, je nʹai jamais songé un<br />

seul instant à isoler notre action <strong>de</strong> celle <strong>de</strong> la Société; je nʹai même jamais compris com‐<br />

ment nous pourrions marcher séparément.<br />

Je prie Dieu, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt, quʹIl nous inspire <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts lʹesprit <strong>de</strong> paix<br />

et <strong>de</strong> cordiale bienveillance et je vous réitère, en toute sincérité, lʹexpression <strong>de</strong>s sentiments<br />

respectueux et dévoués <strong>avec</strong> lesquels je suis,<br />

Votre humble serviteur et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

750 à M. Baudon<br />

Avec empressement, MLP. accepte lʹentrevue proposée pour régler définitivement lʹaffaire <strong>de</strong> Nazareth et <strong>de</strong><br />

Grenelle, mais, indisposé, il ne pourra pas sʹy rendre.<br />

Vaugirard, 1er mars 1861<br />

Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt Général,<br />

Nous acceptons <strong>avec</strong> empressement lʹoffre que vous voulez bien nous faire <strong>de</strong> nous<br />

réunir à vous dimanche prochain pour régler amiablement et définitivement lʹaffaire<br />

concernant les <strong>de</strong>ux maisons <strong>de</strong> Nazareth et <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Grâce. MM. Myionnet, Lantiez et<br />

Paillé se rendront chez vous à 1h.1/2, temps que nous supposons pouvoir être à votre<br />

convenance. Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rai, pour moi, permission <strong>de</strong> ne point les accompagner; je<br />

843


suis, ainsi que jʹai eu lʹhonneur <strong>de</strong> vous lʹécrire, absolument incapable physiquement <strong>de</strong><br />

prendre aucune part à cet entretien. Mais je nʹai pas dʹautre vue que nos frères, jʹespère<br />

bien aussi quʹaprès lʹentrevue, les pensées et les dispositions <strong>de</strong> tous se réuniront dans un<br />

commun désir <strong>de</strong> travailler <strong>avec</strong> une cordiale entente au bien <strong>de</strong>s œuvres; je vais prier ar‐<br />

<strong>de</strong>mment S t Joseph que vous affectionnez, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt, tout particulièrement, <strong>de</strong><br />

nous ménager ce tant désirable résultat.<br />

Je suis, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt, <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s sentiments <strong>de</strong> respect et dʹaffection,<br />

Votre humble serviteur et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. 4h. ou même 4h.1/2 seront un moment bien plus commo<strong>de</strong> pour MM. Lantiez<br />

et Myionnet qui ont dimanche une petite séance <strong>de</strong>s enfants à Vaugirard vers 2 heures; si<br />

cette heure (4h. ou 4h.1/2) vous convenait également, ils la préféreraient beaucoup; autre‐<br />

ment, ils se rendront chez vous pour 1h.1/2. Je vous prie dʹavoir la bonté <strong>de</strong> donner un mot<br />

<strong>de</strong> réponse au porteur pour nous dire votre choix 319 .<br />

751 à M. Risse<br />

Nouvelles <strong>de</strong> jeunes postulants messins. MLP. a reçu une réponse encourageante <strong>de</strong> lʹévêque <strong>de</strong> Metz.<br />

[Vers le 10 mars 1861]<br />

Bien cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je laisse partir cette lettre, bien que sa forme un peu ru<strong>de</strong> me paraisse laisser à dési‐<br />

rer; je pense que vous êtes accoutumé à cette franchise un peu sauvage du bon enfant Gui‐<br />

chard, il ne va pas mal dʹailleurs, ainsi que Ferdinand [Bosmel] qui me semble être doux et<br />

bon garçon; nous les aimons tous les <strong>de</strong>ux, ils sont susceptibles dʹêtre formés.<br />

Jʹai reçu <strong>de</strong> Mgr <strong>de</strong> Metz une réponse aussi bonne que possible; un consentement en‐<br />

tier à notre union <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s paroles toutes paternelles et toutes encourageantes; à lʹoccasion,<br />

veuillez bien lui exprimer notre reconnaissance et lui offrir notre profond respect. Sa lettre<br />

mʹapprend que vous achetez le terrain attenant à votre maison; jʹen suis tout aise, car les<br />

œuvres <strong>de</strong> patronage doublent leurs avantages quand elles ont un vaste espace.<br />

Je souhaite bien que le temps du Carême et <strong>de</strong>s belles fêtes qui le suivent apporte<br />

dʹabondantes bénédictions à vous et à tous vos chers jeunes gens.<br />

Mille affections <strong>de</strong> tous.<br />

Votre tout dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

752 à M. Risse<br />

Une lettre, dont le <strong>de</strong>stinataire était M. Risse, nʹa pas été acheminée.<br />

[18 mars 1861]<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

La petite lettre ci‐jointe a été écrite il y a un mois; cʹest par un oubli <strong>de</strong> ma part<br />

quʹelle ne vous est point parvenue en son temps. Elle avait été déposée par votre jeune<br />

319 La réponse n’a pas dû être remise au porteur, car quelques lignes <strong>de</strong> M. Baudon, en tête <strong>de</strong> la lettre, posent, à M. Decaux sans<br />

doute, la question préalable : « Dites-moi <strong>de</strong>main matin par Maillard quelle heure vous convient le mieux pour que je répon<strong>de</strong> à M.<br />

Le <strong>Prevost</strong> ». La réunion eut bien lieu le 3 mars 1861 sans apporter <strong>de</strong> décision définitive. Elle prépara dans un esprit <strong>de</strong> conciliation<br />

et <strong>de</strong> charité la solution qui intervint le 30 avril (cf. infra, lettre 761).<br />

844


<strong>Léon</strong> [Guichard] dans une boîte qui est à la porte <strong>de</strong> ma chambre, mais que jʹouvre rare‐<br />

ment, parce quʹon nʹen fait guère usage; à mon grand regret, jʹy ai trouvé hier la lettre en<br />

question que votre pauvre enfant croyait bien <strong>de</strong>puis longtemps entre vos mains. Je vous<br />

lʹenvoie, quoique bien tardivement, afin quʹelle vous témoigne du bon désir quʹavaient vos<br />

jeunes gens <strong>de</strong> vous donner <strong>de</strong> leurs nouvelles dès le commencement. Aujourdʹhui, votre<br />

jeune <strong>Léon</strong> vous prépare une autre lettre pour sʹexcuser <strong>de</strong> la ru<strong>de</strong>sse <strong>de</strong> celle quʹil vous a<br />

écrite ces jours <strong>de</strong>rniers; je crois quʹil nʹy avait que <strong>de</strong> lʹétour<strong>de</strong>rie et du défaut <strong>de</strong> réflexion<br />

<strong>avec</strong> lʹabsence dʹéducation, le cœur vous est certainement fort attaché et reconnaissant.<br />

Tout va bien ici; jʹespère que vous êtes content <strong>de</strong> votre côté à Metz; les épreuves ne<br />

manquent jamais, elles sont comme le pain quotidien <strong>de</strong>s œuvres, mais elles portent <strong>avec</strong><br />

elles la bénédiction qui découle <strong>de</strong> la croix.<br />

Adieu, bien cher Monsieur lʹabbé, croyez à tous nos sentiments respectueux et dé‐<br />

voués.<br />

Votre ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

753 à M. Caille<br />

Deman<strong>de</strong> <strong>de</strong> statistiques <strong>de</strong> lʹŒuvre dʹArras. Fête <strong>de</strong> Saint Joseph.<br />

Vaugirard, 18 mars 1861<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je nʹavais pas eu <strong>de</strong>puis quelque temps <strong>de</strong> vos nouvelles, aussi votre petite lettre,<br />

quoique bien courte, mʹa été bien agréable; je crains quelquefois que nous ne nous suivions<br />

pas <strong>de</strong>s yeux dʹassez près et que notre vie commune en <strong>de</strong>vienne, sinon moins vraie, peut‐<br />

être moins intime; ne restez donc pas trop longtemps, cher ami, sans nous donner signe <strong>de</strong><br />

vie et sans nous tenir au courant <strong>de</strong> ce qui regar<strong>de</strong> vous, votre maison et vos œuvres.<br />

Cʹest vers ce temps ordinairement que vous mʹenvoyez un petit compte‐rendu <strong>de</strong><br />

votre situation après lʹannée finie; je joins ici le sommaire <strong>de</strong>s questions principales. Je ne<br />

vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pas un rapport très détaillé qui vous prendrait trop <strong>de</strong> temps, mais une vue<br />

dʹensemble qui, rapprochée dʹun travail pareil que je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à nos autres œuvres, nous<br />

permettra <strong>de</strong> nous rendre compte <strong>de</strong> notre situation générale.<br />

Jʹespère que je pourrai, au moment <strong>de</strong> la retraite, envoyer vers vous le jeune frère<br />

que vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z et reprendre, pour lʹune <strong>de</strong> nos maisons <strong>de</strong> Paris, le f. Ernest [Vas‐<br />

seur]; je pense que la chose se pourra faire.<br />

Nous fêtons aujourdʹhui St Joseph <strong>de</strong> notre mieux, en famille; je souhaite bien quʹil<br />

exauce tous les vœux que nous avons remis en ses mains pour vous et pour tout ce qui<br />

vous entoure; priez‐le aussi un peu pour nous.<br />

Mille affections à tous.<br />

Votre ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

753 bis 320 à M. Guillot<br />

Réponse à une lettre que MLP. a retrouvée longtemps après. Cʹest la charité qui dissipe le découragement. Sou‐<br />

tenir le bon combat. Support <strong>de</strong>s défauts.<br />

320 Supplée la lettre 781.<br />

845


19 mars [1861] ‐ St Joseph<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Vous mʹavez écrit, il y a un mois, dans un moment <strong>de</strong> tristesse et <strong>de</strong> décourage‐<br />

ment, pour me dire votre peine et chercher près <strong>de</strong> moi un peu <strong>de</strong> consolation. Dieu a<br />

permis, cher ami, que votre lettre ne me soit connue que <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux ou trois jours, je lʹai<br />

donc laissée sans réponse et vous avez dû vous contrister <strong>de</strong> lʹapparent oubli où je vous<br />

laissais dans cette petite épreuve; il nʹen était rien et cette négligence a été toute involon‐<br />

taire. Ne mʹayant pas trouvé dans ma chambre, celui qui apportait votre lettre lʹa mise<br />

dans une boîte placée à la porte, mais que je nʹouvre que rarement; elle est ainsi restée en‐<br />

sevelie durant un mois, et cʹest par une sorte <strong>de</strong> hasard que je lʹai enfin trouvée. Dieu a<br />

voulu sans doute, cher ami, que vous nʹayez quʹen Lui seul votre consolation; jʹespère<br />

quʹelle nʹen aura été que meilleure et plus efficace, car, quand le Seigneur prend lui‐même<br />

en main les choses, on peut être sûr quʹelles ne restent pas imparfaites.<br />

Je recevrai <strong>avec</strong> joie une petite lettre <strong>de</strong> vous qui mʹannonce que vous avez bien vite<br />

retrouvé votre repos et que ce nuage sʹest dissipé à la chaleur <strong>de</strong> la divine charité.<br />

Je pense que vous faites un peu chez vous le mois <strong>de</strong> St Joseph; nous le fêtons <strong>de</strong> no‐<br />

tre mieux aujourdʹhui à Vaugirard; que ne sommes‐nous tous réunis! Avec le temps, les<br />

charges <strong>de</strong> chacun <strong>de</strong>viennent si lour<strong>de</strong>s quʹon a moins <strong>de</strong> liberté et quʹil est plus difficile<br />

<strong>de</strong> se trouver tous ensemble. Vous sentez mieux que personne chez vous tous ces sacrifices<br />

<strong>de</strong> chaque jour, mais vous nʹoubliez point, cher ami, que cʹest pour cela même que Dieu<br />

nous bénit et que cʹest par cela surtout que nous sommes agréables à ses yeux. Que cette<br />

pensée vous encourage dans vos difficultés, dans vos contrariétés, dans le support quoti‐<br />

dien <strong>de</strong>s défauts <strong>de</strong>s autres et <strong>de</strong>s vôtres propres; tout cela, cʹest le bon combat, ceux qui<br />

lʹauront bien soutenu auront enfin la palme <strong>de</strong>s vainqueurs. Marchons donc toujours en<br />

avant, mon cher Henry, les jours passent, les années sʹécoulent, lʹheure du repos et <strong>de</strong> la<br />

paix viendra; cʹest ainsi que notre divin Sauveur et modèle J.C. est entré dans sa gloire, al‐<br />

lons bravement à sa suite pour arriver là où son amour nous attend.<br />

Adieu, bien cher ami, nous verrons à la retraite (2e quinzaine dʹavril) sʹil est possi‐<br />

ble, comme je lʹespère, <strong>de</strong> vous envoyer un jeune frère; jʹai aussi toujours le désir dʹaller<br />

vous voir au printemps. Je vous embrasse tous bien affectueusement.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Bon souvenir <strong>de</strong> ma part à Mlle Adélaï<strong>de</strong>.<br />

754 à M. Halluin<br />

Confiance en la Provi<strong>de</strong>nce. Rapport statistique à envoyer. Les maisons doivent sʹentrai<strong>de</strong>r et soutenir aussi la<br />

Maison‐Mère. Voyages <strong>de</strong>s frères dans leur famille.<br />

Vaugirard, 24 mars 1861<br />

Fête <strong>de</strong>s Rameaux<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Nous attendions <strong>de</strong> vos nouvelles et nous avons reçu <strong>avec</strong> joie votre lettre du 19 <strong>de</strong><br />

ce mois, laquelle ne contient rien, en ensemble, que <strong>de</strong> satisfaisant, puisquʹà travers les dif‐<br />

ficultés quotidiennes, votre personnel se soutient et votre œuvre continue à faire le bien.<br />

846


Que <strong>de</strong> grâces nʹavons‐nous pas à rendre à Dieu, et comment ne reconnaîtrions‐nous pas<br />

quʹIl nous assiste visiblement, puisquʹ<strong>avec</strong> <strong>de</strong>s moyens si insuffisants, nous parvenons à<br />

nous soutenir, peut‐être même à progresser! Continuons donc en persévérance et en<br />

confiance, Celui qui nous a protégés jusquʹici ne nous retirera point son appui.<br />

Je vous serai obligé, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> mʹenvoyer, comme <strong>de</strong> coutume, une<br />

sorte <strong>de</strong> petit état <strong>de</strong> situation, répondant aux questions indiquées sur la feuille ci‐jointe. A<br />

lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> ces documents, nous pouvons, chaque année, faire un relevé dʹensemble <strong>de</strong> notre<br />

situation.<br />

Jʹespère que notre retraite aura lieu dans la <strong>de</strong>uxième quinzaine dʹavril, je suis en<br />

pourparlers <strong>avec</strong> les rr. pp. Jésuites à ce sujet.<br />

Je pense que nous pourrons, à ce moment, ramener ici le jeune Mesny; nos arran‐<br />

gements ne sont pas toutefois encore absolument réglés, nous nous entendrons <strong>avec</strong> vous<br />

pour cela. Le jeune abbé [Jacques Clément] désire aussi aller à Arras pour sa théologie. Il<br />

ne manque pas <strong>de</strong> qualités, mais nous sommes jusquʹici encore incertains sʹil a celles qui le<br />

rendraient particulièrement propre à faire le bien dans notre Communauté. Sʹil va chez<br />

vous, il y paiera une petite pension. Il pourrait toutefois arriver <strong>de</strong>s cas où un frère serait<br />

envoyé à Arras, comme en toute autre maison <strong>de</strong> la Communauté, sans y apporter <strong>de</strong> res‐<br />

sources propres. Nous <strong>de</strong>vons nous rendre les uns aux autres ces bons offices, autrement<br />

le mien et le tien <strong>de</strong>viendraient si prononcés chez nous que nous perdrions le véritable es‐<br />

prit et, en même temps, les avantages <strong>de</strong> la vie commune. Une maison, quelque peu char‐<br />

gée momentanément par la présence dʹun frère en étu<strong>de</strong>s ou peu utile pour elle, retrouve‐<br />

ra bientôt dans quelque occasion <strong>de</strong>s compensations à ce sacrifice par les allégements que<br />

lui apportera à son tour une autre maison. La Maison‐Mère, qui accepte dʹailleurs tant <strong>de</strong><br />

charges pour la formation <strong>de</strong>s sujets, pour les retraites, les voyages, lʹhospitalité quʹelle<br />

donne, en tout temps, à tous les membres <strong>de</strong> la famille, a bien droit <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r, à son<br />

tour, un peu dʹassistance aux maisons particulières; lʹunion, la cordiale affection pour la<br />

famille y gagnent aussi. Je crois que nous ne saurions nous éloigner <strong>de</strong> ces bonnes tradi‐<br />

tions qui ont eu cours, dès le principe, parmi nous.<br />

Vous jugerez sʹil est utile que le f. Alphonse [Vasseur] aille quelques jours dans sa<br />

famille, après Pâques; nous avons une gran<strong>de</strong> répugnance à ces voyages, nous tâchons <strong>de</strong><br />

les rendre rares, courts et nous ne les accordons que pour <strong>de</strong>s motifs <strong>de</strong> quelque gravité;<br />

ces termes nʹont rien dʹabsolu, vous verrez donc, cher Monsieur lʹabbé, ce qui sera le<br />

mieux.<br />

Nous sommes toujours dans les mêmes dispositions <strong>avec</strong> M. lʹabbé Risse, <strong>de</strong> Metz.<br />

M gr lʹEvêque mʹa écrit une lettre parfaite pour me dire quʹil voyait cette union <strong>avec</strong> plaisir<br />

et quʹil y donnait tout agrément.<br />

Nous verrons mieux, aux approches <strong>de</strong> la retraite, si MM. Myionnet ou Lantiez<br />

pourraient vous remplacer momentanément; cela nʹest pas sans quelque difficulté, parce<br />

que, ordinairement, lʹun ou lʹautre a déjà la charge <strong>de</strong> notre maison pendant que le reste<br />

du personnel suit les exercices <strong>de</strong> la retraite. Je ne perdrai pas la chose <strong>de</strong> vue, sachant bien<br />

que vous aussi, cher Monsieur lʹabbé, avez besoin <strong>de</strong> repos spirituel et corporel tout en‐<br />

semble.<br />

Assurez bien, je vous prie, tous nos frères <strong>de</strong> ma tendre affection et croyez aussi à<br />

mes sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> dévouement en J.M.J. Le <strong>Prevost</strong> P tre<br />

P. S. La mère <strong>de</strong> M. Sadron <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>avec</strong> instance quʹil écrive à sa tante.<br />

847


755 à M. Caille<br />

Que M. Caille intervienne en faveur dʹun jeune collégien dʹAmiens.<br />

Vaugirard, 25 mars 1861<br />

Mon bon ami et fils en N.S.,<br />

Un <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong>s Conférences <strong>de</strong> St ‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul <strong>de</strong> Paris, M. <strong>de</strong> Chavagnac,<br />

me prie <strong>de</strong> réclamer votre entremise pour une petite affaire à laquelle il attache un grand<br />

intérêt.<br />

Il connaît particulièrement la famille dʹun jeune garçon reçu, (je crois, charitable‐<br />

ment) au Collège dʹAmiens chez les rr. Pères, et nommé Rouillé. Cet enfant <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>avec</strong><br />

une vive instance à ne point rester au Collège durant les vacances <strong>de</strong> Pâques; lʹan <strong>de</strong>rnier,<br />

ses parents, qui sont au Mans et peu aisés, lʹy ont laissé, ses camara<strong>de</strong>s lʹy ont humilié,<br />

supposant que cʹétait par économie quʹil était resté; <strong>de</strong> là un chagrin quʹil ne veut à aucun<br />

prix encourir <strong>de</strong> nouveau. Il a amassé lʹargent nécessaire pour faire un voyage soit à Paris,<br />

soit ailleurs; sa mère consent à ce quʹil le fasse, mais elle est mal entourée au Mans, elle<br />

souhaite quʹil nʹy vienne point en ce moment. M. <strong>de</strong> Chavagnac la connaît beaucoup et en<br />

dit du bien, il voudrait lui complaire en donnant satisfaction au désir du pauvre enfant. Il<br />

pense que le r.p. Recteur du Collège consentirait à envoyer lʹenfant Rouillé passer les va‐<br />

cances <strong>de</strong> Pâques au Collège <strong>de</strong>s Pères <strong>de</strong> Vaugirard, ou que vous le recevriez vous‐même<br />

momentanément, moyennant in<strong>de</strong>mnité, pour le séjour <strong>de</strong> quinze jours quʹil passerait chez<br />

vous, ou enfin quʹon lʹenverrait ici chez nous. Il me semble que son envoi au Collège chez<br />

les Pères à Vaugirard serait le moyen le plus naturel et le plus simple; je vous prie dʹen<br />

parler ou faire parler au r.p. Recteur et dʹarranger la chose pour le plus grand bien du<br />

jeune Rouillé. Cʹest assurément un enfantillage, mais cet enfant, bon dʹailleurs, a beaucoup<br />

dʹorgueil; il a été blessé, il ne se sent pas la force <strong>de</strong> subir une nouvelle épreuve; ce chagrin<br />

est aussi digne <strong>de</strong> compassion que la plupart <strong>de</strong> ceux quʹon rencontre dans le mon<strong>de</strong>, vous<br />

nʹy refuserez point votre attention charitable.<br />

Adieu, mon bien bon ami, la chose presse, puisque les vacances vont commencer.<br />

Je suis tout affectueusement, en J. et M.,<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

756 à M. Guillot<br />

Sʹappuyer sur Dieu. MLP. rassure le frère Guillot qui pourra faire sa retraite annuelle.<br />

Vaugirard, 5 avril 1861<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Caille vient nous dire adieu en hâte, je nʹai absolument quʹun moment pour vous<br />

dire que nous vous restons ici tous bien intimement unis <strong>de</strong> cœur et que pour moi, en par‐<br />

ticulier, je prends le plus tendre intérêt à tout ce qui concerne vous et vos travaux. Ayez<br />

bonne confiance, cher enfant, appuyez‐vous sur Dieu et soyez sûr quʹen toute difficulté Il<br />

vous sera toujours présent.<br />

Quant à la retraite, cher ami, soyez tranquille, vous la ferez certainement; si nous ne<br />

pouvions vous faire venir au moment <strong>de</strong> la retraite <strong>de</strong> la Communauté réunie, vous vien‐<br />

driez immédiatement après pour la faire <strong>avec</strong> MM. Myionnet et Halluin qui ne pourront<br />

848


probablement sʹarranger autrement; en tout état <strong>de</strong> cause, soyez certain que vous aurez<br />

cette réfection spirituelle dʹune façon ou dʹune autre. Ce nous sera une véritable joie <strong>de</strong><br />

vous revoir à cette occasion, nous y songeons dʹavance et attendons impatiemment le<br />

moment qui doit vous réunir quelques jours <strong>avec</strong> nous.<br />

Je vous embrasse bien tendrement, faites mille affections pour moi à nos <strong>de</strong>ux jeu‐<br />

nes frères Ernest [Vasseur] et Lamoury.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

757 à M. Risse<br />

Unité <strong>de</strong> vues et <strong>de</strong> sentiments <strong>avec</strong> lʹŒuvre <strong>de</strong> Metz. Lien <strong>de</strong> la charité: ʺpuissions‐nous allumer partout le feu<br />

divinʺ. Avantage <strong>de</strong> la retraite annuelle. Fruits <strong>de</strong>s fêtes pascales dans les Œuvres. Utilité <strong>de</strong>s petites associa‐<br />

tions <strong>de</strong> piété.<br />

Vaugirard, 9 avril 1861<br />

Bien cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Depuis bien <strong>de</strong>s jours, je veux répondre à votre <strong>de</strong>rnière et bonne lettre, les déran‐<br />

gements continus mʹen empêchent; je passe aujourdʹhui par‐<strong>de</strong>ssus tout, ne voulant pas<br />

vous laisser croire quʹon est oublieux chez nous et quʹon reconnaît mal votre sincère et<br />

cordiale affection. Loin <strong>de</strong> là, bien cher ami, je remercie Dieu chaque jour <strong>de</strong> nous avoir<br />

rapprochés et je Le prie <strong>de</strong> cimenter <strong>de</strong> plus en plus notre union; soyez bien sûr que, pour<br />

notre part, nous ferons tout ce qui dépendra <strong>de</strong> nous pour la rendre à la fois intime et fruc‐<br />

tueuse pour le bien. Les <strong>de</strong>ux bons enfants que vous nous avez envoyés commencent heu‐<br />

reusement lʹexécution <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>sseins charitables; ils se forment sensiblement et nous don‐<br />

nent toujours bon espoir pour lʹavenir; ils sʹaccoutument bien du reste, parmi nous et sont<br />

déjà ici comme sʹils y avaient toujours vécu. Cʹest quʹau fond, cher Monsieur lʹabbé, après<br />

un peu <strong>de</strong> temps nécessaire pour sʹaccoutumer à <strong>de</strong> nouveaux lieux et à <strong>de</strong> nouveaux vi‐<br />

sages, ils ont retrouvé chez nous le même esprit, les mêmes œuvres, le même ordre <strong>de</strong><br />

pensées et <strong>de</strong> sentiments que ceux dans lesquels ils vivaient à Metz; cʹétait la charité qui les<br />

avait attirés près <strong>de</strong> vous, jʹespère que cʹest la charité qui les soutient parmi nous; la chari‐<br />

té! quel mot et quelle chose, bien cher ami, et que le bon Maître a fait un beau présent au<br />

mon<strong>de</strong> quand Il est venu apporter ce feu divin; puissions‐nous, selon ses <strong>de</strong>sseins, lʹallu‐<br />

mer partout en son nom autour <strong>de</strong> nous!<br />

Si les <strong>de</strong>ux autres jeunes amis que vous nous <strong>de</strong>stinez gar<strong>de</strong>nt toujours leurs bonnes<br />

résolutions, une occasion prochaine semblerait favorable pour les réaliser.<br />

Nous aurons, le 21 <strong>de</strong> ce mois, une retraite <strong>de</strong> quelques jours qui nous sera donnée<br />

par un r.p. Jésuite [r.p. Vézières] très bienveillant pour nous et qui a un remarquable ta‐<br />

lent, en même temps que beaucoup <strong>de</strong> piété. Déjà, une autre année, il est venu nous don‐<br />

ner la retraite durant cinq jours, nous en avons été enchantés; il nʹy avait nulle fatigue pour<br />

personne, tant sa parole est claire, vive, attachante. Une petite retraite <strong>de</strong> ce genre est un<br />

bon commencement et met bien, dès lʹarrivée, dans les dispositions qui font aimer le ser‐<br />

vice <strong>de</strong> Dieu. Vous jugerez toutefois, cher Monsieur lʹabbé, et vos bons jeunes gens verront<br />

eux‐mêmes si rien ne sʹoppose à ce quʹils prennent pour ce moment leurs arrangements; je<br />

sais bien quʹun départ est chose toujours un peu difficile et quʹon ne peut bien souvent lʹef‐<br />

fectuer à point nommé; Dieu y pourvoira, si cʹest sa très sainte volonté.<br />

849


Je pense, cher Monsieur lʹabbé, que vous aurez, comme nous, eu dʹabondantes<br />

consolations dans votre œuvre au temps <strong>de</strong> Pâques; il semble que cette année le Seigneur<br />

ait voulu consoler ses serviteurs dans les tristesses que leur causent les épreuves doulou‐<br />

reuses <strong>de</strong> lʹEglise, leur Mère; tous nos patronages et lʹensemble <strong>de</strong>s œuvres qui nous sont<br />

confiées ont eu, après les retraites, <strong>de</strong> véritables fruits <strong>de</strong> bénédiction. Jʹai vu <strong>avec</strong> joie que<br />

vos jeunes gens ont aussi travaillé <strong>de</strong> leur mieux pour vous secon<strong>de</strong>r et ont préparé <strong>avec</strong><br />

zèle et persévérance un bon nombre dʹadultes pour la première communion. Dieu leur<br />

rendra certainement ce quʹils ont fait pour Lui.<br />

Le moyen adopté par vous <strong>de</strong>s petites associations <strong>de</strong> piété est excellent; <strong>avec</strong> ce<br />

noyau <strong>de</strong> sujets dʹélite, on mène tout le reste, on se fait <strong>de</strong>s agents dévoués et lʹon soutient<br />

et élève lʹesprit <strong>de</strong> lʹœuvre; en avançant, vous vous féliciterez <strong>de</strong> plus en plus dʹavoir<br />

consacré à ces bons jeunes gens quelques soins particuliers; leur avancement propre sera<br />

votre première récompense.<br />

Demeurons bien unis par la prière, cher Monsieur lʹabbé; quoi que nous fassions,<br />

nos correspondances ne nous laissent suivre quʹassez imparfaitement nos mouvements<br />

respectifs, mais dans le Cœur du divin Sauveur tout se voit, tout se sent, car, à mesure que<br />

la charité sʹaccroît, on entre davantage dans cette sainte intelligence <strong>de</strong>s âmes qui se com‐<br />

prennent sans mouvement ni grand bruit <strong>de</strong> paroles. Jʹespère que nous sommes déjà un<br />

peu ainsi par la confiance et lʹaffection réciproques. Je <strong>de</strong>meure dans ces sentiments, cher<br />

Monsieur lʹabbé.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

N.B. Vous mʹavez <strong>de</strong>mandé, dans une <strong>de</strong> vos lettres qui me retombe sous les yeux,<br />

si un jeune ecclésiastique pourrait, le cas échéant, faire à Metz lʹaumônerie <strong>de</strong>s orphelins;<br />

je ne verrais pas dʹimpossibilité à cette combinaison; nous sommes présentement bien peu<br />

nombreux, ayons confiance dans lʹavenir.<br />

Nous avons imaginé <strong>de</strong> faire faire une toute petite classe aux jeunes Guichard et<br />

Bosmel, pensant quʹen enseignant, ils apprendraient; ils sʹen trouvent bien.<br />

758 à M. Halluin<br />

Remplacement du frère Alphonse Vasseur. Ai<strong>de</strong>r ses surveillants et comprendre leurs difficultés.<br />

Vaugirard, 13 avril 1861<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Nous allons examiner quels moyens nous pourrions avoir <strong>de</strong> remplacer le f. Al‐<br />

phonse [Vasseur]; nous avons beaucoup <strong>de</strong> jeunes gens et fort peu dʹhommes faits, capa‐<br />

bles <strong>de</strong> conduire un personnel <strong>de</strong> lʹâge <strong>de</strong> vos apprentis dʹArras; la tâche nʹest pas sans dif‐<br />

ficulté. Je sais que vous faites <strong>de</strong> votre mieux pour soutenir ceux qui sont chargés <strong>de</strong> la<br />

porter <strong>avec</strong> vous. Il faut ne pas oublier quʹils nʹont pas lʹinfluence morale attachée à votre<br />

personne, à votre caractère, à votre position et que le far<strong>de</strong>au pèse dʹautant plus lour<strong>de</strong>‐<br />

ment sur eux. Nous aurons toute bonne volonté ici pour arranger les choses autant bien<br />

que nous pourrons.<br />

Nos MM. pensent que vous pourriez plus aisément faire un peu <strong>de</strong> retraite immé‐<br />

diatement après la nôtre. Nous serons bien satisfaits si vous pouvez avoir le repos spirituel<br />

850


dont nous comprenons bien que vous ayez besoin <strong>avec</strong> les charges si nombreuses qui vous<br />

sont imposées.<br />

Nous prions bien cordialement pour vous et nous vous <strong>de</strong>meurons affectueusement<br />

unis en J. et M.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

759 à M. Vasseur<br />

Encouragement paternel à <strong>de</strong>meurer fidèle et dévoué. Inconvénient <strong>de</strong>s changements pour les Œuvres.<br />

Vaugirard, 17 avril 1861<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Jʹai retrouvé dans votre petite lettre mon Alphonse <strong>de</strong>s meilleurs jours, ou plutôt<br />

toujours le même Alphonse facile à démonter, mais aussi disposé toujours à écouter la<br />

voix <strong>de</strong> la sagesse et <strong>de</strong> la foi qui ne tar<strong>de</strong> pas à parler au fond <strong>de</strong> son cœur. Que Dieu dai‐<br />

gne, cher enfant, vous maintenir dans cet esprit <strong>de</strong> fidélité et <strong>de</strong> dévouement, quʹIl gar<strong>de</strong><br />

ce foyer <strong>de</strong> vraie charité quʹIl a mis dans votre âme et quʹIl lʹaccroisse encore pour votre<br />

sanctification comme pour le bien <strong>de</strong>s œuvres!<br />

Ainsi que vous le pensez bien, nous nʹaurions donné à M. Halluin quʹune <strong>de</strong>mi‐ sa‐<br />

tisfaction par les moyens que nous aurions pu prendre pour votre remplacement; les<br />

changements dʹailleurs sont rarement sans <strong>de</strong> grands inconvénients, il faut du temps pour<br />

faire une position, pour connaître les enfants et apprendre à les diriger; une expérience<br />

chèrement acquise par beaucoup <strong>de</strong> peines et <strong>de</strong> travaux est, en un moment, perdue par<br />

un changement; il faut ailleurs recommencer <strong>avec</strong> peines et difficultés nouvelles; les œu‐<br />

vres comme les hommes en souffrent beaucoup. Cʹest donc une bonne et chrétienne inspi‐<br />

ration qui vous a été donnée ici évi<strong>de</strong>mment par le bon Maître.<br />

M. Halluin part; je finis, mais content <strong>de</strong> vous, plein <strong>de</strong> bonnes espérances et bénis‐<br />

sant Dieu qui vous maintient dans lʹamour du bien et <strong>de</strong> la charité.<br />

Je vous embrasse tendrement et les autres <strong>avec</strong> vous.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

760 à M. Halluin<br />

MLP. regrette le poids <strong>de</strong>s charges <strong>de</strong> la Communauté, eu égard à ses moyens. Les moyens <strong>de</strong> lʹŒuvre dʹArras.<br />

Vaugirard, 29 avril 1861<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Notre f., M. François [Le Carpentier], mʹa témoigné le désir <strong>de</strong> passer une quinzaine<br />

<strong>de</strong> jours à Paris, afin <strong>de</strong> sʹoccuper <strong>de</strong> quelques affaires qui intéressent très particulièrement<br />

sa famille. je nʹai pu mʹy refuser, ses motifs mʹayant paru réellement graves. Il nʹest pas dé‐<br />

cidé jusquʹici quʹil ne retournera pas à Arras, quoiquʹil mʹait fait beaucoup dʹobjections sur<br />

les difficultés que la faiblesse <strong>de</strong> sa vue lui cause pour la surveillance <strong>de</strong>s enfants. Je crois<br />

quʹil sʹexagère le peu dʹimportance <strong>de</strong> ses services à Arras. Il les compte presque pour rien.<br />

Vous semblez, cher Monsieur lʹabbé, en juger autrement. Nous verrons, durant les jours<br />

851


quʹil passera ici, ce qui sera le mieux dans lʹintérêt <strong>de</strong> votre œuvre et <strong>de</strong> ce bon frère lui‐<br />

même. Jʹai bien <strong>de</strong>s fois examiné sʹil nous serait absolument impossible <strong>de</strong> vous donner un<br />

f. ecclésiastique qui vous serait, comme vous me lʹavez dit souvent, dʹun grand secours. Jʹy<br />

penserai <strong>de</strong> nouveau <strong>de</strong>vant Dieu, nos charges sont si lour<strong>de</strong>s, eu égard à nos faibles<br />

moyens!<br />

Cette lettre vous sera, je pense, remise par M. Clément. Jʹespère quʹil pourra vous<br />

être un peu utile. Je vais prier M. Lantiez, qui lʹa suivi <strong>de</strong> près, <strong>de</strong> vous indiquer, par quel‐<br />

ques mots, à quoi il pourrait convenablement être employé. Une fois son règlement tracé<br />

et ses occupations indiquées, je vous serai obligé <strong>de</strong> tenir à ce quʹil y soit fidèle. Nous ne<br />

faiblirons point et nous exigerons <strong>avec</strong> vous quʹil vous soit un peu utile, il en aura la bonne<br />

volonté, je lʹespère; il a <strong>de</strong> lʹordre, <strong>de</strong> lʹexactitu<strong>de</strong>, il est pieux et a toujours une tenue par‐<br />

faite.<br />

1 er mai. Au moment où M. Clément part, je cherche inutilement cette lettre que je<br />

nʹai retrouvée quʹaprès quʹil est sorti; je vous lʹenvoie donc par la poste. Nous allons bien<br />

tenir compte <strong>de</strong>s observations que vous mʹavez faites et nous tâcherons <strong>de</strong> satisfaire aux<br />

besoins <strong>de</strong> votre œuvre, autant bien que nous le pourrons.<br />

Tout le mon<strong>de</strong> ici vous assure <strong>de</strong> ses sentiments affectueux et se joint à moi pour<br />

vous embrasser en J. et M.<br />

Votre tout dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je nʹoublie point le désir que vous auriez <strong>de</strong> venir faire un peu <strong>de</strong> retraite. Nous<br />

verrons si M. Lantiez ou M. Myionnet pourraient, dʹici à quelque temps, sʹéchapper quel‐<br />

ques jours pour vous donner moyen <strong>de</strong> prendre quelque repos pour lʹâme et pour le corps.<br />

761 à M. Baudon<br />

Heureux dénouement dans lʹaffaire <strong>de</strong>s immeubles <strong>de</strong> Nazareth et <strong>de</strong> Grenelle.<br />

Vaugirard, 6 mai 1861<br />

Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt Général,<br />

Une retraite qui nous a retenus quelques jours mʹa empêché <strong>de</strong> répondre plus tôt à<br />

la lettre que vous mʹavez fait lʹhonneur <strong>de</strong> mʹécrire le 30 avril321 pour me communiquer la<br />

décision prise par vous et par le Conseil au sujet <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux maisons <strong>de</strong> Nazareth et <strong>de</strong> N.D.<br />

<strong>de</strong> Grâce.<br />

Je suis particulièrement touché, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt, <strong>de</strong>s sentiments qui ont inspi‐<br />

ré votre détermination, et je mʹy suis attaché plus quʹà tout le reste. Je souhaite par‐<strong>de</strong>ssus<br />

tout, en effet, que nos efforts restent constamment unis aux vôtres et à ceux <strong>de</strong> nos confrè‐<br />

res pour le bien <strong>de</strong>s œuvres, jʹose assurer que tous nos rapports <strong>avec</strong> vous et <strong>avec</strong> eux,<br />

vous en seront un constant témoignage. Nous ferons tout ce qui dépendra <strong>de</strong> nous pour<br />

alléger successivement les charges <strong>de</strong>s loyers à mesure que les œuvres seront exonérées.<br />

Nous compterons, <strong>de</strong> notre part, sur lʹai<strong>de</strong> bienveillante <strong>de</strong> la Société pour hâter le mo‐<br />

321 « Notre Société crut <strong>de</strong>voir renoncer à toute réclamation ultérieure, vis-à-vis <strong>de</strong> votre Communauté, tant pour la copropriété que<br />

pour les sommes avancées par elle pour le payement <strong>de</strong>s immeubles <strong>de</strong> Nazareth et <strong>de</strong> Notre-Dame <strong>de</strong> Grâce. Par contre, elle croit<br />

pouvoir se déclarer étrangère pour l’avenir à toute charge <strong>de</strong> propriété sur ces Maisons ». (…) M. Baudon assurait que le motif déterminant<br />

<strong>de</strong> cet arrangement était « avant tout le désir <strong>de</strong> conserver une union précieuse entre <strong>de</strong>ux forces charitables qui paraissent<br />

<strong>de</strong>voir se compléter l’une l’autre ». (VLP. t.II, p. 164).<br />

852


ment <strong>de</strong> cette entière libération, également désirable pour tous ceux qui donnent leur<br />

concours aux œuvres charitables <strong>de</strong> Nazareth et <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Grâce.<br />

Je <strong>de</strong>meure, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt, <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s sentiments respectueux et sincèrement<br />

dévoués.<br />

Votre humble serviteur et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P tre<br />

762 à M. Halluin<br />

M. Planchat va prêter main‐forte à lʹŒuvre dʹArras.<br />

Vaugirard, 8 mai 1861<br />

Vigile <strong>de</strong> lʹAscension<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je viens <strong>de</strong> mʹentendre <strong>avec</strong> ceux <strong>de</strong> nos frères qui me servent <strong>de</strong> Conseil ordinaire;<br />

nous reconnaissons les besoins pressants que vous nous signalez dans votre maison et<br />

nous allons faire un effort pour vous donner un secours que vous souhaitez <strong>avec</strong> raison.<br />

Notre bon abbé Planchat ira vous donner son concours pour quelques mois, pour un<br />

temps plus long si nous trouvons le moyen <strong>de</strong> combler le vi<strong>de</strong> considérable que son ab‐<br />

sence va causer à Grenelle. Son bon esprit, sa cordiale affection pour tous nos frères me<br />

laissent espérer quʹil pourra <strong>avec</strong> vous servir <strong>de</strong> lien à la communauté. Son zèle si dévoué,<br />

son expérience dans la culture et le soin <strong>de</strong>s âmes mʹassurent aussi quʹil vous secon<strong>de</strong>ra<br />

bien utilement près <strong>de</strong> vos enfants.<br />

Il me <strong>de</strong>man<strong>de</strong> sʹil peut, sans inconvénient, ajourner son départ jusquʹau mardi <strong>de</strong><br />

la Pentecôte. Si vous avez <strong>de</strong>s raison graves <strong>de</strong> souhaiter son arrivée pour un moment plus<br />

rapproché, écrivez‐le moi, je tâcherai <strong>de</strong> lever les difficultés et <strong>de</strong> lʹenvoyer plus tôt. Je prie<br />

Dieu, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> vous faire trouver dans ce moyen tous les secours que nous<br />

souhaitons vous assurer.<br />

Tous nos frères vous offrent <strong>avec</strong> moi leurs respectueuses affections. Veuillez me<br />

croire toujours, cher Monsieur lʹabbé, en J. et M.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

763 à M. Halluin<br />

La présence du père Planchat réconfortera le frère Vasseur. Conseils pour la formation dʹun postulant. Défauts<br />

qui seraient un empêchement à lʹadmission.<br />

Vaugirard, le 13 mai 1861<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie quelques lignes pour encourager un peu le f. Alphonse [Vasseur],<br />

qui est parfois découragé et que les difficultés <strong>de</strong> sa position ne trouvent pas toujours as‐<br />

sez fort. Je pense que la présence <strong>de</strong> M. Planchat le consolera beaucoup; ils se connaissent<br />

<strong>de</strong>puis nombre dʹannées. M. Planchat est dʹailleurs pru<strong>de</strong>nt, conciliant et dʹun excellent<br />

esprit. Vous nʹaurez, je pense, quʹà vous louer <strong>de</strong> son concours.<br />

853


Quant à M. Clément, il nous paraîtrait essentiel quʹil rendît au moins quelque peu<br />

<strong>de</strong> service à la sacristie quʹil connaît parfaitement, pour quelque surveillance matin et soir<br />

aux dortoirs. Il a une disposition à se faire une vie à part et tout à lui, contre laquelle nous<br />

<strong>de</strong>vons lutter, parce que cet esprit particulier est tout à fait contraire à la vie commune et<br />

rendrait son admission parmi nous définitivement impossible, sʹil ne se montrait plus<br />

flexible, plus disposé à se conformer à la règle. Je désire donc bien expressément quʹil ne<br />

soit pas déchargé <strong>de</strong> tout soin et je vous prie dʹexiger obéissance <strong>de</strong> sa part à tout ce que<br />

vous lui aurez prescrit. Cʹest sous ce rapport quʹil nous reste <strong>de</strong>s doutes sur sa vocation.<br />

Bien que la Communauté, ici, soit en ce moment lour<strong>de</strong>ment chargée et en<strong>de</strong>ttée,<br />

nous vous donnerons néanmoins une petite pension <strong>de</strong> 400f pour ai<strong>de</strong>r à lʹentretien et au<br />

séjour <strong>de</strong> M. Clément à Arras. Jʹespère quʹil saura reconnaître notre bon vouloir à son<br />

égard par son attachement à la Communauté et à ses œuvres.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, je prie le Seigneur <strong>de</strong> bénir vous et votre chère maison.<br />

Je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à la S te Vierge <strong>de</strong> porter votre far<strong>de</strong>au <strong>avec</strong> vous.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

764 à M. Vasseur<br />

Exhortation à la patience. Prendre les choses du bon côté. Lʹapprobation <strong>de</strong> Dieu vaut mieux que celle <strong>de</strong>s hom‐<br />

mes. Quʹil se confie à M. Planchat. Recourir à Marie et à lʹEsprit Saint.<br />

Vaugirard, 13 mai 1861<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Votre petite lettre mʹaurait beaucoup peiné si je nʹavais pris confiance en me souve‐<br />

nant que, si les impressions du moment vous remuent profondément, le bon esprit et la ré‐<br />

flexion vous remettent toujours dans le calme et dans le sentiment du bien. Je conçois, cher<br />

ami, quʹil vous soit dur <strong>de</strong> voir tant <strong>de</strong> réserve en M. Halluin dans lʹabandon quʹil vous fait<br />

<strong>de</strong> la conduite <strong>de</strong> ses enfants et quʹun peu plus <strong>de</strong> liberté dʹallure vous fût parfois désira‐<br />

ble pour vous. Mais, cher ami, la responsabilité <strong>de</strong> M. Halluin est bien plus gran<strong>de</strong> que<br />

nʹest la vôtre; il sait la ru<strong>de</strong>sse et les emportements <strong>de</strong> ses jeunes gens, il craint que, mal<br />

disposés comme ils le sont quelquefois contre ceux qui acceptent courageusement comme<br />

vous les obligations <strong>de</strong> lʹordre et <strong>de</strong> la discipline, ils ne se portent à quelque violence ou<br />

acte <strong>de</strong> rébellion qui compromettrait tout le bien <strong>de</strong> lʹœuvre; un peu <strong>de</strong> circonspection et<br />

<strong>de</strong> timidité est bien concevable en cette situation. Tâchez donc, cher enfant, <strong>de</strong> prendre les<br />

choses du bon côté, faites pour le mieux et cherchez votre paix en Dieu. Soyez sûr que Lui<br />

au moins appréciera vos efforts; son approbation vaut mieux que celle <strong>de</strong>s hommes, mieux<br />

surtout que la nôtre propre, car, lorsque nous avons tout fait pour le bien, nous ne <strong>de</strong>vons<br />

dire ni penser autre chose, sinon: je suis un serviteur inutile.<br />

Il me semble, cher enfant, que vous ne pensez pas assez, pour vous consoler et vous<br />

remettre, à tout ce que la présence <strong>de</strong> M. Planchat va vous donner dʹappui et <strong>de</strong> consola‐<br />

tion spirituelle; vous savez comme il est charitable, compatissant, serviable; vous vous en‐<br />

tendrez à merveille <strong>avec</strong> lui, il vous ai<strong>de</strong>ra pour les exercices <strong>de</strong> Communauté, pourra<br />

vous diriger au S t Tribunal, vous encouragera dans vos difficultés et, quoique particuliè‐<br />

rement <strong>de</strong>stiné aux offices spirituels, pourra encore à lʹoccasion vous donner un peu <strong>de</strong> se‐<br />

cours dans vos emplois. Il est si bon, si réconfortant dʹavoir quelquʹun qui nous com‐<br />

854


prenne, qui sympathise à tout ce qui nous touche; cʹest principalement dans cette vue que<br />

nous nous sommes décidés à nous séparer <strong>de</strong> notre bon abbé; il ira aussi fréquemment à<br />

Amiens pour soutenir aussi nos frères qui sont là peu nombreux et peu soutenus, je crois<br />

quʹil fera ainsi beaucoup <strong>de</strong> bien.<br />

Donc, cher ami, confiance, bonne espérance; nous sommes dans le mois <strong>de</strong> Marie,<br />

ne lʹoubliez pas; nous nous préparons à la fête <strong>de</strong> la Pentecôte, souvenez‐vous en aussi, in‐<br />

voquez lʹEsprit Saint, Il est lʹEsprit consolateur, cʹest Lui qui rend la force aux âmes et qui y<br />

entretient une sainte ar<strong>de</strong>ur.<br />

Je Lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pour vous, cher ami, une gran<strong>de</strong> effusion <strong>de</strong> grâces; jʹai la confiance<br />

quʹelle vous sera accordée.<br />

Je vous embrasse tendrement en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Mille amitiés à nos frères.<br />

765 à M. Risse<br />

Conseils dʹordre pratique à propos <strong>de</strong> lʹentrée <strong>de</strong> M. Risse dans la Congrégation.<br />

Vaugirard, 18 mai 1861<br />

Vigile <strong>de</strong> la Pentecôte<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Vous <strong>de</strong>vez penser que la promptitu<strong>de</strong> et lʹactive expédition <strong>de</strong>s choses nʹest guère<br />

au nombre <strong>de</strong>s qualités <strong>de</strong> notre Communauté, car voilà bien <strong>de</strong>s jours déjà que votre<br />

chère lettre nous est arrivée et la réponse sʹest bien fait attendre; la bonne volonté ne nous<br />

a pas manqué, mais le temps opportun, à travers les incessants dérangements <strong>de</strong> chaque<br />

jour. Et pourtant, sur le point principal <strong>de</strong> votre lettre, la solution était facile à donner, si<br />

facile que vous la pouviez dire dʹavance; toute disposition qui avancera le moment <strong>de</strong> no‐<br />

tre parfaite union sera fort bonne et fort aimable pour nous, septembre vaut mieux que fé‐<br />

vrier et 1861 mieux que 1862, puisque lʹintelligence dʹesprit et <strong>de</strong> cœur est entière, que lʹef‐<br />

fet y mette la consommation, cʹest notre désir comme le vôtre; donc, cher Monsieur lʹabbé,<br />

cʹest bien entendu, nous vous attendrons au mois <strong>de</strong> septembre. Cʹest un moment bien<br />

choisi aussi pour nous; lʹéloignement <strong>de</strong> presque toutes les personnes occupées <strong>de</strong> charité<br />

laisse un peu <strong>de</strong> relâche à lʹactivité, les choses organisées marchent comme dʹelles‐mêmes<br />

alors et <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt moins <strong>de</strong> mouvements et <strong>de</strong> préoccupation. Nos frères pourront donc<br />

être plus facilement <strong>avec</strong> vous et compléter par la vie commune la fusion <strong>de</strong> nos existences<br />

comme <strong>de</strong> nos œuvres.<br />

Jʹadmets sans restriction vos vues pour lʹavenir et pour la constitution <strong>de</strong> votre petit<br />

intérieur <strong>de</strong> communauté à Metz. Je nʹai point <strong>de</strong> prévision arrêtée pour le personnel qui<br />

vous pourra donner assistance, mais Dieu nous éclairera en temps utile et nous prêtera se‐<br />

cours pour tout arranger pour le mieux. Quant aux détails dʹintérêt <strong>avec</strong> votre famille, je<br />

mʹen rapporte tout à fait à votre jugement; la Communauté est fort désintéressée, je crois<br />

pouvoir le dire, et toujours disposée à conseiller ce qui peut plaire aux familles et les ren‐<br />

dre favorables aux œuvres <strong>de</strong> la Religion.<br />

855


Il me semble que, pour faire agréer à vos parents votre absence plus prolongée que<br />

<strong>de</strong> coutume, vous pourriez dire que, dans le désir dʹassurer à votre œuvre <strong>de</strong>s appuis pour<br />

lʹavenir, vous voulez étudier <strong>de</strong> près une association dʹhommes dévoués aux institutions<br />

du même genre, afin <strong>de</strong> voir si quelque assistance peut vous venir <strong>de</strong> ce côté. Peut‐être<br />

pourriez‐vous ne rien dire dʹavance et motiver ainsi, en écrivant dʹici, la prolongation <strong>de</strong><br />

votre absence. Ainsi vous donneriez moins <strong>de</strong> solennité à votre départ et vous vous épar‐<br />

gneriez <strong>de</strong>s scènes dʹadieu souvent pénibles et brisantes. Je ne sais si ce moyen est pratica‐<br />

ble; vous en serez, mieux éclairé, bien meilleur juge que moi.<br />

Je ne vois ici aucun fait bien mémorable que jʹaie à vous signaler, tout marche pour<br />

nous dans dʹassez bonnes conditions, mais sans mouvements bien remarquables; nous<br />

sentons Dieu près <strong>de</strong> nous et nous trouvons là notre paix; les menaces du temps présent<br />

sont pour lʹEglise entière sans rien <strong>de</strong> propre pour nous, nous les regardons tristement<br />

comme chrétiens, mais aussi <strong>avec</strong> confiance, puisque les promesses du divin Maître à son<br />

Eglise sont là pour nous rassurer. Quelle force on trouve quand, au milieu <strong>de</strong> lʹinstabilité<br />

<strong>de</strong> toutes choses, on peut se reposer sur la parole <strong>de</strong> lʹéternelle Vérité!<br />

Je souhaite, bien cher Monsieur lʹabbé, que lʹEsprit Saint comble vous et les vôtres<br />

<strong>de</strong> ses grâces et quʹIl accroisse encore lʹar<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> votre zèle et <strong>de</strong> votre charité.<br />

Assurez tous vos bons jeunes associés <strong>de</strong> nos tendres affections et veuillez, en parti‐<br />

culier, dire à ceux que nous attendons que nos cœurs sont ouverts et prêts à les recevoir.<br />

Je suis bien cordialement et respectueusement, cher Monsieur lʹabbé,<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

766 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Intentions <strong>de</strong> messes à célébrer.<br />

14 mai 1861<br />

M. Le <strong>Prevost</strong> commencera la neuvaine à lʹintention <strong>de</strong> Madame la Comtesse <strong>de</strong><br />

Hou<strong>de</strong>tot le mercredi après la Pentecôte; il dira chaque jour la Sainte Messe pour le cher<br />

enfant [Marquis Richard <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot] qui doit faire sa première communion et il fera<br />

prier les orphelins pour lui.<br />

767 à M. Caille<br />

MLP. se rendra à la fête patronale dʹAmiens, mais il ne pourra pas la prési<strong>de</strong>r.<br />

Vaugirard, 23 mai 1861<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je ferai en sorte <strong>de</strong> vous rendre la petite visite que vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z; je partirai<br />

samedi, si rien ne se met à la traverse, pour arriver chez vous dans lʹaprès‐midi ou dans la<br />

soirée. Je vous prie <strong>de</strong> vous souvenir combien je suis peu fort et peu capable <strong>de</strong> contribuer<br />

en rien à la solennité ou à lʹintérêt <strong>de</strong> vos exercices; je vous prie donc dʹavoir un Prési<strong>de</strong>nt<br />

qui puisse payer <strong>de</strong> sa personne, si vous avez quelque réunion où on ait à parler ou à re‐<br />

présenter. Je puis dire la messe le matin et y parler 10 minutes, cʹest le bout <strong>de</strong> mes forces;<br />

pour tout le reste, je ne saurais guère vous servir à rien. Cʹest ce qui me rend si peu disposé<br />

856


aux sorties; ici, je puis encore être un peu utile, au <strong>de</strong>hors mon impuissance physique et<br />

autre me paralyse presque entièrement.<br />

Jʹirai sans doute lundi à Arras faire une apparition, et je tâcherai dʹêtre <strong>de</strong> retour ici<br />

pour mardi.<br />

Adieu, bien cher ami, je me réjouis <strong>de</strong> vous revoir ainsi que nos frères; assurez‐les<br />

<strong>de</strong> ma tendre affection, vous savez quʹelle vous est aussi bien profondément acquise.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N. S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

768 à M. Halluin<br />

Invité à la fête patronale dʹAmiens, MLP. ira ensuite visiter Arras.<br />

Vaugirard, 24 mai 1861<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Notre f. Caille mʹayant écrit et <strong>de</strong>mandé <strong>avec</strong> instance <strong>de</strong> venir dimanche 26, pour<br />

assister à la fête patronale <strong>de</strong> sa maison, je nʹai pas cru <strong>de</strong>voir me refuser à son désir. Je<br />

partirai <strong>de</strong>main samedi et je passerai la journée du dimanche à Amiens. Si je ne suis pas<br />

trop incapable dʹaller un peu plus loin, je pourrais lundi vous rendre une petite visite,<br />

mais fort courte, car je pense que je <strong>de</strong>vrais revenir ici mardi, ayant, <strong>de</strong>ux jours après, une<br />

réunion assez nombreuse <strong>de</strong> personnes du <strong>de</strong>hors, au sujet <strong>de</strong> laquelle jʹaurais à me<br />

concerter <strong>avec</strong> nos frères. Ce me sera toujours une joie bien vive que <strong>de</strong> vous voir quelques<br />

instants ainsi que nos frères et vos enfants.<br />

M. Alphonse [Vasseur] est arrivé un peu fatigué et abattu moralement, jʹespère que<br />

nous allons le relever et le remettre en bonnes dispositions, le cœur nʹest pas atteint, je<br />

crois; il nʹy a que lassitu<strong>de</strong> et, sans doute aussi, affaiblissement spirituel, le recueillement<br />

lui rendra la paix.<br />

Je suis bien affectueusement, en J. et M.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

769 à M. Caille<br />

Mouvement <strong>de</strong> personnel.<br />

Vaugirard, 3 juin 1861<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie temporairement le f. Alphonse [Vasseur] pour soulager un peu le f.<br />

Henry [Guillot]; jʹespère quʹainsi assisté il pourra mieux respirer et reprendre ses forces fa‐<br />

tiguées.<br />

Vous pourrez nous envoyer le jeune Godard quand vous voudrez, puisque nos jeu‐<br />

nes Leclerc [Edmond] et Allard [Emile] peuvent ai<strong>de</strong>r aux travaux du ménage.<br />

Je suis heureux que vos chers enfants se soient bien amusés dans leur promena<strong>de</strong>;<br />

jʹai emporté bon souvenir dʹeux et <strong>de</strong> toute votre maison. Jʹaurais voulu renvoyer le f. Mar‐<br />

caire à vos grands jeunes gens, dites‐leur que je nʹai pas oublié leur <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, mais M.<br />

Marcaire ne pourrait quitter présentement lʹemploi dont il est chargé.<br />

857


Je pense que lʹabbé Planchat vous viendra voir bientôt; tâchez <strong>de</strong> tirer bon parti <strong>de</strong><br />

sa présence, surtout pour les besoins spirituels.<br />

Adieu, cher ami, je suis en hâte, je vous embrasse dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

770 à M. Halluin<br />

Assistance manifeste <strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce pour nos Œuvres; ce qui plaît à MLP. dans lʹŒuvre dʹArras; le père<br />

Planchat doit donner une ai<strong>de</strong> spirituelle aux frères. Arrivée à Vaugirard <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux jeunes gens venus <strong>de</strong> Metz.<br />

Vaugirard, 4 juin 1861<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Notre retour sʹest effectué sans nulle difficulté ni aucun acci<strong>de</strong>nt. Nous sommes <strong>de</strong><br />

tous points très satisfaits <strong>de</strong> notre voyage qui nous a donné bien <strong>de</strong>s occasions dʹadmirer<br />

les miséricor<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Dieu à lʹégard <strong>de</strong> notre Communauté et <strong>de</strong> ses œuvres. Les choses vont<br />

bien, en effet, à Amiens, en ensemble, malgré les charges qui pèsent sur les frères et sur‐<br />

tout sur M. Caille. Evi<strong>de</strong>mment, il faut un ai<strong>de</strong> incessant <strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce pour y subvenir.<br />

On y arrive pourtant à dʹheureux résultats. Les enfants internes vont bien et ceux du <strong>de</strong>‐<br />

hors ont un appui vraiment utile durant le temps <strong>de</strong> leur apprentissage. Il y a <strong>de</strong>s perfec‐<br />

tionnements, sans doute, à attendre du temps, mais <strong>avec</strong> la grâce <strong>de</strong> Dieu, ils viendront.<br />

Jʹai aussi emporté <strong>de</strong> la maison dʹArras une bien bonne impression. Elle gar<strong>de</strong> son<br />

bon esprit, sa pauvreté que je crois, dans lʹœuvre quʹelle fait, un don <strong>de</strong> Dieu, son dé‐<br />

vouement et ses habitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> famille. Elle est une école dʹabnégation pour ceux qui sʹy<br />

emploient, elle leur méritera, je lʹespère, <strong>de</strong>s grâces pour lʹavenir, comme elle en a obtenu<br />

par le passé.<br />

M. Alphonse [Vasseur] se remet peu à peu. Comme le f. Henry [Guillot], à Amiens,<br />

se trouvait souffrant et très fatigué, M. Caille mʹa <strong>de</strong>mandé <strong>de</strong> lui envoyer, en ai<strong>de</strong> provi‐<br />

soire, le f. Alphonse. Il y est parti, en effet, <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux jours. Jʹai regretté un peu cette dis‐<br />

position, parce quʹun séjour un peu prolongé ici pouvait être utile au f. Alphonse. Mais si,<br />

comme je lʹespère, la santé du f. Henry se raffermit bientôt, nous rappellerons lʹautre ici<br />

pour lʹy occuper jusquʹà décision sur sa <strong>de</strong>stination définitive.<br />

Je serais bien aise que notre bon abbé Planchat allât bientôt à Amiens pour y donner<br />

quelques soins spirituels à nos frères. Il me semble que, chaque fois quʹil ira là, il <strong>de</strong>vrait<br />

leur faire une petite instruction à tous ensemble sur leurs obligations, <strong>de</strong>voirs dʹétat, et en‐<br />

suite voir chacun en particulier, en une sorte <strong>de</strong> direction, évitant néanmoins tout ce qui<br />

pourrait contrarier M. Caille et semblerait infirmer son autorité.<br />

Comment va M. Clément? Son esprit entre‐t‐il dans le calme? Je le plains, je crains<br />

quʹil trouve difficilement sa place <strong>avec</strong> lʹétrangeté <strong>de</strong> sa nature. Je désire lʹai<strong>de</strong>r, mais au‐<br />

tant toutefois quʹil ne paraîtra pas absolument impropre aux œuvres et aux exercices <strong>de</strong> la<br />

Communauté.<br />

Nous nʹavons rien ici <strong>de</strong> nouveau. Deux jeunes gens [Pierre Reisdorfer et André<br />

Brouant] nous sont arrivés pendant mon absence, envoyés par M. lʹabbé Risse. Ils semblent<br />

bien faits pour nous et prennent bien leur place. Ces quatre sujets venus <strong>de</strong> Metz ont tous<br />

leur valeur; cʹest, je crois, un bon sol qui pourra nous donner <strong>de</strong>s frères. M. Risse, <strong>de</strong> son<br />

côté, est excellent; cʹest un prêtre éminent en piété, en vertu, en dévouement; bénissons<br />

Dieu qui lʹa conduit vers nous.<br />

858


Adieu, cher Monsieur lʹabbé, jʹai été touché <strong>de</strong> votre bon et cordial accueil. Jʹai été<br />

content aussi du bon vouloir <strong>de</strong> vos enfants, je me recomman<strong>de</strong> à leurs prières et je leur<br />

gar<strong>de</strong> aussi bon souvenir <strong>de</strong>vant Dieu.<br />

Assurez, je vous prie, nos frères <strong>de</strong> mes sentiments affectueux et croyez vous‐<br />

même, cher Monsieur lʹabbé, au respect et au dévouement <strong>avec</strong> lesquels je suis<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je pense que vous avez M. Houriez et quʹil vous apporte un notable soulage‐<br />

ment; jʹapprendrai <strong>avec</strong> joie que vous trouvez ainsi plus <strong>de</strong> repos et <strong>de</strong> liberté.<br />

Je nʹoublie point les petites pensions <strong>de</strong> M. Clément et <strong>de</strong> Maillard; non plus que les<br />

<strong>de</strong>ux anges pour la chapelle.<br />

771 à M. Halluin<br />

Difficile changement <strong>de</strong> personnel. Portrait du frère Guillot. Il faut fortifier lʹautorité <strong>de</strong>s surveillants. Utilité<br />

dʹune association pieuse pour les grands. Nécessité dʹune visite du père Planchat à Grenelle pour confondre les<br />

calomnies répandues contre lui.<br />

9 juin 1861<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Jʹétais resté persuadé que M. Houriez vous <strong>de</strong>vait venir, un mot dit en passant dans<br />

une lettre <strong>de</strong> M. Planchat mʹavait fait naître un doute, mais il avait seulement affaibli la<br />

première impression <strong>de</strong> certitu<strong>de</strong> sur lʹentrée <strong>de</strong> M. Houriez; je ne mʹétais pas, dès lors, au‐<br />

tant pressé peut‐être que la situation le <strong>de</strong>mandait, <strong>de</strong> vous envoyer du secours. Il y avait<br />

bien aussi quelque embarras <strong>de</strong> vous donner le sujet qui était nécessaire dans la situation.<br />

Réflexion bien faite, il nous semble que le f. Guillot Henry, qui est à Amiens, pourrait être<br />

celui qui vous conviendrait le mieux. M. Lantiez est parti aujourdʹhui dimanche pour<br />

Amiens, afin <strong>de</strong> sʹassurer si M. Alphonse [Vasseur] y réussit bien et peut y prendre posi‐<br />

tion; sʹil en est ainsi, comme je lʹespère, le f. Henry partira immédiatement pour Arras.<br />

Cʹest un frère soli<strong>de</strong>, dévoué, simple et droit dans son intention, courageux et pieux. Jʹai la<br />

confiance quʹil pourra faire beaucoup <strong>de</strong> bien à Arras. Il aime lʹordre et la discipline, mais<br />

M. Lantiez lui recomman<strong>de</strong>ra <strong>de</strong> nʹinsister sur ce point quʹautant que ce sera dans votre<br />

volonté; il est docile et disposé à lʹobéissance, il se conformera à vos instructions.<br />

Je suis persuadé, comme M. Planchat, que la discipline telle quʹelle sʹobserve sous<br />

votre propre surveillance est suffisante et la meilleure quʹon puisse souhaiter, parce quʹelle<br />

est commandée par le respect, la reconnaissance que vous inspirez à vos enfants, et aussi<br />

par la dépendance absolue où ils sont <strong>de</strong> vous. Mais on ne saurait espérer quʹun sentiment<br />

et une disposition pareils se trouvent en eux à lʹégard dʹun frère ou surveillant laïc ou<br />

même ecclésiastique, quel quʹil soit; il faut donc, ou se résigner à avoir une discipline im‐<br />

parfaite, une soumission dʹentente et mal tranquillisante pour vous‐même envers ce sur‐<br />

veillant, ou bien tendre à confirmer assez son autorité pour quʹelle ait valeur et suffisant<br />

effet; il nʹy a point là <strong>de</strong> milieu et nous retrouverons, si nous nʹy portons attention, inces‐<br />

samment les mêmes difficultés, quelque sujet que nous puissions envoyer. Je crois que si<br />

lʹon faisait pour les grands, comme on fait pour les écoliers, une petite association pieuse<br />

et quʹon se servît <strong>de</strong>s plus sûrs et <strong>de</strong>s meilleurs pour ai<strong>de</strong>r aux services et surveillances, on<br />

859


en pourrait tirer un grand parti; il nʹest pas une seule <strong>de</strong> nos œuvres qui ne trouve en ce<br />

moyen <strong>de</strong> précieuses ressources. Les enfants ou jeunes gens y gagnent eux‐mêmes, pren‐<br />

nent plus <strong>de</strong> consistance et <strong>de</strong> raison; la présence <strong>de</strong> M. Planchat pourrait vous ai<strong>de</strong>r à es‐<br />

sayer <strong>de</strong> ce secours.<br />

Je désire que tout aussitôt après lʹarrivée du f. Henry, M. Planchat vienne faire une<br />

apparition <strong>de</strong> quelques jours à Grenelle, après lesquels il se hâtera <strong>de</strong> vous revenir; son ab‐<br />

sence a donné lieu à mille suppositions et bruits absur<strong>de</strong>s; je nʹy ai fait dʹabord nulle atten‐<br />

tion méprisant ces misérables rumeurs, mais <strong>de</strong> tant <strong>de</strong> côtés ses amis sʹen sont émus, <strong>de</strong><br />

tant <strong>de</strong> parts on sʹen est occupé quʹunanimement on mʹa <strong>de</strong>mandé <strong>de</strong> le rappeler momen‐<br />

tanément pour montrer aux méchants ou aux esprits crédules quʹil était bien, comme il lʹa<br />

dit, à Arras et à Amiens pour y faire quelque bien. A lʹArchevêché même, on a prié lʹun<br />

<strong>de</strong>s vicaires, M. Rembouillet, <strong>de</strong> me dire quʹon verrait <strong>avec</strong> plaisir que M. Planchat reparût<br />

au moins quelques instants à Grenelle; les esprits étant si disposés aujourdʹhui, par la<br />

mauvaise presse, à croire toute imputation mauvaise contre le clergé quelque absur<strong>de</strong> et<br />

dénuée <strong>de</strong> tout fon<strong>de</strong>ment quʹelle pût être. Nous avons cherché dʹoù pouvait venir cette<br />

rumeur insensée que pas lʹombre dʹun prétexte ne pouvait expliquer, on nous dit que<br />

quelques bas officiers <strong>de</strong> lʹéglise en sont les premiers moteurs. Il nʹen est peut‐être rien,<br />

mais on peut être assuré dʹavance que, quels quʹils soient, M. Planchat leur pardonnera<br />

sans peine et priera pour eux. Je pense quʹil pourra être parmi nous pour mercredi; <strong>de</strong>ux<br />

ou trois jours me semblent suffire pour prouver à tous quʹil nʹest pas en prison et quʹil jouit<br />

comme toujours du respect et <strong>de</strong> lʹaffection <strong>de</strong> tous ceux qui le connaissent. M. le Curé a<br />

parlé <strong>de</strong> lui affectueusement au jour <strong>de</strong> sa première communion; M. Roussel en a fait au‐<br />

tant à la réunion <strong>de</strong> la S te ‐Famille; je croyais que cela suffisait, mais lʹavis contraire prévaut<br />

<strong>de</strong> tous côtés, je dois mʹy rendre.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, mille affections à tous nos frères et respectueux atta‐<br />

chement pour vous.<br />

Votre tout affectionné en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

772 à M. Caille<br />

Mouvement <strong>de</strong> personnel.<br />

Vaugirard, 11 juin 1861<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai à peine le temps <strong>de</strong> remettre <strong>de</strong>ux lignes au f. Marcaire. Je suis convenu <strong>avec</strong> lui<br />

que M. Alphonse [Vasseur] sera votre remplaçant, il faut le poser ainsi, M. Marcaire sera<br />

plus tranquille <strong>avec</strong> un peu moins <strong>de</strong> responsabilité. Si, comme je lʹespère, M. Henry [Guil‐<br />

lot] va bien et réussit à Arras, M. Alphonse restera à Amiens, quʹil fasse donc <strong>de</strong> son mieux<br />

pour que tout aille bien <strong>avec</strong> la grâce <strong>de</strong> Dieu.<br />

Pour M. Gustave [Marinier], je lui écrirai au plus tôt; quʹil soit tranquille, je lʹinvite à<br />

prier Dieu, afin quʹIl lʹéclaire et le dirige; nous verrons dans quelques jours quel parti est à<br />

prendre pour son plus grand bien.<br />

M. Planchat est obligé <strong>de</strong> faire un court voyage à Paris, quelques jours seulement;<br />

en retournant, il sʹarrêtera à Amiens et il y reviendra très fréquemment pour donner un<br />

peu dʹappui spirituel à votre maison.<br />

Adieu, bien cher ami, mille affections <strong>de</strong> tous pour vous en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

860


773 à M. Planchat<br />

Les exigences du Curé <strong>de</strong> Grenelle vis‐à‐vis du père Planchat.<br />

Vaugirard, vendredi 14 juin [1861]<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. le Curé, que jʹai vu, mʹa paru mieux disposé que je ne le pensais; il ne veut pas<br />

que vous repreniez la conduite <strong>de</strong> la Ste ‐Famille ni que vous exerciez aucun ministère à<br />

Grenelle, en tant que cela dépend <strong>de</strong> lui, mais il consent à ce que vous veniez à la réunion<br />

<strong>de</strong> la Ste ‐Famille dimanche, à la condition que vous nʹy prendriez pas position <strong>de</strong> prêtre di‐<br />

rigeant, mais seulement dʹami qui, en passage, visite ses amis. Vous pourriez, dans ces li‐<br />

mites, parler 10 minutes, un quart dʹheure au plus; cʹest chose ainsi convenue entre lui et<br />

moi, je désire que vous vous en teniez là. M. le Curé <strong>de</strong>man<strong>de</strong> que, pour nʹavoir pas lʹair<br />

dʹouvrir la séance, vous nʹarriviez pas dès le commencement, mais 20 minutes environ<br />

après lʹouverture <strong>de</strong>s exercices.<br />

Il me semble que vous pourriez très convenablement parler dʹAmiens et dʹArras,<br />

<strong>de</strong>s institutions pieuses et charitables que vous y avez vues et auxquelles vous avez com‐<br />

mencé à prendre part, <strong>de</strong>mandant les prières <strong>de</strong> lʹassemblée pour que Dieu bénisse vos<br />

travaux.<br />

Adieu, bien cher ami, mille affections en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

774 à M. Halluin<br />

MLP. propose un jeune homme susceptible dʹai<strong>de</strong>r M. Halluin.<br />

Vaugirard, 25 juin [1861]<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Notre f. Caille, qui a fait une apparition ici il y a <strong>de</strong>ux jours, était convenu <strong>avec</strong> moi<br />

quʹil allait vous écrire pour vous proposer <strong>de</strong> ma part un jeune postulant qui est dans sa<br />

maison, âgé <strong>de</strong> 18 ans, frère dʹun Curé <strong>de</strong>s environs dʹAmiens, lequel lui semblait pouvoir<br />

rendre <strong>de</strong>s services essentiels chez vous. Jʹai vu ce jeune homme à mon passage à Amiens,<br />

jʹen ai été content; il montre beaucoup dʹexactitu<strong>de</strong> et <strong>de</strong> bonne volonté dans ses services.<br />

Le seul défaut quʹon lui pourrait trouver, cʹest son jeune âge; mais il est bien connu du f.<br />

Henry Guillot, il était accoutumé à marcher sous sa direction, je crois quʹil aurait ainsi un<br />

point dʹappui et un moyen plus sûr <strong>de</strong> réussir dans la maison dʹArras. Je vous prie, cher<br />

Monsieur lʹabbé, dʹécrire immédiatement à notre f. Caille qui aura perdu le souvenir <strong>de</strong> la<br />

proposition quʹil mʹavait faite et <strong>de</strong> lʹagrément que jʹy avais donné.<br />

M. Emile [Beauvais] sʹoccupe <strong>de</strong> lʹenvoi <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux anges, il doit aussi envoyer quel‐<br />

que argent pour la petite pension <strong>de</strong> M. Clément et <strong>de</strong> Maillard; je le crois fort peu en<br />

fonds en ce moment, mais il ne négligera pas néanmoins cette <strong>de</strong>tte. Patientez tant que<br />

vous le croirez sage pour M. Clément, sans oublier quʹaucun lien ne lʹattache à nous et<br />

quʹil peut ailleurs trouver sa voie, si définitivement il ne semblait pas à sa place parmi<br />

nous.<br />

Mille affections et respects <strong>de</strong> tous en J. et M. Le <strong>Prevost</strong><br />

861


775 à M. Decaux<br />

Souhaits <strong>de</strong> fête.<br />

Vaugirard, 29 juin 1861<br />

Mon bien bon ami,<br />

La fête du grand St Paul, votre patron, me sert dʹoccasion pour vous renouveler<br />

lʹexpression <strong>de</strong> tous mes sentiments <strong>de</strong> tendre et profon<strong>de</strong> affection. Je ne vous vois pas<br />

aussi souvent que je le voudrais, la vie est si mouvante et si précipitée! mais je vous gar<strong>de</strong><br />

un souvenir bien constant, je mʹunis à tout ce que vous faites <strong>de</strong> bien et je prie souvent au<br />

St Sacrifice pour que le Seigneur vous bénisse toujours dans cette carrière <strong>de</strong> charité et <strong>de</strong><br />

dévouement quʹIl vous a tracée. Demain tout particulièrement, je <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rai pour vous<br />

une participation <strong>de</strong> plus en plus abondante aux dons que le Seigneur avait répandus sur<br />

votre saint patron et dont quelque écoulement semble sʹêtre épandu sur vous.<br />

Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, bien cher ami, <strong>de</strong> lʹintéresser <strong>de</strong> votre côté pour moi, afin quʹau<br />

<strong>de</strong>rnier jour il me ménage à vos côtés quelque place <strong>avec</strong> les Saints au Ciel.<br />

Je vous embrasse bien cordialement en N.S.<br />

Votre tout dévoué ami et frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Ptre 776 à M. Caille<br />

Regrets <strong>de</strong> ne pas lʹavoir rencontré à Paris.<br />

Vaugirard, 2 juillet [1861] Visitation<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai éprouvé dimanche un sincère regret <strong>de</strong> nʹêtre pas à Paris pour vous voir ainsi<br />

que vos chers enfants, dʹautant que notre f. Maignen sʹétant trouvé indisposé, il nʹa pu lui‐<br />

même vous faire accueil comme il nous eût été doux <strong>de</strong> le faire. Depuis plusieurs jours, di‐<br />

verses courses et <strong>de</strong>s allées et venues multipliées mʹavaient extrêmement fatigué et mis<br />

dans une sorte dʹaccablement; pourtant, si jʹeusse appris à temps lʹindisposition <strong>de</strong> M.<br />

Maignen (laquelle, du reste, nʹa eu aucune suite), jʹaurais passé outre à tous les malaises<br />

pour vous voir. Nos ff. Paillé et Hello me disent quʹils ont fait <strong>de</strong> leur mieux pour vous<br />

témoigner combien la visite <strong>de</strong> vos enfants leur était agréable. Jʹespère quʹils nʹauront point<br />

regretté leur voyage et quʹils gar<strong>de</strong>ront un bon souvenir <strong>de</strong> Paris et <strong>de</strong> ses œuvres.<br />

Tout le mon<strong>de</strong> va ici comme <strong>de</strong> coutume; je recomman<strong>de</strong> aux prières <strong>de</strong> votre mai‐<br />

son la première communion <strong>de</strong> nos enfants qui a lieu jeudi 4 <strong>de</strong> ce mois.<br />

Mille affections à vous, à vos frères et à vos enfants.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Ptre 777 à M. Halluin<br />

Un postulant quitte la Communauté. Etat <strong>de</strong>s santés.<br />

Vaugirard, 3 juillet 1861<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je pense <strong>avec</strong> vous que nous avons fait, à lʹégard <strong>de</strong> M. Clément, tout ce que la cha‐<br />

rité <strong>de</strong>mandait <strong>de</strong> nous et que nos épreuves sont suffisantes pour ne nous laisser aucun<br />

862


doute sur sa vocation quant à ce qui concerne la Communauté. Je crois donc quʹil faut<br />

lʹavertir définitivement quʹil doit au plus tôt prendre sa direction dans une autre voie.<br />

Quoique la Communauté nʹait aucune obligation envers lui, puisquʹil ne lui a rien apporté,<br />

et ne lui a point rendu <strong>de</strong> services équivalents aux charges quʹil lui causait, je veux bien<br />

concourir, pour cinquante francs, au voyage quʹil se propose <strong>de</strong> faire. Je vous envoie, en<br />

outre, 70f pour les <strong>de</strong>ux mois quʹil a passés dans la maison dʹArras et 100f pour Maillard.<br />

La protectrice <strong>de</strong> cet enfant est toujours en retard et semble trouver long le temps <strong>de</strong><br />

son apprentissage, mais je sais combien ce pauvre enfant est léger et <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> soins, je<br />

ferai donc en sorte quʹil ne soit pas encore délaissé par ceux qui lʹont soutenu jusquʹici.<br />

Je serais bien aise que M. Planchat me dît sʹil va <strong>de</strong> temps en temps à Amiens, sʹil y<br />

exerce quelque action utile et si la petite communauté va bien, comme je lʹespère, <strong>de</strong> ce cô‐<br />

té. M. Caille pourvoira aux frais <strong>de</strong> voyage ou nous ici, sʹil était besoin.<br />

Notre frère Georges [<strong>de</strong> Lauriston] est un peu souffrant, <strong>de</strong>s mouvements <strong>de</strong> sang,<br />

se portant à la tête, sont fréquents pour lui, sans danger jusquʹici, mais cʹest un indice qui<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> surveillance. Notre jeune Ernest [Vasseur], frère <strong>de</strong> M. Alphonse, reste fort lan‐<br />

guissant <strong>de</strong>puis un mois, le mé<strong>de</strong>cin pense néanmoins quʹil sʹen tirera, il a une tumeur au<br />

côté; je le recomman<strong>de</strong> à vos prières.<br />

Nous prierons bien pour la première communion <strong>de</strong> vos enfants. Les nôtres ont eu<br />

aujourdʹhui [4 juillet] cette gran<strong>de</strong> félicité, bien préparés, je lʹespère. Tout sʹest très bien<br />

passé. Que Dieu en soit mille fois béni!<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, tout le mon<strong>de</strong> ici vous est tendrement uni et vous as‐<br />

sure <strong>avec</strong> moi <strong>de</strong> son respectueux attachement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

778 à M. Maignen<br />

Exhortation à la charité, à lʹhumilité et au support fraternel.<br />

Vaugirard, 4 juillet 1861<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je me suis assuré quʹil nʹest pas du tout question quʹaucun avis soit donné par M.<br />

Hello sur le travail du dimanche ni sur rien <strong>de</strong> ce qui se rapporte au triste malentendu <strong>de</strong><br />

dimanche <strong>de</strong>rnier. Veillez bien, cher ami, sur vos dispositions pour empêcher toute<br />

contention dans votre esprit, autrement vous prépareriez à votre œuvre <strong>de</strong>s préjudices<br />

bien autrement sérieux que les très petites et très légères contradictions dont vous vous<br />

troublez trop. Que nous ferions sagement si nous examinions <strong>de</strong> temps en temps, <strong>avec</strong><br />

calme <strong>de</strong>vant Dieu, ce que sa gloire et le bien <strong>de</strong>s âmes <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt réellement <strong>de</strong> nous, et<br />

combien souvent alors nous verrions que la patience, le support réciproque, la con<strong>de</strong>scen‐<br />

dance en tout ce qui nʹatteint pas le fond <strong>de</strong>s choses sont le seul moyen <strong>de</strong> soutenir les<br />

œuvres et <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r la paix. Si vous arrivez à ne savoir supporter aucune contradiction, à<br />

ne pouvoir gar<strong>de</strong>r la charité <strong>avec</strong> ceux qui vous entourent, que <strong>de</strong>viendront les œuvres et<br />

le bien que vous faites par elles, et le premier bien <strong>de</strong> tous votre propre sanctification?<br />

Pensez à cela, cher ami, ramenez le calme dans votre âme, reprenez <strong>avec</strong> ceux <strong>de</strong> votre<br />

maison <strong>de</strong>s sentiments <strong>de</strong> charité, lʹesprit <strong>de</strong> conciliation sans lesquels rien ne se fait <strong>de</strong><br />

durable et <strong>de</strong> bon dans les œuvres <strong>de</strong> Dieu. Enfin, exercez‐vous à lʹhumilité, à lʹoccasion,<br />

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econnaissez simplement vos fautes et faites <strong>de</strong> courageux efforts pour que lʹamour‐propre<br />

sʹéteigne <strong>de</strong> plus en plus en vous. Quel bon avenir vous vous préparerez ainsi et que<br />

dʹamertumes vous vous épargnerez; soyez bien assuré, cher ami, que mes prières et mes<br />

tendres sympathies secon<strong>de</strong>ront vos efforts; jʹai conduit vos premiers pas dans la carrière<br />

<strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong> Dieu, je voudrais, quand je quitterai ce mon<strong>de</strong>, vous voir <strong>avec</strong> assurance<br />

bien affermi dans la voie et marchant généreusement jusquʹau bout. Daignent le Seigneur<br />

et la T. S te Vierge vous assister et vous tendre la main.<br />

Je vous embrasse affectueusement en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

779 à M. Risse<br />

Excuses pour une réponse tardive. Souhaits <strong>de</strong> bienvenue; remerciements à lʹévêque <strong>de</strong> Metz. Ce quʹest un cœur<br />

dʹévêque. Concession <strong>de</strong> la Sainte Réserve à la chapelle <strong>de</strong> Chaville. Avoir gran<strong>de</strong> confiance en Dieu. Ne pas se<br />

troubler <strong>de</strong>vant les difficultés à venir.<br />

Vaugirard, 7 juillet 1861<br />

Bien cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Les occupations et divers empêchements réels, notamment un voyage à Amiens et à<br />

Arras, ont assurément concouru à mettre quelque retard dans mes correspondances, mais<br />

un peu <strong>de</strong> décousu et <strong>de</strong> défaut <strong>de</strong> règle dans mes travaux y ont aussi contribué; vous<br />

pourriez donc, cher Monsieur lʹabbé, vous plaindre <strong>avec</strong> quelque raison que, moins chargé<br />

que vous peut‐être <strong>de</strong> difficultés et <strong>de</strong> soins, je sois moins attentif à vous répondre que<br />

vous à nous prévenir. Je suis vieux, faible, maladif, voilà ma véritable excuse, mes mou‐<br />

vements sont lents et mon travail peu facile; je suis sur le chemin <strong>de</strong> beaucoup <strong>de</strong> gens et<br />

beaucoup mʹabor<strong>de</strong>nt dans un jour; et pourtant je pourrais faire mieux, je le confesse, et<br />

vous prie, bien cher ami, dʹêtre indulgent pour moi.<br />

Nous voyons approcher <strong>avec</strong> une véritable joie le moment qui vous amènera parmi<br />

nous, vous êtes si bien du bois dont on peut faire un bon frère <strong>de</strong> S t ‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul! Puis‐<br />

sions‐nous ne pas trop mal répondre à votre confiance et donner satisfaction au besoin que<br />

vous avez dʹouvrir votre cœur pour que Dieu et sa divine charité le remplissent tout en‐<br />

tier. Hélas! vous verrez quʹau milieu <strong>de</strong> nous lʹhomme naturel nʹest pas encore absolument<br />

mort et quʹen presque tous on le retrouve par quelque endroit, mais tous au moins ont le<br />

bon et sincère désir <strong>de</strong> mieux faire et <strong>de</strong> sauver quelques âmes en gagnant eux‐mêmes le<br />

Ciel. Vos chers enfants ne sont pas les moins bons; tous les quatre paient cordialement <strong>de</strong><br />

leur personne dans le travail <strong>de</strong>s œuvres, ils suivent les exercices <strong>avec</strong> piété et intérêt, en‐<br />

fin ils sont dociles, sociables et vrais hommes <strong>de</strong> bonne volonté. Lʹavenir nous montrera<br />

assurément en chacun dʹeux quelque imperfection inévitable, mais je crois que le fond est<br />

bon et donnera substance suffisante pour faire dʹeux tous <strong>de</strong> vrais serviteurs <strong>de</strong> Dieu.<br />

Nous ne saurions témoigner trop <strong>de</strong> reconnaissance à M gr <strong>de</strong> Metz qui se montre si<br />

bienveillant et vous donne si généreusement à nous; nous userons discrètement <strong>de</strong> sa<br />

confiance et nous nʹaurons gar<strong>de</strong> <strong>de</strong> rien faire qui puisse compromettre en quoi que ce soit<br />

le bien qui sʹopère par vous et par votre œuvre dans le pays; nous tâcherons, au contraire,<br />

<strong>de</strong> lʹaffermir et dʹen assurer la durée dans lʹavenir. Nous sommes, du reste, comblés <strong>de</strong><br />

bienveillance par tous les évêques sous les yeux <strong>de</strong>squels nous avons quelque œuvre à<br />

faire; cʹest une aimable étu<strong>de</strong> que celle dʹun cœur dʹEvêque; évi<strong>de</strong>mment lʹaction dʹune<br />

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grâce surabondante y est sensible, lʹélévation <strong>de</strong>s vues, la largeur <strong>de</strong>s affections y sont ma‐<br />

nifestes; dans les rangs inférieurs du clergé, nous rencontrons parfois quelques difficultés,<br />

mais elles ont été sans gravité jusquʹici; jʹespère quʹ<strong>avec</strong> <strong>de</strong> la pru<strong>de</strong>nce et surtout lʹesprit<br />

<strong>de</strong> simplicité et <strong>de</strong> conciliation, nous parviendrons à nous frayer une voie où, sans nuire à<br />

lʹaction <strong>de</strong>s autres, nous pourrons faire quelque part <strong>de</strong> ce qui échappe au zèle et au bon<br />

vouloir du clergé <strong>de</strong>s paroisses.<br />

Nous avons eu ces jours <strong>de</strong>rniers une nouvelle marque <strong>de</strong> la con<strong>de</strong>scendance <strong>de</strong>s<br />

Premiers Pasteurs à notre égard. M gr lʹEvêque <strong>de</strong> Versailles nous a accordé, pour la maison<br />

<strong>de</strong> repos et <strong>de</strong> convalescence que nous avons à Chaville, la permission <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r le S t Sa‐<br />

crement dans notre petite chapelle et divers autres privilèges qui nous rendront ce séjour<br />

plus profitable et plus aimable; le bon Maître nous comble <strong>de</strong> tendresses; ai<strong>de</strong>z‐nous, cher<br />

Monsieur lʹabbé, à Lʹen remercier.<br />

Un jeune ecclésiastique, connu <strong>de</strong> vous, fort attiré aux œuvres <strong>de</strong> charité dont il<br />

sʹoccupe déjà <strong>avec</strong> prédilection, lʹabbé Auger, nous a fait quelques ouvertures pour sʹad‐<br />

joindre à nous. M. Carbon, qui le dirige, lʹincline <strong>de</strong> ce côté; je recomman<strong>de</strong> cette vocation<br />

à vos prières et sacrifices.<br />

Je désire, bien cher ami, que vous ayez lʹâme toute en paix pour ce qui regar<strong>de</strong><br />

lʹavenir; comptez beaucoup, mais beaucoup, ce ne sera jamais trop, sur lʹai<strong>de</strong> miséricor‐<br />

dieuse du divin Seigneur; Il veut notre union, Il veut que vous ayez autour <strong>de</strong> vous quel‐<br />

ques ai<strong>de</strong>s dévoués et tout donnés comme vous à son service, laissez‐Le faire, il mettra la<br />

main à tout; si vous saviez comme Il multiplie les miracles pour ceux qui se donnent à Lui<br />

entièrement, et cela si simplement, si adroitement tout ensemble que toute apparence<br />

merveilleuse semble sʹeffacer; à la réflexion pourtant, on ne peut sʹy tromper, on prend sur<br />

le fait la main <strong>de</strong> lʹadorable bienfaiteur. Confiance, abandon, si vous allez en paix dans<br />

cette voie, tout arrivera à bien.<br />

Je nʹai pas répondu immédiatement aux propositions que vous me communiquiez<br />

relativement à lʹéloignement absolu <strong>de</strong> votre bonne femme <strong>de</strong> ménage, je ne voyais pas as‐<br />

sez comment vous pourriez suppléer à son service, le moyen terme que vous pensez pren‐<br />

dre me semble meilleur et plus pru<strong>de</strong>nt.<br />

Quant au dépouillement, lʹessentiel est fait puisquʹil est consommé en votre cœur;<br />

pour sa réalisation extérieure, elle pourrait être différée jusquʹau temps <strong>de</strong> vos vœux; nous<br />

laisserons toutefois agir lʹEsprit Saint dont il faut suivre les mouvements. Je trouve bien,<br />

du reste, vos vues sur la répartition.<br />

Pour la tentation, laissons aboyer le démon, il est enchaîné, il ne saurait nous at‐<br />

teindre que si nous allions volontairement à lui; le divin Maître, la T. S te Vierge et notre<br />

bon ange veillent <strong>avec</strong> nous; que nous sommes bien gardés, <strong>de</strong>meurons <strong>avec</strong> eux, il ne<br />

nous sera fait aucun mal.<br />

Je <strong>de</strong>meure, cher Monsieur lʹabbé, ainsi que tous nos frères, bien tendrement uni à<br />

vous en J. et M.<br />

Votre tout dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

780 à M. Halluin<br />

Souhaits <strong>de</strong> fête. Remerciements au père Planchat. Instances pour le renvoi dʹun postulant.<br />

865


Vaugirard, 15 juillet 1861<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je mʹétais chargé, au nom <strong>de</strong> tous mes frères, <strong>de</strong> vous assurer quʹaucun <strong>de</strong> nous<br />

nʹoubliait que cʹétait aujourdʹhui la fête <strong>de</strong> St Henry et que nous avions à prier particuliè‐<br />

rement pour vous et pour les trois Henry [MM. Planchat, Guillot et Sadron] qui semblent<br />

sʹêtre comme provi<strong>de</strong>ntiellement groupés autour <strong>de</strong> vous pour faire une famille tout fra‐<br />

ternellement unie et dévouée, puisquʹelle a au Ciel un même patronage, comme elle a sur<br />

terre une même voie et une pareille fin. La lassitu<strong>de</strong> et la multiplicité <strong>de</strong>s dérangements<br />

mʹen ont empêché. Mais nous nous sommes souvenus <strong>de</strong> vous au T. St Sacrifice, ceux qui<br />

lʹont pu ont offert pour vous la sainte communion.<br />

Dieu aura entendu les désirs <strong>de</strong> nos cœurs, Il vous donnera <strong>de</strong> nouvelles grâces<br />

pour croître en perfection et opérer chaque jour plus <strong>de</strong> bien pour son service. Il vous ré‐<br />

compensera, dès cette vie, par les fruits que produiront vos œuvres et par la sanctification<br />

<strong>de</strong> tous ces pauvres enfants auxquels vous avez consacré votre existence. Veuillez, cher<br />

Monsieur lʹabbé, donner quelque petite part <strong>de</strong> ces sentiments aux frères qui vous entou‐<br />

rent et qui concourent à vos travaux, comme nous les avons aussi compris dans nos vœux<br />

et souvenirs <strong>de</strong>vant Dieu.<br />

Jʹai été très consolé dʹune bonne et longue lettre que mʹa écrite notre cher abbé Plan‐<br />

chat, où il me dit les heureux résultats <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux retraites du Collège et <strong>de</strong> la première<br />

communion chez vous. Jʹen bénis Dieu et jʹespère que ce nʹest que le commencement du<br />

bien que pourra produire le séjour <strong>de</strong> notre bon abbé chez vous.<br />

Un mot <strong>de</strong> sa lettre me laisserait croire que M. Clément ne vous a pas encore quit‐<br />

tés. Je reste persuadé néanmoins que nous ne pouvons attendre <strong>de</strong> lui les dispositions ni<br />

les actes qui le pourraient rendre utile à nos œuvres, même dans lʹavenir. Je pense donc<br />

que nos épreuves ayant été suffisamment faites, nous ne pourrions sans détriment conti‐<br />

nuer les sacrifices que nous nous étions imposés pour favoriser ses étu<strong>de</strong>s.<br />

Je pense que vous avez reçu lʹenvoi que je vous ai fait <strong>de</strong> 220f dans une lettre, sa‐<br />

voir: 100f pour Maillard, 70f pour <strong>de</strong>ux mois <strong>de</strong> séjour à Arras <strong>de</strong> M. Clément, et 50f que je<br />

croyais <strong>de</strong>voir lui accor<strong>de</strong>r pour son départ. Je vous serai reconnaissant <strong>de</strong> mʹen accuser<br />

réception. Vous avez dû recevoir aussi les <strong>de</strong>ux anges adorateurs <strong>de</strong>stinés à votre chapelle;<br />

ils ont été emballés et mis au chemin <strong>de</strong> fer il y a plusieurs semaines.<br />

Nous allons ici passablement. Le jeune f. Ernest [Vasseur] languit toujours, mais<br />

semble pourtant se remonter quelque peu.<br />

Nous nous préparons à fêter vendredi la fête <strong>de</strong> notre St Patron, St Vincent <strong>de</strong> Paul;<br />

puisse‐t‐il obtenir pour ses indignes enfants quelque participation <strong>de</strong>s grâces qui ont été<br />

répandues sur lui et <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r surtout pour eux lʹabnégation, lʹar<strong>de</strong>ur du zèle et du dé‐<br />

vouement.<br />

Je vous réitère, cher Monsieur lʹabbé, <strong>avec</strong> tous nos frères, lʹassurance <strong>de</strong> notre res‐<br />

pectueux et cordial attachement en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

781 322<br />

322 Suppléée par la lettre 753 bis.<br />

866


782 à M. Halluin<br />

MLP. maintient sa décision <strong>de</strong> ne pas admettre un candidat. Brèves nouvelles.<br />

Vaugirard, 26 juillet 1861<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Jʹai communiqué à nos ff. du Conseil la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> que mʹa envoyée M. Clément, afin<br />

<strong>de</strong> continuer à faire partie <strong>de</strong> notre Communauté; ils ont pensé unanimement que ce bon<br />

Monsieur, sans être dépourvu <strong>de</strong> qualités estimables, nʹavait pas celles qui le rendraient<br />

propre à donner un concours efficace à nos œuvres, ni surtout celles qui lʹuniraient cordia‐<br />

lement et franchement à la famille. Je me vois donc obligé <strong>de</strong> maintenir la décision que je<br />

vous ai déjà fait connaître. Toutefois, je ne mʹoppose pas à ce que vous le mainteniez chez<br />

vous, sʹil peut vous être <strong>de</strong> quelque utilité ou si vous avez le mouvement dʹexercer envers<br />

lui la charité en lui donnant facilité pour ses étu<strong>de</strong>s, mais il serait considéré comme les<br />

personnes étrangères que vous avez quelquefois reçues ainsi, et non comme membre <strong>de</strong> la<br />

Communauté.<br />

Jʹespère que les bons résultats <strong>de</strong>s retraites durent toujours et que vous avez satis‐<br />

faction dans la conduite <strong>de</strong> vos enfants. Nous avons ici lieu <strong>de</strong> bénir aussi les miséricor<strong>de</strong>s<br />

du Seigneur. Notre fête <strong>de</strong> St Vincent <strong>de</strong> Paul a été <strong>de</strong>s plus édifiantes. Lʹadoration <strong>de</strong>s<br />

Quarante Heures à Nazareth a été comme une petite mission, il y a eu 400 communions.<br />

Les distributions <strong>de</strong> prix à Grenelle et à Nazareth ont été fort satisfaisantes. En ensemble,<br />

tout marche <strong>avec</strong> le travail et à travers les difficultés <strong>de</strong> chaque jour.<br />

M. lʹabbé Risse nous arrivera dans le commencement <strong>de</strong> septembre, il a un parfait<br />

consentement <strong>de</strong> Mgr <strong>de</strong> Metz. Sa famille a aussi accepté le sacrifice, tout nous laisse penser<br />

que son union <strong>avec</strong> nous se consommera dans les meilleures dispositions.<br />

Notre frère Emile [Beauvais] me <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> nouveau si les <strong>de</strong>ux anges dont il a<br />

fait lʹexpédition vous sont arrivés à bon port. Je vous prie aussi <strong>de</strong> me dire si vous avez re‐<br />

çu lʹenvoi que je vous ai fait <strong>de</strong> 220f pour Maillard et M. Clément.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé; assurez tous nos frères, M. Planchat en particulier, <strong>de</strong><br />

tous nos sentiments <strong>de</strong> cordiale affection. Je suis allé à lʹArchevêché pour voir Son Emi‐<br />

nence, afin <strong>de</strong> régulariser lʹabsence <strong>de</strong> notre bon abbé, quoique peut‐être cette démarche<br />

ne fût pas absolument nécessaire, eu égard aux bienveillantes dispositions <strong>de</strong> Mgr et <strong>de</strong> son<br />

entourage pour nous; je ne lʹai pas rencontré. Je crois quʹen ce moment il est aux eaux; à<br />

son retour, je me présenterai <strong>de</strong> nouveau chez lui.<br />

Je suis comme toujours, cher Monsieur lʹabbé, <strong>avec</strong> une respectueuse affection,<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

783 à M. Halluin<br />

Le personnel dʹArras. Confection <strong>de</strong> souliers pour les communautés <strong>de</strong> Paris.<br />

Vaugirard, 7 août 1861<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vous renvoie, signé comme vous me lʹavez <strong>de</strong>mandé, lʹacte pour lʹemprunt au<br />

Crédit Foncier. Il nous semble, en effet, que ce moyen est le plus simple pour parer aux be‐<br />

soins du moment et quʹil nʹengage pas lʹavenir, puisque vous restez libre <strong>de</strong> rembourser<br />

quand vous le pourrez faire.<br />

867


Je mʹétonne <strong>de</strong> la résistance <strong>de</strong> M. Clément, puisquʹil avait déclaré lui‐même quʹil<br />

pouvait se rendre chez les Oblats, pour peu quʹil fût aidé dans son voyage. Cʹest à cette in‐<br />

tention que jʹai envoyé 50f. Il ne peut indéfiniment rester chez vous, sʹil ne vous est pas ré‐<br />

ellement utile. Je pense quʹà Paris, il serait reçu chez les Picpuciens qui <strong>de</strong>sservent <strong>de</strong>s mis‐<br />

sions.<br />

Je serai bien aise que notre jeune Leduc écrive ou à moi ou à M. Lantiez; nous lʹex‐<br />

horterons un peu, il est bon et consciencieux, jʹespère quʹil se soutiendra.<br />

M. Myionnet et M. Emile [Beauvais] me prient <strong>de</strong> vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si, comme vous<br />

nous lʹaviez offert il y a quelque temps, vous êtes encore en mesure <strong>de</strong> nous fournir quel‐<br />

ques paires <strong>de</strong> souliers; en ce cas, nous vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rions dʹen faire confectionner au<br />

plus tôt 25 paires dans les dimensions indiquées ci‐contre, le plus tôt possible, car nous<br />

sommes fort à court, le départ <strong>de</strong> M. Leduc ayant mis la cordonnerie en souffrance et dé‐<br />

sorganisé momentanément le service. Jʹattendrai, en tout cas, un mot <strong>de</strong> réponse <strong>de</strong> vous<br />

sur ce point.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé; si vous trouviez utile, dans le temps <strong>de</strong>s vacances, <strong>de</strong><br />

vous échapper quelques jours pour faire un peu <strong>de</strong> retraite, nous vous verrions <strong>avec</strong> plai‐<br />

sir. Lʹabbé Risse, que nous attendons au commencement <strong>de</strong> septembre, en aurait aussi sa‐<br />

tisfaction.<br />

Mille affections et respects <strong>de</strong> tous.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

784 à M. Planchat<br />

Nouvelles <strong>de</strong>s communautés.<br />

14 août [1861]<br />

Vigile <strong>de</strong> lʹAssomption<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vais faire parvenir à M. Roussel votre narration du pèlerinage à Amettes; je viens<br />

seulement <strong>de</strong> le recevoir à Chaville où je suis <strong>de</strong>puis quelques jours. Je recomman<strong>de</strong>rai à<br />

M. Lantiez le jeune homme que vous lui adressez. Je ne puis vous écrire longuement au‐<br />

jourdʹhui, me rendant à Vaugirard à cause <strong>de</strong> lʹAssomption. La petite retraite pour cette<br />

fête à Grenelle va bien, il y a 60 hommes et une multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> femmes.<br />

Nous écrirons après lʹAssomption à notre jeune Leduc; je reçois une nouvelle lettre<br />

<strong>de</strong> M. Clément, cʹest une peine pour moi, parce que je ne crois pas quʹil ait réellement la<br />

flexibilité <strong>de</strong> volonté, lʹouverture <strong>de</strong> cœur et la disposition à se donner au bien <strong>de</strong>s autres<br />

qui est le fond <strong>de</strong> notre vocation. Que fait‐il à la maison dʹArras? Je ne mʹy explique guère<br />

sa position.<br />

Adieu, bien cher ami, nous prions beaucoup et constamment pour vous tous. Jʹécri‐<br />

rai au plus tôt au f. Guillot. Dites‐lui, dès ce moment, que je trouve bien quʹil essaie pen‐<br />

dant quelque temps <strong>de</strong> la communion très fréquente et que, dʹaprès les avantages et fruits<br />

quʹil en retirera, nous jugerons sʹil y a lieu <strong>de</strong> continuer à marcher ainsi.<br />

Mille affections à tous. A vous en J.M.J.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

868


785 à M. Risse<br />

Le sacrifice <strong>de</strong> soi‐même, principal mérite <strong>de</strong> la vocation religieuse. Annonce <strong>de</strong> lʹarrivée <strong>de</strong> M. Risse pour le 8<br />

septembre, jour <strong>de</strong> la Nativité <strong>de</strong> Marie.<br />

Duclair, 28 août 1861<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je voulais répondre le jour même à votre bonne et affectueuse lettre, et me réjouir<br />

<strong>avec</strong> vous <strong>de</strong> la grâce que Dieu vous a faite <strong>de</strong> dénouer lʹun après lʹautre vos liens pour<br />

vous attacher à Lui seul; jʹai toujours beaucoup <strong>de</strong> bonnes intentions, mais elles se réalisent<br />

imparfaitement, par ma faute toujours un peu et aussi par la multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s empêchements<br />

qui se mettent à la traverse <strong>de</strong> tous nos actes. Je bénis le Seigneur qui va enfin vous rap‐<br />

procher <strong>de</strong> nous et unir plus parfaitement votre existence à la nôtre. Il me vient parfois<br />

lʹinquiétu<strong>de</strong> que vous ne trouviez quʹun faible avantage dans cette union et que nous<br />

nʹayons pas assez <strong>de</strong> fond en vie spirituelle pour répondre à vos aspirations, ni peut‐être<br />

assez <strong>de</strong> moyens pour ai<strong>de</strong>r bien efficacement votre action dans les œuvres. Mais je me<br />

console par cette pensée: il y aura, en tout cas, un avantage assuré, cʹest lʹoffran<strong>de</strong>, cʹest le<br />

sacrifice <strong>de</strong> soi‐même généreusement fait à Dieu, cʹest la volonté <strong>de</strong> tout quitter pour Lui,<br />

même sa volonté, même le peu quʹon a, sʹabandonnant à Lui <strong>avec</strong> la confiance <strong>de</strong> lʹenfant<br />

aux bras <strong>de</strong> son père. Cela au moins, cher Monsieur lʹabbé, est bien assuré et cʹest un grand<br />

bien, car cʹest la marque la plus excellente quʹon puisse donner à Dieu <strong>de</strong> son amour, et<br />

cʹest aussi un moyen certain dʹattirer sur soi <strong>de</strong>s grâces nouvelles et surabondantes. Ayons<br />

donc confiance <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts, cher bon ami, le Maître auquel vous vous donnez nʹest<br />

point ingrat envers ses serviteurs, et si ce nʹest par nous, indignes, quʹil vous récompense,<br />

il saura le faire dʹautre sorte bien généreusement. Je vous promets, en tout cas, pour notre<br />

faible part, la bienveillance cordiale et la fraternelle affection <strong>de</strong> tous, <strong>avec</strong> mon dévoue‐<br />

ment le plus entier. Il me semble aussi que nos efforts concertés et nos quelques facultés<br />

réunies opéreront plus puissamment le bien, que, <strong>de</strong> retour à Metz, vous vous sentirez<br />

tout affermi, et par le peu dʹai<strong>de</strong> que nous vous donnerons, et par la pensée que <strong>de</strong>rrière<br />

vous il y aurait, en cas <strong>de</strong> besoin, dʹautres vous‐même pour vous donner appui et renfort.<br />

Enfin, et par‐<strong>de</strong>ssus tout, notre Dieu est le Dieu <strong>de</strong> charité, ce nʹest pas en vain quʹil nous<br />

fait redire chaque jour ce chant <strong>de</strong> joie: Ecce quam bonum et quam jucundum..., il donnera la<br />

réalisation <strong>de</strong> ce doux sentiment dans lʹunion <strong>de</strong> cœur et <strong>de</strong> notre zèle pour sa gloire et le<br />

bien <strong>de</strong>s pauvres enfants ouvriers.<br />

Je suis pour trois ou quatre jours absent, mais je serai <strong>de</strong> retour à la fin <strong>de</strong> cette se‐<br />

maine, bien avant votre arrivée. Conséquemment, croyez bien, cher Monsieur lʹabbé, que<br />

nous allons compter les jours jusquʹà la fête <strong>de</strong> la Nativité <strong>de</strong> la Ste Vierge, qui sera pour<br />

nous lʹannonce <strong>de</strong> votre venue; vos jeunes amis <strong>de</strong> Metz, tout particulièrement, parlent<br />

constamment <strong>de</strong> la joie quʹils y trouveront. Nous continuons dʹêtre satisfaits <strong>de</strong> leurs dis‐<br />

positions, je crois que vous serez heureux aussi <strong>de</strong> les retrouver.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, vous prendrez soin, nʹest‐ce pas, <strong>de</strong> me dire le mo‐<br />

ment <strong>de</strong> lʹarrivée du train qui vous amènera, afin quʹon aille à votre rencontre pour vous<br />

faciliter la route <strong>de</strong> la gare à Vaugirard.<br />

Mille affections respectueuses <strong>de</strong> tous, en particulier <strong>de</strong> celui qui est heureux <strong>de</strong> se<br />

dire<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

869


786 à M. Halluin<br />

Nouvelles injonctions pour presser le départ dʹun postulant. Ne pas admettre <strong>de</strong> prêtre âgé.<br />

Vaugirard, 4 septembre 1861<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Jʹétais absent pour un voyage <strong>de</strong> quelques jours quand votre lettre est arrivée ici, jʹy<br />

réponds en quelques mots seulement, trouvant à mon retour bien <strong>de</strong>s correspondances ar‐<br />

riérées.<br />

Pour ce qui regar<strong>de</strong> en premier lieu M. Clément, <strong>de</strong>s épreuves prolongées nous ont<br />

assez convaincus quʹil nʹa point les qualités que <strong>de</strong>man<strong>de</strong> notre vocation, sa ténacité dans<br />

ses idées, le peu <strong>de</strong> souplesse <strong>de</strong> sa volonté, sa tendance à sʹisoler et à se mettre en <strong>de</strong>hors<br />

<strong>de</strong> tout, nous assurent quʹil ne conviendrait ni à la famille ni à ses œuvres. Sʹil ne sʹagissait<br />

que dʹune question dʹargent, je consentirais encore à maintenir, au moins quant à présent,<br />

la petite pension que je mʹétais engagé à payer pour lui, mais je ne saurais le considérer<br />

comme membre <strong>de</strong> la Communauté et, sʹil ne peut avancer dans les ordres quʹen cette qua‐<br />

lité, je ne pourrais en conscience le présenter comme tel aux Supérieurs du Séminaire.<br />

Les membres du Conseil pensent quʹon ne pourrait sans inconvénient admettre le<br />

prêtre <strong>de</strong> 50 ans dont vous me parlez, ni comme membre <strong>de</strong> la Communauté, à cause <strong>de</strong><br />

son âge et <strong>de</strong>s habitu<strong>de</strong>s trop fortement prises, ni même comme prêtre pensionnaire, parce<br />

que les étrangers, quels quʹils soient, ne peuvent, sans embarras, prendre place dans la<br />

maison qui déjà a fait quelques concessions <strong>de</strong> ce genre et ne pourrait quʹ<strong>avec</strong> détriment<br />

en faire un plus grand nombre.<br />

M. Carment a remis à Vallé les 25f que vous désiriez quʹon avançât pour lui.<br />

Nos ff. <strong>de</strong> Grenelle, obligés <strong>de</strong> faire un emprunt pour la construction <strong>de</strong> leur cha‐<br />

pelle, me prient <strong>de</strong> vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r quelles démarches vous avez faites pour votre em‐<br />

prunt au Crédit Foncier, à qui sʹadresse la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> et en quelle forme. Ils sont un peu<br />

pressés dʹavoir le renseignement, parce quʹils savent que les formalités sont un peu lon‐<br />

gues et retar<strong>de</strong>nt la solution.<br />

Nous attendons M. Risse dimanche ou lundi. Jʹai lu <strong>avec</strong> beaucoup dʹintérêt une let‐<br />

tre que vient <strong>de</strong> mʹécrire M. Planchat, je lui écrirai prochainement. Je nʹai pas bien compris<br />

quelle réponse il me <strong>de</strong>mandait relativement au travail dont il pourrait être chargé<br />

concernant les familles <strong>de</strong> vos enfants. Je ne me souviens point précisément <strong>de</strong> quoi il<br />

sʹagissait, et jʹai remis à M. Roussel la lettre où il était question <strong>de</strong> cet objet.<br />

Je vous écris un peu en hâte, ayant fait ces jours‐ci une absence qui mʹa mis fort en<br />

retard.<br />

Nous <strong>de</strong>meurons tous bien affectueusement unis à vous; croyez en particulier aux<br />

sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> dévouement <strong>avec</strong> lesquels je suis en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

787 323<br />

323 Suppléée par la lettre 792 bis.<br />

870


788 à M. Halluin<br />

Placement dʹun jeune dʹArras reconu impropre à la vie religieuse.<br />

Vaugirard, 10 septembre 1861<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Notre jeune Théron, après une épreuve prolongée et examen attentif <strong>de</strong>vant Dieu,<br />

ne se trouve pas, définitivement, énergie suffisante pour se donner au service du prochain<br />

dans une œuvre <strong>de</strong> zèle et <strong>de</strong> dévouement. Nous avons donc à le caser dans la situation la<br />

meilleure et la plus sûre pour lui. Nous redoutons beaucoup Paris et ses dangers, nous le<br />

verrions <strong>avec</strong> bien plus <strong>de</strong> tranquillité retourner près <strong>de</strong> vous et chercher sous vos yeux<br />

<strong>de</strong>s moyens dʹexistence quʹil lui serait assurément facile <strong>de</strong> trouver, puisquʹil a la main fort<br />

adroite et serait, dès quʹil le voudrait, un très habile ouvrier. Ce qui lui manque, cʹest le<br />

cœur à lʹouvrage, il faut que le besoin <strong>de</strong> gagner sa vie le pousse, le dévouement et les mo‐<br />

tifs surnaturels ne suffisent pas pour le pousser. Il gar<strong>de</strong> dʹailleurs une piété assez soute‐<br />

nue et ne nous laisse rien à dire pour la conduite. Veuillez me faire connaître le plus tôt<br />

possible, cher Monsieur lʹabbé, si vous voyez quelque moyen <strong>de</strong> le placer autour <strong>de</strong> vous<br />

ou si, contre notre désir, nous <strong>de</strong>vons le placer à Paris. Je crois quʹil retournerait volontiers<br />

à Arras.<br />

Toute notre petite famille vous assure <strong>de</strong> son affection, lʹabbé Risse <strong>avec</strong> les autres<br />

et moi comme eux, je suis bien cordialement tout vôtre en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Bon souvenir, en particulier, à notre cher abbé Planchat; nous ne songeons point,<br />

quant à présent, à vous le retirer.<br />

789 à M. Planchat<br />

Zèle apostolique du père Planchat. Quels sont ses pouvoirs <strong>de</strong> confesseur à Amiens. Temporiser avant <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>r<br />

une Sainte‐Famille à Arras.<br />

Vaugirard, 15 septembre 1861<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong>s bonnes et longues lettres que vous mʹavez écrites, elles mʹont<br />

vivement intéressé; jʹai communiqué à nos frères tout ce qui pouvait les édifier dans vos<br />

récits. Je suis aussi tout particulièrement satisfait <strong>de</strong>s soins spirituels que vous donnez au<br />

personnel <strong>de</strong> nos <strong>de</strong>ux maisons dʹArras et dʹAmiens, ce secours leur sera très salutaire, jʹen<br />

ai la confiance; puisez toujours vos forces en Dieu pour ne donner à ces âmes rien que <strong>de</strong><br />

soli<strong>de</strong>, <strong>de</strong> pur, <strong>de</strong> saint; votre ministère alors portera partout la bénédiction. Je ne verrais<br />

pas dʹinconvénient à ce que M. Caille <strong>de</strong>mandât pour vous la permission <strong>de</strong> confesser à<br />

Amiens; je crois cependant que vous ne <strong>de</strong>vriez pas confesser les frères, parce que vous ne<br />

le pouvez pas faire assez souvent pour leurs besoins et quʹil semble à propos, consé‐<br />

quemment, <strong>de</strong> ne point les séparer <strong>de</strong> M. le Curé <strong>de</strong> S te Anne. Je crois que ce serait à obser‐<br />

ver et je crains, quand vous aurez <strong>de</strong>s pouvoirs, que les frères dʹune part et vous <strong>de</strong> lʹautre<br />

ne teniez pas assez compte <strong>de</strong> cette observation; cʹest ce qui mʹavait jusquʹici empêché <strong>de</strong><br />

répondre sur ce point; je crains aussi que, ne venant quʹen passant à Amiens, vous ne puis‐<br />

siez confesser les personnes autres que celles <strong>de</strong> la communauté sans quelque méconten‐<br />

tement du clergé circonvoisin.<br />

871


Je crois quʹà Arras il peut être bien que vous aidiez M. Halluin à voir les familles <strong>de</strong><br />

vos enfants, mais je pense quʹil serait pru<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> ne pas encore songer, quant à présent, à<br />

une S te ‐Famille, ce qui vous préparerait bientôt trop dʹoccupation; nous nʹavons dʹailleurs<br />

encore aucune vue bien arrêtée pour lʹavenir; en passant lʹhiver en observation, vos rela‐<br />

tions <strong>avec</strong> les familles seraient une bonne préparation du terrain et si, au printemps, on ju‐<br />

geait à propos dʹentreprendre quelque chose, on le ferait <strong>avec</strong> connaissance <strong>de</strong> cause.<br />

Je ne vois personne présentement chez nous quʹon pût envoyer en ce moment à Ar‐<br />

ras pour secon<strong>de</strong>r nos frères, nous ferons toujours tout ce que nous pourrons pour ai<strong>de</strong>r<br />

chacune <strong>de</strong> nos œuvres, nos ressources en personnel sont faibles, vous le savez.<br />

La retraite aura lieu, je lʹespère, au commencement dʹoctobre, le jour dʹouverture<br />

nʹest pas encore fixé.<br />

Adieu, mon bien bon ami, priez pour nous, je conjure la T. S te Vierge <strong>de</strong> répandre<br />

sur vous les parfums <strong>de</strong> son nom tant béni<br />

Votre affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je vous charge <strong>de</strong> toutes mes affections et <strong>de</strong>s bons souvenirs <strong>de</strong> la famille pour<br />

tous nos frères; je verrai <strong>avec</strong> joie ceux qui pourront venir à la retraite, M. Halluin en parti‐<br />

culier.<br />

790 à M. Caille<br />

Nécessité du repos après le travail. Confessions du père Planchat à Amiens.<br />

Vaugirard, 15 septembre 1861<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je suis bien loin <strong>de</strong> blâmer la pensée que vous avez eue <strong>de</strong> prendre un peu <strong>de</strong> repos,<br />

au contraire, je regrette quʹil ait été si court; un peu <strong>de</strong> détente est nécessaire pour lʹesprit<br />

comme pour le corps; N.S. disait lui‐même à ses apôtres après leurs travaux: Venez, reti‐<br />

rons‐nous à lʹécart et reposez‐vous un peu. Je suis satisfait aussi que le f. Marcaire ait pu<br />

vous accompagner, il paraît sʹêtre bien trouvé <strong>de</strong> ce moment <strong>de</strong> paix et dʹépanouissement<br />

en présence <strong>de</strong>s grands spectacles <strong>de</strong> la nature; le Dieu que nous servons est bon, il fait<br />

tout tourner à notre bien quand nous allons droitement et simplement dans nos rapports<br />

<strong>avec</strong> Lui.<br />

M. Planchat mʹa <strong>de</strong>mandé <strong>de</strong>ux fois <strong>de</strong> vous autoriser à solliciter pour lui le pouvoir<br />

<strong>de</strong> confesser à Amiens, voyez ce qui vous semble désirable. Je crains seulement, sʹil<br />

confesse les frères, que ceux‐ci ne délaissent trop M. le Curé <strong>de</strong> Ste ‐Anne qui cessera alors<br />

<strong>de</strong> sʹoccuper dʹeux et <strong>de</strong> leur donner son intérêt. Il me semble que, par les conseils <strong>de</strong> di‐<br />

rection spirituelle, M. Planchat peut, en général, entrer assez intimement en relation <strong>avec</strong><br />

les frères et quʹil nʹaurait à les confesser quʹacci<strong>de</strong>ntellement. Pour la confession dʹautres<br />

personnes du <strong>de</strong>hors, il est trop peu <strong>de</strong> temps et trop peu librement à Amiens pour pou‐<br />

voir bien utilement y prendre <strong>de</strong>s pénitents, je crois que ce serait une mauvaise combinai‐<br />

son; voyez pourtant ce qui est le mieux.<br />

Notre retraite aura lieu, nous lʹespérons, au commencement dʹoctobre, le jour nʹest<br />

pas encore fixé.<br />

872


Adieu, bien cher ami, mille affections à nos frères et mes bien dévoués sentiments<br />

pour eux et pour vous.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

791 à M. Caille<br />

Le personnel <strong>de</strong> la maison dʹAmiens. Le voyant <strong>de</strong> La Salette, Maximin Giraud, en visite à Vaugirard.<br />

Vaugirard, 20 septembre 1861<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je pense <strong>avec</strong> vous quʹil nʹy a point, quant à présent, urgence à <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s pou‐<br />

voirs à Amiens pour notre cher abbé Planchat; je crois aussi quʹil nʹest pas nécessaire quʹil<br />

visite M. Victor [Trousseau, au Petit Séminaire <strong>de</strong> Montdidier] aussi souvent quʹil le pense;<br />

un ou <strong>de</strong>ux voyages à un mois <strong>de</strong> distance peuvent être utiles pour le moment, afin <strong>de</strong> dis‐<br />

traire et encourager cet enfant qui doit nécessairement avoir un peu dʹennui, mais une fois<br />

quʹil sera bien remis, on pourra éloigner les intervalles; vous réglerez dʹailleurs la chose,<br />

étant mieux à même dʹen juger.<br />

M. Lantiez a répondu pour la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> faite par M. Victor.<br />

Je trouve bien votre manière <strong>de</strong> tenir lʹordre <strong>de</strong> votre maison. M. Alphonse [Vas‐<br />

seur] comprendra lui‐même, je lʹespère, en y réfléchissant mieux, que tout est bien ainsi,<br />

ses petits mécontentements tomberont; il a, au fond, du cœur et <strong>de</strong> la bonne volonté, la<br />

grâce <strong>de</strong> Dieu lui viendra en ai<strong>de</strong>.<br />

Le jeune homme [Théron] dont vous a parlé M. Planchat est toujours au milieu <strong>de</strong><br />

nous; il est doux <strong>de</strong> manières, assez pieux, fort adroit au travail, mais pas assez dévoué à<br />

notre sens et pas assez laborieux. Je ne verrais pas <strong>de</strong> nécessité à ce quʹil logeât chez vous,<br />

si vous y voyez lʹombre dʹinconvénient, il est assez habile comme menuisier pour gagner<br />

sa vie au <strong>de</strong>hors, il pourrait donc seulement venir aux réunions <strong>de</strong> la semaine et du di‐<br />

manche. Nous irons du reste <strong>avec</strong> lui jusquʹà la retraite, nous ne lui avons pas encore parlé<br />

<strong>de</strong> son changement; nous ne voyons pas chez lui <strong>de</strong> vocation bien indiquée, cʹest ce qui<br />

nous porte à lui conseiller la vie ordinaire.<br />

Vous pouvez avoir toute confiance en M. Gustave [Marinier], nous vous répondons<br />

<strong>de</strong> lui. Si M. Thenon a pu dire, ce que jʹignore, que la Communauté ne trouverait pas une<br />

gran<strong>de</strong> vigueur en lui, il était dans le vrai, mais il nʹa certainement rien dit <strong>de</strong> plus; M.<br />

Gustave pouvait nʹavoir pas la suffisance pour lʹemploi très difficile et fort lourd quʹil<br />

sʹagissait <strong>de</strong> lui donner à Ste ‐Mélanie; mais, dans un office moins important, il peut rendre<br />

<strong>de</strong>s services réels; il est pieux, a bonne volonté et, un peu encouragé, il ira bien partout.<br />

Soyez sûr que M. Thenon nʹa pu rien dire en autre sens; sʹil lʹavait fait, il eût été mal infor‐<br />

mé. M. Carment a suivi <strong>de</strong> très près ce jeune homme pendant plusieurs mois à Ste ‐Mélanie<br />

et il rend le meilleur compte <strong>de</strong> lui; les Frères, que sa santé lʹavait contraint autrefois <strong>de</strong><br />

quitter, lui ont écrit quʹils étaient disposés à le reprendre.<br />

Adieu, mon bien bon ami, mille affections à nos frères. Nous avons eu hier une ai‐<br />

mable et pieuse solennité à la chapelle <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette; Maximin [Giraud], momenta‐<br />

nément à Paris, nous a rendu visite dans lʹaprès‐midi.<br />

Votre tout affectionné ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

873


792 à M. Vasseur<br />

Lʹobéissance, remè<strong>de</strong> à la versatilité. Ne pas fuir la croix. Lutter en paix contre les tentations.<br />

Vaugirard, 21 septembre 1861<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Je regrettais en effet que vous mʹécrivissiez si rarement, mais je mʹaccusais moi‐<br />

même <strong>de</strong> votre peu dʹempressement, me souvenant que, parfois, je nʹavais pu répondre<br />

sans retard à vos lettres; je tâche <strong>de</strong> faire mieux, jʹécris quelques mots seulement, mais je<br />

tiens ma correspondance au courant. Jʹai aussi <strong>de</strong> vos nouvelles par notre bon abbé Plan‐<br />

chat qui est content, en ensemble, <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux maisons dʹArras et dʹAmiens. Je ne crois pas,<br />

non plus que lui, quʹil y ait à sʹinquiéter <strong>de</strong> vos alternatives si variées <strong>de</strong> dispositions, ni <strong>de</strong><br />

cette humeur mobile qui fait que vous ne vous trouvez guère bien nulle part; cela tient à<br />

votre caractère en gran<strong>de</strong> partie; votre frère a la tête aussi extrêmement mobile. Dieu, sans<br />

doute, qui sait <strong>de</strong> quelle argile nous sommes faits, regar<strong>de</strong> ses pauvres créatures <strong>avec</strong> in‐<br />

dulgence et daignera leur faire miséricor<strong>de</strong>; Il a mis dʹailleurs en vous, comme contrepoids<br />

à cette instabilité dʹesprit, un certain sentiment du <strong>de</strong>voir qui vous retiendra toujours, je<br />

lʹespère, et vous empêchera <strong>de</strong> compromettre votre avenir <strong>de</strong> chrétien et <strong>de</strong> religieux. Ai‐<br />

mez lʹobéissance, cher enfant, croyez aux lumières <strong>de</strong>s autres plutôt quʹaux vôtres, car, en<br />

ce qui vous concerne personnellement, votre propre jugement vous égarerait infaillible‐<br />

ment.<br />

Prenez en patience les petites contrariétés que vous pouvez trouver dans votre em‐<br />

ploi; cʹest la croix ici, comme cʹétait la croix ailleurs; vous fuyez la croix <strong>avec</strong> impatience et<br />

aversion, elle vous suivra partout; mieux vaudrait la prendre bravement que la porter <strong>avec</strong><br />

mécontentement et répulsion; vous auriez alors la paix et un secours plus grand <strong>de</strong> la<br />

grâce <strong>de</strong> Dieu.<br />

Lisez les chapitres XI et XII du 3e livre <strong>de</strong> LʹImitation; je crois que vous y trouverez<br />

consolation.<br />

Quant à vos luttes contre la chair, cʹest le sort commun, ce sont là les combats du<br />

Seigneur; à travers tout, vous restez sur pied. Dieu ne vous abandonne pas, le temps passe<br />

et chaque jour amène quelque mérite; ainsi est la vie. Dans une autre condition, telle que la<br />

rêve votre imagination dans les mauvais moments et sous lʹinspiration <strong>de</strong> lʹesprit <strong>de</strong> ma‐<br />

lice, vous ne seriez pas plus tranquille, si vous vouliez rester chrétien réellement; donc,<br />

<strong>de</strong>meurez où Dieu vous a mis, où son appel vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> encore et où vous trouverez la<br />

paix si vous la cherchez dans son bon plaisir, dans le soin <strong>de</strong> sa gloire et dans lʹapplication<br />

à votre salut.<br />

Adieu, cher ami, faites du bien à tous ceux qui vous entourent, vous serez content et<br />

vous vous plairez à Amiens ou en quelque autre lieu que Dieu vous marquera.<br />

Je vous embrasse tendrement en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

792 bis 324 à M. Maignen<br />

Contacts <strong>avec</strong> lʹabbé Peigné, <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Toutes‐Joies, à Nantes.<br />

324 Supplée la lettre 787.<br />

874


[25 septembre 1861]<br />

Cher enfant en N.S.,<br />

Je ne sais si je vous ai bien dit ma pensée relativement à lʹaffaire <strong>de</strong> Nantes.<br />

1° ‐ En termes déférents toujours, exprimer à M. Peigné quʹil vous semble, sauf son<br />

avis sans doute plus éclairé que le vôtre, quʹune maison <strong>de</strong> vieillards le mettrait bien hors<br />

<strong>de</strong> sa voie, lʹobligerait à une immense entreprise, source <strong>de</strong> grands embarras pour une<br />

œuvre <strong>de</strong> peu <strong>de</strong> conséquence spirituelle qui détruirait lʹunité <strong>de</strong> ses travaux et pèserait<br />

indéfiniment sur lui et sur ses opérations dʹun autre genre.<br />

2° ‐ Que la Communauté prendrait <strong>avec</strong> joie pied en Bretagne, cette terre bénie <strong>de</strong> la<br />

foi et du dévouement; que toutefois la chose, si elle se <strong>de</strong>vait faire, <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rait à être pré‐<br />

parée <strong>de</strong> longue main, que nous ne serions pas prêts immédiatement et <strong>de</strong>vrions, le cas<br />

échéant, prédisposer les choses <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> lui et <strong>avec</strong> maturité.<br />

3° ‐ Quʹune pensée vous est venue, que vous lui communiquez en toute simplicité,<br />

quʹune pareille union <strong>de</strong> son œuvre <strong>avec</strong> les nôtres serait bien plus facile, plus vraie, plus<br />

efficace, si lui‐même associait ses efforts aux nôtres en apportant à la Communauté lʹappui<br />

<strong>de</strong> son zèle, <strong>de</strong> son expérience et <strong>de</strong>s dons précieux que Dieu a mis en lui, en sʹunissant à<br />

nous, en un mot, comme lʹont fait MM. Halluin et Risse, à Arras et à Metz; quʹainsi il pour‐<br />

rait préparer les voies, attirant à lui quelques sujets dʹélite, les façonnant dʹavance, faisant<br />

autour <strong>de</strong> lui un petit noyau dʹamis dévoués qui se donneraient à nos œuvres et, fortifiant<br />

la Communauté, la mettraient mieux à même <strong>de</strong> lui donner quelques sujets formés pour<br />

lʹassister à Nantes; quʹune pareille décision, vous le sentez, voudrait réflexion, ne se pour‐<br />

rait réaliser quʹ<strong>avec</strong> ménagement et sage mesure, mais quʹen soi elle vous paraîtrait du<br />

plus haut intérêt pour lʹavenir <strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong> patronage quʹil a à cœur, comme nous, <strong>de</strong><br />

fon<strong>de</strong>r sur <strong>de</strong>s bases soli<strong>de</strong>s, pour la gloire <strong>de</strong> Dieu et le bien <strong>de</strong>s âmes.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

793 à M. Halluin<br />

Nʹaccepter dʹŒuvres du <strong>de</strong>hors que dans la mesure où cela ne nuit pas à notre ministère dans la maison. Condi‐<br />

tions dʹadmission dʹun postulant désirant faire ses étu<strong>de</strong>s ecclésiastiques. Dispositions pour que M. Halluin<br />

fasse sa retraite à Vaugirard. Nouvelles <strong>de</strong> M. Risse.<br />

Vaugirard 28 septembre 1861<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je réponds un peu brièvement à votre lettre du 24, étant au moment <strong>de</strong> sortir et ne<br />

voulant pas différer davantage à vous écrire.Je crois quʹil serait très à propos <strong>de</strong> quitter le<br />

St ‐Sacrement325 qui vous crée <strong>de</strong>s difficultés assez gran<strong>de</strong>s pour vos occupations à lʹinté‐<br />

rieur, mais je verrais <strong>avec</strong> joie que vous pussiez vous charger du refuge qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rait<br />

moins <strong>de</strong> soins et pourrait donner à M. Planchat un peu dʹactivité extérieure, sans le trop<br />

jeter au <strong>de</strong>hors, ce quʹon peut craindre sʹil entreprenait quelque œuvre comme une Ste ‐<br />

Famille.<br />

Pour le bon jeune homme dont vous me parlez, nous ne refusons pas <strong>de</strong> le recevoir<br />

et dʹaccepter la charge <strong>de</strong> ses étu<strong>de</strong>s, mais toutefois je désirerais que vous me donniez une<br />

325<br />

Le St-Sacrement, probablement le monastère <strong>de</strong>s Bénédictines du Saint-Sacrement, situé sur la rue d’Amiens, et près du couvent<br />

<strong>de</strong>s Clarisses.<br />

875


éponse définitive<br />

quʹaprès lʹavoir vu et<br />

vous être assuré, en<br />

causant <strong>avec</strong> lui, quʹil<br />

a vraiment les mar‐<br />

ques dʹune bonne vo‐<br />

cation et assez dʹintel‐<br />

ligence et <strong>de</strong> moyens<br />

pour promettre à la<br />

Communauté un<br />

fruit réel <strong>de</strong> ses sacri‐<br />

fices et <strong>de</strong> ses soins.<br />

Dans le cas où il vous<br />

semblerait vraiment<br />

tel que nous le pou‐<br />

vons souhaiter, on pourrait lʹenvoyer directement à Vaugirard où il pourrait, comme vous<br />

le pensez, suivre ses étu<strong>de</strong>s en <strong>de</strong> meilleures conditions quʹailleurs, nos cours commençant<br />

à se bien organiser.<br />

Nous serions tout heureux <strong>de</strong> vous voir à la retraite. Nous craignons seulement que<br />

M. Myionnet ne puisse quitter la maison à ce moment, ayant ordinairement lʹobligation <strong>de</strong><br />

gar<strong>de</strong>r nos enfants pour laisser M. Lantiez libre <strong>de</strong> suivre tous ses jeunes postulants du‐<br />

rant les exercices <strong>de</strong> la retraite. Nous avions pensé que vous pourriez venir la veille <strong>de</strong> la<br />

clôture et faire après une retraite particulière durant quelques jours. Nous chercherons en‐<br />

core si quelque combinaison serait meilleure et plus satisfaisante pour vous; nous avons,<br />

soyez‐en bien assuré, le plus sincère désir <strong>de</strong> tout faire pour le bien <strong>de</strong> votre maison et le<br />

vôtre propre. Lʹépoque <strong>de</strong> la retraite nʹest pas encore entièrement arrêtée; le p. <strong>de</strong> Ponle‐<br />

voy qui doit, je lʹespère, nous donner un <strong>de</strong>s pères <strong>de</strong> sa maison, est absent jusquʹau 1 er oc‐<br />

tobre; il a ajourné jusque là lʹexamen <strong>de</strong>s moyens dont il pourra disposer.<br />

M. Risse, ici <strong>de</strong>puis 20 jours, va très bien. Nous sommes, je crois, faits les uns pour<br />

les autres et cʹest Dieu, tout nous lʹannonce, qui a préparé notre rapprochement.<br />

Recevez, cher Monsieur lʹabbé, les affections <strong>de</strong> toute la famille, <strong>avec</strong> les sentiments<br />

<strong>de</strong> respect et dʹattachement, en J. et M., <strong>de</strong><br />

Votre tout dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

794 à M. Planchat<br />

Intérêt <strong>de</strong> la correspondance <strong>de</strong> M. Planchat. Encouragement à écrire un recueil <strong>de</strong> méditations pour la Commu‐<br />

nauté.<br />

28 septembre [1861]<br />

Merci, mon bien bon ami et fils en N.S., <strong>de</strong> vos intéressantes lettres; elles répon<strong>de</strong>nt<br />

tout à fait au besoin que nous avions dʹavoir <strong>de</strong>s détails un peu ordinaires et circonstanciés<br />

sur nos frères et nos œuvres <strong>de</strong> province; <strong>de</strong> cette sorte, nous nous suivons vraiment <strong>de</strong>s<br />

yeux.<br />

876


Comme je lʹécris à M. Halluin, le moment précis <strong>de</strong> la retraite nʹest pas encore dé‐<br />

terminé, jʹespère pouvoir vous le dire bien prochainement.<br />

Je vous remercie aussi pour les <strong>de</strong>ux sujets <strong>de</strong> méditation. Cʹest une bonne pensée<br />

que <strong>de</strong> préparer ainsi une série <strong>de</strong> méditations propres pour toutes les occasions qui <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> notre petite famille quelque intention pieuse plus spéciale et plus<br />

marquée. Attachez‐vous à traiter votre matière substantiellement, clairement et pas trop<br />

longuement.<br />

Assurez tous nos frères <strong>de</strong> notre tendre affection et réservez pour vous une bien<br />

large part <strong>de</strong> tous nos sentiments <strong>de</strong> cordial dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

795 à M. Caille<br />

Date <strong>de</strong> la prochaine retraite <strong>de</strong> Communauté.<br />

Vaugirard, 5 octobre 1861<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

La retraite ouvrira définitivement le dimanche au soir 13 <strong>de</strong> ce mois; nous nʹavons<br />

pu en préparer le moment à une époque plus rapprochée. Elle sera donnée par le r.p. Ber‐<br />

trand, jésuite.<br />

Mille affections et dévouements à vous et à nos frères.<br />

Votre affectionné ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

796 à M. Halluin<br />

Prochaine retraite <strong>de</strong> Communauté. M. Myionnet ne pourra suppléer M. Halluin.<br />

Vaugirard, 5 octobre 1861<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Notre retraite est définitivement fixée, pour son ouverture, au dimanche 13 <strong>de</strong> ce<br />

mois. Le soir <strong>de</strong> ce jour aura lieu lʹouverture. Je ne sais pas encore si elle se clora le ven‐<br />

dredi matin ou le samedi.<br />

Nous nʹavons pas, jusquʹici, trouvé <strong>de</strong> combinaison pour vous envoyer M. Myion‐<br />

net durant les jours <strong>de</strong> la retraite, mais il pourrait plus facilement aller à Arras immédia‐<br />

tement après. Une retraite en particulier pourrait encore vous faire grand bien; vous pour‐<br />

riez, par exemple, visiter M. lʹabbé Pinaud chaque jour et prendre ses conseils pour vos<br />

exercices spirituels. Si, dʹici au commencement <strong>de</strong> la retraite, nous voyions quelque moyen<br />

plus satisfaisant, je mʹempresserais <strong>de</strong> vous lʹécrire.<br />

Mille affections et dévouement <strong>de</strong> tous en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

797 à M. Halluin<br />

Embarras pour remplacer M. Halluin à Arras. Explications détaillées <strong>de</strong> MLP.<br />

877


Vaugirard, 10 octobre 1861<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vous renvoie ci‐joint, signé comme vous le désirez, le contrat relatif à lʹemprunt<br />

<strong>de</strong> 20.000f.<br />

Je suis bien touché <strong>de</strong>s raisons que vous me donnez pour ce qui regar<strong>de</strong> la retraite;<br />

cʹest bien à regret que moi‐même jʹai fait quelques objections à cet arrangement que je dé‐<br />

sire autant que vous. Les difficultés que nous voyons à son exécution, les voici: M. Lantiez,<br />

obligé <strong>de</strong> suivre les jeunes frères quʹil dirige, durant la retraite, doit nécessairement y<br />

prendre part et assister aux exercices. Si M. Myionnet était absent, toute la charge <strong>de</strong>s en‐<br />

fants retomberait sur M. Augustin [Déage], Préfet <strong>de</strong> discipline qui, non seulement serait<br />

entièrement privé <strong>de</strong> la retraite, mais aurait un far<strong>de</strong>au extrêmement lourd durant toute la<br />

semaine. M. Augustin est un jeune homme intelligent, fort capable, précieux pour nous,<br />

ses dispositions sont bonnes, il semble être sincèrement attaché à la Communauté, mais il<br />

nʹest pas encore très avancé en piété, la retraite lui est fort nécessaire, dʹautant quʹil ne sau‐<br />

rait pas, comme un ecclésiastique ou un religieux consommé, faire une retraite isolément<br />

et <strong>avec</strong> les seuls conseils dʹun directeur. Ces raisons nous ont paru bien graves, et le<br />

Conseil mʹa invité à vous les communiquer dans la pensée que vous en seriez frappé<br />

comme nous.<br />

Si toutefois, cher Monsieur lʹabbé, vous sentiez, <strong>de</strong> votre côté, un besoin <strong>de</strong> cette re‐<br />

traite commune assez pressant pour quʹon dût passer outre aux considérations sérieuses<br />

que je viens dʹénoncer, je nʹinsisterais pas davantage et, sur nouvel avis que vous me don‐<br />

neriez, nous prendrions nos mesures en conséquence. Autrement, après avoir assisté à la<br />

clôture <strong>de</strong> la retraite, vous feriez la vôtre en particulier et, durant ce temps, M. Myionnet<br />

irait vous remplacer.<br />

Nous attendrons le jeune homme <strong>de</strong> 18 ans dont vous nous annoncez lʹarrivée ainsi<br />

que celle <strong>de</strong> nos frères.<br />

Mille affections <strong>de</strong> tous et, en particulier, <strong>de</strong><br />

Votre tout dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

798 à M. Planchat<br />

MLP. se résoud à passer par‐<strong>de</strong>ssus toutes les difficultés pour faire venir M. Halluin en retraite.<br />

Vaugirard, 12 [octobre 1861]<br />

Mon bon abbé et fils en N.S.,<br />

Je ne résiste pas au désir quʹa M. Halluin <strong>de</strong> faire la retraite, je crois quʹil en a un vé‐<br />

ritable besoin, jʹai seulement exprimé le sentiment du Conseil sur les difficultés que je vous<br />

ai fait connaître; M. Halluin peut compter que M. Myionnet se rendra à Arras lundi et fera<br />

<strong>de</strong> son mieux pour être <strong>de</strong> quelque utilité aux enfants <strong>de</strong> votre maison.<br />

M. Augustin [Déage] fera ce quʹil pourra <strong>de</strong> retraite, il montre la bonne disposition<br />

<strong>de</strong> se prêter à tout ce quʹon réglera pour le mieux. M. Lantiez, <strong>de</strong> son côté, concourra au‐<br />

tant quʹil le pourra au bien <strong>de</strong> tous; espérons que le Seigneur, voyant notre faiblesse, nous<br />

ai<strong>de</strong>ra dans sa miséricor<strong>de</strong>.<br />

La lettre <strong>de</strong> votre bonne mère était un simple billet me <strong>de</strong>mandant <strong>de</strong> vous faire<br />

parvenir une lettre y jointe, il ne mʹavait pas semblé quʹelle attendît une réponse; la lettre<br />

878


vous a été envoyée, je mʹétonnerais quʹelle ne vous fût pas parvenue. Assurez votre bonne<br />

mère <strong>de</strong> mon respect, <strong>de</strong> mon affectueux intérêt pour tout ce qui touche elle et sa famille,<br />

et dites‐lui mon regret <strong>de</strong> lʹinquiétu<strong>de</strong> où je lʹai involontairement laissée.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

799 à M. Halluin<br />

Mgr <strong>de</strong> Ségur prêche la retraite aux persévérants. Injonction dʹavoir à congédier lʹun <strong>de</strong>s surveillants <strong>de</strong> la mai‐<br />

son.<br />

Vaugirard, 25 octobre 1861<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

M. Myionnet, à son retour, nous a rapporté <strong>de</strong> bonnes impressions <strong>de</strong> son séjour à<br />

Arras, il espère bien <strong>de</strong> lʹavenir, Dieu protège toujours visiblement votre chère maison.<br />

Je voulais vous écrire aussitôt après lʹarrivée ici <strong>de</strong> M. Myionnet au sujet <strong>de</strong> M.<br />

Clément, la retraite <strong>de</strong> nos persévérants, donnée par Mgr <strong>de</strong> Ségur ces jours‐ci et close seu‐<br />

lement dʹhier, mʹa empêché <strong>de</strong> le faire aussi vite que je lʹaurais voulu. Je vous prie, cher<br />

Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> tenir fermement à la décision que M. Myionnet avait signifiée à M.<br />

Clément et dʹexiger quʹil quitte votre maison dans le délai <strong>de</strong> huit jours qui lui a été mar‐<br />

qué. A cette fin, je crois quʹil est essentiel dʹavertir sans retard les directeurs du Séminaire<br />

que vous nʹenten<strong>de</strong>z nullement appuyer M. Clément et quʹil <strong>de</strong>meure et <strong>de</strong>meurera étran‐<br />

ger à la Communauté. Ce malheureux jeune homme abuse trop à la fin <strong>de</strong> notre longani‐<br />

mité et il est temps <strong>de</strong> mettre un terme à une situation quʹil ne nous convient point <strong>de</strong> tolé‐<br />

rer davantage. Si M. Clément se retire sans difficulté et comme il convient à un homme <strong>de</strong><br />

quelque sens, vous pourrez lui remettre pour moi 50f et lui délivrer un certificat. Sʹil ne se<br />

rend pas résolument et sagement à lʹinjonction que vous lui ferez formellement <strong>de</strong> quitter<br />

votre maison, écrivez‐moi, je vous prie, sans retard. Pour vous épargner lʹennui <strong>de</strong> vous<br />

commettre <strong>avec</strong> cet homme, jʹenverrai immédiatement M. Myionnet <strong>avec</strong> charge expresse<br />

<strong>de</strong> vous délivrer dʹune contrariété que je regrette dʹavoir causé à votre maison, en y pla‐<br />

çant un sujet qui ne <strong>de</strong>vait point y trouver place. Il ne nous est pas ordinaire dʹen venir à<br />

<strong>de</strong> pareilles mesures, mais nous nʹavons non plus, grâces à Dieu, pas rencontré jusquʹici<br />

tant dʹobstination, dʹinintelligence et dʹoubli <strong>de</strong>s convenances. Jʹattendrai, cher Monsieur<br />

lʹabbé, votre réponse pour prendre les dispositions que le cas pourra <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r.<br />

La retraite <strong>de</strong> nos persévérants a été parfaite, toute la maison sʹen est ressentie, la<br />

présence <strong>de</strong> Mgr <strong>de</strong> Ségur, qui est un véritable saint, édifiait tout le mon<strong>de</strong> et sera pour<br />

nous une bénédiction, nous en avons la confiance.<br />

Mille affections à tous.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

800 à M. Maignen<br />

Peine causée à MLP. par la débilité <strong>de</strong> certaines vocations; confiance néanmoins dans lʹavenir encore inaperçu <strong>de</strong><br />

lʹInstitut.<br />

879


Vaugirard, 8 novembre 1861<br />

Octave <strong>de</strong> la Toussaint<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vais examiner votre manuscrit <strong>avec</strong> attention, je vous dirai ensuite ce quʹil mʹen a<br />

semblé.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> vos bonnes paroles, je <strong>de</strong>vrais consoler tout le mon<strong>de</strong> et je suis<br />

heureux, au contraire, dʹaccepter <strong>de</strong>s paroles encourageantes; je ne désespère pas le moins<br />

du mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> notre avenir, mais il se <strong>de</strong>ssine trop vaguement pour me faire un appui sen‐<br />

sible, je ne me repose quʹen Dieu seul; où trouver quelque fond soli<strong>de</strong> hors <strong>de</strong> là? La débi‐<br />

lité <strong>de</strong> cette multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> pauvres âmes qui ont traversé ces temps <strong>de</strong>rniers la Communau‐<br />

té mʹa donné une sorte dʹennui et <strong>de</strong> doute<br />

général qui me lasse et me brise; mais jʹaccepte<br />

cette amertume et la supporterai, je lʹespère, le<br />

Seigneur aidant; elle passera dʹailleurs <strong>avec</strong><br />

quelque peu <strong>de</strong> temps. Je retournerai vous voir<br />

et jʹai aussi lʹintention <strong>de</strong> réunir le Conseil à<br />

Grenelle. Ayons bonne espérance, je crois <strong>avec</strong><br />

vous que toute épreuve prépare quelque effusion<br />

nouvelle <strong>de</strong>s grâces et <strong>de</strong>s bénédictions <strong>de</strong> Dieu.<br />

Adieu, cher ami, mille affections à tous, je<br />

vous embrasse en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

800‐1 à Sa Sainteté Pie IX<br />

Deman<strong>de</strong> dʹindulgences pour lʹInstitut, transmise par lʹArchevêché <strong>de</strong> Paris.<br />

14 novembre 1861<br />

Très Saint Père,<br />

La pieuse association <strong>de</strong> prêtres et <strong>de</strong> laïques, érigée <strong>de</strong>puis douze ans environ et<br />

communément dite <strong>de</strong>s Frères <strong>de</strong> Saint‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul, prosternée humblement aux<br />

pieds <strong>de</strong> votre Sainteté, expose :<br />

Quʹelle est toute vouée à lʹinstruction religieuse et morale <strong>de</strong>s ouvriers, pauvres et<br />

orphelins, et que, Dieu aidant, elle est prête à toutes les bonnes œuvres; car, en ces tristes<br />

temps, elle est toute dévouée au Saint‐Siège Apostolique et a donné tous ses soins et ses ef‐<br />

forts pour témoigner <strong>de</strong> sa fidélité et <strong>de</strong> son amour envers lui, en recevant, à Paris, comme<br />

<strong>de</strong>s frères dans le Christ, les soldats <strong>de</strong> lʹarmée pontificale délivrés <strong>de</strong> la captivité, nʹépar‐<br />

gnant rien pour soulager les peines du Souverain Pontife son Père bien‐aimé.<br />

Cʹest pourquoi elle prie et <strong>de</strong>man<strong>de</strong> humblement à Votre Sainteté <strong>de</strong> lui concé<strong>de</strong>r,<br />

en toute charité, <strong>de</strong>s faveurs spirituelles qui lui seront ai<strong>de</strong> et consolation:<br />

1°‐ Une indulgence plénière, aux conditions habituelles, le jour où les frères seront ad‐<br />

mis dans la Congrégation;<br />

2°‐ Une indulgence dʹune année pour les fidèles le jour où ils seront reçus comme col‐<br />

laborateurs à ses œuvres;<br />

880


3°‐ Une indulgence plénière in articulo mortis pour les frères et les fidèles qui favorisent<br />

les dites œuvres;<br />

4°‐ Une indulgence plénière pour les uns et les autres aux fêtes <strong>de</strong> la Congrégation, à<br />

savoir lʹImmaculée Conception <strong>de</strong> la B.V. Marie, <strong>de</strong> Saint Joseph, son époux, <strong>de</strong> Saint Vin‐<br />

cent <strong>de</strong> Paul, et à la clôture <strong>de</strong> la retraite spirituelle;<br />

5°‐ Une indulgence <strong>de</strong> cent jours pour les Conseillers et les Supérieurs <strong>de</strong> la Congréga‐<br />

tion les jours où ils se réuniront en Conseil, à condition <strong>de</strong> réciter une prière.<br />

6°‐ Une indulgence <strong>de</strong> quarante jours pour chaque frère ou chaque fidèle, chaque fois<br />

quʹils favoriseront les bonnes œuvres et la Congrégation par <strong>de</strong>s offran<strong>de</strong>s, par la parole et<br />

<strong>de</strong>s exhortations, toujours en récitant une prière.<br />

Que ces indulgences, sʹil plaît à Votre Sainteté, soient applicables aux fidèles dé‐<br />

funts.<br />

Le <strong>Prevost</strong>, Supérieur <strong>de</strong> lʹInstitut<br />

Accordé en observant ce qui doit être observé. 326<br />

801 à M. Planchat<br />

Encouragements à gui<strong>de</strong>r et à soutenir les frères. Ne pas excé<strong>de</strong>r les bienfaiteurs par trop <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s. La circu‐<br />

laire Persigny contre la SSVP.<br />

Vaugirard, 15 novembre 1861<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> vos lettres pleines <strong>de</strong> détails intéressants pour moi, puisquʹils<br />

concernent nos frères, leurs œuvres, leur état, leurs dispositions; continuez à leur servir<br />

dʹappui, <strong>de</strong> conseil, <strong>de</strong> consolation surtout, car, au jour le jour, les épreuves leur sont mé‐<br />

nagées comme à tous; je me plais à penser que cʹest par la<br />

miséricor<strong>de</strong> du Seigneur que vous êtes placé près dʹeux pour les leur<br />

rendre plus supportables et leur apprendre à sʹen faire un trésor <strong>de</strong><br />

mérites.<br />

Jʹai eu occasion <strong>de</strong> voir S. Em. hier et lui ai <strong>de</strong>mandé <strong>de</strong><br />

trouver bon que votre absence se prolonge sans terme précis; Mgr y a<br />

donné son assentiment; les dispositions restent toujours les mêmes à<br />

Grenelle; attendons, le temps ou plutôt la lumière <strong>de</strong> Dieu nous<br />

éclairera.Vous savez les épreuves <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> St ‐Vincent <strong>de</strong><br />

Paul327 ; elle fait <strong>de</strong> son mieux pour en amoindrir lʹeffet, mais le<br />

Conseil Général et les Conseils provinciaux sont définitivement<br />

dissous, le coup est ru<strong>de</strong>, elle ne périra pas néanmoins, ses membres<br />

gar<strong>de</strong>nt confiance. <strong>de</strong> Persigny<br />

326 Cette supplique reçut l’agrément <strong>de</strong> Pie IX, qui ajouta <strong>de</strong> sa main, à quelles conditions (soulignées) certaines indulgences seraient<br />

concédées. Il semble que ce premier document pontifical accordé à l’Institut ait été sollicité à la suite <strong>de</strong> la défaite <strong>de</strong> Castelfidardo,<br />

le 18 septembre 1860. Un certain nombre <strong>de</strong> volontaires pontificaux, <strong>de</strong>s soldats irlandais, retournant dans leur pays, avaient<br />

été accueillis dans nos maisons (cf. VLP. t.II. p. 197-198).<br />

327 Le 16 octobre 1861, le Ministre <strong>de</strong> l’Intérieur, M. <strong>de</strong> Persigny, avait envoyé aux Préfets une circulaire qui les invitait à faire rentrer<br />

dans les conditions <strong>de</strong> la loi les associations <strong>de</strong> bienfaisance non encore régulièrement autorisées. L’autorisation légale pouvait<br />

être accordée sans délai; mais la circulaire ordonnait la dissolution <strong>de</strong> tout Conseil supérieur, central ou provincial.<br />

881


Votre petite lettre à M. Brice lui a été remise par M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] et jʹavais<br />

autorisé lʹachat dʹune partie <strong>de</strong>s livres <strong>de</strong>mandés par vous, je ne sais sʹils vous ont été en‐<br />

voyés, M. Brice étant à ce moment repris dʹune indisposition qui lʹa retenu quelques jours<br />

à la chambre; il va mieux présentement; <strong>de</strong> divers côtés, quelques plaintes me sont venues<br />

sur les <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s multipliées et excessives que vous faisiez <strong>de</strong> livres, etc.; une dame, bien<br />

bonne pourtant, mʹa fait dire entre autres quʹelle ne pouvait satisfaire à toutes ces exigen‐<br />

ces; mettez‐y donc <strong>de</strong> la mesure, cher ami, et dans les <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s et dans les distributions.<br />

Assurez tous nos frères <strong>de</strong> mes tendres affections, dites en particulier à notre bon<br />

abbé Halluin que je désire bien que vos correspondances <strong>avec</strong> moi ne lʹempêchent pas <strong>de</strong><br />

mʹécrire aussi souvent quʹil le pourra, ses communications <strong>avec</strong> moi ayant une utilité bien<br />

gran<strong>de</strong> pour maintenir et accroître lʹunion entre nous.<br />

Invitez notre petit f. Auguste [Leduc] à mʹécrire, nous lui sommes tendrement atta‐<br />

chés, jʹespère quʹil gar<strong>de</strong>ra sa tranquillité.<br />

Adieu, mon bien bon ami, souvenez‐vous bien fidèlement <strong>de</strong> nous au S t Sacrifice,<br />

nous ne vous oublions pas ici <strong>de</strong> notre côté.<br />

A vous dans les Sacrés Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

802 à M. Caille<br />

User <strong>de</strong> charité <strong>avec</strong> un frère. Mesure <strong>de</strong> police contre les Confrères. Surveillance exercée vis‐à‐vis <strong>de</strong> la Congré‐<br />

gation.<br />

Vaugirard, 16 novembre 1861<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai tardé quelques jours à répondre à votre <strong>de</strong>rnière lettre pensant que notre f. Al‐<br />

phonse [Vasseur] allait mʹécrire, ainsi que vous me lʹavez dit; je nʹai rien reçu qui vînt <strong>de</strong><br />

lui, jʹai donc lieu <strong>de</strong> penser que le calme et la réflexion lʹauront, comme il lui arrive ordi‐<br />

nairement, remis en meilleures dispositions. Je suis persuadé que vous faites tout <strong>avec</strong> lui,<br />

comme <strong>avec</strong> tous, dans un esprit <strong>de</strong> conciliation et <strong>de</strong> charité; ayons confiance, sa foi qui<br />

est sincère et les appuis spirituels qui lui sont abondamment accordés le soutiendront et,<br />

mieux encore, lʹétabliront enfin dans une véritable abnégation.<br />

M. Planchat, dont je reçois ce matin quelques lignes, me dit que, en ensemble, tout<br />

va et promet <strong>de</strong> bien marcher.<br />

Vous savez les tribulations <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> St ‐Vincent <strong>de</strong> Paul; on gémit en voyant<br />

une institution, si inoffensive et noble dans ses actes, méconnue et tristement entravée; on<br />

ne sait quʹattendre <strong>de</strong> lʹavenir pour tout ce qui tient à la foi et à la charité. Nous avons, <strong>de</strong><br />

notre côté, été lʹobjet <strong>de</strong> surveillances et inquisitions328 jusquʹici inusitées pour nous; lʹor‐<br />

phelinat <strong>de</strong> Vaugirard est maintenant soumis aux inspections <strong>de</strong> lʹUniversité, etc. Nous<br />

pensons toutefois que, quant à présent, il nʹy aura pas grand inconvénient à ces disposi‐<br />

tions; mais la police sʹest visiblement occupée et inquiétée à notre sujet; nous nʹen prenons<br />

point <strong>de</strong> souci, nʹayant jamais rien fait qui ne pût être mis au jour.<br />

328 Les accusations lancées à l’encontre <strong>de</strong> l’Orphelinat <strong>de</strong> Vaugirard et <strong>de</strong> son Supérieur étaient d’ordre politique, puisque MLP.<br />

était soupçonné <strong>de</strong> liens étroits <strong>avec</strong> le parti légitimiste. Fort heureusement, l’inspecteur général qui visitera l’Orphelinat remettra<br />

les choses au point : « Les renseignements recueillis sur l’abbé Le <strong>Prevost</strong> lui sont tous favorables. On loue sa charité, son zèle<br />

pour le bien public et le complet désintéressement dont il a toujours fait preuve ».<br />

882


En tout cela néanmoins et en dʹautres faits, on sent que lʹEglise est gravement en<br />

épreuve, tâchons <strong>de</strong> nous conformer aux vues <strong>de</strong> Dieu et <strong>de</strong> tourner à bien tout ce qui<br />

nous peut arriver <strong>de</strong> contristant et <strong>de</strong> pénible.<br />

Adieu, bien cher ami, assurez tous nos frères <strong>de</strong> ma tendre affection, et croyez en<br />

particulier à tout mon cordial dévouement en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Jʹapprends <strong>avec</strong> plaisir que les règlements <strong>de</strong>s ff. ont été modifiés par vous; le f.<br />

Alphonse [Vasseur], au moment <strong>de</strong> la retraite, mʹavait dit quʹil avait trop <strong>de</strong> temps <strong>de</strong> li‐<br />

bre, je crois que lʹoccupation ne lui eût pas manqué en réalité, sʹil lʹavait cherchée sérieu‐<br />

sement, mais ses travaux étaient trop laissés à son libre arbitre; plus <strong>de</strong> précision est une<br />

amélioration pour lui comme pour les autres.<br />

802 bis à M. Marcaire<br />

Demeurer dans la voie du renoncement et <strong>de</strong> lʹabandon à la volonté <strong>de</strong> Dieu.<br />

Vaugirard, 16 novembre 1861<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Je suis content <strong>de</strong> votre petite lettre et <strong>de</strong>s détails consolants, en ensemble, que<br />

mʹenvoie notre cher M. Planchat sur notre maison dʹAmiens; je vois <strong>avec</strong> joie que le Sei‐<br />

gneur ne cesse point <strong>de</strong> bénir votre petite famille, et quʹen particulier il se plaît à reposer<br />

dans vos cœurs, les attirant <strong>de</strong> plus en plus à Lui et les remplissant <strong>de</strong> son esprit.<br />

Cʹest bien, en effet, <strong>de</strong> Jésus lui‐même que vient lʹintelligence et lʹamour <strong>de</strong> la croix,<br />

le désir du renoncement, lʹabandon absolu à son adorable volonté. Demeurez fermement<br />

dans cette voie, cher enfant, et tenez pour certain que vous êtes là sur le véritable sol chré‐<br />

tien et dans le chemin qui mène à la perfection. Mais les défaillances reviendront encore,<br />

les éblouissements et les obscurités se succé<strong>de</strong>ront; ne vous troublez point, laissez passer<br />

les temps difficiles, le calme revient immanquablement après.<br />

Je trouve bien, cher enfant, que vous continuiez vos communions fréquentes329 ,<br />

puisquʹelles vous consolent et vous fortifient; ayez soin <strong>de</strong> les bien préparer, et les fruits en<br />

seront <strong>de</strong> plus en plus abondants.<br />

Adieu, bien cher ami, soyez bien bon pour tous et Dieu vous le rendra.<br />

Votre ami et Père bien affectionné en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

803 à M. Vasseur<br />

Le secret <strong>de</strong> la paix: ʺapprendre à souffrir volontiersʺ.<br />

Vaugirard, 19 novembre 1861<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> joie, par votre lettre, que votre indisposition a disparu et que votre<br />

santé se remet entièrement; vous allez, comme par le passé, bien employer vos forces pour<br />

la gloire <strong>de</strong> Dieu et pour lʹutilité <strong>de</strong> votre œuvre; marchez toujours ainsi, cher enfant. Je ne<br />

329 Il s’agit <strong>de</strong> la communion quotidienne, que le frère Marcaire avait <strong>de</strong>mandé l’autorisation <strong>de</strong> pouvoir faire.<br />

883


mʹétonne point que vous rencontriez quelques contrariétés et dégoûts; où nʹy en a‐t‐il pas?<br />

Nous nʹen manquons pas ici, quand vous y étiez, vous en aviez votre part; dans les patro‐<br />

nages, nos frères ne sont pas sans peines et sans gémissements, partout la croix; le plus<br />

sage est <strong>de</strong> porter celle que le Seigneur nous donne, <strong>de</strong> peur quʹun sort plus dur encore ne<br />

nous advienne en voulant changer. Lʹunique secret pour avoir la paix, cʹest dʹapprendre à<br />

souffrir volontiers, hors <strong>de</strong> cela, il nʹy a point <strong>de</strong> repos. Souffrir dans nos emplois, dans le<br />

support du prochain, souffrir en nous‐même et par nos propres imperfections, voilà le lot<br />

commun; plus on sʹirrite, plus on murmure, plus on rend la croix pénible et lour<strong>de</strong> à por‐<br />

ter; regar<strong>de</strong>z votre crucifix quand vous êtes en épreuve, et dites: si je nʹarrive à porter ma<br />

croix <strong>avec</strong> J.C., je ne serai jamais un chrétien sérieux. Et alors, que seriez‐vous? Un chrétien<br />

faible, chancelant, moitié à Dieu, moitié au mon<strong>de</strong>, sans appui ni joie vraie ni <strong>de</strong> lʹun ni <strong>de</strong><br />

lʹautre, ou bien tout à fait au mon<strong>de</strong> <strong>avec</strong> les déceptions, les remords et la crainte <strong>de</strong> lʹéter‐<br />

nité; être tout à Dieu est le meilleur lot; Il vous lʹa donné dans sa miséricor<strong>de</strong>, gar<strong>de</strong>z‐le<br />

précieusement, appréciez votre bonheur.<br />

Rappelez, je vous prie, à notre f. Caille que jeudi 21, fête <strong>de</strong> la Présentation, on fait<br />

ordinairement le renouvellement <strong>de</strong>s vœux.<br />

Votre frère va mieux que vous ne semblez le supposer, le mé<strong>de</strong>cin ne montre au‐<br />

cune inquiétu<strong>de</strong>; il dit que lʹos avait subi une petite atteinte qui <strong>de</strong>vait nécessairement dis‐<br />

paraître <strong>avec</strong> quelque lenteur, mais que le rétablissement se fait sensiblement.<br />

Adieu, bien cher ami, soutenez‐vous toujours par la piété, par la Sainte Communion<br />

surtout, cʹest la vie surnaturelle, elle <strong>de</strong>meurera en vous et vous préservera <strong>de</strong> toute at‐<br />

teinte sérieuse.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

804 à M. Planchat<br />

LʹŒuvre <strong>de</strong> M lle Payen. Conseils <strong>de</strong> discrétion vis‐à‐vis du Supérieur local.<br />

Vaugirard, 19 novembre 1861<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

La bonne Dlle Payen recomman<strong>de</strong> son œuvre à vos prières; samedi <strong>de</strong>rnier au soir,<br />

la nouvelle Supérieure <strong>de</strong>s Sœurs, arrivée <strong>de</strong> la veille, lʹa avertie que, dʹaprès les ordres <strong>de</strong><br />

M. le Curé, cʹétait elle désormais qui <strong>de</strong>vait conduire le patronage et que tout ensemble,<br />

dans ce même jour, lʹœuvre, maintenue jusque‐là à lʹancien local, <strong>de</strong>vait être transférée<br />

dans le nouveau; dans cette nouvelle combinaison, on permettait à Mlle Payen dʹai<strong>de</strong>r, au<br />

moins pour un temps, la Supérieure, et aussi <strong>de</strong> faire dans la semaine les courses pour le<br />

placement <strong>de</strong>s apprenties. Dans la journée du dimanche pourtant, on a paru hésiter et on a<br />

parlé dʹun sursis, mais je ne sais encore ce que comporte ce délai. Mlle Payen a vu MM. Le<br />

Rebours et <strong>de</strong> Girardin; peut‐être arriveront‐ils à détourner le coup qui menace cette œu‐<br />

vre; Dieu veille, nous avons fait <strong>de</strong> notre côté ce qui nous a paru <strong>de</strong> mieux et <strong>de</strong> plus<br />

conforme à sa volonté.<br />

Je vous prie <strong>de</strong> rappeler à M. Halluin que jeudi, fête <strong>de</strong> la Présentation, il serait bien<br />

que lʹon fît la petite solennité <strong>de</strong> la rénovation <strong>de</strong>s vœux.<br />

884


Je vous engage à être bien discret dans vos observations, soit sur la nourriture, soit<br />

sur les autres points; si M. Halluin voit en vous un censeur et un observateur incommo<strong>de</strong><br />

pouvant communiquer aux frères ses impressions et accueillir leurs plaintes, il entrera en<br />

défiance et le malaise se mettra entre vous.<br />

Adieu, bien cher ami, croyez à tous mes sentiments dévoués et affectueux en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Mille affections à nos frères; jʹattendrai bientôt une lettre <strong>de</strong> M. Halluin.<br />

805 à M. Planchat<br />

Invitation à la bénédiction <strong>de</strong> la chapelle <strong>de</strong> Grenelle.<br />

Vaugirard, vendredi 6 décembre [1861]<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

La bénédiction <strong>de</strong> la chapelle <strong>de</strong> Grenelle sera faite dimanche 8 <strong>de</strong> ce mois par M.<br />

lʹabbé Le Rebours, à 8h. du matin; il y aura divers exercices dans la journée, salut lʹaprès‐<br />

midi par M. lʹabbé Lagar<strong>de</strong>, <strong>de</strong> lʹArchevêché; nous avons pensé quʹil serait bien que vous<br />

assistiez à cette solennité qui attirera sans doute la plupart <strong>de</strong> nos familles ouvrières.<br />

Voyez <strong>avec</strong> M. Halluin si une courte absence ne portera pas trop préjudice à vos obliga‐<br />

tions à Arras, particulièrement à raison <strong>de</strong> la fête <strong>de</strong> lʹImmaculée Conception. Si vous ju‐<br />

giez, ainsi que M. Halluin auquel jʹabandonne la décision, que la chose nʹest pas imprati‐<br />

cable, vous pourriez partir le soir du samedi et arriver le dimanche <strong>de</strong> bon matin à Gre‐<br />

nelle. Si vous faisiez ce voyage nocturne, prenez bien vos précautions contre le froid.<br />

Adieu, bien cher ami, assurez tous nos frères <strong>de</strong> ma tendre affection et croyez vous‐<br />

même à mon cordial attachement en J. et M.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

885


806 à M. Caille<br />

Le jeune Trousseau a trouvé une place dʹemployé <strong>de</strong> commerce.<br />

Vaugirard, 4 janvier 1862<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Victor [Trousseau] mʹécrit quʹil est à Orléans, placé dans une maison <strong>de</strong> com‐<br />

merce tenue par un <strong>de</strong> ses amis. Il désire que vous ayez la bonté <strong>de</strong> lui envoyer ses malles,<br />

non pas à son adresse, mais simplement à M. <strong>de</strong>s Francs, propriétaire, rue <strong>de</strong> Recouvrance,<br />

Orléans. Il insiste beaucoup pour quʹon efface <strong>de</strong>s malles et son nom et toute trace indi‐<br />

quant le lieu où elles ont été précé<strong>de</strong>mment, nʹayant pas lʹintention <strong>de</strong> dire où il séjournait<br />

en <strong>de</strong>rnier lieu.<br />

Je ne puis vous écrire présentement que ces <strong>de</strong>ux mots aujourdʹhui; assurez tous<br />

nos frères que jʹai été bien touché <strong>de</strong> leurs lettres <strong>de</strong> fête et nouvel an, je leur écrirai bien<br />

prochainement.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

807 à M. Maignen<br />

MLP. sʹinforme au sujet dʹune jeune homme, envoyé à Vaugirard par M. Maignen.<br />

Vaugirard, 5 janvier 1862<br />

Cher enfant en N.S.,<br />

Notre jeune Moutier paraît <strong>de</strong>voir, <strong>de</strong>main, arriver parmi nous. Je ne connais pas<br />

beaucoup ses aptitu<strong>de</strong>s. Quels emplois pensez‐vous quʹon dût lui donner? Quelles étu<strong>de</strong>s<br />

lui seraient le plus nécessaires? Où en est‐il en fait <strong>de</strong> science? Je me propose <strong>de</strong> lui donner<br />

la sacristie <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> chapelle, sous la direction <strong>de</strong> Philibert qui en est chargé, mais qui,<br />

nʹayant pas le temps <strong>de</strong> sʹen occuper, fait tout faire par<br />

dʹautres mains que les siennes; il mettrait Moutier au fait <strong>de</strong><br />

ce service jusquʹà ce quʹil pût en prendre seul la conduite. Si<br />

cette occupation lui convient, elle ne suffira pas pour<br />

remplir sa journée, que pensez‐vous quʹon dût lui donner en<br />

outre?<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Le frère Ernest Philibert<br />

808 à M. Pavie<br />

A lʹoccasion du mariage dʹun <strong>de</strong> ses enfants. Suite <strong>de</strong> la persécution contre la SSVP.<br />

Vaugirard, 5 janvier 1862<br />

Mon bien bon ami,<br />

Je vous réponds sans retard, au nom <strong>de</strong> M. Myionnet et au mien, à votre lettre du 3 pour<br />

vous dire toute la part que nous prenons à lʹimportant événement qui réjouira prochaine‐<br />

886


ment votre maison. Il nous est doux dʹavoir, à travers les années, gardé toute vive et tou‐<br />

jours la même la vieille affection qui nous unit à vous et qui nous associe à tout ce qui peut<br />

vous advenir en un sens ou en un autre, triste ou joyeux, selon que notre vie se compose<br />

ici‐bas.<br />

Il me semble, mon bon ami, et nous en bénissons <strong>avec</strong> vous le Seigneur, que la part<br />

du contentement lʹa emporté sur celle <strong>de</strong> la peine dans votre chère famille; je nʹoublie pas<br />

vos jours dʹépreuves, mais les grâces et bénédictions ont été surabondantes et vous pouvez<br />

bien constater que la main du Seigneur a été généreuse à votre égard. Vous continuerez<br />

jusquʹà la fin à lui être fidèle, votre vie chrétienne <strong>de</strong> vos jeunes années restera telle dans<br />

lʹâge plus avancé et gar<strong>de</strong>ra la tradition <strong>de</strong>s mœurs chrétiennes <strong>de</strong> votre famille, laquelle<br />

sera continuée par vos enfants. Il nʹy a rien <strong>de</strong> mieux que cela en ce mon<strong>de</strong>, vous aurez<br />

ainsi bien mérité <strong>de</strong>vant les hommes et <strong>de</strong>vant Dieu. En dépeignant ainsi votre état pré‐<br />

sent, jʹexprime aussi nos vœux pour votre avenir et jʹai la confiance quʹils seront exaucés.<br />

Nous ne nous bornerons pas, du reste, à ces sentiments <strong>de</strong> bien cordiale sympathie, nous<br />

prierons constamment pour vous et pour les vôtres, pour le cher ménage futur particuliè‐<br />

rement. Je ne manquerai pas, pour ce qui me regar<strong>de</strong>, <strong>de</strong> porter ces souvenirs au Très Saint<br />

Sacrifice, heureux dʹavoir ce suprême moyen <strong>de</strong> rendre efficaces mes affections. Jʹai pris<br />

connaissance, <strong>avec</strong> M. Myionnet, <strong>de</strong> vos délibérations et décisions concernant vos Confé‐<br />

rences. Je pense <strong>avec</strong> vous quʹil faut, en ce triste naufrage, rassembler tous les débris <strong>de</strong><br />

lʹœuvre quʹon pourra sauver et en tirer tout le parti possible, en attendant <strong>de</strong>s circonstan‐<br />

ces meilleures. Nous nʹavons pas besoin <strong>de</strong> dire que nous regardons le brisement <strong>de</strong> la So‐<br />

ciété <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul comme un <strong>de</strong>s événements les plus tristes et les plus menaçants<br />

<strong>de</strong> notre temps. Le sentiment, je ne dis pas <strong>de</strong>s catholiques, mais <strong>de</strong>s chrétiens est unanime<br />

sur ce point. Je crois que les anciens chefs <strong>de</strong> la Société auraient désiré que généralement<br />

les Conférences continuassent à se réunir, en protestant <strong>de</strong> leur attachement au Conseil<br />

Général, mais on manquait <strong>de</strong> direction pour agir uniformément. Chacun a fait selon sa<br />

conscience et comme il lui a paru meilleur, espérant que tout tournera à bien définitive‐<br />

ment et que le Maître souverain <strong>de</strong>s hommes et <strong>de</strong>s choses ramènera à une bonne fin une<br />

perturbation quʹon pourrait dire fatale.<br />

Tout va autour <strong>de</strong> nous selon lʹusage. Je ne vois rien dʹintéressant à vous signaler<br />

dans ce qui nous entoure.<br />

Mille respects à votre chère épouse pour M. Myionnet et pour moi, dites aussi à vos<br />

chers enfants quʹils ont <strong>de</strong> sincères amis à Vaugirard.<br />

Votre vieil ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

809 à M. Decaux<br />

M. <strong>de</strong> Lauriston doit se reposer. Difficultés <strong>de</strong> la situation <strong>de</strong>s frères à Grenelle; entente <strong>avec</strong> M. Decaux à ce su‐<br />

jet.<br />

Vaugirard, 6 janvier 1862<br />

Mon bien bon ami,<br />

Notre f. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] éprouve <strong>de</strong>puis longtemps une gran<strong>de</strong> fatigue qui<br />

récemment encore lui a occasionné quelques acci<strong>de</strong>nts assez graves; je crois quʹil est essen‐<br />

tiel <strong>de</strong> lui donner un peu <strong>de</strong> repos en le déchargeant, au moins pour quelques mois, <strong>de</strong> la<br />

887


tâche un peu lour<strong>de</strong> pour lui quʹil doit supporter à Grenelle. Sa bonne mère, âgée <strong>de</strong> 71<br />

ans, femme vénérable à tous égards, mʹa écrit une lettre instante pour me dire ses vives in‐<br />

quiétu<strong>de</strong>s sur les acci<strong>de</strong>nts réitérés <strong>de</strong> la santé <strong>de</strong> son fils et me conjurer <strong>de</strong> prendre quel‐<br />

ques mesures pour le soulager. Je lui ai promis dʹy aviser et je crois, en effet, quʹil est à<br />

propos <strong>de</strong> donner momentanément un peu plus <strong>de</strong> calme à ce bon Georges si dévoué, si<br />

oublieux <strong>de</strong> lui‐même. Mon désir serait <strong>de</strong> le changer <strong>de</strong> position temporairement et <strong>de</strong> lui<br />

donner quelque emploi doux, peu préoccupant, qui pût lui faire respirer un autre air et lui<br />

rendre un peu <strong>de</strong> calme. Je ne me dissimule pas que, durant ce temps, il y aura quelque<br />

souffrance pour N.D. <strong>de</strong> Grâce et que la bonne influence <strong>de</strong> son esprit affectueux et conci‐<br />

liant y fera défaut; mais je tâcherai <strong>de</strong> couvrir son absence autant quʹil se pourra, en mʹar‐<br />

rangeant pour que M. Myionnet ou M. Lantiez passent chaque jour un temps assez long à<br />

Grenelle, les soirs et les dimanches surtout où nos frères ont particulièrement besoin<br />

dʹai<strong>de</strong>.<br />

Cette disposition ne sera pas, à certains égards, sans avantages; la multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

leurs travaux a entraîné nos ff. <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Grâce à quelques négligences sous le rapport <strong>de</strong><br />

lʹordre, leur état financier est assez lourd, leurs relations <strong>avec</strong> quelques membres <strong>de</strong> la<br />

Conférence, M M. Bénard au moins, ne sont pas ce que jʹaurais souhaité quʹelles fussent;<br />

enfin, leur position à lʹendroit <strong>de</strong> M. le Curé est en ce moment un peu tendue. Je crois que<br />

la présence plus habituelle, durant quelque temps, dʹun homme plus mûr et plus calme<br />

quʹils ne le sont eux‐mêmes pourra leur être très utile et les ai<strong>de</strong>r à traverser un moment<br />

difficile.<br />

Je désire, en cela comme en tout, ne rien faire que <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> vous; je vous se‐<br />

rais donc bien obligé, mon bien cher ami, si vous vouliez bien donner votre agrément à cet<br />

arrangement temporaire; je le crois, <strong>de</strong>puis longtemps déjà, impérieusement <strong>de</strong>mandé par<br />

lʹétat <strong>de</strong> santé <strong>de</strong> notre f. Georges, et les vives instances <strong>de</strong> sa bonne mère semblent aussi<br />

réclamer quelque acte <strong>de</strong> déférence et <strong>de</strong> bon vouloir <strong>de</strong> notre part. Enfin, je crois quʹ<strong>avec</strong><br />

les précautions que je me propose <strong>de</strong> prendre, son absence momentanée sera compensée et<br />

laissera place même à quelques bons résultats que présentement il ne pourrait guère obte‐<br />

nir lui‐même.<br />

Je profite <strong>de</strong> lʹoccasion, mon bon ami, pour vous offrir tous mes vœux <strong>de</strong> nouvel an;<br />

les épreuves qui nous ont frappés <strong>de</strong>rnièrement ne font que me rendre plus chers les liens<br />

qui mʹattachent à vous et à tous nos amis <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul, je redoublerai donc dʹins‐<br />

tances auprès <strong>de</strong> Dieu pour quʹIl fasse tourner à sa gloire, comme nous le souhaitons tous,<br />

et nos travaux et nos épreuves, et je joindrai mes humbles efforts aux vôtres pour que nos<br />

œuvres souffrent le moins possible <strong>de</strong>s difficultés quʹelles ont à surmonter.<br />

Je suis comme toujours en J. et M.<br />

Votre dévoué et affectionné frère et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Respects et affections à M. Baudon, si vous le voyez avant que je ne le rencontre<br />

moi‐même.<br />

810 à M. Halluin<br />

Souhaits <strong>de</strong> nouvel an. Avis défavorable <strong>de</strong> MLP. sur lʹadmission dʹun jeune instituteur; il faut tendre à avoir<br />

un personnel homogène. M. <strong>de</strong> Lauriston va à Metz pour se reposer.<br />

888


Vaugirard, 8 janvier 1862<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

La nouvelle année est déjà commencée <strong>de</strong>puis une semaine et je nʹai pu encore vous<br />

dire, ainsi quʹà nos frères qui vous entourent, quelques mots <strong>de</strong> bonne affection, comme on<br />

se sent inspiré <strong>de</strong> les exprimer à ce moment à lʹégard <strong>de</strong> tous ceux quʹon aime. Je me ré‐<br />

jouis toutefois bien sincèrement <strong>de</strong> me retrouver en union <strong>de</strong> cœur, <strong>de</strong> prières et dʹœuvres<br />

<strong>avec</strong> vous pour commencer cette nouvelle année, et je remercie Dieu qui, sans regar<strong>de</strong>r<br />

mon indignité, mʹa associé à tant dʹhommes pieux et dévoués qui ne cherchent que sa<br />

gloire et le bien <strong>de</strong>s âmes. Jʹespère quʹ<strong>avec</strong> sa grâce et ses bénédictions, que jʹimplore cha‐<br />

que jour pour notre petite famille, nous irons progressant dans lʹœuvre quʹIl attend <strong>de</strong><br />

nous; œuvre multiple et vraiment grave, puisquʹelle comprend tout ensemble notre propre<br />

sanctification, la fondation <strong>de</strong> notre Congrégation et le développement <strong>de</strong>s institutions par<br />

lesquelles nous tâchons dʹédifier nos frères.<br />

10 janvier. Jʹétais à ce point <strong>de</strong> ma lettre quand on mʹapporte celle que vous mʹécri‐<br />

vez <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> M. Planchat, relativement à lʹinstituteur quʹon vous propose <strong>de</strong> pren‐<br />

dre chez vous et dont vous espéreriez tirer quelques services.<br />

Les circonstances qui se rattachent à cette <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, les particularités <strong>de</strong> la situation<br />

<strong>de</strong> lʹinstituteur en question mʹont paru réclamer ici une attention toute spéciale; jʹai donc<br />

examiné la chose <strong>de</strong>vant Dieu et jʹai aussi <strong>de</strong>mandé lʹavis du petit Conseil qui mʹentoure. Il<br />

mʹa paru, après cette considération, quʹil y aurait pour votre maison bien plus dʹinconvé‐<br />

nients que dʹavantages à recevoir lʹinstituteur en question chez vous. La faiblesse <strong>de</strong> sa<br />

tête, les préoccupations dont il est rempli, les inci<strong>de</strong>nts et scènes peut‐être que son essai <strong>de</strong><br />

rapprochement <strong>avec</strong> sa femme peut amener et, dʹune autre part, le bruit et lʹespèce <strong>de</strong><br />

scandale que ses débats <strong>avec</strong> elle ont déjà causé, tout cela réuni nous paraît faire <strong>de</strong> son in‐<br />

troduction chez vous une chose peu convenable et qui pourrait <strong>de</strong>venir lʹoccasion <strong>de</strong> bien<br />

<strong>de</strong>s difficultés et contrariétés pour vous.<br />

Vous avez déjà, dʹailleurs, bien <strong>de</strong>s éléments divers dans votre intérieur, je crois<br />

quʹil faut tendre <strong>de</strong> plus en plus à lʹunité, au lieu <strong>de</strong> rassembler <strong>de</strong>s matériaux dont on ne<br />

pourra jamais faire un édifice. Ni la maison, ni la communauté ne se poseront jamais en<br />

bonne assiette dans ces conditions. Jʹaime mieux aviser sérieusement à vous envoyer un<br />

ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> plus, comme vous me lʹavez <strong>de</strong>mandé, que <strong>de</strong> voir un étranger se mêler encore à<br />

votre vie et à vos travaux. Nous avons, ces temps <strong>de</strong>rniers, fait quelques recrues qui sem‐<br />

blent être dʹassez bon aloi; leur arrivée nous permettra, je lʹespère, <strong>de</strong> détacher quelquʹun<br />

<strong>de</strong> nos jeunes gens pour le diriger vers vous. Je ne méconnais pas le service qui serait à<br />

rendre en cette occasion à un ecclésiastique respectable et à son frère qui semble bien di‐<br />

gne dʹintérêt. Mais cette raison, quel que soit son poids, est beaucoup moins à envisager ici<br />

que les convenances <strong>de</strong> votre communauté et <strong>de</strong> votre maison. Je crois donc, cher Mon‐<br />

sieur lʹabbé, que nous ne <strong>de</strong>vons pas admettre la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> qui vous a été faite. Je ferai en<br />

sorte, ainsi que je viens <strong>de</strong> le dire, <strong>de</strong> vous donner un peu dʹai<strong>de</strong> prochainement.<br />

Je joins ici un mot <strong>de</strong> M. Carment. M. Risse retourne à Metz dimanche au soir; il<br />

emmène M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] qui est fatigué et va prendre un peu <strong>de</strong> repos, au<br />

moins provisoirement, en vivant quelque temps près <strong>de</strong> M. Risse, où il sera moins occupé<br />

et moins chargé. Grenelle va se trouver un peu démuni, nous cherchons à combler le vi<strong>de</strong><br />

temporaire quʹy fera lʹabsence du f. Georges, jʹespère que Dieu nous assistera.<br />

889


Adieu, cher Monsieur lʹabbé, dites bien à tous nos frères nos vœux, notre affection<br />

pour eux, et croyez vous‐même à mon tendre et respectueux dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

811 à M. Decaux<br />

Exposé <strong>de</strong>s motifs qui ont obligé à éloigner momentanément M. <strong>de</strong> Lauriston <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Grenelle. Nouvelles<br />

<strong>de</strong>s frères.<br />

Vaugirard, 10 janvier 1862<br />

Mon bien bon ami,<br />

Je regrette <strong>avec</strong> vous le préjudice que peut causer à N.D. <strong>de</strong> Grâce lʹabsence du f.<br />

Georges [<strong>de</strong> Lauriston], mais quʹy avait‐il à faire en présence <strong>de</strong>s fatigues et acci<strong>de</strong>nts <strong>de</strong><br />

santé <strong>de</strong> ce bon excellent frère, en présence <strong>de</strong>s supplications quʹil me faisait presque <strong>avec</strong><br />

larmes et dans un trouble extrême, <strong>de</strong>puis plus dʹune année, <strong>de</strong> lui donner un peu <strong>de</strong> relâ‐<br />

che; que dire à sa vénérable mère qui, invoquant le souvenir du fils quʹelle a perdu lʹan<br />

<strong>de</strong>rnier par une congestion cérébrale, me représentait que les étourdissements survenus à<br />

diverses reprises au f. Georges <strong>de</strong>puis quelques mois étaient un indice bien alarmant et<br />

quʹelle me conjurait dʹy faire attention? Quʹeussiez‐vous fait à ma place, bien cher ami,<br />

eussiez‐vous pris la responsabilité dʹune persistance inflexible et si contraire à lʹesprit qui<br />

régit vous et nous? Il y a quelques mois, ému <strong>de</strong> la souffrance et <strong>de</strong>s défaillances du f.<br />

Georges, je crus <strong>de</strong>voir consulter M. Baudon, son parent, qui le connaît <strong>de</strong>puis le jeune<br />

âge; il fut dʹavis quʹil serait sage <strong>de</strong> lui donner, au moins pour un certain temps, un emploi<br />

qui fît peser sur lui moins <strong>de</strong> responsabilité et lui rendît un peu <strong>de</strong> calme.<br />

Jʹentre dans ces détails, mon bon ami, afin <strong>de</strong> vous prouver que je ne fais point<br />

parmi nos frères, ceux surtout qui sont attachés au patronage, <strong>de</strong> mouvements arbitraires;<br />

je ne cè<strong>de</strong> quʹaux nécessités absolument impérieuses, sachant tous les inconvénients et<br />

mauvais résultats <strong>de</strong>s changements.<br />

Comme je vous lʹai dit, je ferai ce que je pourrai pour faire ai<strong>de</strong>r M. Roussel et cou‐<br />

vrir lʹabsence du f. Georges; M. Lantiez ou M. Myionnet coucheront à Grenelle, y seront le<br />

samedi et toute la journée du dimanche; si je puis rappeler M. Alphonse Vasseur dʹAmiens<br />

pour secon<strong>de</strong>r M. Gallais, je le ferai; nos agents soli<strong>de</strong>s et expérimentés sont peu nom‐<br />

breux; nous avons beaucoup <strong>de</strong> très jeunes gens dont plusieurs sont susceptibles dʹêtre<br />

formés, ils peuvent aller comme seconds ou comme troisièmes dans les œuvres; ceux<br />

quʹon peut mettre en avant sont bien rares.<br />

M. Roussel compte sur vous pour lʹai<strong>de</strong>r à composer un Conseil; M. Georges avait<br />

déjà mis en œuvre tous ses moyens pour trouver <strong>de</strong>s quêteuses, les voies, en ce qui le tou‐<br />

che, restent préparées, son absence durant cet hiver ne se fera donc point sentir <strong>de</strong> ce côté.<br />

Adieu, mon bien bon ami, croyez à ma cordiale volonté <strong>de</strong> tout faire pour travailler<br />

comme toujours <strong>avec</strong> vous, non en esprit propre ni <strong>avec</strong> préoccupation exclusive <strong>de</strong>s<br />

convenances <strong>de</strong> notre petite Communauté, mais <strong>avec</strong> une conviction entière, au contraire,<br />

que plus nos efforts seront concertés, plus notre action sera commune, plus aussi nous fe‐<br />

rons <strong>de</strong> bien et serons bénis <strong>de</strong> Dieu.<br />

Votre tout affectionné ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

890


812 à M. Maignen<br />

A propos du personnel <strong>de</strong> Nazareth.<br />

15 janvier [1862]<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Vos inquiétu<strong>de</strong>s nʹont pas, en ce qui me regar<strong>de</strong>, le moindre fon<strong>de</strong>ment; je ne sais ce<br />

qui a pu faire penser à M. Paillé que je nʹeusse pas souvenir <strong>de</strong>s besoins <strong>de</strong> lʹœuvre <strong>de</strong>s<br />

Jeunes Ouvriers. Si cʹest lʹenvoi que je lui ai fait dʹun jeune postulant [Louis Rémond], il a<br />

tout à fait mal compris mon intention; je nʹai mis ce jeune homme près <strong>de</strong> vous que pour<br />

avoir le temps dʹexaminer ses aptitu<strong>de</strong>s et dispositions avant <strong>de</strong> lui donner place au novi‐<br />

ciat; cʹest une transition <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux, trois ou quatre semaines. Tâchez <strong>de</strong> lʹemployer <strong>de</strong><br />

concert un peu utilement; jʹen pense du bien, je regretterais quʹil fût négligé chez vous.<br />

Quant à M. Boucault, je ne sais pas du tout quelles sont ses vues; il va faire une pe‐<br />

tite retraite; je crois quʹil faut lui faire cordial accueil et lʹattirer doucement à ce qui serait<br />

véritablement sagesse et raison pour lui, mais éviter <strong>de</strong> le presser vivement, parce quʹon le<br />

jetterait ainsi dans un courant contraire; il aime beaucoup sa liberté, on a besoin <strong>de</strong> ne pas<br />

trop lui imposer <strong>de</strong>s vues et <strong>de</strong>s sentiments. Jʹai lieu <strong>de</strong> craindre que la vie aventureuse<br />

quʹil vient <strong>de</strong> mener lʹait mis en goût <strong>de</strong> continuer et quʹil nʹaccepte pas la perspective<br />

dʹune vie plus calme et plus sensée.<br />

Adieu, ami, mille affections en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

813 à M. Caille<br />

Mouvement <strong>de</strong> personnel pour Amiens. Deman<strong>de</strong> <strong>de</strong> rapport statistique annuel.<br />

Vaugirard, 15 janvier 1862<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu vos lettres bonnes et dévouées et soumises comme toujours. Jʹai vu <strong>avec</strong><br />

joie, par la <strong>de</strong>rnière, que notre f. Alphonse [Vasseur] était rentré dans les bons sentiments<br />

qui font le fond <strong>de</strong> son être et dont il ne se départ que dans les moments où son esprit<br />

monté et troublé nuit à la rectitu<strong>de</strong> naturelle <strong>de</strong> son jugement. Je ne perds pas <strong>de</strong> vue les<br />

besoins <strong>de</strong> votre maison et jʹexaminerai attentivement ce que la situation peut <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r,<br />

mais il mʹeût été pénible dʹavoir comme la main forcée et dʹêtre obligé à un changement<br />

qui mʹeût été comme imposé par une disposition dʹesprit imparfaitement soumise.<br />

Je compte envoyer assez prochainement quelquʹun <strong>de</strong> Vaugirard à Amiens; il pour‐<br />

rait, à cette occasion, sʹentretenir <strong>avec</strong> vous et reconnaître ce qui pourrait être <strong>de</strong> mieux<br />

dans lʹintérêt <strong>de</strong> votre petite communauté et <strong>de</strong> ses œuvres.<br />

Vos <strong>de</strong>ux jeunes postulants, Alexandre [Legrand] et Lemaire vont bien jusquʹici,<br />

nous avons bonne espérance; en ensemble, nous allons présentement en assez bonne voie.<br />

Je vous serai obligé <strong>de</strong> faire préparer un petit relevé <strong>de</strong> votre situation, sommaire‐<br />

ment, <strong>avec</strong> un aperçu aussi sommaire <strong>de</strong> vos comptes; lʹan <strong>de</strong>rnier, je vous avais <strong>de</strong>mandé<br />

ce petit renseignement, je ne lʹai point reçu.<br />

Adieu, mon bien cher ami, le travail nous presse fort vivement dans cette saison et<br />

mʹoblige à rendre mes correspondances plus courtes que je ne le voudrais.<br />

891


M. Risse est retourné à Metz, emmenant <strong>avec</strong> lui les ff. Georges <strong>de</strong> Lauriston et Lu‐<br />

zier. Nous gardons la meilleure impression <strong>de</strong> son séjour parmi nous.<br />

Votre tout affectionné ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

814 à M. Decaux<br />

Comment empêcher la Sainte‐Famille <strong>de</strong> St‐Sulpice <strong>de</strong> sʹéteindre.<br />

Vaugirard, 17 janvier 1862<br />

Mon bien bon ami,<br />

MM. Boutron et Paillé me disent que la Ste ‐Famille <strong>de</strong> St ‐Sulpice est en gran<strong>de</strong> souf‐<br />

france et quʹelle décline sensiblement. Ils pensent, <strong>avec</strong> plusieurs autres personnes qui<br />

mʹen ont aussi entretenu, quʹil serait tout à fait urgent <strong>de</strong> la remonter en lui donnant un<br />

Prési<strong>de</strong>nt nouveau qui sʹen occupât et la remît sur pied. Celui qui est désigné pour la diri‐<br />

ger est habituellement absent et nʹy imprime aucun mouvement. Il me semblerait bien à<br />

propos que vous pussiez tourner un peu votre attention, je le sais, déjà bien chargée, <strong>de</strong> ce<br />

côté. Si notre excellent ami, M. Frion, pouvait donner quelques soins à cette œuvre, ne fût‐<br />

ce que pour un temps, il la sauverait <strong>de</strong> sa ruine. La Ste ‐Famille a fait beaucoup <strong>de</strong> bien<br />

dans le quartier St ‐Sulpice; la bibliothèque, la caisse <strong>de</strong>s loyers, le fourneau, etc. sʹy ratta‐<br />

chent; tout cela souffrira et languira plus ou moins si la Ste ‐Famille tombe, et la maison <strong>de</strong>s<br />

Vieillards aussi se désorganisera. Jʹespère que cette pensée frappera notre ami, M. Frion, et<br />

le déci<strong>de</strong>ra, si vous le trouvez bien, à faire un effort pour relever cette œuvre déjà ancienne<br />

et qui semblait avoir encore <strong>de</strong> lʹavenir. Il me paraît aussi que, pour soutenir le moral <strong>de</strong>s<br />

Conférences, il serait bien à souhaiter quʹelles ne vissent pas leurs œuvres décliner et<br />

sʹéteindre. Je livre, mon bien bon ami, ces réflexions à votre charitable attention, bien sûr<br />

que si quelque chose est possible pour le bien, vous le ferez très certainement.<br />

Votre tout affectionné ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

815 à M. Halluin<br />

MLP. projette dʹenvoyer le frère Brice à Arras. Nouvelles <strong>de</strong> Metz. Lʹabbé Braun va faire un essai dans lʹInsti‐<br />

tut.<br />

Vaugirard, 19 janvier 1862<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je nʹai point oublié le désir que vous mʹavez témoigné dʹavoir un frère <strong>de</strong> plus pour<br />

secon<strong>de</strong>r un peu le personnel dont vous disposez et qui est insuffisant pour vos charges.<br />

Jʹai cherché bien attentivement quel sujet vous conviendrait le mieux; il mʹa semblé que le<br />

f. Brice pourrait vous rendre <strong>de</strong>s services essentiels, ayant acquis par quatre années <strong>de</strong> vie<br />

commune une gran<strong>de</strong> pratique <strong>de</strong>s œuvres, une habitu<strong>de</strong> particulière <strong>de</strong>s surveillances et<br />

lʹattachement réel à la Communauté. M. Lantiez, qui le dirige, en est satisfait au point <strong>de</strong><br />

vue <strong>de</strong> la piété; enfin, pour ce qui concerne sa conduite propre et ses rapports, soit à lʹinté‐<br />

rieur, soit à lʹextérieur, il ne nous a jamais donné lieu à aucun soupçon qui pût nous don‐<br />

ner la moindre inquiétu<strong>de</strong>. Il connaît votre maison et vous est affectionné, et plusieurs fois<br />

892


il mʹa témoigné que son attachement pour vous lui rendrait la coopération à votre œuvre<br />

particulièrement agréable. On peut objecter quʹil est sorti <strong>de</strong> cette maison et y trouverait<br />

moins <strong>de</strong> facilité quʹun autre pour y exercer quelque influence; mais il y a 5 ans quʹil a<br />

quitté Arras, il est <strong>de</strong>venu homme <strong>de</strong>puis lors, il a pris plus dʹaplomb et <strong>de</strong> tenue, et dʹail‐<br />

leurs la plupart <strong>de</strong> ceux qui lʹont connu sont éloignés. Voilà mes raisons pour supposer<br />

quʹil ferait le bien près <strong>de</strong> vous; on en est content à Grenelle, mais, cette rési<strong>de</strong>nce étant<br />

tout près <strong>de</strong> nous et sous nos yeux, je pourrais lʹy remplacer par quelque très jeune et nou‐<br />

veau frère quʹon ne pourrait encore envoyer sûrement au loin. Cʹest là toujours notre diffi‐<br />

culté quand il sʹagit <strong>de</strong> donner <strong>de</strong>stination à gran<strong>de</strong> distance à <strong>de</strong>s frères très jeunes, on est<br />

trop peu sûr <strong>de</strong> leur consistance, ils sont trop peu mûrs, on ne peut leur donner quʹune<br />

mission temporaire dont le résultat reste nécessairement bien imparfait.<br />

M. lʹabbé Risse est retourné à Metz, emmenant <strong>avec</strong> lui le f. Georges [<strong>de</strong> Lauriston]<br />

qui éprouvait une gran<strong>de</strong> lassitu<strong>de</strong> et avait besoin <strong>de</strong> se trouver pour un temps dans une<br />

position plus calme et plus paisible; lʹœuvre <strong>de</strong> M. Risse étant fort simple dans ses procé‐<br />

dés sera un repos pour lui. Le jeune Luzier lui a été adjoint. Leur arrivée a été une sorte<br />

dʹovation, ils ont été tous les trois reçus <strong>avec</strong> une affection et une cordialité vraiment tou‐<br />

chantes. M gr <strong>de</strong> Metz, en particulier, a été pour eux dʹune bonté dont nous <strong>de</strong>vons gar<strong>de</strong>r<br />

une gran<strong>de</strong> reconnaissance. Cette petite fondation se fait donc dans <strong>de</strong>s conditions toutes<br />

favorables; vous en bénirez <strong>avec</strong> nous le Seigneur.<br />

Nous avons quelque espérance quʹun bon prêtre [M. Braun], parent <strong>de</strong> lʹabbé Risse,<br />

âgé, je crois, <strong>de</strong> 34 ans, viendra, <strong>avec</strong> le consentement <strong>de</strong> son<br />

Evêque, faire ses essais dans la Communauté dans le courant<br />

du mois prochain; la chose nʹest pas encore absolument<br />

décidée. Je la recomman<strong>de</strong> à vos prières et à celles <strong>de</strong> notre<br />

cher abbé Planchat. Je nʹécris point aujourdʹhui à ce bon<br />

abbé, je vous prie <strong>de</strong> lui dire que je nʹai point négligé ses re‐<br />

commandations; jʹai rappelé au f. Georges quʹil avait promis<br />

100f pour ai<strong>de</strong>r votre œuvre, il était très préoccupé <strong>de</strong> son<br />

départ et <strong>de</strong> ses comptes à mettre au clair, il a pourtant bien<br />

accueilli la requête quʹil a reconnue fondée; M. Roussel ne<br />

mʹa pas encore <strong>de</strong>mandé les 5f pour la famille recommandée<br />

par M. Planchat, il en a fait lʹavance sans doute, je la lui<br />

rembourserai. M. Lantiez a dû sʹoccuper <strong>de</strong> M me Duhamel que je vois fidèlement tous les 15<br />

jours. Je saurai aujourdʹhui <strong>de</strong> M. Lantiez, qui est à Grenelle et qui y va maintenant tous<br />

les jours, le résultat <strong>de</strong> ses recherches à ce sujet. Je crois que cʹest tout ce que M. Planchat<br />

mʹavait recommandé. Les travaux sont en ce moment fort multipliés pour nous, il en est<br />

assurément pour vous <strong>de</strong> même; <strong>de</strong>mandons le secours <strong>de</strong> Dieu afin quʹIl supplée à notre<br />

insuffisance et daigne bénir nos petits efforts.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, jʹaurais dû, jʹaurais voulu écrire à tous vos frères, mais<br />

je crois que je nʹai pas à me reprocher <strong>de</strong> lʹavoir omis par ma faute, nous sommes vraiment<br />

bien occupés ici; je nʹoublie aucun dʹeux au S t Sacrifice, je me console aussi <strong>de</strong> les délaisser<br />

plus que je ne le voudrais en songeant quʹils ont votre direction paternelle et quʹelle pour‐<br />

voit à tout; dites‐leur, je vous prie, quelques mots <strong>de</strong> vive affection <strong>de</strong> ma part, je me sens<br />

le besoin <strong>de</strong> les savoir assurés que notre cordiale sollicitu<strong>de</strong> leur est gardée tout entière.<br />

893


Adieu, cher Monsieur lʹabbé, croyez bien vous‐même aux sentiments <strong>de</strong> respect et<br />

<strong>de</strong> dévouement en N.S. <strong>de</strong><br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

816 à M. Risse<br />

Bons effets <strong>de</strong> lʹunion à la Congrégation. Réponse à <strong>de</strong>s questions particulières.<br />

20 janvier 1862<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu votre bonne et joyeuse lettre, elle nous a causé une gran<strong>de</strong> joie et nous<br />

avons tous ensemble béni le Seigneur qui vous a préparé à Metz un si consolant accueil.<br />

Vous voilà fort maintenant pour porter les travaux et même les épreuves, sʹil plaisait à<br />

Dieu dʹen envoyer, car les consolations bien prises nous affermissent pour lʹheure <strong>de</strong> la<br />

tribulation. Nous continuerons à bien prier pour vous, disposés à mettre en commun <strong>avec</strong><br />

vous et <strong>avec</strong> votre chère maison les joies et les peines, puisque désormais nous sommes un<br />

en N.S.<br />

Mgr <strong>de</strong> Ségur vous a écrit une petite lettre que je ne vous envoie point, parce quʹelle<br />

contient uniquement lʹavertissement que les 125 messes quʹil vous a remises doivent être<br />

dites dans lʹespace <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux mois.<br />

Tout va assez bien ici, hors du côté <strong>de</strong> notre jeune mala<strong>de</strong> qui baisse sensiblement et<br />

qui, selon toute apparence, va bientôt retourner près <strong>de</strong> Dieu; il est très bien préparé,<br />

pieux et soumis à la divine volonté; puissions‐nous être ainsi quand notre heure sonnera.<br />

Mille affections et respects autour <strong>de</strong> vous, à M. Faivre en particulier, qui mʹa écrit<br />

une lettre que son cœur a inspirée; embrassez mon f. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] pour moi et<br />

notre petit Luzier; M. Mignon lʹinvite à écrire à sa tante Mme Trimaille, femme vraiment<br />

chrétienne et respectable, quʹil néglige trop.<br />

Adieu, cher bon abbé, nous pensons déjà au temps où nous pourrons vous revoir.<br />

Exprimez mon regret à M. Freschard <strong>de</strong> ne pouvoir répondre à ses désirs, nous<br />

nʹaurions possibilité dʹadmettre son jeune frère que comme persévérant et lui‐même que<br />

comme novice, mais je crois que ni lʹun ni lʹautre nʹa les dispositions et volontés requises;<br />

la règle <strong>de</strong> notre maison est <strong>de</strong> ne recevoir aucun étranger dans lʹintérieur, particulière‐<br />

ment dans la Maison‐Mère.<br />

Je suis bien affectueusement, en J. et M.,<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

817 à M. Planchat<br />

Le frère Brice bientôt à Arras. Nouvelles dʹune dame secourue par le père Planchat.<br />

24 janvier [1862]<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je joins ces <strong>de</strong>ux mots à la lettre <strong>de</strong> M. Carment pour vous dire que nous avons ex‐<br />

pédié les diverses lettres que vous nous avez envoyées ces jours <strong>de</strong>rniers.<br />

894


Jʹenverrai le plus tôt possible M. Brice à Arras, mais il faut que je le dégage <strong>de</strong> di‐<br />

vers emplois quʹil a et que jʹavise à le remplacer, cela entraînera quelques jours <strong>de</strong> délai; je<br />

le regrette puisque vous êtes chargés à Arras plus que <strong>de</strong> coutume.<br />

M. Legentil, quʹon a dû consulter pour lʹasile <strong>de</strong>mandé à S t ‐Charles pour le M. <strong>de</strong> la<br />

panification, a jugé que le défaut <strong>de</strong> locaux libres en ce moment rendrait la chose imprati‐<br />

cable. Il me semble quʹaux Jeunes Ouvriers <strong>de</strong> Nazareth, rue Montparnasse, ce ne serait<br />

pas impossible.<br />

Je me suis entretenu <strong>avec</strong> M me Duhamel <strong>de</strong> sa position; elle mʹa dit <strong>avec</strong> un air <strong>de</strong><br />

sincérité et en entrant dans quelques détails que, sans sʹêtre notablement améliorée, sa si‐<br />

tuation présente est moins mauvaise quʹen dʹautres moments; elle a obtenu, outre sa pen‐<br />

sion <strong>de</strong> 500f, plusieurs secours du Ministère <strong>de</strong> la Guerre; lʹan <strong>de</strong>rnier, 500f <strong>de</strong> lʹEmpereur;<br />

elle renouvelle sa <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pour obtenir quelque subsi<strong>de</strong> du même genre aux Tuileries<br />

pour cette année; elle vient dʹobtenir une <strong>de</strong>uxième concession <strong>de</strong> terres en Algérie sous le<br />

nom <strong>de</strong> sa fille; la première, sous son nom, va commencer à rapporter cette année un reve‐<br />

nu <strong>de</strong> 300f. En ensemble, elle mʹa dit que, présentement, elle se tirait à peu près dʹaffaire.<br />

Mille affections à tous, à notre p. Halluin en particulier; jʹespère quʹil nʹa gardé au‐<br />

cun chagrin sur lʹavis que jʹai donné touchant lʹadmission dans lʹétablissement <strong>de</strong> lʹinstitu‐<br />

teur qui lui avait été recommandé.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

818 à M. Caille<br />

Le frère <strong>Jean</strong> Gauffriau à Amiens.<br />

Vaugirard, 30 janvier 1862<br />

Mon bien bon ami,<br />

Jʹai arrangé définitivement les petites dispositions concernant lʹenvoi <strong>de</strong> M. <strong>Jean</strong><br />

[Gauffriau] à Amiens; il vous arrivera, je lʹespère, après‐<strong>de</strong>main samedi, 1er février, dans<br />

lʹaprès‐midi. Dimanche et lundi, M. Alphonse [Vasseur] le mettra <strong>avec</strong> vous au courant <strong>de</strong><br />

ce quʹil aurait à faire et, lundi soir ou mardi matin, M. Alphonse arriverait ici pour prendre<br />

un emploi à la maison du Patronage <strong>de</strong> Grenelle.<br />

Les Directeurs du Séminaire St‐Sulpice pensent quʹil aurait grand avantage à suivre,<br />

comme externe, les cours du Séminaire dʹAmiens; vous verrez, après quʹil sera assis parmi<br />

vous, ce qui serait praticable à ce sujet; nous en pourrons parler <strong>de</strong> nouveau à ce moment.<br />

Adieu, mille affections <strong>de</strong> tous ici à tous chez vous.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

819 à M. Caille<br />

M. <strong>Léon</strong> Guichard va renforcer Amiens.<br />

Vaugirard, 13 février 1862<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai examiné bien attentivement qui nous pourrions envoyer pour vous donner ai<strong>de</strong><br />

et faciliter vos services et jʹai, <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> nos frères du Conseil, désigné M. <strong>Léon</strong> Gui‐<br />

895


chard pour se rendre près <strong>de</strong> vous. Je pense quʹil pourra partir lundi prochain. M. <strong>Jean</strong><br />

[Gauffriau], qui le connaît, pourra vous dire quʹil est intelligent, habitué aux surveillances,<br />

se prêtant à tout, dʹun bon caractère, pieux et régulier; cʹest <strong>de</strong> tous points un bon sujet, at‐<br />

taché à la Communauté et sur lequel elle peut, je crois, bien compter. Il complétera heu‐<br />

reusement le personnel <strong>de</strong> votre maison. Je lui remettrai une petite somme <strong>de</strong> 80f environ<br />

qui mʹest venue à différentes fois par M. Marinier, elle servira à ce bon jeune homme à se<br />

rendre dans son pays ou en quelque autre lieu où il trouverait un emploi convenant à sa<br />

faible santé. Je pense que vous lʹavez déjà averti quʹil semblait définitivement impossible<br />

que notre genre <strong>de</strong> vie pût lui convenir.<br />

Je suis bien aise que M. <strong>Jean</strong> suive les cours du Séminaire, je lʹinvite bien à nʹy met‐<br />

tre aucun retard, dès quʹil aura pu prendre ses dispositions à cet effet <strong>avec</strong> vous. Jʹattendrai<br />

une prochaine lettre <strong>de</strong> lui, jʹen joins ici une reçue aujourdʹhui pour lui.<br />

Jʹespère que tout va bien chez vous; nous nʹavons ici rien <strong>de</strong> notable, nous marchons<br />

dans les conditions ordinaires. On est content à Metz et à Arras; allons toujours <strong>de</strong>vant<br />

nous, travaillant en simplicité <strong>de</strong> cœur et comptant sur lʹassistance constante <strong>de</strong> notre di‐<br />

vin Seigneur.<br />

Assurez tous nos frères <strong>de</strong> mon cordial attachement et <strong>de</strong>s bons souvenirs <strong>de</strong> notre<br />

entourage; que la charité soit toujours en nos cœurs et dans tous nos actes.<br />

Votre affectionné et dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

820 <strong>de</strong> M. Carment à M. Planchat<br />

P. S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Remerciement pour une offran<strong>de</strong>.<br />

14 février 1862<br />

Je vous remercie, cher ami, <strong>de</strong>s 50f pour les Orphelins. Les autres 50f, sauf 4f, ont<br />

servi au voyage <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux jeunes gens envoyés par vous à M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet].<br />

Mille affections<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

821 à M. Risse<br />

LʹŒuvre <strong>de</strong> Metz: un grain <strong>de</strong> senevé qui donnera du fruit. Questions financières.<br />

[février 1862]<br />

Bien cher abbé et fils en N.S.,<br />

Vos bonnes lettres et celles <strong>de</strong> notre f. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] ont gran<strong>de</strong>ment réjoui<br />

toute notre communauté; nous bénissons Dieu qui se plaît si visiblement à encourager la<br />

petite famille qui se fon<strong>de</strong> à Metz; cʹest le grain <strong>de</strong> sénevé, une toute petite œuvre qui, <strong>avec</strong><br />

le temps, sʹenracinera et donnera <strong>de</strong>s fruits abondants. Allons fidèlement, selon les vues <strong>de</strong><br />

la divine Sagesse, confions‐nous à la tendresse et à la miséricor<strong>de</strong> <strong>de</strong> notre bon Maître.<br />

Vous avez eu tort, bien cher ami, <strong>de</strong> nous envoyer en ce moment quelque argent,<br />

vous avez trop à faire vous‐même pour subvenir aux charges <strong>de</strong> votre installation; aussi je<br />

fais payer <strong>avec</strong> cet argent vos cartes, votre surplis et le voyage du f. Georges, ne voulant<br />

896


pas vous imposer pour nous <strong>de</strong>s sacrifices qui viendraient mal à propos pour votre chère<br />

œuvre.<br />

Je crois que vous êtes pleinement en droit <strong>de</strong> réserver, pour les besoins <strong>de</strong> votre<br />

communauté, telle part que vous jugerez nécessaire sur les dons que vous recevez; faites<br />

en sorte seulement que votre Conseil dʹAdministration ne prenne pas en mauvais sens cet<br />

emploi, sʹil est obligé dʹen avoir absolument et <strong>de</strong> tout point connaissance; en général, on<br />

est très exigeant pour les serviteurs <strong>de</strong> Dieu, on attend beaucoup dʹeux et on désire ne leur<br />

rien donner, on leur sait gré dʹêtre comme les anges qui nʹont besoin <strong>de</strong> rien; cʹest contre<br />

toute raison, mais cʹest ainsi.<br />

Je ferai votre commission près <strong>de</strong> M. Maignen.<br />

Nous nʹentendons point parler jusquʹici <strong>de</strong> M. Braun. M. Paillé a prié M. <strong>de</strong>s Francs<br />

<strong>de</strong> passer à la maison où il est et <strong>de</strong> le voir pour lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r purement et simplement <strong>de</strong><br />

ses nouvelles <strong>de</strong> votre part; on nʹa rien dit <strong>de</strong> plus à M. <strong>de</strong>s Francs qui se bornera à faire ce<br />

quʹon lui a <strong>de</strong>mandé. Je crois que cela suffit et que ce ne sera pas trop non plus.<br />

Je voudrais vous écrire bien <strong>de</strong>s pages; cʹest à la hâte que je vous écris ces <strong>de</strong>ux<br />

mots, un peu <strong>de</strong> meilleur temps viendra; je me borne aujourdʹhui à vous assurer <strong>de</strong> la ten‐<br />

dre affection <strong>de</strong> toute la famille, le lien est bien formé, votre court séjour a suffi, tout le<br />

mon<strong>de</strong> vous aime, frères et enfants et le Père par‐<strong>de</strong>ssus tout.<br />

Tout à vous en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

822 à M. Halluin<br />

Conscription pour un postulant. Irrégularité dans la correspondance qui échappe au Supérieur. Ne pas faire les<br />

choses <strong>de</strong> son goût, <strong>de</strong> préférence à celles dont on est chargé. Devoir <strong>de</strong> ménager ses forces.<br />

Vaugirard, 4 mars 1862<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Notre jeune ami, Auguste Leduc, a eu en partage un assez bon numéro, pas assez<br />

avancé néanmoins pour quʹon ait une certitu<strong>de</strong> absolue <strong>de</strong> sa libération. Nous nous oc‐<br />

cupons <strong>de</strong>s démarches qui sont à faire en ce sens, ou plutôt nous les continuons, ayant déjà<br />

écrit et fait divers mouvements à cet effet. Il y a tout lieu dʹespérer que, soit par son numé‐<br />

ro, soit par ses causes dʹexemption, il sera mis hors <strong>de</strong> toute sollicitu<strong>de</strong>. Je vous prie néan‐<br />

moins <strong>de</strong> lui donner ces détails rassurants, parce que jʹai su par M. Planchat quʹil se tour‐<br />

mentait plus que <strong>de</strong> raison <strong>de</strong> cette affaire <strong>de</strong> conscription. Jʹai appris <strong>avec</strong> regret, par la<br />

même voie, que ce pauvre garçon, pourtant droit et simple dans sa foi et son bon vouloir,<br />

avait le tort <strong>de</strong> correspondre secrètement <strong>avec</strong> M. Clément qui lui écrit poste restante. Il y a<br />

là un manque <strong>de</strong> confiance et dʹobéissance qui nous ont ici vivement contristés. Nous nous<br />

intéressons à cet enfant qui a quelques qualités heureuses et nous verrions <strong>avec</strong> peine quʹil<br />

sʹécartât du droit chemin, ce qui ne manquerait pas dʹarriver sʹil se créait ainsi, en <strong>de</strong>hors<br />

<strong>de</strong> ses Supérieurs, <strong>de</strong>s relations dont on ne saurait rien attendre <strong>de</strong> bon, la conduite <strong>de</strong> M.<br />

Clément, à Arras, nous ayant démontré quʹil nʹavait ni bon sens, ni élévation <strong>de</strong> cœur. Je<br />

vous prie, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> faire quelques représentations à notre jeune Auguste et<br />

<strong>de</strong> lui faire comprendre combien <strong>de</strong> pareils actes lʹéloignent <strong>de</strong> la fin <strong>de</strong> sa vocation.<br />

Jʹai vu <strong>avec</strong> plaisir que notre jeune Brice, remis <strong>de</strong> son indisposition, prenait bien à<br />

Arras et pourrait vous rendre dʹutiles services. Il est, en général, très bon enfant, il nʹa be‐<br />

897


soin que dʹêtre un peu suivi <strong>de</strong>s yeux pour ne pas préférer parfois aux besognes nécessai‐<br />

res quelques occupations qui peuvent être <strong>de</strong> son goût; à cela près <strong>de</strong> cette petite disposi‐<br />

tion, du reste fort amoindrie <strong>de</strong>puis quʹil est <strong>de</strong>venu homme, je ne crois pas que vous ayez<br />

rien à lui reprocher; il ne nous a donné ici aucun sujet <strong>de</strong> mécontentement. Il sera bien<br />

aussi quʹil ne cultive pas beaucoup les connaissances du <strong>de</strong>hors. Cʹest un danger pour les<br />

sujets qui sont placés dans leur pays.<br />

M. Planchat me dit quʹil faut vous recomman<strong>de</strong>r <strong>de</strong> prendre plus <strong>de</strong> soin <strong>de</strong> votre<br />

santé qui est bien souvent chancelante, par suite <strong>de</strong> vos fatigues. Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> bien<br />

instamment, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> nʹuser que modérément <strong>de</strong> vos forces; il faut quʹelles<br />

durent encore longtemps pour le bien <strong>de</strong> votre œuvre, lʹédification <strong>de</strong> vos enfants et la<br />

consolation <strong>de</strong> notre petite famille.<br />

Mille bons souvenirs <strong>de</strong> tous ici, <strong>de</strong> M. Carment en particulier, et <strong>de</strong> ceux qui ont<br />

travaillé près <strong>de</strong> vous. Mille affections aussi pour nos frères que jʹembrasse affectueuse‐<br />

ment.<br />

Votre tout dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

823 à M. Risse<br />

A propos dʹun jeune frère <strong>de</strong> Metz. Correspondance souhaitée. Copie <strong>de</strong>s indulgences en faveur <strong>de</strong> lʹInstitut.<br />

Vaugirard, 11 mars 1862<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Nous nous étonnons <strong>de</strong> ne point voir revenir notre jeune f. M. Brouant; il mʹavait,<br />

<strong>de</strong> lui‐même, dit quʹune semaine lui semblait tout à fait suffisante pour son voyage, et quʹil<br />

se proposait <strong>de</strong> revenir le mercredi 5 <strong>de</strong> ce mois, quʹen tout cas, si quelque prolongation<br />

semblait vraiment nécessaire, il ne manquerait pas <strong>de</strong> mʹécrire; or, voilà presque 8 jours<br />

écoulés <strong>de</strong>puis le 5 et nous ne recevons aucune nouvelle <strong>de</strong> lui. Je vous prie, cher Mon‐<br />

sieur lʹabbé, <strong>de</strong> lui rappeler que le moment semblerait venu pour lui <strong>de</strong> reprendre ses oc‐<br />

cupations ici, ou bien, sʹil a rencontré quelque cause réelle <strong>de</strong> retard, <strong>de</strong> lʹinviter à nous en<br />

informer. Nous nʹavons point cessé, durant son absence, <strong>de</strong> prier pour lui et pour sa bonne<br />

mère; nous espérons que nos prières auront été exaucées et que cette bonne dame aura<br />

éprouvé quelque adoucissement à son infirmité, ou <strong>de</strong>s grâces <strong>de</strong> soumission et <strong>de</strong> douce<br />

résignation à la volonté <strong>de</strong> Dieu.<br />

Nous nʹoublions pas non plus la petite communauté <strong>de</strong> Metz, bien quʹelle‐même<br />

semble nous délaisser un peu. Je crois quʹelle <strong>de</strong>vrait sʹimposer lʹobligation <strong>de</strong> nous en‐<br />

voyer régulièrement quelques détails sur son personnel et ses œuvres, au moins tous les<br />

mois; sans ces communications un peu déterminées, peu à peu les liens dʹaffection et<br />

dʹunion parfaite se relâcheraient et les membres <strong>de</strong> la famille <strong>de</strong>viendraient presque étran‐<br />

gers les uns aux autres.<br />

Je ne vois rien aujourdʹhui <strong>de</strong> bien notable à vous dire sur nous et dʹailleurs le<br />

temps me manque, pour ne pas mettre cette missive en retard; M. Gallais est absent mo‐<br />

mentanément pour soigner son père mala<strong>de</strong>, M. Alphonse [Vasseur] fait <strong>de</strong> son mieux,<br />

<strong>avec</strong> ceux qui lʹentourent, pour ne rien laisser en souffrance.<br />

898


Nous préparons la retraite, lʹépoque nʹen est pas encore fixée, mais la chose ne vous<br />

intéresse pour cette fois quʹindirectement.<br />

Adieu, bien cher Monsieur lʹabbé, tout le mon<strong>de</strong> vous aime ici comme toujours;<br />

mille respects à votre chère famille, ainsi quʹà M. Faivre. Offrez nos respectueux hommage<br />

à M gr , en temps opportun.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je vous enverrai tout prochainement copie du bref <strong>de</strong> nos indulgences.<br />

824 à M. Halluin<br />

Conscription dʹun jeune dʹArras. Deman<strong>de</strong> dʹexemption rédigée par MLP. Date <strong>de</strong> la retraite à établir.<br />

Vaugirard, 11 mars 1862<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

La mère du jeune Leduc et nous, chacun <strong>de</strong> notre côté, faisons tous nos efforts pour<br />

préparer sa libération du service. Il résulte <strong>de</strong>s renseignements recueillis par nous quʹil se‐<br />

rait à propos quʹil adressât une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> au Préfet <strong>de</strong> la Seine pour exposer sa situation et<br />

ses titres à lʹexemption. Nous <strong>de</strong>vons remettre cette <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à un membre du Conseil<br />

Municipal qui doit lʹappuyer. Jʹindique, au verso <strong>de</strong> cette lettre, en quels termes et forme<br />

cette <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong>vrait être à peu près rédigée. Je vous prie, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> veil‐<br />

ler à ce que cette pièce nous arrive bientôt. Peut‐être sera‐t‐il bien que la signature <strong>de</strong> Le‐<br />

duc soit légalisée par le Maire dʹArras.<br />

Nous commençons à nous occuper <strong>de</strong> la retraite, parce que nous avons à déci<strong>de</strong>r si<br />

elle se fera avant ou après Pâques; il y a <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux côtés quelque difficulté. Avant, ce ne<br />

pourrait guère être que dans la semaine <strong>de</strong> la Passion, et déjà on prépare à ce moment les<br />

Pâques. Après, vient le mois <strong>de</strong> Marie, dont on entamerait au moins le commencement par<br />

la fin <strong>de</strong> la retraite qui se prolongerait jusquʹau jeudi 1er et vendredi 2. Nous examinerons<br />

<strong>de</strong> notre mieux quel parti serait le moins défavorable, et nous nous y arrêterons.<br />

Tout va ici comme <strong>de</strong> coutume; la vie matérielle est dure, mais bien dʹautres souf‐<br />

frent encore plus que nous; bénissons Dieu qui nous épargne visiblement dans sa miséri‐<br />

cor<strong>de</strong>.<br />

Mille affections à tous et <strong>de</strong> tous, à vous en particulier, cher Monsieur lʹabbé, à qui<br />

jʹoffre au nom <strong>de</strong> la famille nos sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> dévouement en N.S.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

A Monsieur le Préfet <strong>de</strong> la Seine<br />

Monsieur le Préfet,<br />

Jʹai lʹhonneur <strong>de</strong> vous exposer que je fais partie du contingent déterminé pour lʹan‐<br />

née 1862 et que jʹai pris part au tirage effectué ces jours <strong>de</strong>rniers au.......arrondissement<br />

dans lequel rési<strong>de</strong> ma mère, rue <strong>de</strong> la Boucherie <strong>de</strong>s Invali<strong>de</strong>s, N° 12.<br />

Jʹai divers titres à faire valoir pour obtenir mon exemption du service militaire. Je<br />

suis, en premier lieu, atteint dʹune affection au cœur <strong>de</strong>puis plusieurs années, laquelle<br />

mʹoccasionne <strong>de</strong>s palpitations violentes et mʹa contraint <strong>de</strong> renoncer à lʹétat <strong>de</strong> cordonnier<br />

899


que jʹavais commencé dʹapprendre, ainsi que peuvent lʹattester les Directeurs <strong>de</strong> lʹOrpheli‐<br />

nat sis rue <strong>de</strong>s Vignes, N° 44, à Vaugirard où jʹai été élevé, ensemble le mé<strong>de</strong>cin et tout le<br />

personnel <strong>de</strong> lʹétablissement.<br />

Je reste, en second lieu, le seul soutien <strong>de</strong> ma mère et dʹun jeune frère <strong>de</strong> 9 ans, at‐<br />

tendu que mon père, aliéné <strong>de</strong>puis nombre dʹannées et déclaré incurable, est détenu à Bi‐<br />

cêtre, sans aucun espoir quʹil puisse jamais donner aux siens le moindre appui. Je me pré‐<br />

pare à subir <strong>de</strong>s examens pour la carrière <strong>de</strong> lʹinstruction et, dès ce moment, jʹapporte<br />

quelque soulagement aux charges <strong>de</strong> ma mère en payant la pension <strong>de</strong> mon jeune frère;<br />

mais si jʹétais, malgré les vices <strong>de</strong> ma constitution, contraint dʹentrer au service, je laisse‐<br />

rais ma mère dʹautant plus à plaindre quʹelle est elle‐même fréquemment mala<strong>de</strong> et ne va‐<br />

que que très péniblement au travail que son affection et son dévouement pour nous lui ont<br />

fait entreprendre.<br />

Jʹose espérer, Monsieur le Préfet, que, tenant compte <strong>de</strong> ces motifs si graves, vous<br />

voudrez bien admettre ma réclamation et faire prononcer mon exonération du service mi‐<br />

litaire.<br />

Je suis <strong>avec</strong> respect<br />

Monsieur le Préfet,<br />

Votre très humble et très obéissant serviteur.<br />

Arras, le…<br />

Rue Beaufort.<br />

825 à M. Decaux<br />

Envoi dʹun frère allemand à lʹŒuvre <strong>de</strong> Ste‐Anne; nécessité dʹun accueil confiant <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s Confrères.<br />

Vaugirard, 17 mars 1862<br />

Mon bien bon ami,<br />

Je crois que nous pourrons vous donner pour Ste ‐Anne, <strong>avec</strong> le jeune Moutier, M.<br />

Emes, un brave et digne allemand qui nous est venu <strong>de</strong> Cologne <strong>de</strong>puis plus <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux ans<br />

par M. Kesseler, qui est je crois présentement à Paris. Cʹest un homme rassis, dʹun remar‐<br />

quable bon sens, dévoué au <strong>de</strong>voir comme il nʹest pas ordinaire <strong>de</strong> lʹêtre; il nʹa contre lui<br />

que son accent allemand extrêmement prononcé, mais le jeune Moutier lʹassistant, cet in‐<br />

convénient sera peu grave, dʹautant quʹil y a, me dit‐on, à Ste ‐Anne, un certain nombre<br />

dʹAllemands que sa présence pourra attirer. Je vous le donne comme un homme dʹune va‐<br />

leur réelle. Je compte aussi que, durant les premiers temps, M. Emile [Beauvais] ou M.<br />

Myionnet les accompagnera pour les ai<strong>de</strong>r à connaître les enfants et à sʹen faire aimer.<br />

Je désire bien, mon bon ami, que vous préveniez nos Confrères et amis <strong>de</strong> St‐<br />

Vincent <strong>de</strong> Paul et que vous les disposiez favorablement, afin quʹils acceptent les services<br />

<strong>de</strong> nos frères, comme nous les offrons nous‐mêmes, en toute simplicité <strong>de</strong> cœur et esprit<br />

<strong>de</strong> charité; nous ne voulons absolument rien que le bien <strong>de</strong>s âmes, nous ne <strong>de</strong>mandons<br />

dʹinfluence et <strong>de</strong> position quʹautant quʹil en faut pour agir utilement, mais on ne peut rien<br />

faire <strong>de</strong> bon sans cordialité et bienveillance réciproques, si nous <strong>de</strong>vions trouver <strong>de</strong>s dé‐<br />

fiances, <strong>de</strong>s réserves, <strong>de</strong>s préjugés, nous réussirions bien difficilement à donner un<br />

concours efficace; je crois donc quʹil est bien essentiel que vous sondiez bien le terrain et<br />

voyiez si réellement nous serons acceptés et franchement accueillis.<br />

900


Croyez bien, mon bon ami, à tous mes sentiments <strong>de</strong> fraternel dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

826 à M. Risse<br />

Réflexions sur la vieillesse. Le Patronage Sainte‐Anne. Arrivée <strong>de</strong> M. Audrin. Visite <strong>de</strong> lʹabbé Braun. Une com‐<br />

munauté ne doit pas dépendre <strong>de</strong> ses bienfaiteurs. Le St‐Sacrement à lʹŒuvre <strong>de</strong> Metz.<br />

Vaugirard, 24 mars 1862<br />

Bien cher abbé et fils en N.S.,<br />

Je nʹaurai guère bonne grâce à vous exhorter à nous écrire plus souvent, puisque je<br />

mets moi‐même tant <strong>de</strong> lenteur dans mes correspondances; les ans en sont la cause; les<br />

mouvements <strong>de</strong>s vieillards <strong>de</strong>viennent pesants et lʹactivité <strong>de</strong> leur esprit sʹalanguit en<br />

même temps; donc, bien cher ami, indulgence et support pour ces pauvres vieux servi‐<br />

teurs que le Seigneur gar<strong>de</strong> dans sa maison encore un peu <strong>de</strong> temps pour que les jeunes<br />

mûrissent et pour quʹeux‐mêmes soient moins imparfaits pour le Ciel. Nous nʹavons pas,<br />

du reste dʹévénements notables; nous essayons, <strong>de</strong>puis hier seulement, <strong>de</strong> <strong>de</strong>sservir le pa‐<br />

tronage <strong>de</strong> S te ‐Anne, situé au quartier <strong>de</strong> la Roquette; il est fort nombreux, presque 300 en‐<br />

fants, et jusquʹici nullement constitué; réussirons‐nous, y ferons‐nous quelque bien? Vous<br />

le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rez <strong>avec</strong> nous au Seigneur qui seul peut nous donner grâce et puissance pour<br />

agir. M. Emile [Beauvais] et le jeune Moutier, élève <strong>de</strong> M. Maignen, commencent cette en‐<br />

treprise, sans pourtant se détacher <strong>de</strong> Vaugirard où le premier est nécessaire et où le se‐<br />

cond a besoin <strong>de</strong> rester à loisir, puisque son noviciat nʹest commencé que <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux<br />

mois. Un autre sujet [M. Audrin] jeune ouvrier <strong>de</strong> Nazareth, âgé <strong>de</strong> 24 ans, ayant <strong>de</strong> la va‐<br />

leur en vertu, en intelligence, en acquis, vient aussi dʹentrer au Noviciat, nous en avons<br />

bonne espérance.<br />

M. lʹabbé Braun sʹest échappé à travers les exercices dʹune mission et nous est venu<br />

voir à la dérobée; un peu timi<strong>de</strong> toujours à se risquer, mais pourtant il est parti très<br />

content, mʹa‐t‐il dit, et tout à fait décidé à nous venir vers le temps du Bon Pasteur. Priez<br />

bien toujours pour lui et pour nous; Dieu vous a mêlé à cette vocation, Il a eu en vue assu‐<br />

rément que vous aidiez par vos mérites à lʹamener à quelque heureuse fin en un sens ou en<br />

un autre.<br />

Vous mʹavez <strong>de</strong>mandé, <strong>avec</strong> notre f. Georges [<strong>de</strong> Lauriston], avis sur vos rapports<br />

financiers <strong>avec</strong> votre Conseil dʹadministration. Je ne puis guère répondre que par <strong>de</strong>s vues<br />

générales. Il est bien, dʹordinaire, quʹune communauté ne soit pas trop dépendante, dans<br />

le détail, <strong>de</strong>s personnes du <strong>de</strong>hors qui rarement ont lʹesprit assez large pour ne pas rendre<br />

leur intervention mesquine, tracassière, gênante; mais ce qui est fréquent peut quelquefois<br />

ne pas exister, je me plais à penser quʹil en est ainsi à Metz. Il peut y avoir aussi difficulté<br />

et inconvénient à reculer, si déjà vous vous êtes avancés par <strong>de</strong>s communications qui sont<br />

déjà une sorte <strong>de</strong> lien <strong>avec</strong> ces Messieurs. Je ne puis autrement juger la situation, ne la<br />

voyant pas <strong>de</strong> mes yeux; vous serez mieux à même <strong>de</strong> votre côté <strong>de</strong> lʹasseoir selon que les<br />

circonstances pourront le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r. Jʹapprendrai <strong>avec</strong> plaisir la décision que vous aurez<br />

prise.<br />

Notre cher M. André [Brouant] va bien; il est bien plus à son aise ici quʹà Metz où<br />

les critiques <strong>de</strong> ceux‐ci, les observations <strong>de</strong> ceux‐là le mettent en inquiétu<strong>de</strong> et alarment sa<br />

conscience; bien éclairé ici sur les vues <strong>de</strong> Dieu à son égard, il marche tout droit et bien<br />

901


constamment. Les autres vont bien aussi; M. <strong>Léon</strong> [Guichard] à Amiens donne satisfaction,<br />

Ferdinand [Bosmel] toujours bon garçon, M. Pierre [Reisdorfer] toujours un peu traînant<br />

en santé, marchant pourtant <strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> bizarrerie et originalité dʹesprit.<br />

Je me réjouis <strong>avec</strong> vous que vous ayez enfin le Très S t Sacrement. La maison aura<br />

son véritable Supérieur: pour vous, cher ami, vous serez son représentant, vous tâcherez<br />

quʹon sente bien quʹIl parle par vous, agit par vous, que sa charité, son divin Esprit vous<br />

anime, est lʹâme <strong>de</strong> votre âme; je lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rai cette grâce qui sera la véritable et défini‐<br />

tive fondation <strong>de</strong> votre œuvre.<br />

Tous ici vous aiment <strong>avec</strong> une cordiale affection; la petite maison <strong>de</strong> Metz, la <strong>de</strong>r‐<br />

nière en âge, nʹest ni la moins suivie <strong>de</strong>s yeux, ni la moins chérie par le cœur.<br />

Je vous embrasse en N.S. et en la T. S te Vierge, notre Mère, et aussi en S t Joseph, no‐<br />

tre Patron.<br />

Votre tout affectionné Père et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je ne pourrai écrire aujourdʹhui au f. Georges, je le ferai prochainement. Notre re‐<br />

traite est remise à la semaine qui suit le Bon Pasteur.<br />

Mille respects à votre chère famille, ne manquez point, à lʹoccasion, <strong>de</strong> mʹen donner<br />

toujours <strong>de</strong>s nouvelles.<br />

827 à M. Planchat<br />

A propos dʹun persévérant, M. Cauroy. Nécessité dʹavoir <strong>de</strong>s heures fixes pour la direction <strong>de</strong>s frères. Autorisa‐<br />

tion accordée pour une dévotion à St Joseph.<br />

Vaugirard, 27 mars 1862<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je regrette <strong>de</strong> ne pas toujours répondre à vos lettres <strong>avec</strong><br />

autant dʹexactitu<strong>de</strong> que ce serait désirable, je me suis trouvé assez<br />

chargé cet hiver, M. Lantiez étant fort habituellement absent, et M.<br />

Faÿ étant aussi, ou à St ‐Charles, ou fort occupé. Je nʹen restais pas<br />

moins bien uni dʹesprit <strong>avec</strong> vous; si jʹai laissé sans réponse quel‐<br />

ques‐unes <strong>de</strong> vos recommandations, cʹest que la force dʹattention me<br />

faisait défaut pour suivre beaucoup <strong>de</strong> choses <strong>de</strong> détail et quʹelles<br />

affluaient autour <strong>de</strong> moi.<br />

Pour ce qui regar<strong>de</strong> votre <strong>de</strong>man<strong>de</strong> au sujet dʹun jeune<br />

persévérant [Cauroy] que vous désireriez faire étudier, il serait bien jeune pour que nous<br />

commencions cette épreuve, la personne qui nous a donné un peu dʹai<strong>de</strong> pour cette partie<br />

<strong>de</strong> notre œuvre nʹaccepte mes propositions que pour les enfants âgés <strong>de</strong> 16 ans, le vôtre nʹa<br />

que 14 ans, ce serait <strong>de</strong>ux ans <strong>de</strong> charges pour nous, ce qui est trop; si vous aviez trouvé<br />

<strong>de</strong>s ressources pour payer une première année, nous aurions, je crois, pris la charge dʹune<br />

secon<strong>de</strong>; autrement, nous sommes trop obérés pour entreprendre cette œuvre sans aucun<br />

secours assuré.<br />

La retraite ne commencera, je crois, que le dimanche au soir 11 mai, nos frères ayant<br />

<strong>de</strong>mandé unanimement que les Pâques fussent terminées avant tout.<br />

M. Lantiez va vous envoyer vos pouvoirs <strong>avec</strong> la copie du bref <strong>de</strong> nos indulgences.<br />

902


Je désire bien que vous fassiez étudier régulièrement M. <strong>Jean</strong> [Gauffriau]; il paraît à<br />

peu près certain que le Séminaire dʹAmiens ne se prêtera point à lʹadmettre aux cours.<br />

M. Caille souhaiterait, et cela me paraîtrait bien, que les petites directions et instruc‐<br />

tions que vous faites à Amiens eussent leurs heures réglées, parce que les frères en tire‐<br />

raient ainsi plus dʹavantage, nʹétant pas dérangés dans leurs occupations et se mettant ain‐<br />

si plus paisiblement à ces exercices spirituels.<br />

Je veux bien que vous vous agrégiez au Culte perpétuel <strong>de</strong> S t Joseph; nous avons<br />

tous une sincère dévotion à ce grand Saint, en ce moment les Confréries se multiplient en<br />

son honneur; à Beauvais, les ff. <strong>de</strong>s Ecoles ont un privilège pour une Archiconfrérie; ici, la<br />

petite feuille que vous nous avez envoyée dʹArras est reproduite presque sans changement<br />

pour une association générale ayant la même fin. Nous avons fait tout le mois un petit<br />

exercice spécial à la chapelle <strong>de</strong> S t Joseph tous les jours.<br />

Adieu, bien cher ami, je ne puis à mon grand regret vous écrire plus au long; assu‐<br />

rez bien M. Halluin et tous nos frères <strong>de</strong> ma tendre affection, et croyez vous‐même aux<br />

sentiments <strong>de</strong> cordial dévouement en J.M.J. <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

828 330<br />

829 à M. Maignen<br />

Nouvelles <strong>de</strong> lʹŒuvre <strong>de</strong>s Jeunes Ouvriers. Veiller à ne pas sʹen<strong>de</strong>tter davantage.<br />

[mars ou avril 1862]<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Je ne refuse pas un peu dʹai<strong>de</strong> pour la mère <strong>de</strong> notre jeune Léopold [Moutier], mais<br />

il doit parler aujourdʹhui à sa grand‐mère, nous verrons ce quʹelle fera; il serait bien, je<br />

crois, si elle ne se montre pas bien disposée, que M. Hello lui fît une petite visite pour lui<br />

représenter amicalement quʹen femme chrétienne, elle ne peut refuser dʹai<strong>de</strong>r un peu sa<br />

belle‐fille, ni porter volontairement entrave à la vocation <strong>de</strong> son petit‐fils, quʹelle est bien<br />

âgée, que ce serait mal se préparer à aller à Dieu.<br />

Nous nʹapercevons personne <strong>de</strong> bien convenable pour les Jeunes Ouvriers; il est<br />

vraiment nécessaire que M. Audrin prenne au moins quelque peu lʹair et les habitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />

la vie commune. Recomman<strong>de</strong>z beaucoup à M. Boucault <strong>de</strong> tout faire charitablement pour<br />

empêcher M. Girard <strong>de</strong> se dégoûter <strong>de</strong> lʹœuvre <strong>de</strong>s Jeunes Ouvriers, ce serait une faute et<br />

un vrai malheur pour lʹœuvre.<br />

Je ne crains pas vos richesses, mais je regrette cet état <strong>de</strong> <strong>de</strong>ttes perpétuelles où vous<br />

mettez vos patronages; vous <strong>de</strong>viez 1.200f, disiez‐vous, sont‐ils payés et, sʹils le sont, ne<br />

préparez‐vous pas <strong>de</strong> nouvelles <strong>de</strong>ttes? Voila ce quʹil me semblerait bien dʹéviter, quand il<br />

ne sʹagit pas <strong>de</strong> choses vraiment essentielles ni urgentes.<br />

Adieu, mon cher enfant, ce sont là <strong>de</strong>s observations, non <strong>de</strong>s reproches; je vous<br />

aime toujours en N.S. et suis<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

330 Suppléée par la lettre 854 bis.<br />

903


830 à M. Planchat<br />

Utilité <strong>de</strong> suivre <strong>de</strong> près le mouvement <strong>de</strong>s maisons. Soutenir les âmes faibles. Les charges dʹune vocation. Invi‐<br />

ter M. Halluin à se soigner. Annonce <strong>de</strong> lʹentrée <strong>de</strong> lʹabbé Braun en Communauté.<br />

Vaugirard, 7 avril 1862<br />

Mon bien bon abbé et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> vos renseignements détaillés sur Amiens et aussi sur Arras. Ces<br />

<strong>de</strong>ux œuvres si intéressantes gagneront, jʹen suis sûr, à être bien suivies, à la fois par M.<br />

Halluin et M. Caille qui y sont si admirablement dévoués, et par nous ici qui serons aussi<br />

mieux à même <strong>de</strong> veiller à leurs intérêts.<br />

Je suis bien aise que M. <strong>Jean</strong> [Gauffriau] étudie un peu chaque jour, il se tiendra ain‐<br />

si en mesure <strong>de</strong> rentrer au Séminaire, dès quʹil sera un peu remis pour sa santé. Jʹespère<br />

que ce sera au plus tard pour le temps <strong>de</strong>s vacances.<br />

Je crois quʹil faut être un peu indulgent pour notre jeune Auguste Leduc. On vous<br />

reprochait un peu ici <strong>de</strong> trop poursuivre les gens quelquefois; on court risque ainsi <strong>de</strong> les<br />

décourager. Les âmes sont si peu fortes <strong>de</strong> notre temps quʹon ne peut guère les mener<br />

quʹen les encourageant. Je lui écris un mot pour lʹinviter à observer <strong>de</strong> son mieux son rè‐<br />

glement et les obligations <strong>de</strong> son emploi.<br />

M. Lantiez paraît bien timi<strong>de</strong> à se prononcer relativement à votre cher enfant<br />

Edouard Cauroy; sa petite lettre, un peu suggérée par vous, est aimable, mais il est si jeune<br />

et cʹest une si gran<strong>de</strong> tâche que dʹentreprendre une pareille éducation! Vous ne vous rap‐<br />

pelez pas bien, dʹailleurs, les conditions dʹadmission <strong>de</strong>s persévérants. Ils paient, non pas<br />

200f, mais 300f par an durant <strong>de</strong>ux ans. Nos charges sont telles que nous ne pouvons,<br />

moins que jamais, abaisser ce chiffre. Seulement, si vous étiez bien assuré <strong>de</strong>s signes indi‐<br />

quant sa vocation, on se résignerait à se contenter dʹune année. Je suis, du reste, bien peu<br />

sûr quʹon continue à mʹai<strong>de</strong>r pour nos jeunes étudiants latinistes, je me sens donc peu in‐<br />

cliné à mettre aux étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s sujets si jeunes et dont la volonté peut si aisément changer, à<br />

moins que leur piété, et leurs dispositions bien marquées ne donnent <strong>de</strong>s signes rassurants<br />

sur leur avenir. Embrassez pour moi le cher enfant, lʹassurant que je prierai Dieu pour lui<br />

bien cordialement, afin quʹIl règle les choses selon sa sainte volonté, en ce qui touche sa<br />

vocation.<br />

Invitez bien notre bon abbé Halluin à se soigner. Le mal quʹil a au nez vient, je crois,<br />

<strong>de</strong> la contention du système nerveux; un peu <strong>de</strong> repos et quelques bains le guériraient, je<br />

pense. A la longue, ces sortes <strong>de</strong> maux peuvent sʹaggraver; assurez‐le <strong>de</strong> toute notre affec‐<br />

tion et dites aussi à nos frères notre bon et cordial souvenir.<br />

Lʹabbé Braun entre définitivement chez nous, il nous viendra tout <strong>de</strong> suite après<br />

Pâques. La retraite commencera, je pense, le 11 mai au soir; cʹest un père du Collège choisi<br />

par le r.p. Olivaint qui la donnera.<br />

Adieu, mon bon abbé, je vous embrasse cordialement en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

831 à M. Maignen<br />

Personnel pour Nazareth.<br />

13 avril [1862]<br />

Mon cher enfant,<br />

Je vous envoie le jeune Lhoeur pour ai<strong>de</strong>r M. Boucault; il fera fidèlement et exacte‐<br />

ment tout ce quʹon lui dira, et il ne se dissipera pas autant que Vankenhove qui est bon en‐<br />

904


fant, mais léger et disposé à oublier, pour le jeu et lʹenfantillage, les emplois quʹon lui<br />

donne; un peu <strong>de</strong> vie sérieuse et calme est indispensable pour le former.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

832 à M. Maignen<br />

Placement dʹErnest Vasseur dans un atelier, grâce à M. Maignen.<br />

14 avril [1862]<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Notre jeune Ernest [Vasseur] préfère, entre les trois moyens proposés par vous, le<br />

travail comme ouvrier dans lʹatelier où vous voulez bien lʹintroduire. Je vous remercie <strong>de</strong><br />

ce que vous avez fait pour lui ménager cette position.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

833 à M. Caille<br />

Entrée <strong>de</strong> lʹabbé Braun dans lʹInstitut. Les étu<strong>de</strong>s du frère <strong>Jean</strong> Gauffriau.<br />

Vaugirard, 16 avril 1862<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Il y a déjà quelque temps que nous nʹavons reçu <strong>de</strong> vos nouvelles, je me plais à pen‐<br />

ser que tout va bien chez vous; M. Planchat, du reste, dans une lettre dont la date nʹest pas<br />

encore ancienne, mʹa rassuré sur tout ce qui concerne vous et tout votre entourage. Nous<br />

nʹallons pas mal <strong>de</strong> notre côté ici; les faits dignes <strong>de</strong> mention particulière sont rares parmi<br />

nous, je nʹen vois guère qui méritent votre attention, sinon lʹentrée définitive dans notre<br />

petite famille <strong>de</strong> M. lʹabbé Braun dont je vous avais déjà parlé. Il sʹinstalle aujourdʹhui,<br />

mais <strong>de</strong>puis plusieurs jours il est déjà <strong>de</strong>s nôtres, passant la plus gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong>s jour‐<br />

nées <strong>avec</strong> nous. Il nous paraît être en <strong>de</strong> très bonnes dispositions, nous augurons bien <strong>de</strong><br />

lʹavenir à son sujet. Il commencera, je pense, à donner quelques soins à une réunion <strong>de</strong> fa‐<br />

milles alleman<strong>de</strong>s qui se prépare près <strong>de</strong> nous, sachant parler aisément lʹallemand.<br />

Vous ne mʹavez point dit si vous aviez montré à lʹEvêché le certificat concernant M.<br />

lʹabbé <strong>Jean</strong> [Gauffriau]; je présume quʹil nʹa point changé la décision <strong>de</strong>s MM. du Sémi‐<br />

naire, puisque vous ne mʹen avez rien marqué. Je désire que M. <strong>Jean</strong> étudie exactement un<br />

peu chaque jour, afin <strong>de</strong> ne pas perdre ce quʹil sait et dʹêtre en état <strong>de</strong> rentrer au Séminaire<br />

dès quʹil sera bien remis pour sa santé; je présume que ce serait au plus tard pour le mo‐<br />

ment <strong>de</strong>s vacances; M. Planchat, en suivant ses étu<strong>de</strong>s, pourra les lui rendre plus fructueuses.<br />

La retraite aura lieu définitivement à partir du 11 mai au soir; elle sera, comme or‐<br />

dinairement, donnée par un r.p. Jésuite.<br />

Tous nos frères, <strong>de</strong>s divers lieux où ils sont répartis, mʹenvoient <strong>de</strong>s nouvelles satis‐<br />

faisantes, tout va bien, en particulier, à Metz. Tous <strong>de</strong>meurent en union <strong>avec</strong> nous et <strong>avec</strong><br />

vous, la paix et la charité continuent à régner dans la petite famille.<br />

Adieu, mon bon ami, croyez à toute ma tendre et cordiale affection en J. et M.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

905


834 à M. Planchat<br />

Laisser partir un jeune postulant dʹArras pour son conseil <strong>de</strong> révision.<br />

Vaugirard, 22 avril 1862<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

La mère du jeune Auguste Leduc gar<strong>de</strong> lʹespérance <strong>de</strong> le faire exempter <strong>de</strong> la cons‐<br />

cription comme soutien <strong>de</strong> famille, mais il lui est indispensable <strong>de</strong> lʹavoir ici durant quel‐<br />

ques jours avant la révision qui a lieu le 29, cʹest‐à‐dire mardi prochain; je lui avais promis<br />

quʹil serait ici aujourdʹhui pour voir <strong>avec</strong> elle quelques personnes quʹelle, <strong>de</strong> son côté, nous<br />

du nôtre, nous espérons faire agir dans son intérêt. A travers tout le mouvement <strong>de</strong> ces fê‐<br />

tes, je nʹai pas trouvé le moment <strong>de</strong> vous écrire et je suis en retard pour lʹaccomplissement<br />

<strong>de</strong> ma promesse. Je vous prie donc, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> faire partir Auguste sans au‐<br />

cun délai, afin que nous ne négligions rien <strong>de</strong> ce qui dépendra <strong>de</strong> nous pour lʹassister en<br />

cette occasion.<br />

Je nʹai que le temps <strong>de</strong> réitérer à vous, cher Monsieur lʹabbé, et à toute votre maison<br />

les assurances <strong>de</strong> mon tendre dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

835 à M. Maignen<br />

Appréciation <strong>de</strong> MLP. sur un livre. Exhortation à sʹen inspirer et à le répandre.<br />

Vaugirard, 1er mai 1862<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

je vous remercie <strong>de</strong> mʹavoir fait connaître le nouvel ouvrage <strong>de</strong> Mme Dubos, le Père<br />

Fargeau; cʹest le livre le meilleur et le plus aimable que jʹaie rencontré <strong>de</strong>puis longtemps. Je<br />

ne lʹai pas seulement parcouru, je lʹai lu tout entier; je le gar<strong>de</strong> pour un jour ou <strong>de</strong>ux, afin<br />

dʹen faire lire quelques parties à nos Messieurs. Jʹavais bien pressenti que, quand Mme Du‐<br />

bos ferait quelque ouvrage un peu suivi, il sortirait <strong>de</strong> la ligne vulgaire. Il y a dans sa pen‐<br />

sée quelque chose <strong>de</strong> ferme et <strong>de</strong> viril et dans lʹexpression une netteté et une précision ra‐<br />

res. Lʹétu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s mouvements <strong>de</strong> lʹâme est pénétrante, souvent profon<strong>de</strong>. Il y a <strong>avec</strong> cela un<br />

charme <strong>de</strong> poésie, un sentiment <strong>de</strong>s choses <strong>de</strong> cœur et <strong>de</strong>s beautés <strong>de</strong> la nature qui mʹont,<br />

quant à moi, bien <strong>de</strong>s fois ému jusquʹaux larmes. Vous ferez bien dʹétudier ce livre pour<br />

les quelques pages que vous essayez quelquefois dʹécrire; la nature <strong>de</strong> votre talent aurait<br />

quelque analogie <strong>avec</strong> celui‐là, proportion gardée, vous ne pourriez que gagner à incliner<br />

<strong>de</strong> plus en plus en cette voie.<br />

Adieu, bien cher ami; à lʹoccasion, offrez mon respect à Mme Dubos <strong>avec</strong> mes félicita‐<br />

tions sur son livre, cʹest un bon ouvrage et une bonne action, il fera beaucoup <strong>de</strong> bien, on<br />

ne saurait trop le prôner et trop le répandre. Il y a bien, à mon sens, quelques traits un peu<br />

forcés, mais dans un ou <strong>de</strong>ux endroits seulement; puis un mot qui ne me semble pas heu‐<br />

reux, cʹest facile à rectifier.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

906


836 à M. Halluin<br />

Difficulté <strong>de</strong> recrutement <strong>de</strong>s persévérants. Zèle apostolique <strong>de</strong> lʹabbé Braun. Chants du ʺbeau mois <strong>de</strong> Marieʺ.<br />

Vaugirard, 1er mai 1862<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Notre jeune Auguste Leduc a, comme on le pouvait présumer dʹavance, été jugé<br />

propre au service militaire. Il ne reste plus quʹune chance, cʹest quʹil soit exempté comme<br />

soutien <strong>de</strong> famille, mais je doute bien que nous y réussissions. Deux seulement sont ainsi<br />

favorisés dans chaque arrondissement. Nous prions pour lui, cʹest notre meilleure res‐<br />

source, sans toutefois négliger les moyens dont nous pouvons disposer pour soutenir ses<br />

intérêts. Lʹun <strong>de</strong> nos jeunes sujets venus <strong>de</strong> Metz, Ferdinand Bosmel, est pris pour la ré‐<br />

serve; il en résultera pour lui lʹobligation dʹaller 3 mois, chaque année, à Metz pour les<br />

exercices.<br />

M. Planchat me dit que nous pouvons espérer une visite <strong>de</strong> vous durant la retraite;<br />

je mʹen réjouis et suis toujours heureux <strong>de</strong>s occasions qui vous rapprochent <strong>de</strong> nous. Je<br />

trouverai bien quʹil arrive un jour ou <strong>de</strong>ux avant lʹouverture <strong>de</strong> la retraite, si toutefois vous<br />

y voyez avantage et nʹen <strong>de</strong>vez point trop avoir dʹinconvénient. Vous jugerez aussi, <strong>avec</strong><br />

notre bon abbé, sʹil y a opportunité à faire entrer le jeune Cauroy parmi nos persévérants,<br />

les mécomptes nombreux que les jeunes sujets fournis à la Communauté par cette petite<br />

institution nous ont donnés, nous ont rendus un peu timi<strong>de</strong>s pour les admissions; nous<br />

nous en rapportons néanmoins tout à fait à vous pour ce qui regar<strong>de</strong> celle du jeune Cau‐<br />

roy.<br />

Lʹabbé Braun, récemment admis parmi nous, paraît bien prendre sa position, mais il<br />

nous apportera, je le crains, peu <strong>de</strong> soulagement. A peine arrivé, il sʹest trouvé pris par<br />

quelques Allemands du quartier <strong>de</strong> Grenelle qui lʹont reconnu, lʹayant vu en Lorraine. Sur<br />

leurs instances, nous avons consenti à improviser <strong>avec</strong> lui, pour eux, une petite retraite<br />

préparatoire à la communion pascale; en <strong>de</strong>ux jours, 500 dʹentre eux lʹont suivie, puis un<br />

plus grand nombre, <strong>de</strong> telle sorte quʹen un instant le voilà chargé <strong>de</strong> 12 ou 1500 âmes au<br />

moins, dont près <strong>de</strong> la moitié ont déjà communié, dont lʹautre est en préparation pour y<br />

arriver. Avec une telle charge que la Provi<strong>de</strong>nce semble avoir prédisposée, il lui restera<br />

peu <strong>de</strong> liberté. Nous ferons en sorte toutefois quʹil reste quelques jours <strong>de</strong> la semaine à la<br />

maison, à la fois pour sʹy former à la vie commune et pour suppléer en quelques points M.<br />

Faÿ, lequel lui‐même doit remplacer M. Lantiez que Grenelle absorbe presque entière‐<br />

ment.<br />

Je nʹai pas <strong>de</strong> vue encore relativement aux mesures qui seront à prendre pour votre<br />

maison, si le jeune Leduc est définitivement pris par le service militaire, nous attendons la<br />

décision à intervenir sur sa <strong>de</strong>man<strong>de</strong> dʹexemption.<br />

Adieu, bien cher Monsieur lʹabbé; jʹespère que le beau mois <strong>de</strong> Marie sera plein <strong>de</strong><br />

grâces et <strong>de</strong> bénédictions pour votre maison et pour toute notre petite famille dans son en‐<br />

semble. Je me souviens quʹà mon <strong>de</strong>rnier voyage à Arras, vos enfants chantaient <strong>avec</strong> joie<br />

les louanges <strong>de</strong> la Ste Vierge, elle sera touchée <strong>de</strong> leur foi et obtiendra pour eux les faveurs<br />

<strong>de</strong> son divin Fils.<br />

Votre tout affectionné et dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

907


837 à M. Risse<br />

Avantages dʹun équilibre entre lʹactivité <strong>de</strong>s œuvres et les exercices spirituels. Accord <strong>de</strong> la confiance en la Pro‐<br />

vi<strong>de</strong>nce et <strong>de</strong> lʹaction personnelle. Projet <strong>de</strong> voyage à Metz.<br />

Vaugirard, 11 juin 1862<br />

Mon bien cher abbé et fils en N.S.,<br />

Je voulais remettre au f. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] au moins quelques mots pour vous;<br />

je voulais aussi répondre aux questions que vous mʹavez faites, sans retard; je nʹai point<br />

réalisé ces bons désirs; hélas! que <strong>de</strong> bons propos sont ainsi sans effet! Je ne cherche pas sʹil<br />

y a ici gran<strong>de</strong>ment défaillance <strong>de</strong> volonté ou absolu empêchement, cʹest, je crois, un mé‐<br />

lange <strong>de</strong> lʹun et <strong>de</strong> lʹautre; quoi quʹil en soit, je recours à votre charité pour tout prendre du<br />

meilleur côté.<br />

Jʹai examiné une à une les questions posées dans votre petite feuille; M. Lantiez, qui<br />

en causait <strong>avec</strong> moi, a écrit, en suite <strong>de</strong> notre entretien, la solution quʹil nous paraîtrait <strong>de</strong>‐<br />

voir donner à vos notes; je vous renvoie donc la feuille, pensant quʹelle répondra à vos<br />

vues; si vous désiriez sur quelques points <strong>de</strong>s détails plus explicites, je me ferais un plaisir<br />

<strong>de</strong> vous les donner plus au long.<br />

Jʹai été tout heureux <strong>de</strong> lʹair satisfait <strong>de</strong> M. Georges, sa santé sʹest fortifiée et son<br />

âme a repris plus <strong>de</strong> paix; jʹattribue ces bons effets au régime sagement mesuré <strong>de</strong> la petite<br />

communauté <strong>de</strong> Metz, à la fidélité au règlement, enfin au juste équilibre que vous tâchez<br />

<strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r entre lʹactivité <strong>de</strong>s œuvres et les repos ménagés pour les exercices spirituels; tâ‐<br />

chez dʹy <strong>de</strong>meurer; on prend mal les intérêts <strong>de</strong>s œuvres quand on sacrifie trop au mou‐<br />

vement, quʹon se surcharge, quʹon ne prend pas le temps <strong>de</strong> respirer; la respiration <strong>de</strong><br />

lʹâme, nous le savons, cʹest lʹoraison, sa nourriture, cʹest la parole intérieure <strong>de</strong> Dieu et la Ste Communion; veillez bien à ce que vos frères restent fidèles à ces appuis <strong>de</strong> la grâce et vous<br />

fon<strong>de</strong>rez votre maison dans un esprit <strong>de</strong> sagesse et <strong>de</strong> piété qui lui préparera un bon avenir.<br />

M. Georges vous aura rendu compte <strong>de</strong> notre situation; nous nʹallons pas mal en<br />

ensemble, le Seigneur est toujours pour nous plein <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong>; abandonnons‐nous<br />

beaucoup à Lui; agissons, mais sous son impulsion, et nous arriverons à quelque bonne<br />

fin, meilleure que nous nʹeussions osé lʹespérer. Ainsi avons‐nous été <strong>de</strong>puis notre com‐<br />

mencement, nous trouvant toujours plus haut que notre portée naturelle ne lʹeût fait pré‐<br />

voir; cʹest quʹà notre faiblesse se surajoutait lʹai<strong>de</strong> tout‐puissant <strong>de</strong> Dieu.<br />

Comme vous le voyez dans votre petite note, il semble désirable que je vous ren<strong>de</strong><br />

une petite visite; si lʹété ne mʹôte point le reste <strong>de</strong> mes forces, je serai heureux <strong>de</strong> réaliser ce<br />

projet; je ne compte pourtant sur rien, tant je suis accoutumé aux impuissances <strong>de</strong> ma santé.<br />

M. Planchat se plaint <strong>de</strong> nʹavoir pu obtenir un mot <strong>de</strong> réponse à plusieurs lettres<br />

quʹil a écrites à vous et à M. Georges; si lʹun ou lʹautre dʹentre vous peut lui écrire quelques<br />

lignes, ce sera bien.<br />

M. Braun va bien, il nʹa pas une gran<strong>de</strong> habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s œuvres, elle lui viendra; il<br />

nous semble être <strong>de</strong> cœur simple et <strong>de</strong> bonne volonté, nous allons bien <strong>de</strong> concert jusquʹici.<br />

Son œuvre <strong>de</strong>s Allemands nʹa pas encore pris beaucoup corps, ce qui ne tient pas à lui<br />

seul, sans doute, mais je crois quʹon arrivera toutefois à quelque bon résultat.<br />

Adieu, mon bien bon ami; nous vous restons ici tous tendrement dévoués comme<br />

toujours, le temps ne fera que grandir ces sentiments, parce quʹils sont fondés en N.S. et<br />

quʹils seront constamment soutenus par cette flamme quʹIl est venu apporter sur la terre et<br />

quʹIl veut allumer en toutes les âmes.<br />

908


Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Mille affections aux ff. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] et Paul [Luzier].<br />

838 à M. Guichard<br />

A propos dʹun ouvrage religieux à acheter.<br />

13 juin [1862]<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Je ne trouve aucun exemplaire libre <strong>de</strong> LʹEsprit du Christianisme du p. Neveu. Cʹest<br />

un livre peu cher, priez <strong>de</strong> ma part M. Caille <strong>de</strong> vous en acheter un.<br />

Voici la Bible pour M. <strong>Jean</strong> [Gauffriau].<br />

Je nʹai que le temps <strong>de</strong> vous embrasser ainsi que nos ff. dʹAmiens.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

839 à M. Halluin<br />

Condoléances à M. Halluin qui vient <strong>de</strong> perdre son frère. M. Roussel ne peut sʹabsenter <strong>de</strong> Grenelle.<br />

Vaugirard, 13 juin 1862<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Jʹapprends par notre bon abbé Planchat la peine <strong>de</strong> famille qui vient <strong>de</strong> vous être<br />

envoyée par la divine Provi<strong>de</strong>nce. Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> vous dire combien nous y prenons<br />

part, puisque nous avons tout mis en commun, peines et joies. Notre sincère affection pour<br />

vous nous fait donc sentir combien vous avez besoin en cette circonstance <strong>de</strong> la cordiale<br />

sympathie <strong>de</strong> ceux qui vous aiment, et surtout <strong>de</strong>s consolations que Dieu réserve aux siens<br />

dans les heures dʹépreuve. Nous le prions instamment <strong>de</strong> soutenir vous et les vôtres, dʹas‐<br />

sister votre sœur mala<strong>de</strong> dans sa souffrance et <strong>de</strong> protéger surtout les chers enfants qui<br />

<strong>de</strong>viennent orphelins. Jʹoffrirai pour votre bon frère, et à lʹintention <strong>de</strong> sa famille, le S t Sa‐<br />

crifice et je recomman<strong>de</strong>rai à nos ff. ecclésiastiques <strong>de</strong> vous donner ce témoignage <strong>de</strong> leur<br />

affection. Nos ff. <strong>de</strong> la Communauté prieront tous ensemble à cette même fin.<br />

M. Lantiez me dit quʹil vient <strong>de</strong> vous avertir quʹil paraissait bien difficile dʹenvoyer<br />

M. Roussel pour votre retraite <strong>de</strong> première communion; il craint quʹune absence en ce<br />

moment ne donne lieu à <strong>de</strong>s interprétations insensées comme celle <strong>de</strong> M. Planchat. Nous<br />

avons malheureusement quelques mauvais vouloirs autour <strong>de</strong> nous, disposés à exploiter<br />

malignement les moindres inci<strong>de</strong>nts. Pour moi, je suis incliné à ne pas tenir grand compte<br />

<strong>de</strong> ces vues malveillantes, et à marcher simplement à nos fins, mais ces MM. <strong>de</strong> Grenelle<br />

croient quʹun peu <strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nce nʹest pas à négliger.<br />

Soyez assez bon, cher Monsieur lʹabbé, pour remercier M. Planchat <strong>de</strong> sa lettre et lui<br />

dire que M. Carment sʹoccupe <strong>de</strong> la comman<strong>de</strong> quʹil a faite à lʹatelier. Je nʹoublierai point<br />

<strong>de</strong>vant Dieu la retraite du Collège ni la vôtre, cela va sans dire.<br />

Toute la famille vous assure <strong>de</strong> son cordial dévouement; croyez particulièrement,<br />

cher Monsieur lʹabbé, au mien, comme à ma respectueuse affection en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

909


840 à M. Maignen<br />

Mariage dʹun jeune ouvrier <strong>de</strong> Nazareth.<br />

17 juin 1862<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Je vous communique la lettre ci‐jointe <strong>de</strong> M. Grillon, oncle <strong>de</strong> la future <strong>de</strong> M. Dup...,<br />

en vous priant <strong>de</strong> me la renvoyer, poste pour poste, <strong>avec</strong> vos observations franches sur ce<br />

brave jeune homme. Toutes les remarques <strong>de</strong> M. Grillon sont parfaitement justes et ce ne<br />

sont pas les seules quʹon pût faire; après ces <strong>de</strong>ux entrevues, jʹavoue que je me suis <strong>de</strong>‐<br />

mandé moi‐même si ce jeune homme était seulement ce quʹon appelle un bon garçon, ce<br />

qui nʹexclut ni lʹégoïsme, ni la sécheresse du cœur; ou sʹil était vraiment un homme <strong>de</strong><br />

cœur, généreux, bienveillant, capable <strong>de</strong> sʹoublier pour sʹoccuper <strong>de</strong>s autres, affectueux,<br />

susceptible dʹattentions délicates et <strong>de</strong> la sollicitu<strong>de</strong> que lʹintimité <strong>de</strong> la famille <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />

pour que la vie y soit bonne, dans lʹordre et selon Dieu. Jʹavais quelques doutes déjà, ils se<br />

sont accrus; je ne voudrais pas avancer dans cette affaire, où lui‐même semble aller assez<br />

peu résolument, sans avoir la conscience tranquille sur un point si important. Je passe sur<br />

les imperfections <strong>de</strong> la tête qui me semble laisser à désirer, mais le cœur, quel est‐il? Cʹest<br />

là ma question. Le défaut dʹéducation, <strong>de</strong> politesse, <strong>de</strong> formes vient‐il <strong>de</strong> là ou dʹailleurs?<br />

Répon<strong>de</strong>z‐moi, cher ami, vous qui le connaissez mieux que moi; jʹattends votre réponse<br />

poste pour poste.<br />

Le f. Vankenhove trouve votre jeune ouvrier bien jeune, il nʹa pourtant fait aucune<br />

observation. Jʹen ai dit un mot à M. Hello, lui <strong>de</strong>mandant: “Ce jeune homme a‐t‐il <strong>de</strong> la<br />

tête, est‐il capable <strong>de</strong> porter le far<strong>de</strong>au dʹun ménage?” Il ne mʹa pas paru bien certain du<br />

fait; examinez la chose <strong>de</strong>vant Dieu, cʹest affaire grave.<br />

Mille affections en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Renvoyez‐moi la lettre <strong>de</strong> M. Grillon.<br />

Jʹécris à M. Halluin pour lui communiquer les observations <strong>de</strong> M. Hello sur le mo‐<br />

ment <strong>de</strong> la première communion dʹArras.<br />

841 à M. Halluin<br />

Cérémonies <strong>de</strong> première communion. Etat <strong>de</strong>s santés.<br />

Vaugirard, 17 juin 1862<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie une petite lettre que mʹécrit M. Hello, où il se montre très désireux<br />

<strong>de</strong> vous assister pour votre retraite, mais en faisant difficulté pour le jour où se doit faire<br />

votre première communion. Voyez si vous pouvez vous entendre <strong>avec</strong> lui, écrivez‐lui, au<br />

plus tôt.<br />

M. Faÿ ne peut se rendre à Arras, ayant lui‐même notre première communion <strong>de</strong><br />

Vaugirard le 3 juillet. Si vous ne vous arrangiez pas <strong>avec</strong> M. Hello, je verrais si M. Lantiez<br />

peut se rendre près <strong>de</strong> vous, je ne lui en ai pas encore parlé. Pour M. Braun, le <strong>de</strong>rnier ve‐<br />

nu, je ne sais pas encore assez sʹil a <strong>de</strong>s matériaux pour une retraite <strong>de</strong> première commu‐<br />

nion.<br />

910


Adieu, cher Monsieur lʹabbé, soignez‐vous bien, donnez‐moi particulièrement <strong>de</strong>s<br />

nouvelles détaillées <strong>de</strong> votre santé quand vous mʹécrirez. Je suis resté peiné <strong>de</strong> vous avoir<br />

vu si souffrant à votre <strong>de</strong>rnier voyage.<br />

Je comprends que la perte <strong>de</strong> votre frère peut vous obliger à surveiller un peu les af‐<br />

faires <strong>de</strong> ses enfants. Je me repose pleinement sur vous pour le faire dans la mesure que le<br />

besoin <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ra et que voudra aussi la charge ordinaire qui pèse sur vous.<br />

Je vous embrasse cordialement <strong>avec</strong> tous nos frères et suis affectueusement en N.S.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

841‐1 aux Amis <strong>de</strong> Vaugirard<br />

Faire‐part pour une première communion.<br />

Maison <strong>de</strong>s Orphelins <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul<br />

sous le patronage <strong>de</strong> M gr lʹArchevêque <strong>de</strong> Paris<br />

Paris‐Vaugirard, le 20 juin 1862<br />

M.,<br />

Vous êtes prié dʹassister à la première communion <strong>de</strong> nos enfants qui aura lieu le<br />

jeudi 3 juillet prochain.<br />

A 8h. très précises, Messe et Communion, à 2 h., vêpres, instruction, rénovation <strong>de</strong>s<br />

vœux du baptême, procession et salut.<br />

Votre présence à cette solennité sera, pour nos enfants, un précieux encouragement.<br />

Recevez, M. , lʹassurance <strong>de</strong> nos sentiments respectueux et dévoués.<br />

Le Supérieur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Priez pour nos enfants, s.v.p.<br />

842 à M. Decaux<br />

Souhaits <strong>de</strong> fête. Essai <strong>de</strong> fondation dʹun patronage à Chaville.<br />

Vaugirard, 27 juin 1862<br />

Mon bien bon ami,<br />

Je me joins à nos ff. <strong>de</strong> Nazareth et à tous ceux qui vous aiment (le nombre en est<br />

grand) pour remercier le grand S t Paul <strong>de</strong> vous avoir pris sous sa protection; je ne manque‐<br />

rai pas <strong>de</strong> le prier très instamment, afin quʹil vous continue lʹassistance quʹil vous a si visi‐<br />

blement donnée dans les circonstances graves où vous vous êtes trouvé. Que nous som‐<br />

mes heureux, mon bon ami, <strong>de</strong> ne jamais travailler seuls, et <strong>de</strong> penser et <strong>de</strong> voir que Dieu,<br />

ses anges et ses saints coopèrent <strong>avec</strong> nous; restons bien dans cette aimable et puissante<br />

compagnie et espérons bien <strong>de</strong> lʹavenir.<br />

Jʹoffrirai le S t Sacrifice lundi à votre intention, tout heureux dʹavoir un si précieux<br />

moyen <strong>de</strong> vous témoigner toute mon affection et tout mon dévouement.<br />

Je vous remercie une fois <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> toute votre cordiale bienveillance pour notre<br />

petite famille et vous réitère aussi mes sentiments dʹinviolable attachement en N.S.<br />

Votre Confrère et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

911


P. S. Ceux <strong>de</strong>s ff. <strong>de</strong> notre maison <strong>de</strong> Vaugirard qui ne sont pas <strong>de</strong> service lʹaprès‐<br />

midi du dimanche et qui viennent à Chaville vont essayer, à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> instante <strong>de</strong> M. le<br />

Curé, <strong>de</strong> faire une sorte <strong>de</strong> patronage pour les enfants du pays; M. Grosjean, toujours bon<br />

comme vous le savez, paraît disposé à prêter un local à sa ferme. MM. Tulasne prêteront<br />

appui à cet essai quʹon rattachera, sʹil prend consistance, à la Société; je vous tiendrai au<br />

courant <strong>de</strong> ce qui se pourra faire, ce sera nécessairement un bien fort limité, mais Dieu ne<br />

dédaigne rien <strong>de</strong> ce quʹon fait pour les âmes, les âmes <strong>de</strong> Chaville et <strong>de</strong>s environs sont<br />

bien dignes <strong>de</strong> compassion.<br />

Félicitez pour moi, à lʹoccasion, M. Baudon <strong>de</strong> la naissance <strong>de</strong> son fils; je nʹen ai été<br />

informé quʹindirectement, ce qui ne mʹempêche pas <strong>de</strong> prendre part à sa joie.<br />

843 à M. Caille<br />

Etat <strong>de</strong>s santés. Mouvement <strong>de</strong> personnel. Admission dʹun postulant ayant <strong>de</strong>s charges dans le mon<strong>de</strong>.<br />

Vaugirard, 5 juillet 1862<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai bien tardé à vous dire que nous avions appris <strong>avec</strong> une vive sollicitu<strong>de</strong> votre<br />

maladie dʹabord, puis ensuite celle <strong>de</strong> notre f. <strong>Jean</strong> [Gauffriau]. Nous avons reçu, il est<br />

vrai, presque immédiatement <strong>de</strong>s nouvelles rassurantes sur vous; je nʹeusse pas toutefois<br />

négligé <strong>de</strong> vous écrire quelques mots dʹencouragement et <strong>de</strong> sympathie affectueuse, si un<br />

concours <strong>de</strong> circonstances ne se fussent jetées à la traverse en ce moment. Jʹai été heureux<br />

dʹapprendre par M. Carment que vous étiez maintenant remis et que lʹindisposition <strong>de</strong> M.<br />

<strong>Jean</strong> ne paraissait pas avoir la même gravité quʹavait eue la vôtre. Je vous prie néanmoins,<br />

mon bon ami, <strong>de</strong> mʹécrire bientôt pour me donner quelques détails sur son état. Jʹavais<br />

pensé, comme je vous lʹai dit à votre <strong>de</strong>rnier voyage ici, à le faire revenir près <strong>de</strong> nous<br />

pour se reposer un peu avant la reprise sérieuse <strong>de</strong> ses étu<strong>de</strong>s théologiques; son indisposi‐<br />

tion rendra ce repos encore plus opportun; je pense que vers la fin du mois, plus tôt si<br />

vous le jugez mieux encore, il pourrait revenir à Vaugirard. Jʹai pourtant besoin <strong>de</strong> voir<br />

<strong>avec</strong> nos frères, au préalable, comment nous le pourrons faire remplacer; je vous dirai pro‐<br />

chainement quel moyen nous paraît être le meilleur; nos ressources restent toujours fai‐<br />

bles, eu égard à nos besoins, soit parce que nous sommes fort chargés, soit parce que la<br />

plupart <strong>de</strong> nos sujets sont fort jeunes; nous aviserons <strong>de</strong> notre mieux à ne point vous lais‐<br />

ser en souffrance.<br />

Nos enfants ont fait ici, jeudi, leur première communion; je ne sais si on avait pris<br />

soin <strong>de</strong> les recomman<strong>de</strong>r aux prières <strong>de</strong> votre maison; je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> au moins, à vous<br />

et à votre entourage, <strong>de</strong> prier pour leur persévérance; ils étaient en très bonne disposition<br />

et nous ont donné beaucoup <strong>de</strong> consolation; ils étaient en tout 53, tant renouvelants que<br />

communiants pour la première fois.<br />

Nous allons assez bien ici et au <strong>de</strong>hors aussi; lʹabbé Hello est à Arras où il donne la<br />

retraite <strong>de</strong> première communion. Notre nouvel ecclésiastique, lʹabbé Braun, prend bien sa<br />

position parmi nous, mais il est déjà presque entièrement absorbé par lʹœuvre <strong>de</strong>s Alle‐<br />

mands à Grenelle. Un autre [V. Marty], très aimable et capable, se présente; malheureuse‐<br />

ment, dans sa confiance et par un amour filial peut‐être trop peu réfléchi, il a répondu<br />

pour son père jusquʹà concurrence dʹune somme assez considérable; je crains bien quʹil nʹy<br />

912


ait là un obstacle difficile à surmonter, parce quʹil ne pourrait guère être levé quʹen impo‐<br />

sant à la Communauté <strong>de</strong>s sacrifices assez lourds; nous examinerons toutefois la chose <strong>de</strong>‐<br />

vant Dieu parce que, <strong>de</strong> lʹavis <strong>de</strong> son directeur, homme <strong>de</strong>s plus éclairés, la place <strong>de</strong> ce<br />

jeune et pieux jeune prêtre serait au milieu <strong>de</strong> nous; si le Seigneur y met la main, les obsta‐<br />

cles, quoique graves, ne pèseront pas assez pour empêcher lʹunion <strong>de</strong> se consommer. Dans<br />

le cas où ce sujet, vraiment <strong>de</strong> choix, dʹun caractère très souple et très conciliant, fort pieux<br />

surtout, parlant bien, vous serait <strong>de</strong>stiné, trouverez‐vous possible <strong>de</strong> vous imposer quel‐<br />

que sacrifice, pendant <strong>de</strong>ux ou trois ans, pour ai<strong>de</strong>r à le libérer <strong>de</strong> ses engagements? M lle <strong>de</strong><br />

Lupel et le bon Monsieur si bienveillant (jʹoublie son nom) ne feraient‐ils pas aussi quelque<br />

sacrifice pour vous assurer un si précieux avantage? Je serais bien aise que vous examiniez<br />

la chose pour que je puisse combiner les divers moyens qui seraient à réaliser si nous <strong>de</strong>‐<br />

vions définitivement résoudre affirmativement la question <strong>de</strong> son entrée parmi nous.<br />

Adieu, mon bien bon ami, mille affections à nos frères, au f. <strong>Jean</strong> tout particulière‐<br />

ment; je voulais lui écrire <strong>de</strong>ux mots, je crains <strong>de</strong> nʹen point trouver le temps aujourdʹhui,<br />

le cœur y est, mais je <strong>de</strong>viens lent dans lʹaction; je suis aussi plus chargé ici, lʹabbé Lantiez<br />

étant maintenant à Grenelle.<br />

Croyez bien, mon bon ami, à tous mes sentiments <strong>de</strong> tendre affection en N.S.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. La somme pour laquelle le bon abbé a répondu dépasse 8.000f. Il gar<strong>de</strong>rait la<br />

responsabilité <strong>de</strong> la <strong>de</strong>tte et se reconnaîtrait régulièrement débiteur <strong>de</strong> la Communauté<br />

pour autant quʹelle lui ferait <strong>de</strong>s avances; peut‐être, en réunissant nos moyens, arriverions‐<br />

nous à couvrir cette <strong>de</strong>tte si courageusement contractée.<br />

844 à M. Risse<br />

Eloge <strong>de</strong>s Messins. Nouvelles <strong>de</strong>s Œuvres; difficultés à Grenelle. Envoi <strong>de</strong> M. Gauffriau à Metz.<br />

Vaugirard, 8 juillet 1862<br />

Bien cher abbé et fils en N.S.,<br />

Je pense que tout va bien dans notre bon pays <strong>de</strong> Metz; jʹaime ce bon peuple qui<br />

vous fait si aimable accueil; jʹai été touché profondément <strong>de</strong>s détails que nous a envoyés<br />

notre f. Georges [<strong>de</strong> Lauriston]; jʹai lu sa lettre à toute la Communauté, ainsi que le journal<br />

qui contenait aussi le narré <strong>de</strong> la fête; certes, je suis heureux <strong>de</strong> voir votre œuvre si aimée<br />

et si cordialement traitée, mais je ne le suis pas moins <strong>de</strong> voir quʹil y a encore bien <strong>de</strong>s<br />

cœurs sympathiques à tout ce qui est honnête et chrétien; quʹil y a <strong>de</strong>s ressources dans no‐<br />

tre France pour la générosité et le dévouement, et comme on mènerait loin ce peuple dans<br />

la foi et lʹamour <strong>de</strong>s nobles choses si on savait prendre et cultiver la naturelle disposition<br />

<strong>de</strong>s cœurs!<br />

Ici, sans faire <strong>de</strong> si belles choses, nous allons toujours notre train accoutumé. La<br />

première communion <strong>de</strong> nos enfants à Vaugirard a été parfaite; 53 formaient le troupeau<br />

tant <strong>de</strong>s nouveaux communiants que <strong>de</strong>s renouvelants. Amiens et Arras vont bien; M. <strong>Jean</strong><br />

et M. Caille aussi viennent pourtant à Amiens, <strong>de</strong> subir lʹun après lʹautre une maladie <strong>de</strong><br />

quelque durée. M. Hello arrive <strong>de</strong>main dʹArras, où il était allé donner la retraite <strong>de</strong> la<br />

première communion pour nos enfants. A Grenelle, guerre déclarée <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> M. le<br />

913


Curé qui vient <strong>de</strong> lancer un manifeste violent contre nous; la chose est portée à lʹArchevê‐<br />

ché où, je pense, nous aurons gain <strong>de</strong> cause, puisque nous nʹavons fait jusquʹici que mar‐<br />

cher pas à pas sous sa direction.<br />

M. Braun continue à bien prendre position, bien plus incliné vers Grenelle que vers<br />

Vaugirard, mais bienveillant et flexible jusquʹici, sachant être aimable pour tous; jʹai bonne<br />

espérance pour lʹavenir.<br />

Je vous serais obligé <strong>de</strong> voir si, définitivement, nous pourrions espérer que M gr <strong>de</strong><br />

Metz autoriserait lʹabbé <strong>Jean</strong> [Gauffriau], tonsuré et ayant fait, vous le savez, une première<br />

année <strong>de</strong> théologie au Séminaire St‐Sulpice, à continuer ses étu<strong>de</strong>s au Séminaire <strong>de</strong> Metz<br />

en <strong>de</strong>meurant chez vous. Je pourrais avoir cette facilité à Arras, mais je lʹaimerais mieux<br />

chez vous, où la vie <strong>de</strong> communauté est bien mieux ou au moins bien plus facilement ob‐<br />

servée. M. <strong>Jean</strong> est dʹun caractère charmant et ne nous a pas donné le plus petit sujet <strong>de</strong><br />

plainte, <strong>de</strong>puis bientôt 4 ans quʹil est parmi nous. Il apporterait un très bon certificat <strong>de</strong> St‐<br />

Sulpice, <strong>avec</strong> toutes les attestations désirables <strong>de</strong> ma part; je payerais pour lui une petite<br />

pension chez vous, afin <strong>de</strong> ne point charger trop notre chère communauté <strong>de</strong> Metz. Je<br />

vous serai obligé <strong>de</strong> me dire ce que vous verrez possible <strong>de</strong> ce côté, dès que vous aurez pu<br />

consulter M gr ou MM. du Séminaire.<br />

Toute la famille vous assure <strong>de</strong> ses tendres sentiments et soupire après le moment<br />

où vous viendrez prendre un peu <strong>de</strong> repos ici; vous rentrerez à Vaugirard comme chez<br />

vous, aussi à lʹaise, aussi ouvert que si vous ne lʹaviez jamais quitté; cʹest la récompense<br />

dʹun sacrifice franchement consommé et dʹun noviciat fait, brièvement sans doute, mais<br />

franchement et en sincérité <strong>de</strong> cœur.<br />

Je vous embrasse tous en J. et M.<br />

Votre ami et Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

845 à M. Halluin<br />

Souhaits <strong>de</strong> fête aux quatre Henry <strong>de</strong> la communauté dʹArras.<br />

Vaugirard, 15 juillet 1862<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je passe par‐<strong>de</strong>ssus un amas <strong>de</strong> lettres entassées sur ma table et attendant réponse,<br />

pour vous écrire ces <strong>de</strong>ux lignes à lʹoccasion <strong>de</strong> la St Henry . Nous nʹaurions pu aisément<br />

lʹoublier, puisque quatre souvenirs ensemble [MM. Halluin, Planchat, Guillot et Sadron] se<br />

présentent à nous dans votre maison. Aussi proportionnons‐nous lʹintérêt que nous ins‐<br />

pire cette fête au nombre <strong>de</strong>s amis que St Henry a pris chez nous sous sa protection. Nos<br />

frères nʹont pas manqué <strong>de</strong> prier à cette intention et, pour ma part, je lʹai mise au premier<br />

rang <strong>de</strong> mes recommandations aujourdʹhui au St Sacrifice. Dieu, je lʹespère, exaucera nos<br />

vœux et bénira vous, cher Monsieur lʹabbé, et nos autres Henry <strong>avec</strong> vos enfants et tout ce<br />

qui vous intéresse. Il sait que vous nʹavez dʹattache quʹà ce qui Le regar<strong>de</strong>, Il augmentera<br />

ses grâces pour augmenter en même temps vos moyens <strong>de</strong> Le glorifier. Jʹajoute quʹen ce<br />

qui nous concerne, nous sentons aussi accroître <strong>de</strong> plus en plus <strong>avec</strong> les années la<br />

confiance, lʹaffection et cette cordiale union que nous avons consommée <strong>de</strong>vant Dieu pour<br />

sa louange et pour notre sanctification.<br />

914


Assurez, je vous prie, cher Monsieur lʹabbé, nos Henry <strong>de</strong> tous nos sentiments <strong>de</strong><br />

tendre attachement en N.S. et croyez au dévouement inaltérable <strong>de</strong><br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je joins ici 4 petites images pour les quatre Henry. Je consens volontiers à la pe‐<br />

tite souscription que me propose M. Planchat pour lʹéglise dʹAmettes.<br />

846 à M. Pavie<br />

Joie et union <strong>de</strong> prières à lʹoccasion du mariage du fils aîné <strong>de</strong> V. Pavie.<br />

Vaugirard, 15 juillet 1862<br />

Mon bien bon ami,<br />

Il est bien inutile <strong>de</strong> vous assurer que ni M. Myionnet, ni moi, nʹoublierons ce que la<br />

journée <strong>de</strong> <strong>de</strong>main a dʹintéressant pour vous et pour votre chère famille. Mais nous nous<br />

unissons par nos félicitations à la joie <strong>de</strong> votre cœur <strong>de</strong> père, à celle aussi <strong>de</strong> votre chère<br />

femme dont nous comprenons, au moins un peu, tous les sentiments dans cette solennelle<br />

occasion. Nous nous unissons surtout à vos prières pour obtenir dʹabondantes bénédic‐<br />

tions sur les jeunes époux. Je les recomman<strong>de</strong>rai tout particulièrement <strong>de</strong>main au St Sacri‐<br />

fice; jʹespère que lʹar<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> ma prière la portera jusquʹau cœur <strong>de</strong> Dieu.<br />

Mille respects et affections pour votre cher entourage et pour vous, <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> M.<br />

Myionnet comme <strong>de</strong> la mienne.<br />

Votre tout affectionné ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Ci une petite image pour votre chère fille, en souvenir dʹun ami quʹelle nʹa pas en‐<br />

core vu. Nous embrassons votre cher aîné.<br />

846‐1 aux Amis <strong>de</strong> Vaugirard<br />

Invitation officielle à la distribution <strong>de</strong>s prix <strong>de</strong> lʹOrphelinat <strong>de</strong> Vaugirard.<br />

Maison <strong>de</strong>s Orphelins <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul<br />

sous le patronage <strong>de</strong> M gr lʹArchevêque <strong>de</strong> Paris<br />

Chemin du Moulin, 1<br />

Paris‐Vaugirard<br />

Le 24 juillet 1862<br />

M.,<br />

Vous êtes prié dʹassister à la distribution <strong>de</strong>s Prix qui aura lieu dans notre établis‐<br />

sement le lundi 4 août prochain, à 2 heures précises.<br />

Votre présence à cette solennité sera, pour nous, un honneur vivement senti, et pour<br />

nos enfants, un précieux encouragement.<br />

Recevez, M…, lʹassurance <strong>de</strong> mes sentiments respectueux et dévoués.<br />

Le Supérieur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

915


847 <strong>de</strong> M. Gauffriau à M. Caille<br />

P. S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Envoi dʹun jeune frère à Amiens.<br />

Vaugirard, 25 juillet 1862<br />

Bien cher frère en N.S.,<br />

Jʹai reçu ce matin votre bonne lettre qui mʹa fait beaucoup <strong>de</strong> plaisir.<br />

Le voyage <strong>de</strong> Paris mʹa un peu fatigué, mais je commence à me remettre et jʹespère que le<br />

temps <strong>de</strong> convalescence ne sera pas <strong>de</strong> longue durée.<br />

Il me reste à vous remercier <strong>de</strong> tous les bons soins que vous avez eu la bonté <strong>de</strong> me prodi‐<br />

guer pendant le temps que jʹai eu le bonheur <strong>de</strong> passer près <strong>de</strong> vous, et principalement pendant ce‐<br />

lui <strong>de</strong> ma maladie.<br />

Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> bien sincèrement pardon <strong>de</strong> toutes les peines que jʹai pu vous faire. Je<br />

vous assure que çà a été bien involontaire.<br />

Jʹai appris <strong>avec</strong> peine que Mlle Adélaï<strong>de</strong> sʹétait trouvée indisposée, mais heureusement le<br />

mé<strong>de</strong>cin a fait espérer quʹelle nʹen aurait que pour un jour. Je la remercie bien sincèrement <strong>de</strong> tous<br />

les bons soins quʹelle mʹa prodigués pendant ma maladie. Jʹespère que son ar<strong>de</strong>nte charité lui aura<br />

fait oublier tous les petits sujets <strong>de</strong> peine que jʹaurai pu lui causer.<br />

Je me recomman<strong>de</strong> bien à ses bonnes prières; pour moi, je ne lʹoublierai pas.<br />

Je termine, bien cher frère, en me recommandant à vos ferventes prières. Je vous embrasse<br />

dans les saints Cœurs <strong>de</strong> J.et <strong>de</strong> M.<br />

Votre frère très affectionné en N.S.<br />

f. <strong>Jean</strong><br />

Je me recomman<strong>de</strong> bien aux bonnes prières <strong>de</strong> M. Marcaire et <strong>de</strong> M. <strong>Léon</strong> [Guichard]; je les<br />

embrasse <strong>de</strong> tout mon cœur dans les S ts Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

P.S. Cette lettre, mon bien bon ami et fils en N.S., ne sʹest pas trouvée prête quand<br />

M. Rémond est parti, je vous lʹenvoie donc particulièrement.<br />

Jʹai tout lieu dʹespérer que vous serez satisfait <strong>de</strong> votre nouveau frère, je nʹen ai<br />

point trouvé qui pût mʹinspirer plus <strong>de</strong> confiance et pût vous rendre plus <strong>de</strong> services. Il est<br />

excellent <strong>de</strong> cœur, plein <strong>de</strong> bonne volonté, intelligent et se prêtant à tout pour les surveil‐<br />

lances comme pour lʹordre intérieur ou les choses du <strong>de</strong>hors; il ira au mieux, je lʹespère,<br />

<strong>avec</strong> nos ff. Marcaire et <strong>Léon</strong> [Guichard].<br />

Je vous embrasse tous bien cordialement.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹai bien regretté que la précipitation <strong>de</strong> votre départ mʹait privé <strong>de</strong> la joie <strong>de</strong> vous<br />

voir à ce moment; jʹaurais désiré aussi remercier encore M lle Adélaï<strong>de</strong> <strong>de</strong> toutes les peines<br />

quʹelle a prises pour vous et pour M. <strong>Jean</strong>. Jʹai un chapelet que la Supérieure <strong>de</strong>s Dames <strong>de</strong><br />

Nazareth vient <strong>de</strong> rapporter <strong>de</strong> Jérusalem, je me proposais <strong>de</strong> le donner à cette bonne <strong>de</strong>‐<br />

moiselle, je le lui enverrai à la prochaine occasion.<br />

A vous <strong>de</strong> cœur en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

916


848 à M. Caille<br />

Deman<strong>de</strong>s <strong>de</strong> subsi<strong>de</strong>s pour libérer un postulant <strong>de</strong> ses <strong>de</strong>ttes.<br />

30 juillet 1862<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je rassemble assez péniblement les 6.000f qui me sont nécessaires pour libérer M.<br />

lʹabbé Marty <strong>de</strong>s difficultés financières quʹil a acceptées pour son père; nous nʹarriverons<br />

pas absolument à parfaire cette somme <strong>avec</strong> les dons du <strong>de</strong>hors, et la Communauté aura<br />

quelques sacrifices propres à sʹimposer. La maison <strong>de</strong> Nazareth sʹest exécutée <strong>avec</strong> beau‐<br />

coup <strong>de</strong> bon vouloir et, malgré sa pauvreté, mʹa donné pour cette dépense 600f provenant<br />

dʹun ouvrage que M. Maignen a vendu. Jʹai pensé, mon bon ami, que lʹintérêt ici en ques‐<br />

tion vous paraîtrait assez grave pour motiver <strong>de</strong> votre part un petit concours qui allège la<br />

charge pesant sur nous. Si vous pouviez me donner 300f sans trop vous gêner, je vous en<br />

serais reconnaissant <strong>avec</strong> tous nos frères du Conseil qui ont unanimement décidé que nous<br />

<strong>de</strong>vions nous attacher M. Marty. Je ne puis prévoir absolument quelle <strong>de</strong>stination il aura;<br />

je crains quʹil ne soit obligé dʹaller trois mois au moins pour remplir provisoirement une<br />

place <strong>de</strong> précepteur que lui avait donnée lʹArchevêché pour lʹai<strong>de</strong>r à se libérer <strong>de</strong> la <strong>de</strong>tte<br />

quʹil a acceptée; il <strong>de</strong>vra ensuite vivre un peu <strong>de</strong> temps dans la Communauté pour sʹy at‐<br />

tacher et en prendre lʹesprit; tout cela peut nous mener bien loin et ne laisse guère <strong>de</strong> claire<br />

prévision.<br />

Adieu, mon bon ami, croyez à tous mes sentiments <strong>de</strong> tendre affection en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

849 à M. Halluin<br />

Voyage à prévoir pour le frère Guillot.<br />

Vaugirard, 30 juillet 1862<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Notre f. Guillot mʹécrit pour me dire le vif désir quʹil aurait <strong>de</strong> faire une petite visite<br />

à une sœur qui lui a presque servi <strong>de</strong> mère et quʹil nʹa pas vue <strong>de</strong>puis 7 ans. Cette bonne<br />

<strong>de</strong>moiselle est très chrétienne et a encouragé la vocation <strong>de</strong> son frère. Il a, <strong>de</strong> son côté, as‐<br />

sez <strong>de</strong> piété et <strong>de</strong> gravité pour que ce voyage ne lui soit quʹun repos et une consolation. Je<br />

ne verrais pas, pour ma part, dʹinconvénient à lui donner quelques jours pour réaliser ce<br />

projet.<br />

Les frais <strong>de</strong> voyage seront nécessairement un peu notables. Je crois que sa sœur, qui<br />

a un peu dʹaisance, payerait volontiers le retour. Pour lʹaller, jʹen partagerais volontiers la<br />

charge <strong>avec</strong> vous; <strong>de</strong> cette façon, elle <strong>de</strong>viendrait supportable pour tous.<br />

Tous nos frères vous assurent <strong>avec</strong> moi <strong>de</strong> leur respectueuse affection. M. Tharsice<br />

[dʹArbois] écrira à M. Planchat, comme le désire ce <strong>de</strong>rnier.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je crois quʹun nouveau prêtre, M. lʹabbé Marty, très connu <strong>de</strong> nous, va sʹattacher à la<br />

Communauté.<br />

Cauroy va bien.<br />

917


850 à M. Guillot<br />

Autorisation dʹune visite <strong>de</strong> famille.<br />

30 juillet [1862]<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Jʹécris à M. Halluin pour donner consentement à votre voyage sʹil nʹest pas impossi‐<br />

ble, eu égard aux travaux <strong>de</strong> votre maison.<br />

Je souhaite que ce repos vous soit bon, quʹil console votre sœur et ne vous donne<br />

aucune dissipation nuisible; je prierai Dieu afin que sa grâce vous soutienne et que votre<br />

bon ange vous accompagne.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

851 à M. Decaux331 MLP. envoie <strong>de</strong>ux frères à lʹŒuvre <strong>de</strong> Ste‐Rosalie.<br />

Vaugirard, 1er août 1862<br />

Mon bien bon ami,<br />

En cherchant bien, je crois que jʹarrive à trouver <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> nos jeunes gens, dont lʹun<br />

nʹest pas sans consistance, que je pourrai envoyer le dimanche à Ste ‐Rosalie; je voudrais en<br />

avertir le Prési<strong>de</strong>nt [M. <strong>de</strong> Coulonges] qui avait eu lʹobligeance <strong>de</strong> me venir voir et <strong>de</strong><br />

mʹécrire à ce sujet; malheureusement, jʹai égaré son adresse, soyez donc assez bon pour<br />

lʹavertir que dimanche je lui enverrai nos <strong>de</strong>ux jeunes frères.<br />

Votre tout dévoué ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

852 à M. <strong>de</strong> Varax332 Témoignages dʹaffection. Pressentiment dʹavenir. MLP. compare son jeune correspondant à M. Maignen. Etu‐<br />

dier ses points faibles et ses attraits spirituels, à la lumière <strong>de</strong> lʹEsprit Saint.<br />

Chaville, 12 août 1862<br />

Bien cher Monsieur et fils en N.S.,<br />

Vous mʹappelez mon Père, je vous réponds mon fils, oui, me voici, sʹil y a un peu en<br />

vous <strong>de</strong> sentiment filial à mon égard, il mʹest aisé <strong>de</strong> le dire, il y a au‐<strong>de</strong>dans <strong>de</strong> moi pour<br />

vous tout ce qui unit le père au fils, le dévouement, la tendre affection, le vif désir dʹai<strong>de</strong>r,<br />

dʹassister, la sollicitu<strong>de</strong>, lʹattentive préoccupation <strong>de</strong> lʹavenir.<br />

Jʹai presque besoin <strong>de</strong> vous assurer <strong>de</strong> tous ces sentiments, cher Monsieur, car jʹai<br />

bien tardé à vous répondre, je comptais les jours à regret qui sʹécoulaient lʹun après lʹautre<br />

<strong>de</strong>puis la réception <strong>de</strong> votre lettre, mais aucun dʹeux ne mʹoffrait un moment disponible<br />

pour vous écrire; on éprouve, à mon âge, en voyant passer la vie, ce quʹon sent dans les<br />

331 Ajout en tête <strong>de</strong> M. Decaux : « Communiqué à M. <strong>de</strong> Coulonges <strong>avec</strong> prière <strong>de</strong> me rendre. Paul Decaux ».<br />

332 Né à Chalon-sur-Saône en 1841, Bernard Riverieulx <strong>de</strong> Varax avait collaboré à l’Œuvre <strong>de</strong> Nazareth. Homme <strong>de</strong> talent et<br />

d’envergure, il conquiert l’amitié <strong>de</strong> MLP. qui l’accueillera à Vaugirard le 7 avril 1863. Il sera ordonné prêtre à la fin <strong>de</strong> 1866. En<br />

1871, malgré son jeune âge, (29 ans), il sera choisi par MLP. pour être son vicaire général, charge qu’il assumera <strong>avec</strong> compétence<br />

et générosité jusqu’à l’élection du père Lantiez, le 8 décembre 1874.<br />

918


voyages en chemin <strong>de</strong> fer, les paysages glissent et sʹeffacent lʹun après lʹautre; on sʹarrête‐<br />

rait bien ici ou là, mais rien ne <strong>de</strong>meure, on est déjà loin, emporté sans relâche à travers<br />

lʹespace. Dépêchez‐vous <strong>de</strong> vivre et <strong>de</strong> noblement vivre, bien cher ami, pendant les courts<br />

instants quʹon appelle la jeunesse; entre le passé et lʹavenir, on jouit alors <strong>de</strong> lʹun et <strong>de</strong> lʹau‐<br />

tre <strong>avec</strong> une si merveilleuse puissance <strong>de</strong> souvenir et dʹespérance quʹon semble accroître la<br />

durée du présent, mais cela dure bien peu; la vie, a dit je ne sais quel moraliste, cʹest un<br />

pas entre le berceau et la tombe. Heureusement, ce pas suffit et peut être rempli par <strong>de</strong> si<br />

précieuses choses quʹelles peuvent opérer <strong>de</strong> grands biens, laisser un long souvenir et ga‐<br />

gner, à qui les a faites, une existence sans fin, une félicité éternelle.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> votre chère lettre, elle mʹa vivement touché; lʹar<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> votre<br />

jeune âme si confiante, si généreuse dans ses aspirations, me remue comme si je nʹavais<br />

que vos 20 ans, et jʹai besoin <strong>de</strong> me raisonner un peu pour ne pas trop cé<strong>de</strong>r à lʹentraîne‐<br />

ment; il me semblait en conversant <strong>avec</strong> vous, il me semble encore en lisant vos lettres<br />

(jʹétais là, à Nazareth, quand M. Maignen a reçu la sienne) que je recommence mes intaris‐<br />

sables épanchements <strong>avec</strong> ce <strong>de</strong>rnier, quand il avait lʹâge et la jeunesse <strong>de</strong> cœur qui fait au‐<br />

jourdʹhui votre trésor. Je vous lʹai dit, cher Monsieur, je croyais le retrouver en vous et je<br />

recommençais les jours dʹautrefois, comme un grand‐père qui rajeunit <strong>avec</strong> son petit‐fils.<br />

Est‐ce pur effet <strong>de</strong> sentiment, est‐ce un indice provi<strong>de</strong>ntiel? Lʹavenir le dira. Quant à pré‐<br />

sent, je laisse faire, je ne résiste point à ce qui est doux pour moi et où je ne trouve rien que<br />

le Dieu <strong>de</strong> charité puisse condamner.<br />

Si vous mʹécrivez <strong>de</strong> nouveau, bien cher Monsieur, comme jʹy compte bien, vous<br />

aurez soin <strong>de</strong> me dire bien au long si vous suivez mes petites recommandations en sens<br />

divers, et vous me direz toujours tout ce qui se passe en vous, sans craindre <strong>de</strong> me lasser.<br />

Vous avez laissé tomber le mot dʹindividualisme; si cette tendance était en vous, élevez‐la,<br />

bien cher ami, en la faisant servir à vous étudier vous‐même, pour vous bien connaître,<br />

pour voir vos points faibles et aussi les attraits spiri‐<br />

tuels qui sont en vous, et enfin lʹaction intérieure du<br />

divin Esprit dans votre âme; je ne veux renoncer au<br />

droit que vous mʹavez donné <strong>de</strong> lire dans ce livre que<br />

si vous le fermez vous‐même; je crois quʹil nʹen sera rien.<br />

Je tar<strong>de</strong>rai moins, je lʹespère, une autre fois à vous<br />

écrire; jʹaime mieux dʹordinaire écrire peu, si le temps<br />

me manque, et ne point différer mes réponses; une fois le<br />

premier moment passé, les délais <strong>de</strong>viennent<br />

indéfinis, puis lʹimpression <strong>de</strong> lʹentretien en est<br />

amoindrie. Vaugirard et Nazareth vous gar<strong>de</strong>nt<br />

un tendre souvenir; le moment qui vous ramènera à<br />

Paris sera fêté ici par tous. Comment si peu <strong>de</strong><br />

temps a‐t‐il suffi pour opérer une si intime adhérence<br />

<strong>de</strong>s cœurs? Jʹen trouverais bien <strong>de</strong>s raisons, mais vous<br />

les trouverez <strong>de</strong> votre côté, je lʹespère.<br />

Je mʹunis à la petite prière que fait chaque soir M. Maignen pour vous, un <strong>de</strong> plus<br />

ne gâtera rien. Notre Seigneur a dit: Quand vous serez <strong>de</strong>ux ou trois assemblés en mon<br />

nom, je serai au milieu <strong>de</strong> vous. 333 Quelle douce et divine Parole!<br />

333 Mt 18, 20.<br />

919


Un père a droit dʹembrasser son fils, je vous embrasse donc affectueusement, cher<br />

Monsieur, et suis en J. et M..<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

853 à M. Halluin<br />

Mouvement <strong>de</strong> personnel.<br />

Vaugirard, 19 août 1862<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Jʹai cherché bien attentivement, au moment où la fin <strong>de</strong>s vacances va nous obliger à<br />

recomposer nos classes, si je pouvais, selon vos <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s si bien justifiées, vous envoyer<br />

quelque nouveau frère pour ai<strong>de</strong>r, <strong>avec</strong> M. Sadron, à la conduite <strong>de</strong> la division <strong>de</strong> vos éco‐<br />

liers. La chose nʹest pas sans difficulté, pour la raison que vous avez beaucoup insisté pour<br />

avoir un sujet ayant <strong>de</strong> lʹexpérience et quelque maturité. Les circonstances semblent pour‐<br />

tant favoriser en ce moment un arrangement selon vos vues. Notre frère, Augustin<br />

[Déage], qui faisait la première classe, dirigeait les étu<strong>de</strong>s dans leur ensemble et la disci‐<br />

pline générale, a éprouvé à la fin <strong>de</strong> lʹannée une fatigue assez gran<strong>de</strong> pour avoir une cer‐<br />

taine contention <strong>de</strong> tête qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pour un temps un peu <strong>de</strong> relâche et un emploi moins<br />

absorbant. Il a été quinze jours dans sa famille, il est bien remis, mais le mé<strong>de</strong>cin craint<br />

<strong>avec</strong> nous que les maux <strong>de</strong> tête ne reviennent sʹil reprend lʹensemble <strong>de</strong> sa tâche. Je me dé‐<br />

ci<strong>de</strong>rai donc à vous lʹenvoyer prochainement, assuré que, tout en faisant beaucoup <strong>de</strong> bien<br />

chez vous, il pourra néanmoins trouver avantage à ce changement dʹair et dʹoccupations.<br />

Si rien ne sʹy oppose, je vous lʹenverrai cette semaine; si lʹun <strong>de</strong> nos MM. du Conseil<br />

est libre, il profitera <strong>de</strong> lʹoccasion pour faire une petite visite à Amiens et à Arras.<br />

Je suis à Chaville aujourdʹhui et pour quelques jours peu libre <strong>de</strong> correspondre,<br />

comme je le voudrais, plus à loisir. Je termine donc ici cette lettre, me réjouissant <strong>de</strong> pou‐<br />

voir donner un peu dʹai<strong>de</strong> à vous et à nos frères.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹécrirai à M. Planchat aussitôt que je le pourrai.<br />

854 à M. Baudon<br />

Soumettre au Conseil <strong>de</strong> lʹŒuvre une éventuelle réduction du loyer <strong>de</strong>s Jeunes Ouvriers <strong>de</strong> Nazareth.<br />

Vaugirard, 29 août 1862<br />

Monsieur et Vénéré Confrère,<br />

La lettre que vous mʹavez fait lʹhonneur <strong>de</strong> mʹécrire le 18 <strong>de</strong> ce mois concernant<br />

lʹŒuvre <strong>de</strong>s Jeunes Ouvriers est restée quelques jours à Nazareth; renvoyée à Vaugirard<br />

où je ne me trouvais pas à ce moment, elle mʹa été transmise à Chaville; mais je nʹavais pas<br />

alors près <strong>de</strong> moi MM. Paillé et Maignen, à qui je désirais donner connaissance <strong>de</strong> votre<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> et <strong>de</strong> celle <strong>de</strong> M. Decaux pour la réduction du loyer <strong>de</strong>s Jeunes Ouvriers; il mʹa<br />

donc fallu attendre, pour vous répondre, mon retour ici, lequel ne sʹest effectué que jeudi<br />

920


au soir; je vous prie, Monsieur et vénéré Confrère, dʹexcuser ce retard que jʹeusse sincère‐<br />

ment voulu éviter.<br />

MM. Paillé et Maignen éprouvent bien quelque regret <strong>de</strong> voir lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> la Société,<br />

déjà diminuée pour la maison <strong>de</strong> Nazareth, sur le point <strong>de</strong> lʹêtre <strong>de</strong> nouveau, car les<br />

moyens dʹacquitter le reste <strong>de</strong> la <strong>de</strong>tte sʹamoindrissant ainsi, le moment où toute charge <strong>de</strong><br />

loyer pourrait cesser se trouve par là même ajourné; mais nos frères sont loin <strong>de</strong> vouloir<br />

sʹopposer à ce que vous et M. Decaux croyez nécessaire dans lʹintérêt général <strong>de</strong>s Œuvres<br />

et ils se conformeront à la décision qui aura été prise à ce sujet. Ils pensent toutefois quʹil<br />

serait désirable que la question fût soumise au Conseil <strong>de</strong> lʹŒuvre <strong>de</strong> Nazareth qui a pris<br />

un si vif intérêt à tout ce qui la regar<strong>de</strong> et quʹon ne pourrait convenablement laisser en <strong>de</strong>‐<br />

hors dʹune mesure <strong>de</strong> cette importance; ils sont bien résolus, cela va <strong>de</strong> soi, à ne donner<br />

aucun signe dʹimprobation sur la proposition <strong>de</strong> réduction quʹil sʹagirait <strong>de</strong> faire accepter.<br />

Je pense que vous et M. Decaux partagerez leur avis sur la convenance <strong>de</strong> cette communi‐<br />

cation à faire au Conseil.<br />

Veuillez agréer, Monsieur et vénéré Confrère, les nouvelles assurances du respec‐<br />

tueux dévouement <strong>avec</strong> lequel je suis<br />

Votre humble serviteur et Confrère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

854 bis à M. Maignen334 Loyer <strong>de</strong>s Jeunes Ouvriers à Nazareth.<br />

[septembre 1862]<br />

Cher enfant en N.S.,<br />

Voici la réponse <strong>de</strong> M. Baudon. Ne pourriez‐vous revoir M. <strong>de</strong> la Bouillerie, afin <strong>de</strong><br />

nous assurer si nous pourrions, sans trop <strong>de</strong> risques, prendre la responsabilité du loyer<br />

<strong>de</strong>s Jeunes Ouvriers; si on pouvait ainsi sauver la fondation <strong>de</strong> Ste ‐Anne, ce serait assuré‐<br />

ment un acte bien charitable et bien conforme à lʹesprit <strong>de</strong> notre Père St Vincent.<br />

Lundi, je pourrai vous rendre le manuscrit.<br />

A vous en Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

855 à M. Halluin<br />

Sollicitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> MLP. pour la santé <strong>de</strong> ses frères. Difficulté <strong>de</strong> pourvoir au remplacement dʹun mala<strong>de</strong>.<br />

Vaugirard, 1er septembre 1862<br />

Bien cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

M. Planchat nous écrit que notre frère Augustin [Déage] ne se trouve point mieux,<br />

quoiquʹil ait changé dʹair et dʹoccupations et que le mé<strong>de</strong>cin croirait utile pour lui quʹil<br />

prît, pour un temps, un repos plus complet. Je suis bien contristé <strong>de</strong> ce contretemps qui va<br />

vous priver dʹun ai<strong>de</strong> sur le secours duquel vous pouviez compter et qui, mieux quʹaucun<br />

<strong>de</strong> nos frères, pouvait doucement amener la conduite et la discipline <strong>de</strong> vos enfants au<br />

334 Supplée la lettre 828.<br />

921


point où vous la pouvez souhaiter. Cʹest à lui que nous <strong>de</strong>vons lʹordre, vraiment excellent,<br />

établi présentement à Vaugirard et tout ce que nous pouvons faire maintenant quʹil nous<br />

manque, cʹest <strong>de</strong> maintenir à peu près les choses comme il les avait posées. Je vous engage<br />

donc bien, cher Monsieur lʹabbé, à examiner sérieusement si, <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s temps <strong>de</strong> repos et<br />

peu <strong>de</strong> contention pour le moment, on ne pourrait le rétablir aussi bien que par un séjour<br />

prolongé dans sa famille; si toutefois le soin <strong>de</strong> sa santé et aussi le bien <strong>de</strong> votre maison<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt absolument ce <strong>de</strong>rnier moyen, il faut bien sʹy résigner, mais je le regretterai,<br />

pour moi, bien vivement, voyant là une occasion, que je regardais comme provi<strong>de</strong>ntielle<br />

dans lʹintérêt <strong>de</strong> votre Maison, éloignée et peut‐être indéfiniment ajournée. Acceptons ce<br />

que le Seigneur voudra régler et confions‐nous à sa miséricordieuse bonté. Nous nʹaperce‐<br />

vons en ce moment aucun moyen <strong>de</strong> combler le vi<strong>de</strong> que son absence va faire chez vous,<br />

sʹil est définitivement obligé <strong>de</strong> prendre un congé. Nous chercherons <strong>de</strong> nouveau et au‐<br />

rons toute la bonne volonté possible <strong>de</strong> vous donner secours.<br />

M. Planchat me dit que le voyage <strong>de</strong> M. Guillot sʹest<br />

effectué sans acci<strong>de</strong>nt, je me réjouis <strong>de</strong> son bon retour;<br />

nous contribuerons ici pour 40f aux frais, parce quʹils sont<br />

un peu lourds; nous payerons aussi le voyage <strong>de</strong> M.<br />

Augustin, sʹil est obligé <strong>de</strong> sʹéloigner. Notre maison est<br />

pourtant ici bien en<strong>de</strong>ttée et mille charges lui tombent à la<br />

fois présentement; mais il faut nous confier à la Provi<strong>de</strong>nce<br />

qui nous a toujours traités si tendrement.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, partagez <strong>avec</strong> notre<br />

cher M. Planchat et tous nos autres frères les sentiments <strong>de</strong><br />

cordiale affection <strong>de</strong> toute la famille et les miens bien<br />

particulièrement.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

Je recomman<strong>de</strong> aux prières <strong>de</strong> votre maison le père <strong>de</strong> notre f. M. Abel du Garreau,<br />

décédé samedi <strong>de</strong>rnier en sentiments fort chrétiens.<br />

856 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Comment on écrit à vingt ans. ʺAspirez en Dieu pour respirer la charité, le dévouementʺ, tel est le secret <strong>de</strong> la<br />

vie spirituelle. Chercher Dieu en renonçant aux créatures. Confi<strong>de</strong>nces intimes.<br />

Vaugirard, 2 septembre 1862<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Vos chères lettres sont venues nous consoler <strong>de</strong> votre départ et prolonger un peu la<br />

joie que nous avait causée votre courte apparition; vous conversez en correspondance<br />

comme dans lʹentretien <strong>de</strong> vive voix, on vous retrouve vivant dans vos lettres, parce quʹel‐<br />

les sont un épanchement tout simple et comme un écoulement <strong>de</strong> la source intérieure qui<br />

les suscite; cʹest bien ainsi quʹon écrit à votre âge, la plume reçoit <strong>de</strong> lʹabondance du cœur.<br />

Il vient un temps, il arrivera pour vous comme pour tous, où lʹeffusion est bien moins gé‐<br />

néreuse, la source ne coule plus que goutte à goutte et comme à regret, lʹexpérience en a<br />

tari les saillies et, si la charité nʹy intervient, lʹexpansion se <strong>de</strong>ssèche entièrement. Que<br />

lʹâme débor<strong>de</strong> donc quand elle est jeune, quʹelle répan<strong>de</strong> autour dʹelle sa fécondité, cʹest<br />

son privilège, elle donne si abondamment quʹelle semble ne pouvoir sʹépuiser. Heureux<br />

922


serez‐vous, cher ami, si lʹinspiration étant au <strong>de</strong>dans toujours pure, les flots extérieurs cou‐<br />

lent, aussi limpi<strong>de</strong>s et vivifiants. Aspirez en Dieu pour respirer la charité, le dévouement<br />

et tous les trésors <strong>de</strong> lʹesprit chrétien; là est le secret <strong>de</strong> la vie spirituelle et la cause <strong>de</strong>s<br />

merveilles produites par le zèle et lʹamour divin.<br />

Jʹaurais dû répondre plus tôt, vous le pouvez penser au moins, à la partie <strong>de</strong> votre<br />

lettre par laquelle vous me proposez obligeamment un précepteur pour remplacer M.<br />

Marty. Nous avons cru quʹil convenait avant tout <strong>de</strong> nous informer si lʹemploi était encore<br />

disponible; la famille intéressée nous a répondu quʹelle était en arrangement <strong>avec</strong> un can‐<br />

didat présenté dʹailleurs, quʹil était fort incertain quʹelle prît <strong>de</strong>s engagements <strong>avec</strong> lui, que<br />

sous peu <strong>de</strong> jours elle donnerait une réponse définitive. Cette famille, fort honorable, ha‐<br />

bite ordinairement la Touraine et ne fait quʹà rares intervalles une apparition à Paris. Les<br />

émoluments donnés par elle au précepteur <strong>de</strong> ses enfants sont <strong>de</strong> 2.000f par an, et seraient<br />

portés ensuite à 2.500f. Les <strong>de</strong>ux enfants ont 10 ans, ils sont jumeaux, ils nʹont jamais quitté<br />

la maison paternelle; si quelque réponse ayant le moindre intérêt nous parvenait, je mʹem‐<br />

presserais <strong>de</strong> vous en informer.<br />

Jʹai <strong>de</strong>mandé hier à M. Maignen sʹil vous avait écrit; il ne lʹavait pas encore fait; il le<br />

regrettait vivement, le temps lui a manqué jusquʹici; je le comprends, écrire est chose si<br />

lente, si imparfaite, si insuffisante, penser, sentir, se souvenir sʹopère comme le jet <strong>de</strong><br />

lʹéclair, la plume cependant se traîne sur le papier, épelant les mots comme lʹenfant qui<br />

commence à assembler les lettres; comme jʹexcuse ceux qui écrivent mal pour faire plus<br />

vite, comme je comprends aussi ceux qui ne trouvent pas le loisir pour un si impuissant<br />

exercice, enfin comme je suis <strong>de</strong> ceux qui en usent <strong>avec</strong> défiance et sans goût! Je veux dire<br />

ici que jʹaurais mille choses à dire sur quelques points <strong>de</strong> votre lettre, sur la quatrième<br />

page en particulier où, à lʹexemple <strong>de</strong> S t Augustin (la comparaison nʹa rien <strong>de</strong> déplaisant),<br />

vous reniez toutes choses en ce mon<strong>de</strong> comme incapables <strong>de</strong> remplir votre âme et vous<br />

vous arrêtez en Dieu seul pour y <strong>de</strong>meurer et vous y reposer. Cor nostrum inquietum et irre‐<br />

quietum donec requiescat in Te. Dans cette voie, jʹirai <strong>avec</strong> vous autant et aussi loin que vous<br />

voudrez; si une vérité me va à lʹintime <strong>de</strong> lʹâme et me ferait plus que toute autre entrer en<br />

contemplation extatique, cʹest celle‐là. Que je souhaite, bien cher ami, quʹelle vous pénètre<br />

<strong>de</strong> part en part, ou plutôt comme je me réjouis <strong>de</strong> ce quʹelle vous ait en effet si vivement<br />

saisi; cʹest le signe caractéristique, cʹest la marque que Dieu imprime aux siens, cʹest la<br />

douce chaîne qui les attache et les unit invinciblement à Lui. Tant que cette précieuse tou‐<br />

che <strong>de</strong>meurera en vous, soyez en paix, vous avez la meilleure part et elle ne vous sera<br />

point ôtée ‐ si vous ne lʹôtez vous‐même.<br />

Je voudrais bien converser <strong>avec</strong> vous longtemps, mais pour écrire en hâte ou plutôt<br />

pour achever ces lignes déjà plusieurs fois reprises, jʹai dépassé lʹheure où dʹordinaire je<br />

fais une petite prière pour vous; je vous quitte pour la faire et, sous lʹimpression <strong>de</strong> cet en‐<br />

tretien brisé, je tâcherai <strong>de</strong> jeter au Cœur <strong>de</strong> Dieu tout ce que jʹaimerais exprimer ici. Oh!<br />

oui, bien cher enfant, parlons‐nous beaucoup et souvent en Dieu, là point <strong>de</strong> lenteurs,<br />

point dʹinsuffisance <strong>de</strong> langage et <strong>de</strong> signes, Il voit la préparation du cœur, la pensée qui<br />

va naître, le sentiment confus qui point au fond du cœur, sans bruit <strong>de</strong> paroles. Oh! que ce‐<br />

la est attrayant, je me tais, non, je parle encore, mais dans le sein <strong>de</strong> Dieu. Ecoutez bien,<br />

lʹécho ira à votre cœur dʹami et <strong>de</strong> fils.<br />

Je suis bien affectueusement en J. et M.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

923


857 à M. Caille<br />

MLP. sʹinforme sur un jeune homme dʹAmiens. Nouvelles <strong>de</strong>s Œuvres.<br />

Vaugirard, 9 septembre 1862<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹattendais pour répondre à votre <strong>de</strong>rnière lettre que jʹeusse reçu celle qui mʹa été<br />

écrite, me disiez‐vous, par M. Lothin, mais jʹai attendu en vain; cette lettre, mal adressée<br />

sans doute, ne mʹest point parvenue; invitez ce bon jeune homme à mʹécrire <strong>de</strong> nouveau et<br />

donnez‐lui lʹadresse assez précisément pour que sa missive ne soit point cette fois égarée.<br />

Tout ce que vous mʹavez dit <strong>de</strong> M. Lothin me semble favorable, mais je nʹai pas vu<br />

pourquoi il nʹavait pas continué ses étu<strong>de</strong>s au Séminaire et sʹil nʹy avait eu là rien qui fût à<br />

son désavantage; vous ne mʹavez pas dit non plus si sa piété était telle quʹon la peut sou‐<br />

haiter, sʹil avait un caractère sociable et liant, lʹhabitu<strong>de</strong> et lʹamour du travail; enfin, si, à<br />

votre connaissance, ses antécé<strong>de</strong>nts étaient bons.<br />

Jʹai appris <strong>avec</strong> joie que votre adoration avait été édifiante et votre distribution bril‐<br />

lante, bénissons‐en Dieu et <strong>de</strong>mandons que sa gloire sorte constamment <strong>de</strong> nos humbles<br />

travaux.<br />

La mère et la sœur <strong>de</strong> M. Carment sont présentement à Paris.<br />

Le jeune abbé Allard nous est venu voir <strong>de</strong>ux jours, un peu <strong>avec</strong> la pensée <strong>de</strong> voir si<br />

les œuvres ou instituts <strong>de</strong> Paris lui conviendraient, mais il semble naturellement un peu<br />

indécis, il nʹa rien vu qui pût lʹéclairer sur son avenir. Je crois quʹil désire que le but <strong>de</strong> ce<br />

petit voyage ne soit point connu à Amiens, il sera donc mieux <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r pour vous seul<br />

cette communication.<br />

Je nʹoublie point que vous nous annoncez une visite prochaine, nous la recevrons<br />

<strong>avec</strong> satisfaction.<br />

Adieu, bien cher ami, mille affections dévouées à vous et à nos frères.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

858 à M. Halluin<br />

Avis sur la communion fréquente et la discipline nécessaire aux enfants.<br />

Vaugirard, 11 septembre 1862<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

La date335 <strong>de</strong> cette lettre a été inscrite comme le porte cette feuille, mais jʹen suis res‐<br />

té à ce premier mouvement, ayant été interrompu et <strong>de</strong>puis nʹayant pas trouvé un moment<br />

pour mʹentretenir <strong>avec</strong> vous.<br />

Je <strong>de</strong>vais répondre à la lettre que vous mʹadressiez alors et à celle que mʹécrivait <strong>de</strong><br />

son côté M. Planchat relativement aux petits dissentiments qui existent entre vous sur<br />

<strong>de</strong>ux points particulièrement, la conduite spirituelle et la discipline <strong>de</strong>s enfants. Ma pensée<br />

était à ce moment et reste encore aujourdʹhui quʹil y a lieu <strong>de</strong> tendre à la conciliation afin<br />

<strong>de</strong> continuer à faire le bien ensemble.<br />

335 La lettre 859 dit que cette lettre a été écrite le 18 septembre 1862.<br />

924


Pour ce qui regar<strong>de</strong> la communion fréquente, il me semble quʹil y a tout au moins<br />

lieu <strong>de</strong> faire un essai prolongé qui permette <strong>de</strong> juger définitivement si cette puissante res‐<br />

source peut être avantageusement appliquée à Arras, comme elle lʹest en tant dʹautres<br />

lieux. Lʹefficacité <strong>de</strong> la communion pour soutenir les enfants et les défendre contre les fai‐<br />

blesses <strong>de</strong> leur âge est assez généralement admise pour quʹon puisse sans témérité abon‐<br />

<strong>de</strong>r en ce sens.<br />

Pour ce qui est <strong>de</strong> la discipline, jʹentre bien dans les sages temporisations et miséri‐<br />

cordieuses con<strong>de</strong>scendances dont on doit souvent user à lʹégard dʹenfants dont la première<br />

éducation a été si mauvaise presque pour tous. Je crois pourtant <strong>de</strong>voir vous avouer, cher<br />

Monsieur lʹabbé, quʹil nʹest pas un seul <strong>de</strong> ceux qui, à ma connaissance, ont vu <strong>de</strong> près la<br />

maison dʹArras qui nʹait jugé quʹil y aurait quelque chose à améliorer <strong>de</strong> ce côté. On trouve<br />

unanimement quʹen ménageant trop les individus vous risquez <strong>de</strong> nuire au bien général,<br />

que le niveau spirituel et moral <strong>de</strong> lʹœuvre restant extrêmement bas ne peut influer utile‐<br />

ment pour la réforme <strong>de</strong>s sujets qui y sont admis, quʹau contraire ceux qui y entrent bons<br />

ou passables y <strong>de</strong>viennent bientôt mauvais, tandis quʹ<strong>avec</strong> <strong>de</strong>s habitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> discipline<br />

plus fermes et un système dʹépuration plus courageux, on relèverait lʹesprit <strong>de</strong> lʹœuvre et<br />

on en tirerait bien plus <strong>de</strong> fruits. Je nʹai pas étudié moi‐même dʹassez près les choses pour<br />

émettre un avis précis à cet égard; je ne puis mʹempêcher pourtant <strong>de</strong> penser que lʹinvaria‐<br />

ble opinion <strong>de</strong> tous sur ce point doit avoir un grand poids. Examinez <strong>de</strong>vant Dieu, cher<br />

Monsieur lʹabbé, ce qui pourrait être à faire; vous ne cherchez que le bien, vous ne <strong>de</strong>man‐<br />

<strong>de</strong>z que la lumière, le bon Maître ne refusera ni lʹun ni lʹautre à son humble et dévoué ser‐<br />

viteur.<br />

Jʹécris un mot au bon abbé Planchat qui, dans un premier moment, peut bien mon‐<br />

trer un peu dʹirritation, mais sur la droiture dʹintention, la pureté du zèle et lʹesprit conci‐<br />

liant duquel vous pouvez compter. Du reste, la retraite qui commencera le 5 octobre et qui<br />

donnera lʹoccasion pour nous à quelque rapprochement, nous permettra <strong>de</strong> conférer plus<br />

amplement sur ce sujet. Nous comptons, après cette retraite, nous réunir (les membres<br />

soutiens <strong>de</strong> la petite Congrégation) pour examiner les divers points qui intéressent la<br />

Communauté et ses œuvres.<br />

Jʹai reçu une bonne lettre du f. Augustin [Déage]; il remue et prend autant dʹexercice<br />

quʹil se peut pour rétablir lʹéquilibre dans sa santé, comme sa constitution est très vigou‐<br />

reuse, jʹai bonne espérance que son indisposition ne sera pas <strong>de</strong> très longue durée. Son<br />

frère entre chez les Pères du Saint Sacrement; cette famille est tout à Dieu.<br />

Jʹembrasse vous et tous nos frères du plus profond <strong>de</strong> mon cœur. Je prie tous les<br />

jours au S t Sacrifice pour que lʹEsprit du Seigneur soit au milieu <strong>de</strong> nous, ayons bonne<br />

confiance, tous les autres, dans notre petite famille, prient <strong>avec</strong> moi. Dieu nous voit et nous<br />

entend. Que cette pensée est consolante et doit nous donner confiance!<br />

Votre respectueux ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

858‐1 aux Amis <strong>de</strong> Vaugirard<br />

Faire‐part pour la journée du 19 septembre, en lʹhonneur <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> La Salette.<br />

Maison <strong>de</strong>s Orphelins <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul<br />

sous le patronage <strong>de</strong> M gr le Cardinal<br />

Archevêque <strong>de</strong> Paris<br />

925


Vaugirard, 15 septembre 1862<br />

M.,<br />

Vendredi prochain, 19 <strong>de</strong> ce mois, <strong>de</strong>s messes seront dites à 7h., 8h., 9h., et 10h.,<br />

dans le Sanctuaire que nous avons consacré à N.D. <strong>de</strong> la Salette.<br />

Une exhortation sera faite à la messe <strong>de</strong> 9 heures.<br />

A 3 heures <strong>de</strong> lʹaprès‐midi, il y aura procession suivie dʹune instruction.<br />

Nous serons très heureux, M…., sʹil vous est possible <strong>de</strong> prendre quelque part à ces<br />

pieux exercices.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Les moyens nous manquant pour avertir les personnes que cette solennité pourrait<br />

attirer, nous vous prions <strong>de</strong> remettre les lettres ci‐jointes à celles <strong>de</strong> vos connaissances qui<br />

vous paraîtraient pouvoir y participer.<br />

859 à M. Planchat<br />

Allusion au dissentiment survenu entre MM. Halluin et Planchat au sujet <strong>de</strong> la communion fréquente et <strong>de</strong> la<br />

discipline à Arras.<br />

Vaugirard, 18 septembre 1862<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹexplique à notre bon Père Halluin, à qui jʹécris en même temps que je le fais pour<br />

vous, les empêchements qui ont mis du retard dans ma correspondance. Vous étiez en<br />

peine, jʹaurais voulu vous consoler et vous encourager, je nʹai pu que lever les yeux au Ciel<br />

pour implorer pour vous le secours tout‐puissant dʹen haut; Levavi oculos meos in montes,<br />

jʹai la confiance quʹà cette heure vous êtes calme et remis, lʹEsprit consolateur est si péné‐<br />

trant, si persuasif, in fletu solatium. Je crois, bien cher ami, quʹen priant beaucoup, en recou‐<br />

rant surtout aux moyens <strong>de</strong> foi, nous arriverons à améliorer la situation et nous obtien‐<br />

drons pour lʹexcellente œuvre qui vous occupe les progrès vers lesquels on doit tendre. Du<br />

reste, pour nous ai<strong>de</strong>r nous‐mêmes afin que le Ciel nous ai<strong>de</strong>, je crois quʹil sera bien<br />

quʹaprès la retraite nous conversions à fond sur les points les plus essentiels concernant<br />

nos œuvres, celle dʹArras, si digne dʹun haut intérêt, nʹy sera point oubliée.<br />

La retraite commencera le 5 octobre au soir et sera donnée par le r.p. Verdière, <strong>de</strong> la<br />

rue <strong>de</strong> Sèvres; il nous est choisi par le r.p. <strong>de</strong> Ponlevoy, si dévoué pour nous.<br />

Adieu, cher ami, faites chaque jour tout le bien possible, oraison, vie humble et ca‐<br />

chée, support, charitable intervention pour le soutien spirituel <strong>de</strong>s frères; instruction <strong>de</strong>s<br />

enfants: Laissez venir à moi les petits enfants; enfin, tout dire, tout faire, tout penser et sen‐<br />

tir pour Dieu et en Dieu; le Ciel est au bout et déjà ici‐bas la paix dans lʹunion intérieure<br />

<strong>avec</strong> J.M. J.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

860 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Sʹabandonner à la Provi<strong>de</strong>nce. Encouragement à être fidèle aux exercices <strong>de</strong> piété. Fête <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> La Salette à<br />

Vaugirard; les consolations quʹelle donne.<br />

926


Vaugirard, 20 septembre 1862<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous écris seulement <strong>de</strong>ux mots aujourdʹhui pour vous dire que la famille qui<br />

<strong>de</strong>mandait un précepteur nʹayant point pris arrangement <strong>avec</strong> un sujet qui lui avait été<br />

présenté, reste disposée à sʹentendre <strong>avec</strong> quelque autre candidat. Vous me disiez <strong>de</strong>rniè‐<br />

rement quʹau lieu dʹun, vous en aviez <strong>de</strong>ux en vue; ayez lʹobligeance <strong>de</strong> les avertir que<br />

cette affaire doit être traitée, non par le chef <strong>de</strong> la famille lui‐même, lequel nʹest pas à Paris,<br />

mais <strong>avec</strong> M. Duverger, son parent, <strong>de</strong>meurant ici rue <strong>de</strong> Seine, n° 74. Jʹaperçois, en lisant<br />

la lettre du premier, nommé M. Schmith, que M. Duverger doit quitter aussi prochaine‐<br />

ment Paris; si les candidats en question ne sont pas présents et ne peuvent voir ce Mon‐<br />

sieur avant son départ, il me semble quʹil faudrait quʹils se missent directement en rapport<br />

<strong>avec</strong> M. Schmith, résidant à Montfélix, par Loches (Indre‐et‐Loire), <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> M. lʹabbé<br />

Marty.<br />

Votre <strong>de</strong>rnière lettre mʹa causé une vive, très vive satisfaction; non seulement elle<br />

était bonne et aimable, vous ne savez pas faire autrement, mais il y avait cet accent chré‐<br />

tien, ce ton franchement décidé du serviteur <strong>de</strong> Dieu qui répond bien aux vœux <strong>de</strong> ceux<br />

qui ont vu un peu lʹaction du Seigneur en vous. Allez toujours ainsi, bien cher ami, laissez‐<br />

vous faire, vous nʹaurez pas <strong>de</strong> mouvements propres, pour ainsi dire, à résoudre ou à vou‐<br />

loir, donnez‐vous comme la graine se donne au vent qui la pousse où elle prendra racine<br />

et portera fruit; il est si doux <strong>de</strong> se laisser emporter ainsi au souffle puissant et paisible <strong>de</strong><br />

la Provi<strong>de</strong>nce! Je suis heureux aussi <strong>de</strong> voir que votre temps est bien employé, que vos<br />

pieux exercices ne sont point sacrifiés; cette fermeté <strong>de</strong> vouloir quand rien nʹoblige exté‐<br />

rieurement est dʹexcellent augure pour lʹavenir; obéir au Maître qui ne parle quʹau cœur et<br />

sans bruit <strong>de</strong> parole, cʹest une noble et haute obéissance.<br />

Hier, ici chez nous à Vaugirard, fête <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette, fête charmante tout le<br />

jour, comme la Ste Vierge en fait pour ses enfants: 5 messes, chapelle pleine à toutes les<br />

messes, chants pieux, communions presque générales toute la matinée, tout le jour<br />

concours <strong>de</strong> pèlerins, lʹaprès‐midi procession, 2e instruction, salut, joie douce, épanouis‐<br />

sement <strong>de</strong> tous les cœurs, fête <strong>de</strong> famille présidée sensiblement par la Mère qui donnait à<br />

tous lʹintime charme <strong>de</strong> sa présence; on goûte parfois la présence sensible du Seigneur, il y<br />

a aussi la présence sensible <strong>de</strong> la T. Ste Vierge, que le Seigneur est bon!<br />

Adieu, bien cher ami et fils en N.S., croyez toujours au cordial attachement <strong>de</strong> tous<br />

pour vous chez nous, M. Maignen en tête et moi <strong>avec</strong> lui, lui jeune, moi vieux.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

861 à M. Caille<br />

Réponse favorable à donner à un postulant.<br />

Vaugirard, 24 septembre 1862<br />

Cher ami et fils en N.S.,<br />

Vous pouvez répondre au postulant <strong>de</strong> 36 ans [Pierre Mouret] que nous pouvons<br />

lʹadmettre parmi nous si, examen fait <strong>de</strong>vant Dieu, il se croit sérieusement appelé à son<br />

service. Je réserve seulement la question <strong>de</strong>s vœux, sur laquelle nous <strong>de</strong>venons <strong>de</strong> plus<br />

enplus difficiles, lʹexpérience nous ayant appris que beaucoup <strong>de</strong> sujets se trouvent plus<br />

heureux en vie <strong>de</strong> communauté sans prendre la charge <strong>de</strong>s vœux.<br />

Mille affections en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

927


862 à M. Halluin<br />

Réunions à prévoir concernant les maisons.<br />

Vaugirard, 9 octobre 1862<br />

Bien cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie un programme succinct, comme vous le désirez, M. Planchat et vous,<br />

<strong>de</strong>s choses qui nous occuperont dans nos petites réunions <strong>de</strong> mardi et mercredi. Vous nʹy<br />

trouverez peut‐être rien <strong>de</strong> tout à fait spécial pour la maison dʹArras, mais, si vous et M.<br />

Planchat restez jeudi à Paris, comme il semble indiqué par sa lettre, nous pourrons parler<br />

plus particulièrement <strong>de</strong> ce qui intéresse votre œuvre.<br />

Notre retraite va bien; priez pour nous, nous ne vous oublions pas <strong>de</strong> notre côté.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

863 à M. Halluin<br />

Annonce dʹune visite <strong>de</strong> M. Lantiez à Arras.<br />

Vaugirard, 20 octobre 1862<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Notre bon abbé Lantiez, qui <strong>de</strong>vait vous aller voir dans quelques jours, a pensé, en<br />

y réfléchissant, quʹil serait mieux quʹil effectuât son voyage sans retard. La petite retraite<br />

que vous projetez pour vos enfants, avant la Toussaint, sera en effet bien plus fructueuse si<br />

déjà, à ce moment, vos services sont organisés et si, dans le bon arrangement <strong>de</strong>s choses,<br />

les enfants trouvent un appui pour leur persévérance. Je me rends à cet avis qui me semble<br />

fondé, et je vous envoie le bon abbé qui examinera <strong>avec</strong> vous tout ce qui est à faire pour le<br />

bien <strong>de</strong> votre chère œuvre et <strong>de</strong> la petite communauté. Je prierai Dieu <strong>de</strong> mon côté pour<br />

que vos efforts communs amènent un bon résultat. Je pars <strong>de</strong>main pour Metz, je recom‐<br />

man<strong>de</strong> mon voyage à vos bons souvenirs <strong>de</strong>vant Dieu.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, tous ici vous sont dévoués; <strong>avec</strong> tous, je vous em‐<br />

brasse en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

864 à M. Risse<br />

Impression au retour <strong>de</strong> son voyage à Metz. Questions financières. Ornements liturgiques : Vaugirard se trouve<br />

dans une ʺpauvreté renforcéeʺ.<br />

Vaugirard, 28 octobre 1862<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nos bons anges nous ont assistés dans notre voyage qui sʹest très bien passé, un peu<br />

longuement, puisque nous nʹétions rendus à Vaugirard quʹà 11h.1/2 du soir, mais sans<br />

gran<strong>de</strong> fatigue pour aucun <strong>de</strong> nous.<br />

Je gar<strong>de</strong>, pour ma part, la plus douce impression <strong>de</strong> mon court séjour à Metz; lʹac‐<br />

cueil si cordial, si bienveillant quʹon mʹy a fait mʹa touché profondément; jʹen remercie<br />

928


Dieu et jʹy vois aussi un témoignage <strong>de</strong> lʹaffection quʹon porte à votre œuvre et à vous.<br />

Quant à vos bons jeunes gens, leur esprit mʹa paru excellent, plein <strong>de</strong> simplicité et <strong>de</strong><br />

bonne volonté. Paix aux hommes <strong>de</strong> bonne volonté, jʹespère que le Seigneur les bénira<br />

<strong>avec</strong> prédilection. Les <strong>de</strong>ux jeunes sujets qui mʹont accompagné prennent très bien leur<br />

position: [Alfred] Noël a reçu un parfait consentement <strong>de</strong> sa mère et toutes sortes dʹencou‐<br />

ragements <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> ses protecteurs; [<strong>Léon</strong>] Vion écrira bientôt à ses parents; lʹun et<br />

lʹautre vous assurent <strong>de</strong> leur respectueux attachement.<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> joie les bonnes dispositions <strong>de</strong> nos frères; je suis heureux <strong>de</strong> mʹêtre<br />

trouvé quelques instants au milieu dʹeux en famille, dʹavoir prié <strong>avec</strong> eux, dʹavoir offert le<br />

S t Sacrifice dans votre petite chapelle; jʹespère que le Seigneur aura agréé les vœux ar<strong>de</strong>nts<br />

que jʹai faits pour vous tous. Ne manquez pas <strong>de</strong> dire à chacun mes bons souvenirs, sans<br />

oublier nos chers petits frères coadjuteurs, non plus que le bon M. Joly auquel je me sens<br />

bien cordialement uni. Je nʹai pu encore mʹoccuper <strong>de</strong>s renseignements quʹil mʹa prié <strong>de</strong><br />

prendre, dès que jʹaurai quelque chose dʹun peu précis, je lʹen avertirai; jusque là, sʹil veut<br />

mʹécrire, je recevrai sa lettre <strong>avec</strong> grand plaisir.<br />

Jʹaccor<strong>de</strong> la permission que vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z, mais à titre dʹessai, parce que le repos<br />

vous est bien nécessaire. Vous me direz dans quelque temps si vous nʹen éprouvez point<br />

<strong>de</strong> lassitu<strong>de</strong>.<br />

Je vous envoie un semestre <strong>de</strong><br />

la pension <strong>de</strong> M. <strong>Jean</strong> [Gauffriau], ci 250f<br />

plus, pour emprunt à M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] 20<br />

pour voitures pendant mon séjour à Metz 10<br />

plus, in<strong>de</strong>mnité pour les visites <strong>de</strong> M. Ferdinand [Bosmel] 20<br />

Ensemble: 300f<br />

Jʹenverrai, dès que je pourrai, un ornement vert, je nʹai pu encore mʹen occuper, ce<br />

sera dans les simplicités, nous sommes dʹune pauvreté renforcée en ce moment. Jʹenverrai<br />

aussi le surplis <strong>de</strong> M. <strong>Jean</strong> et ses souliers.<br />

Adieu, bien cher ami, croyez à mes plus tendres sentiments comme au dévouement<br />

<strong>avec</strong> lequel je suis, en J. et M.,<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Respects à tous ceux qui sont si bons pour nous, au bon M. Lefebvre en particulier.<br />

Affections à M. Thiriot.<br />

865 à M. Paillé<br />

Avis sur un postulant.<br />

1er novembre 1862<br />

Toussaint<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Emile [Beauvais] a pris lʹinitiative pour ce qui concerne les services <strong>de</strong> Nazareth<br />

et mʹa remis une petite note que je joins ici, la recommandant à votre attention et à celle <strong>de</strong><br />

notre f. Maignen.<br />

929


Jʹai jugé un peu vite M. Pierre [Mouret], ne faisant pas assez attention quʹà son âge il<br />

est plus difficile <strong>de</strong> se plier aux usages dʹune communauté quʹun tout jeune homme. Je lui<br />

dois aussi cette justice quʹaprès un peu dʹétonnement, il sʹest soumis à tout, simplement et<br />

<strong>avec</strong> une disposition <strong>de</strong> cœur très louable. Je nʹhésite pas à dire quʹen le prenant comme<br />

postulant, on aurait en lui un sujet infiniment préférable à tous les sujets salariés quʹon<br />

pourrait employer.<br />

Sʹil agréait à M. Maignen et à vous et quʹil vous fût commo<strong>de</strong> quʹil résidât à Naza‐<br />

reth, je désirerais quʹil passât un jour à Vaugirard chaque semaine. Il va bien <strong>avec</strong> moi<br />

pour la direction et la confession, je trouverais bien quʹil continuât à rester sous ma<br />

conduite à cet égard.<br />

Voyez tout cela <strong>avec</strong> M. Maignen et répon<strong>de</strong>z‐moi; je conseille la chose, mais<br />

comme quelques points dans les services peuvent mʹéchapper, je ne la prescris point.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

La probité et la conduite <strong>de</strong> M. Pierre peuvent être garanties. Il est docile et se prête<br />

chez nous à toute espèce <strong>de</strong> travaux. Il rédige très convenablement.<br />

Note <strong>de</strong> M. Emile:<br />

Jʹai appris, mon bon Père, que lʹon cherchait un frère pour le mettre à Nazareth, en rempla‐<br />

cement <strong>de</strong> M. Marie <strong>de</strong> Pierreux qui donne quelques inquiétu<strong>de</strong>s sur sa vocation ou sa santé.<br />

Depuis que M. Pierre est <strong>avec</strong> moi à lʹéconomat, il mʹa été facile dʹapprécier tout ce quʹil y<br />

avait <strong>de</strong> ressources chez ce bon Frère pour nos œuvres, et il mʹa semblé que M. Maignen ne serait<br />

point mal partagé si on le lui donnait.<br />

M. Pierre, comme ancien économe, possè<strong>de</strong> une certaine connaissance <strong>de</strong> la valeur <strong>de</strong>s cho‐<br />

ses et <strong>de</strong> la manière <strong>de</strong> traiter les affaires, qui le rendrait certainement fort précieux pour tout ce<br />

qui regar<strong>de</strong> lʹadministration matérielle du patronage. Il a ensuite <strong>de</strong> lʹinstruction, <strong>de</strong> bonnes ma‐<br />

nières et il sʹexprime parfaitement bien; <strong>avec</strong> cela, il serait fort bien reçu dans les ateliers, et comme<br />

il est dʹun âge grave, il nʹen réussirait que mieux auprès <strong>de</strong>s patrons et <strong>de</strong>s différentes personnes<br />

<strong>avec</strong> lesquelles on a à traiter pour cette œuvre.<br />

La seule difficulté que je verrais pour lui, cʹest sa mauvaise vue qui le rendrait peu propre à<br />

la surveillance le dimanche. Mais M. Maignen nʹaurait peut‐être pas <strong>de</strong> peine à le faire suppléer<br />

dans cette fonction par les dignitaires et les Confrères.<br />

Ce sera une véritable perte pour moi <strong>de</strong> nʹavoir plus ce bon Frère à ma disposition. Il faisait<br />

mes courses à merveille et aurait pu me rendre bien <strong>de</strong>s services pour les écritures et pour tout,<br />

mais, sʹil peut être plus utile ailleurs, jʹen prendrai mon parti.<br />

31 octobre 1862<br />

Emile Beauvais<br />

866 à M. Risse<br />

Envoi dʹornements liturgiques et autres affaires pour lʹordination du frère Gauffriau. Eviter les inégalités dʹhu‐<br />

meur. Ne pas sortir quelquʹun <strong>de</strong> sa condition lorsque la vocation ne semble pas certaine. Nouvelles <strong>de</strong>s frères.<br />

Vaugirard, 11 novembre 1862<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je fais partir aujourdʹhui au chemin <strong>de</strong> fer lʹornement vert, bien simple, comme je<br />

vous lʹai annoncé, mais décent, <strong>de</strong>ux surplis qui étaient à lʹusage <strong>de</strong> M. <strong>Jean</strong> [Gauffriau] et<br />

930


quʹon pourra arranger, sʹils nʹétaient pas, pour les manches, comme vous les portez chez<br />

vous, les souliers et enfin les pièces ou actes dont M. <strong>Jean</strong> peut avoir besoin pour son ordi‐<br />

nation. Peut‐être aurai‐je à y ajouter son excorporation; si cette pièce est nécessaire, vous<br />

me le direz, jʹen ferai lʹenvoi. Jʹétais bien persuadé que ce cher enfant se plairait chez vous;<br />

jʹai aussi toute confiance quʹil continuera à donner satisfaction à tous ceux qui lʹentourent,<br />

il est dʹordinaire dʹun caractère très sociable et porté [à] toute bonne volonté.<br />

Je regrette que notre jeune frère Luzier se montre dʹhumeur si peu égale, faites tout<br />

ce que vous pourrez pour lʹéclairer sur lʹinconvénient dʹune telle manière dʹêtre, pour lui et<br />

pour les autres; jʹespère quʹun peu dʹexpérience lui venant en ai<strong>de</strong>, il se corrigera et que la<br />

piété surtout prendra chez lui le <strong>de</strong>ssus <strong>de</strong>s impressions <strong>de</strong> la nature. Je joins ici un mot<br />

pour lui, afin <strong>de</strong> lʹencourager dans les efforts quʹil doit faire pour se vaincre.<br />

Je désire que M. <strong>Jean</strong> suive les avis <strong>de</strong> MM. les Directeurs du Séminaire pour son<br />

ordination définitive; je serai bien aise <strong>de</strong> le voir prêtre, mais je pense quʹil faut quʹil ac‐<br />

quière lʹinstruction indispensable; vous me direz quelle est, à cet égard, votre pensée et<br />

celle <strong>de</strong> MM. les Directeurs.<br />

Je ne puis me dispenser dʹécrire un mot à M. Joly (qui mʹavait instamment prié <strong>de</strong><br />

voir sʹil pourrait trouver ici du travail comme horloger), afin dʹêtre un peu <strong>de</strong> temps près<br />

<strong>de</strong> nous pour étudier sérieusement sa vocation; mais je nʹentends ni le pousser, ni le pres‐<br />

ser en rien, je souhaite quʹil fasse la volonté <strong>de</strong> Dieu et je croirais manquer à lʹesprit chré‐<br />

tien et religieux si je le sortais <strong>de</strong> sa condition, sans indices certains dʹun appel <strong>de</strong> Dieu. Il<br />

me semble que sʹil avait décidément la volonté <strong>de</strong> venir ici, M. <strong>Jean</strong> pourrait en gran<strong>de</strong><br />

partie le remplacer près <strong>de</strong> vos enfants.<br />

Je suis bien satisfait que vous ayez exprimé à M gr <strong>de</strong> Metz toute ma reconnaissance;<br />

jʹaurais dû peut‐être lui écrire, mais jʹen ai laissé passer le moment et maintenant il serait<br />

bien tard; nous en retrouverons lʹoccasion.<br />

M. André [Brouant] vous envoie un petit mot dʹexplication sur la réclamation <strong>de</strong><br />

M me Bosmel, il en paraissait peiné; sa mère nʹa que 45f <strong>de</strong> rente, cʹest bien peu.<br />

Je crois que M. <strong>Jean</strong> doit se confesser à vous ordinairement et, <strong>de</strong> temps en temps,<br />

faire un peu <strong>de</strong> direction comme Séminariste <strong>avec</strong> M. Noël et <strong>de</strong> loin en loin se confesser à<br />

lui, si M. Noël semble le trouver bien; car, pour M. <strong>Jean</strong> lui‐même, je nʹy vois dʹautre avan‐<br />

tage que <strong>de</strong> mettre plus dʹintimité entre ce bon Monsieur et lui.<br />

Adieu, bien cher ami, mille affections à nos frères, y compris Ferdinand [Bosmel], et<br />

aussi aux jeunes coadjuteurs et M. Joly, à tous en un mot.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

867 à M. Maignen<br />

Union <strong>de</strong> prière en saint Joseph.<br />

Vaugirard, 14 novembre 1862<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je me joindrai à vous pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r lʹassistance <strong>de</strong> St Joseph, sans préjuger, quant<br />

à présent, ce qui pourra être le mieux dans lʹintérêt <strong>de</strong> lʹensemble <strong>de</strong> nos œuvres; Dieu<br />

daignera, je lʹespère, nous éclairer.<br />

931


Je tâcherai que M. Marie [<strong>de</strong> Pierreux] aille vous rendre ses comptes <strong>de</strong>main.<br />

Adieu, cher enfant, plusieurs personnes mʹatten<strong>de</strong>nt.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

868 à M. Maignen<br />

Dispositions à envisager pour le personnel <strong>de</strong> Nazareth.<br />

Vaugirard, 15 novembre 1862<br />

Il me semble, mon cher enfant, que vous auriez une combinaison meilleure que les<br />

autres en prenant près <strong>de</strong> vous, pour tout lʹhiver, Sénart qui, lui, pour <strong>de</strong>s raisons soli<strong>de</strong>s,<br />

désire changer sa condition. Cette position près <strong>de</strong> vous lui servirait <strong>de</strong> transition et le<br />

mettrait à même <strong>de</strong> bien considérer autour <strong>de</strong> lui quelle voie lui offre le plus <strong>de</strong> chance <strong>de</strong><br />

se préparer un avenir et <strong>de</strong> chercher les occasions favorables. Personne plus que lui ne<br />

peut vous ai<strong>de</strong>r utilement dans tous vos services du patronage. Lʹhiver passé, sʹil prenait<br />

position en quelque carrière choisie par lui, nous serions peut‐être moins dépourvus<br />

quʹaujourdʹhui <strong>de</strong> sujets susceptibles <strong>de</strong> vous bien secon<strong>de</strong>r.<br />

M. Pierre [Mouret] ne peut marcher sans une direction constante dans le patronage<br />

où il est tout à fait inexpérimenté, et M. Emile [Beauvais] est si peu à lʹœuvre <strong>de</strong> S te ‐Anne<br />

et si peu libre désormais dʹy faire même le peu quʹil y concédait quʹil nʹy aurait pour un<br />

homme à former pas la plus petite assistance. Il ne faut donc pas compter que S te ‐Anne soit<br />

pourvue ainsi. Je dis, en passant, que M. Emile se désole <strong>de</strong> la répugnance, à son gré bien<br />

mal éclairée, <strong>avec</strong> laquelle vous repoussez M. Pierre dont il est, à lʹusé 336 , <strong>de</strong> plus en plus<br />

content. Il me paraît aussi à moi le plus capable <strong>de</strong> vous servir parmi ceux quʹon a mis en<br />

avant en toutes les combinaisons quʹon a faites; mais je désire laisser les choses sʹarranger<br />

en un sens ou en un autre, sans pousser à aucun parti, afin <strong>de</strong> laisser espace à votre initia‐<br />

tive. Pour Moutier, si on le retire <strong>de</strong> S te ‐Anne pour le mettre à Nazareth, M. Decaux pourra<br />

bien plus sʹen blesser que si on le lui enlève pour le Noviciat dont il ne peut raisonnable‐<br />

ment méconnaître lʹindispensable nécessité. Voilà toute ma pensée, continuons à prier,<br />

Dieu nous donnera, espérons‐le, la solution <strong>de</strong> nos difficultés.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

869 337<br />

870 à M. Maignen<br />

Accepter <strong>de</strong> souffrir pour le service <strong>de</strong> Dieu.<br />

[novembre 1862]<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Jʹai vu votre mot à M. <strong>de</strong> Varax et la peine que vous éprouvez; je nʹai pas besoin <strong>de</strong><br />

vous dire que je mʹy associe et dʹailleurs le temps me manque pour mʹentretenir <strong>avec</strong> vous,<br />

336 Expression ancienne : après un essai prolongé, ou un emploi <strong>de</strong> longue durée.<br />

337 Reportée à la 967-1. Classée par erreur en novembre 1862, elle se place <strong>de</strong>ux ans plus tard, en 1864.<br />

932


M. Mouret attendant impatiemment ces lignes pour retourner à Nazareth. Souvenez‐vous<br />

seulement, cher enfant, que tout ce que nous souffrons pour le service <strong>de</strong> Dieu est le plus<br />

sûr et le plus précieux <strong>de</strong> nos mérites et que dʹailleurs toute peine prise chrétiennement est<br />

non seulement un bienfait, mais aussi toujours la préparation <strong>de</strong> quelque joie en ce mon<strong>de</strong><br />

déjà et certainement et infiniment en lʹautre. Vous pleurerez, vous autres, dit N.S., et le<br />

mon<strong>de</strong> se réjouira, mais votre peine se changera en joie et nul ne vous ravira cette joie 338 .<br />

Je vous embrasse affectueusement.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

871 à M. Decaux<br />

Démarches pour relever la Sainte‐Famille <strong>de</strong> St‐Sulpice et empêcher le père Milleriot <strong>de</strong> lui retirer son concours.<br />

Vaugirard, 28 novembre [1862]<br />

Mon bon ami,<br />

MM. Boutron et Daniel, <strong>avec</strong> lesquels je me suis entendu relativement à la Sainte‐<br />

Famille <strong>de</strong> St‐Sulpice, ont pensé quʹil était inutile <strong>de</strong> voir le r.p. Milleriot qui leur avait ré‐<br />

pété <strong>avec</strong> instance que sa démission était irrévocable. Nous avons donc vu, non sans <strong>de</strong>s<br />

démarches réitérées, M. le Curé <strong>de</strong> St‐Sulpice qui reste dans les meilleurs dispositions à<br />

lʹégard <strong>de</strong> lʹœuvre et qui se prêtera à tous les arrangements quʹon lui proposera pour la re‐<br />

lever et la maintenir.<br />

Peut‐être jugerez‐vous quʹil serait utile <strong>de</strong> réunir une Commission <strong>de</strong> tous ceux qui,<br />

<strong>avec</strong> vous, pourraient concourir à ce résultat et chercher particulièrement si, à défaut du p.<br />

Milleriot, on pourrait trouver un prêtre qui le remplaçât comme directeur spirituel.<br />

Veuillez croire, mon bien bon ami, à tous mes sentiments affectueux et dévoués en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je viens <strong>de</strong> recevoir un mot du p. Milleriot par lequel il mʹinforme aussi <strong>de</strong> sa<br />

détermination. Il me dit que lʹŒuvre est fondue, ce qui nʹest pas exact, elle réunit encore<br />

chaque fois plusieurs centaines <strong>de</strong> personnes; elle est en souffrance et peut être relevée; ne<br />

pourriez‐vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à ce bon père un sursis <strong>de</strong> 3 mois durant lesquels on ferait <strong>de</strong>s ef‐<br />

forts pour la rendre plus digne <strong>de</strong> ses soins?<br />

872 à M. Maignen<br />

Questions dʹadministration et <strong>de</strong> personnel à Nazareth.<br />

Vaugirard, 2 décembre 1862<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Notre jeune f. Aimé Vankenhove doit toujours 40f à son oncle en Belgique; si,<br />

comme je le crains, vous ne voyez aucun moyen dʹai<strong>de</strong>r au payement <strong>de</strong> cette somme, je<br />

suis décidé à la donner. Je vous prie donc <strong>de</strong> préparer une petite lettre dʹenvoi à cet oncle,<br />

à qui vous avez déjà écrit, et <strong>de</strong>main je vous remettrai les 40f pour les y joindre.<br />

338 Jn 16, 20.<br />

933


M. Hello vous a dit, je pense, que vous serez attendu jeudi prochain à Deuil, près<br />

Enghien, chez M e Lantiez, pour signer le contrat <strong>de</strong> Chaville. Il faudra se trouver au che‐<br />

min <strong>de</strong> fer du Nord un peu avant 8h. 1/2 , moment du départ. Lʹabbé Faÿ et lʹabbé Lantiez<br />

<strong>de</strong>vront sʹy rendre au même moment. Vous pourrez être revenu, si vous le voulez, à 11h. à<br />

Paris, autrement, M. Lantiez compte que vous déjeunerez <strong>avec</strong> lui chez son frère, sans<br />

nulle cérémonie, ce qui ne vous retar<strong>de</strong>rait que <strong>de</strong> quelques instants.<br />

A 1h. 1/2 , Conseil à Vaugirard, <strong>de</strong>main mercredi<br />

M. Hello nous ayant dit que lʹouverture <strong>de</strong> vos cours du soir vous donnait <strong>de</strong> nou‐<br />

velles surcharges, M. Lantiez offre <strong>de</strong> mettre à votre disposition, pour quelques mois,<br />

Streicher qui peut rendre <strong>de</strong> grands services et qui, quoique très utile à Grenelle, pourrait,<br />

au moyen <strong>de</strong> quelques combinaisons prévues par lʹabbé Lantiez, y être remplacé pour un<br />

temps. Il fait très bien les surveillances, fait <strong>avec</strong> aplomb et succès un cours élémentaire<br />

aux hommes et jeunes ouvriers, travaille courageusement à tous ouvrages quels quʹils<br />

soient et fait parfaitement tous les mouvements et commissions extérieures; il a une bonne<br />

écriture. M. Lantiez répond aussi expressément que vous nʹauriez dʹaucun côté à vous<br />

plaindre <strong>de</strong> lui. Si cet arrangement vous semblait <strong>de</strong> nature à vous soulager, nous en par‐<br />

lerions <strong>de</strong>main.<br />

Si vous préférez Bérard, qui a maintenant 17 ans; écrivant bien, fort intelligent et as‐<br />

sez instruit, on pourrait aussi le mettre à votre disposition.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

873 à M. Caille<br />

Condoléances pour la mort du frère <strong>de</strong> M. Caille. Nouvelles <strong>de</strong> la Communauté.<br />

Vaugirard, 18 décembre 1862<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹavais appris déjà, par un mot <strong>de</strong> M. Planchat, la perte que vous venez <strong>de</strong> faire,<br />

perte selon le sens naturel, selon le sentiment qui <strong>de</strong>meure fidèle à ceux quʹon a aimés dès<br />

lʹenfance, quels que soient les changements qui se puissent opérer en eux; autrement, selon<br />

la raison, selon la sagesse chrétienne elle‐même, on ne saurait dire que cette pauvre âme<br />

ravie <strong>de</strong> ce mon<strong>de</strong> ait rien perdu en le quittant, ni que votre famille elle‐même ait eu à<br />

supporter une séparation douloureuse. Ce que vous mʹavez dit quelquefois <strong>de</strong>s anciennes<br />

dispositions dʹesprit <strong>de</strong> votre frère laisse espérer quʹil est mort dans la grâce <strong>de</strong> Dieu; cʹest<br />

une gran<strong>de</strong>, une décisive consolation. Nous prions ici pour lui; jʹai invité nos ff. ecclésiasti‐<br />

ques à le recomman<strong>de</strong>r spécialement par les mérites du Seigneur aux St Sacrifice; je lʹai fait<br />

moi‐même aujourdʹhui et je continuerai à me souvenir <strong>de</strong> lui.<br />

Nous avons revu notre f. Marcaire <strong>avec</strong> plaisir, il nʹest guère resté au milieu <strong>de</strong><br />

nous, mais il avait peu <strong>de</strong> temps <strong>de</strong>vant lui, il en <strong>de</strong>vait une gran<strong>de</strong> part à sa mère. Il nous<br />

a donné <strong>de</strong> bonnes nouvelles <strong>de</strong> votre maison et <strong>de</strong> vos œuvres; que le Seigneur soit béni.<br />

Nous allons à peu près bien ici, lʹindisposition <strong>de</strong> nos enfants nous est pourtant un grave<br />

dérangement; si, par la recette que nous promet votre mé<strong>de</strong>cin, nous arrivions à quelque<br />

amélioration, ce serait un grand soulagement; faites donc en sorte <strong>de</strong> nous envoyer cette<br />

indication dans le plus court délai possible.<br />

934


Tout va bien à Metz; M. <strong>Jean</strong> [Gauffriau] va être promu aux ordres mineurs, priez<br />

pour lui. M. Risse me dit quʹon prie et offre le S t Sacrifice pour votre frère.<br />

Il est un peu question <strong>de</strong> lʹentrée parmi nous dʹun nouveau f. ecclésiastique [M.<br />

Chanteaud] qui serait, je crois, une bonne acquisition, mettons la chose aux pieds <strong>de</strong> Dieu.<br />

Adieu, bien cher ami, croyez à tous mes sentiments les plus affectionnés en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

874 à M. Halluin<br />

Nouvelles <strong>de</strong> la Communauté.<br />

Vaugirard, 22 décembre 1862<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Notre jeune f. Hournon mʹécrit quʹil éprouve ennui et dégoût <strong>de</strong> la vie religieuse et<br />

quʹil désire rentrer dans le mon<strong>de</strong>. Je crois quʹil doit réfléchir mûrement avant <strong>de</strong> prendre<br />

un parti si grave pour son avenir; je lui écris en ce sens, lʹinvitant à attendre que M. Lantiez<br />

aille faire sa visite à Arras, afin <strong>de</strong> causer <strong>avec</strong> lui et <strong>de</strong> bien sʹassurer quʹil nʹa point voca‐<br />

tion pour le service <strong>de</strong> Dieu dans les œuvres.<br />

M. Planchat me dit quʹun prix a été donné en mon nom à votre distribution <strong>de</strong>r‐<br />

nière; je vous prie <strong>de</strong> lʹavertir que M. Emile [Beauvais] lui enverra, par la plus prochaine<br />

occasion, les 5f, montant <strong>de</strong> ce prix.<br />

Lʹincendie du Petit Séminaire doit, à ce quʹil pense, diminuer un peu les aumônes<br />

qui vous reviennent ordinairement. Je croyais que ce Séminaire était assuré et quʹil ne su‐<br />

birait guère <strong>de</strong> perte, en suite <strong>de</strong> son incendie; espérons que Dieu, dont la miséricor<strong>de</strong> et la<br />

puissance pourvoient à tout, nʹoubliera point votre maison et vos chers orphelins. Cette<br />

circonstance donnerait lieu dʹexaminer peut‐être si on ne pourrait essayer <strong>de</strong> créer à lʹéta‐<br />

blissement quelques ressources moins éventuelles au moyen dʹune souscription ou autre‐<br />

ment.<br />

Nous allons assez bien, en ensemble, ici. Un nouveau f. ecclésiastique, homme <strong>de</strong><br />

vertu et <strong>de</strong> mérite, M. lʹabbé Chanteaud, du diocèse <strong>de</strong> Limoges, nous est accordé par le<br />

bon Evêque qui est <strong>de</strong>s amis <strong>de</strong> M. Myionnet, et entre dans la Communauté. Il sera appli‐<br />

qué à la maison <strong>de</strong>s Jeunes Ouvriers, rue Montparnasse.<br />

Cherchons, cher Monsieur lʹabbé, toute notre force, tout notre secours dans le Cœur<br />

du divin Seigneur. Il a dit: Deman<strong>de</strong>z, et vous recevrez339 . Demandons incessamment,<br />

nous obtiendrons sa grâce et le reste par surcroît.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Mille affections à nos ff., au bon abbé Planchat en particulier.<br />

875 à M. Hournon<br />

Conseils contre le découragement<br />

339 Jn 16, 24.<br />

935


Vaugirard, 22 décembre 1862<br />

Mon bien cher enfant,<br />

Je ne me contriste point du découragement que vous me montrez dans votre lettre,<br />

parce quʹil nʹest pas aussi sérieux que vous le pensez; vous avez un peu <strong>de</strong> dégoût et dʹen‐<br />

nui, vous prenez ce malaise pour défaut <strong>de</strong> vocation. Cʹest juger trop vite, la chose inté‐<br />

resse trop gravement votre avenir pour être si promptement résolue. Je vous invite, mon<br />

cher enfant, à prier beaucoup pour que Dieu vous éclaire et à attendre le voyage que M.<br />

Lantiez doit faire assez prochainement à Arras; il vous connaît à fond, il causera <strong>avec</strong> vous<br />

sérieusement et verra ce que Dieu <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> vous; il se peut que votre abattement<br />

vienne seulement <strong>de</strong>s lassitu<strong>de</strong>s et contrariétés <strong>de</strong> vos emplois, et peut‐être aussi <strong>de</strong> ce que<br />

vous nʹavez point eu <strong>de</strong> noviciat sérieux. Dans peu <strong>de</strong> temps, nous <strong>de</strong>vons établir le novi‐<br />

ciat à Chaville; il pourrait être utile que, pour vous fortifier, vous instruire plus à fond et<br />

prendre mieux lʹesprit religieux, vous vinssiez faire un séjour prolongé <strong>avec</strong> nos autres<br />

jeunes frères dans cette maison, afin <strong>de</strong> prendre définitivement le pli <strong>de</strong> la vie spirituelle et<br />

<strong>de</strong> vous asseoir dans <strong>de</strong> meilleures conditions pour lʹavenir.<br />

Voilà mon avis, cher enfant, <strong>avec</strong> ce quʹil vous convient <strong>de</strong> faire, si vous voulez ne<br />

rien brusquer et ne pas compromettre inconsidérément les indices <strong>de</strong> vocation que nous<br />

avions cru reconnaître en vous. Priez, atten<strong>de</strong>z M. Lantiez, et croyez bien que je prie cor‐<br />

dialement <strong>avec</strong> vous et pour vous.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

876 à M. Caille<br />

MLP. remercie <strong>de</strong>s vœux quʹon lui a exprimés pour la St‐<strong>Jean</strong> et le nouvel an. Il est sensible aux attentions <strong>de</strong> M.<br />

Caille: elles témoignent combien ʺla douce unionʺ <strong>de</strong>s commencements <strong>de</strong>meure ʺla force et la consolationʺ <strong>de</strong><br />

lʹInstitut.<br />

Vaugirard, 1er janvier 1863<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹaurais voulu répondre sans retard aux bonnes et affectueuses lettres que jʹai reçues<br />

<strong>de</strong> vous et <strong>de</strong> nos ff. dʹAmiens, jʹen ai été empêché par une multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> détails et par di‐<br />

verses petites indispositions qui mʹont successivement dérangé ces temps <strong>de</strong>rniers. En ce<br />

moment, jʹai la main droite couverte dʹun cataplasme qui mʹoblige à recourir à un secré‐<br />

taire pour vous écrire ces quelques lignes. En ensemble, tous ces petits malaises sont bien<br />

un peu exerçants, mais nʹont rien <strong>de</strong> sérieux. Jʹai été bien touché, mon bon ami, <strong>de</strong>s senti‐<br />

ments si pleins <strong>de</strong> cordialité que vous et nos frères mʹavez exprimés à lʹoccasion <strong>de</strong> la St <strong>Jean</strong> et <strong>de</strong> la nouvelle année.<br />

Je vois <strong>avec</strong> joie que notre petite famille, en sʹagrandissant, ne perd point cette<br />

douce union qui, dès le commencement, a fait sa force et sa consolation et qui, je lʹespère,<br />

assurera son affermissement définitif dans lʹavenir.<br />

Je340 reçois à lʹinstant votre bonne <strong>de</strong>rnière lettre <strong>avec</strong> la recette pour les têtes mala‐<br />

<strong>de</strong>s, merci <strong>de</strong> ce nouveau bon office.<br />

340 Toute la fin <strong>de</strong> la lettre est <strong>de</strong> la main <strong>de</strong> MLP.<br />

936


Je ne <strong>de</strong>meure point en reste, bien cher ami, <strong>avec</strong> vous et <strong>avec</strong> nos chers ff.<br />

dʹAmiens et, si votre dévouement à notre petite famille est entier, je tâche dʹy répondre par<br />

tout ce que je trouve en moi <strong>de</strong> cordiale et paternelle affection. Je ne manque jamais sur‐<br />

tout <strong>de</strong> me souvenir <strong>de</strong> vous au S t Sacrifice <strong>de</strong> la messe, puissant moyen que la divine Pro‐<br />

vi<strong>de</strong>nce a daigné mʹenvoyer à la fin <strong>de</strong> ma carrière, afin que je puisse mieux acquitter mes<br />

<strong>de</strong>ttes envers vous tous et obtenir pour vous les grâces que ma prière trop impuissante<br />

nʹeût pu seule attirer sur vous.<br />

Je vous embrasse tous en J. et M..<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Bon souvenir à M lle Adélaï<strong>de</strong>.<br />

Mon mal à la main est presque tout guéri.<br />

877 à M. Halluin<br />

En réponse aux témoignages <strong>de</strong> veoux, MLP. remercie M. Halluin <strong>de</strong> son dévouement, en souhaitant que la cha‐<br />

rité se maintienne et grandisse parmi eux. Un candidat à la vie religieuse est recommandé à M. Halluin. Comme<br />

il vient dʹun autre Institut, MLP. lui conseille dʹêtre pru<strong>de</strong>nt. Ne pas cacher que notre vie religieuse est ʺsé‐<br />

rieuse, nos travaux ru<strong>de</strong>s, nos journées laborieuses…ʺ.<br />

Vaugirard, 4 janvier 1863<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je voulais vous remercier affectueusement <strong>de</strong>s lettres si cordiales que vous et nos ff.<br />

mʹavez écrites à lʹoccasion <strong>de</strong> la St <strong>Jean</strong> et du nouvel an; impossible à travers tous les dé‐<br />

rangements qui, en cette saison, compliquent nos travaux, <strong>de</strong> trouver un moment libre; je<br />

me borne ici à vous assurer que nous vous rendons bien sincèrement à tous le dévouement<br />

que vous nous exprimez; la charité, grâces à Dieu, ne fait que croître <strong>avec</strong> le temps parmi<br />

nous. Jʹespère quʹelle se maintiendra et grandira toujours.<br />

Je me hâte <strong>de</strong> vous dire que le f. Ferdinand [Bosmel] vient <strong>de</strong> nous arriver à lʹinstant<br />

même; il va se reposer un jour ou <strong>de</strong>ux et, dans le cours <strong>de</strong> cette semaine, il prendra sa<br />

course vers vous. Jʹai lieu dʹespérer quʹil vous rendra dʹutiles services.<br />

Pour le brave Monsieur au sujet duquel vous a écrit le r.p. Possoz, je pense quʹil<br />

faudrait lui écrire que nous vivons en vie religieuse sérieuse, que nos travaux sont ru<strong>de</strong>s,<br />

nos journées laborieuses et quʹil semble difficile, sʹil nʹa pu aller <strong>avec</strong> la règle du noviciat<br />

<strong>de</strong> St Acheul, quʹil puisse se faire à notre genre <strong>de</strong> vie plus dur et moins soutenu. Il serait<br />

bon aussi <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r au r.p. ce quʹil sait <strong>de</strong> la piété, caractère, capacité, dévouement, vo‐<br />

cation religieuse <strong>de</strong> ce sujet; sans tous ces renseignements, il nʹy a pas moyen <strong>de</strong> donner<br />

suite à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>. Si les renseignements étaient favorables, vous pourriez lʹappeler chez<br />

vous et le recevoir pour un postulat auquel vous donneriez telle durée qui pourrait sem‐<br />

bler convenable pour vous et pour lui.<br />

Tous nos ff. vous assurent <strong>avec</strong> moi <strong>de</strong> leur tendre affection. Jʹembrasse tous les vô‐<br />

tres et vous‐même, cher Monsieur lʹabbé, ainsi que notre cher abbé Planchat.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

937


878 à M. Caille<br />

Se défier <strong>de</strong>s candidats provenant dʹautres Communautés religieuses. Se renseigner sur <strong>de</strong>s critères essentiels<br />

tels que : piété, caractère, dévouement, aptitu<strong>de</strong>, santé.<br />

[janvier 1863]<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous prie <strong>de</strong> voir aussitôt que possible le r.p. Supérieur <strong>de</strong> St Acheul et <strong>de</strong> lui <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>r très confi<strong>de</strong>ntiellement son avis sur le jeune homme dont M. Halluin mʹa renvoyé<br />

la lettre ci‐jointe; nous avons beaucoup à nous défier <strong>de</strong>s sujets qui sortent <strong>de</strong>s autres<br />

Communautés; il est rare quʹils aient une véritable valeur religieuse.<br />

Le certificat ci‐joint répond <strong>de</strong> la conduite, mais la piété, le dévouement, le carac‐<br />

tère, lʹaptitu<strong>de</strong>, la santé, tout cela reste à éclaircir; si le r.p. répondait sur ces points favora‐<br />

blement, vous pourriez voir le jeune homme et causer <strong>avec</strong> lui, et prendre telle décision<br />

qui vous paraîtrait convenable.<br />

Autrement, je répondrais à M. Halluin négativement, en suite <strong>de</strong>s renseignements<br />

que vous mʹaurez transmis.<br />

Mille affections en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

879 à M. Maignen<br />

A propos dʹun manuscrit dʹune pièce <strong>de</strong> théâtre, MLP. y apporte ses corrections, préconisant un texte ʺénergi‐<br />

que et courtʺ, ʺfait sobrementʺ. Réflexion sur les sensualistes du XIX e siècle.<br />

Vaugirard, 12 janvier [1863] 341<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Je vous ai renvoyé, comme vous le désiriez, le manuscrit <strong>de</strong> St <strong>Jean</strong>342 . En y pensant,<br />

je croirais bien hasar<strong>de</strong>ux dʹy ajouter un acte; le travail nʹa pas été prédisposé pour cela, on<br />

détruira lʹharmonie telle quelle <strong>de</strong> la composition, on allongera la durée, déjà suffisante, <strong>de</strong><br />

la représentation et on pourra bien en manquer complètement lʹeffet. Je vous invite donc à<br />

y regar<strong>de</strong>r à <strong>de</strong>ux, et même à trois fois.<br />

A mon avis, on <strong>de</strong>vrait se borner à allonger un peu le 2e acte trop court. On le ferait<br />

aisément, je crois, en développant un peu le caractère <strong>de</strong> Diotrèphe quʹon pourrait faire le<br />

représentant <strong>de</strong> la philosophie épicurienne; vous auriez aisément le type <strong>de</strong>s sectateurs <strong>de</strong><br />

cette Ecole, car tous nos sensualistes <strong>de</strong> ce temps ne sont autres que les Epicuriens étei‐<br />

gnant lʹesprit au profit <strong>de</strong>s sens, ne voyant <strong>de</strong> bonheur que dans les joies et raffinements<br />

du plaisir, nʹayant <strong>de</strong> règle que leur intérêt, résumant la morale à ces <strong>de</strong>ux mots: richesse,<br />

plaisir. Diotrèphe pourrait avoir sur cette matière un dialogue <strong>avec</strong> un <strong>de</strong>s jeunes Ephé‐<br />

siens moins sensuel que lui, inclinant un peu au spiritualisme et paraissant douter que<br />

Caïus puisse, si facilement que lʹespère Diotrèphe, être entraîné par les séductions dont ce<br />

<strong>de</strong>rnier veut lʹentourer.<br />

341 L’original porte 1862 par erreur <strong>de</strong> MLP.<br />

342 La pièce St-<strong>Jean</strong> a été composée par l’abbé V. Marty qui laissera la Congrégation en octobre 1864. Les ASV en ont un exemplaire<br />

<strong>avec</strong> correction et compléments <strong>de</strong> MLP. Les lettres 923 et 924, du 30 décembre 1863, disent qu’elle vient d’être jouée <strong>avec</strong> grand<br />

succès.<br />

938


Je crois aussi quʹau commencement du 3 e acte, dans le dialogue entre Démétrius et<br />

Théophile, le premier pourrait rendre plus explicable le prodigieux pervertissement <strong>de</strong><br />

Caïus en rapportant (brièvement) une scène <strong>de</strong> débauche, <strong>de</strong> jeu effréné, en suite <strong>de</strong> la‐<br />

quelle, dans une querelle <strong>avec</strong> lʹun <strong>de</strong>s joueurs, Caïus armé lʹaurait percé <strong>de</strong> son glaive; <strong>de</strong><br />

là, poursuivi par la famille, par les magistrats, il se serait jeté dans la montagne et enfin as‐<br />

socié à une troupe <strong>de</strong> bandits. Ce récit serait frappant, sʹil était énergique et court; un pre‐<br />

mier meurtre a préparé les autres, le sang enivre comme le vin.<br />

Je crois quʹ<strong>avec</strong> cela, fait sobrement, la pièce serait sur ses pieds et marcherait <strong>avec</strong><br />

ensemble.<br />

Adieu, cher ami, je vous embrasse affectueusement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Quelques mots aussi dans la bouche <strong>de</strong> Diotrèphe qui expliquent, dans son<br />

dialogue <strong>avec</strong> le jeune Ephésien, cette soif <strong>de</strong> prosélytisme quʹont les impies et les hommes<br />

<strong>de</strong> plaisir, prosélytisme dont lʹar<strong>de</strong>ur haineuse et passionnée nous contriste si constam‐<br />

ment tous les jours.<br />

880 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Remerciement pour sa lettre ʺtrop affectueuseʺ envoyée par M. <strong>de</strong> Varax (alors candidat au Noviciat quʹil com‐<br />

mencera à Chaville le 7 avril). MLP. a été remué par son âme jeune et ar<strong>de</strong>nte, une <strong>de</strong> celles qui ʺsans résister<br />

quittent tout pour suivre le divin Jésus.ʺ<br />

Vaugirard, 15 janvier 1863<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Je nʹai pas le courage <strong>de</strong> vous gron<strong>de</strong>r pour la lettre trop affectueuse que vous<br />

mʹavez écrite hier; cʹest une effusion dʹun cœur touché par la grâce, comment arrêter cela?<br />

LʹEsprit souffle où il veut et comme il veut, jʹen ai été, en lisant cette lettre, remué comme<br />

si jʹavais 20 ans; oui, Dieu est bon, mais comme Il est puissant aussi, comme Il sait, quand<br />

Il sʹempare dʹun cœur, y mettre une surabondance dʹamour qui embellit tout et prête vie et<br />

beauté à tout! Ces heures <strong>de</strong> saint enthousiasme pourront et <strong>de</strong>vront certainement passer,<br />

mais je nʹai pas peur, la touche est donnée maintenant, lʹimpulsion est reçue, vous serez<br />

tout à Dieu, dans la voie la plus humble, la plus généreuse, dans la voie du sacrifice; il faut<br />

bien que la tradition sʹen perpétue et que le divin Jésus trouve toujours <strong>de</strong>s âmes auxquel‐<br />

les Il dise <strong>avec</strong> autorité: Suivez‐moi et qui, sans résister, quittent tout pour le suivre; vous<br />

êtes, cher enfant, une <strong>de</strong> ces âmes, bénissez‐Le, car cʹest une grâce, cʹest‐à‐dire un don gra‐<br />

tuit; gratuit, oui, et pourtant don qui ne tombe quʹaux cœurs ayant place pour le recevoir<br />

et lʹapprécier.<br />

Adieu, cher enfant, je ne veux pas prendre votre temps, il faut que vous travailliez<br />

pour bien et vite finir. Vous enten<strong>de</strong>z; adieu donc, je brûlerai votre lettre quand jʹaurai un<br />

sacrifice à faire à Dieu, je la gar<strong>de</strong> aujourdʹhui.<br />

Votre affectionné ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

939


881 à M. Planchat<br />

Ouvrages religieux et profanes à acheter et à apporter au Noviciat <strong>de</strong> Chaville, inauguré il y a trois jours, le 13<br />

janvier. M. Planchat qui vient <strong>de</strong> quitter Arras est nommé ʺsecrétaireʺ <strong>de</strong> MLP.<br />

Vaugirard, 16 janvier 1863<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai besoin dʹemporter <strong>de</strong>main à Chaville quelques livres que je vous prie <strong>de</strong> mʹache‐<br />

ter dʹurgence <strong>de</strong>main matin samedi et <strong>de</strong> me les envoyer pour que je ne manque pas <strong>de</strong> les<br />

procurer à M. Marty et aux jeunes frères qui les atten<strong>de</strong>nt.<br />

‐ 1 Catéchisme du Concile <strong>de</strong> Trente in‐8° qui, je crois, est la meilleure édition.<br />

‐ 1 Catéchisme 3 vol. <strong>de</strong> Le Guillois.<br />

‐ 12 Histoire <strong>de</strong> la religion <strong>de</strong> Lhomond (4 ou 6 suffiraient pour le moment, sʹils<br />

nʹétaient pas cartonnés).<br />

‐ 1 Manuel du Séminariste, par Mgr Devie, Evêque <strong>de</strong> Belley.<br />

‐ 1 Vol. (je crois) Cours <strong>de</strong> Littérature du p. <strong>de</strong> Boylesve (Poussielgue, je crois).<br />

‐ 6 Exemplaires <strong>de</strong> Rodriguez cartonnés, lʹédition qui semblera la meilleure et au<br />

meilleur marché; sʹils nʹétaient pas cartonnés, en prendre 4 seulement reliés. Jʹai lʹargent<br />

pour ces livres, je vous le remettrai mercredi.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

882 <strong>de</strong> M. Planchat à M. Lantiez 343<br />

P. S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Affectation <strong>de</strong> M. Planchat comme secrétaire <strong>de</strong> MLP.<br />

Vaugirard, 19 janvier 1863<br />

Mon bon Père Lantiez,<br />

M. Père Supérieur vous laisse à déci<strong>de</strong>r <strong>avec</strong> M. Halluin ce qui convient mieux pour notre<br />

bon petit Charles Lenoir. Si M. Halluin recevait encore pour cet enfant une in<strong>de</strong>mnité, M. Le Pre‐<br />

vost pense quʹelle <strong>de</strong>vrait être perçue le plus longtemps possible au profit <strong>de</strong> Vaugirard, si déci‐<br />

dément il y entrait. Par bonheur, jʹai su en général me présenter comme un passant. Pour moi‐<br />

même, je suis, je vous lʹassure, dans lʹindifférence. Si <strong>de</strong>ux sentiments me partageaient, ce serait, il<br />

me semble, celui <strong>de</strong> la peine <strong>de</strong> notre bon p. Halluin, <strong>de</strong>s besoins <strong>de</strong> nos enfants dʹArras et du<br />

quartier St Géry dʹune part, dʹautre part le sentiment <strong>de</strong>s besoins <strong>de</strong> Vaugirard, et surtout <strong>de</strong> M. le<br />

Supérieur.<br />

Jʹai répété ces trois jours au St Sacrifice le fiat voluntas, je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à Dieu par Marie et Jo‐<br />

seph <strong>de</strong> le dire <strong>de</strong> tout mon cœur, en oubliant entièrement mes goûts personnels et mes affections.<br />

Tout à vous dans les Sacrés Cœurs<br />

Lʹabbé Planchat, pr.<br />

Mon bon abbé, M. Planchat vous dit mon sentiment en même temps que le sien<br />

propre; je regretterais bien <strong>de</strong> mettre M. Halluin en peine, quoique à vrai dire, nous puis‐<br />

sions utiliser davantage M. Planchat ici quʹà Arras; je suspendrai donc la décision défini‐<br />

tive jusquʹà votre retour sur ce point; assurez M. Halluin <strong>de</strong> nos sincères affections et pre‐<br />

nez‐en vous‐même votre part.<br />

Mille amitiés à nos frères<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

343 Sur l’enveloppe: « pour remettre à M. Lantiez et pour ouvrir en l’absence <strong>de</strong> celui-ci ». M. Halluin n’intervient que pour remettre<br />

la lettre au père Lantiez sans en prendre connaissance.<br />

940


883 à M. Caille<br />

Le projet <strong>de</strong> M. Caille <strong>de</strong> nʹavoir que <strong>de</strong>s apprentis profitera à lʹensemble <strong>de</strong> lʹŒuvre. Admission dʹun jeune<br />

homme. Précautions à prendre avant <strong>de</strong> lʹadmettre.<br />

Vaugirard, 6 février 1863<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> votre bonne lettre apportée par notre f. Carment; les détails<br />

quʹelle contient mʹont vivement intéressé, et jʹai béni Dieu <strong>de</strong> la protection si constante<br />

quʹIl daigne accor<strong>de</strong>r à vos travaux.<br />

Jʹapprouve bien votre pensée <strong>de</strong> nʹavoir que <strong>de</strong>s apprentis; il vous restera ainsi plus<br />

<strong>de</strong> liberté pour vous occuper sérieusement du côté moral et spirituel <strong>de</strong> vos œuvres.<br />

Je ne vois aucune objection à faire à la proposition concernant lʹadmission du jeune<br />

homme indiqué par M. Cacheleux; je serais doublement rassuré si vous avez vu ce jeune<br />

homme, si vous vous êtes entretenu <strong>avec</strong> lui et si vous en êtes satisfait. Envoyez‐le donc,<br />

dès que vous le jugerez à propos, nous le recevrons cordialement, si vous croyez quʹil<br />

puisse nous convenir.<br />

Adieu, bien cher ami, mille affections à nos frères; nous serons heureux <strong>de</strong> vous<br />

voir si, comme vous le prévoyez, les affaires vous amènent prochainement à Paris.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

884 à M. Halluin<br />

Que M. Halluin ménage sa santé, le bien <strong>de</strong> ses enfants le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>. Après avoir quitté lʹŒuvre dʹArras, un ai<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong> M. Halluin en exprime le regret. Il faut tenter <strong>de</strong> le faire revenir. MLP. attendait <strong>de</strong> lui plus <strong>de</strong> confiance à son<br />

égard.<br />

Vaugirard, 14 février 1863<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je joins ici <strong>de</strong>ux mots pour vous recomman<strong>de</strong>r <strong>de</strong> prendre soin <strong>de</strong> votre santé, qui<br />

est encore trop souvent souffrante et fatiguée; pour le bien <strong>de</strong> vos enfants, ménagez‐la,<br />

Dieu, je crois, vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> cette attention.<br />

Jʹai appris que le bon M. Grebert, dont lʹéloignement mʹavait étonné, regrettait la vie<br />

plus occupée, plus utile, plus dévouée quʹil menait près <strong>de</strong> vous. Il était, en effet, bien à sa<br />

place; il nʹeût pas dû, ce me semble, la quitter sans prier et sans consulter. Sʹil croit réelle‐<br />

ment <strong>avec</strong> nous que sa carrière serait plus édifiante pour lui, plus agréable aux yeux <strong>de</strong><br />

Dieu, en continuant comme par le passé à se dévouer au service <strong>de</strong>s pauvres enfants dé‐<br />

laissés, invitez‐le à revenir près <strong>de</strong> vous et à sʹassocier encore à votre œuvre. Je regrette<br />

bien un peu quʹil ne se sente pas un peu <strong>de</strong> confiance qui lʹattire à entretenir quelques rap‐<br />

ports <strong>avec</strong> moi, mais Dieu le lui inspirera peut‐être dans lʹavenir. Assurez‐le <strong>de</strong> mes sen‐<br />

timents dʹestime et <strong>de</strong> cordiale affection.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, je suis <strong>de</strong>s yeux tout ce qui intéresse vous et vos en‐<br />

fants. Mille souvenirs à tous nos frères.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

941


885 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

M. <strong>de</strong> Varax sʹapprête à entrer au Noviciat. MLP. lʹexhorte à la confiance et à la patience face aux résistances <strong>de</strong><br />

sa famille; ʺconfiance toujours en Dieu, en Lui seul; nous ne ferons rien, Il fera toutʺ.<br />

Vaugirard, 16 février 1863<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je bénis <strong>avec</strong> vous la bonne et douce Provi<strong>de</strong>nce qui nous aplanit les voies et qui<br />

surtout veut ménager le cœur <strong>de</strong> vos bons parents. Jʹaurais, je lʹespère, le courage dʹêtre<br />

fort contre eux sʹil le fallait absolument, mais comme je serai bien plus consolé si tout sʹar‐<br />

range amiablement, en entente chrétienne. Je lʹespère, votre bonne mère comprendra peu à<br />

peu et, par sa douce influence, votre vénéré père accé<strong>de</strong>ra aussi. Je ne crois pas que, pour<br />

le moment, il soit besoin dʹavancer davantage; il peut être bon, les pas décisifs étant faits,<br />

<strong>de</strong> laisser au temps et aux circonstances quʹil amènera le soin <strong>de</strong> <strong>de</strong>ssiner peu à peu la si‐<br />

tuation. Une chose me semble <strong>de</strong> nature à rassurer votre famille; vous vous préparerez au<br />

sacerdoce par une voie sûre, puisque le Séminaire St‐Sulpice vous y conduira; le reste<br />

nʹest‐il pas, après tout, secondaire; le champ ne sera‐t‐il pas ouvert bien large <strong>de</strong>vant vous<br />

pour les étu<strong>de</strong>s comme pour le zèle et le dévouement au bien <strong>de</strong>s âmes? Il y a là <strong>de</strong> quoi<br />

satisfaire les plus nobles ambitions, si elles sont selon la foi, selon le cœur <strong>de</strong> Dieu; nous<br />

nʹen trouverons point dʹautres chez vos bons parents. Donc, confiance toujours en Dieu, en<br />

Lui seul; nous ne ferons rien, Il fera tout; comme cʹest commo<strong>de</strong>, aimable et rassurant! Bé‐<br />

nissons‐Le.<br />

Adieu, cher ami, prions fidèlement.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

886 à M. dʹArbois<br />

M. dʹArbois souffre du régime du Séminaire. MLP. le presse <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r la permission <strong>de</strong> se reposer à Vaugi‐<br />

rard avant son ordination. Sa propre santé se maintient ; le père Hello, ʺplus fatigué que luiʺ, est à Chaville pour<br />

reprendre <strong>de</strong>s forces.<br />

Vaugirard, 17 février 1863<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Le mieux momentané que vous éprouvez est tout acci<strong>de</strong>ntel, il tient au temps plus<br />

sec et plus fortifiant que nous traversons; mais cette surexcitation est factice, au moindre<br />

[redoux] <strong>de</strong> la température vous retomberez dans la lassitu<strong>de</strong> où vous étiez précé<strong>de</strong>m‐<br />

ment et qui était pour nous tous un indice du besoin que vous aviez dʹun repos prolongé.<br />

Aux approches <strong>de</strong> lʹordination, vous aurez divers exercices et enfin la retraite qui ne lais‐<br />

seront pas que dʹêtre un peu fatigants; nʹest‐il pas plus sage <strong>de</strong> se tenir prêt pour cette<br />

sainte épreuve que <strong>de</strong> sʹexposer témérairement à ne pouvoir bien ou pas du tout la sup‐<br />

porter? Deman<strong>de</strong>z donc, cher ami, à M. Carrière, <strong>de</strong> ma part, la permission <strong>de</strong> revenir<br />

momentanément près <strong>de</strong> nous; priez, en mon nom aussi, M. Icard, sʹil est besoin, dʹap‐<br />

puyer cette <strong>de</strong>man<strong>de</strong>. Je suis si convaincu quʹelle est fondée que je nʹhésiterai pas à me<br />

rendre moi‐même près <strong>de</strong> M. Carrière pour la lui soumettre, si vous croyez que la chose<br />

rencontre difficulté; jʹai promis à votre bon père que cette permission ne vous serait pas re‐<br />

fusée, soyez sûr que vos Supérieurs sont trop bons et trop sages pour ne pas con<strong>de</strong>scendre<br />

942


à un désir que nous croyons uniquement inspiré par le sentiment <strong>de</strong> vos besoins <strong>de</strong> corps<br />

et dʹesprit.<br />

Je vous remercie, bien cher ami, <strong>de</strong> vos sollicitu<strong>de</strong>s sur ma santé; je suis bien remis<br />

du malaise subit que le saisissement du froid mʹavait causé. Notre cher abbé Hello est plus<br />

fatigué que moi; malgré son courage habituel, il lui a fallu lâcher pied; il est <strong>de</strong>puis quel‐<br />

ques jours à Chaville où son état dʹépuisement nerveux va lʹobliger à faire un séjour un<br />

peu prolongé; il espère revenir à Nazareth pour la fin du carême où son ministère serait le<br />

plus nécessaire; on a tout le soin possible <strong>de</strong> lui à Chaville où il se trouve bien; M. Planchat<br />

le remplace momentanément dans ses œuvres.<br />

Vous ne sauriez vous figurer, cher ami, combien le ministère a <strong>de</strong> fatigues et com‐<br />

bien il est nécessaire que vous nʹusiez pas vos forces jusquʹau bout, si vous voulez ne pas<br />

vous réduire à lʹinaction absolue pour <strong>de</strong>s temps indéfinis. A peine sorti du Séminaire, M.<br />

Planchat a été, durant près <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux ans, dans une impuissance presque entière; tâchez<br />

dʹéviter, par un peu <strong>de</strong> précaution, un si grave inconvénient.<br />

Adieu, bien cher ami, à bientôt, je lʹespère; écrivez‐moi si vous croyez utile que<br />

jʹaille voir moi‐même votre vénéré Supérieur.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

887 à M. Caille<br />

Au sujet <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux candidats à la vie religieuse, MLP. rappelle le discernement à opérer (santé, aptitu<strong>de</strong> aux œu‐<br />

vres, vertu). Il faut quʹils ren<strong>de</strong>nt ʺ<strong>de</strong> vrais services et quʹils nʹapportent pas plus <strong>de</strong> charge que dʹavantage à la<br />

Communauté.ʺ<br />

Vaugirard, 17 février 1863<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je crois quʹil est bien essentiel que vous voyiez <strong>de</strong> tout près le bon M. Thoris, afin <strong>de</strong><br />

ne le recevoir parmi nous quʹautant quʹil serait vali<strong>de</strong>, capable <strong>de</strong> nous rendre <strong>de</strong> vrais<br />

services et <strong>de</strong> ne pas apporter plus <strong>de</strong> charge que dʹavantage à la Communauté; jʹapprouve<br />

donc bien que vous le fassiez venir temporairement à Amiens pour le bien juger. Cet ai<strong>de</strong><br />

momentané sera un soulagement pour notre f. Marcaire que M. Planchat dit être fatigué.<br />

Quant à M. Cathelin, vous pouvez à loisir lʹexaminer, puisquʹil est sous vos yeux; il<br />

faut que la Communauté ne se recrute que <strong>de</strong> sujets valables en vertu et en suffisante ca‐<br />

pacité.<br />

Lʹhiver nous a ici, un peu plus que <strong>de</strong> coutume, éprouvés pour les santés, du côté<br />

<strong>de</strong> nos enfants surtout; quelques frères sont aussi souffrants. Prions Dieu qui remettra tou‐<br />

tes ces débilités en meilleur état et nous fera tirer parti spirituellement <strong>de</strong> toutes ces petites<br />

épreuves.<br />

Mille affections à tous, à vous tout particulièrement.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

943


888 à M. Halluin<br />

Mouvement <strong>de</strong> personnel nécessité par lʹétat <strong>de</strong> santé du père Hello en repos à Chaville. M. Planchat ne peut se<br />

rendre à Arras. Faute <strong>de</strong> locaux, un jeune ouvrier ne peut être hébergé à Nazareth. Abandon à Dieu dans les<br />

épreuves: ʺIl proportionnera sa grâce à nos besoinsʺ.<br />

Vaugirard, 26 février 1863<br />

Bien cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Notre bon abbé Planchat a dû vous écrire déjà pour vous dire lʹembarras momenta‐<br />

né, je lʹespère, que nous apporte lʹétat <strong>de</strong> santé <strong>de</strong> M. lʹabbé Hello qui sʹest trouvé tellement<br />

épuisé quʹil a dû forcément interrompre ses travaux et se retirer à Chaville dans une sorte<br />

dʹimpuissance absolue. Les soins quʹil reçoit et le repos ont déjà adouci sa souffrance, mais<br />

on ne présume guère quʹil puisse reprendre sa place à Nazareth avant les <strong>de</strong>rniers temps<br />

du Carême. Jusque‐là, M. Planchat, obligé <strong>de</strong> le suppléer, ne pourra guère se rendre à Ar‐<br />

ras. Je crains que ce nouvel embarras nʹajoute à vos difficultés. Vous avez heureusement<br />

<strong>de</strong>s séminaristes pour les catéchismes, cʹest un grand point, mais pour les confessions,<br />

comment vous arrangerez‐vous pour ne pas trop laisser vos enfants en souffrance? Jʹes‐<br />

père que la Provi<strong>de</strong>nce vous suscitera quelques secours pour subvenir à ce besoin momen‐<br />

tané.<br />

Nos ff. <strong>de</strong> Nazareth nʹont point en ce moment la possibilité <strong>de</strong> donner asile à M. Si‐<br />

monnet aux Jeunes Ouvriers, lʹétablissement récent dʹune chapelle les ayant privés <strong>de</strong><br />

quelques locaux qui étaient libres jusque‐là. Ils pensent dʹailleurs quʹil est <strong>de</strong> toute impos‐<br />

sibilité que ce bon Monsieur mette à fin ses affaires, sʹil nʹest sur les lieux pour un temps<br />

indéfini. Ils pensent donc quʹil faudrait lui trouver un petit emploi qui, tout en lui assurant<br />

le pain quotidien, lui laisserait le loisir <strong>de</strong> suivre lʹexécution <strong>de</strong> ses projets. Cette combinai‐<br />

son serait assurément la meilleure. M. Planchat et nos MM. <strong>de</strong> Nazareth chercheront <strong>de</strong><br />

grand cœur quelque voie pour secon<strong>de</strong>r les vues <strong>de</strong> ce bon Monsieur; sʹils trouvent quel‐<br />

que occasion favorable, ils sʹempresseront <strong>de</strong> lʹen avertir.<br />

Nous recevrons <strong>avec</strong> joie <strong>de</strong> vos nouvelles; nous avons été, pour nous, plus éprou‐<br />

vés que <strong>de</strong> coutume du côté <strong>de</strong>s santés. Nous avons perdu un <strong>de</strong> nos enfants, un autre<br />

nous donne <strong>de</strong> sérieuses inquiétu<strong>de</strong>s. Les maux <strong>de</strong> tête ont aussi leur cours et nous ont<br />

causé <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s difficultés. Que la sainte volonté <strong>de</strong> Dieu soit faite; sʹIl nous éprouve, Il<br />

proportionnera sa grâce à nos besoins.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, croyez bien à tous nos sentiments les plus affectueux<br />

et les plus dévoués en N.S.<br />

Mille amitiés et souvenirs à nos frères.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

889 à M. Maignen<br />

MLP. lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> rencontrer un postulant présenté par M. Caille. Tenir compte <strong>de</strong> la culture générale, <strong>de</strong><br />

lʹécriture, <strong>de</strong> lʹorthographe.<br />

Vaugirard, 10 mars 1863<br />

Cher enfant en N.S.,<br />

M. Caille a amené hier <strong>avec</strong> lui dʹAmiens un jeune postulant [Cathelin] <strong>de</strong> 24 ans,<br />

quʹil étudiait <strong>de</strong>puis quelques mois et quʹil croit <strong>de</strong>voir nous présenter. Je désirerais que<br />

944


vous arriviez <strong>de</strong>main un peu avant le Conseil pour vous entretenir <strong>avec</strong> lui, afin que vous<br />

voyiez sʹil vous paraîtrait convenir à votre œuvre pour remplacer Bérard. Autrement, je<br />

crois que vous <strong>de</strong>vriez prendre le jeune Vincent Mériguet qui ne manque ni dʹintelligence<br />

ni <strong>de</strong> bonne volonté. Son écriture, assez constamment cultivée ici, est passable, lʹorthogra‐<br />

phe laisse encore à désirer. Lʹautre a une meilleure écriture, mais pas plus dʹorthographe.<br />

Il est assez bien extérieurement.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

889 bis à M. lʹabbé Buquet 344<br />

Autorisation <strong>de</strong>mandée pour que les enfants et fidèles puissent faire leurs Pâques dans nos chapelles.<br />

Vaugirard, 14 mars 1863<br />

Monsieur le Vicaire Général,<br />

Vous avez eu la bonté, les années <strong>de</strong>rnières, <strong>de</strong> nous accor<strong>de</strong>r quelques permissions<br />

pour faire faire les Pâques dans les chapelles <strong>de</strong> Nazareth, <strong>de</strong> St ‐Charles, <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Grâce<br />

et <strong>de</strong>s Orphelins à Vaugirard, à nos enfants, jeunes ouvriers et leurs parents et aux mem‐<br />

bres <strong>de</strong> nos Saintes‐Familles, à la suite <strong>de</strong>s retraites.<br />

Je vous prie <strong>de</strong> nous donner la même autorisation pour cette année. Nous userons<br />

<strong>avec</strong> toute discrétion <strong>de</strong> cette faveur sans laquelle, bien assurément, la majeure partie du<br />

personnel composant nos œuvres rencontreraient dʹextrêmes difficultés pour accomplir le<br />

<strong>de</strong>voir pascal. Il en est <strong>de</strong> même <strong>de</strong> quelques pénitents mala<strong>de</strong>s ou empêchés, qui ne pour‐<br />

raient quʹ<strong>avec</strong> beaucoup <strong>de</strong> peine faire ailleurs leurs Pâques.<br />

Jʹespère donc, Monsieur le Vicaire Général, que vous voudrez bien, dans ces limites,<br />

nous accor<strong>de</strong>r comme précé<strong>de</strong>mment lʹautorisation que nous <strong>de</strong>mandons et que le bien<br />

<strong>de</strong>s âmes, comme celui <strong>de</strong> nos œuvres, nous semble véritablement réclamer.<br />

Je suis, <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s sentiments bien respectueux, Monsieur le Vicaire Général,<br />

Votre très humble et très obéissant serviteur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Monsieur Le <strong>Prevost</strong> me prie dʹajouter, à la nomenclature <strong>de</strong> nos Maisons dʹœuvres, celle<br />

du Patronage S te ‐Anne, qui se trouve oubliée. Dans cette œuvre, <strong>de</strong>s enfants, jeunes gens et parents<br />

<strong>de</strong> toutes paroisses sont compris pour une retraite dont la communion se fait à S te ‐Marguerite.<br />

17 mars. Lʹabbé Planchat, prêtre 345<br />

890 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

A M. <strong>de</strong> Varax qui lui renouvelait son vif désir dʹentrer dans lʹInstitut, MLP. recomman<strong>de</strong> la patience et la<br />

mansuétu<strong>de</strong> envers ses parents. Conseils <strong>de</strong> sagesse: ʺbien peser les conséquences <strong>de</strong>s pasʺ quʹil va faire; suivre la<br />

Provi<strong>de</strong>nce: ʺAllez, si vous voyez clair, ralentissez, si vous êtes dans lʹombreʺ.<br />

344 Vicaire général <strong>de</strong> Paris.<br />

345 J'accor<strong>de</strong> bien volontiers à M. Le <strong>Prevost</strong> la désirée autorisation qu'il me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>.<br />

Il est bon toutefois <strong>de</strong> rappeler à ces bonnes gens les règles <strong>de</strong> l'Eglise et que, s'ils font leur communion pascale dans ces<br />

réunions, c'est qu'on a <strong>de</strong>mandé pour eux une autorisation particulière.<br />

J'ai répondu directement à l'abbé Planchat.<br />

Je prie Dieu <strong>de</strong> continuer à bénir toutes les bonnes œuvres <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong>.<br />

19 mars. Buquet<br />

945


Chaville, 14 mars 1863<br />

Bien cher enfant,<br />

Je vous écris ces <strong>de</strong>ux mots en hâte <strong>de</strong> Chaville, nʹayant pas eu un moment libre <strong>de</strong><br />

tout le jour à Vaugirard; M. Marty, en passant tout à lʹheure près du Montparnasse, y re‐<br />

mettra ces lignes.<br />

Je me réjouis du contenu <strong>de</strong> votre lettre; pourtant, gardons‐nous <strong>de</strong> contrister vos<br />

bons parents, sans absolue nécessité; si un peu <strong>de</strong> patience ménage mieux leurs cœurs,<br />

ayons patience; nʹaffligeons pas votre bon père surtout qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> bien <strong>de</strong> la mansué‐<br />

tu<strong>de</strong> dans les mouvements.<br />

Pesez bien aussi pour vous‐même les conséquences <strong>de</strong>s pas que vous franchirez;<br />

soyez sûr que plus dʹune fois vous regretterez les ombrages <strong>de</strong> Montcoy, la vie libre, les<br />

rêveries, que sais‐je, votre moi qui sera fort immolé. Quand le moment sera absolument<br />

venu <strong>de</strong> mettre la main au travail, que vous serez dans la voie, vous aurez grâce dʹétat;<br />

maintenant que vous resterez encore sur le seuil, même en habitant près <strong>de</strong> nous, est‐il sûr<br />

que vous ne serez pas parfois ébranlé et que, Dieu aidant, vous saurez par avance com‐<br />

mencer déjà votre sacrifice, sans être bien assuré que, pour le moment présent, il était ur‐<br />

gent <strong>de</strong> le consommer? Je ne suis pas timi<strong>de</strong>, je ne doute pas <strong>de</strong> vous, vous le savez bien, je<br />

désire seulement que nous suivions les indices provi<strong>de</strong>ntiels pour avancer et que nous<br />

nʹallions pas sans eux. Si vous les apercevez, marchez hardiment; si vous étiez en doute,<br />

temporisez; voilà le résumé <strong>de</strong> ces lignes; allez, si vous voyez clair; ralentissez, si vous êtes<br />

dans lʹombre.<br />

Sacrifiez absolument la question dʹargent, elle nʹest pour rien ici, ni à vos yeux, ni<br />

aux miens.<br />

Si vous venez me voir lundi, je ne serai <strong>de</strong> retour peut‐être que vers 1h. ou 1h. 1/2 , re‐<br />

tenu que je serai à Chaville, au moins jusquʹà midi, selon lʹapparence.<br />

Jʹai un fait <strong>de</strong> quelque intérêt que je vous dirai à lʹoccasion.<br />

Adieu, bien cher ami, mille affections en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

891 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Que M. <strong>de</strong> Varax se rassure: MLP. le considère déjà comme ʺ<strong>de</strong> la familleʺ; ʺlʹentente du cœur est désormais<br />

pleine et sans nuage possible entre eux.ʺ<br />

Vaugirard, 16 mars 1863<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Votre petite lettre est charmante <strong>de</strong> cordialité et <strong>de</strong> soumission filiale, je nʹai pas le<br />

temps dʹy répondre. Oui, cher ami, jʹaccepte la responsabilité <strong>de</strong> vos actes; vous mʹavez<br />

dit, le 12 janvier, que je <strong>de</strong>vais vous regar<strong>de</strong>r comme <strong>de</strong> la famille, jʹai pris le mot dans<br />

toute son extension. Nʹayez jamais <strong>de</strong> mauvaise pensée sur mes sentiments à votre égard,<br />

ce serait à tort; je nʹen ai pas une seule à me reprocher, il en sera, je lʹespère, toujours ainsi.<br />

Le temps a manqué pour peser assez peut‐être les termes <strong>de</strong> la lettre que je vous ai écrite,<br />

il a manqué aussi à notre entretien dʹhier, mais pas lʹentente <strong>de</strong> cœur qui, jʹen ai la<br />

confiance, est désormais pleine et sans nuage possible entre nous.<br />

Adieu, ami, à bientôt.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

946


892 à M. Halluin<br />

Des critiques ont été faites à lʹŒuvre dʹArras. MLP. appuie M. Halluin en qui il a toute confiance. M. Planchat,<br />

et plus tard M. Lantiez, vont se rendre à Arras.<br />

Vaugirard, 21 mars 1863<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vous renvoie ci‐joint la lettre ci‐jointe, un peu étrange, écrite par M. Grebert. Je lui<br />

réponds doucement, comme cela est vrai, que vous avez pleine autorité, si quelques faits<br />

vous paraissent <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r répréhension dans le régime <strong>de</strong>s frères à lʹégard <strong>de</strong>s enfants,<br />

pour y apporter remè<strong>de</strong>, que je lʹinvite donc à vous communiquer ses observations pour le<br />

bien <strong>de</strong> lʹœuvre.<br />

M. Planchat va vous faire une petite visite; je tâcherai quʹun peu plus tard M. Lan‐<br />

tiez vous aille voir à son tour pour examiner la question concernant lʹusage <strong>de</strong> la chapelle<br />

qui vous est offerte.<br />

Je voudrais mʹentretenir plus longtemps <strong>avec</strong> vous, je suis vraiment débordé en ce<br />

moment par les occupations.<br />

Mille affections à tous.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

892bis à M. <strong>de</strong> Varax346 M. <strong>de</strong> Varax va entrer en Communauté le 7 avril et fera son noviciat à Chaville. MLP. lui suggère <strong>de</strong> ne pas<br />

divulguer la nouvelle, même à son cousin, lʹabbé <strong>de</strong> Bretenières.<br />

23 mars [1863]<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Ne vous semble‐t‐il pas quʹil y a lieu <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r le silence <strong>avec</strong> tous, même pour M.<br />

Christian [<strong>de</strong> Bretenières], tant que votre éloignement <strong>de</strong> Paris nʹest pas tout à fait arrêté et<br />

précisément réglé?<br />

A vous, tout en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

893 <strong>de</strong> M. dʹArbois à M. Caille<br />

P. S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Le Noviciat <strong>de</strong> Chaville. Difficulté dʹy accueillir un jeune pour quelques jours.<br />

Vaugirard, 15 avril 1863<br />

Mon cher frère,<br />

Monsieur le Supérieur me charge <strong>de</strong> vous faire connaître que la retraite <strong>de</strong> la Communauté<br />

commencera le dimanche 26 <strong>de</strong> ce mois pour finir le vendredi matin, 1er mai.<br />

Elle sera donnée par le r.p. Leblanc, directeur spirituel <strong>de</strong>s rr. pp. Jésuites <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong><br />

Vaugirard.<br />

346 Supplée la lettre 900.<br />

947


Monsieur le Supérieur vous prie dʹy envoyer ceux <strong>de</strong>s frères quʹil ne vous serait pas indis‐<br />

pensable <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r.<br />

Tout va bien, grâces à Dieu, dans nos maisons <strong>de</strong> Paris; les retraites pascales ont produit les<br />

meilleurs résultats, vous en bénirez <strong>avec</strong> nous le Seigneur. Nous espérons que chez vous ils nʹau‐<br />

ront pas été moins satisfaisants; Monsieur le Supérieur se réjouira <strong>de</strong> lʹapprendre, quand vous au‐<br />

rez lʹoccasion <strong>de</strong> lui en donner connaissance.<br />

Adieu, mon cher frère, je me recomman<strong>de</strong> bien vivement à vos prières et à celles <strong>de</strong> nos frè‐<br />

res pour recevoir moins indignement la grâce du sacerdoce qui mʹattend dans six semaines.<br />

f. Tharsice [dʹArbois]<br />

Diacre<br />

Bien cher ami,<br />

M. Planchat mʹavait proposé <strong>de</strong> votre part <strong>de</strong> faire venir M. <strong>Léon</strong> [Guichard] à Cha‐<br />

ville jusquʹau moment <strong>de</strong> la retraite, mais je ne crois pas que cette mesure eût pu être bien<br />

utile à ce jeune frère; on suit à Chaville <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s et <strong>de</strong>s cours qui, pris sans commence‐<br />

ment ni fin par lui, nʹeussent pu lui être dʹaucun avantage ni intérêt.<br />

Nous allons bien ici, nous serons heureux dʹavoir <strong>de</strong> vos nouvelles à lʹoccasion <strong>de</strong> la<br />

retraite, si ce nʹest avant.<br />

Adieu, bien cher ami, croyez à ma tendre affection en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

894 à M. Risse<br />

Prière et pru<strong>de</strong>nce avant <strong>de</strong> prendre une décision.<br />

Vaugirard, 24 avril 1863<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Recomman<strong>de</strong>z à Dieu, pendant votre retraite, la pensée qui vous occupe; je me<br />

joindrai à vous pour quʹIl daigne nous éclairer et nous conduire. Je ne suis pas éloigné <strong>de</strong><br />

partager votre sentiment, mais je crois que vous <strong>de</strong>vez essentiellement et avant tout pren‐<br />

dre lʹavis <strong>de</strong> Mgr <strong>de</strong> Metz, si bienveillant et si paternel pour vous; son sentiment <strong>de</strong>vra être<br />

le nôtre et sa décision lʹindice <strong>de</strong> la volonté <strong>de</strong> Dieu. Jʹai la confiance que, <strong>de</strong> la sorte, nous<br />

ne ferons rien que <strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nt et <strong>de</strong> bien inspiré.<br />

Adieu, bien cher ami, je nʹai que le temps <strong>de</strong> vous dire ces <strong>de</strong>ux mots.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

895 à M. Maignen<br />

Envoyer sans délai M. Vasseur à Nazareth entraînerait bien <strong>de</strong>s complications. Il faut prévenir dʹéventuelles<br />

contrariétés <strong>avec</strong> la Société <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul.<br />

Vaugirard, 8 mai 1863<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

La <strong>de</strong>man<strong>de</strong> que vous me faites dʹune réponse immédiate concernant le transfert <strong>de</strong><br />

M. Alphonse [Vasseur] à Nazareth me met en embarras; M. Lantiez vient dʹarriver dʹAr‐<br />

ras, je nʹai encore pu rien concerter <strong>avec</strong> lui; je ne sais pas non plus sʹil peut si brusquement<br />

948


se passer <strong>de</strong> M. Alphonse, sans quʹil ait eu le temps <strong>de</strong> transmettre ses emplois en autres<br />

mains; il nʹest pas à Grenelle, je viens dʹy envoyer M. Boucault qui ne lʹy a point trouvé.<br />

Tout ce que je puis faire, cʹest dʹenvoyer le Père Troussier à Grenelle, afin quʹil porte à M.<br />

Lantiez une lettre dans laquelle je le prie <strong>de</strong> vous envoyer sa réponse dès quʹil sera rentré,<br />

par M. Boucault ou autrement.<br />

Restera M. Decaux auquel jʹeusse désiré communiquer ces arrangements, afin dʹévi‐<br />

ter <strong>de</strong> ce côté <strong>de</strong> nouvelles contrariétés; il comptait sur M. Alphonse pour lʹai<strong>de</strong>r à S t ‐<br />

Charles ou à S te ‐Anne, nos dispositions vont, sans doute, le mécontenter; que le Seigneur<br />

veuille bien nous assister dans toutes ces difficultés.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

896 à M. Caille<br />

Conseils <strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nce avant que M. Caille ne fasse lʹacquisition dʹune propriété. 347 Il sʹen remet à son jugement.<br />

Vaugirard, 10 mai 1863<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Lantiez nʹétait plus à Arras quand votre lettre lui a été envoyée, elle lui est reve‐<br />

nue à Grenelle.<br />

Je crois quʹil peut y avoir avantage à lʹacquisition projetée par vous, si le chemin qui<br />

y conduit nʹoblige pas à traverser la ville dans <strong>de</strong>s quartiers populeux, ce qui ne manque‐<br />

rait pas, à la longue, <strong>de</strong> vous créer <strong>de</strong>s difficultés, et aussi si vous nʹavez pas <strong>de</strong> frais nota‐<br />

bles à faire aux bâtiments, car vos charges sont déjà énormes et il ne faut pas les grossir<br />

outre mesure.<br />

Vous auriez peut‐être à<br />

examiner si les promena<strong>de</strong>s<br />

quʹon ferait à ce jardin ne nui‐<br />

raient pas à la régularité <strong>de</strong>s<br />

exercices du Patronage, où<br />

tout est calculé et où la<br />

répétition habituelle <strong>de</strong>s<br />

mêmes moyens favorise la<br />

discipline et même lʹassiduité<br />

<strong>de</strong>s jeunes gens. Si on va<br />

souvent au jardin, on peut<br />

craindre cet inconvénient; si on y va rarement, on peut se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si la dépense dʹachat,<br />

dʹinstallation et dʹentretien sera suffisamment motivée. Pesez ces raisons et passez outre si<br />

vous nʹy voyez rien qui doive vous arrêter.<br />

Adieu, bien cher ami, je vous embrasse ainsi que vos frères, notamment le cher f.<br />

Marcaire qui sʹest trouvé un peu plus chargé durant la retraite.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

347<br />

Le Petit-St-<strong>Jean</strong> à Amiens. Maison <strong>de</strong> campagne pour l’Œuvre avant <strong>de</strong> <strong>de</strong>venir orphelinat et maison d’apprentis en 1875. (VLP.<br />

II, p.221).<br />

949


897 à M. Vasseur<br />

Nouvelle obédience à Nazareth pour le frère Vasseur. Par <strong>de</strong>s paroles affectueuses, MLP. le réconforte et compte<br />

sur son bon vouloir, son zèle et son obéissance.<br />

Vaugirard, 12 mai 1863<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Ayez bonne confiance, le changement dʹœuvre qui vous est indiqué nʹaura pour<br />

vous aucune cause réelle <strong>de</strong> contrariété; vous vous retrouverez là <strong>avec</strong> <strong>de</strong> bons vieux amis,<br />

les plus anciens membres <strong>de</strong> la Communauté qui ont travaillé <strong>avec</strong> vous <strong>de</strong>puis 10 ans,<br />

vous aurez les œuvres les plus intéressantes que fasse la Communauté et un entourage <strong>de</strong><br />

bons et aimables Confrères, plus sociables que partout ailleurs. Bon courage donc, cher en‐<br />

fant, surmontez un premier mouvement <strong>de</strong> peine qui nʹa pas lʹombre <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>ment et qui<br />

vient <strong>de</strong> votre impressionnabilité trop vive, vous le savez, mais heureusement aussi facile<br />

à guérir par un peu <strong>de</strong> réflexion et <strong>de</strong> bon vouloir. Le bon Dieu, que vous avez toujours<br />

trouvé près <strong>de</strong> vous en toute circonstance, vous assistera encore ici, puisquʹil sʹagit <strong>de</strong> ren‐<br />

dre un service essentiel à lʹœuvre <strong>de</strong> Nazareth, <strong>de</strong> me tirer moi‐même dʹun embarras qui<br />

pourrait être sérieux, et enfin dʹoffrir au Seigneur un petit sacrifice <strong>de</strong> zèle et dʹobéissance.<br />

Je vous embrasse cordialement et prie le divin Seigneur <strong>de</strong> vous bénir.<br />

Votre affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

898 à M. Maignen<br />

Il lui promet <strong>de</strong> se prononcer dès que possible sur <strong>de</strong>s ʺpetits travauxʺ littéraires. Appel à entretenir lʹunion <strong>de</strong>s<br />

cœurs par la divine charité.<br />

Vaugirard, 15 mai 1863<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Je vais lire aussi vite que je le pourrai vos petits travaux.<br />

Ayez bonne confiance, nous nʹétions pas bien loin lʹun <strong>de</strong> lʹautre, même quand<br />

quelque nuage était entre nous; en ce cas, il ne faut quʹun peu <strong>de</strong> patience, le nuage dispa‐<br />

raît et la lumière revient. Soyons bien fidèles à Dieu, plus nous serons à Lui, plus aussi<br />

nous aurons ensemble dʹintime union par sa divine charité.<br />

Je vous embrasse bien affectueusement.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Carment est sorti, je vais lui dire <strong>de</strong> vous envoyer Les 4 prunes; il compte les faire<br />

jouer prochainement ici pour ses 150 Dames.<br />

899 à M. Caille<br />

Envoi dʹune procuration.<br />

Vaugirard, 22 mai 1863<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai bien tardé à vous envoyer la procuration que vous me <strong>de</strong>mandiez; elle ne nous a<br />

été remise quʹhier seulement, et jʹétais absent. Ces actes, ici, sont soumis à <strong>de</strong>s formalités<br />

950


dʹenregistrement qui ne sʹaccomplissent pas sans quelque lenteur. Le retard a été tout à fait<br />

involontaire <strong>de</strong> notre part.<br />

Tout va bien ici, tous vous assurent <strong>de</strong> leurs tendres affections.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

900 348<br />

901 à M. Levassor<br />

Démarches pour ai<strong>de</strong>r son ami à publier lʹouvrage dʹhistoire quʹil vient dʹécrire.<br />

30 mai 1863<br />

Mon bien bon ami,<br />

Jʹai vu le r.p. Lacoste, ou plutôt je lui ai envoyé un <strong>de</strong> nos MM. ecclésiastiques, très<br />

particulièrement en relation <strong>avec</strong> lui, pour lui communiquer vos désirs et propositions. Il<br />

fait jusquʹà présent seul la rédaction <strong>de</strong> son petit journal, afin <strong>de</strong> sʹépargner <strong>de</strong>s frais, et<br />

nʹest pas disposé, quant à présent, à prendre un rédacteur rétribué.<br />

Je pense quʹil pourrait entrer en arrangement <strong>avec</strong> vous pour le livre que vous vou‐<br />

lez publier: Histoire populaire <strong>de</strong>s Ordres Monastiques, non sans doute pour lʹinsérer au Bon<br />

Larron, mais pour le comprendre dans sa publication <strong>de</strong>s bons livres. Je crois que vous <strong>de</strong>‐<br />

vriez le voir pour lui en parler.<br />

Adieu, bien cher ami, partagez <strong>avec</strong> votre cher entourage tous mes sentiments dʹaf‐<br />

fectueux dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

902 à M me la Vicomtesse dʹHurbal<br />

Action <strong>de</strong> grâces pour une conversion obtenue dans la famille dʹune bienfaitrice.<br />

Vaugirard, 9 juin 1863<br />

Madame la Comtesse,<br />

Je remercie Dieu <strong>avec</strong> vous dʹavoir opéré si admirablement la conversion que vous<br />

<strong>de</strong>mandiez <strong>avec</strong> tant dʹinstance et que votre chère fille [Mise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot] avait tant sou‐<br />

haitée elle‐même; cʹest une gran<strong>de</strong> joie pour votre famille, cʹest aussi une bien consolante<br />

espérance pour lʹautre conversion que vous désirez non moins vivement. Continuons donc<br />

à prier, puisque Dieu se montre si favorable, ne semble‐t‐Il pas vous encourager à le faire<br />

en répondant si bien à vos vœux? Soyez bien assurée, Madame que je suis <strong>de</strong> moitié dans<br />

toutes vos intentions et que je nʹoublie point <strong>de</strong> les offrir constamment au Seigneur.<br />

Je vous prie dʹoffrir mes respectueux souvenirs à vos chers voyageurs et dʹagréer<br />

vous‐même les sentiments les plus dévoués dans lesquels je suis<br />

Votre humble et affectionné serviteur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹai remis à M. Carment le S t François Régis, je pense quʹil lʹa reporté chez vous.<br />

348 Suppléée par la lettre 892 bis.<br />

951


903 à M. Maignen<br />

Le frère Tourniquet est <strong>de</strong>mandé pour un service en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> Nazareth, mais MLP. estime que ce frère est déjà<br />

bien occupé. MLP. a rencontré un postulant.<br />

juin 1863<br />

Si M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] peut accepter ce dérangement, je laisse M. Paillé libre<br />

<strong>de</strong> lʹenvoyer à Nanterre, mais nʹa‐t‐il pas déjà énormément à faire? Voyez ce qui est le<br />

mieux. Ici, nous nʹavons personne.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹai parlé à M. Chanteaud que jʹai trouvé bien disposé; il <strong>de</strong>man<strong>de</strong> seulement que<br />

nous ne compromettions pas le petit journal; il comprend quʹil y aurait avantage à ce quʹil<br />

fût pour un temps à Vaugirard.<br />

904 à M. Decaux<br />

Il lʹassure <strong>de</strong> ses prières à lʹoccasion <strong>de</strong> la Saint‐Paul.<br />

Vaugirard, 29 juin 1863<br />

Mon bien bon ami,<br />

Si je nʹavais hier été retenu hors <strong>de</strong> Paris et en même temps un peu souffrant, jʹau‐<br />

rais aimé à faire à Nazareth une petite visite pour unir mes vœux à ceux <strong>de</strong> nos Confrères<br />

et <strong>de</strong> tous nos jeunes gens à lʹoccasion <strong>de</strong> votre fête. Soyez assuré, mon bon ami, que jʹy<br />

étais <strong>de</strong> cœur au moins et que je nʹai point oublié aujourdʹhui au St ‐Sacrifice <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r<br />

au bon Maître toutes les grâces dont vous avez besoin pour porter les lour<strong>de</strong>s charges qui<br />

pèsent sur vous; jʹespère que son secours tout‐puissant vous rendra doux son joug et son<br />

far<strong>de</strong>au léger.<br />

Croyez bien, mon bon ami, à tous mes sentiments <strong>de</strong> fidèle et cordiale affection en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

905 à M. Halluin<br />

Vœux et prières à lʹoccasion <strong>de</strong> la Saint‐Henri. Le Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la Conférence St‐Charles ne peut loger un ouvrier<br />

dʹArras. MLP. montre sa sollicitu<strong>de</strong> pour les frères qui travaillent <strong>avec</strong> M. Halluin. Que le Supérieur dʹArras<br />

exerce sur eux une autorité attentive et stimulante.<br />

Vaugirard, 13 juillet 1863<br />

Bien cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Cʹest après‐<strong>de</strong>main votre fête; tous nos frères sʹunissent à moi pour vous dire à cette<br />

occasion les vœux <strong>de</strong> notre petite famille. Nous bénissons Dieu qui nous a unis à vous, qui<br />

nous a donné part à vos œuvres et aussi, je lʹespère, aux mérites quʹelles vous ont acquis<br />

<strong>de</strong>vant Lui. Puissent‐ils sʹaccroître <strong>de</strong> jour en jour et longtemps encore, afin que votre œu‐<br />

vre reçoive <strong>de</strong> vous sa forme parfaite et quʹelle ait ainsi les conditions qui en perpétueront<br />

les fruits. Je souhaite aussi que vos enfants répon<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> mieux en mieux à vos soins, afin<br />

<strong>de</strong> vous donner dès ici‐bas la récompense la plus précieuse à vos yeux.<br />

Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> dire que nous prierons tous pour vous le jour <strong>de</strong> la S t Henry. Je<br />

le ferai tout particulièrement au S t Sacrifice <strong>de</strong> la Messe.<br />

952


M. Carment vous a écrit que nos démarches près <strong>de</strong> M. Legentil pour procurer un<br />

logement à M. Simonnet nʹavaient pas réussi. Je crois quʹen effet, les lieux prêtent peu à cet<br />

arrangement et que les pièces existantes suffisent à peine aux besoins. A ma connaissance,<br />

M. Legentil sʹest déjà refusé à une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pareille qui lui avait été faite précé<strong>de</strong>mment.<br />

M. Planchat me dit que le f. <strong>Jean</strong> [Maury] est un peu abattu et fatigué, et que quel‐<br />

ques mois <strong>de</strong> repos le remettraient. Si vous pouviez le faire remplacer momentanément<br />

par Nazaire ou autrement, je le ferais venir à Chaville où il travaillerait sans lassitu<strong>de</strong>.<br />

Après un certain temps, il vous reviendrait refait et dispos, ou bien, si jʹavais un sujet plus<br />

vigoureux formé à ce moment, je vous lʹenverrais. Je vous prie dʹexaminer cette proposi‐<br />

tion et <strong>de</strong> faire partir le f. <strong>Jean</strong> dès que vous le croirez possible, si, comme moi, vous voyez<br />

double avantage pour votre maison et pour le f. <strong>Jean</strong> à cet arrangement.<br />

Les détails que mʹa donnés M. Planchat relativement à M. Brice me semblent méri‐<br />

ter gran<strong>de</strong> attention; soutenez‐le, autant que vous le pourrez, spirituellement et ayez les<br />

yeux bien ouverts <strong>de</strong> ce côté; nous prierons <strong>avec</strong> vous.<br />

M. Guillot regrette <strong>de</strong> nʹêtre pas toujours assez appuyé par vous pour le maintien<br />

<strong>de</strong> son autorité. Vous jugerez sʹil y a lieu <strong>de</strong> le fortifier un peu dans son action près <strong>de</strong>s en‐<br />

fants.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, je vous embrasse au nom <strong>de</strong> tous et je suis bien affec‐<br />

tueusement en J.M.J.<br />

Votre dévoué Père et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

906 à M. Caille<br />

Nouvelles <strong>de</strong>s Œuvres et <strong>de</strong>s frères. Difficultés pour les supérieurs dès quʹun changement sʹavère nécessaire: ʺles<br />

changements ont toujours quelque inconvénient et ne se font pas sans quelque embarras souvent.ʺ Le Noviciat <strong>de</strong><br />

Chaville ʺse façonne peu à peuʺ.<br />

Vaugirard, 14 juillet 1863<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Notre cher f. M. Rémond mʹa informé, comme vous lʹaviez fait vous‐même, <strong>de</strong>s dif‐<br />

ficultés quʹil rencontre dans ses emplois. Je chercherai les moyens <strong>de</strong> le remplacer <strong>de</strong><br />

concert <strong>avec</strong> nos ff. du Conseil, et je tâcherai, par ce changement, <strong>de</strong> vous donner conten‐<br />

tement ainsi quʹà lui. Les changements ont toujours quelque inconvénient et ne se font pas<br />

sans quelque embarras bien souvent; dès que je verrai un moyen <strong>de</strong> vous donner satisfac‐<br />

tion, je ne le négligerai point.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong>s renseignements que vous mʹavez donnés sur les frères labou‐<br />

reurs établis à St Riquier; jʹai transmis ces détails à ceux qui me les avaient <strong>de</strong>mandés.<br />

M. Planchat mʹa dit quʹen ensemble vous étiez content <strong>de</strong> la marche <strong>de</strong> vos œuvres,<br />

que votre nouveau jardin vous donnait <strong>de</strong>s moyens <strong>de</strong> plus pour attirer et encourager vos<br />

enfants. Je prie Dieu <strong>de</strong> vous continuer son appui et <strong>de</strong> donner succès à vos constants ef‐<br />

forts.<br />

Nous nʹavons rien <strong>de</strong> neuf ici. On vous a dit que nous nʹavions point gardé M. Ca‐<br />

thelin sur lequel divers rapports inquiétants nous avaient été faits. M. Désiré Vermelle,<br />

que vous aviez pris chez vous à lʹessai, va bien; il est parfois impatient et un peu ru<strong>de</strong> <strong>avec</strong><br />

les enfants, mais il travaille sincèrement à dominer ce penchant à lʹemportement.<br />

953


Le petit établissement <strong>de</strong> Chaville se façonne peu à peu, cʹest une œuvre sérieuse<br />

qui ne se complétera quʹ<strong>avec</strong> longueur <strong>de</strong> temps. Les bâtiments ne sont pas encore ache‐<br />

vés; vous savez par vous‐même combien on a <strong>de</strong> peine à renvoyer <strong>de</strong>s ouvriers une fois<br />

installés dans une entreprise.<br />

Je ne vous rappelle point la neuvaine que nous faisons en ce temps pour la fête <strong>de</strong> S t<br />

Vincent <strong>de</strong> Paul. Nous remettons la solennité à mardi; toute la maison et nos autres frères<br />

iront à Chaville où nous<br />

ferons la fête pour cette fois.<br />

Adieu, mon bien bon<br />

ami, il y a longtemps que<br />

vous nʹêtes venu à Paris,<br />

jʹespère que quelque bonne<br />

occasion nous donnera la<br />

satisfaction <strong>de</strong> vous voir.<br />

Je vous embrasse<br />

cordialement en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

907 à M. Maignen<br />

M. Maignen doit exercer sur ses collaborateurs lʹautorité nécessaire. Au profit <strong>de</strong> lʹŒuvre <strong>de</strong> Nazareth, MLP.<br />

nʹa pas hésité à procé<strong>de</strong>r à <strong>de</strong>s changements, au risque dʹen mécontenter certains, en particulier M. Decaux.<br />

Vaugirard, 17 juillet 1863<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Votre lettre est bonne et affectueuse, je vous en remercie, mais elle ne diminue rien<br />

<strong>de</strong>s dangers que je vous ai signalés; ten<strong>de</strong>z au moins à les restreindre autant que vous le<br />

pourrez, au lieu <strong>de</strong> vous démettre <strong>de</strong> toute action et presque <strong>de</strong> toute surveillance sur ceux<br />

que vous employez. Je vous ai averti quʹen faisant autrement, vous encouriez une bien<br />

954


grave et bien inquiétante responsabilité; croyez‐moi, cher enfant, ne négligez point ces<br />

avertissements. Vous me dites <strong>de</strong> poser moi‐même vos coopérateurs dans leurs emplois, je<br />

ne crois pas que ce soit ni convenable, ni possible; je vous ai invité à ne les prendre que<br />

comme <strong>de</strong>s ai<strong>de</strong>s plus ou moins participant à votre action, mais non comme <strong>de</strong>s rempla‐<br />

çants, mission quʹils nʹauraient utilement ni pour lʹœuvre, ni pour eux, ni pour la Commu‐<br />

nauté. Vous mʹaccusez, cher ami, <strong>de</strong> ne point vous montrer assez dʹaffection en cette occa‐<br />

sion, non plus quʹà vos frères. Nʹest‐ce pas vous témoigner ma sollicitu<strong>de</strong> que <strong>de</strong> vous<br />

éclairer sur les difficultés que telles ou telles dispositions peuvent vous préparer, et nʹest‐<br />

ce pas aussi une marque <strong>de</strong> mon affection pour vos frères que <strong>de</strong> leur épargner les peines<br />

que <strong>de</strong> fausses mesures peuvent leur attirer? Pour vous donner satisfaction, jʹai mis en dé‐<br />

triment lʹœuvre <strong>de</strong> Grenelle et mécontenté ceux qui la protègent et lʹappuient; je vous ai<br />

donné dʹabord M. Chanteaud et lʹai ensuite, malgré ses vives répugnances, retiré; jʹai<br />

changé M. Boucault, bien contre son désir, et enfin je vous ai laissé M. dʹArbois; tout cela,<br />

au grand mécontentement <strong>de</strong> M. Decaux que ces changements multipliés contrariaient;<br />

que pouvais‐je donc faire <strong>de</strong> plus? Je suis bien loin, cher enfant, <strong>de</strong> rappeler tout cela<br />

comme reproche, je ne fais que répondre à lʹobservation contenue dans votre lettre. Mon<br />

affection pour vous reste toujours la même; à mon âge, on gar<strong>de</strong> ses vieux sentiments et<br />

ses vieux amis bien précieusement, je nʹai point <strong>de</strong> sentiment meilleur ni <strong>de</strong> plus vieille<br />

amitié que celle que je vous ai vouée en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

908 <strong>de</strong> M. Planchat à M. Guillot<br />

P.S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Malgré les inattentions <strong>de</strong> M. Halluin envers les frères <strong>de</strong> sa communauté, MLP. exhorte M. Guillot à le soute‐<br />

nir et à ne pas douter <strong>de</strong> son bon vouloir.<br />

“... Qui renferment le plus <strong>de</strong> frères fatigués et souffrants. Avant tout, notre bon Père Hal‐<br />

luin, <strong>avec</strong> toutes ses infirmités, <strong>de</strong>vrait gran<strong>de</strong>ment se ménager par un temps pareil. Le lui écrire<br />

directement serait presqu’inutile; chez lui, l’abnégation est portée jusqu’à un trop complet oubli <strong>de</strong><br />

soi.<br />

Notre bon Père [Le <strong>Prevost</strong>] me charge donc <strong>de</strong> vous prier, <strong>de</strong>main à votre petit Conseil<br />

<strong>de</strong> communauté, <strong>de</strong> conjurer M. Halluin d’avoir soin <strong>de</strong> lui‐même, et cela au nom <strong>de</strong> l’intérêt <strong>de</strong><br />

ses chers enfants, petits et grands, lesquels ont en ce ....<br />

l’abbé Planchat, prêtre<br />

août 1863<br />

Il va sans dire, bien cher ami, que ces petites recommandations ne doivent être lʹoc‐<br />

casion dʹaucune contrariété pour M. Halluin, dont je sais tout le bon vouloir et auquel je<br />

vous prie surtout <strong>de</strong> venir en ai<strong>de</strong>, en lui rappelant les besoins qui vous auraient frappé en<br />

ce qui concerne les frères.<br />

Adieu, bien cher ami, je vous embrasse affectueusement.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

955


909 à M. Halluin<br />

Des remarques <strong>de</strong> M. Planchat ayant peiné M. Halluin, MLP. sʹemploie à panser les blessures: la maison dʹAr‐<br />

ras est bénie <strong>de</strong> Dieu. Eloge <strong>de</strong> ʺson désintéressement et <strong>de</strong> la droiture <strong>de</strong> ses intentionsʺ.<br />

Vaugirard, 27 août 1863<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je regrette dʹavoir laissé partir la lettre <strong>de</strong> M. Planchat, puisquʹelle vous a peiné. Je<br />

pensais que les quelques mots ajoutés par moi vous indiquaient suffisamment quʹil sʹen<br />

rapportait à vous pour prendre ce qui vous paraîtrait bon dans ses observations, et que<br />

moi‐même, plein <strong>de</strong> confiance dans votre pru<strong>de</strong>nce comme dans votre dévouement si bien<br />

éprouvé, je nʹacceptais quʹ<strong>avec</strong> réserve <strong>de</strong>s remarques que lʹimpression du moment pou‐<br />

vait avoir influencées, sans que M. Planchat sʹen fût bien rendu compte.<br />

Ayez donc bonne confiance, cher Monsieur lʹabbé, je crois quʹen ensemble votre<br />

œuvre, comme toutes celles que Dieu nous a confiées, est en travail <strong>de</strong> fondation, quʹelle<br />

est, conséquemment, susceptible <strong>de</strong> perfectionnement, mais que, dès ce moment néan‐<br />

moins, elle fait un bien notable et quʹelle a sensiblement les bénédictions <strong>de</strong> Dieu. Tour‐<br />

nons surtout <strong>de</strong> ce côté nos yeux. Là est notre véritable juge, là, lʹœil qui pénètre au fond<br />

<strong>de</strong>s cœurs. Il voit dans le vôtre, cher Monsieur lʹabbé, le désintéressement et la droiture<br />

<strong>de</strong>s intentions. Soyez sûr quʹIl continuera <strong>de</strong> vous assister. Je ne cesserai point, pour ma<br />

part, <strong>de</strong> Lʹen supplier bien instamment.<br />

Je regrette que M. Berthelotte ne nous fasse point une petite visite, nous le recevrons<br />

<strong>avec</strong> plaisir quand il croira <strong>de</strong>voir venir; je serai <strong>de</strong> retour pour le 8 septembre au plus<br />

tard.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, je vous embrasse encore plus affectueusement que <strong>de</strong><br />

coutume et vous charge, pour tous nos frères, <strong>de</strong>s assurances <strong>de</strong> notre cordial dévoue‐<br />

ment.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

910 à M. Vasseur<br />

Séjour en famille projeté par M. Vasseur. MLP. se montre réservé sur les bienfaits <strong>de</strong> tels séjours: bien souvent,<br />

ils ʺnuisent au calme et au recueillement <strong>de</strong> lʹespritʺ, peuvent causer troubles et hésitation, même lorsque le reli‐<br />

gieux est affermi dans sa vocation. Lʹesprit <strong>de</strong> foi <strong>de</strong> MLP. lui fait affirmer que ʺcʹest surtout par ses prières et<br />

par ses œuvres offertes à leur intentionʺ, quʹun religieux peut servir les siens.<br />

Vaugirard, 27 août 1863<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Je ne crois pas aussi bien inspiré que vous le pensez votre désir dʹaller dans votre<br />

famille; si vous cherchez bien attentivement <strong>de</strong>vant Dieu lʹutilité réelle et sérieuse qui peut<br />

revenir aux vôtres <strong>de</strong> ce voyage, vous trouverez quʹelle est bien restreinte; vous avez un<br />

frère aîné honnête et grave qui veille aux intérêts <strong>de</strong> votre père comme au bon accord <strong>de</strong><br />

tous, il nʹest donc guère à penser quʹétant toujours absent et moins au courant <strong>de</strong>s besoins<br />

et dispositions <strong>de</strong> chacun, vous puissiez intervenir plus utilement que lui dans les affaires<br />

<strong>de</strong> la famille; cʹest surtout par ses prières et par ses œuvres offertes à lʹintention <strong>de</strong>s siens<br />

quʹun religieux peut les servir. La question réduite pour vous au besoin <strong>de</strong> repos et dʹun<br />

956


peu <strong>de</strong> dilatation peut aisément avoir sa solution par un séjour à Chaville, où quelques‐<br />

uns <strong>de</strong> nos frères peuvent venir <strong>avec</strong> vous se refaire. Cʹest dans ce but que nous formons<br />

<strong>avec</strong> tant <strong>de</strong> sacrifices notre établissement dans cette campagne; si un pareil effort <strong>de</strong> la<br />

Communauté dans lʹintérêt <strong>de</strong> ses membres nʹatteignait pas son but, nous aurions bien à le<br />

regretter, et pour les sacrifices perdus, et pour lʹesprit <strong>de</strong> la Communauté elle‐même qui<br />

souffre inévitablement <strong>de</strong>s pérégrinations <strong>de</strong>s frères. Soyez bien assuré, mon cher enfant,<br />

que, pour ce qui vous concerne, loin <strong>de</strong> revenir plus affermi après lʹexcursion que vous<br />

projetez, vous reviendriez moins fort, les dissipations dʹun voyage, les préoccupations <strong>de</strong><br />

mille détails et <strong>de</strong> menus intérêts <strong>de</strong> famille ne pouvant que nuire au calme et au recueil‐<br />

lement <strong>de</strong> lʹesprit. Si, comme je le pense, vous nʹavez pas <strong>de</strong> doutes réels sur votre voca‐<br />

tion, vous ne trouverez quʹavantage à <strong>de</strong>meurer au sein <strong>de</strong> votre famille spirituelle durant<br />

vos jours <strong>de</strong> repos, plutôt que dʹaller au <strong>de</strong>hors trouver peut‐être <strong>de</strong>s causes <strong>de</strong> troubles et<br />

dʹhésitation. Si, au contraire, vous êtes en incertitu<strong>de</strong>, vous courez grand risque <strong>de</strong> faire<br />

pencher la balance du côté qui vous rejetterait dans le mon<strong>de</strong>, si au lieu <strong>de</strong> consulter Dieu<br />

dans un peu <strong>de</strong> retraite et <strong>de</strong> repos chrétien, vous allez chercher inspiration et conseil près<br />

<strong>de</strong>s personnes du <strong>de</strong>hors.<br />

Voilà, cher enfant, mon sentiment, communiquez mes observations à notre p.<br />

Beaussier; sʹil était dʹun avis différent du mien, jʹen causerais bien volontiers <strong>avec</strong> lui et<br />

jʹadopterais certainement le parti auquel il croirait bon <strong>de</strong> sʹarrêter.<br />

Croyez, cher enfant, à tous mes sentiments bien cordialement dévoués en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

911 <strong>de</strong> M. Planchat à M. Caille<br />

P.S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Préparation <strong>de</strong> la fête <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> La Salette. MLP. ne pourra se rendre à Amiens. Prochaine retraite <strong>de</strong> Commu‐<br />

nauté en octobre, suivie <strong>de</strong> la 2 e session du Conseil extraordinaire (Chapitre Général). MLP. projette un mouve‐<br />

ment <strong>de</strong> personnel.<br />

Vaugirard, 10 septembre 1863<br />

1er jour <strong>de</strong> la neuvaine à N.D. <strong>de</strong> la Salette<br />

Mon bien cher frère,<br />

Peut‐être vous nous avez <strong>de</strong>vancés dans la préparation à lʹanniversaire <strong>de</strong> la Sainte Appari‐<br />

tion. Les bonnes âmes qui entretiennent <strong>avec</strong> tant dʹamour votre pieuse grotte seraient là pour<br />

vous annoncer le 10 septembre quand, par impossible, vous nʹy penseriez pas dès le commence‐<br />

ment <strong>de</strong> la neuvaine.<br />

Cependant, notre bon Père Supérieur mʹayant chargé <strong>de</strong> rappeler à chaque maison la fête<br />

<strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette, je nʹaurais gar<strong>de</strong> dʹoublier Amiens. Vous écrire est un dédommagement pour<br />

la privation <strong>de</strong> plaisir que jʹavais, <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux ans, <strong>de</strong> vous voir et <strong>de</strong> vous entretenir souvent. La<br />

nouvelle maison <strong>de</strong> Ste ‐Anne, bien quʹelle nʹexiste encore quʹen préparation plus ou moins loin‐<br />

taine, ne me permet plus les excursions périodiques à Arras ni à Amiens. Vous gagnerez, du reste,<br />

à ce changement <strong>de</strong> voir <strong>de</strong> temps en temps les représentants plus vénérables et plus autorisés <strong>de</strong><br />

la Communauté: le bon p. Lantiez et le bon f. Myionnet.<br />

Comme je lʹavais prévu, notre bon Père Supérieur était trop fatigué par les gran<strong>de</strong>s chaleurs<br />

et trop dérangé par le partage entre Vaugirard et Chaville pour pouvoir ajouter à son petit voyage<br />

<strong>de</strong> Normandie lʹexcursion quʹil eût sans cela tant désiré faire à Amiens. Le raffermissement du<br />

957


temps avait un peu remonté notre bon Père; je crains que les froids prématurés qui sʹannoncent<br />

nʹéprouvent <strong>de</strong> nouveau sa frêle santé.<br />

Vous le recomman<strong>de</strong>rez à N.D. <strong>de</strong> la Salette <strong>avec</strong> tous nos autres besoins, <strong>avec</strong> la retraite<br />

<strong>de</strong>s écoliers réunis pendant les vacances à S t ‐Charles, <strong>avec</strong> la retraite <strong>de</strong> Communauté que nous tâ‐<br />

cherons <strong>de</strong> placer au commencement dʹoctobre, <strong>avec</strong> la 2 e session du Conseil extraordinaire qui sui‐<br />

vra <strong>de</strong> tout près la retraite.<br />

Adieu, mon bon frère, je vous embrasse <strong>de</strong> cœur ainsi que tous nos ff. dʹAmiens; le bon p.<br />

Supérieur vous bénit tous.<br />

Vos petits écoliers amiénois se portent à ravir et sont fort gentils.<br />

Tout à vous dans les Sacrés Cœurs<br />

lʹabbé Planchat, prêtre<br />

La fête <strong>de</strong> la Salette nʹest pas une solennité extérieure, cʹest une dévotion à laquelle dʹhabi‐<br />

tu<strong>de</strong> ne manquent point les diverses maisons <strong>de</strong> la Communauté.<br />

Ci‐joint une ébauche du programme du Conseil extraordinaire. Si vous pouviez adresser au<br />

p. Supérieur vos réponses et réflexions pour le 20 courant, cela lʹai<strong>de</strong>rait gran<strong>de</strong>ment à rédiger le<br />

programme définitif.<br />

Jʹembrasse, bien cher ami, vous et vos frères très cordialement; je nʹoublie point le<br />

remplacement <strong>de</strong> M. Rémond; je cherche toujours ce qui serait le mieux, nous arriverons<br />

sans trop <strong>de</strong> retard, espérons‐le, à quelque combinaison satisfaisante. M. Luzier est revenu<br />

<strong>de</strong> Metz, il prend un peu <strong>de</strong> repos, sa santé étant fatiguée, nous verrons sʹil se remet assez<br />

pour vous convenir.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. <strong>Léon</strong> Guichard est arrivé au moment <strong>de</strong> faire ses premiers vœux à la prochaine<br />

retraite, je pense que vous le trouvez bien disposé pour cette consécration.<br />

912 <strong>de</strong> M. Planchat à M. Halluin<br />

P. S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Préparation <strong>de</strong> la fête <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> La Salette. Zèle <strong>de</strong> M. Planchat à Ste‐Anne. MLP. sʹinterroge sur le renouvel‐<br />

lement <strong>de</strong> vœux dʹun jeune frère dʹArras.<br />

Vaugirard, 10 septembre 1863<br />

1 er jour <strong>de</strong> la neuvaine <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette<br />

Monsieur et bien cher frère en N.S.,<br />

Voilà que nous touchons à lʹanniversaire <strong>de</strong> lʹApparition <strong>de</strong> la Salette. Ce jour, vous le sa‐<br />

vez, est cher à la petite Communauté. Le p. Supérieur sait quʹon nʹoublie pas <strong>de</strong> fêter à Arras, où<br />

du reste cette dévotion nʹest pas exclusivement propre à la Communauté, puisque N.D. <strong>de</strong> la Sa‐<br />

lette a son office solennel à S te ‐Agnès. Cependant le p. Supérieur me charge <strong>de</strong> rappeler à lʹavance<br />

le 19 septembre à chacune <strong>de</strong> nos maisons, afin que, loin <strong>de</strong> Vaugirard et <strong>de</strong> son petit sanctuaire,<br />

chaque frère fasse comme à Vaugirard même sa petite préparation, pour recueillir plus abondam‐<br />

ment les grâces <strong>de</strong> ce saint jour. Cette année du reste, comme lʹan <strong>de</strong>rnier, la Communauté se trou‐<br />

vera représentée sur la S te Montagne, et ce sera cette fois le 19 septembre même. Le bon p. Roussel<br />

a le souvenir dʹArras trop présent à la mémoire pour que tous les chers enfants <strong>de</strong> M. Halluin, et<br />

en particulier ceux <strong>de</strong> la première communion <strong>de</strong> cette année, nʹaient pas une part spéciale dans le<br />

Memento <strong>de</strong> sa Messe sur la S te Montagne. Mieux que tout autre, le bon f. Guillot pourra sʹunir à lui<br />

<strong>de</strong> cœur.<br />

958


Vous trouverez, jʹen suis sûr, moyen <strong>de</strong> faire préparer nos chers écoliers, cette année<br />

comme lʹan <strong>de</strong>rnier, pour la fête <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette, et <strong>de</strong> leur procurer, ainsi quʹà la communau‐<br />

té, une petite instruction <strong>avec</strong> salut. A Vaugirard, il y aura fête le matin et le soir; on espère pou‐<br />

voir renouveler la procession qui avait attiré pas mal <strong>de</strong> mon<strong>de</strong> lʹan <strong>de</strong>rnier.<br />

Je vous adresse ci‐inclus 6f en timbres‐poste pour compléter les 36f versés pour les mois<br />

dʹaoût et <strong>de</strong> septembre par le père du petit Germain. M. Berthelotte a reçu ces jours‐ci 30f quʹil<br />

vous remettra.<br />

Adieu, mon bon Père, S te ‐Anne mʹabsorbe trop maintenant pour que je puisse vous embras‐<br />

ser <strong>de</strong> fait aussi souvent que par le passé. Je ne le fais que plus cordialement, en esprit. Rappelez‐<br />

moi s.v.p. au souvenir <strong>de</strong> tous mes chers enfants, écoliers ou apprentis. Dites aux petits écoliers<br />

que je compte bien sur leur souvenir <strong>de</strong>vant Dieu le jour <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette. Pour moi, cʹest tous<br />

les jours que je porte à lʹautel tous les enfants dʹArras. Je les y ai portés en particulier ce matin <strong>de</strong>‐<br />

vant le T. S t Sacrement exposé pour lʹadoration nocturne. Je compte <strong>de</strong> plus quʹon prie à Arras<br />

pour les enfants <strong>de</strong> S te ‐Anne dont je nʹai du reste quʹà me louer, surtout pour leur empressement à<br />

sʹapprocher <strong>de</strong>s sacrements. Il faisait samedi soir un temps affreux, et cependant jʹai confessé jus‐<br />

quʹà 10h., plusieurs venaient <strong>de</strong> 2 et <strong>de</strong> 3 km. <strong>de</strong> distance. Nous serons <strong>de</strong>ux samedi prochain pour<br />

confesser; obtenez‐nous beaucoup dʹouvrage à chacun pour la gloire <strong>de</strong> Marie, cʹest dimanche que<br />

les patronages fêtent sa Nativité.<br />

Je vous embrasse donc une secon<strong>de</strong> fois, vous et tous nos frères dʹArras. Notre bon p. Supé‐<br />

rieur vous bénit tous.<br />

Votre tout dévoué frère en N.S.<br />

lʹabbé Planchat, prêtre<br />

Une intention au Veni Creator <strong>de</strong> la Communauté, à la dizaine <strong>de</strong> chapelet que disent les en‐<br />

fants au commencement <strong>de</strong> la Messe, pour la retraite <strong>de</strong>s nombreux écoliers réunis à S t ‐Charles<br />

pendant les vacances.<br />

Mille affections à vous et à vos frères <strong>de</strong><br />

Votre tout dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. M. Brice aurait à renouveler ses vœux à la prochaine retraite, pensez‐vous quʹil<br />

soit pru<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> lʹy autoriser?<br />

913 à M. Risse349 Jugement réaliste <strong>de</strong> MLP. sur sa famille religieus: ʺla perfection est peu commune et particulièrement rare chez<br />

nousʺ. Mais le bon vouloir et la ʺconfiance en Dieu toujours miséricordieuxʺ augurent bien <strong>de</strong> son avenir.<br />

octobre 1863<br />

…Vous semblez désirer et attendre beaucoup <strong>de</strong> perfections en celui qui vous serait<br />

envoyé; je crains <strong>de</strong> ne vous satisfaire quʹimparfaitement, la perfection est peu commune<br />

et particulièrement rare chez nous; si le remplaçant nʹarrive pas précisément à jour coïnci‐<br />

dant <strong>avec</strong> le départ <strong>de</strong> M. Luzier, il y aura peu dʹinconvénients, ce me semble, puisque M.<br />

<strong>Léon</strong> Vion est présentement près <strong>de</strong> vous et peut vous rendre bien <strong>de</strong>s services.<br />

Je me console <strong>de</strong> lʹajournement indéfini <strong>de</strong> lʹarrivée du jeune sergent, puisque vous<br />

ne paraissez pas bien sûr <strong>de</strong> sa vocation et que lui‐même semble avoir quelques doutes.<br />

Je suis tout heureux <strong>de</strong>s bonnes dispositions....<br />

349 Partie conservée par M. Risse <strong>de</strong> la lettre écrite au commencement d’octobre.<br />

959


…Tout marche dans la famille à lʹordinaire, travail et charges, mais bon vouloir et<br />

confiance en Dieu toujours miséricordieux au‐<strong>de</strong>là <strong>de</strong> nos attentes, jamais au‐<strong>de</strong>ssous.<br />

Quelle raison dʹêtre en repos pour lʹavenir! Puisse cette confiance, sans témérité, se fon<strong>de</strong>r<br />

dans lʹesprit <strong>de</strong> la Communauté.<br />

Mille affections à tous nos frères et mille et une pour vous.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

914 à M. Pavie<br />

Joies et bénédictions à lʹoccasion <strong>de</strong> la naissance du petit‐fils <strong>de</strong> Victor Pavie.<br />

Vaugirard, 12 octobre 1863<br />

Mon bien cher Victor,<br />

Nous nous associons <strong>de</strong> plein cœur, M. Myionnet et moi, à la joie <strong>de</strong> votre famille et<br />

nous souhaitons <strong>avec</strong> vous la bienvenue au cher petit Joseph qui promet <strong>de</strong> continuer vo‐<br />

tre moisson déjà riche en rejetons. Il vous fait ainsi grand‐père; cʹest un sentiment qui vous<br />

manquait. Le Seigneur remplit le vi<strong>de</strong> <strong>de</strong> votre cœur, afin quʹil ait eu la plénitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la vie<br />

dʹaffection, nous lʹen bénissons <strong>avec</strong> vous.<br />

Nous mettrons aussi nos prières en commun <strong>avec</strong> les vôtres pour que le cher enfant<br />

ait une bonne part en ce mon<strong>de</strong>, une part <strong>de</strong> cette vie que le Sauveur vous a donnée et<br />

dont Il a dit: Je suis venu pour quʹils aient la vie et pour quʹils lʹaient abondamment350 .<br />

Nous vous embrassons et aussi le petit Joseph, M. Myionnet et moi, et nous vous char‐<br />

geons <strong>de</strong> nos affections et respects pour votre cher entourage.<br />

Votre affectionné en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

915 à M. Chaverot351 MLP. lui donne un ren<strong>de</strong>z‐vous et abor<strong>de</strong> quelques points dʹordre pratique.<br />

Vaugirard, 19 octobre 1863<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je crois que le mieux sera pour vous <strong>de</strong> venir mercredi à Chaville; jʹy serai, je pense,<br />

pour midi. M. <strong>de</strong> Varax ira le matin <strong>avec</strong> nous à N.D. <strong>de</strong>s Victoires, mais il sera revenu<br />

aussi à Chaville avant midi.<br />

Nʹavez‐vous besoin <strong>de</strong> rien? Quand <strong>de</strong>vra‐t‐on prendre votre linge pour le blan‐<br />

chissage? On vous a dit, sans doute, que jʹai fait compléter le sol<strong>de</strong> <strong>de</strong>s 300f pour la pen‐<br />

sion, on a aussi payé 6f pour le mé<strong>de</strong>cin; je pense que vous nʹaviez pas déjà payé cette me‐<br />

nue dépense.<br />

350<br />

Jn 10, 10.<br />

351<br />

Michel Chaverot (1838-1879). Membre <strong>de</strong> la Conférence <strong>de</strong> St-Vincent-<strong>de</strong>-Paul <strong>de</strong> St-Sulpice, confrère au Patronage <strong>de</strong> Nazareth,<br />

puis <strong>de</strong> celui <strong>de</strong> St-Charles, ce stéphanois, monté à Paris pour <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> droit, entre en communauté le 28 septembre 1863.<br />

Prêtre en 1867, il est nommé aumônier <strong>de</strong> l’Orphelinat <strong>de</strong> Vaugirard, puis il sera supérieur <strong>de</strong> la communauté <strong>de</strong> Rome (1870). Quelques<br />

mois secrétaire du Père Le <strong>Prevost</strong>, il rédigera un journal, précieux document sur les <strong>de</strong>rnières années du Fondateur. Il mourra à<br />

41 ans, en disant ces paroles qui résument sa vie : « J’ai aimé mon Institut, j’ai observé la Règle, j’ai toujours obéi à mon supérieur,<br />

comment craindrais-je la mort ? ».<br />

960


Adieu, cher enfant, ce nous sera une gran<strong>de</strong> joie <strong>de</strong> passer quelques instants <strong>avec</strong><br />

vous. Je vous embrasse tendrement en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

916 à M. Risse<br />

MLP. se réjouit <strong>de</strong> lʹaccueil qui a été réservé à M. Risse lors <strong>de</strong> son retour à Metz. Sa visite à Vaugirard a resser‐<br />

ré les ʺliens <strong>de</strong> la charitéʺ.<br />

28 octobre 1863<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je joins <strong>de</strong>ux mots à la lettre <strong>de</strong> M. Planchat à M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston], pour me<br />

réjouir <strong>avec</strong> vous <strong>de</strong> lʹaffectueux accueil que tout votre entourage vous a fait à votre re‐<br />

tour. Une petite absence vient à propos parfois pour mieux faire sentir à tous le besoin<br />

quʹon a les uns <strong>de</strong>s autres; vos jeunes gens en comprendront mieux tout le bien que vous<br />

leur faites et lʹutilité <strong>de</strong> votre présence au milieu dʹeux.<br />

Je suis heureux que le f. <strong>Jean</strong> [Gauffriau] ait pu vous donner un peu dʹai<strong>de</strong> durant<br />

ses vacances; le bon Dieu lʹen récompensera, je lʹespère, en lui donnant <strong>de</strong>s grâces pour les<br />

<strong>de</strong>rnières étu<strong>de</strong>s qui lui restent à faire et pour la préparation <strong>de</strong> ses ordres.<br />

Jʹembrasse tous nos frères et vous aussi tout particulièrement, bien cher ami, vous<br />

assurant que votre présence parmi nous a été douce et agréable pour tous; ces visites res‐<br />

serrent entre nous les liens <strong>de</strong> la charité et serviront aussi à la bonne entente <strong>de</strong>s œuvres<br />

pour la gloire <strong>de</strong> Dieu. Nous maintiendrons par la prière cette heureuse disposition <strong>de</strong>s<br />

cœurs et la paix du Seigneur règnera constamment parmi nous.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

N.B. Mardi 3 novembre, nos frères iront à Chaville pour une messe <strong>de</strong>s morts à lʹin‐<br />

tention <strong>de</strong>s membres décédés <strong>de</strong> la Communauté; peut‐être trouverez‐vous possible <strong>de</strong><br />

leur donner aussi, <strong>avec</strong> vos frères, un pareil souvenir. A Arras et à Amiens, il en sera ainsi.<br />

917 à M. Chaverot<br />

Ouvrages pour M. Chaverot, au Séminaire dʹIssy. Dispositions à prendre vis‐<br />

à‐vis <strong>de</strong> sa famille et <strong>de</strong> son diocèse.<br />

Vaugirard, 31 octobre [1863]<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Je vous envoie Le Curé dʹArs et la Logique; vous avez<br />

dû recevoir, il y a <strong>de</strong>ux jours, lʹEcriture S te , les diction‐<br />

naires, <strong>de</strong>s souliers; il me semble quʹil ne reste plus que le<br />

petit carnet, M. Emile [Beauvais] lʹachètera au plus tôt.<br />

Je suis heureux que vous ayez reçu une lettre <strong>de</strong><br />

votre bonne mère; continuons à prier, Dieu calmera sa<br />

peine, les événements <strong>de</strong> famille y feront diversion; je ne<br />

crois pas quʹil soit temps encore <strong>de</strong> faire <strong>de</strong> nouvelles<br />

961


ouvertures sur votre avenir, ni à la famille, ni à personne autre à S t ‐Etienne; je pense quʹil<br />

faudrait avant tout avoir votre exeat à Lyon. Nous examinerons ce <strong>de</strong>rnier point, après y<br />

avoir pensé <strong>de</strong>vant Dieu.<br />

La fête <strong>de</strong> <strong>de</strong>main mʹempêche <strong>de</strong> vous écrire davantage, mais rien ne mʹempêche <strong>de</strong><br />

vous aimer tendrement, <strong>de</strong> vous gar<strong>de</strong>r fidèle souvenir et <strong>de</strong> prier en union <strong>avec</strong> vous.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

918 à M. Chaverot<br />

Il est bon quʹun séminariste ne se mêle plus directement aux fêtes et aux affaires <strong>de</strong> sa famille. Il peut favoriser la<br />

paix, par sa prière, sa messe, ses communions.<br />

Vaugirard, 4 novembre 1863<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je pense comme vous que vous <strong>de</strong>vez faire tout ce qui dépendra <strong>de</strong> vous pour ne<br />

pas faire une absence au moment où vous venez à peine dʹentrer au Séminaire; ces déran‐<br />

gements sont aussi nuisibles à la piété quʹaux étu<strong>de</strong>s, toutes les circonstances <strong>de</strong>s noces,<br />

même en familles chrétiennes, sont dʹailleurs toujours dissipantes, si ce nʹest plus, pour<br />

<strong>de</strong>s jeunes gens, et il me semble tout à fait à propos quʹun Séminariste se dispense, autant<br />

quʹil le peut, dʹy prendre part. Enfin, je crois quʹil est bon que la famille sʹaccoutume à ne<br />

pas trop vous voir mêlé à ses fêtes et affaires, quand la charité ne le <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pas.<br />

Pour les petits démêlés dʹintérieur domestique dont vous mʹavez entretenu, je crois<br />

que la lettre écrite par vous à votre tante est bien dans le sens conciliant quʹil fallait pren‐<br />

dre, il est bon, du reste, <strong>de</strong> voir tout cela dʹun peu haut; soyez sûr que votre intervention<br />

par lettre sera meilleure et plus efficace quʹelle ne pourrait lʹêtre par une action personnelle<br />

et directe; vous risqueriez, sur les lieux, <strong>de</strong> froisser lʹune ou lʹautre partie; à distance, vous<br />

gar<strong>de</strong>rez plus <strong>de</strong> sang‐froid et vous aurez plus <strong>de</strong> chance dʹêtre écouté. Gar<strong>de</strong>z‐vous bien,<br />

cher ami, je vous le recomman<strong>de</strong> expressément, <strong>de</strong> jamais mettre votre vocation en balance<br />

et dʹaccueillir, même un moment, toute pensée qui y serait contraire; ce serait suggestion<br />

du démon; une fois lʹappel <strong>de</strong> Dieu constaté et lʹoffran<strong>de</strong> <strong>de</strong> nous‐même effectuée, le don<br />

est irrévocable, nous ne <strong>de</strong>vons pas en altérer lʹintégrité. Rappelez‐vous ce mot, il est <strong>de</strong><br />

lʹEvangile: Celui qui a mis la main à la charrue ne doit point regar<strong>de</strong>r en arrière; et cet au‐<br />

tre, plus décisif et plus tranchant encore: Laissez les morts enterrer leurs morts352 . Donc,<br />

donnez <strong>de</strong>s conseils conciliants et ai<strong>de</strong>z au maintien <strong>de</strong> la paix, mais <strong>de</strong> haut, je le répète,<br />

sans trouble et sans distraction dissipante pour vous. Il vous reste, pour assister les vôtres,<br />

la prière, les Sts Sacrifices et communions. Allez en esprit <strong>de</strong> foi, confiez‐vous à ces moyens<br />

puissants plutôt quʹà <strong>de</strong>s soins et sollicitu<strong>de</strong>s extérieures dont lʹeffet, pris isolément, aurait<br />

bien peu <strong>de</strong> résultat. On trouve partout, dans les familles, les difficultés dont vous vous<br />

inquiétez, ce sont misères inhérentes à la nature humaine; souvent dʹailleurs, quelque pe‐<br />

tite crise amène quelque changement dont sortent <strong>de</strong> bonnes conséquences; priez Dieu,<br />

confiez‐vous en Lui et atten<strong>de</strong>z beaucoup <strong>de</strong> son appui miséricordieux. Je joindrai mes<br />

prières aux vôtres et je suivrai <strong>avec</strong> vous bien cordialement ces intérêts qui touchent votre<br />

chère famille et, conséquemment, à vos plus intimes affections.<br />

352 Lc 9, 60-62.<br />

962


Adieu, bien cher enfant, tous ici vous embrassent <strong>avec</strong> moi dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong><br />

Jésus et <strong>de</strong> Marie.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

919 à M. Halluin<br />

Un postulant va être rappelé sous les drapeaux. Il conviendrait quʹil vienne se reposer et se recueillir à Vaugi‐<br />

rard. Nouvelles <strong>de</strong>s santés.<br />

Vaugirard, 5 décembre 1863<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Les avis que je vois dans les journaux sur le rappel prochain <strong>de</strong>s jeunes conscrits <strong>de</strong><br />

la réserve me font penser que M. Ferdinand [Bosmel] ne peut tar<strong>de</strong>r beaucoup à être re‐<br />

<strong>de</strong>mandé à son corps pour faire les <strong>de</strong>ux mois <strong>de</strong> présence auxquels il est astreint pour<br />

lʹannée qui va commencer. Il me paraîtrait tout à fait désirable quʹavant <strong>de</strong> rentrer momen‐<br />

tanément dans cette condition qui est toujours un peu dissipante, il passât quelques se‐<br />

maines à Vaugirard pour se reposer et se recueillir un peu. Je vous prie donc <strong>de</strong> faire en<br />

sorte quʹil puisse nous revenir aussitôt que vous trouverez moyen <strong>de</strong> vous passer <strong>de</strong> lui.<br />

Jʹexaminerai ensuite si nous avons quelquʹun qui puisse le remplacer et je me concerterai<br />

pour cela <strong>avec</strong> M. Myionnet.<br />

Deux <strong>de</strong> nos frères sont alités à Vaugirard: M. André [Brouant] a, <strong>de</strong>puis presque<br />

quinze jours, une fluxion <strong>de</strong> poitrine fort grave, et M. Auguste Faÿ (le laïc) est retenu par<br />

<strong>de</strong>s douleurs rhumatismales. Je recomman<strong>de</strong> lʹun et lʹautre aux prières <strong>de</strong> votre maison.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, mille affections à tous nos frères, bons souvenirs à M.<br />

Berthelotte.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

920 à M. Chaverot<br />

MLP. se réjouit à la pensée dʹune prochaine visite <strong>de</strong> M. Chaverot.<br />

Vaugirard, 7 décembre 1863<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je mʹennuyais <strong>de</strong> ne vous point voir et jʹavais résolu <strong>de</strong> vous aller voir <strong>de</strong>main 8,<br />

fête <strong>de</strong> lʹImmaculée Conception. Je suis tout heureux dʹapprendre que vous pourrez venir<br />

vous‐même nous rendre visite. Tâchez dʹarriver <strong>de</strong> bonne heure à Vaugirard, vous y ver‐<br />

rez ceux <strong>de</strong> nos frères qui sʹy trouvent et, <strong>de</strong> là, nous irons à Chaville faire une visite à ceux<br />

que vous y connaissez et qui se chagrinaient aussi <strong>de</strong> ne point vous apercevoir.<br />

M. Antoine [Emes] est prévenu pour vos bas; il a aussi, je crois, un pantalon à vous<br />

rendre.<br />

Adieu, bien cher enfant, priez beaucoup la T. S te Vierge, si bien honorée chez vous,<br />

afin quʹelle nous soit propice; <strong>de</strong> notre côté, nous nous souvenons <strong>de</strong> vous à N.D. <strong>de</strong> la Sa‐<br />

lette. Je vous embrasse dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M., pour moi et pour tous ceux qui<br />

mʹentourent.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

963


921 <strong>de</strong> M. Planchat à M. Caille<br />

P. S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

MLP. souffre dʹune indisposition sans gravité. Mouvement <strong>de</strong> personnel.<br />

Vaugirard, 18 décembre 1863<br />

Fête <strong>de</strong> lʹattente <strong>de</strong> la T. Ste Vierge<br />

Mon bon frère Caille,<br />

Notre très honoré Père, trop souffrant, pour un peu longtemps peut‐être, (recomman<strong>de</strong>z‐le<br />

bien à toutes les prières possibles) pour vous écrire lui‐même comme il lʹaurait voulu, me charge<br />

<strong>de</strong> vous témoigner toute sa joie et toute sa reconnaissance pour la générosité <strong>avec</strong> laquelle vous<br />

vous êtes sacrifié au bien <strong>de</strong> la pauvre maison dʹArras.<br />

De notre côté, nous faisons un vrai sacrifice en vous envoyant <strong>de</strong> suite, les yeux fermés sur<br />

les besoins <strong>de</strong> notre atelier <strong>de</strong> cordonnerie, le jeune Séruzier, porteur du présent message, jeune<br />

homme intelligent, <strong>de</strong> bonne tenue et vraiment désireux <strong>de</strong> faire un peu <strong>de</strong> bien. Sans doute, nous<br />

voudrions que ce cher enfant ait 20 ans au lieu <strong>de</strong> 16, mais le bon f. Marcaire le gui<strong>de</strong>ra charita‐<br />

blement; pour le spirituel, qui chez lui est droit et soli<strong>de</strong>, M. lʹabbé Mangot le soutiendra et perfec‐<br />

tionnera; tout ira donc bien pour le mois que ce jeune homme doit passer à Amiens.<br />

Nous pensons, en effet, quʹau bout <strong>de</strong> ce temps M. Mitouard sera suffisamment remis pour<br />

abor<strong>de</strong>r son importante tâche dʹArras. Lui seul, et non également bien M. <strong>Léon</strong> Guichard, pourra<br />

suffire à cette tâche et préparer à M. Sadron la possibilité dʹun repos à Vaugirard. Allard ne peut<br />

en ce moment quitter lʹatelier <strong>de</strong>s bronzes.<br />

Tout à vous, mon bon frère, et à M. Marcaire, dans les Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> Marie et <strong>de</strong> Joseph,<br />

attendant tous <strong>de</strong>ux la naissance du divin Enfant.<br />

lʹabbé Planchat<br />

P. S. Notre bon Père, en échange <strong>de</strong> vos prières, offrira pour vous ses souffrances.<br />

Mon indisposition, bien cher ami, nʹa rien, je pense, <strong>de</strong> dangereux (ce sont seule‐<br />

ment <strong>de</strong>s hémorroï<strong>de</strong>s assez violentes pour être fort incommo<strong>de</strong>s et douloureuses).<br />

Je vous embrasse affectueusement ainsi que nos frères.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Mille respects à M. lʹabbé Mangot, cʹest une joie pour moi <strong>de</strong> le voir <strong>de</strong> nouveau<br />

veiller sur vous.<br />

19 décembre. Je viens <strong>de</strong> recevoir votre lettre dʹhier; vous faites très bien <strong>de</strong> ména‐<br />

ger M. Mitouard, laissez‐le se remettre avant <strong>de</strong> songer à lʹenvoyer à Arras; <strong>avec</strong> M. <strong>Léon</strong><br />

[Guichard], M. Halluin peut prendre mieux patience; je vous sais bien bon gré, ainsi quʹà<br />

mon f. Marcaire, <strong>de</strong> lʹempressement que vous avez mis lʹun et lʹautre à secourir M. Hal‐<br />

luin, malgré la gêne que vous en <strong>de</strong>viez trouver. Assurez M. Marcaire <strong>de</strong> mes sentiments<br />

affectueux, bon souvenir aussi à M. Mitouard, je suis heureux du bien que vous me dites<br />

<strong>de</strong> lui.<br />

Je bénis Dieu aussi <strong>de</strong> tout le bien qui se fait dans nos chères œuvres dʹAmiens.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

922 <strong>de</strong> M. Lemaire à M. Caille<br />

P. S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Un jeune frère dʹAmiens doit se faire inscrire pour la conscription. MLP. indisposé.<br />

964


Vaugirard, le 19 décembre 1863<br />

Mon cher Monsieur Caille,<br />

Je vous prie <strong>de</strong> ne point oublier <strong>de</strong> me faire inscrire pour le tirage au sort, parce que, si vous<br />

lʹoubliiez, je serais dans un grand embarras.<br />

Veuillez me faire parvenir une petite réponse le plus tôt possible pour que je sois tranquille.<br />

Faites bien <strong>de</strong>s compliments à tous ces Messieurs ainsi quʹà mon frère.<br />

Votre tout dévoué frère<br />

Lemaire<br />

Bien cher ami,<br />

Je recomman<strong>de</strong> à vos soins lʹinscription <strong>de</strong> notre jeune Lemaire; il vous a donné la<br />

date <strong>de</strong> sa naissance, le 28 février 1843, Zozime‐Joseph‐Edouard.<br />

Je suis souffrant en ce moment, je me recomman<strong>de</strong> à vos prières; je ne pense pas<br />

que cette indisposition, fort gênante, ait aucun danger.<br />

Mille affections à vous et à nos frères.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

923 à M. Halluin353 Le manque <strong>de</strong> personnel. Un jeune postulant <strong>de</strong> Metz sous les drapeaux. Noël dans les Œuvres. Succès du<br />

drame <strong>de</strong> St <strong>Jean</strong>. La vie <strong>de</strong>s Œuvres.<br />

Vaugirard, 30 décembre 1863<br />

Très cher fils en N.S.,<br />

Je vous suis reconnaissant <strong>de</strong> vos vœux et plus encore <strong>de</strong> vos cordiales prières. Jʹen<br />

ai déjà senti lʹeffet pour ma pauvre santé, un peu moins vacillante <strong>de</strong>puis trois jours. Jʹen<br />

ressentirai, je nʹen doute pas, <strong>de</strong> plus précieux encore, par lʹefficacité que donne à vos sou‐<br />

venirs pieux lʹentière abnégation <strong>de</strong> vous‐même dans lʹexercice <strong>de</strong> la charité que vous me<br />

souhaitez si bien.<br />

Je compatis vivement à la surcharge que vous occasionne lʹinsuffisance <strong>de</strong> nos res‐<br />

sources en personnel. Je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> chaque jour à Dieu, par Marie, quʹIl vous vienne en ai<strong>de</strong><br />

par le prompt et entier rétablissement <strong>de</strong> M. Mitouard.<br />

M. Ferdinand [Bosmel] vient <strong>de</strong> nous quitter et lʹon nous fait craindre que, dans les<br />

circonstances présentes, il ne soit obligé dʹachever son temps sous les drapeaux dans un<br />

régiment. Nous le regretterions vivement, car son séjour à Vaugirard nous a convaincus<br />

que ce bon petit frère nʹavait rien perdu <strong>de</strong> sa droiture, <strong>de</strong> son bon esprit, ni <strong>de</strong> son dé‐<br />

vouement aux œuvres.<br />

Je me réjouis <strong>avec</strong> vous <strong>de</strong> votre belle et pieuse communion <strong>de</strong> Noël. Cette fête a été<br />

consolante dans toutes nos œuvres. A Nazareth et à Grenelle, au moins 500 communions,<br />

chapelle comble à minuit et aux principales messes du jour. A St ‐Charles, nombreux pa‐<br />

rents et communions nombreuses dʹapprentis. A Charonne, plein succès dʹune première<br />

messe <strong>de</strong> minuit dans une rue à peu près impraticable, 184 communions dʹenfants et <strong>de</strong><br />

jeunes gens; une trentaine <strong>de</strong> communions <strong>de</strong> parents dont la moitié <strong>de</strong> retours. Priez pour<br />

la confirmation que Mgr Buquet doit venir donner à la Maison <strong>de</strong> Charonne dans le courant<br />

du mois <strong>de</strong> janvier.<br />

353 Les lettres 923 et 924 sont <strong>de</strong> la main du P. Planchat sauf la ligne finale et la signature <strong>de</strong> MLP. qui les a dictées, semble-t-il.<br />

965


Les almanachs ont été expédiés seulement aujourdʹhui. Les apprêts <strong>de</strong> la S t <strong>Jean</strong> célé‐<br />

brée solennellement en présence <strong>de</strong> Messieurs les Curés <strong>de</strong> Vaugirard et <strong>de</strong> la Chapelle S t<br />

Denis, entourés dʹune trentaine dʹautres invités, surtout la préparation du drame <strong>de</strong> S t <strong>Jean</strong><br />

exécuté <strong>avec</strong> un succès inespéré 354 mʹavaient fait perdre <strong>de</strong> vue cet envoi.<br />

Adieu, bien‐aimé fils en N.S., que la paix et la joie du Seigneur soient <strong>avec</strong> vous<br />

pendant toute la nouvelle année que nous allons commencer. Quʹelles vous soutiennent<br />

dans les travaux si ru<strong>de</strong>s <strong>de</strong> cette vie, vous donnant force pour gagner à Dieu beaucoup<br />

dʹâmes et pour les mener après vous dans le séjour du repos et <strong>de</strong> la gloire sans fin.<br />

Tous les frères <strong>de</strong> Paris donnent à ceux dʹArras la fraternelle accola<strong>de</strong> du jour <strong>de</strong><br />

lʹan, tous leur donneront une part dans leur communion <strong>de</strong> vendredi 355 .<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

924 à M. Caille<br />

MLP. se félicite <strong>de</strong> lʹai<strong>de</strong> apportée à nos Œuvres par les Jésuites, tant à Amiens, à Arras quʹà Vaugirard. Les cé‐<br />

rémonies <strong>de</strong> Noël ont été très suivies. Toujours la délicate question du mouvement <strong>de</strong> personnel.<br />

Vaugirard, 30 décembre 1863<br />

Mercredi dans lʹOctave <strong>de</strong> Noël et <strong>de</strong> St <strong>Jean</strong><br />

Très cher fils en N.S.,<br />

Béni soit le bon Dieu <strong>de</strong> lʹadmirable moisson quʹil lui a plu <strong>de</strong> faire dans le champ<br />

<strong>de</strong> notre œuvre dʹAmiens. Tout est, du reste, à espérer <strong>de</strong> sa miséricor<strong>de</strong> quand il envoie<br />

pour les âmes confiées à nos soins <strong>de</strong>s ouvriers tels que les pp. Jésuites, et quand il leur<br />

inspire un dévouement aussi entier dans son action que délicat dans ses formes. Ce véné‐<br />

rable p. Guidée assistant à votre soirée pour les écoles du soir nʹétait‐ce pas le prélu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s<br />

bénédictions répandues sur votre retraite? Nʹoubliez pas, très cher fils, dʹêtre à lʹoccasion<br />

lʹinterprète <strong>de</strong> ma vive et profon<strong>de</strong> reconnaissance envers ces bons Pères. Partout, à Vau‐<br />

girard et à Arras, comme à Amiens, nous les trouvons prêts à nous assister spirituellement<br />

et à nous encourager aimablement. Le p. Recteur <strong>de</strong> Vaugirard et <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> ses principaux<br />

assistants participaient hier à nos réjouissances <strong>de</strong> la St <strong>Jean</strong>. Vos bonnes prières mʹont ob‐<br />

tenu assez <strong>de</strong> mieux pour supporter la fatigue <strong>de</strong> ces réceptions (30 convives, dont <strong>de</strong>ux<br />

curés) et <strong>de</strong> ces divertissements. Une pièce chrétienne, dont le héros était St <strong>Jean</strong>, a été exé‐<br />

cutée <strong>avec</strong> un bonheur inespéré.<br />

Il nʹy a pas eu, comme à Amiens, <strong>de</strong> retraite dans nos œuvres <strong>de</strong> Paris. Cependant,<br />

Noël nous a donné partout <strong>de</strong>s résultats consolants. A Nazareth, à Grenelle, à St ‐Charles et<br />

même à Charonne, chapelles combles à la messe <strong>de</strong> minuit. A Grenelle et à Nazareth, plus<br />

<strong>de</strong> 500 communions, à Charonne 184 communions dʹapprentis ou <strong>de</strong> jeunes ouvriers, 30 <strong>de</strong><br />

parents dont la moitié retardataires. Priez pour la confirmation que Mgr Buquet doit don‐<br />

ner dans le courant <strong>de</strong> janvier à Ste ‐Anne <strong>de</strong> Charonne. Remerciez Dieu <strong>avec</strong> nous <strong>de</strong> ce<br />

que M. <strong>Jean</strong> Gauffriau est enfin sous‐diacre. A Metz, retraite comme à Amiens, couronnée<br />

du même succès. A Arras, communion presque générale à la messe <strong>de</strong> minuit, après le<br />

beau succès <strong>de</strong> la retraite <strong>de</strong> lʹImmaculée Conception.<br />

354 Cf. lettre 879, du 12 janvier 1863. Collaboration <strong>de</strong> MLP. et <strong>de</strong> M. Maignen pour compléter la pièce <strong>de</strong> l’abbé Victor Marty.<br />

355 Le 1 er janvier 1864 est un vendredi.<br />

966


Gloire donc et reconnaissance à Dieu, profond anéantissement <strong>de</strong> nous‐mêmes et<br />

abandon plein <strong>de</strong> confiance à Jésus‐Enfant, par la médiation <strong>de</strong> Marie et <strong>de</strong> Joseph, ses fi‐<br />

dèles adorateurs en lʹétable.<br />

M. <strong>Léon</strong> [Guichard], jʹen suis convaincu, nʹa rien fait que du consentement et au<br />

fond selon le désir <strong>de</strong> M. Halluin, et dans la vue <strong>de</strong> soulager M. Marcaire qui, dans le fait,<br />

avait besoin <strong>de</strong> lʹêtre. Il eût peut‐être mieux fait <strong>de</strong> sʹy rendre <strong>de</strong>ux jours plus tôt et <strong>de</strong><br />

mʹécrire, mais un défaut <strong>de</strong> prévoyance et <strong>de</strong> calcul nʹaltère pas la simplicité <strong>de</strong> son bon<br />

vouloir. M. Halluin nous avait bien positivement écrit que tout son mon<strong>de</strong> à peu près était<br />

mala<strong>de</strong>, il avait et il a encore, comme en fait foi sa lettre <strong>de</strong> S t <strong>Jean</strong>, le plus grand besoin<br />

dʹai<strong>de</strong>, mais il a été déconcerté <strong>de</strong> ne pas recevoir M. Mitouard qui lui était annoncé. Mal‐<br />

gré tout, ne lui envoyez ce bon frère que quand il sera complètement remis.<br />

Tous les ff. <strong>de</strong> Paris se transportent en esprit à Amiens pour y embrasser chacun <strong>de</strong>s<br />

frères <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Bon Secours, sans oublier le jeune Séruzier; chacun <strong>de</strong> vous aura sa part<br />

dans les communions <strong>de</strong> vendredi [1 er jour <strong>de</strong> lʹan].<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

925 356<br />

926 à M. Halluin<br />

MLP. envisage dʹenvoyer le frère Mitouard à Arras, mais la multiplicité <strong>de</strong>s tâches dans lʹŒuvre <strong>de</strong> M. Halluin<br />

lʹinquiète car ce frère a besoin <strong>de</strong> ménagement. Les charges sʹaccroissent toujours et ʺnous sommes en pénurie <strong>de</strong><br />

personnelʺ, plus que <strong>de</strong> coutume. A Vaugirard, cas dʹun enfant originaire dʹArras soumis à la mauvaise in‐<br />

fluence dʹun ancien persévérant.<br />

5 janvier 1864<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie, ainsi que tous nos frères, <strong>de</strong> vos bons souhaits à lʹoccasion <strong>de</strong> la St <strong>Jean</strong> et du nouvel an; Dieu les exaucera, jʹen ai la confiance, puisque nous <strong>de</strong>mandons tous<br />

uniquement lʹaccomplissement <strong>de</strong> sa sainte volonté, et en nous, et dans nos œuvres. Soyez<br />

bien assuré que, pour ma part, je lui offre constamment mes prières pour vous et pour vo‐<br />

tre chère maison.<br />

Je suis en correspondance <strong>avec</strong> M. Caille pour ce qui regar<strong>de</strong> lʹenvoi <strong>de</strong> M. Mi‐<br />

touard près <strong>de</strong> vous. Jusquʹici une indisposition assez forte retenait ce <strong>de</strong>rnier; il va un peu<br />

mieux, sans être encore bien vigoureux, on craint quʹil ne soit pas suffisamment robuste<br />

pour la tâche quʹil aurait à porter. Il lui faudrait peut‐être un peu <strong>de</strong> ménagement, les pré‐<br />

occupations sans nombre <strong>de</strong> tous dans votre œuvre comporteraient‐elles ce soin? Dʹune<br />

autre part, M. Mitouard est propre aux classes, le serait‐il pour tous les emplois? Dès que<br />

M. Caille mʹaura répondu et fourni <strong>de</strong> nouveaux renseignements, je ferai tout ce qui dé‐<br />

pendra <strong>de</strong> moi pour donner un peu <strong>de</strong> soulagement à vos frères et dʹappui à vos enfants.<br />

Nous sommes en ce moment plus en pénurie que <strong>de</strong> coutume, à cause du départ <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux<br />

frères appartenant à la réserve. Nos charges, dʹun autre côté, sʹaccroissent toujours un peu,<br />

quelque soin que nous ayons <strong>de</strong> les limiter.<br />

356 Suppléée par la lettre 999 bis.<br />

967


M me Sadron sʹafflige <strong>de</strong> nʹavoir point reçu <strong>de</strong> lettre <strong>de</strong> son fils. Il nʹa point non plus<br />

écrit à sa tante qui est toujours mala<strong>de</strong>.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, je prie le Seigneur <strong>de</strong> bénir vous et votre maison, afin<br />

que sa grâce soit toujours au milieu <strong>de</strong> vous.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Il me paraîtrait tout à fait désirable que vous vissiez le père <strong>de</strong> notre petit Char‐<br />

les Lenoir. Un assez mauvais sujet, persévérant, âgé <strong>de</strong> 18 ans, que nous avons dû ren‐<br />

voyer, avait commencé à sʹemparer <strong>de</strong> lʹesprit <strong>de</strong> cet enfant dans <strong>de</strong>s vues qui ne pou‐<br />

vaient être bonnes, et, non content du mal quʹil commençait à lui faire, il essaie, par toutes<br />

les voies possibles, <strong>de</strong> lui faire, en secret, parvenir <strong>de</strong>s lettres pour le troubler et lʹinduire à<br />

quitter la maison. De plus, ce garçon, fort intrigant, a pris sur lui dʹécrire au père Lenoir<br />

pour lui peindre sous les plus défavorables couleurs la situation <strong>de</strong> son fils chez nous et<br />

lʹexhorter à lʹen retirer. Ce brave homme sʹest laissé prendre à cette intrigue, a répondu<br />

que cʹétait contre son gré que son fils était éloigné <strong>de</strong> lui, quʹon lʹen avait privé et quʹil se‐<br />

rait reconnaissant à celui qui lui écrivait <strong>de</strong> tout ce quʹil ferait pour son enfant. Il serait<br />

bien à propos <strong>de</strong> redresser les idées <strong>de</strong> cet honnête père; nous nʹavons aucune raison <strong>de</strong><br />

vouloir gar<strong>de</strong>r son fils, mais lʹenfant, jusquʹici, sʹétait trouvé heureux chez nous. Au <strong>de</strong>‐<br />

hors, il trouverait bien <strong>de</strong>s dangers et peu dʹappui et, sʹil avait le malheur surtout dʹêtre<br />

rapproché du mauvais sujet qui lʹobsè<strong>de</strong>, on pourrait le regar<strong>de</strong>r comme perdu.<br />

927 à M. Halluin<br />

M. Mitouard rejoint Arras. MLP. renouvelle ses recommandations <strong>de</strong> le ménager.<br />

Vaugirard, 8 janvier 1864<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Jʹai pris mes mesures pour que M. Mitouard vous arrive <strong>de</strong>main samedi. Jʹespère<br />

que son concours sera un soulagement pour vous et pour nos frères. M. Mitouard, en suite<br />

<strong>de</strong>s fatigues quʹil a eues <strong>de</strong>rnièrement au Gard, a été grippé, il reste encore un peu faible.<br />

Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pour lui un peu <strong>de</strong> ménagement, quant au régime et aux garanties contre<br />

le froid. Votre sollicitu<strong>de</strong> saurait bien y pourvoir. Jʹai cru seulement à propos <strong>de</strong> signaler le<br />

fait à votre attention.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, nous vous <strong>de</strong>meurons bien affectueusement unis en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

928 à M. Caille<br />

Remerciements pour lʹenvoi du frère Mitouard à Arras.<br />

Vaugirard, 8 janvier 1864<br />

Mon bien bon ami,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong>s dispositions que vous avez prises pour lʹenvoi à Arras <strong>de</strong> M.<br />

Mitouard; jʹen viens <strong>de</strong> donner avis à M. Halluin. Je bénis Dieu <strong>de</strong>s grâces manifestes quʹil<br />

répand sur votre maison: en nous humiliant, en reconnaissant bien que tout vient <strong>de</strong> Lui,<br />

rien <strong>de</strong> nous, nous obtiendrons, je lʹespère, quʹIl daigne nous continuer son miséricordieux<br />

secours.<br />

968


Je suis touché <strong>de</strong> votre affectueuse sollicitu<strong>de</strong> pour ma santé; je vais mieux; je sens<br />

pourtant le poids <strong>de</strong>s années et <strong>de</strong> misères <strong>de</strong> santé que chacune nous apporte.<br />

Nʹoubliez pas, à lʹoccasion, dʹoffrir mes vœux <strong>de</strong> bonne année à M. Mangot, M. Ca‐<br />

cheleux et aux personnes comme M. Desjardins et M lle <strong>de</strong> Lupel qui voudraient bien se<br />

souvenir <strong>de</strong> moi.<br />

Jʹembrasse vous et nos frères bien cordialement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je vous remercie <strong>de</strong> vos bonnes dispositions pour la maison <strong>de</strong> Chaville; elle<br />

va, mais elle pèse nécessairement sur Vaugirard.<br />

929 <strong>de</strong> M. Planchat à M. Halluin<br />

P. S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

A propos dʹune prochaine visite du père Lantiez à Arras. La St‐François <strong>de</strong> Sales à Vaugirard. Baptême dʹun<br />

jeune protestant. Communion fraternelle dans la prière.<br />

Vaugirard, 26 janvier 1864<br />

Monsieur et bien cher frère en N.S.,<br />

Vous <strong>de</strong>vez être étonné <strong>de</strong> nʹavoir pas encore eu la visite <strong>de</strong> M. Lantiez. Si vous jugiez sa<br />

présence immédiate tout à fait utile, il sʹéchapperait à lʹinstant même <strong>de</strong> Grenelle. Si vous ne voyez<br />

pas dʹinconvénient à ce que ce bon p. Lantiez diffère sa visite chez vous <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux ou trois semaines,<br />

lʹexpédition <strong>de</strong> ses affaires personnelles sʹen trouverait mieux.<br />

Nous aimerions nʹêtre pas trop longtemps sans nouvelles <strong>de</strong> M. Sadron. Sa santé se remet‐<br />

elle? Les soins maternels que le bon M. Mitouard donne à nos chers petits écoliers dʹArras sont‐ils<br />

bien combinés <strong>de</strong> façon à ne pas trop gêner la discipline et à ne pas contrarier les mouvements <strong>de</strong><br />

M. Sadron? Notre p. Supérieur vous a écrit, je crois, quʹil lui paraissait convenable, provisoirement<br />

du moins, <strong>de</strong> laisser à M. Sadron la conduite <strong>de</strong> lʹensemble chez les écoliers.<br />

La fête <strong>de</strong> St François <strong>de</strong> Sales, cet aimable patron <strong>de</strong> la Communauté, sera marquée à Vau‐<br />

girard par le baptême <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux élèves, dont lʹun protestant Genevois, âgé <strong>de</strong> 16 ans, envoyé exprès<br />

par le Curé <strong>de</strong> lʹImmaculée Conception <strong>de</strong> Genève pour se préparer à son abjuration. Nous vous<br />

recommandons nos <strong>de</strong>ux catéchumènes, ainsi quʹun pauvre petit <strong>de</strong> la maison, <strong>de</strong>puis plusieurs<br />

semaines à lʹagonie, et ne pouvant achever <strong>de</strong> mourir. Enfin, je vous recomman<strong>de</strong> la Confirmation<br />

que viendra donner dimanche prochain, au patronage Ste ‐ Anne, Mgr Buquet, le protecteur <strong>de</strong> notre<br />

petite Communauté dès lʹorigine.<br />

Nous aimerons à recevoir bientôt <strong>de</strong> vous une sorte <strong>de</strong> petit journal <strong>de</strong> ce qui sʹest passé à<br />

Arras <strong>de</strong>puis Noël, et notamment le récit <strong>de</strong> votre petite fête <strong>de</strong> St François <strong>de</strong> Sales. Jʹai touché, du<br />

grand‐père <strong>de</strong> Germain, 30f pour les mois <strong>de</strong> janvier et <strong>de</strong> février. Je les ai remis à M. Emile [Beau‐<br />

vais].<br />

Tout à vous dans les Sacrés Cœurs<br />

lʹabbé Planchat<br />

Je nʹajoute rien à la lettre <strong>de</strong> notre cher abbé Planchat, sinon les nouvelles assuran‐<br />

ces <strong>de</strong> ma vive affection pour vous, cher Monsieur lʹabbé, et pour toute votre maison. Dites<br />

bien à nos frères que je nʹen oublie aucun dans mes prières. Jʹai reçu <strong>avec</strong> plaisir leurs let‐<br />

tres toutes cordiales et toutes pleines dʹexcellentes dispositions, elles mʹont été une vraie<br />

consolation.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

969


930 à M. Halluin<br />

MLP. déconseille dʹaccueillir à Arras le frère dʹun jeune postulant. Un frère dʹArras traverse une pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> tris‐<br />

tesse et <strong>de</strong> découragement. Que M. Halluin lʹencourage et gagne son affection pour en faire un ʺcœur zélé et<br />

bienveillantʺ.<br />

Vaugirard, 30 janvier 1864<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Notre Conseil ne pense pas que vous puissiez, sans grave inconvénient, recevoir le<br />

frère <strong>de</strong> [Edmond] Leclerc chez vous. Ce jeune homme est, je crois, un médiocre sujet qui,<br />

à peine marié, sʹest séparé <strong>de</strong> sa femme; qui ne se tient, je crois, à aucun état, aime peu le<br />

travail et ne saurait être dʹun exemple édifiant chez vous. Il suffirait sans doute, pour vous<br />

dégager du côté <strong>de</strong> son frère lʹabbé, <strong>de</strong> lui répondre que les règles <strong>de</strong> la Communauté<br />

sʹopposent à <strong>de</strong>s arrangements <strong>de</strong> ce genre et quʹayant pris avis à ce sujet, on a rappelé les<br />

dispositions du règlement et les usages <strong>de</strong> la Congrégation.<br />

M. Brice a écrit récemment, non pas une plainte, mais une lettre triste et découra‐<br />

gée; tâchez <strong>de</strong> concilier <strong>avec</strong> lui les con<strong>de</strong>scendances que vous croyez <strong>de</strong>voir accor<strong>de</strong>r à<br />

vos enfants <strong>avec</strong> les besoins <strong>de</strong> la discipline. La position <strong>de</strong>s surveillants est souvent bien<br />

dure et bien difficile; celle <strong>de</strong>s Supérieurs lʹest encore davantage, sans doute, mais la voca‐<br />

tion est plus haute pour eux et les grâces sont plus abondantes. Ces jeunes gens ne doivent<br />

donc pas être jugés ni conduits comme sʹils étaient à <strong>de</strong>s <strong>de</strong>grés plus élevés; ils ont besoin<br />

surtout dʹêtre soutenus, encouragés, affectionnés. Vous le savez comme moi, cher Mon‐<br />

sieur lʹabbé, je ne fais autre chose ici que <strong>de</strong> sympathiser <strong>avec</strong> vous touchant les obliga‐<br />

tions que, chacun <strong>de</strong> notre côté, nous remplissons en ce sens. Lʹintérêt <strong>de</strong> nos œuvres dʹail‐<br />

leurs, à part même la charité que nous <strong>de</strong>vons à nos jeunes frères, nous conseille <strong>de</strong> gagner<br />

leur affection et <strong>de</strong> soutenir leurs bonnes dispositions intérieures, car alors, au lieu dʹins‐<br />

truments passifs ou mal souples, nous aurons pour nous ai<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s cœurs zélés et bienveil‐<br />

lants. Prions Dieu pour quʹIl les tienne ainsi unis à Lui et, par Lui, à nous. Vous verrez sʹil<br />

y a lieu <strong>de</strong> consoler un peu notre jeune Brice qui, je le répète, sans manquer au respect et à<br />

lʹaffection pour vous, a montré quelque peine et abattement.<br />

Je joins ici <strong>de</strong>ux mots pour lui. Je crois quʹil sera bien <strong>de</strong> les cacheter pour que vous<br />

restiez libre <strong>de</strong> paraître ignorer sa peine, si vous le jugez à propos.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, croyez bien à tous mes sentiments <strong>de</strong> tendre affection<br />

en N.S. Mille amitiés à nos frères<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Emile [Beauvais] paiera, sʹil ne lʹa déjà fait, le Christ dont vous nous parlez; je le<br />

lui ai recommandé <strong>de</strong> votre part.<br />

930‐1 <strong>de</strong> M. Planchat à M. Caille<br />

P.S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

MLP charge M. Caille <strong>de</strong> rendre visite à une famille dʹAmiens pour juger <strong>de</strong> ses dispositions quant à la vocation<br />

dʹun jeune frère; le père Planchat sert <strong>de</strong> secrétaire.<br />

Vaugirard, 5 février 1864<br />

Mon bon frère Caille,<br />

Les parents <strong>de</strong> M. Alexandre insistent beaucoup pour qu’il aille à Amiens à l’occasion <strong>de</strong><br />

son tirage au sort. M. Alexandre se persua<strong>de</strong> que leur arrière‐pensée est <strong>de</strong> le détourner <strong>de</strong> sa vo‐<br />

970


cation. Or, il veut s’épargner cette secousse, défiant <strong>de</strong> lui‐même autant qu’attaché, il l’est plus que<br />

jamais, à son saint état. Ces pensées fâcheuses ne seraient‐elles pas inspirées aux parents <strong>de</strong> M.<br />

Alexandre, et surtout à sa belle‐mère, par une gêne plus gran<strong>de</strong> en ce moment que d’ordinaire, en<br />

conséquence <strong>de</strong> la maladie du frère <strong>de</strong> M. Alexandre? Peut‐être vous pourriez voir cette famille<br />

<strong>avec</strong> laquelle vous êtes un peu en relations, et par là vous assurer du véritable état <strong>de</strong>s choses.<br />

Voici venir le Carême. Je sais <strong>avec</strong> quel soin vous étudiez ce que vos frères, peu forts et<br />

ayant, comme vous‐même, beaucoup à travailler, peuvent porter <strong>de</strong>s pénitences <strong>de</strong> l’Eglise? Pour<br />

suppléer au jeûne qui sera pour plusieurs ou nul ou bien peu rigoureux, le Conseil a cru pouvoir<br />

exprimer à chaque maison cette pensée: le dispositif <strong>de</strong> Chaville recomman<strong>de</strong> les pénitences cor‐<br />

porelles, dans la mesure <strong>de</strong> la discrétion et <strong>de</strong> l’obéissance. Ne pourrait‐il pas, dans chaque mai‐<br />

son, en être offert une, chaque jour, pour les sept jeunes frères qui vont tirer au sort cette année, et<br />

pour trois <strong>de</strong>squels nous ne connaissons aucun cas d’exemption?<br />

Tout à vous et à tous les frères d’Arras dans les Sacrés‐Coeurs<br />

L’abbé Planchat, prêtre<br />

Remerciez Dieu <strong>de</strong> la bonne Confirmation <strong>de</strong> Ste‐Anne <strong>de</strong> Charonne, et priez pour son<br />

Adoration <strong>de</strong> dimanche et pour ma mère, bien mala<strong>de</strong>.<br />

La visite que je vous prie, mon bon ami, <strong>de</strong> faire à la famille Legrand, serait sur‐<br />

tout pour observer et juger l’état et les dispositions <strong>de</strong> cette famille. M. Alexandre croit<br />

qu’on l’a laissé partir à regret et qu’on voudrait le ramener à Amiens, dans la pensée, sans<br />

doute, qu’il pourrait ai<strong>de</strong>r les siens; le père gagne, mais il boit, je crois, plus qu’il ne serait<br />

sage <strong>de</strong> le faire. Notre jeune frère aurait une gran<strong>de</strong> répugnance à se retrouver dans ce mi‐<br />

lieu. Je ne crois pas que vous ayez à leur parler <strong>de</strong> tout cela, s’ils n’en parlent eux‐mêmes;<br />

voyez, observez et faites ce qui vous semblera à propos.<br />

931 à M. Halluin<br />

Prochain voyage du père Lantiez à Arras.<br />

Vaugirard, 4 mars 1864<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

M. Lantiez me dit que vous lui avez exprimé le désir quʹil fît une petite visite à Ar‐<br />

ras avant Pâques. La préparation du temps pascal <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ra, en effet, sa présence à Gre‐<br />

nelle, et, à ce moment, toute absence lui <strong>de</strong>viendra impossible. Je pense donc quʹil ne doit<br />

point différer le voyage qui serait à faire à Arras. Il partira <strong>de</strong>main dimanche au soir, et<br />

vous arrivera lundi matin. Je souhaite bien quʹen vous concertant <strong>avec</strong> lui vous tiriez quel‐<br />

que avantage <strong>de</strong> sa présence pour votre communauté et pour le bien <strong>de</strong> vos enfants. Je<br />

mʹunirai <strong>de</strong> cœur à vos efforts et conseils, et surtout je prierai Dieu <strong>de</strong> vous donner les pré‐<br />

cieux appuis <strong>de</strong> sa grâce.<br />

Croyez bien, cher Monsieur lʹabbé, à tous mes sentiments <strong>de</strong> respect et dʹaffection<br />

en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

971


932 à M. Halluin<br />

Sollicitu<strong>de</strong> pour un postulant mala<strong>de</strong>. MLP. mesure bien ce que lʹŒuvre dʹArras exigerait en personnel. Malgré<br />

ses vives instances, M. Halluin a laissé son œuvre se développer sans considération <strong>de</strong>s forces nécessaires à sa di‐<br />

rection; comme lui‐même ne peut lʹai<strong>de</strong>r, quʹil se tourne vers les prêtres du séminaire d’Arras. Par cette lettre,<br />

MLP. redonne sa pleine liberté à M. Halluin.<br />

Vaugirard, 1er avril 1864<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> peine la maladie <strong>de</strong> notre jeune [Edmond] Leclerc; sa poitrine nʹest<br />

pas très forte, les vents <strong>de</strong> ces jours <strong>de</strong>rniers lʹauront saisi trop vivement. Je vous remercie<br />

<strong>de</strong>s soins que vous prenez <strong>de</strong> lui; si sa maladie <strong>de</strong>venait moins intense, peut‐être son frère<br />

pourrait‐il lui donner près <strong>de</strong> lui un peu <strong>de</strong> repos. Je vous serai reconnaissant <strong>de</strong> nous<br />

donner <strong>de</strong> ses nouvelles aussi exactement que vos travaux vous le permettront.<br />

Je sais, cher Monsieur lʹabbé, les charges bien lour<strong>de</strong>s <strong>de</strong> votre œuvre et <strong>de</strong>puis<br />

longtemps je souffre <strong>de</strong> lʹinsuffisance du personnel qui vous secon<strong>de</strong>, puisquʹil <strong>de</strong>vrait, à<br />

mon sens, être presque doublé pour subvenir aux besoins réels <strong>de</strong> vos services. Il est bien<br />

vrai que jʹavais <strong>de</strong>mandé <strong>avec</strong> beaucoup dʹinstance, et à bien <strong>de</strong>s reprises, que les déve‐<br />

loppements <strong>de</strong> lʹœuvre fussent mesurés aux forces quʹon pouvait employer à sa direction;<br />

votre charité nʹa pas su résister aux entraînements que lui présentaient tant <strong>de</strong> misères à<br />

secourir, tant <strong>de</strong> faiblesses à protéger! En examinant <strong>de</strong>vant Dieu quels moyens nous<br />

pourrions prendre pour vous ai<strong>de</strong>r efficacement, je nʹen trouve que dʹinsuffisants. Nous ne<br />

pourrions, comme vous le <strong>de</strong>mandiez, retirer M. Myionnet <strong>de</strong> Vaugirard; la chose, mûre‐<br />

ment pesée, nous a paru offrir trop dʹinconvénients. M. Georges <strong>de</strong> Lauriston pourrait, à la<br />

rigueur, être rappelé <strong>de</strong> Metz et être placé près <strong>de</strong> vous; sa maturité, son bon esprit, son af‐<br />

fection pour vous, son aptitu<strong>de</strong> pour lʹadministration vous seraient dʹun utile secours.<br />

Mais je comprends que sa présence même ne suffirait pas à tout; il faudrait quʹun prêtre<br />

vous fût donné aussi pour vous ai<strong>de</strong>r dans la direction spirituelle. M. <strong>Jean</strong> [Gauffriau], sur<br />

lequel vous aviez jeté les yeux, est encore bien jeune pour être mis au ministère <strong>de</strong>s jeunes<br />

gens immédiatement après son ordination. Mgr <strong>de</strong> Metz et M. Risse pensent quʹil lui est<br />

bon <strong>de</strong> passer présentement un an à Metz, dans un ministère que le Vénérable Evêque in‐<br />

dique et qui lui conviendrait, en effet, particulièrement. Je ne crois donc pas quʹon puisse<br />

disposer <strong>de</strong> lui immédiatement pour Arras.<br />

En présence <strong>de</strong> ces difficultés, cher Monsieur lʹabbé, et en considérant le bon vouloir<br />

dont ces MM. du Séminaire dʹArras semblent en ce moment animés pour votre œuvre et,<br />

dʹautre part, les appuis que Mgr lʹEvêque veut bien vous susciter, il me paraîtrait préférable<br />

pour vous dʹaccepter ces secours qui semblent provi<strong>de</strong>ntiellement préparés. Notre Com‐<br />

munauté vous a toujours donné son appui en parfait désintéressement, cherchant le bien<br />

<strong>de</strong> votre œuvre et sʹoubliant elle‐même; elle est encore très disposée à le faire dans le cas<br />

présent; voyez donc aux pieds du Seigneur ce qui vous est le plus utile et soyez assuré que<br />

vous ne rencontrerez, <strong>de</strong> notre côté, aucune difficulté à la réalisation <strong>de</strong>s moyens que vous<br />

aurez définitivement jugés les plus avantageux.<br />

Croyez bien, cher Monsieur lʹabbé, à tous les sentiments dévoués <strong>avec</strong> lesquels je<br />

suis en N.S.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

972


933 à M. Halluin<br />

Séparation <strong>de</strong> M. Halluin dʹ<strong>avec</strong> lʹInstitut. Dispositions pour assurer au mieux la transition. ʺPeines, sacrifices,<br />

fatiguesʺ: autant <strong>de</strong> semences qui porteront du fruit.<br />

Vaugirard, 8 avril 1864<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Le sentiment que Monsieur lʹabbé Lantiez avait rapporté, après son <strong>de</strong>rnier voyage<br />

à Arras, lui avait fait penser déjà que lʹétat présent <strong>de</strong> votre maison se soutiendrait diffici‐<br />

lement sans quelques mesures essentielles pour fortifier le personnel et vous donner à<br />

vous‐même soulagement. Nous avions prié à cette intention durant le mois <strong>de</strong> St Joseph,<br />

vous aviez prié <strong>de</strong> votre côté; nous pouvons espérer, après cela, que les dispositions aux‐<br />

quelles vous croyez <strong>de</strong>voir vous arrêter sont selon les vues <strong>de</strong> la divine Provi<strong>de</strong>nce et<br />

quʹelles produiront les bons effets que nous souhaitons <strong>avec</strong> vous. Jʹai, pour ma part, cher<br />

Monsieur lʹabbé, la pleine confiance que le Seigneur se servira <strong>de</strong> vous pour achever cette<br />

œuvre, comme Il vous a choisi pour en commencer la fondation; trop <strong>de</strong> peines, <strong>de</strong> sacrifi‐<br />

ces et <strong>de</strong> fatigues ont été généreusement offerts pour cette création, Dieu ne laissera pas<br />

ces semences tourner en pure perte. Voilà les pensées qui me donnent ferme espérance; je<br />

me les remets <strong>de</strong>vant lʹesprit pour faire diversion au sentiment pénible que me cause notre<br />

séparation. Tous nos frères du Conseil sont dans les mêmes dispositions et vous pouvez<br />

compter, cher Monsieur lʹabbé, sur leurs vœux et leurs plus vives sympathies; ils gar<strong>de</strong>‐<br />

ront, comme il convient, le secret sur les arrangements réglés par vous tant que vous ne les<br />

aurez pas vous‐même mis au grand jour. Je ne crois pas quʹil y eût inconvénient à en dire<br />

un mot à M. Guillot, quand vos dispositions seront bien réglées. Au moment où les jeunes<br />

prêtres, qui doivent vous assister, arriveront, lʹensemble <strong>de</strong>s frères se retireront, parce<br />

quʹils ne sauraient peut‐être pas prendre leur position dans leurs rapports <strong>avec</strong> eux. Ce‐<br />

pendant, si M. Guillot vous était utile pour installer ces ecclésiastiques et les ai<strong>de</strong>r à pren‐<br />

dre les emplois, il pourrait rester une quinzaine <strong>de</strong> jours après le départ <strong>de</strong>s autres frères.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong>s soins qui sont donnés au jeune Edmond [Leclerc]; lorsquʹil<br />

pourra voyager sans danger, on pourrait le renvoyer à Vaugirard afin <strong>de</strong> vous décharger<br />

et <strong>de</strong> faciliter aussi sa convalescence.<br />

Notre retraite, habituellement placée en cette saison, commencera le dimanche 17<br />

<strong>de</strong> ce mois, le soir. Je ne sais ce que vous croirez <strong>de</strong>voir faire, ni surtout ce que lʹinsuffi‐<br />

sance <strong>de</strong> vos ai<strong>de</strong>s vous permettra <strong>de</strong> faire à cette occasion. Si vous croyez quʹil fût impos‐<br />

sible dʹen détacher aucun, je pourrais leur écrire que, pour le moment, il nʹy a pas moyen<br />

<strong>de</strong> les faire venir, mais que je concerte <strong>avec</strong> vous les mesures pour leur procurer à chacun<br />

un peu <strong>de</strong> retraite et <strong>de</strong> repos dans un temps prochain.<br />

Adieu, cher Monsieur lʹabbé, je prie Dieu <strong>de</strong> bénir vos intentions charitables et <strong>de</strong><br />

pourvoir à tous vos besoins par lʹabondance <strong>de</strong> ses miséricor<strong>de</strong>s.<br />

Votre tout dévoué serviteur et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

973


934 à M. Caille<br />

Recommandations concernant la vie <strong>de</strong> la communauté. Une <strong>de</strong>s raisons du départ <strong>de</strong> M. Halluin: à Arras, on<br />

voulait faire <strong>de</strong> sa maison une œuvre diocésaine.<br />

Vaugirard, 8 avril 1864<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je fais en hâte ces <strong>de</strong>ux mots pour les remettre à nos <strong>de</strong>ux jeunes conscrits, MM.<br />

Alexandre [Legrand] et Lemaire; ils vous diront toutes les amitiés dont nous les chargeons<br />

pour vous et pour nos frères.<br />

Je crois quʹon peut, sur la bonne recommandation du r.p. Dau<strong>de</strong>, envoyer à Vaugi‐<br />

rard le jeune homme quʹil nous présente, il entrerait aux persévérants; pensez‐vous quʹil se<br />

plairait au travail <strong>de</strong>s bronzes durant quelques heures chaque jour, sans préjudice <strong>de</strong>s<br />

exercices et étu<strong>de</strong>s que font les persévérants?<br />

Pour lʹautre jeune homme, sʹil vient, vous pourriez lʹessayer durant un peu <strong>de</strong><br />

temps; après cet examen, si le résultat était favorable, ne pourrait‐il faire un certain postu‐<br />

lat chez vous, ce qui permettrait au jeune Séruzier <strong>de</strong> revenir à Vaugirard, comme nous le<br />

faisons ordinairement pour les persévérants qui vont temporairement donner ai<strong>de</strong> à nos<br />

œuvres du <strong>de</strong>hors. Vous pèserez tout cela, sʹil y a lieu.<br />

Adieu, bien cher ami; M. Planchat vous a dit le moment <strong>de</strong> la retraite, vous verrez<br />

qui vous pourrez y envoyer.<br />

Je vous embrasse cordialement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je regrette notre séparation <strong>avec</strong> le bon M. Halluin; mais, outre lʹinsuffisance réelle<br />

<strong>de</strong> son personnel qui lui est une cause dʹextrême surcharge pour lui‐même, il est poussé<br />

par son Evêque, les Supérieurs du Séminaire et beaucoup <strong>de</strong> gens du pays qui voudraient<br />

faire <strong>de</strong> sa maison une œuvre diocésaine; nous ne pouvons que laisser marcher les choses.<br />

Il désire que rien ne sʹébruite avant le moment où tout sera bien réglé.<br />

935 à M. Risse<br />

Un jeune postulant quitte lʹInstitut. ʺMieux vaut quʹil soit honnête chrétien [dans le mon<strong>de</strong>] que mauvais reli‐<br />

gieux en communautéʺ. MLP. se réjouit <strong>de</strong>s bonnes nouvelles que M. Risse lui donne <strong>de</strong> lʹŒuvre <strong>de</strong> Metz.<br />

Vaugirard, 11 avril 1864<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Ne nous désolons pas trop <strong>de</strong> la défection <strong>de</strong> notre jeune Ferdinand [Bosmel]; je ne<br />

refusais pas <strong>de</strong> le laisser essayer <strong>de</strong> nouveau ses forces, mais je comptais peu sur sa persé‐<br />

vérance; espérons quʹil se sauvera dans le mon<strong>de</strong>; mieux vaut, comme il le dit, quʹil soit<br />

ainsi honnête chrétien que mauvais religieux en Communauté.<br />

Je suis heureux que tout aille bien autour <strong>de</strong> vous; dites à notre f.Georges [<strong>de</strong> Lau‐<br />

riston] quʹil doit se préparer, comme nous tous, à la retraite en détachant son cœur et en y<br />

ménageant la place pour lʹaction <strong>de</strong> la grâce; réjouissons‐nous dans le Seigneur, suivant le<br />

conseil si aimable <strong>de</strong> S t Paul.<br />

Je remets votre mot à M. Planchat.<br />

Mille affections à tous et à vous tous mes tendres et dévoués sentiments en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

974


936 à M. <strong>de</strong> Lauriston<br />

M. <strong>de</strong> Lauriston doit se reposer. Quʹil encourage un postulant ʺun peu abattuʺ. Se donner à Dieu <strong>de</strong> tout son<br />

cœur.<br />

Vaugirard, 14 avril 1864<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Notre bon abbé Planchat vous a <strong>de</strong>mandé quelques notes sur les résultats <strong>de</strong> vos re‐<br />

traites et dispositions concernant le temps pascal; vous les apporterez si vous pouvez en<br />

venant à la retraite, il ne sʹagit pas dʹun rapport, mais dʹun simple aperçu; si ce travail,<br />

quoique fort bref, gênait vos autres occupations, ajournez‐le; vous trouverez un moment<br />

pour le faire ici.<br />

M. Risse, qui mʹécrit <strong>de</strong> sa retraite <strong>de</strong> St ‐Clément, me dit que vous êtes un peu fati‐<br />

gué; je pense bien <strong>de</strong>puis longtemps à vous ménager quelque temps <strong>de</strong> repos, je nʹai pu<br />

jusquʹici y parvenir; je ne désespère pas dʹy arriver après la retraite.<br />

M. Risse me dit que le f. Rémond est un peu abattu; ren<strong>de</strong>z‐lui courage, invitez‐le à<br />

mʹécrire, il mʹa toujours montré confiance et jʹai toujours eu pour lui beaucoup dʹaffection.<br />

Je nʹai pas le temps dʹécrire à notre bon abbé Risse aujourdʹhui, je respecte dʹailleurs<br />

sa retraite, ne lui parlez point aujourdʹhui <strong>de</strong> votre projet <strong>de</strong> repos pour ne point lui don‐<br />

ner <strong>de</strong> distractions, je lui en parlerai en lui écrivant.<br />

Adieu, bien cher ami, aimons Dieu et donnons‐nous cordialement à Lui.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

937 à M. Halluin<br />

Les changements à la maison dʹArras, suite à la décision <strong>de</strong> M. Halluin <strong>de</strong> quitter la Congrégation. Discrétion et<br />

délicatesse <strong>de</strong> MLP.<br />

Vaugirard, 18 avril 1864<br />

Cher Monsieur lʹabbé et ami,<br />

M. Mitouard, traversant Paris pour se rendre près <strong>de</strong> sa mère mala<strong>de</strong>, me dit que les<br />

ai<strong>de</strong>s nouveaux que la Provi<strong>de</strong>nce vous a ménagés arrivent journellement, quʹen consé‐<br />

quence le jeune Edmond [Leclerc] va revenir près <strong>de</strong> nous <strong>de</strong>main et que M. Sadron le sui‐<br />

vra quelques jours après. Je nʹai point voulu, pour ne point manquer au secret que vous<br />

désiriez gar<strong>de</strong>r, mʹavez‐vous écrit, sur lʹexécution <strong>de</strong> vos changements, <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r préci‐<br />

sément à M. Mitouard si nos frères les connaissaient; jʹignore donc ce qui en est, et particu‐<br />

lièrement si M. Guillot en a été instruit, comme je le désirais.<br />

Je vous prie, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> me dire quelles dispositions vous avez prises<br />

en ce sens et aussi, bien précisément, à quel moment nos frères doivent revenir près <strong>de</strong><br />

nous.<br />

Jʹécris ci‐joint un mot à M. Guillot; je vous serai bien obligé <strong>de</strong> le lui remettre.<br />

Croyez bien, cher Monsieur lʹabbé, à tous mes sentiments respectueux et dévoués<br />

en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

975


938 à M. Guillot<br />

MLP. veille, <strong>avec</strong> attention et ménagement, à ce que, pour le départ <strong>de</strong> ses frères <strong>de</strong> la maison dʹArras, ʺtout se<br />

dispose aussi mesurément quʹil se pourraʺ.<br />

Vaugirard, 18 avril 1864<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Halluin vous a dit, je pense, que, pour entrer dans les vues <strong>de</strong> Mgr dʹArras et<br />

pour mettre ses enfants sous une direction plus proprement ecclésiastique quʹil nʹavait pu<br />

le faire jusquʹici, il sʹassociait quelques jeunes prêtres du diocèse qui prennent <strong>avec</strong> lui la<br />

direction <strong>de</strong> lʹœuvre et vont rendre inutile la coopération que nous y donnions <strong>de</strong>puis plu‐<br />

sieurs années.<br />

Je ne sais pas bien précisément à quel moment M. Halluin compte se séparer <strong>de</strong> nos<br />

frères; il me semble que ce doit être bientôt, car ils peuvent avoir quelque difficulté à<br />

prendre leur position <strong>avec</strong> les nouveaux ai<strong>de</strong>s qui sʹadjoignent à notre cher M. Halluin;<br />

écrivez‐moi, je vous prie, sans aucun retard ce que vous sentez et jugez à cet égard. Pour<br />

vous, cher enfant, qui avez plus dʹexpérience, jʹavais dit à M. Halluin quʹil nʹy aurait pas,<br />

sans doute, dʹinconvénient à ce que vous restiez une quinzaine à Arras après lʹarrivée <strong>de</strong>s<br />

associés nouveaux <strong>de</strong> lʹœuvre, si le bien <strong>de</strong>s choses le <strong>de</strong>man<strong>de</strong> et si M. Halluin y voit une<br />

nécessité pour sa maison. Ecrivez‐moi au plus tôt sur tout cela en simplicité et confiance;<br />

M. Halluin ne désire, comme moi, que la gloire <strong>de</strong> Dieu, il ne trouvera pas mauvais que<br />

nous veillions, lui et moi, à ce que tout se dispose aussi mesurément quʹil se pourra.<br />

Assurez nos frères <strong>de</strong> ma tendre affection et croyez vous‐même, cher enfant, à tous<br />

mes sentiments <strong>de</strong> paternel dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

938‐1 à M gr Angebault<br />

Projet dʹétablir à Angers une œuvre pour <strong>de</strong> jeunes ouvriers. Pour remplacer ʺlʹappui <strong>de</strong> la famille absente ou<br />

incompétenteʺ. Etablir un Orphelinat pourrait aussi être envisagé. Conditions nécessaires pour bien poser les<br />

fondations. Mais le développement <strong>de</strong> la Congrégation est ʺ<strong>de</strong> beaucoup la plus intéressante <strong>de</strong> nos Œuvresʺ.<br />

Vaugirard, 20 avril 1864<br />

Monseigneur et vénéré Père,<br />

Je suis, <strong>avec</strong> tous les nôtres, profondément touché <strong>de</strong> lʹaimable et paternelle bonté<br />

<strong>avec</strong> laquelle vous avez bien voulu vous occuper du projet dʹétablissement dʹune petite co‐<br />

lonie <strong>de</strong> notre Congrégation dans votre ville épiscopale357 ; le désir <strong>de</strong> nous trouver enfin<br />

tout près <strong>de</strong> vous serait assurément la raison la plus forte pour nous porter à la réalisation<br />

<strong>de</strong> cette pensée. Elle reste néanmoins encore peu précise dans notre esprit à cause <strong>de</strong> lʹin‐<br />

certitu<strong>de</strong> absolue où nous sommes sur la nature <strong>de</strong> lʹœuvre que nous pourrions établir et<br />

surtout quʹon souhaiterait nous voir établir pour répondre aux besoins les plus pressants<br />

du pays.<br />

Pour ce qui nous regar<strong>de</strong>, il me semble quʹen résumant bien nos forces, il ne nous<br />

serait pas absolument impossible <strong>de</strong> commencer à Angers ou ailleurs un établissement<br />

mo<strong>de</strong>ste dʹabord et susceptible <strong>de</strong> prendre successivement quelque développement.<br />

Lʹœuvre que nous aimerions le mieux entreprendre serait une œuvre <strong>de</strong> protection ou pa‐<br />

357 C’est le 6 mai 1865 que les Frères <strong>de</strong> St-Vincent-<strong>de</strong>-Paul prirent la direction du patronage <strong>de</strong> Notre-Dame <strong>de</strong>s Champs, à Angers.<br />

976


tronage <strong>de</strong>s jeunes ouvriers, soit <strong>de</strong> passage à Angers pour sʹy perfectionner dans la<br />

connaissance <strong>de</strong> leur état, soit dépourvus <strong>de</strong> famille et manquant conséquemment <strong>de</strong> di‐<br />

rection, <strong>de</strong> surveillance et dʹappui. Donner un asile honnête à tous ceux qui auraient lʹat‐<br />

trait <strong>de</strong> vivre près <strong>de</strong> nous et sous nos yeux, attirer les autres à <strong>de</strong>s réunions, exercices et<br />

délassements pour trouver dans nos rapports <strong>avec</strong> eux lʹoccasion dʹexercer sur eux quel‐<br />

que influence morale, religieuse, paternelle et <strong>de</strong> remplacer, en un mot, lʹappui <strong>de</strong> la fa‐<br />

mille absente ou incompétente, tel serait, à notre avis, un <strong>de</strong>s meilleurs moyens dʹêtre uti‐<br />

les à la classe ouvrière au moment le plus critique <strong>de</strong> la carrière <strong>de</strong> lʹouvrier. Nous avons à<br />

Paris une œuvre <strong>de</strong> ce genre qui opère un grand bien.<br />

Si un pareil établissement était peu goûté ou peu compris à Angers, nous pourrions<br />

y commencer un orphelinat.<br />

Mais, soit pour cette <strong>de</strong>rnière œuvre, soit pour la première, nous ne saurions y son‐<br />

ger sans avoir quelques données sur les ressources et moyens quʹon entreverrait, soit pour<br />

les établir, soit pour les soutenir. Sʹil sʹagissait dʹune œuvre <strong>de</strong> jeunes ouvriers, pourrait‐on<br />

former une commission dʹhommes bien posés qui sʹen constituassent les protecteurs, lui<br />

créassent <strong>de</strong>s ressources, lui assurassent un ferme appui? Si on <strong>de</strong>vait au contraire faire un<br />

orphelinat, quels enfants <strong>de</strong>vraient y être reçus, enfants du département ou <strong>de</strong> la ville, pla‐<br />

cés par les protecteurs ou <strong>de</strong>s parents ou bien par lʹadministration? Quels seraient en lʹun<br />

ou lʹautre cas les moyens <strong>de</strong> faire subsister lʹétablissement? Eloignés dʹAngers, sans lumiè‐<br />

res sur ces points essentiels, nous ne faisons nulle avance, non assurément par indiffé‐<br />

rence, mais par défaut dʹincitation suffisante pour nous déterminer à une démarche quel‐<br />

conque. Peut‐être auriez‐vous, Monseigneur, quelque indication et surtout quelques avis à<br />

nous donner.<br />

A un autre point <strong>de</strong> vue encore, nous sommes en incertitu<strong>de</strong>; nous <strong>de</strong>vons particu‐<br />

lièrement souhaiter <strong>de</strong> nous porter du côté où nous pourrions espérer quelques vocations<br />

car la fondation et le développement <strong>de</strong> notre petite Congrégation est <strong>de</strong> beaucoup la plus<br />

intéressante <strong>de</strong> nos œuvres; lʹAnjou serait‐il pour cela un sol favorable et <strong>de</strong> bonne espé‐<br />

rance?<br />

Je ne mʹexcuse pas, Monseigneur, <strong>de</strong> tant <strong>de</strong> détails et <strong>de</strong> questions multipliées, no‐<br />

tre petite famille est vôtre, vous nous avez, dès longtemps, adoptés pour vos enfants, nous<br />

nʹavons gar<strong>de</strong> <strong>de</strong> lʹoublier.<br />

Veuillez agréer, Monseigneur, lʹhommage du profond respect <strong>de</strong><br />

Votre humble serviteur et fils en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

939 à M. Caille358 A propos <strong>de</strong> futures vocations, MLP. se montre réservé <strong>de</strong>vant la jeunesse <strong>de</strong> lʹun ou <strong>de</strong> lʹautre. Bien les suivre<br />

spirituellement avant toute décision les concernant.<br />

Vaugirard, ce 10 mai 1864<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je mʹempresse <strong>de</strong> répondre à votre bonne lettre et à toutes les <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s quʹelle ren‐<br />

ferme.<br />

358 <strong>Lettre</strong> dictée et signée par MLP., entièrement écrite <strong>de</strong> la main <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Lauriston ;<br />

977


Jʹai beaucoup regretté <strong>de</strong> ne pouvoir plus tôt vous envoyer le frère qui vous avait<br />

été annoncé; ce retard a été occasionné par lʹabsence prolongée <strong>de</strong> M. Mitouard qui sʹétait<br />

rendu auprès <strong>de</strong> sa mère mala<strong>de</strong>. Je lʹattends à la fin <strong>de</strong> la semaine; son retour me mettra<br />

en mesure <strong>de</strong> donner le remplaçant promis au jeune Séruzier, lequel reviendra prendre<br />

lʹair <strong>de</strong> Vaugirard.<br />

Je ne me rappelle aucunement que mʹayez déjà parlé dʹun jeune Dubois qui, me di‐<br />

tes‐vous, doit se rendre auprès <strong>de</strong> vous mercredi; du moins mes souvenirs nʹen ont rien<br />

conservé. A lʹoccasion, je vous prierai donc <strong>de</strong> me donner sur lui quelques renseigne‐<br />

ments.<br />

Quant au jeune Bulot, il me semble encore bien jeune, le parti le plus sage et le plus<br />

convenable en ce moment, vis‐à‐vis <strong>de</strong> cet enfant, me paraît donc être que vous le conser‐<br />

viez auprès <strong>de</strong> vous, entretenant et développant ses bonnes dispositions. Si elles se main‐<br />

tiennent, nous verrons plus tard ce quʹil conviendra <strong>de</strong> faire et quand il sera utile <strong>de</strong> le<br />

faire venir ici.<br />

Je nʹai rien à vous dire du jeune Batton, puisque la détermination <strong>de</strong> ses parents<br />

lʹempêche <strong>de</strong> prendre aucun parti avant son tirage au sort.<br />

Je vous charge <strong>de</strong> mes tendresses pour nos bons frères dont jʹaime à encourager les<br />

excellentes dispositions.<br />

Quant à vous, cher bon ami et fils en N.S., vous connaissez <strong>de</strong>puis longtemps les<br />

sentiments <strong>de</strong> ma vieille amitié dont cʹest pour mon cœur une douce joie <strong>de</strong> vous renouve‐<br />

ler la bien vive expression.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

940 à M. Halluin<br />

A M. Halluin qui lui a exprimé sa gratitu<strong>de</strong> pour sa collaboration, MLP. écrit que lʹai<strong>de</strong> apportée ne visait que le<br />

bien surnaturel <strong>de</strong>s enfants. Avec humilité, il lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pardon pour les imperfections <strong>de</strong> sa coopération. La<br />

question <strong>de</strong> la copropriété. Expiration <strong>de</strong>s vœux <strong>de</strong> M. Halluin. Décès dʹun jeune ouvrier dʹArras.<br />

Vaugirard, 13 mai 1864<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Jʹai été bien touché <strong>de</strong>s remerciements que vous nous faites pour la coopération que<br />

nous avons donnée à votre Œuvre; nous en sommes trop récompensés si elle a pu être un<br />

peu utile au bien <strong>de</strong> vos enfants et vous ai<strong>de</strong>r dans les efforts que vous faites pour les<br />

conduire dans le droit chemin <strong>de</strong> la foi et <strong>de</strong> la vie chrétienne. Dieu daignera, nous lʹespé‐<br />

rons, tenir compte <strong>de</strong> nos intentions et nous pardonner tout ce que nous avons pu mettre<br />

dʹimperfection dans nos services.<br />

On me dit que, pour vous dégager <strong>de</strong> notre copropriété <strong>de</strong> la maison, il faudra<br />

quʹelle soit vendue, ce qui vous causera <strong>de</strong>s frais assez considérables. Il ne semble pas quʹil<br />

y ait péril en la <strong>de</strong>meure. Notre Conseil pense quʹil serait sage <strong>de</strong> temporiser. Nous ne<br />

mettrons toutefois nul obstacle aux démarches que vous croiriez <strong>de</strong>voir faire à ce sujet.<br />

Nous nous en rapportons pleinement à votre sagesse.<br />

Le temps <strong>de</strong> vos vœux ne <strong>de</strong>vant expirer quʹau mois dʹoctobre, je crois quʹil serait<br />

désirable que vous vous en fissiez relever par M gr dʹArras qui a pouvoir à cet effet, puisque<br />

vous nʹaviez pas cessé dʹêtre <strong>de</strong> son diocèse.<br />

978


Nous avons appris <strong>avec</strong> peine la mort du pauvre M. Simonnet. Nous espérons que<br />

ses longues souffrances et les épreuves si ru<strong>de</strong>s imposées à ses <strong>de</strong>rnières années lui ob‐<br />

tiendront miséricor<strong>de</strong> près du Seigneur. Nous ignorons absolument où est sa famille, et<br />

même si elle sait encore quʹil est perdu pour elle.<br />

Veuillez, cher Monsieur lʹabbé, nous gar<strong>de</strong>r un bon souvenir dans vos prières et sa‐<br />

crifices et recevez tous nos sentiments respectueux et dévoués en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

941 à M. <strong>de</strong> Lauriston<br />

Limites que MLP. impose au zèle apostolique <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Lauriston, sollicité dʹaller prêter main‐forte au père Plan‐<br />

chat.<br />

Vaugirard, 13 mai 1864<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Si vous pensez que votre présence ait une utilité réelle dimanche matin à Ste ‐Anne,<br />

je ne refuse pas <strong>de</strong> vous y laisser jusque là, mais à la condition très expresse que, confor‐<br />

mément à la promesse que fait M. Planchat, vous seriez en mesure <strong>de</strong> vous rendre à St ‐<strong>Jean</strong><br />

pour midi et <strong>de</strong>mi. Je serais bien aise que vous y rencontriez M. <strong>de</strong> Lambel qui se retire <strong>de</strong><br />

bonne heure, pour aller <strong>de</strong> là à la Sainte‐Famille <strong>de</strong> St‐Sulpice ou à quelque autre réunion.<br />

Il a un peu <strong>de</strong> souci <strong>de</strong> ce que les enfants semblent moins nombreux; en vous voyant don‐<br />

ner quelque intérêt à cette excellente œuvre, il comprendra que nous désirons la soutenir<br />

<strong>de</strong> notre mieux. Pour le lundi, vous verrez <strong>avec</strong> M. Carment sʹil peut se passer <strong>de</strong> vous; je<br />

ne le présume pas, car il aura un lourd travail à préparer pour mercredi.<br />

Veuillez dire à M. Planchat, auquel je ne puis écrire, que M. Emes regar<strong>de</strong> la pro‐<br />

mena<strong>de</strong> <strong>de</strong> Bonneuil comme au‐<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> ses forces et mʹa prié <strong>avec</strong> instance <strong>de</strong> lʹen dis‐<br />

penser.<br />

Je prie Dieu, cher ami, pour que les fruits <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> fête que vous préparez <strong>avec</strong><br />

notre bon abbé Planchat vous donnent à lʹun et à lʹautre une gran<strong>de</strong> consolation.<br />

Votre dévoué ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

942 à M. Caille359 Remplacement dʹun jeune persévérant par M. Brouant, plus expérimenté. Portrait <strong>de</strong> ce frère, que MLP. estime<br />

doué <strong>de</strong> précieuses qualités naturelles.<br />

Vaugirard, ce 18 mai 1864<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Au moment <strong>de</strong> réaliser la promesse que je vous ai faite <strong>de</strong> remplacer le jeune Séru‐<br />

zier par un frère plus âgé et plus formé aux œuvres, je viens vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r quelle apti‐<br />

tu<strong>de</strong> particulière vous désireriez dans le frère qui <strong>de</strong>vra être attaché à votre maison. Mon<br />

intention était <strong>de</strong> vous envoyer M. André Brouant qui a <strong>de</strong> précieuses qualités. Doué dʹun<br />

aimable caractère, il joint à cela quelque instruction, possè<strong>de</strong> une très belle écriture, sʹex‐<br />

359 <strong>Lettre</strong> dictée par MLP., entièrement écrite <strong>de</strong> la main <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Lauriston.<br />

979


prime et écrit <strong>avec</strong> une certaine facilité, commence à toucher lʹorgue assez passablement.<br />

Cʹest, en somme, un sujet dʹune valeur assez notable pour pouvoir être employé utilement<br />

à la Direction <strong>de</strong>s œuvres. Si donc le frère que vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z <strong>de</strong>vait être attaché spé‐<br />

cialement aux travaux manuels <strong>de</strong> votre maison, je préférerais vous choisir un autre frère<br />

plus robuste et plus vigoureux qui ferait aussi bien et mieux peut‐être ce service, et gar<strong>de</strong>r<br />

ici M. André dont on utiliserait les aptitu<strong>de</strong>s dans lʹune <strong>de</strong> nos maisons.<br />

Jʹattends votre réponse pour faire le choix du frère qui <strong>de</strong>vra vous être envoyé. Je<br />

suis en mesure <strong>de</strong> vous lʹexpédier <strong>de</strong> suite, M. Mitouard étant <strong>de</strong> retour.<br />

Tendre souvenir à nos bons frères. Jʹappelle sur eux et sur vous bien spécialement,<br />

cher et bien bon ami, les grâces <strong>de</strong> lʹEsprit Saint, lui <strong>de</strong>mandant quʹIl donne à vos œuvres<br />

<strong>de</strong> merveilleux développements, tels que le désire votre zèle ar<strong>de</strong>nt pour le bien.<br />

Votre dévoué ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Nous recommandons à vos bonnes prières et à celles <strong>de</strong> vos frères et <strong>de</strong> vos enfants<br />

<strong>de</strong>ux <strong>de</strong> nos frères qui, samedi prochain, vont recevoir les saints ordres: M. lʹabbé <strong>Jean</strong><br />

[Gauffriau] qui sera ordonné prêtre à Metz, et M. lʹabbé Chaverot qui recevra la tonsure au<br />

Séminaire <strong>de</strong> St‐Sulpice.<br />

943 à M. Chaverot<br />

M. Chaverot va recevoir la tonsure, et M. Gauffriau lʹordination sacerdotale.<br />

Vaugirard, 20 mai 1864<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Je vous envoie, comme vous lʹavez désiré, six douzaines dʹimages pour être distri‐<br />

buées à vos amis à lʹoccasion <strong>de</strong> votre tonsure. Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> vous dire que toute no‐<br />

tre famille prie pour vous à ce moment où vous allez faire le premier pas dans la carrière<br />

sacerdotale; nous prions aussi, vous le savez, pour notre cher abbé <strong>Jean</strong> [Gauffriau] qui va,<br />

lui, franchir le <strong>de</strong>rnier pas et entrer tout ensemble dans les grands privilèges et dans les<br />

graves obligations du sacerdoce. Tous nos frères vous assurent <strong>de</strong> leurs pieuses et affec‐<br />

tueuses sympathies et les mettent particulièrement aux pieds <strong>de</strong> la T. Ste Vierge à qui vous<br />

<strong>de</strong>vez, après Dieu, votre vocation.<br />

Nous payerons votre pension au temps marqué; je nʹai plus, <strong>de</strong>s petits fonds que<br />

vous mʹaviez remis, quʹune soixante <strong>de</strong> francs; vous jugerez sʹil y a lieu <strong>de</strong> faire quelque<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> à votre famille pour ce trimestre; faites à cet égard ce que vous jugerez opportun.<br />

Adieu, bien cher ami, je vous embrasse tendrement, <strong>avec</strong> lʹespoir quʹaprès lʹordina‐<br />

tion vous aurez tout un jour pour vous reposer près <strong>de</strong> nous.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

944 à M. Caille360 Mouvement <strong>de</strong> personnel entre Vaugirard et Amiens.<br />

Vaugirard, 21 mai 1864<br />

Cher fils et bien digne ami,<br />

Me rendant à vos désirs, je vous envoie <strong>de</strong> suite notre bon petit f. André [Brouant],<br />

360 <strong>Lettre</strong> écrite <strong>de</strong> la main <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Lauriston, <strong>avec</strong> signature et P.S. par MLP.<br />

980


qui, je lʹespère, vous rendra tous les bons services que vous en atten<strong>de</strong>z; il vous portera <strong>de</strong><br />

bonnes nouvelles <strong>de</strong> tous nos frères <strong>avec</strong> les vœux <strong>de</strong> notre tendre affection.<br />

Jʹapprouve toutes les dispositions et arrangements que vous me soumettez au sujet<br />

du jardin du Petit S t ‐<strong>Jean</strong>. Mais je ne puis vous laisser le jeune Séruzier plus tard que mer‐<br />

credi, ayant absolument besoin quʹil soit ce jour‐là à Vaugirard pour la conduite <strong>de</strong> la cor‐<br />

donnerie, à la place <strong>de</strong> M. Thomas [Mackroseane] qui vient <strong>de</strong> nous quitter.<br />

Assurez nos bons frères <strong>de</strong> notre affectueuse sollicitu<strong>de</strong> à leur égard; elle les em‐<br />

brasse tous et leurs personnes et leurs œuvres et leurs enfants et vous tout spécialement,<br />

mon bien digne ami, qui êtes lʹinstrument dont Dieu se sert pour faire tout ce bien au mi‐<br />

lieu <strong>de</strong>s populations qui vous entourent.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je pense que le jeune Dubois pourra accompagner notre cher Séruzier; nous<br />

lʹaccueillerons <strong>avec</strong> cordialité, ayant bonne espérance pour sa vocation, dʹaprès tout ce que<br />

vous et M. Marcaire nous dites <strong>de</strong> bien à son sujet.<br />

L. P.<br />

945 à M me la Comtesse <strong>de</strong> Grandville<br />

Bienfaitrice du frère Gauffriau qui vient dʹêtre ordonné prêtre. MLP. la remercie dʹai<strong>de</strong>r aux frais du voyage que<br />

le jeune prêtre pourra faire auprès <strong>de</strong> sa famille.<br />

Vaugirard, 24 mai 1864<br />

Madame la Comtesse,<br />

Je suis heureux que lʹordination <strong>de</strong> votre jeune protégé, M. <strong>Jean</strong> Gauffriau, ait été<br />

pour nous une occasion <strong>de</strong> recevoir <strong>de</strong> vos nouvelles qui nous arrivent trop rarement à no‐<br />

tre gré. Nous vous gardons, en effet, Madame, une bien sincère reconnaissance pour la<br />

bienveillance que vous nous avez constamment témoignée et que vous nous montrez en‐<br />

core aujourdʹhui en la personne <strong>de</strong> M. lʹabbé Gauffriau.<br />

Jʹavais dit, en effet, aux bons parents <strong>de</strong> notre jeune abbé quʹil ne serait pas impossi‐<br />

ble dʹautoriser un petit voyage pour lui vers sa famille quand il serait promu aux ordres;<br />

ce lui sera, ainsi quʹaux siens, une si gran<strong>de</strong> joie <strong>de</strong> se revoir que je ne voudrais pas la leur<br />

refuser, dʹautant, Madame, que, pour rendre la chose moins lour<strong>de</strong> pour notre Commu‐<br />

nauté, vous offrez <strong>de</strong> concourir aux frais du voyage <strong>avec</strong> Mme dʹHais pour 50f. Je vous en<br />

remercie en notre nom et en celui <strong>de</strong> M. Gauffriau qui nʹest pas encore informé <strong>de</strong> ce nou‐<br />

veau témoignage <strong>de</strong> votre bonté pour lui.<br />

Notre frère Georges [<strong>de</strong> Lauriston] est près <strong>de</strong> nous en ce moment; il est fort touché<br />

<strong>de</strong> votre bon souvenir, il me prie <strong>de</strong> vous en exprimer sa reconnaissance.<br />

Veuillez agréer, Madame la Comtesse, lʹhommage du respect <strong>avec</strong> lequel je suis<br />

Votre humble et dévoué serviteur en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

946 à M. Risse<br />

Témoignage dʹaffection et dʹintérêt pour lʹŒuvre <strong>de</strong> Metz. Jugement sur le frère Guillot :ʺce nʹest pas un esprit<br />

vif, mais cʹest un homme <strong>de</strong> foi, <strong>de</strong> conscience, <strong>de</strong> dévouement.ʺ<br />

981


27 mai 1864<br />

Je ne veux point, mon bien bon ami, laisser partir la lettre du f. Georges [<strong>de</strong> Lauris‐<br />

ton] sans y joindre <strong>de</strong>ux mots dʹaffection et <strong>de</strong> bon souvenir, <strong>avec</strong> les nouvelles assurances<br />

<strong>de</strong> tout lʹintérêt <strong>avec</strong> lequel nous suivons les faits qui concernent vous et vos œuvres.<br />

Jʹai été un peu peiné que M. <strong>Jean</strong> [Gauffriau] nʹait pas senti que cʹétait à lui <strong>de</strong> mʹan‐<br />

noncer lʹheureux événement <strong>de</strong> son ordination et <strong>de</strong> sa première messe; il y avait là, ce me<br />

semble, un sentiment et un <strong>de</strong>voir. Jʹespère que les grâces <strong>de</strong> lʹordination lui auront appor‐<br />

té tout ce que son nouvel état <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ra dʹesprit <strong>de</strong> religion, <strong>de</strong> gravité, <strong>de</strong> zèle et dʹabné‐<br />

gation; Dieu est si bon et si généreux pour ceux qui se donnent à Lui!<br />

Je crois que vous serez <strong>de</strong> plus en plus content <strong>de</strong> M. Guillot à mesure que vous le<br />

pratiquerez davantage; il faut tenir compte <strong>de</strong>s difficultés <strong>de</strong> toute initiation à <strong>de</strong>s emplois,<br />

à <strong>de</strong>s situations, à <strong>de</strong>s relations nouvelles; ce nʹest pas dʹailleurs un esprit vif et qui saisisse<br />

les choses instantanément; mais, une fois entré dans un travail, dans une charge quel‐<br />

conque, il y apporte intelligence, application et invariable dévouement. Retenez donc un<br />

peu votre impatience, prenez‐le doucement, vous aurez sa confiance et assurément son<br />

bon vouloir et sa docilité; cʹest un homme <strong>de</strong> foi, <strong>de</strong> conscience et <strong>de</strong> dévouement.<br />

Adieu, bien cher ami, embrassez nos frères et croyez vous‐même à tous mes senti‐<br />

ments tendrement dévoués en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

947 à M. Decaux<br />

Vœux <strong>de</strong> fête à lʹoccasion <strong>de</strong> la Saint‐Paul.<br />

Vaugirard, 6 juillet 1864<br />

Mon bien bon ami,<br />

Jʹétais ces jours‐ci absent et, à peine arrivé, jʹai eu à mʹoccuper <strong>de</strong> la première com‐<br />

munion <strong>de</strong> nos enfants qui a lieu <strong>de</strong>main; au milieu <strong>de</strong> ces embarras, jʹai négligé, au moins<br />

apparemment, la fête <strong>de</strong> St Paul. Et pourtant, en toute vérité, jʹy ai pensé <strong>de</strong>vant Dieu et à<br />

vous particulièrement, mon bon ami, qui portez si bien ce grand et beau nom; jʹai <strong>de</strong>man‐<br />

dé, je <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rai constamment que votre Saint Patron, qui a tant travaillé, tant souffert,<br />

tant aimé, vous obtienne une participation aux grâces et faveurs dont il a été comblé,<br />

comme vous avez part aux fatigues et aux labeurs quʹil a endurés pour le Seigneur. Je vous<br />

renouvelle, à cette occasion, tous mes sentiments <strong>de</strong> vieille et inaltérable affection en N.S.<br />

et en St Vincent.<br />

Votre dévoué Confrère et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Le jour <strong>de</strong> la fête <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul, nous irons à Chaville comme lʹan <strong>de</strong>r‐<br />

nier; je vous donne ici lʹordre <strong>de</strong> notre journée, espérant que vous nous donnerez au moins<br />

quelques heures, si tout le jour ne peut‐être <strong>de</strong>mandé.<br />

9h. Grand‐Messe<br />

Midi Dîner<br />

2h. Vêpres et Salut<br />

4h. Promena<strong>de</strong><br />

6h. 1/2 Retour ‐ petite réfection<br />

8h. 1/2 Départ pour Paris<br />

982


948 à M me la Comtesse <strong>de</strong> Grandville<br />

Réponse à une proposition dʹétablir ʺun pensionnat payantʺ. Quelles sont les Œuvres spécifiques <strong>de</strong> lʹInstitut.<br />

Place du frère laïc dans nos Œuvres. Réticence à pousser au sacerdoce ceux dont ʺles signes <strong>de</strong> vocation peuvent<br />

paraître douteuxʺ.<br />

Vaugirard, 26 juillet [1864] Ste Anne<br />

Madame,<br />

Je suis toujours heureux lorsquʹune occasion se présente <strong>de</strong> traiter quelque affaire<br />

<strong>avec</strong> vous, car on peut être assuré dʹavance quʹil sʹagit <strong>de</strong> la gloire <strong>de</strong> Dieu et du bien <strong>de</strong>s<br />

âmes; un regret, seulement, peut alors se mêler à la satisfaction, cʹest celui où je me trouve<br />

maintenant, en me trouvant dans lʹimpossibilité <strong>de</strong> concourir à la bonne œuvre dont vous<br />

voulez bien mʹentretenir.<br />

Notre Communauté nʹa pas fait jusquʹici, et ne se propose pas <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s pension‐<br />

nats payants; nous nous occupons uniquement <strong>de</strong>s classes ouvrières ou pauvres; nous<br />

avons <strong>de</strong>s orphelinats où quelque sorte <strong>de</strong> pension est payée par les protecteurs ou les ap‐<br />

puis naturels <strong>de</strong>s enfants, mais cette pension est tellement inférieure aux dépenses occa‐<br />

sionnées par ces enfants quʹune moitié environ <strong>de</strong>s charges nous est laissée. La localité où<br />

<strong>de</strong>s frères seraient désirés <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rait en outre quʹils y fissent <strong>de</strong>s écoles; nous nous<br />

sommes bornés jusquʹici, quant aux œuvres du <strong>de</strong>hors, aux patronages <strong>de</strong>s apprentis et<br />

<strong>de</strong>s jeunes ouvriers ou aux associations <strong>de</strong>s familles ouvrières, dites Saintes‐Familles.<br />

Nous ne saurions donc subvenir aux besoins en question, lors même que nous aurions <strong>de</strong>s<br />

sujets disponibles, ce qui est plus que douteux.<br />

Autour <strong>de</strong> nous, nous ne voyons que les Frères <strong>de</strong>s Ecoles chrétiennes qui pussent<br />

convenir pour cette bonne œuvre, mais je ne crois pas quʹon puisse les déci<strong>de</strong>r à accepter<br />

la position qui leur serait faite dans la paroisse que vous nous avez désignée. Je chercherai<br />

toutefois, <strong>de</strong> côtés divers, sʹil existe quelques autres moyens et, si je puis les découvrir, je<br />

me hâterai, Madame, <strong>de</strong> vous en informer.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> vos bonnes intentions pour le jeune homme du diocèse <strong>de</strong> Ren‐<br />

nes; nous pourrions le recevoir assurément, dʹaprès vos bonnes recommandations, mais<br />

tout nous laisse penser quʹen ce cas il <strong>de</strong>vrait être seulement frère laïc; nos œuvres laissent<br />

une place large et bonne au zèle <strong>de</strong> ceux qui restent en cette condition; nous verrions, sauf<br />

très rares exceptions, <strong>de</strong>s chances peu favorables, et pour la Communauté, et pour les su‐<br />

jets eux‐mêmes, à les pousser au sacerdoce quand les signes <strong>de</strong> vocation peuvent paraître<br />

douteux.<br />

M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] est heureux du bon souvenir que vous lui accor<strong>de</strong>z, Ma‐<br />

dame, heureux aussi dʹapprendre le bon retour et la parfaite santé <strong>de</strong> Mme <strong>de</strong> Lauriston. Je<br />

vous prie, Madame, <strong>de</strong> lui faire agréer et <strong>de</strong> recevoir vous‐même lʹhommage du respect<br />

<strong>avec</strong> lequel je suis<br />

Votre humble et respectueux serviteur en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

949 à M. Levassor<br />

MM. dʹArbois, <strong>de</strong> Varax et Chaverot vont en pèlerinage à Chartres. Avec humilité et confiance, MLP. décrit la<br />

voie choisie par Dieu pour sa famille religieuse.<br />

983


Vaugirard, 28 juillet 1864<br />

Mon bien bon ami,<br />

Trois <strong>de</strong>s jeunes ecclésiastiques <strong>de</strong> notre petite Congrégation, lʹun prêtre, <strong>de</strong>ux sé‐<br />

minaristes, allant dans votre ville pour y faire le pèlerinage à N.D. <strong>de</strong> Chartres, je ne veux<br />

pas les laisser partir sans leur remettre un mot pour vous, afin quʹils me rapportent <strong>de</strong> vos<br />

nouvelles et vous donnent aussi <strong>de</strong>s nôtres.<br />

Jʹespère que tout va pour vous selon vos vœux, cʹest‐à‐dire pour la plus gran<strong>de</strong><br />

gloire <strong>de</strong> Dieu; lʹexcellente paroisse que vous dirigez vous donne, jʹen ai la confiance,<br />

beaucoup <strong>de</strong> travail et <strong>de</strong> douces consolations.<br />

Notre voie à nous, étant moins nettement tracée que la vôtre et nous mettant habi‐<br />

tuellement en exploration, offre moins <strong>de</strong> placidité sans doute; néanmoins nous marchons<br />

assez paisibles, en tâchant dʹavoir toujours les yeux du côté dʹoù vient la lumière et <strong>de</strong> ne<br />

rien faire sans recourir à Dieu. Ce bon Maître daigne nous continuer son appui et graduel‐<br />

lement notre petite famille sʹassied dans <strong>de</strong>s conditions qui semblent préparer un bon ave‐<br />

nir. Priez pour nous, mon bon ami, vous qui nous avez <strong>de</strong>vancés dans la voie du dévoue‐<br />

ment et <strong>de</strong> lʹentière consécration à Dieu. Nous vous payerons <strong>de</strong> retour selon nos faibles<br />

mérites et, pour ma part surtout, je resterai constamment fidèle à la chrétienne affection et<br />

au bon souvenir que je vous gar<strong>de</strong> <strong>de</strong>vant Dieu.<br />

Je <strong>de</strong>meure, mon bon ami, dans les Cœurs Sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.,<br />

Votre dévoué confrère et vieil ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

950 à M. Caille<br />

Projet dʹune visite à Amiens.<br />

Vaugirard, 28 juillet 1864<br />

Mon bien bon ami,<br />

Je ne laisserai point, je lʹespère, passer la saison sans vous aller voir et sans visiter<br />

vos œuvres auxquelles je porte un si cordial intérêt; mais cette petite excursion ne peut se<br />

faire en ce moment où lʹabsence dʹun <strong>de</strong> nos ff. ecclésiastiques rend mon remplacement<br />

presque impossible; dʹun autre côté, jʹaime mieux que les très gran<strong>de</strong>s chaleurs soient pas‐<br />

sées, puisque je puis le faire sans détriment aucun pour la fin que je me propose en vous<br />

visitant, laquelle est <strong>de</strong> vous voir ainsi que nos frères et <strong>de</strong> voir <strong>de</strong> près la suite heureuse<br />

<strong>de</strong> vos travaux. Vers la fin dʹaoût, M. Braun étant revenu, je pourrai plus aisément mʹab‐<br />

senter et jʹen profiterai pour mʹéchapper quelques instants afin <strong>de</strong> me rendre près <strong>de</strong> vous.<br />

Je suis touché <strong>de</strong> vos instances affectueuses, jʹy vois une nouvelle marque <strong>de</strong> cette<br />

fidèle affection que vous avez vouée à la famille et que nous vous rendons bien cordiale‐<br />

ment. Embrassez pour moi, je vous prie, nos frères et recevez vous‐même le tendre em‐<br />

brassement <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

951 à M. Levassor<br />

Remerciement pour lʹaccueil réservé à ses trois frères pèlerins. Union <strong>de</strong>s âmes.<br />

Vaugirard, 2 août 1864<br />

Mon bien bon ami,<br />

Je suis si accoutumé à votre bienveillance et aux témoignages <strong>de</strong> votre vieille amitié<br />

que je nʹaurais pas cru nécessaire peut‐être <strong>de</strong> vous remercier du cordial accueil que vous<br />

984


avez bien voulu faire à mes trois jeunes pèlerins, mais ils en ont été eux‐mêmes si touchés,<br />

ils sont si reconnaissants <strong>de</strong> vos aimables attentions pour eux quʹils me pressent <strong>de</strong> leur<br />

servir dʹinterprète et <strong>de</strong> vous dire quʹaprès les tendres faveurs que la T. S te Vierge a daigné<br />

accor<strong>de</strong>r à chacun dʹeux, rien nʹa tant contribué au charme et à lʹagrément <strong>de</strong> leur excur‐<br />

sion que la douce impression qui leur reste <strong>de</strong> vos rapports <strong>avec</strong> eux. Je ne mʹen étonne<br />

point, mon bon ami; nous avions, en Dieu, si bien uni nos âmes et si bien mis nos œuvres<br />

en commun que nous regardions réciproquement comme nôtre ce que chacun <strong>de</strong> nous fait<br />

pour la gloire du Seigneur. Ces enfants vous ont semblé être <strong>de</strong> votre famille, et vous les<br />

avez reçus comme un père reçoit ses enfants. Ils espèrent bien quʹils pourront vous revoir<br />

et quʹà vos apparitions à Paris vous leur donnerez lʹoccasion <strong>de</strong> sʹédifier encore quelque‐<br />

fois <strong>avec</strong> vous. Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> vous dire que ce sera aussi une joie pour moi qui <strong>de</strong>‐<br />

meure et <strong>de</strong>meurerai jusquʹà la fin<br />

Votre vieil et tout affectionné ami et confrère en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

952 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

M. <strong>de</strong> Varax est en vacances en famille, avant <strong>de</strong> faire sa théologie à St‐Sulpice. MLP. lui donne quelques<br />

conseils concernant la prière et la discipline personnelle. Place du sentiment dans sa vie <strong>de</strong> père <strong>de</strong> la famille.<br />

MLP. va sʹabsenter à Duclair chez sa sœur. Il a reçu une lettre <strong>de</strong> M. Chaverot: ʺle style, cʹest lʹhomme.ʺ<br />

Vaugirard, 23 août 1864<br />

Bien cher fils en N.S.,<br />

Je nʹai pas besoin dʹun secrétaire pour vous écrire; je nʹen mettrai pas bien long, sans<br />

doute, à cause <strong>de</strong>s dérangements trop fréquents qui mʹadviennent, mais je vous donnerai<br />

au moins <strong>de</strong> nos nouvelles, si tant est que, rien <strong>de</strong> nouveau nʹétant à dire, on puisse em‐<br />

ployer ce mot.<br />

Tous et tout vont comme à votre départ, sans nul changement, si ce nʹest le vi<strong>de</strong> que<br />

fait votre absence, vi<strong>de</strong> senti par le cœur surtout; ceux <strong>de</strong> Chaville me disaient à mon arri‐<br />

vée: Nous lʹavons quitté la larme à lʹœil. A Vaugirard, on avait aussi <strong>de</strong>s expressions <strong>de</strong><br />

regret: Ce nʹest que pour quelques semaines, disaient‐ils, oui, mais après vient le Sémi‐<br />

naire, cʹest pourquoi cette absence pèse plus quʹil nʹest ordinaire, la petite en cachant une<br />

gran<strong>de</strong>. Que le saint nom <strong>de</strong> Dieu soit béni! Pour moi, cher enfant, si vous voulez que jʹex‐<br />

prime aussi mon sentiment, jʹavouerai que le sacrifice mʹest pénible à bien <strong>de</strong>s égards,<br />

parce que je me suis fait une douce habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> vous avoir, parce que vous aviez pris vo‐<br />

tre place à Chaville et que cette petite maison, à peine assise dans un commencement <strong>de</strong><br />

constitution, aurait besoin <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r quelques éléments pour cimenter ses fon<strong>de</strong>ments,<br />

parce quʹenfin le Séminaire est bien long et quʹen y voyant entrer mes plus chers enfants, je<br />

me <strong>de</strong>man<strong>de</strong> si je serai là encore quand ils en sortiront; tout cela, bien entendu, <strong>de</strong>meure à<br />

lʹétat <strong>de</strong> sentiment et nʹest pris par la volonté quʹen mesure réglée; mais le sentiment tient<br />

sa place dans notre vie, il crie tout en se soumettant; heureusement, la pensée <strong>de</strong> Dieu do‐<br />

mine tout, et là se retrouvent la paix et lʹacquiescement.<br />

Je suis tout heureux <strong>de</strong>s bonnes et affectueuses dispositions <strong>de</strong> tous vos vénérés pa‐<br />

rents; ce mʹest une joie <strong>de</strong> vous voir aimé, parce que je sais que vous rapporterez au Sei‐<br />

gneur ces consolations et les sanctifierez en Lui; je suis tranquille sur les effets quʹauront<br />

pour vous joies <strong>de</strong> famille, distractions <strong>de</strong>s voyages et impressions <strong>de</strong>s mouvements mul‐<br />

985


tipliés, parce que vous gar<strong>de</strong>rez la présence <strong>de</strong> Dieu, que vous serez fidèle à la prière et<br />

que vous aurez encore un peu <strong>de</strong> règle à travers tout, et quʹainsi le soutien ne vous man‐<br />

quera pas.<br />

Je vous exhorte à faire tout ce que vous pourrez pour avoir une vraie saison <strong>de</strong><br />

bains, et à ne pas oublier que cʹest la fin principale <strong>de</strong> votre voyage.<br />

Je vais faire moi‐même une pérégrination <strong>de</strong> quelques jours; une affaire importante<br />

pour les intérêts <strong>de</strong> ma sœur mʹoblige, comme je lʹavais prévu, à me rendre près dʹelle<br />

pour une <strong>de</strong>mi‐semaine ou un peu plus; au retour, nous aurons ici lʹadoration, après la‐<br />

quelle jʹirai, sans doute, à Amiens.<br />

Jʹai reçu une bonne et toute cordiale et naïve lettre <strong>de</strong> notre cher ami Chaverot, <strong>avec</strong><br />

une petite épître aussi pour vous; il est bien vrai <strong>de</strong> dire que le style cʹest lʹhomme; <strong>avec</strong> un<br />

peu dʹétu<strong>de</strong>, un œil exercé pénètre bien, dans une correspondance, le fond intime <strong>de</strong> celui<br />

qui lʹa écrite.<br />

Eh bien! cher enfant, faites cette étu<strong>de</strong> sur ma propre lettre; si vous nʹy trouvez pas<br />

une tendre et paternelle affection pour vous, une bonne espérance pour votre avenir, une<br />

confiance ferme dans votre parfait attachement pour la petite famille à laquelle Dieu vous<br />

a associé, je dis que vous ne savez pas presser les mots pour en faire sortir le suc; ou plu‐<br />

tôt, cher enfant, je ne dis pas cela, puisque cette science vous lʹavez; trop quelquefois, votre<br />

pénétration vous <strong>de</strong>venant elle‐même un obstacle comme la lumière excessive qui empê‐<br />

che <strong>de</strong> voir.<br />

Adieu, bien cher enfant, je continue, sans y jamais manquer, mon Ave Maria du soir<br />

à votre intention; jʹen mettrai un autre à quelque instant du jour pour votre voyage, jʹaurai<br />

ainsi pourvu à vos jours comme à vos nuits. Tous vous disent leurs cordiales affections; je<br />

vous embrasse pour eux et pour moi du meilleur <strong>de</strong> mon cœur.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹoffre mes respects à ceux <strong>de</strong> vos vénérés parents qui ne les dédaigneraient pas; je<br />

les assure au moins <strong>de</strong> mes prières quʹils sont trop chrétiens pour refuser.<br />

953 à M. Caille<br />

Une affaire urgente appelle MLP. à Duclair. Il se voit contraint dʹajourner la visite prévue à ses frères dʹAmiens.<br />

Vaugirard, 25 août 1864<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je ne serai point à Paris dimanche prochain; une affaire qui intéresse gravement ma<br />

sœur mʹoblige à me rendre samedi près dʹelle et à y passer plusieurs jours sans doute. Je<br />

reviendrai au commencement <strong>de</strong> septembre pour notre adoration <strong>de</strong> Vaugirard qui a lieu<br />

du 5 au 8 inclusivement. Après cela, je ne vois rien qui doive mʹempêcher <strong>de</strong> vous rendre,<br />

ainsi quʹà nos frères, une petite visite. Jʹaime mieux prendre pour cette rencontre un mo‐<br />

ment où vous êtes libres; les solennités sont bien intéressantes, mais elles entraînent <strong>de</strong>s<br />

dérangements qui ne laissent guère <strong>de</strong> tranquillité pour se voir et pour sʹentretenir en paix.<br />

Assurez nos frères que ce sera pour moi une bien douce joie <strong>de</strong> les revoir et croyez<br />

<strong>avec</strong> eux à tous mes sentiments <strong>de</strong> tendre et paternelle affection en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

986


P. S. Je reçois la petite lettre <strong>de</strong> M. André [Brouant]; M. Antoine [Emes] sʹoccupera<br />

<strong>de</strong> ses <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s ainsi que M. Faÿ.<br />

954 à M. Chaverot<br />

Le jeune séminariste est en vacances dans sa famille. Exhortation à parler sans trop dʹinsistance pour le moment<br />

<strong>de</strong> sa vocation religieuse. Exemple <strong>de</strong>s cousins <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax, qui ont laissé ʺune gran<strong>de</strong> fortune, un beau nomʺ<br />

pour suivre le Christ. Compter surtout sur les moyens spirituels et la dévotion au Cœur <strong>de</strong> Marie, ʺsanctuaire et<br />

autelʺ dʹoù sʹélèvera notre prière et se consommeront nos sacrificesʺ.<br />

Vaugirard, 26 août 1864<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Vous avez bien tardé à mʹécrire, jʹen avais un peu dʹinquiétu<strong>de</strong>, craignant que vous<br />

nʹeussiez rencontré quelque contrariété inattendue; il nʹen est rien, Dieu soit béni, toute vo‐<br />

tre chère famille va bien et vous‐même êtes dans <strong>de</strong> parfaites conditions. Je prends intérêt<br />

à tout ce que vous dites concernant votre maison; je suis heureux, en particulier, du bien<br />

que vous pensez <strong>de</strong> votre belle‐sœur; cʹest un si précieux avantage pour le sort et temporel<br />

et spirituel dʹun homme quʹune compagne vraiment animée <strong>de</strong> lʹesprit chrétien; cʹest un<br />

véritable don <strong>de</strong> Dieu et pour lui et pour sa famille; cʹest la bénédiction <strong>de</strong> sa maison.<br />

Tous ici vous gar<strong>de</strong>nt le plus affectueux et le plus fidèle souvenir; je ne manque pas,<br />

pour ma part, à la petite prière que je fais chaque soir à St Joseph et à votre saint patron [St Michel] à votre intention. M. <strong>de</strong> Varax aussi gar<strong>de</strong> ses pieuses pratiques pour vous.<br />

Il a subi très heureusement son examen <strong>de</strong> philosophie et a été admis sans difficulté<br />

pour prendre place au Séminaire à la rentrée dʹoctobre. Il reste seulement peu vigoureux;<br />

<strong>de</strong>puis quelques jours, il est parti (prenant un petit détour par Chalon) afin <strong>de</strong> se rendre<br />

<strong>avec</strong> ses parents aux bains <strong>de</strong> mer du Havre. Jʹaurais préféré quʹil allât vers le midi, à la<br />

Méditerranée, car je sais, par expérience, que la mer est peu aimable dans la Manche, dès<br />

que la saison est un peu avancée; mais son père, fort languissant lui‐même, a désiré aller<br />

dans le Nord, ayant beaucoup souffert <strong>de</strong>rnièrement <strong>de</strong> la chaleur <strong>de</strong> lʹété dans les Pyré‐<br />

nées.<br />

Il paraît que M. Christian <strong>de</strong> Bretenières doit aller commencer son Séminaire à<br />

Rome; je crois que la chose est encore un peu secrète; vous ne lʹaurez pas, probablement, à<br />

St‐Sulpice.<br />

Je serais bien heureux, ainsi que nos frères, si vous pouviez, une fois à Mâcon, vous<br />

diriger vers Paris; le bon Dieu arrangera peut‐être les choses ainsi; Il sʹest bien heureuse‐<br />

ment mêlé jusquʹici <strong>de</strong> toutes vos affaires, continuez à vous abandonner à Lui. Je nʹai pas<br />

<strong>de</strong> conseils, cher enfant, à vous donner pour votre direction durant les vacances; vous avez<br />

votre manuel, les bons avis du r.p. Pinaud vous sont encore présents, et dʹailleurs N.D. <strong>de</strong><br />

la Salette et votre bon ange veillent sur vous; ce quʹils protègent est bien gardé. Peut‐être<br />

pourrez‐vous, dans la conversation, laisser tomber, sans affectation, le fait frappant <strong>de</strong>s<br />

vocations <strong>de</strong> MM. <strong>de</strong> Bretenières; ils laissent, en la dédaignant, une gran<strong>de</strong> fortune, un<br />

beau nom, tous les avantages les plus enviés du mon<strong>de</strong>; lʹun [Just] pour se faire mission‐<br />

naire, lʹautre [Christian] sans doute aussi pour quelque condition <strong>de</strong> renoncement absolu.<br />

Il nʹest guère besoin <strong>de</strong> commentaire, vous nʹen aurez pas dʹautre à y faire, sinon: Dieu ap‐<br />

pelle les siens où Il les veut. Cʹest assez, les insinuations générales suffiront cette année;<br />

vous voyez par vous‐même combien vos bons parents sʹalarmeraient facilement. Mais, in‐<br />

987


dépendamment <strong>de</strong> ces moyens bien secondaires et bien insuffisants, employons surtout les<br />

moyens spirituels, les puissances <strong>de</strong> la foi, la prière, la confiance en la T. S te Vierge qui déjà<br />

est intervenue si aimablement dans vos affaires; confions‐lui lʹachèvement <strong>de</strong> lʹœuvre<br />

quʹelle a commencée, elle y mettra sa <strong>de</strong>rnière main et, sans froissement, par <strong>de</strong>s voies<br />

pleines <strong>de</strong> suavité, elle vous mènera à votre fin. Cʹest dimanche la fête du S t Immaculé<br />

Cœur <strong>de</strong> Marie; réfugions‐nous dans cet asile; doux Cœur <strong>de</strong> Marie, soyez notre refuge; al‐<br />

lons y apprendre toute science chrétienne et toutes les vertus; que là aussi soit notre sanc‐<br />

tuaire, notre autel dʹoù sʹélèvera notre prière et où se consommeront nos sacrifices; école,<br />

refuge, sanctuaire, oui, que le Cœur <strong>de</strong> Marie soit tout cela pour nous; ainsi, nous aurions<br />

lumière, force et consolation.<br />

Adieu, bien cher enfant, je pars <strong>de</strong>main pour un petit voyage <strong>de</strong> 4 ou 5 jours. Je re‐<br />

viendrai pour le 2 ou 3 septembre. Si dʹici là, vous aviez à mʹécrire, je serai chez M me Salva,<br />

ma sœur, à Duclair (Seine Inférieure). Je vous embrasse tendrement en J. et M..<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Déchirez ou brûlez mes lettres.<br />

955 à M. Girard361 La question épineuse <strong>de</strong>s attributions respectives <strong>de</strong>s Frères et <strong>de</strong>s Confrères <strong>de</strong> la SSVP. Déclaration très nette<br />

<strong>de</strong> MLP. sur la ʺvraie constitution <strong>de</strong> lʹŒuvre sagement et chrétiennement équilibrée.ʺ<br />

Vaugirard, 8 septembre [1864]<br />

Nativité<br />

Mon bien cher Confrère,<br />

Je regrette bien que vous soyez venu à Chaville inutilement pour me voir; jʹai été re‐<br />

tenu cette semaine à Vaugirard pour lʹadoration <strong>de</strong>s<br />

Quarante Heures qui avait lieu chez nous.<br />

Après avoir prié <strong>de</strong> notre mieux, suivant votre pieux<br />

conseil, et après avoir examiné <strong>de</strong>vant Dieu la question<br />

relative à la position respective <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> St Vincent<br />

<strong>de</strong> Paul et <strong>de</strong>s directeurs donnés par nous pour les<br />

patronages, nous avons acquis la conviction quʹon ne sau‐<br />

rait, sans provoquer <strong>de</strong>s conflits incessants, retirer aux<br />

directeurs la conduite et direction <strong>de</strong>s mouvements<br />

quotidiens et <strong>de</strong>s dispositions <strong>de</strong> détail <strong>de</strong> lʹœuvre, tels que<br />

lʹassemblée, chaque semaine, <strong>de</strong>s Confrères qui concourent<br />

<strong>avec</strong> lui aux divers services. La haute influence <strong>de</strong> la<br />

Société <strong>de</strong> St ‐Vincent <strong>de</strong> Paul est suffisamment garantie au<br />

moyen du Conseil Général <strong>de</strong>s patronages présidé par M.<br />

Decaux, et par le Conseil particulier quʹil prési<strong>de</strong> aussi<br />

mensuellement pour chaque maison. Dans ces réunions, la<br />

marche dʹensemble <strong>de</strong> lʹœuvre et la conduite propre à<br />

361 René Girard (1837-1868). Confrère <strong>de</strong> St-Vt-<strong>de</strong>-Paul, il se dévoue à Nazareth puis à Ste-Anne. Il entre au Noviciat en novembre<br />

1867. Quatre mois plus tard, il part à Rome ouvrir le Cercle Saint-Michel. Mais les fatigues <strong>de</strong> l’apostolat sous un climat qui ne lui<br />

convient guère l’épuisent. Rapatrié à Chaville, il meurt <strong>de</strong>ux mois après, le 24 août 1868.<br />

988


chaque maison sont bien précisément réglées, il ne reste plus dès lors quʹà procé<strong>de</strong>r à<br />

lʹexécution qui concerne plus particulièrement le directeur et quʹil lui appartient consé‐<br />

quemment <strong>de</strong> conduire; si lʹon venait à créer un nouveau pouvoir qui dût sʹimmiscer dans<br />

ces soins et prétendît y dominer le directeur lui‐même, il ne resterait rien à faire à ce <strong>de</strong>r‐<br />

nier, sinon dʹabandonner une position qui ne lui laisserait plus aucune liberté dʹaction.<br />

Quʹil doive lui‐même être attentif et conciliant, quʹil doive tout faire pour attirer les<br />

Confrères, les intéresser à lʹœuvre en leur donnant toute latitu<strong>de</strong> possible pour y faire<br />

quelque bien, nous en sommes bien pénétrés <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts; mais il ne saurait être dʹune<br />

véritable utilité à lʹœuvre et à ceux qui y concourent quʹà la condition dʹavoir sa part <strong>de</strong> li‐<br />

berté et dʹinitiative, dont il a besoin pour être respecté <strong>de</strong>s enfants ou jeunes ouvriers et<br />

gar<strong>de</strong>r sur eux quelque autorité.<br />

Nous croyons toutefois quʹil faut à chaque maison un Prési<strong>de</strong>nt particulier, mais un<br />

Prési<strong>de</strong>nt qui la protège, lui concilie les appuis et les secours et veille <strong>avec</strong> sollicitu<strong>de</strong> à<br />

tous ses intérêts, Prési<strong>de</strong>nt qui existe à N.D. <strong>de</strong> Grâce dans la personne <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> La Roche‐<br />

foucauld, à S t ‐Charles dans la personne <strong>de</strong> M. Legentil, à S te ‐Anne dans la personne <strong>de</strong> M.<br />

Decaux, et qui avait existé en lui encore pour Nazareth jusquʹà ces <strong>de</strong>rniers temps où dʹau‐<br />

tres préoccupations lʹen ont un peu éloigné.<br />

Voilà, pensons‐nous, la vraie constitution <strong>de</strong> lʹœuvre sagement et chrétiennement<br />

équilibrée; en voulant changer cet ordre, on briserait la bonne harmonie <strong>de</strong>s mouvements<br />

et inévitablement aussi on préparerait la séparation <strong>de</strong>s éléments qui y concourent.<br />

Je suis bien persuadé, mon cher Confrère, quʹen y réfléchissant bien vous partagerez<br />

ce sentiment, et je serais bien étonné si M. Decaux lui‐même, qui comprend si bien lʹagen‐<br />

cement <strong>de</strong>s œuvres, ne reconnaissait pas quʹune situation bien assise peut seule garantir le<br />

succès et la durée <strong>de</strong> nos entreprises charitables.<br />

Je vous remercie tout <strong>de</strong> nouveau <strong>de</strong>s sentiments si dévoués et si désintéressés dont<br />

vous faites preuve en cette circonstance et vous prie <strong>de</strong> me croire, en N.S.,<br />

Votre dévoué Confrère et ami Le <strong>Prevost</strong><br />

956 à M me et M lle Salva<br />

Heureux dénouement <strong>de</strong> lʹaffaire <strong>de</strong> famille qui avait motivé sa visite à Duclair.<br />

Vaugirard, 9 septembre 1864<br />

Bien chères amies,<br />

Je bénis Dieu <strong>de</strong> lʹheureuse conclusion <strong>de</strong> votre affaire; comme lʹavis <strong>de</strong> cet arran‐<br />

gement tardait quelque peu à mʹarriver, je commençais à avoir quelques doutes et redou‐<br />

tais quelques difficultés, mais tout sʹest arrangé pour le mieux; on peut espérer que telle<br />

était la volonté <strong>de</strong> Dieu, puisque vous aviez prié et que vous ne cherchiez, en définitive,<br />

que ce qui vous paraissait être tracé et indiqué par <strong>de</strong>s dispositions provi<strong>de</strong>ntielles. De‐<br />

man<strong>de</strong>z à M. le Curé sʹil pense que la signature <strong>de</strong> Madame la Supérieure seule suffit pour<br />

engager <strong>avec</strong> elle sa communauté; je le crois, mais je nʹen suis pas certain; comme elle est<br />

déjà un peu avancée en âge, il pourrait arriver, si elle nʹa pas pouvoir au nom <strong>de</strong> toutes ses<br />

sœurs, que <strong>de</strong>s difficultés se présentassent, si plus tard celles qui lui succè<strong>de</strong>ront<br />

nʹagréaient point le marché; M. Bicheray, en cas <strong>de</strong> besoin, pourrait vous éclairer à ce sujet.<br />

Il sera bien aussi <strong>de</strong> le consulter au plus tôt sur le petit projet concernant les intérêts<br />

à régler entre Maria et son frère; puisque vous y avez la main, il faut mettre en ordre tou‐<br />

tes vos petites affaires.<br />

989


M me His vous prie <strong>de</strong> faire un paquet <strong>de</strong> son lit <strong>de</strong> plume, <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux oreillers, courte‐<br />

pointe, et <strong>de</strong> tout ce qui peut rester <strong>de</strong> linge, et dʹenvelopper le tout <strong>avec</strong> la toile <strong>de</strong> la pail‐<br />

lasse pour le mettre à la petite vitesse du chemin <strong>de</strong> fer. Pour le peu <strong>de</strong> meubles quʹelle a<br />

encore, elle vous prie <strong>de</strong> le vendre.<br />

Nous sommes arrivés, M. Emile [Beauvais] et moi, à bon port, sans nul encombre.<br />

M. Emile reste fort enchanté <strong>de</strong> son voyage, il vous remercie mille fois <strong>de</strong> votre bonne et<br />

cordiale réception; pour moi, chères amies, bien que je sois tout accoutumé à vos soins si<br />

affectueux, jʹy reste toujours également sensible et je vous en gar<strong>de</strong> une sincère reconnais‐<br />

sance.<br />

Offrez à M. le Curé, ainsi quʹà M lle Baudry, mes affectueux respects; on ne saurait<br />

porter plus loin quʹils ne le font la bonté, la bonne grâce et la délicatesse <strong>de</strong>s procédés. Je<br />

comprends bien le désir que vous avez <strong>de</strong> <strong>de</strong>meurer près dʹeux en restant à Duclair, afin<br />

<strong>de</strong> jouir <strong>de</strong> leur société si édifiante et si aimable, autant <strong>de</strong> temps quʹil plaira à Dieu <strong>de</strong><br />

vous la laisser.<br />

Adieu, bien chères amies, je prie Dieu <strong>de</strong> veiller toujours sur vous et <strong>de</strong> vous accor‐<br />

<strong>de</strong>r toutes les grâces spirituelles et temporelles que vous pouvez souhaiter.<br />

Votre ami et frère et oncle affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Bon souvenir à M lle Louise, sans oublier la bonne Virginie.<br />

957 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Périple <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax dans la région <strong>de</strong> Duclair. Un séminariste <strong>de</strong> Limoges sʹintéresse à la Communauté. Pe‐<br />

tite chronique <strong>de</strong> Vaugirard, Chaville, etc.<br />

Vaugirard, 9 septembre 1864<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Jʹai laissé à Chaville votre petite lettre <strong>de</strong>rnière, écrite après votre excursion du côté<br />

<strong>de</strong> Duclair; je vous fais donc ces <strong>de</strong>ux mots sans prétention précise <strong>de</strong> répondre à votre<br />

missive. Je me souviens que vous étiez content <strong>de</strong> cette petite course, je mʹen suis réjoui;<br />

jʹétais heureux, <strong>de</strong> mon côté, <strong>de</strong> vous voir et touché <strong>de</strong> lʹaimable empressement que vous<br />

aviez eu <strong>de</strong> nous faire une petite visite: Ecce quam bonum! Avez‐vous été revoir Jumièges<br />

<strong>avec</strong> vos bons parents, et, <strong>de</strong> là, S t ‐Georges [<strong>de</strong> Boscherville] et aussi S t ‐Wandrille et lʹéglise<br />

<strong>de</strong> Cau<strong>de</strong>bec?<br />

Nous sommes revenus, M. Emile [Beauvais] et moi, le samedi comme nous en<br />

étions convenus; jʹai pu terminer les petites affaires concernant ma sœur et la voir libre dé‐<br />

sormais <strong>de</strong> prendre plus <strong>de</strong> repos; le poids dʹune maison, quelle quʹelle soit, pèse lourd<br />

quand en est vieux et fatigué. Je ne suis retourné à Chaville que le dimanche dans la mati‐<br />

née; lʹabbé <strong>Jean</strong> [Gauffriau] était encore là et nʹest reparti pour Metz que mardi. En reve‐<br />

nant lundi pour lʹadoration, jʹai trouvé à Vaugirard un bon jeune homme [Ferdinand Bon‐<br />

naud], Séminariste, portant lʹhabit ecclésiastique, venant <strong>de</strong> Limoges et dont je vous avais<br />

parlé, il y a quelques semaines. Il a commencé ses étu<strong>de</strong>s tard. Après 3 ans <strong>de</strong> latin suivi,<br />

sans doute, en médiocres conditions, on a pensé quʹil <strong>de</strong>vait entrer au Séminaire, parce<br />

quʹil avait 23 ans passés; mais il sʹest trouvé faible en latinité et, courageusement, il a préfé‐<br />

ré refaire une année dʹétu<strong>de</strong>s latines en plus. Il était fort intime <strong>avec</strong> les Conférences <strong>de</strong> S t ‐<br />

Vincent <strong>de</strong> Paul et avait un goût marqué pour les œuvres; on lui a parlé <strong>de</strong> notre Commu‐<br />

nauté quʹil a agréée; il semble être très bon, il est peu grand, presque petit, il a la figure in‐<br />

990


telligente et avenante; lʹabbé Ten<strong>de</strong>au <strong>de</strong> Marsac qui nous lʹa adressé et qui est un prêtre<br />

<strong>de</strong>s plus dignes et <strong>de</strong>s plus distingués, mʹa répondu <strong>de</strong> lui comme cœur et comme intelli‐<br />

gence; il va faire <strong>avec</strong> Leclerc, Théodore [Pattinote] et Marie‐Joseph [Boiry], un an dʹétu<strong>de</strong>s<br />

à Chaville; nous verrons après ce que Dieu voudra.<br />

Le Père Alfred Leclerc, en 1884<br />

Notre adoration a été édifiante à Vaugirard; concours<br />

peu nombreux, à cause <strong>de</strong> la saison, la moins favorable <strong>de</strong><br />

toutes, mais quelques âmes pieuses toujours, jour et nuit aux<br />

pieds du Sauveur.<br />

Je reçois <strong>de</strong> bonnes nouvelles <strong>de</strong> M. Paillé à Boulogne,<br />

<strong>avec</strong> une bonne petite lettre <strong>de</strong> lʹami Paul [Baffait], bien remis<br />

corps et âme et heureux près et dans la mer, on ne saurait dire<br />

combien.<br />

Jʹespère que pour votre part, cher ami, vous vous<br />

trouvez bien aussi <strong>de</strong> vos bains; souvenez‐vous que ce nʹest<br />

pas sur lʹheure quʹon en sent les heureux effets, mais un peu<br />

plus tard; ayons donc bonne confiance, vous porterez St‐<br />

Sulpice très vaillamment.<br />

A ce propos, je compte toujours que vous resterez, pour ce qui touche les frais <strong>de</strong><br />

votre séjour là, dans les termes que nous avons dits; je crois que votre chère famille com‐<br />

prendra quʹil nʹen saurait convenablement en être autrement; si pourtant je jugeais mal ses<br />

dispositions, nous passerons outre et poserons les choses comme Dieu veut certainement<br />

quʹelles le soient.<br />

Je vous invite bien à écrire à notre cher f. Michel Chaverot; il a besoin dʹêtre stimulé<br />

pour la correspondance, il ne mʹa écrit quʹune fois.<br />

Les persévérants <strong>de</strong> Chaville ont étudié Les Plai<strong>de</strong>urs durant leurs vacances; ils doi‐<br />

vent, mercredi prochain 14, en donner une sorte <strong>de</strong> représentation, sans grand appareil,<br />

<strong>de</strong>vant les frères qui viendront en assez bon nombre <strong>de</strong>s diverses maisons pour passer ce<br />

jour à Chaville; vous nous manquerez à tous. Ce sera la <strong>de</strong>rnière trace <strong>de</strong>s vacances qui,<br />

dʹailleurs, finissent <strong>de</strong>main. lundi 12, messe du S t Esprit et reprise <strong>de</strong>s classes.<br />

Voilà une vraie Gazette, mais je sais comme vous aimez voir et savoir; pour clôture,<br />

jʹajoute que la musique a faibli; cʹétait inévitable; on a encore le strict indispensable par ce<br />

qui était acquis; lʹorgue est respecté, M. Audrin en gar<strong>de</strong> la clef et ne la donne quʹaux<br />

temps marqués.<br />

Adieu, bien cher enfant, il nʹy a guère <strong>de</strong> choses pieuses, ni non plus pas beaucoup<br />

<strong>de</strong> tendresses dans ces quelques lignes; mais y a au moins un cœur tout ouvert où vous<br />

voyez bien que vous pouvez entrer à toute heure; il y a aussi, en cherchant un peu, un<br />

vrai, un ar<strong>de</strong>nt désir <strong>de</strong> votre bien spirituel que je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> constamment au Seigneur et<br />

quʹIl accroîtra tous les jours, jʹen ai la douce espérance.<br />

Votre ami et Père tout affectionné en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

991


958 à M. Caille<br />

MLP. est en rapport <strong>avec</strong> un jeune homme dʹAmiens, candidat à la vie religieuse.<br />

Vaugirard, 13 septembre 1864<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Un bon jeune homme <strong>de</strong> votre pays, nommé Daboval, mʹa écrit la lettre ci‐jointe, me<br />

rappelant une entrevue quʹil aurait eue <strong>avec</strong> moi pour me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à entrer parmi nous;<br />

je nʹen ai quʹune idée très confuse et nul souvenir <strong>de</strong> lʹimpression bonne ou mauvaise que<br />

mʹavait produite cette rencontre. Je vous renvoie sa lettre, en lʹavertissant quʹil peut confé‐<br />

rer <strong>avec</strong> vous touchant sa <strong>de</strong>man<strong>de</strong>; il a déjà été chez les Frères <strong>de</strong>s Ecoles; nʹy a‐t‐il pas à<br />

craindre quelque inconstance? Vous pourrez examiner ce point. Si, en ensemble, ce jeune<br />

homme vous semblait digne <strong>de</strong> confiance, vous pourriez le prendre à lʹessai durant quel‐<br />

que temps pour le bien juger, ainsi que vous lʹavez fait sagement et utilement en dʹautres<br />

cas.<br />

Jʹespère vous faire une petite visite après la fête <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette qui a lieu le 19;<br />

ce me sera une vraie joie dʹembrasser vous et nos frères; assurez‐les <strong>de</strong> toute ma cordiale<br />

affection.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Jʹavertis M. Daboval que je passerai probablement la journée du mercredi 21 à<br />

notre maison dʹAmiens et quʹil pourrait mʹy rencontrer; si vous connaissiez déjà ce jeune<br />

homme et que vous jugiez quʹil ne nous convient pas, écrivez‐lui un mot pour lʹavertir<br />

quʹil ne pourrait me rencontrer le 21, que je le prie dʹajourner son voyage.<br />

959 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

MLP. donne <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> lʹInstitut. Il est heureux <strong>de</strong> constater les bonnes dispositions <strong>de</strong> la famille <strong>de</strong> Varax.<br />

Invitation à se remettre entre les mains <strong>de</strong> Dieu.<br />

Vaugirard, 16 septembre 1864<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

En même temps que vous partez pour les pérégrinations que vous mʹavez indi‐<br />

quées dans votre <strong>de</strong>rnière lettre et qui doivent, dʹétape en étape, vous ramener à Paris, je<br />

vous écris ces <strong>de</strong>ux mots dans la pensée que vous les <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rez à Amiens, poste res‐<br />

tante, comme vous en avez lʹintention.<br />

Dʹabord, notre maison dʹAmiens est auprès <strong>de</strong> la gare du chemin <strong>de</strong> fer, rue <strong>de</strong><br />

Noyon, n° 32.<br />

En second lieu, si vous recevez cette lettre assez tôt, je pourrai, comme à Duclair,<br />

vous voir un moment à Amiens, car je me suis engagé, <strong>de</strong>puis quelques jours déjà, <strong>avec</strong> M.<br />

Caille à lui rendre mardi une petite visite; jʹarriverai probablement à Amiens à 1h.30 ou<br />

par le train suivant à 3h. Je compte passer la journée <strong>de</strong> jeudi <strong>avec</strong> nos frères dʹAmiens et<br />

revenir le vendredi matin à Paris‐Vaugirard.<br />

Je nʹai reçu jusquʹici aucun avis du retour <strong>de</strong> notre f. Chaverot; je pense quʹil se dé‐<br />

mêle comme il peut <strong>de</strong>s obstacles et quʹil va nous donner bientôt signe <strong>de</strong> vie, ou par let‐<br />

tre, ou en arrivant lui‐même.<br />

992


Je me réjouis, cher enfant, en voyant comme vous prenez dans le bon sens la déci‐<br />

sion <strong>de</strong> vos parents relativement à votre séjour au Séminaire; soyez bien persuadé, mais<br />

vraiment convaincu que, <strong>de</strong> mon côté, je nʹen ai pas la plus petite contrariété; une seule<br />

chose eût pu me peiner, cʹeût été la pensée quʹil y avait en cette détermination quelque<br />

mauvais vouloir contre nous; or, je nʹen vois pas la moindre apparence; cʹest, pour eux,<br />

une vue, une façon quelconque <strong>de</strong> se présenter les choses, et voilà tout; sʹils sont mieux sa‐<br />

tisfaits ainsi, que leur volonté se fasse, nous nʹy contredirons point. Pour le point financier,<br />

nʹen ayez nul souci, quand bien même vos bons parents ne feraient pas, un peu plus tard,<br />

pour le Séminaire ce quʹils ont fait pour Chaville, où, en définitive, ils ont très parfaitement<br />

payé votre séjour, la Communauté est en mesure, grâces aux bontés du Seigneur, <strong>de</strong> pour‐<br />

voir à tout ce que <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ra le temps <strong>de</strong> vos étu<strong>de</strong>s; soyez bien en parfait repos, pas un<br />

regret, pas une préoccupation sur ce point, ce serait offense au Père Céleste qui pourvoit si<br />

miséricordieusement à tous nos besoins. Pour les quelques effets à votre usage, recevez<br />

tout ce quʹon vous donnera, mais sans insistance, afin <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r cette sainte liberté que<br />

Dieu donne à ses enfants, afin quʹils soient en sa seule dépendance. Voyez comme tout<br />

sʹarrange, au mieux quand on se remet entre ses mains; nʹa‐t‐Il pas bien conduit vos affai‐<br />

res <strong>de</strong>puis que vous vous êtes donné à Lui? Restons sous un si doux, un si sage, un si pa‐<br />

ternel régime: Omnia cooperantur in bonum diligentibus Deum. Quelle vérité, vraie, profon<strong>de</strong>,<br />

consolante!<br />

Nous avons eu à Chaville, mercredi <strong>de</strong>rnier, une charmante fête <strong>de</strong> famille, pour<br />

clôture (un peu après coup) <strong>de</strong>s vacances. Nos persévérants latinistes avaient, dans leurs<br />

loisirs, appris les Plai<strong>de</strong>urs; on a improvisé, nos artistes aidant, décors et costumes; puis, à<br />

11h. 1/2 tous les ff. <strong>de</strong> Grenelle, Vaugirard et Nazareth sont arrivés; dîner <strong>de</strong> famille, plus <strong>de</strong><br />

60 réunis (persévérants <strong>de</strong> Chaville compris); après, tour <strong>de</strong> jardin, puis Conseil <strong>de</strong>s Œu‐<br />

vres soutenu et intéressant; repos, et enfin à 5h. 1/2 , un peu <strong>de</strong> musique et représentation<br />

bien réussie, joyeuse, très passablement rendue; nous nʹavions pas dʹétrangers, sinon M. le<br />

Curé; au souper, on était 68. Journée <strong>avec</strong> temps superbe, soirée au clair <strong>de</strong> lune pour le re‐<br />

tour, rien nʹy a manqué, lʹépanouissement était général, tous les cœurs bénissaient Dieu;<br />

M. le Curé, voyant <strong>avec</strong> quelle naïveté les frères faisaient leurs adieux, a voulu sʹen mêler<br />

et nous a embrassés <strong>avec</strong> une cordialité qui venait évi<strong>de</strong>mment du meilleur <strong>de</strong> lui‐même;<br />

vous nous manquiez, mais, en lisant ces lignes, vous y serez rétrospectivement (quel long<br />

mot!) et vous y prendrez votre part tout affectueusement.<br />

Merci <strong>de</strong> votre bonne pensée au sujet du petit Chonard; il allait tout à fait bien en<br />

<strong>de</strong>rnier lieu; nos frères lʹont remmené <strong>avec</strong> eux à Vaugirard.<br />

Adieu, bien cher ami, tous vont assez bien, vous atten<strong>de</strong>nt impatiemment et vous<br />

reverront <strong>avec</strong> joie, celui qui écrit, plus que tous les autres. Je vous embrasse dans les<br />

Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

N. B. Lundi 19, nous avons à la Salette la solennité accoutumée; vous y aurez pensé.<br />

960 à M. Maignen<br />

A propos dʹun jeune aspirant, MLP. invite M. Maignen à étudier comment soutenir sa famille dénuée <strong>de</strong> res‐<br />

sources. Il lui confie une lettre pour M. Decaux.<br />

993


Vaugirard, 16 septembre 1864<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Je désire sincèrement aplanir la voie pour notre cher Derny et le mettre à même <strong>de</strong><br />

répondre à lʹappel <strong>de</strong> Dieu, en ôtant les inquiétu<strong>de</strong>s quʹil pourrait gar<strong>de</strong>r pour ce qui<br />

concerne lʹexistence <strong>de</strong> sa bonne mère. Pour cela, ce qui serait le plus praticable me sem‐<br />

blerait être <strong>de</strong> lui assurer, sur le produit du travail quʹil ferait dans notre atelier <strong>de</strong> bronze,<br />

la petite somme qui serait nécessaire pour suppléer à lʹinsuffisance du gain <strong>de</strong> son jeune<br />

frère. Ainsi, si ce <strong>de</strong>rnier gagne par jour 2f 50 ou 2f 75, nous ajouterions 1f 25 ou 1f 50 pour<br />

parfaire les 4f reconnus nécessaires, tant que ce jeune homme ne gagnerait pas lui‐même<br />

assez pour atteindre ce chiffre.<br />

Peut‐être nous <strong>de</strong>viendrait‐il possible <strong>de</strong> prendre ce jeune frère dans notre atelier<br />

quand nous aurions plus tard attiré à nous <strong>de</strong>s travaux qui lui conviennent, mais nous ne<br />

le pourrions immédiatement; la chose importe peu, ce me semble, puisque lʹessentiel serait<br />

assuré, savoir le produit <strong>de</strong> 4f par jour à apporter pour les besoins du ménage. Voilà, je<br />

crois, le meilleur et le plus sûr moyen <strong>de</strong> bien régler ce petit arrangement.<br />

Je joins ici une lettre que jʹai préparée pour M. Decaux; envoyez‐la par une personne<br />

qui ne semble pas trop ostensiblement <strong>de</strong> Nazareth, si vous la trouvez convenable et si<br />

vous croyez utile <strong>de</strong> lʹexpédier; sinon, gar<strong>de</strong>z‐la; M. Myionnet semble croire que mieux<br />

vaudrait lʹenvoyer, consultez le bon Dieu et faites ensuite selon votre inspiration.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

961 à M me et M lle Salva<br />

Conseils concernant lʹacquisition dʹun logement.<br />

Délicatesse et discrétion <strong>de</strong> MLP. Le Mascaret. Il gar<strong>de</strong><br />

affection à son ʺpetit pays <strong>de</strong> Cau<strong>de</strong>becʺ.<br />

Vaugirard, 17 septembre 1864<br />

Bien chères amies,<br />

Vous ne mʹavez pas informé du<br />

résultat <strong>de</strong> vos recherches pour votre loge‐<br />

ment; à quel parti vous êtes‐vous arrêtées?<br />

Je mʹintéresse, cela va sans dire à cet<br />

arrangement qui doit influer notablement<br />

sur votre manière dʹêtre et la commodité<br />

plus ou moins gran<strong>de</strong> <strong>de</strong> votre existence. Je<br />

crois quʹà 50f près, vous ne <strong>de</strong>vriez pas trop<br />

hésiter dans ce choix; quelque économie sur<br />

dʹautres points sera mieux placée que <strong>de</strong> ce<br />

côté, parce que, dans la condition où vous<br />

allez vous trouver, une petite <strong>de</strong>meure un<br />

peu commo<strong>de</strong> et bien placée est le principal<br />

agrément <strong>de</strong> la vie.<br />

M me His, se ravisant, désire vendre son lit <strong>de</strong> plume qui lʹembarrasserait ici. Pour ce<br />

qui concerne les meubles que vous voudriez pour vous‐mêmes, sʹils nʹétaient pas vendus<br />

994


en vente publique, mais à lʹamiable, je crois que vous feriez bien <strong>de</strong> vous renseigner près<br />

<strong>de</strong> quelquʹun dʹexpérimenté sur leur valeur; il mʹa paru que beaucoup <strong>de</strong> vos estimations<br />

étaient faites bien au hasard et sans connaissance suffisante <strong>de</strong> la valeur <strong>de</strong>s objets.<br />

M lle Marie a‐t‐elle trouvé, que vous sachiez, quelque position à son gré? M lle Louise<br />

est‐elle chez M. Saulnois et sʹy trouve‐t‐elle contente? La bonne Virginie aperçoit‐elle une<br />

place aussi qui lui convienne?<br />

Adieu, bien chères amies, je vois partout <strong>de</strong>s affiches qui annoncent le Mascaret 362 et<br />

les trains spéciaux pour aller, par Yvetot, à Cau<strong>de</strong>bec; ce petit pays re<strong>de</strong>viendra peut‐être<br />

un séjour à la mo<strong>de</strong>, il est si bien situé; je lui gar<strong>de</strong> toujours affection.<br />

Assurez <strong>de</strong> mon respectueux souvenir M. le Curé, M lles Baudry et Auger et la bonne<br />

famille Deshaies.<br />

Votre tout affectionné ami et oncle et frère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Ne négligez pas le petit acte pour vos arrangements <strong>de</strong> famille. Cela fait, vous<br />

serez plus tranquilles.<br />

962 à M. Chaverot<br />

Entrée prochaine au Séminaire <strong>de</strong> St‐Sulpice. Il doit écrire plus fréquemment.<br />

Vaugirard, 23 septembre 1864<br />

Mon bien cher enfant,<br />

Lʹexemple étant la meilleure prédication, je vous écris tout <strong>de</strong> suite <strong>de</strong>ux mots, afin<br />

<strong>de</strong> vous insinuer ainsi lʹhabitu<strong>de</strong> dʹécrire un peu plus souvent et un peu plus vite à vos<br />

vieux amis. Je suis heureux que votre santé se soutienne et jʹespère <strong>avec</strong> vous que les in‐<br />

dispositions <strong>de</strong> ceux qui vous sont chers auront bientôt leur terme.<br />

M. <strong>de</strong> Varax est arrivé <strong>de</strong> mardi au soir; il regrette bien que vous ne reveniez que<br />

lundi ou mardi, trouvant quʹil aura bien peu <strong>de</strong> temps à vous voir et pour préparer <strong>avec</strong><br />

vous votre entrée commune à St‐Sulpice; nous aurons, dès votre arrivée, à rendre ensem‐<br />

ble visite à. M. le Supérieur. Je ne lʹai pas revu <strong>de</strong>puis le jour où nous nous sommes trou‐<br />

vés ensemble à Issy. Faites tous vos efforts pour ne pas différer votre retour au <strong>de</strong>là <strong>de</strong><br />

mardi, si vous ne pouvez mieux faire.<br />

Nous avons eu une fête charmante à la chapelle <strong>de</strong> la Salette au 19 septembre. De‐<br />

puis 5h. 1/2 jusquʹà 11h. environ, il y a eu <strong>de</strong>s messes constamment suivies par une assem‐<br />

blée qui se renouvelait incessamment; à 9h.pieuse instruction, messe <strong>avec</strong> chants; à 3h.,<br />

lʹaprès‐midi, vêpres, instruction, procession, foule véritable. Le matin, M. Bonneau est ar‐<br />

rivé <strong>avec</strong> un troupeau <strong>de</strong> ses jeunes gens du patronage; il est resté là tout le jour; tout le<br />

mon<strong>de</strong> semblait heureux et édifié.<br />

Je finis ici pour ne pas retar<strong>de</strong>r ma lettre, incertain si déjà elle pourra vous arriver à<br />

temps.<br />

Mille tendres affections <strong>de</strong> tous, <strong>de</strong> celui qui écrit tout particulièrement.<br />

Totus in Xto tuus<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

362 Le mascaret, longue vague déferlante (la barre) produite dans certains estuaires par la rencontre du flux et reflux. Ce phénomène<br />

fluvial était particulièrement spectaculaire à Cau<strong>de</strong>bec-en-Caux.<br />

995


963 à M. Guillot<br />

Difficultés quʹil rencontre dans sa nouvelle obédience <strong>de</strong> Metz. Exhortation à la patience. ʺLa confiance et le res‐<br />

pect <strong>de</strong>s jeunes ne se gagnent que peu à peuʺ. Faire preuve <strong>de</strong> longanimité et dʹindulgence inspirées par la chari‐<br />

té chrétienne. Support fraternel.<br />

Vaugirard, 29 septembre 1864<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je ne mʹétonne point que, dans une position nouvelle, <strong>avec</strong> un personnel tout autre<br />

que celui que vous aviez conduit à Arras, vous éprouviez quelques difficultés; il faut, mon<br />

cher enfant, les mettre au pied <strong>de</strong> la croix et offrir cette petite pratique <strong>de</strong> patience au divin<br />

Seigneur. Soyez sûr quʹ<strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> temps, votre influence et votre autorité sur les jeu‐<br />

nes gens sʹaccroîtront et vous rendront la tâche plus facile; la confiance et le respect <strong>de</strong>s<br />

jeunes gens ne se gagnent que peu à peu et le poids <strong>de</strong> lʹautorité ne se manifeste que par<br />

un exercice prolongé. Je crois que vous vous trouverez bien dʹun peu <strong>de</strong> con<strong>de</strong>scendance<br />

toutes les fois quʹil nʹy aura pas impossibilité dʹen faire usage; vous avez gardé quelque<br />

chose <strong>de</strong> la précision <strong>de</strong> la discipline militaire; cʹest bien, cʹest un acquis précieux, mais,<br />

dans les œuvres chrétiennes, il faut tempérer cette fermeté louable par lʹindulgence et la<br />

longanimité que la charité chrétienne inspire. Tâchez donc, cher enfant, <strong>de</strong> concilier ces<br />

dispositions <strong>avec</strong> ce sentiment du <strong>de</strong>voir, ce désir cordial du bien que Dieu a mis en vous;<br />

cʹest dans cette juste mesure que vous trouverez votre paix et que vous rendrez, comme<br />

vous lʹavez fait jusquʹici, <strong>de</strong>s services essentiels dans les œuvres que Dieu nous a confiées.<br />

Ne per<strong>de</strong>z pas courage, recourez souvent, très souvent à la prière, implorez lʹassistance <strong>de</strong><br />

la Ste Vierge et <strong>de</strong> nos saints patrons, et soyez sûr quʹavant peu <strong>de</strong> temps vous éprouverez<br />

les effets <strong>de</strong> leur puissante intercession.<br />

Pour ce qui concerne M. Brice, je sais que son caractère est encore bien peu mortifié,<br />

que la docilité laisse à désirer chez lui et que ses paroles ne sont pas toujours mesurées;<br />

jʹespère quʹ<strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> patience, nous arriverons au moment où il verra mieux ses dé‐<br />

fauts et travaillera plus courageusement à les corriger. Je lui écris quelques mots pour lʹin‐<br />

viter à se montrer plus docile et plus réservé dans ses paroles. Assurez notre frère, M. <strong>Jean</strong><br />

[Gauffriau], <strong>de</strong> tous mes sentiments affectueux. M. Risse mʹa communiqué ses lettres; jʹai<br />

vu <strong>avec</strong> plaisir quʹil contribue <strong>de</strong> son mieux, pour sa part, au bien <strong>de</strong> vos œuvres.<br />

Je prie le Seigneur <strong>de</strong> bénir vous et vos enfants et toute notre chère maison <strong>de</strong> Metz.<br />

Croyez, bien cher enfant, à tous mes sentiments les plus affectueux en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Nous ne savons pas encore si notre retraite aura lieu lundi, le prédicateur nʹétant<br />

pas encore trouvé.<br />

964 à M. Maignen<br />

Précarité financière <strong>de</strong>s Œuvres. Promesses <strong>de</strong> dons et <strong>de</strong> prêts.<br />

Vaugirard, 14 octobre 1864<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Notre ami M. Guillemin, me fait espérer le don <strong>de</strong> 5.000f pour notre maison dʹor‐<br />

phelins dont il a su la gêne présente; mais il y mettait la condition quʹil ne vous prêterait<br />

996


pas les 4.000f quʹil vous avez promis; jʹai insisté et, comme il alléguait lʹaffectation particu‐<br />

lière <strong>de</strong> cette somme à une maison consacrée aux pauvres, jʹai dû me conformer à ses vues.<br />

Mais, quelle que soit notre gêne, je ne veux pas que lʹespoir donné par M. Guillemin pour<br />

un prêt aux jeunes ouvriers vous fasse défaut; jʹai répondu à M. Guillemin que nous vous<br />

prêterions 4.000f pour un temps à régler entre nous, lorsquʹil aurait versé les 5.000f entre<br />

nos mains. Il ne nous les remettra que successivement, <strong>de</strong> mois en mois. Je retiendrai seu‐<br />

lement les premiers 1.000f attendus par M. Emile [Beauvais] pour un payement qui échoit<br />

ces jours‐ci; les autres 4.000f vous seront remis à mesure que nous les recevrons. Voilà ce<br />

que jʹai pu faire <strong>de</strong> mieux, M. Guillemin nʹétant pas libre, mʹa‐t‐il dit, <strong>de</strong> sʹécarter <strong>de</strong>s inten‐<br />

tions <strong>de</strong>s personnes bienfaitrices.<br />

Adieu, bien cher ami, je vous embrasse cordialement.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

965 <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Lauriston à M. Caille<br />

P. S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Retraite <strong>de</strong> communauté à Chaville. Réunion du Conseil Extraordinaire. Rapport sur un jeune postulant<br />

dʹAmiens.<br />

Vaugirard, 14 octobre 1864<br />

Bien cher frère,<br />

Monsieur le Supérieur me charge <strong>de</strong> vous donner avis que la retraite <strong>de</strong> la Communauté<br />

commencera lundi prochain, 17 octobre; elle nous sera donnée par le r.p. Bazin.<br />

Les frères André Brouant, <strong>Léon</strong> Guichard auraient tous <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>s vœux à renouveler; mais<br />

M. le Supérieur laisse entièrement à votre disposition le choix <strong>de</strong>s frères que vous croirez <strong>de</strong>voir<br />

envoyer à cette retraite. M. le Supérieur avait eu quelque idée <strong>de</strong> vous proposer dʹy envoyer le<br />

nouveau postulant, M. Daboval, mais dans ce cas seulement où ses bonnes dispositions vous para‐<br />

îtraient manifestes.<br />

Le mardi ou mercredi (26 octobre) qui suivront la retraite, il y aura à Chaville, comme les<br />

années précé<strong>de</strong>ntes, une réunion du Conseil Extraordinaire <strong>de</strong> la Communauté, <strong>avec</strong> moins <strong>de</strong> du‐<br />

rée et moins <strong>de</strong> développement que les <strong>de</strong>ux autres. Il ne durera quʹun seul jour et se divisera en<br />

<strong>de</strong>ux séances. M. le Supérieur désire vivement que vous puissiez vous y trouver, faisant coïnci<strong>de</strong>r<br />

cette présence au milieu <strong>de</strong> nous <strong>avec</strong> le voyage <strong>de</strong> Paris que vous projetiez.<br />

Chargé par notre bon Supérieur <strong>de</strong> vous offrir à vous ainsi quʹà nos frères toutes les ten‐<br />

dresses <strong>de</strong> son cœur, je suis heureux <strong>de</strong> vous renouveler lʹexpression <strong>de</strong> mon affectueux dévoue‐<br />

ment.<br />

G. <strong>de</strong> Lauriston<br />

Vous jugerez, mon bon ami, sʹil y a lieu dʹenvoyer à la retraite le jeune Daboval; je<br />

vous serais obligé aussi <strong>de</strong> mʹécrire quelques mots pour me dire ce que vous pensez <strong>de</strong> lui:<br />

piété, capacité, raison, aptitu<strong>de</strong> à la vie commune et aux œuvres.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

966 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

M. Justin Faÿ nommé Maître <strong>de</strong>s Novices à Chaville ʺqui se trouve ainsi fondéʺ.<br />

997


17 octobre [1864]<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Voici les 2 Carrière et <strong>de</strong> la bougie.<br />

Vous avez très bien senti la position à prendre <strong>avec</strong> M. Marty363 , vous avez bien<br />

compris aussi le sens <strong>de</strong> sa visite; il a pris les mêmes précautions <strong>de</strong> divers côtés, pas tou‐<br />

jours aussi pru<strong>de</strong>mment quʹil lʹaurait fallu pour nous, mais la Communauté en a bien por‐<br />

té dʹautres. M. Faÿ le remplace à Chaville, qui se trouve ainsi fondé. Que le bon Dieu est<br />

bon <strong>de</strong> faire nos affaires que nous faisons mal nous‐mêmes!<br />

Priez bien pour notre retraite. Je vous embrasse tous les <strong>de</strong>ux [MM. <strong>de</strong> Varax et<br />

Chaverot] en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je prie bien pour le cher blessé.<br />

967 à M. Risse<br />

Bonnes nouvelles <strong>de</strong> la communauté et <strong>de</strong> lʹŒuvre <strong>de</strong> Metz. Joie dʹavoir reçu M. Risse à Vaugirard. Faire preuve<br />

<strong>de</strong> con<strong>de</strong>scendance envers ses jeunes frères que MLP. exhorte à la déférence. Un postulant, jugé trop âgé, ne sem‐<br />

ble pas <strong>de</strong>voir être accepté.<br />

Vaugirard, 11 novembre 1864<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Combien je regrette dʹavoir tant tardé à répondre à votre bonne et cordiale lettre; je<br />

lʹai tenue sous mes yeux pour quʹelle me pressât <strong>de</strong> vous écrire, mais je nʹai pu lui donner<br />

jusquʹici satisfaction.<br />

Je suis heureux <strong>de</strong> tous les détails que vous me transmettez sur la bonne disposition<br />

<strong>de</strong> vos jeunes gens, sur la bonne harmonie qui règne dans le sein <strong>de</strong> la petite Communau‐<br />

té, enfin sur la bienveillance générale dont votre œuvre est lʹobjet; ce sont là autant <strong>de</strong><br />

marques <strong>de</strong> la protection <strong>de</strong> Dieu, ne manquons pas <strong>de</strong> lʹen bénir et <strong>de</strong> rapporter tout à sa<br />

gloire.<br />

Le jeune His [Félix] part <strong>de</strong>main pour se rendre près <strong>de</strong> vous, je le charge <strong>de</strong> ce mot.<br />

Je ne sais pas où se trouve la relique <strong>de</strong> la vraie croix, je vais mʹen informer; M. Faÿ étant<br />

absent aura sans doute remis à lʹun <strong>de</strong> ces Messieurs le dépôt <strong>de</strong>s reliques dont il était<br />

chargé.<br />

Faites pour la messe aux Récollets ce qui vous semblera convenable; quand vous<br />

pourrez avoir la messe régulièrement chez vous, ce sera mieux, parce que cette disposition<br />

favorisera mieux le recueillement et lʹordre <strong>de</strong> la communauté; mais nous <strong>de</strong>vons beau‐<br />

coup <strong>de</strong> déférence à Mgr <strong>de</strong> Metz, si bon pour nous, et dʹailleurs, si les Récollets nʹont pas<br />

dʹautre ressource, il faut bien faire une concession à la charité et au bien <strong>de</strong>s âmes.<br />

Merci mille fois du portrait <strong>de</strong> votre Vénéré Prélat, je lʹai mis aux meilleurs rangs<br />

dans ma petite collection; cʹest pour nous un précieux souvenir.<br />

Je félicite bien notre jeune [Alfred] Noël <strong>de</strong> sa fidélité à gar<strong>de</strong>r ses sentiments et ses<br />

<strong>de</strong>voirs chrétiens; jʹespère que sa foi se soutiendra et que lʹavenir achèvera <strong>de</strong> mûrir les<br />

qualités que Dieu lui a données, sʹil travaille aussi à la correction <strong>de</strong> ses imperfections.<br />

363 L’abbé V. Marty avait fait ses premiers vœux en avril 1864. Il avait été novice faisant fonction <strong>de</strong> maître <strong>de</strong>s novices ! Il partira<br />

donc en octobre. Le P. Justin Faÿ est alors nommé et est le vrai 1 er Maître <strong>de</strong>s Novices.<br />

998


M. Collignon, ignorant le départ <strong>de</strong> His, vous a envoyé <strong>de</strong>s crucifix par la poste, je<br />

crois; sa petite lettre contient ces détails.<br />

Je ne reçois pas, cher ami, vos remerciements pour ce qui regar<strong>de</strong> votre séjour par‐<br />

mi nous, cʹest joie partagée; partant, nous sommes quitte; cʹest un bien <strong>de</strong> se retrouver en‐<br />

semble, <strong>de</strong> prier en commun, <strong>de</strong> se concerter pour la pratique <strong>de</strong>s œuvres, nous ne sau‐<br />

rions marcher dans un même esprit sans ces heureuses rencontres, prions Dieu <strong>de</strong> les fa‐<br />

voriser toujours et <strong>de</strong> les rendre constamment utiles et consolantes, comme elles lʹont été<br />

<strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts.<br />

Adieu, bien cher ami, je vous embrasse cordialement en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je joins ici la petite lettre pour nos frères, je crois que vous ferez bien <strong>de</strong> la cacheter<br />

avant <strong>de</strong> la leur remettre. Je les exhorte à la déférence; vous serez <strong>de</strong> votre côté, con<strong>de</strong>s‐<br />

cendant, souffrant patiemment quʹils vous exposent leur sentiment à lʹoccasion; sauf à le<br />

peser <strong>de</strong>vant Dieu vous‐même, pour résoudre ce qui sera le mieux, paix et conciliation.<br />

Je reçois votre <strong>de</strong>rnière lettre à lʹinstant. Le bon M. Michel me semble bien âgé, <strong>de</strong><br />

plus rai<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> caractère, entêtement et extérieur peu avantageux; ce portrait nʹest pas flat‐<br />

té. Pourtant, voyez; la seule chose faisable serait que, trouvant à Metz <strong>de</strong>s leçons ou quel‐<br />

que emploi, il se fit votre pensionnaire donnant ses loisirs aux œuvres et vous fournissant<br />

ainsi lʹoccasion et le moyen <strong>de</strong> le connaître.<br />

Pour le café, la soupe est certainement aussi saine; le mon<strong>de</strong> médical dit présente‐<br />

ment toutes sortes dʹeffets malfaisants qui résultent <strong>de</strong> lʹusage du café mêlé au lait et veut<br />

quʹon prépare lʹun et lʹautre séparément; accor<strong>de</strong>z pour les plus souffrants.<br />

967‐1 aux Frères <strong>de</strong> Metz 364<br />

Appel à lʹunion <strong>de</strong> cœur et dʹâme <strong>avec</strong> M. Risse. Respect et déférence envers le Supérieur.<br />

[11] novembre [1864]<br />

Bien chers amis et fils en N.S.,<br />

Je vous adresse en commun ces quelques mots dʹaffectueux souvenir, nʹayant pas<br />

assez <strong>de</strong> temps disponible en ce moment pour vous écrire à chacun en particulier. Jʹai<br />

pourtant exprimé le désir, à notre <strong>de</strong>rnier Conseil extraordinaire à Chaville, que mes rap‐<br />

ports <strong>avec</strong> mes frères fussent plus réguliers et plus suivis. Malheureusement, mon activité<br />

nʹest pas assez gran<strong>de</strong> pour répondre à cette bonne intention. Je me console en pensant<br />

que vous trouvez, dans la sollicitu<strong>de</strong> et la cordiale affection <strong>de</strong> notre bon M. Risse, les ap‐<br />

puis et directions dont vous avez besoin.<br />

Plus vous serez en intelligence <strong>avec</strong> lui, plus <strong>de</strong> force vous aurez pour vos œuvres;<br />

plus vous aurez dʹaccord entre vous, plus enfin vous aurez <strong>de</strong> contentement intérieur et<br />

dʹattachement à votre vocation. Je vous invite donc beaucoup, chers amis, à tout faire pour<br />

vivre ainsi en constante union <strong>de</strong> cœur et dʹesprit <strong>avec</strong> votre cher Supérieur. Soyez respec‐<br />

tueux et déférents envers lui. On oublie parfois parmi nous, dans lʹintimité <strong>de</strong> famille à la‐<br />

quelle nous sommes accoutumés, que le respect est un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>voirs essentiels à lʹégard <strong>de</strong><br />

364 C’est l’ancienne 869. Conformément au § qui suit la signature <strong>de</strong> MLP. dans la 967, M. Risse a lu cette lettre, l’a recopiée, cachetée<br />

et remise aux <strong>de</strong>stinataires. C’est sa copie qui nous est parvenue.<br />

999


tous, surtout à lʹégard <strong>de</strong> ceux que Dieu a constitués nos Supérieurs. Lorsque vous voyez<br />

quelque bien à faire, quelques améliorations à apporter dans la discipline, dans les services<br />

ou autrement, soumettez vos observations au Supérieur, soit dans le Conseil <strong>de</strong> la se‐<br />

maine, soit particulièrement. Ne vous rebutez pas si dʹabord votre avis nʹest pas goûté;<br />

soyez sûr que si votre proposition est bonne, elle sera, après réflexion, acceptée et mise en<br />

action; si elle est définitivement rejetée, nʹen continuez pas moins à faire cordialement tous<br />

vos efforts pour bien conduire votre œuvre. Votre soumission déférente sera agréable à<br />

Dieu et tournera à lʹavantage <strong>de</strong> toutes vos œuvres charitables. Enfin, ne cherchez pas une<br />

indépendance entière dans vos travaux. Il faut sans doute une certaine liberté <strong>de</strong> mouve‐<br />

ment et quelque latitu<strong>de</strong> pour conduire les choses, mais il faut aussi déférer aux avis <strong>de</strong><br />

ceux qui ont lʹautorité supérieure et ne pas craindre quelques observations ou blâmes sur<br />

votre marche et vos procédés. Les Supérieurs voient lʹensemble <strong>de</strong>s choses, nous ne les<br />

voyons quʹen partie. Ils ont dʹordinaire plus dʹexpérience; enfin ils ont grâce dʹétat, car leur<br />

autorité vient <strong>de</strong> Dieu.<br />

Je le répète, chers amis, je nʹentends pas restreindre excessivement votre initiative.<br />

Mais je souhaite que vous laissiez aussi à lʹautorité du Supérieur ses droits et sa place. Je<br />

désire que vous joigniez au zèle pour vos œuvres lʹhumble défiance <strong>de</strong> votre jugement et<br />

lʹobéissance <strong>de</strong> foi qui voit dans le Supérieur le représentant <strong>de</strong> Dieu et lʹorgane <strong>de</strong> sa di‐<br />

vine volonté.<br />

Ces observations, chers amis, sont toutes cordiales et affectueuses. je suis sûr <strong>de</strong> vo‐<br />

tre zèle, <strong>de</strong> votre bonne volonté, <strong>de</strong> votre dévouement. Je veux que tous ces précieux<br />

moyens arrivent à leur fin et que rien nʹempêche la charité entre vous, le bon succès <strong>de</strong> vos<br />

œuvres et la gloire qui en doit revenir à Dieu.<br />

Croyez, bien chers amis, à tous mes tendres sentiments en N.S.<br />

Votre affectueux ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

968 à M. Caille<br />

Remerciements pour les renseignements concernant un jeune postulant que MLP. pense <strong>de</strong>voir écarter. Problème<br />

posé par son remplacement à Vaugirard.<br />

Vaugirard, 18 novembre 1864<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie du soin particulier que vous avez mis à prendre <strong>de</strong>s renseigne‐<br />

ments sur le jeune Fulgence [Daboval]; nous avons ici une occasion <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> comprendre<br />

quelle attention nous <strong>de</strong>vons apporter dans lʹexamen <strong>de</strong>s sujets qui se présentent à nous; si<br />

vous vous en étiez tenu aux premières indications que vous aviez dʹabord reçues, nous au‐<br />

rions eu gran<strong>de</strong>ment à regretter, autant que jʹai pu lʹentrevoir par votre lettre, une admis‐<br />

sion qui nʹeût pu être maintenue; bénissons Dieu qui a daigné nous éclairer et prions‐Le <strong>de</strong><br />

nous assister en toute occasion, afin <strong>de</strong> remédier à lʹinsuffisance <strong>de</strong> nos courtes vues.<br />

Je vous rappelle le modèle <strong>de</strong> comptabilité dont vous voulez bien nous préparer<br />

lʹenvoi.<br />

Nous avions compté sur le jeune Fulgence pour faire une très petite classe <strong>de</strong>s plus<br />

élémentaires; M. Myionnet, qui avait combiné ses arrangements en conséquence, est un<br />

peu déconcerté par la non‐réalisation <strong>de</strong> ses espérances. M. Mitouard lui suggère la pensée<br />

1000


que lʹun <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux persévérants que vous avez près <strong>de</strong> vous pourrait remplir ce vi<strong>de</strong>, voyez<br />

si cette pensée est admissible; dans le cas où vous jugeriez cette mesure trop précipitée,<br />

ayez lʹobligeance <strong>de</strong> mʹécrire aussitôt que vous le pourrez votre avis, afin que M. Myionnet<br />

ne sʹarrête pas à cette combinaison. Si, au contraire, vous goûtiez cet arrangement, on<br />

pourrait peut‐être envoyer le jeune protégé <strong>de</strong> la famille Sourdat par cette occasion. Je<br />

joins, à tout événement, ici une feuille indiquant les pièces à produire à lʹentrée <strong>de</strong>s enfants<br />

chez nous; ces pièces pourraient toutefois être envoyées un peu plus tard, si on ne pouvait<br />

les réunir instantanément.<br />

Toute la famille vous assure <strong>de</strong> sa cordiale affection, jʹy joins, pour vos frères et<br />

pour vous, mes bien tendres sentiments en N.S.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Ne manquez pas <strong>de</strong> remercier notre f. Marcaire <strong>de</strong> lʹenvoi quʹil mʹa fait <strong>de</strong>s petits li‐<br />

vres pour lʹApostolat <strong>de</strong> la prière.<br />

969 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Profon<strong>de</strong> affection que MLP. porte à MM. <strong>de</strong> Varax et Chaverot. ʺHâtez‐vous <strong>de</strong> faire votre séminaire, vos pla‐<br />

ces sont bien marquées parmi nousʺ. Les embarras <strong>de</strong> Paris: une promena<strong>de</strong> ʺau bel airʺ, dʹoù MLP. est revenu<br />

ʺcrottéʺ.<br />

Vaugirard, 19 novembre 1864<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Comment allez‐vous, vous et notre cher ami M. Chaverot? Nous trouvons les jours<br />

<strong>de</strong> votre absence longs et durs. Mercredi <strong>de</strong>rnier, comme jʹétais sorti <strong>avec</strong> lʹintention <strong>de</strong><br />

faire une course nécessaire et que jʹattendais rue <strong>de</strong> Vaugirard lʹomnibus, le Séminaire a<br />

défilé si près <strong>de</strong> moi que jʹai dû me coller contre une porte pour lui livrer passage; jʹai donc<br />

fait la revue <strong>de</strong> tous ceux qui marchaient vers Issy, mais je vous ai cherché vainement.<br />

Etiez‐vous empêché, ou sorti dʹun autre côté, ou souffrant, jʹespère que non, puisque M.<br />

Briens vous a vu; écrivez‐nous un mot, nous nʹavons pas besoin <strong>de</strong> prétextes bien notables<br />

pour désirer <strong>de</strong> vos nouvelles. Pour notre cher ami Chaverot, jʹai allongé le bras pour lui<br />

donner signe <strong>de</strong> présence quand il passait près <strong>de</strong> moi; le mouvement nʹa pas été assez<br />

prompt, il était déjà hors dʹatteinte, je nʹai rien saisi, pas même un regard, car il ne mʹa pas<br />

vu; lʹomnibus, dʹautre part, sʹétant trouvé complet quatre fois <strong>de</strong> suite (à cause du parloir<br />

du Collège), je suis revenu crotté, nʹayant rien fait et nʹayant rien dit; cʹest pourquoi je vous<br />

écris, afin quʹil soit résulté au moins quoi que ce soit <strong>de</strong> cette promena<strong>de</strong> au bel air.<br />

Nous avons lundi rénovation <strong>de</strong>s vœux, soyez‐y <strong>de</strong> cœur tous les <strong>de</strong>ux, et offrez‐<br />

vous <strong>avec</strong> la T. Ste Vierge. Mercredi, St Clément, fête <strong>de</strong> M. Myionnet, vous y serez aussi<br />

dans notre souvenir. Hâtez‐vous bien <strong>de</strong> faire votre Séminaire, vos places sont si bien<br />

marquées parmi nous quʹil est malséant <strong>de</strong> les voir vi<strong>de</strong>s.<br />

A bientôt, chers amis, daigne le Seigneur vous donner grâce pour vos étu<strong>de</strong>s, grâce<br />

intérieure aussi pour croître toujours en son amour.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1001


970 à M. Guillot<br />

Difficultés <strong>de</strong> la vie communautaire et apostolique. MLP. encourage M. Guillot à accepter la ʺcroix que Dieu<br />

nous a mise sur les épaules en attendant quʹIl la retire Lui‐mêmeʺ. Quʹil sʹexerce à la soumission pour triom‐<br />

pher <strong>de</strong> sa rai<strong>de</strong>ur et <strong>de</strong> son impatience. Avoir recours aux moyens spirituels. Prier pour ceux qui le contrarient.<br />

Vaugirard, 25 novembre 1864<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Prenez bon courage; je comprends bien vos difficultés et jʹy compatis, mais, vous le<br />

savez, quand on fuit la croix dʹun côté, on la retrouve dʹun autre; le mieux est <strong>de</strong> porter<br />

celle que Dieu nous a mise sur les épaules, en attendant quʹIl nous la retire Lui‐même. Je<br />

ne laisserais point un frère que jʹestime et que jʹaime dans un poste où il me dirait, après<br />

mûre réflexion, quʹil lui est impossible <strong>de</strong> porter son far<strong>de</strong>au; mais il ne faut en venir à <strong>de</strong><br />

telles extrémités que dans lʹimpossibilité absolue <strong>de</strong> faire autrement. Quelle malédification<br />

pour la ville et pour ceux qui sʹintéressent à lʹœuvre que <strong>de</strong> voir la Communauté si peu<br />

consistante, changeant à chaque instant ses sujets parce quʹils nʹont pas force et patience<br />

suffisantes pour porter quelques contrariétés, telles quʹon les rencontre à peu près partout;<br />

malentendus, défaut <strong>de</strong> sympathie et, pour mieux dire, défaut <strong>de</strong> calme, dʹempire sur soi‐<br />

même, défaut <strong>de</strong> support et <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong> réciproques.<br />

Vous vous plaignez <strong>avec</strong> quelque raison dʹêtre un peu rigi<strong>de</strong> et impatient, mais<br />

comment acquerrez‐vous les vertus dont vous avez besoin sous ce rapport, plus <strong>de</strong> flexibi‐<br />

lité, <strong>de</strong> con<strong>de</strong>scendance et <strong>de</strong> douceur? Uniquement en faisant <strong>de</strong>s exercices <strong>de</strong> patience et<br />

<strong>de</strong> soumission. Recourez aussi, et avant tout et bien instamment, aux moyens spirituels;<br />

quand vous vous sentez ému et irrité, élevez intérieurement votre cœur à Dieu, allez à la<br />

chapelle, si vous le pouvez, priez pour ceux qui vous contrarient, invoquez leurs anges<br />

gardiens, cʹest un moyen infaillible, et priez aussi le vôtre; je vous réponds que si vous<br />

usez <strong>de</strong> ces moyens <strong>de</strong> foi, vous <strong>de</strong>viendrez tout à fait maître <strong>de</strong> vous‐même, et vous dou‐<br />

blerez conséquemment vos moyens <strong>de</strong> servir Dieu et <strong>de</strong> Le glorifier. Ces motifs suffiront<br />

pour un cœur qui a une foi sincère comme le vôtre lʹa; je suis donc sans inquiétu<strong>de</strong> et je<br />

compte bien que vous ne tar<strong>de</strong>rez pas à vous trouver calme et consolé; je vais prier <strong>de</strong><br />

toute mon âme à cette intention.<br />

Je vous embrasse affectueusement.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

971 à M. Caille<br />

MLP. <strong>de</strong>man<strong>de</strong> conseil sur le parti à prendre concernant un postulant dʹAmiens.<br />

27 novembre [1864]<br />

Je vous prie, mon bon ami, <strong>de</strong> me dire ce que vous pensez <strong>de</strong> la lettre <strong>de</strong> M. Ful‐<br />

gence [Daboval]. Je crois quʹil a parlé sincèrement et, après mʹêtre entretenu longuement<br />

<strong>avec</strong> lui, je ne trouve guère que légèreté, inexpérience, mais rien <strong>de</strong> mauvais sur aucun<br />

point essentiel. Pensez‐vous quʹon pût faire sans témérité un essai? Il est à Nazareth en at‐<br />

tente pour <strong>de</strong>ux ou trois jours. Je vous prie <strong>de</strong> me répondre sans retard.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1002


Je remercie beaucoup notre cher f. Marcaire <strong>de</strong> ses excellents livres. M. Myionnet a<br />

été très touché <strong>de</strong> sa lettre et <strong>de</strong> celle <strong>de</strong> M. Carment.<br />

Mille affections à tous.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

972 à M. Caille<br />

MLP. presse M. Caille <strong>de</strong> lui donner son avis concernant le jeune postulant qui insiste pour entrer dans la<br />

Communauté.<br />

Vaugirard, 29 novembre 1864<br />

Mon bon ami,<br />

Notre jeune M. Fulgence [Daboval] étant à Nazareth en attente, sans emploi chez<br />

nous et dans une position qui ne peut guère se prolonger, je vous serais obligé <strong>de</strong> me dire<br />

sans retard votre avis sur lʹinsistance quʹil fait pour entrer dans la Communauté. Il mʹa ex‐<br />

pliqué, dʹune façon qui me semble plausible, lʹabandon où le laisse M. le Curé <strong>de</strong> son pays<br />

qui sʹintéressait à lui.<br />

Mille affections à nos frères et à vous en particulier <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] recevra <strong>avec</strong> satisfaction la réponse aux questions posées<br />

dans le programme pour le rapport.<br />

973 à M. Decaux365 Avec courtoisie mais fermeté, MLP. expose les principes nécessaires pour sauvegar<strong>de</strong>r lʹautorité du frère Direc‐<br />

teur sur les enfants qui lui sont confiés; cette autorité ne saurait être contrariée par dʹautres mesures en sens<br />

contraire que pourraient prendre les Confrères. De telles conditions sont appliquées <strong>de</strong>puis les fondations. MLP.<br />

ne recherche vraiment que lʹunion cordiale entre les <strong>de</strong>ux Sociétés.<br />

Vaugirard, [6] décembre 1864<br />

Mon bon ami,<br />

Vous avez témoigné le désir <strong>de</strong> savoir plus précisément quel était le but <strong>de</strong> la visite<br />

que je mʹétais proposé <strong>de</strong> vous faire et que vous avez cru <strong>de</strong>voir ajourner. Je nʹavais pas<br />

dʹautre pensée que <strong>de</strong> vous représenter <strong>de</strong> nouveau les embarras sérieux que nous cause‐<br />

raient les changements que vous projetiez <strong>de</strong> faire dans la condition <strong>de</strong>s frères qui dirigent<br />

les patronages. A défaut <strong>de</strong> cette entrevue, et pour prévenir <strong>de</strong>s malentendus regrettables,<br />

je vous écris ces lignes dans une pensée <strong>de</strong> cordiale explication. Ainsi que je vous lʹai écrit<br />

il y a quelque temps, je désire laisser intactes lʹinfluence et lʹaction <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> St ‐<br />

Vincent <strong>de</strong> Paul dans les patronages, mais il me semble que les dispositions <strong>de</strong> lʹétat actuel<br />

y ont pourvu suffisamment: le Conseil Général <strong>de</strong> toutes les maisons que vous prési<strong>de</strong>z<br />

mensuellement, le Conseil particulier <strong>de</strong> chaque maison que tient aussi tous les mois le<br />

Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> chaque patronage, le concours zélé <strong>de</strong>s Confrères, enfin les subventions que<br />

vous donnez à lʹœuvre forment assurément un ensemble dʹinterventions bien notables;<br />

365 Il existe, aux ASV, un brouillon <strong>avec</strong> ratures et surcharges, qui porte la date du 6.<br />

1003


dʹautant que le Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> chaque Maison, en lui attirant les appuis et les bienveillances,<br />

en aidant le Directeur par ses avis et ses observations, en vous tenant vous‐même au cou‐<br />

rant <strong>de</strong> tous les mouvements <strong>de</strong> lʹœuvre et <strong>de</strong> tout ce qui lʹintéresse, la rattache constam‐<br />

ment à vous et la tient vraiment en vos mains. Ces choses posées du côté <strong>de</strong> la Société, la<br />

part du Directeur, dont la tâche, vous le savez, nʹest pas sans difficulté, <strong>de</strong>vait être aussi<br />

réglée. Il me paraît <strong>de</strong> toute nécessité que, pour conduire et maintenir dans la discipline<br />

<strong>de</strong>s réunions <strong>de</strong> 250 ou 300 enfants apprentis, durant <strong>de</strong>s jours entiers et par tous les<br />

temps, le Directeur ait une autorité ferme et bien assise, qui ne soit jamais infirmée aux<br />

yeux <strong>de</strong>s enfants, ni contrariée par les mesures que prendrait en sens divers une autre di‐<br />

rection. Jʹai vu, <strong>de</strong>puis nombre dʹannées, quelle prodigieuse énergie, quelle dépense <strong>de</strong><br />

forces il faut faire pour assurer le maintien <strong>de</strong> lʹordre durant ces longues journées du di‐<br />

manche, et je me suis convaincu quʹen ajoutant quelques difficultés <strong>de</strong> plus à cette tâche si<br />

ru<strong>de</strong>, on la rendrait intolérable. Il me semble donc indispensable que le Directeur seul sʹen‐<br />

ten<strong>de</strong> le dimanche <strong>avec</strong> ceux qui lʹassistent dans les emplois et services <strong>de</strong> la journée, et<br />

quʹil reste libre aussi dʹavoir <strong>avec</strong> eux, durant la semaine, un petit Conseil pour concerter<br />

dʹavance les moyens dʹexécution. Il sʹagit là <strong>de</strong> simples détails dʹaction quotidienne dans<br />

lesquels le Prési<strong>de</strong>nt nʹa point à intervenir; cʹest au Directeur, chargé <strong>de</strong> la conduite <strong>de</strong>s en‐<br />

fants et <strong>de</strong> la marche <strong>de</strong>s exercices, à régler lui‐même son opération; sans cela, point <strong>de</strong><br />

ressort suffisant, point dʹunité et <strong>de</strong> suite dans les mouvements, point dʹordre ni <strong>de</strong> bien<br />

réel dans la journée du dimanche. Enfin, je crois quʹon doit, comme on lʹa toujours fait,<br />

laisser au Directeur la faculté <strong>de</strong> renvoyer les enfants indisciplinés ou nuisibles au bien <strong>de</strong>s<br />

autres; il peut y avoir avantage à ce que ce renvoi soit considéré comme provisoire et<br />

quʹon ait à en examiner lʹutilité au petit Conseil <strong>de</strong> semaine; il y a là une garantie contre<br />

lʹirréflexion dʹun premier mouvement; mais si, après examen et observation, le Directeur<br />

croit définitivement que le renvoi est nécessaire, on ne saurait lʹobliger à gar<strong>de</strong>r un sujet<br />

qui brave son autorité ou quʹil sait être dangereux pour les autres. Si lʹon <strong>de</strong>man<strong>de</strong> où ré‐<br />

si<strong>de</strong> ainsi lʹautorité, je réponds: en vous‐même pour la haute direction <strong>de</strong> lʹensemble <strong>de</strong>s<br />

patronages; dans le Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> chaque maison pour les dispositions générales concer‐<br />

nant lʹesprit, les règles et les intérêts <strong>de</strong> cette maison; et, enfin, dans le Directeur pour la<br />

conduite <strong>de</strong>s enfants, la marche <strong>de</strong>s exercices, et toutes les mesures dʹexécution, soit au<br />

<strong>de</strong>dans, soit au <strong>de</strong>hors. Pour le spirituel, le domaine exclusif en revient <strong>de</strong> droit à lʹaumô‐<br />

nier.<br />

Ces conditions, dans leur substance principale, me paraissent si essentielles, mon<br />

bon ami, quʹil me serait absolument impossible dʹen accepter dʹautres, au moins pour les<br />

maisons <strong>de</strong> Nazareth et <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Grâce qui ont été suscitées et formées par notre Com‐<br />

munauté et constamment conduites par elle; nous y entretenons plusieurs prêtres et plu‐<br />

sieurs frères anciens et expérimentés; ils ont besoin dʹun peu dʹinitiative et <strong>de</strong> liberté dʹac‐<br />

tion pour maintenir le bien qui sʹy fait heureusement. Ces dispositions ne sont, du reste, en<br />

aucune façon contraires aux traditions que vous êtes justement jaloux <strong>de</strong> conserver. Naza‐<br />

reth nʹa eu que <strong>de</strong>ux Directeurs: M. Myionnet, qui a jeté les premières assises dʹune œuvre<br />

sérieuse, et M. Maignen, qui lui a donné la forme définitive; N.D. <strong>de</strong> Grâce a été également<br />

créée par ce <strong>de</strong>rnier et remise ensuite à nos frères qui la dirigent actuellement; mais, dans<br />

toute cette pério<strong>de</strong>, qui dure <strong>de</strong>puis plus <strong>de</strong> 15 ans, les Directeurs ont constamment gardé<br />

le droit <strong>de</strong> faire eux‐mêmes, <strong>avec</strong> tous ceux qui concourent ordinairement à lʹœuvre, un<br />

petit Conseil <strong>de</strong> semaine pour préparer la journée du dimanche; ils ont eu aussi le privi‐<br />

1004


lège dʹen conduire les exercices, <strong>de</strong> donner les avis habituels aux enfants, et enfin la faculté<br />

dʹexclure les sujets quʹils désespéraient dʹamen<strong>de</strong>r. Vous le voyez, mon cher ami, sʹil sʹéle‐<br />

vait, ce quʹà Dieu ne plaise, quelque triste dissentiment entre nous sur ces points, on ne<br />

saurait nous les imputer, puisque nous nous bornons à <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r le maintien <strong>de</strong>s condi‐<br />

tions où nous avons toujours été placés.<br />

Quant aux maisons, autres que Nazareth et N.D. <strong>de</strong> Grâce, S te ‐Anne, par exemple,<br />

ou dʹautres où on voudrait nous appeler, je ne répugne pas, dans lʹintérêt <strong>de</strong> la paix, à es‐<br />

sayer, si vous le désirez, le régime que vous proposez et qui donnerait une place encore<br />

plus large à lʹaction du Prési<strong>de</strong>nt; lʹon jugerait par là, dans la condition différente où sont<br />

ces maisons par rapport à nous, si lʹœuvre sʹordonnerait convenablement et à la satisfac‐<br />

tion <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parties.<br />

En écrivant ces lignes, je nʹai pas voulu, comme vous le dites, mon bon ami, vous<br />

poursuivre par mes plaintes, mais vous témoigner une fois <strong>de</strong> plus combien une cordiale<br />

union entre nos <strong>de</strong>ux Sociétés me semble désirable, je dirais nécessaire pour tirer <strong>de</strong> nos<br />

travaux <strong>de</strong>s résultats vraiment louables, vraiment utiles à notre édification, au bien <strong>de</strong> nos<br />

patronnés et, par‐<strong>de</strong>ssus tout, à la gloire <strong>de</strong> Dieu.<br />

Je Le prie <strong>de</strong> vous inspirer, ainsi quʹà nos Confrères, lʹesprit <strong>de</strong> conciliation sans le‐<br />

quel nous nʹarriverons point à cette fin.<br />

Je suis, comme toujours, <strong>avec</strong> un affectueux dévouement en N.S.<br />

Votre ami et Confrère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je ne répète pas ici ce que je vous ai déjà dit dans une précé<strong>de</strong>nte lettre tou‐<br />

chant le concours <strong>de</strong>s Confrères au patronage; nous sommes convaincus comme vous<br />

quʹun <strong>de</strong>s points essentiels <strong>de</strong> lʹœuvre est <strong>de</strong> les y attirer et <strong>de</strong> les y intéresser, quʹil ne suf‐<br />

fit pas quʹelle soit utile aux apprentis, quʹelle doit aussi donner aux Confrères, lʹoccasion<br />

dʹexercer la charité; on y a toujours tendu à Nazareth, où nombre <strong>de</strong>s meilleurs membres<br />

<strong>de</strong> la Société y ont pris le goût <strong>de</strong> cette œuvre et ont ensuite rendu <strong>de</strong> grands services en<br />

dʹautres maisons. Si, à Grenelle, nous avons été moins heureux en ces <strong>de</strong>rniers temps, cʹest<br />

contre notre volonté, M. le Curé ayant violemment éloigné la Conférence du patronage;<br />

nous serons heureux quand on lʹen aura rapprochée et que lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong>s Confrères y re<strong>de</strong>‐<br />

viendra fréquente et assidue.<br />

974 à M. Decaux<br />

Invitation à la St‐<strong>Jean</strong>. Leurs dissentiments ne doivent pas atteindre leur amitié.<br />

Vaugirard, 20 décembre 1864<br />

Mon bien bon ami,<br />

Nos petits dissentiments à propos <strong>de</strong> nos Œuvres nʹatteignent pas, je lʹespère, notre<br />

vieille affection; jʹai soutenu, et je soutiendrai fermement ce que je crois être le droit <strong>de</strong> no‐<br />

tre Communauté, mais je gar<strong>de</strong>rai <strong>avec</strong> la même fidélité tous les sentiments qui mʹatta‐<br />

chent à vous. Comme vous êtes, jʹen suis sûr, dans les mêmes dispositions à mon égard,<br />

vous ne refuserez pas <strong>de</strong> faire <strong>avec</strong> nous, comme cʹest <strong>de</strong> fondation, la fête <strong>de</strong> St <strong>Jean</strong>, le 27<br />

<strong>de</strong> ce mois. Voici lʹordre <strong>de</strong> lʹaprès‐midi:<br />

3h. 1/2 , vêpres, instruction, salut<br />

1005


5h. dîner (avancé dʹune heure pour quʹon puisse se retirer au plus tard à 9h. si lʹon<br />

consent à assister au petit divertissement qui suit le dîner).<br />

Croyez bien, mon bon ami, à mon inaltérable attachement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

974‐1 <strong>de</strong> M. Baumert à M. Le <strong>Prevost</strong> 366<br />

Réponse <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

MLP. corrige un exercice <strong>de</strong> rédaction en français quʹil a <strong>de</strong>mandé à un novice.<br />

fin 1864<br />

Mon Révérend Père,<br />

Jʹai bien mérité le reproche que vous mʹavez déjà fait plusieurs fois <strong>de</strong> différer toujours si<br />

longtemps <strong>de</strong> vous écrire ma lettre; ne croyez pas cependant, mon Révérend Père, que ce soit par<br />

oubli ou par négligence. Oh non, je connais déjà assez les obligations que jʹai à remplir envers vous<br />

et ce que mon état exige. Comment pourrais‐je aussi, moi religieux, violer ou négliger volontaire‐<br />

ment les <strong>de</strong>voirs que cet état mʹimpose, mais permettez que je vous dise, mon R. Père, que mon<br />

cœur a toujours été rempli dʹun amour et dʹun zèle ar<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> répondre aux désirs et espérances<br />

que vous avez en moi. La condition dans laquelle je me trouve actuellement me paraît en vérité un<br />

peu critique puisque je me trouve, pour ainsi dire, entre <strong>de</strong>ux feux, <strong>de</strong> son côté, P. Faÿ <strong>de</strong>man<strong>de</strong> le<br />

remplissement fidèle <strong>de</strong> mes <strong>de</strong>voirs <strong>de</strong> la classe; je suis donc, par conséquent, occupé tout le<br />

temps qui est donné aux Persévérants, mais quelquefois encore, ce temps mʹest raccourci par les<br />

différents exercices <strong>de</strong>s Frères.<br />

De lʹautre côté, mon cœur, obligé par votre bonté, veut répondre à vos désirs. Me voilà,<br />

mon Père, jugez si je suis coupable, si cette lettre convenue, quelquefois ne paraît pas. Autant quʹil<br />

est dans mes forces, jʹemploye toujours les courts moments <strong>de</strong> la récréation à mʹappliquer et étu‐<br />

dier le français, et il est dans ma volonté <strong>de</strong> préférer, après Noël, cet exercice à tous les autres.<br />

Pour ce qui regar<strong>de</strong> mes sentiments et lʹétat spirituel <strong>de</strong> mon âme pendant le temps <strong>de</strong>rnier<br />

passé, je ne vous ai à dire que mon ennemi vieux, irrité <strong>de</strong> me voir arraché <strong>de</strong> ses embrassements<br />

et pièges <strong>de</strong> son atelier, du mon<strong>de</strong>, ne se contente non seulement <strong>de</strong> ses attaques quʹil a fait jus‐<br />

quʹici, mais il vient aussi, après avoir rassemblé toutes ses forces, pour monter à lʹassaut, pour ainsi<br />

dire, à mon cœur qui avait commencé, par quelques consolations, à <strong>de</strong>venir une tour fortifiée. Il<br />

me paraît presque que les peines et les contradictions naissent sous mes pas, mon caractère natu‐<br />

rellement gai et expansif, <strong>de</strong>vient triste et mélancolique.<br />

Dans ces pénibles moments, cet ennemi est dʹautant plus redoutable puisque toutes mes<br />

faiblesses lui sont connues. Plaise à Dieu <strong>de</strong> mʹenvoyer son secours; pour moi, je ne suis, je ne peux<br />

rien.<br />

A la fin <strong>de</strong> cette lettre, jʹose encore vous adresser une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> qui mʹest dʹautant plus im‐<br />

portante, quʹil regar<strong>de</strong> ce qui mʹest le plus cher après Dieu et ses saints.<br />

Le beau jour <strong>de</strong> Noël va bientôt reparaître. Son retour me comble <strong>de</strong> joie mais il me rappelle<br />

aussi une obligation que jʹai à remplir envers mes parents. Si jʹétais auprès dʹeux, je ne me servirais<br />

ni dʹencre ni <strong>de</strong> papier pour leur expliquer mes sentiments dʹamour filial. Mais cette douce jouis‐<br />

sance mʹest refusée. Cʹest aujourdʹhui que lʹintervalle qui me sépare dʹeux me paraît dur et pénible.<br />

366 Le P. Baumert ajoute, bien longtemps après, ce témoignage: « Etant encore novice à Chaville en 1864, ne sachant pas le français,<br />

le bon Père Fondateur, M. Le <strong>Prevost</strong>, se préoccupa <strong>de</strong> mes progrès dans la langue française. venant, chaque samedi, à Chaville,<br />

il désira que je lui écrivisse une lettre comme simple exercice. Il prit la peine <strong>de</strong> les lire et <strong>de</strong> les corriger lui-même.<br />

La seule <strong>de</strong> ces lettres que je retrouve ici est datée <strong>de</strong> Grenelle où je m'occupais chaque dimanche <strong>de</strong> l'Œuvre <strong>de</strong>s Allemands.<br />

C'est un précieux autographe qui témoigne <strong>de</strong> la bonté et <strong>de</strong> l'extrême con<strong>de</strong>scendance <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong>... »<br />

1006


Que nʹai‐je à ma disposition un <strong>de</strong> ces wagons qui, dit‐on, sont aussi rapi<strong>de</strong>s que le vent.<br />

Oh, comme je serais bientôt entre leurs bras, mon cœur désire vivement prendre son vol vers une<br />

mère tendre et chérie pour lui renouveler ses protestations dʹamour et dʹattachement quʹil lui avait<br />

fait le jour <strong>de</strong> notre séparation. Et pourrais‐je lui faire une plus gran<strong>de</strong> joie que <strong>de</strong> lui féliciter par le<br />

même ca<strong>de</strong>au que jʹai donné dès mon enfance, savoir le témoignage <strong>de</strong> ma conduite. Je me dresse<br />

donc à votre bonté, mon Père, et je vous prie <strong>de</strong> faire écrire par le P. Faÿ, quelques mots sur ma<br />

conduite, sur les progrès que jʹai faits dans mes étu<strong>de</strong>s. Voilà donc ma <strong>de</strong>man<strong>de</strong>; je crois que vous<br />

mʹaccor<strong>de</strong>rez cette grâce, la plus gran<strong>de</strong> joie pour mon oncle et mes autres parents.<br />

Avec le sentiment dʹune plus profon<strong>de</strong> révérence<br />

Votre fils Urbain<br />

Ce que vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z sera accordé.<br />

Cette lettre a moins <strong>de</strong> fautes que <strong>de</strong> coutume. Le progrès est sensible.<br />

Je ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> lettres que pour les jours où vous aurez un peu <strong>de</strong> loisir pour les faire.<br />

L. P.<br />

975 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Invitation à profiter du congé du 2 janvier du Séminaire dʹIssy.<br />

29 décembre 1864<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je désire que vous suiviez votre attrait pour lʹemploi<br />

<strong>de</strong> la journée du 2 janvier. Si vous nʹavez pas <strong>de</strong> raison <strong>de</strong><br />

rester au Séminaire, il va sans dire que nous serons très<br />

heureux <strong>de</strong> vous voir; je serai tout le jour probablement à<br />

Vaugirard; vous pourriez, si vous êtes libre, nous y rendre<br />

visite, voir quelques amis sʹil y a lieu, N.D. <strong>de</strong>s Victoires<br />

surtout, enfin Chaville ou nos frères <strong>de</strong>s autres maisons.<br />

Adieu, bien cher ami, je vous embrasse tendrement.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Oui, il paraît que vous gagnez M. Poudroux et que nous le perdons; je nʹai rien en‐<br />

trevu qui me fasse penser que la Communauté doive le retrouver plus tard; il sera à Dieu<br />

qui en disposera, que son adorable volonté sʹaccomplisse.<br />

976 à M. Caille367 Remerciements pour les vœux <strong>de</strong> la St‐<strong>Jean</strong>. Appel àʺresserrer chaque jour davantage les liens qui nous unissentʺ.<br />

Vaugirard, 4 janvier 1865<br />

Bien cher fils en N.S.,<br />

Cʹest toujours <strong>avec</strong> une joie nouvelle que je reçois les témoignages <strong>de</strong> votre affection<br />

si douce au cœur dʹun Père, et les vœux que vous aimez à former pour lui au jour <strong>de</strong> sa<br />

367 Ecrite par M. <strong>de</strong> Lauriston. Signature et P.S. <strong>de</strong> MLP. (i<strong>de</strong>m pour la lettre 979).<br />

1007


fête. Jʹétais bien assuré que tous nos frères dʹAmiens sʹuniraient à ceux <strong>de</strong> Vaugirard pour<br />

célébrer la S t ‐<strong>Jean</strong>, fête <strong>de</strong> famille qui, comme <strong>de</strong> coutume, avait appelé autour <strong>de</strong> moi tous<br />

nos frères <strong>de</strong> Paris <strong>avec</strong> les amis <strong>de</strong> notre petite Communauté. Aussi vous pouvez croire<br />

que vous nʹavez été oublié <strong>de</strong> personne, <strong>de</strong> votre Supérieur surtout, particulièrement dans<br />

le moment où, prosternés au pied <strong>de</strong>s saints autels, tous ensemble nous nous efforcions <strong>de</strong><br />

remercier le bon Dieu <strong>de</strong> toutes les grâces quʹIl a bien voulu accor<strong>de</strong>r jusquʹici à notre pe‐<br />

tite Congrégation. Puisse‐t‐elle ne pas se rendre indigne <strong>de</strong> nouvelles faveurs, et pour cela,<br />

resserrons chaque jour davantage les liens qui nous unissent, liens bien doux que le bon<br />

Dieu a formés Lui‐même et qui font à la fois le bonheur du père et celui <strong>de</strong>s enfants, en<br />

même temps quʹils nous donnent la force et la puissance pour le bien que lʹunion <strong>de</strong> nos<br />

efforts peut seule accomplir.<br />

Je me réjouis <strong>de</strong> toutes les bonnes nouvelles que vous me donnez <strong>de</strong> la maison<br />

dʹAmiens et <strong>de</strong> lʹexcellent esprit qui anime tous nos frères. Veuillez dire à chacun toute la<br />

consolation que jʹen éprouve et les espérances que leurs bonnes dispositions me font<br />

concevoir pour la bénédiction et les fruits <strong>de</strong> leurs œuvres.<br />

Tous nos frères <strong>de</strong> Vaugirard sʹunissent à moi pour vous offrir leurs compliments et<br />

leurs vœux les plus dévoués.<br />

Jʹembrasse bien tendrement tous nos bons frères <strong>de</strong> la maison dʹAmiens, en leur re‐<br />

nouvelant, et tout particulièrement à vous à titre <strong>de</strong> vieil ami et <strong>de</strong> fils bien‐aimé, lʹexpres‐<br />

sion <strong>de</strong> mon affection toute paternelle dans les Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] vient, sous ma dictée, <strong>de</strong> vous réitérer lʹexpression <strong>de</strong><br />

tous mes sentiments <strong>de</strong> tendre dévouement pour vous et pour tous ceux qui vous entou‐<br />

rent; je nʹexclus point <strong>de</strong> ce nombre, assurément, notre cher M. Carment; je suis touché <strong>de</strong><br />

votre cordiale charité pour lui, je la partage et jʹai la bonne espérance quʹil pourra concou‐<br />

rir bien utilement aux œuvres saintes qui sʹaccomplissent chez vous; il sʹédifie parmi vous<br />

et tout me laisse penser quʹil contribuera <strong>de</strong> son côté à lʹédification <strong>de</strong> votre maison. Je<br />

pense <strong>avec</strong> vous quʹil nʹest point <strong>de</strong> nature, si impétueuse quʹelle soit, que la grâce ne<br />

puisse dompter et assouplir; attendons cette faveur <strong>de</strong> la miséricor<strong>de</strong> divine et, si le Sei‐<br />

gneur manifeste ainsi ses vues si sages et si tendrement paternelles, nous ne résisterons<br />

point aux indices <strong>de</strong> son adorable volonté.<br />

Embrassez tous nos frères pour moi, je les bénis <strong>avec</strong> vous dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

977 <strong>de</strong> M. Beauvais à M. Halluin<br />

P. S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Action <strong>de</strong> grâces pour le bien réalisé en commun. Humilité <strong>de</strong> MLP. qui bénit Dieu dʹavoir donné à M. Halluin<br />

ʺ<strong>de</strong>s ai<strong>de</strong>s plus puissantsʺ. En ce qui le concerne, MLP. gar<strong>de</strong> confiance dans le secours divin qui ne lui fait pas<br />

défaut.<br />

4 janvier [1865]<br />

Je vous remercie cordialement, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong>s sentiments dʹaffection et<br />

<strong>de</strong> bon souvenir que vous nous gar<strong>de</strong>z; nous remercions Dieu <strong>de</strong> notre part dʹavoir pu<br />

faire un peu <strong>de</strong> bien en union <strong>avec</strong> vous, bien que nous aurions voulu moins imparfait et<br />

plus capable dʹalléger votre far<strong>de</strong>au. Le Seigneur, dans sa miséricor<strong>de</strong>, vous a suscité <strong>de</strong>s<br />

1008


ai<strong>de</strong>s plus puissants, nous lʹen bénissons <strong>avec</strong> vous, heureux <strong>de</strong> voir une œuvre aussi mé‐<br />

ritante que lʹest la vôtre, appréciée et soutenue par le diocèse. Nous allons nous‐mêmes<br />

<strong>avec</strong> la grâce <strong>de</strong> Dieu, non sans peines et sans lour<strong>de</strong>s charges, mais le secours divin ne<br />

nous fait pas défaut et nous acceptons <strong>de</strong> bon cœur le travail et les épreuves qui peuvent<br />

nous advenir. Croyez, bien cher Monsieur lʹabbé, à notre sincère affection et gar<strong>de</strong>z‐nous<br />

un bon souvenir <strong>de</strong>vant Dieu.<br />

Votre serviteur et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

978 à M. Halluin<br />

Inscription dʹun jeune homme pour la conscription. MLP. compte sur M. Halluin pour quʹelle se fasse à Arras.<br />

Nécessité <strong>de</strong> rester discret sur les circonstances <strong>de</strong> sa naissance.<br />

Vaugirard, 7 janvier 1865<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

La famille que le sort du jeune Maillard intéresse sʹinquiète <strong>de</strong> la manière dont il va<br />

faire son inscription pour la conscription; elle est bien désireuse quʹil ne fasse point <strong>de</strong> re‐<br />

cherches sur sa naissance, car <strong>de</strong>s gens honnêtes peuvent se trouver compromis dans leur<br />

repos et aussi parmi ceux qui les entourent. La mère <strong>de</strong> Maillard qui se trouvait, étant<br />

jeune, séparée <strong>de</strong> sa famille et sans appui suffisant, a été un moment entraînée, mais elle<br />

sʹest relevée dʹune faute, dʹailleurs restée inconnue; elle a pu se marier honnêtement, elle a<br />

<strong>de</strong>s enfants quʹelle élève chrétiennement. Vous comprenez, cher Monsieur lʹabbé, quʹil y a<br />

là un intérêt sérieux qui est à ménager. Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> donc, au nom <strong>de</strong> ces pauvres<br />

gens, <strong>de</strong> faire tout ce que vous pourrez pour que Maillard (dit Maillard, car il nʹa pas été<br />

enregistré sous ce nom) tire au sort à Arras, et non à Lille où il a été enregistré à sa nais‐<br />

sance. Il doit avoir été inscrit à lʹétat civil sous les noms <strong>de</strong> <strong>Léon</strong>‐Constant Noyelle, le 28 ou<br />

29 décembre 1844, fils dʹUrsule Noyelle, née à Roubaix, père inconnu, présenté, je crois,<br />

par Mme Bénazet, sage‐femme qui ne <strong>de</strong>meure plus à Lille. La mère <strong>de</strong> Maillard nʹétant pas<br />

libre et ne disposant que <strong>de</strong> ressources limitées, a pourtant promis quʹelle réunirait dans<br />

un temps prochain 200f qui seraient remis en offran<strong>de</strong> à votre maison, si on parvient à<br />

empêcher que cette circonstance du tirage ne <strong>de</strong>vienne pour elle et pour sa famille une<br />

cause <strong>de</strong> triste perturbation. Si Maillard <strong>de</strong>vait inévitablement aller à Lille, ce qui se peut<br />

ordinairement empêcher en sʹy prenant à temps, elle pense que peut‐être vous pourriez le<br />

faire accompagner par une personne pru<strong>de</strong>nte et sûre qui tâcherait (si pourtant cela est<br />

praticable sans plus grand inconvénient) dʹempêcher trop <strong>de</strong> questions et <strong>de</strong> curiosité <strong>de</strong><br />

sa part. Elle aviserait encore à couvrir les frais <strong>de</strong> ce déplacement. Que <strong>de</strong> peines, <strong>de</strong> re‐<br />

mords, <strong>de</strong> difficultés ces pauvres filles se préparent quand elles sont mal surveillées par<br />

leurs parents et entourées <strong>de</strong> dangers sans défenses suffisantes!<br />

Je vous serai reconnaissant, cher Monsieur lʹabbé, <strong>de</strong> mʹécrire un mot <strong>de</strong> réponse<br />

qui me dise ce que vous croyez pouvoir faire pour amoindrir le mal quʹon peut craindre en<br />

cette circonstance.<br />

Tous nos frères se joignent à moi pour vous assurer <strong>de</strong> leurs respectueux et dévoués<br />

sentiments en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1009


979 à M. Risse<br />

M. Gauffriau, jeune prêtre <strong>de</strong> la communauté <strong>de</strong> Metz, privilégie le ministère auprès <strong>de</strong> religieuses, au détriment<br />

<strong>de</strong> lʹévangélisation <strong>de</strong>s jeunes gens, ʺbut principal <strong>de</strong> sa vocationʺ.<br />

Vaugirard, 10 janvier 1865<br />

Cher et bien bon abbé et fils en N.S.,<br />

Jʹapprouve entièrement votre manière <strong>de</strong> voir et dʹagir vis‐à‐vis <strong>de</strong> notre cher abbé<br />

<strong>Jean</strong> [Gauffriau], par rapport à son ministère à lʹégard <strong>de</strong>s Petites Sœurs <strong>de</strong>s Pauvres. Ce<br />

ministère offre bien <strong>de</strong>s avantages et bien <strong>de</strong>s consolations, mais il ne doit sʹy livrer<br />

quʹ<strong>avec</strong> une certaine mesure et sans négliger en aucune façon son autre ministère bien plus<br />

important et but principal <strong>de</strong> sa vocation. Cʹest à cette évangélisation <strong>de</strong>s jeunes gens quʹil<br />

doit sʹappliquer particulièrement et se former, puisque cʹest celui quʹil doit avoir et conser‐<br />

ver toute sa vie, tandis que lʹautre nʹest quʹaccessoire et momentané. Dites donc cela <strong>de</strong> ma<br />

part au bon abbé <strong>Jean</strong> qui le comprendra, je nʹen doute pas; il est appelé à faire beaucoup<br />

<strong>de</strong> bien parmi les jeunes gens, sʹil veut sʹen donner la peine.<br />

Jʹapprouve donc que vous alterniez <strong>avec</strong> lʹabbé <strong>Jean</strong> pour le ministère <strong>de</strong>s Petites<br />

Sœurs et que vous y alliez toutes les fois que vous le jugerez convenable, reconnaissant,<br />

comme vous, la nécessité <strong>de</strong> mettre obstacle à ce que le <strong>de</strong>voir essentiel ne soit sacrifié à un<br />

ministère plus facile et plus consolant.<br />

Je me réjouis <strong>de</strong>s bonnes nouvelles que vous me donnez <strong>de</strong> vous et <strong>de</strong> nos frères,<br />

faites‐leur à tous beaucoup <strong>de</strong> tendresses. La Communauté a, en ce moment, beaucoup<br />

dʹembarras et <strong>de</strong> difficultés, ce qui mʹengage à vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r pour elle un redoublement<br />

<strong>de</strong> prières. Pour nous, nous nʹoublierons pas la petite communauté <strong>de</strong> Metz qui vous est si<br />

chère, comme elle vous est si dévouée.<br />

Recevez donc, mon bien cher ami, lʹexpression que jʹaime tant à vous renouveler <strong>de</strong><br />

ma tendre affection en N.S.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Ne soyez point arrêté, mon bien bon ami, par la crainte que quelques senti‐<br />

ments naturels et propres ne se mêlent à vos justes appréhensions concernant le ministère<br />

<strong>de</strong> notre cher abbé chez les Petites Sœurs; on serait entravé souvent dans les mesures les<br />

plus sages si cette considération était un obstacle à nos mouvements; il faut simplement<br />

élever son cœur à Dieu pour purifier nos intentions et puis aller en avant.<br />

Adieu, bien cher ami, embrassement <strong>de</strong> Père pour vous et pour tous nos frères.<br />

L. P.<br />

Pas <strong>de</strong> lettre jusquʹici <strong>de</strong> His à sa mère; où donc est le cœur <strong>de</strong> cet enfant?<br />

980 à M. Risse<br />

Dispositions à prendre envers le fils dʹune personne <strong>de</strong> service <strong>de</strong> Vaugirard. Esprit surnaturel et sens du bien<br />

commun dans le jugement que porte MLP. sur plusieurs aspirants à la vie religieuse. Allusion aux malentendus<br />

survenus entre la SSVP. et lʹInstitut. Espérance que les difficultés vont sʹaplanir.<br />

Vaugirard, 26 janvier 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong>s renseignements que vous nous transmettez concernant le jeune<br />

His; M. <strong>de</strong> Lauriston <strong>de</strong>vait vous répondre, mais, comme il est absent et que vous désirez<br />

1010


peut‐être un avis prompt <strong>de</strong> notre part, je vous écris ces <strong>de</strong>ux mots pour vous dire quʹil ne<br />

faut pas hésiter à le loger hors <strong>de</strong> chez vous, pour peu que vous croyiez sa présence nuisi‐<br />

ble et <strong>de</strong> mauvais effet parmi vos pensionnaires; si vous pouvez le maintenir au nombre<br />

<strong>de</strong>s jeunes ouvriers externes, ce sera un acte <strong>de</strong> longanimité bien charitable, mais vous<br />

consulterez, même pour cette <strong>de</strong>rnière condition, le bien général <strong>de</strong> votre œuvre qui doit<br />

naturellement passer avant tout; il me semble quʹune fois au <strong>de</strong>hors, obligé quʹil sera <strong>de</strong><br />

pourvoir à sa subsistance au jour le jour, il sera plus ménager <strong>de</strong> son argent, voyant le be‐<br />

soin à sa porte, sʹil nʹest plus sage et plus économe. Il a écrit une seule fois à sa mère quel‐<br />

ques lignes, au moment <strong>de</strong> son arrivée; <strong>de</strong>puis, elle nʹa plus rien reçu. Il se peut que, dans<br />

le même temps, il ait écrit à M. Lantiez, mais il y a déjà bien longtemps.<br />

Je reçois une lettre <strong>de</strong> <strong>Léon</strong> Vion qui promet <strong>de</strong> remettre entre vos mains, dans 15<br />

jours ou 3 semaines, un engagement dʹune année pour revenir parmi nous, suivant la<br />

condition que jʹavais posée pour sa rentrée; je vous prie <strong>de</strong> lʹassurer <strong>de</strong> notre cordiale affec‐<br />

tion et <strong>de</strong> notre bonne disposition à lʹaccueillir; mais ce pauvre enfant, si cordial et si droit,<br />

a une si gran<strong>de</strong> mobilité dans ses impressions quʹil y a tout à parier quʹil aura changé<br />

dʹavis avant 3 semaines et quʹil ne saura pas exécuter sa résolution du moment présent.<br />

Je joins ici <strong>de</strong>ux petites lettres que jʹécris au f. <strong>Jean</strong> [Gauffriau] et au f. Guillot, afin<br />

<strong>de</strong> leur donner quelques mots dʹavis relativement aux petites difficultés quʹils ont ren‐<br />

contrées en <strong>de</strong>rnier lieu dans leurs emplois; je crois quʹil est mieux que vous les leur remet‐<br />

tiez cachetées, afin que ces avis soient plus intimes et soient comme une sorte <strong>de</strong> direction.<br />

Nous allons doucement; plusieurs <strong>de</strong> nos frères ont été éprouvés par la maladie:<br />

MM. Gallais, Philibert et Baudoin à Vaugirard, M. dʹArbois et M. Vasseur à Nazareth; <strong>de</strong><br />

là, quelques gênes pour nous; <strong>de</strong>s ennuis dʹun autre genre nous ont aussi éprouvés, quel‐<br />

ques malentendus survenus entre la Société <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul et nous semblaient ren‐<br />

dre imminente une séparation entre elle et notre Communauté; <strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> Dieu, ces dif‐<br />

ficultés semblent sʹaplanir et nous continuerons, je crois, à faire ensemble plusieurs œuvres<br />

comme précé<strong>de</strong>mment.<br />

Adieu, bien cher ami, mille affections en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹespère toujours quʹaprès les mauvais temps, vers mars, M. Lantiez pourra vous<br />

faire la visite promise. Jusque‐là, vivez bien en paix. Avec un peu <strong>de</strong> douceur, je crois que<br />

vous inclinerez M. Guillot à vos vues; il ne nous a jamais résisté ici et il était aussi très<br />

soumis à M. Halluin; les âmes, <strong>de</strong> notre temps, ont, besoin <strong>de</strong> beaucoup <strong>de</strong> mansuétu<strong>de</strong> et<br />

<strong>de</strong> con<strong>de</strong>scendance; cʹest lʹavis <strong>de</strong>s MM. <strong>de</strong> St‐Sulpice, si bons juges dans la science <strong>de</strong> la<br />

direction.<br />

981 à M. Guillot<br />

Encouragement pour surmonter les difficultés <strong>de</strong> collaboration. Relativiser les impressions pénibles quʹil<br />

éprouve. Prière et humilité, avoir en vue le bien commun.<br />

Vaugirard, 26 janvier 1865<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Je prends une cordiale part à votre peine et je prie Dieu instamment <strong>de</strong> verser sa di‐<br />

vine consolation dans votre cœur. Je sais combien il est pénible <strong>de</strong> ne pas sʹentendre aisé‐<br />

1011


ment <strong>avec</strong> ceux dont on partage les travaux tous les jours, surtout quand on marche fran‐<br />

chement et fidèlement à lʹaccomplissement <strong>de</strong> son <strong>de</strong>voir; mais, bien cher ami, vous ne<br />

lʹignorez pas, dans <strong>de</strong> telles situations on est particulièrement agréable au Seigneur, on est<br />

dans lʹépreuve, dans le combat intérieur et, durant tout ce temps, comme pour le soldat en<br />

campagne auquel le service est compté double, on amasse un double trésor <strong>de</strong> mérites. Je<br />

nʹoublie pas toutefois que notre pauvre nature a ses droits, que notre patience nʹest pas<br />

sans limites; cʹest pourquoi je compatis à votre souffrance et je vous promets <strong>de</strong> vous don‐<br />

ner un autre emploi quand vous ne croirez plus définitivement pouvoir supporter votre<br />

position; que cette pensée vous tranquillise donc, cher ami, et vous serve dʹassurance dans<br />

les heures mauvaises où le courage semble nous abandonner.<br />

Il me semble pourtant, cher enfant, que, après que les impressions pénibles sont<br />

passées, que vous rentrez en vous‐même aux pieds <strong>de</strong> Dieu, vous pouvez vous dire: De<br />

quoi sʹagit‐il en définitive? De quelques paroles blessantes tombées dans un moment dʹirri‐<br />

tation et qui nʹont pas dʹintention réfléchie ni réelle, <strong>de</strong> quelques contradictions dans les<br />

ordres donnés et qui peuvent rendre les mouvements plus difficiles, <strong>de</strong> quelque sévérité<br />

dans la direction qui peut froisser sur le moment et rendre lʹexpansion moins intime; tout<br />

cela est pénible, mais ne le peut‐on supporter à lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> la prière et dʹun sentiment dʹhu‐<br />

milité, surtout en songeant que tout le bien <strong>de</strong> lʹœuvre sʹévanouira si la désharmonie se<br />

met entre vous. En réalité, M. Risse est bon et sincèrement dévoué au bien <strong>de</strong>s âmes, il<br />

vous aime et rend justice à tout ce quʹil y a <strong>de</strong> bon en vous, il serait très fâché <strong>de</strong> vous per‐<br />

dre et, dans toutes ses lettres, il me fait votre éloge; pardonnez‐lui ses défauts, la charité le<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>, ayez un peu <strong>de</strong> souplesse <strong>avec</strong> lui et les choses, je lʹespère, pourront se soutenir<br />

encore. Du reste, M. Lantiez ira dans un mois au plus vous rendre une visite à Metz, ayez<br />

patience, bien cher ami, jusque‐là; je crois quʹen causant <strong>avec</strong> vous et <strong>avec</strong> M. Risse, il<br />

pourra rendre la situation meilleure, soyez sûr que ces épreuves serviront, en fin <strong>de</strong><br />

compte, à votre sanctification.<br />

Adieu, bien cher ami, je vous embrasse tendrement dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Tous nos MM. Directeurs <strong>de</strong>s patronages répètent constamment que, pour la<br />

conduite <strong>de</strong>s apprentis et jeunes ouvriers, il ne faut pas <strong>de</strong> rigueur dans la discipline ni<br />

trop <strong>de</strong> sévérité dans lʹexécution <strong>de</strong>s règles.<br />

982 à M. Maignen<br />

Toujours le différend <strong>avec</strong> les Confrères. M. Decaux tend à réaliser <strong>de</strong>s projets <strong>avec</strong> lesquels MLP. est en désac‐<br />

cord. MLP. est décidé à ne pas souffrir dʹempiètement qui se révèlerait préjudiciable à lʹInstitut.<br />

Vaugirard, 7 février 1865<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

M. Girard, qui est venu me voir aujourdʹhui, me dit que M. Decaux gar<strong>de</strong> pleine‐<br />

ment toutes ses vues et quʹil croit pouvoir assurer quʹelles seront aussi celle du Conseil qui<br />

doit, <strong>avec</strong> M. Baudon, examiner les questions qui sont en litige. En annonçant à M. Girard<br />

quʹil serait Vice‐Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> Nazareth, il lui a dit: Vous signerez les états <strong>de</strong> dépense et<br />

vous prendrez toute lʹautorité que vous voudrez.<br />

1012


Ainsi, malgré la convention faite <strong>avec</strong> M. Baudon que nous resterions, quant à pré‐<br />

sent, sans changement, M. Decaux, poursuivant sa marche sour<strong>de</strong>ment, tend à réaliser <strong>de</strong>s<br />

projets que nous avons formellement repoussés.<br />

Sans y mettre aucune contention, nous <strong>de</strong>vons <strong>de</strong>meurer là où nous sommes et ne<br />

point souffrir dʹempiètements que nous pourrions avoir à regretter. Je crois donc que vous<br />

<strong>de</strong>vriez prier bien affectueusement MM. Vrignault et Girard <strong>de</strong> sʹabstenir <strong>de</strong> tout acte au‐<br />

tre que la signature <strong>de</strong>s états, tant que quelque règlement amiable ne sera pas intervenu<br />

entre la Société et nous; M. Vrignault y est très disposé sans doute; je crois que M. Girard,<br />

sans nulle intention qui nous soit adverse, aimerait assez néanmoins, peut‐être dans une<br />

bonne vue, <strong>de</strong> prendre position; un peu plus tard, ce sera opportun; il me semble que pré‐<br />

sentement, ce serait aller trop vite. On ne saurait se dissimuler que plus tard la position <strong>de</strong><br />

ces <strong>de</strong>ux amis dévoués du patronage <strong>de</strong>viendra difficile pour eux et délicate pour vous; ils<br />

seront poussés à outrance en un sens et arrêtés en lʹautre; si leur affection résiste à une pa‐<br />

reille condition, Dieu y mettra la main assurément. Comptons beaucoup sur Lui; sʹIl nous<br />

éprouve, Il saura nous assister: tâchons <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r la paix et la charité sans lesquelles les<br />

œuvres ne sauraient être agréées par Lui.<br />

Adieu, cher ami, je vous embrasse cordialement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

983 à M. Maignen<br />

Dans le conflit qui lʹoppose à la SSVP., MLP. invite M. Maignen ʺau calme et à la charitéʺ. Mais il ne peut ob‐<br />

tempérer: ʺdans lʹordre <strong>de</strong> la charité, mettre le pied sur la tête <strong>de</strong>s gens et dire: obéissez, cʹest le renversement <strong>de</strong><br />

tous les principesʺ. Il faut poser <strong>de</strong>s conventions, bases <strong>de</strong> lʹordre et <strong>de</strong> lʹentente.<br />

14 février [1865]<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Si vous voyez M. Baudon, gar<strong>de</strong>z le calme et la charité; les récriminations sont inuti‐<br />

les; si on vous accuse, donnez doucement vos explications.<br />

Vous pouvez dire quʹinformé par MM. Decaux et Beluze que le Conseil a examiné,<br />

vous venez voir si on a pensé quʹil y eût quelque chose à régler <strong>avec</strong> nous, afin <strong>de</strong> marcher<br />

<strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts en confiance plus gran<strong>de</strong>.<br />

A quoi se réduit la question pour nous? A savoir si on nous laisse dans lʹétat où<br />

nous avons toujours été.<br />

On se plaint, on crie contre nous; quel est le fond <strong>de</strong> ces plaintes? Nous servions<br />

paisiblement et généreusement, comme <strong>de</strong> coutume, les œuvres, quand on nous notifie ex<br />

abrupto <strong>de</strong>s décrets qui doivent changer notre situation en points essentiels et nous impo‐<br />

ser <strong>de</strong>s sujétions que nous ne pouvons accepter. Peut‐on, dans lʹordre <strong>de</strong> la charité, mettre<br />

le pied sur la tête <strong>de</strong>s gens et dire: Obéissez. Cʹest le renversement <strong>de</strong> tous les principes.<br />

Il nous paraît essentiel <strong>de</strong> poser quelques conventions, comme base <strong>de</strong> lʹordre et <strong>de</strong><br />

lʹentente; autrement, défiance incessante, rai<strong>de</strong>ur inévitable et brisement prochain.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1013


984 à M. Chaverot<br />

Issue heureuse pour une situation délicate, concernant un frère <strong>de</strong> M. Chaverot. MLP. attentif à la santé <strong>de</strong> ses<br />

séminaristes.<br />

Paris‐Vaugirard, 17 février 1865<br />

Je crois, bien cher enfant, quʹil était bien urgent que vos bons parents fussent avertis<br />

du danger que courait votre frère et quʹil sera <strong>de</strong> toute pru<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> ne pas le laisser une<br />

minute <strong>de</strong> plus à Paris, dès quʹon pourra lʹemmener; insistez bien là‐<strong>de</strong>ssus et donnez à<br />

vos parents, dès quʹils arriveront, les renseignements que vous avez; je pense quʹils ne ju‐<br />

geront pas à propos <strong>de</strong> voir la famille en question.<br />

Je prie <strong>avec</strong> vous <strong>de</strong> toute mon âme notre bien‐aimée mère <strong>de</strong> la Salette dʹintervenir<br />

en cette grave et pénible affaire.<br />

Je vais envoyer du vin à mon cher enfant, M. <strong>de</strong> Varax; obligez‐le <strong>de</strong> ma part à goû‐<br />

ter et à prendre toutes les précautions nécessaires pour maintenir sa santé; sʹil se sentait<br />

décidément impuissant à suivre les cours, il faudrait user <strong>de</strong> nouveau dʹune petite suspen‐<br />

sion, autant quʹon croirait pouvoir lʹobtenir <strong>de</strong> MM. les Directeurs; le bon Dieu nous diri‐<br />

gera et disposera, sʹil est besoin, les esprits.<br />

Adieu, bien cher enfant, je vous embrasse tous les <strong>de</strong>ux cordialement.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

985 à M. Maignen<br />

Document sur lʹorganisation <strong>de</strong>s patronages à envoyer à M. Baudon. Humilité dans son apostolat auprès <strong>de</strong>s<br />

jeunes ouvriers.<br />

20 février 1865<br />

Vous nʹoubliez pas, je pense, cher enfant, que nous <strong>de</strong>vons envoyer à M. Baudon<br />

lʹindication <strong>de</strong>s franchises qui <strong>de</strong>vraient, à notre avis, être laissées aux Directeurs dans les<br />

patronages; préparez donc, je vous prie, au plus tôt, le projet <strong>de</strong> ce document, pensez‐y<br />

bien <strong>de</strong>vant Dieu, car cʹest important pour le présent et pour lʹavenir; il faudrait quʹil fût lu<br />

et corrigé au Conseil mercredi, et envoyé, sʹil se peut, le len<strong>de</strong>main.<br />

Adieu, bien cher ami, ayons bon courage; Dieu se plaît en tout à nous montrer notre<br />

insuffisance, mais, dès que nous lʹavons compris, il vient à notre secours; faites pour les<br />

jeunes ouvriers tout ce que vous pourrez en gran<strong>de</strong> humilité et, à ce peu, Dieu ajoutera<br />

tout ce qui nous manquera.<br />

Votre ami et Père affectionné en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

986 à M. Baudon368 Rôles respectifs <strong>de</strong> la SSVP. et <strong>de</strong> lʹInstitut au sein <strong>de</strong>s Œuvres. Place du frère Directeur et <strong>de</strong> lʹaumônier. MLP.<br />

mettra tout en œuvre pour éviter la désunion. Mais il tient, en toute justice, à ses principes dʹorganisation. Sʹil a<br />

montré un peu dʹanimation lors <strong>de</strong> la <strong>de</strong>rnière rencontre, cʹest parce que la discussion avait remué une convic‐<br />

tion profon<strong>de</strong> et formée <strong>de</strong>vant Dieu.<br />

368 Le brouillon est aux ASV. M. Baudon a écrit au verso <strong>de</strong> la lettre sa réponse provisoire.<br />

1014


Vaugirard, 2 mars 1865<br />

Monsieur et Vénéré Confrère,<br />

Nos frères occupés au patronage sont si fort dérangés, ils ont tant <strong>de</strong> peine à se ren‐<br />

contrer quʹils mʹont remis hier seulement les indications que nous <strong>de</strong>vions vous transmet‐<br />

tre concernant les attributions <strong>de</strong>s Directeurs dans cette œuvre. Jʹai lʹhonneur <strong>de</strong> vous les<br />

adresser ci‐joint. Elles me paraissent assez complètes, je ne vois pas que jʹaie rien à y ajou‐<br />

ter. Nous désirons, en résumé, quʹon regar<strong>de</strong> les patronages comme <strong>de</strong>s œuvres commu‐<br />

nes à la Société <strong>de</strong> St ‐Vincent <strong>de</strong> Paul et à nous puisque, si elle fournit pour sa part <strong>de</strong>s<br />

subventions et le concours <strong>de</strong> ses membres, nous donnons, <strong>de</strong> notre côté, la vie entière<br />

dʹun bon nombre dʹhommes dévoués, tant prêtres que laïcs; que nous avons concouru, en<br />

outre, à la fondation <strong>de</strong> lʹœuvre comme à celle <strong>de</strong>s établissements où elle est assise, et<br />

quʹenfin nous avons, bien ordinairement, à suppléer à lʹinsuffisance <strong>de</strong>s allocations. A ces<br />

titres, et plus encore dans lʹintérêt <strong>de</strong>s œuvres, nous <strong>de</strong>mandons quʹon laisse aux Direc‐<br />

teurs une suffisante liberté dʹaction, le dimanche surtout, ainsi que la faculté <strong>de</strong> concerter<br />

leurs moyens pour les exercices <strong>de</strong> cette journée <strong>avec</strong> les Confrères et les frères qui les ai‐<br />

<strong>de</strong>nt, en se réunissant en un simple Comité qui, nʹayant rien <strong>de</strong> la tenue dʹun Conseil, ne<br />

requiert pas, conséquemment, lʹintervention du Prési<strong>de</strong>nt.<br />

Nous reconnaissons à la Société le droit <strong>de</strong> nommer les Prési<strong>de</strong>nts ou Vice‐<br />

Prési<strong>de</strong>nts, comme elle nous reconnaît celui <strong>de</strong> choisir les aumôniers et Directeurs. Il nous<br />

semble, néanmoins, quʹil sera bien utile et bien dans lʹesprit <strong>de</strong> charité quʹil y ait dʹordi‐<br />

naire quelque entente à ce sujet, puisque <strong>de</strong>s choix mal sympathiques <strong>de</strong> part ou dʹautre<br />

prépareraient, ou <strong>de</strong>s conflits, ou <strong>de</strong>s rapports difficiles.<br />

Je nʹajoute pas que nous désirons, pour nos frères ecclésiastiques en particulier, les<br />

égards et le respect dus à leurs fonctions et leur caractère; cette observation serait sans ob‐<br />

jet <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s hommes si sincèrement religieux que le sont, en général, tous les Confrères <strong>de</strong><br />

St ‐Vincent <strong>de</strong> Paul.<br />

Je ne crois pas, Monsieur et Vénéré Confrère, quʹil y ait, dans ces quelques réserves<br />

et dans les indications <strong>de</strong> la note ci‐jointe, rien qui soit contraire aux vues du Conseil <strong>de</strong> la<br />

Société; je le souhaite bien ar<strong>de</strong>mment: la Société peut assurément faire ses œuvres sans<br />

nous, et nous pouvons, <strong>de</strong> notre côté, marcher sans son appui, mais cette désunion serait<br />

très préjudiciable au bien et nous <strong>de</strong>vons, au prix <strong>de</strong> tous les sacrifices acceptables, main‐<br />

tenir cette désirable association; la note et la présente lettre ont été faites sous cette inspira‐<br />

tion.<br />

Je crains dʹavoir, dans notre <strong>de</strong>rnière rencontre, Monsieur et Vénéré Confrère, mon‐<br />

tré un peu dʹanimation; jʹen exprime tous mes regrets à vous et à ces Confrères si bienveil‐<br />

lants, si remplis dʹaménité qui vous entouraient; je nʹai nulle excuse à donner, sinon que<br />

lʹorganisme est en moi faible et impressionnable et quʹil me fallait, pour vous répondre,<br />

remuer une conviction profon<strong>de</strong> et formée <strong>de</strong>vant Dieu, savoir: que notre position dans les<br />

œuvres <strong>de</strong> St ‐Vincent <strong>de</strong> Paul dépasse déjà toutes les concessions admises par les commu‐<br />

nautés ordinaires, et quʹaller au‐<strong>de</strong>là serait nous fourvoyer.<br />

Je <strong>de</strong>meure <strong>avec</strong> tous mes frères, pour vous et pour tous ceux qui vous assistent,<br />

dans les sentiments du respect et du dévouement les plus sincères en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1015


986‐1 à M gr Angebault<br />

Précisions sur le projet <strong>de</strong> fondation à Angers. M. dʹArbois pressenti comme supérieur <strong>de</strong> la nouvelle commu‐<br />

nauté.<br />

Vaugirard, 11 mars 1865<br />

Toutes les fois quʹil sʹagit sérieusement pour nous <strong>de</strong> quelque entreprise nouvelle, le<br />

désir du bien, je lʹespère, et peut‐être un certain besoin <strong>de</strong> faire acte <strong>de</strong> vie nous poussent à<br />

nous porter en avant; mais, quand nous arrivons à lʹexamen <strong>de</strong> nos ressources, nous som‐<br />

mes arrêtés par notre faiblesse et notre impuissance. Cʹest ce qui est arrivé encore dans la<br />

circonstance présente en suite <strong>de</strong> la proposition que votre paternelle bonté nous a faite <strong>de</strong><br />

prendre quelque part aux bonnes œuvres <strong>de</strong> votre diocèse. Cependant, Monseigneur,<br />

comme nous avions ici tant <strong>de</strong> raisons <strong>de</strong> vous donner une marque <strong>de</strong> notre déférence et<br />

<strong>de</strong> notre tendre reconnaissance, nous avons tenté tous les moyens et nous arrivons, non<br />

sans peine, à une combinaison qui semble pouvoir répondre aux exigences <strong>de</strong>s œuvres<br />

que vous consentiriez à nous confier. Il reste bien pour nous quelques difficultés à aplanir,<br />

mais je vous les soumettrai, Monseigneur, et votre pru<strong>de</strong>nce en sera juge.<br />

Je me propose <strong>de</strong> partir pour Angers au commencement <strong>de</strong> la semaine, mardi je<br />

pense, afin <strong>de</strong> mʹentretenir directement <strong>avec</strong> vous <strong>de</strong> lʹimportante affaire qui nous occupe.<br />

Jʹaurai lʹhonneur <strong>de</strong> vous présenter M. lʹabbé dʹArbois <strong>de</strong> Jubainville, actuellement aumô‐<br />

nier <strong>de</strong> notre maison <strong>de</strong>s jeunes ouvriers <strong>de</strong> Nazareth, lequel me semblerait propre à rem‐<br />

plir les emplois que vous nous <strong>de</strong>stinez. Il nʹa que 28 ans, mais il a <strong>de</strong> la maturité, un sens<br />

très droit, <strong>de</strong>s talents et une culture dʹesprit très convenables, une piété et une vertu peu<br />

communes. Jʹespère quʹaidé <strong>de</strong> vos conseils, soutenu par votre bienveillance, il ferait sans<br />

tapage, mais doucement et sûrement, sa place dans les œuvres quʹil aurait à diriger.<br />

Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> vous dire, Monseigneur, quʹil nʹest point <strong>de</strong> lieu où il nous soit<br />

plus attrayant <strong>de</strong> nous établir que celui où nous serons sous votre juridiction. Nous nous<br />

écrierons assurément, comme en lʹévangile <strong>de</strong> <strong>de</strong>main: Seigneur, nous sommes bien ici,<br />

faisons‐y trois tentes 369 ; je nʹai quant à moi quʹun regret, cʹest quʹaucune <strong>de</strong> ces tentes ne se‐<br />

ra pour moi; mais comment me plaindrais‐je puisque mes enfants y seront, et puisque je<br />

vais moi‐même vous rendre visite dans quelques jours et solliciter une fois encore vos<br />

conseils, vos encouragements et votre paternelle bénédiction.<br />

Je suis, Monseigneur, dans cette attente, <strong>avec</strong> un profond et tendre respect<br />

Votre humble serviteur et fils en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P tre<br />

986‐2 à M gr Angebault<br />

MLP. se confond en remerciements après lʹaccueil que lui a réservé Mgr Angebault. Il espère que M. dʹArbois<br />

fera à Angers le bien que Mgr attend <strong>de</strong> lʹInstitut.<br />

Vaugirard, 17 mars 1865<br />

Monseigneur,<br />

A lʹarrivée, et après avoir remercié Dieu qui nous a si bien protégés pour notre<br />

voyage, je me sens pressé aussi <strong>de</strong> vous dire toute notre vive reconnaissance pour les mille<br />

369 Lc 9, 33.<br />

1016


ontés dont vous nous avez comblés, mon cher compagnon et moi. Je ne me souviens pas<br />

dʹavoir reçu jamais <strong>de</strong> si aimable accueil si ce nʹest dans la maison paternelle dont lʹimage<br />

est déjà bien loin <strong>de</strong> moi; votre douce con<strong>de</strong>scendance, Monseigneur, lʹa fait revivre pour<br />

moi durant les quelques instants que nous avons passés près <strong>de</strong> vous. Nous avons été bien<br />

touchés également <strong>de</strong> la cordiale bienveillance <strong>de</strong> cet entourage si digne et si choisi que le<br />

Seigneur vous a donné pour la consolation <strong>de</strong> votre cœur et pour secon<strong>de</strong>r votre zèle pas‐<br />

toral. Permettez‐moi, Monseigneur, dʹexprimer ici notre gratitu<strong>de</strong> à tous ces MM. pour<br />

leur encourageante sympathie.<br />

Tant <strong>de</strong> bienveillance et dʹappuis accroissent nos obligations déjà bien gran<strong>de</strong>s en‐<br />

vers vous, Monseigneur, aussi allons‐nous faire tous nos efforts pour réunir le personnel<br />

qui sera nécessaire au service <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux œuvres que vous consentez à nous confier.<br />

Je vais aussi me mettre en mesure au plus tôt près <strong>de</strong> lʹArchevêché afin dʹobtenir les<br />

permissions dont M. dʹArbois aura besoin.<br />

Jʹespère, Monseigneur, que ce bon ami nʹaura point fait sur vous une impression dé‐<br />

favorable; il est encore un peu jeune mais ce défaut est passager et dʹailleurs ce jeune prê‐<br />

tre a du sang‐froid, <strong>de</strong> la réflexion et surtout beaucoup <strong>de</strong> docilité; <strong>avec</strong> vos conseils quʹil<br />

suivra fidèlement, jʹespère, et Dieu lʹaidant surtout, quʹil réussira à faire le bien que votre<br />

ar<strong>de</strong>nte charité désire.<br />

Veuillez agréer, Monseigneur, les respects <strong>de</strong> toute notre, je dirai votre petite fa‐<br />

mille, et la vénération profon<strong>de</strong> <strong>avec</strong> laquelle je suis<br />

Votre humble serviteur et dévoué fils en J.M.J.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P tre<br />

987 à M. Baudon<br />

MLP. expose <strong>de</strong> nouveau la position <strong>de</strong> lʹInstitut vis‐à‐vis <strong>de</strong>s changements que la SSVP. veut introduire dans la<br />

conduite <strong>de</strong>s Œuvres.<br />

Vaugirard, 22 mars 1865<br />

Monsieur et Vénéré Confrère,<br />

Je trouve, au retour dʹun voyage <strong>de</strong> quelques jours que jʹai été obligé <strong>de</strong> faire, la let‐<br />

tre que vous mʹavez fait lʹhonneur <strong>de</strong> mʹécrire le 15 <strong>de</strong> ce mois, relativement aux œuvres<br />

<strong>de</strong> patronage et à la part que notre Communauté est appelée à y prendre.<br />

La forme <strong>de</strong> cette lettre est si cordiale et si bienveillante que cʹest un regret sincère<br />

pour moi <strong>de</strong> nʹen pouvoir accepter entièrement, quant au fond, les conclusions; permettez‐<br />

moi dʹajouter aussi quʹelles sʹéloignent bien <strong>de</strong>s dispositions conciliantes <strong>de</strong> lʹentrevue qui<br />

nous avait rassemblés chez vous.<br />

Jʹadmets <strong>avec</strong> vous que le Prési<strong>de</strong>nt doit prési<strong>de</strong>r, mais il ne doit pas diriger, et cʹest<br />

ce quʹil fait, à mon sens, quand il suit le Directeur jusque dans les minutieux détails <strong>de</strong> son<br />

action et quʹil se substitue conséquemment à lui.<br />

Du reste, Monsieur et Vénéré Confrère, je nʹinsiste pas sur ces définitions que cha‐<br />

cun interprète selon ses vues et qui nʹauraient point <strong>de</strong> solution. La question, pour nous, se<br />

réduit, ce me semble, à ces termes: nos charges et dépendances dans les œuvres que nous<br />

faisons en commun <strong>avec</strong> la Société nous paraissent déjà suffisamment graves, ainsi que jʹai<br />

eu lʹhonneur <strong>de</strong> vous lʹécrire, et nous ne pouvons consentir à les accroître; la situation qui<br />

nous a été constamment donnée <strong>de</strong>puis 20 ans dans ces œuvres ne saurait être modifiée<br />

1017


sans notre assentiment, et nous nous croyons obligés, dans lʹintérêt du bien, <strong>de</strong> rejeter les<br />

changements quʹon voudrait y introduire aujourdʹhui. Nous ne prétendons pas que les<br />

formes et combinaisons du patronage soient à tout jamais réglées et quʹelles ne soient pas<br />

susceptibles <strong>de</strong> simplifications et améliorations successives; lʹexpérience peut nous appor‐<br />

ter à ce sujet <strong>de</strong> précieuses lumières. Dans cette vue peut‐être, et dans un esprit <strong>de</strong> conci‐<br />

liation surtout, nous avons accepté à S te ‐Anne les essais dʹun nouveau régime; nous<br />

nʹavons pas résolu quʹils ne seraient pas encore possibles pour nous ailleurs, mais nous<br />

avons besoin <strong>de</strong> voir à lʹépreuve, durant quelques années, ce mo<strong>de</strong> dʹopération avant <strong>de</strong><br />

réformer les procédés par lesquels, <strong>de</strong>puis si longtemps, nous avons obtenu dʹheureux ré‐<br />

sultats.<br />

Je pense comme vous, Monsieur et Vénéré Confrère, que les points <strong>de</strong> séparation ne<br />

sont pas tels entre nous quʹils doivent empêcher notre action commune dans les œuvres;<br />

ce serait à condition, toutefois, que, déposant <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts toute défiance, on travaille‐<br />

rait, comme par le passé, <strong>avec</strong> une sincère charité et <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s prévenances réciproques;<br />

quʹen désignant notamment les Prési<strong>de</strong>nts et Vice‐Prési<strong>de</strong>nts, la Société aurait <strong>avec</strong> nous<br />

quelque entente, comme nous le ferions également <strong>avec</strong> elle pour le choix <strong>de</strong>s aumôniers<br />

et <strong>de</strong>s Directeurs. En cette disposition, rien ne semblerait faire obstacle aux cordiales sym‐<br />

pathies qui avaient jusquʹici uni nos efforts pour la gloire <strong>de</strong> Dieu et le bien <strong>de</strong>s âmes.<br />

Veuillez agréer, Monsieur et Vénéré Confrère, les assurances du respect et <strong>de</strong> lʹinal‐<br />

térable dévouement <strong>avec</strong> lesquels je suis<br />

Votre humble serviteur et Confrère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

988 à M. Risse<br />

La vie <strong>de</strong> communauté à Metz. Sérieux <strong>de</strong> lʹapostolat auprès <strong>de</strong>s jeunes gens; effort <strong>de</strong> chacun pour dominer les<br />

saillies <strong>de</strong> la nature ; esprit <strong>de</strong> sacrifice <strong>de</strong> M. Risse. Serait à corriger ʺun peu <strong>de</strong> disposition au blâme plutôt<br />

quʹà lʹencouragementʺ. Il pourrait retirer un frère pour le nommer à Angers. MLP. dit son bonheur <strong>de</strong> travailler<br />

et <strong>de</strong> souffrir pour Dieu: ʺil y a tant à expier, tant à <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r, tant dʹactions <strong>de</strong> grâces à rendreʺ.<br />

Vaugirard, 28 mars 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je suis en retard pour vous répondre; votre lettre, affectueuse et bonne comme tou‐<br />

jours, appelait un prompt retour et voilà que, bien malgré moi, je le fais bien attendre.<br />

Pardonnez‐moi, bien cher ami, jʹai été plus que <strong>de</strong> coutume, cet hiver, chargé dʹaffaires et<br />

<strong>de</strong> mille soins presque tous contrariants et pénibles qui nous ont rendu la vie ru<strong>de</strong> et labo‐<br />

rieuse; ces jours‐ci, en particulier, jʹai eu <strong>de</strong>s dérangements multipliés; un petit voyage fait<br />

à Angers, comme M. Lantiez vous lʹa dit, mʹa encore mis en retard; en un mot, jʹavais votre<br />

lettre sous mes yeux, ma volonté y faisait réponse, mais elle ne trouvait aucun organe pour<br />

la secon<strong>de</strong>r.<br />

Je suis heureux, bien cher ami, que la visite <strong>de</strong> M. Lantiez vous ait fait quelque bien;<br />

il vous porte à tous une gran<strong>de</strong> affection, il est revenu lui‐même content <strong>de</strong> ce quʹil avait<br />

vu et entendu; vos bons jeunes gens le touchent par leur droiture et leur instinct du bien, il<br />

les trouve sociables et faciles à conduire. Il juge bons aussi, en ensemble, les procédés <strong>de</strong><br />

lʹœuvre; elle produit déjà bien <strong>de</strong>s fruits, ayons la confiance que, par la patience et <strong>avec</strong> la<br />

grâce <strong>de</strong> Dieu, elle en produira davantage encore.<br />

1018


Pour votre petit intérieur <strong>de</strong> communauté, il nʹy trouve que <strong>de</strong> bons éléments; il a la<br />

confiance que, si chacun continue à faire <strong>de</strong> sincères et courageux efforts pour dominer les<br />

saillies <strong>de</strong> la nature, la paix et la charité régneront parmi vous. Il rend bien justice à votre<br />

généreux esprit <strong>de</strong> sacrifice, à votre cordial et constant bon vouloir; il y a en vous, dit‐il,<br />

une âme <strong>de</strong> Père; comme unique part faite à lʹimperfection, il pense que le poids <strong>de</strong> votre<br />

responsabilité, <strong>de</strong> vos charges, <strong>de</strong>s difficultés <strong>de</strong> chaque jour vous accable assez souvent et<br />

assombrit un peu votre humeur, dʹoù, peut‐être, un peu <strong>de</strong> disposition au blâme plutôt<br />

quʹà lʹencouragement <strong>de</strong> ceux qui vous entourent, quelque difficulté aussi à supporter la<br />

contradiction. Vous prendrez, bien cher ami, ces remarques comme je les donne et comme<br />

les fait lui‐même lʹabbé Lantiez. Cʹest le tribut que paie notre humanité à sa faiblesse, cʹest<br />

le défaut quʹont, sans doute, plus gran<strong>de</strong>ment que vous ceux qui les signalent ici en autrui.<br />

On nʹa guère dʹailleurs besoin <strong>de</strong> vous signaler les quelques points défectueux qui se peu‐<br />

vent rencontrer en vous, vous êtes le premier à les accuser et à y remédier <strong>de</strong> votre mieux;<br />

Dieu et sa grâce ne délaissent jamais les âmes désireuses <strong>de</strong> sʹamen<strong>de</strong>r.<br />

M. Lantiez paraissait croire que M. <strong>Jean</strong> [Gauffriau] sʹoccuperait <strong>avec</strong> plus dʹintérêt<br />

encore <strong>de</strong>s jeunes gens si vous lui donniez quelque part à leur direction et conduite spiri‐<br />

tuelle; sʹil est jeune dans les choses indifférentes, il ne saurait lʹêtre pour ce qui regar<strong>de</strong> le<br />

bien <strong>de</strong>s âmes; il aurait aussi, sans doute, la pru<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> consulter si, par occasion, il ren‐<br />

contrait quelque cas difficile.<br />

Je crains, malgré tout le désir que jʹai <strong>de</strong> vous épargner ces contrariétés, dʹêtre<br />

contraint <strong>de</strong> vous re<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r (sauf à le remplacer) M. Guillot ou M. <strong>Jean</strong>, le premier <strong>de</strong><br />

préférence. Ce nʹest pas chose décidée, car votre répugnance pour cet arrangement est<br />

dʹun grand poids pour moi; jʹessaie toutes sortes <strong>de</strong> combinaisons, je nʹen vois aucune <strong>de</strong><br />

bonne, mais je prie Dieu <strong>de</strong> mʹéclairer; je vous épargnerai cette contrariété, si je le puis; si‐<br />

non, je tâcherai <strong>de</strong> remplacer <strong>de</strong> mon mieux celui que jʹaurai repris à Metz. Vous savez que<br />

cʹest pour Angers que sʹélabore lʹenvoi dʹune toute petite colonie; mieux vaut, je crois, ne<br />

pas ébruiter ce projet. Savez‐vous où en sont les affaires <strong>de</strong> M. Morel? M. Lantiez lui a<br />

proposé pour remplaçant M. Boucault, que la mort <strong>de</strong> son père et dʹautres circonstances<br />

obligent à prendre une position qui lui crée quelques ressources. Cʹest un homme intelli‐<br />

gent, dʹune rare délicatesse et très actif, suffisamment instruit, faisant bien la correspon‐<br />

dance; je crois quʹune place comme celle <strong>de</strong> M. Morel serait absolument son fait. Si M. Mo‐<br />

rel se décidait bientôt, peut‐être quʹen faisant un postulat prolongé chez vous, il pourrait<br />

combler un vi<strong>de</strong>, ou bien il rendrait le même service dans une autre <strong>de</strong> nos maisons? Di‐<br />

tes‐moi où en sont les choses.<br />

Et Vion, que <strong>de</strong>vient‐il? Si cʹétaient les frais <strong>de</strong> voyage qui lui fissent difficulté, vous<br />

pourriez lui avancer ce qui lui manquerait et je vous le rembourserais immédiatement,<br />

mais en lui laissant à entendre que ce serait à mesure <strong>de</strong>s services quʹil rendrait à nos œu‐<br />

vres.<br />

Voilà quʹil est tard, il faut que je finisse; je suis si dérangé durant le jour que je nʹai<br />

guère <strong>de</strong> libres que les heures du soir. Et pourtant, point <strong>de</strong> plainte, ne sommes‐nous pas<br />

trop heureux <strong>de</strong> travailler un peu, <strong>de</strong> souffrir un peu pour Dieu; on a tant à expier, tant à<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r, tant dʹactions <strong>de</strong> grâces à rendre et pour tout cela si peu à offrir; disons <strong>avec</strong><br />

Tobie: Si nous avons peu, ce que nous avons, donnons‐le <strong>de</strong> bon cœur 370 .<br />

370 Cf. Tb 4, 8.<br />

1019


Mille tendresses à vous et à tous; nos retraites commencent <strong>de</strong> toutes parts, prions<br />

bien pour que le Seigneur fasse une ample moisson <strong>de</strong> cœurs.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en J., M., J.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Faÿ pense que Cauroy pourra venir assez prochainement ici. M. <strong>Jean</strong> se trouve‐<br />

rait déchargé dʹautant, nʹayant plus <strong>de</strong> classe à lui faire.<br />

989 à M. Decaux<br />

La prochaine fondation à Angers <strong>de</strong>vrait entraîner pour Nazareth quelques changements <strong>de</strong> personnel, que MLP.<br />

justifie aux yeux <strong>de</strong> son jeune Confrère et ami.<br />

Vaugirard, 5 avril 1865<br />

Mon cher ami,<br />

Je viens vous proposer <strong>de</strong>ux changements dans le personnel <strong>de</strong>s frères qui concou‐<br />

rent à lʹœuvre du patronage; je vous dirai un peu au long les circonstances qui mʹy obli‐<br />

gent, afin que vous puissiez les apprécier.<br />

Je ne sais si vous nous avez entendu dire, à lʹoccasion, que Mgr lʹEvêque dʹAngers<br />

avait toujours été considéré par nous comme le protecteur et le père <strong>de</strong> notre petite<br />

Congrégation. Il a contribué à sa fondation en nous donnant M. Myionnet quʹil dirigeait, et<br />

sur lequel il avait lui‐même <strong>de</strong>s vues. Il vint alors à Paris pour bénir M. Myionnet, M.<br />

Maignen et moi qui commencions la famille, et <strong>de</strong>puis il nʹa cessé <strong>de</strong> nous favoriser par ses<br />

entremises bienveillantes et par les conseils <strong>de</strong> sa haute expérience. Il ne vient jamais à Pa‐<br />

ris sans nous visiter, nous exhorter et nous donner, en un mot, toutes les marques dʹune<br />

bonté vraiment paternelle. En différents temps, il avait marqué le désir que nous pussions<br />

établir sous ses yeux une petite colonie à Angers, et divers plans ont été présentés, dʹépo‐<br />

que à autre, dans ce sens; leur réalisation a toujours rencontré quelques difficultés. En <strong>de</strong>r‐<br />

nier lieu, ce Vénérable Evêque nous a <strong>de</strong>mandé <strong>de</strong> nous charger du patronage <strong>de</strong>s jeunes<br />

ouvriers qui avait été fondé par M. lʹabbé Leboucher sous le nom <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong>s Champs et<br />

qui, <strong>de</strong>puis sa retraite, avait un peu souffert. Mgr Angebault a insisté <strong>avec</strong> la plus aimable<br />

bonté pour que nous acceptions cette occasion <strong>de</strong> nous rapprocher <strong>de</strong> lui, nous rappelant,<br />

comme il lʹavait fait plusieurs fois déjà, quʹil était bien vieux, que nous <strong>de</strong>vions nous hâter<br />

si nous voulions quʹil bénît notre établissement dans sa ville épiscopale. Il nous a semblé<br />

que nous <strong>de</strong>vions aux bienfaits si multipliés <strong>de</strong> ce saint Evêque et à la protection dont il<br />

nous a constamment couverts <strong>de</strong> rendre quelques services à une œuvre à laquelle il porte<br />

un vif intérêt; nous avons donc promis que, malgré nos charges et notre petit nombre,<br />

nous ferions un effort courageux pour répondre à son attente.<br />

Lʹœuvre <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong>s Champs étant, comme je lʹai dit, en souffrance, il lui faut <strong>de</strong>ux<br />

hommes habitués dès longtemps aux formes et usages <strong>de</strong>s patronages, si lʹon veut avoir<br />

chance <strong>de</strong> la relever; il nous a paru, après essai et rejet <strong>de</strong> diverses combinaisons, que MM.<br />

dʹArbois et Moutier pourraient sʹen acquitter avantageusement et nous nous sommes arrê‐<br />

tés à ce choix. Nous les remplacerions, le premier par M. lʹabbé Braun, le second par notre<br />

jeune Derny, encore nouveau parmi nous, mais que la solidité <strong>de</strong> son caractère et sa lon‐<br />

gue expérience du patronage ren<strong>de</strong>nt digne <strong>de</strong> cette marque <strong>de</strong> confiance. Pour combler le<br />

vi<strong>de</strong> quʹil laisserait lui‐même à Nazareth, nous donnerions comme ai<strong>de</strong> à MM. Maignen et<br />

1020


Vasseur dans cette œuvre un très bon jeune homme qui est déjà <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux ans chez<br />

nous, M. Lucien Jacquart, lequel pourra, après quelque temps passé dans les patronages, y<br />

rendre <strong>de</strong>s services essentiels.<br />

Voilà ce que nous avons pu arranger pour le mieux; nous avions pensé à M. Rous‐<br />

sel, à dʹautres moyens encore, ils ont été jugés peu praticables après examen attentif. Jʹai<br />

tenu, mon cher ami, à vous donner ces détails circonstanciés, afin que vous jugiez par<br />

vous‐même, et <strong>de</strong> lʹobligation que nous avions <strong>de</strong> reconnaître les mille bontés <strong>de</strong> M gr<br />

dʹAngers pour nous, et <strong>de</strong> la nécessité où nous étions <strong>de</strong> lui donner <strong>de</strong>s sujets ayant une<br />

aptitu<strong>de</strong> particulière pour les patronages. Il ne sera pas impossible, je crois, quand N.D.<br />

<strong>de</strong>s Champs aura été, <strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> Dieu, remise en bon état, <strong>de</strong> rappeler M. Moutier à Pa‐<br />

ris, si ces services y étaient jugés plus utiles quʹà Angers.<br />

Je désire, mon cher ami, que ces dispositions soient bien motivées à vos yeux et que<br />

vous restiez persuadé <strong>de</strong> notre sincère désir <strong>de</strong> ne rien faire au détriment <strong>de</strong>s œuvres aux‐<br />

quelles vous accor<strong>de</strong>z ici vos soins si dévoués.<br />

Je suis bien sincèrement en N.S.<br />

Votre dévoué serviteur et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Lʹéloignement <strong>de</strong> M. Moutier sera moins sensible sʹil se fait <strong>avec</strong> transition; ma<br />

pensée serait donc dʹenvoyer dès dimanche, et plusieurs semaines <strong>de</strong> suite, M. Derny à S te ‐<br />

Anne, afin quʹil prît bien connaissance <strong>de</strong> la position; nous ne <strong>de</strong>vons aller à Angers que<br />

dans la première quinzaine <strong>de</strong> mai.<br />

990 à M. Caille<br />

Abattu, découragé, le frère Legrand veut quitter lʹInstitut pour entrer comme frère chez les Jésuites. MLP. ex‐<br />

horte M. Caille à intervenir lui‐même par lettre et auprès dʹun prêtre <strong>de</strong> confiance, pour quʹil surmonte son<br />

épreuve et retrouve la paix.<br />

Vaugirard, 6 avril 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Vous apprendrez <strong>avec</strong> peine que notre cher Alexandre Legrand si dévoué, si exact<br />

en tout dʹordinaire, est en ce moment tout démonté et tellement découragé quʹil est allé<br />

sʹoffrir comme frère coadjuteur chez les pp. Jésuites, et quʹil paraît très décidé en ce mo‐<br />

ment à nous quitter. Jʹai essayé quelques observations, mais il est buté, il mʹévite et refuse<br />

dʹentendre raison. La cause <strong>de</strong> cette triste disposition est le dégoût quʹil a pour lʹenseigne‐<br />

ment; il y éprouvait très souvent <strong>de</strong>s peines, mais il me les disait, je lʹencourageais, il pa‐<br />

raissait se tranquilliser; mais il semble bien maintenant quʹau fond il ne lʹétait pas; les en‐<br />

nuis ainsi gardés intérieurement se sont grossis et amassés, il a cessé <strong>de</strong> venir en direction,<br />

et enfin il sʹest trouvé tout à fait hors <strong>de</strong> sa voie. Je le soupçonnais dʹautant moins que<br />

maintes et maintes fois je lui avais dit: “Portez tant que vous le pourrez le far<strong>de</strong>au <strong>de</strong> votre<br />

emploi, mais, pour vous tranquilliser, rappelez‐vous bien cette promesse: dès que vous<br />

vous sentirez définitivement trop chargé par ces fonctions, avertissez‐moi et, à lʹinstant, je<br />

vous changerai dʹoccupation”.<br />

Je viens <strong>de</strong> transmettre au r.p. Charlet une lettre quʹil lui écrit pour lʹavertir <strong>de</strong> sa ré‐<br />

solution <strong>de</strong> nous quitter et dʹentrer comme frère chez les Jésuites; je vous prie <strong>de</strong> voir ce<br />

1021


on père et dʹen conférer <strong>avec</strong> lui, en le priant dʹuser <strong>de</strong> son influence pour le remettre en<br />

paix. Jʹai pris mes mesures pour le retirer <strong>de</strong>s classes, mais il est en ce moment si mal dis‐<br />

posé quʹil ne paraît vouloir rien prendre en bonne part. Nous lui avons tous et toujours<br />

pourtant, moi en particulier, montré confiance, affection et sollicitu<strong>de</strong>; il répond mal à no‐<br />

tre attachement pour lui.<br />

Ce nʹest, je lʹespère encore, quʹune épreuve; je crois que, si vous lui écriviez une let‐<br />

tre cordiale et paternelle, vous auriez peut‐être meilleur succès que nous. Priez surtout<br />

pour lui, car tous les mouvements <strong>de</strong>s hommes sont impuissants là où nʹest pas lʹaction <strong>de</strong> Dieu.<br />

Adieu, mon bien bon ami, jʹespère que tout va bien chez vous; embrassez pour moi<br />

vos frères comme je vous embrasse vous‐même dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M..<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

990‐1 à Mgr Dupanloup<br />

MLP. <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à lʹévêque dʹOrléans dʹinscrire comme candidat au sacerdoce le frère Boiry, originaire <strong>de</strong> son<br />

diocèse.<br />

Vaugirard, 8 avril 1865<br />

Monseigneur,<br />

Je suis profondément reconnaissant <strong>de</strong> la prompte et favorable réponse que Votre<br />

Gran<strong>de</strong>ur a daigné me faire relativement au jeune Edouard Boiry, né à Fleury, et attaché à<br />

notre petite Congrégation <strong>de</strong> St‐Vincent <strong>de</strong> Paul.<br />

Je vous prie, Monseigneur, dʹavoir la bonté <strong>de</strong> lʹinscrire, ainsi que vous voulez bien<br />

me lʹoffrir, parmi vos étudiants pour le sacerdoce et <strong>de</strong> me faire parvenir aussitôt que pos‐<br />

sible le certificat qui assurera son exonération.<br />

Je suis, <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s sentiments <strong>de</strong> vénération et <strong>de</strong> sincère dévouement, Monseigneur,<br />

<strong>de</strong> Votre Gran<strong>de</strong>ur,<br />

Le très humble et très obéissant serviteur,<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

991 à M. Caille<br />

Le frère Legrand a triomphé <strong>de</strong> sa tentation <strong>de</strong> quitter la Communauté. Il sʹen remet au jugement <strong>de</strong>s Supérieurs,<br />

qui pensent lʹenvoyer à Angers.<br />

Vaugirard, 10 avril 1865<br />

Mon bon ami et fils en N.S.,<br />

Notre cher Alexandre [Legrand] a ouvert les yeux et il a reconnu que son découra‐<br />

gement nʹétait quʹune tentation; il est donc bien rentré en lui‐même et a repris toutes ses<br />

bonnes dispositions. Une lettre paternelle et pleine <strong>de</strong> sagesse que lui a écrite le r.p. Char‐<br />

let a beaucoup contribué à cet heureux résultat. Il nous a avoué que la seule cause <strong>de</strong> son<br />

abattement venait <strong>de</strong>s difficultés quʹil éprouve à faire la classe; mais il sʹest montré néan‐<br />

moins très disposé à rester en cet emploi tant que nous croirions <strong>de</strong>voir lʹy maintenir.<br />

Satisfaits, <strong>de</strong> notre côté, <strong>de</strong> cet acte <strong>de</strong> soumission, nous sommes décidés à lui don‐<br />

ner dʹautres fonctions. Je crois quʹil ira à Angers où nous <strong>de</strong>vons, vous le savez, prendre<br />

<strong>de</strong>ux œuvres après Pâques.<br />

1022


Notre retraite <strong>de</strong> Communauté commencera le dimanche au soir, 7 mai; vous verrez<br />

quels sont ceux <strong>de</strong> votre maison qui auront à y prendre part.<br />

Mille affections à vous et à vos frères.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹécris au r.p. Charlet pour le remercier.<br />

992 à M. Vasseur<br />

MLP. assure M. Vasseur <strong>de</strong> sa prière à lʹoccasion <strong>de</strong> la maladie <strong>de</strong> son père. Vu ses occupations impérieuses, le<br />

frère a eu raison <strong>de</strong> ne pas se déplacer.<br />

13 avril [1865]<br />

Je pense <strong>avec</strong> vous, mon cher enfant, que vos occupations si impérieuses en ce mo‐<br />

ment indiquent la volonté <strong>de</strong> Dieu sur la conduite que vous avez à tenir dans la maladie<br />

<strong>de</strong> votre bon père; il faut avant tout prier pour lui, et ensuite écrire à votre frère aîné vos<br />

empêchements si réels, et en même temps lui recomman<strong>de</strong>r <strong>de</strong> veiller aux intérêts spiri‐<br />

tuels du pauvre mala<strong>de</strong>. Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> vous dire que nous sommes tous ici en union<br />

<strong>avec</strong> vous, je lʹai recommandé moi‐même à nos frères, et M. Myionnet <strong>de</strong>man<strong>de</strong> aussi les<br />

prières <strong>de</strong> nos enfants. Jésus, Marie, Joseph veilleront, je lʹespère, sur ce bon père, soit pour<br />

sa guérison, soit pour son heureuse et chrétienne mort.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

992‐1 à M gr Angebault<br />

MLP. fournit à lʹévêque dʹAngers <strong>de</strong>s renseignemens concernant les fondations à Angers. Le jour dʹarrivée <strong>de</strong>s<br />

frères serait fixé au 8 mai.<br />

Vaugirard, 19 avril 1865<br />

Monseigneur,<br />

Les travaux ou occupations plus quʹordinaires <strong>de</strong>s saints jours que nous traversons<br />

mʹont empêché <strong>de</strong> répondre sans aucun retard, comme je lʹaurais voulu, à votre aimable<br />

lettre du 14 <strong>de</strong> ce mois.<br />

Je suis heureux <strong>de</strong> vous redire, Monseigneur, que pour nous, aller près <strong>de</strong> vous,<br />

établir une petite colonie, ce nʹest ni un sacrifice, ni une sollicitu<strong>de</strong>, notre cœur nous y por‐<br />

tait, nous avions une <strong>de</strong>tte <strong>de</strong> reconnaissance à acquitter, nous bénirons Dieu si nous pou‐<br />

vons, malgré notre insuffisance, être un peu utiles aux œuvres que votre sage et paternelle<br />

administration a si gran<strong>de</strong>ment favorisées dans votre diocèse. Nous comprenons lʹimpor‐<br />

tance <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux établissements que vous daignez nous confier et nous donnerons nos soins<br />

à lʹun et à lʹautre <strong>avec</strong> tout le bon vouloir possible.<br />

Je pense que pour les enfants <strong>de</strong> la Psallette371 en particulier, lʹun <strong>de</strong> nos jeunes frè‐<br />

res <strong>de</strong>stinés pour Angers pourrait leur donner quelques répétitions <strong>de</strong> plain chant; la<br />

chose sera surtout praticable si la fabrique peut prêter à la Psalette un très petit orgue dʹac‐<br />

371 Enfants <strong>de</strong> chœur <strong>de</strong> la cathédrale d’Angers. Cf. VLP., II, p. 224 et 226.<br />

1023


compagnement <strong>de</strong> ceux quʹon emploie dʹordinaire pour les répétitions et dont le prix varie<br />

entre 150 et 200f.<br />

Nos jeunes gens, lʹabbé dʹArbois en tête, comptent bien arriver à Angers le 8 mai;<br />

cʹest un chagrin pour eux et pour moi <strong>de</strong> penser que vous serez déjà parti, Monseigneur,<br />

pour vos tournées épiscopales; mais vous ne serez pas bien loin et ils auront lʹespoir que<br />

votre absence ne les tiendra pas longtemps séparés <strong>de</strong> vous. Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> dʹavance<br />

pour eux votre bénédiction et je mʹincline moi‐même <strong>avec</strong> le reste <strong>de</strong> la famille pour la re‐<br />

cevoir.<br />

Je suis, Monseigneur, <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s sentiments <strong>de</strong> profon<strong>de</strong> vénération<br />

Votre humble serviteur et dévoué fils en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

993 à M. Caille<br />

Retraite <strong>de</strong> Communauté. Nouvelles <strong>de</strong>s frères. MLP. déci<strong>de</strong> dʹécarter M. Carment qui ne lui ʺparaît pas avoir<br />

les dispositions essentielles pour la vie <strong>de</strong> communautéʺ.<br />

27 avril 1865<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Il paraît certain que notre retraite va être retardée <strong>de</strong> 8 jours; le r.p. Doucet, qui nous<br />

la donne, nous a déclaré quʹil ne pourrait la commencer que le dimanche 7, au soir. On<br />

consentait, pour éviter ce dérangement, à nous donner un autre Père, mais, comme <strong>de</strong>s<br />

renseignements très bons nous avaient été donnés sur le r.p. Doucet, nous aimons mieux<br />

nous assurer sa direction.<br />

Ceux <strong>de</strong> nos frères qui vont à Angers feront leur retraite en particulier dʹavance.<br />

M. Guillot et M. <strong>Jean</strong> [Gauffriau] viennent dʹarriver, mais, provi<strong>de</strong>ntiellement, M.<br />

Risse avait jugé quʹils pouvaient faire ici un petit séjour <strong>de</strong> repos et <strong>de</strong> dilatation.<br />

M. Alexandre [Legrand] va bien.<br />

Jʹai écrit aujourdʹhui à M. Carment, en réponse à une lettre quʹil mʹavait adressée<br />

lui‐même concernant sa position à lʹégard <strong>de</strong> la Communauté. Je lui dis, en termes affec‐<br />

tueux mais précis pourtant, que, <strong>de</strong> notre avis unanime, il ne paraît pas avoir les disposi‐<br />

tions essentielles pour la vie <strong>de</strong> Communauté et que ses qualités le rendraient plus propre,<br />

à notre sens, à la vie du mon<strong>de</strong>. Il en paraît être très contristé, mais il fallait bien lui parler<br />

sincèrement.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

994 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Cérémonie <strong>de</strong>s premiers vœux <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax.<br />

Vaugirard, 11 mai 1865<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Je nʹai pas encore consulté le r.p. <strong>de</strong> la retraite sur lʹheure <strong>de</strong> la messe <strong>de</strong>main<br />

[messe <strong>de</strong>s premiers vœux <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax], mais je crois bien que ce sera pour 7h., comme<br />

<strong>de</strong> coutume. Sʹil en était autrement, je vous en ferais avertir.<br />

1024


Nous nous réjouissons bien <strong>de</strong> vous voir quelques instants ce soir et, plus encore, <strong>de</strong><br />

prier tous en famille <strong>de</strong>main.<br />

Je suis touché <strong>de</strong> votre petite lettre. Jʹespère que lʹesprit du Seigneur est au fond <strong>de</strong><br />

votre cœur, cʹest pourquoi je mʹy tiens en pensée, dans une douce et tendre union <strong>avec</strong> Lui<br />

et <strong>avec</strong> vous.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

pect.<br />

Nous serons honorés <strong>de</strong> la présence <strong>de</strong> M. Thibault 372 ; offrez‐lui mon profond res‐<br />

995 à M. dʹArbois<br />

Organisation <strong>de</strong> lʹŒuvre dʹAngers. Confession et direction spirituelle <strong>de</strong>s enfants. MLP. livre ses impressions<br />

sur le prédicateur <strong>de</strong> la <strong>de</strong>rnière retraite.<br />

Vaugirard, 12 mai 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Lantiez et moi pensons, ayant prié, quʹil faut laisser à M. Pessard la confession<br />

<strong>de</strong>s enfants <strong>de</strong> la Psalette en vous réservant seulement <strong>de</strong> leur faire, tous les trois mois, un<br />

petit exercice <strong>de</strong> piété pour les préparer à une confession extraordinaire quʹils seraient in‐<br />

vités, mais non contraints, <strong>de</strong> faire à vous. Il va sans dire quʹétant vos élèves, vous aurez la<br />

ressource, pour influer sur eux, <strong>de</strong> les attirer doucement en direction, soit régulièrement,<br />

soit selon le besoin que vous constaterez; vous aurez, sans doute, en outre le catéchisme ou<br />

instruction religieuse; ces moyens semblent suffisants et nʹauront pas lʹinconvénient dʹune<br />

confession inévitable pour ces enfants au Directeur qui les comman<strong>de</strong> journellement.<br />

Pour N.D. <strong>de</strong>s Champs, la question sera à examiner particulièrement; il me semble<br />

que les jeunes gens <strong>de</strong>vraient au moins y être libres <strong>de</strong> sʹadresser au Directeur ecclésiasti‐<br />

que <strong>de</strong> lʹŒuvre, sʹils en ont lʹattrait.<br />

Pour M. le Préfet, je <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rai à Mgr , quand il sera <strong>de</strong> retour, sʹil trouve à propos<br />

que vous preniez les <strong>de</strong>vants par quelque démarche qui tranquillisera ce fonctionnaire.<br />

Je suis heureux <strong>de</strong> tout ce que vous me dites <strong>de</strong> satisfaisant; nos jeunes frères parti‐<br />

ront <strong>de</strong>main au soir pour vous arriver dimanche matin.<br />

Notre retraite se fait péniblement; le r.p. [Doucet] est fatigué, très austère dans son<br />

langage; cʹest un esprit éclairé et distingué, mais il nʹa dans son enseignement aucune<br />

forme aimable et persuasive; lʹœuvre se fera néanmoins, je le crois, dans les âmes, mais par<br />

Dieu seul et presque sans agent secondaire.<br />

Priez beaucoup pour nous et embrassez‐vous les uns les autres en N.S. pour vous<br />

unir à la clôture <strong>de</strong> notre retraite. M. <strong>de</strong> Varax y vient pour ses vœux. M. Camus a bien<br />

soutenu lʹépreuve et semble être en très bonne résolution.<br />

Je fais à vous et à mes ff. Emile [Beauvais] et Caron mille affections en J. et M.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

372 Prêtre sulpicien proche du père <strong>de</strong> Varax.<br />

1025


996 à M. Chaverot<br />

Confection dʹune soutane dʹété. Impression finale sur la retraite <strong>de</strong> Communauté.<br />

Vaugirard, 13 mai 1865<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Je vous enverrai, au commencement <strong>de</strong> la semaine, lʹétoffe <strong>de</strong> la soutane dʹété; pour<br />

lʹargent, il reste une centaine <strong>de</strong> francs, mais, la soutane payée, il restera peu <strong>de</strong> chose.<br />

Pour ne pas laisser le terme <strong>de</strong> la pension en souffrance, je vous envoie 500f pour M. <strong>de</strong><br />

Varax et pour vous. Jʹajoute 40f, afin que vous puissiez payer la façon <strong>de</strong> la soutane (je<br />

crois une quinzaine <strong>de</strong> francs) et avoir un peu dʹargent pour vous.<br />

La retraite est finie, en bonne conditions, un peu sévère dans sa forme, mais bonne<br />

en substance et, je lʹespère, utile pour le bien <strong>de</strong>s âmes.<br />

Adieu, bien cher ami, je vais prier encore plus que précé<strong>de</strong>mment pour vous et<br />

pour notre cher M. Bernard [<strong>de</strong> Varax]. Je nʹoublierai pas non plus le bon jeune abbé qui<br />

nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pour lui un souvenir <strong>de</strong>vant Dieu.<br />

Je vous embrasse tendrement en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

997 à M. dʹArbois<br />

MLP. est favorable à la construction dʹune chapelle à lʹŒuvre dʹAngers. Se concerter <strong>avec</strong> Mgr Angebault. Re‐<br />

mercier les Myionnet et aller voir les Pavie.<br />

16 mai [1865]<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Il me reste seulement quelques minutes avant lʹheure <strong>de</strong> la poste.<br />

Je trouve très bien que vous ayez une petite chapelle, cʹétait mon grand désir; très<br />

bien que vous appropriiez un local pour cette <strong>de</strong>stination, simplement, mais décemment.<br />

A Chaville, on a teinté, dans la sacristie, le plafond en bleu un peu pâle, cʹest dʹun bon ef‐<br />

fet.<br />

Cette chapelle sera bien petite pour une réunion <strong>de</strong> congrégation, mais on pourra<br />

commencer ainsi; consultez Mgr relativement à cette congrégation, et aussi M. Bompois<br />

avant <strong>de</strong> changer lʹétat <strong>de</strong>s choses; ce serait mieux que vous lʹayez, mais je crois quʹil faut<br />

aller doucement et nʹavancer que si Mgr et M. Bompois sont <strong>de</strong> cet avis pleinement.<br />

Nous attendions M. Emile [Beauvais] hier lundi; il eût dû dire sʹil a <strong>de</strong>s raisons <strong>de</strong><br />

quelque poids pour prolonger son séjour à Angers plus que nous ne lʹavions prévu.<br />

Mille respects à Mgr <strong>avec</strong> notre profond dévouement et à ces MM. <strong>de</strong> lʹEvêché.<br />

Je serai bien aise que vous voyiez bientôt <strong>de</strong> ma part la famille Pavie, Boulevard du<br />

Lis. Remerciez bien la famille Myionnet pour nous.<br />

Adieu, cher ami, nous vous assurons tous <strong>de</strong> notre tendre affection en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Deux confesseurs à N.D. <strong>de</strong>s Champs ne seront pas <strong>de</strong> trop.<br />

Vous ne nous dites rien <strong>de</strong> la bonne Alsacienne; sʹaccoutume‐t‐elle? Traitez‐la dou‐<br />

cement, elle se fera peu à peu à vos affaires. Une fille honnête, chrétienne et bonne nʹest<br />

pas si facile à trouver. Bon souvenir pour elle.<br />

1026


998 à M gr Angebault<br />

Reconnaissance pour lʹaccueil réservé aux frères. Invitation à venir à Vaugirard.<br />

Vaugirard, 18 mai 1865<br />

Monseigneur,<br />

Nous sommes profondément touchés <strong>de</strong> vos bontés et con<strong>de</strong>scendances pour notre<br />

petite famille dʹAngers; nos jeunes frères en sont profondément reconnaissants et se pro‐<br />

mettent bien <strong>de</strong> ne rien négliger pour vous satisfaire. Ils donneront tout particulièrement<br />

leurs soins aux enfants <strong>de</strong> la Psalette et mettront tout en œuvre afin <strong>de</strong> les rendre pieux,<br />

mo<strong>de</strong>stes et <strong>de</strong> bonne tenue, comme vous désirez quʹils le soient; la chose, vous le savez,<br />

Monseigneur, nʹest pas sans difficultés et pourra <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r un peu <strong>de</strong> temps, mais, <strong>avec</strong> la<br />

grâce <strong>de</strong> Dieu et Votre bénédiction qui lʹattirera sur nous, jʹespère que nous obtiendrons ce<br />

résultat.<br />

Nous accueillons <strong>avec</strong> bonheur lʹespoir <strong>de</strong> vous voir ici vers le mois <strong>de</strong> juin; si vous<br />

ne nous visitiez quelquefois, vos enfants <strong>de</strong> Paris seraient trop jaloux <strong>de</strong> ceux dʹAngers.<br />

Tout notre petit troupeau ici se soutient et marche sous les yeux du Seigneur; tous<br />

sʹunissent à moi pour vous offrir leur filial respect et remercient le Seigneur qui leur a mé‐<br />

nagé vos conseils et toutes vos bontés paternelles.<br />

Je suis dans ces sentiments,<br />

Monseigneur,<br />

Votre humble serviteur et fils<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

999 à M. dʹArbois<br />

La vie communautaire et apostolique <strong>de</strong> la nouvelle communauté dʹAngers. Importance dʹune soli<strong>de</strong> formation<br />

intellectuelle. Ne pas se précipiter pour obtenir une messe dominicale au patronage. Veiller sur les dépenses du<br />

frère Moutier.<br />

Vaugirard, 18 mai 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je trouve bien votre petit règlement provisoire; je souligne ce mot parce quʹil nʹa été<br />

fait aucune place dans vos exercices aux étu<strong>de</strong>s, soit chrétiennes et religieuses, soit <strong>de</strong><br />

science usuelle pour les rapports extérieurs; il faudra nécessairement y pourvoir, tous vos<br />

frères, fort jeunes, ayant un grand besoin <strong>de</strong> culture.<br />

Jʹécris un mot à M. Chesneau373 pour le prier <strong>de</strong> vous laisser au moins une après‐<br />

midi libre par semaine, jʹespère quʹil lʹaccor<strong>de</strong>ra.<br />

Je le prie aussi <strong>de</strong> régler <strong>avec</strong> Mgr vos petits intérêts financiers, ayant répugnance à<br />

en parler moi‐même au vénéré Prélat; ces matières veulent toujours un peu <strong>de</strong> délicatesse,<br />

étant inférieures par nature.<br />

Mgr insiste beaucoup dans toutes ses lettres pour que vous donniez <strong>de</strong> grands soins<br />

aux enfants <strong>de</strong> la Psallette, afin <strong>de</strong> les rendre pieux, mo<strong>de</strong>stes, <strong>de</strong> bonne tenue à lʹéglise<br />

surtout; il y attache une très haute importance et mʹen parle en toute occasion.<br />

373 L’abbé Ferdinand Chesneau, Grand Vicaire <strong>de</strong> Mgr Angebault <strong>de</strong>puis 1858.<br />

1027


Notre Conseil vous recomman<strong>de</strong> <strong>avec</strong> une vive instance <strong>de</strong> ne pas faire <strong>de</strong> change‐<br />

ments, dans les premiers temps, et surtout <strong>de</strong> ne pas laisser percer présentement votre vo‐<br />

lonté, peut‐être un peu ar<strong>de</strong>nte, dʹavoir une messe au Patronage le dimanche. Messieurs<br />

les Curés seront à cela très opposés; vous pouvez, par là, vous susciter, dès lʹabord, <strong>de</strong>s dé‐<br />

fiances et <strong>de</strong>s oppositions; allez donc bien pru<strong>de</strong>mment, gar<strong>de</strong>z ce désir pour vous et pour<br />

Dieu, je vous le <strong>de</strong>man<strong>de</strong> instamment. Pour la congrégation et sa messe, prenez lʹavis <strong>de</strong><br />

M gr et <strong>de</strong> M. Bompois et ne leur faites pas prendre la vôtre. Si vous <strong>de</strong>vez avoir le soin <strong>de</strong><br />

cette congrégation, assistez dʹabord à ses réunions chez les Pères, et suivez le règlement et<br />

les usages et pratiques adoptés par eux. Veillez à ce que M. Moutier, <strong>de</strong> son côté, ten<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

toutes ses forces à suivre le règlement et les traditions faites par M. Leboucher. M. Mai‐<br />

gnen assure que les jeunes gens y sont fort attachés et que le meilleur moyen <strong>de</strong> leur ren‐<br />

dre lʹœuvre aimable est <strong>de</strong> tendre à cela fortement.<br />

M. Moutier est dépensier et manque dʹordre, absolument comme M. Maignen; mal‐<br />

gré un don <strong>de</strong> mille francs fait par la Société <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul, et bien que M. Planchat<br />

ait payé une partie <strong>de</strong> ses <strong>de</strong>ttes, il laisse encore un déficit après lui <strong>de</strong> 600f , dont 400f pris<br />

sur la Caisse dʹépargne. Tâchez quʹil nʹait point cette caisse, sʹil y en a une, et quʹil laisse à<br />

ces Messieurs du Conseil toute lʹadministration financière, afin quʹil ne sʹengage pas dans<br />

<strong>de</strong>s dépenses dont la charge nous reste, comme à S te ‐Anne. Lʹordre est une qualité dont il<br />

faut tâcher <strong>de</strong> lui faire comprendre la nécessité.<br />

Jʹécris en très gran<strong>de</strong> hâte, sèchement conséquemment, mais sous cette précipitation<br />

que lʹheure me comman<strong>de</strong>, se trouve toujours ma tendre affection pour vous tous et mon<br />

désir <strong>de</strong> vous voir bons, saints et agréables à Dieu.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

999 bis à M. dʹArbois374 Lʹabbé Braun a écrit à M. dʹArbois. MLP. envisage quelques dispositions pratiques pour bien asseoir lʹŒu‐<br />

vre naissante: relations <strong>avec</strong> le diocèse, les appuis financiers. Veiller à la régularité dans les exercices <strong>de</strong><br />

communauté.<br />

27 mai [1865]<br />

Bien cher ami,<br />

Je joins ces <strong>de</strong>ux mots à la petite lettre <strong>de</strong> notre cher M. Braun pour vous donner <strong>de</strong><br />

nos nouvelles et vous inviter à nous en donner <strong>de</strong>s vôtres. Il y a longtemps que vous ne<br />

nous avez écrit; je pense que la fête <strong>de</strong> lʹAscension a pu vous apporter un surcroît <strong>de</strong> tra‐<br />

vaux et que la prochaine retraite <strong>de</strong> vos jeunes gens doit aussi vous occuper. Il vous reste,<br />

à lʹintérieur, à disposer votre chapelle et à la munir <strong>de</strong> ce qui est indispensable, ce nʹest pas<br />

une petite affaire; il me semble que la famille Pavie pourrait vous ai<strong>de</strong>r un peu; les <strong>de</strong>ux<br />

dames, en particulier, pourraient bien préparer quelque linge pour lʹautel; vous me direz<br />

quelles ressources la cathédrale, lʹEvêché, les Communautés, les personnes pieuses peu‐<br />

vent réunir pour vous ai<strong>de</strong>r; il me semble que les Jésuites ou M. Leboucher pourraient<br />

bien vous indiquer quelques bonnes sources où on pourrait trouver un peu dʹappui.<br />

374 Supplée la lettre 925.<br />

1028


M. Chesneau a‐t‐il concédé la liberté <strong>de</strong> vos moments pour une après‐midi dans la<br />

semaine? Je lʹavais prié aussi <strong>de</strong> parler à M gr <strong>de</strong> la fixation <strong>de</strong> votre petit budget, qui restait<br />

insuffisant à 2.800f, afin quʹon règle définitivement cette affaire. Si la Commission du pa‐<br />

tronage prend un peu à cœur les intérêts <strong>de</strong> lʹœuvre, ne pourrait‐elle travailler un peu ac‐<br />

tivement pour la création <strong>de</strong> ressources et trouver moyen alors dʹassurer au moins 500f,<br />

soit sur la tête <strong>de</strong> lʹaumônier, soit sur celle <strong>de</strong> lʹagent ou directeur laïc?<br />

Je désire bien que tous les exercices <strong>de</strong> votre petite communauté se fassent exacte‐<br />

ment; tâchez <strong>de</strong> les prési<strong>de</strong>r aussi régulièrement que vous le pourrez. Un peu dʹinstruction<br />

<strong>de</strong> diverses sortes sera aussi indispensable pour les frères. Patience, tout viendra à point.<br />

Adieu, bien cher ami, nous allons assez bien ici, rien <strong>de</strong> nouveau, les choses vont<br />

faiblissant <strong>de</strong> plus en plus du côté <strong>de</strong> lʹunion à S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul. Nous allons mercredi à<br />

N.D. <strong>de</strong>s Victoires, nous y porterons le souvenir dʹAngers.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1000 à M. dʹArbois<br />

MLP. sʹinquiète <strong>de</strong>s débuts <strong>de</strong> la fondation angevine. Ses ennuis <strong>de</strong> santé.<br />

Vaugirard, 8 juin 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nos frères me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> vos nouvelles; ils trouvent les <strong>de</strong>rnières déjà ancien‐<br />

nes; je suis tenté dʹêtre <strong>de</strong> leur avis, quoique la date <strong>de</strong> votre lettre ne soit pas proprement<br />

antique. Mais il vous reste tant <strong>de</strong> choses à nous dire, nous sommes si peu éclairés encore<br />

sur votre position, sur vos œuvres, sur votre installation que la curiosité <strong>de</strong> nos frères est<br />

inquiète. Arrivez‐vous à vous préparer une chapelle? La retraite <strong>de</strong> la Pentecôte a‐t‐elle été<br />

satisfaisante? La petite congrégation pourra‐t‐elle vous être laissée? En prépare‐t‐on la re‐<br />

mise entre vos mains? Vos frères vont‐ils bien tous? M. Moutier gagne‐t‐il lʹaffection <strong>de</strong>s<br />

jeunes gens? Commence‐t‐il à prendre pied parmi eux, doucement et surtout par le bien<br />

quʹil fait à lʹœuvre?<br />

Mgr vous a‐t‐il rendu visite? Parle‐t‐on un peu dʹasseoir votre situation financière?<br />

Vous laisse‐t‐on définitivement une après‐midi libre chaque semaine?<br />

Avez‐vous assez dʹargent pour attendre le moment où la fabrique <strong>de</strong>vra vous en<br />

donner?<br />

Nous pouvons vous procurer du linge dʹautel, que vous manquera‐t‐il? Nous espé‐<br />

rons aussi quelque ornement.<br />

La bonne fille alleman<strong>de</strong>, comment va‐t‐elle? sʹaccoutume‐t‐elle?<br />

Et beaucoup dʹautres choses.<br />

Ici, nous allons assez bien; je suis, pour ma part, très souffrant <strong>de</strong> la poitrine, tous‐<br />

sant, crachant le sang <strong>de</strong>puis une dizaine <strong>de</strong> jours; je gar<strong>de</strong> presque constamment la<br />

chambre et suis propre à bien peu <strong>de</strong> choses.<br />

Parlez‐moi bien <strong>de</strong> nos frères, <strong>de</strong> votre petite vie commune; êtes‐vous bien unis,<br />

bien réguliers et bien pieux; cʹest un vrai chagrin pour moi <strong>de</strong> ne pouvoir, <strong>avec</strong> une longue<br />

vue ou autrement, vous apercevoir et vous suivre <strong>de</strong>s yeux. Je tâcherai, dans un mois ou<br />

<strong>de</strong>ux, dʹenvoyer M. Maignen vous faire une petite visite ou bien quelque autre.<br />

1029


Adieu, bien cher ami et fils, croyez bien à toutes nos affections, à celles en particu‐<br />

lier <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M gr dʹAngers a annoncé son voyage à Paris pour le mois courant, en parle‐t‐il?<br />

1001 à M. dʹArbois<br />

Placer la chapelle <strong>de</strong> lʹŒuvre sous le vocable du St‐Sacrement. Conseils pour bien asseoir lʹŒuvre. Compter<br />

<strong>avec</strong>ʺle temps, la persévérance et la prièreʺ. La santé <strong>de</strong> MLP. reste faible.<br />

Chaville, 15 juin 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai tardé un peu à vous donner réponse relativement au vocable <strong>de</strong> votre petit sanc‐<br />

tuaire, je désirais prendre lʹavis <strong>de</strong> nos frères du Conseil qui se réunissaient hier; ils ont<br />

pensé <strong>avec</strong> moi que consacrer cette petite chapelle au T. St Sacrement serait bien; nous <strong>de</strong>‐<br />

vons, tout particulièrement dans la Communauté, tant <strong>de</strong> reconnaissance à N. S. au St Sa‐<br />

crement, il sʹy est montré pour nous si con<strong>de</strong>scendant, ne nous refusant sa présence en au‐<br />

cune <strong>de</strong> nos chapelles, et dans celle dʹAngers comme en toutes les autres! Je ne sais si lʹavis<br />

envoyé par le télégraphe à ce sujet vous est encore arrivé à temps; sinon, ce que vous aurez<br />

fait sera bien fait.<br />

Pour lʹassociation pieuse <strong>de</strong> votre division <strong>de</strong>s apprentis, je lʹapprouve bien, faites<br />

en sorte quʹelle soit attachante et prise dans les vrais besoins <strong>de</strong> ces enfants. Avez‐vous<br />

suivi quelques‐uns <strong>de</strong>s exercices <strong>de</strong>s réunions que font les Jésuites pour vos jeunes gens?<br />

Proportion gardée, vous pourriez imiter ces réunions; peut‐être quelque petite pratique <strong>de</strong><br />

zèle pourrait sʹy joindre, mais examinez, consultez; M. Leboucher ou les Pères doivent<br />

avoir à ce sujet <strong>de</strong>s vues éclairées.<br />

Le résultat <strong>de</strong> la retraite <strong>de</strong> la Pentecôte est bien bon, il faut en bénir Dieu; <strong>avec</strong> du<br />

temps et <strong>de</strong> la persévérance, et la prière surtout, vous arriverez à quelque bonne fin.<br />

Jʹai prié M. Emile [Beauvais] <strong>de</strong> vous envoyer 200f, je pense quʹil lʹaura fait; peut‐<br />

être vous sera‐t‐il possible, après cela, <strong>de</strong> marcher <strong>avec</strong> les subventions <strong>de</strong> la Psallette; je<br />

tâcherai dʹamener notre Vénéré Seigneur dʹAngers à quelque conclusion sur ce point <strong>de</strong> fi‐<br />

nance; je ne vois pas pourquoi la Commission administrative du patronage ne voterait pas<br />

au moins une allocation <strong>de</strong> 500f.<br />

On pourra vous envoyer un peu <strong>de</strong> linge dʹautel, un assortiment <strong>de</strong> ce qui est essen‐<br />

tiel <strong>avec</strong> les autres choses promises, mais je suis à Chaville, cʹest peu commo<strong>de</strong> pour pres‐<br />

ser les expéditions, je ferai <strong>de</strong> mon mieux pour abréger.<br />

Je suis moins souffrant, mais faible, poitrine fatiguée ne faisant plus que moitié <strong>de</strong><br />

ses fonctions; les conversations me sont difficiles, la parole à la chapelle impossible; merci<br />

<strong>de</strong> vos bonnes prières et <strong>de</strong> celles <strong>de</strong> nos frères.<br />

Je les embrasse et vous tout tendrement aussi.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Vous faites, nʹest‐ce pas, quelques pratiques en lʹhonneur du Sacré‐Cœur <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

M. Pavie, qui est à Paris, a été charmé <strong>de</strong> votre visite; remerciez M. [A] Myionnet<br />

qui continue dʹêtre bon pour vous.<br />

1030


Je crois que ce sera bien quand on pourra sʹoccuper <strong>de</strong>s placements, visites aux ate‐<br />

liers et aux parents; lʹœuvre, peu consistante, se fortifiera; elle nʹintéresse presque per‐<br />

sonne; <strong>de</strong> cette sorte, patrons, parents, etc. y donneront affection, elle sʹétendra par là<br />

même; mais il nʹy a rien <strong>de</strong> perdu, il fallait bien vous installer et prendre pied; peu à peu,<br />

les occasions viendront et le bien à faire se trouvera.<br />

1002 à M. Caille<br />

Pru<strong>de</strong>nce à lʹégard dʹun abbé qui cherche à sʹétablir dans la maison dʹAmiens. Départ <strong>de</strong> lʹabbé Mangot, proche<br />

collaborateur <strong>de</strong> M. Caille. Le mé<strong>de</strong>cin <strong>de</strong> MLP. veut lʹenvoyer en cure.<br />

Chaville, 19 juin 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je souffrais, en effet, <strong>de</strong> nʹavoir pas <strong>de</strong> vos nouvelles <strong>de</strong>puis trop longtemps; les dé‐<br />

tails que mʹavait donnés notre f. Marcaire à son <strong>de</strong>rnier voyage mʹavaient tranquillisé, il<br />

est vrai, sur votre situation à tous et sur le bon état <strong>de</strong> vos œuvres; mais les jours se suivent<br />

et ne se ressemblent pas; notre position, comme nos propres dispositions, sont bien peu<br />

stables, et le jour présent ne promet jamais rien pour le len<strong>de</strong>main; je serais donc heureux<br />

que, par vous ou par quelquʹun <strong>de</strong> vos frères, il nous arrive un peu plus souvent quelques<br />

renseignements sur tout ce qui vous concerne.<br />

Je suis heureux du bon succès <strong>de</strong> votre loterie, et bien heureux surtout <strong>de</strong> la bonne<br />

disposition <strong>de</strong> cœur <strong>de</strong>s enfants que vous avez préparés à la première communion; cʹest<br />

une <strong>de</strong> nos œuvres les plus méritoires.<br />

Je regrette que M. Chanteaud juge à propos <strong>de</strong> sʹétablir chez vous; si cʹest pour un<br />

passage, ce sera faible inconvénient, mais je ne vois aucune raison qui lʹautorise à faire un<br />

séjour quelque peu prolongé chez vous qui le connaissez à peine et nʹavez aucune relation<br />

<strong>avec</strong> lui. Il est fort entrant et se met volontiers à son aise partout; allez discrètement <strong>avec</strong><br />

lui. Jʹai comme vous, peu <strong>de</strong> confiance dans ses entreprises, il me semble vouloir faire<br />

beaucoup <strong>de</strong> choses et à tout prix. Cette entreprise <strong>de</strong> commission et colportage me semble<br />

fort hasar<strong>de</strong>use pour un prêtre. Il a réussi à fon<strong>de</strong>r une petite publication: Les Annales <strong>de</strong> la<br />

première communion, pâle et sans gran<strong>de</strong> portée, mais qui paraît se soutenir; nous le voyons<br />

très peu et toujours <strong>avec</strong> gran<strong>de</strong> réserve; je ne sais et ne pense rien <strong>de</strong> désavantageux sur<br />

lui, mais il ne me semble pas que sa voie soit la nôtre.<br />

Je regrette bien le départ <strong>de</strong> M. Mangot qui a été si bienveillant, si fidèle dans ses<br />

soins pour vous; exprimez‐lui ma peine et offrez‐lui toute notre reconnaissance. Quant au<br />

successeur que vous lui cherchez pour vous, je serai bien aise dʹen causer <strong>avec</strong> vous, puis‐<br />

que vous prévoyez un prochain voyage à Paris.<br />

Jʹai été, en effet, un peu plus souffrant que <strong>de</strong> coutume et je suis imparfaitement re‐<br />

mis, quoique moins éprouvé quʹaux premiers instants; le mé<strong>de</strong>cin juge quʹun voyage à je<br />

ne sais quelles eaux, les eaux dʹAllevard (Isère) je crois, serait nécessaire durant un mois,<br />

afin <strong>de</strong> pouvoir affronter lʹhiver; je répugne infiniment à ce déplacement et je ne mʹy rési‐<br />

gnerai quʹen présence dʹune nécessité absolue; je suis à Chaville <strong>de</strong>puis quelques jours et<br />

mʹy sens un peu mieux, mais frêle et ébranlé; il me semble pourtant que cette indisposition<br />

sera passagère.<br />

Nous allons ici et à Paris comme <strong>de</strong> coutume, tout se soutient, <strong>avec</strong> la grâce <strong>de</strong> Dieu;<br />

tâchons dʹy correspondre, elle ne nous fera point défaut.<br />

1031


Tout va bien aussi à Angers, nos frères y prennent bien position, nous avons bonne<br />

espérance que Dieu les y maintiendra.<br />

Adieu, bien cher ami, croyez à tous mes sentiments tendrement dévoués pour vous<br />

et pour vos frères.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.,<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1003 à M. Chaverot<br />

La famille <strong>de</strong> M. Chaverot est mieux disposée vis‐à‐vis <strong>de</strong> sa vocation.<br />

Chaville, 20 juin 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Bénissons Dieu qui a ménagé à votre chère famille la consolation <strong>de</strong>s pieuses et ras‐<br />

surantes dispositions <strong>de</strong> votre frère dont il lui fallait se séparer; se quitter ainsi pour <strong>de</strong>s<br />

chrétiens, cʹest comme pour une absence temporaire; on sʹéloigne en disant: Au revoir.<br />

Comment donc les hommes, en rejetant la foi, peuvent‐ils follement se priver <strong>de</strong> tout ce<br />

quʹelle apporte dʹadoucissement à nos peines, comme <strong>de</strong> sécurité à nos joies! Gardons la<br />

meilleure part qui nous a été donnée, en la souhaitant à tous ceux qui en sont déshérités.<br />

Votre voyage aura encore dénoué quelques‐unes <strong>de</strong>s difficultés qui entouraient vo‐<br />

tre vocation et, chemin faisant, vous aurez encore concouru à tourner une pauvre âme<br />

ignorante vers le bon et droit chemin; comme la Provi<strong>de</strong>nce est sage et habile dans ses<br />

voies! En vérité, si on ne se retenait, on arrêterait les passants en leur criant: ʺMon frère, si<br />

vous nʹêtes chrétien, hâtez‐vous <strong>de</strong> le <strong>de</strong>venirʺ. Crions ainsi <strong>de</strong>vant Dieu, ce ne sera pas<br />

peine perdue, car, dʹautre façon, ce serait trop souvent crier dans le désert.<br />

Je pense que vous et M. <strong>de</strong> Varax, vous faites quelque petit acte <strong>de</strong> dévotion en<br />

lʹhonneur du Sacré Cœur ce mois‐ci; si vous nʹaviez pas <strong>de</strong> petit livre, il nous en reste à<br />

Vaugirard quelques‐uns, on vous en enverrait <strong>de</strong>ux.<br />

Je vous embrasse tendrement lʹun et lʹautre.<br />

Votre ami et Père dans les Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je suis peu fort, mais un peu moins souffrant.<br />

1004 à M. dʹArbois<br />

Bien réorganiser lʹŒuvre avant <strong>de</strong> chercher à recruter. Un séjour <strong>de</strong> MLP. dans lʹIsère prévu par son mé<strong>de</strong>cin.<br />

Maintenant que la communauté dʹAngers a le St‐Sacrement, quʹelle sache Le retenir par sa piété.<br />

Chaville, 26 juin 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Vous avez dû recevoir une caisse que nous vous avons envoyée contenant divers<br />

objets pour votre chapelle. Nazareth vous enverra dans quelques jours <strong>de</strong>ux ornements<br />

fort propres: un blanc, je crois, et un rouge qui pourront servir aux bons jours.<br />

Cette lettre nʹarrivera pas à temps pour répondre à votre question concernant la<br />

convenance dʹune proposition au Conseil (qui se réunit <strong>de</strong>main) pour une allocation <strong>de</strong><br />

1032


500f. à donner par le Comité du Patronage à votre communauté. Mais vous aurez présumé<br />

que mon avis, comme le vôtre, est que cette <strong>de</strong>man<strong>de</strong> ne serait pas, présentement, oppor‐<br />

tune. Il me semble quʹon doit patienter <strong>de</strong> ce côté et que vous <strong>de</strong>vez attendre que les servi‐<br />

ces <strong>de</strong> notre Communauté soient plus appréciables. Mais je crois quʹau retour <strong>de</strong> la cam‐<br />

pagne <strong>de</strong>s personnes posées et chrétiennes, il sera tout à fait désirable <strong>de</strong> stimuler M.<br />

Bompois et dʹautres, afin dʹarriver à composer une Commission sérieuse, travaillant réel‐<br />

lement et efficacement à créer <strong>de</strong>s ressources au patronage; dʹici là, vous pourrez, <strong>avec</strong> les<br />

rr.pp. et M. Myionnet, et M gr avant tout, voir à loisir quelles seraient les personnes quʹon<br />

pourrait solliciter pour cette Commission; seulement M gr , fort chargé <strong>de</strong> tant dʹobligations<br />

déjà, craindra peut‐être que ce mouvement ne détourne quelques‐unes <strong>de</strong>s ressources qui<br />

lui adviennent ordinairement. Jʹespère que non.<br />

Je pense que vous cherchez aussi, mais sans vous presser, quels moyens on aurait<br />

<strong>de</strong> bien recruter le patronage, il nʹy a <strong>de</strong> ce côté toutefois rien <strong>de</strong> perdu; lʹessentiel en ce<br />

moment, cʹest <strong>de</strong> bien sʹen rendre maître, dʹy faire un bon fond, un personnel soli<strong>de</strong> et dé‐<br />

voué, sur lequel vous puissiez compter; une fois ce point obtenu et lʹordre étant bien établi,<br />

les recrues viendront dʹelles‐mêmes. Les rapports <strong>avec</strong> les familles et les patrons y<br />

concourront aussi <strong>avec</strong> les placements.<br />

Jʹavais déjà répondu fermement à M. Choyer, avant votre départ pour Angers, que<br />

nous ne pouvions songer aucunement à introduire un nouvel élément dans nos affaires<br />

déjà compliquées; ce quʹil propose ne serait possible quʹà N.D. <strong>de</strong>s Champs, si on y avait<br />

une maison <strong>de</strong> jeunes ouvriers, cela est loin <strong>de</strong> nous.<br />

Lʹaumônerie pour tous les jours nʹétait pas possible non plus. Vous savez que M gr<br />

arrive à Paris aujourdʹhui, il viendra <strong>de</strong>main à Vaugirard. Peut‐être pourra‐t‐il donner la<br />

confirmation à nos enfants dont la première communion a lieu jeudi 29. Priez tous pour<br />

eux; M. Chesnet accompagnera M gr dʹAngers qui vient pour donner lʹhabit religieux à sa<br />

nièce, entrée chez les Dames Anglaises, à Neuilly.<br />

Je suis beaucoup moins souffrant, mais pas encore absolument remis; je reste aussi<br />

souvent que possible à Chaville où jʹai plus <strong>de</strong> repos quʹà Vaugirard; M. Jousset insiste<br />

pour que jʹaille un mois aux eaux dʹAllevard (dans lʹIsère), je résiste <strong>de</strong> mon mieux; une<br />

seule chose me consolerait <strong>de</strong> ce voyage malencontreux, cʹest quʹil me donnerait lʹoccasion<br />

du pèlerinage à N.D. <strong>de</strong> la Salette.<br />

Adieu, bien cher ami, je suis heureux <strong>de</strong> penser que vous avez maintenant lʹinsigne<br />

honneur et la gran<strong>de</strong> consolation dʹhabiter près du divin Maître qui repose sous votre toit;<br />

quel hôte aimable! retenez‐le bien par votre piété et vos tendres instances, disant <strong>avec</strong> les<br />

disciples dʹEmmaüs: Ne nous quittez pas, <strong>de</strong>meurez <strong>avec</strong> nous.<br />

Jʹembrasse vous et vos frères dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

1005 à M. Chaverot<br />

Invitation à une réunion autour <strong>de</strong> M gr Angebault.<br />

Vaugirard, 27 juin 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M gr lʹEvêque dʹAngers, arrivé hier à Paris, vient nous voir aujourdʹhui et veut bien<br />

nous réunir autour <strong>de</strong> lui quelques instants. Vous savez quelle est sa bonté, je puis dire pa‐<br />

1033


ternelle pour nous, quels pieux et sages avis il se plaît à nous donner toutes les fois quʹil<br />

daigne nous visiter. Je serais heureux que vous puissiez vous trouver au milieu <strong>de</strong> nous,<br />

durant quelques instants, afin <strong>de</strong> recevoir sa bénédiction. Comme jʹignore quel est celui <strong>de</strong><br />

MM. les Directeurs qui prési<strong>de</strong> aujourdʹhui la promena<strong>de</strong>, je vous laisse le soin <strong>de</strong> vous<br />

assurer près <strong>de</strong> lui sʹil peut vous permettre <strong>de</strong> vous absenter cet après‐midi <strong>de</strong>ux ou trois<br />

heures pour faire cette petite excursion; vous seriez <strong>de</strong> retour à temps pour revenir <strong>avec</strong> la<br />

communauté <strong>de</strong> St‐Sulpice, nul dérangement ne serait fait au règlement. M gr dʹAngers sera<br />

à Vaugirard un peu avant 4h.<br />

Croyez bien, cher ami, à tous mes sentiments accoutumés <strong>de</strong> tendre affection en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1006 à M. Decaux<br />

Souhaits <strong>de</strong> bonne et sainte fête.<br />

Vaugirard, 1er juillet 1865<br />

Mon bien bon ami,<br />

Je nʹai point passé la fête <strong>de</strong>s Saints Apôtres Pierre et Paul sans me souvenir que<br />

vous étiez tout particulièrement sous leur protection; je dis, leur, car lʹEglise ne les sépare<br />

point dans les hommages quʹelle leur rend et, <strong>de</strong> leur côté aussi, ils associent assurément<br />

leur heureuse et puissante influence pour le bien <strong>de</strong>s âmes. Jʹai prié Dieu pour que vous en<br />

receviez bien efficacement la manifestation et pour que vous participiez <strong>de</strong> plus en plus<br />

aux grands dons <strong>de</strong> foi, <strong>de</strong> zèle et <strong>de</strong> sainte ar<strong>de</strong>ur dont ils ont été comblés; je continue<br />

mes instances durant toute lʹoctave et après quʹelle sera finie, le bon pli en étant pris, je<br />

nʹinterromprai pas davantage puisque le sentiment qui mʹinspire <strong>de</strong>meure toujours le<br />

même.<br />

Croyez bien, mon cher, ami, à la sincère et durable affection <strong>de</strong> votre dévoué<br />

Confrère et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1007 à M. dʹArbois<br />

Appréciation favorable sur les divers règlements <strong>de</strong> la maison dʹAngers. Joie <strong>de</strong> se sentir soutenu par M gr Ange‐<br />

bault. Quelques nouvelles <strong>de</strong>s frères.<br />

Vaugirard, 1 er juillet 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous accuse réception tout ensemble <strong>de</strong>s 200f. envoyés à M. Emile [Beauvais] et<br />

<strong>de</strong>s règlements généraux et particuliers que jʹai reçus hier, apportés <strong>de</strong> Chaville. Jʹy re‐<br />

tourne aujourdʹhui. La visite <strong>de</strong> M gr dʹAngers et sa présence hier encore parmi nous pour<br />

la confirmation <strong>de</strong> nos enfants mʹa retenu ici ces jours <strong>de</strong>rniers, je me sens un peu fatigué.<br />

Les règlements, celui <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong>s Champs en particulier, mʹont paru très convena‐<br />

bles. Je nʹai point vu dans celui <strong>de</strong>s frères le temps quʹils consacrent aux classes <strong>de</strong> la Psal‐<br />

lette; je le trouverai dans le règlement <strong>de</strong>s exercices <strong>de</strong>s enfants <strong>de</strong> cette maison, si vous me<br />

lʹenvoyez.<br />

M gr a été meilleur et plus aimable encore que <strong>de</strong> coutume <strong>avec</strong> nous, tous nos frères<br />

en étaient enchantés; nos enfants ont aussi compris combien la bonté est un précieux don<br />

1034


du Seigneur. M. Chesnet a été aussi très gracieux pour nous; il paraît vous aimer tous<br />

beaucoup, son appui ne vous manque pour rien; il vous prépare un ornement rouge pour<br />

votre chapelle, il pourvoira à tout ce qui vous manquera.<br />

M gr pense que la réorganisation du Conseil ou Commission <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong>s Champs est<br />

tout à fait à désirer, il y prêtera la main; je pense que vous trouverez par là les appuis né‐<br />

cessaires pour lʹœuvre et pour la Communauté. Autrement, pour vous, M gr trouverait<br />

quelque autre moyen, je gar<strong>de</strong> pourtant quelque doute, sa bonne et paternelle volonté<br />

pouvant bien manquer dʹoccasion pour se satisfaire.<br />

Première communion, confirmation, tout a été bien à Vaugirard; 75 enfants, renou‐<br />

velants compris; bénissons‐en Dieu.<br />

M. <strong>de</strong> Varax est un peu souffrant dʹune scarlatine; il arrive lundi à Chaville <strong>avec</strong> M.<br />

Chaverot.<br />

M. Camus, par ordre du mé<strong>de</strong>cin, fait une petite saison aux Eaux‐Bonnes <strong>avec</strong> sa<br />

mère; il fait définitivement partie <strong>de</strong> la Communauté.<br />

Je partirai dans une quinzaine; je sens que cela peut‐être utile, si je dois travailler<br />

encore un peu; vos 200f. ont été mis <strong>de</strong> côté pour mon voyage, selon votre filiale intention.<br />

Adieu, cher ami, mille tendres affections à vous et à vos frères.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1008<br />

Attestation certifiant que M. Baumert suit <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s dans lʹInstitut en vue du sacerdoce et quʹil a les aptitu<strong>de</strong>s<br />

requises.<br />

Chaville, 2 juillet 1865<br />

Je certifie que M. Urbain BAUMERT, né à Grussau (Silésie) le 18 décembre 1846,<br />

suit ses étu<strong>de</strong>s dans notre maison afin <strong>de</strong> se préparer au sacerdoce, et que sa conduite, ses<br />

sentiments et toutes ses dispositions nous semblent le rendre propre à cette carrière; en foi<br />

<strong>de</strong> quoi, nous lui avons délivré la présente attestation.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Supérieur <strong>de</strong> la Congrégation<br />

<strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul<br />

1009 à M. Decaux<br />

Cordiale invitation à la fête <strong>de</strong> Saint Vincent <strong>de</strong> Paul.<br />

Vaugirard, 14 juillet 1865<br />

Mon bon ami,<br />

Nos enfants <strong>de</strong> Vaugirard doivent, comme <strong>de</strong> coutume, venir à Chaville le 19 <strong>de</strong> ce<br />

mois pour y faire la fête <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul, et nous y serons aussi tous réunis. Lʹan <strong>de</strong>r‐<br />

nier, vous y êtes venu vous‐même pour y passer quelques instants <strong>avec</strong> nous; nous serions<br />

heureux quʹil en fût encore ainsi cette année, et la fête en serait assurément plus aimable<br />

pour notre petite famille.<br />

Dans la bonne espérance que rien ne vous empêchera <strong>de</strong> nous donner cette satisfac‐<br />

tion, je vous donne ici lʹindication <strong>de</strong>s mouvements <strong>de</strong> la journée:<br />

1035


9h. Grandʹmesse, ensuite petite promena<strong>de</strong><br />

Midi Dîner ‐ délassement<br />

2h.1/2 Vêpres, panégyrique par M. Taillandier, Salut<br />

4h. Courses et exercice <strong>de</strong>s enfants<br />

6h.1/2 Réfection<br />

Tout cela est bien simple, lʹair et le soleil <strong>de</strong> la campagne feront presque tous les<br />

frais <strong>de</strong> la fête, mais jʹespère que la cordialité et lʹunion <strong>de</strong>s âmes dans la charité y prête‐<br />

ront aussi quelque agrément; venez donc, mon cher ami, vous reposer quelques moments<br />

si vous en avez la possibilité.<br />

Croyez bien, je vous prie, à tous mes sentiments accoutumés dʹaffectueux dévoue‐<br />

ment en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1010 à M. Halluin<br />

Un jeune patronné est mal disposé envers sa mère. Sages conseils <strong>de</strong> MLP. pour lʹamener à <strong>de</strong> meilleurs senti‐<br />

ments.<br />

Vaugirard, 15 juillet 1865<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Jʹai reçu, <strong>avec</strong> votre lettre, celle <strong>de</strong> notre pauvre Maillard. Elle mʹa bien contristé, les<br />

sentiments quʹelle exprime sont bien mauvais. Cet enfant est bien mal conseillé dans ses<br />

entourages dʹatelier pour se porter à <strong>de</strong>s actes si outrageants. Il nʹa jamais vu sa mère, il lui<br />

écrit pour la première fois, et ce sont <strong>de</strong>s injures et <strong>de</strong>s menaces quʹil lui adresse. La pauvre<br />

femme, déjà si tristement punie, lʹest ici bien durement! Elle nʹa pas voulu lʹabandonner à<br />

un homme inconnu pour elle, ouvrier assez grossier à ce quʹil paraît et dans lequel elle ne<br />

pouvait <strong>de</strong> prime abord prendre confiance. Voilà le crime que lui reproche son fils. Depuis<br />

sa naissance, elle lʹa suivi constamment, elle a pourvu à ses besoins dans la mesure <strong>de</strong> ses<br />

ressources qui sont fort restreintes, car elle nʹa rien apporté à son mari; elle ne peut dispo‐<br />

ser que <strong>de</strong> peu <strong>de</strong> chose sans son autorisation. Depuis plusieurs mois, elle a été mala<strong>de</strong> et<br />

nʹavait pu nous donner signe <strong>de</strong> vie. Au commencement <strong>de</strong> la semaine, elle doit subir une<br />

opération douloureuse et non sans danger. Elle mʹa promis <strong>de</strong> vous envoyer quelque ar‐<br />

gent, et elle ne refuse pas non plus dʹai<strong>de</strong>r Maillard un peu, autant quʹelle le pourra.<br />

Je ne comprends pas comment ce malheureux garçon saisit si mal ici son propre<br />

avantage. Si, comme sa lettre mal avisée lʹindiquait, il avait la mauvaise pensée diabolique<br />

et méchante <strong>de</strong> troubler le ménage <strong>de</strong> sa mère, quʹarriverait‐il? Son mari, sʹemportant et lui<br />

retirant sa confiance, la mettrait dans lʹimpossibilité absolue <strong>de</strong> lui donner aucun secours.<br />

Si, au contraire, revenant à <strong>de</strong>s idées plus sages et mieux inspirées, il accepte une position<br />

quʹil ne dépend <strong>de</strong> personne <strong>de</strong> changer, elle fera comme elle lʹa fait tant quʹelle lʹa pu, elle<br />

lʹai<strong>de</strong>ra un peu à se soutenir et à <strong>de</strong>venir un bon et honnête ouvrier. Vous seriez le pre‐<br />

mier, Monsieur lʹabbé, à lui dire, et nous serions unanimement <strong>de</strong> cet avis, quʹen agissant<br />

autrement il sʹattirerait le mépris et la répulsion <strong>de</strong> tous les honnêtes gens, en se montrant<br />

à la fois sans raison et sans cœur.<br />

Jʹespère mieux <strong>de</strong> lui; il avait, étant plus jeune, lʹâme assez aimante et susceptible <strong>de</strong><br />

quelques bons sentiments, quʹil les réveille en lui et agisse comme le lui conseilleront tous<br />

ceux qui lui portent un véritable intérêt.<br />

1036


Veuillez recevoir, cher Monsieur lʹabbé, les assurances accoutumées <strong>de</strong> mes senti‐<br />

ments bien respectueux et bien dévoués en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹaffirme, en toute vérité, que la position <strong>de</strong> la mère <strong>de</strong> Maillard ne lui permet que<br />

<strong>de</strong>s sacrifices restreints; elle nʹa toujours payé chez nous, quand nous avions son fils à<br />

Vaugirard, quʹune pension moindre que le taux ordinaire, parce que nous étions assurés<br />

quʹelle ne pouvait faire plus. Je crois donc que, si Maillard veut être sensé et intelligent <strong>de</strong><br />

ses intérêts, il se contentera <strong>de</strong>s secours quʹelle pourra lui procurer. Je vous prie, Monsieur<br />

lʹabbé, <strong>de</strong> voir <strong>avec</strong> lui ce qui peut lui être vraiment utile et <strong>de</strong> me lʹécrire ou à M. Emile<br />

[Beauvais]; nous ferons ce que nous pourrons pour arranger les choses. Il fera bien dʹécrire<br />

à sa mère quelques lignes dʹun meilleur esprit, mais quʹil se gar<strong>de</strong> dʹécrire directement et<br />

quʹil adresse sa lettre à M. Emile Beauvais qui la fera parvenir.<br />

1011 à M. Chaverot<br />

Encouragements à accomplir la volonté <strong>de</strong> Dieu. MLP. a prié pour lui à La Salette.<br />

Allevard, 2 août 1865<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Merci <strong>de</strong> votre bonne petite lettre; je suis heureux que vous ayez pu rester jusquʹà<br />

lundi à Chaville, nos frères ont tant <strong>de</strong> joie à vous gar<strong>de</strong>r un peu à loisir; vous ferez <strong>de</strong> vo‐<br />

tre mieux à St ‐Etienne pour encourager vos bons parents et leur faire comprendre que<br />

vous ne faites que la volonté <strong>de</strong> Dieu. Jusquʹici, son ai<strong>de</strong> miséricordieux est bien manifeste;<br />

bénissons‐le et préparons‐nous, sʹil lui plaisait <strong>de</strong> nous éprouver davantage, à nous repo‐<br />

ser sur Lui et à tout attendre <strong>de</strong> sa bonté et <strong>de</strong> son amour. Notre cher M. Camus subit <strong>de</strong><br />

bien dures épreuves <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> son père; il les porte jusquʹici fermement, priez pour lui,<br />

il en a grand besoin. Je viens <strong>de</strong> recevoir une petite lettre <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax, il se mettait en<br />

route pour les eaux; il me dit mille choses affectueuses pour vous, il va vous écrire.<br />

Jʹai prié particulièrement pour vous à N.D. <strong>de</strong> la Salette; jʹespère quʹun jour il vous<br />

sera donné <strong>de</strong> faire ce pieux pèlerinage, peut‐être votre bonne mère voudra vous y accom‐<br />

pagner; <strong>de</strong> quelque façon, la Ste Vierge vous y attirera, puisque, pour vous comme pour<br />

moi, elle est intervenue dans votre vocation. Je la prie, en attendant, bien cher ami, <strong>de</strong> vous<br />

traiter <strong>avec</strong> une prédilection particulière, comme un <strong>de</strong> ses enfants les plus chéris et <strong>de</strong><br />

faire <strong>de</strong> vous un serviteur humble, ar<strong>de</strong>nt et dévoué pour son divin Fils.<br />

Votre ami et Père tout affectionné en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1012 à M. J. Faÿ<br />

Pèlerinage <strong>de</strong> MLP. à La Salette. Il est accompagné du frère Paillé. Description <strong>de</strong> la station thermale dʹAllevard.<br />

Bienfaits quʹils en retirent. Force et confiance renouvelées.<br />

Allevard, 2 août 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Votre petite lettre a bravement franchi les montagnes et, traversant la fameuse val‐<br />

lée <strong>de</strong> Grésivaudan, mʹest venue trouver à Allevard, non plus à lʹhôtel du Commerce, mais<br />

1037


à lʹhôtel du Dauphiné où nous sommes installés définitivement, ne nous étant pas trouvés<br />

à notre gré dans la première <strong>de</strong>meure; le bruit, le manque dʹair dans une rue étroite et<br />

mouvante nous semblaient trop peu champêtres, nous avons émigré aux abords <strong>de</strong> la ville,<br />

nous y sommes beaucoup plus paisibles; le ciel ouvert, la vue <strong>de</strong>s montagnes et <strong>de</strong>s arbres<br />

nous rappellent mieux que ce mon<strong>de</strong> nʹest pas lʹœuvre <strong>de</strong>s hommes, mais celle <strong>de</strong> Dieu. Il<br />

nous était dʹautant plus pénible à Allevard <strong>de</strong> nous enfoncer dans le creux le plus étouffé<br />

dʹune vallée que nous avions été profondément émus par la gran<strong>de</strong>ur <strong>de</strong>s spectacles quʹon<br />

rencontre pour arriver à la Salette, et par les impressions plus hautes encore que laisse<br />

dans lʹâme ce pieux pèlerinage. Ici, tout naturellement, bien cher ami, vous atten<strong>de</strong>z que je<br />

vous raconte, pour vous‐même et pour vos chers novices, notre ascension à la Salette, les<br />

saints exercices que nous y avons faits, les sentiments que nous y avons éprouvés. Peut‐<br />

être pourrai‐je le faire dans une autre lettre; aujourdʹhui, je crains <strong>de</strong> ne pas mettre à fin<br />

une narration nécessairement un peu longue; je me borne à vous dire ici que cette pieuse<br />

excursion nous a profondément touchés et que tout, sur la Sainte Montagne: les vestiges<br />

du passage <strong>de</strong> la T. S te Vierge, les monuments élevés pour en marquer la place, le magnifi‐<br />

que sanctuaire bâti pour éterniser ce message céleste, tout est édifiant et porte dans lʹâme<br />

la conviction, une douce joie, une tendre reconnaissance. Les Pères qui <strong>de</strong>sservent le pèle‐<br />

rinage, les religieuses qui, <strong>de</strong> leur côté, dans les bâtiments qui leur sont propres, les ai<strong>de</strong>nt<br />

à exercer lʹhospitalité envers les pèlerins, contribuent aussi, par leur piété et leurs soins<br />

obligeants, à rendre le séjour <strong>de</strong> la Salette aimable et <strong>de</strong> bon souvenir. Si, comme je le<br />

pense, ces quelques mots ne peuvent satisfaire lʹimpatience <strong>de</strong> vos chers enfants <strong>de</strong> Cha‐<br />

ville et quʹils aient hâte <strong>de</strong> mieux suivre nos mouvements à la Sainte Montagne, faites <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>r à M. Hello une longue lettre que lui a écrite avant‐hier M. Paillé; elle est bien dé‐<br />

taillée, pieuse et capable <strong>de</strong> les édifier.<br />

M. Jules [Ginet] peut, <strong>de</strong> vive voix, vous dire sur<br />

Allevard tout ce que vous pourriez désirer; il y a passé un<br />

mois lʹan <strong>de</strong>rnier pour le même motif qui nous y a conduits;<br />

cʹest un pays qui a ses beautés, sans doute, mais qui nʹégale<br />

pas sous ce rapport dʹautres contrées où il a plu à Dieu <strong>de</strong><br />

nous faire séjourner en divers temps. Nous y avons trouvé<br />

une belle église neuve <strong>de</strong> bon style, un Curé pieux et<br />

homme édifiant, très bienveillant pour tous, pour nous en<br />

particulier. Jʹoffre tous les jours le S t Sacrifice presque à la<br />

même heure quʹon le fait chez nous, à 7h; jʹai la chapelle du<br />

Sacré Cœur, mon f. Paillé est mon servant <strong>de</strong> messe; les<br />

soins <strong>de</strong> santé nʹempêchent jusquʹici aucun <strong>de</strong> nos exercices.<br />

Jʹai essayé <strong>de</strong> boire <strong>de</strong> lʹeau <strong>de</strong>s sources sulfureuses, elle ne<br />

mʹa pas réussi, loin <strong>de</strong> là; il faudra pourtant encore lʹessayer; présentement, je vais 4 ou 5<br />

fois par jour dans la salle dʹinhalation (cela veut dire respiration) et je prends quelques<br />

bains dʹeau sulfurée. Il y a ici à peu près 1.500 mala<strong>de</strong>s; aucun ne paraît mourant, mais<br />

presque tous y sont pour un soin réel et un besoin vrai <strong>de</strong> leur santé. Allevard nʹest pas,<br />

comme dʹautres séjours dʹeaux, un lieu <strong>de</strong> distraction et <strong>de</strong> plaisir; il y a un grand nombre<br />

dʹecclésiastiques et <strong>de</strong> religieux et religieuses; lʹenseignement et la prédication sont <strong>de</strong><br />

gran<strong>de</strong>s causes <strong>de</strong> fatigue et dʹépuisement. Prenez, cher ami, quelque temps <strong>de</strong> repos pour<br />

nʹavoir pas besoin <strong>de</strong> venir à Allevard. Ai‐je besoin <strong>de</strong> dire que nous pensons beaucoup à<br />

1038


vous, que nous prions beaucoup pour notre cher Chaville, et pour tous ceux qui lʹhabitent,<br />

et pour tous ceux qui y viendront; quʹà la montagne <strong>de</strong> la Salette, surtout, nous avons prié<br />

<strong>de</strong> toute la ferveur <strong>de</strong> notre âme et que mon Memento aux <strong>de</strong>ux messes que jʹy ai célébrées<br />

a été bien long; jʹavais tant <strong>de</strong> choses à <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r! Lʹesprit <strong>de</strong> notre divin Seigneur encore<br />

si imparfaitement entré en nous, lʹesprit <strong>de</strong> notre Père S t Vincent <strong>de</strong> Paul, qui met pour<br />

ainsi dire à notre portée et modèle à notre usage les vertus et la vie <strong>de</strong> notre bien‐aimé<br />

Sauveur. En outre, lʹesprit religieux, lʹesprit <strong>de</strong> nos œuvres dans lʹabnégation <strong>de</strong> nous‐<br />

mêmes et le zèle vrai et ar<strong>de</strong>nt pour le bien <strong>de</strong>s âmes. Jʹai la confiance que quelque chose<br />

<strong>de</strong> tout cela viendra en nous, car peut‐on revenir les mains vi<strong>de</strong>s quand on a visité la Mère<br />

par excellence, la bonne, la tendre et miséricordieuse Mère; confiance, lʹavenir sera bon<br />

pour nous.<br />

Adieu, bien cher ami, adieu aussi à tous nos chers frères; je les vois tous <strong>de</strong>s yeux<br />

du cœur, et je les embrasse bien tendrement en J. et M.<br />

Votre ami et Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹai répondu à M me Busquet que son offre ne pouvait être acceptée. Notre f. Audrin<br />

peut donner un acompte au marchand <strong>de</strong> bois, sʹil le juge à propos.<br />

Secouez un peu les mélancolies <strong>de</strong> M. François [Bokel]; sʹil nʹy prend gar<strong>de</strong>, son<br />

humeur inquiète et sensible ferait préjudice à son avenir spirituel; suivez‐le <strong>de</strong> près, cau‐<br />

sez <strong>avec</strong> lui, tâchez <strong>de</strong> pénétrer cet intérieur que nous ne voyons pas encore assez intime‐<br />

ment.<br />

Présentez mon respect à M. le Curé; jʹaurais aimé à le voir avant mon départ, mais<br />

jʹétais à bout <strong>de</strong> forces et dans une extrême fatigue.<br />

1012 bis <strong>de</strong> M. Paillé à M. Hello<br />

ʺDans lʹhabitu<strong>de</strong> dʹêtre ensemble aux exercices communs, puiser la cordialité fraternelle qui fait le bonheur<br />

dʹune communautéʺ. Récit détaillé du pèlerinage à La Salette. Détails pittoresques sur les fatigues du voyage.<br />

Allevard [1 et 2] août 1865<br />

Après une semaine <strong>de</strong> marche nous voici installés à Allevard, prenant <strong>de</strong>s bains sulfureux,<br />

avalant <strong>de</strong> lʹeau soufrée, humant une atmosphère <strong>de</strong> soufre; vous <strong>de</strong>vriez vous dépêcher dʹarriver<br />

tous ici pour partager notre sort dʹallumettes. Malgré tout cela, la santé <strong>de</strong> notre cher Père est satis‐<br />

faisante. Priez bien N.D. <strong>de</strong> la Salette, et elle rendra notre cher Père capable <strong>de</strong> passer un bon hiver<br />

et <strong>de</strong> répondre à toutes les mille questions que nous allons lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong> résoudre à tous les ins‐<br />

tants <strong>de</strong> la journée. Après cet exposé <strong>de</strong> lʹétat présent, laissez‐moi remonter le passé pour vous<br />

faire faire le voyage <strong>avec</strong> nous.<br />

Au départ, jʹétais pénétré dʹune certaine tristesse; lʹétat <strong>de</strong> notre Communauté était peu ré‐<br />

gulier. Jʹavais <strong>de</strong>s reproches personnels à me faire à cet égard, et je sentais quʹen mʹéloignant, le<br />

peu qui existait encore allait tomber. Nous ne tenons pas assez aux exercices <strong>de</strong> Communauté,<br />

parce que nous nʹen sentons pas lʹeffet direct pour nos œuvres. Notre illusion est que notre sancti‐<br />

fication ne dépend pas <strong>de</strong>s exercices <strong>de</strong> Communauté et que la réussite <strong>de</strong> nos œuvres ne dépend<br />

pas <strong>de</strong> notre sanctification. Je ne veux pas mʹétendre pour démontrer ces illusions; je ne veux que<br />

vous manifester mon impression en vous quittant, et vous exprimer que la force du religieux est<br />

souvent placée par Dieu dans les cheveux, cʹest‐à‐dire dans la fidélité aux exercices, et que cette<br />

obéissance dans les petites choses lui est très agréable. Je serais donc très heureux dʹapprendre que<br />

1039


vous êtes exacts aux exercices <strong>de</strong> Communauté et que, dans cette habitu<strong>de</strong> dʹêtre ensemble, vous<br />

puisez la cordialité fraternelle qui fait le bonheur dʹune communauté. Comme dʹhabitu<strong>de</strong>, chers<br />

frères, je ne vais pas vite; jʹen suis à mes impressions <strong>de</strong> départ [lundi 25 juillet 1865], sans être par‐<br />

ti. Enfin, nous voici en wagon, le train part, nous sommes en route pour Chalon. Nous avons été<br />

assez libres dans notre compartiment; nous avons pu causer, et lorsquʹon est <strong>avec</strong> le bon Père et M.<br />

<strong>de</strong> Varax et quʹon sʹentretient <strong>de</strong> vous et <strong>de</strong> la Communauté, on est bien. A Chalon, nous avons été<br />

reçus gracieusement par le frère <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax et, le len<strong>de</strong>main [mardi 26] il a fallu partir pour<br />

Grenoble et nous séparer <strong>de</strong> ce bien cher f. <strong>de</strong> Varax que nous avons laissé dans un état <strong>de</strong> santé<br />

satisfaisant, pas trop fatigué <strong>de</strong> la route. Nous sommes arrivés à Grenoble à 5h.1/2 du soir. Notre<br />

bon Père nʹétait pas trop fatigué; nous avons pu sans témérité partir le len<strong>de</strong>main mercredi [27] à<br />

6h.1/2, après la messe, pour Corps. Nous<br />

sommes à la partie la plus fatigante du<br />

voyage. Nous étions dans une mauvaise<br />

voiture, la pluie tombait par torrents; le<br />

trajet a duré 8h.1/2. Heureusement quʹil<br />

nʹavait presque pas plu à Corps et que nous<br />

pouvions sans danger faire lʹascension <strong>de</strong> la<br />

Salette. Le trajet était <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux heures et<br />

<strong>de</strong>mie. Nous avons pris <strong>de</strong>s mulets; nous<br />

nous sommes mis en route en compagnie<br />

dʹun ecclésiastique, <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux religieuses, dʹun<br />

Monsieur et <strong>de</strong> quatre dames, en tout dix<br />

personnes. La montée sʹest faite sans<br />

acci<strong>de</strong>nt. La montagne était couverte <strong>de</strong><br />

nuages; il a fallu y entrer, cʹest‐à‐dire entrer<br />

dans un brouillard épais à ne rien distinguer<br />

à quinze pas <strong>de</strong> distance; nous pensions être<br />

en novembre. Enfin, après avoir reçu une<br />

petite pluie, nous sommes arrivés à la Sainte<br />

Montagne, harassés <strong>de</strong> fatigue, mais<br />

heureux dʹavoir une petite souffrance à<br />

offrir à notre Sainte Mère <strong>de</strong>s Douleurs. On<br />

nous fit entrer dans lʹhôtellerie, on nous<br />

donna <strong>de</strong> petites chambres comme celles <strong>de</strong><br />

Vaugirard, et, après y avoir déposé nos paquets, nous sommes allés adorer le S t Sacrement dans la<br />

magnifique église <strong>de</strong> Notre‐Dame, puis nous sommes <strong>de</strong>scendus sur le terrain <strong>de</strong> lʹapparition, où<br />

se trouvaient trois groupes en bronze <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>ur naturelle <strong>de</strong> la plus parfaite exécution. Le pre‐<br />

mier représentait Notre‐Dame assise sur la pierre <strong>de</strong> la fontaine. Au‐<strong>de</strong>ssous, la source miracu‐<br />

leuse qui coule continuellement. Avec quel bonheur on sʹagenouille aux pieds <strong>de</strong> cette Sainte Mère<br />

qui pleure, la tête dans les mains. Quand on pense quʹelle a ainsi pleuré pour nous, on se sent ému<br />

et on pleure <strong>avec</strong> elle. Lʹon voudrait avoir le moyen dʹarrêter ces larmes; le moyen, cʹest <strong>de</strong> se puri‐<br />

fier du péché et dʹamener les autres à sʹen purifier. Elle pleure parce quʹon ne se convertit pas;<br />

convertissons‐nous, et travaillons au salut <strong>de</strong>s autres. A quatre pas <strong>de</strong> cette statue se trouve Notre‐<br />

Dame <strong>de</strong>bout, parlant aux petits bergers. La T. S te Vierge a les bras croisés, un crucifix, <strong>de</strong>s tenail‐<br />

les, <strong>de</strong>s clous sur la poitrine; elle charge les enfants dʹannoncer à tout son peuple, cʹest‐à‐dire à tous<br />

les chrétiens, la nouvelle <strong>de</strong> la colère <strong>de</strong> Dieu, si lʹon ne se convertit pas. En parlant aux bergers,<br />

elle parlait à tous et ses larmes coulaient sans interruption. A genoux au pied <strong>de</strong> ce groupe, on re‐<br />

çoit les paroles dites aux bergers et, en considérant lʹattitu<strong>de</strong> et le visage désolé <strong>de</strong> notre Sainte<br />

Mère, on sent les yeux se remplir <strong>de</strong> larmes et le cœur se pénétrer dʹhorreur pour le péché qui<br />

1040


cause tant <strong>de</strong> douleur à notre Mère. En quittant ce groupe, on passe le ruisseau quʹa passé la S te<br />

Vierge et on monte le chemin quʹelle a parcouru qui se trouve planté <strong>de</strong> 14 croix; et on dit <strong>avec</strong> la<br />

T. S te Vierge le chemin <strong>de</strong> la croix, en union dʹexpiation. Cette montée du chemin <strong>de</strong> croix, qui est<br />

brisée à <strong>de</strong>ux endroits, est, au dire <strong>de</strong>s Pères <strong>de</strong> Terre Sainte qui sont venus à la Salette, la figure<br />

exacte du chemin du Calvaire à Jérusalem. Ce qui prouve quʹen parcourant ce chemin, la S te Vierge<br />

a voulu tracer un chemin <strong>de</strong> croix et prévenir ses enfants que, pour sécher ses larmes, il faut la sui‐<br />

vre dans lʹexpiation et, après cette expiation, monter au Ciel <strong>avec</strong> Elle. Arrivé sur le monticule qui<br />

est au haut du chemin <strong>de</strong> croix, on entre dans la chapelle <strong>de</strong> lʹAssomption où lʹon trouve le groupe<br />

représentant la T. S te Vierge.<br />

Après avoir jeté sur la terre <strong>de</strong>s regards <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong>, on la voit, les yeux au ciel, <strong>de</strong>man‐<br />

dant grâce pour les pécheurs. Dans cette chapelle, on y trouve <strong>de</strong>s sentiments <strong>de</strong> consolation, on<br />

pense au Ciel où est notre Mère; on se sent bien dans cet endroit dʹoù elle sʹest élevée vers la patrie;<br />

on <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à la suivre. Quand on est sorti <strong>de</strong> cette chapelle, on retourne à la Vierge assise, à la<br />

Vierge parlant aux enfants, au chemin <strong>de</strong> croix, et on continue ainsi, sans pouvoir se résoudre à<br />

quitter ces lieux si chers; mais une personne ou une chose vous réclame, on quitte <strong>avec</strong> lʹintention<br />

dʹy retourner au plus vite. Cette terre est une terre bénie. On sent que notre Sainte Mère a passé<br />

par là, et on ne peut se résoudre à quitter ses traces; on boit lʹeau miraculeuse, on cueille <strong>de</strong>s fleurs<br />

sur le chemin quʹa parcouru notre Mère; on voudrait rester pour toujours dans ce lieu béni. Ce sen‐<br />

timent est si vif quʹune dame <strong>de</strong> Grenoble, qui venait très souvent à la Salette, voulut être enterrée<br />

sur la montagne et <strong>de</strong>manda par testament quʹon écrivît sur sa tombe ces paroles: Elle repose où<br />

son cœur fut toujours.<br />

Quittons cet endroit pour un instant. Nous arrivons à 6h. Après avoir visité les Saints Lieux<br />

rapi<strong>de</strong>ment, on sonne le souper à 6h.1/2. Nous étions une trentaine à table dont un grand nombre<br />

ecclésiastiques; nous nʹétions pas <strong>avec</strong> les frères (ils mangent à part). Après le souper, nous retour‐<br />

nâmes visiter les Saints Lieux, mais il pleuvait. A huit heures, on sonna la prière; tout le mon<strong>de</strong> se<br />

rendit dans lʹéglise. Le Père Directeur <strong>de</strong> lʹexercice fit diverses recommandations <strong>de</strong> prières; on ré‐<br />

cita cinq dizaines <strong>de</strong> chapelet, on fit la prière du soir; puis le Père, dans une petite instruction <strong>de</strong> 17<br />

minutes, donna la matière <strong>de</strong> la méditation du len<strong>de</strong>main. On finit par un cantique à N.D. <strong>de</strong> la Sa‐<br />

lette. A 9h., coucher. A 4h.1/2 lever pour la prière du matin, la méditation, la S te Messe; à 7h.1/2, dé‐<br />

jeuner; puis on retourne aux Saints Lieux. (jeudi 28 juillet).<br />

Nous achetons un grand vase <strong>de</strong> fer‐blanc pouvant contenir dix litres et nous allons le rem‐<br />

plir à la fontaine; nous achetons trois photographies représentant les trois groupes en bronze. A<br />

11h. (cela se fait tous les jours à la même heure), un Père vient sur les Saints Lieux raconter toute<br />

lʹhistoire <strong>de</strong> lʹapparition dans tous ses détails. Ce récit fut fait dʹune manière très simple et très in‐<br />

téressante; il dura trois quarts dʹheure, sans fatiguer personne. On était assis par terre, écoutant le<br />

Père qui parlait <strong>de</strong>bout. Je me figurai alors N.S. enseignant la foule dans le désert. A midi, dîner.<br />

Après cela, chacun va où son attrait le porte. Le soleil vient <strong>de</strong> paraître, mais les nuages couvrent<br />

encore les montagnes et le temps est incertain. Les pèlerins se dispersent, les uns grimpent sur le<br />

môle voisin, les autres sur un autre môle à quarante minutes <strong>de</strong> distance, mais on sʹentretient tou‐<br />

jours <strong>de</strong> la céleste apparition. Je ne pus gravir: mes jambes se ressentaient trop <strong>de</strong> la montée à mu‐<br />

let. Je restai sur une petite hauteur, en vue <strong>de</strong>s Saints Lieux, et mʹassis, contemplant toutes ces cho‐<br />

ses admirables: ces Saints Lieux, cette église, cet hospice, ces Pères <strong>de</strong> la Salette, cette affluence <strong>de</strong><br />

pèlerins, cette terre où lʹon sent la T. S te Vierge encore présente. A 3h., nous <strong>de</strong>vions faire le chemin<br />

<strong>de</strong> croix, mais, à partir <strong>de</strong> 2h.1/2, la pluie vint à tomber abondamment. Nous nous retirâmes dans<br />

la chapelle <strong>de</strong> lʹAssomption, méditant sur toutes ces choses; puis nous visitâmes lʹéglise, qui est<br />

très gran<strong>de</strong> et dans un très beau style roman. Sur le maître‐autel figurent ces chan<strong>de</strong>liers <strong>de</strong>s ate‐<br />

liers <strong>de</strong> Vaugirard. Les chapelles sont remplies dʹex‐voto. Cette église est toute en granit et en mar‐<br />

bre pris dans le voisinage. Toutes les constructions ont coûté un million trois cent mille francs. Les<br />

trois groupes en bronze, du prix <strong>de</strong> 45.000f, ont été donnés par une seule personne. Le soir, à<br />

1041


6h.1/2, souper; 8h., chapelet, prière, instruction, cantique; 9h., coucher. Vendredi [29 juillet] 4h.1/2,<br />

lever, méditation; 7h., S te Messe au maître‐autel, ainsi que la veille, dite par notre Père Supérieur et<br />

servie par moi. Nous avons bien prié pour notre chère Communauté, pour vous tous, pour toutes<br />

nos œuvres. Je pensais à vous qui, <strong>avec</strong> nous, faisiez une neuvaine à notre Sainte Mère. Je puis dire<br />

que, dans ces Saints Lieux, la prière est une grâce donnée à tous; elle est facile, elle est douce, on sʹy<br />

complaît. Après la S te Messe, chemin <strong>de</strong> croix. Déjeuner à 8h. Le temps était supportable, il fallait<br />

partir, notre Père sur un mulet, moi à pied. Le mulet part, il faut suivre, il faut quitter les Saints<br />

Lieux; je me retournai bien <strong>de</strong>s fois et je voyais encore la Vierge <strong>de</strong> lʹAssomption; enfin un nuage<br />

finit par la voiler et il fallut avancer, le cœur gros. Je sentais le chagrin dʹun enfant qui quitte sa<br />

mère, et, comme un enfant, je pleurais. Je <strong>de</strong>scendis ainsi pendant <strong>de</strong>ux heures la montagne; les si‐<br />

tes étaient très beaux, mais ils mʹimportaient peu. Jʹavais bien autre chose au cœur. Ce chagrin nʹa<br />

pas cessé; je ne puis penser sans émotion à la Sainte Montagne. Vendredi, à 10h., nous étions à<br />

Corps; à 6h., à Grenoble. Samedi [30 juillet], départ pour Allevard. Arrivée à 2h. Difficulté pour<br />

trouver un logement convenable. Enfin, le len<strong>de</strong>main dimanche [31], à 10 h., nous trouvons un hô‐<br />

tel retiré, bien situé, bien tranquille. Nous nous y installons. Le len<strong>de</strong>main lundi [1 er août], (jour<br />

présent), nous souffrons par tout le corps et nous commençons à pouvoir prendre une plume pour<br />

vous écrire. Vous pensez que nous avons été lents en cela; gar<strong>de</strong>z‐vous bien <strong>de</strong> ce jugement témé‐<br />

raire; il est 10h du soir, et je suis obligé <strong>de</strong> mʹarrêter. A <strong>de</strong>main. Bonsoir.<br />

Mardi 2 août. Lau<strong>de</strong>tur Jesus Christus: Me voici sur pied. Notre Père a dit sa messe (je la lui<br />

sers tous les jours). Son état <strong>de</strong> santé est bon. Le régime du soufre lʹa un peu troublé, mais pas as‐<br />

sez pour quʹil ne puisse le continuer. Il y a lieu dʹespérer que, par vos prières, le traitement <strong>de</strong>s<br />

bains lui réussira.<br />

Adieu, chers amis, notre Père et moi nous vous embrassons tous bien tendrement. Nous au‐<br />

rions voulu vous avoir à la Salette, mais la T. S te Vierge, je nʹen doute pas, vous fera <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s<br />

grâces. Engagez bien le bon frère Chaverot à aller à la Salette, à bien prier pour obtenir la grâce <strong>de</strong><br />

faire ce pèlerinage.<br />

Présentez mes amitiés à tous les amis.<br />

Votre dévoué frère en S t Vincent <strong>de</strong> Paul<br />

Paillé<br />

1013 à M gr Angebault<br />

Gratitu<strong>de</strong> pour le soutien que lʹêvêque dʹAngers apporte à lʹInstitut. Une telle bienveillance console MLP., au<br />

moment où à Grenelle les frères sont en butte aux vexations du curé et subissent ʺquelques rigueurs inaccoutu‐<br />

mées <strong>de</strong> lʹArchevêchéʺ.<br />

Allevard les Bains (Isère), 6 août 1865<br />

Monseigneur,<br />

Je nʹai pu répondre aussi vite que je lʹaurais voulu à la bonne et paternelle lettre que<br />

vous mʹavez fait lʹhonneur <strong>de</strong> mʹécrire à la fin du mois <strong>de</strong>rnier, la pru<strong>de</strong>nce extrême <strong>de</strong>s<br />

mé<strong>de</strong>cins mʹayant obligé à prendre quelques précautions pour affronter plus résolument<br />

les rigueurs <strong>de</strong> lʹhiver. A cette fin, on mʹa envoyé passer quelque temps à Allevard (Isère),<br />

où se trouve une source sulfureuse très estimée. Je me suis à regret soumis à cette prescrip‐<br />

tion, à cause du déplacement et <strong>de</strong> la dépense et parce que, en général, les médicaments ne<br />

me sont dʹaucun effet; jʹai cru quʹil fallait prendre cette disposition comme étant dans les<br />

vues <strong>de</strong> Dieu, dʹautant que la route à suivre pour gagner Allevard me mettait à très petite<br />

distance <strong>de</strong> la montagne <strong>de</strong> la Salette et me fournissait une occasion <strong>de</strong> faire ce pieux pèle‐<br />

rinage; jʹai pu, en effet, lʹaccomplir et jʹy ai trouvé une gran<strong>de</strong> consolation; jʹy ai bien prié<br />

1042


pour tous ceux que le bon Maître a fait près <strong>de</strong> nous les représentants <strong>de</strong> sa bonté et <strong>de</strong> ses<br />

tendres con<strong>de</strong>scendances; cʹest dire que le nom <strong>de</strong> notre Vénéré et bien‐aimé Evêque<br />

dʹAngers Lui a été particulièrement recommandé. Votre bienveillance pour nous, en effet,<br />

Monseigneur, doit lui être particulièrement agréable, puisquʹelle vient en surcroît <strong>de</strong> tout<br />

ce que vous opérez <strong>de</strong> bien dans votre diocèse et quʹelle émane <strong>de</strong> la surabondance <strong>de</strong> vo‐<br />

tre charité. Elle nous est surtout aimable, consolante et précieuse en ce moment où quel‐<br />

ques rigueurs inaccoutumées <strong>de</strong> lʹArchevêché à notre égard nous ont vivement contristés.<br />

Malgré la patience <strong>avec</strong> laquelle nous avons supporté les mille vexations du Curé <strong>de</strong> Gre‐<br />

nelle, ne répondant jamais que par <strong>de</strong>s marques <strong>de</strong> déférence à ses accusations et attaques<br />

incessantes, M. lʹArchidiacre a exigé, pour rétablir la paix, a‐t‐il dit, que lʹaumônier très<br />

inoffensif <strong>de</strong> cette maison fût changé et que lʹœuvre fût soumise à lʹautorité <strong>de</strong> M. le Curé.<br />

Nous acceptons volontiers la surveillance du Pasteur <strong>de</strong> la Paroisse; mais comment peut‐il<br />

avoir autorité dans une œuvre qui lui est entièrement étrangère, qui réunit <strong>de</strong>s enfants et<br />

jeunes gens <strong>de</strong> tous les quartiers et qui consiste, en définitive, à les placer en apprentis‐<br />

sage, à leur procurer <strong>de</strong>s travaux et à les surveiller dans leurs ateliers? Ce Curé prend les<br />

choses à la lettre, vient fréquemment, envoie son vicaire plusieurs fois la semaine exercer<br />

<strong>de</strong>s surveillances, intimer ses avis et répéter chaque fois <strong>de</strong>s paroles menaçantes, en prévi‐<br />

sion <strong>de</strong>s oppositions que nous ferions à son autorité. Jusquʹici, jʹexhorte nos frères à la pa‐<br />

tience, espérant quʹune situation si anormale ne saurait se maintenir, mais mes bons frères<br />

sont peinés et découragés. M. Lantiez a essayé <strong>de</strong> faire appel à M gr , mais il a répondu quʹil<br />

ne voulait pas entraver lʹaction <strong>de</strong> ses Vicaires Généraux. Vous daignerez, mon bon Sei‐<br />

gneur, vous souvenir <strong>de</strong> nous <strong>de</strong>vant Dieu, afin que cette épreuve tourne à sa gloire et soit<br />

portée par nous dans un esprit vraiment chrétien.<br />

Combien le sort <strong>de</strong> nos frères dʹAngers est à envier pour les autres; votre appui, vos<br />

conseils <strong>de</strong> Père, vos encouragements, jʹose presque dire dʹami, leur font la voie bien douce<br />

et ren<strong>de</strong>nt leurs travaux faciles. Je me plais à espérer quʹils sʹattacheront <strong>de</strong> plus en plus à<br />

vous complaire par leur régularité, par leur dévouement aux œuvres que vous leur avez<br />

confiées, notamment pour la Psallette dont ils comprennent lʹimportance et la gran<strong>de</strong> utilité.<br />

Veuillez agréer, Monseigneur, les nouvelles assurances du respect <strong>avec</strong> lequel je<br />

suis<br />

Votre dévoué et tendrement affectionné fils en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1014 à M. Planchat<br />

Les difficultés à Grenelle. Il manque les conditions pour faire le bien. Face au zèle <strong>de</strong> M. Planchat pour lʹŒuvre<br />

<strong>de</strong> Charonne, MLP. lʹinvite à la patience. ʺLes œuvres chrétiennes donnent du fruit par la patienceʺ, vertu pra‐<br />

tiquée par MLP. vis‐à‐vis <strong>de</strong> la SSVP.<br />

Allevard, 8 août 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je nʹai point encore répondu à votre bonne et cordiale lettre, dʹune date déjà <strong>de</strong> plu‐<br />

sieurs jours; jʹen avais néanmoins lʹintention et, chose peu croyable dans ma position, le<br />

temps surtout mʹa manqué pour la réaliser. Je nʹen ai pas beaucoup encore aujourdʹhui; je<br />

veux au moins vous écrire quelques lignes pour répondre aux points les plus essentiels <strong>de</strong><br />

votre lettre.<br />

1043


Je ne vois guère, pour subvenir à la petite <strong>de</strong>tte dont vous me parlez concernant les<br />

calorifères, quʹune quête ou <strong>de</strong>s petits billets à 10 ou 25 centimes; mais ces <strong>de</strong>rniers lasse‐<br />

ront tout votre mon<strong>de</strong> et vous empêcheront <strong>de</strong> recourir à la charité <strong>de</strong> vos connaissances<br />

pour <strong>de</strong>s choses plus essentielles; il faudrait dʹailleurs un prétexte à cette émission <strong>de</strong> peti‐<br />

tes feuilles et on ne voit guère celui quʹon pourrait imaginer.<br />

Quant à notre établissement à S te ‐Anne, lʹobstacle que vous signalez humblement<br />

dans les quelques imperfections <strong>de</strong> votre manière habituelle <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r nʹest que le<br />

moindre <strong>de</strong> tous et le plus facile, sans doute, à surmonter, puisque vous y travaillez <strong>avec</strong><br />

une constante et chrétienne bonne volonté. Mais il en existe plusieurs autres qui <strong>de</strong>man‐<br />

<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> notre part un peu dʹattente et <strong>de</strong> circonspection pru<strong>de</strong>nte; cʹest, avant tout, lʹinsuf‐<br />

fisance <strong>de</strong> notre personnel pour fon<strong>de</strong>r à S te ‐Anne un établissement un peu consistant et<br />

donnant confiance. Cʹest aussi la disposition présente <strong>de</strong> lʹArchevêché qui veut être mieux<br />

comprise et définie avant quʹil nous soit permis dʹavancer. A quoi bon, en effet, créer à Pa‐<br />

ris <strong>de</strong>s institutions multipliées, si on nous y refuse les conditions les plus essentielles pour<br />

faire le bien: un peu <strong>de</strong> liberté, un peu dʹestime, un peu dʹencouragement; tout cela man‐<br />

que à Grenelle et pourra éventuellement nous manquer ailleurs, si nous sommes aban‐<br />

donnés à lʹarbitraire <strong>de</strong> MM. les Curés, même <strong>de</strong> MM. les Vicaires, sans aucune défense ni<br />

garantie. Si les Frères <strong>de</strong>s Ecoles <strong>de</strong>vaient établir leurs maisons dans <strong>de</strong> pareilles condi‐<br />

tions, les ouvriraient‐ils?<br />

Nous en pouvons dire autant et plus encore du côté <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong><br />

Paul, car, <strong>de</strong> cette part, on trouverait encore moins <strong>de</strong> sûretés, lʹexpérience, la haute raison,<br />

la stabilité étant en moindre proportion. Peut‐on asseoir <strong>de</strong>s fondations, si mo<strong>de</strong>stes quʹon<br />

les suppose, sur un sol si peu soli<strong>de</strong>; le Seigneur lui‐même traite dʹinsensés ceux qui po‐<br />

sent sur le sable les fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> leur maison; vous verrez cette parabole rendue en pein‐<br />

ture sous le porche <strong>de</strong> S t ‐Germain lʹAuxerrois.<br />

Voilà pourquoi, bien cher ami, sans rejeter vos vœux si légitimes pour une assiette<br />

meilleure et moins incommo<strong>de</strong> <strong>de</strong> notre œuvre à S te ‐Anne, je crois quʹil faut un peu patien‐<br />

ter encore, laisser les nuages se dissiper et le Ciel sʹéclaircir; mais, vous le savez, rien nʹest<br />

persistant en ce mon<strong>de</strong>; quand le temps est sombre et que vient la pluie, il semble quʹelle<br />

durera toujours; mais bientôt le vent change, balaie les vapeurs et le soleil reparaît; patien‐<br />

tons un peu; les œuvres chrétiennes donnent du fruit par la patience; prions, confions‐<br />

nous en Dieu, adorons sa divine Sagesse, Il nous montrera combien ses <strong>de</strong>sseins étaient<br />

adorables et miséricordieux.<br />

Offrez à lʹoccasion mes respectueux sentiments à votre bien bon Curé; je suis tout<br />

consolé par sa bienveillance, mais hélas! celle <strong>de</strong> M. le Curé <strong>de</strong> Grenelle nʹétait pas moin‐<br />

dre autrefois, nous avons tout fait pour la conserver et pourtant aujourdʹhui, et <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s<br />

années, quelle guerre implacable ne nous a‐t‐il pas fait?<br />

Jʹaimerais à continuer cette lettre, cher ami, à vous parler un peu <strong>de</strong> vous, <strong>de</strong> nous,<br />

<strong>de</strong> Dieu surtout pour qui nous sommes uniquement, pour qui nous voulons seulement<br />

agir, travailler; mais je veux que cette lettre ne soit pas plus longtemps retardée, je la clos<br />

donc ici.<br />

Je viens <strong>de</strong> recevoir une lettre <strong>de</strong> notre cher M. <strong>de</strong> Varax; il mʹécrit <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong>s<br />

Hermites et touche au terme <strong>de</strong> son voyage; sa lettre, comme toujours, est pleine <strong>de</strong> ten‐<br />

dres sentiments pour toute la petite famille; je crois que Dieu nous donne en lui et en M.<br />

Chaverot une double et heureuse espérance.<br />

1044


un siècle après le pèlerinage du P. Le <strong>Prevost</strong>,<br />

inauguration et bénédiction <strong>de</strong> l’église Notre-Dame <strong>de</strong> La Salette.<br />

PARIS, 1965 :<br />

Adieu, bien cher ami, renouvelez à tous nos ff. mes affectueux sentiments et prenez‐<br />

en pour vous une large part. Mille respects, à lʹoccasion, à votre si bonne mère; donnez‐<br />

moi <strong>de</strong> ses nouvelles si vous mʹécrivez.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Jʹai écrit hier à M. Lantiez au sujet du projet dʹécole payante à Arras, je lui dis<br />

mes répugnances pour cet arrangement. Je montre quʹon peut occuper bien utilement, bien<br />

charitablement les ff. sans prendre un emploi que la Communauté ne sʹest pas crue appe‐<br />

lée jusquʹici à remplir. Je cite diverses œuvres <strong>de</strong> charité quʹon pourrait faire, mais il en est<br />

une meilleure que toutes les autres que jʹai omise, quʹon pourrait aisément, sous les auspi‐<br />

ces et <strong>avec</strong> les appuis <strong>de</strong> M gr dʹArras, entreprendre: cʹest une œuvre <strong>de</strong> première commu‐<br />

nion proportionnée, pour les formes quʹon lui donnerait, au personnel, aux ressources, au<br />

temps quʹon y pourrait consacrer. Suggérez cette idée à nos MM., afin quʹils la mûrissent<br />

et la fassent, sʹil y a lieu, goûter à M. Laroche 375 .<br />

L.P.<br />

1015 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Impressions du pèlerin <strong>de</strong> La Salette. Place que la Vierge Marie tient dans la vie spirituelle <strong>de</strong> MLP. Brèves nou‐<br />

velles <strong>de</strong> la Communauté.<br />

Allevard, 10 août 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je ne vous cherche plus à N.D. <strong>de</strong>s Hermites, puisque déjà vous avez passé outre;<br />

cʹest ainsi pour toutes choses en ce mon<strong>de</strong>; lʹhomme est un passant, il ne sʹarrête ni aux<br />

lieux, ni aux choses, une voix impérieuse lui crie: ʺMarcheʺ. Marchons donc, cher ami,<br />

mais marchons vers la patrie où nous nous reposerons enfin! (Jʹécris en plein air, sur mes<br />

genoux; lisez si vous pouvez, ce sont mes usages à la campagne). A votre retour, vous me<br />

375 L’abbé Laroche était directeur <strong>de</strong> l’Œuvre du Coclipas, à Arras (école et patronage). L’évêque d’Arras était désireux <strong>de</strong> voir la<br />

Congrégation prendre la direction <strong>de</strong> cette Œuvre. L’Institut laissera le Coclipas en août 1867 pour y revenir en octobre 1896.<br />

1045


direz les pieux inci<strong>de</strong>nts <strong>de</strong> votre pèlerinage à Einsie<strong>de</strong>ln; je vous raconterai ceux <strong>de</strong> la Sa‐<br />

lette, ce sera double occasion dʹédification. Il ne faut pas chercher, ni toujours attendre<br />

dans cette visite <strong>de</strong>s lieux saints <strong>de</strong>s émotions vives, <strong>de</strong>s grâces sensibles et extraordinai‐<br />

res; le calme et la sérénité <strong>de</strong> lʹâme dans la simplicité <strong>de</strong> la foi sont un état bien doux et que<br />

Dieu seul peut asseoir en nous; il faut donc savoir en jouir et ne pas regretter <strong>de</strong>s disposi‐<br />

tions qui sont autres, sans doute, mais qui ne sont pas meilleures. Je ne saurais dire que<br />

jʹaie, pour moi, éprouvé <strong>de</strong>s sentiments inconnus, saisissants au Sanctuaire et aux stations<br />

pieuses <strong>de</strong> la Salette; jʹétais en paix, heureux comme on lʹest dans la maison paternelle, la‐<br />

quelle nʹa rien qui remue, mais où on se plaît mieux que partout ailleurs; la dépense, la fa‐<br />

tigue, dʹautres inconvénients nʹétaient même pas aperçus et ne comptaient pour rien; on<br />

était aux pieds <strong>de</strong> la Mère, on y était bien, on y serait volontiers resté. Vous le sentez<br />

comme moi, cher ami, la S te Vierge, dans notre foi si sainte et si parfaite, cʹest la mère dans<br />

la famille; nʹest‐ce pas tout dire? Retirez la mère <strong>de</strong> la famille, le feu sʹéteint au foyer, les<br />

biens qui nous restent sont décomplétés et per<strong>de</strong>nt presque tout leur prix. La S te Vierge en‐<br />

core, cʹest cette lune douce et pure qui éclaire les nuits; oui, le soleil est radieux; oui, il<br />

échauffe et vivifie toute créature, mais la lune va bien aux affligés, aux cœurs brisés; elle<br />

est lʹimage <strong>de</strong> la Mère <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong>, secours <strong>de</strong>s misérables et refuge <strong>de</strong>s pécheurs. En‐<br />

fin, Marie est lʹinstrument par excellence, choisi par la main <strong>de</strong> Dieu pour exécuter <strong>avec</strong> le<br />

Sauveur lui‐même le grand œuvre <strong>de</strong> la réparation du mon<strong>de</strong>. Si nous avions, si vous<br />

aviez, vous, cher ami, le calice dont se servait S t Vincent <strong>de</strong> Paul pour le S t Sacrifice, quel<br />

trésor, quel bonheur! Marie est le calice dans lequel a été offert le sacrifice par le doux Jé‐<br />

sus lui‐même; dans son sein virginal, la victime était offerte, immolée et agréée du Père<br />

Eternel. Et ce calice, il nʹétait pas matériel, insensible; vas spirituale, vaisseau spirituel, il<br />

concourait par lʹesprit et par lʹassentiment au grand sacrifice qui se consommait. Cʹest<br />

pourquoi, à travers les temps, Marie est encore, et avant tous les autres saints, lʹinstrument<br />

aux mains <strong>de</strong> Dieu, le canal <strong>de</strong> ses grâces et lʹorgane <strong>de</strong> ses miséricor<strong>de</strong>s.<br />

On voit bien que je suis en plein champ; je me mets à lʹaise et ne ménage ni lʹencre,<br />

ni le papier; mais le f. Paillé est là qui me rappelle à lʹordre, il faudra lever le siège et aller<br />

aux aspirations, on dit les inhalations, cʹest plus médical et scientifique, la confiance est<br />

plus gran<strong>de</strong>. La mienne nʹest pas très robuste, je subis tout cela passivement, jʹai déjà vou‐<br />

lu retourner à Vaugirard plusieurs fois et je ne pense pas que ma patience ait <strong>de</strong>s termes<br />

bien lointains.<br />

Je ne vois pas <strong>de</strong> faits et gestes bien notables à vous dire touchant la Communauté.<br />

Notre ami M. Chaverot est parti <strong>de</strong> Chaville le lundi 7 seulement; il sʹy trouvait à sa place,<br />

il sʹen éloignait <strong>avec</strong> peine, il voulait aussi concourir à la distribution <strong>de</strong> Vaugirard, que<br />

sais‐je? Il est <strong>de</strong> la famille et tout lʹy intéresse. Que le bon Dieu est bon <strong>de</strong> donner ainsi aux<br />

siens le goût <strong>de</strong>s choses les plus simples et <strong>de</strong> les leur rendre aimables, parce que cʹest Lui<br />

qui les a faites et qui les leur donne. Benedictus Dominus etc. Que toute la nature le chante<br />

et le loue <strong>avec</strong> nous! Notre ami, M. Camus, est moins avancé, par le fait au moins; son<br />

père, <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s fureurs inouïes, <strong>de</strong>s menaces contre sa femme, contre lui‐même, <strong>de</strong>s injures<br />

contre tout ce qui a rapport à la religion, injures violentes, a juré quʹil donnerait sa malé‐<br />

diction à son fils le jour où il entrerait dans une Communauté; hélas! il lit Le Siècle. Dʹaprès<br />

lʹavis du p. Milleriot et le mien propre, il a paru sage <strong>de</strong> temporiser un peu et <strong>de</strong> laisser<br />

passer lʹorage. Ces tristes faits ont leur bon côté; ils affermissent et élèvent la volonté <strong>de</strong><br />

notre ami; à son retour <strong>de</strong>s eaux, son père a déclaré quʹil lui fermait sa maison, à moins<br />

1046


quʹil ne sʹengageât à renoncer à tout projet <strong>de</strong> vie religieuse, il a refusé bravement <strong>de</strong><br />

prendre cet engagement; il est donc resté à Paris, résidant en apparence Hôtel Fénelon,<br />

mais, par le fait, presque incessamment <strong>avec</strong> les nôtres. Son désir <strong>de</strong> faire la volonté <strong>de</strong><br />

Dieu et <strong>de</strong> la bien connaître nʹa pas varié un instant. Continuons donc à prier, et le Dieu <strong>de</strong><br />

miséricor<strong>de</strong> tournera <strong>de</strong> cette vocation un double bien: la sanctification <strong>de</strong> lʹun, la conver‐<br />

sion <strong>de</strong> lʹautre.<br />

M. lʹabbé Laroche est à Chaville à faire une retraite, nos MM. sʹenten<strong>de</strong>nt à mer‐<br />

veille <strong>avec</strong> lui; cʹest, en effet, un saint prêtre, un homme intelligent, dʹun grand zèle, dʹune<br />

vraie piété.<br />

Lʹabbé Roussel, très fatigué, se repose un peu et prend quelques bains <strong>de</strong> mer. M.<br />

Georges [<strong>de</strong> Lauriston] tient la maison <strong>de</strong> Grenelle, et M. Lantiez y va les dimanches et<br />

jeudis pour le spirituel; nous examinons la situation.<br />

Je ne vous dis rien dʹAllevard, vos bons parents lʹont vu, mʹavez‐vous dit; ce pays a<br />

ses beautés assurément, mais nous avons vu mieux dans les Pyrénées et dans la Provence.<br />

Pour les sociétés, nombreuses ici, comme en toutes les eaux, nous y sommes absolument<br />

étrangers; je nʹai guère dʹailleurs le goût <strong>de</strong>s observations dans ce mon<strong>de</strong> pour lequel nous<br />

nʹavons dʹautre mission que celle <strong>de</strong> la prière et <strong>de</strong>s bons désirs; daigne le Seigneur les<br />

agréer. Jusquʹici, sauf le pèlerinage à N.D. <strong>de</strong> la Salette, je ne sais quel bon souvenir jʹaurais<br />

à remporter <strong>de</strong> ce voyage, le <strong>de</strong>rnier peut‐être un peu lointain que jʹaurai à faire, sinon<br />

lʹimpression <strong>de</strong> contentement qui mʹest restée <strong>de</strong> lʹaimable et hospitalière réception <strong>de</strong><br />

Chalon; rien nʹy a manqué pour nous la rendre gracieuse et obligeante: les soins préve‐<br />

nants <strong>de</strong> votre bonne mère, la cordialité franche <strong>de</strong> votre cher frère, et aussi tout particu‐<br />

lièrement la présence du vénérable Curé <strong>de</strong> S t ‐Pierre que je désirais tant connaître et que<br />

vous mʹaviez dʹavance fait aimer. Cherchez bien, cher ami, quelque occasion <strong>de</strong> remercier<br />

pour nous vos bons parents, <strong>de</strong> la manière la mieux sentie; ils ont voulu faire une bonne<br />

action, ils y ont bien réussi; que le Seigneur veuille les en récompenser!<br />

Adieu, bien cher ami, les jours coulent, ils iront vite, et celui qui <strong>de</strong>vra nous réunir<br />

arrivera sans maintenant beaucoup tar<strong>de</strong>r; ce sera un jour béni pour moi, car, plus je <strong>de</strong>‐<br />

viens vieux, plus je sens le besoin dʹêtre entouré <strong>de</strong> mes enfants aimés.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Tendres affections et bons souvenirs du f. Paillé.<br />

1016 à M. Maignen<br />

Le moment est venu pour lʹInstitut <strong>de</strong> faire sa place dans le mon<strong>de</strong> chrétien. Obstacles quʹil rencontre. Nécessité<br />

<strong>de</strong> la régularité aux exercices communs pour persévérer dans la vocation. Exhortation à une vie spirituelle plus<br />

généreuse, à travailler pour Dieu dans lʹoraison ʺpendant que vous prierez, Dieu fera vos œuvresʺ.<br />

Allevard, 14 août 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Notre absence ne sera pas aussi courte que vous semblez le croire; il ne paraît guère<br />

probable que nous arrivions avant mardi prochain, 22 <strong>de</strong> ce mois, nous aurons donc été 30<br />

jours partis; le temps coule vite; M. Paillé a tenu à ce que je fisse une saison à peu près or‐<br />

dinaire aux eaux, bien que, pour ma part, jʹen atten<strong>de</strong> peu dʹeffet; jʹai toujours pensé que la<br />

fin réelle <strong>de</strong> mon voyage était le pèlerinage <strong>de</strong> la Salette; puissions‐nous y avoir obtenu les<br />

1047


grâces dont nous avons, comme vous le dites, en ce moment, tout particulièrement besoin.<br />

Nous semblons arrivés, en effet, au moment où la Communauté <strong>avec</strong> ses œuvres doit<br />

prendre sa place dans le mon<strong>de</strong> chrétien, et, loin <strong>de</strong> nous ai<strong>de</strong>r à nous poser le moins mal<br />

possible, chacun semble nous mesurer jalousement nos limites et prendre à tâche que nous<br />

soyons aussi petits que possible; cʹest mauvais signe. Si ceux qui nous entourent étaient<br />

grands eux‐mêmes, ils nous tendraient noblement la main et nous abriteraient sous leur<br />

puissance; mais comme, aujourdʹhui surtout, le mot <strong>de</strong> Bossuet en présence <strong>de</strong> la cour est<br />

vrai: Dieu seul est grand, mes frères!...ʺ Oui, Il est grand, heureusement cela suffit; que les<br />

autres soient petits et faibles, il nʹimporte, ceux qui sʹappuieront fermement en Lui ne dé‐<br />

failliront point. Cʹest bien là, nʹest‐il pas vrai, cher ami, le sens <strong>de</strong> votre lettre, du sorte <strong>de</strong><br />

gémissement quʹelle exprime et <strong>de</strong> lʹaspiration pénible quʹelle exhale. Jʹy fais écho bien<br />

sympathiquement et nous sommes à <strong>de</strong>ux (et bien plus assurément) dans les mêmes pen‐<br />

sées, dans le même sentiment. Avant que votre lettre mʹarrivât, M. Paillé, dans les entre‐<br />

tiens quʹamènent nos longs tête‐à‐tête, me disait la souffrance que lui donnait lʹinexacti‐<br />

tu<strong>de</strong> et même lʹapparente indifférence <strong>de</strong> quelques frères pour les exercices; en même<br />

temps, M. Hello nous écrivait dans ce sens, et une autre lettre encore redisait la même<br />

plainte. Comment donc un besoin si profondément senti est‐il si mal satisfait? Lʹattrait<br />

pour lʹactivité extérieure, ou plutôt la paresse <strong>de</strong> lʹesprit qui répugne à lʹapplication au spi‐<br />

rituel, lʹéloignement naturel pour toute règle, lʹobéissance imparfaite <strong>de</strong>s frères, lʹautorité<br />

faible ou insuffisante chez les Supérieurs. Le remè<strong>de</strong> serait: une mortification plus gran<strong>de</strong>,<br />

une obéissance plus vraie, un esprit <strong>de</strong> foi plus profond. Nous sommes tous un peu<br />

comme Louis XIV, cher ami, nous voulons bien, dans les sermons, faire notre part, mais<br />

nous nʹaimons pas quʹon nous la fasse; je ne vous ferai donc aucune application person‐<br />

nelle <strong>de</strong> tout ceci, dʹautant que, prenant les <strong>de</strong>vants, vous vous lʹêtes mesurée généreuse‐<br />

ment. Pourtant, il ne serait pas excessif <strong>de</strong> dire quʹaprès tant <strong>de</strong> mouvements, <strong>de</strong> travaux<br />

extérieurs, <strong>de</strong> rapports <strong>avec</strong> le mon<strong>de</strong>, ou lʹexpérience <strong>de</strong> tous les maîtres spirituels est<br />

vaine, ou vous avez un besoin urgent, extrême dʹun peu dʹoraison prolongée, dʹun peu <strong>de</strong><br />

calme et <strong>de</strong> recueillement, dʹun peu dʹunion et <strong>de</strong> retour à Dieu. A moins <strong>de</strong> miracle, per‐<br />

sonne ne vit sans nourriture; ce serait tenter le Seigneur que dʹespérer pour votre âme<br />

quʹelle échappera à la langueur, au dépérissement et peut‐être à la chute si elle est trop<br />

peu refaite et soutenue; il faut essentiellement au religieux lʹoraison, la mortification, une<br />

règle; vous nʹavez plus rien <strong>de</strong> tout cela, la conclusion est claire, vous ne serez pas long‐<br />

temps par lʹesprit et le cœur, ni un religieux, ni un homme spirituel. Ces mots me coûtent à<br />

écrire, car il serait bien amer quʹaprès avoir tout quitté si généreusement à la fleur <strong>de</strong> votre<br />

âge, après avoir tant travaillé <strong>de</strong>puis vingt ans, vous vous retrouviez au point <strong>de</strong> départ et<br />

peut‐être en <strong>de</strong>çà; mais, cher enfant, il vaut mieux le dire, afin <strong>de</strong> lʹempêcher, que <strong>de</strong> le<br />

laisser sʹaccomplir par un ménagement <strong>de</strong> sentiment. Tout ce que vous me dites dans vo‐<br />

tre lettre, en ce qui vous touche, me frappait et peinait M. Paillé, et mettait encore dʹautres<br />

en souffrance. Mais que faire? dites‐vous; et les exigences et attentes <strong>de</strong>s bienfaiteurs, et les<br />

ressources à recueillir, et les jeunes gens à recruter et à soutenir au jour le jour. Tout cela<br />

est vrai, mais tout cela se fera par Dieu mieux que par vous; travaillez pour Lui dans<br />

lʹoraison, dans les lectures pieuses (quʹon me dit bien négligées), dans quelques sacrifices<br />

aux exercices et à la règle; Dieu vous le rendra et, pendant que vous prierez, le Seigneur<br />

fera vos œuvres. Ayez, cher enfant, cet esprit <strong>de</strong> foi, faites courageusement la part du spiri‐<br />

tuel, calculez bien vos affaires, ne manquez jamais surtout les exercices pour <strong>de</strong> légers pré‐<br />

1048


textes et souvent pour rien, et vous verrez que vos affaires en iront mieux. En ce moment<br />

<strong>de</strong> lʹannée, vous pouvez plus aisément, <strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> volonté, rentrer un peu en votre in‐<br />

térieur; faites‐le, reprenez quelques livres saints, (lisez la Vie <strong>de</strong> S te Chantal, par exemple, li‐<br />

vre hors ligne). ʺFuyez, taisez‐vous, reposez‐vousʺ, dit un ange à S t Arsène; il le fit et <strong>de</strong>‐<br />

vint un saint. Voilà, cher enfant, ce que je sentais le besoin <strong>de</strong> vous dire; je crois quʹau fond<br />

cʹest pour cela que jʹai provoqué votre lettre; je serai heureux si, à mon retour, vous avez<br />

fait quelques pas dans le sens que jʹindique, si surtout vous prenez dʹavance vos mesures<br />

pour faire, entière et sans rognure, la prochaine retraite; je vous y ai<strong>de</strong>rai <strong>de</strong> mon côté, car<br />

je suis résolu à nʹaccepter aucune <strong>de</strong>s raisons qui pourraient vous faire empêchement.<br />

Jʹai bonne confiance que, malgré les difficultés et par elles peut‐être, et notre Com‐<br />

munauté, et nos œuvres sʹasseoiront, mais à la condition que lʹesprit <strong>de</strong> vie sera à lʹinté‐<br />

rieur; faisons moins, mais travaillons selon Dieu et <strong>avec</strong> Lui, là est le secret <strong>de</strong> notre avenir;<br />

si nous le comprenons, nous vivrons.<br />

Demain, nous allons bien penser à vous tous et à vos enfants; les retraites <strong>de</strong> la<br />

Sainte‐Famille, les préparations <strong>de</strong> toutes sortes pour la gran<strong>de</strong> solennité, nous suivrons<br />

tout par le cœur, nous serons partout <strong>avec</strong> vous, <strong>avec</strong> Marie notre Mère, <strong>avec</strong> les anges et<br />

les Saints qui la glorifient, <strong>avec</strong> Dieu qui lʹembrasse et la couronne.<br />

Adieu, mon vieux, mon bien cher enfant, je vous embrasse en prédilection et suis et<br />

serai jusquʹà la fin<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1017 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Appréciations <strong>de</strong> MLP. sur la population dʹAllevard. Détails sur la vocation <strong>de</strong> M. Charrin et <strong>de</strong> M. Camus. Les<br />

jeunes philosophes.<br />

Allevard, 17 août 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Ma lettre <strong>de</strong>rnière sʹest croisée <strong>avec</strong> celle que vous mʹécriviez vous‐même, il nʹen se‐<br />

ra pas peut‐être <strong>de</strong> même pour celle‐ci qui sera, sans doute, la <strong>de</strong>rnière écrite dʹAllevard,<br />

car, mon f. Paillé et moi, nous comptons partir lundi prochain pour aller coucher à Lyon,<br />

dʹoù, le len<strong>de</strong>main, nous partirons pour Paris. Nous y arriverons sur les 7h. du soir. Vous<br />

voulez bien, cher ami, exprimer le désir que ma santé se soit bien trouvée du séjour <strong>de</strong>s<br />

eaux, je ne saurais dire ce quʹil en sera; jʹai passé les 15 premiers jours à essayer ces eaux<br />

qui ne me réussissaient point et surtout à souffrir <strong>de</strong>s nourritures moins simples quʹil me<br />

les fallait; <strong>de</strong>puis huit jours, je me sens mieux et un peu reposé. En ensemble, ce pays nous<br />

plaît médiocrement, les habitants sont pauvres et portent péniblement leur vie ru<strong>de</strong> et la‐<br />

borieuse, on ne sent pas parmi eux le calme et la consolation que Dieu donne à ceux qui<br />

travaillent sous ses yeux; je ne puis dire quʹils ne sont pas assez chrétiens, ne les ayant pas<br />

vus assez à loisir, mais je le crains; un grand nombre aussi sont disgraciés naturellement<br />

par <strong>de</strong>s goitres qui semblent lʹindice dʹune déformation aussi dans lʹesprit, les crétins se<br />

rencontrent fréquemment et cʹest une vue <strong>de</strong>s plus attristantes. Parmi les étrangers, on voit<br />

beaucoup <strong>de</strong> prêtres que la prédication a fatigués, beaucoup <strong>de</strong> religieux et religieuses<br />

épuisés par les labeurs <strong>de</strong> lʹenseignement. Il y a quelques promena<strong>de</strong>s quʹon dit être di‐<br />

gnes dʹêtre visitées, mais à quelques distances un peu longues; nous nʹy sommes pas allés<br />

1049


jusquʹici; on cite en particulier les ruines du couvent <strong>de</strong> S t ‐Hugon, à 2h. 1/2 dʹAllevard; cʹest<br />

le premier asile préparé pour les Chartreux par st Bruno avant la fondation <strong>de</strong> la Gran<strong>de</strong><br />

Chartreuse.<br />

En passant par Lyon, nous verrons peut‐être un moment notre ami, M. Charrin;<br />

avant son départ <strong>de</strong> Paris, il a fait une retraite sérieuse chez les pp. Jésuites et sʹest assuré<br />

décidément quʹil était vraiment appelé au service <strong>de</strong> Dieu dans notre Communauté; il mʹa<br />

écrit ici pour me lʹannoncer et <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r son entrée au milieu <strong>de</strong> nous. Il travaille présen‐<br />

tement à obtenir le consentement <strong>de</strong> son père; il espère bien quʹil nʹaura point <strong>de</strong> refus, ce<br />

père étant sincèrement chrétien et ayant précé<strong>de</strong>mment déclaré quʹil ne mettrait point obs‐<br />

tacle à sa vocation, sʹil en avait une; mais le moment décisif a toujours ses difficultés, priez<br />

donc pour cet excellent ami dont vous savez les aimables qualités.<br />

Pour notre cher M. Camus, il est toujours dans la lutte et les ru<strong>de</strong>s épreuves; on lui<br />

conseille dʹentrer une année à Issy pour gagner du temps, laisser les colères sʹéteindre et<br />

trouver un peu <strong>de</strong> relâche à la persécution; jʹy ai consenti comme expédient, <strong>avec</strong> un peu<br />

<strong>de</strong> regret, mais le père trouve quʹIssy est encore trop près <strong>de</strong> St‐Sulpice où il sait que sont<br />

<strong>de</strong>s ff. <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul, il repousse donc Issy; on parlemente sur ce point; vous voyez<br />

combien ce pauvre enfant a besoin dʹêtre assisté; priez pour lui tous les jours, jusquʹici il<br />

est dʹun courage exemplaire.<br />

Point <strong>de</strong> nouvelles encore <strong>de</strong> lʹami Chaverot. Je crains<br />

que lui aussi nʹait ses épreuves à subir.<br />

Les nouvelles diverses <strong>de</strong> Paris et autres lieux nʹont<br />

rien <strong>de</strong> notable.<br />

Je ne sais bien encore comment se vont arranger les<br />

dispositions pour les jeunes philosophes; à mon arrivée, je<br />

vais y pourvoir, jʹespère que cela sera pour le mieux. Merci,<br />

bien cher enfant, <strong>de</strong> votre tendre et charitable intérêt pour<br />

eux; que votre vénéré grand‐père est bon, délicat, généreux;<br />

que ces âmes sont aimables sur la terre et comme elles bril‐<br />

leront au Ciel!<br />

M. Paillé mʹarrache cette lettre pour le départ; lui et<br />

moi vous embrassons en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1018 à M. dʹArbois<br />

Retour imminent <strong>de</strong> MLP. à Paris. Ménager ses forces; savoir se faire ai<strong>de</strong>r. Projet <strong>de</strong> changement dʹun frère ec‐<br />

clésiastique. Sollicitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> M gr Angebault. Impressions rapportées <strong>de</strong> La Salette. Entrée <strong>de</strong> M. Charrin en Com‐<br />

munauté.<br />

Allevard, 18 août 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Votre petite lettre mʹa été renvoyée ici par nos frères <strong>de</strong> Vaugirard; jʹy ai aussi reçu<br />

le numéro <strong>de</strong> La Semaine religieuse dʹAngers que vous mʹavez adressé directement; si vous<br />

mʹécrivez <strong>de</strong> nouveau, ce sera à Vaugirard que <strong>de</strong>vront être envoyées vos lettres, car nous<br />

comptons partir, mon frère Paillé et moi, lundi pour Lyon où nous passerons la nuit, et le<br />

len<strong>de</strong>main nous arriverons, sʹil plaît à Dieu, à la Communauté dans la soirée. Je me sens<br />

un peu reposé, peut‐être ma poitrine est‐elle aussi un peu raffermie, je nʹen pourrai guère<br />

1050


juger toutefois quʹaux épreuves <strong>de</strong> lʹhiver; je nʹai pu suivre ici que la moitié du traitement,<br />

les eaux nʹayant pu convenir à mon estomac, je les ai prises par aspiration; si le Seigneur y<br />

a donné bénédiction pour lʹamen<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> ma santé, quʹIl en soit bien humblement re‐<br />

mercié, et, sʹil en a été autrement, que grâces lui soient rendues encore, car Il aura tout dis‐<br />

posé dans sa miséricordieuse bonté.<br />

Le compte‐rendu <strong>de</strong> votre distribution <strong>de</strong> la Psallette mʹa fort intéressé; presque en<br />

même temps, je recevais <strong>de</strong> M gr dʹAngers une bonne et affectueuse lettre, où il me disait<br />

toute la bonne impression que lui avait laissée, ainsi quʹà lʹassemblée, cette petite solenni‐<br />

té; il mʹavait aussi écrit après la distribution du patronage; ce vénérable Père ne perd au‐<br />

cune occasion <strong>de</strong> nous encourager et <strong>de</strong> nous dire le contentement quʹil éprouve <strong>de</strong> nous<br />

avoir près <strong>de</strong> lui. Nous tâcherons <strong>de</strong> lui donner toujours satisfaction. Il me fait remarquer<br />

que vous vous fatiguez trop, que vous êtes maigre et peu vigoureux; souvenez‐vous, cher<br />

enfant, quʹil vaut mieux faire un peu moins bien et ne pas vous épuiser, car les choses<br />

souffriraient bien davantage si vous étiez tout à fait hors <strong>de</strong> service, ce qui ne manquerait<br />

pas dʹarriver <strong>avec</strong> un travail trop soutenu. Tâchez <strong>de</strong> former un peu votre mon<strong>de</strong>, afin <strong>de</strong><br />

faire moins par vous‐même. Je ne sais ce qui pourra se faire touchant votre <strong>de</strong>man<strong>de</strong> rela‐<br />

tivement à M. <strong>Jean</strong> [Gauffriau]; mon absence mʹa empêché <strong>de</strong> voir <strong>de</strong> visu nos affaires; je<br />

sais quʹon parlait <strong>de</strong> le rappeler à Vaugirard parce que M. Lantiez, partagé entre Grenelle<br />

et lʹorphelinat, subvient imparfaitement à cette double tâche; on avait jugé aussi quʹil im‐<br />

portait <strong>de</strong> rapprocher M. <strong>Jean</strong>, afin <strong>de</strong> lui donner à un plus haut <strong>de</strong>gré lʹesprit <strong>de</strong> la com‐<br />

munauté et la tenue digne quʹon ne trouve pas assez constamment en lui. A mon retour, je<br />

vais trouver aussi à régler toute lʹaffaire dʹArras; M. Laroche vient <strong>de</strong> faire une retraite à<br />

Chaville; tout le mon<strong>de</strong> le trouve à son gré et le regar<strong>de</strong> comme réellement appelé parmi<br />

nous; M gr dʹArras, <strong>de</strong> son côté, nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>avec</strong> une extrême bienveillance; tout cela est<br />

parfait, mais lʹœuvre reste à constituer, et ce nʹest pas petite entreprise pour notre petit<br />

troupeau. Croyez bien néanmoins, cher ami, que je rappellerai au Conseil notre chère œu‐<br />

vre dʹAngers que tous aiment chez nous, et pour elle, et pour vous.<br />

Je voudrais vous dire notre pèlerinage à N.D. <strong>de</strong> la Salette; lʹespace me manque, je<br />

tâcherai que M. Paillé vous en écrive le détail; nous en avons été, lʹun et lʹautre, très édifiés.<br />

Jʹai pu dire <strong>de</strong>ux fois la S te Messe à lʹautel principal, dans la magnifique église élevée pour<br />

perpétuer le souvenir <strong>de</strong> lʹapparition <strong>de</strong> la T. S te Vierge; jʹy ai prié <strong>de</strong> toutes les puissances<br />

<strong>de</strong> mon âme pour notre chère famille et pour tous ses membres, et pour nos œuvres; je suis<br />

persuadé que nous nʹavons pas été envoyés là sans un <strong>de</strong>ssein <strong>de</strong> la divine Provi<strong>de</strong>nce et<br />

quʹElle nous y ménageait <strong>de</strong>s grâces dont nous recevrons le bienfait; je lʹen remercie<br />

dʹavance, comme <strong>de</strong> tant dʹautres qui sont déjà tombées sur nous.<br />

M. Charrin, que vous avez connu à Nazareth, sʹest décidé, après une retraite sé‐<br />

rieuse faite chez les Jésuites, à <strong>de</strong>venir membre <strong>de</strong> notre Communauté; il est présentement<br />

à Lyon, afin dʹobtenir le consentement <strong>de</strong> son père qui, heureusement, est chrétien et ne fe‐<br />

ra point, nous lʹespérons, <strong>de</strong> grave opposition. M. Camus lutte <strong>avec</strong> un vrai courage contre<br />

les colères et violences <strong>de</strong> son père; il a été contraint, dʹaprès notre avis et celui du p. Mille‐<br />

riot, <strong>de</strong> temporiser un peu; il se peut que, dʹaprès le sentiment <strong>de</strong> ce bon Père et pour lais‐<br />

ser passer lʹorage, il entre une année à Issy; ce serait du temps <strong>de</strong> gagné et du loisir obtenu<br />

pour prier davantage, afin que le Seigneur ouvre les yeux <strong>de</strong> ce pauvre père aveuglé. Je le<br />

recomman<strong>de</strong> à vous et aux vôtres.<br />

1051


Je vous écris en plein air peu commodément, mais loin du bruit; je me sens bien ain‐<br />

si tout <strong>avec</strong> vous et <strong>avec</strong> nos chers ff. dʹAngers; je visite par la pensée votre petit sanctuaire<br />

où je serai si heureux un jour (si Dieu le permet) dʹoffrir le S t Sacrifice, je suis vos travaux,<br />

vos exercices, et je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> au Seigneur <strong>de</strong> vous bénir en tous vos actes. Je me sens<br />

confiance dans sa gran<strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong> et je crois quʹIl a tout particulièrement <strong>de</strong>s vues sur<br />

notre petite famille dʹAngers, qui a été fondée sous dʹheureux auspices et <strong>avec</strong> une béné‐<br />

diction vraiment généreuse et cordiale <strong>de</strong> la part du saint Pontife quʹIl a préposé à la tête<br />

du diocèse.<br />

Adieu, bien cher enfant, je vous embrasse tous dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.,<br />

et je suis en eux<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1019 à M. Chaverot<br />

Souvenirs du pèlerinage à La Salette. Vocation <strong>de</strong> M. Chaverot: MLP. admire le sacrifice <strong>de</strong> ses parents. Bonté <strong>de</strong><br />

M gr Angebault pour nos frères.<br />

Allevard, 20 août 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous écris <strong>de</strong>ux mots seulement pour vous dire que votre petite lettre mʹest par‐<br />

venue ici à bon port et quʹelle mʹa causé une vraie satisfaction, <strong>avec</strong> un regret pourtant<br />

pour le pèlerinage manqué à N.D. <strong>de</strong> la Salette. Mais ayons confiance, la S te Vierge a ses<br />

vues, elle ne veut pas que la Communauté obtienne toutes ensemble les grâces qui lui sont<br />

réservées; elle entend nous les ménager, comme une Mère sagement économe, pour nous<br />

les remettre à mesure que nous en aurons plus particulièrement besoin. Soyez sûr quʹen<br />

quelquʹune <strong>de</strong> ces occasions, elle vous attirera à son sanctuaire, afin que vous soyez<br />

comme le messager <strong>de</strong> la famille et que vous nous rapportiez les nouvelles faveurs qui au‐<br />

ront été mises en réserve. En tout cas, bien cher enfant, en offrant <strong>de</strong>ux fois le S t Sacrifice à<br />

lʹautel principal du vénéré sanctuaire, jʹai prié tout spécialement pour vous qui <strong>de</strong>vez vo‐<br />

tre vocation à N.D. <strong>de</strong> la Salette et qui lui avez voué reconnaissance, confiance, amour;<br />

gar<strong>de</strong>z bien ces sentiments et la Vierge fidèle ne vous abandonnera point. Ne semble‐t‐elle<br />

pas vous continuer son appui sensiblement, puisque vos bons parents semblent se résigner<br />

à un autre avenir pour vous que celui quʹils avaient rêvé. Continuons aussi à prier pour<br />

eux, car Dieu leur a, presque en même temps, <strong>de</strong>mandé un double sacrifice, sinon égale‐<br />

ment pénible, du moins douloureux toujours, et dans le décès <strong>de</strong> votre frère, et dans votre<br />

vocation qui vous tiendra souvent éloigné dʹeux; tout cela tournera à leur sanctification; le<br />

sentiment naturel prédominait encore trop en eux, ces brisements élèveront leur cœur vers<br />

Dieu en qui toutes les affections sʹépurent et se spiritualisent. Mettez toujours beaucoup <strong>de</strong><br />

douceur et <strong>de</strong> cordialité dans vos rapports <strong>avec</strong> eux, car la fermeté se concilie admirable‐<br />

ment <strong>avec</strong> les ménagements <strong>de</strong> la charité.<br />

Cʹest maintenant à Vaugirard que vous <strong>de</strong>vrez mʹécrire, car nous y retournerons<br />

<strong>de</strong>main, mon f. Paillé et moi. Nous coucherons lundi soir à Lyon et nous arriverons mardi<br />

à Vaugirard, sʹil plaît à Dieu. Vous nous y rejoindrez quand vous le pourrez faire sans<br />

manquer à ce que vous <strong>de</strong>vez à vos bons parents.<br />

Je suis un peu reposé, peut‐être un peu fortifié.<br />

1052


Tout va comme <strong>de</strong> coutume au foyer <strong>de</strong> notre petite famille; les nouvelles qui mʹen<br />

arrivent sont satisfaisantes. M gr dʹAngers mʹécrit aussi les lettres les plus consolantes sur<br />

les œuvres dʹAngers; il est très content du petit troupeau que nous lui avons envoyé. Il<br />

sʹoccupe <strong>de</strong> nos frères <strong>avec</strong> une sollicitu<strong>de</strong> vraiment paternelle; quel admirable Evêque et<br />

que sa bonté est bien inspirée par le Bon Pasteur.<br />

Jʹai reçu <strong>de</strong> bonnes petites lettres <strong>de</strong> notre ami, M. <strong>de</strong> Varax; il me parle <strong>de</strong> vous en<br />

toutes et vous écrira. Je me réjouis <strong>de</strong> la cordiale et tendre union que le rapprochement<br />

particulier <strong>de</strong> vos étu<strong>de</strong>s établira entre vous.<br />

Adieu, bien cher enfant, je prépare mes dispositions pour le départ. Jʹespère trouver<br />

assez dʹinstants dans notre court passage à Lyon pour monter à N.D. <strong>de</strong> Fourvière. Vous<br />

pensez bien que vous nʹy serez pas oublié.<br />

Je vous embrasse tendrement en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Le frère Paillé vous assure <strong>de</strong> sa cordiale affection.<br />

1020 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Retour dʹAllevard. Défauts qui déterminent à ne pas recevoir un novice allemand. Entrée au Séminaire dʹIssy <strong>de</strong><br />

quatre scolastiques, démarches pour lʹordination <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax. Dévotion au Saint Cœur <strong>de</strong> Marie.<br />

Chaville, 26 août 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Pour cette fois, votre lettre est arrivée bien directement et sans ricochet à sa <strong>de</strong>stina‐<br />

tion; jʹétais ce matin à Vaugirard quand elle mʹa été remise, et ce soir jʹy fais quelques li‐<br />

gnes <strong>de</strong> réponse à mon arrivée à Chaville; quelques lignes, parce que cʹest <strong>de</strong>main diman‐<br />

che, que jʹai peu <strong>de</strong> temps et que je veux confier ce message au fidèle Pascau.<br />

Nous sommes <strong>de</strong> retour, M. Paillé et moi, <strong>de</strong>puis mardi au soir, un peu fatigués, un<br />

peu éprouvés par le traitement <strong>de</strong>s eaux, les changements <strong>de</strong> lieux, <strong>de</strong> régimes, etc. mais,<br />

en ensemble, attendant lʹun et lʹautre quelque mieux en santé que lʹautomne amènera<br />

peut‐être.<br />

Dans le petit troupeau, tout va bien in globo; les misères, ou morales ou physiques,<br />

ne sont que dans le détail. A Chaville, que vous affectionnez <strong>avec</strong> bon vouloir particulier,<br />

M. François [Bokel], lʹallemand, ne paraît pas <strong>de</strong>voir persévérer. Cʹest un garçon rêveur,<br />

susceptible à lʹexcès, préoccupé <strong>de</strong> lui plus quʹil ne faut pour se donner aux autres, mais<br />

par‐<strong>de</strong>ssus tout ambitieux, visant humainement à <strong>de</strong>s choses hautes, voulant la science<br />

pour atteindre à quelque position. En un mot, esprit nébuleux sans vues bien assises, parce<br />

quʹelles ne sont pas simples et nettes. Nous lʹavons bien étudié, nous ne croyons pas quʹil<br />

soit près <strong>de</strong> nous dans sa voie, il nʹa pas lʹombre dʹintelligence <strong>de</strong> nos fins, ni <strong>de</strong> lʹesprit<br />

dans lequel nous désirons nous asseoir.<br />

En voilà un peu long, mais jʹai pensé que vous auriez peut‐être un regret; jʹai voulu<br />

vous assurer quʹil ne serait pas fondé. Les quatre jeunes philosophes, je ne vous en ai rien<br />

dit, parce que je ne savais rien, rien nʹétait décidé; <strong>de</strong> loin, je nʹy voyais pas assez clair pour<br />

avoir une pensée bien arrêtée; <strong>de</strong>puis mon retour, il semble arrêté quʹils iront comme in‐<br />

ternes tous les quatre à Issy, au moins pour la première année; nous pensons que si, au<br />

bout <strong>de</strong> lʹan, ils étaient fatigués, ils pourraient, en prévision <strong>de</strong>s trois années du Grand Sé‐<br />

1053


minaire, se reposer en suivant comme externes la 2 e année dʹIssy; quʹayant alors déjà pris le<br />

bon pli et les bonnes habitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> tenue et <strong>de</strong> discipline du Séminaire, ils pourraient <strong>avec</strong><br />

moins dʹinconvénient rester au <strong>de</strong>hors la 2 e année. Voilà le projet présentement, mais, chez<br />

nous, lʹimprévu déconcerte si souvent nos dispositions, justifiant le proverbe: Lʹhomme<br />

sʹagite et Dieu le mène, que je nʹose encore assurer que ce sera le <strong>de</strong>rnier mot pour cet ar‐<br />

rangement. Je suis toutefois allé hier faire inscrire ces quatre jeunes gens à Issy. M. Camus<br />

mʹaccompagnait et sʹest fait inscrire aussi comme élève <strong>de</strong> première année; je vous lʹai dit,<br />

pour gagner du temps et laisser sʹapaiser les colères violentes et menaçantes <strong>de</strong> son père, il<br />

sʹest résigné à ce parti; peut‐être Dieu se sert‐il <strong>de</strong> ce moyen pour lʹamener au sacerdoce<br />

vers lequel il nʹinclinait point. M. Maréchal est en vacances, le bon économe qui le rem‐<br />

place vous est particulièrement affectionné; il viendra nous voir à Chaville.<br />

Dimanche 27. Je pars <strong>de</strong>main matin lundi pour régler quelques affaires <strong>de</strong> ma sœur;<br />

je reviendrai vendredi 1 er septembre; je pense que vous ne tar<strong>de</strong>rez guère à me rejoindre et<br />

à reprendre le chemin <strong>de</strong> Chaville; concé<strong>de</strong>z néanmoins à votre santé ce quʹelle <strong>de</strong>man<strong>de</strong>,<br />

et aussi à vos parents ce qui vous paraîtra désirable. Je ne vois pas dʹinconvénient à la vi‐<br />

site <strong>de</strong> M gr dʹAutun [M gr <strong>de</strong> Marguerye]; ce pourrait être, au contraire, une occasion <strong>de</strong> lui<br />

rappeler que vous aurez bientôt à lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r les autorisations pour vos <strong>de</strong>grés dʹordi‐<br />

nation, et, en même temps, <strong>de</strong> paraître persuadé (respectueusement) quʹil ne mettra nul<br />

obstacle à votre vocation religieuse.<br />

Je voudrais, cher enfant, répondre à la partie la plus intéressante <strong>de</strong> votre lettre,<br />

celle qui regar<strong>de</strong> votre intérieur; je réservais à cette fin cette <strong>de</strong>rnière page tout entière,<br />

mais lʹheure <strong>de</strong> ma messe est arrivée et Pascau doit emporter cette dépêche immédiate‐<br />

ment après; nous réservons donc cet intéressant sujet pour nos entretiens à votre retour.<br />

Cʹest aujourdʹhui la fête du Saint et Immaculé Cœur <strong>de</strong> Marie. Je lui dédie notre petite fa‐<br />

mille et la cache bien abritée dans ce doux asile. La paroisse <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong>s Victoires, précé‐<br />

<strong>de</strong>mment ari<strong>de</strong>, <strong>de</strong>sséchée, objet <strong>de</strong> désolation pour son Pasteur, a refleuri, sʹest ravivée<br />

après quʹelle a été par lui confiée, dédiée au Saint Cœur <strong>de</strong> Marie. Il me semble quʹil en va<br />

être ainsi <strong>de</strong> notre petite famille et <strong>de</strong> chacun <strong>de</strong> nous en particulier; nous allons nous sen‐<br />

tir plus fervents, plus dévoués, rapprochés <strong>de</strong> ce Cœur si pur, si ar<strong>de</strong>nt, si généreux en sa‐<br />

crifices et quʹon nous présente orné dʹune couronne <strong>de</strong> roses blanches, surmonté dʹune<br />

flamme, percé dʹun glaive, triple emblème <strong>de</strong> sa pureté, <strong>de</strong> son ar<strong>de</strong>nte charité, <strong>de</strong> ses gé‐<br />

néreuses immolations. Je vous embrasse tendrement en ce Cœur si beau et suis à toujours<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1021 à M. Guillot<br />

Exhortation à la résignation dans lʹépreuve; MLP. lui promet <strong>de</strong> chercher à lʹadoucir. Difficulté dʹavoir <strong>de</strong> bons<br />

employés.<br />

Vaugirard, 28 août 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu votre petite lettre à mon retour dʹun voyage que ma santé fatiguée mʹa<br />

obligé <strong>de</strong> faire. Jʹai vu <strong>avec</strong> peine que vous rencontriez dans vos emplois quelques diffi‐<br />

cultés qui troublent votre esprit et qui vous semblent nuire à votre bien spirituel. Vous le<br />

savez comme moi, bien cher enfant, les tribulations sont pour notre âme un précieux exer‐<br />

1054


cice quand nous savons les unir aux contradictions <strong>de</strong> N.S. et les lui offrir dans une pa‐<br />

tience humble et soumise; le plus parfait serait donc ici que vous vous armiez <strong>de</strong> courage<br />

pour accepter cette épreuve comme venant <strong>de</strong> la main <strong>de</strong> Dieu. Toutefois, cher ami, je sais<br />

bien que cʹest là la perfection et lʹœuvre <strong>de</strong>s Saints, que notre pauvre nature ne sait pas<br />

toujours se tenir à cette hauteur et quʹelle <strong>de</strong>man<strong>de</strong> parfois un peu <strong>de</strong> con<strong>de</strong>scendance.<br />

Dans cette pensée, jʹécris à notre bon abbé Risse pour lʹinviter à voir sʹil nʹaurait pas quel‐<br />

que moyen dʹadoucir les amertumes dont vous avez à souffrir. Il se peut quʹil aime mieux<br />

sʹentretenir <strong>de</strong> vive voix <strong>avec</strong> moi <strong>de</strong> ce sujet, puisquʹil doit venir tout prochainement à<br />

Vaugirard pour la retraite, et même avant pour se reposer un peu. Jusque là, cher enfant,<br />

tenez votre âme en paix et comptez bien que jʹunirai mes prières aux vôtres pour que telle<br />

épreuve finisse et quʹelle laisse en définitive un bien à votre âme, un mérite qui tournera à<br />

lʹavantage <strong>de</strong> vos œuvres.<br />

Adieu, bien cher enfant, croyez à ma plus tendre affection en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Peut‐être ne savez‐vous pas assez, cher enfant, combien il est rare, aujourdʹhui<br />

surtout, <strong>de</strong> rencontrer <strong>de</strong>s serviteurs dont on nʹait pas énormément à souffrir; lʹesprit <strong>de</strong><br />

notre temps détruit en eux la docilité, le dévouement <strong>avec</strong> la foi simple <strong>de</strong>s anciens temps,<br />

se servir dʹeux <strong>de</strong>vient une croix perpétuelle; nous avons, pour nous, beaucoup à souffrir<br />

<strong>de</strong>s quelques employés que nous prenons pour nos services. M. Risse jugera néanmoins ce<br />

que le cas <strong>de</strong>man<strong>de</strong> ou mʹen parlera ici prochainement.<br />

1022 à M. Guillot<br />

Attendre son changement <strong>avec</strong> patience; aimer sa vocation; respecter son Supérieur.<br />

Vaugirard376 , 1er septembre 1865<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je souffre <strong>avec</strong> vous <strong>de</strong>s peines que vous éprouvez, mais je pensais que ma lettre<br />

[du 28 août] <strong>de</strong>vait vous tranquilliser, puisque je vous assurais positivement quʹau mo‐<br />

ment <strong>de</strong> la retraite jʹallais aviser à prendre les mesures que votre état intérieur semblait<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r. Cʹest à la fin <strong>de</strong> ce mois que cette retraite a lieu, prenez donc patience, jʹespère<br />

que vous aurez satisfaction. Je ne pourrais guère avant ce moment y pourvoir, cʹest alors<br />

que les dispositions concernant chaque maison sont réglées; encore une fois, cher enfant,<br />

ayez patience et tournez‐vous plus tendrement vers Dieu pour lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong> vous sou‐<br />

tenir durant cette courte attente. M. Risse vient <strong>de</strong> mʹécrire quʹil allait renvoyer le domesti‐<br />

que qui vous obéit mal; je lʹinvite, <strong>de</strong> son côté, à attendre aussi jusquʹau moment <strong>de</strong> la re‐<br />

traite.<br />

Souvenez‐vous, cher enfant, <strong>de</strong> la sainteté et <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> votre vocation; sou‐<br />

venez‐vous aussi <strong>de</strong> votre attachement à la Communauté, et enfin <strong>de</strong> lʹaffection tendre‐<br />

ment dévouée <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Soyez aimable et déférent pour M. Risse, il représente Dieu pour vous.<br />

376 Cette lettre n’a manifestement pas pu être écrite <strong>de</strong> Vaugirard. MLP. est à Duclair <strong>de</strong>puis le 28 août (lettre 1020). La lettre 1026<br />

confirme que le 4 septembre MLP. est là <strong>de</strong>puis le 28 ou 29.<br />

1055


1023 à M. Maignen<br />

Critères <strong>de</strong> discernement au sujet dʹun candidat à la vie religieuse. Les fruits <strong>de</strong> notre action sont‐ils en propor‐<br />

tion <strong>de</strong>s grâces reçues? Les avertissements <strong>de</strong> MLP. sont inspirés <strong>de</strong> Dieu. Que la volonté <strong>de</strong> Dieu soit faite!<br />

Duclair, 1er septembre 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Un jeune ouvrier <strong>de</strong> Nantes, nommé Hubert [Louis], qui a <strong>de</strong>meuré quelque temps<br />

à votre maison <strong>de</strong> Jeunes Ouvriers, mʹécrit pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à entrer parmi nous. Que dois‐<br />

je lui répondre? Quel est‐il en piété, caractère, santé, aptitu<strong>de</strong>s, constance, âge, famille,<br />

etc.?<br />

Il y a déjà plusieurs jours que sa lettre a été envoyée, ayant dʹabord passé par Cha‐<br />

ville; tâchez donc <strong>de</strong> me répondre sans retard.<br />

Je crois que je vais rester ici jusquʹà vendredi, mʹy étant trouvé moins souffrant<br />

presque à mon arrivée. Je me rappelle que cʹest là que sʹest décidée votre vocation et ce<br />

mʹest une occasion <strong>de</strong> remercier Dieu qui a tant fait pour nous; je suis étonné que nous<br />

soyons si peu <strong>de</strong> chose, et en nous‐mêmes et dans nos œuvres, en considérant la multitu<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong>s grâces répandues sur nous. Tâchons <strong>de</strong> bien employer le temps qui nous reste, nous ne<br />

savons pas sʹil durera beaucoup.<br />

Vous ne mʹavez pas dit si vous aviez fait un peu attention aux observations que je<br />

vous avais écrites dʹAllevard; jʹai lieu <strong>de</strong> penser que Dieu lui‐même me pressait <strong>de</strong> vous<br />

les faire; car, avant quʹaucune remarque ou avertissement me vînt du <strong>de</strong>hors, je revenais<br />

intérieurement à penser à vous souvent et <strong>avec</strong> une certaine inquiétu<strong>de</strong> qui me semblait<br />

venir <strong>de</strong> lʹaction <strong>de</strong> Dieu, ne méprisons pas ces appels et sollicitations <strong>de</strong> la miséricor<strong>de</strong><br />

divine.<br />

Ma sœur et ma nièce gar<strong>de</strong>nt bon souvenir <strong>de</strong> vous et vous verraient <strong>avec</strong> plaisir<br />

assurément; mais, à mesure que nous avançons, nos charges augmentent et notre liberté<br />

diminue dʹautant; que le Seigneur soit béni et que son adorable volonté sʹaccomplisse en<br />

nous!<br />

Adieu, bien cher enfant, vous savez combien je vous aime en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Mille tendresse à tous. Comment va le mariage Lasnier?<br />

1024 à M. Caille<br />

M. Caille doit écrire plus souvent. Ce que MLP. a <strong>de</strong>mandé pour la Congrégation à N.D. <strong>de</strong> La Salette: ʺlʹéléva‐<br />

tion <strong>de</strong>s vues, lʹesprit intérieur et le don <strong>de</strong> lʹoraisonʺ. Etat <strong>de</strong>s démarches <strong>avec</strong> lʹabbé Laroche, dʹArras.<br />

Duclair, 2 septembre 1865<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Il y a bien longtemps que nous nʹavons reçu <strong>de</strong> vos nouvelles. Nous souffrions tous,<br />

à Vaugirard et à lʹentour, <strong>de</strong> ce long silence. M. Lantiez ayant dû faire <strong>de</strong>rnièrement un<br />

court voyage à Arras, je lʹavais chargé <strong>de</strong> vous voir et <strong>de</strong> sʹarrêter un peu à Amiens au re‐<br />

tour, mais une circonstance imprévue lʹa fait revenir directement et cette bonne occasion<br />

nous a échappé. Dans ma <strong>de</strong>rnière lettre, je vous disais, cher ami, que <strong>de</strong> trop longues in‐<br />

terruptions dans nos correspondances nʹétaient pas sans inconvénient et nuiraient peut‐<br />

1056


être, si nous nʹy prenions gar<strong>de</strong>, à lʹintimité <strong>de</strong> nos rapports; jʹappelle encore votre atten‐<br />

tion sérieuse à ce sujet, et je vous prie dʹinviter M. Marcaire ou quelque autre à nous écrire<br />

tous les mois au moins pour nous faire suivre <strong>de</strong>s yeux vos mouvements et dispositions et<br />

les faits concernant vos œuvres. Nous sommes bien peu forts, malgré lʹappui que nous<br />

trouvons dans notre union; que serait‐ce si nous venions à nous isoler <strong>de</strong> plus en plus?<br />

Vous partagerez, jʹen suis sûr, ce sentiment et vous ferez effort pour satisfaire à notre désir.<br />

Je suis revenu dʹAllevard médiocrement fortifié par un traitement supporté seule‐<br />

ment en partie, et dont lʹefficacité était dʹavance pour moi assez douteuse. Une seule chose<br />

me rendait ce voyage attrayant, cʹétait le pèlerinage si facile à N.D. <strong>de</strong> la Salette, dʹaprès la<br />

route que nous avions à suivre. Nous lʹavons fait effectivement <strong>avec</strong> beaucoup <strong>de</strong> joie et<br />

dʹédification. Jʹespère que la T. S te Vierge, qui daignait nous attirer dans ce sanctuaire béni,<br />

aura reçu tous nos vœux et les aura mis aux pieds <strong>de</strong> son divin Fils. Jʹai pu célébrer <strong>de</strong>ux<br />

fois la S te Messe à lʹautel qui lui est particulièrement dédié, et jʹy ai prié <strong>avec</strong> toutes les for‐<br />

ces <strong>de</strong> mon âme; jʹai <strong>de</strong>mandé surtout pour notre petite famille lʹélévation <strong>de</strong>s vues, lʹesprit<br />

intérieur, le don <strong>de</strong> lʹoraison, sans lesquels nos efforts seront vains et nos œuvres infruc‐<br />

tueuses. Cʹest assurément ce que le Seigneur lui‐même désire le plus nous donner; puis‐<br />

sions‐nous ouvrir nos âmes pour recevoir un si grand bienfait.<br />

Je suis ici pour une affaire intéressant ma famille, jusquʹau vendredi 8. A Vaugirard<br />

et ailleurs, nous ne sommes pas sans épreuves, sans inci<strong>de</strong>nts divers qui auraient quelque<br />

intérêt peut‐être pour vous, mais le temps me manquerait pour entrer dans le détail <strong>de</strong>s<br />

faits et gestes <strong>de</strong> notre petite famille; il faudrait pour cela une correspondance plus régu‐<br />

lière et plus suivie. On prépare la retraite qui sera donnée par le r.p. Milleriot; le jour pré‐<br />

cis nʹétait pas encore réglé au moment <strong>de</strong> mon départ, on ne manquera pas <strong>de</strong> vous le dire<br />

dès quʹil sera bien arrêté.<br />

Lʹaffaire dʹArras rencontre bien <strong>de</strong>s difficultés, je ne sais si elle pourra arriver à<br />

bonne fin, au moins immédiatement; la volonté reste parfaite <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts, mais les<br />

moyens dʹexécution sont insuffisants.<br />

Nous attendions toujours votre visite que vous nous aviez annoncée; jʹespère que<br />

cette satisfaction nʹa été que différée et ne sera pas perdue.<br />

Adieu, mon bon ami, assurez tous vos frères <strong>de</strong> ma tendre affection et croyez vous‐<br />

même aux dévoués sentiments <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1025 à M. dʹArbois<br />

Accepter les épreuves comme la consolation. MLP. se montre réservé sur lʹenvoi dʹun jeune prêtre. Organisation<br />

<strong>de</strong> lʹŒuvre dʹAngers.<br />

Duclair, 3 septembre 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie, ainsi que vos chers frères, <strong>de</strong> vos bonnes et affectueuses lettres; je<br />

les reçois toujours <strong>avec</strong> joie, dʹautant que jusquʹici elles mʹapportent plus <strong>de</strong> bonnes que <strong>de</strong><br />

mauvaises nouvelles; nous aimons tant la consolation et si peu les épreuves! Pourtant je<br />

ferai en sorte, sʹil plaît à Dieu que les jours soient parfois nébuleux à Angers comme ail‐<br />

leurs, <strong>de</strong> les accepter ainsi que le Seigneur les fait, puisquʹil lui plaît <strong>de</strong> les entremêler<br />

dʹordinaire <strong>de</strong> pluie et <strong>de</strong> soleil.<br />

1057


M gr a eu, comme vous le pensiez, la bonté <strong>de</strong> mʹécrire au sujet <strong>de</strong> lʹenvoi dʹun se‐<br />

cond prêtre à Angers. Je lui réponds aujourdʹhui quʹà mon retour à Paris, vers la fin <strong>de</strong> la<br />

semaine, je vais examiner, <strong>avec</strong> nos frères du Conseil, ce que nous pouvons faire. Je ne vois<br />

guère, comme vous, que M. <strong>Jean</strong> [Gauffriau] qui pût vous être envoyé; il ne serait libre en<br />

tout cas et au plus tôt quʹà la fin <strong>de</strong> ce mois, ne pouvant être remplacé comme aumônier<br />

<strong>de</strong>s Petites Sœurs quʹ<strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> ménagement et <strong>de</strong> délai; je verrai toutefois ce point<br />

plus précisément. Je craindrais aussi quʹil nʹapportât pas chez vous toute lʹédification que<br />

je voudrais, sinon pour le fond qui, heureusement, est intact, au moins pour lʹextérieur qui<br />

nʹest pas assez dominé; prions le Seigneur <strong>de</strong> nous éclairer.<br />

Je crois quʹil y aura à temporiser encore un peu pour le cours <strong>de</strong> musique chaque<br />

semaine; cet hiver, la chose se fera plus aisément et vous serez mieux installés; si vous<br />

aviez <strong>de</strong>s raisons <strong>de</strong> faire autrement, vous verriez; mais je pense quʹen ce moment vous fe‐<br />

rez bien <strong>de</strong> ne point accroître le mouvement autour <strong>de</strong> vous, ni le nombre <strong>de</strong> vos occupa‐<br />

tions.<br />

Je suis ici jusquʹà vendredi, appelé par une affaire concernant ma famille.<br />

Je désire bien que, <strong>de</strong> temps en temps, vos frères me donnent, comme aujourdʹhui,<br />

une petite marque <strong>de</strong> bon souvenir; on entretient ainsi lʹunion <strong>de</strong>s âmes et la charité.<br />

Je vous embrasse tous bien affectueusement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1026 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Séjour <strong>de</strong> MLP. à Duclair. Arguments pour obtenir dʹune bienfaitrice la pension <strong>de</strong> plusieurs séminaristes.<br />

Duclair, 4 septembre 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je suppose quʹau moment où je vous écris, vous êtes sur le chemin qui mène à<br />

Montcoy; je vous y adresse ces <strong>de</strong>ux lignes, <strong>de</strong>ux lignes sans plus, puisque dans très peu<br />

<strong>de</strong> jours nous achèverons <strong>de</strong> vive voix les entretiens trop écourtés <strong>de</strong>s communications<br />

épistolaires.<br />

Comme vous le voyez par la date <strong>de</strong> cette lettre, je suis momentanément à Duclair;<br />

jʹy <strong>de</strong>vais rester 4 ou 5 jours seulement, mais les malaises que jʹéprouvais avant mon dé‐<br />

part ayant diminué sensiblement dès mon arrivée ici, jʹai cru utile <strong>de</strong> prolonger un peu<br />

mon séjour qui sera <strong>de</strong> 11 jours en tout; je reste jusquʹà jeudi 7. Je pense, dʹaprès les indica‐<br />

tions <strong>de</strong> vos lettres, que vous reviendrez vous‐même peu après au milieu <strong>de</strong> nous. Ce mot<br />

est aimable; on revient volontiers où lʹon est toujours attendu. Tous nos frères vous atten‐<br />

<strong>de</strong>nt, ceux <strong>de</strong> Chaville notamment; M. Camus vous attend pour acheter les livres quʹil lui<br />

faut avoir.<br />

Je nʹai pas reçu <strong>de</strong> nouvelles fraîches <strong>de</strong> notre f. Chaverot.<br />

La lettre <strong>de</strong> Mme Cottu est un peu menaçante, je ne crois pas quʹelle soit définitive‐<br />

ment inquiétante, seulement cʹest une femme qui raisonne et qui ne veut rien faire sans<br />

que sa raison soit satisfaite; tâchez <strong>de</strong> lui donner contentement. Comptant sur son ai<strong>de</strong><br />

bienveillant, jʹai retenu les places à Issy pour nos étudiants; vous pourriez le lui dire, cette<br />

raison a quelque valeur. Mais quel meilleur motif <strong>de</strong> se déci<strong>de</strong>r peut‐elle <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r que<br />

celui‐ci: elle donnera à lʹEglise un prêtre dévoué, désintéressé, qui se consacrera à lʹinstruc‐<br />

1058


tion et au salut <strong>de</strong>s classes ouvrières si fourvoyées par lʹerreur, si disposées pourtant à re‐<br />

venir à la vérité quand elle luit à leurs yeux. Ayons confiance, Dieu veille sur nos pauvres<br />

jeunes frères et ne les laissera pas frapper en vain aux portes <strong>de</strong> son sanctuaire; ils sont<br />

pieux, intelligents et <strong>de</strong> cœur élevé; le bon Maître ne rejette pas ceux quʹIl a ainsi doués.<br />

Cʹest tout ce que je vais vous dire aujourdʹhui, bien cher ami, je me réjouis bien <strong>de</strong><br />

vous revoir. Peut‐être feriez‐vous bien dʹécrire un mot à M. Chaverot lʹavertissant que<br />

vous revenez et lui <strong>de</strong>mandant quelle sera la date <strong>de</strong> son retour. Jʹoubliais <strong>de</strong> vous dire,<br />

chose pourtant intéressante, que notre retraite, donnée par le r.p. Milleriot, commencera le<br />

dimanche au soir, 24 <strong>de</strong> ce mois; vous ferez bien dʹen avertir M. Chaverot. Vous suivrez<br />

cette retraite, cela va sans dire, <strong>avec</strong> les oreilles et la bonne volonté seulement, laissant la<br />

tête dans son parfait repos.<br />

Je vous embrasse bien cordialement en N.S. Jʹai toujours envie, quand je vous écris,<br />

dʹoffrir mes respects à vos bons parents; sʹils arrivent (ces respects) inopportunément, ré‐<br />

servez‐les pour les jours désirés où tout nuage aura disparu entre la pauvre Communauté<br />

et votre chère famille.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1027 à M. Maignen<br />

Acquiescement à divers avis. Les tractations <strong>avec</strong> lʹabbé Laroche, directeur du Coclipas. Que M. Maignen ne<br />

croit pas MLP. sévère envers lui; pourquoi il en a lʹapparence. Conseils pratiques pour la régularité religieuse.<br />

Duclair, 5 septembre 1865<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Jʹai écrit au jeune Hubert [Louis] dans le sens que vous jugez le meilleur, lʹencoura‐<br />

geant dans sa pensée <strong>de</strong> consécration à Dieu, mais lʹinvitant à consulter son directeur et lui<br />

proposant <strong>de</strong> revenir dʹabord aux Jeunes Ouvriers, afin <strong>de</strong> bien étudier les vues du Sei‐<br />

gneur à son égard.<br />

Pour lʹaffaire dʹArras, nous sommes aussi du même sentiment; les combinaisons<br />

proposées nʹétaient pas satisfaisantes; jʹai écrit, on vous lʹa dit sans doute, à M gr dʹArras<br />

pour lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r lʹajournement <strong>de</strong> notre union <strong>avec</strong> M. Laroche, jusquʹau moment où<br />

nous serons en mesure <strong>de</strong> nous poser en <strong>de</strong> bonnes conditions. M. Laroche, un peu décou‐<br />

ragé, a pris <strong>de</strong>s arrangements provisoires. Je crois que les choses sont ainsi pour le mieux.<br />

Je suis satisfait <strong>de</strong> lʹouverture simple et cordiale <strong>de</strong> votre lettre; je vous y retrouve<br />

<strong>avec</strong> votre confiance et affectueux abandon dʹautrefois; jʹespère quʹil sortira quelque chose<br />

dʹutile <strong>de</strong> cet épanchement <strong>de</strong> votre âme, vous en serez plus disposé à vous rapprocher <strong>de</strong><br />

temps en temps <strong>de</strong> celui dont Dieu sʹest servi, quoique indigne, pour vous attirer à Lui; je<br />

ne suis pas incliné à la sévérité à votre égard, comme vous semblez le penser, tant sʹen<br />

faut; jʹai pu en avoir acci<strong>de</strong>ntellement lʹapparence, mais jʹy étais contraint par une certaine<br />

faiblesse <strong>de</strong> cœur <strong>de</strong> votre côté et par une opiniâtre contention <strong>de</strong> tête dʹune autre part,<br />

plus difficile peut‐être à maîtriser. Tout cela est bien loin maintenant; plus jʹavance, plus je<br />

vois combien notre pauvre nature a besoin dʹindulgence, mais aussi <strong>de</strong> soutien; ne vouloir<br />

que lʹun et négliger lʹautre serait bien mal pru<strong>de</strong>nt.<br />

Pour ce qui vous touche présentement, il me semble que vous arriveriez en peu <strong>de</strong><br />

temps à <strong>de</strong> bons résultats si vous tendiez à ces points bien simples: tenir compte <strong>de</strong>s petits<br />

1059


points <strong>de</strong> la règle que vous pouvez observer, <strong>de</strong>s petits moyens ou pratiques qui vous ont<br />

été inspirés intérieurement et que vous avez peut‐être délaissés; en un mot, reprendre em‐<br />

pire sur vous‐même par les petites choses; en second lieu, faire oraison, quelque chose qui<br />

arrive, et nʹomettre aucune partie <strong>de</strong> lʹoffice sans en rendre compte exactement; enfin sacri‐<br />

fier un peu <strong>de</strong>s apparents avantages <strong>de</strong>s œuvres pour assister aux exercices; autant que<br />

possible, nʹy manquer jamais sans raison vraiment sérieuse, chercher un livre <strong>de</strong> spirituali‐<br />

té qui vous aille et faire moins <strong>de</strong> lectures vaines qui nʹapportent aucun bien à lʹâme. Tout<br />

cela est faisable, au moins en gran<strong>de</strong> partie, et le plus souvent y renoncer tout à fait parce<br />

quʹil y a parfois <strong>de</strong>s empêchements, cʹest laisser la barque au courant, quel que péril quʹelle<br />

puisse rencontrer. Je vous conjure, bien cher enfant, <strong>de</strong> tenir compte <strong>de</strong> ces indications et<br />

avertissements. Vous sentez toujours, dites‐vous, que Dieu me charge encore <strong>de</strong> vous<br />

montrer les voies; écoutez donc Dieu qui me presse <strong>de</strong> vous donner ces affectueux<br />

conseils. Un ouvrier vaut mieux que dix, dit Rodriguez, quand il cherche son appui en<br />

Dieu.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, je ne me trouve jamais aux lieux où nous avons été ici<br />

ensemble sans quʹils éveillent <strong>de</strong> profonds souvenirs; vous savez sʹils sont tendres et pro‐<br />

fondément dévoués pour vous. Demandons au Seigneur que toutes ces choses, où son ac‐<br />

tion a été si sensible, <strong>de</strong>meurent, comme Il a voulu quʹelles le fussent, <strong>de</strong>s moyens <strong>de</strong> sanc‐<br />

tification pour nous et pour plusieurs.<br />

Je vous embrasse tendrement en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Notre petit f. Streicher dit que sa sœur <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à faire exécuter sa photogra‐<br />

phie. Je lʹinvite à ne pas se presser, nous en pourrons parler; il peut y avoir là abus comme<br />

en tout.<br />

1028 à M. Caille<br />

Nécessité dʹun peu <strong>de</strong> relâche dans le travail et dʹune direction spirituelle suivie.<br />

Duclair, 7 septembre [1865]<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu <strong>avec</strong> joie votre lettre et celles <strong>de</strong> nos frères; nous étions tous un peu peinés<br />

<strong>de</strong> lʹinterruption trop longue <strong>de</strong> nos correspondances; je crois que nous ne pourrions rester<br />

sans détriment dans <strong>de</strong>s rapports trop peu fréquents.<br />

Les lettres <strong>de</strong> nos frères, celle <strong>de</strong> M. Marcaire en particulier, portent la trace <strong>de</strong> la<br />

lassitu<strong>de</strong> et du besoin <strong>de</strong> repos; ne pourriez‐vous, après les travaux ru<strong>de</strong>s quʹils viennent<br />

<strong>de</strong> supporter, diminuer un peu le mouvement ordinaire <strong>de</strong> la maison pour quʹils aient un<br />

peu <strong>de</strong> calme et <strong>de</strong> paix? Des travaux qui ne sʹinterrompent jamais sont lourds à soutenir.<br />

Vous verrez ce que les exigences <strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt ou permettent.<br />

On vous a écrit, je pense, que notre retraite, donnée par le r.p. Milleriot, commence<br />

le dimanche 24 <strong>de</strong> ce mois.<br />

Il sera bien nécessaire, je crois, que vous avisiez à trouver quelque bon prêtre pour<br />

donner un peu dʹédification et <strong>de</strong> direction spirituelle à vos frères; ils regrettent tous M.<br />

Mangot et semblent éprouver un vi<strong>de</strong> qui serait à combler.<br />

1060


Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S. Je prie Dieu <strong>de</strong> bénir vous, et vos frères, et<br />

vos œuvres.<br />

Votre ami et Père tout affectionné en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Ci‐joint un mot pour M. Marcaire.<br />

Je retourne et rentre <strong>de</strong>main 8 à Vaugirard.<br />

1029 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

A propos dʹune maladie <strong>de</strong> la mère <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax. Nouvelles <strong>de</strong> M. Charrin et dʹun Confrère.<br />

Duclair, 7 septembre 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je bénis Dieu, avant toute autre pensée, <strong>de</strong> ce quʹIl a daigné tirer votre bien bonne et<br />

bien‐aimée mère du danger momentané quʹelle a couru; Il sait combien elle est nécessaire<br />

à votre excellent père et combien utile elle est aussi pour toute votre famille, il la gar<strong>de</strong>ra à<br />

votre affection et se contentera <strong>de</strong> vous avoir rappelé par cette épreuve quel grand don Il<br />

fait à une famille en y préposant une mère tendre, dévouée, sage et chrétienne; quel trésor,<br />

en effet! on nʹy pense pas toujours assez. Je crois que vous <strong>de</strong>vez rester près dʹelle tant que<br />

votre présence peut être utile à elle et à M. votre père. Si, contre votre attente, sa convales‐<br />

cence à Lyon se prolongeait beaucoup, peut‐être M. votre frère, après avoir séjourné un<br />

temps à Montcoy, pourrait revenir pour vous remplacer; allons au jour le jour, le Seigneur<br />

nous dira, à point convenable, sa sainte volonté; je suis heureux <strong>de</strong> vous savoir, en ces<br />

conjonctures, aux pieds <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Fourvière. Il y a bien peu <strong>de</strong> temps, nous y étions nous‐<br />

mêmes, M. Paillé et moi, en compagnie <strong>de</strong> notre ami, M. Charrin; nous y avons prié <strong>de</strong> no‐<br />

tre mieux; peut‐être préparions‐nous aussi votre venue et quelque adoucissement à<br />

lʹépreuve douloureuse que <strong>de</strong>vait bientôt subir votre bonne mère; jʹaime à le penser. M.<br />

Charrin nʹest pas, je crois, à Lyon, mais à Meyzieu (si je ne me trompe), à la campagne <strong>de</strong><br />

son père. Toutefois, il va et vient et doit se trouver <strong>de</strong> temps en temps à la ville. Je crois<br />

quʹil serait bien heureux <strong>de</strong> vous voir. Vous pourriez passer Place <strong>de</strong> la Miséricor<strong>de</strong>, chez<br />

M. Lodoix‐Girard, notre ami commun, Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> St ‐Vincent <strong>de</strong> Paul, lequel avertirait<br />

dʹune façon ou dʹune autre M. Charrin <strong>de</strong> votre présence. M. Girard <strong>de</strong>meure chez son<br />

père, négociant en gros <strong>de</strong> <strong>de</strong>nrées coloniales; il y tient la caisse. Jʹai vu son père aux eaux<br />

dʹAllevard, homme fort chrétien qui nous a montré beaucoup dʹamitié. Son fils, fort in‐<br />

firme, marchant <strong>avec</strong> <strong>de</strong>ux béquilles, est dʹune volonté si ar<strong>de</strong>nte, dʹun zèle si charitable,<br />

quʹil est lʹâme <strong>de</strong>s Conférences et surmonte merveilleusement les difficultés que lui crée sa<br />

faiblesse physique; il avait pensé à sʹadjoindre à nous et a fait dans le temps une retraite à<br />

cette intention, mais il nʹeût pas trouvé assez <strong>de</strong> ménagements chez nous pour sa constitu‐<br />

tion débile. Il nous est fort dévoué. Je crois quʹil <strong>de</strong>meure au n° 2, sans certitu<strong>de</strong>, mais la<br />

maison <strong>de</strong> son père est fort connue.<br />

Je vous ai écrit ces jours‐ci à Montcoy, pensant que vous y arriveriez le 5; priez M.<br />

votre frère <strong>de</strong> vous renvoyer la lettre, peu longue dʹailleurs.<br />

Je retourne <strong>de</strong>main 8 à Vaugirard, un peu remis par les quelques jours passés ici et<br />

meilleurs pour ma santé, je crois, que tout mon séjour aux eaux.<br />

1061


Eglise <strong>de</strong> CAUDEBEC <strong>–</strong> en - CAUX<br />

Tout le mon<strong>de</strong> à Duclair, y<br />

compris le bon Curé, gar<strong>de</strong> aimable<br />

souvenir <strong>de</strong> votre apparition <strong>de</strong> lʹan<br />

<strong>de</strong>rnier; je suis allé hier visiter S t ‐<br />

Georges [<strong>de</strong> Boscherville] en pensant<br />

à vous; on me dit que vous avez<br />

assez près <strong>de</strong> chez vous lʹancienne<br />

abbaye <strong>de</strong> Vézelay, belle entre<br />

toutes. Avez‐vous écrit à M.<br />

Chaverot?<br />

Jʹai reçu une bonne lettre ces jours‐ci <strong>de</strong> M.<br />

Chaverot; sa position est acceptée par sa famille,<br />

non sans quelque regret; quʹon a <strong>de</strong> peine <strong>de</strong> nos<br />

jours à faire pleinement un sacrifice à Dieu! Il<br />

paiera néanmoins ces <strong>de</strong>mi‐consentements, ces<br />

oblations faites dʹune main et retenues <strong>de</strong> lʹautre;<br />

puissions‐nous, nous autres au moins, offrir la vic‐<br />

time <strong>de</strong> tout et plein cœur.<br />

Je vous dis adieu, bien cher enfant; assurez<br />

votre bonne mère, si vous le croyez bon, que je me<br />

souviendrai dʹelle au S t Sacrifice; croyez à mes<br />

tendres sentiments dʹami et <strong>de</strong> Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1062


1030 à M. Maignen<br />

Trop <strong>de</strong> fêtes dans lʹŒuvre du frère Maignen. Place <strong>de</strong>s moyens naturels dans les Œuvres. Appel pressant à la<br />

pratique <strong>de</strong> la règle.<br />

Vaugirard, 16 septembre 1865<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Jʹentends parler <strong>de</strong> divers côtés, en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> la Communauté, <strong>de</strong> vos fêtes et diver‐<br />

tissements <strong>de</strong>s Jeunes Ouvriers ou <strong>de</strong> Nazareth; on trouve tout cela très bien, mais on sʹac‐<br />

cor<strong>de</strong> à dire quʹune œuvre qui se met sur ce pied ne saurait se soutenir longtemps. Ne<br />

prenez‐vous pas une gran<strong>de</strong> responsabilité <strong>de</strong>vant Dieu et <strong>de</strong>vant le mon<strong>de</strong> charitable en<br />

ne tenant aucun compte <strong>de</strong>s avis qui vous viennent ainsi <strong>de</strong> toutes parts et du sentiment<br />

que notre Conseil et moi‐même vous avons tant <strong>de</strong> fois exprimé? Je vous avoue que les<br />

raisons par lesquelles vous justifiez votre manière <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r me paraissent plus spécieu‐<br />

ses que soli<strong>de</strong>s; je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> donc, et je vous prescris sʹil est nécessaire, <strong>de</strong> ralentir no‐<br />

tablement ce mouvement excessif imprimé à votre œuvre; on ne sort jamais impunément<br />

<strong>de</strong> la mesure et <strong>de</strong> la sagesse que lʹexpérience a consacrées. Vous prenez votre attrait pour<br />

les pompes et les réjouissances extérieures comme une nécessité, cʹest une illusion.<br />

Jʹinsiste <strong>de</strong> nouveau, cher enfant, pour que vous fassiez un retour sérieux aux prati‐<br />

ques pieuses trop résolument délaissées par vous et sans nulle autorisation. Il faut abso‐<br />

lument, et je vous y oblige, que vous trouviez quelque temps réservé chaque jour à lʹorai‐<br />

son; il faut aussi que vous repreniez la récitation <strong>de</strong> lʹoffice et que vous ne vous en dispen‐<br />

siez jamais, même en partie, et pour <strong>de</strong>s raisons graves, sans donner vos motifs à M. Paillé.<br />

Vous ne verrez pas, cher enfant, dans ces prescriptions aucun indice <strong>de</strong> sévérité; il<br />

nʹy a autre chose quʹune conviction <strong>de</strong> plus en plus profon<strong>de</strong> quʹen restant dans lʹétat où<br />

vous êtes, vous ne sauriez aller longtemps et que vous arriveriez à vous fourvoyer. Met‐<br />

tez‐vous sans retard aux choses que je vous indique; elles vous prépareront une bonne re‐<br />

traite qui vous méritera les grâces abondantes dont nous avons tant besoin.<br />

Je vous embrasse tendrement en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1031 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Voyage <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax. Envoi <strong>de</strong> plusieurs frères à Arras.<br />

Vaugirard, 18 septembre 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai perdu tout à fait vos traces et je ne sais plus où vous trouver, à Lyon, à Montcoy<br />

ou ailleurs; je ne sais à quelle supposition mʹarrêter. Vous êtes si fidèle, si prévenant dans<br />

les correspondances quʹun silence un peu plus long que <strong>de</strong> coutume me laisse une ombre<br />

dʹinquiétu<strong>de</strong>; je crois, il est vrai, que vous mʹavez écrit le <strong>de</strong>rnier, mais vous ne comptez<br />

pas. Jʹai bien pensé au voyage que vous aviez dit faire <strong>avec</strong> votre bonne mère convales‐<br />

cente, mais le voyage <strong>de</strong> Lyon à Montcoy nʹest pas bien long; enfin, je cherche sans trou‐<br />

ver; votre bonne mère aurait‐elle eu quelque rechute ou vous‐même seriez‐vous souffrant?<br />

Jʹespère que non, vous me lʹauriez fait savoir. Avec <strong>de</strong>ux lignes que vous allez me faire<br />

1063


vite, toutes ces obscurités vont se dissiper; comme nous avons besoin <strong>de</strong> lumière et comme<br />

les ténèbres nous font bientôt peur!<br />

Demain, fête <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette; vous serez <strong>avec</strong> nous en esprit et vous serez aus‐<br />

si dans le souvenir affectueux <strong>de</strong> tous, cʹest une double présence, il en manquera pourtant<br />

une troisième qui sera sentie. Nos jeunes Séminaristes [A. Leclerc, Pattinote et Boiry] y<br />

étrenneront leurs soutanes que jʹai bénies hier. Il y en a une <strong>de</strong> plus que vous ne pensiez;<br />

Ad. Lainé, obligé dʹaller à Arras <strong>avec</strong> M. Victor [Trousseau] pour ai<strong>de</strong>r M. Laroche au pa‐<br />

tronage (le dimanche), prend aussi lʹhabit ecclésiastique. M. Victor sera tonsuré à son arri‐<br />

vée à Arras, après la retraite quʹil y va suivre; tous ces arrangements ont lʹagrément <strong>de</strong> M gr<br />

dʹArras; nous avons été si vivement pressés par ses invitations bienveillantes et par les ins‐<br />

tances vives, réitérées <strong>de</strong> M. Laroche que nous avons dû nous y rendre. M. Victor a dʹail‐<br />

leurs incliné pour lui à ce parti, craignant un peu la vie trop soutenue et serrée dʹIssy. Ce<br />

nʹest, du reste, quʹun essai qui ne préjuge que faiblement pour lʹavenir.<br />

Je crois que M. Chaverot arrivera pour la retraite ou au plus tard le 25. M. Risse ar‐<br />

rive, je pense, aujourdʹhui; M. dʹArbois a désiré venir lui‐même, il sera ici le 25 <strong>avec</strong> M.<br />

Moutier, peut‐être aussi Alexandre [Legrand].<br />

Avez‐vous vu M. Charrin? Nous attendons pour la retraite un bon jeune homme <strong>de</strong><br />

Nantes [M. Hubert], ami <strong>de</strong> MM. Audrin et Charles Jouin.<br />

Adieu, bien cher ami, je ne veux pas aujourdʹhui vous écrire, le temps me manque;<br />

jʹai en vue seulement <strong>de</strong> provoquer une lettre <strong>de</strong> vous.<br />

Nous prierons <strong>de</strong>main pour les intentions que vous mʹavez recommandées.<br />

Votre ami et Père bien affectionné en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1032 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Retraite prêchée par le père Millériot. Nouvelles <strong>de</strong>s frères.<br />

Vaugirard, 21 septembre 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Votre petite lettre du 16 <strong>de</strong> ce mois mʹa été remise seulement aujourdʹhui, ayant été<br />

oubliée par M. Maignen, mauvais commissionnaire; <strong>de</strong> là un commencement dʹinquiétu<strong>de</strong><br />

exprimé dans une lettre adressée, il y a 3 ou 4 jours, par moi à Montcoy (où je vous croyais<br />

revenu) et qui peut‐être vous aura été renvoyée. Je vois <strong>avec</strong> joie que votre bonne mère est<br />

définitivement mieux, et <strong>avec</strong> satisfaction aussi que vous croyez pouvoir, sans manquer à<br />

aucun <strong>de</strong> vos <strong>de</strong>voirs envers les vôtres, reprendre la route qui vous ramènera au milieu <strong>de</strong><br />

nous. Je mʹen réjouis dʹautant plus que le r.p. Milleriot paraît prendre tout à fait à cœur la<br />

retraite quʹil va commencer pour nous dimanche au soir, 24 <strong>de</strong> ce mois. Je crois que, sans<br />

mettre à cette retraite une application que vous pouvez utilement réserver pour votre ren‐<br />

trée à St‐Sulpice, vous suivrez néanmoins <strong>avec</strong> grand intérêt les instructions du p. Mille‐<br />

riot. Notre ami, M. Chaverot, arrivera pour le 25.<br />

Nos jeunes gens (MM. Victor [Trousseau] et Adolphe [Lainé])sont partis le 19 au<br />

soir pour Arras. Les trois autres [MM. Leclerc, Pattinote et Boiry] sont parfaits <strong>avec</strong> leurs<br />

soutanes et heureux comme vous le pouvez croire. Je nʹai point encore reçu la lettre <strong>de</strong> Mme Cottu pour vous; je suis aujourdʹhui à Chaville, il ne paraît pas quʹon en ait connaissance.<br />

1064


Ce serait jouer <strong>de</strong> malheur. Je pense quʹà son retour, je pourrai lʹaller voir <strong>avec</strong> vous, sʹil<br />

était besoin, ou mieux peut‐être M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston].<br />

Notre fête <strong>de</strong> la Salette a été charmante, plus quʹelle ne lʹavait été jusquʹici.<br />

M. Paillé prend ces lignes écrites en hâte et les emporte. Adieu donc, bien cher ami,<br />

à bientôt, ce mot me charme. Je prie Dieu <strong>de</strong> vous bénir et je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à votre bon ange <strong>de</strong><br />

vous accompagner dans le chemin.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je mʹen rapporte à vous pour la visite à M gr . Tâchez, sʹil la faut faire, quʹelle ne vous<br />

retar<strong>de</strong> point. Tous vous font mille affections et vous atten<strong>de</strong>nt.<br />

<strong>Lettre</strong> <strong>de</strong> M me Cottu renvoyée, il y a 8 ou 10 jours, à Montcoy.<br />

1033 à M. dʹArbois<br />

Retraite <strong>de</strong> communauté: quelques observations concernant le déplacement <strong>de</strong>s frères dʹAngers.<br />

Vaugirard, 21 septembre 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous accueillons <strong>avec</strong> joie lʹespérance <strong>de</strong> vous voir à la retraite, ainsi que ceux <strong>de</strong><br />

nos frères que leurs emplois ne retiendront pas nécessairement à Angers. Notre conseil <strong>de</strong><br />

Communauté me faisait hier quelques observations que je vous communique.<br />

Sans blâmer en aucune façon les dispositions que vous prenez, il exprimait néan‐<br />

moins la crainte que vos œuvres, la Psallette surtout, nʹeussent à souffrir <strong>de</strong> lʹabsence si‐<br />

multanée <strong>de</strong> tous les membres <strong>de</strong> votre petite famille, notre cher Caron excepté. Vous êtes<br />

sur les lieux, cher ami, et mieux à même conséquemment <strong>de</strong> juger <strong>de</strong>s nécessités <strong>de</strong> la po‐<br />

sition; vous agirez pour le mieux, en <strong>de</strong>mandant toujours au bon Maître <strong>de</strong> vous inspirer.<br />

On remarquait, en outre, quʹà la distance surtout où vous êtes, on ne pouvait envoyer les<br />

frères aux <strong>de</strong>ux retraites annuelles, mais à lʹune <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux seulement; quʹil convenait,<br />

conséquemment, dʹenvoyer à lʹune ceux qui nʹauraient pas profité <strong>de</strong> la précé<strong>de</strong>nte; il<br />

semble quʹen ce cas, notre f. Alexandre [Legrand] <strong>de</strong>vrait attendre la retraite du printemps<br />

prochain. Je le répète, cher enfant, ces observations, faites à distance, ne doivent pas, dans<br />

ma pensée, gêner votre décision, si vous avez <strong>de</strong>s raisons, que vous me direz, pour main‐<br />

tenir les dispositions prévues par vous. En cette supposition, je ne vois pas dʹinconvénient<br />

à ce que M. Alexandre arrive un jour avant le dimanche <strong>de</strong> la retraite. M. Maignen, dʹaprès<br />

la connaissance quʹil a <strong>de</strong> la trempe dʹesprit du jeune Caron, pensait quʹil avait besoin<br />

dʹêtre soigné spirituellement; il regrettait quʹil ne pût profiter <strong>de</strong> la retraite. On ne peut<br />

amener tout le mon<strong>de</strong>.<br />

Pour ce qui vous regar<strong>de</strong>, bien cher ami, vous savez déjà <strong>avec</strong> quelle joie nous vous<br />

reverrons et combien nous serons satisfaits si votre séjour peut se prolonger un peu après<br />

la retraite, sans inconvénient; mais pourrez‐vous vous absenter le dimanche, les choses<br />

sont‐elles assez assises pour que M. Moutier puisse rester sans vous? Pesez tout cela <strong>de</strong>‐<br />

vant Dieu, cher ami, et faites ce qui sera le meilleur. Un <strong>de</strong> nos Messieurs pensait que vous<br />

auriez pu venir plus facilement après la retraite et après le retour <strong>de</strong> vos frères; je vous dis<br />

tous les avis, afin quʹils vous servent à former votre jugement. Jʹespère que, contrairement<br />

au proverbe <strong>de</strong> la fable: on ne peut contenter tout le mon<strong>de</strong> et son père, vous aurez ce rare<br />

bonheur que tous seront satisfaits.<br />

1065


Je vous quitte pour prévenir M gr <strong>de</strong> Metz du retour parmi nous <strong>de</strong> M. <strong>Jean</strong> [Gauf‐<br />

friau]; je nʹai pas, <strong>de</strong>puis 15 jours, eu une minute pour le faire; il trouvera peut‐être quʹon<br />

lui donne trop peu <strong>de</strong> temps pour le remplacer.<br />

Adieu, bien cher ami, embrassez pour moi nos frères et croyez aussi à ma tendre af‐<br />

fection en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1034 à MM. Trousseau et A. Lainé<br />

Nouvelles <strong>de</strong> la retraite <strong>de</strong> Communauté; activités <strong>de</strong>s scolastiques.<br />

Vaugirard, 1er octobre 1865<br />

Bien chers enfants en N.S.,<br />

Notre retraite sʹest terminée hier très heureusement, comme elle avait été donnée<br />

aussi en <strong>de</strong>s conditions aussi favorables que possible. A peine sorti <strong>de</strong>s surcroîts <strong>de</strong> soucis<br />

quʹelle mʹoccasionnait, je me tourne vers vous, chers enfants, pour vous dire que vous<br />

étiez présents au souvenir et à lʹaffection <strong>de</strong> tous, et que tous ont prié pour que vous ayez<br />

part aux fruits <strong>de</strong> nos pieux exercices. Je ne veux pas exciter vos regrets en vous disant<br />

trop <strong>de</strong> détails sur ces jours <strong>de</strong> recueillement et <strong>de</strong> prière; il suffit que vous sachiez que<br />

lʹimpression la plus vive et la plus profon<strong>de</strong> nous en est restée et quʹelle sera, nous lʹespé‐<br />

rons, dʹun effet durable pour notre sanctification et pour le bien <strong>de</strong> nos œuvres. Nous<br />

nʹavions jamais été si nombreux; on avait été obligé <strong>de</strong> dresser plusieurs lits dans la salle<br />

<strong>de</strong> communauté, les chambres ayant manqué; nous étions plus <strong>de</strong> 60. Nos ff. <strong>de</strong> Varax et<br />

Chaverot, arrivés lʹun et lʹautre quand la retraite était déjà commencée, en ont pu profiter<br />

encore néanmoins, à leur vive satisfaction. M. Chaverot était au nombre <strong>de</strong> ceux qui fai‐<br />

saient leurs vœux. Lʹun et lʹautre rentrent aujourdʹhui à St‐Sulpice, et <strong>de</strong>main ceux <strong>de</strong><br />

Chaville iront à Issy.<br />

M. Urbain [Baumert] partira au milieu <strong>de</strong> la semaine <strong>avec</strong> M. Risse pour commen‐<br />

cer à Metz la philosophie. Je vous laisse à penser quelle joie! La soutane, la philosophie, un<br />

mouvement, un pas en avant, il est rayonnant! Jʹespère quʹil va aimer les Français autant<br />

que les Allemands. M. <strong>Jean</strong> [Gauffriau] revient <strong>de</strong> Metz et ira <strong>avec</strong> M. dʹArbois à Angers.<br />

Ce <strong>de</strong>rnier était à la retraite <strong>avec</strong> les ff. Alexandre [Legrand] et Moutier.<br />

Je chercherai quelque prochaine occasion pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r le consentement <strong>de</strong> Mgr dʹOrléans [Mgr Dupanloup] à votre agrégation chez nous; il nʹy a heureusement pas <strong>de</strong> dif‐<br />

ficulté, je lʹespère.<br />

Je recomman<strong>de</strong> à notre cher Adolphe [Lainé] <strong>de</strong> ne pas se trop fatiguer à la musi‐<br />

que, un cours est fort lassant à faire; il est loin encore dʹêtre<br />

vigoureux, il pourrait aisément en souffrir; veillez‐y, cher Victor<br />

[Trousseau], jʹen ai parlé aussi à M. Laroche. Secondairement, sa<br />

voix qui mue encore se cassera si elle est trop fatiguée.<br />

Adieu, bien chers enfants, vous savez combien vous êtes<br />

chers à tous et surtout à<br />

Votre affectionné ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

Edouard [Lainé] va très bien; la mère [M me Lainé] va bien, après<br />

avoir été un peu souffrante. Edouard Lainé (1844-1911)<br />

1066


1035 à M. Chaverot<br />

Le reçu <strong>de</strong> sa pension <strong>de</strong> séminariste doit être signé.<br />

3 octobre 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Vous avez omis <strong>de</strong> signer le reçu pour M. Pichery; il a néanmoins remis lʹargent et je<br />

fais payer 300f. aujourdʹhui au Séminaire. Nous sommes convenus <strong>avec</strong> M. Pichery que<br />

vous lui renverrez le reçu après lʹavoir signé; je le joins ici à cet effet.<br />

Mille affections en N.S. pour vous et pour M. Camus que vous verrez, je pense, aus‐<br />

si souvent que possible. Sʹil y a lieu, on ferait bien <strong>de</strong> reprendre la petite entrevue qui se<br />

faisait chaque semaine à Issy entre tous ceux qui sont <strong>de</strong>s nôtres.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1036 à M. Guillot<br />

MLP. lui envoie un successeur. Ne pas lui parler <strong>de</strong>s difficultés, ni lʹindisposer dʹavance.<br />

Vaugirard, 4 octobre 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹenvoie, <strong>avec</strong> M. Risse, M. André [Brouant] qui doit vous succé<strong>de</strong>r dans vos fonc‐<br />

tions; vous le mettrez au fait <strong>de</strong> ses emplois en lui donnant tous les renseignements que<br />

vous croirez pouvoir lui être utiles; mais je vous recomman<strong>de</strong> bien expressément dʹéviter<br />

tout blâme, toute remarque critique sur le Supérieur et sur sa manière <strong>de</strong> conduire les cho‐<br />

ses; ceux quʹon indispose ainsi agissent <strong>avec</strong> prévention et sʹéloignent aisément du respect<br />

et <strong>de</strong> la docilité quʹils doivent au Supérieur; laissez donc M. André <strong>avec</strong> les sentiments <strong>de</strong><br />

confiance et dʹaffection dont il semble animé envers M. Risse et gar<strong>de</strong>z‐vous <strong>de</strong> mettre au‐<br />

cune inquiétu<strong>de</strong> dans son esprit; vous nʹen auriez certainement pas lʹintention, mais, sans<br />

le vouloir, vous produiriez assurément ce résultat si vous lui disiez les petites difficultés<br />

que vous avez pu rencontrer.<br />

Je pense que quelques jours suffiront pour bien installer M. André; vous reviendrez<br />

alors vers nous à Vaugirard, où vous savez dʹavance que vous serez accueilli <strong>avec</strong> joie et<br />

cordialité.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, à bientôt; je vous embrasse affectueusement en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1037 à M. dʹArbois<br />

Le départ du père Gauffriau pour Angers est imminent.<br />

Vaugirard, 6 octobre 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. <strong>Jean</strong> [Gauffriau] vient dʹarriver; il partira je pense, ce soir ou <strong>de</strong>main pour An‐<br />

gers, afin dʹêtre disponible pour dimanche comme vous le désirez.<br />

En examinant, je trouve <strong>de</strong> plus en plus quʹil serait regrettable <strong>de</strong> lui donner la<br />

chambre près du salon, et que les inconvénients <strong>de</strong>s autres logements où vous pourriez<br />

1067


lʹétablir sont moindres que vous ne les voyez; pensez‐y donc <strong>de</strong> nouveau; un essai dans ce<br />

<strong>de</strong>rnier sens nʹaurait, en tout cas, pas dʹinconvénient.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1038 à MM. Trousseau et A. Lainé<br />

Visite du père Lantiez. Encouragements.<br />

Vaugirard, 14 octobre 1865<br />

Bien chers enfants en N.S.,<br />

Je ne vous écris pas, puisque jʹenvoie vers vous notre bon abbé Lantiez qui vaut<br />

bien mieux quʹune lettre. Il répondra à toutes vos questions; il examinera tout ce qui peut<br />

vous être utile; je suis sûr dʹavance quʹil vous trouvera, comme je vous ai toujours vus, dé‐<br />

sireux <strong>de</strong> contribuer à la gloire <strong>de</strong> Dieu, pleins <strong>de</strong> zèle pour votre instruction, pleins <strong>de</strong><br />

bon vouloir pour ai<strong>de</strong>r, dans la mesure <strong>de</strong> vos moyens, au bien qui se fait autour <strong>de</strong> vous;<br />

je suis heureux en pensant au bon avenir que vous allez vous préparer et aux grâces que le<br />

Seigneur daignera sans doute vous accor<strong>de</strong>r.<br />

Je crois que les catéchismes et les petites instructions que fait le f. Victor [Trousseau]<br />

lui seront à lui‐même fort utiles, surtout sʹil peut, sans prétention aucune, les préparer un<br />

peu.<br />

Jʹenvoie à notre cher petit frère Adolphe [Lainé] la soutane <strong>de</strong>mandée; il a dû rece‐<br />

voir la musique.<br />

M. Faÿ a reçu vos lettres; il en est fort satisfait et il vous écrira.<br />

Ici, tout le mon<strong>de</strong> vous aime et sʹintéresse sincèrement à tout ce qui vous touche. M.<br />

Faÿ arrive dʹIssy; tous nos amis vont bien, Leclerc sʹy trouve bien mieux en santé; Dieu<br />

daignera, je lʹespère, lui donner force suffisante.<br />

Adieu, bien chers amis. Croyez à mes plus tendres sentiments en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1039 à M. Risse<br />

Nouvelles du personnel. Son insuffisance est une épreuve, mais le Seigneur nous en a épargné <strong>de</strong> plus ru<strong>de</strong>s.<br />

Vaugirard, 24 octobre 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je nʹai point encore répondu à lʹaffectueuse lettre que vous mʹavez envoyée par le f.<br />

Guillot; ce nʹest pas que je nʹen eusse la volonté, mais, vous le savez par vous‐même, on est<br />

si fort dérangé dans les œuvres dont nous nous occupons quʹon laisse souvent en souf‐<br />

france les choses qui intéressent le plus vivement. De ce nombre sont assurément pour moi<br />

celles qui concernent votre chère maison, vous‐même avant tout, vos frères, vos enfants. Je<br />

bénis Dieu <strong>de</strong>s détails consolants que vous me donnez sur tous ces sujets si chers pour<br />

moi; jʹai la confiance que vous continuerez à <strong>de</strong>meurer satisfait <strong>de</strong> votre personnel; tous<br />

ont simplicité et droiture <strong>de</strong> cœur. M. Urbain [Baumert], en particulier, <strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong><br />

culture et dʹexpérience, peut <strong>de</strong>venir un sujet dʹune valeur réelle, il a <strong>de</strong> lʹélévation et <strong>de</strong> la<br />

générosité <strong>de</strong> cœur. Notre petit f. André [Brouant] ira bien aussi, mais, comme il est flexi‐<br />

1068


le et un peu faible <strong>de</strong> caractère, il a besoin dʹêtre suivi et soutenu; à cette condition, il peut<br />

faire le bien parmi les jeunes gens, sa douceur et ses manières affectueuses les attireront. Je<br />

ne sais pas sʹil nʹy a pas quelque inconvénient à lui donner le service du vin, non que jʹaie<br />

rien vu <strong>de</strong> ce côté qui me fasse ombrage, mais ceux qui sont faibles ont besoin quʹon éloi‐<br />

gne dʹeux les occasions dʹentraînement. M. Urbain avait ce service à Chaville et sʹen acquit‐<br />

tait fort consciencieusement, mais il ne serait guère possible, sans doute, <strong>de</strong> le lui donner à<br />

Metz.<br />

M. Luzier est regretté à Grenelle. MM. <strong>de</strong> Saint‐Vincent <strong>de</strong> Paul, en particulier, ap‐<br />

préciaient ses services; je crois que vous le trouverez en progrès moralement comme en<br />

santé.<br />

M. Guillot reprend position ici et va secon<strong>de</strong>r très utilement M. Emile [Beauvais],<br />

trop chargé dans lʹadministration <strong>de</strong> la lour<strong>de</strong> maison <strong>de</strong> Vaugirard; M. Brice languit un<br />

peu, sa santé est débile presque toujours <strong>de</strong>puis son retour; cette disposition, jointe à lʹim‐<br />

pression dʹun changement imprévu dans son poste, le rend un peu triste; il ne se plaint<br />

pas, mais il est silencieux et contraint; je crois que ce sera passager; il se montre docile et<br />

sans aucun mauvais vouloir. Il va vous écrire, ainsi que M. Guillot; ils vont vous envoyer<br />

lʹadresse <strong>de</strong>s parents <strong>de</strong> M. Rémond.<br />

M. <strong>Jean</strong> [Gauffriau] paraît sʹasseoir dans sa position à Angers; jʹai été content <strong>de</strong> la<br />

lettre que jʹai reçue <strong>de</strong> lui; il doit vous écrire, sʹil ne lʹa fait déjà, il mʹen a manifesté lʹintention.<br />

Voilà bien <strong>de</strong>s détails sur le personnel, mais ne sont‐ils pas les plus intéressants;<br />

sans le personnel, que seraient les œuvres? Lʹargent assurément est nécessaire, mais quand<br />

Dieu donne les hommes <strong>de</strong> foi et <strong>de</strong> dévouement, Il donne après le reste par surcroît.<br />

Nous souffrons souvent par la pénurie <strong>de</strong>s ressources, mais bénissons Dieu qui par là nous<br />

donne, en définitive, la moins dure <strong>de</strong>s épreuves; celles qui viennent, ou <strong>de</strong> lʹinconstance,<br />

ou du défaut <strong>de</strong> vertu, ou enfin <strong>de</strong>s défaillances, quelles quʹelles soient, <strong>de</strong>s sujets sont<br />

bien plus ru<strong>de</strong>s et plus douloureuses; oui, le Seigneur nous a traités jusquʹici en enfants<br />

gâtés; ni les persécutions, ni les dispersions, ni lʹatteinte <strong>de</strong> nos personnes ne nous ont en‐<br />

core éprouvés. De quoi vous plaignez‐vous, dit lʹauteur <strong>de</strong> LʹImitation, vous nʹavez pas en‐<br />

core souffert jusquʹau sang. Bénissons Dieu, soyons patients dans les épreuves, accoutu‐<br />

mons‐nous à y voir une marque <strong>de</strong> son amour et <strong>de</strong> sa prédilection. La chose est dure et<br />

difficile à goûter; laissons‐nous faire au moins, le Seigneur se contentera <strong>de</strong> notre soumis‐<br />

sion.<br />

Adieu, bien cher ami, nous avons tous regretté que votre séjour parmi nous ait été<br />

trop court; tous nos ff., vieux et jeunes, vous assurent <strong>avec</strong> moi <strong>de</strong> leur tendre affection en N.S.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹembrasse cordialement nos frères.<br />

1039 bis 377 à M. Maignen<br />

Envoi <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux manuscrits378 . MLP. propose quelques améliorations.<br />

Octobre 1865<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Voilà les <strong>de</strong>ux manuscrits Le dialogue est sensiblement mieux ainsi retouché.<br />

377 Supplée la lettre 1052.<br />

378 Sans doute: "Le feu d'artifice <strong>de</strong> la S t Victor" et "Le bon oiseau se fait lui-même" , parus dans "l'Almanach <strong>de</strong> l'Apprenti et <strong>de</strong><br />

l'Ecolier" pour 1866.<br />

1069


Lʹautre écrit est bien; il me semble quʹau premier aspect, on peut penser que cʹest au<br />

point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> la famille que vous montrez lʹaction <strong>de</strong> lʹenfant, tandis que tout à coup ce‐<br />

la tourne à lʹapprentissage. Je crois que, vers la fin, il faudrait, par quelques mots en pas‐<br />

sant, indiquer quʹil influa aussi utilement pour sa famille, pour la paix, la consolation. Je<br />

ne comprends pas, même après le dialogue lu, ce mot : le bon oiseau se fait lui‐même; il<br />

me paraît être un non‐sens, ou, sʹil signifie quʹun enfant peut, à lui seul, préparer son ave‐<br />

nir, il serait une assertion fausse; lʹéducation, les conditions et entourages quʹon lui donne<br />

influent évi<strong>de</strong>mment sur lui; autrement, à quoi servirait la famille, à quoi le patronage lui‐<br />

même? Cela est à expliquer.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1040 à M me la Vicomtesse dʹHurbal<br />

Félicitations pour une naissance. Le choléra à Paris (lʹépidémie <strong>de</strong> 1865‐1866 fit 11 000 victimes). Réflexions sur<br />

la crise qui en résulta.<br />

Vaugirard, 3 novembre 1865<br />

Madame la Comtesse,<br />

Ma pensée se tournait <strong>de</strong>puis quelque temps <strong>avec</strong> une persistance encore plus<br />

gran<strong>de</strong> que <strong>de</strong> coutume vers vous et vers votre chère famille quand votre bonne et aimable<br />

lettre mʹest arrivée; était‐ce pressentiment ou bien besoin plus vif <strong>de</strong> recevoir <strong>de</strong> vos nou‐<br />

velles? Je ne saurais le dire, mais, pour lʹune ou lʹautre raison, pour les <strong>de</strong>ux peut‐être, la<br />

lettre a été reçue <strong>avec</strong> empressement et joie. Je suis tout heureux dʹapprendre que la fa‐<br />

mille <strong>de</strong> M me <strong>de</strong> Romanet sʹest accrue dʹun petit ange quʹon appelle Louis; ce sera un S t<br />

Louis, je lʹespère; ce nom est cher au ciel et à la terre, glorieux dans lʹEglise et lʹhonneur <strong>de</strong><br />

la France; le cher enfant qui lʹa reçu sera digne <strong>de</strong> le porter; nʹa‐t‐il pas, comme notre grand<br />

1070


oi Louis, une mère (et même trois, en comptant celle qui est <strong>avec</strong> Dieu) pour lui appren‐<br />

dre la piété, la bonté et la gran<strong>de</strong>ur dʹâme? Je joins tous mes vœux et toutes mes prières<br />

aux vôtres pour que le Seigneur lui prépare un bon avenir.<br />

Jʹai dit fidèlement la S te Messe chaque semaine aux intentions <strong>de</strong> M me dʹHou<strong>de</strong>tot et<br />

aux vôtres, en y joignant un bon souvenir pour la famille tout entière, car je me sens res‐<br />

pect et dévouement pour tous ses membres, <strong>avec</strong> affection plus marquée, cela est bien<br />

permis, pour ceux quʹil mʹest donné <strong>de</strong> connaître et <strong>de</strong> rencontrer quelquefois. Je tiens<br />

grand compte aussi <strong>de</strong> toutes les recommandations que vous me faites, Madame, ou <strong>de</strong>s<br />

besoins particuliers qui attirent vos sollicitu<strong>de</strong>s; <strong>avec</strong> une mère vraiment chrétienne, on<br />

peut sans risque sʹassocier à tous ses désirs, car ils sont tous soumis à lʹadorable et toute<br />

sage volonté <strong>de</strong> Dieu. Jʹai envoyé les notes que vous <strong>de</strong>mandiez à N.D. <strong>de</strong>s Victoires; on<br />

les a aussi mentionnées à notre chapelle qui est agrégée à lʹArchiconfrérie.<br />

Je ne vois aucune chose digne dʹintérêt dans notre Paris, que je puisse porter à votre<br />

connaissance; les journaux sont une sorte <strong>de</strong> correspondance qui restreint les communica‐<br />

tions épistolaires aux faits tout à fait intimes; la terrible épidémie a été relativement assez<br />

restreinte cette année; elle a diminué définitivement <strong>de</strong> moitié, et lʹon espère que la froi‐<br />

dure, dont nous avons les premières atteintes, va entièrement lʹéteindre. On a été impuis‐<br />

sant, cette fois comme les autres, à en démêler nettement la cause et aussi à en indiquer sû‐<br />

rement le remè<strong>de</strong>.<br />

On ne se presse guère jusquʹici <strong>de</strong> revenir <strong>de</strong> la campagne, mais le fléau aura dispa‐<br />

ru complètement dans le cours <strong>de</strong> novembre, tout le laisse espérer; on peut donc penser<br />

que rien ne sera changé aux habitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> ceux qui vont lʹété en villégiature. En ce mo‐<br />

ment, le mouvement du commerce et <strong>de</strong> lʹindustrie souffre un peu <strong>de</strong>s frayeurs <strong>de</strong> la pro‐<br />

vince; peu dʹétrangers viennent à Paris, les industriels, incertains <strong>de</strong>s chances <strong>de</strong> la saison,<br />

sont timi<strong>de</strong>s et travaillent peu; il en est du corps social comme <strong>de</strong> notre propre corps, le<br />

moindre embarras arrête les rouages, et la machine fonctionne péniblement; espérons que<br />

le Grand Ouvrier dont la main lʹa façonnée saura bientôt tout remettre en mouvement.<br />

Je nʹai pas lu les excellents ouvrages dont vous me parlez, Madame; jʹai entendu<br />

louer beaucoup surtout les Mémoires dʹun père, mais il ne sʹest pas rencontré sous ma main;<br />

sʹil est en votre possession, je compterai sur votre obligeance pour le lire; jʹaime à faire ain‐<br />

si quelques bonnes et soutenantes lectures parmi celles que vous goûtez le plus; cela fait<br />

un fonds commun <strong>de</strong> sentiments et <strong>de</strong> bonnes pensées qui entretient lʹentente <strong>de</strong>s âmes et<br />

accroît leur union dans lʹamour du bien.<br />

M. <strong>de</strong> Lauriston est infiniment touché <strong>de</strong> votre bon souvenir; il sʹunit à moi pour<br />

vous offrir son respectueux dévouement, ainsi quʹà tous les membres <strong>de</strong> votre chère fa‐<br />

mille dont vous êtes entourée; veuillez bien lʹagréer, Madame la Comtesse, <strong>avec</strong> tous mes<br />

sentiments <strong>de</strong> profond attachement en N.S. Le <strong>Prevost</strong> P tre<br />

1041 à M. dʹArbois<br />

Sollicitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> MLP. pour la santé <strong>de</strong>s frères dʹAngers et les besoins financiers <strong>de</strong> la maison. Epidémie <strong>de</strong> choléra.<br />

Vaugirard, 6 novembre 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous prenons une vive part aux sollicitu<strong>de</strong>s que vous ont causées les santés <strong>de</strong> vos<br />

frères; cʹest à travers les épreuves que marchent les œuvres du Seigneur, et cʹest par notre<br />

1071


patience à les porter que nous obtenons la bénédiction quʹIl daigne y donner; ayons donc<br />

bonne confiance, chers amis, <strong>de</strong>mandons par la prière le secours que nos nécessités récla‐<br />

ment et lʹai<strong>de</strong> divin ne nous fera point défaut. Je vous prie, mon cher ami, <strong>de</strong> me tenir au<br />

courant <strong>de</strong> lʹétat <strong>de</strong> vos bons frères; nous prions pour eux tout particulièrement; en ce<br />

moment, la maison <strong>de</strong> Vaugirard fait une neuvaine pour la délivrance <strong>de</strong>s âmes du Purga‐<br />

toire, en <strong>de</strong>mandant à ces saintes âmes <strong>de</strong> nous donner en retour leurs suffrages pour les<br />

œuvres et les besoins <strong>de</strong> la Communauté; unissez‐vous à nous; nous sommes en commu‐<br />

nauté <strong>de</strong> toutes façons, mais surtout par les besoins comme par la prière qui doit y subvenir.<br />

A propos <strong>de</strong> besoins, dites‐moi si vous nʹêtes pas en gêne excessive; quoique pau‐<br />

vres, nous ferions en sorte <strong>de</strong> vous ai<strong>de</strong>r un peu si vous êtes plus pauvres encore que<br />

nous.<br />

Jʹai écrit lundi à M gr dʹAngers; jʹai pensé, comme vous, que la Communauté <strong>de</strong>vait,<br />

en cette circonstance, lui donner signe <strong>de</strong> respectueuse sympathie; je lui avais déjà écrit<br />

<strong>de</strong>rnièrement pour le remercier <strong>de</strong> ses <strong>de</strong>ux lettres pastorales, mais cela ne suffisait pas<br />

sans doute.<br />

Il faut que je sois bien pressé pour nʹavoir pas répondu plus tôt à votre <strong>de</strong>rnière let‐<br />

tre dont les détails me touchaient si vivement; jʹen ai été empêché, sans possibilité aucune<br />

<strong>de</strong> mieux faire.<br />

Nous nʹavons, <strong>avec</strong> la grâce <strong>de</strong> Dieu, eu aucune atteinte <strong>de</strong> lʹépidémie; il paraît cer‐<br />

tain quʹelle a beaucoup diminué dʹintensité; durant quelque temps, ses ravages étaient<br />

sensibles.<br />

Assurez tous nos frères que leur souvenir nous est bien présent, que nous prions<br />

pour eux et que nous leur gardons une cordiale affection.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Il mʹest venu dans lʹesprit que le vin dʹAngers, qui est âpre et capiteux, pourrait ne<br />

pas convenir à M. Alexandre [Legrand]; il me semble que, pour moi, il me prendrait sur<br />

les nerfs; dites‐en un mot au mé<strong>de</strong>cin, à lʹoccasion.<br />

1042 à M. Chaverot<br />

Recommandation à M. Chaverot qui sʹapprête à recevoir la tonsure.<br />

Vaugirard, 13 novembre 1865<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie, comme vous me le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z, votre lettre <strong>de</strong> tonsure; jʹai en outre,<br />

un extrait <strong>de</strong> votre acte <strong>de</strong> naissance, mais je ne crois pas que cette pièce, déjà visée au Sé‐<br />

minaire, vous soit nécessaire.<br />

Je me réjouis bien <strong>avec</strong> vous <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> faveur que le Seigneur daigne vous ac‐<br />

cor<strong>de</strong>r; son appel est bien manifeste, répon<strong>de</strong>z‐y donc <strong>avec</strong> une filiale confiance; je ne vois,<br />

comme vous, pas <strong>de</strong> meilleure préparation que <strong>de</strong> faire, au jour le jour, sous les yeux <strong>de</strong><br />

Dieu et dans une vue surnaturelle, toutes les actions que comporte votre règlement; cʹest<br />

ainsi que S t Louis <strong>de</strong> Gonzague croyait sage <strong>de</strong> se préparer à la mort; nous pouvons être<br />

tranquilles si nous agissons comme lui. Vous pouvez compter sur les prières <strong>de</strong> tous nos<br />

frères, ceux <strong>de</strong> la conférence ecclésiastique en particulier; je me charge, pour ma part, dʹob‐<br />

tenir la puissante intercession <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette.<br />

1072


Partagez <strong>avec</strong> notre ami, M. <strong>de</strong> Varax, tous mes sentiments <strong>de</strong> tendre et paternelle<br />

affection en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1043 à M. dʹArbois<br />

Sollicitu<strong>de</strong> charitable. Ne pas embrasser trop <strong>de</strong> choses. MLP. signale le départ définitif <strong>de</strong> M. Roussel, découragé<br />

par les contrariétés suscitées par lʹArchevêché.<br />

Vaugirard, 17 novembre 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous sais bien bon gré <strong>de</strong> me tenir exactement au courant <strong>de</strong> la situation <strong>de</strong> votre<br />

maison, <strong>de</strong> votre personnel particulièrement, les santés, en ces <strong>de</strong>rniers temps, ayant laissé<br />

beaucoup à désirer. Je pense bien que ces circonstances doivent vous créer quelques em‐<br />

barras; je le répète, cher ami, bien que nous soyons ici très pauvres, si vous éprouviez une<br />

gêne réelle, ne manquez pas <strong>de</strong> nous en avertir, les pauvres entre eux sʹai<strong>de</strong>nt encore et<br />

cette charité plaît au Seigneur; nous lʹexercerons donc, sʹil y a lieu, à charge <strong>de</strong> revanche.<br />

Je nʹavais pas répondu sur votre projet <strong>de</strong> réunir durant la semaine les jeunes gens<br />

<strong>de</strong> la 2e section, concurremment <strong>avec</strong> ceux <strong>de</strong> la première. Nos Messieurs sʹeffrayaient <strong>de</strong><br />

vous voir trop embrasser <strong>de</strong> travaux et craignaient lʹaccablement; il leur semblait aussi que<br />

vos réunions pour les grands jeunes gens seraient plus attrayantes si vous ne vous sépa‐<br />

riez point et si vous y assistiez tous. Examinez ces raisons <strong>de</strong>vant Dieu (il faut lui parler <strong>de</strong><br />

tout) et faites pour le mieux.<br />

Jʹai reçu avant‐hier une bonne et affectueuse lettre <strong>de</strong> Mgr dʹAngers; il est content <strong>de</strong><br />

la Maîtrise et <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong>s Champs; tâchons que le divin Maître soit satisfait aussi et bé‐<br />

nisse nos travaux.<br />

Engagez M. Alexandre [Legrand] à mʹécrire quelques mots, ou plutôt quʹil écrive à<br />

M. Myionnet à lʹoccasion <strong>de</strong> sa fête [23 novembre], cela lui fera une diversion, je pense que<br />

sa santé doit lʹattrister un peu. Si quelque acci<strong>de</strong>nt nouveau survenait, il faudrait le ren‐<br />

voyer vers nous pour quʹon essaie quelque régime ou traitement, afin <strong>de</strong> le guérir, sʹil y a<br />

lieu.<br />

Tout va ici comme <strong>de</strong> coutume; M. Roussel a quitté définitivement la Communauté,<br />

il est aumônier au Collège Stanislas, les contrariétés que lʹArchevêché lui a suscitées à<br />

Grenelle lʹont découragé; nous sommes ainsi encore un peu plus chargés que précé<strong>de</strong>m‐<br />

ment: Deus provi<strong>de</strong>bit.<br />

Adieu, bien cher ami, nous continuons à prier pour vous tous; ayons confiance, le<br />

Seigneur sera <strong>avec</strong> nous.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹespère que votre pauvreté ne va pas jusquʹà faire aucun retranchement sur vos be‐<br />

soins réels; il ne faudrait pas, si Dieu le permet, que les frères sentissent la pauvreté <strong>de</strong> la<br />

maison dʹune façon trop incommo<strong>de</strong>. Vous me direz ce quʹil en est.<br />

1073


1044 à M. dʹArbois<br />

Ne pas trop se charger. Appréciation sur un chanteur comique qui pourrait se produire à Angers, ʺétant extrê‐<br />

mement chrétienʺ.<br />

Vaugirard, 24 novembre 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu <strong>avec</strong> plaisir votre petite lettre: M. Myionnet a aussi été très touché <strong>de</strong> celle<br />

<strong>de</strong> notre cher M. Alexandre [Legrand], représentant <strong>de</strong> nos autres ff. dʹAngers pour lui<br />

faire les vœux <strong>de</strong> bonne fête. Je pense quʹil répondra dès quʹil aura un peu <strong>de</strong> loisir pour le<br />

faire. Jʹespère que vos santés sont meilleures, puisque vous ne mʹen parlez point.<br />

Pour vos réunions du soir, je vous recomman<strong>de</strong> toujours <strong>de</strong> ne pas trop vous char‐<br />

ger, non plus que vos frères; mais faites, en tenant compte <strong>de</strong> cette observation, bien grave<br />

assurément, ce qui vous paraîtra vraiment nécessaire.<br />

Je vous envoie ci‐joint 100f; si cela ne suffit pas, vous pourriez retenir 100 autres<br />

francs sur lʹenvoi que doit, je crois, vous faire vers ce temps M. votre père. Si cet envoi était<br />

trop différé et que vous dussiez en souffrir, vous mʹen avertiriez.<br />

Nous avons eu une aimable fête <strong>de</strong> St Clément, favorisée par une température <strong>de</strong><br />

printemps. M. Mosnier, ancien élève <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Toutes‐Joies à Nantes, qui a un très re‐<br />

marquable talent pour les chants comiques et autres, se trouvant présentement en passage<br />

à Paris, est venu à la soirée et il en a fait le plus grand charme; si jamais vous pouvez lʹatti‐<br />

rer à Angers pour quelque séance extraordinaire, vous pouvez compter quʹil y apportera<br />

un agrément bien puissant; il reste dans le bon goût et la parfaite convenance, étant extrê‐<br />

mement chrétien.<br />

Adieu, bien cher ami, je vous embrasse tous bien paternellement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Mercredi <strong>de</strong>rnier, M. Maignen, profitant du séjour <strong>de</strong> M. Mosnier, a donné un<br />

petit concert aux Jeunes Ouvriers; on y a fait une quête, elle a produit 330f. Une fête sem‐<br />

blable, <strong>avec</strong> ou sans billets, à N.D. <strong>de</strong>s Champs, ne produirait‐elle pas aussi à Angers? M.<br />

Mosnier donne <strong>de</strong>s soirées dans les grands collèges chrétiens; M. Maignen vous dirait au<br />

besoin quelle offran<strong>de</strong> on a à lui faire; elle doit être modérée dans les Patronages.<br />

Je désire que vous vous accommodiez <strong>de</strong> votre nouvelle domestique, car les chan‐<br />

gements perpétuels ont bien <strong>de</strong>s inconvénients; cependant si, après épreuve sérieuse, vous<br />

étiez contraint dʹaviser à un nouveau choix, je crois avoir entendu dire à M. Antoine Emes<br />

quʹil connaissait une femme dʹune cinquantaine dʹannées, parlant français, quʹil croyait<br />

pouvoir vous convenir; ce serait à vérifier, ce serait aussi, la chose se réalisant, un voyage à<br />

payer.<br />

P. S. Quand vous avez quelque argent à <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r ou à envoyer vous‐même, je dé‐<br />

sire que lʹenvoi soit fait à moi, et non à M. Emile [Beauvais].<br />

1045 à M. Caille<br />

Motifs <strong>de</strong> ne pas admettre au postulat. A Vaugirard, la St‐Clément a été célébrée très aimablement, mais il faut<br />

simplifier le mouvement extérieur <strong>de</strong>s Œuvres.<br />

Vaugirard, 28 novembre 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Les renseignements que jʹai recueillis concernant M. Beldame ne sont pas, en en‐<br />

semble, tels que nous pourrions les souhaiter. Ceux qui lʹont suivi <strong>de</strong> près sʹaccor<strong>de</strong>nt à ne<br />

1074


le pas juger propre au sacerdoce: peu <strong>de</strong> constance, peu <strong>de</strong> jugement, une certaine suffi‐<br />

sance et pas assez dʹélévation <strong>de</strong> cœur. Il me semble que dans ces termes, il nʹaurait même<br />

pas ce que nous avons droit <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r dans un frère laïc, quʹen conséquence il vaut<br />

mieux pour nous ne pas lʹattacher à notre Communauté. Il se peut que la plupart <strong>de</strong>s dé‐<br />

fauts signalés en lui viennent <strong>de</strong> la jeunesse et <strong>de</strong> lʹinexpérience et puissent, en une cer‐<br />

taine mesure, se corriger, mais il y a trop <strong>de</strong> chances défavorables à courir et nous ne sau‐<br />

rions pru<strong>de</strong>mment prendre sur nous ce que les hommes plus éclairés que nous nʹont pas<br />

consenti à accepter.<br />

Jʹai vu <strong>avec</strong> plaisir les détails que vous me transmettez sur votre maison et sur vos<br />

œuvres; jʹallais vous écrire, trouvant que vous tardiez trop à nous donner <strong>de</strong> vos nouvel‐<br />

les. Jʹai dit quelques mots <strong>de</strong> bon souvenir <strong>de</strong> votre part à tous, à M. Myionnet à lʹoccasion<br />

<strong>de</strong> sa fête, sachant bien que je répondais ainsi à vos intentions; nous lʹavons célébrée le 23<br />

[S t ‐Clément] très aimablement; tous les ff. <strong>de</strong> Paris étaient réunis à Vaugirard, cʹétait une<br />

bonne réunion <strong>de</strong> famille. Ces fêtes sont rares à Vaugirard et je tends à les éloigner <strong>de</strong> plus<br />

en plus lʹune <strong>de</strong> lʹautre, parce que les solennités à grand mouvement sont, à mon gré, bien<br />

trop multipliées dans nos patronages; je veux prêcher dʹexemple en les réduisant au seul<br />

nécessaire dans les maisons où je puis exercer une influence directe. A mon sens, cette ac‐<br />

tivité tout extérieure cause un grand préjudice à lʹaction morale et religieuse, quand une<br />

juste mesure nʹest pas gardée.<br />

Je vais écrire quelques lignes <strong>de</strong> réponse polie à la lettre <strong>de</strong> M. Beldame.<br />

Jʹaccueille <strong>avec</strong> joie lʹespérance que vous nous donnez dʹun prochain voyage à Paris<br />

<strong>de</strong> votre part; malheureusement, nous vous voyons bien en hâte quand vous apparaissez<br />

au milieu <strong>de</strong> nous.<br />

M. Antoine [Emes], chargé <strong>de</strong> la lingerie, mʹa remis les <strong>de</strong>ux chemises réclamées par<br />

notre f. Mitouard; dois‐je vous les envoyer exprès, ou bien les prendrez‐vous à votre<br />

voyage à Paris?<br />

Vous nʹavez point oublié la rénovation <strong>de</strong>s vœux au jour <strong>de</strong> la Présentation et vous<br />

en avez fait une fête aimable pour vos frères; nous étions, <strong>de</strong> notre côté, en union <strong>avec</strong><br />

vous; ce jour nous a laissé aussi à tous un bon souvenir; ceux qui viennent <strong>de</strong>s solennités<br />

religieuses ou <strong>de</strong>s choses <strong>de</strong> piété sont les meilleurs et les plus profonds.<br />

Adieu, mon bien bon ami, ne tar<strong>de</strong>z point à nous donner <strong>de</strong> vos nouvelles; que M.<br />

Marcaire nous écrive quand vous êtes trop pressé pour le faire.<br />

Jʹembrasse vous et nos frères bien cordialement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1046 à M. Beldame<br />

Réponse négative à une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> dʹadmission pour lʹétat ecclésiastique.<br />

Vaugirard, 28 novembre 1865<br />

Cher Monsieur,<br />

Jʹai le regret <strong>de</strong> ne point répondre comme jʹaurais souhaité <strong>de</strong> le faire à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />

que vous mʹavez adressée, à lʹeffet dʹêtre agrégé à notre petite Communauté. Les rensei‐<br />

gnements que jʹai recueillis, ainsi que vous lʹaviez désiré vous‐même, vous sont à beau‐<br />

coup dʹégards favorables; mais les personnes que jʹai consultées sʹaccor<strong>de</strong>nt à penser que le<br />

1075


sacerdoce ne semblerait pas être lʹétat <strong>de</strong> vie auquel vous seriez appelé. Il se peut que dʹau‐<br />

tres, vous ayant suivi <strong>de</strong> plus près, voient <strong>de</strong>s raisons graves pour émettre un avis<br />

contraire, mais je me crois obligé, dans ma position, <strong>de</strong> mʹen rapporter au sentiment <strong>de</strong><br />

ceux auxquels je me suis adressé.<br />

Je fais <strong>de</strong>s vœux bien sincères pour que Dieu vous ouvre la voie où vous pourrez le<br />

mieux vous sanctifier et je vous prie <strong>de</strong> croire, cher Monsieur, à tous mes sentiments dé‐<br />

voués en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong>,<br />

P tre<br />

1047 à M. dʹArbois<br />

MLP. sʹinquiète <strong>de</strong> la santé <strong>de</strong> ses frères. Choix du personnel domestique.<br />

Vaugirard, 29 novembre 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹespère <strong>avec</strong> vous que M. <strong>Jean</strong> [Gauffriau] se remettra <strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> temps et <strong>de</strong><br />

soins. Jʹespère aussi que les découragements <strong>de</strong> M. Alexandre [Legrand] sont purement<br />

temporaires et auront leur fin; il ne faudrait pas toutefois aller jusquʹà la <strong>de</strong>rnière extrémi‐<br />

té et, sʹil était évi<strong>de</strong>nt quʹil ne peut sʹoccuper <strong>de</strong> classes, mieux vaudrait chercher sʹil nʹest<br />

pas dʹautre moyen <strong>de</strong> lʹoccuper, soit à Angers, soit ailleurs. Priez le mé<strong>de</strong>cin <strong>de</strong> veiller tou‐<br />

jours sur sa santé. Je pense que, sʹil mʹécrivait quelquefois et que je pusse lui répondre, il<br />

en éprouverait peut‐être un peu dʹencouragement.<br />

Jʹapprouve la combinaison pour votre ancienne domestique. Si elle ne pouvait ve‐<br />

nir, votre alleman<strong>de</strong> Béatrix serait disposée, me dit M. Baltenweck, à vous revenir; mais il<br />

ne faudrait pas tar<strong>de</strong>r si vous y voyez avantage, car elle peut être placée dʹun moment à<br />

lʹautre; je ne mʹexplique guère cette sorte dʹinstabilité; M. Baltenweck semblait croire que<br />

vous lʹaviez plutôt encouragée à partir quʹinvitée à rester.<br />

Pour les réunions du soir chez vous, je vous ai fait une recommandation générale <strong>de</strong><br />

ne pas trop vous charger; je la renouvelle, comme je le fais toujours; mais si, examen fait,<br />

vous croyez que vous pouvez marcher ainsi librement, je nʹinsiste point et me confie à vo‐<br />

tre pru<strong>de</strong>nce.<br />

Adieu, bien cher ami; il est tard, le sommeil me poursuit, je me laisse prendre; aussi<br />

bien il mʹemporterait <strong>de</strong> vive force.<br />

A tous et pour tous mille affections<br />

Votre ami [et Père en N.S.]<br />

[Le <strong>Prevost</strong>]<br />

1048 à M. Caille<br />

A quelle condition il serait possible <strong>de</strong> revenir sur le refus opposé à M. Beldame (cf. lettre 1046).<br />

Vaugirard, 6 décembre 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Le r.p. Eustache, franciscain, mʹécrit la lettre ci‐jointe concernant M. Beldame. Quel‐<br />

que avantageuse quʹelle soit à ce jeune homme, elle ne détruit pas la valeur <strong>de</strong>s rensei‐<br />

1076


gnements que jʹai reçus et qui, sans atteindre sa moralité, sʹaccor<strong>de</strong>nt néanmoins à mettre<br />

en doute sa vocation au sacerdoce. Comme on peut alléguer, en définitive, que lʹexpé‐<br />

rience et les épreuves ont force pour corriger la légèreté et le jugement, je désire que vous<br />

consultiez ceux <strong>de</strong> Messieurs les Vicaires Généraux dʹAmiens qui peuvent connaître M.<br />

Beldame et que vous leur <strong>de</strong>mandiez si on nous conseillerait <strong>de</strong> lui donner <strong>de</strong>s espérances<br />

pour son admission après quʹil serait ordonné, et si M gr consentirait à le faire avancer dans<br />

les ordres à Amiens, et enfin sʹil consentirait à lui donner asile à cette fin dans son Sémi‐<br />

naire. Si toutes ces <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s recevaient une réponse satisfaisante, peut‐être y aurait‐il lieu<br />

dʹessayer et <strong>de</strong> voir ce quʹil y a réellement comme fond soli<strong>de</strong> en ce jeune homme. Cepen‐<br />

dant, si vous et nos frères nʹaviez point gardé une bonne impression vous‐mêmes du sé‐<br />

jour quʹil a fait au milieu <strong>de</strong> vous, il nʹy aurait quʹà sʹen tenir purement et simplement à la<br />

décision que je vous ai donnée précé<strong>de</strong>mment, sans pousser plus loin les recherches. Je se‐<br />

rai bien aise que vous me disiez votre sentiment personnel et celui <strong>de</strong> nos frères sur M.<br />

Beldame; on mʹassure quʹil a lʹextérieur et les manières très engageants, mais il faut <strong>avec</strong><br />

cela un fond réel <strong>de</strong> vertu et dʹabnégation; en avez‐vous saisi quelques signes?<br />

Je me borne à écrire au r.p. Eustache que je vous ai invité à prendre à ce sujet lʹavis<br />

<strong>de</strong>s personnes graves qui vous entourent, sans donner aucune autre explication; tenez‐<br />

vous dans la même réserve pour ne point mettre en gêne les personnes que vous auriez à<br />

consulter.<br />

Croyez, comme toujours, bien cher ami et fils, à tous mes sentiments <strong>de</strong> tendre af‐<br />

fection en N.S. pour vous et pour nos ff. dʹAmiens.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1049 à M. Caille<br />

Essai dʹadmission <strong>de</strong> M. Beldame comme frère laïc.<br />

Vaugirard, 15 décembre 1865<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹécris ci‐joint un mot à M. Beldame pour lʹavertir que nous lʹadmettons à faire par‐<br />

mi nous son essai comme frère laïc. Vous pourrez donc régler <strong>avec</strong> lui le moment où il<br />

conviendra quʹil vienne vers nous. Jʹai bonne espérance, dʹaprès les témoignages que vous<br />

me ren<strong>de</strong>z <strong>de</strong> lui, quʹil pourra trouver sa place dans la famille. Je crois quʹil a pu être utile,<br />

dans la circonstance, quʹil passe quelques jours sous vos yeux; nous avons grand besoin<br />

dʹêtre fort attentifs et bien éclairés dans nos choix.<br />

Jʹécris aussi un mot <strong>de</strong> remerciement au r.p. Eustache dont la lettre était vraiment<br />

aimable et bienveillante.<br />

Assurez tous nos frères <strong>de</strong> ma tendre affection, et croyez vous‐même à mon plus af‐<br />

fectueux attachement en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je vous prie <strong>de</strong> mettre une enveloppe pour le p. Eustache. Je crains <strong>de</strong> grossir<br />

trop cet envoi pour la poste.<br />

1077


1050 à M. Trousseau<br />

Ne pas sʹingénier à se tourmenter. Ne pas sʹétonner si les gens du mon<strong>de</strong> ne sʹélèvent guère jusquʹau surnaturel.<br />

Espérances fondées sur les dix scolastiques qui se préparent au sacerdoce.<br />

Vaugirard, 21 décembre 1865<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Notre cher M. Magnien va vous rejoindre à Arras; jʹespère que ce sera pour vous<br />

tous un nouveau sujet <strong>de</strong> bénir le bon Dieu qui se compose chez vous une petite famille<br />

qui lui sera toute dévouée et qui sera cordialement unie dans sa divine charité.<br />

Je mʹétonne, cher enfant, quʹ<strong>avec</strong> tant <strong>de</strong> raisons dʹadmirer la conduite si miséricor‐<br />

dieuse <strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce à votre égard, vous soyez inquiet et ingénieux à vous tourmenter.<br />

Que pouviez‐vous souhaiter <strong>de</strong> mieux proportionné à vos aptitu<strong>de</strong>s et à vos besoins<br />

que ce que Dieu a fait? Craignons <strong>de</strong> nʹêtre pas assez reconnaissants envers Lui. Vous <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>z, du côté <strong>de</strong> votre famille, plus quʹelle ne peut vous accor<strong>de</strong>r, dans lʹesprit et le <strong>de</strong>‐<br />

gré <strong>de</strong> lumières spirituelles où elle est. Comment <strong>de</strong>s gens du mon<strong>de</strong>, préoccupés avant<br />

tout du matériel et du positif <strong>de</strong> la vie, pourraient‐ils sʹélever jusquʹau surnaturel, jusquʹà<br />

lʹintelligence dʹune vocation et du domaine souverain que Dieu a sur nous? Prions pour<br />

eux, sinon pour leur obtenir une pareille intelligence, que sans doute Il ne leur <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />

pas, au moins pour quʹIl leur donne autant <strong>de</strong> foi et <strong>de</strong> charité quʹil leur en faut pour opé‐<br />

rer leur salut. Cela fait, soyons en paix, sans solliciter <strong>avec</strong> anxiété <strong>de</strong>s sympathies dont<br />

nous pouvons nous passer, si nous savons chercher en Dieu notre part et notre consola‐<br />

tion.<br />

Considérez <strong>avec</strong> reconnaissance quelle aimable génération <strong>de</strong> bons prêtres le Sei‐<br />

gneur prépare en ce moment à notre petite famille; vous voilà 10 maintenant au seuil du<br />

sanctuaire [MM. <strong>de</strong> Varax, Chaverot, Baumert, Trousseau, Leclerc, Pattinote, Boiry, A.<br />

Lainé, Magnien, Camus]; puissent tous les 10 rester fidèles à leur vocation, à Dieu qui les<br />

veut pour ministres, aux pauvres ouvriers qui atten<strong>de</strong>nt dʹeux leur lumière et leur consola‐<br />

tion, à notre petite famille quʹils doivent grossir et fortifier.<br />

Adieu, cher enfant, je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à Dieu pour vous, pour votre maison et pour vos<br />

œuvres, toutes les bénédictions que sa tendresse <strong>de</strong> Père sait trouver pour ses enfants.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹai chargé M. Magnien <strong>de</strong> vous embrasser, ainsi que notre cher tonsuré Adolphe<br />

[Lainé]. Tonsurandus non tonsuratus.<br />

1051 à M. Decaux<br />

Invitation à la fête <strong>de</strong> la Saint‐<strong>Jean</strong>.<br />

Vaugirard, 23 décembre 1865<br />

Mon cher ami,<br />

Nous ferons, le 27 <strong>de</strong> ce mois, notre fête <strong>de</strong> St ‐<strong>Jean</strong> très simplement et tout à fait en<br />

famille; cʹest une raison <strong>de</strong> plus pour que nous souhaitions que vous soyez <strong>de</strong>s nôtres;<br />

nous espérons bien que vous nous donnerez cette nouvelle marque <strong>de</strong> votre vieille affec‐<br />

tion.<br />

1078


A 3h.1/2 Vêpres, petit panégyrique et Salut<br />

5h.1/2 pour 6h. très précises, dîner<br />

Ensuite, très mo<strong>de</strong>ste divertissement.<br />

Veuillez croire, mon bon ami, à tous mes sentiments <strong>de</strong> sincère et constant attache‐<br />

ment en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1052 379<br />

1053 à M. dʹArbois<br />

Témoignage <strong>de</strong> tendre affection aux frères dʹAngers à lʹoccasion <strong>de</strong>s vœux <strong>de</strong> nouvel an.<br />

Vaugirard, 1er janvier 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Le premier jour <strong>de</strong> lʹan nʹest guère favorable pour correspondre <strong>avec</strong> ses mille mou‐<br />

vements et dérangements; mais jʹai voulu vous écrire au moins <strong>de</strong>ux mots pour vous re‐<br />

mercier <strong>de</strong> vos vœux <strong>de</strong> fête et <strong>de</strong> bonne année et vous assurer que la famille qui mʹen‐<br />

toure ne me fait pas oublier ceux qui sont moins près <strong>de</strong> moi, mes chers enfants dʹAngers<br />

surtout qui ne sont pas <strong>de</strong>s moins aimés. Ce matin, au St Sacrifice, jʹai prié ar<strong>de</strong>mment<br />

pour vous; jʹai la confiance que le Cœur du divin Seigneur aura entendu les vœux dʹun<br />

père qui vous est tendrement dévoué. Embrassez tous mes chers frères, dites‐leur que, <strong>de</strong><br />

loin, je suis par lʹattention et par le cœur leurs travaux, leurs progrès dans la perfection et<br />

que je bénis Dieu <strong>de</strong>s satisfactions qui mʹarrivent par eux.<br />

Jʹai écrit aujourdʹhui à Mgr ; renouvelez‐lui, à lʹoccasion, mes respectueux sentiments,<br />

et offrez aussi à Messieurs les Vicaires Généraux et au Chapitre lʹexpression <strong>de</strong> mon res‐<br />

pect.<br />

Adieu, bien cher ami, je vous embrasse en J. et M.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

Bon et affectueux souvenir à la famille Pavie et à M. Myionnet.<br />

1054 380<br />

1055 à M. dʹArbois<br />

M. dʹArbois est éprouvé dans sa santé. Insuffisance du personnel: confiance et abandon à la Provi<strong>de</strong>nce.<br />

Vaugirard, 16 janvier 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> peine que vous avez quelques ressentiments <strong>de</strong>s indispositions<br />

dont vous avez souffert les <strong>de</strong>ux années <strong>de</strong>rnières et que votre tâche, déjà bien lour<strong>de</strong><br />

dʹordinaire, vous est, en ce moment, pénible à porter. Espérons, cher ami, que cʹest une in‐<br />

disposition qui vous éprouve un instant, mais qui nʹaura pas <strong>de</strong> longue suite; le bon Maî‐<br />

379<br />

Suppléée par la lettre 1039 bis.<br />

380<br />

Suppléée par la lettre 1132 bis.<br />

1079


tre qui, jusquʹici, a béni vos travaux à Angers, ne vous laissera pas sans secours; jʹai bien<br />

prié pour vous à la chapelle <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette, jʹai la confiance que sa miséricordieuse<br />

intercession nous tirera <strong>de</strong> cette difficulté. Vous savez lʹétat <strong>de</strong> notre personnel, vous avez<br />

vu vous‐même combien chacun est chargé; <strong>de</strong>puis le départ <strong>de</strong> M. Roussel, M. Lantiez,<br />

partagé entre Vaugirard et Grenelle, ne suffit ni à lʹun ni à lʹautre et laisse en souffrance la<br />

moitié <strong>de</strong> ses services. Le bon Dieu voit nos embarras, recommandons‐nous bien instam‐<br />

ment à sa bonté et nous ne serons point délaissés. Si vous apercevez quelque moyen, que<br />

je ne vois pas au premier coup dʹœil, <strong>de</strong> vous donner soulagement, indiquez‐le moi et, sʹil<br />

est praticable, je nʹaurai gar<strong>de</strong> <strong>de</strong> le négliger; si autrement il plaît à Dieu <strong>de</strong> nous éprouver<br />

temporairement, nous <strong>de</strong>vons nous incliner sous sa main; il nʹest pas dʹœuvre qui nʹait ses<br />

jours difficiles, où le bien quʹon voudrait faire est en détriment, mais elle se relève après et,<br />

loin dʹavoir perdu, elle se trouve, en définitive, en état plus prospère. Nous lʹavons vu ain‐<br />

si chez nous <strong>de</strong>puis plus <strong>de</strong> 20 ans. Cherchons dans le passé la confiance pour lʹavenir.<br />

Ne manquez pas <strong>de</strong> nous donner bien régulièrement <strong>de</strong> vos nouvelles, afin que<br />

nous suivions, autant quʹil se pourra, votre marche et les vues <strong>de</strong> Dieu en cette difficulté.<br />

Vos dépenses, comme vous le remarquez, semblent plus élevées quʹil nʹest ordinaire<br />

dans nos maisons; je pense que le fait est acci<strong>de</strong>ntel et provient en gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong> vos<br />

frais dʹinstallation; il est à croire que, mieux assis désormais et aussi plus expérimenté,<br />

vous vous en tirerez plus aisément. M. Planchat pense que M me Guillot, votre nouvelle mé‐<br />

nagère, est économe et saura tenir votre service aux moindres frais possibles.<br />

Puisque vous êtes un peu gênés présentement, je vous renvoie le mandat <strong>de</strong> 100f.<br />

contenu dans votre lettre; nous sommes nous‐mêmes extrêmement pauvres, mais nous<br />

sommes plus accoutumés à dépendre <strong>de</strong>s dispositions journalières <strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce. Je me<br />

suis assuré quʹon vous rendra à la poste lʹargent déposé, en y ajoutant même le prix payé<br />

pour la prise du mandat.<br />

Adieu, mon bien cher ami; je recomman<strong>de</strong> aux prières <strong>de</strong> votre communauté le père<br />

<strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax, décédé récemment; si vous pouvez dire <strong>de</strong>ux messes à son intention, ce<br />

sera bien, tous nos ff. ecclésiastiques ont voulu lui donner une pareille marque <strong>de</strong> pieux<br />

souvenir.<br />

M. Lacroix, récemment ordonné, pensait à venir chez nous pour ai<strong>de</strong>r au patronage<br />

S t ‐Charles, mais ses parents font <strong>de</strong> telles oppositions quʹon surmontera difficilement cet<br />

obstacle.<br />

Prions beaucoup, cher ami, en union <strong>avec</strong> la T. S te Vierge; les mérites <strong>de</strong> N.S. et la<br />

prière <strong>de</strong> Marie sont <strong>de</strong>ux puissances <strong>avec</strong> lesquelles nous pouvons tout obtenir.<br />

Je vous embrasse, ainsi que tous vos frères, dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre ami et Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1056 à M me Planchat<br />

Ai<strong>de</strong> sollicitée.<br />

Vaugirard, 23 janvier 1866<br />

Madame,<br />

Bien que nous nʹayons pas eu lʹhonneur <strong>de</strong> vous voir <strong>de</strong>puis trop longtemps, vous<br />

nʹavez pas oublié, jʹen suis sûr, la maison <strong>de</strong>s Petits Orphelins dont vous avez été la bien‐<br />

faitrice et qui vous gar<strong>de</strong>, <strong>de</strong> son côté, un souvenir fidèle et bien reconnaissant.<br />

1080


Jʹenvoie donc <strong>avec</strong> confiance <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> nos Messieurs, fort en peine pour composer le<br />

personnel <strong>de</strong>s Dames pour notre assemblée <strong>de</strong> Charité à S t ‐Thomas dʹAquin. Je vous<br />

conjure, Madame, <strong>de</strong> leur prêter un peu dʹappui; ils seraient heureux surtout si vous<br />

consentiez vous‐même à être Dame quêteuse, heureux aussi si vous les ai<strong>de</strong>z à en trouver<br />

encore quelques autres.<br />

Veuillez agréer, Madame, par avance mes bien vifs remerciements et les nouvelles<br />

assurances <strong>de</strong> mon respectueux dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1057 <strong>de</strong> M. Planchat à M. dʹArbois<br />

P.S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Cʹest <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s instruments ébréchés que Dieu fait ses chefs‐dʹœuvre. Simplifier les œuvres et diminuer les fêtes.<br />

Vaugirard, 30 janvier 1866<br />

Fête <strong>de</strong> lʹOraison <strong>de</strong> N.S. au Jardin <strong>de</strong>s Oliviers<br />

Mon bon Frère,<br />

Je reçois <strong>de</strong> Jules et <strong>de</strong> sa mère, conjointement, une charmante lettre toute naïve et tout af‐<br />

fectueuse pour Vaugirard et pour Angers à la fois. Jʹespère bien vous avoir donné là <strong>de</strong>ux cœurs<br />

dévoués. Vous faites bien dʹarmer la pauvre mère dʹun peu <strong>de</strong> dureté apparente contre son fils aî‐<br />

né. Le pauvre garçon, du reste, est un peu moins à plaindre; il a trouvé un travail provisoire qui lui<br />

rapporte une cinquantaine <strong>de</strong> sous par jour, et le moment approche où le percepteur retiré <strong>de</strong><br />

Vaugirard espère lui trouver, dans une Recette <strong>de</strong>s finances, une place analogue à celle quʹil avait<br />

gérée, en tout bien tout honneur, comme le prouvent ses certificats. Nʹavez‐vous pas quelques rela‐<br />

tions aux Finances? Si réellement la bonne tenue et le dévouement cordial, ce me semble, <strong>de</strong> la<br />

mère et du fils, vous agréent, ne serait‐il pas mieux <strong>de</strong> ménager un peu la pauvre femme? Dans la<br />

lettre à son fils quʹelle me dit <strong>de</strong> lire, elle exagère sans doute à <strong>de</strong>ssein les choses, afin <strong>de</strong> lui ôter,<br />

selon nos conventions, tout espoir <strong>de</strong> trouver ressource en elle. Mais enfin, elle dit <strong>de</strong>ux choses qui,<br />

même atténuées, méritent attention <strong>de</strong> votre part:<br />

1° Je me couche à minuit et me lève à 4h.1/4. Cʹest là évi<strong>de</strong>mment un travail au‐<strong>de</strong>ssus,<br />

comme ordinaire, <strong>de</strong>s forces <strong>de</strong> la plus robuste chambrière que vous puissiez jamais trouver à An‐<br />

gers intra limites ætatis…2° Mes jambes sont enflées.<br />

Vous recomman<strong>de</strong>rez, nʹest‐ce pas, à Mme Guillot lʹéconomie <strong>de</strong> ses forces, comme celle du<br />

beurre et du charbon. Donnez plutôt quelques raccommodages à faire au <strong>de</strong>hors. Vous mʹavez dit<br />

que Jules ai<strong>de</strong>rait sa mère; dans le fait, il peut, à la cuisine, préparer et nettoyer bien <strong>de</strong>s choses. Je<br />

ne vois pas quʹil en soit question.<br />

Pas un mot non plus du loisir laissé à Mme Guillot pour prier et fréquenter les Sacrements.<br />

Je lui ai dit quʹelle serait bien libre à cet égard. Sʹil faut quʹelle le soit moralement, il faut quʹelle le<br />

soit aussi matériellement.<br />

Voyez comme je me permets <strong>de</strong> vous donner <strong>de</strong>s avis, moi pauvre simple soldat, à un Co‐<br />

lonel <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux régiments, à un Supérieur <strong>de</strong> par lʹEvêque et <strong>de</strong> par notre Père! Vous me le pardon‐<br />

nerez, nʹest‐ce pas, en faveur <strong>de</strong> lʹintention.<br />

Mille choses à tous vos bons frères, un baiser à mon petit Jules, si heureux dʹêtre votre clerc.<br />

Soignez votre santé en dormant plus et remuant moins. Fermez quelquefois votre porte à ce flot <strong>de</strong><br />

visiteurs qui émerveille Mme Guillot.<br />

Adieu, bien cher ami, nʹoubliez pas <strong>de</strong> prier pour la Communauté, pour les œuvres et pour<br />

Ste ‐Anne plus que jamais.<br />

Tout à vous en N.S. Lʹabbé Planchat<br />

1081


Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Vous prendrez, comme ils doivent être pris, les avis <strong>de</strong> M. Planchat qui, du reste, à<br />

la réflexion, a bien saisi le sens <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> M me Guillot, laquelle ne donnait pas comme<br />

ordinaires les fatigues quʹelle avait eues à porter, mais seulement comme acci<strong>de</strong>ntelles et<br />

comme résultant dʹun peu dʹarriéré, soit dans ses affaires propres, soit dans celles <strong>de</strong> la<br />

maison. Elle semble satisfaite dʹailleurs et se loue beaucoup <strong>de</strong>s bons procédés <strong>de</strong> toute la<br />

famille dʹAngers.<br />

Comment allez‐vous, cher ami, ce temps mou est bien défavorable aux santés débi‐<br />

les. Ici, M. Lacroix, à peine entré, fait une petite maladie, suite <strong>de</strong> ses fatigues <strong>de</strong> lʹordina‐<br />

tion; il va mieux, mais lʹépuisement résultant <strong>de</strong> ses cinq années <strong>de</strong> vie recluse est bien<br />

manifeste et sera long à réparer. Il se plaît jusquʹici au milieu <strong>de</strong> nous. M. Braun soutient<br />

assez bien ses jeunes gens, mais sa santé est dix fois plus chancelante que la vôtre. Cʹest<br />

<strong>avec</strong> ces instruments ébréchés que le grand Maître se plaît à faire ses chefs‐dʹœuvre; il est<br />

plus manifeste ainsi que le grand art <strong>de</strong> lʹOuvrier a su triompher, malgré lʹimperfection<br />

<strong>de</strong>s instruments.<br />

Adieu, bien cher ami, complaisons‐nous dans nos faiblesses et impuissances si elles<br />

servent à la gloire <strong>de</strong> notre Dieu. Embrassez vos frères, que jʹembrasse ici moi‐même en<br />

votre personne et dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

31 janvier. P. S. Nous recevons votre lettre à lʹinstant. Hélas! que <strong>de</strong> charges pour les<br />

jours gras, et que ce moyen <strong>de</strong> remettre sa santé doit être peu efficace! Je présume bien que<br />

vous nʹavez pu rien retrancher; cʹest pourtant bien compliqué. On me dit quʹà Nantes, où<br />

le patronage est parmi les meilleurs, il nʹy a que <strong>de</strong>ux fêtes un peu notables par an. Si <strong>avec</strong><br />

le temps, nous pouvions, dans toutes nos œuvres, simplifier un peu nos moyens, nous se‐<br />

rions certainement en progrès; vous en êtes, jʹen suis sûr, convaincu comme moi; peut‐être,<br />

<strong>avec</strong> <strong>de</strong> la persévérance, y arriverons‐nous.<br />

Adieu encore, cher enfant, ne manquez pas <strong>de</strong> nous donner très souvent <strong>de</strong> vos<br />

nouvelles, ne fût‐ce que par un mot.<br />

Votre tout affectionné Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1058 à M. Trousseau<br />

Causes <strong>de</strong> nos impatiences. Nécessité <strong>de</strong> prier. MLP. donne <strong>de</strong>s conseils pour la correction <strong>de</strong>s défauts. Paroles<br />

dʹencouragement. Epreuves <strong>de</strong> santé pour <strong>de</strong>ux frères.<br />

Vaugirard, 8 février 1866<br />

Bien cher enfant,<br />

Votre bonne et cordiale lettre mériterait sans doute une longue réponse; <strong>de</strong> peur<br />

quʹen la différant elle ne soit fort ajournée, je la fais courte, provisoire, mais prompte.<br />

Votre compte <strong>de</strong> conscience est franc et simple et donne assez bien, je crois, la vue<br />

<strong>de</strong> votre état présent; il me semble que le bien y domine le mal et quʹ<strong>avec</strong> quelque effort,<br />

vous pouviez encore amoindrir celui‐ci et grandir celui‐là. Le fond <strong>de</strong> vos dispositions<br />

pour le côté défectueux, cʹest un peu <strong>de</strong> tié<strong>de</strong>ur pour la piété, provenant <strong>de</strong> quelque mol‐<br />

lesse dans lʹapplication <strong>de</strong> lʹesprit et <strong>de</strong> la volonté, et une certaine disposition à lʹimpa‐<br />

1082


tience et à lʹirascibilité. Ce <strong>de</strong>rnier défaut vient dʹun amour encore trop grand <strong>de</strong> soi, dʹune<br />

aversion extrême <strong>de</strong> ce qui gêne, dʹun défaut <strong>de</strong> résolution et <strong>de</strong> courage pour souffrir.<br />

Le mal trouvé, il faut chercher le remè<strong>de</strong>. Vous avez déjà la crainte dʹoffenser Dieu,<br />

cʹest le commencement <strong>de</strong> la sagesse: Initium sapientiae timor Domini. Il faut y ajouter<br />

lʹamour plus grand pour ce Dieu: rappelez‐vous quʹil est notre Père, notre bienfaiteur, la<br />

beauté, le bien suprême, lʹunique objet qui peut remplir votre âme; appliquez‐vous plus<br />

fermement à Lui par la méditation et lʹoraison; surtout, <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z souvent à la T. S te<br />

Vierge <strong>de</strong> vous conduire à Jésus, son divin Fils; elle est la porte à laquelle il faut frapper.<br />

Frappez, et on vous ouvrira.<br />

Pour la correction <strong>de</strong>s défauts, vous le savez, cher enfant, trois moyens sont à em‐<br />

ployer: vigilance pour se connaître et se surveiller, prière pour attirer la grâce, lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

Dieu qui secoure notre faiblesse, et enfin le travail, lʹeffort, les petits sacrifices quotidiens et<br />

réitérés, dans les petites choses dʹabord, parce quʹelles nous conduiront aux gran<strong>de</strong>s; si<br />

vous êtes un peu fidèle à ce régime, vous serez bientôt, sinon satisfait ‐ qui peut jamais<br />

lʹêtre? ‐ au moins vous aurez conscience que lʹœuvre marche et que Dieu est <strong>avec</strong> vous.<br />

Adieu, bien cher enfant, je souffre bien <strong>de</strong> vos fatigues; portons‐les tant quʹil plaira à<br />

Dieu <strong>de</strong> nous les laisser; prions‐Le bien, cʹest dʹordinaire dans les situations difficiles quʹIl<br />

aime à se montrer. Nous sommes aussi éprouvés <strong>de</strong> notre côté; M. Lacroix, à peine entré, a<br />

été si gravement mala<strong>de</strong> quʹil a fallu lʹadministrer. Il semble mieux et hors <strong>de</strong> danger, mais<br />

la convalescence sera longue. M. dʹArbois est languissant et accablé. Hélas! nos œuvres<br />

sont ru<strong>de</strong>s, nous les compliquons souvent trop, et nous sommes peu forts. Que Dieu dai‐<br />

gne nous venir en ai<strong>de</strong>!<br />

Ecrivez‐moi pour me donner <strong>de</strong> vos nouvelles à tous, quand M. Laroche ne peut le<br />

faire. Que ne puis‐je, jour par jour, porter au moins un regard jusque chez vous et ailleurs<br />

encore! Comme nous avons courte vue! Soyez patient et encourageant pour M. Magnien.<br />

Je crois quʹainsi on le posera et on en tirera bon parti. Je crains quʹon ne lui donne pas as‐<br />

sez confiance en lui‐même.<br />

Adieu, mille tendres affections à vous tous et à chacun.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1059 à MM. <strong>de</strong> Varax et Chaverot<br />

Mot affectueux <strong>de</strong> MLP. à ses jeunes frères. Proposition pour un petit orphelinat à Chaville. Les parents et la vo‐<br />

cation. Examens <strong>de</strong>s séminaristes dʹIssy.<br />

Vaugirard, 20 février 1866<br />

Bien chers amis et fils en N.S.,<br />

Que votre <strong>de</strong>rnière visite a été courte et comme nous serons heureux ici tous si le<br />

Séminaire, un peu débonnaire, vous laisse <strong>de</strong> temps en temps quelques échappées vers<br />

nous, <strong>de</strong> plus en plus longues, à mesure que les jours grandissent.<br />

Nous nous réjouissons du bon succès <strong>de</strong>s examens, comportant bonne espérance<br />

pour lʹordination <strong>de</strong> la Trinité; nous prions tous les jours à vos intentions, ceux <strong>de</strong> Chaville<br />

y sont aussi bien fidèles.<br />

Les fêtes inévitables <strong>de</strong> nos patronages, avant le Carême, se sont bien passées par‐<br />

tout, à Paris comme au <strong>de</strong>hors; il en reste un peu <strong>de</strong> fatigue, mais aussi <strong>de</strong> bons souvenirs,<br />

parce que nulle part le bon Dieu nʹy a été oublié; vous savez que, suivant votre conseil,<br />

1083


cher Monsieur <strong>de</strong> Varax, M. Thenon fait <strong>de</strong>s conférences aux jeunes ouvriers <strong>de</strong> Nazareth;<br />

il a bien réussi jusquʹici. Nʹoubliez pas <strong>de</strong> me dire ce quʹil faut faire du côté <strong>de</strong> M mes Cottu<br />

et <strong>de</strong> Rœ<strong>de</strong>rer 381 .<br />

Je mʹaperçois que je ne dis rien <strong>de</strong> direct à mon cher fils Michel [Chaverot], ce nʹest<br />

pas lʹenvie qui mʹen manque; jʹavais pensé à vous faire à chacun une épître séparée, mais<br />

la chose serait peut‐être encore retardée; jʹai pris par le plus court chemin, plus sûr dʹarri‐<br />

ver ainsi. Bien cher M. Chaverot, nous ferions volontiers un petit orphelinat aux environs<br />

<strong>de</strong> Paris, surtout si cʹétait à Chaville ou pas loin <strong>de</strong> là, parce que nos maisons, rapprochées<br />

lʹune <strong>de</strong> lʹautre, sʹassistent et en vont plus aisément. Le jeune Confrère qui vous a parlé <strong>de</strong><br />

ce projet peut être assuré que nous ne mettrions pas trop dʹempressement à lʹadopter, le<br />

nombre si restreint <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> notre Communauté nous obligeant à une gran<strong>de</strong> cir‐<br />

conspection dans le choix <strong>de</strong>s postes, malheureusement trop multipliés, qui nous sont of‐<br />

ferts.<br />

Jʹespère, <strong>avec</strong> vous, que le temps guérira la blessure que votre vocation a faite au<br />

cœur <strong>de</strong> votre bonne mère; nous prions pour les parents <strong>de</strong> nos frères; je me souviens aus‐<br />

si souvent du bon et vénéré père <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax au S t Sacrifice; ce sont les bons anges qui<br />

mʹapportent, juste au moment opportun, ce souvenir. Tous les parents ne sont pas encore<br />

aussi pacifiques que les vôtres; ceux <strong>de</strong> M. Lacroix font à sa vocation une opposition si<br />

singulièrement violente quʹil semble douteux que le pauvre jeune prêtre y puisse résister;<br />

laissons faire le bon Maître, Il sait tant <strong>de</strong> choses que nous ignorons!<br />

Nos jeunes Séminaristes dʹIssy ont eu dʹassez bonnes notes à lʹexamen, sauf M. Boi‐<br />

ry quʹune question <strong>de</strong> géométrie, à lui tout inconnue, a déconcerté, mais M. Maréchal lʹa<br />

beaucoup encouragé, lʹassurant que lʹassemblée nʹavait aucun doute sur son bon avenir.<br />

Dites‐moi le résultat <strong>de</strong> vos propres examens. Je suis sûr que si MM. les Directeurs<br />

voyaient le décousu <strong>de</strong> cette lettre et la multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> sujets quʹelle énonce plutôt quʹelle nʹy<br />

donne espace, ils comprendraient combien il est nécessaire que nous nous rapprochions<br />

un peu plus souvent; cʹest une conversion à <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>avec</strong> tant dʹautres!<br />

Adieu, bien chers enfants, jʹespère que nous vous aimons ici comme Dieu le veut,<br />

cʹest‐à‐dire beaucoup, beaucoup, mais pour Lui et en Lui.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1060 à M. dʹArbois<br />

Vie <strong>de</strong> lʹŒuvre dʹAngers. Association <strong>de</strong> piété; fêtes du Carnaval; questions financières. Nouvelles <strong>de</strong> la Com‐<br />

munauté.<br />

Vaugirard, 21 février 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je crois quʹil peut y avoir avantage à mêler un peu <strong>de</strong> pratique charitable aux exer‐<br />

cices pieux <strong>de</strong> vos petites associations ou congrégations <strong>de</strong> piété; je suis entièrement <strong>de</strong> cet<br />

avis sur ce point, et nos frères nʹy voient non plus nulle difficulté.<br />

Nous avons vu <strong>avec</strong> joie le succès <strong>de</strong> vos fêtes du Carnaval; beaucoup <strong>de</strong> mal est<br />

évité ainsi, et la part du Seigneur nʹy est pas oubliée puisque lʹadoration et les offices <strong>de</strong> ce<br />

381 Mme <strong>de</strong> Roe<strong>de</strong>rer est la sœur <strong>de</strong> l’ambassa<strong>de</strong>ur près le Saint-Siège (1873-1876) F. <strong>de</strong> Corcelles. Tous <strong>de</strong>ux sont cousins germains<br />

<strong>de</strong> M. Louis <strong>de</strong> Varax, père <strong>de</strong> Bernard. Bienfaitrice comme Mme Cottu qui participent aux frais d’étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Bernard. M. et Mme<br />

<strong>de</strong> Varax, si généreux par ailleurs, n’avaient pas cru <strong>de</strong>voir s’en charger.<br />

1084


temps ont eu leur place. Il y a aussi un petit avantage financier. Cependant, et malgré ces<br />

points favorables, il faut être sobre <strong>de</strong> ces fêtes, sous peine dʹêtre débordé par les travaux<br />

et fatigues et dʹexagérer le mouvement et la surexcitation <strong>de</strong> lʹœuvre. Beaucoup reconnais‐<br />

sent cette vérité et lʹoublient dans la pratique. Il nʹest pas défendu, si vos ressources <strong>de</strong><br />

communauté sont insuffisantes momentanément, <strong>de</strong> prélever quelque part sur les fonds<br />

qui vous adviennent <strong>de</strong> côtés divers, mais il ne le faut faire quʹ<strong>avec</strong> gran<strong>de</strong> discrétion. Je<br />

prie Dieu pour la bonne tante qui veille <strong>avec</strong> tant <strong>de</strong> bienveillance à ce qui peut vous être<br />

nécessaire.<br />

Le bon succès <strong>de</strong> vos entreprises vous ayant un peu remonté, jʹespère que vos santés<br />

à tous se sont aussi un peu affermies; vous ne mʹen parlez point, je prends ce silence du<br />

meilleur côté. Ici, pas dʹindispositions graves; M. Lacroix, en convalescence dans sa fa‐<br />

mille, nʹest pas encore rétabli. Sa famille profite <strong>de</strong> cette occurrence et fait <strong>de</strong>s efforts, jus‐<br />

quʹà la violence inclusivement, pour lʹéloigner <strong>de</strong> nous; il y a bien apparence quʹil ne sera<br />

pas assez ferme pour <strong>de</strong> tels assauts. Ceux <strong>de</strong> St‐Sulpice, dʹIssy, dʹArras et Metz vont bien.<br />

M. Laroche est encore plus fatigué que vous; notre état est ru<strong>de</strong>; espérons que le Seigneur<br />

proportionnera la grâce à nos besoins et faiblesses: à brebis tondue, Dieu mesure le vent.<br />

Adieu, bien cher ami, assurez tous nos frères <strong>de</strong> notre tendre affection, et recevez<br />

pour vous et pour eux lʹembrassement cordial, en J. et M., <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1061 à M. Caille<br />

MLP. se plaint <strong>de</strong> lʹinterruption <strong>de</strong> la correspondance. Nécessité <strong>de</strong> sʹécrire. Nouvelles <strong>de</strong>s différentes maisons.<br />

Manque <strong>de</strong> personnel à Arras.<br />

Vaugirard, 27 février 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Tous nos frères du Conseil se contristent <strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong> lʹinterruption presque<br />

complète <strong>de</strong>s correspondances entre votre maison et le centre <strong>de</strong> la Communauté; voilà<br />

plus <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux mois que nous nʹavons eu <strong>de</strong> lettres <strong>de</strong> chez vous; jʹavais prié M. Marcaire <strong>de</strong><br />

nous écrire quand vos occupations vous empêchent <strong>de</strong> le faire; un autre <strong>de</strong> ces Messieurs<br />

pourrait encore, au besoin, sʹen charger; dʹoù vient donc que votre silence se prolonge si<br />

démesurément? Nos trois autres communautés <strong>de</strong> province entretiennent <strong>avec</strong> nous les<br />

rapports les plus intimes, nous font suivre leurs travaux, leurs difficultés, leurs succès.<br />

Cʹest à cette condition que lʹunion <strong>de</strong> tous les membres <strong>de</strong> notre Société se peut entretenir<br />

et ne court point risque <strong>de</strong> sʹaffaiblir. Nʹest‐il pas regrettable quʹAmiens, notre plus an‐<br />

cienne colonie, la plus chère conséquemment, celle qui nous a donné le plus <strong>de</strong> gages dʹun<br />

fidèle et cordial attachement, <strong>de</strong>meure en arrière dans ces communications quʹon ne sau‐<br />

rait sans danger laisser se ralentir. Je suis sûr, mon bon ami, quʹau fond vous partagez<br />

mon avis, et que cʹest seulement la multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> vos charges et occupations qui vous em‐<br />

pêche <strong>de</strong> nous entretenir plus souvent <strong>de</strong> tout ce qui vous touche ainsi que votre maison.<br />

Mais, je le répète, que quelquʹun <strong>de</strong> chez vous vous supplée en cela, soyez sûr que nous y<br />

gagnerons tous et que lʹesprit <strong>de</strong> notre condition se maintiendra plus sûrement. Il serait à<br />

propos notamment, en cette fin dʹannée 1865, que vous nous envoyiez un résumé, au<br />

moins sommaire, <strong>de</strong> votre situation et <strong>de</strong>s chiffres <strong>de</strong>s recettes et dépenses <strong>de</strong> la commu‐<br />

1085


nauté et <strong>de</strong> ses œuvres. Concevez‐vous, sans ces communications, une véritable commu‐<br />

nauté dʹintérêts, une sympathie soutenue, une union réelle en un mot, satisfaisante pour le<br />

présent, rassurante pour lʹavenir? Je suis si convaincu <strong>de</strong> la nécessité dʹune plus régulière<br />

correspondance entre nous que je nʹhésiterais pas, pour notre bien à tous, à la prescrire ri‐<br />

goureusement, si je ne savais, par une longue expérience, tout votre bon vouloir et votre<br />

cordial dévouement à tout ce qui est selon lʹordre et lʹavantage <strong>de</strong> nos œuvres. Je nʹinsiste<br />

donc plus, mʹen remettant, pour plus dʹattention sur ce point, à votre zèle sincère et à votre<br />

filiale affection.<br />

Tout va, ici et autour <strong>de</strong> nous, à peu près bien; le travail est ru<strong>de</strong> partout et les fati‐<br />

gues gran<strong>de</strong>s, mais le courage se soutient généralement. M. Laroche, languissant à force <strong>de</strong><br />

soins et <strong>de</strong> travail, se repose momentanément à S t Omer pour quelques jours; je ne crois<br />

pas quʹil soit encore rentré à Arras. Peut‐être lʹaurez‐vous vu; nous marchons bien ensem‐<br />

ble, je crois que lʹunion est soli<strong>de</strong> <strong>de</strong> ce côté. A plus forte raison en est‐il ainsi à Angers,<br />

puisque la communauté est sortie tout dʹune pièce <strong>de</strong> Vaugirard. Le patronage, presque<br />

tombé à lʹarrivée <strong>de</strong> nos frères, est relevé et la Maîtrise également; ce nʹa été ni sans fati‐<br />

gues, ni sans peines; M. dʹArbois en a souffert, il tient bon néanmoins, jʹespère quʹil portera<br />

le far<strong>de</strong>au, quelque lourd quʹil soit.<br />

A Metz, tout va bien. Je le répète, cher ami, ces trois maisons se font suivre <strong>de</strong>s yeux<br />

par nous, <strong>de</strong> telle sorte que leur vie se mêle à la nôtre; tâchez quʹil en soit ainsi pour<br />

Amiens.<br />

Je reçois à lʹinstant une lettre <strong>de</strong> M. Laroche; il me dit que, ses forces nʹétant pas re‐<br />

venues, il est contraint, par ordre du mé<strong>de</strong>cin, dʹaller quelque temps hors dʹArras pour se<br />

remettre moins imparfaitement; sa maison souffre <strong>de</strong> cette absence et nos jeunes frères, qui<br />

le remplacent tant bien que mal, sont insuffisants en nombre et très fatigués, dʹautant que<br />

le <strong>de</strong>rnier envoyé à Arras, le jeune Magnien, excellent dʹailleurs, ne réussit point aux sur‐<br />

veillances et les secon<strong>de</strong> conséquemment si peu que je vais être, sans doute, obligé <strong>de</strong> le<br />

rappeler. M. Laroche me <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>avec</strong> instance <strong>de</strong> lui envoyer comme ai<strong>de</strong>, au moins<br />

temporaire, un homme plus fait et qui puisse imposer un peu davantage. Jʹai pensé que, si<br />

vous pouviez lui prêter momentanément M. Mitouard, il pourrait leur donner présente‐<br />

ment un ai<strong>de</strong> fort utile. Je vous prie <strong>de</strong> me dire si ce bon office vous est possible et si nous<br />

<strong>de</strong>vrions vous envoyer un frère ou un persévérant pour vous assister vous‐même, dans le<br />

cas où la santé <strong>de</strong> M. Laroche <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rait que le séjour <strong>de</strong> M. Mitouard se prolongeât<br />

<strong>de</strong>ux ou trois mois à Arras. Jʹattends votre réponse pour écrire à M. Laroche.<br />

Je clos ici ma lettre, afin quʹelle parte sans retard. Croyez bien, cher ami, à tous mes<br />

sentiments <strong>de</strong> tendre affection en N.S. Nos frères sont en union <strong>avec</strong> moi et vous assurent<br />

aussi <strong>de</strong> leur cordial dévouement.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1062 à M. Trousseau<br />

Encouragement <strong>de</strong>vant la surcharge dʹoccupations; épreuves qui en résultent surout à Arras. Dévotion à st Joseph.<br />

Vaugirard, 1 er mars 1866<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Je vous envoie les litanies <strong>de</strong> S t Joseph que vous mʹavez <strong>de</strong>mandées. Jʹaurais voulu,<br />

comme vous le souhaitiez, vous écrire en même temps un peu à lʹaise, mais nous sommes<br />

1086


en ce moment si fort en presse par la multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> nos travaux que nous nʹy subvenons<br />

quʹimparfaitement. Lʹabsence <strong>de</strong> M. Laroche, les charges extraordinaires quʹelle fait peser<br />

sur vous, pauvres jeunes gens bien peu forts pour un si lourd far<strong>de</strong>au, nous touche vive‐<br />

ment; mais ces épreuves sont <strong>de</strong> Dieu, elles tourneront donc à bien; elles auront pour effet<br />

aussi <strong>de</strong> vous rendre plus utile à M. Laroche si, comme je lʹespère, vous appuyant sur le<br />

Seigneur seul et bien défiant <strong>de</strong> vous‐même, vous arrivez à remplacer, sans trop dʹin‐<br />

convénients, le chef <strong>de</strong> la communauté; il se sentira ainsi moins chargé, sʹil peut parfois<br />

être suppléé sans que les choses souffrent sensiblement; cʹest à la longue une gran<strong>de</strong> diffi‐<br />

culté dʹêtre seul dans une œuvre, car il nʹy a ni repos, ni relâche possibles. Mais, pour quʹil<br />

en puisse advenir ainsi, il faut être bien humble, bien patient, pru<strong>de</strong>nt et circonspect en<br />

même temps, cʹest beaucoup <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong> votre âge; mais si Dieu est là, rien nʹest impos‐<br />

sible; lʹimportant, cʹest quʹIl y soit. Il y sera si on Le cherche et quʹon sʹoublie soi‐même.<br />

M. Laroche mʹa écrit quʹil avait été content et que rien nʹavait été mal jusquʹici;<br />

ayons bonne confiance, cette petite épreuve aura sa fin. Je lui écris un mot aujourdʹhui à<br />

Calais, où il me dit quʹil va séjourner quelques jours.<br />

Voilà le mois <strong>de</strong> S t Joseph, il va vous ai<strong>de</strong>r; il le fait déjà, puisque cette bonne famille<br />

Laroche, inspirée assurément par lui, se montre si aimablement attentive pour vous; que<br />

Dieu daigne la bénir et la récompenser!<br />

Adieu, bien cher enfant, je vous embrasse bien affectueusement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Jʹavais écrit à M. Brice <strong>de</strong> revenir ici, mais il mʹécrit quʹil est <strong>de</strong>puis quelques<br />

jours beaucoup plus souffrant; suivez‐le un peu <strong>de</strong>s yeux, pour quʹil ne soit pas tout à fait<br />

délaissé.<br />

1063 à M. Decaux<br />

A la suite du départ <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux frères, lʹai<strong>de</strong> donnée à St‐Charles est reconsidérée.<br />

Vaugirard, 6 mars 1866<br />

Mon cher ami,<br />

Le départ successif <strong>de</strong> MM. Marty et Roussel ayant mis une gêne extrême dans nos<br />

services pour le spirituel <strong>de</strong>s Œuvres, nous étions arrivés à la conviction quʹil nous serait<br />

impossible <strong>de</strong> donner, pour un temps au moins, le secours dʹun <strong>de</strong> nos ecclésiastiques à St ‐<br />

Charles, quand lʹespoir dʹêtre aidés par M. Lacroix nous fut donné. Nous étions donc<br />

convenus <strong>avec</strong> vous et <strong>avec</strong> M. Legentil que M. Faÿ ferait en sorte <strong>de</strong> sʹassocier dʹabord M.<br />

Lacroix et <strong>de</strong> le substituer ensuite en sa place, si tout réussissait comme on le <strong>de</strong>vait sou‐<br />

haiter. Une maladie assez grave <strong>de</strong> M. Lacroix, et surtout lʹopposition violente <strong>de</strong> sa fa‐<br />

mille, ont déconcerté ces plans.<br />

Réduits aujourdʹhui à nos forces ordinaires et trop insuffisantes, nous sommes<br />

contraints <strong>de</strong> rappeler temporairement M. Faÿ, afin <strong>de</strong> soulager un peu M. Lantiez quʹun<br />

partage trop fatigant entre Grenelle et Vaugirard a jeté dans une lassitu<strong>de</strong> extrême.<br />

M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet], partageant le vif regret que nous avons <strong>de</strong> retirer un<br />

appui spirituel à une œuvre aussi intéressante que lʹest St ‐Charles, a fait quelques enquê‐<br />

tes, en suite <strong>de</strong>squelles il sʹest assuré que, si vous et M. Legentil lʹaviez pour agréable, M.<br />

Thenon pourrait donner à ce patronage le concours <strong>de</strong> M. lʹabbé Bé<strong>de</strong>l, quʹon dit être un<br />

1087


excellent prêtre; vous jugerez si ce moyen vous paraît être le meilleur pour assurer les se‐<br />

cours spirituels à S t ‐Charles.<br />

Il va sans dire quʹun peu plus tard, nous serions heureux dʹy apporter <strong>de</strong> nouveau<br />

lʹai<strong>de</strong> dʹun <strong>de</strong> nos prêtres, si les circonstances le <strong>de</strong>mandaient et que nous en eussions,<br />

mieux quʹaujourdʹhui, les moyens.<br />

Recevez, je vous prie, mon cher ami, les assurances accoutumées <strong>de</strong> mon affectueux<br />

dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1064 à M. Caille<br />

Les instances faites pour resserrer les liens entre eux ne sont pas <strong>de</strong>s reproches. Charger un frère dʹentretenir une<br />

correspondance régulière. A propos dʹun jeune frère quʹil sʹagit <strong>de</strong> ʺracheterʺ du service militaire.<br />

Vaugirard, 7 mars 1866<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> lʹempressement que vous avez mis à répondre à ma <strong>de</strong>rnière<br />

lettre; jʹai reconnu, à tous les bons et dévoués sentiments quʹelle exprime, votre cordiale af‐<br />

fection et votre charité accoutumée. Vous pouvez bien penser, très cher ami, que je ne les<br />

ai pas un seul moment mis en doute; après 14 ans <strong>de</strong> franche et bien fraternelle union, la<br />

confiance réciproque est assez établie pour quʹil ne reste plus dʹépreuve nouvelle à <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>r. Je prenais seulement quelque inquiétu<strong>de</strong>, soit pour nos jeunes frères, soit pour le<br />

bien <strong>de</strong> nos œuvres, <strong>de</strong> la langueur et du ralentissement <strong>de</strong> nos rapports, toujours moins<br />

fréquents à mesure que nous avançons, bien que le besoin dʹentente semblât, au contraire,<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r quʹils fussent plus rapprochés et plus réguliers. La bonne disposition que vous<br />

montrez <strong>de</strong> répondre sur ce point à nos désirs nous donne une sincère satisfaction. Il me<br />

semble aussi que, si M. Carment continue à prendre quelque part à vos travaux, il pour‐<br />

rait, pour chaque semaine, tenir note <strong>de</strong> tous les faits ayant quelque peu dʹintérêt, en ma‐<br />

nière <strong>de</strong> petit journal, et vous nous lʹenverriez chaque mois au moins, soit vous‐même, soit<br />

par lʹentremise dʹun <strong>de</strong> vos frères. Rien ne serait plus simple et vous‐même, par ce journal,<br />

trouveriez le moyen dʹétablir, pour vos œuvres comme pour la communauté, un coutu‐<br />

mier extrêmement utile pour établir <strong>de</strong>s traditions et faire une assise soli<strong>de</strong> à vos travaux<br />

charitables. Nous attendrons les rapports et documents dont vous nous annoncez lʹenvoi.<br />

Jʹai averti M. Laroche que vous étiez disposé à lui envoyer en ai<strong>de</strong> M. Mitouard, dès<br />

quʹil serait revenu <strong>de</strong> la campagne où il était allé passer quelques jours pour essayer <strong>de</strong> se<br />

remettre. Mais vous ne mʹavez point dit si M. Mitouard <strong>de</strong>vrait être remplacé chez vous,<br />

dans le cas où, la santé <strong>de</strong> M. Laroche restant languissante, lʹai<strong>de</strong> que vous lui prêteriez<br />

<strong>de</strong>vrait durer quelques mois; je vous serai obligé <strong>de</strong> nous lʹécrire.<br />

Nous avions appris la maladie grave <strong>de</strong> la mère <strong>de</strong> M. Carment; nous nʹen avons<br />

point eu <strong>de</strong>puis <strong>de</strong> nouvelles, nous supposons quʹelle va mieux; vous nous direz à ce sujet<br />

ce qui en est; nous avons bien prié pour elle.<br />

Je vous joins ici une petite lettre que vous écrit M. Allard; elle est bien incorrecte,<br />

quoiquʹil fasse <strong>de</strong>puis plus dʹun an une petite classe; je lʹai laissée telle quelle, afin que<br />

vous suiviez mieux ce qui le concerne. Il a eu un très mauvais numéro au tirage <strong>de</strong> la cons‐<br />

cription, et nous ne lui voyons que <strong>de</strong>s causes peu valables dʹexemption, à moins quʹil ne<br />

soit bien appuyé; vous verrez quels moyens vous pourriez avoir <strong>de</strong> le soutenir à lʹépoque<br />

1088


<strong>de</strong> la révision. La Communauté, obérée par <strong>de</strong> lour<strong>de</strong>s charges, est tout à fait hors dʹétat <strong>de</strong><br />

faire aucun sacrifice pour son exonération; elle nʹa pas eu dʹailleurs à se féliciter <strong>de</strong>s dé‐<br />

penses très notables quʹelle a faites, en temps divers, pour trois sujets appelés par le sort:<br />

<strong>de</strong>ux lʹont quittée, un troisième est peu sûr et dʹune valeur médiocre. Le jeune Allard est<br />

doux, bon garçon, mais peu ferme et mal résolu dans sa vocation; il avait lʹidée folle <strong>de</strong><br />

faire <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s, quand il nʹa pas même aptitu<strong>de</strong> suffisante pour comprendre les premiers<br />

éléments <strong>de</strong> la grammaire.<br />

Vous ne mʹavez pas parlé <strong>de</strong>puis longtemps <strong>de</strong> la direction spirituelle <strong>de</strong> vos frères;<br />

ont‐ils quelquʹun qui leur donne à cet égard un peu dʹappui?<br />

Adieu, bien cher ami et fils en N.S., croyez bien à tous nos sentiments les plus affec‐<br />

tueux en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Nous bénissons Dieu <strong>de</strong>s préparations qui se font pour le patronage <strong>de</strong> S t ‐Jacques;<br />

je ne vois pas malheureusement que nous fussions immédiatement en mesure <strong>de</strong> donner<br />

un personnel pour le soutenir, si nous étions appelés à le diriger.<br />

1064 bis à M. Marcaire<br />

Conseils <strong>de</strong> discrétion pour une dévotion à saint Joseph.<br />

Vaugirard, 7 mars 1866<br />

Mois <strong>de</strong> St Joseph<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Je trouve très pieux et très propre à soutenir votre amour pour la Sainte Famille,<br />

lʹacte <strong>de</strong> consécration que vous désirez prononcer au jour <strong>de</strong> la fête <strong>de</strong> St Joseph. Je vous<br />

autorise à vous donner ainsi à notre divin Seigneur par Marie et Joseph, et à les faire dépo‐<br />

sitaires <strong>de</strong> votre personne, comme <strong>de</strong> vos sentiments et <strong>de</strong> vos actes. Toutefois, comme il<br />

sʹagit là dʹune marque <strong>de</strong> dévotion tout à fait intime et qui ne peut convenir à toutes les<br />

dispositions, je vous invite à la gar<strong>de</strong>r pour vous seulement, en nʹy attirant les autres<br />

quʹ<strong>avec</strong> discrétion et en consultant votre directeur.<br />

Je <strong>de</strong>mandais tout à lʹheure à M. Caille, en lui écrivant, si vous aviez quelque prêtre<br />

expérimenté pour vous donner un peu <strong>de</strong> direction, et si vous aviez lieu dʹen être satis‐<br />

faits.<br />

Je renouvelle aussi à M. Caille lʹinstante recommandation <strong>de</strong> me faire suivre, par<br />

<strong>de</strong>s correspondances et communications plus régulières, votre vie, vos œuvres, tout ce qui<br />

vous intéresse; veillez‐y <strong>avec</strong> lui.<br />

Adieu, bien cher enfant, tous ici vous aiment et sont en union <strong>de</strong> cœur <strong>avec</strong> vous<br />

par la prière, comme par tous leurs travaux charitables.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1065 à M. dʹArbois<br />

Projet dʹagrandissement dʹune chapelle: ne pas se précipiter, ne pas engager trop <strong>de</strong> dépenses. Ménager les san‐<br />

tés.<br />

1089


Vaugirard, 14 mars 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous avons reçu <strong>avec</strong> satisfaction, comme toujours, votre <strong>de</strong>rnière lettre et les dé‐<br />

tails intéressants quʹelle renferme, tant sur le personnel <strong>de</strong> votre communauté que sur vos<br />

œuvres.<br />

Le point capital, en ce qui regar<strong>de</strong> vos travaux <strong>de</strong> zèle, serait la nécessité, qui vous<br />

semblerait évi<strong>de</strong>nte, dʹagrandir votre petite chapelle <strong>de</strong> la Maîtrise. La disposition para‐<br />

îtrait avoir, en effet, quelque avantage pour vos réunions; mais nʹest‐ce pas aller trop vite,<br />

quand vous avez déjà surcharge dans vos occupations; le nombre <strong>de</strong>s assemblées ne serait<br />

pas augmenté peut‐être, mais les soins, les rapports personnels, les mouvements <strong>de</strong> toute<br />

sorte croîtraient <strong>avec</strong> lʹétendue <strong>de</strong> la chapelle.<br />

Dʹun autre côté, la dépense, que vous jugez presque assurément très minime parce<br />

que les appréciations en projet sont toujours fort simples, ne manquerait pas <strong>de</strong> sʹélever<br />

encore assez haut pour vous créer quelque embarras financier. Il me semblerait absolu‐<br />

ment impossible que votre communauté prît cette dépense à sa charge, et je ne vois pas<br />

comment elle pourrait autrement être couverte. Le petit plan que vous mʹavez esquissé in‐<br />

dique, <strong>de</strong>rrière votre autel actuel, un mur qui doit avoir une certaine importance dans la<br />

construction; sʹil en est ainsi, comme tout lʹannonce, il ne pourrait être supprimé sans <strong>de</strong>s<br />

travaux notables pour assurer la solidité <strong>de</strong> cette partie <strong>de</strong> la maison et, conséquemment,<br />

sans <strong>de</strong>s frais considérables; à Grenelle, un travail pareil a exigé <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s précautions et<br />

occasionné une très forte dépense. Le Conseil <strong>de</strong> la Communauté, que jʹentretenais <strong>de</strong> ce<br />

projet, exprimait la pensée que, pour donner un avis, on aurait besoin dʹêtre renseigné sur<br />

ces points: importance réelle <strong>de</strong>s travaux, taux bien certain <strong>de</strong> la dépense, enfin moyens<br />

assurés dʹy pourvoir en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s ressources, déjà à peine suffisantes, <strong>de</strong> la communauté.<br />

Notre cher M. Alexandre [Legrand], qui me semble heureusement bien remis pour<br />

sa santé, mʹentretient <strong>de</strong> la retraite prochaine et <strong>de</strong>man<strong>de</strong> si nous avons quelque vue rela‐<br />

tivement à ceux qui pourront y prendre part. Le grand éloignement où vous êtes et le chif‐<br />

fre élevé <strong>de</strong>s frais <strong>de</strong> voyage <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pour vous, plus encore que pour les autres, une cer‐<br />

taine circonspection pour ces déplacements; vous jugerez, bien cher ami, quelles proposi‐<br />

tions vous croiriez <strong>de</strong>voir nous faire pour le choix <strong>de</strong> tels ou tels <strong>de</strong> vos frères qui vous<br />

paraîtraient plus particulièrement <strong>de</strong>voir être envoyés. Nous pensions tous que, par lʹin‐<br />

termédiaire <strong>de</strong> Mgr dʹAngers ou peut‐être aussi <strong>de</strong> quelquʹun <strong>de</strong>s protecteurs <strong>de</strong> vos œu‐<br />

vres, vous pourriez obtenir la faveur <strong>de</strong> <strong>de</strong>mi‐places pour vos voyages, soit ordinairement,<br />

soit <strong>de</strong> temps en temps. Examinez si cette tentative est à faire.<br />

Ménagez vos forces et celles <strong>de</strong> vos frères. M. Laroche se remet péniblement et<br />

traîne sa langueur; M. Lantiez est obligé <strong>de</strong> faire à cette maison une visite ces jours‐ci pour<br />

sʹassurer sʹils peuvent marcher néanmoins et porter leur far<strong>de</strong>au accoutumé.<br />

Adieu, bien cher ami, assurez nos frères <strong>de</strong> ma tendre affection à laquelle vous<br />

prendrez une bonne part, laquelle nʹamoindrira pas celle <strong>de</strong>s autres.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

La retraite, selon notre désir, commencerait le soir du dimanche du Bon Pasteur, 15<br />

avril, mais nous nʹavons pas jusquʹici <strong>de</strong> Père pour nous la donner.<br />

1090


1066 à M. dʹArbois<br />

Veiller à ne pas se mortifier indiscrétement, ni à se fatiguer au‐<strong>de</strong>là <strong>de</strong> ses forces.<br />

Vaugirard, 22 mars 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. <strong>Jean</strong> [Gauffriau], mʹécrivant ces jours <strong>de</strong>rniers, me faisait remarquer que les<br />

quelques mortifications du Carême, bien que mitigées, ne laissaient pas <strong>de</strong> vous abattre un<br />

peu; je vous invite à y regar<strong>de</strong>r bien attentivement, je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> même <strong>avec</strong> instance<br />

<strong>de</strong> suspendre jusquʹà la fin du Carême les privations qui peuvent affaiblir réellement vos<br />

forces, puisque vos travaux vont sʹaccroître et que vous y subvenez à grand peine dans les<br />

temps et conditions ordinaires. Je crois que cette disposition est dans le vrai bien et que,<br />

conséquemment, elle est selon les vues <strong>de</strong> Dieu.<br />

M. <strong>Jean</strong> pense aussi que vous vous épargnerez beaucoup <strong>de</strong> fatigue en couchant<br />

<strong>de</strong>ux fois (je crois) à N.D. <strong>de</strong>s Champs lorsque vous y <strong>de</strong>vez dire la messe; je vous prie <strong>de</strong><br />

faire attention à cette observation, si elle a réellement quelque chose <strong>de</strong> praticable.<br />

Je ne sais rien encore <strong>de</strong> la retraite; jʹai écrit à M. Codant, absent, pour lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r<br />

<strong>de</strong> nous la donner; jʹattends sa réponse.<br />

Adieu, bien cher ami, je vous embrasse cordialement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1067 à M. Gauffriau<br />

Encouragements à la générosité. Accepter une santé fragile en toute confiance et soumission à la divine Sagesse.<br />

Quelques nouvelles <strong>de</strong>s Œuvres.<br />

Vaugirard, 22 mars 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu votre lettre du 17 <strong>de</strong> ce mois; jʹen ai été content comme toujours, puisque<br />

vous semblez toujours pénétré <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s obligations <strong>de</strong> votre état comme prêtre, comme<br />

religieux, comme homme dévoué au zèle et à la charité; tout est là pour vous; comme chré‐<br />

tien, vous apprenez à souffrir dans la patience; religieux, à obéir généreusement; homme<br />

<strong>de</strong> zèle, à vous dévouer, à vous oublier pour vos frères; continuez et marchez dans cette<br />

voie, en la suivant on tend vraiment à la perfection. Je vous remercie <strong>de</strong>s efforts que vous<br />

faites pour ai<strong>de</strong>r sérieusement M. dʹArbois; je regrette bien que votre santé, encore frêle, ne<br />

répon<strong>de</strong> pas toujours à votre bon vouloir; acceptons les dispositions <strong>de</strong> la divine Sagesse,<br />

et attendons <strong>de</strong> sa bonté quʹelle nous donnera tout ce quʹil nous faut pour soutenir les œu‐<br />

vres quʹelle a daigné mettre en nos faibles mains.<br />

Jʹécris un mot à M. dʹArbois pour lʹinviter à se ménager davantage durant le carême,<br />

afin <strong>de</strong> subvenir jusquʹau bout aux lour<strong>de</strong>s charges <strong>de</strong> sa position.<br />

Tout le mon<strong>de</strong> ici va assez bien; M. Lantiez a été faire une petite et courte visite à<br />

Arras et à Amiens; nous lʹattendons ce soir; Metz va bien; écrivez quelquefois un mot au<br />

bon abbé Risse, si vous ne lʹavez déjà fait; il vous reste bien attaché.<br />

Adieu, cher enfant, faites mille amitiés à nos ff. pour moi; je les aime, et vous <strong>avec</strong><br />

eux, bien tendrement en N.S.; je Le prie <strong>de</strong> bénir toute votre maison.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1091


1068 à M. dʹArbois<br />

MLP. réitère ses réticences au projet dʹagrandissement <strong>de</strong> la chapelle. Suggestions portant sur <strong>de</strong>s aménage‐<br />

ments. Retraite prêchée par le chanoine Codant.<br />

Vaugirard, 28 mars 1866<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous avons examiné attentivement votre projet dʹagrandissement <strong>de</strong> votre chapelle<br />

<strong>de</strong> Maîtrise; on sʹaccor<strong>de</strong> à remarquer, M. Lantiez tout particulièrement, plus expérimenté<br />

que les autres, quʹil est impossible que la dépense ne sʹélève pas à 500f. au moins. Or, nous<br />

ne voyons pas que vous ayez <strong>de</strong> ressources, sinon celles <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong>s Champs (recueillies<br />

par vous pour les besoins <strong>de</strong> votre communauté) et celles <strong>de</strong> la Maîtrise qui vous sont<br />

propres aussi. Il nous paraît donc quʹil y aurait ici une nouvelle cause <strong>de</strong> malaise pour vo‐<br />

tre maison. Nous sommes malheureusement ici obérés et hors dʹétat <strong>de</strong> vous ai<strong>de</strong>r; les ma‐<br />

laises financiers sont une gran<strong>de</strong> difficulté <strong>avec</strong> les mille soins et charges que nous impo‐<br />

sent nos œuvres; nous verrions <strong>avec</strong> regret que vous ajoutiez cet embarras à tous les au‐<br />

tres, à moins que vous ayiez, bien positivement et en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s ressources applicables à<br />

votre communauté, ce qui est nécessaire pour lʹacquit <strong>de</strong> la dépense.<br />

Nous pensons aussi quʹil vaudrait mieux supprimer les <strong>de</strong>ux petites cloisons latéra‐<br />

les A‐A et laisser libres les <strong>de</strong>ux petits espaces que jʹai crayonnés en bleu; ce serait un peu<br />

plus dʹair et dʹespace et <strong>de</strong>ux recoins <strong>de</strong> moins. On figurerait alors un second pilier en face<br />

<strong>de</strong> celui qui existe et quʹon avait voulu masquer. Peut‐être pourrait‐on figurer légèrement,<br />

au droit <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux piliers, une sorte <strong>de</strong> péristyle, ou bien laisser seulement les piliers en les<br />

ornant un peu.<br />

Nous avons pensé tous aussi quʹil semblait bien fâcheux dʹenfermer lʹautel dans une<br />

sorte <strong>de</strong> boîte étroite, étouffée, puisquʹon pouvait donner à cet entourage beaucoup plus<br />

dʹespace sans nul détriment pour lʹaspect et <strong>avec</strong> immense avantage pour la liberté <strong>de</strong>s<br />

mouvements et, au besoin, pour donner place au sanctuaire à quelques prêtres, à quelques<br />

enfants pour les cérémonies; si ce sanctuaire avait aussi un peu plus <strong>de</strong> profon<strong>de</strong>ur, il<br />

semble quʹil y gagnerait.<br />

M. Codant a accepté <strong>de</strong> donner notre retraite. Je ne suis pas absolument sûr quʹelle<br />

commence le 16 avril, je vous le marquerai précisément. Je nʹai pas consulté le Conseil sur<br />

le choix <strong>de</strong> ceux qui doivent y venir. Votre avis donné (sans en parler à vos frères) pourrait<br />

nous éclairer.<br />

Nous sommes obligés <strong>de</strong> faire remplacer M. Laroche pour plusieurs mois; cʹest pour<br />

nous une embarrassante difficulté.<br />

Adieu, bien cher ami, croyez, <strong>avec</strong> vos frères, à tous mes tendres sentiments en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1069 à M me la Vicomtesse dʹHurbal<br />

Objet <strong>de</strong> piété indulgencié. Neuvaine pour une guérison.<br />

Vaugirard, 28 mars 1866<br />

Madame la Comtesse,<br />

Jʹai lʹhonneur <strong>de</strong> vous renvoyer, indulgencié comme vous le désiriez, le petit cruci‐<br />

fix fait par nos ateliers; je suis bien satisfait quʹil soit à votre gré.<br />

1092


Je commencerai la neuvaine pour M. le Comte <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot [Marquis Edmond <strong>de</strong><br />

Hou<strong>de</strong>tot] lundi prochain, 2 avril; je mʹunirai <strong>de</strong> toutes mes forces aux prières que vous<br />

adressez à Dieu pour sa parfaite guérison, et pour que cette douloureuse épreuve se<br />

tourne en bénédiction pour lui et pour tout ce qui lui est cher.<br />

Je termine en hâte, pressé par le départ du porteur.<br />

Veuillez agréer, Madame la Comtesse, lʹhommage <strong>de</strong> mes sentiments respectueu‐<br />

sement dévoués en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1070 à M. Maignen<br />

Mouvement <strong>de</strong> personnel.<br />

30 mars [1866]<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

M. Audrin me dit quʹil ne peut se passer <strong>de</strong> M. Hubert à Chaville; il ne sera donc<br />

pas possible <strong>de</strong> vous lʹenvoyer.<br />

Jʹétais convenu <strong>avec</strong> vous quʹon ne mettrait pas <strong>de</strong> lits dans la gran<strong>de</strong> salle <strong>de</strong>s jeu‐<br />

nes ouvriers; je regrette que vous lʹayez si vite oublié.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1071 à M. Maignen<br />

Ai<strong>de</strong> provisoire en personnel; « cʹest le don <strong>de</strong> la plus pauvre <strong>de</strong> nos Œuvres ».<br />

5 avril 1866<br />

Mon cher enfant,<br />

Jʹai vu aujourdʹhui M. Audrin; pour vous donner une marque <strong>de</strong> sa bonne volonté,<br />

il vous enverra M. Hubert <strong>de</strong>ux jours par semaine; cʹest bien peu, mais cʹest le don <strong>de</strong> la<br />

plus pauvre <strong>de</strong> nos œuvres; Chaville, en ce moment, est réduit à rien.<br />

M. Hubert vous viendra <strong>de</strong>main vendredi, dès le matin.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1072 à M. Caille<br />

MLP. accepte <strong>de</strong> participer financièrement à lʹexemption du jeune Allard. Ai<strong>de</strong> à la maison dʹArras.<br />

Vaugirard, 6 avril 1866<br />

Mon bon ami et fils en N.S.,<br />

Notre jeune Allard montrant beaucoup dʹaffliction à lʹapproche du moment où son<br />

sort va se déci<strong>de</strong>r pour la conscription, le Conseil <strong>de</strong> la Communauté a décidé, pour lui<br />

donner une marque <strong>de</strong> son bon vouloir, que, malgré les charges qui grèvent en ce moment<br />

notre situation, nous contribuerions pour 500f à son exonération si son père, ouvrant une<br />

souscription et sollicitant lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong>s ecclésiastiques et personnes pieuses qui sʹintéressent à<br />

1093


lui, du jeune abbé Allard <strong>de</strong> Montdidier, votre propre concours aussi, parvenait à réunir la<br />

somme indispensable pour empêcher son incorporation à lʹarmée. Sans être un sujet <strong>de</strong><br />

choix, ce pauvre garçon nʹest pas dépourvu <strong>de</strong> qualités et si lʹâge, comme on peut lʹespérer,<br />

affermit son caractère un peu faible, on aurait en lui un ai<strong>de</strong> qui ne serait pas sans utilité. Il<br />

nʹa rien dʹailleurs <strong>de</strong> ce qui convient pour la carrière militaire; il y serait assurément en<br />

souffrance, ne se trouvant pas à sa place.<br />

Je lui ai promis <strong>de</strong> vous donner ces détails; vous jugerez si, autour <strong>de</strong> vous, au Col‐<br />

lège peut‐être et ailleurs, vous auriez quelque moyen <strong>de</strong> lui créer quelques protections<br />

bienfaisantes.<br />

Nous avons envoyé à Arras M. Joseph [Beldame] pour ai<strong>de</strong>r nos frères, M. Laroche<br />

étant tellement épuisé quʹil est obligé <strong>de</strong> faire une absence peut‐être prolongée.<br />

Adieu, bien cher ami et fils en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. La mère <strong>de</strong> M. Marcaire a été un peu souffrante, elle va bien maintenant.<br />

La retraite nous sera donnée par M. Codant, Chanoine <strong>de</strong> Versailles; elle commen‐<br />

cera, ou le 16, ou le 23 avril; je vous donnerai la date précise.<br />

1073 à M. Trousseau<br />

M. Trousseau a besoin dʹêtre réconforté. Bénir Dieu dans les épreuves; se confier aux moyens surnaturels.<br />

Vaugirard, 10 avril 1866<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Bénissons Dieu, puisquʹIl nous visite par la tribulation et les difficultés. Tout mar‐<br />

chait bien chez vous, et la fondation assez ru<strong>de</strong> <strong>de</strong> votre école, les soins du patronage, vos<br />

cours et réunions du soir, enfin la part essentielle pour vos étu<strong>de</strong>s, tout semblait concilié et<br />

assis; selon nos courtes vues, nous disions: Le Seigneur doit être content <strong>de</strong> ses pauvres<br />

serviteurs; mais voilà que dʹun souffle Il ébranle et trouble tout; comme ce Père <strong>de</strong> la re‐<br />

traite (je ne sais plus lequel) avait raison en nous disant: Dieu est contrariant. Mais, nous le<br />

savons, cette contradiction nʹest autre, en définitive, que la Sagesse <strong>de</strong> Dieu se substituant<br />

miséricordieusement à nos vues étroites et mal éclairées; remercions‐Le donc et ayons<br />

bonne confiance. M. Laroche mʹécrit encore aujourdʹhui une lettre <strong>de</strong> regrets <strong>de</strong> lʹimpossi‐<br />

bilité où nous avons été <strong>de</strong> lui envoyer un prêtre; vous savez mieux que lui, vous qui<br />

connaissez particulièrement le personnel <strong>de</strong> la Communauté et ses charges, combien il<br />

nous est difficile <strong>de</strong> porter nos œuvres. Depuis le départ <strong>de</strong> M. Roussel, nous nʹavons donc<br />

trouvé aucune combinaison, quant à présent, pour vous ai<strong>de</strong>r mieux que nous ne lʹavons<br />

fait. Tâchez <strong>de</strong> bien utiliser M. Joseph [Beldame]; il est capable <strong>de</strong> vous secon<strong>de</strong>r, si on lui<br />

donne lieu <strong>de</strong> sʹemployer pour le bien <strong>de</strong>s œuvres.<br />

Pour ce qui vous regar<strong>de</strong> personnellement, je comprends, cher enfant, votre sollici‐<br />

tu<strong>de</strong> et la pesanteur du far<strong>de</strong>au qui pèse sur vous. Mais il ne sera pas autre quʹil nʹa été dé‐<br />

jà pendant la première absence quʹa faite M. Laroche. Avec lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> Dieu, vous avez pu<br />

porter la tâche, Dieu ne vous délaissera pas non plus maintenant. Nous prierons tous les<br />

jours pour vous, et nous suivrons <strong>de</strong>s yeux, autant que nous le pourrons, vos travaux. Ap‐<br />

puyez‐vous beaucoup aussi sur les moyens surnaturels, invoquez souvent lʹEsprit‐Saint<br />

1094


dans vos actions, <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> nos saints Patrons, la S te Vierge, S t Joseph, S t Vincent<br />

<strong>de</strong> Paul; ainsi appuyé, vous ne succomberez pas sous le faix, le Seigneur le portera <strong>avec</strong><br />

vous.<br />

La retraite ici est fixée définitivement au 22 avril, dimanche au soir. Je ne prévois<br />

guère que, chargé comme vous lʹêtes, vous puissiez détacher aucun <strong>de</strong> vous pour y venir;<br />

vous examinerez la chose <strong>avec</strong> M. Laroche.<br />

Adieu, bien cher enfant, je prie Dieu <strong>de</strong> vous bénir tout particulièrement et je vous<br />

embrasse, ainsi que nos frères, bien tendrement en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Mettre sous enveloppe la lettre ci‐jointe <strong>de</strong> M. Magnien à M. Hauvent, et en‐<br />

voyer aussi à M. Laroche les <strong>de</strong>ux qui sont pour lui.<br />

1074 à M. dʹArbois<br />

Veiller à ce quʹun frère laïc, impressionnable, ne soit pas cantonné au ʺrôle <strong>de</strong> frère <strong>de</strong>s travaux manuelsʺ. Eviter<br />

les <strong>de</strong>ttes. A Arras, lʹabbé Laroche est épuisé et doit sʹéloigner <strong>de</strong> lʹŒuvre.<br />

Vaugirard, 13 avril 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Deux mots seulement; cʹest aujourdʹhui la vente <strong>de</strong>s petits bronzes, tout est ici en<br />

mouvement.<br />

La retraite, donnée par M. Codant, commencera seulement le dimanche au soir 22<br />

avril. Envoyez‐y qui vous croirez pour le mieux, en partageant votre mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> telle sorte<br />

que ceux qui nʹauront pu venir à cette retraite viennent à celle <strong>de</strong> la fin <strong>de</strong> septembre.<br />

Nous serions ici tous bien affligés si M. Alexandre [Legrand], faute <strong>de</strong> dominer son<br />

impressionnabilité, rendait nulles toutes les facultés heureuses que Dieu lui a données<br />

pour <strong>de</strong>s emplois sérieusement utiles dans la Communauté; le réduire uniquement au rôle<br />

<strong>de</strong> frère <strong>de</strong>s travaux manuels serait une sorte <strong>de</strong> suici<strong>de</strong>; ayons confiance, Dieu indiquera<br />

Lui‐même ce que <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ra lʹavenir.<br />

En critiquant, je crois <strong>avec</strong> raison, quelques dispositions <strong>de</strong> votre projet, en vous fai‐<br />

sant remarquer lʹinsuffisance évi<strong>de</strong>nte <strong>de</strong> lʹévaluation <strong>de</strong> la dépense, nous nʹavons pas en‐<br />

tendu vous détourner dʹy songer, si vous avez réellement les moyens <strong>de</strong> couvrir les frais<br />

<strong>de</strong> ce travail; je consacrerai volontiers, pour ai<strong>de</strong>r votre maison à lʹexécuter, 100f pris sur<br />

les 200f que vous venez <strong>de</strong> mʹenvoyer et jʹemploierai les autres 100f aux frais <strong>de</strong> voyage <strong>de</strong><br />

ceux qui viendront à la retraite; mais nous souffrons tant <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ttes qui nous grèvent pres‐<br />

que partout que je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>avec</strong> instance <strong>de</strong> ne pas ajouter ce malaise à toutes vos<br />

autres difficultés. Ce conseil vous vient <strong>de</strong> notre expérience comme <strong>de</strong> notre affection.<br />

Adieu, bien cher ami, cʹest tout pour aujourdʹhui; ne vous fatiguez pas trop; M. La‐<br />

roche sʹest tellement épuisé que le voilà absolument hors <strong>de</strong> service pour plusieurs mois,<br />

obligé <strong>de</strong> sʹéloigner dʹArras; <strong>de</strong> là, gran<strong>de</strong>s difficultés pour sa maison; nous nʹavons pas <strong>de</strong><br />

prêtre à lui donner et les ai<strong>de</strong>s laïcs ne le remplaceront quʹimparfaitement.<br />

Croyez, <strong>avec</strong> tous nos frères, à nos sentiments tendrement dévoués en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Hommage <strong>de</strong> respectueux attachement à M gr , en toute rencontre. Un mot aussi à<br />

lʹoccasion à qui <strong>de</strong> droit: supérieurs, bienfaiteurs, amis.<br />

1095


1075 à M. Caille<br />

MLP. rappelle un frère indocile.<br />

Vaugirard, 16 avril [1866]<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Joseph [Beldame] nʹa point réussi à Arras; il ne montre pas <strong>de</strong> docilité à lʹégard<br />

<strong>de</strong> M. Victor [Trousseau] et ne se prête pas aux emplois quʹon veut lui donner pour le bien<br />

<strong>de</strong> lʹœuvre. Nous croyons donc <strong>de</strong>voir le retirer <strong>de</strong> cet établissement. Dans le prochain<br />

Conseil qui aura lieu avant la fin <strong>de</strong> la semaine, nous examinerons ce qui est à faire pour le<br />

mieux au sujet <strong>de</strong> M. Joseph. Jusque là, je lʹinvite à se rendre chez vous, où je vous prie <strong>de</strong><br />

le recevoir momentanément. Dʹici à <strong>de</strong>ux ou trois jours, nous saurons quel parti est à<br />

prendre à son sujet.<br />

Comme je nʹai point eu occasion <strong>de</strong> lui envoyer la lettre que vous mʹaviez remise, je<br />

vous la renvoie pour quʹelle lui parvienne sans plus <strong>de</strong> retard.<br />

Adieu, mon bien cher ami et fils en N.S.; bons souvenirs à nos frères; leurs petites<br />

lettres mʹont fait grand plaisir.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1076 à M. Chaverot<br />

Formalités auprès <strong>de</strong> sa famille.<br />

Vaugirard, 18 avril 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Le meilleur parti à prendre pour le titre clérical est dʹenvoyer à vos bons parents<br />

une formule qui nʹéveille point leur attention sur <strong>de</strong>s points qui puissent les inquiéter et en<br />

les prévenant, comme vous lʹindiquez, quʹil sʹagit seulement dʹune formalité dont vous<br />

nʹenten<strong>de</strong>z tirer aucune obligation pour eux.<br />

Soyez sans inquiétu<strong>de</strong> du côté <strong>de</strong> la Communauté; elle pourrait prendre un enga‐<br />

gement pour ce titre clérical, mais je crois que M. Icard aime mieux recourir à vos parents,<br />

parce quʹon ne veut guère en ce moment tenir compte <strong>de</strong>s Communautés, sinon au Sémi‐<br />

naire, au moins ailleurs.<br />

Demain, nous allons en pèlerinage à St Vincent <strong>de</strong> Paul; comme nous y prierons<br />

pour les ordinands sous‐diacres tout particulièrement!<br />

Adieu, bien cher ami, mille tendres affections en N.S. et en Marie, notre bien‐aimée<br />

protectrice <strong>de</strong> la Salette.<br />

Votre ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

Ci‐joint un mot pour M. <strong>de</strong> Varax.<br />

1077 à M. Caille<br />

Il manque à M. Beldame les qualités dʹune vocation qui ʺpromît <strong>de</strong> lʹavenirʺ. Exemption du jeune Allard.<br />

Vaugirard, 20 avril 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous sais bien bon gré <strong>de</strong> votre charitable intervention au sujet <strong>de</strong> M. Joseph<br />

[Beldame]; notre intention étant bien quʹon entendît ses explications, cʹest pourquoi je lʹai<br />

1096


invité à se rendre chez vous, jusquʹà ce que nous ayons mûrement examiné ce qui est le<br />

mieux pour son bien et pour le nôtre.<br />

Sans donner lieu à <strong>de</strong>s plaintes notables à Vaugirard (il nʹa point été employé ail‐<br />

leurs), il nous avait laissé craindre quʹil nʹy eût pas en lui solidité suffisante <strong>de</strong> jugement,<br />

simplicité et droiture dans les vues, détachement <strong>de</strong> lui‐même, sentiment vrai <strong>de</strong>s obliga‐<br />

tions religieuses; en un mot, marques dʹune vocation qui promît <strong>de</strong> lʹavenir et en valeur et<br />

en consistance; cʹest pourquoi, étant gran<strong>de</strong>ment en doute quʹil <strong>de</strong>meurât longtemps par‐<br />

mi nous, nous inclinions à penser quʹil valait mieux peut‐être ne pas prolonger une<br />

épreuve dont le résultat nous semblait presque indiqué. Je ne sais sʹil est près <strong>de</strong> vous; on<br />

ne mʹen parle point dans une lettre que je reçois aujourdʹhui dʹArras; sʹil vous vient, vous<br />

vous entretiendrez <strong>avec</strong> lui. Nous nous sommes aperçus plusieurs fois quʹil nʹétait pas<br />

dʹune entière franchise.<br />

Le jeune Allard pourra vous porter cette lettre, partant <strong>de</strong>main pour Amiens. Il<br />

paraît consterné <strong>de</strong> ce que son père ne semble pas avoir fait plus <strong>de</strong> démarches pour se<br />

procurer les 1.000f qui manquent pour son rachat. La somme <strong>de</strong> lʹexonération est seule‐<br />

ment cette année <strong>de</strong> 2.100f. Je lui suggérais cette idée: si son père, ou dʹautres <strong>de</strong> ses amis,<br />

trouvaient quelque personne bienveillante qui consentît à prêter ces mille francs pour 5<br />

ans, le père donnant, je suppose, 100f chaque année, son cousin, lʹabbé Allard, 50f, la<br />

Communauté 50f, en 5 ans, la somme ainsi garantie serait remboursée sûrement. Il a pris<br />

lʹengagement <strong>de</strong>vant Dieu, et formellement, <strong>de</strong> rester 10 ans dans la Communauté si Dieu<br />

daigne lʹexempter du service. Il voulait prendre un engagement indéfini; jʹai voulu quʹil fût<br />

seulement <strong>de</strong> 10 ans. Cʹest beaucoup déjà pour <strong>de</strong> jeunes têtes.<br />

Adieu, bien cher ami et fils en N.S., mille affections à toute votre petite communauté.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1078 à M. Trousseau<br />

Les suites du rappel <strong>de</strong> M. Beldame. Difficultés du support mutuel; pénurie <strong>de</strong> personnel. Offre <strong>de</strong> subsi<strong>de</strong>s.<br />

Vaugirard, 20 avril 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous souffrons profondément <strong>de</strong> lʹépreuve que vous traversez et nous <strong>de</strong>mandons<br />

à Dieu <strong>de</strong> vous assister, <strong>de</strong> vous soutenir et dʹalléger votre peine. Nous avons bonne<br />

confiance quʹil ne sortira que du bien <strong>de</strong> cette croix, comme il arrive toujours <strong>de</strong> celles qui<br />

viennent <strong>de</strong> la main du Seigneur. Hier, nous étions en pèlerinage à St Vincent <strong>de</strong> Paul; jʹai<br />

pu monter jusquʹaux reliques <strong>de</strong> notre saint patron et jʹy ai prié tout particulièrement pour<br />

vous.<br />

Je ne vous dis rien <strong>de</strong> la difficulté que vous avez eue à vous accommo<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s servi‐<br />

ces <strong>de</strong> M. Joseph [Beldame], cʹest là une <strong>de</strong> ces entraves que notre faiblesse humaine nous<br />

suscite; nous ne savons pas nous pénétrer, nous comprendre, nous ajuster les uns aux au‐<br />

tres, et nous nous privons ainsi <strong>de</strong> lʹai<strong>de</strong> que nous trouverions dans lʹaccord et dans lʹasso‐<br />

ciation <strong>de</strong> nos forces. Ceci nʹest pas un reproche, cʹest une réflexion générale qui tombe sur<br />

notre infirmité et dont je prends ma part tout le premier. Vous ne mʹavez point dit si M.<br />

Joseph sʹest rendu chez M. Caille, comme je lʹy ai invité. Comme il ne mʹa pas écrit, je se‐<br />

1097


ais bien aise <strong>de</strong> le savoir; priez M. Adolphe [Lainé] <strong>de</strong> me le dire, si vous ne pouvez me<br />

lʹécrire vous‐même. Vous êtes mieux à même que M. Laroche, connaissant mieux notre<br />

personnel, <strong>de</strong> comprendre lʹimpossibilité absolue où nous étions dʹéloigner aucun <strong>de</strong> nos<br />

ecclésiastiques dʹici, puisquʹil nʹen est aucun qui nʹait <strong>de</strong>s emplois qui ne peuvent être dé‐<br />

laissés. En offrant dʹenvoyer M. Faÿ, si M. Laroche pouvait seulement venir à Chaville<br />

donner la messe et gar<strong>de</strong>r la chapelle, nous faisions un sacrifice qui eût mis en souffrance,<br />

non seulement tout ce qui se fait à Chaville, mais encore tous les services dont M. Faÿ sʹoc‐<br />

cupe ici dans les jours quʹil y passe pour remplacer M. Lantiez, retenu alors à Grenelle. M.<br />

Laroche nʹa pu se rendre compte <strong>de</strong> ces difficultés que vous aurez entrevues sans doute.<br />

M. Caille vient <strong>de</strong> nous écrire que le bon ecclésiastique qui loge au Petit‐S t ‐<strong>Jean</strong> et<br />

qui nʹest pas sans mérites consentirait à aller près <strong>de</strong> vous pendant 3 ou 4 semaines, sans<br />

sʹengager précisément à y rester ensuite. Je pense quʹil voudrait essayer, avant <strong>de</strong> sʹenga‐<br />

ger. Sʹil vous convenait, ou bien si vous en trouviez un autre qui pût faire vos services<br />

moyennant une in<strong>de</strong>mnité, la Communauté, ici, quoique bien lour<strong>de</strong>ment chargée, contri‐<br />

buerait volontiers à cette dépense pour 300f, comprenant que vos difficultés <strong>de</strong> position<br />

peuvent être accrues par la nécessité <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s sacrifices pécuniaires trop lourds pour<br />

vos ressources ordinaires. Dites cette offre à M. Laroche; comme il ne sʹagit, après tout, que<br />

dʹun concours <strong>de</strong> quelques mois <strong>de</strong>mandé par vous à un ecclésiastique, il se pourrait que<br />

lʹembarras pût être levé par un petit subsi<strong>de</strong> pécuniaire.<br />

Notre retraite commence dimanche au soir, 22. Nous nʹy oublierons, ni la santé <strong>de</strong><br />

M. Laroche, ni vos fatigues, ni vos difficultés <strong>de</strong> toutes sortes; priez aussi un peu pour que<br />

nous tirions grand fruit <strong>de</strong> nos saints exercices.<br />

Adieu, bien cher enfant, croyez à tous les sentiments tendrement dévoués <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1079 à M. dʹArbois<br />

Portrait du frère Ladouce. Allusion au projet dʹaménagement <strong>de</strong> la chapelle dʹAngers.<br />

Vaugirard, 25 avril 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

La retraite me prend <strong>de</strong> telle sorte que je puis seulement vous dire <strong>de</strong>ux mots.<br />

M. Ladouce, qui professe dans la 2e division à Vaugirard, est le seul sujet réellement<br />

capable dont nous pourrions disposer pour remplacer, à Angers, M. Alexandre [Legrand],<br />

et le sacrifice est déjà bien ru<strong>de</strong> pour nous. M. Sadron, qui fait la 1ère à cause <strong>de</strong> son an‐<br />

cienneté, est moins instruit que lui.<br />

M. Ladouce est très bon, <strong>de</strong> caractère très aimable; il est musicien passable, tient<br />

bien la contrebasse, pourrait, <strong>avec</strong> un tout petit peu <strong>de</strong> pratique, enseigner le plain‐chant.<br />

Mais, vous le savez, il est boiteux et marche aidé dʹune béquille; sa santé est dʹailleurs par‐<br />

faite.<br />

Vous seul pouvez juger jusquʹà quel point cette défectuosité naturelle peut être ac‐<br />

ceptée chez vous; sʹil ne vous convient pas, nous chercherons si un autre peut vous être<br />

envoyé, mais nous serons alors dans lʹimpossibilité absolue <strong>de</strong> vous donner un sujet pro‐<br />

1098


pre à lʹenseignement et à la conduite <strong>de</strong>s classes. M. Ladouce, nombre dʹannées élève très<br />

distingué <strong>de</strong>s Frères, a seul aptitu<strong>de</strong> et science.<br />

Je vous prie <strong>de</strong> me donner une réponse immédiate, afin que nous avisions à temps<br />

aux mesures à prendre.<br />

Vous ne mʹavez plus reparlé <strong>de</strong> votre projet pour la chapelle, je crains que vous<br />

nʹayez été blessé <strong>de</strong> nos observations; je le regretterais doublement, car je pensais quʹelles<br />

nʹétaient pas <strong>de</strong> nature à produire cet effet.<br />

Adieu, cher enfant, vous nʹêtes aucun <strong>de</strong> vous oubliés aux prières <strong>de</strong> la retraite. Elle<br />

va bien.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. M. Ladouce nʹa que 20 ans, mais il paraît en avoir 25.<br />

1080 à M. Caille<br />

Jugement <strong>de</strong> MLP. sur MM. Carment et Beldame; leur aptitu<strong>de</strong> à la vie religieuse. Le rachat du service militaire<br />

du jeune Allard se heurte à <strong>de</strong>s difficultés.<br />

Vaugirard, 1er mai 1866<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je ne trouve pas du tout que vous avez manqué à lʹobéissance ni à la déférence, que<br />

vous observez si bien dʹordinaire, en intervenant charitablement pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r indul‐<br />

gence et longanimité en faveur <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux frères, lʹun ancien, lʹautre postulant, et dont la si‐<br />

tuation et les dispositions vous paraissaient <strong>de</strong>voir être étudiées <strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> temps et<br />

dʹattention. Je vous ai témoigné, par le fait, que jʹétais loin dʹimprouver ce bon mouvement<br />

<strong>de</strong> votre cœur en adhérant à votre double proposition. Maintenant, vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z ce qui<br />

sera à faire à lʹégard <strong>de</strong> lʹun et <strong>de</strong> lʹautre, sʹils insistent pour <strong>de</strong>meurer attachés à la Com‐<br />

munauté. Il me semble, en ce qui concerne M. Carment, quʹon lui rendra un vrai service en<br />

lʹinvitant à vivre <strong>avec</strong> son excellente sœur, ainsi que son père, peu avant sa mort, le lui<br />

avait recommandé; il me paraît être bien plus propre à la vie <strong>de</strong> famille, <strong>avec</strong> sa sœur sur‐<br />

tout, quʹà la vie <strong>de</strong> communauté, dont les exigences ne seront jamais bien observées ni res‐<br />

pectées par lui. Si néanmoins il persistait, assurant quʹil se soumettra à tout, peut‐être <strong>de</strong>‐<br />

vrions‐nous essayer encore, mais il est impossible quʹil soit rappelé à Vaugirard ni auprès<br />

<strong>de</strong> Paris, et je ne vois que vous qui, le connaissant bien, pourriez le suivre dans cette nou‐<br />

velle épreuve et juger si, tout ensemble, on peut le faire vivre en religieux et tirer quelque<br />

bon parti <strong>de</strong> ses services. Voyez si, le cas échéant, vous pourriez prendre ce soin.<br />

Pour M. Joseph [Beldame], nous avons <strong>de</strong>s doutes encore bien plus fondés sur ses<br />

aptitu<strong>de</strong>s pour la vie religieuse. Il est déjà trop âgé, il a <strong>de</strong>s vues trop peu formées sur la<br />

gravité <strong>de</strong>s obligations du religieux pour que nous ayons chance <strong>de</strong> lʹattacher sérieuse‐<br />

ment à la Communauté; il <strong>de</strong>meurerait sur les limites <strong>de</strong> la Congrégation sans jamais en‐<br />

trer intimement dans son sein. Cette perspective nʹest guère propre à nous déci<strong>de</strong>r à pro‐<br />

longer ses épreuves. Cependant, comme vous lʹavez vu plus à loisir que nous, essayez, si<br />

vous le croyez désirable, <strong>de</strong> le mettre encore un peu à lʹœuvre sous vos yeux; mais aurez‐<br />

vous <strong>de</strong> quoi lʹoccuper utilement pour votre maison? là est la difficulté.<br />

1099


Pour M. Allard, nous arriverons, je lʹespère, quoique nous nʹayons encore pu nous<br />

en occuper absolument, à trouver, comme vous le ferez à Amiens, quelquʹun qui prête 500f<br />

sans intérêt, remboursables en 5 ans.<br />

Pour les 200f à payer chaque année, vous consentiriez, dites‐vous, ainsi que nous le<br />

faisons nous‐même, à donner 50f chaque année; vous espérez que lʹabbé Allard donnerait<br />

aussi 50f, il ne resterait plus que 50f à trouver; nous les cherchons, mais nous quêtons si<br />

souvent que nous avons peine à y arriver; nous ne serions guère sûrs dʹy réussir; nous par‐<br />

tagerons <strong>avec</strong> vous, comme vous le proposez généreusement, cette <strong>de</strong>rnière différence si<br />

nous ne parvenons point à la couvrir par lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> nos amis.<br />

Il y a encore, il est vrai, une somme <strong>de</strong> 100f à laquelle on nʹa pas pourvu, puisque le<br />

prix <strong>de</strong> lʹexonération est <strong>de</strong> 2.100f et que nos prévisions nʹarrivent à réaliser que 2.000f. No‐<br />

tre jeune Allard, sʹillusionnant et prenant ses désirs pour une certitu<strong>de</strong>, mʹavait déclaré<br />

quʹen sa présence vous aviez dit: Si on parvenait à réunir les 2.000f, on aurait confiance<br />

pour subvenir aux 100f restant. Il en avait conclu que vous entrevoyiez quelques person‐<br />

nes charitables pour couvrir le complément; mais il nʹavait pas songé assurément quʹen dé‐<br />

finitive, dʹune façon ou dʹune autre, presque tout lʹensemble <strong>de</strong> la charge retomberait sur<br />

nous.<br />

Ne serait‐ce pas le cas <strong>de</strong> presser un peu le père Allard <strong>de</strong> faire au moins ces 100f?<br />

Je ne puis mʹempêcher dʹêtre un peu mécontent <strong>de</strong> la nullité absolue <strong>de</strong> ses efforts en cette<br />

occasion. Il ne voit que lui, son fils se donnant à Dieu ne lui produit rien; mais ne doit‐il<br />

avoir aucun souci <strong>de</strong> son âme puisquʹil est chrétien, et sʹimagine‐t‐il que son fils, après<br />

avoir passé 7 ans au régiment, lui reviendra en bon état au point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> la foi et <strong>de</strong>s<br />

mœurs? Nous le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rions à Dieu, sans doute, mais ces sortes <strong>de</strong> miracles sont‐ils<br />

communs? Voyez, cher ami, si, consciencieusement, ce père ne <strong>de</strong>vrait pas être pressé <strong>de</strong><br />

se montrer moins indifférent.<br />

Adieu, bien cher ami, croyez à tous mes sentiments affectueux et tendrement dé‐<br />

voués en N.S. Mille affections à nos frères.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1081 à M. Caille<br />

Il faut dire nettement les choses à M. Beldame. MLP. sait que la charité <strong>de</strong> M. Caille en sera éprouvée. Il compte<br />

sur son bon vouloir.<br />

Vaugirard, 3 mai 1866<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Le Conseil <strong>de</strong> la Communauté sʹétant réuni hier mercredi, je lui ai communiqué, en<br />

substance, la réponse que je vous ai faite concernant M. Joseph [Beldame]. Sans improuver<br />

le sens <strong>de</strong> cette décision absolument, le Conseil a pensé néanmoins que vous ne feriez pas<br />

une épreuve avantageuse pour votre maison ni pour la Communauté en essayant, <strong>avec</strong><br />

une persistance charitable, <strong>de</strong> faire <strong>de</strong> M. Joseph un religieux, les dispositions essentielles<br />

pour cet état <strong>de</strong> vie paraissant faire défaut en lui; nos ff. ont donc pensé quʹil serait mieux<br />

dʹagir nettement, en lui faisant connaître que nous ne le croyons pas appelé, à raison <strong>de</strong> sa<br />

santé en particulier, à embrasser un genre <strong>de</strong> vie aussi ru<strong>de</strong> et aussi laborieux que lʹest le<br />

nôtre.<br />

1100


Si les termes <strong>de</strong> ma <strong>de</strong>rnière lettre avaient été communiqués par vous à M. Joseph et<br />

vous faisaient une difficulté pour lui notifier la décision plus précise que je vous commu‐<br />

nique aujourdʹhui, dʹaprès le vœu du Conseil, vous pourrez user <strong>de</strong> telles temporisations<br />

et ménagements que vous croirez nécessaires; la pensée qui a surtout occupé le Conseil,<br />

cʹest quʹici une tâche infructueuse allait incomber à votre charité, le succès ne paraissant<br />

point possible là où le fond même du sujet paraissait être insuffisant; cʹétait surtout pour<br />

ne pas user sans discrétion <strong>de</strong> votre bon vouloir, toujours disposé à obliger et à concourir<br />

au bien, que lʹavis du Conseil a été émis.<br />

Je pense <strong>avec</strong> vous que M. Allard fera bien <strong>de</strong> revenir sans retard, si vous jugez<br />

quʹau moyen <strong>de</strong>s combinaisons dont nous nous sommes entretenus, son exonération soit<br />

praticable. Nous vous enverrons, dès que vous nous aurez donné avis définitif:<br />

1° les 500f accordés par la Communauté,<br />

2° les 500 autres f que nous emprunterons, suivant nos conventions.<br />

Adieu, mon bien bon ami, croyez comme toujours à nos sentiments les plus affec‐<br />

tueusement dévoués en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Si je puis, je vous ferai, comme vous le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z, une visite au jour <strong>de</strong> la Tri‐<br />

nité; mais je nʹose lʹassurer, y voyant encore plusieurs obstacles.<br />

Nous avons dû gar<strong>de</strong>r à Vaugirard, après la retraite, M. Alexandre [Legrand] au‐<br />

quel lʹair dʹAngers ne semblait pas favorable; <strong>de</strong>s acci<strong>de</strong>nts <strong>de</strong> santé sʹétaient <strong>de</strong>rnièrement<br />

plusieurs fois répétés.<br />

M. Lantiez voulait répondre à la lettre <strong>de</strong> M. Joseph, mais il a été obligé dʹaller à<br />

Metz; il reviendra à la fin <strong>de</strong> cette semaine.<br />

1082 à M. Trousseau<br />

Pénurie <strong>de</strong> personnel. Eviter <strong>de</strong>s combinaisons provisoires successives.<br />

Vaugirard, 3 mai 1866<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Nous sommes heureux que vous ayez fait un bon voyage et soyez arrivé sain et sauf<br />

à Arras; jʹai reçu un mot aussi <strong>de</strong> M. Laroche, écrit <strong>de</strong> Duisans.<br />

Lʹabsence dʹun <strong>de</strong> vos professeurs vous crée une nouvelle charge; jʹespère quʹelle se‐<br />

ra tout à fait momentanée et que le prompt retour <strong>de</strong> ce bon Monsieur va vous dégager <strong>de</strong><br />

ce côté.<br />

Nous nous sommes occupés hier, au Conseil, <strong>de</strong>s possibilités, sʹil en existe, <strong>de</strong> vous<br />

donner un peu dʹai<strong>de</strong>. M. Laroche <strong>de</strong>man<strong>de</strong> quʹon envoie quelquʹun, ne fût‐ce, dit‐il, que<br />

pour un mois, M. Emile [Beauvais], par exemple, ou quelque autre. Le Conseil pense quʹil<br />

serait fâcheux <strong>de</strong> vous mettre ainsi dans un provisoire constant et <strong>de</strong>s changements multi‐<br />

pliés, quʹune difficulté semblable serait, à vrai dire, inévitable si M. Emile vous était en‐<br />

voyé parce quʹaprès un court délai, on sentirait la nécessité <strong>de</strong> le rappeler; il a préféré<br />

quʹon sʹévertuât pour vous donner un ai<strong>de</strong> plus stable et qui pût vous rester durant le<br />

temps <strong>de</strong> lʹabsence <strong>de</strong> M. Laroche. Deux <strong>de</strong> nos ff. ont été nommés comme pouvant, à peu<br />

près <strong>avec</strong> avantage égal, vous donner assistance: MM. Guillot et Jouin. M. Laroche peut<br />

choisir celui <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux quʹil croira, <strong>avec</strong> vous, le meilleur pour vos services.<br />

1101


Je mʹabstiens <strong>de</strong> donner un avis, parce que je crois que vous tirerez meilleur parti <strong>de</strong><br />

celui qui vous conviendra le mieux, quand même il serait en réalité moins capable que<br />

lʹautre; il faut laisser une part aux convenances personnelles, notre pauvre nature semble<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r ces ménagements.<br />

Je voulais écrire aussi à M. Laroche aujourdʹhui, mais, si je le fais, ma lettre sera re‐<br />

tardée; écrivez‐lui ou envoyez‐lui ces lignes, afin que vous décidiez <strong>avec</strong> lui ce qui est le<br />

plus avantageux pour vous. MM. Guillot et Jouin sont également sûrs, dévoués et obéis‐<br />

sants.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1083 à M. Chaverot<br />

Diverses formalités (pension, titre clérical). Petites réunions à Issy.<br />

Vaugirard, 4 mai 1866<br />

Totum per Mariam<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Je reçois votre petite lettre <strong>avec</strong> le mandat y joint. Je vous prie <strong>de</strong> me dire ce que je<br />

dois au Séminaire pour ce <strong>de</strong>rnier trimestre, tant pour vous que pour M. <strong>de</strong> Varax, afin<br />

que jʹy pourvoie sans retard.<br />

Votre petite lettre est affectueuse et bien aimable, comme toujours; puis elle me<br />

donne bonne espérance pour mercredi. Je mʹafflige un peu <strong>de</strong> lʹindisposition <strong>de</strong> notre cher<br />

M. <strong>de</strong> Varax; obligez‐le, en mon nom, à se soigner beaucoup et à me donner bientôt <strong>de</strong> ses<br />

nouvelles.<br />

Nʹayez aucune préoccupation pour ce qui concerne votre titre clérical; je puis, si vos<br />

bons parents tardaient trop à sʹen occuper, pour une raison ou pour une autre, vous four‐<br />

nir <strong>de</strong>s valeurs qui vous permettraient <strong>de</strong> constituer vous‐même cette garantie; nous lève‐<br />

rions donc ainsi toute difficulté. Ayez lʹesprit en paix et laissons tout à la conduite <strong>de</strong> Dieu.<br />

Les petites réunions à Issy me semblent charmantes; jʹai dit déjà à M. <strong>de</strong> Varax com‐<br />

bien cette pensée mʹavait réjoui; soyez bien sûr que Dieu est au milieu <strong>de</strong> vous, car vous<br />

êtes assemblés en son nom et sous les auspices <strong>de</strong> notre bien‐aimée Mère, la T. Ste Vierge.<br />

La lettre <strong>de</strong> Mgr dʹAutun à M. <strong>de</strong> Varax est toute consolante; vous voyez bien que le<br />

Seigneur travaille <strong>avec</strong> nous, les épreuves seront, en autre sens, un second témoignage.<br />

Adieu, bien cher ami, partagez <strong>avec</strong> M. <strong>de</strong> Varax tous mes sentiments <strong>de</strong> tendre af‐<br />

fection en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Emile [Beauvais] <strong>de</strong>man<strong>de</strong> sʹil doit toujours acheter pour 200f <strong>de</strong> drap pour vos<br />

pauvres; M. <strong>de</strong> Varax ne mʹen a pas parlé mercredi.<br />

1084 à M. Trousseau<br />

Première communion <strong>de</strong>s enfants dʹArras. Comment ménager la susceptibilité <strong>de</strong> MM. les Curés, sans nuire à<br />

lʹordre <strong>de</strong> la maison. Changement <strong>de</strong> personnel.<br />

1102


Vaugirard, 8 mai 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous nous sommes entretenus <strong>de</strong> la question <strong>de</strong> la première communion à faire à<br />

lʹintérieur. Nos ff. du Conseil pensent que, si lʹon prévoit que MM. les Curés voient cette<br />

disposition <strong>avec</strong> mécontentement, il y aurait inconvénient à les indisposer contre vous au<br />

commencement dʹun établissement et quand vos petites tribulations du moment vous<br />

ren<strong>de</strong>nt la bienveillance <strong>de</strong> votre entourage plus désirable. Il y aurait lieu toutefois dʹexa‐<br />

miner la question <strong>de</strong> très près si vos élèves, faisant leur première communion <strong>de</strong>hors, <strong>de</strong>‐<br />

vaient la faire, non tous ensemble et dans une même paroisse, mais dans leurs paroisses<br />

respectives, cʹest‐à‐dire les uns à certain moment, les autres à un autre moment; il est évi‐<br />

<strong>de</strong>nt quʹen ce <strong>de</strong>rnier cas, il y aurait pour vos classes une cause <strong>de</strong> dérangement et <strong>de</strong> dé‐<br />

sordre qui pourrait avoir sa gravité. Pesez ces <strong>de</strong>ux considérations; elles nous ont paru les<br />

plus propres à motiver votre décision en un sens ou un autre. Si vous en avez dʹautres <strong>de</strong><br />

quelque valeur, elles peuvent entrer aussi dans la balance. Enfin, puisque Mgr Lequette, le<br />

nouvel évêque, est très bien veillant pour M. Laroche, il serait bien, en cas <strong>de</strong> doute sé‐<br />

rieux, <strong>de</strong> prendre son avis.<br />

Jʹespère que M. Guillot pourra vous arriver à la fin <strong>de</strong> cette semaine; il avait, <strong>de</strong>puis<br />

la retraite et à raison <strong>de</strong> lʹenvoi <strong>de</strong> M. Ladouce à Angers, été obligé <strong>de</strong> prendre ici une pe‐<br />

tite classe; il faut le remplacer et faire un remaniement dans le personnel dʹautres classes;<br />

tous ces mouvements, dont vous comprenez les inconvénients, ne se peuvent faire quʹ<strong>avec</strong><br />

quelques jours qui ménagent les transitions.<br />

Nous espérons que le beau temps, qui semble nous arriver, contribuera bientôt à<br />

redonner un peu dʹamélioration à la santé <strong>de</strong> M. Laroche. Nous avons appris <strong>avec</strong> plaisir<br />

quʹil a trouvé une petite <strong>de</strong>meure au bord <strong>de</strong> la mer; nous prions tous les jours pour lui et<br />

aussi pour vous, cher ami, afin que Dieu porte vos charges <strong>avec</strong> vous et vous les ren<strong>de</strong><br />

profitables.<br />

Tous nos ff. vont assez bien; tous vous assurent <strong>avec</strong> moi <strong>de</strong> leur tendre affection en NSJC.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1085 à M gr Angebault<br />

Pouvoirs <strong>de</strong> confesseur à Angers. Un peu dʹépreuve ne tue pas.<br />

Vaugirard, 8 mai 1866<br />

Monseigneur,<br />

Je suis bien vivement reconnaissant <strong>de</strong> la bonté que vous avez eue <strong>de</strong> me communi‐<br />

quer la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> que vous a adressée notre cher M. dʹArbois, afin dʹobtenir, en faveur <strong>de</strong><br />

M. Gauffriau, le pouvoir <strong>de</strong> confesser.<br />

Je ne pense pas, Monseigneur, quʹil y ait aucun inconvénient à donner cette permis‐<br />

sion à M. Gauffriau; il confessait à Metz et remplissait les fonctions dʹaumônier dans la<br />

maison <strong>de</strong>s Petites Sœurs <strong>de</strong>s Pauvres; M gr <strong>de</strong> Metz sʹest montré très satisfait du bien spiri‐<br />

tuel quʹil faisait dans cette maison; je crois que, sʹil en avait les occasions, il en serait <strong>de</strong><br />

même à Angers; il est à croire seulement que, dans la sphère dʹaction où il est placé, il<br />

nʹaurait pas souvent à user <strong>de</strong>s pouvoirs que vous auriez bien voulu lui accor<strong>de</strong>r. Pour ce<br />

qui regar<strong>de</strong> la communauté, je pense quʹil en userait discrètement et seulement dans les<br />

limites que tracerait M. dʹArbois.<br />

1103


Toute notre petite famille accueille <strong>avec</strong> bonheur lʹespoir <strong>de</strong> vous voir au mois <strong>de</strong><br />

juillet prochain; votre présence, vos paroles paternelles seront pour nous une douce conso‐<br />

lation, et nous chanterons à pleine voix: Benedictus qui venit in nomine Domini.<br />

Nous nous soutenons, <strong>avec</strong> la grâce <strong>de</strong> Dieu, bien que les temps aient été un peu<br />

durs; un peu dʹépreuve ne tue pas; si le Seigneur daigne nous enseigner le grand art dʹen<br />

profiter, nous serons assis sur le sol soli<strong>de</strong> <strong>de</strong> la confiance et <strong>de</strong> la soumission envers le<br />

Souverain Maître.<br />

Veuillez agréer, Monseigneur, les sentiments <strong>de</strong> profond respect <strong>avec</strong> lesquels je<br />

suis, en N.S.,<br />

Votre humble et tendrement dévoué serviteur et fils<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1086 à M. dʹArbois<br />

Confession et direction <strong>de</strong>s frères. Allier la liberté et lʹordre. Encouragement à consulter un père jésuite qui lui<br />

inspire confiance. M. dʹArbois fait une bonne œuvre envers le personnel domestique. Dévotion au mois <strong>de</strong> Marie.<br />

Vaugirard, 8 mai 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M gr dʹAngers mʹécrit un mot pour me dire la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> que vous lui avez faite<br />

concernant les confessions que M. Gauffriau pourrait avoir, particulièrement dans votre<br />

communauté.<br />

Je nʹai guère compris dʹabord <strong>de</strong> quoi il sʹagissait, car les confessions chez nous ne<br />

pouvaient guère concerner notre bon Seigneur lʹEvêque dʹAngers; jʹai donc pensé que, jus‐<br />

quʹici, M. Gauffriau nʹavait pas eu à Angers <strong>de</strong> pouvoirs pour la confession et que cʹétait là<br />

lʹobjet <strong>de</strong> votre <strong>de</strong>man<strong>de</strong>. Dans cette supposition, je réponds à M gr que M. Gauffriau fera, à<br />

lʹoccasion, bon usage <strong>de</strong> ses pouvoirs <strong>de</strong> confesser et que je verrai <strong>avec</strong> plaisir quʹils lui<br />

soient accordés. Je ne vois guère toutefois quelles occasions il aura <strong>de</strong> sʹen servir puisque,<br />

sous ce rapport, le patronage et la Maîtrise sont déjà pourvus. Quant à la confession <strong>de</strong> vos<br />

trois frères, ils ont un p. Jésuite et si, par circonstance, ils ont besoin dans la semaine dʹune<br />

réconciliation, il me semble fort simple quʹils recourent alors à vous; sʹil sʹagissait dʹune<br />

confession proprement dite, la maison <strong>de</strong>s rr.pp. nʹest pas si loin; je ne verrais guère<br />

dʹavantage à ce quʹayant votre direction, celle du Père Jésuite, ils en prissent encore une<br />

troisième près <strong>de</strong> M. Gauffriau; la lettre <strong>de</strong> M gr mʹa semblé écrite sous cette impression.<br />

Pour ce qui vous regar<strong>de</strong> personnellement, cher ami, je regrette dʹavoir omis, tout à<br />

fait involontairement, <strong>de</strong> vous dire que je trouverai très bien que vous consultiez quelque‐<br />

fois le r. p. qui vous inspire confiance, afin <strong>de</strong> suppléer à la trop gran<strong>de</strong> brièveté <strong>de</strong>s avis<br />

<strong>de</strong> votre confesseur ordinaire.<br />

Ce que vous faites pour la femme Guillot est une bonne œuvre; cʹest une femme fai‐<br />

ble que le malheur a abattue et que <strong>de</strong> mauvais enfants, un du moins, tourmente cruelle‐<br />

ment. Si toutefois elle vous <strong>de</strong>venait à charge, rien ne vous oblige à la gar<strong>de</strong>r; seulement,<br />

en évitant un ennui, vous tomberez dans un autre. Béatrix, votre première servante, serait<br />

disposée à vous revenir, moyennant une augmentation <strong>de</strong> 5f par mois; mais gagneriez‐<br />

vous au change et auriez‐vous une garantie <strong>de</strong> plus gran<strong>de</strong> constance?<br />

Je prie Dieu <strong>de</strong> rendre bien fructueux vos exercices du mois <strong>de</strong> Marie. Mettez aux<br />

pieds <strong>de</strong> cette bonne Mère toutes vos petites difficultés et <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z‐lui <strong>de</strong> faire tourner<br />

1104


toute épreuve au bien <strong>de</strong> vos âmes et à la sanctification <strong>de</strong> tous ceux dont vous avez la<br />

charge spirituelle.<br />

Adieu, bien cher ami, tous ici vous aiment <strong>avec</strong> moi; M gr dʹAngers me dit une fois <strong>de</strong><br />

plus que tout va bien à la Maîtrise et au patronage; il veut seulement que je vous recom‐<br />

man<strong>de</strong> <strong>de</strong> ménager votre santé.<br />

Votre affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1087 à M. dʹArbois<br />

Le personnel domestique. Quelques nouvelles <strong>de</strong>s scolastiques et <strong>de</strong> leurs examens.<br />

16 mai [1866]<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Planchat a reçu vos notes concernant les affaires <strong>de</strong> Mme Guillot; il sʹen occupe, je<br />

ne sais si ce sera <strong>avec</strong> quelque succès.<br />

Nous avons bien prié pour la retraite <strong>de</strong> vos jeunes gens et pour la première com‐<br />

munion <strong>de</strong> la Maîtrise. Demain jeudi, nous irons à N.D. <strong>de</strong>s Victoires; nous y porterons ces<br />

intentions au St Sacrifice.<br />

Ici, rien <strong>de</strong> nouveau, les esprits et les corps semblent être en assez bonne disposi‐<br />

tion; nos jeunes ff. <strong>de</strong>s Séminaires vont bien aussi; MM. <strong>de</strong> Varax et Chaverot sont appelés<br />

au sous‐diaconat, MM. Leclerc, Pattinote, Camus à la tonsure; M. Boiry, quoique non infé‐<br />

rieur aux autres, a été dérouté par une question <strong>de</strong> géométrie et a échoué, mais <strong>avec</strong> les<br />

encouragements <strong>de</strong>s Supérieurs qui le jugent très propre et très capable pour suivre la car‐<br />

rière.<br />

Adieu, bien cher ami, nous pensons <strong>avec</strong> satisfaction que vous pourrez vous échap‐<br />

per quelques instants vers le mois <strong>de</strong> septembre ou autrement, pour passer vos jours <strong>de</strong><br />

repos <strong>avec</strong> nous. Assurez tous vos ff. <strong>de</strong> notre tendre affection en N.S.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

La santé <strong>de</strong> M. Alexandre [Legrand] se soutient; <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z néanmoins au mé<strong>de</strong>cin<br />

ce quʹil croirait pru<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> faire et sʹil prescrit quelque traitement préventif, envoyez‐nous<br />

son ordonnance.<br />

Les parents <strong>de</strong> M. Ladouce ont reçu sa lettre <strong>avec</strong> joie.<br />

1088 à M. lʹabbé Laroche<br />

A propos dʹun jeune garçon que lʹabbé Laroche pourrait recevoir à Arras. Sʹil est seul dans sa voie, sans pouvoir<br />

être suivi, MLP. nʹest guère favorable.<br />

Vaugirard, 24 mai 1866<br />

Cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S.,<br />

Nous avons trouvé, dans votre lettre, quelques petits indices ou promesses dʹamé‐<br />

lioration dans votre santé; nous en avons éprouvé une gran<strong>de</strong> joie et nous espérons<br />

1105


quʹ<strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> patience, cette crise <strong>de</strong> maladie donnera lieu peut‐être à un affermisse‐<br />

ment complet et définitif <strong>de</strong> votre constitution.<br />

Jʹai consulté nos ff. au sujet du jeune garçon que vous avez quelque tentation <strong>de</strong> re‐<br />

cevoir chez vous. Ils nʹont pu donner dʹavis bien éclairé, faute <strong>de</strong> connaître les aptitu<strong>de</strong>s, la<br />

science, le goût pour lʹétu<strong>de</strong> ou pour tout autre carrière quʹaurait cet enfant. Sa piété, son<br />

caractère, sa tenue sont aussi <strong>de</strong>s raisons à mettre dans la balance. En général, lʹexpérience<br />

nous a démontré quʹun enfant se trouve, soit pour <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s, soit pour la préparation<br />

dʹune carrière quelconque, en mauvaise position, pour lui comme pour la maison, quand il<br />

est seul dans sa voie; il ne peut être suivi ni surveillé convenablement; il nʹa pas lʹentou‐<br />

rage et les appuis quʹil lui faut; il nʹa pas, en un mot, sa place, il végète et tourne mal. Nous<br />

avons résolu, pour nous, <strong>de</strong> nʹen mettre aucun dans <strong>de</strong> pareilles conditions. Je ne saurais<br />

énoncer dʹavis plus précis, faute <strong>de</strong> renseignements sur les divers points que jʹindiquais<br />

plus haut, concernant les aptitu<strong>de</strong>s et les aspirations <strong>de</strong> cet enfant. Je vous prie, cher Mon‐<br />

sieur lʹabbé, si vous croyez bon <strong>de</strong> suivre cette pensée, <strong>de</strong> nous faire parvenir quelque au‐<br />

tre explication.<br />

Je ne me suis pas expliqué la tristesse <strong>de</strong> M. Mitouard, ne voyant pour lui aucune<br />

cause <strong>de</strong> découragement; cʹest un homme sûr et <strong>de</strong> bonne volonté, nous avons estime et af‐<br />

fection pour lui.<br />

Tout le mon<strong>de</strong> ici se recomman<strong>de</strong> à vos bons souvenirs; nous aurons soin, <strong>de</strong> notre<br />

côté, <strong>de</strong> nʹoublier ni vous, ni les vôtres, ni particulièrement vos enfants <strong>de</strong> la première<br />

communion.<br />

Adieu, bien cher Monsieur lʹabbé et fils en N.S., croyez à tous nos sentiments <strong>de</strong><br />

cordiale affection.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1089 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Félicitations pour son ordination au sous‐diaconat. Union <strong>de</strong> prières.<br />

Vaugirard, 28 mai 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Vous aurez bien compris tous les <strong>de</strong>ux, vous et M. Chaverot, quʹabsent corporelle‐<br />

ment <strong>de</strong> lʹordination, jʹy étais plus que personne par la volonté et la pensée; le samedi est<br />

pris tout entier pour moi et, si une heure se trouve libre, mes mouvements sont lents, une<br />

heure ne me suffit pas pour changer <strong>de</strong> place. Heureusement, la pensée franchit les espa‐<br />

ces et les murailles; jʹai donc pénétré jusquʹà vous, je vous ai vus, jʹai prié près <strong>de</strong> vous et,<br />

tout en même temps, je priais à la chapelle <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette. Tous nos frères mʹont dit<br />

vos saintes joies; M. Lantiez a trouvé toutefois que vous sembliez être très fatigué. Cʹest<br />

particulièrement afin que vous mʹécriviez un mot qui me donne <strong>de</strong> vos nouvelles que je<br />

fais ces lignes. Je crains quʹà raison <strong>de</strong> la Fête‐Dieu jeudi, votre sortie soit avancée et placée<br />

à <strong>de</strong>main mardi; je ne serai pas <strong>de</strong>main à Vaugirard. M. Paillé mʹemmène pour une excur‐<br />

sion; mais ce ne serait, ni pour vous ni pour notre cher M. Chaverot, une raison <strong>de</strong> nʹy pas<br />

venir, nos frères seront si heureux <strong>de</strong> vous voir lʹun et lʹautre!<br />

Je ne vous dis rien <strong>de</strong>s joies <strong>de</strong> lʹordination; ces choses sont plus gran<strong>de</strong>s que la pa‐<br />

role; on sent, on aime, on bénit Dieu, cʹest tout; on préfère ne rien dire, cela répond mieux<br />

à lʹinfini quʹon a dans le cœur.<br />

1106


Jʹai aperçu aux mains <strong>de</strong> M. lʹabbé Leclerc le premier volume <strong>de</strong> lʹIntérieur <strong>de</strong> la<br />

Sainte Vierge; je suis heureux que vous ayez lʹespoir <strong>de</strong> lʹavoir bientôt entre vos mains, ce<br />

sera une douce pâture pour vos vacances.<br />

Adieu, bien cher ami, offrez, si vous le trouvez à propos, mon respect à Madame<br />

votre mère; partagez <strong>avec</strong> M. Chaverot mes sentiments les plus tendres et les plus dévoués<br />

en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1090 à M. dʹArbois<br />

Observations à propos dʹune nouvelle chapelle. Rayonnement <strong>de</strong> la communauté dʹAngers. Nouvelles <strong>de</strong>s frères<br />

<strong>de</strong>s séminaires. Questions financières.<br />

Vaugirard, 2 juin 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous renvoie votre petit plan concernant lʹappropriation dʹune nouvelle chapelle<br />

à la Maîtrise dans le salon <strong>de</strong> réception. Elle sera un peu plus commodément établie ainsi,<br />

mais elle restera extrêmement petite, le couloir qui est à côté restant couloir et étant trop<br />

étroit pour donner un agrandissement proprement dit. M. Lantiez faisait observer que, si<br />

la chapelle gagne quelque peu à cet arrangement, le salon <strong>de</strong> réception y perdra beaucoup,<br />

puisque la chapelle actuelle, qui serait mise à usage <strong>de</strong> salon, est basse, mal éclairée et<br />

triste; il <strong>de</strong>mandait si ces inconvénients nʹétaient pas moindres pour une chapelle où on ne<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> pas dʹordinaire un grand jour et où tout est sérieux, que pour un salon <strong>de</strong> récep‐<br />

tion, <strong>de</strong>stiné surtout aux réceptions presque quotidiennes <strong>de</strong>s jeunes gens. Cette observa‐<br />

tion me paraît avoir une valeur sérieuse, mais je lʹabandonne à votre sagesse et vous laisse<br />

tout à fait libre dʹexécuter votre projet; le premier ayant déjà été arrêté dans sa marche par<br />

nos critiques, je ne veux pas jeter encore <strong>de</strong>s entraves à celui‐ci; nous pensons comme vous<br />

quʹil est difficile <strong>de</strong> tirer grand parti <strong>de</strong>s locaux <strong>de</strong> la Maîtrise; vous jugerez si le salon<br />

nouveau peut convenir sans trop <strong>de</strong> défectuosité à la <strong>de</strong>stination qui lui serait donnée. Je<br />

remarque que vous ne comptez rien en dépense pour son arrangement, et surtout pour<br />

lʹappropriation <strong>de</strong> la sacristie qui en dépendrait; il semble que ces changements ne se fe‐<br />

ront pas sans frais.<br />

Nous avons vu M gr dʹAngers <strong>avec</strong> M. Chesnay; il a eu la bonté <strong>de</strong> donner vendredi<br />

la confirmation à nos enfants <strong>de</strong> la première communion; il a déjeuné ensuite <strong>avec</strong> les an‐<br />

ciens <strong>de</strong> la Communauté, et après il nous a réunis tous pour nous faire une très aimable et<br />

toute paternelle exhortation.<br />

Il nous a, ainsi que M. Chesnay, assurés que vous aviez <strong>avec</strong> la Communauté une<br />

très bonne position à Angers, où tout le mon<strong>de</strong> était très bien disposé pour vous; M. Pavie,<br />

il y a quelques jours, me répétait la même affirmation; ayez donc confiance, bien cher ami,<br />

puisque Dieu bénit vous et vos travaux, et continuez à le bien servir là où Il vous a placé<br />

dans son œuvre.<br />

Je pense que tous vos frères vont bien. Tout Vaugirard se plaint <strong>de</strong> ne point recevoir<br />

<strong>de</strong> lettres <strong>de</strong> M. Ladouce.<br />

Ces Messieurs <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul <strong>de</strong> S te ‐Anne ont trouvé, après la mort dʹun<br />

jeune ouvrier nommé Hugon, diverses lettres écrites par M. Moutier et dont le sens était<br />

1107


fort contraire à leurs vues pour la direction <strong>de</strong> la maison S te ‐Anne; ils en ont montré beau‐<br />

coup <strong>de</strong> mécontentement.<br />

Nos jeunes ff. <strong>de</strong>s Séminaires sont arrivés ces jours‐ci et sont momentanément ré‐<br />

unis à Chaville; plusieurs y resteront peu; M. Chaverot est obligé <strong>de</strong> faire une apparition<br />

dans sa famille; M. <strong>de</strong> Varax, au bout <strong>de</strong> ses forces, est obligé, par ordre du mé<strong>de</strong>cin, <strong>de</strong> re‐<br />

tourner aux eaux où il est allé lʹan <strong>de</strong>rnier; à son retour, il ira porter un peu secours à la<br />

maison dʹArras, où lʹabsence <strong>de</strong> M. Laroche, mala<strong>de</strong>, fait un grand vi<strong>de</strong>.<br />

Je nʹai point parlé, ni à M gr , ni à M. Chesnay, <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong> la Maîtrise; M gr mʹa dit<br />

quʹil vous trouvait timi<strong>de</strong> pour la chapelle <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong>s Champs; je conçois pour moi aisé‐<br />

ment que vous redoutiez <strong>de</strong> vous créer <strong>de</strong>s embarras financiers, nous éprouvons trop à<br />

Grenelle et aux Jeunes Ouvriers <strong>de</strong> Nazareth combien <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ttes lour<strong>de</strong>s créent <strong>de</strong> diffi‐<br />

cultés pour la marche <strong>de</strong>s œuvres et embarrassent lʹaction religieuse et morale <strong>de</strong> lʹœuvre.<br />

Il semble difficile, en ce moment, quʹaucun <strong>de</strong> nos frères puisse aller à Angers, mais<br />

le temps nʹest pas loin où vous pourrez venir vous‐même un peu; M gr me disait que vous<br />

pourrez vous absenter aisément quinze jours, peut‐être eût‐il dit plus si je nʹeusse moi‐<br />

même indiqué ce terme. Ce sera une gran<strong>de</strong> joie pour tous nos frères, qui vous sont très at‐<br />

tachés, <strong>de</strong> vous revoir au milieu dʹeux; elle sera bien partagée par moi, vous le savez, cher<br />

enfant.<br />

Mille affections pour vous tous et par tous, surtout par<br />

Votre affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1091 à M. Trousseau<br />

Comment on combat le découragement.<br />

Vaugirard, 3 juin 1866<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Je pense que la petite tentation <strong>de</strong> découragement que vous me manifestiez dans<br />

votre lettre dʹhier est déjà passée, comme les nuages qui cachent un moment le soleil, mais<br />

que le soleil dévore ou chasse au loin. Je vous ai vu souvent <strong>de</strong>s épreuves semblables, mais<br />

je vous ai aussi toujours vu vous en rendre maître et prendre le <strong>de</strong>ssus. Vous en tirerez<br />

bon parti, comme vous lʹavez fait par le passé; vous reconnaîtrez quʹil faut fortifier <strong>de</strong> plus<br />

en plus en vous la patience, la fermeté en présence <strong>de</strong>s difficultés, afin dʹachever lʹœuvre<br />

<strong>de</strong> votre formation spirituelle; vous le savez bien, on nʹest pleinement un bon instrument<br />

aux mains du Seigneur que quand on sʹest endurci à la peine, et quʹon peut porter résolu‐<br />

ment les contrariétés et les passes difficiles. Et comment y arrive‐t‐on? Comme on arrive à<br />

fortifier le corps et à lʹassouplir, par les exercices <strong>de</strong> gymnastique et un travail un peu<br />

ru<strong>de</strong>. Vous y êtes en ce moment, cher enfant, non par votre choix, mais par <strong>de</strong>s circonstan‐<br />

ces qui manifestent évi<strong>de</strong>mment la volonté <strong>de</strong> Dieu; tenez donc ferme, en lʹinvoquant<br />

pieusement et <strong>avec</strong> ferveur, et soyez sûr quʹIl disposera les choses pour que vous ayez sou‐<br />

lagement ou pour que dʹautres moyens nous adviennent.<br />

Vous nʹavez dʹailleurs en ce moment quʹà temporiser chrétiennement, puisque dans<br />

quelques jours M. Laroche doit nous venir voir. Il nous exposera à ce moment ses vues sur<br />

la situation et sur les remè<strong>de</strong>s qui pourraient y être apportés. Remontez‐vous donc, si,<br />

1108


comme je le disais, ce nʹest déjà fait; ayez confiance, priez, la foi remue les montagnes et la<br />

ferveur touche infailliblement le cœur <strong>de</strong> N.S., le cœur aussi si tendre, si miséricordieux <strong>de</strong><br />

Marie, notre Mère. Je prie <strong>avec</strong> vous, et je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> aussi la prière <strong>de</strong> ceux qui mʹentourent<br />

et qui vous sont, comme moi, bien affectueusement dévoués en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1092 à M. Caille<br />

Le choléra à Amiens. On peut, dans <strong>de</strong> telles circonstances, accepter une surcharge passagère <strong>de</strong> travail, (accueil<br />

dʹorphelins), mais il ne faut pas sʹengager dans <strong>de</strong>s entreprises définitives quʹon ne pourrait soutenir.<br />

Vaugirard, 5 juin 1866<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Nous suivons <strong>avec</strong> un douloureux intérêt les phases <strong>de</strong> lʹépidémie qui désole votre<br />

ville; nous espérons que Dieu éloignera bientôt ce terrible fléau et nous le prions à cette in‐<br />

tention. Nous disons les messes que vous avez <strong>de</strong>mandées et nous continuons, sʹil est be‐<br />

soin, à offrir nos sacrifices <strong>de</strong>vant le Seigneur, afin quʹIl mette fin, selon sa miséricor<strong>de</strong>, à<br />

cette pénible épreuve.<br />

Nous le remercions en même temps <strong>de</strong> ce que, jusquʹici, votre maison a été épar‐<br />

gnée. Je ne saurais blâmer le zèle charitable que vous avez montré pour secourir les orphe‐<br />

lins dans ces graves circonstances; jʹaurais trouvé mieux toutefois que vous eussiez <strong>de</strong>‐<br />

mandé un délai dʹun jour ou <strong>de</strong>ux pour convenir <strong>avec</strong> nous <strong>de</strong> ce qui pouvait être accepté<br />

par vous. En ce cas, jʹeusse cru à propos que vous nʹacceptiez cette charge nouvelle que<br />

provisoirement et jusquʹà ce que les Conférences eussent avisé <strong>avec</strong> les autorités à trouver<br />

<strong>de</strong>s agents dignes et sûrs pour leur confier définitivement ces enfants orphelins. Je ne vois<br />

pas, en effet, comment vous pourriez, sans détriment pour les œuvres déjà absorbantes<br />

que vous avez, prendre <strong>de</strong>s soins constants dʹenfants orphelins résidant chez vous. Vous<br />

avez dû, après un premier et long essai, renoncer à réunir ensemble chez vous <strong>de</strong>s écoliers<br />

et <strong>de</strong>s jeunes ouvriers; vous allez vous retrouver <strong>avec</strong> les mêmes difficultés, sans nou‐<br />

veaux moyens pour y subvenir. Je ne puis dʹailleurs juger entièrement la question, votre<br />

lettre ne contenant aucun détail sur le nombre <strong>de</strong>s enfants adoptés et sur les conditions<br />

auxquelles ils seront reçus dans votre Maison. Une surcharge temporaire est acceptable<br />

dans <strong>de</strong>s circonstances impérieuses, mais une longue expérience nous a trop appris com‐<br />

bien <strong>de</strong>s œuvres diverses et compliquées se nuisent lʹune à lʹautre et créent, en avançant,<br />

<strong>de</strong> tristes embarras.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> lʹenvoi <strong>de</strong> lʹétoffe que je vous avais <strong>de</strong>mandée; je ne lʹai pas vue,<br />

mais on mʹa dit quʹelle était arrivée; M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] sʹentendra <strong>avec</strong> vous pour<br />

lʹacquit <strong>de</strong> la facture.<br />

M. Laroche continuant à être fatigué et hors dʹétat <strong>de</strong> sʹoccuper <strong>de</strong> sa maison, nous<br />

sommes obligés dʹenvoyer dans quelques jours M. Chaverot pour ai<strong>de</strong>r M. Trousseau; M.<br />

<strong>de</strong> Varax, après avoir remis sa santé fatiguée par <strong>de</strong>ux années <strong>de</strong> Séminaire, ira à son tour<br />

passer un certain temps à Arras. Nous sommes si peu nombreux et si peu forts que les<br />

moindres acci<strong>de</strong>nts parmi notre personnel nous font <strong>de</strong>s difficultés.<br />

Adieu, mon bien cher ami, recourons à Dieu et comptons sur ses miséricordieuses<br />

bontés; Il nous a, jusquʹici, bien assistés; son secours ne nous manquera pas non plus dans<br />

lʹavenir.<br />

1109


Mille affections pour vous et pour nos frères.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1093 à M. dʹArbois<br />

MLP. ai<strong>de</strong> M. dʹArbois à combattre sa propension naturelle au pessimisme. Invitation à être bienveillant envers<br />

ses frères. Encourager leurs qualités par la patience. Nouvelles <strong>de</strong> la Communauté.<br />

Vaugirard, 8 juin 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Aujourdʹhui, fête du Sacré Cœur, la plupart <strong>de</strong> nos ff. <strong>de</strong>s œuvres sont ici, je ne<br />

compte guère vous écrire bien longtemps; je fais néanmoins quelques lignes, regrettant<br />

dʹavoir tardé plus que je ne voulais à le faire.<br />

Votre <strong>de</strong>rnière lettre, en effet, était un peu triste et semblait appeler consolation.<br />

Mais jʹai pensé, cher ami, que la disposition <strong>de</strong> votre esprit venait <strong>de</strong> la fatigue et <strong>de</strong> lʹin‐<br />

suffisance du repos; jʹespère que, présentement, vous êtes revenu à une meilleure assiette<br />

et que vous voyez toutes choses sous un jour plus tranquillisant. Vous le savez, cher ami,<br />

nous lʹavons dit souvent, vous êtes un peu pessimiste, et ce nʹest pas par le beau côté que<br />

vous envisagez les gens et les choses; vous <strong>de</strong>vez donc vous défier un peu <strong>de</strong> cette pro‐<br />

pension et redresser vous‐même vos jugements par un acte <strong>de</strong> haute raison et aussi par un<br />

sentiment <strong>de</strong> charité. Quand on voit le mon<strong>de</strong> fort en noir, il est difficile <strong>de</strong> ne pas lʹattris‐<br />

ter par le manque <strong>de</strong> sympathie, et le support quʹon lui accor<strong>de</strong> est parfois si strict quʹil at‐<br />

tire peu et laisse chacun dans la froi<strong>de</strong>ur. Ranimez un peu votre bienveillance si sincère<br />

dʹordinaire, elle fait contrepoids à la disposition contraire qui vous sollicite <strong>de</strong> temps à au‐<br />

tre et, <strong>avec</strong> la grâce du Seigneur, elle vous fera continuer tout le bien que vous avez fait<br />

constamment parmi nous, à vos frères et à nos œuvres.<br />

Vos frères sont jeunes, mais ils ne sont mauvais par aucun côté essentiel et ils ont,<br />

au contraire, tous dʹheureuses qualités qui, si elles sont cultivées, produiront du fruit par<br />

la patience. Ce nʹest pas sans raison que lʹEvangile se sert <strong>de</strong> ce terme; il faut, en effet,<br />

beaucoup <strong>de</strong> temps et <strong>de</strong> patience pour nous corriger et nous amen<strong>de</strong>r, mais la grâce du<br />

Seigneur, obtenue par la prière, fait beaucoup abréger ces délais; en définitive aussi, tant<br />

quʹil y a bon vouloir, lutte et résistance contre la mauvaise nature, il y a mérite, le temps<br />

nʹest pas perdu et Dieu, plus miséricordieux, moins exigeant que nous, sait trouver sa<br />

gloire là où nous ne trouvons quʹimperfection et sujet <strong>de</strong> blâme. Je le répète, cher enfant, je<br />

suis persuadé que toutes ces réflexions sont hors <strong>de</strong> saison; vous avez repris confiance,<br />

vous travaillez comme précé<strong>de</strong>mment, sous les yeux <strong>de</strong> Dieu, soumis à ses dispositions<br />

toutes sages, et bien résolu à prendre toute épreuve, toute difficulté comme un moyen <strong>de</strong><br />

sanctification que son amour vous a préparé.<br />

Je remarque que notre cher fils, M. Ladouce, ne nous a encore écrit que quelques<br />

mots, encore nʹen suis‐je pas bien sûr. Invitez‐le à nous écrire quelquefois, ainsi que les au‐<br />

tres; on fait toujours, pour ces lettres, un petit effort <strong>de</strong> bonne volonté et <strong>de</strong> retour dʹaffec‐<br />

tion, ce nʹest pas sans avantage pour le cœur qui en reste mieux disposé.<br />

Pensez‐vous que je ferais bien dʹécrire à M. <strong>Jean</strong> [Gauffriau] quelques mots <strong>de</strong> re‐<br />

présentation affectueuse pour lʹinviter à ne pas retomber dans ses mauvaises tenues qui lui<br />

ont été, ici et ailleurs, si justement reprochées?<br />

1110


Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> un petit renseignement. Vous mʹavez dit, je crois que vous aviez<br />

trouvé ici, rue du Bac ou rue S t ‐Dominique un chasublier qui établissait ses marchandises<br />

à <strong>de</strong>s prix fort modérés. Pensez‐vous quʹil soit plus accessible que dʹautres? En ce cas, di‐<br />

tes‐moi plus précisément son adresse. Je voudrais acheter, pour Chaville ou pour Vaugi‐<br />

rard, une petite chape blanche simple et pas chère.<br />

Je nʹai point <strong>de</strong> nouvelles à vous donner; nous sommes au calme immobile en ce<br />

moment, ni bien ni mal; on se soutient, le travail donne fort toujours, lʹargent est peu<br />

commun; êtes‐vous à flot <strong>de</strong> votre côté? Il y a longtemps que vous ne mʹavez rien dit en<br />

matière financière.<br />

M. Laroche est toujours très faible, très épuisé; il doit venir nous voir prochaine‐<br />

ment, il est fort courageux et domine sa faiblesse. M. Paillé est aussi très fatigué en ce mo‐<br />

ment; M. <strong>de</strong> Varax gagnera à peine le moment dʹouverture <strong>de</strong>s vacances au 2 juillet. Il a,<br />

vous le savez, été, ainsi que notre f. Chaverot, promu au sous‐diaconat; 3 sur 4 <strong>de</strong> nos jeu‐<br />

nes ff. dʹIssy ont été tonsurés, M. Urbain [Baumert] lʹa été également à Metz, M. Victor<br />

[Trousseau], <strong>avec</strong> M. [A] Lainé, aussi à Arras; tous marchent; notre jeune Boiry, dʹIssy, dé‐<br />

concerté par une désagréable question <strong>de</strong> géométrie (que fait ici la géométrie?) a mal réus‐<br />

si lʹexamen, il est rejeté à lʹannée prochaine; gran<strong>de</strong> amertume, il nʹest pas encore consolé.<br />

Adieu, bien cher ami, assurez nos frères que je les aime en N.S. bien tendrement, et<br />

croyez aussi à mes plus vives affections dans les Cœurs divins <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Avez‐vous assez <strong>de</strong> mois du Sacré‐Cœur pour vos frères? Je crois que nous en avons<br />

3 ou 4 disponibles.<br />

1094 à M. Girard<br />

Témoignage <strong>de</strong> sympathie à lʹoccasion <strong>de</strong> la maladie <strong>de</strong> sa sœur.<br />

Vaugirard, 21 juin 1866<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Tout ce qui vous touche nous intéresse vivement; nous prenons gran<strong>de</strong> part aux sol‐<br />

licitu<strong>de</strong>s que vous cause la maladie <strong>de</strong> votre chère sœur; les épreuves sont <strong>de</strong>s signes <strong>de</strong><br />

lʹaction <strong>de</strong> Dieu en nous; vous ne lʹoublierez pas et vous attendrez fermement le bien qui<br />

sortira, sensiblement ou non, <strong>de</strong> celle qui vous advient. Nous joignons nos prières aux vô‐<br />

tres; assurez votre chère mala<strong>de</strong> que <strong>de</strong>main vendredi et samedi, je me souviendrai tout<br />

particulièrement dʹelle à lʹautel <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette; votre bonne mère et ses enfants se<br />

sont montrés pieux envers elle, elle ne lʹoubliera pas, soyons‐en bien persuadés.<br />

Adieu, mon bien cher ami, croyez à mes plus cordiales affections en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1095 à M. Caille<br />

Epreuves à Amiens. Départ <strong>de</strong> MM. Carment et Beldame.<br />

Vaugirard, 21 juin 1866<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous sais bien bon gré <strong>de</strong> nous avoir rassurés sur lʹétat <strong>de</strong> tous ceux qui vous en‐<br />

tourent et sont confiés à vos sollicitu<strong>de</strong>s. Je bénis Dieu <strong>avec</strong> vous qui vous a tous épargnés<br />

1111


jusquʹici; jʹespère quʹil daignera encore montrer sa miséricordieuse protection envers votre<br />

maison.<br />

Je vais faire dire les 9 messes que vous désirez, dont une à N.D. <strong>de</strong>s Victoires, lʹautre<br />

à N.D. <strong>de</strong> la Salette.<br />

Je recomman<strong>de</strong>, <strong>de</strong> mon côté, à vous et à vos frères, la première communion <strong>de</strong> nos<br />

enfants qui se fera le jeudi 28, jeudi prochain.<br />

Nous avons pris gran<strong>de</strong> part à lʹaffliction <strong>de</strong> notre f. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet]; sa<br />

pauvre belle‐sœur va rester bien chargée par le far<strong>de</strong>au <strong>de</strong> sa nombreuse famille; Dieu, es‐<br />

pérons‐le, veillera sur ces orphelins.<br />

Ne doutez pas <strong>de</strong> mon bon vouloir en ce qui regar<strong>de</strong> la visite que je <strong>de</strong>vais vous<br />

faire; il mʹa été impossible <strong>de</strong> trouver les moyens <strong>de</strong> me faire remplacer à Chaville le di‐<br />

manche. Dʹune autre part, je craignais <strong>de</strong> rencontrer quelque embarras du côté <strong>de</strong> MM.<br />

Carment et Joseph [Beldame], dont la position nʹétait pas encore tranchée. M. Carment<br />

mʹayant écrit pour me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r une décision, je lui ai répondu affectueusement, mais en<br />

lui conseillant, <strong>avec</strong> tout notre Conseil, <strong>de</strong> faire le bien dans le mon<strong>de</strong>, plutôt que <strong>de</strong> faire<br />

<strong>de</strong> nouveaux essais, sans doute infructueux, pour sʹétablir dans la vie religieuse. Je pense<br />

quʹil sʹy résigne, aucune lettre nouvelle <strong>de</strong> lui ne nous étant venue.<br />

Pour M. Joseph, où en est‐il? Avez‐vous réussi à le placer dans quelque établisse‐<br />

ment, selon ses aptitu<strong>de</strong>s? Je crois, et vos frères qui le voient <strong>de</strong> près sont, je pense, <strong>de</strong> cet<br />

avis, quʹil ne convient pas à notre Communauté, quʹon nʹen ferait ni un religieux, ni un<br />

homme vraiment utile aux œuvres.<br />

Nous sommes entièrement dépourvus dʹétoffe dʹété pour faire <strong>de</strong>s soutanes; je vous<br />

prie <strong>de</strong> mʹen envoyer la quantité nécessaire pour 4 soutanes, une quinzaine <strong>de</strong> mètres, je<br />

pense, aussi soli<strong>de</strong> quʹil se pourra et autant vite que vous le pourrez, à cause <strong>de</strong> lʹavance‐<br />

ment <strong>de</strong> la saison; marquez, je vous prie, en même temps à M. <strong>de</strong> Lauriston, qui remplace<br />

M. Emile [Beauvais], le prix <strong>de</strong> cet envoi.<br />

Adieu, mon bien bon ami, les temps sont menaçants, il faut redoubler <strong>de</strong> prières et<br />

nous hâter <strong>de</strong> faire un peu <strong>de</strong> bien tant que les voies nous sont libres pour y parvenir.<br />

Mille tendres affections <strong>de</strong> tous à vous et à vos frères<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1096 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Ordination <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax au diaconat. Première communion à Vaugirard.<br />

Vaugirard, 26 juin 1866<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Nous pensons toujours quʹil faudra nous résigner à vous envoyer temporairement à<br />

Arras et que, suivant le désir <strong>de</strong> Mgr dʹArras, vous aurez à vous préparer pour lʹordination<br />

en septembre dʹabord et à Noël ensuite. Il y aurait assurément avantage à ce que le diaco‐<br />

nat vous fût conféré dans votre diocèse; cʹest à vous à examiner si les facilités pourront<br />

vous en être assurées. Il me semble que vous ne pourriez guère traiter cette affaire que <strong>de</strong><br />

vive voix <strong>avec</strong> Mgr dʹAutun et que, par lettre, vous <strong>de</strong>vriez seulement vous informer <strong>de</strong>s<br />

projets du Prélat pour le temps <strong>de</strong>s vacances. Mais je nʹémets ici que <strong>de</strong>s conjectures,<br />

1112


connaissant bien moins que vous tout ce qui concerne les mouvements <strong>de</strong> M gr lʹEvêque,<br />

vous seul pouvez juger quelles mesures sont à prendre; vous y aviserez autant bien que<br />

vous le pourrez.<br />

Nous avons après‐<strong>de</strong>main jeudi 28 la première communion <strong>de</strong> nos enfants <strong>de</strong> Vau‐<br />

girard; vous prierez bien pour eux ainsi que M. Chaverot. M. le Curé <strong>de</strong> Bonne Nouvelle<br />

[M. lʹabbé Millaut] veut bien prési<strong>de</strong>r la cérémonie. M gr lʹEvêque dʹAngers arrive <strong>de</strong>main<br />

pour la profession religieuse <strong>de</strong> sa nièce; nous pensons quʹil donnera la confirmation,<br />

comme il lʹa fait lʹan <strong>de</strong>rnier.<br />

Je ne vois pas sans peine pour vous les très gran<strong>de</strong>s chaleurs que nous traversons,<br />

vous <strong>de</strong>vez beaucoup en souffrir; à Chaville surtout, on trouve encore un peu <strong>de</strong> respir 382 ;<br />

à Vaugirard, cʹest mesuré plus strictement; le temps viendra où nous nʹaurons plus à respi‐<br />

rer quʹen Dieu; Veni Domine Jesu.<br />

Adieu, bien chers amis, je suis contristé <strong>de</strong> la tournure que prennent nos vacances;<br />

nous avions tant compté que nous serions un peu à lʹaise réunis; décidément le bon p. Re‐<br />

naud avait raison: le bon Dieu est contrariant.<br />

Votre dévoué et affectionné Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1097 à M. Decaux<br />

Vœux <strong>de</strong> bonne fête. Félicitations pour une distinction.<br />

Vaugirard, 30 juin 1866<br />

Mon bon ami,<br />

Je viens mʹunir à tous les vœux qui vous sont offerts à lʹoccasion <strong>de</strong> votre fête et<br />

vous assurer quʹaujourdʹhui tout particulièrement je recomman<strong>de</strong>rai au St Sacrifice toutes<br />

vos intentions, sachant bien quʹelles ont pour fin la gloire <strong>de</strong> Dieu et lʹextension <strong>de</strong>s œu‐<br />

vres saintes.<br />

Je joins aussi mes félicitations bien cordiales à celles <strong>de</strong> vos Confrères pour la dis‐<br />

tinction précieuse qui vous est venue <strong>de</strong> la part du Souverain Pontife; cʹest aujourdʹhui<br />

peut‐être la seule main qui puisse donner une décoration dont un homme <strong>de</strong> cœur ait à<br />

sʹhonorer.<br />

Croyez bien, mon cher ami, à mes sentiments <strong>de</strong> constant attachement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1098 à M. Trousseau<br />

Embarras pour les remplacements <strong>de</strong> personnel. Visite <strong>de</strong> Mgr Angebault.<br />

Vaugirard, 30 juin 1866<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

La première communion <strong>de</strong> nos enfants, qui vient dʹavoir lieu ainsi que la confirma‐<br />

tion, nous a tellement occupés ces jours‐ci que le temps mʹa manqué pour répondre sans<br />

382 Ou respire, mot très employé au XVI e s. comme désignation du souffle, <strong>de</strong> l’action <strong>de</strong> respirer ; a été évincé par respiration, mais<br />

survit dans plusieurs parlers du Centre et <strong>de</strong> l’Ouest <strong>de</strong> la France, ainsi qu’au Canada.<br />

1113


etard à votre lettre. Je vous écris ces <strong>de</strong>ux mots pour vous tirer dʹinquiétu<strong>de</strong> au sujet <strong>de</strong>s<br />

efforts que nous faisons pour donner un peu <strong>de</strong> soulagement à M. Laroche et à ses œuvres.<br />

Jʹespère que, vers le milieu <strong>de</strong> juillet, M. Chaverot pourra se rendre à Arras et vous ai<strong>de</strong>r,<br />

jusquʹà ce que M. <strong>de</strong> Varax puisse à son tour se rendre près <strong>de</strong> vous, après avoir remis sa<br />

santé très fatiguée, par une saison <strong>de</strong> bains. Ces arrangements nʹont pas été sans <strong>de</strong> péni‐<br />

bles sacrifices pour nous et sans contrarier singulièrement nos vues; mais nous nous y<br />

sommes résignés, puisquʹils paraissent être indispensables.<br />

Nos jeunes séminaristes dʹIssy sont arrivés hier ici pour leurs vacances; ils sont un<br />

peu fatigués. Ils arrivaient heureusement au moment où le bon Evêque dʹAngers, que la<br />

Provi<strong>de</strong>nce nous envoie toujours si fort à point, allait donner la confirmation à nos enfants.<br />

Il nous a réunis comme <strong>de</strong> coutume, après le déjeuner, et nous a parlé, comme toujours,<br />

<strong>avec</strong> la plus aimable et la plus paternelle bonté. Il a 77 ans. Il est extrêmement content <strong>de</strong><br />

M. dʹArbois et <strong>de</strong> nos ff. qui se sont très bien posés à Angers, y font beaucoup <strong>de</strong> bien et y<br />

sont aimés <strong>de</strong> tous. Bénissons‐en Dieu qui a daigné les assister.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, je vous écris en hâte, cʹest samedi, jour plus chargé<br />

pour moi que les autres.<br />

Embrassez pour moi nos frères, et partagez <strong>avec</strong> eux nos bien cordiales affections en<br />

N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Laroche a <strong>de</strong>mandé que nous vous donnions un peu dʹai<strong>de</strong> financier; malgré no‐<br />

tre pauvreté, nous allons tâcher <strong>de</strong> vous envoyez 200f.<br />

1099 à M. Trousseau<br />

Pénurie <strong>de</strong> personnel. Fatigue du frère Trousseau. Eviter les allées et venues multipliées.<br />

Vaugirard, 3 juillet 1866<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

M. Laroche, dans une lettre qui sʹest croisée <strong>avec</strong> celle que je vous écrivais ainsi quʹà<br />

lui et que vous avez dû recevoir dimanche <strong>de</strong>rnier, me dit que vous êtes très fatigué et que<br />

vous avez absolument besoin <strong>de</strong> prendre du repos. Nous avions pensé, comme je vous lʹai<br />

dit, à y pourvoir en envoyant dʹabord M. Chaverot, et ensuite M. <strong>de</strong> Varax. Mais M. Cha‐<br />

verot, qui sort après une année entière <strong>de</strong> vie contenue et fatigante au Séminaire, avait be‐<br />

soin <strong>de</strong> quelques jours au moins <strong>de</strong> détente; et dʹailleurs, il était obligé <strong>de</strong> faire une appari‐<br />

tion dans sa famille qui ne sait encore quʹà <strong>de</strong>mi son entrée en Communauté et qui se rési‐<br />

gne bien péniblement à ce sacrifice. Il a donc dû partir pour une quinzaine <strong>de</strong> jours, ainsi<br />

que je vous lʹai marqué. Je viens ici vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si votre fatigue est telle que vous ne<br />

puissiez attendre sans difficulté réelle le retour <strong>de</strong> M. Chaverot. Je ne sais qui nous pour‐<br />

rions vous envoyer jusque là, sinon un <strong>de</strong>s jeunes séminaristes dʹIssy qui vous serait sans<br />

doute peu utile. Si on peut sʹépargner les allées et venues multipliées, ce sera assurément<br />

beaucoup mieux; je crois quʹelles seraient aussi dʹun assez mauvais effet à Arras. Cepen‐<br />

dant, comme nous ne voulons pas vous mettre en peine intolérable, jʹattendrai votre ré‐<br />

ponse, et je ferai ce que vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rez.<br />

Adieu, mon bien cher enfant; nous prions beaucoup afin que Dieu et la Ste Vierge<br />

vous assistent et vous donnent force pour porter les épreuves <strong>de</strong> votre situation, comme il<br />

1114


est dans les vues <strong>de</strong> la Sagesse divine que vous les supportiez, mais sans excé<strong>de</strong>r la me‐<br />

sure quʹy veut mettre la bonté miséricordieuse du Seigneur.<br />

Votre affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Mille bons souvenirs à nos ff.<br />

1100 à M. Maignen<br />

Nécessité urgente <strong>de</strong> remettre la maison <strong>de</strong> Nazareth à la pratique <strong>de</strong> la règle.<br />

Chaville, 5 juillet 1866<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Vous le voyez, lʹordre, la discipline, lʹesprit religieux sont en extrême souffrance à<br />

Nazareth; les vocations <strong>de</strong> quelques frères semblent être en souffrance; nʹavez‐vous rien à<br />

faire dans une telle situation et ne pouvez‐vous, par quelque effort plus énergique,<br />

concourir au rétablissement <strong>de</strong> lʹordre en vous montrant moins inexact aux exercices et<br />

plus déférent, en tout ce qui dépend <strong>de</strong> vous, pour les avertissements <strong>de</strong> M. Paillé? M.<br />

Vasseur semble sʹautoriser <strong>de</strong> votre exemple et secoue tout joug <strong>de</strong> la règle; où va une<br />

communauté en <strong>de</strong> telles voies? Je vous fais un cas <strong>de</strong> conscience dʹemployer tous vos<br />

moyens pour secon<strong>de</strong>r M. Paillé dans le mandat que je lui ai donné <strong>de</strong> rétablir un ordre<br />

régulier à Nazareth. Je mʹadresse surtout à votre bonne volonté et à votre affection pour la<br />

Communauté, qui vous éclaireront sur la nécessité dʹun retour aux habitu<strong>de</strong>s régulières.<br />

Votre affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1101 à M. Caille<br />

Comment MLP. était attentif à la santé <strong>de</strong> ses frères.<br />

Vaugirard, 6 juillet 1866<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

M. Paillé a reçu la dépêche télégraphique par laquelle vous invitez M. <strong>Jean</strong>‐Marie<br />

[Tourniquet] à se rendre près <strong>de</strong> son frère, atteint dʹune cholérine.<br />

M. <strong>Jean</strong>‐Marie étant lui‐même souffrant <strong>de</strong>puis plusieurs jours dʹune diarrhée fati‐<br />

gante, M. Paillé ne croit pas quʹon puisse, sans une grave impru<strong>de</strong>nce, le faire voyager<br />

<strong>avec</strong> une pareille incommodité dans les circonstances mauvaises où se trouve Amiens pré‐<br />

sentement. Je vous prie donc, mon bon ami, <strong>de</strong> suivre <strong>de</strong> près lʹétat du frère <strong>de</strong> M. <strong>Jean</strong>‐<br />

Marie; sʹil présentait un danger imminent, vous nous enverriez une dépêche télégraphi‐<br />

que; alors, à moins dʹempêchement absolu, M. <strong>Jean</strong>‐Marie partirait immédiatement; hors<br />

ce cas dʹurgence, je crois quʹil est vraiment nécessaire que M. <strong>Jean</strong>‐Marie raffermisse, avant<br />

<strong>de</strong> voyager, sa santé très ébranlée en ce moment.<br />

M. Paillé <strong>de</strong>man<strong>de</strong> si vous désirez un nouvel envoi <strong>de</strong> lʹeau quʹil vous a adressée<br />

pour arrêter les premiers symptômes du mal.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1115


1102 à M. Caille<br />

Le choléra à Amiens. Comment MLP. sʹoccupait <strong>de</strong> détails du matériel.<br />

Vaugirard, 8 juillet 1866<br />

Mon bon ami et fils en N.S.,<br />

Je vois dans les journaux que lʹépidémie est notablement diminuée à Amiens, je se‐<br />

rai satisfait néanmoins si lʹun <strong>de</strong> vous nous écrit pour nous donner <strong>de</strong>s nouvelles directes;<br />

M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] sera aussi bien tranquillisé sʹil est informé <strong>de</strong> lʹétat présent <strong>de</strong><br />

son frère; jʹattends donc quelques mots <strong>de</strong> votre maison.<br />

Jʹai vu hier seulement lʹétoffe que vous mʹavez envoyée pour les soutanes; il se peut<br />

quʹelle convienne aussi pour cet emploi, cependant elle nʹest pas pareille à lʹescot que vous<br />

mʹaviez envoyé jusquʹici et dont nous avions fait un très bon usage. De plus, le luxor que<br />

vous nous avez envoyé est <strong>de</strong> moitié moins large (plus encore peut‐être) que lʹescot (ou es‐<br />

caut, je ne sais comment sʹécrit ce mot) et, conséquemment, il est beaucoup plus cher. Des<br />

soutanes dʹété établies dans ces conditions seraient bien dispendieuses pour nous. Je gar‐<br />

<strong>de</strong>rais néanmoins cette étoffe si la pièce ainsi coupée courait risque <strong>de</strong> nʹêtre pas facile‐<br />

ment placée par vous et sʹil <strong>de</strong>vait en résulter le moindre détriment pour votre maison.<br />

Mais sʹil en était autrement et si vous <strong>de</strong>viez en trouver le placement facile, je préférerais<br />

beaucoup avoir lʹétoffe large et plus simple, quoique forte et soli<strong>de</strong>, que vous nous avez<br />

envoyée plusieurs fois pour un pareil emploi. Je vous serai obligé <strong>de</strong> me dire en toute sim‐<br />

plicité ce qui peut être à faire sur ce petit arrangement; jʹai compté que vous nʹauriez au‐<br />

cune gêne <strong>de</strong> ma proposition et me diriez franchement si elle nʹaurait pour vous aucun in‐<br />

convénient.<br />

Bien que la santé <strong>de</strong> M. <strong>Jean</strong>‐Marie nous ait obligés à quelque précaution, nous ne<br />

voudrions pas le priver <strong>de</strong> voir son frère, sʹil était en danger sérieux; je vous renouvelle<br />

donc la prière instante <strong>de</strong> nous adresser une dépêche si vous voyez quelque signe sérieu‐<br />

sement inquiétant. Son jeune fils écrit à son oncle un mot alarmant, mais un enfant <strong>de</strong> 14<br />

ans ne peut régler nos déterminations; jʹattends une réponse <strong>de</strong> vous, afin dʹagir comme le<br />

cas le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ra.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1103 à M. dʹArbois<br />

Intérêt porté à la famille dʹArbois. Ai<strong>de</strong> généreuse aux dépenses <strong>de</strong> lʹŒuvre dʹAngers. Lʹépidémie <strong>de</strong> choléra à<br />

Amiens a touché la famille du frère Tourniquet.<br />

Vaugirard, 9 juillet 1866<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu lʹenvoi que vous mʹavez fait <strong>de</strong> 200f., représentant un trimestre <strong>de</strong> la pen‐<br />

sion que vous fait M. votre père.<br />

Jʹai recommandé à nos frères votre vénérable grand‐père et je me suis souvenu moi‐<br />

même <strong>de</strong> lui au S t Sacrifice; vous nous tiendrez au courant <strong>de</strong>s suites <strong>de</strong> sa maladie; bien<br />

que je nʹaie jamais vu ce vénéré père, je mʹintéresse, ainsi que nos frères, à lui, parce quʹil<br />

vous appartient et aussi parce quʹil est un bel exemple dʹune carrière honorablement et<br />

chrétiennement parcourue.<br />

1116


Nous suivons <strong>de</strong>s yeux vos entreprises, particulièrement celle <strong>de</strong> la chapelle <strong>de</strong><br />

N.D. <strong>de</strong>s Champs, à laquelle M gr dʹAngers nous a paru prendre un intérêt tout particulier;<br />

nous espérons que lʹinitiative aimable prise par les jeunes gens <strong>de</strong> lʹœuvre aura une bonne<br />

influence sur les habitants dʹAngers et les portera à se montrer aussi, eux, généreux pour<br />

votre œuvre. Pour y concourir un peu <strong>de</strong> notre côté, nous mettons dès à présent à votre<br />

disposition les 200f du prochain trimestre <strong>de</strong> votre pension; si vous préfériez les 200f que<br />

vous venez <strong>de</strong> mʹenvoyer, je vous les retournerais, mais, si vous nʹêtes pas pressé <strong>de</strong> tou‐<br />

cher cet argent, je préférerais vous laisser le prochain trimestre, parce que les embarras<br />

causés à la maison dʹArras par la maladie <strong>de</strong> M. Laroche nous obligent à faire en ce mo‐<br />

ment quelques sacrifices pour cette œuvre.<br />

Nous nous préparons à la fête <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul; <strong>de</strong>main mardi commencera la<br />

neuvaine par laquelle nous nous y disposons; nous avons repris aussi, selon lʹusage, en<br />

lecture, la Vie et les Vertus <strong>de</strong> notre saint patron. Si le temps nʹest pas absolument mauvais,<br />

on fera sa fête à Chaville; voilà déjà la <strong>de</strong>uxième année que vous nʹy aurez pas assisté, à<br />

moins que vous ne mettiez à ce moment le petit séjour que vous vous proposez <strong>de</strong> faire au<br />

milieu <strong>de</strong> nous; M gr dʹAngers ne voyait pas dʹimpossibilité à ce que vous fussiez remplacé<br />

pour une quinzaine <strong>de</strong> jours, mais ce pourra sans doute être fait plus commodément par<br />

vous durant les vacances <strong>de</strong> la Maîtrise ou à la retraite; vous nous direz ce que vous pré‐<br />

voyez à ce sujet.<br />

Amiens, vous lʹaurez appris, est fort éprouvé par le choléra; nos frères sont jusquʹici<br />

personnellement épargnés. M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] a perdu un <strong>de</strong> ses frères et un au‐<br />

tre est en ce moment gravement mala<strong>de</strong>; priez pour eux tous. Ici, nous allons comme <strong>de</strong><br />

coutume, fort chargés <strong>de</strong> travaux, traînant un peu péniblement notre far<strong>de</strong>au financier,<br />

mais confiants en Dieu et nous remettant entre ses mains.<br />

Adieu, mon bien cher ami, croyez à nos tendres sentiments pour vous et assurez<br />

aussi nos frères <strong>de</strong> notre vive affection en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je vous ai dit, je crois, que M gr et M. Chesnay nous ont assurés quʹon était très<br />

content <strong>de</strong>s services <strong>de</strong> la Communauté à Angers et au Chapitre en particulier; M. Pavie<br />

nous a parlé <strong>de</strong>rnièrement dans le même sens; courage donc, puisque Dieu vous ai<strong>de</strong> si vi‐<br />

siblement.<br />

1104 à M. Caille<br />

Veiller à la santé du frère Tourniquet qui part pour Amiens. Adopter <strong>de</strong>s orphelins est en soi excellent, mais tout<br />

bien n’est pas à faire.<br />

Vaugirard, 9 juillet 1866<br />

Mon bon ami et fils en N.S.,<br />

Nous envoyons M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] à Amiens, mais non sans regret, car il<br />

est toujours souffrant, ses entrailles sont mal disposées; espérons que le Seigneur le pré‐<br />

servera.<br />

Il ne paraît guère possible que les affaires <strong>de</strong> sa famille sʹarrangent durant la mala‐<br />

die <strong>de</strong> sa belle‐sœur; il paraîtrait donc tout à fait sage <strong>de</strong> le renvoyer après les obsèques <strong>de</strong><br />

1117


son frère. Il a lʹesprit très frappé et est précisément dans les conditions les plus défavora‐<br />

bles au point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> la santé. Vous verrez ce qui est nécessaire, je mʹen rapporte à votre<br />

jugement.<br />

Je viens <strong>de</strong> recevoir votre lettre, mais après le départ <strong>de</strong> M. <strong>Jean</strong>‐Marie.<br />

Vos raisons pour lʹadoption <strong>de</strong>s orphelins sont excellentes, comme justifiant un<br />

mouvement <strong>de</strong> charité; je doute toujours que vous puissiez indéfiniment ajouter cette œu‐<br />

vre <strong>avec</strong> les vôtres sans fatiguer vos frères et sans nuire à lʹœuvre du patronage.<br />

Adieu, mon bien bon ami, nous prions fidèlement pour vous.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1105 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Progrès vers lʹordination sacerdotale. Nous ne sommes sur la terre que <strong>de</strong>s passants. St Vincent <strong>de</strong> Paul, notre<br />

modèle et notre gui<strong>de</strong>.<br />

Vaugirard, 12 juillet 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je remercie Dieu <strong>avec</strong> vous <strong>de</strong> la bonne tournure que prend lʹaffaire, objet <strong>de</strong> votre<br />

voyage à Autun et jʹespère quʹIl daignera consommer lʹœuvre quʹIl a ainsi commencée. Jʹai<br />

envoyé le jour même votre lettre à M. Laroche. M. Lantiez se trouvait à Arras au moment<br />

où elle a dû y arriver; il aura pu faire <strong>avec</strong> M. Laroche ce qui était pour le mieux.<br />

Je goûte bien votre pensée dʹécrire à M gr dʹAutun qui semble si aimablement dispo‐<br />

sé pour nos œuvres; je vais attendre le retour <strong>de</strong> M. Lantiez qui nous dira ce quʹil aura en‐<br />

tendu à Arras; je serai ainsi mieux éclairé pour écrire à M gr dʹAutun.<br />

Je me réjouis <strong>de</strong> penser quʹen ce moment vous vous remettez, dans les plus douces<br />

conditions, <strong>de</strong> vos fatigues du Séminaire et <strong>de</strong>s lassitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> votre voyage; les consolations<br />

si puissantes que Dieu a mises dans la famille vont faire un moyen plus fort que les eaux et<br />

que tous les remè<strong>de</strong>s pour affermir votre santé; jʹen suis doublement heureux puisquʹil<br />

vous restera à franchir, selon toute apparence, <strong>de</strong>ux pas décisifs dans votre carrière et sous<br />

un assez bref délai <strong>de</strong> quelques mois; le tout étant pour la gloire <strong>de</strong> Dieu, Il daignera sub‐<br />

venir aux besoins <strong>de</strong> chaque circonstance; quel dommage que notre confiance et notre foi<br />

répon<strong>de</strong>nt trop imparfaitement à tant <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong>s!<br />

Jʹai reçu <strong>de</strong> très bonnes nouvelles <strong>de</strong> notre cher frère, M. Chaverot; il a été ce que la<br />

situation voulait: doux et fort, ses affaires vont bien; il reviendra pour le 17 à Chaville. Je<br />

vous envoie quelques mots quʹil vous écrit; je suis bien sûr que vous lui rendrez la pareille.<br />

Je vais lui écrire <strong>de</strong> mon côté. Sa position à Arras, toute transitoire et conséquemment mal<br />

définie, ne sera pas sans quelque difficulté, mais son bon esprit et sa simplicité <strong>de</strong> cœur lui<br />

feront tout traverser heureusement. Jʹai la confiance quʹil passera en faisant le bien. Puis‐<br />

sions‐nous passer ainsi, partout où nous passons; et, en vérité, en ce mon<strong>de</strong>, nous sommes<br />

si mobiles, si peu persistants en tout, que nous ne sommes que <strong>de</strong>s passants, en quelque<br />

lieu ou état que nous soyons.<br />

Je ne vous accuse point réception <strong>de</strong> la lettre chargée qui <strong>de</strong>vait être envoyée par<br />

M me votre mère, je ne sais si elle est arrivée à Chaville; je lʹai attendue lundi jusquʹà 11h.1/2,<br />

heure du facteur, et jʹai laissé ensuite pour M. Faÿ lʹautorisation écrite que vous aviez faite<br />

pour en donner décharge. Depuis ce moment, je nʹai vu personne <strong>de</strong> Chaville; jʹai pensé<br />

1118


que M me votre mère, voyant le temps trop court jusquʹau moment <strong>de</strong> votre départ, en avait<br />

ajourné lʹenvoi; si samedi je trouvais quʹelle est arrivée en mon absence, je vous écrirais<br />

dimanche pour vous en informer; sinon, cʹest quʹelle ne serait pas arrivée; M me <strong>de</strong> Varax<br />

vous aura, du reste, dit ce qui a été fait.<br />

Nous nous préparons à la fête <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul; vous y manquez, mais vous la<br />

ferez partout où vous serez, et vous saurez bien vous rapprocher ce jour‐là <strong>de</strong> ce grand et<br />

beau saint, plus intimement encore que <strong>de</strong> coutume; <strong>de</strong>mandons‐lui bien <strong>de</strong> nous mettre<br />

nettement, franchement dans la haute et sainte voie où il a marché; que lʹétu<strong>de</strong> dʹune si<br />

gran<strong>de</strong> âme est édifiante, lumineuse et consolante!<br />

Adieu, bien cher ami, je vous laisse <strong>avec</strong> lui; si Dieu daigne faire par sa grâce que<br />

nous <strong>de</strong>venions vraiment ses enfants, nous nʹaurions rien à envier aux plus dignes et aux<br />

plus saintes Congrégations.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

N.B. Offrez, si vous le trouvez opportun, mon hommage respectueux à M me votre<br />

mère et aux personnes <strong>de</strong> votre famille dont jʹai lʹhonneur dʹêtre connu.<br />

Lʹétoffe qui mʹavait été envoyée dʹAmiens nʹétant pas celle que jʹavais <strong>de</strong>mandée, on<br />

a dû la remplacer par une autre qui convient. Désireriez‐vous quʹon vous en envoyât la<br />

quantité suffisante pour faire, soit à Chalon, soit ailleurs, une soutane pour votre usage?<br />

1106 à M. Chaverot<br />

Bonheur <strong>de</strong> la vocation religieuse. Epreuves dans la famille Tourniquet. Fête <strong>de</strong> Saint Vincent <strong>de</strong> Paul: sa vie est<br />

comme le Saint Evangile.<br />

Vaugirard, 13 juillet 1866<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je trouvais, en lisant votre petite lettre, presque autant <strong>de</strong> sujets <strong>de</strong> rendre grâces à<br />

Dieu quʹelle comprenait <strong>de</strong> lignes; tout sʹéclaircit, tout sʹarrange pour le mieux, non sans<br />

peine et sans sacrifice <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts dans votre famille; mais ces sacrifices, qui voudrait<br />

les retrancher puisque cʹest par là, sans doute, que vous et les vôtres serez particulièrement<br />

agréables à Dieu. Espérons‐le, lʹœuvre aura sa consommation et le jour viendra où vos<br />

bons parents béniront le Seigneur qui a daigné choisir un <strong>de</strong> leurs fils pour en faire tout<br />

ensemble un prêtre et un religieux, cʹest‐à‐dire lʹœuvre la plus parfaite que Dieu lui‐même<br />

puisse tirer <strong>de</strong> sa créature, puisquʹIl lui donne tout et que lʹhumble créature, à son tour,<br />

donne tout ce quʹil est en elle <strong>de</strong> donner; espérez que ces bons et si chrétiens parents senti‐<br />

ront cela, <strong>avec</strong> la grâce dʹen haut, et chanteront la louange <strong>de</strong> Celui qui a fait en vous <strong>de</strong><br />

gran<strong>de</strong>s choses: magna fecit qui potens est.<br />

Il ne sʹest passé, <strong>de</strong>puis votre départ, quʹun certain nombre <strong>de</strong> faits qui méritent<br />

dʹêtre mentionnés. Notre f. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] a été appelé à Amiens par la mort<br />

dʹun second frère que le terrible fléau vient <strong>de</strong> lui enlever. Le fils aîné <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier est ma‐<br />

la<strong>de</strong>, mais jusquʹici sans apparence inquiétante; vous prierez pour ce bon frère que vous<br />

aimez et qui est bien ru<strong>de</strong>ment éprouvé; il était souffrant au moment <strong>de</strong> son départ et<br />

nous ne le voyions pas sans inquiétu<strong>de</strong> aller en cette disposition dans un lieu visité par<br />

lʹépidémie, dont Dieu se sert pour nous châtier et pour nous rappeler à sa loi; Il le prendra<br />

1119


par la main et nous le ramènera; vous vous souviendrez <strong>de</strong> lui, car nul parmi nous ne vous<br />

est plus dévoué que lui.<br />

M. <strong>de</strong> Varax est parti lundi <strong>de</strong>rnier pour Autun; il y a vu M gr lʹEvêque quʹil a trouvé<br />

fort bien disposé à lʹordonner, sauf lʹavis <strong>de</strong> M gr dʹArras à qui on a écrit, afin <strong>de</strong> concerter<br />

les choses <strong>avec</strong> lui; il ne paraît pas néanmoins que cette ordination doive avoir lieu avant<br />

le mois <strong>de</strong> septembre; du reste, M. <strong>de</strong> Varax vous a peut‐être déjà écrit lui‐même; il le fera<br />

au plus tôt, si déjà vous nʹavez sa lettre entre vos mains.<br />

Nous nous préparons à la fête <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul; nous tâcherons quʹelle soit<br />

avant tout une fête spirituelle, une occasion pour nous <strong>de</strong> nous rappeler plus fortement les<br />

vertus <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul et dʹobtenir par son entremise dʹabondantes grâces pour notre<br />

petite famille. Je me réjouis <strong>de</strong> plus en plus que Dieu nous lʹait donné pour patron; sa vie<br />

est, proportion gardée, comme le Saint Evangile: plus on la lit, plus on y trouve <strong>de</strong> lumière<br />

et <strong>de</strong> sainteté. Cʹest que la sainteté nʹest, en effet, que la réalisation <strong>de</strong> la doctrine évangéli‐<br />

que, un écoulement <strong>de</strong> lʹEsprit <strong>de</strong> J.C. dans ses saints.<br />

Cʹest samedi aujourdʹhui; jʹai plus dʹoccupation que <strong>de</strong> coutume ce jour‐là et dʹail‐<br />

leurs ma journée se termine à 3h., moment <strong>de</strong> mon départ pour Chaville. Jʹabrège donc ces<br />

quelques lignes. Je pense que je resterai ces jours‐ci à Chaville, jusquʹà la fête <strong>de</strong> S t Vincent<br />

<strong>de</strong> Paul. Cʹest là que vous me trouverez et que je vous attendrai. Tous nos frères seront<br />

aussi heureux <strong>de</strong> vous voir et <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ront à Dieu que vos bons parents lui fassent ce sa‐<br />

crifice, puisque le bien <strong>de</strong> son service vous appelle ailleurs. Cette pensée me console un<br />

peu <strong>de</strong> votre départ pour Arras. Cʹest que, indépendamment <strong>de</strong>s convenances <strong>de</strong> la vie re‐<br />

ligieuse, nous avons pour raison <strong>de</strong> votre rappel parmi nous, non notre propre satisfac‐<br />

tion, mais les exigences dʹune œuvre en souffrance, à distance notable <strong>de</strong> nous. Nous par‐<br />

tageons donc le sacrifice imposé à votre famille.<br />

Adieu, bien cher ami et fils en N.S., notre affection est trop bien assise pour que jʹaie<br />

besoin <strong>de</strong> vous en redire lʹassurance; je vous embrasse seulement au nom <strong>de</strong> tous dans les<br />

Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1107 à M. Decaux<br />

Invitation à la fête <strong>de</strong> Saint Vincent <strong>de</strong> Paul.<br />

Vaugirard, 13 juillet 1866<br />

Mon bon ami,<br />

Nous ferons comme <strong>de</strong> coutume, jeudi 19 la fête <strong>de</strong> St Vincent <strong>de</strong> Paul en notre petit<br />

Noviciat <strong>de</strong> Chaville. Nous avons compté que vous trouveriez moyen dʹarracher quelques<br />

instants à vos occupations pour passer <strong>avec</strong> nous quelque partie du jour. Un peu <strong>de</strong> repos<br />

ne sera pas <strong>de</strong> trop au milieu <strong>de</strong> vos fatigues, et lʹextrême chaleur le rend en ce moment<br />

doublement nécessaire; nous espérons donc que nous aurons la satisfaction <strong>de</strong> vous voir.<br />

Dans cette attente, jʹindique ci‐après lʹordre <strong>de</strong>s exercices <strong>de</strong> la journée.<br />

Veuillez recevoir, mon bon ami, tous mes sentiments dʹaffectueux dévouement en<br />

N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1120


9h.1/2 Grand ʹmesse<br />

Midi 1/2 Dîner<br />

2h.1/2 Vêpres, petit panégyrique par M. Le Rebours, Salut.<br />

Ensuite, promena<strong>de</strong> dans le bois <strong>de</strong> Chaville.<br />

A 7 h Mo<strong>de</strong>ste réfection pour ceux qui préféreront partir le soir.<br />

1108 à M. Girard<br />

Invitation à la fête <strong>de</strong> Saint Vincent <strong>de</strong> Paul.<br />

Vaugirard, 13 juillet 1866<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je me réjouis <strong>de</strong> lʹamélioration progressive <strong>de</strong> la santé <strong>de</strong> votre chère sœur, et je<br />

continuerai à prier <strong>avec</strong> ceux qui mʹentourent pour son prompt et parfait rétablissement.<br />

Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> dire que nous comptons que vous aurez quelques moments<br />

jeudi 19, fête <strong>de</strong> St Vincent <strong>de</strong> Paul, pour vous unir à nous dans notre petit Noviciat <strong>de</strong><br />

Chaville où nous passerons cette journée. Je joins ici, dans cette espérance, lʹindication <strong>de</strong>s<br />

exercices <strong>de</strong> la journée:<br />

9h.1/2 Grandʹmesse<br />

Midi 1/2 Dîner<br />

2h.1/2 Vêpres, court panégyrique par M. Le Rebours, Salut.<br />

Ensuite promena<strong>de</strong> dans le bois <strong>de</strong> Chaville.<br />

A 7h. petite réfection pour ceux qui préféreront ne partir que le soir.<br />

La petite porte du jardin, au bas <strong>de</strong> la gare, sera ouverte.<br />

Adieu, bien cher ami, croyez‐moi bien affectueusement à vous en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1109 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Préparatifs <strong>de</strong> fête. La prière et le travail. Esprit <strong>de</strong> famille. Lʹamour <strong>de</strong> Dieu pour nous. MLP. se réjouit dʹap‐<br />

prendre que M. <strong>de</strong> Varax est traité en religieux.<br />

Chaville, 18 juillet [1866]<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai écrit, comme vous le souhaitiez, à M gr dʹAutun; je pense que cʹest bien dans le<br />

sens expliqué par lʹexcellent M. Picard.<br />

Jʹai reçu la lettre et sa charge; il mʹa fallu aller à Paris pour la prendre, la poste ayant<br />

cette fois oublié quʹun <strong>de</strong> nos MM. a une autorisation écrite afin <strong>de</strong> recevoir les lettres à<br />

moi <strong>de</strong>stinées, le far<strong>de</strong>au heureusement nʹétait pas lourd à porter.<br />

Aujourdʹhui, veille <strong>de</strong> la fête <strong>de</strong> notre saint Patron, la journée est ici plus active que<br />

contemplative; hors le jeûne et lʹoraison du matin <strong>avec</strong> la lecture <strong>de</strong>s Vertus, on a plus <strong>de</strong><br />

distraction que <strong>de</strong> recueillement; mais nous avons un si bon Maître et un si puissant Pa‐<br />

tron que nous <strong>de</strong>vons néanmoins gar<strong>de</strong>r lʹespérance que notre fête sera glorieuse pour<br />

Dieu, agréable à notre saint Patron. Nous lʹavons prié pour avoir du beau temps. Presque<br />

toutes les prières ne sont‐elles pas intéressées et ne faut‐il pas se confondre en admiration<br />

<strong>de</strong> ce que le bon Dieu, dans sa miséricor<strong>de</strong>, compte néanmoins ces mêmes prières comme<br />

1121


louables à ses yeux et méritantes pour nous? Cʹest une admirable invention <strong>de</strong> miséri‐<br />

cor<strong>de</strong>; les mères seules, sur la terre, initiées sans doute par la S te Vierge aux secrets intimes<br />

<strong>de</strong> la divine Bonté, ont parfois <strong>de</strong> ces inventions; le cœur a son génie comme lʹesprit, car<br />

lʹun et lʹautre reçoivent les inspirations du Ciel.<br />

Je suis loin <strong>de</strong> la fête. M. Chaverot arrive cette nuit pour nʹy pas manquer. M. dʹAr‐<br />

bois est ici <strong>de</strong>puis hier, pour un repos <strong>de</strong> 15 jours. Plusieurs frères arrivent, au moment où<br />

jʹécris, pour coucher ici, afin dʹêtre plus frais <strong>de</strong>main. Cet esprit <strong>de</strong> famille me touche, car<br />

rien <strong>de</strong> naïf et <strong>de</strong> primitif comme cette fête où pas lʹombre dʹéclat ni <strong>de</strong> combinaisons un<br />

peu attrayantes ne peut convier les gens; mais les cœurs y sont à lʹunisson, on fête le Saint<br />

Patron, protecteur au Ciel, modèle à imiter sur la terre; et quel Patron! le Père <strong>de</strong>s pauvres,<br />

qui a passé comme Jésus en faisant le bien, qui a évangélisé les humbles, aimé les petits,<br />

les souffrants, les enfants.<br />

Comme je suis heureux, cher enfant, quʹon vous ait traité en religieux et quʹon vous<br />

ait rappelé que vous lʹétiez tout <strong>de</strong> bon; vous ne lʹoublierez pas durant toute cette intermi‐<br />

nable absence qui va vous tenir trop éloigné <strong>de</strong> nous; voyez comme la Provi<strong>de</strong>nce est sage<br />

et comme elle prépare maternellement votre viatique, soyez reconnaissant et correspon<strong>de</strong>z<br />

fidèlement.<br />

Adieu, bien cher enfant en N.S., jʹai voulu aujourdʹhui faire un peu <strong>de</strong> fête <strong>de</strong> S t<br />

Vincent <strong>avec</strong> vous, puisque <strong>de</strong>main nous la ferons sans votre présence sensible. Je vous<br />

embrasse tendrement en N.S.<br />

Mille respects à qui <strong>de</strong> droit.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Samedi prochain, office <strong>de</strong> lʹImmaculée Conception.<br />

Jʹessaie <strong>de</strong> faire votre soutane sans vous, risquant bien quʹelle soit imparfaite; nous<br />

vous lʹenverrons comme vous nous direz quʹon peut le faire et où il faut lʹexpédier quand<br />

elle sera façonnée.<br />

1110 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

A propos <strong>de</strong> la santé <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax. Remerciements à sa mère pour sa générosité.<br />

Chaville, dimanche 21 juillet 1866<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je ne vois aucun inconvénient à consulter un mé<strong>de</strong>cin <strong>de</strong> Genève; je regrette seule‐<br />

ment que vous nʹayez pas eu le temps dʹécrire à M. Jousset, afin dʹéviter les embarras que<br />

peuvent créer, souvent, les contradictions <strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins entre eux. Si cʹest M. Dufresnes<br />

que vous voyez, je vous prie <strong>de</strong> lui offrir mes affectueux souvenirs; je le connais très inti‐<br />

mement; il a été bien <strong>de</strong>s années secrétaire <strong>de</strong> la Conférence St‐Sulpice, au temps où jʹen<br />

faisais partie moi‐même. Je prierai Dieu que vous ayez, <strong>de</strong> quelque part que ce soit, un<br />

avis favorable à lʹaffermissement <strong>de</strong> votre santé. Les malaises <strong>de</strong> cœur ne viennent le plus<br />

souvent que dʹune gran<strong>de</strong> faiblesse et disparaissent quand reviennent les forces.<br />

Je ne vous écris que ce mot, afin <strong>de</strong> ne pas manquer le courrier. Nous avons eu une<br />

fête <strong>de</strong> S t Vincent irréprochable; jʹespère quʹelle est telle <strong>de</strong>vant Dieu.<br />

M. Chaverot part <strong>de</strong>main pour Arras.<br />

Jʹai omis, dans ma <strong>de</strong>rnière lettre, dʹoffrir mes remerciements à M me votre mère pour<br />

son aumône généreuse à lʹŒuvre <strong>de</strong>s Clercs; vous savez que je nʹavais pas attendu ce mo‐<br />

1122


ment pour vous dire combien jʹen avais été reconnaissant; vous pourrez donc attester quʹil<br />

nʹy a nulle ingratitu<strong>de</strong> dans le fait. M. <strong>de</strong> la Coste mʹa envoyé les 100f promis.<br />

Je ferai imprimer la notice. Adieu, bien cher ami.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Que votre bon ange vous accompagne. Bon voyage!<br />

1111 à M. Decaux<br />

Difficile changement <strong>de</strong> personnel à Ste‐Anne. Lʹensemble <strong>de</strong>s Œuvres risque dʹen souffrir. Prier le Dieu <strong>de</strong> cha‐<br />

rité; Il dilate le cœur et Il donnera les ressources nécessaires.<br />

Vaugirard, 25 juillet 1866<br />

Mon bien bon ami,<br />

Je nʹai pas répondu vite à votre lettre du 15 <strong>de</strong> ce mois; jʹéprouvais quelque embar‐<br />

ras à le faire selon mon désir, cʹest‐à‐dire <strong>de</strong> telle sorte que vous ayez satisfaction et que<br />

vous ne puissiez douter <strong>de</strong> notre bon vouloir pour concourir au bien que vous souhaitez<br />

accomplir.<br />

Jʹai, comme vous, une gran<strong>de</strong> répugnance aux changements <strong>de</strong> personnel; pour peu<br />

quʹun homme ait <strong>de</strong> facultés et <strong>de</strong> zèle, il acquiert à la longue, dans une œuvre, une posi‐<br />

tion et <strong>de</strong>s influences qui sont bien favorables au succès <strong>de</strong> ses efforts; si on le déplace, il<br />

faut à celui qui lui succè<strong>de</strong> un long apprentissage pour arriver au même point; <strong>de</strong> là une<br />

dépense <strong>de</strong> soins et <strong>de</strong> travaux tout en pure perte, si elle nʹest justifiée par une évi<strong>de</strong>nte<br />

nécessité.<br />

Je nʹaperçois pas jusquʹici une telle urgence dans le changement <strong>de</strong> M. Derny. Du‐<br />

rant plus dʹune année, après son entrée à Ste ‐Anne, ses services et qualités ont été assez ap‐<br />

préciés pour que M. <strong>de</strong> Coulonges, verbalement et par écrit, mʹait exprimé toute sa satis‐<br />

faction, mʹassurant que ses assistances au patronage dépassaient beaucoup celles <strong>de</strong> M.<br />

Moutier et ne laissaient point à désirer. Il y a 3 ou 4 mois à peine, M. <strong>de</strong> Coulonges, me<br />

communiquant obligeamment les résultats obtenus en 1865 au patronage Ste ‐Anne, consta‐<br />

tait encore un progrès extraordinaire dans le personnel, dans lʹassiduité, dans la discipline,<br />

en un mot, dans toutes les fins essentielles <strong>de</strong> lʹœuvre. Depuis quelque temps, il est vrai,<br />

M. <strong>de</strong> Coulonges a commencé à se plaindre <strong>de</strong>s insuffisances <strong>de</strong> M. Derny; mais ne peut‐<br />

on pas penser que ces plaintes sont <strong>de</strong>venues plus fréquentes à mesure que M. <strong>de</strong> Coulon‐<br />

ges, sʹemparant <strong>de</strong> tout le mouvement du patronage, a tellement éteint toute initiative chez<br />

M. Derny quʹil lʹa réduit à une passivité presque absolue? Cet état <strong>de</strong> choses explique peut‐<br />

être, non aucune diminution <strong>de</strong> zèle quʹon ne reproche point à M. Derny, mais une effica‐<br />

cité moindre dans sa coopération. Il y a, dans nos efforts communs, un équilibre à gar<strong>de</strong>r;<br />

si la charité ne nous y maintient, les œuvres en souffriront et, tôt ou tard, notre union sera<br />

brisée.<br />

Si vous pensez quʹen tout cas on doit ici opérer un changement, je doute quʹil y ait<br />

avantage pour Ste ‐Anne à remplacer M. Derny par M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] plus mûr,<br />

sans doute, plus expérimenté que lui, mais moins robuste en santé, moins apte à diriger les<br />

jeux et les délassements, qui ne sont pas sans importance dans lʹœuvre. Il va sans dire que<br />

St ‐Charles, déjà bien démuni par la retraite <strong>de</strong> M. Faÿ, recevra un coup dangereux par<br />

1123


lʹéloignement <strong>de</strong> M. <strong>Jean</strong>‐Marie. Je crois donc, mon cher ami, que sʹil vous paraissait défi‐<br />

nitivement opportun <strong>de</strong> faire une mutation, il serait moins désavantageux pour lʹensemble<br />

<strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong> remplacer M. Derny par M. Charrin, par exemple, ou autrement, mais sans<br />

contrecoup pour les autres maisons.<br />

Vous avez, je crois, reconnu, en causant <strong>avec</strong> M. Planchat, quʹil nʹy avait pas utilité<br />

essentielle au déplacement <strong>de</strong> M. Alphonse [Vasseur] et quʹon risquerait ainsi <strong>de</strong> déranger<br />

lʹharmonie, présentement assez bien établie, à Nazareth; je nʹinsiste donc pas sur cette<br />

combinaison.<br />

Quant au vœu que vous exprimez concernant lʹinstallation dʹun personnel entière‐<br />

ment stable pour lʹŒuvre <strong>de</strong> S te ‐Anne, nous ne refusons pas dʹen rechercher les moyens;<br />

mais, si vous jetez un coup dʹœil, mon bon ami, sur les charges que nous avons déjà assu‐<br />

mées et sur les forces si restreintes dont nous disposons, vous resterez bien convaincu que,<br />

loin <strong>de</strong> songer à nous étendre, nous <strong>de</strong>vrions viser à nous restreindre. Depuis un temps<br />

notable, nous avons refusé toutes les offres qui nous ont été faites pour <strong>de</strong> nouveaux pos‐<br />

tes, et nous en sommes aux expédients dès quʹil arrive le moindre inci<strong>de</strong>nt dans ceux que<br />

nous occupons. Nous ne saurions, en toute vérité, réunir aucun élément propre à former<br />

un établissement <strong>de</strong> quelque consistance, non plus que dʹun secours définitivement stable<br />

et régulier. Nous ne perdons pas <strong>de</strong> vue cette pensée, soyez‐en bien assuré; nous voyons<br />

chaque jour tout ce qui est à faire dans le quartier <strong>de</strong> Charonne, nous serons heureux dʹy<br />

apporter notre part <strong>de</strong> labeur et <strong>de</strong> zèle, si les circonstances <strong>de</strong>viennent plus tard moins<br />

difficiles pour nous.<br />

Jʹajoute, mais seulement comme témoignage <strong>de</strong> notre désintéressement et sans nulle<br />

arrière‐pensée, que, si la faiblesse <strong>de</strong> nos moyens était un obstacle au développement <strong>de</strong><br />

lʹŒuvre et si quelque secours moins impuissant vous était offert, nous accueillerions les<br />

premiers, comme un bienfait dʹen haut, <strong>de</strong>s assistances moins inefficaces que les nôtres et<br />

nʹen resterions pas moins dévoués dans le concours quʹil nous serait possible <strong>de</strong> vous prê‐<br />

ter sur dʹautres points.<br />

Gardons confiance, prions sans nous lasser, et le Dieu <strong>de</strong> charité nous donnera enfin<br />

la dilatation <strong>de</strong> cœur et <strong>de</strong> ressources que voudraient les nécessités pressantes dont nous<br />

sommes entourés.<br />

Agréez, mon bon ami, les assurances accoutumées <strong>de</strong> mon affectueux dévouement<br />

en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1112 à M. Caille<br />

Retour à Amiens du frère Mitouard.<br />

Vaugirard, 25 juillet 1866<br />

Mon bon ami,<br />

Nous serons heureux dʹavoir <strong>de</strong> vos nouvelles; en ces temps dʹépreuve, on aime à<br />

suivre les siens <strong>de</strong> tout près.<br />

M. Mitouard sʹennuie à Arras, je crois que vous lʹavez gâté à Amiens où il se plaisait<br />

beaucoup; ce ne serait pas une raison suffisante pour le déplacer, mais M. Laroche pense<br />

aussi que son humeur mélancolique peut <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r quelque mouvement. Jʹai pensé quʹà<br />

raison <strong>de</strong> lʹaugmentation du nombre <strong>de</strong>s habitants <strong>de</strong> votre maison, un ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> plus pour‐<br />

1124


ait vous être utile et quʹil vous conviendrait <strong>de</strong> le reprendre; si toutefois il en était autre‐<br />

ment, nous verrions ce qui convient le mieux pour le bien <strong>de</strong> M. Mitouard; vous savez sa<br />

foi sincère, ses habitu<strong>de</strong>s régulières; jugez et écrivez‐moi sans retard, afin que je lui ré‐<br />

pon<strong>de</strong> moi‐même.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Nous avons reçu lʹétoffe anacoste. Elle nous a paru moins belle et moins forte<br />

que les autres; peut‐être nous trompons‐nous. Je pense quʹelle fera néanmoins bon usage;<br />

M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] en acquittera le prix.<br />

1113 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Démarches pour lʹordination. Nouvelles <strong>de</strong>s frères. Ravages du choléra. Amis et protecteurs <strong>de</strong> lʹInstitut. Cons‐<br />

truction <strong>de</strong> la chapelle à N.D. <strong>de</strong>s Champs. Souhaits affectueux.<br />

Vaugirard, 3 août 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Votre voyage ayant été un peu long, nous avions hâte dʹavoir <strong>de</strong> vos nouvelles; elles<br />

sont arrivées enfin et <strong>de</strong>s meilleures, nous en avons béni Dieu et nous continuons à Le<br />

prier pour que vous puisiez aux eaux force et puissance, afin <strong>de</strong> subvenir aux graves éven‐<br />

tualités concernant vos ordres. Je nʹai jusquʹici tiré dʹArras à ce sujet aucun détail précis;<br />

M gr Lequette est venu à Paris pour prêter serment aux mains <strong>de</strong> lʹEmpereur; dès que je lʹai<br />

appris, jʹai envoyé vite à son hôtel pour mʹassurer si lʹabbé Lantiez et moi nous pourrions<br />

le voir comme jʹen avais le désir; il venait <strong>de</strong> repartir; à son retour, son sacre lʹa fort occupé,<br />

lʹabbé Laroche était allé six fois chez lui sans le rencontrer; <strong>de</strong>puis, sʹil lʹa vu, je lʹignore; si<br />

on a écrit dʹAutun, je ne le sais pas davantage. M gr dʹAutun partant nʹa pas répondu à ma<br />

lettre qui, du reste, nʹappelait pas précisément <strong>de</strong> réponse jusquʹà nouveaux éclaircisse‐<br />

ments à prendre du côté dʹArras. Peut‐être pourrez‐vous savoir par M. Picard si quelque<br />

chose a été précisé; je vois que le temps <strong>de</strong>s vacances, dans les évêchés comme en toutes<br />

les administrations, est peu favorable à la prompte expédition <strong>de</strong>s affaires.<br />

M. Chaverot mʹa écrit dʹArras; il est, comme vous le présumez bien, parfaitement<br />

disposé à faire tout ce quʹil pourra pour se rendre utile; mais M. Victor [Trousseau] est si<br />

fatigué quʹil est réduit presque à lʹimpuissance; je lʹinvite à accompagner M. Laroche aux<br />

bains <strong>de</strong> mer, sʹil se peut, sinon à venir à Chaville pour se remettre; je ne sais encore ce<br />

quʹil pourra faire.<br />

Ici, nous allons assez bien, malgré un peu <strong>de</strong> choléra courant un peu partout, sans<br />

rien <strong>de</strong> menaçant toutefois; Vaugirard, je crois, nʹen a jusquʹici aucune atteinte; Amiens est<br />

encore fort maltraité; M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet], je vous lʹai dit, je crois, a perdu ses <strong>de</strong>ux<br />

frères; un enfant est mort dans notre maison chez M. Caille. Sa charité sʹest montrée,<br />

comme toujours, en ces tristes circonstances, il a ouvert sa porte aux orphelins; il a préparé<br />

<strong>de</strong>s places pour 25, mais il sera débordé; Dieu est, mieux que lui encore, le Père <strong>de</strong>s orphe‐<br />

lins et subviendra à tout.<br />

Nous avons eu à Vaugirard notre distribution <strong>de</strong>s prix avant‐hier, 1 er août; elle nʹa,<br />

Dieu aidant, été pour nous quʹune occasion <strong>de</strong> toutes sortes <strong>de</strong> consolations, vous rendrez<br />

grâces <strong>avec</strong> nous; ces MM. <strong>de</strong> St‐Sulpice, MM. Icard et Dugrais y ont très obligeamment<br />

assisté. Ils doivent nous visiter à Chaville la semaine prochaine; peut‐être M. Caval sera‐t‐<br />

1125


il <strong>de</strong> la partie, peut‐être dîneront‐ils <strong>avec</strong> la petite communauté. Ils nous montrent tous<br />

une particulière bienveillance; Dieu dispose les cœurs <strong>de</strong>s siens et en tire <strong>de</strong>s trésors <strong>de</strong><br />

bonté et <strong>de</strong> charité quʹIl répand comme une rosée; cʹest Lui toujours qui donne, mais en se<br />

cachant sous cet intermédiaire; mais Il ne se cache quʹà <strong>de</strong>mi et lʹon crie: Ah! mon Dieu! je<br />

vous reconnais.<br />

M. dʹArbois a passé 15 jours ici, remuant plus quʹil ne se reposait; il ne va pas mal; il<br />

va bâtir une chapelle à N.D. <strong>de</strong>s Champs, M gr lʹy pousse et souscrit pour 5.000f; il nʹen faut<br />

que 20.000, les constructions étant, à Angers, à <strong>de</strong>s prix extrêmement modérés. Il a parfai‐<br />

tement réussi à Angers à relever les <strong>de</strong>ux œuvres quʹon lui a confiées; lʹEvêché, le Chapitre<br />

et tout le mon<strong>de</strong> chrétien est parfaitement disposé pour lui; il reste néanmoins humble et<br />

bien dans lʹesprit religieux.<br />

M. Urbain [Baumert], à Metz, a aussi gagné le cœur du bon Evêque qui a été fort<br />

content <strong>de</strong> ses examens; il va lui conférer les ordres mineurs à lʹAssomption et peut‐être le<br />

sous‐diaconat en septembre. Quelques petites rumeurs menaçantes commencent à venir<br />

pour lui <strong>de</strong> la Prusse 383 . Peut‐il venir <strong>de</strong> là autre chose! Je remplis cette feuille <strong>de</strong> tous ces<br />

détails parce que je vous sais très avi<strong>de</strong> <strong>de</strong> connaître; je me gar<strong>de</strong> bien dʹappeler cela curio‐<br />

sité, sachant bien quʹici cʹest le cœur qui est avi<strong>de</strong>, non lʹesprit.<br />

Je vous envoie une lettre arrivée à votre adresse; jʹai regardé si on vous <strong>de</strong>mandait<br />

quelque disposition que nous puissions exécuter à votre place, je nʹai rien aperçu <strong>de</strong> tel. Je<br />

vous ai adressé à Chalon, rue S t Georges, il y a 8 jours, la soutane dʹété, (étoffe moins bien<br />

que <strong>de</strong> coutume. M. Caille, pris par mille soins, nʹa pu sʹoccuper <strong>de</strong> ce détail); le diction‐<br />

naire y est joint. On mʹa fait une soutane en pareille étoffe, et le tailleur ingénieux lʹa mise à<br />

lʹenvers; cʹest tout à fait excentrique. On se sent lʹenvie <strong>de</strong> penser à S t Eloi donnant lʹavis<br />

que vous savez au roi Dagobert.<br />

Voilà que ma page finit, je ne vous ai guère parlé <strong>de</strong> vous; en correspondance, ce<br />

quʹon attend cʹest que les gens nous parlent <strong>de</strong> ce quʹils font et non <strong>de</strong> ce que nous faisons<br />

nous‐mêmes puisque, à distance, ils nʹen parleraient guère à lʹaise ni à propos; lʹéloigne‐<br />

ment ne mʹempêche pas néanmoins <strong>de</strong> vous suivre en tout ce qui regar<strong>de</strong> et votre âme et<br />

vos affections, votre âme dans tous vos rapports <strong>avec</strong> Dieu, vos affections en votre douce<br />

intimité <strong>avec</strong> votre bonne mère; je sympathise à tout cela et mʹy unis bien cordialement. Je<br />

pense à vous surtout tous les jours au S t Sacrifice, et le soir aussi je vous paie fidèlement<br />

lʹAve Maria que je vous ai affecté dès le commencement et qui vous restera, je le crois bien,<br />

jusquʹà la fin. Priez pour nous <strong>de</strong> votre côté, car, malgré quelques petits succès <strong>de</strong> temps à<br />

autre, nous nʹavons pas moins tout autant <strong>de</strong> misères et dʹépreuves quʹil en faut pour nous<br />

rappeler combien nous sommes faibles et combien nous serions impuissants si Dieu ne<br />

nous assistait.<br />

Adieu, bien cher ami; il se peut que je fasse, après la semaine prochaine, une petite<br />

absence <strong>de</strong> 8 ou 10 jours, mais jusquʹici je nʹen vois guère la possibilité. Offrez, je vous prie,<br />

mon respect à M me votre mère, si vous le trouvez opportun, et croyez, bien cher enfant, à<br />

tous mes plus tendres sentiments en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

383 Le frère Urbain Baumert, <strong>de</strong> père prussien et <strong>de</strong> mère polonaise, avait dû se réfugier en France, suite à <strong>de</strong>s activités politiques<br />

contre le gouvernement prussien. Mais c’est sans doute à cause <strong>de</strong> la guerre austro-prussienne (défaite <strong>de</strong> l’Autriche à Sadowa le 3<br />

juillet), que le jeune ressortissant prussien est recherché par la police <strong>de</strong> Bismarck.<br />

1126


1114 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Questions dʹordre administratif. Fatigue <strong>de</strong> MLP. Que M. <strong>de</strong> Varax se ménage.<br />

Chaville, 6 août 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je réponds promptement à votre lettre, pas si vite pourtant que vous le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z;<br />

jʹai été pris dès mon arrivée ici samedi, et hier, après la messe, je me suis trouvé si fatigué<br />

quʹune sorte <strong>de</strong> torpeur mʹa laissé oublier lʹheure <strong>de</strong> la poste; pour ne pas la laisser passer<br />

aujourdʹhui, je réponds ici <strong>avec</strong> un extrême laconisme que vous prendrez dans le meilleur<br />

sens.<br />

Les démarches que vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> M. Laroche (renseignement précis pris par moi)<br />

sont sans conséquence et sans lien pour notre liberté. LʹUniversité nʹadmet point <strong>de</strong> rem‐<br />

plaçants provisoires; si un instituteur sʹabsente un peu longuement, celui qui le supplée<br />

doit purement et simplement faire une déclaration, comme sʹil établissait lui‐même une<br />

institution. De là, le contenu principal <strong>de</strong> la lettre <strong>de</strong> M. Laroche. Je crois, conséquemment,<br />

que vous pouvez y accé<strong>de</strong>r sans nul inconvénient.<br />

Pour ce qui concerne les renseignements concernant la partie <strong>de</strong> votre famille qui<br />

habiterait lʹArtois, je crois quʹelle tend seulement à donner à M. Laroche un moyen <strong>de</strong><br />

fournir dʹun seul mot une pleine garantie morale à tous, pour ce qui vous regar<strong>de</strong>, en in‐<br />

diquant les honorables entourages que vous pouvez avoir dans le pays même où vous ar‐<br />

rivez; répon<strong>de</strong>z toutefois <strong>avec</strong> la réserve que vous croirez pru<strong>de</strong>nte, sauf à vous en expli‐<br />

quer mieux <strong>avec</strong> M. Laroche. Je lui sais dʹailleurs du tact et <strong>de</strong> la circonspection; cʹest peut‐<br />

être son père, ancien magistrat dignement posé dans le pays, qui a provoqué cette <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>. Jʹai votre diplôme <strong>de</strong> licencié et votre acte <strong>de</strong> naissance (cʹest bien ce <strong>de</strong>rnier acte<br />

quʹil faut, lʹUniversité nʹa cure du baptême, au moins officiellement). Je les enverrai à M.<br />

Laroche dès que vous me donnerez avis à cet effet.<br />

M. Chaverot mʹa écrit tout récemment que Mgr dʹArras nʹaurait à écrire à Autun que<br />

sur la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> renseignements <strong>de</strong> lʹEvêque, laquelle <strong>de</strong>man<strong>de</strong> nʹest pas arrivée, mais<br />

quʹil restait pour sa part dans les dispositions quʹil avait déjà manifestées relativement à<br />

votre ordination. Attendons donc quelque mouvement dʹAutun. Vous verrez si vous avez<br />

à écrire à M. Picard, ou sʹil vaut mieux attendre simplement. Je vais mʹarrêter ici, sauf à<br />

écrire plus au long à quelque prochain courrier. Adieu, bien cher enfant, soignez votre<br />

corps pour le bien <strong>de</strong> votre âme dont il est le serviteur; tant quʹil ne lʹoublie pas et quʹil<br />

<strong>de</strong>meure humble et soumis, vous pouvez lui faire quelques concessions, elles ne détrui‐<br />

ront pas la subordination.<br />

Tout le mon<strong>de</strong> ici vous assure <strong>de</strong> ses affectueux et dévoués sentiments, <strong>avec</strong> un gé‐<br />

missement senti sur votre absence, bien dure pour tous ceux qui vous voient peu durant<br />

lʹannée et qui bientôt vont vous voir moins encore.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1115 à M. Caille<br />

Autorisation <strong>de</strong> vendre un terrain. Le choléra sʹéloigne dʹAmiens. MLP. à Duclair.<br />

Duclair, 10 août [1866]<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je ne vois pas dʹinconvénient dans la vente que vous proposez <strong>de</strong> faire dʹune petite<br />

partie <strong>de</strong> votre terrain <strong>de</strong> S t <strong>Jean</strong>, afin <strong>de</strong> constituer une assiette à lʹhypothèque à produire<br />

1127


pour la tutelle <strong>de</strong>s orphelins que vous avez recueillis ces temps <strong>de</strong>rniers dans votre mai‐<br />

son. Cet arrangement sera dʹautant moins grave que vous vous réservez la faculté <strong>de</strong> ra‐<br />

cheter cette parcelle <strong>de</strong> terrain dans le cas où elle serait vendue au prix <strong>de</strong> 1.000f, frais<br />

compris.<br />

Jʹavais appris <strong>avec</strong> joie, par les journaux, la presque cessation <strong>de</strong> lʹépidémie à<br />

Amiens, mais le témoignage <strong>de</strong> ceux qui sont sur les lieux est plus sûr que toutes les affir‐<br />

mations <strong>de</strong> la presse; les renseignements que vous me donnez sont conséquemment les<br />

bienvenus et rassurent, en particulier, ceux <strong>de</strong> nos frères dont les familles sont à Amiens.<br />

Je suis ici pour une douzaine <strong>de</strong> jours, tant pour régler quelques affaires <strong>de</strong> ma<br />

sœur que pour remettre un peu ma santé avant les mauvais temps <strong>de</strong> lʹhiver.<br />

Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S., croyez bien à toute notre affection pour<br />

vous et pour vos frères.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1116 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Faiblesse <strong>de</strong> MLP. Formalités concernant lʹordination sacerdotale <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax.<br />

Duclair, 14 août [18]66<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai tant écrit aujourdʹhui que je vois trouble <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s éblouissements <strong>de</strong> lassitu<strong>de</strong>. Je<br />

fais seulement ces <strong>de</strong>ux mots pour vous remercier <strong>de</strong> vos chères lettres affectueuses;<br />

comme je suis heureux <strong>de</strong> les recevoir, rapportant à Dieu cette charité quʹIl allume et ali‐<br />

mente.<br />

Je suis ici jusquʹau 23. Il mʹa semblé que je ne pouvais guère raisonner <strong>avec</strong> vous sur<br />

vos mouvements, parce quʹils sont trop subordonnés encore aux nouvelles dʹAutun; at‐<br />

tendons quelques jours, vous aurez vous‐même quelque chose <strong>de</strong> plus précis.<br />

Jʹai fait parvenir toutes vos pièces à M. Laroche qui les a reçues; je rappelle à M.<br />

Henry [Piquet] le croquis <strong>de</strong> reliquaire; je lui ai dit quʹil pouvait aller jusquʹà 70f, il me<br />

semble que vous mʹaviez déterminé ce chiffre au maximum. Je lui dis dʹenvoyer à Montcoy.<br />

Je regrette bien cordialement, cher ami, dʹenvoyer ce rien <strong>de</strong> lettre à si gran<strong>de</strong> dis‐<br />

tance; mais vous la pèserez dans lʹintention, non dans ce quʹelle comporte. Combien sou‐<br />

vent Dieu, notre Père, nous donne cet exemple en pesant nos pauvres œuvres.<br />

Je vous embrasse, en compensation, <strong>avec</strong> une tendresse redoublée.<br />

Votre ami et Père en J. et M. Le <strong>Prevost</strong><br />

MM. Victor [Trousseau] et Baumert arrivent <strong>de</strong>main ou après à Chaville. Ici, pluie<br />

continuelle, temps qui semble mala<strong>de</strong> <strong>de</strong> façon inquiétante.<br />

1117 à M. Chaverot<br />

Autorisation pour un voyage à St‐Etienne. Nouvelles <strong>de</strong>s frères.<br />

Duclair, 16 août 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je nʹai que quelques minutes pour répondre à votre lettre du 14 avant le départ <strong>de</strong> la<br />

poste. Jʹapprouve lʹarrangement pour votre voyage à S t Etienne; avertissez, si vous le pou‐<br />

1128


vez, vos bons parents <strong>de</strong> cette disposition. Je vous verrai à votre passage à Paris, lorsque<br />

vous retournerez à Arras; tout cela fait du mouvement plutôt que du repos, mais il y a tou‐<br />

tefois une diversion à vos travaux du Séminaire. Avez‐vous trouvé quelques moments<br />

pour les étu<strong>de</strong>s que le Séminaire vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> durant les vacances?<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> tous les détails intéressants que vous me communiquez et <strong>de</strong>s<br />

renseignements sur les projets dʹorganisation; je nʹai pas vu quʹon y ait marqué la part <strong>de</strong><br />

M. Mitouard. Comment va‐t‐il? En est‐on content? Est‐il satisfait lui‐même?<br />

Voilà que je finis, ajournant à prochaine occasion le reste. Je suis ici à Duclair (Seine<br />

Inférieure), chez M me Salva, jusquʹà mercredi prochain 22. Je pense que le vendredi 24 jʹirai<br />

à Chaville pour faire une visite à nos ff. Victor [Trousseau] et Baumert. Je crois que M. Vic‐<br />

tor fait sagement <strong>de</strong> ne sʹoccuper présentement que <strong>de</strong> sa santé et dʹajourner la pensée <strong>de</strong><br />

voyage à Orléans à un autre moment.<br />

Adieu, bien cher ami; mille affections en J. et M., à vous et autour <strong>de</strong> vous.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1118 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Incertitu<strong>de</strong>s sur la date dʹordination; MLP. en est contrarié. Nouvelles <strong>de</strong>s séminaristes en vacances.<br />

Chaville, 27 août 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je suis présentement tout désorienté à votre sujet; jʹai perdu vos traces et jʹignore<br />

absolument où vous êtes. Jʹignore aussi où en sont vos affaires concernant lʹordination; on<br />

me dit, dʹaprès quelques mots écrits par M. Chaverot, que peut‐être le moment en serait<br />

avancé, si elle se faisait à Autun; avez‐vous à ce sujet quelque indice un peu précis? Il ne<br />

mʹest, quant à moi, venu aucun renseignement.<br />

Jʹespère que votre santé sʹest affermie. M. Chaverot, qui mʹécrit <strong>de</strong> St Etienne, paraît<br />

assuré quʹil en est ainsi; dites‐moi quelques mots qui changent cette espoir en certitu<strong>de</strong>.<br />

Je suis <strong>de</strong> retour <strong>de</strong> mon petit voyage <strong>de</strong>puis le 23 <strong>de</strong> ce mois, et je reste, tantôt ici,<br />

tantôt à Vaugirard, selon que le besoin le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>. Nos jeunes séminaristes sont toujours<br />

heureux <strong>de</strong> leur repos <strong>de</strong> vacances. MM. Victor [Trousseau] et Urbain [Baumert] sont <strong>de</strong> ce<br />

nombre, mais leur temps <strong>de</strong> séjour ici touche à son terme; M. Victor reviendra vers le 15<br />

septembre, si M. Laroche qui est installé aux Baraques (cʹest le nom <strong>de</strong> la localité384 ), au<br />

bord <strong>de</strong> la mer, ne peut lʹappeler près <strong>de</strong> lui.<br />

Le jeune Boiry semble découragé, doute <strong>de</strong> sa vocation et est en examen sur ce que<br />

lʹavenir lui peut donner; je lʹenvoie à M. Pinaud, à Issy, pour sʹéclairer auprès <strong>de</strong> lui; cette<br />

petite âme est peu vigoureuse, je ne sais comment elle sortira <strong>de</strong> cette épreuve. Les sou‐<br />

tiens extérieurs sont bien insuffisants, il faut que lʹEsprit <strong>de</strong> Dieu rési<strong>de</strong> dans lʹâme et lui<br />

donne le souffle <strong>de</strong> force et <strong>de</strong> vie.<br />

M. Chaverot sera <strong>de</strong> retour à Arras le 10 septembre au plus tard; il avait résolu <strong>de</strong><br />

passer ici quelques jours, du 6 au 9, mais je crois quʹil ne pourra résister aux instances<br />

pressantes <strong>de</strong> sa famille et sera obligé <strong>de</strong> sacrifier Chaville au profit <strong>de</strong> St Etienne. Sa bonne<br />

mère mʹa écrit une lettre à la fois plaintive et priante pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r quʹon lui laissât plus<br />

384 Près <strong>de</strong> Calais, s’appelle aujourd’hui Blériot-Plage, du nom du 1 er aviateur qui traversa la Manche.<br />

1129


<strong>de</strong> repos et quʹon ne changeât pas ses vacances en travail; jʹai répondu <strong>de</strong> mon mieux, la<br />

nature veut sa part, le sentiment crie, le corps a ses exigences. Quand tous sont satisfaits,<br />

que reste‐t‐il pour le bon Dieu? Donnons‐lui au moins tout ce qui reste libre, notre indo‐<br />

lence est trop disposée à se lʹapproprier.<br />

Je finis là, mon bien cher ami, pour écrire quelques mots à M. Chaverot, en réponse<br />

à sa <strong>de</strong>rnière lettre; écrivez‐moi dès que vous le pourrez; tout le mon<strong>de</strong> ici sera heureux <strong>de</strong><br />

vous revoir, mais vous ne ferez que passer parmi nous si votre ordination est tardive; lais‐<br />

sons faire le bon Maître, obéissons‐lui <strong>avec</strong> amour et soumission bien filiale: sicut in cœlo et<br />

in terra.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1119 à M. Chaverot<br />

MLP. partage fraternellement quelques nouvelles <strong>de</strong>s Œuvres et <strong>de</strong>s frères. Sollicitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> santé; détachement <strong>de</strong>s<br />

parents.<br />

Chaville, 27 août 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous écris <strong>de</strong>ux mots un peu hâtivement, mon absence <strong>de</strong> 15 jours mʹayant pré‐<br />

paré un certain amas <strong>de</strong> correspondances quʹil faut déblayer à mon retour.<br />

M. Trousseau sʹoccupe, <strong>avec</strong> M. Lantiez et M. Laroche, <strong>de</strong> lʹorganisation <strong>de</strong>s services<br />

dʹArras; on a trouvé un second jeune professeur et M. Lantiez doit, au moment convena‐<br />

ble, se rendre à Arras pour mettre tout le mon<strong>de</strong> en place; espérons que tout ira bien, mal‐<br />

gré lʹinsuffisance <strong>de</strong>s moyens. M. Guillot ne mʹa pas écrit jusquʹici.<br />

Votre bonne mère mʹa écrit une lettre aimable et pleine <strong>de</strong> sollicitu<strong>de</strong> pour votre<br />

santé; elle craint quʹon ne vous laisse pas assez <strong>de</strong> repos, que vos vacances ne soient pas<br />

assez franches <strong>de</strong> sujétions et travaux; je lui ai répondu <strong>de</strong> mon mieux pour la tranquilli‐<br />

ser, lʹassurant que nous ferions en sorte que vous nʹayez guère à porter que la surveillance<br />

<strong>de</strong> la maison dʹArras dans le nouveau séjour que vous allez bientôt y faire. Je pressens bien<br />

quʹelle ne trouvera pas ainsi une satisfaction entière; un séjour long, prolongé <strong>de</strong> votre part<br />

à St Etienne eût pu seul la consoler, mais que faire? les nécessités nous pressent; prions le<br />

Seigneur <strong>de</strong> donner lui‐même le contentement à ces pauvres cœurs que nous sommes im‐<br />

puissants à rassasier.<br />

Tout le mon<strong>de</strong> ici pense à vous; on nʹoublie pas, aux prières, <strong>de</strong> rappeler les frères<br />

absents; nous serons heureux si, en passant, nous avons encore quelques moments à vivre<br />

ensemble.<br />

Je nʹai, <strong>de</strong>puis bien <strong>de</strong>s jours, aucune nouvelle <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax. Est‐il revenu? Où en<br />

est‐il <strong>de</strong> ses affaires dʹordination? Je lʹignore; si vous le savez, dites‐le moi; je lui écris au‐<br />

jourdʹhui à Montcoy; mais il est peut‐être encore en Suisse ou sur les chemins; la lumière<br />

se fera <strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> patience.<br />

M. Trousseau repartira, je crois, dans <strong>de</strong>ux jours pour Arras; il ne sait encore si M.<br />

Laroche pourra le recevoir aux Baraques; je lʹenvoie aujourdʹhui chez le mé<strong>de</strong>cin pour avi‐<br />

ser à fortifier sa tête et ses jambes.<br />

1130


Adieu, bien cher ami, je suis heureux du petit commencement <strong>de</strong> relations qui sʹest<br />

fait entre votre chère famille et nous; jʹespère que le Bon Dieu mettra dans nos âmes une<br />

sainte confiance et une charitable union.<br />

Je <strong>de</strong>meure, dans les Cœurs divins,<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1120 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Réflexions <strong>de</strong> MLP. sur lʹabsence. Détails sur la visite <strong>de</strong> lʹévêque dʹAutun à Vaugirard. Exhortation à la<br />

confiance.<br />

Vaugirard, 31 août 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Vous voilà retrouvé, vous voilà revenu en France, à Lyon, à Montcoy, autant <strong>de</strong> pas<br />

qui vous rapprochent <strong>de</strong> nous; cʹest singulier quʹon souffre moins <strong>de</strong> lʹabsence <strong>de</strong> ses amis<br />

quand ils sont moins loin <strong>de</strong> nous; cʹest toujours lʹabsence, lʹimagination franchit, il paraît,<br />

plus facilement lʹespace ainsi amoindri; elle vole pourtant bien vite!<br />

Je réponds à vos <strong>de</strong>ux lettres à la fois, la secon<strong>de</strong> dévorant un peu la première.<br />

Mgr dʹAutun a eu lʹextrême bonté et con<strong>de</strong>scendance <strong>de</strong> venir hier ici, mais jʹétais à<br />

Chaville et la maison était déserte; cʹétait gran<strong>de</strong> promena<strong>de</strong>; M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston]<br />

était seul à la maison et a eu pour lui seul lʹhonneur <strong>de</strong> sa visite; M. Georges est sorti <strong>de</strong>‐<br />

puis le matin, au moment où je vous écris, et je ne puis rien savoir <strong>de</strong> cette visite; elle a eu<br />

lieu vers 3 ou 4h.; M. Georges a dit à M. Myionnet que ce bon Seigneur sʹétait montré fort<br />

aimable, cʹest tout; votre curiosité va être bien mal satisfaite; jʹai été vers chacun tour à tour<br />

pour en savoir davantage: impossible, le portier lui‐même ne peut rien me dire.<br />

M. Georges a eu la bonne pensée <strong>de</strong> mʹenvoyer prévenir à Chaville; bien que je<br />

fusse déjà venu à Paris et à Vaugirard le matin et que je fusse rentré à Chaville assez fati‐<br />

gué, je suis reparti vers 5h. et je me suis rendu rue <strong>de</strong> Sèvres, chez les Lazaristes, où était<br />

<strong>de</strong>scendu Mgr ; mais course inutile, le bon Seigneur était parti dîner chez Mgr Buquet; sa<br />

voiture sʹéloignait quand jʹarrivais. Jʹai écrit au parloir quelques mots dʹhommage, <strong>de</strong> re‐<br />

gret et <strong>de</strong> reconnaissance; ainsi a fini lʹépiso<strong>de</strong>.<br />

Si je nʹeusse été abattu par la fatigue, lʹidée me serait venue, sans doute, dʹaller chez<br />

Mgr Buquet attendre la fin du dîner, après avoir moi‐même refait un peu mes forces à Na‐<br />

zareth, mais cette lumière ne mʹest venue que le soir, quand jʹétais rentré à Chaville.<br />

Néanmoins, je suis revenu content, Mgr aura vu mon empressement, puisquʹil me savait à<br />

la campagne; puis, jʹavais prié le Père St Vincent <strong>de</strong> Paul, à sa chapelle, <strong>de</strong> tout faire pour le<br />

mieux; enfin, Mgr était si bien chez Mgr Buquet, le meilleur et le plus vénérable <strong>de</strong> nos amis!<br />

Je crois donc que tout a été divinement réglé par la bonne Provi<strong>de</strong>nce. Quelle longue his‐<br />

toire! heureusement, cʹest à vous quʹelle est contée!<br />

Je vais attendre, pour écrire à M. Chaverot, lʹarrivée <strong>de</strong> la procuration pour la signa‐<br />

ture dont vous mʹannoncez lʹenvoi. M. Victor [Trousseau] sort dʹici à lʹinstant, après nous<br />

avoir fait ses adieux; il va coucher à Nazareth pour partir plus commodément <strong>de</strong>main ma‐<br />

tin. Il reviendra dans 8 jours, si M. Laroche nʹest pas en mesure <strong>de</strong> le recevoir aux Bara‐<br />

ques; il était déjà plus fort et mieux reposé, mais pas encore vraiment remis sur pied.<br />

1131


Ayez bonne confiance pour vous, cher ami, les eaux éprouvent inévitablement;<br />

quand, lʹan <strong>de</strong>rnier, je suis arrivé dʹAllevard, jʹétais extrêmement faible; 10 jours passés en<br />

Normandie mʹont rendu fort, Montcoy va faire <strong>de</strong> même pour vous. Je crois que vous y se‐<br />

rez peut‐être, non peut‐être, mais très certainement mieux soigné, mieux intéressé que<br />

chez nous; je ne vous invite donc pas à revenir avant votre ordination, à moins que vous<br />

nʹen ayez une inspiration prononcée et que vous y voyiez un moyen utile pour votre santé.<br />

Du reste, la saison est si constamment mauvaise quʹil nʹest guère <strong>de</strong> lieu où lʹon puisse<br />

<strong>avec</strong> assurance compter quʹon <strong>de</strong>viendra fort; les orages, les pluies continuelles sont peu<br />

propres à fortifier et à rasseoir une santé ébranlée. Deus provi<strong>de</strong>bit ! Ayons confiance, Il sera<br />

à Arras, Il est là où vous êtes; oh! quʹIl soit surtout dans votre cœur.<br />

On sonne la lecture spirituelle, il y a pourtant encore dans vos lettres bien <strong>de</strong>s cho‐<br />

ses qui voudraient réponse; <strong>de</strong>s sympathies à exprimer, comme je les ai senties, pour tout<br />

ce qui vous entoure et tout ce qui vous arrive; vous <strong>de</strong>vinez tout cela: intelligenti pauca. Si<br />

jʹai oublié quelque point essentiel, vous allez mʹécrire, vous me le direz; adieu, mille res‐<br />

pects profonds à votre chère famille, si elle veut bien les recevoir.<br />

Votre affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1121 à M. Trousseau<br />

Encouragements à la charité et à la patience. M. <strong>de</strong> Varax ordonné diacre le 22 septembre à Autun.<br />

[6 septembre 1866]<br />

M. Lantiez vous a écrit hier pour vous dire que, si M. Mitouard vous est inutile,<br />

nous lʹavons compris dans lʹorganisation <strong>de</strong> nos services et que vous pourrez lʹenvoyer,<br />

dès que vous pourrez vous passer <strong>de</strong> lui.<br />

Jʹécris quelques mots dʹencouragement à M. Guillot; faites <strong>de</strong> votre mieux pour que<br />

la paix et le contentement règnent autour <strong>de</strong> vous. Cʹest une bonne occasion que vous a<br />

ménagée le Seigneur dans cette position transitoire et si propre à exercer la charité et la pa‐<br />

tience.<br />

Nous nʹavons pas reçu <strong>de</strong>puis longtemps <strong>de</strong> lettres <strong>de</strong> M. Laroche; dites‐lui que<br />

nous serons satisfaits dʹavoir <strong>de</strong> ses nouvelles. Vous appelle‐t‐il aux bains <strong>de</strong> mer?<br />

La procuration <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax est à la légalisation et vous sera envoyée <strong>de</strong>main; il<br />

serait bien <strong>de</strong> régler cette affaire avant <strong>de</strong> partir pour la mer ou Chaville.<br />

Je ne sais si M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] vous a payé votre retour à Arras; cʹétait son<br />

intention.<br />

Adieu, bien cher ami, je vous embrasse tendrement ainsi que nos ff. dʹArras.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. <strong>de</strong> Varax sera ordonné diacre à Autun le 22 septembre, et nous arrivera tout <strong>de</strong><br />

suite après. Jʹattends M. Chaverot. Je ne saurai que <strong>de</strong>main le jour précis <strong>de</strong> la retraite.<br />

1122 à M. Guillot<br />

Conseils <strong>de</strong> patience et <strong>de</strong> douceur dans les difficultés.<br />

1132


Vaugirard, 6 septembre 1866<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je me peinerais bien du contenu <strong>de</strong> votre lettre et du ton irrité <strong>avec</strong> lequel elle est<br />

écrite, si je ne savais par expérience que vous nʹêtes dépourvu ni <strong>de</strong> foi, ni <strong>de</strong> vertu, que les<br />

heures mauvaises ont leur fin et que, rentrant en vous‐même, vous retrouvez votre cœur<br />

<strong>de</strong> chrétien fidèle et <strong>de</strong> religieux jaloux du bien <strong>de</strong> son âme.<br />

Je tiens compte aussi <strong>de</strong>s circonstances difficiles que vous traversez; songez quʹelles<br />

auront un terme; M. Lantiez ira dans <strong>de</strong>ux ou trois semaines à Arras et vous y fera la posi‐<br />

tion la meilleure quʹil pourra; M. <strong>de</strong> Varax, dont vous savez la pru<strong>de</strong>nce et la bonté, nʹest<br />

pas loin non plus dʹarriver et M. Chaverot ira vous ai<strong>de</strong>r, en attendant, dʹici à quelques<br />

jours. Souvenez‐vous aussi, cher enfant, que cʹest dans les jours dʹépreuve quʹon mérite le<br />

plus et quʹon obtient le plus <strong>de</strong> grâces, pour peu quʹon correspon<strong>de</strong> par quelques efforts<br />

aux <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> Dieu; vous regretteriez bien, plus tard, <strong>de</strong> nʹêtre pas rentré dans ses vues<br />

<strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong> et dʹavoir rejeté le calice quʹil lui plaît <strong>de</strong> vous imposer pour un peu <strong>de</strong><br />

temps. Je vous parle, cher ami, le langage <strong>de</strong> la foi et <strong>de</strong> la résignation chrétienne, parce<br />

que cʹest le seul qui puisse réellement vous convenir et vous consoler.<br />

Si le nombre <strong>de</strong>s jeunes gens diminue momentanément, on doit lʹattribuer au départ<br />

<strong>de</strong> M. Laroche et à la saison présente qui est pleine <strong>de</strong> causes <strong>de</strong> dérangement pour eux;<br />

ayez bonne confiance, <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> Dieu, et faites ensuite <strong>de</strong> votre mieux sans vous<br />

tourmenter.<br />

Ne soyez pas non plus trop impatient contre vous‐même; vous avez vos défauts,<br />

cʹest vrai, mais chacun <strong>de</strong> nous, sous ce rapport, a aussi sa part; cʹest par lʹhumilité et le re‐<br />

cours au Seigneur que nous arrivons à nous corriger; employez ce double moyen, vous re‐<br />

trouverez le calme et la consolation.<br />

Je nʹinsiste pas sur votre pensée <strong>de</strong> vous réfugier dans un ordre sévère; votre santé<br />

répond suffisamment que cette pensée nʹest pas <strong>de</strong> Dieu; ce nʹest pas dʹailleurs <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s<br />

pénitences quʹIl vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, mais dʹacquérir la patience et la soumission dʹesprit qui<br />

sont si agréables à ses yeux. Travaillez‐y doucement, au jour le jour, cher enfant, et soyez<br />

sûr que vous accomplirez pleinement, quant à présent, sa sainte volonté.<br />

Adieu, mon bon ami, je suis sûr que vous mʹécrirez bientôt une lettre plus conso‐<br />

lante; la présence <strong>de</strong> M. Lantiez lèvera vos difficultés, et la régularité que reprendra la<br />

maison mettra fin à tous vos troubles. Je vais prier bien instamment pour vous à la belle<br />

fête <strong>de</strong> la Nativité; unissez‐vous à nous, afin que tous ensemble nous honorions bien notre<br />

Mère, la T. Ste Vierge, qui nous a rendus frères <strong>de</strong> son divin fils J.C.<br />

Je vous embrasse tendrement en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1123 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Diverses nouvelles <strong>de</strong>s Œuvres et <strong>de</strong>s frères. MLP. ne peut sʹépancher davantage.<br />

Vaugirard, 6 septembre 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Votre procuration, dont jʹai annoncé lʹenvoi à M. Victor [Trousseau], ne lui sera<br />

transmise que <strong>de</strong>main, ayant subi quelques retards par les formalités <strong>de</strong> la légalisation;<br />

tout est en règle, elle partira <strong>de</strong>main.<br />

1133


Je ne crois pas quʹil y ait raison suffisante <strong>de</strong> faire un voyage ici <strong>avec</strong> la nécessité<br />

pour vous <strong>de</strong> retourner à Autun au moment <strong>de</strong> lʹordination. Ce serait fatigue et dépense<br />

quʹil faut éviter, la fatigue surtout; ce serait bien si, ayant vu votre chère famille à lʹaise,<br />

vous pouviez ne guère tar<strong>de</strong>r pour votre retour après lʹordination; (le repos nécessaire, si<br />

vous êtes fatigué, étant réservé, cela va sans dire). Votre présence à Arras sera gran<strong>de</strong>ment<br />

désirée et jʹaurai encore à vous entretenir avant que vous ne vous y rendiez; vous verrez ce<br />

que les circonstances comporteront et vous ferez pour le mieux.<br />

Jʹai grondé M. Henry [Piquet] ce matin, qui a omis, dans la presse <strong>de</strong> ses travaux, <strong>de</strong><br />

vous envoyer un croquis pour la petite châsse; cʹest oubli involontaire, vous le lui pardon‐<br />

nerez; je lui ai dit quʹil était maintenant trop tard; vous lʹexcuserez <strong>de</strong> ce que ces lenteurs<br />

ont pu vous causer <strong>de</strong> contrariété; vous savez quʹil est fort porté <strong>de</strong> bonne volonté pour<br />

vous.<br />

Jʹattends M. Chaverot bien prochainement; jʹespère quʹil sera bien reposé, quoique<br />

ses vacances aient été un peu mouvantes, mais, <strong>avec</strong> la santé, cette activité fait un bon<br />

contrepoids à la vie fermée du Séminaire.<br />

Notre retraite ici commencera le 23 septembre au soir, vous verrez donc nos ff. un<br />

peu assemblés; elle sera donnée par le r.p. Bazin, un <strong>de</strong>s Pères les plus éminents <strong>de</strong> la rue<br />

<strong>de</strong> Sèvres; nous le désirions beaucoup, parce quʹil nous a gran<strong>de</strong>ment édifiés dans les pré‐<br />

cé<strong>de</strong>nts exercices quʹil a déjà dirigés chez nous. La retraite ne mʹempêchera pas <strong>de</strong> vous<br />

voir, parce que le r.p. Bazin occupera assez son mon<strong>de</strong> pour que jʹaie plus <strong>de</strong> liberté que<br />

dans les retraites un peu froi<strong>de</strong>s et languissantes; vous nʹen prendrez vous‐même <strong>de</strong> cette<br />

retraite que ce qui sera bien pour votre état et pour ce que vous avez à faire dʹautre part.<br />

Notre jeune Boiry a <strong>de</strong>mandé à passer une année comme f. laïc, disposé à rester tel,<br />

sʹil ne se trouve pas inspiré et conseillé, à la fin <strong>de</strong> cette épreuve, <strong>de</strong> reprendre ses cours<br />

pour le Séminaire. Il est à Vaugirard, sacristain, surveillant, etc. et paraît joyeux et plein<br />

dʹespérance, le mouvement semble lui avoir été nécessaire et le remettre en équilibre. Dieu<br />

soit béni, cʹest à Lui à mettre ses serviteurs là et comme Il les veut.<br />

Deux jeunes persévérants latinistes iront ces jours‐ci à Chaville: lʹun <strong>de</strong> Metz [Phi‐<br />

lippe Juckem], lʹautre dʹArras [<strong>Léon</strong> Escouté]. M. Risse amène le premier, M. Victor amè‐<br />

nera celui dʹArras, si M. Laroche ne peut le prendre (M. Victor) <strong>avec</strong> lui au bord <strong>de</strong> la mer.<br />

Un jeune homme [Oscar Rinquet], qui semble assez bien, fait <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux jours son<br />

essai à Vaugirard.<br />

Si le style décousu et bref vous convient, vous êtes ici servi à souhait. Si je nʹécris en<br />

hâte, je ne puis écrire du tout en ce moment, ayant beaucoup à correspondre; vous saurez<br />

bien, sous la brusquerie forcée, trouver la tendre affection et la confiante ouverture du<br />

père et <strong>de</strong> lʹami; quand on sʹentend, toute langue est bonne, même le silence qui est une<br />

langue aussi et que le cœur comprend.<br />

Adieu, bien cher ami, mille affections <strong>de</strong> tous nos frères, vous vous unirez à nous<br />

dans lʹaimable fête <strong>de</strong> la Nativité; nous serons <strong>avec</strong> vous dans la touchante solennité <strong>de</strong><br />

votre ordination.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1134


1124 à M. dʹArbois<br />

Retraite prêchée par le père Bazin. Ordination <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax à Noël.<br />

Vaugirard, 6 septembre [1866]<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je reçois seulement tout à lʹheure lʹavis que notre retraite commencera le dimanche<br />

au soir 23 <strong>de</strong> ce mois; elle sera donnée par le r.p. Bazin, un <strong>de</strong>s meilleurs Pères <strong>de</strong> la rue <strong>de</strong><br />

Sèvres qui nous a déjà gran<strong>de</strong>ment édifiés dans <strong>de</strong> précé<strong>de</strong>nts exercices quʹil a dirigés chez<br />

nous. Remercions J. et M. qui nous assurent ce précieux avantage.<br />

Il y a longtemps que nous nʹavons eu <strong>de</strong> vos nouvelles; je ne vous ai point accusé<br />

réception <strong>de</strong> votre <strong>de</strong>rnier rapport sur la Maîtrise, il nous a pourtant bien intéressés. Jʹétais<br />

au moment <strong>de</strong> faire une absence qui mʹa retenu quinze jours loin <strong>de</strong> la maison; je faisais ce<br />

voyage pour refaire mes forces avant lʹhiver, je nʹen sens pas jusquʹici dʹeffet appréciable.<br />

Vous verrez qui vous pouvez envoyer à la retraite.<br />

Tous vont assez bien autour <strong>de</strong> nous. M. Laroche est auprès <strong>de</strong> la mer pour un<br />

temps un peu long, plusieurs mois au moins; M. <strong>de</strong> Varax ira le remplacer; pour quʹil le<br />

fasse plus utilement, son Evêque, Mgr dʹAutun, va lʹordonner diacre le 22 <strong>de</strong> ce mois, et Mgr dʹArras le fera prêtre à Noël prochain; nous avons agréé cet arrangement qui dʹailleurs, est<br />

une faveur, à cause <strong>de</strong> la santé frêle et fatiguée <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax qui eût porté difficilement<br />

une 3e année <strong>de</strong> rési<strong>de</strong>nce constante au Séminaire.<br />

M. Risse va arriver. Voilà toutes les nouvelles; jʹen attendrai <strong>de</strong>s vôtres.<br />

Adieu, bien cher ami, je souhaite que la T. Ste Vierge, en sa Nativité, nous apporte à<br />

tous, à vous et aux vôtres en particulier, les grâces <strong>de</strong> Sainte Enfance, <strong>de</strong> pureté <strong>de</strong> cœur et<br />

dʹamour dévoué que comporte ce doux et aimable mystère.<br />

Je vous embrasse tendrement en J. et M..<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Mille respectueux hommages à M gr et à ces Messieurs du Chapitre, et affectueux<br />

souvenirs à vos amis.<br />

1125 à M. Decaux<br />

Changement dʹobédience pour le frère Charrin, dont MLP. brosse le portrait.<br />

Vaugirard, 7 septembre 1866<br />

Mon bon ami,<br />

Je vous poursuis dans votre retraite et jʹinterromps presque à regret votre repos si<br />

nécessaire pour vous entretenir, mais en quelques mots seulement, dʹune circonstance in‐<br />

téressant nos patronages.<br />

Je prévois quʹaprès notre retraite, qui va se donner dans le courant <strong>de</strong> ce mois, je<br />

vais être obligé <strong>de</strong> donner à M. Charrin une <strong>de</strong>stination qui lʹéloignerait pour un temps <strong>de</strong><br />

Paris. Comme il avait été vaguement question entre nous du remplacement <strong>de</strong> M. Derny à<br />

Ste ‐Anne et que jʹavais proposé pour cette mutation M. Charrin, je nʹai pas voulu consentir<br />

à son éloignement avant <strong>de</strong> mʹassurer quʹil ne dérangerait pas vos vues. Je vous prie donc<br />

<strong>de</strong> mʹécrire une ligne à ce sujet.<br />

1135


A mon avis, M. Charrin ne remplacerait pas pleinement, au moins pour les pre‐<br />

miers temps, M. Derny; il a <strong>de</strong>s qualités excellentes, une douceur charmante <strong>de</strong> caractère<br />

qui nʹexclut ni le mouvement ni lʹinitiative dans les œuvres, mais il est moins fort physi‐<br />

quement que M. Derny et il nʹa pas eu une aussi longue expérience que lui <strong>de</strong>s pratiques<br />

du patronage; vous jugerez, mon bon ami, <strong>de</strong> la convenance plus ou moins gran<strong>de</strong> que<br />

lʹun ou lʹautre aurait présentement pour convenir à lʹœuvre <strong>de</strong> S te ‐Anne.<br />

Je souhaite bien que, malgré le mauvais temps, vous tiriez bon parti <strong>de</strong> vos trop<br />

courtes vacances; je recomman<strong>de</strong> notre petite famille et moi‐même à vos prières et je vous<br />

promets que nous ne vous oublierons point <strong>de</strong> notre côté. Offrez nos bons souvenirs à M.<br />

Beluse si, comme je le présume, il est auprès <strong>de</strong> vous.<br />

Je suis bien affectueusement en N.S. tout à vous <strong>de</strong> cœur.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1126 à M. Trousseau<br />

Envoi dʹune procuration pour M. <strong>de</strong> Varax.<br />

10 septembre [1866]<br />

Mon bien cher enfant,<br />

Je vous envoie la procuration <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax, retardée ici par la légalisation et que<br />

je viens seulement dʹobtenir.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1127 à M. Chaverot<br />

Renouvellement <strong>de</strong>s vœux. Eviter la présence habituelle dʹétrangers à table. MLP. lui annonce le martyre, en Co‐<br />

rée, <strong>de</strong> Just <strong>de</strong> Brétenières, cousin <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax.<br />

Vaugirard, 12 septembre 1866<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je viens <strong>de</strong> converser <strong>avec</strong> M. Lantiez <strong>de</strong>s divers points dont M. Victor [Trousseau]<br />

et vous nous entretenez; voici ce que nous en pensons, sauf avis meilleur. Pour ce qui re‐<br />

gar<strong>de</strong> votre retour ici pour le prononcé <strong>de</strong> vos vœux, si cʹest le seul obstacle à ce que M.<br />

Trousseau puisse venir pour prendre un nouveau repos ici ou à Chaville (et nous lʹavons<br />

compris ainsi), rien ne serait plus facile que <strong>de</strong> lever la difficulté. Vous renouvelleriez vos<br />

vœux en particulier après votre retour ici; je dirais la S te Messe à N.D. <strong>de</strong> la Salette et, en<br />

présence <strong>de</strong> nos frères réunis, vous feriez le renouvellement <strong>de</strong> vos vœux.<br />

Nous pensons comme vous que la présence dʹun enfant à votre table, et <strong>de</strong> plus<br />

celle du jeune homme quʹon veut vous confier et même celle <strong>de</strong>s professeurs, peut être mal<br />

commo<strong>de</strong> pour vous. Il nous semble que la venue <strong>de</strong> tous ces jeunes gens du <strong>de</strong>hors peut<br />

être une occasion pour vous <strong>de</strong> leur faire une table à part qui serait présidée par lʹun <strong>de</strong>s<br />

professeurs. On nʹaurait pas <strong>de</strong>ux cuisines à faire, mais seulement à partager les aliments<br />

pour les <strong>de</strong>ux tables; <strong>de</strong> cette sorte, vous retrouveriez plus <strong>de</strong> liberté. On dirait aux profes‐<br />

seurs que, dans la prévision où lʹon est que le nombre <strong>de</strong> ces pensionnaires ou <strong>de</strong>mi‐<br />

pensionnaires peut augmenter, on a jugé mieux <strong>de</strong> leur faire une table particulière prési‐<br />

1136


dée par les professeurs. M. Lantiez pense quʹon ferait bien <strong>de</strong> commencer <strong>de</strong> suite, pen‐<br />

dant quʹil nʹy a encore quʹun professeur présent, afin que lʹautre, trouvant à son arrivée la<br />

chose établie, sʹy conforme plus aisément. Il se peut quʹà lʹexécution ce moyen trouve <strong>de</strong>s<br />

difficultés, mais M. Lantiez et moi ne les avons pas entrevues.<br />

Vous avez dû recevoir la procuration que je nʹai pu obtenir quʹaprès votre départ et<br />

que jʹai envoyée quelques heures après que vous aviez quitté Paris.<br />

Je reçois une lettre <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax, heureux et ému pourtant du martyre <strong>de</strong> son<br />

cousin, M. Just <strong>de</strong> Bretenières, décapité en mars <strong>de</strong>rnier <strong>avec</strong> ses <strong>de</strong>ux Evêques, en Corée,<br />

et six autres missionnaires. Nous sommes ici sous la même impression, glorifiant Dieu <strong>de</strong><br />

plein cœur, mais <strong>avec</strong> quelque cri <strong>de</strong> la nature qui répugne au brisement dʹune si noble et<br />

si belle existence. La joie <strong>de</strong> la foi domine néanmoins le sentiment naturel; le saint jeune<br />

homme qui offrait sa vie si généreusement ne serait pas satisfait que nous ne prissions<br />

point part à son bonheur.<br />

M. <strong>de</strong> Varax sʹaccuse <strong>de</strong> ne vous avoir point écrit; il prépare son examen et la re‐<br />

traite qui doit le disposer au diaconat; il a été obligé aussi <strong>de</strong> se rendre à Dijon près <strong>de</strong> la<br />

famille <strong>de</strong> Bretenières. Il apportera quelques livres à Arras, notamment une théologie <strong>de</strong><br />

Libermann quʹil croit pouvoir être fort utile à M. Victor.<br />

Adieu, bien cher ami et fils en N.S.; ménagez‐vous tous, autant que les moyens <strong>de</strong><br />

votre position le permettent, nous vous suivons <strong>de</strong>s yeux <strong>avec</strong> une tendre affection. Nous<br />

vous embrassons <strong>de</strong> cœur en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Avez‐vous <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> M. Laroche? Nous nous étonnons ici <strong>de</strong> ne pas recevoir<br />

quelques mots <strong>de</strong> lui qui nous tiennent au courant <strong>de</strong> sa position et <strong>de</strong> tout ce qui lʹinté‐<br />

resse.<br />

1128 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Le martyre <strong>de</strong> son cousin missionnaire. Pour MLP., cʹest la charité qui avait allumé en lui la soif <strong>de</strong> ce sacrifice.<br />

ʺSoyons martyrs aussi dans la voie où le Seigneur nous a misʺ. Démarches pour lʹordination au diaconat. Diffi‐<br />

cultés <strong>de</strong>s mouvements <strong>de</strong> personnel.<br />

Vaugirard, 13 septembre 1866<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je nʹavais pas attendu la réception <strong>de</strong> votre lettre pour me réjouir dans le Seigneur<br />

<strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> faveur quʹIl a faite à votre cher et vénéré cousin, M. <strong>de</strong> Bretenières, en lui<br />

donnant une âme <strong>de</strong> martyr et en lui donnant aussi lʹoccasion <strong>de</strong> satisfaire cette soif <strong>de</strong> sa‐<br />

crifice que la charité avait allumée en lui. Jʹajouterai sans confusion, parce que le Seigneur<br />

lui‐même ne désapprouve pas ce retour du sentiment naturel, que jʹai eu presque autant<br />

<strong>de</strong> brisement <strong>de</strong> cœur que <strong>de</strong> joie en voyant dans le journal lʹannonce formelle <strong>de</strong> ce grand<br />

événement. M. Lemée, ancien secrétaire <strong>de</strong> M gr Morlot, aujourdʹhui missionnaire en Co‐<br />

chinchine, en a aussi transmis la nouvelle à lʹArchevêché <strong>de</strong> Paris. Jʹattends, comme vous,<br />

une nouvelle abondance <strong>de</strong> grâces pour votre famille et même pour tous ceux que le bien‐<br />

heureux martyr a aimés, pour nous en particulier quʹil a honorés dʹune si aimable bienveil‐<br />

lance. Soyons martyrs aussi dans la voie où le Seigneur nous a mis, sinon par une immola‐<br />

tion consommée en un jour, au moins par le don toujours répété <strong>de</strong> nous‐mêmes, dans nos<br />

cœurs comme dans nos actions.<br />

1137


Je suis heureux <strong>de</strong> ce que vous me dites <strong>de</strong>s admirables sentiments <strong>de</strong> la famille <strong>de</strong><br />

votre cher cousin; un père et une mère à la hauteur dʹun tel sacrifice, voilà <strong>de</strong> ces œuvres<br />

qui ravissent le Cœur <strong>de</strong> Jésus; cʹest la scène du Calvaire renouvelée: Marie <strong>avec</strong> le glaive<br />

<strong>de</strong> douleur.<br />

M. Audrin nʹaura pas oublié la touchante circonstance que vous rappelez.<br />

Je vous répète, bien cher ami, que, à moins dʹimpossibilité ou difficulté sérieuse, il<br />

sera bien désirable que vous reveniez près <strong>de</strong> nous dès que vous serez libre <strong>de</strong> le faire<br />

après lʹordination; je voudrais, comme repos pour vous et comme moyen <strong>de</strong> nous enten‐<br />

dre, que vous fissiez une petite station ici avant dʹaller à Arras, et vous savez comme M.<br />

Chaverot, qui vous y remplace, sera pressé <strong>de</strong> revenir pour la rentrée <strong>de</strong> St‐Sulpice. Lʹex‐<br />

press sera le meilleur.<br />

M. Thibault sera‐t‐il à Autun pour votre diaconat, comme nous lʹavions espéré? Jʹen<br />

serais bien satisfait. Il serait bien difficile que lʹun <strong>de</strong> nous allât à Autun à ce moment; ce<br />

me serait un regret que personne <strong>de</strong> vos entourages dʹici ne fût près <strong>de</strong> vous dans cette si<br />

intéressante solennité; aviez‐vous compté sur lʹun <strong>de</strong> nous? Ce serait malaisé, au moment<br />

<strong>de</strong> la retraite commençante surtout. Pour lʹordination dʹArras, nous avons déjà vérifié que,<br />

malgré la solennité <strong>de</strong> Noël, lʹun ou lʹautre <strong>de</strong> nous pourra y assister.<br />

Je suis contrit <strong>de</strong> la mauvaise adresse, cela ressemble fort à maladresse, <strong>de</strong> ma lettre<br />

<strong>de</strong>rnière; je ne dormais pas, mais jʹécrivais précipitamment; que nʹai‐je eu souvenir du mot<br />

judicieux dʹun <strong>de</strong> nos amis: Je vais lentement parce que je suis pressé. Vous mʹavez cru<br />

plus malicieux ou plus spirituel quʹil ne fallait pour ce qui concerne les longues histoires;<br />

vous nʹêtes pas tombé dans mon sens, mais à côté.<br />

Je remercie M. Caval <strong>de</strong> ses touchantes et belles paroles, elles sont bien dignes dʹun<br />

Supérieur <strong>de</strong> St‐Sulpice; le bon Dieu, dans sa miséricor<strong>de</strong>, vous les avait déjà dites au fond<br />

du cœur.<br />

Nous allons faire, malgré nous, quelques mutations dans le personnel <strong>de</strong> nos œu‐<br />

vres. M. Decaux nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> instamment M. Charrin 385 à S te ‐Anne; peut‐être allons‐nous<br />

donner M. Emile [Beauvais] à Metz; tout cela est encore obscur et secret; je nʹaime pas les<br />

mouvements et pourtant, à toutes nos retraites, il en est dʹinévitables; au ciel, nous avance‐<br />

rons, mais sans mouvement, notre esprit sʹavancera toujours en Dieu; les avancements <strong>de</strong><br />

la terre ne sont pas si doux.<br />

Adieu, cher enfant, je serai, nous serons heureux <strong>de</strong> vous revoir; quelle absence!<br />

presque 3 mois; elle en prépare une autre; décidément, ce nʹest pas en ce mon<strong>de</strong> que sont<br />

les bons arrangements.<br />

Je vous embrasse tendrement en J. et M.<br />

Votre ami et Père tout affectionné Le <strong>Prevost</strong><br />

Offrez mes sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> profon<strong>de</strong> sympathie à votre chère famille.<br />

1129 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Tremblement <strong>de</strong> terre à Chaville. Eloge <strong>de</strong>s scolastiques. Les Sulpiciens à Metz. Lʹordination au diaconat est proche.<br />

Vaugirard, 16 septembre 1866<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S., M. Faÿ me remet une lettre qui est arrivée pour vous<br />

385 La lettre 1125, du 7 septembre, n’a donc pas convaincu Paul Decaux.<br />

1138


à Chaville; il ne vous lʹa point en envoyée directement, ne sachant si vous étiez encore à<br />

Montcoy, et ensuite il lʹa peut‐être un peu oubliée dans son portefeuille, ne mʹayant pas<br />

près <strong>de</strong> lui pour sʹéclairer au juste sur la direction à donner à cette missive. La voilà, ayant<br />

perdu <strong>de</strong> son opportunité, mais non par sa faute, non plus que par la volonté <strong>de</strong> celui qui<br />

lʹa écrite; recevez‐la donc aimablement; peut‐être quʹune très prompte réponse vous épar‐<br />

gnera, encore à temps, lʹapparence <strong>de</strong> la négligence.<br />

Tout va ici comme <strong>de</strong> coutume, ce nʹest pas dire <strong>avec</strong> une gran<strong>de</strong> sérénité ni améni‐<br />

té <strong>de</strong> la température; le mon<strong>de</strong> semble être bouleversé physiquement comme moralement<br />

et politiquement; avez‐vous senti le tremblement <strong>de</strong> terre? A Chaville, on en a été remué et<br />

terrifié, non seulement chez nous, mais dans tout le village; Orléans écrit à M. Leclerc quʹil<br />

en a été aussi ru<strong>de</strong>ment secoué. Vaugirard ne sʹest douté <strong>de</strong> rien.<br />

Les vacances touchent à leur terme, nos jeunes séminaristes en ont usé <strong>avec</strong> joie,<br />

mais <strong>avec</strong> une mesure tout aimable; cette première année dʹIssy leur a déjà fait un grand<br />

bien; ils ont la simplicité <strong>de</strong>s enfants et, en même temps, un certain sentiment digne <strong>de</strong><br />

lʹélévation <strong>de</strong> leur vocation. Chaville est encore nombreux; M. Risse est arrivé <strong>de</strong>puis 8 ou<br />

10 jours; il emmènera probablement <strong>avec</strong> lui M. Magnien dont la santé est bien remise,<br />

mais qui soutiendrait néanmoins difficilement lʹinternat du séminaire. Il y a, à Metz, une<br />

petite course entre notre maison et le séminaire; répétée <strong>de</strong>ux fois chaque jour, elle fera<br />

une utile diversion aux étu<strong>de</strong>s. Notre cher M. Baumert aura ainsi un compagnon; il a passé<br />

15 jours à Chaville, nous avons été fort contents <strong>de</strong> lui; <strong>de</strong> son côté, il ressentait une vraie<br />

joie <strong>de</strong> retrouver la famille. A ce propos <strong>de</strong> Metz, gran<strong>de</strong> nouvelle: les Sulpiciens en pren‐<br />

nent le séminaire; je mʹen réjouis dans tous les sens; je crains quelque peu néanmoins quʹils<br />

se montrent moins favorables que leurs <strong>de</strong>vanciers à la fréquentation <strong>de</strong>s cours par les ex‐<br />

ternes; ce nous serait une vraie contrariété. A Angers comme à Paris, ils refusent absolu‐<br />

ment <strong>de</strong> les admettre. Peut‐être sont‐ils moins rigoureux pour la philosophie; M. Magnien<br />

serait au moins sauvé pour cette année; pour M. Baumert, peut‐être nʹy aurait‐il pas ré‐<br />

troaction; dʹautre part, ils ne seront pas dès lʹabord (MM. <strong>de</strong> St‐Sulpice) en pleine régulari‐<br />

té; les premiers emplois seuls seront occupés par eux, quelques prêtres du diocèse conti‐<br />

nueront à faire <strong>de</strong>s cours comme professeurs.<br />

Voilà tout, cher enfant, la présente nʹétant à autre fin que <strong>de</strong> vous envoyer votre let‐<br />

tre attardée.<br />

M. Victor [Trousseau], revenu à Chaville jusquʹà jeudi ou vendredi, vous assure <strong>de</strong><br />

ses affectueux souvenirs et tous les autres se joignent à lui; ils nʹoublient point combien<br />

lʹordination est proche, comme nous tous, ils prient ar<strong>de</strong>mment pour vous; comme le Veni<br />

Creator est, en cas pareil, un précieux langage pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r comme il faut les grâces si<br />

gran<strong>de</strong>s quʹon ne saurait même nommer si lʹEsprit Saint ne nous fournissait les mots pour<br />

les dire. Ah! quʹIl parle et que nous parlions après lui; on ne saurait autrement bien<br />

converser <strong>avec</strong> Dieu.<br />

Jʹai vu, vous lʹai‐je dit? M. Fouache, vicaire à Yvetot, il <strong>de</strong>vait vous écrire; il mʹa paru<br />

dépaysé au milieu dʹun troupeau <strong>de</strong> vicaires; il nʹest pas <strong>de</strong> même sang quʹeux; je doute<br />

quʹil sʹarrête là.<br />

Adieu, bien cher ami et fils en N.S., je serai heureux <strong>de</strong> vous revoir.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1139


1130 à M. Caille<br />

Convocation à une réunion <strong>de</strong> concertation autour <strong>de</strong> MLP.<br />

27 septembre [1866]<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Notre retraite approche <strong>de</strong> sa fin; elle va bien, quoique le r.p. Bazin qui la donne,<br />

homme saint et plein dʹexpérience et <strong>de</strong> science chrétienne, soit un peu fatigué et que sa<br />

voix manque un peu <strong>de</strong> fermeté; tous semblent bien disposés.<br />

Nous nous proposons <strong>de</strong> faire lundi à Chaville une petite réunion <strong>de</strong>s anciens, afin<br />

dʹexaminer si quelques points sont à considérer, particulièrement pour la marche régulière<br />

et digne <strong>de</strong> notre petite famille. Vous seriez bien utile dans cette petite assemblée; nous ne<br />

pouvons la tenir plus tard, M. Lantiez étant obligé <strong>de</strong> partir lundi au soir pour Arras.<br />

Voyez si vous pouvez être à Chaville lundi matin; nous serons réunis en Conseil à 9h.1/2,<br />

et nous nʹavons que la journée pour nous concerter.<br />

Mille affections pour vous et pour M. Marcaire. Nous prions tous les jours pour<br />

vous à la retraite.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1131 à M. Chaverot<br />

Pru<strong>de</strong>nce dans le choix <strong>de</strong>s candidats à la vie religieuse. Prendre soin <strong>de</strong>s santés.<br />

Vaugirard, 28 septembre 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous ne pouvons accepter le jeune Sauvage quʹautant que M. Laroche, et aussi vous<br />

et M. Trousseau, aurez remarqué en lui quelques indices dʹune vocation religieuse <strong>avec</strong><br />

quelque attrait un peu marqué pour nos œuvres et pour nous‐mêmes. Ces dispositions<br />

sont bien établies dans le petit Noviciat <strong>de</strong> Chaville. M. Faÿ craint beaucoup quʹelles ne<br />

sʹaffaiblissent si <strong>de</strong>s sujets moins bien inspirés sʹy agrégeaient. Il serait aussi nécessaire que<br />

la pension <strong>de</strong> 300f au moins fût assurée, la chose ne mʹa pas paru bien démontrée pour Es‐<br />

couté. Il me semble quʹil y aurait avantage à attendre, pour déci<strong>de</strong>r cette petite affaire, la<br />

présence <strong>de</strong> M. Lantiez qui ramènerait <strong>avec</strong> lui lʹenfant, sʹil y avait lieu, et si vous ne lʹaviez<br />

pas déjà emmené vous‐même.<br />

Demain matin, clôture <strong>de</strong> la retraite qui a bien marché tous les jours; nous prions<br />

pour vous tous.<br />

Rappelez à M. Trousseau que M. <strong>de</strong> Varax, très disposé à négliger les soins qui lui<br />

sont nécessaires, a besoin dʹune nourriture soli<strong>de</strong>, vian<strong>de</strong> rôtie et bouillon; un peu <strong>de</strong> vin<br />

passable, il en a à Paris chez M me sa mère, quʹil nous donne les moyens <strong>de</strong> le lui envoyer; le<br />

vôtre, à Arras, doit être trop fort pour lui.<br />

Je vais bientôt vous revoir. Jʹétouffe le regret humain que jʹai <strong>de</strong> vous avoir tant fati‐<br />

gué ces vacances, puisque cʹest un commencement <strong>de</strong> vos travaux <strong>de</strong> charité et <strong>de</strong> votre<br />

apostolat.<br />

Je vous embrasse tous en N.S., et en Marie, notre Mère.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1140


1132 à M. Caille<br />

MLP. envoie le frère Hubert pour secon<strong>de</strong>r M. Caille.<br />

29 septembre [1866]<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous gardons M. <strong>Léon</strong> [Guichard] à Vaugirard; je mʹentendrai <strong>avec</strong> vous lundi<br />

pour son remplacement.<br />

Jʹenvoie vers vous pour vous secon<strong>de</strong>r, ainsi que vous me lʹavez <strong>de</strong>mandé, M. Hu‐<br />

bert, lʹun <strong>de</strong> nos jeunes frères les plus dévoués et les plus exemplaires. Il est parmi nous au<br />

Noviciat <strong>de</strong>puis plus dʹun an, nous nʹavons pas encore eu un seul reproche à lui faire.<br />

Il nous a été envoyé <strong>de</strong> Nantes par un très vénérable p. Jésuite, son confesseur <strong>de</strong>‐<br />

puis plusieurs années, et qui nous a répondu <strong>de</strong> sa vocation religieuse dans <strong>de</strong>s termes<br />

quʹon nʹaccor<strong>de</strong> que bien rarement. Il les a justifiés pleinement, il est pieux, régulier, labo‐<br />

rieux; nous le regretterions tous ici sʹil ne nous quittait pour aller <strong>avec</strong> vous.<br />

A lundi; nous aurons messe à 8h.1/2 et, après une légère réfection, nous examine‐<br />

rons les choses qui intéressent notre famille religieuse.<br />

Mille affections à vous et à notre f. Marcaire.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1132 bis 386 à M. J. Faÿ<br />

Coutumiers rédigés par M. Planchat à rechercher.<br />

30 septembre [1866]<br />

Je prie M. Faÿ dʹavoir lʹobligeance <strong>de</strong> rechercher dans ma chambre la collection <strong>de</strong>s<br />

règlements <strong>de</strong> nos exercices faits par M. Planchat et autres; il y en a 23 ou 24, ils sont ré‐<br />

unis. Ils doivent se trouver auprès <strong>de</strong> ma petite table verte où je travaille; peut‐être dans<br />

un <strong>de</strong>s cartons du casier (plusieurs <strong>de</strong>s dits casiers pleins <strong>de</strong> pots <strong>de</strong> confiture ingénieuse‐<br />

ment placés là par M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] qui nʹa pas trouvé dʹautre buffet).<br />

Prière dʹapporter <strong>de</strong>main, ou dʹenvoyer par main sûre aujourdʹhui, ces règlements<br />

quʹon aura sans doute besoin <strong>de</strong>main dʹexaminer.<br />

Ci‐joint une lettre <strong>de</strong> S r Boucault.<br />

In X to amicus et Pater<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1133 à M. Chaverot<br />

Un reçu est à signer.<br />

3 octobre 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Vous avez omis <strong>de</strong> signer le reçu pour M. Pichery; il a néanmoins remis lʹargent et je<br />

fais payer 300f. aujourdʹhui au séminaire. Nous sommes convenus <strong>avec</strong> M. Pichery que<br />

vous lui renverriez le reçu, après lʹavoir signé; je le joins à cet effet ici.<br />

386 Supplée la lettre 1054.<br />

1141


Mille affections en N.S. pour vous et pour M. Camus que vous verrez, je pense, aus‐<br />

si souvent que possible. Sʹil y a lieu, on ferait bien <strong>de</strong> reprendre la petite entrevue qui se<br />

faisait chaque semaine à Issy entre tous ceux qui sont <strong>de</strong>s nôtres.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1134 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Tractations pour permettre à M. <strong>de</strong> Varax dʹêtre ordonné prêtre hors du diocèse dʹAutun.<br />

11 octobre 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je conçois la juste répugnance que vous aviez à parler dʹexcorporation à Mgr dʹAu‐<br />

tun; je ne lʹaurais pas fait moi‐même sans peine. Jʹai pris le parti, vous mettant tout à fait en<br />

<strong>de</strong>hors et notant expressément tout ce quʹune proposition <strong>de</strong> ce genre aurait eu pour vous<br />

dʹinacceptable, <strong>de</strong> rendre compte simplement <strong>de</strong> la situation et <strong>de</strong>s offres si désintéressées<br />

<strong>de</strong> Mgr dʹArras qui sʹengage à ne pas faire usage <strong>de</strong> lʹexcorporation, et jʹai laissé juge Mgr dʹAutun <strong>de</strong> ce que le cas <strong>de</strong>mandait, promettant que son avis serait pour nous une déci‐<br />

sion à laquelle nous nous conformerions <strong>avec</strong> une profon<strong>de</strong> et respectueuse soumission.<br />

Jʹai lieu dʹespérer que cette communication, que jʹai faite aussi déférente, révérencieuse et<br />

reconnaissante que jʹai pu, nʹaura rien qui offense Mgr dʹAutun et quʹil nous donnera la ré‐<br />

ponse quʹil croira la meilleure dans la circonstance.<br />

Jʹécris à M. Portenard aujourdʹhui pour lui rendre compte <strong>de</strong> ce que jʹai fait, en suite<br />

<strong>de</strong> sa lettre bienveillante.<br />

Adieu, bien cher ami et fils en N.S., bonne confiance au Dieu miséricordieux et à<br />

Marie qui nous assiste si fidèlement.<br />

Mille amitiés à tous et respects dans les occasions et occurrences à ceux qui dai‐<br />

gnent avoir bienveillance pour nous.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1135 à M. Chaverot<br />

Dispositions pour la cérémonie privée <strong>de</strong>s vœux <strong>de</strong> M. Chaverot.<br />

Vaugirard, 16 octobre 1866<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Si vendredi prochain, fête <strong>de</strong> St Pierre dʹAlcantara, vous convenait pour la petite cé‐<br />

rémonie <strong>de</strong> vos vœux, je ne verrais nulle difficulté <strong>de</strong> notre côté. Mais notre messe <strong>de</strong><br />

communauté se dit à 6h. Cʹest bien matin, car il faut à peu près 3/4 dʹheure pour venir ici<br />

<strong>de</strong> St‐Sulpice, quʹen pensez‐vous? Je pourrais vous dire la messe à 7 h, mais la communau‐<br />

té nʹy pourrait assister et nos frères, comme vous‐même, le regretteraient. Venir coucher ici<br />

le veille déplairait peut‐être à MM. du Séminaire.<br />

Ecrivez‐moi un mot pour me dire à quel parti vous trouverez plus à propos <strong>de</strong> vous<br />

arrêter.<br />

1142


père.<br />

Adieu, bien cher ami; à vendredi, si rien ne sʹy oppose, comme je le désire et je lʹes‐<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M gr dʹAutun ne donnant pas dʹexcorporation, M. <strong>de</strong> Varax ne sera, selon toute appa‐<br />

rence, ordonné quʹà Noël.<br />

1136 à M. Caille387 Ai<strong>de</strong> financière <strong>de</strong>mandée pour le Noviciat.<br />

Paris, ce 16 octobre 1866<br />

Bien cher frère,<br />

Nos paiements <strong>de</strong> fin dʹannée, qui sʹélèvent à une somme considérable, ren<strong>de</strong>nt no‐<br />

tre situation financière tellement difficile que nous allons nous trouver dans lʹobligation,<br />

malgré nos répugnances à cet égard, dʹaugmenter la pension <strong>de</strong>s enfants <strong>de</strong> lʹOrphelinat.<br />

Nous vous verrions donc <strong>avec</strong> reconnaissance faire quelques efforts sérieux pour verser la<br />

subvention <strong>de</strong> 300f. due par votre maison au Noviciat, aux besoins duquel nous avons in‐<br />

finiment <strong>de</strong> peine à pourvoir.<br />

Recevez, bien cher frère, la nouvelle expression <strong>de</strong> notre bien vive affection en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Il est bien entendu que la somme due par la maison <strong>de</strong> Vaugirard sera déduite <strong>de</strong>s 300f.<br />

1137 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Démarches pour lʹordination. MLP. sʹenquiert <strong>de</strong> sa santé. Vœux <strong>de</strong> M. Chaverot.<br />

Vaugirard, 16 octobre 1866<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je reçois quelques mots bienveillants <strong>de</strong> Mgr dʹAutun, portant quʹil paie <strong>de</strong> réciproci‐<br />

té lʹaffection que vous exprimez pour lui et quʹil ne peut se résoudre à une excorporation.<br />

Votre ordination sera donc ajournée à Noël, à moins (ce qui nʹest pas probable) que<br />

Mgr dʹArras <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à Rome une exception pour comprendre dans lʹextra tempora un sujet<br />

étranger à son diocèse, mais qui y est présentement employé.<br />

Je joins ici une lettre <strong>de</strong> M. Fouache, arrivée ici pour vous.<br />

Allez‐vous toujours bien, ne vous fatiguez‐vous pas outre mesure, avez‐vous un<br />

peu <strong>de</strong> respir388 spirituel, tous vos ff. et vos œuvres vont‐ils selon vos souhaits, nʹêtes‐vous<br />

pas dans une pauvreté par trop dure?<br />

Adieu, bien cher ami, la cloche sonne; tout le mon<strong>de</strong> marche bien ici, ou au moins<br />

<strong>avec</strong> la perfection relative que vous connaissez à la famille.<br />

Mille tendres amitiés pour vous et pour vos frères.<br />

Vos <strong>de</strong>ux petits latinistes artésiens vont bien.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

387<br />

Ecriture du frère Emile Beauvais, sauf la signature qui est <strong>de</strong> MLP.<br />

388<br />

Cf. la note 76, p.443.<br />

1143


P.S. M. Chaverot viendra ici vendredi matin, 6h., je pense, pour faire en particulier<br />

ses vœux à la messe <strong>de</strong> communauté; prière pour lui.<br />

1138 à M. Chaverot<br />

Au sujet <strong>de</strong>s vœux que M. Chaverot doit prononcer en privé.<br />

Vaugirard, 18 octobre [1866]<br />

(St Luc)<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous ai écrit, il y a trois jours, pour vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si vous pouviez venir <strong>de</strong>main<br />

vendredi, afin <strong>de</strong> prononcer vos vœux. Je vous priais <strong>de</strong> me donner quelques mots <strong>de</strong> ré‐<br />

ponse et <strong>de</strong> mʹindiquer si vous pouviez assister à notre messe <strong>de</strong> 6h, messe un peu mati‐<br />

nale, mais qui réunissait les membres <strong>de</strong> la communauté, tandis quʹà 7h., leurs emplois les<br />

retenant, ils ne pourraient sʹy trouver. Ayez lʹamabilité, cher ami, <strong>de</strong> me donner réponse<br />

par Pascaut, porteur <strong>de</strong> ce billet, afin que nous réglions nos mesures en conséquence.<br />

Je pense que ma lettre ne vous sera pas parvenue.<br />

Adieu, bien cher ami, à <strong>de</strong>main sans doute; nous allons prier pour vous, afin que<br />

Dieu daigne agréer tendrement vos vœux.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1139 à M. Chaverot<br />

La cérémonie <strong>de</strong> ses vœux est fixée.<br />

Jeudi 18 octobre [1866]<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous vous attendrons samedi matin à 6h. Les travaux quʹon a faits dans notre che‐<br />

min du Moulin lʹayant rendu fort mauvais, vous ferez bien dʹentrer par la rue Dombasle,<br />

n° 44, par la petite porte (à côté <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong>), je veillerai à ce quʹelle soit ouverte.<br />

Je prie N.S. et sa Ste Mère <strong>de</strong> vous compter parmi leurs serviteurs les plus aimés et<br />

les plus fidèles.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1140 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Démarches pour son ordination. Nouvelles <strong>de</strong> Vaugirard et <strong>de</strong> Chaville.<br />

Vaugirard, 22 octobre 1866<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je fais partir sans retard la lettre pour Mgr Bouange.<br />

Je suis heureux du bon compte que vous me ren<strong>de</strong>z <strong>de</strong> votre situation; jʹétais un peu<br />

inquiet, nʹayant point <strong>de</strong> nouvelles <strong>de</strong>puis plusieurs jours.<br />

1144


Ecrivez‐moi souvent, ne fût‐ce quʹen style <strong>de</strong> télégraphe. Ici, tout va comme <strong>de</strong> cou‐<br />

tume; à Chaville également; en ce <strong>de</strong>rnier lieu, on est si peu nombreux quʹà peine on<br />

sʹaperçoit. M. Faÿ étudie ses <strong>de</strong>ux petits artésiens; il semble un peu en doute sur la valeur<br />

dʹEscouté dont le caractère mou et sans couleur lui semble peu promettre; cependant, il ne<br />

prononce rien; pour Sauvage, il y a plus <strong>de</strong> ressort, mais il ne peut encore juger <strong>de</strong> lʹavenir.<br />

Mille affections à tous, <strong>avec</strong> part très large pour vous.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Chaverot a fait ses vœux samedi <strong>de</strong>rnier à la chapelle <strong>de</strong> la Salette. Tous étaient<br />

heureux.<br />

1141 389<br />

1142 à M. Caille<br />

Rappel à une correspondance régulière. Veiller à ce que les frères aient une direction spirituelle suivie. Ne pas se<br />

surcharger dʹœuvres nouvelles. Démarches pour lʹordination <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax. Pourquoi il ne vient plus <strong>de</strong> voca‐<br />

tions dʹAmiens.<br />

Vaugirard, 25 octobre 1866<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Vous mʹaviez promis <strong>de</strong> nous donner, ou par vous ou par un <strong>de</strong> vos frères, un peu<br />

plus souvent <strong>de</strong> vos nouvelles, mais vos occupations si multipliées vous empêchent sans<br />

doute <strong>de</strong> suivre à cet égard vos bonnes intentions. Je vous écris donc moi‐même pour vous<br />

les rappeler, espérant que vous trouverez quelque moment pour nous faire réponse.<br />

Je désirerais savoir si, comme vous en aviez presque lʹassurance, vous avez pu<br />

trouver un prêtre qui donne un peu <strong>de</strong> direction spirituelle à vos frères. Ce point est <strong>de</strong>s<br />

plus essentiels; Dieu vous soutient, pour vous, directement, mais tous ne sont pas dans la<br />

même voie et vos frères ne sauraient bien marcher sans quelques conseils, directions et ex‐<br />

hortations.<br />

Les changements dʹemplois et <strong>de</strong> lieux ont toujours été une épreuve pénible pour<br />

M. Emile [Beauvais], parce quʹil sʹaccoutume difficilement à <strong>de</strong> nouvelles habitu<strong>de</strong>s et à <strong>de</strong><br />

nouveaux visages; je serais satisfait que vous nous écrivissiez pour nous dire sʹil prend<br />

bien sa position, sʹil semble sʹy plaire et sʹil est bien <strong>avec</strong> tous ceux qui lʹentourent.<br />

Nos frères composant le Conseil craignaient un peu que la présence <strong>de</strong> M. Emile, et<br />

peut‐être son propre désir, ne vous portât à hâter lʹouverture <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> St ‐Jacques.<br />

Nous pensons tous ici quʹil serait regrettable quʹon précipitât le commencement <strong>de</strong> cette<br />

nouvelle fondation; nous sommes si chargés déjà, nous faisons si imparfaitement les Œu‐<br />

vres dont nous sommes chargés; vous êtes vous‐même déjà partagé entre tant <strong>de</strong> préoccu‐<br />

pations quʹil semblerait plus sage <strong>de</strong> temporiser et dʹattendre <strong>de</strong>s circonstances moins dif‐<br />

ficiles; tel est notre sentiment à tous; je vous engage donc, mon bon ami, à ne rien avancer<br />

sans nous avoir consultés, afin <strong>de</strong> ne pas tenter la Provi<strong>de</strong>nce, et aussi pour que votre mar‐<br />

che reste réglée <strong>avec</strong> la nôtre.<br />

389 Suppléée par la lettre 1161 bis.<br />

1145


On a fait plusieurs copies du procès‐verbal <strong>de</strong> notre petite assemblée <strong>de</strong> Chaville<br />

après la retraite; on vous en fera parvenir une. Si M. <strong>de</strong> Varax est ordonné dans les pre‐<br />

miers jours <strong>de</strong> novembre, comme nous lʹavons espéré, lʹun <strong>de</strong> nous se rendant à Arras, et<br />

passant par Amiens, pourra la porter chez vous.<br />

A propos <strong>de</strong> cette ordination <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax, voici une difficulté quʹon peut pré‐<br />

voir:<br />

M gr dʹArras a reçu <strong>de</strong> Rome une permission <strong>de</strong> faire une ordination <strong>de</strong> plusieurs<br />

prêtres (extra tempora), cʹest‐à‐dire par anticipation sur lʹépoque ordinaire qui est, vous le<br />

savez, le samedi avant Noël; le Vicaire Général <strong>de</strong> M gr avait averti M. <strong>de</strong> Varax quʹon<br />

comptait lʹy comprendre, parce que lʹabsence dʹun prêtre est pour eux un sujet continuel<br />

dʹembarras et <strong>de</strong> difficultés. Mais M gr , à son arrivée, sʹest assuré que la permission venue<br />

<strong>de</strong> Rome était applicable exclusivement aux prêtres <strong>de</strong> son diocèse. On a <strong>de</strong>mandé, en<br />

<strong>de</strong>rnier lieu, à Rome une permission spéciale pour M. <strong>de</strong> Varax, mais un peu tard et, si elle<br />

arrive, il se peut que lʹordination dʹArras, fixée au 4 novembre, soit déjà faite, et M gr lʹEvê‐<br />

que doit partir immédiatement après pour une tournée épiscopale. Un autre Evêque pou‐<br />

vant le remplacer, présumez‐vous que M gr Boudinet, sur la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> dʹArras et sur notre<br />

propre requête, consentirait à ordonner M. <strong>de</strong> Varax à Amiens, dans sa chapelle ou en tout<br />

autre lieu qui lui conviendrait? Je vous fais cette question à vous tout seul, car, les choses<br />

étant absolument incertaines encore, il serait tout à fait impru<strong>de</strong>nt dʹébruiter, si peu que ce<br />

fût, cette pensée qui plus probablement nʹaura pas <strong>de</strong> suite. Cʹest donc un avis, un senti‐<br />

ment purement personnel que vous pourriez me donner.<br />

Je ne vois rien <strong>de</strong> nouveau ici, tout et tous marchent selon lʹordinaire. Nous nous<br />

sommes peu recrutés <strong>de</strong>puis un an ou <strong>de</strong>ux, nous nous sommes soutenus seulement, répa‐<br />

rant nos pertes, mais sans augmentation sensible. Depuis longtemps, nous nʹavons plus<br />

reçu <strong>de</strong> nouveaux frères dʹAmiens, en particulier; je lʹattribue au ralentissement <strong>de</strong> nos<br />

rapports et <strong>de</strong> nos correspondances; la Communauté est aussi bien effacée à Amiens, parce<br />

que vous seul êtes connu et posé; lʹabsence dʹun prêtre se fait aussi sentir et nuit à lʹin‐<br />

fluence que la famille pourrait avoir au point <strong>de</strong> vue intime où on peut connaître et soute‐<br />

nir les vocations. Dieu réveillera tous ces moyens quand Il le trouvera bien dans sa sa‐<br />

gesse.<br />

Adieu, mon bien cher ami et fils en N.S., croyez à mes plus tendres sentiments pour<br />

vous et pour votre entourage dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je viens <strong>de</strong> recevoir <strong>de</strong> M. Emile une petite lettre satisfaisante; il sʹaccoutume à<br />

Amiens et y fera sa position pour le bien; il peut faire beaucoup, mais on doit le suivre<br />

pour quʹil ne prenne pas trop sur lui sans consulter ceux qui ont la responsabilité <strong>de</strong>s Œu‐<br />

vres.<br />

1143 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Démarches pour lʹordination. Soins <strong>de</strong> santé. Lecture <strong>de</strong> journaux: veiller à ne pas y perdre du temps. Renouve‐<br />

ler souvent le don <strong>de</strong> soi à Dieu.<br />

1146


Vaugirard, 30 octobre 1866<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je pense bien que vous nʹavez reçu encore aucun signe <strong>de</strong> Rome ni dʹAutun concer‐<br />

nant lʹexcorporation, puisque je ne reçois <strong>de</strong> vous à ce sujet nulle communication. Cette at‐<br />

tente nous est une occasion <strong>de</strong> remettre toutes choses, une fois <strong>de</strong> plus, entre les mains <strong>de</strong><br />

Dieu; il faut ajouter aussi quʹaprès tout, la décision perd <strong>de</strong> son importance à mesure que<br />

les distances diminuent jusquʹà lʹordination du 22 décembre, car, tout à lʹheure, ce ne sera<br />

plus guère quʹune vingtaine <strong>de</strong> jours à gagner par lʹextra tempora sollicité. Cʹest ce qui rend<br />

douteuse la chance <strong>de</strong> lʹobtenir; Mgr dʹArras a pu motiver la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> quʹil a faite en ce<br />

sens par les besoins <strong>de</strong> son diocèse et la nécessité, pour lui, <strong>de</strong> commencer avant les grands<br />

froids ses tournées épiscopales; mais, pour nous, il sʹagit <strong>de</strong> la convenance dʹun particulier<br />

et dʹune œuvre peu considérable; nous nous tiendrons dans notre petitesse si nous som‐<br />

mes refusés, pensant que cʹest à juste titre, et si, par hasard, on nous a écoutés, nous serons<br />

émerveillés et confus <strong>de</strong> tant <strong>de</strong> con<strong>de</strong>scendance.<br />

Pour votre ordination, si elle <strong>de</strong>vait se faire plus tard que le 4 novembre, je crois<br />

quʹon pourrait sʹadresser à Mgr dʹAmiens, très bienveillant pour nous, et que, si on en‐<br />

voyait dʹArras un avis favorable (sinon une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> formelle), Mgr dʹAmiens ne refuserait<br />

pas <strong>de</strong> vous ordonner dans sa chapelle. Cʹest ici une simple conjecture <strong>de</strong> ma part, à la‐<br />

quelle il ne faudrait point donner à Arras une couleur autre, tant quʹaucune démarche<br />

nʹaurait été faite auprès <strong>de</strong> Mgr [Boudinet] dʹAmiens, lequel nʹa été nullement pressenti. Si<br />

vous receviez au <strong>de</strong>rnier moment une autorisation suffisante pour votre ordination, vous<br />

pourriez, ce me semble, nous en aviser par le télégraphe, afin que lʹun <strong>de</strong> nous pût se ren‐<br />

dre à temps pour assister à cette consécration si intéressante pour vous et pour nous.<br />

Quant à la retraite, suivez‐la comme vous le conseillera M. Roussel, quʹon dit être<br />

un homme tout judicieux et particulièrement bienveillant pour vous. Vos obligations à la<br />

maison vous serviront aussi <strong>de</strong> règle. Vous ne mʹavez pas répondu sur ces points: ne vous<br />

fatiguez pas trop, votre santé sʹaffermit‐elle? avez‐vous un régime tel que votre nature<br />

nerveuse et fatiguée le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, vous reste‐t‐il un temps suffisant pour lʹétu<strong>de</strong>? Je désire<br />

bien être édifié sur tous ces articles. Combien avez‐vous dʹélèves au pensionnat? les classes<br />

se font‐elles passablement? les professeurs ont‐ils à cœur leur emploi et les élèves sem‐<br />

blent‐ils sʹattacher à leurs maîtres? Que <strong>de</strong> questions! Vous ne répondrez pas à toutes à la<br />

fois, si cʹest trop <strong>de</strong> détails ensemble; enfin, votre pauvreté nʹest‐elle pas excessive?<br />

Un journal, paraissant <strong>de</strong>ux ou trois fois par semaine et que vous parcourriez seu‐<br />

lement, ne serait pas hors <strong>de</strong> propos pour vous, mais bien difficilement vous empêcherez<br />

ceux qui vous entourent <strong>de</strong> perdre à cette lecture beaucoup <strong>de</strong> temps; ils ont déjà, sans<br />

doute, quelques petites feuilles pour le patronage, la Revue <strong>de</strong> la Presse ou autre, cʹest bien<br />

assez; je vous conseille donc <strong>de</strong> nʹavoir <strong>de</strong> journal politique quʹautant que vous serez sûr<br />

dʹempêcher les frères et les professeurs <strong>de</strong> les avoir entre les mains; cʹest, je le répète, chose<br />

infiniment difficile et qui supposera <strong>de</strong> votre part une volonté très arrêtée pour en faire la<br />

défense et pour empêcher quʹelle ne soit enfreinte. A Vaugirard, jʹy tiens fermement et,<br />

dans la pratique, tout le mon<strong>de</strong> reconnaît quʹil est sage dʹagir ainsi; cette expérience <strong>de</strong><br />

longues années nʹest pas à oublier, elle nʹa jamais eu que <strong>de</strong>s avantages et nul inconvé‐<br />

nient.<br />

Nous nʹavons à Vaugirard quʹun seul Bouvier, encore est‐il incomplet. Nos MM.<br />

mʹassurent que le volume <strong>de</strong>s diaconales se vend séparément et que vous trouveriez cer‐<br />

1147


tainement à Arras, soit au Séminaire, soit chez le libraire, le moyen facile <strong>de</strong> vous le procu‐<br />

rer; si vous nʹy réussissez point, nous lʹachèterons ici et nous lʹenverrons par le meilleur<br />

procédé que nous pourrons trouver.<br />

Voilà toute une lettre dʹaffaires où le bon Dieu nʹest guère apparent; Il y est pour‐<br />

tant, puisque tout est ici pour son service, et jʹespère quʹil en est ainsi <strong>de</strong>s moindres parcel‐<br />

les <strong>de</strong> notre vie; nʹavons‐nous pas tout donné? Oui, mais on peut reprendre, et ici la chose<br />

est malheureusement facile; les hommes, une fois en possession dʹune chose donnée, la<br />

tiennent et ne se laissent désemparer; Dieu ne résiste pas dʹordinaire, parce quʹIl ne veut<br />

que ce que le cœur donne, non à un moment seulement, mais à tous les instants; redon‐<br />

nons‐nous donc toujours, et, sʹil se peut, toujours plus pleinement et plus généreusement.<br />

Cʹest aussi <strong>de</strong> cette sorte quʹil faut nous donner à nos frères; cʹest pourquoi je vous renou‐<br />

velle, pour vous et pour les vôtres, bien cher ami, mes tendres affections en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Chaverot va bien; il mʹa écrit ces jours‐ci une petite lettre, bonne, cordiale,<br />

comme toujours; les autres sont aussi en bon état; M. Camus, un peu souffrant, pas assez<br />

ferme ni assez net dans ses rapports <strong>avec</strong> nous, bien intentionné toutefois, mais sui generis.<br />

1144 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Diverses nouvelles <strong>de</strong>s Œuvres et <strong>de</strong>s Frères. Derniers renseignements sur lʹordination <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax. Conseils<br />

pour les étu<strong>de</strong>s et le soin <strong>de</strong> sa santé.<br />

Vaugirard, 2 novembre 1866<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Il mʹen coûte <strong>de</strong> vous écrire par mots coupés et brefs; cʹest si peu le langage qui<br />

convient à lʹintimité chrétienne; mais, sous peine dʹajourner beaucoup mes réponses, je ne<br />

puis bien souvent écrire dʹautre façon; après tout, quand on sʹentend bien, la brièveté nʹest<br />

pas la sécheresse: Intelligenti pauca. Donc: paucibus.<br />

Je suis heureux (je veux dire nous) <strong>de</strong>s bonnes et paternelles dispositions <strong>de</strong> M gr<br />

dʹArras, et aussi <strong>de</strong> M gr dʹAutun. Nous attendrons maintenant lʹenvoi <strong>de</strong> Rome. Jʹavais mal<br />

calculé dans ma <strong>de</strong>rnière lettre, disant quʹil ne sʹagissait guère que <strong>de</strong> 20 jours, si lʹon avan‐<br />

çait lʹordination, jʹoubliais le mois <strong>de</strong> novembre, passant dʹemblée dʹoctobre à décembre,<br />

singulière abréviation.<br />

Nous nʹavons pas <strong>de</strong> professeur parmi les nôtres; nous cherchons au <strong>de</strong>hors. M.<br />

Lantiez se renseigne et écrit; il me semble quʹil faut faire un choix <strong>avec</strong> quelque soin, car<br />

les changements trop répétés nuiront aux élèves et à lʹécole quʹils discréditeraient; exami‐<br />

nez <strong>de</strong> votre côté, si nous trouvons, nous vous écrirons sans retard. Pour quelle division,<br />

ce professeur? On me le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>. Combien le pensionnat, en ensemble, a‐t‐il dʹélèves?<br />

Vous ne me lʹavez pas dit, malgré mes <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s.<br />

Je ne crois, nous ne croyons pas que M. [Adolphe] Lainé doive prendre la classe qui<br />

resterait à faire, si le professeur se retirait.<br />

Jʹai reçu <strong>de</strong> M. Laroche une lettre bonne et indiquant plus dʹattache à nous que nous<br />

ne lʹavons cru; il sʹoccupe aussi du professeur et me prie dʹen envoyer un.<br />

Je vous envoie une lettre arrivée ici <strong>de</strong>puis une huitaine <strong>de</strong> jours et que jʹai oublié <strong>de</strong><br />

joindre à ma <strong>de</strong>rnière dépêche; heureusement elle mʹa paru nʹavoir rien dʹurgent.<br />

1148


M. Lantiez pense <strong>avec</strong> moi que vous <strong>de</strong>vriez vous dégager <strong>de</strong> quelques détails et<br />

entretiens pour faire une petite part à la préparation <strong>de</strong> votre examen et à lʹachèvement <strong>de</strong><br />

la théologie, pour lʹexamen surtout; on ne peut, dʹintuition, en apprendre les matières, il<br />

faut nécessairement un peu dʹétu<strong>de</strong>. Enfin, à travers tout cela, il faut ménager vos forces;<br />

vous ne mʹavez point dit si vous avez le régime quʹil vous faut, le vin etc.<br />

Le vin <strong>de</strong> Montcoy (les 6 bouteilles) est simple et assez agréable, je mʹen accommo‐<br />

<strong>de</strong>rais bien; jʹen ai bu 3 bouteilles, mais il me semblait quʹil me soutenait peu; jʹy reviendrai<br />

comme essai quand, la transition <strong>de</strong> la saison étant faite, je pourrai mieux faire quelque<br />

expérience sans inconvénient.<br />

La chute que jʹai faite, il y a 4 ou 5 mois, a toujours ses conséquences; je marche très<br />

difficilement et très peu longtemps.<br />

Adieu, bien cher ami, avez‐vous là‐bas un peu <strong>de</strong> direction spirituelle? Mille affec‐<br />

tions à tous vos frères, <strong>avec</strong> les plus tendres sentiments pour vous en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Lebrun, (dʹOrléans) vient <strong>de</strong> perdre sa mère, on lʹa mandé en hâte <strong>de</strong> Metz; priez<br />

ensemble pour sa mère et pour lui. Jʹattends un étudiant <strong>de</strong> Metz [Mathias Moës], 23 ans,<br />

faisant sa rhétorique, pour le noviciat, dʹune famille assez bien posée, très bon et intelli‐<br />

gent, dit M. Risse.<br />

1145 à M. Caille<br />

Où peut conduire lʹhabitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> juger et <strong>de</strong> critiquer toutes choses et toutes personnes. Conseils pour ai<strong>de</strong>r un<br />

frère à retrouver le chemin <strong>de</strong> lʹhumilité et <strong>de</strong> lʹabnégation. Il faut faire preuve <strong>de</strong> compassion envers lui.<br />

Vaugirard, 13 novembre 1866<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je nʹai pas été un seul moment en doute que tout nʹait été fait par vous et par notre<br />

excellent f. Marcaire pour faire une bonne et utile position à M. Emile [Beauvais]; il est, je<br />

vous lʹai dit, dans sa nature <strong>de</strong> sʹaccoutumer difficilement aux impressions quʹun change‐<br />

ment <strong>de</strong> lieux et <strong>de</strong> personnes et dʹoccupations peuvent susciter; <strong>de</strong> plus, son esprit est, en<br />

ce moment, mal disposé; il sʹest accoutumé un peu, comme lʹavait fait M. Carment, à tout<br />

juger, à tout blâmer, à croire tout le mon<strong>de</strong> peu bienveillant pour lui. Quand on sort <strong>de</strong><br />

lʹhumilité, <strong>de</strong> lʹobéissance et <strong>de</strong> lʹabnégation en vie religieuse, on est complètement hors <strong>de</strong><br />

sa voie et on ne saurait trouver <strong>de</strong> repos; cʹest là son état; nous avions espéré quʹun chan‐<br />

gement <strong>de</strong> lieux pourrait lui être favorable; jusquʹici, le moyen ne réussit guère; pourtant<br />

nous pensons quʹ<strong>avec</strong> quelque ménagement, il se rassoira; il pourrait, en ce cas, rendre <strong>de</strong><br />

grands services, car il a lʹexpérience <strong>de</strong> nos œuvres, il est laborieux et fidèle à ses emplois,<br />

quels quʹils soient. Je lui écris pour lui dire que M. Lantiez ou moi <strong>de</strong>vons, dʹici à quelques<br />

jours, aller à Arras pour lʹordination <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax, du 20 au 25 <strong>de</strong> ce mois, que nous<br />

causerons <strong>avec</strong> vous et <strong>avec</strong> lui pour aviser aux moyens <strong>de</strong> lui rendre la paix. Peut‐être ces<br />

quelques jours suffiront pour lʹacheminer à une meilleure disposition; sʹil en était autre‐<br />

ment, nous verrions comment on doit le remplacer chez vous et lʹemployer ailleurs. Dites<br />

bien tout cela à notre cher frère, M. Marcaire, en lʹassurant que jʹai pleine confiance,<br />

comme toujours, en son zèle et en son dévouement, aussi bien quʹau vôtre propre. Prions<br />

Dieu ensemble pour notre pauvre f. Emile; son esprit est abattu et mal disposé, cʹest un<br />

mal comme un autre et qui veut compassion <strong>de</strong> notre part.<br />

1149


Adieu, mon bien cher ami, embrassez pour moi nos chers ff. Marcaire et Hubert, et<br />

croyez aussi à ma tendre affection en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Cachetez ma lettre à M. Emile avant <strong>de</strong> la lui remettre.<br />

1146 à M. dʹArbois<br />

Projet <strong>de</strong> chapelle pour lʹŒuvre dʹAngers. Pru<strong>de</strong>nce avant <strong>de</strong> prendre dʹautres charges.<br />

Vaugirard, 15 novembre 1866<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous renvoie, <strong>avec</strong> quelques observations concertées entre M. Lantiez et moi, vo‐<br />

tre projet <strong>de</strong> chapelle; il me semble quʹen les adoptant, on aurait <strong>de</strong>s améliorations nota‐<br />

bles. Dans la limite <strong>de</strong> 20.000f., il me semble quʹil nʹy aurait pas impru<strong>de</strong>nce à en prendre<br />

la responsabilité.<br />

Pour ce qui regar<strong>de</strong> les réunions <strong>de</strong>s écoliers dans la semaine (je crois, votre lettre<br />

nʹest pas sous mes yeux), je mʹen rapporte à votre pru<strong>de</strong>nce; nʹacceptez cette nouvelle<br />

charge quʹautant quʹelle ne nuira, ni à vos autres œuvres, ni à votre vie <strong>de</strong> communauté.<br />

Prions pour notre cher M. Ladouce. Cʹest peut‐être une épreuve temporaire que la<br />

grâce <strong>de</strong> Dieu saura chasser comme un nuage.<br />

Je vous écris ces mots en hâte; tous vont assez bien ici, tous vous aiment fraternel‐<br />

lement et vous embrassent <strong>avec</strong> moi en J. et M.<br />

Votre ami et Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1147 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Vie <strong>de</strong>s Œuvres. Comment inciter lʹabbé Laroche à ai<strong>de</strong>r lʹInstitut.<br />

Vaugirard, 17 novembre 1866<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je ne puis vous écrire que <strong>de</strong>ux mots aujourdʹhui. Je vais écrire tout <strong>de</strong> suite à Or‐<br />

léans, mais en <strong>de</strong>mandant simplement le dimissoire pour M. Victor [Trousseau], sans pré‐<br />

ciser le moment où on lui conférera les ordres mineurs. Il me semble quʹil faut, sur la date<br />

<strong>de</strong> cette ordination, laisser faire entièrement MM. <strong>de</strong> lʹEvêché dʹArras sans les presser au‐<br />

cunement, <strong>de</strong> peur <strong>de</strong> paraître apporter en nos actes <strong>de</strong> la précipitation, même quand rien<br />

ne la rend nécessaire.<br />

M. Lantiez a vu un jeune instituteur qui nous est présenté par lʹEcole Normale <strong>de</strong>s<br />

Frères, âgé <strong>de</strong> 23 ans, déjà en fonctions comme instituteur‐adjoint, ayant son brevet, pieux,<br />

garanti par les Frères, bonne tenue; il viendra nous voir jeudi; il vous coûtera 500f. .Cʹest<br />

beaucoup pour vous, mais il ne faut pas hésiter, sʹil est aussi bien quʹon le dit; le bon Dieu<br />

saura bien vous trouver 200f. <strong>de</strong> plus que vous nʹaviez compté.<br />

Il faut ne point cé<strong>de</strong>r sans lutte à M. Laroche pour sa subvention et en obtenir au<br />

moins moitié, si on ne peut avoir le tout, et tâcher aussi quʹil se charge <strong>de</strong>s 600f. dus à M.<br />

son père. Lui dire: il est à ma connaissance que, lʹan <strong>de</strong>rnier, huit villes <strong>de</strong>s plus importan‐<br />

1150


tes <strong>de</strong>mandaient ensemble <strong>de</strong>s frères à la Communauté pour <strong>de</strong>s œuvres bien assises, <strong>avec</strong><br />

locaux et ressources garanties; serait‐il bien à vous dʹavoir engagé notre Communauté<br />

dans une œuvre moindre à tous égards, en lui promettant <strong>de</strong>s ressources qui bientôt lui<br />

seraient retirées, et <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s appuis qui viendraient aussi à lui faire défaut? Ne serait‐il pas<br />

à craindre que la Congrégation, jusquʹici sans nulle obligation, ne se retirât dʹune position<br />

si peu tenable et si peu encourageante?<br />

Quand M. Lantiez ou moi irons à Arras, nous examinerons ensemble quels moyens<br />

on pourrait avoir dʹéquilibrer vos recettes et vos dépenses; il serait désirable que ces<br />

moyens fussent, en ensemble, fournis par le pays, car une œuvre qui nʹa pas sa subsistance<br />

dans le sol nʹa guère <strong>de</strong> racines soli<strong>de</strong>s.<br />

Pour les 2.761,55 que vous atten<strong>de</strong>z <strong>de</strong> Lyon, je crois, comme vous, quʹil faut me<br />

mettre en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s faits financiers, peut‐être même aussi Vaugirard; je pense donc quʹil<br />

serait bien <strong>de</strong> les adresser à M. Abel du Garreau, Passage Landrieu n° 9, que jʹavertirai à<br />

cette fin. Si ces fonds sont capital, je les remettrai à M. Lantiez, notaire; si revenu, jʹen ré‐<br />

glerai lʹemploi <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> vous et nʹen disposerai pas autrement.<br />

Jʹai trouvé les diaconales à la bibliothèque; jʹai quelque répugnance à les envoyer<br />

par la poste ou par chemin <strong>de</strong> fer, ce livre ne doit pas être égaré; si pourtant vous nʹen<br />

trouvez pas aisément au séminaire dʹArras, dites ce que vous désirez et je le ferai.<br />

Adieu, mon cher enfant, cʹest samedi; je vous embrasse en hâte, mais bien tendre‐<br />

ment en J. et M., <strong>avec</strong> tous vos frères.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1148 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

M. <strong>de</strong> Varax a été ordonné prêtre le 25 novembre par Mgr Lequette: joies <strong>de</strong> lʹordination. Ménagements à avoir<br />

envers lʹabbé Laroche qui ne peut tenir tous ses engagements envers lʹŒuvre dʹArras.<br />

Vaugirard, 27 novembre 1866<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Les joies surabondantes <strong>de</strong> votre âme ont autant dʹéchos et <strong>de</strong> sympathies quʹil y a<br />

dʹâmes vraiment sacerdotales, car il nʹen est pas une qui ne se souvienne, dʹun souvenir<br />

ineffaçable et toujours vif, <strong>de</strong>s grâces dont le Seigneur lʹa comblée à lʹheure insigne <strong>de</strong> son<br />

ordination. Parmi nous, ces sympathies sont accrues <strong>de</strong> toutes nos tendresses pour vous; si<br />

jʹosais, je dirais que, pour ma part, il y avait quelque chose <strong>de</strong> plus intime encore, mais je<br />

nʹélève pas la voix, car plusieurs réclameraient contre la prétention; sans débat, soyez bien<br />

sûr, cher enfant, que tous nos cœurs, toutes nos émotions et nos prières étaient <strong>avec</strong> les vô‐<br />

tres. Cor unum et anima una, cʹest la vie, la respiration commune, lʹunion en Dieu, la plus<br />

tendre charité.<br />

Je me propose <strong>de</strong> vous écrire, après le retour <strong>de</strong> M. Lantiez que jʹattends ce soir ou<br />

<strong>de</strong>main matin, sauf information contraire, afin <strong>de</strong> vous dire ce qui aura été réglé concer‐<br />

nant le jeune instituteur. Il <strong>de</strong>vait voir M. Lantiez dimanche à Grenelle, il ne lʹy a pas trou‐<br />

vé et aura été bien déconcerté.<br />

Je ne vois pas dʹinconvénient réel à votre petit voyage à Lille; jʹaurais aimé bien<br />

mieux pour vous, en ces premiers moments, un peu <strong>de</strong> calme et <strong>de</strong> paix <strong>avec</strong> Dieu que <strong>de</strong>s<br />

excursions au <strong>de</strong>hors, mais, si vous jugez quʹil y ait là pour vous un <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> famille,<br />

agissez pour le plus grand bien.<br />

1151


Je vous enverrai au plus tôt les 100f. que je voulais remettre à M. Lantiez pour vous;<br />

jʹaviserai aussi à vous adresser, par la voie la meilleure, les <strong>de</strong>ux livres que vous mʹavez<br />

<strong>de</strong>mandés.<br />

M. Abel du Garreau a reçu lʹenvoi <strong>de</strong> M. Berloty et en a accusé réception; le montant<br />

du mandat nʹest pas touché, mais pourra lʹêtre quand on voudra; vous me direz, en temps<br />

opportun, vos pensées à ce sujet.<br />

Jʹai reçu hier <strong>de</strong> M. Laroche une lettre où il se montre contristé dʹêtre si vivement<br />

pressé pour le paiement <strong>de</strong>s secours par lui promis à lʹœuvre dʹArras; il mʹexplique les<br />

causes, réelles je le vois, <strong>de</strong> la gêne où lʹa mis son installation aux Baraques, où il a dû tout<br />

apporter et où il trouve bien peu <strong>de</strong> ressources. Il me paraît bien évi<strong>de</strong>nt que la bonne vo‐<br />

lonté ne lui a pas manqué pour nous assister. Il promet du reste que, vers le mois <strong>de</strong> mars,<br />

il recommencera à ai<strong>de</strong>r lʹœuvre, autant bien quʹil le pourra. Je pense que vous ferez bien<br />

<strong>de</strong> lui écrire quelques mots <strong>de</strong> cordialité pour lʹassurer que vous étiez bien loin <strong>de</strong> vouloir<br />

le contrister, que si vous avez été un peu pressant, cʹest sous cet empire <strong>de</strong> la nécessité<br />

quʹon exprime par le dicton: la faim fait sortir le loup du bois, ou mieux encore: la poule<br />

gar<strong>de</strong> bien ses poussins.<br />

Adieu, bien cher ami, on a dû recevoir <strong>de</strong>puis plusieurs jours, à lʹEvêché dʹArras, le<br />

dimissoire <strong>de</strong> M. Victor [Trousseau]. M gr [Dupanloup] a été dʹune con<strong>de</strong>scendance sans<br />

pareille; il mʹa répondu lui‐même immédiatement et, <strong>de</strong>ux jours après, son secrétaire<br />

mʹavertissait <strong>de</strong> lʹenvoi <strong>de</strong> la pièce. Lʹautorité chrétienne a la main douce et ferme en même<br />

temps; je baise cette main respectueusement.<br />

Jʹai bien pensé que nous avions tous notre part <strong>de</strong> votre bénédiction <strong>de</strong> prêtre; je me<br />

suis incliné en pensée, à lʹheure à peu près (sans doute) où vous aviez acquis lʹheureux<br />

privilège <strong>de</strong> nous la donner.<br />

Je ne sais encore si votre bonne mère était là, M. Lantiez me le dira <strong>avec</strong> le reste.<br />

Adieu, bien cher enfant, toujours mon enfant quoique prêtre, et moi toujours votre<br />

Père très affectionné en J. et M.<br />

Tendres sentiments pour tous<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1149 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

M. Lantiez <strong>de</strong> retour <strong>de</strong> la cérémonie dʹordination. Diverses questions concernant lʹŒuvre dʹArras.<br />

Vaugirard, 28 novembre 1866<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

M. Lantiez nous est arrivé hier au soir sous lʹimpression encore <strong>de</strong>s douces joies<br />

quʹil avait ressenties, très touché aussi <strong>de</strong> la bonté toute paternelle <strong>de</strong> Mgr lʹEvêque, enfin<br />

bien reconnaissant <strong>de</strong> lʹaimable bienveillance <strong>de</strong> votre bonne mère; nous remercions Dieu<br />

ensemble, dont la tendre charité sʹépand sur nous directement et par lʹintermédiaire <strong>de</strong>s<br />

âmes auxquelles Il inspire son esprit <strong>de</strong> con<strong>de</strong>scendance et dʹamour.<br />

Voilà que M. Chaverot sʹéchappe <strong>de</strong> la promena<strong>de</strong> du séminaire pour venir se ré‐<br />

jouir <strong>avec</strong> nous <strong>de</strong> votre ordination; on ne saurait dire combien son âme est sympathique<br />

et était vraiment façonnée pour sʹunir à une famille religieuse.<br />

1152


Le jeune instituteur qui <strong>de</strong>vait vous être envoyé paraît fort hésitant dans sa déci‐<br />

sion; M. Lantiez va tout à lʹheure à lʹEcole Normale <strong>de</strong>s Frères pour sʹassurer, à tout évé‐<br />

nement, dʹun remplaçant; vous nʹavez donc aucunement, je crois, à en prendre inquiétu<strong>de</strong>.<br />

Je vous envoie, comme je lʹai dit, 100f, pensant que lʹordination vous a peut‐être in‐<br />

duit en quelques frais, et sachant dʹailleurs que la maison dʹArras nʹest pas en avance; jʹau‐<br />

rai à vous envoyer, à la fin du mois <strong>de</strong> décembre, 200f pour le trimestre; si vous étiez trop<br />

en gêne, je pourrais les envoyer plus tôt; si vous pouvez ne point <strong>de</strong>vancer, cela établira<br />

mieux la régularité <strong>de</strong>s envois; vous ferez selon la nécessité.<br />

M. Lantiez a trouvé, mʹa‐t‐il dit, tout votre personnel, et M. Guillot en particulier,<br />

bien disposé; jʹécrirai bientôt à ce <strong>de</strong>rnier.<br />

Offrez mon hommage respectueux à votre bonne mère et tous mes tendres senti‐<br />

ments à nos frères.<br />

Votre affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1150 à M. Caille<br />

Inquiétu<strong>de</strong> <strong>de</strong> MLP. au sujet <strong>de</strong> la surcharge imposée aux frères dʹAmiens. Prières et communions pour lʹEglise<br />

et pour le Pape.<br />

Vaugirard, 4 décembre 1866<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Lantiez, à son retour dʹAmiens, nous a dit que, les services sʹaugmentant chez<br />

vous, il allait <strong>de</strong>venir difficile pour vos frères dʹy subvenir, et surtout quʹils nʹauraient<br />

nulle possibilité <strong>de</strong> suivre leurs exercices <strong>avec</strong> ensemble et régularité. Si le besoin est réel<br />

et sʹil y faut pourvoir, nous aurions à examiner comment on pourrait le faire. Sʹil ne sʹagis‐<br />

sait que <strong>de</strong> services purement matériels, peut‐être un domestique bien choisi (ce qui nʹest<br />

pas chose facile) pourrait vous tirer dʹembarras; mais M. Lantiez pense que ce moyen ne<br />

suffirait pas à tout. Je ne vois pas, au premier aspect, quelle ressource nous aurions ici<br />

pour vous ai<strong>de</strong>r; mais, avant tout, je voudrais avoir votre avis sur cette nécessité et sur les<br />

services qui adviendraient à celui quʹon désignerait pour se rendre près <strong>de</strong> vous. Je vous<br />

prie, mon bon ami, <strong>de</strong> mʹécrire à ce sujet; M. Lantiez doit probablement aller à Arras la<br />

semaine prochaine; si vous nous dites jusque‐là ce qui est à faire, nous verrons quels sont<br />

nos moyens; ils sont assurément <strong>de</strong>s plus restreints.<br />

Le père <strong>de</strong> notre f. Emile [Beauvais] mʹécrit quʹil est étonné <strong>de</strong> nʹavoir point eu <strong>de</strong><br />

nouvelles <strong>de</strong> lui <strong>de</strong>puis assez longtemps; priez‐le dʹécrire dès quʹil le pourra, afin que ce<br />

bon père ne sʹinquiète pas.<br />

M. Emile sʹaccoutume‐t‐il à Amiens et prend‐il position pour le bien <strong>de</strong> vos œuvres<br />

et <strong>de</strong> la Communauté? Invitez‐le à nous écrire aussi, comme je le lui avais <strong>de</strong>mandé.<br />

Rien <strong>de</strong> notable ici; nous prions beaucoup pour lʹEglise et pour le Saint Père; tous<br />

les jours quelques frères sont désignés pour communier à cette intention.<br />

Nous faisons aussi la neuvaine préparatoire à lʹImmaculée Conception.<br />

Adieu, mon cher ami, assurez tous nos frères <strong>de</strong> nos tendres sentiments et croyez<br />

vous‐même à mon vieux et affectueux dévouement.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1153


1151 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Envoi dʹun professeur laïc à Arras. Nouvelles explications sur la lecture <strong>de</strong>s journaux. Regret <strong>de</strong> ne parler que<br />

<strong>de</strong>s affaires et <strong>de</strong>s urgences du quotidien.<br />

6 décembre 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Le jeune professeur, dégagé <strong>de</strong> son emploi, est venu aujourdʹhui se mettre à notre<br />

disposition; je lʹai envoyé à Chaville où M. Lantiez donne la retraite aux jeunes étudiants,<br />

revenant chaque soir à Vaugirard. Lʹinstituteur restera là jusquʹà lundi, jour où il doit se<br />

rendre <strong>avec</strong> M. Lantiez à Arras, à moins quʹon ne trouve mieux quʹil parte à lʹavance pour<br />

prendre une première connaissance <strong>de</strong>s choses et mieux comprendre sa position. Il nous<br />

paraît être <strong>de</strong> tout point fort bien; je le crois capable <strong>de</strong> remonter vos classes et <strong>de</strong> les éta‐<br />

blir sur un bon pied. Il serait bien que lʹun <strong>de</strong> vous étudiât un peu le mouvement et lʹorga‐<br />

nisation régulière <strong>de</strong>s classes, afin <strong>de</strong> les maintenir en bonne condition après quʹelles y au‐<br />

ront été placées; cette étu<strong>de</strong> vous sera assurément nécessaire pour surveiller lʹensemble <strong>de</strong><br />

lʹœuvre du pensionnat, car comment surveiller et faire dʹutiles observations sans la<br />

connaissance <strong>de</strong>s opérations quʹon a à contrôler?<br />

Jʹécris ci‐joint un mot à M. Guillot pour lʹencourager. Je partage votre reconnais‐<br />

sance pour les bontés <strong>de</strong> votre excellente mère; rien ne mʹétonne <strong>de</strong> ses sollicitu<strong>de</strong>s pour<br />

vous et pour votre maison. Je trouve que vous avez bien fait pour les 2.000f oubliés.<br />

Je crains que la petite retraite <strong>de</strong> ces MM. <strong>de</strong> St Vincent <strong>de</strong> Paul ne vous fatigue,<br />

vous avez tant à faire et tant à ménager vos forces; défen<strong>de</strong>z‐vous contre le <strong>de</strong>hors, puis‐<br />

que vous suffirez à peine au <strong>de</strong>dans.<br />

Je finis, ayant beaucoup à écrire. M. Lantiez causera <strong>avec</strong> vous à loisir <strong>de</strong> tout et<br />

plus que tout.<br />

Je nʹai pas dit quʹun coup dʹœil sur un journal ne vous fût pas dʹune certaine utilité;<br />

mais ce qui serait dʹun usage fort discret, pour vous, serait un abus presque, ou même tout<br />

à fait inévitable pour tous les autres; je ne vois absolument aucun moyen <strong>de</strong> lʹéviter; il sʹin‐<br />

diquait déjà à Chaville, où on nʹavait que <strong>de</strong>s feuilles peu attirantes; je crois quʹil serait pé‐<br />

rilleux chez vous.<br />

Adieu, mon bien cher ami, les causeries intimes font place dans nos lettres aux af‐<br />

faires, aux urgences <strong>de</strong> tous les jours; vous voilà dans le mouvement, le noviciat est bien<br />

passé; il y a ainsi plusieurs âges dans la vie, sachons <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à chacun dʹeux ce quʹil<br />

comporte dʹoccasions et <strong>de</strong> moyens pour glorifier Dieu et nous sanctifier nous‐mêmes.<br />

Votre ami et Père tendrement affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Affections bien dévouées à nos frères.<br />

1152 à M. Guillot<br />

Paroles dʹencouragement. Il le félicite <strong>de</strong> son bon vouloir, son impressionnabilité tenant ʺplus du naturel que <strong>de</strong><br />

la volontéʺ. Supporter la légèreté et lʹindocilité <strong>de</strong>s enfants.<br />

Vaugirard, 6 décembre 1866<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je voulais répondre sans retard à la petite lettre que vous mʹavez écrite <strong>de</strong>rnière‐<br />

ment pour me dire votre état financier; le temps mʹa manqué pour me donner cette satis‐<br />

1154


faction. En ce qui touche les finances, jʹespère que lʹéquilibre se fera, Dieu aidant; M. Laro‐<br />

che promet, vers la première partie <strong>de</strong> lʹannée, <strong>de</strong> sʹen occuper <strong>avec</strong> vous; le pensionnat se<br />

remontera, la position mieux définie <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax et lʹarrivée dʹun professeur capable<br />

donneront plus gran<strong>de</strong> confiance aux familles.<br />

Pour vous‐même, cher ami, M. <strong>de</strong> Varax se loue beaucoup <strong>de</strong> votre bon vouloir, <strong>de</strong><br />

votre esprit religieux, <strong>de</strong> votre régularité; tout serait donc très bien, si ce nʹest que vous<br />

vous impressionnez trop vivement <strong>de</strong>s indocilités <strong>de</strong>s enfants et <strong>de</strong>s défauts ordinaires à<br />

leur âge; faites ce que vous pourrez pour dominer cette impatience qui tient plus, je le sais,<br />

chez vous du naturel que <strong>de</strong> la volonté. M. Lantiez, qui va à Arras au commencement <strong>de</strong> la<br />

semaine prochaine, causera <strong>avec</strong> vous et verra où vous en êtes à cet égard, et nous ferons<br />

ce qui semblera le mieux dans votre intérêt. Surmonter cette difficulté <strong>de</strong> nature serait très<br />

certainement le plus méritoire et le plus parfait, mais chacun sent dans quelle mesure <strong>de</strong>s<br />

sacrifices pareils lui sont possibles; tenez‐vous, en tout cas, bien paisible, cher ami, et soyez<br />

assuré que nous vous mettrons certainement à quelque emploi moins pénible pour vous,<br />

dès que nous le pourrons sans trop dʹembarras; si même cette attente vous semblait décou‐<br />

rageante, nous aviserions sans retard à cette mesure, quelque difficulté que nous y puis‐<br />

sions trouver. Avec cette certitu<strong>de</strong>, vous ne pourrez plus gar<strong>de</strong>r <strong>de</strong> souci, puisque vous se‐<br />

rez sûr <strong>de</strong> sortir <strong>de</strong> peine, dès que vous croirez tout à fait nécessaire dʹavoir un autre em‐<br />

ploi. M. Lantiez verra ce qui est à faire en un sens ou en un autre.<br />

Adieu, bien cher ami, je prie Dieu <strong>de</strong> vous accor<strong>de</strong>r sa grâce pour travailler vail‐<br />

lamment à son service, à lʹavenir comme par le passé.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1153 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Conseils <strong>de</strong> discrétion. Préparation <strong>de</strong>s sermons. Direction spirituelle dʹun frère. Qualités essentielles du Supé‐<br />

rieur: une gran<strong>de</strong> patience et une gran<strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong>.<br />

Vaugirard, 10 décembre 1866<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Sous peine <strong>de</strong> longs retards peut‐être, je suis contraint <strong>de</strong> vous écrire en quelques<br />

lignes seulement. Pour le projet concernant lʹécole, prenez gar<strong>de</strong> à lʹébruitement, ne parlez<br />

à personne, si vous pouvez, au moins à aussi peu que possible. Je crois quʹil faut accueillir<br />

les propositions <strong>avec</strong> actions <strong>de</strong> grâces, mais sans rien préjuger, <strong>de</strong>mandant temps <strong>de</strong> ré‐<br />

flexion pour vous et aussi pour le Conseil <strong>de</strong> la Communauté qui doit être consulté; nous<br />

ne saurions déci<strong>de</strong>r cette question assez grave sans prière et sans examen.<br />

Pour la retraite <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul, jʹaurais mieux aimé, <strong>de</strong> prime abord, quʹon<br />

vous laissât en ce moment un peu tranquille, mais, sʹil y a une sorte <strong>de</strong> nécessité, il faut y<br />

voir la volonté <strong>de</strong> Dieu. Je crois que, sʹil en était ainsi, vous auriez à vous préparer un peu<br />

sérieusement. On ne fait pas trois discours <strong>de</strong> quelque solidité, édifiants, simples, prati‐<br />

ques, sans un peu <strong>de</strong> travail et <strong>de</strong> réflexion <strong>de</strong>vant Dieu; la facilité ne suffit pas; autrement,<br />

on parle <strong>avec</strong> certaine forme, élégante peut‐être, mais presque assurément ce sont verba et<br />

voces. Voyez un peu ce qui est dans la situation, <strong>de</strong> quels conseils ils ont besoin, les mesu‐<br />

rant à leur portée et facultés; ils sont dans la charité, mais non dans la voie <strong>de</strong> perfection.<br />

M. Lantiez peut causer peut‐être <strong>avec</strong> vous utilement à ce sujet, sʹil y a lieu.<br />

1155


Je ne crois pas quʹil y ait inconvénient à ce que vous confessiez M. Guillot. Vous au‐<br />

rez ainsi plus <strong>de</strong> moyens <strong>de</strong> le soutenir moralement et <strong>de</strong> lʹencourager; la qualité essen‐<br />

tielle pour un Supérieur, cʹest une gran<strong>de</strong> patience et une gran<strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong> pour les<br />

âmes, faibles presque toutes; il faut les soutenir, les aimer et beaucoup prier pour elles.<br />

Adieu, bien cher ami, mille tendres affections en N.S. à vous et à tous.<br />

Votre Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1154 à M. Caille<br />

MLP. juge préférable <strong>de</strong> faire revenir M. Beauvais à Chaville.<br />

Vaugirard, 19 décembre 1866<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

M. Lantiez, ayant causé à loisir <strong>avec</strong> M. Emile [Beauvais], reste persuadé quʹil serait<br />

mieux en ce moment pour lui quʹil revînt à Chaville prendre un peu <strong>de</strong> repos et se mettre<br />

ensuite à la classe quʹil faisait à nos enfants <strong>de</strong> Vaugirard. Il me dit quʹil vous a proposé,<br />

pour remplacer à Amiens M. Emile, M. Charles Jouin qui est un très bon frère, pieux, do‐<br />

cile et suffisamment accoutumé à nos œuvres, ayant été longtemps à lʹŒuvre <strong>de</strong> Toutes‐<br />

Joies à Nantes.<br />

Je suis tout disposé à entrer dans ces vues qui ont eu votre agrément; jʹenverrai<br />

donc vers vous M. Jouin, dès que vous aurez réglé le départ <strong>de</strong> M. Emile. Il serait désirable<br />

quʹil pût sʹeffectuer assez promptement, les choses étant préparées pour cet arrangement<br />

ici; jʹattendrai votre réponse pour le départ <strong>de</strong> M. Jouin.<br />

M. Lantiez nous a dit que vous ne désespériez pas dʹassister à notre fête <strong>de</strong> St <strong>Jean</strong> le<br />

jeudi 27, et vous avez déjà envoyé en avant <strong>de</strong>s provisions qui vous assurent quʹon ne sera<br />

pas au dépourvu pour vous recevoir. Tâchez, mon bon ami, <strong>de</strong> réaliser notre espoir; vous<br />

êtes bien rarement <strong>avec</strong> nous dans nos réunions <strong>de</strong> famille, tous nos frères seraient heu‐<br />

reux <strong>de</strong> vous voir à celle <strong>de</strong> St <strong>Jean</strong>.<br />

Mille affections dévouées pour vous et pour nos frères.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1155 à M. Decaux<br />

Invitation à la St‐<strong>Jean</strong>.<br />

Vaugirard, 21 décembre 1866<br />

Mon bon ami,<br />

Nous faisons ici, comme <strong>de</strong> coutume, la fête <strong>de</strong> S t <strong>Jean</strong> lʹEvangéliste, jeudi prochain,<br />

27 décembre; vous voulez bien dʹordinaire vous unir à nous ce jour‐là; nous avons bien<br />

compté que vous nous accor<strong>de</strong>riez aussi cette année la même satisfaction. Cʹest pour moi,<br />

en particulier, une <strong>de</strong>s rares occasions où je puisse vous rencontrer. Je dois toujours pen‐<br />

ser, eu égard à mon âge et à ma chétive santé, que ce pourrait bien être la <strong>de</strong>rnière; vous<br />

tiendrez compte, je lʹespère, <strong>de</strong> ces bonnes raisons et vous nous viendrez, malgré la saison<br />

et les chemins mauvais.<br />

1156


Il est à noter, à ce propos, que le Chemin du Moulin, en préparation <strong>de</strong> pavage en ce<br />

moment, est peu praticable. On entre donc <strong>de</strong> préférence par la porte au bas <strong>de</strong> ce chemin,<br />

rue Dombasle 44, précé<strong>de</strong>mment rue <strong>de</strong>s Vignes.<br />

A 4h. Vêpres et salut; à 6h. précises dîner, suivi dʹun petit divertissement musical et<br />

scénique.<br />

Croyez, mon bon ami, à tous mes sentiments <strong>de</strong> sincère affection et <strong>de</strong> vrai dé‐<br />

vouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1156 à M me la Vicomtesse dʹHurbal<br />

Témoignage <strong>de</strong> condoléances. Prières et messes aux intentions <strong>de</strong>mandées.<br />

Vaugirard, 24 décembre 1866<br />

Madame la Comtesse,<br />

La veille <strong>de</strong> la fête <strong>de</strong> Noël me laisse bien peu dʹinstants libres; jʹen prends un en<br />

hâte néanmoins pour répondre aux points les plus urgents contenus dans la lettre que<br />

vous mʹavez fait lʹhonneur <strong>de</strong> mʹécrire.<br />

Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> dire que jʹai pris une gran<strong>de</strong> et vive part à la douleur <strong>de</strong> votre<br />

famille à lʹoccasion <strong>de</strong> la perte quʹelle vient <strong>de</strong> faire en la personne <strong>de</strong> M. le Comte dʹHou‐<br />

<strong>de</strong>tot [Mis Edmond <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot]; tout ce que vous mʹen aviez dit mʹavait inspiré pour lui<br />

une bien haute estime, et ses longues souffrances appelaient aussi une vive sympathie;<br />

jʹentre particulièrement aussi dans la peine <strong>de</strong> Mme dʹHou<strong>de</strong>tot, si pieuse, si dévouée. Dieu,<br />

qui sait mieux que nous ce qui nous convient, a entendu assurément ses prières pleines <strong>de</strong><br />

foi et <strong>de</strong> confiance, mais Il a donné au pauvre martyr le repos du Ciel au lieu <strong>de</strong> la santé<br />

sur la terre; cʹest plus quʹon ne <strong>de</strong>mandait pour lʹheure présente; soumettons‐nous à ses<br />

<strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong>, bien que le cœur saigne et se sente brisé.<br />

Je pense fidèlement à toutes vos intentions, Madame, et à cette <strong>de</strong>rnière en particu‐<br />

lier, et à celle qui vous cause tant dʹinquiétu<strong>de</strong> aussi bien quʹà tous les vôtres; prions tou‐<br />

jours, jamais la prière chrétienne et cordiale ne tombe à terre. Nous dirons <strong>de</strong>ux messes<br />

par semaine, mardi‐jeudi, pendant un an, indépendamment <strong>de</strong>s autres déjà <strong>de</strong>mandées<br />

par Mme dʹHou<strong>de</strong>tot une fois par semaine, jʹen dis une, un <strong>de</strong> nos MM. dit les <strong>de</strong>ux autres.<br />

Veuillez, Madame la Comtesse, offrir tous mes sentiments <strong>de</strong> profon<strong>de</strong> condoléance<br />

à Mme dʹHou<strong>de</strong>tot et à toute votre chère famille, et agréez vous‐même tout mon bien res‐<br />

pectueux dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1157 à M. dʹArbois<br />

Remerciements pour les vœux <strong>de</strong> fête et <strong>de</strong> nouvel an. Affection <strong>de</strong> MLP. pour ses frères. Joie <strong>de</strong> voir sa<br />

famille ʺ<strong>de</strong>meurer dans son esprit <strong>de</strong> primitive simplicitéʺ.<br />

Vaugirard, 3 janvier 1867<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je vous envoie, pour M gr dʹAngers, une petite lettre que je vous prie <strong>de</strong> lui faire re‐<br />

mettre le plus tôt possible. Je mʹaperçois que je nʹai rien dit pour Messieurs les Vicaires<br />

1157


Généraux; réparez cela en leur disant, dès que vous en aurez lʹoccasion, quelques mots <strong>de</strong><br />

respect et <strong>de</strong> reconnaissance <strong>de</strong> ma part.<br />

Jʹécris surtout ces lignes pour vous remercier, ainsi que nos frères, <strong>de</strong> vos vœux <strong>de</strong><br />

fête et <strong>de</strong> nouvel an. Je vous embrasse tous bien tendrement et je vous ai portés tous <strong>de</strong>‐<br />

vant Dieu en commençant lʹannée. Dites un mot affectueux à chacun, ce mʹest un vrai re‐<br />

gret <strong>de</strong> ne pas vous écrire à tous; jʹespère que le f. <strong>Léon</strong> [Guichard] est bien accoutumé,<br />

que le cher M. Ladouce nous donnera, à ses bons parents et à nous, la joie <strong>de</strong> le voir sʹaf‐<br />

fermir dans le service <strong>de</strong> Dieu; sa bonne mère mʹest venue voir ces jours‐ci; elle prie tant<br />

quʹelle obtiendra la persévérance <strong>de</strong> son enfant dont elle juge si sagement les véritables in‐<br />

térêts.<br />

Bon souvenir aussi à notre frère <strong>Jean</strong> [Gauffriau]; que le Seigneur fortifie sa santé et<br />

le maintienne en ses bonnes dispositions; enfin, bien <strong>de</strong>s tendresses à mon cher enfant<br />

Moutier, le plus ancien aujourdʹhui <strong>avec</strong> vous à Angers et qui donnera constamment, jʹen<br />

suis sûr, le bon exemple à tous.<br />

Tous nos frères vous aiment et sont toujours tendrement unis; la famille <strong>de</strong>meure<br />

dans son esprit <strong>de</strong> primitive simplicité et vous gar<strong>de</strong>, <strong>de</strong> cœur et <strong>de</strong>vant Dieu, le plus af‐<br />

fectueux souvenir.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1158 à M gr Angebault<br />

Gratitu<strong>de</strong> et piété filiale, exprimées au nom <strong>de</strong> toute la Communauté.<br />

Vaugirard, 3 janvier 1867<br />

Monseigneur,<br />

Bien que nous ayons maintenant près <strong>de</strong> vous comme <strong>de</strong>s représentants accrédités<br />

qui peuvent se faire les interprètes <strong>de</strong> nos sentiments pour vous, nous avons encore le be‐<br />

soin <strong>de</strong> vous dire une fois <strong>de</strong> plus tout le profond respect, tout lʹinviolable attachement,<br />

toute la vive reconnaissance dont nos cœurs sont pénétrés pour votre Gran<strong>de</strong>ur. Veuillez<br />

en agréer lʹhommage, Monseigneur, et recevoir nos vœux pour que le Seigneur daigne bé‐<br />

nir <strong>de</strong> plus en plus les œuvres <strong>de</strong> votre Episcopat, déjà si riche en bienfaits; chacun dit au‐<br />

jourdʹhui: il passe en faisant le bien, comme on lʹa dit autrefois <strong>de</strong> notre divin Maître et<br />

modèle lui‐même; puisse le diocèse dʹAngers apprécier dignement le don que le Seigneur<br />

lui a fait en lui accordant un pasteur selon son cœur, et correspondre par son amour à une<br />

si gran<strong>de</strong> faveur.<br />

Pour nous, Monseigneur, jʹose dire que nous sentons tout ce que nous <strong>de</strong>vons à<br />

Dieu pour nous avoir accordé en votre personne un Père, un gui<strong>de</strong>, un ange <strong>de</strong> bon conseil<br />

dont les directions nous ont conduits et les doux encouragements nous ont soutenus. Nous<br />

<strong>de</strong>vons à ce secours dʹavoir pu nous asseoir dans le service du bon Maître, malgré notre<br />

inexpérience, comme nous <strong>de</strong>vons à vos prières <strong>de</strong> nʹavoir pas été rejetés malgré notre in‐<br />

dignité. Nous <strong>de</strong>mandons humblement la continuation <strong>de</strong> ce précieux appui qui nous<br />

reste toujours nécessaire et auquel nous correspondrons par notre docilité et notre défé‐<br />

rence filiale.<br />

1158


Nous vous rendons grâces tout particulièrement, Monseigneur, <strong>de</strong> la protection si<br />

pleine <strong>de</strong> con<strong>de</strong>scendance et <strong>de</strong> bonté que vous daignez accor<strong>de</strong>r à notre petite famille<br />

dʹAngers; nous la regardons, parmi nous, comme la plus privilégiée, puisquʹelle a le bon‐<br />

heur <strong>de</strong> vous voir souvent, <strong>de</strong> recevoir directement vos avis, et <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r aussi votre<br />

paternelle bénédiction.<br />

Tous ici, Monseigneur, nous nous inclinons par la pensée pour en recevoir aussi les<br />

puissantes influences, et nous osons aussi vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r quelques souvenirs dans vos<br />

saints sacrifices.<br />

Nous avons lu <strong>avec</strong> gran<strong>de</strong> édification et nous nous sommes passé les uns aux au‐<br />

tres votre <strong>de</strong>rnier man<strong>de</strong>ment; nous avons reconnu <strong>avec</strong> joie que nous étions bien vos en‐<br />

fants, puisque les sentiments si chaleureusement exprimés par le vénéré Père faisaient bat‐<br />

tre unanimement le cœur <strong>de</strong> ses dévoués fils.<br />

Je suis, <strong>avec</strong> une profon<strong>de</strong> et une tendre vénération,<br />

Monseigneur<br />

De Votre Gran<strong>de</strong>ur<br />

Le très humble et très soumis enfant<br />

Le <strong>Prevost</strong>, p tre .<br />

1159 à M. Decaux<br />

MLP. doit retirer le frère Charrin <strong>de</strong> lʹŒuvre <strong>de</strong> St‐Anne, sans pouvoir le remplacer.<br />

Vaugirard, 4 janvier 1867<br />

Mon bon ami,<br />

Nos affaires du patronage S te ‐Anne vous causent sans doute quelque embarras, ne<br />

fût‐ce que par la crainte charitable <strong>de</strong> nous désobliger en rejetant notre concours à cette<br />

bonne œuvre. Mais voilà que la Provi<strong>de</strong>nce y met elle‐même la main. La santé <strong>de</strong> M. Char‐<br />

rin, que je savais un peu faible, se montre définitivement insuffisante pour un travail et<br />

1159


<strong>de</strong>s excursions pénibles; une bronchite, qui <strong>de</strong>vient chronique, menace dʹatteindre très<br />

gravement sa poitrine et exige <strong>de</strong>s ménagements que le mé<strong>de</strong>cin déclare formellement in‐<br />

compatibles <strong>avec</strong> son emploi présent. Il est donc contraint <strong>de</strong> se retirer. Je doute bien que,<br />

dans lʹétat <strong>de</strong>s choses, vous désiriez quʹun <strong>de</strong>s nôtres le remplace; on a déclaré à bien <strong>de</strong>s<br />

reprises à M. Charrin que sa retraite était désirée et quʹelle était le meilleur parti quʹon pût<br />

souhaiter. Mais, quoiquʹil en fût, nous nʹaurions présentement, dans la vérité du mot, au‐<br />

cun sujet qui pût le remplacer. Nos Confrères sont animés dʹun zèle bien louable et qui<br />

peut, quant à présent, parer à tout, jʹen suis persuadé. Si vous jugez que le ministère <strong>de</strong> M.<br />

Planchat vous soit encore utile, je crois quʹil le continuera volontiers jusquʹà ce que vous<br />

trouviez quʹun autre arrangement vous serait plus convenable.<br />

Si plus tard nos Confrères, moins libres <strong>de</strong> leurs moments, éprouvaient quelque dif‐<br />

ficulté pour subvenir à quelque temps <strong>de</strong> vacances ou autres, soyez sûr quʹautant que<br />

nous en aurions les moyens, vous trouverez toujours prête notre bonne volonté pour leur<br />

rendre service.<br />

Pardonnez‐moi mon écriture si mal formée, jʹai les doigts glacés.<br />

Croyez bien, mon bon ami, à tous mes sentiments <strong>de</strong> constante amitié en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1160 à M. Caille<br />

Souhaits <strong>de</strong> nouvel an. Promesse dʹenvoyer un père <strong>de</strong> lʹInstitut pour donner à la Communauté dʹAmiens ʺune<br />

assiette plus soutenue et bien régulièreʺ. A la suite <strong>de</strong> la Saint‐<strong>Jean</strong>, représentation du Mystère <strong>de</strong> St Tharsice.<br />

Vaugirard, 4 janvier 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je saisis le premier moment libre après quʹont fini les tumultueux mouvements du<br />

nouvel an, et je vous écris <strong>de</strong>ux mots dʹaffection et <strong>de</strong> bon souvenir. Je voudrais écrire à<br />

tous nos frères qui mʹont envoyé, comme vous, <strong>de</strong> bonnes et aimables lettres, mais je nʹar‐<br />

riverais pas à les mettre à fin en ce moment, à cause du surcroît dʹoccupations que nous<br />

apporte cette époque <strong>de</strong> la saison. Quʹils soient au moins bien assurés que je songe à eux<br />

constamment, que tous leurs besoins spirituels surtout sont lʹobjet <strong>de</strong> mes sollicitu<strong>de</strong>s et<br />

que ce sera un bonheur pour moi si jʹarrive, comme je le souhaite, à y donner satisfaction.<br />

Il me semble que vous auriez tous à un plus haut <strong>de</strong>gré une assiette régulière et plus sou‐<br />

tenue si vous aviez un prêtre <strong>de</strong> la Communauté pour tous vos services quotidiens <strong>de</strong> la<br />

chapelle et pour vos propres exercices; jʹy pense souvent et, dès que jʹaurai le moyen dʹy<br />

pourvoir, je le ferai <strong>avec</strong> empressement; ce quʹon cherche <strong>avec</strong> persistance, on lʹobtient<br />

bien communément; espérons et attendons tout <strong>de</strong> la bonté <strong>de</strong> Dieu.<br />

Nous avons bien regretté, mon bon ami, <strong>de</strong> ne pas vous voir à la fête <strong>de</strong> la S t ‐<strong>Jean</strong>,<br />

nous avions un peu compté sur votre visite; la réunion était nombreuse et tout sʹest passé<br />

aimablement. M. le Curé <strong>de</strong> Bonne‐Nouvelle [M. lʹabbé Millaut] y a parlé le soir délicieu‐<br />

sement et a laissé à tous une douce et édifiante impression.<br />

La soirée seulement sʹest terminée trop tard; je lʹai regretté, parce que je recom‐<br />

man<strong>de</strong> à toutes nos œuvres <strong>de</strong> ne pas renvoyer leurs jeunes gens à <strong>de</strong>s heures trop tardi‐<br />

ves; cette circonstance a tenu au choix <strong>de</strong> la représentation qui était le drame <strong>de</strong> S t Tharsice<br />

et qui, étant joué par les jeunes ouvriers <strong>de</strong> Nazareth, ne pouvait commencer <strong>de</strong> bonne<br />

heure. A cela près, elle a fort bien réussi; ce genre <strong>de</strong> pièce est plus moral et plus avanta‐<br />

1160


geux pour le bien que les plaisanteries souvent plus que futiles; elle a été très générale‐<br />

ment goûtée.<br />

Donnez‐nous <strong>de</strong> vos nouvelles et <strong>de</strong> celles <strong>de</strong> vos frères; M. Marcaire est‐il remis <strong>de</strong><br />

sa fatigue? M. Hubert bien au fait <strong>de</strong> ses emplois? Je sais quʹil sʹy met <strong>de</strong> tout cœur. M.<br />

Jouin est, je lʹespère, bien accoutumé. Adieu, bien chers amis, je resterais volontiers long‐<br />

temps à converser <strong>avec</strong> vous; être en famille et en famille spirituelle, cʹest une gran<strong>de</strong> joie;<br />

je la goûte profondément quand je suis au milieu <strong>de</strong> vous. Je vous embrasse tous tendre‐<br />

ment en J. et M.<br />

Votre ami et Père tout affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1161 à M. dʹArbois<br />

Paiement <strong>de</strong> sa pension. La santé du frère Legrand donne <strong>de</strong>s signes dʹinquiétu<strong>de</strong>.<br />

8 janvier 1867<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu, il y a déjà trois jours, les 200f. pour le trimestre <strong>de</strong> votre pension; je nʹai pu<br />

vous en accuser plus tôt réception à cause <strong>de</strong>s fêtes du nouvel an, etc.<br />

Je vous envoie une petite épître du f. Alexandre [Legrand]; il est toujours bon reli‐<br />

gieux, consciencieux, régulier; sa santé laisse <strong>de</strong> temps en temps à désirer, mais sans acci‐<br />

<strong>de</strong>nts très graves; ce sont <strong>de</strong>s éblouissements qui suspen<strong>de</strong>nt tout à coup le sentiment et le<br />

laissent sans mouvement; ces jours <strong>de</strong>rniers, il a eu un <strong>de</strong> ces étourdissements étant à ta‐<br />

ble; on sʹest aperçu quʹil était immobile, appuyé à la table; on lʹa enlevé, porté dans la cour<br />

sans quʹil en ait conscience; dix minutes après, il jouait aux boules en récréation dans la<br />

cour. Je crains cependant quʹen se répétant, ces acci<strong>de</strong>nts nʹaltèrent un peu le cerveau.<br />

Jʹai reçu aujourdʹhui une très aimable lettre <strong>de</strong> notre vénéré Père Mgr dʹAngers; il se<br />

loue toujours <strong>de</strong>s bons services <strong>de</strong> votre petite communauté et montre le plus affectueux<br />

intérêt pour lʹensemble <strong>de</strong> la famille.<br />

Tous vous assurent ici, <strong>avec</strong> moi, <strong>de</strong> leur tendre attachement.<br />

Votre ami et Père affectionné en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1161 bis 390 au Docteur Jousset<br />

Deman<strong>de</strong> <strong>de</strong> consultation pour le frère Charrin.<br />

Vaugirard, 10 janvier 1867<br />

Bien cher Monsieur,<br />

Je viens, dès ce commencement dʹannée, <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r encore le secours <strong>de</strong> vos<br />

conseils; mais, avant tout, je veux vous offrir tous mes vœux pour vous et pour votre chère<br />

famille, et vous exprimer en même temps notre vive reconnaissance pour tous les bons of‐<br />

fices et marques dʹintérêt que notre famille religieuse a reçus <strong>de</strong> vous <strong>de</strong>puis bien long‐<br />

temps déjà. Nous espérons que Dieu vous en tiendra compte en bénissant vous et tout ce<br />

qui vous est cher.<br />

390 Supplée la lettre 1141.<br />

1161


Je vous prie dʹavoir la bonté dʹexaminer lʹétat du bon et pieux frère [M.Charrin] que<br />

jʹenvoie vers vous, et <strong>de</strong> me dire votre avis sur ce que sa santé exige.<br />

Il a, tous les hivers, <strong>de</strong>s rhumes qui durent plusieurs mois <strong>de</strong> suite, le moindre froid<br />

les renouvelle; toute lʹannée, il crache fréquemment (<strong>de</strong>s eaux autant quʹil me paraît plutôt<br />

quʹautre chose), et il revient souvent à lʹinfirmerie pour ces faiblesses <strong>de</strong> poitrine.<br />

Cependant, par suite <strong>de</strong>s besoins <strong>de</strong> nos œuvres, nous avons dû lui donner un poste<br />

très fatigant; il doit, par tous les temps et par toutes les saisons, aller trois ou quatre fois<br />

par semaine <strong>de</strong> Vaugirard à Charonne, faire <strong>de</strong>s placements dʹapprentis et <strong>de</strong>s surveillan‐<br />

ces dans les ateliers; les dimanches et fêtes, il a la discipline et conduite, <strong>de</strong>puis le matin<br />

jusquʹau soir, <strong>de</strong> 350 apprentis et jeunes ouvriers dont il doit diriger tous les mouvements.<br />

Un pareil emploi est nécessairement pour lui très fatigant et <strong>de</strong>man<strong>de</strong> un grand déploie‐<br />

ment <strong>de</strong> la voix presque tout le jour.<br />

Je désirerais que vous ayez la bonté <strong>de</strong> lʹausculter et <strong>de</strong> bien vous rendre compte <strong>de</strong><br />

son état et <strong>de</strong> ses puissances physiques, afin que nous sachions si nous pouvons, en cons‐<br />

cience et sans abuser <strong>de</strong> ses forces, le maintenir dans son emploi. Lʹen retirer sera pour<br />

nous une gêne et lʹoccasion peut‐être <strong>de</strong> quelques embarras, mais, puisquʹil sʹest remis en<br />

confiance entre nos mains, nous aurons à rendre compte à Dieu <strong>de</strong> lʹusage que nous au‐<br />

rons fait <strong>de</strong> ce généreux abandon. Cʹest pourquoi, cher Monsieur, je recours à vos lumières<br />

pour agir en connaissance <strong>de</strong> cause.<br />

Agréez, je vous prie, tous mes sentiments affectueux et bien dévoués en N.S.<br />

Votre serviteur et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong> p tre<br />

Monsieur lʹabbé,<br />

Lʹensemble est bon, mais il y a un point douteux du côté gauche au sommet du poumon, et<br />

il serait possible que ce jeune homme commence une maladie <strong>de</strong> poitrine.<br />

Dans ces circonstances, il est nécessaire <strong>de</strong> suspendre toute détermination définitive; quʹil<br />

continue son service et renvoyez‐le moi dans 15 jours.<br />

Recevez, Monsieur lʹabbé, lʹassurance <strong>de</strong> mon respectueux attachement.<br />

D r Jousset<br />

1162 à M. Decaux<br />

La question du personnel à lʹŒuvre <strong>de</strong> Ste‐Anne. Avec tact et clairvoyance, MLP. examine comment employer<br />

les frères, compte tenu <strong>de</strong>s santés, <strong>de</strong>s compétences et du travail déjà accompli.<br />

Vaugirard, 11 janvier 1867<br />

Mon bon ami,<br />

Je nʹai mis aucun retard volontaire à la réponse que jʹavais à vous faire relativement<br />

à lʹoeuvre <strong>de</strong> Ste ‐Anne. Nous avons examiné <strong>avec</strong> tout le bon vouloir possible les moyens<br />

que nous pouvions avoir dʹy maintenir notre coopération et, en définitive, nous nʹavons<br />

toujours trouvé, comme sujets susceptibles dʹy travailler utilement, que M. Derny et M.<br />

Charrin. Nous nʹavons pas dû nous arrêter au premier, à raison <strong>de</strong> lʹopposition que pour‐<br />

rait rencontrer son retour à Ste ‐Anne. Ce nʹétait pas toutefois sans regret que nous lʹécar‐<br />

tions, puisque son expérience plus gran<strong>de</strong> <strong>de</strong> lʹœuvre et sa bonne santé le rendaient plus<br />

apte, à beaucoup dʹégards, aux services qui sont à soutenir.<br />

1162


Pour M. Charrin, une question <strong>de</strong> conscience était à éclaircir pour nous; était‐il phy‐<br />

siquement en état <strong>de</strong> porter cet emploi? Je joins ici la lettre que jʹai écrite à M. Jousset, notre<br />

mé<strong>de</strong>cin, pour le consulter formellement sur ce point. Il résulte <strong>de</strong> sa réponse, écrite en<br />

suite <strong>de</strong> ma lettre, que, présentement, il pourrait essayer <strong>de</strong> continuer ses fonctions, mais<br />

quʹil reste dans lʹétat <strong>de</strong> sa poitrine <strong>de</strong>s indices à surveiller et qui laissent <strong>de</strong>s doutes pour<br />

lʹavenir.<br />

Vous jugerez, mon bon ami, si vous pouvez lʹaccepter dans ces conditions; il se<br />

donne, quant à lui, <strong>avec</strong> un sacrifice parfait et nous vous le remettons nous‐mêmes, <strong>avec</strong><br />

cette réserve seulement que les faits relatifs à sa santé pourraient comman<strong>de</strong>r. Je vous <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>, mon bon ami, et vous mʹy avez paru bien disposé, <strong>de</strong> lui faire, sʹil vous reste, une<br />

position telle quʹil puisse remplir la tâche qui lui sera donnée, quelle quʹelle soit. Ce ne<br />

sont pas <strong>de</strong>s fonctions éminentes que nous <strong>de</strong>mandons pour lui, mais la liberté <strong>de</strong> mou‐<br />

vement et les ai<strong>de</strong>s dont il a besoin pour opérer les actes quʹon attend <strong>de</strong> lui.<br />

Nous avions entrevu une combinaison qui, à notre gré, serait plus sûre; ce serait, en<br />

reprenant M. Derny, <strong>de</strong> lui adjoindre pour le spirituel M. Faÿ, qui donnerait à S te ‐Anne la<br />

coopération quʹil donnait à S t ‐Charles. On ne serait pas pour cela entièrement privé <strong>de</strong>s<br />

services réels, et peut‐être difficiles à remplacer, que M. Planchat rend à S te ‐Anne. Il a<br />

commencé dans le quartier, si propice aux œuvres <strong>de</strong> zèle, beaucoup <strong>de</strong> relations quʹil im‐<br />

porte <strong>de</strong> ne pas laisser se perdre. Notre pensée serait quʹil y prît à loyer une salle où il fe‐<br />

rait ses catéchismes et réceptions et préparerait ses premières communions. Il ne serait pas<br />

les dimanches et fêtes à S te ‐Anne, <strong>de</strong>vant prendre à Vaugirard ces jours‐là la place <strong>de</strong> M.<br />

Faÿ; mais, plusieurs jours <strong>de</strong> la semaine, il viendrait dans le voisinage, rendrait les services<br />

que la maison pourrait attendre <strong>de</strong> lui pour la chapelle ou autrement, et surtout recruterait<br />

le personnel <strong>de</strong>s apprentis et jeunes ouvriers dans ses visites <strong>de</strong>s familles. Peut‐être lui<br />

permettrait‐on <strong>de</strong> faire (un jour <strong>de</strong> semaine) ses cérémonies <strong>de</strong> première communion, plus<br />

édifiantes alors parce quʹelles ne seraient pas en concours <strong>avec</strong> les exercices et les assem‐<br />

blées du patronage.<br />

Ces dispositions nous paraissaient <strong>de</strong>voir concilier tous les intérêts <strong>de</strong> lʹœuvre;<br />

mais, pour leur exécution, il faudrait une entente franche, cordiale, et quelque conformité<br />

<strong>de</strong> sentiments entre tous ceux qui concourraient à les réaliser; vous verrez, mon bon ami,<br />

ce que le bon Dieu vous inspirera sur ce sujet; pour nous, nous lʹavons beaucoup prié pour<br />

que lʹunion et la paix régnassent entre nous; car si la charité souffre, comment Dieu sera‐t‐<br />

il <strong>avec</strong> nous?<br />

Croyez bien, mon bon ami, à tous mes sentiments accoutumés <strong>de</strong> bien affectueux<br />

dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1163 à M. Caille<br />

Reconnaissance envers une bienfaitrice défunte. Encouragements à <strong>de</strong>s frères.<br />

12 janvier 1867<br />

Mon bon ami,<br />

Je reçois à lʹinstant la lettre par laquelle vous nous apprenez la perte sensible que<br />

vous venez <strong>de</strong> faire, je puis dire que toute notre famille vient <strong>de</strong> faire, dans la personne <strong>de</strong><br />

lʹexcellente M lle <strong>de</strong> Lupel. Elle était assurément sur cette terre un <strong>de</strong> ces anges <strong>de</strong> bonté et<br />

1163


<strong>de</strong> charité que le Seigneur envoie à ceux qui le servent pour les encourager dans leurs tra‐<br />

vaux et leurs difficultés; Il lʹa rappelée à Lui pour la récompenser <strong>de</strong> ses vertus et pour<br />

grossir au Ciel le nombre <strong>de</strong>s âmes saintes qui continuent là‐haut, <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s moyens bien<br />

plus puissants, les œuvres miséricordieuses quʹelles opéraient ici‐bas; ayons donc<br />

confiance, si elle est gagnée pour le Ciel, elle nʹest pas pour cela perdue pour la terre; <strong>de</strong>‐<br />

meurons en relation <strong>avec</strong> elle, nous par nos prières, elle par ses entremises auprès <strong>de</strong> Dieu.<br />

Je vais dire, au commencement <strong>de</strong> la semaine, les trois messes que vous me <strong>de</strong>man‐<br />

<strong>de</strong>z; nous acquitterons ainsi, et par les prières <strong>de</strong> toute la Communauté, les obligations que<br />

ses bontés nous ont fait contracter envers elle.<br />

Encouragez notre f. Marcaire; assurez‐le que les <strong>de</strong>ux jeunes frères quʹil a [MM.<br />

Jouin et Hubert] sont bons et sincèrement dévoués; <strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> temps, il les formera à<br />

leurs nouveaux emplois et tout ira bien mieux; nous songeons aussi toujours à vous <strong>de</strong>sti‐<br />

ner un prêtre; ce serait lʹaffermissement <strong>de</strong> vos œuvres et une source <strong>de</strong> bénédictions pour<br />

vous comme pour vos enfants; mais il ne faut pas nous lasser au service du Seigneur, Il<br />

veut quʹon atten<strong>de</strong> les temps quʹIl a marqués et quʹon gagne par la patience les grâces quʹIl<br />

nous prépare.<br />

Je trouve très bonne votre pensée pour lʹemploi du legs; il faudra aviser à en faire le<br />

placement dʹune manière sûre. Adieu, mon bon ami, mille affections à vous et à tous nos<br />

frères.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1164 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Confiance invincible dans le concours <strong>de</strong> Dieu; conseils pour les finances et le personnel.<br />

Vaugirard, 15 janvier 1867<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Ne nous abattons pas dans les difficultés; ce serait mauvais signe si nous nʹaperce‐<br />

vions pas <strong>de</strong>vant nous la croix <strong>de</strong> N.S., nous pourrions craindre <strong>de</strong> nous être trompés <strong>de</strong><br />

route; mais jusquʹici nous avons lieu <strong>de</strong> nous rassurer; il nʹest pas une seule <strong>de</strong> nos œuvres<br />

qui nʹait <strong>de</strong> graves difficultés, mais toujours (<strong>de</strong>puis maintenant plus <strong>de</strong> 20 ans) le secours<br />

divin, souvent sensible, est venu les aplanir. Il en sera ainsi <strong>de</strong>s embarras dʹArras et, plus<br />

nous serons confiants et soumis, plus la grâce sera gran<strong>de</strong> et consolante.<br />

Pour le personnel, jʹespère, à moins <strong>de</strong> contretemps nouveaux, vous envoyer un<br />

ai<strong>de</strong> pour le patronage après un délai quʹun double acci<strong>de</strong>nt, dont je parle ci‐contre à M.<br />

Victor [Trousseau], a suscité, mais qui ne peut, je pense, être long.<br />

Quant aux finances, vous voyez, il me semble, les choses trop en noir. Mme <strong>de</strong> Bréda<br />

a donné, lʹan <strong>de</strong>rnier, 500f pour M. Adolphe [Lainé], lesquels ont été, en leur temps, versés<br />

à différents moments <strong>de</strong> cette année; je pense quʹelle fera <strong>de</strong> même pour 1867. Vous avez<br />

<strong>de</strong> votre côté, tant <strong>de</strong> votre pension que <strong>de</strong> vos honoraires <strong>de</strong> messes, <strong>de</strong> 12 à 1.300f. M.<br />

Laroche sʹest engagé à recommencer une subvention à partir <strong>de</strong> mars prochain, je ne la<br />

suppose que <strong>de</strong> 5 ou 600f pour lʹannée; enfin Mgr dʹArras a promis que, vers le printemps<br />

ou dans cette année au moins, il vous donnerait 500f. Ces divers secours, joints à vos au‐<br />

tres ressources, et sans compter quelques éventualités que le Père céleste a toujours en ré‐<br />

1164


serve, nous paraissent à tous ici vous ménager <strong>de</strong>s ressources bien plus clairement indi‐<br />

quées quʹil nʹest ordinaire dans les œuvres qui se confient à la Provi<strong>de</strong>nce. Bonne espé‐<br />

rance donc, cher ami; travaillons <strong>de</strong> notre mieux, <strong>avec</strong> un esprit fidèle et bien simple, la foi<br />

et lʹabandon filial seront notre salut.<br />

M. Mordat écrit à M. Lantiez une bonne lettre bien tournée où il se montre content,<br />

plein <strong>de</strong> sympathie et dʹestime pour le milieu où Dieu lʹa placé. Ce jeune homme est intel‐<br />

ligent et doit, <strong>avec</strong> le temps, attirer <strong>de</strong>s élèves au pensionnat. Vous nous avez parlé dʹun<br />

esclandre <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> vos <strong>de</strong>ux professeurs au nouvel an, nous avons regretté que vous<br />

nʹayez rien ajouté <strong>de</strong> plus; cʹétait éveiller en nous une inquiétu<strong>de</strong>, sans aucun détail qui<br />

nous permit dʹen juger; les énigmes en affaires sérieuses sont pénibles pour lʹesprit.<br />

M. Lantiez me dit que les 500f promis à M. Mordat sont pour lʹannée, payables par<br />

douzièmes.<br />

Je tiens un règlement prêt pour vous; les mille occupations qui nous pressent en ce<br />

moment ne mʹont pas encore laissé le loisir <strong>de</strong> me procurer le manuel du confesseur, je<br />

vais le faire acheter et je vous lʹenverrai <strong>avec</strong> les diaconales. Le frère qui vous est <strong>de</strong>stiné (M.<br />

Charrin, je pense) pourrait vous les apporter.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, prions beaucoup; vous avez maintenant le S t Sacrifice,<br />

cette joie couvre toutes les peines, cette force domine et relève toutes les faiblesses; soyons<br />

donc forts <strong>avec</strong> Celui qui nous fortifie. Je vous embrasse tendrement en J. et M.<br />

Offrez quelquefois mon souvenir respectueux à votre bonne mère.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1165 à M. Trousseau<br />

Conseils pour lutter contre le découragement et la fatigue.<br />

Vaugirard, 15 janvier 1867<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je sens bien vivement les difficultés que vous créent tout ensemble lʹétat <strong>de</strong> votre<br />

santé, lʹirrégularité <strong>de</strong> vos étu<strong>de</strong>s et, en outre, la préoccupation <strong>de</strong>s soins du patronage<br />

dont vous êtes contraint <strong>de</strong> vous charger, malgré tous ces ennuis. Je vous invite à prendre,<br />

pour votre santé, autant <strong>de</strong> précautions que la situation le permettra; je prierai, comme je<br />

lʹai fait déjà, le bon Maître <strong>de</strong> vous donner soulagement et jʹespère quʹIl daignera se rendre<br />

à nos vœux. On peut penser que la saison rigoureuse vous aura causé quelque refroidis‐<br />

sement qui aura renouvelé vos douleurs nerveuses, mais quelque repos et lʹattention un<br />

peu soutenue à préserver du froid les parties endolories vous suffiront, comme cʹest ordi‐<br />

naire, à dissiper ce malaise si incommo<strong>de</strong>.<br />

Pour les fatigues que vous cause le patronage, jʹai été le premier à y penser et je<br />

mʹoccupais <strong>de</strong> vous envoyer un <strong>de</strong> nos frères assez expérimenté dans cette œuvre, bien<br />

que ce ne fût pas sans un grand détriment pour nous ici; mais la Provi<strong>de</strong>nce, qui veut sans<br />

doute nous mettre à lʹépreuve, nous a envoyé une double contrariété: celui que je voulais<br />

vous envoyer [M. Charrin] a été pris dʹun rhume fatigant qui le retient presque constam‐<br />

ment à lʹinfirmerie, et celui qui <strong>de</strong>vait le remplacer sʹest en même temps donné une entorse<br />

qui lʹempêche absolument <strong>de</strong> marcher. Ces malaises ou dérangements seront momentanés<br />

sans doute, mais ils mʹont mis dans lʹimpossibilité absolue <strong>de</strong> vous porter secours aussi<br />

1165


vite que je lʹaurais voulu. Jʹai la confiance que bientôt ces <strong>de</strong>ux éclopés seront sur pied et<br />

que lʹun dʹeux pourra se rendre près <strong>de</strong> vous.<br />

Ayons confiance; M. <strong>de</strong> Varax me dit que vous souffrez patiemment, je vous en féli‐<br />

cite bien; en nous conformant à la volonté <strong>de</strong> Dieu, nous sommes agréables à ses yeux,<br />

nous épargnons à nos frères la peine que cause une humeur chagrine et nous attirons du<br />

Ciel la grâce qui doit mettre fin à nos maux.<br />

Vous pourriez écrire à M. <strong>de</strong>s Francs en le priant <strong>de</strong> vous donner <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong><br />

votre famille; tout va bien sans doute, puisquʹon ne vous en écrit rien. Aimez Dieu plus<br />

que tout, offrez‐Lui tout, Il vous rendra tout.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, faites pour moi bien <strong>de</strong>s amitiés à nos frères et croyez<br />

vous‐même à ma tendre affection en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1166 <strong>de</strong> M. Beauvais à M. Caille<br />

P.S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Chansonnettes et monologues dans les Œuvres.<br />

Vaugirard, 19 janvier 1867<br />

Bien cher frère en N.S.,<br />

Je me suis procuré, conformément à votre désir, quelques chansonnettes et dialogues qui<br />

mʹont paru pouvoir vous convenir. Le tout a coûté environ 7f.50. Je mʹempresse <strong>de</strong> vous en faire<br />

lʹenvoi, faisant <strong>de</strong>s vœux pour que vous en soyez satisfait.<br />

Je gar<strong>de</strong> toujours un bon souvenir dʹAmiens, et je ne cesse pas <strong>de</strong> penser aux bons frères<br />

que jʹy ai laissés; Veuillez bien leur offrir à tous les assurances <strong>de</strong> mes sentiments les plus affec‐<br />

tueux et les plus dévoués et me croire votre frère respectueux et bien affectionné en N.S.<br />

Emile Beauvais<br />

P. S. Jʹajoute un mot à la lettre <strong>de</strong> notre frère Emile; je vous recomman<strong>de</strong>, mon bon<br />

ami, une gran<strong>de</strong> discrétion dans lʹusage <strong>de</strong>s chansonnettes comiques, elles sont souvent <strong>de</strong><br />

mauvais goût, pas toujours innocentes et laissent toujours, en général, une impression peu<br />

morale; on sʹen sert <strong>de</strong> plus en plus rarement dans nos œuvres.<br />

Votre ami et Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1167 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Sympathie pour <strong>de</strong>s amis et parents mala<strong>de</strong>s. MLP. estime ne plus pouvoir accepter en province dʹŒuvres qui ne<br />

trouveraient pas leurs ressources sur place. Le frère Charrin quitte lʹŒuvre <strong>de</strong> Ste‐Anne pour raison <strong>de</strong> santé.<br />

Vaugirard, 22 janvier 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous prenons une vive part au grave acci<strong>de</strong>nt arrivé à lʹexcellent M. Chazaud et<br />

nous prions pour lui, comme il le mérite si bien pour tant <strong>de</strong> bonnes œuvres quʹil a faites<br />

ou encouragées. On peut espérer que ce premier acci<strong>de</strong>nt ne sera pas sans remè<strong>de</strong>; rare‐<br />

ment une première attaque a une pareille gravité; <strong>de</strong>mandons à Dieu quʹIl fasse pour son<br />

1166


serviteur ce qui sera le mieux, selon sa sagesse et sa miséricor<strong>de</strong>. Les financiers chrétiens et<br />

hommes <strong>de</strong> bonnes œuvres sont rares!<br />

Pour votre cher frère, il mʹest impossible <strong>de</strong> me figurer ce bon jeune homme, plein<br />

<strong>de</strong> vie il y a si peu <strong>de</strong> temps encore, tombé tout à coup en état vraiment inquiétant; jʹentre<br />

toutefois <strong>de</strong> toute mon âme dans vos inquiétu<strong>de</strong>s, dans les sollicitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> votre bonne<br />

mère, dans les tristesses <strong>de</strong> ce vénérable grand‐père; tous ces intérêts sont pour moi <strong>de</strong>s in‐<br />

térêts <strong>de</strong> famille, puisque, par vous, nous avons une sorte <strong>de</strong> lien <strong>avec</strong> tous les vôtres, en<br />

Dieu avant tout et par une profon<strong>de</strong> sympathie ensuite. Ne doutez donc pas, mon bon<br />

ami, que tous, chez nous, ne soient vivement préoccupés <strong>de</strong> la souffrance <strong>de</strong> votre cher<br />

frère et nʹy pensent souvent aux pieds du Seigneur. Jʹaurai, en particulier, un mémento<br />

spécial pour lui au S t Sacrifice chaque jour.<br />

Vous aurez compris, cher ami, à travers mes observations sur ce qui touche aux fi‐<br />

nances <strong>de</strong> votre œuvre, quʹil ne pouvait entrer dans mes vues <strong>de</strong> vous laisser définitive‐<br />

ment sans ai<strong>de</strong>, si vos embarras <strong>de</strong>venaient sérieux; mais je voulais porter votre attention<br />

sur cette pensée, que vous acceptez assurément comme nous, savoir: que nous ne saurions<br />

nous déci<strong>de</strong>r à faire en Province, ni ailleurs, à lʹavenir, <strong>de</strong>s œuvres qui ne pourraient trou‐<br />

ver leur subsistance en elles‐mêmes et dans les localités qui en ont les fruits; secon<strong>de</strong>ment,<br />

quʹavant <strong>de</strong> recourir aux ressources si restreintes, si insuffisantes <strong>de</strong> la Communauté, nous<br />

<strong>de</strong>vions épuiser toutes les facultés que le sol propre pouvait produire. Jʹavais pensé, en<br />

particulier, que vous pourriez voir M. Roussel, le priant <strong>de</strong> conférer <strong>avec</strong> M. Chazaud sur<br />

cet objet. En mettant le pensionnat <strong>de</strong> côté, puisque ces MM. ne semblent pas vouloir sʹen<br />

occuper, il semble incontestable que le patronage ne se peut bien faire sans trois person‐<br />

nes: le Supérieur ou aumônier ecclésiastique, le directeur laïc et un ai<strong>de</strong> pour les travaux<br />

secondaires. Il serait donc <strong>de</strong> toute justice que <strong>de</strong>s ressources fussent fournies par lʹœuvre<br />

ou par ses protecteurs pour lʹentretien <strong>de</strong> ces trois personnes. Sʹil en était ainsi, les produits<br />

du pensionnat et les quelques fonds provenant <strong>de</strong> vous et <strong>de</strong> la petite pension <strong>de</strong> M.<br />

Adolphe Lainé couvriraient certainement les autres dépenses <strong>de</strong> la communauté.<br />

Je regrette bien que vous ayez été obligé <strong>de</strong> recourir à votre bonne mère; elle peut se<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r ce que vous faites <strong>de</strong> votre revenu et ne doit pas bien comprendre cette obliga‐<br />

tion <strong>de</strong> chaque maison <strong>de</strong> se suffire à elle‐même. Je pense comme vous quʹil serait mieux<br />

<strong>de</strong> ne pas importuner, avant le temps, M gr <strong>de</strong> nos <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s.<br />

M. Charrin cessera, comme vous lʹavez compris, dʹaller à Charonne et M. Derny y<br />

reprendra son emploi. Ce nʹest pas par suite <strong>de</strong> difficultés <strong>avec</strong> la Société <strong>de</strong> St‐Vincent <strong>de</strong><br />

Paul, ni parce que M. Charrin ne réussissait pas à S te ‐Anne; il y est fort aimé <strong>de</strong>s jeunes<br />

gens et tenait bien la place, quelque lour<strong>de</strong> quʹelle soit, quant à la capacité et suffisance<br />

morale; mais, physiquement, les allées et venues multipliées à si gran<strong>de</strong> distance, les cou‐<br />

chers tardifs, la direction et discipline <strong>de</strong> près <strong>de</strong> 400 apprentis et ouvriers les dimanches et<br />

fêtes, enfin les visites et placements en semaine <strong>avec</strong> les écritures, etc. formaient, en en‐<br />

semble, un tel far<strong>de</strong>au que sa santé nʹy pouvait plus suffire; il reste enrhumé presque cons‐<br />

tamment et nous avons dû songer à lui donner un poste moins ru<strong>de</strong>. M. Decaux a compris<br />

cette nécessité, et M. Derny a fait sa première réapparition à S te ‐Anne dimanche. M. Char‐<br />

rin <strong>de</strong>vra encore lʹy accompagner pour les élections <strong>de</strong>s dignitaires à la fin <strong>de</strong> ce mois. Il<br />

doit retourner voir M. Jousset qui a trouvé lʹensemble <strong>de</strong> sa constitution excellent, mais qui<br />

a ajourné à quelques jours pour un avis définitif sur les emplois qui peuvent lui être don‐<br />

nés.<br />

1167


Adieu, bien cher ami, mille affections à vous et à vos frères <strong>de</strong> tous ici et aux alen‐<br />

tours; chacun se soutient, M. Philibert, très languissant présentement, fait exception. M.<br />

Streicher, à force <strong>de</strong> persévérance dans ses instances, obtient sa rentrée près <strong>de</strong> M. Mai‐<br />

gnen, à lʹœuvre <strong>de</strong>s Jeunes Ouvriers.<br />

Jʹai oublié <strong>de</strong> vous dire que M. Lantiez avait remis à son frère, à son retour dʹArras,<br />

vos feuilles <strong>de</strong> chemin <strong>de</strong> fer; nous allons lui en <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r le nombre et les chiffres que<br />

nous nʹavons pas notés.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1168 à M. dʹArbois<br />

Remerciements pour lʹenvoi du bilan. Equilibrer le budget. Construction <strong>de</strong> la chapelle <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong>s Champs. Peu<br />

<strong>de</strong> vocations lʹan passé.<br />

Vaugirard, 24 janvier 1867<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu votre compte <strong>de</strong> recettes et dépenses pour 1866. Il est bien en ordre dans sa<br />

forme; pour le fond, il serait désirable dʹarriver à un équilibre plus parfait puisque, en ap‐<br />

parence, les ressources suffisantes vous sont assurées; peut‐être arriverez‐vous, en 1867, à<br />

un résultat tout à fait exact et selon vos vues; je sais bien que les soins et lʹattention ne fe‐<br />

ront pas défaut <strong>de</strong> votre part.<br />

La saison que nous traversons a dû suspendre vos travaux pour la chapelle <strong>de</strong> N.D.<br />

<strong>de</strong>s Champs; il me semble aussi quʹ<strong>avec</strong> les neiges et les inondations vous <strong>de</strong>vez avoir là<br />

<strong>de</strong> moins nombreuses assemblées en cette saison; on me disait ces jours‐ci quʹen effet,<br />

lʹœuvre était un peu moins animée et vivante que précé<strong>de</strong>mment; vos préoccupations<br />

pour vos constructions vous empêchent peut‐être aussi <strong>de</strong> donner autant <strong>de</strong> temps et <strong>de</strong><br />

soins à lʹœuvre; je nʹai néanmoins nul souci, je sais que vous suivez fidèlement les choses<br />

dont vous avez la charge.<br />

M. Caron est à la maison <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Grâce; chacun le trouve régulier, affectueux,<br />

honnête garçon, mais tête singulière et dʹune étrangeté qui ne permet pas <strong>de</strong> tirer <strong>de</strong> son<br />

service tout le parti quʹon peut souhaiter.<br />

Nous marchons, en ensemble, comme <strong>de</strong> coutume; les particularités <strong>de</strong> nos œuvres<br />

et <strong>de</strong> la Communauté ne sont pas telles quʹil y ait lieu <strong>de</strong> vous les faire suivre en détail;<br />

nous avons eu peu <strong>de</strong> vocations lʹan <strong>de</strong>rnier et plusieurs jeunes frères ont fait défection; <strong>de</strong><br />

là quelques vi<strong>de</strong>s et un peu <strong>de</strong> charge dans les services; Dieu, espérons‐le, y pourvoira.<br />

Nous sommes dans la neuvaine préparatoire à la fête <strong>de</strong> St François <strong>de</strong> Sales.<br />

Adieu, mon bien cher ami et fils en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Affectueux souvenirs à tous nos frères<br />

1169 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Relever et encourager le frère Trousseau, abattu par diverses épreuves.<br />

1168


25 janvier 1867<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie ci‐joint quelques mots <strong>de</strong> lettre pour M. Trousseau; jʹespère quʹils le<br />

consoleront et lui rendront confiance.<br />

Je crois quʹil nʹa pas assez <strong>de</strong> sang‐froid et <strong>de</strong> calme dans le moment <strong>de</strong>s épreuves<br />

<strong>de</strong> santé ou autres pour quʹon doive lui faire alors beaucoup <strong>de</strong> morale; il faut le consoler,<br />

le relever et attendre <strong>de</strong>s moments meilleurs pour lʹéclairer. Jʹai remarqué souvent quʹil<br />

rentre dʹailleurs en lui‐même et reconnaît ensuite le tort quʹont ses impatiences et les trou‐<br />

bles où elles le jettent. Il est impressionnable et peu fort encore contre les épreuves, mais<br />

puisque Dieu le cultive ainsi, il y a bien à espérer pour lʹavenir. Il nʹest ni sans vertu, ni<br />

sans désir sincère <strong>de</strong> la gloire <strong>de</strong> Dieu; ayons confiance et patience aussi nous‐mêmes. Je<br />

ne vois pas <strong>de</strong> raisons dʹinterrompre ses étu<strong>de</strong>s pour peu quʹil ait force et volonté pour les<br />

soutenir; il me semble quʹil faut le laisser, à cet égard, faire ce quʹil aura puissance <strong>de</strong> faire.<br />

Adieu, mon bien cher enfant; nous prions tous ici pour votre cher frère, pour votre<br />

bonne mère et pour toute votre famille. Je vous enverrai 100f par M. Charrin.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Jʹai fait <strong>de</strong>s fonds venus <strong>de</strong> Lyon lʹusage que vous désiriez: 1.000f au Noviciat,<br />

1.000f aux Jeunes Ouvriers <strong>de</strong> Nazareth, très gênés pour achever leur fondation; le reste<br />

sert aux envois que je vous ai faits.<br />

Peut‐être ferez‐vous bien <strong>de</strong> fermer la lettre pour M. Trousseau après lʹavoir lue.<br />

1170 à M. Trousseau<br />

Les souffrances et la maladie ne sont pas <strong>de</strong>s obstacles à lʹavancement dans les ordres; à moins quʹelles nʹobligent<br />

à interrompre complètement les étu<strong>de</strong>s. Avec sa délicatesse coutumière, MLP. montre au frère Trousseau que les<br />

épreuves sont <strong>de</strong>s gages <strong>de</strong> la bénédiction <strong>de</strong> Dieu et servent à la sanctification.<br />

Vaugirard, 25 janvier 1867<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je crois fermement que Dieu vous veut prêtre et religieux; reprenez confiance et ne<br />

recevez pas les épreuves que sa Sagesse vous envoie dans une autre vue quʹIl ne les re‐<br />

gar<strong>de</strong> lui‐même. Elles sont évi<strong>de</strong>mment un travail par lequel il veut vous façonner, vous<br />

perfectionner et vous rendre digne <strong>de</strong>s grands privilèges, comme <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s fonctions<br />

auxquelles vous aspirez.<br />

Le prêtre, le religieux ont beaucoup à souffrir, beaucoup à sʹimmoler, beaucoup à<br />

plier leur volonté pour le service <strong>de</strong> Dieu et pour le bien du prochain. La nature impres‐<br />

sionnable, répugnant à la souffrance et à la contrariété, se prêtait peu chez vous à ces bri‐<br />

sements nécessaires; et voilà que le divin Maître a passé cette nature sous le marteau cruci‐<br />

fiant <strong>de</strong>s souffrances physiques et <strong>de</strong>s contradictions; pliez sous cette main divine, mon<br />

cher enfant, car elle apporte la guérison, la grâce et la paix.<br />

Il semble, du reste, que la patience vous échappe au moment où Dieu vous montre<br />

le soulagement puisque, sans tenir compte <strong>de</strong>s immenses charges que nous gardons ici<br />

pour nous‐mêmes, nous avons tout disposé pour vous envoyer un ai<strong>de</strong> qui prenne à votre<br />

place le soin du patronage. Il ne dépendait pas <strong>de</strong> nous <strong>de</strong> lever instantanément les obsta‐<br />

1169


cles qui sʹopposaient à son départ immédiat. Mais je pense que dans peu <strong>de</strong> jours, proba‐<br />

blement dans le cours <strong>de</strong> la semaine prochaine, il pourra être près <strong>de</strong> vous; il suffira que<br />

vous preniez le soin <strong>de</strong> le substituer à vous, sans brusquer absolument la situation, pour<br />

que lʹœuvre nʹait pas à souffrir <strong>de</strong> ce changement. Je ne vois pas là <strong>de</strong> raison dʹinterrompre<br />

vos étu<strong>de</strong>s, à moins quʹindépendamment <strong>de</strong> tous les soulagements apportés à votre rè‐<br />

glement, votre santé sʹoppose absolument à ce que vous les souteniez présentement; en‐<br />

core <strong>de</strong>vriez‐vous, en ce cas, réserver les dispositions <strong>de</strong> la Sagesse divine pour lʹavenir. Il<br />

est si bon, si sûr, si tranquillisant <strong>de</strong> nous remettre entre ses mains! Quand notre divin<br />

Sauveur expliquait aux disciples dʹEmmaüs la suite mystérieuse <strong>de</strong> ses souffrances, il ajou‐<br />

tait: Ne fallait‐il pas que le Christ souffrit toutes ces choses, et quʹil entrât ainsi dans la<br />

gloire? 391 Vous, cher enfant, à son exemple, vous repasserez dans votre esprit, <strong>avec</strong> dou‐<br />

ceur et consolation, la série <strong>de</strong> vos épreuves, et, arrivé au noble but que vous entrevoyez,<br />

vous direz: Disciple <strong>de</strong> J.C. et son représentant en ce mon<strong>de</strong>, je <strong>de</strong>vais marcher après Lui et<br />

atteindre, comme Lui, ma fin par la peine et la souffrance. Soyez sûr, cher enfant, que la<br />

vérité est là, que telles sont les vues <strong>de</strong> Dieu à votre égard; soyez docile sous sa main, elle<br />

vous conduit au repos et à la consolation.<br />

Adieu, mon cher enfant, priez pour moi, comme nous prions pour vous, les diffi‐<br />

cultés ne nous manquent pas non plus dans notre voie, mais nous prenons pour nous‐<br />

mêmes aussi les conseils que nous vous donnons en son nom.<br />

Votre ami et Père tout affectionné en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1171 à M. Decaux<br />

Liste <strong>de</strong> dignitaires <strong>de</strong> lʹŒuvre <strong>de</strong> Ste‐Anne, soumise au jugement <strong>de</strong> MLP.<br />

Vaugirard, 29 janvier 1867<br />

Mon bon ami,<br />

Je vous renvoie ci‐joint la liste que vous avez bien voulu me communiquer <strong>de</strong>s di‐<br />

gnitaires proposés par nos frères pour la prochaine élection.<br />

Je vous remercie beaucoup du témoignage <strong>de</strong> confiance que vous mʹavez donné en<br />

cette occasion; je lʹapprécie et jʹy aurais répondu en rectifiant les choix proposés dans la<br />

liste si jʹavais eu le moindre indice dʹune amélioration à indiquer. Mais je ne connais moi‐<br />

même que fort peu les jeunes gens portés comme candidats et, dʹune autre part, nos frères<br />

mʹassurent quʹaprès un examen mûr et fait consciencieusement, ils croient que les sujets<br />

désignés par eux sont véritablement les plus capables et les mieux disposés pour faire le<br />

bien dans lʹœuvre <strong>de</strong> Ste ‐Anne. Ils vous prient donc dʹagréer leurs propositions, acceptant<br />

dʹailleurs en cordiale soumission les changements que vous croiriez <strong>de</strong>voir y apporter.<br />

Veuillez agréer, mon bon ami, tous mes sentiments accoutumés <strong>de</strong> bien affectueux<br />

dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

391 Lc 24, 26.<br />

1170


1172 à M. Maignen<br />

Relations <strong>avec</strong> la SSVP. Choix du Prési<strong>de</strong>nt et du Vice‐Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> lʹŒuvre <strong>de</strong> Ste‐Anne.<br />

Vaugirard, 1er février 1867<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Jʹignorais absolument quʹil fût question <strong>de</strong> nommer M. <strong>de</strong> la Villeboisnet à la Prési‐<br />

<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> Ste ‐Anne. M. son père et lui sont venus me voir ce matin pour me lʹannoncer, et<br />

cʹest immédiatement après leur visite que M. Planchat vous a envoyé un mot <strong>de</strong> ma part.<br />

Nous avons peut‐être à craindre quʹon ne nomme un Vice‐Prési<strong>de</strong>nt, moins sympathique<br />

pour nous (nous croyons que M. <strong>de</strong> la Villeboisnet prendra dʹassez haut les choses pour<br />

nous servir, sans nous apporter dʹentraves), mais il est à Paris 4 mois <strong>de</strong> lʹannée seulement<br />

et il doit, il paraît, cette année, sʹabsenter déjà dans <strong>de</strong>ux mois pour affaires graves le<br />

concernant (ceci est à prendre comme secret). Donc, le Vice‐Prési<strong>de</strong>nt serait Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong><br />

fait. Mais nous ignorons sur ce point ce qui est projeté.<br />

Autre point. M. Lantiez est allé à lʹArchevêché et a parlé à M. Lagar<strong>de</strong> <strong>de</strong> M. lʹabbé<br />

Leclerc. M. le Vic. Général a répondu: ʺOui, il pensait à vous, et nous, nous avions songé à<br />

lui donner un emploi, mais son Evêque lʹa re<strong>de</strong>mandé.ʺ Nous pensons que seulement<br />

lʹEvêque <strong>de</strong> M. Leclerc a consenti à ce que quʹil retournât dans son diocèse, mais que si M.<br />

Leclerc, se voyant accepté par nous, <strong>de</strong>mandait à venir chez nous, il obtiendrait aisément<br />

permission <strong>de</strong> nous rester. Sʹil ne croyait pas pouvoir <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r lui‐même, peut‐être trou‐<br />

verait‐il bien que nous <strong>de</strong>mandions nous‐mêmes; lʹobstacle principal, qui était du côté <strong>de</strong><br />

lʹArchevêché, étant levé, il semble que, si vous ou M. Hello voyiez le plus tôt possible M.<br />

Leclerc pour causer <strong>de</strong> tout cela <strong>avec</strong> lui, ce serait très bien, car lʹéloignement <strong>de</strong> M. Bal‐<br />

tenweck va nous créer <strong>de</strong> nouvelles gênes.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1173 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Envoi <strong>de</strong> M.Charrin à Arras. Nécessité dʹun Conseil par semaine. Ne pas trop entreprendre. Ménager ses forces.<br />

Vaugirard 1er février 1867<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Je vous envoie M. Charrin pour vous porter secours, particulièrement dans lʹœuvre<br />

du patronage; il a pour cette bonne œuvre une aptitu<strong>de</strong> marquée et une assez satisfaisante<br />

expérience. Il sera toutefois bien nécessaire que vous et M. Trousseau ne le posiez quʹ<strong>avec</strong><br />

gradation et transition ménagée; M. Victor a assez bien la confiance <strong>de</strong>s grands jeunes<br />

gens, il doit tâcher <strong>de</strong> leur être encore utile; déchargé <strong>de</strong>s soins et préoccupations matériel‐<br />

les, il pourra (en tâchant sur toutes choses dʹêtre en parfaite entente <strong>avec</strong> M. Charrin) exer‐<br />

cer encore une utile influence.<br />

Je crois que vous ferez bien dʹavoir chaque semaine entre vous un petit Conseil, où<br />

tous les intérêts du patronage et ses principaux gestes seraient examinés, préparés. Là,<br />

sans user trop impérativement <strong>de</strong> votre autorité, vous pourrez juger <strong>de</strong> lʹutilité <strong>de</strong>s dépen‐<br />

ses projetées, à moins quʹelles ne concernent <strong>de</strong>s objets fort minimes; veillez bien à la régu‐<br />

larité <strong>de</strong>s comptes et aux mesures dʹordre; il ne faut pas trop dʹadministration, mais il en<br />

faut assez; votre esprit a la précision désirable pour aimer lʹordre et le faire observer. Le<br />

1171


petit Conseil <strong>de</strong> semaine me semble <strong>de</strong> toute nécessité; on y peut porter à peu près toutes<br />

les questions, sauf celles qui auraient une importance exceptionnelle et que vous croiriez<br />

<strong>de</strong>voir réserver.<br />

Il nous semble impossible que vous preniez présentement le soin <strong>de</strong> lʹŒuvre <strong>de</strong> S t ‐<br />

François <strong>de</strong> Sales, vous êtes trop chargé dʹoccupations; peut‐être le pourrez‐vous un peu<br />

plus tard, à moins que vous nʹy voyiez une utilité patente, notable pour nos propres œu‐<br />

vres.<br />

Vous êtes bien peu robuste pour prêcher dans une gran<strong>de</strong> église, et vous avez bien<br />

peu <strong>de</strong> loisir pour vous y préparer; posez‐vous nettement comme ne mangeant pas au <strong>de</strong>‐<br />

hors, <strong>avec</strong> toutes les formes polies possibles. Je ne me rappelle pas que M. Trousseau ait<br />

<strong>de</strong>mandé un livret <strong>de</strong> caisse dʹépargne.<br />

M. Charrin vous porte 150f, un Manuel du confesseur, un règlement, un cahier <strong>de</strong><br />

musique pour M. Lainé.<br />

M. Charrin a négligé un rhume qui se passe lentement; il aura besoin dʹun peu <strong>de</strong><br />

ménagement; il faut aussi le suivre et le diriger un peu dans ses travaux, il nʹest pas encore<br />

assez ferme pour quʹun peu dʹappui moral ne lui soit pas très utile. Cʹest lʹâme la meil‐<br />

leure, la plus cordiale, la plus franchement donnée à Dieu que vous puissiez rencontrer;<br />

son caractère et sa bonté sont rares.<br />

Adieu, bien cher ami, croyez à tous mes sentiments tendrement dévoués en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Soyez bien économe, afin que nous ne posions pas lʹœuvre dʹArras <strong>de</strong> telle<br />

sorte que nous ne puissions la gar<strong>de</strong>r.<br />

1174 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

MLP. est éprouvé dans sa santé. Nouvelles diverses. Ordre <strong>de</strong>s préséances dans la communauté. Rechercher<br />

avant tout la vie intérieure.<br />

Vaugirard, 14 février 1867<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Vous trouverez peut‐être que jʹai bien tardé à répondre aux questions contenues<br />

dans votre lettre, ce nʹest pas sans quelque raison; je suis très languissant <strong>de</strong>puis quelque<br />

temps, un affaiblissement général causé, ou par la saison trop humi<strong>de</strong>, ou par dʹautres in‐<br />

ci<strong>de</strong>nts, mʹa laissé une telle débilité dans les jambes que je ne puis marcher sans bâton,<br />

même dans la maison; tout le corps sʹen ressent, et la tête comme le reste; <strong>de</strong> là, retard en<br />

toutes mes affaires. Je vais répondre par oui ou non à vos interrogations.<br />

M. Lantiez, notaire, a essayé <strong>de</strong> vendre les valeurs appartenant au patronage dʹAr‐<br />

ras; les Mexicaines ou Espagnoles sont à un tel taux <strong>de</strong> baisse quʹil a cru <strong>de</strong>voir y renoncer.<br />

Que doit‐on faire?<br />

Pour le jeune Goubet, nous ne pouvons le prendre que si <strong>de</strong>s protecteurs consentent<br />

à répondre pour lui dʹune pension <strong>de</strong> 400f. M. Laroche est attendu à Paris très prochaine‐<br />

ment pour le mariage <strong>de</strong> son frère; peut‐être aura‐t‐il quelque vue à cet égard. Je ne crois<br />

pas que vous <strong>de</strong>viez quêter à Paris pour un enfant dʹArras.<br />

Pour les préséances, lʹancienneté parmi les ff. laïcs est la mesure qui les règle dʹor‐<br />

dinaire; lʹancienneté est primée néanmoins par la dignité du sacerdoce et même <strong>de</strong>s or‐<br />

1172


dres, mais seulement à un <strong>de</strong>gré élevé dʹavancement; certains emplois éminents peuvent<br />

aussi <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r considération; <strong>de</strong> tout cela, il peut résulter bien <strong>de</strong>s complications; en cas<br />

douteux, comme en lʹespèce, le Supérieur local, appréciant les convenances particulières<br />

quʹil peut mieux que dʹautres connaître, doit trancher lui‐même la question. Ce qui ne fait<br />

point <strong>de</strong> doute, cʹest que chaque chef dʹemploi nʹait autorité sur ceux qui concourent acci‐<br />

<strong>de</strong>ntellement ou secondairement à cet emploi; ainsi, M. Charrin prend lʹavis <strong>de</strong> M. Lainé<br />

[Ad.] en ce qui touche le pensionnat, comme M. Lainé <strong>de</strong> M. Charrin en ce qui concerne le<br />

patronage.<br />

Jʹai quelques images que mʹa remises M. Chaverot; je vais vous les envoyer <strong>avec</strong> un<br />

livret <strong>de</strong> caisse dʹépargne.<br />

M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] a écrit immédiatement pour votre vin à Sète. M. Chave‐<br />

rot pensait que vous aviez été satisfait du vin quʹil avait fait venir <strong>de</strong> Bourgogne; est‐ce<br />

quʹil en a été autrement? Je cherche moi‐même du vin <strong>de</strong> Bourgogne qui me convienne, ce‐<br />

la <strong>de</strong>vient difficile à trouver.<br />

Vous ne nous donnez plus <strong>de</strong> nouvelles <strong>de</strong> M. votre frère et <strong>de</strong> M. Chazaud; chacun<br />

ici sʹy intéresse vivement.<br />

Tout va ici comme <strong>de</strong> coutume; nous sentons beaucoup la pénurie du côté du per‐<br />

sonnel, partout trop peu nombreux, ou trop peu expérimenté. Tout le Conseil dit, chaque<br />

jour, à cette intention, le chapelet; offrez le vôtre dans cette même pensée.<br />

Adieu, bien cher ami, assurez tous nos frères <strong>de</strong> mes tendres sentiments, M. Charrin<br />

en particulier, à qui je ne réponds pas aujourdʹhui; quʹil se fasse une vie bien soutenue, in‐<br />

térieure surtout; puissions‐nous être bien pénétrés, chacun <strong>de</strong> nous, que tout est là, pour le<br />

présent comme pour lʹavenir.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1175 à M. dʹArbois<br />

Relève le courage <strong>de</strong> M. dʹArbois dʹun pessimisme plus accentué que <strong>de</strong> coutume. Toutes les Œuvres sont impar‐<br />

faites. Lʹessentiel est <strong>de</strong> faire ʺ<strong>avec</strong> zèle et bon vouloir ce que lʹon peut, <strong>de</strong> faire surtout en union <strong>avec</strong> Dieuʺ.<br />

Vaugirard, 15 février 1867<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je ne vous écrirai pas longuement; le mauvais temps, les pluies dʹhiver venant après<br />

les pluies dʹété mʹont comme détrempé lʹesprit, ma tête et le reste du corps sont chez moi<br />

vraiment détendus en ce moment; je ne puis presque rien faire.<br />

Je serais tenté <strong>de</strong> penser quʹà dʹautres égards, vous subissez aussi quelque influence<br />

sombre, car votre <strong>de</strong>rnière lettre est dʹun pessimisme bien plus accentué que <strong>de</strong> coutume.<br />

Les œuvres, les gens, vous surtout, vos serviteurs, vos comptes, votre administration, tout<br />

est déclaré détestable; si pourtant, cher ami, vous jetiez tout cela <strong>de</strong>hors, soyez assuré quʹil<br />

ne manquerait pas <strong>de</strong> mon<strong>de</strong> pour le ramasser, moi tout le premier qui saurais bien tirer<br />

grand parti <strong>de</strong> vous et <strong>de</strong>s vôtres, si vous nʹaviez déjà beaucoup à faire chez vous.<br />

M. et M me Pavie, qui nous rendaient visite hier, tenaient un autre langage que vous;<br />

mais il nʹest pas mal que vous aperceviez les imperfections <strong>de</strong> vos actes pour tendre tou‐<br />

jours à les rendre meilleurs, et aussi pour ne pas cé<strong>de</strong>r aux suggestions <strong>de</strong> la vanité, si sub‐<br />

tile, si insinuante et dont on se défait si difficilement.<br />

1173


Il nʹest guère étonnant quʹen si vilaine saison, <strong>avec</strong> les inondations et lʹéloignement<br />

où se trouve N.D. <strong>de</strong>s Champs, on sʹy empresse un peu moins; mais les premiers rayons<br />

du soleil seront comme un appel pour la foule, et tout votre mon<strong>de</strong> accourra. Faites <strong>avec</strong><br />

zèle et bon vouloir ce que vous pourrez, faites surtout en union <strong>avec</strong> Dieu, et soyez bien<br />

sûr que vous retrouverez tous vos avantages. Vous ne me paraissez pas assez persuadé<br />

que dʹordinaire les hommes, en tout ce quʹils opèrent, ne font rien quʹimparfaitement, <strong>de</strong>s<br />

à peu près. Depuis trente ans et plus que je mʹoccupe <strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong> Dieu, je nʹai jamais<br />

rien vu <strong>de</strong> vraiment complet, chez nous dʹabord, et chez les autres non plus, quand il mʹa<br />

été donné dʹy regar<strong>de</strong>r <strong>de</strong> près. Acceptez donc humblement cette condition <strong>de</strong>s faits et ges‐<br />

tes auxquels vous prenez part et consolez‐vous, car si vous êtes imparfait, si vos œuvres<br />

sont aussi imparfaites, beaucoup <strong>de</strong> compagnons partagent votre sort.<br />

Nous allons ici comme <strong>de</strong> coutume; M. Philibert semble pourtant décliner plus sen‐<br />

siblement; je suis moi‐même, <strong>de</strong>puis quelque temps surtout, fort caduc; mes jambes sont<br />

tellement percluses que je ne puis, même dans la maison, aller sans bâton; ce qui est pis,<br />

jʹai grand‐peine à dire la S te Messe et je crains dʹêtre bientôt entièrement empêché. Priez<br />

pour moi, pour nous, priez aussi pour la Communauté dont le personnel nʹest pas en pro‐<br />

portion <strong>avec</strong> ses charges, le Conseil dit chaque jour le chapelet à cette intention; unissez‐<br />

vous à lui.<br />

M. Derny a repris la direction <strong>de</strong> S te ‐Anne et M. Charrin est au patronage dʹArras,<br />

dont M. Victor Trousseau, à cause <strong>de</strong> ses étu<strong>de</strong>s, ne pouvait plus sʹoccuper.<br />

Adieu, mon bon ami, faites quelques bonnes affections <strong>de</strong> ma part à nos frères et<br />

croyez vous‐même à tout mon tendre dévouement en N.S.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Vous pourrez gar<strong>de</strong>r le prochain envoi dʹargent que vous fera M. votre père, si vous<br />

ne voyez pas dʹautre moyen dʹatténuer le déficit accusé par votre lettre; ne doutez pas<br />

dʹailleurs que vous ne soyez en droit <strong>de</strong> retenir, pour les besoins réels <strong>de</strong> votre Commu‐<br />

nauté, quelque part <strong>de</strong>s aumônes qui vous sont remises sans désignation <strong>de</strong> personnes,<br />

anonymes ou autres.<br />

1176 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Eloge du frère Charrin. Questions financières. Approbation dʹune supplique à Rome. MLP. est en gran<strong>de</strong> lassi‐<br />

tu<strong>de</strong> et épuisement physique.<br />

Vaugirard, 19 février 1867<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu <strong>avec</strong> plaisir votre lettre qui contient <strong>de</strong>s détails satisfaisants sur votre mai‐<br />

son, et sur nos frères en particulier.<br />

M. Charrin est un bon religieux, obéissant, affectueux; il dit son avis assez ron<strong>de</strong>‐<br />

ment, mais cʹest simplicité et bonhomie, non entêtement; il a le goût et lʹintelligence du pa‐<br />

tronage; on peut le surveiller un peu du côté <strong>de</strong> la précision et <strong>de</strong> la prestesse dans lʹexécu‐<br />

tion; cʹest, en ensemble, un bien bon frère; lʹété, sa santé sera plus forte, il payera davan‐<br />

tage <strong>de</strong> sa personne. Lʹordonnance du mé<strong>de</strong>cin nʹa pas été retrouvée dans sa chambre qui<br />

avait été rangée après son départ.<br />

1174


M. Laroche est venu nous voir; son frère a dû être marié aujourdʹhui.<br />

Il mʹa expliqué que, sur les fonds du patronage, il <strong>de</strong>vait, pense‐t‐il, y avoir 700f à la<br />

Caisse dʹEpargne, 100f à la Petite Conférence, le reste serait un fonds <strong>de</strong> réserve du patro‐<br />

nage; cʹest du moins ce que jʹai compris.<br />

Pour Goubet, il va écrire à M me <strong>de</strong> Madre; il espère obtenir dʹelle 200f par an, pen‐<br />

dant un certain nombre dʹannées; M. Laroche, son père, a promis <strong>de</strong> donner 100f aussi par<br />

an; peut‐être trouveriez‐vous, dans ceux qui sʹintéressent à cet enfant, une autre subven‐<br />

tion annuelle <strong>de</strong> 100f. Pour les placements <strong>de</strong>s fonds du patronage, ils ont été faits par<br />

MM. Chazaud et Roussel, non par M. Laroche.<br />

Il ne faut pas compter, je crois, sur la subvention promise par ce <strong>de</strong>rnier; il assure<br />

quʹil a grand‐peine à subvenir à ses plus stricts besoins.<br />

Je ne vois quʹavantage et pas dʹinconvénient dans votre supplique pour Rome; je<br />

crois donc que vous pouvez lʹenvoyer et jʹen verrai le succès <strong>avec</strong> joie.<br />

Votre lettre ne contenait aucune nouvelle <strong>de</strong> M. votre frère, ni <strong>de</strong> M. Chazaud; M.<br />

Laroche nous a un peu parlé <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier; tenez‐nous au courant <strong>de</strong> ce qui touche ces<br />

<strong>de</strong>ux chers mala<strong>de</strong>s; assurez M me votre mère, à lʹoccasion, que ce grave intérêt nʹest point<br />

oublié ici et quʹon y prie habituellement pour son cher fils.<br />

Adieu, mon cher enfant, je vous écris encore sèchement; je suis en gran<strong>de</strong> lassitu<strong>de</strong><br />

et épuisement physique, et si gêné par mes jambes que je dis à grand effort la S te Messe et<br />

ne marche quelques pas dans la maison sans un bâton.<br />

Mille tendres affections à nos frères et plusieurs mille pour vous.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1177 à M. Maignen<br />

Relations <strong>avec</strong> la SSVP. Détails <strong>de</strong> santé.<br />

Jeudi 21 février 1867<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Jʹai vu M. Girard qui mʹa montré les meilleures dispositions; bien quʹil ait <strong>de</strong>mandé<br />

à ne pas donner, séance tenante, une décision absolue, il ne lʹa fait, je crois, quʹafin dʹatten‐<br />

dre la proposition officielle et directe que <strong>de</strong>vrait lui faire M. Decaux. Vous pouvez donc<br />

voir ce <strong>de</strong>rnier dès que vous le voudrez. Je crois quʹil conviendrait <strong>de</strong> ne point me mêler à<br />

ces arrangements et <strong>de</strong> ne point dire que jʹai vu M. Girard.<br />

Priez pour mes jambes qui semblent définitivement sʹéteindre; je pense que le reste<br />

les suivra.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1178 à M. Caille<br />

Pour raison <strong>de</strong> santé, MLP. ne peut se rendre à Amiens.<br />

23 février 1867<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Ma santé est en ce moment plus mauvaise quʹelle nʹa été <strong>de</strong>puis longtemps. Mon es‐<br />

tomac fonctionne mal et mes jambes sont si fort affaiblies que, même dans la maison, je ne<br />

1175


marche quʹappuyé sur un bâton; je ne dis la S te Messe quʹ<strong>avec</strong> une gran<strong>de</strong> difficulté. Un<br />

voyage en ce moment me serait donc absolument impossible. Si quelquʹun <strong>de</strong> nos frères<br />

est sans empêchement, il pourra vous voir et me rapportera vos vues relativement au pa‐<br />

tronage; je les examinerai <strong>avec</strong> le Conseil <strong>avec</strong> grand intérêt.<br />

Aujourdʹhui samedi, je ne puis vous écrire que ce mot en hâte.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1179 à M. Maignen<br />

Fêtes religieuses à Amiens. MLP. qui ne peut sʹy rendre, invite M. Maignen à le remplacer.<br />

25 février 1867<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

M. Caille mʹécrit pour mʹinviter à venir assister à la gran<strong>de</strong> solennité quʹon prépare<br />

à Amiens pour honorer la mémoire <strong>de</strong> Mgr Daveluy. 20 cardinaux, archevêques et évêques<br />

doivent y assister; Mgr Mermillod y parlera. Jʹai répondu que ma santé me rend en ce mo‐<br />

ment tout voyage impossible, mais que si lʹun <strong>de</strong> vous peut y aller sans notable dérange‐<br />

ment et y voit quelque avantage, je ne mʹy opposerai pas. M. Caille dit quʹà cette occasion,<br />

il nous soumettrait diverses questions concernant le patronage. MM. Myionnet et Lantiez<br />

sont empêchés; je ne vois guère que vous qui puissiez désirer <strong>de</strong> faire cette excursion;<br />

voyez si elle aurait pour vous quelque réelle utilité.<br />

En ce cas, il faudrait en causer <strong>avec</strong> M. Paillé et mʹavertir sans nul retard, afin quʹen<br />

avançant mercredi lʹheure du Conseil, nous rendions possible votre départ dans lʹaprès‐<br />

midi.<br />

Nous aurions aussi à écrire un mot dʹavis à M. Caille.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1180 à M. Caille<br />

MLP. avertit M. Caille que M. Maignen se rendra à Amiens dans les prochains jours.<br />

Mardi 26 février [1867]<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Maignen ira, je crois, vous faire une petite visite; il compte partir <strong>de</strong>main mer‐<br />

credi par le train <strong>de</strong> 8h. du soir; je crains que son arrivée à heure si tardive ne vous soit un<br />

dérangement.<br />

M. <strong>de</strong> Varax, <strong>de</strong> son côté, mʹa <strong>de</strong>mandé à se rendre aussi près <strong>de</strong> vous, mais je pré‐<br />

sume quʹil pourra arriver moins tard.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1181 à M. dʹArbois<br />

Eloge <strong>de</strong> lʹobéissance. Nécessité <strong>de</strong> la con<strong>de</strong>scendance. Entrées et départs dans la Communauté.<br />

1176


Vaugirard, 26 février 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu <strong>avec</strong> une vive satisfaction votre bonne et filiale lettre; je savais déjà votre<br />

esprit <strong>de</strong> soumission à la volonté <strong>de</strong> Dieu et <strong>de</strong> déférence pour le Supérieur, quoique indi‐<br />

gne, qui a été donné à notre petite famille, mais jʹen ai reçu la nouvelle expression <strong>avec</strong><br />

joie, parce quʹelle mʹest une assurance que Dieu ne vous délaissera point dans vos emplois<br />

et quʹIl établira aussi constamment la paix dans votre âme, puisque vous la remettez entre<br />

ses mains. Demeurez toujours, bien cher ami, dans ces sentiments et soyez sûr que, <strong>de</strong> no‐<br />

tre côté, nous savons compatir à vos difficultés comme à vos fatigues.<br />

Je présume, dʹaprès quelques mots <strong>de</strong> vos lettres, que notre cher M. Ladouce va un<br />

peu mieux. Tâchez <strong>de</strong> voir, au moins chaque quinzaine, vos frères, afin dʹouvrir leur cœur<br />

et <strong>de</strong> le verser dans le vôtre; je crois que pris doucement, comme vous le savez faire, vous<br />

les redresserez peu à peu. Il nʹest guère dʹesprits, <strong>de</strong> notre temps surtout, qui nʹaient grand<br />

besoin <strong>de</strong> con<strong>de</strong>scendance; N.S. nous a donné sur ce point, comme sur tout le reste, <strong>de</strong><br />

bien frappants exemples.<br />

Je persiste à penser que, si vous nʹavez point <strong>de</strong> ressources inattendues, vous ferez<br />

bien <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r les 200f que votre bon père enverra pour le trimestre.<br />

M. Philibert est toujours bien souffrant; nous pensons quʹil ne peut guère traîner au<br />

<strong>de</strong>là <strong>de</strong> quelques mois. Priez pour lui <strong>avec</strong> vos frères. Je suis moi‐même faible en ce mo‐<br />

ment et je marche péniblement.<br />

M. lʹabbé Leclerc (je ne sais si vous lʹavez connu dans nos œuvres où il prenait quel‐<br />

que part, quand il dirigeait la maîtrise <strong>de</strong> Ste ‐Clotil<strong>de</strong>) pense sérieusement à sʹadjoindre à<br />

nous. Cʹest un homme déjà mûr et dʹun mérite réel. De son côté, M. Baltenweck va se déta‐<br />

cher <strong>de</strong> notre famille; nous le regrettons, cʹest un excellent homme; sa santé a trop dʹexi‐<br />

gences, dit‐il, pour quʹil puisse vivre en communauté; il a été trop longtemps soigné par sa<br />

bonne servante alleman<strong>de</strong>, que vous connaissez, pour pouvoir se passer dʹattentions sem‐<br />

blables. Je ne sais sʹil est bien nécessaire <strong>de</strong> dire ces faits à vos frères, le <strong>de</strong>rnier surtout qui<br />

les intéressera médiocrement.<br />

Tous nos jeunes Séminaristes vont bien et sont <strong>de</strong> bonne espérance; M. Chaverot ne<br />

sera guère ordonné quʹà Noël, aux vacances peut‐être.<br />

Adieu, bien cher ami, dites‐moi quelques mots <strong>de</strong> temps en temps sur votre chère<br />

famille, et offrez à lʹoccasion mon respect à votre bon père.<br />

Mille affections à vous et à tous vos frères. Mon profond respect à Mgr , et quelque‐<br />

fois aussi souvenirs respectueux à MM. les Vicaires Généraux.<br />

Votre ami et Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1182 à M. Caille<br />

A propos dʹun jeune homme à réintégrer dans lʹŒuvre. Avant lʹacquisition dʹune maison, bien en peser les<br />

avantages et les inconvénients.<br />

Vaugirard, 8 mars 1867<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je vous communique ci‐joint une lettre que le jeune Lemaire a écrite ici à son jeune<br />

frère et dans laquelle, témoignant un très grand regret dʹavoir quitté votre maison, il le<br />

prie dʹintercé<strong>de</strong>r près <strong>de</strong> vous pour obtenir dʹy être admis <strong>de</strong> nouveau.<br />

1177


Notre frère Lemaire, qui nous donne satisfaction pour le présent et bonne espérance<br />

pour lʹavenir, vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> dʹêtre miséricordieux pour son frère; je me joins à lui, sous la<br />

réserve toutefois que vous ne voyez aucun inconvénient à son retour dans votre maison.<br />

Nos ff. ont été signer aujourdʹhui la procuration que vous nous avez <strong>de</strong>mandée; je<br />

désirerais quʹavant dʹen faire lʹemploi, vous me disiez par un mot si le revenu que vous<br />

donnera la maison à acquérir représentera les intérêts du capital employé pour lʹacquisi‐<br />

tion, en tenant compte aussi <strong>de</strong>s impositions et réparations annuelles dʹentretien.<br />

Je termine ici pour ne pas retar<strong>de</strong>r lʹenvoi <strong>de</strong> cette lettre.<br />

Votre ami et père bien affectionné en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Aujourdʹhui a eu lieu lʹinhumation <strong>de</strong> la mère <strong>de</strong> notre bon abbé Faÿ. Mes jambes<br />

sont toujours extrêmement débiles.<br />

Aussitôt que la procuration, qui doit être légalisée au Palais, aura été remise au no‐<br />

taire, je vous lʹenverrai sans aucun retard.<br />

1183 à M. Maignen<br />

Contretemps que MLP. <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à M. Maignen <strong>de</strong> bien prendre. Il fera tout pour ne pas négliger spirituellement<br />

lʹŒuvre <strong>de</strong>s Jeunes Ouvriers.<br />

Samedi 9 mars 1867<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

M. Braun couchera <strong>de</strong>main au soir (dimanche), à la fois pour ne pas rentrer trop<br />

tard aux Jeunes Ouvriers et pour donner la messe lundi matin à Grenelle, où elle est abso‐<br />

lument nécessaire ce jour‐là. Nʹen prenez point inquiétu<strong>de</strong>; nous travaillons et nous prions<br />

pour ne point laisser les Jeunes Ouvriers au dépourvu pour le spirituel, et vous avez vu<br />

que nous sommes disposés pour cela à tous les sacrifices; ayez donc confiance, <strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong> Dieu, nous surmonterons cette difficulté.<br />

Votre ami et Père tout affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1184 à M. Chaverot<br />

Son ordination pourrait, par faveur, être avancée au mois <strong>de</strong> septembre.<br />

Vaugirard, 12 mars 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> votre bonne petite épître qui me console <strong>de</strong> la privation <strong>de</strong> vos<br />

visites, que le Carême va sans doute rendre plus rares; nous tâcherons <strong>de</strong> nous retrouver<br />

<strong>de</strong>vant Dieu; cʹest un ren<strong>de</strong>z‐vous bien intime et bien consolant.<br />

Jʹespérais vous envoyer aujourdʹhui quelques nouvelles <strong>de</strong> notre f. M. <strong>de</strong> Varax,<br />

mais je nʹen ai pas encore reçu.<br />

Bien que mes jambes soient toujours également débiles, je me suis arrêté hier en re‐<br />

venant <strong>de</strong> Chaville (<strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> dʹune voiture) quelques instants au séminaire, et jʹai eu la<br />

satisfaction <strong>de</strong> trouver ensemble M. Caval et M. Icard. Je désirais que M. Icard voulût bien<br />

1178


préciser une espérance quʹil avait, il y a quelques jours, laissé entrevoir à M. Lantiez, sa‐<br />

voir: quʹil ne serait pas impossible <strong>de</strong> proposer votre ordination au mois <strong>de</strong> septembre; M.<br />

Caval et M. Icard mʹont promis ensemble, <strong>avec</strong> beaucoup <strong>de</strong> bonté, quʹils donneraient un<br />

avis favorable à cette disposition. Je crois quʹil sera bien <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r cette communication<br />

pour vous, lʹArchevêché nʹayant pas encore été consulté et MM. <strong>de</strong> St‐Sulpice <strong>de</strong>vant dési‐<br />

rer, sans doute, que cette faveur ne soit pas pour dʹautres une raison dʹen solliciter <strong>de</strong> pa‐<br />

reilles.<br />

Je prierai pour votre bonne mère et pour toute votre famille; vous savez quʹà cause<br />

<strong>de</strong> notre parenté <strong>avec</strong> vous, nous nous considérons aussi comme unis en Dieu <strong>avec</strong> tous<br />

les vôtres, dʹautant plus cordialement que tous nous semblent aussi honorables que bons.<br />

Dites bien toutes nos affections à notre cher M. Camus et croyez aussi, cher enfant, à<br />

notre plus tendre dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Nous penserons tout particulièrement à vous à la belle fête <strong>de</strong> S t Joseph; votre ab‐<br />

sence y sera regrettée.<br />

Priez pour M. Philibert, sa santé décline beaucoup, il ne se lève plus guère.<br />

1185 à M. Trousseau<br />

Soins <strong>de</strong> la santé. MLP. porte surtout grand intérêt à son avancement spirituel.<br />

Vaugirard, 12 mars 1867<br />

Mon cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> lʹenvoi que vous mʹavez fait <strong>de</strong> lʹordonnance médicale <strong>de</strong>stinée<br />

à M. Mitouard; il est aussi bien reconnaissant <strong>de</strong> cet envoi.<br />

Jʹaurais voulu vous envoyer <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax, mais je nʹai point reçu <strong>de</strong><br />

lettres <strong>de</strong> lui <strong>de</strong>puis son départ <strong>de</strong> Paris; peut‐être vous a‐t‐il écrit? Nous continuons à<br />

prier pour son frère et pour sa bonne mère.<br />

Nous vous recommandons, <strong>de</strong> notre côté, M. Philibert dont les forces déclinent sen‐<br />

siblement; il ne se lève plus guère; il ne peut marcher, ses jambes étant enflées; il est en très<br />

bonnes dispositions dʹesprit.<br />

Jʹaurais besoin moi‐même <strong>de</strong> recomman<strong>de</strong>r mes jambes aussi à vos bons souvenirs,<br />

car elles sont si faibles, et parfois lʹune <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux est si endolorie en suite dʹune chute négli‐<br />

gée, que je ne marche plus sans <strong>de</strong>ux cannes. Je puis encore dire la Ste Messe, et je me<br />

traîne le samedi à Chaville.<br />

Jʹai la confiance que vous êtes en paix toute fraternelle en lʹabsence <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax,<br />

et que la régularité accoutumée est gardée autant bien que vous pouvez lʹobserver. Obli‐<br />

gez M. Charrin à quelques ménagements pour son rhume; assurez tous nos frères <strong>de</strong> ma<br />

tendre sollicitu<strong>de</strong> et <strong>de</strong> ma constante affection pour eux. Il me serait doux <strong>de</strong> leur écrire à<br />

tous <strong>de</strong> temps en temps, mais je nʹy sais pas suffire; lʹhiver mʹa fort affaibli cette année et<br />

me rend encore moins expéditif que <strong>de</strong> coutume.<br />

Pour ce qui vous touche en particulier, cher enfant, je pense souvent à vous <strong>de</strong>vant<br />

Dieu, <strong>de</strong>mandant que vos bonnes et heureuses qualités se dégagent <strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong><br />

quelques restes dʹalliage qui en altèrent encore quelquefois lʹheureuse influence; mais jʹai<br />

bonne confiance, je sais que vous avez lʹœil ouvert, que vous luttez et priez toujours; <strong>avec</strong><br />

1179


cela, la victoire est certaine et, <strong>avec</strong> elle, la paix <strong>de</strong> lʹâme et la plus douce union <strong>avec</strong> le<br />

bien‐aimé Seigneur.<br />

Adieu, cher enfant, je prie S t Joseph <strong>de</strong> vous bien gar<strong>de</strong>r tous et dʹêtre votre Supé‐<br />

rieur durant tous les jours qui lui sont consacrés.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1186 à M. dʹArbois<br />

Grand embarras pour assurer aux Œuvres un personnel suffisant dʹaumôniers.<br />

Vaugirard, 13 mars 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Baltenweck se trouvant définitivement trop âgé pour renoncer à mille habitu<strong>de</strong>s<br />

contractées par lui en son pays et en son poste <strong>de</strong> Curé <strong>de</strong> campagne, sʹest déterminé à<br />

chercher une autre position, et lʹArchevêché lui a donné un poste où il peut rendre quel‐<br />

ques services à <strong>de</strong>s familles alleman<strong>de</strong>s.<br />

Il résulte pour nous <strong>de</strong> sa retraite <strong>de</strong>s difficultés, au moins temporaires, que toutes<br />

les combinaisons essayées, examinées jusquʹici par le Conseil ne peuvent surmonter. Mes‐<br />

sieurs <strong>de</strong> St‐Sulpice consentent à ce que M. Chaverot soit ordonné aux vacances en sep‐<br />

tembre; peut‐être, <strong>avec</strong> un extra tempora, pourra‐t‐il lʹêtre même un ou <strong>de</strong>ux mois plus tôt;<br />

lʹembarras se réduirait donc à cette limite <strong>de</strong> quatre ou cinq mois au plus. Mais, même ain‐<br />

si, nous ne trouvons rien pour y subvenir; M. Braun, qui était au Cercle <strong>de</strong>s Jeunes Ou‐<br />

vriers, a dû retourner à Grenelle pour soutenir lʹœuvre <strong>de</strong>s allemands; il laisse un vi<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong>rrière lui et, pour le combler, nous serions obligés dʹen préparer un autre, lequel, à son<br />

tour, opère un nouvel embarras; nous ne voyons comment sortir <strong>de</strong> ce labyrinthe. Serait‐il<br />

impossible (sans notable préjudice ni pour vous, ni pour les œuvres) que Messieurs du<br />

Chapitre fissent momentanément, et dans la limite stricte que jʹai indiquée, remplacer M.<br />

lʹabbé Gauffriau? Cet arrangement nous mettrait hors <strong>de</strong> peine et, les quelques mois écou‐<br />

lés, M. <strong>Jean</strong> reviendrait fidèlement à son poste. Cette variété temporaire dans ses occupa‐<br />

tions lui serait avantageuse à lui‐même et le remettrait pour quelques instants sous lʹin‐<br />

fluence du centre <strong>de</strong> la Congrégation. Si vous voyez quelque peu jour à réaliser sans trop<br />

dʹinconvénients cette absence, je vous prie dʹen parler à ces MM. du Chapitre que cela re‐<br />

gar<strong>de</strong>, et <strong>de</strong> nʹen parler quʹensuite à M gr , puisquʹil serait, ce me semble, inutile <strong>de</strong> lʹen en‐<br />

tretenir dans le cas dʹune véritable impossibilité. Je remets la chose à votre examen et à vo‐<br />

tre discrète entremise. Créer chez vous un embarras sérieux pour remédier au nôtre serait<br />

chose mal calculée.<br />

M. <strong>de</strong> Varax a traversé, ces jours <strong>de</strong>rniers, Paris allant à Lyon près <strong>de</strong> son frère, at‐<br />

teint, paraît‐il, dʹune phtisie mortelle qui est à son <strong>de</strong>rnier terme; il reviendra à la fin <strong>de</strong><br />

cette semaine.<br />

M. Philibert sʹen va aussi <strong>de</strong> jour en jour et laisse craindre une fin prochaine.<br />

Vous avez reçu lʹavis <strong>de</strong> la mort <strong>de</strong> la mère <strong>de</strong> notre f. M. Faÿ.<br />

Vous prierez, bien cher ami, <strong>avec</strong> nos frères, à toutes ces intentions; nous sommes<br />

aussi en instance près <strong>de</strong> S t Joseph, afin dʹobtenir pour notre famille quelques ouvriers<br />

nouveaux qui travaillent <strong>avec</strong> nous à la vigne du Seigneur; soyez <strong>de</strong>s nôtres aussi dans<br />

cette supplication.<br />

1180


Mille affections tendres à tous et à vous <strong>de</strong> tous ici, et en particulier <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père tout dévoué<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je pense que le mauvais temps aura fait suspendre vos travaux <strong>de</strong> chapelle.<br />

1187 à M. dʹArbois<br />

Mouvement <strong>de</strong> personnel. Bon vouloir <strong>de</strong> M. dʹArbois.<br />

Chaville, dimanche 17 mars [1867]<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je trouve sage la circonspection que vous avez mise dans lʹexamen <strong>de</strong> la question<br />

que je vous avais posée et très bonnes les raisons que vous mʹindiquez en me transmettant<br />

une réponse négative. Jʹavais prévu cette solution et pressenti les difficultés que vous au‐<br />

riez à réaliser la combinaison dont il sʹagissait, mais jʹavais cru <strong>de</strong>voir ne négliger aucun<br />

moyen pour prouver à M. Maignen notre bon vouloir en cette circonstance contrariante<br />

pour son œuvre. Je crois quʹil a dû obtenir quʹun oratorien viendrait pour un temps don‐<br />

ner le spirituel au Cercle <strong>de</strong>s Jeunes Ouvriers. Je nʹen ai pas encore la certitu<strong>de</strong>, ne lʹayant<br />

pas vu samedi avant <strong>de</strong> partir pour Chaville. Je vous remercie du bon vouloir que vous<br />

avez témoigné, je savais bien que jʹy pouvais compter.<br />

Bonne St Joseph, bon Carême, grands fruits pour Pâques, tels sont nos souhaits pour<br />

vous et pour votre œuvre. Mille affections à vous et à vos frères.<br />

Votre ami et Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1188 à M. Caille<br />

Mort du frère Ernest Philibert.<br />

Vaugirard, 25 mars 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Notre cher f. Philibert vient <strong>de</strong> rendre son âme à Dieu aujourdʹhui, je puis dire tout<br />

à lʹheure, à 3h. <strong>de</strong> lʹaprès‐midi. Il venait <strong>de</strong> recevoir le St Viatique et lʹExtrême‐Onction;<br />

pendant que nous disions les prières <strong>de</strong>s agonisants, il a expiré si doucement que nous ne<br />

nous en sommes pas aperçus; jʹétais agenouillé près <strong>de</strong> lui, tenant sa main, le regardant; il<br />

avait quitté ce mon<strong>de</strong> pour aller <strong>de</strong>vant le Seigneur.<br />

Prions pour lui, en espérant quʹil prie déjà pour nous.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1189 à M. dʹArbois<br />

Mort du frère Ernest Philibert.<br />

Vaugirard, 25 mars 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Notre cher f. Philibert vient <strong>de</strong> rendre son âme à Dieu aujourdʹhui, je puis dire tout<br />

à lʹheure, à 3h. <strong>de</strong> lʹaprès‐midi; il venait <strong>de</strong> recevoir le S t Viatique et lʹExtrême‐Onction;<br />

1181


pendant que nous disions les prières <strong>de</strong>s agonisants, il a expiré si doucement que nous ne<br />

nous en sommes pas aperçus; jʹétais agenouillé près <strong>de</strong> lui, tenant sa main, le regardant; il<br />

avait quitté ce mon<strong>de</strong> pour aller <strong>de</strong>vant le Seigneur.<br />

Prions pour lui, en espérant quʹil prie déjà pour nous.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1189‐1 à M. Risse<br />

Décès du frère Ernest Philibert.<br />

Vaugirard, 25 mars 1867<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Notre cher f. Philibert vient <strong>de</strong> rendre son âme à Dieu aujourdʹhui, je puis dire tout<br />

à lʹheure, à 3h. <strong>de</strong> lʹaprès‐midi. Il venait <strong>de</strong> recevoir le St Viatique et lʹExtrême‐Onction;<br />

pendant que nous disions les prières <strong>de</strong>s agonisants, il a expiré si doucement que nous ne<br />

nous en sommes pas aperçus; jʹétais agenouillé près <strong>de</strong> lui, tenant sa main, le regardant; il<br />

avait quitté ce mon<strong>de</strong> pour aller <strong>de</strong>vant le Seigneur.<br />

Prions pour lui en espérant quʹil prie déjà pour nous.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Faire‐part joint:<br />

M.<br />

La Communauté <strong>de</strong>s Frères <strong>de</strong> Saint‐Vincent <strong>de</strong> Paul recomman<strong>de</strong> à vos prières et Saints<br />

Sacrifices lʹâme du Frère <strong>Jean</strong>‐Hippolyte‐Ernest PHILIBERT, décédé le 25 mars courant, à la Mai‐<br />

son <strong>de</strong>s Orphelins, dans sa 24 e année, muni <strong>de</strong>s Sacrements <strong>de</strong> lʹEglise.<br />

Le Frère PHILIBERT faisait partie <strong>de</strong> la Communauté <strong>de</strong>puis 1861.<br />

Paris‐Vaugirard, le 26 mars 1867<br />

Fragment dʹune lettre dʹun Frère :<br />

Vous avez eu, je crois, les consolants détails <strong>de</strong> la mort <strong>de</strong> notre bon f. Philibert qui sʹest<br />

éteint doucement dans les bras <strong>de</strong> notre bon Supérieur, entouré <strong>de</strong> quatre <strong>de</strong> nos ff. ecclésiastiques<br />

qui lʹavaient assisté dans lʹadministration <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rniers Sacrements. Le bon Dieu lui a épargné tou‐<br />

tes les angoisses <strong>de</strong> la mort: la cessation du mouvement du pouls a seule indiqué la cessation <strong>de</strong> la<br />

vie. Nous avons tous été gran<strong>de</strong>ment impressionnés <strong>de</strong> cette mort si pieuse et si édifiante. Sur son<br />

lit <strong>de</strong> mort, sa figure avait un calme céleste, il semblait endormi. Nous avons été le conduire à Cha‐<br />

ville où il a pris place à côté <strong>de</strong> notre bon f. Olivier[Urvoy].<br />

1190 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Décès du frère Ernest Philibert. Gran<strong>de</strong> émotion <strong>de</strong> MLP.<br />

Vaugirard, 25 mars 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Notre cher f. Philibert vient <strong>de</strong> rendre son âme à Dieu aujourdʹhui, je puis dire tout<br />

à lʹheure, à 3h. <strong>de</strong> lʹaprès‐midi. Il venait <strong>de</strong> recevoir le St Viatique et lʹExtrême‐Onction;<br />

pendant que nous disions les prières <strong>de</strong>s agonisants, il a expiré si doucement que nous ne<br />

1182


nous en sommes pas aperçus; jʹétais agenouillé près <strong>de</strong> lui, tenant sa main, le regardant; il<br />

avait quitté ce mon<strong>de</strong> pour aller <strong>de</strong>vant le Seigneur.<br />

Prions pour lui, en espérant quʹil prie déjà pour nous.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Planchat et M. Derny regrettent bien que M. Charrin nʹécrive pas quelques mots<br />

<strong>de</strong> bon souvenir pour lʹœuvre <strong>de</strong> Charonne, dont les jeunes gens <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt constamment<br />

<strong>de</strong> ses nouvelles.<br />

Jʹattends aussi <strong>de</strong> vos nouvelles; comment allez‐vous tous, comment vont les pau‐<br />

vres mala<strong>de</strong>s: votre frère et M. Chazaud?<br />

Jʹai le cœur bien serré; une mort, même attendue, est toujours dure à accepter, je bé‐<br />

nis Dieu néanmoins <strong>de</strong> ce quʹelle est si belle.<br />

1191 à M. Chaverot<br />

Décès du frère Ernest Philibert. Précisions supplémentaires sur les circonstances <strong>de</strong> sa mort.<br />

26 mars 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Hier, 25 mars, fête <strong>de</strong> lʹAnnonciation, notre f. Philibert a rendu son âme à Dieu dou‐<br />

cement et <strong>avec</strong> un souffle si imperceptible que nul <strong>de</strong> nous, qui lʹentourions, nʹa saisi le<br />

moment où il venait <strong>de</strong> sʹéloigner <strong>de</strong> nous.<br />

On terminait à peine la touchante cérémonie par laquelle il venait <strong>de</strong> recevoir le St Viatique et lʹExtrême‐Onction; on lʹavait, selon son désir, assis dans son fauteuil et il avait<br />

gardé jusquʹà la fin sa connaissance; comme tout sʹachevait, nous avons commencé les<br />

prières <strong>de</strong>s agonisants; il avait sa main dans la mienne, rien ne mʹa averti quʹil nʹavait plus<br />

<strong>de</strong> sentiment, la vie est donc bien ténue et bien subtile!<br />

Demain mercredi, nous avons pour lui messe <strong>de</strong> communauté à notre chapelle, et<br />

nous le conduisons ensuite à notre sépulture <strong>de</strong> Chaville.<br />

Priez et faites prier pour lui, pour nous et pour sa pauvre mère, veuve, et qui nʹavait<br />

dʹautre amour que lui; elle est faible en foi; jʹespère que lui aura obtenu que sa foi si vive<br />

fût pour elle un héritage.<br />

Adieu, bien cher ami, mille affections en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1192 Aux Frères séminaristes dʹIssy<br />

Décès du frère Ernest Philibert.<br />

26 mars [1867]<br />

Bien chers amis,<br />

Notre cher f. Philibert a rendu hier, 25 mars, fête <strong>de</strong> lʹAnnonciation, son âme au Sei‐<br />

gneur, à 3h. <strong>de</strong> lʹaprès‐midi, doucement, comme il avait traité toute chose en sa vie. Il ve‐<br />

nait <strong>de</strong> recevoir le St Viatique et les <strong>de</strong>rnières onctions; il sʹest éteint sans bruit aucun dans<br />

1183


le fauteuil où on lʹavait assis. Le Seigneur était encore en lui quand la mort est venue; Il a,<br />

espérons‐le, emporté son âme qui nʹaura pas pu le quitter.<br />

Priez, chers amis, et faites prier pour lui, sʹil est besoin, pour nous et pour sa mère,<br />

jusquʹici faible en foi; espérons que celle <strong>de</strong> son fils <strong>de</strong>viendra son héritage.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1193 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Vie <strong>de</strong>s Œuvres. Coopération <strong>de</strong>s frères à la presse religieuse. Patience dans les difficultés. Utilité <strong>de</strong> lʹépreuve<br />

pour lʹInstitut et pour les Œuvres. Funérailles du frère Philibert.<br />

Vaugirard, 29 mars 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vais répondre à vos <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rnières lettres, mais cʹest <strong>de</strong>main samedi, jʹai beau‐<br />

coup à faire et à écrire; vous nʹaurez donc quʹune parole brève, sinon sèche, ce qui nʹest pas<br />

<strong>de</strong> mise entre nous.<br />

Pour votre sermon, il a manqué son but pour votre œuvre, mais, sʹil a fait quelque<br />

bien spirituel, il ne faut rien regretter. Vous savez que, sauf raison tout extraordinaire,<br />

nous ne prêchons pas dans les paroisses <strong>de</strong> villes.<br />

Lʹarticle <strong>de</strong> la Semaine Religieuse est convenable, la communauté y est effacée,<br />

comme il nous appartenait <strong>de</strong> le faire. Cette petite publication locale me semble être assez<br />

bien faite et doit avoir son intérêt.<br />

Pour la coopération à la Feuille dʹAngers, il faut attendre un peu pour en voir la cou‐<br />

leur: on en a offert la direction à M. dʹArbois qui a refusé, nʹayant pas le loisir dʹy donner<br />

ses soins; je pense quʹelle sera convenable, mais il nʹest pas facile <strong>de</strong> rendre un pareil écrit<br />

intéressant dans une sphère si restreinte. Lisez‐vous lʹOuvrier? M. Maignen y écrit réguliè‐<br />

rement, quelquefois assez bien.<br />

Je vous ai dit, à votre <strong>de</strong>rnière visite à Vaugirard, que vous pouviez appliquer aux<br />

besoins <strong>de</strong> votre maison les 500f offerts par Madame votre mère, à la condition dʹen user<br />

toujours économiquement.<br />

Les rentes espagnoles sont en vente chez lʹagent <strong>de</strong> change; je crois que M. Lantiez<br />

(notaire à Deuil, près Enghien, Seine‐et‐Oise) ne se souciait pas <strong>de</strong> négocier une si triste<br />

opération; il a dit (il est vrai fort justement) à son frère que chacun <strong>de</strong> nous pouvait faire<br />

cette opération, le seul soin à prendre étant <strong>de</strong> voir lʹagent <strong>de</strong> change. Il craint quʹon nʹen<br />

tire guère plus <strong>de</strong> 200f. M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] ira voir M me Cottu <strong>de</strong> votre part.<br />

Je crois, comme vous, quʹun tout petit voyage fera bien à M. Trousseau; vous mesu‐<br />

rerez la chose suivant le besoin.<br />

Je suis touché <strong>de</strong> lʹobligeant souvenir <strong>de</strong> M me votre mère; je ne vois guère que jʹaie<br />

les occasions <strong>de</strong> me rencontrer <strong>avec</strong> elle; mais elle mʹavait paru avoir gardé un peu <strong>de</strong><br />

peine du refus que jʹavais fait autrefois, un peu trop nettement sans doute, dʹentrer dans<br />

ses vues en ce qui touchait votre union <strong>avec</strong> nous; ce me sera une consolation <strong>de</strong> la voir<br />

revenir sur cette impression; jʹai une si haute idée <strong>de</strong> son caractère, <strong>de</strong> sa bonté, <strong>de</strong> sa piété<br />

et <strong>de</strong> son dévouement que je souffrirais dʹêtre en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> ses sympathies.<br />

Jʹentre dans ses douloureuses sollicitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> mère en ce moment, comme vous le<br />

pouvez faire vous‐même, et je continue à recomman<strong>de</strong>r fidèlement votre cher frère aux<br />

prières <strong>de</strong> notre communauté.<br />

1184


Le pensionnat produit peu dʹavantages matériels, il est vrai, mais il fait un poids<br />

moral pour votre maison; il fait aussi un bien réel pour les élèves qui ont là un abri chré‐<br />

tien et un enseignement honnête; cʹest quelque chose en ce temps. Patience, Dieu nous<br />

conduira; prenons au jour le jour nos épreuves, nos insuffisances, nos faiblesses; tout cela<br />

humilie et Dieu se plaît parmi les faibles et les petits; il y a aussi là, comme vous le dites<br />

très bien, un excellent Carême, sans préjudice pour lʹestomac; enfin vous pensez comme<br />

nous que, si dans leurs commencements nos œuvres nʹétaient marquées du sceau <strong>de</strong> la<br />

croix, si nous nʹavions beaucoup dʹépreuves et <strong>de</strong> travaux, nous nʹaurions pas les signes<br />

ordinaires <strong>de</strong> la bénédiction <strong>de</strong> Dieu et les promesses dʹune assiette ferme et durable pour<br />

lʹavenir, dans le service <strong>de</strong> Dieu.<br />

Adieu, mon bien cher ami; encouragez, réconfortez vos frères; nous sommes tous<br />

faibles et nous avons tous besoin que Dieu et nos frères nous assistent.<br />

Mille affections à vous et à tous.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Nous avons conduit mercredi notre cher f. Philibert à notre sépulture <strong>de</strong> Cha‐<br />

ville; la cérémonie a été simple et touchante, point dʹétrangers, excepté <strong>de</strong>ux ou trois per‐<br />

sonnes <strong>de</strong> Chaville et la mère du cher défunt; nous étions, pour nous, réunis en grand<br />

nombre, tous je crois; messe à notre chapelle <strong>de</strong> Vaugirard et office <strong>de</strong>s morts à lʹéglise <strong>de</strong><br />

Chaville; notre f. Olivier [Urvoy <strong>de</strong> S t Bedan] nʹest plus seul.<br />

1194 à M. dʹArbois<br />

Série <strong>de</strong> recommandations pour la direction spirituelle <strong>de</strong>s frères <strong>de</strong> la communauté.<br />

Vaugirard, 29 mars 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vais répondre <strong>avec</strong> une extrême brièveté à votre lettre, étant plus pressé le samedi<br />

que les autres jours.<br />

Invitez M. votre père en mon nom; vous pourrez dire à vos frères: M. le Supérieur a<br />

pris sur lui dʹinviter mon père à loger <strong>de</strong>ux ou trois jours ici; je mʹen serais gardé <strong>de</strong> moi‐<br />

même, sachant que la règle sʹy oppose formellement comme nos usages, mais M. le Supé‐<br />

rieur, considérant que mon père a rendu à la Communauté quelques services notables, lʹa<br />

considéré comme bienfaiteur <strong>de</strong> lʹœuvre et a agi en conséquence. Il me semble que cela<br />

passerait ainsi. Je nʹai pas compris quelles questions embarrassantes il vous pourrait faire;<br />

si cʹest pour votre pension, vous pourriez dire: M. le Supérieur en fait profiter notre mai‐<br />

son et nos œuvres; jʹen règle ordinairement lʹemploi selon ses avis.<br />

M. Ladouce. Jʹai vu sa bonne mère aujourdʹhui; ses parents vont bien, ils sont heu‐<br />

reux <strong>de</strong>s nouvelles que je leur ai données <strong>de</strong> lui. Ils seront contents <strong>de</strong> le revoir à la re‐<br />

traite, mais ils comptent bien quʹil resterait à Angers au moins jusquʹà lʹannée scolaire pro‐<br />

chaine; ils voient <strong>avec</strong> joie quʹil progresse en bien sous votre direction et lʹencourageront<br />

dignement à être fidèle en tout aux <strong>de</strong>voirs <strong>de</strong> sa position. Dieu exaucera leurs prières<br />

pour leur cher enfant, dont ils comprennent admirablement les véritables intérêts.<br />

Quʹil <strong>de</strong>man<strong>de</strong> permission pour les exceptions au règlement: coucher, lever, etc., si<br />

elles sont nécessaires, et ne prenne rien sur lui; en direction, doucement influer autant que<br />

1185


vous pourrez. Tous doivent préparer la Conférence; un peut être désigné particulièrement<br />

chaque fois pour la traiter plus spécialement et en faire la lecture à lʹassemblée. Ainsi, à<br />

Vaugirard, <strong>de</strong>ux sont désignés chaque fois.<br />

Cuisine. Revenir souvent sur lʹobservation, prendre <strong>de</strong>s notes sur les manquements<br />

<strong>de</strong> chacun; en cela comme en tout, sʹen servir dans la direction.<br />

Vin. Recommandations à haute voix et en particulier; peut‐être y mêler un peu<br />

dʹeau par avance, mais pas dans la pièce.<br />

M. Moutier. Le relevé <strong>de</strong> ses occupations ordinaires serait son règlement particulier.<br />

Il avait besoin <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> liberté à Vaugirard, à cause <strong>de</strong> lʹéloignement <strong>de</strong> S te ‐Anne et <strong>de</strong> la<br />

longueur <strong>de</strong>s courses pour placements. En direction, parler à sa conscience pour lʹemploi<br />

du temps; esprit <strong>de</strong> foi et <strong>de</strong> piété doivent le conduire.<br />

M. Gauffriau. Dire que je vous rappelle expressément que nous <strong>de</strong>vons plus que<br />

jamais éviter tous signes <strong>de</strong> familiarité <strong>avec</strong> les enfants.<br />

LʹUniversité. M. Duruy, particulièrement, recueille les moindres faits quʹil peut no‐<br />

ter contre les institutions chrétiennes, les signale à la tribune <strong>avec</strong> malveillance évi<strong>de</strong>nte;<br />

recommandations nouvelles et instantes <strong>de</strong> ma part. Tenue digne et convenable <strong>avec</strong> tous,<br />

<strong>avec</strong> les enfants en particulier.<br />

Revenez doucement sur les avantages, la nécessité <strong>de</strong> lʹoraison; la paresse et le sans‐<br />

gêne sont en cela pour beaucoup, mais vous ne gagnerez rien par la sévérité, lʹétoffe ne la<br />

supporterait pas; faites ce que les sujets peuvent comporter; en direction, lui parler peut‐<br />

être <strong>de</strong> lʹinfraction <strong>de</strong> votre défense pour lʹorgue (je ne me souvenais pas quʹil en sût assez<br />

pour accompagner); sauf la défense enfreinte, cʹétait peut‐être une occasion <strong>de</strong> sʹexercer;<br />

sʹil était possible <strong>de</strong> régulariser la chose sans que lʹautorité du Supérieur fût en préjudice,<br />

on pourrait, je crois, fléchir, mais en le faisant sentir et en avertissant la fabrique que cʹest<br />

sans engagement pour lʹavenir.<br />

Pour lʹaumônerie, tâchez que lʹaumônier vienne plus régulièrement et <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z<br />

quʹil se fasse remplacer par un autre (non tantôt lʹun, tantôt lʹautre), afin <strong>de</strong> rendre aussi<br />

rares que possible les suppléances <strong>de</strong> M. Gauffriau.<br />

Adieu, bien cher ami; cʹest tâche difficile <strong>de</strong> diriger <strong>de</strong>s âmes peu fermes et peu<br />

éclairées, mais la patience et la con<strong>de</strong>scendance sont dans nos obligations absolues; N.S.<br />

nous supporte, quel admirable exemple! Il a supporté ses apôtres et tous ceux qui lʹentou‐<br />

raient, imitons‐Le; si les imparfaits <strong>de</strong>viennent meilleurs ou même nʹempirent pas, nous<br />

trouverons grâce <strong>de</strong>vant Lui.<br />

Mille affections à vous et à tous.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1195 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Organisation <strong>de</strong> la maison dʹArras. Chaque Œuvre doit vivre <strong>avec</strong> les ressources trouvées dans le pays. Nécessité<br />

du silence. Qualité <strong>de</strong> la vocation du frère Charrin. Un acci<strong>de</strong>nt à lʹatelier <strong>de</strong> ciselure.<br />

Vaugirard, 8 avril 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vais, comme vous le désirez, vous envoyer 200f, montant du <strong>de</strong>uxième trimestre<br />

<strong>de</strong> votre petite pension.<br />

1186


Pour les obligations ou inscriptions <strong>de</strong> Séville, si elles ne se ven<strong>de</strong>nt point, il ne faut<br />

pas lʹattribuer à quelque acte <strong>de</strong> négligence; personne nʹa rien à se reprocher à cet égard,<br />

lʹagent <strong>de</strong> change pas plus que les autres, bien que ces actions soient entre ses mains <strong>de</strong>‐<br />

puis plusieurs semaines. Ces sortes <strong>de</strong> valeurs, nulles en produits présentement et ne don‐<br />

nant quʹun droit fort éventuel pour lʹavenir, sont cotées fort bas à la Bourse et sont si peu<br />

<strong>de</strong>mandées quʹil faut attendre souvent fort longtemps pour trouver quelque chance <strong>de</strong> sʹen<br />

défaire.<br />

Je ne mʹexplique pas bien la pensée que vous auriez dʹappliquer 400f, sur les 500<br />

que vous atten<strong>de</strong>z <strong>de</strong> votre bonne mère, à la caisse dʹépargne du patronage. Il me semble<br />

que cʹest déjà bien assez que la communauté à Arras ait à pourvoir en bonne partie à sa<br />

propre subsistance, sans que nous ayons à fournir encore pour les charges du patronage,<br />

soit par nous‐mêmes, soit par les fonds qui nous viennent <strong>de</strong> nos familles; à moins que nos<br />

parents, expressément et dʹeux‐mêmes, enten<strong>de</strong>nt que leurs dons aient cette <strong>de</strong>stination.<br />

M. Lantiez me dit quʹil était bien convenu <strong>avec</strong> vous que nous nʹaccepterions pour nous<br />

aucune <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ttes du patronage, et que nous aurions soin <strong>de</strong> les faire reconnaître par la<br />

Conférence et les autres protecteurs du patronage. Il en est <strong>de</strong> même <strong>de</strong>s travaux ou ap‐<br />

propriations <strong>de</strong>s locaux, le pays doit pourvoir à toutes les dépenses. Je mʹétonne que M gr<br />

dʹArras ne parle point <strong>de</strong>s 500f quʹil avait promis; est‐ce que M. Roussel ne pourrait lui en<br />

dire un mot?<br />

Nous verrons <strong>avec</strong> plaisir M. Trousseau; nʹest‐ce pas au moment <strong>de</strong> notre retraite<br />

quʹil doit venir nous voir? Je nʹai pas compris si, dans votre lettre, vous lʹindiquiez ainsi ou<br />

autrement; quant au voyage chez sa mère, vous pouvez mieux que moi juger, dʹaprès ses<br />

dispositions, du <strong>de</strong>gré dʹutilité <strong>de</strong> cette démarche; lʹesprit <strong>de</strong> notre règle, comme ses pres‐<br />

criptions, y répugne beaucoup, mais les raisons graves font plier la règle (non sans gémis‐<br />

sement).<br />

Je vous serai obligé <strong>de</strong> renvoyer le questionnaire emporté par Escouté à lʹoccasion<br />

<strong>de</strong> la venue <strong>de</strong> M. Trousseau.<br />

Je crois, comme vous, quʹun peu <strong>de</strong> vrai et bon silence est bien salutaire; cʹest un <strong>de</strong>s<br />

exercices les plus fortifiants, il rasseoit et fait contrepoids à la dissipation, si difficile à évi‐<br />

ter dans nos œuvres.<br />

Je ne me souviens pas bien <strong>de</strong> la fin que vous voulez atteindre par votre œuvre du<br />

vestiaire, ni quelle <strong>de</strong>stination auront les vêtements confectionnés; est‐ce pour vêtir ceux<br />

<strong>de</strong> nos patronnés qui sont pauvres? Est‐ce pour les ventes?<br />

Cette lettre est bien décousue, mais comment parler autrement dʹune série <strong>de</strong> dé‐<br />

tails tels que les amènent les œuvres? Je reviens sur les fonds espagnols; il me semble<br />

quʹen <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s actions <strong>de</strong> Séville, qui sont dʹun chemin <strong>de</strong> fer, il y avait, dans les valeurs<br />

remises à M. Lantiez, notaire, quelques inscriptions sur le Gouvernement Espagnol; me<br />

trompé‐je? sont‐elles à vous ou au patronage? Si au patronage, elles se vendraient moins<br />

mal que les chemins [<strong>de</strong> fer] <strong>de</strong> Séville.<br />

Je suis heureux que M. Charrin vous contente; je lʹaime à cause <strong>de</strong> sa droiture <strong>de</strong><br />

cœur, <strong>de</strong> la franchise <strong>avec</strong> laquelle il sʹimmole et se donne à Dieu; il y a si souvent tant <strong>de</strong><br />

retours dʹamour‐propre, <strong>de</strong> recherche <strong>de</strong> soi‐même dans les consécrations quʹon fait à<br />

Dieu! Il me semble que, pour lui, cʹest généreusement quʹil sʹest donné. Les autres ont aus‐<br />

si <strong>de</strong> bonnes dispositions qui se perfectionnent <strong>avec</strong> les temps et par la grâce <strong>de</strong> Dieu. Tâ‐<br />

chons, nous, <strong>de</strong> donner à tous lʹexemple.<br />

1187


Adieu, mon bien cher ami, je mets ici sous cet adieu toute une masse <strong>de</strong> tendres af‐<br />

fections pour vous et pour vos frères.<br />

Nous prions à vos intentions, ne nous oubliez pas <strong>de</strong> votre côté. M. Paul [Baffait] est<br />

<strong>de</strong>puis un mois au lit, sans quʹon voie clair à sa maladie; un <strong>de</strong> nos enfants les meilleurs et<br />

les plus attachés à nous 392 a été, à lʹatelier, victime dʹun acci<strong>de</strong>nt qui compromet (le mot est<br />

adouci) un <strong>de</strong> ses yeux; cʹest une gran<strong>de</strong> affliction pour nous.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Chazaud et M. votre frère nʹont donc nulle amélioration dans leur santé? Offrez<br />

mes respectueux souvenirs à Madame votre mère quand vous le jugerez opportun. M.<br />

Georges [<strong>de</strong> Lauriston] a vu M me Cottu qui lui a remis <strong>avec</strong> bonne grâce sa souscription.<br />

1196 à M. Chaverot<br />

Achat <strong>de</strong> couvertures. Le jeune apprenti acci<strong>de</strong>nté ne pourra pas être guéri.<br />

Vaugirard, 13 avril 1867<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je ne crois pas que les couvertures aient coûté plus <strong>de</strong> 130f. M. Georges [<strong>de</strong> Lauris‐<br />

ton] nʹen a pas acheté un plus grand nombre parce que je ne lui avais rien précisé à cet<br />

égard; il est sorti. Je lui en vais parler à son retour; soyez en paix, je ne crois pas que vous<br />

lui <strong>de</strong>viez rien, tout au plus le port <strong>de</strong>s couvertures.<br />

Nous avons envoyé notre enfant au chirurgien <strong>de</strong> Dusseldorf; il pense quʹil nʹy a<br />

rien à faire.<br />

Je vous sais gré <strong>de</strong> reprendre à Issy vos petites lectures sur St Vincent <strong>de</strong> Paul; cette<br />

pensée est <strong>de</strong> Dieu, il faut y rester fidèle.<br />

Adieu, bien cher ami.<br />

Tout à vous en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1197 à M. Caille<br />

Deman<strong>de</strong> <strong>de</strong> renseignements sur un postulant. Retraite prêchée par le père Leblanc.<br />

Vaugirard, 15 avril 1867<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Un bon jeune homme dʹAmiens, <strong>de</strong>s Conférences, et qui est en voyage à Paris, est<br />

venu me voir aujourdʹhui pour me parler <strong>de</strong> la disposition où serait M. Bour<strong>de</strong>t (ou Bor‐<br />

<strong>de</strong>t) [Paul Bor<strong>de</strong>cq, dit Paulin], bien connu <strong>de</strong> vous, dʹentrer dans notre Communauté. Il a,<br />

mʹa dit ce jeune Monsieur, 45 ans; il est très attiré aux œuvres <strong>de</strong> zèle, il sʹen occupe <strong>avec</strong><br />

vous; il est dirigé par le r.p. Aubert.<br />

Je vous prie, mon bon ami, <strong>de</strong> me faire connaître votre sentiment sur cette vocation<br />

et <strong>de</strong> me dire sʹil y aurait utilité à laisser venir ce M. à la retraite, ainsi quʹil en aurait le dé‐<br />

392<br />

Pain, apprenti à l'atelier <strong>de</strong> ciselure, qui, en faisant semblant <strong>de</strong> boire une bouteille d'eau forte, s'en était laissé tomber quelques<br />

gouttes sur un œil.<br />

1188


sir. A‐t‐il un peu dʹinstruction, <strong>de</strong> capacité dʹexpérience et <strong>de</strong> bonne tenue? On me dit quʹil<br />

est très pieux.<br />

Notre retraite commencera le dimanche au soir, 5 mai; elle sera donnée par le r.p.<br />

Leblanc, homme dʹune gran<strong>de</strong> expérience et <strong>de</strong> la plus aimable bonté. Il est fort affectionné<br />

à notre Communauté. Je recomman<strong>de</strong> à vos prières et à celles <strong>de</strong> nos frères M. Paul Baffait,<br />

qui est mala<strong>de</strong> <strong>de</strong>puis un mois, sans que nous voyions bien quelle tournure prendra ce<br />

mal prolongé.<br />

Mille affections à vous et à nos frères.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Les jeunes gens qui vous semblaient attirés vers nous et dont vous mʹaviez parlé à<br />

votre <strong>de</strong>rnier voyage persistent‐ils dans leurs bonnes dispositions?<br />

1198 à M. Maignen<br />

Deman<strong>de</strong> <strong>de</strong> renseignements sur un postulant. Lʹindécision habituelle est un obstacle.<br />

Vaugirard, 16 avril 1867<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Un M. Coudray, du Mans, qui paraît être connu <strong>de</strong> vous, mʹa écrit, il y a quelque<br />

temps, pour me dire ses indécisions au sujet <strong>de</strong> son avenir et <strong>de</strong> pensées <strong>de</strong> vocation qui<br />

lui revenaient constamment. Je lui avais répondu quʹil mettrait fin peut‐être à ses indéci‐<br />

sions en faisant <strong>avec</strong> nous une <strong>de</strong> nos retraites; il mʹécrit pour mʹavertir quʹil a lʹintention<br />

<strong>de</strong> venir à celle que nous allons suivre.<br />

Que pensez‐vous <strong>de</strong> ce Monsieur? Son état (il paraît habituel) dʹindécision me sem‐<br />

ble indiquer dʹavance quʹil ne prendra aucun parti et je regrette un peu lʹoffre que je lui ai<br />

faite; je ne puis néanmoins revenir sur ce que jʹai proposé. Avez‐vous quelque souvenir<br />

précis en ce moment qui le concerne? Pensez‐vous que sa présence nous soit une gêne no‐<br />

table? Renvoyez‐moi vite sa lettre <strong>avec</strong> un mot dʹéclaircissement, afin que je lui répon<strong>de</strong>.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Vos retraites sont‐elles commencées et vont‐elles bien? Nous prions ici pour leur<br />

succès.<br />

1199 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Avis divers relatifs à lʹŒuvre dʹArras. Observation sur le ministère paroissial. A Arras, lʹaumônier du patro‐<br />

nage étant sous‐occupé, il faut maintenir et lʹécole et le patronage.<br />

Vaugirard, 16 avril 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Notre retraite commencera le dimanche au soir, 5 mai, et nous sera donnée par un<br />

r.p. du Collège, le r.p. Leblanc, directeur du spirituel <strong>de</strong> cette maison.<br />

Vous arrangerez pour le mieux lʹenvoi <strong>de</strong> ceux dʹentre vous qui <strong>de</strong>vront y partici‐<br />

per; je ne puis, à cet égard, vous donner dʹinstructions qui pourraient préjudicier aux be‐<br />

soins <strong>de</strong> vos services.<br />

1189


Vous règlerez aussi pour le plus grand bien le départ <strong>de</strong> M. Trousseau et le temps<br />

<strong>de</strong> son absence; je pense, comme vous, que huit jours passés chez sa mère sont bien assez;<br />

lʹobstination <strong>de</strong> cette famille est, espérons‐le, plus aveugle que mauvaise; les bons procé‐<br />

dés lui ouvriront peut‐être les yeux; il sera nécessaire toutefois que la grâce <strong>de</strong> Dieu inter‐<br />

vienne.<br />

Le lundi <strong>de</strong> Pâques, nous allons dʹordinaire retrouver nos enfants <strong>de</strong> Vaugirard à<br />

Bellevue, où ils assistent aux vêpres et au salut à 4h.; il est probable que, si jʹy vais, je ne<br />

partirai pas <strong>de</strong> Chaville avant 2h.40 et peut‐être 3h.40. M. Victor [Trousseau] mʹy trouve‐<br />

rait donc au moins jusquʹà 2h.40.<br />

Je crois quʹil sera bon <strong>de</strong> ne pas relever ses admirations pour le ministère paroissial;<br />

elles peuvent être une taquinerie et, en tous cas, lʹesprit <strong>de</strong> contradiction pourrait les ren‐<br />

dre réelles <strong>de</strong> fictives quʹelles sont présentement.<br />

Je ne vous ai point dit, à propos <strong>de</strong> votre prédication dans la paroisse dʹArras où on<br />

vous avait invité <strong>de</strong>rnièrement, que nous nous abstenons <strong>de</strong>s prédications dans les parois‐<br />

ses <strong>de</strong> villes, parce que le fait était tout exceptionnel; jʹai pensé que vous aviez cette même<br />

disposition et que vous éviteriez, autant quʹil dépendrait <strong>de</strong> vous, dʹaccepter <strong>de</strong> tels enga‐<br />

gements.<br />

Je mʹétonne que M gr dʹArras pousse à la suppression <strong>de</strong> notre école qui avait été jugé<br />

nécessaire; elle se fait assurément dans un bon esprit et <strong>avec</strong> toutes les garanties chrétien‐<br />

nes désirables; les établissements dʹinstruction tenus religieusement pourraient‐ils donc<br />

être jamais trop nombreux? Les mauvais sont malheureusement bien plus multipliés quʹil<br />

ne faudrait.<br />

Est‐il certain dʹailleurs quʹun patronage aussi peu nombreux que lʹest celui dʹArras<br />

motivât la présence dʹune communauté, fût‐elle réduite à trois personnes; que feraient ces<br />

religieux durant la semaine? du ministère dans la ville pour ce qui regar<strong>de</strong> le prêtre, mais<br />

ce nʹest guère là notre fin directe; il faudrait donc sʹoccuper à quelque autre œuvre, mais<br />

avons‐nous position suffisante à Arras pour cela?<br />

Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S.; prions toujours beaucoup, cʹest le plus sûr<br />

<strong>de</strong> nos actes et le plus puissant.<br />

M. Paul [Baffait] reste fort mala<strong>de</strong>, <strong>avec</strong> une tout imperceptible amélioration. Vous<br />

ne mʹavez rien dit <strong>de</strong> vos mala<strong>de</strong>s; il me semble quʹil pourrait y avoir un peu dʹespoir pour<br />

votre cher frère, la jeunesse a <strong>de</strong> telles ressources et les prières <strong>de</strong> votre bonne mère doi‐<br />

vent tant valoir auprès <strong>de</strong> Dieu!<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1200 à M. dʹArbois<br />

Retraite <strong>de</strong> Communauté. La santé du frère Baffait décline.<br />

Vaugirard, 17 avril 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Notre retraite <strong>de</strong> Communauté commencera le dimanche au soir, 5 mai. Elle sera<br />

donnée par le r.p. Leblanc, homme dʹune haute expérience et très affectionné à notre petite<br />

famille.<br />

1190


Vous verrez quels sont ceux <strong>de</strong> vos frères que vous croirez pouvoir y envoyer.<br />

Nous prions pour vos retraites, priez aussi pour les nôtres; elles nous donnent jus‐<br />

quʹici bonne espérance.<br />

Nous recommandons aussi à vos souvenirs <strong>de</strong>vant Dieu M. Paul Baffait, languis‐<br />

sant <strong>de</strong>puis plus dʹune année, et qui est alité <strong>de</strong>puis un mois sans quʹon définisse bien sa<br />

maladie.<br />

Tout le mon<strong>de</strong> ici sʹunit à moi pour vous assurer, ainsi que vos frères, <strong>de</strong> notre bien<br />

affectueux dévouement en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Respects à M gr et à son entourage.<br />

1201 à M. Maignen<br />

Invitation pressante à une réunion du Conseil. Que M. Maignen paie ses <strong>de</strong>ttes sans retard.<br />

Vaugirard, 23 avril 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous rappelle que nous aurons Conseil <strong>de</strong>main mercredi, à 2h.1/2; nʹy manquez<br />

pas; vous étiez absent au <strong>de</strong>rnier Conseil que nous avons eu, cʹest regrettable.<br />

Le couvreur se plaint amèrement du tort que vous lui faites par le retard excessif<br />

que vous apportez à le payer; il me semble quʹil serait urgent <strong>de</strong> faire cesser ces plaintes,<br />

malheureusement trop motivées.<br />

Bénissons Dieu pour les fruits obtenus par nos retraites; ils ont encore dépassé les<br />

résultats ordinaires.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1202 à M. Caille<br />

Un frère donné (sans vœux). Besoin <strong>de</strong> nouvelles recrues. Ne pas entreprendre <strong>de</strong> nouvelle œuvre sans nouveau<br />

personnel.<br />

Vaugirard, 25 avril 1867<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

M. Bor<strong>de</strong>c [Paul Bor<strong>de</strong>cq, dit Paulin], que nous attendions tout au plus pour la re‐<br />

traite, nous est arrivé hier; puisque le voilà, nous allons voir à lʹessai sʹil peut rendre quel‐<br />

ques services; on lʹemploie à différents travaux dʹordre et <strong>de</strong> propreté, pour préparer le lo‐<br />

gement <strong>de</strong>s frères; je lʹai averti que, sʹil reste <strong>avec</strong> nous, il sera seulement frère donné, cʹest‐<br />

à‐dire sans vœux.<br />

Nous attendrons les jeunes gens dont vous nous annoncez lʹarrivée pour le moment<br />

<strong>de</strong> la retraite. Il nous serait aussi bien nécessaire dʹavoir comme recrues quelques hommes<br />

capables et sûrs pour fortifier plusieurs maisons qui sont trop peu soli<strong>de</strong>s, à cause <strong>de</strong> la<br />

jeunesse ou <strong>de</strong> lʹinexpérience <strong>de</strong> quelques‐uns <strong>de</strong> leurs sujets.<br />

Je ne puis mʹempêcher dʹavoir quelque inquiétu<strong>de</strong> au sujet <strong>de</strong> vos <strong>de</strong>sseins pour le<br />

patronage St ‐Jacques, car nous nʹavons pas <strong>de</strong> sujet capable et consistant pour cette œuvre,<br />

1191


et comment pourrait‐elle se constituer si elle nʹa une tête qui la sache diriger? Vous et M.<br />

Marcaire avez déjà plus <strong>de</strong> charges que vous nʹen pouvez porter.<br />

Nous verrons <strong>avec</strong> plaisir M. Masson, sʹil vient en nos quartiers.<br />

M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] vous prie <strong>de</strong> lui envoyer par nos frères venant à la re‐<br />

traite une vingtaine <strong>de</strong> mètres dʹanacoste noir, gran<strong>de</strong> largeur, comme vous nous en four‐<br />

nissez dʹordinaire; cette étoffe sera employée pour paletots dʹété et pour soutanes.<br />

Assurez nos ff. <strong>de</strong> nos cordiales affections et recevez‐en vous‐même bien particuliè‐<br />

rement lʹassurance.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1203 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Réponses au sujet <strong>de</strong> points <strong>de</strong> détails. Remerciements à <strong>de</strong>s bienfaitrices. Nouvelles <strong>de</strong>s frères séminaristes.<br />

ʺTout se soutient, non par nous, mais par le souffle <strong>de</strong> Dieuʺ.<br />

Vaugirard, 26 avril 1867<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous avons vu M. Trousseau à son passage ici, jʹai été content <strong>de</strong> ses dispositions;<br />

nous lʹattendons à son retour et converserons plus amplement <strong>avec</strong> lui; je lui ai dit que 8<br />

jours pour son voyage dʹOrléans me semblaient bien assez.<br />

Les questions traitées dans votre lettre sont graves; il serait peut‐être difficile <strong>de</strong> les<br />

trancher sans sʹentendre <strong>de</strong> vive voix; je pense quʹaprès notre retraite, M. Lantiez pourrait<br />

aller passer quelques jours à Arras pour examiner toutes choses et nous bien renseigner à<br />

son retour. Vous verrez sʹil vaut mieux le dire à M. Roussel ou vous réserver <strong>de</strong> voir avant,<br />

tout à lʹaise, M. Lantiez, afin dʹavoir <strong>de</strong>s vues nettes à présenter, soit à lui, soit à Mgr .<br />

Nous verrons <strong>avec</strong> joie M. Guillot avant et pendant la retraite; le tour <strong>de</strong> notre cher<br />

Ad. Lainé viendra un peu plus tard.<br />

Je suis la neuvaine pour votre cher frère qui est ordinairement nommé dans les re‐<br />

commandations du soir. Je prierai aussi <strong>avec</strong> vous St Joseph pour quʹil vous soit en ai<strong>de</strong>.<br />

Remerciez beaucoup votre bonne mère pour son envoi <strong>de</strong>s 100f <strong>de</strong>stinés aux clercs;<br />

que Dieu les lui ren<strong>de</strong>! Il semble quʹIl la paie <strong>avec</strong> son plus précieux trésor, la croix; cʹest<br />

quʹelle est assez unie à Lui pour en savoir la valeur; nous compatissons à ses épreuves et<br />

douleurs.<br />

Je ne me souviens pas si Mme <strong>de</strong> Rœ<strong>de</strong>rer vous avait promis une souscription conti‐<br />

nuée et si vous lʹavez reçue cette année.<br />

M. Chaverot et les tonsurés dʹIssy vont bien, ainsi que les scolastiques <strong>de</strong> Chaville et<br />

autres lieux; en ensemble, tout se soutient, comme nous‐mêmes, non par nous, mais par le<br />

souffle <strong>de</strong> Dieu.<br />

Demeurons en Lui; ailleurs ni force, ni paix, ni espérance, ni amour.<br />

Je reste à ce <strong>de</strong>rnier mot; cʹest bien finir <strong>avec</strong> vous et <strong>avec</strong> vos ff., mon bien cher ami<br />

et fils en N.S.<br />

Votre Père et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1192


1204 à M. dʹArbois<br />

Donner davantage <strong>de</strong> nouvelles sur la vie <strong>de</strong> lʹŒuvre dʹAngers. MLP. communique quelques informations sur<br />

les fêtes <strong>de</strong> Pâques, la retraite, les santés.<br />

Vaugirard, 26 avril 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Les nouvelles dʹAngers se font rares; je pense bien que la préparation <strong>de</strong>s fêtes <strong>de</strong><br />

Pâques et la construction <strong>de</strong> votre chapelle, jointes au courant <strong>de</strong> vos travaux ordinaires,<br />

nʹont pas laissé que <strong>de</strong> vous absorber beaucoup.<br />

Je vous serai obligé <strong>de</strong> nous dire quel frère ou frères vous vous proposez dʹenvoyer<br />

à la retraite (5 mai).<br />

Avez‐vous été satisfait <strong>de</strong>s résultats <strong>de</strong> vos retraites pour vos œuvres?<br />

Où en est votre chapelle, et les ressources pour la bâtir viennent‐elles en proportion<br />

<strong>avec</strong> les dépenses?<br />

Votre bon père vient‐il définitivement vous rendre visite?<br />

Je <strong>de</strong>vrais, en pendant <strong>de</strong> toutes ces questions, vous dire un certain nombre <strong>de</strong> faits<br />

qui puissent vous intéresser, en ce qui touche notre petite famille.<br />

M. Paul [Baffait] reste souffrant <strong>de</strong>puis 6 semaines assez gravement pour nous in‐<br />

quiéter; on le trouve mieux, cependant il a toujours la fièvre, gar<strong>de</strong> le lit <strong>avec</strong> une faiblesse<br />

extrême. On ne sait pas bien quel est son mal.<br />

M. Caille envoie à la retraite <strong>de</strong>ux ou trois jeunes postulants. M. Risse en a un ou<br />

<strong>de</strong>ux en examen à Metz.<br />

Nous avons eu partout dʹexcellents résultats pour les fêtes <strong>de</strong> Pâques, plus satisfai‐<br />

sants encore que <strong>de</strong> coutume; que Dieu en soit béni!<br />

Le frère <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax paraît approcher <strong>de</strong> sa fin.<br />

M. Victor Trousseau, appelé à Orléans pour une petite affaire <strong>de</strong> famille, nous a vi‐<br />

sités en passant; nous lʹattendons pour un séjour <strong>de</strong> quelques jours quʹil doit faire en sʹen<br />

retournant à Arras.<br />

Je reste faible, marchant mal et presque point; je pourrais être encore beaucoup plus<br />

mal, la situation est donc supportable.<br />

Prions bien les uns pour les autres, afin que Dieu nous gar<strong>de</strong> à son service et nous<br />

ren<strong>de</strong> plus dignes du choix quʹIl a fait <strong>de</strong> nous.<br />

Adieu, bien cher ami; tous ici sont vôtres et nʹont quʹun cœur et quʹune âme <strong>avec</strong><br />

vous et <strong>avec</strong> vos frères.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1205 à M. Caille<br />

Renouvellement <strong>de</strong>s vœux pour le frère Jouin. MLP. donne son appréciation sur la position <strong>de</strong> lʹInstitut à<br />

Amiens ; les difficultés quʹil entrevoit si lʹon ouvrait un nouveau patronage.<br />

Vaugirard, 30 avril 1867<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Il est vrai que M. Ch. Jouin a <strong>de</strong>s vœux à renouveler à la retraite qui va sʹouvrir,<br />

mais, si son absence doit vous être incommo<strong>de</strong> présentement et si vous présumez quʹil<br />

1193


puisse plus aisément sʹéloigner pour quelques jours au mois dʹoctobre, je lʹautoriserais à<br />

les faire en particulier pour six mois ou pour un an, selon quʹil semblera plus opportun.<br />

Vous avez compris, mon cher ami, que si je vous ai fait quelques observations au<br />

sujet <strong>de</strong> lʹouverture du patronage S t ‐Jacques, que vous semblez regar<strong>de</strong>r comme arrêtée<br />

pour une époque très rapprochée, ce nʹest pas que nous nʹappréciions lʹutilité <strong>de</strong> cette œu‐<br />

vre. Mais il nous semble sage <strong>de</strong> ne rien précipiter, dʹavoir réuni les moyens indispensa‐<br />

bles, en personnel surtout, pour la faire marcher régulièrement et sans détriment pour le<br />

patronage qui est déjà existant.<br />

Cette nouvelle maison nʹest pas la propriété <strong>de</strong> la Communauté. Si elle est conduite<br />

par dʹautres que par nos ff., elle se posera bientôt en rivalité <strong>avec</strong> celle <strong>de</strong> la rue <strong>de</strong> Noyon.<br />

Non seulement elle voudra entrer en partage du produit <strong>de</strong> la loterie, mais, comme elle se‐<br />

ra sans doute plus directement sous la main <strong>de</strong>s Conférences, elles se montreront partiales<br />

pour elle. Nous voyons un danger réel et les difficultés inévitables pour lʹavenir dans la<br />

fondation dʹun nouveau patronage, dans <strong>de</strong>s conditions différentes <strong>de</strong> celles qui existent<br />

pour le premier. Notre Communauté est extrêmement peu posée à Amiens, parce que<br />

nous nʹy avons pas <strong>de</strong> prêtre et que toutes choses y ont été créées ostensiblement par vous<br />

plutôt que par la Communauté; lʹavenir est donc peu ou point du tout préparé par nous à<br />

Amiens, si on avance dans un sens qui tendra à nous annuler davantage. Cʹest préparer en<br />

même temps notre éloignement dʹAmiens et peut‐être la ruine <strong>de</strong>s œuvres elles‐mêmes. Je<br />

vois <strong>avec</strong> peine que vous semblez plutôt tendre à faire le nouveau patronage quʹà le faire<br />

<strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> nous. Je ne désire pas pour nous <strong>de</strong> nouvelles œuvres, car nous en avons<br />

déjà assez pour ne les faire quʹimparfaitement; mais nous souhaitons tous <strong>de</strong> ne pas voir<br />

les choses se poser en <strong>de</strong>s conditions telles quʹen créant une nouvelle maison, on préjudicie<br />

à celle qui existe déjà dans la même ville, en nuisant encore à lʹassiette et à lʹavenir <strong>de</strong> la<br />

Communauté.<br />

M. Lantiez doit aller à Arras après la retraite, il pourra vous voir en passant; je dési‐<br />

rerais que vous ne décidiez rien relativement au patronage S t ‐Jacques avant <strong>de</strong> vous être<br />

entretenu <strong>avec</strong> lui.<br />

Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Nʹoubliez point <strong>de</strong> joindre la facture à lʹenvoi <strong>de</strong> lʹétoffe.<br />

1206 à M. Caille<br />

Témoignage <strong>de</strong> confiance et dʹamiité.<br />

11 mai 1867<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Jʹespère que vous nʹaurez rien trouvé <strong>de</strong> pénible dans les observations que je vous<br />

faisais dans ma <strong>de</strong>rnière lettre. Je les ai imparfaitement énoncées, mais soyez sûr quʹen<br />

nous expliquant, vous verrez quʹau fond nous sommes sur ce point, comme en tout le<br />

reste, dans les mêmes sentiments.<br />

Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> faire un petit changement dans votre personnel; je ne le pro‐<br />

pose que bien assuré <strong>de</strong> ne faire aucun tort à vos œuvres et <strong>de</strong> vous donner au moins<br />

1194


lʹéquivalent du frère que je vous retire. M. Lucien Jacquart est un excellent frère ayant déjà<br />

lʹexpérience, dans une certaine mesure, du patronage; il pourra ai<strong>de</strong>r utilement M. Mar‐<br />

caire. Celui‐ci vous expliquera mieux cet arrangement.<br />

Merci pour les étoffes, elles sont un acompte sur la subvention du Noviciat.<br />

Mille affections à vous et à vos frères.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1207 à M. Trousseau<br />

Deman<strong>de</strong> <strong>de</strong> renseignements sur un aspirant. M. <strong>de</strong> Varax est absent, à cause du décès <strong>de</strong> son frère.<br />

Vaugirard, 14 mai 1867<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je pense que M. <strong>de</strong> Varax est absent peut‐être, à cause <strong>de</strong> lʹaffliction qui vient <strong>de</strong><br />

frapper sa famille. Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> dire que nous y prenons part tous ici; jʹai offert ce<br />

matin la Ste Messe à cette intention, M. Lantiez et ces autres MM. ecclésiastiques le font<br />

également.<br />

Je pense bien que, si M. <strong>de</strong> Varax est parti pour Lyon, jʹaurai bientôt <strong>de</strong> ses nouvel‐<br />

les.<br />

M. Abel Salmon mʹa écrit pour me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à entrer dans la Communauté; je me<br />

souviens bien que vous mʹavez parlé <strong>de</strong> lui, mais je crois me rappeler que ce nʹétait pas fa‐<br />

vorablement, du moins au point <strong>de</strong> vue dʹune sérieuse vocation. Comme il faut que je lui<br />

répon<strong>de</strong> sans trop <strong>de</strong> retard, je vous prie <strong>de</strong> mʹécrire, en quatre mots seulement, ce que<br />

vous pensez au sujet <strong>de</strong> son entrée chez nous. Son séjour, pendant plusieurs années, dans<br />

une autre Congrégation est déjà une cause <strong>de</strong> défaveur.<br />

M. Chaverot a envoyé hier quelques livres à lʹadresse <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax; je vous les<br />

enverrai par la plus prochaine occasion.<br />

Adieu, mon bien cher ami; assurez notre cher M. Guillot et notre petit f. Lainé <strong>de</strong><br />

tous mes sentiments bien affectueux. Faites aussi votre part, elle y est assurément.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1208 393<br />

1209 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Questions touchant la famille <strong>de</strong> Varax. Prédications à Arras. Brèves nouvelles.<br />

Vaugirard, 28 mai 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je réponds brièvement aux <strong>de</strong>ux points essentiels <strong>de</strong> votre lettre, afin <strong>de</strong> ne pas ris‐<br />

quer <strong>de</strong> différer cette missive. Il me semble que vous avez, pour les affaires dont vous a<br />

entretenu Mme votre mère, un peu <strong>de</strong> répit, car elle doit voir M. Bartholy [Berloty] <strong>de</strong> Lyon;<br />

393 Suppléée par la lettre 1259 bis.<br />

1195


il y a gran<strong>de</strong> chance quʹelle reçoive <strong>de</strong> ce côté un avis favorable et quʹensuite, en se rappro‐<br />

chant <strong>de</strong> la famille <strong>de</strong> votre frère, elle soit amenée, par quelques occasions toutes naturel‐<br />

les, à donner les éclaircissements qui seraient nécessaires, paraît‐il, pour prévenir <strong>de</strong>s ma‐<br />

lentendus. Je parle ici un peu par conjecture, car les termes <strong>de</strong> la lettre <strong>de</strong> M me <strong>de</strong> Varax<br />

contenant beaucoup <strong>de</strong> sous‐entendus, intelligibles pour vous aisément, je nʹai quʹen partie<br />

saisi les difficultés <strong>de</strong> la position; jʹen suis presque aise, parce que si M me <strong>de</strong> Varax, vous<br />

pressant un peu, <strong>de</strong>mandait précisément si vous mʹavez entretenu <strong>de</strong> ces choses intimes,<br />

vous pourriez <strong>avec</strong> raison répondre: Jʹai essayé <strong>de</strong> lui en donner sommairement une idée,<br />

mais il a à peine compris.<br />

Quoiquʹil en soit, jʹentrevois assez que votre présence serait agréable, probablement<br />

utile, mais il me semble quʹun peu <strong>de</strong> temporisation, si elle nʹest pas impossible absolu‐<br />

ment, permettrait aux choses <strong>de</strong> sʹéclaircir comme dʹelles‐mêmes et quʹen même temps, le<br />

calme revenant dans les esprits, on sentirait moins le besoin <strong>de</strong> vous appeler <strong>de</strong> nouveau;<br />

en tout cas, lʹabsence se pourrait mesurer selon les besoins <strong>de</strong> votre maison dʹArras. Je<br />

pense que M. Lantiez pourra saisir le moment où M gr dʹArras fera une apparition à travers<br />

ses visites pastorales; M. Roussel pourrait peut‐être vous assurer si M gr serait à même <strong>de</strong><br />

recevoir M. Lantiez, afin quʹil ne fît point un voyage inutile: lʹordination et la première<br />

communion ne peuvent guère se faire sans vous. Tâchez <strong>de</strong> subvenir à tout, sans contrister<br />

votre bonne mère et sans accroître ses embarras; vous allez voir plus clair, sans doute, dʹici<br />

à quelque temps.<br />

Pour la prédication, je crois quʹil serait mieux, selon la règle, <strong>de</strong> ne pas accepter, et<br />

que M. le Curé comprendra que ce qui est dans notre position est le plus parfait pour<br />

nous; si pourtant ce bon Curé était blessé <strong>de</strong> votre refus, cé<strong>de</strong>z en le suppliant <strong>de</strong> ne plus<br />

vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r.<br />

Rien <strong>de</strong> neuf ici: un ou <strong>de</strong>ux ou 3 postulants, bons, je lʹespère, par les côtés essen‐<br />

tiels, fort inexpérimentés dʹailleurs et ne pouvant valoir que dans lʹavenir. Promena<strong>de</strong> très<br />

aimable après la retraite (le mercredi 22) sur la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> du r.p. Leblanc. Toute la famille<br />

réunie à Chaville, en cordiale effusion.<br />

M. Hello partira, je crois, le 11 juin 394 il règle ses moyens pour son remplaçant. M.<br />

Be<strong>de</strong>l est son compagnon <strong>de</strong> voyage, mais, à moins <strong>de</strong> miracle, nʹen augurez rien pour un<br />

rapprochement vers nous, lʹArchevêché refuse absolument <strong>de</strong> sʹen <strong>de</strong>ssaisir. Pour lui, je<br />

crois quʹil nʹy songe aucunement.<br />

M. Lantiez est revenu content <strong>de</strong> son voyage; sʹil retourne, montrez‐lui bien le faible<br />

autant que le fort; il nous importe <strong>de</strong> tout voir pour bien juger.<br />

Il me semble que nous <strong>de</strong>vons ne rien vouloir et chercher simplement la volonté <strong>de</strong> Dieu.<br />

M. Laroche mʹa écrit récemment <strong>de</strong> sa cure où il sʹinstalle <strong>de</strong> plus en plus, paroles<br />

bienveillantes dʹailleurs et encourageantes sur le bien que la Communauté opère à Arras.<br />

Cʹest bien en ce sens que cette correspondance <strong>de</strong>vait être conçue.<br />

Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S., mille affections <strong>de</strong> cœur pour vous et pour vos ff.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

394 Le Père Hello allait à Rome pour les fêtes du 18 e centenaire <strong>de</strong> St Pierre et St Paul, et <strong>de</strong> la canonisation <strong>de</strong>s martyrs japonais :<br />

« L’aumônier <strong>de</strong> Nazareth boit Rome, il s’en laisse imbiber « comme une éponge dans l’eau ». Il est enthousiasmé : «Un départ <strong>de</strong><br />

Rome est bien triste, on ne peut s’arracher à la douce ville, quand on a la connaît. Les splen<strong>de</strong>urs <strong>de</strong> la fête étaient passées : elles<br />

passent même à Rome. Il n’y a que la fête du ciel qui ne passera pas.» Cf. le père Hello à MLP. Rome, 23 juin 1867 ASV. et VLP.<br />

II, p.275.<br />

1196


1210 à M. Chaverot<br />

Rapports <strong>avec</strong> la famille, au sujet dʹun séjour après lʹordination.<br />

Vaugirard, 4 juin 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je voulais vous renvoyer sans retard la lettre <strong>de</strong> votre bonne mère, je nʹen ai pas<br />

trouvé le moment. Si vous ne venez pas <strong>de</strong>main nous voir, en vous rendant à Issy, je vous<br />

la ferai parvenir <strong>avec</strong> ce mot.<br />

Je crois que vous pourriez répondre à cette bonne mère quʹil vous est impossible <strong>de</strong><br />

prévoir encore comment se passera pour vous le temps <strong>de</strong>s vacances, que quelques mots,<br />

saisis en passant, vous laissent penser que votre ordination pourrait avoir lieu au mois <strong>de</strong><br />

septembre; quʹen ce cas, quelques étu<strong>de</strong>s qui vous restent encore à faire et la nécessité <strong>de</strong><br />

vivre en retraite comme préparation, sans vous priver <strong>de</strong> voir durant quelque temps votre<br />

chère famille, pourraient néanmoins vous obliger à une rési<strong>de</strong>nce un peu prolongée, soit<br />

au Séminaire, soit à la Communauté; quʹon peut, en tout cas, bien compter que vous ferez<br />

tout ce qui se pourra pour donner la part aux affections comme aux <strong>de</strong>voirs <strong>de</strong> votre posi‐<br />

tion. Jʹindique le sens en général, la forme vous appartiendra entièrement (affectueuse, ce‐<br />

la va sans dire).<br />

M. dʹArbois recomman<strong>de</strong> gran<strong>de</strong>ment à vos prières la retraite annuelle <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong>s<br />

Champs qui se donne présentement.<br />

Il y a bien longtemps que nous ne vous avons vu, jʹen sens souvent comme une<br />

sorte <strong>de</strong> malaise. Le 27 juin, heureusement, nʹest pas loin.<br />

Adieu, bien cher ami, partagez nos affections <strong>avec</strong> nos chers ff. qui nous entourent.<br />

Votre ami et Père<br />

dans les Cœurs divins <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1211 à M. dʹArbois<br />

A propos <strong>de</strong> la vocation du frère Ladouce. Rapports à entretenir <strong>avec</strong> la famille; fonds provenant <strong>de</strong>s parents<br />

dʹArbois. Prochain voyage à Rome du père Hello. Un père Jésuite prédicateur <strong>de</strong>s retraites du mois.<br />

Vaugirard, 6 juin 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous ai écrit, en effet, une assez longue lettre durant la retraite; je regrette quʹelle<br />

ne vous soit pas parvenue. Je ne me souviens pas bien <strong>de</strong> son contenu. Je vous disais que<br />

nous avions été contents <strong>de</strong> M. Ladouce, qui avait bien suivi la retraite et nʹavait pas mon‐<br />

tré pour la vie <strong>de</strong> communauté lʹéloignement où je craignais <strong>de</strong> le trouver. Ses bons pa‐<br />

rents le soutiennent bien, nous lui avons montré <strong>de</strong> lʹaffection, il nous a semblé quʹil y ré‐<br />

pondait; il espère être ramené à Vaugirard aux vacances; sans mʹy engager, je nʹai pas dit<br />

non; je pense que ce sera praticable.<br />

Je me rappelle aussi que, vous parlant du prochain voyage <strong>de</strong> votre bon père, je ré‐<br />

pondais à lʹinquiétu<strong>de</strong> où vous étiez quʹil ne vous interrogeât sur lʹemploi <strong>de</strong>s sommes<br />

quʹil vous envoyait. Il me semblait que vous lui répondriez vraiment et à sa satisfaction:<br />

nous nous assistons réciproquement; quand jʹai momentanément un peu plus que le né‐<br />

cessaire, jʹai<strong>de</strong> un peu la Maison‐Mère qui, à son tour, me donne appui en tous mes be‐<br />

1197


soins et en toute occasion pressante; cette réciprocité est la force <strong>de</strong>s communautés qui, au‐<br />

trement, ne pourraient rien entreprendre dʹimportant et <strong>de</strong> sérieux.<br />

Nous prions bien tous pour votre retraite, je lʹai recommandée à plusieurs <strong>de</strong> nos<br />

maisons <strong>de</strong> province; dans le mois du Sacré Cœur, elle réussira assurément.<br />

On me dit que M gr dʹAngers est venu à Paris, se rendant à Rome, mais en transition<br />

seulement; je pense quʹà mon retour il stationnera un peu. M. Hello, pour quelques raisons<br />

particulières, ira peut‐être faire aussi une apparition à Rome. Si vous aviez quelques pou‐<br />

voirs à <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r, il faudrait vous hâter <strong>de</strong> lui écrire.<br />

Tout va ici comme <strong>de</strong> coutume; le r.p. <strong>de</strong> Boylesve a été désigné, sur notre <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>, par le r.p. Provincial (le p. <strong>de</strong> Ponlevoy) pour nous faire chaque mois quelques ins‐<br />

tructions spirituelles et religieuses; <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z à Dieu que nous en profitions bien.<br />

Adieu, mon bien bon ami, recevez pour vous et pour vos frères tous mes sentiments<br />

les plus tendrement dévoués.<br />

Votre ami et Père dans les Cœurs Sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. M. et M me Cosnier, qui nous ont visités aujourdʹhui, disent beaucoup <strong>de</strong> bien <strong>de</strong><br />

N.D. <strong>de</strong>s Champs.<br />

1212 à M. Decaux<br />

Témoignage dʹaffection et assurance <strong>de</strong> prières à lʹoccasion <strong>de</strong> son mariage.<br />

Vaugirard, 7 juin 1867<br />

Mon bien bon ami,<br />

Je voulais vous dire plus tôt combien je prends part au grave et intéressant événe‐<br />

ment que vous mʹavez annoncé par votre lettre du 5 <strong>de</strong> ce mois; jʹen ai été empêché par<br />

beaucoup <strong>de</strong> dérangements et aussi par <strong>de</strong>s malaises <strong>de</strong> santé.<br />

Je me réjouis dʹune disposition qui va compléter votre vie, vous créer un intérieur,<br />

et donner un nouvel aliment à toutes les puissances dʹaffection et <strong>de</strong> dévouement que Dieu<br />

a mises en vous. Croyez bien que je ne me bornerai point à ces sentiments <strong>de</strong> vive sympa‐<br />

thie, mais que je prierai le Seigneur, au St Sacrifice particulièrement, pour votre bonheur et<br />

pour la femme si digne et si hautement chrétienne qui va associer son existence à la vôtre.<br />

Veuillez bien lui faire agréer le respect dʹun <strong>de</strong> vos plus vieux amis, et recevoir<br />

vous‐même lʹassurance <strong>de</strong> mon profond attachement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong> ptre 1213 à M. Maignen<br />

Sollicitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> MLP. pour un jeune frère mala<strong>de</strong>, qui a grand besoin <strong>de</strong> ménagements.<br />

Vaugirard, 13 juin 1867<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

On me dit que notre jeune Streicher est souffrant et très fatigué, que les maux dʹes‐<br />

tomac qui lʹont autrefois si fortement éprouvé sont revenus et que néanmoins ses travaux<br />

lʹobligent à veiller et à épuiser ses forces, au lieu <strong>de</strong> prendre quelques ménagements.<br />

1198


M. Paillé ayant sans résultat employé son autorité pour lui faire prendre un peu <strong>de</strong><br />

repos, je vous prie <strong>de</strong> faire en sorte, même en lui retirant momentanément les emplois qui<br />

le chargent ainsi, quʹil ait le repos dont il a un impérieux besoin. Sʹil nʹen était pas ainsi, il<br />

me faudrait lʹenvoyer absolument se remettre à Chaville ou le rappeler à Vaugirard.<br />

Je pense, mon cher ami, que vous allez prendre au sérieux cette recommandation et<br />

veiller à ce que le jeune frère prenne un soin convenable <strong>de</strong> sa santé.<br />

Votre ami et Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1214 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

M. Lantiez, <strong>de</strong> retour dʹArras. M gr Lequette désireux <strong>de</strong> fermer lʹécole, étant dans lʹimpossibilité dʹen assurer les<br />

charges financières. MLP. conseille <strong>de</strong> temporiser.<br />

Vaugirard, 18 juin 1867<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Lantiez nous est arrivé ce matin, mais je lʹai à peine vu, il <strong>de</strong>vait se rendre à Gre‐<br />

nelle; vous mʹavez dit, en ensemble, le fond <strong>de</strong> son entretien <strong>avec</strong> Mgr dʹArras; il me semble<br />

quʹil nʹen résulte rien <strong>de</strong> bien précis, et nous ne pourrons arriver à une conclusion précise<br />

quʹaprès le retour <strong>de</strong> Mgr Lequette.<br />

Peut‐être vous satisferiez vos professeurs en leur disant que votre décision à leur<br />

égard ne sera pas différée au <strong>de</strong>là <strong>de</strong> ce terme. Il importe <strong>de</strong> ne point les décourager, si<br />

vous <strong>de</strong>viez encore avoir besoin <strong>de</strong> leurs services, ce qui pourrait arriver si, en définitive,<br />

nous <strong>de</strong>vions rester à Arras. Quant à lʹopposition <strong>de</strong> Mgr au pensionnat, elle ne porte, en<br />

apparence, que sur le point financier et elle ne persisterait point dans le cas où, prenant la<br />

responsabilité <strong>de</strong> cette partie <strong>de</strong> lʹœuvre, nous ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rions appui réel et déterminé<br />

que pour le patronage et pour le personnel le <strong>de</strong>sservant.<br />

Je serais heureux assurément que vous pussiez vous reposer un peu en paix à Cha‐<br />

ville. Vous verrez vous‐même à quel moment vous le feriez sans trop dʹinconvénient; le<br />

temps <strong>de</strong> la fermeture <strong>de</strong> lʹécole serait assurément le meilleur, mais cʹest bien loin encore;<br />

peut‐être quʹaprès la sortie dʹIssy, M. Leclerc ou M. Pattinote, ou tous les <strong>de</strong>ux, en allant<br />

porter ai<strong>de</strong> à M. Trousseau, pourraient rendre votre absence moins sensible; pour M. Cha‐<br />

verot, je crois quʹon nʹy pourrait compter, divers obstacles <strong>de</strong>vant sʹy opposer, surtout si<br />

son ordination est avancée.<br />

Adieu, mon bien cher enfant en N.S., que la divine Bonté daigne vous assister et bé‐<br />

nir vous, vos ff., vos enfants et toutes vos œuvres.<br />

Votre ami et Père affectionné en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1215 à M. Trousseau<br />

M. Trousseau admis aux ordres mineurs. Dans la vie religieuse et sacerdotale, il faut un don total <strong>de</strong> soi‐même. Il<br />

y a <strong>de</strong>s heures décisives dans la vie spirituelle. Ce quʹil faut faire alors. Nouvelles <strong>de</strong>s frères.<br />

Vaugirard, 18 juin 1867<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je prends part aux saintes joies que le Seigneur a répandues dans votre âme à lʹoc‐<br />

casion <strong>de</strong> votre admission aux ordres mineurs. On ne saurait douter que ce bon Maître<br />

1199


nʹait apparu au fond <strong>de</strong> votre cœur, puisquʹIl y a laissé le signe le plus certain <strong>de</strong> son ac‐<br />

tion en vous: un sentiment profond dʹhumilité, un désir ar<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> lʹacquérir, une vue nette<br />

<strong>de</strong>s précieux biens quʹelle nous procure. Heureux serez‐vous, bien cher ami, si cette douce<br />

et divine impression est durable et si elle vous porte à travailler efficacement pour mainte‐<br />

nir votre esprit dans cette sainte disposition. On peut penser que cette lumière plus vive<br />

qui a lui à vos yeux est une grâce <strong>de</strong> choix que le Seigneur vous a réservée pour ce beau<br />

jour <strong>de</strong> lʹordination et, comme vous le remarquerez, cʹest la grâce propre au <strong>de</strong>gré <strong>de</strong>s or‐<br />

dres où vous étiez admis. Quel bon augure pour lʹavenir! Notre Seigneur ne semble‐t‐il<br />

pas vous avoir dit: Faites valoir, mon cher fils, le talent que je vous confie aujourdʹhui, et<br />

plus tard, si vous avez été fidèle, dʹautres talents plus abondants vous seront bientôt ac‐<br />

cordés. Courage, cher ami, ces promesses sont trop encourageantes pour que vous ne fas‐<br />

siez pas résolument un pas décisif qui vous assoira dans lʹhumilité et dans une généreuse<br />

abnégation. Dans la vie commune ou séculière, <strong>de</strong>s vertus ordinaires peuvent suffire; mais<br />

dans lʹordre purement surnaturel, dans la vie religieuse et sacerdotale, <strong>de</strong>s vertus émi‐<br />

nemment franches, généreuses sont seules <strong>de</strong> mise; une <strong>de</strong>mi‐consécration, un don in‐<br />

complet <strong>de</strong> soi‐même ne sauraient suffire ni répondre à la gran<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> la position.<br />

Jʹabon<strong>de</strong> bien dans votre sens, cher ami, et jʹinsiste à <strong>de</strong>ssein sur les affections si<br />

cordiales que contient votre lettre, parce que je sais, par une longue expérience, quʹil est<br />

<strong>de</strong>s heures décisives dans la vie spirituelle où Dieu parle haut à notre âme; si nous répon‐<br />

dons à lʹappel, si nous sommes fidèles à la grâce, nous entrons dans un mon<strong>de</strong> supérieur<br />

et nous nous y assoyons définitivement. Quel bonheur ne serait‐ce pas pour vous si ce<br />

moment était venu et si vous saisissiez la main que le doux Maître a tendue vers vous! Jʹen<br />

ai la confiance et je vais faire prier pour vous à cette intention. Faites effort pour vous sou‐<br />

tenir. Ne vous déconcertez pas si quelques petits fléchissements reviennent parfois; rele‐<br />

vez‐vous vite et avancez toujours, vous arriverez au but.<br />

M. Lantiez nous rapporte <strong>de</strong> bonnes nouvelles <strong>de</strong> toute votre maison; cʹest une joie<br />

pour nous. Nos frères vont assez bien ici également, sauf M. Paul [Baffait] qui reste lan‐<br />

guissant à Chaville et se remet péniblement.<br />

Nous attendons nos Issyens pour le 27 et M. Chaverot pour le 30. Bientôt le person‐<br />

nel ecclésiastique sera plus imposant autour <strong>de</strong> nous. Nous avons vu ces jours‐ci M. <strong>de</strong>s<br />

Francs; il mʹa dit confi<strong>de</strong>ntiellement que le jeune M. Savigny, qui est présentement à Pithi‐<br />

viers dans une maison <strong>de</strong> commerce, sʹétait ouvert à lui sur son désir arrêté dʹentrer parmi<br />

nous. Il doit venir faire une retraite chez nous au mois <strong>de</strong> septembre pour régler cet arran‐<br />

gement. Il faut être discret à cause <strong>de</strong> son père qui incline peu aux vocations religieuses.<br />

Espérons quʹil répondra si Dieu lʹappelle; on dit quʹil a dans le caractère un peu dʹindécision.<br />

Votre ami et Père en J. et M. Le <strong>Prevost</strong><br />

1216 à M. Chaverot<br />

Dispositions préparatoires à son ordination.<br />

Vaugirard, 29 juin [1867]<br />

(Sts Pierre et Paul)<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous nous consolons <strong>de</strong> votre longue absence en pensant quʹelle touche à sa fin.<br />

Remerciez bien vivement <strong>de</strong> notre part M. Icard <strong>de</strong> ses bienveillantes dispositions<br />

relativement à votre ordination; nous serons heureux si elle peut avoir lieu bientôt.<br />

1200


Je pense que cʹest à Vaugirard que vous resterez habituellement, sauf excursions <strong>de</strong><br />

repos à Chaville aussi souvent quʹil sera nécessaire pour vous donner quelque repos. Il<br />

faudra bien faire quelque petite part à vos bons parents; nous réglerons cela selon les né‐<br />

cessités qui se manifesteront.<br />

M. Abel [Salmon] était parti déjà quand votre lettre est arrivée; je vais lui faire par‐<br />

venir votre billet.<br />

Je trouve bien toutes vos dispositions pour votre petit mobilier <strong>de</strong> St‐Sulpice.<br />

Adieu, bien cher ami; je pense que ce mot sera porté et remis en vos mains par M.<br />

Leclerc.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1216‐1 395 à M gr Jaquemet<br />

Exposé détaillé, fait à lʹévêque <strong>de</strong> Nantes, <strong>de</strong>s raisons pour lesquelles lʹInstitut a cessé <strong>de</strong> payer la pension dʹun<br />

jeune protégé du frère Urvoy <strong>de</strong> St‐Bedan.<br />

2 juillet 1867<br />

Monseigneur,<br />

Jʹai reçu la lettre que Votre Gran<strong>de</strong>ur mʹa fait lʹhonneur <strong>de</strong> mʹécrire le 22 du mois<br />

<strong>de</strong>rnier <strong>avec</strong> une note remise par Me Billot, notaire, concernant la pension que nous avons<br />

payée durant quelques années à votre séminaire pour un jeune protégé <strong>de</strong> M. Urvoy <strong>de</strong> St ‐<br />

Bedan, et qui a cessé dʹêtre acquittée par nous <strong>de</strong>puis le mois dʹoctobre <strong>de</strong>rnier.<br />

Les raisons graves qui nous ont obligé à prendre cette décision ne paraissant pas<br />

avoir été mises sous les yeux <strong>de</strong> Votre Gran<strong>de</strong>ur, je dois lui en faire brièvement lʹexposé.<br />

Les dons qui ont été attribués à nos œuvres par M. Urvoy nous ont été faits par lui,<br />

non à titre <strong>de</strong> succession, mais <strong>de</strong> son vivant, et <strong>avec</strong> sa volonté expresse <strong>de</strong> les consommer<br />

immédiatement. Il est vrai quʹau moment où ses dispositions venaient dʹêtre réglées et<br />

formulées <strong>avec</strong> le plein assentiment <strong>de</strong> sa famille, il est tombé mala<strong>de</strong> et est décédé après<br />

une courte maladie, mais il a maintenu constamment ses libéralités qui étaient déjà réali‐<br />

sées à ses yeux. Il les avait faites, selon notre conviction, sans aucune restriction et nul<br />

dʹentre nous nʹa gardé le moindre souvenir quʹil ait mis aucune condition onéreuse à ses<br />

dons. Loin <strong>de</strong> là, si les résistances <strong>de</strong> notre Communauté nʹy eussent fait obstacle, sa fa‐<br />

mille ne lʹignore pas non plus, M. Urvoy eut avantagé bien plus encore les œuvres.<br />

Cependant M. Billot, intermédiaire <strong>de</strong> ces arrangements, et dont nous respectons la<br />

réputation si méritée comme les sentiments chrétiens, croit pouvoir affirmer que, dans<br />

lʹentretien qui eut lieu entre lui, M. Urvoy et M. Le <strong>Prevost</strong>, il fut convenu verbalement<br />

que notre Communauté se chargerait <strong>de</strong> lʹéducation <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux jeunes protégés <strong>de</strong> M. Urvoy.<br />

Sans vouloir infirmer en rien la parole si autorisée <strong>de</strong> M. Billot, nous déclarons que M. Le<br />

<strong>Prevost</strong> nʹa pas retenu un seul instant la plus légère impression <strong>de</strong> cette circonstance.<br />

Nʹadministrant point seul les intérêts <strong>de</strong> sa Communauté, il rendit compte dès lors à son<br />

Conseil <strong>de</strong>s dispositions réglées pour M. Urvoy et nous pouvons tous témoigner que nulle<br />

mention nʹy fut faite dʹaucune condition concernant ces jeunes protégés.<br />

395 Brouillon <strong>de</strong> MLP. qui a dû être recopié et signé par M. Lantiez.<br />

1201


Plus tard, un <strong>de</strong>s membres du Conseil dut se rendre à Nantes, à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> M.<br />

Billot pour recevoir <strong>de</strong> ses mains les sommes affectées à nos œuvres; ni dans cette occa‐<br />

sion, ni dans aucune <strong>de</strong>s correspondances postérieures <strong>de</strong> M. Billot durant les trois ans qui<br />

suivirent, il ne fut question une seule fois <strong>de</strong> la charge laissée en ce sens à notre Commu‐<br />

nauté. Ce fut seulement après ce long délai que, contre toute attente <strong>de</strong> notre part, une<br />

note assez considérable (<strong>de</strong> 1300f si je ne me trompe) nous fut envoyée. M. Le <strong>Prevost</strong>,<br />

moins souffrant alors quʹaujourdʹhui, exprima notre étonnement à M. Billot <strong>de</strong> cette charge<br />

imposée après coup à notre Congrégation et déclara notre intention <strong>de</strong> ne pas lʹaccepter.<br />

Cependant, sur les instances <strong>de</strong> M. Billot et dʹaprès le sentiment exprimé par M. le Comte<br />

<strong>de</strong> Bouillé, nous consentîmes à prendre cette bonne œuvre non comme obligation <strong>de</strong> jus‐<br />

tice mais comme marque <strong>de</strong> notre respect et <strong>de</strong> notre gratitu<strong>de</strong> envers le bienfaiteur <strong>de</strong>s<br />

orphelins et <strong>de</strong>s pauvres. Notre acceptation fut faite formellement en ces termes.<br />

Je ne saurais trop répéter, Monseigneur, quʹil est aussi loin que possible <strong>de</strong> notre<br />

pensée <strong>de</strong> soupçonner un seul instant la parfaite conviction <strong>de</strong> M. Billot et lʹentière sincéri‐<br />

té <strong>de</strong> ses déclarations; notre confiance, sous ce rapport est absolue mais nous avons dû<br />

considérer quʹil ne sʹagissait en définitive en cette circonstance que dʹimpressions <strong>de</strong> mé‐<br />

moire <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts et quʹen admettant la droiture et la sincérité <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux côtés on ne<br />

pouvait justement attribuer un poids prépondérant plutôt à lʹun quʹà lʹautre. Cʹest en ce<br />

sens que nous nʹavons pu voir dans la réclamation à nous faite, une obligation <strong>de</strong> justice.<br />

Accepté comme acte <strong>de</strong> convenance et <strong>de</strong> gratitu<strong>de</strong>, ce fait a été accompli fidèle‐<br />

ment par nous durant plusieurs années et jusquʹau moment où <strong>de</strong>s far<strong>de</strong>aux multipliés<br />

sont tombés tout à coup sur nous. Notre position, dès lors, est <strong>de</strong>venue si difficile quʹelle<br />

menaçait <strong>de</strong> compromettre lʹexistence <strong>de</strong> nos établissements et <strong>de</strong> préparer une sorte <strong>de</strong><br />

scandale dans le diocèse. LʹArchevêché <strong>de</strong> Paris, inquiet lui‐même <strong>de</strong> cet état <strong>de</strong> choses, a<br />

dû en rendre témoignage à M. votre secrétaire qui a vu récemment lʹun <strong>de</strong> MM. les Vicai‐<br />

res Généraux.<br />

Jʹai fourni déjà, dans une précé<strong>de</strong>nte correspondance, <strong>de</strong>s détails précis qui mon‐<br />

trent tout ensemble la situation critique <strong>de</strong> nos principales œuvres et les sacrifices extrê‐<br />

mes par lesquels nous essayons dʹen empêcher la ruine; je ne crois donc pas, Monseigneur,<br />

quʹil soit nécessaire dʹy insister; non plus que sur quelques appréciations peu justes <strong>de</strong> la<br />

note <strong>de</strong> M. Billot. Au besoin, je mettrais sous vos yeux <strong>de</strong>s documents aussi formels que<br />

possible sur tous ces points.<br />

Si, bien peu connus <strong>de</strong> vous, Monseigneur, nous avions besoin <strong>de</strong> donner à vos<br />

yeux plus <strong>de</strong> poids à notre Institut, je rappellerais la bénédiction si ostensiblement donnée<br />

à nos commencements par M gr Affre, la protection constante <strong>de</strong> M gr Sibour, les bontés et as‐<br />

sistances signalées du C al Morlot, enfin lʹappui que nous accor<strong>de</strong> encore aujourdʹhui M gr<br />

Darboy. Nous pouvons y ajouter le témoignage du vénérable Evêque dʹAngers qui, <strong>de</strong>puis<br />

notre premier jour, nʹa cessé <strong>de</strong> nous suivre <strong>de</strong>s yeux, nous éclairant <strong>de</strong> sa haute expé‐<br />

rience, nous aidant en toute occasion <strong>de</strong> ses conseils.<br />

Je ne sais quel jugement vous formerez, Monseigneur, en suite <strong>de</strong> ce long exposé. Je<br />

déclare en terminant que, conduits au tribunal <strong>de</strong> Votre Gran<strong>de</strong>ur, nous ne déclinerions<br />

pas sa juridiction, nous trouvons en vous, Monseigneur, le Pontife vénérable, le compa‐<br />

gnon fidèle du S t Martyr qui a béni notre berceau; nous nous soumettons dʹavance à sa dé‐<br />

cision.<br />

1202


Nous avons dit notre sentiment sur notre droit, nos embarras présents, les diffi‐<br />

cultés que nous causerait une surcharge nouvelle. Mais si, contre notre attente, Votre<br />

Gran<strong>de</strong>ur juge quʹelle doit malgré tout, nous incomber, nous y subviendrons, fallût‐il pour<br />

cela vendre les vases sacrés, comme nous avons été au moment <strong>de</strong> le faire dans une occa‐<br />

sion récente.<br />

1217 à M. Maignen<br />

Invitation au Conseil. Pièces <strong>de</strong> théâtre pour la distribution <strong>de</strong>s prix à Vaugirard.<br />

[3 juillet 1867]<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Aujourdʹhui, Conseil à 2h.1/2 très précises.<br />

Je vous prie <strong>de</strong> remettre à M. Chaverot une ou <strong>de</strong>ux ou trois petites pièces à choisir<br />

pour notre distribution <strong>de</strong>s prix <strong>de</strong> Vaugirard; nous sommes absolument au dépourvu.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1218 à M. dʹArbois<br />

Joie <strong>de</strong> lʹaccueillir bientôt à Vaugirard. Brèves nouvelles <strong>de</strong> la Communauté.<br />

Vaugirard, 6 juillet 1867<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je viens <strong>de</strong> recevoir votre lettre <strong>avec</strong> les <strong>de</strong>ux billets <strong>de</strong> 100f y inclus.<br />

Nous apprenons <strong>avec</strong> plaisir que vous pourrez nous rendre une petite visite sans<br />

doute prochainement; M. <strong>de</strong> Varax, très fatigué, vient passer quinze jours <strong>avec</strong> nous; il est<br />

à regretter que votre voyage ne soit pas au temps <strong>de</strong>s vacances, où vous auriez pu prolon‐<br />

ger plus aisément votre séjour.<br />

Je recomman<strong>de</strong> aux prières <strong>de</strong> votre communauté la retraite <strong>de</strong> première commu‐<br />

nion <strong>de</strong> nos enfants qui commence <strong>de</strong>main au soir; elle est donnée par M. Codant.<br />

Je ne suis habituellement à Chaville que le dimanche; peut‐être, un peu plus tard, y<br />

pourrai‐je aller le jeudi; nos services présentement ne nous le permettent pas.<br />

M. Hello est heureux à Rome, cependant il sʹy fatigue beaucoup; il sera <strong>de</strong> retour le<br />

14 <strong>de</strong> ce mois.<br />

M. Affichard, ami intime <strong>de</strong> M. Pavie, est un homme excellent, profondément chré‐<br />

tien et <strong>de</strong> cœur élevé; ce sera certainement un ami pour votre maison; rappelez‐moi à son<br />

souvenir.<br />

Lʹune <strong>de</strong>s sœurs <strong>de</strong> notre jeune frère Bérard est assez gravement mala<strong>de</strong> au Bon‐<br />

Pasteur, ce ne sont toutefois que <strong>de</strong>s maux nerveux; peut‐être lʹenvie <strong>de</strong> quitter cette mai‐<br />

son entre un peu dans son mal; si vous aviez quelque occasion dʹavoir <strong>de</strong> ses nouvelles par<br />

lʹaumônier ou autrement, ce serait bien; il faudrait alors les donner ici <strong>avec</strong> mesure à son<br />

frère; il songeait ces jours‐ci à un voyage pour voir ses sœurs, projet qui nous semblerait<br />

peu réalisable.<br />

Adieu, mon bien cher ami et fils en N.S., à bientôt.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1203


1219 à M. Maignen<br />

Plan dʹun dialogue pour la distribution <strong>de</strong>s prix. Souci <strong>de</strong> MLP. dʹéduquer le sens moral <strong>de</strong>s ouvriers et <strong>de</strong>s pauvres.<br />

Vaugirard, 13 juillet 1867<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

M. Emile [Beauvais] est fort embarrassé pour son dialogue <strong>de</strong> la distribution <strong>de</strong>s<br />

prix; il en a examiné plusieurs, il en a fait essayer un, rien ne va. Il est persuadé que Le Ju‐<br />

gement Téméraire <strong>de</strong> M. Wilhem, irait mieux que tout autre; mais il trouve, et je suis <strong>de</strong> son<br />

avis, que cette petite pièce est par trop courte, tourne trop brusquement et ne donne pas,<br />

par là même, satisfaction à lʹesprit. Je pensais quʹon pourrait lʹallonger un peu, à peu près<br />

ainsi:<br />

Au moment où le juge indiscret, détrompé sur ses faux soupçons commence à reve‐<br />

nir et est déjà ébranlé, survient un bon vieillard qui est parvenu à découvrir ses jeunes vi‐<br />

siteurs et qui arrive à eux tout empressé, ayant mille choses à leur dire; sa femme, qui était<br />

mala<strong>de</strong>, vient dʹêtre guérie par les soins dʹun mé<strong>de</strong>cin envoyé par eux; elle commence à<br />

marcher; elle voulait à tout prix les trouver, trop faible encore, elle lʹa pressé <strong>de</strong> les cher‐<br />

cher, elle veut les voir, les remercier; elle pleure <strong>de</strong> joie en parlant dʹeux, elle ne sera<br />

contente que lorsquʹelle les aura vus et bénis pour leur charité qui lʹa sauvée, etc. (Si ce bon<br />

vieillard pouvait nʹêtre pas ridicule, être simple, naïf et touchant dans son langage, il ajou‐<br />

terait un élément dʹintérêt à la pièce).<br />

Dʹun autre côté, un <strong>de</strong>s jeunes visiteurs aperçoit à ce moment, par la fenêtre, <strong>de</strong>ux<br />

petits garçons dʹune famille quʹil visite, le plus jeune semble éploré; le visiteur va à sa ren‐<br />

contre et lʹintroduit. Quʹa‐t‐il? Que veulent‐ils? Comment ont‐ils trouvé le patronage? Ils<br />

ont vu les visiteurs y entrer; le petit a voulu absolument parler à M. Adolphe (je ne me<br />

souviens pas du nom <strong>de</strong> lʹapprenti); le portier ne voulait pas quʹils entrent, <strong>de</strong> là ses<br />

pleurs.<br />

Imaginez un petit colloque aimable. Il voulait lui montrer un livre obtenu à lʹécole,<br />

lui réciter <strong>de</strong>s leçons que le visiteur lui a apprises et quʹil a bien retenues; le petit Moïse<br />

dans son berceau dans les roseaux, le petit Jésus dans la crèche; (il brouille un peu tout ce‐<br />

la) Jésus bénit les enfants, etc., les petits oiseaux qui ne sèment point et qui récoltent <strong>de</strong>s<br />

grains <strong>de</strong> blé, etc., le grand frère a aussi <strong>de</strong>s choses cordiales à dire. (Si tout cela était dia‐<br />

logué dʹune façon piquante, sans tomber ni dans lʹidylle, ni dans le grotesque, il en résulte‐<br />

rait <strong>de</strong> petites scènes touchantes, qui motiveraient la conversion du juge téméraire. Emu<br />

lui‐même, il donne aux petits enfants du sucre dʹorge ou autres bonbons. Au vieillard, il<br />

avait donné une orange et quelque argent pour la femme mala<strong>de</strong>. Ainsi convaincu du<br />

bonheur quʹil y a à fréquenter le patronage et à faire un peu <strong>de</strong> bien à ceux qui souffrent, il<br />

se réunit aux apprentis patronnés.<br />

Jʹindique ces moyens qui peuvent assurément être remplacés par dʹautres, mais qui<br />

montrent la lacune à remplir, en même temps quʹils dégagent mieux la morale <strong>de</strong> la pièce:<br />

— Il est doux dʹêtre bon.<br />

— On nʹest bien que dans la société <strong>de</strong>s bons.<br />

M. Emile et moi avons compté que vous alliez arranger ce petit développement au‐<br />

jourdʹhui même, les moments étant tellement comptés quʹun retard rend lʹexécution <strong>de</strong> la<br />

pièce impossible. Cette petite pièce, un peu grossie, aura sa valeur pour les patronages;<br />

telle quʹelle est, elle est presque <strong>de</strong> nul usage.<br />

Votre affectionné ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

1204


1220 à M. Caille<br />

Célébration <strong>de</strong> la St‐Vincent <strong>de</strong> Paul.<br />

16 juillet [1867]<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous faisons, comme <strong>de</strong> coutume, la fête <strong>de</strong> St Vincent <strong>de</strong> Paul à Chaville le 19, qui<br />

est vendredi.<br />

Je vous le rappelle pour le cas où vous auriez quelque affaire à Paris qui pourrait<br />

concourir <strong>avec</strong> ce jour <strong>de</strong> réunion <strong>de</strong> famille.<br />

M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] vous répond pour les étoffes.<br />

Mille affections à tous.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je ne puis avant quelques jours vous donner réponse au sujet <strong>de</strong>s étoffes; la couleur brune<br />

ne paraît pas convenir, on aurait désiré du gris, on hésite encore sur le noir; dans peu, vous aurez<br />

notre décision.<br />

En attendant, affectueux souvenir à vos bons frères et à vous.<br />

Votre bien dévoué frère<br />

G. <strong>de</strong> Lauriston<br />

1221 à M. dʹArbois<br />

Célébration <strong>de</strong> la St‐Vincent <strong>de</strong> Paul. Nouvelles <strong>de</strong>s santés.<br />

Vaugirard, 16 juillet [1867]<br />

N.D. du Mont Carmel<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Vous nous aviez annoncé votre visite; je vous ai répondu que nous vous verrions<br />

<strong>avec</strong> joie, cependant nous ne voyons rien venir; peut‐être avez‐vous pensé que la fête <strong>de</strong> St Vincent <strong>de</strong> Paul vous serait une meilleure occasion. Nous la faisons le 19, vendredi,<br />

comme <strong>de</strong> coutume.<br />

M. Chaverot sera ordonné probablement le 25 <strong>de</strong> ce mois, jour <strong>de</strong> St Jacques, extra<br />

tempora.<br />

M. <strong>de</strong> Varax est en repos pour 15 jours à Chaville.<br />

M. Paul Baffait, très languissant <strong>de</strong>puis longtemps, a une maladie <strong>de</strong> foie; il décline<br />

dʹune façon inquiétante. Priez pour lui.<br />

Je termine ici, étant un peu en presse aujourdʹhui.<br />

Affections à vous et à nos frères <strong>de</strong> tous ici, et en particulier <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Nous avons pris une gran<strong>de</strong> part à la douleur <strong>de</strong> la famille Myionnet 396 ; on prie<br />

ici pour le défunt et pour ceux qui lui survivent.<br />

396 Le 11 juillet, venait <strong>de</strong> mourir Etienne Myionnet, frère aîné <strong>de</strong> Clément Myionnet.<br />

1205


1222 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Démarches pour une place dʹintendant dans la famille <strong>de</strong> Varax. Insistance sur la nécessité pour les Œuvres <strong>de</strong><br />

vivre <strong>de</strong>s ressources locales. Ne pas brusquer les choses dans la question <strong>de</strong> la fermeture <strong>de</strong> lʹécole. Laissser faire<br />

la Provi<strong>de</strong>nce. Manière dʹéprouver la vocation dʹun postulant.<br />

Vaugirard, 28 juillet 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

La petite famille, et moi en particulier, nous nous accoutumions aisément à vous<br />

voir rentré à la maison paternelle; il a fallu sʹéloigner <strong>de</strong> nouveau, le Père par excellence,<br />

Chef souverain <strong>de</strong> toutes les familles, vous appelait ailleurs pour son service; que ses <strong>de</strong>s‐<br />

seins sages et miséricordieux sʹaccomplissent et que notre cordiale obéissance lui prouve<br />

notre filial amour!<br />

Je vous écris vite, parce que M.M. Tulasne, très convaincus que le sujet proposé par<br />

eux pour lʹemploi près <strong>de</strong> Mme votre mère serait pleinement ce qui conviendrait, insistent<br />

pour que, <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts, on ne per<strong>de</strong> pas une si belle occasion. Leur conviction et la sa‐<br />

gesse <strong>de</strong> leur jugement ont du poids pour me persua<strong>de</strong>r moi‐même; mais je manque au‐<br />

trement <strong>de</strong> moyens pour asseoir un avis, puisque je ne connais pas le sujet proposé. Lʹau‐<br />

tre étant loin et peut‐être pas absolument libre <strong>de</strong> se dégager sans quelque délai, surtout si<br />

les menaces <strong>de</strong> troubles à Rome <strong>de</strong>venaient, comme il semble, <strong>de</strong> plus en plus sérieuses397 ,<br />

il nʹy aurait peut‐être pas dʹinconvénient à ce que, vous ou Mme <strong>de</strong> Varax, entriez en rela‐<br />

tion <strong>avec</strong> M.M. Tulasne pour renseignements, et ensuite <strong>avec</strong> le Monsieur lui‐même, sans<br />

rien préjuger. Se bien éclairer et comparer les sujets présentés me paraîtrait être le mieux,<br />

car il est probable quʹen ayant chacun <strong>de</strong>s qualités estimables, ils ne conviendraient pas<br />

également, ni à lʹemploi, ni à la personne quʹils doivent secon<strong>de</strong>r dans son administration.<br />

Je vous prie <strong>de</strong> me répondre aussitôt que vous le croirez possible, afin que je donne satis‐<br />

faction à ceux qui, dans lʹun ou lʹautre sens, sʹintéressent à cette affaire. Les éclaircisse‐<br />

ments amples, sérieux, me semblent être tout à fait désirables pour le repos et la satisfac‐<br />

tion <strong>de</strong> Mme votre mère et la vôtre.<br />

Je serais bien aise aussi <strong>de</strong> savoir la tournure que prennent les choses à Arras. Il me<br />

semble que vous <strong>de</strong>vez tendre à ne pas prononcer votre avis et à laisser beaucoup faire à la<br />

Provi<strong>de</strong>nce dont nous cherchons la volonté; notre raison incline ici à regar<strong>de</strong>r notre éloi‐<br />

gnement dʹArras comme désirable pour nous, mais nous temporisons néanmoins sans<br />

trancher absolument la question, afin dʹêtre sûrs que nous marchons selon les vues <strong>de</strong><br />

Dieu. Je crois que, pour la question <strong>de</strong> lʹécole, on ne peut tar<strong>de</strong>r à la résoudre et quʹil faut y<br />

aviser sans délai; pour lʹautre, elle sʹéclaircira bientôt, puisque nous sommes décidés fer‐<br />

mement à ne pas <strong>de</strong>meurer si le pays ne peut pourvoir aux besoins <strong>de</strong> lʹœuvre et <strong>de</strong> ceux<br />

qui la <strong>de</strong>sservent. Si cet ensemble <strong>de</strong> choses, œuvre et Communauté, était posé ailleurs, et<br />

là en particulier, dans lʹétat <strong>de</strong> mendicité proprement dite, nous ne <strong>de</strong>vrions pas nous y re‐<br />

fuser; mais lʹœuvre ne se prête, ni par sa nature, ni par ses relations à cette condition<br />

dʹexistence, il faut donc quʹon lui assure les moyens <strong>de</strong> se soutenir.<br />

Une pensée venait ce matin à M. Lantiez et à moi; elle nʹest quʹune simple hypo‐<br />

thèse que je vous donne comme premier aperçu et sans examen; ce serait, sʹil faut rester à<br />

Arras et supprimer lʹécole, <strong>de</strong> rappeler ici M. Lainé qui entrerait à St‐Sulpice <strong>avec</strong> MM. Le<br />

397 Depuis la défaite autrichienne <strong>de</strong> Sadowa (3 juillet 1866) face aux Prussiens, et le départ <strong>de</strong>s bataillons français à la fin <strong>de</strong> 1866, la<br />

ville <strong>de</strong> Rome vivait sous la menace d’une intervention <strong>de</strong> Garibaldi.<br />

1206


clerc et Pattinote, et dʹenvoyer près <strong>de</strong> vous M. Parent qui secon<strong>de</strong>rait admirablement M.<br />

Charrin. Il nous semblerait bien <strong>de</strong> le mouvoir un peu, afin <strong>de</strong> le voir sous toutes les faces;<br />

il est excellent garçon et a <strong>de</strong>s qualités peu communes, mais il est entré tard chez nous et<br />

nous avons intérêt à voir à fond, sʹil est appelé à la religion, sʹil lʹest pour nous spéciale‐<br />

ment; pour le sacerdoce, nous ne voyons nul doute. Il est docile, sociable, il serait chez<br />

vous utile et pas du tout un inconvénient; cʹest une simple épreuve et manière <strong>de</strong> le voir<br />

que nous envisageons en ceci.<br />

Tout va assez bien ici; M. Chaverot ira vendredi à S t ‐Etienne et autres lieux pour<br />

une quinzaine <strong>de</strong> jours; il est heureux <strong>avec</strong> paix, sans grands mouvements, mais ferme<br />

dans son contentement; il a, dimanche<br />

<strong>de</strong>rnier, dit la S te Messe à Chaville et a<br />

fait la petite instruction; il sʹen est très<br />

convenablement tiré.<br />

Adieu, bien cher ami, tous nos<br />

frères regrettent la distance qui nous<br />

sépare; le jour <strong>de</strong>s ballons 398 se lèvera<br />

enfin, et après se lèvera bien plus<br />

sûrement encore le grand jour du Ciel<br />

éternel.<br />

Votre affectionné ami et Père en<br />

N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1223 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Conduite à tenir au moment <strong>de</strong> quitter<br />

lʹŒuvre dʹArras. Le départ est lié au fait que le patronage, faute <strong>de</strong> ressources, irait sʹamoindrissant.<br />

Vaugirard, 31 juillet 1867<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Bénissons Dieu, vous lʹavez dit, la décision <strong>de</strong> Mgr dʹArras est pleine <strong>de</strong> sagesse, et la<br />

meilleure aussi pour nous. Lʹécole détruite, il faut, pour soutenir le patronage, un prêtre<br />

du pays qui puisse créer <strong>de</strong>s ressources que nous, étrangers, ne saurions susciter; ou bien<br />

cette œuvre, fort amoindrie, ne motiverait plus le secours dʹune Communauté.<br />

Il faut nous gar<strong>de</strong>r ni dʹaucun abattement, ni, <strong>de</strong> sens contraire, <strong>de</strong> faire sonner haut<br />

que nous nous retirons; une contenance simple et mo<strong>de</strong>ste est le vrai point quʹil faut gar‐<br />

<strong>de</strong>r; tâchons surtout <strong>de</strong> <strong>de</strong>meurer dans les termes <strong>de</strong> respect et dʹaffection <strong>avec</strong> le diocèse<br />

et les amis qui nous avaient accueillis.<br />

Nous pensons que vous <strong>de</strong>vez tout faire pour profiter <strong>de</strong> la bonne volonté quʹa té‐<br />

moignée Mgr <strong>de</strong> prési<strong>de</strong>r votre distribution; cʹest une marque extérieure <strong>de</strong> bon accord et<br />

<strong>de</strong> haute bienveillance quʹil importe <strong>de</strong> vous assurer. Jʹécris ce mot en hâte; il contient bien<br />

lʹexpression <strong>de</strong> nos sentiments ici.<br />

Votre tout affectionné Père et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

398 Allusion aux ascensions en ballon <strong>de</strong> Nadar. Car le célèbre photographe était aussi aéronaute et avait fait construire un ballon Le<br />

Géant dont les ascensions défrayaient alors la chronique.<br />

1207


1224 à M. Risse<br />

Fragment <strong>de</strong> lettre. MLP. se réjouit dʹune prochaine visite <strong>de</strong> M. Risse. Nouvelles <strong>de</strong>s santés. Le frère Baffait<br />

semble se remettre.<br />

[Fin juillet ou début dʹaoût 1867]<br />

... communication est pour vous seul et pour vous diriger à lʹoccasion.<br />

Tous et tout va ici comme <strong>de</strong> coutume. M. Paul Baffait se remet très lentement <strong>de</strong> sa<br />

longue maladie. Nous pensons <strong>avec</strong> joie que la belle saison ne sʹachèvera point sans que<br />

vous nous fassiez une bonne et longue visite; ceux <strong>de</strong> Chaville, en particulier, en seront<br />

heureux et vous envoient leurs meilleurs souvenirs.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je ne suis à Chaville que le dimanche; je marche toujours mal et extrêmement peu.<br />

1225 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Fermeture <strong>de</strong> la maison dʹArras. Aspects légitimes et raisons sérieuses dʹun tel départ. ʺNous nʹavons fait que<br />

nous conformer aux vues <strong>de</strong> Dieu manifestées par les circonstancesʺ.<br />

Vaugirard, 9 août 1867<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je me réjouis <strong>avec</strong> vous <strong>de</strong> lʹheureux succès <strong>de</strong> vos <strong>de</strong>ux distributions; il me semble<br />

que cʹest bien finir et que le bon Maître a voulu assister jusquʹà la fin ses pauvres servi‐<br />

teurs.<br />

Je comprends les impressions pénibles que vous ressentez et jʹy compatis bien cor‐<br />

dialement; vous aviez mis là beaucoup <strong>de</strong> soins, dʹaffections et <strong>de</strong> labeurs; espérons<br />

quʹaprès un moment dʹépreuve tout, sauf lʹécole, se soutiendra et que le fruit <strong>de</strong> vos tra‐<br />

vaux ne sera point perdu.<br />

Pour nous, au point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> lʹensemble <strong>de</strong> notre action, nous ne pouvons regret‐<br />

ter le poste dʹArras qui, dans une sphère extrêmement étroite, eût absorbé <strong>de</strong>s forces que<br />

nous pouvons employer bien plus utilement ailleurs; nous avons plusieurs établissements<br />

qui sont bien plus nôtres que celui‐là et dont la souffrance trouvera sa fin, grâce aux ren‐<br />

forts que le retour <strong>de</strong> votre personnel va nous donner. Je crois que les vues <strong>de</strong> Dieu ont été<br />

marquées ici par les circonstances et que nous ne faisons, comme dʹordinaire, que nous y<br />

conformer.<br />

Pour le départ <strong>de</strong> M. [Ad.]Lainé, il peut sʹeffectuer aussitôt que vous le voudrez;<br />

nous lʹattendons et ses amis <strong>de</strong> Chaville trouvent quʹil leur manque; il fera bien dʹapporter<br />

tout son bagage, car il nʹy a nulle raison pour lui <strong>de</strong> laisser rien en arrière. Il <strong>de</strong>vra aussi<br />

beaucoup remercier ces MM. du séminaire <strong>de</strong>s soins quʹils lui ont donnés.<br />

Pour les autres départs, ils seront subordonnés aux besoins <strong>de</strong> lʹœuvre que vous<br />

avez à transmettre aux Frères <strong>de</strong>s Ecoles. Je crois que, dès quʹils y paraîtront, ils auront<br />

hâte <strong>de</strong> nous voir éloignés.<br />

Adieu, mon bien bon ami, partagez <strong>avec</strong> vos frères tous mes sentiments bien affec‐<br />

tueux.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1208


Vous ne mʹavez rien répondu pour lʹintendant <strong>de</strong> Montcoy.<br />

M gr dʹArras serait aimable sʹil nous donnait, comme ca<strong>de</strong>au dʹadieu, le bon jeune ec‐<br />

clésiastique dont vous me parliez <strong>de</strong>rnièrement; mais donner, quand nous retirons ce que<br />

nous apportions <strong>de</strong> notre côté, ce serait gran<strong>de</strong> générosité.<br />

1226 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Modalités <strong>de</strong> départ <strong>de</strong> lʹŒuvre dʹArras. Attitu<strong>de</strong> à observer vis‐à‐vis <strong>de</strong>s successeurs, les Frères <strong>de</strong>s Ecoles<br />

Chrétiennes. Le frère Baffait est à toute extrémité.<br />

Vaugirard, 10 août 1867<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je crois, <strong>avec</strong> nos frères, quʹil faut gar<strong>de</strong>r une juste mesure dans nos offres <strong>de</strong> séjour<br />

à Arras; nous ne pouvons partir brusquement, ni créer aucun embarras à lʹEvêché ni à<br />

lʹœuvre du patronage; mais, une fois lʹecclésiastique désigné pour le prendre arrivé, notre<br />

présence à une ou <strong>de</strong>ux séances du patronage pour lui remettre en main les choses suffira<br />

gran<strong>de</strong>ment; on ne tient pas le moins du mon<strong>de</strong> à Arras, me dit M. Lantiez, à nos systèmes<br />

et procédés; on y voudra faire les choses comme on lʹentendra, et nous nʹavons à donner<br />

nos avis et traditions que dans une proportion fort mesurée.<br />

Il ne nous semble pas non plus que nous <strong>de</strong>vions aucunement nous mêler dʹun pa‐<br />

tronage du jeudi; lʹecclésiastique qui viendra peut ne pas lʹagréer, il vaut mieux lui laisser<br />

toute libre initiative on lʹattend, du reste, il agira selon ses vues.<br />

Pour M. Laroche, je lʹavais pressenti seulement, il y a <strong>de</strong>ux mois environ; je lui écris<br />

un mot pour lʹavertir définitivement. Il nous semble que, pour la part du mobilier lui ap‐<br />

partenant, nous nʹavons autre chose à faire quʹà prendre lʹavis <strong>de</strong> M. Roussel, et à donner<br />

connaissance ensuite à M. Laroche <strong>de</strong> ce que lʹEvêché pense sur le matériel <strong>de</strong> lʹœuvre.<br />

Quant à ce qui est à nous, vendre aurait assez mauvais air; emportez ou envoyez à<br />

Vaugirard tout ce qui peut nous être utile et peut être emporté sans trop <strong>de</strong> difficulté; lais‐<br />

sez à lʹœuvre ce que vous ne pourriez aisément faire voyager, en tant que ce lui serait utile;<br />

donnez aux pauvres ou aux serviteurs ce qui nʹirait pas à lʹœuvre.<br />

Faites votre petit voyage <strong>de</strong> Lille et <strong>de</strong> Calais; je crois que les questions délicates<br />

concernant votre famille veulent beaucoup <strong>de</strong> ménagement; Mme votre mère, expérimentée<br />

et pru<strong>de</strong>nte, sʹen tirerait bien; je crois quʹil ne faut pas trop sʹavancer; ayez soin <strong>de</strong> prier<br />

Dieu, afin <strong>de</strong> nʹagir que sous son inspiration.<br />

Il faut beaucoup prier pour notre f. Paul [Baffait]; on est venu hier au soir <strong>de</strong> Cha‐<br />

ville nous avertir que, dʹaprès lʹavis du mé<strong>de</strong>cin, il ne passerait pas la nuit; je ne sais pas ce<br />

matin ce quʹil en est, je vais partir tout à lʹheure; il est bien disposé; M. Faÿ est près <strong>de</strong> lui,<br />

il a communié jeudi et peut‐être encore <strong>de</strong>puis; que Dieu daigne le recevoir dans sa misé‐<br />

ricor<strong>de</strong>.<br />

Adieu, mon bien bon ami, mille affections pour vous tous.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1227 à M. Chaverot<br />

Le frère Baffait est à lʹagonie. MLP. sensible ʺaux douces joiesʺ éprouvées par le père Chaverot lors <strong>de</strong> son séjour<br />

en famille, avant <strong>de</strong> rejoindre l’Orphelinat <strong>de</strong> Vaugirard où il a été nommé. Brèves nouvelles.<br />

1209


Vaugirard, 11 août 1867<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai tardé à répondre à votre affectueuse lettre, et pourtant jʹy répondrai assez briè‐<br />

vement par la double raison que notre f., M. Paul [Baffait], est arrivé aux <strong>de</strong>rnières limites<br />

<strong>de</strong> la faiblesse et que nous attendons dʹun moment à lʹautre son départ pour un mon<strong>de</strong><br />

meilleur. Il a été extrêmisé vendredi, et on était venu nous avertir <strong>de</strong> la part du mé<strong>de</strong>cin<br />

quʹil ne passerait pas la nuit; il a survécu néanmoins jusquʹà aujourdʹhui, mais dans un état<br />

tel dʹépuisement quʹil ne peut évi<strong>de</strong>mment tar<strong>de</strong>r à rendre le <strong>de</strong>rnier souffle.<br />

Je prends part aux douces joies que vous trouvez dans votre réunion à vos bons pa‐<br />

rents; je pense <strong>avec</strong> vous que vous pourrez <strong>de</strong>meurer près dʹeux jusquʹau jeudi qui suivra<br />

lʹAssomption, afin <strong>de</strong> répondre à leurs désirs et <strong>de</strong> jouir vous‐même un peu en paix <strong>de</strong><br />

leur société. Ce moment venu, nos frères vous attendront pour régler <strong>avec</strong> vous les dispo‐<br />

sitions concernant les emplois importants dont vous serez chargé <strong>avec</strong> M. lʹabbé Lantiez<br />

pour le spirituel du personnel et <strong>de</strong>s sujets <strong>de</strong> lʹœuvre <strong>de</strong> Vaugirard.<br />

Jʹai dit que jʹécrirais peu longuement pour <strong>de</strong>ux raisons; la secon<strong>de</strong>, cʹest que ma<br />

sœur, sachant que je ne pouvais me rendre près dʹelle, est arrivée à Paris <strong>avec</strong> sa fille et<br />

que sa visite mʹoblige à lui donner un peu <strong>de</strong> mon temps.<br />

Je vous envoie une lettre arrivée chez nous pour vous, il y a quelques jours; je ne<br />

vous lʹai pas envoyée immédiatement, voulant y joindre quelques mots et voyant quʹelle<br />

ne comportait rien dʹurgent.<br />

M. Baumert est ici <strong>de</strong>puis plusieurs jours, il mourait dʹenvie <strong>de</strong> vous voir; il aura, je<br />

crois, le regret dʹy renoncer, étant obligé <strong>de</strong> repartir le jeudi, jour même où vous serez en<br />

route vers Paris.<br />

Nous recevrons <strong>avec</strong> bonheur la précieuse relique [du cœur <strong>de</strong> St Vincent <strong>de</strong> Paul]<br />

dont vous nous annoncez lʹarrivée.<br />

Jʹespère que la jambe <strong>de</strong> votre bon père est bien guérie; assurez‐le, ainsi que Mme vo‐<br />

tre mère et Mlle votre tante, <strong>de</strong> tous mes sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> dévouement en N.S.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, vous savez notre tendre affection pour vous; tous nos<br />

frères vous saluent et vous reverront <strong>avec</strong> joie.<br />

Votre dévoué ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1228 à M. dʹArbois<br />

Démarches à faire pour la famille du jeune frère Bérard. Le frère Baffait est à lʹagonie.<br />

Vaugirard, 13 août 1867<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Lʹune <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux sœurs <strong>de</strong> notre jeune f. Bérard, placées au Bon Pasteur comme élè‐<br />

ves à Angers, est tombée <strong>de</strong>puis quelque temps en paralysie dʹune façon très inquiétante.<br />

Toute sa famille (en Belgique) sʹen tourmente beaucoup; leur frère, <strong>de</strong> son côté, en est fort<br />

préoccupé et aurait souhaité la voir; les Supérieures ont écrit que, si la maladie persiste, el‐<br />

les ne pourront gar<strong>de</strong>r cette jeune fille. Notre f. Bérard serait bien tranquillisé si vous pou‐<br />

viez voir sa sœur, interroger les Supérieures et nous envoyer quelques renseignements ca‐<br />

pables <strong>de</strong> le rassurer. Il paraît que lʹaccès près <strong>de</strong>s pensionnaires est assez difficile; au be‐<br />

1210


soin, vous pourriez prendre une autorisation près <strong>de</strong> M gr , ou près du Vicaire Général qui<br />

est sans doute chargé <strong>de</strong> la direction <strong>de</strong> cette Maison. Je vous prie <strong>de</strong> faire pour le mieux<br />

dans lʹintérêt <strong>de</strong> ces pauvres jeunes filles; on sʹoccupe en Belgique <strong>de</strong> leur placement, mais<br />

la chose ne se peut faire très vite.<br />

Notre f. Paul Baffait, mala<strong>de</strong> <strong>de</strong>puis longtemps déjà, est à la <strong>de</strong>rnière extrémité; son<br />

agonie a commencé ce matin, il nʹa plus quʹun souffle quʹil va rendre dans quelques mo‐<br />

ments. Il est bien préparé; présentement, il a perdu toute connaissance.<br />

Priez bien pour son âme <strong>avec</strong> vos frères.<br />

Mille affections dévouées à vous et à eux.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1229 à M. dʹArbois<br />

M. dʹArbois doit prendre du repos. Brèves nouvelles. Cas <strong>de</strong> la sœur du frère Bérard. Mort du frère Paul Baffait,<br />

la veille <strong>de</strong> lʹAssomption, ʺen parfaites dispositionsʺ.<br />

Chaville, 19 août 1867<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je suis contristé <strong>de</strong>s détails que vous me donnez sur votre santé; il faut la soigner et<br />

surtout vous reposer; voilà que vos gran<strong>de</strong>s corvées sont passées, disposez vos affaires<br />

pour venir, aussitôt que vous pourrez vous échapper, chercher un peu <strong>de</strong> calme et <strong>de</strong> dila‐<br />

tation près <strong>de</strong> nous.<br />

Vous pouvez envoyer M. Ladouce pour prendre aussi un peu <strong>de</strong> repos quand vous<br />

le croirez à propos; mais sʹil ne sait pas sʹoccuper un peu par lui‐même, il trouvera lʹennui<br />

partout; nous ferons ce que nous pourrons pour que son temps ne soit pas trop pesant<br />

pour lui, en réglant un peu ses journées.<br />

Ne manquez pas, quand vous verrez M gr , <strong>de</strong> lui dire ou, si vous ne le voyez, <strong>de</strong> lui<br />

faire savoir toute la peine que nous a causée sa maladie; nous <strong>de</strong>mandons à Dieu <strong>de</strong> le<br />

conserver à son diocèse et à nous qui lui sommes tout dévoués.<br />

Nos jeunes séminaristes sont présentement à Chaville. Lʹun, M. Baumert <strong>de</strong> Metz,<br />

va déjà repartir pour faire place à MM. Risse et Magnien. Ceux dʹArras viendront à leur<br />

tour.<br />

Nous allons ici comme <strong>de</strong> coutume; je pense que vous avez prié pour notre f. M.<br />

Paul Baffait, décédé la veille <strong>de</strong> lʹAssomption, ou plutôt le 13 août, surveille, en parfaites et<br />

édifiantes dispositions.<br />

Vous ne mʹavez rien dit sur les sœurs <strong>de</strong> M. Bérard; votre maladie ne vous aura pas<br />

permis <strong>de</strong> vous en occuper. La situation est assez délicate; les Dames du Bon Pasteur vou‐<br />

laient que la famille reprît la pauvre infirme, mais je crois quʹelle nʹest pas transportable et,<br />

dʹailleurs, elle nʹa personne pour la recevoir: sa mère est morte et le père, presque aveugle,<br />

est incapable <strong>de</strong> lui donner appui. Son frère est, vous le savez presque un enfant et sans<br />

nulle position ni relations.<br />

Adieu, bien cher ami, mille affections à vous et à tous autour <strong>de</strong> vous; je remercie<br />

M. Gauffriau qui vous a charitablement soigné.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1211


1230 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Envoi inconditionnel <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax à Amiens. Conditions <strong>de</strong> la pension <strong>de</strong>s apprentis <strong>de</strong> Vaugirard. Détails sur<br />

les scolastiques à Metz.<br />

Vaugirard, 23 août 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous pensons que vous irez à Amiens, mais vous savez que nos vues sont si sou‐<br />

vent changées dʹun moment à lʹautre par les circonstances que vous ne <strong>de</strong>vez regar<strong>de</strong>r<br />

cette disposition que comme projet, plutôt que comme une décision formelle. Vous pouvez<br />

toutefois envoyer chez M. Caille vos livres et autres objets, prenant soin dʹy joindre un pe‐<br />

tit mot indiquant que cet envoi est fait à tout hasard, mais sans que vous ni nous‐mêmes<br />

ayons une certitu<strong>de</strong> absolue que là sera définitivement votre <strong>de</strong>stination.<br />

Je vais écrire les <strong>de</strong>ux lettres, pour Mgr et pour M. Roussel; les chaleurs me donnent<br />

un peu <strong>de</strong> malaise <strong>de</strong> santé et me ren<strong>de</strong>nt le travail difficile.<br />

Pour le jeune Lefebvre, M. Myionnet me prie <strong>de</strong> vous dire que nous <strong>de</strong>mandons à<br />

nos apprentis une pension <strong>de</strong> 30f par mois pendant 2 ans; après, ils continuent sous nos<br />

yeux gratuitement leur apprentissage et sont nourris et entretenus comme <strong>de</strong>vant par<br />

nous. M. Lantiez pense que, si la santé du jeune Lefebvre sʹest fortifiée et si ces conditions<br />

sont agréées par son frère, on pourrait lʹadmettre.<br />

Vous ne pensez pas que les vues <strong>de</strong> son frère pour sa consécration au soin <strong>de</strong>s jeu‐<br />

nes gens soient assez arrêtées pour que vous lui proposiez <strong>de</strong> faire son année dʹépreuve<br />

<strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s à Chaville?<br />

Sʹil abondait, <strong>avec</strong> votre avis favorable, en ce sens, nous nous contenterions <strong>de</strong> 400f<br />

<strong>de</strong> pension, blanchissage et raccommodage compris; il serait ainsi à même <strong>de</strong> veiller sur<br />

son frère. Pesez, et nʹallez en avant que si la pru<strong>de</strong>nce est sauve.<br />

Je crois que la place <strong>de</strong> M. Trousseau serait, pour le plus grand bien, à Metz (maison<br />

régulière entre toutes), <strong>avec</strong> M. Baumert excellent <strong>de</strong> tous points, M. Magnien et proba‐<br />

blement un autre <strong>de</strong>s étudiants <strong>de</strong> Chaville; ce serait comme un petit séminaire, dans <strong>de</strong><br />

parfaites conditions, MM. <strong>de</strong> St‐Sulpice ayant à Metz, comme Directeurs, <strong>de</strong>s sujets fort<br />

distingués.<br />

Je crois quʹà lʹhiver, M. Victor [Trousseau] porterait difficilement lʹinternat dʹun sé‐<br />

minaire.<br />

M. Chaverot est arrivé ce matin; il vous offre ses sentiments les plus dévoués et à<br />

tous les vôtres. Recevez aussi, pour vous et pour eux, mes tendres sentiments en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1231 à M. Chaverot<br />

Correction <strong>de</strong> documents sur La Salette. Envers sa tante, que M. Chaverot agisse plus ʺen affection quʹen remon‐<br />

tranceʺ.<br />

26 août [1867]<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous renvoie, en proposant <strong>de</strong>ux minimes modifications au crayon, vos <strong>de</strong>ux do‐<br />

cuments concernant la Salette. Je crois que la ponctuation est incomplète.<br />

1212


Je ne goûterais pas la pensée <strong>de</strong> M lle votre tante; elle coûterait je crois, et ne produi‐<br />

rait rien <strong>de</strong> bon; mais je pense quʹun appel venu <strong>de</strong> votre cœur <strong>de</strong> prêtre, plus en affection<br />

quʹen remontrance, pourrait être entendu; <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z aux Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M. quʹils<br />

vous donnent cette inspiration.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1232 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Suites consécutives au départ dʹArras. Brèves nouvelles.<br />

Chaville, 28 août 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> lʹavertissement; quand la lettre <strong>de</strong> M. lʹabbé Proyart mʹest arri‐<br />

vée, jʹavais déjà écrit à Mgr dʹArras et à M. Roussel les lettres <strong>de</strong> remerciement convenues<br />

<strong>avec</strong> vous; elles comportaient le maintien <strong>de</strong> la décision concernant notre départ dʹArras.<br />

Jʹai répondu <strong>avec</strong> reconnaissance à lʹexcellente lettre <strong>de</strong> M. Proyart que, les <strong>de</strong>stinations<br />

<strong>de</strong>s frères étant désignées, annoncées, leur présence étant attendue et les emplois ne pou‐<br />

vant <strong>de</strong>meurer en souffrance, il nous était présentement impossible dʹaccepter ses offres<br />

obligeantes.<br />

M. dʹArbois est arrivé; il vous offre, <strong>avec</strong> nous, ses sentiments affectueux. Nous at‐<br />

tendons M. Risse.<br />

Nous avons cru <strong>de</strong>voir nous séparer <strong>de</strong> M. Parent (du Noviciat), bon garçon, mais<br />

difficile à former par nos mains pas assez expérimentées ou fermes. Bon vouloir subsiste<br />

<strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux côtés.<br />

M. Dupaigne, marié <strong>de</strong> mardi <strong>de</strong>rnier, est parti en Suisse <strong>avec</strong> sa femme. Il paraît<br />

que le ménage est très bien assorti, chrétiennement en particulier.<br />

Adieu, bien cher ami, bien tendres affections à vous et à vos frères <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Jʹai pressé bien <strong>de</strong>s fois M. Henry [Piquet] pour le petit bronze, je ne sais où il<br />

en est, ne lʹayant pas aujourdʹhui sous les yeux; il sera <strong>de</strong>main ici, je le pousserai <strong>de</strong> nou‐<br />

veau.<br />

1233 à M. Caille<br />

Témoignage dʹaffection à lʹégard <strong>de</strong>s frères dʹAmiens. Le père Olivaint prêchera la retraite en octobre.<br />

Vaugirard, 30 août 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je joins ici <strong>de</strong>ux mots <strong>de</strong> lettre que jʹavais promis dʹécrire à M. Marcaire, en réponse<br />

à sa <strong>de</strong>rnière missive. Je voulais faire aussi quelques mots pour nos autres frères, le temps<br />

va me manquer; assurez‐les que je ne les oublie pas un seul jour <strong>de</strong>vant Dieu non plus que<br />

vous, mon bon ami, qui êtes si chargé et qui avez tant besoin <strong>de</strong> lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> Dieu. Jʹespère<br />

toujours que le concours <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax pourra vous être assuré; il prendra dʹabord un<br />

peu <strong>de</strong> repos, afin <strong>de</strong> mieux subvenir à ses emplois quand il sera bien remis.<br />

1213


Nous nʹavons rien <strong>de</strong> nouveau ici que les visites <strong>de</strong> quelques‐uns <strong>de</strong> nos frères <strong>de</strong><br />

Province. La retraite paraît toujours <strong>de</strong>voir nous être donnée par le r.p. Olivaint au com‐<br />

mencement dʹoctobre.<br />

Nous recevrons <strong>avec</strong> joie <strong>de</strong> vos nouvelles et <strong>de</strong> celles <strong>de</strong> vos frères. Recevez <strong>avec</strong><br />

eux tous nos affectueux sentiments en J. et M.<br />

Votre ami et Père tout dévoué<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1234 à M. Girard<br />

Regret <strong>de</strong> ne pas lʹavoir rencontré. Emploi du temps <strong>de</strong> MLP. et horaire <strong>de</strong> ses déplacements. Conseils sur la vo‐<br />

cation: ʺne pas <strong>de</strong>vancer les <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nceʺ.<br />

Vaugirard, 30 août 1867<br />

Mon cher ami et fils en N.S.,<br />

Vous êtes venu hier à Vaugirard quelque peu avant mon arrivée <strong>de</strong> Chaville; jʹai re‐<br />

gretté <strong>de</strong> ne pas vous avoir vu, car nous nʹavons que <strong>de</strong> rares occasions <strong>de</strong> nous ren‐<br />

contrer; jʹespère que quelque prochaine visite <strong>de</strong> votre part mʹen dédommagera; jʹai grand<br />

désir <strong>de</strong> savoir où vous en êtes <strong>de</strong> vos affaires.<br />

De peur que <strong>de</strong> nouveau vous ne veniez inutilement, je vais vous dire comment je<br />

vais me comporter durant quelques semaines. A cause <strong>de</strong>s vacances <strong>de</strong> nos séminaristes et<br />

<strong>de</strong>s allées et venues <strong>de</strong> plusieurs <strong>de</strong> nos frères <strong>de</strong> province, je <strong>de</strong>meure à Chaville <strong>de</strong>puis le<br />

samedi dans lʹaprès‐midi (1h. 1/2 ) jusquʹau jeudi, où je suis <strong>de</strong> retour à Vaugirard un peu<br />

avant 6h. du soir.<br />

Je sors bien peu, soit à Chaville, soit à Vaugirard, marchant difficilement, et si, par<br />

impossible, je suis <strong>de</strong>hors, ce nʹest ni loin ni pour longtemps. Avec ces indications précises,<br />

il y aura grand malheur si nous ne nous rencontrons pas.<br />

Je prie Dieu, bien cher ami, <strong>de</strong> vous assister dans les dispositions que vous avez à<br />

prendre pour votre avenir. Il ne faut pas <strong>de</strong>vancer les <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce, mais il ne<br />

faut pas non plus résister quand elle nous attire ni se défier <strong>de</strong> son secours divin; dans le<br />

surnaturel, on doit, sans écarter la raison, se souvenir toutefois quʹelle est prédominée par<br />

une puissance supérieure à laquelle il faut obéir <strong>avec</strong> une filiale confiance. Le bon Maître<br />

vous dira tout cela au fond du cœur et mettra en vous sa force et sa lumière. Soyez bien<br />

sûr que je lʹinvoque constamment <strong>avec</strong> vous et croyez à tous mes sentiments accoutumés<br />

<strong>de</strong> bien affectueux dévouement.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong> ptre 1235 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Souvenirs biographiques sur son cousin martyr, M. <strong>de</strong> Brétenières. Les vacances <strong>de</strong>s frères et lʹesprit religieux.<br />

Chaville, 31 août 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Durant ces temps‐ci, je suis à Chaville jusquʹau jeudi dans lʹaprès‐midi, et je ne sé‐<br />

journe à Vaugirard que jusquʹau samedi 1h.1/2; donc, si vous et nos frères arrivez dans le<br />

commencement <strong>de</strong> la semaine, ce serait à Chaville que vous me trouveriez.<br />

1214


Nous recevons aujourdʹhui pour vous une lettre <strong>de</strong> M me <strong>de</strong> Bretenières qui vous<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> recueillir vos souvenirs, si vous en avez quelquʹun dʹaimable sur lʹenfance <strong>de</strong><br />

son cher martyr; M. lʹabbé Bougault prépare sur lui une notice. Vous trouverez ici cette pe‐<br />

tite lettre dont la forme et le fond sont aimables.<br />

Je ne pourrais autoriser M. Victor [Trousseau] à une excursion que si le mé<strong>de</strong>cin la<br />

juge indispensable; nous sommes très poursuivis cette année <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s pour <strong>de</strong>s mou‐<br />

vements au <strong>de</strong>hors; les jeunes étudiants se résignent <strong>avec</strong> une répugnance marquée à<br />

prendre leurs vacances à lʹintérieur, ou regrettent leurs familles, lesquelles, <strong>de</strong> leur côté,<br />

nous poursuivent pour avoir leurs enfants; où est le surnaturel, le sentiment, lʹesprit reli‐<br />

gieux? En quelques coins reculés ou bien dans les beaux âges <strong>de</strong> la foi.<br />

Adieu, mon bien cher ami et fils en N.S.; tout le mon<strong>de</strong>, ici et ailleurs, parmi nous<br />

sera heureux <strong>de</strong> revoir vous et nos frères; pour vous et pour eux, mille affections en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1236 à M. Caille<br />

Observations sur la direction spirituelle <strong>de</strong>s frères <strong>de</strong> la communauté.<br />

Vaugirard, 6 septembre 1867<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

M. <strong>de</strong> Lauriston vous ayant envoyé sans mʹavertir sa réponse pour les étoffes, je nʹai<br />

pu joindre quelques mots à sa lettre, comme je mʹétais proposé <strong>de</strong> le faire.<br />

Je nʹai pas eu lʹintention <strong>de</strong> vous presser dʹenvoyer M. Marcaire aux bains <strong>de</strong> mer;<br />

jʹavais supposé seulement quʹil y était, dʹaprès quelques paroles <strong>de</strong> M. <strong>Jean</strong> Marie [Tourniquet].<br />

Je pense quʹil vaut mieux ne pas prendre un nouveau Père pour la direction <strong>de</strong>s ff.<br />

dʹAmiens et quʹon peut attendre que M. <strong>de</strong> Varax soit arrivé pour régler ce point impor‐<br />

tant. Il fait en ce moment une courte absence pour sa santé; je pense que, dans une quin‐<br />

zaine <strong>de</strong> jours, son retour aura lieu ou sera tout prochain.<br />

Le jour définitif <strong>de</strong> lʹouverture <strong>de</strong> la retraite nʹest pas encore fixé; nous vous averti‐<br />

rons dès quʹil nous sera connu.<br />

Adieu, mon bien bon ami, croyez comme toujours à mes affectueux sentiments en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1237 à M. Caille<br />

Embarras pour soigner le frère Legrand, mala<strong>de</strong>. Participation <strong>de</strong>s Œuvres à une annexe <strong>de</strong> lʹExposition Univer‐<br />

selle <strong>de</strong> 1867. Limiter lʹapostolat <strong>de</strong>s frères; ʺbien poser la communautéʺ.<br />

Vaugirard, 18 septembre 1867<br />

Mon bon ami et fils en N.S.,<br />

La santé <strong>de</strong> notre cher f. Alexandre [Legrand] nous donne <strong>de</strong>s inquiétu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> plus<br />

en plus sérieuses; non seulement sa mémoire, son attention et toute initiative sʹéteignent<br />

chez lui, mais ses attaques <strong>de</strong>viennent si fréquentes quʹil paraît presque impossible <strong>de</strong> le<br />

laisser dans une maison dʹenfants et même dans <strong>de</strong>s exercices ou réunions <strong>de</strong> communau‐<br />

té. Que faire? Où le placer? Comment subvenir aux frais dʹune pension dans un établisse‐<br />

1215


ment <strong>de</strong> santé, <strong>avec</strong> les charges que nous imposent déjà le Noviciat et les pensions <strong>de</strong> nos<br />

séminaristes? nous ne trouvons aucune solution satisfaisante à ces questions. Nous<br />

nʹavons plus à Amiens notre excellente amie, M lle <strong>de</strong> Lupel; je ne crois pas que les rr.pp. Jé‐<br />

suites pussent nous ai<strong>de</strong>r; ceux qui connaissent le f. Alexandre ne sont peut‐être plus en<br />

Picardie; a‐t‐il dʹautres connaissances qui pussent sʹintéresser à lui, ou <strong>de</strong>s parents qui<br />

pussent le recevoir? Je ne le crois pas. Je ne parle pas <strong>de</strong> vous, car je sais les charges que<br />

vous portez; elles sont accablantes. Connaissez‐vous quelque établissement qui ne fût pas<br />

trop exigeant? Celui <strong>de</strong> Tain est bien loin; je ne sais pas si notre pauvre Alexandre y serait<br />

mieux quʹailleurs. Nous avons pensé quʹà raison <strong>de</strong> votre affection pour ce cher enfant si<br />

bon, si docile, si régulier, nous <strong>de</strong>vions prendre votre avis. Nous prions Dieu <strong>de</strong> vous ins‐<br />

pirer les vues que nous nʹavons pas nous‐mêmes jusquʹà présent et qui pourraient mettre<br />

ce pauvre enfant mala<strong>de</strong> dans la condition la plus favorable pour lui.<br />

M. <strong>de</strong> Varax reviendra prochainement, je ne pense pas néanmoins quʹil vous arrive<br />

avant la retraite; je tâcherai que M. Lantiez aille vous le conduire et lʹinstaller à son poste.<br />

M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] vous a accusé réception <strong>de</strong> lʹétoffe que vous lui avez en‐<br />

voyée.<br />

Jʹécris cette lettre <strong>de</strong> Chaville, je retourne ce soir à Vaugirard pour la fête <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong><br />

la Salette; vous vous unirez à nous pour cette aimable solennité.<br />

5h. Je reçois votre lettre à mon arrivée à Vaugirard; je ne vois pas dʹinconvénient à<br />

la souscription Bareswille. Ces Messieurs <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul atten<strong>de</strong>nt peu<br />

<strong>de</strong> fruit <strong>de</strong> cette association qui leur paraît trop étreindre pour bien embrasser utilement.<br />

Protestants, Juifs y sont compris <strong>avec</strong> les catholiques; cet amalgame ne saurait être favora‐<br />

ble. On se rendra néanmoins à lʹassemblée générale du Palais <strong>de</strong> lʹIndustrie, afin <strong>de</strong> ne se<br />

point signaler par un refus 399 .<br />

Je pense toujours que vous ferez bien <strong>de</strong> ne pas appliquer, quant à présent, vos frè‐<br />

399 A l’occasion <strong>de</strong> l’Exposition Universelle <strong>de</strong> 1867 à Paris, une distribution <strong>de</strong> bannières <strong>de</strong>vait se faire au nom <strong>de</strong> l’Impératrice, à<br />

toutes les sociétés philanthropiques et charitables. Mais ces bannières n’arboraient aucune signe religieux. On voit <strong>avec</strong> quelle répugnance<br />

la SSVP. participa à ce concours.<br />

1216


es à lʹœuvre du Patronage S t ‐Jacques; vous avez avant tout à relever <strong>avec</strong> eux lʹœuvre <strong>de</strong><br />

la rue <strong>de</strong> Noyon qui a faibli et diminue notablement; vous <strong>de</strong>vez, en second lieu (si ce nʹest<br />

en premier) poser la communauté et lui donner lʹensemble et la régularité qui <strong>de</strong>vront en<br />

assurer le libre exercice.<br />

Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S., partagez <strong>avec</strong> vos frères tous mes senti‐<br />

ments affectueux.<br />

Votre ami et Père dévoué en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Les concierges dʹArras (homme et femme, le mari cordonnier) se nomment Legros.<br />

Vous pouvez leur écrire à la Société S t ‐Joseph, rue Coclipas.<br />

1238 à M. Caille<br />

Mouvement <strong>de</strong> personnel.<br />

Vaugirard, 20 septembre 1867<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai oublié <strong>de</strong> vous dire, dans ma <strong>de</strong>rnière lettre, que le Conseil <strong>de</strong> notre Commu‐<br />

nauté désirant vous ai<strong>de</strong>r un peu du côté du personnel laïc, comme il le fait pour le côté<br />

ecclésiastique en vous <strong>de</strong>stinant M. <strong>de</strong> Varax, a résolu <strong>de</strong> remplacer M. Lucien [Jacquart]<br />

par M. Boiry, excellent jeune homme, déjà formé aux œuvres et qui appartient à la Com‐<br />

munauté <strong>de</strong>puis plusieurs années. Il pense <strong>de</strong>puis longtemps au sacerdoce et il a fait déjà,<br />

par nos soins, une année <strong>de</strong> séminaire; mais, <strong>de</strong> lʹavis <strong>de</strong> ses Directeurs et surtout parce<br />

que sa santé souffrait <strong>de</strong> la vie trop recluse du séminaire, il a pris un temps indéterminé<br />

pour examiner sa vocation. Il porte toujours la soutane. Il est dʹun caractère aimable, intel‐<br />

ligent et fort propre à gagner le cœur <strong>de</strong>s jeunes gens. Il ira à merveille <strong>avec</strong> le f. Marcaire<br />

qui le connaît et qui fera parfait ménage <strong>avec</strong> lui, ainsi que nos autres frères.<br />

Nous donnerons une autre <strong>de</strong>stination au f. Lucien qui, probablement, ira à Metz<br />

<strong>avec</strong> M. Risse qui lʹa <strong>de</strong>mandé pour sa maison.<br />

A lʹheure quʹil est, nous ne pouvons savoir encore le jour où sʹouvrira la retraite; dès<br />

que nous le saurons, vous en serez immédiatement informé. Nous avons cherché si quel‐<br />

quʹun <strong>de</strong> chez nous pourrait ai<strong>de</strong>r M. Marcaire, nous ne trouvons personne jusquʹici.<br />

Adieu, mon bien bon ami, mille tendres sentiments à vous et à vos frères.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1239 à M. Caille<br />

Excuses pour une méprise concernant le frère promis à M. Caille (cf. lettre 1238).<br />

Vaugirard, 20 septembre 1867<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

En recevant <strong>de</strong> moi lettre sur lettre, vous allez penser que ma tête <strong>de</strong>vient bien<br />

mouvante et en prendre quelque inquiétu<strong>de</strong>; ce ne serait pas tout à fait sans raison dans le<br />

cas présent, car, en revoyant mes notes sur le personnel, je mʹaperçois que jʹai fait une mé‐<br />

prise en vous annonçant ce matin quʹen vous reprenant, après la retraite, M. Lucien [Jac‐<br />

1217


quart], nous vous donnerions M. Boiry, le séminariste. Cʹest tout à fait par erreur; M. Boiry<br />

a été promis à M. dʹArbois la semaine <strong>de</strong>rnière, lors <strong>de</strong> son voyage ici, et il doit partir pour<br />

Angers, afin <strong>de</strong> faire une classe à la maîtrise <strong>de</strong> la Cathédrale qui, vous le savez, nous est<br />

confiée. Je nʹai pas vu encore précisément quel frère remplacerait M. Lucien, mais soyez en<br />

paix, nous allons nous en occuper sérieusement.<br />

Jʹai tenu, sans nul retard, à rectifier mon erreur que je vous prie dʹexcuser.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1240 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Fête <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> La Salette. Terrible acci<strong>de</strong>nt aux ateliers; protection <strong>de</strong> Marie. Vœux <strong>de</strong> cinq scolastiques. Gran‐<br />

<strong>de</strong>ur et mérite <strong>de</strong>s petits faits <strong>de</strong> chaque jour: ʺà nous <strong>de</strong> les relever par lʹintention qui les transforme, les rend<br />

glorieux pour Dieu et méritoires pour nous; laissons nos pieds sur la terre, mais ayons la tête et le cœur dans le<br />

Cielʺ.<br />

Chaville, 25 septembre 1867<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je suis heureux que les eaux dʹAllevard vous aient été salutaires; vous allez nous<br />

revenir remonté et fort, sinon gros, ce qui nʹest pas absolument nécessaire; je me réjouis<br />

aussi <strong>de</strong> ce que Mme <strong>de</strong> Varax est venue, par sa présence, mettre un aimable couronnement<br />

à votre voyage; quelque douce que vous ait été la solitu<strong>de</strong> absolue, la solitu<strong>de</strong> à <strong>de</strong>ux,<br />

cʹest‐à‐dire <strong>avec</strong> une affection tout intime, vous sera encore meilleure.<br />

Ici, où votre pensée <strong>de</strong> religieux vous reporte quelquefois, tout marche selon nos<br />

coutumes. La fête <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette a été aussi édifiante que nous le pouvions souhai‐<br />

ter. Bien quʹon ait fait une ouverture à la gran<strong>de</strong> chapelle du Sacré Cœur pour avoir une<br />

entrée et vue sur le sanctuaire <strong>de</strong> la Salette, ce <strong>de</strong>rnier, à toutes les messes <strong>de</strong> la matinée, a<br />

toujours été rempli dʹune foule empressée. Lʹaprès‐midi, 12 ou 1500 personnes suivaient la<br />

procession et prenaient part aux exercices; cependant, nous ne faisons aucune annonce<br />

pour ne pas nous écarter <strong>de</strong>s recommandations <strong>de</strong> lʹArchevêché.<br />

N.D. <strong>de</strong> la Salette nous a visiblement protégés dans lʹun <strong>de</strong> nos ateliers, où un terri‐<br />

ble acci<strong>de</strong>nt, survenu ces jours <strong>de</strong>rniers, eût pu être funeste pour plusieurs <strong>de</strong> nos enfants.<br />

Cʹest à lʹatelier <strong>de</strong>s pointes dʹacier que ce triste événement est arrivé. La meule dʹune roue<br />

qui tourne <strong>avec</strong> une extrême rapidité a éclaté tout à coup <strong>avec</strong> explosion, mettant en pièces<br />

un grand poêle <strong>de</strong> fonte placé près <strong>de</strong> là et brisant la tête du malheureux jeune ouvrier ou<br />

patron qui dirigeait les travaux. Les soins les plus empressés du mé<strong>de</strong>cin et <strong>de</strong> nos frères<br />

dʹabord, les efforts du chirurgien <strong>de</strong> lʹhospice ensuite nʹont pu rappeler à lui le pauvre<br />

jeune homme qui a expiré une heure et <strong>de</strong>mie après, muni <strong>de</strong> lʹextrême‐onction seulement,<br />

la connaissance ne lui étant pas revenue, au moins apparemment. Cet événement nous a<br />

navrés. Ce jeune homme, intelligent, laborieux, dévoué à son œuvre, remarquablement<br />

instruit et distingué <strong>de</strong> tout point, était plein dʹavenir; il était seul <strong>avec</strong> sa mère et avait ré‐<br />

uni tous les éléments dʹune fortune presque assurée; tout périt <strong>avec</strong> lui, la pauvre mère va<br />

<strong>de</strong>meurer en grand veuvage. Dieu a ses secrets; nous espérons que le pauvre jeune homme<br />

aura trouvé grâce <strong>de</strong>vant Lui, il nous semble que sa droiture <strong>de</strong> cœur <strong>de</strong>vait le tenir pas<br />

loin du Dieu <strong>de</strong> vérité et <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong>; vous prierez certainement pour lui et pour sa<br />

1218


mère. Pas un <strong>de</strong>s douze enfants qui entouraient la roue nʹa été atteint. Que le Seigneur et<br />

N.D., protectrice <strong>de</strong> nos ateliers, en soient bénis!<br />

Puisque je parle <strong>de</strong> prière, priez pour notre f. Alexandre [Legrand]; on fait en ce<br />

moment (M. Chaverot <strong>avec</strong> lui) une neuvaine <strong>de</strong> messes à S t ‐Lazare, rue <strong>de</strong> Sèvres, et toute<br />

la communauté sʹy unit. Elle se terminera <strong>de</strong>main vendredi, anniversaire du trépas <strong>de</strong> S t<br />

Vincent <strong>de</strong> Paul.<br />

Ce même jour aura lieu la cérémonie <strong>de</strong>s vœux <strong>de</strong> cinq <strong>de</strong> nos jeunes séminaristes et<br />

du f. Lebrun, <strong>de</strong> Metz, lesquels ne peuvent assister à la retraite. Ils ont pris <strong>de</strong>ux jours <strong>de</strong><br />

récollection et vont tous prononcer leurs engagements en gran<strong>de</strong> joie <strong>de</strong> cœur. Je regrette<br />

que cet avis vous arrive si tard, mais, qui sait! leurs bons anges vous apporteront peut‐être<br />

quelque pressentiment.<br />

Je reçois à lʹinstant pour vous dʹArras lʹavis ci‐joint, que nos frères nʹont pu com‐<br />

prendre et pour lequel nous nʹavons rien vu <strong>de</strong> praticable quʹun renvoi immédiat vers<br />

vous. M. Trousseau <strong>de</strong>man<strong>de</strong> si ce ne serait pas pour du vin non payé. Deman<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s ex‐<br />

plications promptes à la succursale dʹArras nous semblerait le parti unique à prendre. Je<br />

viens <strong>de</strong> consulter votre livre <strong>de</strong> dépenses. La pensée <strong>de</strong> M. Trousseau pourrait être juste,<br />

car je trouve, aux 7 et 8 juillet, le paiement <strong>de</strong>s droits dʹentrée et du port dʹune pièce <strong>de</strong><br />

vin, mais je ne vois ensuite aucun paiement pour le prix du vin lui‐même.<br />

Je crois que le jeune Lefebvre sʹaccoutume peu à peu à Vaugirard; il a eu dʹabord un<br />

peu dʹennui mêlé <strong>de</strong> quelque malaise, lʹun et lʹautre sʹaidant réciproquement; il va mainte‐<br />

nant; il semble être doux et flexible, mais un peu trop peut‐être, comme cʹest ordinaire aux<br />

natures artésiennes.<br />

Jʹai une très gran<strong>de</strong> estime pour la flanelle et je crois quʹelle vous convient parfaite‐<br />

ment. Il nʹest arrivé aucune lettre intéressante pour vous. Un remerciement <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Bon‐<br />

nière pour le S t Vincent, et dʹune sœur <strong>de</strong> S t ‐Charles pour divers objets à elle par vous en‐<br />

voyés.<br />

Chose que vous croirez à peine: à lʹheure quʹil est, je ne sais encore au juste à quel<br />

jour commencera notre retraite; nos frères sʹen désespèrent; jʹai multiplié les moyens, mes‐<br />

sagers, lettres; le r.p. Olivaint, passant dʹune retraite à lʹautre, nʹentend plus, nʹécrit plus.<br />

Quand M. Hello lʹa vu <strong>de</strong> notre part, la <strong>de</strong>rnière fois, il allait commencer celle du séminaire<br />

<strong>de</strong> St‐Sulpice pour le clergé diocésain, gran<strong>de</strong> affaire assez préoccupante, je le comprends,<br />

pour lui laisser peu <strong>de</strong> liberté dʹesprit; M. Paillé va retourner vers lui.<br />

Nous aurons définitivement, je crois un petit échantillon <strong>de</strong> cours <strong>de</strong> philosophie<br />

cette année à Chaville pour M. Girard et M. Mœs.<br />

Je crois vous avoir tout dit par le menu. Je voudrais, au lieu <strong>de</strong> tous ces détails, vous<br />

avoir entretenu seulement <strong>de</strong> choses spirituelles et portant plus directement à Dieu, mais<br />

hélas! le courant <strong>de</strong> la vie se compose <strong>de</strong> faits terre à terre, non sans <strong>de</strong>ssein et pour nous<br />

tenir bien humbles; à nous <strong>de</strong> les relever par lʹintention qui les transforme, les rend glo‐<br />

rieux pour Dieu et méritoires pour nous. Cette disposition est vraiment marquée du sceau<br />

divin et pleine <strong>de</strong> consolation pour lʹâme; laissons donc nos pieds sur la terre, mais ayons<br />

la tête et le cœur dans le Ciel.<br />

Adieu, bien cher ami et fils; tous <strong>avec</strong> moi vous embrassent ici, en attendant mieux,<br />

puisque nous serons bientôt réunis.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1219


1241 à M. Caille<br />

Difficultés dans les mouvements <strong>de</strong> personnel. Premiers vœux <strong>de</strong>s jeunes séminaristes.<br />

Vaugirard, 30 septembre 1867<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Après examen bien attentif, le Conseil <strong>de</strong> la Communauté a pensé que, pour rem‐<br />

placer M. Lucien Jacquart, nous <strong>de</strong>vions vous donner M. François Chery qui nʹest pas <strong>de</strong>‐<br />

puis très longtemps parmi nous, mais qui avait été éprouvé à la communauté <strong>de</strong> Metz par<br />

M. Risse, qui nous a donné sur lui les meilleures assurances. Il est, en effet, fort docile,<br />

pieux; il a été militaire et, à travers la vie si difficile <strong>de</strong>s camps, il nʹa jamais cessé, malgré<br />

les tracasseries, dʹy rester ferme et sincèrement chrétien. Il a trente ans, se tient bien, ayant<br />

été élevé par <strong>de</strong>s parents au‐<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> la classe ouvrière. Il est bon musicien, instrumental<br />

surtout, il faisait, au patronage <strong>de</strong> Metz, un cours <strong>de</strong> musique; sa bonne volonté et sa droi‐<br />

ture <strong>de</strong> cœur peuvent faire <strong>de</strong> lui un sujet très utile; il nʹa pas beaucoup dʹinitiative, mais<br />

bien obéir est si précieux en communauté!<br />

Jʹéprouve quelque embarras pour le moment où il pourra vous être envoyé.<br />

M. Risse, obligé <strong>de</strong> retourner à Metz pour le 10 octobre, repartira <strong>de</strong> Chaville le 9; il<br />

désire emmener <strong>avec</strong> lui M. Lucien, dont il aura besoin dès son arrivée. De plus, le père <strong>de</strong><br />

M. Lucien se propose <strong>de</strong> venir à Paris <strong>avec</strong> son fils le prêtre, afin <strong>de</strong> voir ensemble et son<br />

fils Lucien, et sa fille Sœur <strong>de</strong> Charité à lʹhospice Ste ‐Eugénie. Il mʹa prié <strong>de</strong> lʹavertir, afin<br />

quʹil soit ici <strong>de</strong>ux ou trois jours avant le départ <strong>de</strong> M. Lucien. Il faudrait donc que ce <strong>de</strong>r‐<br />

nier fût au plus tard à Vaugirard pour le dimanche 6 octobre.<br />

Il serait regrettable que M. François Chery, qui nʹa pas fait encore <strong>de</strong> retraite, fût<br />

privé <strong>de</strong> celle qui va sʹouvrir (bien tard malheureusement, le 20 octobre). Pensez‐vous que<br />

M. Chery doive se rendre vers vous en même temps que M. Lucien partira dʹAmiens, sauf<br />

à revenir pour les jours <strong>de</strong> la retraite; ou bien préférez‐vous quʹil diffère son départ jus‐<br />

quʹaprès la retraite? Dans le premier cas, il y aura double dépense <strong>de</strong> voyage, mais il fau‐<br />

drait passer outre si le vi<strong>de</strong> laissé par le départ <strong>de</strong> M. Lucien <strong>de</strong>vait vous causer une gêne<br />

et charger outre mesure vos frères. Je vous prie <strong>de</strong> donner un mot <strong>de</strong> réponse et dʹavertir<br />

M. Lucien <strong>de</strong> préparer son départ pour le moment que je viens dʹindiquer. Je vais, <strong>de</strong> mon<br />

côté, informer son père quʹil pourra le rencontrer à Vaugirard à partir du 6 octobre.<br />

M. Lucien pourrait regretter dʹêtre ainsi privé <strong>de</strong> la retraite, mais la communauté en<br />

fait une petite à Metz en novembre, sous la conduite dʹun p. Jésuite, avant le renouvelle‐<br />

ment <strong>de</strong>s vœux; il trouvera donc là une sorte <strong>de</strong> compensation, je vous prie <strong>de</strong> le lui dire.<br />

Nos jeunes séminaristes, obligés <strong>de</strong> reprendre leurs cours au 1er octobre, ont fait une<br />

petite retraite et ont fait ensuite leurs premiers vœux le 27 septembre à Chaville, au jour<br />

commémoratif du trépas <strong>de</strong> St Vincent <strong>de</strong> Paul. Cette petite cérémonie a été extrêmement<br />

édifiante.<br />

Mille affections pour vous et pour vos frères, priez pour la mère <strong>de</strong> M. Hello qui<br />

vient dʹêtre rappelée à Dieu.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1220


1242 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Difficultés pour choisir la date <strong>de</strong> la retraite. Désir <strong>de</strong> voir nos prêtres prêcher ces exercices; appréciation <strong>de</strong> la<br />

Vie <strong>de</strong> M. Allemand.<br />

Chaville, 2 octobre 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Le r.p. Olivaint, poursuivi par nos instances concernant la fixation <strong>de</strong> lʹouverture <strong>de</strong><br />

notre retraite, a enfin satisfait à notre requête; mais sa réponse va mal à nos arrangements,<br />

cʹest seulement à la fin <strong>de</strong> la <strong>de</strong>uxième semaine dʹoctobre que pourraient commencer nos<br />

exercices. A ce moment, un grand nombre <strong>de</strong> nos frères seront repartis pour leurs postes<br />

respectifs. Nos jeunes scolastiques: MM. Leclerc, Pattinote et [Ad.] Lainé sont entrés dʹhier<br />

au Séminaire St‐Sulpice; MM. Risse, Magnien, Trousseau et Lebrun partiront le 9 <strong>de</strong> ce<br />

mois, cʹest‐à‐dire au commencement <strong>de</strong> la semaine prochaine, pour Metz, <strong>avec</strong> M. Lucien<br />

[Jacquart] que M. Risse emmène comme économe. M. François Chery, <strong>de</strong> Vaugirard, rem‐<br />

placera M. Lucien à Amiens. Dʹautres encore seront dérangés ou partis; ce sera pour beau‐<br />

coup un notable détriment. Appelons <strong>de</strong> nos vœux le temps où, <strong>de</strong>venus plus nombreux,<br />

les membres <strong>de</strong> notre clergé pourront se recueillir et étudier davantage, afin <strong>de</strong> donner<br />

eux‐mêmes les exercices <strong>de</strong> la retraite à la Communauté.<br />

Si, à raison <strong>de</strong> ce retard <strong>de</strong> la retraite, vous jugiez que <strong>de</strong>ux ou trois jours <strong>de</strong> délai<br />

pour votre retour vous fussent utiles, nous le trouverions bien; je ne vous propose pas un<br />

plus long ajournement, pensant quʹen notre état, on ne doit <strong>de</strong>meurer hors <strong>de</strong> la commu‐<br />

nauté que le temps juste où il est nécessaire <strong>de</strong> le faire.<br />

Je resterai à Chaville jusquʹà la retraite, ne venant<br />

à Vaugirard que le vendredi et le samedi jusquʹà lʹaprès‐<br />

midi.<br />

Je crois, comme vous, que le train express sera le<br />

meilleur, <strong>de</strong>vant vous épargner <strong>de</strong> la fatigue; il ne faut<br />

pas compromettre le mieux obtenu par votre saison <strong>de</strong><br />

bains.<br />

Nos frères liront <strong>avec</strong> joie la Vie <strong>de</strong> M. Allemand,<br />

<strong>de</strong> M. Gaduel. Quelques‐uns dʹeux, qui lʹont vue, ont<br />

inspiré à tous les autres ici un vif désir <strong>de</strong> la lire. Elle<br />

sera, je crois, surtout précieuse en nous montrant<br />

combien était gran<strong>de</strong> la passion <strong>de</strong> ce saint homme pour<br />

le bien <strong>de</strong>s âmes et comme il rapportait tous ses moyens<br />

à cette fin suprême; il est si difficile, dans notre voie, <strong>de</strong><br />

ne pas se laisser parfois entraîner par lʹactivité naturelle,<br />

en concédant trop aux mouvements et à la vie<br />

extérieure.<br />

Je nʹajoute rien, bien cher ami, à ces quelques lignes, ayant la perspective <strong>de</strong> votre<br />

prochain retour et <strong>de</strong>s faciles épanchements qui nous seront ainsi ménagés; faites agréer, je<br />

vous prie, les assurances <strong>de</strong> mon respect à M me votre mère et recevez <strong>de</strong> tous, et <strong>de</strong> moi<br />

par‐<strong>de</strong>ssus tous, les affections tendrement dévouées que nous vous avons à toujours<br />

vouées.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1221


1243 à M. dʹArbois<br />

Propositions pour un changement <strong>de</strong> personnel dans lʹŒuvre dʹAngers.<br />

Chaville, 5 octobre 1867<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai appris <strong>avec</strong> plaisir que vous aviez fait bon voyage, sans trop <strong>de</strong> fatigue; ména‐<br />

gez, autant que vous le pourrez, vos forces qui seront très limitées et peu proportionnées à<br />

vos charges.<br />

La retraite, comme nous pouvions déjà la prévoir lors <strong>de</strong> votre séjour ici, ne com‐<br />

mencera que la troisième semaine dʹoctobre, le dimanche 20 au soir; cʹest bien tard, bien<br />

peu accommodé aux convenances <strong>de</strong> la Communauté, mais quʹy faire? nous sommes si<br />

peu nombreux, nous ne pouvons aller <strong>de</strong> pair dans nos prétentions <strong>avec</strong> les gran<strong>de</strong>s<br />

Communautés.<br />

Je pense <strong>avec</strong> chagrin à la gêne que lʹabsence ainsi prolongée <strong>de</strong> M. Boiry peut vous<br />

causer. Il est bien disposé, va <strong>avec</strong> joie près <strong>de</strong> vous; il pourra, nous lʹespérons, vous don‐<br />

ner un secours utile.<br />

Pour le patronage, la pensée nous venait, à M. Lantiez et à moi, que, si vous preniez<br />

à la place <strong>de</strong> M. Moutier M. Allard, qui nʹest ni <strong>de</strong>ssinateur, ni musicien, mais qui sʹest<br />

formé à beaucoup dʹégards (il est laborieux, appliqué, intelligent dans les choses quʹil a à<br />

faire; il fait bien la classe, pas à une division élevée, à cause <strong>de</strong> son orthographe imparfaite,<br />

mais <strong>avec</strong> tenue et succès dans les autres divisions; il a fait <strong>de</strong>s progrès notables, même en<br />

orthographe, il a une bonne écriture; sous le rapport <strong>de</strong> lʹenseignement, un peu cultivé, il<br />

<strong>de</strong>viendrait irréprochable), pour les œuvres, en peu <strong>de</strong> temps, vous auriez en lui un ai<strong>de</strong><br />

dévoué, très docile. Il ne lui manque quʹun peu <strong>de</strong> pratique et dʹexpérience quʹil acquerrait<br />

bientôt; il est vraiment susceptible dʹêtre formé et ses dispositions dʹesprit sont très bon‐<br />

nes. M. Moutier, <strong>de</strong> son côté, gagnerait à être rapproché <strong>de</strong> nous ou changé, afin <strong>de</strong> perdre<br />

le mauvais pli quʹil a pris dans son temps dʹindépendance à Ste ‐Anne.<br />

Mais nous laissons ici <strong>de</strong> côté ce qui le regar<strong>de</strong> et nous ne voulons songer quʹà vous.<br />

Il se peut que M. Allard, étant à former aux œuvres, ne vous soutienne pas, dès le premier<br />

moment, autant que vous auriez besoin; examinez donc la chose au point <strong>de</strong> votre utilité et<br />

<strong>de</strong> votre convenance seulement, vous êtes meilleur juge que nous <strong>de</strong> la situation; pesez la<br />

chose, et déci<strong>de</strong>z en pleine liberté; nous cherchons pour vous un soulagement, nous au‐<br />

rions bien du regret si cʹétait, au contraire, une difficulté <strong>de</strong> plus que vous y <strong>de</strong>viez trouver.<br />

Je vous serai obligé dʹy penser <strong>de</strong>vant Dieu et <strong>de</strong> nous dire assez promptement vo‐<br />

tre sentiment, parce quʹau Conseil <strong>de</strong> mardi prochain, nous désirons, avant la retraite, ré‐<br />

gler les emplois <strong>de</strong>s frères.<br />

M. Hello vient <strong>de</strong> perdre sa bonne mère, excellente et pieuse dame; je vous <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong> <strong>de</strong> prier pour elle <strong>avec</strong> vos frères et <strong>de</strong> dire quelques messes à son intention, 3, je<br />

crois.<br />

M. Audrin est à Nantes, près <strong>de</strong> sa mère mala<strong>de</strong>; priez encore; combien on a, en<br />

cette vie, <strong>de</strong> raisons et dʹoccasions <strong>de</strong> prier!<br />

Je termine en hâte, vous assurant, ainsi que vos frères, <strong>de</strong> nos tendres affections<br />

dans le Seigneur et en sa Ste Mère.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1222


1244 à M. Caille<br />

Convocation au Conseil <strong>de</strong> Communauté à Chaville.<br />

Vaugirard, 5 octobre 1867<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Le Conseil aura lieu mercredi prochain à Chaville, à 2h. En prenant à la gare Mont‐<br />

parnasse le train <strong>de</strong> 2h., vous arriveriez encore bien à temps; il en serait <strong>de</strong> même du train<br />

<strong>de</strong> 3h., parce que nous resterons réunis, sans doute, jusquʹà près <strong>de</strong> 5h. Nous y examine‐<br />

rons <strong>avec</strong> vous ce qui peut‐être le mieux pour votre maison, dont nous savons les grands<br />

et pressants besoins.<br />

Croyez bien, cher ami, à tous mes sentiments <strong>de</strong> tendre affection en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1245 à M. dʹArbois<br />

Mouvement <strong>de</strong> personnel. Délicatesse et ménagement <strong>de</strong> MLP. pour faire accepter ce changement.<br />

Vaugirard, 11 octobre 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je me réjouis du bon arrangement que vous avez pris et qui va réveiller, je lʹespère,<br />

toute la bonne volonté <strong>de</strong> M. Moutier pour le bien du patronage. Je sais combien on a be‐<br />

soin, dans nos œuvres, dʹêtre cordialement et efficacement aidé et quelle souffrance on<br />

éprouve en nʹarrivant quʹà <strong>de</strong>s résultats trop imparfaits.<br />

Je viens vous proposer un petit changement qui ne concerne pas M. Moutier et qui,<br />

je pense, nʹapporterait aucun trouble dans lʹharmonie <strong>de</strong> vos dispositions.<br />

Nous sommes obligés <strong>de</strong> remplacer à Amiens M. Lucien [Jacquart], qui est envoyé à<br />

Metz à la place <strong>de</strong> M. Brouand André, lequel ne persévère pas dans sa vocation. Or, le seul<br />

frère qui soit susceptible dʹêtre remué en ce moment, cʹest M. Allard, dont je vous parlais<br />

<strong>de</strong>rnièrement; il irait à merveille à cet emploi, mais il est dʹAmiens, il y a père, mère,<br />

sœurs, frères, etc., etc., chrétiens à leur manière, mais très disposés, à toute occasion, à dé‐<br />

tourner leur fils <strong>de</strong> sa vocation; impossible donc <strong>de</strong> le caser là. M. Caille est venu me pres‐<br />

ser <strong>de</strong> lui donner un frère qui eût, sinon <strong>de</strong>s qualités éminentes, au moins un peu <strong>de</strong> sym‐<br />

pathie pour Amiens; dans ces conditions, il nʹa vu que M. <strong>Léon</strong> [Guichard], qui a été à<br />

Amiens, et qui sʹy plaisait. Jʹai, en ce moment surtout, si grand‐peur <strong>de</strong> vous apporter au‐<br />

cune surcharge nouvelle que jʹaurais évité à tout prix une proposition qui mʹeût paru le<br />

moins du mon<strong>de</strong> défavorable pour vos services; mais, à part lʹinconvénient réel dʹavoir à<br />

mettre au fait dans ses travaux un nouveau sujet, je crois pouvoir vous assurer que, loin <strong>de</strong><br />

perdre au change en prenant M. Allard, vous y gagneriez. M. Allard, chargé <strong>de</strong>puis long‐<br />

temps déjà <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux sacristies, accoutumé à diriger les enfants dans toutes les cérémonies,<br />

faisant bien les surveillances, suivant ses occupations <strong>avec</strong> attention et persistance,<br />

conduisant très bien une classe dans les divisions non élevées, enfin ayant maintenant<br />

vraiment le pli <strong>de</strong> la Communauté et <strong>de</strong>s exercices communs, serait vite formé et ne vous<br />

donnerait nulle difficulté, ni par son caractère souple et docile, ni par son inexpérience,<br />

puisquʹil est parfaitement apte à remplacer M. <strong>Léon</strong>. Notre seule raison, je vous lʹai dit,<br />

1223


pour le changement proposé, cʹest lʹentourage dangereux à Amiens pour M. Allard. Nos ff.<br />

du Conseil pensent <strong>avec</strong> moi que vous nʹaurez nulle cause <strong>de</strong> regret en cet arrangement.<br />

Toutefois, mon cher ami, je vous lʹai dit, malgré les besoins urgents dʹAmiens, la dif‐<br />

ficulté que nous avons dʹy pourvoir autrement, nous avons été si préoccupés <strong>de</strong> votre fati‐<br />

gue que je suis bien décidé à renoncer à cette combinaison si vous y voyez une contrariété<br />

pour vous.<br />

Je crois que, si vous agréiez cet arrangement, nous pourrions vous envoyer <strong>de</strong> suite<br />

M. Allard, sauf à vous, quand vos ff. seraient revenus <strong>de</strong> la retraite, à lui en faire une petite<br />

près <strong>de</strong> vous, vers le 21 novembre, par exemple, et cela sans que vous fussiez obligé <strong>de</strong><br />

vous <strong>de</strong>ssaisir <strong>de</strong> M. <strong>Léon</strong> avant le 20 novembre.<br />

Pensez‐y un moment <strong>de</strong>vant Dieu, croyez à notre parole sur la valeur <strong>de</strong> M. Allard<br />

pour le poste quʹil aurait chez vous et répon<strong>de</strong>z‐moi <strong>avec</strong> la liberté filiale qui vous est,<br />

vous le savez, bien tout assurée <strong>avec</strong><br />

Votre affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1246 à M. dʹArbois<br />

Souci <strong>de</strong> la santé <strong>de</strong>s frères. Efforts pour soulager le père dʹArbois dans sa tâche.<br />

Vaugirard, 13 octobre 1867<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Paillé me dit que, dans <strong>de</strong>ux lettres écrites par vous à MM. Maignen et Hello,<br />

vous vous plaignez tristement <strong>de</strong> votre santé, <strong>de</strong> vos fatigues. Je cherche ce que nous pour‐<br />

rions faire pour vous soulager. En me rappelant le désir que vous mʹexprimiez surtout<br />

dʹavoir dans votre personnel un homme sur lequel vous pourriez compter comme cons‐<br />

cience et sentiment du <strong>de</strong>voir, comme raison et esprit vraiment religieux, jʹai pensé que<br />

nous aurions peut‐être ce qui vous irait: M. Guillot, que nous avons ramené dʹArras à<br />

Vaugirard, réunit ces qualités; il ferait <strong>avec</strong> une exactitu<strong>de</strong> parfaite vos services du Chapi‐<br />

tre et <strong>de</strong> la Cathédrale pour la maîtrise, il vous serait encore fort utile pour vos affaires<br />

dʹadministration intérieure ou les courses et achats du <strong>de</strong>hors.<br />

Bien quʹil soit convenablement posé dans son emploi actuel, nous nʹhésiterions pas<br />

à vous lʹenvoyer, même immédiatement, si vous voyiez dans sa coopération à vos travaux<br />

un allégement pour vos charges. Si cet arrangement vous sourit, plus quʹun autre, écrivez‐<br />

moi un mot et nous aviserons à le réaliser sans retard.<br />

Dites‐moi si votre santé est en voie dʹamélioration.<br />

Croyez à tous nos affectueux sentiments en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1247 à M. dʹArbois<br />

Appréciations sur le frère Guillot. MLP. prendra en compte le point <strong>de</strong> vue du supérieur dʹAngers, avant <strong>de</strong><br />

prendre une décision.<br />

Vaugirard, 19 octobre 1867<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Guillot peut vous rendre <strong>de</strong>s services essentiels; il a plus <strong>de</strong> gravité, <strong>de</strong> tenue,<br />

dʹesprit religieux que la plupart <strong>de</strong> nos frères; mais il est peu propre ou pour mieux dire,<br />

1224


pas apte à lʹenseignement, son esprit, un peu porté à lʹimpatience, ne pouvant se prêter à la<br />

double obligation dʹenseigner et <strong>de</strong> surveiller tout ensemble ses élèves; nous avons donc<br />

dû renoncer à lʹappliquer aux classes qui fatiguaient sa tête jusquʹà la souffrance. Il ne fau‐<br />

drait donc pas compter sur lui pour cet office. Il ferait bien dignement le service <strong>de</strong> la maî‐<br />

trise, vous ai<strong>de</strong>rait utilement pour lʹéconomat, lʹordre, lʹadministration intérieure; voilà le<br />

ressort dans lequel il peut agir; si cette compétence ne peut suffire à vos besoins, il vau‐<br />

drait mieux ne pas songer à lui pour Angers.<br />

M. Caille désire particulièrement M. <strong>Léon</strong> [Guichard] parce quʹil était aimé <strong>de</strong>s jeu‐<br />

nes gens et réussissait bien <strong>avec</strong> eux, quoique, à vrai dire, sans exercer une influence sé‐<br />

rieuse sur eux; M. <strong>de</strong> Varax étant là désormais, ces moyens combinés pourraient relever<br />

lʹesprit <strong>de</strong>s jeunes gens qui ont beaucoup souffert. Mais il ne faut pas guérir un mal en<br />

suscitant un autre mal; je ne pense donc pas que M. <strong>Léon</strong> doive vous être retiré, si M. Guil‐<br />

lot ne vous semble pas compenser sa perte. Jʹattendrai votre <strong>de</strong>rnier mot pour prendre une<br />

décision.<br />

Vous me dites que la pénurie <strong>de</strong> vos finances entre pour une part dans vos tribula‐<br />

tions; je vous envoie 200f, afin <strong>de</strong> vous donner un peu dʹallégement <strong>de</strong> ce côté.<br />

Adieu, mon bon ami, priez bien pour notre retraite; nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rons à Dieu<br />

quʹune participation à ses fruits soit donnée à vous et à tous nos frères absents. Je causerai<br />

sérieusement <strong>avec</strong> M. Moutier.<br />

Votre ami et Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1248 à M. dʹArbois<br />

Retraite prêchée par le père Olivaint. Appréciations sur certains frères et la façon dont il convient <strong>de</strong> les traiter.<br />

Vaugirard, 28 octobre 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nos <strong>de</strong>ux ff. Boiry et Moutier vous ont dit déjà combien notre retraite a été aimable<br />

et édifiante; le r.p. Olivaint a réjoui et fortifié nos âmes en les nourrissant <strong>de</strong>s plus soli<strong>de</strong>s<br />

et <strong>de</strong>s plus consolantes vérités. Je crois que personne nʹa échappé aux précieux effets <strong>de</strong><br />

son zèle. Les <strong>de</strong>ux frères qui vous arrivent, en particulier, sont parfaitement disposés; M.<br />

Boiry pourra, je crois, vous être très utile; il est intelligent, actif et plus instruit quʹil nʹest<br />

nécessaire pour les emplois quʹil <strong>de</strong>vra remplir. Sʹil lui restait quelque loisir, il serait dési‐<br />

rable quʹil fît quelques lectures instructives, afin que son esprit se soutienne et revienne<br />

aux étu<strong>de</strong>s quand le moment arrivera pour lui, comme nous y comptons, <strong>de</strong> reprendre ses<br />

cours du séminaire momentanément interrompus. M. Lantiez, qui le dirigeait, vous adres‐<br />

sera à son sujet une petite note, afin <strong>de</strong> vous ai<strong>de</strong>r dans vos rapports <strong>avec</strong> lui. Il est dʹun<br />

caractère doux, affectueux, docile; mais parfois, rarement, sujet aux découragements; votre<br />

bienveillante sollicitu<strong>de</strong> le soutiendra.<br />

Pour M. Moutier, il mʹa paru simple et ouvert dans ses quelques entretiens <strong>avec</strong><br />

moi; il reconnaît ses défauts et désire sʹen corriger; il vous aime et désire vous ai<strong>de</strong>r mieux;<br />

il me dit quʹayant été un peu gâté par les tendresses <strong>de</strong> M. Hello, <strong>de</strong> M. Maignen, et peut‐<br />

être aussi parfois par les miennes, il vous trouve un peu froid et réservé <strong>avec</strong> lui; quʹun<br />

peu <strong>de</strong> cordial encouragement <strong>de</strong> votre part le gagnerait tout à fait et le mettrait dans vo‐<br />

1225


tre main. Essayez: cet enfant a besoin, en effet, dʹun peu du lait <strong>de</strong>s consolations affectueu‐<br />

ses; vous saurez bien les trouver en votre cœur pour lui. Il vante votre patience et votre<br />

longanimité, il attend quelque dilection qui achèvera <strong>de</strong> le contenter.<br />

Je nʹai, non plus que nos frères du Conseil, trouvé aucun sujet qui puisse mieux<br />

vous convenir que M. Guillot; nous avons donc renoncé pour le moment à rendre M. <strong>Léon</strong><br />

[Guichard] à M. Caille. M. <strong>de</strong> Varax, qui est maintenant à Amiens, étudiera les besoins <strong>de</strong><br />

cette maison et nous dira ses vues sur les moyens dʹy satisfaire.<br />

Adieu, bien cher ami, nous avons beaucoup prié pendant la retraite pour les frères<br />

qui gardaient les maisons; nous espérons bien que vous aurez eu, <strong>avec</strong> nos ff. <strong>Jean</strong> [Gauf‐<br />

friau] et <strong>Léon</strong>, une bonne part <strong>de</strong> ses fruits.<br />

Embrassez pour nous tous vos frères, et partagez <strong>avec</strong> eux tous nos tendres dé‐<br />

vouements en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1249 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Prochaine visite <strong>de</strong> M. Lantiez à Amiens. Changement <strong>de</strong> personnel: <strong>avec</strong> le temps, ʺbien <strong>de</strong>s choses se mettront<br />

en ordre régulierʺ.<br />

Chaville, 31 octobre 1867<br />

Vigile <strong>de</strong> la Toussaint<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je reçois votre lettre à lʹinstant (3h. <strong>de</strong> relevée), arrivant <strong>de</strong> Vaugirard où jʹétais allé<br />

pour quelques confessions. Je présume que votre mal <strong>de</strong> gorge a lâché prise, puisque vous<br />

ne mʹen parlez pas; vous iriez tout à fait contre la sagesse chrétienne et contre mes recom‐<br />

mandations formelles si vous nʹusiez du goudron et <strong>de</strong>s autres moyens qui vous ont été<br />

prescrits pour prévenir les acci<strong>de</strong>nts qui pourraient atteindre votre santé.<br />

M. Lantiez se rendra lundi, 2 novembre, à Amiens pour régler <strong>avec</strong> vous lʹordre <strong>de</strong><br />

vos exercices et services. Un peu dʹattente, pour vous laisser préalablement observer les<br />

choses autour <strong>de</strong> vous, eût peut‐être été mieux, mais il a besoin, dit‐il, <strong>de</strong> revenir sans<br />

grand retard à Vaugirard pour diverses dispositions. Je pense quʹà ce moment vous pour‐<br />

riez voir définitivement <strong>avec</strong> lui ce qui sera praticable concernant M. Victor [Trousseau].<br />

Peut‐être pourriez‐vous voir Mgr si vous aperceviez quelque indice <strong>de</strong> difficulté. Sans y<br />

mettre dʹempressement, nous aurions à souhaiter que, si la chose se doit faire, elle tar<strong>de</strong><br />

peu à se réaliser, car plus la position sera assise à Metz, soit au séminaire, soit ailleurs, plus<br />

il sera difficile <strong>de</strong> la défaire. Dès ce moment, jʹai déjà quelque embarras pour justifier près<br />

<strong>de</strong> Mgr lʹEvêque ce changement si peu mesuré en apparence. Le bon Dieu nous inspirera,<br />

sʹil y a lieu dʹagir en ce sens.<br />

Avec un peu <strong>de</strong> temps, <strong>de</strong> charité et <strong>de</strong> patience, bien <strong>de</strong>s choses se mettront en or‐<br />

dre régulier.<br />

Je vous enverrai un calice, qui sera prêté seulement.<br />

Jʹapprouve le fauteuil <strong>de</strong> paille que votre santé faible peut exiger.<br />

Jʹécris très brièvement, la veille <strong>de</strong> la Toussaint se prêtant peu aux longues corres‐<br />

pondances.<br />

1226


Adieu, mon bien cher ami et fils en N.S., croyez à tous mes sentiments affectueux<br />

pour vous; assurez aussi nos ff., M. Caille en particulier, <strong>de</strong> mon paternel dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Lʹimage va être remise à M. Augustin [Chiararelli].<br />

M. lʹabbé dʹHulst mʹ écrit pour me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r votre adresse, que je lui ai donnée.<br />

1250 à M. Marcaire<br />

M. <strong>de</strong> Varax, éprouvé dans sa santé, a besoin dʹun régime alimentaire.<br />

31 octobre [1867]<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je ne vous écris quʹun mot, la Toussaint <strong>de</strong>main est un empêchement aux longs en‐<br />

tretiens.<br />

M. <strong>de</strong> Varax, dont la santé a été <strong>de</strong>rnièrement éprouvée, reste peu soli<strong>de</strong> encore;<br />

une nourriture un peu soutenante (souvent un peu <strong>de</strong> rôti ou vian<strong>de</strong> grillée) sera néces‐<br />

saire, pendant un temps au moins. Je vous prie dʹy veiller <strong>avec</strong> M. Caille; cette précaution<br />

vous assurera un ai<strong>de</strong> plus soutenu en M. <strong>de</strong> Varax dont le zèle, autrement, serait trahi par<br />

la faiblesse <strong>de</strong> sa constitution. Il nʹa besoin, dʹailleurs, <strong>de</strong> rien <strong>de</strong> recherché et est fort ac‐<br />

commodant, sous ce rapport comme sous tous les autres.<br />

Prions à Amiens et ici et partout.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1251 à M. Risse<br />

Extrait <strong>de</strong> lettre. Remerciements pour lʹenvoi du journal <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Metz. La paix en communauté. Quali‐<br />

tés quʹil faut exiger <strong>de</strong>s aspirants au sacerdoce.<br />

Vaugirard, 7 novembre 1867<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai lu <strong>avec</strong> intérêt votre petit journal du mois dʹoctobre <strong>de</strong>rnier; jʹai admiré et béni<br />

<strong>avec</strong> vous la divine Provi<strong>de</strong>nce qui veille si manifestement à tous les besoins <strong>de</strong> votre mai‐<br />

son; humilions‐nous bien, reconnaissons que nous sommes indignes <strong>de</strong> ses miséricor<strong>de</strong>s et<br />

que nous sommes doublement re<strong>de</strong>vables à son infinie con<strong>de</strong>scendance pour notre fai‐<br />

blesse et notre insuffisance.<br />

Je remercie bien le divin Seigneur <strong>de</strong> ce que la paix règne bien dans votre petit inté‐<br />

rieur et que la charité, si nécessaire dans les familles religieuses, unit vos âmes dans le Sei‐<br />

gneur. [……...]<br />

Vous mʹentretenez <strong>de</strong> plusieurs jeunes sujets que le bon Maître semble incliner vers<br />

notre petite famille; ils seront les bienvenus, sʹils sont réellement envoyés par Lui. Celui<br />

qui veut étudier le latin, aspirant au sacerdoce, serait particulièrement à examiner, car il<br />

nous faut <strong>de</strong> ce côté <strong>de</strong>s sujets <strong>de</strong> choix, soli<strong>de</strong>s en piété, en dévouement, et doués <strong>de</strong> fa‐<br />

cultés suffisantes pour préparer <strong>de</strong> bons prêtres éclairés, pouvant exercer autour dʹeux une<br />

utile influence. Vous en jugerez, mon bien cher ami, et, si M. Barthélemy Alexis vous pa‐<br />

rait réunir ces conditions, nous nous en rapporterons pleinement à votre jugement.<br />

1227


Pour M. Kopp, il serait préférable quʹil parlât le français assez distinctement.<br />

[……...]<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1252 à M. Maignen<br />

Avantages dʹun confessionnal à Chaville. Que M. Maignen se laisse convaincre.<br />

Chaville, 12 novembre 1867<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Il y a presque cinq ans que nous souffrons à Chaville <strong>de</strong> lʹabsence dʹun confession‐<br />

nal; lʹinconvénient est grave car, lorsquʹon confesse, tout le mon<strong>de</strong> est contraint <strong>de</strong> sʹécar‐<br />

ter; nombre <strong>de</strong> personnes ont renoncé à y venir à cause <strong>de</strong> cette incommodité. La gloire <strong>de</strong><br />

Dieu est donc intéressée ici. Que cette considération vous touche, si toutes les autres sont<br />

sans poids pour vous, et ren<strong>de</strong>z à M. Audrin le léger service quʹil vous a <strong>de</strong>mandé pour<br />

préciser quelques détails <strong>de</strong> son plan.<br />

Votre ami et Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1253 à M. Caille<br />

Venue prochaine <strong>de</strong> M. Trousseau. Difficultés rencontrées par MLP. car le frère est encore séminariste.<br />

Vaugirard, 13 novembre 1867<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Jʹespérais un peu que nous pussions dégager avant les vacances M. Victor [Trous‐<br />

seau] <strong>de</strong> sa position à Metz. Dieu aidant, on y est parvenu sans trop <strong>de</strong> dérangement; je<br />

lʹenvoie donc à votre chère maison, espérant quʹil pourra être utile, particulièrement pour<br />

les jeunes ouvriers. M. <strong>de</strong> Varax le présentera, je pense, à M. le Supérieur du séminaire.<br />

Comme ses étu<strong>de</strong>s emploieront une partie notable <strong>de</strong> ses journées, nous donnerons à la<br />

maison dʹAmiens, comme nous <strong>de</strong>vions faire à Metz, une petite in<strong>de</strong>mnité <strong>de</strong> 3 ou 400f.<br />

Adieu, mon bien bon ami et cher fils en N.S., croyez à notre tendre et paternel dé‐<br />

vouement.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1254 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Conseils dʹhygiène. Maladies <strong>de</strong> MM. Leclerc et Legrand. Diverses nouvelles. Belle conduite <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong>s<br />

Œuvres engagés dans lʹarmée pontificale.<br />

Vaugirard, 15 novembre 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Vous ne <strong>de</strong>vez pas oublier quʹaprès les saisons dʹeaux sulfureuses, les organes <strong>de</strong> la<br />

respiration restent fort impressionnables et que, durant tout lʹhiver suivant, on a plus que<br />

<strong>de</strong> coutume à prendre <strong>de</strong>s précautions contre le froid et aussi contre la fatigue qui résulte‐<br />

rait <strong>de</strong> parlers trop longs ou trop accentués. Par pru<strong>de</strong>nce et par obéissance aussi, gar<strong>de</strong>z<br />

1228


ces ménagements. Je désire que vous me disiez, dans votre prochaine lettre, quelle place<br />

tient, dans votre régime quotidien, lʹeau goudronnée.<br />

Aujourdʹhui, je ne vous écris à autre fin que <strong>de</strong> vous recomman<strong>de</strong>r ces soins <strong>de</strong><br />

prévoyance.<br />

M. Leclerc est assez bien, en apparence bien remis; cependant le mé<strong>de</strong>cin ici, trop<br />

timi<strong>de</strong> ce me semble, voudrait quʹil restât encore à Vaugirard jusquʹau 1 er janvier; ce serait<br />

6 mois <strong>de</strong> perdus; le mé<strong>de</strong>cin prétendait quʹon aurait dû lʹenvoyer à Amiens, plutôt que M.<br />

Trousseau.<br />

M. Alexandre [Legrand] va si mal que nous écrivons à Tain pour solliciter son ad‐<br />

mission; priez pour lui, et aussi pour nous tous que cette situation pénible contriste.<br />

Jʹai rencontré hier M. Be<strong>de</strong>l en omnibus, il vous écrira.<br />

M. Girard est à Chaville, philosophant <strong>de</strong> son mieux.<br />

On nous écrit <strong>de</strong> Rome que tous nos amis et enfants et jeunes ouvriers au service du<br />

Saint‐Père ont tous fait leur <strong>de</strong>voir 400 ; ils ren<strong>de</strong>nt témoignage à M. Boucault dont la<br />

conduite, disent‐ils, a été héroïque (<strong>Lettre</strong> <strong>de</strong> M. Vrignault) 401 .<br />

M. [Jules] Blanchetière, qui avait été présenté par M.M. Tulasne à M me votre mère,<br />

est nommé Secrétaire <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul, en remplacement <strong>de</strong> M. Brandon<br />

qui sʹest engagé dans les zouaves pontificaux.<br />

400 En octobre 1867, Garibaldi marche sur Rome <strong>avec</strong> 11000 mercenaires. Le corps expéditionnaire français débarque en hâte à Civit<strong>avec</strong>chia<br />

les 29 et 30 octobre, et fait sa jonction <strong>avec</strong> l’armée pontificale. Les garibaldiens furent battus à Mentana, le 3 novembre.<br />

Les fameux chassepots français « firent merveille ». La glorieuse victoire <strong>de</strong> Mentana permit <strong>de</strong> régler la question romaine jusqu'à<br />

la guerre <strong>de</strong> 1870.<br />

401 Paul Vrignault, confrère à Nazareth, cousin du père Hello, avait rejoint l’armée pontificale en qualité d’infirmier, la veille <strong>de</strong> la<br />

bataille <strong>de</strong> Mentana. Arrivé le soir <strong>de</strong> la glorieuse journée, il assistera le docteur Charles Ozanam pour se dévouer auprès <strong>de</strong>s blessés<br />

et <strong>de</strong>s mourants. M. Boucault, membre <strong>de</strong> l’Œuvre <strong>de</strong> Nazareth, avait fait partie <strong>de</strong> la communauté pendant une dizaine<br />

d’années, puis s’était engagé comme soldat dans l’armée pontificale. Le père Hello a raconté son histoire dans Un zouave pontifical.<br />

1229


Je mets fin à ces détails, vous laissant, cher enfant, dans le Cœur <strong>de</strong> notre divin Sei‐<br />

gneur où, je pense, est votre <strong>de</strong>meure la plus habituelle; je tâcherai <strong>de</strong> mʹy trouver bien<br />

souvent <strong>avec</strong> vous.<br />

Mille bons souvenirs à M. Caille et aux autres ff.; je remercie M. Trousseau <strong>de</strong> sa let‐<br />

tre, jʹespère un peu plus tard trouver un moment pour lui écrire.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1255 à M. dʹArbois<br />

Mesures pour guérir un frère, mala<strong>de</strong> imaginaire.<br />

Vaugirard, 22 novembre 1867<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous avons pensé tous ici <strong>de</strong>puis longtemps que lʹimagination entrait pour beau‐<br />

coup dans lʹétat <strong>de</strong> santé <strong>de</strong> M. lʹabbé <strong>Jean</strong> [Gauffriau] et quʹ<strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> fermeté dans<br />

la volonté, il pourrait sʹaffranchir <strong>de</strong> plusieurs <strong>de</strong>s servitu<strong>de</strong>s que lui impose sa crainte ex‐<br />

cessive <strong>de</strong> lʹapparence même dʹune souffrance. Nous croyons quʹil y a bien quelques<br />

points faibles dans son organisme, mais quʹil sʹexagère cette débilité et quʹil nuit par là<br />

probablement à sa santé quʹil soigne trop, et certainement à lʹaction quʹil pourrait avoir<br />

successivement dans les œuvres.<br />

Avant tout, le temps quʹil donne à lʹoraison est trop court; si une application fort<br />

persistante le fatigue, il pourrait suppléer à la brièveté <strong>de</strong> son oraison du matin en faisant<br />

au moins, dans un autre moment du jour, quelque quart dʹheure <strong>de</strong> méditation. Pourquoi<br />

le samedi lecture tronquée? Sʹil se couche plus tôt, il semble quʹil pourrait se lever moins tard.<br />

Sʹil prend du vin le matin, un peu <strong>de</strong> soupe remplacerait avantageusement le choco‐<br />

lat; on sʹexplique difficilement du chocolat et du vin ensemble, il y a là une sorte dʹabus.<br />

Sʹil est vrai que son estomac, un peu fantasque, ait quelques lassitu<strong>de</strong>s durant le<br />

jour, un peu <strong>de</strong> gomme non sucrée remplacerait le chocolat dont on peut faire une sensua‐<br />

lité, à moins dʹune habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> mortification soutenue.<br />

La chambre fermée est tout à fait hors <strong>de</strong> nos habitu<strong>de</strong>s et nʹest pas motivée en ap‐<br />

parence, non plus que <strong>de</strong>s cheveux longs quelque peu notablement.<br />

M. Risse se plaignait beaucoup du peu <strong>de</strong> résistance quʹavait M. <strong>Jean</strong> contre les en‐<br />

traînements du saint ministère; il a éprouvé quʹà moins dʹêtre strictement limité dans ses<br />

services extérieurs, il prêterait vite matière à observation pour lʹexécution <strong>de</strong> ses emplois<br />

essentiels.<br />

Pour la confession <strong>de</strong>s femmes, je suis presque sûr que M gr sʹy opposerait, ses vues à<br />

cet égard mʹayant été déjà manifestées; je désire que nous nʹentrions pas dans cette voie.<br />

Je mʹarrête ici; je vais écrire <strong>de</strong>ux mots à notre cher f. Moutier qui me montre <strong>de</strong><br />

bonnes dispositions et que je désire encourager.<br />

Assurez notre cher abbé <strong>Jean</strong> que mes petites observations sur son règlement me<br />

sont inspirées seulement par le sentiment que jʹai <strong>de</strong> tout le bien quʹil peut faire sʹil arrive à<br />

fortifier quelques points faibles qui restent dans son imagination et dans sa volonté.<br />

Adieu, mon bien cher ami et fils en N.S.; croyez, <strong>avec</strong> tous vos frères, à mon tendre<br />

dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1230


Pour notre cher M. Boiry, je ne mʹétonne point <strong>de</strong> ses bonnes dispositions, jʹen bénis<br />

Dieu; je crois que nous <strong>de</strong>vrons <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r la tonsure pour la Trinité, si, comme jʹy compte<br />

bien, tout se soutient jusque‐là. Pour la philosophie, cʹest une excellente pensée; le premier<br />

volume est égaré; je ferai en sorte, dʹune façon ou dʹune autre, que vous en ayez un au plus tôt.<br />

1256 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Emploi du temps <strong>de</strong> MLP. Comment se comporter dans un nouveau poste: patience, humilité, ʺil faut que Dieu y<br />

mette sa très gran<strong>de</strong> partʺ. MLP. sʹinquiète <strong>de</strong> sa santé. Que la communauté observe bien le règlement. Rensei‐<br />

gnements à prendre sur un postulant qui a fait un essai chez les Franciscains.<br />

Chaville, 25 novembre 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous écris <strong>de</strong> notre ermitage <strong>de</strong> Chaville, où je passe jusquʹici une partie <strong>de</strong> cha‐<br />

que semaine, <strong>de</strong> samedi à mercredi lʹaprès‐midi; <strong>de</strong> là, je vais à Nazareth coucher et vivre<br />

tout un jour <strong>avec</strong> ceux <strong>de</strong> nos frères qui rési<strong>de</strong>nt dans les <strong>de</strong>ux maisons; enfin, je reviens le<br />

jeudi à Vaugirard. On a pensé que, <strong>de</strong> cette façon, je pourrais être un peu utile en ces di‐<br />

vers lieux, sans doute faute <strong>de</strong> pouvoir en faire beaucoup et sérieusement en aucun dʹeux;<br />

ils sont rares ceux dont on peut dire, comme on lʹa fait du divin Maître: transiit benefaciendo.<br />

Pour vous, cher ami, qui <strong>de</strong>meurez bien assis maintenant à notre chère œuvre<br />

dʹAmiens, vous allez, je lʹespère, y opérer <strong>de</strong> saintes choses, mais ce sera <strong>avec</strong> patience et<br />

longueur <strong>de</strong> temps; vous prendrez dʹabord une connaissance approfondie <strong>de</strong> la situation,<br />

en vous défiant <strong>de</strong>s premières impressions quʹon a si souvent à modifier; puis, vos vues<br />

étant bien prises <strong>de</strong>vant Dieu, vous tâcherez, au jour le jour, dʹeffectuer quelque peu du<br />

labeur que vous vous serez imposé; il sʹagit <strong>de</strong> faire à Amiens une œuvre vraiment utile<br />

pour les pauvres enfants orphelins, apprentis, jeunes ouvriers, et <strong>de</strong> constituer une com‐<br />

munauté bien posée pour <strong>de</strong>sservir cette œuvre. Il faut que Dieu y mette sa très gran<strong>de</strong><br />

part, vous avez le bon esprit <strong>de</strong> le reconnaître; si nous sommes humbles, fidèles, et aussi si<br />

nous sommes hommes dʹoraison, cette sainte entreprise se réalisera.<br />

Jʹachevais cette phrase un peu longue quand le carillon <strong>de</strong> la porte mʹannonce votre<br />

lettre dʹhier, quʹon me remet à lʹinstant.<br />

Je me contriste un peu <strong>de</strong>s malaises si fréquents <strong>de</strong> votre santé; êtes‐vous bien sûr<br />

quʹil nʹy ait pas <strong>de</strong> votre faute? (gron<strong>de</strong>r les gens qui sont mala<strong>de</strong>s, cela se voit souvent).<br />

Prenez‐vous les précautions nécessaires, suivez‐vous le régime quʹon vous a prescrit, écou‐<br />

tez‐vous les avis <strong>de</strong> M. Marcaire que jʹai chargé dʹêtre votre moniteur hygiénique? Faites<br />

un petit examen sur ces points et voyez si vous êtes sans reproche; si cʹest le fait <strong>de</strong> Dieu, Il<br />

est le maître, il faut nous soumettre.<br />

Je crois quʹen faisant <strong>de</strong>s registres séparés, particulièrement pour la communauté,<br />

on sʹen applaudirait, la Communauté étant proprement à former et ses traditions à poser à<br />

Amiens. Pour lʹorphelinat et le patronage, si le premier a un avenir, ce serait bien dʹagir <strong>de</strong><br />

même.<br />

M. Lantiez, à qui jʹai communiqué votre première lettre, insiste beaucoup pour<br />

quʹon gar<strong>de</strong> ses règlements et quʹon lui signale les atteintes réellement graves quʹon tente‐<br />

rait dʹy apporter.<br />

1231


Je crois que vos honoraires <strong>de</strong> messes ai<strong>de</strong>raient faiblement à lʹentretien <strong>de</strong> la cha‐<br />

pelle; mieux vaut, vos aumônes essentielles et menues dépenses faites, remettre le reste à<br />

lʹéconome.<br />

Je vous serais obligé <strong>de</strong> voir le Supérieur <strong>de</strong>s Franciscains et <strong>de</strong> lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r confi‐<br />

<strong>de</strong>ntiellement son jugement sur le nommé Jules Dubois [dit Julien], qui nous est venu <strong>de</strong><br />

chez lui (Sup r. ) <strong>de</strong>puis le mois <strong>de</strong> mai. Ce garçon, fort laborieux, assez docile et régulier, a<br />

une certaine étrangeté dans lʹesprit; il est curieux, indiscret, fait <strong>de</strong>s connaissances au <strong>de</strong>‐<br />

hors, se mêle <strong>de</strong> choses qui ne le concernent pas et pourrait, sʹil nʹétait surveillé, se créer,<br />

par zèle indiscret, <strong>de</strong>s affaires fâcheuses pour lui en même temps que pour la Communau‐<br />

té. Des <strong>de</strong>mi aveux <strong>de</strong> sa part me persua<strong>de</strong>nt que, pour <strong>de</strong>s raisons semblables, il avait<br />

rendu sa position difficile chez les Franciscains; ces points sont à éclaircir.<br />

Par la même occasion, vous pourriez utilement faire aussi quelques questions sur<br />

lʹautre jeune homme (M. Wattelet, je crois) qui est près <strong>de</strong> vous à Amiens.<br />

Je vous enverrai une montre dès que jʹen aurai lʹoccasion.<br />

Jʹai chargé M. Paillé <strong>de</strong> toucher les petits bons chez M. Blount, mais cʹest 50f. seule‐<br />

ment à toucher pour ceux <strong>de</strong> Rome <strong>avec</strong> tout lʹarriéré <strong>de</strong> trois trimestres, ils donneront 40f.<br />

Notre rénovation sʹest faite aimablement <strong>avec</strong> le r.p. Leblanc.<br />

Adieu, bien cher ami, assurez tous nos frères <strong>de</strong> mes tendres sentiments, M. Caille<br />

en particulier, et croyez aussi à ma vive affection en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je vais mʹinformer pour lʹherméneutique.<br />

1257 à M. Risse<br />

Action <strong>de</strong> grâces pour le bien qui se fait à Metz, vie communautaire et vie apostolique. Nouvelles <strong>de</strong>s jeunes ori‐<br />

ginaires <strong>de</strong> lʹŒuvre. Projet <strong>de</strong> Cercle militaire à Rome. Petite chronique <strong>de</strong> la Communauté.<br />

Vaugirard, 3 décembre 1867<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je suppose quʹ<strong>avec</strong> la grâce du divin Maître, tout continue <strong>de</strong> marcher selon nos<br />

vœux dans notre chère maison; la bonne Provi<strong>de</strong>nce a tant fait jusquʹici pour vous quʹelle<br />

ne saurait vous délaisser non plus à lʹavenir. Le bien qui sʹopère dʹailleurs par votre œu‐<br />

vre, le bon esprit <strong>de</strong> vos frères et la sympathie si sincère dont vous êtes favorisés sont au‐<br />

tant <strong>de</strong> garanties pour le succès <strong>de</strong> vos efforts. Rendons grâces à Dieu <strong>de</strong> cet ensemble <strong>de</strong><br />

dispositions et reconnaissons humblement quʹau Seigneur en revient toute la gloire. Nous<br />

sentons, nous aussi, les effets du secours divin; toutes nos œuvres et les serviteurs que<br />

Dieu y a attachés se soutiennent et prospèrent. Vos jeunes Messieurs, en particulier, ne<br />

vont pas mal. M. Barthélemy [Marchand] est à Amiens <strong>avec</strong> M. <strong>de</strong> Varax, M. Guichard à<br />

Angers, M. Kneib à Vaugirard; sans être parfait, du côté <strong>de</strong> lʹhumilité notamment, ce <strong>de</strong>r‐<br />

nier donne bonne espérance pour sa vocation. Quelques bons jeunes gens sont en aspi‐<br />

rance, mais les difficultés à briser ne manquent jamais dans cette condition transitoire; il<br />

faut donc prier beaucoup pour eux, je les recomman<strong>de</strong> à vous et à vos frères.<br />

On travaille particulièrement à Vaugirard à bien asseoir les exercices, on arrête <strong>avec</strong><br />

précision les formules, on va aussi préparer lʹannuaire <strong>de</strong>s fêtes et solennités en usage<br />

dans nos Communautés; on enverra cet annuaire à toutes nos maisons, mois par mois,<br />

pour 1868.<br />

1232


Nous avons reçu <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> notre ami Vion, blessé sensiblement à la main, et<br />

<strong>de</strong> M. Boucault, dont la conduite à lʹarmée pontificale a été aussi courageuse que chré‐<br />

tienne. Un certain nombre <strong>de</strong> nos anciens enfants, <strong>de</strong>s jeunes ouvriers ou <strong>de</strong> nos amis res‐<br />

tent dans les troupes du Saint Père. On songe à faire pour ces jeunes gens un cercle à<br />

Rome, qui serait leur maison <strong>de</strong> famille; cet appui leur serait, dit‐on, bien nécessaire.<br />

Jʹoubliais <strong>de</strong> vous donner <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> votre petit Herlique; il ne va pas mal en<br />

ensemble; M. Hello fait en ce moment une petite retraite à lui et à ses jeunes condisciples.<br />

M. Moës fait, à Chaville, sa philosophie <strong>avec</strong> M. Girard (ancien Prési<strong>de</strong>nt du patro‐<br />

nage <strong>de</strong> S te ‐Anne‐Charonne); je pense que lʹun et lʹautre seront, à la fin <strong>de</strong> lʹannée, en état<br />

dʹentrer au séminaire.<br />

Les trois qui sont à St‐Sulpice marchent bien; M. Leclerc toutefois ayant eu, quel‐<br />

ques semaines après son entrée, une sorte <strong>de</strong> fluxion <strong>de</strong> poitrine, a été contraint <strong>de</strong> pren‐<br />

dre un temps notable <strong>de</strong> repos à Vaugirard; il retournera <strong>de</strong>main à St‐Sulpice.<br />

Je vous tiens au courant <strong>de</strong> ces détails, bien cher ami, sachant combien vous vous<br />

intéressez à ces bons jeunes gens, espoir <strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong> la Communauté. Je suis heureux<br />

<strong>de</strong>s bonnes dispositions <strong>de</strong> M. Lucien [Jacquart] et du contentement quʹil vous donne, je<br />

lui écris <strong>de</strong>ux mots pour lʹencourager.<br />

Assurez les autres <strong>de</strong> ma tendre affection, et croyez vous‐même à mon tendre dé‐<br />

vouement en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. M. <strong>de</strong>s Francs doit nous amener jeudi un <strong>de</strong>s bons jeunes gens <strong>de</strong> son œuvre<br />

dʹOrléans, lequel vient pour commencer son noviciat; je ne sais pas son nom, la curiosité<br />

toute naturelle <strong>de</strong> M. Lebrun ne pourra donc être satisfaite aujourdʹhui.<br />

1258 à M. dʹArbois<br />

Trois ouvrages <strong>de</strong> philosophie expédiés à Angers. Brèves nouvelles <strong>de</strong>s santés.<br />

6 décembre 1867<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Les trois volumes <strong>de</strong> philosophie pour notre cher M. Boiry seront déposés <strong>de</strong>main<br />

au chemin <strong>de</strong> fer. Nous nʹavons pas eu le temps <strong>de</strong> les faire relier, peut‐être une couver‐<br />

ture <strong>de</strong> fort papier suffira‐t‐elle pour les maintenir.<br />

M. Leclerc, retenu ici presque durant <strong>de</strong>ux mois par une fausse fluxion <strong>de</strong> poitrine,<br />

est remis et est retourné mercredi au séminaire.<br />

M. Pattinote a une grosse grippe; le séminaire les éprouve dans leur santé. Les au‐<br />

tres ici vont bien.<br />

Et vous, cher ami, et vos frères, comment allez‐vous? Vos services se soutiennent‐<br />

ils? Avez‐vous un peu <strong>de</strong> contentement et <strong>de</strong> paix? Votre chapelle est‐elle couverte?<br />

Quand sera‐t‐elle bénite et livrée à vos chers jeunes patronnés? Sont‐ils assidus et nom‐<br />

breux?<br />

Notre cher M. Moutier va‐t‐il bien? Jʹattends <strong>de</strong> lui une petite lettre bientôt; jʹai vu sa<br />

mère qui va bien.<br />

1233


Affections à tous; MM. Gauffriau, Boiry, <strong>Léon</strong> [Guichard], tous sont présents à nos<br />

souvenirs et ont part à nos prières chaque jour.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1259 à M. Pavie<br />

Condoléances à lʹoccasion dʹun <strong>de</strong>uil familial.<br />

Vaugirard, 6 décembre 1867<br />

Mon bien cher ami,<br />

Nous prenons la part la plus cordiale, notre ami Myionnet et moi, à lʹaffliction que<br />

Dieu vient dʹenvoyer à votre chère famille. Vous êtes accoutumés, chez vous, à vénérer<br />

toujours quelque aïeul qui est comme lʹange gardien du foyer. Il me semble quʹautrefois<br />

vous mʹavez bien longtemps parlé dʹune bonne grand‐mère qui était aussi arrivée à un âge<br />

fort avancé. Mais un moment vient où ces vieux témoins <strong>de</strong> notre vie retournent vers<br />

Dieu, qui nous façonne à notre tour pour prendre leur place dans le respect <strong>de</strong> ceux qui<br />

nous entourent. Bien que vous soyez déjà grand‐père, vous ne sauriez encore prendre un<br />

rôle si grave; mais peu à peu le poids <strong>de</strong>s ans vous assoira au fauteuil <strong>de</strong> la bonne mère<br />

qui est partie pour le mon<strong>de</strong> meilleur. Elle a laissé au milieu <strong>de</strong> vous son exemple, le sou‐<br />

venir <strong>de</strong> sa charité, <strong>de</strong> sa patience et <strong>de</strong> sa soumission à Dieu; cʹest un précieux héritage. Je<br />

nʹai pas besoin <strong>de</strong> dire que M. Myionnet et moi, nous nous unirons à vos prières pour la<br />

chère défunte. Nos frères et nos enfants sont avertis aussi quʹun <strong>de</strong> nos plus fidèles amis<br />

attend <strong>de</strong> leur part une prière, témoignage <strong>de</strong> leur sympathie.<br />

Offrez, mon bon ami, à Mme Pavie nos profon<strong>de</strong>s condoléances, et croyez à notre<br />

plus vive affection pour vous et pour tous les vôtres.<br />

Votre dévoué ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1259 bis 402 à M. Caille<br />

Questions sur les Œuvres dʹAmiens. Les charges <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux Œuvres déjà existantes interdisent <strong>de</strong> ne rien entre‐<br />

prendre <strong>de</strong> nouveau sans en converser <strong>avec</strong> MLP. Mort dʹErnest Vasseur, frère dʹAlphonse.<br />

Vaugirard, 10 décembre 1867<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Voilà plusieurs semaines que jʹentends annoncer un voyage <strong>de</strong> votre part à Paris,<br />

mais je ne vois pas quʹil se réalise; je ne mʹen étonne pas beaucoup, sachant combien vos<br />

occupations sont multipliées; nous ne désespérons pas néanmoins que vous ne puissiez<br />

vous échapper durant quelques jours pour nous visiter et nous dire comment vont, et vo‐<br />

tre maison, et vos œuvres. M. <strong>de</strong> Varax, qui est plus libre et pour lequel <strong>de</strong>s correspondan‐<br />

ces fréquentes sont une habitu<strong>de</strong>, me dit, il est vrai, en ensemble, comment vous marchez,<br />

mais il nʹest encore quʹà <strong>de</strong>mi au courant <strong>de</strong> vos travaux et sa participation y est encore as‐<br />

sez restreinte. Néanmoins, le sachant à la fois zélé et très intelligent <strong>de</strong> tous les rouages <strong>de</strong>s<br />

402 Supplée la lettre 1208.<br />

1234


œuvres, je suis persuadé quʹil vous rendra successivement <strong>de</strong>s services bien utiles. Il pa‐<br />

raissait croire que, les travaux <strong>de</strong> la maison S t ‐Jacques étant déjà avancés, vous gardiez<br />

lʹespérance quʹelle pourrait bien prochainement recevoir un patronage. La chose, assuré‐<br />

ment, serait désirable au point <strong>de</strong> vue du bien <strong>de</strong>s pauvres jeunes apprentis, mais votre<br />

personnel soutient <strong>avec</strong> peine déjà et imparfaitement les <strong>de</strong>ux œuvres réunies rue <strong>de</strong><br />

Noyon; on ne voit pas bien comment on pourrait, à distance notable, donner encore appui<br />

et concours actif à un autre établissement. Jʹespère, mon bon ami, que, tenant compte <strong>de</strong>s<br />

observations que je vous ai adressées déjà à ce sujet, vous nʹentreprendrez rien sans en<br />

converser avant tout <strong>avec</strong> nous.<br />

M. Alphonse Vasseur recomman<strong>de</strong> à vos prières son frère, M. Ernest, qui vient <strong>de</strong><br />

mourir dʹune maladie <strong>de</strong> poitrine. Il a été malheureusement surpris par la mort qui est ve‐<br />

nue plus vitement quʹon ne lʹavait pensé, et il nʹa pu être confessé.<br />

Nous allons essayer pour M. Alexandre [Legrand] <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Tain; ses accès<br />

sont si fréquents et si graves quʹil <strong>de</strong>venait impossible <strong>de</strong> le laisser plus longtemps en si<br />

triste état.<br />

M. Arsène [Briscul] ne va pas mal, nos Messieurs ne sont pas mécontents <strong>de</strong> ses<br />

dispositions.<br />

Jʹespère que tout va bien aussi pour vous. Adieu, mon bien bon ami, croyez à mon<br />

affectueux dévouement pour vous et pour tous nos chers frères.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1260 à M. <strong>de</strong> Montrond 403<br />

Invitation à la fête familiale <strong>de</strong> la St‐<strong>Jean</strong>.<br />

Vaugirard, 20 décembre 1867<br />

Mon bien bon ami et frère en N.S.,<br />

Vendredi 27, fête <strong>de</strong> St <strong>Jean</strong>, nous aurons ici une solennité <strong>de</strong> famille; nous avons<br />

bien compté que vous seriez <strong>de</strong>s nôtres.<br />

A 4 heures, vêpres, panégyrique, Salut; à 5h.1/2 dîner; à 8h., petit délassement.<br />

Jʹespère que, pour la soirée, Mme <strong>de</strong> Montrond et ses chers enfants viendraient vous<br />

rejoindre. M. Rousseau mʹa promis quʹil amènerait aussi sa chère fille.<br />

Votre tout affectionné ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1261 à M. Risse<br />

Fragment <strong>de</strong> lettre. Remerciements pour les nouvelles <strong>de</strong> Metz. MLP. exprime sa confiance: à travers les diffi‐<br />

cultés, nous progressons sans cesse.<br />

[Fin décembre 1867]<br />

[ ……………..]<br />

Je ne renonce pas à vous écrire, bien cher ami et fils en N.S., mais comme acompte,<br />

je joins ici quelques lignes à celles que vous adresse notre cher abbé Planchat. Jʹai été, ces<br />

403 Le <strong>de</strong>stinataire <strong>de</strong> cette lettre a été, jusqu’à cette édition-ci, M. Levassor. Le texte <strong>de</strong> la lettre s’y oppose. (Les relations privilégiées<br />

<strong>de</strong> Montrond-Levassor expliquent peut-être que l’original ait été transmis par l’abbé Levassor qui est, plutôt que l’abbé Taillandier,<br />

celui qui accompagnait M. <strong>de</strong> Montrond en sa visite à MLP. mourant, cf. Positio, p. 575 « Dernière visite <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux amis à<br />

Chaville »).<br />

1235


temps <strong>de</strong>rniers, un peu souffrant et, par là, retardé dans mes correspondances. Je suis heu‐<br />

reux <strong>de</strong>s nouvelles, bonnes dans leur ensemble, que me transmet votre lettre. Combien je<br />

bénis Dieu qui se montre si con<strong>de</strong>scendant pour nos œuvres et qui donne à toutes son ap‐<br />

pui. A travers les difficultés quotidiennes, en effet, toutes nos petites familles prospèrent et<br />

se constituent peu à peu, le travail est lent, mais progressif; puisse lʹavancement se faire<br />

sentir surtout dans le bon esprit et lʹamélioration spirituelle.<br />

Soyez bien assuré, cher ami, que ce nous est une douce joie <strong>de</strong> suivre <strong>de</strong>s yeux vos<br />

mouvements et le bien que le Seigneur daigne faire par vous et les vôtres. Aussi recevrons‐<br />

nous <strong>avec</strong> une vive satisfaction le journal [...........]<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1262 à M. Risse<br />

Sur lʹusage du tabac dans la Congrégation.<br />

Sans date<br />

[………..]<br />

Jamais nos frères ne fument, cette inutile et mauvaise sensualité leur est absolument<br />

interdite.<br />

1262bis 404 à M. Risse<br />

Remerciements pour lʹenvoi du journal <strong>de</strong> communauté. Un aspirant a été écarté.<br />

[Décembre 1867]<br />

[…………]<br />

Jʹai reçu vos bonnes lettres et votre petit journal si fidèlement tenu. Grâce à cette<br />

communication, nous suivons <strong>de</strong>s yeux votre vie et celle <strong>de</strong> vos œuvres, et lʹunion <strong>de</strong> nos<br />

cœurs en profite en même temps que lʹintime association <strong>de</strong> nos moyens.<br />

[………….] quelques jours; je le suivrai <strong>de</strong>s yeux et <strong>avec</strong> affection.<br />

M. Kneib ne nous a pas donné satisfaction; ses relations <strong>avec</strong> les enfants nous inspi‐<br />

raient <strong>de</strong>s inquiétu<strong>de</strong>s assez sérieuses pour […………]<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1263 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Condoléances pour la mort dʹun grand‐père. Relations <strong>de</strong> famille.<br />

Chaville, 30 décembre 1867<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous prenons une bien vive part à la nouvelle affliction qui frappe votre famille et,<br />

en particulier, votre bonne mère que bien <strong>de</strong>s épreuves douloureuses ont atteinte coup sur<br />

coup; heureusement, sa foi la rend forte et son âme se réfugie dans une soumission filiale<br />

aux décrets <strong>de</strong> la divine Sagesse.<br />

404 Supplée la lettre 1453.<br />

1236


La mort <strong>de</strong> ce vénéré grand‐père ne saurait être non plus pour vous, bien cher en‐<br />

fant, sans une peine profon<strong>de</strong>, car il était lʹange protecteur <strong>de</strong> la famille; il avait, <strong>avec</strong> votre<br />

père et votre mère, veillé sur votre enfance <strong>avec</strong> cette douce autorité <strong>de</strong> lʹâge et dʹune belle<br />

vie noble et chrétienne. Voilà votre maison bien désolée; le bon Maître, espérons‐le, com‐<br />

blera tous les vi<strong>de</strong>s par le redoublement dʹamour et <strong>de</strong> sollicitu<strong>de</strong> quʹIl répandra sur vous<br />

tous. Nous le prions à cette intention et aussi pour le cher défunt. Demain, je dirai pour lui<br />

la messe <strong>de</strong> Communauté, afin que tous nos frères soient unis au S t Sacrifice, tandis que <strong>de</strong><br />

votre côté vous lʹoffrirez aussi, sans doute, dans les mêmes intentions.<br />

Examinez si vos affaires à Amiens peuvent supporter quelque absence <strong>de</strong> votre part<br />

sans un détriment absolu. Dans ce cas, vous ne pourriez refuser à votre bonne mère la<br />

consolation <strong>de</strong> votre présence durant quelques jours. Il nʹest peut‐être pas nécessaire que<br />

vous suiviez jusquʹau bout le règlement <strong>de</strong>s affaires, mais il peut être utile que vous pre‐<br />

niez une connaissance générale <strong>de</strong> lʹétat <strong>de</strong>s choses, afin que vous puissiez, au besoin,<br />

concerter quelques décisions <strong>avec</strong> votre bonne mère, si elle croyait <strong>de</strong>voir vous consulter.<br />

Voyez, du reste, ce que la situation <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, et, <strong>de</strong>vant Dieu, faites ce qui vous<br />

semblera selon sa sainte volonté.<br />

Jʹavertis nos frères <strong>de</strong> divers côtés, afin que tous prient en union <strong>avec</strong> vous et <strong>avec</strong><br />

votre chère famille.<br />

Je pense que vous écrirez vous‐même un mot à Amiens.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, je recevrai <strong>avec</strong> consolation <strong>de</strong> vos nouvelles.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1264 à M. Caille<br />

Souhaits <strong>de</strong> nouvel an. MLP. rend grâces pour le zèle <strong>de</strong> M. Caille. Souci <strong>de</strong> resserrer les liens fraternels à lʹave‐<br />

nir, car il sent que ʺsa carrière sera courte désormaisʺ.<br />

31 décembre 1867<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je remercie Dieu, en finissant cette année, <strong>de</strong> mʹavoir donné en vous, en vos frères et<br />

en tous les membres <strong>de</strong> notre petite famille <strong>de</strong>s amis si dévoués, si édifiants pour moi et<br />

dont lʹaffection mʹa donné <strong>de</strong> si douces consolations. Vous nʹêtes dans ce nombre, cher<br />

ami, ni <strong>de</strong>s moins anciens, ni <strong>de</strong>s moins fidèles; soyez bien assuré que jʹapprécie votre zèle<br />

pour la gloire <strong>de</strong> Dieu, votre généreux attachement pour la Communauté et votre bonté<br />

particulière pour moi. Je prie tous les jours pour vous, pour vos frères, pour vos œuvres; je<br />

vais le faire <strong>avec</strong> un redoublement dʹinstances cette année, car ma carrière sera courte dé‐<br />

sormais; je veux en remplir dignement la fin, <strong>avec</strong> le secours <strong>de</strong> Dieu, et je sens que je vous<br />

ai<strong>de</strong>rai bien, que je vous prouverai dignement mon attachement si je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> ar<strong>de</strong>mment<br />

au Seigneur pour vous tous lʹabondance <strong>de</strong> ses grâces et <strong>de</strong> ses bénédictions. Cʹest ce que<br />

je fais à lʹinstant même et pour finir cette année en pieuse union <strong>avec</strong> vous.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Si vous allez chez M gr dʹAmiens, offrez‐lui mes humbles respects. Souvenir à M. Ca‐<br />

cheleux et à vos autres amis.<br />

1237


Vous avez reçu sans doute lʹavis du décès du grand‐père <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax; jʹen ai été<br />

averti hier.<br />

1265 à M. Risse<br />

Souhaits <strong>de</strong> nouvel an. Que Dieu fasse <strong>de</strong> nous <strong>de</strong> bons instruments entre ses mains.<br />

Vaugirard, 31 décembre [1867]<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> vos vœux <strong>de</strong> fête et <strong>de</strong> nouvel an; je les avais lus dʹavance dans<br />

votre cœur que vous mʹavez ouvert bien souvent et dont je sais toutes les affectueuses dis‐<br />

positions pour la petite famille à laquelle vous vous êtes pour toujours uni.<br />

Bénissons Dieu, cher ami, <strong>de</strong> toutes les grâces répandues chaque année sur nous;<br />

<strong>de</strong>mandons‐lui <strong>de</strong> nous les continuer malgré notre indignité, et dʹaccroître surtout en nous<br />

les vertus qui feront <strong>de</strong> nous <strong>de</strong> bons et soli<strong>de</strong>s instruments entre ses mains. […que vos<br />

travaux…] [Le <strong>Prevost</strong>]<br />

1266 à M. dʹArbois<br />

Souhaits affectueux à un fils estimé. MLP. a le sentiment que sa vie touche au but. Il emploiera ce qui lui reste <strong>de</strong><br />

jours pour prier pour ses fils et leur témoigner son tendre dévouement.<br />

Vaugirard, 31 décembre 1867<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je termine cette année en vous écrivant ce mot dʹaffection; cʹest, quant au sentiment<br />

du cœur du moins, finir ce temps comme je lʹai commencé et continué; cʹest aussi <strong>de</strong> même<br />

quʹil se poursuivra encore, bien cher enfant, autant quʹil plaira à Dieu <strong>de</strong> le faire durer à<br />

lʹavenir, ou <strong>de</strong>s jours, ou <strong>de</strong>s mois, je dirais trop, sans doute, en disant <strong>de</strong>s années, jusquʹà<br />

la fin quelle quʹelle soit. Notre affection est trop bien assise en Dieu pour que rien, je lʹes‐<br />

père, puisse lʹaltérer jamais. A mesure que jʹavance, je sens mieux le besoin <strong>de</strong> prier pour<br />

vous tous, en voyant combien peu je vous suis utile par le mouvement et les soins exté‐<br />

rieurs; comptez bien sur ces <strong>de</strong>ux choses: mes habituelles instances pour vous auprès du<br />

Seigneur et mon bien tendre dévouement en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. <strong>Jean</strong> [Gauffriau] semble me bou<strong>de</strong>r; peut‐être ai‐je été un peu rigoureux en ce<br />

qui concerne son règlement particulier, qui pourtant avait besoin dʹêtre revu en plusieurs<br />

points; assurez‐le que nous lui sommes tous affectueusement attachés.<br />

Si vous voyez la famille Pavie, assurez‐la <strong>de</strong> nos sentiments fidèlement dévoués.<br />

1267 à M. dʹArbois<br />

Remerciement pour une offran<strong>de</strong>.<br />

Chaville, 6 janvier [1868]<br />

Epiphanie<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu les 200f don <strong>de</strong> votre bon père, et que vous mʹavez fidèlement renvoyés.<br />

1238


Il me semble quʹil a été convenu entre nous que, pour ai<strong>de</strong>r votre petite communau‐<br />

té, je partagerais <strong>avec</strong> vous le montant <strong>de</strong> ces envois.<br />

Je vous retourne donc ci‐contre 100f.<br />

Tout va ici comme <strong>de</strong> coutume. Je vous ai dit que M. Alexandre [Legrand] était en<br />

traitement à la maison <strong>de</strong> Tain, près Valence. Et aussi que M. <strong>de</strong> Varax avait perdu son<br />

grand‐père.<br />

Adieu, cher enfant, mille affections pour vous et pour vos frères. Ici, nous avons un<br />

froid sévère <strong>de</strong> dix à onze ou douze <strong>de</strong>grés.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1268 à M. Maignen<br />

MLP. partage quelques inquiétu<strong>de</strong>s à propos <strong>de</strong> lʹŒuvre <strong>de</strong> Nazareth.<br />

Vaugirard, 10 janvier 1868<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Jʹai, au sujet <strong>de</strong> votre œuvre, quelques petites inquiétu<strong>de</strong>s:<br />

1°‐ relativement à cette Société Coopérative, véritable hors‐dʹœuvre qui absorbe un<br />

<strong>de</strong> vos frères et qui pourrait <strong>de</strong>venir lʹoccasion <strong>de</strong> bien <strong>de</strong>s ennuis pour vous; elle <strong>de</strong>vrait<br />

être faite par les Confrères et non par vous.<br />

2°‐ pour la surveillance du coucher et <strong>de</strong> la vigilance <strong>de</strong> la nuit dans votre gran<strong>de</strong><br />

salle, M. Faÿ me paraît insuffisant pour ce service; la discipline pour le coucher, qui se <strong>de</strong>‐<br />

vrait faire en silence, est mal observée; en ensemble, je crois, le règlement est faible et fai‐<br />

blement gardé.<br />

3°‐ enfin, vous <strong>de</strong>meurez trop souvent dans la journée hors <strong>de</strong> votre maison et vos<br />

écrits vous empêchent, peut‐être plus quʹil ne faut, <strong>de</strong> chercher <strong>de</strong>s ressources.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1269 à M. Caille<br />

Approbation conditionnelle dʹune nouvelle fondation.<br />

Nazareth, 21 janvier 1868<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Jʹattendais, pour vous donner notre avis relativement à lʹouverture <strong>de</strong> la maison S t ‐<br />

Jacques, que jʹeusse pu réunir le Conseil <strong>de</strong> la Communauté qui ne <strong>de</strong>vait sʹassembler<br />

quʹhier. En regrettant <strong>de</strong> nouveau, comme nous lʹavions fait déjà précé<strong>de</strong>mment, quʹon<br />

nʹait pas différé davantage le commencement <strong>de</strong> cette nouvelle œuvre qui ne manquera<br />

pas <strong>de</strong> surcharger votre mon<strong>de</strong>, <strong>de</strong> nuire à lʹordre <strong>de</strong>s exercices <strong>de</strong> la communauté<br />

dʹAmiens et <strong>de</strong> porter aussi préjudice à la maison <strong>de</strong> la rue <strong>de</strong> Noyon, nous avons pensé<br />

quʹil fallait cé<strong>de</strong>r à la force <strong>de</strong>s choses et à un entraînement quʹil eût été sans doute plus<br />

pru<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> maîtriser.<br />

Cette réserve faite, nous souhaitons cordialement le succès <strong>de</strong> cette entreprise, et<br />

nous y donnerons sympathie comme à tout ce que vous faites pour la gloire <strong>de</strong> Dieu.<br />

1239


La bénédiction <strong>de</strong> lʹœuvre <strong>de</strong>vant avoir lieu un dimanche, aucun <strong>de</strong> nous ne pourra<br />

y assister; je crois même que nous en aurions été empêchés un autre jour, à cause <strong>de</strong>s oc‐<br />

cupations dont nous sommes tous surchargés dans cette partie <strong>de</strong> lʹannée. Soyez sûr, mon<br />

bon ami, que nous nʹoublierons pas <strong>de</strong> prier pour que le Seigneur bénisse vos efforts et les<br />

fasse servir au salut <strong>de</strong> bien <strong>de</strong>s âmes.<br />

Tous nos ff. sʹassocieront à mes vœux et sʹunissent aussi à moi pour vous redire ici<br />

tous nos sentiments <strong>de</strong> tendre et bien dévouée affection en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1270 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Intentions <strong>de</strong> messe à la mémoire <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot.<br />

Vaugirard, 22 janvier 1868<br />

Madame la Marquise,<br />

Je dirai et ferai dire pour votre cher mari les <strong>de</strong>ux messes que vous désirez pour<br />

chaque semaine; jʹai déjà commencé à prendre ces intentions; les messes seront dites les<br />

mardi et jeudi <strong>de</strong> chaque semaine.<br />

Je suis heureux <strong>de</strong> porter les vœux <strong>de</strong> votre chère famille <strong>de</strong>vant Dieu et <strong>de</strong> mʹasso‐<br />

cier une fois <strong>de</strong> plus à vos pieux et si intimes souvenirs.<br />

Je recevrai <strong>avec</strong> joie lʹassurance que votre vénérée grandʹmère [Mme <strong>de</strong> Caulaincourt<br />

mère] est bien remise <strong>de</strong> son indisposition; je ne tar<strong>de</strong>rai pas dʹailleurs à faire <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong><br />

ses nouvelles, ce sera un <strong>de</strong> mes premiers soins en arrivant à Paris. Jʹécris ce mot <strong>de</strong> Cha‐<br />

ville, il est à tort daté <strong>de</strong> Vaugirard.<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, et partager <strong>avec</strong> votre cher entourage, tous<br />

mes sentiments respectueux et bien dévoués en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong> Ptre 1271 à M. Risse<br />

Utilité <strong>de</strong>s correspondances régulières. Un frère <strong>de</strong> Metz tenté <strong>de</strong> laisser sa vocation pour sʹengager dans les<br />

zouaves pontificaux.<br />

Vaugirard, 26 janvier 1868<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu <strong>avec</strong> joie votre affectueuse lettre du 24 <strong>avec</strong> les divers documents qui y sont<br />

joints; tout cela nous intéresse vivement et nous fait, pour ainsi dire, vivre <strong>avec</strong> vous, en<br />

nous permettant <strong>de</strong> suivre vos mouvements et <strong>de</strong> nous i<strong>de</strong>ntifier <strong>avec</strong> tout ce qui regar<strong>de</strong><br />

vous et vos travaux. Ecrire est long et parfois gênant, mais il y a <strong>de</strong> grands avantages, en<br />

famille religieuse, aux correspondances suivies et régulières. Merci donc, et que le bon<br />

Dieu vous ai<strong>de</strong> dans vos œuvres si laborieuses.<br />

[………….]<br />

Dieu lʹa appelé et où il peut faire sûrement son salut; un soldat pontifical nʹest quʹun<br />

<strong>de</strong> plus en beaucoup <strong>de</strong> mille, un frère <strong>de</strong> St Vincent [<strong>de</strong> Paul] <strong>de</strong> plus compte pour beau‐<br />

1240


coup dans le petit nombre dʹhommes zélés qui se vouent au service <strong>de</strong> leurs frères, <strong>de</strong>s<br />

ouvriers, <strong>de</strong>s apprentis, <strong>de</strong>s enfants.<br />

Quʹil reste donc où Dieu lʹa mis, sʹil ne veut compromettre tristement son avenir.<br />

Adieu, mon bien cher ami et fils en N.S.; mille affections à vous et à vos ff.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. François Cherry a compris lui‐même [………..]<br />

1272 à M. dʹArbois<br />

Conseils à <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à Mgr Angebault concernant la propriété <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong>s Champs.<br />

Vaugirard, 26 janvier 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous allons, suivant le désir <strong>de</strong> notre cher f. Moutier, nous entendre <strong>avec</strong> sa mère et<br />

<strong>avec</strong> son propriétaire pour que le montant <strong>de</strong>s loyers soit versé aux mains <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier.<br />

Je gémis <strong>avec</strong> vous <strong>de</strong>s impatiences si fâcheuses <strong>de</strong> vos ff. dans la conduite <strong>de</strong> leurs<br />

enfants; je mʹunis à vous pour leur <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r instamment dʹy apporter plus <strong>de</strong> calme et <strong>de</strong><br />

charité.<br />

Pour lʹaffaire <strong>de</strong> la propriété <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong>s Champs, je crois que vous pourriez écrire<br />

à Mgr pour lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r ses conseils sur ce quʹil vous reste à faire (lettre bien respectueuse<br />

qui ne semble ni une plainte, ni lʹexpression dʹun mécontentement, mais seulement lʹincer‐<br />

titu<strong>de</strong> sur la ligne que vous avez à suivre). Gar<strong>de</strong>r copie <strong>de</strong> votre lettre et inscrire au bas la<br />

réponse que Mgr vous aura faite si elle est verbale, la conserver si elle est écrite. Votre res‐<br />

ponsabilité sera ainsi garantie. Peut‐être Mgr vous autorisera à la faire connaître au notaire,<br />

sʹil juge quʹil y ait là un moyen <strong>de</strong> le stimuler.<br />

Nous, nous vous aimons tous bien cordialement et nous prions pour vous.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Dites pour moi quelques mots dʹaffection à vos ff.<br />

1273 à M. Caille<br />

Raisons dʹun mouvement <strong>de</strong> personnel. Bien que souffrant du zèle incontrôlé <strong>de</strong> M. Caille, MLP. lui sait gré <strong>de</strong><br />

lʹattention quʹil porte à ses frères.<br />

Vaugirard, 28 janvier 1868<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

M. <strong>de</strong> Varax mʹayant dit, à son <strong>de</strong>rnier voyage ici, que M. Louis Hubert, bien<br />

quʹanimé <strong>de</strong> bonnes intentions et ne manquant pas <strong>de</strong> qualités, était peu propre aux sur‐<br />

veillances, vous auriez désiré quʹil pût être remplacé. Nous avons, à plusieurs reprises,<br />

cherché qui nous pourrions vous donner à sa place qui fût plus capable <strong>de</strong> bien faire ce<br />

service, nous nʹavons trouvé personne <strong>de</strong> disponible qui eût quelque valeur sérieuse pour<br />

<strong>de</strong>s emplois <strong>de</strong> confiance. En ces <strong>de</strong>rniers temps, un bon jeune homme <strong>de</strong> 18 ans seule‐<br />

ment, mais grand et fort et assez intelligent, pieux et <strong>de</strong> bon caractère, sʹétant attaché à no‐<br />

tre Communauté, jʹavais eu la pensée quʹétant un peu formé, il pourrait vous rendre <strong>de</strong><br />

1241


ons services; mais ces MM. du Conseil ont jugé quʹil était encore trop peu initié aux œu‐<br />

vres et surtout quʹétant né à la campagne, il nʹaurait pas, sans une attente plus prolongée,<br />

la subtilité et lʹexpérience suffisantes pour surveiller <strong>de</strong>s enfants <strong>de</strong>s villes et pour prendre<br />

influence sur eux. Cette ressource nʹest donc pas immédiatement disponible.<br />

M. <strong>de</strong> Varax mʹécrit un mot pour me faire connaître quʹun jeune homme <strong>de</strong> votre<br />

œuvre, nommé Gérold, est disposé à faire son postulat chez vous et pourrait, dès ce mo‐<br />

ment, vous ai<strong>de</strong>r à S t ‐Jacques. Je mʹen réjouis et je pense que cʹest là, sans doute, une grâce<br />

<strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce qui veut venir à votre secours; vous regar<strong>de</strong>rez seulement sʹil ne<br />

conviendrait pas <strong>de</strong> laisser rue <strong>de</strong> Noyon ce jeune homme et si un autre, un peu plus expé‐<br />

rimenté parmi les frères, ne pourrait plus convenablement vous accompagner à S t Jacques;<br />

vous pouvez mieux que moi en juger.<br />

M. <strong>de</strong> Varax me dit que, malgré les soins dont vous lʹentourez <strong>avec</strong> beaucoup <strong>de</strong><br />

charité, il a été souffrant ces jours <strong>de</strong>rniers; les indispositions sont partout, en ce moment,<br />

fort multipliées; espérons que celle <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax sera sans suite. Je ne vous remercie pas<br />

<strong>de</strong> votre bonté pour vos ff., et pour M. <strong>de</strong> Varax en particulier; jʹai vu souvent par moi‐<br />

même combien cette charité est habituelle pour vous.<br />

Le temps me manque pour écrire aujourdʹhui à M. <strong>de</strong> Varax, veuillez lui dire la<br />

substance <strong>de</strong> ma lettre. Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S. Croyez à toutes mes ten‐<br />

dres affections pour vous et pour tous vos frères.<br />

Votre ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1274 à M. Caille<br />

Comptes <strong>de</strong> la communauté dʹAmiens à faire parvenir sans tar<strong>de</strong>r.<br />

4 février 1868<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je prie M. <strong>de</strong> Varax <strong>de</strong> voir <strong>avec</strong> vous si, en aidant un peu M. Marcaire, il ne pour‐<br />

rait nous envoyer un état très sommaire <strong>de</strong>s recettes et dépenses pour vos œuvres et pour<br />

la Communauté. Toutes nos maisons, sans exception, nous produisent cet état en fin dʹannée.<br />

Jʹapprendrai <strong>avec</strong> plaisir que votre cérémonie <strong>de</strong> bénédiction sʹest bien passée.<br />

Nous allons ici comme <strong>de</strong> coutume; je ne vois aucun fait notable à vous conter. On<br />

va vous envoyer le coutumier ou annuaire pour février. M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston], extrê‐<br />

mement chargé, est un peu en retard pour vous lʹadresser.<br />

Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S. Croyez à tous nos sentiments <strong>de</strong> tendre af‐<br />

fection en N.S.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

1275 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Sʹhumilier <strong>de</strong> ses imperfections. Ne pas se troubler.<br />

7 février [1868]<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Lefebvre, averti par nous que son jeune frère était toujours languissant, lʹa fait<br />

revenir à Arras; il y est arrivé le samedi 1 er février, à bon port; nous en avons <strong>de</strong>puis reçu<br />

<strong>de</strong>s nouvelles.<br />

1242


Pour vos vœux, vous pourriez venir à la fin <strong>de</strong> la retraite, sinon au commencement.<br />

Humilions‐nous pour nos impatiences ou autres imperfections, sans nous découra‐<br />

ger; on ne va pas à la bataille, cʹest‐à‐dire à lʹactivité <strong>de</strong>s œuvres, sans quelque égratignure.<br />

Il y a là un grand exercice pour le support, la miséricor<strong>de</strong> et la charité.<br />

Jʹembrasse tout le mon<strong>de</strong> ensemble et bien affectueusement.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1276 à M. dʹArbois<br />

Projets <strong>de</strong> changement dans le personnel dirigeant <strong>de</strong> Vaugirard. Pru<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> MLP. qui utilise au mieux les<br />

ʺfaibles ressourcesʺ dont il dispose. Le père Lantiez et lʹŒuvre <strong>de</strong>s Dames (Cours Désir, <strong>de</strong> la rue Jacob).<br />

Vaugirard, 10 février 1868<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je voulais joindre quelques mots à lʹenvoi que vous a fait M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston]<br />

du coutumier ou annuaire (partiel) pour le présent mois; je nʹai pas trouvé pour cela un<br />

seul moment opportun; je vous lʹai dit, je crois, mes semaines sont partagées maintenant<br />

entre Vaugirard, Chaville et Nazareth. Ces allées et venues coupent mes journées et absor‐<br />

bent beaucoup <strong>de</strong> temps; nous sommes obligés, tous, dʹêtre ainsi occupés <strong>de</strong> plusieurs<br />

choses, à cause du nombre trop insuffisant <strong>de</strong> notre personnel comparé à la multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

nos charges.<br />

Nous avons cherché souvent si, par <strong>de</strong>s combinaisons nouvelles <strong>de</strong> nos moyens,<br />

nous ne pourrions pas améliorer nos services; mais nous répugnons beaucoup aux chan‐<br />

gements qui rarement sʹeffectuent sans <strong>de</strong> graves inconvénients. Le meilleur moyen <strong>de</strong><br />

nous faire une condition moins onéreuse serait assurément <strong>de</strong> nous dégager <strong>de</strong> quelques‐<br />

unes <strong>de</strong> nos œuvres les moins essentielles. Au <strong>de</strong>rnier Conseil, on proposait, pour déchar‐<br />

ger M. Lantiez dʹune œuvre <strong>de</strong> Dames quʹil a <strong>de</strong>puis plusieurs années et qui ne se déci<strong>de</strong>ra<br />

pas sans difficultés à se passer <strong>de</strong> ses soins, <strong>de</strong> lʹenvoyer en province et <strong>de</strong> rappeler à Paris<br />

quelquʹun <strong>de</strong>s ff. ecclésiastiques qui y sont posés, afin <strong>de</strong> surveiller à sa place la maison <strong>de</strong><br />

Vaugirard <strong>avec</strong> M. Myionnet et M. Chaverot, ce <strong>de</strong>rnier étant encore trop jeune pour mar‐<br />

cher seul. Sans mʹarrêter à cette hypothèse, qui nʹa pas été la seule mise en avant, jʹai pensé<br />

quʹil pourrait être sage, au moins, dʹétudier ce moyen en même temps que les autres, pour<br />

voir jusquʹà quel point lʹun ou lʹautre, entre tous, pourrait être réalisable sans trop dʹin‐<br />

convénient. Je vous prie donc, à lʹoccasion, <strong>de</strong> me dire si, en prenant un délai <strong>de</strong> quelques<br />

mois, vous croyez quʹun changement pareil serait praticable à Angers, à la condition<br />

dʹuser <strong>de</strong>s ménagements que toute mutation <strong>de</strong>man<strong>de</strong>.<br />

Gar<strong>de</strong>z‐vous <strong>de</strong> croire, je le répète, quʹil y ait rien <strong>de</strong> précis dans cette vue, quant à<br />

Angers en particulier. Cʹest, bien positivement, un simple coup dʹœil jeté sur lʹensemble <strong>de</strong><br />

nos faibles ressources pour chercher si elles ne pourraient être plus commodément combi‐<br />

nées; si un changement doit en entraîner plusieurs autres et faire un grand mouvement<br />

chez nous, nous nʹy songerons assurément point; je suis trop vieux pour me complaire aux<br />

révolutions et bouleversements.<br />

Cʹest dans cet esprit que <strong>de</strong>vront être conçues les réponses que jʹattendrai, soit<br />

dʹAngers, soit dʹailleurs. Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> dire quʹil serait fort à regretter quʹon soup‐<br />

1243


çonnât rien <strong>de</strong> ces quelques délibérations qui mettraient en lʹair toutes les têtes et, assez<br />

probablement, sans aucun fond notable quant aux effets qui en résulteront.<br />

Jʹespère que le ru<strong>de</strong> et long hiver <strong>de</strong> cette année ne vous aura pas trop maltraités; je<br />

souhaite aussi que lʹindisposition dont vous aviez souffert, il y a quelque temps, nʹaura<br />

point eu <strong>de</strong> suite. Dites‐moi un mot sur cet article bien important.<br />

M. <strong>Léon</strong> [Guichard], à son passage ici, nous a dit que les travaux <strong>de</strong> votre chapelle<br />

avancent; en prévoyez‐vous le terme? le prix <strong>de</strong>s ouvrages se tiendra‐t‐il bien dans la li‐<br />

mite <strong>de</strong>s prévisions, vos fonds se réaliseront‐ils sans trop <strong>de</strong> difficulté?<br />

Jʹai appris <strong>avec</strong> joie que vous étiez secondé par un aumônier qui avait su gagner<br />

lʹesprit <strong>de</strong> vos jeunes gens; que le Seigneur en soit béni!<br />

Jʹattendrai, dʹici à peu, quelques mots <strong>de</strong> mon cher fils Moutier qui mʹa promis <strong>de</strong><br />

mʹécrire <strong>de</strong> temps en temps.<br />

Il serait bien aussi que M. Boiry fît <strong>de</strong> même, ou pour M. Lantiez, ou pour moi.<br />

Adieu, mon bien cher enfant en N.S.; assurez tous nos ff. <strong>de</strong> ma tendre affection et<br />

gar<strong>de</strong>z‐en une notable part pour vous.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Etes‐vous toujours content <strong>de</strong> vos nouveaux moyens pour lʹadministration <strong>de</strong> votre<br />

économie domestique?<br />

1277 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Sur divers points <strong>de</strong> la vie communautaire. Prière à Marie après la messe. Eviter le surmenage. Un ʺgar<strong>de</strong> na‐<br />

tional mobileʺ. MLP. sent le poids <strong>de</strong>s années. Décès dʹune bienfaitrice, Mme <strong>de</strong> Caulaincourt.<br />

Vaugirard, 28 février 1868<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Paillé, oublieux à son grand regret, ne mʹa remis quʹhier seulement votre lettre<br />

du 18 <strong>de</strong> ce mois.<br />

Je vous envoie ci‐joint lʹannuaire ou coutumier pour mars; il indique, en substance,<br />

nos usages quʹon observe autant bien que les exigences <strong>de</strong>s œuvres peuvent le permettre.<br />

La petite prière qui se fait (lʹAve Maria) après la messe se rapporte à la pensée quʹon<br />

a particulièrement attachée à la chapelle dans sa dédicace; <strong>de</strong> là, la diversité <strong>de</strong>s invoca‐<br />

tions qui se font <strong>avec</strong> lʹAve Maria; je ne me souviens pas quʹon y ait mis une intention par‐<br />

ticulière; on pourrait, en tout cas, y mettre telle intention quʹon voudrait, ou unique, ou su‐<br />

rajoutée.<br />

Faites, <strong>avec</strong> M. Caille, pour le mieux relativement aux comptes financiers pour le<br />

<strong>de</strong>rnier exercice, et préparez autant <strong>de</strong> régularité quʹil se pourra pour lʹan prochain.<br />

Je mʹétonnais <strong>de</strong> nʹavoir reçu aucun détail sur lʹouverture <strong>de</strong> S t ‐Jacques ou N.D. <strong>de</strong>s<br />

Victoires; je vois quʹelle a été un peu retardée; je vous remercie <strong>de</strong> ce que vous mʹen dites<br />

et je bénis Dieu qui semble agréer et soutenir cette nouvelle entreprise. Lʹintervention <strong>de</strong>s<br />

rr.pp. Jésuites me paraît toujours un bienfait. Je crois, <strong>avec</strong> vous, quʹil vous reste pour la<br />

surveillance dʹensemble <strong>de</strong> la communauté et <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux maisons une tâche morale et spiri‐<br />

tuelle largement taillée et qui est dʹune haute importance; je prie le Seigneur <strong>de</strong> vous y as‐<br />

sister par sa grâce. Lʹabsence <strong>de</strong> M. Caille, une gran<strong>de</strong> partie du dimanche, augmente vos<br />

emplois ce jour‐là; faites le nécessaire sans vous charger outre mesure; vos forces ont <strong>de</strong>s<br />

1244


limites restreintes. Vous ne me parlez pas <strong>de</strong> votre santé; vous ne me dites rien non plus<br />

<strong>de</strong> celle <strong>de</strong> votre bonne mère. Nous avons reçu <strong>avec</strong> satisfaction les Rohrbacher et les 2 vol.<br />

<strong>de</strong> Benoît‐Joseph Labre. Je vous en remercie pour tous. Je suis heureux du bon examen <strong>de</strong> M.<br />

Trousseau; il va ainsi prendre définitivement courage; il aura plus <strong>de</strong> confiance et plus<br />

dʹattrait pour les autres et sʹy préparera <strong>avec</strong> un zèle nouveau.<br />

Lʹâge ne lui manque point pour avancer dans les ordres; je pense quʹil fera un pas à<br />

la Trinité; si, comme je le crois, jʹai à faire à cet effet une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à M gr dʹAmiens, vous me<br />

le direz en temps utile.<br />

M. Lemaire va se trouver compris au nombre <strong>de</strong> ceux que doit atteindre la gar<strong>de</strong><br />

nationale mobile; je vous prie dʹaviser <strong>avec</strong> M. Caille à le faire inscrire, (car je crois que les<br />

victimes sont obligées <strong>de</strong> se présenter dʹelles‐mêmes pour le sacrifice). Il est né le 28 février<br />

1843 et a pour patrons S ts Zozime, Joseph, Edouard.<br />

Il a été exempté comme aîné dʹorphelins et, <strong>de</strong> plus, il a une jambe torse et difforme<br />

qui lui rendrait impossible la fatigue <strong>de</strong>s exercices et <strong>de</strong>s marches. Est‐ce à Paris quʹil<br />

pourrait passer à la révision? Si cela est possible, mieux vaut éviter <strong>de</strong>s déplacements.<br />

Ne manquez pas ici et toujours, quand je vous écris, <strong>de</strong> dire à chacun <strong>de</strong> nos ff.<br />

quelques mots obligeants <strong>de</strong> ma part, en prenant soin <strong>de</strong> parler à M. Caille surtout <strong>de</strong> tout<br />

ce qui pourrait lʹintéresser; jʹaimerais à écrire à tous en particulier, mais mon esprit,<br />

comme ma plume, sʹalourdit <strong>avec</strong> les années, tant la marche et tous les mouvements <strong>de</strong>‐<br />

viennent lents chez les pauvres vieilles gens.<br />

A ce propos, vous <strong>de</strong>vrez prier pour M me <strong>de</strong> Caulaincourt, vieille amie et bienfai‐<br />

trice <strong>de</strong> notre Communauté; elle vient <strong>de</strong> mourir saintement comme elle a vécu, à lʹâge <strong>de</strong><br />

78 ans; elle était veuve <strong>de</strong>puis sa 23 e année et rappelle ainsi S te Anne qui vivait dans le<br />

Temple et eut la joie <strong>de</strong> saluer Jésus et Marie au jour <strong>de</strong> la Présentation. Cʹétait un cœur<br />

dʹélite, dʹune bonté et dʹune charité bien rares en un si haut <strong>de</strong>gré. Demain aura lieu son<br />

convoi, jʹirai; <strong>de</strong>puis longues années, elle et son excellente famille mʹavaient admis à une<br />

intimité dont jʹétais honoré et édifié.<br />

Donnez‐moi encore, quand vous mʹécrirez, quelques détails <strong>de</strong> plus sur lʹœuvre <strong>de</strong><br />

N.D. <strong>de</strong>s Victoires; comment sʹorganise‐t‐elle pour le personnel? Nʹira‐t‐on pas trop vite<br />

pour lʹadmission <strong>de</strong>s enfants? La chapelle donne‐t‐elle un provisoire passable?<br />

Adieu, mon bien bon ami, je vous redis tous mes sentiments tendrement dévoués et<br />

affectionnés en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1278 à M. dʹArbois<br />

Surveillance <strong>de</strong>s enfants. Nouvelles <strong>de</strong> plusieurs frères.<br />

Vaugirard, 28 février 1868<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je joins un mot au coutumier que je vous envoie pour mars; on le suit autant bien<br />

quʹon peut, admettant toutefois les modifications <strong>de</strong> temps ou autres que les situations<br />

exigent.<br />

Jʹai bien vivement compati aux peines que vous ont causées les fautes <strong>de</strong> vos en‐<br />

fants. Espérons quʹ<strong>avec</strong> un redoublement <strong>de</strong> surveillance et <strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong>s S ts Anges, nous<br />

arriverons à prévenir le retour <strong>de</strong> semblables afflictions.<br />

1245


Il existe un excellent ouvrage du p. <strong>de</strong> Damas sur la surveillance, <strong>avec</strong> <strong>de</strong> précieux<br />

conseils pour ceux qui ont à lʹexercer; peut‐être serait‐il bien dʹen lire quelque chose cha‐<br />

que jour à vos ff.<br />

Jʹai écrit à M. <strong>de</strong>s Francs à Orléans pour M. Boiry, jʹattends sa réponse. Dites à ce<br />

cher frère que je nʹai pas négligé cette affaire; jʹai été content <strong>de</strong> sa lettre, dites‐le lui et en‐<br />

couragez‐le bien; son défaut est <strong>de</strong> perdre aisément confiance en lui‐même et aussi en<br />

Dieu.<br />

Jʹai tenu compte <strong>de</strong> vos observations relativement aux communications que je vous<br />

avais faites.<br />

Nos ff. vont assez bien; notre f. Alexandre [Legrand] nous écrit régulièrement, il<br />

nʹéprouve pas en sa santé <strong>de</strong> changement notable; continuons à prier pour lui.<br />

Je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à Dieu pour vous tous un bon Carême, bien édifiant, et dʹheureux fruits<br />

<strong>de</strong> vos efforts pour les âmes <strong>de</strong> vos jeunes gens.<br />

Jʹattends une petite lettre <strong>de</strong> mon cher enfant Moutier; je nʹai pas vu le propriétaire<br />

<strong>de</strong> sa mère, je pense donc quʹelle sʹest arrangée <strong>avec</strong> lui. Je vais voir au terme ce qui sera à<br />

faire pour que son loyer soit exactement payé.<br />

Adieu, bien cher ami et fils en N.S. Tous vous aiment ici et vous assurent <strong>avec</strong> moi<br />

<strong>de</strong> leurs affectueux souvenirs.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Comment va M. <strong>Léon</strong> [Guichard] qui était un peu souffrant?<br />

1279 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Démarches pour un précepteur.<br />

Chaville, 2 mars 1868<br />

Madame la Marquise ,<br />

Jʹai vu hier le précepteur qui mʹavait été indiqué pour votre cher fils. Il se nomme<br />

Bonnald, il est âgé <strong>de</strong> 39 ans; tout ce que jʹai vu <strong>de</strong> lui en cette première entrevue est ex‐<br />

trêmement en sa faveur.<br />

M. <strong>de</strong> Caulaincourt pourra dʹailleurs prendre <strong>de</strong> plus amples renseignements chez<br />

M. le Comte <strong>de</strong> Guébriant, 14, rue S t ‐Guillaume. M. Bonnald a passé plusieurs années dans<br />

cette famille; il doit y rentrer dans <strong>de</strong>ux ans pour lʹéducation du second fils <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Gué‐<br />

briant, lʹaîné étant entré dans un collège pour <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s spéciales, afin <strong>de</strong> se préparer à la<br />

carrière militaire.<br />

M. Bonnald me semble être un chrétien sincère et bien éclairé; il est présentement en<br />

<strong>de</strong> très bonnes conditions au point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> ses intérêts propres, mais il ne veut pas y res‐<br />

ter parce quʹil ne voit pas, consciencieusement, quʹil puisse faire aucun bien à un élève qui<br />

nʹa aucun goût pour le travail et ne remplit pas les <strong>de</strong>voirs les plus essentiels <strong>de</strong> religion,<br />

pas même la S te Messe le dimanche. Il est donc déterminé a ne pas rester en cette position.<br />

Je crois que M. Bonnald est très capable <strong>de</strong> préparer un jeune homme au baccalauréat.<br />

Il est parfaitement simple et sans prétention dans ses manières; il se tient bien, cause<br />

bien, mais il nʹa pas lʹélégance dʹun homme du mon<strong>de</strong>, sans quʹil y ait rien en lui toutefois<br />

qui sente ni la maladresse ni la gaucherie. Je remarque cette circonstance parce quʹelle me<br />

paraît un indice dʹhabitu<strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>stes et déférentes qui tiendraient M. Bonnald à sa place,<br />

1246


sans créer à vous, Madame, ni à M me dʹHurbal aucune gêne ni malaise. Jʹai entrevu aussi,<br />

dans les détails quʹil me donnait, quʹon pourrait attendre <strong>de</strong> lui pour son élève les soins<br />

pru<strong>de</strong>nts et affectueux que les parents ont à <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r dʹun précepteur.<br />

Il avait, mʹa‐t‐il dit, chez M. <strong>de</strong> Guébriant, 300f par mois et sʹétait réservé, au moins<br />

pour le temps quʹon passe à Paris, quelques heures le dimanche, afin <strong>de</strong> visiter quelques<br />

amis, en particulier le regretté abbé Pereyve, prêtre si distingué et dʹun si beau talent.<br />

Peut‐être consentirait‐il à se contenter dʹavantages un peu moindres sʹil trouvait, comme<br />

cela se rencontrerait près <strong>de</strong> vous, Madame, tout ce qui pourrait lui convenir moralement<br />

et chrétiennement.<br />

Je désire beaucoup que M. <strong>de</strong> Caulaincourt voie M. <strong>de</strong> Guébriant et sʹentretienne<br />

après, sʹil y a lieu, <strong>avec</strong> M. Bonnald; cʹest une grave responsabilité que celle du choix dʹun<br />

précepteur et je nʹoserais la prendre pour moi seul.<br />

M. Bonnald <strong>de</strong>meure, dans son nouvel et provisoire emploi, rue Truffaut, 25 aux<br />

Batignolles. Il désirerait, si on avait à le voir, quʹon le fît venir en lui indiquant un ren<strong>de</strong>z‐<br />

vous rue S t ‐Florentin ou autrement. Il nʹest guère libre que le soir, <strong>de</strong> 8 à 10 h. Je nʹai pas<br />

cru <strong>de</strong>voir lui taire votre nom, Madame, quʹil mʹa <strong>de</strong>mandé; il mʹa dit avoir rencontré sou‐<br />

vent, dans les promena<strong>de</strong>s, votre cher fils, sans avoir eu occasion <strong>de</strong> lui parler.<br />

Jʹai cru entrevoir quʹun ecclésiastique vous eût convenu davantage; pour vous, Ma‐<br />

dame, et pour M me dʹHurbal, je conçois bien que vous lʹeussiez préféré ainsi, mais il me<br />

semble quʹà lʹâge <strong>de</strong> M. Richard, un laïc sûr, instruit, sincèrement chrétien, sera plus allant,<br />

plus disponible, tout en vous donnant autant <strong>de</strong> garanties. On trouve dʹailleurs plus diffi‐<br />

cilement un précepteur ecclésiastique qui réunisse les qualités désirables, parce que ce<br />

nʹest que par exception que <strong>de</strong>s ecclésiastiques dʹun vrai mérite peuvent et veulent se<br />

consacrer à <strong>de</strong>s éducations particulières.<br />

Je nʹai, du reste, aucunement préjugé la décision à intervenir dans mon entretien<br />

<strong>avec</strong> M. Bonnald, voulant vous réserver entièrement, Madame, ainsi quʹà M me dʹHurbal et<br />

à M. <strong>de</strong> Caulaincourt, <strong>de</strong> juger par vous‐même ce qui sera le plus avantageux dans lʹintérêt<br />

<strong>de</strong> votre cher enfant.<br />

Jʹai toujours présent le souvenir <strong>de</strong> votre tant regrettée grandʹmère; je prie pour elle<br />

et pour la famille affligée quʹelle consolera, je lʹespère, du haut du Ciel.<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, et partager <strong>avec</strong> Madame votre mère, tous<br />

mes sentiments <strong>de</strong> bien respectueux dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Puisque vous me permettez dʹêtre aussi lʹami <strong>de</strong> votre cher fils, je lui offre mes tout<br />

affectueux souvenirs.<br />

P. S. Point <strong>de</strong> difficulté pour le répétiteur.<br />

1280 à M. Maignen<br />

Désir ar<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> MLP. <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>r un Cercle à Rome pour les zouaves pontificaux405 . Que M. Maignen fasse inter‐<br />

venir Emile Keller.<br />

405 MLP. revient sur le projet évoqué plus haut (lettre 1257). A la fin <strong>de</strong> 1867, le conseil <strong>de</strong> recrutement <strong>de</strong>s zouaves avait fait appel à<br />

MLP. pour qu’il envoyât à Rome quatre frères comme infirmiers ; MLP. sait aussi que <strong>de</strong>s patronnés <strong>de</strong> Nazareth font partie <strong>de</strong><br />

l’armée pontificale, enfin, ce que le père Hello avait constaté lors <strong>de</strong> son voyage à Rome, et le témoignage <strong>de</strong> M. Vrignault, venu<br />

en personne exposer <strong>de</strong>vant le Conseil <strong>de</strong> Communauté « la nécessité d’établir à Rome une maison <strong>de</strong> famille pour les zouaves<br />

pontificaux fort délaissés sous le rapport spirituel » (p.v. du Conseil, 23.12.1867), toutes ces raisons expliquent pourquoi MLP. prit<br />

à cœur un tel projet. « Démarche contraire à ses habitu<strong>de</strong>s : il va au-<strong>de</strong>vant d’une fondation nouvelle »…(VLP., II, p.282).<br />

1247


Vaugirard, 3 mars 1868<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je nʹentends rien dire du projet dʹun Cercle pour les Zouaves à Rome; est‐il aban‐<br />

donné, ou bien ne sommes‐nous plus appelés à y prendre part? Je mʹen inquiète; non<br />

quʹen voyant naturellement les choses, je sois bien pressé <strong>de</strong> nous voir engagés dans une<br />

entreprise <strong>de</strong> plus, quand nous en avons déjà plus que nous ne pouvons les bien suivre,<br />

mais, si celle‐là a une importance dʹune haute gravité, il faut accepter quelques sacrifices<br />

pour la réaliser.<br />

Jʹy vois, comme tout le mon<strong>de</strong>, dʹassez gran<strong>de</strong>s difficultés, mais les difficultés aussi<br />

il faut les vaincre si la gloire <strong>de</strong> Dieu et le bien <strong>de</strong> lʹEglise y sont intéressés. Les Zouaves<br />

ont besoin dʹêtre soutenus, leurs familles ont besoin dʹêtre rassurées par les assistances<br />

dʹune pareille institution, et surtout lʹEglise a besoin que ses défenseurs dévoués gar<strong>de</strong>nt<br />

une tenue digne qui fasse honneur à sa cause. Voilà les pensées qui mʹintéressent au projet<br />

du Cercle et qui me déci<strong>de</strong>ront, malgré nos embarras, à y prêter notre faible concours.<br />

Je vous invite à rendre visite à M. Keller et à voir <strong>avec</strong> lui sʹil nʹy a pas quelque<br />

chose à faire pour avancer lʹopération. Il me semble que, si lʹon réunissait un jour chez M.<br />

Keller les hommes qui ont particulièrement à cœur cette œuvre, on examinerait définiti‐<br />

vement si elle doit être entreprise, dans quels termes et par quels moyens on doit essayer<br />

<strong>de</strong> la réaliser, et enfin quels instruments doivent y mettre la main. Les vues ainsi nettement<br />

posées et bien arrêtées, on marcherait et lʹaffaire, Dieu aidant, irait à bonne fin. Voyez,<br />

mon cher ami, si M. Keller agrée cette pensée et sʹil veut y donner quelque suite.<br />

Adieu, cher ami, à bientôt; prions Dieu <strong>de</strong> nous éclairer et <strong>de</strong> nous prêter secours.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong> Ptre 1281 à M. dʹArbois<br />

Démarche auprès <strong>de</strong> Mgr Angebault pour lʹaffectation dʹun frère à la gar<strong>de</strong> mobile.<br />

Drapeau <strong>de</strong>s Zouaves<br />

Vaugirard, 4 mars 1868<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous renvoie une lettre <strong>de</strong> M. <strong>de</strong>s Francs concernant lʹappel <strong>de</strong> M. Boiry comme<br />

gar<strong>de</strong> mobile. Je crois quʹil faudrait voir Mgr dʹAngers au plus tôt et obtenir <strong>de</strong> sa bonté<br />

1248


quʹil inscrive M. Boiry comme Séminariste <strong>de</strong> son diocèse, puisquʹil est employé à la Psal‐<br />

lette. Peut‐être M gr trouverait‐il à propos aussi <strong>de</strong> lui donner la tonsure, sʹil ne lʹa déjà.<br />

Remerciez ce bon et vénéré Seigneur <strong>de</strong> son excellent man<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> carême.<br />

Je crois quʹil nʹy a pas <strong>de</strong> temps à perdre; il serait sans doute déjà trop tard à Or‐<br />

léans.<br />

Votre ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1282 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Inscription pour la gar<strong>de</strong> mobile. Comman<strong>de</strong> dʹobjets liturgiques.<br />

Vaugirard, 7 mars 1868<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je nʹécris pas à M. Caille, parce que je le sais si chargé <strong>de</strong> travaux que le temps lui<br />

manquerait pour me répondre.<br />

Deman<strong>de</strong>z‐lui sʹil a pris soin <strong>de</strong> faire inscrire M. Lemaire pour la gar<strong>de</strong> mobile<br />

(nouvelle invention). Il serait grand temps dʹy aviser, car cʹest du 9 au 12 quʹon doit, je<br />

crois, être appelé à Paris, où il <strong>de</strong>vra se présenter. Causes dʹexemption: soutien <strong>de</strong> famille<br />

et jambe difforme.<br />

M. Henry [Piquet] a commencé la fonte <strong>de</strong>s chan<strong>de</strong>liers; il <strong>de</strong>man<strong>de</strong> si cʹest 4 ou 6,<br />

et si cʹest verni ou doré ou argenté? Réponse s.v.p.<br />

Pour lʹostensoir, il serait <strong>de</strong> 110f, 104f <strong>avec</strong> remise; mais je vais faire <strong>de</strong> petites éco‐<br />

nomies pour offrir ce don à la nouvelle maison <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong>s Victoires.<br />

Cʹest toute ma correspondance pour aujourdʹhui; vendredi et samedi sont jours très<br />

remplis pour moi.<br />

Mille tendres affections à tous et à vous en particulier.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je pense bien que vous faites beaucoup dʹaimables dévotions à St Joseph.<br />

1283 à M. Maignen<br />

Voyage <strong>de</strong> M. Maignen à Rome. Importance pour lʹInstitut <strong>de</strong>s démarches faites là‐bas. Rôle du Supérieur:<br />

ʺquʹil aime plus que les autres ceux que le Seigneur lʹa chargé <strong>de</strong> conduireʺ, grâce à la part spéciale <strong>de</strong> charité<br />

que Dieu lui a communiquée. Nouvelles <strong>de</strong> Nazareth. Profiter spirituellement du séjour <strong>de</strong> Rome.<br />

Paris, le 17 mars 1868<br />

Maison <strong>de</strong> Nazareth<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous avons reçu vos lettres, je nʹai pas besoin <strong>de</strong> vous dire <strong>avec</strong> quelle satisfaction<br />

pour tous, <strong>avec</strong> quelle joie pour moi surtout, à qui Dieu permet <strong>de</strong> vous aimer plus que les<br />

autres ne vous aiment. Depuis Saint Pierre, en effet, cʹest le propre <strong>de</strong> tous ceux, dans<br />

lʹEglise, qui ont quelque part dʹautorité, dʹavoir en même temps, par grâce spéciale <strong>de</strong><br />

Dieu, quelque effusion <strong>de</strong> sa divine charité, afin quʹils aiment plus que les autres ceux que<br />

le Seigneur les a chargés <strong>de</strong> conduire et dʹaimer. Nous partageons votre bonheur; plu‐<br />

sieurs lʹenvient, sans doute; pour moi, jʹen jouis, il me semble, comme si je lʹéprouvais per‐<br />

1249


sonnellement; non par insensibilité, pour le réel contentement quʹon trouve dans la vue<br />

<strong>de</strong>s belles et saintes choses, mais parce que je mʹi<strong>de</strong>ntifie <strong>avec</strong> vous, autant quʹil est possi‐<br />

ble <strong>de</strong> le faire. Votre voyage est dʹun grave intérêt pour la fin qui vous lʹa fait entrepren‐<br />

dre, mais il est à mes yeux encore plus important pour ce qui concerne notre petite famille<br />

religieuse. Je regar<strong>de</strong> comme un grand bonheur que M. Hello dʹabord et vous aujourdʹhui,<br />

ayez pu aller recomman<strong>de</strong>r au Seigneur, aux pieds <strong>de</strong>s Saints Apôtres, notre chère<br />

Congrégation, jusquʹici si peu forte et quʹun rayon <strong>de</strong> grâce vivifierait en un instant; <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>z‐le ar<strong>de</strong>mment, cher enfant, et, si vous lʹobtenez, dans ces sanctuaires bénis, si<br />

chers à Dieu, oh! que votre voyage aura été heureux pour nous! Un petit indice <strong>de</strong> béné‐<br />

diction spéciale sʹest un peu montré ces jours‐ci, mais indice vague et mal défini encore;<br />

prions, <strong>de</strong> ce côté ou dʹun autre, le secours dʹEn Haut se manifestera.<br />

Je suis <strong>de</strong> mon mieux, <strong>de</strong>s yeux, ce qui concerne votre œuvre, sans que ni moi, ni<br />

ceux qui vous y assistent dʹordinaire puissent empêcher que votre absence sʹy fasse assez<br />

notablement sentir, sans rien dʹinquiétant toutefois jusquʹici. Jʹai écrit à M. Meurinne une<br />

petite lettre cordiale dans le sens que vous aviez indiqué à M. Paillé.<br />

Jʹai vu hier votre bonne mère à la Chapelle S t ‐Tharsice; elle a été heureuse dʹavoir <strong>de</strong><br />

vos nouvelles, mais elle a gémi un peu <strong>de</strong> ce que nous avions seuls <strong>de</strong> vos lettres et quʹelle<br />

en était privée; peut‐être trouverez‐vous quelque moment pour lui écrire un mot.<br />

Voilà tout ce que je vous puis écrire aujourdʹhui. M. Hello a été souffrant dʹune an‐<br />

gine <strong>de</strong>puis une huitaine <strong>de</strong> jours; on lʹavait confiné à Chaville; il va mieux et reviendra<br />

<strong>de</strong>main pour la fête <strong>de</strong> S t Joseph qui se fera lʹaprès‐midi, jeudi, à la Chapelle, à peu près<br />

complètement terminée; ce serait bien sans le plafond qui <strong>de</strong>vient plus laid à mesure que<br />

le reste sʹaméliore. On nʹest jamais content en ce mon<strong>de</strong>; lʹhomme ne dit jamais, comme<br />

Dieu à la création, quʹil vit que tout était bien; lʹimparfait est notre lot, hélas! pas en ma‐<br />

çonnerie seulement.<br />

Je compte que, consciencieusement, vous ne resterez à Rome que le temps néces‐<br />

saire pour vos affaires, dʹautant quʹon peut espérer, <strong>avec</strong> la tournure heureuse quʹelles<br />

prennent, un retour assez prochain.<br />

Bien que vous écriviez, sans aucun doute, exactement à M. Keller, jʹai pensé quʹil<br />

était bien <strong>de</strong> lui communiquer votre <strong>de</strong>rnière lettre qui traitait uniquement du but <strong>de</strong> votre<br />

voyage et qui, peut‐être, <strong>de</strong>vançait dʹun jour celle que vous lui auriez écrite à lui‐même; M.<br />

Paillé est allé la lui porter.<br />

Adieu, mon bien cher enfant; il me semble que vous allez rapporter <strong>de</strong> tout ce<br />

mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> sainteté que vous avez traversé quelque chose <strong>de</strong> pénétrant et <strong>de</strong> vivifiant qui<br />

accroîtra votre foi, votre amour pour Dieu, votre zèle <strong>de</strong>s âmes, et qui apportera aussi la<br />

bénédiction dans notre petite famille; je serai heureux que tout ce bien lui arrive par vous.<br />

Adieu, mon cher enfant, mille amitiés <strong>de</strong> nous tous aux amis que vous avez trouvés<br />

à Rome; tous nos ff. prient pour vous; les apprentis, les jeunes ouvriers, personne ne vous<br />

oublie et, moins que personne,<br />

Votre affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1284 à M. Risse<br />

Intérêt <strong>de</strong> MLP. pour lʹŒuvre <strong>de</strong> Metz. Annonce du voyage à Rome <strong>de</strong> M. Maignen pour y établir un Cercle<br />

militaire.<br />

1250


Vaugirard, 17 mars 1868<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu <strong>avec</strong> ou après votre lettre le plan <strong>de</strong> vos constructions projetées; je vous le<br />

renvoie aujourdʹhui, accompagné dʹune note quʹy a inscrite M. Lantiez après avoir attenti‐<br />

vement examiné le projet; je crois que son observation est bonne, vous jugerez si elle est<br />

praticable pour vous.<br />

Jʹai reçu en outre 1° les 100f dont vous mʹannonciez lʹenvoi, et divers petits messa‐<br />

ges que jʹai fait parvenir à leur <strong>de</strong>stination. Merci <strong>de</strong> votre don fraternel. M. Georges [<strong>de</strong><br />

Lauriston] vous en remercie <strong>avec</strong> moi.<br />

Le récit <strong>de</strong> votre pèlerinage à Luxembourg nous a vivement intéressés; je crois que<br />

ce rapprochement <strong>de</strong>s diverses œuvres entre elles est bien bon et peut accroître lʹesprit <strong>de</strong><br />

charité dans les âmes.<br />

Je nʹai pas encore lu le man<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> Mgr <strong>de</strong> Metz, mais nos ff. le lisent à Chaville<br />

aujourdʹhui au réfectoire, jʹen vais prendre lecture moi‐même à mon retour; tout ce qui in‐<br />

téresse Metz, tout ce qui vient <strong>de</strong> ce vénérable Evêque si bon pour tous, si généreusement<br />

paternel pour vous, nous touche bien particulièrement.<br />

M. Maignen est à Rome <strong>de</strong>puis quelques jours, député par <strong>de</strong>s âmes zélées qui dési‐<br />

reraient quʹon pût y établir un Cercle pour les Zouaves Pontificaux et qui ont désiré quʹil<br />

allât préparer le terrain pour cette bonne œuvre, son séjour a toutefois été limité par nous à<br />

15 ou 18 jours. Vous recomman<strong>de</strong>rez son voyage au divin Seigneur par St Joseph, ainsi<br />

quʹune autre affaire qui intéresse gravement notre petite famille.<br />

Tous nos ff. vous sont affectueusement dévoués et vous assurent <strong>avec</strong> moi <strong>de</strong> leurs<br />

sentiments <strong>de</strong> tendre fraternité en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1285 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Nouvelles <strong>de</strong> la Communauté. M. Maignen à Rome. La chapelle <strong>de</strong> Nazareth. Sʹécrire souvent.<br />

Chaville, 18 mars 1868<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je mʹinquiète un peu <strong>de</strong> votre silence profond et prolongé; je vous avais <strong>de</strong>mandé,<br />

pour vos chan<strong>de</strong>liers, est‐ce 4 ou 6, doré, verni ou argenté? Point <strong>de</strong> réponse.<br />

M . Paillé vous a notifié le résultat <strong>de</strong> la vente <strong>de</strong> vos titres; il en a envoyé le produit<br />

à M. Berlotti, qui a accusé réception. Vous nʹavez pas non plus dit à M. Paillé que tout était<br />

bien ainsi.<br />

De plus, nous avons eu <strong>de</strong>s tempêtes, <strong>de</strong>s neiges et grêles fondues; tout cela a‐t‐il<br />

été inoffensif pour vous? Ici, plusieurs, M. Hello et dʹautres, et moi aussi, nʹavons pas sup‐<br />

porté ces intempéries sans courber un peu la tête; tous se relèvent, mais un peu languis‐<br />

sants encore. Vous, cher enfant, roseau dʹordinaire assez flexible au vent, avez‐vous résisté<br />

cette fois? Répon<strong>de</strong>z‐moi, et ajoutez en outre tout ce qui peut nous intéresser par rapport à<br />

vous, cʹest‐à‐dire tout ce qui a valeur et intérêt pour <strong>de</strong>s amis tendrement dévoués.<br />

Je ne vois pas ici <strong>de</strong> faits mémorables; M. Maignen est à Rome pour une quinzaine<br />

<strong>de</strong> jours pour une mission charitable que lui a donnée une association <strong>de</strong> gens <strong>de</strong> zèle et <strong>de</strong><br />

foi; cʹétait pour lui une belle occasion, il ne faut pas <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si sa joie est gran<strong>de</strong>!<br />

1251


On a un peu réparé la chapelle <strong>de</strong> Nazareth dans la partie basse <strong>de</strong> la nef qui se<br />

trouve assez bien restaurée; mais faute <strong>de</strong> fonds, on nʹa pu toucher au plafond qui reste<br />

parfaitement plat et nu; lʹaspect dʹensemble <strong>de</strong>meure donc fort incomplet; nous sommes<br />

voués aux œuvres imparfaites; que Dieu en soit béni, si nous y trouvons lʹoccasion <strong>de</strong> nous<br />

humilier cordialement.<br />

Recomman<strong>de</strong>z à Dieu, par S t Joseph, plusieurs choses assez notables pour nous,<br />

mais qui sont à lʹétat dʹindice simple; le nuage peut prendre corps ou bien se dissiper, Dieu<br />

seul en déci<strong>de</strong>ra, mais nous pouvons beaucoup par la prière sur le Cœur <strong>de</strong> Dieu.<br />

Puisque jʹécris à vous plus quʹaux autres à Amiens, vous êtes obligé <strong>de</strong> vous faire<br />

lʹintermédiaire <strong>de</strong> tous les sentiments ou communications que je nʹadresse pas directement<br />

à chacun <strong>de</strong> nos ff.; faites en sorte quʹils aperçoivent notre affection, notre sollicitu<strong>de</strong> pour<br />

eux et leurs œuvres; cette habituelle relation et mise en commun <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> tous les<br />

membres <strong>de</strong> la famille est bien essentielle; soyez lʹagent conducteur <strong>de</strong> cette mutuelle effu‐<br />

sion.<br />

Adieu, bien cher enfant; croyez, pour vous et pour tous, à notre tendre dévouement<br />

en J.M.J.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1286 à M. dʹArbois<br />

Propriété <strong>de</strong>s immeubles affectés aux Œuvres. Amis <strong>de</strong> lʹInstitut à Angers (docteur Renier); dévouement <strong>de</strong>s<br />

jeunes gens. Fondation du Cercle <strong>de</strong>s Zouaves à Rome.<br />

Vaugirard, 20 mars 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous pensons quʹil sera désirable pour vous <strong>de</strong> nʹêtre point en nom dans la proprié‐<br />

té <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong>s Champs, si vous avez quelque moyen <strong>de</strong> lʹéviter. Nous ne sommes jamais<br />

sûrs que les membres <strong>de</strong> notre Communauté resteront indéfiniment dans le même poste;<br />

si lʹun <strong>de</strong> nous ayant ainsi pris <strong>de</strong>s liens dans un pays, venait à être changé dʹemploi, il<br />

laisserait après lui quelques difficultés toutes les fois que <strong>de</strong>s arrangements seraient à<br />

prendre concernant la propriété dont il serait possesseur indivis.<br />

Voilà ce qui nous a semblé le mieux au premier aspect; si vous aviez <strong>de</strong> graves mo‐<br />

tifs <strong>de</strong> penser autrement, consultez Mgr et faites comme il vous dira. Nous avons déjà plu‐<br />

sieurs immeubles sous notre nom sans en être plus riches, puisquʹils ont tous leur <strong>de</strong>stina‐<br />

tion exclusive; nʹest‐il pas meilleur pour nous que <strong>de</strong>s Commissions charitables prennent<br />

sur elles cette responsabilité?<br />

Vous avez à Angers un homme fort dévoué aux œuvres et zélé par‐<strong>de</strong>ssus tous les<br />

autres, cʹest M. Renier, mé<strong>de</strong>cin, récemment revenu, après un séjour <strong>de</strong> plusieurs années à<br />

la campagne. Cʹest un ami très intime <strong>de</strong> M. Myionnet et je le connais aussi; il a servi dʹin‐<br />

termédiaire pour rapprocher M. Myionnet <strong>de</strong> moi; soyez sûr que vous trouverez en lui un<br />

ami dévoué et plus hardi que les autres à se donner pour le bien; voyez‐le <strong>de</strong> notre part et<br />

dites‐lui que M. Myionnet et moi comptons sur lui pour vous secon<strong>de</strong>r en toute occasion.<br />

Nous sommes bien touchés ici <strong>de</strong> lʹélan généreux <strong>de</strong> vos bons jeunes gens pour<br />

lʹembellissement <strong>de</strong> leur chapelle; lʹar<strong>de</strong>ur pour le bien ne manque pas à ces jeunes âmes,<br />

1252


et vous <strong>de</strong>vez y trouver tout ensemble un encouragement et une espérance pour lʹavenir<br />

<strong>de</strong> lʹœuvre; cʹest Dieu qui vous donne ce signe <strong>de</strong> sa bénédiction sur vos travaux.<br />

Vous ai‐je dit que M. Maignen est temporairement à Rome, envoyé par <strong>de</strong>s hommes<br />

dévoués à la cause <strong>de</strong> lʹEglise afin dʹai<strong>de</strong>r à lʹétablissement dʹun Cercle pour les Zouaves; il<br />

y restera encore, je crois une quinzaine <strong>de</strong> jours; priez pour le succès <strong>de</strong> cette bonne œuvre.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, donnez à nos ff. lʹassurance accoutumée <strong>de</strong> ma tendre<br />

affection à nos ff. et partagez‐la <strong>avec</strong> eux.<br />

Je voulais écrire aujourdʹhui à mon cher enfant Moutier, cʹest chose un peu différée;<br />

M. Girard part tout à lʹheure pour rejoindre M. Maignen, afin <strong>de</strong> le dégager le plus tôt pos‐<br />

sible et lui donner le moyen <strong>de</strong> revenir au plus tôt à son œuvre quʹil ne peut délaisser<br />

longtemps.<br />

Votre affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1286‐1 à M. Maignen<br />

Télégramme <strong>de</strong> MLP. au frère Maignen lui annonçant lʹarrivée du frère Girard.<br />

TELEGRAFI PONTIFICI <strong>–</strong> TELEGRAMMA 21 mars 1868<br />

Presentato a Parigi 21/3/68 2 h 55<br />

Arrivato a Roma 4 h 35<br />

MAIGNEN, Via Pie<strong>de</strong> di Marmo, 1 chez GENNETIER ROME<br />

GIRARD PART DE MARSEILLE DIMANCHE ‐ LE PREVOST<br />

1287 à M. Maignen<br />

Indications pour la fondation du Cercle militaire. Nouvelles <strong>de</strong> lʹŒuvre <strong>de</strong>s Jeunes Ouvriers <strong>de</strong> Montparnasse.<br />

Nazareth, 24 mars 1868<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je pense que vous avez reçu une lettre <strong>de</strong> moi, plus un télégramme envoyé par M.<br />

Myionnet <strong>de</strong> ma part pour vous annoncer le départ <strong>de</strong> M. Girard qui, à cette heure, doit<br />

être déjà près <strong>de</strong> vous. Son arrivée et ce quʹil a pu vous dire <strong>de</strong> vive voix ont dû vous tran‐<br />

quilliser. Chacun veille <strong>avec</strong> attention, afin que votre absence mette le moins possible vo‐<br />

tre œuvre en souffrance; on sauve le plus essentiel, les bons se soutiendront, mais les fai‐<br />

bles se ressentiront toujours du défaut <strong>de</strong> lʹappui ordinaire.<br />

Tout est bien du côté <strong>de</strong> M. Meurinne; il mʹa répondu une bonne lettre obligeante, il<br />

gar<strong>de</strong> toutes ses dispositions bienveillantes; seulement, il nʹavait reçu aucun avis <strong>de</strong> votre<br />

départ; la veille <strong>de</strong> lʹenvoi <strong>de</strong> ma lettre, il avait seulement appris par M. Lesort que vous<br />

étiez à Rome.<br />

M. Le Rebours vous avertit que M. lʹabbé Gay est à Rome au Séminaire français; il<br />

vous invite à le voir; il pense que, par lui, vous pourriez entrer en relations <strong>avec</strong> M. Roger<br />

<strong>de</strong> Gontaud, lequel, étant à Rome sans occupation, vous serait très utile pour concourir à<br />

lʹœuvre <strong>de</strong>s Zouaves. Je ne sais pas si ce M. <strong>de</strong> Gontaud est fils <strong>de</strong> M me la Comtesse <strong>de</strong><br />

Gontaud; il faudrait savoir au juste par M. Gay quelle aptitu<strong>de</strong> il aurait pour le Cercle. Je<br />

crois que vous <strong>de</strong>vez tendre (<strong>avec</strong> circonspection toutefois et sérieux examen) à susciter<br />

1253


<strong>de</strong>s agents dignes et dévoués à cette œuvre; M. Girard aura besoin dʹêtre gran<strong>de</strong>ment aidé,<br />

mais Dieu y pourvoira si nous prions et si nous avons ferme confiance en Lui.<br />

Nous pensons un peu à inviter M. Cochin à venir le soir du dimanche <strong>de</strong>s Rameaux<br />

parler aux jeunes gens; on ferait une petite soirée pour eux seulement; M. Vrignault y se‐<br />

rait et, à la fin, le p. Foinel pourrait recomman<strong>de</strong>r chau<strong>de</strong>ment la retraite.<br />

M. <strong>de</strong>s Francs mʹa averti <strong>de</strong> la manière la plus formelle et la plus décidée quʹil aurait<br />

besoin <strong>de</strong> 10 000f au moins pour juillet; il mʹa donné <strong>de</strong> son insistance <strong>de</strong>s raisons qui<br />

mʹont paru sérieuses, je crois que vous lʹindisposeriez gravement si vous ne lui donniez sa‐<br />

tisfaction; ce sera une lour<strong>de</strong> difficulté pour vous; espérons en Dieu et en S t Joseph.<br />

Je vais <strong>de</strong> ce pas chez M. Thenon pour voir si lʹarrangement dont M. Girard vous a<br />

sans doute dit un mot peut arriver à conclusion satisfaisante. Cʹest aussi affaire grave et<br />

difficile dʹexécution; mettez‐la aux pieds <strong>de</strong>s S ts Apôtres.<br />

Peut‐être quʹun mot <strong>de</strong> vous au r.p. Foinel et à M. Vrignault ferait bien pour soute‐<br />

nir et grandir encore leur zèle.<br />

Adieu, mon bien cher enfant; nous ne sommes pas ordinairement si loin lʹun <strong>de</strong><br />

lʹautre, mais en Dieu les rapprochements sont prompts; usons‐en, en attendant que votre<br />

retour les réalise sensiblement. Tout le mon<strong>de</strong> ici vous aime comme moi, sinon autant que<br />

moi.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Bon souvenir à M. Boucault et à tous nos amis.<br />

1287 bis à M. lʹabbé Lagar<strong>de</strong> 406<br />

Diverses autorisations <strong>de</strong>mandées en faveur <strong>de</strong> nos Œuvres.<br />

Vaugirard, 27 mars 1868<br />

Monsieur le Vicaire Général,<br />

Depuis quelques années, Mgr lʹArchevêque, par lʹentremise <strong>de</strong> MM. nos Archidia‐<br />

cres, nous a autorisés à nous entendre pour les Pâques <strong>de</strong>s sujets dépendant <strong>de</strong> nos patro‐<br />

nages dʹapprentis et <strong>de</strong> jeunes ouvriers <strong>avec</strong> MM. les Curés <strong>de</strong> nos paroisses respectives.<br />

Quant aux Allemands, aux Italiens, aux Saintes‐Familles et aux militaires, Mgr a<br />

permis quʹils fissent leur communion pascale dans les maisons dʹ Œuvres qui sʹoccupent<br />

dʹeux, sous la réserve que, si un grand nombre <strong>de</strong> personnes <strong>de</strong> ces catégories appartenait<br />

à une ou <strong>de</strong>ux paroisses plus ou moins voisines, nous ayons soin <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à MM. les<br />

Curés une permission qui nous serait facilement accordée.<br />

Je viens vous prier, Monsieur le Vicaire Général, <strong>de</strong> nous faire connaître si Mgr lʹAr‐<br />

chevêque veut bien nous maintenir ces autorisations pour la présente année.<br />

Jʹai aussi à solliciter, pour notre orphelinat <strong>de</strong> Vaugirard, une faveur dʹune autre na‐<br />

ture. En bien <strong>de</strong>s circonstances, nous avons éprouvé combien il nous serait utile dʹavoir<br />

chez nous les saintes huiles. Les enfants sont sujets à <strong>de</strong>s maux subits qui, en un instant,<br />

prennent <strong>de</strong>s caractères inquiétants; <strong>avec</strong> un personnel <strong>de</strong> près <strong>de</strong> 250 élèves, ces cas ne<br />

sont pas rares, et bien souvent nous avons éprouvé alors bien <strong>de</strong>s peines pour nous procu‐<br />

rer à temps les saintes huiles. Nous vous serions donc bien reconnaissants, Monsieur le Vi‐<br />

406 Vicaire Général <strong>de</strong> l'archidiocèse <strong>de</strong> Paris.<br />

1254


caire Général, <strong>de</strong> lever pour nous cette difficulté en nous autorisant à gar<strong>de</strong>r les saintes<br />

huiles pour les besoins <strong>de</strong> notre institution.<br />

Veuillez agréer, Monsieur le Vicaire Général, les sentiments <strong>de</strong> respectueux dé‐<br />

vouement <strong>avec</strong> lesquels je suis<br />

Votre humble et obéissant serviteur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je renouvelle bien volontiers pour cette année les autorisations accordées les années précé‐<br />

<strong>de</strong>ntes pour la communion pascale. Quant aux saintes huiles, jʹautorise également, en ce qui me<br />

concerne, mais à la condition expresse que M. le Curé <strong>de</strong> la paroisse y consentira <strong>de</strong> son côté.<br />

E.J. Lagar<strong>de</strong> v.g. Paris, le 29 mars 68<br />

1288 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Remerciements pour sa correspondance régulière. Rôle <strong>de</strong> lʹaction en commun: ʺlʹaffection et le bon vouloir ne<br />

suffisent pas pour maintenir lʹunion dʹune société, il faut quʹon marche et agisse ensembleʺ. Nouvelles <strong>de</strong> la fon‐<br />

dation du Cercle militaire à Rome.<br />

Chaville, 29 mars 1868<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux bonnes lettres, si intéressantes par tous les faits et détails<br />

dont elles sont remplies, que vous mʹavez écrites. Je me fais parfois scrupule dʹencourager<br />

ces correspondances fréquentes qui accroissent notablement vos occupations déjà multi‐<br />

pliées; cependant, jʹy vois <strong>de</strong> grands avantages pour la bonne union <strong>de</strong> notre petite famille;<br />

M. Marcaire étant trop sobre en effusions et M. Caille trop accablé <strong>de</strong> travaux, peu à peu la<br />

maison dʹAmiens, une <strong>de</strong>s plus anciennes et <strong>de</strong>s plus aimées chez nous, tendait à sʹisoler et<br />

à <strong>de</strong>venir presque étrangère au mouvement commun; donc, sans abon<strong>de</strong>r dans un excès<br />

contraire, je suis heureux, et notre Conseil aussi, <strong>de</strong> sentir cette chère œuvre vivre plus in‐<br />

timement et plus sensiblement <strong>avec</strong> nous; lʹaffection et le bon vouloir ne suffisent pas pour<br />

maintenir lʹunion dʹune société, il faut aussi quʹon marche et agisse ensemble; quand le<br />

cœur ne bat plus, on dit: la vie est éteinte.<br />

Bénissons Dieu <strong>de</strong>s quelques progrès que semblent faire la régularité <strong>de</strong> la commu‐<br />

nauté et lʹesprit <strong>de</strong>s œuvres; rapportons tout à Lui, en faisant toutes choses comme si elles<br />

dépendaient <strong>de</strong> notre seule action. Ne vous tuez pas toutefois, faisons feu qui dure; je vous<br />

recomman<strong>de</strong> instamment, très instamment <strong>de</strong> vous ménager le dimanche surtout, très fa‐<br />

tigant pour vous; parlez le moins possible, faites‐vous ai<strong>de</strong>r par les Pères; si un ne suffit<br />

pas, je suis persuadé quʹils en donneront <strong>de</strong>ux.<br />

Je nʹai pas vu Mme <strong>de</strong> Varax, je ne croyais pas quʹelle fût à Paris; en quittant Amiens,<br />

elle a eu lʹamabilité <strong>de</strong> mʹécrire une petite lettre pour me donner <strong>de</strong> vos nouvelles et me<br />

recomman<strong>de</strong>r encore <strong>de</strong> veiller à ce que vous songiez à la saison dʹeaux pour achever <strong>de</strong><br />

guérir votre larynx. Elle me disait quʹelle retournait à Montcoy, où je lui ai adressé quel‐<br />

ques mots <strong>de</strong> réponse.<br />

On mʹa dit aujourdʹhui que les objets <strong>de</strong>mandés par vous étaient prêts et allaient<br />

être expédiés; jʹai indiqué quʹon y <strong>de</strong>vait joindre un St Vincent, comme vous le désiriez.<br />

LʹŒuvre du Cercle va bien à Rome, toutes les difficultés aplanies et tous les consen‐<br />

tements obtenus, on a loué le Palais Torlonia, au moins la chose semblait assurée dʹaprès la<br />

1255


<strong>de</strong>rnière lettre <strong>de</strong> M. Maignen. Il ne pourra revenir quʹaprès Pâques. Pour rendre son ab‐<br />

sence moins criante aux yeux <strong>de</strong> ses amis, je reste les quatre premiers jours <strong>de</strong> chaque se‐<br />

maine à sa maison; jʹy suis médiocrement utile, mais cela sauve la position.<br />

Rien nʹest absolument réglé pour la retraite; le p. Eymard a promis conditionnelle‐<br />

ment; ce serait, je crois, pour le 26 avril; je vous informerai mieux plus prochainement.<br />

Les chemises propres pour M. Marcaire sont nécessaires, la forme est à choisir entre<br />

vous.<br />

Envoyez‐nous les noms <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux enfants qui sont chez M. Bayle, nous verrons <strong>avec</strong><br />

sa maison ce que nous pouvons faire. Accepte‐t‐on les conditions <strong>de</strong> la nôtre?<br />

Si je ne réponds pas à tout ici, signalez‐moi les lacunes; je nʹai pas votre première<br />

lettre, je lʹaurai laissée dans une <strong>de</strong>s quatre maisons où je couche maintenant successive‐<br />

ment.<br />

Ci‐joint lʹannuaire, accommo<strong>de</strong>z‐le pour les points <strong>de</strong> détail: heure, jour, etc. à vos<br />

nécessités propres, gardant lʹessentiel autant que possible.<br />

Adieu, bien cher ami, non à vous seulement, mais à tous aussi; vos lettres me don‐<br />

nent le moyen <strong>de</strong> porter la vie dʹAmiens ici; que les miennes portent la nôtre parmi vous;<br />

cet échange fera le battement commun <strong>de</strong> nos <strong>de</strong>ux existences.<br />

Votre ami et Père tendrement dévoué en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Pressez M. Caille <strong>de</strong> mʹécrire quelquefois; il faut bien quʹil ne sʹefface pas par une<br />

humilité excessive.<br />

1289 à M. Decaux<br />

M. Maignen encore à Rome. Invitation à venir parler aux jeunes gens du Cercle <strong>de</strong> Nazareth.<br />

Nazareth, 30 mars 1868<br />

Mon bien bon ami,<br />

Quelques difficultés dʹexécution pour la mission qui lui a été confiée à Rome retar‐<br />

<strong>de</strong>nt un peu le retour <strong>de</strong> M. Maignen; il reviendra immédiatement après Pâques, mais jus‐<br />

que là, les jeunes gens du Cercle, qui comptaient seulement sur une absence <strong>de</strong> 15 jours<br />

sʹinquiètent et ont quelque peine à rester bien exacts à leurs réunions. Nous avons pensé<br />

que le meilleur moyen <strong>de</strong> les soutenir serait que vous leur fissiez dimanche, dans la soirée,<br />

une petite visite, où vous leur diriez quelques mots dʹaffection et dʹencouragement.<br />

Je pense que cette visite dʹune <strong>de</strong>mi‐heure ou trois quarts dʹheure, vers 8h., nʹempê‐<br />

cherait pas pour vous une réunion <strong>de</strong> famille ou autre assemblée et ferait un grand bien à<br />

ces jeunes gens.<br />

Je <strong>de</strong>meure <strong>avec</strong> eux quatre jours <strong>de</strong> la semaine, mais je les connais peu ou point, je<br />

leur sers donc à bien peu <strong>de</strong> chose; je suis dʹailleurs retenu tout le dimanche à Chaville. Les<br />

dignitaires ont eux‐mêmes exprimé le désir que vous leur accordiez la consolation <strong>de</strong> vo‐<br />

tre visite; jʹose attendre <strong>de</strong> votre bonté quʹelle ne leur sera pas refusée; on désire dʹailleurs<br />

quʹils soient nombreux dimanche, leur retraite pour Pâques <strong>de</strong>vant commencer ce jour‐là.<br />

Votre tout affectionné ami et Confrère<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1256


1290 à M. Maignen<br />

Encouragements face aux difficultés rencontrées pour établir lʹŒuvre du Cercle <strong>de</strong>s zouaves. Nouvelles du Cer‐<br />

cle <strong>de</strong> Nazareth.<br />

Paris, 31 mars 1868<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Nous avons pris une vive part aux soins que vous ont causés les inci<strong>de</strong>nts <strong>de</strong> lʹœu‐<br />

vre qui vous a conduit à Rome; mais vous vous serez raffermi, je le pense bien, par la pen‐<br />

sée que les contrariétés et peines sont le signe manifeste <strong>de</strong> la bénédiction <strong>de</strong> Dieu dans les<br />

choses quʹon entreprend pour son service. Autrement, on ne prierait pas assez, on se<br />

confierait en soi‐même et lʹon sʹattribuerait le succès si on vient à lʹobtenir; priez donc<br />

beaucoup, cher ami, humiliez‐vous dans votre indignité et dans votre impuissance, et<br />

après allez fermement, Dieu sera près <strong>de</strong> vous.<br />

M. Paillé arrive <strong>de</strong> chez M. Keller, dont il est allé prendre lʹavis <strong>de</strong> ma part. M. Kel‐<br />

ler est tout à fait <strong>de</strong> votre sentiment; il croit quʹil faut, à moins dʹoppositions et résistances<br />

supérieures auxquelles on ne puisse résister définitivement, passer outre et sʹarrêter au Pa‐<br />

lais Torlonia; ses raisons sont les vôtres: lieu un peu en <strong>de</strong>hors du mouvement, voisin <strong>de</strong>s<br />

casernes et <strong>de</strong> lʹhôpital. Cʹest surtout pour ceux qui manquent dʹappui quʹon fait le Cercle;<br />

ceux‐là sauront le venir chercher en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s promena<strong>de</strong>s. On fera, sʹil y a lieu, quelque<br />

chose <strong>de</strong> spécial pour la Légion dʹAntibes, trop éloignée du Palais Torlonia.<br />

M. Meurinne est venu au Cercle dimanche; il a été aimable <strong>avec</strong> les jeunes gens,<br />

mais il a manifesté quelque inquiétu<strong>de</strong> et peine <strong>de</strong> votre absence prolongée, la regardant<br />

comme bien préjudiciable en ce moment pour les intérêts du Cercle <strong>de</strong>s Ouvriers. Il insiste<br />

pour que vous reveniez sans faute tout <strong>de</strong> suite après Pâques; je ne suis pas même sûr que<br />

M. Paillé ait osé lui avouer que vous ne pourriez revenir avant.<br />

M. Vrignault vous lʹécrit, il sera à Rome pour le 1er mai; si donc vous avez quitté<br />

cette ville le 15, il nʹy aura quʹune courte lacune jusquʹà son arrivée. Ne donnez pas trop <strong>de</strong><br />

position à M. Boucault, <strong>de</strong> peur quʹil ne se prévale trop en votre absence.<br />

M. Myionnet a passé dimanche la soirée au Cercle, où il a été bien accueilli. M. De‐<br />

caux y viendra dimanche au soir et y parlera aux jeunes gens. Nous employons toutes les<br />

industries pour quʹils restent fidèles et viennent à la retraite. Mais ces moyens ne sont que<br />

<strong>de</strong>s expédients et nʹauront pas longtemps efficacité.<br />

Je voulais écrire un mot à mon cher fils Girard, le remercier <strong>de</strong> sa bonne petite let‐<br />

tre; je lui sais gré <strong>de</strong> regretter un peu, même à Rome, sa vie studieuse et calme <strong>de</strong> Chaville;<br />

elle valait mieux pour lui, sans doute, dans lʹordre ordinaire <strong>de</strong>s choses, mais puisque<br />

Dieu lʹa attiré ailleurs, cʹest quʹil en sera définitivement mieux ainsi pour lui; quʹil ait<br />

confiance, ses étu<strong>de</strong>s ne souffriront que momentanément; après que les choses seront assi‐<br />

ses, la régularité et le calme suffisants reviendront; quʹil cherche en Dieu sa paix, elle <strong>de</strong>s‐<br />

cendra dans son cœur. Jʹenvoie la lettre pour sa sœur.<br />

Le jeune Conort, ancien membre du Cercle, est venu me consulter sur la voie quʹil<br />

doit suivre; sa santé est meilleure; il incline à la vie religieuse, sans quʹil mʹait précisé en<br />

quelle Congrégation; il mʹa paru quʹil pensait à nous, il vous consultera à votre retour<br />

Pour MM. Thenon et Girodon, ils sont toujours bien disposés, mais ils nʹarrêteront<br />

leur sentiment quʹaprès Pâques et après un pèlerinage à N.D. <strong>de</strong> Chartres; alors, si le Sei‐<br />

gneur les tourne vers nous, il y aura plusieurs difficultés dʹexécution à surmonter: consen‐<br />

1257


tement <strong>de</strong> lʹArchevêché, etc. Il faut beaucoup prier, afin dʹavoir sûrement la volonté et le<br />

secours <strong>de</strong> Dieu.<br />

Adieu, mon cher enfant, je suis obligé <strong>de</strong> finir; tout le mon<strong>de</strong> ici prie pour vous et<br />

montre son affection pour vous. M. Cochin mʹécrit une bonne lettre, mais il est sérieuse‐<br />

ment empêché pour dimanche, cʹest pourquoi nous avons recours à M. Decaux.<br />

Croyez, cher enfant, à ma tendre, très tendre affection en J.M.J.<br />

Votre ami et Père dévoué<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Avancez au jeune Mauger 20f que M me dʹErceville lui donne; M. Vasseur vous les<br />

rendra au retour.<br />

1291 à M. Girard<br />

Conseils sur la part dʹautorité à laisser à M. Charrin. Nécessité <strong>de</strong> lʹabandon à la volonté <strong>de</strong> Dieu: entré en vie<br />

religieuse, le religieux est entré ʺdans la conduite <strong>de</strong> Provi<strong>de</strong>nce où Dieu se réserve <strong>de</strong> tout mener sans lui laisser<br />

rien prévoir, au moins <strong>de</strong> loinʺ. Nouvelles <strong>de</strong> Ste‐Anne. Bénédiction du Pape.<br />

Chaville, 12 avril [1868]<br />

Pâques<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je nʹai pas trouvé le moment jusquʹici <strong>de</strong> vous écrire et <strong>de</strong> répondre à vos affectueu‐<br />

ses lettres; la vie noma<strong>de</strong> que je mène <strong>de</strong>puis le commencement <strong>de</strong> lʹhiver favorise peu<br />

lʹordre et lʹactivité dans les occupations, mais jʹai tenu compte <strong>de</strong>s communications que<br />

contenait votre correspondance, et surtout je me suis souvenu <strong>de</strong>vant Dieu <strong>de</strong> tout ce qui<br />

vous intéressait.<br />

Je serais bien étonné que vos chères sœurs nʹeussent point reçu votre première let‐<br />

tre; je lʹai mise moi‐même sous enveloppe <strong>avec</strong> un timbre et je lʹai donnée à un <strong>de</strong> nos ff.<br />

pour la porter immédiatement. M. Myionnet est allé chez vous hier pour avertir vos sœurs<br />

<strong>de</strong>s <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s que vous faisiez en vêtements, etc., et en même temps pour leur donner <strong>de</strong><br />

vos nouvelles et en prendre <strong>de</strong>s leurs; je ne lʹai pas revu <strong>de</strong>puis, mais M. Charrin vous dira<br />

le résultat <strong>de</strong> cette visite, lequel, je lʹespère, sera tranquillisant pour vous.<br />

Je crois, mon cher ami, quʹil sera mieux quʹà raison <strong>de</strong> votre âge et <strong>de</strong> votre plus<br />

gran<strong>de</strong> expérience, vous ayez autorité sur M. Charrin qui, dʹailleurs, aurait peine, jʹen suis<br />

assuré, à prendre les choses autrement. Vous trouverez en lui un ai<strong>de</strong> dévoué et plein <strong>de</strong><br />

bon vouloir; il est aussi dʹun caractère doux et aimable qui le rendra agréable à ceux qui<br />

fréquenteront le Cercle. Ne vous hâtez pas, néanmoins, systématiquement, <strong>de</strong> lui laisser<br />

toute influence, direction, surveillance; il a besoin <strong>de</strong> se mûrir un peu pour quʹon puisse<br />

tant se reposer sur lui; il nʹest pas encore accoutumé à prévoir lʹensemble <strong>de</strong>s choses dans<br />

une entreprise ou opération quelconque et à la suivre <strong>avec</strong> ordre et précision; trop compter<br />

sur lui, dès lʹabord, serait sʹexposer à <strong>de</strong>s mécomptes; gar<strong>de</strong>z donc, quant à présent, la res‐<br />

ponsabilité <strong>de</strong>s mouvements; vous verrez successivement ce que vous pouvez sans crainte<br />

lui abandonner. Je vois bien, comme vous, quʹil résultera un peu <strong>de</strong> gêne et peut‐être <strong>de</strong><br />

retard pour vos étu<strong>de</strong>s dans ces soins <strong>de</strong>s premiers temps, mais comptez sur Dieu qui sau‐<br />

ra bien vous rendre en assistance <strong>de</strong> grâce ce que vous aurez sacrifié pour son service.<br />

Lʹœuvre que vous faites est entreprise pour sa gloire seule; ni vous, ni nous ne nous y<br />

sommes ingérés <strong>de</strong> notre volonté propre; nous y sommes, parce quʹil nous a semblé clai‐<br />

1258


ement quʹIl nous y appelait; ayons donc confiance, succès ou non succès, difficultés ou re‐<br />

tards, tout sera bien puisque tout sera pesé et réglé par sa sagesse et son amour; faisons<br />

bien aujourdʹhui ce quʹIl nous donne à faire, <strong>de</strong>main, Il nous dira ce quʹIl attend <strong>de</strong> nous. Il<br />

mʹa paru que vous nʹétiez pas exempt dʹun peu <strong>de</strong> souci sur lʹavenir et sur le moment où<br />

vous retrouveriez une pleine liberté pour reprendre la régularité accoutumée <strong>de</strong> vos mou‐<br />

vements et <strong>de</strong> vos étu<strong>de</strong>s. En entrant tout à fait à la discrétion <strong>de</strong> Dieu par la vocation reli‐<br />

gieuse, vous êtes entré dans lʹordre surnaturel, dans la conduite <strong>de</strong> Provi<strong>de</strong>nce où Dieu se<br />

réserve <strong>de</strong> tout mener sans nous laisser rien prévoir, au moins <strong>de</strong> loin; il faut en cette voie<br />

beaucoup dʹabandon et pas beaucoup <strong>de</strong> raisonnement; quand on sʹy met franchement et<br />

sans résistance, on sʹy trouve gran<strong>de</strong>ment consolé, car on sent lʹaction divine presque visi‐<br />

blement et rien nʹest si doux pour lʹâme que <strong>de</strong> voir quʹelle nʹest pas seule et que Dieu lui<br />

est présent; abandon et confiance, nous arriverons à mieux que nous nʹaurions osé espérer.<br />

Tous nos ff. me parlent <strong>de</strong> vous <strong>avec</strong> intérêt et affection, ceux <strong>de</strong> Chaville et <strong>de</strong> S te ‐<br />

Anne en particulier, mais tous généralement; vous êtes déjà <strong>de</strong> la famille et votre place,<br />

préparée un peu <strong>de</strong> longue main, sʹest faite bien promptement. Nos retraites ont bien mar‐<br />

ché; je nʹen sais pas encore les résultats définitifs, mais jʹai lieu dʹespérer quʹils seront heu‐<br />

reux. Je nʹai presque rien ouï‐dire <strong>de</strong> S te ‐Anne: MM. Planchat et Derny, partis <strong>de</strong>puis plus<br />

<strong>de</strong> huit jours, nʹont pas donné signe <strong>de</strong> vie, mais ils ne seront pas <strong>de</strong>meurés inactifs; vous<br />

en êtes bien assuré comme moi, M. Planchat a, sous ce rapport, assez fait ses preuves pour<br />

quʹon nʹait point dʹinquiétu<strong>de</strong> sur lʹemploi <strong>de</strong> son temps.<br />

Nous avons aujourdʹhui, jour <strong>de</strong> Pâques, reçu la bénédiction obtenue pour nous du<br />

Souverain et bien‐aimé Pontife Pie IX, nous sommes convaincus quʹelle apporte pour nous<br />

<strong>de</strong>s grâces abondantes; sans doute, vous lʹaurez reçue directement <strong>avec</strong> M. Maignen; nous<br />

envions votre bonheur. Jʹespère que votre séjour à Rome, quelle quʹen soit la durée, sera<br />

bienfaisant pour votre âme et avantageux pour votre carrière dans le sacerdoce; cʹest une<br />

gran<strong>de</strong> joie, cʹest une grâce <strong>de</strong> choix pour un prêtre dʹavoir touché les tombeaux et les reli‐<br />

ques <strong>de</strong>s S ts Apôtres et <strong>de</strong> tant <strong>de</strong> Saints qui composent à Rome comme une cité à part et<br />

comme un vestibule du Ciel.<br />

Si vous rencontrez sous votre main le livre <strong>de</strong> M gr Gerbet sur Rome, vous le lirez<br />

<strong>avec</strong> fruit; dʹautres disent les merveilles extérieures <strong>de</strong> cette ville bénie, lui en pénètre la<br />

vie intime et la haute signification.<br />

Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S. Quand vous reverrai‐je? Bientôt ou dans<br />

bien <strong>de</strong>s jours? Je ne sais, nous ne le savons pas; mais vous êtes bien gardé, les anges <strong>avec</strong><br />

les saints doivent se plaire à Rome; mon esprit misérable se glissera souvent parmi eux<br />

pour vous visiter, vous bénir et aussi pour vous embrasser tendrement, paternellement.<br />

Votre ami et Père affectionné en J. et M. Le <strong>Prevost</strong> P tre<br />

1292 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Nouvelles <strong>de</strong> la fondation à Rome. MLP. se plaint du silence <strong>de</strong> M. Caille. Lʹavenir <strong>de</strong>s Œuvres dʹAmiens<br />

(Noyon et St‐Jacques). La retraite sera prêchée par le père Eymard, fondateur <strong>de</strong> la Congrégation du<br />

T.S.Sacrement.<br />

Paris, 15 avril 1868<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous écris cursivement, comme presque toujours, trouvant après Pâques bien <strong>de</strong>s<br />

correspondances en suspens; je suis dʹailleurs, jusquʹà jeudi 16, gardien du Cercle, en lʹab‐<br />

1259


sence <strong>de</strong> M. Maignen qui arrivera <strong>de</strong> Rome samedi. Il a mis sur pied le Cercle Romain, es‐<br />

pérons quʹil prospérera; MM. Girard et Charrin restent pour le soutenir; M. Vrignault part<br />

pour un mois et les secon<strong>de</strong>ra <strong>de</strong> son mieux dans les premiers temps; Dieu fera le reste,<br />

nous en avons la confiance; <strong>de</strong> bons entourages et <strong>de</strong>s appuis soli<strong>de</strong>s sʹy intéressent, mais<br />

les difficultés sont nombreuses.<br />

Je joins ici 200f pour le trimestre <strong>de</strong> votre petite pension à Amiens; jʹai pu la compo‐<br />

ser <strong>avec</strong> ce qui me restait <strong>de</strong> quelques intérêts touchés avant la vente <strong>de</strong> vos titres et en<br />

parfaisant la somme au moyen <strong>de</strong> 50f que je viens <strong>de</strong> toucher pour inscriptions romaines.<br />

M. Paillé me prie <strong>de</strong> vous dire quʹil placera, selon votre désir, les 1000f envoyés en<br />

trop à M. Berlotti pour les droits <strong>de</strong> mutation, quʹil vous prie conséquemment dʹécrire à ce<br />

<strong>de</strong>rnier, afin quʹil ait lʹautorisation <strong>de</strong> les lui adresser.<br />

Nos retraites et clôtures pour Pâques ont été excellentes partout; je pense bien que<br />

vous aurez été heureux à Amiens. M. Caille ne me donne pas signe <strong>de</strong> vie; invitez‐le à me<br />

dire comment va S t ‐Jacques et à me donner son avis sur lʹensemble <strong>de</strong>s œuvres dʹAmiens<br />

et sur la communauté; jʹai sans doute vos communications, mais son avis me sera précieux<br />

aussi; il faut bien dʹailleurs quʹil reste en communication habituelle <strong>avec</strong> moi, puisquʹil est<br />

membre du Conseil.<br />

Notre retraite sera donnée par le r.p. Eymard, Supérieur <strong>de</strong>s pp. du Saint Sacre‐<br />

ment. Sera‐ce le 26 avril ou le 3 mai? Je ne le sais pas encore, je vous lʹécrirai très prochai‐<br />

nement.<br />

Nous avons lu <strong>avec</strong> grand intérêt vos observations sur lʹavenir <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux œuvres <strong>de</strong><br />

Noyon et <strong>de</strong> S t ‐Jacques; nous goûtons, en général, vos vues; nous nʹinclinerions guère tou‐<br />

tefois à faire nous‐mêmes les classes aux orphelins, à moins dʹimpossibilité absolue <strong>de</strong> les<br />

maintenir aux écoles <strong>de</strong>s Frères. Nous nʹavons pas non plus <strong>de</strong> sujet capable que nous<br />

puissions envoyer présentement pour être préposé à ce service; lʹéloignement <strong>de</strong> MM. Gi‐<br />

rard et Charrin nous occasionne <strong>de</strong> nouveaux vi<strong>de</strong>s difficiles à combler.<br />

Je vous écrirai, je lʹespère, plus à loisir à prochaine occasion. Nous ferons <strong>avec</strong> joie<br />

connaissance à la retraite <strong>avec</strong> vos <strong>de</strong>ux postulants [MM. Watelet et Gérold]; vous y vien‐<br />

drez vous‐même, me dites‐vous, au moins pour la clôture; nous en serons tous heureux,<br />

voilà déjà longtemps que vous êtes loin <strong>de</strong> nous.<br />

Adieu, bien cher ami, si vous faites bien selon mes désirs, vous parlerez beaucoup à<br />

tous vos ff. <strong>de</strong> nous, <strong>de</strong> moi, leur Père, qui les aime et pense à eux tous les jours <strong>de</strong>vant<br />

Dieu; embrassez‐les, M. Caille avant tous, qui vous le rendra <strong>de</strong> ma part.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1293 à M. dʹArbois<br />

Fondation du Cercle <strong>de</strong>s Zouaves à Rome (placé sous le patronage <strong>de</strong> St Michel, il venait dʹêtre inauguré le lundi<br />

<strong>de</strong> Pâques, 13 avril). Santé <strong>de</strong> Mgr Angebault. Nouvelles <strong>de</strong>s Œuvres.<br />

Paris, 15 avril 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous écris quelques mots du Cercle <strong>de</strong>s Jeunes Ouvriers dont je suis le gardien<br />

<strong>de</strong>puis plusieurs semaines, en lʹabsence <strong>de</strong> M. Maignen qui a été chargé, je vous lʹai dit je<br />

crois, dʹaller à Rome fon<strong>de</strong>r un Cercle pour les Zouaves Pontificaux. Il revient samedi pro‐<br />

1260


chain, ayant réussi dans cette entreprise (autant quʹon en peut juger maintenant, puisque<br />

lʹouverture du Cercle date seulement du jour <strong>de</strong> Pâques), mais lʹœuvre est sur pied et,<br />

paraît‐il, en <strong>de</strong>s conditions qui donnent bonne espérance pour lʹavenir; MM. Girard et<br />

Charrin restent après M. Maignen pour conduire lʹœuvre; M. Vrignault part pour aller leur<br />

donner appui pendant un mois ou cinq semaines, M. Maignen nʹayant pu le faire plus<br />

longtemps, à cause <strong>de</strong>s besoins <strong>de</strong> son propre Cercle quʹune plus longue absence eût mis<br />

en souffrance.<br />

Jʹai reçu en son temps votre envoi <strong>de</strong> 100f. Je nʹai pu jusquʹici vous en accuser réception.<br />

Je regrette que votre <strong>de</strong>rnière lettre ne mʹait rien dit <strong>de</strong> la santé <strong>de</strong> M gr dʹAngers;<br />

nous restons inquiets au sujet <strong>de</strong> ce vénéré Prélat que nous aimons et vénérons comme<br />

lʹange gardien visible <strong>de</strong> notre famille religieuse. Ne manquez pas <strong>de</strong> mʹen parler <strong>avec</strong> dé‐<br />

tails dans votre plus prochaine lettre.<br />

Jʹai lu <strong>avec</strong> peine les particularités que vous me signalez sur le défaut <strong>de</strong> circonspec‐<br />

tion et <strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> M. <strong>Jean</strong> [Gauffriau]; je pense quʹil convient que je lui écrive, dites‐<br />

moi en quels termes il vous semble que je doive le faire.<br />

Notre retraite sera donnée par le r.p. Eymard, Supérieur <strong>de</strong>s pp. du Saint Sacre‐<br />

ment; elle sʹouvrira, ou le 26 avril, ou le 3 mai; je ne sais encore absolument pas lequel <strong>de</strong>s<br />

<strong>de</strong>ux, je vous lʹécrirai tout prochainement.<br />

Nos retraites ont été parfaites et les clôtures très consolantes. Au Cercle, 120 com‐<br />

munions à la chapelle, plus toutes celles faites au <strong>de</strong>hors. Je pense que le bon Dieu aura<br />

aussi béni vos efforts; remercions‐Le ar<strong>de</strong>mment et <strong>de</strong>mandons <strong>de</strong> nouvelles grâces.<br />

Jʹécris à M. lʹabbé Drolle, en réponse à sa lettre touchant votre assistance au repas <strong>de</strong><br />

noces du jeune dʹHommée; la distance du lieu où se fera ce mariage justifie lʹexception à la<br />

règle, la composition <strong>de</strong> lʹassemblée nous assure que vous nʹaurez point à regretter cette<br />

infraction à nos usages.<br />

Adressez à nos frères quelques paroles bien affectueuses <strong>de</strong> ma part et croyez aussi,<br />

bien cher ami, à tous mes sentiments les plus dévoués en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹécris aujourdʹhui à Orléans pour le dimissoire à <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r concernant la tonsure<br />

<strong>de</strong> M. Boiry.<br />

1294 à M. Risse<br />

Satisfaction dʹêtre tenu au courant <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> communauté et <strong>de</strong> ses Œuvres. Nouvelles sur le Cercle militaire<br />

<strong>de</strong> Rome.<br />

Vaugirard, 16 avril 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu votre petit journal du mois <strong>de</strong> janvier. Il a, comme toujours, un véritable in‐<br />

térêt pour nous et nous fait suivre vos travaux et presque votre vie quotidienne. Je vois<br />

seulement <strong>avec</strong> peine quʹil est ordinairement transcrit par vous, ce qui doit accroître vos<br />

occupations déjà si multipliées; ne pourriez‐vous confier ce travail à quelquʹun <strong>de</strong> vos frè‐<br />

res?<br />

[……] et Charrin restent pour conduire cette œuvre. Elle a son siège Palazzo Mari‐<br />

scotti, via <strong>de</strong>lla Pigna. Vous bénirez <strong>avec</strong> nous le Seigneur qui nous a assistés pour lʹac<br />

1261


complissement dʹune œuvre qui peut servir beaucoup à sa gloire, mais cʹest encore jus‐<br />

quʹici une semence jetée en terre, il faut obtenir par nos prières que Dieu daigne y donner<br />

accroissement.<br />

Assurez tous nos ff. <strong>de</strong> nos constants souvenirs et affection pour eux et croyez bien,<br />

cher ami, vous‐même à mes bien affectueux sentiments.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1295 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Nouvelles et recommandations diverses. Au sujet du mouvement <strong>de</strong>s Œuvres, MLP. rappelle le sage principe:<br />

ʺfaire bien plutôt que faire beaucoupʺ. Un religieux ne doit pas se rendre étranger à ses frères. M. Maignen <strong>de</strong><br />

retour <strong>de</strong> Rome.<br />

Vaugirard, 18 avril 1868<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai écrit à Orléans, il y a quelques jours, pour le dimissoire <strong>de</strong> M. Trousseau; pour la<br />

publication <strong>de</strong>s bans, il me semble que cʹest à lui à écrire directement à son Curé; enfin,<br />

nous répondrons pour le titre clérical dès quʹon nous en donnera lʹindication.<br />

La retraite commencera le 3 mai, dimanche au soir, par le r.p. Eymard.<br />

Oui, assurément, lʹostensoir est offert par nous à lʹœuvre <strong>de</strong> S t ‐Jacques‐N.D. <strong>de</strong>s Vic‐<br />

toires.<br />

Si M. Marcaire vient plusieurs jours avant ou sʹil reste plusieurs jours après, il pour‐<br />

ra <strong>de</strong>meurer <strong>de</strong>ux jours à Nazareth pour être plus à portée <strong>de</strong> voir sa mère, mais les autres<br />

jours il <strong>de</strong>vra rési<strong>de</strong>r à Vaugirard, afin dʹêtre un peu <strong>avec</strong> ses ff. auxquels il ne faut pas<br />

quʹil se ren<strong>de</strong> étranger; il sʹisole, en général, un peu trop.<br />

Le Conseil <strong>de</strong>man<strong>de</strong> quʹon ajourne les patronages du lundi jusquʹà ce que vos affai‐<br />

res dans les <strong>de</strong>ux maisons, déjà si lour<strong>de</strong>s à bien conduire, soient mieux assises; faire bien<br />

plutôt que faire beaucoup, il faut nous répéter cela souvent les uns aux autres.<br />

1262


M. Caille fera‐t‐il une apparition à la retraite? Prenez‐vous soin <strong>de</strong> vérifier quelque‐<br />

fois la literie du f. Barthélemy [Marchand]?<br />

Je doute que M. Christian [<strong>de</strong> Bretenières] accepte votre proposition; je ne sais sʹil se<br />

plairait à Amiens.<br />

Je tiendrai compte <strong>de</strong> lʹobservation pour Metz.<br />

Cʹest ici une lettre du samedi, jour où je ne puis guère écrire, lettre faite en hâte,<br />

brève et presque sèche involontairement. Le cœur reste le même ce jour‐là comme les au‐<br />

tres.<br />

Votre ami et Père affectionné en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Nous attendons M. Maignen ce soir.<br />

1296 à M. dʹArbois<br />

Date <strong>de</strong> la retraite. Sollicitu<strong>de</strong> pour la santé <strong>de</strong> Mgr Angebault. Relations <strong>avec</strong> le docteur Renier.<br />

Vaugirard, 18 avril 1868<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

La retraite commencera seulement le dimanche au soir, 3 mai, par le r.p. Eymard.<br />

Mgr dʹAngers va‐t‐il mieux? Lui faites‐vous dire que nous prions pour sa santé <strong>avec</strong><br />

une affectueuse sollicitu<strong>de</strong>?<br />

M. Renier se montre‐t‐il disposé à sʹoccuper un peu cordialement <strong>de</strong> vos œuvres? Il<br />

serait bien changé sʹil en était autrement.<br />

Affections à tous.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1297 à M. Girard<br />

Aperçus sur lʹutilité du Cercle <strong>de</strong>s Zouaves et les moyens <strong>de</strong> le bien fon<strong>de</strong>r. Nécessité <strong>de</strong>s correspondances. Nou‐<br />

velles <strong>de</strong>s Œuvres <strong>de</strong> France.<br />

Vaugirard, 27 avril 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Maignen vous écrivant pour les affaires du Cercle, je me borne à vous faire seu‐<br />

lement quelques mots dʹaffection. Nous avons attendu bien longtemps votre lettre et <strong>avec</strong><br />

un peu dʹinquiétu<strong>de</strong>; M. Maignen avait laissé toutes choses en état encore si peu affermi<br />

que nous avions hâte dʹavoir quelques détails précis sur vous‐même, sur lʹarrivée <strong>de</strong> M.<br />

Charrin, sur lʹœuvre dont vous vous occupez. Je crois quʹil sera bien désirable, pour que<br />

nous puissions vous suivre <strong>de</strong>s yeux et soutenir ici les intérêts <strong>de</strong> la fondation qui se fait<br />

pour les Zouaves, que vous nous écriviez régulièrement et, autant quʹil se pourra, à jour<br />

fixe, afin que, comptant à peu près sûrement sur un message <strong>de</strong> votre part, nous ne croi‐<br />

sions pas nos courriers <strong>avec</strong> les vôtres. Je désire aussi que M. Charrin secoue un peu sa ré‐<br />

pugnance à écrire et correspon<strong>de</strong> <strong>avec</strong> moi <strong>de</strong> temps en temps; la fréquence <strong>de</strong>s communi‐<br />

cations <strong>de</strong>s ff. <strong>avec</strong> les Supérieurs est tout à fait nécessaire en communauté, particulière‐<br />

ment lorsquʹils sont loin du centre; autrement, les liens <strong>de</strong> charité se relâchent, lʹunion sʹaf‐<br />

faiblit et la vocation en souffre aussi dommage.<br />

1263


M. Vrignault vous portera ces lignes; nous nous réjouissons du concours quʹil vous<br />

prêtera et qui consistera surtout à vous ai<strong>de</strong>r à vous asseoir fermement dans votre position<br />

et à encourager MM. les membres <strong>de</strong> la Commission à se bien unir à vous pour que, <strong>de</strong><br />

concert, vous meniez à bien votre entreprise. Il peut être dʹune si gran<strong>de</strong> utilité pour les<br />

Zouaves, éloignés <strong>de</strong> leur pays et <strong>de</strong> leurs parents, <strong>de</strong> trouver au Cercle comme une mai‐<br />

son <strong>de</strong> famille où les atten<strong>de</strong>nt toujours <strong>de</strong> bons amis prêts à les accueillir, à prendre part à<br />

tout ce qui les touche, à leur donner un conseil et à leur rendre quelque bon office au be‐<br />

soin; cʹest bien là <strong>de</strong> la charité et nous serons bien dans lʹesprit <strong>de</strong> notre Institut si nous ac‐<br />

complissons bien cette mission. Je sais dʹavance que nous pouvons y compter <strong>de</strong> votre part<br />

et <strong>de</strong> celle <strong>de</strong> M. Charrin; cʹest pour cela que vous avez été choisis lʹun et lʹautre par Dieu<br />

plutôt que par nous‐mêmes.<br />

Tous vont bien ici et se sont montrés sensibles à votre souvenir; Chaville recevra<br />

<strong>avec</strong> joie une lettre <strong>de</strong> vous, quand vous serez sorti <strong>de</strong> vos plus pressantes affaires.<br />

Nos retraites <strong>de</strong> Pâques ont été partout satisfaisantes et la grâce <strong>de</strong> Dieu nous a vi‐<br />

siblement assistés. S te ‐Anne a un Prési<strong>de</strong>nt très bon, jʹoublie son nom; il a été pris à S t ‐<br />

Charles où il nʹétait pas, je crois, attaché <strong>de</strong>puis bien longtemps.<br />

Je voulais écrire un mot à M. Charrin, mais M. Vrignault arrive et je dois clore cette<br />

lettre pour la lui remettre.<br />

Adieu donc, bien chers amis; je suis souvent en esprit près <strong>de</strong> vous et mon affection<br />

y <strong>de</strong>meure sans cesse. Faites ma part <strong>de</strong>s grâces que vous obtenez dans les pieux sanctuai‐<br />

res <strong>de</strong> Rome; vous nʹêtes jamais oubliés ici dans nos prières <strong>de</strong> chaque jour.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1298 à M. Piquet<br />

Que ce jeune frère (le premier orphelin <strong>de</strong> la rue <strong>de</strong> lʹArbalète) informe M. <strong>de</strong> Varax au sujet dʹun projet <strong>de</strong><br />

comman<strong>de</strong> à lʹatelier dʹorfèvrerie.<br />

1 er mai [1868]<br />

M. <strong>de</strong> Varax mʹécrit et paraît contristé que M. Henry Piquet ne lui répon<strong>de</strong> rien au<br />

sujet <strong>de</strong> la comman<strong>de</strong> que sa belle‐sœur, M me André <strong>de</strong> Varax, était disposée à faire. Je<br />

crois quʹen général M. Henry nʹest pas assez exact dans les correspondances.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1299 à M. Girard<br />

MLP. ajoute quelques mots à une lettre <strong>de</strong> M. Maignen (cf. infra, 1299bis). Le père Eymard prêche une magnifi‐<br />

que retraite. Assurance <strong>de</strong> prières en cette pério<strong>de</strong> difficile <strong>de</strong> la fondation.<br />

Vaugirard, 7 mai 1868<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹajoute une ligne à la lettre <strong>de</strong> M. Maignen pour vous assurer que ni vous, ni notre<br />

f. Charrin nʹêtes oubliés durant notre retraite. Elle est donnée par le r.p. Eymard <strong>avec</strong> une<br />

gran<strong>de</strong> consolation pour tous. La parole <strong>de</strong> ce bon Père est saisissante pour lʹâme et la met<br />

1264


ien avant dans le surnaturel 407 . Nous <strong>de</strong>mandons à Dieu que, quoique à distance, vous<br />

ayez quelque part à ce festin; vous en avez besoin pour bien subvenir à votre tâche. Je re‐<br />

gar<strong>de</strong> <strong>avec</strong> M. Maignen, comme dʹune gran<strong>de</strong> importance<br />

dʹentretenir et <strong>de</strong> fortifier la Commission qui peut vous ai<strong>de</strong>r,<br />

confirmer votre autorité et vous faire respecter.<br />

Que mon f. Charrin offre à Dieu ses petites peines ou<br />

humiliations sʹestimant, comme les Apôtres, heureux <strong>de</strong><br />

souffrir quelque chose pour son divin Maître.<br />

Je vous embrasse tous les <strong>de</strong>ux.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1299 bis <strong>de</strong> M. Maignen à M. Girard<br />

Recommandations pour bien asseoir lʹŒuvre naissante du Cercle <strong>de</strong>s Zouaves.<br />

Vaugirard, 7 mai 1868<br />

Mon bien cher frère,<br />

Je vous reprochais un peu aigrement, dans ma <strong>de</strong>rnière lettre,<br />

<strong>de</strong> prendre, <strong>avec</strong> le Cercle <strong>de</strong> Rome, <strong>de</strong>s allures <strong>de</strong> nourrice plutôt que <strong>de</strong> vraie mère. Vous mʹavez<br />

déjà excusé dans votre cœur, et vous avez compris lʹespèce dʹanxiété où jʹétais sur la marche et la<br />

<strong>de</strong>stinée dʹune œuvre qui nʹa pas été sans me coûter bien <strong>de</strong>s sacrifices, beaucoup <strong>de</strong> peines, <strong>de</strong><br />

souffrances même, sans parler <strong>de</strong> lʹintérêt immense quʹelle peut avoir dans lʹavenir pour notre<br />

Communauté et dans le présent pour lʹEglise et le Souverain Pontife. Mettez‐vous un peu à ma<br />

place, pensez à mon caractère sensible, impressionnable et songez à ce que jʹai souffert en aban‐<br />

donnant cette œuvre dans cette pério<strong>de</strong> du début qui est la plus intéressante, la plus attachante.<br />

Combien aussi il mʹétait douloureux <strong>de</strong> quitter cette ville admirable, dont la pensée ne me quitte<br />

plus, même la nuit dans mes rêves. Vous me direz que ce sont là <strong>de</strong>s faiblesses. Oui, peut‐être, et<br />

voilà pourquoi vous <strong>de</strong>vez me pardonner la désolation <strong>de</strong> ma lettre, mes reproches, etc., et voilà<br />

pourquoi vous êtes coupable envers moi que vous connaissez trop bien!<br />

Assez dʹexplications rétrospectives et dʹexcuses réciproques. Quelques recommandations:<br />

1°‐ Préparer dʹavance, <strong>avec</strong> mûre réflexion, lʹemploi <strong>de</strong> vos journées, les démarches à faire,<br />

commençant par la plus urgente, par <strong>de</strong>gré dʹimportance, mesure que le bon Dieu vous donnera, si<br />

vous le priez. Ceci est très important pour le progrès <strong>de</strong> lʹœuvre, la sagesse <strong>de</strong> sa direction, etc.<br />

2°‐ Correspondre régulièrement <strong>avec</strong> M. Le <strong>Prevost</strong> surtout, et également <strong>avec</strong> M. Keller<br />

qui est lʹorgane du Comité, qui nous a donné mission et argent. Il doit être bien surpris <strong>de</strong> votre si‐<br />

lence à son égard, qui est vraiment un manquement grave aux convenances, laissez‐moi vous le dire.<br />

3°‐ Recrutez, agrandissez et composez dʹéléments <strong>de</strong> choix votre Commission. Occupez ses<br />

membres, que ce ne soit pas seulement une assemblée délibérante, mais active. Cʹest lʹavenir du<br />

Cercle.<br />

4°‐ Ne négligez pas les relations extérieures; maintenant que lʹœuvre est établie et organi‐<br />

sée, il ne faut pas se tenir sournoisement à lʹécart, il faut la faire connaître et lui gagner les sympa‐<br />

thies. Il lui faut faire <strong>de</strong>s amis.<br />

5°‐ M. Keller mʹa réclamé mes comptes. Songez quʹil y a trois semaines que je suis à Paris. Il<br />

est bien temps <strong>de</strong> se mettre en règle.<br />

407 Cette retraite fit date dans les annales <strong>de</strong> l’Institut. L’apôtre <strong>de</strong> l’Eucharistie malgré sa gran<strong>de</strong> fatigue laissa débor<strong>de</strong>r son âme et<br />

enflamma tous les cœurs, prêchant sur un thème cher à MLP. : la charité. « Nous n’avons pas la source en nous…il faut recevoir<br />

d’ailleurs…glorifiez Dieu en vous d’abord, vous irez ensuite le glorifier dans les autres ». Nul doute que MLP., qui mettait au<br />

point les Constitutions, n’ait reçu <strong>de</strong> lui lumières et encouragements.<br />

1265


6°‐ Maintenez lʹesprit <strong>de</strong> famille en vous faisant une loi dʹentrer en rapport <strong>avec</strong> chaque<br />

zouave en particulier; sachez leurs noms, que personne nʹentre sans vous voir. Offrez vos poignées<br />

<strong>de</strong> main à tous.<br />

7°‐ Pensez à mes reliques.<br />

8°‐ Avez‐vous reçu les arbustes promis par la duchesse Salviati? Allez les lui réclamer, cʹest<br />

très important. Je lui ai parlé <strong>de</strong> vous, et elle mʹa promis pour vous toute sa bienveillance.<br />

Adieu, je vous embrasse et vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pardon <strong>de</strong> ma méchanceté. Vous savez bien que<br />

je vous aime beaucoup, beaucoup, beaucoup.<br />

Maurice Maignen<br />

Votre lettre nʹétait pas affranchie. Je lʹai payée 30c. Vous remarquerez que je vous réponds<br />

courrier par courrier, ou à peu près.<br />

Mon cher ami, je rouvre ma lettre pour vous dire que M. Keller vient <strong>de</strong> me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r ex‐<br />

pressément que vous lui fassiez un rapport sur la situation du Cercle pour le Comité, et que vous<br />

lui écriviez régulièrement dans le même but.<br />

1300 à M. Girard<br />

Envoi du frère <strong>Jean</strong>‐Marie Tourniquet à Rome, comme Supérieur.<br />

Vaugirard, 15 mai 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹenvoie M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] pour fortifier votre petite communauté ro‐<br />

maine et travailler à lʹœuvre excellente à laquelle vous êtes aussi employés, vous et M.<br />

Charrin; un quatrième le suivra plus tard, si la chose semble nécessaire. Vous formerez<br />

donc une petite famille <strong>de</strong> frères. Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> dire quʹelle sera tendrement unie<br />

dans la charité du divin Seigneur; où trouverait‐on les vertus chrétiennes et la sainte dilec‐<br />

tion surtout, sinon au centre même <strong>de</strong> la vie selon lʹesprit du Sauveur?<br />

Je crois quʹà raison <strong>de</strong> son ancienneté et <strong>de</strong>s liens qui lʹattachent absolument à la<br />

Congrégation, M. <strong>Jean</strong>‐Marie <strong>de</strong>vra être le chef <strong>de</strong> la colonie romaine; son autorité, je le<br />

sais, ne sera lour<strong>de</strong> à personne. Il rési<strong>de</strong>ra autant et aussi souvent quʹil pourra près <strong>de</strong><br />

vous; vous avez besoin dʹêtre ensemble pour être un peu forts, cependant vos moments <strong>de</strong><br />

vie commune seront encore moins constants que je ne le voudrais. Tâchez <strong>de</strong> ne pas vous<br />

départir <strong>de</strong> lʹexactitu<strong>de</strong> à vos exercices autant que vous le pourrez.<br />

Je mʹarrête ici, ne voulant pas retar<strong>de</strong>r M. <strong>Jean</strong>‐Marie dont les heures, ou plutôt les<br />

instants sont comptés. Je vous embrasse, vous et M. Charrin, bien tendrement en N.S.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je vous félicite du mariage <strong>de</strong> votre chère sœur; jʹirai à la cérémonie, si je le puis.<br />

1301 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Difficultés dʹun mouvement <strong>de</strong> personnel. Déplacements <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax. Tableau réaliste <strong>de</strong> la situation <strong>de</strong> la<br />

Communauté: nous sommes ʺdans les chaînesʺ. Prendre soin <strong>de</strong>s santés.<br />

Vaugirard, 15 mai 1868<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je ne vois pas en ce moment la possibilité <strong>de</strong> faire aucun changement utile pour<br />

vous dans votre personnel dʹAmiens; lʹenvoi, je ne sais encore pour combien <strong>de</strong> temps, <strong>de</strong><br />

1266


M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] à Rome, lʹobligation assurée <strong>de</strong> lui donner prochainement un<br />

ai<strong>de</strong> pour la mission quʹon lui confie nous créent déjà <strong>de</strong> sérieuses difficultés; nous ne<br />

pouvons remuer un <strong>de</strong>s pions du damier sans faire tout <strong>de</strong> suite <strong>de</strong>s vi<strong>de</strong>s qui nous lais‐<br />

sent à découvert et sans aucune défense possible; vous me faites trembler en énumérant<br />

tous ces noms dont pas un ne peut bouger sans faire crouler son œuvre; vous nʹavez pas<br />

une juste idée <strong>de</strong> notre pénurie et <strong>de</strong> lʹinsuffisance <strong>de</strong> notre milice pour gar<strong>de</strong>r les 12 pos‐<br />

tes, si ce nʹest plus, que nous <strong>de</strong>vons tenir en état au moins supportable. Ne remuez guère<br />

en ce moment, <strong>de</strong> peur que tout ne sʹabîme. Rappelez‐vous bien aussi que, pour lʹétablis‐<br />

sement <strong>de</strong> lʹorphelinat à S t ‐Jacques, je nʹaperçois rien que nous puissions faire pour y<br />

concourir; la pensée est bonne, je crois, mais pour lʹheure opportune à sa réalisation, je nʹy<br />

vois absolument quʹune parfaite obscurité.<br />

Pour lʹexcursion à Montcoy, elle nʹest pas dans les conditions <strong>de</strong> vraie nécessité pré‐<br />

vue par notre règle, et elle serait trop rapprochée <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux fêtes <strong>de</strong> lʹAscension et <strong>de</strong> la<br />

Pentecôte pour ne pas leur porter préjudice; mais vous pouvez y voir, sachant mieux les<br />

choses, <strong>de</strong>s convenances graves que je nʹaperçois pas, cʹest pourquoi jʹai laissé la décision à<br />

votre arbitre et à celui <strong>de</strong> M. Caille. Si vous vous arrêtez à la négative, ayez soin <strong>de</strong> moti‐<br />

ver, près <strong>de</strong> votre bonne mère et <strong>de</strong> votre belle‐sœur, assez précisément vos motifs pour<br />

quʹelles en perçoivent lʹévi<strong>de</strong>nce et ne nous accusent point <strong>de</strong> mauvais vouloir.<br />

M. Tulasne est attendu dans le cours <strong>de</strong> la semaine qui va sʹouvrir; dès son arrivée,<br />

je le consulterai concernant les eaux.<br />

Je ne vois pas la moindre possibilité <strong>de</strong> vous envoyer un prêtre pendant le séjour<br />

que vous ferez aux eaux, nous en empruntons nous‐mêmes constamment; S t ‐Charles, le<br />

Cercle sont ainsi en dépendance, Grenelle nʹa que la moitié <strong>de</strong> M. Lantiez; je ne puis faire<br />

la moindre absence, quelque infirme que je sois pour le service ecclésiastique, sans créer<br />

une souffrance à Chaville ou ailleurs; nous sommes tous rivés à notre muraille sans un<br />

mouvement possible; nous pourrions, comme S t Paul, dater nos lettres: dans les chaînes,<br />

chaînes bénies puisque nous les portons pour Dieu. Il est vrai que notre confiance (Dieu ne<br />

voudra pas quʹelle soit impru<strong>de</strong>nte) en est aussi la cause. M. <strong>de</strong> Bretenières pourrait bien<br />

au moins pour la durée <strong>de</strong>s eaux, sʹenchaîner à votre place: <strong>de</strong> telles actions sont exaltées<br />

dans la vie <strong>de</strong>s saints.<br />

Jʹai averti M. Henry [Piquet] <strong>de</strong> la solution négative pour les chan<strong>de</strong>liers, ses longs<br />

retards ne méritaient pas mieux; je crois quʹil y a eu impuissance dʹagir autrement pour lui<br />

dans la presse où il sʹest trouvé.<br />

Tâchez dʹarranger lʹaffaire pour M. Trousseau; nous donnerons telle garantie quʹon<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>ra pour le titre clérical. Soignez votre jeune Gérold, je crois sa constitution déli‐<br />

cate; les dysenteries viennent presque invariablement dʹéchauffements ou bien <strong>de</strong> refroi‐<br />

dissements qui font refluer le sang aux entrailles; dans les <strong>de</strong>ux cas, régime doux; dans le<br />

second, chaleur et détente.<br />

Je commençais à écrire à M. Trousseau, mais mes ff. arrivent pour les directions; as‐<br />

surez bien ce bon ami que sa lettre mʹa fort touché; ses sentiments sont tels quʹils plairont à<br />

Dieu et donneront consolation à tous ceux qui lʹaiment, particulièrement à moi, son vieil<br />

ami et Père en N.S. Embrassez‐le, et tous les autres aussi, pour moi et croyez vous‐même à<br />

ma tendre affection. Nous attendons la visite <strong>de</strong> M. Caille.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en J.M.J.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1267


1302 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Démarche auprès <strong>de</strong> lʹévêque dʹAmiens, en faveur <strong>de</strong> M. Trousseau.<br />

Vaugirard, 16 mai 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je pense, comme vous, quʹinsister auprès <strong>de</strong> Mgr dʹAmiens est le mieux avant tout,<br />

en déclarant, comme vous le disait ma lettre dʹhier, que nous constituerons, soit comme<br />

Communauté, soit particulièrement, tel titre clérical que Mgr désirera. Il est bien tard pour<br />

agir dʹun autre côté; je crois quʹà Paris, où M. Trousseau est absolument inconnu, ce serait<br />

chose inutile. Ne faut‐il pas que les diocèses qui profitent si gratuitement <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong>s<br />

religieux leur soient un peu secourables?<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je vous renvoie le projet <strong>de</strong> lettre, afin que vous nʹayez quʹà transcrire, sauf ce qui<br />

concerne le titre clérical à ajouter.<br />

1303 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Toujours les démarches <strong>avec</strong> lʹEvêché au sujet <strong>de</strong> M. Trousseau. Garantie morale donnée par lʹInstitut. Il faut<br />

modérer le zèle <strong>de</strong> M. Caille.<br />

Chaville, 23 mai 1868<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Il serait bien préférable que lʹEvêché se contentât <strong>de</strong> la promesse régulière <strong>de</strong> M.<br />

Trousseau <strong>de</strong> ne point aliéner son héritage et que la Congrégation nʹeût pas à sʹengager<br />

elle‐même. Outre quʹun pareil lien serait une sorte <strong>de</strong> titre pour un sujet contre sa Congré‐<br />

gation en cas <strong>de</strong> discor<strong>de</strong>, celle‐ci se trouverait bientôt privée <strong>de</strong> toute liberté à lʹégard <strong>de</strong><br />

ses possessions si elle <strong>de</strong>vait successivement prendre plusieurs obligations semblables<br />

concernant les membres qui lui appartiennent; nous <strong>de</strong>vons donc faire tout ce que nous<br />

pourrons pour les éviter et nʹy adhérer quʹà toute extrémité; je crois que lʹEvêché bienveil‐<br />

lant comprendrait cette difficulté et se contenterait, <strong>avec</strong> lʹengagement <strong>de</strong> M. Trousseau,<br />

<strong>de</strong> notre garantie morale.<br />

Priez <strong>de</strong> ma part M. Caille <strong>de</strong> ne rien avancer pour la reconnaissance <strong>de</strong> la Maison<br />

rue <strong>de</strong> Noyon avant que jʹaie pu consulter le Conseil et lui faire connaître son sentiment<br />

touchant ce projet. Je crois quʹil ferait sagement dʹaller <strong>avec</strong> pru<strong>de</strong>nce et réflexion, même<br />

pour la rue St ‐Jacques.<br />

Adieu, bien cher ami, mille affections à vous tous; je ne retar<strong>de</strong> pas, par plus dʹex‐<br />

tension <strong>de</strong> cette lettre, son départ au courrier <strong>de</strong> ce soir.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1304 à M. dʹArbois<br />

Admission du frère Boiry dans le diocèse dʹAngers.<br />

Paris, 1 er juin [1868]<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie ci‐joint la lettre que jʹécris, comme vous le trouvez nécessaire, à M gr<br />

pour lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r dʹadmettre M. Boiry dans son diocèse. Je ne sais si, eu égard à la<br />

1268


connaissance que vous avez <strong>de</strong>s êtres à Angers, vous jugerez quʹelle est telle quʹelle doit<br />

être; sinon, je vous autorise à la modifier et, après lʹavoir fait copier par un <strong>de</strong> nos frères, à<br />

y mettre ma signature que vous imiterez; le temps ne permettrait pas <strong>de</strong> faire autrement.<br />

On mʹa écrit dʹOrléans quʹon avait envoyé lʹexeat <strong>de</strong> M. Boiry à Angers; je ne vois<br />

pas, pour la tonsure, quelle autre pièce serait à produire.<br />

Nous prierons pour votre première communion; vous prierez à votre tour pour<br />

celle <strong>de</strong> Vaugirard, fixée au 25 <strong>de</strong> ce mois.<br />

Mille affections à nos frères et à vous <strong>de</strong> tous et <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père dévoué en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Ceux <strong>de</strong> Rome vont bien, leur œuvre aussi.<br />

1304‐1 à M gr Angebault<br />

Deman<strong>de</strong> dʹincorporation au diocèse dʹAngers pour le frère Boiry.<br />

Vaugirard, 1er juin 1868<br />

Monseigneur,<br />

Vous avez eu la bonté <strong>de</strong> promettre à M. dʹArbois que, conformément à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />

que jʹai eu lʹhonneur <strong>de</strong> vous adresser, vous voudriez bien donner la tonsure, à lʹordina‐<br />

tion <strong>de</strong> la Trinité, à notre jeune philosophe M. Boiry, qui est attaché au service <strong>de</strong> votre<br />

maîtrise.<br />

Jʹavais <strong>de</strong>mandé à Mgr lʹEvêque dʹOrléans, dans le diocèse duquel il est né, <strong>de</strong> lui ac‐<br />

cor<strong>de</strong>r un dimissoire selon lʹusage; mais Mgr Dupanloup paraît avoir envoyé à votre secré‐<br />

tariat, ainsi que mʹen informe un <strong>de</strong> ses Vicaires généraux, un exeat pour la raison que, ne<br />

suivant pas <strong>de</strong>s yeux les étu<strong>de</strong>s théologiques <strong>de</strong> ce jeune homme, il préfère lui laisser liber‐<br />

té <strong>de</strong> sʹattacher à tel diocèse ou congrégation quʹil voudra choisir.<br />

Notre Congrégation nʹétant pas canoniquement approuvée, ne peut le dispenser<br />

dʹêtre incorporé à un diocèse quel quʹil soit; je viens donc vous prier, Monseigneur, <strong>de</strong><br />

vouloir bien lʹattacher au vôtre, sous la réserve quʹil fera dans les conditions régulières ses<br />

étu<strong>de</strong>s théologiques à Angers et sera soumis à votre juridiction comme tous les religieux<br />

dont les constitutions ne sont pas approuvées par la Cour <strong>de</strong> Rome.<br />

Jʹhésite dʹautant moins à vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r cette faveur, Monseigneur, que M. Boiry,<br />

attaché à notre Communauté <strong>de</strong>puis plusieurs années déjà, a fait assez ses preuves pour<br />

que nous puissions répondre <strong>de</strong> lui et vous assurer quʹil sera digne <strong>de</strong> la protection que<br />

vous daignerez lui accor<strong>de</strong>r. Si nous avions à fournir pour son avenir temporel quelques<br />

garanties, nous nous conformerions aux dispositions que vous croiriez <strong>de</strong>voir nous indi‐<br />

quer.<br />

Toute notre petite famille sʹunit à moi, Monseigneur, pour vous offrir son hommage<br />

bien respectueux; veuillez lʹagréer ainsi que le profond dévouement <strong>de</strong><br />

Votre humble serviteur et fils en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1269


1305 à M. Tourniquet<br />

Etablir la vie régulière à la maison <strong>de</strong> Rome. Incertitu<strong>de</strong> sur une vocation. Nouvelles du patronage St‐Charles.<br />

Chaville, 2 juin 1868<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Lantiez est à Metz et nʹa pu répondre à M. Varré; il mʹa prié <strong>de</strong> lui faire savoir<br />

quʹà son avis, le mieux serait quʹil fît sa retraite à son arrivée ici, puisquʹil nʹa pu la faire à<br />

Rome.<br />

Je suis bien en retard en mes correspondances <strong>avec</strong> mes chers frères <strong>de</strong> Rome; les<br />

très gran<strong>de</strong>s chaleurs que nous traversons ici mʹont beaucoup fatigué, me causent une<br />

contention nerveuse qui me rend le travail fort difficile et souvent impossible; je me suis<br />

ainsi trouvé en arrière pour tout.<br />

Nous avons reçu <strong>avec</strong> joie vos lettres et celles <strong>de</strong> notre f. Girard; en ensemble, elles<br />

ne nous ont apporté constamment que <strong>de</strong>s témoignages <strong>de</strong> la bonté divine à notre égard et<br />

<strong>de</strong> nouveaux sujets <strong>de</strong> reconnaissance pour nous envers Elle.<br />

Je suis particulièrement satisfait <strong>de</strong> voir que, <strong>de</strong>puis votre arrivée, la petite Com‐<br />

munauté va prendre <strong>de</strong>s exercices et <strong>de</strong>s habitu<strong>de</strong>s réguliers; il le fallait pour votre propre<br />

soutien, et aussi pour lʹédification <strong>de</strong> ceux qui vous entourent. Comment vous tiendrait‐on<br />

pour <strong>de</strong>s religieux si, nʹayant pas dʹhabit, vous nʹaviez non plus nulle régularité? Je crois<br />

quʹil serait aussi plus édifiant que vous puissiez manger chez vous et non à la salle du res‐<br />

taurant, dès que cette disposition sera praticable. Quant au règlement <strong>de</strong> vos dépenses,<br />

quʹon nʹa pas déterminé dès lʹabord afin que la pratique et <strong>de</strong>s habitu<strong>de</strong>s déjà assises indi‐<br />

quassent quel il <strong>de</strong>vait être, vous ferez bien dʹen préparer les éléments, en tenant note <strong>de</strong><br />

tout ce qui vous est ordinairement nécessaire; <strong>avec</strong> le relevé <strong>de</strong> ces notes, on tâchera <strong>de</strong><br />

proposer un chiffre aussi modéré quʹil se pourra.<br />

Il vous serait difficile, dans lʹétat présent, <strong>de</strong> faire préparer votre nourriture autre‐<br />

ment que par le restaurant; mais ne pourrait‐on en réduire la dépense <strong>de</strong> manière à ne pas<br />

dépasser le chiffre <strong>de</strong>s frais <strong>de</strong> nourriture pour chaque frère à Nazareth ou ailleurs? Exa‐<br />

minez ce point; vous <strong>de</strong>vez pourvoir à ce qui est nécessaire, mais dans les conditions les<br />

moins dispendieuses quʹil se pourra.<br />

Je ne sais pas bien que répondre à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> M. Vion; cʹest un excellent enfant,<br />

plein <strong>de</strong> cœur, mais en même temps dʹune telle mobilité dʹesprit quʹil gar<strong>de</strong> rarement, du‐<br />

rant plusieurs jours <strong>de</strong> suite, la même résolution touchant son avenir. Pourrait‐il, sʹil restait<br />

<strong>avec</strong> vous, tenir lieu du frère dont vous réclamez la présence? Sinon, on ne voit pas quʹil<br />

convînt dʹavoir cinq frères, puisquʹon a jusquʹici pensé que quatre au plus suffiraient.<br />

Les affaires <strong>de</strong> S t ‐Charles, dont vous vous occupez en pensée et surtout <strong>de</strong>vant<br />

Dieu, se soutiennent assez bien jusquʹici; MM. Gresser, Bion, le jeune ingénieur et M. Pra‐<br />

dine, <strong>avec</strong> M. lʹabbé Girodon, y travaillent très courageusement. Hier, lundi <strong>de</strong> Pentecôte,<br />

était une journée difficile; ils sont venus à Chaville; ils ont été assez contents <strong>de</strong> leur<br />

mon<strong>de</strong> et tout paraît sʹêtre assez bien passé, M. Guillot va fidèlement les ai<strong>de</strong>r aux jours<br />

marqués, le dimanche particulièrement; il a aussi surveillé toute la semaine ceux <strong>de</strong> la<br />

première communion.<br />

Adieu, mon bien cher enfant; je vais écrire quelques lignes ci‐contre pour M. Girard,<br />

si je ne suis pas dérangé avant lʹheure <strong>de</strong> la poste. Je vous embrasse tous bien affectueuse‐<br />

ment.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

1270


1306 à M. Girard<br />

Quelques directives écrites à la suite <strong>de</strong> la lettre 1305. Comment présumer une permission <strong>de</strong>s Supérieurs. Affec‐<br />

tions au frère Charrin mais lʹinciter à écrire.<br />

[2 juin 1868]<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai dit ci‐contre à M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] les malaises <strong>de</strong> santé qui mʹont, ces<br />

temps <strong>de</strong>rniers, empêché dʹécrire à vous et aux autres <strong>avec</strong> lʹempressement que jʹaurais été<br />

porté à y mettre; le temps me manquera pour mʹentretenir aujourdʹhui à loisir <strong>avec</strong> vous,<br />

et <strong>de</strong> la petite Communauté <strong>de</strong> Rome, et <strong>de</strong> vos œuvres. Grâces à Dieu qui prend en misé‐<br />

ricor<strong>de</strong> notre insuffisance, vous arrivez à reprendre la régularité <strong>de</strong>s exercices et, dʹune au‐<br />

tre part, la fondation <strong>de</strong>s Cercles prend bonne figure.<br />

Au point <strong>de</strong> vue religieux, il eût été mieux <strong>de</strong> vous conformer aux instructions que<br />

nous avions transmises, et sans doute un peu <strong>de</strong> délai nʹeût rien compromis dans lʹintérêt<br />

réel <strong>de</strong>s œuvres; à moins <strong>de</strong> nécessité évi<strong>de</strong>nte, préférez, en général, lʹobéissance aux vues<br />

que suggèrent dʹailleurs les circonstances; je dis, en général, parce quʹen certains cas, après<br />

avoir prié et sʹêtre recueilli <strong>de</strong>vant Dieu, on peut présumer le sentiment <strong>de</strong>s Supérieurs et<br />

agir comme on croit quʹils le voudraient sʹils avaient la vue <strong>de</strong>s choses; cʹest ainsi, jʹaime à<br />

le penser, que vous avez voulu faire dans les faits qui intéressaient le Cercle <strong>de</strong>s Zouaves.<br />

La lettre si attachante <strong>de</strong> M. Vrignault et vos propres explications semblent bien lʹindiquer;<br />

les résultats obtenus semblent, en définitive, satisfaisants; espérons que Dieu est content.<br />

Faites tous vos efforts pour soutenir <strong>avec</strong> M. Charrin le bien qui paraît promis par les bons<br />

commencements <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux fondations.<br />

Jʹai assisté, <strong>avec</strong> M. Vasseur et autres, au mariage <strong>de</strong> votre chère sœur et jʹai pu lui<br />

donner <strong>de</strong> vos nouvelles, ayant reçu la veille une lettre <strong>de</strong> vous. Les amis étaient très nom‐<br />

breux, lʹassemblée semblait fort sympathique et toute votre famille paraissait heureuse.<br />

Dieu fait vos affaires, faites bien les siennes.<br />

Adieu, mon bien cher ami et fils en N.S., soutenons‐nous par la piété; notre unique<br />

et vraie force est là.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je ne finirai pas sans un mot dʹaffection pour notre f. Charrin, bien que nous soyons<br />

tous mécontents <strong>de</strong> son silence si persistant; il ne doit pas sʹannuler ainsi, ce serait un dé‐<br />

triment pour lui et pour les œuvres dont il sʹoccupe. Il faut quʹil surmonte sa répugnance à<br />

écrire et reste en correspondance <strong>avec</strong> moi; il doit mʹécrire <strong>de</strong> temps en temps, la règle<br />

lʹexige, mon affection le <strong>de</strong>man<strong>de</strong> et son attachement à la famille religieuse sʹaffaiblirait sʹil<br />

ne se rendait à ces instances. Jʹattends une lettre <strong>de</strong> lui.<br />

Je joins ici une lettre <strong>de</strong>s enfants <strong>de</strong> S t ‐<strong>Jean</strong>; il faut aussi quʹil y répon<strong>de</strong>. Obligez‐le à<br />

lutter constamment contre un peu <strong>de</strong> mollesse <strong>de</strong> volonté qui est son défaut dominant et<br />

qui nuirait à ses bonnes et cordiales qualités.<br />

Je lʹembrasse nonobstant et suis <strong>avec</strong> un tendre attachement en N.S.<br />

Son ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1271


1307 à M. Girard<br />

Inconvénients <strong>de</strong> sʹinstaller Villa Strozzi. Instantes recommandations: sauvegar<strong>de</strong>r les exercices communs,<br />

prendre le repos nécessité par le climat; prendre les repas en communauté; ne pas avoir lʹair <strong>de</strong> simples séculiers.<br />

Paris, 9 juin 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Une lettre que M. Paillé a écrite ces jours <strong>de</strong>rniers à M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet]<br />

vous a déjà dit notre pensée relativement au projet dʹinstallation <strong>de</strong> votre petite commu‐<br />

nauté à la Villa Strozzi, dans son ensemble. Outre lʹavantage quʹil y a pour vous à trouver<br />

en cette <strong>de</strong>meure un logement plus sain, mieux aéré et plus paisible quʹau Palais Mariscot‐<br />

ti408 , il semble <strong>de</strong> toute nécessité quʹétant si peu nombreux, vous ne viviez pas séparés; au‐<br />

trement, aucun exercice commun, aucune entente entre vous, aucun acte, en un mot, dʹune<br />

existence religieuse ne serait, à vrai dire, possible; vous ne tar<strong>de</strong>riez pas à sentir le poids<br />

<strong>de</strong> votre isolement. M. Vrignault assure que, par abonnement, vous pouvez vous faire<br />

conduire chaque soir en voiture; ce moyen simple et, en somme, pas bien onéreux (50 ou<br />

30 centimes) vous épargnera la fatigue et vous donnera lʹavantage dʹêtre réunis le matin<br />

pour les exercices principaux, et le soir pour la clôture <strong>de</strong> la journée.<br />

Jʹécris, à Nazareth, interrompu par les allants et venants; vous vous en apercevrez<br />

aux redites dans lesquelles je me laisse aller409 .<br />

Tout le Conseil <strong>de</strong> la Communauté insiste pour que les Cercles soient fermés <strong>de</strong>ux<br />

ou trois heures chaque jour et que vous preniez un peu <strong>de</strong> repos et <strong>de</strong> calme durant ce<br />

temps, comme le <strong>de</strong>man<strong>de</strong> la température dʹItalie. Donnez‐nous donc, dans votre pro‐<br />

chaine lettre, lʹassurance que vous suivez cet avis; vous êtes tous fatigués, un peu <strong>de</strong> dé‐<br />

tente vous doit être nécessaire.<br />

M. Maignen mʹa paru aujourdʹhui un peu contristé <strong>de</strong>s oppositions que vous avez<br />

rencontrées dans les Prési<strong>de</strong>nts et Vice‐Prési<strong>de</strong>nts; nous avions prévu ces difficultés et<br />

nous avions désiré les prévenir en ne mettant pas lʹinfluence <strong>de</strong> dignitaires semblables en<br />

présence <strong>de</strong> lʹautorité ordinaire qui doit rési<strong>de</strong>r dans la personne du directeur <strong>de</strong> Cercle; il<br />

faudra, si on le peut, éviter cet obstacle au Cercle <strong>de</strong> la Légion Romaine; autrement, votre<br />

position pourrait être compromise. Il faut bien attendre un peu pour la chapelle, puisque<br />

les choses ne sʹarrangent pas dʹelles‐mêmes, peut‐être aura‐t‐on plus <strong>de</strong> facilité à la Légion<br />

Romaine.<br />

M. Maignen sʹoccupe <strong>de</strong>s envois que vous lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z.<br />

Le rapport <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Lagrange410 a‐t‐il été imprimé? Je nʹen ai pas entendu parler.<br />

M. Keller est maintenant loin <strong>de</strong> Paris pour toute la saison dʹété; nos rapports <strong>avec</strong><br />

lui <strong>de</strong>viennent difficiles et ceux qui le suppléent ici, bien moins autorisés, naturellement<br />

seront bien plus timi<strong>de</strong>s à faire droit aux <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s; modérez‐les <strong>de</strong> votre mieux pour<br />

cette raison et pour que nous nʹayons pas <strong>de</strong> refus contristants.<br />

M. Maignen attendait, je crois, <strong>de</strong>s comptes que vous <strong>de</strong>viez lui envoyer pour M.<br />

Keller.<br />

408 La Villa Strozzi, siège du Cercle <strong>de</strong> la Légion Romaine, était située près <strong>de</strong> l’actuelle gare Termini et <strong>de</strong>s thermes <strong>de</strong> Dioclétien,<br />

quartier alors presqu’inhabité. Le Palais Mariscotti, siège du Cercle <strong>de</strong>s Zouaves pontificaux, était situé au centre <strong>de</strong> Rome, place<br />

<strong>de</strong> la Pigna, près <strong>de</strong> l’église Ste-Marie <strong>de</strong> la Minerve.<br />

409 Deux lignes en fin du paragraphe précé<strong>de</strong>nt sont rayées, en effet.<br />

410 M. <strong>de</strong> Lagrange, officier aux zouaves pontificaux fut tué à la guerre <strong>de</strong> 1870, (bataille <strong>de</strong> Loigny, 2 déc.). Il avait fait un rapport à<br />

la séance inaugurale du Cercle.<br />

1272


La gare Termini au 19 è siècle<br />

Vous ne mʹavez pas dit si vous pourriez, comme je le <strong>de</strong>mandais, prendre vos repas<br />

chez vous plutôt quʹau restaurant; vous pourriez avoir ainsi plus dʹintimité et, dans les re‐<br />

pas communs, faire au moins quelques instants <strong>de</strong> lecture; ne négligez pas, je ne saurais<br />

trop vous le dire, les pratiques <strong>de</strong> la vie commune, vous apprendriez à vos dépens quʹelles<br />

vous sont indispensables. Il importe aussi à la Communauté, dans son ensemble, que vous<br />

ne sembliez pas absolument <strong>de</strong> simples séculiers.<br />

Adieu, mon bien cher ami; nous pensons beaucoup à vous tous ici, vos lettres sont<br />

impatiemment attendues et nous communiquons à tous, sinon textuellement, au moins en<br />

substance, tout ce qui peut intéresser la famille; nous prions surtout fidèlement tous les<br />

soirs pour les ff. absents et, à ce mot, tous les esprits font un saut jusquʹà Rome; pour moi,<br />

cʹest bien <strong>de</strong>s fois par jour.<br />

Je vous embrasse tous en N.S. bien affectueusement.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1307‐1 à M gr Angebault<br />

Gratitu<strong>de</strong> témoignée à Mgr Angebault qui a donné la tonsure au frère Boiry.<br />

Vaugirard, 11 juin 1868<br />

Monseigneur,<br />

M. dʹArbois mʹinforme quʹ<strong>avec</strong> votre con<strong>de</strong>scendance ordinaire, vous avez bien<br />

voulu donner la tonsure à M. Boiry bien que lʹexeat envoyé pour lui dʹOrléans paraisse<br />

nʹêtre pas arrivé à Angers.<br />

Je viens au nom <strong>de</strong> notre petite famille, Monseigneur, vous remercier <strong>de</strong> ce nouveau<br />

témoignage du paternel et si constant intérêt que vous daignez nous accor<strong>de</strong>r.<br />

Jʹécris aujourdʹhui même à Orléans afin <strong>de</strong> savoir la date précise <strong>de</strong> lʹenvoi qui au‐<br />

rait été fait <strong>de</strong> lʹexeat en question afin quʹà lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> ce renseignement on puisse plus aisé‐<br />

ment le rechercher, sʹil y a lieu, au secrétariat <strong>de</strong> votre Evêché.<br />

1273


Veuillez agréer, Monseigneur, le profond respect <strong>de</strong> toute notre famille religieuse et<br />

les sentiments <strong>de</strong> tendre dévouement <strong>avec</strong> lesquels je suis<br />

Votre humble serviteur et fils en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong> prêtre<br />

1308 <strong>de</strong> M. Nominé à M. Risse<br />

P. S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

A la suite dʹune lettre où un jeune frère <strong>de</strong> Metz exprime sa reconnaissance à M. Risse, MLP. ajoute quelques<br />

mots <strong>de</strong> bienveillance.<br />

Chaville, le 13 juin 1868<br />

Mon très cher Père,<br />

Depuis longtemps, je désire vous donner <strong>de</strong> mes nouvelles et en avoir <strong>de</strong>s vôtres, mais je<br />

nʹai pas osé exprimer ce désir à mes Supérieurs; aujourdʹhui, jʹai pris le cœur dans la main et jʹai<br />

<strong>de</strong>mandé à mon Directeur, le bon M. Faÿ, la permission <strong>de</strong> vous écrire; et il ne me lʹa pas seule‐<br />

ment permis, mais il mʹa autorisé. Je suis toujours en parfaite santé, et jʹespère que la présente vous<br />

trouvera <strong>de</strong> même.<br />

Je vous remercie du petit avis que vous mʹavez donné dans votre <strong>de</strong>rnière lettre, et je vous<br />

prie humblement <strong>de</strong> mʹen donner encore dʹautres, car il me semble que mes Supérieurs me trou‐<br />

vent, ou trop délicat et ils craignent <strong>de</strong> me faire <strong>de</strong> la peine, ou trop méchant et ils nʹosent pas me<br />

répriman<strong>de</strong>r comme ils le voudraient.<br />

Je vous remercie également du compte rendu que vous mʹavez envoyé; il est cependant<br />

bien tard, mais il vaut mieux tard que jamais. Vous croyez sans doute que je vous ai oublié, parce<br />

que je ne vous ai pas écrit <strong>de</strong>puis si longtemps; ce serait une ingratitu<strong>de</strong> si jʹoubliais celui qui a tant<br />

fait pour moi, aussi je ne vous oublierai jamais.<br />

Vous avez dû avoir <strong>de</strong> la peine en apprenant que plusieurs <strong>de</strong> ceux que vous avez envoyés<br />

au même endroit où je suis nʹy sont pas restés; moi aussi, jʹen étais attristé, mais ne nous désolons<br />

pas, mon cher Père, espérons que le bon Dieu vous en enverra dʹautres qui seront plus fermes.<br />

Jʹespère que le cher M. Bouquet le sera aussi, car je lʹai toujours connu pour un jeune homme qui<br />

réfléchit avant dʹagir.<br />

Quant à moi, je ne pense plus à autre chose que <strong>de</strong> vivre et mourir dans la Communauté,<br />

nʹimporte dans quel lieu, pourvu que ce soit dans le sein <strong>de</strong> la Communauté. La seule chose qui<br />

pourrait me retirer <strong>de</strong> la Communauté serait un cas <strong>de</strong> renvoi, et jʹespère que le bon Dieu me pré‐<br />

servera dʹun tel malheur.<br />

Jʹai eu lʹhonneur <strong>de</strong> connaître M. Lucien [Jacquart] pendant la <strong>de</strong>rnière retraite, cela mʹa fait<br />

grand plaisir. Pas autre chose dʹimportant à vous dire, mes Supérieurs et mes Frères se portent<br />

bien, ainsi que le cher petit Herlicq, et se réjouissent <strong>de</strong> vous voir dans quelques mois.<br />

Je termine en vous priant dʹagréer lʹassurance <strong>de</strong>s sentiments les plus affectueux <strong>de</strong><br />

Votre très humble et soumis enfant<br />

Nominé Pierre<br />

A.M.D.G.<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Lantiez nous a rapporté <strong>de</strong> vos nouvelles et <strong>de</strong> celles <strong>de</strong> votre chère maison; il<br />

est revenu content, comme <strong>de</strong> coutume, du bien que vous faites et <strong>de</strong> celui que vous dési‐<br />

rez faire; il vous a trouvés tous.[….]<br />

1274


1309 à M. dʹArbois<br />

Situation <strong>de</strong>s frères séminaristes par rapport à lʹEvêque du diocèse. Difficultés qui peuvent en résulter pour les<br />

communautés religieuses. Lʹexeat du frère Boiry.<br />

Chaville, 17 juin 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous prie <strong>de</strong> mettre sous enveloppe la lettre ci‐jointe et <strong>de</strong> lʹenvoyer à Mgr dʹAn‐<br />

gers; vous pouvez la lire, elle regar<strong>de</strong> les affaires <strong>de</strong> M. Boiry.<br />

Mgr veut bien lʹadmettre dans son diocèse et se contentera, je crois, dʹune simple dé‐<br />

claration analogue à la formule que jʹenvoie pour la renonciation aux appuis du diocèse.<br />

Pour les étu<strong>de</strong>s, je ne verrais pas dʹinconvénient à ce quʹil entrât au séminaire dʹAn‐<br />

gers si, comme vous me lʹavez dit, on peut espérer <strong>de</strong>s conditions pécuniaires peu onéreu‐<br />

ses. Croyez‐vous que M. Boiry ne souffrît pas dʹune vie toute sé<strong>de</strong>ntaire? Serait‐ce la théo‐<br />

logie quʹil commencerait? Pourrait‐il se dispenser dʹune nouvelle année <strong>de</strong> philosophie? A‐<br />

t‐il continué à étudier cette <strong>de</strong>rnière matière dʹune façon suivie et utile?<br />

Nous avions fait à Mgr <strong>de</strong> Versailles [Mgr Mabille] la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> dʹenvoyer comme ex‐<br />

ternes nos sujets aux cours <strong>de</strong> son séminaire; cette <strong>de</strong>man<strong>de</strong> nʹa pas eu encore <strong>de</strong> solution<br />

et, en tout cas, elle ne serait guère applicable à M. Boiry que Mgr veut bien agréger au dio‐<br />

cèse dʹAngers; cette faveur ne semble‐t‐elle pas impliquer lʹobligation dʹétudier dans le<br />

diocèse? Je nʹen sais rien. Je ne sais pas si, en tout cas, Mgr <strong>de</strong> Versailles voudrait ordonner<br />

nos sujets, ni surtout sʹil les inscrirait comme incorporés à son diocèse; il nous connaît en‐<br />

core fort peu, il est bien douteux quʹil consentît à nous rendre <strong>de</strong> tels services.<br />

Un jeune homme [M. Cesbron] qui vous a connu au Cercle Montparnasse où il a ré‐<br />

sidé 6 mois en 1864 et qui va se marier à Montjean, près dʹAngers, mʹécrit pour me <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>r que vous alliez à son mariage; je vais lui répondre que vous jugerez vous‐même si<br />

la chose vous est possible et conciliable <strong>avec</strong> vos occupations; ces <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s peuvent <strong>de</strong>‐<br />

venir fréquentes, cependant voyez <strong>de</strong> quel intérêt il peut être pour le bien quʹon y donne<br />

consentement; jʹapprouve volontiers la présence au mariage, jʹai peu dʹattrait pour les fes‐<br />

tins <strong>de</strong> noces.<br />

Jʹai reçu <strong>de</strong> M. Rabotin, Vicaire Général dʹOrléans, une nouvelle et formelle assu‐<br />

rance que lʹexeat <strong>de</strong> M. Boiry a été envoyé en mai (je nʹai pas sa lettre ici pour vous donner<br />

le jour précis, je vous le dirai sʹil le faut), mais il paraîtrait sûr que cette pièce a été reçue à<br />

lʹEvêché dʹAngers; priez ces Messieurs <strong>de</strong> la rechercher.<br />

Je nʹai plus <strong>de</strong> place pour rien ajouter, sinon mes tendres affections pour vous tous.<br />

La vente est‐elle finie, êtes‐vous content du résultat? Les chaleurs ne sont‐elles pas préju‐<br />

diciables à votre santé? Tout va‐t‐il à votre gré?<br />

[Votre ami et Père] [Le <strong>Prevost</strong>]<br />

1309‐1 à M gr Angebault<br />

Remerciements pour avoir accepté dʹagréger le frère Boiry à son diocèse.<br />

Chaville 17 juin 1868<br />

Monseigneur,<br />

Jʹai reçu <strong>avec</strong> une vive reconnaissance la très bonne lettre que vous mʹavez fait<br />

lʹhonneur <strong>de</strong> mʹécrire relativement à lʹagrégation à votre diocèse que vous voulez bien ac‐<br />

1275


cor<strong>de</strong>r à notre jeune f. M. Boiry, employé présentement au service <strong>de</strong> la Maîtrise <strong>de</strong> votre<br />

Cathédrale.<br />

Je trouve parfaitement justes, Monseigneur, les observations que vous me commu‐<br />

niquez sur les garanties que le diocèse est en droit <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à M. Boiry puisque,<br />

sʹétant donné à notre Congrégation, il ne peut prétendre, <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> lʹadministration<br />

diocésaine, aux mêmes protections qui sont assurées aux prêtres originaires du lieu et<br />

dans les conditions ordinaires.<br />

Je joins ici la copie dʹune reconnaissance que lʹun <strong>de</strong> nos jeunes frères, placé à<br />

Amiens dans les mêmes conditions que M. Boiry à Angers, a dû souscrire en étant <strong>de</strong>rniè‐<br />

rement ordonné sous‐diacre par M gr Boudinet. Peut‐être jugeriez‐vous, Monseigneur,<br />

quʹune semblable déclaration signée par M. Boiry, pourrait dégager la responsabilité <strong>de</strong><br />

votre administration diocésaine. Sʹil en était autrement, la Congrégation y ajouterait telle<br />

garantie qui vous paraîtrait nécessaire. A Metz, M gr lʹEvêque a bien voulu se contenter<br />

aussi <strong>de</strong> la déclaration faite par ceux <strong>de</strong> nos sujets quʹil a ordonnés, quʹils renonçaient à<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r, en aucun cas, secours temporel au diocèse; je ne suis même pas sûr quʹelle leur<br />

ait été formellement <strong>de</strong>mandée, leur vœu <strong>de</strong> pauvreté et leur agrégation à notre famille re‐<br />

ligieuse dégageant déjà le diocèse <strong>de</strong> toute responsabilité réelle.<br />

Jʹattendrai vos instructions, Monseigneur, sur ce point et je mʹy conformerai <strong>avec</strong><br />

une sincère et complète soumission.<br />

Pour les étu<strong>de</strong>s théologiques à faire par M. Boiry, je crois que le mieux serait quʹil<br />

entrât comme interne au séminaire dʹAngers; je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> toutefois, Monseigneur, la<br />

permission <strong>de</strong> différer quelque peu cette décision afin que je puisse mʹassurer près du mé‐<br />

<strong>de</strong>cin si sa santé, qui a été un moment fortement éprouvée, ne souffrirait pas dʹune vie sé‐<br />

<strong>de</strong>ntaire.<br />

Veuillez agréer, Monseigneur, les assurances nouvelles du profond respect et du fi‐<br />

lial dévouement <strong>avec</strong> lesquels je suis<br />

Votre humble et obéissant serviteur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1310 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Comment gouverner <strong>de</strong>s ʺtêtes picar<strong>de</strong>sʺ. Avoir recours à la prière, ce ʺparatonnerre si merveilleuxʺ.<br />

Chaville, 17 juin 1868<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Il est bien possible que, les chaleurs extrêmes montant les têtes picar<strong>de</strong>s <strong>de</strong> vos jeu‐<br />

nes gens, têtes naturellement mal faciles à gouverner, il y ait un peu <strong>de</strong> fermentation par‐<br />

mi elles, mais vous prierez Dieu qui vous inspirera pru<strong>de</strong>nce, humilité, patience pour dé‐<br />

tourner les orages; la prière est un paratonnerre si merveilleux! Tâchez <strong>de</strong> bien poser tou‐<br />

tes choses et <strong>de</strong> disposer les esprits parmi vos ff. et parmi les jeunes gens, afin quʹen votre<br />

absence rien ne se défasse du quelque bien et progrès que vous avez pu obtenir. Si je puis<br />

(mais cʹest un si seulement), je tâcherai <strong>de</strong> dégager M. Bérard du service <strong>de</strong>s persévérants,<br />

afin <strong>de</strong> lʹéchanger contre quelquʹun <strong>de</strong> vos frères qui aurait moins dʹinitiative et dʹacquis<br />

que lui. La chose est si incertaine encore que je vous prie <strong>de</strong> nʹen rien dire quant à présent.<br />

1276


Jʹécris quelques lignes à notre f. Victor [Trousseau] et je partage la joie que vous a<br />

causée à tous sa promotion au sous‐diaconat.<br />

Je ne me souviens plus si jʹai écrit à M gr dʹAmiens pour le remercier, jʹen ai eu lʹin‐<br />

tention.<br />

Ces chaleurs me fatiguent un peu, jʹai en ce moment la mémoire comme <strong>de</strong>mi<br />

éteinte. Jʹespère vous voir le 25, vous savez que cʹest toujours <strong>avec</strong> joie. Nous nʹavons pas<br />

encore songé <strong>avec</strong> suite à vous chercher un compagnon; à plusieurs ce voyage serait utile,<br />

mais les difficultés ne manquent jamais.<br />

Adieu, bien cher ami, mille amitiés à M. Caille et à tous, croyez‐y bien particulière‐<br />

ment vous‐même.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Nous inclinons <strong>de</strong> moins en moins à faire reconnaître administrativement nos insti‐<br />

tutions; toutes choses semblent en ce moment mal posées, on a besoin <strong>de</strong> voir plus clair.<br />

1311 à M. Trousseau<br />

Conseils à un nouveau sous‐diacre. MLP. priera pour quʹil <strong>de</strong>vienne ʺun bon et saint prêtre, un enfant <strong>de</strong> St<br />

Vincent <strong>de</strong> Paul, dévoré du zèle <strong>de</strong> la Maison du Seigneurʺ.<br />

Chaville, le 17 juin 1868<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Jʹai voulu vous écrire à bien <strong>de</strong>s reprises, mais je suis si souvent sur les chemins que<br />

mes correspondances sont rarement au courant. Lors du passage si court <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax<br />

ici, jʹai commencé une épître dont les premières lignes seules ont été tracées. Pour ne pas<br />

courir pareil risque ici, je prends un petit, très petit papier, bien décidé à ne cé<strong>de</strong>r à aucune<br />

interruption.<br />

Je me réjouis cordialement <strong>avec</strong> vous, bien cher ami, et <strong>de</strong> votre examen satisfaisant,<br />

et surtout <strong>de</strong> votre promotion au sous‐diaconat; cʹest un pas décisif, cʹest une assurance<br />

<strong>de</strong>s grâces spéciales que Dieu vous a départies et <strong>de</strong> toutes celles quʹil vous prépare encore<br />

pour vous frayer la voie et, <strong>de</strong> <strong>de</strong>grés en <strong>de</strong>grés, vous conduire à ce terme bienheureux où<br />

tout ce que le Ciel peut donner à lʹhomme <strong>de</strong> grands et glorieux privilèges, <strong>de</strong> puissants<br />

moyens pour se sanctifier et sanctifier les autres vous sera conféré <strong>avec</strong> une cordiale pro‐<br />

fusion.<br />

Marchez donc <strong>avec</strong> courage, bien cher ami, continuez à vous rendre chaque jour<br />

plus digne <strong>de</strong> tant <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong>s et <strong>de</strong> faveurs. Soyez sûr que <strong>de</strong>s yeux <strong>de</strong> lʹesprit, que <strong>de</strong><br />

cœur surtout je vous suis fidèlement, priant Dieu et la Ste Vierge <strong>de</strong> toute mon âme <strong>de</strong> vous<br />

assister, afin que vous <strong>de</strong>veniez un bon, un saint prêtre, un enfant <strong>de</strong> St Vincent <strong>de</strong> Paul,<br />

plein <strong>de</strong> vertus et dévoré, comme lui, du zèle <strong>de</strong> la Maison du Seigneur. Quel bien ce sera<br />

pour notre petite famille, si insuffisante pour ses moissons spirituelles qui jaunissent au‐<br />

tour dʹelle, quand elle pourra envoyer à lʹœuvre un prêtre digne et fervent <strong>de</strong> plus! Je mʹen<br />

réjouis dʹavance, <strong>de</strong> peur <strong>de</strong> nʹêtre plus là quand le moment sera venu; ou plutôt je vais<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à Dieu <strong>de</strong> me gar<strong>de</strong>r jusquʹà ce moment sur cette terre, afin que je puisse, en ce<br />

jour <strong>de</strong> bonheur, vous embrasser et vous bénir.<br />

1277


Jʹespère que nous vous verrons quelque temps ici, après le retour <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax, et<br />

que vous pourrez prendre un peu <strong>de</strong> repos; tous nos frères le désirent <strong>avec</strong> moi et tous<br />

vous accueilleront à bras ouverts.<br />

Adieu, mon cher enfant, soyez mon interprète pour dire à nos frères tous mes sen‐<br />

timents pour eux, et croyez pour vous‐même à ma tendre affection en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1312 à M. Tourniquet<br />

Instructions pour lʹinstallation et la bonne marche <strong>de</strong> la communauté <strong>de</strong> Rome. MLP. porte attention à ce qui<br />

fait lʹordinaire <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> ses religieux.<br />

Vaugirard, 27 juin 1868<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Je bénis Dieu qui a permis que vous ne soyez pas écrasé; jʹespère quʹil a voulu vous<br />

conserver pour que vous travailliez à votre perfection et que vous fassiez un peu <strong>de</strong> bien<br />

pour sa gloire.<br />

Je vous envoie ci‐joint la rectification que M. Vrignault, <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> ceux qui<br />

fon<strong>de</strong>nt les Cercles <strong>de</strong> Rome, a réglée en ce qui concerne lʹordre et la conduite <strong>de</strong> ces œu‐<br />

vres; il faut sʹy tenir et ne pas accepter dʹautres conditions; celles‐là ont paru essentielles<br />

entre toutes, user <strong>de</strong> formes douces pour les poser, mais ne sʹen point départir.<br />

Je consulterai le Conseil <strong>de</strong> notre Communauté lundi 29 sur la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> que vous<br />

faites dʹun frère pour vous secon<strong>de</strong>r; nous avons peu <strong>de</strong> sujets capables dont on puisse<br />

disposer. Est‐ce que, parmi tous les hommes dévoués <strong>de</strong> la Légion Romaine, il nʹen est pas<br />

quelquʹun <strong>de</strong> valeur et <strong>de</strong> zèle suffisants pour se dévouer <strong>avec</strong> vous? Il ferait <strong>avec</strong> vous<br />

son postulat.<br />

Jʹinsiste beaucoup pour que MM. Girard et Charrin sʹabonnent dès ce moment à une<br />

voiture pour se rendre les soirs à la Villa Strozzi; il me semble quʹà 10h. du soir, les rues <strong>de</strong><br />

Rome ne doivent pas être bien sûres.<br />

Je crois que M. Charrin, <strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> patience, prendra position chez les Zoua‐<br />

ves; son autorité sʹétablira. On ne parle guère <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> la Commission; est‐ce quʹil<br />

ne sʹen est pas trouvé quelques‐uns dʹassez dévoués pour ai<strong>de</strong>r utilement et <strong>avec</strong> régulari‐<br />

té dans vos Cercles, comme le font chez nous MM. les membres <strong>de</strong> St ‐Vincent <strong>de</strong> Paul? Les<br />

membres <strong>de</strong> votre Conseil <strong>de</strong> semaine, <strong>de</strong> leur côté, ne peuvent‐ils vous rendre les services<br />

que les dignitaires ren<strong>de</strong>nt dans les patronages? Ces ai<strong>de</strong>s seraient bien utiles et pren‐<br />

draient doublement intérêt au succès <strong>de</strong>s Cercles.<br />

Je crois que vous <strong>de</strong>vez vous occuper dʹabord uniquement du vôtre et ajourner<br />

dʹautres soins concernant la conférence et le patronage pour ne pas trop embrasser à la<br />

fois.<br />

Je ne mʹexplique pas tous les travaux que vous entreprenez à la Villa Strozzi: plan‐<br />

chers, plafonds, etc. Cette maison est donc en ruines, et qui paiera toutes ces réparations?<br />

Est‐ce le propriétaire? Est‐ce lʹœuvre qui fon<strong>de</strong> les Cercles? Le Comité <strong>de</strong> Paris, en ce <strong>de</strong>r‐<br />

nier cas, est‐il consentant à toutes ces dépenses? Je pense que vous êtes en règle sous ce<br />

rapport.<br />

1278


Je vois <strong>avec</strong> quelque inquiétu<strong>de</strong> le projet quʹa M gr Basti<strong>de</strong> dʹétablir un sous‐<br />

aumônier à la Villa; à moins dʹêtre bien particulièrement sociable et discret, il pourra vous<br />

être bien mal commo<strong>de</strong>. Espérons que Dieu y veillera pour que le bien que nous désirons<br />

faire ne soit pas compromis. En tout cas, cet aumônier <strong>de</strong>vrait se renfermer strictement<br />

dans son action spirituelle.<br />

Je joins ici une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> que jʹadresse à Sa Sainteté Pie IX, afin dʹobtenir permission<br />

<strong>de</strong> commencer Matines et Lau<strong>de</strong>s à 2 h. toute lʹannée. Mettez‐la sous enveloppe et veuillez<br />

la remettre à M gr Nardi, en la recommandant à ses bons soins et en lui présentant mon pro‐<br />

fond respect.<br />

Adieu, bien cher ami; aujourdʹhui samedi, je suis en hâte mais je prends encore le<br />

temps <strong>de</strong> vous assurer tous <strong>de</strong> ma tendre affection et <strong>de</strong> vous redire que vous êtes toujours<br />

présents, nos cœurs et nos esprits ne cessant <strong>de</strong> vous suivre particulièrement <strong>de</strong>vant Dieu.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1313 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Projet <strong>de</strong> mouvement <strong>de</strong> personnel. Invitation à abréger son séjour en famille.<br />

Chaville, 30 juin 1868<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai proposé hier au Conseil <strong>de</strong> remplacer M. Hubert à Amiens par M. Bérard; la<br />

pensée a été acceptée, mais on y a vu cette difficulté que M. Hubert <strong>de</strong>vra, en ce cas, servir<br />

<strong>de</strong> second à M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] à Rome, lequel presse très vivement lʹenvoi <strong>de</strong><br />

lʹai<strong>de</strong> dont il a un très grand besoin. Or, je ne crois pas quʹon doive opérer la mutation pro‐<br />

jetée à Amiens avant votre retour, parce quʹil importe que M. Bérard soit, dès lʹabord, posé<br />

et bien dirigé dans son emploi; le départ <strong>de</strong> M. Hubert serait donc retardé jusquʹà votre ar‐<br />

rivée. Je ne désespère pas <strong>de</strong> faire patienter un peu M. <strong>Jean</strong>‐Marie, bien que sa situation<br />

<strong>de</strong>vienne <strong>de</strong> plus en plus difficile à cause <strong>de</strong> son isolement, mais il est vraiment nécessaire<br />

que ce malaise soit autant abrégé quʹil dépendra <strong>de</strong> nous <strong>de</strong> le faire. Je crois donc, mon<br />

bien cher ami, quʹil sera tout à fait désirable que vous ne donniez à votre absence que la<br />

durée réellement utile au bien <strong>de</strong> votre santé. Ce but à atteindre est essentiel, jʹy donne<br />

toute lʹimportance quʹil comman<strong>de</strong>, mais il sera bien <strong>de</strong> ne pas concé<strong>de</strong>r beaucoup à<br />

lʹagrément en présence, dʹune part, <strong>de</strong> la gêne où se trouve M. <strong>Jean</strong>‐Marie, et <strong>de</strong> lʹautre, du<br />

vi<strong>de</strong> que laisse si gravement à Amiens votre absence.<br />

Cʹest vous faire, nʹest‐il pas vrai, une mesure un peu stricte et prendre notre vie bien<br />

au sérieux; mais nʹest‐ce pas ainsi quʹelle sera selon Dieu et méritante pour nous? Nʹest‐ce<br />

pas ainsi également que nous lʹaimerons davantage et que nous la ferons aimer aux au‐<br />

tres? Enfin, nʹest‐ce pas ainsi que vous <strong>de</strong>viendrez un saint, et nʹest‐ce pas le désir le plus<br />

ar<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> votre cœur? Vous prendrez toutefois ceci selon lʹesprit, et non selon la lettre; as‐<br />

surez bien votre santé, la gloire <strong>de</strong> Dieu y est intéressée; prenez pour cela le temps vrai‐<br />

ment convenable et je serai content, mais <strong>de</strong>meurez autant que possible dans cette limite<br />

pour que rien ne soit en réelle souffrance. Lʹexplication est un peu longue, mais il fait bien<br />

chaud aujourdʹhui.<br />

1279


Je nʹai pas, dʹailleurs, beaucoup <strong>de</strong> choses à consigner ici; dans ce pays <strong>de</strong> Chaville,<br />

il se fait peu <strong>de</strong> nouvelles, et je nʹai pu rester hier à Nazareth que <strong>de</strong>ux ou trois heures. Le<br />

festin annuel <strong>de</strong> S t ‐Pierre, pour le Cercle <strong>de</strong> MM. les étudiants, sʹy préparait <strong>avec</strong> fracas et<br />

ne <strong>de</strong>vait, me disait‐on, sʹy accomplir, musiques et comédies comprises, quʹaux dépens<br />

dʹune partie <strong>de</strong> la nuit. Sous peine dʹinsomnie inévitable, il mʹa fallu revenir en hâte à<br />

Chaville.<br />

Tous nos ff. font <strong>de</strong>s vœux pour que vous ayez un bon voyage, et surtout pour quʹil<br />

vous donne autant <strong>de</strong> forces que vous avez <strong>de</strong> zèle et dʹamour du bien. Je sais dʹavance<br />

quʹaccompli en compagnie <strong>de</strong> votre bonne mère, il nʹôtera rien, tant sʹen faut, à votre piété;<br />

faites agréer, je vous prie, à M me <strong>de</strong> Varax mes respectueux souvenirs et croyez vous‐<br />

même, bien cher ami, à tous mes bien tendres sentiments en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Le coutumier ou annuaire pour juillet porte, outre la neuvaine préparatoire à la<br />

fête <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul, lʹindication dʹune prière spéciale <strong>de</strong>mandée par le Supérieur<br />

pour affaires importantes <strong>de</strong> la Communauté 411 : Pater, Ave, et les trois invocations: O Marie<br />

conçue etc. S t Joseph, priez etc. S t Vincent <strong>de</strong> Paul, priez etc. Ce sera un bon mémento pour<br />

votre voyage.<br />

1314 à M. dʹArbois<br />

Instructions pour lʹadmission <strong>de</strong>s frères Boiry et Cauroy au séminaire dʹAngers.C’est une contrainte que dʹen‐<br />

voyer les frères ecclésiastiques faire leurs étu<strong>de</strong>s dans <strong>de</strong>s séminaires diocésains. Nouvelles <strong>de</strong>s Cercles <strong>de</strong> Rome.<br />

Chaville, 30 juin 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je crois, comme vous, que M. Boiry ne pourrait faire son séminaire en <strong>de</strong>s condi‐<br />

tions meilleures quʹil ne les aurait à Angers; je vous prie donc <strong>de</strong> préparer son admission<br />

pour la rentrée; le consentement <strong>de</strong> Mgr est parfaitement acquis, il a eu la bonté <strong>de</strong> mʹécrire<br />

en ce sens; il ne resterait donc quʹà sʹentendre <strong>avec</strong> M. le Supérieur du séminaire. Il est ex‐<br />

trêmement désirable que vous obteniez que la pension ne dépasse pas 400f, chiffre dʹail‐<br />

leurs bien modéré, je le reconnais. Il me <strong>de</strong>vient aussi nécessaire <strong>de</strong> caser pour ses étu<strong>de</strong>s<br />

M. Cauroy, qui termine sa rhétorique et qui va entrer en philosophie. Si le prix <strong>de</strong> la pen‐<br />

sion à Angers est réellement <strong>de</strong> 400f, jʹaurais la pensée <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à Mgr dʹAngers <strong>de</strong> le<br />

recevoir également; il serait bien, près <strong>de</strong> vous, et il y aurait avantage pour ces <strong>de</strong>ux jeunes<br />

gens à se trouver ensemble pour suivre leurs étu<strong>de</strong>s.<br />

Je joins ici une lettre par laquelle je fais cette <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à Mgr dʹAngers; veuillez, sʹil y<br />

a lieu, après avoir <strong>de</strong>mandé sa réponse, négocier aussi lʹaffaire dans la même fin près <strong>de</strong><br />

M. le Supérieur, en faveur <strong>de</strong> M. Cauroy. Le Conseil a fort agréé cette combinaison.<br />

Je comprends bien que vous soyez extrêmement fatigué; nʹapercevez‐vous donc pas<br />

le moment où vous pourrez prendre un peu <strong>de</strong> repos? Chaville y est très favorable et tous<br />

ici seront heureux <strong>de</strong> vous voir.<br />

On va vous envoyer lʹannuaire pour juillet.<br />

Nos séminaristes <strong>de</strong> St‐Sulpice arriveront ici le 7 juillet; les autres viendront succes‐<br />

sivement.<br />

411 Au P.V. du Conseil du 29.06.1868 : 1° pour l’approbation <strong>de</strong> la Congrégation ; 2° pour l’entrée <strong>de</strong> plusieurs prêtres dévoués.<br />

1280


Les <strong>de</strong>ux Cercles <strong>de</strong> Rome vont bien; nous sommes obligés dʹenvoyer un quatrième<br />

frère pour secon<strong>de</strong>r M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] qui est chargé du Cercle <strong>de</strong> la Légion Ro‐<br />

maine; il était, jusquʹici, aidé par <strong>de</strong>s militaires, mais ces secours étrangers sont passagers,<br />

il ne pouvait <strong>de</strong>meurer seul indéfiniment.<br />

Priez pour ces œuvres et pour les autres, et aussi pour une intention particulière<br />

que jʹai fait recomman<strong>de</strong>r, ainsi que vous le verrez, à lʹannuaire.<br />

Mille affections à tous.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1315 à M gr Angebault<br />

Deman<strong>de</strong> pour lʹadmission du frère Cauroy au séminaire dʹAngers.<br />

Chaville, 30 juin 1868<br />

Monseigneur,<br />

Je suis infiniment reconnaissant <strong>de</strong> toutes vos bontés pour notre jeune tonsuré, M.<br />

Boiry; jʹinvite M. dʹArbois à voir M. le Supérieur du séminaire dʹAngers et à sʹentendre<br />

<strong>avec</strong> lui pour lʹadmission <strong>de</strong> ce sujet au nombre <strong>de</strong> ses élèves internes à la prochaine ren‐<br />

trée <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s.<br />

Cette faveur mʹencourage, Monseigneur, à vous en <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r une autre. Un bon<br />

jeune homme pieux, convenablement intelligent, qui fait ses étu<strong>de</strong>s près <strong>de</strong> nous à Cha‐<br />

ville <strong>de</strong>puis plusieurs années et dont la vocation est bien assurée, vient <strong>de</strong> terminer sa rhé‐<br />

torique et doit maintenant entrer en philosophie. Ne serait‐il pas bien avantageux pour lui<br />

dʹaller rejoindre à Angers M. Boiry et dʹentrer <strong>avec</strong> lui au Séminaire? Ces <strong>de</strong>ux jeunes<br />

gens, membres dès longtemps <strong>de</strong> la même famille, feraient ensemble leurs étu<strong>de</strong>s, sʹap‐<br />

puyant lʹun lʹautre; ils seraient près <strong>de</strong> notre petite communauté dʹAngers et surtout, Mon‐<br />

seigneur, ils seraient sous vos yeux, sous votre main paternelle qui les bénirait et appelle‐<br />

rait sur eux les grâces <strong>de</strong> Dieu. Cette pensée nous sourit à tous ici, et jʹai quelque espérance<br />

que vous aurez la con<strong>de</strong>scendance, Monseigneur, <strong>de</strong> ne pas la rejeter.<br />

Dans cette attente, jʹinvite M. dʹArbois à prendre votre décision et, si elle est favora‐<br />

ble, à voir en même temps M. le Supérieur du séminaire pour M. Boiry et pour M. Cauroy,<br />

le second élève dont jʹai lʹhonneur <strong>de</strong> vous entretenir ici.<br />

Je me réjouis à lʹidée que notre petite colonie angevine tendrait ainsi à sʹaccroître et<br />

à prendre racine sur le sol hospitalier qui lʹa si charitablement accueillie.<br />

Veuillez agréer, Monseigneur, les sentiments <strong>de</strong> profond respect <strong>avec</strong> lesquels je<br />

suis<br />

Votre humble et dévoué serviteur et fils<br />

Le <strong>Prevost</strong>, prêtre<br />

Dans la marge, réponse <strong>de</strong> M gr Angebault:<br />

M. Le <strong>Prevost</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pour lʹadmission au séminaire dʹun jeune homme M. Cau‐<br />

roy. Jʹai prié M. dʹArbois <strong>de</strong> parler à M. le Supérieur.<br />

1281


1316 à M. Decaux<br />

Invitation à la fête reportée <strong>de</strong> saint Vincent <strong>de</strong> Paul.<br />

Vaugirard, 10 juillet 1868<br />

Mon bien bon ami,<br />

Notre petite Communauté, ne pouvant faire la fête <strong>de</strong> St Vincent <strong>de</strong> Paul le diman‐<br />

che 19, la remettra au mardi suivant, 21 <strong>de</strong> ce mois. Nous la célébrerons comme <strong>de</strong> cou‐<br />

tume à Chaville, <strong>avec</strong> nos enfants et aussi <strong>avec</strong> quelques amis qui veulent bien sʹunir à<br />

nous; entre tous, nous avons espéré que vous seriez <strong>de</strong> ce nombre; autrement, la fête serait<br />

bien incomplète. Peut‐être que Mme Decaux, rendant visite à Mme Dauchez, nous viendrait<br />

voir aussi; ce serait une joie <strong>de</strong> plus pour tous les nôtres qui lʹhonorent et, laissez‐moi le<br />

dire, lʹaiment pour elle‐même et pour vous. Voici lʹordre <strong>de</strong> la journée:<br />

9h. Grandʹmesse<br />

Midi 1/2 dîner ou déjeuner<br />

3h. 1/2 Vêpres, petit panégyrique par M. Codant<br />

et salut <strong>–</strong> Promena<strong>de</strong><br />

6h. 1/2 Réfection du soir<br />

Si votre journée peut nous appartenir, nous en serons heureux; nous comptons bien<br />

au moins que vous nous en réserverez tout ce qui ne sera pas impérieusement pris par<br />

dʹindispensables obligations.<br />

Veuillez croire, mon bon ami, à tous mes sentiments dévoués et faites, je vous prie,<br />

agréer à Mme Decaux mon hommage respectueux.<br />

Le <strong>Prevost</strong> prêtre<br />

1317 à M. Tourniquet<br />

Organisation <strong>de</strong>s maisons <strong>de</strong> Rome.<br />

Vaugirard, 11 juillet 1868<br />

Mon bien cher fils en N.S.,<br />

M. Keller désire que lʹun <strong>de</strong> vous prenne la charge <strong>de</strong> suppléer, au moins dans<br />

quelques points essentiels <strong>de</strong> ses offices, M. Descemet, en son absence. Vous verrez <strong>avec</strong><br />

M. Girard lequel <strong>de</strong> vous <strong>de</strong>ux est mieux à portée <strong>de</strong> prendre cette charge temporaire, et<br />

vous réglerez la chose comme vous le croirez le plus utile. Dans la crainte que ce surcroît<br />

<strong>de</strong> travaux ne nuise à vos précé<strong>de</strong>nts emplois, jʹai fait <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r au bureau du Comité si<br />

on ne trouverait pas bon que vous <strong>de</strong>mandiez en ce cas un peu dʹai<strong>de</strong> à M. Brandon, habi‐<br />

tué à la comptabilité et dʹailleurs, me dit‐on, fort serviable et obligeant. On mʹa répondu af‐<br />

firmativement, remarquant toutefois quʹen ce cas, il serait toujours indispensable que vous<br />

ou M. Girard preniez bien ostensiblement position comme remplaçant officiellement M.<br />

Descemet et recevant lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> M. Brandon, parce que ce <strong>de</strong>rnier, comme simple zouave,<br />

nʹaurait pas autorité suffisante près <strong>de</strong>s autres zouaves ou militaires et rencontrerait <strong>de</strong>s<br />

difficultés que votre condition indépendante <strong>de</strong> la hiérarchie militaire vous épargnera.<br />

Nous avons remarqué aussi, M. Paillé et moi, que si vous recevez, pour les paie‐<br />

ments à faire au nom du Comité, <strong>de</strong>s fonds, il ne serait pas pru<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> les gar<strong>de</strong>r chez<br />

vous, mais que vous <strong>de</strong>vriez les déposer à la banque et vous entendre <strong>avec</strong> elle pour les<br />

reprendre à mesure <strong>de</strong>s besoins.<br />

1282


Nous nʹavons désigné encore personne pour vous secon<strong>de</strong>r; ces Messieurs du Co‐<br />

mité nous font observer que les étrangers, sʹils arrivent à Rome en cette saison <strong>de</strong> chaleurs<br />

et <strong>de</strong> fièvres, courent bien plus <strong>de</strong> risques et sʹacclimatent difficilement; ils conseillent<br />

dʹajourner un peu; tâchez donc dʹavoir quelque bon et chrétien assistant pris dans vos en‐<br />

tourages pour vous secon<strong>de</strong>r durant un peu <strong>de</strong> temps.<br />

Jʹai envoyé à M. Keller les comptes <strong>de</strong> M. Girard; tenez les vôtres bien exactement et<br />

faites le moins <strong>de</strong> dépenses que vous pourrez sans nuire au bien réel <strong>de</strong> lʹœuvre.<br />

La cloche sonne, je finis, vous embrassant, vous bénissant tous dans les Cœurs sa‐<br />

crés <strong>de</strong> J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Le p. <strong>de</strong> Boylesve prépare <strong>de</strong>s livres.<br />

1318 <strong>de</strong> M. Faÿ à M. Girard<br />

P.S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Communion fraternelle <strong>avec</strong> les frères <strong>de</strong> Rome. Deman<strong>de</strong> <strong>de</strong> nouvelles. Un autre frère sera bientôt envoyé en<br />

renfort.<br />

Paris‐Vaugirard, ce 13 juillet 1868<br />

Bien cher frère et ami en N.S.,<br />

Nous sommes dans la neuvaine préparatoire à notre fête patronale, laquelle est fixée pour<br />

cette année au mardi 21 juillet, comme toujours, à Chaville. A cette occasion, je vous rapporterai<br />

textuellement <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> notre S t Patron; nous les lisions, il y a quelques jours, au réfectoire, et<br />

jʹai eu <strong>de</strong> suite la pensée <strong>de</strong> vous les envoyer dans ma réponse. S t Vincent, dans une lettre quʹil<br />

écrivit, 30 ans après son voyage à Rome, à un Prêtre <strong>de</strong> sa Compagnie qui était comme vous, cher<br />

ami, et comme nos amis, MM. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] et Charrin, dans cette même ville <strong>de</strong> Rome,<br />

lui témoigna ʺquʹil fut si consolé <strong>de</strong> se voir en cette ville, maîtresse <strong>de</strong> la Chrétienté, où est le Chef<br />

<strong>de</strong> lʹEglise militante, où sont les corps <strong>de</strong> S t Pierre et <strong>de</strong> S t Paul et <strong>de</strong> tant dʹautres martyrs, et <strong>de</strong><br />

saints Personnages qui ont autrefois versé leur sang et employé leur vie pour Jésus‐Christ, quʹil<br />

sʹestimait heureux <strong>de</strong> marcher sur la terre où tant <strong>de</strong> grands saints avaient marché; que cette conso‐<br />

lation lʹavait attendri jusquʹaux larmes. ʺAinsi donc cher ami, vous êtes heureux comme lʹétait<br />

Monsieur Vincent, et nous le sommes tous, car il existe une si gran<strong>de</strong> union entre les membres <strong>de</strong><br />

notre famille religieuse que le bonheur <strong>de</strong> lʹun fait le bonheur <strong>de</strong> lʹautre et, dans notre petit Cha‐<br />

ville, quand nous foulons le sable <strong>de</strong> notre cour en allant <strong>de</strong> la chapelle à notre salle, et <strong>de</strong> notre<br />

salle à la chapelle, nous sommes aussi heureux que vous trois, les privilégiés <strong>de</strong> la Communauté;<br />

nous voyons par vos yeux, nous entendons par vos oreilles. Vous pensez bien, cher ami, que je<br />

nʹentends point parler ici <strong>de</strong>s merveilles artistiques que renferme la ville <strong>de</strong> Rome, tout cela ne<br />

nous touche guère, vous et nous; mais ce sont les grâces qui doivent surabon<strong>de</strong>r en cette capitale<br />

du mon<strong>de</strong> catholique. M. Hello se réjouit <strong>de</strong> voir, <strong>de</strong> sa fenêtre, le sanctuaire <strong>de</strong> Nazareth; plus<br />

heureux, vous autres, vous habitez dans lʹEglise même, car Rome est une Eglise.<br />

Lʹarrivée <strong>de</strong> vos images si pieuses a causé gran<strong>de</strong> joie aux novices, grands et petits; tout le<br />

mon<strong>de</strong> a la sienne, jʹen ai une dans mon bréviaire, ce qui nʹétait pas nécessaire pour me rappeler le<br />

souvenir <strong>de</strong> nos excellents frères; merci <strong>de</strong> votre attention à nous faire plaisir.<br />

La distribution solennelle, <strong>avec</strong> lecture <strong>de</strong> la lettre explicative, sʹest faite en face la gran<strong>de</strong><br />

prairie, sur les <strong>de</strong>grés <strong>de</strong> la maison blanche, à 7h.1/2 du soir. Maintenant, je vous chargerai, bien<br />

cher ami, <strong>de</strong> faire les amitiés les plus tendres à vous‐même dʹabord <strong>de</strong> ma part, puis à ce vieil ami<br />

<strong>de</strong> S t ‐Charles, déserteur forcé comme moi pour <strong>de</strong>s causes semblables et différentes, puis à ce cher<br />

1283


ami et collaborateur <strong>de</strong> S t ‐<strong>Jean</strong>, en religion f. Charrin; dites‐lui que lʹon use et abuse du passe‐<br />

rivière 412 , que le patronage ne va pas trop mal, vu la saison, quʹil y a un petit mouvement <strong>de</strong> piété<br />

et quʹil y a une communion ou <strong>de</strong>ux chaque dimanche; oh! si la semence pouvait prendre! Mais il<br />

faudrait <strong>de</strong>s saints, et nous nʹy travaillons pas assez; peut‐être est‐ce plus facile à Rome que dans<br />

notre pays <strong>de</strong> France; voyez cela, chers amis, <strong>de</strong>venez, en votre genre, <strong>de</strong>s Benoît Labre; nous<br />

prions pour quʹil en soit ainsi <strong>de</strong> chacun <strong>de</strong> nous, car, afin quʹil nʹy ait pas <strong>de</strong> jaloux, nous <strong>de</strong>vons<br />

nous mettre tous au concours. Adieu, priez pour le Noviciat; nous y avons <strong>de</strong>s âmes généreuses<br />

qui un jour, si ce nʹest déjà, nous mangeront la laine sur le dos, cʹest intolérable! Je pense que vous<br />

recevez souvent <strong>de</strong>s nouvelles, je mʹabstiens <strong>de</strong> tout détail, seulement notre bon Père Supérieur se<br />

porte bien, <strong>de</strong>ux frères sont indisposés, M. Edouard [Lainé] (le musicien) et un nouveau (musicien<br />

quoque).<br />

Je vous embrasse, mon cher ami, ainsi que nos chers f. <strong>Jean</strong>‐Marie et Charrin, en les Sacrés<br />

Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Faÿ pr.<br />

Prière <strong>de</strong> mettre sous enveloppe la lettre ci‐incluse pour M. Boucault, je ne sais où il est ac‐<br />

tuellement. M. du Garreau nʹa pas reçu les médailles <strong>de</strong> M. Charrin.<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S,<br />

M. Faÿ ne me laissant pas <strong>de</strong> place pour rien ajouter à sa lettre, je me borne à vous<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong> nous envoyer le plus tôt possible <strong>de</strong> vos nouvelles pour que nous soyons as‐<br />

surés que votre indisposition nʹa point eu <strong>de</strong> suite. Dès que les chaleurs seront un peu pas‐<br />

sées, jʹaviserai à diriger vers Rome un frère nouveau pour ai<strong>de</strong>r M. <strong>Jean</strong>‐Marie et vous ap‐<br />

porter à tous un peu <strong>de</strong> soulagement.<br />

Votre ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1319 à M. Caille<br />

Visite <strong>de</strong>s frères à leurs familles. Nouvelles diverses.<br />

Chaville, 16 juillet 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹécris ici <strong>de</strong>ux mots à notre f., M. Louis [Hubert], relativement à sa <strong>de</strong>man<strong>de</strong> dʹun<br />

voyage dans sa famille. Jʹai répondu aussi, il y a quelques jours déjà, à sa bonne mère dont<br />

la lettre était bien chrétienne. Je ne sais pas encore ce qui se pourra faire relativement à<br />

cette <strong>de</strong>man<strong>de</strong> qui est contraire aux règles <strong>de</strong> la Communauté; quelque occasion favorable<br />

pourrait seule rendre cette absence moins impraticable; nous verrons ce que les circons‐<br />

tances pourront amener.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> votre aimable invitation; si je puis mʹéchapper un jour pour<br />

vous faire une visite, je serai heureux <strong>de</strong> vous voir, vous et nos ff. dʹAmiens; mais, en ce<br />

moment, les chaleurs me ren<strong>de</strong>nt assez souffrant et je suis dʹailleurs fort retenu, nos sémi‐<br />

naristes arrivant successivement et plusieurs <strong>de</strong> nos frères étant aussi en repos ou conva‐<br />

lescence ici.<br />

Nous remettons notre fête <strong>de</strong> St Vincent <strong>de</strong> Paul au mardi 21, ne pouvant, à cause<br />

<strong>de</strong>s patronages, la célébrer le dimanche.<br />

Jʹai reçu <strong>de</strong> bonnes nouvelles <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax; il vous a écrit <strong>de</strong> son côté, aussi je ne<br />

vous en dis donc rien.<br />

412 Longue cor<strong>de</strong>, simple ou double, fixée à un portique ou à un arbre, à laquelle on se suspend pour franchir <strong>de</strong>s obstacles en largeur.<br />

1284


A Rome, les Cercles marchent; dʹaprès la <strong>de</strong>rnière lettre, lʹun <strong>de</strong>s frères, M. Girard,<br />

avait quelque fièvre; jʹespère que ce sera sans suite.<br />

Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je ne me souviens pas que vous ayez jamais assisté ici à la fête <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul.<br />

1320 à MM. Baumert et Magnien<br />

Grâces reçues au diaconat et à la tonsure.<br />

Chaville, 16 juillet 1868<br />

Bien chers amis et fils en N.S.,<br />

Vous nʹavez pas pensé, je lʹespère, que le jour <strong>de</strong> votre ordination échappait à notre<br />

souvenir; loin <strong>de</strong> là; ma volonté était <strong>de</strong> répondre immédiatement à vos <strong>de</strong>ux bonnes et<br />

pieuses lettres pour vous assurer que nous serions tous en union <strong>avec</strong> vous pour <strong>de</strong>man‐<br />

<strong>de</strong>r à Dieu les grâces spéciales et si précieuses quʹIl réserve à ceux qui font, comme notre<br />

cher Amédée [Magnien], le premier pas dans la voie sacerdotale, ou qui franchissent,<br />

comme notre cher Urbain [Baumert], la <strong>de</strong>rnière station avant le grand terme qui consacre<br />

définitivement un prêtre <strong>de</strong> plus pour le service <strong>de</strong>s autels. La joie est gran<strong>de</strong> pour tous<br />

<strong>de</strong>ux, car lʹun commence et lʹautre voit déjà la fin; les anges au Ciel voient ces saintes allé‐<br />

gresses; ils les envient peut‐être, ou plutôt ils les partagent dans leur si pure et si frater‐<br />

nelle charité. Nous aussi, tous ici, nous étions à lʹunisson <strong>avec</strong> vous, particulièrement ceux<br />

qui ont eu <strong>de</strong>s jours pareils à celui qui vous a comblés <strong>de</strong> si douces faveurs. De votre côté,<br />

vous avez prié pour nous et, dans cet instant <strong>de</strong> si douce union <strong>avec</strong> le Seigneur, la prière<br />

est bien puissante. Nous le voyons tous les jours, même dans notre mon<strong>de</strong> humain et si<br />

tristement imparfait, il est <strong>de</strong>s heures <strong>de</strong> choix où lʹon ne sait rien refuser à ceux que lʹon<br />

aime. Combien le Père Céleste, si généreux dans son amour, doit‐Il donc être facile à tou‐<br />

cher dans les jours <strong>de</strong> lʹordination! Avec le baptême et la première communion, il nʹest rien<br />

qui donne mieux lʹidée du bonheur et <strong>de</strong>s grâces du Ciel.<br />

Nos jeunes séminaristes <strong>de</strong> St‐Sulpice sont ici <strong>de</strong>puis le 6 juillet; ils sʹenquièrent <strong>de</strong><br />

temps en temps <strong>de</strong>s visites quʹils peuvent attendre <strong>de</strong> leurs condisciples <strong>de</strong> province; je ne<br />

donne quʹune faible satisfaction à leur curiosité, car je ne sais pas bien encore qui sont ceux<br />

qui pourront sʹéloigner pour cette fois <strong>de</strong> leur maison; quels quʹils soient, ils sont sûrs<br />

dʹêtre cordialement accueillis et <strong>de</strong> trouver <strong>de</strong>s frères en tous les membres <strong>de</strong> la famille, et<br />

un Père tout affectionné en celui qui, quoique indigne, a reçu <strong>de</strong> Dieu la mission <strong>de</strong> les ai‐<br />

mer et <strong>de</strong> les conduire à Lui; il espère que pas un ne lui manquera et quʹau jour <strong>de</strong> la<br />

gran<strong>de</strong> et universelle réunion, il les retrouvera tous au Ciel.<br />

Adieu, bien chers enfants, je prie le Seigneur <strong>de</strong> vous bénir et je vous embrasse ten‐<br />

drement dans les Cœurs Sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Vous faites, je le pense bien, la neuvaine préparatoire à la fête <strong>de</strong> St Vincent <strong>de</strong> Paul;<br />

ne pouvant faire sa fête le dimanche à cause <strong>de</strong> nos patronages, nous lʹavons remise au<br />

mardi 21 Les enfants <strong>de</strong> Vaugirard viendront, comme <strong>de</strong> coutume, <strong>avec</strong> la communauté à<br />

Chaville tout le jour.<br />

1285


1321 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Pèlerinage à La Salette. Impressions sur les <strong>de</strong>ux témoins <strong>de</strong> lʹapparition. Nouvelles sur les affaires <strong>de</strong> la Congré‐<br />

gation.<br />

Chaville, 23 juillet 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je ne mʹétonne point <strong>de</strong>s sentiments pieux et consolants que vous avez éprouvés à<br />

la Salette; on sent là, on touche du doigt la vérité du fait et, ce point admis, on ne saurait<br />

sans émotion passer sur les traces <strong>de</strong> la miséricordieuse Vierge Marie; ses avertissements<br />

frappent aussi davantage, on en saisit mieux la gravité. Les<br />

<strong>de</strong>ux témoins ont, à vrai dire, disparu comme elle, Mélanie<br />

dans une obscurité profon<strong>de</strong>, Maximin dans une sorte <strong>de</strong><br />

nullité. De grands troubles avaient été prédits pour lʹItalie, ne<br />

se sont‐ils pas terriblement réalisés?<br />

Je suis heureux <strong>de</strong>s paroles rassurantes du mé<strong>de</strong>cin <strong>de</strong>s<br />

eaux; jʹespère quʹil sera prophète à sa manière et que vous<br />

aurez une amélioration décisive dans votre santé. Jʹavais vu à<br />

Allevard le traitement <strong>de</strong>s injections; je croirais bien quʹil peut<br />

être efficace.<br />

Je tâcherai <strong>de</strong> vous retirer encore <strong>de</strong>s messes, si vous en<br />

trouvez trop <strong>de</strong> ce qui vous reste; vous pouvez employer pour<br />

votre usage les 25f <strong>de</strong>s intentions que jʹai reprises; jʹy<br />

pourvoirai à lʹégard du bon Curé qui les a <strong>de</strong>mandées; si<br />

lʹargent vous fait défaut, ne manquez pas <strong>de</strong> me le dire, jʹen ai reçu quelque peu <strong>de</strong>puis vo‐<br />

tre départ.<br />

Notre fête <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul sʹest passée à merveille, la joie était dans toutes les<br />

âmes, nous nʹavons pas eu une contrariété durant tout le jour; évi<strong>de</strong>mment, le bon Père S t<br />

Vincent mettait la main à tout. M. Codant a très bien parlé. M. Baumert est arrivé à point la<br />

veille. M. dʹArbois était aussi au milieu <strong>de</strong> nous, mais son court repos <strong>de</strong> quinze jours ex‐<br />

pire à la fin <strong>de</strong> cette semaine.<br />

Je nʹai pu jusquʹici aller à Amiens et présentement les chaleurs, poussées ces jours‐ci<br />

aux <strong>de</strong>rnières limites, mʹont causé quelques indispositions et un abattement qui me ren‐<br />

<strong>de</strong>nt impropre au voyage. Pour votre retour, cʹest à vous, cher ami, à en régler le moment,<br />

puisque vous voyez mieux que moi les besoins <strong>de</strong> votre santé et les exigences <strong>de</strong>s œuvres<br />

dʹAmiens.<br />

Vous combinerez, au milieu <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux nécessités, ce qui vous paraîtra le mieux sa‐<br />

tisfaire aux unes et aux autres. Si, pour affermir le bien obtenu par le traitement, vous pro‐<br />

longez <strong>de</strong> quelques jours votre absence, il me semble quʹils ne suffiront pas pour <strong>de</strong> nou‐<br />

velles excursions et que les passer dans le calme et le repos, près <strong>de</strong> votre bonne mère, se‐<br />

rait le parti le plus sage.<br />

Je vous ai dit, je crois, que nos séminaristes emploient jusquʹici leur temps au repos<br />

et à donner quelque ai<strong>de</strong> à quelques‐unes <strong>de</strong>s œuvres qui se sont trouvées en ces jours‐ci<br />

le plus chargées; ils vont tâcher <strong>de</strong> reprendre un peu <strong>de</strong> régularité quʹon avait, dans ces<br />

premiers jours, un peu sacrifiée. M. Cauroy a pris la soutane le jour <strong>de</strong> notre fête <strong>de</strong> S t Vin‐<br />

cent <strong>de</strong> Paul; il entrera comme interne, <strong>avec</strong> M. Boiry, au séminaire dʹAngers à la fin <strong>de</strong>s<br />

vacances. M gr <strong>de</strong> Versailles accor<strong>de</strong>, pour lʹavenir, à nos sujets ecclésiastiques la faculté <strong>de</strong><br />

1286


suivre, comme externes, les cours <strong>de</strong> son séminaire. Ce sera une faculté <strong>de</strong> plus dont nous<br />

pourrons profiter en temps opportun.<br />

Les MM. <strong>de</strong>s Carmes [Thenon et Girodon] gar<strong>de</strong>nt leurs bonnes intentions, mais les<br />

difficultés <strong>de</strong> leur position et <strong>de</strong> leurs œuvres exigent <strong>de</strong>s temporisations et ménagements<br />

dont le terme peut être assez éloigné; les choses resteront donc présentement dans lʹattente<br />

et dans une réserve fort discrète.<br />

Je vous ai dit, sur nos affaires, tout ce que jʹen sais; Dieu a sans doute bien <strong>de</strong>s se‐<br />

crets, mais Il les gar<strong>de</strong> en Lui‐même et ne mʹen laisse rien voir; nous sommes accoutumés<br />

à ses voies lentes et cachées, nous allons en confiance et sans curiosité sur les vues <strong>de</strong> sa<br />

sagesse profon<strong>de</strong>; Il y mêle toujours sa miséricordieuse bonté, adorons‐la, cher ami, et<br />

abandonnons‐nous à Lui.<br />

Offrez mes respectueux sentiments à M me votre mère et soyez assuré comme tou‐<br />

jours, bien cher enfant, <strong>de</strong> mon tendre dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Tous nos ff. vous offrent leurs sentiments affectueux, ils espèrent vous voir à votre<br />

passage, lorsque vous retournerez à Amiens.<br />

1322 à M. Tourniquet<br />

Conseils pour parer au manque <strong>de</strong> personnel à Rome. Nouvelles du patronage St‐Charles.<br />

Vaugirard, 27 juillet 1868<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Ce nʹest pas sans regret que jʹai vu lʹobligation qui vous arrivait, ainsi quʹà M. Gi‐<br />

rard, <strong>de</strong> remplacer temporairement M. Descemet; M. Keller me lʹa <strong>de</strong>mandé <strong>avec</strong> une telle<br />

instance que je nʹai pu le refuser; il paraît quʹil ne voyait personne à qui confier ce service.<br />

Tâchez <strong>de</strong> vous faire ai<strong>de</strong>r par M. Brandon pour les écritures et <strong>de</strong> trouver aussi quelquʹun<br />

qui vous secon<strong>de</strong> pour les visites <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s. Quelle durée doit avoir lʹabsence <strong>de</strong> M.<br />

Descemet?<br />

Jʹespère que le départ <strong>de</strong>s zouaves pour le camp va donner un peu <strong>de</strong> relâche à nos<br />

chers ff. Girard et Charrin; mais, dans le même temps, la Légion arrivant dirigera vers<br />

vous le fort du travail. Dieu, jʹen ai la confiance, vous assistera. Pour le trappiste, M. Mai‐<br />

gnen nʹen peut rien dire; il croit quʹil est peu capable <strong>de</strong> vous ai<strong>de</strong>r, sinon pour les travaux<br />

manuels; il vous conseillerait <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r seulement pour lui à<br />

M. <strong>de</strong> Charette un congé <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux mois qui vous serviraient pour<br />

lʹéprouver; si, après cela, il ne vous convenait point, vous prieriez<br />

M. <strong>de</strong> Charette <strong>de</strong> le rappeler, <strong>de</strong> sorte que, sans le renvoyer vous‐<br />

même, vous procureriez doucement son éloignement. Je ne pense<br />

pas que vous <strong>de</strong>viez prendre M. Kneib; nous nʹen avons point eu<br />

satisfaction à Vaugirard; dites‐lui seulement que, nʹayant pas été<br />

attaché à la Communauté et nʹayant pas dʹindice <strong>de</strong> vocation <strong>de</strong> ce<br />

côté, il ne peut être attaché directement au Cercle.<br />

Général <strong>de</strong> Charrette<br />

1287


Le r.p. <strong>de</strong> Boylesve mʹa remis quelques volumes que je vous enverrai; ils sont sé‐<br />

rieux, mais ils conviendront néanmoins à beaucoup <strong>de</strong> lecteurs.<br />

Soyez tranquille sur le compte <strong>de</strong> S t ‐Charles, les choses sʹy soutiennent bien; MM.<br />

Gresser, Bion, Pradine, et aussi M. Girodon et M. Guillot, y sont attachés <strong>avec</strong> une fidélité<br />

qui sauve lʹœuvre. M. Gresser <strong>de</strong>meure à Nazareth; il nʹa plus son travail du matin et, <strong>de</strong><br />

lui‐même, il soupire souvent après lʹheure où il serait débarrassé aussi <strong>de</strong> celui du jour,<br />

mais nous ne le poussons pas, sachant combien il est timi<strong>de</strong> à prendre une résolution har‐<br />

die. Priez pour lui; nous prions ici ar<strong>de</strong>mment pour vous tous, nos entretiens roulent bien<br />

souvent sur vous dans nos récréations; nous prenons part à vos difficultés; comptez bien<br />

que nous vous enverrons un frère dès que la saison sera un peu plus favorable. Ici, tout le<br />

mon<strong>de</strong> souffre <strong>de</strong>s chaleurs exceptionnelles, plusieurs en sont mala<strong>de</strong>s. Notre fête <strong>de</strong> S t<br />

Vincent <strong>de</strong> Paul a été charmante, vraie fête <strong>de</strong> famille chrétienne; avez‐vous un peu fêté<br />

aussi à Rome? Je vous embrasse et vous bénis tous du plus profond <strong>de</strong> mon cœur.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Suivre, s.v.p. ma <strong>de</strong>man<strong>de</strong> près <strong>de</strong> M gr Nardi.<br />

M. Paillé vous a répondu, je crois, que le marchand <strong>de</strong> billards nʹavait pas voulu se<br />

porter garant <strong>de</strong>s transports. On me dit que la chose peut se réparer sans désavantage no‐<br />

table, mais il faut sans doute quʹun homme du métier recolle le marbre.<br />

1323 à M. Girard<br />

Paroles <strong>de</strong> réconfort à la suite dʹune indisposition due au climat romain. Que M. Girard accepte lʹinterruption <strong>de</strong><br />

ses étu<strong>de</strong>s comme une épreuve pour affermir son espérance en Dieu. Nouvelles <strong>de</strong> la fête <strong>de</strong> saint Vincent <strong>de</strong><br />

Paul; lʹinvoquer ʺpour que son nom soit aimé et béni dans la Ville éternelleʺ.<br />

[27 juillet 1868]<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Nous nous réjouissons tous ici <strong>de</strong> ce que votre indisposition tend à disparaître <strong>de</strong><br />

jour en jour; cʹest une épreuve dʹacclimatation, maintenant, le tribut étant payé, vous allez<br />

<strong>de</strong>venir fort comme si vous étiez citoyen romain. La Provi<strong>de</strong>nce a peut‐être arrangé les<br />

choses ainsi pour que M. Charrin, prenant plus dʹassurance, puisse tenir votre place toutes<br />

les fois que ce sera nécessaire. Nous enverrons aussi un frère dès que la saison sera plus<br />

favorable; ayez donc confiance, mon cher enfant; le bon Dieu a pu vous éprouver un peu,<br />

mais il ne cesse pas pour cela, tant sʹen faut, <strong>de</strong> vous aimer; il veillera, à point, aux besoins<br />

<strong>de</strong> vos étu<strong>de</strong>s; ayez seulement une confiance et un abandon tout filial en Lui, sa miséri‐<br />

cor<strong>de</strong> sera dʹautant plus gran<strong>de</strong> que votre espérance aura été plus fidèle.<br />

Nous parlons tous les jours <strong>de</strong> vous, nous prions surtout constamment pour la pe‐<br />

tite famille <strong>de</strong> Rome; nous avons une ferme assurance quʹelle ne sera pas en vain placée si<br />

près du foyer <strong>de</strong> la vérité et <strong>de</strong> la charité; elle en sentira lʹeffet, et la surabondance en re‐<br />

viendra sur nous.<br />

Nous avons eu une charmante fête <strong>de</strong> St Vincent <strong>de</strong> Paul le mardi 21, à Chaville;<br />

nous y étions tous, bon nombre <strong>de</strong> nos amis aussi; les chaleurs excessives <strong>de</strong>puis un mois,<br />

jusquʹà rendre mala<strong>de</strong>s plusieurs dʹentre nous, étaient ce jour‐là tempérées par un air ai‐<br />

mable. Tous ont éprouvé un contentement que le bon Père St Vincent avait évi<strong>de</strong>mment<br />

1288


préparé au Ciel. Invoquez‐le souvent; il y a si longtemps quʹà divers titres vous êtes son<br />

enfant quʹil ne manquera pas <strong>de</strong> vous assister affectueusement. Il en est <strong>de</strong> même aussi <strong>de</strong><br />

mon fils Charrin; il faut quʹensemble vous posiez les assises dʹune nouvelle fondation qui<br />

fera aimer et bénir son nom dans la Ville Eternelle; redites parfois son mot favori: Il se fait<br />

beaucoup <strong>de</strong> mal, faisons un peu <strong>de</strong> bien.<br />

Adieu, très chers amis; si tous ici pensent à vous et vous aiment, il me semble que,<br />

comme S t Pierre le répondait au Seigneur, je pourrais dire: Vous savez, Seigneur, si je les<br />

aime!<br />

Votre dévoué ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je ne désespère pas dʹun voyage <strong>de</strong> M. Vrignault en septembre; il gar<strong>de</strong> cette pensée<br />

au fond du cœur.<br />

1324 à M. Maignen<br />

Simple billet non signé. Conseils sur lʹattitu<strong>de</strong> à adopter dans une polémique engagée entre LʹOuvrier et Le<br />

Croisé. Sʹil ne faut pas craindre <strong>de</strong> défendre la vérité, il est opportun <strong>de</strong> se taire pour ne pas faire <strong>de</strong> publicité.<br />

[Fin juillet 1868]<br />

Je crois que le silence serait le mieux, le Croisé étant peu connu et peu prisé.<br />

Si on répond, il faudrait supprimer toute injure ou parole blessante.<br />

La raison <strong>de</strong> M. Seigneur, quʹon dit ménager M. Gasperini parce quʹil a du talent,<br />

est mauvaise.<br />

Tous les chrétiens, eussent‐ils un talent médiocre, ont droit <strong>de</strong> répudier <strong>de</strong>s doctri‐<br />

nes qui blessent leur foi.<br />

Si, sous prétexte que Michelet, Renan, Taine, etc. ont quelque talent <strong>de</strong> style ou<br />

dʹimagination, on les eût ménagés, on eût beaucoup accru le mal quʹils ont fait. On peut<br />

craindre quʹà la réponse, M. Seigneur nʹoppose une contre‐réponse; <strong>de</strong> là, une polémique<br />

où lʹOuvrier nʹaura pas peut‐être le <strong>de</strong>rnier mot et qui, presque certainement, ennuiera ses<br />

lecteurs.<br />

Je crois quʹil serait sage, en se taisant, <strong>de</strong> priver M. Seigneur <strong>de</strong> lʹavantage, quʹil<br />

cherche sans doute, <strong>de</strong> révéler lʹexistence <strong>de</strong> son journal aux 25.000 lecteurs <strong>de</strong> lʹOuvrier.<br />

1325 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Invitation affectueuse à venir finir ses vacances à Chaville. Nouvelles inquiétantes <strong>de</strong> la santé <strong>de</strong>s frères <strong>de</strong> Rome.<br />

Chaville, 2 août 1868<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je ne vous ai point écrit plus tôt à cause <strong>de</strong>s mouvements successifs que vous com‐<br />

menciez à faire au moment où vous mʹadressiez votre <strong>de</strong>rnière lettre et qui me laissaient<br />

en incertitu<strong>de</strong> sur le lieu où mon message pourrait vous rencontrer. Aujourdʹhui, vous <strong>de</strong>‐<br />

vez être à Montcoy ou vous y arrivez; je vous y envoie ces <strong>de</strong>ux mots.<br />

Ce nʹest dʹailleurs à autre fin que <strong>de</strong> vous dire, ce que vous savez dʹavance, quʹil se‐<br />

ra agréable à tous, à moi en particulier, que vous nous réserviez quelque part dans le court<br />

espace qui séparera la fin <strong>de</strong> vos bains ou saison dʹeaux <strong>de</strong> votre rentrée à Amiens. Je ne<br />

1289


vous lʹavais pas <strong>de</strong>mandé, dans la crainte dʹabréger les temps <strong>de</strong> délassement et <strong>de</strong> détente<br />

qui <strong>de</strong>vaient vous reposer et remettre vos forces; mais, si cʹest sans préjudice <strong>de</strong> ce bien es‐<br />

sentiel, nous serons tous très joyeux <strong>de</strong> passer quelques instants <strong>avec</strong> vous.<br />

Ne vous inquiétez pas <strong>de</strong>s quelques petits sentiments dʹennui qui vous viennent au<br />

sujet dʹAmiens; tous les frères vous y désirent, le bien que leur fera votre présence et le be‐<br />

soin quʹils ont <strong>de</strong> vos soins vous auront bientôt rendu le cordial contentement dʹêtre au<br />

milieu dʹeux et <strong>de</strong> vos jeunes gens.<br />

M. Caille nous est venu voir à la fin <strong>de</strong> cette <strong>de</strong>rnière semaine; il mʹa paru être<br />

content <strong>de</strong> tous et <strong>de</strong> tout; il nʹavait aperçu, ni en M. Charles [Jouin], ni en aucun <strong>de</strong>s au‐<br />

tres, les nuages qui les auraient troublés. A votre retour, en tout cas, vous saurez les conso‐<br />

ler tous et leur rendre la paix, sʹil était besoin <strong>de</strong> le faire.<br />

M. Henry [Piquet] achève vos appliques et pourra vous les remettre à votre passage ici.<br />

Nous aurons mercredi la distribution <strong>de</strong>s prix <strong>de</strong> nos enfants à Vaugirard, dans<br />

lʹaprès‐midi, à 2h. 1/2; je ne sais si vous serez déjà parmi nous, ce serait un contentement<br />

pour tous, mais ne dérangez point néanmoins vos dispositions, si elles sont bien réglées en<br />

sens contraire.<br />

Je recomman<strong>de</strong> bien particulièrement nos ff. <strong>de</strong> Rome à vos prières; <strong>de</strong>ux dʹentre<br />

eux, MM. Girard et Charrin, étaient assez sérieusement mala<strong>de</strong>s au moment où M. <strong>Jean</strong>‐<br />

Marie [Tourniquet] nous écrivait, au milieu <strong>de</strong> la semaine <strong>de</strong>rnière; il paraissait même as‐<br />

suré que M. Girard ne pourrait sʹacclimater à Rome et que nous aurions à le rappeler bien<br />

prochainement. M. Charrin était au lit <strong>de</strong>puis quatre jours; ces acci<strong>de</strong>nts compliquent bien<br />

la position du pauvre <strong>Jean</strong>‐Marie, et cependant le Comité nous dissua<strong>de</strong> dʹenvoyer <strong>de</strong> sitôt<br />

le quatrième frère que nous <strong>de</strong>vions diriger vers ce poste, à raison <strong>de</strong> lʹinclémence du cli‐<br />

mat en cette saison. Nous passerons outre si la situation <strong>de</strong>vient <strong>de</strong> plus en plus difficile.<br />

Quelque soin que nous <strong>de</strong>vions avoir dʹécarter <strong>de</strong> nos frères toute cause <strong>de</strong> malaise pour<br />

leur santé, la charité peut <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r quʹon coure quelque risque pour secourir ceux qui<br />

sont en peine.<br />

Je ne vois pas <strong>de</strong> fait bien notable à vous communiquer et dʹailleurs, pour que le<br />

départ <strong>de</strong> cette lettre sʹeffectue ce soir, je nʹai que le temps <strong>de</strong> la fermer.<br />

Offrez mes sentiments respectueux à M me votre mère et croyez bien vous‐même,<br />

bien cher ami, à mon tendre dévouement en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Lʹindulgence [pour les 5 Pater, Ave, Gloria aux intentions du Souverain Pontife], ac‐<br />

cueillie <strong>avec</strong> gran<strong>de</strong> joie, est fidèlement gagnée par toutes nos maisons <strong>de</strong> Paris; je fais<br />

avertir celles du <strong>de</strong>hors. Que Dieu soit béni <strong>de</strong> cette nouvelle faveur!<br />

1326 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Bonheur <strong>de</strong> pouvoir conserver le St‐Sacrement sous son toit.<br />

Vaugirard, 12 août 1868<br />

Madame la Marquise,<br />

Jʹai reçu <strong>avec</strong> reconnaissance et joie la lettre que vous mʹavez fait lʹhonneur <strong>de</strong><br />

mʹécrire. Je comptais les temps écoulés <strong>de</strong>puis votre départ, et je regrettais déjà <strong>de</strong> nʹavoir<br />

point <strong>de</strong> vos nouvelles, ni <strong>de</strong> celles <strong>de</strong> M me dʹHurbal, ni <strong>de</strong> toute votre chère famille que je<br />

respecte et que jʹaime. Mais jʹai eu tout ensemble satisfaction <strong>de</strong> divers points. En même<br />

1290


temps que mʹarrivait votre lettre, jʹen recevais une <strong>de</strong> votre cher oncle, M. <strong>de</strong> Caulaincourt,<br />

établi dans le département <strong>de</strong> lʹOrne, dans la <strong>de</strong>meure <strong>de</strong> votre tant regrettée bonne mère<br />

M me <strong>de</strong> Caulaincourt votre grand‐mère]; il va bien aussi, comme tout son entourage; il est<br />

heureux que les partages <strong>de</strong> famille se soient faits en parfaite concor<strong>de</strong> et sans que nulle<br />

affection <strong>de</strong> famille fût froissée; lʹesprit chrétien est un esprit dʹunion et <strong>de</strong> paix, on <strong>de</strong>vait<br />

ici bien naturellement en retrouver les fruits.<br />

Combien je suis joyeux, Madame, que vous ayez enfin cette autorisation si désirée<br />

pour la chapelle; nous savons, nous autres, en Communauté, quelles consolations apporte<br />

N.S. dans les lieux où Il daigne rési<strong>de</strong>r. Bientôt Il sera votre hôte, Il <strong>de</strong>meurera sous votre<br />

toit, ou plutôt Il sera le Maître et Seigneur dans votre maison; oh! que son autorité sera<br />

douce; vous désirez sincèrement que son règne vous arrive, Le voici qui vient et répond à<br />

votre appel; il nʹy aura plus jamais dʹennui, en aucun temps, <strong>avec</strong> une si aimable et si atta‐<br />

chante compagnie; pour <strong>de</strong>s âmes vraiment pieuses, on ne saurait souhaiter un plus pré‐<br />

cieux avantage; le S t Sacrifice tous les jours et, jour et nuit, le Dieu fort et puissant pour<br />

vous diriger, vous consoler et veiller sur tout ce qui vous est cher, quʹIl soit mille fois béni<br />

dʹune si tendre et si miséricordieuse con<strong>de</strong>scendance! Jʹaurais une vraie joie <strong>de</strong> cœur à cé‐<br />

lébrer la messe dans ce petit sanctuaire, à lʹoffrir pour vous, Madame la Marquise, pour<br />

votre bonne mère, pour votre cher Richard; à mon grand regret, je crains beaucoup que ce<br />

ne puisse être pour cette année; je vois <strong>de</strong> nombreux obstacles qui vont mʹempêcher cette<br />

année <strong>de</strong> faire le voyage <strong>de</strong> Normandie; je mʹen dédommagerai en espérant, pour lʹan pro‐<br />

chain, <strong>de</strong>s circonstances plus favorables, et en priant ici comme je lʹeusse fait si volontiers à<br />

la petite chapelle <strong>de</strong> S t ‐Laurent.<br />

Jʹai recommandé instamment à nos ateliers <strong>de</strong> se mettre en mesure pour lʹenvoi<br />

exact <strong>de</strong>s objets commandés par vous; je vais veiller à ce quʹon sʹen occupe activement.<br />

Je dis habituellement moi‐même les messes que vous mʹavez <strong>de</strong>mandées pour ceux<br />

qui vous ont <strong>de</strong>vancée dans la vie meilleure; ce mʹest un moyen <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> penser à votre<br />

chère famille et <strong>de</strong> mʹunir à tous vos sentiments pieux.<br />

Veuillez, Madame la Marquise, agréer, et partager <strong>avec</strong> Madame dʹHurbal mon pro‐<br />

fond respect; jʹoffre aussi à votre cher fils mes bien dévoués et affectueux sentiments.<br />

Votre humble serviteur et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong> P tre<br />

1327 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Deman<strong>de</strong> dʹéclaircissements; conseils <strong>de</strong> conduite pour sa santé: régler le régime et les activités pour limiter la fa‐<br />

tigue. Nouvelles diverses. A Rome, ʺon sʹattend à quelque mouvementʺ; déboires <strong>de</strong> lʹarmée pontificale.<br />

Chaville, 17 août 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je nʹai pas parfaitement compris, par votre lettre dʹhier 16, à quel jour précisément<br />

vous atten<strong>de</strong>z lʹarrivée <strong>de</strong> M. Leclerc; plein <strong>de</strong> votre pensée, vous nʹavez pas précisé assez<br />

les points; il en résulte un peu dʹobscurité; il y a, dans lʹexposé, un certain nombre <strong>de</strong> mar‐<br />

di, mercredi et jeudi qui reviennent et sʹentrecroisent <strong>de</strong> manière à causer un peu<br />

dʹéblouissement; il se peut aussi que la pluie, qui tombe incessamment <strong>de</strong>puis hier et qui a<br />

noyé toutes les promena<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s patronages en campagne hier, ait un peu détrempé mon<br />

esprit; quoiquʹil en soit, je me sens mal éclairé; je vais attendre le retour <strong>de</strong> M. Faÿ qui<br />

1291


mʹai<strong>de</strong>ra à pénétrer nettement quel est votre désir. En attendant, je réponds au reste <strong>de</strong> vo‐<br />

tre lettre.<br />

Pour la fête <strong>de</strong> S t Bernard, je crois que vous pouvez faire comme lʹan passé. Il me<br />

semble quʹil serait bien que, sans vous avoir précisément consulté, M. Trousseau sʹentendît<br />

à ce sujet <strong>avec</strong> M. Caille, les choses se poseraient ainsi simplement et sans difficulté; on<br />

peut être assuré dʹavance que M. Caille verra <strong>avec</strong> plaisir la communauté vous donner une<br />

marque dʹaffection.<br />

Pour ce qui regar<strong>de</strong> votre santé, jʹai pleine confiance quʹaprès lʹinévitable transition<br />

qui suit lʹaction <strong>de</strong>s eaux, vous en éprouverez un bien sensible. Je trouverai sage tout ce<br />

que vous croirez bon <strong>de</strong> régler pour le repos que vous a prescrit le docteur dʹAllevard; je<br />

nʹai pas une confiance assez illimitée dans les jugements <strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins et dans les inspira‐<br />

tions qui les font parler pour vous imposer ce repos très prolongé; je mʹen rapporte à votre<br />

sentiment et jʹapprouverai le parti que vous aurez pris. En tout état <strong>de</strong> cause, vous <strong>de</strong>vriez,<br />

au moins, régler votre régime et vos occupations <strong>de</strong> manière à vous réserver un sommeil<br />

franc et à mesurer, soit votre activité, soit surtout votre parole, pour éviter toute fatigue.<br />

Il me semble que, pour M me Cottu, vous pourriez lui écrire que votre saison dʹeaux<br />

sʹétant prolongée sensiblement, vous nʹavez pu, au retour, vous arrêter à Paris, que vous<br />

lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z, en conséquence, sʹil lui conviendrait que quelquʹun <strong>de</strong>s nôtres vînt <strong>avec</strong> un<br />

mot <strong>de</strong> vous toucher la souscription promise, ou sʹil lui agrée mieux dʹattendre quʹune oc‐<br />

casion plus ou moins éloignée vous ramenant à Paris vous permette <strong>de</strong> lʹaller <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r<br />

vous‐même. De cette sorte, on empêcherait au moins la prescription, si tant est toutefois<br />

que vous nʹayez répugnance à solliciter fermement cette aumône donnée peu gracieuse‐<br />

ment. Lʹoriginalité <strong>de</strong> cette dame, bonne dʹailleurs, excuse peut‐être ses allures un peu sin‐<br />

gulières<br />

Vous avez bien raison pour les retards <strong>de</strong> M. Henry [Piquet], jʹen souffre comme<br />

vous; je lui lirai la petite semonce <strong>de</strong> votre lettre.<br />

Je ne sais que penser <strong>de</strong> la promena<strong>de</strong> à la mer, vous verrez ce que le moment vous<br />

inspirera; à lʹheure où jʹécris, jʹinclinerais un peu pour la négative.<br />

Tout va ici comme <strong>de</strong> coutume. Les ff. <strong>de</strong> Rome sont sur pied, pas vigoureux toute‐<br />

fois; le temps se détend ici, peut‐être sera‐ce <strong>de</strong> même là‐bas. Il paraît quʹon sʹy attend tou‐<br />

jours à quelque mouvement. On est aussi inquiet sur un point grave: <strong>de</strong>s fusils à aiguille<br />

commandés pour lʹarmée pontificale nʹarrivent pas, bien que lʹépoque <strong>de</strong> leur livraison par<br />

lʹAngleterre soit passée <strong>de</strong> beaucoup; on crie à la trahison, et les apparences sont <strong>de</strong> ce cô‐<br />

té. Les catholiques sont facilement dupés; on ne trompe jamais Dieu, heureusement; espé‐<br />

rons donc en Lui.<br />

Je nʹai pas encore fait mon petit voyage à Troyes pour voir le r.p. Cotel 413 au sujet <strong>de</strong><br />

notre règle; jʹattends un jour <strong>de</strong> beau temps.<br />

Adieu, mon bien cher ami et fils, nous suivrons <strong>de</strong> cœur votre adoration. Cʹest une<br />

aimable occasion <strong>de</strong> se réunir aux pieds du bien‐aimé Seigneur; continuez tous à le prier<br />

pour notre petite famille, afin quʹIl la bénisse, la remplisse <strong>de</strong> son esprit et lʹaccroisse selon<br />

les vues <strong>de</strong> sa divine sagesse.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

413 MLP. se rendra à Troyes à la fin du mois (cf. lettre 1331 di 28 août) pour consulter ce jésuite, expert en droit <strong>de</strong>s Religieux, qui<br />

avait participé à l’élaboration <strong>de</strong> nombreuses Constitutions et auteur d’un Catéchisme <strong>de</strong>s vœux très répandu dans les Instituts. En<br />

décembre 1868, le père Lantiez ira porter le manuscrit révisé et, le 12 févrirer 1869, le travail sera terminé.<br />

1292


P. S. Délibération faite, il paraît clair que vous atten<strong>de</strong>z lʹai<strong>de</strong> que nous <strong>de</strong>vons vous<br />

envoyez lundi ou mardi, après votre distribution qui a lieu le 30. Si nous nous trompons,<br />

détrompez‐nous, s.v.p.<br />

1328 à M. Tourniquet<br />

Débuts <strong>de</strong>s Cercles <strong>de</strong> Rome (Cercle St‐Maurice). Les santés semblent se rétablir. M. Charrin doit écrire à sa<br />

mère. Diverses nouvelles <strong>de</strong> France.<br />

Chaville, 24 août 1868<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Nous nous réjouissons beaucoup du retour <strong>de</strong> vos santés, dont vous avez tant be‐<br />

soin pour le service <strong>de</strong> Dieu et la cause du Saint Père. Nous espérons que les quelques ma‐<br />

laises <strong>de</strong> MM. Girard et Charrin vont bientôt prendre fin puisque, vers la mi‐septembre,<br />

nous dit‐on, les chaleurs diminuent sensiblement.<br />

Nous avons lu <strong>avec</strong> un vif intérêt les détails concernant lʹouverture du Cercle St ‐<br />

Maurice, les débuts font bien augurer pour lʹavenir; appuyons‐nous toujours sur Dieu et<br />

ne nous tourmentons pas trop <strong>de</strong> quelques mauvais vouloirs ou bien <strong>de</strong>s diversités <strong>de</strong><br />

vues <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s entourages extérieurs, soit à St ‐Michel, soit à St ‐Maurice. Avec le divin<br />

Seigneur et la Ste Vierge, et les Sts Patrons <strong>de</strong> vos cercles, et les Sts Apôtres Pierre et Paul, et<br />

enfin tous ces saints qui ont un culte et comme une rési<strong>de</strong>nce à Rome, que pouvons‐nous<br />

craindre? Mettons tous ces puissants appuis <strong>de</strong> notre côté et nous surmonterons tous les<br />

obstacles. Il me semble que si partout les chrétiens doivent marcher en esprit <strong>de</strong> foi, cʹest<br />

surtout dans la capitale du mon<strong>de</strong> catholique, où on voit <strong>de</strong> plus près les tempêtes qui agi‐<br />

tent la barque <strong>de</strong> Pierre et lʹinvincible puissance qui la remet constamment dans le calme.<br />

M. Legentil vous a rendu un compte très exact <strong>de</strong> la distribution <strong>de</strong> St ‐Charles; je<br />

voulais vous en écrire, mais je nʹai rien à ajouter au narré <strong>de</strong> votre cher Prési<strong>de</strong>nt; ses ap‐<br />

préciations sont justes et, en particulier, les marques <strong>de</strong> sympathie et dʹaffection pour vous<br />

nʹont rien dʹexagéré. M. Gresser va bien, mais il craint toujours les difficultés du côté <strong>de</strong> sa<br />

famille et nʹose jusquʹici franchir le <strong>de</strong>rnier pas; cette foi confiante, qui se jette les yeux<br />

fermés dans les bras du Père Céleste, il nʹa pas le courage <strong>de</strong> sʹy livrer; priez beaucoup<br />

pour lui aux pieds <strong>de</strong>s Sts Apôtres et aux autels <strong>de</strong> la T. Ste Vierge; il est visiblement dans sa<br />

voie aux œuvres <strong>de</strong> dévouement; que le Seigneur le pousse, puisquʹil nʹose avancer seul.<br />

Dites à mon f. Charrin:<br />

Il y a déjà quelque temps, son excellente mère mʹa écrit, inquiète et contristée <strong>de</strong><br />

nʹavoir pas encore reçu une seule lettre <strong>de</strong> lui <strong>de</strong>puis son arrivée à Rome. Je lui ai répondu<br />

pour lui donner <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> son enfant et je lui ai promis quʹil allait lui écrire tout <strong>de</strong><br />

suite; il y a <strong>de</strong> cela plusieurs semaines; vos maladies mʹont fait perdre ce souvenir <strong>de</strong> vue;<br />

sa pauvre mère doit être peinée si notre f. Charrin nʹa pas eu lʹinspiration <strong>de</strong> lui écrire;<br />

quʹil le fasse sans nul retard, si la chose nʹa déjà été effectuée et que, <strong>de</strong> temps en temps, il<br />

donne marque <strong>de</strong> bon souvenir aux siens. Gron<strong>de</strong>z‐le <strong>de</strong> sa paresse à écrire, cʹest un vrai<br />

défaut quʹen chrétien et en religieux il <strong>de</strong>vrait corriger.<br />

Vos appareils <strong>de</strong> gymnastique ont dû partir au commencement <strong>de</strong> cette semaine. Je<br />

vais aussi faire porter au Comité <strong>de</strong>ux paquets <strong>de</strong> livres que jʹai reçus pour votre Cercle;<br />

malheureusement, les occasions pour les envois sont rares maintenant.<br />

1293


M. Paillé vous écrira; il a été, ainsi que M. Lantiez et les autres, bien sensible à vos<br />

souhaits à lʹoccasion <strong>de</strong> la S t Louis.<br />

M. Vrignault est toujours dans <strong>de</strong> bonnes intentions; il est présentement se reposant<br />

à Versailles, un peu indisposé; je serai heureux si, comme nous lʹespérons, il réalise son<br />

projet <strong>de</strong> prochain voyage.<br />

Tous nos ff. vont bien, sauf M. Pierre [Pialot] toujours fort débile; tous vous assu‐<br />

rent <strong>avec</strong> moi <strong>de</strong> leurs, <strong>de</strong> mes tendres affections; nous accueillons toujours <strong>avec</strong> joie les<br />

lettres que nous recevons <strong>de</strong> vous, <strong>de</strong> notre f. Girard; il en serait <strong>de</strong> même <strong>de</strong> celles du f.<br />

Charrin, sʹil faisait effort pour écrire aussi quelquefois.<br />

Adieu, mon bien cher enfant; jʹai reçu les pouvoirs que vous mʹavez envoyés, jʹai<br />

aussi la médaille dʹargent que vous aviez reçue <strong>de</strong> la main du Saint Père; elle est attachée<br />

au pied dʹune petite statue <strong>de</strong> bronze <strong>de</strong> S t Pierre, laquelle mʹa été laissée par notre f. Gi‐<br />

rard avant son départ; ces souvenirs sont sous mes yeux; je nʹen ai pas besoin pour vous<br />

aimer tous dans le Cœur <strong>de</strong> Notre Seigneur et pour vous recomman<strong>de</strong>r fidèlement à Lui<br />

chaque jour.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1329 à M. Girard<br />

Les étu<strong>de</strong>s cléricales du frère Girard. Quʹil se renseigne auprès <strong>de</strong>s Camilliens, dont les cours seraient ʺdʹun bon<br />

usage pour les membres <strong>de</strong> notre famille religieuseʺ.<br />

Chaville, 25 août 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu <strong>avec</strong> une satisfaction particulière votre <strong>de</strong>rnière lettre; elle a dissipé mes in‐<br />

quiétu<strong>de</strong>s sur votre santé, au moins pour ce qui regar<strong>de</strong> <strong>de</strong>s malaises graves; cʹest beau‐<br />

1294


coup dʹavoir traversé sauf, sinon tout à fait sain, cet été ru<strong>de</strong> et difficile, une première an‐<br />

née surtout. Jʹai vu aussi que vous nʹaviez pas <strong>de</strong> souci pénible au sujet <strong>de</strong> vos étu<strong>de</strong>s;<br />

vous avez raison <strong>de</strong> vous remettre pour cela, comme pour tout, aux mains <strong>de</strong> Dieu. Je crois<br />

quʹil est selon ses vues que nous y songions sérieusement pour la réouverture <strong>de</strong>s cours.<br />

Jʹespère toujours que votre séjour à Rome et la haute surveillance du Cercle S t ‐Michel ne<br />

feraient point obstacle à ce que vous suiviez vos étu<strong>de</strong>s, soit au Collège Romain, soit au‐<br />

trement, si on voyait quelque autre établissement où vous pussiez y pourvoir plus com‐<br />

modément et peut‐être plus brièvement. La présence <strong>de</strong> M. Vrignault pourrait vous prêter<br />

appui pour la surveillance du Cercle quʹil partagerait peut‐être <strong>avec</strong> vous, dans une cer‐<br />

taine mesure au moins.<br />

Un jeune religieux <strong>de</strong> la Congrégation <strong>de</strong> S t ‐Camille <strong>de</strong> Lellis, fort connu <strong>de</strong> M.<br />

Risse et qui reçoit en ce moment lʹhospitalité chez nous à Vaugirard, sʹen retournant à sa<br />

Congrégation à Rome, M. Morel, nous disait quʹen leur ordre, on fait chez eux‐mêmes <strong>de</strong>s<br />

cours préparatoires pour le sacerdoce et quʹils sont faits par quelques‐uns <strong>de</strong> leurs Pères,<br />

fort habiles théologiens et moralistes distingués. Ces cours, spécialement faits pour <strong>de</strong>s re‐<br />

ligieux, sont plus courts, parce quʹon sʹétend moins sur les matières peu pratiques pour<br />

ceux qui ne se <strong>de</strong>stinent pas à lʹenseignement <strong>de</strong>s hautes sciences ecclésiastiques, le droit<br />

canon en particulier, très longuement développé au Collège Romain. Comme <strong>de</strong>s sujets<br />

étrangers à sa Congrégation suivent ces cours, M. Morel pensait quʹils pourraient être dʹun<br />

bon usage pour les membres <strong>de</strong> notre famille religieuse. Il va retourner à Rome; vous<br />

pourriez en causer <strong>avec</strong> lui et me dire ensuite ce que vous en pensez. M. Morel croit aussi<br />

que les membres <strong>de</strong> sa Congrégation, qui sont tous consacrés à lʹassistance spirituelle et<br />

temporelle <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s, pourraient vous être utiles en bien <strong>de</strong>s cas pour vous‐mêmes et<br />

pour ceux qui vous intéressent; vous en conférerez <strong>avec</strong> lui tous, à son retour très pro‐<br />

chain.<br />

Si vous <strong>de</strong>viez trouver trop <strong>de</strong> difficultés réelles pour suivre à Rome vos étu<strong>de</strong>s, ou<br />

si votre santé ne sʹaccommodait pas définitivement <strong>de</strong> ce séjour, nous aviserions à vous y<br />

faire remplacer; bien quʹil y eût peut‐être quelque embarras à le faire, on saurait néan‐<br />

moins le surmonter.<br />

Adieu, mon bien cher ami; vous vivez tous parmi nous, tant votre souvenir y est<br />

puissant, tant les sympathies y sont vives à votre endroit, pour tous; croyez particulière‐<br />

ment au tendre dévouement <strong>de</strong><br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1330 à M. Caille<br />

Avis <strong>de</strong> MLP. sur la question <strong>de</strong> la propriété <strong>de</strong>s immeubles <strong>de</strong> lʹŒuvre dʹAmiens; importance dʹavoir une posi‐<br />

tion indépendante; dangers <strong>de</strong> la reconnaissance dʹutilité publique. Retour <strong>de</strong> M. Girard à Paris.<br />

Vaugirard, 27 août 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. <strong>de</strong> Varax mʹa dit, dans sa <strong>de</strong>rnière lettre, lʹissue <strong>de</strong> vos conférences <strong>avec</strong> M. Ca‐<br />

cheleux, concernant la propriété <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux maisons <strong>de</strong> la rue S t ‐Jacques et <strong>de</strong> la rue <strong>de</strong>s Wa‐<br />

telets. Si jʹai bien compris, on a fait une sorte <strong>de</strong> partage qui attribue la rue <strong>de</strong>s Watelets à<br />

lʹadministration que représente M. Cacheleux, et la rue S t ‐Jacques à vous. Si lʹon considère<br />

1295


ce que vous avez apporté <strong>de</strong> soins et <strong>de</strong> sacrifices en ces œuvres et ce que lʹautre adminis‐<br />

tration a fourni, pour les <strong>de</strong>ux maisons en question, <strong>de</strong> fonds et <strong>de</strong> ressources, on peut<br />

trouver quʹelle est plus avantagée que vous dans lʹarrangement quʹon vient <strong>de</strong> régler. Mais<br />

cʹest un si grand bien que dʹavoir une position indépendante et tranchée quʹen définitive il<br />

faut se réjouir dʹune disposition qui vous assure cette liberté.<br />

Pour régulariser lʹarrangement en question, il y aura nécessité que la part <strong>de</strong> la mai‐<br />

son S t ‐Jacques qui nʹest pas à vous, (M. Cacheleux étant copropriétaire), soit acquise au<br />

moyen dʹune vente. Il me semble que la meilleure voie à prendre, pour mettre cet immeu‐<br />

ble dans les mêmes conditions où se trouvent la maison <strong>de</strong> la rue <strong>de</strong> Noyon et celle du Pe‐<br />

tit S t ‐<strong>Jean</strong>, serait que lʹacquisition <strong>de</strong> la part en question <strong>de</strong> S t ‐Jacques soit faite au nom <strong>de</strong>s<br />

<strong>de</strong>ux membres <strong>de</strong> la Communauté qui sont copropriétaires <strong>avec</strong> vous <strong>de</strong> ces maisons<br />

Noyon et S t ‐<strong>Jean</strong>, en donnant à lʹacte dʹacquisition une forme tontinière qui fait reposer<br />

lʹimmeuble sur trois têtes, comme nous lʹavons fait jusquʹici pour tous nos immeubles.<br />

Pour que lʹopération fût bien régulière, il serait bien <strong>de</strong> suivre, pour la rédaction <strong>de</strong> lʹacte,<br />

les formes adoptées pour les <strong>de</strong>ux premières acquisitions. Je serai satisfait dʹavoir votre<br />

avis à ce sujet et <strong>de</strong> savoir ce que vous aurez fait pour régulariser lʹaffaire. Les Commu‐<br />

nautés sont si volontiers inquiétées, soit par le Gouvernement, soit par les familles, quʹil<br />

est bien important <strong>de</strong> se mettre en règle, autant quʹon le peut.<br />

Pour la reconnaissance <strong>de</strong>s maisons comme établissements dʹutilité publique, les<br />

rr.pp. Jésuites, que jʹai consultés récemment, ne conseillent pas cette mesure, assurant que<br />

le fisc, par diverses voies, trouve moyen dʹimposer <strong>de</strong>s charges aux établissements autori‐<br />

sés et que lʹadministration, par ses surveillances exigeantes, leur crée aussi bien <strong>de</strong>s em‐<br />

barras.<br />

Lʹépoque <strong>de</strong> notre retraite nʹest pas encore absolument déterminée, mais elle aura<br />

lieu dans la <strong>de</strong>rnière quinzaine <strong>de</strong> septembre. Elle sera donnée par le r.p. Cotel, Supérieur<br />

<strong>de</strong> la maison <strong>de</strong>s Pères à Troyes.<br />

Tout va ici comme <strong>de</strong> coutume; M. Girard, que nous avions envoyé à Rome pour le<br />

Cercle <strong>de</strong>s Zouaves, a beaucoup souffert du climat <strong>de</strong> Rome, difficile à supporter pour les<br />

étrangers, surtout durant les mois dʹété; après avoir essayé tous les moyens <strong>de</strong> se refaire, il<br />

a dû, sur lʹavis <strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins, revenir pour respirer un moment lʹair <strong>de</strong> la France; il est ar‐<br />

rivé mercredi en mon absence et a dû se rendre à Chaville; il est, me dit‐on, comme une<br />

ombre tant il est affaibli; il a gardé bon courage et a constamment été soutenu par le sen‐<br />

timent du <strong>de</strong>voir accompli. M. Charrin est aussi fort souffrant, prions pour eux.<br />

Adieu, mon bien bon ami, jʹassure vous et tous vos ff. <strong>de</strong> nos tendres affections en N.S.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1331 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Démarches pour la rédaction <strong>de</strong>s Constitutions. Le père Cotel prêchera la retraite. M. Girard, très affaibli, est ar‐<br />

rivé <strong>de</strong> Rome pour se reposer. ʺNous commençons à pâtir pour la foi, cʹest bon signeʺ.<br />

Vaugirard, 28 août 1868<br />

Bien cher enfant en N.S.,<br />

Jʹarrive <strong>de</strong> Troyes, où je suis allé voir le r.p. Cotel au sujet <strong>de</strong> notre règle. Jʹai été<br />

content du bon accueil, <strong>de</strong>s bons avis et <strong>de</strong>s utiles renseignements quʹil a bien voulu me<br />

communiquer.<br />

1296


Il viendra nous donner la retraite dans la <strong>de</strong>uxième quinzaine <strong>de</strong> septembre. Cʹest<br />

un vénérable Père qui rappelle le r.p. Renaud. Il a dit quʹil nʹest pas orateur; nous aurons<br />

donc à mettre un peu du nôtre dans les exercices quʹil nous donnera à la retraite. Est‐ce un<br />

mal? Je ne le crois pas, si on prend soin dʹai<strong>de</strong>r et <strong>de</strong> soutenir un peu les jeunes frères. Ce<br />

bon Père semble, en effet, comme on nous lʹavait dit, avoir une gran<strong>de</strong> expérience dans les<br />

organisations <strong>de</strong>s Congrégations. Il mʹa communiqué un travail précieux qui contient les<br />

bases essentielles <strong>de</strong> toute règle religieuse; je pense quʹil me sera bien utile.<br />

Jʹécris à M. Caille au sujet <strong>de</strong> la question <strong>de</strong>s propriétés <strong>de</strong> S t ‐Jacques et Watelets. M.<br />

Trousseau va bien, il vous a écrit sans doute. Je pense que, <strong>de</strong> son côté, notre cher M. Lainé<br />

[Adolphe] se trouve bien <strong>de</strong> lʹair dʹAmiens.<br />

M. Girard, à bout <strong>de</strong> forces, vient dʹarriver pour respirer un peu lʹair français et se<br />

refaire; on me dit quʹil est comme une ombre; je ne lʹai pas encore vu, il a été directement à<br />

Chaville, dʹailleurs jʹétais absent; M. Charrin est aussi souffrant; nous commençons à pâtir<br />

un peu pour la foi, cʹest bon signe; mais, comme dit LʹImitation, nous nʹavons pas encore<br />

souffert jusquʹau sang; par les temps que nous traversons, nul <strong>de</strong> nous ne doit désespérer<br />

<strong>de</strong> ne pas aller jusque là.<br />

Adieu, mon bien cher ami, mille affections à nos ff.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1332 à M. Risse<br />

Invitation à se reposer. Travail <strong>de</strong> révision <strong>de</strong>s Constitutions <strong>avec</strong> le père Cotel.<br />

Chaville, 31 août 1868<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Nous avons appris <strong>avec</strong> regret que votre arrivée parmi nous serait retardée jusquʹau<br />

15 septembre, à cause <strong>de</strong> votre promena<strong>de</strong> à Luxembourg. Notre retraite paraissant <strong>de</strong>voir<br />

commencer le 21 du même mois, vous auriez bien peu <strong>de</strong> temps pour vous reposer si vous<br />

ne trouvez moyen <strong>de</strong> prendre un peu sur le mois dʹoctobre. Je vous invite à le faire, si vous<br />

le pouvez sans trop dʹinconvénient, car, après une longue année <strong>de</strong> ru<strong>de</strong>s labeurs, lʹâme et<br />

le corps ont besoin dʹun peu <strong>de</strong> calme et <strong>de</strong> réfection.<br />

[……] <strong>de</strong> la vie religieuse et a travaillé <strong>de</strong>puis 15 ans presque toutes les Constitu‐<br />

tions <strong>de</strong>s Congrégations qui se sont établies. Cʹest à ce titre que les Pères <strong>de</strong> Paris mʹont<br />

conseillé <strong>de</strong> mʹadresser à lui pour donner à notre règle lʹensemble et le développement qui<br />

nous poseront dans <strong>de</strong> bonnes conditions pour lʹavenir comme pour le présent. Je suis allé<br />

le voir à Troyes et jʹai pris ses conseils; il mʹa, en outre, communiqué un précieux travail,<br />

résultat <strong>de</strong> ses étu<strong>de</strong>s sur les Constitutions religieuses.<br />

Il se prépare à publier un petit ouvrage qui est le commentaire et le développement<br />

<strong>de</strong> son Catéchisme <strong>de</strong>s vœux.<br />

Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S., nous sommes tous [……]<br />

[Le <strong>Prevost</strong>]<br />

1297


1333 à M. Maignen<br />

Au sujet dʹune composition littéraire. MLP. y apporte quelques corrections. Situation précaire <strong>de</strong> la communauté<br />

romaine. Nouvelles alarmantes <strong>de</strong> Rome ʺinondée dʹhommes à sinistres figures qui semblent oiseaux <strong>de</strong> mauvais<br />

présageʺ.<br />

Chaville, 2 septembre 1868<br />

Mon bien cher enfant,<br />

Votre petit dialogue, à cela près <strong>de</strong>s fautes énormes du typographe quʹil faut corri‐<br />

ger <strong>avec</strong> soin, me semble intéressant et fait bien ressortir la pensée vraie et trop souvent<br />

réalisée <strong>de</strong> lʹincertitu<strong>de</strong> dans les principes comme dans la conduite.<br />

Je ne sais si je me trompe, mais il me semble que, si le personnage <strong>de</strong> Gustave était<br />

un peu plus <strong>de</strong>ssiné, il y aurait avantage pour le tableau. Si vous aviez pu, par exemple,<br />

ménager une scène entre lui et Karl, et où celui‐ci, non se posant en mentor, mais amené<br />

par quelque provocation (non méchante, mais venant <strong>de</strong> la conscience mal contente <strong>de</strong><br />

Gustave) avait accentué davantage pour celui‐ci la vue <strong>de</strong> sa mollesse et <strong>de</strong> son inconsé‐<br />

quence, les blâmes et mépris <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux anciens sociétaires, témoins <strong>de</strong> la scène ou en ayant<br />

eu connaissance, seront plus motivés; le défaut signalé <strong>de</strong>viendrait aussi plus frappant.<br />

Peut‐être ce que je propose est‐il difficile, car il ne faudrait pas rendre Gustave odieux. Les<br />

autres caractères: Karl, Follichon, sont bien.<br />

La retraite commence le 28 septembre (27 au soir pour les diligents).<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je reçois <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> Rome. La Commission et le malencontreux règle‐<br />

ment ont été jetés par terre par le Colonel <strong>de</strong> Charette et Mgr Basti<strong>de</strong>. Donc, paix <strong>de</strong> ce côté.<br />

Mais le pauvre <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] est absolument seul pour les <strong>de</strong>ux Cercles et pour<br />

le remplacement <strong>de</strong> M. Descemet. M. Charrin continue à être mala<strong>de</strong> et <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, comme<br />

M. Girard, à revenir. M. <strong>Jean</strong>‐Marie ne le croit pas dʹailleurs assez vigoureux en volonté<br />

pour une pareille position. Les zouaves vont revenir à Rome pour le 15 ou le 20 au plus<br />

tard, plus tôt peut‐être. Nous ne pouvons laisser M. <strong>Jean</strong>‐Marie sans secours. Rome est<br />

inondée dʹhommes à figures sinistres qui semblent oiseaux <strong>de</strong> mauvais présage; on a esca‐<br />

ladé <strong>de</strong>ux ou trois fois, la nuit, les murs <strong>de</strong> la Villa Strozzi pour voler ou faire pis; on a es‐<br />

sayé trois fois dʹincendier une caserne qui est voisine et à laquelle touche une poudrière;<br />

on est parvenu à toujours éteindre lʹincendie.<br />

Je pense quʹil faut nous réunir lundi pour le Conseil à Nazareth, à 2h.1/2. Avertissez<br />

ceux que vous verrez. Peut‐être même plus tôt serait mieux: vendredi par exemple, à Vau‐<br />

girard; je vais en parler à M. Paillé qui est à St ‐Cloud, sʹil revient à Chaville.<br />

1334 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Maladie <strong>de</strong> M. Girard. Esprit <strong>de</strong> pauvreté. Ai<strong>de</strong> apportée par <strong>de</strong>s bienfaiteurs à la formation <strong>de</strong>s séminaristes; ne<br />

pas solliciter la reconnaissance dʹutilité publique pour les Œuvres qui risqueraient dʹêtre sous la dépendance du<br />

gouvernement.<br />

Chaville, 2 septembre 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Dieu soit béni <strong>de</strong>s bons résultats <strong>de</strong> votre adoration et <strong>de</strong> votre distribution <strong>de</strong> prix;<br />

tâchez maintenant <strong>de</strong> vous reposer un peu; ces <strong>de</strong>ux gran<strong>de</strong>s entreprises nʹont pas dû se<br />

1298


mettre sur pied sans une fatigue assez notable; il ne faudrait pas, par un travail forcé, per‐<br />

dre en peu <strong>de</strong> temps tout le bon effet <strong>de</strong> votre saison <strong>de</strong> bains. Je suis bien satisfait que no‐<br />

tre cher M. [Adolphe] Lainé vous ait aidé efficacement; je savais dʹavance quʹil sʹy porte‐<br />

rait <strong>avec</strong> une parfaite bonne volonté; tous nos jeunes séminaristes se prêtent <strong>avec</strong> bonne<br />

grâce et intelligence à tout bon office quʹon leur <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pour le bien <strong>de</strong>s œuvres.<br />

Je ne pense pas quʹil y ait besoin quʹon achète une montre; jʹen ai plusieurs, dont<br />

quelques‐unes sont bonnes; on pourra en donner une à M. Lainé si la sienne est hors <strong>de</strong><br />

service.<br />

Quant à lʹargent (25f) quʹil mʹa remis, il a été employé immédiatement à acheter une<br />

soutane qui a coûté 50f. Vous semblez ne pas bien saisir dʹoù vient cet argent. Voici: M me<br />

<strong>de</strong> Bréda, dans lʹorigine, avait promis quʹelle subviendrait aux frais <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> M.<br />

Adolphe. Une première année, elle donna 600f qui <strong>de</strong>vaient être partagés entre lui et son<br />

frère. Lʹannée suivante, elle donna, je crois, seulement 150 ou 200f pour les <strong>de</strong>ux frères.<br />

Dernièrement, elle a cru mieux dʹavertir M. Adolphe quʹelle avait résumé ces secours en<br />

une petite rente annuelle <strong>de</strong> 100f quʹelle avait constituée chez son notaire. Nous acceptons<br />

<strong>avec</strong> reconnaissance ce don, puisquʹil est purement gratuit et charitable. Mais vous com‐<br />

prendrez, et notre cher M. Adolphe aussi, que lʹai<strong>de</strong>, tout aimable quʹil soit, compense peu<br />

les frais <strong>de</strong> la pension <strong>de</strong> 800f au séminaire et les frais dʹentretien et <strong>de</strong> livres et menues<br />

dépenses. M me <strong>de</strong>s Réaux avait, <strong>de</strong> son côté, assuré quʹelle se chargerait dʹune part <strong>de</strong> la<br />

pension, ou tout au moins <strong>de</strong> lʹentretien; ses vues ont été changées ou mal comprises, sans<br />

doute, car jamais une obole ne nous est venue <strong>de</strong> ce côté. Je ne sais si ces détails sont<br />

connus <strong>de</strong> notre cher M. Adolphe; il est peut‐être bien <strong>de</strong> les lui dire, non assurément pour<br />

diminuer sa reconnaissance pour M me <strong>de</strong> Bréda qui a été, <strong>de</strong>puis longues années, une vraie<br />

bienfaitrice pour lui et pour son frère, mais afin que le véritable état <strong>de</strong>s choses soit bien<br />

posé.<br />

La retraite commencera le 28 <strong>de</strong> ce mois; on avait un peu pensé à la donner à Cha‐<br />

ville, à titre dʹessai, mais je commence à douter quʹon sʹy déci<strong>de</strong> en voyant la multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s<br />

dispositions quʹil faudrait prendre pour héberger et faire vivre ensemble plus <strong>de</strong> 60 per‐<br />

sonnes au noviciat (non compris les 10 étudiants) [10 étudiants latinistes: Frézet, Rousseau,<br />

Pialot, Mondor, Chupin, Lepage, Vernay, Sauvage, Herlicq, petit domestique, Nicolet]; il<br />

nʹy a guère <strong>de</strong> moyens présentement que pour 40; il faudrait amener tout le nécessaire,<br />

pour le reste, <strong>de</strong> Vaugirard.<br />

Notre jeune M. Magnien vient dʹarriver; nous attendons M. Risse du 16 au 20. Je<br />

vous ai dit que M. Girard était venu <strong>de</strong> Rome bien délabré; il se refait lentement.<br />

Je croyais lʹaffaire <strong>de</strong> la maison S t ‐Jacques terminée. Détournez M. Caille du projet<br />

<strong>de</strong> reconnaissance <strong>de</strong> cette maison comme établissement dʹutilité publique. Cʹest, au sen‐<br />

timent <strong>de</strong> religieux fort graves que jʹai consultés récemment, un véritable leurre qui nʹexo‐<br />

nère pas réellement les établissements, qui les soumet à <strong>de</strong>s dépendances gênantes à<br />

lʹégard <strong>de</strong> lʹadministration et qui, en temps mauvais, les met sous la main du Gouverne‐<br />

ment pour être très simplement confisqués. Tant quʹun immeuble reste propriété person‐<br />

nelle, on sʹen empare plus difficilement. Dans les conditions les mieux assises, le droit <strong>de</strong><br />

propriété est aujourdʹhui bien affaibli, il ne faut pas, je crois, le réduire presque à néant; tel<br />

est aussi lʹavis <strong>de</strong> M. le Supérieur <strong>de</strong>s Lazaristes dont la Maison‐Mère, objet pour sa<br />

Congrégation <strong>de</strong> dépenses et acquisitions immenses, lui semble néanmoins mal assurée à<br />

cause <strong>de</strong> cette dépendance du Gouvernement.<br />

1299


Adieu, mon bien bon ami, je recomman<strong>de</strong> au Seigneur toutes vos âmes, sans oublier<br />

les enveloppes tant quʹelles seront utiles selon sa Sagesse.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1335 à M. Maignen<br />

MLP. convoque M. Maignen à un Conseil qui doit traiter <strong>de</strong> la situation <strong>de</strong> la communauté romaine.<br />

Vaugirard, 3 septembre 1868<br />

Mon bien cher enfant,<br />

Je reçois une dépêche <strong>de</strong> Rome; les zouaves sont <strong>de</strong> retour ; les <strong>de</strong>ux Cercles sont<br />

ouverts, M. Charrin est mala<strong>de</strong>; M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>avec</strong> instance <strong>de</strong><br />

lʹai<strong>de</strong>. Il est urgent que nous y pourvoyions; venez donc <strong>de</strong>main vendredi, à 2h., à Vaugi‐<br />

rard; je vais faire prévenir aussi M. Paillé à Chaville.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

8h. du soir Le <strong>Prevost</strong><br />

1336 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Embarras <strong>de</strong> MLP. pour venir en ai<strong>de</strong> à la communauté <strong>de</strong> Rome. Avis sur la pratique <strong>de</strong> la pauvreté.<br />

Vaugirard, 5 septembre 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

La retraite commencera le 28 septembre et finira le samedi 3 octobre, au matin; il<br />

semble quʹen cette limite, elle convient à la plupart <strong>de</strong> nos frères. Le r.p. Cotel mʹa dit quʹà<br />

partir du 20 septembre, il serait à notre disposition; je lui ai écrit que nous nous arrêtions<br />

pour lʹouverture au 28; je ne pense pas que cet arrangement souffre aucune difficulté.<br />

Je tiendrai compte, si je le puis, <strong>de</strong> votre remarque au sujet <strong>de</strong>s petites débilités du f.<br />

Hubert, parce que je crois quʹil a assez <strong>de</strong> foi et <strong>de</strong> cœur pour se fortifier <strong>avec</strong> les années, et<br />

aussi parce quʹune pareille mollesse pourrait nʹêtre pas à la hauteur <strong>de</strong>s abnégations quʹil<br />

faut pratiquer à Rome.<br />

Les zouaves étant revenus, les <strong>de</strong>ux Cercles fonctionnent; M. Charrin est mala<strong>de</strong> et<br />

réduit à lʹinaction; M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] est entre les <strong>de</strong>ux Cercles et la maison <strong>de</strong><br />

lʹagent <strong>de</strong> la Commission, M. Descemet, absent pour plusieurs semaines et quʹil faut rem‐<br />

placer plusieurs fois par semaine dans les audiences et renseignements, etc. quʹil donne<br />

aux militaires. Cette situation est intolérable. M. <strong>Jean</strong>‐Marie, par télégramme, me <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />

en hâte du secours; je réponds <strong>de</strong> même que M. Emile [Beauvais] et un autre vont partir<br />

dans quelques jours. De là, gran<strong>de</strong> gêne pour tous nos services, pour la conduite, en parti‐<br />

culier, <strong>de</strong>s 27 apprentis <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Vaugirard que M. Emile dirigeait <strong>de</strong>puis quelque<br />

temps. MM. Myionnet et Lantiez me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt si M. Watelet pourrait supporter cet em‐<br />

ploi passablement durant <strong>de</strong>ux mois environ que peut durer lʹabsence <strong>de</strong> M. Emile, jusquʹà<br />

ce que M. Girard, bien languissant, soit assez remis pour reprendre sa place à Rome. Quʹen<br />

pensez‐vous? Tous ces détails sont pour vous et pour M. Caille.<br />

Durant les vacances ordinairement, le temps du sommeil est un peu allongé quand<br />

les emplois nʹy mettent point obstacle.<br />

1300


Les ff. ne peuvent rien accepter <strong>de</strong> leurs familles ou autrement que conditionnelle‐<br />

ment. Ce quʹils ont reçu appartient <strong>de</strong> droit absolu à la Communauté; ils ont reçu pour<br />

elle, et non pour eux; elle dispose librement <strong>de</strong>s choses ainsi acceptées et en attribue<br />

lʹusage à qui elle le juge bon; il faut poser ces principes et les autres concernant la pauvre‐<br />

té, lʹobéissance, etc. et les faire exécuter dans la pratique; il est à propos que M. Hubert sa‐<br />

che cela; vous jugerez sʹil doit gar<strong>de</strong>r son chapeau; il faut quʹil vous remette lʹargent, vous<br />

le lui donnerez à mesure que vous croirez pouvoir le faire; nous ne fléchissons point sur<br />

ces principes; si on les a méconnus, cʹest par surprise ou à notre insu. Il faut prendre dou‐<br />

cement le f. Hubert, jeune et peu fort encore, mais il faut, en direction, lʹéclairer et tâcher<br />

dʹen faire un homme, un chrétien un peu ferme, un religieux. Son voyage dans sa famille<br />

aura eu lʹeffet inévitable <strong>de</strong> ces excursions irrégulières: un affaiblissement, au moins mo‐<br />

mentané, <strong>de</strong> lʹesprit religieux.<br />

Nous ferons , pour votre personnel, <strong>de</strong> notre mieux, mais nous sommes éprouvés<br />

présentement par les charges <strong>de</strong> Rome. Chacun sentira que nous <strong>de</strong>vons accepter et parta‐<br />

ger fraternellement la grâce que toute épreuve comporte <strong>avec</strong> elle.<br />

Adieu, bien cher ami, je ne sais encore si la retraite se fera à Vaugirard ou à Cha‐<br />

ville; je vous le dirai. Mille affections tendres à tous, à M. Caille en particulier, ou plutôt en<br />

particulier à chacun; ils nous sont tous vraiment chers en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Pour M. Trouille, combien il serait plus sage quʹil fît la retraite <strong>avec</strong> nous et quʹil prît<br />

ensuite un parti franc et net; les <strong>de</strong>mi‐mesures sont défectueuses. Dieu donne <strong>de</strong>s grâces<br />

surabondantes aux volontés qui se montrent généreuses.<br />

1337 à M. d’Arbois<br />

Date <strong>de</strong> la prochaine retraite <strong>de</strong> Communauté prêchée par le père Cotel.<br />

Vaugirard, 5 septembre 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je me hâte <strong>de</strong> vous dire que notre retraite commencera le lundi, 28 <strong>de</strong> ce mois; elle<br />

sera donnée par le r.p. Cotel, Supérieur <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong>s Jésuites <strong>de</strong> Troyes.<br />

Assurez tous nos ff. <strong>de</strong> mes affectueux sentiments et croyez aussi à mon tendre dé‐<br />

vouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1338 à M. Caille<br />

MLP. propose un changement <strong>de</strong> personnel.<br />

Chaville, 10 septembre [1868]<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. <strong>de</strong> Varax a dû vous dire, dʹaprès une lettre que lui a écrite <strong>de</strong> ma part M. Trous‐<br />

seau, que nous étions obligés <strong>de</strong> mettre M. Hubert à Nazareth pour remplacer M. Jouin<br />

qui se rend à Rome <strong>avec</strong> M. Emile [Beauvais] pour secourir M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet],<br />

qui reste seul chargé <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux Cercles et du remplacement temporaire <strong>de</strong> lʹagent <strong>de</strong> la<br />

Commission, MM. Girard et Charrin sʹétant trouvés lʹun et lʹautre mala<strong>de</strong>s à la fois.<br />

1301


Pour que lʹéloignement <strong>de</strong> M. Hubert ne vous soit pas un détriment pour vos servi‐<br />

ces, je vous propose dʹajourner un peu la venue <strong>de</strong> M. Charles Watelet au Noviciat, jus‐<br />

quʹau retour <strong>de</strong> M. Emile qui pourrait revenir à Vaugirard dans quelques mois, quand M.<br />

Girard, bien remis <strong>de</strong> ses malaises <strong>de</strong> santé, sera en état <strong>de</strong> retourner à Rome.<br />

Si vous teniez absolument à ce que M. Charles vînt dès à présent au Noviciat, il se‐<br />

rait possible pour nous <strong>de</strong> vous envoyer un jeune frère <strong>de</strong> bonne espérance, [M. Félix Vin‐<br />

cent] récemment arrivé parmi nous et qui pourrait faire quelques mois <strong>de</strong> postulat chez<br />

vous et remplacer M. Charles ou M. Hubert.<br />

Ce <strong>de</strong>rnier moyen serait toutefois moins convenable pour nous, parce que le jeune<br />

frère en question ai<strong>de</strong> M. Faÿ pour les étu<strong>de</strong>s et est chargé dʹune classe à Chaville. Toute‐<br />

fois, si M. Charles pouvait faire, comme je le suppose, cette petite classe <strong>de</strong>s commençants<br />

à 2 ou 3 élèves et une heure ou une heure et <strong>de</strong>mie seulement, le changement aurait moins<br />

dʹinconvénient.<br />

Vous ferez donc <strong>avec</strong> M. <strong>de</strong> Varax le choix qui vous paraîtra le meilleur entre les<br />

<strong>de</strong>ux moyens proposés.<br />

Mille affections <strong>de</strong> tous pour vous et pour tous nos frères.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1339 à M. <strong>de</strong> Montrond<br />

Condoléances à lʹoccasion du décès <strong>de</strong> son épouse, <strong>de</strong>meurée 32 ans le partage <strong>de</strong> sa vie. MLP. fait appel à lʹesprit<br />

<strong>de</strong> foi <strong>de</strong> cet ami intime, profondément chrétien.<br />

Vaugirard, 12 septembre 1868<br />

Mon bien cher ami,<br />

Votre première lettre mʹavait fait pressentir le coup douloureux dont vous et vos<br />

chers enfants viennent dʹêtre frappés. Vous le redoutiez déjà vous‐même, mais le cœur<br />

nʹest jamais assez préparé pour <strong>de</strong> si durs sacrifices. Il semble parfois que le bon Maître<br />

éprouve bien ru<strong>de</strong>ment ses fidèles serviteurs! Mais à qui sʹadressera‐t‐Il pour porter <strong>avec</strong><br />

Lui lʹinévitable croix qui doit peser sur lʹhumanité coupable? Pourrions‐nous nous plain‐<br />

dre quʹIl nous préfère et nous donne témoignage <strong>de</strong> la confiance quʹIl a en nous? La croix,<br />

dʹailleurs, est toujours bienfaisante quand on lʹaccepte comme vous, en gémissant sans<br />

doute, mais <strong>avec</strong> un cœur soumis. Un accroissement <strong>de</strong> biens spirituels vous adviendra<br />

ainsi quʹà vos chers enfants et Dieu, qui vous retire une consolation dans un appui sensi‐<br />

ble, interviendra Lui‐même pour combler par sa grâce le vi<strong>de</strong> quʹIl a creusé. Vous savez<br />

bien toutes ces choses, mon bien bon ami, mais je les répète néanmoins afin dʹêtre en sym‐<br />

pathie <strong>avec</strong> vous et <strong>de</strong> vous assurer toute la part que je prends ici à vos pensées et à vos<br />

sentiments.<br />

Jʹallais monter à lʹautel quand jʹai reçu votre lettre. Jʹai porté tout aussitôt aux pieds<br />

du Seigneur vos intentions pour la chère âme quʹIl a rappelée à Lui et pour sa famille affli‐<br />

gée qui souffre si douloureusement dʹêtre, pour un temps, séparée dʹelle. Lʹheure <strong>de</strong> la ré‐<br />

union viendra, et ce sera sans crainte <strong>de</strong> nouveaux brisements.<br />

Croyez bien, mon cher ami, à tous mes sentiments <strong>de</strong> tendre dévouement, et assu‐<br />

rez aussi vos chers enfants <strong>de</strong> ma sincère affection en N.S. et en sa T. S te Mère, consolatrice<br />

<strong>de</strong>s affligés.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1302


1340 à M. Tourniquet<br />

Envoi <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux frères à Rome, les frères Beauvais et Jouin.<br />

Vaugirard, 13 septembre 1868<br />

Mon bien cher fils en N.S.,<br />

Le secours que vous nous avez <strong>de</strong>mandé vous arrive enfin, bien plus tard que nous<br />

ne lʹeussions voulu, mais sans que nous ayons à nous reprocher dʹavoir rien négligé pour<br />

vous ai<strong>de</strong>r plus tôt. Les difficultés <strong>de</strong> saison ou incommodités <strong>de</strong> santé à craindre ne nous<br />

eussent point arrêtés; lʹabsence <strong>de</strong> M. Keller et <strong>de</strong> tous les membres <strong>de</strong> la Commission en<br />

position <strong>de</strong> sʹentendre <strong>avec</strong> nous a été le seul obstacle à un plus prompt envoi <strong>de</strong> nos ff. Ils<br />

arrivent en très bonnes dispositions et sont prévenus lʹun et lʹautre que vous restez le chef<br />

<strong>de</strong> la petite communauté <strong>de</strong> Rome et quʹils doivent accepter les directions que, <strong>de</strong>vant<br />

Dieu, vous aurez jugé les meilleures pour eux‐mêmes et pour les œuvres. Jʹespère que lʹes‐<br />

prit du Seigneur sera au milieu <strong>de</strong> vous et quʹIl vous inspirera à tous la charité qui vous<br />

rendra douce la tâche que vous aurez à porter pour Lui. Je souhaite aussi que, par le même<br />

esprit, une sainte union ne fasse <strong>de</strong> vous tous quʹune seule vie, pour ainsi dire, et quʹun<br />

cœur et quʹune âme.<br />

Embrassez pour moi mon f. Charrin et croyez tous les <strong>de</strong>ux à ma tendre affection en N.S.<br />

Votre ami et Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1341 à M. Maignen<br />

MLP. cherche à guérir le frère Maignen dʹun accès <strong>de</strong> misanthropie. Ses frères nʹont pas quʹun côté noir; il faut<br />

apercevoir le côté blanc et le côté noir, et ʺbénir Dieu qui se montre dans le premier, en Le priant dʹéclairer aussi<br />

le secondʺ.<br />

Chaville, 14 septembre 1868<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Chacun <strong>de</strong> nous a un bon et un mauvais côté, un côté blanc et un côté noir, et peut<br />

être, conséquemment, jugé ou sévèrement ou favorablement, selon la disposition <strong>de</strong> lʹes‐<br />

prit et selon lʹaspect par lequel nous sommes envisagés. En ce moment, vous regar<strong>de</strong>z vos<br />

voisins du côté noir et je ne mʹétonne point que vous tourniez à la misanthropie. Regar<strong>de</strong>z<br />

du côté opposé, et vous aurez dʹautres sentiments. Il est une troisième manière <strong>de</strong> voir qui<br />

convient à une âme chrétienne et charitable, cʹest dʹapercevoir ensemble le côté blanc et le<br />

côté noir et <strong>de</strong> bénir Dieu qui se montre dans le premier, en le priant dʹéclairer aussi le se‐<br />

cond. Cʹest ce que vous faites le plus souvent et ce que vous ferez encore quand un peu<br />

dʹirritation, qui vous a surpris ces temps‐ci, sera passé. Je tiendrai compte, aussi bien que je<br />

le pourrai, <strong>de</strong> vos observations en ce quʹelles ont <strong>de</strong> fondé; ceux qui en sont lʹobjet ont<br />

pour excuse, M. Paillé, son état <strong>de</strong> souffrance qui était <strong>de</strong>puis quelques mois plus pénible<br />

que <strong>de</strong> coutume, M. Hello, le manque dʹavertissements et <strong>de</strong> direction suivie. La droiture<br />

<strong>de</strong> leur intention trouvera grâce <strong>de</strong>vant Dieu qui les relèvera lʹun et lʹautre et qui ne per‐<br />

mettra pas que ses dons, si abondants en eux, soient amoindris. Il leur donnera une lu‐<br />

mière plus gran<strong>de</strong> pour voir les points imparfaits quʹils ont à corriger. Mais croyons bien<br />

nous‐mêmes, cher ami, que nous avons besoin aussi dʹune semblable lumière, la parabole<br />

<strong>de</strong> la paille et <strong>de</strong> la poutre ne <strong>de</strong>meure pas sans raison dans lʹEvangile; tout passe, mais la<br />

parole éternelle ne passe point.<br />

1303


Adieu, mon cher enfant, ne négligez pas le conseil quʹon donne souvent en direc‐<br />

tion spirituelle <strong>de</strong> prier pour ceux quʹon a quelque peine à supporter; votre charité y ga‐<br />

gnera, vos frères en auront du profit et vous même aurez un vrai mérite <strong>de</strong>vant Dieu.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1342 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Dévotion à N.D. <strong>de</strong> La Salette. Pourquoi nous lʹavons; comment la répandre. Nouvelles <strong>de</strong>s frères. Mort dʹun pe‐<br />

tit orphelin.<br />

Chaville, 20 septembre 1868<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je suis heureux <strong>de</strong> penser quʹà Amiens vous étiez en union <strong>avec</strong> nous pour honorer<br />

et remercier N.D. <strong>de</strong> la Salette. Sa protection sur nous est sensible; pourquoi nous a‐t‐elle<br />

choisis comme indignes agents <strong>de</strong> son culte à Paris? Par cette raison, sans doute, que nous<br />

étions les plus petits et les plus ignorés comme les <strong>de</strong>ux petits bergers; heureuse petitesse,<br />

si elle nous vaut <strong>de</strong> pareils privilèges!<br />

Malgré un temps affreux, les messes, à toutes les heures, ont été suivies presque<br />

comme toujours; le soir, le temps sʹétait éclairci, la procession avait affluence comme <strong>de</strong><br />

coutume. Il serait bien facile <strong>de</strong> rendre cette dévotion populaire, même à Paris, si on avait<br />

un peu <strong>de</strong> liberté pour indiquer quʹelle a un petit foyer dans notre humble sanctuaire.<br />

Nous avons proposé à lʹassemblée un petit commencement dʹassociation <strong>de</strong> prières et <strong>de</strong><br />

réunions; la proposition a été assez goûtée; peut‐être en résultera‐t‐il un mouvement un<br />

peu plus soutenu dans la fréquentation <strong>de</strong> la chapelle; si cela prenait, on ferait une petite<br />

exhortation chaque mois, à la messe <strong>de</strong> 9h., le samedi. M. Courta<strong>de</strong> a parlé le matin très<br />

bien; le soir M. Chaverot bien aussi, un peu trop exclusivement pour les enfants.<br />

Vous avez compris <strong>de</strong> vous‐même, cher ami, quel détriment ce serait pour notre<br />

cher M. [Adolphe] Lainé dʹinterrompre <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s bien commencées, qui se suivent en <strong>de</strong><br />

si bonnes conditions <strong>avec</strong> <strong>de</strong>ux autres <strong>de</strong> nos ff. dont la société le soutient et dont le<br />

concours est aussi un moyen dʹémulation. Ce serait à plaisir jeter à terre lʹœuvre édifiée<br />

par la divine Provi<strong>de</strong>nce. Nous sommes trop accoutumés à étudier ses dispositions pour<br />

les méconnaître ici.<br />

Je bénis Dieu <strong>de</strong>s bons sentiments <strong>de</strong> nos ff. et <strong>de</strong> nos chers postulants en particu‐<br />

lier. M. Hubert va bien jusquʹici à Nazareth; il a plu beaucoup aux jeunes gens par sa sim‐<br />

plicité. Nos ff. Emile [Beauvais] et Jouin ont dû arriver à Rome vendredi; M. Charrin est<br />

faiblement acclimaté encore.<br />

Ici, M. Girard, <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux jours, éprouve quelque apparence dʹamélioration.<br />

Nous avons <strong>de</strong> mauvaises nouvelles du f. Alexandre [Legrand] et, à Vaugirard, le<br />

jeune [Pierre] Pialot semble décliner définitivement.<br />

Dix <strong>de</strong> nos enfants, pris ensemble <strong>de</strong> la rougeole, vont mieux. Lʹépidémie semble<br />

sʹarrêter.<br />

Un charmant petit mala<strong>de</strong> qui, <strong>de</strong>puis plusieurs mois, avait tourné à lʹhydropisie,<br />

est mort la veille <strong>de</strong> la fête <strong>de</strong> la Salette. Cʹétait un petit ange <strong>de</strong> piété et <strong>de</strong> résignation,<br />

tendrement dévot à la S te Vierge; elle lʹaura pris pour sa fête.<br />

Mille affections à vous et à tous; jʹécris au jour tombé.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1304


Si M. Trousseau peut plus commodément pour vous faire sa retraite à Amiens, il sʹy<br />

soumettra volontiers.<br />

1343 à M. dʹArbois<br />

Renseignements nécessaires pour la bonne organisation <strong>de</strong> la retraite.<br />

Chaville, 22 septembre 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Le frère qui prépare les logements pour la retraite vous prie instamment dʹécrire un<br />

mot à Vaugirard pour lui dire quels sont ceux <strong>de</strong> votre maison qui doivent venir pour y<br />

participer.<br />

MM. Boiry et Cauroy se proposent <strong>de</strong> partir samedi pour se rendre à Angers.<br />

Croyez bien toujours, mon cher enfant en N.S., à mes bien dévoués sentiments.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1344 à M. Bérard<br />

Exhortation à lʹobéissance, et à la confiance envers les supérieurs, malgré ses répugnances et la défiance <strong>de</strong> soi‐<br />

même.<br />

Chaville, 8 octobre 1868<br />

Mon bien cher enfant,<br />

Jʹapprouve vos sages défiances <strong>de</strong> vos forces à lʹégard du patronage; plus <strong>de</strong> sang‐<br />

froid et dʹempire sur vous‐même vous serait assurément nécessaire pour cette œuvre, mais<br />

les supérieurs dʹAmiens, comme ceux <strong>de</strong> Vaugirard, sont loin <strong>de</strong> faire tout ce qui leur<br />

semblerait le meilleur, faute <strong>de</strong> moyens pour y pourvoir. Je leur communique vos observa‐<br />

tions; si nonobstant, ils vous appellent à cet emploi, allez <strong>avec</strong> confiance puisque vous se‐<br />

rez dans lʹobéissance; ai<strong>de</strong>z‐vous par la pru<strong>de</strong>nce autant que vous pourrez. Dieu vous ai‐<br />

<strong>de</strong>ra par sa grâce, si vous lʹinvoquez <strong>avec</strong> piété et foi.<br />

Adieu, mon bien cher enfant.<br />

Votre ami et Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1345 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

MLP. lui fait part <strong>de</strong>s recommandations adressées au frère Bérard.<br />

Vaugirard, 10 octobre 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je crois, comme vous, que les mesures dʹessai que vous prenez sont les meilleures<br />

dans lʹétat <strong>de</strong> transition où vous vous trouvez; espérons que Dieu nous donnera à son<br />

heure les moyens <strong>de</strong> poser mieux et plus précisément les choses.<br />

Je vous renvoie le modèle <strong>de</strong> testament; M. Paillé juge quʹune entente <strong>avec</strong> M. <strong>de</strong><br />

Bretenières serait un moyen souverain et qui assurerait tout, mieux que quoi que ce soit.<br />

1305


Jʹécris un mot à M. Bérard pour lui recomman<strong>de</strong>r beaucoup <strong>de</strong> circonspection dans<br />

les soins et surveillances <strong>avec</strong> les enfants, pas <strong>de</strong> préférences, pas <strong>de</strong> familiarités, les temps<br />

sont mauvais; les Frères <strong>de</strong>s Ecoles se plaignent dʹavoir plus <strong>de</strong> peines <strong>de</strong> ce côté quʹils<br />

nʹen ont jamais eues; un <strong>de</strong> nos patronages ici a beaucoup <strong>de</strong> misères en ce sens et est obli‐<br />

gé à trancher dans le vif par un renvoi <strong>de</strong> nombre <strong>de</strong> sujets. Veillez donc <strong>de</strong> votre côté sur<br />

votre entourage, cʹest un <strong>de</strong>s grands soins <strong>de</strong> notre tâche.<br />

Tout va ici comme <strong>de</strong> coutume, M. Girard avance peu; nous avons <strong>de</strong> bonnes nou‐<br />

velles <strong>de</strong> Rome. M. dʹArbois me <strong>de</strong>man<strong>de</strong> vivement à Angers pour dimanche, mais je ne<br />

vois pas jusquʹici comment me faire remplacer un dimanche à Chaville; notre pénurie <strong>de</strong><br />

prêtres se fait, en toute occasion, sentir. Rogate Dominum etc.<br />

Adieu, mon bien cher enfant en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1346 à M. Bérard<br />

Encouragements à surmonter sa défiance envers lui‐même. Etre, pour les enfants qui lui sont confiés, ʺun bon<br />

ange gardienʺ.<br />

Vaugirard, 10 octobre [1868]<br />

Mon bien cher enfant,<br />

M. <strong>de</strong> Varax me dit que, surmontant vos justes défiances, vous vous mettez <strong>de</strong> bon<br />

cœur à la tâche <strong>avec</strong> les apprentis; cʹest ce qui était à faire puisque, provisoirement du<br />

moins, on nʹavait pas dʹautre moyen; priez Dieu fidèlement et la Ste Vierge, le secours vous<br />

viendra dʹEn Haut.<br />

Je vous recomman<strong>de</strong> <strong>avec</strong> une vive instance une gran<strong>de</strong> circonspection dans vos<br />

surveillances, matin, soir et toujours à lʹégard <strong>de</strong>s enfants; évitez toutes préférences, fami‐<br />

liarités, soyez leur ange gardien et soyez sûr que Dieu vous récompensera, car ces âmes lui<br />

sont infiniment chères, si quelquʹune se perdait par votre faute, ce serait une immense res‐<br />

ponsabilité; les termes <strong>de</strong> lʹEvangile sur ce point sont terrifiants.<br />

Je compte sur vous et sur tous nos ff. dʹAmiens pour vous tenir à la hauteur <strong>de</strong> la<br />

sainte mission qui vous est confiée.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, croyez à ma tendre et paternelle affection en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1347 à M. Tourniquet<br />

Œuvre <strong>de</strong> Rome. Humilité et perspicacité <strong>de</strong> jugement <strong>de</strong> MLP. Ne pas solliciter dʹaudience privée du Pape. In‐<br />

convénients dʹaccepter <strong>de</strong>s dépôts dʹargent. Nouvelles <strong>de</strong> la Communauté et <strong>de</strong>s Œuvres. Pour le frère Girard,<br />

ʺle mieux est lent à venirʺ.<br />

Vaugirard, 10 octobre 1868<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vais répondre un peu en hâte, mais sans retard, à vos <strong>de</strong>rnières lettres.<br />

Pour lʹaudience que vous voulez solliciter du St Père, nos ff. du Conseil pensent<br />

<strong>avec</strong> moi quʹil serait plus humble et plus conforme à la mo<strong>de</strong>ste position que nous avons à<br />

1306


Rome que vous vous contentiez <strong>de</strong> voir le Souverain Pontife et <strong>de</strong> solliciter sa bénédiction<br />

dans une <strong>de</strong> ses audiences publiques. Notre communauté a rendu encore <strong>de</strong>s services trop<br />

peu longs et trop peu manifestes dans la Cité Catholique pour quʹelle se pose ainsi comme<br />

un corps dont vous seriez les représentants. Attendons pour nous mettre en évi<strong>de</strong>nce que<br />

la Provi<strong>de</strong>nce nous en donne les occasions et ne prenons pas les <strong>de</strong>vants sur ses <strong>de</strong>sseins;<br />

le S t Père nous a envoyé déjà <strong>de</strong>s indulgences et M. Maignen nous a rapporté sa bénédic‐<br />

tion écrite <strong>de</strong> sa main; je crois que présentement nous <strong>de</strong>vons nous en tenir à ces faveurs<br />

déjà bien précieuses.<br />

Nous voyons <strong>de</strong>s difficultés assez graves aux dépôts quʹon vous propose <strong>de</strong> rece‐<br />

voir, <strong>de</strong> lʹargent et <strong>de</strong>s effets <strong>de</strong>s soldats. Pour lʹargent, il serait nécessaire <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r <strong>avec</strong><br />

un ordre rigoureux pour lʹenregistrement <strong>de</strong>s sommes reçues ou payées et peut‐être don‐<br />

ner aux déposants un petit livret où seraient inscrites ces sommes et quʹils gar<strong>de</strong>raient<br />

<strong>avec</strong> eux; beaucoup savent mal compter ou manqueront <strong>de</strong> mémoire et pourront vous ac‐<br />

cuser <strong>de</strong> soustraire leur argent. Pour leurs malles, avez‐vous un lieu convenable pour les<br />

déposer? les punaises sont bien à craindre. Lʹun, lʹautre <strong>de</strong> ces soldats auront <strong>de</strong>s choses à<br />

prendre souvent dans leurs malles; si on ne les accompagne, vous aurez bientôt <strong>de</strong>s plain‐<br />

tes; les malles imparfaitement fermées seront visitées par les curieux, peut‐être forcées et<br />

dévalisées. Ce ne serait donc que par une constante et invariable vigilance quʹon prévien‐<br />

drait tous ces inconvénients graves; pourrez‐vous lʹobserver? Serez‐vous assez libres, as‐<br />

sez attentifs pour le faire exactement? La chose est bien douteuse. Pesez bien toutes ces<br />

circonstances et nʹacceptez le dépôt, soit pour lʹargent, soit pour les effets, quʹautant que<br />

vous pourrez en conscience répondre que toutes les précautions nécessaires seront fidèle‐<br />

ment observées.<br />

M. Keller ne nous a pas encore répondu concernant la circulaire projetée pour les li‐<br />

braires; il pensera que ce nʹest pas à vous qui êtes inconnus, mais au Comité à se mettre en<br />

avant pour cette <strong>de</strong>man<strong>de</strong>. M. Girard paraît prendre la chose assez à cœur; dès quʹil va se<br />

sentir un peu mieux, il va sʹen occuper et se concerter <strong>avec</strong> les MM. du Comité.<br />

Le mieux pour M. Girard est lent à venir, le mé<strong>de</strong>cin répond toutefois <strong>de</strong> le remettre<br />

sur pied. M. [Pierre] Pialot languit constamment à lʹinfirmerie; notre pauvre Alexandre<br />

[Legrand], dont le mal augmente, va être transféré à Lyon chez les Frères <strong>de</strong> S t <strong>Jean</strong> <strong>de</strong><br />

Dieu.<br />

M. Gresser, toujours dévoué au patronage S t ‐Charles et résidant à Nazareth, reste<br />

impuissant pour prendre une décision nette sur sa position; vous voyez combien nous<br />

avons besoin <strong>de</strong> prières et <strong>de</strong> secours <strong>de</strong> Dieu. La retraite a eu lieu à Vaugirard, non à<br />

Chaville; elle a été donnée par le r.p. Cotel, Supérieur <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Troyes, qui a fait le<br />

Catéchisme <strong>de</strong>s vœux; lʹensemble, un peu grave, a néanmoins été bon et salutaire. Je me ré‐<br />

jouis bien <strong>de</strong>s soins que vous donne si charitablement le bon p. Laurençot; offrez‐lui mon<br />

respect et ma vive reconnaissance.<br />

Assurez aussi nos chers ff. Emile [Beauvais], Charrin, Jouin <strong>de</strong> tous mes sentiments<br />

<strong>de</strong> tendre affection; leurs lettres nous ont fort intéressés.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1307


1348 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

MLP. ne peut lui donner <strong>de</strong> lʹai<strong>de</strong>. La santé du frère Girard ne sʹaméliore pas.<br />

Chaville, 14 octobre 1868<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je voudrais pouvoir vous donner quelque ai<strong>de</strong> pour vos <strong>de</strong>ux œuvres, malheureu‐<br />

sement nous sommes absolument au dépourvu; M. Girard est dans un état <strong>de</strong> santé qui ne<br />

lui permet aucun mouvement, il se lève très tard et se couche une partie du jour, et le soir<br />

se remet au lit à 7h 1/2 . Aucune amélioration sensible jusquʹici dans son mal qui déconcerte<br />

M. Jousset; sa faiblesse est telle quʹun tour <strong>de</strong> notre jardin est trop pour lui; vous voyez<br />

que lʹimpuissance est absolue; <strong>de</strong> tout lʹhiver, il ne pourra rien faire, trop heureux si, plus<br />

tard, il reprend quelques forces; on prétend que lʹhoméopathie nʹest pas le moyen quʹil<br />

faudrait prendre, je ne sais que faire, sinon <strong>de</strong> le recomman<strong>de</strong>r à Dieu. Dans le même<br />

temps, je lui rappellerai aussi vos besoins.<br />

A lʹoccasion, ne manquez pas <strong>de</strong> parler au r.p. Lazariste <strong>de</strong> notre jeune M. Lecamus;<br />

je désire bien savoir si on nous a tout dit.<br />

Merci pour le calice; il y en a un convenable à Angers; en tous cas, jʹeusse pris plutôt<br />

celui <strong>de</strong> Chaville.<br />

Mille affections à vous et à tous en N.S.<br />

Votre ami et Père dévoué<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Paillé se réjouit du bon vouloir <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Bretenières.<br />

1349 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Lʹorphelinat dʹAmiens. Fête à lʹŒuvre dʹAngers. La santé du frère Girard décline.<br />

Chaville, 22 octobre 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai, comme vous, la confiance que Dieu bénira lʹorphelinat <strong>de</strong> St ‐Vincent <strong>de</strong> Paul<br />

dʹAmiens; il nʹest pas à <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r que ce soit dès à présent une bénédiction dʹaccroisse‐<br />

ment, puisque nous sommes peu forts pour y subvenir et quʹil vaut mieux avant tout que<br />

nos ff. acquièrent <strong>de</strong> lʹexpérience pour la bonne direction <strong>de</strong> cette œuvre; mais, pour ces<br />

points essentiels, la grâce <strong>de</strong> Dieu ne nous fera point défaut; le développement viendra en‐<br />

suite par surcroît.<br />

Je vous remercie bien <strong>de</strong>s détails intéressants que vous me donnez sur la cérémonie;<br />

jʹai presque cru y être, ce qui est une joie véritable pour moi; je voudrais me trouver par‐<br />

tout où quelque chose dʹimportant se fait pour nos œuvres. Je redouterais, comme M.<br />

Caille, la présence habituelle en cette maison dʹun prêtre dʹune gran<strong>de</strong> autorité, sʹil nʹétait<br />

pas absolument <strong>de</strong>s nôtres; prenons bien gar<strong>de</strong> <strong>de</strong> nous donner un maître (qui a compa‐<br />

gnon, etc..) et <strong>de</strong> nous créer <strong>de</strong> sérieux embarras, laissons faire la Provi<strong>de</strong>nce, ne faisons<br />

pas trop nous‐mêmes; cʹest notre voie ordinaire, <strong>de</strong>meurons‐y. Je verrai si M. Lantiez ou<br />

M. Myionnet peuvent vous rendre une visite, je suis absent <strong>de</strong>puis samedi <strong>de</strong>rnier et je ne<br />

sais comment vont les choses ici.<br />

1308


Je suis arrivé hier au soir <strong>avec</strong> M. Myionnet <strong>de</strong> la solennité dʹAngers. Tout a été par‐<br />

fait (temps passable) cordialité, paternité par excellence dans les paroles et tous les gestes<br />

<strong>de</strong> M gr qui a charmé tout le mon<strong>de</strong> par sa bonté, chapelle fort jolie, assemblée nombreuse,<br />

presque tout le clergé dʹAngers, 14 chanoines en grand costume, députations <strong>de</strong> toutes les<br />

villes voisines: Nantes, etc, dîner <strong>de</strong> 100 couverts, chants bien exécutés, rien nʹa manqué.<br />

M. dʹArbois, sur pied incessamment, par grâce <strong>de</strong> Dieu reposé presque miraculeusement<br />

le len<strong>de</strong>main; la petite communauté va bien, les <strong>de</strong>ux séminaristes aussi; beau séminaire,<br />

maîtres et Directeurs excellents. On mʹa forcé à payer <strong>de</strong> ma personne, paroles par ci par<br />

là, visites nombreuses, courses pour voir les principaux monuments, dîners chez MM.<br />

Myionnet et Choyer, invitations <strong>de</strong> M gr non acceptées faute <strong>de</strong> temps; cʹétait beaucoup<br />

pour mes forces; je suis aujourdʹhui un peu souffrant, mais sans indice aucunement in‐<br />

quiétant.<br />

Priez beaucoup pour M. Girard dont la santé décline sensiblement et est pour nous<br />

une cause <strong>de</strong> grave sollicitu<strong>de</strong>. Je le trouve, au retour, définitivement au lit, ne prenant<br />

plus quʹun peu <strong>de</strong> lait comme <strong>de</strong>rnier essai. M. Jousset ne dissimule plus ses craintes; nous<br />

faisons une neuvaine à N.D. <strong>de</strong> la Salette; il me semble quʹil faut maintenant une interven‐<br />

tion surnaturelle, je crois que les moyens humains seront sans effet.<br />

Notre pauvre [Pierre] Pialot décline aussi et M. Alexandre [Legrand] nʹest pas<br />

mieux. Nʹoubliez pas, je vous prie, <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à lʹoccasion à lʹecclésiastique <strong>de</strong><br />

St‐Lazare qui connaît notre jeune M. Le Camus ce quʹil sait <strong>de</strong> ce jeune homme et <strong>de</strong>s vrais<br />

motifs qui lʹont fait éloigner du Séminaire <strong>de</strong> Tours.<br />

Adieu, mon bien bon ami; assurez M. Caille et nos ff. <strong>de</strong> mes affections bien dé‐<br />

vouées et croyez aussi à mes sentiments <strong>de</strong> tendre charité en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Jʹespère que M. Lantiez pourra, après la Toussaint, vous rendre une petite visite.<br />

1350 à M. Maignen<br />

Mort du frère Girard.<br />

Chaville, 24 octobre 1868<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Vous aurez déjà appris la mort <strong>de</strong> notre frère M. Girard; je ne vous recomman<strong>de</strong><br />

pas <strong>de</strong> prier pour lui et <strong>de</strong> faire prier à son intention; vous lʹaimiez comme ami et comme<br />

religieux. Lundi, à 9h., nous ferons son convoi; invitez‐y qui vous pourrez, car il nʹy aura<br />

guère que nous pour ce qui nous touche, sa famille avertira les siens.<br />

Je nʹai pas eu le temps <strong>de</strong> répondre à votre lettre à mon retour dʹAngers; jʹétais dʹail‐<br />

leurs embarrassé pour le faire; vos raisons sont excellentes, car vos difficultés sont extrê‐<br />

mes, mais les sollicitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> M. Paillé sont bien gran<strong>de</strong>s, puisquʹil ne peut plus suffire aux<br />

besoins <strong>de</strong> la maison.<br />

Je vous verrai bien prochainement, nous examinerons ce quʹil y a <strong>de</strong> mieux à faire;<br />

je nʹai pas dʹautre désir que <strong>de</strong> vous encourager tous.<br />

Votre tout affectionné ami et père,<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1309


1351 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Mort du frère Girard.<br />

Chaville, 25 octobre [1868]<br />

Mon bien cher fils et ami en N.S.,<br />

Notre f. M. Girard nʹa pu surmonter le mal dont il était atteint. Hier 24, à 9h. 1/2 du<br />

matin, il a rendu son âme à Dieu; le service aura lieu <strong>de</strong>main à Chaville, à 9h. Priez tous<br />

beaucoup pour lui. Sa mort a été parfaite <strong>de</strong> piété et <strong>de</strong> généreux sacrifice.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1352 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Mort du frère Girard. ʺdécédé en suite <strong>de</strong> ses travaux pour le service <strong>de</strong> Dieu et <strong>de</strong> lʹEgliseʺ. Pratiques <strong>de</strong> piété<br />

dans lʹInstitut. Progrès <strong>de</strong> lʹŒuvre <strong>de</strong> Rome.<br />

Chaville, 28 octobre 1868<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Lundi, nous avons accompagné les restes <strong>de</strong> notre cher f. M. Girard, quʹon a dépo‐<br />

sés dans le caveau commun, bien quʹil nʹeût point encore <strong>de</strong> vœux; cʹest en suite <strong>de</strong> ses<br />

travaux pour le service <strong>de</strong> Dieu et <strong>de</strong> lʹEglise quʹil est mort, ce titre valait bien quelque<br />

temps dʹancienneté <strong>de</strong> plus; la cérémonie a été pieuse et fraternelle; sa famille, ceux qui<br />

lʹont aimé et apprécié dans les œuvres étaient <strong>avec</strong> nous; nous prions pour lui maintenant;<br />

nos ff. ecclésiastiques disent à son intention 3 messes, les ff. laïcs offrent à la même inten‐<br />

tion 3 communions et 3 S ts Sacrifices.<br />

Le jeune Digeon ne peut prendre place dans la Communauté, ceux qui le connais‐<br />

sent bien pensent quʹil nʹy ferait pas le bien.<br />

Je ne vois pas dʹinconvénient à donner le crucifix à M. Watelet et à faire commencer<br />

son noviciat du 1 er novembre, puisquʹil vous donne satisfaction et bonne espérance pour<br />

lʹavenir. Jʹai aussi confiance comme vous.<br />

Pour le De profundis, cʹétait une dévotion <strong>de</strong> pure bonne volonté; il faudrait donc<br />

quʹelle fût dans lʹattrait du plus grand nombre et quʹelle ne vînt pas en surcharge par‐<br />

<strong>de</strong>ssus les autres piétés: déjà le soir, on dit le De profundis; il semble que cette itération peut<br />

être laissée au libre mouvement <strong>de</strong> chacun.<br />

On est convenu, en effet, quʹon offrirait le S t Sacrifice une fois par semaine à mes in‐<br />

tentions, cʹest‐à‐dire pour les intérêts les plus graves <strong>de</strong> lʹEglise et <strong>de</strong> notre petite famille,<br />

<strong>de</strong>ux intérêts qui se confon<strong>de</strong>nt et sont habituellement les mêmes pour moi; quelques‐uns,<br />

à cause <strong>de</strong> la pauvreté <strong>de</strong> leurs œuvres, ont apporté moins dʹexactitu<strong>de</strong> quʹil ne le fallait à<br />

cette pratique <strong>de</strong> foi; je crois quʹelle est salutaire, Dieu nous rendra ce que nous ferons ain‐<br />

si, en esprit <strong>de</strong> piété et <strong>de</strong> confiance.<br />

Le privilège dont nous jouissons pour la récitation <strong>de</strong> lʹoffice pro clero romano atteint<br />

tous les ecclésiastiques appartenant à la Communauté; cela se conçoit: le Saint Père, qui<br />

cherche si persévéramment lʹunité, nʹeût pu la briser là où elle est si nécessaire, dans une<br />

Communauté.<br />

Je remets seulement à M. Faÿ la partie que vous mʹenvoyez du questionnaire; il nʹa<br />

donc pas eu encore le temps <strong>de</strong> vous en remercier; il le fera.<br />

1310


Je reçois <strong>de</strong> bonnes nouvelles <strong>de</strong> Rome, nos ff. vont bien; les Cercles se posent <strong>de</strong><br />

manière à faire penser quʹils seront réellement utiles; <strong>avec</strong> le temps, la confiance vient, les<br />

rapports <strong>de</strong>viennent plus intimes entre les militaires et nos ff.; continuons à prier pour<br />

cette œuvre et pour tant et tant <strong>de</strong> besoins auxquels nous ne savons autrement donner sa‐<br />

tisfaction; heureusement ce moyen est souverain, atteint tout, embrasse et remue tout;<br />

quelle merveille et cette puissance, Dieu lʹa mise en notre main: quʹIl soit béni <strong>de</strong> cette im‐<br />

mense miséricor<strong>de</strong>!<br />

Adieu, mon bien cher enfant; en vous écrivant, je regrette <strong>de</strong> ne pas envoyer aussi<br />

quelques mots à chacun <strong>de</strong> nos ff., je sens que ce serait bon et consolant à Amiens et ail‐<br />

leurs aussi, mais je ne sais pas y suffire; jʹen accuse la lenteur <strong>de</strong> ce procédé dʹexpansion<br />

quʹon appelle lʹécriture; peut‐être lʹimpuissance vient‐elle <strong>de</strong> mon propre fonds.<br />

Quoiquʹil en soit, assurez tous ces bons ff. Caille et Marcaire et Trousseau, Watelet,<br />

Barthélemy [Marchand], Bérard, Gérold <strong>de</strong> tous mes sentiments tendrement dévoués en N.S.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1353 à M. Tourniquet<br />

Récit <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rniers moments du frère Girard. Nouvelles <strong>de</strong> la Communauté. Acci<strong>de</strong>nt à Rome. Les frères, ʺaffai‐<br />

rés, toujours en lʹairʺ ne font pas suivre les messages. Envoi <strong>de</strong> lʹAnnuaire. Devoir <strong>de</strong> maintenir la charité fra‐<br />

ternelle dans son cœur.<br />

Chaville, 2 novembre 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nos lettres se croisent très ordinairement à cause <strong>de</strong> la lenteur <strong>de</strong>s messagers qui les<br />

portent; il suit <strong>de</strong> là quʹelles ne se font guère réponse lʹune à lʹautre. Ainsi, je vois dans vos<br />

<strong>de</strong>rnières missives que vous semblez heureux dans la persuasion que notre cher f. M. Gi‐<br />

rard allait se guérir bientôt; hélas! la guérison, cʹétait pour lui la mort. Il déclinait <strong>de</strong> plus<br />

en plus <strong>de</strong>puis quelque temps; après une courte absence que jʹai dû faire <strong>avec</strong> M. Myion‐<br />

net pour assister à la bénédiction <strong>de</strong> la chapelle du patronage dʹAngers, je lʹai trouvé défi‐<br />

nitivement alité; cʹétait le mercredi et le samedi suivant, 24 octobre, il a rendu son âme à<br />

Dieu à 9h. 1/2 du matin, au moment même où, à ma messe à N.D. <strong>de</strong> la Salette, nous priions<br />

pour lui <strong>avec</strong> les personnes qui y étaient réunies. Il est mort sans aucune agonie, sʹétei‐<br />

gnant dans lʹépuisement absolu <strong>de</strong> ses forces où lʹavait mis son dérangement dʹentrailles.<br />

La connaissance ne lʹa quitté que peu dʹinstants avant quʹil expirât. Il avait reçu les sacre‐<br />

ments <strong>avec</strong> une gran<strong>de</strong> piété et, une heure à peu près avant <strong>de</strong> mourir, il répondait encore<br />

aux prières quʹon faisait pour lui. Comme M. Faÿ lui avait <strong>de</strong>mandé la veille sʹil faisait <strong>de</strong><br />

bon cœur à Dieu son sacrifice, il avait répondu, après un moment <strong>de</strong> recueillement: ʺOui,<br />

vivre pour travailler, ou rester languissant et inutile, ou bien mourir, jʹaccepte, quelle<br />

quʹelle soit, la très sainte volonté <strong>de</strong> Dieu.ʺ Cʹest en ces dispositions quʹil a quitté ce<br />

mon<strong>de</strong>; nous espérons que le Seigneur lʹaura reçu dans sa miséricor<strong>de</strong>. Ses restes sont dé‐<br />

posés dans le caveau <strong>de</strong> Chaville, bien quʹil nʹeût point fait <strong>de</strong> vœux; il sʹétait donné tout<br />

entier <strong>de</strong> cœur par avance, la famille lʹa regardé comme lui appartenant bien; maintenant,<br />

il grossit la petite phalange <strong>de</strong>s nôtres qui nous attend (au moins cʹest notre espérance)<br />

dans le mon<strong>de</strong> meilleur. Vous aurez assurément prié bien pieusement pour lui; ici, tous<br />

1311


nos ff. ecclésiastiques ont dit plusieurs messes à son intention et nos ff. laïcs ont offert aus‐<br />

si leurs communions et œuvres dans le même sentiment.<br />

Il est bien tard <strong>de</strong> vous dire que nous avons été bien émus <strong>de</strong> lʹacci<strong>de</strong>nt fâcheux<br />

dont vous et notre f. Jouin avez failli être les victimes 414 ; la divine Provi<strong>de</strong>nce, comme le<br />

remarque si bien notre f. Emile [Beauvais], est intervenue visiblement pour vous protéger<br />

en cette occurrence. Nous lui avons bien rendu grâce pour la protection dont Elle vous a<br />

couverts et nous y voyons une heureuse assurance quʹElle vous garantira encore contre<br />

tout danger à lʹavenir; nous ne manquons pas, du reste, <strong>de</strong> le Lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r en priant en‐<br />

semble tous les jours pour vous.<br />

Cʹest <strong>avec</strong> raison que vous vous plaignez <strong>de</strong> lʹinexactitu<strong>de</strong> quʹon met à sʹacquitter <strong>de</strong><br />

vos commissions; tous affairés, toujours en lʹair, ayant peine à se rencontrer, à sʹentendre<br />

entre eux, nos ff., involontairement, laissent en souffrance beaucoup <strong>de</strong> choses quʹils au‐<br />

raient à cœur <strong>de</strong> faire; je vais mettre toute lʹattention possible désormais à remettre vos<br />

messages en mains sûres, en prenant soin <strong>de</strong> noter la date <strong>de</strong> cette remise, le nom <strong>de</strong> ceux<br />

qui lʹauront reçue, afin <strong>de</strong> suivre et poursuivre, sʹil est nécessaire, les négligents.<br />

Jʹai reçu, par M. Bailly, le morceau du vêtement du Saint Père; cʹest un précieux<br />

souvenir; je le partage <strong>avec</strong> M. Hello qui vous en remercie <strong>avec</strong> moi. Les vêtements <strong>de</strong> M.<br />

Girard ne sont pas encore arrivés ici; il nʹy a pas <strong>de</strong> retard, mais je vous le marque ici pour<br />

renseignement. Jʹai recommandé à M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] <strong>de</strong> vous envoyer le Coutumier.<br />

Le r.p. <strong>de</strong> Boylesve, envoyé dans une maison <strong>de</strong> Province, ne nous gratifie plus <strong>de</strong><br />

livres. Je me réjouis <strong>de</strong> la pensée que M. Keller vous en enverra; nous le lui rappellerons.<br />

Les libraires, sur un premier appel, nʹont presque rien donné; M. Girard voulait aller les<br />

voir pour faire lui‐même ses <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s; Dieu ne lui en a pas laissé le temps.<br />

Je ne relève point les quelques mots <strong>de</strong> votre lettre concernant quelques dissenti‐<br />

ments <strong>de</strong> MM. Emile [Beauvais] et Charrin; je veux croire quʹils ont le sentiment <strong>de</strong> leur<br />

<strong>de</strong>voir et quʹils se rendront dignes <strong>de</strong> la confiance que la Communauté a mise en eux en<br />

les envoyant à un poste dʹhonneur; je nʹinsiste donc pas, bien assuré que ce seul mot, sans<br />

nulle répriman<strong>de</strong> ni menace suffira; ils sont chrétiens et serviteurs <strong>de</strong> Dieu, ils recourront à<br />

Dieu qui maintiendra la charité dans leur cœur. Du reste, il nʹy a quʹune seule Communau‐<br />

té pour nous à Rome, malgré la séparation où vous trouvent vos occupations durant quel‐<br />

ques heures chaque jour; vous êtes le Supérieur <strong>de</strong> cette petite colonie, tracez à chacun ce<br />

quʹil a à faire et, <strong>avec</strong> la grâce du Seigneur, ceux que vous dirigez obéiront.<br />

Offrez à M gr Basti<strong>de</strong> mes respectueux souvenirs, sʹil nʹa pas tout à fait oublié les<br />

jours où il mʹa été donné dʹavoir <strong>avec</strong> lui <strong>de</strong>s rapports <strong>de</strong> charité. Les liens quʹon forme<br />

ainsi sont ordinairement plus forts et durent plus que tous les autres.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, je vous embrasse tous et je prie le Seigneur <strong>de</strong> vous bénir.<br />

Votre ami et Père en J. et M. Le <strong>Prevost</strong><br />

1354 à M. Jouin<br />

Sympathie témoignée à lʹoccasion <strong>de</strong> son acci<strong>de</strong>nt. Correction <strong>de</strong> fautes <strong>de</strong> français.<br />

Chaville, 2 novembre 1868<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Nous avons tous pris part à lʹacci<strong>de</strong>nt dont vous avez failli être fort maltraité; mais,<br />

rassurés en même temps par les détails que nous transmettaient nos ff. sur les conséquences<br />

414 En se rendant <strong>de</strong> bon matin du palais Mariscotti à la Villa Strozzi, les <strong>de</strong>ux frères avaient été renversés par un cheval.<br />

1312


que pouvait avoir votre chute, nous avons remercié Dieu et la S te Vierge qui vous ont visi‐<br />

blement préservé dʹun mal plus grave. Demeurons toujours sous leur gar<strong>de</strong>, afin quʹil ne<br />

nous arrive rien <strong>de</strong> sérieusement fâcheux.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> vos lettres qui nous intéressent en nous faisant suivre les parti‐<br />

cularités <strong>de</strong> votre vie quotidienne. Cette obligation dʹécrire plus souvent vous sera utile;<br />

elle vous accoutumera peu à peu à mettre plus dʹordre dans vos récits et vous formera<br />

peut‐être aussi à mettre lʹorthographe.<br />

Je vous signale particulièrement <strong>de</strong>ux mots entre plusieurs autres que vous <strong>de</strong>vez<br />

rectifier: vous écrivez que vous avez vu un busque, cʹest buste quʹil faut dire; un busque<br />

est la lame dʹacier ou <strong>de</strong> baleine que les dames mettent dans leur corset.<br />

Il ne faut pas dire non plus la prison Lamertine, mais la prison Mamertine.<br />

Vous aurez appris <strong>avec</strong> une peine particulière la mort <strong>de</strong> notre cher M. Girard que<br />

vous connaissiez beaucoup; priez bien pour lui, dans ces jours surtout que lʹEglise consa‐<br />

cre au souvenir <strong>de</strong> ceux qui ont quitté ce mon<strong>de</strong>; espérons quʹil est en un lieu meilleur.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, croyez à toute mon affection en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1355 à M. Tourniquet<br />

Difficultés du courrier <strong>avec</strong> Rome. Mésintelligence entre frères: les rappeler à la pru<strong>de</strong>nce et surtout à la charité.<br />

Pour éviter tout embarras, ne pas se priver <strong>de</strong> tout appui. Dépenses inutiles.<br />

Vaugirard, 10 novembre 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je mʹétonne constamment que vous vous plaigniez <strong>de</strong> ne point recevoir nos lettres.<br />

Quelques jours après le décès <strong>de</strong> M. Girard, je vous ai écrit une lettre assez longue conte‐<br />

nant <strong>de</strong>s détails sur sa fin édifiante; jʹy ai joint aussi une petite lettre pour chacun <strong>de</strong> vos<br />

frères. Cet envoi ne vous est‐il point parvenu? Dans votre lettre du 4 novembre, apportée<br />

par le jeune zouave (Chariot, je crois), vous dites nʹavoir appris que par un mot <strong>de</strong> M.<br />

Maignen le décès <strong>de</strong> M. Girard; mes lettres ne vous sont donc pas parvenues? Plusieurs<br />

fois déjà la même incertitu<strong>de</strong> nous est restée.<br />

La mésintelligence entre M. Emile [Beauvais] et M. Charrin est à la fois un chagrin<br />

et un scandale pour nous; pensent‐ils donc justifier ainsi la confiance quʹon leur a témoi‐<br />

gnée et ne comprennent‐ils pas quʹils compromettent ainsi le bien quʹon leur donne à faire<br />

et se notent fâcheusement dans lʹesprit <strong>de</strong> leurs Supérieurs? Le Conseil <strong>de</strong> la Communauté<br />

est profondément peiné <strong>de</strong> ce manque <strong>de</strong> vertu et <strong>de</strong> sagesse et sʹunit à moi pour rappeler<br />

ces <strong>de</strong>ux frères à la pru<strong>de</strong>nce et surtout à la charité.<br />

Je partage bien le sentiment <strong>de</strong> M. Maignen relativement à la Commission du Cercle<br />

S t ‐Michel. En voulant vous affranchir <strong>de</strong> toute gêne et <strong>de</strong> tout contrôle, vous risquerez <strong>de</strong><br />

vous priver <strong>de</strong> tout appui; en cas dʹembarras, personne ne vous soutiendra. M. Maignen<br />

assure dʹailleurs que M. <strong>de</strong> Charette ne vous souffrirait pas ainsi en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> tout<br />

concours <strong>de</strong>s Supérieurs du Corps et que vous compromettriez votre existence; vivez donc<br />

en paix <strong>avec</strong> la Commission et tâchez quʹelle vous soit utile sans vous trop gêner; quelques<br />

égards et un peu <strong>de</strong> déférence suffiront sans gêner réellement votre libre action.<br />

M. Girard avait, comme reliquat <strong>de</strong> ses frais <strong>de</strong> voyage, 90f environ. M. Keller per‐<br />

met quʹon les emploie aux achats <strong>de</strong> détail que vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z; je vais faire prendre quel‐<br />

1313


ques manuels du soldat et vous les envoyer comme spécimens, afin <strong>de</strong> voir sʹils vous<br />

conviennent.<br />

MM. Paillé et Maignen, ayant trouvé votre <strong>de</strong>rnière lettre à M. Keller trop négligée,<br />

ont pensé quʹelle pouvait être supprimée. On avertit seulement le Comité <strong>de</strong> lʹenvoi <strong>de</strong>s<br />

800f <strong>de</strong> timbres.<br />

Jʹai reçu la caisse contenant les effets <strong>de</strong> M. Girard <strong>avec</strong> le marmo; elle a coûté 16f <strong>de</strong><br />

port, plus presque que la valeur <strong>de</strong>s effets. Je reçois aussi aujourdʹhui, par le jeune zouave,<br />

la médaille dʹargent. Je vous en remercie. Les chapelets <strong>de</strong> M. Jouin ont aussi fait plaisir<br />

aux bonnes dames. Le frère <strong>de</strong> M. Girard a paru désirer son habit noir; je vous écrirai sʹil<br />

faut lʹenvoyer.<br />

Adieu, mon cher ami et fils, je vous embrasse cordialement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Pour les commissions, pas beaucoup dʹinconvénient à en donner quelques‐<br />

unes à quelque personne choisie; ne pas trop les multiplier, ménager la dépense, ne pas<br />

avoir trop <strong>de</strong> moyens et dʹinventions. Une sage mesure, ni trop ni trop peu.<br />

1356 à M. Tourniquet<br />

Renouvellement <strong>de</strong>s vœux du frère Charrin. Conduite à tenir <strong>avec</strong> un collaborateur du Comité <strong>de</strong>s Cercles. Nou‐<br />

velles <strong>de</strong> la Communauté. Maladie du frère Legrand.<br />

Chaville, 18 novembre [1868]<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Je viens <strong>de</strong> gron<strong>de</strong>r fort M. Faÿ <strong>de</strong> ce quʹil a différé lʹenvoi <strong>de</strong> la musique; je lui re‐<br />

mets la note <strong>de</strong>s nouveaux morceaux que vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z, afin quʹil puisse les joindre aux<br />

autres.<br />

Je bénis Dieu <strong>de</strong> ce que la paix et la bonne entente règnent dans vos <strong>de</strong>ux Cercles;<br />

une disposition contraire serait un vrai scandale et un sujet constant dʹinquiétu<strong>de</strong> pour<br />

nous. Jʹécris ci‐joint un mot à notre f. Charrin au sujet <strong>de</strong> ses vœux. Il peut, sʹil est bien dis‐<br />

posé, les renouveler au 21 novembre, quand vous ferez, pour votre part, la cérémonie <strong>de</strong> la<br />

fête <strong>de</strong> la Présentation <strong>de</strong> la Ste Vierge. Tâchez <strong>de</strong> vous recueillir un peu la veille, car cʹest<br />

un acte grave et pieux. Je pense que le r.p. Laurençot ne refuserait pas <strong>de</strong> recevoir vos<br />

promesses, à moins quʹà cause <strong>de</strong> la fête, il ne fût empêché. Vous verriez alors si vous<br />

pouvez discrètement vous entendre <strong>avec</strong> quelque autre, ce serait moins convenable et plus<br />

difficile; vous feriez, en tout cas, vos promesses intérieurement <strong>de</strong>vant Dieu à la Ste Messe.<br />

M. Emile [Beauvais] me parle dʹun Conseil <strong>avec</strong> M. Descemet tous les 15 jours; si<br />

cʹest un compte rendu <strong>de</strong>s dépenses, on avait jugé que lui montrer vos comptes avant <strong>de</strong><br />

les envoyer au Comité était acceptable. Pour un Conseil régulier et périodique, sʹil <strong>de</strong>vait<br />

porter sur les menus détails et mouvements <strong>de</strong> vos faits habituels, il me semble quʹil pour‐<br />

rait, <strong>avec</strong> le temps, vous <strong>de</strong>venir une difficulté. Je crois, tout me le dit, que M. Descemet est<br />

sage, mesuré et bienveillant pour vous; mais, dans ce Conseil, il aurait bientôt une assez<br />

gran<strong>de</strong> influence et, sʹil arrivait que, sur beaucoup <strong>de</strong> points, il ne partageât pas votre avis,<br />

vous vous trouveriez à son égard dans une dépendance fort gênante. Au premier aspect, il<br />

me paraîtrait sage quʹon se bornât à <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r souvent à M. Descemet ses avis, recourant<br />

ainsi à son bon jugement et à son expérience, mais quʹon nʹallât pas au‐<strong>de</strong>là. Donc, sʹil<br />

1314


sʹagissait bien réellement, dans sa proposition, dʹun Conseil tel que je lʹai compris, tâchez<br />

<strong>de</strong> différer un peu dʹy répondre jusquʹà ce que jʹaie consulté nos ff. du Conseil <strong>de</strong> la Com‐<br />

munauté. Evitez surtout <strong>de</strong> lui montrer aucune défiance, ce qui le blesserait inévitable‐<br />

ment.<br />

M. Hello va remettre la lettre à Ponchel.<br />

Lʹautel que vous voulez faire faire doit être un simple châssis couvert <strong>de</strong> toile; au‐<br />

trement, cette dépense, purement personnelle pour vous, ne saurait plaire au Comité. M.<br />

<strong>de</strong> Charette avait désapprouvé formellement lʹétablissement dʹune chapelle dans les Cer‐<br />

cles; eu égard à la composition trop mêlée <strong>de</strong>s corps, cette répugnance est fort explicable;<br />

soyez donc pru<strong>de</strong>nt.<br />

La petite narration sur la fête <strong>de</strong> S t ‐Charles est très bien faite; on lʹenvoie à M. Keller;<br />

vous pouvez choisir le militaire qui lʹa écrite pour lʹhistorien ordinaire <strong>de</strong> vos faits et ges‐<br />

tes, je crois que personne ne se plaindra <strong>de</strong> la préférence que vous lui aurez accordée.<br />

Je pense que votre excursion à Monte Rotondo peut être utile et quʹenvoyer aux<br />

corps en garnison journaux et jeux est une bonne mesure.<br />

Je nʹécris pas aujourdʹhui à M. Emile [Beauvais] dont la lettre nous a fait plaisir; je<br />

crois quʹen ensemble le règlement <strong>de</strong> M. Charrin est bien, veillez à lʹexécution. Veillez aus‐<br />

si à ce quʹon donne aux soldats toutes choses à prix bien modérés, quʹils ne puissent voir<br />

en vous <strong>de</strong>s marchands, mais <strong>de</strong> bienveillants intermédiaires. Jʹécrirai à M. Jouin que nous<br />

nʹoublions pas; il sait combien je suis occupé, vieux, lent à écrire; en écrivant à lʹun par ici,<br />

par le fait jʹécris à tous, vous connaissez bien mes sentiments dʹégale affection pour tous<br />

mes enfants.<br />

M. Alexandre [Legrand] est à la maison <strong>de</strong> S t ‐<strong>Jean</strong> <strong>de</strong> Dieu à Lyon, il sʹy trouve bien;<br />

dans une crise dʹégarement <strong>de</strong> tête, il sʹétait enfui <strong>de</strong> Tain; les Frères <strong>de</strong> S t <strong>Jean</strong> <strong>de</strong> Dieu<br />

lʹont retrouvé près <strong>de</strong> Lyon. Il mʹa écrit une lettre touchante, où il sʹexcuse <strong>de</strong> cette esca‐<br />

pa<strong>de</strong> dont il nʹest assurément pas coupable; prions bien pour lui. Dieu peut le guérir; pour<br />

les hommes, ils semblent impuissants.<br />

M. Tridon, <strong>de</strong> Troyes, est mort tout récemment; priez bien aussi pour lui.<br />

S t ‐Charles marche bien, les soins dévoués <strong>de</strong> M. Girodon font naître peu à peu la<br />

piété dont les signes augmentent; M. Gresser toujours zélé, mais toujours indécis, avançant<br />

un jour, reculant le len<strong>de</strong>main; il <strong>de</strong>meure 3 ou 4 jours chaque semaine à Nazareth, les 3<br />

autres à S t ‐Charles.<br />

M. [Pierre] Pialot languit toujours, ne quitte pas lʹinfirmerie.<br />

On vous enverra le mois prochain le coutumier du mois.<br />

M. Paillé a acheté aujourdʹhui 3 ou 4 douzaines <strong>de</strong> manuels du soldat; on vous les en‐<br />

verra pour que vous jugiez sʹils vous conviennent.<br />

La famille <strong>de</strong> M. Girard a re<strong>de</strong>mandé lʹhabit noir quʹil a laissé à Rome; son jeune<br />

frère désire lʹavoir comme souvenir <strong>de</strong> lui, envoyez‐le par quelque prochaine occasion. La<br />

caisse au marmo a coûté bien cher: 16f; il faut ménager ces ports ruineux.<br />

Adieu, bien chers amis; il fait bien froid ici, il gèle à 6 <strong>de</strong>grés; vous avez chaud là‐<br />

bas et vous avez <strong>de</strong>s fleurs, nos fleurs ici sont <strong>de</strong>s glaçons; M. Charrin, qui avait toujours<br />

froid, doit se trouver heureux à Rome. Je vous embrasse tous les quatre à la fois et je vous<br />

redis tous mes sentiments <strong>de</strong> tendre affection en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Voici la formule:<br />

1315


Je, ...... , renouvelle en présence <strong>de</strong> Dieu le vœu que jʹai fait <strong>de</strong> me consacrer au ser‐<br />

vice <strong>de</strong>s pauvres dans la Congrégation <strong>de</strong>s Frères <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul. ‐ Quand tous lʹont<br />

prononcée tour à tour, on dit ensemble: Dominus pars haereditatis meae et calicis mei, tu es qui<br />

restitues haereditatem meam mihi; puis tous baisent ensemble la terre.<br />

Ne manquez pas <strong>de</strong> nous faire dire si M. Boucault est hors <strong>de</strong> peine pour la cause en<br />

question. M. Faÿ vient <strong>de</strong> vérifier quʹil a envoyé le rouleau <strong>de</strong> musique il y a trois semai‐<br />

nes, rue Servandoni, au Comité; il va réclamer un prompt envoi.<br />

1357 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

La notice nécrologique du frère Girard par M. Faÿ. Exhortation à la patience: savoir temporiser et supporter tout<br />

ce qui nʹest pas intolérable. ʺIl faut pardonner énormément à lʹhumanité; sauvegar<strong>de</strong>z par‐<strong>de</strong>ssus tout la paix et<br />

la charitéʺ.<br />

Vaugirard, 22 novembre 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je crois vous faire plaisir, ainsi quʹà nos ff. dʹAmiens, en vous envoyant une copie<br />

faite par les persévérants, sur ma <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, dʹune lettre que M. Faÿ a écrite à nos ff. <strong>de</strong><br />

Rome pour leur communiquer quelques détails sur la mort édifiante <strong>de</strong> notre cher f. Gi‐<br />

rard; elle nʹétait pas <strong>de</strong>stinée à une autre fin, mais elle mʹa paru bonne à être conservée<br />

comme souvenir du frère que nous ne reverrons quʹau Ciel.<br />

M. Lantiez mʹa dit vos peines relativement au service <strong>de</strong> la cuisine et concernant les<br />

cours du soir; je conçois les ennuis que vous pouvez avoir et jʹy prends part; jʹattends la<br />

lettre que doit nous écrire, dites‐vous, M. Caille pour examiner à fond ce que la situation<br />

peut <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r; jusque là, je vous exhorte à ne pas prendre les choses trop à cœur et à pa‐<br />

tienter; <strong>avec</strong> un homme dont les intentions sont si droites quʹelles le sont en M. Caille, on a<br />

bien à espérer quʹil reconnaîtra son erreur, si lʹon temporise un peu; et pour les personnes<br />

<strong>de</strong> service elles‐mêmes, elles ont leurs mauvaises lunes, lesquelles étant passées permet‐<br />

tent quʹon ait à tirer bon parti <strong>de</strong> qualités momentanément obscurcies par le caractère et la<br />

mauvaise humeur. A Vaugirard et à Chaville, nous en sommes là. Souvent nous souffrons<br />

tout ce qui nʹest pas intolérable; en général, il faut prendre ainsi lʹhumanité et lui pardon‐<br />

ner énormément. Il y a <strong>de</strong>s bornes assurément à la patience, je mʹen rapporte à votre sa‐<br />

gesse et à votre charité pour les poser. Gar<strong>de</strong>z, à travers ces petits démêlés, une constante<br />

estime et une fraternelle affection pour M. Caille; il mérite certainement lʹune et lʹautre;<br />

sauvegar<strong>de</strong>z aussi par <strong>de</strong>ssus tout la paix et la charité; sans elles, nous nʹirions pas loin<br />

dans le bien.<br />

Il me semble, sans en avoir certitu<strong>de</strong>, que le moment dʹenvoyer les 200f pour la pe‐<br />

tite pension affectée par nous à lʹœuvre dʹAmiens est arrivé; je vais en faire lʹenvoi; je ne<br />

me souviens plus quand a été fait le <strong>de</strong>rnier versement; nʹest‐ce pas à la fin <strong>de</strong> septembre?<br />

Ce serait alors fin décembre que jʹaurais à faire lʹenvoi; dites‐moi ce qui en est.<br />

Adieu, mon bien cher enfant en N. S., assurez tous nos frères <strong>de</strong> mes biens affec‐<br />

tueux sentiments. Je pense que la visite <strong>de</strong> M. Lantiez les a tous encouragés et quʹil a ré‐<br />

pondu à leurs <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s, sʹils en avaient à faire. M. Gérold a pu être considéré comme no‐<br />

vice ou le pourra dès que le moment vous semblera venu.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

Demain lundi, fête <strong>de</strong> M. Myionnet; vous prierez tous pour lui, il le mérite si bien.<br />

1316


Copie <strong>de</strong> la lettre <strong>de</strong> M. Faÿ aux Frères <strong>de</strong> Rome sur la mort <strong>de</strong> M. Girard<br />

Chaville, 2 novembre 1868<br />

Mes bien chers frères,<br />

Je vous dois à tous quelques détails sur la mort édifiante <strong>de</strong> notre excellent ami M. Girard,<br />

votre prédécesseur et collaborateur dans lʹŒuvre du Cercle Français <strong>de</strong>s Zouaves Pontificaux.<br />

Atteint à Rome du mal qui <strong>de</strong>vait lʹemporter, il est venu mourir à Chaville, au milieu <strong>de</strong><br />

nous, sa première famille, et nous le regardons comme une victime offerte par la Communauté<br />

pour la plus sainte <strong>de</strong>s causes. Malgré la douleur profon<strong>de</strong> <strong>de</strong> cette séparation, bénissons le Sei‐<br />

gneur, fiat! Est‐il rien <strong>de</strong> meilleur pour nous tous que sa sainte et toujours aimable volonté?<br />

Depuis son retour à Chaville, malgré le traitement homéopathique dans lequel il avait mis<br />

toute sa confiance, M. Girard entrevoyait à peine le terme <strong>de</strong> son indisposition; aucun mieux réel et<br />

durable ne se déclarait dans son état <strong>de</strong> faiblesse; il suivait le plus quʹil pouvait les principaux<br />

exercices du Noviciat, et nous étions édifiés, comme il y a huit mois, <strong>de</strong> son exactitu<strong>de</strong> et <strong>de</strong> sa<br />

gran<strong>de</strong> mo<strong>de</strong>stie. Dimanche, 18 octobre, il assistait pour la <strong>de</strong>rnière fois à la messe, mais il dut ce<br />

jour là gar<strong>de</strong>r la chambre, et il fut si faible, à partir <strong>de</strong> ce moment, que lʹon crut nécessaire <strong>de</strong> faire<br />

coucher un frère dans son voisinage. Je vous dirai quʹil occupait la chambre qui est au‐<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> la<br />

cuisine <strong>de</strong> lʹancien bâtiment et dont les fenêtres donnent sur la cour du Noviciat. Lorsque le lundi<br />

matin, à mon retour <strong>de</strong> Paris, je revis ce bon frère dans une impuissance presque complète <strong>de</strong><br />

mouvement, jʹeus dès lors quelques doutes sur sa guérison. A peine pouvait‐il porter la cuiller à sa<br />

bouche. Il fallait le faire manger comme un tout petit enfant et il dut forcément, pour les moindres<br />

services, réclamer le secours <strong>de</strong> notre bon M. Xavier Walter, novice récemment arrivé et qui, pen‐<br />

dant la maladie <strong>de</strong> M. Girard, exerça, sous la direction <strong>de</strong> M. Audrin, les fonctions dʹinfirmier et <strong>de</strong><br />

gar<strong>de</strong>‐mala<strong>de</strong>. M. Jules Ginet se rendit à Paris pour y consulter le Docteur Jousset. Il en rapporta,<br />

<strong>avec</strong> la prescription médicale, la nouvelle que lʹétat du mala<strong>de</strong> était très grave. M. Girard payait<br />

tous les bons soins quʹon essayait <strong>de</strong> lui rendre par lʹexemple dʹune patience admirable; jamais <strong>de</strong><br />

plaintes. Comptant sur la charité <strong>de</strong> ses frères, il disait simplement ce quʹil croyait lui être bon et<br />

utile, puis il sʹexcusait, craignant <strong>de</strong> paraître exigeant et difficile.<br />

Il me dit plus dʹune fois quʹil ne <strong>de</strong>mandait pas au Bon Dieu sa guérison, que cela ne le re‐<br />

gardait pas; une seule pensée lʹoccupait: que sa maladie pût servir à sa sanctification et au bien <strong>de</strong>s<br />

œuvres. Néanmoins, jusquʹà la veille <strong>de</strong> sa mort, il conservait lʹespoir <strong>de</strong> guérir et raisonnait sur<br />

son mal à la façon <strong>de</strong> certains mala<strong>de</strong>s avancés. Nous lui procurâmes <strong>de</strong>s persévérants pour lui<br />

faire quelques lectures plusieurs fois le jour,et, comme la faiblesse ne lui permettait plus <strong>de</strong> choisir<br />

lui‐même les traits détachés que renfermait un certain recueil, il craignait que ses jeunes lecteurs ne<br />

tombassent sur une histoire tant soit peu scabreuse. Sa charité nʹétait pas moins gran<strong>de</strong> que sa dé‐<br />

licatesse; il <strong>de</strong>manda que chacun <strong>de</strong> ses lecteurs apportât un livre particulier, pour quʹils ne sʹen‐<br />

nuyassent pas en ne lisant que <strong>de</strong>s fragments sans suite du même ouvrage. Lʹétat du mala<strong>de</strong> était<br />

assez inquiétant pour nous faire recourir à une prière plus pressante, nous ne pouvions nous faire<br />

à la pensée que le Bon Dieu voulût nous enlever un si excellent frère; donc, ce même mardi soir,<br />

nous écrivîmes à tous les frères <strong>de</strong> Paris et <strong>de</strong> la Province, les invitant à commencer une neuvaine<br />

aux Sts Cœurs <strong>de</strong> Jésus et <strong>de</strong> Marie. Un messager partit pour recomman<strong>de</strong>r ce cher mala<strong>de</strong> aux<br />

prières <strong>de</strong> nos petits Orphelins <strong>de</strong> Vaugirard; il fut décidé quʹau Noviciat nous réciterions chacun<br />

le chapelet tout entier pendant neuf jours, et quʹun jeûne facultatif serait proposé aux novices pour<br />

mercredi, vendredi et samedi. Tout fut accepté et exécuté. Nous avions pleine confiance, mais le<br />

Seigneur nous a exaucés en nous imposant un douloureux sacrifice. Je dis néanmoins exaucés car,<br />

lorsque le Bon Dieu change ainsi lʹobjet <strong>de</strong> prières ferventes, cʹest quʹIl a <strong>de</strong>s <strong>de</strong>sseins secrets <strong>de</strong><br />

bonté et <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong>. Adorons! Le mercredi 21, notre Père Supérieur revenait dʹAngers à Cha‐<br />

ville; comme chapelain <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette, il mêla un peu dʹeau <strong>de</strong> la Salette dans la potion <strong>de</strong><br />

notre ami Girard qui lʹaccepta très volontiers; mais le Ciel voulait que tout ceci ne fût quʹun exer‐<br />

cice <strong>de</strong> foi <strong>de</strong> la part du mala<strong>de</strong> et <strong>de</strong> la nôtre. Le jeudi soir, le Père Supérieur retournait à Vaugi‐<br />

1317


ard, après avoir assuré au mala<strong>de</strong> les prières <strong>de</strong> tous les frères. Le vendredi matin, M. Tulasne, si<br />

charitable comme vous le savez, eut un long entretien <strong>avec</strong> M. Girard qui lui fit, en présence <strong>de</strong> M.<br />

Audrin, sa confession générale. Quelques légers remè<strong>de</strong>s furent indiqués, mais, au sortir <strong>de</strong> sa vi‐<br />

site, le mé<strong>de</strong>cin déclara que cʹétait fini et que le mal ferait <strong>de</strong> rapi<strong>de</strong>s progrès. Nous comptions le<br />

faire communier à minuit, mais vers le soir, voyant quʹil baissait toujours, nous pensâmes quʹil<br />

était temps <strong>de</strong> lʹéclairer doucement, mais dans la vérité, sur sa situation réelle; jusque‐là, il parais‐<br />

sait lʹignorer. Donc, vers les cinq heures, après en avoir conféré <strong>avec</strong> Notre‐Seigneur, jʹabordai la<br />

gran<strong>de</strong> question et lui proposai, en frère et en ami, <strong>de</strong> recevoir au plus tôt le Saint Viatique et lʹEx‐<br />

trême‐Onction, <strong>avec</strong> le concours <strong>de</strong>s prières et lʹassistance <strong>de</strong> toute la Communauté. Cʹétait bien lui<br />

dire que le Bon Dieu lui <strong>de</strong>mandait le <strong>de</strong>rnier sacrifice; il le comprit et, sans le moindre sentiment<br />

<strong>de</strong> trouble ni <strong>de</strong> crainte, ni même <strong>de</strong> tristesse, il reçut la nouvelle dʹune mort plus que probable.<br />

Sʹabandonnant entièrement à ce que nous voudrions faire <strong>de</strong> lui, il accepta toutes les dispositions<br />

<strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce à son égard. Sept mois auparavant, un vendredi, fête <strong>de</strong>s cinq plaies <strong>de</strong> Notre‐<br />

Seigneur, quand M. Hello vint au Noviciat lui annoncer quʹil <strong>de</strong>vait partir pour Rome, il reçut cet<br />

ordre sans sʹémouvoir et partit. Tel il fut à lʹannonce <strong>de</strong> sa fin prochaine. Ce nʹest pas quʹil ne sentît<br />

ce que son sacrifice avait <strong>de</strong> pénible; vous savez combien il aimait la Communauté, comme il dési‐<br />

rait dʹêtre prêtre, comme il eût été heureux <strong>de</strong> retourner à Rome, quel était son zèle pour les œu‐<br />

vres auxquelles il avait voué toute sa vie; sa famille le chérissait, et toutes ses espérances quʹun<br />

cœur si généreux et si dévoué avait conçues pour la gloire <strong>de</strong> Dieu et le salut <strong>de</strong>s âmes! Tels étaient<br />

les objets qui se présentaient à sa pensée. Je compris, à son langage, quʹil avait conscience du grand<br />

sacrifice que le Bon Dieu lui <strong>de</strong>mandait; mais quelle résignation! Chers amis, quelle noble tranquil‐<br />

lité! Quelle confiance en Dieu surtout! Il craignait dʹen avoir trop. Quel abandon <strong>de</strong> tout lui‐même<br />

à Dieu! ʺJe suis inutile; ah! que sommes‐nous, sinon <strong>de</strong>s serviteurs inutiles! Néanmoins, ma<br />

confiance est sans bornes: In te, Domine, speravi, non confundar in aeternum.ʺ Voilà ce quʹil disait et<br />

jʹavais, moi seul, le bonheur <strong>de</strong> lʹentendre. Nʹest‐ce pas là vraiment la récompense que le Bon Dieu<br />

accor<strong>de</strong> à ceux qui ont tout quitté pour Lui, que ce calme inaltérable et cette confiance illimitée en<br />

face <strong>de</strong> la mort! Puissions‐nous, comme lui, nous dévouer pour nos frères et mériter dʹavoir les<br />

mêmes sentiments à notre <strong>de</strong>rnière heure! Il se confessa et, comme je pressais un peu, <strong>de</strong> peur <strong>de</strong> le<br />

fatiguer, il modéra mon empressement, pour avoir le temps <strong>de</strong> tout bien faire; mais il craignait que<br />

sa faiblesse ne mît obstacle à la ferveur <strong>de</strong> son acte <strong>de</strong> contrition. Vers les six heures, il reçut la vi‐<br />

site <strong>de</strong> Notre‐Seigneur, accompagné <strong>de</strong>s Novices et <strong>de</strong>s Persévérants.<br />

Cette cérémonie fut très édifiante; le mala<strong>de</strong> répondit à toutes les prières, communia, reçut<br />

lʹExtrême onction et eut tout le temps <strong>de</strong> goûter les paroles <strong>de</strong> la Sainte liturgie que nous pronon‐<br />

cions à <strong>de</strong>ssein <strong>avec</strong> une certaine lenteur; lʹétat du mala<strong>de</strong> le permettait, et même celui‐ci désirait<br />

que rien ne fût omis.<br />

Le soir, il mʹappela pour me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r sʹil ne pouvait ajouter quelque chose à son sacrifice,<br />

et il me dit quʹil offrait à Dieu, non seulement sa vie sʹIl la lui <strong>de</strong>mandait, mais <strong>de</strong> plus son bon<br />

plaisir, la continuation <strong>de</strong> cet état dʹanéantissement et <strong>de</strong> complète impuissance dans lequel il se<br />

trouvait. ʺJʹai compris, mon bien cher frère, lui dis‐je alors, voilà votre pensée: Jʹoffre à Dieu ma vie,<br />

sʹIl la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>; je lui offre mes services, sʹIl lui plaît <strong>de</strong> me rendre la santé; je lui offre enfin mon<br />

état dʹimpuissance, sʹIl désire quʹil continue.ʺ ʺCʹest cela, me dit‐il.ʺ<br />

Chers amis, que désirer <strong>de</strong> plus parfait?<br />

Admirable conformité à la volonté du Bon Maître, voilà le vrai, le bon et fidèle serviteur.<br />

La nuit du vendredi au samedi, je voulus rester auprès <strong>de</strong> lʹami Girard <strong>avec</strong> M. Xavier. Je<br />

récitai lʹoffice <strong>de</strong> S t Raphaël, où il nʹest parlé que <strong>de</strong> guérisons, et jʹespérais toujours jusquʹau <strong>de</strong>r‐<br />

nier moment. Cette nuit, il eut <strong>de</strong>ux ou trois instants <strong>de</strong> délire; le matin, à 4h 1/2 , heure du lever <strong>de</strong><br />

la Communauté, il me <strong>de</strong>manda comment faire pour sʹéveiller dʹune manière aimable; je lui dis<br />

alors: ʺBenedicamus Dominoʺ, et il répondit: ʺDeo gratiasʺ. Un peu plus tard, je lui <strong>de</strong>mandai sʹil<br />

voulait entendre la prière du matin; il le voulut bien, et je la récitai <strong>avec</strong> M. Audrin qui avait suc‐<br />

1318


cédé à M. Xavier. Le bon frère répondit aux litanies et à la dizaine <strong>de</strong> chapelet, presque comme il<br />

lʹeût fait en bonne santé. M. Audrin proposa <strong>de</strong> lui réciter les <strong>de</strong>rnières prières. Je le fis en français<br />

et le mala<strong>de</strong> fit signe ensuite quʹil avait tout suivi. La victime était prête, notre ami portait son cru‐<br />

cifix et ses scapulaires; je pris congé du bon frère en lui disant que jʹallais dire la S te Messe à son in‐<br />

tention; je ne <strong>de</strong>vais plus le revoir.<br />

Du reste, à partir <strong>de</strong> ce moment, il ne répondit plus à aucune question; je le recommandai<br />

aux prières avant le S t Sacrifice, et nous le mîmes sous la protection <strong>de</strong> S t Raphaël dont cʹétait la<br />

fête. Nous ajoutâmes son invocation aux invocations dʹusage. M. Xavier <strong>de</strong>meura auprès du ma‐<br />

la<strong>de</strong> pendant la messe; il entendit quelques paroles sans suite, puis celles‐ci:ʺ Ah! quʹelle est belle la<br />

S te Vierge! et lʹEnfant‐Jésus! ʺ Etait‐ce le délire ou une grâce que le Bon Dieu lui accordait? Vers<br />

9h.3/4, comme jʹétais en classe <strong>avec</strong> les Persévérants, M. Xavier vint mʹannoncer les <strong>de</strong>rniers mo‐<br />

ments; jʹaccourus, mais comme jʹarrivais, M. Audrin, <strong>de</strong>meuré auprès <strong>de</strong> lui, venait <strong>de</strong> recevoir les<br />

<strong>de</strong>rniers soupirs <strong>de</strong> notre excellent f. Girard; un léger mouvement <strong>de</strong> la lèvre inférieure mʹindiqua<br />

que tout était terminé. Ainsi donc, sans aucune agonie, il avait rendu doucement son âme à Dieu,<br />

un samedi, jour <strong>de</strong> la S te Vierge,en la fête du glorieux archange S t Raphaël! Ne convenait‐il pas que<br />

le Directeur <strong>de</strong> votre Œuvre entrât dans la bienheureuse éternité sous les auspices <strong>de</strong> S t Michel et<br />

<strong>de</strong> S t Raphaël? Encore une fois, mes bien chers Frères, bénissons le Seigneur en tout ce qui nous ar‐<br />

rive; jʹai la confiance que, si nous travaillons sérieusement à <strong>de</strong>venir <strong>de</strong>s Saints, nous verrons, après<br />

lʹépreuve, abon<strong>de</strong>r les consolations et les fruits dans la Communauté et dans les œuvres.<br />

1357‐1 à M. Maignen<br />

MLP. invite le frère Maignen à sʹentretenir <strong>avec</strong> un candidat à la vie religieuse.<br />

29 novembre [1868]<br />

Je prie M. Maignen <strong>de</strong> causer un peu <strong>avec</strong> ce jeune homme qui dit avoir une voca‐<br />

tion religieuse; il semble être <strong>de</strong> bonne foi mais il est sans place et cette circonstance influe<br />

beaucoup sur sa résolution.<br />

Si on voulait le placer ou lʹoccuper en quelque emploi au <strong>de</strong>hors, on aurait la possi‐<br />

bilité <strong>de</strong> le connaître et <strong>de</strong> lʹai<strong>de</strong>r utilement en un sens ou en un autre.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1358 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Pour soutenir ses frères éprouvés dans leur apostolat. Difficultés <strong>de</strong> lʹéducation <strong>de</strong>s enfants. Lʹinsuffisance <strong>de</strong><br />

personnel est leur plus dure croix. Refonte <strong>de</strong>s Constitutions. Première pensée dʹun voyage à Rome. Avis sur la<br />

vocation <strong>de</strong> M. Le Camus.<br />

Chaville, 30 novembre 1868<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je partage les sentiments que vous éprouvez sur les difficultés <strong>de</strong> vos œuvres à<br />

Amiens; jʹespère toutefois quʹelles ne seront pas insurmontables, car la grâce <strong>de</strong> Dieu peut<br />

donner le supplément à toutes nos insuffisances; cʹest ce quʹelle a fait <strong>de</strong>puis plus <strong>de</strong> vingt‐<br />

<strong>de</strong>ux ans que nous existons; ayons confiance, mon bien cher ami, et comptons bien<br />

quʹaprès quelques épreuves, nous trouverons, en définitive, un résultat heureux qui, tout<br />

ensemble, nous laissera convaincus <strong>de</strong> notre misère et <strong>de</strong> la bonté miséricordieuse <strong>de</strong><br />

Dieu. Le Seigneur tend constamment à nous donner cette double vue; nous assurons que<br />

1319


nous lʹavons déjà, mais elle nʹest jamais assez ferme et assez nette, cʹest pourquoi lʹépreuve<br />

se renouvelle souvent.<br />

Lʹéducation <strong>de</strong>s enfants, <strong>de</strong>s enfants du peuple surtout, est une œuvre ru<strong>de</strong>, <strong>de</strong> lon‐<br />

gue patience, mais quand on se résigne à beaucoup attendre, à beaucoup souffrir, lʹheure<br />

arrive où le travail a son fruit et le dévouement sa récompense. Il en est <strong>de</strong> même pour la<br />

formation <strong>de</strong>s âmes dans la vie religieuse. Cʹest une éducation aussi, ru<strong>de</strong>, lente, souvent<br />

déconcertante; patience et courage persévérant et lʹon arrive; enfin, pour notre propre<br />

sanctification, patienter, travailler et prier sont les grands et souverains moyens. Cʹest ainsi<br />

quʹont été façonnés tous les saints. Donc, bien cher ami, allons au jour le jour, sans nous<br />

lasser; nos enfants <strong>de</strong>viendront <strong>de</strong> bons et chrétiens ouvriers, nos frères <strong>de</strong> vrais religieux<br />

et nous‐mêmes <strong>de</strong>s serviteurs selon le Cœur du Divin Maître.<br />

Lʹinsuffisance du personnel est votre plus dure croix, sans doute; il vous faudrait un<br />

homme capable pour donner quelque consistance à lʹaction un peu faible <strong>de</strong> vos jeunes<br />

frères; M. Lantiez, qui sait bien précisément lʹétat <strong>de</strong> nos forces, vous lʹa dit quand il était<br />

près <strong>de</strong> vous, nous sommes dans une impossibilité absolue <strong>de</strong> fournir présentement cet<br />

ai<strong>de</strong> dont nous savons bien la réelle utilité. Dieu, je lʹespère, comblera encore cette lacune<br />

en faisant une part plus abondante à sa grâce.<br />

Jʹavais prévu ces difficultés qui <strong>de</strong>vaient inévitablement résulter <strong>de</strong> lʹoccupation dé‐<br />

finitive <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> S t ‐Jacques, mais lʹétat où se trouvaient les <strong>de</strong>ux œuvres réunies<br />

vous imposait dʹautres gênes; en évitant un mal, on est tombé dans un autre; le moment<br />

viendra où lʹon pourra y porter remè<strong>de</strong>; mais, en attendant, ceux qui subissent la charge<br />

sont bien en peine; le bon Maître les verra et, je lʹespère, Il leur enverra secours. Cette for‐<br />

mule dʹespérance semble peut‐être une redite, mais cʹest comme le Gloria Patri qui termine<br />

les psaumes, il faut toujours finir par là.<br />

Je viens <strong>de</strong> terminer la refonte <strong>de</strong> notre Constitution dʹaprès la donnée du r.p. Cotel;<br />

il me semble que le travail ainsi remanié est enfin complet, mais plusieurs fois déjà, jʹai cru<br />

que ma tâche était achevée, et pourtant il fallait toujours recommencer; peut‐être en sera‐t‐<br />

il encore ainsi.<br />

Il reste encore à façonner, <strong>avec</strong> les éléments du r.p. Cotel, le Directoire commun et<br />

celui <strong>de</strong>s Supérieurs, mais ces <strong>de</strong>ux documents, ne regardant que lʹintérieur <strong>de</strong> la Congré‐<br />

gation, nʹont pas besoin dʹêtre soumis à lʹexamen <strong>de</strong>s Supérieurs; le fond en est dʹailleurs,<br />

en substance, dans la Constitution et les <strong>de</strong>ux parties qui restent ont pour fin seulement<br />

dʹen faciliter lʹapplication.<br />

Jʹavais presque promis à nos ff. <strong>de</strong> Rome que lʹun <strong>de</strong>s anciens frères ou moi peut‐<br />

être irions les visiter dans le cours <strong>de</strong> cet hiver; mais, quant à moi, jʹhésite beaucoup, moins<br />

par crainte du voyage (car, sʹil est utile, il nʹy a pas à hésiter) que par le doute où je suis sur<br />

lʹutilité <strong>de</strong> ma présence et <strong>de</strong> mes mouvements à Rome; je suis peu propre, désormais sur‐<br />

tout, aux entremises extérieures; me remplacer à Chaville pour quelques services, particu‐<br />

lièrement le dimanche, nʹest pas sans difficulté. Dʹun autre côté, jʹavais pensé quelquefois<br />

que vous pourriez, le cas échéant, mʹaccompagner; mais ne serait‐ce pas témérité dʹy son‐<br />

ger quand votre personnel et vos œuvres ont un si impérieux besoin <strong>de</strong> votre présence? Le<br />

projet, quant à ce qui me concerne, me semble bien peu réalisable; le Conseil jugera sʹil au‐<br />

rait <strong>de</strong> sérieux avantages, effectué par lʹun <strong>de</strong>s anciens ff.<br />

M. Le Camus, comme on pouvait le présumer, a témoigné le désir <strong>de</strong> continuer ses<br />

étu<strong>de</strong>s ecclésiastiques; je nʹai pas cru <strong>de</strong>voir mʹy refuser, puisquʹil nʹa pas dʹempêchement<br />

1320


personnel et quʹil a fait déjà un an <strong>de</strong> théologie; je crois que nous lʹenverrons à Angers où<br />

le séminaire nous fait, pour lʹinternat, <strong>de</strong>s conditions douces. Jʹaurais préféré quʹil <strong>de</strong>meu‐<br />

rât à lʹintérieur <strong>de</strong> la Communauté où il est encore peu posé. Mais Metz est bien loin et,<br />

pour Amiens, comme il avait montré inclination pour les Lazaristes et quʹil y a renoncé<br />

<strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> regret, je ne pense pas quʹil fût bien pru<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> le remettre entre leurs<br />

mains et <strong>de</strong> le replacer, pour ainsi dire, sous la direction <strong>de</strong> son précé<strong>de</strong>nt Supérieur <strong>de</strong><br />

Tours qui se trouve précisément à Amiens. Pour ces raisons, et sauf lʹavis du Conseil, je me<br />

déterminerai pour Angers.<br />

Adieu, mon bien bon ami et fils; marchons en esprit <strong>de</strong> foi, toutes nos faiblesses et<br />

impuissances sont admises dans les vues <strong>de</strong> Dieu pour nous poser dans le surnaturel et<br />

dans un abandon filial à sa divine Bonté.<br />

Mille affections à vous et à tous.<br />

Votre ami et Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1359 à M. Tourniquet<br />

Annonce dʹun prochain voyage. La Commission <strong>de</strong>s zouaves. Comment prési<strong>de</strong>r un Conseil: ʺil faut <strong>de</strong> lʹordre et<br />

<strong>de</strong> la clarté, voilà les points essentielsʺ. Petites nouvelles <strong>de</strong> la famille.<br />

Vaugirard, 14 décembre [1868]<br />

Bien chers amis et fils en N.S.,<br />

Je nʹai pas assez <strong>de</strong> temps libre aujourdʹhui pour vous écrire à tous; je joins ici quel‐<br />

ques mots seulement pour ne pas vous laisser trop longtemps sans nouvelles.<br />

Vos lettres nous intéressent toujours vivement; jʹai lu à nos ff. celle <strong>de</strong> M. Emile<br />

[Beauvais] concernant sa rencontre si désirée <strong>avec</strong> le Saint Père dans la cérémonie <strong>de</strong> lʹof‐<br />

fran<strong>de</strong> <strong>de</strong>s armes; elle nous a bien donné lʹidée <strong>de</strong> cette assemblée. M. Faÿ prépare <strong>avec</strong><br />

soin un nouvel envoi <strong>de</strong> musique.<br />

Je vous envoie, bien tardivement, lʹannuaire pour décembre; je tâcherai quʹon vous<br />

lʹadresse plus utilement et plus opportunément à lʹavenir.<br />

Jʹespère toujours que je pourrai assez prochainement aller vous voir; si jʹen étais<br />

empêché, un <strong>de</strong> nos anciens ff. pourrait y aller à ma place; je nʹai pu fixer encore précisé‐<br />

ment le moment <strong>de</strong> ce voyage; je pense que dans peu <strong>de</strong> temps, jʹaurai à cet égard une vue<br />

plus arrêtée.<br />

Nous pensons que vous ferez bien <strong>de</strong> prési<strong>de</strong>r les réunions <strong>de</strong> la Commission <strong>de</strong>s<br />

Zouaves; prenez soin <strong>de</strong> préparer un petit ordre du jour,où les matières à traiter seront<br />

classées <strong>avec</strong> précision; menez la séance <strong>avec</strong> un peu dʹordre et tâchez dʹavoir une idée<br />

nette <strong>de</strong>s choses, afin <strong>de</strong> les énoncer clairement; puis, allez en simplicité et pour le plus<br />

grand bien, comme vous le faites dʹordinaire, et le bon Dieu vous assistera. Il faut <strong>de</strong> lʹor‐<br />

dre et <strong>de</strong> la clarté, voilà les points essentiels.<br />

Vous ne pouvez pas vous associer aux mouvements et à lʹaction <strong>de</strong> M. Germain‐<br />

ville, ni prendre aucune responsabilité quelconque dans ses entreprises; tenez‐vous bien à<br />

votre œuvre et ne lʹy mêlez pas, non plus que vous ne <strong>de</strong>vez vous immiscer aux siennes; je<br />

crois que cʹest bien la pensée du Comité, cʹest aussi bien positivement la nôtre; le tout sans<br />

aucune forme désobligeante.<br />

1321


Les excursions vers les détachements faites à propos et mesurément et lʹenvoi <strong>de</strong>s<br />

livres, journaux et <strong>de</strong> quelques jeux semblent bien utiles; je crois quʹils accroîtront le bien<br />

que font les Cercles.<br />

Je ne vois pas <strong>de</strong> nouvelles bien fraîches et bien dignes dʹattention à vous donner;<br />

tout marche à peu près comme <strong>de</strong> coutume. S t ‐Charles se soutient par ses ai<strong>de</strong>s et direc‐<br />

teurs ordinaires, M. Gresser toujours un pied en avant et un en arrière.<br />

M. Alexandre [Legrand] est bien installé à Lyon chez les Frères <strong>de</strong> S t ‐<strong>Jean</strong> <strong>de</strong> Dieu,<br />

mais il sʹy ennuie beaucoup. M. [Pierre] Pialot languit à lʹinfirmerie. Quelques frères nou‐<br />

veaux ont été admis au postulat, nous ne saurions encore rien présumer sur leur avenir; le<br />

bon accord et lʹintime union sont toujours dans la famille <strong>avec</strong> un sincère désir <strong>de</strong> glorifier<br />

Dieu. Le petit noviciat <strong>de</strong> Chaville va bien, pas nombreux, mais un bon esprit.<br />

Adieu, bien chers amis, si je <strong>de</strong>vais tar<strong>de</strong>r à prendre une décision au sujet du<br />

voyage, je vous lʹécrirais, afin que M. Charrin pût faire ses vœux.<br />

Croyez bien à toutes les affections <strong>de</strong> nos ff. et <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1359 bis à M. Tourniquet<br />

Notes concernant les fêtes trop multipliées. Veiller sur les courses et lʹemploi du temps dʹun frère porté à la<br />

curiosité; un autre a besoin dʹêtre dirigé et encouragé.<br />

[14 décembre 1868]<br />

Le Conseil <strong>de</strong> la Communauté craint que vos <strong>de</strong>ux Cercles ne multiplient trop les<br />

fêtes et nʹabusent peut‐être <strong>de</strong> la con<strong>de</strong>scendance <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s autorités en les appelant<br />

trop souvent à ces humbles délassements, bons seulement pour les soldats; faites attention<br />

à ces remarques. Ne pas parler aussi à M. Keller par trop souvent <strong>de</strong> ces moyens dʹattrait,<br />

mais lui signaler les résultats plus sérieux, si on en obtient moralement.<br />

M. Emile [Beauvais], dans son règlement, sʹest réservé toutes les courses, tous les<br />

rapports et mouvements extérieurs; cʹest bien peut‐être. Il faut pourtant considérer que M.<br />

Emile est extrêmement curieux; on doit donc prendre gar<strong>de</strong> quʹil ne profite <strong>de</strong> ses courses<br />

pour tout voir, tout visiter, perdant ainsi beaucoup <strong>de</strong> temps au détriment <strong>de</strong> lʹœuvre dont<br />

il est chargé. Veillez donc sur ses courses et aussi sur lʹemploi du temps <strong>de</strong> M. Charrin, qui<br />

a besoin dʹêtre conduit et surveillé. Quʹon soit dʹailleurs doux et bienveillant <strong>avec</strong> lui; lʹen‐<br />

courager, le stimuler, mais <strong>avec</strong> charité et cordialité.<br />

1360 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Ordination du frère Trousseau au diaconat. Soin à apporter au choix <strong>de</strong>s collaborateurs dans nos Œuvres. Quali‐<br />

tés requises chez les jeunes gens. Conseils pour la rédaction <strong>de</strong> son testament.<br />

Chaville, 16 décembre 1868<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹenvoie, comme vous le désirez <strong>avec</strong> raison, quelques mots à notre cher M. Victor<br />

[Trousseau] à lʹoccasion <strong>de</strong> son ordination.<br />

1322


Pour ce qui regar<strong>de</strong> votre proposition au sujet <strong>de</strong> M. Gérold, nous nʹavions aucune<br />

prévision sur le temps où il pourrait être appelé au Noviciat. Lʹy faire entrer créerait un<br />

vi<strong>de</strong> chez vous, le remplacer ferait un autre vi<strong>de</strong> chez nous; encore faudrait‐il que le sujet à<br />

vous envoyé ne fût pas moindre que lui; cʹest ce qui arriverait assurément puisquʹaprès un<br />

examen attentif, le Conseil nʹa trouvé, comme susceptible <strong>de</strong> vous être donné, que le jeune<br />

Dufour, âgé <strong>de</strong> 18 ans, faisant la 3 e division <strong>de</strong>s Classes à Vaugirard, assez intelligent, fai‐<br />

sant assez bien sa classe et ses surveillances, mais imberbe encore, payant peu <strong>de</strong> mine et<br />

ressemblant plus à un grand écolier quʹà un maître; si vous ajoutez à cela le vêtement et<br />

toute la tenue mal soignée quʹon tolère à Vaugirard, vous serez dʹavis que gar<strong>de</strong>r M. Gé‐<br />

rold est bien préférable. Au Noviciat, nous nʹavions quʹun homme un peu formé, M. No‐<br />

miné; on a dû lʹenvoyer à Metz pour remplacer M. Lucien Jacquart, que son inconstance<br />

incorrigible a jeté <strong>de</strong>hors dans une heure <strong>de</strong> folie et que nous nʹavons pas cru <strong>de</strong>voir re‐<br />

prendre, malgré ses instances, nʹespérant pas plus <strong>de</strong> raison <strong>de</strong> lui pour lʹavenir; il a erré,<br />

cherchant <strong>de</strong>s emplois, même bas, puis, en désespoir <strong>de</strong> succès, sʹest rendu à Rome où<br />

lʹarmée pontificale sera, je lʹespère, son refuge. Nos ff., ici, ignorent cette fugue insensée,<br />

nʹen dites rien; tâchez que le pauvre M. Watelet reçoive grâce <strong>de</strong> sagesse et ne fasse pas<br />

pareille fin; je prie pour lui <strong>avec</strong> vous.<br />

Je crois que vous faites ce qui est le mieux pour la conscription <strong>de</strong> M. Gérold.<br />

Pour le testament, je trouve bien tout ce que vous ferez; il est plus sage, peut‐être,<br />

<strong>de</strong> nʹêtre pas trop exclusif, comme lʹindique le notaire; il faudrait aussi ne pas froisser vo‐<br />

tre bonne mère; je crois bien assuré que, sʹil arrivait quʹelle vous survécût, nos ff. (je ne<br />

parle pas <strong>de</strong> moi qui serais déjà dans les vagues souvenirs) ne feraient aucune résistance à<br />

une personne qui leur inspirerait autant dʹestime et <strong>de</strong> respect quʹils en ont pour elle; il se‐<br />

rait donc bien, non seulement en cette hypothèse peu fondée, mais dans tous les sens, <strong>de</strong><br />

ne pas aller contre ses sentiments.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1361 à M. Trousseau<br />

Exhortation spirituelle à lʹoccasion <strong>de</strong> son ordination au diaconat. Ce qui doit animer notre petite famille: humi‐<br />

lité et renoncement. La grâce propre au diaconat est la vertu <strong>de</strong> force. Il faut sʹopposer à lʹesprit du mon<strong>de</strong>.<br />

Abandon à la Provi<strong>de</strong>nce.<br />

Chaville, 16 décembre 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous vois <strong>avec</strong> une gran<strong>de</strong> joie approcher du but si haut auquel vous avez aspiré<br />

<strong>de</strong>puis bien <strong>de</strong>s années déjà et que vous nʹaurez pas atteint sans épreuves et sans souffran‐<br />

ces. Mais, plus jʹy regar<strong>de</strong>, plus je reconnais que la divine et bonne Provi<strong>de</strong>nce vous a<br />

conduit par la main et a mesuré dans sa Sagesse les difficultés, les retards comme les assis‐<br />

tances et les grâces apparentes. Grâce à ces conduites miséricordieuses, vous arriverez au<br />

sacerdoce <strong>avec</strong> une âme virile, une heureuse expérience et surtout <strong>avec</strong> lʹesprit <strong>de</strong> piété et<br />

dʹabnégation qui sont lʹessence même <strong>de</strong> la vie sacerdotale. Plus <strong>de</strong> hâte ne vous eût pas<br />

trouvé suffisamment prêt; que le bon Dieu est un sage et tendre Père et quʹIl fait bien<br />

lʹéducation <strong>de</strong> ses enfants! Jʹespère quʹà présent, Il vous regar<strong>de</strong> <strong>avec</strong> complaisance et quʹil<br />

prépare les progrès nouveaux pour la consommation <strong>de</strong> son ouvrage. Soyez donc bien do‐<br />

1323


cile sous sa main, mon bien cher enfant, et soyez attentif aux mouvements quʹIl vous im‐<br />

primera. La grâce spéciale <strong>de</strong> lʹordre que vous allez recevoir, cʹest la grâce <strong>de</strong> force, ad ro‐<br />

bur; cʹest un précieux don, bien nécessaire pour nous vaincre nous‐mêmes et pour briser<br />

les <strong>de</strong>rniers liens qui pourraient encore nous attacher au mon<strong>de</strong>; son esprit est si subtil, on<br />

le respire si inévitablement quʹil faut constamment et résolument rejeter, au jour le jour, ce<br />

quʹon peut encore en retrouver en soi. Heureusement pour vous, comme pour nous tous,<br />

la vocation spéciale <strong>de</strong> notre petite Congrégation nous pose nettement en opposition <strong>avec</strong><br />

ses aspirations et ses vues. Evangelizare pauperibus misit me; sinite te parvulos ad me venire.<br />

Voilà, en résumé toute notre mission, toute notre carrière; quʹelle est sûre et quʹelle est<br />

belle, puisque le Sauveur lʹa choisie pour Lui; quʹelle est bonne aussi pour nous maintenir<br />

dans lʹhumilité et le renoncement, dans lʹesprit <strong>de</strong> petitesse, dans le vrai sacrifice et aussi<br />

dans lʹesprit dʹunion au Cœur <strong>de</strong> notre bien‐aimé Sauveur. Entrez <strong>de</strong> plus en plus en cette<br />

voie <strong>de</strong> foi pure, <strong>de</strong> consécration absolue; elle est, je lʹai dit, particulièrement celle <strong>de</strong> notre<br />

petite famille, elle est la marque assurée <strong>de</strong> la prédilection <strong>de</strong> notre Père Céleste et <strong>de</strong> ses<br />

<strong>de</strong>sseins sur nous. Continuez donc, bien cher ami, dʹamasser, dans le recueillement et les<br />

saintes étu<strong>de</strong>s, le fonds précieux que vous <strong>de</strong>vrez bientôt dépenser pour le bien <strong>de</strong>s âmes.<br />

La Trinité va sitôt venir; oh! que cette heure bénie puisse vous trouver tout armé et en vigi‐<br />

lance, et puisse aussi la Trinité Sainte répandre sur vous, au grand, au solennel jour <strong>de</strong> vo‐<br />

tre ordination, la force, la sagesse et lʹamour, dès à présent, pour le diaconat, et surabon‐<br />

damment à la prêtrise. Je vais prier <strong>de</strong> plein cœur à cette intention <strong>avec</strong> tous nos ff.; tous,<br />

nous serons <strong>avec</strong> vous en esprit quand la grâce <strong>de</strong>s grâces <strong>de</strong>scendra sur vous.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1362 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Deux jeunes ai<strong>de</strong>s pour aller renforcer Amiens.<br />

Vaugirard, 19 décembre 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous avons bien cherché qui nous pourrions envoyer à Amiens; nous ne voyons<br />

absolument que <strong>de</strong>ux sujets, moins suffisants que nous ne voudrions, mais dont on peut<br />

néanmoins tirer parti en les soutenant un peu; malheureusement, ils seraient peu soutenus<br />

rue St ‐Jacques.<br />

Le premier, M. Mitouard; je joins ici un mot que M. Lantiez, partant en hâte ce ma‐<br />

tin, mʹa remis sur lʹenvoi chez vous <strong>de</strong> ce sujet; lʹobstacle <strong>de</strong>s crèches cessera après Noël.<br />

Le <strong>de</strong>uxième, M. Thueux, jeune, <strong>de</strong> tête un peu picar<strong>de</strong> ou artésienne, mais intelli‐<br />

gent, ayant <strong>de</strong> la foi, du bon vouloir; il va, à la condition <strong>de</strong> lui donner direction chaque<br />

semaine, <strong>de</strong>ux fois plutôt quʹune. Il fait ici une petite classe et la sacristie; il est soigneux et<br />

propre pour ce <strong>de</strong>rnier service, il fait bien sa classe aussi. Il a les défauts dʹun très jeune<br />

homme, mais lʹesprit <strong>de</strong> foi sincère et la naïveté peu commune <strong>de</strong> son cœur compensent<br />

ces imperfections; un peu plus tard, nous serons peut‐être à même <strong>de</strong> vous ai<strong>de</strong>r mieux;<br />

pour le moment, voilà nos seuls moyens disponibles. M. Thueux vous vaudrait mieux en‐<br />

core que le jeune Dufour, moins sûr, dont je vous avais parlé précé<strong>de</strong>mment.<br />

1324


Veillez à ce que M. Bérard nʹait pas <strong>de</strong> préférés; il y avait gran<strong>de</strong> tendance et elle<br />

pouvait <strong>de</strong>venir, elle <strong>de</strong>venait fort dangereuse pour lui.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1363 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Deuxième révision <strong>de</strong>s Constitutions par le père Cotel. Inconvénients <strong>de</strong> faire faire un remplacement provisoire<br />

par un jeune ecclésiastique nʹappartenant pas à lʹInstitut.<br />

Paris, le 22 décembre 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Le moment où se pourrait effectuer mon voyage est encore indéterminé; notre rè‐<br />

glement vient dʹêtre revu pour la <strong>de</strong>uxième fois par le r.p. Cotel; il faut quʹil soit recopié, il<br />

est assez long pour que cela exige quelque temps; si jʹéprouvais, du côté <strong>de</strong> lʹarchevêché,<br />

quelques difficultés, ce serait une autre cause, ou <strong>de</strong> retard, ou dʹindécision.<br />

Je ne puis parfaitement juger <strong>de</strong> la convenance pour nous <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r lʹai<strong>de</strong> du<br />

jeune ecclésiastique dont vous me parlez; ses qualités personnelles, ses aptitu<strong>de</strong>s, ses dis‐<br />

positions par rapport à la Communauté et à ses œuvres <strong>de</strong>vraient entrer pour beaucoup<br />

dans le sentiment quʹon aurait à ce sujet et toutes ces circonstances me sont inconnues. Ce<br />

serait à vous et à M. Caille quʹil serait plus facile dʹavoir, en ce sens, une opinion.<br />

Vos fonctions essentielles étant <strong>de</strong> diriger, <strong>de</strong> soutenir la Communauté, un prêtre<br />

étranger, jeune surtout, ne vous remplacerait aucunement pour ces points essentiels, M.<br />

Trousseau, vous absent, aurait plus naturellement influence pour ce qui ne serait pas pro‐<br />

prement le ministère ecclésiastique. Les ff. ne pourraient guère, sauf le cas où cet ecclésias‐<br />

tique aurait <strong>de</strong>s qualités éminentes, lui donner dʹabord confiance pour la confession. Il ne<br />

serait donc guère utile que pour la Ste Messe et sʹil savait, comme on le fait chez nous, se<br />

prêter à tout, ai<strong>de</strong>r en certaines surveillances en secondant les ff.<br />

Il ne pourrait guère non plus prendre une part régulière à lʹensemble <strong>de</strong>s exercices.<br />

Ces difficultés sʹatténueraient sʹil avait une inclination marquée pour notre Communauté;<br />

encore est‐il douteux quʹun intérim fût un temps bien choisi pour fortifier cette bonne dis‐<br />

position. Voyez tout cela <strong>avec</strong> M. Caille; vous êtes, lʹun et lʹautre, mieux placés que moi<br />

pour bien juger. Ce point reste aussi à considérer que lʹépoque où je pourrai partir est en‐<br />

core bien peu arrêtée, ainsi que je lʹai dit en commençant.<br />

M. Paillé vous a écrit quʹil ne pouvait faire inscrire M. Gérold pour la conscription à<br />

Paris, puisquʹil nʹy rési<strong>de</strong> réellement pas; vous avez bien fait <strong>de</strong> ne point dire quʹil fût <strong>de</strong> la<br />

Communauté, à cause <strong>de</strong>s circonstances qui regar<strong>de</strong>nt la naissance; M. Paillé a pris lʹaf‐<br />

faire comme concernant un étranger; mais, à moins quʹil ne <strong>de</strong>meurât réellement ici, on ne<br />

peut le faire passer pour habitant <strong>de</strong> Paris; le faire venir pour cette nécessité particulière ne<br />

serait pas sans difficultés, si lʹon veut tenir dans lʹombre les détails particuliers qui vous<br />

sont connus.<br />

M. Chaverot joindra à lʹenvoi quʹil doit vous faire lʹétole que vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z.<br />

Rien <strong>de</strong> nouveau. Depuis le départ du r.p. <strong>de</strong> Boylesve, envoyé à Poitiers, nos ff. ec‐<br />

clésiastiques font à tour <strong>de</strong> rôle lʹinstruction à laquelle la Communauté assiste tous les<br />

quinze jours à Vaugirard; ils le font à la satisfaction <strong>de</strong> tous; nous pensons un peu quʹon<br />

1325


pourrait <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à lʹun dʹeux la retraite du mois <strong>de</strong> mai, sauf à réclamer le secours <strong>de</strong>s<br />

rr.pp. pour celle du mois dʹoctobre.<br />

Nous faisons cette année la Saint‐<strong>Jean</strong> sans invitations au <strong>de</strong>hors.<br />

Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S.; assurez tous nos ff. <strong>de</strong> ma tendre affection,<br />

dont vous avez vous‐même toute la part que vous consentirez à prendre.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

(lettre écrite <strong>avec</strong> une plume animale)<br />

1364 à M. dʹArbois<br />

A propos dʹun frère qui a eu une ʺconduite si tristement légère et coupableʺ. Annonce du voyage <strong>de</strong> MLP. à<br />

Rome.<br />

Chaville, 25 décembre 1868<br />

Noël<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je mʹafflige vivement <strong>avec</strong> vous <strong>de</strong>s tristes conséquences <strong>de</strong> la conduite si tristement<br />

légère et coupable <strong>de</strong> M. Gauffriau; jʹen suis dʹautant plus peiné quʹil nʹen comprend pas,<br />

je le crois, la gravité et que son regret, sʹil en a, nʹest pas en proportion <strong>avec</strong> lʹinfidélité où il<br />

sʹest mis en ce qui touche sa sainte vocation, comme prêtre et comme religieux. Si Dieu ne<br />

lui ouvre les yeux, on ne saurait dire ce quʹon peut attendre <strong>de</strong> son avenir.<br />

Je crois quʹil faut arrêter, autant que possible, les suites <strong>de</strong> cette triste affaire.<br />

Ne pourriez‐vous voir le confesseur <strong>de</strong> M. Gauffriau et obtenir <strong>de</strong> lui quʹil mandât<br />

près <strong>de</strong> lui Mme R. pour lui représenter lʹodieux <strong>de</strong> sa conduite; si elle a quelque foi, peut‐<br />

elle continuer dʹagir comme elle le fait et ne cé<strong>de</strong>rait‐elle pas aux représentations dʹun prê‐<br />

tre respectable? Je ne crois pas quʹil convînt que vous fissiez cette démarche vous‐même.<br />

Ne pourrait‐on aussi sʹadresser au confesseur <strong>de</strong> cette femme?<br />

Si ces moyens, ou dʹautres que vous croiriez meilleurs, ne peuvent être employés,<br />

vous auriez à examiner sʹil est mieux <strong>de</strong> lʹéloigner et si vous pouvez, ou plutôt si la cathé‐<br />

drale peut le faire remplacer. Pour le moment, nous nʹaurions pas <strong>de</strong> prêtre à vous donner,<br />

ni même <strong>de</strong> f. laïc un peu capable et formé.<br />

Nous avons un jeune homme bon et dʹaimable caractère, qui a fait un an et <strong>de</strong>mi <strong>de</strong><br />

théologie au séminaire <strong>de</strong> Tours, mais il nʹest que tonsuré; <strong>de</strong> plus, il est <strong>de</strong> taille peu im‐<br />

posante (plus petit quʹaucun <strong>de</strong> nos prêtres), <strong>de</strong> bonne tenue dʹailleurs <strong>avec</strong> une voix sou‐<br />

tenue et convenable, sachant le plain‐chant. Je comptais un peu, son désir étant <strong>de</strong> suivre<br />

sa carrière ecclésiastique, lʹenvoyer à Angers vers Pâques pour le séminaire ou à Metz; il a<br />

<strong>de</strong> bons certificats et jʹai eu <strong>de</strong> première main <strong>de</strong>s renseignements sûrs à son sujet; cʹest<br />

tout ce que je verrais <strong>de</strong> proposable.<br />

Dans ce cas, jʹécrirais à Mgr dʹAngers que, me proposant <strong>de</strong> faire une absence <strong>de</strong> six<br />

semaines ou <strong>de</strong>ux mois pour aller à Rome (ce à quoi je suis, en effet, presque résolu pour<br />

visiter nos ff. <strong>de</strong> Rome), je ne vois aucun autre moyen <strong>de</strong> pourvoir à certains services qui<br />

exigent le ministère dʹun prêtre, quʹen reprenant, au moins temporairement, M. Gauffriau.<br />

Cet arrangement ferait transition et se prolongerait ensuite selon le besoin.<br />

Voyez, mon cher ami, ce qui vous paraît praticable.<br />

M. Le Camus, cʹest le nom du tonsuré, est à Chaville <strong>de</strong>puis trois mois.<br />

1326


Je crois que vous <strong>de</strong>vez dire à M. Gauffriau, mesurément pour ne pas le décourager<br />

absolument, quʹinformé plus précisément <strong>de</strong> la gravité <strong>de</strong> ses légèretés, jʹen suis profon‐<br />

dément peiné pour le présent, inquiet pour lʹavenir; faites pourtant ce que les circonstan‐<br />

ces vous paraîtront <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r; sʹil <strong>de</strong>vait revenir ici, mieux serait peut‐être <strong>de</strong> ne pas lui<br />

faire trop redouter son retour.<br />

Adieu, mon cher ami et fils en N.S.; remettons nos soins et nos difficultés au pied <strong>de</strong><br />

la crèche, le Dieu ré<strong>de</strong>mpteur et réparateur apportera remè<strong>de</strong> à tout.<br />

Votre affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

N.B. Si on acceptait M. Le Camus pour la messe <strong>de</strong> la cathédrale, ce qui est peu pro‐<br />

bable puisquʹil nʹest pas sous‐diacre, peut‐être M gr lui donnerait cet ordre sur les rensei‐<br />

gnements produits et lèverait la difficulté, au moins prochainement, si ce nʹest immédia‐<br />

tement.<br />

1365 à M. Risse<br />

Remerciements aux souhaits <strong>de</strong> la Saint‐<strong>Jean</strong>. Bon esprit <strong>de</strong> lʹŒuvre <strong>de</strong> Metz. Souvenir à quelques frères.<br />

Chaville, 31 décembre 1868<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie, ainsi que nos ff. <strong>de</strong> Metz, <strong>de</strong> vos bons souhaits <strong>de</strong> Saint‐<strong>Jean</strong> et <strong>de</strong><br />

nouvel an; je comptais bien quʹils ne viendraient pas <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rniers, car notre chère maison<br />

<strong>de</strong> Metz nʹest jamais en retard pour manifester son zèle, son dévouement au bien et son at‐<br />

tachement à la petite Communauté. Que le Seigneur vous gar<strong>de</strong> à tous ces sentiments que<br />

sa grâce a mis en vos âmes, ils sont la marque <strong>de</strong> son véritable esprit et <strong>de</strong> votre fidélité à<br />

Le suivre, puisquʹIl a dit: ʺCʹest à cela quʹon vous reconnaîtra pour mes disciples, si vous<br />

vous aimez les uns les autres comme je vous ai aimés.ʺ<br />

Nous répondrons <strong>de</strong> notre mieux à votre cordiale affection et il nous semble que le<br />

temps ne fait que lʹaccroître <strong>de</strong> jour en jour.<br />

Je voudrais bien écrire quelques mots à chacun <strong>de</strong> mes bien‐aimés ff. Baumert, Ma‐<br />

gnien, Lebrun, Nominé, Bouquet; je le ferai certainement un peu plus tard; aujourdʹhui, ce<br />

me serait chose impossible; <strong>de</strong>main, jʹaurai souvenir <strong>de</strong> tous au St Autel.<br />

Nous allons attendre les bons ff. futurs dont vous nous annoncez lʹarrivée pro‐<br />

chaine; ils recevront <strong>de</strong> tous ici un accueil fraternel. Le jeune persévérant sera aussi très<br />

bien reçu.<br />

Jʹaccepte les conditions dʹadmission que porte votre lettre.<br />

Ne manquez pas dʹoffrir mes profonds respects à Mgr <strong>de</strong> Metz et mes souvenirs dé‐<br />

voués à tous vos amis.<br />

Votre affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1366 à M. Tourniquet<br />

Souhaits <strong>de</strong> nouvel an; la Saint‐<strong>Jean</strong> à Vaugirard. Santés <strong>de</strong>s frères Pialot et Legrand. Raisons <strong>de</strong> refuser un can‐<br />

didat. Le budget <strong>de</strong>s Cercles <strong>de</strong> Rome. Ne pas assumer <strong>de</strong> responsabilités qui risquent dʹentraver le bien.<br />

1327


Nazareth, 5 janvier 1869<br />

Bien chers amis et fils en N.S.,<br />

Je vous écris collectivement aujourdʹhui, ne prévoyant pas que jʹarrive à vous faire<br />

<strong>de</strong>s lettres séparées; il mʹeût été bien doux cependant <strong>de</strong> répondre à tous vos bons souhaits<br />

<strong>de</strong> St ‐<strong>Jean</strong> et <strong>de</strong> nouvel an; chacun <strong>de</strong> vous méritait bien quelques mots particuliers, mais<br />

ce que je ne fais pas toujours <strong>avec</strong> le papier, je ne lʹoublie pas <strong>de</strong>vant Dieu, au St Sacrifice<br />

particulièrement, et vos noms si chers pour moi, et vos âmes surtout, je les présente au di‐<br />

vin Seigneur: ʺVoici, mon Dieu, mes enfants bien‐aimés: <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet], Emile<br />

[Beauvais], Eugène [Charrin] et Charles [Jouin]; vous les connaissez bien; ils sont là‐bas,<br />

bien loin <strong>de</strong> nous, pour votre service et celui <strong>de</strong> votre Eglise, protégez‐les, gar<strong>de</strong>z‐les, bé‐<br />

nissez‐les et permettez que moi aussi, en votre nom, je les aime et les bénisse.ʺ Voilà ce que<br />

je dis, non au premier <strong>de</strong> lʹan seulement, mais tous les jours. Nos frères aussi vous gar<strong>de</strong>nt<br />

un affectueux souvenir; je leur parle souvent <strong>de</strong> vous, je leur lis <strong>de</strong>s fragments <strong>de</strong> vos let‐<br />

tres et je vous rends présents pour eux autant que je le puis. La St‐<strong>Jean</strong> sʹest faite cette an‐<br />

née tout à fait en famille; M. le Curé et notre bon P. Beaussier ont seuls partagé notre dîner<br />

<strong>de</strong> Communauté, fort gai néanmoins et plein <strong>de</strong> cordialité. Le soir, les jeunes ouvriers <strong>de</strong><br />

Grenelle se sont chargés du divertissement (La fête interrompue, en <strong>de</strong>ux actes), parfaite‐<br />

ment joué par Giraud et autres; succès complet, assemblée comble; on a fini un peu tard,<br />

cʹest toujours le défaut inévitable quand ces jeunes ouvriers, libres seulement à 7 ou 8 h.,<br />

sont les acteurs <strong>de</strong> la pièce.<br />

Les ff. vont bien, sauf M. [Pierre] Pialot qui décline beaucoup et ne semble guère<br />

pouvoir vivre au <strong>de</strong>là <strong>de</strong> quelques semaines. Notre cher Alexandre [Legrand], toujours à<br />

la maison <strong>de</strong>s Frères <strong>de</strong> Saint‐<strong>Jean</strong> <strong>de</strong> Dieu à Lyon, dit quʹil est un peu mieux; il espère re‐<br />

venir bientôt, mais humainement parlant, cet espoir serait peu fondé, tant son état est<br />

grave; Dieu seul peut faire cette merveille, <strong>de</strong>mandons‐la, le pauvre enfant est si sage et si<br />

bon, il servirait si bien le divin Seigneur; vous qui êtes si près <strong>de</strong>s saints, <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z leur in‐<br />

tercession pour le pauvre Alexandre.<br />

Jʹai le regret <strong>de</strong> ne pouvoir accueillir la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> M. Lucien [Jacquart]. Le<br />

Conseil, consulté par moi, juge quʹil ne peut rentrer dans la Communauté. Il nʹa pas su res‐<br />

ter chez les Lazaristes, il nous a fallu le changer dans tous les postes où nous lʹavons placé,<br />

enfin il sʹest sauvé indignement <strong>de</strong> Metz sans nulle raison, laissant M. Risse et nos ff. en<br />

inquiétu<strong>de</strong> et faisant jaser tout le mon<strong>de</strong> à son sujet et sur la Communauté qui avait <strong>de</strong> tels<br />

religieux; nous ne pouvons nous exposer à <strong>de</strong> nouvelles scènes <strong>de</strong> ce genre; il nʹa pas<br />

mauvaise volonté, mais sa tête, extrêmement faible, le mène à <strong>de</strong>s écarts que sa piété, trop<br />

insuffisante, ne sait pas détourner. Voilà les raisons du Conseil pour ne pas adhérer à sa<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>. Dites‐lui que nous lui portons intérêt et verrons <strong>avec</strong> plaisir quʹil prenne un par‐<br />

ti courageux et <strong>de</strong>meure sincèrement chrétien, par sa foi comme par sa conduite.<br />

Je vous envoie une lettre que mʹa écrite M. Maignen, après avoir examiné vos pro‐<br />

jets <strong>de</strong> budget. Ses observations vous paraîtront peut‐être un peu sévères, cependant le<br />

Conseil a pensé comme lui que bien <strong>de</strong>s articles dans les dépenses semblaient bien consi‐<br />

dérables, pour lʹéclairage notamment qui ne doit durer quʹune partie <strong>de</strong> lʹannée et aussi<br />

pour lʹensemble.<br />

1328


Je crois quʹil serait pru<strong>de</strong>nt dʹattendre M gr Basti<strong>de</strong> pour cette association pieuse <strong>de</strong><br />

N.D. <strong>de</strong>s Victoires; il pourra mieux que personne juger <strong>de</strong> ce qui doit être établi et aimera<br />

mieux se réserver cette création.<br />

Pour les pensions à payer, je crains que ce soin ne vous donne moins dʹavantages<br />

que <strong>de</strong> contrariétés; on mʹa dit que les exigences <strong>de</strong>s jeunes militaires, quʹon ne satisfait<br />

pas toujours, pouvaient être une occasion <strong>de</strong> froissements et les éloigner <strong>de</strong> vous plutôt<br />

que <strong>de</strong> les attirer. Voyez cela entre vous; si cela pouvait être, vous en feriez lʹobservation à<br />

M. Descemet, en acceptant seulement le service pour trois mois, à titre dʹessai; ce nʹest pas<br />

la peine que vous craignez, mais seulement les causes <strong>de</strong> contradiction <strong>avec</strong> ceux que vous<br />

cherchez à édifier.<br />

Je pense toujours que jʹirai assez prochainement à Rome; la chose a été retardée,<br />

parce que divers arrangements à prendre avant nʹont pas été aussi vite que je lʹespérais;<br />

mais lʹhiver ne fait que commencer, jʹespère que mon désir se réalisera; dès que le moment<br />

sera précisément fixé, je vous en avertirai; je pense que ce sera M. <strong>de</strong> Varax qui mʹaccom‐<br />

pagnera.<br />

Adieu, bien chers enfants, je vous embrasse tous <strong>avec</strong> une tendresse toute particu‐<br />

lière à lʹoccasion <strong>de</strong> la nouvelle année; nos ff., ceux <strong>de</strong> Nazareth tout spécialement, vous<br />

assurent aussi <strong>de</strong> leurs tendres affections.<br />

Votre dévoué ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1367 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Le frère Lemaire, dʹAmiens, pense quitter lʹInstitut; ses défauts. Déplacements hebdomadaires <strong>de</strong> MLP. Examen<br />

<strong>de</strong>s Constitutions par lʹArchevêché <strong>de</strong> Paris.<br />

Chaville, 7 janvier 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous enverrai volontiers M. Lemaire, si tant est que je le puisse ; il était ces jours‐<br />

ci en telle disposition que, révolté entièrement contre lʹautorité <strong>de</strong> M. Myionnet, pourtant<br />

patient et maniable, il a déclaré vouloir partir malgré ses vœux, a dit quʹil écrivait à son<br />

frère pour quʹil lui trouvât une place à Amiens et a montré en paroles et en actes une en‐<br />

tière insubordination. Le malheur <strong>de</strong> ce pauvre enfant, cʹest un esprit dʹune étroitesse ex‐<br />

trême qui ne permet pas <strong>de</strong> faire pénétrer jusquʹà sa vue intérieure aucune vérité haute,<br />

aucun principe <strong>de</strong> conduite, et <strong>avec</strong> cela un orgueil indomptable. Tant quʹil nʹest pas<br />

contrarié, que son amour‐propre excessif a quelque pâture, il va très bien, sauf les exerci‐<br />

ces pieux quʹil goûte peu et dont il sʹexempte par tous les prétextes possibles; dʹailleurs la‐<br />

borieux, menant bien un service matériel, conduisant bien les enfants dans la discipline et,<br />

en général, dévoué dans ses emplois. Jusquʹici, <strong>avec</strong> beaucoup <strong>de</strong> ménagement et <strong>de</strong><br />

con<strong>de</strong>scendance, on est parvenu à en tirer parti, mais ayant été un peu chargé en ces <strong>de</strong>r‐<br />

niers temps, ne sachant pas se servir <strong>de</strong>s ai<strong>de</strong>s quʹon lui donne et dont il <strong>de</strong>vient jaloux dès<br />

quʹils sont un peu capables, il est hors <strong>de</strong>s gonds et je doute quʹil veuille même finir ses<br />

vœux dʹune année. Si, retournant à Vaugirard aujourdʹhui, je le trouve calmé et revenu à<br />

quelque bon sens, je vous lʹenverrai, sinon nous ferons pour le mieux; son départ, sʹil nous<br />

quitte absolument, nous crée un nouveau vi<strong>de</strong>, car il conduit <strong>avec</strong> succès <strong>de</strong>puis long‐<br />

temps un <strong>de</strong>s ateliers. Nos ff. vous conseillent <strong>de</strong> vous accommo<strong>de</strong>r temporairement <strong>de</strong> M.<br />

1329


Mitouard, homme <strong>de</strong> conscience, pieux et qui ne manque pas dʹintelligence. Ce conseil est<br />

à la fois désintéressé et sage.<br />

Je vous envoie un mot pour M. Gérold, jʹespère quʹil suffira; si vous le voyiez en<br />

danger, nous verrions, mais je ne sais, en vérité, comment on le remplacerait.<br />

Je suis à Chaville le samedi <strong>de</strong>puis 3h. <strong>de</strong> lʹaprès‐midi jusquʹau lundi 11h. 1/2 . En‐<br />

suite, à Nazareth jusquʹau mardi 1h. De là, à Chaville jusquʹau jeudi 2h. 1/2 ; le reste du<br />

temps est pour Vaugirard.<br />

Jʹai vu M. Icard qui examine notre Constitution et que je reverrai lundi; il nʹadmet à<br />

aucun prix quʹon agisse sans consulter lʹarchevêché et sans soumettre la pièce à son exa‐<br />

men; jʹai promis <strong>de</strong> suivre son conseil, je crois quʹon ne pouvait éviter ce pas; Dieu, espé‐<br />

rons‐le, nous ai<strong>de</strong>ra à le franchir.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, je vous ai vu bien peu <strong>de</strong> temps; lʹéternité viendra!<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Dites bien à nos ff., à MM. Caille, Marcaire, Bérard, Barthélemy, Trousseau que cʹest<br />

une vraie peine pour moi <strong>de</strong> ne pas leur écrire; le temps me fait défaut.<br />

1368 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Nouvelles observations sur le frère Lemaire. Services quʹil peut rendre. Un mot sur les Constitutions.<br />

Vaugirard, 8 janvier [1869]<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Voici M. Lemaire bien remis en bonne disposition; si vous le suivez <strong>de</strong> près et le<br />

soutenez bien spirituellement, il sera lʹhomme que vous me <strong>de</strong>mandiez, ferme, expérimen‐<br />

té, laborieux et fidèle à son poste; il est tout cela ordinairement, mais sa tête est picar<strong>de</strong> et<br />

veut être prise <strong>avec</strong> fermeté et con<strong>de</strong>scendance, le Bon Dieu vous inspirera. Il y a beau‐<br />

coup <strong>de</strong> qualités en lui; <strong>de</strong>ux défauts: un grand orgueil et le peu dʹétendue <strong>de</strong> lʹesprit <strong>avec</strong><br />

une rare ignorance sont le mauvais côté. Depuis 7 ans, il a rendu ici <strong>de</strong> grands services; il<br />

peut, à lʹorphelinat dʹAmiens, apporter un secours décisif, mais il faut quʹil soit dominé et<br />

non quʹil domine; il faut que M. Marcaire, doucement mais fermement, gar<strong>de</strong> sa position;<br />

si, <strong>avec</strong> la conduite spirituelle suivie, on peut donner quelques soins à son instruction in‐<br />

tellectuelle, il en est aux premiers éléments, même pour la lecture et lʹécriture, ayant mon‐<br />

tré longtemps peu dʹaptitu<strong>de</strong>s et <strong>de</strong> goût pour lʹétu<strong>de</strong>; il commence à en sentir lʹutilité et<br />

est très humilié <strong>de</strong> son ignorance.<br />

Adieu, bien cher ami et fils en N.S., vous savez le tendre dévouement <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je dois revoir lundi M. Icard pour recevoir ses observations sur la Constitution; il<br />

croit indispensable <strong>de</strong> consulter lʹArchevêché, je mʹy attendais.<br />

1369 à M. Caille<br />

Conduite à tenir envers le frère Lemaire.<br />

1330


Vaugirard, 8 janvier [1869]<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

M. Lemaire était <strong>de</strong>puis quelque temps si mal disposé que son envoi à Amiens ne<br />

me semblait guère praticable; mais heureusement le bon esprit a pris en lui le <strong>de</strong>ssus sur le<br />

mauvais caractère et le voilà remis en disposition chrétienne et religieuse. Il sera nécessaire<br />

toutefois <strong>de</strong> le suivre <strong>de</strong> près au point <strong>de</strong> vue spirituel si on veut que sa vocation, plus<br />

dʹune fois ébranlée, se soutienne et se perfectionne. Il y aurait aussi grand avantage à ce<br />

quʹon donnât quelques soins pour son instruction; jusquʹici, il y avait montré peu <strong>de</strong> goût,<br />

il commence à en comprendre lʹutilité. Il pourra, dʹailleurs, rendre <strong>de</strong> grands services à<br />

lʹorphelinat, mais que M. Marcaire gar<strong>de</strong> bien sa position, autrement il ne serait pas long‐<br />

temps maître dʹimprimer à lʹœuvre et à la maison la direction quʹil lui conviendra <strong>de</strong> lui<br />

donner.<br />

Adieu, mon bien bon ami, nous attendons votre visite promise.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1370 à M. Tourniquet<br />

Mort du frère Pierre Pialot: ʺle mon<strong>de</strong> a peu dʹaussi consolantes mortsʺ. MLP. bientôt à Rome. Les Œuvres <strong>de</strong>s<br />

Cercles: séparer le restaurant dʹ<strong>avec</strong> le Cercle; ne pas faire <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s exagérées au Comité; prévisions budgé‐<br />

taires à réduire.<br />

Chaville, 20 janvier 1869<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

La première ligne <strong>de</strong> cette lettre appartient, en droit <strong>de</strong> charité, à notre f. [Pierre]<br />

Pialot, que le Divin Maître vient <strong>de</strong> rappeler à Lui. Hier 19, à 2h. <strong>de</strong> lʹaprès‐midi, il sʹest<br />

éteint doucement, préparé par la réception <strong>de</strong>s sacrements et par toutes les consolations<br />

spirituelles dont nous avons pu lʹentourer. Il ne paraît pas avoir éprouvé <strong>de</strong> très gran<strong>de</strong>s<br />

souffrances, mais, <strong>de</strong>puis plusieurs mois, retenu par une langueur et une impuissance ab‐<br />

solue, il avait cet état douloureux dʹune <strong>de</strong>struction lente ou plutôt dʹune mort incessante<br />

qui se consomme jour par jour; cʹest une sorte <strong>de</strong> creuset qui purifie; il a parfaitement ac‐<br />

cepté son sacrifice, gardant parfaite connaissance jusquʹà la <strong>de</strong>rnière heure et remettant,<br />

bien soumis, son âme aux mains <strong>de</strong> Dieu. Cʹest ainsi que meurent les vrais religieux, tous<br />

nos ff. décédés ont quitté ce mon<strong>de</strong> dans les mêmes sentiments; songeons‐y, nous autres<br />

qui survivons, et si parfois nos épreuves nous semblent un peu ru<strong>de</strong>s, pensons quʹil est<br />

sage <strong>de</strong> les accepter pour nous assurer une pareille mort; le mon<strong>de</strong> en a peu dʹaussi conso‐<br />

lantes et, tandis que chez nous le salut est sûr, il reste bien incertain dans les soins et pré‐<br />

occupations <strong>de</strong> la terre.<br />

Jʹécris un mot à M. Charrin pour lui donner courage; jʹespère que lʹassurance réité‐<br />

rée <strong>de</strong> mon arrivée prochaine va le tranquilliser et lui faire prendre patience; il nʹaura pas,<br />

du reste, beaucoup à attendre; selon toute apparence, le mois <strong>de</strong> février ne se passera point<br />

sans que je me mette en route; jʹai différé jusquʹici à <strong>de</strong>ssein ma visite <strong>de</strong> nouvel an à M gr<br />

lʹArchevêque <strong>de</strong> Paris, afin <strong>de</strong> profiter <strong>de</strong> lʹoccasion pour obtenir son agrément à ce<br />

voyage; cʹest un acte <strong>de</strong> déférence nécessaire, mais dans la situation je nʹai aucunement à<br />

craindre un refus. Cette démarche faite, je pourrai régler définitivement le moment où, M.<br />

<strong>de</strong> Varax et moi, nous nous acheminerons vers la Villa Strozzi ou plutôt vers S t ‐Pierre <strong>de</strong><br />

1331


Rome, car nous irons vers vous sans doute, mais, avant tout, cʹest à la Ville éternelle, au<br />

siège <strong>de</strong> la catholicité que, comme disciples <strong>de</strong> Jésus‐Christ, nous marquons notre but.<br />

Pour lʹaffaire Gennetier, je crois que vos observations sont fondées; puisque lʹétat <strong>de</strong><br />

choses a attiré lʹattention <strong>de</strong> M. Descemet, ne pourriez‐vous lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r dʹintervenir un<br />

peu près <strong>de</strong> Gennetier pour lui faire comprendre que les conditions à lui accordées, pour<br />

faciliter dans le premier moment son établissement, nʹont plus <strong>de</strong> raison dʹêtre maintenues<br />

aujourdʹhui quʹil est parfaitement posé et réussit très bien. M. Maignen pense, et il nʹest<br />

pas le seul <strong>de</strong> son avis, que ce serait un bien pour le Cercle S t ‐Michel si le restaurant se<br />

transportait hors <strong>de</strong> la maison, mais Gennetier a, dans lʹétat actuel, trop dʹavantages pour<br />

quʹil se résignât volontiers à se poser au <strong>de</strong>hors; il aurait chance pourtant ainsi dʹarriver à<br />

un plus grand développement <strong>de</strong> son entreprise.<br />

La liste <strong>de</strong> livres envoyée par vous pour compléter une bibliothèque était infiniment<br />

trop ambitieuse; jʹai prié M. Keller <strong>de</strong> vouloir bien indiquer quelle somme le Comité pou‐<br />

vait affecter à cette dépense, afin que, mieux fixés sur ce point essentiel, vous puissiez dé‐<br />

signer les ouvrages qui, dès ce moment, seraient le plus nécessaires.<br />

Il y a quelque inconvénient à tomber dans lʹexagération en vos <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s parce que,<br />

une fois en défiance au sujet <strong>de</strong> votre modération, on sera disposé à rabattre sur toutes vos<br />

réclamations. On remarque, par exemple, dans les notes quʹenvoie M. Emile [Beauvais]<br />

pour justifier vos propositions <strong>de</strong> budget, quʹil indique comme probable le remplacement<br />

<strong>de</strong> 4 tapis <strong>de</strong>s billards; il nʹest pas à présumer que, tout à la fois, on ait à remettre à neuf<br />

ces 4 tapis; dʹune autre part, M. Emile évalue à 1000f cette réparation; ici, à Paris, le rem‐<br />

placement dʹun tapis coûte 60f; en le portant pour Rome à 100f, on aurait encore une sin‐<br />

gulière réduction sur les 1000f indiqués; <strong>de</strong>meurez dans le vrai; le Comité est très bien<br />

disposé, il faut le maintenir dans lʹestime et lʹaffection quʹil montre pour vous. Jʹemporterai<br />

les projets <strong>de</strong> budgets et je les réglerai définitivement <strong>avec</strong> vous, non que je veuille vous<br />

imposer <strong>de</strong>s réductions nuisibles aux Cercles, mais parce que, après quelques mois écou‐<br />

lés, vous pouvez désirer les revoir et les rectifier, comme vous avez rectifié déjà vos comp‐<br />

tes pour 1868. Si vous pensez quʹil valût mieux les envoyer tout <strong>de</strong> suite tels quels, écrivez‐<br />

le moi, je les enverrai simplement à M. Keller.<br />

Je nʹai pas <strong>de</strong> détails dʹun véritable intérêt à vous transmettre sur la Communauté et<br />

sur ses œuvres; tout marche dans les conditions ordinaires, <strong>avec</strong> la grâce <strong>de</strong> Dieu; S t ‐<br />

Charles se soutient bien; un déficit <strong>de</strong> 10000f dans la loterie oblige M. Decaux à faire subir<br />

une diminution aux allocations <strong>de</strong> tous les patronages; cʹest une difficulté pour chacun;<br />

Dieu, nous lʹespérons, fera sentir autrement son appui.<br />

Je vous quitte, bien chers amis, pour rendre les <strong>de</strong>rniers <strong>de</strong>voirs à notre f. Pialot<br />

dont on apportent ici les restes mortels ; nos ff. arrivent, tristes sans doute <strong>de</strong> se séparer <strong>de</strong><br />

ce bon et pieux enfant, mais pleins d’espérance, puisque la séparation n’est que momenta‐<br />

née et que l’heure <strong>de</strong> la réunion viendra.<br />

Adieu, mes bien chers amis; je vous quitte aussi en ce moment, mais bientôt, je lʹes‐<br />

père, je vous reverrai pour prier <strong>avec</strong> vous au tombeau <strong>de</strong>s S ts Apôtres à Rome; cʹest<br />

comme le vestibule du Ciel.<br />

Votre ami et Père tout affectionné en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1332


1371 à M. dʹArbois<br />

Pour lui annoncer la mort du frère Pialot. Quelques nouvelles <strong>de</strong>s frères.<br />

Chaville, 25 janvier [1869]<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je ne sais si M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] vous a informé du décès <strong>de</strong> notre jeune f.<br />

Pialot; il est mort mardi <strong>de</strong>rnier, admirablement préparé, en pleine connaissance et remet‐<br />

tant, doucement soumis, son âme aux mains <strong>de</strong> Dieu. Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pour lui trois mes‐<br />

ses, trois communions <strong>de</strong> nos ff. et un souvenir fidèle <strong>de</strong>vant le Seigneur.<br />

Jʹenverrai, à la fin <strong>de</strong> cette semaine, un trimestre <strong>de</strong> la pension <strong>de</strong> nos ff. Boiry et<br />

Cauroy, et 50f pour leurs menues dépenses; dites‐moi <strong>de</strong> suite si vous avez fait pour eux<br />

quelques avances.<br />

Jʹespère que vous avez pu éteindre les rumeurs inquiétantes concernant M. <strong>Jean</strong><br />

[Gauffriau]. Jʹespère aussi que Dieu éclairera cet esprit et lui donnera le don <strong>de</strong> sagesse<br />

quʹil semble nʹavoir pas gardé jusquʹici.<br />

Mille affections à vous et à nos ff.; rien <strong>de</strong> nouveau bien notable. Trois postulants<br />

venus <strong>de</strong> Metz, <strong>de</strong> bonnes apparences [MM. Bouchy, Holzheim, Nauroy] 415 .<br />

Votre Père et ami tout affectionné en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

N.B. Je nʹai pas, je crois, encore écrit à M gr dʹAngers.<br />

1372 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Annonce du décès du frère Pialot. Préparatifs du voyage à Rome. Nouvelles <strong>de</strong>s frères.<br />

Chaville, 25 janvier 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je ne sais si M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] vous a informé du décès <strong>de</strong> notre jeune f.<br />

Pialot; il est mort mardi <strong>de</strong>rnier, admirablement préparé, en pleine connaissance et remet‐<br />

tant, doucement soumis, son âme aux mains <strong>de</strong> Dieu. Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pour lui trois mes‐<br />

ses, trois communions <strong>de</strong> nos ff. et un souvenir fidèle <strong>de</strong>vant le Seigneur.<br />

Je prépare toujours le voyage <strong>de</strong> Rome, mais tout marche lentement; M. [Félix],<br />

Vincent, copiste, vient dʹêtre 15 jours mala<strong>de</strong>; il achève son travail.<br />

Trois nouveaux postulants, [MM. Bouchy, Holzheim, Nauroy], arrivés <strong>de</strong> Metz,<br />

sont à Chaville; nous ne les connaissons quʹà peine, les apparences sont satisfaisantes. Jʹes‐<br />

père que M. Lemaire, bien suivi par vous, rendra <strong>de</strong> vrais services; sʹil était cultivé, lʹesprit<br />

religieux faible, mais surtout mal éclairé, en lui prendrait le <strong>de</strong>ssus; il y a un fonds <strong>de</strong> qua‐<br />

lités essentielles.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, vous savez mon tendre dévouement pour vous. Affec‐<br />

tions bien vraies à tous nos ff.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

415 L’original porte 2 postulants. Le père Imhoff, qui était alors persévérant ecclésiastique, corrige en nommant les 3 entrées le 13<br />

janvier. Le 3 e est, plus loin, marqué Nauroy (lettre 1397) au lieu <strong>de</strong> Neuvroy.<br />

1333


1373 à M. Maignen<br />

Que le frère Maignen règle la question du séjour à Paris du sergent Boucault.<br />

26 janvier [1869]<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

M. Boucault désire beaucoup abréger son séjour à Paris; il importe dʹailleurs quʹon<br />

ne semble pas lui faire acheter le service quʹil attend <strong>de</strong> nous; enten<strong>de</strong>z‐vous donc <strong>avec</strong> M.<br />

Hello pour terminer au plus tôt cette affaire.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1374 à M. dʹArbois<br />

La sœur <strong>de</strong> M. dʹArbois est mala<strong>de</strong>; MLP. réconforte et rassure son frère qui se croit atteint du même mal. Quel‐<br />

ques nouvelles; réflexions sur plusieurs postulants.<br />

Vaugirard, 30 janvier 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je prie et fais prier pour votre chère sœur; jʹai la bonne espérance que Dieu nous en‐<br />

tendra et éloignera dʹelle lʹaffliction qui lʹéprouve présentement. Je ne crois pas que vous<br />

ayez à craindre, quant à vous, aucune fatigue semblable, les quelques malaises que votre<br />

santé a parfois ressentis étant communs à beaucoup <strong>de</strong> personnes, sans avoir aucun carac‐<br />

tère particulier dont on ait à sʹinquiéter; les préoccupations <strong>de</strong> votre position vont dimi‐<br />

nuer journellement, vos travaux étant terminés pour la chapelle et les paiements à faire<br />

nʹétant pas tellement rapprochés que vous ayez à en prendre sollicitu<strong>de</strong>. Dieu, qui vous a<br />

aidé jusquʹici, achèvera lʹœuvre quʹil a commencée <strong>avec</strong> vous.<br />

Je vous envoie ci‐joint 210f pour le sol<strong>de</strong> <strong>de</strong>s dépenses <strong>de</strong> nos jeunes frères au sémi‐<br />

naire. Je pense que vous gar<strong>de</strong>z toujours moitié <strong>de</strong> la pension envoyée par votre bon père;<br />

si vous ne lʹaviez pas fait, je vous en tiendrais compte, désirant toujours que vous ayez ce<br />

petit avantage.<br />

Dites‐moi, en votre prochaine lettre, si nos séminaristes vont bien et si on vous rend<br />

dʹeux <strong>de</strong> bons témoignages.<br />

M. <strong>Jean</strong> [Gauffriau] comprend‐il un peu ce que ses procédés ont eu dʹimpru<strong>de</strong>nt, si<br />

ce nʹest plus, pour lui‐même et <strong>de</strong> compromettant pour nous? Sent‐il aussi lʹoffense <strong>de</strong><br />

Dieu? Je le voudrais, mais est‐ce bien réel?<br />

Nous nʹavons rien <strong>de</strong> notable et la famille marche en sa voie ordinaire. Vous avez<br />

appris la mort du bon abbé Tridon. M. Lambey, votre ami et parent, lui succè<strong>de</strong>. Il nous a<br />

envoyé, quelque temps avant le décès <strong>de</strong> M. Tridon, un postulant, jeune ouvrier, qui est à<br />

Chaville <strong>de</strong>puis quelques mois. Cʹest un brave et honnête garçon, ouvert et bien disposé,<br />

mais malheureusement né à la campagne et très peu instruit; le former sera tâche longue et<br />

nécessairement dʹun résultat restreint; il en sera <strong>de</strong> même pour <strong>de</strong>ux autres postulants que<br />

la maison <strong>de</strong> Metz vient <strong>de</strong> nous envoyer; nous ne pouvons encore rien préjuger sur leur<br />

persévérance; ils ne sont guère non plus instruits; si, comme nous lʹespérons, ils sʹaffermis‐<br />

sent dans leur vocation, Dieu mettra la main à leur avancement. Un prêtre [M. Demante]<br />

<strong>de</strong> talent médiocre, mais <strong>de</strong> cœur élevé, <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à lʹArchevêché la permission dʹentrer<br />

chez nous; il y a lieu <strong>de</strong> penser quʹelle lui sera accordée; ce sera toujours un ai<strong>de</strong> utile, sʹil<br />

1334


persévère toutefois, car on lui reproche un peu dʹinconstance; elle semble moins venir <strong>de</strong><br />

la volonté que du besoin habituel dʹun conseil pour sa direction; cet appui lui serait donné<br />

par la vie commune, où on se concerte et où lʹon sʹentend pour agir.<br />

Je recomman<strong>de</strong> toutes ces volontés qui ont tant besoin <strong>de</strong> lumières et <strong>de</strong> force; <strong>de</strong>‐<br />

mandons‐les à Dieu.<br />

Mille affections pour nos chers ff. et pour vous; tous ici vous restent cordialement<br />

dévoués.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Hier, nous avons fait en famille et aimablement la fête <strong>de</strong> S t François <strong>de</strong> Sales.<br />

1375 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Communication <strong>de</strong>s Constitutions à lʹArchevêché <strong>de</strong> Paris. Conseils <strong>de</strong> patience pour le support <strong>de</strong>s contradic‐<br />

tions et <strong>de</strong>s peines. Agrégation à lʹŒuvre <strong>de</strong> la Communion Réparatrice (apostolat <strong>de</strong> la prière). Prières pour le<br />

futur Concile.<br />

Paris‐Nazareth, 2 février [1869]<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je nʹai point entendu dire dʹaucune part chez nous quʹon ait reçu une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pour<br />

lʹadmission du jeune Goubet à Vaugirard. Il est vrai quʹayant vu hier tous nos ff. au<br />

Conseil qui sʹest réuni ici, jʹai oublié <strong>de</strong> leur <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r sʹils ont eu quelque avertissement<br />

en ce sens; jeudi, en retournant à Vaugirard, je ne manquerai pas <strong>de</strong> leur en parler, particu‐<br />

lièrement à M. Lantiez qui avait vu, je crois, ce jeune homme à Arras.<br />

Nous recevrons volontiers M. Gérold pour sa petite retraite à Chaville; je pense,<br />

comme vous, que ce repos spirituel lui sera doublement utile, en lui rendant moins long le<br />

temps dʹattente jusquʹà son entrée au noviciat.<br />

Nous allons seulement après‐<strong>de</strong>main jeudi rendre visite à Mgr <strong>de</strong> Paris. Je vous lʹai<br />

dit, il a fallu huit jours pour la communication <strong>de</strong> lʹécrit à M. Icard, puis le copiste [M. Vin‐<br />

cent] est tombé mala<strong>de</strong> et est resté 15 jours à lʹinfirmerie; après, copie lentement préparée<br />

sur papier spécial pour autographie, mauvaise réussite du travail pour plusieurs parties,<br />

obligation <strong>de</strong> refaire, etc. Jusquʹici rien encore <strong>de</strong> bien fâcheux, la saison sera moins dure,<br />

mais le moment semble bien arrivé; je ne crois pas que les délais jusquʹici soient volontai‐<br />

res. Un prêtre estimable [M. Demante], mais <strong>de</strong> talents médiocres, montre le désir dʹentrer<br />

chez nous; il y a quelque espoir que la chose ne souffrira pas trop <strong>de</strong> difficultés; si elle ar‐<br />

rive à bonne conclusion, ce serait un embarras <strong>de</strong> moins pour mon remplacement à Cha‐<br />

ville les dimanches et fêtes.<br />

Prenez courage, mon bien cher ami, dans vos difficultés quotidiennes; ne sommes‐<br />

nous pas heureux, misérables condamnés que nous sommes tous ici‐bas, que le divin Sei‐<br />

gneur nous ait permis <strong>de</strong> changer toutes nos peines, tous nos châtiments en trésors et en<br />

précieux mérites? Si les prisonniers <strong>de</strong> la justice humaine gagnaient chaque jour <strong>de</strong> très<br />

grosses sommes dʹargent en subissant leur punition, tout le mon<strong>de</strong> voudrait aller en pri‐<br />

son; gagnons, pour nous, tous les avantages que contiennent les supports, les contrariétés,<br />

les impressions pénibles <strong>de</strong> chaque jour, et nous serons bien riches, et nos richesses nous<br />

ouvriront le Ciel. Vous avez dʹailleurs les joies <strong>de</strong> la charité, car ces âmes faibles que vous<br />

1335


soutenez, elles tomberaient si elles manquaient dʹappui et qui sait si, à la longue, elles ne<br />

porteront pas du fruit par la patience.<br />

Nous ne manquons pas non plus ici dʹépreuves semblables; bien que notre petite<br />

famille soit fort peu nombreuse, il nʹest guère <strong>de</strong> jour que, <strong>de</strong> quelque côté, il ne nous ar‐<br />

rive quelque pénible atteinte; <strong>de</strong>venons durs à porter la souffrance morale, comme les<br />

gens accoutumés aux intempéries sont forts contre toutes les violences <strong>de</strong> lʹair, <strong>de</strong> la froi‐<br />

dure ou <strong>de</strong> la chaleur; hélas! moi qui vous parle, je me sens encore la peau bien tendre!<br />

Je cherche dans mon esprit quelles choses nouvelles ou intéressantes je pourrais<br />

vous communiquer, je nʹen trouve aucune; cʹest pourquoi je finis, vous assurant, comme<br />

toujours, <strong>de</strong> mon affection déjà vieille et vous priant dʹassurer aussi nos ff. <strong>de</strong> mon bien<br />

cordial attachement en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Le Conseil a décidé hier que nous <strong>de</strong>vrions tous nous agréger à lʹassociation <strong>de</strong><br />

la Communion Réparatrice, <strong>de</strong> laquelle les membres sʹengagent à offrir une communion<br />

chaque mois (mieux chaque semaine) en réparation <strong>de</strong>s outrages faits à N.S. en sa divinité<br />

et en sa présence réelle au T. S t Sacrement <strong>de</strong> lʹAutel; nos ff. dʹAmiens goûteront certaine‐<br />

ment cette pensée. Il faut: 1° ‐ faire partie <strong>de</strong> lʹAssociation du Sacré‐Cœur; 2° ‐ accepter un<br />

jour pour la communion réparatrice. 80000 communions se font déjà ainsi par année ou<br />

par mois, je ne me souviens pas; on voudrait arriver à 80000 par jour; ce serait le salut du<br />

mon<strong>de</strong>. Nous <strong>de</strong>vons faire aussi mention quotidienne, dʹaprès lʹavis du Conseil, aux re‐<br />

commandations habituelles, <strong>de</strong> la préparation du Concile. ‐ Adieu.<br />

1376 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Présentation <strong>de</strong>s Constitutions à Rome. <strong>Lettre</strong>s postulatoires. Admission dʹun abbé ʺjeune <strong>de</strong> cœur et flexible <strong>de</strong><br />

caractèreʺ. Condoléances <strong>de</strong> Pie IX pour la mort du frère Girard.<br />

Vaugirard, 12 février 1869<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Jʹarrive bien lentement, les ans en sont la cause, mais plus encore les choses elles‐<br />

mêmes qui ont leurs résistances et qui nʹavancent pas, comme on veut quʹelles le fassent.<br />

Nous avons eu un bon accueil <strong>de</strong> Mgr <strong>de</strong> Paris (M. Lantiez et moi); il a trouvé bon le<br />

voyage et bonne la pensée <strong>de</strong> soumettre nos Constitutions à Rome; il a chargé M. Icard <strong>de</strong><br />

les examiner, ce qui va être vite fait, mʹa dit ce <strong>de</strong>rnier, puisquʹil les avait déjà approuvées;<br />

il mʹa promis une recommandation <strong>de</strong> Mgr pour Rome.<br />

Je joins donc ici une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> pareil appui à Mgr dʹAmiens, et jʹécris aussi à An‐<br />

gers et à Metz; voyez la lettre et veuillez la porter vous‐même à Mgr Boudinet. M. Icard<br />

pense que les Evêques dans les diocèses <strong>de</strong>squels nous nʹavons point <strong>de</strong> maisons nous re‐<br />

comman<strong>de</strong>raient bien faiblement; nous verrons pourtant ce qui serait le mieux.<br />

Je vous prie dʹexaminer quel moment il conviendrait que nous choisissions pour le<br />

départ; je pensais que la <strong>de</strong>rnière semaine <strong>de</strong> février pourrait convenir; en outre, prévoir<br />

comment marcheront chez vous les choses en votre absence, et un peu aussi comment<br />

nous pourrions échelonner nos étapes.<br />

M. Demante, entrant définitivement chez nous, me délivrera <strong>de</strong> la difficulté <strong>de</strong> mon<br />

remplacement à Chaville les dimanches. Je ne sais si vous le connaissez; cʹest le fils <strong>de</strong> lʹan‐<br />

1336


cien professeur <strong>de</strong> droit (décédé); son frère est Jésuite. Pour lui, il a été condisciple <strong>de</strong> M.<br />

Lantiez et est resté <strong>de</strong> ses amis; il a eu toujours un attrait prononcé pour les œuvres; il a 43<br />

ans, mais il est jeune <strong>de</strong> cœur et flexible <strong>de</strong> caractère; je pense quʹil ira bien chez nous.<br />

Vous voudrez bien cacheter la lettre pour M gr , après lʹavoir mise sous enveloppe.<br />

Je ne puis écrire plus longuement. Les vendredis et samedis sont <strong>de</strong>s jours si rem‐<br />

plis pour moi quʹil nʹy a place pour rien <strong>de</strong> ce qui ne regar<strong>de</strong> pas ceux <strong>de</strong> la maison ou <strong>de</strong><br />

lʹentourage.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Le Saint Père a, ces jours‐ci, exprimé son regret pour la mort <strong>de</strong> notre f. Girard<br />

et a prononcé pour nos Cercles <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> très aimable encouragement.<br />

1377 à M gr <strong>de</strong> Metz et à M gr dʹAmiens<br />

Modèle <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> lettres testimoniales en vue dʹobtenir lʹapprobation <strong>de</strong> lʹInstitut (la mention ʺEv.<br />

dʹAmiensʺ est remplacée par ʺEv. <strong>de</strong> Metzʺ selon le <strong>de</strong>stinataire).<br />

Vaugirard, 13 février 1869<br />

Monseigneur,<br />

Vous avez daigné accueillir dans votre diocèse une petite colonie <strong>de</strong> notre Congré‐<br />

gation <strong>de</strong>s Frères <strong>de</strong> St ‐Vincent <strong>de</strong> Paul, et vous avez encouragé par vos bontés ceux <strong>de</strong> ses<br />

membres qui ont le bonheur <strong>de</strong> travailler sous vos yeux aux œuvres <strong>de</strong> zèle et <strong>de</strong> miséri‐<br />

cor<strong>de</strong>. Votre bienveillance pour nous, Monseigneur, me donne la confiance <strong>de</strong> solliciter <strong>de</strong><br />

Votre Gran<strong>de</strong>ur une faveur nouvelle.<br />

Fondée <strong>de</strong>puis 22 ans passés, notre famille religieuse a grandi lentement et dans<br />

une voie bien humble; mais, par là même, elle a pu étudier attentivement les vues <strong>de</strong> Dieu<br />

sur elle, sʹasseoir dans les conditions appropriées à sa mission et préparer ses Constitu‐<br />

tions à mesure que la grâce et lʹexpérience éclairaient ceux qui la conduisent.<br />

Arrivée à ce point, elle serait heureuse si elle obtenait du Saint‐Siège quelque té‐<br />

moignage approbatif qui lʹassurât mieux dans sa marche et fût pour lʹInstitut comme le<br />

souffle <strong>de</strong> vie.<br />

La recommandation <strong>de</strong> Votre Gran<strong>de</strong>ur pouvant contribuer bien puissamment à lui<br />

ménager une si désirable faveur, jʹose vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r, Monseigneur, quelques mots bien‐<br />

veillants qui me donnent crédit à Rome, où mʹappelle la visite que je vais faire à ceux <strong>de</strong><br />

nos ff. qui y sont établis et qui dirigent les <strong>de</strong>ux Cercles militaires français.<br />

Mgr <strong>de</strong> Paris veut bien, <strong>de</strong> son côté, me donner une pareille marque dʹintérêt; jʹai<br />

lʹespérance quʹelle me sera accordée par Nos Seigneurs les Evêques dʹAngers et dʹAmiens,<br />

dans les diocèses <strong>de</strong>squels nous <strong>de</strong>sservons quelques Etablissements.<br />

Une feuille autographiée, placée en tête <strong>de</strong> nos Constitutions, contenant lʹexposé <strong>de</strong><br />

notre état présent, je prends la liberté dʹen joindre ici un exemplaire.<br />

Veuillez agréer, Monseigneur, les sentiments <strong>de</strong> profond respect <strong>avec</strong> lesquels je<br />

suis,<br />

<strong>de</strong> Votre Gran<strong>de</strong>ur<br />

Le très humble et très obéissant serviteur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1337


1378 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

MLP. lui annonce sa prochaine visite.<br />

Vaugirard, 13 février 1869<br />

Madame la Marquise,<br />

Je suis bien vivement touché <strong>de</strong> lʹaimable souvenir que vous et Madame votre Mère<br />

avez la bonté <strong>de</strong> mʹaccor<strong>de</strong>r; jʹavais résolu cette semaine dʹaller vous présenter mon res‐<br />

pect et jʹavais pris pour cela mes dispositions jeudi <strong>de</strong>rnier, mais je me suis trouvé souf‐<br />

frant ces jours‐ci et forcé <strong>de</strong> <strong>de</strong>meurer à la maison; je me sens mieux aujourdʹhui et, si vous<br />

le permettez, je me rendrai mardi 16, vers 1h., rue St‐Florentin, 11; je serai bien heureux sʹil<br />

mʹest donné <strong>de</strong> vous rencontrer.<br />

Je ne suis jamais à Vaugirard le dimanche, étant obligé <strong>de</strong> rester à Chaville pour le<br />

service spirituel <strong>de</strong> la maison; jʹaurais donc le regret <strong>de</strong> ne pas vous voir si vous choisissiez<br />

ce jour pour visiter les orphelins.<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, et partager <strong>avec</strong> Madame dʹHurbal, mes sen‐<br />

timents bien respectueux et bien dévoués.<br />

Votre humble serviteur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1378‐1 à M gr Angebault<br />

Voyage <strong>de</strong> MLP. à Rome. MLP. sollicite ʺquelques lignes <strong>de</strong> sa mainʺ pour donner du poids au document quʹil<br />

emporte <strong>avec</strong> lui et qui est <strong>de</strong>stiné à obtenir la première approbation <strong>de</strong> lʹInstitut par le Saint‐Siège.<br />

Vaugirard, 15 février 1869<br />

Monseigneur,<br />

Jʹai reçu presque en même temps votre bonne et paternelle lettre et un exemplaire<br />

<strong>de</strong> votre man<strong>de</strong>ment au sujet du Concile convoqué pour le 8 décembre 1869.<br />

Jʹai lu à nos ff. du Conseil la lettre, ainsi que je le fais dʹordinaire, afin que tous en‐<br />

semble nous profitions <strong>de</strong> vos avis et observations qui ont été, dès nos petits commence‐<br />

ments, notre lumière et notre appui. Pour le man<strong>de</strong>ment, il intéressait toute la famille sans<br />

distinction, il est donc lu au réfectoire et laissé aussi sous la main <strong>de</strong> chacun.<br />

Je me prépare en ce moment à faire un voyage bien long pour ma faiblesse mais<br />

dans lequel, je lʹespère, la grâce du Seigneur me soutiendra. Ceux <strong>de</strong> nos ff. qui sont à<br />

Rome les gardiens <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux Cercles militaires français me pressent vivement <strong>de</strong> leur faire<br />

visite, ayant besoin <strong>de</strong> quelques directions sur quelques points concernant leur conduite,<br />

soit dans cette œuvre, soit pour leurs habitu<strong>de</strong>s propres; le Conseil <strong>de</strong> notre Communauté<br />

a jugé quʹil y aurait utilité réelle à cette excursion, et quʹil était à propos quʹelle fût effec‐<br />

tuée par moi.<br />

Jʹen profiterai pour donner au S t ‐Siège quelque connaissance première <strong>de</strong> notre pe‐<br />

tite Congrégation. Nos Constitutions, plusieurs fois mises sous vos yeux, Monseigneur, et<br />

en <strong>de</strong>rnier lieu un peu revues par le r. p. Cotel, Jésuite qui sʹest tout spécialement occupé<br />

<strong>de</strong>s Règles <strong>de</strong>s Communautés, ont été par nous communiquées à lʹun <strong>de</strong> MM. les Vicaires<br />

généraux <strong>de</strong> Paris, lequel en a entretenu M gr lʹArchevêque. Jʹai pu dès lors <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r moi‐<br />

même, dans une visite faite à ce Prélat, son agrément pour porter à Rome cet acte qui cons‐<br />

tituerait régulièrement notre société religieuse. M gr Darboy a parfaitement accueilli la re‐<br />

1338


quête, a donné son agrément à mon voyage et veut bien aussi me donner quelques mots<br />

<strong>de</strong> recommandation pour Rome.<br />

On mʹassure que le suffrage dʹun seul Prélat ne suffirait pas pour nous obtenir<br />

quelque signe approbatif du S t ‐Siège et quʹil serait essentiel dʹavoir aussi lʹavis favorable<br />

<strong>de</strong> ceux <strong>de</strong> M grs les Evêques dans les diocèses <strong>de</strong>squels nous avons quelquʹétablissement<br />

ou poste à <strong>de</strong>sservir. Cette vue va tout à fait à nos sentiments car nous ne nous croirions<br />

pas assez protégés si nous ne lʹétions par vous, Monseigneur, qui avez été visiblement<br />

lʹAnge que le Seigneur a chargé <strong>de</strong> nous conduire et <strong>de</strong> nous assister dans notre voie. Jʹose<br />

donc attendre <strong>de</strong> votre bonté paternelle que vous daignerez mʹaccor<strong>de</strong>r quelques lignes <strong>de</strong><br />

votre main afin quʹelles me donnent crédit à Rome et mʹy préparent un accueil encoura‐<br />

geant.<br />

Jʹécris aussi à Nosseigneurs dʹAmiens et <strong>de</strong> Metz dans les diocèses <strong>de</strong>squels nous<br />

avons <strong>de</strong>s œuvres à <strong>de</strong>sservir. Le Souverain Pontife a déjà quelque petit indice <strong>de</strong> notre<br />

existence, à lʹoccasion <strong>de</strong>s Cercles dont on lui a parlé plusieurs fois. Dernièrement, il a dai‐<br />

gné donner quelques paroles <strong>de</strong> regret à lʹun <strong>de</strong> nos ff. qui lui avait été présenté et qui<br />

ayant contracté dans son emploi à Rome une dysenterie dangereuse, est revenu mourir ici<br />

près <strong>de</strong> nous.<br />

Je sais la prédilection que lʹAuguste Chef <strong>de</strong> lʹEglise a témoigné pour votre per‐<br />

sonne, Monseigneur, en mainte circonstance, et jʹai la confiance que votre suffrage serait<br />

pour nous un puissant appui.<br />

Je serai, je pense, accompagné par lʹun <strong>de</strong> nos prêtres, M. <strong>de</strong> Varax, qui a déjà vu<br />

Rome et qui pourra me gui<strong>de</strong>r dans mes mouvements.<br />

Nos Constitutions nʹayant, <strong>de</strong>puis quʹelles ont été mises sous vos yeux, subi que<br />

quelques modifications <strong>de</strong> détail ou <strong>de</strong> forme, il me semble superflu <strong>de</strong> vous les transmet‐<br />

tre <strong>de</strong> nouveau; je joins seulement ici une feuille autographiée qui précè<strong>de</strong> nos Règles et<br />

qui rend un compte sommaire <strong>de</strong> notre état présent.<br />

Veuillez agréer, Monseigneur, les nouvelles assurances <strong>de</strong> mon profond respect et<br />

du filial dévouement <strong>avec</strong> lequel je suis<br />

Votre humble serviteur et fils en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong> prêtre<br />

Origine <strong>de</strong> la Congrégation<br />

La Congrégation <strong>de</strong>s Frères <strong>de</strong> Saint‐Vincent <strong>de</strong> Paul a commencé en lʹannée 1845<br />

par quelques hommes, simples laïques, quʹun vif attrait pour les œuvres <strong>de</strong> zèle et <strong>de</strong> mi‐<br />

séricor<strong>de</strong> avait rapprochés, et quʹune même pensée avait frappés simultanément, savoir:<br />

que ces formes diverses empruntées <strong>de</strong> nos jours par la charité pour attirer les âmes (insti‐<br />

tutions populaires, patronages, cercles, conférences, réunions pieuses, etc.) semblent bien<br />

réellement selon les vues <strong>de</strong> la Divine Sagesse, mais que manquant généralement dʹagents<br />

libres et dégagés pour les soutenir, elles languiraient bientôt impuissantes si Dieu ne susci‐<br />

tait <strong>de</strong>s âmes dégagées <strong>de</strong> tout lien terrestre qui sʹappliquassent uniquement à les déve‐<br />

lopper et à les affermir. Cette conviction, fortifiée en eux par la prière et par <strong>de</strong>s médita‐<br />

tions longtemps répétées auprès <strong>de</strong>s reliques du grand apôtre <strong>de</strong> la Charité, St Vincent <strong>de</strong><br />

Paul, les détermina à sʹouvrir au Pontife qui gouvernait alors le diocèse <strong>de</strong> Paris, Mgr Affre,<br />

<strong>de</strong> vénérable mémoire.<br />

1339


Ce prélat les accueillit <strong>avec</strong> bonté, déclara que leur pensée était bien <strong>de</strong> Dieu, et les<br />

autorisa à se réunir pour en commencer lʹexécution, offrant à cette fin <strong>de</strong> leur donner asile<br />

dans la Maison <strong>de</strong>s Carmes, où lʹEcole Supérieure Ecclésiastique nʹoccupait encore quʹun<br />

petit emplacement. Profondément touchés <strong>de</strong> cet encouragement mais se défiant <strong>de</strong> leurs<br />

moyens et <strong>de</strong> leur petit nombre, ils préférèrent prendre leur <strong>de</strong>meure dans une humble<br />

maison <strong>de</strong> Patronage dʹapprentis louée récemment au quartier S t ‐Germain par la Société<br />

<strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul.<br />

Dès ces premiers moments, au principe même <strong>de</strong> leur existence, ils avaient reçu <strong>de</strong><br />

Dieu une précieuse bénédiction par les mains <strong>de</strong> M gr Angebault, Evêque dʹAngers, doyen<br />

<strong>de</strong>s Prélats <strong>de</strong> France, lequel étant lʹévêque diocésain et le directeur spirituel <strong>de</strong> lʹun <strong>de</strong>s<br />

premiers membres <strong>de</strong> lʹInstitut naissant avait été le conseiller naturel, osons dire le pre‐<br />

mier Père <strong>de</strong> la petite Famille. Son appui, sa haute expérience, ses con<strong>de</strong>scendances les<br />

plus aimables lʹont dirigée, ont assuré sa marche sans nulle interruption jusquʹà ce jour.<br />

Ce vénérable Pontife ne dédaigna pas <strong>de</strong> venir à Paris pour consacrer la première<br />

pierre <strong>de</strong> la fondation. Il obtint <strong>de</strong> M. le Supérieur général <strong>de</strong> S t ‐Lazare que la châsse <strong>de</strong><br />

saint Vincent fût découverte; il offrit le saint sacrifice et communia les premiers Frères <strong>de</strong><br />

S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul. Ils étaient trois seulement: lʹun dʹeux, prêtre aujourdʹhui, est resté <strong>de</strong>‐<br />

puis lors chef <strong>de</strong> la famille, les <strong>de</strong>ux autres sont à la tête <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux plus anciennes maisons<br />

dʹœuvres fondées par la Congrégation.<br />

Dans le cours <strong>de</strong> cette année, les trois nouveaux religieux, reconnaissant que leur<br />

rési<strong>de</strong>nce au sein dʹune œuvre active attirant un concours constant dʹenfants et <strong>de</strong> person‐<br />

nes <strong>de</strong> tout état, ne leur laisserait aucune liberté pour les exercices pieux, se retirèrent dans<br />

une petite maison quʹon leur offrit provi<strong>de</strong>ntiellement à Grenelle, près Paris. Là, sans<br />

abandonner leur œuvre à laquelle ils venaient vaquer chaque jour, ils purent le matin et le<br />

soir sʹinitier au recueillement et à la régularité dont ils sentaient impérieusement le besoin.<br />

Après que <strong>de</strong>ux membres nouveaux se furent joints à eux, M gr Sibour, successeur <strong>de</strong><br />

M gr Affre, les autorisa à établir chez eux une chapelle et, faveur inappréciable, à y conser‐<br />

ver le T. S t Sacrement. De cet instant seulement ils se crurent sûrs <strong>de</strong> lʹavenir et se regardè‐<br />

rent comme fondés. Ils le furent doublement, car alors fut envoyé <strong>de</strong> Dieu le premier prê‐<br />

tre <strong>de</strong> la Communauté.<br />

Dès lʹannée 1851, lʹInstitut fut assez nombreux pour quʹon pût prendre à Paris une<br />

vaste maison et y établir un Orphelinat où furent admis, moyennant <strong>de</strong> très modiques<br />

pensions, <strong>de</strong> jeunes garçons <strong>de</strong> la classe ouvrière, privés <strong>de</strong> leur père ou <strong>de</strong> leur mère. Cet<br />

établissement, fort agrandi <strong>de</strong>puis, a été transféré dans un local acquis à Vaugirard par la<br />

Congrégation, et qui forme aujourdʹhui la Maison‐Mère.<br />

Vers ce temps, M gr Sibour, proprio motu, désigna M. Dedoue, Vicaire général et son<br />

secrétaire particulier, comme conseiller et protecteur <strong>de</strong> la famille pour le diocèse. Ce prê‐<br />

tre vénérable vint durant <strong>de</strong>ux ou trois années encourager <strong>de</strong> temps à autre les œuvres <strong>de</strong><br />

la petite Congrégation, lʹéclairant <strong>de</strong> ses conseils, présidant parfois ses solennités particu‐<br />

lièrement celles où se prononçaient les vœux. Depuis, ayant été appelé à un canonicat et<br />

ayant, pour cause <strong>de</strong> santé, cessé <strong>de</strong> participer à lʹadministration diocésaine, il mit fin à ses<br />

visites. Aucun successeur ne lui fut donné près <strong>de</strong> lʹInstitut, le Conseil <strong>de</strong> lʹArchevêché<br />

ayant jugé, selon lʹapparence, la Congrégation désormais assez constituée pour suivre<br />

fermement sa voie. Mais les rapports entre lʹadministration diocésaine et la Congrégation<br />

nʹont jamais cessé dʹêtre ceux <strong>de</strong> la plus paternelle bienveillance dʹune part, et <strong>de</strong> la plus<br />

1340


sincère déférence <strong>de</strong> lʹautre. Son Em. le Cardinal Morlot tout particulièrement sʹest montré<br />

pour la famille un bienfaiteur insigne. A diverses reprises, il donna lʹapprobation la plus<br />

cordiale à la Congrégation et à ses œuvres; <strong>de</strong> ses <strong>de</strong>niers, il concourut pour <strong>de</strong>s sommes<br />

considérables à lʹédification dʹune chapelle dépendant dʹune <strong>de</strong>s maisons <strong>de</strong> lʹInstitut et,<br />

en maintes circonstances encore, lui prodigua les témoignages <strong>de</strong> son affectueux et géné‐<br />

reux intérêt. Soutenue par cette haute bienveillance continuée par son digne successeur,<br />

M gr Darboy, la Congrégation a pu successivement se trouver à la tête, dans la circonscrip‐<br />

tion <strong>de</strong> Paris, <strong>de</strong> sept établissements charitables, dont quatre lui appartenant sont sous sa<br />

direction immédiate, et les autres sont <strong>de</strong>sservis par elle. La maison du Noviciat est sise à<br />

Chaville (Seine‐et‐Oise) sous les yeux <strong>de</strong> M gr <strong>de</strong> Versailles.<br />

En province, la Congrégation <strong>de</strong>ssert <strong>de</strong>ux établissements dans le diocèse <strong>de</strong> son<br />

premier protecteur, M gr lʹEvêque dʹAngers. Elle possè<strong>de</strong> en outre, toujours <strong>avec</strong> lʹagrément<br />

<strong>de</strong>s Prélats, <strong>de</strong>ux établissements à Amiens et un à Metz; enfin, <strong>de</strong>rnière et précieuse béné‐<br />

diction <strong>de</strong> Dieu, ses Frères sont les gardiens <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux Cercles militaires français à Rome.<br />

Le personnel <strong>de</strong> la Congrégation, dans ses <strong>de</strong>ux éléments ecclésiastique et laïque,<br />

sʹest accru successivement, en mesure un peu stricte il est vrai, mais telle néanmoins<br />

quʹelle satisfait rigoureusement à ses charges. Elle compte 12 prêtres, 2 autres vont être or‐<br />

donnés cette année; <strong>de</strong> plus, elle a 7 séminaristes à divers <strong>de</strong>grés <strong>de</strong>s Ordres et 10 Scolasti‐<br />

ques; les Frères laïques sont au nombre <strong>de</strong> 65. Mais combien un si petit troupeau reste im‐<br />

perceptible dans lʹimmense champ <strong>de</strong>s œuvres. Les principales villes <strong>de</strong> France et même<br />

dʹautres pays, sentant lʹutilité <strong>de</strong> ce moyen dʹaction, suscitent <strong>de</strong> toutes parts <strong>de</strong>s institu‐<br />

tions <strong>de</strong> zèle et <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt à grands cris <strong>de</strong>s agents pour les soutenir. Les bras ne suffisent<br />

pas à la tâche; daigne le Maître <strong>de</strong> la moisson envoyer pour la recueillir, <strong>de</strong> nombreux et<br />

vaillants ouvriers.<br />

Les Constitutions et la Règle <strong>de</strong> la Congrégation, établies successivement et à me‐<br />

sure que la grâce et lʹexpérience éclairaient ceux qui la conduisent, forment présentement<br />

un ensemble assez complet. On prend donc la confiance <strong>de</strong> les soumettre au Saint Siège<br />

Apostolique afin quʹelles soient examinées et, sʹil y a lieu, approuvées par lui.<br />

1379 à M. dʹArbois<br />

Pour quʹil transmette la lettre adressée à Mgr Angebault. Questions financières.<br />

Vaugirard, 16 février [1869]<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie ci‐joint une lettre par laquelle je prie M gr dʹAngers <strong>de</strong> me donner<br />

quelques lignes <strong>de</strong> sa main qui me recomman<strong>de</strong>nt à Rome, où je vais aller (probablement<br />

la <strong>de</strong>rnière semaine <strong>de</strong> février) pour visiter nos ff., lesquels désirent vivement que je puisse<br />

personnellement bien me rendre compte <strong>de</strong> leur situation et <strong>de</strong> leur œuvre dans les Cercles.<br />

Je profiterai <strong>de</strong> lʹoccasion pour solliciter quelque commencement dʹapprobation <strong>de</strong><br />

notre petite famille. Cʹest pourquoi je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> la recommandation <strong>de</strong> M gr dʹAngers, ainsi<br />

que vous le verrez dans la lettre.<br />

Je vous prie <strong>de</strong> la lui porter, après lʹavoir mise sous enveloppe.<br />

Je remarque dans le compte, dʹailleurs bien régulier, que vous mʹavez envoyé <strong>de</strong>s<br />

dépenses <strong>de</strong> nos jeunes frères au séminaire dʹAngers, que vous portez: Reçu directement<br />

du Supérieur <strong>de</strong> la Communauté, ci 400f.<br />

1341


Il me semblait nʹavoir remis à MM. Boiry et Cauroy que 300f pour leur pension au<br />

départ; me trompai‐je ou vous ai‐je remis dʹailleurs 100f, ou vous trompez‐vous vous‐<br />

même?<br />

Adieu, mon bien cher ami, priez <strong>avec</strong> nos ff. pour notre voyage (M. <strong>de</strong> Varax, je<br />

crois, mʹaccompagnera), et continuez après notre départ, afin que cette excursion, difficile<br />

pour moi, tourne à la gloire <strong>de</strong> Dieu.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1380 à M. Tourniquet<br />

Départ pour Rome. Un mot du Séminaire Français, tenu par les Spiritains pour la cause <strong>de</strong> béatification <strong>de</strong> leur<br />

fondateur, le père Libermann, déposition <strong>de</strong> MLP.<br />

Nazareth, 16 février [1869]<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je vous écris <strong>de</strong>ux mots seulement pour vous avertir que jʹespère partir (sauf contre‐<br />

temps) pour vous aller visiter à la fin <strong>de</strong> ce mois; jʹattends la réponse <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax pour<br />

fixer le jour que je vous dirai. Nous serons un peu longtemps en route, car probablement,<br />

nous irons par terre, à moins que la mer ne soit assez douce pour ne pas écraser ma fai‐<br />

blesse; cʹest peu probable.<br />

Nous pourrions, avant le départ, faire pour vous quelques commissions, pas trop<br />

nombreuses pourtant, car nous sommes ici, vous le savez, si affairés; jʹai encore 75f envi‐<br />

ron restant du voyage <strong>de</strong> M. Girard; M. Keller mʹa permis dʹen disposer pour menus<br />

achats concernant votre œuvre.<br />

On mʹappelle pour le Conseil <strong>de</strong> Nazareth.<br />

M. Hello cherche quelques ornements; quels sont ceux qui vous sont le plus néces‐<br />

saires? Il en a un blanc passable.<br />

Je suis heureux <strong>de</strong> la bienveillance <strong>de</strong>s MM. du Séminaire Français; jʹai fait, en<br />

temps utile, sur la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> leur maison <strong>de</strong> Paris, la déposition concernant M. Liber‐<br />

mann.<br />

Adieu, je vous embrasse fort, très fort, en ami, en Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1381 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Préparatifs <strong>de</strong> départ. Mouvement <strong>de</strong> personnel pour pallier leur absence, M. <strong>de</strong> Varax <strong>de</strong>vant accompagner<br />

MLP. <strong>Lettre</strong>s testimoniales pour lʹInstitut.<br />

Chaville, jeudi matin, 18 février [1869]<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Caille vous dira, sʹil est déjà <strong>de</strong> retour, que je mʹarrangerai pour le départ <strong>de</strong> la<br />

première semaine <strong>de</strong> mars, puisque vous le trouvez préférable; mais je crois quʹil faut nous<br />

mettre en route dès le commencement <strong>de</strong> cette semaine, lundi sʹil se peut, ou au plus tard<br />

mardi, si vous êtes fatigué le lundi.<br />

1342


Jʹaccepterai ce que vous croirez bien pour M. <strong>de</strong> Bretenières; il y aurait pour moi un<br />

peu moins <strong>de</strong> liberté <strong>de</strong> mouvement dans la compagnie dʹun homme si respectable auquel<br />

nous <strong>de</strong>vrons déférence, mais je mʹen rapporte à votre sentiment.<br />

Jʹai fait partir la lettre à M. Berloty; je vous remercie dʹavoir eu cette pensée qui faci‐<br />

litera pour moi bien <strong>de</strong>s arrangements que je dois prévoir ici avant <strong>de</strong> partir, afin que rien<br />

ne <strong>de</strong>meure en souffrance quand nous serons éloignés.<br />

Je comprends quʹil serait bien utile, peut‐être nécessaire, que, vous absent, M.<br />

Trousseau ne soit pas délaissé sans secours; M. Guillot conviendrait, je le crois comme<br />

vous; Vaugirard, quoique <strong>avec</strong> souffrance, le prêterait peut‐être, mais il représente la<br />

Communauté au patronage S t ‐Charles, qui va faiblement <strong>de</strong>puis que nous lui avons retiré<br />

successivement M. Faÿ comme aumônier et le Directeur si influent, M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tour‐<br />

niquet]; <strong>avec</strong> M. Guillot, nous nʹavons pas encore lâché pied, mais lʹenlever, même tempo‐<br />

rairement, ce serait nuire à lʹœuvre notablement et soulever contre nous <strong>de</strong>s clameurs qui<br />

nous effraient <strong>avec</strong> juste raison.<br />

Ne pourrait‐on, momentanément, mettre à la maison <strong>de</strong> Bon Secours M. Lemaire,<br />

que nous remplacerions peut‐être moins difficilement à S t ‐Jacques? En <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> cet ar‐<br />

rangement, nous ne voyons, quant à présent, rien <strong>de</strong> praticable et dʹefficace.<br />

Je vais passer chez le r.p. <strong>de</strong> Ponlevoy et jʹécrirai à M gr <strong>de</strong> Ségur. M gr <strong>de</strong> Metz pré‐<br />

pare <strong>de</strong> sa main une lettre très bienveillante pour le Saint‐Père. M gr dʹAngers mettra, <strong>de</strong><br />

son côté, son cœur <strong>de</strong> Père dans sa lettre.<br />

Je suis appelé pour <strong>de</strong>main à lʹarchevêché <strong>de</strong> Paris; tout sʹapprête donc, et nous aus‐<br />

si, apprêtons‐nous.<br />

Nous attendrons M. Gérold au commencement <strong>de</strong> la semaine. Ne peut‐on espérer<br />

que sa constitution délicate lui soit une cause dʹexemption? Prions pour lui, prions pour<br />

tous et pour tout, car le mon<strong>de</strong> entier a besoin <strong>de</strong> grâce et <strong>de</strong> secours dʹEn haut.<br />

Adieu, mon bien cher enfant; je vous quitte pour recevoir un jeune postulant mulâ‐<br />

tre, protégé <strong>de</strong> M gr <strong>de</strong> Ségur; il a lʹambition <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s; son âme paraît naïve et in‐<br />

telligente, nigra sed formosa; il est bien aussi extérieurement, 21 ans, Ludger Montalvan.<br />

Adieu encore, affections à vous et à tous en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1382 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

M. Le Camus quitte lʹInstitut. Comment les difficultés servent à nous sanctifier. Vocation particulière aux fon‐<br />

dateurs: ils ʺne sont pas appelés à faire <strong>de</strong>s œuvres parfaitesʺ. Acceptation dʹun nouveau retard; plan <strong>de</strong> voyage<br />

pour Rome. Embarras pour combler le vi<strong>de</strong> que va causer l’absence <strong>de</strong> MLP. et <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax.<br />

Chaville, dimanche 21 février [1869]<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Ayons confiance, nos difficultés sont gran<strong>de</strong>s, mais Dieu est plus grand que les dif‐<br />

ficultés; lʹEvangile aujourdʹhui disait: Jésus, sʹapprochant, les toucha et leur dit: Levez‐<br />

vous et ne craignez point. 416 Obéissons‐Lui, soyons sans crainte et faisons le moins mal<br />

possible. Une <strong>de</strong>rnière ressource nous restait qui eût pu être la meilleure: M. Le Camus eût<br />

pu retar<strong>de</strong>r dʹun mois la reprise <strong>de</strong> sa théologie à Versailles, où nous avions pris nos ar‐<br />

416 Mt 17, 7.<br />

1343


angements; mais ces jours‐ci, il a, par quelques faits nouveaux, confirmé nos doutes sur sa<br />

vocation, sinon au sacerdoce, du moins à la vie religieuse; nous nous séparons <strong>de</strong> lui; ce<br />

matin même, il se met en course pour chercher ailleurs sa place.<br />

Nous trouverons un homme pour les emplois secondaires que votre lettre indique;<br />

mais un homme capable dʹune plus gran<strong>de</strong> responsabilité, je ne le vois pas sous notre<br />

main; je vais revoir <strong>de</strong>main nos ff. à la Conférence ecclésiastique à Nazareth, jʹen causerai<br />

<strong>avec</strong> eux.<br />

Ne vous découragez pas <strong>de</strong> lʹimperfection <strong>de</strong> tous vos moyens; ceux qui fon<strong>de</strong>nt ne<br />

sont pas appelés à faire <strong>de</strong>s œuvres parfaites, leur voie dans la sainteté consiste à porter<br />

patiemment les obstacles et les détresses quʹils subissent incessamment; nous sommes<br />

heureux que Dieu nous laisse ce moyen <strong>de</strong> nous sanctifier, nous qui, pour la plupart, ne<br />

saurions pas y arriver peut‐être par dʹéminentes vertus.<br />

Je regrette un peu le nouveau retard que vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z pour notre départ; non<br />

que jʹaie hâte personnellement <strong>de</strong> faire ce voyage qui est pour moi affaire <strong>de</strong> <strong>de</strong>voir, mais<br />

<strong>de</strong>puis trois mois je suis en partance, nos ff. <strong>de</strong> Rome nous atten<strong>de</strong>nt semaine par semaine;<br />

ils me croient en route à compter <strong>de</strong> la semaine qui va sʹouvrir; retar<strong>de</strong>r encore est un peu<br />

regrettable, mais je suis décidé néanmoins à faire selon votre désir; notre départ nʹaurait<br />

donc guère lieu que le mercredi matin, au lieu du mardi que vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z pour vos<br />

commissions.<br />

Si vous nʹy voyez pas <strong>de</strong> difficulté pour vous, je désirerais ne pas voyager <strong>de</strong> nuit,<br />

la nuit me donnant une double fatigue à cause <strong>de</strong> lʹinsomnie; je crois quʹà moins dʹun<br />

calme parfait, sur lequel nous ne pouvons guère compter, la mer nous serait bien peu sup‐<br />

portable; je préfère les secon<strong>de</strong>s classes aux premières quand on peut ainsi avoir <strong>de</strong>s trains<br />

express; autrement, il faudra nous résigner aux trains <strong>de</strong> première classe, beaucoup plus<br />

dispendieux, mais qui abrègent la durée du voyage, sorte <strong>de</strong> compensation.<br />

Je trouve bien vos observations au sujet <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Bretenières, cʹest peut‐être une<br />

grâce que la Provi<strong>de</strong>nce nous ménage; je crois quʹil eût été plus parfait seulement, comme<br />

régularité religieuse, <strong>de</strong> me dire un mot dʹavertissement avant <strong>de</strong> faire la proposition. Ne<br />

vous contristez pas <strong>de</strong> la remarque faite tout affectueusement.<br />

Je crois que sʹarrêter à Lyon serait bien pour une nuit; aller tout dʹune traite à Mar‐<br />

seille serait peut‐être ru<strong>de</strong>; je crois toutefois quʹon y va maintenant en 18 heures, ce qui, au<br />

début du voyage, ne semblerait pas impossible.<br />

Je ne suis pas obligé dʹarriver à jour fixe; nous irons selon nos forces. Je crois,<br />

comme vous, que M. Lemaire nʹirait pas rue <strong>de</strong> Noyon. Il me vient une pensée, sa réalisa‐<br />

tion serait bien terrible pour Chaville, M. Faÿ, les persévérants, mais je crois quʹelle sauve‐<br />

rait la position chez vous; ce serait <strong>de</strong> vous envoyer M. Vincent pendant votre absence. Il a<br />

<strong>de</strong> lʹéducation, il mène ici très bien les persévérants, enseigne très bien, sait gar<strong>de</strong>r sa<br />

place, est fort supérieur à tout votre personnel, M. Trousseau excepté, à cause <strong>de</strong> son habit<br />

et <strong>de</strong> ses ordres. Mais M. Faÿ pourra‐t‐il y consentir, au moment où M. Le Camus, qui fai‐<br />

sait une classe, sʹéloigne? M. Vincent en fait <strong>de</strong>ux ou trois et a une gran<strong>de</strong> part <strong>de</strong>s surveil‐<br />

lances; M. Ginet, quʹon a déchargé cette année afin quʹil puisse étudier un peu mieux, est<br />

<strong>de</strong>puis quelque temps fort souffrant et absolument incapable <strong>de</strong> reprendre ce service; que<br />

<strong>de</strong> souffrances, <strong>de</strong> gênes, <strong>de</strong> détriments peut‐être pour le noviciat! Il semble peu probable<br />

que M. Faÿ puisse les accepter; je lui en parlerai néanmoins <strong>de</strong>main; priez pour que Dieu<br />

nous conduise.<br />

1344


M. Laroche, en traitement à Paris, mʹa parlé <strong>de</strong> Goubet, mais il ne voyait aucune<br />

chance quʹon pût trouver quelques ressources pour une petite pension; Vaugirard est trop<br />

pauvre pour lʹaccepter sans quelque in<strong>de</strong>mnité; du reste, il faudrait que quelquʹun dʹArras<br />

ou dʹautre lieu entrât directement en relations <strong>avec</strong> M. <strong>de</strong> Lauriston à ce sujet; on nʹen a en‐<br />

tendu parler jusquʹici que par tiers, sans mission précise pour sʹen occuper; <strong>de</strong> cette sorte,<br />

la chose nʹarrivera jamais à une solution en aucun sens, sinon lʹabstention et lʹattente vaine.<br />

Adieu, mon bien cher ami, je crois que jʹai répondu à tout, mais la poste, je le crains,<br />

sera partie; je vais envoyer à Viroflay.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1383 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

MLP. sʹen remet à M. <strong>de</strong> Varax du soin <strong>de</strong> régler les détails du voyage à Rome.<br />

Nazareth, mardi 23 février [1869]<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Vous avez été bien inspiré assurément en sollicitant près <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Bretenières le<br />

bien <strong>de</strong> sa société pour nous, je lʹai compris dès le commencement; une fois encore, soyez<br />

sûr que jʹentrais bien dans vos intentions.<br />

Je nʹai pas dʹautre raison <strong>de</strong> hâter notre départ que celle dont je vous ai fait part:<br />

mettre fin à une incertitu<strong>de</strong> déjà longue; mais nous <strong>de</strong>vons éviter aussi toute précipitation<br />

et tout le premier jʹaurai peine peut‐être à être prêt, tant je vois <strong>de</strong> détails à régler avant <strong>de</strong><br />

tout quitter ici.<br />

Merci <strong>de</strong> la lettre très bonne <strong>de</strong> Mgr dʹAmiens, je lʹai fait copier. Quant au voyage,<br />

réglez tout comme vous le croirez bien, vous avez plus que moi parcouru les chemins que<br />

nous avons à suivre, vous serez mon conducteur. Pour le jour, jʹavais annoncé à tous que<br />

nous partions le mercredi 3 mars; vous pouvez maintenir cet arrangement qui mʹira aussi<br />

bien que lʹautre; sinon, je tâcherai dʹêtre prêt pour le mardi, si vous vous arrêtez à ce <strong>de</strong>r‐<br />

nier parti; je vous attends, en tout cas, pour lundi.<br />

Si vous voyez inconvénient ou retard dans le séjour à Lyon, nʹauriez‐vous pas le<br />

temps encore <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à M. Berloty <strong>de</strong> vous envoyer ici, à telle adresse que vous vou‐<br />

drez, pour la recevoir lundi, telle somme quʹil aurait à vous adresser? Peut‐être est‐il trop tard.<br />

Je ne sais pas encore qui nous pourrons vous envoyer; M. Lantiez irait volontiers<br />

vous voir vendredi, le malheur est que, toujours courant chacun <strong>de</strong> notre côté, nous ne<br />

pouvons nous trouver pour concerter et déci<strong>de</strong>r nettement les choses. Je vais y tendre encore.<br />

A bientôt, mon cher enfant, mille affections à tous. M. Gérold est déjà à Chaville.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1384 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Projet <strong>de</strong> combinaison <strong>de</strong> personnel pendant leur voyage.<br />

Chaville, 24 février [1869]<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Votre lettre <strong>de</strong> dimanche est arrivée à Chaville lundi après que jʹen étais parti, mais<br />

ma dépêche dʹhier semble y répondre suffisamment.<br />

1345


Nous pensons à une combinaison <strong>de</strong> personnel qui semblerait convenable pour<br />

Amiens, sans rien bouleverser chez nous. M. Ginet va mieux <strong>de</strong>puis quelques jours. MM.<br />

Lantiez et Myionnet sont persuadés quʹune mission temporaire au <strong>de</strong>hors lui serait salu‐<br />

taire, moralement et physiquement, et que, par sa tenue <strong>de</strong> religieux, il relèverait un peu<br />

lʹautorité <strong>de</strong>s ff. Cette pensée, acceptée comme toujours par lui en parfaite obéissance,<br />

semble lui sourire. Si les besognes matérielles étaient fort nombreuses et bien ru<strong>de</strong>s et quʹil<br />

ne dût pas suffire à tout, on enverrait à son ai<strong>de</strong> (toujours pour le temps <strong>de</strong> notre absence)<br />

M. Xavier [Walter] qui nʹest pas beau et qui gar<strong>de</strong> le langage un peu paysan, mais qui,<br />

dʹailleurs, est propre à tout, maniable, dʹun charmant caractère, gai, inépuisable en ra‐<br />

contages, sachant <strong>de</strong>s sciences plaisantes et se faisant aimer partout.<br />

Donc, vendredi, M. Lantiez irait à Amiens <strong>avec</strong> M. Ginet, verrait, en sʹentendant<br />

<strong>avec</strong> vous, la situation et jugerait si elle exige du renfort. Pour les fonds Berloty, soit quʹils<br />

viennent ici, soit quʹils restent à Lyon, nous nous en occuperons après votre arrivée ici.<br />

Affections bien dévouées en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1385 à M. Tourniquet<br />

Annonce du départ pour Rome. Dispositions pour célébrer la messe dans la Ville.<br />

Chaville, 24 février 1869<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Nous comptons, M. <strong>de</strong> Varax et moi, partir pour notre grand voyage mardi, 2 mars;<br />

nous nʹarriverons probablement à Rome que le mardi suivant, voyageant par terre et pas<br />

aussi prestement que <strong>de</strong>s gens robustes le peuvent faire.<br />

Je mʹentends <strong>avec</strong> M. Myionnet pour que vous ayez bientôt quelques douzaines <strong>de</strong><br />

livres <strong>de</strong> classe, comme vous les <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z; sʹils vous conviennent, on en pourra expédier<br />

un plus grand nombre, selon vos besoins.<br />

Je nʹajoute rien, la conversation ira plus vite que les correspondances écrites et bien‐<br />

tôt nous en serons là <strong>avec</strong> vous. Je nʹai pas songé à vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si vous aurez <strong>de</strong>ux<br />

chambres pour nous à la Villa Strozzi, je lʹai supposé; nos dépenses personnelles, pour M.<br />

<strong>de</strong> Varax et pour moi, resteront à notre charge, notre voyage ne se faisant point aux frais<br />

du Comité; vous aurez donc à noter en particulier ce qui sera dépensé pour nous.<br />

Nous partons (moi du moins, et M. <strong>de</strong> Varax implicitement) <strong>avec</strong> la bénédiction <strong>de</strong><br />

Mgr lʹArchevêque qui a donné un entier agrément à cette excursion; nous sommes donc en<br />

règle et jʹespère que Dieu aussi nous bénira.<br />

Je serai heureux dʹoffrir le St Sacrifice dans votre petite chapelle, si elle est préparée;<br />

ne vous gênez pas toutefois, ce nʹest pas à Rome quʹil faut aller loin pour célébrer la Ste Messe. Jʹai bonne espérance que le Seigneur sera au milieu <strong>de</strong> nous en cette petite réunion<br />

et quʹIl consacrera vos travaux et vos efforts pour son service dans la Ville Sainte.<br />

Je vous embrasse tous les quatre à la fois et bien affectueusement.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. <strong>de</strong> Varax arrive ici lundi; tous nos ff. voudraient partir <strong>avec</strong> nous.<br />

1346


1386 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Le frère Ginet va à Amiens. Portrait. (MLP. le présente comme <strong>de</strong> constitution délicate, mais il mourra, en 1930,<br />

à plus <strong>de</strong> 85 ans !).<br />

Chaville, 25 février 1869<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Lantiez vous portera ce mot en vous amenant, comme je vous lʹai écrit, M. Ginet;<br />

jʹespère que tout sʹarrangera pour le mieux; M. Caille et M. Victor [Trousseau] auront au<br />

moins, en M. Ginet, un homme à leur hauteur comme sentiments et capable <strong>de</strong> sʹentendre<br />

<strong>avec</strong> eux; il est avant tout religieux plein <strong>de</strong> conscience, digne dans sa tenue, dévoué à tous<br />

ses <strong>de</strong>voirs, autant que lʹest M. Marcaire auquel il ressemble un peu, <strong>avec</strong> plus <strong>de</strong> laisser‐<br />

aller et dʹenjouement. Il nʹest pas fort <strong>de</strong> santé; il faut adoucir pour lui le Carême à peu<br />

près, je pense, comme pour M. Marcaire; sa débilité <strong>de</strong> constitution <strong>de</strong>man<strong>de</strong> une nourri‐<br />

ture abondante et substantielle; hors cela, il va dʹordinaire; en ces temps <strong>de</strong>rniers, il sʹest<br />

trouvé un peu souffrant, il va mieux <strong>de</strong>puis quelques jours. Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> régler son<br />

régime avant votre départ.<br />

La somme Berloty est <strong>de</strong> 3344,12f. Je crois quʹon pourrait laisser les 44f pour quel‐<br />

ques vêtements dont M. Jules Ginet aurait peut‐être besoin.<br />

Je trouve bien votre plan <strong>de</strong> voyage. Je remets votre mot à M. Gérold qui paraît<br />

content ici.<br />

Ci‐joint un mot pour M. Bérard.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Expliquez à M. Caille que, si je ne lʹai point consulté relativement à lʹenvoi <strong>de</strong> M. Ju‐<br />

les Ginet et au voyage <strong>de</strong> M. Lantiez, cʹest que, jusquʹau <strong>de</strong>rnier moment, je suis resté en<br />

incertitu<strong>de</strong>. Il serait bien désirable que, dans le règlement <strong>de</strong> M. Ginet, on pût réserver<br />

quelque temps dʹétu<strong>de</strong>, afin que son avancement, notable cette année, ne soit pas trop re‐<br />

tardé.<br />

1387 à M. Trousseau<br />

Vivre lʹabsence <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax <strong>avec</strong> dévouement et abnégation. Appel au sacerdoce pour la Trinité. Eloge du<br />

frère Ginet. Assurance <strong>de</strong> prières à Rome.<br />

Chaville, 25 février 1869<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Lʹabsence <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax va faire un grand vi<strong>de</strong> dans votre petite Communauté.<br />

Vous tâcherez quʹil soit autant rempli quʹil se pourra, eu égard à vos étu<strong>de</strong>s et aux prépa‐<br />

rations quʹil vous reste à faire pour arriver au terme tant désiré. Je me tranquillise en pen‐<br />

sant que <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s grâces ont déjà été répandues sur vous dans les ordres que vous avez<br />

reçus et que, dʹautre part, la perspective <strong>de</strong> la faveur immense et décisive qui vous est<br />

promise pour la Trinité vous dispose plus que jamais au dévouement et à lʹabnégation, et<br />

aux sacrifices que <strong>de</strong>man<strong>de</strong> la charité.<br />

Notre cher M. Ginet, que jʹenvoie pour vous ai<strong>de</strong>r, vous rendra je lʹespère, la tâche<br />

moins lour<strong>de</strong>; cʹest une âme noble, simple, pieuse, qui pourra aisément sʹentendre <strong>avec</strong><br />

1347


vous. Il nʹest pas bien fort physiquement; vous le ménagerez un peu et veillerez à ce quʹil<br />

ait ce que sa constitution un peu délicate peut <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r. A cette condition, je crois que<br />

vous serez heureux <strong>de</strong> lʹavoir près <strong>de</strong> vous. Vous pouvez vous reposer sur lui et lui don‐<br />

ner toute confiance, il y répondra certainement. Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> vous dire que je prie‐<br />

rai ar<strong>de</strong>mment pour vous aux pieds <strong>de</strong>s S ts Apôtres; je vais surtout à Rome pour invoquer<br />

les S ts fondateurs <strong>de</strong> lʹEglise, et afin dʹobtenir par eux une grâce <strong>de</strong> puissance et <strong>de</strong> confir‐<br />

mation pour nous tous et pour les œuvres qui sont entre nos mains.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, je vous embrasse tendrement en J. et M.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1388 à M me la Vicomtesse dʹHurbal<br />

MLP. célèbre la messe aux intentions <strong>de</strong> sa mère; à Rome, il priera pour toute sa famille.<br />

Vaugirard, 27 février 1869<br />

Madame la Baronne,<br />

Jʹai offert le St Sacrifice pour votre bien aimée mère [Mme <strong>de</strong> Caulaincourt mère], et je<br />

vais continuer <strong>avec</strong> les miens à prier pour elle; aujourdʹhui même, je porterai son souvenir<br />

encore <strong>de</strong>vant Dieu; je vais <strong>de</strong> ce pas au convoi <strong>de</strong> Madame la Comtesse <strong>de</strong> Gontaut, âme<br />

éminente aussi en piété et en charité; je confondrai ces <strong>de</strong>ux cœurs si généreux dans mes<br />

instances près du Seigneur; il semble quʹIl ne peut les tenir éloignés <strong>de</strong> Lui, car ils ont ten‐<br />

du constamment à sʹunir à Lui.<br />

Je pars mercredi matin; je nʹoublierai ni vous ni votre chère fille [Marquise <strong>de</strong> Hou‐<br />

<strong>de</strong>tot], ni son cher Richard au tombeau <strong>de</strong>s Sts Apôtres; je me souviendrai aussi <strong>de</strong> M. lʹabbé.<br />

A mon retour, ce me sera une joie <strong>de</strong> revoir vous et votre chère famille.<br />

Je suis, <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s sentiments respectueusement dévoués,<br />

Madame la Baronne,<br />

Votre humble serviteur et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong> Ptre 1389 à M. Tourniquet<br />

Ultimes précisions avant le départ pour Rome.<br />

Chaville, 2 mars 1869<br />

Bien chers amis,<br />

Demain, mercredi 3, nous nous mettons en route, M. <strong>de</strong> Varax et moi, pour nous<br />

rendre vers vous. Nous prenons la voie <strong>de</strong> terre et, le Mont Cenis étant peu praticable en<br />

ce moment, nous sommes obligés <strong>de</strong> suivre le chemin le plus long; nous serons huit jours<br />

en route; si je puis, nous vous avertirons dans le trajet du jour <strong>de</strong> notre arrivée, quand<br />

nous verrons plus nettement la disposition <strong>de</strong> notre itinéraire.<br />

Priez bien pour nous; chaque jour va nous mettre plus près <strong>de</strong> vous, bientôt nous<br />

pourrons prier ensemble. Je vous embrasse cordialement en J., M. et J.<br />

Votre ami et Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1348


P. S. M. Myionnet fait aujourdʹhui le paquet <strong>de</strong> vos livres <strong>de</strong> classe; je ne sais sʹils se‐<br />

ront prêts absolument pour le moment <strong>de</strong> notre départ.<br />

1390 Aux Frères <strong>de</strong> Rome<br />

Première partie du voyage. Hâte <strong>de</strong> reprendre la vie régulière en communauté.<br />

La Spezia, 8 mars 1869<br />

Bien chers amis,<br />

Nous nous rapprochons <strong>de</strong> vous, un peu lentement parce quʹil faut peu compter sur<br />

nos forces, mais nous arriverons, je lʹespère, sans avarie notable et sans beaucoup tar<strong>de</strong>r<br />

maintenant. Arrivés aujourdʹhui à la Spezia, nous avons manqué dʹune <strong>de</strong>mi‐heure envi‐<br />

ron le train qui <strong>de</strong>vait nous conduire à Pise; mais <strong>de</strong>main mardi, nous irons coucher dans<br />

cette ville et mercredi, à 8h.35 du soir, à Rome, étant partis <strong>de</strong> Livourne à 10h.25 du matin.<br />

M. <strong>de</strong> Varax sʹest très bien soutenu en santé durant le voyage et mʹa assisté cordia‐<br />

lement; jʹai eu, pour moi, <strong>de</strong>ux jours <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> fatigue, soit par la longueur <strong>de</strong>s trajets que<br />

nous avions parcourus, soit par le décousu ou les mauvaises conditions <strong>de</strong> notre régime; je<br />

suis un peu remis, mais quelques jours <strong>de</strong> vrai repos me seront bien nécessaires à lʹarrivée.<br />

Je ne sais si vous avez reçu une caisse <strong>de</strong> vin que jʹai expédiée quelques jours à<br />

lʹavance chez vous; jʹen serais aise, car le vin est toujours la gran<strong>de</strong> difficulté <strong>de</strong> mon ré‐<br />

gime alimentaire. Cette caisse en contient 17 bouteilles, une pour <strong>de</strong>ux jours, ce qui donne<br />

ensemble 34 jours. Si je restais davantage, je pense que M. Gennetier aurait quelque moyen<br />

<strong>de</strong> me fournir ce qui me manquerait; je porte à Rome comme ailleurs mes infirmités; vous<br />

les connaissez dès longtemps et vous êtes accoutumés à les porter charitablement.<br />

Nous nous réjouissons <strong>de</strong> nous retrouver <strong>avec</strong> vous en famille et <strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> ré‐<br />

gularité religieuse; les voyages en sont bien éloignés et le nôtre, qui aura duré huit jours,<br />

nous donne autant <strong>de</strong> lassitu<strong>de</strong> spirituelle que <strong>de</strong> fatigue physique. Rome nous refera en<br />

tous sens et votre cordiale affection nous donnera cette douce chaleur <strong>de</strong> lʹâme quʹon ne<br />

trouve que dans la vie intime <strong>avec</strong> ses ff. en J. et M.<br />

Votre ami et Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. <strong>de</strong> Varax vous assure <strong>de</strong> ses sentiments <strong>de</strong> sincère dévouement.<br />

1391 à M me et M lle Salva<br />

Récit du voyage vers Rome. Conclusion sur les fruits spirituels quʹen espère MLP.<br />

Pise, 9 mars 1869<br />

Bien chères amies,<br />

Je vous écris <strong>de</strong>ux lignes <strong>de</strong> cette ville <strong>de</strong> Pise qui est notre <strong>de</strong>rnière station avant<br />

Rome, afin <strong>de</strong> vous tranquilliser sur les circonstances <strong>de</strong> notre voyage. Il sʹest bien passé,<br />

<strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> du Seigneur. Je nʹai pas été sans mʹapercevoir plus dʹune fois que je suis bien<br />

vieux aujourdʹhui pour faire <strong>de</strong> longues excursions; jʹai eu quelques jours <strong>de</strong> fatigue un<br />

peu pénible, mais, en ménageant nos forces et en stationnant, autant que possible, le soir<br />

dans les villes où nous passions pour éviter dʹêtre en route la nuit; nous arriverons, je<br />

pense, sans malaises sérieux. Nous nʹavons passé quʹune nuit en wagon. Nous couchons ce<br />

1349


soir ici, à Pise, et <strong>de</strong>main, <strong>avec</strong> 11 heures <strong>de</strong> chemin <strong>de</strong> fer, nous arriverons à Rome à 8h. 1/2<br />

du soir. Nous tâcherons dʹy prendre un repos un peu prolongé, afin <strong>de</strong> nous bien remettre<br />

<strong>de</strong> la fatigue <strong>de</strong> la route, avant <strong>de</strong> rien faire qui puisse nous donner une nouvelle lassitu<strong>de</strong>.<br />

M.<strong>de</strong> Varax, plus jeune que moi, a pu ressentir moins les malaises dʹune si longue route; il<br />

éprouve néanmoins aussi une vraie satisfaction à se sentir au terme.<br />

Nous sommes allés ainsi <strong>de</strong> Paris à Chalon‐sur Saône, le premier jour; comme la<br />

mère <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax <strong>de</strong>meure près <strong>de</strong> là, elle nous a envoyé chercher et nous avons passé<br />

la première nuit chez elle. Le len<strong>de</strong>main, nous couchions à Valence; ensuite à Menton<br />

(principauté <strong>de</strong> Monaco), puis à Gênes, où nous sommes arrivés en passant la nuit; <strong>de</strong> là,<br />

nous avons gagné la Spezia, port du royaume dʹItalie; enfin aujourdʹhui, nous sommes à<br />

Pise et <strong>de</strong>main, si Dieu nous assiste, nous arriverons à Rome. Notre voyage aura duré huit<br />

jours pleins. Pour éviter la fatigue, il eût fallu cheminer encore plus lentement, mais les<br />

dépenses dʹun pareil parcours sont bien lour<strong>de</strong>s et on se sent pressé <strong>de</strong> les grossir le moins<br />

quʹon peut.<br />

Je ne vous dis rien, chères amies, <strong>de</strong>s choses qui ont pu nous intéresser durant la<br />

route; jʹai voulu seulement aujourdʹhui vous dire où nous en étions <strong>de</strong> notre entreprise.<br />

Jʹaurai dʹailleurs, moins que bien <strong>de</strong>s voyageurs <strong>de</strong> récits à faire, nʹentreprenant pas cette<br />

excursion par curiosité, ni par besoin <strong>de</strong> changer <strong>de</strong> lieux. Je suis parti, parce que jʹai cru<br />

voir en cela la volonté <strong>de</strong> Dieu et le bien <strong>de</strong> notre petite Congrégation. A mon âge, on a be‐<br />

soin <strong>de</strong> calme et <strong>de</strong> paix, on nʹaccepte le mouvement que par <strong>de</strong>voir; jʹespère donc que le<br />

Seigneur comptera mon voyage comme une part du travail que lʹhomme doit subir ici‐bas;<br />

jʹai la confiance aussi quʹil y mêlera quelque consolation dans la visite <strong>de</strong> tant <strong>de</strong> lieux<br />

saints qui ren<strong>de</strong>nt Rome si chère aux chrétiens.<br />

Adieu, bien chères amies, je prierai Dieu pour vous partout; priez aussi pour que je<br />

ne fasse pas ce voyage sans profit spirituel pour moi.<br />

Votre affectionné frère et oncle<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1391 bis à Sa Sainteté Pie IX<br />

Supplique pour lʹapprobation <strong>de</strong> lʹInstitut.<br />

23 mars 1869<br />

Beatissime Pater,<br />

Joannes Leo Le <strong>Prevost</strong>, presbyter Archidiœcesis Parisiensis, conditor et Superior<br />

generalis Congregationis vulgo dictae Fratrum a Sto Vincentio a Paulo, ad sacros pe<strong>de</strong>s<br />

provolutus recens elaboratas dictae Congregationis Constitutiones, adjunctis plurium<br />

Episcoporum litteris commendatitiis, ante oculos Vestrae Sanctitatis exponit et supremae<br />

Vestrae auctoritatis judicio subjicit, humiliter et instanter orans, ut Congregationem Fra‐<br />

trum a Sto Vincentio a Paulo ad procurandam gentis operariae salutem institutam, necnon<br />

accurate studio pravae novitatis praecavendae innixam recognoscat, collau<strong>de</strong>t, approbet et<br />

benedicat Vestra Sanctitas.<br />

Quod Deus......<br />

ʺ<strong>Jean</strong>‐<strong>Léon</strong> Le <strong>Prevost</strong>, prêtre <strong>de</strong> lʹArchidiocèse <strong>de</strong> Paris, fondateur et Supérieur gé‐<br />

néral <strong>de</strong> la Congrégation appelée communément Frères <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul, prosterné à<br />

1350


Vos Pieds Sacrés, met sous les yeux <strong>de</strong> Votre Sainteté et soumet au jugement <strong>de</strong> Votre au‐<br />

torité suprême, les Constitutions récemment élaborées <strong>de</strong> la dite Congrégation, auxquelles<br />

sont jointes les lettres <strong>de</strong> recommandations d’un grand nombre d’Evêques, priant hum‐<br />

blement et <strong>avec</strong> instance Votre Sainteté <strong>de</strong> daigner reconnaître, favoriser, approuver et bé‐<br />

nir la Congrégation <strong>de</strong>s Frères <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul instituée pour procurer le salut <strong>de</strong> la<br />

classe ouvrière et qui met à la base <strong>de</strong> ses efforts le soin attentif d’éviter les nouveautés<br />

pernicieuses.<br />

Que Dieu…ʺ<br />

1392 417 à M. dʹArbois<br />

Le séjour à Rome; les démarches en vue dʹobtenir lʹapprobation <strong>de</strong>s Constitutions. M. <strong>de</strong> Varax ajoute quelques<br />

lignes.<br />

Rome, le 30 mars 1869<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je vous aurais écrit déjà plusieurs fois <strong>de</strong>puis notre arrivée à Rome, si je nʹeusse<br />

écouté que mon désir, mais lʹenveloppe corporelle chez moi est si frêle, vous le savez,<br />

quʹelle sert bien mal mes aspirations. Je veux au moins vous envoyer ces quelques lignes<br />

<strong>de</strong> souvenir, afin <strong>de</strong> vous assurer que ni vous, ni vos frères nʹêtes oubliés, non plus que<br />

vos chers enfants, dans les pèlerinages quʹil nous est donné <strong>de</strong> faire, dans tous les pieux<br />

sanctuaires que nous visitons.<br />

Je me proposais une double fin dans notre voyage à Rome: recomman<strong>de</strong>r aux Sts Apôtres lʹœuvre dʹapostolat que nous tentons tous ensemble <strong>de</strong>puis plus <strong>de</strong> 22 ans parmi<br />

les classes ouvrières, et solliciter la bénédiction du Vicaire <strong>de</strong> Jésus‐Christ en ce mon<strong>de</strong> sur<br />

la petite famille qui sʹest formée autour <strong>de</strong> nous pour soutenir cette œuvre. Ce double but,<br />

nous lʹavons rempli, je crois. Nous avons bien <strong>de</strong>s fois déjà prié à la Confession <strong>de</strong> St Pierre, là où sont ses précieux restes et nous avons, M. <strong>de</strong> Varax et moi, célébré la Ste Messe<br />

dans la prison où il a été enfermé avant dʹêtre crucifié; cʹest un affreux cachot taillé dans le<br />

roc, sans jour, ni air, un trou percé au haut et donnant dans une autre prison servait à <strong>de</strong>s‐<br />

cendre <strong>avec</strong> une cor<strong>de</strong> ceux qui <strong>de</strong>vaient gémir dans ce lieu infect. On se <strong>de</strong>man<strong>de</strong> là si on<br />

a droit <strong>de</strong> repousser les humiliations et la souffrance, quand les fondateurs <strong>de</strong> lʹEglise, nos<br />

ancêtres dans la foi, ont été si gran<strong>de</strong>ment éprouvés. Jʹespère que cette impression ne sera<br />

pas perdue pour nous.<br />

Nous avons pu aussi recevoir, pour nous et pour notre chère famille, la bénédiction<br />

du Saint Père, en audience publique dʹabord, puis <strong>de</strong>ux fois sur la place St Pierre (la<br />

gran<strong>de</strong> bénédiction Urbi et Orbi, à plus <strong>de</strong> cent mille personnes assemblées.)<br />

Enfin, lundi <strong>de</strong>rnier, nous avons eu une audience particulière du vénéré Pie IX. Il a<br />

daigné nous permettre <strong>de</strong> lʹentretenir <strong>de</strong> notre petite Congrégation et <strong>de</strong> ses œuvres. Nous<br />

avons baisé son anneau et nous avons reçu sa bénédiction toute spéciale.<br />

Après cela, il semble que notre mission est accomplie et que nous pourrions chanter<br />

le Nunc dimittis servum tuum, Domine, comme le vieillard Siméon; mais il nous reste à sui‐<br />

vre lʹaffaire <strong>de</strong> nos Constitutions; elle est déjà en bonne position; notre règle, <strong>avec</strong> les let‐<br />

tres <strong>de</strong>s Evêques qui nous recomman<strong>de</strong>nt, sont entre les mains du Cardinal Préfet <strong>de</strong> la<br />

417 L’écriture est <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax. La signature et les 2 lignes suivantes sont <strong>de</strong> MLP.<br />

1351


Sacrée Congrégation; beaucoup <strong>de</strong> personnes haut placées ici ont pris la chose à cœur et<br />

nous appuient <strong>avec</strong> une bienveillance tout imméritée que nous <strong>de</strong>vons certainement aux<br />

S ts Sacrifices, prières et communions que toute la famille offre chaque jour pour nous. Bé‐<br />

nissons donc le Seigneur qui nous a visiblement protégés et ne nous lassons pas <strong>de</strong> lʹinvo‐<br />

quer; toute notre force est là.<br />

Malheureusement, quelques vacances que prennent à Pâques les administrations<br />

ecclésiastiques et les apprêts <strong>de</strong> la fête <strong>de</strong> la cinquantaine sacerdotale <strong>de</strong> Pie IX vont retar‐<br />

<strong>de</strong>r sensiblement la marche <strong>de</strong> notre affaire qui, dʹailleurs, nʹest pas seule <strong>de</strong> son espèce à<br />

lʹexamen; mais nous avons lʹespérance fondée que si nous nʹobtenons pas, nous présents,<br />

la conclusion, nous la laisserons néanmoins assez avancée pour avoir bon espoir <strong>de</strong> son<br />

succès.<br />

Jʹaurais bien <strong>de</strong>s détails intéressants à ajouter encore ici sur les particularités <strong>de</strong> no‐<br />

tre séjour à Rome, mais le temps ou les forces me manquent; <strong>de</strong>puis quelques jours,<br />

jʹéprouve une fatigue assez gran<strong>de</strong> pour être obligé au repos. Je pense que ce malaise nʹau‐<br />

ra point <strong>de</strong> durée.<br />

Adieu, mon bien bon ami; cʹest une gran<strong>de</strong> consolation pour moi <strong>de</strong> penser que<br />

jʹaurai pu, en terminant ma carrière, appeler aux pieds <strong>de</strong>s S ts Apôtres et du Souverain<br />

Pontife <strong>de</strong> précieuses et certainement efficaces bénédictions sur la petite famille religieuse<br />

à laquelle jʹai voué mes plus tendres affections.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Un malaise sans gravité, je pense, mʹoblige à recourir à M. <strong>de</strong> Varax qui me sert<br />

complaisamment <strong>de</strong> secrétaire.<br />

Cher Monsieur dʹArbois,<br />

Jʹajoute un mot, <strong>de</strong> mon côté, à la lettre du Père Général, pour vous dire que je suis <strong>de</strong> moi‐<br />

tié dans les prières et S ts sacrifices offerts ici pour nos œuvres. Ce matin, jʹai baisé les murs <strong>de</strong> la<br />

maison quʹhabitait S t Paul quand il écrivit ses Epîtres aux Hébreux etc... Jʹai lu, sur une colonne <strong>de</strong><br />

granit quʹon y a apportée <strong>de</strong>s catacombes, ces paroles gravées: Verbum Dei non est alligatum. Puis‐<br />

sent‐elles être notre <strong>de</strong>vise, et puissions‐nous ne faire autre chose jusquʹà notre <strong>de</strong>rnier soupir que<br />

<strong>de</strong> prêcher Notre Seigneur Jésus‐Christ au milieu <strong>de</strong>s ouvriers.<br />

Nous avons fait <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r le Samedi Saint au soir au Saint Père quʹil daigne bénir tous ceux<br />

<strong>de</strong> nos œuvres qui feraient leurs Pâques dimanche matin. Vous et les vôtres avez reçu votre part <strong>de</strong><br />

cette bénédiction spéciale.<br />

Adieu, mon bon et vénéré frère; mille affectueux souvenirs à MM. Gauffriau, Moutiers,<br />

<strong>Léon</strong> [Guichard] et à vos chers séminaristes [MM. Boiry et Cauroy].<br />

Votre petit frère très humble en N.S.<br />

B. <strong>de</strong> Varax<br />

1392 bis à M. Risse<br />

Même texte que pour M. dʹArbois. M. Le <strong>Prevost</strong>, <strong>avec</strong> sa signature, ajoute la même remarque sur son malaise<br />

qui lʹa obligé obligé à prendre M. <strong>de</strong> Varax comme secrétaire. Ce <strong>de</strong>rnier ajoute la lettre ci‐<strong>de</strong>ssous.<br />

Rome, 30 mars 1869<br />

Cher et vénéré frère en N. S.,<br />

En servant <strong>de</strong> secrétaire au Père Général, je ne puis faire abnégation si complète <strong>de</strong> ma per‐<br />

sonne, que je nʹaie quelques sentiments affectueux à joindre aux siens. Quoique nous ne fassions<br />

1352


quʹun, nous avons <strong>de</strong>ux cœurs, et il ne faut pas que nos frères per<strong>de</strong>nt rien. Je joins donc mes priè‐<br />

res aux siennes pour que les Saints, dont la terre <strong>de</strong> Rome semble le pays natal par excellence, fas‐<br />

sent <strong>de</strong> vous et <strong>de</strong> nos frères <strong>de</strong> ces hommes <strong>de</strong>s premiers âges, comme il en faut dans notre vieux<br />

mon<strong>de</strong> pour ranimer sa foi et sa charité.<br />

Le Père Supérieur ne vous a pas dit que le Samedi Saint au soir, un bon serviteur du Saint<br />

Père, que nous avions prié <strong>de</strong> nous rendre ce service, lui a <strong>de</strong>mandé sa bénédiction spéciale pour<br />

tous ceux <strong>de</strong>s jeunes gens <strong>de</strong> nos œuvres qui feraient leurs Pâques le len<strong>de</strong>main.<br />

Je ne sais ce que le bon Dieu fera <strong>de</strong> nous pendant notre séjour. Nos affaires semblent se<br />

passer bien favorablement, mais il nʹest pas trop pru<strong>de</strong>nt dʹespérer quʹelles échapperont aux len‐<br />

teurs romaines. Continuez à prier pour que les nouvelles voies où le bon Sauveur nous a visible‐<br />

ment fait entrer ne semblent pas trop extraordinaires aux Prélats italiens. Ils ne pourraient pas<br />

nous comprendre si le bon Dieu ne les éclairait intérieurement sur <strong>de</strong>s faits et <strong>de</strong>s besoins encore<br />

inconnus à leur nation. Jʹai baisé aujourdʹhui le sol <strong>de</strong> la maison où S t Paul habitait à Rome quand il<br />

y fit ses Epîtres <strong>avec</strong> S t Luc. Il y a, sur une colonne <strong>de</strong> granit, gravés en souvenir, ces mots, vraie<br />

<strong>de</strong>vise <strong>de</strong>s pères <strong>de</strong> jeunesse: Verbum Dei non est alligatum.<br />

Je vous serre les mains <strong>avec</strong> respect et affection vive en N. S.<br />

B. <strong>de</strong> Varax, en f. S.V.P. <strong>–</strong> Pr.<br />

1393 à M me la Vicomtesse dʹHurbal<br />

Impression <strong>de</strong> son séjour à Rome. Audiences <strong>de</strong> Pie IX, etc.<br />

Rome, 13 avril 1869<br />

Madame la Baronne,<br />

Jʹuse, un peu tardivement il est vrai, <strong>de</strong> la permission que vous mʹavez donnée, ain‐<br />

si que Madame la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot, <strong>de</strong> vous écrire quelques lignes durant mon sé‐<br />

jour à Rome. Voilà un mois que je suis arrivé, et le moment <strong>de</strong> mon retour ne saurait être<br />

maintenant éloigné, mais je nʹai pu faire durant ces quelques semaines beaucoup <strong>de</strong> cor‐<br />

respondance. A lʹarrivée, la fatigue du voyage et bientôt celle que jʹai ressentie <strong>de</strong>s visites<br />

et courses nombreuses quʹil mʹa fallu faire mʹont occasionné une indisposition assez sé‐<br />

rieuse qui mʹa retenu 10 jours enfermé et souffrant; je suis bien remis en ce moment, mais<br />

les fêtes <strong>de</strong> la cinquantaine sacerdotale du Saint Père ont donné ici tant <strong>de</strong> mouvement, ont<br />

amené une telle multitu<strong>de</strong> dʹétrangers quʹon est un peu étourdi du tumulte et <strong>de</strong> lʹextraor‐<br />

dinaire activité auxquels on sʹest trouvé mêlé.<br />

Vous pressentez bien, Madame, que ce nʹest pas dans cette agitation que jʹai trouvé<br />

les joies <strong>de</strong> mon choix; elles ont été pour moi dans la visite <strong>de</strong>s lieux saints, <strong>de</strong>s admirables<br />

églises <strong>de</strong> Rome, dans la vue <strong>de</strong> certaines ruines antiques merveilleusement conservées et<br />

aussi dans les traces et reliques si précieuses qui forment ici un trésor immense que lʹar‐<br />

<strong>de</strong>ur la plus avi<strong>de</strong> ne saurait épuiser.<br />

Jʹai reçu plusieurs fois la bénédiction du Saint Père; <strong>de</strong>ux fois sur la place St Pierre<br />

<strong>avec</strong> plus <strong>de</strong> cent mille personnes rassemblées, quand le Souverain Pontife donne la<br />

gran<strong>de</strong> bénédiction Urbi et Orbi; enfin, en audience publique, où nous étions bien 2.500<br />

étrangers réunis dans une <strong>de</strong>s galeries du Vatican; le Saint Père sʹarrêtait à chaque groupe<br />

et disait quelques paroles qui étaient recueillies <strong>avec</strong> empressement; arrivé au milieu <strong>de</strong> la<br />

galerie, il sʹest un moment reposé sur un trône qui y était préparé, et il a fait à lʹassemblée<br />

une petite allocution sur la fête du len<strong>de</strong>main (nous étions au Samedi Saint); nous lʹavons<br />

1353


parfaitement entendu, sa voix est pleine et sonore, il parle le français distinctement, <strong>avec</strong><br />

un petit accent italien tout à fait aimable.<br />

Pour comble <strong>de</strong> faveur, jʹavais assisté le Jeudi Saint à sa messe, en sa chapelle parti‐<br />

culière, et jʹy avais communié <strong>de</strong> sa main; une quarantaine <strong>de</strong> prélats <strong>de</strong> sa Maison, quel‐<br />

ques évêques et 6 ou 7 prêtres seulement avaient été admis à cette pieuse et tout intime so‐<br />

lennité; le Saint Père, après sa messe, a repris sa place et a récité à haute voix les litanies<br />

<strong>de</strong>s Saints, et nous répondions tous en chœur; cette prière du Père et <strong>de</strong>s enfants était si<br />

touchante que beaucoup dʹentre nous étaient émus jusquʹaux larmes. Ce même jour, mon<br />

compagnon <strong>de</strong> voyage, M. lʹabbé <strong>de</strong> Varax, a été choisi pour être un <strong>de</strong>s douze prêtres qui<br />

font le rôle dʹApôtres et auxquels le Saint Père lave et baise (très réellement) les pieds. En‐<br />

suite vient la Cène dans une salle haute <strong>de</strong> S t Pierre, où le Saint Père sert aux douze apô‐<br />

tres les mets que les Cardinaux lui présentent à genoux.<br />

Le lundi <strong>de</strong> Pâques, nous avons, M. <strong>de</strong> Varax et moi, été reçus en audience particu‐<br />

lière par le Souverain Pontife; nous avons baisé sa main et son anneau; il nous a adressé<br />

<strong>de</strong>s paroles paternelles et encourageantes sur nos œuvres, et il nous a donné une fois en‐<br />

core et tout spécialement sa bénédiction pour nous, pour nos familles et pour nos amis; jʹai<br />

été heureux à ce moment <strong>de</strong> penser que vous me permettiez, ainsi que votre cher entou‐<br />

rage, <strong>de</strong> vous mettre <strong>de</strong> ce nombre, et jʹai prié Dieu dʹappliquer à vous et à tous les vôtres<br />

cette précieuse bénédiction.<br />

Après toutes ces grâces, et les affaires qui mʹappelaient à Rome paraissant en bonne<br />

voie <strong>de</strong> succès, je ne vais pas y prolonger beaucoup mon séjour; je présume donc que je<br />

pourrai aller prochainement, après mon retour, vous voir ainsi que Madame <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

et son cher fils et vous dire plus au long les détails intéressants <strong>de</strong> mon voyage.<br />

Jusque‐là, veuillez agréer, Madame la Baronne, et partager <strong>avec</strong> Madame votre fille<br />

et son cher fils, tous mes sentiments accoutumés <strong>de</strong> respect et dʹaffectueux dévouement.<br />

Votre humble serviteur et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je serai heureux dʹêtre rappelé au bon souvenir <strong>de</strong> mon excellent ami, M. <strong>de</strong> Cau‐<br />

laincourt, et <strong>de</strong> Madame la Comtesse <strong>de</strong> Caulaincourt.<br />

Je nʹai point oublié, aux pieds <strong>de</strong>s S ts Apôtres, M. lʹabbé, précepteur <strong>de</strong> votre cher M.<br />

Richard.<br />

Jʹai vu plusieurs fois, et très amicalement, M. le Capitaine Roch, neveu <strong>de</strong> Madame<br />

Guilhem; cʹest un très brave et très digne officier, fort estimé au corps; jʹai vu aussi sa jeune<br />

femme, très aimable, et sa mère qui ne lʹest pas moins.<br />

1394 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

A M. <strong>de</strong> Varax resté pour les démarches en vue <strong>de</strong> lʹapprobation, MLP. fait le récit du voyage jusquʹà Marseille.<br />

Conseils. Impression gardée du séjour à Rome.<br />

Marseille, 19 avril 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous sommes arrivés aujourdʹhui seulement à Marseille. Vendredi, la mer étant fort<br />

grosse à Civita, nous avons dû nous y arrêter et y passer la nuit; le len<strong>de</strong>main, bien quʹelle<br />

ne fût pas plus calme, nous avons pris les Messageries; la nuit a été <strong>de</strong>s plus ru<strong>de</strong>s; ce<br />

1354


nʹétait, dʹun bout à lʹautre du navire, que cris et gémissements; le dimanche, dans la soirée,<br />

le capitaine, arrivé à la hauteur <strong>de</strong> Toulon, a jugé pru<strong>de</strong>nt dʹy relâcher et dʹy déposer tout<br />

son mon<strong>de</strong>, non peut‐être quʹil y eût <strong>de</strong> danger réel à poursuivre sa route, mais il restait<br />

trois ou quatre heures <strong>de</strong> traversée plus mauvaises que les autres et à travers la nuit; il a<br />

craint sans doute dʹexcé<strong>de</strong>r les puissances <strong>de</strong>s plus fatigués; donc, <strong>avec</strong> force tumulte et<br />

presse et encombrement dans les bateaux <strong>de</strong> transport, nous sommes <strong>de</strong>scendus à Toulon<br />

à 9h. 1/2 . Ce matin lundi, arrivant à Marseille par le chemin <strong>de</strong> fer à 11h., nous nous y instal‐<br />

lons à lʹhôtel du Petit S t ‐<strong>Jean</strong>, Miotte 418 et moi, pour nous y reposer, M. Emile [Beauvais],<br />

moins éprouvé par la mer, étant sorti pour faire ses courses. Le jeune soldat, en restant<br />

constamment couché, a évité presque tout mal; pour moi, lʹair suffocant <strong>de</strong>s cabines, joint<br />

au mouvement extrême du vaisseau, mʹa mis parmi les moins épargnés; jʹai donc eu là,<br />

comme à Rome, un succès <strong>de</strong> compassion; on me désignait comme une <strong>de</strong>s plus lamenta‐<br />

bles victimes; quelques‐uns remarquaient que, dès lʹarrivée, jʹavais déjà lʹair mala<strong>de</strong>. Tout<br />

cela augmente mon regret <strong>de</strong> vous avoir quitté, voyant que vous auriez pu encore tirer<br />

parti <strong>de</strong> mon visage défait dont lʹaspect vous semblait si favorable au succès <strong>de</strong> nos dé‐<br />

marches près <strong>de</strong>s administrations romaines; je vais prier Dieu pour que lʹimpression déjà<br />

produite ne sʹefface pas avant que vous ayez tout mis à bonne fin.<br />

Un bain que je viens <strong>de</strong> prendre mʹa fort soulagé; je compte partir <strong>de</strong>main <strong>avec</strong> le<br />

jeune Miotte à 11h.30 <strong>de</strong> Marseille, et poursuivre ma route dʹun seul élan jusquʹà Paris, à<br />

moins quʹune fatigue extrême ne me contraigne à mʹarrêter à Lyon; si je gar<strong>de</strong> un peu <strong>de</strong><br />

force pour aller directement, jʹarriverai à Paris mercredi à 7h. du matin.<br />

Je crains un peu que, moi absent, vous ne cédiez trop à votre ar<strong>de</strong>ur active et que<br />

vous nʹusiez <strong>de</strong> vos forces outre mesure; je nʹai pas assez appelé à ce sujet lʹattention <strong>de</strong><br />

M me <strong>de</strong> Varax 419 ; je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> instamment <strong>de</strong> lui dire cette mienne inquiétu<strong>de</strong> (vieux<br />

style que vous aimez), afin quʹelle y veille autant quʹelle le pourra. Profitez, je vous prie, <strong>de</strong><br />

lʹoccasion pour lui offrir mes respects et lui dire que je gar<strong>de</strong>rai un doux souvenir <strong>de</strong> ses<br />

bontés. M lle Lauffer y a mis aussi sa part, et je lui en suis bien reconnaissant. Nʹoubliez pas<br />

que vous avez à lui remettre 2f pour les Prince‐Albert quʹelle a eu lʹobligeance dʹacheter; ils<br />

nous ont servi à tous en route; 2 <strong>de</strong> ces petits Princes ont fait toute ma nourriture, <strong>avec</strong> un<br />

bouillon, pendant 36 heures; aussi, mon voyage à Rome a complété ma maigreur qui me<br />

semble maintenant arrivée à sa plus haute perfection; je compte sur Chaville pour réparer<br />

tous ces désastres.<br />

Dites à tous nos ff. que jʹai été heureux <strong>de</strong> leurs témoignages dʹaffection et que je<br />

suis content du zèle quʹils apportent dans leurs œuvres; quʹils le soutiennent par lʹesprit <strong>de</strong><br />

prière, afin que Dieu épure et accroisse encore leur charité; faites‐leur spirituellement tout<br />

le bien que vous pourrez; une fois <strong>de</strong> plus, jʹai vérifié près dʹeux que toute notre force vient<br />

du Seigneur et que nous ne la pouvons trouver quʹen Lui seul. Recomman<strong>de</strong>z‐leur le sup‐<br />

port et la patience. Joseph, en Egypte, disait à ses frères: Ne disputez pas dans le chemin. Il<br />

faut dire la même chose à Rome, car les hommes nʹont pas changé; <strong>de</strong> plus, le Seigneur<br />

Dieu est venu parmi nous, et Lui aussi Il a dit: La paix soit <strong>avec</strong> vous. Quand Dieu nous a<br />

parlé, il faut lui obéir.<br />

En résumant les fruits <strong>de</strong> mon voyage à Rome, je mʹen retourne heureux et content;<br />

dʹautres regretteraient <strong>de</strong> nʹavoir pas plus fait et dʹavoir si peu vu; je crois avoir fait les<br />

418 Jeune zouave pontifical qui désirait étudier sa vocation dans la Communauté.<br />

419 M me <strong>de</strong> Varax était venue à Rome en même temps que son fils ; elle y passait régulièrement une partie <strong>de</strong> l’hiver.<br />

1355


choses les plus essentielles et avoir vu les choses les plus dignes dʹêtre contemplées; celles‐<br />

là me donnent lʹidée du reste et le contiennent pour moi comme implicitement. Dieu me<br />

fait la grâce <strong>de</strong> voir un peu ce mon<strong>de</strong> en Lui; là, on nʹa pas besoin <strong>de</strong> multiplicité, la vue<br />

dʹensemble suffisant pour contenter lʹâme. De plus, jʹai trouvé à Rome ce que je goûte le<br />

plus sur cette terre: beaucoup <strong>de</strong> bonté, beaucoup <strong>de</strong> cœurs sympathiques et généreux; je<br />

serais bien difficile si je nʹétais satisfait. Que le Seigneur soit béni, il mʹa accordé une<br />

gran<strong>de</strong> grâce pour finir; je ne lui en <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />

plus quʹune, cʹest <strong>de</strong> me bien préparer pour me<br />

présenter à Lui.<br />

Jʹai pensé trop tardivement à rendre<br />

visite à M me <strong>de</strong> Jurieu dont M me Courballet sait,<br />

je crois, lʹadresse; que vous feriez bien, si vous<br />

voyiez la première, <strong>de</strong> lui dire que la pauvre<br />

<strong>de</strong>moiselle Antoinette, qui a soigné <strong>avec</strong> tant <strong>de</strong><br />

dévouement la tante <strong>de</strong> Mme <strong>de</strong> Jurieu (tante<br />

dont celle‐ci a été héritière), est en extrême<br />

détresse, parce que sa pension, <strong>de</strong>puis<br />

plusieurs années, nʹest pas payée; je vous dis<br />

les faits, vous parleriez en mon nom, je ne dis<br />

pas que vous <strong>de</strong>vriez le faire délicatement, cʹest<br />

chose quʹon nʹa pas à vous recomman<strong>de</strong>r.<br />

Remerciez M. le docteur Laval que je nʹai<br />

pu voir avant mon départ; jʹécris <strong>avec</strong> le dos<br />

dʹune plume; je vais pourtant tâcher <strong>de</strong> faire<br />

<strong>de</strong>ux mots que vous enverriez à M gr <strong>de</strong> Méro<strong>de</strong>;<br />

vous mettriez lʹadresse, je ne sais pas bien son<br />

titre et ses fonctions.<br />

Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S. Je vais beaucoup prier <strong>avec</strong> nos ff. pour que<br />

vous acheviez lʹœuvre commencée, afin <strong>de</strong> nous revenir bientôt.<br />

Votre ami et Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je regrette <strong>de</strong> ne pas pouvoir écrire à mon fils <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] et à tous<br />

nos frères; peut‐être pourriez‐vous leur lire ou laisser lire cette lettre qui, en somme, est un<br />

peu omnibus; vous savez déjà que je fais <strong>de</strong>s lettres, sans le chercher, qui peuvent être à<br />

plusieurs fins et recevoir plusieurs adresses.<br />

1395 à M. Tourniquet<br />

Voyage <strong>de</strong> retour. Arrivée à la communauté. Accueil filial.<br />

Chaville, 22 avril 1869<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je vous écris un mot, comme je lʹavais promis, pour vous informer <strong>de</strong> notre arrivée,<br />

hier 7h. matin; notre voyage <strong>de</strong> Marseille à Paris sʹest passé sans trop <strong>de</strong> fatigues et en<br />

bonnes conditions; je crois quʹen définitive le moyen le meilleur, le plus économique et<br />

1356


peut‐être le moins gênant est dʹaller ainsi dʹune seule traite par train direct. Si la mer eût<br />

été moins ru<strong>de</strong>, tout eût été bien; mais comme notre f. Emile [Beauvais] vous lʹa dit, elle<br />

nous a fort maltraités; nous sommes néanmoins sains et saufs, un peu fatigués, mais sans<br />

atteinte jusquʹici à la santé.<br />

Nos ff. nous ont accueillis <strong>avec</strong> une cordialité bien aimable, à lʹembarcadère, à Na‐<br />

zareth, et nous ont suivis pour la plupart jusquʹà Chaville, où a recommencé lʹaffectueuse<br />

réception; le Bon Seigneur, cela va sans dire, a daigné se prêter à la fête et cʹest surtout à<br />

ses pieds que la famille sʹest réjouie.<br />

Jʹécris un mot à notre f. Emile; il mʹa assisté, ainsi que notre jeune postulant Miotte,<br />

<strong>avec</strong> une bonne volonté et une activité qui nous ont été bien utiles.<br />

Tous nos ff. ont été heureux dʹavoir <strong>de</strong> vos nouvelles fraîches et détaillées; ils vous<br />

envoient à tous leurs affections fraternelles.<br />

Veillez bien à lʹenvoi <strong>de</strong>s lettres; je me suis assuré quʹelles ne parviennent pas exac‐<br />

tement, une entre autres que jʹavais écrite à M. Faÿ, longue et contenant tous les faits les<br />

plus intéressants <strong>de</strong> notre séjour à Rome, nʹest pas arrivée; jʹai aussi la certitu<strong>de</strong> que plu‐<br />

sieurs écrites par moi à vous ou à nos ff. <strong>de</strong> Rome nʹont pas été reçues.<br />

Adieu, mon bien cher ami et fils; je vous écrirai plus au long, je tiendrai compte <strong>de</strong>s<br />

notes que vous avez remises au jeune Miotte. Je vous embrasse tendrement ainsi que nos<br />

frères, je suis heureux dʹavoir passé quelques jours au milieu <strong>de</strong> vous; jʹai été touché <strong>de</strong> vos<br />

soins affectueux, ils auraient accru, sʹil était possible, mon tendre dévouement pour vous tous.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Mille bons souvenirs à tant <strong>de</strong> personnes qui se sont montrées si bienveillantes pour<br />

nous, amitiés aussi à M. Vrignault.<br />

1396 à M. dʹArbois<br />

Nouvelles du voyage <strong>de</strong> retour; bon succès <strong>de</strong>s démarches faites à Rome: on y trouve ʺbeaucoup <strong>de</strong> bienveillance,<br />

mais on mène lentement les affairesʺ.<br />

Chaville, 24 avril 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je suis arrivé <strong>de</strong> mon long voyage avant‐hier mercredi, à 7h. du matin; Dieu a dai‐<br />

gné bénir mon retour comme le reste <strong>de</strong> cette excursion, car, malgré dʹassez gran<strong>de</strong>s souf‐<br />

frances en mer et un trajet <strong>de</strong> 21 heures <strong>de</strong> Marseille à Paris, je secoue assez bien la fatigue<br />

et jʹespère, après un jour ou <strong>de</strong>ux, être en mesure <strong>de</strong> suivre les exercices <strong>de</strong> notre retraite<br />

qui va commencer. Nous y verrons, je pense, quelquʹun <strong>de</strong> chez vous; je trouverai bien<br />

dʹailleurs les dispositions que vous prendrez à ce sujet.<br />

Jʹai beaucoup à remercier Dieu <strong>de</strong>s grâces sensibles, palpables, si je puis ainsi dire,<br />

quʹIl a daigné nous accor<strong>de</strong>r dans notre pèlerinage; les fins que nous voulions atteindre se‐<br />

ront obtenues; lʹapprobation, au <strong>de</strong>gré voulu, nous est promise et M. <strong>de</strong> Varax, resté pour<br />

quelques formalités à Rome, la rapportera, je lʹespère, dans un délai très prochain. Jʹaurai,<br />

je pense, dans quelques jours le pouvoir dʹappliquer directement à la Congrégation la bé‐<br />

nédiction pontificale que nous avons reçue pour elle du Saint Père; je ferai, si je le puis,<br />

cette application à la clôture <strong>de</strong> la retraite et je prendrai soin <strong>de</strong> vous en avertir, afin que<br />

1357


vous et nos chers ff. dʹAngers ouvriez votre cœur pour la recevoir. Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

continuer tous à prier pour que tout arrive à bonne conclusion. On trouve à Rome beau‐<br />

coup <strong>de</strong> bienveillance, mais on y mène lentement les affaires et lʹon admet volontiers <strong>de</strong>s<br />

retards déconcertants et qui compromettent parfois les résultats en apparence assurés.<br />

Il me semble que je dois à cette époque <strong>de</strong> lʹannée, payer un trimestre pour les pen‐<br />

sions <strong>de</strong> nos jeunes séminaristes; ayez le soin, je vous prie, mon cher ami, <strong>de</strong> me dire ce<br />

que jʹai à vous envoyer pour ces pensions et pour les autres dépenses <strong>de</strong> MM. Boiry et<br />

Cauroy; jʹai aussi à régler lʹaffaire <strong>de</strong>s 100f que vous aviez portés en trop comme recette.<br />

Donnez‐moi surtout <strong>de</strong> vos nouvelles et vos observations sur votre personnel.<br />

Offrez mon profond respect à M gr dʹAngers; je lui écrirai pour le remercier <strong>de</strong>s let‐<br />

tres quʹil mʹavait envoyées et qui mʹont très utilement recommandé à Rome; la retraite va<br />

mʹempêcher <strong>de</strong> le faire immédiatement.<br />

Adieu, mon bien cher ami et fils en N.S.; jʹespère que jʹaurai rapporté <strong>de</strong> Rome <strong>de</strong>s<br />

grâces nouvelles et, sinon plus dʹaffection pour vous et pour nos ff., au moins plus <strong>de</strong> zèle<br />

et <strong>de</strong> lumière pour les servir et les assister.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Dites‐moi comment se trouve présentement M me votre sœur.<br />

1397 à M. Risse<br />

MLP. rend grâces <strong>de</strong> son séjour à Rome. Joie dʹavoir retrouvé les frères <strong>de</strong> Paris.<br />

Chaville, 24 avril 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je suis arrivé avant‐hier mercredi <strong>de</strong> mon long voyage, à 7h. du matin; Dieu a dai‐<br />

gné me bénir dans mon retour comme dans le reste <strong>de</strong> cette excursion, car, malgré dʹassez<br />

gran<strong>de</strong>s souffrances en mer et un trajet <strong>de</strong> 21 heures en chemin <strong>de</strong> fer, <strong>de</strong> Marseille à Paris,<br />

je secoue assez bien la fatigue et jʹespère être, après un jour ou <strong>de</strong>ux, en état <strong>de</strong> suivre les<br />

exercices <strong>de</strong> notre retraite qui va commencer.<br />

Nous y verrons, je pense, quelquʹun <strong>de</strong> chez vous; je mʹen rapporte du reste à votre<br />

sagesse pour la disposition que vous prendrez à ce sujet.<br />

Jʹai beaucoup à remercier Dieu <strong>de</strong>s grâces manifestes, palpables, pour ainsi dire,<br />

quʹIl a daigné nous accor<strong>de</strong>r dans notre pèlerinage; nous avons reçu lʹassurance que les<br />

fins que nous désirions atteindre seront obtenues. Il ne reste que quelques formalités pour<br />

lesquelles M. <strong>de</strong> Varax est resté après moi à Rome; je pense que, dans une quinzaine, il se‐<br />

ra <strong>de</strong> retour, mais il faut continuer à prier. On trouve à Rome beaucoup <strong>de</strong> bienveillance,<br />

mais on ne se presse pas en affaires, et lʹon admet volontiers <strong>de</strong>s retards qui parfois com‐<br />

promettent <strong>de</strong>s résultats en apparence assurés.<br />

Remerciez beaucoup pour moi Mgr <strong>de</strong> Metz; sa si bonne lettre nous a protégés gran‐<br />

<strong>de</strong>ment; je ne manquerai pas <strong>de</strong> lui écrire dès que jʹaurai quelque nouvelle certaine sur la<br />

conclusion <strong>de</strong> nos affaires.<br />

Jʹai trouvé, ici et à Paris, tout en bon état; je nʹai pas besoin <strong>de</strong> dire que nos ff. mʹont<br />

fait un accueil cordial, lʹaffectueuse union est, vous le savez, le premier trésor <strong>de</strong> notre pe‐<br />

tite famille.<br />

1358


Vos jeunes Messieurs vont bien; le jeune Bouquet agrée à tous par sa simplicité et sa<br />

droiture. M. Bouchy, après avoir souffert assez notablement dʹun rhume quʹil avait pris<br />

dans le voyage, semble être bien remis; il est content, son caractère un peu ru<strong>de</strong> sʹassou‐<br />

plit, la lumière se fait. Le jeune Nauroy est très doux, pas très capable, mais dʹun heureux<br />

caractère.<br />

Jʹai <strong>de</strong>mandé à Rome le pouvoir dʹappliquer directement à la Congrégation la béné‐<br />

diction pontificale que jʹai reçue pour elle. Je ferai cette application à la clôture <strong>de</strong> la re‐<br />

traite, si jʹai reçu à temps lʹautorisation. En ce cas, je vous avertirai, afin que vous aussi<br />

vous ouvriez vos cœurs pour la recevoir.<br />

Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S., assurez mes frères <strong>de</strong> tout mon tendre dé‐<br />

vouement; jʹespère que jʹaurai puisé aux pieds <strong>de</strong>s S ts Apôtres à Rome, sinon plus dʹaffec‐<br />

tion pour notre chère famille, au moins plus <strong>de</strong> grâce, <strong>de</strong> zèle et <strong>de</strong> lumière pour la servir<br />

et lʹassister.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1398 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Pour lui fixer un jour <strong>de</strong> visite.<br />

Chaville, 25 avril 1869<br />

Madame la Marquise,<br />

Ce me sera une gran<strong>de</strong> joie <strong>de</strong> revoir vous et votre chère famille, après une absence<br />

que jʹai trouvée longue; je me serais empressé <strong>de</strong> me présenter chez vous si, <strong>de</strong>puis trois<br />

jours que je suis <strong>de</strong> retour, je nʹavais été retenu par beaucoup <strong>de</strong> soins négligés en mon ab‐<br />

sence. Je ne serai pas libre durant toute la journée ni durant la semaine qui va commencer,<br />

car notre maison <strong>de</strong> Vaugirard a une retraite à partir <strong>de</strong> ce soir, mais lundi, mardi et mer‐<br />

credi, <strong>de</strong> midi 1/2 à 2h. 1/2 , jʹaurai un temps dont je serai heureux <strong>de</strong> disposer pour mʹentrete‐<br />

nir <strong>avec</strong> vous, sans nul détriment pour les obligations que me crée la retraite; je compte<br />

donc pour un <strong>de</strong> ces jours sur la visite que vous voulez bien me promettre.<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, et partager <strong>avec</strong> votre cher entourage, tous<br />

mes sentiments <strong>de</strong> bien respectueux dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong> Ptre 1399 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Diverses questions touchent lʹŒuvre <strong>de</strong> Rome: changement <strong>de</strong> personnel, emplacement du Cercle <strong>de</strong>s zouaves.<br />

Chaville, 2 mai 1869<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Les exercices <strong>de</strong> notre retraite, terminée hier seulement, ne mʹont pas laissé une<br />

seule minute <strong>de</strong> liberté pour répondre à votre lettre du 25 avril. Aujourdʹhui dimanche, je<br />

mʹempresse <strong>de</strong> vous écrire quelques lignes.<br />

Je regrette bien que vous ne mʹécriviez rien au sujet <strong>de</strong> M me <strong>de</strong> Jurieu, que je vous ai<br />

prié plusieurs fois <strong>de</strong> visiter <strong>de</strong> ma part, pour la conjurer <strong>de</strong> prendre en pitié la situation<br />

dʹune ancienne, très digne et très pieuse domestique <strong>de</strong> sa tante, à laquelle domestique<br />

1359


(Antoinette) elle néglige <strong>de</strong>puis plusieurs années <strong>de</strong> servir une rente, léguée par la tante, et<br />

qui est absolument lʹunique ressource <strong>de</strong> cette servante dévouée. MM. Tulasne mʹont écrit<br />

<strong>de</strong>ux fois, me priant <strong>de</strong> mʹoccuper <strong>de</strong> cette pieuse femme qui les intéresse hautement; je la<br />

connais moi‐même, elle est ma pénitente à Chaville; il y a pour moi plusieurs obligations<br />

<strong>de</strong> ne mettre à cette œuvre aucune négligence; cʹest à la veille <strong>de</strong> quitter Rome que jʹai ap‐<br />

pris que M me <strong>de</strong> Jurieu nʹétait pas absente comme M gr <strong>de</strong> Luçon 420 nous lʹavait dit; je vous<br />

en prie donc, mettez‐moi à même <strong>de</strong> répondre sans plus <strong>de</strong> retard à MM. Tulasne.<br />

Pour le voyage en Suisse, il peut retar<strong>de</strong>r votre retour à Amiens où votre absence<br />

laisse un grand vi<strong>de</strong>, fort pénible surtout pour M. Trousseau et pour lʹensemble <strong>de</strong> lʹœu‐<br />

vre; si vous pouvez amoindrir assez cette difficulté pour quʹelle ne reste pas trop lour<strong>de</strong> à<br />

nos frères dʹAmiens, il y a certainement une bonne œuvre à faire et les choses sont dʹail‐<br />

leurs assez avancées pour quʹon ne puisse guère les défaire; je suis donc dʹavis <strong>avec</strong> vous<br />

quʹil faut rendre ce bon office au Séminaire français et au pauvre M. Calpini.<br />

M. Faÿ a porté, dès hier samedi, la lettre pour M gr <strong>de</strong> Versailles; il est absent, ache‐<br />

vant une visite pastorale; dès son arrivée, M. Morel, Vicaire Général, fort bienveillant pour<br />

nous, mettra la chose sous ses yeux. M. Lantiez sʹoccupe <strong>de</strong>s bustes, M. Maignen verra<br />

<strong>de</strong>main lundi le livre <strong>de</strong>s Ordres religieux.<br />

Dimanche 2, à 1 h., on mʹapporte <strong>de</strong> Vaugirard votre lettre du 27 avril.<br />

Le Conseil se réunissant <strong>de</strong>main, je le consulterai relativement à la fondation ro‐<br />

maine en question et je vous en écrirai promptement. Je me réjouis quʹon ne sʹarrête pas au<br />

Caffè Nuovo pour les Zouaves; il faut une maison à soi et un jardin véritable, un peu <strong>de</strong><br />

liberté, dʹespace et <strong>de</strong> respir, pas trop au centre du mouvement et du bruit; on en a <strong>de</strong> reste<br />

à la caserne, aux exercices, etc.<br />

Lʹheure <strong>de</strong> la promena<strong>de</strong> du dimanche étant venue à Chaville, je continue cette let‐<br />

tre dans le bois où jʹaccompagne les infirmes, lʹordre déjà douteux <strong>de</strong> lʹépître court risque<br />

<strong>de</strong> tourner au décousu. Jʹachève pourtant dʹépuiser les sujets mentionnés dans vos lettres.<br />

Je fais jeter à la poste à Paris, pour plus <strong>de</strong> prestesse, votre lettre à M. Trousseau; mais, ar‐<br />

rivée aujourdʹhui dimanche chez nous, elle ne peut parvenir le samedi à M. Trousseau. Les<br />

correspondances entre Rome et la France sont définitivement bien mal commo<strong>de</strong>s: ou les<br />

lettres ne parviennent point, ce qui est fréquent, ou elles arrivent <strong>avec</strong> dʹinsupportables re‐<br />

tards.<br />

Je crois quʹil ne faudrait songer à lʹaudience <strong>de</strong> congé quʹautant quʹon serait sûr<br />

dʹéchapper à lʹimportunité, le Souverain Pontife étant bien accablé.<br />

M. Ginet père, à Paris <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux mois, sans avoir pu voir son fils, lʹobsè<strong>de</strong> <strong>de</strong> let‐<br />

tres pour hâter son retour.<br />

Le remplacement ou exonération Gérold a été arrangé par M. Caille. M. Bérard,<br />

dont M. Caille paraissait désirer le rappel, quoiquʹil eût continué à faire assez convena‐<br />

blement son emploi à Amiens, avait, à la retraite, reçu <strong>de</strong> nous le conseil dʹentrer pour<br />

<strong>de</strong>ux ans dans les Zouaves; après avoir eu dʹabord beaucoup <strong>de</strong> chagrin <strong>de</strong> cette proposi‐<br />

tion et <strong>de</strong> sʹéloigner <strong>de</strong> la Communauté, il avait fini, sur lʹavis du Père <strong>de</strong> la retraite, par<br />

prendre cordialement son parti; mais le projet rencontre <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s difficultés. Le Comité<br />

français lui dit: Vous êtes belge, allez au Comité belge. Celui‐ci dit: Vous nʹêtes pas régu‐<br />

lièrement libéré du service en Belgique; il vous manque aussi plusieurs pièces essentielles,<br />

le consentement <strong>de</strong> votre famille. Ces objections ne sont pas absolument graves. Il a 24 ans<br />

420 L’ancien évêque <strong>de</strong> Luçon, Mgr Baillès, résidait à Rome.<br />

1360


et, au Comité français, on nʹexige pas <strong>de</strong> consentement <strong>de</strong>s parents à cet âge; ce même<br />

Comité a enrôlé quelquefois <strong>de</strong>s belges résidant <strong>de</strong>puis longtemps en France; priez M.<br />

<strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] <strong>de</strong> voir le représentant du Cercle belge pour savoir si, <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s<br />

explications bien nettes sur ces divers points, on nʹenrôlerait pas M. Bérard à Rome, ou<br />

plutôt encore si M. <strong>de</strong> Charette ou autre ne le recevraient pas du côté <strong>de</strong>s français; la vraie<br />

difficulté, cʹest quʹil voudrait que sa famille le pût croire à Rome pour la Communauté et<br />

non comme zouave pontifical.<br />

M. Caille viendra à Paris au moment où vous y serez pour concerter ensemble tout<br />

ce qui intéresse lʹœuvre dʹAmiens; tâchez que cela tar<strong>de</strong> peu.<br />

Je vous recomman<strong>de</strong> encore lʹaffaire <strong>de</strong> Jurieu.<br />

Mille affections à nos ff., ils ont été bien recommandés pendant la retraite; bonnes et<br />

cordiales affections à M. Vrignault; respects à M me <strong>de</strong> Varax et à M lle Lauffer, et à tous ceux<br />

qui nous montrent bienveillance.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Le changement du régime à Rome ne serait praticable que dans le cas où on se‐<br />

rait mieux posé pour les services <strong>de</strong> table, ayant un cuisinier sachant choisir et convena‐<br />

blement apprêter les aliments, <strong>de</strong> manière à donner ce que la santé <strong>de</strong>man<strong>de</strong>; en ce mo‐<br />

ment, il faut attendre et marcher.<br />

1400 à M. Maignen<br />

Se renseigner sur le prix et la valeur dʹun livre, les Ordres religieux.<br />

Chaville, 5 mai [1869]<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je vous prie <strong>de</strong> voir chez M. Mathelon, rue Madame, 40, lʹalbum <strong>de</strong>s Ordres religieux<br />

dont nous parle M. <strong>de</strong> Varax; jʹai bien lieu <strong>de</strong> craindre, ou que ce soit fort cher, ou bien <strong>de</strong><br />

nulle valeur comme art et comme science. Vous auriez lʹobligeance <strong>de</strong> mʹen écrire un mot.<br />

Votre ami et Père tout dévoué en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1401 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Projet <strong>de</strong> fondation à Rome: avantages et inconvénients. Précautions à prendre vis‐à‐vis <strong>de</strong> certains auxiliaires <strong>de</strong><br />

lʹOeuvre. MLP. réservé quant à lʹinstallation dʹun aumônier à <strong>de</strong>meure.<br />

Chaville, 5 mai 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nos ff. nʹont pas rejeté la pensée dʹun établissement à Rome, <strong>avec</strong> quelque délai que<br />

les appropriations, etc. pourraient entraîner; mais, pour juger la question à fond et en<br />

connaissance <strong>de</strong> cause, il serait nécessaire <strong>de</strong> savoir plus précisément quelles charges et<br />

conditions grèveraient la fondation, quelle quʹelle fût, qui nous serait concédée; nécessaire<br />

aussi <strong>de</strong> voir, mais bien voir lʹétablissement pour se faire quelque idée <strong>de</strong> lʹœuvre ou <strong>de</strong>s<br />

œuvres quʹon y pourrait établir en telle ou telle circonstance quʹon peut prévoir. Une œu‐<br />

1361


vre française serait le mieux, mais laquelle? Ne pourriez‐vous, près dʹune personne amie et<br />

discrète, M gr <strong>de</strong> Luçon [M gr Baillès, ancien évêque <strong>de</strong> Luçon, résidant à Rome] ou le r.p.<br />

Brichet (<strong>avec</strong> gran<strong>de</strong> recommandation <strong>de</strong> secret) vous enquérir quelle œuvre serait vrai‐<br />

ment utile, opportune, afin dʹexaminer ensuite si, dans un temps donné, nous serions en<br />

mesure dʹy subvenir. Et, en attendant cette réalisation plus ou moins lointaine, <strong>de</strong> création<br />

dʹœuvre, comment subsisteraient les sujets posés là? Voilà bien <strong>de</strong>s questions, la réponse<br />

peut être embarrassante.<br />

M. Hello, averti par moi <strong>de</strong> la pénurie dʹornements à la Villa, a envoyé aujourdʹhui<br />

au Comité lʹornement blanc et sʹoccupe <strong>de</strong>s autres.<br />

Je ne sais si je vous ai dit que mes pouvoirs pour bénir et indulgencier chapelets,<br />

médailles, etc. sont expirés; je vous prie <strong>de</strong> me les faire renouveler; pour nos autres ff., ils<br />

ne paraissent pas encore être à la fin <strong>de</strong>s leurs. Je vais voir <strong>avec</strong> nos ff. si quelque chose est<br />

praticable pour Amiens; M. Trousseau écrit quʹil est à bout <strong>de</strong> forces, mais il vous attend<br />

prochainement, ce qui lui donne courage.<br />

Revenant à la question dʹun poste à Rome, le Conseil, examinant quels en seraient<br />

les avantages, pensait que, vivant là au foyer le plus rayonnant <strong>de</strong> la foi, il y participerait<br />

plus directement, sʹy pénétrant <strong>de</strong> cette fermeté qui fait les Instituts forts, et surtout <strong>de</strong><br />

cette union à J.C. qui est la seule véritable vie <strong>de</strong> tout ce qui se rattache profondément à<br />

son Eglise. Est‐il nécessaire pour cela dʹêtre à Rome et, en tout cas, ne serait‐ce pas préma‐<br />

turé pour nous? Ce serait matière à grave considération.<br />

Vous ne me parlez plus <strong>de</strong>s locaux pour les zouaves; quelquʹun <strong>de</strong> ceux quʹon a<br />

proposés semble‐t‐il convenir et pourra‐t‐on lʹobtenir? Le petit couvent génois serait‐il<br />

pour cette <strong>de</strong>stination et est‐ce ainsi seulement que nous pourrions y avoir asile? Je pense<br />

que lʹavoir pour nous, Communauté, serait bien hypothétique.<br />

Je crois que, sʹil fallait supprimer lʹassistant laïc, il faudrait désigner lʹéconome géné‐<br />

ral sous le titre <strong>de</strong> Procureur Général, qui sonnerait mieux et qui serait mieux comme une<br />

sorte <strong>de</strong> représentant <strong>de</strong> la position faite dans les œuvres aux ff. laïcs.<br />

Je ne mʹétonne point du regret que M gr Basti<strong>de</strong> témoigne <strong>de</strong> ne pouvoir poser plus<br />

précisément M. Louis [Klingenhofen] à la Villa; il mʹavait bien expliqué quʹ<strong>avec</strong> ce bon ec‐<br />

clésiastique zélé et M. Compans, il espérait créer une force quʹil dirigerait pour le spirituel<br />

<strong>de</strong>s légionnaires; jʹavais comme entrevu aussi, par quelques mots dits par lui, dès mon ar‐<br />

rivée, et quʹil nʹa plus répétés, me trouvant assez réservé <strong>avec</strong> lui, quʹil espérait réunir<br />

quelques sujets, montrant vocation parmi les militaires, pour sʹen faire <strong>de</strong>s agents dans le<br />

même but; cette confi<strong>de</strong>nce, comme pressentie à ce moment, nʹa pas été plus loin, mais je<br />

crois que telle était et telle est peut‐être encore sa pensée et celle <strong>de</strong> ses aumôniers adjoints.<br />

Comme il est bon toutefois et quʹil gar<strong>de</strong> bienveillance pour nous, je ne pense pas quʹil<br />

songe actuellement à réaliser ces vues en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> nous, mais il est bien important, à tous<br />

égards, que nos ff. restent en bonne harmonie <strong>avec</strong> lui; autrement, il pourrait, sʹil leur était<br />

défavorable, leur faire une position mauvaise et difficile. Lʹinstallation à <strong>de</strong>meure <strong>de</strong> lʹau‐<br />

mônier, M. Louis, à la Villa serait, si mes conjectures sont, comme je le crois, bien fondées,<br />

une annulation à peu près sûre <strong>de</strong> toute influence <strong>de</strong> nos ff.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, assurez <strong>de</strong> mes affections nos ff. et M. Vrignault, et<br />

faites une gran<strong>de</strong> distribution <strong>de</strong> mes respects à tous ceux à qui je dois rendre ce <strong>de</strong>voir.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1362


M. Hello a dû écrire au f. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] que Ponchel, accablé <strong>de</strong> travaux,<br />

ne pouvait faire ses commissions malgré tout son bon vouloir; M. Paillé en fera autant quʹil<br />

le pourra.<br />

1402 à M. Caille<br />

M. <strong>de</strong> Varax étant toujours à Rome, M. Lantiez va passer quelques jours à Amiens.<br />

Vaugirard, 8 mai 1869<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

M. <strong>de</strong> Varax mʹécrit quʹil sera <strong>de</strong> retour, à peu près certainement, pour le 21 ou le 22<br />

mai; que, sʹil doit sʹarrêter un jour ou <strong>de</strong>ux à Paris, il se pourrait quʹil ne fût pas à Amiens<br />

pour la fête <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Bon Secours; il craint quʹen ce cas, vous et M. Trousseau ne soyez<br />

bien en presse pour tous les services <strong>de</strong> vos œuvres; il me <strong>de</strong>mandait dʹaller concerter <strong>avec</strong><br />

vous ce quʹil pourrait être utile <strong>de</strong> faire pour quʹun dʹentre nous allât passer quelques jours<br />

à Amiens et vous prêter un peu secours; je ne vois guère que je puisse mʹabsenter en ce<br />

moment pour mʹentretenir <strong>avec</strong> vous en ce sens. M. Lantiez, plus agile que moi, sʹoffre à<br />

me remplacer; il ira donc vous voir un moment lundi 10, mais je pense quʹil reviendra le<br />

jour même à Paris, ayant à préparer ses dispositions pour la Pentecôte.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1403 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Admissions dʹun jeune frère belge, aux Zouaves pontificaux. Nouvelles diverses.<br />

Chaville, 9 mai 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je ne vous écris que <strong>de</strong>ux mots, car je présume que votre départ <strong>de</strong> Rome, fixé, me<br />

disiez‐vous, dans votre <strong>de</strong>rnière dépêche, au 14 <strong>de</strong> ce mois, sera presque effectué quand la<br />

présente vous arrivera.<br />

Je <strong>de</strong>vais vous dire seulement que lʹadmission <strong>de</strong> M. Bérard aux Zouaves paraît dé‐<br />

finitivement impraticable en ce moment; il vient <strong>de</strong> recevoir <strong>de</strong> Belgique une feuille qui lui<br />

signifie son exemption pour une année seulement du service, comme soutien <strong>de</strong> famille,<br />

sauf à recevoir une pareille exemption pour les trois années qui lui resteraient encore à<br />

faire comme soldat belge; il avait lieu dʹespérer que cette exemption serait définitive; dans<br />

la condition présente, il ne saurait prendre du service ailleurs quʹen son pays; il doit donc<br />

renoncer au parti quʹil avait accepté en ce sens. Ses dispositions paraissent excellentes en<br />

ce moment, M. Caille ne semble pas éloigné <strong>de</strong> lʹaccepter, si on lui donnait à Amiens un<br />

poste qui le mît moins directement en rapport <strong>avec</strong> les grands jeunes gens particulière‐<br />

ment; nous verrons ce qui sera le mieux.<br />

M. Trousseau <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à cor et à cri <strong>de</strong> lʹai<strong>de</strong>, mais je lui serais trop peu utile effec‐<br />

tivement; avant la Pentecôte, aucun <strong>de</strong> nos prêtres ne peut sʹéloigner; immédiatement<br />

après cette fête, lʹun dʹeux pourrait donner un peu dʹai<strong>de</strong> durant quelques jours.<br />

Je nʹai reçu aucune réponse <strong>de</strong> vous au sujet <strong>de</strong> M me <strong>de</strong> Jurieu; nombre <strong>de</strong> personnes<br />

doivent la connaître, la Sœur Lequette en particulier, car cette dame, fort mêlée aux œu‐<br />

1363


vres <strong>de</strong> charité, a eu beaucoup <strong>de</strong> rapports <strong>avec</strong> les Sœurs <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul; ne négli‐<br />

gez donc pas <strong>de</strong> rendre à MM. Tulasne et à la pauvre D lle Antoinette le service quʹils ont si<br />

instamment réclamé <strong>de</strong> nous.<br />

Lʹalbum <strong>de</strong>s Ordres religieux est une vraie mystification; M. Maignen lʹa vu, cʹest une<br />

publication sans valeur que M. Maignen estime à 2f: gravures sur bois grossièrement en‐<br />

luminées, texte insignifiant, etc. Nous verrons à votre retour ce quʹon peut choisir <strong>de</strong> pré‐<br />

férence.<br />

Je suis heureux <strong>de</strong> la consolation que nos ff. ont pu trouver dans leur petite retraite;<br />

elle leur donnera le désir <strong>de</strong> ne point se priver dʹun si utile appui.<br />

Assurez‐les <strong>de</strong> notre tendre affection; votre départ va leur laisser un vi<strong>de</strong> bien sen‐<br />

sible, nous tâcherons, par nos prières, dʹobtenir <strong>de</strong> Dieu ces grâces <strong>de</strong> choix qui savent suf‐<br />

fire à tout.<br />

Assurez aussi M. Vrignault <strong>de</strong> notre cordiale sympathie; nous savons son zèle et<br />

nous faisons <strong>de</strong>s vœux pour que Dieu y donne bénédiction.<br />

Enfin, offrez une <strong>de</strong>rnière fois mes sincères respects à M me <strong>de</strong> Varax et à M lle Lauffer.<br />

Nous allons prier, afin que votre voyage soit heureux.<br />

Adieu, mon bien cher enfant; je me réjouis <strong>de</strong> vous revoir après une absence que je<br />

trouve déjà longue; ceux dʹAmiens sont bien en droit aussi dʹavoir le même sentiment.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Cʹest du fond du cœur et <strong>de</strong>vant Dieu que je suis reconnaissant <strong>de</strong> tant <strong>de</strong><br />

bienveillances qui nous ont été accordées à Rome.<br />

1404 à M. A. Lainé<br />

Affectation dʹune offran<strong>de</strong> reçue à lʹoccasion <strong>de</strong> son diaconat. Annonce <strong>de</strong> lʹapprobation <strong>de</strong>s Constitutions, en<br />

date du 7 mai.<br />

Chaville, 10 mai 1869<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je remercie <strong>avec</strong> vous Notre Seigneur qui inspire à Mlle <strong>de</strong> Lagrange tant <strong>de</strong> géné‐<br />

reuse bonté à lʹoccasion <strong>de</strong> votre sous‐diaconat; nous la paierons <strong>de</strong> notre mieux par nos<br />

prières et par notre reconnaissance.<br />

Employez pour le mieux, en prenant conseil, les 150f quʹelle vous a remis. Je crois<br />

quʹil vaut mieux ne pas prendre une aube <strong>de</strong> luxe qui absorberait à elle seule tout le trésor;<br />

solidité et bon goût simple suffisent. Pour le bréviaire, cet ouvrage 4 vol., reliure chagrin,<br />

doré sur tranche, ne dépasse pas, je crois, 30f chez Lesort; si M. Hello peut vous voir, il<br />

vous conseillera utilement pour cet objet.<br />

Réjouissez‐vous tous <strong>avec</strong> nous: jʹai reçu hier <strong>de</strong> Rome un télégramme mʹannonçant<br />

que lʹapprobation au <strong>de</strong>gré désirable et dans les termes les plus favorables <strong>de</strong> notre<br />

Congrégation a été signée le 7 et sera remise le 12 à M. <strong>de</strong> Varax.<br />

Informez‐en M. Icard, toujours si bon pour nous.<br />

Je vous embrasse tous affectueusement<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1364


1405 à M. dʹArbois<br />

Frais <strong>de</strong> scolarité <strong>de</strong>s frères séminaristes.<br />

Chaville, 10 mai 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je reçois le compte que vous mʹavez transmis <strong>de</strong>s recettes et dépenses concernant<br />

nos jeunes Séminaristes jusquʹau présent mois.<br />

Il se sol<strong>de</strong> par 74f.40 dont je vous suis re<strong>de</strong>vable.<br />

Je vous envoie, pour y pourvoir, sous ce pli, 100f. Je vous remercie <strong>de</strong> la parfaite ré‐<br />

gularité que vous mettez dans cette petite gestion et <strong>de</strong> lʹéconomie que vous y apportez;<br />

les 24f.60 restant disponibles peuvent être appliqués au blanchissage; je nʹajoute rien pour<br />

les mêmes dépenses <strong>de</strong> nos ff. Séminaristes, vous priant <strong>de</strong> leur avancer jusquʹà prochain<br />

compte ce qui leur serait nécessaire. Avertissez‐moi, je vous prie, dès que jʹaurai un nou‐<br />

veau paiement à faire au séminaire.<br />

Je reçois aujourdʹhui <strong>de</strong> Rome un télégramme, par lequel M. <strong>de</strong> Varax mʹannonce<br />

que lʹapprobation au <strong>de</strong>gré désirable nous est accordée dans les termes les plus favorables;<br />

elle comporte implicitement lʹapprobation définitive dans les délais dʹusage. Nous avons<br />

donc tout ce que nous souhaitions, et plus peut‐être que nos mérites ne pouvaient nous<br />

faire espérer.<br />

Jʹécris ici un mot à notre Vénéré Seigneur dʹAngers pour lʹen informer. Je crois quʹil<br />

conviendra dʹajouter à votre prochain Salut un Magnificat, à moins que vous ne <strong>de</strong>man‐<br />

diez, mieux encore, à Mgr un Salut spécial dʹactions <strong>de</strong> grâces. La faveur est assez signalée<br />

pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r une vive reconnaissance <strong>de</strong> notre part. Continuez à mʹenvoyer vos lettres<br />

à Chaville, elles mʹarrivent plus sûrement.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je crois que, si on pouvait faire nettement la part du Maître <strong>de</strong> Chapelle, <strong>de</strong><br />

telle sorte que les conflits fussent évités, il serait mieux que M. Moutier ne prît pas cet em‐<br />

ploi; il nʹest pas sûr que nous ayons toujours un musicien pour le remplir; on peut craindre<br />

aussi que, jeune et ar<strong>de</strong>nt, M. Moutier nʹabon<strong>de</strong> trop <strong>de</strong> ce côté et se passionne plus que <strong>de</strong><br />

raison pour la musique, et aussi ne puisse plus guère vous ai<strong>de</strong>r dans les autres services<br />

quʹil négligera forcément. Pesez ces observations et agissez après y avoir pensé <strong>de</strong>vant<br />

Dieu. Ces mêmes objections avaient, dès quʹil avait été question primitivement <strong>de</strong> confier<br />

ces fonctions à M. Moutier, préoccupé le Conseil.<br />

Ayez soin, je vous prie, <strong>de</strong> mettre une enveloppe à la lettre pour M gr .<br />

Informez les jeunes séminaristes <strong>de</strong> la bonne nouvelle venue <strong>de</strong> Rome. Dites bien à<br />

M. Boiry que nous prions pour que sa santé, comme nous lʹespérons, se remette bientôt.<br />

Jʹapprendrai <strong>avec</strong> joie que le mieux éprouvé par votre chère sœur se soutient et se<br />

confirme définitivement; ce ne serait alors quʹune fatigue acci<strong>de</strong>ntelle.<br />

1405‐1 à M gr Angebault<br />

MLP. lui fait part <strong>de</strong> lʹapprobation reçue <strong>de</strong> Rome et lui témoigne sa gratitu<strong>de</strong> pour y avoir contribué.<br />

Chaville, 10 mai 1869<br />

Monseigneur,<br />

Jʹai pu accomplir, <strong>avec</strong> la grâce <strong>de</strong> Dieu, mon voyage à Rome. Jʹy ai goûté les saintes<br />

joies que jʹy allais chercher; celle <strong>de</strong> prier et dʹoffrir le St Sacrifice à la Confession <strong>de</strong>s S ts<br />

1365


Apôtres, le bonheur <strong>de</strong> voir, dʹentendre le Souverain Pontife, <strong>de</strong> communier <strong>de</strong> sa main au<br />

Jeudi‐Saint, <strong>de</strong> lʹentretenir quelques instants en audience particulière et enfin <strong>de</strong> recevoir<br />

sa bénédiction spéciale pour moi, pour notre petite famille religieuse et pour les œuvres<br />

que le Seigneur lui a confiées.<br />

Dʹune autre part, je nʹai quitté Rome quʹaprès mʹêtre assuré que lʹapprobation solli‐<br />

citée par nous <strong>de</strong> notre Institut et <strong>de</strong> nos Constitutions nous serait accordée dans un bref<br />

délai. Je viens, en effet, <strong>de</strong> recevoir un télégramme mʹannonçant que cette approbation,<br />

émise dans les termes les plus favorables, a été signée le 7 <strong>de</strong> ce mois et sera délivrée mer‐<br />

credi 12 à M. lʹabbé <strong>de</strong> Varax, celui <strong>de</strong> nos frères qui mʹavait accompagné et que jʹai laissé à<br />

Rome pour attendre la conclusion <strong>de</strong> lʹaffaire.<br />

Je mʹempresse, Monseigneur, <strong>de</strong> vous dire ce bon succès, sachant quelle part bien‐<br />

veillante vous daignerez y prendre. Cʹest aussi pour moi un <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> reconnaître que vo‐<br />

tre suffrage y a contribué singulièrement, et a pesé pour beaucoup dans lʹexamen que la<br />

Sacrée Congrégation a fait <strong>de</strong> notre Institut et <strong>de</strong> ses Règles. Nous avons donc à bénir le<br />

Seigneur qui, une fois <strong>de</strong> plus, nous témoigne quʹil lui plaît toujours que votre bonté et vo‐<br />

tre sagesse dirigent le développement <strong>de</strong> notre Congrégation comme elles ont présidé à sa<br />

fondation.<br />

Permettez‐moi aussi une fois <strong>de</strong> plus, Monseigneur, <strong>de</strong> vous exprimer toute notre<br />

vive reconnaissance <strong>avec</strong> les sentiments <strong>de</strong> profond respect <strong>avec</strong> lesquels je suis<br />

Votre humble serviteur et dévoué fils en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1406 à M. Risse<br />

<strong>Lettre</strong> (dont la <strong>de</strong>rnière partie nʹa pas été conservée), pour annoncer à Metz la première approbation <strong>de</strong> lʹInstitut<br />

par le Saint‐Siège.<br />

Chaville, 12 mai 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Vous apprendrez <strong>avec</strong> joie que notre requête à Rome a été favorablement accueillie.<br />

Sa Sainteté, par un Bref laudatif signé le 7 <strong>de</strong> ce mois, a daigné nous accor<strong>de</strong>r, dans les<br />

termes les plus encourageants, lʹapprobation que nous avons sollicitée <strong>de</strong> notre Institut et<br />

<strong>de</strong> nos Constitutions. M. <strong>de</strong> Varax, que jʹavais laissé pour quelques jours après moi à<br />

Rome, va nous rapporter cette précieuse marque <strong>de</strong> la bénédiction du Saint‐Siège. Toute<br />

notre Congrégation en éprouve une gran<strong>de</strong> joie. Pour témoigner à Dieu notre gratitu<strong>de</strong>,<br />

nous <strong>de</strong>mandons en chaque lieu un Salut dʹactions <strong>de</strong> grâces; je pense bien que vous lʹau‐<br />

rez aussi à Metz.<br />

Je vous lʹai déjà écrit, nous avons trouvé à Rome <strong>de</strong>s bienveillances toutes particu‐<br />

lières et <strong>de</strong>s appuis évi<strong>de</strong>mment ménagés par la grâce du Seigneur. Je vous dirai plus au<br />

long toutes les consolations que ce voyage à Rome nous a données.<br />

Je vous prie <strong>de</strong> voir sans retard M gr <strong>de</strong> Metz [M gr du Pont <strong>de</strong>s Loges] pour lui an‐<br />

noncer, exprès <strong>de</strong> notre part, cet heureux succès que son bienveillant appui près du Saint<br />

Père a beaucoup favorisé et quʹil apprendra, jʹen suis sûr, <strong>avec</strong> la paternelle sympathie<br />

quʹil nous témoigne en toute occasion.<br />

Jʹai écrit, il y a une douzaine <strong>de</strong> jours, à ce vénéré Prélat pour lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r lʹordina‐<br />

tion <strong>de</strong> notre cher f. Baumert, le priant, en même temps, dʹobtenir la dispense dʹâge néces‐<br />

1366


saire pour ce cher ordinand. Jʹavertissais M gr que, sʹil était à propos quʹon hâtât à Rome<br />

[.......]<br />

1407 à M. Caille<br />

Remplacement <strong>de</strong> personnel.<br />

15 mai [1869]<br />

Mon cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹenvoie le jeune f. Pappaz pour remplacer M. Barthélemy [Marchand], ainsi que M.<br />

Lantiez vous lʹa dit; je pense que vos services y gagneront.<br />

Je nʹai pas le temps <strong>de</strong> vous remercier du bon accueil que vous avez fait à M. dʹAr‐<br />

bois et à moi; je suis accoutumé, du reste, à votre cordiale hospitalité.<br />

M. Lantiez vous a prévenu, je pense, que je tenais à votre disposition la moitié <strong>de</strong> la<br />

somme pour lʹexonération <strong>de</strong> M. Gérold.<br />

Le train part, je ne puis continuer.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1408 à M. Baumert<br />

Dispense dʹâge nécessaire pour lʹordination <strong>de</strong> M. Baumert (il nʹa que que 23 ans).<br />

Vaugirard, 15 mai 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Un <strong>de</strong> nos ff. ecclésiastiques sʹest rendu, après la réception <strong>de</strong> votre lettre, à la non‐<br />

ciature, afin <strong>de</strong> voir ce quʹil était possible dʹobtenir relativement à la dispense dʹâge qui<br />

vous est nécessaire pour être ordonné présentement.<br />

M. le Secrétaire <strong>de</strong> Mgr le Nonce a répondu quʹil était beaucoup trop tard mainte‐<br />

nant pour obtenir cette dispense par voie ordinaire avant lʹordination <strong>de</strong> la Trinité.<br />

Jʹenvoie une dépêche télégraphique à M. <strong>de</strong> Varax, mais je crains quʹil nʹait déjà<br />

quitté Rome; en ce cas, il faudrait renoncer à lʹordination <strong>de</strong> la Trinité, mais je me rendrais<br />

chez Mgr le Nonce pour obtenir cette dispense pour le délai le plus rapproché quʹon pourra<br />

déterminer. Si la dispense est obtenue dès ce moment, elle sera envoyée directement à<br />

Metz; je ne sais si Mgr lʹEvêque [Mgr du Pont <strong>de</strong>s Loges] ne jugera pas, et MM. du séminaire<br />

aussi, que cette incertitu<strong>de</strong> est un obstacle à ce que vous soyez admis à la retraite; vous<br />

agirez en pleine et intérieure soumission à ce qui pourra être réglé, voyant en tout cela la<br />

volonté <strong>de</strong> Dieu.<br />

Lʹordination <strong>de</strong> M. Trousseau sera aussi retardée <strong>de</strong> quelques semaines par lʹab‐<br />

sence <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax, laquelle a laissé peser sur M. Trousseau trop <strong>de</strong> charges pour quʹil<br />

ait pu se préparer complètement à cette si grave consécration.<br />

Offrez tous mes sentiments dévoués à M. Risse et à nos ff., et croyez aussi, cher ami,<br />

à toute ma cordiale affection en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1367


1409 à M. Maignen<br />

Léger désaccord <strong>avec</strong> M. A. Faÿ, à règler dans la charité.<br />

Vaugirard, 21 mai 1869<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je parlerai lundi à M. Paillé du petit différend qui sʹest élevé entre vous concernant<br />

le séjour momentané <strong>de</strong> M. Auguste Faÿ au Cercle; jʹespère que tout sʹarrangera sans at‐<br />

teinte pour la charité. Veillons‐y bien tous; quelques signes divers me semblent indiquer<br />

en ce moment que le démon voudrait nous attaquer <strong>de</strong> ce côté, mais le Dieu doux et hum‐<br />

ble saura nous protéger.<br />

Adieu, bien cher enfant.<br />

Votre ami et Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1410 à M. Caille<br />

Retour prochain <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax. Se concerter pour la bonne marche <strong>de</strong>s Œuvres.<br />

Jeudi 21 mai 1869<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je profite <strong>de</strong> lʹenvoi que je fais à M. Faÿ dʹune soutane qui doit lui être nécessaire<br />

pour vous écrire ces <strong>de</strong>ux mots.<br />

Jʹai reçu hier une lettre <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax; il se mettait en route au moment où sa mis‐<br />

sive partait, il ne saurait donc tar<strong>de</strong>r à nous arriver; je doute néanmoins quʹil soit <strong>avec</strong><br />

vous pour votre fête patronale, parce quʹil accompagne Mme sa mère qui a voulu revenir<br />

par le St ‐Gothard, ce qui allonge un peu sensiblement la route.<br />

Dès quʹil sera <strong>de</strong> retour, je vous en avertirai, afin que vous nous rendiez visite pour<br />

concerter ensemble la marche <strong>de</strong> vos œuvres. Jʹai toute confiance quʹune entente parfaite<br />

se fera entre nous, car nous ne voulons tous que la gloire <strong>de</strong> Dieu; Il daignera nous assister<br />

pour asseoir les choses <strong>de</strong> telle sorte que chacun se sente à lʹaise pour marcher en esprit <strong>de</strong><br />

zèle et <strong>de</strong> cordiale union. Soyez bien assuré, mon bon ami, que je ne saurais oublier tout ce<br />

que vous doivent les œuvres dʹAmiens et le besoin quʹelles ont, comme toujours, <strong>de</strong> votre<br />

expérience et <strong>de</strong> vos appuis si dévoués; le Seigneur le sait mieux encore et nous donnera<br />

lumière pour que nous correspondions à ses vues <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong>.<br />

Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S., nous prierons <strong>avec</strong> vous dans votre aima‐<br />

ble fête <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Bon Secours.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

boîte.<br />

P. S. Pour ne pas mʹexposer à quelque réclamation <strong>de</strong> la poste, je jette cette lettre à la<br />

1410‐1 à M gr Angebault<br />

Remerciement pour sa ʺtrès bonne lettreʺ envoyée à lʹoccasion <strong>de</strong> lʹapprobation.<br />

1368


Vaugirard, 23 mai 1869<br />

Monseigneur,<br />

Je vous rends mille grâces <strong>de</strong> la bonne, très bonne lettre que vous avez eu la tout<br />

aimable pensée <strong>de</strong> mʹécrire, et <strong>de</strong>s conseils si sages quʹelle contient. Nous les suivrons <strong>de</strong><br />

notre mieux, bien assurés que nous répondrons ainsi aux vues du Seigneur sur notre petite<br />

Congrégation.<br />

Jʹai lʹhonneur <strong>de</strong> vous transmettre ci‐joint une lettre que Mgr [Baillès] lʹancien évêque<br />

<strong>de</strong> Luçon a confiée pour vous à M. lʹabbé <strong>de</strong> Varax que jʹavais laissé après moi à Rome et<br />

qui vient <strong>de</strong> nous rejoindre en rapportant aussi le Bref laudatif accordé par le Souverain<br />

Pontife.<br />

Mgr <strong>de</strong> Luçon a été plein <strong>de</strong> bienveillance pour nous et a tenu tout le compte possi‐<br />

ble <strong>de</strong> la recommandation que nous lui avions présentée <strong>de</strong> votre part.<br />

Veuillez agréer, Monseigneur, la nouvelle assurance du profond respect <strong>avec</strong> lequel<br />

je suis,<br />

Monseigneur<br />

Votre très dévoué serviteur et fils en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1411 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Difficultés à Rome: santés et dissensions. ʺLa croix semble peser sur nousʺ.<br />

Samedi 29 mai [1869]<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous transmets une lettre quʹa écrite pour vous Mgr Termoz. M. <strong>Jean</strong>‐Marie<br />

[Tourniquet] qui me lʹenvoie, me dit que MM. Charrin, Jouin et lui‐même sont plus ou<br />

moins souffrants, M. Jouin surtout. Les dissi<strong>de</strong>nces entre M. Emile [Beauvais] et M. Char‐<br />

rin recommencent. Prions, car la croix semble en ce moment peser sur nous; puissions‐<br />

nous la bien porter. M. Boiry nous arrive dʹAngers <strong>avec</strong> une atteinte à la poitrine dʹun ca‐<br />

ractère dangereux. Dieu, je le sais, veille sur nous; gardons confiance et soyons soumis.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je vais envoyer les petits bustes à Rome; envoyez‐moi, je vous prie, à Chaville les<br />

adresses bien exactes <strong>de</strong> NN. SS. Svegliati, <strong>de</strong> Luca et Termoz. M. Cirlot toujours très ma‐<br />

la<strong>de</strong>, priez pour lui; la Légion assez troublée en ce moment.<br />

1412 à M. Tourniquet<br />

Nouvelles concernant la communauté romaine; différend entre un frère et un zouave.<br />

Chaville, 1er juin 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> peine que notre cher M. Jouin est souffrant; nous avons immédia‐<br />

tement et persévéramment prié pour lui; jʹai la confiance que Dieu a entendu nos prières et<br />

quʹau moment où jʹécris il est déjà remis; assurez‐le <strong>de</strong> nos sincères sympathies et donnez‐<br />

1369


nous au plus tôt <strong>de</strong> ses nouvelles. Je compte bien aussi que les malaises <strong>de</strong> nos ff. Emile<br />

[Beauvais] et Charrin nʹauront été quʹun effet <strong>de</strong>s premières chaleurs et nʹauront pas <strong>de</strong><br />

suite.<br />

Je me hâte <strong>de</strong> vous dire que jʹai obtenu du Comité que le jeune Rabusier aille vous<br />

rejoindre comme postulant <strong>de</strong> notre Communauté et comme ai<strong>de</strong> pour vous; il partira, je<br />

pense, tout prochainement. M. Faÿ lui écrit près <strong>de</strong> sa mère, où il sʹest rendu en attendant<br />

la décision, afin quʹil arrive sans retard. Il désire avoir chaque jour quelques instants pour<br />

étudier; vous verrez si vous avez possibilité <strong>de</strong> favoriser cette aspiration sans gran<strong>de</strong> diffi‐<br />

culté.<br />

Nous prions beaucoup pour le Commandant Cirlot; dites à sa chère et pieuse<br />

femme, ainsi quʹà lui, tout lʹintérêt que nous inspire sa position.<br />

M. Vrignault prépare le rapport sur les <strong>de</strong>ux Cercles; il y joindra les budgets.<br />

M. Paillé a recommandé au Comité le renouvellement <strong>de</strong>s abonnements. Je ne sais<br />

si M. Vrignault a pu faire quelque chose dans le sens du bien que vous mʹindiquez dans<br />

votre lettre.<br />

Je regrette bien le démêlé que M. Charrin a eu <strong>avec</strong> un zouave; ne peut‐on, <strong>avec</strong> un<br />

peu <strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nce et une conduite mesurée, éviter ces contrariétés? Vous ne me dites pas en<br />

quoi a consisté ce différend. Si celui qui a menacé M. Charrin était dans son tort et si M.<br />

Charrin nʹen a eu aucun <strong>de</strong> son côté, il y avait peut‐être à examiner sʹil nʹy avait pas à en<br />

avertir M. <strong>de</strong> Charette; il faut que nos ff. soient respectés, mais il faut surtout quʹils méri‐<br />

tent <strong>de</strong> lʹêtre. Il y aurait, en pareil cas, à examiner ce que la pru<strong>de</strong>nce chrétienne <strong>de</strong>man<strong>de</strong>,<br />

afin <strong>de</strong> ne pas importuner pour un rien les chefs, en courant risque <strong>de</strong> susciter beaucoup<br />

<strong>de</strong> rancunes parmi les zouaves. Je le répète, tout alors est à peser <strong>de</strong>vant Dieu, en prenant<br />

aussi conseil, si le cas le <strong>de</strong>mandait. Je pense que vous aurez suivi cette marche.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, je vous écrirai, si je puis le faire à temps, pour vous<br />

annoncer le départ du jeune Rabusier.<br />

Offrez à lʹoccasion nos respects à toutes les personnes qui nous ont montré bienveil‐<br />

lance, et cʹest en vérité toutes celles que nous avons vues. Priez M gr Basti<strong>de</strong> <strong>de</strong> vous avertir<br />

quand M. Cuvinot, un <strong>de</strong> nos amis communs, viendra chez les FF. <strong>de</strong> S t <strong>Jean</strong> <strong>de</strong> Dieu pour<br />

sa santé, à Paris, afin que jʹaille le visiter.<br />

Je vous autorise, si vous le trouvez à propos, à ne pas remettre le mot ci‐joint à MM.<br />

Emile et Charrin; il me semble toutefois quʹil ne peut que leur faire du bien.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1413 à MM. Beauvais et Charrin<br />

A propos dʹune mésentente. Exhortation à la pratique <strong>de</strong> la charité fraternelle.<br />

Chaville, 1er juin 1869<br />

Mes bien chers enfants en N.S.,<br />

M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet]; en me rendant compte dʹune contrariété que M. Char‐<br />

rin a eue <strong>avec</strong> un zouave, est obligé <strong>de</strong> mʹavouer quʹen suite <strong>de</strong> cet inci<strong>de</strong>nt, un peu <strong>de</strong> mal<br />

entente sʹest renouvelée entre vous; jʹai pu le comprendre au moins par un détail contenu<br />

dans sa lettre. Vous mʹaviez pourtant promis, ainsi quʹà M. <strong>de</strong> Varax, que ces différends ne<br />

se renouvelleraient point. Je vous conjure <strong>de</strong> nouveau <strong>de</strong> vivre dans la charité et dans la<br />

1370


paix du Seigneur; autrement, vous perdrez tout le mérite <strong>de</strong> vos travaux et <strong>de</strong> vos sacrifi‐<br />

ces, vous vous déconsidérerez et la Communauté <strong>avec</strong> vous; enfin, vous causerez un dé‐<br />

triment notable aux œuvres que vous voulez servir.<br />

Je vous ai <strong>de</strong>mandé formellement, en cas <strong>de</strong> dissentiment, <strong>de</strong> soumettre les choses à<br />

M. <strong>Jean</strong>‐Marie et <strong>de</strong> vous en rapporter à sa décision. On est mauvais juge dans sa propre<br />

cause, on se passionne et lʹon croit <strong>avec</strong> entêtement avoir raison. Un tiers désintéressé peut<br />

mieux voir et mieux juger; M. <strong>Jean</strong>‐Marie aura dʹailleurs lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> Dieu, puisquʹil me repré‐<br />

sente près <strong>de</strong> vous. Encore une fois, mes chers enfants, vivez en frères, en vrais serviteurs<br />

<strong>de</strong> Dieu; sans cela, point <strong>de</strong> paix et pas <strong>de</strong> secours divin, car Dieu nʹest pas là où la charité<br />

est absente. Jʹespère que ces <strong>de</strong>ux mots dʹun ami, dʹun Père qui vous aime tendrement vont<br />

suffire et que vous veillerez attentivement à gar<strong>de</strong>r un parfait accord entre vous.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong>.<br />

1414 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Sollicitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> père. Scrupule dʹartiste. Soins dʹadministration.<br />

Chaville, 2 juin 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Vous êtes dʹordinaire si exact à répondre à mes lettres que je mʹinquiète aisément<br />

dès que votre correspondance <strong>avec</strong> moi offre le moindre retard. Je vous ai écrit jeudi ou<br />

vendredi <strong>de</strong>rnier, peut‐être avant, pour vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r lʹadresse <strong>de</strong> NN.SS. Svegliati, <strong>de</strong><br />

Luca et Termoz; vous ne me lʹavez pas envoyée; il nʹy a guère lieu <strong>de</strong> sʹen étonner, car<br />

vous avez bien <strong>de</strong>s choses à reprendre et à suivre après une si longue absence. Mais je suis<br />

frappé <strong>de</strong> cette pensée que peut‐être le changement subit <strong>de</strong> climat vous aura, comme à<br />

moi, causé quelque malaise plus ou moins incommo<strong>de</strong>; cʹest ce qui me pousse à vous<br />

écrire ici <strong>de</strong> nouveau; lʹadresse <strong>de</strong>mandée ne pressait pas tellement que je ne pusse lʹatten‐<br />

dre, dʹautant que je suis un peu confus dʹoffrir, dans un pays où les choses dʹart sont<br />

communes, <strong>de</strong>s objets <strong>de</strong> mince valeur.<br />

Commencez‐vous à voir clair dans vos installations? MM. Gérold et Ginet voient‐ils<br />

sans trop <strong>de</strong> peine que leur venue ou retour ici soient un peu différés? M. Trousseau a‐t‐il<br />

en perspective le moment où il pourra être ordonné?<br />

Jʹai reçu <strong>de</strong> Mgr dʹAmiens [Mgr Boudinet], en réponse à lʹannonce <strong>de</strong> notre approba‐<br />

tion, une excellente et bien aimable lettre; offrez‐lui nos remerciements quand vous le verrez.<br />

Je crois que vous <strong>de</strong>vriez faire copier par M. Ginet (à qui ce serait un exercice <strong>de</strong> la‐<br />

tinité) les formules diverses que vous avez réunies pour les correspondances <strong>avec</strong> Rome;<br />

vous pourriez alors gar<strong>de</strong>r pour vous ou lʹoriginal, ou cette copie, et me renvoyer lʹun <strong>de</strong>s<br />

<strong>de</strong>ux <strong>avec</strong> les autres documents concernant nos gestes à Rome; il est bien que je gar<strong>de</strong> ici<br />

les pièces qui <strong>de</strong>vront nous servir en temps utile.<br />

Nos ff. <strong>de</strong> Rome ont été indisposés ensemble ou tour à tour, M. Jouin plus que les<br />

autres; ils commencent à se remettre; un jeune séminariste, le jeune Rabusier, ancien pro‐<br />

tégé à St ‐Charles <strong>de</strong> M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet], va le rejoindre comme postulant <strong>de</strong> notre<br />

Congrégation; le Comité lʹaccepte ainsi; jʹespère quʹil pourra ai<strong>de</strong>r utilement nos ff., M.<br />

<strong>Jean</strong>‐Marie paraît faire fonds sur lui.<br />

1371


Nous allons ici comme <strong>de</strong> coutume; M. Xavier [Walter] traîne lʹaile, le surnaturel<br />

semble être insuffisant et nous nʹavons pas su lʹobtenir pour lui; nous ne prions sans doute<br />

pas assez; daigne le Seigneur nous inspirer les moyens dʹattirer en nous cet esprit <strong>de</strong><br />

prière!<br />

Le Commandant Cirlot reste encore bien mala<strong>de</strong>, il faut se souvenir <strong>de</strong> lui <strong>de</strong>vant<br />

Dieu.<br />

Adieu, mon bien cher ami et fils, je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> instamment au Cœur Sacré <strong>de</strong> Jésus <strong>de</strong><br />

mettre en toutes vos âmes et en tous vos actes sa divine charité, afin que vous viviez dans<br />

une aimable et sainte union.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. M. Fonlupt va mieux, mais il nʹest pas entièrement remis; le soleil, qui se mon‐<br />

tre enfin, va le réconforter.<br />

1415 à M. Tourniquet<br />

Envoi dʹun postulant à Rome. Vie <strong>de</strong> la communauté <strong>de</strong> Rome.<br />

Nazareth, 7 juin 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie le jeune Rabusier, ainsi que je vous lʹavais annoncé. Le Comité a bien<br />

voulu lʹadmettre comme postulant <strong>de</strong> notre Communauté, <strong>de</strong> sorte quʹil pourra vous ai<strong>de</strong>r<br />

plus librement, nʹayant aucun engagement militaire qui lui impose <strong>de</strong>s services. Il me<br />

paraît être bien disposé; il conviendra quʹil se regar<strong>de</strong> comme lié pour <strong>de</strong>ux ans à lʹégard<br />

du Comité qui lui a donné une marque <strong>de</strong> confiance en sʹen rapportant à sa parole.<br />

Le Comité, assemblé samedi <strong>de</strong>rnier pour examiner la question <strong>de</strong> changement <strong>de</strong><br />

local du Cercle <strong>de</strong>s Zouaves, nʹa pas cru <strong>de</strong>voir prendre <strong>de</strong> décision sans avoir lʹavis <strong>de</strong> M.<br />

Descemet; on lui a envoyé un télégramme, aujourdʹhui lundi, on nʹavait pas encore sa ré‐<br />

ponse; je doute quʹelle soit favorable à la proposition.<br />

Le jeune Rabusier vous porte les livres, Saint Vincent et le Catéchisme du Concile <strong>de</strong><br />

Trente; M. Paillé me dit quʹil a acheté ce <strong>de</strong>rnier non neuf, mais <strong>de</strong> bonne édition.<br />

M. Girodon doit quitter St ‐Charles au mois <strong>de</strong> septembre, plus tôt peut‐être, pour<br />

fon<strong>de</strong>r, Chaussée dʹAntin, une maison <strong>de</strong> sa Communauté. Cʹest une bien gran<strong>de</strong> perte<br />

pour cette œuvre, nous ne savons encore comment on la comblera.<br />

Je vous ai écrit plusieurs lettres, accusez‐mʹen réception, car on ne sait, à cause <strong>de</strong>s<br />

délais, si les lettres arrivent à leur <strong>de</strong>stination.<br />

Nous allons comme <strong>de</strong> coutume; jʹespère que vos santés se soutiennent.<br />

M. Emile [Beauvais], en voyant, lors <strong>de</strong> son passage <strong>avec</strong> moi à Civit<strong>avec</strong>chia, com‐<br />

bien lʹair <strong>de</strong> la mer était rafraîchissant, avait pensé que ce lieu pourrait vous convenir pour<br />

vous remettre quelquefois, et à tour <strong>de</strong> rôle, au temps <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s chaleurs; mais <strong>de</strong>puis,<br />

<strong>de</strong>s militaires ayant séjourné là mʹont dit quʹen été ce séjour était absolument insalubre et<br />

ne convenait nullement; il ne restera donc que le voisinage <strong>de</strong>s montagnes.<br />

Adieu, mon bien cher ami, je laisse ma plume à M. Hello; jʹespère quʹil va vous par‐<br />

ler un peu du Bon Dieu dont je ne vous dis pas un mot; nos fêtes se sont bien passées à la<br />

1372


Communauté et dans nos œuvres. Assurez nos ff. <strong>de</strong> mes constants souvenirs et partagez<br />

<strong>avec</strong> eux ma bien tendre affection.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Bien cher f. <strong>Jean</strong>‐Marie,<br />

Voici une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pour renouveler mes pouvoirs dʹindulgence, <strong>avec</strong> 7f.50 pour les frais; si<br />

cela ne suffisait pas, veuillez les avancer et me le dire pour que je vous restitue.<br />

Je tâcherai <strong>de</strong> vous rendre à Paris les petits services que je pourrai; je serai ici votre corres‐<br />

pondant, et vous serez le mien à Rome.<br />

Vous parlerai‐je patronage? Vous êtes bien au‐<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> cela maintenant. Cependant, je<br />

vous dirai quʹen mai, à Nazareth, il y a eu environ 470 confessions, et je pense au moins autant <strong>de</strong><br />

communions.<br />

Cher f. Jouin,<br />

Vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z mon ornement blanc. Il y a longtemps quʹil est parti et quʹil est au fond<br />

<strong>de</strong> la mer, car, suivant toute apparence, il était sur le navire qui a sombré.<br />

Je pense à vous tous les jours. Priez pour les projets <strong>de</strong> M. Vrignault. Cʹest bien beau ce quʹil<br />

médite. Vivent les Croisés <strong>de</strong> S t Pierre!<br />

Je vous embrasse tous quatre <strong>de</strong> tout cœur.<br />

Votre frère en N.S. Hello<br />

Je joins, comme M. Hello, une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> pouvoirs et jʹajoute 7f.50. 421<br />

1416 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Exhortation àe la patience et au support <strong>de</strong>s difficultés inhérentes aux fondations. Faire <strong>de</strong> son mieux et le Sei‐<br />

gneur fera le reste. Sauvegar<strong>de</strong>r surtout la charité. Sollicitu<strong>de</strong> pour la santé <strong>de</strong>s frères. Nouvelles <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong><br />

Rome.<br />

Chaville, 9 juin 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je reconnais une fois <strong>de</strong> plus, par le contenu <strong>de</strong> votre <strong>de</strong>rnière lettre, quʹil plaît au<br />

Seigneur <strong>de</strong> nous éprouver dans nos œuvres par les difficultés sans nombre que nous y<br />

rencontrons; mais rien <strong>de</strong> soli<strong>de</strong> et <strong>de</strong> valable ne sʹopère quʹ<strong>avec</strong> force labeur et peine; la<br />

terre, labourée et semée, ne porte <strong>de</strong>s fruits que par la patience, et ceux‐là seuls se sauvent<br />

qui persévèrent jusquʹà la fin; ayons donc bonne confiance, marchons au jour le jour dans<br />

la paix, dans le travail et la charité, Dieu nous assistera et sa grâce comblera tous les vi<strong>de</strong>s<br />

<strong>de</strong> notre insuffisance.<br />

M. Fonlupt va <strong>de</strong> mieux en mieux; après que je lʹaurai vu <strong>de</strong>main à Vaugirard, je<br />

pourrai préparer son départ, je le pense, pour les premiers jours <strong>de</strong> la semaine. M. Audrin<br />

réunit les quelques vêtements <strong>de</strong> M. Ginet pour les lui envoyer par cette occasion, mais il<br />

ne paraît pas quʹil y en ait aucun qui puisse aller pour une tenue un peu soignée. Je pense<br />

que M. Caille, à raison <strong>de</strong>s bons services <strong>de</strong> M. Ginet, lui donnera volontiers un petit pale‐<br />

tot dʹétoffe dʹAmiens, lequel sera propre et convenable, bien que dʹun prix minime. Par M.<br />

Fonlupt aussi, nous vous enverrons une chape, je crois, déposée par un marchand à votre<br />

adresse à Nazareth.<br />

421 Ecriture au crayon <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong>.<br />

1373


M. Marcaire vient <strong>de</strong> mʹécrire une petite lettre bonne, filiale et soumise, comme sont<br />

toutes celles quʹil mʹécrit, mais par laquelle il exprime la crainte que son emploi à la rue <strong>de</strong><br />

Noyon <strong>de</strong>vant être plus fatigant que celui dont il est présentement chargé, le far<strong>de</strong>au ne<br />

soit trop lourd pour sa santé assez affaiblie <strong>de</strong>puis quelque temps. Je lʹinvite, dans ma ré‐<br />

ponse, à faire ces observations à M. Caille, afin que ce <strong>de</strong>rnier, ou avise à diminuer la tâche<br />

rue <strong>de</strong> Noyon, ou ne la donne pas à M. Marcaire, ou fasse prendre avant tout une quin‐<br />

zaine <strong>de</strong> jours <strong>de</strong> repos à ce cher frère, dès que lʹarrivée <strong>de</strong> M. Fonlupt rendra cette mesure<br />

plus praticable.<br />

M. Pattinote nʹest pas encore en état <strong>de</strong> porter un service soutenu, ni <strong>de</strong> se passer<br />

<strong>de</strong>s soins <strong>de</strong> lʹinfirmerie; nous verrons après quʹil sera remis sʹil peut recevoir quelque mis‐<br />

sion temporaire. Lʹintention <strong>de</strong> ces MM. <strong>de</strong> St‐Sulpice est que sa maladie ne retar<strong>de</strong> pas<br />

son avancement dans les ordres et quʹil subisse à cette fin, après les vacances, un examen<br />

qui lui permettra <strong>de</strong> reprendre <strong>avec</strong> les autres la suite <strong>de</strong>s cours.<br />

Je ne réponds ici que bien imparfaitement aux points énoncés dans votre <strong>de</strong>rnière<br />

lettre, mon bien cher enfant, mais il en est beaucoup auxquels il nʹy a dʹautre solution,<br />

quant à présent, que la prière et lʹattente confiante en la protection toujours si fidèle du<br />

Dieu que nous servons; faisons <strong>de</strong> notre petit mieux, comme me dit souvent notre vieux<br />

père Louis [Boursier], et le Seigneur fera le reste; sauvegardons surtout la charité, tâchons<br />

<strong>de</strong> lʹinspirer à ceux qui nous entourent en leur donnant lʹexemple du calme, du support<br />

patient; les choses prendront enfin une meilleure assiette et notre vertu méritera <strong>de</strong> plus<br />

gran<strong>de</strong>s assistances dʹEn haut.<br />

Je vais continuer à prier à cette intention, en même temps que jʹaurai les yeux atten‐<br />

tifs aux moindres jours qui se feraient, pour vous ai<strong>de</strong>r, <strong>de</strong> notre côté, autant quʹil dépen‐<br />

drait <strong>de</strong> nous.<br />

Les santés et les bonnes dispositions semblent se remettre à Rome; nous avons en‐<br />

voyé hier comme ai<strong>de</strong> à M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] le jeune Rabusier, Séminariste, son<br />

ancien protégé, qui suspend pour un an ou <strong>de</strong>ux ses étu<strong>de</strong>s et qui a <strong>de</strong>mandé à se rendre<br />

près <strong>de</strong> lui comme postulant <strong>de</strong> notre Communauté. Le Comité lʹa admis à ce titre.<br />

Le changement <strong>de</strong> local du Cercle <strong>de</strong>s Zouaves paraît souffrir <strong>de</strong>s difficultés; le<br />

Comité, sans rejeter le projet, a désiré, comme je lʹavais <strong>de</strong>mandé moi‐même, quʹon prît<br />

lʹavis <strong>de</strong> M. Descemet; je doute quʹil soit favorable; peut‐être, en effet, le Caffè Nuovo crée‐<br />

rait‐il encore plus <strong>de</strong> difficultés pour cette œuvre déjà épineuse.<br />

Adieu, mon bien cher enfant; je pense que M me <strong>de</strong> Varax est rentrée chez elle, jʹap‐<br />

prendrai <strong>avec</strong> plaisir que sa saison <strong>de</strong> bains a été favorable à sa santé. Offrez à M. Caille et<br />

à tous nos ff. mes bons souvenirs et partagez <strong>avec</strong> eux mes sentiments <strong>de</strong> tendre affection en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1417 à M. Caille<br />

Ménager la santé du frère Marcaire.<br />

Chaville, 9 juin 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Marcaire mʹécrit une petite lettre bonne et filiale, comme toujours, où il mʹexpose<br />

que sa santé étant en ce moment bien fatiguée, il a lieu <strong>de</strong> craindre que lʹemploi dont il se‐<br />

1374


a chargé rue <strong>de</strong> Noyon ne soit au‐<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> ses forces; il pense donc quʹil y aurait pru‐<br />

<strong>de</strong>nce à le maintenir à lʹOrphelinat. Je lʹinvite, par un mot <strong>de</strong> réponse, à vous communi‐<br />

quer à ce sujet ses observations. Vous verrez <strong>avec</strong> lui sʹil nʹest pas possible que ses fonc‐<br />

tions à la rue <strong>de</strong> Noyon soient mesurées à ses forces. Peut‐être aussi un repos dʹune quin‐<br />

zaine bien employée à se soigner ai<strong>de</strong>rait beaucoup à le remettre et à le fortifier. Lʹarrivée<br />

<strong>de</strong> M. Fonlupt, qui va partir vers le commencement <strong>de</strong> la semaine, permettrait peut‐être à<br />

M. Trousseau dʹaller à lʹOrphelinat, afin que le vi<strong>de</strong> fût rempli et que lʹœuvre ne soit pas<br />

en souffrance. Voyez, mon bon ami, ce qui est possible; votre affection pour M. Marcaire<br />

me dispense dʹinsister, car je sais dʹavance que vous aurez à cœur, comme toujours, <strong>de</strong><br />

ménager un instrument si dévoué à vos œuvres et à vous.<br />

Adieu, mon bien bon ami, croyez à mes sentiments <strong>de</strong> tendre affection en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1418 <strong>de</strong> M. Planchat à M. dʹArbois<br />

P.S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Retour du frère Cauroy à Paris. Ordo romain et fête <strong>de</strong> St Vincent <strong>de</strong> Paul. Les santés.<br />

Vaugirard, 11 juin 1869<br />

11e jour du mois du Sacré Cœur<br />

Mon bien cher frère,<br />

Le P. Supérieur, <strong>de</strong>puis mon retour dʹAngers, se propose chaque jour <strong>de</strong> vous écrire au su‐<br />

jet <strong>de</strong> notre bon Cauroy; toujours dépassé par sa correspondance, il me charge <strong>de</strong> vous entretenir à<br />

ce sujet.<br />

Le f.Cauroy souffrant, à cause <strong>de</strong> sa forte santé, du régime complètement interne, la pensée<br />

du P. Supérieur serait <strong>de</strong> lui faire suivre, lʹan prochain, les cours du séminaire <strong>de</strong> Versailles. En<br />

présence <strong>de</strong> ce projet qui mêlerait à ses étu<strong>de</strong>s lʹexercice <strong>de</strong>s allées et venues <strong>de</strong> Chaville à Versail‐<br />

les, à quel moment vous paraîtrait‐il plus opportun <strong>de</strong> faire revenir le f. Cauroy? Si la fin dʹannée<br />

lui prépare un nouveau sujet <strong>de</strong> découragement, il serait peut‐être mieux <strong>de</strong> le rappeler <strong>de</strong> suite.<br />

Si, au contraire, il mord à la théologie, mieux vaudrait, sans doute, ne pas rompre le petit élan si<br />

péniblement obtenu.<br />

Réfléchissez, cher frère, ren<strong>de</strong>z‐vous compte <strong>de</strong> votre impression personnelle, consultez<br />

surtout ses Supérieurs si bons, et pour lui et pour la Communauté. Si ces Messieurs opinaient pour<br />

le retour avant la fin <strong>de</strong> lʹannée, il serait bien, pense notre p. Supérieur, <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à M. le Pro‐<br />

fesseur <strong>de</strong> Philosophie lʹemploi le plus utile pour le f. Cauroy <strong>de</strong>s quelques mois qui lui restent<br />

dʹici à lʹouverture <strong>de</strong>s cours 1869‐70 à Versailles. Serait‐ce la revue <strong>de</strong> la partie théologique <strong>de</strong> son<br />

cours <strong>de</strong> cette année, dans le but <strong>de</strong> le préparer à abor<strong>de</strong>r <strong>avec</strong> un certain avantage une première<br />

année <strong>de</strong> théologie à Versailles? Serait‐ce lʹétu<strong>de</strong> <strong>de</strong> quelque ouvrage dʹensemble sur la philoso‐<br />

phie, comme base soli<strong>de</strong> dʹun cours <strong>de</strong> théologie proprement dite? Serait‐ce enfin un complément<br />

dʹétu<strong>de</strong>s et <strong>de</strong> lectures, dʹexercices <strong>de</strong> mémoire pour compléter lʹinstruction du f. Cauroy au point<br />

<strong>de</strong> vue <strong>de</strong> lʹintelligence du latin et <strong>de</strong> la facilité à retenir les textes et définitions nécessaires?<br />

Notre p. Supérieur vous sera reconnaissant <strong>de</strong> vouloir bien lui communiquer, dʹici à peu <strong>de</strong><br />

jours, les avis et réponses.<br />

Tout à vous dans les Sacrés Cœurs. Je pense que tous nos chers enfants <strong>de</strong> la retraite <strong>de</strong> la<br />

Maîtrise auront honoré ces Cœurs sacrés par une bonne communion, que du moins ils se disposent<br />

à le faire avant la fin du mois. Vous aurez eu, jʹen suis sûr, une procession et une fête du Sacré‐<br />

Cœur splendi<strong>de</strong>s à N.D.<strong>de</strong>s Champs.<br />

1375


Tout à vous donc et à tous nos ff. dʹAngers.<br />

Votre frère<br />

lʹabbé Planchat<br />

N. B. Jʹai pensé chaque jour au St Autel à ces bons petits enfants <strong>de</strong> la Maîtrise dʹAngers et<br />

réclame leurs prières pour Ste Anne et pour moi‐même.<br />

Mon bien cher ami,<br />

Je nʹai rien à ajouter à ce que vous dit très exactement M. Planchat concernant notre<br />

jeune Cauroy.<br />

Nous espérons vous voir bientôt; nous désirerions que votre séjour parmi nous fût<br />

arrangé <strong>de</strong> manière que vous puissiez assister à la fête <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul, le 19 juillet.<br />

Probablement alors seriez‐vous chargé <strong>de</strong> chanter la grandʹmesse, parce que notre ordo<br />

romain rejetant la fête au 24, aucun <strong>de</strong> nous ici ne pourrait chanter la messe <strong>de</strong> S t Vincent<br />

<strong>de</strong> Paul le 19 422 .<br />

M. Boiry semble aller un peu mieux; il gar<strong>de</strong> sa gaieté et ne paraît avoir aucune in‐<br />

quiétu<strong>de</strong> sur sa santé. Le mé<strong>de</strong>cin <strong>de</strong> Paris a jugé sa maladie comme celui dʹAngers, en<br />

prescrivant toutefois un régime différent. M. Tulasne (à Chaville) me dit que ce mal nʹest<br />

pas inguérissable.<br />

Assurez tous nos ff. <strong>de</strong> mes sentiments affectueux et dévoués, et prenez‐en vous<br />

même une part bien et très large.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1419 à M. dʹArbois<br />

Renouvellement <strong>de</strong> permissions. Défiance vis‐à‐vis dʹune association. Témoignage rendu aux qualités <strong>de</strong> M.<br />

dʹArbois: ʺil ne mʹest venu <strong>de</strong> votre part que joie et consolationʺ.<br />

Vaugirard, 12 juin 1869<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Bien que je vous aie écrit hier quelques lignes au bas <strong>de</strong> la lettre faite, sur ma <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>, par M. Planchat, je vous envoie ces quelques mots, ayant à cœur dʹacquitter mon<br />

arriéré, puisquʹil paraît que jʹai laissé <strong>de</strong>ux lettres <strong>de</strong> vous sans réponse. Pardonnez‐moi<br />

cette négligence qui ne vient dʹaucune volonté <strong>de</strong> ma part, mais <strong>de</strong> mes continuelles allées<br />

et venues entre Vaugirard, Chaville, Nazareth et parfois ailleurs encore.<br />

Pour les permissions, en règle générale, celles que vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z sont si rai‐<br />

sonnables quʹen cas <strong>de</strong> retard, vous pouvez présumer quʹelles sont accordées. Celle pour la<br />

nourriture est admise, puisquʹelle semble en effet utile; pour la permission <strong>de</strong> vous reposer<br />

auprès <strong>de</strong> nous, vous saviez dʹavance que cʹétait préparer une joie à tous ici et à moi tout<br />

particulièrement; la lettre dʹhier a déjà répondu sur ce point.<br />

Pour les relations <strong>avec</strong> M. Bareswille et son association, nous en attendons peu <strong>de</strong><br />

résultats; mais en certains lieux on peut, comme à Amiens, avoir <strong>de</strong>s raisons dʹy attacher<br />

quelque importance; je ne vois pas dʹinconvénient à ce que chacun règle à cet égard ses ac‐<br />

tes selon sa convenance et les besoins que les circonstances locales peuvent lui créer.<br />

422 Le diocèse <strong>de</strong> Paris n’étant pas encore revenu à la liturgie romaine, les prêtres <strong>de</strong> l’Institut obtenaient individuellement du Saint-<br />

Siège la permission <strong>de</strong> dire l’office selon le rite romain en suivant le propre <strong>de</strong> Rome; la fête <strong>de</strong> saint Vincent <strong>de</strong> Paul pouvait ainsi<br />

être remise et elle l’était en 1869. En cette même année, M. d’Arbois n’avait pas encore pris l’ordo <strong>de</strong> Rome.<br />

1376


Nʹayez jamais dans lʹesprit, mon bien cher et très cher enfant, que vous puissiez me<br />

contrarier en rien; <strong>de</strong>puis que le bon Seigneur, dans sa charité, mʹa rapproché <strong>de</strong> vous, il<br />

ne mʹest venu jamais <strong>de</strong> votre part que joie et consolation; soyez bien en paix, ayez bonne<br />

santé et contentement en toutes choses, afin que mon affection pour vous nʹait rien à souf‐<br />

frir <strong>de</strong> votre fait; ce serait seulement <strong>de</strong> votre souffrance que je pourrais pâtir à votre en‐<br />

droit.<br />

Mille affections à vous et à nos ff. A bientôt. Dites‐nous quand vous arriverez.<br />

Votre ami et Père dévoué en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1420 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Manque <strong>de</strong> personnel; le Noviciat se vi<strong>de</strong>. Agir <strong>de</strong> concert: cʹest à ce prix que ʺle bien se fera pour vous et pour<br />

les Œuvresʺ.<br />

Chaville, 14 juin 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie notre jeune Fonlupt, à peu près remis en santé, sans être encore bien<br />

fort; vous aurez, dans les premiers moments, un peu <strong>de</strong> ménagement pour lui. Je crois que<br />

vous serez content <strong>de</strong> ses services; il a un cœur droit, le sentiment du <strong>de</strong>voir, lʹamour <strong>de</strong> la<br />

régularité et une gran<strong>de</strong> docilité; cʹest beaucoup, cʹest, <strong>avec</strong> la piété, ce quʹon <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />

pour faire un vrai religieux; puisse‐t‐il, sous votre conduite, confirmer et accroître ces bon‐<br />

nes dispositions. Le Noviciat, comme je vous lʹai dit, perd dʹun seul coup lʹapparence<br />

dʹaugmentation quʹil avait prise; le jeune Fournet, venu <strong>de</strong> Vaugirard, a dû se retirer par<br />

insuffisance physique, morale et spirituelle; bon enfant dʹailleurs, mais pas du bois dont se<br />

taille un bon religieux; ainsi, en dʹautres conditions, <strong>de</strong> MM. Xavier [Walter] et Miotte, par‐<br />

tis aujourdʹhui lʹun et lʹautre; le jeune Fonlupt envoyé à Amiens, vous voyez que le Novi‐<br />

ciat reste bien mo<strong>de</strong>ste.<br />

Une pensée, point mûrie encore, me tenait à lʹesprit: vous envoyer dans une quin‐<br />

zaine, ou après la fête <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul, jusquʹà la fin <strong>de</strong> septembre, MM. Pattinote et<br />

Boiry ensemble, parce quʹisolés ils auraient quelque ennui peut‐être et quʹils se soutien‐<br />

draient lʹun lʹautre étant réunis; ils vous ai<strong>de</strong>raient lʹun et lʹautre, ayant le goût, lʹintelli‐<br />

gence <strong>de</strong>s œuvres et étant alors assez remis pour y participer sans trop <strong>de</strong> fatigue. Tous les<br />

<strong>de</strong>ux auraient besoin dʹun peu dʹétu<strong>de</strong>, mais ils la trouveraient, ce me semble, sans diffi‐<br />

culté. Pour alléger la charge <strong>de</strong> la maison dʹAmiens, je paierais pour eux une petite pen‐<br />

sion, à raison <strong>de</strong> 300f pour chacun, leurs services servant <strong>de</strong> compensation pour le reste<br />

(vêtements restant à ma charge.) Je ne sais quelles objections rencontrera, ici ou ailleurs, ce<br />

projet tout à fait inédit (hors <strong>de</strong> mon cerveau); je le risque, sauf à lʹeffacer sʹil est mal conçu.<br />

Lʹaffaire <strong>de</strong> Ragatz est curieuse, mais tout sera bien; le propriétaire a sa montre, M me<br />

<strong>de</strong> Varax, le contentement du service quʹelle lui a rendu; jʹespère que lʹhomme aura au<br />

moins donné les 5f aux pauvres, après tout, mieux vaut cela que rien.<br />

Jʹai la honte <strong>de</strong> nʹavoir pas encore fait lʹenvoi <strong>de</strong>s trois S t ‐Vincent à Rome; je mʹy<br />

mets aujourdʹhui, je ferai corriger mon grimoire latin par M. Planchat. Je suis toujours sur<br />

les chemins, ce qui avance peu les correspondances.<br />

Dites <strong>de</strong> temps en temps un mot à chacun <strong>de</strong> nos ff. <strong>de</strong> notre part; il est littérale‐<br />

ment vrai que nous les avons toujours présents à lʹesprit; communiquez cette lettre à M.<br />

1377


Caille et, en général, faites tout ensemble et <strong>de</strong> concert; cʹest à cette condition que le bien se<br />

fera pour vous et pour les œuvres.<br />

Ci‐joint une lettre pour M. Ginet; on le regrette toujours à Chaville.<br />

Votre ami et Père affectionné en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹattends un jeune postulant latiniste qui mʹest envoyé par <strong>de</strong>ux ecclésiastiques <strong>de</strong><br />

Paris, les choses ne sont pas pourtant pleinement décidées; il me paraît bien, jʹai besoin <strong>de</strong><br />

le revoir.<br />

Notre fête <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul se fera, je pense, le 19; elle est, en notre ordo, trop<br />

romain, rejetée au 24 (samedi); mais, à la condition <strong>de</strong> faire chanter la grandʹmesse par M.<br />

dʹArbois, qui sera ici à ce moment, ou par un prêtre moins romain que nous, nous tourne‐<br />

rons la difficulté.<br />

1421 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Remerciements aux membres <strong>de</strong> la S. Congrégation. Bustes <strong>de</strong> saint Vincent à offrir.<br />

Chaville, 15 juin 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je mʹaperçois, en faisant mes lettres pour MM. <strong>de</strong> la Sacrée Congrégation, que je<br />

vais presque inévitablement répéter presque la même chose aux quatre personnes aux‐<br />

quelles il faut écrire. Je dis quatre, car je suppose quʹil faut écrire aussi à S. Em. le Cardinal<br />

Quaglia; je pense donc que, pour avoir un peu <strong>de</strong> diversité, il serait bien que vous fissiez<br />

<strong>de</strong>ux lettres sur les quatre et que vous me les envoyiez; si vous pensiez quʹil ne fût pas né‐<br />

cessaire dʹen écrire au Cardinal, écrivez seulement pour Mgr <strong>de</strong> Luca; je viens <strong>de</strong> faire la<br />

lettre pour Mgr Svegliati et je fais celle pour Mgr Termoz; chargez‐vous <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux autres. Si<br />

on fait quatre lettres, il faut donc envoyer quatre St ‐Vincent. Ce sera presque grotesque; ce‐<br />

la me rappelle cette famille anglaise dont tous les membres sʹétant fait peindre étaient tous<br />

représentés tenant une orange à la main. Si vous pensiez quʹon pût ne pas écrire au Cardi‐<br />

nal, ce serait plus simple; je penserais au moins quʹil serait plus digne <strong>de</strong> ne pas lui en‐<br />

voyer le St ‐Vincent, assez mince présent pour un si haut personnage.<br />

Votre ami dévoué et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1422 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Réconfort dans lʹépreuve. Esprit <strong>de</strong> foi.<br />

Chaville, 19 juin 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> lʹenvoi <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux projets <strong>de</strong> lettre423 ; ils sont bien, je vais en faire<br />

usage.<br />

M. Ginet me <strong>de</strong>man<strong>de</strong> une lettre <strong>de</strong> sa tante; je crois être bien assuré <strong>de</strong> lʹavoir mise,<br />

soit dans la missive confiée à M. Fonlupt, soit dans une autre que je vous ai adressée direc‐<br />

tement.<br />

423 Le brouillon est au dos <strong>de</strong> la lettre du 15 juin <strong>de</strong> MLP. à M. <strong>de</strong> Varax.<br />

1378


La Maison‐Mère, écrasée par <strong>de</strong>s charges <strong>de</strong> toutes sortes, ne peut fournir dʹautres<br />

habits à M. Fonlupt; prenez, je vous prie, 50f sur les 100f dont on nous a fait lʹenvoi pour<br />

lʹŒuvre <strong>de</strong>s Clercs, et achetez‐lui ce qui vous paraîtra le plus nécessaire.<br />

Jʹai, comme vous, le bonne espérance que lʹépreuve dont vous souffrez sera passa‐<br />

gère et fera place à un état meilleur; le passé mʹest un sûr garant quʹil en sortira un bien dé‐<br />

finitif qui nous donnera lieu dʹadmirer la sagesse et la bonté <strong>de</strong> Dieu; je nʹai pas souvenir<br />

quʹaucune grâce insigne nous soit venue sans quʹelle ait été précédée <strong>de</strong> quelques brise‐<br />

ments et humiliations; tâchons <strong>de</strong> <strong>de</strong>meurer dans une attente patiente et courageuse; nous<br />

plaindre nʹest pas défendu, mais en revenant toujours à cette conclusion: Quʹil soit fait,<br />

non comme je veux, mais comme vous voulez.<br />

Adieu, mon bien cher enfant; nos orphelins <strong>de</strong> Vaugirard font jeudi, 24, leur pre‐<br />

mière communion; ils y seront préparés par M. Girodon; jʹai lʹespérance que leur prière at‐<br />

tirera sur nous une rosée venant du Ciel.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1423 à M. Trousseau<br />

A lʹoccasion <strong>de</strong> sa prochaine ordination sacerdotale, belle exhortation <strong>de</strong> MLP. à la patience et à la confiance en<br />

Dieu. ʺA chaque jour suffit sa peine, parce quʹà chaque jour arrive sa grâceʺ.<br />

Chaville, 19 juin 1869<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je vois approcher <strong>avec</strong> consolation le moment où les longues épreuves qui vous ont<br />

préparé au sacerdoce arriveront à leur fin; soyez persuadé, cher ami, que quand cette<br />

heure aura sonné et que vous serez enfin Sacerdos in aeternum, toutes vos peines vous sem‐<br />

bleront légères, tant la grâce obtenue vous paraîtra <strong>de</strong> haut prix. Demeurez donc dans la<br />

patience jusquʹau bout, persua<strong>de</strong>z‐vous que cʹest par ces délais et difficultés que vous au‐<br />

rez acquis les bénédictions dont Dieu se réserve <strong>de</strong> gratifier votre carrière; pensez aussi<br />

que la nature, assez accentuée en vous, <strong>de</strong>mandait un travail <strong>de</strong> martèlement et <strong>de</strong> ré‐<br />

forme. Dieu sʹen est chargé, pourrions‐nous nous plaindre <strong>de</strong> lʹavoir eu pour maître? Espé‐<br />

rons plutôt quʹayant été dociles à ses leçons, nous aurons appris ces <strong>de</strong>ux gran<strong>de</strong>s sciences<br />

quʹIl enseigne à ceux qui sont ses disciples: la patience, lʹacceptation soumise et toute fi‐<br />

liale <strong>de</strong> la souffrance qui tombe comme un don <strong>de</strong> sa main, et, en second lieu, la miséri‐<br />

cor<strong>de</strong>, la compassion vraie pour les peines <strong>de</strong> nos ff.; on ne lʹa jamais que si lʹon a soi‐<br />

même souffert. Oh! que vous serez heureusement doué et que votre ministère sera conso‐<br />

lant et fructueux si vous avez cette double grâce: la patience et la miséricor<strong>de</strong>. On nʹest pas<br />

un bon prêtre quand on nʹa pas à un <strong>de</strong>gré un peu haut ce trésor au fond <strong>de</strong> lʹâme. Aussi,<br />

vous ne voyez pas quʹaucun <strong>de</strong> ceux que Dieu a choisis pour quelque œuvre <strong>de</strong> salut ait<br />

jamais échappé à cette ru<strong>de</strong> préparation. Laissons‐nous donc faire. Dieu nous aime et,<br />

puisquʹIl veut se charger <strong>de</strong> nous conduire à ses fins, baisons cette main paternelle qui<br />

nous gui<strong>de</strong>.<br />

Ne pensons pas trop non plus à lʹavenir; à chaque jour suffit sa peine, parce quʹà<br />

chaque jour arrive sa grâce. Levons les yeux en haut, Levavi oculos in montes un<strong>de</strong> veniet<br />

auxilium mihi; plus nous aurons <strong>de</strong> confiance, dʹabandon, <strong>de</strong> paix en Dieu, plus grand sera<br />

le secours, plus intime et plus douce sera la consolation.<br />

1379


Je nʹajoute rien <strong>de</strong> précis sur les œuvres que vous pourrez avoir à faire, sinon que<br />

jʹaurai lʹattention <strong>de</strong> suivre vos mouvements et que je ferai cordialement tout ce qui me se‐<br />

ra possible pour vous ai<strong>de</strong>r par mes prières et par les moyens que le Seigneur daignera me<br />

donner.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, je vous embrasse cordialement en J. et M.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

1424 à M. dʹArbois<br />

Observations sur un projet <strong>de</strong> règlement <strong>de</strong> lʹŒuvre dʹAngers.<br />

Vaugirard, 25 juin 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous renvoie ci‐joint votre projet <strong>de</strong> règlement pour la section <strong>de</strong>s membres les<br />

plus âgés <strong>de</strong> votre Patronage. Je lʹai lu attentivement et je lʹai revu encore <strong>avec</strong> M. Mai‐<br />

gnen; nous y avons fait <strong>de</strong> concert quelques notes, au crayon seulement, pour que vous<br />

puissiez les effacer. Plusieurs <strong>de</strong> ces notes me semblent assez importantes. Celle qui re‐<br />

gar<strong>de</strong> le dépôt <strong>de</strong> la caisse ou trésor pourrait choquer vos jeunes gens; peut‐être serait‐il<br />

bien <strong>de</strong> prier un <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> la Commission Supérieure du Patronage <strong>de</strong> prendre<br />

provisoirement, et en transition, la fonction <strong>de</strong> Trésorier qui, en définitive, reviendrait à<br />

lʹun <strong>de</strong> vos frères; nous avons vu quʹinévitablement le dépôt <strong>de</strong> lʹargent était une pierre<br />

dʹachoppement pour ceux à qui il échoit; on pourra, du premier coup, trouver un homme<br />

dʹélite offrant toute garantie, le second, après lui, ne sera pas assez fort pour la tâche.<br />

Je crains aussi que vos grands jeunes gens, constitués en œuvre spéciale et propre,<br />

négligent les autres sections et ne vous secon<strong>de</strong>nt plus; si leur ai<strong>de</strong> vous est utile, peut‐être<br />

vous fera‐t‐il défaut. Enfin, ou ces jeunes gens se constitueront presque en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> vous,<br />

ou, si vous êtes obligé <strong>de</strong> diriger et <strong>de</strong> suivre leurs mouvements, ce vous sera un far<strong>de</strong>au<br />

<strong>de</strong> plus.<br />

Peut‐être toutes ces craintes sont exagérées; M. Maignen les partage un peu <strong>avec</strong> moi.<br />

Adieu, mon bien cher ami et fils en N.S., nous nous réjouissons à la pensée que vous<br />

vous réunirez bientôt à nous pour un peu <strong>de</strong> temps; jʹespère quʹen votre absence M. Gauf‐<br />

friau sera pru<strong>de</strong>nt. Assurez nos ff. <strong>de</strong> notre cordiale affection.<br />

Nous laisserons M. Cauroy suivre ses cours jusquʹau bout; il est faible, sans doute,<br />

en ses étu<strong>de</strong>s, mais son sens est droit; il a lʹesprit peu prompt, nous ne désespérons pas<br />

toutefois <strong>de</strong> son avenir.<br />

Notre première communion hier sʹest heureusement accomplie; nous en rendons<br />

grâces à Dieu et à Marie.<br />

Votre affectionné ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1425 à M. dʹArbois<br />

Mouvement <strong>de</strong> personnel; délicatesse coutumière <strong>de</strong> MLP.<br />

Vaugirard, 3 juillet 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous vous attendons pour mercredi 7, comme vous me lʹavez annoncé. Je pense<br />

que vous serez accompagné par M. Cauroy, bien que votre lettre ne le dise point. Je pen‐<br />

1380


sais un peu à lʹenvoyer pour quelques semaines, <strong>de</strong>ux ou trois, un mois peut‐être, pour<br />

donner une ai<strong>de</strong> momentanée à la maison dʹAmiens, au moment où lʹétablissement défini‐<br />

tif <strong>de</strong> lʹorphelinat dans la maison rue S t ‐Jacques rend les services plus compliqués, jusquʹà<br />

ce que les ff. chargés <strong>de</strong> ces œuvres soient façonnés à leur tâche; cʹest un moment <strong>de</strong> transi‐<br />

tion, le service <strong>de</strong>mandé à M. Cauroy serait presque nul: 2 heures par jour, une heure au<br />

milieu du jour, une autre le soir.<br />

Ce petit voyage ne lui serait, je crois, quʹagréable; peut‐être avez‐vous compté sur<br />

lui pour quelque service à Angers en votre absence; sʹil en était ainsi et si vous ne voyez<br />

pas moyen dʹy pourvoir autrement, écrivez‐le moi <strong>de</strong> suite, je vous prie, afin que je voie si<br />

moi‐même je puis me tourner dʹun autre côté; cet arrangement me semblait ici pour moi le<br />

meilleur, mais je ne veux pas vous créer dʹembarras, sʹil nʹy a pas chez nous nécessité absolue.<br />

Je crois quʹil vaut mieux nʹen pas parler à M. Cauroy quʹil serait temps dʹavertir<br />

après son arrivée ici, si vous lʹamenez <strong>avec</strong> vous.<br />

Mille affections à vous tous. Le <strong>Prevost</strong><br />

1426 à M. Tourniquet<br />

Envois à Rome (bustes <strong>de</strong> St Vincent). Recommandations <strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nce à propos <strong>de</strong> candidats à la vie religieuse.<br />

Accueil <strong>de</strong>s carabiniers suisses; visites aux détachements militaires hors <strong>de</strong> Rome. Ne pas se troubler du juge‐<br />

ment <strong>de</strong>s hommes. Nouvelles <strong>de</strong>s ordinands.<br />

Vaugirard, 3 juillet 1869<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Je vous envoie, en les remettant aujourdʹhui au Comité, rue Servandoni, 3 bustes <strong>de</strong><br />

S t Vincent <strong>de</strong>stinés: 1°) à M gr Svegliati, Secrétaire <strong>de</strong> la Sacrée Congrégation <strong>de</strong>s Evêques et<br />

Réguliers; 2°) à M gr <strong>de</strong> Luca, Consulteur <strong>de</strong> cette même Congrégation; 3°) à M gr Termoz.<br />

De plus, il y a une lettre à remettre à Son Eminence le Cardinal Quaglia, <strong>de</strong>meurant au Pa‐<br />

lais Mariscotti. M. Emile [Beauvais] pourrait peut‐être la lui porter. Il y a aussi une lettre<br />

pour chacun <strong>de</strong>s trois Monsignori auxquels sont envoyés par nous les 3 S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul.<br />

Soignez bien notre cher M. Rabusier, et assurez‐le que nous ne lʹoublions pas; je lʹai<br />

recommandé aux prières <strong>de</strong> nos ff. qui le regar<strong>de</strong>nt déjà comme <strong>de</strong> la famille.<br />

Pour M. [Clovis] Jousset, il est absolument impossible quʹil rentre dans la Commu‐<br />

nauté; il ne faut non plus que vous couvriez <strong>de</strong> votre responsabilité aucun <strong>de</strong> ses actes;<br />

croyez‐en notre expérience et suivez la direction que je crois <strong>de</strong>voir vous donner, nous<br />

avons assez vécu près <strong>de</strong> lui pour être sûrs <strong>de</strong> ne point agir ici sans <strong>de</strong> justes raisons; nous<br />

nʹaccusons pas ses intentions, mais le jugement lui manque absolument, il vous compro‐<br />

mettrait inévitablement. Cette décision <strong>de</strong> notre part est sans retour, tenez‐en compte exac‐<br />

tement. Avertissez‐le charitablement que je ne puis lui répondre moi‐même étant fort oc‐<br />

cupé, mais que le Conseil juge positivement quʹil nʹa pas vocation pour notre Communau‐<br />

té et quʹil ne doit aucunement espérer <strong>de</strong> ce côté.<br />

Lʹaffaire pour le Caffè Nuovo paraît être abandonnée.<br />

Jʹai reçu les pouvoirs dʹindulgence, je vous en remercie, ainsi que M. Hello qui a<br />

aussi les siens.<br />

Je vais parler à M. Vrignault lundi <strong>de</strong> la Carte <strong>de</strong>s Etats Pontificaux. Qui est‐ce qui<br />

fait cette <strong>de</strong>man<strong>de</strong>? Qui paiera cette carte? Vous ne le dites point, écrivant seulement: On<br />

désire…<br />

1381


Remerciez M gr Basti<strong>de</strong> <strong>de</strong> lʹavis pour M. Cuvinot; je vais aller le visiter au plus tôt.<br />

Dites en même temps à M gr Basti<strong>de</strong> que je lui écrirai après avoir vu le mala<strong>de</strong> pour lui en<br />

donner <strong>de</strong>s nouvelles. Pour le jeune Miotte, il a été re<strong>de</strong>mandé par sa famille, il ne se<br />

croyait pas dʹailleurs appelé chez nous, il voulait que nous lui fissions faire <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s<br />

pour le sacerdoce. Cʹest une vraie folie à mon sens; jʹai refusé. Il espère quʹà la Pierre‐Qui‐<br />

Vire on sera plus con<strong>de</strong>scendant; je le souhaite, si cʹest la volonté <strong>de</strong> Dieu.<br />

Je crois que vous pouvez donner <strong>de</strong>s encouragements et <strong>de</strong>s marques dʹaffection<br />

aux carabiniers suisses parlant français; pour les secours, sʹil en faut, je ne sais pas assez les<br />

délimitations posées entre les corps pour en juger; je crois quʹil serait bien <strong>de</strong> consulter à<br />

cet égard M. Descemet. Offrez‐lui à lʹoccasion mes bons souvenirs.<br />

Je crois que les visites aux détachements sont bien utiles et peuvent faire beaucoup<br />

<strong>de</strong> bien, les soldats étant là dans <strong>de</strong>s conditions plus pénibles quʹils ne sont à Rome. M.<br />

Emile mʹécrit quʹil nʹa plus dʹargent pour les mala<strong>de</strong>s; ne pourrait‐il, en écrivant à M. Kel‐<br />

ler, <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r que le Comité fasse, pour ces besoins, une petite subvention? Je nʹentends<br />

point parler ici <strong>de</strong> Gennetier; je pense que le Comité ne déci<strong>de</strong>ra rien à son sujet sans<br />

consulter M. Descemet et vous; je pense quʹil nʹaura pas parlé <strong>de</strong>s ff. dans le sens le plus<br />

favorable, mais nous faisons ce que nous pouvons pour le plus grand bien, nʹayons que<br />

Dieu en vue, sans trop nous inquiéter <strong>de</strong>s jugements humains. Suivez la ligne <strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nce<br />

que vous avez gardée jusquʹici, <strong>de</strong>meurez étranger aux démêlés ou rivalités qui peuvent<br />

sʹagiter autour <strong>de</strong> vous, priez pour tous, souhaitez le bien et contribuez‐y par la charité et<br />

le dévouement; nous ne saurions, nous, sortir <strong>de</strong> cette voie; nous nʹavons ni influence ni<br />

action autre à exercer.<br />

Tous nos ff. vont assez bien; MM. Patinotte et Boiry sont néanmoins toujours en<br />

traitement et pas bien forts encore. M. Baumert sera ordonné prêtre le 11 <strong>de</strong> ce mois, M.<br />

Magnien minoré; M. Trousseau ordonné prêtre peut‐être à la fin du mois; MM. Leclerc, Pa‐<br />

tinotte et [Adolphe] Lainé sont sous‐diacres <strong>de</strong>puis la Trinité.<br />

Les patronages se soutiennent, celui <strong>de</strong> S t ‐Charles comme les autres; nous nous<br />

préparons à la fête <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul; on fait les lectures <strong>de</strong> sa vie et bientôt la neuvaine<br />

va commencer; invoquez aussi ce Saint Protecteur <strong>de</strong> notre petite famille, afin que tous, à<br />

son exemple, nous soyons les serviteurs <strong>de</strong> Dieu humbles, dévoués, patients et charitables.<br />

Mille affections à nos ff.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

En portant à M gr Termoz le S t ‐Vincent, vous lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rez sʹil veut se charger <strong>de</strong><br />

remettre celui <strong>de</strong> M gr <strong>de</strong> Luca (<strong>avec</strong> la lettre) quʹil voit tous les jours, et sʹil convient que<br />

vous portiez vous‐même celui <strong>de</strong> M gr Svegliati, ce <strong>de</strong>rnier ne parle pas français, cʹest une<br />

petite difficulté, la lettre pour lui est en latin.<br />

1426 bis au Cardinal Quaglia<br />

<strong>Lettre</strong> <strong>de</strong> remerciement au Préfet <strong>de</strong> la S. Congrégation <strong>de</strong>s Evêques et Réguliers.<br />

Parisiis, 3 julii 1869<br />

Eminentissime Domine,<br />

Vix quam mihi a Rev. nostro <strong>de</strong> Varax relatum est Eminentiam tuam verbis amicis‐<br />

simis preces fratrum nostrorum coram Deo sibi postulasse, quam dignum et justum erat<br />

pro benevolentia tua hoc <strong>de</strong>si<strong>de</strong>rium non mihi latuit.<br />

1382


Nec tamen sat visum ita <strong>de</strong> officio nostro sentire quin Eminentiae tuae gratitudinis<br />

hujus sensus patefecerimus. Itaque mihi indigno servo tuo hodie contingit totius Instituti<br />

nostri reverentiam offerre et pia suffragia prompto animo praestare; quo munere eo liben‐<br />

tius his litteris fungor quo melius Eminentia tua actibus et affatibus <strong>de</strong> Instituto Fratrum<br />

Sancti Vincentii a Paulo merita est. Horum autem nunquam futurus immemor merito pro<br />

addictissimo et observantissimo volo servorum Eminentiae tuae reputari<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Sup r Generalis Fratrum<br />

S ti Vincentii a Paulo<br />

Paris, 3 juillet 1869<br />

Eminentissime Seigneur,<br />

En apprenant du r.p. <strong>de</strong> Varax que votre Eminence en <strong>de</strong> très aimables termes, avait<br />

<strong>de</strong>mandé les prières <strong>de</strong> nos frères <strong>de</strong>vant Dieu, jʹai compris combien ce désir était digne et<br />

juste, en retour <strong>de</strong> votre bienveillance.<br />

Il mʹa même semblé que ce sentiment <strong>de</strong> notre <strong>de</strong>voir <strong>de</strong>vait aller jusquʹà manifester<br />

à Votre Eminence toute notre reconnaissance. Aussi mʹappartient‐il aujourdʹhui, à moi vo‐<br />

tre indigne serviteur, dʹexprimer le respect <strong>de</strong> tout notre Institut et dʹoffrir ses pieux suf‐<br />

frages <strong>de</strong> grand cœur. Cʹest dʹautant plus volontiers que, par cette lettre, je mʹacquitte <strong>de</strong><br />

ce <strong>de</strong>voir, que Votre Eminence, par ses actes et ses paroles, a mieux droit à la gratitu<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

lʹInstitut <strong>de</strong>s Frères <strong>de</strong> Saint‐Vincent <strong>de</strong> Paul.<br />

Je nʹoublierai jamais ces bienfaits et veux, à juste titre, être tenu pour le plus dévoué<br />

et le plus obéissant <strong>de</strong>s serviteurs <strong>de</strong> Votre Eminence.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Sup. Général <strong>de</strong>s Frères<br />

<strong>de</strong> Saint‐Vincent <strong>de</strong> Paul<br />

1427 à M gr Svegliati<br />

<strong>Lettre</strong> <strong>de</strong> remerciement au Secrétaire <strong>de</strong> la S. Congrégation <strong>de</strong>s Evêques et Réguliers.<br />

3 juillet 1869<br />

Reverendissime Domine,<br />

Ab Illustrissimo Parisiensi Archiepiscopo nuper accipiebamus Breve <strong>de</strong> Lau<strong>de</strong>,<br />

quod a Sacra Episcoporum ac Regularium Congregatione propositum, relative ad Consti‐<br />

tutiones Instituti nostri, Sanctitas Sua, die I0a mensis Maii approbare dignata est. Summae<br />

erga nos benevolentiae testimonio permoti, eoque incitati stimulo conabimur ut ad sancti‐<br />

ficationem nostram, necnon ad salutem pauperum et operariorum, quam semper et prae‐<br />

cipue intendimus novo incumbamus zelo.<br />

Quasdam animadversiones quae, sive ad formae tantum, sive ad ipsius Constitu‐<br />

tionum substantiae emendationem spectantes, approbationem nobis impertitam comitan‐<br />

tur, obsequiosissime perpendimus nobisque curandum erit ut illorum ad experientiam<br />

animus noster dirigatur.<br />

1383


Quantum autem, Reverendissime Domine, tua auctoritate tuoque praesidio ad feli‐<br />

cissimun hujus rei nobis tanti momenti exitum procurandum valueris, nostra non exci<strong>de</strong>t<br />

memoria, tuaeque benignitati solvemus in Domino grates perpetuas.<br />

Praeterea orphani pueri, Parisiis domi nostrae ʺ<strong>de</strong> Vaugirardʺ dictae educati, com‐<br />

munis laetitiae participes, atque opificum Italiae jure laudatorum quasi aemulos esse vo‐<br />

luerunt, un<strong>de</strong> illis opusculum ipsorum industria confectum Tibi offerre optantibus libenter<br />

annuimus, aestimantes fore, nec qui<strong>de</strong>m immerito, ut operis minus arti quam operantis<br />

voluntati atten<strong>de</strong>res.<br />

Oro ut sinceros omnium nostrum venerationis sensus accipias, in quibus sum.<br />

Illustrissime ac Reverendissime Domine,<br />

Tibi <strong>de</strong>votissimus et humillimus famulus<br />

J. Le <strong>Prevost</strong><br />

Révérendissime Seigneur,<br />

Le très Illustre Archevêque <strong>de</strong> Paris nous a <strong>de</strong>rnièrement remis le Décret Laudatif<br />

qui, proposé par la Sacrée Congrégation <strong>de</strong>s Evêques et Réguliers, relativement aux Cons‐<br />

titutions <strong>de</strong> notre Institut, a été approuvé le 10 mai par la bienveillance <strong>de</strong> Sa Sainteté.<br />

Emus dʹun tel témoignage <strong>de</strong> sa souveraine bonté envers nous, et excités par cet encoura‐<br />

gement, nous nous efforcerons <strong>de</strong> travailler <strong>avec</strong> une nouvelle ar<strong>de</strong>ur à notre sanctifica‐<br />

tion, ainsi quʹau salut <strong>de</strong>s pauvres et <strong>de</strong>s ouvriers, qui est notre fin constante et principale.<br />

Quant aux Animadversions relatives à lʹamen<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> nos Constitutions, soit<br />

pour la forme seulement, soit pour le fond même, qui accompagnent lʹapprobation à nous<br />

accordée, nous les avons examinées <strong>avec</strong> gran<strong>de</strong> soumission et nous aurons soin dʹappli‐<br />

quer notre esprit à les expérimenter.<br />

Nous nʹoublierons pas combien votre autorité, Révérendissime Seigneur, et votre<br />

protection ont influé sur lʹheureuse issue dʹune affaire si importante pour nous, et nous<br />

rendrons à votre bonté <strong>de</strong> perpétuelles actions <strong>de</strong> grâces par nos prières au Seigneur.<br />

En outre, nos petits orphelins <strong>de</strong> Paris, élevés dans notre maison <strong>de</strong> Vaugirard, ont<br />

voulu participer à notre joie commune et se montrer comme les émules <strong>de</strong>s artistes Ita‐<br />

liens, à bon droit renommés; ils ont, pour cela, résolu <strong>de</strong> vous offrir un petit travail [un<br />

buste <strong>de</strong> St Vincent <strong>de</strong> Paul en bronze] fait <strong>de</strong> leurs propres mains, et nous y avons volon‐<br />

tiers donné notre assentiment, pensant quʹ<strong>avec</strong> juste raison, vous feriez mieux attention à<br />

la bonne volonté quʹau travail même <strong>de</strong> lʹartiste.<br />

Je vous prie dʹagréer les sincères sentiments <strong>de</strong> vénération <strong>de</strong> tous les nôtres, senti‐<br />

ments dans lesquels je suis,<br />

Illustrissime et Révérendissime Seigneur,<br />

Votre très dévoué et très humble serviteur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1427 bis à M gr <strong>de</strong> Luca<br />

Reconnaissance à un prélat romain, auditeur <strong>de</strong> M gr le Secrétaire <strong>de</strong> la S. Congrégation <strong>de</strong>s Evêques et Réguliers.<br />

3 juillet 1869<br />

Monseigneur,<br />

La bienveillance et le charitable accueil dont vous avez daigné user récemment en‐<br />

vers lʹInstitut <strong>de</strong>s Frères <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul nous a fait connaître que les vertus <strong>de</strong> notre<br />

1384


Saint Patron vous sont familières. Aussi avons‐nous cru que vous recevriez volontiers son<br />

image. Vous la recevrez donc telle quʹelle sort <strong>de</strong>s mains <strong>de</strong>s petits ouvriers orphelins que<br />

nous élevons à Paris.<br />

En recevant ce mo<strong>de</strong>ste objet, vous verrez aisément, Monseigneur, quʹil vous vient<br />

dʹun Institut pauvre; mais en ayant égard à nos sentiments, vous nʹaurez pas <strong>de</strong> peine à<br />

croire que notre reconnaissance ne soit bien au‐<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> nos présents.<br />

Cʹest cette reconnaissance que jʹose vous prier dʹagréer ici; jʹy joins lʹoffre du respect<br />

et du dévouement dans lequel je suis,<br />

Monseigneur,<br />

Votre humble et obéissant serviteur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1428 à M. Jouin<br />

Sollicitu<strong>de</strong> pour sa santé. Nouvelles du patronage <strong>de</strong> Nazareth.<br />

Vaugirard, 3 juillet [1869]<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Nous avons appris <strong>avec</strong> joie que votre santé sʹétait bien remise; jʹavais fait prier tous<br />

nos ff. en voyant, par la lettre <strong>de</strong> M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet], que plusieurs dʹentre vous<br />

étaient souffrants; je ne manque jamais, en particulier à la retraite du mois où la Commu‐<br />

nauté est réunie, <strong>de</strong> donner <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong>s ff. <strong>de</strong> Rome et <strong>de</strong> leurs œuvres; nous vous<br />

suivons ainsi <strong>de</strong>s yeux et toute la famille sʹintéresse à vos affaires.<br />

Lʹornement blanc quʹavait envoyé M. Hello a été perdu dans le naufrage <strong>de</strong> lʹAbat‐<br />

tucci. Je viens <strong>de</strong> persua<strong>de</strong>r à M. Frézet, sacristain <strong>de</strong> Chaville, <strong>de</strong> vous en donner un pour<br />

les messes <strong>de</strong> chaque jour; il lʹenverra au plus tôt au Comité.<br />

Le patronage <strong>de</strong> Nazareth va très bien, comme <strong>de</strong> coutume; la chapelle est très fré‐<br />

quentée, presque trop le dimanche, on a peine à gar<strong>de</strong>r les places <strong>de</strong>s enfants; le Bon Sei‐<br />

gneur bénit toujours nos œuvres, à Paris et ailleurs. Nous autres, indignes serviteurs,<br />

sommes trop imparfaits; Dieu fait gran<strong>de</strong>ment sa part, mais la nôtre est toujours insuffi‐<br />

sante. Tâchez à Rome, étant si près <strong>de</strong>s Sts Apôtres et <strong>de</strong> tant dʹadmirables saints, <strong>de</strong> don‐<br />

ner lʹexemple au reste <strong>de</strong> la famille, afin que le feu divin <strong>de</strong> la vraie charité sʹallume dans<br />

nos âmes.<br />

Je fais parvenir son chapelet à M. <strong>de</strong> Varax.<br />

Je ne puis écrire aujourdʹhui à nos ff. Emile [Beauvais] et Charrin. Assurez‐les <strong>de</strong><br />

mon bien tendre attachement; vous savez vous‐même, mon cher enfant, quʹil vous est aus‐<br />

si bien acquis. Bons et affectueux souvenirs à tous ceux qui se sont montrés pour nous si<br />

bons dans notre séjour à Rome.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

1429 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Ai<strong>de</strong> pour Amiens. Que le frère Cauroy puisse étudier. Nouvelles <strong>de</strong>s frères.<br />

Chaville, 7 juillet 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Votre silence me laisse penser que vous ne croyez pas pouvoir vous passer définiti‐<br />

vement dʹun ai<strong>de</strong> pour vos surveillances, rue <strong>de</strong> Noyon; je vous envoie donc M. Cauroy.<br />

1385


Son arrivée a un peu <strong>de</strong>vancé le moment où elle <strong>de</strong>vait avoir lieu ici; mais nous nʹavons pu<br />

lui refuser un jour ou <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> repos avant quʹil se remît en route; il est bien disposé à vous<br />

être utile <strong>de</strong> son mieux; je lui ai recommandé dʹêtre, <strong>avec</strong> les jeunes apprentis, calme,<br />

ferme et tel que la nécessité le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>; vous lʹinstruirez vous‐même mieux encore.<br />

Je lui ai promis quʹil aurait du temps pour étudier, il en a grand besoin. Il faut quʹil<br />

revoie les points les plus essentiels <strong>de</strong> la philosophie quʹil a faite trop faiblement; vous lui<br />

donnerez quelques avis et directions pour le soutenir. Je joins ici le règlement que lui avait<br />

préparé pour Chaville M. Faÿ; il pourra vous ai<strong>de</strong>r pour lui en préparer un durant son sé‐<br />

jour à Amiens. Nos ff. du Conseil ont présumé que ce séjour ne <strong>de</strong>vrait durer que le temps<br />

nécessaire pour poser et autoriser M. Fonlupt.<br />

Je ne remets point le trimestre <strong>de</strong> pension à M. Cauroy puisque vous me dites dʹat‐<br />

tendre votre compte. Comprenez‐y, outre les 50f pour vêtements, soit à M. Ginet, soit à M.<br />

Fonlupt, 25f pour un mois <strong>de</strong> lʹin<strong>de</strong>mnité <strong>de</strong>stinée par moi pour le séjour <strong>de</strong> M. Cauroy; je<br />

tiens à ne pas charger Amiens.<br />

M. dʹArbois est arrivé; il vous envoie ses affections, ainsi que nos ff. du noviciat qui<br />

vous sont particulièrement attachés.<br />

Jʹécris un mot, ci‐contre, à M. Trousseau; jʹavais pensé un moment à vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r<br />

quʹil sʹéchappe un jour pour assister à la fête <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul le lundi 19, mais ce se‐<br />

rait encore le déranger <strong>de</strong> ses étu<strong>de</strong>s; jʹaime mieux faire en sorte, si je le puis, dʹaller assis‐<br />

ter à son ordination, quand le moment en sera fixé.<br />

Adieu, mon bien bon ami, assurez M. Caille, et M. Marcaire, et M. Gérold, et tous <strong>de</strong><br />

mes affectueux sentiments, dont vous êtes vous‐même en toute et entière possession.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1430 à M. Trousseau<br />

Lʹordination sacerdotale approche. MLP. y assistera.<br />

Chaville, 7 juillet 1869<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Jʹai appris <strong>avec</strong> joie que vous étiez posé à lʹorphelinat. Jʹespère que lʹabsence <strong>de</strong> vos<br />

enfants durant presque tout le jour va vous laisser le loisir <strong>de</strong> vous remettre et <strong>de</strong> vous re‐<br />

cueillir pour préparer en meilleures conditions votre examen.<br />

Jʹavais pensé un moment à vous faire prendre un jour pour assister <strong>avec</strong> nous à la<br />

fête <strong>de</strong> St Vincent <strong>de</strong> Paul, le lundi 19; mais ce serait encore un dérangement; jʹaime mieux,<br />

en définitive, faire en sorte dʹaller assister à votre ordination, quand le moment en sera<br />

fixé. Jʹespère que cette joie du rapprochement prochain <strong>avec</strong> un ami dévoué va redoubler<br />

votre bonne disposition pour porter le labeur <strong>de</strong> préparation.<br />

Adieu, mon bien cher ami, à bientôt, je lʹespère, et croyez, comme toujours, à mon<br />

tendre dévouement en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1386


1431 à M. Streicher<br />

Nécessité absolue <strong>de</strong> la surveillance dans les Œuvres.<br />

Vaugirard, 8 juillet 1869<br />

Mon cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Maignen regrette que vous nʹayez pas assez soin, malgré ses recommandations<br />

réitérées, <strong>de</strong> ne point laisser les jeunes gens seuls sans surveillance. Ce point est absolu‐<br />

ment essentiel, en effet, pour la bonne discipline dʹune maison; partout où il est négligé, le<br />

désordre arrive inévitablement; tenez donc compte, je vous en prie, mon bon ami, <strong>de</strong> nos<br />

instances à cet égard; nous avons une plus longue expérience que vous ne lʹavez <strong>de</strong> la<br />

conduite <strong>de</strong>s jeunes gens, vous <strong>de</strong>vez vous rendre à nos avertissements; soyez sûr quʹau‐<br />

trement vous prendriez une lour<strong>de</strong> responsabilité, puisque les acci<strong>de</strong>nts fâcheux qui ad‐<br />

viendraient vous seraient tristement imputés. Je sais quʹil nʹy a point ici <strong>de</strong> votre part <strong>de</strong><br />

défaut <strong>de</strong> soumission, mais simple laisser‐aller et un peu <strong>de</strong> faiblesse. Vous veillerez donc<br />

attentivement à ce que nos observations soient bien suivies à lʹavenir.<br />

Croyez, mon bien cher enfant, à tous mes sentiments affectueux en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1432 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

A une bienfaitrice. Intérêt que MLP. porte à toute sa famille.<br />

Vaugirard, 12 juillet 1869<br />

Madame la Marquise,<br />

Votre bonne lettre, très désirée, mʹa causé une gran<strong>de</strong> joie; votre santé sʹaméliore;<br />

celle <strong>de</strong> Madame dʹHurbal, celle aussi <strong>de</strong> votre cher Richard sont satisfaisantes; voilà bien<br />

<strong>de</strong>s sujets <strong>de</strong> se réjouir.<br />

Il y en a encore dʹautres dans votre aimable épître: le professeur (un peu cher)<br />

donne, comme nous lʹespérions, toute satisfaction; à cette condition, les sacrifices semblent<br />

légers; enfin, tout annonce que vous allez avoir <strong>de</strong>s conditions meilleures du côté <strong>de</strong> la pa‐<br />

roisse et que vous pourrez trouver cette conformité <strong>de</strong> vues que vous aviez tant souhaitée<br />

dans lʹintérêt du bien; que le Seigneur en soit béni! cʹest une si gran<strong>de</strong> souffrance <strong>de</strong> ne pas<br />

trouver lʹappui quʹon cherche et dʹêtre toujours mal compris. Puissiez‐vous être bien par‐<br />

tagées et obtenir un pasteur, non seulement régulier, ce qui est beaucoup, mais aussi doué<br />

dʹun sens droit et intelligent <strong>de</strong>s moyens si heureux que Dieu a mis dans son entourage<br />

pour favoriser un zèle vraiment éclairé. Jʹespère quʹà cette heure la chose est déjà faite, ou<br />

quʹelle est au moins tout près dʹarriver.<br />

Vous avez lʹextrême bonté <strong>de</strong> mʹinviter <strong>de</strong> nouveau à vous rendre visite à S t ‐<br />

Laurent; ce me serait une vraie et douce consolation, mais jʹai fait une si longue absence<br />

pour mon voyage à Rome que, si je mʹéchappe pour une apparition en Normandie, ce sera<br />

pour 4 ou 5 jours à peine, juste le temps <strong>de</strong> voir comment se trouve ma sœur, vieille et fai‐<br />

ble en santé, et vite revenir à mes travaux accoutumés. Si, contre mon attente, je voyais,<br />

par <strong>de</strong>s ai<strong>de</strong>s inespérés, plus <strong>de</strong> latitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>vant moi, jʹirais <strong>avec</strong> gran<strong>de</strong> joie jouir <strong>de</strong> votre<br />

aimable hospitalité, prier dans votre petite chapelle et y offrir le S t Sacrifice qui, à votre<br />

grand regret, y est trop rarement célébré.<br />

1387


On me parlait <strong>de</strong>rnièrement dʹun prêtre très digne auquel le mé<strong>de</strong>cin prescrivait<br />

quelque séjour à la campagne pour raffermir sa santé fatiguée et qui eût accepté, sans at‐<br />

tendre nulle in<strong>de</strong>mnité, <strong>de</strong> servir temporairement dʹaumônier à une famille chrétienne qui<br />

aurait consenti à le recevoir pour tel temps quʹelle aurait déterminé. Je ne sais pas sʹil nʹa<br />

pas déjà trouvé ce quʹil désirait; en cas contraire, je prendrais <strong>de</strong>s renseignements plus pré‐<br />

cis et jʹaurais lʹhonneur <strong>de</strong> vous les adresser, sans lui faire, bien entendu, à lʹavance, au‐<br />

cune sorte dʹouverture.<br />

Mon bien bon ami, M. <strong>de</strong> Caulaincourt, à son <strong>de</strong>rnier voyage à Paris, mʹavait vive‐<br />

ment invité à rendre visite à sa chère fille, Madame Dauger (?), résidant à Auteuil pour sa<br />

santé; malheureusement son adresse, écrite par moi sur une feuille volante, sʹest égarée<br />

parmi la masse <strong>de</strong>s papiers entassés sur mon bureau, et je nʹai pu réaliser le désir <strong>de</strong> votre<br />

cher oncle; peut‐être ne serait‐il pas trop tard encore dʹy songer; je vous serais donc recon‐<br />

naissant, Madame la Marquise, si vous voulez bien me donner <strong>de</strong> nouveau lʹadresse égarée.<br />

Je souhaite, en finissant, que le Seigneur vous donne, à la campagne et dans lʹair<br />

plus libre quʹon y respire, quelque chose <strong>de</strong> ce calme et <strong>de</strong> cette paix quʹon trouve trop ra‐<br />

rement à Paris; puissiez‐vous, Madame, vous et votre cher entourage, vous trouver plus<br />

près <strong>de</strong> Dieu et bien sentir quʹIl vous aime et vous bénit; vous le servez <strong>de</strong> votre côté, vous<br />

désirez lui gar<strong>de</strong>r aimable et intacte lʹâme <strong>de</strong> votre cher fils; Il vous assistera, jʹen ai la<br />

confiance, dans ce <strong>de</strong>ssein quʹIl vous inspire Lui‐même, et vous aurez la joie <strong>de</strong> continuer<br />

les saintes traditions <strong>de</strong> votre famille, en marchant tous ensemble sur les traces <strong>de</strong> cette<br />

vénérée aïeule [M me <strong>de</strong> Caulaincourt] que vous pleurez encore, bien quʹelle soit déjà, tout<br />

lʹannonce, <strong>avec</strong> les anges du Ciel.<br />

Veuillez agréer, Madame, <strong>avec</strong> Madame dʹHurbal, tous mes sentiments <strong>de</strong> respec‐<br />

tueux et profond dévouement.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1433 à M. Tourniquet<br />

Le Saint‐Sacrement à la chapelle <strong>de</strong> Rome; nécessité dʹun prêtre dévoué au Cercle. Questions <strong>de</strong>s vacances; fré‐<br />

quentation du Cercle par <strong>de</strong>s ecclésiastiques. Fête <strong>de</strong> Saint Vincent <strong>de</strong> Paul. Conseil <strong>de</strong> sous‐officiers.<br />

Vaugirard, 23 juillet 1869<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Nous avons appris <strong>avec</strong> joie la faveur que vous a accordée le Saint Père, en vous au‐<br />

torisant à gar<strong>de</strong>r le Saint Sacrement dans votre petite chapelle; jʹai la confiance que la pré‐<br />

sence <strong>de</strong> notre divin Seigneur en votre maison sera un puissant stimulant pour accroître<br />

votre piété, vous inspirer à lʹintérieur lʹesprit <strong>de</strong> charitable union et, pour le <strong>de</strong>hors, un<br />

zèle <strong>de</strong> plus en plus ar<strong>de</strong>nt dans vos œuvres. Sʹil en était autrement, vous nʹauriez pas bien<br />

correspondu à la grâce insigne qui vous a été accordée.<br />

Encouragez beaucoup M. lʹabbé Louis [Klingenhofen] par le respect et lʹaffection<br />

que vous lui montrerez; il peut faire beaucoup <strong>de</strong> bien dans la Légion, à la longue, et sʹil ne<br />

se rebute pas <strong>de</strong>s difficultés <strong>de</strong>s premiers temps; son éloignement serait certainement un<br />

vrai malheur pour les pauvres soldats qui ont tant besoin dʹappui spirituel. Il nʹest pas<br />

possible que son zèle échoue entièrement; il y a beaucoup dʹâmes simples et droites dans<br />

la Légion, il les gagnera successivement, à mesure que sa position se fera parmi elles; je<br />

prierai en union <strong>avec</strong> vous pour que Dieu attire à Lui bientôt beaucoup <strong>de</strong> cœurs.<br />

1388


Je suis heureux <strong>de</strong>s bonnes dispositions <strong>de</strong> notre jeune Rabusier; assurez‐le que je<br />

suis <strong>de</strong>s yeux tous ses efforts dans le bien; M. Faÿ va lui écrire.<br />

Jʹécris ici un mot à M. Charrin; quʹil prenne patience; comme vous le pensez bien,<br />

sʹil persiste à désirer son retour près <strong>de</strong> nous, jʹaviserai à le rappeler au mois dʹoctobre,<br />

quand il sera possible <strong>de</strong> lui donner un remplaçant; jusque là, quʹil soit courageux et laisse<br />

<strong>de</strong> lui un bon souvenir à Rome, sʹil doit la quitter.<br />

M. Emile [Beauvais] me parle, en effet, <strong>de</strong>s bains <strong>de</strong> mer à Palo ou à Civita; on pour‐<br />

rait <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r lʹavis du mé<strong>de</strong>cin sur le bien que vos santés en pourraient retirer.<br />

M. Cuvinot a été opéré <strong>de</strong> nouveau dʹune façon plus radicale que la première fois; il<br />

va aussi bien quʹon peut lʹespérer après une si ru<strong>de</strong> épreuve; on ne peut encore rien pré‐<br />

sumer sur les suites.<br />

Je crois quʹil est désirable que M. Emile soit bien pru<strong>de</strong>nt dans ses rapports <strong>avec</strong> M gr<br />

Daniel; le mieux est, il me semble, dʹavertir simplement les ecclésiastiques qui viennent au<br />

Cercle (<strong>avec</strong> beaucoup <strong>de</strong> politesse et <strong>de</strong> charité) quʹil est réservé aux militaires. Sʹil en est<br />

quelques‐uns dont on soit bien sûr et qui vous soient bien connus, on peut les inviter à<br />

voir M gr Daniel, afin dʹobtenir <strong>de</strong> lui une permission <strong>de</strong> fréquenter le Cercle; leur admis‐<br />

sion est une véritable exception et, puisquʹil sʹagit dʹecclésiastiques, cʹest à lʹaumônier à ju‐<br />

ger <strong>de</strong> ce qui les concerne. En marchant ainsi simplement, on nʹaura, je pense, aucune dif‐<br />

ficulté.<br />

Nous avons eu, à Chaville, une fête <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul très aimable; nulle contra‐<br />

riété, sainte union et pure allégresse en Dieu tout le jour; jʹespère que vous en aurez eu à<br />

Rome quelque ressentiment. Les filles <strong>de</strong> S t Vincent y sont maintenant et voilà que vous y<br />

êtes aussi; le Père ne saurait être loin <strong>de</strong> ses enfants, ayez soin <strong>de</strong> lʹinvoquer souvent.<br />

S t ‐Charles se soutient, non sans quelques difficultés, à cause <strong>de</strong> lʹinsuffisance <strong>de</strong> li‐<br />

berté et <strong>de</strong> loisir pour M. Gresser; M. Girodon, empêché par dʹautres occupations, ne pour‐<br />

ra plus faire que le service spirituel du samedi soir et du dimanche matin; M. Faÿ <strong>de</strong>vra<br />

revenir vers midi pour le reste; je ne sais si cet arrangement sera bien bon; ne cessez pas <strong>de</strong><br />

prier pour vos enfants <strong>de</strong> S t ‐Charles.<br />

Adieu, mon cher enfant, rappelez‐moi au souvenir <strong>de</strong>s rr.pp. Brichet et Laurençot et<br />

offrez‐leur nos respects ainsi quʹà M. lʹabbé Louis.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. M. Hello vient <strong>de</strong> me communiquer une lettre où vous lui parlez dʹun Conseil<br />

<strong>de</strong> sous‐officiers que voudrait faire le Capitaine <strong>Prevost</strong>. Vous nʹexpliquez pas, ou je nʹai<br />

pas compris, si ce Conseil <strong>de</strong>vrait régler les mouvements du Cercle et sʹil ne pourrait pas<br />

renouveler pour vous les inconvénients <strong>de</strong> lʹancien Conseil; je ne puis donc vous donner<br />

dʹavis; tout ce que je vois, cʹest quʹil faudrait éviter <strong>de</strong> froisser le Capitaine <strong>Prevost</strong> qui<br />

nous aime et quʹil nous importe <strong>de</strong> ne pas mettre contre nous, mais quʹil est bien à désirer<br />

aussi que vous nʹayez pas dans votre action les gênes dʹune direction trop minutieuse; que<br />

le Bon Dieu daigne vous éclairer pour éviter à la fois ces <strong>de</strong>ux inconvénients.<br />

1434 à M. Trousseau<br />

Conseils dans lʹemploi du temps à lʹapproche <strong>de</strong> lʹordination. Calme et patience.<br />

1389


Chaville, 26 juillet 1869<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je ne pense pas, en effet, que vous <strong>de</strong>viez interrompre vos étu<strong>de</strong>s, ni faire la classe à<br />

vos enfants durant les vacances; il faut tâcher dʹarriver à bonne fin pour votre ordination<br />

en évitant <strong>de</strong> nouveaux dérangements.<br />

Il me semble que vous pourriez parer à lʹoccupation que <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ra la présence <strong>de</strong>s<br />

enfants durant quelques semaines en partageant la journée en trois principales parties:<br />

lʹétu<strong>de</strong>, la classe, la promena<strong>de</strong>. Pour lʹétu<strong>de</strong>, en y comprenant même la lecture à haute<br />

voix, elle pourrait être faite, ainsi que les promena<strong>de</strong>s, par MM. Barthélemy [Marchand] et<br />

Lemaire, parfois une petite partie aussi par M. Ginet, sʹil en était absolument besoin.<br />

Quant à la classe qui se ferait une seule fois le jour, M. Fonlupt, ou M. Cauroy, ou<br />

M. Gérold pourraient la venir faire, sauf à être remplacés en retour pendant leur absence<br />

par lʹun <strong>de</strong> vos ff. Ce serait un petit dérangement, il est vrai, mais il serait tout à fait mo‐<br />

mentané et ne pourrait se comparer à lʹinconvénient <strong>de</strong> chercher encore une fois <strong>de</strong>s expé‐<br />

dients extraordinaires, en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> votre personnel.<br />

Ménagez‐vous, tout en portant la tâche qui vous reste à accomplir; soyez bien pa‐<br />

tient. Il faut que vous ayez du calme, pour vous et pour vos ff., car, sʹils viennent chercher<br />

consolation et encouragement près <strong>de</strong> vous, vous <strong>de</strong>vez les leur donner. Ayons confiance,<br />

le Père <strong>de</strong>s miséricor<strong>de</strong>s en aura dʹabondantes pour vous.<br />

Assurez M. <strong>de</strong> Varax que nous sympathisons bien à son état <strong>de</strong> fatigue et <strong>de</strong> ma‐<br />

laise; aujourdʹhui, la Communauté, <strong>avec</strong> les enfants <strong>de</strong> Vaugirard, était dès le matin à la<br />

chapelle <strong>de</strong> St ‐Vincent <strong>de</strong> Paul en pèlerinage. M. Baumert a eu la consolation dʹoffrir le St Sacrifice au grand autel; nous avons beaucoup prié pour vous tous, notre saint Patron ne<br />

lʹoubliera pas.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, je vous embrasse, vous et vos ff., affectueusement.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. En sortant <strong>de</strong> la chapelle <strong>de</strong>s Lazaristes, nous sommes allés au convoi du frère<br />

<strong>de</strong> M. Faÿ (le lampiste musicien). Priez pour lui; sa mort, très chrétienne, a été précédée<br />

dʹune bien longue maladie. Il faut toujours que la souffrance nous purifie.<br />

1435 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Dans lʹattente <strong>de</strong> le revoir, car du repos lui est nécessaire. Insuffisance <strong>de</strong> personnel.<br />

Chaville, 29 juillet 1869<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Nous vous verrons <strong>avec</strong> plaisir prendre quelques jours <strong>de</strong> repos à Chaville, les<br />

gran<strong>de</strong>s chaleurs, jointes à vos fatigues, vous ren<strong>de</strong>nt ce relâche bien nécessaire, je regrette<br />

seulement que vous <strong>de</strong>viez en mesurer si strictement la durée.<br />

Pour M. Cauroy, nous le laisserions volontiers toutes les vacances près <strong>de</strong> vous si,<br />

dʹune part, il travaille un peu réellement la philosophie qui sʹest trouvée être plus que fai‐<br />

ble lʹan <strong>de</strong>rnier, dans son acquis scientifique, et, dʹautre part, sʹil ne trouve pas ce moyen<br />

<strong>de</strong> passer son temps <strong>de</strong> repos un peu trop sévère; son<strong>de</strong>z‐le un peu sur ce point.<br />

1390


Je ne saurais dire que nous puissions vous donner un sujet nouveau, tel que vous le<br />

souhaiteriez; le personnel est insuffisant en toutes nos œuvres et le noviciat nʹa que <strong>de</strong>s<br />

jeunes gens non formés; toutefois, nous pourrons mieux examiner cette question vous pré‐<br />

sent, puisquʹun court entretien produit plus dʹentente que <strong>de</strong> longues correspondances.<br />

Vous avez pu vous convaincre, sans que jʹaie eu le temps <strong>de</strong> vous lʹécrire, que M.<br />

dʹArbois nʹavait reçu <strong>de</strong> nous absolument aucune mission et quʹil a fait son voyage<br />

dʹAmiens uniquement et exclusivement pour vous rendre visite et voir vos œuvres.<br />

Adieu, mon bien cher ami, à bientôt; offrez à M. Caille et à nos ff. tous mes senti‐<br />

ments dévoués.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1436 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Projet <strong>de</strong> promena<strong>de</strong> à Amiens. Motifs qui détournent <strong>de</strong> solliciter la reconnaissance dʹutilité publique pour nos<br />

Œuvres.<br />

Chaville, 10 août [1869]<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Cʹest le 23 août que M. Faÿ, <strong>avec</strong> MM. Hello, Planchat et peut‐être Vasseur, désire‐<br />

raient faire leur pèlerinage à Amiens; jʹécris un mot à M. Caille pour prendre son avis à ce<br />

sujet; vous avez déjà donné le vôtre.<br />

Je parle aussi au long à M. Caille du projet <strong>de</strong> reconnaissance légale <strong>de</strong>s maisons St ‐<br />

Jacques et Watelets; lʹavis formel, exprès du Conseil a été quʹon ne <strong>de</strong>vait admettre aucune<br />

sorte <strong>de</strong> mention <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Noyon en cette affaire, afin <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r la pleine et entière<br />

indépendance dont nous avons besoin comme Communauté. Nous prêterons certaine‐<br />

ment cette maison pour lʹexercice du patronage et dʹune volonté constante, mais dʹune vo‐<br />

lonté libre en même temps qui laissera intacte lʹinfluence quʹil nous importe <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r en<br />

cette œuvre.<br />

Je joins ici un mot <strong>de</strong> M. Lagny; nous nʹavons pas encore dʹopinion faite à son sujet;<br />

il paraît, pour sa part, sʹaccoutumer ici. Jʹespère que vous me donnerez bientôt <strong>de</strong>s nouvel‐<br />

les <strong>de</strong> M. Bouchy et quʹelles seront satisfaisantes.<br />

Rien <strong>de</strong> nouveau autour <strong>de</strong> nous. Mille affections <strong>de</strong> tous et <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1437 à M. Caille<br />

Reconnaissance légale. MLP. détaille les raisons <strong>de</strong> la refuser. Promena<strong>de</strong> à Amiens.<br />

Chaville, 10 août 1869<br />

Mon bon ami et fils en N.S.,<br />

Nous avons examiné au Conseil le projet <strong>de</strong> reconnaissance <strong>de</strong>s maisons S t ‐Jacques<br />

et <strong>de</strong>s Watelets comme établissements dʹutilité publique. De lʹavis unanime <strong>de</strong> tous les<br />

membres assemblés, une pareille mesure offrirait plus dʹinconvénients que dʹavantages et,<br />

si la chose était à notre décision, nous ne nous prononcerions pas affirmativement. Toute‐<br />

1391


fois, dans les vues et dans la position où se mettent les Messieurs <strong>de</strong> votre Commission, il<br />

se peut que cet arrangement soit, en quelque sens, acceptable. Mais pour nous, Commu‐<br />

nauté, mais pour vous surtout qui avez eu déjà tant à souffrir <strong>de</strong>s dépendances que vous<br />

ont imposées M. Cacheleux et tous ceux qui vous entourent, presque sans exception, il est<br />

évi<strong>de</strong>nt que nous <strong>de</strong>vons gar<strong>de</strong>r à tout prix notre liberté dʹaction par rapport à la maison<br />

<strong>de</strong> la rue <strong>de</strong> Noyon.<br />

Cette liberté serait compromise, plus ou moins gravement, si vous laissiez intro‐<br />

duire dans lʹacte qui doit servir à la reconnaissance <strong>de</strong> la Société, que ces Messieurs veu‐<br />

lent faire approuver officiellement, la promesse que cette maison sera prêtée aux œuvres<br />

<strong>de</strong> cette Société, il y aurait là comme un engagement peut‐être difficile à dénouer en cas <strong>de</strong><br />

malentendus <strong>avec</strong> elle; nous <strong>de</strong>mandons donc quʹil nʹen soit fait aucune mention. Nous<br />

prêterons volontiers cette maison pour lʹusage du patronage, cʹest bien notre formelle et<br />

constante intention, mais ce prêt doit être entièrement libre et notre indépendance doit<br />

<strong>de</strong>meurer parfaite.<br />

Si les <strong>de</strong>ux maisons <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong>s Victoires sont reconnues officiellement, une Com‐<br />

mission, officielle aussi, va être formée; le Prési<strong>de</strong>nt, qui doit avoir une gran<strong>de</strong> autorité, est<br />

choisi par lʹAdministration Départementale; toutes les dispositions pour lʹexécution <strong>de</strong>s<br />

œuvres, toutes les dépenses, tout le mouvement, en un mot, sera réglé <strong>avec</strong> détail et minu‐<br />

tieusement par cette Commission; une semblable direction peut‐être fort gênante souvent,<br />

et elle serait peut‐être intolérable si les vues venaient à différer très essentiellement <strong>de</strong>s nô‐<br />

tres. Il nous importe donc <strong>de</strong> ne pas nous lʹimposer puisque nous pouvons, en gardant no‐<br />

tre liberté entière comme propriétaires <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> la rue <strong>de</strong> Noyon, mesurer, à notre<br />

gré, lʹingérence que la Commission voudrait se donner dans les œuvres qui sʹy font. Si<br />

cette ingérence reste sage et pru<strong>de</strong>nte, nous marcherons en bon accord; au contraire, si elle<br />

était gênante, tracassière ou malveillante, nous serions forts pour lʹécarter. Or, elle sera<br />

dʹautant plus pru<strong>de</strong>nte, mesurée et sage que nous aurons à son égard une position plus<br />

nettement assise et plus dégagée.<br />

Je passe à une affaire moins sérieuse. M. lʹabbé Faÿ ayant promis à ses huit étu‐<br />

diants latinistes [MM. Frézet, Vernay, Rousseau (étu<strong>de</strong>s finies le 15 août), Chupin, Pialot,<br />

Lepage, Herlicq, Sauvage, Lefebvre] une promena<strong>de</strong> extraordinaire durant leurs vacances,<br />

aurait le désir <strong>de</strong> les conduire à Amiens le 23 <strong>de</strong> ce mois. Il vous<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> si vous pourriez dispo ser, pour une nuit, dʹune salle où<br />

on placerait <strong>de</strong>s paillasses et <strong>de</strong>s couvertures; ce coucher suffirait<br />

pour ces jeunes gens peu difficiles à satisfaire. Ils seraient<br />

accompagnés <strong>de</strong> MM. Faÿ, Hello et Planchat, peut‐être aussi <strong>de</strong><br />

M. Alphonse Vasseur; en tout 12 au plus. Ce sera assurément un<br />

embarras <strong>de</strong> plus à joindre aux autres qui vous sont ordinaires,<br />

mais il sera court et ne se renouvellera <strong>de</strong> bien longtemps; je nʹai<br />

pas voulu toutefois donner permission pour cette excursion<br />

avant <strong>de</strong> vous avoir consulté.<br />

Jules Pialot Jʹespère que M. Joseph Bouchy, amené chez vous par M. <strong>de</strong> Varax,<br />

pourra vous être utile; dès quʹil sera au courant <strong>de</strong> ses fonctions,<br />

on pourra nous envoyer M. Gérold; après lʹordination <strong>de</strong> M. Trousseau, on ramènera aussi<br />

près <strong>de</strong> nous M. Ginet, afin <strong>de</strong> décharger Amiens qui, évi<strong>de</strong>mment, serait embarrassé dʹun<br />

personnel trop nombreux.<br />

1392


Adieu, mon bien bon ami; je prie pour vous, pour vos frères, pour vos œuvres, jʹes‐<br />

père que Dieu et la S te Vierge entendront mes vœux.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je pense que M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] vous a accusé réception <strong>de</strong> lʹanacoste et lʹa<br />

porté en compte.<br />

1438 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Favoriser lʹadoration nocturne dans nos chapelles.<br />

Chaville, 12 août 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous renvoie ci‐joint les pièces relatives à lʹadoration nocturne que désirent faire<br />

dans notre chapelle quelques hommes pieux <strong>de</strong> votre ville dʹAmiens.<br />

Je pense que nous <strong>de</strong>vons favoriser cette œuvre sainte, si nous le pouvons faire sans<br />

préjudice notable pour nos propres travaux. Veillez donc seulement à ce que nos ff., déjà<br />

fort chargés par leurs emplois, nʹaient à lʹoccasion <strong>de</strong>s exercices <strong>de</strong> lʹadoration, aucun dé‐<br />

rangement sérieux; sous cette réserve, nous <strong>de</strong>vons nous estimer heureux que ces stations<br />

se tiennent dans notre chapelle.<br />

Mille affectueux souvenirs pour M. Caille et pour nos autres frères.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1439 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Le frère Cauroy éprouvé dans sa vocation. Que M. <strong>de</strong> Varax fasse appel ʺau bon sens et au cœurʺ <strong>de</strong> ce frère,<br />

pour le ramener à dʹautres sentiments.<br />

Chaville, 12 août 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je prie <strong>avec</strong> vous pour notre jeune Cauroy; son découragement, espérons‐le, se pas‐<br />

sera comme plusieurs autres, sous lʹinfluence <strong>de</strong> la grâce et <strong>de</strong> ses propres réflexions; il a<br />

du bon sens et du cœur, cʹest plus quʹil nʹen faut pour le ramener à dʹautres sentiments. Ce<br />

serait pour lui, en effet, le comble <strong>de</strong> la folie et <strong>de</strong> lʹingratitu<strong>de</strong> que <strong>de</strong> briser là, sans nulle<br />

raison valable, sa vocation et tout son avenir, sans aucune perspective, tant soit peu consis‐<br />

tante, dʹune position convenable dans le mon<strong>de</strong>. Ses qualités auront valeur dans le service<br />

<strong>de</strong> Dieu, parce quʹelles y sont propres; elles serait peu estimées dans le mon<strong>de</strong> et ne le mè‐<br />

neraient à rien.<br />

Si, comme on le peut penser, il craint <strong>de</strong> se retrouver à Amiens dans une condition<br />

défavorable pour étudier, étant partagé entre ses classes et les services <strong>de</strong>s œuvres, il ne<br />

faudrait pas hésiter un moment à lui promettre quʹaussitôt après lʹordination <strong>de</strong> M. Trous‐<br />

seau, il reviendrait ici pour continuer ses étu<strong>de</strong>s dʹune façon régulière et <strong>avec</strong> entière liber‐<br />

té, soit à Versailles, soit en quelque autre séminaire. Il a déjà souffert du décousu <strong>de</strong> ses<br />

précé<strong>de</strong>ntes étu<strong>de</strong>s, on ne pourrait lui imposer une condition pareille sans quʹelle lui parût<br />

meilleure quʹune autre pour lui, eu égard à ses aptitu<strong>de</strong>s.<br />

1393


Si, contre mon attente, vos bons conseils ne le ramenaient pas à <strong>de</strong> meilleures pen‐<br />

sées, il faudrait lʹenvoyer ici, afin que je converse <strong>avec</strong> lui à loisir; il sait lʹintérêt tendre que<br />

je lui porte, je crois quʹil examinerait volontiers <strong>avec</strong> moi ce que ses véritables intérêts <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>nt.<br />

Adieu, mon bien bon ami, jʹattends votre réponse pour le pèlerinage projeté <strong>de</strong> nos<br />

persévérants; il leur resterait, sʹil nʹy a nul obstacle chez vous, à faire les démarches pour<br />

obtenir les <strong>de</strong>mi‐places.<br />

Votre ami et Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1440 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Pour la soutenir spirituellement. Dʹordinaire, les épreuves précè<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> nouvelles grâces. Impossibilité pour<br />

MLP. dʹaller en Normandie.<br />

Vaugirard, 12 août 1869<br />

Madame la Marquise,<br />

Je partage bien cordialement toutes vos sollicitu<strong>de</strong>s et toutes les peines que vous<br />

causent les embarras divers qui vous assiègent à la fois. Jʹai toutefois cette consolation que<br />

ces pénibles épreuves sont presque toujours la préparation <strong>de</strong> quelques grâces insignes<br />

ménagées par la divine bonté du Seigneur. Jʹen ai eu lʹexpérience bien souvent et vous‐<br />

même, en y pensant, vous retrouverez quʹaprès <strong>de</strong>s situations comme désespérées, toutes<br />

choses ont tout à coup repris un sens favorable et se sont dénouées à votre entier conten‐<br />

tement. Ayons bonne espérance que tout tournera ainsi dans vos affaires, et surtout pour<br />

la plus intéressante, lʹexamen <strong>de</strong> votre cher Richard. Voilà les gran<strong>de</strong>s chaleurs passées,<br />

lʹétu<strong>de</strong> va lui <strong>de</strong>venir moins pénible et il va reprendre confiance; le but quʹil veut atteindre<br />

mérite bien un courageux effort, car ce titre <strong>de</strong> bachelier pose mieux et lui ouvrirait plu‐<br />

sieurs carrières si, dans la suite, il lui plaisait dʹen rechercher quelquʹune. Mais le profit le<br />

plus sérieux, cʹest que les étu<strong>de</strong>s opiniâtres quʹon suit pour arriver à ce gra<strong>de</strong> ouvrent lʹes‐<br />

prit à plusieurs sciences quʹon peut prendre goût à cultiver plus tard. Je vais redoubler <strong>de</strong><br />

prières pour que la grâce <strong>de</strong> Dieu lʹassiste puissamment à bien prendre les choses; quand il<br />

ne serait pas reçu dès la première épreuve, le malheur ne serait pas bien grand; nombre et<br />

nombre infini <strong>de</strong> sujets distingués subissent cet échec qui ne préjuge aucunement <strong>de</strong> lʹinfé‐<br />

riorité <strong>de</strong> ceux qui échouent; mais il faudrait dans ce cas être un peu persévérant et ne pas<br />

reculer <strong>de</strong>vant quelques instants dʹétu<strong>de</strong> <strong>de</strong> plus; alors, cʹest un heureux insuccès, parce<br />

que la science ainsi acquise est plus soli<strong>de</strong> et <strong>de</strong>meure bien plus fructueuse pour lʹesprit.<br />

Cʹeût été pour moi une véritable joie <strong>de</strong> vous rendre visite, Madame, ainsi quʹà Ma‐<br />

dame dʹHurbal et à votre cher fils, mais je perds même lʹespoir dʹaller quelques jours en<br />

Normandie; les gran<strong>de</strong>s chaleurs mʹont causé un épuisement nerveux qui me rend la mar‐<br />

che presque impossible et qui ne me permettrait pas dʹentreprendre un voyage en ce mo‐<br />

ment; je pense que la température plus ferme pourra me rendre un peu moins faible; mais<br />

alors les mauvais temps seront revenus et mes travaux auront redoublé; tout me laisse<br />

donc croire que je ne <strong>de</strong>vrai pas mʹéloigner <strong>de</strong> Paris cette année.<br />

Heureusement, lʹesprit et le cœur nʹont pas besoin <strong>de</strong> jambes pour franchir les dis‐<br />

tances, jʹose donc dire que lʹun et lʹautre feront <strong>de</strong> fréquents voyages vers vous, Madame,<br />

et vers votre chère famille que <strong>de</strong>puis si longtemps déjà jʹai appris à aimer et à vénérer.<br />

1394


Veuillez offrir lʹexpression <strong>de</strong> ces sentiments à votre cher entourage et agréer vous‐<br />

même, Madame, lʹhommage du respectueux dévouement <strong>de</strong><br />

Votre humble serviteur et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong> P tre<br />

P. S. Ayez, je vous prie, la bonté <strong>de</strong> me rappeler au souvenir <strong>de</strong> votre cher oncle et<br />

<strong>de</strong> Madame la Comtesse <strong>de</strong> Caulaincourt; ce mʹest un vrai regret dʹavoir, par ma négli‐<br />

gence tout involontaire, perdu lʹoccasion <strong>de</strong> voir sa chère fille; jʹespère que sa santé sʹest<br />

améliorée puisquʹelle a quitté Auteuil.<br />

1441 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Observations sur le retard excessif apporté à lʹordination du frère Trousseau et les étu<strong>de</strong>s qui lui restent à com‐<br />

bler. Pénurie dʹargent. MLP. a reçu <strong>de</strong>s autorités romaines les remarques concernant les Constitutions.<br />

Chaville, 16 août 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu, <strong>de</strong> lʹAdministration du Chemin <strong>de</strong> fer, les billets <strong>de</strong> <strong>de</strong>mi‐place, je présume<br />

donc que le voyage projeté sʹaccomplira au jour marqué; nos ff., sans doute, vous écriront<br />

un <strong>de</strong>rnier avis; M. Caille mʹa répondu cordialement, comme je le présumais bien.<br />

Pour M. Cauroy, je prie pour lui, ma lettre lui disait assez nos bonnes dispositions<br />

pour lui, jʹespère que Dieu lʹéclairera; il y a dans son fait beaucoup dʹinexpérience <strong>de</strong>s cho‐<br />

ses <strong>de</strong> ce mon<strong>de</strong>, le temps et la grâce <strong>de</strong> Dieu y remédieront, je le crois.<br />

Il me semble, quant à lʹordination <strong>de</strong> M. Trousseau, quʹil serait tout à fait chrétien et<br />

charitable <strong>de</strong> consulter son attrait pour le temps où on <strong>de</strong>vrait la préparer. Il nous paraît ici<br />

que, nonobstant un désir contraire exprimé par nous, vous ten<strong>de</strong>z toujours et invincible‐<br />

ment à reculer cette consécration <strong>de</strong> notre frère. Il ne semblerait pas impossible quʹil eût<br />

une connaissance au moins suffisante <strong>de</strong> ce traité <strong>de</strong> la grâce, quʹun bon résumé bien fait<br />

mettrait peut‐être plus nettement dans son esprit que <strong>de</strong>s explications fort développées,<br />

utiles peut‐être pour le petit nombre, et qui embarrassent parfois la tête au lieu <strong>de</strong> lʹéclai‐<br />

rer. Il est probable aussi que Mgr dʹAmiens [Mgr Boudinet], qui sait bien nos besoins, ferait<br />

lʹordination ou lʹautoriserait volontiers, quand même le traité <strong>de</strong> la grâce nʹaurait pas été<br />

vu jusquʹà la fin, si lʹon répondait quʹon lʹachèvera sans y manquer et sans tar<strong>de</strong>r. Je ver‐<br />

rais à cela cet avantage quʹon satisferait M. Trousseau en lui assurant le bonheur <strong>de</strong> dire la<br />

Ste Messe, quʹon lui donnerait la paix en le délivrant <strong>de</strong> la contention où le laisse lʹaspira‐<br />

tion trop longue au but désiré; enfin, on ne priverait pas indéfiniment dʹétu<strong>de</strong> M. Ginet,<br />

quʹon sacrifie ici un peu impitoyablement. Toutefois, je subordonne toutes ces vues à ce<br />

point: M. Trousseau préférerait‐il, comme je lʹindique, que son ordination fût sollicitée<br />

pour le mois <strong>de</strong> septembre? Alors, il conviendrait, selon ma pensée et celle <strong>de</strong> nos MM., <strong>de</strong><br />

chercher cordialement si la chose est praticable. Autrement, si M. Trousseau aime mieux<br />

lʹajournement, nous prendrons lʹaffaire en ce sens; jʹaimerais quʹil me dît franchement son<br />

sentiment.<br />

Jʹenverrai 46f, si je puis, pour nos frères; je suis criblé <strong>de</strong> <strong>de</strong>ttes en ce moment, ayant<br />

eu plusieurs avalanches qui me sont tombées à lʹimproviste et mʹont créé un embarras plus<br />

quʹordinaire.<br />

1395


Rien <strong>de</strong> nouveau ici; je nʹavance pas, comme vous le pensez, mes écritures <strong>de</strong> Direc‐<br />

toires; je suis souffrant <strong>de</strong>puis quelque temps, affaibli par les chaleurs, <strong>avec</strong> jambes pres‐<br />

que impotentes et tête presque aussi peu vali<strong>de</strong>. Je vous enverrai les Animadversiones.<br />

Adieu, mon bien bon ami; je vous suis, comme toujours, affectueusement dévoué.<br />

Votre ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1442 à M. Tourniquet<br />

Encouragement à faire face aux difficultés. Servir Dieu <strong>de</strong> façon désintéressée.<br />

Chaville, 17 août 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Votre lettre du 12, qui mʹest arrivée hier, me met en embarras; elle semble supposer<br />

que jʹen ai reçu <strong>de</strong> vous une autre presque aussi récente et qui mʹaurait entretenu <strong>de</strong> plu‐<br />

sieurs affaires. Cette lettre ne mʹest point parvenue.<br />

Ainsi, dans celle du 12, vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z trois solutions:<br />

1° ‐ sur lʹéchange <strong>de</strong>s timbres‐postes,<br />

2° ‐ sur le tabac,<br />

3° ‐ sur M. Charrin.<br />

Pour ce <strong>de</strong>rnier, votre lettre du 5 <strong>de</strong> ce mois me disait quʹil était toujours découragé<br />

et avait peine à attendre le moment que jʹavais marqué pour son rappel, si, définitivement,<br />

il ne savait pas porter les difficultés <strong>de</strong> sa position. Je crois toujours quʹil serait plus sage à<br />

lui dʹattendre ainsi patiemment; sʹil ne sʹen trouve pas capable, renvoyez‐le près <strong>de</strong> nous<br />

quand vous croirez pouvoir le faire pru<strong>de</strong>mment. Je pense quʹen motivant ce retour sur<br />

<strong>de</strong>s raisons <strong>de</strong> santé, vous obtiendriez aisément du Comité (pour cette raison ou quelque<br />

autre qui vous paraîtrait meilleure) les frais <strong>de</strong> son retour; jʹobtiendrai ici ceux du voyage<br />

<strong>de</strong> son remplaçant. Mais attendre serait mieux, lʹair nʹest pas bon en France présentement,<br />

on y ressent en plusieurs lieux <strong>de</strong>s influences cholériques, pas très considérables, mais ce‐<br />

pendant sensibles.<br />

Pour le tabac et les timbres‐poste, aucune <strong>de</strong> vos lettres ne mʹen a parlé.<br />

Jʹai cru voir aussi que M. Rabusier nʹallait pas bien ou même quʹil serait parti, puis‐<br />

que vous me dites avoir vu M. lʹabbé Louis le matin après le départ <strong>de</strong> Rabusier. Ai‐je mal<br />

compris?<br />

Pour lʹaffaire principale contenue dans votre lettre du 12, attendons, ainsi que vous<br />

le dites bien, il se peut que la chose ne se réalise pas ou que, faite, elle soit moins gênante<br />

que nous ne le craignons. Notre position ne sera jamais mauvaise, en ce sens que nous<br />

agissons <strong>avec</strong> un parfait désintéressement; nous tiendrons bien dans lʹintérêt <strong>de</strong> la cause<br />

sainte que nous servons, nous nous soutiendrons, sʹil le faut, à lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong>s amis que nous<br />

avons à Rome, et, si on nous rend la condition insoutenable, nous nous retirerons. Nous<br />

nʹen sommes pas là, laissons dire les gens mal disposés, prions Dieu et confions‐nous en<br />

Lui. Cʹest Lui que nous servons, Il fera <strong>de</strong> nous ce quʹil voudra dans sa sagesse.<br />

Prenez conseil, en cas nécessaire, près <strong>de</strong>s rr.pp. Brichet et Laurençot. A lʹoccasion,<br />

rappelez‐moi à leur souvenir.<br />

Mille affections à vous et à nos ff.<br />

Votre ami et Père bien dévoué en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1396


1443 à un membre <strong>de</strong> la Commission du Cercle <strong>de</strong>s Zouaves<br />

Le frère Tourniquet pourra remplacer un membre influent <strong>de</strong> la Commission.<br />

Chaville, 18 août 1869<br />

Monsieur,<br />

Bien volontiers, je verrai M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] prêter ai<strong>de</strong> à M. Descemet et le<br />

suppléer temporairement durant son absence. Ce ne sera pas sans quelque préjudice pour<br />

les <strong>de</strong>ux emplois, car M. <strong>Jean</strong>‐Marie, en cette saison surtout, joignant à ses occupations or‐<br />

dinaires la visite <strong>de</strong>s détachements, subvient à peine à sa charge; mais il fera <strong>de</strong> son mieux<br />

et tâchera <strong>de</strong> ne laisser rien en trop gran<strong>de</strong> souffrance.<br />

Je vous prie, Monsieur, <strong>de</strong> lʹavertir que nous ne mettons nul obstacle à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong> M. Descemet; comme jʹai écrit hier même à Rome, je nʹai pas <strong>de</strong> raison <strong>de</strong> le faire <strong>de</strong><br />

nouveau aujourdʹhui, si vous voulez bien communiquer cet avis à M. <strong>Jean</strong>‐Marie.<br />

Veuillez agréer, Monsieur, lʹassurance <strong>de</strong> mes sentiments bien dévoués en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Ptre 1444 à M. Maignen<br />

Encouragement à la fondation dʹun Cercle dʹemployés. Ne pas se surcharger.<br />

Chaville, 18 août [1869]<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je voulais vous envoyer un mot en réponse à votre lettre concernant le Cercle <strong>de</strong>s<br />

Commis, jʹen ai manqué les occasions.<br />

Je bénis Dieu <strong>avec</strong> vous, qui a daigné vous assister pour préparer cette bonne œu‐<br />

vre. Vous aurez bien compris que mes résistances à ce sujet ne regardaient pas lʹœuvre,<br />

que jʹapprécie comme vous, mais seulement la surcharge que vous ne pouviez sagement<br />

ajouter à vos <strong>de</strong>voirs présents et que je me croyais obligé dʹécarter <strong>de</strong> vous. Je prierai <strong>de</strong><br />

tout cœur, comme vous, pour que le Seigneur la mène à bonne fin, tout en persistant à<br />

vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong> ne point vous y engager personnellement.<br />

En reconnaissant les qualités <strong>de</strong> M. Sénart, je crois quʹil est un peu jeune pour la tâ‐<br />

che <strong>de</strong> Prési<strong>de</strong>nt; espérons que tout ira bien néanmoins.<br />

Votre Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1445 à M me et M lle Salva<br />

A propos dʹun éventuel séjour<strong>de</strong> MLP. à Duclair. Si sa santé ne le lui permettait pas, MLP. les accueillerait à<br />

Chaville, ou dans le quartier <strong>de</strong> Nazareth.<br />

Chaville, 19 août 1869<br />

Bien chères amies,<br />

Avant <strong>de</strong> vous répondre, jʹai voulu attendre quelques jours, espérant que mes jam‐<br />

bes <strong>de</strong>viendraient un peu plus fortes; jusquʹici, je ne vois aucun progrès, néanmoins,<br />

comme je mange et dors comme <strong>de</strong> coutume et que je nʹai quʹun extrême épuisement ner‐<br />

1397


veux, je suppose que, vers la mi‐septembre, jʹaurai recouvré assez <strong>de</strong> vigueur pour faire un<br />

petit voyage chez vous; si la chose vous paraît incertaine et que vous préfériez venir vous‐<br />

mêmes à Paris, je nʹai pas besoin <strong>de</strong> vous dire que je serai bien heureux <strong>de</strong> vous voir. Jʹai<br />

fait chercher ici, à Chaville, sʹil existait quelque hôtel ou même auberge décente où vous<br />

pussiez vous poser pour quelques jours; il nʹen existe absolument aucun, toutes les recher‐<br />

ches en divers sens ont été inutiles.<br />

Je pensais que le mieux serait pour vous <strong>de</strong> <strong>de</strong>scendre dans quelquʹun <strong>de</strong>s hôtels<br />

fort convenables qui avoisinent la maison <strong>de</strong> Nazareth, lesquels, étant tout près <strong>de</strong> la gare<br />

Montparnasse, vous mettraient à même <strong>de</strong> me venir voir à Chaville sans nulle fatigue. M.<br />

Paillé, que je consultais à ce sujet, me dit quʹil a en ce moment dans la Maison <strong>de</strong>s vieil‐<br />

lards à Nazareth une assez gran<strong>de</strong> chambre non occupée, quʹil pourrait y mettre <strong>de</strong>ux lits,<br />

le moins mauvais quʹil serait en lui <strong>de</strong> les faire, et quʹune bonne femme <strong>de</strong> Nazareth pour‐<br />

rait vous préparer votre nourriture comme vous lʹentendriez; vous seriez dans la maison<br />

<strong>de</strong>s pauvres, mais ils sont honnêtes et ne vous seraient pas un voisinage désagréable ou<br />

pénible. Vous auriez la petite chapelle à côté <strong>de</strong> vous. On est en ce moment à badigeonner<br />

cette chambre, elle sera prête dans le courant <strong>de</strong> la semaine prochaine. Ceux qui doivent<br />

lʹoccuper ne sont pas, je crois, encore désignés; voyez, chères amies, ce qui vous convient<br />

le mieux; je regrette <strong>de</strong> ne pouvoir vous faire un accueil plus hospitalier, mais notre condi‐<br />

tion nous restreint singulièrement, et plus encore présentement quʹavant notre approba‐<br />

tion à Rome, les règles, un peu facultatives encore jusque là, <strong>de</strong>venant pour nous mainte‐<br />

nant obligatoires.<br />

Adieu, chères amies, je ne désespère pas <strong>de</strong> vous voir dʹune façon ou dʹune autre<br />

puisque, <strong>de</strong> ces diverses combinaisons, soit que jʹaille, soit que vous veniez, lʹune ou lʹautre<br />

paraît bien réalisable.<br />

Votre tout affectionné frère et oncle<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1446 à M. Maignen<br />

Proposition dʹun directeur pour le Cercle <strong>de</strong>s employés; son portrait élogieux.<br />

Vaugirard, 20 août 1869<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je vous communique une pensée qui me vient relativement à la gar<strong>de</strong> habituelle du<br />

Cercle <strong>de</strong>s Commis.<br />

M. Noël [Barbier], chargé ici <strong>de</strong> la sacristie, vient <strong>de</strong> mʹavertir quʹil sent quʹà son âge<br />

la vie <strong>de</strong> communauté est trop ru<strong>de</strong> pour lui et quʹil ne peut sagement sʹy engager, quʹen<br />

conséquence il va être contraint <strong>de</strong> se retirer.<br />

Je crois quʹil serait éminemment propre pour recevoir tous ceux qui viennent au<br />

Cercle et y représenter habituellement la Commission. Jʹavais songé déjà à vous le donner,<br />

comme nous appartenant, mais, voyant les difficultés <strong>de</strong> Vaugirard du côté du personnel,<br />

jʹavais dû y renoncer. Sʹil se retire, vous pourriez le retenir pour le Cercle. Je crois quʹil se<br />

contenterait <strong>de</strong> 1000f, parce quʹil a une petite rente <strong>de</strong> 500f. Si vous lui donniez une cham‐<br />

brette aux Jeunes Ouvriers, il pourrait prendre ses repas à votre restaurant et aurait ainsi<br />

sa vie assurée.<br />

1398


Il a le ton très doux, <strong>de</strong>s manières fort polies, cause bien et est fort excellent homme,<br />

pieux, parfaitement sûr et délicat <strong>de</strong> tout point. Son âge lui donnerait dʹailleurs le poids et<br />

lʹinfluence nécessaires, sans quʹil eût besoin dʹuser <strong>de</strong> comman<strong>de</strong>ment et <strong>de</strong> volontés im‐<br />

pératives, ce qui ne va guère aux jeunes gens.<br />

Voyez, je crois que cʹest une vraie trouvaille pour la position, si la chose vous agrée,<br />

écrivez‐moi sans tar<strong>de</strong>r, afin que je lui en parle; je partirai pour Chaville <strong>de</strong> bonne heure<br />

<strong>de</strong>main, samedi (à 1h.), obligé <strong>de</strong> faire un grand détour pour éviter, <strong>avec</strong> le chemin <strong>de</strong> fer<br />

<strong>de</strong> ceinture, <strong>de</strong> faire quelques pas à pied, mes jambes me refusant leur service.<br />

On me dit que vous êtes souffrant; soignez‐vous, afin <strong>de</strong> vous gar<strong>de</strong>r pour le service<br />

<strong>de</strong> Dieu.<br />

Votre affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1447 à M. dʹArbois<br />

Fondation dʹun patronage pour les enfants <strong>de</strong>s fabriques: pru<strong>de</strong>ntes réserves.<br />

Chaville, 25 août 1869 ‐ St Louis<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je me réjouis <strong>de</strong> la création du nouveau patronage dont vous avez cru possible <strong>de</strong><br />

vous occuper pour les jeunes apprentis <strong>de</strong>s fabriques <strong>de</strong> votre ville. Ma vieille pru<strong>de</strong>nce,<br />

un peu trop timi<strong>de</strong> peut‐être, a bien un peu dʹinquiétu<strong>de</strong>, sans doute, en vous voyant seul<br />

à N.D. <strong>de</strong>s Champs, et M. Moutier seul aussi à la nouvelle œuvre. Lui, si jeune, un peu<br />

trop confiant en ses forces et disposé ordinairement à agir sans beaucoup consulter, peut<br />

trouver là <strong>de</strong>s écueils, mais votre vigilance saura, je lʹespère, le prémunir contre ce danger,<br />

sans néanmoins le priver <strong>de</strong> la part dʹinitiative dont il peut sagement disposer. Je compte<br />

surtout sur lʹai<strong>de</strong> du Seigneur qui voit la droiture <strong>de</strong> vos vues et qui daignera vous assister.<br />

Je pense que vous et vos ff. prenez en ce moment quelque peu <strong>de</strong> repos durant lʹin‐<br />

terruption <strong>de</strong> vos classes; il sera bien court et la charge ordinaire <strong>de</strong> vos travaux reviendra<br />

bientôt sʹimposer à vos épaules. Je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> au bon Maître quʹil daigne la porter <strong>avec</strong><br />

vous, afin quʹunis à Lui et tout allégés, vous puissiez dire: Le joug est doux et le far<strong>de</strong>au<br />

léger. Cʹest la merveille quʹopère le véritable amour.<br />

Encore un peu <strong>de</strong> temps et viendra le moment <strong>de</strong> la retraite; elle sera donnée par le<br />

r.p. Demante (frère <strong>de</strong> notre abbé Demante), jésuite <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Poitiers, et commence‐<br />

ra le dimanche soir 3 octobre; vous verrez si vous et quelquʹun <strong>de</strong> vos ff. pouvez y prendre<br />

part.<br />

Nous attendons ces jours‐ci M. Risse, qui va prendre un peu <strong>de</strong> repos à Chaville. M.<br />

Baumert, le nouvel ordonné, gar<strong>de</strong>ra la Maison en son absence.<br />

Je pense que M. Trousseau va être ordonné en septembre. Il a, à Amiens, la direc‐<br />

tion <strong>de</strong> la <strong>de</strong>uxième maison occupée par lʹorphelinat et un patronage.<br />

Les jeunes Frézet, Rousseau et Vernay (<strong>de</strong> Chaville) ont pris la soutane au jour <strong>de</strong><br />

lʹAssomption.<br />

M. Boiry va un peu mieux, mais je doute quʹil puisse reprendre sa place au sémi‐<br />

naire dʹAngers à la rentrée; je vais tâcher dʹavoir un avis précis du mé<strong>de</strong>cin.<br />

1399


Je ne sais non plus comment ira M. Cauroy; il désire beaucoup suspendre une année<br />

ses étu<strong>de</strong>s, cʹest, je le crois, un mauvais moyen <strong>de</strong> se remettre.<br />

Adieu, mon bien bon ami, assurez tous nos frères <strong>de</strong> ma cordiale affection et pre‐<br />

nez‐en vous‐même une gran<strong>de</strong> part.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1448 à M. Tourniquet<br />

Résumé <strong>de</strong>s difficultés <strong>de</strong> lʹŒuvre <strong>de</strong> Rome; conseils <strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nce. Un jeune postulant est rentré en France.<br />

MLP. soucieux <strong>de</strong> sauvegar<strong>de</strong>r lʹautorité du frère <strong>Jean</strong>‐Marie Tourniquet face à celle <strong>de</strong>s officiers et aumôniers.<br />

Confiance en Dieu.<br />

Vaugirard, vendredi 27 août 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Les lettres se croisent aisément à cause <strong>de</strong>s distances quʹelles parcourent trop len‐<br />

tement. Jʹai reçu ensemble, <strong>de</strong>puis le départ <strong>de</strong> ma <strong>de</strong>rnière dépêche, vos <strong>de</strong>ux lettres <strong>de</strong>s 7<br />

et 11 août et, plus récemment, celles <strong>de</strong>s 19 et 21 du même mois. Par ces missives, jʹai vu le<br />

départ <strong>de</strong> Rabusier, lʹexposé <strong>de</strong> plusieurs questions concernant votre position au Cercle, et<br />

enfin lʹannonce du départ <strong>de</strong> M. Charrin. Un peu avant, et en suite dʹun télégramme en‐<br />

voyé par M. Descemet, jʹai cru ne pouvoir mʹopposer à ce que vous le remplaciez, bien que<br />

cette surcharge me chagrinât singulièrement pour vous, déjà bien assez occupé. Les tim‐<br />

bres‐poste quʹapportait le jeune Rabusier ont peut‐être été remis ou envoyés par lui à M.<br />

Paillé; je nʹen ai, pour moi, point entendu parler; je <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rai <strong>de</strong>main à M. Paillé sʹil les a<br />

reçus; les lettres dont ce jeune homme était porteur me sont parvenues par la poste; sa<br />

conduite est triste, jʹespère que son inexpérience très gran<strong>de</strong> peut un peu lʹexcuser, mais il<br />

est regrettable que vous ne lʹayez pas assez connu pour vous défier davantage <strong>de</strong> sa stabi‐<br />

lité. Le Comité peut, <strong>avec</strong> juste raison, nous reprocher dʹavoir causé à sa caisse, par les<br />

voyages et le séjour <strong>de</strong> cet enfant au Cercle, <strong>de</strong>s dépenses sans résultat; vous auriez dû<br />

imposer à cet étourdi lʹobligation <strong>de</strong> rembourser au Comité au moins ses frais <strong>de</strong> retour, et<br />

même lui faire <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à sa mère lʹargent dont il avait besoin pour ce retour.<br />

Le changement <strong>de</strong> M. Charrin et son remplacement seront encore une occasion <strong>de</strong><br />

dépenses nouvelles.<br />

Le conseil <strong>de</strong>s rr.pp. Brichet et Laurençot est fort sage; allez votre chemin, faites <strong>de</strong><br />

votre mieux sans paraître vous émouvoir autrement <strong>de</strong>s dires ou vues diverses <strong>de</strong> ceux<br />

qui vous entourent. Je ne pense pas que personne autour <strong>de</strong> vous ose prendre sur lui <strong>de</strong>s<br />

mesures <strong>de</strong> quelque gravité, parce que personne nʹa dʹautorité réelle; cʹest le Comité qui a<br />

établi les Cercles et qui en porte les dépenses, lui seul peut prendre quelques dispositions<br />

décisives. Les officiers pourraient désapprouver les Cercles et, en cas graves, les interdire<br />

aux soldats, mais cʹest tout ce quʹils pourraient faire; encore y parviendraient‐ils difficile‐<br />

ment, parce que lʹautorité <strong>de</strong>s uns paralyse celle <strong>de</strong>s autres. Cʹest là la gran<strong>de</strong> cause <strong>de</strong> la<br />

faiblesse <strong>de</strong> tous; personne nʹest assez posé pour faire nettement prévaloir sa volonté. Tâ‐<br />

chez <strong>de</strong> ne heurter personne, mais gar<strong>de</strong>z autant que possible la liberté dʹaction qui vous<br />

est nécessaire. Chacun est persuadé que tout irait beaucoup mieux sʹil était chargé <strong>de</strong> diri‐<br />

ger; les aumôniers, les officiers voudraient avoir omnipotence, mais ils trouveraient résis‐<br />

tance partout sʹils essayaient <strong>de</strong> comman<strong>de</strong>r. Vous avez une position acquise, gar<strong>de</strong>z‐la;<br />

1400


plus vous ferez <strong>de</strong> bien sagement, chrétiennement, plus elle se fortifiera; le dévouement<br />

est la seule puissance qui doive prévaloir dans la situation, telle que la Provi<strong>de</strong>nce lʹa faite<br />

à Rome. Ménagez‐vous toutefois raisonnablement, car, si vos forces sʹépuisent, lʹimpuis‐<br />

sance sʹensuivra.<br />

M. Keller nʹest pas à Paris; dès que jʹaurai occasion <strong>de</strong> le voir, je causerai <strong>avec</strong> lui à<br />

loisir; mais je sais quʹil pense comme nous sur les choses <strong>de</strong> Rome et la condition <strong>de</strong>s Cer‐<br />

cles; il nous soutiendra au besoin, voulant certainement que les aumôniers aient toute faci‐<br />

lité pour leur ministère, mais non quʹils gouvernent les Cercles. Un Conseil ou Commis‐<br />

sion eût été sans doute utile pour vous éclairer et vous appuyer, mais comment le compo‐<br />

ser? Hors M.Descemet, honnête et bon sans doute, mais méticuleux et pas large dans ses<br />

allures, qui pourrait en faire partie? Les officiers? Qui les choisirait? Si les Colonels dési‐<br />

gnaient, ils pourraient bien ne pas convenir, et les autres dʹailleurs leur verraient <strong>de</strong> mau‐<br />

vais œil prendre ce pied; ils obéissent au régiment, mais le Cercle est en <strong>de</strong>hors du com‐<br />

man<strong>de</strong>ment militaire. En tout cela, il y a donc beaucoup <strong>de</strong> difficultés, et on peut présumer<br />

quʹon ne tentera rien <strong>de</strong> bien sérieux.<br />

En <strong>de</strong>rnier ressort, nous sommes les enfants <strong>de</strong> Dieu et ses soumis serviteurs; nous<br />

ferons, au jour le jour, sa très adorable volonté, dès quʹIl daignera nous la manifester;<br />

prions, ayons confiance et suivons en paix notre chemin.<br />

Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S., croyez à tous nos sentiments <strong>de</strong> tendre af‐<br />

fection et partagez‐les <strong>avec</strong> nos ff.<br />

Votre ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1449 à M. Maignen<br />

Critique dʹun dialogue du frère Maignen, la liberté (cf.Scènes et croquis <strong>de</strong> la vie ouvrière). MLP. lui confie<br />

plusieurs démarches.<br />

Vaugirard, 28 août 1869<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Je remets à M. Paillé votre dialogue sur la liberté; cʹest bien; lʹaction fait un peu dé‐<br />

faut, mais on peut peut‐être sʹen passer; peut‐être un ou <strong>de</strong>ux mots un peu exagérés sur la<br />

perfection et lʹinfluence <strong>de</strong> Marcel quand il était sage; le sentiment est vrai, lʹexpression<br />

seule est peut‐être à retoucher un peu, très peu.<br />

Je vous envoie: 1° une lettre <strong>de</strong> M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet], 2° une aussi <strong>de</strong> M. Hel‐<br />

lo. Jʹincline à penser quʹil a raison au sujet du jeune homme que je vous avais proposé. Pré‐<br />

somption, peu <strong>de</strong> jugement et originalité, je le crois, mais <strong>avec</strong> quelque intelligence et aussi<br />

culture dʹesprit; voyez, il y a bien lieu dʹexaminer.<br />

Ci‐joint aussi une lettre à remettre le plus tôt possible à M. Streicher; il mʹa <strong>de</strong>mandé<br />

très instamment trois fois <strong>de</strong> suite à faire un voyage à la mer <strong>avec</strong> la mère dʹun jeune ou‐<br />

vrier et son fils; cʹest inadmissible, il ne le comprend pas du tout; prenez doucement cette<br />

fantaisie, sʹil vous en parle, tout en maintenant mon avis et ma décision.<br />

Lundi prochain, Conseil à Chaville à 2h.1/2. Ma main tremble aujourdʹhui, <strong>de</strong> telle<br />

sorte que je suis illisible; lʹépuisement nerveux est, en ce moment, extrême en moi.<br />

Adieu, bien cher enfant, que Dieu bénisse vous et vos travaux.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1401


1450 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Une promena<strong>de</strong> à Amiens réussie. Le frère Cauroy reprend courage. La santé <strong>de</strong> MLP. est faible. Difficultés à<br />

lʹŒuvre <strong>de</strong> Rome; ne pas multiplier les Commissions: elles alourdissent les Œuvres et gênent les frères dans la<br />

poursuite <strong>de</strong> la fin surnaturelle.<br />

Chaville, 31 août 1869<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Nos ff. et nos persévérants sont revenus si enchantés <strong>de</strong> leur voyage à Amiens, si<br />

reconnaissants surtout <strong>de</strong> la très cordiale hospitalité quʹils ont reçue parmi vous que<br />

jʹeusse dû, pour les satisfaire, écrire sans retard à vous et à M. Caille, et vous dire tout le<br />

bien que vous leur avez fait. A part, en effet, un peu trop <strong>de</strong> fatigue quʹils se sont donnée<br />

en allant à Corbie sans gran<strong>de</strong> raison, leur voyage a été plein <strong>de</strong> douces joies pour eux et<br />

sans aucune cause <strong>de</strong> regret, au point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> lʹordre et <strong>de</strong> la régularité. Tous parlent<br />

<strong>avec</strong> complaisance et gratitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s soins bienveillants et <strong>de</strong>s attentions délicates dont ils<br />

ont été lʹobjet. Je ne mʹen étonne point, car je me souviens <strong>de</strong>s si aimables procédés <strong>de</strong> vo‐<br />

tre bonne mère envers ses hôtes et je comprends bien que, formé par elle, vous ayez retenu<br />

ses prévenances attentives.<br />

M. Planchat, qui a un peu causé <strong>avec</strong> M. Cauroy, lʹa trouvé en meilleure disposition<br />

que je ne lʹespérais; il est vrai que la joie <strong>de</strong> revoir <strong>de</strong>s amis dʹenfance a fait diversion heu‐<br />

reuse à son abattement; il sʹest montré, en définitive, tout disposé à suivre la direction<br />

quʹon lui donnera. Peut‐être reprendrait‐il lʹétu<strong>de</strong> <strong>avec</strong> plus <strong>de</strong> succès et <strong>de</strong> cœur si, sui‐<br />

vant les cours dans un séminaire, il avait, pour lʹai<strong>de</strong>r, une sorte <strong>de</strong> répétition <strong>de</strong>ux ou<br />

trois fois la semaine; cela pourrait se faire, je pense, à Chaville, sʹil suivait le séminaire <strong>de</strong><br />

Versailles; si ce <strong>de</strong>vait être ailleurs, on <strong>de</strong>vrait aviser à lui procurer un répétiteur. Je verrai,<br />

si je vais à Amiens, quels seraient ses sentiments dans ce sens.<br />

Bien que je sois <strong>de</strong>puis quelques semaines dʹune faiblesse telle que je suis presque<br />

impropre à tout, à marcher particulièrement, je désire toujours vous rendre une visite à<br />

lʹoccasion <strong>de</strong> lʹordination <strong>de</strong> M. Trousseau; si je ne <strong>de</strong>viens un peu plus fort, je serais dʹune<br />

gran<strong>de</strong> nullité; jʹespère que la prière, en ces états dʹépuisement, prend plus <strong>de</strong> puissance à<br />

mesure que le corps en a moins.<br />

Aviez‐vous remarqué, dans les corrections faites aux Constitutions, quelques points<br />

qui ne vous sembleraient pas conformes aux Animadversiones?<br />

Comme vous me le disiez <strong>de</strong>rnièrement, la question <strong>de</strong> la chambre pour lʹaumônier<br />

à la Villa Strozzi reste toujours en plusieurs esprits. De son côté, le Capitaine Prévost se<br />

remue, dans la pensée quʹil faut à ce Cercle une Commission. M. Descemet voudrait aussi<br />

avoir plus <strong>de</strong> prise sur la conduite <strong>de</strong>s ff. Je ne sais si, <strong>de</strong> tout cela, il sortira quelque chose<br />

<strong>de</strong> plus ou moins offensif ou gênant pour nos ff. Si, en <strong>de</strong>rnière analyse, on voyait quʹon ne<br />

pourra éviter cette Commission, il me semble quʹil serait sage <strong>de</strong> prévoir quelque peu<br />

comment elle <strong>de</strong>vrait être composée. Moins elle serait nombreuse, et plus on aurait chance<br />

quʹelle fît quelque bien. M. Louis [Klingenhofen], M. Descemet et un officier <strong>de</strong> choix <strong>avec</strong><br />

M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet], ce serait assez, plus un Prési<strong>de</strong>nt; mais là serait la gran<strong>de</strong> dif‐<br />

ficulté, parce que lʹhomme qui conviendrait serait presque introuvable. Il faudrait que sa<br />

personnalité fût grave, afin dʹimposer et dʹavoir une prépondérance, et pourtant il faudrait<br />

quʹil fût assez débonnaire pour suivre les détails, souvent minimes, dont la Commission<br />

aurait à sʹoccuper. M gr Tizzani serait bien, mais trop vieux et ne pourrait être mêlé à la me‐<br />

nue administration du Cercle. Je crois que là serait le point dʹarrêt et peut‐être lʹobstacle<br />

1402


quʹon pourrait mettre en avant pour arrêter lʹar<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> ceux qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt obstinément<br />

une Commission. M. <strong>Jean</strong>‐Marie semble préoccupé et inquiet <strong>de</strong> ces instances en sens di‐<br />

vers; la question <strong>de</strong> la chambre peut être aussi une cause <strong>de</strong> souci pour lui, parce que, <strong>de</strong>r‐<br />

rière M. Louis, il voit M gr Basti<strong>de</strong> et M. Compans. Jusquʹici, il marche au jour le jour, ne di‐<br />

sant rien et laissant dire chacun; cʹest le mieux, tant que ce rôle passif sera tenable.<br />

1 er septembre. Je viens <strong>de</strong> recevoir votre lettre du 30 août; le contenu <strong>de</strong> la présente<br />

y répond en partie. Pour votre retraite <strong>de</strong> Jubilé, je verrai <strong>avec</strong> plaisir que M. Hello ou M.<br />

Planchat vous donnent leur concours; le premier voit une grave difficulté à sʹéloigner <strong>de</strong><br />

Nazareth les samedi et dimanche. Je crains que M. Planchat, à qui je nʹai pas encore parlé,<br />

ne fasse la même objection; cependant, comme M. Risse sera sans doute ici à ce moment, il<br />

pourrait, je lʹespère, remplacer celui <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux qui irait à Amiens; par là, nous pourrons<br />

peut‐être lever lʹobstacle; je vais inviter nos ff. à sʹentendre à ce sujet et à vous donner une<br />

réponse définitive.<br />

Jʹaccueille <strong>avec</strong> joie la bonne espérance, quoique lointaine, que vous donne M. Da<br />

Costa; nous la mettrons au Cœur <strong>de</strong> N.S., afin quʹIl en prépare la réalisation.<br />

Je bénis Dieu du bon succès <strong>de</strong> votre adoration et <strong>de</strong> votre distribution; nous sen‐<br />

tons en toutes nos œuvres sa visible assistance; puisse notre confiance en Lui <strong>de</strong>venir tou‐<br />

jours plus gran<strong>de</strong>, là est notre salut assuré.<br />

Adieu, mon bien cher ami; affections dévouées à vous et à nos ff.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je vais faire une lettre pour M gr dʹAmiens. [Mgr Costa <strong>de</strong> Beauregard]<br />

1451 à M. Caille<br />

Remerciement pour lʹaccueil fraternel aux frères et aux jeunes persévérants.<br />

Chaville, 1 er septembre 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nos ff. et nos jeunes persévérants sont revenus <strong>de</strong> leur voyage dʹAmiens le cœur<br />

plein <strong>de</strong> joie, et aussi bien reconnaissants <strong>de</strong>s marques si cordiales <strong>de</strong> bonne et fraternelle<br />

affection quʹils ont reçues <strong>de</strong> vous comme <strong>de</strong> toute votre maison. Je vous en remercie <strong>avec</strong><br />

eux et, je puis le dire, <strong>avec</strong> toute la Communauté, parce que ces actes <strong>de</strong> vraie charité<br />

concourent à mettre en elle lʹesprit dont elle doit être animée, en son propre sein et dans<br />

ses rapports <strong>avec</strong> le <strong>de</strong>hors. Ce nʹest pas dʹaujourdʹhui du reste, je me plais à le dire, quʹon<br />

expérimente toute la bienveillance <strong>de</strong> votre chère maison; jʹai pu le constater moi‐même et<br />

tous ceux dʹentre nous qui vous ont visités ont été unanimes dans le même sentiment.<br />

Puissent ces bonnes traditions se gar<strong>de</strong>r chez vous et en toutes nos maisons, afin que nous<br />

soyons <strong>de</strong> dignes disciples du Maître qui a dit: Je vous donne ce comman<strong>de</strong>ment nouveau:<br />

que vous vous aimiez les uns les autres comme je vous ai aimés. 424<br />

Je suis en ce moment faible et fatigué, en suite dʹun très grand épuisement nerveux;<br />

rendre visite, si je le puis, à lʹoccasion <strong>de</strong> lʹordination <strong>de</strong> M. Trousseau. M. Alphonse [Vas‐<br />

seur], qui nʹa pu faire partie du pèlerinage, désire mʹaccompagner.<br />

A bientôt donc, mon bien cher ami; je serai heureux <strong>de</strong> passer quelques instants<br />

<strong>avec</strong> vous et <strong>avec</strong> vos frères.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

424 Jn 15, 12.<br />

1403


1452 à M. Chaverot<br />

Comment remplacer MLP. à la chapelle <strong>de</strong> ND. <strong>de</strong> La Salette, pendant son séjour à Duclair. Liberté dʹadorer<br />

Dieu; habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la présence <strong>de</strong> Dieu.<br />

Duclair, 7 septembre 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je suis arrivé ici hier, lundi 6, chez ma sœur, où je dois rester jusquʹà la fin <strong>de</strong> la se‐<br />

maine; je nʹai pas pris soin toutefois <strong>de</strong> mʹentendre <strong>avec</strong> vous pour que vous me fassiez<br />

remplacer samedi prochain à la chapelle <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette, et je ne suis pas sûr que<br />

vous puissiez le faire sans difficulté. Il me semble cependant que M. Lantiez, prévenu à<br />

temps, pourrait dire la messe <strong>de</strong> communauté, M. Demante celle <strong>de</strong> ces Dames <strong>de</strong> la<br />

Convalescence, et vous celle <strong>de</strong> la Salette. Mais, si je ne me trompe, cʹest ce même samedi<br />

11 que doit se faire la clôture <strong>de</strong> lʹadoration à notre chapelle <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Grâces; en ce cas,<br />

on nʹaurait pas à compter sur M. Lantiez, ce qui ferait une lacune difficile à combler. M.<br />

Juéry, vicaire <strong>de</strong> Vaugirard, pourrait‐il vous donner sa messe? Cʹest douteux, en ce temps<br />

<strong>de</strong>s vacances.<br />

Jʹai voulu vous dire à temps ce petit embarras, afin que vous voyiez si vous pouvez<br />

y parer; sinon, je reviendrais vendredi au lieu <strong>de</strong> samedi. Jʹaurais préféré ce <strong>de</strong>rnier jour<br />

parce quʹà peine arrivé ici et à <strong>de</strong>mi reposé du voyage, je suis obligé presque tout <strong>de</strong> suite<br />

<strong>de</strong> me remettre en route; mais je ne veux pas, dʹun autre côté, vous créer une gêne par ma<br />

faute; je vous prie donc <strong>de</strong> me dire si vous voyez quelque moyen <strong>de</strong> pourvoir à la messe<br />

<strong>de</strong> la Salette pour samedi 11; sinon, je reviendrais vendredi à Vaugirard. En me répondant,<br />

je vous serais obligé <strong>de</strong> me renvoyer les lettres qui me seraient arrivées et qui sembleraient<br />

pressantes; si elles nʹavaient rien dʹurgent, inutile <strong>de</strong> me les adresser, je les trouverais sa‐<br />

medi à mon retour.<br />

Je nʹai rien appris <strong>de</strong> nouveau dans ma route et je trouve ici tout comme je lʹavais<br />

vu, il y a trois ans, quand jʹy suis venu; on peut adorer Dieu ici comme à Paris, je mʹy<br />

trouve donc fort bien; partout où jʹaurai ce précieux avantage, le pays, quel quʹil soit, me<br />

plaira; là où est Dieu, Il suffit; Il est partout, on pourrait donc être bien partout; oui, mais<br />

les hommes ne veulent pas quʹon Le serve librement, en tout lieu; voilà ce qui peut faire<br />

que tous les lieux ne soient pas également bons et habitables. Dieu est bon et ses œuvres<br />

sont bonnes, les hommes seuls sont mauvais. Vous le saviez déjà, jʹai voulu seulement<br />

vous montrer que je nʹavais rien appris <strong>de</strong> nouveau et joindre la preuve à ce que je disais à<br />

la première ligne <strong>de</strong> ce paragraphe. Il serait superflu <strong>de</strong> rien dire <strong>de</strong> plus, cʹest pourquoi je<br />

clos ces lignes, en vous assurant (sans nouveauté aussi) <strong>de</strong> mes bien tendres sentiments en<br />

J. et M.<br />

Votre dévoué ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Demain, je vais beaucoup prier notre bien‐aimée Mère pour toutes les âmes <strong>de</strong><br />

notre petite famille et pour toutes celles <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> famille humaine; son cœur est assez<br />

large pour les embrasser toutes, elle est assez puissante pour répandre <strong>de</strong>s grâces sur tou‐<br />

tes.<br />

1453 425<br />

425 Suppléée par la 1262 bis .<br />

1404


1454 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Démarches pour le frère Cauroy. Prochaine ordination du frère Trousseau.<br />

Duclair, 9 septembre 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Votre lettre, qui me cherchait à Paris, ne mʹy a pas rencontré; je suis ici près <strong>de</strong> ma<br />

sœur, <strong>de</strong>puis trois jours et jʹy vais rester jusquʹà après‐<strong>de</strong>main matin samedi. Vous voyez<br />

déjà que le délai trop court dont jʹaurais eu à disposer à Paris pour écrire à Verdun est en‐<br />

core plus insuffisant après ce détour éprouvé par votre dépêche. Je nʹaurais dʹailleurs ici<br />

aucun renseignement sur le temps et le lieu <strong>de</strong> la naissance <strong>de</strong> notre cher f. Cauroy; il y a<br />

donc impossibilité bien nette <strong>de</strong> donner suite à votre pensée concernant la tonsure. Ce qui<br />

est différé ne sera pas perdu, nous le retrouverons à prochaine occasion.<br />

Lʹordination dʹAmiens va coïnci<strong>de</strong>r <strong>avec</strong> la fête <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette à Vaugirard;<br />

elle se fait cette année le 18, et non le 19, à cause du dimanche qui ne serait pas commo<strong>de</strong><br />

pour nos ff. Jʹai quelque regret <strong>de</strong> cette occurrence; je pense néanmoins que je me rendrai à<br />

Amiens, ayant dès longtemps désiré <strong>de</strong> donner cette marque dʹaffection à notre f. Trous‐<br />

seau. Si je dois faire ce voyage, je pense que jʹarriverai la veille <strong>de</strong> lʹordination. Si quelque<br />

chose était changé à cet arrangement, je vous en écrirais.<br />

Ma famille me charge <strong>de</strong> vous offrir ses souvenirs les meilleurs; jʹy joins mes senti‐<br />

ments <strong>de</strong> bien tendre affection pour vous et pour nos ff.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1454‐1 à M. Bouchy<br />

Condoléances à lʹoccasion du décès <strong>de</strong> sa mère. Sʹaffermir dans sa vocation.<br />

Chaville, 13 septembre 1869<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Nous avons appris <strong>avec</strong> une vive affliction la douloureuse épreuve que le Seigneur<br />

vous a imposée en vous retirant votre bonne mère; lʹaffection tendre que vous aviez pour<br />

elle vous a rendu ce coup dʹautant plus sensible quʹil vous a frappé presquʹà lʹimproviste<br />

et sans que vous ayez pu vous y préparer. Bénissons toutefois la divine Miséricor<strong>de</strong>, car<br />

Elle a pris soin dʹadoucir votre peine en vous laissant la consolation <strong>de</strong> penser que votre<br />

bonne mère, si bien préparée par ses pieuses dispositions, nʹa quitté la terre que pour cher‐<br />

cher le ciel. Bienheureux les morts qui meurent dans le Seigneur, dit la Sainte Ecriture; or<br />

si votre excellente mère est ou doit être bientôt heureuse comme nous le pouvons espérer,<br />

nous ne saurions nous affliger comme ceux qui sont sans espérance.<br />

Nous ne sommes pas seulement unis à vos regrets, nous nous sommes associés à<br />

vos prières en <strong>de</strong>mandant tous ensemble dans nos exercices, et au S t Sacrifice surtout, que<br />

le Seigneur ne tar<strong>de</strong> pas à attirer au ciel lʹâme <strong>de</strong> sa fidèle servante, morte dans la foi et<br />

dans la sainte espérance.<br />

Vous pouvez compter tout particulièrement que nos ff. dʹAmiens vous accompa‐<br />

gneront <strong>de</strong> leurs sincères sympathies, ils vous sont déjà très attachés; M. <strong>de</strong> Varax mʹécri‐<br />

vait <strong>de</strong>rnièrement quʹil était très satisfait <strong>de</strong> vos bonnes dispositions et <strong>de</strong> votre zèle dans<br />

vos emplois.<br />

1405


Demeurez donc ferme dans votre vocation qui paraît être vraiment <strong>de</strong> Dieu, et<br />

comme le séjour hors <strong>de</strong> la communauté est toujours une épreuve pour les volontés même<br />

les plus soli<strong>de</strong>s, ne prolongez point votre absence au‐<strong>de</strong>là du temps qui sera nécessaire<br />

pour le règlement <strong>de</strong> vos affaires et affections <strong>de</strong> famille. Votre lettre mʹannonce, du reste,<br />

que telle est votre intention et je présumais bien dʹailleurs quʹil en serait ainsi en me sou‐<br />

venant que vous avez été courageux, dès lʹabord, en vous offrant pour le service <strong>de</strong> Dieu.<br />

Comptez bien quʹil ne laissera aucun sacrifice sans récompense.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, je compte me rendre à Amiens samedi prochain 18,<br />

pour lʹordination <strong>de</strong> M. Trousseau. Ce sera une joie pour moi si je puis vous y trouver.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1455 à M. Maignen<br />

Informations sur un jeune escroc, dont le frère Maignen doit se méfier.<br />

Chaville, 14 septembre 1869<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Des renseignements peu favorables, ou plutôt fort mauvais, me sont donnés <strong>de</strong><br />

main honnête et sûre concernant M. Louis Maze. On mʹassure quʹil nʹy a pas longtemps,<br />

sʹétant revêtu dʹune soutane, il a parcouru une partie du Midi, recueillant frauduleuse‐<br />

ment <strong>de</strong>s aumônes et que, pour ce fait ou pour un autre semblable, il était, en temps <strong>de</strong>r‐<br />

nier, recherché par la police. Tout cela me paraît <strong>de</strong>voir attirer votre attention. Mgr <strong>de</strong> Sé‐<br />

gur et M. Roussel (qui a eu beaucoup à se plaindre <strong>de</strong> M. Louis) pourraient vous rensei‐<br />

gner plus précisément.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1456 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Motifs <strong>de</strong> charité qui déterminent MLP. à faire le voyage dʹAmiens pour lʹordination du frère Trousseau, et ce,<br />

malgré son grand état <strong>de</strong> faiblesse.<br />

Chaville, 14 septembre 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je compte partir vendredi au train <strong>de</strong> 10h. du matin (si je ne me trompe), afin dʹarri‐<br />

ver chez vous dans lʹaprès‐midi. Si je ne considérais que le fonds dont je dispose en santé<br />

présentement, je ne me mettrais point en route, car ma faiblesse est telle que je puis à peine<br />

supporter une marche <strong>de</strong> quelques minutes, et je ne la soutiens même quʹ<strong>avec</strong> difficulté<br />

dans cette mesure. Je partirai néanmoins, désirant donner cette marque dʹaffection à M.<br />

Trousseau et aussi vous faire à tous une visite. A mon grand regret, elle sera bonne au<br />

point <strong>de</strong> la charité seulement, car je ne vois guère que je puisse autrement vous être quel‐<br />

que peu utile dans vos affaires, ayant lʹesprit aussi lassé que le corps. Je pensais donc abré‐<br />

ger pour cette fois mon séjour à Amiens et revenir ici samedi au soir, à moins que quelque<br />

circonstance <strong>de</strong> poids vous semble, ainsi quʹà M. Caille, exiger plus longtemps ma pré‐<br />

sence. Ce nʹest pas assurément pour mʹépargner une fatigue plus ou moins gran<strong>de</strong> que je<br />

1406


prévois ainsi les choses, mais uniquement parce que je me sens impuissant à une action ef‐<br />

ficace et suivie.<br />

Durant quatre ou cinq jours que jʹai passés en Normandie, jʹai dû me refuser à tout<br />

mouvement perceptible au <strong>de</strong>hors, étant incapable <strong>de</strong> le supporter. Le voyage pour le re‐<br />

tour, bien quʹassez court, mʹavait réduit à un épuisement complet. Ces détails, trop longs,<br />

ten<strong>de</strong>nt seulement à excuser lʹinsuffisance très gran<strong>de</strong> dont je suis présentement humilié.<br />

Je prends toutefois nourriture et sommeil; jʹespère donc, si telle est la volonté <strong>de</strong> Dieu, que<br />

cet affaiblissement cessera peu à peu, après que la température sera moins molle.<br />

Jʹai reçu une lettre bonne <strong>de</strong> M. Bouchy; il me paraît en bonne disposition et doit<br />

vous revenir cette semaine.<br />

Adieu, la poste part; on court pour lui faire prendre ce mot.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Communiquer à M. Caille. Amitiés aux ff. Nous prions pour M. Trousseau.<br />

1457 à M me et M lle Salva<br />

Reconnaissance pour leur accueil si affectueux. Liens familiaux à maintenir. Quelques informations pratiques et<br />

commissions.<br />

Chaville, 16 septembre 1869<br />

Bien chères amies,<br />

Me voilà venu ici, et mon trop court congé passé près <strong>de</strong> vous est déjà fini; les joies<br />

sont courtes ici‐bas. Je suis arrivé à bon port, sans nul acci<strong>de</strong>nt, un peu fatigué seulement.<br />

Je suis, comme santé, ce que vous mʹavez vu, sans aucun progrès, très faible conséquem‐<br />

ment, marchant plus ou moins mal, selon les jours et le temps, mais mal toujours.<br />

Jʹai été heureux <strong>de</strong> vous revoir; ces visites, même courtes, rafraîchissent les disposi‐<br />

tions du cœur et maintiennent les liens que Dieu a formés dans la famille. Jʹai revu aussi<br />

<strong>avec</strong> joie vos amis toujours bons et obligeants; en avançant, je mʹassure davantage que les<br />

relations entre les chrétiens sincères sont plus faciles et plus cordiales quʹelles ne sont entre<br />

ceux que la foi et la charité nʹéclairent ni ne réchauffent. Bénissons donc Dieu qui nous a<br />

mis en cette voie meilleure, et malheureusement suivie par le plus petit nombre.<br />

Je ne vous remercie point <strong>de</strong> votre si affectueux accueil, jʹy pouvais compter et jʹy<br />

suis accoutumé, mais je nʹy suis pas moins sensible et jʹen gar<strong>de</strong> un bon souvenir. Vous of‐<br />

frirez à M. le Curé tout particulièrement et à sa famille mes respects et ma reconnaissance<br />

pour la bienveillance quʹils nous montrent, à vous et à moi. Je crois que vous aurez à vous<br />

louer du choix quʹon a fait pour remplacer M. Baudry; vous ne pouviez, il me semble, at‐<br />

tendre mieux.<br />

Jʹespère que lʹindisposition <strong>de</strong> Mme Coiffier a tout à fait disparu.<br />

Offrez aussi mes souvenirs dʹamitié à Mme Lestorey; je regrette <strong>de</strong> ne lʹavoir point vue.<br />

Jʹai laissé dans votre petit salon un numéro <strong>de</strong> la Revue du Mon<strong>de</strong> Catholique; il ne<br />

mʹappartient pas, je vous prie donc <strong>de</strong> le remettre à M. Lami qui aurait lʹobligeance <strong>de</strong> me<br />

le rapporter. Assurez‐le, en même temps, <strong>de</strong> mes sentiments dévoués; je serai aise <strong>de</strong> le<br />

voir à Paris. M. Hello se propose, <strong>de</strong> son côté, <strong>de</strong> le voir et <strong>de</strong> le remercier <strong>de</strong> la bonne dis‐<br />

position quʹil a montrée <strong>de</strong> lʹai<strong>de</strong>r quelquefois à Nazareth.<br />

1407


Nos MM. qui vous connaissent vous offrent leurs respects.<br />

Je nʹai pas pensé, aujourdʹhui que les plus anciens étaient ici à Chaville, <strong>de</strong> les<br />

consulter relativement au prêt que vous consentiriez à faire pour la maison <strong>de</strong> Grenelle,<br />

<strong>avec</strong> les garanties convenables; je vais aujourdʹhui à Vaugirard, je vais leur en parler.<br />

Demain vendredi, je vais aller à Amiens pour lʹordination, comme je vous lʹai dit; je<br />

serai <strong>de</strong> retour lundi, je pense.<br />

Lʹaube a été trouvée magnifique, riche et dʹune belle simplicité et plaît à tous, parce<br />

quʹelle ne ressemble à aucune <strong>de</strong> celles que nous avons.<br />

Je pense que M. Paillé vous a envoyé le portrait et N.D. <strong>de</strong> Lour<strong>de</strong>s; je désire que<br />

lʹun et lʹautre vous soient agréables.<br />

Adieu, bien chères amies, je prie Dieu <strong>de</strong> tout cœur pour vous. Cʹest le moyen le<br />

plus excellent <strong>de</strong> vous témoigner ma tendre affection.<br />

Votre dévoué frère et oncle<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Offrez mon respect à M me Saunois et embrassez pour moi Edouard. Dites à Alber‐<br />

tine que je tiens à ce quʹon me dise <strong>de</strong> temps en temps les progrès quʹelle fait en sagesse et<br />

en piété.<br />

1458 à M. Tourniquet<br />

Difficultés <strong>de</strong> la communauté <strong>de</strong> Rome. Etre plus circonspect dans les relations <strong>avec</strong> les soldats; éviter les diver‐<br />

tissements <strong>de</strong> mauvais goûts. Directives pour lʹétablissement dʹune Commission. Action morale et spirituelle à<br />

mener.<br />

Chaville, 23 septembre 1869<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je prends bien part aux tribulations qui vous adviennent en ce moment, mais rappe‐<br />

lons‐nous cette parole du Divin Seigneur: Bienheureux ceux qui souffrent persécution<br />

pour la justice. Mettons au pied <strong>de</strong> la croix nos petites épreuves et <strong>de</strong>mandons humble‐<br />

ment à Dieu la grâce pour les bien porter.<br />

Je nʹai point encore vu le Capitaine Prévost ni le Colonel, je ne sais sʹils mʹhonore‐<br />

ront <strong>de</strong> leur visite. Quelque rumeur mʹétait déjà venue concernant les reproches quʹon<br />

vous fait, notamment le voyage à Ferentino et quelques détails dʹune fête militaire. Jʹavais<br />

réduit dʹavance à une juste mesure la portée <strong>de</strong> ces accusations et jʹavais pensé que, sʹil y a<br />

eu <strong>de</strong> votre part quelque défaut <strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nce, un peu <strong>de</strong> charité et <strong>de</strong> bienveillance eût suf‐<br />

fi pour expliquer et couvrir lʹimperfection, sʹil y en a eu quelquʹune. Ici encore, il faut, en<br />

toute humilité, accepter les blâmes <strong>de</strong> ceux qui ont été les premiers à vous tendre <strong>de</strong>s piè‐<br />

ges et leur gar<strong>de</strong>r néanmoins les sentiments que veut la charité. Pour tirer profit <strong>de</strong> cette<br />

épreuve, vous <strong>de</strong>vrez, dʹune part, être plus circonspect dans vos rapports <strong>avec</strong> les militai‐<br />

res, quels quʹils soient, particulièrement dans les détachements; éviter <strong>de</strong> manger <strong>avec</strong> eux,<br />

si vous le pouvez; sinon, vous gar<strong>de</strong>r <strong>de</strong> ces expansions quelquefois excessives que vous<br />

croyez propres à établir la cordialité et qui, vous le voyez, engendrent les critiques et le<br />

mépris.<br />

Dʹune autre part, il faut veiller plus que jamais sur le choix <strong>de</strong>s pièces et chants dans<br />

vos fêtes; éviter non seulement les choses mauvaises, mais même les grosses plaisanteries<br />

1408


ou charges <strong>de</strong> mauvais goût. Je vous recomman<strong>de</strong> <strong>de</strong> nouveau cette réserve ainsi quʹà M.<br />

Emile [Beauvais]; je crois que, lʹun et lʹautre, vous nʹêtes pas assez difficiles sous ce rap‐<br />

port.<br />

Je pense bien quʹil sera question ici dʹune Commission à établir pour vos Cercles. En<br />

principe, je ne la repousserais pas; il serait assez naturel que le Comité, les aumôniers et<br />

lʹarmée, intéressés au succès <strong>de</strong>s Cercles quʹils ont fondés et quʹils soutiennent (le Comité<br />

surtout) en surveillent les opérations. Mais il faudrait:<br />

1° ‐ que ce Comité fût composé <strong>de</strong> gens sages et bien‐veillants, je suppose, par<br />

exemple, M. Descemet, M. Louis [Klingenhofen], re<strong>de</strong>venu calme et charitable, un officier<br />

désigné par le Colonel et un Prési<strong>de</strong>nt grave et bien impartial .<br />

2° ‐ que ce Comité prévît les dispositions générales, réglât, en ensemble, la marche<br />

<strong>de</strong>s Cercles, contrôlât les dépenses, mais laissât la conduite et lʹadministration ordinaire à<br />

vous qui en êtes chargés, sans entraver votre action par <strong>de</strong>s interventions tracassières qui<br />

rendraient vos mouvements embarrassés ou impossibles. Peut‐on espérer que les choses<br />

seront conduites en cette voie? Lʹavenir nous le dira; attendons et prions. Dieu, je lʹespère,<br />

sera <strong>avec</strong> nous.<br />

Pour la chambre <strong>de</strong> lʹaumônier, il me paraît presque impossible, surtout <strong>avec</strong> les<br />

dispositions que montre M. Louis, quʹil pût <strong>de</strong>meurer dans la maison sans vous causer <strong>de</strong>s<br />

gênes et <strong>de</strong>s contrariétés incessantes; <strong>avec</strong> quelque réflexion sérieuse, il serait le premier à<br />

le reconnaître; il ne saurait pas sʹabstenir <strong>de</strong> se mêler <strong>de</strong>s choses qui regar<strong>de</strong>nt votre admi‐<br />

nistration et, <strong>de</strong> votre côté, vous ne pouvez admettre quʹon entrave à tout propos vos<br />

mouvements. Quʹil ait un lieu convenable pour confesser, rien <strong>de</strong> mieux, mais je crois quʹil<br />

ne doit pas <strong>de</strong>meurer dans la maison; si on vous contraignait à le souffrir, il faudrait éta‐<br />

blir expressément quʹil ne se mêlera en quoi que ce soit <strong>de</strong> lʹadministration intérieure;<br />

même <strong>avec</strong> cette réserve, il est fort à craindre que vous ne fussiez bientôt contraints <strong>de</strong><br />

quitter la place, parce que la convention ne serait pas bien gardée.<br />

Je vous envoie ci‐joint une lettre que M. Maignen écrit à M. Emile au sujet <strong>de</strong> lʹaf‐<br />

faire Gennetier. Nous désirons lʹun et lʹautre quʹelle sʹarrange en conciliation et nous espé‐<br />

rons quʹil en sera ainsi. Dites <strong>de</strong> ma part à M. Gennetier que je nʹai reçu quʹhier la lettre<br />

quʹil mʹa écrite, étant à Amiens ces jours <strong>de</strong>rniers; dites‐lui aussi que M. Maignen vient<br />

dʹécrire à M. Keller pour avoir la décision du Comité qui, seul, peut ici se prononcer; dès<br />

que nous aurons sa réponse, nous vous lʹenverrons sans nul retard.<br />

M. Emile semble incliner à se charger <strong>de</strong> lʹadministration dʹun restaurant; jʹy répu‐<br />

gnerais extrêmement, voyant en cet arrangement une source <strong>de</strong> désagréments et une sur‐<br />

charge pour <strong>de</strong>s soins purement matériels que dʹautres que nous peuvent prendre; vous<br />

verrez ce que les circonstances <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ront absolument; cʹest toujours pour moi un regret<br />

<strong>de</strong> voir notre action sʹéloigner du moral et du spirituel pour sʹabsorber dans les détails ma‐<br />

tériels; nous ne <strong>de</strong>vons prendre <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>rniers que la part indispensable au succès <strong>de</strong><br />

lʹœuvre spirituelle.<br />

Je gar<strong>de</strong> la note <strong>de</strong>s affaires que vous me rappelez; je vais parler <strong>de</strong>s 600f en tim‐<br />

bres.<br />

Jʹautorise la toute petite réfection <strong>de</strong>mandée, quand parfois vous en sentez, le soir,<br />

un véritable besoin. Si vous pouvez, sans abuser <strong>de</strong> lʹobligeance <strong>de</strong> vos amis, nous envoyer<br />

1409


la Correspondance <strong>de</strong> Rome, nous tâcherons dʹen faire un bon usage. 426 On est, ici, consterné<br />

<strong>de</strong> lʹespèce dʹapostasie du P. Hyacinthe. 427<br />

Adieu, mon bien cher<br />

enfant, assurez nos ff. <strong>de</strong> ma<br />

tendre affection et partagez‐la<br />

fraternellement <strong>avec</strong> eux.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

P. S. Le paquet contenant<br />

votre lettre et la note <strong>de</strong> M. Jouin,<br />

etc. a été décacheté, je ne sais par<br />

qui; le cachet était brisé et<br />

lʹenveloppe déchirée quand on<br />

nous lʹa apportée, <strong>avec</strong> une<br />

déclaration <strong>de</strong> la poste déclarant<br />

quʹelle était arrivée ainsi.<br />

1459 428<br />

1460 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Les Œuvres se compliquent trop et ne<br />

laissent plus la liberté suffisante pour la vie<br />

<strong>de</strong> prière et la vie <strong>de</strong> communauté.<br />

Considérations sur les frères Boiry et<br />

Pra<strong>de</strong>aux.<br />

Chaville, 28 septembre 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Il est bien regrettable que<br />

nos ff. dʹAmiens ne puissent<br />

arriver au commencement <strong>de</strong> la<br />

retraite, et il est fort à craindre quʹaprès lʹexcursion à Boulogne, ceux qui en auront fait par‐<br />

tie ne soient guère en état <strong>de</strong> sʹappliquer aux exercices durant les premiers jours. Mais que<br />

faire? Nous laissons nos œuvres se compliquer toujours davantage, leurs exigences <strong>de</strong>‐<br />

viennent <strong>de</strong> plus en plus impérieuses, la liberté <strong>de</strong> nos mouvements sʹen trouve consé‐<br />

quemment <strong>de</strong> moins en moins gran<strong>de</strong>. Je crois que nous subissons ainsi lʹentraînement du<br />

siècle qui se précipite <strong>de</strong> plus en plus dans lʹactivité; si cette impulsion vertigineuse ne<br />

sʹarrête, où ira donc la pauvre humanité? Cette réflexion morose énoncée, je pense quʹil<br />

faut se résigner à nʹenvoyer les ff. que lundi matin.<br />

426<br />

Pour se tenir informé <strong>de</strong>s préparatifs du Concile qui allait s’ouvrir le 8 décembre 1869, et alors que s’agitait déjà l’opinion religieuse.<br />

427<br />

Le père Hyacinthe Loyson, carme, célèbre prédicateur à N.D. <strong>de</strong> Paris, <strong>de</strong> 1864 à 1868. Cet ancien Provincial se mariera, se révoltera<br />

contre l'infaillibilité pontificale et fon<strong>de</strong>ra une chapelle gallicane. On sait que, sur son lit d’agonie, Ste Thérèse <strong>de</strong> l’Enfant-<br />

Jésus, offrira ses souffrances et sa <strong>de</strong>rnière communion pour lui.<br />

428 bis<br />

Suppléée par la lettre 1359 .<br />

1410


Il y a quelque difficulté à envoyer immédiatement un remplaçant à M. Cauroy, car<br />

ce serait priver <strong>de</strong> la retraite celui quʹon enverrait. Dʹun autre côté, le mé<strong>de</strong>cin mis en <strong>de</strong>‐<br />

meure <strong>de</strong> donner son avis sur la position quʹon pourrait donner à MM. Boiry et Pra<strong>de</strong>aux,<br />

a formellement dit quʹil ne pouvait rien prononcer, quant à présent, concernant ce <strong>de</strong>rnier,<br />

dont lʹétat lʹinquiète et quʹil veut suivre et étudier attentivement. Il est donc impossible<br />

quʹil sʹéloigne pour cette saison. Il répond pour M. Boiry quʹil peut continuer ses étu<strong>de</strong>s,<br />

soit comme externe, soit même comme interne dans un séminaire, à la condition <strong>de</strong> lui<br />

écrire et <strong>de</strong> suivre ses conseils pour sa santé. Pouvez‐vous vous contenter dʹun étudiant<br />

qui suivra le séminaire, lui laisserez‐vous assez <strong>de</strong> liberté pour quʹil étudie sans trop <strong>de</strong><br />

dérangement? Voilà la question. Quant aux aptitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> M. Boiry pour les œuvres, elles<br />

sont plus gran<strong>de</strong>s que vous ne semblez le croire et son caractère est doux et maniable. Le<br />

séminaire dʹAngers mʹa rendu <strong>de</strong> lui les meilleurs témoignages pour les étu<strong>de</strong>s comme<br />

pour la piété et la régularité. Il ne sʹest troublé inci<strong>de</strong>mment quʹà cause <strong>de</strong> la négligence<br />

quʹon mettait à le suivre et à dissiper quelques nuages tels que tous peuvent en avoir <strong>de</strong><br />

semblables. Voyez, mon cher ami, quel sentiment vous avez à ce sujet; nous nʹapercevons,<br />

pour nous, aucun autre secours aussi valable que nous puissions vous donner.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> vos bons soins pour M. Gallais; le séjour dʹAmiens lui fait un<br />

bien extrême; il a écrit une lettre qui a charmé M. Lantiez par le calme et le bien‐être<br />

quʹelle exprime.<br />

Je vais écrire affectueusement à M. Caille pour lui conseiller <strong>de</strong> ne pas intervenir<br />

dans les admissions <strong>de</strong> lʹorphelinat, au moins sans concert <strong>avec</strong> M. Trousseau.<br />

Il faut que je vous quitte, la cloche sonne et vous savez son autorité chez nous.<br />

Vous avez vu la bonne lettre <strong>de</strong> M gr dʹOrléans au p. Hyacinthe; peut‐être ne faut‐il<br />

pas désespérer <strong>de</strong> son retour; prions pour lui, un retour vrai le remettrait sur pied, et meil‐<br />

leur sans doute quʹavant sa chute.<br />

Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Affections à tous.<br />

1461 à M. Caille<br />

Bon souvenir du voyage à Amiens. A qui doit appartenir la décision dʹadmettre les enfants dans un établissement.<br />

Chaville, 29 septembre 1869<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie du bon accueil que vous mʹavez fait à moi‐même et, <strong>de</strong>puis, à M.<br />

Gallais et à M. Risse. M. Gallais, en particulier, sʹest si bien trouvé <strong>de</strong> son séjour à Amiens<br />

quʹune lassitu<strong>de</strong> extrême jointe à une sorte dʹabattement où il était tombé ont entièrement<br />

disparu; il a écrit à Grenelle à nos frères une lettre toute réjouie qui montre le bon état où il<br />

se sent aujourdʹhui; votre hospitalité cordiale aura produit cet heureux résultat. M. Risse<br />

ne paraît pas moins satisfait <strong>de</strong> lʹair dʹAmiens, car son retour, <strong>de</strong>ux fois annoncé, nʹest pas<br />

encore effectué.<br />

M. Cauroy ayant désiré sʹunir, pour continuer ses étu<strong>de</strong>s théologiques, à ceux <strong>de</strong> ses<br />

condisciples qui vont aller au séminaire <strong>de</strong> Versailles, je nʹai pas cru <strong>de</strong>voir mʹy opposer.<br />

1411


Pour le remplacer chez vous, jʹai proposé à M. <strong>de</strong> Varax M. Boiry, bien supérieur en expé‐<br />

rience à M. Cauroy, mais qui nʹest pas musicien comme lui; nous nʹavons pas, en ce mo‐<br />

ment, <strong>de</strong> sujet disponible qui ait ce talent. Nous nʹavons pas encore vu M. Trousseau; je<br />

pense quʹil sera ici aujourdʹhui.<br />

Dans mes entretiens <strong>avec</strong> lui, jʹai vu quʹil sʹinquiète beaucoup <strong>de</strong> la disposition où<br />

vous semblez être <strong>de</strong> faire les admissions en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> lui pour lʹOrphelinat. Je crois quʹen<br />

effet vous pourriez souvent lui créer <strong>de</strong>s difficultés en amoindrissant son autorité auprès<br />

<strong>de</strong>s parents et aussi <strong>de</strong>s enfants. En toutes les Institutions, celui qui a la conduite habituelle<br />

<strong>de</strong> la maison doit avoir le pouvoir dʹadmettre et <strong>de</strong> renvoyer les enfants. Il en est ainsi à<br />

Vaugirard. Depuis que jʹai cessé <strong>de</strong> conduire personnellement la maison, je ne fais jamais<br />

dʹadmission par moi‐même; on sʹadresse souvent à moi, mais, sous prétexte que MM.<br />

Myionnet et Georges [<strong>de</strong> Lauriston] savent mieux sʹil y a <strong>de</strong>s places vacantes, je renvoie à<br />

eux; pour les renvois ordinaires, ils les font aussi; pour <strong>de</strong>s renvois collectifs <strong>de</strong> plusieurs<br />

enfants, ils mʹen parlent dʹordinaire, mais sans que je leur en aie toutefois imposé lʹobliga‐<br />

tion.<br />

Soyez bien sûr que votre autorité ne sera pas pour cela amoindrie, ni intérieure‐<br />

ment, ni extérieurement; ayant maintenant <strong>de</strong>ux établissements (sans compter vos affaires<br />

propres), vous exercez sur lʹensemble une haute surveillance, en abandonnant aux Direc‐<br />

teurs particuliers lʹadministration habituelle.<br />

Nous nous préparons à la retraite, je ne sais si vous y pourrez prendre quelque part;<br />

vous viendrez du moins pour la réunion qui aura lieu <strong>de</strong>s anciens membres <strong>de</strong> la famille<br />

après la retraite; nous nʹavons pas encore décidé si ce sera le lundi ou le mardi; on vous<br />

lʹécrira.<br />

Adieu, mon bien bon ami; nous serons, <strong>de</strong> quelque façon que ce soit, unis pendant<br />

cette retraite, car si tous nʹy sont pas corporellement, ils y mettront assurément leurs cœurs<br />

et leurs prières.<br />

Croyez bien à ma tendre affection en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1462 à M. Maignen<br />

Recrutement et formation au Noviciat. MLP. souhaite <strong>de</strong>s religieux à la vocation éprouvée. Une formation soli<strong>de</strong>.<br />

Nous faisons ce qui est faisable <strong>avec</strong> les éléments dont on dispose. Importance <strong>de</strong> la pério<strong>de</strong> du Noviviat.<br />

Chaville, 29 septembre 1869<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Jʹen conviens volontiers, je ne porte pas assez la contradiction, surtout sʹil sʹy mêle<br />

quelque exagération; lundi, en particulier, je vous ai parlé trop impétueusement; je mʹen<br />

suis excusé cordialement et jʹai tâché, dans le reste <strong>de</strong> la séance, <strong>de</strong> vous marquer mon dé‐<br />

sir <strong>de</strong> vous faire oublier cette peine. Il ne semble pas que jʹy aie réussi, puisque vous<br />

mʹécriviez hier une lettre très irritée dʹun bout à lʹautre ; pour achever, sʹil se peut, <strong>de</strong> vous<br />

apaiser, je vais vous répondre doucement, comme je voudrais toujours le faire.<br />

Jʹai dit à M. Streicher, relativement à la pièce préparée au Cercle, que lʹexigence <strong>de</strong><br />

M. Hello me paraissait un tort et que je tâcherais dʹy obvier à lʹavenir; pour le moment,<br />

voulant prévenir lʹéclat que les dispositions <strong>de</strong> M. Hello faisaient craindre, jʹai conseillé à<br />

M. Streicher <strong>de</strong> faire acte <strong>de</strong> vertu en lui envoyant la pièce; sans plus différer, M. Paillé<br />

1412


mʹétant venu voir dans la journée, je lʹai chargé dʹavertir M. Hello que je désapprouvais sa<br />

prétention et que je me réservais <strong>de</strong> le lui dire moi‐même.<br />

Je crois quʹaprès y avoir un peu pensé <strong>de</strong>vant Dieu, vous nʹeussiez pas fait autrement.<br />

La question que vous me signalez pour le Conseil, concernant le recrutement et la<br />

formation <strong>de</strong>s sujets, me paraît, comme à vous, <strong>de</strong>s plus sérieuses; vous feriez un travail<br />

bien utile si vous développiez ce sujet dans une note, où vous expliqueriez les moyens<br />

quʹon <strong>de</strong>vrait prendre pour arriver à cette fin.<br />

Jʹen entrevois bien quelques‐uns et on les emploiera, je lʹespère, à mesure que,<br />

moins insuffisants pour nos charges, nous pourrons donner à nos maisons un personnel<br />

plus nombreux et surtout plus expérimenté. Quant à présent, nous faisons, je fais pour ma<br />

part tout ce qui paraît praticable. Je ne parle pas seulement <strong>de</strong> tout ce que nous avons fait<br />

pour fon<strong>de</strong>r, au prix <strong>de</strong> si grands sacrifices, le Noviciat, mais nous y avons préposé <strong>de</strong>ux<br />

<strong>de</strong> nos meilleurs sujets ecclésiastiques et laïcs [MM. J. Faÿ et Audrin]; les frères <strong>de</strong>stinés au<br />

sacerdoce sont entretenus, sans compter la dépense, dans les Séminaires, et, pour les ff.<br />

laïcs, on cultive pour lʹinstruction ceux qui ont quelques aptitu<strong>de</strong>s qui prêtent au dévelop‐<br />

pement, et on les forme <strong>avec</strong> un zèle soutenu au point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> la vie chrétienne et reli‐<br />

gieuse. Jʹai cru, pour ma part, que je suivais les vues <strong>de</strong> Dieu en donnant à cette œuvre si<br />

importante le meilleur <strong>de</strong> mes <strong>de</strong>rnières heures en ce mon<strong>de</strong>. Quelques pas sont faits en<br />

cette voie et quelques fruits ont déjà été recueillis; il faut en attendre <strong>de</strong> plus nombreux du<br />

temps et <strong>de</strong> la patience.<br />

Quelques‐uns <strong>de</strong>s sujets les plus capables <strong>de</strong> culture parmi les laïcs, MM. Derny et<br />

Moutier en particulier, ont été privés <strong>de</strong>s épreuves <strong>de</strong> la formation du Noviciat; nous en<br />

gémissons tous, mais peut‐on oublier la dure nécessité que nous avons subie et quelquʹun<br />

peut‐il parmi nous en imputer la faute à lʹun ou à lʹautre <strong>de</strong>s Supérieurs ou Conseillers?<br />

Il nʹy a point <strong>de</strong>ux balances au Noviciat ni dans aucun acte <strong>de</strong> notre administration,<br />

à lʹégard <strong>de</strong>s novices laïcs et <strong>de</strong>s novices ecclésiastiques, les uns et les autres ont, <strong>avec</strong> la<br />

seule différence <strong>de</strong> la matière <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s, le même traitement, le même régime et, je lʹat‐<br />

teste, les mêmes égards et la même affection.<br />

Parfois, les moyens <strong>de</strong> formation varient selon les natures diverses. M. Ginet étudie<br />

très lentement, parce que la trempe <strong>de</strong> son esprit le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>; M. Gérold a fait à Amiens 18<br />

mois <strong>de</strong> postulat parce que son caractère, extrêmement irascible, avait besoin dʹêtre brisé<br />

au frottement <strong>de</strong>s œuvres, avant que son esprit pût être façonné, éclairé au Noviciat. M.<br />

Bouchy Joseph a été envoyé, pour une raison analogue, au <strong>de</strong>hors, à cause <strong>de</strong> son extrême<br />

ignorance du véritable sens <strong>de</strong> notre vocation; dans un an, il reviendra <strong>avec</strong> grand avan‐<br />

tage faire un Noviciat sérieux. Ainsi, nous étudions toutes les aptitu<strong>de</strong>s et, autant quʹil dé‐<br />

pend <strong>de</strong> nous, nous y donnons satisfaction. Nos moyens sont bornés, nous allons le moins<br />

mal quʹil nous est possible, opérant, comme on le fait, <strong>avec</strong> les rudiments <strong>de</strong>s choses qui<br />

commencent; ceux qui viendront après nous auront dʹautres ressources et procé<strong>de</strong>ront<br />

plus largement; espérons que Dieu bénira le travail <strong>de</strong>s uns et <strong>de</strong>s autres.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je prépare ma lettre pour M. Keller. Le Comité a <strong>de</strong>mandé quʹon joignît à la lettre<br />

pour M. Keller une copie du traité passé <strong>avec</strong> Gennetier; il serait donc nécessaire que vous<br />

fissiez faire immédiatement une expédition et que vous me la remettiez le plus tôt possi‐<br />

ble.<br />

1413


1463 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Sur la retraite <strong>de</strong> communauté. Chapitre général à Chaville.<br />

Vaugirard, 7 octobre 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

La retraite marche, enseignement soli<strong>de</strong> et ferme, mais un peu austère <strong>de</strong> forme, pas<br />

dʹimages, pas assez dʹapplications, pas assez dʹonction, un peu trop sévère conséquem‐<br />

ment pour plusieurs; lʹensemble néanmoins et le résultat seront bons <strong>avec</strong> la grâce <strong>de</strong><br />

Dieu.<br />

Lundi matin, à 10h., réunion du Chapitre à Chaville.<br />

Samedi, dans la matinée, M. Boiry, très bien disposé et très valable, croyez‐le bien,<br />

partira pour se rendre à Amiens; vous aurez ainsi le temps <strong>de</strong> vous entendre <strong>avec</strong> lui et<br />

aussi <strong>de</strong> le présenter au séminaire, <strong>de</strong> telle sorte quʹil puisse, dès le premier jour, se présen‐<br />

ter aux cours, sʹil est bien, comme je le suppose, quʹil le fasse.<br />

Je ne puis en écrire plus long, je vous verrai bientôt. Les longs écrits ne sont pas né‐<br />

cessaires.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1464 à M. Caille<br />

Information sur la retraite. Le frère Boiry à Amiens.<br />

Vaugirard, 7 octobre 1869<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Notre retraite marche bien, elle se clora samedi comme <strong>de</strong> coutume; dans la matinée<br />

<strong>de</strong> ce jour, M. Boiry partira pour se rendre vers vous, afin <strong>de</strong> remplacer M. Cauroy.<br />

Lundi matin, à 10h., le Conseil Général ou Chapitre se réunira à Chaville; vous y se‐<br />

rez attendu ainsi que M. <strong>de</strong> Varax.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1465 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Diverses questions concernant la maison dʹAmiens.<br />

Vendredi soir, 8 octobre [1869]<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Ne me gron<strong>de</strong>z pas si jʹai trop tardé à vous répondre; la retraite mʹa trouvé cette fois<br />

plus faible encore que <strong>de</strong> coutume et je nʹai que bien imparfaitement pu en supporter les<br />

charges.<br />

M. Risse a, du reste, écrit à son jeune homme quʹil lʹattendait pour <strong>de</strong>main samedi;<br />

cʹest presque le moment que vous aviez désigné.<br />

Consolez et encouragez M. Bouchy; un peu dʹexpérience le mettra vite au niveau <strong>de</strong><br />

sa position; comment M. Lemaire, qui concourt aux surveillances le dimanche, nʹa‐t‐il pu<br />

1414


lʹai<strong>de</strong>r et dominer les enfants? Je ne puis penser quʹil lʹait laissé en peine pour rehausser<br />

son autorité propre, ce serait trop pervers.<br />

Bonne retraite, soli<strong>de</strong>, élevée, pieuse, un peu austère en ensemble, surtout les <strong>de</strong>ux<br />

premiers jours, mais bien plus accessible dans ceux qui ont suivi. On est content. Jʹespère<br />

quʹil y aura profit pour les âmes.<br />

Adieu, mon bien bon ami, à lundi.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. <strong>de</strong> Madre a trouvé les formes les meilleures pour notre Société Civile. On peut y<br />

comprendre M. Caille. Tout le mon<strong>de</strong> a paru satisfait. On prépare les éléments <strong>de</strong> lʹacte à<br />

dresser.<br />

P. S. M. Boiry montrant beaucoup <strong>de</strong> regret <strong>de</strong> quitter Angers, je crois que je vais<br />

être obligé <strong>de</strong> lʹy renvoyer; je ne sais pas encore qui nous pourrons trouver pour votre<br />

maison.<br />

1466 à M. Caille<br />

Invitation à participer au Chapitre général. Statut <strong>de</strong>s Œuvres dʹAmiens.<br />

Vaugirard, 9 octobre 1869<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Nous aurions un grand regret si vous nʹétiez pas présent au moins pour lundi à no‐<br />

tre assemblée <strong>de</strong> Chaville; vous pourrez, si vous le voulez, arriver le matin <strong>avec</strong> M. <strong>de</strong> Va‐<br />

rax, et repartir le soir si vos obligations dʹaffaires lʹexigent.<br />

Nous vous donnerons communication dʹun projet <strong>de</strong> Société Civile pour les im‐<br />

meubles qui semblerait soli<strong>de</strong>ment établi. Si vous voulez apporter les titres <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux mai‐<br />

sons <strong>de</strong> la rue <strong>de</strong> Noyon, on en prendrait lʹénoncé si, comme je le pense, vous trouvez le<br />

projet bien conçu.<br />

Notre retraite a été bonne, jʹespère quʹelle laissera dʹheureuses impressions.<br />

Vos ff. vont vous revenir au moment convenu entre vous.<br />

A lundi donc, mon bon ami; nous aurons messe à Chaville à 9h. et ouverture <strong>de</strong> la<br />

réunion à 10h.<br />

Votre tout affectionné Père et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1466‐1 à M. Caille<br />

Télégramme convoquant dʹurgence M. Caille à lʹassemblée <strong>de</strong> Chaville.<br />

Monsieur CAILLE, 32 rue NOYON. AMIENS.<br />

Votre présence nécessaire immédiatement si possible.<br />

Apporter titres et quittances <strong>de</strong>s trois immeubles.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1415<br />

11 octobre 1869


1467 à M. Tourniquet<br />

Difficultés aux Cercles Militaires: ménagements à lʹégard <strong>de</strong>s aumôniers. Voyage du père Lantiez à Rome. Rai‐<br />

son dʹaccepter une Commission.<br />

Vaugirard, 19 octobre 1869<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

M. le Vicomte Anatole Lemercier, lʹun <strong>de</strong>s membres les plus influents du Comité,<br />

est parti pour Rome <strong>de</strong>puis trois jours; il y est sans doute, et vous lʹaurez peut‐être vu déjà.<br />

Vous pourrez vous entendre <strong>avec</strong> lui, en particulier pour lʹaffaire Gennetier, et faire ce<br />

quʹil vous conseillera. Je pense quʹil maintiendra aussi la décision très formelle du Comité<br />

qui sʹoppose absolument au logement au Cercle <strong>de</strong>s aumôniers. Je mʹétonne que M. Des‐<br />

cemet ait si peu compris la portée <strong>de</strong>s vues <strong>de</strong> MM. les aumôniers et lʹintérêt quʹavait le<br />

Comité à sʹy opposer; <strong>de</strong>s renseignements sûrs, venus <strong>de</strong> Rome, avaient informé MM. du<br />

Comité assez nettement pour quʹil sût à quoi sʹen tenir.<br />

Je répondrai à M. Emile [Beauvais] au plus tôt et jʹécrirai, si je puis, à M. Jouin.<br />

Après‐<strong>de</strong>main jeudi, 21, je ferai partir le jeune Pappaz pour remplacer aux Zouaves M.<br />

Charrin; je crois quʹil fera bon ménage <strong>avec</strong> M. Emile; cʹest aujourdʹhui un grand jeune<br />

homme <strong>de</strong> 20 ans, tout à fait capable <strong>de</strong> bien tenir cette position; vous veillerez beaucoup<br />

sur cette jeune âme, chère à Dieu et bien préservée.<br />

En même temps, M. Lantiez, ayant pour la Communauté une mission absolument<br />

étrangère aux Cercles, se rendra aussi à Rome pour quelques semaines. Il va sans dire quʹil<br />

ne pourra loger à la Villa Strozzi; son arrivée, après les entreprises <strong>de</strong>s aumôniers, aurait<br />

trop lʹair dʹun acte dʹopposition; rien nʹest plus loin <strong>de</strong> notre pensée. Vous verrez où il<br />

pourrait loger convenablement sans trop <strong>de</strong> frais. Peut‐être serait‐il praticable, quand<br />

Gennetier aura quitté le Palais Mariscotti, que M. Lantiez y trouvât une petite chambre<br />

momentanément; il resterait aussi étranger dʹailleurs aux Zouaves quʹà la Légion. Vous<br />

agirez toutefois pru<strong>de</strong>mment et sans risquer <strong>de</strong> vous susciter <strong>de</strong> nouveaux ennuis; je<br />

pense, du reste, que si MM. les aumôniers sʹoccupent <strong>de</strong> M. Lantiez, ils seront bientôt<br />

convaincus quʹil nʹest à Rome pour aucune cause qui puisse les intéresser.<br />

Présentez mes respects au Commandant Cirlot; il a eu la bonté <strong>de</strong> venir à Vaugirard<br />

en mon absence, je lʹai profondément regretté; <strong>de</strong> tous les officiers <strong>de</strong> la Légion, il nʹen est<br />

aucun pour qui je me sente plus dʹestime et <strong>de</strong> sympathie. Jʹai vu le Capitaine <strong>Prevost</strong>,<br />

mais pas le Colonel; je ne sais sʹils ont, <strong>avec</strong> M. Keller, arrangé quelque chose pour ce qui<br />

regar<strong>de</strong> la Commission; M. Lemercier y avisera sans doute, si on a jugé quʹon <strong>de</strong>vait pren‐<br />

dre ce parti. Jʹai écrit au Comité quʹen ce cas il me semblerait nécessaire que vous fissiez<br />

partie <strong>de</strong> cette Commission. Je nʹai du reste aucun indice qui me montre quʹon y songe. Je<br />

pense, pour ma part, que, si elle était bien composée, elle pourrait vous appuyer et vous<br />

conseiller utilement; en bien <strong>de</strong>s occasions, un avis bienveillant et éclairé vous serait avan‐<br />

tageux.<br />

Trois jeunes zouaves viennent <strong>de</strong> venir ici à Nazareth, dʹoù je vous écris, pour sʹen‐<br />

quérir dʹun paquet <strong>de</strong> timbres <strong>de</strong> 200 et quelques francs qui y aurait été, disent‐ils, déposé<br />

en juillet <strong>de</strong>rnier; nul ici nʹen a souvenir ni trace.<br />

Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S., croyez, vous et vos ff., à tous mes senti‐<br />

ments <strong>de</strong> tendre affection en N.S.<br />

Respects aux rr.pP. Brichet et Laurençot. Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹai envoyé votre lettre à M. Keller.<br />

1416


1468 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Départ du père Lantiez pour un séjour <strong>de</strong> six semaines à Rome. Appel du père <strong>de</strong> Varax à Rome.<br />

Vaugirard, jeudi 21 octobre 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Lantiez est parti cet après‐midi pour son grand voyage; il emmène <strong>avec</strong> lui le<br />

jeune f. Pappaz qui va ai<strong>de</strong>r M. Emile [Beauvais] au Cercle <strong>de</strong>s Zouaves.<br />

Comme vous lʹavez bien compris, cette absence <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux mois, six semaines au<br />

moins, va nous créer, dans les premiers moments surtout, quelques difficultés; il importe,<br />

pour le <strong>de</strong>dans comme pour le <strong>de</strong>hors, que rien ne semble fléchir et déchoir, car les âmes<br />

ne sont pas toutes fortes à lʹintérieur, et, à lʹextérieur, la critique et le blâme arrivent vite. Je<br />

pense, conséquemment, que nous aurons besoin, au centre <strong>de</strong> la famille, dʹun peu dʹappui.<br />

M. dʹArbois, plus isolé et moins entouré que vous, pouvant difficilement se déplacer pré‐<br />

sentement, il semble quʹil sera mieux que vous veniez nous prêter ai<strong>de</strong>. Peut‐être serait‐il<br />

bien, avant tout, que nous pussions concerter <strong>avec</strong> vous ce qui serait à faire pour nous for‐<br />

tifier un peu ici, sans trop démunir Amiens qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> aussi <strong>de</strong>s ménagements. Je dési‐<br />

rerais donc que vous puissiez, lundi 25, faire une apparition ici à cet effet. Je serai ce jour‐<br />

là à Nazareth; vous mʹy trouverez. Si vous désiriez me voir plutôt avant quʹaprès la Confé‐<br />

rence ecclésiastique, il faudrait mʹavertir par un mot qui me dirait lʹheure à laquelle vous<br />

seriez rendu à Nazareth, afin que jʹy sois moi‐même.<br />

Communiquez cette lettre à M. Caille, cʹest pour vous ensemble que je lʹécris. Je<br />

crois quʹil vaut mieux ne rien dire aux ff. pour éviter les entretiens inutiles.<br />

Adieu, mon bien cher ami et fils en N.S., ayons gran<strong>de</strong> confiance et prions <strong>avec</strong> foi;<br />

Dieu tirera quelque grand bien <strong>de</strong>s quelques difficultés <strong>de</strong> nos travaux si nous nous ap‐<br />

puyons beaucoup sur Lui, comptant sur sa paternelle et miséricordieuse bonté.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong> Ptre 1469 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Comment subvenir aux besoins <strong>de</strong>s Œuvres en personnel. Contrordre pour le voyage dʹAmiens à Paris.<br />

Vaugirard, 27 octobre 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Myionnet comprend les difficultés que votre absence, insuffisamment préparée,<br />

pourrait apporter aux œuvres dʹAmiens; il va donc, <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> moi, prendre <strong>de</strong>s me‐<br />

sures pour marcher sans vous jusquʹaprès la Toussaint; à ce moment, si votre ai<strong>de</strong> lui est<br />

absolument nécessaire, je vous lʹécrirai. Je suis heureux que les choses puissent se régler<br />

ainsi, afin <strong>de</strong> ménager le bien qui se fait à Amiens, comme celui quʹon essaie <strong>de</strong> faire ici.<br />

Jʹattends aujourdʹhui M. Baumert, que M. Risse prête temporairement pour le pa‐<br />

tronage <strong>de</strong> Grenelle.<br />

Partagez <strong>avec</strong> M. Caille et nos autres ff. tous mes sentiments dʹaffectueux dévoue‐<br />

ment. Remerciez pour moi M. Vincent <strong>de</strong> sa bonne petite lettre; nous serons bien satisfaits<br />

en constatant lʹexcellent effet pour sa santé <strong>de</strong> son séjour parmi vous. M. Gallais a éprouvé,<br />

<strong>de</strong> son côté, un mieux sensible quʹil attribue aussi à votre cordial accueil.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1417


1470 à M. dʹArbois<br />

Nécessité <strong>de</strong> travailler au bien général <strong>de</strong> lʹInstitut; utilité du voyage du père Lantiez à Rome.<br />

Chaville, 28 octobre 1869<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Je ne suis pas sûr que M. Caille ait encore signé lʹacte <strong>de</strong> Société; MM. Risse, Faÿ,<br />

Planchat, Hello sont en règle; trois associés nouveaux dans notre entourage sont entrés<br />

aussi dans lʹopération; dès que je me serai assuré que tous ont signé, je vous lʹécrirai sans<br />

retard.<br />

Nos ff. du Conseil persistent à penser que vous <strong>de</strong>vez revenir pour ai<strong>de</strong>r aux choses<br />

<strong>de</strong> la Congrégation ici; M. <strong>de</strong> Varax a trouvé <strong>de</strong> graves difficultés à quitter Amiens tant<br />

quʹon ne peut lʹy remplacer; lʹarrangement que nous projetons ne serait donc guère possi‐<br />

ble quʹau retour <strong>de</strong> M. Lantiez; même à ce moment, il serait bien désirable que M. <strong>de</strong> Va‐<br />

rax, sʹil allait à Angers, pût y passer quelques semaines <strong>avec</strong> vous pour y bien prendre po‐<br />

sition. Dès que les choses se <strong>de</strong>ssineront mieux par lʹannonce du retour <strong>de</strong> M. Lantiez, je<br />

mʹen entendrai <strong>avec</strong> vous. Son voyage à Rome semble avoir été réglé provi<strong>de</strong>ntiellement.<br />

Certaines difficultés que rencontrent là nos ff. y ren<strong>de</strong>nt en ce moment la présence <strong>de</strong> M.<br />

Lantiez fort utile et, à vrai dire, nécessaire.<br />

Assurez nos ff. <strong>de</strong> nos sentiments <strong>de</strong> bien cordiale affection et prenez‐en, cher ami,<br />

une belle part aussi.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1471 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Ajournement sine die du voyage <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax à Paris. Nouvelles <strong>de</strong>s frères. Allusion à quelques difficultés<br />

<strong>avec</strong> M. Caille.<br />

Chaville, 30 octobre 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Myionnet, que je viens <strong>de</strong> consulter après la réception <strong>de</strong> votre lettre, pense que<br />

nous <strong>de</strong>vons marcher au jour le jour et ne vous déranger <strong>de</strong> vos œuvres et travaux quʹau<br />

moment où nous verrons que votre ai<strong>de</strong> nous <strong>de</strong>vient indispensable. Nous avons pu sui‐<br />

vre le train courant cette semaine et nous espérons que M. Baumert, qui est animé <strong>de</strong>s<br />

meilleures dispositions, va bien prendre position à Grenelle; allons donc ainsi en dépen‐<br />

dance <strong>de</strong> Dieu, prêts à faire sa sainte volonté, dès quʹIl nous la manifestera par le moindre<br />

signe.<br />

Faites tous vos efforts pour vivre en paix <strong>avec</strong> M. Caille; ne faut‐il pas, si vous <strong>de</strong>‐<br />

vez, un peu plus tôt ou un peu plus tard, quitter Amiens, que vous y laissiez pour tous un<br />

regret <strong>avec</strong> un doux souvenir? Je pense que, si vous le pressez un peu cordialement, il<br />

vous remplacera aux Jeunes Ouvriers durant la soirée <strong>de</strong>s confessions.<br />

Je nʹai pas encore <strong>de</strong> nouvelles <strong>de</strong> nos voyageurs <strong>de</strong> Rome; jʹen attends bientôt.<br />

M. Guillot gar<strong>de</strong> ses emplois à St ‐Charles et à Vaugirard, il ne les pourrait abandon‐<br />

ner que pour combler à Amiens quelque part du vi<strong>de</strong> quʹy ferait votre absence, si vous <strong>de</strong>‐<br />

viez venir ici. Je tâcherais, en ce cas, <strong>de</strong> vous lʹenvoyer <strong>de</strong>ux ou trois jours à lʹavance.<br />

1418


Je reçois une bonne lettre <strong>de</strong> M. Lemaire qui me semble être en disposition satisfai‐<br />

sante.<br />

Nous apprenons <strong>avec</strong> plaisir que M. Caille va venir dans le cours <strong>de</strong> cette semaine<br />

pour la signature <strong>de</strong>mandée; le notaire déclare que lʹacte doit être clos et régularisé et ne<br />

pourrait attendre davantage son achèvement. Mercredi, nous serons à Chaville pour la<br />

messe à lʹintention <strong>de</strong> nos ff., parents et bienfaiteurs défunts; nous penserons à tous ceux<br />

qui vous étaient chers et que Dieu a rappelés à Lui.<br />

Mille bons souvenirs à nos ff. et cordiales affections pour vous.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

4 ou 5 pouces <strong>de</strong> neige durant un jour et <strong>de</strong>mi; hier fondue; recommence <strong>de</strong> plus<br />

belle aujourdʹhui; gelée à 3 ou 4 <strong>de</strong>grés la nuit.<br />

1472 à M. Tourniquet<br />

Visite à M. Keller. Instructions pour la constitution <strong>de</strong> la Commission <strong>de</strong>s Cercles. ʺQuʹelle se compose <strong>de</strong> gens<br />

dʹesprit droit et sans passion, quʹon vous y admetteʺ.<br />

Vaugirard, 1er novembre 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹattendais aujourdʹhui <strong>de</strong> vos nouvelles ou une lettre <strong>de</strong> M. Lantiez; pour prendre<br />

mieux patience, je commence à vous écrire moi‐même.<br />

Jʹai vu mardi <strong>de</strong>rnier M. Keller, <strong>de</strong> retour à Paris <strong>de</strong>puis la veille seulement; il ne<br />

mʹa pas paru être impressionné défavorablement en suite <strong>de</strong>s rapports que lui ont fait le<br />

Colonel et le Capitaine Prévost; il est vrai quʹil est fort discret, comme il convient que soit<br />

un homme politique, et que son silence nʹa pas <strong>de</strong> signification bien précise. Il est dʹavis,<br />

<strong>avec</strong> le Comité, quʹon doit composer une Commission <strong>de</strong> trois ou quatre personnes bien<br />

choisies pour la haute direction du Cercle; jʹai insisté sur ces points quʹon fût bien attentif à<br />

ne pas gêner lʹaction habituelle <strong>de</strong>s frères et quʹon vous mît <strong>de</strong> la Commission projetée. Jʹai<br />

entrevu que <strong>de</strong>s instructions avaient déjà été envoyées en ce sens à M. Lemercier. On lʹa<br />

aussi chargé <strong>de</strong> préparer, <strong>avec</strong> la Commission, un projet <strong>de</strong> règlement. Je crois quʹil serait<br />

fort à souhaiter quʹon ne mette point dans cette Commission ceux qui vous sont systéma‐<br />

tiquement opposés.<br />

Je ne vois aucun fait intéressant à vous communiquer dʹailleurs concernant les Cer‐<br />

cles; la présence à Rome <strong>de</strong> M. Lemercier transporte là en ce moment lʹexamen <strong>de</strong>s ques‐<br />

tions qui vous occupaient, celle <strong>de</strong> Gennetier en particulier.<br />

Je pense que M. Emile [Beauvais] est content <strong>de</strong> son jeune compagnon [Pappaz].<br />

M. Paillé mʹa remis pour vous, en <strong>de</strong>ux versements à distance, 72 et 60f provenant<br />

<strong>de</strong> valeurs à vous appartenant; si vous le trouviez à propos, jʹenverrais 50f à M. <strong>de</strong> Varax<br />

pour votre sœur (je ne sais pas laquelle) qui se plaint beaucoup.<br />

M. Keller a exprimé <strong>de</strong> nouveau la volonté expresse que M. Louis [Klingenhofen] ne<br />

<strong>de</strong>meurât pas à la Villa Strozzi; je pense quʹil lʹaura dit aussi à M. Lemercier, je ne lui ai pas<br />

<strong>de</strong>mandé.<br />

2 novembre.‐ Je reçois à lʹinstant la dépêche télégraphique <strong>de</strong> M. Lantiez et jʹy ai ré‐<br />

pondu, comme vous lʹavez vu, par un télégramme à M. Lemercier. Je nʹai pas le temps<br />

1419


dʹécrire aujourdʹhui à M. Lantiez, mais tout ce que jʹaurais à lui dire est compris ici; aller<br />

pru<strong>de</strong>mment, gar<strong>de</strong>r pour vous position digne et liberté suffisante pour agir dans lʹintérêt<br />

du bien; tâcher que la Commission se compose <strong>de</strong> gens dʹesprit droit et sans passion,<br />

quʹon vous y admette, cʹest tout ce que je vois.<br />

M. Paillé attend cette lettre.<br />

Tendres affections pour tous.<br />

Votre ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1473 à M. Maignen<br />

Heure dʹune messe pour les frères et parents défunts.<br />

Vaugirard, 3 novembre [1869]<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

La messe pour nos ff. et parents défunts aura lieu <strong>de</strong>main à 8h., la majorité <strong>de</strong> ceux<br />

qui doivent y assister ayant désiré quʹil en fût ainsi pour la communion.<br />

Après la messe, simple déjeuner au café ou chocolat.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Avez‐vous une réponse <strong>de</strong> M. Benoît dʹAzy?<br />

1474 à M. dʹArbois<br />

Quelques nouvelles. Rumeurs sur le remplacement <strong>de</strong> Mgr Angebault.<br />

Vaugirard, 9 novembre 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je crois que votre présence au mariage dont vous mʹavez parlé est suffisamment<br />

motivée par les raisons énoncées en votre lettre; vous aurez, je pense, présumé ce consen‐<br />

tement, sʹil en a été besoin.<br />

Lʹacte chez M. <strong>de</strong> Madre est en règle; on vous a désigné comme secrétaire, comptant<br />

sur votre exactitu<strong>de</strong> pour les formes à suivre plus que sur celle <strong>de</strong> tout autre. M. Paillé a<br />

dû vous en écrire.<br />

M. Lantiez est à Rome; son voyage, qui semblait être sans utilité précise pour nos af‐<br />

faires, se trouve répondre précisément aux besoins <strong>de</strong> notre petite Communauté romaine.<br />

Nous nʹavons rien dʹarrêté pour le moment où nos changements désirés <strong>de</strong> person‐<br />

nel pourront être réalisés; il faut marcher sans hasar<strong>de</strong>r comme sans trop tâtonner, en<br />

priant Dieu <strong>de</strong> nous inspirer.<br />

Nous ne recevons pas <strong>de</strong> nouvelles <strong>de</strong> notre cher M. Boiry; nous désirons quʹil nous<br />

écrive particulièrement au sujet <strong>de</strong> sa santé; plus il est isolé, plus il <strong>de</strong>vrait correspondre<br />

fréquemment <strong>avec</strong> ceux quʹil a quittés; une lettre plus ou moins étendue, selon le besoin,<br />

ne serait pas trop tous les mois ou six semaines.<br />

Rien <strong>de</strong> nouveau ni <strong>de</strong> notable ici; tous vous affectionnent comme <strong>de</strong> coutume ainsi<br />

que les vôtres, assurez‐les <strong>de</strong> nos bons souvenirs.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

On nʹentend rien dire touchant le remplacement <strong>de</strong> notre vénéré Père M gr lʹEvêque<br />

dʹAngers.<br />

1420


1475 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Diverses questions intéressant la famille <strong>de</strong> sa bienfaitrice. Dans le climat politique <strong>de</strong> ʺnotre pauvre Franceʺ,<br />

MLP. se réjouit <strong>de</strong> la nomination, à un poste <strong>de</strong> responsabilités, dʹun homme sage et loyal.<br />

Vaugirard, 9 novembre 1869<br />

Madame la Marquise,<br />

Pardonnez‐moi dʹavoir tant tardé à répondre à votre aimable lettre; <strong>de</strong>s malaises<br />

successifs, occasionnés par les premières atteintes <strong>de</strong> la mauvaise saison, mʹont fort déran‐<br />

gé dans mes travaux; je ne veux pas toutefois différer davantage à vous remercier, ainsi<br />

que votre cher entourage, <strong>de</strong> vos bons souvenirs, si précieux pour moi.<br />

Je prends la plus vive part à vos sollicitu<strong>de</strong>s, et je les ai mises bien <strong>de</strong>s fois <strong>de</strong>vant<br />

Dieu; je comprends, je dirais presque que je sens les souffrances <strong>de</strong>s mères en ce qui tou‐<br />

che le bonheur <strong>de</strong> leurs enfants, et je mʹassocie cordialement à vos préoccupations au sujet<br />

<strong>de</strong> votre cher fils. Jʹespère quʹelles vont trop loin et que lʹissue <strong>de</strong> ses épreuves sera meil‐<br />

leure que vous ne pensez.<br />

Je nʹoserais émettre un avis relativement à un séjour momentané <strong>de</strong> votre cher Ri‐<br />

chard dans une maison <strong>de</strong> préparation pour les examens, ne connaissant pas assez ses ha‐<br />

bitu<strong>de</strong>s et son caractère pour rien préjuger en ce sens. Prise en général, la question me<br />

semblerait bien plus facile à résoudre, parce que je vois <strong>de</strong> grands avantages pour un jeune<br />

homme à goûter un peu <strong>de</strong> la vie en commun et à sentir le frottement <strong>avec</strong> ses semblables,<br />

puisque, tôt ou tard, il faudra bien subir ce contact.<br />

Jʹai eu un moment la pensée quʹil serait peut‐être utile <strong>de</strong> consulter le r.p. Olivaint,<br />

qui connaît votre cher fils et qui pourrait indiquer les établissements les plus sûrs, ou indi‐<br />

quer dʹautres moyens; je ne pourrais faire cette démarche sans y être autorisé par vous; si<br />

vous la jugiez utile, Madame, je la ferais <strong>de</strong> grand cœur, dans la supposition où votre re‐<br />

tour à Paris ne serait pas tout prochain.<br />

Jʹai commencé les 50 messes <strong>de</strong>mandées par Madame dʹHurbal; dans la pensée<br />

quʹelle désire que ses intentions soient bientôt remplies, je donnerai la moitié <strong>de</strong> ces mes‐<br />

ses à lʹun <strong>de</strong> nos ecclésiastiques.<br />

Jʹai vu quelques instants <strong>de</strong>rnièrement votre bien bon oncle, M. <strong>de</strong> Caulaincourt, et<br />

je viens <strong>de</strong> recevoir un bulletin qui mʹannonce, si je ne me trompe, quʹil est nommé <strong>de</strong><br />

nouveau membre du Conseil Général, je mʹen réjouis; les hommes sages et <strong>de</strong> loyales vues<br />

comme lui sont trop rares aujourdʹhui dans les affaires <strong>de</strong> notre pauvre France.<br />

Je vais attendre, Madame la Marquise, le moment qui ramènera ici vous et votre<br />

chère maison; ce me sera une vraie joie <strong>de</strong> vous revoir et <strong>de</strong> vous assurer <strong>de</strong> nouveau du<br />

bien respectueux dévouement <strong>avec</strong> lequel je suis<br />

Votre humble serviteur et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1476 à M. Maignen<br />

Affaire à régler <strong>avec</strong> M. Lantiez envoyé à Rome en lui ʺmontrant <strong>de</strong> lʹaffectionʺ.<br />

Vaugirard, 13 novembre [1869]<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Lantiez mʹécrit que lʹaffaire <strong>de</strong> Gennetier, qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> toujours 500f, ne se ter‐<br />

mine point; il désirerait que vous lui écriviez un mot dʹavis; M. Descemet déclare que cela<br />

1421


nous regar<strong>de</strong> et ne veut pas se mêler, dit‐il, <strong>de</strong> cette affaire quʹil trouve mal commencée;<br />

tous nos ff. jugent la prétention injuste et croient quʹon ne doit rien donner. Ecrivez un mot<br />

à M. Lantiez; montrez‐lui affection, il reste fort abattu et consomme difficilement le sacri‐<br />

fice que nous lui imposons. Ne touchez point cette question, cordiale affection seulement.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Paillé vous aura dit que je vous priais <strong>de</strong> prendre le <strong>de</strong>rnier avis <strong>de</strong> M. Boucault.<br />

Devons‐nous, à lʹarrivée <strong>de</strong> M. Benoît dʹAzy, nous borner à une lettre <strong>de</strong> remerciement, en<br />

avertissant que M. Boucault est content, ou faudra‐t‐il faire une visite pour connaître<br />

mieux les intentions <strong>de</strong> M. Benoît?<br />

1477 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Atelier <strong>de</strong> bronze. Faire agir les grands jeunes gens pour le bien <strong>de</strong> lʹŒuvre. Difficultés aux Cercles <strong>de</strong> Rome.<br />

Proposition <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r pour cardinal protecteur le cardinal Préfet <strong>de</strong> la Propagan<strong>de</strong>; <strong>de</strong>s évêques dʹAmérique<br />

prêts à nous acccueillir. ʺMarcher fermement dans la voie souvent un peu ru<strong>de</strong> où Dieu nous a misʺ.<br />

Vaugirard, 13 novembre 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹavais prié M. Caille <strong>de</strong> son<strong>de</strong>r un peu M. Trouille pour sʹassurer si notre atelier <strong>de</strong><br />

bronze ne lui conviendrait pas, à la condition <strong>de</strong> sʹinitier un temps convenable à cette<br />

branche <strong>de</strong> lʹindustrie; je crains que M. Caille nʹait perdu la chose <strong>de</strong> vue, je vous serais<br />

obligé <strong>de</strong> la lui rappeler.<br />

En conversant <strong>avec</strong> lui, jʹai insisté sur le bien quʹon pourrait faire à vos grands jeu‐<br />

nes gens si on les mêlait peu à peu aux services <strong>de</strong>s œuvres, plus quʹon ne lʹa fait jusquʹà<br />

présent; on trouverait aussi <strong>de</strong>s ai<strong>de</strong>s bien utiles <strong>de</strong> cette façon; cʹétait le grand secret <strong>de</strong> M.<br />

Allemand, et cʹest sur ce fond quʹil a assis son œuvre; je ne sais si M. Caille en aura causé<br />

<strong>avec</strong> vous.<br />

Jʹespère que M. Bouchy ira mieux et que ses malaises auront été acci<strong>de</strong>ntels; je me<br />

tranquillise à son sujet, sachant bien que vous suivez attentivement ceux qui vous entourent.<br />

A Rome, il y a une sorte <strong>de</strong> conciliation, je ne suis pas sûr qu’elle nʹest pas plus ap‐<br />

parente que réelle; une Commission composée <strong>de</strong> Mgr Basti<strong>de</strong>, <strong>de</strong> MM. Descemet et <strong>Jean</strong>‐<br />

Marie [Tourniquet], commence à fonctionner; il est à penser que Mgr Basti<strong>de</strong> sera ordinai‐<br />

rement remplacé par M. Louis [Klingenhofen]. Nous essaierons, en bonne volonté, cette<br />

combinaison. Les chambres sont livrées, je ne sais si on y couchera.<br />

Pour le projet <strong>de</strong> Cardinal protecteur, on me proposait celui <strong>de</strong> la Propagan<strong>de</strong>, di‐<br />

sant que nous pourrions présenter pour motif que, <strong>de</strong>s évêques dʹAmérique nous propo‐<br />

sant <strong>de</strong> former <strong>de</strong>s sujets quʹils nous enverraient afin <strong>de</strong> préparer pour ce pays <strong>de</strong>s établis‐<br />

sements comme les nôtres, nous aurions, avant tout, besoin dʹêtre dirigés et protégés par la<br />

Propagan<strong>de</strong>. Quʹen pensez‐vous? Quel est ce Cardinal? Auriez‐vous quelque meilleure<br />

vue? Il me semblait, pour moi, quʹil eût été bien <strong>de</strong> laisser tomber quelque temps la petite<br />

rumeur et émotion que les démêlés <strong>avec</strong> les aumôniers avaient suscitées; si on insiste, je fe‐<br />

rai ce quʹon <strong>de</strong>man<strong>de</strong>; je ne sais pas bien quelles formes sont à suivre; on me dit: <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>s, une au Saint Père, lʹautre au Directeur (est‐ce Directeur?) <strong>de</strong> la Propagan<strong>de</strong>.<br />

1422


Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S.; marchons fermement dans la voie, souvent<br />

un peu ru<strong>de</strong>, où Dieu nous a mis; cʹest, suivant sa divine parole, emporter après Lui sa<br />

croix et Le suivre.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je ne me souviens plus du moment où doit commencer et finir votre retraite; ne<br />

manquez pas dʹy beaucoup prier pour nous tous.<br />

1478 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

A propos dʹune nomination provisoire à Paris; MLP. a confiance en M. <strong>de</strong> Varax, car ʺle dévouement et la géné‐<br />

rosité ne lui font pas défautʺ.<br />

Chaville, 15 novembre 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Votre retraite commence aujourdʹhui, je ne veux pas la troubler; je note seulement<br />

ici ce point qui, soit maintenant si on vous renvoie ma lettre, soit à votre retour si elle vous<br />

attend rue <strong>de</strong> Noyon, vous témoignera quʹil nʹy a point eu <strong>de</strong> malentendu entre nous, tou‐<br />

chant la pensée que jʹavais eue <strong>de</strong> vous appeler temporairement à Vaugirard. Je nʹai pas<br />

douté un seul instant <strong>de</strong> votre volonté <strong>de</strong> vous rendre à mon avis, en quelque sens que je<br />

lʹeusse prononcé, ni <strong>de</strong> votre disposition parfaite <strong>de</strong> faire à Vaugirard tout le bien que le<br />

cas eût <strong>de</strong>mandé; jʹai tenu compte <strong>de</strong> votre répugnance à laisser vos œuvres en souffrance,<br />

et par la considération même <strong>de</strong> cette souffrance et parce que le sentiment que vous en<br />

aviez était extrêmement prononcé; si jʹeusse vu un intérêt majeur à passer outre, je lʹeusse<br />

fait, et si je voyais utilité impérieuse à mʹy arrêter en avançant, soyez sûr, mon bon ami,<br />

que jʹagirais sans hésiter. Le dévouement et la générosité ne vous font point défaut que je<br />

sache, votre éducation et les habitu<strong>de</strong>s élevées <strong>de</strong> votre maison vous y ont accoutumé; je<br />

mʹen souviendrai bien, croyez‐le, quand lʹoccasion le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ra.<br />

Je termine ici ces quelques mots, en <strong>de</strong>mandant instamment à Dieu quʹIl bénisse les<br />

saints exercices <strong>de</strong> votre retraite et vous cache pendant ces jours <strong>de</strong> recueillement dans les<br />

Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre tout dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1479 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

MLP. voudrait confier à M. Trouille la direction <strong>de</strong> lʹatelier <strong>de</strong> ciselure <strong>de</strong> Vaugirard. Il sʹinforme <strong>de</strong> ce qui sʹy<br />

oppose.<br />

Vaugirard, 17 novembre 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Voulez‐vous bien me dire pour quels motifs les parents <strong>de</strong> M. Trouille refusent leur<br />

agrément à sa mise en possession <strong>de</strong> notre fabrication <strong>de</strong> bronzes? Est‐ce à cause <strong>de</strong> lʹéloi‐<br />

gnement, pourtant peu notable, où il serait dʹAmiens? A cela, nous nʹaurions rien à oppo‐<br />

ser, si leur répugnance est bien prononcée. Est‐ce parce que les avances <strong>de</strong> fonds les ef‐<br />

1423


fraient? Sous ce <strong>de</strong>rnier rapport, nous serions peu exigeants <strong>avec</strong> un jeune homme qui<br />

nous inspire une réelle confiance aussi bien que sa famille.<br />

Je vous écris ces mots entre <strong>de</strong>ux réceptions que doivent suivre plusieurs autres.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1480 à M. Ginet 429<br />

Encouragement à un scolastique qui doutait <strong>de</strong> sa vocation sacerdotale.<br />

Chaville, 17 novembre 1869<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je bénis Dieu <strong>de</strong> lʹesprit <strong>de</strong> soumission quʹIl vous inspire et <strong>de</strong> la confiance filiale<br />

<strong>avec</strong> laquelle vous me laissez le soin <strong>de</strong> vous diriger pour votre vocation.<br />

Les qualités les plus essentielles pour aspirer au sacerdoce, la piété, lʹesprit dʹabné‐<br />

gation et <strong>de</strong> renoncement, je les ai <strong>avec</strong> joie reconnues en vous. Les conditions <strong>de</strong> second<br />

ordre, aptitu<strong>de</strong> pour lʹétu<strong>de</strong> et libre intelligence, vous les avez à un <strong>de</strong>gré convenable, si‐<br />

non éminent. Comme empêchements vous objectez une santé un peu frêle et une timidité<br />

encore mal surmontée; sous ce double rapport, vous êtes en progrès et je crois que lʹavenir<br />

vous apportera <strong>de</strong> nouveaux avantages. Je crois donc, cher enfant, que vous pouvez per‐<br />

sister dans lʹaspiration que vous avez eue jusquʹici vers le saint ministère, et jʹespère que<br />

Dieu vous ai<strong>de</strong>ra à y arriver. Si sa volonté se manifestait en sens contraire, Il vous trouve‐<br />

rait tout disposé à lʹaccepter <strong>avec</strong> amour.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1481 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Un jeune homme doit sʹéloigner <strong>de</strong> Vaugirard. Amiens pourrait lʹaccueillir.<br />

Vaugirard, 25 novembre 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Le jeune Dufour, <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Vaugirard où il fait la classe <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux ans déjà,<br />

est tellement obsédé par son père, dont la conduite est déplorable, que nous nʹavons dʹau‐<br />

tre moyen <strong>de</strong> le soustraire à cette calamité que <strong>de</strong> lʹenvoyer au loin. Je vous prie, ainsi que<br />

M. Caille, <strong>de</strong> le recevoir provisoirement et dʹétudier ses aptitu<strong>de</strong>s. Après cet examen, vous<br />

verriez sʹil peut remplacer utilement, pour votre Maison, un <strong>de</strong> vos ff. que vous nous ren‐<br />

verriez, en vous concertant <strong>avec</strong> M. Caille dʹabord, et ensuite <strong>avec</strong> nous. Pour plus <strong>de</strong> sûre‐<br />

té, je crois bon que le jeune Dufour change son nom et prenne celui <strong>de</strong> Girard ou un autre<br />

à votre choix. Il fait bien la classe et les surveillances, est fort maniable et bon, un peu fai‐<br />

ble <strong>de</strong> caractère; il fera tout ce que vous voudrez et <strong>avec</strong> droite volonté.<br />

Il est essentiel que les ff. dʹAmiens ne révèlent dʹaucune façon son séjour au milieu<br />

<strong>de</strong> vous, séjour qui nʹaura rien dʹailleurs qui soit illégal, le Commissaire <strong>de</strong> Police ici étant<br />

429 Note <strong>de</strong> M. Ginet: En réponse à une lettre écrite d’Amiens, dans laquelle je marquais à notre vénéré Père que le sentiment <strong>de</strong> mon<br />

insuffisance me faisait mettre en doute ma vocation sacerdotale.<br />

1424


en mesure <strong>de</strong> déclarer que son père ne pourrait exercer convenablement son autorité sur<br />

lui.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1482 à M. Caille<br />

Accueil possible dʹun jeune homme quʹil faut éloigner <strong>de</strong> Vaugirard (cf. lettre 1481).<br />

Vaugirard, 25 novembre 1869<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Le jeune Dufour, lʹun <strong>de</strong>s nos jeunes aspirants qui, <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux ans déjà, fait la<br />

classe à notre maison <strong>de</strong> Vaugirard, est tellement obsédé par son père dont la conduite est<br />

<strong>de</strong>s plus désordonnée, quʹil nous faut le soustraire à cette calamité en lʹéloignant. Je vous<br />

prie <strong>de</strong> le recevoir, dʹétudier ses aptitu<strong>de</strong>s et <strong>de</strong> voir ensuite si on peut lʹéchanger contre un<br />

<strong>de</strong> vos frères. Il fait bien la classe et les surveillances; il est intelligent, maniable et se prête‐<br />

ra à tout. Je crois quʹon en serait content chez vous. Si, après examen, vous ne voyiez pas<br />

sa place, jʹaviserais à le caser autrement. Il ferait, je crois, mieux que M. Barthélemy [Mar‐<br />

chand] à N.D. <strong>de</strong>s Victoires, mais je verrais quelque difficulté à faire revenir ce <strong>de</strong>rnier à<br />

cause <strong>de</strong> sa mère; ces considérations viendront en leur temps.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je désirerais que, pour plus <strong>de</strong> sûreté, il prît un nom, Girard ou quelque autre.<br />

1482 bis à M. dʹArbois<br />

Des affaires dʹadministration (Société Civile) requièrent la présence <strong>de</strong> M. dʹArbois chez le notaire. Le poids <strong>de</strong>s<br />

Œuvres repose sur le petit nombre.<br />

27 novembre 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je ne sais pas si vous pouvez venir, comme le <strong>de</strong>man<strong>de</strong> M. Paillé, sans grave in‐<br />

convénient pour vos affaires. Dans le cas où vous y verriez <strong>de</strong> graves difficultés, regar<strong>de</strong>z<br />

si quelquʹun ici vous paraîtrait en état <strong>de</strong> remplir exactement les formalités nécessaires. M.<br />

Lantiez est absent, M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] accablé dʹoccupations; M. Paillé, craintif, mé‐<br />

ticuleux, a impatienté M. <strong>de</strong> Madre qui ne sʹentendrait pas volontiers <strong>avec</strong> lui. Faire venir<br />

M. <strong>de</strong> Varax, je répugne à le déranger tant que nous nʹavons rien <strong>de</strong> décidé sur la durée du<br />

séjour <strong>de</strong> M. Lantiez à Rome. Jusquʹici, nos ff. qui sont en ce poste ne peuvent se passer <strong>de</strong><br />

sa présence. Que pensez‐vous qui soit à faire <strong>de</strong> mieux? Nʹai‐je pas à vous envoyer le pre‐<br />

mier trimestre <strong>de</strong> la pension <strong>de</strong> M. Boiry? Quelle somme faut‐il vous envoyer? Jʹai reçu <strong>de</strong><br />

M. Boiry une bonne lettre, je lui répondrai.<br />

Affections à vous et à nos ff.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1425


1483 à M. dʹArbois<br />

Communion fréquente dans un patronage. Nécessité dʹun prêtre <strong>de</strong> lʹInstitut à Rome.<br />

Chaville, 30 novembre 1869<br />

Mon cher ami et fils en N.S.,<br />

Je nʹai point répondu jusquʹici à la question que vous mʹaviez posée relativement à<br />

lʹaumônerie du patronage <strong>de</strong>s enfants <strong>de</strong>s fabriques; je désirais (sans particularité et sans<br />

personnalité) prendre lʹavis <strong>de</strong> notre Conférence du lundi. Unanimement, nos ff. ecclésias‐<br />

tiques ont répondu quʹon ne pouvait que donner <strong>de</strong>s avis à lʹaumônier concernant la<br />

communion plus ou moins fréquente; que le suivre dans lʹapplication <strong>de</strong> ces avis semblait<br />

chose impraticable et peut‐être inadmissible. Quʹen cas <strong>de</strong> doute sur la pru<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> lʹau‐<br />

mônier, confier à un autre la confession, et conséquemment la direction pour les commu‐<br />

nions, serait assurément le meilleur et le plus sûr parti. En lʹespèce, ne pourrait‐on, sous<br />

prétexte dʹattirer la bienveillance <strong>de</strong>s Conférences et <strong>de</strong>s bienfaiteurs en choisissant un<br />

prêtre qui leur fût particulièrement agréable, introduire un ecclésiastique étranger pour la<br />

confession et même pour la plupart <strong>de</strong>s instructions? Cet arrangement me semblerait ici<br />

bien désirable; voyez si la chose est possible; dites, si vous le croyez utile, que jʹai conseillé<br />

ce moyen comme très propre à attacher, soit les Conférences, soit la paroisse, etc...<br />

Je nʹai pas <strong>de</strong> nouvelles fraîches <strong>de</strong> Rome; les inci<strong>de</strong>nts <strong>de</strong>rnièrement survenus, tra‐<br />

casseries <strong>de</strong>s aumôniers, défaut dʹappui moral <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s représentants du Comité, ont<br />

fait à nos ff. une position difficile et mettent pour nous en doute la possibilité <strong>de</strong> les laisser<br />

là sans lʹappui habituel dʹun f. ecclésiastique qui les soutienne spirituellement et extérieu‐<br />

rement; mais poser ainsi un ecclésiastique est un autre embarras; il serait bien peu occupé,<br />

il laisserait en France quelquʹun <strong>de</strong> nos Etablissements ou œuvres en souffrance, il faudrait<br />

probablement lʹentretenir à nos frais; autant <strong>de</strong> points <strong>de</strong> solution malaisée. Tant que M.<br />

Lantiez est absent, impossible <strong>de</strong> déplacer personne pour soutenir la Congrégation en son<br />

centre trop dégarni. Priez <strong>avec</strong> nous pour que Dieu daigne nous éclairer et nous assister.<br />

Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S., assurez nos ff. <strong>de</strong> ma tendre affection et<br />

soyez‐en vous‐même bien assuré.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1484 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Encouragement à affermir ses bonnes dispositions, ne pas ʺsʹarrêter aux quelques moments dʹabattement et<br />

même <strong>de</strong> douteʺ. Tenir compte du contexte défavorable: ʺles temps sont mauvais, la famille est presque détruite,<br />

le gouvernement tend à sʹemparer <strong>de</strong>s âmes…ʺ Nécessité et utilité <strong>de</strong> nos Œuvres, conçues pour ai<strong>de</strong>r les pau‐<br />

vres que les moyens ordinaires <strong>de</strong> lʹEglise ne peuvent toucher. MLP. conscient <strong>de</strong>s forces et <strong>de</strong>s faiblesses <strong>de</strong><br />

lʹInstitut. Confiance pour lʹavenir.<br />

Chaville, 6 décembre 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je réponds à votre lettre du 2 <strong>de</strong> ce mois, sinon longuement, ce que les mouvements<br />

et dérangements auxquels je suis constamment assujetti ne me permettent guère, au moins<br />

pour vous dire que jʹai lu <strong>avec</strong> attention et intérêt le compte <strong>de</strong> conscience que vous me fai‐<br />

tes, en suite <strong>de</strong> votre <strong>de</strong>rnière retraite.<br />

1426


Il me semble que le résultat définitif <strong>de</strong> cette sorte dʹinventaire <strong>de</strong> vos dispositions<br />

intérieures est, en beaucoup <strong>de</strong> points, satisfaisant; quelque progrès en douceur, en mépris<br />

et défiance <strong>de</strong> vous‐même, une volonté plus affermie pour lʹobéissance, un amour plus<br />

marqué pour les petits et les faibles; tout cela est bien dans lʹesprit chrétien et bien essen‐<br />

tiel dans la vie <strong>de</strong> perfection à laquelle nous aspirons. Quant aux saillies <strong>de</strong> lʹimagination,<br />

<strong>de</strong>s sens, <strong>de</strong> lʹexpansion parfois excessive, cʹest surtout <strong>de</strong> ce côté que nous avons à veiller<br />

dans notre existence <strong>de</strong> tous les jours, les occasions <strong>de</strong> manquement se renouvellent inces‐<br />

samment, mais le bienfait <strong>de</strong> votre retraite sera spécialement <strong>de</strong> vous porter à un redou‐<br />

blement <strong>de</strong> soins et <strong>de</strong> mortification pour soumettre toutes vos facultés inférieures à la<br />

haute raison divinement inspirée et qui est la reine <strong>de</strong> tout intérieur bien ordonné. Tout ce‐<br />

la bien vu, bien senti, bien accepté, comme vous paraissez lʹavoir fait, donnera une bonne<br />

et fructueuse conclusion au travail <strong>de</strong> votre recueillement spirituel à S t Acheul.<br />

8 décembre. Immaculée Conception. Vaugirard.<br />

Je reprends ici ma lettre interrompue, sans être bien sûr <strong>de</strong> la mettre à fin, la gran<strong>de</strong><br />

fête du jour ayant amené à lʹorphelinat la plupart <strong>de</strong> nos ff. <strong>de</strong> Paris et <strong>de</strong> Chaville.<br />

Je ne mʹétonne point, mon cher ami, que vous ayez parfois quelques moments dʹen‐<br />

nui, dʹabattement, et même <strong>de</strong> doute sur la voie où vous êtes engagé; Dieu y pourvoira et<br />

ces malaises dʹesprit passeront, sʹils ne sont déjà loin. La maison et les œuvres où vous êtes<br />

ont toujours été regardées parmi nous comme étant <strong>de</strong>s plus ru<strong>de</strong>s, le personnel <strong>de</strong>s en‐<br />

fants et <strong>de</strong>s jeunes gens, <strong>de</strong> soi assez difficile déjà, nʹayant jamais été cultivé <strong>avec</strong> assez <strong>de</strong><br />

persistance et <strong>de</strong> suite pour quʹon ait pu y former un esprit et obtenir <strong>de</strong>s fruits tout à fait<br />

sérieux. Pour notre situation en général, il faut considérer que les temps sont mauvais; tout<br />

concourt à rendre le travail spirituel peu productif. La famille, ce premier et si admirable<br />

moyen <strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce pour façonner les âmes, est presque détruite, chrétiennement par‐<br />

lant, et ne vit plus que dans les sentiments naturels quʹelle exagère; le Gouvernement, qui<br />

tend, perfas et nefas, à sʹemparer <strong>de</strong>s âmes, les égare et les pervertit, et lʹEglise suffit à peine,<br />

dans ses moyens ordinaires, aux besoins <strong>de</strong>s fidèles qui savent encore le chemin <strong>de</strong> la pa‐<br />

roisse. Ce qui reste en <strong>de</strong>hors dʹelle est immense; le pauvre peuple surtout est errant<br />

comme un troupeau sans pasteur. Nous avons désiré, pour notre part, lui donner un peu<br />

dʹassistance; à ce premier point, au moins, on ne saurait nier que notre vocation ne soit<br />

sainte et bien assise. Les besoins à satisfaire étant immenses, nous les avons pris hardiment<br />

(trop peut‐être) dans toute leur étendue; nous avons embrassé tous les âges, <strong>de</strong>puis lʹen‐<br />

fant jusquʹau vieillard; nous suivons le pauvre et lʹouvrier dans son éducation, dans son<br />

travail, dans ses nécessités spirituelles et temporelles et jusquʹen ses délassements; nous<br />

nous sommes faits pauvres pour eux, nous avons partagé notre <strong>de</strong>meure <strong>avec</strong> eux et nous<br />

vivons comme eux; si nous sommes allés trop loin, Dieu nous le dira, mais au moins le<br />

fond essentiel dʹune vraie vocation religieuse ne nous a pas manqué, nous avons accepté<br />

cordialement le renoncement et lʹimmolation. Nos œuvres, assises sur cette base, peuvent<br />

se modifier <strong>avec</strong> le temps et dʹaprès la lumière que nous apportera lʹexpérience, mais la<br />

Congrégation, posée sur ce sol soli<strong>de</strong>, <strong>de</strong>meurera, jʹen ai la confiance. Si nous [nous] étions<br />

fourvoyés, comme le découragement lʹa murmuré à votre oreille, le bon Dieu, qui a donné<br />

succès et bénédiction à presque toutes nos œuvres et qui nous a mis en mains <strong>de</strong>s ressour‐<br />

ces que notre industrie nʹeût certes pas créées, les Evêques qui ont constamment encoura‐<br />

gé nos efforts et le Saint Père qui les a approuvés et bénis, atténueraient bien notre erreur;<br />

je crois que nous pouvons bannir cette inquiétu<strong>de</strong>.<br />

1427


Votre appréciation sur le personnel <strong>de</strong> la Congrégation me paraît aussi se ressentir<br />

<strong>de</strong> la disposition dʹesprit où vous ont mis les difficultés et les fatigues que vous avez es‐<br />

suyées. En revenant à un sentiment plus juste, vous remarquerez que nous avons assez <strong>de</strong><br />

sujets, tant ecclésiastiques que laïcs, dʹune vertu soli<strong>de</strong> pour quʹen excluant tout ce qui<br />

semblerait trop faible, il restât encore une société consistante ayant assez <strong>de</strong> vie et <strong>de</strong> va‐<br />

leur spirituelle pour faire un foyer dʹune véritable puissance. Je dirai plus, ceux même qui<br />

sont peu avancés ont, au moins, sauf exceptions assez rares, les qualités <strong>de</strong>s pierres quʹon<br />

cache en terre dans les constructions; ils portent les fatigues, les privations dʹune vie sé‐<br />

vère, souvent bien pauvre et toujours laborieuse. Pauvres enfants! ils ont manqué le plus<br />

souvent <strong>de</strong> culture intellectuelle, <strong>de</strong>s disciplines du Noviciat, le peu quʹils ont leur est pro‐<br />

pre, car, en ce cas, la Congrégation ne leur a presque rien donné. Mais cʹest peut‐être cette<br />

faute <strong>de</strong> la Congrégation que vous lui reprochez et qui vous a mis en doute sur son avenir.<br />

Eh bien! comme je vous écrivais ces lignes, à lʹinstant même, mʹest venu le r.p. Sturm, Jé‐<br />

suite, qui est à la tête <strong>de</strong>s œuvres les plus importantes <strong>de</strong> Lille et qui jouit dʹune gran<strong>de</strong> es‐<br />

time. Plein <strong>de</strong> la pensée qui mʹoccupait en vous répondant, je lʹai consulté à ce sujet.<br />

Avons‐nous eu tort, lui dis‐je, dʹavoir cédé à <strong>de</strong>s circonstances qui nous ont paru impé‐<br />

rieuses, en prenant plus <strong>de</strong> postes peut‐être que la pru<strong>de</strong>nce ne lʹeût conseillé? Devons‐<br />

nous nous inquiéter <strong>de</strong> ce quʹun certain nombre <strong>de</strong> frères, <strong>de</strong> rang secondaire, sont assez<br />

faibles et ont manqué <strong>de</strong> culture? Il mʹa répondu hardiment et nettement: ʺNon. Au point<br />

<strong>de</strong> vue <strong>de</strong> la pru<strong>de</strong>nce humaine, ce serait un tort, mais vous avez agi en droite intention et<br />

pour les œuvres <strong>de</strong> Dieu; comptez bien que Dieu est engagé à vous soutenir et quʹIl le fera.<br />

Nous‐mêmes, a‐t‐il ajouté, nous sommes souvent, encore aujourdʹhui, obligés dʹagir<br />

comme vous. Quand nous avons pris la Belgique, il nous fallut occuper à la fois un grand<br />

nombre <strong>de</strong> postes, afin <strong>de</strong> saisir les positions; nous manquions <strong>de</strong> sujets; ayant avancé<br />

néanmoins, nous étions partout faibles, insuffisants, au‐<strong>de</strong>ssous <strong>de</strong> notre tâche; mais, <strong>avec</strong><br />

le temps, nous nous sommes fortifiés, collèges et rési<strong>de</strong>nces ont pris pied, et la Belgique<br />

nous <strong>de</strong>vra, en très gran<strong>de</strong> part, la foi et la vie chrétienne qui lʹaniment. Ayez donc bon<br />

courage, mʹa‐t‐il dit en terminant, il nʹest pas un seul Institut qui, dans son origine, nʹait eu<br />

à traverser les phases difficiles dont vous me parlez; votre Congrégation est du temps;<br />

<strong>avec</strong> tous ceux qui la connaissent, je la regar<strong>de</strong> comme essentielle et voulue <strong>de</strong> Dieuʺ. Cette<br />

autorité, ajoutée à bien dʹautres, mʹa paru répondre aux pensées qui vous ont agité et <strong>de</strong><br />

nature à vous tranquilliser.<br />

Le jeune Eugène [Dufour] a, en effet, souvent <strong>de</strong>s maux <strong>de</strong> <strong>de</strong>nts; hors cela, il est as‐<br />

sez robuste et doit suivre le régime commun; il faut y tenir; bon garçon et doux <strong>de</strong> carac‐<br />

tère, il est un peu faible, il a besoin dʹêtre soutenu par une direction suivie; sʹil se confesse<br />

à vous, ce sera bien.<br />

Nous avons fait aujourdʹhui notre clôture du Jubilé après trois jours dʹexercices<br />

préparatoires, et nous avons fêté en même temps lʹImmaculée Conception. Lʹouverture du<br />

Concile nous préoccupait à juste titre; nos ff. ecclésiastiques ont offert à cette intention le S t<br />

Sacrifice. La journée sʹest heureusement passée, on regrettait seulement lʹabsence <strong>de</strong> M.<br />

Lantiez et celle <strong>de</strong> M. Planchat qui a, pour <strong>de</strong>main 9, la première communion <strong>de</strong> 85 adultes<br />

et le baptême dʹun israélite. Vous prierez, sinon pour la première communion, au moins<br />

pour la persévérance <strong>de</strong> ceux qui la font.<br />

Je prends part à la fatigue <strong>de</strong> santé <strong>de</strong> notre f. Trousseau; je voudrais lui écrire sou‐<br />

vent, hélas! le temps et les forces me manquent. M. Ginet ne mʹa point dit quelle avait été<br />

1428


la réponse <strong>de</strong> sa tante et quels [étaient] aussi ses sentiments propres au sujet <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s.<br />

Assurez bien toute cette maison, comme celle où vous êtes, <strong>de</strong> tous mes affectueux senti‐<br />

ments.<br />

Je ne sais si je vous ai dit que M. Gresser, enfin délivré <strong>de</strong> ses liens, est tout à la vie<br />

religieuse et aux œuvres. Un nouveau séminariste [M. Perthuisot], déjà assez avancé en<br />

théologie, a pris place à Chaville; il appartenait au diocèse <strong>de</strong> Troyes. Peut‐être vous lʹai‐je<br />

déjà écrit. Il paraît être intelligent et bien disposé. Six suivent donc les cours <strong>de</strong> Versailles<br />

[MM. Cauroy, Pra<strong>de</strong>aux, Vernay, Frézet, Castellan et Perthuisot].<br />

Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S., croyez à tous mes sentiments les plus affec‐<br />

tueux en J. et M.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1485 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Crainte <strong>de</strong> révolution. MLP. tente <strong>de</strong> rassurer sa correspondante: pas <strong>de</strong> péril immédiat.<br />

Vaugirard, 8 décembre 1869<br />

Fête <strong>de</strong> Marie Immaculée<br />

Madame la Marquise,<br />

La lettre que vous mʹavez fait lʹhonneur <strong>de</strong> mʹécrire le 4 <strong>de</strong> ce mois mʹa été remise<br />

seulement hier au soir 7, à mon arrivée ici; je mʹempresse dʹy répondre.<br />

Je ne puis donner, sur la situation <strong>de</strong>s choses publiques, que mon sentiment et celui<br />

<strong>de</strong>s personnes qui mʹentourent; les temps sont mauvais sans doute, et lʹesprit public bien<br />

perverti; je ne vois pas néanmoins ces symptômes effrayants que jʹai aperçus en 1830 et en<br />

1848; la masse <strong>de</strong>s esprits me semble être encore bien fermement opposée aux boulever‐<br />

sements, et le Gouvernement est assez armé et assez énergique pour sʹy opposer. Je ne<br />

crois donc pas que lʹordre soit sérieusement troublé. Lʹopinion <strong>de</strong>s gens les plus intéressés<br />

à se bien renseigner est en ce sens; les fonds, loin <strong>de</strong> fléchir, ont monté. Selon ma pensée,<br />

vous pourriez donc, Madame la Marquise, passer lʹhiver à Paris sans danger apparent<br />

pour vous et pour votre chère famille. Je désire toutefois que vous mettiez mon humble<br />

jugement en balance <strong>avec</strong> celui quʹauraient pu vous énoncer <strong>de</strong>s personnes plus éclairées<br />

que moi.<br />

Veuillez agréer, Madame, et partager <strong>avec</strong> votre cher entourage, tous mes senti‐<br />

ments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> profond dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1486 à M. dʹArbois<br />

Ne pas se charger dʹœuvres écrasantes qui ren<strong>de</strong>nt impossible le gouvernement <strong>de</strong> la Congrégation.<br />

Vaugirard, 10 décembre 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je viens dʹenvoyer à la poste une expédition <strong>de</strong> lʹacte <strong>de</strong> Société, afin que vous puis‐<br />

siez à lʹavance prendre les dispositions nécessaires, votre séjour ici <strong>de</strong>vant être fort court.<br />

Nos ff. du Conseil sʹinquiètent plus que moi encore <strong>de</strong> la diversion inévitable que le nou‐<br />

1429


veau patronage <strong>de</strong>s manufactures va apporter aux soins que vous <strong>de</strong>vez avant tout aux<br />

<strong>de</strong>ux œuvres, déjà bien lour<strong>de</strong>s, <strong>de</strong> la Maîtrise et <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong>s Champs. Tous trouveraient<br />

bien désirable que vous fissiez <strong>de</strong>s enfants <strong>de</strong>s manufactures une œuvre entièrement dé‐<br />

pendante <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul et que vous nʹy engagiez ni vous ni vos ff.. Parmi les jeunes<br />

gens excellents <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong>s Champs, nʹen est‐il donc pas un ou <strong>de</strong>ux que pussent secon<strong>de</strong>r<br />

activement les confrères <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul?<br />

Partout nos charges sont écrasantes; le centre <strong>de</strong> la Congrégation, qui doit soutenir<br />

lʹensemble du corps, est absolument dégarni et souffre notablement; si les Supérieurs lo‐<br />

caux se font <strong>de</strong>s positions telles quʹon ne puisse les changer <strong>de</strong> <strong>de</strong>stination sans faire crou‐<br />

ler toutes leurs œuvres, cʹest créer un état <strong>de</strong> choses qui rend le gouvernement <strong>de</strong> la<br />

Congrégation impossible. Les <strong>de</strong>ttes <strong>de</strong> votre chapelle ne sont pas encore payées, et voilà<br />

quʹil faut en contracter dʹautres. Faites ce que vous pourrez pour atténuer ces graves diffi‐<br />

cultés dont nous sommes fort préoccupés.<br />

Vous ne prendrez ces observations, bien cher ami, aucunement comme un blâme;<br />

jʹen aurais dʹailleurs ma part, puisque je me suis borné, au premier indice <strong>de</strong> ce projet, à<br />

exprimer <strong>de</strong>s craintes et <strong>de</strong>s répugnances et que je nʹai pas saisi <strong>de</strong> suite quʹil sʹagissait<br />

pour nous <strong>de</strong> prendre une part active à cette œuvre; telle que je la vois présentement, elle<br />

est tout autre; elle nous est un juste sujet dʹinquiétu<strong>de</strong>; si vous pouvez en diriger le cours<br />

<strong>de</strong> façon à nʹen pas faire un poids <strong>de</strong> plus pour nous, vous entrerez bien dans nos vues.<br />

Recevez, pour vous et pour vos frères, tous mes sentiments <strong>de</strong> tendre affection en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1487 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Décès du père du frère Allard. Mouvement <strong>de</strong> personnel dès le retour du père Lantiez.<br />

Vaugirard, 17 décembre 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Notre jeune f. M. Allard, vient dʹêtre appelé à Amiens par la perte douloureuse quʹil<br />

a faite <strong>de</strong> son bon père; vous partagerez tous <strong>avec</strong> nous son affliction. Sʹil vous est possible<br />

dʹoffrir à lʹintention du défunt le St Sacrifice, je suis sûr que vous le ferez; notre cher f. et sa<br />

famille en seront touchés et la pauvre âme, si elle nʹest déjà auprès <strong>de</strong> Dieu, en sera soula‐<br />

gée. Cet événement peut créer <strong>de</strong>s difficultés à notre f. Allard; il en serait bien peiné, car il<br />

tient sérieusement à sa vocation, il nʹy renoncerait pas sans un réel déchirement. Priez M.<br />

Caille, comme je vous prie vous‐même, <strong>de</strong> conseiller pru<strong>de</strong>mment ce pauvre enfant, en tâ‐<br />

chant <strong>de</strong> le gar<strong>de</strong>r au service <strong>de</strong> Dieu, à moins que le Seigneur ne semble évi<strong>de</strong>mment lui<br />

prescrire dʹautres <strong>de</strong>voirs.<br />

Je lʹautorise à coucher provisoirement près <strong>de</strong> sa famille; sʹil peut faire autrement,<br />

les premiers et très douloureux moments passés, vous en jugerez <strong>avec</strong> lui. Je lʹinvite à vous<br />

voir très souvent, tous les jours sʹil le peut.<br />

Adieu, mon bien cher ami et fils en N.S., priez pour nous, nos ff. sont ici accablés <strong>de</strong><br />

charges présentement; nous ne vous oublions pas <strong>de</strong> notre côté.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1430


Le retour <strong>de</strong> M. Lantiez sera prochain. Cʹest toujours vers vous quʹil doit être dirigé;<br />

pensez <strong>de</strong>vant Dieu à ce que nous pourrions faire après; nos ff. tiendraient à ce que M.<br />

dʹArbois, nommé au <strong>de</strong>rnier Chapitre membre du Conseil, résidât ici; M. Lantiez lui‐même<br />

mʹécrit quʹil sera bien peu régulier que <strong>de</strong>ux conseillers soient éloignés à la fois et insiste<br />

aussi pour que M. dʹArbois vienne. Peut‐il quitter bientôt Angers? Lʹy remplaceriez‐vous<br />

sans trop <strong>de</strong> répugnance? (Je sais bien que vous accepteriez le sacrifice, sʹil y en avait); je<br />

ne sais que penser. M. dʹArbois arrive lundi pour régulariser les formalités <strong>de</strong> notre Socié‐<br />

té Civile, il repartira mercredi; sʹil pensait quʹil fût à propos que nous examinions à fond la<br />

question ensemble, je vous le man<strong>de</strong>rais par télégramme; sinon, (et quoi quʹil arrive), <strong>de</strong>‐<br />

meurez en paix; nous ne ferons que ce que le Seigneur semblera <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r; cette vue, si<br />

elle nous est donnée, nous mettra tous en gran<strong>de</strong> tranquillité.<br />

1488 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Vœux <strong>de</strong> nouvel an; changement <strong>de</strong> rési<strong>de</strong>nce accepté <strong>de</strong> ʺbonne grâceʺ par le père <strong>de</strong> Varax; ne pas interrompre<br />

le noviciat. MLP. constate quʹil y a ʺbeaucoup <strong>de</strong> mouvement dans nos Œuvresʺ; quand et comment échapper<br />

au tourbillon <strong>de</strong> ce siècle?<br />

Chaville, 29 décembre 1869<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je vous remercie, ainsi que vos ff., <strong>de</strong>s vœux que vous mʹexprimez à lʹoccasion <strong>de</strong><br />

ma fête et du nouvel an; ils seront certainement exaucés, car <strong>de</strong>s vœux chrétiens, bien sin‐<br />

cères comme les vôtres, ne sont autre chose quʹune prière adressée tout haut à Dieu et dont<br />

on prend à témoin ceux pour lesquels on la fait. Vous pouvez bien penser quʹen ce sens, je<br />

vous rends fidèlement la pareille, à vous, mon bien cher ami, qui vous êtes donné si géné‐<br />

reusement à notre petite famille et à moi, quoique indigne, pour servir le Seigneur dans<br />

une fraternelle union. Assurez bien nos frères auxquels je ne puis, comme je le voudrais<br />

tant , écrire séparément aujourdʹhui, <strong>de</strong> ma constante sollicitu<strong>de</strong> et <strong>de</strong> ma tendre affection.<br />

Par vos lettres si exactes, si attentives, je suis chacun dʹeux presque comme si jʹétais près <strong>de</strong><br />

lui; dites‐le leur bien , afin quʹils sachent quʹaucun dʹeux nʹest perdu <strong>de</strong> vue et que chacun<br />

mʹest toujours présent.<br />

Votre bonne lettre mʹa encore réjoui par un autre endroit; je craignais que vous<br />

nʹeussiez subi un trop grand sacrifice en prenant le poste dʹAngers et que vous nʹeussiez<br />

fait un effort trop pénible en lʹacceptant <strong>de</strong> si bonne grâce. Comme la douce intimité dans<br />

laquelle nous vivons jusquʹici nous permet dʹadoucir lʹobéissance par une cordiale entente,<br />

jʹavais particulièrement à cœur que la décision à prendre fût concertée entre nous; je le<br />

voulais dʹautant plus que, nʹayant aucun parti pris, je désirais avoir quelques raisons vala‐<br />

bles pour incliner en un sens ou en un autre. Vous voyant souffrant, jʹavais décidé <strong>avec</strong> M.<br />

dʹArbois quʹil irait sʹentretenir <strong>avec</strong> vous à Amiens et que vous verriez ensemble ce qui<br />

était <strong>de</strong> mieux à faire. M. Caille a fait changer cette disposition en nous disant que votre<br />

santé, assez bien remise, vous permettait <strong>de</strong> faire le voyage. Si la décision eût tourné au‐<br />

trement quʹelle nʹa fait, je nʹen eusse éprouvé aucun regret, loin <strong>de</strong> là; pour moi personnel‐<br />

lement, les rapports constants <strong>avec</strong> vous mʹeussent été réellement doux, votre nature sym‐<br />

pathique et communicative mʹallant singulièrement, tandis que le caractère décidé et un<br />

peu cassant <strong>de</strong> M. dʹArbois me sera une occasion <strong>de</strong> support; jʹajoute vite que son esprit<br />

1431


dʹobéissance ôtera toute difficulté véritable dans nos relations et que son bon vouloir les<br />

rendra certainement satisfaisantes.<br />

Dans la pensée quʹil vous faudra un ai<strong>de</strong> pour N.D. <strong>de</strong>s Champs, jʹai cherché <strong>de</strong>s<br />

yeux quel il pourrait être; je ne trouve guère ce qui conviendrait; M. Gérold vous est très<br />

attaché et serait bien maniable en votre main, mais auriez‐vous le temps <strong>de</strong> continuer pour<br />

lui quelques exercices et pratiques <strong>de</strong> Noviciat dont il a tant besoin? Cʹest douteux, jʹen<br />

parlerai à M. Faÿ. Ce serait, en tout cas, fâcheux comme exemple et comme persistance<br />

dans la regrettable nécessité où nous nous sommes trouvés dʹabréger si souvent les disci‐<br />

plines du Noviciat; dʹautre part, je nʹaperçois rien; le jeune Bouquet, moins apte aux œu‐<br />

vres, est presque <strong>de</strong> la même date que M. Gérold, comme novice; prions Dieu <strong>de</strong> nous ai<strong>de</strong>r.<br />

Je vois <strong>avec</strong> plaisir que tout a bien marché pour vous à Noël et dans votre gran<strong>de</strong><br />

assemblée <strong>de</strong>s Jeunes Ouvriers. Ces réunions, quand elles sont bien préparées, font un<br />

bien réel à tous ceux qui y participent, les auditeurs du <strong>de</strong>hors compris; cʹest une prédica‐<br />

tion sous une forme spéciale qui atteint son but plus sûrement parfois que les enseigne‐<br />

ments religieux proprement dits. Noël a eu aussi, comme les exercices du Jubilé, <strong>de</strong>s résul‐<br />

tats très satisfaisants en toutes nos œuvres. En ces bons jours, on pense volontiers à cette<br />

parole si profon<strong>de</strong> <strong>de</strong> la Sainte Ecriture: Euntes ibant et flebant mittentes semina sua; venientes<br />

autem venient, cum exultatione portantes manipulos suos. 430<br />

Oui, il est vrai, il y a beaucoup <strong>de</strong> mouvement et une activité trop gran<strong>de</strong> en nos<br />

œuvres; mais, en ce siècle, où donc, excepté dans les déserts <strong>de</strong> la contemplation, échappe‐<br />

t‐on à cet inévitable tourbillon? Lʹhumanité ne marche plus, elle se précipite et, même en<br />

lui résistant, on est plus ou moins entraîné. Jʹespère toutefois quʹ<strong>avec</strong> le temps, et mieux<br />

assis, nous aurons plus <strong>de</strong> calme, nos voies étant mieux tracées, nos moyens plus sûrs et<br />

mieux façonnés; nous allons au <strong>de</strong>vant‐<strong>de</strong>s âmes aujourdʹhui, nous courons à leur recher‐<br />

che, nous les suivons pour quʹelles nous suivent à leur tour; un jour, Dieu aidant, elles<br />

viendront à nous, attirées par <strong>de</strong>s appâts plus puissants; souffrons donc et patientons: ex‐<br />

pectans expectavi. Veniens veniet; cʹest Dieu Lui‐même attendu et qui viendra. Veni, Domine Jesu!<br />

A propos dʹattente, (gar<strong>de</strong>z pour vous seul ceci) jʹespère que M. Lantiez pourrait ar‐<br />

river dans le cours <strong>de</strong> la semaine prochaine. Il resterait un jour ou <strong>de</strong>ux tout à fait incogni‐<br />

to à Chaville et arriverait tout droit à Amiens; si ses dispositions ne sont point dérangées,<br />

elles se réaliseront ainsi. Ici, personne ne sait rien.<br />

Si je ne puis me faire apporter la montre ici pour quʹelle parte par cette occasion, je<br />

la ferai au plus tôt envoyer par M. Paillé.<br />

Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S. A Angers, nous serons plus éloignés lʹun <strong>de</strong><br />

lʹautre, mais nous ferons quelques économies pour que quelques voyages ne soient pas<br />

très onéreux; il est bien entendu que vous ferez un simple essai du diaconat et quʹaprès<br />

lʹépreuve, nous jugerons ce que le cas pourra <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r. Je vous embrasse tendrement.<br />

Jʹembrasse aussi tous nos ff. par vous; jʹécrirai à M. Caille quelques mots dʹaffection, et<br />

aussi à M. Trousseau; jʹenvoie ici une image pour chacun; si le paquet est trop gros, jʹen<br />

mettrai seule‐ment moitié, vous ajouterez le reste.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

430 Ps. 125, 6.<br />

1432


Je vous prie dʹoffrir à M me <strong>de</strong> Varax mes hommages respectueux à lʹoccasion du<br />

nouvel an.<br />

Pressez‐vous un peu M. Marcaire pour la préparation <strong>de</strong> ses comptes?<br />

1489 à M. Trousseau<br />

Encouragement sur la voie du zèle et <strong>de</strong> la charité. Ne pas hésiter à écrire à MLP.<br />

Chaville, 29 décembre 1869<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.J.C.,<br />

Les jours que nous traversons sont pour moi lʹoccasion <strong>de</strong> correspondances multi‐<br />

pliées, et nécessairement un peu brèves. Mais me faut‐il beaucoup <strong>de</strong> mots pour vous dire<br />

et pour vous persua<strong>de</strong>r que je vous suis comme toujours bien tendrement dévoué, que je<br />

suis <strong>de</strong>s yeux vos travaux et particulièrement tout ce qui intéresse votre vie propre, vos<br />

progrès comme vos épreuves et vos difficultés. M. <strong>de</strong> Varax, très fidèle dans ses rapports<br />

<strong>avec</strong> moi, me met au courant <strong>de</strong> tout ce qui vous touche et me permet <strong>de</strong> ne rester étranger<br />

à aucun fait dʹun intérêt un peu sérieux pour vous. Ce mʹest une gran<strong>de</strong> consolation; elle<br />

ne me rend pas moins sensible toutefois à vos bons souvenirs, et vos lettres, quand jʹen re‐<br />

çois, me causent toujours une vive satisfaction. Ne manquez donc pas <strong>de</strong> mʹécrire quand<br />

vous avez quelque bonne disposition <strong>de</strong> le faire, ou que vous avez quelque chose que je<br />

puisse examiner <strong>avec</strong> vous; si je nʹai beaucoup <strong>de</strong> lumière, jʹen <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rai à Dieu, et jʹau‐<br />

rai dʹailleurs attention et sympathie pour tout ce qui intéressera vous, vos frères, vos en‐<br />

fants et vos affaires, quelles quʹelles soient.<br />

Jʹaurais voulu écrire à tous vos frères, dont jʹai reçu les bonnes et affectueuses let‐<br />

tres; je ne le puis aujourdʹhui, mais vous leur direz <strong>de</strong> ma part toutes mes affections, toutes<br />

mes sollicitu<strong>de</strong>s pour eux; je bénis Dieu qui leur inspire à tous, ainsi quʹà vous‐même, un<br />

zèle constant pour leurs œuvres et une vraie charité pour leurs enfants. Continuez, <strong>avec</strong><br />

ces ai<strong>de</strong>s dévoués, à puiser votre force dans la prière et les pieux exercices et, pour vous en<br />

particulier, qui sentez si vivement le bonheur dʹêtre consacré à Dieu dans le St Ministère,<br />

puissiez‐vous trouver <strong>de</strong>s joies toujours plus gran<strong>de</strong>s dans lʹoffran<strong>de</strong> du St Sacrifice, dans<br />

la culture <strong>de</strong>s âmes et dans lʹunion intime <strong>avec</strong> le divin Seigneur.<br />

Je vous embrasse bien affectueusement. Embrassez pour moi tous vos ff., qui sont<br />

aussi mes bien chers enfants.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Ci‐joint une petite image pour chacun <strong>de</strong> vous.<br />

1490 à M. Caille<br />

Annonce <strong>de</strong> lʹarrivée du père Lantiez à Amiens.<br />

Chaville, 4 janvier 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Lantiez, arrivé <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux jours <strong>de</strong> Rome, va se rendre près <strong>de</strong> vous <strong>de</strong>main<br />

mercredi, afin <strong>de</strong> préparer <strong>avec</strong> vous et <strong>avec</strong> M. <strong>de</strong> Varax son installation dans vos œuvres.<br />

1433


Je sais dʹavance quʹil trouvera en vous tout le bon vouloir et tous les appuis et secours quʹil<br />

en peut attendre. De son côté, je suis assuré quʹil sera <strong>avec</strong> vous en parfaite entente, ses<br />

vues ne tendant, comme les vôtres, quʹà la gloire <strong>de</strong> Dieu et au plus grand bien <strong>de</strong>s âmes.<br />

Vous pouvez compter quʹen particulier il vous secon<strong>de</strong>ra parfaitement pour les mesures<br />

dʹordre économique et financier que vous désirez, à juste raison, établir. Il avait, sous ce<br />

rapport, mis les choses sur un bon pied à Grenelle.<br />

Je souhaite à vous, mon bien cher ami, à vos œuvres et à tout ce qui vous intéresse<br />

une bonne année, et je prie Dieu dʹaccroître encore les grâces précieuses quʹIl a mises en<br />

vous.<br />

Votre dévoué Père et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1490‐1 à M. Bouchy<br />

Rechercher la paix du cœur. Humilité <strong>de</strong>vant ses imperfections.ʺSʹouvrir <strong>avec</strong> simplicité à son supérieurʺ. MLP.<br />

le rassure <strong>de</strong> sa vocation.<br />

Chaville, 4 janvier 70<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Jʹai reçu <strong>avec</strong> une double satisfaction votre bonne lettre du nouvel an qui mʹassurait<br />

<strong>de</strong> vos sentiments <strong>de</strong> filiale affection et me tranquillisait en même temps sur vos disposi‐<br />

tions intérieures, un peu troublées momentanément comme vous me le marquiez dans une<br />

précé<strong>de</strong>nte lettre. Heureusement ce petit nuage est dissipé et vous avez retrouvé la paix.<br />

Comme il se pourrait que, dans la suite, quelque épreuve pareille se représentât, il sera<br />

sage dʹexaminer <strong>avec</strong> un peu dʹattention dʹoù est venu le trouble, et comment vous êtes<br />

rentré dans le calme.<br />

Vous êtes trop sensible au blâme ou aux avertissements, vous trouvez trop sévères<br />

ceux qui vous reprennent et ne pouvez prendre patiemment cette peine. A mesure, cher<br />

enfant, que vous entrerez mieux dans lʹesprit <strong>de</strong> notre divin Seigneur, vous <strong>de</strong>viendrez<br />

plus fort contre <strong>de</strong> telles afflictions. Nous sommes les disciples du Dieu doux et humble <strong>de</strong><br />

cœur, nous <strong>de</strong>vons reconnaître <strong>de</strong>vant lui nos imperfections et nos misères, et ne pas trop<br />

chercher à les dissimuler aux yeux <strong>de</strong>s autres non plus que craindre si fort dʹessuyer quel‐<br />

que reproche. On arrive, vous le savez, à ce calme heureux par la prière, par la contempla‐<br />

tion <strong>de</strong> notre divin modèle et enfin en sʹexerçant chaque jour à porter doucement quelque<br />

froissement <strong>de</strong> notre amour‐propre.<br />

Un moyen bien sûr aussi pour se calmer (et je vois <strong>avec</strong> contentement que vous<br />

avez su y recourir) cʹest <strong>de</strong> sʹouvrir simplement à son supérieur, à mesure quʹon lui expli‐<br />

que sa peine, on sent quʹelle diminue et sʹil ajoute quelques mots <strong>de</strong> consolation et dʹen‐<br />

couragement comme il arrive dʹordinaire, le mal a disparu, la sérénité et la confiance sont<br />

revenues.<br />

Vous venez <strong>de</strong> lʹéprouver vous‐même. Vous mʹécriviez, le cœur gros dʹaffliction,<br />

doutant <strong>de</strong> vos forces, désespérant presque <strong>de</strong> lʹavenir, mais bientôt une nouvelle lettre<br />

mʹapprenait que tout était changé: vous aviez parlé, vous aviez ouvert votre âme, la grâce<br />

et la paix étaient <strong>de</strong>scendues par cette ouverture, le mal était guéri.<br />

Il en arrivera <strong>de</strong> même une autre fois si le cas se représentait. Ayez donc bonne<br />

confiance, cher enfant, votre intention est droite, les indices dʹune vraie vocation sont sen‐<br />

1434


sibles chez vous; le Dieu qui vous a appelé vous soutiendra dans la route et nous, vos<br />

amis, vos Pères en J.C., nous entrerons dans les vues <strong>de</strong> sa divine miséricor<strong>de</strong> en vous as‐<br />

sistant <strong>de</strong> notre mieux dans la voie parfaite où nous <strong>de</strong>vons ensemble marcher.<br />

Je me souviendrai, pour moi, tout particulièrement <strong>de</strong> vous donner mes prières et<br />

sacrifices et je serai toujours disposé à vous témoigner ma bien cordiale affection.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1491 à M. Tourniquet<br />

Après le départ du père Lantiez, se ʺconfier <strong>de</strong> plein cœur en la Provi<strong>de</strong>nceʺ. Sʹappuyer sur la grâce, ʺlumière<br />

pour nous conduire, charité pour rendre tout aimable, force pour tout supporterʺ.<br />

Chaville, 6 janvier [1870]<br />

Epiphanie<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Voilà M. Lantiez revenu parmi nous; sa présence était bien nécessaire <strong>de</strong> notre côté,<br />

car nos charges sont lour<strong>de</strong>s et nous sommes peu forts pour les porter quand nous ne<br />

sommes pas tous réunis; mais, pour votre part, vous sentirez son absence, car il vous sou‐<br />

tenait et vous encourageait, tout en évitant <strong>de</strong> vous séparer <strong>de</strong> votre direction ordinaire<br />

quʹil importait <strong>de</strong> ménager. Lʹappui momentané que la Provi<strong>de</strong>nce vous a ainsi envoyé au<br />

temps où vous en aviez le plus besoin vous sera une raison nouvelle <strong>de</strong> vous confier <strong>de</strong><br />

plein cœur en Elle, car ce quʹElle a fait dans le passé, Elle le ferait encore si quelque nou‐<br />

velle épreuve vous advenait. Bon courage donc, mon bien cher enfant; si Dieu est <strong>avec</strong><br />

nous, que pourrions‐nous craindre? Nous serons forts contre tous.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> vos souhaits <strong>de</strong> nouvel an, je sais quʹils partent dʹun cœur affec‐<br />

tueux et dévoué dont les années mʹont prouvé la fidélité. Tous nos ff. sʹunissent à moi pour<br />

vous assurer dʹun parfait retour; nous pensons à vous, nous en parlons souvent, et surtout<br />

nous prions bien régulièrement pour vous; aux recommandations du soir, celle <strong>de</strong>s ff. <strong>de</strong><br />

Rome nʹest jamais omise et ce nʹest pas une seule voix qui la prononce.<br />

M. Lantiez me laisse espérer que vous allez vous soutenir et vivre dans la paix; res‐<br />

tez bien fermes dans vos exercices et appuyez‐vous beaucoup sur le spirituel; la grâce <strong>de</strong><br />

Dieu, cʹest tout ensemble lumière pour nous conduire, charité pour rendre tout aimable,<br />

force pour tout supporter.<br />

M. Lantiez, en partant pour Amiens dont il <strong>de</strong>vient Supérieur, me disait <strong>avec</strong> ins‐<br />

tance quʹil fallait recomman<strong>de</strong>r à M. Emile [Beauvais] et à vous <strong>de</strong> tenir bien vos comptes<br />

en règle; ce point est, en effet, dʹune importance majeure.<br />

Jʹai remis à M. Gallais la note <strong>de</strong> vos commissions, cʹest lui qui doit en surveiller<br />

lʹexécution, confiée à M. Bérard; M. Charrin sʹentendra <strong>avec</strong> eux.<br />

Adieu, mon bien cher enfant en N.S., croyez au tendre dévouement <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1435


1492 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Vie <strong>de</strong>s Œuvres. Ne pas se mésestimer. Voir le bon en nous et en autrui, cʹest ainsi que ʺDieu nous regar<strong>de</strong> puis‐<br />

quʹIl daigne nous aimerʺ.<br />

Vaugirard, 7 janvier 1870<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je commence par réparer une maladresse <strong>de</strong> ma part; hier, retraite du mois, entouré<br />

<strong>de</strong> tous nos ff. du <strong>de</strong>hors et <strong>de</strong> la Maison‐Mère, jʹai chargé un dʹeux <strong>de</strong> porter à M. Henry<br />

[Piquet] le mot que vous lui écriviez concernant quelque travail dʹatelier; ce mot ne lui a<br />

pas été remis et je ne puis me souvenir à qui je lʹai confié, il paraît être égaré; écrivez donc<br />

quelques lignes directement à M. Henry pour y suppléer.<br />

2°‐ M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston], trop chargé et dʹailleurs absolument seul pour sʹoc‐<br />

cuper <strong>de</strong> son sermon annuel, est découragé et ne bouge dʹaucune façon pour le mettre en<br />

bon chemin. Il faudrait quʹil fût un peu aidé pour cela, le moindre secours lui suffirait,<br />

mais je ne vois personne qui puisse lui rendre ce bon office. Voilà la pensée qui nous est<br />

venue et quʹagréent nos ff. ici <strong>avec</strong> gran<strong>de</strong> satisfaction. Avant <strong>de</strong> vous rendre à Angers, où<br />

le remplacement <strong>de</strong> M. dʹArbois nʹest pas urgent, vous pourriez passer ici quinze jours ou<br />

trois semaines pour rendre un peu cœur à M. Georges en prenant quelque intérêt à ses af‐<br />

faires par quelques vues échangées, quelques petites tentatives communes; il nʹen faudra<br />

pas davantage pour le réconforter; ce qui nous est dur surtout, comme vous lʹavez éprouvé<br />

à Amiens, cʹest <strong>de</strong> nous trouver seuls et <strong>de</strong> nʹêtre à même, ni <strong>de</strong> nous concerter, ni dʹêtre<br />

un peu sérieusement secondés. Je vais écrire un mot en ce sens à M. dʹArbois, afin quʹil<br />

mette cette prévision dans ses arrangements. Jʹavais prié M. Lantiez <strong>de</strong> vous parler en ce<br />

sens, je ne sais sʹil lʹa fait.<br />

Pour la discipline <strong>de</strong> lʹorphelinat, ne pourriez‐vous y essayer M. Eugène [Dufour],<br />

et prendre M. Lemaire rue <strong>de</strong> Noyon pour ai<strong>de</strong>r au patronage. Nous rapellerions bien M.<br />

Lemaire ici, où il serait très utile à M. Myionnet pour les ateliers, mais je ne vois personne<br />

qui puisse vous être envoyé en remplacement, ayant lʹombre dʹacquis ou <strong>de</strong> disposition<br />

pour la discipline. En tout cas, il faut que M. Lemaire obéisse; je crois que la persuasion,<br />

jointe à la fermeté, ne sera pas sans résultat.<br />

Je crois que vous pensez et parlez trop mal <strong>de</strong> vous; nous ne <strong>de</strong>vons voir ni nous‐<br />

même, ni les autres à la loupe; lʹhumanité nʹa pas été conçue (<strong>de</strong>puis la chute) pour être<br />

regardée ainsi; prise en masse et en choisissant le point, on y trouve assez <strong>de</strong> bon pour la<br />

supporter; cʹest ainsi, sans doute, que Dieu nous regar<strong>de</strong> puisquʹIl daigne nous aimer; pre‐<br />

nons son Cœur miséricordieux, afin dʹavoir pitié du prochain et <strong>de</strong> nous‐même.<br />

Venez bientôt (quand vous le croirez opportun); nous nous consolerons et nous ré‐<br />

conforterons ensemble. M. Lantiez paraît être content <strong>de</strong> la besogne quʹil trouve déjà faite<br />

et paraît être bien disposé à la continuer.<br />

Adieu, mon bien cher ami; cʹest aujourdʹhui samedi, jʹai autour <strong>de</strong> moi plusieurs<br />

choses qui ne seront pas faites; que ces <strong>de</strong>ux mots partent donc, sans rien <strong>de</strong> plus, sinon<br />

mon affectueux attachement en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1436


1493 à M. dʹArbois<br />

Vœux <strong>de</strong> nouvel an. MM. <strong>de</strong> Varax et <strong>de</strong> Lauriston accablés par leurs travaux. ʺDaigne la grâce <strong>de</strong> Dieu sup‐<br />

pléer à toutes nos indignités et impuissancesʺ.<br />

Chaville, 10 janvier 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie, ainsi que nos ff., <strong>de</strong> votre bonne lettre <strong>de</strong> fête et <strong>de</strong> nouvel an;<br />

vous savez dʹavance combien nos vœux sont sincères pour vous et pour ceux qui parta‐<br />

gent vos travaux; puisse la cordiale charité que le Seigneur a mise dans notre petite famille<br />

sʹaccroître encore et ne sʹamoindrir jamais.<br />

Ordinairement, chacun <strong>de</strong> nos ff. mʹécrit un mot à cette occasion; tous lʹont fait<br />

comme toujours, hors ceux dʹAngers (M. Boiry mʹa écrit). Je le remarque, non pour moi,<br />

mais pour rester fidèle aux traditions qui ont leur valeur quand elles concourent à rendre<br />

un <strong>de</strong>voir et une marque dʹaffection au chef <strong>de</strong> la famille.<br />

M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston], accablé par ses travaux et plus encore par les responsa‐<br />

bilités financières qui pèsent sur lui pour Vaugirard et pour Grenelle, sʹaffaisse sous le<br />

poids et est absolument découragé pour ses sermons <strong>de</strong> cette année. Il déclare son impuis‐<br />

sance à rien entreprendre sʹil nʹest aidé, soutenu et poussé. Jʹai <strong>de</strong>mandé à M. <strong>de</strong> Varax<br />

(près <strong>de</strong> qui M. Lantiez vient <strong>de</strong> se rendre) <strong>de</strong> venir à Vaugirard <strong>de</strong>ux ou trois semaines,<br />

quand il pourra quitter Amiens, afin <strong>de</strong> donner un coup <strong>de</strong> main à M. Georges pour ses<br />

sermons. Si jʹattendais le moment où vous serez libre dʹarriver vous‐même ici, il serait<br />

beaucoup trop tard; la saison est déjà avancée et le premier pas nʹest point encore fait.<br />

Pour tout dire, je crois ce séjour momentané au foyer <strong>de</strong> la Communauté nécessaire<br />

aussi pour M. <strong>de</strong> Varax; les travaux à Amiens ont été ru<strong>de</strong>s pour lui; les fatigues <strong>de</strong> la<br />

charge, jointes aux fréquents malaises <strong>de</strong> sa santé, lʹont mis dans un état physique et moral<br />

quʹil mʹa déjà signalé plusieurs fois et qui a quelques indices inquiétants, non comme me‐<br />

nace dʹune prostration absolue, mais au moins comme indiquant peut‐être quʹun temps <strong>de</strong><br />

calme et <strong>de</strong> détente lui serait nécessaire avant quʹil pût reprendre la responsabilité dʹune<br />

autre œuvre.<br />

Je vous communique ci‐joint, confi<strong>de</strong>ntiellement, sa <strong>de</strong>rnière lettre, <strong>de</strong> même cou‐<br />

leur que <strong>de</strong>ux ou trois autres qui lʹont précédée; je vous prie <strong>de</strong> me la renvoyer après<br />

lʹavoir lue. Cet état <strong>de</strong> choses pouvant amener un délai dans les mutations arrêtées, peut‐<br />

être serait‐il bien <strong>de</strong> ne pas indiquer votre départ dʹAngers comme immédiat, pour ne pas<br />

avoir à dire ensuite quʹil serait retardé.<br />

Nous allons comme toujours; tous sont très occupés et trop chargés, soit à cause du<br />

poids <strong>de</strong>s œuvres, soit à cause <strong>de</strong> notre insuffisance. Daigne la grâce <strong>de</strong> Dieu suppléer à<br />

toutes nos indignités et impuissances.<br />

Adieu, mon bien bon ami; offrez mes respects à MM. les Vicaires Généraux. Si vous<br />

pensez que je dusse leur écrire à lʹoccasion du nouvel an, comme je le faisais pour Mgr dʹAngers, dites‐le moi vite; je nʹécris point dʹordinaire à Metz ni à Amiens.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1437


1494 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Difficultés <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong>s Œuvres, dues au caractère <strong>de</strong>s uns ou à la position inconfortable faite aux autres (com‐<br />

munauté romaine).<br />

Chaville, 13 janvier [1870]<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je crois que si lʹon peut temporiser pour M. Lemaire, ce sera bien; pendant votre sé‐<br />

jour ici, nous verrons sʹil y aurait moyen <strong>de</strong> le bien remplacer pour le mois dʹavril. Jʹespère<br />

<strong>avec</strong> vous que M. Fonlupt ira <strong>de</strong> mieux en mieux.<br />

M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] se réjouit dans lʹespoir <strong>de</strong> vous voir bientôt près <strong>de</strong> lui; se<br />

flatte‐t‐il trop en pensant que ce pourrait être lundi ou mardi <strong>de</strong> la semaine prochaine, 17<br />

ou 18?<br />

Le mot <strong>de</strong> vous à M. <strong>de</strong> Lauriston lui a été remis dès sa réception, je ne me souviens<br />

plus quel en était lʹobjet; je vais le lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r. Je mʹinquiète toujours <strong>de</strong> la situation iso‐<br />

lée <strong>de</strong> nos ff. à Rome; soutenons‐les par nos prières, si nous ne le pouvons autrement; sou‐<br />

tenons‐nous ainsi nous‐mêmes, et nos œuvres, et lʹEglise, et tout en un mot, car qui est‐ce<br />

qui nʹest caduc ici‐bas, si la grâce nʹétait là pour étayer hommes et choses?<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1495 à M. dʹArbois<br />

Tragique acci<strong>de</strong>nt mortel du jeune novice François Marlin. Nouvelles <strong>de</strong>s frères.<br />

Nazareth, 18 janvier 1870<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Un mot <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Lauriston vous a appris le douloureux acci<strong>de</strong>nt qui prive notre<br />

noviciat dʹun <strong>de</strong> ses membres <strong>de</strong> la meilleure espérance, le jeune Marlin, blessé mortelle‐<br />

ment au chemin <strong>de</strong> fer jeudi <strong>de</strong>rnier, en revenant <strong>de</strong> Vaugirard à Chaville. Vous aurez of‐<br />

fert, je le pense, le St Sacrifice <strong>de</strong>ux fois au moins pour lui, ainsi que M. Gauffriau, et nos ff.<br />

auront prié <strong>avec</strong> vous pour ce pauvre enfant, objet pour nous <strong>de</strong> regrets qui nous sont tout<br />

personnels, puisquʹil avait été confessé et communié le matin et quʹil priait au moment où<br />

la mort lʹa frappé, comme le témoigne son chapelet quʹon a trouvé à son bras. Nous res‐<br />

tons péniblement impressionnés par cette épreuve si saisissante.<br />

M. <strong>de</strong> Varax nʹarrivera ici quʹau commencement <strong>de</strong> la semaine prochaine; quand je<br />

lʹaurai vu ici durant quelque temps, je pourrai mieux juger <strong>de</strong> ce que nous serons à même<br />

<strong>de</strong> faire pour les mutations proposées; je pense comme vous sur le malaise <strong>de</strong>s situations<br />

incertaines.<br />

Vous ne mʹavez point dit ce que je dois au séminaire dʹAngers pour M. Boiry, ni les<br />

avances que vous auriez faites pour lui; je vous prie <strong>de</strong> mʹen informer dans votre pro‐<br />

chaine lettre.<br />

M. Boucault verrait <strong>avec</strong> plaisir que vous vous informiez près <strong>de</strong> la famille dont<br />

vous nous avez parlé, et qui a <strong>de</strong>ux jeunes filles à marier, si elle consentirait à en donner<br />

une pour un mari résidant à Paris; nous le mettons définitivement en possession <strong>de</strong> notre<br />

fabrication <strong>de</strong> bronzes dʹéglise.<br />

1438


Je vous quitte ici, obligé <strong>de</strong> faire (quoique ne marchant presque plus) quelques<br />

courses en omnibus ou autrement; assurez tous nos ff. <strong>de</strong> mes bien affectueux sentiments<br />

et croyez vous‐même à mon absolu dévouement en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1496 à M. Tourniquet<br />

Démarches pour un prélat romain. Circonstances <strong>de</strong> la mort tragique du frère Marlin. MLP. en est profondément<br />

affecté.<br />

Vaugirard, 22 janvier 1870<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

M gr Termoz ayant, par lettre, <strong>de</strong>mandé à M. Lantiez <strong>de</strong> lui acheter, pour un ca<strong>de</strong>au,<br />

je pense, quʹil veut faire, une papeterie riche <strong>avec</strong> un buvard, M. Vasseur a été chargé <strong>de</strong><br />

cette acquisition à la place <strong>de</strong> M. Lantiez maintenant résidant à Amiens, comme vous le<br />

savez.<br />

M. Vasseur, qui connaît plusieurs grands fabricants, a examiné <strong>de</strong> divers côtés ce<br />

quʹil y avait <strong>de</strong> mieux dans les objets désirés par M gr Termoz. Voici le résultat <strong>de</strong> ses re‐<br />

cherches:<br />

Une belle papeterie complète, cuir <strong>de</strong> Russie: 82f<br />

très belle: 135f<br />

En cuir <strong>de</strong> Russie seulement au <strong>de</strong>hors et imitation à lʹintérieur, <strong>de</strong> 85 à 105f<br />

Une papeterie <strong>de</strong> ces divers genres comprend un buvard parmi les fournitures; je ne<br />

pense pas que M gr Termoz <strong>de</strong>man<strong>de</strong> lʹachat dʹun buvard à part, outre lʹachat <strong>de</strong> la papete‐<br />

rie; sʹil en était autrement, une belle papeterie séparée coûte 20, 30, 59f.<br />

Avant <strong>de</strong> consommer lʹachat, M. Vasseur désire savoir quel prix est le mieux dans<br />

les intentions <strong>de</strong> M gr Termoz. On pourrait trouver les objets en question en article Paris,<br />

cʹest‐à‐dire cartonnage ou autres imitations, mais lʹinfériorité <strong>de</strong>s qualités est sans propor‐<br />

tion.<br />

Offrez à cette occasion mes respects et mes vœux bien affectueux à M gr Termoz.<br />

M. Jousset mʹa écrit à lʹoccasion du nouvel an, remerciez‐le.<br />

Je ne sais si vous avez appris quʹun <strong>de</strong> nos jeunes novices <strong>de</strong> Chaville, François<br />

Marlin, enfant <strong>de</strong> M. Hello, très bon et très pieux sujet <strong>de</strong> 20 ans, vient <strong>de</strong> nous être enlevé<br />

par un bien douloureux acci<strong>de</strong>nt; en revenant <strong>de</strong> Vaugirard à Chaville, étant seul dans un<br />

compartiment du chemin <strong>de</strong> fer, il a mis trop avant au <strong>de</strong>hors sa tête, il a été frappé et en‐<br />

traîné violemment par un choc contre un <strong>de</strong>s ponts à lʹarrivée <strong>de</strong> Sèvres. Comme le jour fi‐<br />

nissait, on ne sʹest pas aperçu dʹabord <strong>de</strong> cet affreux acci<strong>de</strong>nt; cʹest <strong>de</strong>ux heures après seu‐<br />

lement quʹun employé du chemin <strong>de</strong> fer lʹa trouvé sanglant et brisé dans un fossé, il était<br />

sans connaissance, il a été porté à lʹhospice <strong>de</strong> Sèvres; avertis à 9h. 1/2 du soir, MM. Faÿ et<br />

Audrin sʹy sont rendus en hâte; le pauvre enfant a expiré vers le matin sans avoir pu re‐<br />

trouver la parole. Il sʹétait confessé et avait communié le matin; il priait quand le coup lʹa<br />

frappé, son chapelet étant resté à son bras. Ce malheur nous a frappés cruellement, jʹai<br />

peine pour ma part à mʹen remettre; que la très adorable volonté <strong>de</strong> Dieu soit faite! Notre<br />

pauvre enfant a été déposé samedi <strong>de</strong>rnier dans le caveau; cʹest le neuvième rappelé à<br />

Dieu.<br />

1439


Manque va très bien; sa famille fait dʹincroyables efforts pour lʹobliger à revenir, je<br />

ne sais ce qui en adviendra.<br />

Adieu, mon bien cher enfant; dites à nos ff. toutes mes tendres affections, priez bien<br />

ensemble et vivez dans la charité du Seigneur.<br />

Votre ami et Père dévoué en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1497 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Tout est prêt à Vaugirard pour accueillir le père <strong>de</strong> Varax.<br />

Chaville, 24 janvier 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous attendrai mercredi, comme vous me lʹannoncez; votre venue ayant été plus<br />

différée que nous ne lʹavions espéré, je vous saurai gré <strong>de</strong> ne pas la retar<strong>de</strong>r davantage.<br />

Votre cellule est préparée à Vaugirard, ce qui nʹempêchera pas que vous veniez à Chaville<br />

à certains jours, puisque lʹai<strong>de</strong> que vous voulez bien donner à M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston]<br />

ne saurait être telle quʹil vous retienne <strong>avec</strong> lui tous les jours <strong>de</strong> la semaine.<br />

Je nʹajoute rien, puisque <strong>de</strong>main les entretiens rendront les correspondances écrites<br />

superflues.<br />

A bientôt donc, et croyez que bientôt est, pour moi, moins bien que tout à lʹheure.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1498 à M. Tourniquet<br />

Vie <strong>de</strong> la communauté romaine. La vocation <strong>de</strong> M. Manque soumise à ru<strong>de</strong> épreuve.<br />

Chaville, 2 février 1870<br />

Purification<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je réponds brièvement à votre lettre du 27 janvier.<br />

Nous partageons vos regrets <strong>de</strong> la mort du Colonel dʹArgy; nous sommes heureux<br />

que sa mort ait été si chrétienne. Qui lui succé<strong>de</strong>ra? Prions pour que le choix soit bon.<br />

Je viens <strong>de</strong> recomman<strong>de</strong>r <strong>de</strong> nouveau toutes vos commissions à M. Bérard, qui les<br />

fait sous la direction <strong>de</strong> M. Gallais; je les verrai <strong>de</strong>main, je leur en parlerai encore. Pour<br />

lʹatelier <strong>de</strong> Vaugirard, je vous ferai répondre aussi. Les achats sont faits pour vos commis‐<br />

sions, je saurai par M. Bérard sʹils ont été remis au Comité.<br />

Vos charges sont telles quʹil me semble peu pru<strong>de</strong>nt dʹy ajouter encore la caisse du<br />

recrutement; les erreurs en comptabilité sont presque inévitables quand on est trop oc‐<br />

cupé.<br />

Je nʹai pas refusé à M. Lhermitte, que je sais très bienveillant pour vous, la permis‐<br />

sion <strong>de</strong> vous faire son représentant à lʹexposition romaine; jʹespère quʹil nʹen résultera pas<br />

beaucoup <strong>de</strong> dérangement pour vous.<br />

1440


M. lʹabbé Choyer, qui a envoyé un grand groupe représentant les adieux <strong>de</strong> S t Pierre<br />

et <strong>de</strong> S t Paul au moment où on les sépare pour aller au martyre, part pour Rome. Vous le<br />

verrez sans doute.<br />

Pour le corps du petit martyr, à qui doit être adressée la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>? On me dit que<br />

les formalités, quand cette faveur est accordée, entraînent dʹassez grands frais; en quoi<br />

consistent‐ils et quelle en est lʹimportance? Je ne puis faire la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> avant dʹavoir ces<br />

renseignements. Dites bien à M gr Termoz que, sʹil y a eu <strong>de</strong> notre part quelque retard à lui<br />

répondre concernant lʹachat <strong>de</strong>mandé par lui, il vient uniquement du transfert à Amiens<br />

<strong>de</strong> M. Lantiez qui nʹa pu immédiatement sʹoccuper <strong>de</strong> cette affaire. Je vous serai obligé <strong>de</strong><br />

me dire quelle relique, et <strong>de</strong> quel saint (si on le sait), est enfermée dans la boîte scellée <strong>de</strong>s<br />

armes du Cardinal Bonaparte; jʹattends, pour la présenter à lʹArchevêché, ces renseigne‐<br />

ments. Peut‐être quelques mots du r.p. Cheri seraient bien pour donner valeur à cet envoi<br />

près <strong>de</strong> lʹArchevêché.<br />

Notre brave Manque a gagné ici, dès lʹabord, le cœur <strong>de</strong> tous, mais je ne sais sʹil<br />

nous sera donné <strong>de</strong> lʹavoir parmi nous, immédiatement du moins. Son père ayant été at‐<br />

teint <strong>de</strong> paralysie au moment <strong>de</strong> son entrée chez nous, tous ses frères (il en a 6, beaux et<br />

grands comme lui, et 3 belles‐sœurs, épouses <strong>de</strong> trois <strong>de</strong> ses frères) se sont ligués pour le<br />

faire revenir, assurant que son père était tombé mala<strong>de</strong> <strong>de</strong> chagrin et quʹil le réclamait à<br />

grands cris. Manque a répondu doucement, mais fermement, que, si bien entouré, son<br />

père évi<strong>de</strong>mment nʹavait pas besoin <strong>de</strong> ses soins, et il a <strong>de</strong>mandé instamment quʹon lui<br />

laissât suivre sa vocation. Alors, nouvelle lettre plus pressante, signée <strong>de</strong> tous les membres<br />

<strong>de</strong> la famille, appuyée dʹune lettre non moins instante du<br />

Curé qui atteste que sa présence est nécessaire pour le<br />

repos et le rétablissement <strong>de</strong> son père. Il a dû cé<strong>de</strong>r, il est<br />

parti lundi <strong>de</strong>rnier, fort triste et promettant <strong>de</strong> revenir. Il<br />

pourra difficilement le faire, nous le craignons, si son père<br />

vit et surtout sʹil se rétablit imparfaitement. De tous les<br />

membres <strong>de</strong> la famille, cʹétait lui qui restait le plus<br />

ordinairement à la maison; quand les autres allaient, le soir<br />

ou les dimanches, aux divertissements, cʹétait Michel qui<br />

restait toujours <strong>avec</strong> le père; celui‐ci ne lʹa pas oublié, cʹest<br />

pour cela quʹil gémit et pleure et le veut, quoi quʹon dise.<br />

Le bon Seigneur, qui sait les droites et saintes intentions du<br />

brave Michel, arrangera les choses en sa sagesse; prions pour Frère Michel Manque<br />

ce digne garçon.<br />

Nous allons ici comme <strong>de</strong> coutume. M. <strong>de</strong> Varax est <strong>avec</strong> nous pour une quinzaine<br />

<strong>de</strong> jours, se préparant à se rendre à Angers, où il va remplacer M. dʹArbois qui viendra à<br />

Vaugirard. M. Baumert, quoique jeune, est posé à Grenelle; il vient chaque semaine <strong>avec</strong><br />

ses frères faire son Conseil près <strong>de</strong> moi.<br />

Nous pensons souvent à vous; nos ff. <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt constamment <strong>de</strong> vos nouvelles et<br />

prient pour vous. Vous pouvez donc compter tous que votre éloignement ne diminue en<br />

rien la cordiale affection que chacun vous gar<strong>de</strong> en N.S.<br />

Soyez aussi bien unis à nous par la prière et par une vraie charité; soyez aussi bien<br />

unis entre vous, patients, sachant vous supporter, évitant ce qui peut vous contrarier les<br />

uns les autres et faisant tout pour vous assister réciproquement. A cette condition, Dieu<br />

1441


vous assistera dans vos travaux et dans vos difficultés et tirera <strong>de</strong> vos œuvres <strong>de</strong> grands<br />

fruits pour sa gloire.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je remercie M. Jouin <strong>de</strong> sa lettre, je lui écrirai dès que je le pourrai.<br />

1499 à M. Halluin<br />

MLP. confie à M. Halluin le projet dʹune bienfaitrice désireuse <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>r une colonie agricole.<br />

Chaville, 3 février 1870<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

ou mieux, Mon Révérend Père431 ,<br />

Une bonne œuvre, en projet, me donne lʹoccasion <strong>de</strong> me rappeler à votre souvenir.<br />

Une dame <strong>de</strong> notre connaissance, Mme <strong>de</strong> Nonjon, rue <strong>de</strong> Bourgogne, 52, Paris, dont<br />

vous avez, je crois, entendu parler quelquefois, ayant, près <strong>de</strong> St ‐Omer, un domaine assez<br />

considérable [Clairmarais], aurait le désir dʹen consacrer une partie à la fondation dʹune<br />

colonie agricole et nous a proposé <strong>de</strong> nous charger <strong>de</strong> cette création.<br />

Nʹayant pas <strong>de</strong> sujets qui y soient propres, et déjà trop chargés <strong>de</strong> travaux, nous<br />

nʹavons pu accepter la proposition. Toutefois, nous avons cru rendre service à Mme <strong>de</strong><br />

Nonjon en lui faisant connaître votre établissement dʹArras et en lui suggérant la pensée<br />

que la Congrégation à laquelle vous vous êtes associé pourrait trouver avantage à se char‐<br />

ger <strong>de</strong> cette bonne œuvre, soit à raison <strong>de</strong> la proximité, soit comme complément <strong>de</strong> votre<br />

maison dʹArras.<br />

Dans cette vue, Mme <strong>de</strong> Nonjon vous écrit une lettre que je joins à la présente, <strong>avec</strong><br />

une autre quʹelle mʹavait adressée et qui contient divers renseignements; elle les compléte‐<br />

ra par plus <strong>de</strong> détails si son offre vous paraît mériter examen.<br />

Mme <strong>de</strong> Nonjon a une assez gran<strong>de</strong> fortune; elle en dispose en partie pour <strong>de</strong> bonnes<br />

œuvres; elle a un peu <strong>de</strong> bizarrerie dans lʹesprit, mais elle rachète ce défaut par beaucoup<br />

<strong>de</strong> générosité et <strong>de</strong> bonté. Je suis persuadé que, si lʹétablissement quʹelle projette réussis‐<br />

sait, elle y donnerait tous les développements qui seraient désirables.<br />

Je fais <strong>de</strong>s vœux pour que cette entreprise convienne à vous et à votre Congrégation<br />

et je vous réitère, mon Révérend Père, les assurances <strong>de</strong> mon respectueux dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

ptre 1500 à M. dʹArbois<br />

Mouvement <strong>de</strong> personnel.<br />

Chaville, 3 février 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je nʹai pu, jusquʹici, vous écrire rien <strong>de</strong> précis sur les décisions qui nous restaient à<br />

prendre concernant la position qui serait donnée à M. <strong>de</strong> Varax; jʹavais besoin, vous lʹavez<br />

431 Assomptionniste <strong>de</strong>puis peu : il a prononcé ses vœux le 8 décembre 1869.<br />

1442


compris, <strong>de</strong> le voir à loisir et <strong>de</strong> mʹassurer quʹil nʹétait pas trop fatigué <strong>de</strong> ses durs travaux<br />

à Amiens pour reprendre sans transition ni repos la charge <strong>de</strong>s œuvres dʹAngers. Le temps<br />

quʹil a passé <strong>avec</strong> M. Lantiez et celui quʹil passe parmi nous <strong>de</strong>puis une dizaine <strong>de</strong> jours<br />

ont déjà beaucoup fait pour le remettre; je pense donc quʹil sera prochainement en mesure<br />

<strong>de</strong> se rendre près <strong>de</strong> vous. Il ai<strong>de</strong> un peu M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] à organiser ses <strong>de</strong>ux<br />

sermons; lorsque cette tâche sera finie, je crois quʹil pourra partir; moins <strong>de</strong> quinze jours<br />

me paraissent <strong>de</strong>voir y suffire.<br />

Nous cherchons lequel <strong>de</strong> nos ff. pourrait lʹaccompagner; nous ne trouvons pas faci‐<br />

lement ce qui conviendra.<br />

Je remercie <strong>avec</strong> vous le bon Maître qui a inspiré à M. Angebault et à une autre per‐<br />

sonne charitable <strong>de</strong> vous ai<strong>de</strong>r par <strong>de</strong> généreuses aumônes; cette assistance est double‐<br />

ment heureuse, puisque le souvenir <strong>de</strong> notre vénéré Père, M gr dʹAngers, y est mêlé.<br />

Je ne vois rien <strong>de</strong> particulièrement intéressant à vous dire sur la Congrégation, qui<br />

marche péniblement toujours, mais toujours aussi <strong>avec</strong> les signes <strong>de</strong> la grâce et <strong>de</strong> la béné‐<br />

diction <strong>de</strong> Dieu.<br />

Je me complais dans la pensée que vous pourrez bientôt nous apporter votre ai<strong>de</strong> et<br />

partager ici nos travaux.<br />

Assurez nos ff. <strong>de</strong> nos cordiales affections et croyez aussi à mes bien affectueux sen‐<br />

timents en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Avez‐vous la note <strong>de</strong> ce que je dois au séminaire dʹAngers? M. Boiry est‐il tou‐<br />

jours satisfait et en bonnes dispositions?<br />

1501 à M. Tourniquet<br />

A propos <strong>de</strong> diverses commissions et démarches. Brèves nouvelles <strong>de</strong> la Communauté.<br />

Chaville, 10 février 1870<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je vous envoie, comme vous me le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z, le prix <strong>de</strong> la croix <strong>de</strong> procession 52. Il<br />

est (verni) <strong>de</strong> 95 f<br />

plus le bâton en cuivre (verni) 39 f<br />

Argenté ou doré, <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s cabochons, le prix sʹélève naturellement, ainsi que lʹindi‐<br />

que la feuille ci‐jointe.<br />

Vos commissions doivent être en route, je les ai recommandées plusieurs fois à nos<br />

MM. qui mʹont dit quʹelles étaient prêtes; ils observaient quʹils manquaient dʹargent pour<br />

les payer, les créances dont vous parlez, ou nʹétant pas suffisamment indiquées, ou parais‐<br />

sant mal assises.<br />

Les photographies envoyées par M. Charrin avaient pour but <strong>de</strong> vous mettre à<br />

même <strong>de</strong> recomman<strong>de</strong>r à lʹoccasion les bronzes <strong>de</strong> notre atelier.<br />

Vous ne mʹavez rien dit pour lʹachat que nous <strong>de</strong>mandait Mgr Termoz, y renonce‐t‐<br />

il? Offrez‐lui mon respectueux souvenir.<br />

Et mes questions sur la gran<strong>de</strong> relique que vous mʹavez envoyée, vous nʹy avez pas<br />

répondu. De quel saint ou martyr est‐elle? dʹoù vient‐elle? qui en était possesseur? qui<br />

1443


nous la donne? pourrait‐elle être mise dans une chapelle où se dit la messe? Je vous rap‐<br />

pelle aussi les questions au sujet du corps dʹun jeune saint. Je nʹoublie pas dʹailleurs com‐<br />

bien vous êtes tous occupés, et je prends patience paisiblement.<br />

Ci‐joint aussi une note <strong>de</strong> M. Planchat sur les honoraires <strong>de</strong> messe; cʹest chez M.<br />

Mabire quʹil en faut <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r le prix, il vous a déjà donné son adresse.<br />

Manque est encore auprès <strong>de</strong> son père qui va mieux, il espère nous revenir bientôt;<br />

il nous semble avoir une vraie vocation.<br />

Voilà que je pars pour retourner à Vaugirard; je partage toujours ma semaine entre<br />

Chaville, Nazareth et la Maison‐Mère.<br />

M. Lantiez sʹétablit bien à Amiens; M. <strong>de</strong> Varax, qui est près <strong>de</strong> nous <strong>de</strong>puis quinze<br />

jours, va partir la semaine prochaine pour Angers; après quʹil sʹy sera bien posé (<strong>de</strong>ux ou<br />

trois semaines), M. dʹArbois viendra nous ai<strong>de</strong>r à la maison <strong>de</strong> Vaugirard qui est trop dé‐<br />

munie présentement.<br />

M. Gresser soutient toujours S t ‐Charles <strong>avec</strong> zèle; il <strong>de</strong>meure entièrement à Naza‐<br />

reth, délivré <strong>de</strong> son emploi aux Postes; il est enfin dans <strong>de</strong>s conditions régulières.<br />

Nous avons regretté <strong>avec</strong> vous le Colonel dʹArgy. Est‐il bien remplacé?<br />

Vous mʹaviez annoncé lʹenvoi <strong>de</strong> vos comptes; je souhaite gran<strong>de</strong>ment quʹils soient<br />

bien réguliers.<br />

Assurez nos ff. que cʹest un vrai regret pour moi <strong>de</strong> ne pouvoir leur écrire; peut‐être<br />

que, M. dʹArbois étant là, je pourrai vous écrire à tous un peu plus souvent.<br />

Toute la famille vous assure <strong>de</strong> ses affectueux souvenirs; je parle <strong>de</strong> vous à nos ff. et<br />

je leur communique vos lettres, soit en substance, soit en les lisant.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, croyez à mes bien tendres sentiments, et priez pour<br />

moi qui prie constamment pour vous.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1502 à M. Manque<br />

Encouragement à persévérer dans son désir <strong>de</strong> vie religieuse. MLP. sʹexplique bien les oppositions quʹil ren‐<br />

contre: ʺles temps sont mauvais, la foi affaiblieʺ.<br />

Chaville, 10 février 1870<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Nous avons reçu votre lettre <strong>avec</strong> une gran<strong>de</strong> joie, car elle nous annonce quʹaprès<br />

un voyage heureux, vous avez trouvé votre bon père bien mieux que vous ne lʹespériez et<br />

tout le reste <strong>de</strong> votre famille en santé satisfaisante. Nous prions <strong>avec</strong> vous pour que votre<br />

cher père achève <strong>de</strong> se rétablir et que son état vous mette hors dʹinquiétu<strong>de</strong>.<br />

Nous comprenons bien les difficultés <strong>de</strong> votre position et les oppositions que ren‐<br />

contre votre vocation, nous les avions prévues dʹavance et nous savions déjà ce que vous<br />

auriez à souffrir. Nous sommes en <strong>de</strong>s temps mauvais, la foi sʹest affaiblie, il nʹest presque<br />

plus <strong>de</strong> familles qui donnent généreusement et <strong>avec</strong> cœur quelquʹun <strong>de</strong> leurs membres<br />

pour le service du Seigneur. On consent encore à faire quelque part au sacerdoce, parce<br />

que, <strong>de</strong> ce côté, on peut se créer une certaine position, sʹattirer quelque honneur, mais ces<br />

vues toutes humaines, ne trouvant rien qui puisse les contenter dans lʹétat religieux, le dé‐<br />

daignent et nʹen saisissent ni le mérite ni la sainteté. Pour vous, mon cher enfant, sachez<br />

1444


ien que tant que lʹEglise aura <strong>de</strong> vrais enfants, ceux‐là sauront que la consécration entière<br />

<strong>de</strong> soi‐même à Dieu, <strong>avec</strong> le détachement complet <strong>de</strong>s choses <strong>de</strong> ce mon<strong>de</strong>, constitue lʹétat<br />

<strong>de</strong> perfection, la meilleure part, ainsi que lʹa déclaré notre divin Seigneur, et quʹheureux,<br />

trois fois heureux sont ceux quʹIl y appelle et quʹIl sʹest choisis comme une milice privilé‐<br />

giée qui doit marcher <strong>de</strong> tout près à sa suite. Ne tenez donc aucun compte <strong>de</strong>s dires et <strong>de</strong>s<br />

contradictions <strong>de</strong> vos entourages, le manque <strong>de</strong> lumières les explique et doit nous les faire<br />

excuser, mais chacun a sa voie; si le plus grand nombre est appelé à la vie ordinaire, Dieu<br />

se fait sa part, Il réserve les siens pour son service et leur <strong>de</strong>voir est <strong>de</strong> répondre à son appel.<br />

Jʹen étais là <strong>de</strong> cette lettre que je vous écrivais quand on me remet la secon<strong>de</strong> que<br />

vous mʹadressez.<br />

Je vois <strong>avec</strong> joie que le divin Seigneur vous a suivi dans votre absence du Noviciat<br />

et a suppléé Lui‐même aux directions que vous y recevez. Vous pensez justement, mon<br />

cher enfant, vous êtes parfaitement en droit <strong>de</strong> revenir, et jʹajoute très nettement que vous<br />

<strong>de</strong>vez le faire. Je conçois bien le regret quʹéprouve M. le Curé <strong>de</strong> vous voir partir; un pas‐<br />

teur zélé est heureux dʹavoir dans sa paroisse <strong>de</strong>s fidèles pieux qui puissent édifier les au‐<br />

tres; mais quand vous serez ici, aux pieds <strong>de</strong> Dieu, dans les pieux exercices du Noviciat,<br />

soyez bien assuré que votre prière, <strong>de</strong>venue plus puissante par le sacrifice, obtiendra plus<br />

<strong>de</strong> bénédictions pour votre pays, pour votre Pasteur lui‐même et pour votre famille que ne<br />

le ferait votre présence habituelle.<br />

Donc, mon cher enfant, puisque votre bon père est mieux et que, dʹailleurs, il est en‐<br />

touré <strong>de</strong> six autres fils et <strong>de</strong> trois belles‐filles, nʹhésitez pas à revenir aussitôt que vous le<br />

pourrez. Dès que vous saurez le jour <strong>de</strong> votre départ, écrivez‐le moi, afin que nos frères<br />

vous atten<strong>de</strong>nt et se réjouissent <strong>de</strong> votre arrivée.<br />

Vous savez que chaque jour ici on prie en commun pour tout ce qui intéresse la<br />

Communauté; nous ne manquons pas <strong>de</strong> prier spécialement pour vous, et nous faisons<br />

aussi une mention pour votre bon père.<br />

Offrez‐lui mon respect et croyez vous‐même, mon cher enfant, à ma cordiale affec‐<br />

tion en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1503 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Divers points en souffrance sur lesquels MLP. attend une réponse.<br />

Vaugirard, 15 février 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] (souffrant à lʹinfirmerie) sʹinquiète <strong>de</strong> ne point recevoir<br />

<strong>de</strong> réponse <strong>de</strong>s Dames franciscaines dʹArras concernant notre lingerie; vous mʹavez bien<br />

dit pourtant, si je ne me trompe, que vous leur aviez écrit?<br />

M. Perthuisot attend pour partir un mot que je désirais recevoir <strong>de</strong> vous ou <strong>de</strong> M.<br />

dʹArbois, mʹannonçant lʹagrément <strong>de</strong> MM. les Vicaires Généraux capitulaires au change‐<br />

ment du Directeur <strong>de</strong> la Maîtrise et <strong>de</strong>s œuvres dʹAngers; je désirerais que cet avis tardât<br />

peu, M. Perthuisot étant un peu désœuvré à Vaugirard.<br />

1445


Si vous nʹavez pas contremandé encore votre proposition au p. Morel concernant M.<br />

Castellant, ce <strong>de</strong>rnier, revenu vite dʹun premier mouvement <strong>de</strong> fâcherie contre les Congré‐<br />

gations, ne semblerait pas éloigné <strong>de</strong> ce parti qui lʹabriterait contre ses tendances aux étu‐<br />

<strong>de</strong>s hautes; il en sent vivement les dangers aujourdʹhui.<br />

A cause <strong>de</strong> lʹabsence <strong>de</strong> M. Myionnet, je reste à Vaugirard jusquʹà samedi. Com‐<br />

ment vous êtes‐vous trouvé <strong>de</strong> votre voyage?<br />

Mille affections <strong>de</strong> tous et particulièrement <strong>de</strong><br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1504 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Un séminariste va ai<strong>de</strong>r le père <strong>de</strong> Varax dans son nouveau poste. Deman<strong>de</strong> <strong>de</strong> nouvelles.<br />

Vaugirard, 16 février 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

La lettre dʹacceptation <strong>de</strong> votre digne personne par MM. les Vicaires Généraux étant<br />

arrivée, je vais faire partir M. Perthuisot <strong>de</strong>main matin jeudi, au départ <strong>de</strong> 7h; il arrivera, je<br />

crois, vers 2h. 1/2 . Il est très bien disposé et me semble très maniable; je crois quʹil vous se‐<br />

con<strong>de</strong>ra bien, étant à la fois intelligent et robuste.<br />

Nous recevrons <strong>avec</strong> joie <strong>de</strong> vos nouvelles; je viens dʹouvrir la requête <strong>de</strong>s jeunes<br />

gens dʹAngers <strong>de</strong>mandant le maintien <strong>de</strong> M. dʹArbois; ils auront déjà compris, en vous<br />

voyant, que leur <strong>de</strong>man<strong>de</strong> serait sans résultat; elle les honore et promet pour vous <strong>de</strong>s<br />

agents fidèles et dévoués. Je leur écrirai, ainsi quʹà M. Jouin, dont jʹai aussi reçu la lettre.<br />

Votre ami et Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1505 à M. dʹArbois<br />

Prendre le temps dʹinitier le père <strong>de</strong> Varax à sa nouvelle charge avant <strong>de</strong> gagner Vaugirard.<br />

Vaugirard, 17 février 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu, mercredi ou mardi, une bonne lettre <strong>de</strong> Messieurs les Vicaires Généraux,<br />

pleins dʹestime et dʹaffection pour vous; bénissons Dieu qui vous a assisté dans la tâche<br />

dont vous étiez chargé à Angers; espérons quʹIl sera encore <strong>avec</strong> vous dans votre nouvel<br />

emploi, lequel ne sera pas sans peines et sans fatigues.<br />

Je vous envoie une réponse à la lettre que mʹont envoyée les jeunes ouvriers dʹAn‐<br />

gers et à celle <strong>de</strong> M. Jouin; lʹune et lʹautre étaient bien cordiales. Vous aurez lʹobligeance<br />

dʹy faire mettre <strong>de</strong>s enveloppes et <strong>de</strong> les faire parvenir sans retard; jʹaurais voulu écrire<br />

plus tôt.<br />

Je vous recomman<strong>de</strong> le jeune Séminariste [M. Perthuisot] qui ai<strong>de</strong>ra un peu M. <strong>de</strong><br />

Varax; je le crois bon, il est simple et intelligent et <strong>de</strong> soli<strong>de</strong> santé.<br />

M. <strong>de</strong> Varax a besoin <strong>de</strong> quelques ménagements, sa santé étant peu forte, il ne fait<br />

pas maigre le samedi; je ne sais si les gros vins dʹAnjou lui iraient, mais je crois que vous<br />

prenez le vôtre du <strong>de</strong>hors. Je nʹose vous presser pour le moment <strong>de</strong> votre venue, car il im‐<br />

1446


porte <strong>de</strong> bien poser M. <strong>de</strong> Varax. Mais je sais dʹavance que vous saurez, <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong><br />

lui, faire toute chose en temps convenable.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1506 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Le père <strong>de</strong> Varax dans sa nouvelle obédience. Appréciation sur <strong>de</strong>s Œuvres <strong>de</strong> jeunes gens; il y faut un ʺbon prê‐<br />

treʺ, soutenu par un laïc éminent et un ou <strong>de</strong>ux frères.<br />

18 février 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous salue dans votre nouvelle rési<strong>de</strong>nce dʹAngers. Jʹai reçu <strong>avec</strong> joie lʹannonce<br />

<strong>de</strong> votre bonne arrivée en cette ville, <strong>avec</strong> peine lʹavis <strong>de</strong> votre indisposition, <strong>avec</strong> espé‐<br />

rance la perspective <strong>de</strong> votre prompt rétablissement.<br />

Sans connaître lʹœuvre dʹOrléans, je pense <strong>avec</strong> vous quʹelle est en bonne voie si elle<br />

est arrivée à former un centre composé <strong>de</strong> jeunes gens vraiment soli<strong>de</strong>s qui donnent le<br />

mouvement et lʹesprit à la famille. Mais, pour former et soutenir ce noyau dʹélite, il faut<br />

dʹordinaire un bon prêtre; un laïc éminent ne ferait que la moitié <strong>de</strong> sa tâche; si ce prêtre<br />

est soutenu <strong>de</strong> quelque homme pieux et dévoué, comme M. Desfrancs à Orléans, M. Faivre<br />

(décédé) à Metz, la combinaison est parfaite; un ou <strong>de</strong>ux ff. peuvent sʹy adjoindre utile‐<br />

ment, à la condition <strong>de</strong> ne pas nuire au ressort et à lʹactivité <strong>de</strong>s bons jeunes dignitaires.<br />

Dans les très gran<strong>de</strong>s villes, le mouvement <strong>de</strong>s affaires et travaux est tel que ces dignitaires<br />

sont rarement assez libres pour suffire aux services <strong>de</strong>s œuvres, lʹintervention <strong>de</strong> plusieurs<br />

frères est alors nécessaire. Le voisinage émouvant <strong>de</strong> tant <strong>de</strong> lieux <strong>de</strong> plaisir oblige aussi<br />

les œuvres à plus dʹanimation et <strong>de</strong> fréquence dans leurs moyens extérieurs dʹattrait et,<br />

dans un autre sens, à rendre plus pressante et plus forte lʹaction spirituelle. Nazareth ici,<br />

mieux équilibrée que le Cercle, me semble être un assez bon type pour Paris. Puisse le type<br />

à citer pour les villes <strong>de</strong> province se trouver à Angers!<br />

Nous allons attendre pour les Franciscaines; les Dames Auxiliatrices dʹAmiens ont<br />

répondu négativement.<br />

Si M. Perthuisot peut nʹavoir point <strong>de</strong> relations affectées <strong>avec</strong> M. <strong>Jean</strong> [Gauffriau],<br />

ce sera bien.<br />

Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S.<br />

Votre ami et Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Nous avons reçu la dépêche pour le retour <strong>de</strong> M. Myionnet.<br />

18 février. M. Myionnet est arrivé ce matin à 4h., sʹétant arrêté chez sa nièce. Il me<br />

parle <strong>de</strong>s Sœurs qui sont à lʹEvêché dʹAngers comme pouvant nous convenir. M. dʹArbois<br />

ne pourrait‐il <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à lʹEvêché ce quʹon pense dʹelles et <strong>de</strong> leurs services?<br />

1507 à M. Tourniquet<br />

Persévérer dans la patience et lʹhumilité. Plusieurs questions dʹordre pratique. Récit <strong>de</strong> la mort subite dʹAuguste<br />

Myionnet, <strong>de</strong>rnier <strong>de</strong>s frères <strong>de</strong> Clément Myionnet.<br />

1447


Vaugirard, 19 février 1870<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Continuez à travailler, ainsi que nos frères, dans la patience et lʹhumilité; Dieu sera<br />

<strong>avec</strong> vous, Il vous bénira tous et, si vous nʹavez pas lʹapprobation <strong>de</strong>s hommes, vous en se‐<br />

rez dʹautant plus chers au Seigneur.<br />

Je vais prier M. Vasseur dʹacheter la papeterie <strong>de</strong> Mgr Termoz et je vous en ferai<br />

lʹenvoi.<br />

Pour la croix <strong>de</strong> procession, on va la faire, mais il ne faut pas sʹen rapporter à la<br />

mémoire <strong>de</strong> notre cher Pappaz. Le prix réel <strong>de</strong> cette croix est, comme je vous lʹai dit:<br />

Croix sans cabochons, vernie 95f<br />

Bâton cuivre ciselé verni 39f<br />

On conseille les cabochons,<br />

qui ajoutentbeaucoup à lʹeffet 24f<br />

158f<br />

On la cè<strong>de</strong>ra à 150f, mais pas à moins; elle est vraiment belle, et cʹest une œuvre<br />

dʹart.<br />

Je vais faire la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pour le corps du jeune saint et je vous lʹenverrai.<br />

M. Gallais me dit que tous vos envois <strong>de</strong>mandés par vos notes sont en route.<br />

Le chapelet pour la rue Virginie, à Grenelle, a dû être remis à nos ff. <strong>de</strong> Grenelle; je<br />

saurai sʹils en ont connaissance.<br />

Pour la petite boîte <strong>de</strong>stinée à Compiègne, on avait dit quʹelle <strong>de</strong>vait être portée<br />

chez les Dominicains qui la feraient parvenir. M. Paillé lʹy a portée.<br />

Offrez nos sympathies affectueuses à M. Herr.<br />

Manque nous écrit quʹil revient, je pense que je le trouverai ce soir à Chaville; il a<br />

bravement lutté pour rester dans sa vocation.<br />

Nous prierons pour M. <strong>de</strong> Rivoire; je serais heureux que Dieu le donnât à notre fa‐<br />

mille religieuse, je crois que ce serait bien selon les vues <strong>de</strong> Dieu, puisquʹil a perfectionné<br />

ou peut‐être trouvé sa vocation dans nos œuvres.<br />

M. Myionnet vient <strong>de</strong> perdre son frère, M. Auguste Myionnet, bien connu <strong>de</strong> vous<br />

tous; cʹétait le <strong>de</strong>rnier <strong>de</strong> ses frères, il est mort subitement, revenant dʹune petite prome‐<br />

na<strong>de</strong> quʹil venait <strong>de</strong> faire à une lieue dʹAngers <strong>avec</strong> ses enfants. Il causait gaiement <strong>avec</strong><br />

eux quand il a été saisi; il est mort sur la route, la tête appuyée sur lʹune <strong>de</strong> ses filles, tandis<br />

que lʹautre courait chercher un prêtre et un mé<strong>de</strong>cin; ces secours sont arrivés trop tard; sa<br />

vie était fort chrétienne; il venait <strong>de</strong> sortir dʹune église <strong>de</strong>vant laquelle il était passé, il<br />

nʹavait pas voulu passer outre sans y faire une petite prière <strong>avec</strong> ses enfants; cʹest Dieu cer‐<br />

tainement qui lui a donné cette inspiration; cette petite prière en famille a dû remplacer<br />

pour lui les secours <strong>de</strong> lʹEglise et les <strong>de</strong>rniers sacrements. Priez pour lui et faites aussi prier<br />

à son intention. M. dʹArbois perd en lui son appui le plus actif et le plus dévoué.<br />

Le petit Josset, protégé du r.p. Cheri, va bien comme conduite et comme travail.<br />

Je vois dans votre lettre envoyée par moi à M. Keller, selon votre désir, que <strong>de</strong>s er‐<br />

reurs se seraient trouvées dans vos comptes pour votre gestion en lʹabsence <strong>de</strong> M. Desce‐<br />

met; quelles étaient ces erreurs? quelle importance avaient‐elles? ont‐elles été réparées?<br />

Jʹai examiné vos comptes pour 1869. Vos dépenses personnelles nʹont‐elles pas<br />

augmenté et ne dépassent‐elles pas celles <strong>de</strong> lʹannée précé<strong>de</strong>nte?<br />

1448


Adieu, mon bien cher ami et fils en N.S.; assurez nos ff. que, si je ne leur écris pas,<br />

cʹest par défaut absolu <strong>de</strong> temps; je les aime, je prie pour eux; si je puis faire mieux en<br />

temps moins surchargés, je le ferai <strong>avec</strong> joie.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1508 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Directives au sujet <strong>de</strong> M. Perthuisot. Impossibilité <strong>de</strong>ʺdéranger les frères quelque peu valables chez nousʺ.<br />

Chaville, 24 février [1870]<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie une lettre <strong>de</strong> M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet], qui vous suppose encore<br />

résidant à Vaugirard; je gar<strong>de</strong> la note pour M. Charrin.<br />

Si Mme <strong>de</strong> Varax jugeait un voyage <strong>de</strong> M. Audrin nécessaire, il ne serait pas absolu‐<br />

ment impossible quʹil le fît; mais il semblerait bien à propos, avant tout, quʹil y eût entente<br />

entre M. <strong>de</strong> Bretenières et Mme votre mère, autrement le voyage serait sans résultat.<br />

Ne vous découragez pas trop vite au sujet <strong>de</strong> M. Perthuisot, et surtout quʹon ne le<br />

mette pas <strong>de</strong> côté comme M. Moutier, pourtant réellement fort capable et quʹon est réduit<br />

à regretter aujourdʹhui. Vous savez mieux que personne, en ayant souffert à Amiens, com‐<br />

bien sont impossibles à déranger les ff. quelque peu valables chez nous; tâchez donc <strong>de</strong> ti‐<br />

rer parti dʹun jeune homme neuf, il est vrai, mais intelligent, soli<strong>de</strong> <strong>de</strong> corps et plein <strong>de</strong><br />

bonne volonté. Pour ce jeune homme, il sera à suivre pour la piété; on ne lui reprochait pas<br />

<strong>de</strong> fautes <strong>de</strong> conduite à Troyes, mais une piété faible. Le milieu où il se trouvait y contri‐<br />

buait peut‐être; extérieurement, il était fort régulier à Chaville, mais cʹest lʹintérieur que<br />

Dieu <strong>de</strong>man<strong>de</strong>; vous verrez.<br />

Je vais envoyer à M. dʹArbois les 127f pour la pension <strong>de</strong> M. Boiry.<br />

Pour M. Castellant, il ne paraît pas incliner à lʹinfirmerie <strong>de</strong>s prêtres; il sʹest épuisé<br />

en lettres et en efforts pour rentrer chez nous; nous avons maintenu notre décision, <strong>avec</strong><br />

quelque regret <strong>de</strong> ma part <strong>de</strong> nʹavoir point dʹindication convenable pour lui à lui donner;<br />

un patronage <strong>de</strong> province peut‐être; <strong>de</strong>s ecclésiastiques isolés dans leurs entreprises se‐<br />

raient heureux sans doute dʹavoir son ai<strong>de</strong>; en connaissez‐vous?<br />

Votre affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Affections dévouées à M. dʹArbois et à nos ff.<br />

Jʹaurais désiré que M. dʹArbois <strong>de</strong>mandât à M. Pessard ou autre si on était content à<br />

lʹEvêché du service <strong>de</strong>s Sœurs.<br />

1509 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Diverses questions en suspens. Budget <strong>de</strong> la communauté dʹAngers. Les pays qui nous appellent <strong>de</strong>vraient sou‐<br />

tenir les Œuvres. Premier schéma du Manuel <strong>de</strong> la congrégation. Les frères laïcs et la tentation du sacerdoce.<br />

Vaugirard, 4 mars 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vais répondre bien brièvement à votre lettre du 3 <strong>de</strong> ce mois, me sentant <strong>de</strong>puis<br />

quelques jours plus faible et plus souffrant que <strong>de</strong> coutume.<br />

1449


Je rends grâces à Dieu du bon succès <strong>de</strong> vos fêtes et je le prie <strong>de</strong> vous donner un<br />

peu <strong>de</strong> ce repos quʹIl accordait à ses apôtres après leurs travaux: Venite seorsum...<br />

Je crois quʹon peut suspendre la récitation <strong>de</strong>s prières faites aux intentions indi‐<br />

quées avant notre départ pour Rome; mais il faut prier autrement, si ce nʹest <strong>de</strong> cette sorte,<br />

car le besoin du secours dʹen haut est bien pressant toujours.<br />

Ci‐joint le <strong>de</strong>ssin pour le timbre sec <strong>de</strong>mandé par M. <strong>Jean</strong>‐Marie[Tourniquet].<br />

Je vais tâcher <strong>de</strong> faire copier le dispositif du Chapitre Général dʹoctobre, afin <strong>de</strong><br />

vous lʹenvoyer. M. <strong>de</strong> Lauriston va vous envoyer le paquet adressé pour vous par M. Lan‐<br />

tiez. Point <strong>de</strong> lettre <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Costa [Costa <strong>de</strong> Beauregard].<br />

Je désire aller à Amiens, dʹaprès le vœu exprimé par M. Lantiez; si ma santé se re‐<br />

met un peu, je le ferai. Je ne me souviens pas quels règlements voulait bien nous commu‐<br />

niquer le p. Durand, Recteur <strong>de</strong> S t ‐Acheul.<br />

Je verrai, je pense, M. Ginet assez prochainement, quand lʹarrivée <strong>de</strong> sa tante moti‐<br />

vera sa venue ici, je causerai <strong>avec</strong> lui <strong>de</strong> votre pensée à son sujet; mais à Angers, qui le sui‐<br />

vrait dans ses étu<strong>de</strong>s? Nʹest‐il pas à craindre que le mouvement <strong>de</strong> votre maison les favo‐<br />

rise peu? Sʹil montrait à ce projet une répugnance sensible, je <strong>de</strong>vrais, je crois, en tenir<br />

compte; soyez sûr aussi que votre désir ne sera point oublié. Je crois que M. Moutier, pris<br />

<strong>avec</strong> cordialité et suivi régulièrement, pourrait donner gran<strong>de</strong> satisfaction.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> la bonne pensée qui vous porte à partager entre Angers et<br />

lʹŒuvre <strong>de</strong>s Clercs lʹaumône <strong>de</strong> M me votre sœur. Je ferai comme vous et M. dʹArbois juge‐<br />

rez bien <strong>de</strong> faire, relativement à la dépense occasionnée par la présence <strong>de</strong> M. Perthuisot.<br />

Sauf un autre avis, on pourrait régler ainsi les choses: M. dʹArbois appliquait annuelle‐<br />

ment 400f venant <strong>de</strong> son père pour parfaire les sommes nécessaires aux dépenses <strong>de</strong> la<br />

communauté. Une pareille somme, prise sur les 800f que vous apporterez <strong>de</strong> votre côté,<br />

laisserait encore 400f disponibles pour M. Perthuisot; on pourrait y ajouter 200 ou 300f re‐<br />

cueillis pour lʹŒuvre <strong>de</strong>s Clercs, afin dʹêtre moins strictement limité. Si M. dʹArbois et<br />

vous pensez que ce ne serait pas assez encore, je mʹen rapporterai à vos appréciations. Il<br />

serait mieux assurément que les pays qui appellent nos ff. fussent assez généreux ou assez<br />

justes pour soutenir leur œuvre; mais nous acceptons, autant que nous le pouvons, les<br />

conditions telles quelles où on nous pose; la Provi<strong>de</strong>nce se montre, elle, toujours bonne et<br />

généreuse. Comptons donc sur son appui et réglez en conséquence, <strong>avec</strong> M. dʹArbois, cet<br />

article <strong>de</strong> votre budget. Je vais chercher plus attentivement le petit livre <strong>de</strong>s souscriptions.<br />

Je vous quitte pour lʹexercice du vendredi soir, durant le carême, je pense que le<br />

surcroît <strong>de</strong> malaise et dʹépuisement qui mʹest survenu est la part que Dieu me fait aux pé‐<br />

nitences <strong>de</strong> ce saint temps; puissé‐je lʹaccepter cordialement.<br />

On a écrit au f. <strong>de</strong> Jules Lefebvre; je doute quʹil aille en ce mon<strong>de</strong> plus dʹun mois;<br />

lʹétat <strong>de</strong> Frézet nʹest pas bien caractérisé encore, mais il y a <strong>de</strong>s indices inquiétants. Vous<br />

verrez quelquefois, nʹest‐ce pas, M. Boiry. Je pense quʹil sera bien que M. Perthuisot nous<br />

écrive dès quʹil verra un peu clair dans sa position nouvelle.<br />

M. dʹArbois me dit quʹil ne pourra arriver ici avant le 10 ou le 15 <strong>de</strong> ce mois; si je<br />

reste souffrant et incapable, son arrivée sera dʹautant plus nécessaire.<br />

Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S., croyez à mes sentiments bien tendrement<br />

dévoués.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1450


Excusez la flétrissure que ma lampe vient <strong>de</strong> faire à cette feuille ‐7h. du soir‐. Jʹécris<br />

à M. dʹArbois pour lui envoyer lʹargent quʹil <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pour M. Boiry.<br />

La petite feuille pour la direction est bien; peut‐être <strong>de</strong>vrait‐on examiner si elle ré‐<br />

sume les obligations comprises dans les Constitutions.<br />

Je suis très content du petit travail sur le postulat. Ce qui serait à faire maintenant,<br />

ce serait un abrégé <strong>de</strong>s Constitutions, pour être remis comme memento manuel <strong>de</strong> leurs <strong>de</strong>‐<br />

voirs à tous les ff. Sans ce document, ils nʹauront jamais pleinement la possibilité <strong>de</strong> se pé‐<br />

nétrer <strong>de</strong> leurs obligations.<br />

Dans la notice sur le postulat, quelques mots seraient à ajouter pour éloigner <strong>de</strong><br />

lʹesprit <strong>de</strong>s ff. laïcs la tentation dʹaspirer au sacerdoce. 5 ont fait <strong>de</strong>s instances en ce sens<br />

ces temps <strong>de</strong>rniers; aucun dʹeux nʹy <strong>de</strong>vait songer raisonnablement. Lʹun dʹeux, M. Grise‐<br />

lain, va, me dit‐on, quitter la Congrégation parce quʹon refuse <strong>de</strong> consentir à sa prétention.<br />

1510 à M. dʹArbois<br />

Egards à observer vis‐à‐vis <strong>de</strong> lʹabbé Le Boucher. Mauvaise santé <strong>de</strong> MLP.<br />

Vaugirard, 5 mars 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Leboucher y est déjà; autrement, il ne serait pas bien que vous sembliez prendre posses‐<br />

sion dʹune œuvre quʹil avait fondée et où vous lui avez seulement succédé.<br />

Il serait sage <strong>de</strong> ne pas faire pour cela une bien gran<strong>de</strong> dépense; on pourrait lʹimpu‐<br />

ter moitié sur la Communauté et moitié sur les aumônes par vous reçues, lʹœuvre, en défi‐<br />

nitive, étant bien plus intéressée que la communauté à lʹexistence <strong>de</strong> ce portrait.<br />

Je vous envoie ci‐joint, en un billet et en un mandat, 130f pour la pension, etc. <strong>de</strong> M.<br />

Boiry.<br />

Nous vous attendons pour le 15 <strong>de</strong> ce mois, comme vous me lʹavez annoncé; une<br />

faiblesse <strong>de</strong> corps et dʹesprit dont je suis atteint <strong>de</strong>puis quelque temps à un <strong>de</strong>gré inconnu<br />

pour moi jusquʹici rend votre présence <strong>de</strong> plus en plus nécessaire.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1511 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Conduite à tenir à lʹégard dʹun postulant dʹAmiens inconstant. Fermeté et patience <strong>de</strong> MLP. Petit nombre <strong>de</strong><br />

novices. Compter sur le dévouement <strong>de</strong> Victor Pavie.<br />

Chaville, 7 mars 1870<br />

Mon bien bon ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai quelque petite inquiétu<strong>de</strong> au sujet <strong>de</strong>s dispositions <strong>de</strong> notre cher petit f. Gérold.<br />

Après avoir montré un désir si ar<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> venir au Noviciat, il commençait à y trouver un<br />

peu dʹennui. Pour faire un peu diversion aux exercices quotidiens, je lui ai proposé dʹaller<br />

le dimanche dans une œuvre <strong>de</strong> Patronage, ce quʹil a accepté <strong>avec</strong> un extrême empresse‐<br />

ment. Lʹépreuve a paru dʹabord avoir plein succès; il revenait le dimanche enchanté. Mais<br />

le contentement a peu duré; après trois semaines environ, il mʹavertissait que lʹœuvre <strong>de</strong><br />

Grenelle ne lui convenait pas, que les enfants lui déplaisaient, que ceux dʹAmiens lui<br />

1451


convenaient bien mieux, quʹil serait heureux <strong>de</strong> retourner près dʹeux. Très doucement et<br />

affectueusement, je lui ai rappelé les principes <strong>de</strong> la vie religieuse sur la sainte indifférence<br />

à lʹégard dʹun emploi, et aussi cet amour généreux <strong>de</strong>s âmes qui doit nous donner force<br />

pour surmonter quelques répugnances. Répugnance, pour le dire en passant, bien peu<br />

fondée, car les enfants <strong>de</strong> Grenelle sont loin dʹêtre inférieurs comme tenue et habitu<strong>de</strong>s à<br />

ceux dʹAmiens. Enfin je lui ai dit que, sans lui prescrire formellement dʹaller à Grenelle,<br />

puisque je ne lʹy avais envoyé quʹà titre <strong>de</strong> diversion utile pour lui, je lʹy engageais néan‐<br />

moins, persuadé quʹil sʹy accoutumerait bientôt et prendrait affection pour les enfants. Il<br />

me répondit quʹil irait, mais en pleurant à chau<strong>de</strong>s larmes; je le consolais, lʹembrassais af‐<br />

fectueusement <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s paroles dʹencouragement. Il se plaignait quʹil restait une partie du<br />

jour au contrôle. Jʹécrivis à M. Caron, qui a la conduite du patronage (M. Gallais ayant les<br />

Jeunes Ouvriers), afin quʹil restât quelques instants seulement au contrôle. Cependant, et<br />

malgré ces prévoyances, dimanche <strong>de</strong>rnier, au moment <strong>de</strong> partir, il est venu mʹavertir quʹil<br />

avait la migraine et <strong>de</strong>mandait à ne pas aller à Grenelle; il est resté, mais avant midi la mi‐<br />

graine avait disparu, il a dîné comme <strong>de</strong> coutume. Comme il mʹa dit avoir été réellement<br />

indisposé, je lui ai montré confiance et nʹai pas insisté. Je lui ai témoigné aujourdʹhui la<br />

même confiance; il mʹapportait une lettre quʹil avait faite pour vous, mais elle était fermée;<br />

il lʹavait close ainsi, mʹa‐t‐il dit, par mégar<strong>de</strong>; jʹai laissé partir la lettre sans difficulté; en<br />

général, je crois bon ne point montrer <strong>de</strong> défiance aux ff. pour les accoutumer à agir di‐<br />

gnement et en droite intention.<br />

Je dois dire quʹà part quelques bizarreries dʹhumeur, parfois le manque <strong>de</strong> savoir‐<br />

vivre, je nʹai rien vu qui soit réellement à reprendre en lui. Si, en suite du contenu <strong>de</strong> sa let‐<br />

tre, vous voyez quelque indication à me donner pour sa direction, jʹen tiendrai compte vo‐<br />

lontiers. Je crois que sa seule et vraie difficulté, cʹest le peu <strong>de</strong> maturité <strong>de</strong> sa raison, <strong>de</strong>s<br />

vues encore trop enfantines et lʹinsuffisance <strong>de</strong> la piété et <strong>de</strong> lʹesprit <strong>de</strong> sacrifice; non que<br />

tout cela soit absolument en défaut, mais tout cela est peu avancé.<br />

Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S., priez pour nous; le Noviciat est assez ap‐<br />

pauvri en ce moment; nous nʹavions, sans compter M. Ludger [Montalvan] encore à lʹétat<br />

<strong>de</strong> probation, que 4 étudiants latinistes; ils vont être réduits à 3 [MM. Pialot, Lepage et<br />

<strong>Prevost</strong>], Chupin se retirant <strong>avec</strong> une aspiration plus ou moins fondée pour les Domini‐<br />

cains. Deux jeunes gens, lʹun <strong>de</strong> St‐Etienne, lʹautre <strong>de</strong> Tours, mʹont écrit pour le côté laïc; je<br />

ne sais ce quʹil en adviendra. Prions, cʹest le grand, le seul vrai moyen <strong>avec</strong> le zèle et le dé‐<br />

vouement; hors cela, tout est sans valeur et sans effet.<br />

Votre tout affectionné ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

Mille affections à tous; comptez bien sur le dévouement <strong>de</strong> M. Victor Pavie, cʹest un<br />

cœur chaud et une âme haute.<br />

1512 à M. Tourniquet<br />

Un nouveau postulant; veiller sur ses frères. Deman<strong>de</strong> dʹexplications sur les comptes <strong>de</strong> la communauté. Nou‐<br />

velles <strong>de</strong>s Œuvres <strong>de</strong> lʹInstitut.<br />

Chaville, 10 mars 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie ci‐joint une lettre pour M. Coquerel; les renseignements que jʹai reçus<br />

sur lui <strong>de</strong> Tours étant fort bons, je crois quʹil doit être admis à faire son postulat, quʹil<br />

1452


pourra passer près <strong>de</strong> vous à Rome, ainsi quʹil en a le désir; nous en réglerons la durée se‐<br />

lon quʹil nous paraîtra sage <strong>de</strong> la déterminer. Il ne serait pas pru<strong>de</strong>nt, ce me semble, quʹil<br />

<strong>de</strong>meurât à la Villa Strozzi avant que nous nous en soyons entendus <strong>avec</strong> le Comité et que<br />

M. Descemet en soit informé par ce <strong>de</strong>rnier; je vois quelque difficulté à faire une proposi‐<br />

tion en ce sens aux membres du Comité, parce que nous ne savons pas encore si M. Co‐<br />

querel persévérera et que lʹépreuve malheureuse faite <strong>avec</strong> le jeune Rabusier a laissé une<br />

impression peu favorable à <strong>de</strong>s essais <strong>de</strong> pareille nature. Voyez‐vous quelque moyen <strong>de</strong><br />

parer à cet embarras?<br />

Veillez bien sur vos ff., sur le plus jeune en particulier [M. Pappaz]; il mʹavait com‐<br />

muniqué plusieurs fois ses petites difficultés <strong>de</strong> conscience et mʹavait averti, dʹaprès lʹavis<br />

<strong>de</strong> son confesseur, quʹil était à propos quʹil allât peu au <strong>de</strong>hors et, autant que possible, quʹil<br />

ne sortît pas seul; vous tiendrez compte <strong>de</strong> ce renseignement. Voyez‐le souvent, montrez‐<br />

lui beaucoup dʹaffection; tâchez quʹil nʹabandonne pas la pratique <strong>de</strong>s sacrements; pour<br />

lui, comme pour la communauté, il sentira quʹil doit puiser en Dieu la grâce <strong>de</strong> <strong>de</strong>meurer<br />

sage et fidèle au saint état auquel il aspire; engagez‐le à écrire à M. Lantiez qui le connaît<br />

bien, qui lui donnera <strong>de</strong> bons conseils.<br />

Je regrette que M. Emile [Beauvais] ne mʹécrive pas; si je ne lui réponds pas toujours<br />

bien exactement, cʹest, il le sait, que le temps et les forces me manquent pour subvenir à<br />

mes travaux.<br />

Je crois quʹil vaut mieux, pour lʹoffice, gar<strong>de</strong>r lʹuniformité <strong>de</strong> prononciation comme<br />

nous lʹavons en France.<br />

M. Charrin mʹassure quʹil vous a écrit une longue lettre pour ses comptes.<br />

M gr . Termoz est‐il content <strong>de</strong> sa papeterie? Elle a coûté 25f, plus 1f 50, je crois, pour<br />

lʹemballage.<br />

Je pourrais vous envoyez 20f pour honoraires <strong>de</strong> 20 messes dont je puis disposer, et<br />

même en ajouter 6 pour compléter un chiffre égal au prix <strong>de</strong> la papeterie; ce serait un<br />

moyen <strong>de</strong> me rembourser <strong>de</strong> cette avance quand M gr Termoz vous aura remis cet argent;<br />

atten<strong>de</strong>z, du reste, quʹil vous le remette sans le lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r.<br />

Je ne comprends pas bien lʹexplication que vous me donnez sur lʹaugmentation <strong>de</strong><br />

vos dépenses du <strong>de</strong>rnier exercice. On peut, me dites‐vous, compter comme un frère <strong>de</strong><br />

plus à nourrir en réunissant MM.<strong>de</strong> Varax, Le <strong>Prevost</strong>, Rabusier, Lantiez, Vrignault. Je<br />

vous rappelle, mon cher enfant, que M. <strong>de</strong> Varax et moi avons constamment payé notre<br />

nourriture, notre éclairage et notre blanchissage; je suppose bien quʹil en a été <strong>de</strong> même <strong>de</strong><br />

M. Lantiez, que je nʹavais point autorisé à se faire nourrir par vous; pour ma part, je payais<br />

en supplément tout ce que je faisais venir journellement <strong>de</strong> chez M. Gennetier; quant à Ra‐<br />

busier et à M. Vrignault, vous aviez dû vous entendre <strong>avec</strong> le Comité ou <strong>avec</strong> M. Descemet<br />

pour leurs dépenses; il semble dès lors quʹil y avait lieu <strong>de</strong> faire figurer ces frais à part et<br />

comme ne provenant pas <strong>de</strong> la communauté. Je vous serai obligé, en particulier, <strong>de</strong> me<br />

dire si bien réellement M. Lantiez a été nourri à vos frais; il ne mʹa pas du tout dit quʹil en<br />

fût ainsi.<br />

Vous ne mʹavez pas dit non plus en quoi consistaient les erreurs <strong>de</strong> vos comptes<br />

pendant votre remplacement <strong>de</strong> M. Descemet.<br />

M. Giraud nʹétant pas (que je sache) encore <strong>de</strong> retour à Paris, je nʹai encore reçu ni la<br />

lettre, ni les 14 reliques que vous mʹannoncez. Il a été retenu à Gênes.<br />

1453


Je presse <strong>de</strong> mon mieux M. Charrin pour la croix <strong>de</strong> procession; le prix sera, comme<br />

je vous lʹai dit, <strong>de</strong> 150f; elle est fort belle.<br />

On vous enverra bientôt les prix pour les <strong>de</strong>ssins photographiés qui sont chez vous.<br />

Nous attendons M. dʹArbois à Vaugirard pour mardi; il doit prendre la conduite <strong>de</strong><br />

cette maison et mʹai<strong>de</strong>r un peu pour lʹensemble <strong>de</strong>s affaires <strong>de</strong> la Communauté. M. <strong>de</strong> Va‐<br />

rax semble bien prendre à Angers; M. Lantiez tient aussi bien sa place à Amiens. Metz va<br />

bien également. Mais à Paris, S te ‐Anne et S t ‐Charles nʹont pas encore <strong>de</strong> communautés à<br />

<strong>de</strong>meure, ce qui est un détriment pour les ff. et pour les œuvres. Grenelle a un personnel<br />

insuffisant, S t ‐<strong>Jean</strong> reste une très petite œuvre; <strong>de</strong>mandons au Seigneur <strong>de</strong>s ouvriers forts<br />

et généreux pour sa moisson.<br />

Tout ce quʹon me dit <strong>de</strong> M. Coquerel me laisse penser quʹil pourrait être un <strong>de</strong> ces<br />

bons ouvriers, tâchez quʹil ne trouve que <strong>de</strong>s sujets pour sʹédifier quand il vient au milieu<br />

<strong>de</strong> vous; faites aussi, <strong>de</strong> ma part, cette recommandation à nos ff.<br />

Ne mʹoubliez pas auprès <strong>de</strong>s rr. pp. Brichet, Laurençot, M gr Termoz, etc..etc... Qui<br />

remplace le Colonel dʹArgy? Comment va le Commandant Cirlot? Respects à tous.<br />

Adieu, mon bien bon ami, priez pour moi, je suis encore plus affaibli que vous ne<br />

mʹavez vu à Rome, jʹattends lʹheure que Dieu aura choisie pour mon rappel vers Lui.<br />

Tendres affections à tous.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1513 à M. dʹArbois<br />

La venue du père d’Arbois <strong>de</strong> Jubainville à Vaugirard <strong>de</strong> nouveau ajournée. Qu’il prenne le repos nécessaire.<br />

Vaugirard, 11 mars 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Cʹest <strong>avec</strong> un véritable regret quʹaprès <strong>de</strong>s retards plus prolongés que nous ne lʹeus‐<br />

sions désiré, nous voyons encore votre arrivée différée; <strong>de</strong>puis bien longtemps, beaucoup<br />

<strong>de</strong> choses sont en souffrance ici et votre présence y est impatiemment attendue. Toutefois,<br />

si vous ne pouvez autrement que par <strong>de</strong>s veilles régler convenablement vos affaires, je ne<br />

veux pas compromettre, par cet accroissement <strong>de</strong> fatigue, votre santé dont vous aurez<br />

gran<strong>de</strong>ment besoin ici; nous nous résignerons donc au nouvel ajournement que vous pro‐<br />

posez. Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> instamment <strong>de</strong> prendre le sommeil dont je sais que vous ne pou‐<br />

vez vous passer.<br />

On comptait, à Vaugirard, que vous seriez posé dans vos fonctions le jour <strong>de</strong> St Jo‐<br />

seph, samedi 19, et on avait pensé que <strong>de</strong>ux ou trois jours ne seraient pas trop pour vous<br />

en donner une première connaissance. On tâchera <strong>de</strong> faire les choses plus brièvement si<br />

vous nʹarrivez ou ne partez que jeudi. Nos frères espéraient que vous parleriez sur St Jo‐<br />

seph le samedi, à lʹoffice <strong>de</strong> lʹaprès‐midi, qui commencera à 1h. 1/2 pour laisser à nos ff. <strong>de</strong>s<br />

œuvres la possibilité <strong>de</strong> ne rentrer pas trop tard chez eux, où ils auront à préparer la jour‐<br />

née du dimanche. Si vous trouviez impossible cet arrangement, je vous serais obligé <strong>de</strong><br />

mʹen informer.<br />

Adieu, mon bien cher ami et fils en N.S.; jʹai la confiance que lʹaffection <strong>de</strong> tous nos<br />

ff. ici et la mienne, en particulier, vous rendront moins pénible votre séparation <strong>de</strong> tous<br />

1454


ceux qui vous regretteront à Angers; M. <strong>de</strong> Varax, <strong>de</strong> son côté, sans vous faire oublier,<br />

comblera le vi<strong>de</strong> résultant <strong>de</strong> votre absence.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1514 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Mouvement <strong>de</strong> personnel difficile. Compter sur Dieu:ʺen Lui, espérance toujoursʺ.<br />

Chaville, 14 mars 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> votre réponse concernant M. Gérold; jʹavais besoin <strong>de</strong> ces<br />

éclaircissements pour agir <strong>avec</strong> lui, autant bien que je le pourrai, dans son intérêt. Je tâche‐<br />

rai quʹil ait <strong>avec</strong> moi ou <strong>avec</strong> M. Faÿ plus dʹouverture. Je ne sais si sa nature ar<strong>de</strong>nte se<br />

pourra accommo<strong>de</strong>r dʹun temps illimité à passer au Noviciat; je pensais un peu à me<br />

contenter pour le moment <strong>de</strong> ce quʹil en a fait et <strong>de</strong> ce quʹil y a appris, et à lui donner un<br />

emploi, en me réservant <strong>de</strong> le reprendre ici, dans un an ou <strong>de</strong>ux, quand il se sera un peu<br />

mûri dans la vie active. M. Lantiez me <strong>de</strong>mandant <strong>de</strong> rappeler M. Lemaire qui ne va pas à<br />

St ‐Jacques, je songerais à envoyer là M. Caron, présentement chargé <strong>de</strong> la section <strong>de</strong>s ap‐<br />

prentis à Grenelle, et à le faire remplacer pour ce <strong>de</strong>rnier emploi par M. Gérold; il aurait<br />

les conseils <strong>de</strong> M. Gallais, lequel a la section <strong>de</strong>s jeunes gens constitués en Cercle et régis<br />

par un règlement particulier dans <strong>de</strong>s salles et locaux qui leur sont affectés.<br />

La tâche serait encore un peu lour<strong>de</strong>, parce que le patronage <strong>de</strong>s apprentis a une<br />

section, dite <strong>de</strong> St Joseph, dont les sujets ont <strong>de</strong> 15 a 17 ans; mais lʹensemble du personnel<br />

<strong>de</strong>s apprentis, grands et petits, ne dépasse guère une centaine, en moyenne, chaque di‐<br />

manche; le Directeur a un ou <strong>de</strong>ux membres <strong>de</strong> St ‐Vincent <strong>de</strong> Paul bien choisis qui lʹai<strong>de</strong>nt<br />

assidûment, et <strong>de</strong> plus un frère que le Noviciat peut aussi envoyer le dimanche, ainsi quʹil<br />

le fait en ce moment en la personne <strong>de</strong> M. Gérold. Ne pensez‐vous pas quʹil pourrait mar‐<br />

cher ainsi? Réponse, sʹil vous plaît.<br />

Je suis entré, autant que possible, dans votre pensée et votre désir en autorisant, il<br />

est vrai non sans regret, M. dʹArbois à ne partir que le jeudi 17; faire plus nous serait im‐<br />

possible; plusieurs questions fort urgentes pour la maison <strong>de</strong> Vaugirard sont restées en<br />

suspens, <strong>avec</strong> souffrance réelle, en attendant lʹarrivée <strong>de</strong> M. dʹArbois; une plus longue at‐<br />

tente <strong>de</strong>vient impossible.<br />

M. Perthuisot se plaît‐il à Angers et sʹy accoutume‐t‐il? Deman<strong>de</strong>z‐lui ce quʹil sait et<br />

pense dʹun jeune séminariste <strong>de</strong> Troyes, M. Choullier, qui paraît disposé à venir chez<br />

nous; M. Roussel, chez qui il a été une année, nous en a donné <strong>de</strong> bons renseignements.<br />

Tâchez, à travers tout, <strong>de</strong> ne pas négliger votre santé, soignez votre régime et faites<br />

très mesurément le Carême; Dieu, en ce moment, ne vous en <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pas plus.<br />

Le jeune Lefebvre sʹéteint doucement; son f. dʹArras lʹest venu voir et est reparti; ce‐<br />

lui <strong>de</strong> Marseille a dû arriver hier dimanche.<br />

M. Frézet va mieux, mais est encore languissant; le mé<strong>de</strong>cin le plus éclairé [M. Jous‐<br />

set] ne sʹest pas prononcé jusquʹici sur son état et a <strong>de</strong>mandé un temps dʹexamen.<br />

Adieu, mon bien cher ami et fils en N.S; comptons peu ou pas du tout sur nous,<br />

mais beaucoup sur Dieu; en Lui, espérance toujours; où donc est cette parole <strong>de</strong> David:<br />

1455


ʺQuand même, ô mon Dieu, vous me tueriez, jʹespérerais encore en vousʺ. Cʹest une espé‐<br />

rance contre toute espérance quʹil nous faut; notre état <strong>de</strong> vie surnaturelle ne comporte<br />

rien <strong>de</strong> moins; si nous lʹobtenons, tout sera sauf.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Affections à tous.<br />

1514‐1 à M lle Désir<br />

MLP. lui notifie sa décision <strong>de</strong> ne plus permettre au père Lantiez <strong>de</strong> la diriger.<br />

Chaville, 14 mars 1870<br />

Chère Ma<strong>de</strong>moiselle,<br />

Je viens, au nom <strong>de</strong> notre vieille et très sincère amitié pour vous, vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r un<br />

sacrifice que nous croyons indispensable pour le bien <strong>de</strong> notre Congrégation, et utile pour<br />

vous‐même et pour vos œuvres si dignes dʹintérêt.<br />

M. Lantiez mʹécrit que vous êtes allée le voir à Amiens et que vous lui avez <strong>de</strong>man‐<br />

dé dʹentretenir <strong>avec</strong> vous une correspondance spirituelle; je lui ai répondu que je ne<br />

croyais pas pouvoir autoriser cet arrangement, ne la croyant bonne ni pour vous, ni pour<br />

lui, ni pour nous.<br />

Je ne vous ai dit quʹà <strong>de</strong>mi, chère Ma<strong>de</strong>moiselle, que la préoccupation quʹavait prise<br />

M. Lantiez <strong>de</strong> vos œuvres et <strong>de</strong> la direction quʹil vous donnait, lʹavait détourné très nota‐<br />

blement <strong>de</strong> ses obligations <strong>de</strong> position, au point dʹexciter les plaintes continuelles <strong>de</strong> ceux<br />

quʹil avait à conduire, quʹil avait, en suite <strong>de</strong>s blâmes qui lui en sont advenus, conçu une<br />

sorte <strong>de</strong> dégoût et dʹaversion pour ses travaux et que sa vocation en avait été fort com‐<br />

promise.<br />

Jʹai aussi évité <strong>de</strong> vous dire que votre assiduité et celle <strong>de</strong> vos dames à Grenelle fai‐<br />

saient jaser entre eux les jeunes gens <strong>de</strong> nos œuvres, que les langues féminines, dans la so‐<br />

ciété <strong>de</strong> Grenelle, sʹexerçaient aussi dans le même sens et que M. le Curé avait cru sage <strong>de</strong><br />

nous en avertir. Dans le même temps, un haut dignitaire du diocèse, portant aussi son at‐<br />

tention <strong>de</strong> ce côté, disait: M. Lantiez sʹégare <strong>de</strong> sa voie et tombe dans une déplorable illu‐<br />

sion.<br />

Cʹest dans ces circonstances et pour faire diversion à ces malaises pénibles que nous<br />

avons dû nous résigner à un voyage dispendieux <strong>de</strong> M. Lantiez à Rome, ensuite à un dé‐<br />

placement préjudiciable pour plusieurs <strong>de</strong> nos maisons. Lʹai<strong>de</strong> cordial que notre famille<br />

religieuse vous a donné <strong>de</strong> son mieux pendant plusieurs années ne lui donne‐t‐il pas le<br />

droit dʹattendre que vous renonciez franchement et généreusement à <strong>de</strong>s relations bonnes<br />

assurément à certains égards, mais que, <strong>de</strong>vant Dieu et après mûr examen, elle juge préju‐<br />

diciable pour elle?<br />

Pour vous‐même, serait‐ce vous bien poser dans le diocèse et préparer à vos œuvres<br />

lʹappui <strong>de</strong> lʹautorité supérieure ecclésiastique que <strong>de</strong> concourir à détourner <strong>de</strong> lʹobéissance<br />

un religieux jusquʹici si justement estimé <strong>de</strong> tous?<br />

Nʹest‐il pas aussi dans le véritable intérêt <strong>de</strong> votre association et <strong>de</strong> son avenir <strong>de</strong><br />

vous assurer une direction ferme, précise et bien posée? Or comment M. Molinier [S.J.] ou<br />

tout autre prendront‐ils à cœur votre conduite spirituelle et celle <strong>de</strong> vos dames associées,<br />

1456


sʹils sentent quʹils nʹont, <strong>de</strong> votre part, quʹune <strong>de</strong>mi‐confiance et quʹen réalité cʹest dʹune<br />

autre part que vous recevez avis et inspiration?<br />

Cʹest pour ces diverses raisons que jʹai dû refuser mon autorisation à M. Lantiez<br />

pour la correspondance spirituelle que vous lui <strong>de</strong>mandiez et, sʹil était nécessaire, je le lui<br />

interdirais à titre dʹobéissance religieuse.<br />

Mais je sais, chère Ma<strong>de</strong>moiselle, quʹune pareille mesure ne sera provoquée ni <strong>de</strong> sa<br />

part, ni <strong>de</strong> la vôtre, vous tiendrez compte <strong>de</strong> lʹhumble prière que je vous adresse ici et vous<br />

voudrez que, comme par le passé, nous <strong>de</strong>meurions unis <strong>de</strong> prière et par une mutuelle<br />

sympathie dans la voie <strong>de</strong>s œuvres saintes où Dieu nous a placés pour sa gloire.<br />

Veuillez agréer, chère Ma<strong>de</strong>moiselle, la nouvelle assurance <strong>de</strong> mon bien respec‐<br />

tueux dévouement en N. S.<br />

Le <strong>Prevost</strong> P tre<br />

1515 432<br />

1516 à M. Trousseau<br />

Sʹaffermir dans la patience et la soumission aux <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> Dieu. Sollicitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> MLP. pour ses frères (M. Ginet).<br />

Chaville, 16 mars 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu <strong>avec</strong> grand plaisir votre petite lettre, dʹautant que la rareté <strong>de</strong> vos corres‐<br />

pondances en fait pour moi une chose inaccoutumée et presque inattendue; jʹy réponds<br />

tout <strong>de</strong> suite, pour que mon empressement témoigne <strong>de</strong> ma satisfaction.<br />

Je nʹai pas immédiatement dʹintentions <strong>de</strong> messes, ayant distribué ces jours‐ci celles<br />

dont je pouvais disposer. Je vais tâcher dʹen réunir quelques‐unes, et je vous les enverrai<br />

sans retard. Ne vous préoccupez pas dʹailleurs <strong>de</strong> cette pensée que vous ne concourez pas<br />

directement à lʹacquit <strong>de</strong>s dépenses <strong>de</strong> la maison; vous y contribuez par votre travail et par<br />

vos prières. Cʹest à cette double bonne œuvre que nous <strong>de</strong>vons la bénédiction <strong>de</strong> Dieu, <strong>de</strong><br />

laquelle découlent toutes les ressources qui nous adviennent.<br />

Je pense que M. Ginet ferait bien d’écrire à Mme sa tante et prendre jour <strong>avec</strong> elle<br />

pour la visite quʹil doit lui faire; je suppose quʹil lui aura déjà répondu. Sʹil ne lʹavait pas<br />

fait, il serait à propos quʹil lui écrivît sans retard. Je vous prie <strong>de</strong> veiller à ce quʹil ait <strong>de</strong>s vê‐<br />

tements propres au moyen <strong>de</strong> 100f quʹil a dû réserver pour cette dépense.<br />

Je suis heureux dʹapprendre que vous continuez courageusement vos efforts pour<br />

vous affermir dans la patience et la soumission aux <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> Dieu, lorsquʹIl vous<br />

éprouve. Aussi vous <strong>de</strong>viendrez fort et vous aurez la paix <strong>de</strong> lʹâme, bien si précieux que la<br />

Sainte Ecriture la déclare au‐<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> tout sentiment.<br />

La cloche sonne, il me faut finir ici; je vous dirai une autre fois ce qui pourrait re‐<br />

gar<strong>de</strong>r votre personnel ou nos propres faits et gestes ici.<br />

Votre dévoué ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

432 Suppléée par la lettre 1392 bis .<br />

1457


Amitiés à nos ff. Je voulais écrire un mot à M. Ginet, le temps me manque; quʹil dise<br />

à sa tante quʹil pourra lʹaller voir et que le Carême nʹy met pas dʹobstacle. La lettre <strong>de</strong> sa<br />

tante ne porte pas son adresse; il la sait sans doute.<br />

1517 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Date dʹune prochaine visite.<br />

Chaville, 20 mars 1870<br />

Madame la Marquise,<br />

Je tiens pour certain que nos bons anges sʹenten<strong>de</strong>nt; je me sentais vivement pressé<br />

<strong>de</strong> voir vous et votre chère famille, et jʹavais arrêté positivement que jʹirais vous rendre vi‐<br />

site mardi prochain. Une course à lʹArchevêché ne me laissera guère libre ce jour‐là que<br />

vers 3h. Si, pour ne pas gêner votre promena<strong>de</strong>, il vous était commo<strong>de</strong> que jʹarrivasse seu‐<br />

lement rue St ‐Florentin à 4h., je vous serais reconnaissant <strong>de</strong> mʹen avertir par un mot<br />

adressé rue Stanislas, 11, où je dois me trouver <strong>de</strong>main lundi.<br />

Veuillez, Madame la Marquise, agréer et partager <strong>avec</strong> votre cher entourage tous<br />

mes sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1518 à M. Lemaire<br />

Obédience pour Vaugirard. M. Myionnet et MLP. ont lʹespérance <strong>de</strong> voir ses bonnes dispositions se maintenir.<br />

Vaugirard, 26 mars 1870<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

M. Myionnet qui, vous le savez, vous est très attaché, vous verra revenir <strong>avec</strong> plaisir<br />

à Vaugirard, mais nous avons quelque difficulté pour vous remplacer à Amiens; nous al‐<br />

lons nous en occuper; la chose se fera aussitôt quʹil sera possible, et au plus tard pour le<br />

moment <strong>de</strong> la retraite.<br />

Laissez‐moi vous dire, cher enfant, que M. Myionnet, en donnant son agrément à<br />

votre retour, ajoutait: ʺJʹai la confiance que M. Lemaire, dont les dispositions, au moment<br />

<strong>de</strong> son départ, laissaient beaucoup à désirer, sera, maintenant quʹil est bien reposé, docile,<br />

maniable et vraiment dans lʹesprit <strong>de</strong> sa vocationʺ. Je partage cette espérance, mon cher<br />

ami, et, dans ces conditions, je serais heureux que vous repreniez à Vaugirard les soins que<br />

vous pouvez si utilement donner à nos enfants. Soyez sûr que vous vous en acquitterez<br />

<strong>avec</strong> succès, si vous vous maintenez dans la piété, afin que Dieu daigne vous accor<strong>de</strong>r sa<br />

grâce, sans laquelle tous nos efforts <strong>de</strong>meurent infructueux.<br />

Adieu, mon cher enfant, croyez à tous mes sentiments bien affectueux en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1519 à M. Maignen<br />

Embarras pour procé<strong>de</strong>r à un mouvement <strong>de</strong> personnel. Projet dʹassociation <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s Cercles ouvriers <strong>de</strong> Belgi‐<br />

que.<br />

1458


Chaville, 30 mars 1870<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Je cherche, sans le pouvoir trouver, le moyen <strong>de</strong> vous donner un homme sûr et un<br />

peu capable pour le Cercle. Je suis dans le même embarras pour Amiens, où M. Lantiez,<br />

déjà <strong>de</strong>puis quelque temps, me presse <strong>de</strong> lui amener un sujet valable pour lʹorphelinat <strong>de</strong><br />

St ‐Jacques. Si vous aviez quelques vues, dites‐les moi.<br />

M. <strong>de</strong> Lambel, à qui jʹai parlé <strong>de</strong> la petite feuille du r.p. Foinel, désirerait la voir,<br />

ainsi quʹun exemplaire du Moniteur.<br />

Il serait bien aise <strong>de</strong> vous entretenir dʹune association dʹouvriers fondée en Belgique<br />

et qui en compte déjà 45.000; il pense que nous pourrions avantageusement y affilier nos<br />

Cercles, dʹautant que nous aurions ainsi un moyen dʹattirer les jeunes ouvriers belges, si<br />

nombreux à Paris. Un autre avantage, cʹest que cette association est soutenue par une autre<br />

Société, dont le but est <strong>de</strong> lui donner par ses prières force et appui spirituel; le moyen<br />

semble heureux, puisquʹil a produit un si notable résultat.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Il faudrait aussi charitablement penser à lʹavenir <strong>de</strong> M. Streicher.<br />

1520 à M. Tourniquet<br />

Un postulant nʹapprend rien <strong>de</strong> la vie religieuse dans une maison dʹœuvre au mouvement incessant. Soin à ap‐<br />

porter à la tenue <strong>de</strong>s comptes. Le manque <strong>de</strong> réflexion et lʹimpulsivité engendrent un activisme stérile et épui‐<br />

sant. Maladie du frère Gallais.<br />

Chaville, 30 mars 1870<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Jʹai appris <strong>avec</strong> joie, par une lettre <strong>de</strong> notre f. Emile [Beauvais], que notre jeune<br />

Pappaz allait mieux; que le Seigneur en soit béni! Espérons quʹil persévérera; autrement,<br />

veillez bien <strong>de</strong> près, et ne manquez pas <strong>de</strong> nous avertir sʹil fléchissait <strong>de</strong> nouveau.<br />

La pensée que vous auriez <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à M. Descemet dʹautoriser M. Coquerel à<br />

loger à la Villa ne pourrait être réalisable quʹ<strong>avec</strong> la convention que le séjour <strong>de</strong> ce bon<br />

jeune homme à Rome serait temporaire; vous avez trop lʹexpérience <strong>de</strong> la vie que nous<br />

menons pour ne pas voir, comme nous, que M. Coquerel nʹapprendra rien <strong>de</strong> la vie reli‐<br />

gieuse dans le mouvement incessant où vous tient votre poste, et <strong>avec</strong> le peu <strong>de</strong> suite<br />

quʹon peut donner à sa formation dans son nouvel état; ce peut être une transition accep‐<br />

table pour un temps, mais un temps limité seulement. Jʹaurais désiré quʹil mʹécrivît pour<br />

remercier la Communauté qui a consenti à son postulat, et aussi pour faire acte <strong>de</strong> soumis‐<br />

sion à la condition que je lui ai posée pour son entrée au Noviciat, après un séjour déter‐<br />

miné à Rome. Sans lui dire précisément que je fais cette remarque, il serait bien que vous<br />

lui conseilliez <strong>de</strong> mʹécrire en ce sens et <strong>de</strong> correspondre <strong>de</strong> temps en temps <strong>avec</strong> moi pour<br />

que nos relations et le lien <strong>de</strong> famille commencent à sʹétablir entre nous. Plus M. Coquerel<br />

semble avoir <strong>de</strong> qualités, plus il importe <strong>de</strong> ne pas fausser sa voie.<br />

Je ne saurais trop vous recomman<strong>de</strong>r, mon bien cher enfant, <strong>de</strong> mettre une sérieuse<br />

attention dans vos comptes; je ne vous trouve pas à lʹabri <strong>de</strong> tout reproche sous ce rapport;<br />

il serait sage, à mon gré et à celui du Conseil, dʹentreprendre moins <strong>de</strong> choses et <strong>de</strong> les<br />

1459


faire plus posément; bornez‐vous, croyez‐moi, à celles qui sont les plus essentielles et exé‐<br />

cutez‐les <strong>avec</strong> une précision plus gran<strong>de</strong>. Cʹest une tentation dans nos œuvres, bien dange‐<br />

reuse, nous le reconnaissons tous les jours, <strong>de</strong> nous livrer à une activité excessive, dʹajouter<br />

toujours à nos entreprises <strong>de</strong>s perfectionnements ou accessoires qui nous écrasent et nous<br />

font <strong>de</strong> notre tâche un far<strong>de</strong>au intolérable. Tout ce qui est mal fait est à recommencer, ne<br />

dure pas, et souvent fait le mal au lieu du bien. Ce ne sont pas <strong>de</strong>s reproches que je fais,<br />

cʹest un avis dʹami et <strong>de</strong> père, cʹest une direction pour lʹavenir.<br />

Jʹétais convenu <strong>avec</strong> le Comité que les dépenses <strong>de</strong> M. Lantiez ne seraient point à la<br />

charge <strong>de</strong> cette administration; je vous enverrai donc 100f comme in<strong>de</strong>mnité pour sa nour‐<br />

riture; son voyage pour arriver à Rome nʹavait pas été payé, provisoirement, parce que<br />

lʹemployé, rue Servandoni, lui avait dit que ce serait à régler à Marseille; averti par le Co‐<br />

mité, jʹai payé immédiatement cette dépense; si vous apercevez quelque erreur notable,<br />

comme lʹindiquerait la réclamation <strong>de</strong> M. Descemet, faites‐y une sérieuse attention et<br />

voyez quel fond pourrait avoir ce rappel <strong>de</strong> M. Descemet. Si vous aviez acci<strong>de</strong>ntellement<br />

quelque excé<strong>de</strong>nt, il serait sage <strong>de</strong> ne pas le dépenser jusquʹà certitu<strong>de</strong> quʹon nʹaura pas<br />

raison <strong>de</strong> vous le réclamer.<br />

Si M gr Termoz ne vous remboursait pas les 26f <strong>de</strong> la papeterie, avertissez‐moi pour<br />

que je ne vous laisse pas en perte sur ce point; autrement, les 26 intentions <strong>de</strong> messe sont à<br />

faire acquitter par vous. Quant à la somme <strong>de</strong> 13f, à vous due par M. Codant, sʹil a rendu<br />

<strong>de</strong>s services un peu appréciables à vos œuvres ou sʹil a pu supposer que, mangeant chez<br />

vous, vous exerciez à son égard lʹhospitalité, on pourrait mettre cette dépense au chapitre<br />

<strong>de</strong>s aumônes; sinon, il nʹy aurait pas dʹinconvenance à lui rappeler sa <strong>de</strong>tte en lui faisant<br />

observer quʹaux Cercles, toutes les dépenses étant à la charge du Comité, il ne dépend pas<br />

<strong>de</strong> vous <strong>de</strong> les porter à votre gré sur son compte.<br />

Jʹenvoie à M. Risse la relique <strong>de</strong> S t François Xavier et le reste. Le Curé <strong>de</strong> Bezons<br />

nʹest pas encore venu.<br />

Je recomman<strong>de</strong> à vos prières et à celles <strong>de</strong> nos ff. M. Gallais, gravement mala<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

la petite vérole. Il avait visité et soigné un jeune homme <strong>de</strong> son œuvre atteint <strong>de</strong> ce mal,<br />

puis se sentant fatigué et souffrant, il est venu à Chaville, et bientôt le mal sʹest déclaré; il<br />

est <strong>de</strong>s plus violents; le pauvre frère, méconnaissable, tuméfié, ne parle plus et ne semble<br />

plus entendre; le mé<strong>de</strong>cin dit pourtant quʹil ne voit pas jusquʹici un danger marqué. Le<br />

mal est en ce moment à lʹétat dʹépidémie à Paris et aux environs, <strong>de</strong> telle sorte que, <strong>de</strong><br />

mémoire dʹhomme, on nʹa rien vu <strong>de</strong> pareil; tous les établissements, sans exception que je<br />

sache, font vacciner enfants et maîtres; la mortalité est considérable; certaines institutions<br />

ont dû être évacuées. Priez donc pour les mala<strong>de</strong>s, et <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z quʹune crainte salutaire<br />

prépare beaucoup <strong>de</strong> conversions.<br />

Votre tout affectionné ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

Voyez‐vous M. Choyer? Son groupe <strong>de</strong> sculpture a‐t‐il succès? Bons souvenirs pour lui.<br />

1521 à M. Tourniquet<br />

Décès <strong>de</strong> M. Gallais. Le postulant <strong>de</strong> la communauté <strong>de</strong> Rome viendrait en France.<br />

4 avril 1870<br />

La réception <strong>de</strong> votre lettre du 29 mars mʹoblige à modifier en quelques points le<br />

contenu <strong>de</strong> la feuille ci‐jointe; un triste événement doit dʹailleurs vous être communiqué à<br />

1460


tous. Notre cher M. Gallais, atteint <strong>de</strong> la petite vérole en donnant soins et consolation à un<br />

<strong>de</strong> ses jeunes gens qui a été frappé lui‐même mortellement <strong>de</strong> ce terrible mal, vient <strong>de</strong><br />

nous être enlevé samedi, à 9h. du matin, après quelques jours <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> souffrance passés<br />

à Chaville. Dimanche, 3 avril, nous lʹavons déposé dans notre caveau <strong>de</strong> famille; nous<br />

sommes consternés, mais soumis. Notre f. meurt martyr <strong>de</strong> la charité, nous ne pouvons<br />

nous plaindre; il a été plein <strong>de</strong> résignation et <strong>de</strong> fervente piété tant quʹil a gardé sa<br />

connaissance; il a été confessé à temps, il avait communié le jour où le mal lʹa contraint <strong>de</strong><br />

sʹaliter. Prions beaucoup pour lui et aussi pour notre famille religieuse.<br />

Cet événement me fait penser quʹil sera nécessaire que M. Coquerel <strong>de</strong>meure seu‐<br />

lement à Rome jusquʹà la semaine après Pâques; son expérience <strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong> jeunes gens<br />

laisse espérer quʹaprès quelque temps <strong>de</strong> noviciat, il pourra, en un poste quelconque, bou‐<br />

cher un vi<strong>de</strong> bien utilement dans nos emplois. Pour le remplacer, je vous enverrai M.<br />

Streicher qui pourra vous ai<strong>de</strong>r considérablement, ayant une gran<strong>de</strong> activité, <strong>de</strong> lʹentrain<br />

et une aptitu<strong>de</strong> particulière pour lʹemploi <strong>de</strong> nos ff. laïcs à Rome. Il a rendu, <strong>de</strong>puis trois<br />

ans, <strong>de</strong>s services précieux au Cercle <strong>de</strong> M. Maignen, mais les responsabilités extrêmes quʹil<br />

a dans une si dure position lui donnent un peu <strong>de</strong> lassitu<strong>de</strong>, et jʹaccè<strong>de</strong> au désir quʹil a<br />

dʹêtre changé. Je vais mʹentendre à ce sujet <strong>avec</strong> le Comité et jʹenverrai M. Streicher, si je<br />

puis, la semaine prochaine (Semaine Sainte).<br />

Je vous recomman<strong>de</strong> vos commissions.<br />

Faites en sorte que vos comptes <strong>avec</strong> M. Descemet ne puissent lui faire soupçonner,<br />

ni votre droiture, ni votre bonne foi. Vérifiez plus souvent vos comptes, afin dʹéviter à<br />

lʹavenir <strong>de</strong> pareilles erreurs.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Conservez provisoirement le jeune Pappaz.<br />

1522 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Détails sur la mort édifiante du frère Gallais. Espérance <strong>de</strong> MLP. au milieu <strong>de</strong>s épreuves:ʺsoumettons‐nous <strong>avec</strong><br />

amour et espérons!ʺ Repos nécessaire pour M. <strong>de</strong> Varax. Nouvelles <strong>de</strong>s frères. Comment remplacer le frère Gal‐<br />

lais.<br />

Chaville, 7 avril 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

La mort <strong>de</strong> notre cher f. Gallais a été, comme vous lʹavez senti, un coup bien dou‐<br />

loureux pour nous. Il est revenu souffrant, fatigué, pour prendre un peu <strong>de</strong> repos à Cha‐<br />

ville; cʹétait le repos profond <strong>de</strong> la mort quʹil y <strong>de</strong>vait trouver. Je ne sais si on vous a dit<br />

que cʹest en pratiquant courageusement la charité quʹil a été atteint <strong>de</strong> la maladie conta‐<br />

gieuse (la petite vérole) à laquelle il a succombé. Un bon jeune homme <strong>de</strong> son œuvre, quʹil<br />

était allé voir et consoler à lʹhospice, lui a communiqué ce mal; à diverses reprises, la sœur<br />

<strong>de</strong> la salle lʹavait averti que lʹépidémie était, cette année, <strong>de</strong>s plus malignes; il nʹy avait pas<br />

assez pris gar<strong>de</strong>, sentant que sa présence était un grand bien pour le jeune mourant; il était<br />

resté plusieurs heures près <strong>de</strong> lui; le len<strong>de</strong>main, après lʹavoir conduit au cimetière, il était<br />

contraint lui‐même <strong>de</strong> sʹaliter pour ne plus se relever.<br />

Dès son arrivée à Chaville, jʹavais senti en lui un mouvement <strong>de</strong> grâce extraordi‐<br />

naire, et jʹai observé en lui la même disposition tant quʹil a gardé sa connaissance; il nous a<br />

1461


prévenus à temps et a <strong>de</strong>mandé à se confesser, et, au milieu <strong>de</strong> souffrances extrêmes, il a<br />

montré une patience parfaite <strong>avec</strong> une soumission touchante à la volonté <strong>de</strong> Dieu, ne ces‐<br />

sant, par ses pieuses aspirations, <strong>de</strong> sʹélever vers Lui; malgré les soins les plus courageux<br />

et les plus dévoués <strong>de</strong> nos ff. qui ont veillé près <strong>de</strong> lui nuit et jour, il a expiré doucement<br />

samedi, vers 9h. du matin. Dès jeudi, il semblait avoir perdu connaissance, ne parlant plus<br />

et ne pouvant rien prendre; quand je vins lui dire adieu avant mon départ pour Vaugirard,<br />

il ne put me répondre, ni sans doute mʹentendre quand je lui donnai un <strong>de</strong>rnière bénédic‐<br />

tion; ses yeux, gonflés par le mal, étaient absolument fermés.<br />

Dimanche, 120 jeunes gens <strong>de</strong> Grenelle, quelques groupes <strong>de</strong>s autres patronages, et<br />

tous ceux <strong>de</strong> nos ff. qui ont pu sʹéchapper <strong>de</strong> leurs œuvres se sont réunis à nous pour son<br />

convoi. Voilà dix <strong>de</strong>s serviteurs placés par Dieu dans notre petite famille quʹIl a rappelés à<br />

Lui; ce sont autant <strong>de</strong> plaies qui, tour à tour, ramènent quelque gémissement en nous,<br />

quand leur souvenir se réveille; puissions‐nous, autant <strong>de</strong> fois, nous incliner sous la main<br />

divine <strong>avec</strong> soumission profon<strong>de</strong>. Tout à lʹheure, cherchant, comme souvent, quelque<br />

consolation au livre <strong>de</strong> lʹImitation, je trouvai: ʺSi vous retirez vos consolations <strong>de</strong> moi, que<br />

la soumission à votre volonté et à cette justice par laquelle vous mʹéprouvez dans les maux<br />

me tienne lieu dʹune souveraine consolation. Car vous ne serez pas toujours en colère et<br />

vous nʹuserez pas éternellement <strong>de</strong> menaces.ʺ Donc, soumettons‐nous <strong>avec</strong> amour, et es‐<br />

pérons!<br />

Vous avez, vous aussi, particulièrement occasion <strong>de</strong> vous soumettre, puisque vous<br />

êtes en ce moment éprouvé physiquement et moralement; prenez aussi pour vous, cher<br />

ami, cette douce parole dʹespérance vous ne serez pas toujours en colère; lʹheure <strong>de</strong> la<br />

consolation reviendra. Quand la saison sera venue où vous trouverez utile <strong>de</strong> prendre le<br />

repos dont vous sentez chaque année le besoin, nous aviserons à soutenir <strong>de</strong> notre mieux<br />

les choses à Angers durant votre absence, et lʹéquilibre <strong>de</strong> votre santé se rétablira. Quant<br />

au poste que vous avez à Angers, Dieu vous y ménagera <strong>de</strong>s joies comme il vous en faut,<br />

dès que les occasions <strong>de</strong> faire du bien aux âmes seront, <strong>avec</strong> le temps, <strong>de</strong>venues fréquentes<br />

pour vous.<br />

M. Perthuisot semble déjà sentir le bon effet <strong>de</strong> ses rapports <strong>avec</strong> vous, puisquʹil<br />

commence à comprendre et à goûter la vie religieuse; je crois que le fonds en lui ne man‐<br />

que pas, mais que la culture a fait jusquʹici défaut.<br />

Pour M. Ginet, je crois que son règlement dʹétu<strong>de</strong>s doit être bien suivi et compren‐<br />

dre le latin, lʹhistoire et un peu <strong>de</strong> littérature, le tout mêlé <strong>de</strong>s exercices pieux et dʹautant<br />

<strong>de</strong> travail manuel quʹil en aura besoin pour soutenir sa liberté dʹesprit.<br />

Le remplacement <strong>de</strong> M. Gallais vous préoccupe, sans doute, comme nous; cʹest, en<br />

effet, une grave difficulté pour le Conseil <strong>de</strong> la Congrégation. Nous allons, je pense, arran‐<br />

ger un état provisoire que le Cercle <strong>de</strong>s jeunes gens, dont sʹoccupait uniquement M. Gal‐<br />

lais, pourra momentanément supporter, au moins nous lʹespérons, sous la conduite <strong>de</strong> M.<br />

Baumert assisté dʹEd. Lainé, lequel sera lui‐même aidé par un frère donné par nous. Je<br />

viens en même temps dʹécrire à Rome pour rappeler un postulant [G. Coquerel] que jʹai<br />

autorisé à y faire un séjour temporaire et qui pourra nous être utile, quand il aura fait son<br />

temps <strong>de</strong> noviciat. Il était Prési<strong>de</strong>nt du Cercle <strong>de</strong>s jeunes gens à Tours; il est cultivé, a 27<br />

ans et mʹa été recommandé par <strong>de</strong>s ecclésiastiques, <strong>de</strong> nous connus, comme ayant <strong>de</strong><br />

gran<strong>de</strong>s aptitu<strong>de</strong>s pour nos œuvres. Prions pour que Dieu en fasse un instrument pour<br />

son service. Il ai<strong>de</strong>, <strong>de</strong>puis six semaines ou <strong>de</strong>ux mois, nos ff. à Rome.<br />

1462


Adieu, mon bien cher enfant, ne manquez pas, sʹil vous revient quelques moments<br />

<strong>de</strong> bien‐être intérieur, <strong>de</strong> les partager <strong>avec</strong> moi.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1523 à M. Maignen<br />

ʺExtrême pénurie <strong>de</strong> personnelʺ. Veiller à la tenue <strong>de</strong>s comptes.<br />

Chaville, 10 avril 1870<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Je ne sais pas bien jusquʹici qui pourra remplacer au Cercle M. Streicher. Si ce <strong>de</strong>vait<br />

être M. Charrin, auquel on a un peu pensé, on ne peut prévoir <strong>avec</strong> précision quand il se‐<br />

rait dégagé <strong>de</strong> lʹatelier où il porte tout présentement, M. Henry [Piquet] nʹy paraissant<br />

presque plus et M. Boucault nʹétant encore saisi <strong>de</strong> rien. Il faudrait donc peut‐être penser à<br />

un provisoire quelconque pour que vos comptes et écritures ne soient pas embrouillés et<br />

quʹun peu dʹordre <strong>de</strong>meure dans les dépenses. M. Audrin et M. Camille [Dupit] étant as‐<br />

sez gravement mala<strong>de</strong>s, le premier dʹune fièvre persistante qui lʹépuise et lʹoblige à gar<strong>de</strong>r<br />

le lit, le second dʹune sorte <strong>de</strong> pleurésie qui mʹa contraint à lʹenvoyer à lʹinfirmerie <strong>de</strong> Vau‐<br />

girard, il ne me reste ici que M. Bouquet qui tient la maison, et M. Gérold chargé du mé‐<br />

nage. A défaut <strong>de</strong> mieux, je pourrais vous prêter ce <strong>de</strong>rnier, qui écrit et calcule bien et qui<br />

a <strong>de</strong> la précision dans ce quʹil fait. Mais si, à raison <strong>de</strong> lʹextrême pénurie où sont présente‐<br />

ment nos services, vous voyiez quelque autre ressource pour parer assez convenablement<br />

à vos besoins propres, ce serait le mieux assurément.<br />

Voyez donc ce que le cas <strong>de</strong>man<strong>de</strong>; il importe que vos embarras financiers ne sʹac‐<br />

croissent pas, faute dʹordre dans la tenue <strong>de</strong>s comptes et dans la surveillance <strong>de</strong>s dépenses.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je ne compte pas aller <strong>de</strong>main à Nazareth, nʹayant ni conférence ecclésiastique, ni<br />

Conseil. Le petit article sur M. Gallais est simple et convenable.<br />

1524 à M. Tourniquet<br />

Simplifier son apostolat. Bien tenir ses comptes.<br />

14 avril [1870]<br />

Jeudi Saint<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je nʹai pas le temps <strong>de</strong> vous écrire aujourdʹhui; ma lettre <strong>de</strong> ce jour à M. Emile<br />

[Beauvais] y suppléera. Je vous recomman<strong>de</strong> tout <strong>de</strong> nouveau: 1° <strong>de</strong> ne pas trop faire <strong>de</strong><br />

choses; simplifiez votre tâche, au lieu <strong>de</strong> la compliquer par une multitu<strong>de</strong> dʹadditions et<br />

surcharges qui vous noieront: 2° soignez la régularité <strong>de</strong> vos comptes. Si vous négligez ces<br />

<strong>de</strong>ux points, vous serez formellement en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> mes recommandations expresses; vous<br />

attirerez à vous et à nous <strong>de</strong> graves difficultés.<br />

Jʹespère que M. Coquerel a pris en brave religieux la décision <strong>de</strong> son prochain rap‐<br />

pel; la difficulté que jʹai à rencontrer M. Keller, fort occupé présentement, va donner un pe‐<br />

1463


tit répit pour le départ <strong>de</strong> M. Coquerel; je vous écrirai au plus tôt pour en fixer plus préci‐<br />

sément le moment.<br />

A vous bien affectueusement en N.S.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

1525 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Conduite à lʹégard dʹun jeune homme un peu ʺpositifʺ. Veiller à sa santé. Guérison du frère Audrin.<br />

Chaville, 20 avril 1870<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je pense que M. dʹArbois vous aura envoyé la date précise <strong>de</strong> lʹouverture <strong>de</strong> notre<br />

retraite, première semaine <strong>de</strong> mai, lequel mai commence dimanche; vous verrez sʹil<br />

convient que MM. Gauffriau et Guichard arrivent seulement le lundi matin. Pour M. Per‐<br />

thuisot, il me semble que ce serait bien vite le faire revenir; je crois quʹil est utile que vous<br />

soyez plus maître <strong>de</strong> son esprit, jʹespère que vous y arriverez; montrez‐lui confiance et af‐<br />

fection; il nʹa pas vécu jusquʹici réellement dans le mon<strong>de</strong> spirituel et religieux; peu à peu,<br />

si nous prions et si nous secondons patiemment lʹaction <strong>de</strong> Dieu, nous pourrons lʹy voir<br />

arriver; je le crois simple, mais, comme vous le dites, un peu positif. Soignez bien votre<br />

santé; jʹinsiste beaucoup, <strong>avec</strong> M. dʹArbois, pour que vous fassiez venir du vin <strong>de</strong> Bourgo‐<br />

gne qui puisse vous aller mieux que ceux dʹAnjou ou <strong>de</strong> Sète. Faites‐vous un régime tel<br />

quʹil vous convienne; quand vous serez fort, vous serez plus mortifié; il y a temps pour<br />

tout.<br />

Vous apprendrez <strong>avec</strong> joie que notre cher M. Audrin qui, en soignant nuit et jour M.<br />

Gallais, avait pris son mal, entre en convalescence aujourdʹhui; lʹépreuve a été ru<strong>de</strong> pour<br />

lui et pour nous, mais il a été patient et résigné; il en sera, et la Congrégation <strong>avec</strong> lui, plus<br />

agréable à Dieu. Le Seigneur choisit bien ses victimes; que cette pensée vous encourage<br />

dans vos difficultés <strong>de</strong> diverses sortes; quand lʹépreuve est passée, on sent quʹelle venait<br />

<strong>de</strong> la bonté miséricordieuse <strong>de</strong> Dieu.<br />

Je tiendrai compte <strong>de</strong> vos recommandations concernant lʹŒuvre <strong>de</strong>s Clercs, en ce<br />

qui regar<strong>de</strong> surtout la prière.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, je pense à vous souvent; écrivez‐moi, quand ce soin<br />

nʹest pas une surcharge au milieu <strong>de</strong> vos nombreuses préoccupations; je sympathise tou‐<br />

jours à tout ce qui vous touche.<br />

Votre affectionné ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1526 à M. Tourniquet<br />

Malentendu à propos dʹun mouvement <strong>de</strong> personnel.<br />

Vaugirard, 27 avril 1870<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Dans votre <strong>de</strong>rnière lettre, vous mʹinformiez que M. Georges Coquerel partirait,<br />

pour se rendre près <strong>de</strong> nous, la semaine après Pâques, et vous mʹinvitiez à attendre son ar‐<br />

rivée avant dʹenvoyer M. Streicher, afin que jʹaie pu, avant toute disposition, converser<br />

<strong>avec</strong> M. G. Coquerel et recevoir les renseignements quʹil me communiquerait. Sur cet avis,<br />

1464


jʹai suspendu le départ <strong>de</strong> M. Streicher. Cependant, M. Emile [Beauvais] mʹécrit (22 avril)<br />

que vous ne pourrez vous déci<strong>de</strong>r à laisser partir M. Coquerel avant dʹavoir reçu le succes‐<br />

seur qui le remplacera près <strong>de</strong> vous.<br />

Que puis‐je faire <strong>avec</strong> ces malentendus? Je pensais que, par M. Coquerel, je saurais<br />

aussi si décidément M. Jouin ne pourrait aller <strong>avec</strong> M. Emile, et ce que vous pensiez quʹon<br />

<strong>de</strong>vait faire; votre silence me laisse en embarras. Il est difficile <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s changements<br />

bien multiples dans le personnel <strong>de</strong>s quelques frères que nous avons à Rome; outre le<br />

mauvais effet que ces mutations fréquentes produiraient au <strong>de</strong>hors, le Comité sʹen ac‐<br />

commo<strong>de</strong>rait aussi difficilement. Ecrivez‐moi donc au plus tôt, afin que jʹagisse le moins<br />

mal que je pourrai.<br />

Nous entrons en retraite lundi, 2 mai; priez bien en union <strong>avec</strong> nous.<br />

Votre ami et Père affectionné en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1527 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Extrait dʹune lettre incomplète, écrite avant le départ <strong>de</strong> MLP. pour Amiens le samedi 23 avril 1870. A propos<br />

<strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s et <strong>de</strong> lʹavenir du fils <strong>de</strong> sa bienfaitrice.<br />

Avril 1870<br />

[……….] et dans les moyens spirituels; voilà bien la chose première, essentielle,<br />

quʹil faut obtenir avant tout: cʹest que son cœur reste fidèle et pur; par là sera assuré, plus<br />

que par toute autre voie, son avenir comme la dignité <strong>de</strong> son caractère et la fermeté <strong>de</strong> sa<br />

marche. Par là aussi seront sauvegardés votre repos, la paix et la consolation <strong>de</strong> votre inté‐<br />

rieur. En supposant même que par timidité ou par quelque circonstance défavorable, il eût<br />

une mauvaise chance pour lʹexamen, ce serait un malheur bien réparable, puisquʹaprès<br />

tout ces examens sont un préjugé plus quʹun indice du plus ou moins <strong>de</strong> science; les<br />

connaissances déjà acquises par votre cher fils, son bon jugement, sa parfaite éducation<br />

jointe à la science <strong>de</strong> la vie que le temps et lʹexpérience apportent, en feraient en tout cas<br />

un homme distingué; et si, à tout cela, il ajoutait encore <strong>de</strong>s principes sûrs et une pratique<br />

constante <strong>de</strong>s <strong>de</strong>voirs chrétiens, vous seriez encore, Madame, une mère heureuse entre<br />

mille, et vous béniriez encore le Seigneur <strong>avec</strong> une profon<strong>de</strong> reconnaissance. Quelque<br />

chose qui arrive donc, il y aura toujours place pour le contentement et la paix. Ayons<br />

gran<strong>de</strong> confiance, le Bon Maître montrera quʹIl aime vous et votre chère maison.<br />

Dans la première semaine du mois, notre Communauté sera en retraite à Vaugirard;<br />

après, nous serons libres et avant aussi; ce nʹest pas à Vaugirard quʹont séjourné nos mala‐<br />

<strong>de</strong>s, on peut donc venir en toute sûreté.<br />

Je vais prier tous les jours à vos intentions; mais, dans le mois <strong>de</strong> mai tout particu‐<br />

lièrement, je mʹattacherai à mettre votre cher enfant sous la protection spéciale <strong>de</strong> la S te<br />

Vierge et <strong>de</strong> S t Joseph.<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, et partager <strong>avec</strong> Madame votre Mère, tous<br />

mes sentiments <strong>de</strong> bien respectueux attachement <strong>avec</strong> lesquels je suis<br />

Votre humble serviteur et dévoué ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1465


1528 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Emploi du temps <strong>de</strong> MLP. Assurance <strong>de</strong> sa prière à lʹintention <strong>de</strong> son fils.<br />

27 avril 1870<br />

Madame la Marquise,<br />

Jʹarrive dʹAmiens, où jʹai été contraint <strong>de</strong> me rendre samedi <strong>de</strong>rnier. Je trouve à mon<br />

arrivée votre chère et aimable lettre qui, à vrai dire, nʹest pas restée sans réponse, car, pré‐<br />

occupé <strong>de</strong> votre vive sollicitu<strong>de</strong> aux approches <strong>de</strong> lʹexamen <strong>de</strong> votre cher enfant, jʹai pensé<br />

à vous et à lui, comme vous pouviez le souhaiter, au St Sacrifice.<br />

Je vais commencer fidèlement la neuvaine <strong>de</strong> messes et <strong>de</strong> prières le 29, et elle sera<br />

exactement suivie.<br />

Je serai tout heureux <strong>de</strong> voir vous et votre cher entourage si vous pouvez, comme<br />

vous me le faites espérer, mʹhonorer <strong>de</strong> votre visite. Demain jeudi, 28, je serai <strong>de</strong> retour à<br />

Vaugirard à partir <strong>de</strong> 3h. <strong>de</strong> lʹaprès‐midi, et vendredi jʹy serai toute la journée, tous les<br />

moments me seront bons, et rien ne mʹempêchera <strong>de</strong> jouir <strong>de</strong> votre présence dans les mo‐<br />

ments que vous voudrez bien mʹaccor<strong>de</strong>r.<br />

A mon arrivée, je verrai <strong>de</strong>main si nous avons quelque moyen dʹaccé<strong>de</strong>r près du Se‐<br />

crétaire <strong>de</strong> lʹAcadémie <strong>de</strong> Paris.<br />

Je mʹarrête ici, pour que le départ <strong>de</strong> ce mot ne soit point retardé, me consolant <strong>de</strong><br />

vous quitter si brusquement par lʹespoir <strong>de</strong> vous entretenir bientôt plus longuement.<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, <strong>avec</strong> votre chère famille, tous mes sentiments<br />

<strong>de</strong> respectueux dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1529 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Envoi <strong>de</strong>s renseignements quʹelle avait <strong>de</strong>mandés à MLP.<br />

Vaugirard, 30 avril 1870<br />

Madame la Marquise,<br />

Je reçois, et jʹai lʹhonneur <strong>de</strong> vous adresser la liste que vous désiriez obtenir; je lʹai<br />

un peu brouillée pour la rendre plus claire, jʹespère quʹelle pourra vous être utile.<br />

Si je ne me trompe, la rue <strong>de</strong> lʹOuest nʹest plus aujourdʹhui que la prolongation <strong>de</strong> la<br />

rue dʹAssas.<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, mes remerciements pour votre chère visite et<br />

celle <strong>de</strong> Madame dʹHurbal, et recevez aussi mes sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> dévouement<br />

en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong> Ptre P. S. Jʹai commencé la neuvaine <strong>de</strong> messes.<br />

1530 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

MLP. sʹinquiète <strong>de</strong> lʹexamen que <strong>de</strong>vait passer son fils.<br />

Vaugirard, 5 mai 1870<br />

Madame la Marquise,<br />

Jʹattendais un mot hier ou aujourdʹhui qui me dît le résultat <strong>de</strong> lʹexamen; à mon<br />

grand regret, notre retraite me retient absolument toute cette semaine, et je ne puis aller<br />

1466


moi‐même voir quelle a été lʹissue <strong>de</strong> votre pénible attente. Jʹose donc vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r<br />

quelques lignes pour me tirer dʹincertitu<strong>de</strong>.<br />

Votre <strong>de</strong>rnière lettre me donnait au moins lʹassurance que la décision, quelle quʹelle<br />

fût, vous trouverait disposée, ainsi que Madame dʹHurbal, à tout prendre comme envoyé<br />

par Dieu.<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, tous mes sentiments <strong>de</strong> respectueux dé‐<br />

vouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1531 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Entretiens <strong>de</strong> MLP. <strong>avec</strong> les frères pendant la retraite. Difficultés à Rome.<br />

Vaugirard, 6 mai 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Notre retraite va se clore <strong>de</strong>main matin; tout sʹest bien passé; nos ff. paraissent être<br />

satisfaits et vont sʹen retourner en bonnes dispositions; le r.p. a été fort à leur goût; il est,<br />

en effet, aimable personnellement et ses instructions étaient simples, soli<strong>de</strong>s, attachantes;<br />

tous les pouvaient suivre.<br />

M. dʹArbois et nos ff. ecclésiastiques sʹétant partagé les ff. laïcs pour converser <strong>avec</strong><br />

eux et les ai<strong>de</strong>r à bien suivre le mouvement, il ne mʹa pas semblé quʹaucun dʹeux sʹen‐<br />

nuyât. Un très grand nombre sont venus me voir; bien que fort soulagé par les soins <strong>de</strong>s<br />

autres prêtres, je me suis senti néanmoins fatigué, ma santé sʹétant trouvée ces jours‐ci fort<br />

affaiblie; le bon Maître calcule tout; il y a bien à penser que, si jʹeusse été plus fort, jʹeusse<br />

reçu moins <strong>de</strong> secours; confiance, toujours confiance, nous ne saurions trop nous y aban‐<br />

donner.<br />

Merci <strong>de</strong>s renseignements sur vos ff.; ces notes sont utiles en pareille circonstance.<br />

M. Gauffriau est bien remonté; si vous pouvez couper un peu le temps quʹil consa‐<br />

cre aux enfants <strong>de</strong> la Maîtrise par un court moment qui en interrompe la continuité, il en<br />

sera fort soulagé.<br />

Il me paraît bien à désirer que nous ne prenions pas présentement la classe <strong>de</strong> latin<br />

pour ces enfants, car ce soin <strong>de</strong>viendra bientôt très assujettissant.<br />

Pour le journal, la Correspondance <strong>de</strong> Rome ne pourrait‐elle suffire, ou bien un journal<br />

paraissant <strong>de</strong>ux fois par semaine; une feuille quotidienne fait perdre beaucoup <strong>de</strong> temps et<br />

dissipe lʹesprit.<br />

Nous ferons ce que nous pourrons pour faciliter votre voyage; il serait regrettable<br />

que vous fussiez absent lors <strong>de</strong> lʹarrivée <strong>de</strong> Mgr Freppel, mais qui sait le moment <strong>de</strong> son re‐<br />

tour!<br />

Lundi 9 mai. Vos frères sont partis si vite samedi que le temps mʹa manqué pour<br />

fermer ces quelques lignes et vous les envoyer; je nʹy ajoute rien, ne voyant pas <strong>de</strong> choses<br />

notables à vous communiquer.<br />

Nous sommes toujours incertains sur le parti à prendre relativement à notre posi‐<br />

tion à Rome. M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] qui est maintenant, en suite <strong>de</strong> sa permutation,<br />

<strong>avec</strong> M. Emile [Beauvais] (sorte <strong>de</strong> satisfaction donnée aux aumôniers), y fait du bien, mais<br />

sʹy est fort exténué. M. Beluze, qui arrive <strong>de</strong> Rome, nous assure que, sʹil y passe lʹété, il<br />

1467


nʹen reviendra point. Il a eu, <strong>avec</strong> les travaux, beaucoup dʹennuis. M. Jouin ne va pas, on<br />

<strong>de</strong>vra le rappeler. Tous mʹassurent que ce poste ne serait tenable pour nos ff. quʹà la condi‐<br />

tion dʹavoir <strong>avec</strong> eux un f. ecclésiastique. Nous avions pensé à M. Chaverot, que la venue<br />

<strong>de</strong>s jeunes nouveaux prêtres aux vacances (Leclerc, etc 433 .) pourrait, à la rigueur, dégager<br />

<strong>de</strong> Vaugirard. Faut‐il prendre ce parti, ou bien rappeler nos ff.? Jʹinclinerais beaucoup à ce<br />

<strong>de</strong>rnier moyen, car il y a en ce poste énormément <strong>de</strong> fatigue et dʹépuisement corporel et<br />

spirituel, <strong>avec</strong> un bien presque philanthropique; on dit pourtant que les Pâques <strong>de</strong>rnières<br />

ont été meilleures que précé<strong>de</strong>mment.<br />

Je ne sais si je vous ai dit, comme jʹaurais dû le faire, que le successeur <strong>de</strong> M. Berloti,<br />

M. X., a envoyé à M. Paillé, qui me les a remis, 3.300f. Je vous remercie <strong>de</strong> cet envoi et aus‐<br />

si <strong>de</strong>s 5 f pour les Clercs.<br />

Adieu, mon bien cher enfant; je veux toujours vous appeler ainsi, bien que lʹenfance<br />

naturelle sʹéloigne déjà notablement <strong>de</strong> vous; la s te enfance dure toujours.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je pense que votre très bonne mère va bien; je prie pour elle et pour tous les vôtres.<br />

1532 à M. Decaux<br />

Remerciement pour la sympathie témoignée à lʹoccasion du décès du frère Gallais. Comment combler le vi<strong>de</strong> quʹil<br />

a laissé à N.D. <strong>de</strong> Grâce.<br />

Vaugirard, 9 [Avril] 1870434 Mon bien bon ami,<br />

Vous avez partagé notre affliction <strong>de</strong> la perte si inattendue que nous faisons dans la<br />

personne <strong>de</strong> notre cher frère Gallais, et vous avez béni Dieu <strong>avec</strong> nous <strong>de</strong> la consolation<br />

que nous trouvons dans les circonstances <strong>de</strong> sa mort édifiante et telle que la peuvent sou‐<br />

haiter les hommes dévoués à la charité. Nous étions sûrs dʹavance <strong>de</strong> votre sympathie,<br />

dont nous vous sommes bien reconnaissants.<br />

Nous cherchons maintenant les moyens <strong>de</strong> combler le vi<strong>de</strong> quʹil laisse après lui à<br />

N.D. <strong>de</strong> Grâce. En attendant que nous ayons pu préparer un sujet qui le remplace, nous<br />

pourvoyons provisoirement aux services <strong>de</strong> lʹœuvre, lesquels seront assurés par MM.<br />

Baumert et Edouard Lainé, qui seront assistés eux‐mêmes par un frère envoyé <strong>de</strong> Vaugi‐<br />

rard; M. Caron restant à la division <strong>de</strong>s apprentis, les <strong>de</strong>ux divisions <strong>de</strong> lʹœuvre seront ain‐<br />

si soutenues temporairement sans détriment notable, et nous permettront dʹaviser à loisir<br />

à quelque arrangement définitif.<br />

Je désire bien, mon cher ami, que ces dispositions aient votre agrément, et nous<br />

concerterons aussi <strong>avec</strong> vous les mesures que le bien <strong>de</strong> lʹœuvre pourrait <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r ulté‐<br />

rieurement.<br />

Veuillez recevoir toutes les assurances accoutumées <strong>de</strong> mon bien affectueux atta‐<br />

chement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

433<br />

Etc. = Pattinote, Ad. Lainé.<br />

434<br />

L’original porte 9 mai. Or les dispositions annoncées le 7 avril au père <strong>de</strong> Varax (L. 1522) n’ont pas attendu un mois pour être<br />

envoyées à M. Decaux.<br />

1468


1533 à M. Tourniquet<br />

Difficultés <strong>de</strong> la situation à Rome. Répugnance pour une réintégration dans lʹŒuvre.<br />

Vaugirard, 13 mai 1870<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

M. Beluze, en arrivant <strong>de</strong> Rome, nous a rapporté que vous étiez très fatigué et fort<br />

souffrant dʹune dysenterie qui dure <strong>de</strong>puis plusieurs mois. MM. Coquerel et Pappaz nous<br />

ont parlé dans le même sens, et tous ont conclu à la nécessité pour vous <strong>de</strong> prendre un re‐<br />

pos un peu prolongé (<strong>de</strong>ux mois au moins) pour vous remettre et pour éviter la saison <strong>de</strong>s<br />

chaleurs à Rome. M. Keller, à qui jʹen ai parlé, trouve la chose praticable; nous penserions<br />

donc à vous faire venir pour passer ce temps <strong>de</strong> vacances près <strong>de</strong> nous, persuadés quʹen<br />

famille vous reprendriez mieux vos forces et votre santé. La difficulté serait <strong>de</strong> vous rem‐<br />

placer durant cette absence. Nous pensions quʹune fois M. Streicher mis bien au courant, il<br />

pourrait faire <strong>avec</strong> M. Jouin, quʹon laisserait aux zouaves, quant à présent au moins, tout le<br />

service dʹactivité, et que M. Georges <strong>de</strong> Lauriston tiendrait la position pour répondre à<br />

toutes les <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s ou renseignements et traiter <strong>avec</strong> les chefs militaires ou autres. Si M.<br />

Keller, à qui je nʹai pu dire que quelques mots en hâte sur ces arrangements, les trouvait<br />

praticables, y verriez‐vous, <strong>de</strong> votre côté, avantage et pas <strong>de</strong> notables inconvénients dans<br />

lʹexécution? Répon<strong>de</strong>z‐moi bientôt, afin que jʹexamine définitivement si tout ce projet est<br />

réalisable.<br />

Pour M. Emile [Beauvais], il me propose <strong>de</strong> le laisser prendre <strong>avec</strong> lui M. Lucien<br />

Jacquart qui ne veut pas rester chez les frères belges; <strong>de</strong> cette sorte, dit M. Emile, on évite‐<br />

rait lʹinconvénient <strong>de</strong> déplacer un frère <strong>de</strong> la Communauté et dʹoccasionner au Comité <strong>de</strong><br />

nouveaux frais <strong>de</strong> voyage. Je vois à ce parti <strong>de</strong>ux difficultés: nous ne pourrions reprendre<br />

<strong>de</strong> longtemps M. Jacquart comme membre <strong>de</strong> la Congrégation, son inconstance manifeste<br />

ne nous donnant pas <strong>de</strong> garantie pour lʹavenir; il ne conviendrait pas, dʹun autre côté, que<br />

nous recevions un sujet sortant <strong>de</strong> chez les ff. belges; ou ils pourraient nous accuser <strong>de</strong> leur<br />

enlever un sujet, sʹils tiennent à lui, ou nous semblerions nous accommo<strong>de</strong>r <strong>de</strong> leurs re‐<br />

buts, sʹils sont aises <strong>de</strong> le voir partir. Une seule supposition serait admissible: si M. Lucien<br />

sortait <strong>de</strong> lui‐même <strong>de</strong> chez les ff., vous pourriez lʹadmettre comme employé à la Villa, le<br />

nourrissant et lui donnant un petit traitement pour son entretien. En ce cas, vous iriez,<br />

avant toute admission <strong>de</strong> ce genre, trouver le Supérieur Belge et vous lui diriez:<br />

ʺM. Jacquart, sorti <strong>de</strong> chez vous, nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> un emploi à la Villa; nʹavez‐vous<br />

aucune plainte sérieuse à formuler contre lui?ʺ Le Frère, ainsi bien renseigné sur les faits et<br />

sur la position prise par M. Lucien, ne pourrait raisonnablement nous accuser dʹaucune fa‐<br />

çon. Cette marche serait tout à fait essentielle.<br />

M. Keller ne verrait aucun inconvénient à ce quʹun <strong>de</strong> nos prêtres eût le titre dʹau‐<br />

mônier honoraire; il en parlera au Conseil du Comité lundi prochain, je vous dirai sans re‐<br />

tard la décision. Si elle est affirmative, le Comité serait disposé à appuyer notre <strong>de</strong>man<strong>de</strong>.<br />

Serait‐ce près <strong>de</strong> Mgr Tizzani ou près <strong>de</strong> Mgr Basti<strong>de</strong> que nous <strong>de</strong>vrions agir? Vous me le<br />

diriez. Il faudrait tâcher que la chose, si elle se fait, ne blessât personne; ce nʹest peut‐être<br />

pas sans difficulté. Dieu y pourvoirait, le cas échéant.<br />

Tâchez, cher enfant, <strong>de</strong> débrouiller vos comptes, afin que, si vous aviez à les trans‐<br />

mettre temporairement à un autre, vous puissiez le faire <strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> clarté.<br />

1469


Jʹai <strong>de</strong>mandé expressément à M. Keller que vous fussiez déchargé <strong>de</strong>s pensions <strong>de</strong>s<br />

militaires, il croyait que cʹétait déjà chose faite; je pense quʹon va en écrire à M. Descemet.<br />

La gestion du restaurant nous inquiète aussi, parce quʹil peut arriver, nous dit M. Coque‐<br />

rel, quʹon ait mensuellement <strong>de</strong>s déficits notables sur cette entreprise. Regar<strong>de</strong>z tout cela<br />

<strong>de</strong> bien près.<br />

Adieu, mon cher enfant, nous prions pour vous tous et nous <strong>de</strong>mandons en particu‐<br />

lier que votre santé se raffermisse.<br />

M. Streicher partira, je pense, dans le cours <strong>de</strong> la semaine où nous allons entrer; il<br />

fait toutes vos commissions arriérées.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1534 à M. Decaux<br />

Remerciements pour la sollicitu<strong>de</strong> envers le frère Tourniquet.<br />

Vaugirard, 14 mai 1870<br />

Mon bien bon ami,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> votre cordiale sollicitu<strong>de</strong> pour la santé <strong>de</strong> notre frère <strong>Jean</strong>‐Marie<br />

[Tourniquet]; je mʹen préoccupe <strong>de</strong> mon côté et je cherche les moyens <strong>de</strong> lui procurer au<br />

moins un repos assez prolongé, afin quʹil puisse refaire ses forces; la chose nʹest pas sans<br />

quelque difficulté, mais jʹentre‐vois néanmoins la possibilité dʹy arriver.<br />

Il sera bien touché <strong>de</strong> ce témoignage <strong>de</strong> votre affectueux intérêt.<br />

Veuillez offrir mes respects à Madame Decaux et agréer vous‐même, <strong>avec</strong> elle, tous<br />

mes sentiments bien dévoués en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1535 à M. Tourniquet<br />

Dispositions pour quʹil vienne se reposer en France. Démarches pour faire agréer un prêtre <strong>de</strong> lʹInstitut à titre<br />

dʹaumônier.<br />

Vaugirard, 17 mai 1870<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

MM. du Comité approuvent parfaitement que vous veniez prendre un temps suffi‐<br />

sant <strong>de</strong> repos près <strong>de</strong> nous, afin <strong>de</strong> remettre votre santé. Je vais donc aviser définitivement<br />

à vous envoyer un frère (M. <strong>de</strong> Lauriston, si je puis) que vous mettrez bien au fait <strong>de</strong> vos<br />

services, afin que rien ne souffre en votre absence.<br />

Pour M. Streicher, je vais le faire partir cette semaine par le premier paquebot, sa‐<br />

medi, je crois, à Marseille; je vais <strong>de</strong> ce pas mʹen informer.<br />

Le Comité agrée aussi quʹon vous décharge <strong>de</strong>s pensions; M. Keller écrit en ce sens<br />

aujourdʹhui à M. Descemet; tâchez que ce <strong>de</strong>rnier ne prenne pas mal la chose. En même<br />

temps, M. Keller prie M. Descemet <strong>de</strong> voir au plus tôt Mgr Basti<strong>de</strong> et <strong>de</strong> lui dire que le Co‐<br />

mité verrait <strong>avec</strong> plaisir quʹun <strong>de</strong> nos prêtres fût choisi comme aumônier adjoint <strong>de</strong> la Lé‐<br />

gion. Jʹécris moi‐même dans le même sens à Mgr Basti<strong>de</strong> la lettre ci‐jointe; je vous charge <strong>de</strong><br />

1470


la lui porter (vous ou M. Emile [Beauvais], selon quʹil sera mieux) et <strong>de</strong> lui dire quʹau nom<br />

du Comité, M. Descemet doit appuyer cette <strong>de</strong>man<strong>de</strong>.<br />

Il serait à propos, sans doute, <strong>de</strong> parler aussi <strong>de</strong> cette affaire en mon nom à M gr Tiz‐<br />

zani; si vous pensiez quʹil serait mieux que ce fût le r.p. Brichet qui sʹen chargeât, je pense<br />

quʹil ne refuserait pas <strong>de</strong> le faire, les choses étant ainsi dʹaccord <strong>avec</strong> le Comité. Sʹil y a<br />

quelque autre chose à faire, dites‐le moi; il me semble quʹen tout cas, vous feriez bien <strong>de</strong><br />

remettre sans retard la lettre à M gr Basti<strong>de</strong>, parce quʹil cherche un ai<strong>de</strong> et quʹil peut le trou‐<br />

ver ailleurs. Je pense quʹil ne faudrait parler <strong>de</strong> ces démarches quʹà M. Emile [Beauvais]<br />

seulement chez vous.<br />

Lʹintention du Comité serait que notre ecclésiastique <strong>de</strong>meurât à la Villa; il vaut<br />

mieux peut‐être nʹen point parler présentement à M. Descemet et laisser les choses suivre<br />

leur cours.<br />

Je termine ici, écrivant aujourdʹhui difficilement; M. Audrin va bien, sans être par‐<br />

faitement remis; il travaille pourtant un peu et est hors <strong>de</strong> tout danger.<br />

M. Pappaz est à Amiens, près <strong>de</strong> M. Lantiez qui a lʹhabitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> le conduire; M. Co‐<br />

querel sʹaccoutume bien à Chaville.<br />

Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S.; je vous embrasse tous affectueusement en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je vais répondre à la bonne lettre <strong>de</strong> M gr [Crété <strong>de</strong>] Palluel; il me semble que<br />

nous ne sommes pas encore en position <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r un couvent pour notre Congréga‐<br />

tion; cette <strong>de</strong>man<strong>de</strong> nuirait peut‐être près <strong>de</strong> M gr Basti<strong>de</strong> à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> concernant lʹaumô‐<br />

nier; il serait aussi nécessaire que nous eussions un Cardinal protecteur.<br />

Vous fermerez la lettre pour M gr Basti<strong>de</strong> avant quʹelle lui soit portée.<br />

1536 à M. Maignen<br />

Précisions pour dissiper un malentendu et ménager la sensibilité du frère Maignen.<br />

Chaville, 18 mai 1870<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Votre lettre mʹa surpris singulièrement; cʹest <strong>avec</strong> une sincérité entière que je vous le<br />

déclare, je nʹai pas dit un seul mot au Conseil dʹhier dont vous pussiez vous blesser. A<br />

propos <strong>de</strong>s fêtes, jʹai dit que souvent elles couvraient à peine leurs frais; doucement, sans<br />

lʹombre même dʹun reproche, jʹai cité la <strong>de</strong>rnière donnée au Cercle et qui a laissé ce résul‐<br />

tat; je doute quʹaucun Supérieur pût faire une observation en termes plus calmes et plus<br />

mesurés; je ne me fais <strong>de</strong>vant Dieu aucun reproche à ce sujet.<br />

Quant aux remarques adressées à M. Vasseur, et <strong>avec</strong> juste raison assurément,<br />

puisquʹelles signalaient une fois <strong>de</strong> plus la tendance constante <strong>de</strong>s œuvres (non à Nazareth<br />

seulement, mais <strong>de</strong> toutes parts, en province même où je lʹai encore constaté <strong>de</strong>rnièrement<br />

à Amiens) à sortir <strong>de</strong>s justes mesures pour la durée <strong>de</strong>s fêtes, les proportions quʹon leur<br />

donne, les dépenses dʹactivité et dʹargent quʹon y consacre. Jʹy ai mis quelque insistance,<br />

parce que M. Vasseur se refusait à reconnaître la vérité <strong>de</strong> cette disposition, au moment<br />

même où on signalait lʹhabitu<strong>de</strong> quʹil prenait <strong>de</strong> terminer toutes ses réunions à lʹheure ex‐<br />

trême que le Chapitre avait déterminée pour les assemblées extraordinaires.<br />

1471


Je déclare ici <strong>de</strong> la manière la plus expresse que, <strong>de</strong> fait et dʹintention, je ne pensais<br />

et ne parlais quʹà M. Vasseur seul, sans faire lʹombre dʹune application à vous; cʹest donc<br />

sans aucun motif que vous en avez pris ombrage. Ce <strong>de</strong>rnier mot explique votre méprise<br />

en cette occasion et, en général, dans toutes les autres. Que jʹaie moi, votre ami le plus af‐<br />

fectionné, votre Père par le cœur comme par le titre, que jʹaie <strong>de</strong> la prévention, presque <strong>de</strong><br />

lʹaversion contre vous, que je méconnaisse vos travaux, vos services dans la Congrégation<br />

et dans les œuvres, vous seul au mon<strong>de</strong> pouvez concevoir une telle imagination; cʹest un<br />

effet <strong>de</strong> susceptibilité, une ombre qui se projette sur votre esprit et lʹempêche <strong>de</strong> rester<br />

dans le vrai. Croyez à ma parole, mon cher enfant, croyez surtout à ma vieille et inaltéra‐<br />

ble affection et soyez assuré que, si je résiste à certains entraînements <strong>de</strong>s œuvres, je le fais<br />

par conscience et par sentiment <strong>de</strong> mon <strong>de</strong>voir, mais sans que mon absolu dévouement à<br />

mes enfants et frères, et à vous tout particulièrement, en soit aucunement altéré.<br />

Je vous embrasse tendrement.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1537 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Recommandations pour la lecture <strong>de</strong>s journaux en communauté. Rester <strong>de</strong>s ʺhommes séparés, <strong>de</strong>s hommes reli‐<br />

gieuxʺ.<br />

Chaville, 18 mai 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je mʹaperçois que, dans ma lettre dʹhier, jʹai omis <strong>de</strong> répondre à votre question<br />

concernant les journaux. Vous êtes dʹavance entré dans ma pensée; on peut laisser aux ff.<br />

la disposition <strong>de</strong> quelques petites feuilles qui sont utiles pour leurs œuvres. Quant à un<br />

journal politique, ce qui serait le mieux, ce serait quʹils en vissent, une fois par semaine, un<br />

seul qui résumât ce quʹil est essentiel <strong>de</strong> savoir pour nʹêtre pas étranger au gros <strong>de</strong>s évé‐<br />

nements qui intéressent la famille humaine et le pays auquel on appartient. Le détail <strong>de</strong><br />

cette histoire, suivi journellement, préoccupe trop, nuit au spirituel et jette trop dans lʹexté‐<br />

rieur; nous avons assez <strong>de</strong> peine à y échapper et à <strong>de</strong>meurer quelque peu <strong>de</strong>s hommes sé‐<br />

parés, <strong>de</strong>s hommes religieux, il ne faut pas accroître nos difficultés et les rendre insurmon‐<br />

tables.<br />

Votre tout affectionné ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

Je crois quʹil faut aussi considérer la couleur <strong>de</strong>s feuilles et ne pas risquer dʹentamer<br />

lʹunité <strong>de</strong> doctrines et <strong>de</strong> sentiments parmi nous par la lecture habituelle dʹécrits qui ne<br />

sont pas dans nos voies.<br />

1538 à M. Maignen<br />

Attention mutuelle en communauté. Un frère ne voit que son patronage. Deman<strong>de</strong>r plus <strong>de</strong> largeur dʹesprit et <strong>de</strong><br />

charité fraternelle.<br />

Chaville, 19 mai 1870<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Pour ne laisser aucun nuage dans votre esprit, je vous donne cette explication. M.<br />

Paillé ne cesse <strong>de</strong> me représenter que ses ressources ne suffisent plus pour lʹentretien <strong>de</strong> la<br />

1472


maison et, comme il ne reçoit pas les secours dont il a besoin, il reste sourd aux <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s<br />

quʹon lui fait. En ce moment, je suis obligé dʹacheter un paletot pour un <strong>de</strong>s frères qui en a<br />

un absolu besoin; <strong>de</strong> son côté, M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] prend le parti dʹhabiller M. Strei‐<br />

cher qui ne peut faire son voyage et se présenter à Rome démuni comme il lʹest. Jʹai essayé,<br />

pendant la retraite, <strong>de</strong> faire affectueusement quelques représentations à M. Vasseur; elles<br />

ont été sans effet; il ne voit que son patronage et ses propres difficultés, sans tenir aucun<br />

compte <strong>de</strong>s embarras quotidiens <strong>de</strong> M. Paillé. Que peut donc faire ce <strong>de</strong>rnier, et que peut<br />

faire aussi le Supérieur, en présence <strong>de</strong> ces vues mal éclairées? Deman<strong>de</strong>r plus <strong>de</strong> largeur<br />

<strong>de</strong> cœur et plus <strong>de</strong> charité <strong>de</strong>s frères les uns pour les autres. Si la Congrégation souffre<br />

dans son esprit, si chaque Maison est sans abnégation et sans miséricor<strong>de</strong>, les œuvres en<br />

iront‐elles mieux? La question est là, je suis contraint <strong>de</strong> le rappeler; je lʹai fait sans amer‐<br />

tume, un Supérieur mieux obéi lʹeût fait <strong>avec</strong> une autorité décisive; moins fort, je me borne<br />

à <strong>de</strong>s représentations; je bénirai Dieu si je suis mieux compris que je ne lʹai été durant la re‐<br />

traite.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1539 à M. Tourniquet<br />

Arrivée du frère Streicher. Rappel à venir se reposer en France.<br />

Chaville, 19 mai 1870<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Je vous envoie la lettre pour Mgr [Crété <strong>de</strong>] Palluel; vous corrigerez lʹadresse si elle<br />

nʹest pas telle quʹelle <strong>de</strong>vrait être.<br />

M. Streicher partira <strong>de</strong>main vendredi et arrivera presque aussitôt que ma lettre.<br />

Vous ne mʹavez point dit si vous étiez satisfait du soin que nous prenons <strong>de</strong> vous<br />

procurer un peu <strong>de</strong> repos; on nous a assuré quʹil était nécessaire que vous pussiez, après<br />

vous être refait, reprendre votre service <strong>de</strong> Rome. Jʹattends une lettre <strong>de</strong> vous.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1540 à M gr Crété <strong>de</strong> Palluel<br />

MLP. décline une offre que ce prélat lui avait faite dʹobtenir un couvent à Rome.<br />

Chaville, 19 mai 1870<br />

Monseigneur,<br />

Jʹai reçu <strong>avec</strong> une vive reconnaissance votre honorée lettre, par laquelle vous avez la<br />

bonté <strong>de</strong> mʹinformer que la retraite <strong>de</strong>s rr.pp. Arméniens laisse vacant un couvent quʹil<br />

nous serait bien avantageux dʹobtenir, afin dʹy poser notre Congrégation dans <strong>de</strong>s condi‐<br />

tions stables qui lui permissent <strong>de</strong> travailler un peu à Rome dans lʹintérêt du bien.<br />

Cette perspective serait assurément séduisante, car quelle est la famille religieuse<br />

qui ne se regar<strong>de</strong> comme très favorisée si elle peut être représentée dans la Ville Eternelle<br />

et y servir la gran<strong>de</strong> cause <strong>de</strong> la Catholicité. Mais cette noble ambition nous semble bien<br />

haute, eu égard à notre avancement comme corps religieux et comme puissance dʹaction.<br />

1473


Nous ne voyons pas bien quelle œuvre nous pourrions faire à Rome, sinon lʹessai dʹun sé‐<br />

minaire propre exclusivement à nos jeunes sujets ecclésiastiques qui pourraient être avan‐<br />

tageusement formés à Rome, en suivant les cours du Collège Romain dont les enseigne‐<br />

ments sont si justement réputés. Mais cette entreprise, toute particulière, suffirait‐elle, aux<br />

yeux <strong>de</strong> Sa Sainteté, pour quʹElle daignât nous accor<strong>de</strong>r la précieuse faveur dʹun poste sta‐<br />

ble et privilégié dans sa Ville pontificale? Nous nʹosons lʹespérer, étant surtout dépourvus<br />

dʹappuis influents, nʹayant pas <strong>de</strong> Cardinal protecteur, manquant, en un mot, <strong>de</strong>s condi‐<br />

tions essentielles qui pourraient ménager le succès <strong>de</strong> nos démarches.<br />

Telles sont les raisons, Monseigneur, qui nous font penser que nous ne sommes<br />

guère en mesure présentement <strong>de</strong> profiter <strong>de</strong> la bonne occasion que vous avez eu lʹaimable<br />

pensée <strong>de</strong> nous signaler. Nous nʹen gardons pas moins une vive reconnaissance <strong>de</strong> cette<br />

initiative bienveillante; nous savions déjà, par les correspondances <strong>de</strong> nos ff. et par les ré‐<br />

cits <strong>de</strong> ceux qui reviennent <strong>de</strong> Rome, combien tous les nôtres ont à se louer <strong>de</strong> vos bontés,<br />

<strong>de</strong> vos constantes obligeances à leur égard; je suis heureux, Monseigneur, dʹavoir cette oc‐<br />

casion <strong>de</strong> vous en exprimer notre gratitu<strong>de</strong> et <strong>de</strong> vous assurer <strong>de</strong>s sentiments <strong>de</strong> respec‐<br />

tueux dévouement <strong>avec</strong> lesquels je suis<br />

Votre humble et obéissant serviteur en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

<strong>de</strong>s ff. <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul<br />

1541 à M. Tourniquet<br />

Pour régler divers points <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> la communauté romaine.<br />

Vaugirard, 24 mai 1870<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Je vous envoie, comme vous me lʹavez <strong>de</strong>mandé, une lettre pour Mgr Tizzani; si<br />

jʹavais pu concerter <strong>avec</strong> vous dʹavance la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, jʹaurais pu mieux entrer dans les vues<br />

que paraissait avoir le r.p. Brichet; mais la lenteur <strong>de</strong>s correspondances entre Rome et Pa‐<br />

ris rend lʹentente <strong>de</strong>s esprits bien difficile; remettons cette affaire, comme les autres, aux<br />

mains <strong>de</strong> Dieu.<br />

M. <strong>de</strong> Lauriston compte toujours partir au commencement <strong>de</strong> la semaine prochaine;<br />

jʹespère quʹil vous ai<strong>de</strong>ra à mettre vos comptes en règle et que M. Emile [Beauvais], ainsi<br />

que vous, vous ferez tout ce que M. Georges trouvera le mieux. En supposant que vous ar‐<br />

riviez à couvrir la différence qui est signalée et que la réclamation <strong>de</strong> M. Descemet soit<br />

bien fondée, il restera à expliquer dʹune façon plausible comment vous avez pu penser que<br />

les fonds assez considérables, en reliquat dans votre caisse, provenaient <strong>de</strong> quelque boni,<br />

nécessairement peu notable, <strong>de</strong> vos ventes au buffet ou pour le tabac. Il serait bien désira‐<br />

ble que lʹexplication fût plausible et satisfaisante, afin <strong>de</strong> ne laisser place à aucun soupçon<br />

malveillant.<br />

Je suppose que M. Streicher est arrivé près <strong>de</strong> vous à bon port; dites‐lui que jʹai reçu<br />

<strong>avec</strong> plaisir sa lettre <strong>de</strong> Marseille.<br />

M. Georges Coquerel va bien jusquʹici; M. Pappaz est à Amiens.<br />

1474


Adieu, mon cher enfant en N.S. Confions‐nous en Dieu et en la T. S te Vierge pour<br />

conduire à bien tout ce que nous faisons; nous ne manquerions pas, si nous nʹavions cet<br />

appui, <strong>de</strong> tout gâter.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1542 à M. Tourniquet<br />

Vie <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Rome. Mouvement <strong>de</strong> personnel. Tenue <strong>de</strong>s comptes.<br />

Chaville, 24 mai 1870<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je conçois que les difficultés <strong>de</strong> votre emploi et les ennuis qui sʹy joignent présente‐<br />

ment vous fassent une pénible épreuve; je compatis à votre peine comme à vos fatigues, et<br />

je désire bien que lʹarrivée <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Lauriston vous apporte soulagement; il vous ai<strong>de</strong>ra à<br />

examiner vos comptes et vous mettra à même, je lʹespère, <strong>de</strong> venir prendre quelque temps<br />

<strong>de</strong> repos près <strong>de</strong> nous.<br />

Nous pensons quʹil pourra partir <strong>de</strong> Paris lundi prochain, 30 mai, supposant quʹun<br />

paquebot part au milieu <strong>de</strong> la semaine <strong>de</strong> Marseille pour Civit<strong>avec</strong>chia. Prenez donc<br />

confiance; Dieu vous tirera <strong>de</strong> peine et vous donnera soulagement; souffrir pour son ser‐<br />

vice est le partage <strong>de</strong> ceux quʹil aime et cʹest un moyen aussi dʹexpier les imperfections qui<br />

se glissent en nos actes, même les meilleurs.<br />

M. Emile [Beauvais] me dit quʹen mêlant M. Descemet à notre <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pour lʹau‐<br />

mônier, nous nʹavons pas pris la meilleure voie; jʹai fait, <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> M. Keller, ce que<br />

nous avons cru ensemble <strong>de</strong> plus simple; je remets la chose aux mains <strong>de</strong> Dieu, ne voulant<br />

que sa sainte volonté.<br />

M. Streicher est maintenant près <strong>de</strong> vous, jʹespère quʹil va vous ai<strong>de</strong>r efficacement; il<br />

tenait bien les comptes au Cercle et faisait bien lʹéconomat; peut‐être pourra‐t‐il surveiller<br />

le restaurant. Ne serait‐il pas possible <strong>de</strong> se décharger sur dʹautres que nous <strong>de</strong> la gestion<br />

et <strong>de</strong> la responsabilité <strong>de</strong> ce restaurant? Je comprends que ce parti a bien <strong>de</strong>s difficultés,<br />

mais, dʹun autre côté, cʹest une bien lour<strong>de</strong> direction pour nous, vous examinerez cette<br />

question <strong>avec</strong> M. Descemet et, avant tout, <strong>avec</strong> M. <strong>de</strong> Lauriston.<br />

Jʹécris un mot à M. Emile et je lʹavertis que M. <strong>de</strong> Lauriston va venir pour vous ai<strong>de</strong>r<br />

à vérifier vos comptes; vous lui direz vous‐même, quand vous le jugerez à propos, quʹil<br />

sʹagit ensuite pour vous <strong>de</strong> prendre quelques semaines <strong>de</strong> repos. Adieu, mon bien cher en‐<br />

fant, je vous embrasse affectueusement en N.S.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

1543 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Mouvements divers <strong>de</strong> personnel pour suppléer le père <strong>de</strong> Varax et le frère Tourniquet. « Tout pousse à renverser<br />

nos édifices; les moines qui faisaient <strong>de</strong>s corbeilles… »<br />

Chaville, 24 mai 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. dʹArbois me dit, et je pense aussi, que vous feriez votre petit voyage <strong>de</strong> santé en<br />

repos dʹesprit plus complet si votre petite communauté nʹétait pas tout à fait dépourvue <strong>de</strong><br />

1475


surveillance durant votre absence. Or, M. dʹArbois <strong>de</strong>vant passer trois semaines à Angers<br />

pour la vente, si vous faisiez coïnci<strong>de</strong>r le commencement <strong>de</strong> votre absence <strong>avec</strong> le moment<br />

<strong>de</strong> son arrivée, ce serait autant <strong>de</strong> gagné et le délaissement <strong>de</strong>s ff. et <strong>de</strong>s œuvres, étant ré‐<br />

duit à ce qui resterait <strong>de</strong> temps pour compléter la durée <strong>de</strong> votre repos, serait relativement<br />

très supportable. On peut objecter, il est vrai, que M gr lʹEvêque dʹAngers peut arriver du‐<br />

rant votre absence, mais la venue du Prélat, quant à sa date, est sans doute bien incertaine<br />

et vous pourrez difficilement y subordonner lʹheure <strong>de</strong> votre départ. En supposant même<br />

que vous fussiez réellement éloigné quand il viendra, une lettre polie lui ferait aisément<br />

comprendre et agréer les raisons graves qui nécessitent votre absence.<br />

Je serais bien aise que vous goûtiez cet arrangement, la communauté, aujourdʹhui<br />

plus nombreuse, ne me paraissant guère pouvoir <strong>de</strong>meurer seule longtemps, et les moyens<br />

<strong>de</strong> vous remplacer étant pour nous bien difficiles.<br />

M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] est obligé dʹaller temporairement suppléer M. <strong>Jean</strong>‐Marie<br />

[Tourniquet] dont la santé est altérée; cʹest un vi<strong>de</strong> qui va nous causer quelque embarras.<br />

M. Audrin ira momentanément à Vaugirard, mais non sans détriment pour Chaville. Que<br />

les combinaisons humaines sont fragiles! mort, maladies, défaillances <strong>de</strong>s volontés, acci‐<br />

<strong>de</strong>nts sans nombre, tout pousse à renverser nos édifices; les moines, qui faisaient <strong>de</strong>s cor‐<br />

beilles pour les détruire et les refaire ensuite, avaient presque la même tâche que nous;<br />

tout est bien néanmoins, si le Maître Suprême est content.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, je me réjouis à la pensée <strong>de</strong> vous revoir, mais cʹest<br />

pour si peu <strong>de</strong> temps! les affections et les joies quʹelles donnent sont encore comme les<br />

corbeilles, à peine produites, elles sont défaites.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1544 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Difficultés soulevées à Versailles pour l’appel aux ordres. Indult <strong>de</strong>mandé à Rome. M. Chaverot agréé comme<br />

aumônier militaire à Rome. Il faut le remplacer.<br />

Chaville, 2 juin 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je rencontre en ce moment une difficulté pour nos jeunes séminaristes <strong>de</strong> Versailles:<br />

lʹun dʹeux, M. Cauroy, étant présenté par nous pour les ordres mineurs et ayant subi, <strong>avec</strong><br />

MM. Planchat et Faÿ, <strong>de</strong>s examens qui constatent sa suffisance, est arrêté néanmoins par<br />

une objection quʹa faite, non son professeur, mais un autre <strong>de</strong>s Directeurs, savoir: que no‐<br />

tre Congrégation, nʹétant encore approuvée à Rome quʹau premier <strong>de</strong>gré, ne saurait pré‐<br />

senter dʹelle‐même <strong>de</strong>s sujets pour les ordres, à moins dʹy être autorisée par un indult du<br />

Saint Siège. Le Supérieur, bien que nʹétant pas <strong>de</strong> ce sentiment, a cru <strong>de</strong>voir en référer au<br />

Vicaire Général, lequel, en lʹabsence <strong>de</strong> lʹEvêque et un peu en doute <strong>de</strong> ce quʹil pourrait<br />

faire, juge à propos dʹadopter lʹavis du Directeur. Nous sommes donc arrêtés court, bien<br />

que M gr [Mabile] <strong>de</strong> Versailles ait précé<strong>de</strong>mment admis sans difficulté le même Cauroy à<br />

la tonsure, et bien aussi que NN.SS. dʹAmiens, dʹArras et <strong>de</strong> Metz aient aussi reçu nos su‐<br />

jets aux ordres dans <strong>de</strong>s conditions pareilles, <strong>avec</strong> cette réserve toutefois que les examens<br />

préparatoires avaient été faits par MM. les Directeurs <strong>de</strong>s Séminaires locaux, tandis quʹà<br />

Versailles, ils ont été faits par nos Pères, M gr <strong>de</strong> Versailles ayant, dès le principe, déclaré<br />

quʹil ne se chargeait pas, non plus que son Séminaire, <strong>de</strong> ce soin.<br />

1476


M. Cauroy a écrit à son Evêque (<strong>de</strong> Verdun) pour lui dire lʹobstacle quʹil rencontre<br />

et le prier <strong>de</strong> le lever en lui donnant une autorisation spéciale quʹil puisse présenter à Ver‐<br />

sailles; jʹai appuyé la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, mais il est bien douteux que lʹEvêque (absent dʹailleurs)<br />

croie <strong>de</strong>voir lʹaccueillir. Il a donné volontiers une excorporation; il objectera probablement<br />

que, ne suivant aucunement <strong>de</strong>s yeux le sujet, il ne peut prendre sur lui <strong>de</strong> lui donner <strong>de</strong>s<br />

autorisations pour avancer dans les ordres. Peut‐être nous eussions prévenu tout cet em‐<br />

barras en priant le professeur <strong>de</strong> M. Cauroy dʹassister à lʹexamen et son témoignage eût<br />

paru suffisant; quoi quʹil en soit, le cas est posé autrement aujourdʹhui; il semble que le<br />

mieux à faire serait <strong>de</strong> se pourvoir dʹun indult du Saint‐Père. Comment et par quelle en‐<br />

tremise lʹobtenir? Cʹest sur ce point que je vous consulte. Le Cardinal Pitra, M gr Isoard ou<br />

M gr Tizzani, ou consulter avant tout le r.p. Brichet?<br />

Quelle forme prendre aussi pour la supplique; comment expliquer nos procédés<br />

pour le passé, comment expliquer la difficulté présente, les détails ne peuvent‐ils pas don‐<br />

ner lieu <strong>de</strong> blâmer les Evêques qui nous ont admis sans indult?<br />

Le refus <strong>de</strong> Versailles nʹest‐il pas comme un indice <strong>de</strong> défiance sur la valeur <strong>de</strong>s su‐<br />

jets présentés par nous? Quel est, sur ces différents points, votre sentiment? Vous connais‐<br />

sez un peu Rome et les Romains.<br />

Je reçois hier un télégramme <strong>de</strong> M. Emile [Beauvais] mʹannonçant que M. Chaverot<br />

est agréé comme aumônier honoraire, mais que M gr Basti<strong>de</strong> partant bientôt pour une ab‐<br />

sence prolongée, il faut que M. Chaverot arrive au plus tôt. Nouvelle difficulté pour nous;<br />

Vaugirard va être fort délaissé jusquʹà ce que nos jeunes séminaristes <strong>de</strong> St‐Sulpice puis‐<br />

sent être ordonnés. Deus provi<strong>de</strong>bit! Je ne sais pas comment les gens du mon<strong>de</strong> peuvent se<br />

passer <strong>de</strong> Dieu; pour nous, nous ne saurions faire un pas sans crier vers Lui, ayant peur <strong>de</strong><br />

tomber si sa main ne nous soutient; les autres du mon<strong>de</strong> sont‐ils plus forts, sommes‐nous<br />

plus faibles, ou bien le Seigneur nous tient‐il en plus stricte dépendance? Je ne le saurais<br />

dire.<br />

M. Audrin se remet lentement, sa poitrine reste faible et lʹensemble <strong>de</strong> sa constitu‐<br />

tion est plus débile que précé<strong>de</strong>mment. Il remplace M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston], parti pour<br />

Rome; nous sommes fort gênés par son absence à Chaville; confiance encore et confiance<br />

toujours.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, jʹespère que votre voyage dʹeaux va vous refaire; à<br />

bientôt, priez pour nous qui prions pour vous. Cor Jesu Cor Mariae.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1545 à M. dʹArbois<br />

MLP. fait suivre une lettre <strong>de</strong> Rome. Brèves nouvelles. M. Chaverot sur le départ.<br />

Vaugirard, 10 juin 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie une lettre qui nous arrive pour vous <strong>de</strong> Rome.<br />

Je ne vois rien <strong>de</strong> bien notable ici <strong>de</strong>puis votre départ, sinon le vi<strong>de</strong> que laisse votre<br />

absence.<br />

M. Boucault se marie le 16; ce sera, je crois, M. Faÿ qui le mariera.<br />

1477


Je nʹai rien <strong>de</strong> précis encore pour le jour du départ <strong>de</strong> M. Chaverot; jʹattends une let‐<br />

tre <strong>de</strong> M gr Tizzani, dès quʹelle mʹarrivera, le moment <strong>de</strong> partir sera venu; M. Chaverot fait<br />

ses apprêts, dʹailleurs fort simples et conformes à la mo<strong>de</strong>stie <strong>de</strong> ses habitu<strong>de</strong>s.<br />

Remerciez M. <strong>de</strong> Varax <strong>de</strong> sa lettre, je ne lui dis rien, sinon mes tendres affections,<br />

attendant sa venue toute prochaine.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Pourriez‐vous savoir au séminaire ce que je dois pour M. Boiry, en y joignant<br />

les avances faites par la communauté dʹAngers?<br />

1546 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Conseils pour l’éducation <strong>de</strong> son fils.<br />

Vaugirard, 11 juin 1870<br />

Madame la Marquise,<br />

Je me hâte <strong>de</strong> répondre à votre bonne lettre, que jʹattendais <strong>avec</strong> espérance et pour‐<br />

tant un peu impatiemment; et maintenant, je mʹassocie <strong>de</strong> plein cœur à votre joie et à celle<br />

<strong>de</strong> votre bonne mère. Une fois <strong>de</strong> plus, nous aurons vu que la prière nʹest jamais vaine et<br />

que, si Dieu nʹaccor<strong>de</strong> pas toujours ce que nous <strong>de</strong>mandons, cʹest quʹIl veut nous donner<br />

mieux encore, en proportionnant ses dons à nos véritables besoins. Il vous eût été, sans<br />

doute, plus agréable, Madame, que votre cher Richard emportât dʹemblée son brevet <strong>de</strong><br />

bachelier; mais, par le fait, il lui sera bien plus profitable <strong>de</strong> ne lʹavoir que par <strong>de</strong>s efforts<br />

soutenus. Outre quʹil va maintenant faire preuve <strong>de</strong> persévérance, quʹil fait aussi acte <strong>de</strong><br />

déférence pour les désirs <strong>de</strong> la plus tendre mère, il va fortifier son esprit par une étu<strong>de</strong><br />

plus approfondie et acquérir une science soli<strong>de</strong>, au lieu <strong>de</strong> notions entassées en hâte et né‐<br />

cessairement superficielles. Si, comme tout le laisse penser, il prend ainsi goût à lʹétu<strong>de</strong>, il<br />

aura pour le reste <strong>de</strong> sa vie un véritable trésor. Car les avantages <strong>de</strong> la naissance et <strong>de</strong> la<br />

position ne sont pas tout; ce sont surtout les jouissances dʹun esprit cultivé qui concourent<br />

à élever les hommes et les mettent à même dʹexercer une utile influence autour dʹeux.<br />

Avec tous les avantages quʹil a déjà, votre cher fils, sʹil acquiert <strong>de</strong>s connaissances réelles,<br />

pourra rendre <strong>de</strong>s services à son pays, prendre place dans les Conseils Généraux, ou rem‐<br />

plir quelques hautes fonctions où lʹappellerait la confiance <strong>de</strong> son entourage. Dans la pre‐<br />

mière jeunesse, on sʹarrête peu à ces pensées; mais, quand lʹesprit a mûri, que le sentiment<br />

<strong>de</strong>s <strong>de</strong>voirs parle plus haut, on apprécie justement les ressources que procurent un juge‐<br />

ment exercé, <strong>de</strong>s connaissances bien acquises. Tout cela est en promesse dans les bonnes<br />

dispositions que montre votre cher fils pour continuer ses étu<strong>de</strong>s; possédant mieux la<br />

science, il y prendra goût, je le répète, et il aura à cœur <strong>de</strong> la cultiver et <strong>de</strong> lʹaccroître tou‐<br />

jours. Enfin, il y trouvera un utile emploi <strong>de</strong> ses facultés, un préservatif contre lʹennui, un<br />

moyen <strong>de</strong> plus dʹêtre aimable et <strong>de</strong> sʹattirer lʹestime.<br />

Bénissons donc le Seigneur qui a bien fait toutes choses; il fera tourner lʹavenir aussi<br />

bien que le passé pour votre consolation et pour la joie <strong>de</strong> votre cœur. Je vais continuer <strong>de</strong><br />

prier dans cette vue, heureux <strong>de</strong> trouver dans mon saint ministère <strong>de</strong> précieux moyens<br />

pour secon<strong>de</strong>r vos désirs.<br />

1478


Jʹapprendrai <strong>avec</strong> joie que tout est selon vos souhaits dans notre cher pays nor‐<br />

mand, que vos entourages savent reconnaître la bonne influence quʹexerce votre séjour à la<br />

campagne et que, pour le spirituel aussi, vos difficultés vont enfin sʹaplanir; jʹaimerais en‐<br />

core que votre petite chapelle eût au moins un peu souvent les avantages que vous aviez<br />

espérés; en réunissant toute votre maison pour le S t Sacrifice et pour les prières communes,<br />

Dieu serait ainsi encore plus près <strong>de</strong> vous: Quand vous serez réunis <strong>de</strong>ux ou trois en mon<br />

nom, nous dit‐Il, je serai au milieu <strong>de</strong> vous. 435 Il se plairait dans une famille si chrétienne!<br />

Espérons quʹIl voudra y faire un jour bien définitivement sa place.<br />

Je ne sais si M. <strong>de</strong> Caulaincourt est près <strong>de</strong> vous; jʹadresse à tout hasard à lui et à<br />

tous les vôtres, dont jʹai lʹhonneur dʹêtre connu, mes sentiments très dévoués et vous prie,<br />

Madame la Marquise, dʹagréer vous‐même, ainsi que Madame dʹHurbal, mon bien respec‐<br />

tueux attachement en N.S.<br />

Votre humble serviteur et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Je joins ici la lettre qui contient, au sujet <strong>de</strong>s efforts si soutenus <strong>de</strong> votre cher Ri‐<br />

chard, un témoignage plein dʹespérances.<br />

1547 à M. <strong>de</strong> Lauriston<br />

Recommandations utiles pour ai<strong>de</strong>r M. Chaverot dans sa nouvelle fonction.<br />

Jeudi, 16 juin 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous écris <strong>de</strong>ux mots seulement pour que notre cher M. Chaverot nʹarrive pas les<br />

mains vi<strong>de</strong>s. Je pense quʹil arrivera bien fatigué, mais je me repose sur votre sollicitu<strong>de</strong><br />

pour veiller à le refaire. Son absence va nous créer un grand vi<strong>de</strong> et beaucoup dʹembarras,<br />

mais nos ff. <strong>de</strong> Rome ont souffert <strong>de</strong> leur côté, nous souffrirons à notre tour, Dieu ne per‐<br />

mettant pas, quant à présent, que nous puissions jamais satisfaire à tous les besoins en‐<br />

semble; que son saint nom soit béni et que sa sagesse soit adorée en tout!<br />

Jʹai reçu, comme vous me lʹaviez annoncé, une lettre très bonne <strong>de</strong> Mgr Tizzani; ne<br />

manquez pas <strong>de</strong> le remercier ainsi que Mgr Basti<strong>de</strong>, dont jʹai reçu hier un télégramme me<br />

rappelant quʹil part à la fin du mois. Jʹespère que le Seigneur bénira le ministère humble et<br />

dévoué <strong>de</strong> notre cher f. Chaverot. Il <strong>de</strong>vra marcher pru<strong>de</strong>mment jusquʹà ce quʹil connaisse<br />

le terrain; il me semble que M. lʹabbé Feiher, aumônier <strong>de</strong>s Allemands et Alsaciens, fort<br />

aimé <strong>de</strong> Mgr Tizzani et bienveillant pour nous, pourra le conseiller utilement ainsi que le<br />

bon p. Brichet, toujours dévoué pour nous. Vous lui indiquerez quelles visites il aura à<br />

faire. Mgr Daniel ne <strong>de</strong>vra pas être oublié. M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet], sʹil est encore là, et<br />

M. Emile [Beauvais] indiqueront dans quelle mesure convenable et sans excès il <strong>de</strong>vra<br />

faire à cet égard. Mgr Isoard me semble aussi à visiter par lui.<br />

Je termine, étant aujourdʹhui extrêmement fatigué par la chaleur et lʹinsomnie <strong>de</strong> la<br />

nuit.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

435 Mt 18, 20.<br />

1479


P.S. Je crois quʹà Rome, un ecclésiastique posé <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s ff. laïcs ne saurait être ac‐<br />

cepté autrement que comme leur Supérieur; il faudra donc poser ainsi M. Chaverot, sauf<br />

les égards dûs à vos cheveux presque blancs. Pour la confession, les ff. resteront libres <strong>de</strong><br />

choisir entre lui et le r.p. Laurençot.<br />

1548 à M. dʹArbois<br />

Départ <strong>de</strong> M. Chaverot pour Rome. Organisation <strong>de</strong> Vaugirard. Compter sur le secours <strong>de</strong> Dieu. Prières pour<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r la fin <strong>de</strong> la sécheresse; souci <strong>de</strong>s pauvres.<br />

Chaville, 21 juin 1870<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Jʹai différé un peu à vous répondre, attendant <strong>de</strong> jour en jour lʹarrivée <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Va‐<br />

rax et pensant quʹil me donnerait peut‐être quelques renseignements qui pourraient <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>r une réponse ou une solution <strong>de</strong> ma part; il est ici <strong>de</strong>puis lundi et je nʹai vu dans les<br />

communications, dʹailleurs intéressantes, quʹil mʹa pu faire, rien dont jʹeusse à mʹoccuper<br />

immédiatement.<br />

Nous allons péniblement à Vaugirard, privés <strong>de</strong> votre concours ordinaire; <strong>de</strong> votre<br />

côté, vous avez trouvé à Angers une tâche ru<strong>de</strong> et doublement pénible par les gran<strong>de</strong>s<br />

chaleurs que nous subissons. Les difficultés que vous aurez supportées seront, espérons‐le,<br />

une cause <strong>de</strong> plus pour attirer la bénédiction sur lʹœuvre que vous servez si courageuse‐<br />

ment. Nous prions fidèlement pour vous et Vaugirard, en particulier, vous mentionne tou‐<br />

jours aux recommandations.<br />

Vous aurez appris non sans quelque peine, au point <strong>de</strong> vue du moins du bien <strong>de</strong><br />

lʹorphelinat, que notre cher M. Chaverot a dû nous quitter jeudi <strong>de</strong>rnier (Fête‐Dieu) pour<br />

se rendre à Rome; embarqué hier lundi à Marseille, il sera déjà à sa <strong>de</strong>stination au moment<br />

où cette lettre vous parviendra. Les dépêches successives qui me sont arrivées nous ont<br />

paru exiger cette dure séparation, sans plus différer; nous avons pensé quʹelle était selon<br />

les vues <strong>de</strong> Dieu, sa grâce assistera notre cher frère.<br />

Nous avons ajusté les affaires à Vaugirard le moins mal que nous avons pu, non<br />

sans bien <strong>de</strong>s vi<strong>de</strong>s quʹon ne peut combler présentement. M. Demante reste constamment<br />

(le dimanche excepté) à lʹorphelinat; jʹy <strong>de</strong>meure moi‐même un jour <strong>de</strong> plus et M. Planchat<br />

y donne aussi plus <strong>de</strong> temps; un prêtre du <strong>de</strong>hors dit une messe chaque matin pour que le<br />

personnel <strong>de</strong> la maison y puisse facilement assister; pour le dimanche, le spirituel est aussi<br />

donné par <strong>de</strong>s étrangers; vous voyez, <strong>de</strong> votre pays dʹAngers, combien tous ces ajuste‐<br />

ments sont défectueux.<br />

M. Boucault, marié <strong>de</strong> jeudi, est, je crois, déjà en voyage; nous ne lʹavons vu quʹun<br />

moment <strong>avec</strong> sa jeune dame et nʹavons pu donner la <strong>de</strong>rnière conclusion à ses arrange‐<br />

ments <strong>avec</strong> nous; ce sera pour son retour.<br />

M. <strong>de</strong> Varax partira <strong>de</strong>main pour un temps toujours trop long et dont je ne sais pas<br />

absolument la durée; bien convaincu que ce voyage est nécessaire, il sʹy jette résolument,<br />

sans sʹeffrayer <strong>de</strong>s difficultés quʹil laisse <strong>de</strong>rrière lui; il a raison, sans doute; tâchons dʹavoir<br />

la même résolution, en nous appuyant sur la bonté paternelle <strong>de</strong> Dieu; Il daignera, espé‐<br />

rons‐le, se constituer le gardien <strong>de</strong> toutes les œuvres amoindries ou délaissées.<br />

La Fête‐Dieu sʹest très bien passée, M. le Curé <strong>de</strong> Vaugirard la présidait à lʹorpheli‐<br />

nat; les autres Maisons ont aussi été satisfaites.<br />

1480


Nous prions à Vaugirard et à Chaville pour attirer <strong>de</strong> la pluie (un Pater et Ave, <strong>avec</strong><br />

trois invocations: Cor Jesu, une: Cor Mariae); je crois quʹil serait bien que ces prières se fis‐<br />

sent partout chez nous; elles répon<strong>de</strong>nt à un besoin qui atteindra le peuple et les pauvres<br />

surtout.<br />

Adieu, mon bien bon ami; jʹoublie, sans doute, quelques points peut‐être intéres‐<br />

sants dont jʹaurais à vous parler; mais, sʹil en est ainsi, jʹy aviserai par quelque nouvelle<br />

missive puisque, à mon grand regret, le moment où nous serons réunis est encore un peu<br />

éloigné; faites beaucoup dʹamitiés pour moi à nos frères et à tous les amis qui nous accor‐<br />

<strong>de</strong>nt leur affection à Angers.<br />

Respects à MM. <strong>de</strong> lʹEvêché.<br />

Votre tout dévoué ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Encouragez bien tous, M. Moutier en particulier, dites‐lui que je lui écrirai bien‐<br />

tôt; nous nous sommes toujours bien entendus.<br />

1549 à M. Chaverot<br />

Restrictions aux pouvoirs <strong>de</strong> confesser. Avis du père Planchat.<br />

Vaugirard, 27 juin [1870]<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Jʹai reçu vos <strong>de</strong>ux lettres <strong>de</strong> Marseille et <strong>de</strong> Rome; elles nous ont beaucoup réjouis et<br />

nous ont donné lieu <strong>de</strong> bénir le Dieu <strong>de</strong> bonté qui a veillé sur vous et vous a conduit au<br />

port, et quel port que celui <strong>de</strong> Rome!<br />

Je partage votre sentiment: un peu <strong>de</strong> temporisation pour ce qui regar<strong>de</strong> lʹhabitation<br />

au Cercle est pru<strong>de</strong>nte; un peu plus tard, cette disposition se fera <strong>de</strong> soi, le Comité désirant<br />

lui‐même quʹelle se réalise.<br />

Relativement aux pouvoirs <strong>de</strong> confession, je serais porté à croire quʹil serait bien <strong>de</strong><br />

les laisser tels que les donnerait Mgr Tizzani; mais, en ce cas, je pourrais, (comme Supé‐<br />

rieur) vous prescrire <strong>de</strong> nʹen user pour la confession <strong>de</strong>s femmes quʹen cas urgents ou <strong>de</strong><br />

réelle nécessité; je vais, du reste, en causer <strong>avec</strong> M. Planchat.<br />

Je viens <strong>de</strong> le voir; il a, <strong>de</strong> lui‐même, énoncé un avis semblable au mien. Il est donc<br />

entendu que vous nʹuseriez <strong>de</strong> ces pouvoirs (en lʹespèce) que pour <strong>de</strong>s circonstances où<br />

dʹautres ne pourraient que difficilement vous suppléer.<br />

Nos enfants <strong>de</strong> première communion sont en retraite; priez pour eux, ils prieront<br />

aussi pour vous; quant à nous, vous le savez, nous nʹavons gar<strong>de</strong> dʹy manquer.<br />

M. Georges Coquerel est mala<strong>de</strong> assez sérieusement à Chaville, sans danger toute‐<br />

fois; il est content parmi nous. Affections à tous.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

1550 à M. <strong>de</strong> Lauriston<br />

Sur divers points <strong>de</strong> la vie communautaire.<br />

Vaugirard, 27 juin [1870]<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je viens <strong>de</strong> recevoir vos trois lettres, cʹest‐à‐dire une <strong>de</strong> vous, une <strong>de</strong> M. Chaverot et<br />

une <strong>de</strong> M. Streicher datée du 12 juin, bien que timbrée à Rome sur lʹenveloppe du 22. Je<br />

pense que cʹest une erreur <strong>de</strong> plume <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> M. Streicher.<br />

1481


Je pense, comme vous, quʹil est pru<strong>de</strong>nt dʹajourner lʹhabitation <strong>de</strong> M. Chaverot au<br />

Cercle jusquʹau moment où MM. Louis et Compans (le premier surtout) seront éloignés.<br />

Pour la direction spirituelle, les ff. seront libres <strong>de</strong> continuer à se confesser au r.p.<br />

Laurençot ou <strong>de</strong> sʹadresser à M. Chaverot; ce <strong>de</strong>rnier moyen sera évi<strong>de</strong>mment plus com‐<br />

mo<strong>de</strong>, mais il est bon quʹils aient une certaine latitu<strong>de</strong>. Je pense quʹon fera bien néanmoins<br />

dʹobtenir du r.p. Laurençot quʹil veuille bien continuer à vous donner la petite retraite du<br />

mois.<br />

M. Audrin <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>avec</strong> une vive instance une autorisation qui lui suffise pour<br />

toucher les mandats à votre nom sur la poste. Il en a en retard dʹun mois.<br />

Je suis bien aise que lʹaffaire <strong>de</strong>s 10.000f soit bien terminée; M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourni‐<br />

quet], ainsi que nous, en aura le cœur plus tranquille.<br />

1551 à M. dʹArbois<br />

Nouvelles <strong>de</strong>s Œuvres <strong>de</strong> Paris et <strong>de</strong> Rome. Les vocations <strong>de</strong> jeunes frères (et <strong>de</strong>s autres): le rôle du supérieur est<br />

d’encourager. Neuvaine pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong> la pluie.<br />

Chaville, 28 juin 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous sais si occupé à Angers que je ne mʹétonne guère que vous nʹayez point <strong>de</strong><br />

temps pour nous écrire. De notre côté, nous ne manquons pas <strong>de</strong> travail et, <strong>avec</strong> celui que<br />

nous pouvons faire, nous en laissons beaucoup dʹinachevé ou <strong>de</strong> non fait.<br />

Je ne sais pas si M. <strong>de</strong> Varax est arrivé aux eaux; <strong>de</strong>puis son départ dʹici, il y aura<br />

<strong>de</strong>main huit jours, je nʹai reçu <strong>de</strong> lui aucune nouvelle; il entrait bien dans ses plans, je<br />

crois, <strong>de</strong> rester quelques jours à Montcoy chez sa mère; il semble croire quʹun repos un peu<br />

prolongé lui est nécessaire; puisse son absence suffire pour le remettre et nʹêtre néanmoins<br />

pas trop préjudiciable aux choses quʹil laisse après lui.<br />

Dans ses entretiens <strong>avec</strong> moi sur le personnel dʹAngers, il mʹa communiqué les in‐<br />

quiétu<strong>de</strong>s que lui avaient causées les doutes <strong>de</strong> M. Moutier sur sa vocation. Je me plais à<br />

penser que ce <strong>de</strong>rnier prend quelques ennuis et dégoûts naturels dʹune vie laborieuse et<br />

assez monotone pour un absolu découragement; je lui écris ici une petite lettre pour lʹinvi‐<br />

ter à sʹen entretenir <strong>avec</strong> moi. Peut‐être y aurait‐il avantage, pour faire diversion à ces ma‐<br />

laises intérieurs, à le ramener près <strong>de</strong> nous en le faisant remplacer. Encouragez‐le, encou‐<br />

ragez aussi les autres, car cʹest là le grand rôle <strong>de</strong>s supérieurs; le chemin est ru<strong>de</strong> pour<br />

tous, il faut les soutenir et les consoler pour quʹils puissent arriver au terme. M. Perthuisot<br />

a besoin aussi dʹêtre soutenu; le surnaturel, en lui, nʹa pas encore jusquʹici bien surmonté le<br />

positif et le naturel; jʹespère, et M. <strong>de</strong> Varax comme moi croit quʹ<strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> persévé‐<br />

rance il méritera <strong>de</strong> Dieu la grâce qui le confirmera dans sa sainte vocation. Si on voyait<br />

quelque signe heureux sous ce rapport, lui faire faire un pas dans lʹavancement aux ordres<br />

serait pour lui un grand encouragement; M. Pessard a écrit à M. <strong>de</strong> Varax que, si nous y<br />

voyions convenance, M gr Freppel nʹy ferait nulle objection. Tâchez <strong>de</strong> trouver quelques<br />

moments pour donner un peu <strong>de</strong> direction à chacun tour à tour.<br />

Je crains que vous ne vous épuisiez à trouver <strong>de</strong>s ressources; il serait mieux <strong>de</strong> ne<br />

payer que ce qui est exigible et ne peut être différé; je pourrais vous donner, comme légère<br />

assistance <strong>de</strong> la Maison‐Mère, 500f, si cet ai<strong>de</strong> minime, joint à dʹautres, pouvait vous être<br />

utile.<br />

1482


Jʹai reçu hier <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> Rome; nos ff. vont bien, M. Chaverot a fait un très<br />

bon voyage et a été fort bien accueilli; il va être posé comme aumônier en titre <strong>de</strong> la légion<br />

romaine et reconnu comme tel officiellement. Lʹaffaire du déficit est convenablement ré‐<br />

glée, sans nul vernis mauvais pour personne. Ces détails satisfaisants sont contrebalancés<br />

ici par lʹétat <strong>de</strong> santé <strong>de</strong> M. Coquerel qui est tombé sérieusement mala<strong>de</strong>, <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s indices<br />

inquiétants; prions Dieu dʹépargner notre faiblesse et <strong>de</strong> nous ai<strong>de</strong>r à porter ces épreuves.<br />

M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] part <strong>de</strong> Rome le 30 juin; il nous arrivera, je pense, le 4<br />

ou le 5 juillet.<br />

Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> vous recomman<strong>de</strong>r nos enfants <strong>de</strong> première communion qui<br />

sont en retraite; M. Planchat, aidé <strong>de</strong> M. Leclerc en congé <strong>de</strong> repos, les dirige dans les exer‐<br />

cices; M. dʹHulst fait les instructions.<br />

Ci‐joint une lettre pour M. Ginet, que jʹengage à y répondre sans retard.<br />

Adieu, mon bien bon ami et fils en N.S., nous vous verrons revenir <strong>avec</strong> gran<strong>de</strong> joie;<br />

la maison <strong>de</strong> Vaugirard, privée à la fois <strong>de</strong> votre présence et <strong>de</strong> celle <strong>de</strong> M. Chaverot, est<br />

en grand veuvage; tous vous assurent <strong>de</strong> leurs sentiments bien dévoués.<br />

Jʹadresse <strong>de</strong> mon côté, ici, toutes sortes dʹaffections à nos frères dʹAngers qui, je nʹen<br />

doute pas, ont été heureux <strong>de</strong> vous revoir parmi eux; jʹy suis aussi moi‐même <strong>de</strong> cœur et<br />

dʹesprit.<br />

Votre tout dévoué et affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P.S. Nous commençons une secon<strong>de</strong> neuvaine pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong> la pluie; je pense<br />

que vous priez aussi à Angers à cette intention; ici et ailleurs, la prière est Pater, Ave, trois<br />

invocations Cor Jesu, une Cor Mariæ.<br />

1552 à M. Chaverot<br />

Première communion à l’Orphelinat <strong>de</strong> Vaugirard.<br />

Vaugirard, 1er juillet 1870<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Hier, 30 juin, nos enfants <strong>de</strong> Vaugirard ont fait leur première communion; ils pa‐<br />

raissaient être généralement bien disposés; ils avaient suivi en <strong>de</strong> bonnes conditions la re‐<br />

traite excellente que M. dʹHulst, assisté <strong>de</strong> M. Planchat et <strong>de</strong> M. Leclerc en congé <strong>de</strong> repos,<br />

leur a donnée.<br />

M. Taillandier a dit la messe <strong>de</strong> communion le matin, à 8h.; un bon nombre <strong>de</strong> mè‐<br />

res ont communié <strong>avec</strong> leurs enfants; la journée, en ensemble, a été excellente; M. dʹHulst,<br />

le soir, a parfaitement parlé; il était heureux, mʹa‐t‐il répété plusieurs fois, <strong>de</strong> concourir à<br />

une première communion si bien préparée; nous avons répondu que cʹétait vous qui, pa‐<br />

tiemment et sans vous lasser <strong>de</strong> la légèreté <strong>de</strong> ces enfants, les aviez cultivés et préparés <strong>de</strong><br />

longue main. Dieu bénit votre travail puisque cette sainte œuvre, si capitale dans lʹorphe‐<br />

linat, semble sʹêtre dignement accomplie; je vous donne ces détails afin que vous remer‐<br />

ciiez le Seigneur; lʹhomme sème et arrose, Dieu donne lʹaccroissement. Puisse‐t‐il aussi bé‐<br />

nir vos travaux à Rome, vous inspirer, vous conduire et vous assister par sa grâce.<br />

1483


Nos ff. vont bien en ensemble, sauf M. Coquerel qui est alité à Chaville, sans danger<br />

apparent toutefois; les fatigues <strong>de</strong> Rome, du voyage et du changement <strong>de</strong> climat semblent<br />

en être les seules causes; il se plaît parmi nous.<br />

Nos enfants ont prié hier pour vous et pour les ff. <strong>de</strong> Rome; aujourdʹhui, ils sont en<br />

promena<strong>de</strong>.<br />

Je pense que nos trois séminaristes <strong>de</strong> St‐Sulpice [Leclerc, Pattinote, Ad. Lainé] se‐<br />

ront ordonnés dans le courant <strong>de</strong> juillet; il est probable que je vais vous envoyer une <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>, à faire valoir près <strong>de</strong> la Sacrée Congrégation <strong>de</strong>s Rites, pour obtenir lʹextra tempora<br />

et, pour M. Lainé, une dispense dʹâge pour sept mois qui lui manqueront.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Tendres affections à tous, au f. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] en particulier.<br />

1553 à M. Chaverot<br />

Dispense <strong>de</strong>mandée pour plusieurs ordinations sacerdotales.<br />

Vaugirard, 1er juillet 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie ci‐joint, ainsi que je vous lʹannonçais ce matin par une autre lettre,<br />

une supplique que jʹadresse à la Sacrée Congrégation <strong>de</strong>s Rites, afin dʹobtenir: 1° permis‐<br />

sion pour nos ff. Leclerc, Pattinote et Lainé dʹêtre ordonnés extra tempora pour le sacerdoce;<br />

2° dispense dʹâge pour M. Lainé, auquel il manque sept mois pour le terme fixé ordinai‐<br />

rement.<br />

Tâchez que la chose marche un peu vite; le r.p. Brichet pourra vous renseigner et<br />

vous ai<strong>de</strong>ra certainement sʹil le peut, comme je le crois.<br />

Je nʹai pas indiqué, dans la supplique, en quels diocèses nos ff. sont nés: MM. Le‐<br />

clerc et Pattinote sont <strong>de</strong> Paris, M. Lainé du diocèse <strong>de</strong> Coutances; tous les trois nʹont fran‐<br />

chi les ordres inférieurs à la prêtrise quʹ<strong>avec</strong> lʹautorisation <strong>de</strong>s Ordinaires qui les ont cédés<br />

à notre Congrégation.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1554 à M. Caille<br />

Répartition <strong>de</strong>s tâches à Amiens. Voyage <strong>de</strong> M. Myionnet pour bien l’établir.<br />

Vaugirard, 2 juillet 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Lantiez, dans une <strong>de</strong> ses <strong>de</strong>rnières lettres, tout en me rendant un compte satis‐<br />

faisant à certains égards <strong>de</strong> la situation <strong>de</strong> vos œuvres, me marquait que, parfois, quelques<br />

malentendus se manifestaient entre vous et M. Trousseau, faute, sans doute, dʹavoir établi<br />

les emplois dʹune façon assez précise. Ne pouvant, à distance, me bien rendre compte <strong>de</strong><br />

cette difficulté et <strong>de</strong>s gênes quʹelle peut vous causer, je crois bien faire, pour assurer votre<br />

tranquillité à tous, dʹenvoyer M. Myionnet vous rendre une visite lundi prochain; il arrive‐<br />

1484


a donc dans la matinée à Amiens et reviendra le soir même à Vaugirard. Il me semble que<br />

M. Lantiez eût pu régler lui‐même <strong>avec</strong> vous cette petite affaire, mais le voyage dʹAmiens<br />

est assez praticable pour que je nʹaie pas hésité à prendre ce moyen à défaut du premier<br />

qui eût été plus simple encore.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1555 à M. Maignen<br />

MLP. a le désir sincère <strong>de</strong> venir en ai<strong>de</strong> à l’œuvre <strong>de</strong> Nazareth.<br />

2 juillet [1870] ‐ Visitation<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Je prends bien part aux difficultés que vous créent votre isolement et lʹindisposition<br />

<strong>de</strong> M. [Auguste] Faÿ; je vais chercher sans délai quels moyens peuvent me rester pour<br />

vous ai<strong>de</strong>r; je dis peuvent me rester, car Chaville est sans économe ni surveillant le plus<br />

souvent, Vaugirard sans aumônier, Amiens presque en même pénurie, M. Lantiez, fatigué,<br />

ne couvrant pas la position; jʹai néanmoins un sincère désir <strong>de</strong> vous donner soulagement.<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Le Conseil nʹaura pas lieu lundi, M. Myionnet étant obligé dʹaller à Amiens, à cause<br />

<strong>de</strong> malentendus entre M. Caille et M. Trousseau. Nous tiendrons le Conseil mardi, si la<br />

fête nous en laisse la possibilité, ou mercredi autrement. Avertissez‐en M. Paillé.<br />

1556 à M. dʹArbois<br />

Conseils pour le remplacement provisoire du Supérieur d’Angers. Nouvelles <strong>de</strong>s frères. M. Lantiez semble <strong>de</strong>voir<br />

faire défaut. Mission du Supérieur: suivre et soutenir ses frères.<br />

Chaville, 6 juillet 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu votre bonne et longue lettre du 2 <strong>de</strong> ce mois; je crains dʹy répondre briève‐<br />

ment plus que je ne voudrais, étant assez encombré dʹarriéré en suite <strong>de</strong>s fêtes, <strong>de</strong> la pre‐<br />

mière communion et confirmation <strong>de</strong> nos enfants et, hier, <strong>de</strong> la fête du Sacré Cœur. Tout<br />

sʹest passé dʹune manière satisfaisante, nous nʹavons quʹà en louer Dieu.<br />

Je le remercie aussi <strong>de</strong> tout ce que vous faites à Angers pour soutenir à la fois la<br />

communauté, les œuvres et pourvoir encore aux charges du passé. Les 2.000f qui resteront<br />

dus à N.D. <strong>de</strong>s Champs, <strong>avec</strong> le délai qui vous est laissé, ne paraîtront pas, je lʹespère, une<br />

grosse charge à M. <strong>de</strong> Varax. Je reçois (avant‐hier, je crois) une lettre <strong>de</strong> lui; il nʹest arrivé à<br />

Bagatz que le 28 juin, il se trouve assez bien, je crains un peu quʹil ne juge pas son repos<br />

assez long sʹil sʹarrête au 30 <strong>de</strong> ce mois; il ne mʹen dit rien toutefois, mais je le présume par<br />

quelques mots quʹil mʹa dit ici sur lʹimportance quʹil verrait pour lui à prendre part au<br />

Congrès <strong>de</strong> Versailles436 ; je regretterais quʹil différât tant à reprendre sa position à Angers,<br />

436<br />

Il s’agit ici du Congrès où fut décidée la fondation <strong>de</strong> l’Union <strong>de</strong>s Directeurs <strong>de</strong>s Associations ouvrières catholiques, sous la prési<strong>de</strong>nce<br />

<strong>de</strong> Mgr <strong>de</strong> Ségur.<br />

1485


où un supérieur est bien nécessaire. Espérons que tout sʹarrangera pour le mieux. Je ne<br />

vois nul inconvénient à ce que vous alliez vous‐même à ce Congrès si M. <strong>de</strong> Varax, par ses<br />

retards, ne prolonge plus quʹil nʹest désirable votre retour parmi nous. Nous sentons<br />

gran<strong>de</strong>ment votre absence, et elle nʹest supportable quʹà la condition dʹêtre fort limitée.<br />

Je ne vois rien <strong>de</strong> bien neuf à Vaugirard, M. Barthélemy [Marchand] y donne son<br />

ai<strong>de</strong> <strong>de</strong>puis quinze jours et montre bonne volonté. Dalstein ne nous restera pas, sa famille<br />

sʹest liguée pour lʹentraîner, il a cédé; ce sera une difficulté pour les classes.<br />

Nous ne recevons aucune nouvelle <strong>de</strong> M. Boucault; si vous <strong>de</strong>viez tar<strong>de</strong>r plus que<br />

jusquʹau 18 (jour que vous proposiez à notre entière satisfaction), ce pourrait être un em‐<br />

barras pour les arrangements à prendre <strong>avec</strong> lui, car il pourrait nous presser <strong>de</strong> les<br />

conclure et jʹaimerais ne les faire quʹ<strong>avec</strong> vous qui avez suivi <strong>de</strong> près lʹaffaire. Jʹaimerais<br />

que, doucement, vous interrogiez M. <strong>de</strong> Varax sur ses désirs, relativement à son retour, en<br />

lui disant les raisons qui vous faisaient entrevoir le 30 comme le terme <strong>de</strong> son absence. M.<br />

Henry [Piquet] sʹest résigné à attendre aussi le retour <strong>de</strong> M. Boucault.<br />

M. Charrin est fatigué; le gros <strong>de</strong> la tâche pèse sur lui. Je ne sais pas au juste où en<br />

sont les travaux.<br />

Tâchez <strong>de</strong> voir et <strong>de</strong> confirmer nos ff. dʹAngers; ne pourriez‐vous employer M. Boi‐<br />

ry à débrouiller les comptes? Je le crois assez discret. Jugez la chose toutefois, je ne la vois<br />

que <strong>de</strong> loin.<br />

Je tâcherai <strong>de</strong> donner M. [Adolphe] Lainé à M. <strong>de</strong> Varax, mais nous aurons <strong>de</strong>s dif‐<br />

ficultés bien gran<strong>de</strong>s pour pourvoir à tout; il paraît <strong>de</strong> plus en plus assuré que M. Lantiez<br />

nous fera défaut; le poste dʹAmiens sera donc à pourvoir, et comment? Nous ne voyons<br />

rien, absolument rien, prions Dieu <strong>de</strong> nous inspirer. Cette communication est pour vous<br />

seul.<br />

Jʹavais écrit à M. Moutier une lettre affectueuse, il ne mʹa rien répondu; peut‐être<br />

quʹaprès sʹêtre entretenu <strong>avec</strong> vous, il sera mieux disposé.<br />

Je crains que les vacances entières pour M. Boiry et M. Perthuisot, passées à Cha‐<br />

ville, ne leur paraissent longues; nʹy aurait‐il pas lieu <strong>de</strong> partager cette durée? Pour M.<br />

Perthuisot dʹailleurs, sa présence nʹest‐elle pas nécessaire à N.D. <strong>de</strong>s Champs?<br />

Je crois que nous enverrons un séminariste, peut‐être <strong>de</strong>ux, à Angers au retour <strong>de</strong>s<br />

vacances; je nʹai encore rien <strong>de</strong> clair. Jʹapprouve votre proposition pour les dépenses <strong>de</strong> M.<br />

Boiry; je vais donc joindre ici seulement les 500f pour la <strong>de</strong>tte <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong>s Champs.<br />

Je nʹai pas le moindre doute sur lʹutilité <strong>de</strong> votre retour à Vaugirard; quant aux<br />

quelques petits dissentiments dont vous me parlez, je nʹy vois nulle gravité et je crois<br />

quʹils sont plutôt <strong>de</strong>s malentendus que <strong>de</strong>s défauts dʹaccord; dʹailleurs, on ne saurait ja‐<br />

mais éviter quelques supports, même entre frères; acceptons donc dʹavance les conditions<br />

<strong>de</strong> toutes les associations humaines.<br />

Adieu, mon bien cher ami, je vous recomman<strong>de</strong> encore nos ff.; les suivre et les sou‐<br />

tenir est notre première obligation après celle du soin <strong>de</strong> nous‐mêmes. Tous vous assurent<br />

<strong>avec</strong> moi <strong>de</strong> leur tendre affection en N.S.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

Je joins ici <strong>de</strong>s pièces arrivées pour M. Ginet.<br />

M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] est arrivé le 4, lundi <strong>de</strong>rnier, fatigué seulement; le repos<br />

le remettra.<br />

M. Chaverot est bien posé à Rome comme aumônier.<br />

1486


1557 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Conseils pour parfaire l’instruction <strong>de</strong> son fils Richard. Sollicitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> MLP. pour la famille <strong>de</strong> sa bienfaitrice.<br />

Vaugirard, 7 juillet 1870<br />

Madame la Marquise,<br />

Je mʹassocie à tous vos sentiments et à ceux <strong>de</strong> Madame votre mère touchant lʹave‐<br />

nir <strong>de</strong> votre bien cher fils. Pour le moment présent, il semble quʹun peu <strong>de</strong> repos lui est<br />

nécessaire pour remettre ses forces un peu lassées; une fois bien refait, il reviendra <strong>de</strong> lui‐<br />

même aux étu<strong>de</strong>s dont il sent heureusement la véritable utilité. Peut‐être quelques lectures<br />

bien choisies contribueraient à accroître ce goût <strong>de</strong>s choses <strong>de</strong> lʹesprit. Le r.p. Olivaint, qui<br />

le connaît bien, et aussi peut‐être M. Després, son professeur, pourraient indiquer les ou‐<br />

vrages qui, tout ensemble, lʹintéresseraient et lʹinstruiraient. Vous pourriez dʹailleurs, Ma‐<br />

dame, obtenir <strong>de</strong> ce cher fils quʹil réservât pour le soir les ouvrages qui seraient <strong>de</strong> délas‐<br />

sement et quʹil pourrait vous lire à la veillée, en famille. Puisquʹil doit un jour aller en Ita‐<br />

lie, un bon ouvrage sur ce pays lui donnerait <strong>de</strong>s connaissances qui seraient une prépara‐<br />

tion pour son excursion future.<br />

Il va sans dire que je nʹoublie point la neuvaine qui se fait, moitié par moi et moitié<br />

par un <strong>de</strong> nos prêtres; jʹai la confiance que cet acte <strong>de</strong> foi et <strong>de</strong> piété, désiré par vous, sera<br />

agréable à Dieu; les bonnes œuvres multipliées attirent lʹabondance <strong>de</strong>s grâces célestes, le<br />

Seigneur ne pouvant <strong>de</strong>meurer en reste <strong>avec</strong> sa créature. Jʹai reçu aujourdʹhui les timbres<br />

pour les honoraires.<br />

Nʹy aurait‐il donc aucun moyen <strong>de</strong> rendre votre isolement moins profond à la cam‐<br />

pagne? Cette bonne cousine si dévouée, que jʹai rencontrée chez vous souvent, ne pour‐<br />

rait‐elle passer <strong>avec</strong> vous une partie <strong>de</strong> la saison, ou bien quelque autre qui serait libre et<br />

vous serait agréable ainsi quʹà votre cher entourage? Ou bien encore un aumônier un peu<br />

vieux, mais aimable et <strong>de</strong> bonne société, qui resterait chez lui à ses heures, se promènerait<br />

parfois <strong>avec</strong> votre cher fils et animerait un peu les temps <strong>de</strong>s repas et <strong>de</strong>s soirées; ou bien<br />

enfin <strong>de</strong>ux ou trois amis, bien choisis, <strong>de</strong> votre cher fils, qui passeraient quelques semaines<br />

<strong>avec</strong> lui? Ces imaginations, je le sais, sont vite écloses sur le papier, mais leur réalisation<br />

suscite cent objections qui font tout évanouir; votre sollicitu<strong>de</strong>, si ingénieuse à chercher<br />

tout ce qui pourrait être utile ou aimable pour votre cher enfant, nʹa pas besoin quʹon lui<br />

suggère les moyens dʹy parvenir.<br />

Pardonnez‐moi donc, Madame, ces quelques suppositions inspirées par la vive<br />

sympathie que jʹéprouve en tout ce qui touche vous et votre chère famille. Il est un côté<br />

par lequel je serai toujours sûr <strong>de</strong> ne pouvoir me tromper, cʹest le recours à Dieu; <strong>de</strong> toute<br />

mon âme donc, je le conjure <strong>de</strong> donner, à vous et à votre maison, sa bénédiction et sa paix;<br />

puisse‐t‐Il conduire par la main votre cher enfant et lui servir <strong>de</strong> père; et puisse aussi la Ste Vierge, appui <strong>de</strong> toutes les mères, vous assister dans votre gran<strong>de</strong> tâche, vous la rendre <strong>de</strong><br />

plus en plus douce en accroissant les aimables qualités <strong>de</strong> votre cher fils, en même temps<br />

quʹelle lʹornera <strong>de</strong> toutes les vertus chrétiennes. Cʹest le vœu <strong>de</strong><br />

Votre très respectueux serviteur et dévoué ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Mes respects bien empressés, je vous prie, à Madame dʹHurbal, et mes affectueux<br />

sentiments à votre bien cher fils.<br />

1487


1558 à M. Trousseau<br />

Congrès <strong>de</strong> Versailles pour les Directeurs d’œuvres. Conseils d’union <strong>avec</strong> M. Caille.<br />

Chaville, 12 juillet 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je ne mʹopposerai pas à ce que vous assistiez à la réunion <strong>de</strong>s Directeurs dʹŒuvres<br />

à Versailles si, <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> MM. Lantiez et Caille, vous trouvez que cette absence ne<br />

nuira pas beaucoup à votre maison et à vos jeunes gens; autrement, comme <strong>de</strong>ux ou trois<br />

<strong>de</strong> nos ff. se rendront à cette assemblée, vous seriez très exactement informé <strong>de</strong> ce qui sʹy<br />

sera passé.<br />

Je vous prie <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à M. Caille et <strong>de</strong> me dire sʹil a entendu parler du jeune<br />

abbé Helluin qui mʹavait, à mon <strong>de</strong>rnier voyage à Amiens, manifesté fortement le désir<br />

dʹentrer dans notre Congrégation. Est‐il à Amiens? A‐t‐il pris domicile chez vous? Est‐il<br />

toujours dans les mêmes intentions? Sa santé continue‐t‐elle à sʹaffermir? Enfin, sʹil veut<br />

toujours être <strong>de</strong>s nôtres, ne conviendrait‐il pas <strong>de</strong> lʹenvoyer à la fête <strong>de</strong> St Vincent <strong>de</strong> Paul?<br />

M. Caille ne pourrait‐il sʹéchapper et venir aussi à cette fête?<br />

Je vous recomman<strong>de</strong> toujours dʹaimer M. Caille, dʹêtre respectueux, charitable, pa‐<br />

tient, conciliant <strong>avec</strong> lui. Les œuvres dʹAmiens sont siennes absolument; elles lui doivent<br />

tout et sont le fruit du travail <strong>de</strong> toute sa vie; ne mérite‐t‐il pas <strong>de</strong> grands égards et une<br />

sincère affection <strong>de</strong> notre part? En pensant à cela et à ses qualités si éminentes, vous sau‐<br />

rez, jʹaime à le penser, ce que le Seigneur <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> vous, et vous le ferez cordialement.<br />

Votre ami et Père affectionné en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1559 à M. dʹArbois<br />

Epreuves multipliées du moment. M. Lantiez pense entrer chez les Jésuites: MLP. s’abandonne à la volonté du<br />

Seigneur. Nouvelles <strong>de</strong>s Œuvres. Les frères ont besoin d’être suivis spirituellement.<br />

Chaville, 12 juillet 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je pense <strong>avec</strong> vous quʹil est difficile, supposé le retour <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax pour le 8 ou 9<br />

août à Angers, que vous délaissiez la communauté et les œuvres pour un temps trop long;<br />

nous <strong>de</strong>vrions donc nous résigner à ce que votre arrivée parmi nous fût différée jusquʹau<br />

24 ou 25 <strong>de</strong> ce mois, ou même huit jours encore plus tard, si nous ne sommes pas pressés<br />

gran<strong>de</strong>ment par M. Boucault comme on peut le craindre. Jusquʹici, nous nʹentendons pas<br />

parler <strong>de</strong> lui. Ce sera une peine réelle et sentie par tous <strong>de</strong> ne pas vous avoir <strong>avec</strong> nous à la<br />

fête <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul, où nous serons peu forts en nombre et le cœur moins dilaté que<br />

<strong>de</strong> coutume. Cʹest aussi un vrai détriment pour Vaugirard dʹêtre si longtemps sans direc‐<br />

tion suivie, jʹen éprouve pour ma part un regret bien vif; <strong>de</strong>puis un certain temps, les<br />

épreuves brisantes, les causes <strong>de</strong> souffrance pour notre petite Congrégation se succè<strong>de</strong>nt<br />

presque journellement et me causent une tristesse contre laquelle je lutte <strong>avec</strong> la grâce <strong>de</strong><br />

Dieu et en désirant toujours me conformer à son adorable volonté, mais non sans gémis‐<br />

sement intérieur.<br />

M. <strong>de</strong> Varax mʹécrit quʹil se sent mieux, mais quʹil est loin encore dʹêtre fort; il dé‐<br />

sespérait, en partant pour les eaux, me dit‐il, <strong>de</strong> pouvoir reprendre le poste dʹAngers; il<br />

semble aujourdʹhui plus rassuré; je pense que la perspective dʹavoir <strong>avec</strong> lui M. Lainé, aux<br />

capacités duquel il a une gran<strong>de</strong> confiance, concoure, je crois, à lui donner plus dʹassu‐<br />

1488


ance. Cʹest une gran<strong>de</strong> difficulté que dʹavoir un corps frêle et souvent impuissant; les<br />

âmes, même énergiques, se sentant si mal servies, sont contraintes dʹêtre timi<strong>de</strong>s et <strong>de</strong><br />

douter dʹelles‐mêmes.<br />

Jʹai reçu <strong>de</strong> M. Moutier une lettre polie, mais énonçant une décision très nette et très<br />

arrêtée pour sa défection au mois <strong>de</strong> septembre. Je lui répondrai, sans grand espoir <strong>de</strong> rien<br />

gagner; son esprit se réfugie volontiers dans une obstination muette dont on ne peut rien<br />

obtenir; prions pour lui, Dieu tient les cœurs dans sa main.<br />

Une autre défection <strong>de</strong>vient <strong>de</strong> plus en plus imminente et nous est même notifiée,<br />

cʹest celle qui, entre toutes, pouvait nous être la plus douloureuse puisquʹelle atteint la<br />

Communauté dans une <strong>de</strong> ses premières bases, dans un <strong>de</strong> ses membres anciens, <strong>de</strong> ses<br />

agents les plus actifs, qui a mis la main à tout et dont il eût paru impossible quʹon pût se<br />

séparer jamais, sinon par la mort; ce coup nous est préparé et nous atteindra bientôt; lʹor‐<br />

dination <strong>de</strong> nos jeunes frères Sulpiciens est le <strong>de</strong>rnier terme qui nous est marqué, il faudra<br />

courber la tête; Seigneur, que votre volonté se fasse et non la nôtre! Je nʹai pas besoin <strong>de</strong><br />

vous dire dʹoù nous viendra cette peine, ou plutôt dʹoù elle nous est déjà venue, vos re‐<br />

gards se tournent vers Amiens. Il [M. Lantiez] déclare quʹil entre chez les rr.pp. Jésuites et<br />

que les choses semblent être réglées.<br />

Je crois quʹil sera bien <strong>de</strong> ramener <strong>avec</strong> vous M. Boiry; tâchez <strong>de</strong> lʹoccuper.<br />

Votre réclamation à lʹUnion <strong>de</strong> lʹOuest me semble motivée; il ne sʹagissait pas seu‐<br />

lement dʹun titre nobiliaire, mais aussi dʹune imputation <strong>de</strong> supercherie et dʹune sorte <strong>de</strong><br />

mensonge; la forme du redressement me semble aussi mesurée et convenable.<br />

Pour la musique instrumentale, je mʹétonne que M. <strong>de</strong> Varax y adhère, car je sais<br />

son opinion très arrêtée contre cette sorte dʹexercice dans nos patronages, et jʹai vu une let‐<br />

tre longue, motivée, pressante par laquelle il dissuadait M. Derny <strong>de</strong> former une musique<br />

<strong>de</strong> ce genre à S te ‐Anne; mais, sʹil a cru <strong>de</strong>voir donner son assentiment, je nʹai rien à dire,<br />

<strong>de</strong>s convenances locales et autres pouvant justifier en certains cas ce quʹen dʹautres on<br />

pourrait regar<strong>de</strong>r comme dangereux.<br />

Je vous recomman<strong>de</strong> toujours le soin <strong>de</strong> nos ff.; plus nous marchons, plus je mʹas‐<br />

sure quʹils ont grand besoin dʹêtre suivis spirituellement; tâchez <strong>de</strong> confirmer M. Perthui‐<br />

sot doucement, affectueusement, sans pourtant que nous semblions avoir besoin <strong>de</strong> lui;<br />

lʹorgueil nʹest pas un lien soli<strong>de</strong>.<br />

Priez bien pour tous, pour Chaville en particulier. M. Coquerel est convalescent,<br />

mais M. Vernay vient <strong>de</strong> sʹaliter, non pour la même maladie, mais <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s indices <strong>de</strong> fiè‐<br />

vre typhoï<strong>de</strong>. Cʹest la quatrième maladie qui, sans interruption, frappe cette maison.<br />

Tendres affections à tous, à vous tout particulièrement.<br />

Votre ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1560 à M. Chaverot<br />

Voie à suivre pour un frère <strong>de</strong> St‐Vincent‐<strong>de</strong>‐Paul. Nouvelles <strong>de</strong> la Communauté. Préparatifs <strong>de</strong> fête.<br />

Vaugirard, 15 juillet 1870<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Jʹai reçu <strong>avec</strong> une vive satisfaction vos <strong>de</strong>ux lettres ensemble, particulière et géné‐<br />

rale, lʹune sur votre personne, lʹautre concernant vos actes extérieurs.<br />

1489


Pour ce qui regar<strong>de</strong> la première, je rends grâces à Dieu qui vous met dans la dispo‐<br />

sition <strong>de</strong> le servir humblement et <strong>avec</strong> zèle, travaillant à vous sanctifier et à faire autour <strong>de</strong><br />

vous tout le bien dont chaque jour vous donnera lʹoccasion. Cʹest bien là la véritable voie<br />

où le Seigneur vous a mis, en vous plaçant sous la conduite <strong>de</strong> son grand serviteur, S t Vin‐<br />

cent <strong>de</strong> Paul. Lʹétu<strong>de</strong> particulière que nous faisons présentement <strong>de</strong> sa vie et <strong>de</strong> ses vertus<br />

nous montre tout ce quʹil nous reste à faire pour répondre aux <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> sa divine sa‐<br />

gesse à notre égard; allons donc en avant, sans nous décourager <strong>de</strong> notre peu dʹavance‐<br />

ment. Pour votre part, cher enfant, je crois que vous êtes en bon chemin; je vous recom‐<br />

man<strong>de</strong> seulement dʹaller ron<strong>de</strong>ment, sans trop dʹhésitation, <strong>de</strong> scrupules, <strong>de</strong> retours in‐<br />

quiets sur vous‐même; là serait votre danger si vous nʹy veilliez attentivement; suivez le<br />

conseil du r.p. Laurençot, point <strong>de</strong> mortifications hasardées; vous avez à supporter la fati‐<br />

gue <strong>de</strong>s chaleurs et <strong>de</strong>s inconvénients dʹun nouveau climat, prenez cette mortification que<br />

Dieu vous impose, gar<strong>de</strong>z vos forces pour le service du prochain et tâchez, en prenant<br />

conseil <strong>de</strong> ceux qui rési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>puis longtemps à Rome, <strong>de</strong> suivre le régime qui convient le<br />

mieux pour vous prémunir contre les acci<strong>de</strong>nts <strong>de</strong> santé qui atteignent souvent les étran‐<br />

gers.<br />

Je crois bien que vous faites sagement, tout en étant aimable, obligeant <strong>avec</strong> tous, <strong>de</strong><br />

gar<strong>de</strong>r votre position <strong>de</strong> religieux, ne faisant pas <strong>de</strong> camara<strong>de</strong>ries <strong>avec</strong> les officiers ni <strong>avec</strong><br />

personne.<br />

Je recomman<strong>de</strong> à vos soins notre <strong>de</strong>man<strong>de</strong> dʹextra tempora; il nous serait bien <strong>de</strong><br />

lʹavoir bientôt, mais je sais quʹon ne peut presser jusquʹà lʹimportunité; M. lʹabbé Clerc est,<br />

je crois, un bon intermédiaire; il nʹy a pas dʹinconvénient à le voir toutes les fois que vous<br />

croirez pouvoir ainsi avancer lʹaffaire. Sʹil y a quelques frais, on peut les retenir sur la<br />

somme que votre administration <strong>de</strong>s Cercles doit pour avances faites par M. Charrin.<br />

Nous nous préparons ici à la fête <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul; nous tâcherons quʹelle soit<br />

une fête pieuse avant tout. Nous y prierons beaucoup pour notre petite communauté <strong>de</strong><br />

Rome. M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] se remet <strong>de</strong> ses fatigues; on lʹa partout accueilli <strong>avec</strong><br />

gran<strong>de</strong> joie. Nous avons dû donner M. Guillot au Cercle <strong>de</strong> M. Maignen; Vaugirard, ainsi<br />

amoindri, a dépouillé à son tour Chaville en lui enlevant M. Audrin; les instruments hu‐<br />

mains sont caducs, on nʹen peut user bien longtemps. M. Coquerel est en pleine convales‐<br />

cence; il pourra, je pense, reprendre sa place <strong>avec</strong> le reste <strong>de</strong>s ff. à la fête <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong><br />

Paul. M. Vernay qui, à son tour, était mala<strong>de</strong> à Chaville dʹune sorte <strong>de</strong> fièvre muqueuse,<br />

va mieux également. Cʹétait la quatrième maladie grave qui, sans interruption, affligeait<br />

Chaville; espérons que le Seigneur daignera se contenter présentement <strong>de</strong> cette expiation<br />

<strong>de</strong> nos péchés.<br />

Jʹai reçu <strong>de</strong> Nantes 600f pour le compte <strong>de</strong> M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] et je les ai re‐<br />

mis à Grenelle; je vais voir si, dans les actions que mʹa laissées M. Georges, il y a quelques<br />

coupons à toucher en juillet.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, nous parlons souvent <strong>de</strong>s ff. <strong>de</strong> Rome et nous prions<br />

surtout pour eux; ren<strong>de</strong>z‐nous la pareille, les temps sont difficiles et durs pour les<br />

Congrégations; <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z, aux pieds <strong>de</strong>s S ts Apôtres, que nous méritions, par notre dé‐<br />

vouement, une grâce définitive et abondante <strong>de</strong> confirmation.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1490


1561 à M. dʹArbois<br />

Quel avenir pour les Œuvres d’Angers ?<br />

15 juillet 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Le jeune domestique [Samson] est arrivé à bon port, il est provisoirement à Cha‐<br />

ville.<br />

M. Jouin, dʹAngers, qui mʹa écrit pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r que M. <strong>de</strong> Varax aille <strong>avec</strong> lui au<br />

Congrès <strong>de</strong> Versailles, mʹassure quʹil serait <strong>de</strong> retour <strong>avec</strong> lui à Angers pour le samedi 6<br />

août. Vous verrez, en ce cas, si vous ne <strong>de</strong>vez pas vous‐même revenir ici un jour plus tôt<br />

après le 25 <strong>de</strong> ce mois.<br />

La lettre ci‐jointe, que mʹécrit M. <strong>de</strong> Varax et que je vous prie <strong>de</strong> me renvoyer bien‐<br />

tôt <strong>avec</strong> vos observations, me laisse en doute sʹil pourra en effet reprendre ce poste; je crois<br />

quʹau fond il est loin <strong>de</strong> le désirer.<br />

M. Lantiez me manquant et M. <strong>de</strong> Varax se déclarant si peu fort, je ne sais si nous<br />

pourrons gar<strong>de</strong>r les œuvres dʹAngers. Que Dieu daigne nous conduire!<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1562 à M. dʹArbois<br />

Coup dʹœil sur les épreuves <strong>de</strong> lʹInstitut à la veille <strong>de</strong> la guerre. La défection du père Lantiez, suivie <strong>de</strong> plusieurs<br />

autres. Résignation et sagesse.<br />

Chaville, 20 juillet 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> lʹétu<strong>de</strong> attentive que vous avez faite <strong>de</strong>s observations et dispo‐<br />

sitions personnelles <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax. Une lettre que je reçois <strong>de</strong> lui mʹindique encore plus<br />

nettement lʹextrême répugnance quʹil aura à retourner à Angers et, conséquemment, le<br />

danger quʹil y aurait à lʹy renvoyer. Il en vient à considérer comme désirable la suppres‐<br />

sion, pour nous, <strong>de</strong> ce poste, et il pousse un gémissement douloureux en pensant quʹon<br />

pourra souhaiter ce retranchement, mais quʹon nʹaura pas le courage <strong>de</strong> lʹexécuter. Ce se‐<br />

rait, en effet, un acte grave et qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rait <strong>de</strong> grands ménagements. Mais nous sera‐t‐<br />

il possible sagement <strong>de</strong> lʹéviter?<br />

Hier, fête <strong>de</strong> St Vincent <strong>de</strong> Paul, jʹai reçu, par une lettre <strong>de</strong> M. Lantiez, lʹavis formel<br />

<strong>de</strong> sa retraite <strong>de</strong> chez nous et <strong>de</strong> sa volonté arrêtée et, je crois, acceptée dʹentrer chez les Jé‐<br />

suites; jʹai mis le sacrifice aux pieds <strong>de</strong> Dieu; cʹest le plus dur <strong>de</strong> ceux que jʹaie dû<br />

consommer <strong>de</strong>puis mon entrée en vie commune.<br />

Amiens est donc à pourvoir; si vous restiez à Angers, Vaugirard serait aussi dé‐<br />

pourvu, et cʹest le foyer <strong>de</strong> la famille; Grenelle, si faible en sa direction, a grand besoin <strong>de</strong><br />

surveillance, et Ste ‐Anne plus encore, et St ‐Charles et St ‐<strong>Jean</strong> également. Pouvons‐nous,<br />

dans les circonstances graves où nous allons nous trouver en temps dʹune terrible<br />

guerre437 , <strong>avec</strong> peu <strong>de</strong> recrutement probable (car la conscription, comme un immense filet,<br />

couvre et dépouille en ce moment toutes les familles), pouvons‐nous <strong>de</strong>meurer faibles et<br />

éparpillés à <strong>de</strong>s distances notables les uns <strong>de</strong>s autres, et ne faut‐il pas, au contraire, nous<br />

réunir autant que possible et nous fortifier au centre <strong>de</strong> la Congrégation? Je suppose quʹon<br />

437 La déclaration <strong>de</strong> guerre <strong>de</strong> la France à la Prusse avait été proclamée la veille, le 19.<br />

1491


mette M. Faÿ à Amiens, M. <strong>de</strong> Varax à Chaville, vous à Angers <strong>avec</strong> M. Lainé, que restera‐<br />

t‐il à Vaugirard pour ai<strong>de</strong>r à mon insuffisance dans la direction <strong>de</strong> lʹensemble du corps et<br />

<strong>de</strong> ses membres particuliers, pour faire à Vaugirard une force soutenante et réconfortante<br />

pour tous, en même temps quʹun moyen <strong>de</strong> surveillance pour toutes les œuvres groupées<br />

à Paris et qui, à commencer par Nazareth et par le Cercle, nʹont pas <strong>de</strong> direction sérieuse<br />

ni <strong>de</strong> supérieur proprement dit? Sacrifier Angers serait douloureux, mais il se pourrait que<br />

ce fût le seul vrai moyen <strong>de</strong> sauver la corporation, sinon peut‐être dʹune <strong>de</strong>struction abso‐<br />

lue, au moins dʹune langueur et dʹun appauvrissement peut‐être incurables.<br />

Pensez‐y <strong>de</strong>vant Dieu, la situation est grave; outre M. Lantiez, M. Henry [Piquet],<br />

M. Moutier, le jeune Pappaz, et presque sûrement les jeunes Dufour et Gérold nous quit‐<br />

tent ou nous quitteront bientôt. MM. Gresser et Michel Manque (<strong>de</strong> Chaville) ont la crainte<br />

fondée dʹêtre contraints par leurs familles, amoindries par les levées en masse, <strong>de</strong> retour‐<br />

ner près dʹelles; dʹautres sont peut‐être encore atteints à mon insu. Il y a là matière à ré‐<br />

flexion; sans trancher témérairement la question, il est sage <strong>de</strong> lʹexaminer <strong>de</strong>vant Dieu.<br />

Il me semble que, si vous êtes contraint <strong>de</strong> rester jusquʹau 27 pour la réception à<br />

faire à M gr Freppel, il serait bien que vous revinssiez tout <strong>de</strong> suite après, M. <strong>de</strong> Varax ayant<br />

promis dʹêtre <strong>de</strong> retour <strong>avec</strong> M. Jouin pour le samedi 6 août. Si on <strong>de</strong>vait se retirer défini‐<br />

tivement <strong>de</strong> ce poste, ce ne saurait être sans transition ni précaution; il faudrait toujours,<br />

ou que vous, ou que M. <strong>de</strong> Varax y retournassiez temporairement.<br />

Pour lʹaffaire <strong>de</strong> lʹatelier, rien ne presse du côté <strong>de</strong> M. Boucault puisque, <strong>de</strong>puis son<br />

départ, nous nʹavons pas eu un seul signe <strong>de</strong> vie <strong>de</strong> sa part; mais les travaux marchent,<br />

non sans frais à lʹatelier, les comptes sont arriérés; où en est‐on? Je nʹen sais rien, nʹayant<br />

pas pénétré dans la situation assez avant pour mʹen bien rendre raison.<br />

La fête <strong>de</strong> S t Vincent sʹest passée hier convenablement, M. le Supérieur du séminaire<br />

<strong>de</strong> Versailles chantant le matin la grandʹmesse, et M. Codant donnant le soir le panégyri‐<br />

que; les enfants et les ff. paraissent avoir été contents; les anciens <strong>de</strong> la famille avaient bien<br />

pourtant quelques soucis au fond du cœur, mais, dans lʹépreuve, nous gardons la<br />

confiance en Dieu et aussi une sincère soumission aux dispositions adorables <strong>de</strong> sa Sa‐<br />

gesse.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Mille affections à nos ff.<br />

P. S. Je pense que vous ramènerez <strong>avec</strong> vous M. Boiry. Si vous aviez besoin dʹargent<br />

pour votre voyage et pour celui <strong>de</strong> M. Boiry, écrivez‐le moi.<br />

1563 à M. Chaverot<br />

Réponse à la nouvelle <strong>de</strong> la définition <strong>de</strong> l’infaillibilité pontificale, communiquée par un télégramme du frère<br />

Streicher au père Hello: «Te Deum ‐ infaillibilité proclamée 18 juillet ‐ St Pierre gran<strong>de</strong> démonstration ‐ <strong>de</strong>ux<br />

non placet». Ne pas faire <strong>de</strong> pénitences indiscrètes.<br />

Chaville, 21 juillet 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je ne vous écris que <strong>de</strong>ux mots, retournant dans un quart dʹheure à Vaugirard.<br />

Nous avons reçu <strong>avec</strong> joie le télégramme, bien quʹil ne pût nous donner tous les détails<br />

que notre curiosité avi<strong>de</strong> eût désirés.<br />

1492


Jʹai lu attentivement vos communications <strong>de</strong> direction. Je mettrai <strong>de</strong>vant Dieu tous<br />

vos bons désirs et intentions. Je vous recomman<strong>de</strong> toujours <strong>de</strong> ne point faire <strong>de</strong> pénitence<br />

sans autorisation <strong>de</strong> votre directeur et <strong>de</strong> ne vous fatiguer quʹ<strong>avec</strong> discrétion, surtout dans<br />

la saison que nous traversons. Veillez aussi à la santé <strong>de</strong> tous, <strong>de</strong> M. Georges [<strong>de</strong> Lauris‐<br />

ton] particulièrement. Avez‐vous remercié vos bons parents <strong>de</strong> lʹenvoi quʹils mʹont fait <strong>de</strong>s<br />

400f? Ils se plaignaient que vous aviez beaucoup tardé à leur écrire.<br />

Il ne fallait pas empêcher M. Descemet <strong>de</strong> faire rectifier votre nom; cʹest là un <strong>de</strong> ces<br />

scrupules un peu trop minutieux comme je vous les ai reprochés souvent; un peu <strong>de</strong> lar‐<br />

geur et <strong>de</strong> ron<strong>de</strong>ur sans relâchement; tâchez <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r cette juste mesure.<br />

Mille affections à tous nos frères. Dites à M. Streicher que jʹai été content <strong>de</strong> sa let‐<br />

tre. Jʹattends toujours lʹextra tempora et la dispense dʹâge.<br />

Notre S t Vincent <strong>de</strong> Paul sʹest bien passée à Chaville. Grandʹmesse le matin par M. le<br />

Supérieur du séminaire <strong>de</strong> Versailles, et panégyrique lʹaprès‐midi par M. Codant.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1564 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

A propos d’un éventuel départ <strong>de</strong> son fils pour la guerre. L’éducation chrétienne qu’il a reçue <strong>de</strong>vrait garantir la<br />

«noblesse du cœur au milieu <strong>de</strong> l’épreuve».<br />

Vaugirard, 23 juillet 1870<br />

Madame la Marquise,<br />

Jʹentre dans toutes vos sollicitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> mère et <strong>de</strong> chrétienne, et je partage aussi vos<br />

sentiments relativement à cette guerre, en apparence bien redoutable; conjurons le Sei‐<br />

gneur pour quʹIl détourne ce fléau et quʹIl ne châtie pas trop sévèrement les iniquités si<br />

gran<strong>de</strong>s <strong>de</strong> notre temps. Beaucoup <strong>de</strong> familles gémissent en ce moment, privées <strong>de</strong> leurs<br />

enfants, <strong>de</strong> leurs soutiens; un bon nombre dʹentre eux, mariés, abandonnent leurs jeunes<br />

femmes et <strong>de</strong> tout jeunes enfants; ce sont là, dès le début, <strong>de</strong> bien douloureux sacrifices.<br />

Pour ce qui vous touche en particulier, Madame, je comprends bien vos alarmes.<br />

Cependant, en considérant votre sincère attachement à Dieu, votre désir si vrai <strong>de</strong> lui gar‐<br />

<strong>de</strong>r votre cher enfant, je ne puis me persua<strong>de</strong>r quʹen ces pénibles circonstances, le Bon<br />

Maître répon<strong>de</strong> à vos instantes prières par une épreuve, par un danger qui puisse être fa‐<br />

tal à votre cher fils. Je me persua<strong>de</strong> au contraire quʹici, comme toujours, le Seigneur fera<br />

éclater sa sagesse et sa miséricor<strong>de</strong>.<br />

En examinant les choses en cet esprit <strong>de</strong> confiance et <strong>de</strong> foi, ne peut‐on pas espérer<br />

que votre cher enfant, sʹil <strong>de</strong>vait prendre quelque part à la lutte qui commence, sʹy fortifie‐<br />

rait en ses bons principes, en ses nobles dispositions, au lieu <strong>de</strong> sʹen écarter. Il ne saurait<br />

rester toujours sous lʹombre <strong>de</strong> votre tendre protection, il faut quʹil acquière lʹinitiative,<br />

lʹaction propre qui appartient à un homme, <strong>avec</strong> quelque expérience dans les relations au<br />

<strong>de</strong>hors. Ce complément était nécessaire à lʹéducation tout intérieure et toute <strong>de</strong> famille<br />

quʹil a reçue sous vos yeux. Lʹinaction où il allait se trouver dans son isolement commen‐<br />

çait à vous inquiéter; sʹil va pour un temps au corps dont il <strong>de</strong>vra faire partie, il y trouvera<br />

du mouvement, <strong>de</strong>s relations, <strong>de</strong>s contacts multipliés qui lʹobligeront à payer <strong>de</strong> sa per‐<br />

sonne et développeront son énergie, sa fermeté, ses qualités viriles, en un mot; tout cela est<br />

nécessaire pour nʹêtre pas désarmé et sans défense dans cette vie, où, pour les hommes<br />

1493


surtout, la connaissance du mon<strong>de</strong> et la force <strong>de</strong> la volonté sont <strong>de</strong>s nécessités <strong>de</strong> premier<br />

ordre.<br />

Il est vrai quʹon peut craindre quʹ<strong>avec</strong> ce frottement <strong>avec</strong> beaucoup <strong>de</strong> natures qui<br />

sont loin dʹêtre toutes bonnes et choisies, lʹâme si droite et si honnête <strong>de</strong> votre cher enfant<br />

nʹy per<strong>de</strong> quelque chose <strong>de</strong> sa can<strong>de</strong>ur si aimable; mais la solidité <strong>de</strong> sa foi, sa fidélité à<br />

pratiquer jusquʹici ses <strong>de</strong>voirs chrétiens et aussi vos prières incessantes seront <strong>de</strong> bien<br />

puissantes garanties; Dieu sera <strong>avec</strong> ce bon cher jeune homme et son ange le protégera.<br />

Après une absence assez limitée, peut‐être il vous reviendra fortifié, aguerri et définitive‐<br />

ment assis dans cette voie <strong>de</strong> la vérité et du bien où votre cœur a tant désiré <strong>de</strong> le voir éta‐<br />

bli; ce sera lʹaccomplissement <strong>de</strong> votre tâche, et Dieu aura concouru à la réaliser <strong>avec</strong> vous;<br />

cʹest ainsi que tout ce qui est bon et saint sʹopère dans le mon<strong>de</strong>. Ayons donc confiance,<br />

Madame la Marquise, toutes choses tourneront à cette heureuse fin. Lʹépreuve que vous<br />

redoutez tant doit être subie par tous, en un sens ou en un autre; autour <strong>de</strong> vous, dans vo‐<br />

tre famille, votre cher oncle, M. <strong>de</strong> Rugy et le frère <strong>de</strong> votre oncle, mort en Algérie que jʹai<br />

aussi connu, ont débuté ainsi; presque tous les fils <strong>de</strong> famille doivent, au commencement<br />

<strong>de</strong> leur carrière, payer leur <strong>de</strong>tte par quelque service militaire; tous ceux qui ont été vrai‐<br />

ment fortifiés et trempés par une éducation première vraiment chrétienne tirent avantage<br />

<strong>de</strong> cette épreuve et nʹy per<strong>de</strong>nt rien <strong>de</strong> leurs sentiments et <strong>de</strong> leur noblesse <strong>de</strong> cœur.<br />

Je crois, Madame la Marquise, que les choses sont ainsi selon les vues <strong>de</strong> Dieu à<br />

lʹégard <strong>de</strong> votre cher fils, et quʹ<strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> vos prières et celles <strong>de</strong> votre vénérée mère,<br />

tout se passera comme je viens <strong>de</strong> le dire. Il se peut quʹen définitive, le Seigneur règle les<br />

choses autrement, que votre cher fils ne parte pas ou ne parte que pour quelques instants,<br />

mais je gar<strong>de</strong> cette conviction que votre foi ne sera point déçue, que les bons sentiments <strong>de</strong><br />

votre cher enfant seront conservés et quʹen quelque voie que Dieu le mette, il restera sous<br />

sa gar<strong>de</strong> et quʹil sera votre consolation; confiance, tout ira à bonne fin, cʹest mon <strong>de</strong>rnier<br />

mot et ma ferme espérance.<br />

Je suis, <strong>avec</strong> un bien respectueux et bien sincère dévouement pour vous et pour vo‐<br />

tre chère famille,<br />

Votre humble serviteur et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. On a commencé les messes dès la réception <strong>de</strong> votre lettre; on les continuera<br />

fidèlement tous les jours.<br />

1565 <strong>de</strong> M. A. Lainé à M. Chaverot<br />

P. S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Proclamation du dogme <strong>de</strong> l’infaillibilité pontificale. Dispenses pour les ordinations.<br />

Chaville, ce 26 juillet 1870<br />

Mon bien cher frère en N.S.,<br />

Le P. Supérieur me charge <strong>de</strong> vous dire combien votre <strong>de</strong>rnière lettre lui a fait plaisir. Elle<br />

contenait lʹannonce et les détails dʹune définition trop souhaitée chez nous pour nʹy pas causer une<br />

joie <strong>de</strong>s plus vives. Dès le jour <strong>de</strong> la S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul, quelques instants après la grandʹmesse, M.<br />

Maignen apportait un télégramme <strong>de</strong> M. Streicher: Te Deum, lʹinfaillibilité est proclamée; 2 non<br />

placet seulement. A mesure que la nouvelle pénétrait, on entendait éclater ce cri que chaque jour<br />

vous enten<strong>de</strong>z à Rome: Vive Pie IX! M. Hello rayonnait, M. Codant et ces autres Messieurs prêtres<br />

1494


se félicitaient; tous nous étions heureux du triomphe <strong>de</strong> notre Mère, nʹoubliant pas cependant <strong>de</strong><br />

prier pour les Evêques <strong>de</strong> lʹopposition quʹon pensait, <strong>de</strong> par ce télégramme, convertis, <strong>de</strong>ux excep‐<br />

tés. Aujourdʹhui, on sait le vrai.<br />

On parle, en même temps que <strong>de</strong> leur absence lors du <strong>de</strong>rnier vote, <strong>de</strong>s protestations <strong>de</strong><br />

NN.SS. <strong>de</strong> Paris, dʹOrléans, etc. Quel malheur, si cʹest vrai!<br />

Le P. Supérieur nous a promis <strong>de</strong> nous lire les passages <strong>de</strong> votre lettre où il est question <strong>de</strong>s<br />

fêtes <strong>de</strong> Rome à propos <strong>de</strong> la définition. Comme vous le pensez bien, il a été, comme nous, réjoui<br />

par ces nouvelles; une seule chose a manqué pour que sa joie fût parfaite: vous ne disiez rien <strong>de</strong><br />

lʹextra tempora et <strong>de</strong> la dispense dʹâge dont jʹai besoin. Les soucis <strong>de</strong>s Eglises pèsent lour<strong>de</strong>ment sur<br />

lui, les besoins sont extrêmes et trois ordonnés <strong>de</strong> plus, malgré leur inexpérience et leurs misères,<br />

apporteraient un sensible soulagement à nos anciens dont les épaules fléchissent sous le faix. On<br />

comptait recevoir ces permissions <strong>de</strong> façon que lʹordination eût lieu à la S t ‐Jacques, qui était hier;<br />

on sʹest rejeté sur la S t ‐Pierre, mais votre lettre, où il nʹest pas question <strong>de</strong> permission, a démontré<br />

quʹon ne le pouvait plus. Le P. Supérieur en était un peu chagrin; on crie vers lui <strong>de</strong> tous côtés<br />

pour obtenir du secours; nous, témoins aussi <strong>de</strong> cette détresse commune, malgré lʹeffroi quʹinspire<br />

toujours une démarche si grave, désirons la prêtrise. Pressez donc, je vous en prie. Le P. Supérieur<br />

parle dʹun M. Clerc qui, paraît‐il, pourrait beaucoup; ne lui laissez pas <strong>de</strong> repos.<br />

Pensant bien que le triomphe et les travaux du Concile ne permettent pas aux Congréga‐<br />

tions <strong>de</strong> vite expédier <strong>de</strong> telles affaires, le Père pense, si à Rome elles ne sont pas trop avancées,<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à M gr <strong>de</strong> Paris pour ces <strong>de</strong>ux Messieurs lʹextra tempora; il peut, dit‐on, lʹaccor<strong>de</strong>r en pou‐<br />

voir dʹun indult à lui spécial; il ne sʹagirait donc plus que dʹobtenir <strong>de</strong> Rome la dispense dʹâge pour<br />

moi.<br />

Le P. Supérieur, nos anciens, nous‐mêmes comptons sur toute votre célérité. Faites bien, je<br />

vous prie, nos amitiés à nos frères; Edouard [Lainé], qui se repose à Chaville, remercie M. Georges<br />

[<strong>de</strong> Lauriston] <strong>de</strong> ses petites lettres et lui envoie les respects et les amitiés <strong>de</strong> tout Grenelle. M. Co‐<br />

querel est tout à fait remis, M. Leclerc a fêté dimanche <strong>de</strong>rnier, <strong>avec</strong> vos petits enfants <strong>de</strong> Vaugi‐<br />

rard, la définition. Pour donner plus dʹéclat et faire mieux songer à Rome, il avait mis un petit col‐<br />

let blanc en place du rabat. La S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul sʹest bien passée; cʹétait, comme toujours, aimable<br />

et cordial, mais peu frais. Pas un nuage, pas un souffle, un air irrespirable. Malgré cela, les enfants<br />

ont couru, gambadé, été au mât <strong>de</strong> cocagne; pour <strong>de</strong>s Parisiens, Chaville est toujours frais et char‐<br />

mant. Malabre se meurt à Vaugirard; il est bien disposé. Un ange <strong>de</strong> plus que Vaugirard donne au<br />

Ciel.<br />

Nous prions pour vous et nos frères <strong>de</strong> Rome, aussi pour ceux qui vous sont confiés. Pen‐<br />

sez quelquefois à nous tous, que les réalités ne trompent les espérances quʹaprès tant <strong>de</strong> sacrifices<br />

on peut à bon droit faire sur nous, que nous soyons <strong>de</strong> vrais enfants <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul.<br />

Adieu, mon très aimé frère en N.S. Croyez‐moi tout vôtre.<br />

Ad. Lainé diacre <strong>de</strong>s ff. S.V.P.<br />

Mon bien cher enfant, pressez nos extra tempora et la dispense dʹâge; nous ne pou‐<br />

vons avancer ni régler nos affaires sans la prompte ordination <strong>de</strong> nos diacres.<br />

Je vous rappelle que vous <strong>de</strong>viez réviser régulièrement les comptes <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux Cer‐<br />

cles; priez M. Georges <strong>de</strong> vous les soumettre exactement et tenez‐moi au courant <strong>de</strong> lʹor‐<br />

dre quʹon y gar<strong>de</strong>.<br />

Je fais <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à M. Keller un mot qui autorise votre installation à la Villa.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1495


Le peuple <strong>de</strong> Rome à Saint-Pierre, le jour <strong>de</strong> la proclamation du vote <strong>de</strong> l’infaillibilité.<br />

D’après un <strong>de</strong>ssin paru dans l’Univers Illustré. (Bibliothèque historique <strong>de</strong> la Ville <strong>de</strong> Paris).<br />

1565‐1 à M gr Freppel<br />

MLP. lui annonce un changement <strong>de</strong> personnel à l’Œuvre d’Angers.<br />

Paris‐Vaugirard, 4 août 1870<br />

Monseigneur,<br />

M. lʹabbé <strong>de</strong> Varax qui, <strong>de</strong>puis quelques mois, avait remplacé M. dʹArbois dans la<br />

direction <strong>de</strong> la Maîtrise <strong>de</strong> votre Cathédrale et <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux patronages <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong>s Champs<br />

et <strong>de</strong>s enfants <strong>de</strong>s manufactures, sʹest trouvé si fatigué <strong>de</strong> cette triple mission quʹaprès un<br />

repos prolongé il reste encore hors dʹétat <strong>de</strong> la reprendre.<br />

M. dʹArbois va donc, Monseigneur, si vous daignez lʹagréer, revenir à lʹemploi quʹil<br />

avait rempli précé<strong>de</strong>mment.<br />

La difficulté quʹil avait éprouvée lui‐même à porter cette tâche multiple et lʹimpuis‐<br />

sance où se trouve M. <strong>de</strong> Varax <strong>de</strong> la soutenir plus longtemps me laissent en doute si un<br />

même Directeur peut indéfiniment donner ses soins à <strong>de</strong>s œuvres qui nʹont pas <strong>de</strong> rapport<br />

entrʹelles, et dont une seule suffirait pour réclamer toute son attention.<br />

Si quelque combinaison autre pouvait être trouvée qui, sans imposer <strong>de</strong> nouvelles<br />

charges au diocèse, fit subsister les <strong>de</strong>ux patronages séparés <strong>de</strong> la Maîtrise, il semble bien<br />

que cet arrangement aurait, pour les <strong>de</strong>ux parts, <strong>de</strong>s avantages réels et quʹil rendrait leur<br />

marche mieux assurée. Il ne mʹappartient en aucune sorte <strong>de</strong> rechercher quels moyens<br />

pourraient conduire à cette fin, jʹai pensé seulement, Monseigneur, que je ne serais pas in‐<br />

discret en soumettant à votre haute sagesse la difficulté que la situation actuelle peut pré‐<br />

senter.<br />

1496


Jʹose <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à Votre Gran<strong>de</strong>ur pour M. dʹArbois et pour ceux qui lʹassistent, la<br />

bienveillance dont les honorait votre vénérable prédécesseur, et je vous prie dʹagréer les<br />

sentiments <strong>de</strong> profond respect <strong>avec</strong> lesquels je suis,<br />

Monseigneur,<br />

<strong>de</strong> Votre Gran<strong>de</strong>ur,<br />

le très humble et très dévoué serviteur Le <strong>Prevost</strong><br />

Sup. <strong>de</strong> la Congrégation<br />

<strong>de</strong>s FF. <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul<br />

1566 à M gr Bravard<br />

Deman<strong>de</strong>s <strong>de</strong> dispenses à l’Evêque <strong>de</strong> Coutances, pour le frère Adolphe Lainé.<br />

Paris‐Vaugirard, 5 août 1870<br />

Monseigneur,<br />

Jʹai reçu ces jours <strong>de</strong>rniers, par lʹentremise <strong>de</strong> M. le Secrétaire <strong>de</strong> votre Evêché, un<br />

dimissoire <strong>de</strong>vant servir pour la promotion au sacerdoce <strong>de</strong> M. Adolphe Lainé, membre<br />

<strong>de</strong> notre Congrégation (<strong>de</strong>s Frères <strong>de</strong> St ‐Vincent <strong>de</strong> Paul), né dans votre diocèse, à Cher‐<br />

bourg, au commencement <strong>de</strong> février 1847.<br />

Jʹavais espéré que jʹobtiendrais <strong>de</strong> Mgr lʹArchevêque <strong>de</strong> Paris lʹextra tempora et la dis‐<br />

pense dʹâge <strong>de</strong> six mois nécessaires pour cette ordination, dʹautant que ce Prélat consent à<br />

délivrer le pouvoir dʹêtre ordonnés à <strong>de</strong>ux autres jeunes diacres aussi attachés à notre fa‐<br />

mille religieuse; mais on me fait observer que ces pouvoirs ne sont remis à chaque Evêque<br />

que pour les sujets originaires <strong>de</strong> son diocèse, et quʹen conséquence, cʹest à vous, Monsei‐<br />

gneur, que je dois recourir pour lʹextra tempora et la dispense dʹâge concernant M. Lainé.<br />

Je viens donc vous prier, Monseigneur, dʹajouter ces <strong>de</strong>ux permissions indispensa‐<br />

bles au dimissoire que vous avez daigné mʹadresser <strong>de</strong>rnièrement.<br />

Jʹose espérer que cette faveur ne me sera pas refusée. M. Lainé, élevé sous nos yeux<br />

<strong>avec</strong> les <strong>de</strong>ux autres diacres qui se présentent <strong>avec</strong> lui à lʹordination, ne les a pas quittés<br />

<strong>de</strong>puis lʹenfance et vient, en <strong>de</strong>rnier lieu, <strong>de</strong> suivre comme eux, durant cinq années, les<br />

cours du séminaire St‐Sulpice, dont les pieux directeurs nʹont cessé <strong>de</strong> rendre sur les trois<br />

également les témoignages les plus satisfaisants.<br />

Vous ne voudrez pas, Monseigneur, que ces trois condisciples, frères en religion,<br />

soient séparés au jour si heureux et si solennel <strong>de</strong> lʹordination; vous aurez égard aussi aux<br />

besoins pressants <strong>de</strong> notre Congrégation, que plusieurs décès ou maladies graves ont sin‐<br />

gulièrement éprouvée cette année et pour laquelle quelques ai<strong>de</strong>s nouveaux sont dʹune<br />

impérieuse nécessité.<br />

Jʹose donc espérer <strong>de</strong> votre bonté une réponse favorable et je vous prie dʹagréer<br />

dʹavance, <strong>avec</strong> ma vive reconnaissance, les respectueux sentiments dans lesquels je suis,<br />

Monseigneur,<br />

<strong>de</strong> Votre Gran<strong>de</strong>ur,<br />

le très humble et très dévoué serviteur Le <strong>Prevost</strong><br />

Sup. <strong>de</strong> la Congrégation<br />

<strong>de</strong>s FF. <strong>de</strong> St Vincent <strong>de</strong> Paul<br />

1497


Dans la marge, réponse du Secrétaire :<br />

Mgr l’Evêque <strong>de</strong> Coutances dispenserait volontiers, mais il ne peut pas le faire : 1° il ne<br />

peut pas accor<strong>de</strong>r l’extra tempora puisqu’il ne fait pas l’ordination. 2° il faut un indult aux Evêques<br />

pour accor<strong>de</strong>r une dispense d’âge. S.G. a épuisé cet indult à l’occasion <strong>de</strong> la <strong>de</strong>rnière ordination<br />

faite pour son diocèse. Elle autoriserait bien volontiers Mgr l’Archevêque <strong>de</strong> Paris à faire<br />

l’ordination extra tempora, si tant est que ce <strong>de</strong>rnier Prélat eût vraiment besoin <strong>de</strong> cette autorisation.<br />

Je prie Monsieur le Supérier d’agréer mes respects et <strong>de</strong> m’excuser <strong>de</strong> lui répondre par cette simple<br />

note. Le temps me presse. Tréborier, sec.<br />

1567 à M me et M lle Salva<br />

Emprunt contracté auprès d’elles. Situation <strong>de</strong> l’Institut au début <strong>de</strong> la guerre.<br />

Vaugirard, 5 août 1870<br />

Bien chères amies,<br />

M. <strong>de</strong> Lauriston étant à Rome <strong>de</strong>puis quelques semaines pour remplacer un <strong>de</strong> nos<br />

ff. <strong>de</strong>s Cercles militaires qui était extrêmement fatigué, je ne sais où il en est <strong>avec</strong> vous<br />

pour les intérêts <strong>de</strong> votre prêt; si je ne me trompe, six mois doivent être échus du 1er juillet;<br />

comme lʹéchéance, en tout cas, doit être à peu près à cette date, je vous envoie ci‐joint 500f<br />

en vous priant <strong>de</strong> mʹen adresser un reçu, au nom <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Lauriston, pour lʹŒuvre <strong>de</strong><br />

N.D. <strong>de</strong> Grâce, à Grenelle, laquelle est votre débitrice.<br />

Je ne vois rien à vous dire aujourdʹhui; nous souffrons, comme tout le mon<strong>de</strong>, <strong>de</strong> la<br />

guerre, lʹaffliction du moment; trois <strong>de</strong> nos MM. nous sont pris actuellement, je ne sais si<br />

dʹautres encore nous seront enlevés. Parmi nos œuvres, <strong>de</strong>s multitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> jeunes gens,<br />

mariés ou non mariés, sont appelés au service; le Cercle <strong>de</strong>s Jeunes Ouvriers <strong>de</strong> M. Mai‐<br />

gnen en perd 67 pour sa part, et ainsi à peu près pour les autres œuvres.<br />

Chez nous, <strong>de</strong>ux ou même trois <strong>de</strong> nos MM. ecclésiastiques sont épuisés par un tra‐<br />

vail trop continu et vont être contraints dʹinterrompre pour un temps leurs occupations<br />

ordinaires. Trois <strong>de</strong> nos séminaristes seront ordonnés prêtres dans quelques jours, mais <strong>de</strong><br />

très jeunes gens ne peuvent suppléer <strong>de</strong>s hommes <strong>de</strong> maturité et dʹexpérience; nous espé‐<br />

rons que Dieu y pourvoira.<br />

Pour ce qui me regar<strong>de</strong>, les chaleurs continues ont achevé <strong>de</strong> briser mes jambes; je<br />

ne puis plus aller hors <strong>de</strong> la maison, sinon en voiture; reprendrai‐je un peu <strong>de</strong> force à lʹau‐<br />

tomne, jʹen doute, à cause <strong>de</strong> la faiblesse <strong>de</strong> mon estomac, cause <strong>de</strong> tous mes épuisements.<br />

Donnez‐moi <strong>de</strong> vos nouvelles; les chaleurs nʹont pas dû vous épargner, non plus<br />

que nous; si vous nʹêtes pas trop faibles, un peu <strong>de</strong> mouvement, après que la température<br />

aura changé, vous serait salutaire; pourquoi nʹauriez‐vous pas fait un petit voyage vers la<br />

mer; quelques bains auraient été fortifiants pour Maria, et le bon air vif eût fait aussi beau‐<br />

coup <strong>de</strong> bien à sa mère. Il nʹest pas trop tard pour y songer et le chemin <strong>de</strong> fer vous ren‐<br />

drait ce voyage si facile!<br />

Adieu, bien chères amies, je pense souvent à vous et je prie aussi pour vous; ne<br />

mʹoubliez pas <strong>de</strong> votre côté. Ma tâche a été, cette année, plus ru<strong>de</strong> que <strong>de</strong> coutume, et<br />

jʹétais cependant plus faible en même temps pour la porter; Dieu fera plus, je lʹespère, à<br />

mesure que je ferai moins.<br />

Votre tout affectionné frère et oncle<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1498


1568 à M. Trousseau<br />

Invitation à l’occasion <strong>de</strong>s ordinations <strong>de</strong> trois <strong>de</strong> ses frères. Abandon à la Provi<strong>de</strong>nce.<br />

11 août [1870]<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je joins un mot à la lettre <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax, que je nʹai pas le temps <strong>de</strong> lire étant bien<br />

en presse; je pense <strong>avec</strong> lui que, si vous pouviez nous faire une visite à lʹoccasion <strong>de</strong> lʹor‐<br />

dination, que nous espérons maintenant <strong>de</strong>voir peu tar<strong>de</strong>r, <strong>de</strong> nos trois Sulpiciens, ce se‐<br />

rait aimable et reposant pour vous; mais le pourrez‐vous? Nous sommes sur le qui‐vive<br />

comme les soldats et allons heure par heure. Dieu nous dira ce que nous <strong>de</strong>vons faire et<br />

par où nous <strong>de</strong>vons marcher.<br />

Votre ami et Père dévoué en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Les 20 messes dont je vous ai envoyé, par M. Caille, les honoraires sont pressées et<br />

doivent être dites <strong>de</strong> suite. Je puis vous en envoyer 10 encore […]<br />

1569 <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax à M. Chaverot<br />

<strong>Lettre</strong> non dictée, mais écrite par simple délégation. Nouvelles <strong>de</strong>s communautés : certaines sont menacées par<br />

l’affectation <strong>de</strong> frères à la gar<strong>de</strong> nationale mobile.<br />

Chaville, le 11 août 1870<br />

Mon bon frère en N.S.,<br />

Accablé par les soins que réclament nos communautés menacées en France par la<br />

mobile, le P. Supérieur vous remercie par mon ministère <strong>de</strong> votre <strong>de</strong>rnière lettre et <strong>de</strong> tou‐<br />

tes vos lettres in genere. A distance, on sent mieux le prix dʹune correspondance suivie sur<br />

les objets qui intéressent notre zèle commun. Il vous remercie <strong>de</strong> ce que vous lʹentretenez<br />

fidèlement <strong>de</strong> tout.<br />

Vos détails sur la santé <strong>de</strong> chacun, et <strong>de</strong> M. Streicher en particulier, ont attiré son at‐<br />

tention. Nous compatissons bien aux épreuves du pauvre nouveau, Dieu les abrégera, je<br />

lʹespère, en suspendant les chaleurs.<br />

Enfin, vous êtes logé à la Villa, cʹest un heureux pas <strong>de</strong> fait, il sera fructueux pour<br />

votre ministère; Dieu vous a déjà donné <strong>de</strong> belles consolations, plaise à sa bonté <strong>de</strong> les ac‐<br />

croître pour le salut <strong>de</strong> vos chers enfants les soldats. Ah! que nos Français du Rhin au‐<br />

raient besoin <strong>de</strong> semblables secours!<br />

Le P. Général écrit en ce moment à M. Emile [Beauvais] pour lui dire quʹil désire<br />

que, selon la coutume <strong>de</strong> nos communautés les mieux réglées, les comptes soient revus<br />

par vous, à intervalles déterminés, autant que possible.<br />

Je profite <strong>de</strong> mon emploi <strong>de</strong> secrétaire pour vous envoyer à tous mes bien tendres<br />

souvenirs. Combien je serais satisfait dʹêtre un peu auprès <strong>de</strong> mon f. Streicher pour lui<br />

faire un peu <strong>de</strong> misères comme jadis!<br />

M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] est ici, soignant sa carcasse comme moi. Nous parlons<br />

souvent <strong>de</strong> vous.<br />

Impossible <strong>de</strong> découvrir où lʹon a mis la permission <strong>de</strong> réciter le bréviaire propre <strong>de</strong><br />

S t Vincent <strong>de</strong> Paul pour ses trois fêtes; M. <strong>de</strong> Lauriston, qui lʹa reçue dans le temps, sʹen<br />

souvient‐il?<br />

1499


Adieu, cher et bon frère. Un Souvenez‐vous pour moi à S te Marie Majeure le 15, et à<br />

S t Bernard le 20, si vous pouvez.<br />

Tout à vous en N.S. B. <strong>de</strong> Varax<br />

pr. FF. St‐Vt <strong>de</strong> Paul<br />

Nos frères Pattinote, Leclerc et Lainé Ad. seront probablement ordonnés le 25, jour<br />

<strong>de</strong> lʹoffice <strong>de</strong> S t Barthélemy.<br />

1570 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

A propos du service militaire <strong>de</strong> son fils. Nouvelles <strong>de</strong> la guerre: copie d’une lettre envoyée du camp militaire <strong>de</strong><br />

Châlons par un membre du Cercle <strong>de</strong> Grenelle.<br />

Vaugirard, 13 août 1870<br />

Madame la Marquise,<br />

Je vous remercie beaucoup <strong>de</strong> me tenir au courant <strong>de</strong> ce qui concerne votre cher fils,<br />

et vos dispositions propres, et lʹétat <strong>de</strong> votre bonne mère; en ce temps dʹagitation et dʹin‐<br />

quiétu<strong>de</strong>, on a besoin <strong>de</strong> ne pas perdre <strong>de</strong> vue tous ceux quʹon respecte et quʹon aime.<br />

Il sera bien difficile, en effet, que votre cher Richard évite un départ temporaire, car<br />

les lois qui appellent tous ceux qui sont vali<strong>de</strong>s se pressent et se succè<strong>de</strong>nt, <strong>de</strong> plus en plus<br />

envahissantes. Je crois que si, à raison <strong>de</strong> sa jeunesse et du besoin quʹil aurait dʹachever la<br />

gran<strong>de</strong> entreprise <strong>de</strong> ses étu<strong>de</strong>s, on peut le soustraire au service en ce moment, ce sera le<br />

plus sage. Si on nʹy peut réussir, la volonté <strong>de</strong> Dieu étant manifeste et rien nʹayant été né‐<br />

gligé pour éloigner cette épreuve, vous accepterez <strong>avec</strong> soumission et confiance, Madame,<br />

les dispositions <strong>de</strong> la Sagesse divine, espérant quʹelle saura tirer quelque grand bien <strong>de</strong> ce<br />

qui serait si dur pour votre cœur <strong>de</strong> mère.<br />

Nous avons, <strong>de</strong> notre côté, bien <strong>de</strong>s difficultés; 28 ou 30 <strong>de</strong> nos MM. laïcs vont nous<br />

être retirés <strong>de</strong>s œuvres pour le service militaire, toutes nos maisons vont être en gran<strong>de</strong><br />

souffrance; Dieu daignera se souvenir quʹelles lui appartiennent, comme tout ce qui est en‐<br />

tre nos mains.<br />

Je veille à ce que la Ste Messe soit offerte chaque jour à vos intentions par quelquʹun<br />

<strong>de</strong> nos prêtres. Cʹest le plus puissant moyen <strong>de</strong> lʹordre spirituel; ayons confiance, Dieu<br />

nous entendra.<br />

Un <strong>de</strong>s jeunes membres du Cercle <strong>de</strong> notre maison <strong>de</strong> Grenelle, simple ouvrier ou<br />

contremaître, mais fort chrétien et intelligent, écrivait ces jours <strong>de</strong>rniers à son camara<strong>de</strong><br />

une lettre du Camp <strong>de</strong> Châlons, où il est comme gar<strong>de</strong> mobile. Cette lettre est si simple et<br />

si naïve, elle donne si bien la notion du camp et <strong>de</strong> la vie quʹon y mène, que je crois bien<br />

faire <strong>de</strong> vous en envoyer une copie. Un <strong>de</strong> nos prêtres qui arrive du camp, où il est allé vi‐<br />

siter un <strong>de</strong> ses jeunes gens qui fait partie <strong>de</strong>s recrues, a été tristement impressionné <strong>de</strong>s<br />

dispositions morales <strong>de</strong> la généralité <strong>de</strong>s hommes qui sont rassemblés là.<br />

Il y a, auprès du camp, une jolie église, mais, même le dimanche, on y voit à peine<br />

quelques militaires; à une heure <strong>de</strong> marche du camp, il y a une autre église dans un village<br />

isolé, les bons militaires y vont volontiers, loin <strong>de</strong>s yeux malveillants.<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, et partager <strong>avec</strong> Madame dʹHurbal et votre<br />

cher fils, tous mes sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1500


Camp <strong>de</strong> Châlons<br />

A mes bons amis du Cercle,<br />

Je suis encore à me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si je ne rêve pas et sʹil est bien vrai que, <strong>de</strong>puis huit jours, je<br />

suis séparé <strong>de</strong> tous ceux que jʹaime; famille, amis, habitu<strong>de</strong>s, tout a disparu pour moi et, pour par‐<br />

tage, jʹai la compagnie <strong>de</strong> gens qui, sous aucun aspect, ne me sont sympathiques. Je couche sous<br />

une tente, à lʹinjure du vent et <strong>de</strong> la pluie et en rapports continuels <strong>avec</strong> une dizaine dʹindividus<br />

plus ou moins convenables!<br />

Quelle belle invention que la poste! Elle seule me permet <strong>de</strong> communiquer <strong>avec</strong> ceux que<br />

jʹai laissés en partant pour la gloire. Les témoignages dʹaffection ne me manquent pas. Ils mʹarri‐<br />

vent <strong>de</strong> ma famille chérie, <strong>de</strong> mes amis intimes et, ce matin, jʹai reçu une longue lettre <strong>de</strong> notre ami<br />

à tous, <strong>de</strong> lʹexcellent M. Edouard [Lainé]. Sur une <strong>de</strong>s feuilles, jʹai lu <strong>avec</strong> un plaisir inexprimable<br />

les noms <strong>de</strong> plusieurs <strong>de</strong> mes bien‐aimés amis du Cercle. Merci mille fois <strong>de</strong> penser à ce pauvre<br />

mobile qui, loin <strong>de</strong> tout, loin <strong>de</strong> son cher Cercle <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Grâce, nʹoublie personne. Je ne vous di‐<br />

rai pas, mes chers amis, que je mʹennuie beaucoup, je pense que vous nʹen doutez pas. Les pre‐<br />

miers jours ont été ru<strong>de</strong>s, je vous lʹassure, mais jʹai écrit tout cela à notre cher Prési<strong>de</strong>nt, et je sais<br />

quʹil vous a donné <strong>de</strong> mes nouvelles; je vous dirai néanmoins que, pour un jeune homme habitué à<br />

vivre dans sa famille, rien ne peut‐être plus pénible que la vie du Camp. Mais, pour nous chré‐<br />

tiens, quelles ressources nʹavons‐nous pas? On peut prier partout, même sous une tente (qui est, à<br />

mon avis, ce qui ressemble le plus à lʹenfer). Je le fais du mieux quʹil mʹest possible, et je vous as‐<br />

sure que mes compagnons ne sʹen doutent guère!... Dimanche, jʹai eu le bonheur <strong>de</strong> pouvoir assis‐<br />

ter à la S te Messe à Mourmelon (dʹoù je vous écris); cʹest à 25 minutes <strong>de</strong> lʹendroit où je campe. Jʹy<br />

vais presque tous les jours, car on ne trouve rien au camp.<br />

A la messe, trois mobiles, <strong>de</strong>ux ou trois militaires et un officier supérieur, qui a édifié lʹas‐<br />

sistance en sʹapprochant <strong>de</strong> la S te Table. Lʹéglise <strong>de</strong> Mourmelon est belle comme style, mais la dé‐<br />

votion nʹest pas le fort <strong>de</strong> la population. Les rues sont pleines <strong>de</strong> soldats et <strong>de</strong> mobiles, les restau‐<br />

rants débor<strong>de</strong>nt, les cafés, très nombreux, sont archi pleins, mais la maison <strong>de</strong> Dieu est<br />

vi<strong>de</strong>!...Demain soir, si jʹétais à Grenelle, je passerais une bonne heure en adoration dans notre pe‐<br />

tite chapelle. Jʹespère que, si je nʹy suis pas, mes confrères <strong>de</strong> lʹadoration nʹoublieront pas lʹabsent<br />

et quʹils prieront <strong>de</strong> tout leur cœur pour celui qui serait si heureux dʹêtre <strong>avec</strong> eux à cette sainte<br />

veillée, si salutaire pour nos âmes.<br />

Jʹespérais recevoir prochainement la visite <strong>de</strong> mes amis, les mobiles du Cercle, mais il a été<br />

jugé pru<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> ne pas les adjoindre à ceux qui sont déjà ici, et ils vont aller où....Dieu sait! ... On<br />

parle <strong>de</strong> S t Maur (les veinards!), <strong>de</strong> S t Omer (où je voudrais bien aller à cause <strong>de</strong> ma famille), <strong>de</strong><br />

Lunéville (pas chic).<br />

Voulez‐vous avoir une idée <strong>de</strong> ce quʹest le Camp <strong>de</strong> Châlons et <strong>de</strong> la vie que nous y me‐<br />

nons? Voici: le camp a 80 Km <strong>de</strong> circon‐férence (je nʹai guère envie dʹen faire le tour). Cette im‐<br />

mense étendue est divisée en plaines immenses pour les manœuvres (les plus petites sont gran<strong>de</strong>s<br />

comme le Champ <strong>de</strong> Mars). Il y a le quartier impérial, où loge le Maréchal Canrobert, qui nous a<br />

passés en revue il y a 3 ou 4 jours; puis <strong>de</strong>s buttes pour lʹexercice du canon, <strong>de</strong>s cibles, <strong>de</strong>s campe‐<br />

ments pour 80 ou 100.000 hommes, <strong>de</strong>s parcs dʹartillerie et mille autres choses que je nʹai pas vues.<br />

Oh! il y a aussi un temple protestant (rien pour les catholiques). Jʹoubliais lʹhôpital, les ambulances.<br />

Je nʹen finirais pas. Du reste, je nʹai presque rien vu encore, tout cela est éloigné. A 4h. 1/2 du matin,<br />

un coup <strong>de</strong> canon donne le signal du réveil, quʹon joue en musique pour la troupe (il y a encore<br />

30.000, on dit même 50.000 hommes campés ici et qui atten<strong>de</strong>nt lʹordre <strong>de</strong> départ). A 6h., nous al‐<br />

lons à lʹappel, puis à lʹexercice pendant 2 ou 3 heures; ensuite, nous mangeons la soupe, puis, si<br />

lʹon nʹest <strong>de</strong> gar<strong>de</strong> ou <strong>de</strong> corvée, on est libre jusquʹà midi; on va à lʹappel, puis où lʹon veut (si on<br />

nʹest <strong>de</strong> service). Il faut être rentré à 9h., mais plus <strong>de</strong> la moitié ne le sont quʹà 11 et plus tard en‐<br />

core. Presque toute la journée, les soldats exécutent <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s manœuvres. Les musiques jouent<br />

et, pour moi, ce nʹest pas la partie la moins intéressante. Hier, jʹai assisté, <strong>avec</strong> une foule considéra<br />

1501


le, à <strong>de</strong>s expériences <strong>de</strong> mitrailleuses. Nous étions tenus à distance très très respectueuse. Les of‐<br />

ficiers <strong>de</strong> tous corps étaient seuls près <strong>de</strong>s machines <strong>de</strong> mort dont nous nʹapercevions que vague‐<br />

ment les formes. La détonation est formidable.<br />

A la première décharge, plus <strong>de</strong> la moitié <strong>de</strong>s spectateurs sʹétaient couchés à plat ventre.<br />

On a tiré à 2.000 et à 2.500 m. et il paraît que le résultat obtenu est étonnant. Tout cela nʹest pas<br />

gai... Si, après cette guerre, on pouvait arriver à un désarmement général, mais... Pardon dʹêtre si<br />

bavard, je ne veux pas vous fatiguer à mʹécouter plus longtemps.<br />

Amitiés et remerciements à tous; je ne nomme personne, dans la crainte dʹoublier quel‐<br />

quʹun. Je me recomman<strong>de</strong> <strong>de</strong> nouveau aux bonnes prières du Cercle et, en attendant que je re‐<br />

vienne recevoir mes cotisations, je vous serre à tous la main.<br />

Votre ami tout dévoué A. Gobrecht<br />

Mes respects à M. lʹabbé Baumert, M. Piquet, Caron et tous ceux que jʹoublie. Le tumulte<br />

mʹempêche dʹécrire un peu<br />

proprement.<br />

Excusez fautes, ratures,<br />

etc...<br />

Camp <strong>de</strong> Châlons,<br />

vendredi 5 août 1870<br />

Manœuvres<br />

au Camp <strong>de</strong> Châlons<br />

1502


1571 à M. dʹArbois<br />

Moyens d’éviter la mobilisation pour <strong>de</strong>s frères. Affectation possible comme ambulanciers.<br />

Chaville, 14 août 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je crois, comme vous, quʹon peut sauver M. Moutier en faisant valoir quʹil nʹest pas<br />

français. Son inscription, lors <strong>de</strong> la conscription, est une erreur dont il semble quʹon ne<br />

peut se prévaloir. En tout cas, ce seul moyen nous est donné pour lui et pour les autres, 19<br />

ou 20 en tout, susceptibles dʹêtre pris par la gar<strong>de</strong> mobile ou pour le service actif: entrer<br />

dans le corps <strong>de</strong>s infirmiers pour les ambulances; on nous promet, le chef ordonnateur<br />

étant <strong>de</strong> nos amis, <strong>de</strong> nous donner un service composé seulement <strong>de</strong> nos ff. et <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux<br />

aumôniers pris parmi nos ecclésiastiques. Nous avons accepté et, dans huit jours, la chose<br />

sera organisée. Si vos <strong>de</strong>ux ff. ne peuvent échapper autrement, il sera sage quʹils sʹunissent<br />

à nous; je pense que M. Perthuisot nʹéchappera pas non plus autrement, on prend les sé‐<br />

minaristes qui ne sont pas sous‐diacres, et à Paris, et autour <strong>de</strong> nous les Congrégations et<br />

même, je crois, les diocèses font avancer au sous‐diaconat tous ceux qui sont en mesure<br />

dʹy être promus. Ces dispositions gêneront singulièrement nos œuvres, mais il y a force<br />

majeure et la gêne sera temporaire.<br />

Pour M. Ginet, je ne sais si son exemption <strong>de</strong>meure valable. Répon<strong>de</strong>z‐moi sans re‐<br />

tard, je vous prie.<br />

Peut‐être faudrait‐il faire une visite à Mgr dʹAngers, qui mʹa écrit la lettre la plus ai‐<br />

mable pour me dire quʹil allait aviser concernant la maîtrise; le pressentir sur le départ <strong>de</strong><br />

MM. <strong>Léon</strong> [Guichard] et Moutier qui rendra difficile (au moins pour un temps qui se pro‐<br />

longerait) le service <strong>de</strong> la Maîtrise.<br />

Pensez‐vous que votre visite ne suffise pas et quʹil est bon, en outre, que jʹécrive<br />

pour remercier Mgr [Freppel]?<br />

Votre ami dévoué<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1572 à M. dʹArbois<br />

Formation d’un corps d’infirmiers volontaires (la 7 e ambulance); la guerre ayant renversé son projet <strong>de</strong> quitter<br />

l’Institut, le père Lantiez s’y retrouve aumônier <strong>avec</strong> le père Hello.<br />

Chaville, 15 août [1870]<br />

Assomption<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai besoin <strong>de</strong> savoir, dans le plus court délai possible, la situation <strong>de</strong> M. Moutier et<br />

<strong>de</strong> M. <strong>Léon</strong> Guichard par rapport à la gar<strong>de</strong> mobile. M. <strong>Léon</strong> me semble certainement ap‐<br />

pelé; pour M. Moutier, je ne me rappelle pas au juste son âge, mais la nouvelle loi qui<br />

vient <strong>de</strong> paraître appelle les hommes âgés <strong>de</strong> moins <strong>de</strong> 30 ans qui ont satisfait à la cons‐<br />

cription. Sʹil est <strong>de</strong> ce nombre, je suppose ici quʹil nʹest pas exempt comme étranger, aime‐<br />

t‐il mieux aller à lʹarmée, ou bien veut‐il entrer dans le corps dʹambulance que nous som‐<br />

mes autorisés officiellement à former <strong>avec</strong> ceux <strong>de</strong> nos ff. qui sont dans les conditions pré‐<br />

vues par les lois militaires nouvellement rendues? Nous en avons 22, qui seront sous la<br />

conduite <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> nos ff. ecclésiastiques désignés comme aumôniers, MM. Hello et Lan‐<br />

1503


tiez. Quelques ff. du Saint‐Esprit et quelques jeunes gens <strong>de</strong> nos œuvres se joindront à eux<br />

pour compléter le chiffre <strong>de</strong> 40 au moins qui est <strong>de</strong>mandé. Si vous aviez quelques jeunes<br />

gens sûrs qui préférassent ces fonctions <strong>de</strong> charité au service militaire, on les accepterait<br />

sur votre présentation. Victor Samson, notre jeune domestique, dont nous sommes<br />

contents et qui est chrétien, est heureux dʹêtre admis <strong>avec</strong> nous dans le service <strong>de</strong> santé ou<br />

dʹinfirmiers que nous formons. Si M. Perthuisot a raison <strong>de</strong> penser quʹil sera suffisamment<br />

couvert contre un appel pour le service militaire, il vaut mieux assurément quʹil reste à ses<br />

étu<strong>de</strong>s; en cas contraire, il serait sage quʹil se mît à lʹabri par ce même moyen du service<br />

dʹambulance. Le plus parfait serait (si on pouvait réellement et sérieusement compter sur<br />

lui) que M gr dʹAngers consentît à lʹordonner sous‐diacre. Ce moyen est employé ici par<br />

toutes les Congrégations.<br />

Je pense que M. Ginet, exempté comme faible <strong>de</strong> complexion, est libéré; il serait bon<br />

toutefois <strong>de</strong> sʹen assurer discrètement.<br />

Adieu, mon bien cher ami et fils en N.S.; nous ne dissimulons pas les difficultés que<br />

le départ dʹun grand nombre <strong>de</strong> nos ff. créera pour nos œuvres, mais, entre <strong>de</strong>ux maux,<br />

nous choisissons le moindre.<br />

Cʹest à la fin <strong>de</strong> cette semaine, ou tout au commencement <strong>de</strong> lʹautre, que partira<br />

pour la frontière notre ambulance. Elle est la septième, il nʹen reste plus quʹune à organi‐<br />

ser. Cʹest M. <strong>de</strong> Melun qui est officiellement posé pour la composition <strong>de</strong> ces services.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1573 à M. Maignen<br />

Formation <strong>de</strong> la 7 e ambulance (<strong>de</strong>s religieux), sous la direction <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Melun.<br />

Vaugirard, 19 août 1870<br />

Mon cher ami et fils en N.S.,<br />

La lettre <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Melun (laquelle vous sera remise par M. Audrin) porte que lʹen‐<br />

semble <strong>de</strong>s infirmiers se divise en 4 escoua<strong>de</strong>s, ayant un major choisi parmi elles. M. <strong>de</strong><br />

Melun doit vous consulter pour ces choix. Ce sera pour nous un véritable embarras, car je<br />

ne vois aucun <strong>de</strong> ces ff. capable <strong>de</strong> conduire une division du Service; 4 <strong>de</strong> nos ff. seraient<br />

moins insuffisants: MM. Henry [Piquet], Vincent, Garault, Charrin; mais, <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux pre‐<br />

miers, lʹun a <strong>de</strong> la bizarrerie, lʹautre <strong>de</strong> lʹirascibilité; je ne sais pas si Garault sait conduire<br />

un service et je me défie aussi, sous ce rapport, <strong>de</strong> M. Charrin. Peut‐être, <strong>avec</strong> force re‐<br />

commandations, MM. Henry et Vincent iraient‐ils; ils ont une réelle supériorité dʹintelli‐<br />

gence ; M. Lantiez pourrait les surveiller et conseiller un peu.<br />

Ceux‐là, je suppose, étant admis, je crois quʹil faudrait que M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourni‐<br />

quet] vît le Supérieur du Saint‐Esprit et lui <strong>de</strong>mandât lequel, sur ses 10 ff., serait le plus<br />

capable, et pareillement quʹil consultât M. Mailly, <strong>de</strong>s Lazaristes, au sujet <strong>de</strong> ses 6 ff.. Il<br />

faudrait que cette enquête fût faite par M. <strong>Jean</strong>‐Marie avant 10h., moment où vous partirez<br />

pour voir, à 11h., M. <strong>de</strong> Melun. Autrement, vous seriez fort embarrassé pour répondre aux<br />

questions quʹil vous fera.<br />

Je crois que, si vous aviez quelque scrupule au sujet <strong>de</strong> M. Vincent, il faudrait pas‐<br />

ser outre, un temps notable <strong>de</strong> bonnes œuvres ayant passé sur quelques défaillances <strong>de</strong><br />

jeunesse. Il a une certaine expérience et habileté près <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s.<br />

1504


Après que vous aurez vu M. <strong>de</strong> Melun, il serait désirable que M. <strong>Jean</strong>‐Marie vînt me<br />

dire précisément le résultat <strong>de</strong> votre entretien et sa réponse à vos diverses questions, afin<br />

que nous fassions aux divers intéressés telles communications qui sembleraient nécessai‐<br />

res.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je paierai volontiers quelque in<strong>de</strong>mnité pour vos frais <strong>de</strong> voiture.<br />

1573 bis <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Melun à M. Maignen<br />

Palais <strong>de</strong> lʹIndustrie, Paris, le… 1870<br />

Mon cher ami,<br />

Envoyez‐moi au plus vite un <strong>de</strong> vos frères ou <strong>de</strong> vos pères <strong>avec</strong> lequel je puisse mʹenten‐<br />

dre; la 7e ambulance doit partir la semaine prochaine; elle sera uniquement composée <strong>de</strong> religieux,<br />

à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> du chirurgien en chef. Mais il en veut 40, et jʹai besoin <strong>de</strong> causer <strong>avec</strong> vous ou votre<br />

représentant pour compléter lʹambulance; il faudra que vos frères et leurs associés se divisent en 4<br />

escoua<strong>de</strong>s, chaque section nommant son major.<br />

Permettez‐moi, mon cher ami, <strong>de</strong> compter sur la rapidité <strong>avec</strong> laquelle vous voudrez bien<br />

répondre à mon appel. Jʹattendrai votre père ou votre frère <strong>de</strong>main à 11h.<br />

Mille assurances <strong>de</strong>s plus affectueux compliments.<br />

Le Vicomte <strong>de</strong> Melun<br />

1505


1573‐1 à M gr Darboy<br />

Permission extra tempora <strong>de</strong>mandée à l’Archevêque <strong>de</strong> Paris.<br />

Vaugirard, 19 août 1870<br />

Monseigneur,<br />

Je viens <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à Votre Gran<strong>de</strong>ur pour trois <strong>de</strong>s membres ecclésiastiques <strong>de</strong> no‐<br />

tre petite Congrégation, MM. Alfred Leclerc, Théodore Pattinote et Adolphe Lainé, la<br />

permission dʹêtre ordonnés prêtres extra tempora le jour <strong>de</strong> la fête <strong>de</strong> la St Barthélemy, apôtre.<br />

Tous les trois, élèves <strong>de</strong>puis cinq ans du séminaire St‐Sulpice, ont été admis au dia‐<br />

conat à Noël <strong>de</strong>rnier, ils ont subi pour lʹordination définitive lʹexamen canonique <strong>de</strong>vant<br />

lʹun <strong>de</strong> MM. les directeurs du séminaire, et présentement ils font à Issy la retraite qui doit<br />

les préparer à la consécration sacerdotale. Deux <strong>de</strong> ces jeunes gens, MM. Leclerc et Patti‐<br />

note, appartiennent à votre diocèse, le troisième, M.<br />

Lainé, originaire <strong>de</strong> celui <strong>de</strong> Coutances, a obtenu <strong>de</strong><br />

son Evêque le dimissoire et les autres permissions<br />

qui lui étaient nécessaires.<br />

En accordant la permission que nous<br />

sollicitons, Monseigneur, Votre Gran<strong>de</strong>ur comblera<br />

les vœux <strong>de</strong> nos jeunes aspirants et elle procurera, à<br />

nos œuvres quelques nouveaux ai<strong>de</strong>s dont elles ont<br />

le plus pressant besoin.<br />

Je supplie en même temps Votre Gran<strong>de</strong>ur<br />

<strong>de</strong> vouloir bien autoriser, pour faire lʹordination,<br />

Mgr Bigan<strong>de</strong>t, <strong>de</strong> la Congrégation <strong>de</strong>s Missions<br />

étrangères, Evêque titulaire <strong>de</strong> Ramatha, <strong>de</strong> passage<br />

à Paris, et qui a consenti à nous promettre son<br />

ministère, réserve faite <strong>de</strong> votre agrément.<br />

Veuillez recevoir, Monseigneur, les nouvelles<br />

assurances du profond respect <strong>avec</strong> lequel je suis,<br />

De Votre Gran<strong>de</strong>ur,<br />

Le très humble et très obéissant serviteur en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Ptre En haut <strong>de</strong> la lettre, réponse du v.g. Lagar<strong>de</strong>:<br />

Fiat ut petitur (qu’il soit fait comme <strong>de</strong>mandé).<br />

1574 à M. Maignen<br />

Attestation nécessaire pour un jeune employé <strong>de</strong> Vaugirard.<br />

[Vers le 20 août 1870]<br />

Mon cher ami et fils en N.S.,<br />

Notre jeune domestique, Victor Samson, qui figure sur la liste que jʹai remise à M.<br />

<strong>de</strong> Melun <strong>de</strong>s sujets proposés par nous pour lʹambulance, reçoit <strong>de</strong> son pays lʹavis quʹil y<br />

est appelé pour la gar<strong>de</strong> mobile et que le départ <strong>de</strong>s conscrits se fait aujourdʹhui même.<br />

1506


Il est tout à fait urgent quʹil obtienne <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Melun, et sans nul retard, une attes‐<br />

tation prouvant quʹil fait partie dʹun service sanitaire dépendant <strong>de</strong> lʹarmée; je vous prie<br />

donc <strong>de</strong> lui procurer cette pièce indispensable; sʹil ne la produit pas, il sera tenu et puni<br />

comme réfractaire.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1575 à M me et M lle Salva<br />

Situation générale <strong>de</strong> la France; Paris menacé; formation <strong>de</strong> l’ambulance volontaire.<br />

Vaugirard, samedi 20 août 1870<br />

Bien chères amies,<br />

Je ne vous ai point écrit ces temps <strong>de</strong>rniers; la situation générale <strong>de</strong> notre pays vous<br />

est connue comme à moi, je nʹavais rien à vous en apprendre; elle occupe si fort les esprits<br />

quʹon nʹa plus guère dʹattention pour les affaires privées. Vous êtes jusquʹici, vous autres,<br />

en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> lʹaction <strong>de</strong>s armées; elle se rapproche successivement <strong>de</strong> Paris et on semble<br />

assuré quʹelle sera bientôt autour <strong>de</strong> son enceinte.<br />

Pour ceux <strong>de</strong> notre maison, ne pouvant combattre, ils se sont enrôlés pour le service<br />

<strong>de</strong>s blessés. Une ambulance spéciale, qui nous a été confiée officiellement et qui se com‐<br />

pose exclusivement <strong>de</strong> nos ff. et <strong>de</strong> quelques religieux <strong>de</strong> Congrégations qui nous sont<br />

amies, partira mardi 23 pour rejoindre lʹarmée, je ne sais encore sur quel point; les <strong>de</strong>ux<br />

aumôniers qui lʹaccompagnent sont MM. Lantiez et Hello, que vous connaissez. Priez bien<br />

pour eux tous; leur mission est sainte et dévouée, mais elle a <strong>de</strong> graves dangers et aussi<br />

bien <strong>de</strong>s fatigues. Toutes nos maisons ici sont offertes au Gouvernement qui en disposera,<br />

sʹil y a lieu, pour les besoins du service public. Cʹest lʹheure du détachement <strong>de</strong> nous‐<br />

mêmes et <strong>de</strong> tout. Je crois que tout notre entourage y est bien disposé.<br />

M. Paillé, <strong>de</strong>vant conduire en province sa sœur qui <strong>de</strong>meure trop près <strong>de</strong>s fortifica‐<br />

tions, passera peut‐être pas loin <strong>de</strong> vous, à lʹoccasion <strong>de</strong> ce voyage; il se pourrait quʹen re‐<br />

venant il vous rendît visite. Je vous donne ce détail pour que vous soyiez sans inquiétu<strong>de</strong><br />

sʹil arrivait, quʹen effet, il vous donnât en passant <strong>de</strong> nos nouvelles; la chose est, du reste,<br />

fort incertaine.<br />

Adieu, bien chères amies, mettons‐nous bien entre les mains <strong>de</strong> Dieu. Offrez mes<br />

respects à M. le Curé et à vos amis.<br />

Votre frère et oncle dévoué<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1576 à M. dʹArbois<br />

Au sujet <strong>de</strong>s frères ambulanciers volontaires. Ne pas abandonner nos Œuvres pendant la guerre.<br />

Chaville, 21 août 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vois, par une lettre écrite par vous à M. <strong>de</strong> Varax, que je ne me serais pas assez<br />

expliqué relativement à la composition <strong>de</strong> lʹambulance spéciale que nous avons été autori‐<br />

sés à former pour les blessés <strong>de</strong> lʹarmée. Nous ne <strong>de</strong>vions y faire entrer que ceux <strong>de</strong> nos ff.<br />

1507


dont le départ était exigé par les décisions récentes du Gouvernement. Or, par votre lettre<br />

du 17 <strong>de</strong> ce mois, vous me dites vous‐même: lʹexemption obtenue par M. Ginet, lors du ti‐<br />

rage à la conscription, paraissant être maintenue, il nʹy a point à craindre quʹil soit appelé.<br />

Dʹun autre côté, les élèves <strong>de</strong>s grands séminaires étant aussi mis jusquʹici hors <strong>de</strong> cause,<br />

M. Perthuisot est également exempté. MM. Moutier et <strong>Léon</strong> Guichard ayant préféré se<br />

rendre à lʹarmée, je ne vois pas ce qui nous restait à faire <strong>de</strong> plus que nous nʹavons fait.<br />

Pour ce qui vous regar<strong>de</strong> personnellement, mon bien cher enfant, je nʹai vu dans votre of‐<br />

fre <strong>de</strong> vous joindre à lʹambulance que cette disposition, habituelle chez vous, <strong>de</strong> vous sa‐<br />

crifier au bien, <strong>de</strong> quelque façon que ce soit. Mais votre éloignement dʹAngers, dans les<br />

circonstances présentes, eût été la mort <strong>de</strong>s œuvres que vous dirigez et nous <strong>de</strong>vons ten‐<br />

dre, au contraire, à les conserver comme les autres, sinon florissantes, au moins vivaces et<br />

susceptibles <strong>de</strong> se relever après lʹorage. Jʹespère que nous y parviendrons; le Noviciat va se<br />

trouver plus effacé que les autres maisons, son personnel étant réduit presque à zéro, et la<br />

commune ayant accepté <strong>avec</strong> empressement lʹoffre dʹy faire un asile pour les blessés; ce‐<br />

pendant, quelques ff. y restent encore et, jusquʹà nouvelle nécessité, nous y maintenons les<br />

offices et messes ordinaires <strong>de</strong> la chapelle, pensant que cʹest la meilleure sauvegar<strong>de</strong> du<br />

foyer.<br />

Nous donnons seulement 15 ou 16 <strong>de</strong> nos ff. à lʹambulance, <strong>avec</strong> quelques membres<br />

<strong>de</strong>s Conférences ou <strong>de</strong> nos Cercles et quelques religieux Lazaristes, Spiritains et <strong>de</strong>s Mis‐<br />

sions Etrangères, 4 Sulpiciens, MM. Lantiez et Hello aumôniers; en tout 45, je crois. Lʹad‐<br />

ministration y ajoute, je pense, un autre prêtre, un pasteur, un chirurgien en chef, 12 ai<strong>de</strong>s<br />

chirurgiens, 6 soldats pour les fourgons, etc. Le départ aura lieu mercredi 24 438 ; je ne sais<br />

au juste si cʹest pour le côté <strong>de</strong> Metz ou autrement. Lʹengagement est pour tout le temps <strong>de</strong><br />

la guerre. Tous résisteront‐ils aux fatigues et aux dangers? Nous ne saurions le prévoir,<br />

mais je lʹespère; Dieu et la S te Vierge les gar<strong>de</strong>ront et, si quelquʹun venait à succomber, il<br />

aurait le mérite, dans les combats du Seigneur, dʹêtre mort les armes à la main.<br />

M. Ginet a <strong>de</strong>mandé instamment à <strong>de</strong>meurer à Angers jusquʹau mois dʹoctobre;<br />

vous me direz si vous y voyez quelque inconvénient.<br />

Pour M. Perthuisot, je désire toujours quʹil se prononce; veut‐il sérieusement être<br />

prêtre et religieux chez nous? Devons‐nous aviser à le maintenir sur la liste dʹun Evêque<br />

pour le sauver dʹun appel à lʹarmée?<br />

La poste part, je finis; on craint la venue <strong>de</strong> lʹennemi jusquʹà Paris; que la volonté <strong>de</strong><br />

la divine Sagesse sʹaccomplisse; pour nous, veillons et prions. On dit, dans nos maisons,<br />

quatre fois par jour: Sub tuum præsidium, <strong>avec</strong> trois fois: Auxilium christianorum.<br />

Votre affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Souvenirs à nos ff. Lʹordination jeudi 25 seulement. Priez pour les ordinands. Jʹavi‐<br />

serai, dès que possible, en ce qui touche M. Lainé [Ad.]<br />

1577 <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax à M. Chaverot,<br />

au nom <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Ordination <strong>de</strong> trois frères. L’ambulance est partie la veille. L’ennemi progresse vers Paris.<br />

438 Il eut lieu le jeudi 25.<br />

1508


Paris, vendredi 26 août 1870<br />

Mon bon frère,<br />

Nous venons <strong>de</strong> recevoir une double grâce du Sauveur.<br />

Hier, nos trois frères Leclerc, Pattinote et Ad. Lainé ont reçu lʹordination <strong>avec</strong> 16 au‐<br />

tres ordinands, tonsurés, minorés, sous‐diacres, et diacres, dans la chapelle <strong>de</strong> Vaugirard,<br />

<strong>de</strong>s mains <strong>de</strong> Mgr Bigan<strong>de</strong>t, Evêque <strong>de</strong> Ramatha, <strong>de</strong>s Missions Etrangères. Ce matin, les<br />

trois premières messes ont été célébrées <strong>avec</strong> gran<strong>de</strong> édification à Vaugirard, à Grenelle et<br />

à lʹAbbaye‐aux‐Bois.<br />

En outre, hier soir, une ambulance <strong>de</strong> la Société Internationale a pris le chemin <strong>de</strong><br />

fer du Nord et est partie, emmenant aux champs <strong>de</strong> bataille, auprès <strong>de</strong>s pauvres mourants<br />

ou blessés, une douzaine <strong>de</strong> nos frères et dʹautres bons serviteurs <strong>de</strong> Dieu: Séminaristes,<br />

frères <strong>de</strong> St Lazare, <strong>de</strong>s Missions Etrangères, <strong>de</strong> St <strong>Jean</strong> <strong>de</strong> Dieu et jeunes gens <strong>de</strong> nos œu‐<br />

vres, dont M. Lecoq dʹArras.<br />

Ainsi, en nous donnant <strong>de</strong> nouvelles forces, Dieu veut que tout dʹabord nous lui<br />

fassions hommage <strong>de</strong> ce petit surcroît dont il vient <strong>de</strong> nous favoriser.<br />

Vous nous ai<strong>de</strong>rez à lʹen remercier. Nous prions pour que vous soyez soutenus là‐<br />

bas au milieu <strong>de</strong> vos inquiétu<strong>de</strong>s, et pour que le Bon Dieu couvre <strong>de</strong> sa protection Notre<br />

Saint Père. Ici, Paris, malgré nos victoires <strong>de</strong>s 16 et 18, nʹest pas sans vives appréhensions.<br />

Lʹennemi se répand toujours plus près <strong>de</strong> nous, dans les campagnes <strong>de</strong> lʹAube et <strong>de</strong> la<br />

Marne. A la gar<strong>de</strong> <strong>de</strong> Dieu et <strong>de</strong> Marie!<br />

Adieu, mon bon frère en N.S. Mille souvenirs tendres à nos frères <strong>de</strong> Rome et à nos<br />

amis.<br />

Votre petit serviteur B. <strong>de</strong> Varax<br />

pr.f. S.V.P.<br />

Vous <strong>de</strong>vinez aisément que je vous écris au nom du bon Père Général, et cʹest <strong>de</strong> sa<br />

chambre que je le fais. Pendant la guerre, je suis <strong>de</strong>venu aumônier <strong>de</strong> Nazareth; MM. Lan‐<br />

tiez et Hello sont aux ambulances.<br />

1578 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Gar<strong>de</strong>r confiance en Dieu. Récit <strong>de</strong> la journée du 25 août.<br />

Vaugirard, 26 août 1870<br />

Madame la Marquise,<br />

Je vous ai suivie par la pensée et en sincère sympathie dans les courses fatiguantes<br />

et multipliées que vous avez dû faire pour exempter à tout prix votre cher fils du service<br />

militaire. Votre lettre me laisse en incertitu<strong>de</strong> sur le résultat obtenu; mais, après tant <strong>de</strong><br />

prières et aussi tant <strong>de</strong> démarches et <strong>de</strong> mouvements, on peut <strong>de</strong>meurer certain que lʹétat<br />

<strong>de</strong>s choses, quel quʹil soit, sera <strong>de</strong> Dieu et, conséquemment, pour le plus grand bien <strong>de</strong> vo‐<br />

tre cher fils. Ayons donc confiance et attendons la manifestation du <strong>de</strong>ssein <strong>de</strong> sa divine<br />

Sagesse.<br />

Je pense bien quʹ<strong>avec</strong> Madame dʹHurbal et <strong>avec</strong> tout votre entourage, vous suivez,<br />

non sans quelque inquiétu<strong>de</strong>, la marche <strong>de</strong>s faits politiques; ici à Paris, nous semblons au<br />

moment dʹen apprécier lʹimportance par les actes accomplis sous nos yeux, car on attend<br />

dʹun jour à lʹautre lʹennemi au pied <strong>de</strong>s murs <strong>de</strong> Paris; cette perspective est émouvante,<br />

mais on se tranquillise dans la pensée que Dieu tient tout dans sa main et quʹIl fera pen‐<br />

1509


cher la balance selon quʹIl lʹaura réglé dans sa Sagesse et dans sa Miséricor<strong>de</strong>. On prie<br />

beaucoup, mais pas assez encore, les âmes pieuses sont encore lentes à le faire; pour dé‐<br />

tourner <strong>de</strong> grands fléaux publics, il faut les gémissements et les supplications dʹun peuple<br />

tout entier.<br />

Je sais bien que votre chère maison nʹest pas <strong>de</strong>s moins empressées à se porter à ces<br />

pieux exercices; je prie <strong>de</strong> mon côté pour vous et, chaque jour, le S t Sacrifice est offert à vos<br />

intentions par lʹun <strong>de</strong> nos MM; on continuera, comme vous lʹavez <strong>de</strong>mandé, jusquʹau mois<br />

dʹoctobre. Jʹai reçu exactement les 100f pour les honoraires <strong>de</strong> ces messes.<br />

Vous apprendrez <strong>avec</strong> intérêt, ainsi que votre cher entourage, quʹhier trois jeunes<br />

diacres <strong>de</strong> notre Congrégation ont été ordonnés prêtres dans notre chapelle. Dix‐sept reli‐<br />

gieux, Jésuites ou Capucins, etc. ayant désiré prendre part à cette ordination, ceux qui ont<br />

été promus à divers <strong>de</strong>grés <strong>de</strong>s ordres se sont trouvés assez nombreux et ont fait <strong>de</strong> cette<br />

consécration une solennité vraiment imposante.<br />

Le même jour et à la même heure, lʹambulance que nous avions été autorisés à for‐<br />

mer <strong>avec</strong> <strong>de</strong>ux aumôniers <strong>de</strong> notre Congrégation, un certain nombre <strong>de</strong> ff. laïcs et quel‐<br />

ques autres religieux, prenait la direction vers lʹarmée pour le soin <strong>de</strong>s blessés <strong>avec</strong> le chi‐<br />

rurgien en chef 439 , les ai<strong>de</strong>s <strong>de</strong> chirurgie et quelques soldats pour la conduite <strong>de</strong>s fourgons;<br />

le personnel <strong>de</strong> lʹambulance se compose <strong>de</strong> 60 ou 65 hommes.<br />

Je recomman<strong>de</strong> tous ces intérêts spirituels ou <strong>de</strong> soins charitables à vos bons sou‐<br />

venirs <strong>de</strong>vant Dieu.<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, et partager <strong>avec</strong> ceux que vous aimez et que<br />

jʹhonore sincèrement, tous mes sentiments bien respectueux et bien dévoués en N.S.<br />

Votre humble serviteur et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1579 à M. dʹArbois<br />

Avis pour l’Œuvre d’Angers. Nouvelles <strong>de</strong> l’ambulance. Attente du siège <strong>de</strong> Paris.<br />

Vaugirard, 31 août 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Lainé [Adolphe] part aujourdʹhui pour se rendre près <strong>de</strong> vous; je ne sais si cʹest<br />

par lui ou par la poste que ce mot vous arrivera, sa rési<strong>de</strong>nce à Grenelle le tenant à dis‐<br />

tance et ses adieux mʹayant été faits hier au soir; il part en très bonnes dispositions.<br />

Je pense, comme vous, que les œuvres du patronage gagneront beaucoup à être sé‐<br />

parées <strong>de</strong> la Maîtrise.<br />

Pour le patronage <strong>de</strong>s Manufactures, je ne saurais donner un avis, ne me rendant<br />

pas compte <strong>de</strong> la valeur <strong>de</strong> M. Perthuisot comme agent <strong>de</strong> patronage; il serait mieux, en<br />

tout cas, que celui, quel quʹil soit, qui aurait cet emploi ne fût pas seul; si M. Ginet <strong>de</strong>vait<br />

rester à Angers, sa présence, sans être bien efficace comme action, le serait comme conseil<br />

et surveillance.<br />

Nous avons <strong>de</strong> bonnes nouvelles <strong>de</strong> nos ff. <strong>de</strong> lʹambulance; ils sont à Montmédy; ils<br />

sont dans lʹexercice <strong>de</strong> leurs fonctions; ils auront beaucoup à faire si la gran<strong>de</strong> bataille<br />

quʹon annonce a lieu.<br />

439 Le Docteur Després écrira l’histoire <strong>de</strong> la 7 e ambulance, ses marches et contremarches jusqu’à Sedan, <strong>avec</strong> ses « hommes » que<br />

« j’avais choisis, comptant sur l’esprit <strong>de</strong> discipline <strong>de</strong>s religieux, beaucoup plus fort que l’esprit <strong>de</strong> discipline militaire ».<br />

1510


Nous prions pour votre famille; cʹest une pénible position que dʹêtre en pays enne‐<br />

mi dans sa propre patrie.<br />

Nous avons congédié nos enfants orphelins bien à regret; il nous en reste encore<br />

une quarantaine.<br />

On est un peu moins sous le coup du Siège <strong>de</strong> Paris présentement, mais lʹincerti‐<br />

tu<strong>de</strong> sur ce point reste absolue; toute la banlieue est déserte, tout le mon<strong>de</strong> est rentré dans<br />

la ville; nous occupons Chaville, dont le personnel est fort réduit, jusquʹau <strong>de</strong>rnier signal<br />

<strong>de</strong> lʹarrivée <strong>de</strong> lʹennemi.<br />

Nous sommes préparés pour <strong>de</strong>s ambulances dans nos maisons, si le besoin le <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>.<br />

Adieu, mon bien cher ami, priez bien <strong>avec</strong> nos ff. plusieurs fois par jour pour la<br />

France et pour les âmes que la guerre, ou afflige douloureusement, ou envoie au tribunal<br />

<strong>de</strong> Dieu.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Affections à nos ff.<br />

1580 à M. dʹArbois<br />

Envoi d’une lettre pour le père Planchat.<br />

31 août 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

La petite lettre que je joins ici pour M. Perthuisot ne <strong>de</strong>vrait lui être remise que si<br />

vous êtes, en effet, dʹavis quʹon pourrait lui faire franchir un pas dans les ordres.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Le pasteur protestant sʹest trouvé très à lʹaise <strong>avec</strong> M. Lantiez; il est croyant,<br />

sincère dans la ligne restreinte où il est placé.<br />

1581 à M. Chaverot<br />

Du fait <strong>de</strong> la guerre (évacuation <strong>de</strong> Rome par les Français le 5 août, l’armée piémontaise est aux portes <strong>de</strong> la<br />

Ville), la situation est difficile pour nos Œuvres. Surveillance nécessaire du personnel. Dieu mène tout à bonne<br />

fin. Nouvelles <strong>de</strong> Paris.<br />

Vaugirard, 31 août 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu <strong>avec</strong> satisfaction votre <strong>de</strong>rnière lettre, comme toutes celles qui lʹont précé‐<br />

dée. Elle porte, ainsi quʹil est ordinaire dans les choses humaines, le bien à côté du mal.<br />

Nous regrettons bien <strong>avec</strong> vous les défections dans la Légion; mais Dieu gar<strong>de</strong>ra lui‐même<br />

son Vicaire sur la terre et montrera une fois <strong>de</strong> plus que lʹaction <strong>de</strong>s hommes nʹest quʹun<br />

semblant <strong>de</strong> force et que tout notre secours est en Lui seul.<br />

Pour la nomination dʹun nouvel aumônier à la Légion, nous ne nous en plaindrons<br />

pas, sʹil sʹy fait plus <strong>de</strong> bien quʹauparavant. Je vais mʹoccuper <strong>de</strong> lʹobédience.<br />

1511


Je ne goûte guère la pensée dʹenvoyer M. Jouin seul à lʹhôpital, il y fera <strong>de</strong>s connais‐<br />

sances et relations en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> toute surveillance; quʹil aille dans les églises pour lʹadora‐<br />

tion, bien, et quʹil ren<strong>de</strong> compte <strong>de</strong> ses courses; on ne saurait se fier à lui tant quʹil man‐<br />

quera dʹouverture et <strong>de</strong> sincérité <strong>avec</strong> ses Supérieurs.<br />

Je comprends vos difficultés dans les circonstances présentes; faites ce que le bon<br />

Seigneur vous inspirera <strong>de</strong> faire, dites ce quʹIl vous suggérera <strong>de</strong> dire; quand on a prié,<br />

quʹon a consulté Dieu et quʹon agit en son nom, il faut aller <strong>avec</strong> confiance, Il travaille <strong>avec</strong><br />

nous et mène toute chose à bonne fin.<br />

Ici, vous en savez presque autant que nous; on attendait <strong>de</strong> jour en jour la venue<br />

<strong>de</strong>s Prussiens autour <strong>de</strong> Paris; ils se sont un peu éloignés, mais, si notre armée ne rem‐<br />

porte pas <strong>de</strong>s avantages considérables, ils seront ici dans quelques jours. Nous avons dû<br />

congédier nos enfants; il en reste seulement 40 environ qui nʹavaient point dʹasile.<br />

Nous avons <strong>de</strong> bonnes nouvelles <strong>de</strong> nos ff. <strong>de</strong>s ambulances; ils sont à Montmédy en<br />

exercice <strong>de</strong> leurs fonctions. Nos œuvres, amoindries, subsistent néanmoins; nous gardons<br />

jusquʹici nos positions partout. Chaville, réduit à un imperceptible personnel, <strong>de</strong>vra être<br />

évacué si les ennemis entourent Paris. Nous avons offert toutes nos maisons pour les am‐<br />

bulances.<br />

Le Comité se plaint <strong>de</strong> nʹavoir aucun détail sur la situation <strong>de</strong>s Cercles.<br />

Adieu, mon bien cher enfant; recevez, <strong>avec</strong> nos ff., tous mes sentiments <strong>de</strong> tendre<br />

dévouement en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1582 à M. Caille<br />

Appréciations sur MM. Pattinote et Trousseau. Que la bonne entente règne entre tous les membres <strong>de</strong> la com‐<br />

munauté.<br />

Vaugirard, 31 août 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Le départ <strong>de</strong> M. Lantiez et celui <strong>de</strong> M. Gérold faisant un grand vi<strong>de</strong> dans vos œu‐<br />

vres, jʹenvoie pour vous ai<strong>de</strong>r, à la fois rue <strong>de</strong> Noyon et à lʹOrphelinat, M. lʹabbé Pattinote,<br />

nouvellement promu au sacerdoce. Son bon esprit, lʹaménité <strong>de</strong> son caractère et une assez<br />

gran<strong>de</strong> pratique acquise <strong>de</strong> longue main dans les œuvres me laissent espérer quʹil pourra<br />

rendre à Amiens <strong>de</strong> véritables services.<br />

Je compte toujours sur votre dévouement et sur votre pru<strong>de</strong>nce chrétienne pour<br />

appuyer M. Trousseau, sans nuire à cette liberté dʹaction dont il a besoin plus quʹun autre<br />

et dont il est très, et peut‐être trop jaloux; cʹest un faible que lʹexpérience et le temps guéri‐<br />

ront, mais qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> présentement quelque ménagement. Votre charité saura sʹy prê‐<br />

ter; à cette condition, je crois que M. Trousseau peut relever et asseoir fermement les <strong>de</strong>ux<br />

œuvres du patronage et <strong>de</strong>s jeunes ouvriers et <strong>de</strong> lʹorphelinat, lesquelles ont souffert <strong>de</strong>s<br />

changements que les circonstances ont rendus nécessaires dans leur direction. Il importe<br />

dʹéviter <strong>de</strong> nouvelles mutations qui achèveraient <strong>de</strong> ruiner ces Institutions si gran<strong>de</strong>ment<br />

utiles.<br />

1512


Je sais combien vous acceptez généreusement toutes sortes <strong>de</strong> sacrifices dans lʹinté‐<br />

rêt du bien; je compte donc que vous ferez tout ce qui dépendra <strong>de</strong> vous pour que la<br />

bonne entente règne entre tous les membres <strong>de</strong> la petite communauté dʹAmiens.<br />

Croyez bien, mon cher ami, à tous mes sentiments bien affectueux.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1583 à M. dʹArbois<br />

Intérêt pour les besoins financiers <strong>de</strong> la maison d’Angers. Mesures prises en prévision du siège <strong>de</strong> Paris. Vaugi‐<br />

rard sans doute occupée pour loger les gar<strong>de</strong>s mobiles. «Le présent est triste, l’avenir est menaçant» ; soumission<br />

à la Provi<strong>de</strong>nce.<br />

Chaville, 5 septembre 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Les graves événements <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rniers jours mʹobligent à vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong> surseoir<br />

provisoirement au changement <strong>de</strong> MM. Gauffriau, Perthuisot et Ginet; cette mesure sera<br />

aisément expliquée par ceux qui vous entourent, à raison <strong>de</strong>s circonstances où nous nous<br />

trouvons. Quelque temporaire quʹelle soit, elle causera quelque charge à la maison dʹAn‐<br />

gers; vous mʹen direz lʹimportance et je mʹempresserai <strong>de</strong> vous in<strong>de</strong>mniser. Jʹai prié M.<br />

Lainé <strong>de</strong> vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si je restais re<strong>de</strong>vable <strong>de</strong> quelque dépense à la communauté<br />

dʹAngers.<br />

Je nʹai que peu <strong>de</strong> choses à vous dire sur notre situation; nous jetons nos sollicitu<strong>de</strong>s<br />

dans le sein <strong>de</strong> Dieu.<br />

Nous allons abandonner Chaville dès que lʹennemi sera peu éloigné <strong>de</strong> Paris; on<br />

parle dʹenlever les rails du chemin <strong>de</strong> fer; nous <strong>de</strong>vrons prévenir cette disposition.<br />

Nos enfants <strong>de</strong> Vaugirard, sauf 35, sont partis; une vingtaine partira encore si le<br />

siège <strong>de</strong> Paris se fait, comme tout lʹannonce. Un officier ou plusieurs sont venus plusieurs<br />

fois prendre <strong>de</strong>s mesures pour préparer lʹétablissement dʹune partie <strong>de</strong>s gar<strong>de</strong>s mobiles<br />

dans les bâtiments <strong>de</strong> lʹorphelinat; nous ne savons si le nouveau Gouvernement adoptera<br />

cette mesure; nous espérons que, en ce cas, on nous laisserait au moins les bâtiments oc‐<br />

cupés par la Communauté <strong>avec</strong> la cuisine et lʹinfirmerie; nous attendons la décision.<br />

Le présent est triste, lʹavenir est menaçant, mais nous irons au jour le jour, selon que<br />

Dieu daignera nous conduire, pleins <strong>de</strong> confiance et <strong>de</strong> soumission aux <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> sa di‐<br />

vine Sagesse.<br />

La <strong>de</strong>rnière lettre <strong>de</strong> notre ambulance était datée <strong>de</strong> Belgique, où elle avait été<br />

contrainte <strong>de</strong> se réfugier au moment <strong>de</strong> la bataille <strong>de</strong> Carignan; je pense quʹelle a repris<br />

son service, bien nécessaire, après les cruels massacres <strong>de</strong> cette terrible affaire.<br />

Les santés se soutiennent ici, dites‐moi quʹil en est ainsi chez vous. Nous sommes<br />

dans lʹattente <strong>de</strong> nouveaux appels pour le service; la guerre dévore maintenant <strong>de</strong>s nations<br />

entières.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1513


1584 à M. Caille<br />

Après la capitulation à Sedan (2 septembre), et la déchéance <strong>de</strong> l’Empire (le 4), le siège <strong>de</strong> Paris est inévitable.<br />

MLP. déci<strong>de</strong> l’éloignement <strong>de</strong> plusieurs frères. Sérénité au milieu <strong>de</strong> l’épreuve que «le Seigneur impose à notre<br />

France. »<br />

Paris‐Vaugirard, 9 septembre 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Le siège, maintenant inévitable, <strong>de</strong> Paris par lʹennemi nous paraît <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r lʹéloi‐<br />

gnement <strong>de</strong> tous ceux <strong>de</strong> nos ff. qui ne sont pas absolument nécessaires pour la gar<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

nos maisons; nous en avons distribué plusieurs <strong>de</strong> divers côtés. Je vous adresse, dans cette<br />

même pensée, M. Barthélemy [Marchand] et M. Frézet, mʹengageant expressément à ne<br />

pas laisser à votre maison la charge <strong>de</strong> leur dépense; ils vous remettront dès ce moment, à<br />

leur arrivée, ce qui leur restera <strong>de</strong> la petite somme à eux remise pour leur voyage.<br />

Nous inclinons la tête, en toute soumission, sous lʹépreuve que le Seigneur impose à<br />

notre France et à tous ceux qui lʹhabitent; espérons que nos prières et notre résignation dé‐<br />

tourneront les fléaux que la guerre semble encore nous promettre.<br />

Croyez bien, mon cher ami, que nous ne vous oublions pas <strong>de</strong>vant Dieu; priez aussi<br />

pour nous, afin que lʹaffliction ne fasse quʹaccroître notre charité réciproque.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1585 à M. J. Faÿ<br />

Préparatifs du siège <strong>de</strong> Paris. Installation du Noviciat à Tournay.<br />

Vaugirard, 11 septembre 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Votre lettre nous a fort réjouis et rassurés; nous bénissons Dieu qui vous a conduits<br />

par la main jusquʹà votre <strong>de</strong>stination et qui vous a fait trouver sur votre route lʹappui si<br />

bienveillant <strong>de</strong> M. Lefort. Jʹai écrit à ce bon Monsieur pour le remercier et, en même temps,<br />

pour lui recomman<strong>de</strong>r nos six novices: MM. Magnien, Coquerel, Vialloux, Pialot, Lepage<br />

et Prévost, partis dʹici le 9 pour vous rejoindre; jʹespère quʹils sont près <strong>de</strong> vous, arrivés<br />

sans encombre.<br />

Je ne sais sʹils pourront aussi trouver place <strong>avec</strong> vous au séminaire [<strong>de</strong> Tournay].<br />

Vous ne mʹavez pas dit si cʹétait à titre provisoire que vous y avez été reçus, ni<br />

comment vous vous procurez la nourriture.<br />

Peut‐être pourrez‐vous communiquer <strong>avec</strong> nos ff. <strong>de</strong> lʹambulance, présentement à<br />

Sedan. Je viens <strong>de</strong> leur écrire à cette adresse quʹils me donnent: M. Pierre Dutilleux, pour<br />

remettre à M. lʹabbé Lantiez, poste restante, à Bouillon (Belgique); mais je crois quʹils nʹen‐<br />

voient chercher les lettres que quand ils sont prévenus. Je ne sais à quelle distance Bouil‐<br />

lon se trouve <strong>de</strong> Tournay.<br />

Lʹennemi nʹest pas encore aux portes <strong>de</strong> Paris; il semble aller en sens divers sur sa<br />

route pour rançonner et affamer les villes; on dit quʹil veut dépouiller la contrée autour <strong>de</strong><br />

Paris et le prendre ensuite par la famine.<br />

Nous avons envoyé MM. Frézet et Barthélemy [Marchand] à Amiens; MM. Plan‐<br />

chat, Deny, Camille [Dupit] <strong>de</strong>meurent à Ste ‐Anne. Nous avons gardé encore vingt enfants<br />

1514


provisoirement et dix apprentis ou persévérants; nous verrons ce que les circonstances<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>ront, nous allons au jour le jour.<br />

Je vous ai envoyé M. Coquerel pour quʹil vous serve dʹéconome; il était exposé à<br />

être pris journellement pour le service militaire.<br />

Je vous recomman<strong>de</strong> <strong>de</strong> tenir bien sûrement enfermées les pièces que je vous ai re‐<br />

mises.<br />

Tous les jours, nous prions fidèlement pour nos ff. dispersés, espérant que Dieu<br />

nous réunira tous un jour; mais que les réunions <strong>de</strong> la terre sont faciles à rompre! Heureu‐<br />

sement, viendra un jour la bienheureuse réunion du Ciel qui durera sans fin ni brisement.<br />

Je vous embrasse tous dans les Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M. Ecrivez‐moi vite pour<br />

mʹôter toute inquiétu<strong>de</strong> au sujet <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rniers partis; jʹai besoin <strong>de</strong> les savoir près <strong>de</strong> vous.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Offrez mes respects aux vénérables prêtres qui vous ont accueillis, à M. le Supérieur<br />

en particulier.<br />

1586 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Deman<strong>de</strong>s <strong>de</strong> nouvelles <strong>de</strong> son entourage. Chronique <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rniers événements.<br />

Vaugirard, 11 septembre 1870<br />

Madame la Marquise,<br />

Le facteur mʹayant dit que la poste allait, dʹun jour à lʹautre interrompre son service,<br />

je profite du <strong>de</strong>rnier moment où elle reste libre pour mʹinformer <strong>de</strong> votre situation et <strong>de</strong><br />

celle <strong>de</strong> tout ce qui vous est cher, particulièrement votre bien‐aimée mère et votre cher fils.<br />

Je nʹose espérer que vous soyez tranquille, car qui est en repos en ce moment? Jʹen‐<br />

tendais dire hier que lʹennemi voulait faire du Havre et <strong>de</strong> Rouen une sorte dʹentrepôt<br />

pour les substances quʹil veut recueillir en dépouillant les villes et les provinces et, après<br />

1515


avoir ravagé les environs <strong>de</strong> Paris, le prendre par la famine. Que cette haine acharnée <strong>de</strong>s<br />

hommes les uns contre les autres est cruelle et sʹéloigne <strong>de</strong> lʹesprit chrétien! Mais il paraît<br />

que ce grand fléau, prévu par la Sagesse divine et permis par Elle, est ramené plus tard à<br />

<strong>de</strong>s fins miséricordieuses où le bien est tiré du mal; puisse le jour où cette vérité se mani‐<br />

festera pour nous ne guère tar<strong>de</strong>r à paraître!<br />

Ici, on est dans lʹattente <strong>de</strong> lʹimminente invasion <strong>de</strong>s ennemis autour <strong>de</strong> Paris. Jʹai<br />

dû envoyer à Tournay <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> nos prêtres [Faÿ et Baumert] <strong>avec</strong> quelque reste <strong>de</strong> nos<br />

étudiants, 12 en tout. On les a accueillis provisoirement au séminaire, je ne sais pour com‐<br />

bien <strong>de</strong> temps ni à quelles conditions. Si M. <strong>de</strong> Caulaincourt était à Lille, je le prierais <strong>de</strong><br />

les recomman<strong>de</strong>r à ses amis <strong>de</strong> Tournay, non pour leurs besoins propres, mais pour les<br />

mettre à même <strong>de</strong> se rendre un peu utiles.<br />

Nous avons dû abandonner notre Maison <strong>de</strong> Chaville qui ne sera point garantie<br />

contre les incursions. Ici, on prend le grand bâtiment <strong>de</strong> notre orphelinat <strong>de</strong> Vaugirard<br />

pour loger <strong>de</strong>s troupes. Je ne sais si on nous laissera la partie où nous nous sommes réfu‐<br />

giés, vers la chapelle; nous nʹavons plus que 30 enfants qui nʹont pas été repris par leurs<br />

protecteurs.<br />

Vous ne me savez pas mauvais gré, Madame la Marquise, dʹentrer dans ces détails;<br />

vous accor<strong>de</strong>z à nous et à nos œuvres un intérêt tout aimable qui me permet <strong>de</strong> vous dire<br />

en quel état nous sommes; pour lʹavenir, nous ne saurions le prévoir, même jusquʹau len‐<br />

<strong>de</strong>main.<br />

Veuillez partager <strong>avec</strong> votre cher entourage tous les sentiments <strong>de</strong> respect et dʹatta‐<br />

chement dévoué <strong>de</strong><br />

Votre très humble serviteur et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

lettre.<br />

P. S. Pardonnez‐moi dʹomettre, par pru<strong>de</strong>nce, votre titre sur lʹenveloppe <strong>de</strong> cette<br />

1587 à M. Trousseau<br />

Le siège <strong>de</strong> Paris. Mesures à prendre pendant la guerre. Esprit <strong>de</strong> foi et <strong>de</strong> charité.<br />

Vaugirard, 12 septembre 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai répondu à votre <strong>de</strong>man<strong>de</strong> dʹhonoraires <strong>de</strong> messes en me concertant <strong>avec</strong> M.<br />

Planchat, qui vous en a envoyé un certain nombre. Si vous veniez à en manquer <strong>de</strong> nou‐<br />

veau, je tâcherais dʹy pourvoir encore.<br />

La vue <strong>de</strong> ce qui se passe ici, où on dispose pour les besoins publics et les logements<br />

militaires <strong>de</strong>s locaux appartenant aux institutions charitables, divers renseignements aussi<br />

qui mʹarrivent, me persua<strong>de</strong>nt que vous ne serez pas exempts à Amiens <strong>de</strong> cette réquisi‐<br />

tion et que lʹorphelinat <strong>de</strong> St ‐Jacques, en particulier, sera pris pour une ambulance; il serait<br />

donc à propos <strong>de</strong> songer aux moyens quʹon aurait à prendre en ce cas. Je ne sais si, en ré‐<br />

unissant les enfants <strong>de</strong> lʹorphelinat à la maison <strong>de</strong> la rue <strong>de</strong> Noyon, on y trouverait assez<br />

<strong>de</strong> place pour y caser tout le personnel <strong>de</strong>s œuvres; si on <strong>de</strong>vait être trop à lʹétroit, il serait<br />

à propos dʹexaminer comment on pourrait caser les apprentis, soit chez leurs parents, soit<br />

chez leurs maîtres. Dites‐moi ce que vous en pensez; au point <strong>de</strong> vue du bien général, gar‐<br />

1516


<strong>de</strong>r tous ceux que vous protégez, sous quelque forme que ce soit, serait le mieux assuré‐<br />

ment; mais, si cʹétait risquer <strong>de</strong> mal faire les choses en voulant trop en embrasser, on <strong>de</strong>‐<br />

vrait se résigner à cette suppression. Je vous prie, mon cher ami, dʹexaminer cette question<br />

qui va se présenter immanquablement, jʹen ai <strong>de</strong>s indices assurés.<br />

M. Pattinote se case‐t‐il? Commence‐t‐il à avoir ses occupations et son règlement un<br />

peu tracé? Je pense quʹil mʹécrira quand il se sentira un peu assis.<br />

Jʹespère que vous êtes, en province, un peu plus tranquilles quʹon ne lʹest à Paris;<br />

nous traversons <strong>de</strong>s temps bien difficiles; tenons‐nous à la hauteur <strong>de</strong> nos épreuves par<br />

lʹesprit <strong>de</strong> foi et <strong>de</strong> charité, et en nous prêtant à tous les sacrifices que la vue du bien sem‐<br />

blera nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r: patience, support, bienveillance et dévouement pour nos frères,<br />

amour <strong>de</strong> Dieu par <strong>de</strong>ssus tout.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1588 à M. dʹArbois<br />

Réponses à diverses questions posées par M. d’Arbois.<br />

Vaugirard, 14 septembre 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je trouve, sur mon registre, que M. Moutier a prononcé <strong>de</strong>s vœux <strong>de</strong> 3 ans le 1er sep‐<br />

tembre 1865, 2° le 3 octobre 1868, <strong>de</strong> 3 ans encore; il lui resterait donc, pour se libérer régu‐<br />

lièrement, un engagement dʹune année.<br />

Je trouve bien que le jeune Gauthier fasse son postulat près <strong>de</strong> vous; M. <strong>de</strong> Varax<br />

avait déjà eu mon consentement.<br />

Merci pour la maison généreusement offerte par le bienfaiteur; pour le moment, je<br />

nʹen sens pas le besoin, il se peut que bientôt la nécessité se prononce.<br />

Je vous ai dit, je crois, que les restes du noviciat <strong>avec</strong> <strong>de</strong>ux ou trois ff. laïcs, avaient<br />

trouvé asile en Belgique; je ne vois rien <strong>de</strong> précis pour les autres; nous préparons partout<br />

<strong>de</strong>s ambulances.<br />

Affections à tous.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1589 à M. Trousseau<br />

Sur le personnel <strong>de</strong> la communauté d’Amiens; organisation <strong>de</strong>s Œuvres en fonction <strong>de</strong>s circonstances. Les portes<br />

<strong>de</strong> Paris viennent d’être fermées.<br />

Vaugirard, 15 septembre 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Thuillier avait <strong>de</strong>mandé directement à lʹArchevêché lʹirritation <strong>de</strong> ses vœux, je<br />

ne me souviens pas à quelle condition elle lui fut accordée. Je pense quʹon ne ferait aucune<br />

difficulté, sur une réclamation motivée faite par lui, dʹaccor<strong>de</strong>r une modification aux ré‐<br />

serves <strong>de</strong> la libération quʹon lui avait octroyée.<br />

1517


Je vous ai écrit relativement à la translation <strong>de</strong>s orphelins à la rue <strong>de</strong> Noyon. M. <strong>de</strong><br />

Varax serait dʹavis, quant à lui, <strong>de</strong> faire tous les efforts possibles pour les maintenir là où<br />

ils sont; la chose semble bien difficile.<br />

Je pense que, si M. Dufour ne va pas bien et ne veut pas marcher dans lʹobéissance,<br />

le mieux quʹil eût à faire serait <strong>de</strong> sʹengager dans la gar<strong>de</strong> nationale; en tout cas, vous<br />

pourriez, <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> M. Caille, lʹinviter à chercher hors <strong>de</strong> chez nous une autre posi‐<br />

tion.<br />

Il faut encourager M. Barthélemy [Marchand]; cʹest un honnête enfant, nous avons<br />

été très contents <strong>de</strong> lui ici.<br />

Rien <strong>de</strong> nouveau chez nous; on ferme les portes <strong>de</strong> Paris aujourdʹhui; je ne sais si la<br />

poste marchera encore <strong>de</strong>main; la situation va <strong>de</strong>venir <strong>de</strong> jour en jour plus critique; que<br />

Dieu et la S te Vierge daignent nous y ai<strong>de</strong>r. Soutenons‐nous réciproquement par la prière.<br />

Votre tout dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je reçois à lʹinstant vos <strong>de</strong>ux lettres; je crois que le <strong>de</strong>rnier parti proposé par M.<br />

Caille est acceptable et dégagera la maison <strong>de</strong> Noyon; mais le jeune ouvrier logeant rue<br />

<strong>de</strong>s Wattelets viendrait‐il fidèlement, les dimanches et fêtes, aux réunions <strong>de</strong> la rue <strong>de</strong><br />

Noyon? Il serait bien désirable que les œuvres ne fussent point atteintes, jʹespère quʹil en<br />

sera ainsi, si vous montrez un peu <strong>de</strong> conciliation et <strong>de</strong> patience, vertus bien chères à N.S.<br />

et qui nous attireront le secours <strong>de</strong> sa grâce. Pour la chapelle <strong>de</strong> la rue <strong>de</strong>s Wattelets, rien à<br />

faire provisoirement; quand on saura précisément quel en sera lʹaumônier, nous verrons<br />

ce que le cas <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ra.<br />

Affections à M. Pattinote.<br />

1589‐1 à Mère Gertru<strong>de</strong> 440<br />

Sollicitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> MLP. pour une communauté <strong>de</strong> religieuses.<br />

Exhortation à se confier en la Provi<strong>de</strong>nce.<br />

Vaugirard, 16 septembre 1870<br />

Ma Mère,<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> une gran<strong>de</strong> satisfaction que vous<br />

avez trouvé un asile à Versailles sous la protection <strong>de</strong><br />

Mgr [Mabile] lʹEvêque et que les moyens <strong>de</strong> vous<br />

soutenir paraissent ne pas <strong>de</strong>voir vous manquer. Cʹest<br />

une preuve <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> lʹassistance que Dieu donne à ceux<br />

qui se dévouent à Lui et qui ne per<strong>de</strong>nt pas confiance<br />

dans le temps <strong>de</strong> lʹépreuve.<br />

Jʹapprouve bien la pensée charitable que vous<br />

avez <strong>de</strong> prêter secours à vos sœurs dʹArgenteuil; je les<br />

fais avertir sans aucun retard <strong>de</strong> la disposition où vous êtes<br />

<strong>de</strong> les recevoir près <strong>de</strong> vous, je pense quʹelles vont en<br />

profiter. Il paraît seulement que les Sœurs <strong>de</strong> Grenelle<br />

440 Supérieure <strong>de</strong>s Sœurs Servantes du Sacré-Cœur, fondées par le père Braun. Celui-ci, alors à St-Avold, dans l’Est <strong>de</strong> la France, est<br />

suppléé par MLP. Mais le siège <strong>de</strong> Paris, complet le 19 septembre, a dû couper toute relation <strong>avec</strong> Argenteuil et Versailles.<br />

1518


voient quelque difficulté à gar<strong>de</strong>r les enfants qui seraient en ce moment une gran<strong>de</strong> charge<br />

pour elles. Si elles ne pouvaient en effet sʹen charger, il me semble, quʹayant quelques res‐<br />

sources assurées par la gar<strong>de</strong> <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s, vous pourriez sans impru<strong>de</strong>nce accepter ce<br />

far<strong>de</strong>au, la provi<strong>de</strong>nce vous ai<strong>de</strong>rait certainement à soutenir ces enfants qui sont tout à fait<br />

sans appui dans le mon<strong>de</strong>!<br />

Je prie Dieu, ma mère, <strong>de</strong> vous bénir ainsi que vos chères filles et <strong>de</strong> vous confirmer<br />

toutes dans lʹesprit <strong>de</strong> votre sainte vocation.<br />

Je suis en N.S., bien sincèrement,<br />

Votre humble et dévoué serviteur Le <strong>Prevost</strong><br />

P tre<br />

1590 à M. dʹArbois<br />

A propos <strong>de</strong>s frères Moutier et Gauffriau. MLP. refuse <strong>de</strong> quitter Paris, où il peut «s’occuper encore un peu effi‐<br />

cacement pour le bien» <strong>de</strong> la Congrégation.<br />

Vaugirard, 18 septembre 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Moutier fait mal ses calculs; il nʹest pas entré chez nous en 1861, mais en janvier<br />

1862. MM. Audrin et Chaffaut, entrés la même année que lui et à quelques mois <strong>de</strong> dis‐<br />

tance, témoignent lʹun et lʹautre <strong>de</strong> lʹexactitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> cette date. Le registre <strong>de</strong> lʹéconomat,<br />

dressé sur un bulletin rempli par M. Moutier lui‐même, porte la même indication. Ce<br />

même registre, confronté <strong>avec</strong> celui que je tiens personnellement, porte: Entrée M. Audrin<br />

5, et moi 6 janvier 1862. Vœux: 10 octobre 1863, 1 an — 8 octobre 1864, 1 an — septembre<br />

1865, 3 ans — 3 octobre 1868, 3 ans. Ces témoignages et ces inscriptions sont incontesta‐<br />

bles; je pourrais ajouter dʹautres preuves si celles‐là nʹétaient suffisantes.<br />

Pour M. <strong>Jean</strong> Gauffriau, je nʹai reçu aucune lettre <strong>de</strong> lui, je nʹai pas à prendre les <strong>de</strong>‐<br />

vants; sa conduite me servira <strong>de</strong> règle, il faudrait quʹelle fût bien mesurée pour me rassu‐<br />

rer sur son avenir et sur sa vocation pour <strong>de</strong>meurer parmi nous.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> vos affectueuses instances pour un séjour plus ou moins long à<br />

faire par moi à Angers. Jʹy serais bien peu utile; ici, je suis dans un point central où je puis<br />

mʹoccuper encore un peu efficacement pour le bien <strong>de</strong> notre petite famille; je ne saurais<br />

dʹailleurs déserter un poste qui peut offrir quelque danger et où je laisserais <strong>de</strong>rrière moi<br />

beaucoup <strong>de</strong> nos ff.<br />

La guerre commence autour <strong>de</strong> Paris; nous voilà au moment critique; puisse le Sei‐<br />

gneur tirer un bien pour les âmes <strong>de</strong> cette gran<strong>de</strong> épreuve si pénible à la nature; sʹil en est<br />

ainsi, comme nous le <strong>de</strong>vons espérer, inclinons la tête <strong>avec</strong> une amoureuse soumission.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹai <strong>de</strong>s nouvelles satisfaisantes <strong>de</strong> nos ff. dispersés. Cordiales affections à nos ff.<br />

dʹAngers. Vous dois‐je quelque chose pour lʹun ou lʹautre dʹeux?<br />

1591 à M. Leclerc<br />

Proposition du maire du 15 e arrondissement <strong>de</strong> Paris <strong>de</strong> reprendre le fourneau économique <strong>de</strong> Grenelle. MLP. s’y<br />

montre favorable.<br />

1519


Vaugirard, 23 septembre 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. le Maire du XVe arrondissement me fait <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r par M. Roussel, Secrétaire <strong>de</strong><br />

la mairie chargé du Bureau <strong>de</strong> Bienfaisance, <strong>de</strong> lui cé<strong>de</strong>r notre fourneau <strong>de</strong> Grenelle, assu‐<br />

rant quʹil lui fera produire un bien infiniment plus grand quʹil nʹen fait actuellement, les<br />

subventions dont il dispose le mettant à même <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s sacrifices que nous ne pouvons<br />

nous imposer.<br />

Les résultats si médiocres, en effet, du fourneau <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Grâce, et le succès si ré‐<br />

el <strong>de</strong> celui <strong>de</strong> la mairie qui donne 3.000 portions abondantes et saines chaque jour sont une<br />

double assurance quʹil y aurait pour les pauvres, si nombreux aujourdʹhui, un véritable<br />

avantage à ce que la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> M. le Maire fût agréée. Je nʹhésiterais donc pas pour ma<br />

part à y adhérer, dʹautant que M. Roussel mʹa paru être <strong>de</strong> tous points un homme respec‐<br />

table, sincère et animé <strong>de</strong>s meilleures intentions. Je crois aussi que lʹAdministration, qui<br />

nous fait cette proposition dans les termes les plus convenables, nous saurait mauvais gré<br />

<strong>de</strong> préférer, dans lʹintérêt <strong>de</strong> nos influences propres, notre action dans cette œuvre à celle<br />

<strong>de</strong> la commune, mieux posée que nous aujourdʹhui pour servir efficacement les classes<br />

souffrantes.<br />

Je vous prie <strong>de</strong> voir M. Decaux sans retard, ou dʹenvoyer vers lui M. Bérard si vous<br />

ne pouvez vous absenter, afin <strong>de</strong> me mettre à même <strong>de</strong> faire à M. le Maire la prompte ré‐<br />

ponse quʹil attend <strong>de</strong> nous.<br />

Votre tout dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

La mairie trouve que les Sœurs chargées <strong>de</strong> votre fourneau ne le tiennent pas bien;<br />

les Sœurs <strong>de</strong> S t ‐André, qui soignent celui <strong>de</strong> lʹAdministration, paraissent être beaucoup<br />

plus habiles.<br />

1592 à M. Chaverot<br />

Courrier envoyé <strong>de</strong> Paris à Rome par ballon. Le départ <strong>de</strong> Rome est envisagé. Pour MLP. l’avenir est sombre,<br />

« parce qu’on ne prie pas assez. Là serait le salut».<br />

Vaugirard, 4 octobre 1870<br />

Chers amis,<br />

A tout hasard, je vous écris ces mots; les correspondances qui se font par les ballons<br />

vous feront peut‐être parvenir ce témoignage <strong>de</strong> notre souvenir.<br />

Si vous ne pouvez rester à Rome441 , vous pourriez aller à Angers, où une petite mai‐<br />

son nous a été offerte comme refuge, ou bien à Tournay (Belgique), où M. Faÿ et nos jeu‐<br />

nes étudiants ont trouvé asile. Si vous manquez dʹargent, empruntez et, Dieu aidant, je<br />

couvrirai votre <strong>de</strong>tte. Si vous pouvez attendre à Rome sans inconvénient, ce serait peut‐<br />

être moins <strong>de</strong> dérangement; avisez.<br />

Paris est assiégé, cerné, on nʹy peut entrer; il y a <strong>de</strong>s combats partiels tous les jours,<br />

mais nous ne sommes quʹaux commencements <strong>de</strong> la lutte suprême.<br />

441 Le 20 septembre, les frères <strong>de</strong> la Villa Strozzi se font secouer, dès 5h. du matin, par la canonna<strong>de</strong> qui durera jusqu’à 10h. Pie IX<br />

fait hisser le drapeau blanc. Les bersaglieri <strong>de</strong> Cadorna défoncent la muraille et entrent dans Rome par la Porta Pia. La communauté<br />

romaine va alors vivre plusieurs jours dans une insécurité permanente. Le 6 octobre, <strong>de</strong>ux frères pourront quitter Rome pour<br />

Angers.<br />

1520


Je ne sais rien <strong>de</strong> fâcheux au sujet <strong>de</strong>s nôtres, mais nous sommes sans nouvelles <strong>de</strong><br />

ceux qui sont hors <strong>de</strong> Paris. Nous ne voyons pas lʹavenir en beau, parce quʹon ne prie pas<br />

assez; le mon<strong>de</strong> pieux est dans ce mouvement, mais les masses ne comprennent pas que là<br />

serait le salut.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

1593 à M. Maignen<br />

MLP. et M. Maignen ont pensé tous <strong>de</strong>ux à <strong>de</strong>s mesures <strong>de</strong> rapatriement <strong>de</strong> Rome.<br />

Dimanche 9 octobre 1870<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Votre pensée a rencontré la mienne. Il y a une huitaine <strong>de</strong> jours déjà, prévoyant les<br />

difficultés que nos ff. pouvaient rencontrer à Rome, je leur ai écrit, par ballon monté, les<br />

invitant à se rendre, à leur rentrée en France, soit à Angers, soit à Tournay, et leur disant,<br />

sʹils manquaient dʹargent, dʹen emprunter sur la garantie formelle que je donnais <strong>de</strong> rem‐<br />

bourser dès que nous serions re<strong>de</strong>venus libres. Je ne sais si ma lettre a pu leur parvenir.<br />

Adieu, mon cher enfant, je ne vous vois plus guère, mais je pense à vous et vous<br />

mʹêtes présent <strong>de</strong>vant Dieu. Puisse‐t‐Il nous réunir un jour auprès <strong>de</strong> Lui!<br />

Votre affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1594 à M. Maignen<br />

MLP. ne croit pas qu’il faille laisser s’établir M. <strong>de</strong> Varax parmi les gar<strong>de</strong>s mobiles, délaissant pour cela<br />

l’Œuvre <strong>de</strong> Nazareth dont il est chargé. Avis sollicité.<br />

teur.<br />

Vaugirard, 9 octobre 1870<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Je vous prie <strong>de</strong> lire la lettre ci‐jointe et <strong>de</strong> me la retourner <strong>avec</strong> votre avis, par le por‐<br />

1521


M. <strong>de</strong> Varax, poussé par un zèle louable en soi, mais qui est à régler, insiste pour al‐<br />

ler sʹétablir au milieu <strong>de</strong>s gar<strong>de</strong>s mobiles du 6 e bataillon, posté en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> Paris, à Baga‐<br />

telle, afin <strong>de</strong> leur servir dʹaumônier; il y est particulièrement attiré parce que quelques‐uns<br />

<strong>de</strong>s jeunes gens du patronage ou du Cercle (en très petit nombre) font partie <strong>de</strong> ce bataillon.<br />

Ma pensée est toujours que le <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax est <strong>de</strong> rester à son poste à Na‐<br />

zareth, où la plupart <strong>de</strong>s jeunes gens et enfants <strong>de</strong> lʹœuvre viennent fidèlement et qui,<br />

comme maison régulièrement posée, donne un peu exemple et courage aux autres pour<br />

<strong>de</strong>meurer fermes à nos œuvres, afin quʹelles <strong>de</strong>meurent <strong>de</strong>s foyers protecteurs où nos en‐<br />

fants sont sûrs <strong>de</strong> trouver, maintenant et après lʹorage, un asile toujours ouvert.<br />

M. <strong>de</strong> Varax se tranquillise parce quʹun curé du Raincy, réfugié à Paris, un peu ti‐<br />

mi<strong>de</strong> paraît‐il et peu fait aux allures <strong>de</strong> nos œuvres, le remplacerait à Nazareth durant la<br />

semaine et les dimanches aussi, quand les communications <strong>avec</strong> Paris seraient faciles, et<br />

après sans doute que le service <strong>de</strong> Bagatelle, <strong>de</strong>venu le principal pour lui, lui laisserait li‐<br />

berté suffisante.<br />

Il ne me semble pas que M. <strong>de</strong> Varax doive, ici, suivre son attrait, mêlé, à son insu,<br />

dʹun peu dʹesprit dʹaventure, fort naturel aux jeunes gens et utile peut‐être aux hommes <strong>de</strong><br />

grand zèle.<br />

Mais jʹai peur que, <strong>de</strong> mon côté, un peu <strong>de</strong> timidité <strong>de</strong> vieillard et <strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nce trop<br />

exclusive ne mʹinclinent à veiller plus quʹil nʹest opportun au salut <strong>de</strong> nos œuvres; je vous<br />

prie donc <strong>de</strong> me dire, vous qui savez mieux que moi les besoins <strong>de</strong> Nazareth et <strong>de</strong>s autres<br />

patronages, ce que vous croiriez <strong>de</strong>voir conseiller.<br />

Pour moi, jʹautoriserais une visite ou <strong>de</strong>ux dans la semaine à Bagatelle, et rien <strong>de</strong><br />

plus; Nazareth en souffrirait déjà beaucoup par lʹattention partagée, et surtout par la pré‐<br />

férence et lʹattrait qui portent M. <strong>de</strong> Varax <strong>de</strong> lʹautre côté.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1595 à M. Maignen<br />

MLP. intercè<strong>de</strong> en faveur <strong>de</strong>s cuisiniers <strong>de</strong> l’ambulance du Cercle.<br />

11 octobre 1870<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

M. Audrin me dit que vous vous séparez <strong>de</strong> vos cuisiniers par la seule raison quʹils<br />

veulent augmenter dʹun sou les portions. Je ne sais si vous vous ren<strong>de</strong>z bien compte <strong>de</strong><br />

lʹextrême difficulté quʹon a à présent à se procurer <strong>de</strong>s aliments, et aussi lʹembarras que<br />

vous pouvez avoir à trouver dʹautres agents sans mettre en souffrance votre ambulance.<br />

Cʹest aussi pour vos cuisiniers un moment peu favorable pour se placer.<br />

Je recomman<strong>de</strong> ces considérations à votre attention, pensant bien dʹailleurs que<br />

vous pèserez tout, sagement et chrétiennement.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. M. Benoît dʹAzy ne paraît pas avoir compris que je <strong>de</strong>mandais à lui faire la re‐<br />

mise <strong>de</strong> 2.000f.<br />

1522


1595 bis à M. Maignen<br />

Se renseigner auprès d’un plénipotentiaire sur la situation à Chaville.<br />

19 octobre [1870]<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Je vois dans Le Français que M. le Comte <strong>de</strong> Flavigny, ayant voulu se rendre à Ver‐<br />

sailles, a dû sʹarrêter à Chaville, un officier prussien lui ayant signifié quʹil ne pouvait aller<br />

plus loin.<br />

Je serais bien satisfait si vous pouviez <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à M. <strong>de</strong> Flavigny ce quʹil aurait vu<br />

ou appris <strong>de</strong> la situation <strong>de</strong> Chaville. Les Prussiens y sont‐ils installés, les habitants y<br />

jouissent‐ils <strong>de</strong> quelque liberté, y respecte‐t‐on les personnes et les propriétés, le Curé [ab‐<br />

bé Metcalfe] y est‐il encore?<br />

Votre ami et Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1596 à M. J. Faÿ<br />

<strong>Lettre</strong> envoyée par ballon. Questions posées <strong>avec</strong> l’espoir d’échapper au contrôle prussien. Nouvelles <strong>de</strong>s assiégés.<br />

Vaugirard, 14 novembre 1870<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Grâce à lʹaction combinée <strong>de</strong>s ballons et <strong>de</strong>s pigeons voyageurs, je puis espérer <strong>de</strong><br />

vous faire parvenir ces quelques lignes et dʹobtenir même quelque apparence <strong>de</strong> réponse<br />

<strong>de</strong> vous, au moyen <strong>de</strong> la carte ci‐jointe, ainsi que les journaux vous lʹont peut‐être déjà ex‐<br />

pliqué.<br />

Je vais poser ici quatre questions, et vous pourrez y répondre par oui ou non que<br />

vous inscrirez sur cette carte, aux numéros 4, 5, 6, 7, sous lesquels elles sont classées.<br />

Je gar<strong>de</strong>rai note moi‐même <strong>de</strong>s 4 questions et je ferai correspondre vos réponses oui<br />

ou non aux numéros 4,5,6,7 sous lesquels elles sont classées.<br />

4 Vous portez‐vous bien tous ou au moins passablement?<br />

5 Les étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> vos jeunes gens marchent‐elles?<br />

6 Avez‐vous quelques nouvelles <strong>de</strong> nos ff. <strong>de</strong> lʹambulance, en <strong>de</strong>rnier lieu à Sedan?<br />

(Nous nʹen entendons plus parler)<br />

7 Savez‐vous aussi quelques nouvelles <strong>de</strong> nos ff.<strong>de</strong> Rome? (Nous sommes à leur<br />

égard dans la même ignorance).<br />

Voilà mes quatre questions pour aujourdʹhui; votre réponse oui ou non sera bien<br />

brève, mais, si elle me parvient, je pourrai vous poser dʹautres interrogations.<br />

Vous aurez, après avoir écrit les oui et les non, à remettre purement et simplement<br />

la carte (en lʹaffranchissant) au Directeur <strong>de</strong> la poste, qui se charge <strong>de</strong> faire parvenir les oui<br />

et non par les pigeons. Au moyen <strong>de</strong> la photographie, on réduit lʹécriture à <strong>de</strong>s propor‐<br />

tions qui échappent à lʹœil et, arrivé à Paris, on grossit les caractères par un procédé<br />

contraire.<br />

Avant le commencement du siège, jʹai prié M me <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot, nièce <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Cau‐<br />

laincourt, laquelle lui écrivait, <strong>de</strong> le prier <strong>de</strong> ma part <strong>de</strong> vous avancer les fonds dont vous<br />

auriez besoin, mʹengageant à les rendre dès que le siège <strong>de</strong> Paris serait levé. Mais, soit<br />

quʹelle lui ait fait, comme je pense, cette <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, soit que M. <strong>de</strong> Caulaincourt ne lʹait pas<br />

1523


eçue, vous pouvez compter que cet excellent ami vous rendra les services dont vous au‐<br />

rez besoin.<br />

Nous nʹallons pas mal jusquʹici à Paris; le siège apporte gênes et difficultés, mais<br />

pas encore intolérables. Nos œuvres se maintiennent, amoindries en nombre, mais libres<br />

présentement dans leur action; presque en toutes sont <strong>de</strong>s ambulances et <strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong> ré‐<br />

union pour les militaires, particulièrement ceux qui sont venus <strong>de</strong> province.<br />

On sʹattend à quelques efforts plus importants <strong>de</strong> nos troupes qui commencent à<br />

être bien organisées; peu dʹespoir pour lʹarmistice qui avait paru <strong>de</strong>voir se réaliser. Ceux<br />

dʹentre nous qui sont à Paris se réuniront lundi, 21 <strong>de</strong> ce mois; vous serez assurément en<br />

union <strong>avec</strong> nous. Tous les jours et en toutes les circonstances favorables, nous faisons mé‐<br />

moire <strong>de</strong>s ff. absents.<br />

Adieu, mon bien cher ami, jʹembrasse vous et nos ff. du plus profond <strong>de</strong> mon cœur.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Offrez mon respect et ma vive reconnaissance à M. le Supérieur [du Séminaire <strong>de</strong><br />

Tournay].<br />

1597 à M me et M lle Salva<br />

MLP. s’enquiert <strong>de</strong> leurs nouvelles par le procédé <strong>de</strong> questions‐réponses oui/non.<br />

Vaugirard, 15 novembre 1870<br />

Bien chères amies,<br />

Grâce à lʹaction combinée <strong>de</strong>s ballons et <strong>de</strong>s pigeons voyageurs, je puis espérer <strong>de</strong><br />

vous faire parvenir ces quelques lignes et dʹobtenir même quelque apparence <strong>de</strong> réponse<br />

<strong>de</strong> vous au moyen <strong>de</strong> la carte ci‐jointe, ainsi que les journaux vous lʹont peut‐être déjà ex‐<br />

pliqué.<br />

Je vais poser ici quatre questions, et vous pourrez y répondre par oui ou non, aux<br />

numéros 4, 5, 6, 7 sur cette carte. Comme je gar<strong>de</strong>rai copie <strong>de</strong> mes quatre questions dans le<br />

même ordre où je les écris, je pourrai y faire correspondre vos réponses oui ou non après<br />

que je les aurai reçues.<br />

4 Vous portez‐vous bien ou au moins passablement?<br />

5 Les Prussiens vont‐ils envahir votre pays probablement?<br />

6 La cherté <strong>de</strong>s vivres ne vous met‐elle pas en gêne?<br />

7 Avez‐vous reçu une lettre que je vous ai écrite par un ballon?<br />

Voilà mes quatre questions pour aujourdʹhui; votre réponse oui ou non sera bien<br />

brève, mais, si je la reçois, je pourrai vous poser dʹautres interrogations.<br />

Pour nous ici, nous nʹallons pas mal; les gênes et difficultés du siège se font sentir,<br />

mais jusquʹici pas dʹune manière intolérable.<br />

Vous aurez, après avoir écrit les oui et non à remettre simplement au Directeur <strong>de</strong><br />

la poste la carte, en lʹaffranchissant; elle <strong>de</strong>vra ainsi me revenir partiellement, savoir dans<br />

la portion qui portera les réponses oui ou non.<br />

Jʹai vu Emile [Salva] <strong>de</strong>rnièrement; nommé lieutenant dans la gar<strong>de</strong> nationale et<br />

obligé <strong>de</strong> sʹhabiller à ses frais, il mʹa prié <strong>de</strong> lui avancer pour vous 70f nécessaires à lʹachat<br />

1524


<strong>de</strong> ses habits; je vous lʹai écrit, je ne sais si vous avez reçu la lettre. Emile va bien, son ad‐<br />

ministration est fermée, il vit <strong>avec</strong> sa paie <strong>de</strong> gar<strong>de</strong> national.<br />

Nous ne savons comment finira cette terrible épreuve que nous traversons, mais<br />

nous nous confions en Dieu pour la France et pour nous‐mêmes. Nous croyons que, si on<br />

priait un peu généralement par un retour <strong>de</strong> foi sincère, la fin <strong>de</strong> la tribulation viendrait;<br />

nous tâchons <strong>de</strong> faire en cela notre part; je suis bien sûr que vous faites aussi la vôtre; at‐<br />

tendons et espérons.<br />

Respects à Monsieur le Curé et à vos amis; je nʹen oublie aucun <strong>de</strong>vant Dieu.<br />

Votre affectionné ami frère et oncle.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1598 à M. dʹArbois<br />

Procédé <strong>de</strong> correspondance par questions‐réponses oui/non. La situation à Paris. MLP. est sans nouvelles <strong>de</strong><br />

Tournay, <strong>de</strong> l’ambulance militaire et <strong>de</strong>s Cercles <strong>de</strong> Rome.<br />

Vaugirard, 16 novembre 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Grâce aux ballons et aux pigeons voyageurs, je puis espérer que ces quelques lignes<br />

vous parviendront et que vous serez à même dʹy faire une sorte <strong>de</strong> réponse, au moyen <strong>de</strong><br />

la carte ci‐jointe, réponse bien brève, il est vrai, car elle se bornera à oui ou non à quatre<br />

questions que je vais poser ci‐après:<br />

4 Vous portez‐vous bien tous ou au moins passablement?<br />

5 Votre personnel est‐il resté intact?<br />

6 Le service militaire vous a‐t‐il enlevé quelquʹun <strong>de</strong>s vôtres?<br />

7 Vos œuvres ne sont‐elles pas trop en souffrance et trop amoindries?<br />

A chacune <strong>de</strong> ces questions, vous ferez réponse par oui ou par non sur la carte ci‐<br />

jointe, en gardant lʹordre <strong>de</strong>s numéros: 4, 5, 6, 7, imprimés sur cette carte. Cela fait, vous la<br />

remettrez au Directeur <strong>de</strong> la poste, <strong>avec</strong> affranchissement <strong>de</strong> 1f. Les journaux vous ont ex‐<br />

pliqué, sans doute, que la photographie réduit cette réponse à <strong>de</strong>s proportions impercep‐<br />

tibles et quʹaprès lʹarrivée <strong>de</strong>s pigeons messagers cette même réponse, convenablement<br />

grossie, est envoyée au <strong>de</strong>stinataire, lequel ici sera moi.<br />

Pour nous ici, nous nʹallons pas mal relativement; les gênes et difficultés du siège<br />

ne sont pas, jusquʹici, insupportables; nos œuvres, un peu amoindries, se soutiennent;<br />

nous pouvons aussi nous occuper <strong>de</strong> diverses ambulances et nous avons ouvert chez nous<br />

plusieurs lieux <strong>de</strong> réunion pour les soldats, particulièrement pour ceux qui sont venus <strong>de</strong><br />

province.<br />

A notre grand regret, nous sommes sans nouvelles <strong>de</strong> nos ff. <strong>de</strong> Tournay, <strong>de</strong> lʹam‐<br />

bulance militaire et <strong>de</strong>s Cercles <strong>de</strong> Rome. Jʹespère, à lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> cartes pareilles à celle que je<br />

vous envoie, obtenir quelques renseignements; plusieurs cartes envoyées successivement<br />

pourront éclaircir les choses quʹune première réponse aurait laissées obscures.<br />

Lundi 21, ceux dʹentre nous qui sont à Paris se réuniront pour la fête <strong>de</strong> la Présenta‐<br />

tion; vous serez en union <strong>avec</strong> nous, jʹen suis assuré.<br />

Tous les jours, nous prions bien vivement pour tous nos ff. absents.<br />

Recevez toutes nos affections pour vous et pour ceux qui vous entourent.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1525


1599 à M. Maignen<br />

M. Maignen avait <strong>de</strong>s raisons précises pour congédier ses cuisiniers (cf. L.1595). Embarras financiers <strong>de</strong>s pa‐<br />

tronages.<br />

23 novembre [1870] ‐ St Clément<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu votre lettre concernant le service <strong>de</strong>s cuisiniers du Cercle; jʹai bien compris<br />

vos raisons, dont M. Paillé mʹa, dans le même moment, donné aussi quelque connaissance.<br />

Je ne me rappelle pas que vous mʹayez parlé, sinon inci<strong>de</strong>mment, <strong>de</strong>s embarras financiers<br />

<strong>de</strong>s patronages; M. Vasseur mʹa dit les reproches que lui avait faits M. Decaux, mais il pré‐<br />

tend quʹil ne sait comment combiner ses dispositions autrement quʹil le fait. Je nʹai pas non<br />

plus saisi quelle sorte dʹintervention M. Decaux <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rait <strong>de</strong> moi à cet égard. Jʹai toute<br />

bonne volonté, mais jʹai peu <strong>de</strong> moyens dʹaction dans les mouvements du patronage que je<br />

ne peux suivre <strong>de</strong> près; dites‐moi ce que vous pensez que jʹaurais à faire.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1600 à M. Planchat<br />

Attention à l’excès <strong>de</strong> zèle. Faire toutes les concessions possibles raisonnablement.<br />

26 novembre [1870]<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je crois, comme M. le Curé, que vous <strong>de</strong>vez recevoir exclusivement dans votre cha‐<br />

pelle, <strong>avec</strong> les militaires, vos jeunes gens du patronage et quelques‐uns <strong>de</strong> leurs parents,<br />

mais en très petit nombre.<br />

Je crains, comme M. le Curé, que lʹexcès <strong>de</strong> votre zèle ne nuise, en définitive, au<br />

bien que vous voulez faire, et que votre extrême activité ne lasse vos assistants ecclésiasti‐<br />

ques et laïcs. Veillez‐y, croyez‐moi, et ayez plus <strong>de</strong> défiance <strong>de</strong> vos entraînements natu‐<br />

rels.<br />

Je crois que ce sera bien <strong>de</strong> voir M. le Curé et <strong>de</strong> lui faire toutes les concessions quʹil<br />

persistera à <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r, après avoir entendu les observations que vous lui ferez, ayant soin<br />

<strong>de</strong> parler <strong>avec</strong> calme et sincère déférence.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1601 à M. Maignen<br />

Convocation à un Conseil.<br />

11 décembre [1870]<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous aurons un petit Conseil <strong>de</strong>main lundi, à 1h. 1/2 . Venez‐y bien exactement.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1526


1602 à M. J. Faÿ<br />

Deman<strong>de</strong> <strong>de</strong> nouvelles. Renseignements sur les Œuvres <strong>de</strong> Paris. MLP. regrette le peu <strong>de</strong> prières publiques<br />

«pour apaiser Dieu et mériter qu’Il pardonne à son peuple».<br />

Vaugirard, 14 décembre 1870<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous ai écrit, il y a quelque temps, par ballon; aucune réponse ne mʹétant venue,<br />

je ne sais si ma lettre vous est parvenue; jʹy avais joint une carte, au moyen <strong>de</strong> laquelle<br />

vous auriez pu répondre par oui ou par non à quatre questions qui étaient posées; mais je<br />

crois que les inscriptions que jʹavais mises nʹétaient pas régulièrement faites, il se pourrait<br />

donc que ce fût pour cette raison que mon envoi nʹeut point eu <strong>de</strong> suite. Je vais renouveler<br />

mes questions; vous auriez à répondre par oui ou par non; dans le même ordre où je les<br />

pose, dans les colonnes tracées sur la carte ci‐jointe:<br />

1 e question. ‐ Vous portez‐vous tous bien ou au moins passablement? (Colonne n° 4<br />

sur la carte)<br />

2 e question. ‐ (Colonne n° 5) Avez‐vous pu subvenir à vos besoins et pouvez‐vous<br />

marcher <strong>avec</strong> les ai<strong>de</strong>s quʹon vous a procurés jusquʹà ce que nous soyons délivrés ici?<br />

3 e question. ‐ (Colonne n° 6) Avez‐vous <strong>avec</strong> vous, (M. Baumert excepté, quʹon me<br />

dit être à Londres) tous ceux qui sont partis en votre compagnie ou qui vous ont rejoints<br />

<strong>de</strong>puis <strong>de</strong> Paris?<br />

4 e question.‐ (Colonne n° 7) Est‐il à votre connaissance que MM. Chaverot et <strong>de</strong><br />

Lauriston se portent bien?<br />

A ces questions, vous répondrez par oui ou par non, en chacune <strong>de</strong>s colonnes que je<br />

viens dʹindiquer.<br />

A la case ou colonne n°1, vous inscrirez le nom du pays où vous êtes (Tournay Bel‐<br />

gique); à la 2 e colonne, vos initiales; à la 3 e , mon adresse à Paris‐Vaugirard, Chemin du<br />

Moulin, n°1; aux autres colonnes, oui ou non , selon la convenance. On nous a écrit <strong>de</strong><br />

Tours, par télégraphe, que M. Hello était à Angers, MM. Streicher et Jouin à Tournay;<br />

dʹAngers, une autre dépêche nous a dit que ceux <strong>de</strong> Rome étaient sauvegardés; comment?<br />

Nous ne savons; quʹAmiens était au complet, M. Baumert à Londres, MM. Ginet et Gui‐<br />

chard soldats.<br />

A Paris, le siège a <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s gênes, mais pas intolérables jusquʹici; nous ne savons<br />

ce que lʹavenir nous apportera. Nos œuvres, amoindries, subsistent néanmoins; Paris et la<br />

France sont en armes et veulent résister énergiquement à lʹennemi; sa férocité dans cette<br />

guerre a soulevé partout la colère et le besoin <strong>de</strong> le repousser à tout prix.<br />

On prie assez généralement; les militaires, pour la plupart, se montrent chrétiens,<br />

nous nʹavons quʹà nous louer dʹeux dans les ambulances <strong>de</strong> nos maisons; mais les masses,<br />

dans leur ensemble, ne sont pas encore converties; jusquʹici, pas <strong>de</strong> prières publiques ou<br />

<strong>de</strong> gran<strong>de</strong> manifestation pour apaiser Dieu et mériter quʹIl pardonne à son peuple; lʹauto‐<br />

rité ecclésiastique se montre timi<strong>de</strong> à les provoquer, par crainte, sans doute, <strong>de</strong>s opposi‐<br />

tions ou <strong>de</strong> quelque scandale.<br />

Je suis persuadé que vous priez <strong>avec</strong> nous; tous les soirs, nous prions pour les ff.<br />

absents, et aussi pour nos orphelins éloignés forcément <strong>de</strong> nous; il en reste néanmoins 35 à<br />

Vaugirard.<br />

Affections à tous.<br />

1527


Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Après avoir rempli la carte, vous la remettrez au Directeur <strong>de</strong> la Poste, <strong>avec</strong> af‐<br />

franchissement <strong>de</strong> 1f. Il se chargera <strong>de</strong> faire parvenir vos oui et non .<br />

1603 à M. Decaux<br />

La Saint‐<strong>Jean</strong> pendant le siège <strong>de</strong> Paris.<br />

Vaugirard, 26 décembre 1870<br />

Mon bien cher ami,<br />

Notre fête <strong>de</strong> St ‐<strong>Jean</strong> va, cette année, se faire bien tristement; nous serons absolu‐<br />

ment seuls et, pour <strong>de</strong>meurer dans la convenance du moment, nous éviterons jusquʹà<br />

lʹapparence dʹune réjouissance et dʹun festoyement quelconque. Ce ne serait pas, je le sais,<br />

une raison pour votre vieille et si fidèle amitié pour ne pas vous joindre à nous, mais reste<br />

encore lʹextrême rigueur <strong>de</strong> la saison.<br />

Toutefois, à tout hasard, et en supposant le cas où votre santé et vos occupations,<br />

plus multipliées que jamais, vous permettraient <strong>de</strong> passer <strong>avec</strong> nous une partie du jour, je<br />

note ici lʹordre <strong>de</strong> nos exercices:<br />

8h. grandʹmesse<br />

9h. 1/2 déjeuner<br />

3h. vêpres, petite allocution par M. <strong>de</strong> Varax, et Salut<br />

5h. maigre dîner<br />

6h. réunion en famille au coin du feu<br />

Votre tout dévoué ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1603‐1 <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax à M. dʹArbois 442<br />

Nouvelles <strong>de</strong>s communautés <strong>de</strong> Paris pendant le siège.<br />

Paris, Nazareth, 30 janvier 1871<br />

Mon bien cher vénéré Père en N.S.,<br />

Cʹest au nom <strong>de</strong> notre Père Supérieur que je vous écris. La réouverture <strong>de</strong>s commu‐<br />

nications en lui rendant la faculté <strong>de</strong> correspondre <strong>avec</strong> ses enfants ne lui donne pas, hé‐<br />

las! lʹagilité <strong>de</strong> plume quʹil faudrait pour écrire à la fois <strong>de</strong> tous les côtés. Aussi mʹa‐t‐il<br />

donné mission <strong>de</strong> vous faire parvenir tout <strong>de</strong> suite lʹexpression <strong>de</strong> sa tendresse pour vous<br />

et tous vos Frères, <strong>avec</strong> le désir bien vif quʹil ressent dʹavoir au plus vite <strong>de</strong> vos nouvelles<br />

en grand détail. Votre télégramme si précieux du mois <strong>de</strong> novembre nʹa pas laissé que<br />

dʹêtre bien court comme tous les télégrammes; une ou plusieurs lettres remplies <strong>de</strong> lʹhis‐<br />

toire dʹun chacun <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> la famille à vous confiés satisferont mieux notre légi‐<br />

time curiosité. Dʹailleurs nʹest‐il pas probable que bientôt les autorisations dʹentrer à Paris<br />

442 Jusqu’en mai 1871, (L. 1634), M. <strong>de</strong> Varax fera, pour plusieurs lettres, office <strong>de</strong> secrétaire à MLP. Ces lettres (même lorsqu’elles<br />

sont assorties d’un P.S. <strong>de</strong> MLP.) seront toujours présentées <strong>avec</strong> le même type <strong>de</strong> caractères choisi pour les lettres écrites par<br />

MLP. lui-même.<br />

1528


permettront à M. Hello dʹy pénétrer et <strong>de</strong> nous rapporter <strong>de</strong> visu les récits circonstanciés<br />

dont notre affection est avi<strong>de</strong>?<br />

Ici notre situation comme œuvres nʹa pas varié au fond. Le nombre, seul, a subi <strong>de</strong>s<br />

mutations. Lʹesprit est <strong>de</strong>meuré ce quʹil est en dʹautres temps dans chaque maison. Au‐<br />

cune nʹa été supprimée. Le Cercle lui‐même a fonctionné <strong>avec</strong> vingt ou trente gamins et<br />

éclopés, grossi dʹailleurs <strong>de</strong>s militaires <strong>de</strong> lʹambulance. Aucun <strong>de</strong> nos frères nʹa été grave‐<br />

ment atteint par la maladie ou les acci<strong>de</strong>nts <strong>de</strong> la guerre. LʹOrphelinat, dispersé au mo‐<br />

ment du Siège, ne compte que 30 enfants environ, quʹon a conduits à S t ‐Charles pendant le<br />

bombar<strong>de</strong>ment et qui rentrent à Vaugirard <strong>de</strong>main, à la faveur <strong>de</strong> lʹarmistice. En ce mo‐<br />

ment 400 artilleurs sont casernés dans les grands bâtiments dont ils occupent plus <strong>de</strong> la<br />

moitié.<br />

Pas un seul <strong>de</strong> nos enfants <strong>de</strong> Nazareth nʹa été touché par les balles ennemies, en‐<br />

core que la Mobile et la Gar<strong>de</strong> Nationale <strong>de</strong> marche en comptassent un grand nombre.<br />

Cʹest une protection merveilleuse.<br />

Un seul enfant, du reste, Bruneau, a été frappé dans la rue dʹEnfer par un obus <strong>de</strong><br />

bombar<strong>de</strong>ment, en plein midi; le pauvre enfant a subi lʹamputation. Il estime être hors <strong>de</strong><br />

danger; on le soigne au Val <strong>de</strong> Grâce.<br />

Vaugirard a été criblé dʹobus. Un seul a pénétré dans le bâtiment dʹhabitation dʹune<br />

manière grave. Il est entré dans votre chambre, il a roulé à terre et nʹa pas éclaté quoi‐<br />

quʹayant fait son trou dans le mur du pignon, près <strong>de</strong> la cloche. Dʹautres acci<strong>de</strong>nts sans<br />

importance ont été causés par <strong>de</strong>s éclats. Les alentours et le jardin ont reçu <strong>de</strong>s projectiles<br />

par douzaines. Ces Messieurs <strong>de</strong>meuraient à la cave au nombre <strong>de</strong> cinq ou six, M. le Supé‐<br />

rieur nʹa pas voulu sʹéloigner non plus. Le reste était hors dʹatteinte, à S t ‐Charles.<br />

Grenelle a vu un obus rouler sans éclater au pied du tertre où la S te Vierge est placée<br />

dans la cour.<br />

Nazareth entouré <strong>de</strong> projectiles, au‐<strong>de</strong>ssus, à droite et à gauche, a reçu aussi protec‐<br />

tion <strong>de</strong> la bonne Mère. Aucun dégât. Un seul obus a pénétré dans la cour et éclaté à un<br />

mètre en terre, au milieu <strong>de</strong> la gymnastique, presque <strong>de</strong>vant la statue <strong>de</strong> lʹAnge gardien.<br />

Ni un cheval <strong>de</strong> bois, ni un escabeau, ni aucun engin nʹa eu la moindre avarie.<br />

Le Cercle, aussi exposé et moins soli<strong>de</strong> que nous, nʹa rien reçu non plus que quel‐<br />

ques éclats dans le petit préau <strong>de</strong> S t ‐Joseph, près du boulevard dʹEnfer. Plusieurs maisons<br />

voisines ont été perforées et le cimetière, qui est à cent mètres <strong>de</strong> là à peine, a été criblé.<br />

Nous avons peu souffert <strong>de</strong> la difficulté dʹavoir <strong>de</strong>s vivres, quoique mal pourvus<br />

dans certaines <strong>de</strong> nos maisons, nous avons reçu provi<strong>de</strong>ntiellement le nécessaire jusquʹau<br />

bout. En réalité on ne peut pas dire que Paris ait beaucoup pâti <strong>de</strong> la famine. Lʹabsence <strong>de</strong><br />

bois a été bien plus cruelle pour les mala<strong>de</strong>s et les pauvres. Aussi la capitulation (quʹon<br />

décore du nom dʹarmistice) a surpris beaucoup <strong>de</strong> gens. Pour moi, je ne me lʹexplique que<br />

par <strong>de</strong>s considérations <strong>de</strong> politique aisées à soupçonner, mais dont je ne parle pas ici.<br />

Comme vous nʹaimez pas les longues lettres, je crois que je ferai bien <strong>de</strong> clore celle‐<br />

ci. Dʹailleurs jʹen ai dit autant que peut faire un reclus sortant <strong>de</strong> sa forteresse après cinq<br />

mois <strong>de</strong> retraite. Je ne savais que ce qui sʹest passé dans la casemate.<br />

A plus tard les mille détails <strong>de</strong> nos longues journées <strong>de</strong> siège. Pour le moment, je<br />

me borne à tourner <strong>de</strong> préférence mes regards vers N.D. <strong>de</strong>s Champs où vous savez que<br />

mon cœur est resté à peu près tout entier. Embrassez pour moi ceux <strong>de</strong>s enfants qui ne<br />

mʹont pas encore oublié. Serrez les mains à M. Pessard, aux abbés Fournier, Lecacheur, of‐<br />

1529


frez mes respects à M me <strong>de</strong> Villontrays, à M. Pavie... Je crois bien que je les reverrai quelque<br />

jour car, plus je me retrouve dans Paris, plus je sens que je ne suis pas fait pour y vivre <strong>de</strong><br />

la vie <strong>de</strong>s œuvres, il me faut le bruit <strong>de</strong> la province. Si jʹosais faire <strong>de</strong>s plans, jʹambitionne‐<br />

rais dʹaller prendre la place du bon M. [Ad.] Lainé auprès <strong>de</strong> vous. Mais quel rêve!<br />

Jʹécris à lʹexcellent M. Jouin. Avez‐vous reçu mes lettres dans les premiers mois du<br />

siège <strong>de</strong> Paris?...<br />

Tout à vous, <strong>avec</strong> respectueuse affection en N.S.<br />

Jʹembrasse nos frères. B. <strong>de</strong> Varax Pr. S.V.P.<br />

Je rouvre ma lettre pour lʹenvoyer par voie <strong>de</strong> terre. Avez‐vous toujours le bon Gau‐<br />

thier? Embrassez‐le pour moi, ainsi quʹHaffner, Bion, Chanteau, Huet.<br />

1604 à M. dʹArbois<br />

Nouvelles <strong>de</strong> la Congrégation pendant le siège <strong>de</strong> Paris.<br />

Vaugirard, 2 février [1871]<br />

Purification<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

On mʹassure que, dʹaujourdʹhui, la poste recommence à fonctionner; sans retard au‐<br />

cun, je vous envoie<br />

quelques lignes pour vous<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong> vos nouvelles;<br />

nous avons reçu en son<br />

temps votre télégramme,<br />

mais il était nécessairement<br />

bien court. Pour nous, je<br />

nʹai que peu <strong>de</strong> choses à<br />

vous dire: tous ceux dʹentre<br />

nous qui étaient <strong>de</strong>meurés<br />

ici sont sains et saufs,<br />

malgré les dangers que la<br />

situation a pu présenter<br />

souvent à Vaugirard, à<br />

Montparnasse et à Grenelle.<br />

Nos œuvres, bien amoin‐<br />

dries, vous le <strong>de</strong>vinez bien,<br />

ont été soutenues partout;<br />

nous y avons joint <strong>de</strong>s<br />

ambulances et <strong>de</strong>s réunions<br />

<strong>de</strong> militaires par toutes nos<br />

maisons. Les privations ou<br />

souffrances du siège nʹont<br />

été bien notables que dans<br />

les <strong>de</strong>rniers temps.<br />

1530<br />

Siège <strong>de</strong> Paris (banlieue est)


Lʹorphelinat, gratifié dʹune gran<strong>de</strong> multitu<strong>de</strong> dʹobus, a subi quelques dommages dans les<br />

bâtiments, sans nous préparer pourtant <strong>de</strong>s frais considérables <strong>de</strong> réfection. On a dû, là et<br />

à Grenelle, coucher dans les caves et, pour Vaugirard, installer à S t ‐Charles ce qui nous<br />

restait dʹorphelins non repris par les protecteurs; ils sont <strong>de</strong> retour dʹhier.<br />

Hier aussi, nous avons eu quelques renseignements sur la position <strong>de</strong> nos ff. <strong>de</strong><br />

Chaville; malgré quelques gênes ou difficultés, ils ont traversé lʹépreuve sans encombre<br />

réel. Une compagnie <strong>de</strong> ligne prussienne ainsi quʹun bureau <strong>de</strong> poste occupent la maison,<br />

qui nʹa pas été absolument épargnée, mais sans ruines irréparables.<br />

Quant à nos ff. <strong>de</strong> province, nous nʹavons à leur sujet que <strong>de</strong>s renseignements pres‐<br />

que nuls.<br />

3 février.‐ Hier, M. Mitouard, lʹun <strong>de</strong> nos ff. qui gar<strong>de</strong>nt Chaville, a pu arriver jus‐<br />

quʹà nous; lui et les autres sont saufs, mais la propriété est lamentablement dévastée. Les<br />

pièces principales du rez‐<strong>de</strong>‐chaussée servent dʹécurie, la chapelle <strong>de</strong> magasin à grains,<br />

divers murs et cloisons abattus, volets et persiennes brûlés, mobilier brûlé ou dispersé<br />

même hors du pays, etc. Dieu lʹavait donné, Il lʹa repris, que son saint nom soit béni!<br />

Par M. Mitouard aussi, qui a pu recevoir <strong>de</strong>s lettres <strong>de</strong> Belgique, nous avons <strong>de</strong>s<br />

nouvelles un peu plus précises et généralement assez satisfaisantes <strong>de</strong> nos ff. en divers<br />

lieux; je ne vous en dis rien puisque vous avez vu ceux <strong>de</strong> Belgique.<br />

Pour ceux dʹAngers, je pense que tous vont assez bien; nous sommes cependant en<br />

incertitu<strong>de</strong> concernant M. Ginet et M. Guichard; M. Moutier paraît être encore <strong>de</strong>s nôtres,<br />

puisquʹil voyageait <strong>avec</strong> vous. Nous serons bien heureux <strong>de</strong> recevoir directement <strong>de</strong> vos<br />

nouvelles. On a besoin, après tant dʹépreuves, <strong>de</strong> se retrouver, <strong>de</strong> se toucher et voir pour<br />

ainsi dire, une <strong>de</strong>mi‐information ne suffit pas.<br />

Je termine ces lignes, désirant écrire en sens divers; mais, les communications étant<br />

rouvertes, nous pourrons, grâce à Dieu, correspondre plus intimement.<br />

Tous nos ff. <strong>avec</strong> moi embrassent tendrement vous et la famille dʹAngers. Nous<br />

<strong>de</strong>mandons à Dieu quʹIl soit <strong>avec</strong> vous et quʹIl bénisse vos travaux.<br />

Votre tout dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1605 à M. J. Faÿ<br />

Première lettre après la levée du siège <strong>de</strong> Paris. Nouvelles <strong>de</strong> la Communauté.<br />

Vaugirard, 6 février 1871<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je puis donc enfin rompre ce long silence et vous écrire en espérant que, pour cette<br />

fois, la lettre vous parviendra. De toutes nos misères, la plus dure était ce brisement absolu<br />

<strong>de</strong> toute relation <strong>avec</strong> tous ceux dont la vie est fondue <strong>avec</strong> la nôtre pour nʹen faire quʹune<br />

dans la divine charité.<br />

Vous avez pu, par votre correspondance <strong>avec</strong> nos ff.<strong>de</strong> province et <strong>avec</strong> M. Mi‐<br />

touard, suivre à peu près nos mouvements; mais pour nous ici, la barrière était infranchis‐<br />

sable, nous étions séparés du mon<strong>de</strong>. Cʹest dire que nous aurions beaucoup <strong>de</strong> questions à<br />

vous faire et guère <strong>de</strong> choses nouvelles à vous apprendre443 . En quelques mots, pour ce qui<br />

443 Ici commence la partie dictée par MLP. au frère Ladouce, jusqu’à la mention qu’il a servi <strong>de</strong> secrétaire (10 paragraphes infra).<br />

1531


nous concerne, malgré le déluge dʹobus et <strong>de</strong> leurs éclats, personne <strong>de</strong>s nôtres nʹa été at‐<br />

teint; quelques dommages aux bâtiments <strong>de</strong> Vaugirard, quelques détriments plus notables<br />

à Chaville sont, en ensemble, nos pertes matérielles. Je ne parle pas <strong>de</strong> la famine, du loge‐<br />

ment dans les caves, ni surtout <strong>de</strong> la misère <strong>de</strong>s pauvres, <strong>de</strong> la mortalité plus que doublée,<br />

du désarroi <strong>de</strong> nos œuvres, ce sont là <strong>de</strong>s détresses communes.<br />

Jʹajoute, quant à nos œuvres, quʹelles sont amoindries, mais quʹelles restent <strong>de</strong>bout<br />

partout, susceptibles dʹêtre restaurées et ravivées <strong>avec</strong> un peu dʹeffort. M. Mitouard a pu<br />

venir nous voir il y a trois jours et il vit, ainsi que MM. <strong>Jean</strong> [Maury], Louis [Boursier], Ar‐<br />

sène [Briscul] (arrivé à Chaville dès le commencement du siège), côte à côte <strong>avec</strong> les Prus‐<br />

siens qui sont, à vrai dire, bien plus que nous les maîtres <strong>de</strong> la maison. Jʹai reçu hier une<br />

lettre <strong>de</strong> lʹabbé Hello qui veut arriver bientôt près <strong>de</strong> nous; jʹespère quʹil y parviendra,<br />

quoique non sans peine. <strong>Lettre</strong> aussi hier <strong>de</strong> M. Trousseau qui désire, <strong>de</strong> son côté, nous<br />

faire une visite, si les voies ne lui sont pas fermées.<br />

A Vaugirard, 400 artilleurs, dont le nombre va être encore augmenté, occupent le<br />

bâtiment <strong>de</strong> nos enfants; nous sommes réfugiés, <strong>avec</strong> 25 grands et petits qui nous restent,<br />

dans les locaux <strong>de</strong> la communauté. Les ambulances, que nous avions établies dans toutes<br />

nos maisons, sont en voie <strong>de</strong> se clore.<br />

Aucun <strong>de</strong>s renseignements que jʹai pu recevoir ne mʹa rien dit au sujet <strong>de</strong> plusieurs<br />

<strong>de</strong> nos ff.; M. Coquerel est‐il toujours près <strong>de</strong> vous?<br />

Que sont <strong>de</strong>venus MM. Lemaire, Caron, Allard, Garreau, Manque, Emes, Pappaz,<br />

Piquet?<br />

Où sont enfin MM. Blanchetière, Trouille, un jeune ouvrier <strong>de</strong> S t ‐<strong>Jean</strong>, les frères La‐<br />

zaristes, ceux <strong>de</strong>s Missions et du Saint‐Esprit; en un mot, tous ceux qui formaient la 7 e am‐<br />

bulance? Les communautés mʹont fait <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s renseignements sur leurs sujets, je<br />

nʹai pu rien répondre. M. Risse mʹa écrit, il y a trois jours; lui et ses ff. vont bien. MM. Ma‐<br />

gnien et Pra<strong>de</strong>aux ont <strong>de</strong>s leçons particulières <strong>de</strong> théologie <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> MM. les Sulpi‐<br />

ciens. M. Hubert paraît être retourné vers vous et M. Bonnet, convalescent, à son tour va<br />

aussi vous rejoindre; que pourrez‐vous faire dʹeux? Votre troupeau <strong>de</strong>vient évi<strong>de</strong>mment<br />

trop nombreux; toutefois, il ne paraîtrait guère à propos <strong>de</strong> renvoyer personne avant les<br />

élections et la formation <strong>de</strong> lʹAssemblée Nationale. En attendant, cette surcharge peut met‐<br />

tre vos finances en déficit. Quoique peu riches nous‐mêmes, nous pourrions vous envoyer<br />

200 ou 300f. présentement. Voyez‐vous quelque autre voie quʹun mandat sur un banquier<br />

<strong>de</strong> Tournay pour vous les faire parvenir?<br />

Jʹespère que vous mʹécrirez bientôt, ainsi que mon bien cher abbé Lantiez; sa pré‐<br />

sence à Tournaya été un grand appui pour vous tous. Est‐il bien remis <strong>de</strong> ses fatigues <strong>de</strong><br />

lʹambulance? Quelle ru<strong>de</strong> entreprise! Que Dieu daigne bénir ce mouvement <strong>de</strong> notre petite<br />

famille, jusque là si rassise. M. dʹArbois, mʹécrit M. Hello, est à Berlin, ayant pu arriver<br />

jusquʹaux prisonniers et leur ayant fait parvenir les secours quʹil apportait. Que pensez‐<br />

vous, M. Lantiez et vous, du projet <strong>de</strong> M. Baumert pour un établissement à Londres, et<br />

que penser aussi dʹun poste définitif à former à Tournay? Jʹespère que M. <strong>Jean</strong>‐Marie<br />

[Tourniquet] a fortifié sa santé qui était fatiguée, ainsi que M. Bouchy et les autres; je vou‐<br />

drai les nommer tous, quʹils me parlent ou quʹon parle dʹeux, jʹai besoin <strong>de</strong> sentir quʹils vi‐<br />

vent et quʹils sont en paix.<br />

Je vous avais recommandé, en cas <strong>de</strong> pénurie dʹargent, <strong>de</strong> recourir à M. <strong>de</strong> Caulain‐<br />

court; nʹavez‐vous pas eu quelque occasion <strong>de</strong> le voir?<br />

1532


Je vais terminer là cette lettre pour aujourdʹhui, nʹen voulant pas retar<strong>de</strong>r le départ;<br />

mais, si Dieu nous prête vie et si les Prussiens, les agents <strong>de</strong> sa justice près <strong>de</strong> nous, nous<br />

en laissent la liberté, nos correspondances, maintenant renouées, ne seront plus interrompues.<br />

Dans lʹattente bien impatiente <strong>de</strong> vos nouvelles et <strong>de</strong> celles <strong>de</strong> tous nos frères, je<br />

vous embrasse <strong>de</strong> cœur <strong>avec</strong> tous ceux qui mʹentourent; M. Ladouce, qui vient <strong>de</strong> me ser‐<br />

vir <strong>de</strong> secrétaire, vous assure tout particulièrement <strong>de</strong> ses biens vives affections.<br />

Vendredi 10, la retraite du mois nous réunira à Vaugirard; comme nous parlerons<br />

<strong>de</strong> vous et comme nous prierons pour vous! les larmes mʹen viennent aux yeux; la ré‐<br />

union, un jour, sera bien plus nombreuse quand Dieu, dans sa miséricor<strong>de</strong>, aura daigné<br />

nous rassembler tous pour le bénir dʹune seule voix et dʹun seul cœur.<br />

Votre dévoué et affectionné Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je ne saurai vous dire combien est vive notre reconnaissance pour lʹadmirable<br />

bonté <strong>de</strong> M gr lʹ Evêque et <strong>de</strong> MM. du Séminaire, et <strong>de</strong> M. Desclée; que Dieu daigne leur<br />

rendre tout le bien quʹils vous font et agréer les prières que nous faisons à Dieu pour eux.<br />

1605 bis 444 à M. Risse<br />

Remerciements pour sa lettre. MLP. l’assure <strong>de</strong> la solidité <strong>de</strong> leur union que Dieu a formée et que «la main <strong>de</strong>s<br />

hommes ne saurait briser».<br />

[7 février 1871]<br />

Merci, mon bien cher ami, <strong>de</strong> votre bonne et excellente lettre; oui nous sommes unis<br />

par un lien que Dieu a formé, la main <strong>de</strong>s hommes ne saurait le briser; les œuvres pour<br />

lesquelles nous travaillons <strong>de</strong><br />

concert sont dʹailleurs au‐<strong>de</strong>ssus<br />

<strong>de</strong>s luttes politiques et na‐<br />

tionales; nous agissons pour le<br />

bien <strong>de</strong>s âmes; elles nʹont toutes<br />

quʹune patrie, la patrie du Ciel et<br />

un seul Père, qui est Dieu.<br />

Jʹespère que, dans cet ordre <strong>de</strong><br />

pensées, nous nʹaurons point<br />

dʹentraves, ni pour vivre en<br />

sainte fraternité, ni pour nous<br />

dévouer au bien <strong>de</strong>s petits et <strong>de</strong>s<br />

faibles.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

444 Supplée la lettre 1614.<br />

1533<br />

La Commune <strong>de</strong> Paris s’organise.<br />

Ci-contre, le transport d’une pièce, le 4<br />

février. Le convoi passe <strong>de</strong>vant le Moulin<br />

<strong>de</strong> la Galette, au pied <strong>de</strong> la Butte<br />

Montmartre. (Cabinet <strong>de</strong>s estampes. Photo<br />

Bibliothèque nationale).


1606 à M. Trousseau<br />

Grand désir <strong>de</strong> se revoir. Reconnaissance à Dieu.<br />

Vaugirard, 7 février 1871<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous verrai <strong>avec</strong> grand plaisir; ce nous sera ici une gran<strong>de</strong> joie dʹavoir <strong>de</strong> vos<br />

nouvelles à tous dʹune manière précise et bien détaillée. Cette longue interruption <strong>de</strong> nos<br />

rapports rend le rapprochement dʹautant plus nécessaire; ils sont surtout un besoin pour<br />

notre fraternelle affection.<br />

Il serait bien désirable que je pusse aussi voir M. Caille, afin <strong>de</strong> concerter, après que<br />

je me serai entendu <strong>avec</strong> lʹun et lʹautre, ce que le bien <strong>de</strong> nos œuvres <strong>de</strong>man<strong>de</strong>. Je ne sais si<br />

vous pourriez venir ensemble; jʹécris un mot ci‐joint à M. Caille pour quʹil examine <strong>avec</strong><br />

vous sʹil vaut mieux que vous veniez ensemble ou lʹun après lʹautre, selon que la gar<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

vos maisons peut lʹexiger.<br />

Tous ici vous embrassent, ainsi que les ff. dʹAmiens, bien affectueusement.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Nous nʹavons essuyé que <strong>de</strong>s dommages matériels; tout ce qui mʹarrive ici du<br />

<strong>de</strong>hors en renseignement paraît être aussi en sens favorable. Dieu nous a protégés, que<br />

son saint Nom soit béni!<br />

1607 à M. Maignen<br />

Vie <strong>de</strong>s œuvres. Objections à la création d’un restaurant au Cercle.<br />

11 février 1871<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je comptais répondre hier verbalement à votre lettre <strong>de</strong> la veille; vous nous avez<br />

quittés si vite que lʹoccasion mʹa manqué.<br />

Pour les réunions <strong>de</strong> soldats, jʹen sais toute lʹutilité; voyez vous‐même si elles seront<br />

sans détriment pour votre œuvre; il est difficile, je crois, dʹéviter tout inconvénient.<br />

Jʹapprouve bien une retraite isolée pour vous, si vous ne croyez pas pouvoir la faire<br />

<strong>avec</strong> la Communauté. Il semble toutefois quʹil y aurait commodité pour vous à nʹavoir pas<br />

une trop dure température.<br />

M. <strong>de</strong> Varax, en me parlant hier <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux soldats qui doivent dîner, je ne sais quel<br />

jour, au Cercle, semblait penser que vous alliez prendre à votre compte le restaurant, que<br />

je vous ai si particulièrement prié <strong>de</strong> laisser à <strong>de</strong>s mains étrangères. Je renouvelle, sʹil y a<br />

réellement lieu <strong>de</strong> le faire, lʹexpression <strong>de</strong> notre répugnance, aux autres membres du<br />

Conseil et à moi, pour une semblable entreprise; comme moyen dʹattrait, cʹest le pire et le<br />

plus grossier <strong>de</strong> tous; comme gestion financière, il sera ruineux; enfin, comme occasion <strong>de</strong><br />

dissentiment entre vos jeunes gens et vous, il est <strong>de</strong>s plus scabreux. Je crois que, non seu‐<br />

lement au Cercle, mais aussi en toutes nos œuvres, nous <strong>de</strong>vons nous interdire ce soin<br />

personnel <strong>de</strong> lʹalimentation <strong>de</strong>s jeunes gens.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1534


1608 <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax à M. J. Faÿ<br />

P. S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Nouvelles <strong>de</strong>s Œuvres et <strong>de</strong>s frères. MLP. se réjouit <strong>de</strong> savoir M. Lantiez sain et sauf.<br />

Vaugirard, 16 février 1871<br />

Mon bien vénéré frère en N.S.,<br />

Sans doute, les lenteurs <strong>de</strong>s premiers convois <strong>de</strong> dépêches sortis <strong>de</strong> Paris après le<br />

débloquement auront été cause que vous nʹaurez point reçu la longue lettre du P. Supé‐<br />

rieur, dans laquelle il vous posait toutes les questions que son affection pouvait lui suggé‐<br />

rer sur vous et votre maison. Votre lettre du 3 <strong>de</strong> ce mois le laisse encore dans lʹincertitu<strong>de</strong><br />

sur divers points; en me chargeant <strong>de</strong> vous en remercier, il vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> la compléter<br />

dès que vous le pourrez.<br />

En premier lieu, une liste, précisant les noms <strong>de</strong> ceux <strong>de</strong> nos frères réunis en ce<br />

moment à Tournay sous votre gar<strong>de</strong>, serait bien utile à dresser. Le P. Général, se reposant<br />

pleinement sur vous <strong>de</strong>s soins à donner et <strong>de</strong> la surveillance à exercer auprès <strong>de</strong> ceux‐ci,<br />

nʹaurait plus quʹà sʹenquérir <strong>de</strong> lʹétat <strong>de</strong> ceux qui sont encore hors <strong>de</strong> Tournay.<br />

Quoique la situation qui nous est faite par les événements soit loin dʹêtre prospère<br />

au point <strong>de</strong> vue financier, le Père ne veut pas que votre petite famille souffre dans son<br />

éloignement et il sʹest offert, en vous écrivant, à ai<strong>de</strong>r, dès ce moment, à votre entretien par<br />

un envoi <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux ou trois cents francs. Il vous a <strong>de</strong>mandé quel moyen serait le meilleur<br />

pour les faire parvenir; probablement une traite sur quelque banquier <strong>de</strong> Tournay ou <strong>de</strong><br />

Mons...? Vous voudrez bien lui répondre selon vos besoins, et lui dire si cette somme suf‐<br />

firait pour le présent.<br />

La situation qui vous a été faite là‐bas par les hôtes bienveillants qui vous ont ac‐<br />

cueillis, tant à lʹEvêché quʹau séminaire et dans les Conférences, est une marque bien visi‐<br />

ble <strong>de</strong> la protection dont Dieu entoure les faibles et aussi un témoignage <strong>de</strong> lʹesprit <strong>de</strong> cha‐<br />

rité qui anime ces Messieurs. Le Père Supérieur vous prie <strong>de</strong> leur en exprimer ses senti‐<br />

ments reconnaissants quand vous en aurez lʹoccasion, surtout auprès <strong>de</strong> Mgr lʹEvêque <strong>de</strong><br />

Tournay, <strong>de</strong> lʹexcellent M. Desclée et <strong>de</strong> Messieurs du séminaire. Un jour viendra, sans<br />

doute, où la miséricor<strong>de</strong> <strong>de</strong> N.S. rendra au centuple à ce pays hospitalier le bien quʹil fait<br />

aujourdʹhui à nos chers exilés.<br />

Vous savez peut‐être indirectement quelque chose <strong>de</strong> notre situation à Paris. Les<br />

malheurs du siège ne nous ont atteints que juste assez pour bien marquer à nos yeux la<br />

protection <strong>de</strong> notre bon Maître et <strong>de</strong> sa très Ste Mère, qui est aussi la nôtre. Le quartier <strong>de</strong><br />

Vaugirard, exposé au feu violent que lʹennemi dirigeait sur la batterie du Bastion 73, a été<br />

labouré dʹobus. Notre maison en a vu <strong>de</strong>s milliers passer sur ses toits sans y causer <strong>de</strong><br />

dommage notable; un seul obus a percé le toit <strong>de</strong> la Salle St ‐Louis <strong>de</strong> Gonzague, un obus<br />

entier est entré dans la chambre occupée jadis par M. dʹArbois, sous la cloche, et nʹa pas<br />

éclaté. Un troisième a fait <strong>de</strong> même dans les petites huttes <strong>de</strong> la basse‐cour. Le jardin, cri‐<br />

blé, nʹen a pas vu tomber un seul sur le mo<strong>de</strong>ste toit <strong>de</strong> la Salette.<br />

A Grenelle, même protection. Un obus est tombé au pied <strong>de</strong> la statue <strong>de</strong> la Ste Vierge, dans la cour, et nʹa pas éclaté. A Nazareth, les <strong>de</strong>ux maisons, en péril imminent,<br />

nʹont pas reçu une seule écornure. Un obus a éclaté dans le gymnase <strong>de</strong>s apprentis, après<br />

sʹêtre enfoncé à un mètre en terre, au pied <strong>de</strong> la statue <strong>de</strong> lʹange gardien. A sagitta volante<br />

in die, a negotio perambulante in tenebris... custodisti nos, Domina!... Les œuvres se sont main‐<br />

1535


tenues, <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s phases plus ou moins pénibles <strong>de</strong> ferveur ou <strong>de</strong> relâchement, mais au‐<br />

cune nʹa été fermée. Elles reprennent une vie nouvelle en ce moment sur plusieurs points.<br />

M. Hello est <strong>de</strong> nouveau au milieu <strong>de</strong> son troupeau à Nazareth. Le p. Foinel est attendu au<br />

Cercle. A S te ‐Anne, M. Planchat nʹa pas cessé <strong>de</strong> grossir le nombre <strong>de</strong> ses conquêtes apos‐<br />

toliques, tant parmi les militaires (mobiles, blessés, etc.) que parmi les enfants <strong>de</strong> ses fau‐<br />

bourgs et leurs pauvres parents. Lʹœuvre ne désemplit jamais. M. <strong>de</strong> Broglie y donne son<br />

temps tout entier, ou à peu près. S t ‐<strong>Jean</strong> regorge <strong>de</strong> soldats qui y sont reçus comme en un<br />

Cercle militaire et paraissent y prendre goût à la vie calme et chrétienne quʹon y respire.<br />

Grenelle a eu, comme Nazareth, son ambulance toujours pleine. Aujourdʹhui, lʹon joint<br />

lʹœuvre <strong>de</strong>s soldats à celle du Patronage.<br />

Vaugirard nʹa pas reçu à nouveau ses orphelins, on y a logé 400 artilleurs. En atten‐<br />

dant la paix, nous songeons un peu à leur faire quelque bien.<br />

En voilà peu pour votre légitime curiosité, mon bon frère, mais assez déjà pour<br />

vous engager à remercier Dieu <strong>avec</strong> nous <strong>de</strong> ce quʹIl nʹait pas encore permis que le rameau<br />

se <strong>de</strong>sséchât entre nos mains. Puisse‐t‐il reverdir enfin par toute la France, et la foi régner<br />

dans tant <strong>de</strong> cœurs qui lʹavaient trop oubliée! Nous prions en union <strong>avec</strong> vous à ces inten‐<br />

tions quotidiennes.<br />

Adieu, mon bon et vénéré frère. En vous envoyant à tous lʹexpression <strong>de</strong> la ten‐<br />

dresse <strong>de</strong> notre Père Général, jʹy joins celle <strong>de</strong> mon humble affection en N.S.<br />

B. <strong>de</strong> Varax pr. f. S.V.P.<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. <strong>de</strong> Varax, me voyant entouré <strong>de</strong> beaucoup <strong>de</strong> correspondances qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt<br />

réponse, me donne aujourdʹhui son ai<strong>de</strong>; jʹajoute seulement ce mot pour vous assurer tous<br />

<strong>de</strong> ma tendre affection. Dites en particulier à mon p. Lantiez que je suis bien heureux <strong>de</strong> le<br />

savoir sain et sauf, ainsi que tous nos ambulanciers. Toute sa famille va bien; quand nous<br />

avons vu son frère <strong>de</strong>rnièrement, il nʹavait rien que <strong>de</strong> satisfaisant à dire pour lui et pour<br />

les siens. A ce moment, M me Lantiez et les enfants nʹétaient pas encore revenus dʹEtretat; je<br />

ne crois pas quʹelles se ren<strong>de</strong>nt à Paris avant la paix conclue. Les Dames <strong>de</strong> la rue Jacob<br />

vont bien, jʹen ai eu hier <strong>de</strong>s nouvelles toutes fraîches. Pour vos parents, comme vous le<br />

pouviez prévoir, M. Flammarion est décédé, le cousin Préau également, M me Bachotet<br />

souffrante, comme elle lʹest souvent; tous les autres, y compris le f. Auguste [Faÿ] qui me<br />

donne ces renseignements, sont en état satisfaisant.<br />

Nous avons vu plusieurs fois ceux <strong>de</strong> Chaville. Jʹai une lettre <strong>de</strong> MM. Baumert,<br />

dʹArbois, Risse, Trousseau; tous vont bien. Pour les œuvres Tournay, Londres, je vous en<br />

parlerai quand nous pourrons nous rencontrer. Rien <strong>de</strong> Rome encore, je vais écrire.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

Tendres affections à tous.<br />

1609 <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax à M. Baumert<br />

P. S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Baumert à Londres.<br />

Vaugirard, le 16 février 1871<br />

Mon bon et cher frère en S t Vincent,<br />

Je réponds pour le Père Supérieur à votre lettre du 7 février, reçue par lui le 14, et à<br />

laquelle il attache dʹautant plus <strong>de</strong> prix quʹelle confirme parfaitement les nouvelles bonnes<br />

1536


que lʹon avait indirectement <strong>de</strong> vous, et les récits pleins dʹintérêt que M. Braun vient <strong>de</strong><br />

nous faire en personne sur vos voyages et votre sainte entreprise.<br />

Il est visible que la Provi<strong>de</strong>nce ménageait, en ce temps dʹépreuve, un asile à votre<br />

personne et un champ à votre zèle, au milieu <strong>de</strong> ces bons Allemands <strong>de</strong> Londres. La docile<br />

et cordiale ouverture que vous donnez au Père <strong>de</strong> vous indiquer votre ligne <strong>de</strong> conduite<br />

pour lʹavenir lui a paru plus quʹun indice consolant <strong>de</strong> votre vertu. Il y voit aussi le signe<br />

dʹun <strong>de</strong>ssein <strong>de</strong> Dieu qui, évi<strong>de</strong>mment, se servira <strong>de</strong> votre zèle comme dʹun instrument <strong>de</strong><br />

bénédiction, tant quʹIl le trouvera, comme aujourdʹhui, pénétré <strong>de</strong> la douceur et <strong>de</strong> lʹhumi‐<br />

lité <strong>de</strong> son propre Cœur.<br />

Restez donc à Londres jusquʹà ce que les événements, dont lʹissue ne peut tar<strong>de</strong>r<br />

beaucoup à se déclarer, permettent au Père Général <strong>de</strong> vous faire connaître par <strong>de</strong> nouvel‐<br />

les lettres la décision à prendre sur tout ce que vous lui avez proposé.<br />

Dans le cas où les choses se résoudraient affirmativement, il semblerait bien utile<br />

que vous eussiez auprès <strong>de</strong> vous lʹexcellent M. Emes [Antoine], dont la vertu et lʹexpé‐<br />

rience vous sont connues. Quoique bien occupé <strong>de</strong> ses filles, M. Braun ira peut‐être vous<br />

revoir dʹici peu.<br />

A Paris, malgré les malheurs <strong>de</strong> la guerre, nos œuvres ont été miraculeusement<br />

épargnées dans leur petitesse. Aucune nʹa été interrompue. Grenelle se soutient, grâce à<br />

M. Leclerc qui sʹy donne un peu plus aujourdʹhui...<br />

Adieu, cher et bien vénéré ami; je vous serre les mains <strong>avec</strong> tendre et fraternelle af‐<br />

fection en N.S.<br />

B. <strong>de</strong> Varax pr. ff. S.V.P.<br />

Nos frères vous envoient leurs meilleurs souvenirs et le Père Supérieur, par <strong>de</strong>ssus<br />

tout, sa bénédiction.<br />

P. S. Un peu en hâte aujourdʹhui, je ne joins à cette lettre que mes bien affectueux<br />

sentiments.<br />

Votre dévoué ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

1610 <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax à M. Chaverot<br />

P.S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Deman<strong>de</strong> instante <strong>de</strong> nouvelles <strong>de</strong>s frères et <strong>de</strong>s Œuvres <strong>de</strong> Rome. Récit <strong>de</strong>s tribulations par lesquelles sont pas‐<br />

sées les communautés <strong>de</strong> France.<br />

Vaugirard, le 17 février 1871<br />

Mon bien‐aimé et vénéré frère,<br />

Cʹest au nom du Père Supérieur que je vous écris. Il a besoin <strong>de</strong> savoir <strong>de</strong> vos nou‐<br />

velles et <strong>de</strong> celles <strong>de</strong> nos frères, après une longue captivité comme celle du siège qui nous<br />

a mis en isolement pendant cinq mois.<br />

Une seule dépêche, arrivée sous lʹaile <strong>de</strong>s pigeons nous a donné, en décembre, un<br />

vague renseignement sur le retour <strong>de</strong> MM. Jouin et Streicher qui sont en Belgique à pré‐<br />

sent. Pour vous, cher ami, et MM. <strong>de</strong> Lauriston et Beauvais, nous vous voyons encore dans<br />

les murs <strong>de</strong> cette Rome si désolée par les récents fléaux que nous venons enfin dʹappren‐<br />

dre et nous nous <strong>de</strong>mandons <strong>avec</strong> une sollicitu<strong>de</strong> bien vive: Que font‐ils? Que sont‐ils <strong>de</strong>‐<br />

venus? Etes‐vous encore tous vivants? Avez‐vous eu à souffrir <strong>de</strong>s événements politiques?<br />

Avez‐vous été exposés en quelque manière à lʹoccasion <strong>de</strong>s inondations?<br />

1537


Répon<strong>de</strong>z, sʹil vous plaît. Aujourdʹhui, grâce aux <strong>de</strong>rnières conventions postales<br />

conclues <strong>avec</strong> nos ennemis, la poste française dirigera nos lettres et les vôtres <strong>avec</strong> la<br />

même liberté quʹavant la guerre.<br />

Un point paraît surtout mériter explication au Père Général. La retraite <strong>de</strong>s troupes<br />

françaises (zouaves et Légion) a amené la fermeture <strong>de</strong> nos Cercles. Nʹa‐t‐elle pas, du<br />

même coup, rendu la présence <strong>de</strong> nos frères inutile à Rome? Quelle cause a déterminé le<br />

séjour <strong>de</strong> plusieurs dʹentre vous là‐bas, et y a‐t‐il urgence à prolonger ce séjour désormais?<br />

Au milieu <strong>de</strong> vos peines <strong>de</strong> chrétiens et <strong>de</strong> français, vous aurez sans doute trouvé<br />

quelque consolation dans la bienveillance dont la Communauté nʹa cessé dʹêtre entourée à<br />

Rome; et puis la noble sérénité du Saint Père nʹaura pas manqué <strong>de</strong> vous inspirer un peu<br />

<strong>de</strong> cette confiance hors <strong>de</strong> laquelle on ne vit pas heureux. Ici, et particulièrement à Paris, la<br />

Provi<strong>de</strong>nce a daigné nous donner part à ce sentiment et nous y a affermis visiblement au<br />

milieu <strong>de</strong> nos plus cruelles épreuves.<br />

Tandis que nos maisons <strong>de</strong> province, Metz surtout, échappaient comme par miracle<br />

aux dévastations que la guerre entraîne, nos œuvres <strong>de</strong> Paris nʹont pas été interrompues.<br />

Les soldats, en plusieurs lieux, ont été juxtaposés aux enfants ou jeunes gens. Les mala<strong>de</strong>s<br />

et blessés ont aussi trouvé leur place dans quatre <strong>de</strong> nos maisons; mais le cours <strong>de</strong>s tra‐<br />

vaux ordinaires a pu être suffisamment maintenu pour que les œuvres nʹaient eu guère à<br />

souffrir que dʹune diminution plus ou moins notable dans leurs membres. Le personnel <strong>de</strong><br />

direction a été provi<strong>de</strong>ntiellement garanti dans les diverses mesures militaires qui pe‐<br />

saient sur nous, et chacun <strong>de</strong> ces Messieurs néanmoins a pu se rendre cette justice dʹavoir<br />

largement fait son <strong>de</strong>voir pour la défense du pays, sans sʹêtre désistés pour cela <strong>de</strong>s autres<br />

emplois quʹils exerçaient au nom <strong>de</strong> la charité.<br />

Pendant la terrible pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> bombar<strong>de</strong>ment, les projectiles, nombreux à Vaugi‐<br />

rard, nʹont causé que <strong>de</strong>s dégâts secondaires. A Grenelle, un seul, je crois, est tombé dans<br />

le jardin et nʹa pas éclaté. A Nazareth, quoique nous fussions entourés <strong>de</strong> tous côtés dʹobus<br />

qui éclataient à quelques mètres <strong>de</strong> nous, un seul, pénétrant dans le gymnase, y a éclaté en<br />

terre et nʹa causé nul dégât. Les chapelles, le cercle, la maison <strong>de</strong>s vieillards, tout a été gar‐<br />

dé par la S te Vierge ut pupillam oculi.<br />

Puissiez‐vous nous revenir tous, mes bien chers frères, en aussi bon état que nous<br />

nous trouvons nous‐mêmes après cette lour<strong>de</strong> épreuve. Le régime alimentaire du siège nʹa<br />

pas fait <strong>de</strong> victimes parmi nous. Le canon nʹen a pas fait non plus, quoique dans nos murs<br />

ou sur les champs <strong>de</strong> bataille plusieurs aient senti les bombes ou les balles <strong>de</strong> bien près.<br />

Nos jeunes gens <strong>de</strong>s œuvres ont été épargnés comme nous; un seul, à ma connaissance, a<br />

été frappé et nous en avions un grand nombre dans la ligne, lʹartillerie, la marine, la mo‐<br />

bile, la mobilisée, etc...<br />

Voilà un court récit <strong>de</strong> notre siège, mon bon frère. En sentant combien nos dépor‐<br />

tements vous intéressent, mesurez, à votre tour, combien il nous sera doux <strong>de</strong> savoir les<br />

vôtres!<br />

Je vous laisse tous trois dans la paix et lʹunion à N.S. que vous <strong>de</strong>vez sans doute<br />

goûter à la Trappe 445 , et je vous envoie, <strong>avec</strong> la bénédiction du Père Supérieur, les humbles<br />

et affectueux sentiments <strong>de</strong><br />

445 MM. Chaverot, <strong>de</strong> Lauriston et Beauvais avaient dû quitter la Villa Strozzi, dont les nouveaux propriétaires avaient pris possession<br />

en janvier. Se trouvant sans logement, nos frères avaient accepté l’hospitalité <strong>de</strong>s Pères Trappistes, dans leur maison <strong>de</strong> la via<br />

S. Giovanni in Laterano, face à la basilique <strong>de</strong> S. Clément. Ce sera le 14 mars (cf. infra L.1618) que MLP. donnera le signal du retour<br />

en France.<br />

1538


Votre petit serviteur et frère en N.S. B. <strong>de</strong> Varax pr. ff. S.V.P.<br />

M. <strong>de</strong> Varax, bien chers amis, ne fait quʹexprimer ici mes sentiments; jʹinsiste seu‐<br />

lement sur la joie que nous aurons tous à vous revoir et sur lʹutilité quʹaura pour nous vo‐<br />

tre concours. Lʹensemble <strong>de</strong> notre personnel a été épargné, le noviciat et plusieurs <strong>de</strong>s nô‐<br />

tres sont à Tournay. Si vous pouvez revenir, faites‐le; si vous avez besoin dʹargent pour ce<br />

retour, faites‐le moi savoir.<br />

Je vous embrasse bien affectueusement.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

1611 à M. J. Faÿ<br />

Nouvelles <strong>de</strong>s différentes maisons <strong>de</strong> l’Institut pendant la guerre.<br />

Vaugirard, 21 février 1871<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Une occasion toute favorable, et analogue à celle qui mʹa apporté si sûrement votre<br />

dépêche du 12 <strong>de</strong> ce mois, me permet, à mon tour, <strong>de</strong> vous écrire sans crainte <strong>de</strong> retards ni<br />

<strong>de</strong> négligence <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s courriers. M. Decaux part pour Tournay; peut‐être, à son re‐<br />

tour, mʹapportera‐t‐il quelques nouvelles toutes fraîches <strong>de</strong> notre petite colonie <strong>de</strong> Tour‐<br />

nay; je dis petite, parce quʹelle est tout aimable pour moi, mais gran<strong>de</strong> en nombre et en<br />

mérites aussi, jʹen suis persuadé. Je nʹai presque rien à ajouter à la lettre que je vous ai<br />

écrite (M. <strong>de</strong> Varax tenant la plume) il y a quelques jours, vendredi <strong>de</strong>rnier, je crois. Nous<br />

allons tous assez bien; M. Bonnet vient <strong>de</strong> nous arriver <strong>de</strong> Metz assez bien remis, un peu<br />

faible encore; son voyage a duré trois jours, les communications, même <strong>avec</strong> un passeport,<br />

étant encore lentes et se faisant <strong>avec</strong> divers changements <strong>de</strong> trains; nos ff. <strong>de</strong> Metz sont en<br />

bonne condition; les jeunes gens, fort dispersés, commencent à revenir. Il en est <strong>de</strong> même<br />

dans nos patronages <strong>de</strong> Paris, un peu entravés toutefois par <strong>de</strong>s réunions <strong>de</strong> militaires,<br />

mobiles, etc. quʹon y reçoit en plusieurs <strong>de</strong> nos Maisons.<br />

A Vaugirard, notre grand bâtiment est toujours la caserne <strong>de</strong> compagnies dʹartil‐<br />

leurs; nous venons <strong>de</strong> leur procurer <strong>de</strong>ux billards et divers jeux établis, aux frais <strong>de</strong> la So‐<br />

ciété catholique, dans <strong>de</strong>ux salles <strong>de</strong>s persévérants. Si la paix se fait, ils quitteront Paris et<br />

les Prussiens retourneront dans leur pays. Je ne vous dis rien sur cette très grave question,<br />

vous en savez à peu près autant que nous; M. Decaux, dʹailleurs, vous en pourra parler;<br />

cet excellent ami est <strong>de</strong> plus en plus comme un frère pour nous. Vous avez vu, <strong>de</strong> votre cô‐<br />

té, combien Madame Decaux, sa digne compagne, est excellente par le cœur comme par<br />

son bon esprit.<br />

M. Hello a repris possession <strong>de</strong> Nazareth; M. <strong>de</strong> Varax mʹai<strong>de</strong> un peu à Vaugirard,<br />

mais son œuvre <strong>de</strong> prédilection, en ce moment, est le soin <strong>de</strong>s militaires.<br />

Vous aurez appris, comme nous, que M. Blanchetière avait été tué à lʹarmée <strong>de</strong> la<br />

Loire en relevant un blessé quʹil voulait porter à lʹambulance. Notre Communauté perd en<br />

lui un sujet, car il était décidé à entrer chez nous après la guerre.<br />

MM. Audrin et Mitouard ont perdu leurs mères récemment, M. Gresser a perdu un<br />

frère militaire. Je vous prie, ainsi que M. Lantiez, <strong>de</strong> dire <strong>de</strong>ux messes à leur intention, col‐<br />

lectivement, à cause <strong>de</strong>s difficultés du moment, à moins que vous ne jugiez à propos <strong>de</strong><br />

faire autrement.<br />

1539


Je pense, comme vous, quʹil serait bien important que nous pussions nous voir;<br />

mais cette entrevue ne peut se réaliser quʹaprès le rétablissement régulier <strong>de</strong>s communica‐<br />

tions.<br />

Je ne mets pas opposition à lʹentrée <strong>de</strong> M. Piquet chez les rr.pp., bien quʹà mon sens<br />

il fît plus sagement et plus chrétiennement en restant où Dieu lʹa mis.<br />

Ne manquez pas <strong>de</strong> mʹenvoyer quelque lettre par M. Decaux, cʹest un moyen si<br />

provi<strong>de</strong>ntiel; votre <strong>de</strong>rnière est du 12 courant; jʹen ai reçu <strong>de</strong>puis une arriérée du 31 jan‐<br />

vier; il en a été <strong>de</strong> même dʹune profusion dʹautres arrêtées aussi en chemin sur diverses<br />

voies.<br />

Adieu, mon bien cher ami et fils en N.S., je vous quitte pour écrire quelques mots à<br />

notre p. Lantiez; vous lui ferez, sʹil vous plaît, parvenir sa lettre qui lui arrivera ainsi plus<br />

fidèlement.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Mille tendresses à tous autour <strong>de</strong> vous; je ne puis à mon grand regret, leur écrire à<br />

tous, leurs lettres nous ont causé une gran<strong>de</strong> joie.<br />

1612 <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax à M. Baumert<br />

P.S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

MLP. juge favorablement les propositions <strong>de</strong> M. Baumert. Vocation du frère Emes.<br />

Vaugirard, lundi 27 février [1871]<br />

Mon bien cher frère en N.S.,<br />

Le Père Général vous donne mille affectueux remerciements pour votre lettre du 25,<br />

qui lui est arrivée ce matin. Il me charge <strong>de</strong> vous répondre que vos vues relatives à notre<br />

situation temporelle dans les œuvres lui paraissent fort justes et quʹil y a lieu <strong>de</strong> prendre<br />

<strong>de</strong>s mesures pour écarter le plus possible ces sortes <strong>de</strong> difficultés, comme vous proposez<br />

<strong>de</strong> le faire à Londres. Dans cette vue, le voyage en Allemagne aurait donc son utilité, et le<br />

Père ne désapprouve point que vous vous entendiez dès à présent <strong>avec</strong> M. Braun pour<br />

que celui‐ci soit libre <strong>de</strong> prendre la <strong>de</strong>sserte provisoire <strong>de</strong> lʹœuvre en temps convenable.<br />

Vous auriez une semblable démarche à faire auprès <strong>de</strong> notre bon frère Emes, dont la ve‐<br />

nue peut apporter un élément précieux à votre maison <strong>de</strong> Londres. Le Père va lui écrire<br />

dans ce sens et il verra aussi M. Braun, pour que lʹun et lʹautre soient dʹavance inclinés à<br />

entrer dans vos propositions. Dʹailleurs, vu leur zèle et leur charité, cela ne souffrira pas<br />

<strong>de</strong> difficultés. Je joins à ces détails officiels lʹexpression <strong>de</strong> ma propre reconnaissance pour<br />

le bon souvenir que votre lettre renferme à mon égard. Tous vous ren<strong>de</strong>nt la pareille ici et<br />

espèrent que vous trouverez dans votre ministère les consolations spirituelles que nous<br />

<strong>de</strong>mandons au Bon Maître pour vous.<br />

Je <strong>de</strong>meure, mon bon frère, votre bien respectueux et dévoué frère en N.S.<br />

B. <strong>de</strong> Varax<br />

Jʹai reçu, mon bien cher ami et fils, tout récemment, une bonne et chrétienne lettre<br />

<strong>de</strong> M. Emes qui, jugeant les événements tristes <strong>de</strong> ce moment en vrai religieux, nʹy voit<br />

quʹune raison <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> rester fidèle à sa vocation; il me témoigne donc le désir <strong>de</strong> revenir<br />

près <strong>de</strong> nous dès que je le rappellerai. Je lʹinforme que le calme nʹest pas encore assez réta‐<br />

1540


li ici pour quʹil puisse revenir si promptement, mais je lʹinvite à se concerter <strong>avec</strong> vous<br />

pour prendre part aux bonnes œuvres que la Provi<strong>de</strong>nce semble vous ménager à Londres.<br />

Je crois aussi que, pour vous, il sera mieux <strong>de</strong> différer un peu la visite que vous aviez la<br />

pensée <strong>de</strong> nous faire. Un peu plus tard, cette satisfaction pourra nous être donnée sans au‐<br />

cun inconvénient qui soit à craindre. Je vous embrasse cordialement en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1613 à M. Ginet<br />

Le frère Ginet a été mobilisé comme infirmier. MLP. l’encourage à reprendre la condition <strong>de</strong> religieux.<br />

Vaugirard, 28 février 1871<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Cette lettre, dont jʹai donné la substance à M. <strong>de</strong> Varax, ne serait pas toutefois plei‐<br />

nement <strong>de</strong> moi si je nʹajoutais quelques mots qui indiquassent bien que je sens et pense<br />

tout ce quʹelle exprime; oui, mon affection pour vous est toujours la même; je suis <strong>avec</strong> in‐<br />

térêt tout ce qui vous touche et jʹai lu <strong>avec</strong> un cœur tout sympathique ce que vous mʹavez<br />

écrit <strong>de</strong> votre vie <strong>de</strong> soldat; le bon Maître, meilleur juge que les hommes <strong>de</strong>s aptitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />

ses enfants, savait bien que la guerre et ses tristes horreurs ne sont guère votre fait; Il vous<br />

a donc transformé en infirmier, en attendant quʹIl vous ren<strong>de</strong> à la condition plus sainte en‐<br />

core <strong>de</strong> religieux et serviteur <strong>de</strong> la maison du Seigneur. Jusque là, portez patiemment, cher<br />

enfant, la tâche qui vous est imposée; elle servira à vous éprouver, à accroître votre expé‐<br />

rience, et surtout à témoigner <strong>de</strong> votre entière soumission aux <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> la divine Sa‐<br />

gesse.<br />

Adieu, mon cher enfant, je vous embrasse bien affectueusement ainsi que les ff., en<br />

ce moment bien peu nombreux, <strong>de</strong> votre maison dʹAngers.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1614 446<br />

1614‐1 <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax à M. J. Faÿ<br />

P. S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Organisation du Noviciat. Voyage à Paris envisagé pour M. Faÿ. La paix est en vue. MLP. a reçu <strong>de</strong>s nouvelles<br />

<strong>de</strong> Rome; il incline à en faire revenir les frères.<br />

Vaugirard, le 1er mars 1871<br />

Mon bien vénéré frère en N.S.,<br />

Je vous envoie avis <strong>de</strong> la part du Père Supérieur, <strong>de</strong> quelques dispositions <strong>de</strong> per‐<br />

sonnel que les circonstances annoncent comme <strong>de</strong>vant être prochainement réalisables. Il<br />

sʹagit <strong>de</strong> faire rentrer le bon M. Frézet dans le sein <strong>de</strong> la communauté <strong>de</strong>s étudiants dont<br />

vous êtes le chef et dans le séminaire <strong>de</strong> Tournay.<br />

446 Suppléée par la lettre 1605 bis.<br />

1541


M. Frézet pourra sans doute quitter aisément Amiens dʹici à peu. De plus, la situa‐<br />

tion <strong>de</strong> cette maison dʹAmiens, privée momentanément <strong>de</strong> M. Marcaire, ne pourra re<strong>de</strong>‐<br />

venir normale que lorsque celui‐ci y sera rentré. M. Trousseau <strong>de</strong>vra donc bientôt le rap‐<br />

peler auprès <strong>de</strong> lui.<br />

En cette occurrence, le Père Général a pensé quʹil pourrait aviser à vous décharger<br />

un peu (au point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> la dépense) en vous offrant <strong>de</strong> reprendre à Paris tel <strong>de</strong>s ff. laïcs<br />

dont vous pourriez vous passer avantageusement.<br />

Veuillez donc examiner si vous avez quelque sujet dans ce cas et le proposer au<br />

Père Supérieur par lettre. Il vous donnera avis <strong>de</strong> sa décision en temps convenable. Pour<br />

lors, vous pourriez songer à faire à Paris le voyage que vous projetez, venir respirer un<br />

moment à Vaugirard et réjouir vos frères <strong>de</strong>puis si longtemps privés <strong>de</strong> vous. Ce voyage<br />

en outre, aurait double utilité: il vous donnerait lʹoccasion <strong>de</strong> ramener sous votre conduite<br />

le frère qui doit réintégrer à Paris et vous permettre <strong>de</strong> remmener <strong>avec</strong> vous M. Frézet<br />

quand vous repasseriez à Amiens.<br />

Nous avons aujourdʹhui la consolation <strong>de</strong> possé<strong>de</strong>r M. Trousseau, et M. Caille<br />

viendra peut‐être aussi dans peu passer quelques heures <strong>avec</strong> nous. Amiens, comme les<br />

autres maisons, a reçu son abondante part <strong>de</strong> grâces pendant les malheurs <strong>de</strong> la guerre.<br />

Nous avons bien à bénir le Seigneur: comme ce <strong>de</strong>voir sera doux lorsquʹil nous sera per‐<br />

mis <strong>de</strong> le remplir en votre compagnie!<br />

Amitiés et respects à nos ff. <strong>de</strong> Tournay et environs.<br />

Votre humble et affectueux serviteur en N.S.<br />

B. <strong>de</strong> Varax<br />

pr. S V P<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S., cʹest plutôt pour vous donner à tous signe <strong>de</strong> vie<br />

et vous témoigner que vous êtes bien présent dans ma pensée que je vous écris ces lignes,<br />

que dans lʹintention <strong>de</strong> ne régler rien encore en ce qui concerne les dispositions <strong>de</strong> person‐<br />

nel ou autre. Le moment viendra bientôt, je lʹespère, où vous pourrez vous échapper quel‐<br />

ques instants aux jeunes pour que nous examinions ensemble ce que le bien <strong>de</strong> la Congré‐<br />

gation et <strong>de</strong> ses œuvres <strong>de</strong>man<strong>de</strong>. On vient <strong>de</strong> me dire quʹune affiche annonce la conclu‐<br />

sion <strong>de</strong> la paix; à <strong>de</strong>s conditions fort dures sans doute, mais une fin telle quʹelle ne pouvait<br />

se faire attendre indéfiniment; acceptons jusquʹau bout, dans la soumission, le châtiment<br />

que la justice divine nous impose.<br />

Jʹai reçu <strong>de</strong> longues lettres aujourdʹhui <strong>de</strong> nos ff. <strong>de</strong> Rome <strong>de</strong>mandant sʹils doivent<br />

revenir ou bien rester. Jʹincline pour le premier parti; jʹespère que le Seigneur nous éclaire‐<br />

ra sur ce que nous avons à faire <strong>de</strong> mieux selon sa sainte volonté.<br />

Adieu à vous et à tous; souvenir à M. Lantiez quand vous lui écrirez.<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Nous prions beaucoup S t Joseph.<br />

1615 à M. Caille<br />

Mort héroïque d’un confrère du Patronage Sainte‐Anne, M. Blanchetière. MLP. exprime sa reconnaissance à M.<br />

Caille.<br />

1542


Vaugirard, 2 mars 1871<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous écris <strong>de</strong>ux mots pour vous remercier <strong>de</strong> votre affectueuse lettre, dʹautant<br />

mieux accueillie que, <strong>de</strong>puis bien <strong>de</strong>s mois, je nʹavais pas eu pareille joie. Par une grâce<br />

spéciale et bien manifeste <strong>de</strong> la bonté divine, notre petite Congrégation a été épargnée;<br />

sauf M. Blanchetière, que nous pouvions regar<strong>de</strong>r comme <strong>de</strong>s nôtres puisquʹil <strong>de</strong>vait en‐<br />

trer chez nous après la guerre, nous nʹavons perdu aucun <strong>de</strong> nos ff. Pour lui, il est mort<br />

dans la pratique <strong>de</strong> la charité, ayant été frappé dans lʹarmée <strong>de</strong> la Loire en relevant un<br />

blessé.<br />

Je comprends bien les difficultés que lʹinterruption <strong>de</strong>s affaires a pu vous créer; je<br />

trouverai donc bonnes les dispositions que vous croirez <strong>de</strong>voir régler; M. Trousseau me<br />

fait observer toutefois quʹà son avis, on ne pourrait soutenir la maison <strong>de</strong> Noyon, même si<br />

elle nʹavait plus la charge <strong>de</strong> lʹorphelinat, quʹen ayant 5 frères. Je mʹen rapporte à vous<br />

pour les arrangements que vous croirez possible <strong>de</strong> prendre, <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> M. Trous‐<br />

seau. Je nʹai pas <strong>de</strong> plus grand désir que <strong>de</strong> vous épargner toute contrariété; si vous en<br />

avez eu quelques‐unes, jʹy suis resté absolument étranger; les membres plus jeunes dans la<br />

Congrégation nʹayant pas eu, comme nous, sous les yeux votre consécration au service <strong>de</strong><br />

Dieu, si franchement consommée, et tous les sacrifices que vous nʹavez pas cessé <strong>de</strong> faire<br />

<strong>de</strong>puis sans interruption, ne sauront en apprécier le mérite autant quʹil nous est aisé <strong>de</strong> la<br />

faire; mais soyez sûr, mon cher ami, que tous ceux qui vous connaissent <strong>de</strong> vieille date<br />

nʹoublient aucun <strong>de</strong>s services que vous avez rendus dans les œuvres qui nous occupent, et<br />

auront toujours à cœur <strong>de</strong> vous témoigner leur affection et leur reconnaissance.<br />

Jʹai remis à M. Trousseau 200f qui, <strong>avec</strong> les 100 autres francs envoyés dès lʹarrivée<br />

<strong>de</strong> MM. Frézet et Barthélemy [Marchand] à Amiens, in<strong>de</strong>mniseront un peu la maison <strong>de</strong>s<br />

frais <strong>de</strong> leur séjour. Je mʹoccupe dʹailleurs <strong>de</strong> rappeler ceux <strong>de</strong>s ff. qui seront jugés inutiles;<br />

jʹai besoin seulement dʹun court délai pour examiner les dispositions qui sont à prendre<br />

pour recomposer le personnel fort dispersé <strong>de</strong> plusieurs <strong>de</strong> nos maisons.<br />

Tous nos ff. sʹunissent à moi pour vous assurer <strong>de</strong> leurs sentiments <strong>de</strong> cordial dé‐<br />

vouement et souhaitent bien quʹaprès une si longue séparation, vous puissiez nous faire,<br />

sans beaucoup <strong>de</strong> retard, quelque bonne visite.<br />

Adieu, mon bien bon ami, je suis <strong>avec</strong> ma vieille amitié,<br />

Votre tout affectionné ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1615‐1 <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax à M. J. Faÿ<br />

P. S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

A propos d’une collaboration à La Semaine Religieuse <strong>de</strong> Tournay. Avis sollicité sur plusieurs questions<br />

relatives aux Œuvres et à la réorganisation <strong>de</strong>s maisons.<br />

Vaugirard, le 7 mars 1871<br />

Mon bien cher frère en N.S.,<br />

Le Père Général vous a lu <strong>avec</strong> attention et vous remercie <strong>de</strong>s détails nouveaux <strong>de</strong><br />

votre <strong>de</strong>rnier courrier. Il nʹest pas convaincu, tant sʹen faut, <strong>de</strong> lʹopportunité dʹun arran‐<br />

gement tendant à charger un <strong>de</strong> nos prêtres <strong>de</strong> la rédaction <strong>de</strong> La Semaine. Cette besogne,<br />

plus difficile pour un étranger que pour tous autres (vu le peu <strong>de</strong> relations quʹil a et lʹigno‐<br />

1543


ance <strong>de</strong> beaucoup <strong>de</strong> détails et coutumes du pays), semble revenir naturellement à un<br />

prêtre <strong>de</strong> Tournay, et ce serait déjà beaucoup pour nous, ce semble, que dʹassurer à celui‐ci<br />

lʹai<strong>de</strong> dʹun Frère pour ce qui regar<strong>de</strong> lʹadministration du journal. Sʹil faut voir dans cet ar‐<br />

rangement proposé un moyen quasi obligatoire <strong>de</strong> rendre service par reconnaissance à un<br />

diocèse si hospitalier pour nos étudiants, à coup sûr la difficulté <strong>de</strong> refus sera plus gran<strong>de</strong>,<br />

mais avant dʹaccepter, il y aurait lieu encore dʹexaminer la question, <strong>de</strong> sʹassurer si, prati‐<br />

quement, le travail peut être accompli quoad tempus par le prêtre dont il sʹagit; si aucun au‐<br />

tre moyen ne reste <strong>de</strong> témoigner notre gratitu<strong>de</strong> à nos hôtes, si enfin le désir <strong>de</strong> nous ren‐<br />

fermer strictement dans la sphère <strong>de</strong>s œuvres marquées à notre Institut ne doit pas primer<br />

toute autre considération, car il nʹest pas douteux que La Semaine sort tout à fait du cadre<br />

<strong>de</strong> notre vocation et <strong>de</strong>s besoins <strong>de</strong> la jeunesse ouvrière.<br />

En ce qui concerne les Œuvres <strong>de</strong> jeunes et <strong>de</strong> soldats que nos Frères dirigent, le<br />

Père général pense <strong>de</strong>puis longtemps à vous envoyer une visite <strong>de</strong> M. Maignen pour re‐<br />

cueillir, sous votre conduite, tous les renseignements capables dʹéclairer le Conseil sur la<br />

situation <strong>de</strong> ces œuvres. On voit plus <strong>de</strong> choses quand on est <strong>de</strong>ux à regar<strong>de</strong>r: les observa‐<br />

tions <strong>de</strong> M. Maignen sʹadjoindraient utilement aux vôtres dans lʹexposé qui est à faire <strong>de</strong><br />

ces entreprises nouvelles. Probablement, M. Maignen <strong>de</strong>vrait se mettre en route sous peu<br />

<strong>de</strong> jours afin <strong>de</strong> ne pas se trouver absent <strong>de</strong> son œuvre aux approches <strong>de</strong> Pâques. Il re‐<br />

viendrait alors à Paris <strong>avec</strong> vous et M. Lantiez, ou peu avant (la combinaison nʹest pas im‐<br />

possible sans doute) et votre voyage coïnci<strong>de</strong>rait <strong>avec</strong> le passage <strong>de</strong> M. dʹArbois dont on<br />

va hâter un peu le retour en France. Il y aurait moyen <strong>de</strong> tenir utilement Conseil pour sʹar‐<br />

rêter à quelque décision sur toutes les affaires qui vous occupent.<br />

Comme détails, le Père Supérieur vous serait reconnaissant si vous vouliez lui en‐<br />

voyer un mot <strong>de</strong> lʹétat particulier <strong>de</strong> M. Vialloux, peu connu ici, et sur la valeur et le carac‐<br />

tère duquel il a besoin <strong>de</strong> sentir plus éclairé. M. Garault sera probablement très nécessaire<br />

ici, dans quelque temps, à cause <strong>de</strong>s nombreuses réparations quʹexige la maison <strong>de</strong> Vaugi‐<br />

rard que les soldats vont évacuer incessamment. Pourriez‐vous le diriger sur la France<br />

lorsque le moment sera venu?<br />

Je crois que jʹai rempli le cadre <strong>de</strong> mon épître. Jʹy joins un mot dʹaffection pour<br />

vous, mon bien cher Père, et pour nos Frères dont le souvenir ne me quitte pas un seul<br />

jour.<br />

Votre humble et dévoué serviteur en N.S.<br />

B. <strong>de</strong> Varax<br />

pr. S V P<br />

Cette lettre, vous le comprenez, mon bien cher ami et fils en N.S., est plutôt une sé‐<br />

rie dʹinterrogations ou <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s dʹavis quʹun ensemble <strong>de</strong> décisions arrêtées; donnez‐moi<br />

donc votre avis, il presse un peu en ce qui touche lʹutilité dʹun voyage <strong>de</strong> M. Maignen près<br />

<strong>de</strong> vous; pour lʹenvoi <strong>de</strong> M. Garault, il faudrait sʹassurer près <strong>de</strong> lui sʹil nʹaurait rien à re‐<br />

douter ici pour le service militaire; il me semble que non; je voudrais aussi que son retour<br />

ne fût pas une difficulté sérieuse pour vos services.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Affections à tous.<br />

1544


1616 <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax à M. Chaverot<br />

P. S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Le retour en France est à prévoir dès la prochaine lettre <strong>de</strong> MLP.<br />

Vaugirard, le 9 mars 1871<br />

Mon bon frère,<br />

Les événements font <strong>de</strong> plus en plus pressentir au Père Général lʹopportunité pro‐<br />

chaine <strong>de</strong> votre retour en France. M. Poussielgue est <strong>de</strong>meuré dʹaccord <strong>avec</strong> lui que les<br />

œuvres <strong>de</strong> Rome nʹont pas besoin <strong>de</strong> nous présentement. On nʹattend que lʹassentiment <strong>de</strong><br />

M. Keller qui va arriver pour conclure dʹune manière définitive ce rappel qui est déjà si<br />

nettement indiqué, sauf toutefois à accepter un peu plus tard la situation et les besoins<br />

nouveaux que pourraient créer dʹautres événements. Votre retour gar<strong>de</strong>ra donc, sous ce<br />

rapport, un certain caractère <strong>de</strong> provisoire. Nos cœurs sʹarrangeraient mieux dʹun retour<br />

irrévocable, mais lʹamour du Saint Siège et les quasi engagements du passé maintiennent<br />

la prescription et la feront valoir un jour, sʹil y a lieu, en faveur <strong>de</strong> nos chers Français <strong>de</strong><br />

Rome.<br />

Vous recevrez dʹici à peu un avis positif <strong>de</strong> vous mettre en marche, maintenant dé‐<br />

jà, vous pourrez faire quelques préparatifs qui rendront les <strong>de</strong>rnières dispositions plus ra‐<br />

pi<strong>de</strong>s, lorsque le jour du départ sera venu.<br />

Le Père Supérieur pense que vous ferez utilement <strong>de</strong> réserver pour la Congrégation<br />

les livres à vous appartenant et autres objets fournis par vous dont le transport serait fa‐<br />

cile; il accepte la proposition que M. Emile [Beauvais] lui a faite à ce sujet, les livres <strong>de</strong> di‐<br />

verses sortes pouvant être utiles à nous et à nos œuvres.<br />

Je ne vous dis rien <strong>de</strong> plus, sinon un mot <strong>de</strong> souvenir respectueux <strong>de</strong> ma part pour<br />

les personnes <strong>de</strong> nos amis qui le voudraient agréer et qui sont encore à Rome, je veux dire<br />

les rr.pp. Brichet, Freyd, Laurençot, Chery, Jan<strong>de</strong>l, NN.SS. Termoz, <strong>de</strong> Luca, Ricci, Suter,<br />

<strong>de</strong> Méro<strong>de</strong>, etc., si vous avez quelque occasion <strong>de</strong> les voir.<br />

Le Père Supérieur vous remercie encore <strong>de</strong> vos intéressants mémoires qui ont fait<br />

les délices dʹun chacun ici. Il vous bénit et se réjouit dʹavance <strong>de</strong> vous revoir bientôt.<br />

Votre humble et dévoué petit serviteur et frère en N.S.<br />

B. <strong>de</strong> Varax pr. ff. S V P<br />

Tout ce que vous dit M. <strong>de</strong> Varax, bien chers amis, nʹest que lʹexpression <strong>de</strong> mes<br />

sentiments, particulièrement la joie que jʹaurai, que nous aurons tous à vous revoir bientôt,<br />

après une si longue séparation. Préparez donc vos dispositions, afin quʹau reçu <strong>de</strong> ma pro‐<br />

chaine lettre, vous puissiez vous mettre en route sans retard. Avant <strong>de</strong> partir, vous vous<br />

recomman<strong>de</strong>rez bien vivement à tous les saints protecteurs <strong>de</strong> Rome, spécialement S t<br />

Pierre et S t Paul et S te Marie Majeure.<br />

Je remercie M. Emile <strong>de</strong> son excellente lettre et <strong>de</strong> la copie <strong>de</strong> ses comptes. Mon f.<br />

Georges [<strong>de</strong> Lauriston] ne mʹa point écrit, mais il va venir, il me dira <strong>de</strong> vive voix tout ce<br />

quʹil aurait pu mʹécrire et plus encore.<br />

Notre chère Légion romaine a été ru<strong>de</strong>ment traitée par la guerre; beaucoup <strong>de</strong> ceux<br />

que nous avions connus ont été tués; prions bien pour eux.<br />

Adieu, bien chers amis, à bientôt, je lʹespère. Je vous embrasse dʹavance dans les<br />

Cœurs sacrés <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M.<br />

Votre dévoué ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

1545


1616‐1 <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax à M. J. Faÿ<br />

P. S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong> (et ce qui est souligné dans la lettre).<br />

Le départ <strong>de</strong> Rome s’organise. Dispositions pour le mouvement <strong>de</strong> personnel entre les Œuvres <strong>de</strong> Tournay et<br />

celles <strong>de</strong> France.<br />

Vaugirard, vendredi 10 mars 1871<br />

Mon bien cher frère en N.S.,<br />

Le Père général répond par ce courrier à vos <strong>de</strong>ux bonnes lettres du 4 mars reçues,<br />

je dirais, le même jour.<br />

Il a <strong>de</strong> bonnes nouvelles <strong>de</strong> Rome où nos Frères sont encore chez les PP. Trappistes,<br />

achevant <strong>de</strong> liqui<strong>de</strong>r le matériel <strong>de</strong>s anciens Cercles militaires et se donnant la joie <strong>de</strong> tou‐<br />

tes les dévotions imaginables, pèlerinages, visites aux sept basiliques, etc., etc. Ils vont re‐<br />

venir en France incessamment. De Bâle, rien <strong>de</strong> nouveau: le Père a écrit à M. dʹArbois <strong>de</strong><br />

chercher à faire coïnci<strong>de</strong>r son passage à Paris <strong>avec</strong> votre voyage et lʹarrivée <strong>de</strong> M. Lantiez,<br />

aux environs du 15 ou 20 <strong>de</strong> ce mois.<br />

Pour le personnel à conserver aux œuvres <strong>de</strong> Tournai, ou à renvoyer en France,<br />

voici ce que le Père Supérieur vous fait savoir, non pas à titre <strong>de</strong> décision mais comme<br />

simple échange <strong>de</strong> vues auxquelles vous ferez, après réflexion, telles réponses ou observa‐<br />

tions que vous croiriez utiles.<br />

1° — Lorsque votre voyage sera fixé, ne pourrait‐on compter sur le retour <strong>de</strong> M.<br />

<strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] dont lʹappui ici serait <strong>de</strong>s plus nécessaires. Et en tout cas, sʹil<br />

paraît indispensable <strong>de</strong> le conserver là‐bas, ne pourrait‐on renvoyer à sa place M. Georges<br />

Coquerel. Que pensez‐vous <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier, au double point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> la piété et du travail<br />

dans les œuvres?<br />

2° — La pensée <strong>de</strong> remplacer M. Marcaire par M. Streicher est acceptable, <strong>avec</strong> cette<br />

observation toutefois que le tempérament <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier, qui vous est connu dʹailleurs, nʹof‐<br />

fre pas assez <strong>de</strong> garanties pour quʹon puisse absolument rester sans inquiétu<strong>de</strong> sur lui et la<br />

manière dont il persévérerait dans son emploi.<br />

3° — La médiocrité quʹon remarquait en M. Eugène Dufour, a peut‐être pu se corri‐<br />

ger un peu. Vous en êtes juge. Toutefois, sʹil est le même quʹautrefois (comme on peut le<br />

craindre), il nʹy aurait pas grand inconvénient à le laisser tout doucement glisser en <strong>de</strong>hors<br />

<strong>de</strong> nous en lui assurant, loin <strong>de</strong> son père, une place et un petit avenir.<br />

4° — M. Piquet a envie <strong>de</strong> revenir, mais non pour rester: ce passage à effet et à at‐<br />

tendrissement semble plus nuisible quʹutile pour nous; le Père<br />

Supérieur lui écrivant, vous en aurez connaissance plus<br />

détaillée par sa lettre.<br />

5° — Si la volonté <strong>de</strong> M. Perthuisot nʹest pas nettement<br />

<strong>de</strong> rester uni à la Congrégation, rien <strong>de</strong> mieux à lui faire que<br />

<strong>de</strong> lui écrire comme vous le proposez. Prévoyez‐vous toute‐<br />

fois le cas où cette démarche, au lieu <strong>de</strong> lʹarranger en ses dé‐<br />

sirs intimes, lui causerait <strong>de</strong> la surprise et provoquerait dé‐<br />

monstrations ou réclamations?<br />

6° — Que M. Garault revienne aussitôt quʹil vous plai‐<br />

ra; il sera le bienvenu. Son ai<strong>de</strong> en ce moment nous sera parti‐<br />

culièrement utile.<br />

1546<br />

Le FrèreJoseph Garault, en zouave pontifical 1863


7° — On prévoit lʹutilité dʹenvoyer M. Allard à Metz où lʹon aura besoin dʹai<strong>de</strong> et <strong>de</strong><br />

rendre M. Hubert à Nazareth. Mais il y faut songer encore un peu.<br />

8° — On prévoit <strong>de</strong> même lʹutilité très sérieuse du retour <strong>de</strong> M. Caron à Grenelle.<br />

Examinez toutefois sʹil nʹest pas trop engagé à Tournay; les changements sont si regretta‐<br />

bles.<br />

9° — Quant à MM. Lemaire, Jouin et Bouchy, rien nʹindique quʹils doivent être reti‐<br />

rés, au moins pour les <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rniers.<br />

10° — Un sujet <strong>de</strong> plus vous serait envoyé par contre si lʹaffaire du Courrier <strong>de</strong> lʹEs‐<br />

caut prend consistance. Ce serait M. Boiry; y voyez‐vous inconvénient? Le Père croit quʹil<br />

conviendrait à la besogne et réciproquement. Il lui écrit pour provoquer bien nettement <strong>de</strong><br />

nouvelles affirmations pareilles à celles quʹil a lui‐même formulées dans une récente lettre<br />

où il proteste <strong>de</strong> son attachement à lʹInstitut et <strong>de</strong> son désir dʹy travailler utilement.<br />

11° — Quant à la question du journal in se: il nʹest pas, assurément, dans notre ordre<br />

dʹidées <strong>de</strong> nous livrer à ce genre <strong>de</strong> travail bureaucratique. Toutefois à cause <strong>de</strong> nos obli‐<br />

gations <strong>de</strong> gratitu<strong>de</strong> et, secondairement, <strong>de</strong>s profits qui en résulteraient pour la subsis‐<br />

tance commune, la Congrégation pourrait accepter, sous la réserve <strong>de</strong> nʹy donner concours<br />

quʹaussi longtemps quʹelle aurait <strong>de</strong>s sujets aptes à ce travail spécial et sans prendre à cet<br />

égard aucun engagement qui lie lʹavenir.<br />

12° — Vous pressentez la réponse pour la Semaine Religieuse, nos vues étant abso‐<br />

lument dʹaccord: le Père vous renvoie à la <strong>de</strong>rnière lettre que vous avez reçue.<br />

13° — La bienveillance <strong>de</strong>s MM. du séminaire est bien gran<strong>de</strong> et, comme vous le di‐<br />

tes, on nʹen doit pas abuser. Son<strong>de</strong>z, si vous le pouvez, dʹune manière exacte les disposi‐<br />

tions quʹils ont présentement. Nos internes, en prolongeant leur séjour jusquʹaux vacances,<br />

ne <strong>de</strong>vraient peut‐être même pas réclamer le bénéfice <strong>de</strong> gratuité absolue quʹon leur a ac‐<br />

cordé si généreusement. A coup sûr, si lʹon veut prendre la chose comme cela, nous som‐<br />

mes faits par vocation à recevoir lʹaumône et nous nʹen refuserions pas une si précieuse.<br />

Mais au cas où le diocèse croirait avoir suffisamment fait pour nous en nous soutenant<br />

pendant la durée <strong>de</strong> la guerre, nous accepterions la reprise <strong>de</strong>s dépenses à venir. Expli‐<br />

quez donc ce que vous croirez <strong>de</strong>voir être fait à cet égard, dès que vous aurez pris infor‐<br />

mation auprès <strong>de</strong> qui <strong>de</strong> droit.<br />

14° — Pour les externes qui suivent seulement les cours <strong>de</strong>s Jésuites, leur situation<br />

est‐elle assimilable à celle <strong>de</strong>s théologiens et peuvent‐ils être considérés comme chargeant<br />

la maison qui les admet, cela est, pour le moins, fort douteux.<br />

Je vous laisse, mon bon frère et vénéré ami, pour courir dans notre triste Paris qui<br />

nʹa ni foi ni loi, mais, en revanche, beaucoup dʹorgueil et <strong>de</strong> bavardage.<br />

Priez pour nous et nous vous le rendons <strong>de</strong> notre côté <strong>avec</strong> lʹaffection fraternelle<br />

que vous savez.<br />

Votre respectueux frère en N.S. B. <strong>de</strong> Varax<br />

pr. S V P.<br />

Je vous prie, mon cher ami, <strong>de</strong> faire parvenir le mot ci‐joint à M. Piquet; sʹil a besoin<br />

<strong>de</strong> lʹargent pour son voyage, pourrez‐vous le lui avancer, sauf à en recevoir le montant<br />

lors <strong>de</strong> votre prochain voyage?<br />

Je pense que M. <strong>Jean</strong>‐Marie pourrait, en votre absence, être chef intérimaire <strong>de</strong> la<br />

petite communauté.<br />

1547


Pour M. Vernay, sa santé souffre sans doute <strong>de</strong> sa vie sé<strong>de</strong>ntaire en internat; MM.<br />

du séminaire nʹadmettraient‐ils pour raison <strong>de</strong> santé, quʹil allât temporairement aux cours<br />

comme externe? Je ne vois guère dʹautre moyen.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1617 à M. Trousseau<br />

Exhortation à la patience, dans l’attente <strong>de</strong> ce qui lui sera <strong>de</strong>mandé.<br />

Vaugirard, [11 mars 1871]<br />

Mon cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai lu <strong>avec</strong> attention votre <strong>de</strong>rnière lettre; je pense quʹil faut sans doute tenter <strong>de</strong><br />

bien asseoir vos œuvres, mais il faut aussi tenir compte <strong>de</strong>s difficultés qui sʹopposent sou‐<br />

vent à ce que nous fassions tout ce qui nous semblerait être utile dans lʹintérêt du bien.<br />

Dieu nous éprouve souvent par <strong>de</strong>s attentes pénibles; sachons les supporter, cette patience<br />

trouve grâce <strong>de</strong>vant lui. Du reste, pour bien voir <strong>de</strong> près les choses, je vais tâcher que M.<br />

<strong>de</strong> Varax, au commencement <strong>de</strong> la semaine prochaine, fasse une apparition à Amiens. En<br />

conversant <strong>avec</strong> M. Caille et <strong>avec</strong> vous, il aura une vue plus nette <strong>de</strong> ce qui pourrait être<br />

fait, et il mʹen rendra compte.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1617‐1 <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax à M. J. Faÿ<br />

Fin <strong>de</strong> P. S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong> (et les parenthèses soulignées dans la lettre).<br />

Réorganisation du personnel dans les Œuvres <strong>de</strong> Belgique et <strong>de</strong> France.<br />

Vaugirard, dimanche 12 mars 1871<br />

Mon vénéré frère,<br />

Je réponds <strong>de</strong> la part du Père général à vos <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rnières lettres.<br />

M. Garault, arrivé hier soir, est à Chaville ce matin et travaillera à déblayer le pau‐<br />

vre noviciat <strong>de</strong> lʹordure ennemie. Il paraît que ce sont les étables dʹAugias!<br />

Il nʹa pas eu assez dʹargent, M. Lefort a pu lui en donner un peu, heureusement. Les<br />

couchées et Cie. en sont cause... Merci <strong>de</strong> vos excellents détails sur M. Vialloux.<br />

On vient dʹécrire à Verdun pour le dimissoire <strong>de</strong> M. Cauroy. Dieu soit <strong>avec</strong> ce cher<br />

enfant et lui envoie, en lui donnant le sceau du sous‐diaconat, lʹesprit <strong>de</strong> sacrifice et dʹim‐<br />

molation: jugiter... ce que je dis non comme une critique mais comme la chose la plus ca‐<br />

pable <strong>de</strong> lui faire trouver consolation en cette vie... amara val<strong>de</strong>!<br />

Si M. Maignen va vous voir à Tournay, on espère quʹil pourra satisfaire aux diver‐<br />

ses commissions <strong>de</strong>mandées. Le livre <strong>de</strong>s Constitutions, les Catéchismes <strong>de</strong>s vœux sont notés.<br />

Lʹargent sera envoyé également. Si, comme on peut le craindre aujourdʹhui, M. Maignen<br />

nʹallait pas là‐bas à cause <strong>de</strong> ses affaires du Cercle, vous recevriez visiteur (M. <strong>de</strong> Varax,<br />

sans doute), ou tout au moins lʹargent par un autre moyen.<br />

M. dʹArbois écrit quʹil ne sera libre que le 20, cʹest‐à‐dire à Paris que le 25; cela<br />

donne un petit peu <strong>de</strong> marge pour vos propres mouvements.<br />

1548


Dès à présent, si vous le voulez, on peut expédier à Nazareth et Vaugirard MM.<br />

Hubert et Lemaire. M. Risse écrivant quʹil a besoin dʹun sujet, on pourrait lui réserver M.<br />

Allard. Nous allons en écrire à Metz. Il est économique, et plus expéditif, <strong>de</strong> faire suivre la<br />

voie belge et luxembourgeoise au sujet expédié <strong>de</strong> Tournay sur Metz. M. Risse sʹentendra<br />

immédiatement <strong>avec</strong> vous.<br />

Ne croyez‐vous pas que ce serait meilleur pour la Congrégation <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r à Tour‐<br />

nai M. Coquerel au lieu <strong>de</strong> M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet].... Le poste <strong>de</strong> S t ‐Charles qui attend<br />

lʹun ou lʹautre <strong>de</strong> ces MM. est bien périlleux pour un homme encore peu formé car cʹest un<br />

poste où lʹon est absolument seul. Sous votre regard, M. Coquerel ferait, ce nous semble,<br />

<strong>de</strong>s œuvres même absorbantes sans danger pour sa vocation; à S t ‐Charles, M. <strong>Jean</strong>‐Marie<br />

soutiendrait les dangers beaucoup plus sûrement?<br />

Voulez‐vous avoir la bonté dʹécrire <strong>de</strong> suite à M. Manque, <strong>de</strong> la part du Père Supé‐<br />

rieur, quʹil peut se mettre en route pour Paris dès quʹil voudra. On lʹattend et on le recevra<br />

<strong>avec</strong> joie.<br />

Jʹen viens à la question capitale <strong>de</strong> votre lettre, celle <strong>de</strong>s étudiants. A tous égards, il<br />

paraît indispensable <strong>de</strong> ne précipiter aucunement le retour <strong>de</strong> ces étudiants. Mieux vaut<br />

accepter <strong>de</strong> payer la pension <strong>de</strong> chacun jusquʹau mois dʹaoût. Comment, sans périls, inter‐<br />

rompre une année dʹétu<strong>de</strong>s bien commencée? Chaville dʹailleurs, et Vaugirard non plus<br />

pour dʹautres raisons, ne sont en mesure dʹabriter le petit troupeau. Enfin il faudrait un<br />

berger <strong>de</strong> plus et nous avons besoin, faute <strong>de</strong> bergers, <strong>de</strong> ne pas augmenter le nombre <strong>de</strong><br />

bergeries déjà trop nombreuses.<br />

La pension <strong>de</strong> Lepage et <strong>de</strong> Pialot seront payées ainsi que celle <strong>de</strong> <strong>Prevost</strong> à la<br />

communauté <strong>de</strong> Tournay par la communauté‐mère, cʹest‐à‐dire à la fin <strong>de</strong> lʹannée; on aura<br />

eu le temps <strong>de</strong> se retourner et dʹétudier la marche à suivre pour la rentrée.<br />

La question intérieure <strong>de</strong> surveillance est bien plus difficile à résoudre: peut‐on ar‐<br />

river à se passer dʹun surveillant spécial? Vos obligations particulières vous mettent‐elles<br />

dans lʹimpossibilité <strong>de</strong> prendre en partie ce soin? Aucun <strong>de</strong>s Frères employés le soir et le<br />

dimanche nʹaurait‐il capacité ou liberté <strong>de</strong> vous remplacer dans la mesure nécessaire au‐<br />

près <strong>de</strong> cette jeunesse? Lʹhomme du Courrier <strong>de</strong> lʹEscaut, par exemple, aurait‐il du temps<br />

libre pour soigner les Persévérants? Pour moi, jʹai même suggéré au Père général lʹidée<br />

que peut‐être (comme il faut un homme ferme et sûr dans cet emploi) on y emploierait<br />

<strong>avec</strong> succès M. Vernay en suspendant ses cours <strong>de</strong> théologie pour lui donner repos dans<br />

lʹactivité.<br />

Ici <strong>de</strong>ux jeunes enfants: Imhoff et Duvigny, sont plus<br />

que prêts à être adjoints à leurs jeunes <strong>de</strong>vanciers... Si cette<br />

petite catégorie était bien organisée dʹici au mois dʹaoût,<br />

nous pourrions utilement mettre les <strong>de</strong>ux nouveaux aux étu‐<br />

<strong>de</strong>s <strong>avec</strong> les autres.<br />

Vous verrez, mon cher et bon frère, ce quʹil y a <strong>de</strong><br />

pratique en tout cela et vous y ferez vos observations, soit<br />

par lettre, soit lorsque vous viendrez ici.<br />

Le Père Adolphe Imhoff<br />

1549


Je termine ici, ayant tout développé je crois. Jʹy joins mes affectueux sentiments<br />

pour tous et la bénédiction du Père pour chacun, pour vous surtout, cher ami, qui portez<br />

la responsabilité, cʹest‐à‐dire le poids lourd par excellence.<br />

Joseph, père <strong>de</strong> la Sainte‐Famille, soit <strong>avec</strong> vous.<br />

Votre humble petit frère en N.S. B. <strong>de</strong> Varax pr. S V P.<br />

1° La somme que vous enverrait, pour les voyages, le Père Supérieur, serait <strong>de</strong> 150f.<br />

Vous suffirait‐elle?<br />

2° Sʹassurer, avant <strong>de</strong> prendre une décision, si les étu<strong>de</strong>s ainsi que les pensions du<br />

Séminaire, ne sont pas exorbitantes et hors dʹatteinte pour nous.<br />

3° Les latinistes prennent‐ils quelques repas au collège ou reçoivent‐ils seulement<br />

lʹenseignement?<br />

4° Lʹidée <strong>de</strong> placer M. Vernay comme mentor <strong>de</strong>s Persévérants en interrompant ses<br />

étu<strong>de</strong>s, nʹagrée guère au Père Supérieur.<br />

5° En vue dʹune prolongation <strong>de</strong> séjour au‐<strong>de</strong>là du temps <strong>de</strong>s vacances scolaires à<br />

Tournay, nʹest‐il pas bien essentiel <strong>de</strong> prévoir dès aujourdʹhui dʹune manière un peu pré‐<br />

cise, quels moyens dʹexistence seraient assurés aux Frères quʹon consacrerait aux œuvres.<br />

Leur nombre, dʹaprès nos coutumes, <strong>de</strong>vrait être proportionné au montant <strong>de</strong>s dites res‐<br />

sources.<br />

Ecriture <strong>de</strong> MLP.<br />

Je ne saisis pas bien le sentiment qui pousse M. Vernay à tant désirer son retour en<br />

France. Cʹest à grandʹpeine sʹil y serait à lʹabri <strong>de</strong> toute atteinte au point <strong>de</strong> vue du service<br />

militaire. Il est trop raisonnable et trop chrétien pour mettre en souffrance ses étu<strong>de</strong>s et,<br />

peut‐être, la fermeté <strong>de</strong> sa vocation en cédant à un moment dʹennui? Est‐il mécontent <strong>de</strong><br />

lʹenseignement du séminaire <strong>de</strong> Tournay? Je ne sais quelle explication trouver à cette dé‐<br />

faillance.<br />

Votre tout affectionné Le <strong>Prevost</strong><br />

1618 à M. Chaverot<br />

Invitation à quitter Rome et à regagner la France. Impatience <strong>de</strong> revoir ses frères.<br />

Vaugirard, 14 mars 1871<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Après mʹêtre entendu <strong>avec</strong> MM. Keller et Poussielgue, je puis vous écrire en toute<br />

assurance que, votre séjour à Rome nʹétant plus nécessaire présentement, votre retour en<br />

France est entièrement approuvé par le Comité. Je vous invite donc à nous revenir le plus<br />

tôt possible. La paix, qui vient dʹêtre conclue, nous laissant la possibilité <strong>de</strong> reconstituer<br />

toutes nos œuvres, il importe que nous réunissions au plus tôt tous ceux <strong>de</strong> nos ff. qui<br />

doivent y prendre part.<br />

Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> vous dire <strong>avec</strong> quelle impatience vous êtes attendus; après une<br />

si longue séparation, tous désirent ar<strong>de</strong>mment <strong>de</strong> vous revoir; je pense que, vous aussi,<br />

vous retrouverez <strong>avec</strong> joie les ff. qui vous sont tendrement dévoués.<br />

1550


Je pense que vos bons parents ne vous verront pas sans grand regret passer si près<br />

dʹeux et ne pas vous arrêter un moment pour les embrasser; si donc vous jugez quʹil y ait<br />

charité et convenance à vous arrêter chez eux <strong>de</strong>ux ou trois jours, faites‐le, nos ff. Georges<br />

[<strong>de</strong> Lauriston] et Emile [Beauvais] continuant leur route, vous <strong>de</strong>vanceraient dʹautant.<br />

M. Poussielgue a dit à M. Myionnet, qui est allé sʹentendre <strong>avec</strong> lui, que M. Desce‐<br />

met pourvoira aux frais <strong>de</strong> votre voyage.<br />

Ne manquez pas <strong>de</strong> faire vos adieux à tous nos amis, offrez‐leur notre profon<strong>de</strong><br />

gratitu<strong>de</strong> <strong>avec</strong> la vôtre; assurez‐les que nous acquitterons <strong>de</strong>vant Dieu notre <strong>de</strong>tte envers<br />

eux et que, sʹil plaît au Seigneur <strong>de</strong> nous ramener plus tard à Rome, notre plus vive conso‐<br />

lation serait <strong>de</strong> les y retrouver.<br />

Adieu, à bientôt, chers amis, je vous tends les bras; jʹattends lʹavis <strong>de</strong> votre arrivée<br />

ou, mieux encore, je vous attends vous‐mêmes.<br />

Votre dévoué ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1618 bis 447 à M. Maignen<br />

Convocation à un Conseil <strong>de</strong>s Œuvres.<br />

Vaugirard, 15 mars 1871<br />

Mon cher enfant en N.S.,<br />

Je crois quʹon fera bien dʹavoir un Conseil <strong>de</strong>s Œuvres lundi, jour où nous fêterons<br />

St Joseph en famille; il faudrait préparer ce Conseil et prévoir aussi les questions générales<br />

que nous aurons à examiner lorsque la plupart <strong>de</strong>s anciens ff., MM. Lantiez, Faÿ, dʹArbois,<br />

ceux <strong>de</strong> Rome, etc. vont se trouver momentanément réunis ici vers le 25 <strong>de</strong> ce mois. Je<br />

crois que, pour cette double prévision, il serait tout à fait nécessaire <strong>de</strong> nous voir extraor‐<br />

dinairement vendredi (après‐<strong>de</strong>main); avertissez‐en, je vous prie, M. Paillé. Nous nous ré‐<br />

unirons à 3h. Pensez‐y dʹavance et résumez vos vues, si vous avez un moment pour y ré‐<br />

fléchir.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1619 à M. J. Faÿ<br />

Mouvement <strong>de</strong> personnel.<br />

Vaugirard, 15 mars 1871<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je reçois ce matin, mercredi 15, votre lettre du 13, et jʹy réponds en <strong>de</strong>ux mots.<br />

Jʹaccepte que M. Henry [Piquet] aille sans mystère, mais directement à Grenelle; il<br />

priera M. Ed. Lainé <strong>de</strong> mʹavertir <strong>de</strong> son arrivée et, par le même moyen, je lui ferai dire à<br />

quelle heure je pourrai le voir à Nazareth; quʹil soit bien persuadé que je recevrai sa visite<br />

<strong>avec</strong> plaisir et que les raisons dont je vous ai parlé sont la seule cause <strong>de</strong> lʹhésitation mon‐<br />

trée par moi.<br />

447 Supplée la lettre 1714.<br />

1551


M. Hubert peut arriver, on lʹattend à Nazareth; M. Lemaire pourrait lʹaccompagner;<br />

quant à M. Allard, jʹattends la réponse <strong>de</strong> M. Risse; peut‐être, sʹil va à Metz, il pourrait<br />

faire un petit détour pour passer trois ou quatre jours près <strong>de</strong> sa mère. (Je viens <strong>de</strong> voir la<br />

carte, le détour est bien notable; il serait bien plus raisonnable <strong>de</strong> renoncer à cette excur‐<br />

sion); vous verrez ce que les dispositions <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt.<br />

Cʹest M. <strong>de</strong> Varax qui va vous voir; il vous portera la pension <strong>de</strong> Pialot et Lepage et<br />

un peu dʹargent pour les voyages.<br />

Votre tout dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1620 à M. Maignen<br />

Documents à rechercher.<br />

Vaugirard, 25 mars [1871]<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Les pièces qui ont été déposées chez vous hier, pour être confiées à lʹobligeance <strong>de</strong><br />

M. Senard, ont été emportées en mon absence, avant que jʹaie pu reprendre une feuille<br />

dont jʹai besoin; je vous prie donc <strong>de</strong> mettre à même M. Audrin dʹen faire la recherche. Si<br />

les pièces sont déjà rue du Bac, M. Audrin pourrait y passer et le présent billet, que vous<br />

laisseriez entre ses mains, lui servirait dʹautorisation pour faire la recherche chez M. Se‐<br />

nard.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Le jeune Dalstein, qui porte ce mot, vient seulement pour sʹassurer si, oui ou non,<br />

les pièces sont encore au Cercle; dʹaprès la réponse, M. Audrin ira, soit chez vous, soit chez<br />

M. Senard.<br />

1621 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Précautions pour un voyage à Paris. Les ʺécuries dʹAugiasʺ à Chaville.<br />

Vaugirard, 25 mars 1871<br />

Annonciation<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Une première lettre, que je vous ai adressée à Amiens, a répondu déjà en partie aux<br />

questions que vous me faites sous la date du 23 <strong>de</strong> ce mois; jʹajoute ce qui manque encore<br />

pour vous donner toute satisfaction. Je ne vois pas jusquʹici <strong>de</strong> décision nette à la situation<br />

politique, les mesures <strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nce ne sont donc pas à négliger; je vais faire porter à St ‐<br />

Charles les habits dont vous pourriez vous servir le cas échéant. Je vous écrirai mardi pour<br />

vous dire si les nuages se dissipent définitivement, afin que vous veniez sans crainte le<br />

len<strong>de</strong>main, en supposant que votre santé soit meilleure.<br />

Je vais avertir M. Planchat quʹil ne doit pas compter sur votre concours. Point <strong>de</strong> let‐<br />

tre pour vous, ni dʹAngers, ni <strong>de</strong> Versailles; seulement, le jeune soldat que vous visitiez à<br />

lʹambulance vous fait part <strong>de</strong> la mort <strong>de</strong> sa sœur, âgée <strong>de</strong> 17 ans.<br />

1552


Adieu, mon bien cher ami, comptons beaucoup sur Dieu et sur le secours quʹob‐<br />

tiendront pour nous la S te Vierge et S t Joseph.<br />

Mille affections <strong>de</strong> tous pour vous et pour nos amis dʹAmiens.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je suis à Chaville <strong>de</strong>puis trois jours, présidant, non à <strong>de</strong>s réparations, mais à <strong>de</strong>s<br />

nettoyages; les écuries dʹAugias étaient belles comparées aux <strong>de</strong>meures que nous ont fai‐<br />

tes les Prussiens. Aujourdʹhui samedi, je suis venu à Vaugirard; jʹen partirai ce soir et, à<br />

moins dʹautre disposition non prévue, je resterai la semaine qui va venir à Chaville.<br />

Hercule nettoyant les écuries d'Augias,<br />

Honoré Daumier, 1842.<br />

1622 à M. dʹArbois<br />

MLP. fait rechercher un titre sur le Trésor Public.<br />

Chaville, 25 mars 1871<br />

Annonciation<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je mʹétonne et mʹinquiète <strong>de</strong> ce quʹun titre en petit format (blanc) sur le Trésor, que<br />

jʹavais particulièrement signalé à M. Audrin, nʹait point été trouvé par vous parmi les piè‐<br />

ces contenues dans la Caisse dont vous avez fait ensemble lʹouverture.<br />

Jʹai la certitu<strong>de</strong> quʹil y avait été enfermé par moi, et je suis persuadé quʹil sʹest glissé<br />

en quelque cahier où une recherche plus attentive le fera découvrir. Je vous prie donc,<br />

mon cher ami, <strong>de</strong> compulser, <strong>avec</strong> tout le soin possible, les pièces que vous avez empor‐<br />

tées; <strong>de</strong> mon côté, je charge M. Audrin <strong>de</strong> faire une sérieuse recherche parmi celles qui,<br />

restées entre ses mains, ont été <strong>de</strong>puis envoyées là où elles <strong>de</strong>vaient <strong>de</strong>meurer.<br />

Jʹattendrai un mot <strong>de</strong> réponse <strong>de</strong> votre part quand vous aurez pu vous occuper <strong>de</strong><br />

ce soin essentiel.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Affections à tous.<br />

1553


1623 à M. Chaverot<br />

M. Chaverot ne doit pas prolonger son séjour à Rome.<br />

Chaville, 26 mars 1871<br />

Mon bon ami et fils en N.S.,<br />

Votre <strong>de</strong>rnière lettre du 22 <strong>de</strong> ce mois exprime le désir que vous auriez <strong>de</strong> prolon‐<br />

ger et <strong>de</strong> maintenir votre séjour à Rome dans lʹintérêt <strong>de</strong> la Congrégation, et aussi dans<br />

lʹespoir dʹy faire quelque bien. Je ne ferais pas <strong>de</strong> difficulté à cet arrangement, malgré la<br />

pénurie <strong>de</strong> notre personnel pour relever et soutenir les œuvres nombreuses, vous le savez,<br />

que nous avons à <strong>de</strong>sservir à Paris et en province. Mais nos ressources temporelles sont<br />

tout à fait amoindries et nous avons une peine extrême à soutenir nos maisons; je ne vois<br />

pas quels moyens nous aurions <strong>de</strong> pourvoir à vos dépenses à Rome. Vous ne pourriez y<br />

<strong>de</strong>meurer que si vous aviez un lieu dʹétablissement, quelque œuvre à faire et <strong>de</strong>s ressour‐<br />

ces pour subsister. M. Georges [<strong>de</strong> Lauriston] a bien quelque revenu, mais il est affecté au<br />

soutien <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> Grâce, laquelle est en<strong>de</strong>ttée et fort en souffrance en ce<br />

moment. Si vous ne voyez rien qui semble se préparer pour vous poser dʹune façon quel‐<br />

conque, je crois quʹà défaut <strong>de</strong> cet indice provi<strong>de</strong>ntiel, votre retour ici semble être le seul<br />

parti à prendre.<br />

Vous me parlez dʹune proposition pour <strong>de</strong>s travaux <strong>avec</strong> Mgr le Secrétaire du<br />

Concile; je ne trouve aucune trace <strong>de</strong> cette ouverture dans vos lettres et je ne sais en quoi<br />

elle consiste; si elle est <strong>de</strong> nature telle quʹelle puisse influer sérieusement sur la décision<br />

concernant votre maintien à Rome, dites‐le moi et donnez‐moi quelques explications, afin<br />

que je puisse en juger. Il importe, en tout cas, que vous ne <strong>de</strong>meuriez pas longtemps à<br />

Rome aux dépens du Comité, puisquʹil a reconnu que vous nʹétiez plus nécessaire à lʹœu‐<br />

vre quʹil y avait fondée.<br />

Je vais, comme vous le désirez, vous envoyer une dépêche télégraphique, en même<br />

temps que je mets cette lettre à la poste.<br />

Adieu, mon bien cher ami et fils en N.S. Je prie, nous prions tous <strong>avec</strong> vous; en ce<br />

mon<strong>de</strong>, il nʹy a présentement que ténèbres, il faut chercher la clarté du côté du Ciel.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. 28 mars. Si, contre mon attente, vous trouviez, à votre arrivée en France, <strong>de</strong>s<br />

troubles graves et <strong>de</strong>s empêchements pour venir à Paris, vous pourriez venir à Chaville<br />

où, en cas dʹimpossibilité, vous rendre à Amiens ou à Angers.<br />

1624 à M. <strong>de</strong> Lauriston<br />

Nettoyage <strong>de</strong> Chaville. Le frère <strong>de</strong> Lauriston <strong>de</strong>man<strong>de</strong> dʹaller à Nantes. Questions financières. Prier beaucoup,<br />

ʺtous les moyens humains semblent frappés <strong>de</strong> nullitéʺ.<br />

[26 mars 1871]<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je ne répondrai que <strong>de</strong>ux mots à votre bonne et affectueuse lettre; ma tête est <strong>de</strong>ve‐<br />

nue lente et mal disponible <strong>de</strong>puis quelque temps, et je ne puis presque écrire sans ai<strong>de</strong> ou<br />

secrétaire. M. <strong>de</strong> Varax, qui mʹai<strong>de</strong> temporairement, est absent; son secours me fait défaut.<br />

Je suis ici à Chaville <strong>de</strong>puis quelques jours et, pendant quʹà Vaugirard nos ff. sʹévertuent à<br />

1554


emettre en état leurs bâtiments, successivement endommagés par les obus prussiens et<br />

dévastés par nos corps militaires qui en ont, pendant six mois, fait une caserne à leur<br />

usage, je tâche ici, non pas <strong>de</strong> réparer, ce qui sera pour nous lʹœuvre, peut‐être impossible,<br />

<strong>de</strong> plusieurs années, mais <strong>de</strong> purger, désinfecter, vi<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s ordures et fumiers les cours,<br />

les salles, tous les intérieurs, tellement empestés que les lieux convertis en écuries sem‐<br />

blent avoir été les moins mal employés; jʹai peu <strong>de</strong> mon<strong>de</strong> pour ce travail, nos ff. sont dis‐<br />

persés et les ouvriers manquent; toutes les banlieues ayant à la fois dʹimmenses répara‐<br />

tions et travaux dʹassainissement à effectuer, cʹest œuvre <strong>de</strong> patience, <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z‐la pour<br />

nous.<br />

Je ne saurais répondre dès ce moment à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> que vous me faites <strong>de</strong> vous<br />

rendre à Nantes; comme il est dans le droit chemin que vous passiez par Paris, nous ver‐<br />

rons si les circonstances permettent que cette satisfaction vous soit donnée; je ne présume<br />

pas quʹil y ait empêchement.<br />

Pour peu que votre retour parmi nous soit différé, je vous prie dʹécrire à votre char‐<br />

gé dʹaffaires pour savoir où vous en êtes <strong>de</strong> vos revenus. Grenelle est en souffrance, un<br />

peu dʹai<strong>de</strong> lui viendrait fort à point; pour ce qui regar<strong>de</strong> les actions que vous mʹavez mises<br />

entre les mains, elles sont confiées à la gar<strong>de</strong> <strong>de</strong> notre frère, M. lʹabbé Faÿ; on me dit quʹon<br />

ne paie présentement aucun arrérage <strong>de</strong> ces titres. Jʹavais payé à ma sœur ce qui lui était<br />

dû jusquʹau 15 octobre <strong>de</strong>rnier; pour le terme échu le 15 janvier, il nʹa point été payé. Jʹai<br />

seulement avancé 100f au fils <strong>de</strong> ma sœur, <strong>avec</strong> lʹautorisation <strong>de</strong> cette <strong>de</strong>rnière.<br />

Prions beaucoup; tous les moyens humains semblent autour <strong>de</strong> nous, en politique<br />

surtout, frappés dʹune absolue nullité; la puissance est aux mains <strong>de</strong> Dieu: levavi oculos in<br />

montes un<strong>de</strong> veniet auxilium mihi.<br />

Cordiales affections à mon fils Emile [Beauvais].<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1625 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Encouragement à venir à Paris sans crainte. Concessions à faire à M. Caille. Besoin dʹun ai<strong>de</strong> dévoué.<br />

Lundi 27 mars 1871<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je ne mʹexplique pas que mes lettres ne vous soient pas parvenues; jʹai répondu<br />

sans retard à celles que vous mʹavez écrites, et jʹai tenu compte <strong>de</strong>s questions quʹelles<br />

contenaient. Aujourdʹhui, je reçois, à 4h. 1/4 seulement, celle que vous mʹavez adressée hier;<br />

je vais envoyer ma réponse à Versailles, mais je doute quʹelle vous arrive, comme vous le<br />

pensez, <strong>de</strong>main matin à Amiens, lʹheure <strong>de</strong>s départs doit être passée.<br />

Je crois que vous pouvez venir sans inquiétu<strong>de</strong>; il peut être bien que vous preniez<br />

<strong>de</strong>s habits laïcs, M. Audrin a dû les faire porter à St ‐Charles; il mʹa assuré plusieurs fois<br />

que ce serait fait exactement, il ne paraît pas néanmoins quʹil y ait à cela une bien gran<strong>de</strong><br />

nécessité, beaucoup dʹecclésiastiques circulant sans cette précaution; M. Planchat, qui sort<br />

dʹici, mʹen donne lʹassurance; faites néanmoins ce qui vous semblera être le plus sûr. Je<br />

crois quʹil sera à désirer que, présentement, vous soyez le plus souvent à Chaville; on y<br />

apporte les correspondances; je vais, pour moi, le samedi au moins à Vaugirard.<br />

1555


Je pense quʹon peut, en esprit <strong>de</strong> conciliation, donner M. Marcaire à M. Caille, en<br />

invitant lʹun et lʹautre à ne pas séparer <strong>de</strong> cœur les <strong>de</strong>ux maisons et à tendre, au contraire,<br />

à rendre leurs relations intimes et fréquentes; je crains que M. Trousseau nʹabon<strong>de</strong> pas en<br />

ce sens. Il sera tout à fait désirable que M. Marcaire assiste, rue <strong>de</strong> Noyon, à quelques<br />

exercices communs; ce ne sera pas peut‐être sans quelque difficulté.<br />

Pour M. Boiry, je répondais, dans la lettre où je vous parlais <strong>de</strong> lui, que cʹétait à lui à<br />

son<strong>de</strong>r consciencieusement ses dispositions, quʹaprès votre retour ici, je serais mieux à<br />

même <strong>de</strong> prononcer un jugement éclairé; je ne sais si nous aurons bien sa place à Vaugi‐<br />

rard; nous essaierons néanmoins, si vous le ramenez <strong>avec</strong> vous; il est certain quʹil ne sau‐<br />

rait rester à Amiens; sa lettre mʹa paru être fort étrange.<br />

Je crois quʹen effet il faudra rappeler Frézet, puisquʹil serait dépareillé et sans place<br />

convenable à Tournay.<br />

Adieu, mon bien cher ami; jʹai vivement senti ces jours‐ci combien votre présence<br />

mʹétait nécessaire; je ne sais plus marcher, moralement ni physiquement, sans un bras ami<br />

qui me soutienne; nos ff. du Conseil, qui se refusaient jusquʹici à le reconnaître, ont été<br />

mieux éclairés dans notre <strong>de</strong>rnière assemblée 448 ; je pense que le bien <strong>de</strong> notre Congréga‐<br />

tion y gagnera beaucoup.<br />

A <strong>de</strong>main ou après‐<strong>de</strong>main; je vais prier S t Joseph <strong>de</strong> vous préparer un bon voyage<br />

et <strong>de</strong> faire fructifier tout ce que vous avez semé à Amiens et à Tournay.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Souvenirs dévoués à nos ff.<br />

1626 <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax 449 à M. J. Faÿ<br />

P. S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

MLP. sʹefforce <strong>de</strong> bien remettre en route le Noviciat. Il souhaite une visite <strong>de</strong> M. Faÿ lorsque les temps seront<br />

meilleurs.<br />

Chaville, 30 mars 1871<br />

Mon bon vénéré frère en N.S.,<br />

Votre lettre du 28 me trouve ici à Chaville, où je suis arrivé ce matin, après avoir quitté<br />

Amiens hier à midi.<br />

Je resterai provisoirement à Chaville <strong>avec</strong> le Père Supérieur, cʹest là que vous pouvez lui<br />

adresser vos correspondances. Je réponds brièvement, par article, à vos dires.<br />

1° M. Frézet est revenu à Vaugirard mecum. M. Boiry mʹy a précédé <strong>de</strong> vingt‐quatre heures.<br />

La philosophie se continuera là‐bas fort bien, je lʹespère. Il était évi<strong>de</strong>nt que Frézet nʹavait pas sa<br />

place à Tournai.<br />

448<br />

En février, le Conseil avait accepté la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> MLP. <strong>de</strong> confier la direction <strong>de</strong> l’Institut à un vicaire général qui exercera effectivement<br />

l’autorité. Quelques jours après la proclamation <strong>de</strong> la Commune <strong>de</strong> Paris le 18 mars, MM. Lantiez, d’Arbois, Myionnet,<br />

Maignen et Paillé sont réunis à Chaville, le 23 mars, autour du Fondateur. L’un <strong>de</strong>s conseillers propose Bernard <strong>de</strong> Varax<br />

comme vicaire général « à cause <strong>de</strong> ses dons remarquables pour le maniement <strong>de</strong>s hommes ». L’unanimité se fait immédiatement<br />

autour <strong>de</strong> son nom. Mais M. <strong>de</strong> Varax n’acceptera le poste qu’au début du mois <strong>de</strong> juin.<br />

449<br />

Entre sa signature et le post-scriptum <strong>de</strong> MLP., le père <strong>de</strong> Varax a placé les <strong>de</strong>ux lignes suivantes:<br />

« Mon cher frère, cette lettre n’a pas <strong>de</strong> caractère officiel ;<br />

c’est moi qui vous écris, et non pas le P. Supérieur. »<br />

Elles paraissent indiquer que M. <strong>de</strong> Varax n’y agit pas en secrétaire délégué <strong>de</strong> MLP., mais qu’il fait sa réponse personnelle à la<br />

lettre que M. J. Faÿ lui a adressée. Ce qui explique la typographie en caractères différents.<br />

1556


2° Le Père Général va sʹoccuper <strong>de</strong> notre pauvre f. Cauroy; que je suis affligé <strong>de</strong> ce contre‐<br />

temps!<br />

3° Des mesures vont également être prises pour M. Perthuisot; le Père vient <strong>de</strong> mʹindiquer<br />

comment il fallait lui répondre, et cʹest le sens <strong>de</strong> mon entretien <strong>de</strong> Tournay.<br />

4° La procuration était aux mains <strong>de</strong> M. Caille, il avait charge <strong>de</strong> la chose; voilà pourquoi<br />

vous ne saviez rien. Mais, le jour <strong>de</strong> mon départ, hier, M. Caille a reçu avis que la pièce ne peut<br />

servir. Il a dû vous la renvoyer pour quʹon la fasse légaliser par le Consul français à Tournay. Ainsi<br />

revêtue, elle servira.<br />

5° M. Streicher est ici, arrivant à propos pour suppléer M. Hubert quʹun malheur <strong>de</strong> famille<br />

appelle à Nantes. M. Lemaire va bien. M. Piquet est à Grenelle et persiste dans les sentiments que<br />

vous aviez annoncés au Père Supérieur. Je crois que cʹest un bonheur pour lui, sinon pour nous.<br />

6° Les pouvoirs <strong>de</strong> Chaville vont être re<strong>de</strong>mandés aujourdʹhui. Merci pour lʹavis <strong>de</strong> casibus<br />

reservatis.<br />

7° Nous nʹavons pas lieu <strong>de</strong> compter sur vous maintenant, sinon après Pâques. Le Conseil<br />

projeté a été tenu à Chaville, puis on sʹest éclipsé qui à Angers, qui à Paris ... Votre venue après les<br />

fêtes sera peut‐être bien bonne pour vous, néanmoins vous en jugerez vous‐même. Je nʹai pas pu<br />

voir M. dʹArbois; il est à Angers <strong>de</strong>puis plus <strong>de</strong> huit jours. Nos frères <strong>de</strong> Rome, arrêtés à Lyon par<br />

crainte <strong>de</strong>s troubles <strong>de</strong> Paris, vont nous arriver incessamment. Jusquʹici, la crainte seule paralyse<br />

tout à Paris. Il nʹy a pas eu <strong>de</strong> sang versé cette semaine. Mais peut‐on se bercer <strong>de</strong> lʹespoir que ce<br />

malheur sera évité?<br />

8° M. Desclée nʹa pas encore écrit; il faut lʹavertir <strong>de</strong> correspondre <strong>avec</strong> Chaville jusquʹà<br />

nouvel ordre. La poste nʹest pas sûre par Paris.<br />

9° Quelle difficulté verriez‐vous au changement <strong>de</strong> M. Coquerel? Jʹai trouvé ici M. Lantiez<br />

assez préoccupé <strong>de</strong> sa situation là‐bas, et craignant quʹil ne sorte peu à peu <strong>de</strong> sa voie par ce pen‐<br />

chant quʹil a à lʹinitiative et à effacer graduellement tout ce qui agit autour <strong>de</strong> lui. Un vrai noviciat<br />

(et, contrairement à mon attente, on songe à en reformer un ici) lui vaudrait mieux pour son âme,<br />

il nʹy a pas <strong>de</strong> doute. Reste la question <strong>de</strong> œuvres à Tournay et le moyen <strong>de</strong> pourvoir convenable‐<br />

ment à son remplacement. Que vous en semble? Le Père Général ne paraît en aucune manière op‐<br />

posé, quant à présent, à accor<strong>de</strong>r M. Charrin pour Tournai. Je ne suppose pas que les combinai‐<br />

sons actuellement à lʹétu<strong>de</strong> pour tout le personnel <strong>de</strong> lʹInstitut viennent contrarier les dispositions<br />

favorables à votre désir.<br />

Les enfants auront un jeu <strong>de</strong> dames, un jeu <strong>de</strong> dominos et un jeu dʹoie, héritage <strong>de</strong>s militai‐<br />

res; je vais mʹoccuper du jeu dʹéchecs. Mais il faut maintenant que vous veniez chercher ça, car je<br />

ne sais pas même si le chemin <strong>de</strong> fer sʹen voudrait charger pour Roubaix.<br />

Je ne vous ai guère remercié <strong>de</strong> votre si bonne hospitalité, rendue plus précieuse par les<br />

soins <strong>de</strong> charité dont nos frères ont entouré ma chétive personne. Je leur souhaite autant <strong>de</strong> vertu<br />

et <strong>de</strong> zèle au service <strong>de</strong> Notre‐Seigneur crucifié quʹils mʹont bien voulu montrer dʹaffection, et au‐<br />

tant <strong>de</strong> douceur à se supporter mutuellement quʹils en ont mis à supporter les incommodités que<br />

mon séjour a causées parmi vous.<br />

Adieu, mon bon frère. Je ne vous fais pas une peinture <strong>de</strong> Chaville, parce que cʹest si triste<br />

et cela sent si mauvais que je nʹai débouché encore ni mes yeux, ni mes naseaux <strong>de</strong>puis vingt‐<br />

quatre heures que jʹy suis.<br />

Je me recomman<strong>de</strong> à vos prières; nous ne vous oublions pas, ni les laïcs, ni les Séminaristes,<br />

ni le Père surtout.<br />

Votre petit serviteur en N.S. B. <strong>de</strong> Varax<br />

pr. ff. S.V.P.<br />

Mon cher Frère, cette lettre nʹa pas <strong>de</strong> caractère officiel; cʹest moi qui vous écris, et non pas<br />

le P. Supérieur.<br />

1557


Le Noviciat est plus désiré que certain, bien <strong>de</strong>s questions sont à étudier en suite <strong>de</strong><br />

lʹétat <strong>de</strong>s choses; en tout cas, tâchez <strong>de</strong> modérer un peu lʹélan <strong>de</strong> M. Georges [Coquerel],<br />

quʹil prenne un peu moins sur lui, quʹil fasse une part plus gran<strong>de</strong> à ceux qui lʹai<strong>de</strong>nt et<br />

quʹil prenne moins le ton <strong>de</strong> prédicant lorsquʹil parle; en général, cʹest le propre dʹun bon<br />

Directeur <strong>de</strong> peu faire par lui‐même et <strong>de</strong> sʹattacher surtout à bien mettre en action ceux<br />

qui lʹentourent.<br />

La feuille <strong>de</strong>s pouvoirs pour Chaville a été emportée à Vaugirard et ne doit pas être<br />

égarée; vous rappelez‐vous quelles permissions nous avaient été accordées en sus <strong>de</strong> celles<br />

dont jouit Vaugirard?<br />

La situation politique reste bien peu assise encore; peut‐être pourrez‐vous nous<br />

rendre une visite lorsquʹon verra lʹavenir se <strong>de</strong>ssiner un peu plus nettement.<br />

Assurez tous nos frères <strong>de</strong> nos affectueux sentiments; lʹabsence est bien loin <strong>de</strong> les<br />

affaiblir.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1627 <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax à M. Baumert<br />

La fondation à Londres par le père Baumert. Pru<strong>de</strong>nce avant <strong>de</strong> dresser <strong>de</strong>s plans plus précis.<br />

Chaville, le 2 avril 1871<br />

Mon bien‐aimé frère,<br />

Le Père Général vous autorise bien volontiers à profiter dʹune manière définitive<br />

<strong>de</strong>s propositions si paternelles <strong>de</strong> Mgr lʹArchevêque <strong>de</strong> Westminster [Card. Manning]. Le<br />

Père écrira lui‐même à sa Gran<strong>de</strong>ur pour lui témoigner la reconnaissance à laquelle Elle a<br />

droit <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> notre petit Institut. Pour vous, en contribuant <strong>de</strong> votre personne et <strong>de</strong><br />

votre zèle à fon<strong>de</strong>r définitivement cet Etablissement apostolique, nʹoubliez pas que notre<br />

gran<strong>de</strong> faiblesse et impuissance à travailler au service <strong>de</strong>s âmes nous oblige à compter sur<br />

Dieu beaucoup plus encore que tout autre. Chez nous, ni lʹancienneté, ni le grand nombre,<br />

ni la puissante organisation, ni la renommée ne viennent en ai<strong>de</strong> à nos humbles efforts;<br />

mais nous aurons tout gagné si nous savons prier et attendre, disant comme St Vincent, no‐<br />

tre Père: ʺDans les affaires <strong>de</strong> ce mon<strong>de</strong>, moins il y a <strong>de</strong> lʹhomme, plus il y a <strong>de</strong> Dieuʺ.<br />

Procurez donc le plus tôt que vous pourrez à votre œuvre le bien <strong>de</strong> lʹarrivée du f.<br />

Emes. Il est peut‐être déjà bien impatient dʹaller vous retrouver, car on lʹen a déjà averti, ce<br />

me semble. Il nʹy aura pas lieu <strong>de</strong> presser <strong>de</strong> même lʹinstallation <strong>de</strong> bâtiments nouveaux.<br />

Cʹest assez pour lʹheure <strong>de</strong> vous établir petitement dans les anciens. Il suffit <strong>de</strong> maintenir<br />

lʹœuvre jusquʹà nouvel ordre dans les limites un peu restreintes où vous la trouvez. Au<br />

bout dʹun certain temps, quand on aura vu <strong>de</strong> plus près les exigences et les possibilités <strong>de</strong><br />

chaque chose et <strong>de</strong> chacun, on pourra former <strong>de</strong>s plans plus rassis et plus susceptibles<br />

dʹavenir. Sʹil le fallait même alors pour lʹaccroissement <strong>de</strong>s œuvres, on aurait le temps <strong>de</strong><br />

sʹorienter et <strong>de</strong> se choisir un local plus approprié à nos usages... Tout ceci doit donc, vous<br />

le voyez, rester encore par pru<strong>de</strong>nce dans lʹattente et lʹindécision.<br />

Vous aurez, selon votre désir, la visite dʹun envoyé du Père Supérieur. M. Lantiez<br />

est prévenu. Il se pourrait que son voyage fût empêché par quelques obstacles. Dans ce<br />

cas, jʹirais à sa place, aussitôt quʹun travail dont je mʹoccupe actuellement serait terminé.<br />

1558


En attendant cet embrassement amical que le cœur <strong>de</strong> la Congrégation vous enver‐<br />

ra <strong>avec</strong> joie sur cette terre anglaise qui nous a hospitalièrement reçus, ne per<strong>de</strong>z pas <strong>de</strong><br />

vue, cher ami, que vous avez en vous‐même un trésor dʹunion et <strong>de</strong> paix spirituelle où<br />

vous pouvez puiser tous les jours sans le secours dʹaucun frère, ni visiteur, je veux parler<br />

du trésor <strong>de</strong>s observances.... lʹamour <strong>de</strong>s pratiques <strong>de</strong> lʹInstitut, la méditation fréquente<br />

<strong>de</strong>s traits <strong>de</strong> vertu <strong>de</strong> notre Père S t Vincent <strong>de</strong> Paul, la correspondance sous forme <strong>de</strong> bulle‐<br />

tin (comme à Metz) <strong>avec</strong> le centre du gouvernement <strong>de</strong> la Congrégation; ce seront là <strong>de</strong>s<br />

pratiques qui vous rendront <strong>de</strong> la vie et <strong>de</strong> la compagnie au milieu <strong>de</strong> votre solitu<strong>de</strong>. Vous<br />

ne serez pas seul, ni pour le cœur, ni surtout pour lʹâme, lorsque vous sentirez la sainte rè‐<br />

gle gouverner vos journées et lʹange gardien y conformer toutes vos actions.<br />

Quoique votre voyage en Allemagne soit différé, vous recevrez néanmoins M.<br />

Braun après Pâques. Ses affaires personnelles lʹappellent à Londres. Son affection recon‐<br />

naissante pour notre Institut ne lui permettra pas <strong>de</strong> vivre à côté <strong>de</strong> vous sans vous rendre<br />

quelque service. Toutefois, cʹest à titre dʹami et dʹhôte que vous le <strong>de</strong>vrez recevoir, et son<br />

séjour dans votre maison ne saurait lui donner aucun motif dʹy prendre part à la direction<br />

<strong>de</strong>s affaires, ni dʹy exercer aucune autorité.<br />

Je termine ici les communications du Père Général et je vous envoie, <strong>avec</strong> ses pater‐<br />

nels encouragements, les vœux affectueux <strong>de</strong><br />

Votre petit serviteur et frère in Christo<br />

B. <strong>de</strong> Varax<br />

P. S. Pour mon compte, je sollicite votre charité en faveur dʹun malheureux Allemand (du<br />

diocèse <strong>de</strong> Limbourg) que sa nationalité a forcé <strong>de</strong> quitter la France, où il était venu <strong>de</strong>puis dix ans<br />

environ, après avoir abjuré lʹhérésie. Cʹest un ancien pasteur fort instruit, marié, père <strong>de</strong> plusieurs<br />

enfants... Sa fille aînée, institutrice en Bretagne, doit aussi, je crois, avoir quitté la France. Comme il<br />

est doué dʹun talent extraordinaire en musique, il avait gagné sa vie à Châlon, où ma famille lʹavait<br />

accueilli et fait placer comme organiste dans une paroisse. On le connaît donc à fond et on peut le<br />

recomman<strong>de</strong>r. Il est présentement à Lausanne, attendant <strong>de</strong> trouver une position. Si vous pouviez<br />

lui en découvrir une, écrivez‐lui donc à M. Christfreund, chez Madame Lauffer, rue du Flon, à<br />

Lausanne (Suisse).<br />

Vous lui diriez que cʹest par moi que vous avez été averti. Pour faciliter la chose, je vous di‐<br />

rai quʹil a été plusieurs années éloigné <strong>de</strong> sa famille, afin <strong>de</strong> se placer plus commodément. Si on ne<br />

lui trouvait donc pas dʹautre place, il accepterait, je pense, <strong>de</strong> se séparer encore <strong>de</strong>s siens. Outre le<br />

talent <strong>de</strong> compositeur hors ligne, il possè<strong>de</strong> une instruction variée sur les langues, lʹhistoire, etc.<br />

B.V.<br />

1628 à M. dʹArbois<br />

Difficultés causées par la Commune au gouvernement <strong>de</strong> lʹInstitut. Le canonicat <strong>de</strong> M. dʹArbois. Batailles au‐<br />

tour <strong>de</strong> Chaville.<br />

Chaville, 6 avril 1871<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Les lettres écrites par vous et par M. [Ad.] Lainé nous sont parvenues; présente‐<br />

ment, celles que vous nous écririez doivent être adressées ici, le service <strong>de</strong> la poste à Paris<br />

étant inexact et mal sûr.<br />

1559


Nous sommes, en ce moment, si dispersés que je ne vois pas nettement quel sujet<br />

pourra vous être envoyé pour vos œuvres. Ceux <strong>de</strong> nos ff. qui sont dans Paris nʹen peu‐<br />

vent sortir; hier, nous en attendions plusieurs qui <strong>de</strong>vaient nous venir ici, <strong>de</strong>ux seulement<br />

ont pu y parvenir après <strong>de</strong> longs détours et une route fatiguante; ils auront été arrêtés aux<br />

portes. Le chemin <strong>de</strong> fer ne fonctionne plus <strong>de</strong>puis bien <strong>de</strong>s jours; nous sommes séparés<br />

<strong>de</strong> Paris, comme on lʹétait au temps du siège. M. Guichard est toujours à Metz, et nous<br />

sommes sans nouvelles <strong>de</strong> lui; dès que nous serons sortis <strong>de</strong> ces troubles et embarras si<br />

pénibles, nous nous hâterons <strong>de</strong> vous porter secours dans la mesure <strong>de</strong> nos moyens. Les<br />

gar<strong>de</strong>s nationaux obligent tous les hommes vali<strong>de</strong>s à marcher bon gré, mal gré; je ne sais<br />

ce qui va en être pour ceux <strong>de</strong>s nôtres qui sont dans Paris, pour M. Henry [Piquet] en par‐<br />

ticulier.<br />

M. Lantiez pensait, jusquʹà présent, quʹil lui serait nécessaire <strong>de</strong> rester au centre <strong>de</strong><br />

la Communauté, dont lʹappui moral lui est nécessaire; je verrai dès que nous pourrons<br />

nous réunir, ce quʹil en augure définitivement.<br />

Pour le canonicat, il eût été mieux, je crois, selon lʹesprit <strong>de</strong> notre Institut, que cet<br />

honneur ne nous fût point attribué, mais M gr ayant déjà fait publier la nomination, peut‐<br />

être y aurait‐il un procédé peu aimable à sʹy refuser après coup. M. <strong>de</strong> Varax croit que cʹest<br />

surtout au Directeur <strong>de</strong> la Maîtrise que le titre honorifique est accordé; raison <strong>de</strong> plus pour<br />

nʹy pas tenir, puisque la Maîtrise cessera, au mois dʹaoût, dʹêtre entre nos mains; il pense<br />

aussi quʹil ne serait pas nécessaire que jʹécrivisse à M gr dʹAngers pour le remercier, afin<br />

que le fait fût comme tacitement toléré plutôt quʹaccepté; je vous laisse toutefois juge <strong>de</strong> la<br />

situation et je mʹen rapporterai à lʹavis que vous me donnerez.<br />

Je vous remercie du renseignement concernant le titre dont on vous a parlé; on a<br />

écrit à Tournay pour sʹassurer sʹil y est ou non.<br />

Jʹai reçu <strong>avec</strong> plaisir la petite lettre <strong>de</strong> notre cher M. Adolphe Lainé; je suis heureux<br />

<strong>de</strong> penser que votre retour est déjà un grand allègement pour le far<strong>de</strong>au quʹil portait et qui<br />

était véritablement accablant pour ses forces.<br />

Prions beaucoup, chacun <strong>de</strong> nous en son lieu, pour que les discords désolants qui<br />

déchirent notre pauvre pays, déjà si malheureux, aient bientôt leur fin; puisse le grand<br />

jour <strong>de</strong> la Résurrection <strong>de</strong> notre divin Seigneur être aussi temporellement celui <strong>de</strong> notre<br />

délivrance et <strong>de</strong> notre apaisement.<br />

Affections à vos frères et à vous bien cordialement.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Dimanche et lundi, les batailles avaient lieu tout autour <strong>de</strong> nous: Châtillon, Meu‐<br />

don, Bellevue, Vélizy; nous avons 2 ou 3.000 soldats campés chez M. Fourchon et, à vrai<br />

dire, chez nous, puisque, toutes les clôtures ayant été brûlées et détruites, ils sont aussi<br />

souvent chez nous quʹà leur campement; ce que les Prussiens ont ménagé du bois est cou‐<br />

pé par eux; nous souffrons jusquʹau bout <strong>de</strong>s ravages <strong>de</strong> la guerre; que la sainte volonté <strong>de</strong><br />

Dieu soit faite en nous et en tout ce qui est à nous!<br />

1629 à M. dʹArbois<br />

Il répugne à lʹesprit <strong>de</strong>s Constitutions dʹaccepter un titre <strong>de</strong> chanoine honoraire. Précautions conseillées à un<br />

jeune frère.<br />

1560


Chaville, 9 avril [1871]<br />

Pâques<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je réponds vite et précisément, comme vous me le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z, à votre question<br />

concernant le canonicat honoraire que la bonté <strong>de</strong> Mgr [Freppel] dʹAngers veut vous confé‐<br />

rer. Pour moi, je puis dire aussi pour nous, quoique je nʹaie pu consulter le Conseil dont je<br />

suis momentanément séparé (M. <strong>de</strong> Varax excepté), la décision ne serait pas douteuse; cet<br />

honneur répugne à lʹesprit <strong>de</strong> nos Constitutions, lesquelles nous veulent dans lʹhumilité et<br />

la pauvreté convenables pour <strong>de</strong>s serviteurs <strong>de</strong>s ouvriers et <strong>de</strong>s pauvres.<br />

La seule cause dʹhésitation, cʹest la crainte <strong>de</strong> mécontenter Mgr dʹAngers et <strong>de</strong> ré‐<br />

pondre par un refus à un témoignage <strong>de</strong> bienveillance et dʹestime. Si donc vous pouvez,<br />

sans causer au Vénérable Prélat une contrariété sensible, lui faire agréer les raisons qui<br />

nous feraient décliner ce titre honorifique, je juge nettement que vous <strong>de</strong>vez agir en<br />

conséquence; en cas contraire, nous inclinerons vers la charité qui comman<strong>de</strong> la reconnais‐<br />

sance pour tout bienfait et pour tout procédé gracieux, et vous puiserez en ce sens le motif<br />

<strong>de</strong> votre acceptation, mais, je le répète, non sans quʹil nous en reste ici un regret sincère,<br />

dʹautant quʹil résultera du fait un antécé<strong>de</strong>nt qui aura son danger.<br />

Pour ce qui touche le jeune Gauthier, je partage votre sentiment et jʹapprouve le<br />

parti que vous prenez.<br />

Je regrette <strong>de</strong> nʹavoir pas vu notre cher <strong>Léon</strong> Guichard à son passage près <strong>de</strong> nous;<br />

je nʹai pas le temps <strong>de</strong> lui écrire, mais conjurez‐le instamment <strong>de</strong> ma part <strong>de</strong> ne fréquenter<br />

en aucune façon les militaires quʹil a connus durant les mois <strong>de</strong> son service; jʹy verrais,<br />

pour lui comme pour nous, <strong>de</strong> très notables inconvénients. Je voulais lui faire cette re‐<br />

commandation, faites‐la lui <strong>de</strong> ma part; son avenir dans la voie <strong>de</strong>s œuvres saintes y est<br />

fort intéressé; jʹattends <strong>de</strong> son esprit dʹobéissance et <strong>de</strong> sa cordiale affection pour nous quʹil<br />

tiendra grand compte <strong>de</strong> mes pressantes observations à cet égard; invitez‐le à mʹécrire<br />

quelques mots qui me rassurent entièrement.<br />

Nous sommes sans communication possible <strong>avec</strong> nos ff. <strong>de</strong> Paris; les lettres arrivent<br />

mal ou point dans cette ville, ici même elles peuvent avoir <strong>de</strong>s retards, car jʹen reçois en‐<br />

semble <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> vous: lʹune du 31 mars, lʹautre du 6 avril.<br />

Affections à nos ff. et à vous tout particulièrement.<br />

Votre ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1630 à M. Trousseau<br />

Comment on allait dʹAmiens à Chaville, sous la Commune.<br />

Chaville, samedi 15 avril 1871<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

La présence à Amiens <strong>de</strong> M. Streicher, qui peut très complètement remplacer dans<br />

son emploi M. Bouquet, me donne la pensée <strong>de</strong> vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r pour quelques semaines<br />

ce <strong>de</strong>rnier; il ai<strong>de</strong>rait M. Audrin, qui est ici et y fait divers ouvrages <strong>de</strong> menuiserie que les<br />

dévastations <strong>de</strong>s Prussiens ont rendus dʹune impérieuse nécessité: portes, volets, etc. A<br />

son défaut, M. Alphonse [Vasseur] le remplacerait également.<br />

Il faudrait que M. Bouquet partît lundi matin à la station (6h. je crois) et quʹil sʹarrê‐<br />

tât avant S t ‐Denis, à la station la plus rapprochée <strong>de</strong> S t ‐Germain, et quʹil se rendît à S t ‐<br />

1561


Germain à pied. Je suppose quʹil y serait arrivé vers 1h. environ. A partir <strong>de</strong> 1h., M. Ga‐<br />

rault, quʹil a vu à Amiens au mois <strong>de</strong> novembre, à son retour <strong>de</strong> lʹambulance, <strong>avec</strong> M. Lan‐<br />

tiez, serait dans lʹéglise ou <strong>de</strong>vant lʹéglise <strong>de</strong> S t ‐Germain, et lʹattendrait pour faire <strong>avec</strong> lui<br />

le reste <strong>de</strong> la route <strong>de</strong> S t ‐Germain à Chaville; pour se faire mieux reconnaître <strong>de</strong> M. Bou‐<br />

quet quʹil connaît peu, il aurait une cravate rouge quʹil porte souvent ici et qui est assez<br />

voyante. Il ne faut pas quʹil ait <strong>de</strong> paquet, mais seulement <strong>de</strong> quoi changer durant les<br />

quelques semaines quʹil resterait ici. Si ces instructions peuvent être suivies, il arrivera à<br />

bon port.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> lʹattention que vous avez <strong>de</strong> nous donner <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> nos<br />

ff. <strong>de</strong> Paris; nous nʹen recevons pas dʹautres.<br />

Votre dévoué ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. M. Frézet re<strong>de</strong>man<strong>de</strong> une chemise et une paire <strong>de</strong> bas noirs n° 7, si M. Bouquet<br />

peut les apporter.<br />

1631 à M. Trousseau<br />

Complément <strong>de</strong> la lettre précé<strong>de</strong>nte 1630. Allusion à lʹarrestation <strong>de</strong> M. Planchat.<br />

Chaville, 15 avril [1871]<br />

Samedi<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Ce matin, jʹai fait parvenir pour vous un mot par lequel je vous <strong>de</strong>mandais <strong>de</strong> me<br />

prêter, pour quelques semaines, M. Bouquet, que M. Streicher remplacerait aisément dans<br />

1562


son emploi. Je vous indiquais, comme moyen dʹarriver à nous: arrêter à la station la plus<br />

rapprochée <strong>de</strong> S t ‐Germain, Herblay je crois (sʹen informer); <strong>de</strong> là, gagner S t ‐Germain à<br />

pied. Un <strong>de</strong>s nôtres, M. Garault, <strong>de</strong>vant sʹy trouver, à partir <strong>de</strong> 1h., pour accompagner le<br />

reste <strong>de</strong> sa route M. Bouquet.<br />

MM. Moncel et Camille [Dupit], qui nous arrivent à lʹinstant, nous disent quʹil est<br />

mieux dʹaller jusquʹà S t ‐Denis, où lʹon trouve <strong>de</strong>s omnibus qui conduisent les voyageurs<br />

directement à Versailles; ce parti serait, en effet, plus commo<strong>de</strong>. Si cette lettre nʹarrive pas<br />

trop tard, dites à M. Bouquet <strong>de</strong> prendre cette voie; jʹenverrai néanmoins à tout hasard à<br />

S t ‐Germain lundi.<br />

Le prix <strong>de</strong>s places dans lʹomnibus <strong>de</strong> S t ‐Denis est <strong>de</strong> 7f. Il faut compter sur cette<br />

augmentation dans les frais <strong>de</strong> voyage, et aussi sur lʹéventualité dʹun coucher à S t ‐Denis si<br />

les trains, quʹon dit peu réguliers, nʹarrivaient pas à temps. Soyez dʹailleurs sans nulle in‐<br />

quiétu<strong>de</strong>, dès que jʹaurai une occasion, je vous ferai remettre exactement ce que vous aurez<br />

avancé.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. M. Planchat est réellement arrêté et non relâché.<br />

1632 à M. Baumert<br />

Le projet <strong>de</strong> Londres fait long feu. Le zèle du père Baumert trouvera bien à sʹexercer.<br />

Chaville, 22 avril 1871<br />

Bien cher ami,<br />

Je reçois à lʹinstant communication <strong>de</strong> la lettre que vous avez adressée à lʹabbé<br />

Braun; comme vous le dites fort bien, voyons en cela la volonté <strong>de</strong> Dieu ... Si vous nʹétiez<br />

plus nécessaire à Londres, ren<strong>de</strong>z‐vous à Tournay; là, je vous ferai savoir ce qui me para‐<br />

îtra le mieux pour vous.<br />

Votre ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong>450 P. S. Bon courage, cher ami, le travail ne manquera pas parmi nous et, après tout,<br />

dès que le calme va être rétabli ici, votre place y sera meilleure pour vous quʹun si grand<br />

éloignement <strong>de</strong> notre famille religieuse; quand vous reviendrez, vous trouverez tous les<br />

bras ouverts pour vous recevoir ainsi que notre f. Emes; écrivez‐lui en ce sens et assurez‐le<br />

<strong>de</strong> notre cordiale affection.<br />

1633 <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax à M. Baumert 451<br />

P. S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

On est sans nouvelles du père Baumert. Ce quʹon envisage pour lui et pour le frère Emes.<br />

Chaville, le 28 avril 1871<br />

Mon bien cher frère en N.S.,<br />

Le Père Général attend <strong>avec</strong> un certain désir <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> vous et <strong>de</strong> votre<br />

voyage. Etes‐vous encore à Londres ou déjà en Belgique? Il attend <strong>de</strong> le savoir dʹune façon<br />

450<br />

Jusqu’à la signature, l’écriture est <strong>de</strong> M. Edouard Lainé.<br />

451<br />

L’en-tête porte: <strong>Lettre</strong> passée par Tournai. Toutes mes affections à M. Baumert . (Ecriture <strong>de</strong> M. Faÿ).<br />

1563


positive pour pouvoir fixer la place que le Bon Dieu doit vous marquer dans lʹInstitut. Se‐<br />

lon toute apparence, il ne serait pas temps encore <strong>de</strong> vous rendre en France, où les esprits<br />

<strong>de</strong>meurent toujours troublés et ne sʹapaiseront quʹun peu plus tard. Mais il y a lieu <strong>de</strong><br />

penser quʹà Metz, sous le régime nouveau qui y est établi, vous pourriez rendre dʹutiles<br />

services. Le Père sʹoccupe en ce moment dʹexaminer le projet. Atten<strong>de</strong>z donc à Tournay,<br />

auprès <strong>de</strong> M. Faÿ, les décisions quʹil vous communiquera. La Belgique (à défaut <strong>de</strong> la Lor‐<br />

raine) pourrait vous ouvrir au besoin un beau champ <strong>de</strong> travail.<br />

Ecrivez‐nous, sʹil vous plaît, et ne craignez point <strong>de</strong> perdre votre temps à marquer<br />

les détails <strong>de</strong> votre situation. La poste, quoique lente, est aujourdʹhui assez sûre, et nos<br />

communications sont régulières entre tous les postes <strong>de</strong>sservis par lʹInstitut et notre quar‐<br />

tier général <strong>de</strong> Chaville. Si donc vous aviez quelque décision notable à prendre, soit au<br />

point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> vos finances, soit pour votre propre personne, ne vous contentez pas<br />

(comme il était nécessaire <strong>de</strong> faire pendant le siège) dʹen référer à Tournai. Enten<strong>de</strong>z‐vous<br />

directement <strong>avec</strong> le Père Supérieur.<br />

Vous feriez bien, par la prochaine occasion, <strong>de</strong> lui rendre compte en quelques mots<br />

<strong>de</strong> votre situation spirituelle au point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> la retraite et <strong>de</strong>s secours dont vous pour‐<br />

riez avoir besoin en ce sens.<br />

M. Emes ayant averti le Père que vous lui aviez donné contre‐ordre pour Londres,<br />

on sʹoccupe <strong>de</strong> lui fixer sa <strong>de</strong>stination, afin que ce bon et si digne frère ne reste pas plus<br />

longtemps privé <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> communauté.<br />

Adieu, mon bon frère, offrons ensemble le sacrifice <strong>de</strong>s espérances conçues à Lon‐<br />

dres pour le bien. Le Bon Dieu, en couronnant vos efforts par un grand acte dʹabnégation,<br />

a montré quʹIl les a eus pour agréables.<br />

Votre humble et dévoué frère en N.S.<br />

B. <strong>de</strong> Varax pr. ff. S V P.<br />

Jʹembrasse cordialement mon fils Baumert.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1634 <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax à M. Baumert<br />

Le père Baumert peut prolonger son séjour à Londres. Mais M. Risse lʹattend à Metz.<br />

Chaville, le 6 mai 1871<br />

Mon bien cher frère,<br />

Le Père Supérieur a reçu <strong>avec</strong> joie <strong>de</strong> vos nouvelles et il ne désapprouve pas que,<br />

dans lʹintérêt dʹun bien nécessaire, vous prolongiez <strong>de</strong> quelques jours votre ministère à<br />

Londres, comme vous lʹavez fait. Toutefois, il désire que ce délai ne vous entraîne pas à<br />

tenir le poste <strong>de</strong> St ‐Boniface jusquʹà la fin <strong>de</strong> ce mois. Il serait bon que vous puissiez vous<br />

rendre à Metz entre les fêtes <strong>de</strong> lʹAscension et <strong>de</strong> la Pentecôte. M. Braun, qui vous a appelé<br />

à Londres, ne refusera pas sans doute dʹy prolonger un peu son séjour, sʹil est nécessaire,<br />

pour attendre les pp. Oblats.<br />

Vous serez reçu à Metz à bras ouverts par le bon p. Risse qui se fatigue et travaille<br />

toujours, mais <strong>avec</strong> un besoin marqué <strong>de</strong> trouver enfin ai<strong>de</strong> et appui dans un homme qui<br />

soit un autre lui‐même. Lʹaffection si vive que vous lui témoignez aura <strong>de</strong> quoi se satis‐<br />

faire dans les services que vous allez pouvoir rendre à ce digne et vénéré frère. Allant en<br />

1564


Lorraine <strong>avec</strong> lʹesprit quʹindique votre bonne lettre et dans la sainte obéissance <strong>de</strong>s pro‐<br />

phètes, vous avez une espérance fondée que votre ministère y sera béni.<br />

Il nʹy avait pas lieu <strong>de</strong> sʹarrêter aux paroles couvertes <strong>de</strong> sa Gran<strong>de</strong>ur M gr Manning,<br />

et vous avez agi pru<strong>de</strong>mment en ne les relevant pas. Cependant, si M gr lʹArchevêque par‐<br />

lait dʹune manière catégorique et vous faisait à vous‐même directement <strong>de</strong>s propositions<br />

pour un établissement déterminé, le Père Supérieur ne désapprouverait pas que vous<br />

consultiez <strong>de</strong> nouveau. Le Conseil <strong>de</strong> lʹInstitut verrait ce quʹil aurait à vous répondre.<br />

Mais, si la proposition <strong>de</strong> M gr nʹavait pour objet quʹun poste pour un prêtre tout seul, sans<br />

les moyens dʹétablir une Communauté, vous nʹauriez pas même besoin dʹen référer ici,<br />

vous remercieriez aussitôt sa Gran<strong>de</strong>ur <strong>avec</strong> tout le respect et la soumission quʹil convient<br />

<strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r en cela.<br />

Adieu, mon bon et très digne frère en N.S. Je vous envoie les souvenirs respectueux<br />

<strong>de</strong> nos frères, <strong>de</strong> ceux <strong>de</strong> Grenelle en particulier, et je vous prie <strong>de</strong> me tenir toujours pour<br />

Votre affectionné et très humble frère et serviteur en N.S.<br />

B. <strong>de</strong> Varax pr. ff. S V P.<br />

P.S. officieux. Jʹai remarqué que le P. Supérieur était bien touché <strong>de</strong>s termes affec‐<br />

tueux et pleins <strong>de</strong> soumission que vous employez pour lui témoigner votre attachement à<br />

lʹInstitut. A la distance où nous sommes, on est bien plus sensible à ces témoignages, vous<br />

le comprenez.<br />

1635 au R.P. Brichet<br />

MLP. remercie un père Spiritain du Séminaire français <strong>de</strong> Rome pour lʹappui prêté aux frères <strong>de</strong> Rome. Consul‐<br />

tation pour les démarches à faire en vue dʹobtenir un Vicaire Général.<br />

Chaville, 10 mai 1871<br />

Mon Révérend Père,<br />

Ce nʹest pas sans regret que jʹai invité ceux <strong>de</strong> nos frères qui avaient la consolation<br />

<strong>de</strong> vivre à Rome à quitter cette cité sainte, si chère aux âmes chrétiennes; jʹhésitais dʹautant<br />

plus à le faire quʹil me semblait entrevoir que votre sentiment était contraire à ce retour et,<br />

je puis le dire en parfaite vérité, plein <strong>de</strong> confiance en votre expérience, pénétré surtout<br />

dʹune vive reconnaissance pour les témoignages sans nombre <strong>de</strong> votre bienveillance à<br />

lʹégard <strong>de</strong> notre famille religieuse, jʹinclinais à suivre votre avis plutôt que le mien. Mais à<br />

défaut, présentement, <strong>de</strong> tout emploi pour eux à Rome qui fût conforme à leur vocation,<br />

jʹai pensé que je pouvais sans inconvénient les rappeler temporairement, sauf à les tenir<br />

disponibles dès quʹils pourraient, près <strong>de</strong> vous, rendre <strong>de</strong> nouveau quelques services à la<br />

cause <strong>de</strong> lʹEglise et <strong>de</strong> son Chef, si profondément vénéré452 .<br />

Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> vous dire, mon Révérend Père, <strong>avec</strong> quelle joie nos bien chers<br />

Romains ont été accueillis par tous les membres <strong>de</strong> notre famille que lʹorage révolution‐<br />

naire nʹa pas dispersés. Nos frères <strong>de</strong> Rome, réunis à ceux qui sont <strong>avec</strong> moi ici, sʹoccupent<br />

encore <strong>de</strong>s militaires, mais dans les ambulances qui sont établies dans nos campagnes<br />

comme succursales <strong>de</strong> celles <strong>de</strong> Versailles. Le Seigneur lʹa dit: On trouve partout et tou‐<br />

jours <strong>de</strong>s misères à soulager.<br />

452<br />

Cette lettre porte la date du 12 avril, jour où MLP. commence à l’écrire. Il n’en rédige que le premier paragraphe. La suite est un<br />

brouillon qu’achève, sous dictée, le père Chaverot.<br />

1565


Les journaux vous apprennent toutes les tribulations <strong>de</strong>s serviteurs <strong>de</strong> Dieu dans<br />

cette lamentable tourmente et je suis bien sûr que votre cœur si français en est profondé‐<br />

ment ému; mais où donc aujourdʹhui lʹesprit mauvais ne suscite‐t‐il pas le trouble? Votre<br />

chère cité <strong>de</strong> Rome, asile ordinaire <strong>de</strong> tous les persécutés, refuge <strong>de</strong> toutes les âmes en<br />

peine, nʹest‐elle pas elle‐même en proie aux agitations <strong>de</strong>s suppôts <strong>de</strong> lʹenfer? Espérons<br />

que lʹArchange S t Michel se détachera un jour du château S t ‐Ange et viendra les rejeter<br />

dans lʹabîme.<br />

Je profite <strong>de</strong> lʹoccasion, mon Révérend Père, pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r votre avis touchant<br />

une affaire dʹun intérêt grave pour notre Congrégation.<br />

Bien fatigué <strong>de</strong> corps et dʹesprit par une administration <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 25 années, je<br />

sens le besoin, pour ne pas mettre en souffrance le bien <strong>de</strong> mes frères et <strong>de</strong> nos œuvres, ou<br />

<strong>de</strong> me retirer entièrement <strong>de</strong> la Direction, ou au moins dʹêtre presque entièrement suppléé<br />

dans le gouvernement habituel. Nos Constitutions me donnent, à cet effet, une faculté<br />

dont je désirerais profiter. Aux termes dʹun article quʹelles contiennent, le Conseil ordi‐<br />

naire <strong>de</strong> la Congrégation peut désigner au Supérieur Général, empêché par ses infirmités,<br />

un Vicaire Général qui le remplace dans son administration; la nomination <strong>de</strong> ce Vicaire<br />

doit être approuvée par le Saint Siège. Cette disposition a été, sur ma <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, effectuée<br />

par le Conseil <strong>de</strong> notre Congrégation. Il nous resterait maintenant à solliciter lʹagrément<br />

du Saint Siège. Vous serait‐il possible, mon Révérend Père, <strong>de</strong> me dire en quelle forme je<br />

dois faire ma <strong>de</strong>man<strong>de</strong>? Est‐ce au Saint Père directement ou à la Sacrée Congrégation <strong>de</strong>s<br />

Evêques et Réguliers quʹelle doit être adressée? Est‐il absolument nécessaire que le nom<br />

du Vicaire Général désigné soit porté dans la requête? Le membre choisi par le Conseil hé‐<br />

sitant encore à donner son adhésion, je ne puis, au moment où jʹécris, le présenter nomina‐<br />

tivement. Jʹai cru, pour abréger les délais, pouvoir néanmoins au préalable vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r<br />

ces renseignements.<br />

Je nʹai pas, mon bon Père, à vous assurer <strong>de</strong> notre bien profon<strong>de</strong> et bien vive recon‐<br />

naissance <strong>de</strong> tous les appuis que vous nous avez donnés, <strong>de</strong> tous ces encouragements dont<br />

notre faiblesse avait<br />

besoin pour sʹasseoir<br />

dans le poste <strong>de</strong><br />

confiance où nous avons<br />

été placés à Rome. Le<br />

bon Maître sait combien<br />

souvent nous lʹen avons<br />

remercié et <strong>avec</strong> quelle<br />

ar<strong>de</strong>ur nous lui <strong>de</strong>man‐<br />

dons dʹacquitter nos<br />

<strong>de</strong>ttes envers vous et en‐<br />

vers votre chère Congré‐<br />

gation.<br />

1566<br />

Pont et Château Saint-Ange en 1870


Veuillez bien encore, mon bon Père, vous souvenir <strong>de</strong>vant lui <strong>de</strong> cette petite famille<br />

que votre vénéré fondateur a bénie à son origine et que, par une disposition <strong>de</strong> la divine<br />

Bonté, ses enfants ont continué jusquʹici dʹencourager par leurs charitables et si cordiales<br />

sympathies.<br />

Recevez ici, mon bien cher Père, les respectueux sentiments <strong>de</strong> tous nos frères et<br />

ceux en particulier <strong>de</strong><br />

Votre bien dévoué serviteur et confrère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1636 à M. Trousseau<br />

Remboursement <strong>de</strong> dépenses. Sollicitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> MLP. pour ses frères.<br />

Chaville, 10 mai 1871<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous envoie ci‐joint cent francs, acompte sur les dépenses <strong>de</strong>s jeunes gens <strong>de</strong> Na‐<br />

zareth. M. Vasseur espère y ajouter plus tard un supplément.<br />

Vous trouverez <strong>de</strong> plus sous ce pli 15f <strong>de</strong>stinés à vous rembourser les frais <strong>de</strong> voya‐<br />

ges <strong>de</strong> M. Warin.<br />

Jʹai écrit à Mgr dʹAmiens [Mgr Boudinet] pour le remercier du bon accueil quʹil vous<br />

a fait et du don aimable et généreux par lequel il a témoigné sa sympathie pour lʹœuvre. Je<br />

vous remercie vous‐même <strong>de</strong>s détails par lesquels vous me mettez si exactement au cou‐<br />

rant <strong>de</strong> ce qui regar<strong>de</strong> cette maison, dont nous suivons les intérêts <strong>avec</strong> une tendre sollici‐<br />

tu<strong>de</strong>.<br />

Ce que vous me dites aussi <strong>de</strong> votre fête <strong>de</strong> dimanche mʹa donné une gran<strong>de</strong> satis‐<br />

faction. Je prie Dieu <strong>de</strong> bénir les efforts <strong>de</strong> tous ceux qui y ont contribué. Je Le prie égale‐<br />

ment pour tous ceux qui sont sous lʹépreuve, par suite <strong>de</strong>s embarras financiers occasion‐<br />

nés par la multiplicité <strong>de</strong>s misères et <strong>de</strong>s besoins auxquels il faut faire face en nos malheu‐<br />

reux temps.<br />

M. <strong>de</strong> Varax joint ici une petite lettre; M. Warin également.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1637 à M. dʹArbois<br />

Démarches pour quitter la Maîtrise dʹAngers; le faire dans lʹesprit <strong>de</strong> saint Vincent <strong>de</strong> Paul: dénouer plutôt que<br />

briser. MLP. attend que le père <strong>de</strong> Varax accepte le poste <strong>de</strong> Vicaire général.<br />

Chaville, 13 mai 1871<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous accuse réception, sans retard, <strong>de</strong>s 100f que vous mʹavez adressés pour un<br />

trimestre <strong>de</strong> la pension <strong>de</strong> M me Lainé. Cet argent mʹest parvenu hier seulement. Je lʹai re‐<br />

mis à M. Edouard Lainé qui est <strong>avec</strong> nous à Chaville; il le fera parvenir à sa <strong>de</strong>stination<br />

<strong>de</strong>rnière.<br />

Nous avons appris <strong>avec</strong> plaisir les premiers résultats que vous avez obtenus pour la<br />

préparation <strong>de</strong> votre hôtellerie. Cʹest dʹun bon augure pour la réussite <strong>de</strong> ce projet. Vous<br />

1567


penserez, sans doute, quʹil serait bien <strong>de</strong> se borner, quant à présent, à la recherche du local<br />

qui pourrait convenir, sans arrêter aucune convention jusquʹau rétablissement <strong>de</strong> lʹordre<br />

politique et jusquʹà la décision à intervenir définitivement touchant la suppression, pour<br />

nous, du service <strong>de</strong> la Maîtrise. Je crois, comme vous, quʹil nous est <strong>de</strong>venu très difficile <strong>de</strong><br />

maintenir notre coopération à cette œuvre. Je désirerais seulement quʹen manifestant nos<br />

vues sur ce point à M gr dʹAngers [Mgr Freppel], nous évitions <strong>avec</strong> soin <strong>de</strong> sembler lui<br />

mettre le marché à la main. Avec la forme déférente que vous saurez trouver, nous arrive‐<br />

rons à notre but sans aucun choc pénible. Il était dans lʹesprit <strong>de</strong> notre Père S t Vincent <strong>de</strong><br />

Paul <strong>de</strong> dénouer plutôt que <strong>de</strong> briser.<br />

Jʹespère que, grâce à vos soins affectueux, M. Guichard pourra reprendre peu à peu<br />

lʹesprit et la conduite conformes à sa vocation; comme vous le dites, il a une âme droite et<br />

cordiale qui peut le rendre bien propre au service <strong>de</strong> nos œuvres. Je mʹen rapporterai à vo‐<br />

tre sentiment pour son changement au mois dʹoctobre, si vous croyez toujours quʹil doive<br />

sʹeffectuer.<br />

La difficulté financière que peut vous causer le legs fait par M. <strong>de</strong> Quatrebarbes aux<br />

hospices <strong>de</strong> la somme <strong>de</strong> 8.000f, prêtée à N.D. <strong>de</strong>s Champs, arriverait bien mal à propos en<br />

ce moment. Espérons que la Provi<strong>de</strong>nce nous épargnera ce nouvel embarras. Elle sʹest<br />

montrée bien maternelle pour vous à Angers; on peut penser quʹElle vous sera encore fa‐<br />

vorable.<br />

Jʹai écrit à Rome, comme M. <strong>de</strong> Varax vous lʹa dit, pour notre grave affaire; mais la<br />

réponse que jʹattends ne tranchera pas encore la question, puisque jʹai dû me borner à<br />

prendre <strong>de</strong>s renseignements sur la forme à suivre dans la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> dʹapprobation que jʹai<br />

à faire au Saint Siège. M. <strong>de</strong> Varax, en ne donnant pas jusquʹici un plein consentement, ne<br />

mʹa pas permis <strong>de</strong> régler dʹun seul coup cet arrangement. Jʹai pourtant lʹespérance fondée<br />

quʹil se déci<strong>de</strong>ra. Le travail quʹil fait sur le Congrès, dʹune part, et un petit séjour quʹil pro‐<br />

jette aux eaux dʹAllevard <strong>de</strong> lʹautre, sont, je pense, les seules causes réelles qui retar<strong>de</strong>nt<br />

son adhésion. Continuons à prier et nous pourrons, je lʹespère, dans un bien court délai,<br />

arriver à une heureuse conclusion. Il est en ce moment à Versailles, toujours pour les affai‐<br />

res du Congrès quʹil a prises extrêmement à cœur; cʹest notre cher abbé Chaverot, tout<br />

frais arrivé <strong>de</strong> Rome, qui veut bien aujourdʹhui me servir <strong>de</strong> secrétaire. Il sʹunit à moi pour<br />

vous assurer, ainsi que nos ff. dʹAngers, <strong>de</strong> nos bien affectueux sentiments en N.S.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1638 à M. dʹArbois<br />

Un postulant ne peut être accueilli à Angers. Le père <strong>de</strong> Varax a pris conseil auprès dʹun père Jésuite qui lʹinvite<br />

à accepter la charge <strong>de</strong> Vicaire Général. Nouvelles du siège <strong>de</strong> Paris. Allusion à laʺ lettre sur le drapeau blancʺ<br />

du Comte <strong>de</strong> Chambord.<br />

Chaville, 15 mai 1871<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹapprends que le jeune Lenoir, postulant qui nous était venu <strong>de</strong> Metz et qui vient<br />

<strong>de</strong> sʹenfuir <strong>de</strong> chez nous, sʹest dirigé vers Angers; je vous avertis quʹil ne mérite point votre<br />

confiance et que, sʹil se présentait à vous, il ne <strong>de</strong>vrait pas trouver asile dans votre maison.<br />

Il a manqué <strong>de</strong> fidélité, à différentes reprises et dʹune façon grave; nous avons eu aussi à<br />

1568


nous plaindre <strong>de</strong> lui sous dʹautres rapports; en <strong>de</strong>rnier lieu, il vient, je pense, <strong>de</strong> tromper<br />

M. <strong>de</strong> Broglie quʹil a connu à S te ‐Anne, et a obtenu <strong>de</strong> lui, en lʹabusant, ses frais <strong>de</strong> voyage;<br />

il a prétexté ses relations <strong>avec</strong> M. Gauffriau qui pourrait, disait‐il, lui procurer une place à<br />

Angers; je nʹentre pas en dʹautres détails; il me suffit <strong>de</strong> vous avoir mis en gar<strong>de</strong> contre ses<br />

ruses et ses mensonges.<br />

Vous apprendrez <strong>avec</strong> plaisir une circonstance qui vous aplanira, je lʹespère, les dif‐<br />

ficultés pour lʹaffaire concernant le gouvernement <strong>de</strong> notre Congrégation. M. <strong>de</strong> Varax<br />

avait jugé indispensable, avant <strong>de</strong> prendre une décision, <strong>de</strong> consulter un r.p. du Collège<br />

dʹAmiens, lequel lui inspire une gran<strong>de</strong> confiance. Le Père, après mûr examen, vient <strong>de</strong> lui<br />

écrire une lettre où il repousse nettement et ron<strong>de</strong>ment toutes ses objections et lʹinvite ins‐<br />

tamment à accepter le poste où il est appelé. Je compte que cet avis, si fermement donné,<br />

ne restera pas sans résultat.<br />

Affections à tous, à vous tout particulièrement, <strong>de</strong> tous ceux qui sont réunis à Cha‐<br />

ville.<br />

M. Leclerc nous arrive aujourdʹhui. Rien <strong>de</strong> neuf pour nous à Paris. Les choses du<br />

siège semblent avancer. Cʹest un pas, mais il en reste encore plusieurs à franchir jusquʹau<br />

retour vers un état stable et bien assis.<br />

Je pense que vous avez vu la lettre du duc <strong>de</strong> Bor<strong>de</strong>aux.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1639 à M. J. Faÿ<br />

Avis en vue du retour à Paris. Derniers jours <strong>de</strong> la Commune. Epreuves traversées. Le père Planchat toujours en<br />

prison, sans possibilité dʹêtre visité.<br />

Chaville, 23 mai 1871<br />

Prison du Père Planchat<br />

Je vous prie <strong>de</strong> faire passer la lettre ci‐jointe à<br />

M. Baumert, ainsi quʹil mʹa indiqué lui‐même quʹon<br />

<strong>de</strong>vait faire pour que les missives lui parvinssent<br />

sûrement.<br />

Comment allez‐vous ainsi que tous les<br />

vôtres? Vous suivez, sans aucun doute, le<br />

événements dans les journaux et vous voyez<br />

quʹenfin Paris se rouvre et nous permettra, nous<br />

lʹespérons, <strong>de</strong> nous réunir bientôt à ceux <strong>de</strong> nos ff.<br />

qui ont dû y rester. Bien <strong>de</strong>s vicissitu<strong>de</strong>s se sont<br />

passées pour eux: évacuation nouvelle <strong>de</strong><br />

lʹorphelinat qui sʹest réfugié au Cercle <strong>de</strong>s Jeunes<br />

Ouvriers, occupation <strong>de</strong>s bâtiments <strong>de</strong> Vaugirard<br />

par 500 insurgés qui ont dû en sortir eux‐mêmes<br />

sous la pluie <strong>de</strong>s balles et <strong>de</strong>s obus; je ne sais si leur<br />

occupation a causé <strong>de</strong> grands dommages.<br />

M. Planchat toujours en prison; on ne peut le<br />

voir, mais on lui fait passer quelques aliments.<br />

1569


Chaville se restaure quelque peu; nous y avons une ambulance <strong>de</strong> 25 lits, occupés<br />

tous par <strong>de</strong>s soldats fidèles et par un certain nombre dʹinsurgés prisonniers et blessés.<br />

Adieu, mon bien cher ami et fils; mille affections à vous et à tous nos ff. Nous som‐<br />

mes ici 27 réunis, plus quelques jeunes gens <strong>de</strong>s patronages et un confrère <strong>de</strong> Nazareth, M.<br />

Lécrivain. MM. Chaverot et Leclerc sont partis avant‐hier soir pour suivre les troupes vers<br />

Paris et assister les blessés, priez pour eux.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1640 à M. Risse<br />

Le père Baumert sʹest rendu à Metz. Gravité <strong>de</strong> la situation à Paris. Annonce <strong>de</strong> la mort du père Planchat; son<br />

éloge : ʺnul parmi nous nʹa porté plus loin le zèle et le dévouement pour les pauvres et les ouvriers…ʺ<br />

Chaville, 2 juin 1871<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> plaisir, par votre lettre du 30 mai, lʹarrivée près <strong>de</strong> vous <strong>de</strong> notre<br />

cher f. M. Baumert. Je pense quʹil vous prêtera un utile appui et vous rendra un peu moins<br />

lour<strong>de</strong> la charge <strong>de</strong> vos œuvres. Retenu ici et ne communiquant que difficilement <strong>avec</strong> nos<br />

ff. <strong>de</strong> Paris, je nʹai pu encore me rendre un compte exact <strong>de</strong> notre situation, après les désas‐<br />

tres que nous venons <strong>de</strong> traverser, ni voir bien précisément quels arrangements nous au‐<br />

rons à prendre pour tirer parti du personnel qui nous reste. Je ne puis donc encore rien ré‐<br />

gler que provisoirement; bientôt cette incertitu<strong>de</strong> va cesser; <strong>de</strong>main, nous assure‐t‐on, les<br />

communications seront rouvertes <strong>avec</strong> Paris. Quoiquʹil en soit, je désire sincèrement que<br />

vous soyez assisté, aussitôt quʹil se pourra, par la présence habituelle dʹun prêtre qui vous<br />

soit adjoint. Soyez sûr que le Conseil tiendra compte <strong>de</strong> cette nécessité.<br />

La lettre <strong>de</strong> M. Baumert ne contenait absolument rien que les termes <strong>de</strong> bienveil‐<br />

lance et <strong>de</strong> soumission sur tout ce quʹon voudra arranger relativement à ses emplois. Jʹes‐<br />

père quʹil prendra bien toutes les observations que vous lui pourrez faire sur sa tenue et sa<br />

manière dʹagir.<br />

Notre cher M. Lebrun mʹécrit quʹil est guéri et en état <strong>de</strong> reprendre ses travaux. Dé‐<br />

sirez‐vous quʹil vous revienne? Ou bien, suffisamment aidé par MM. Baumert et Emes,<br />

pourriez‐vous vous passer <strong>de</strong> ses services? Nous lʹemploierions très utilement, un certain<br />

nombre <strong>de</strong> vi<strong>de</strong>s sʹétant fait dans notre personnel laïque. Je vous prie <strong>de</strong> me répondre sans<br />

retard à ce sujet. Peut‐être serait‐il utile que M. Baumert écrivît un mot à M. Emes pour<br />

presser son arrivée; je ne suis pas bien sûr quʹil soit à Greffrath, ni que ma <strong>de</strong>rnière lettre<br />

lui soit parvenue; il pourrait être à Cologne, je ne sais pas au juste à quelle adresse.<br />

La douleur que nous craignions nous atteint définitivement; notre cher abbé Plan‐<br />

chat a été fusillé en même temps que Mgr lʹArchevêque <strong>de</strong> Paris,[Mgr Darboy] <strong>avec</strong> un<br />

nombre notable <strong>de</strong> religieux et <strong>de</strong> prêtres [55], le mercredi 24 mai. Dʹautres exécutions ont<br />

eu lieu les jours suivants, non moins regrettables.<br />

Nos ff. <strong>de</strong> Paris sont parvenus à retrouver son corps qui avait été jeté, <strong>avec</strong> ses<br />

compagnons <strong>de</strong> martyre, dans une fosse commune au Père Lachaise; ils lʹont enseveli et<br />

mis dans une bière que M. le Curé <strong>de</strong> Vaugirard a reçue dans un <strong>de</strong>s caveaux <strong>de</strong> son église,<br />

1570


en attendant que nous puissions le ramener à Chaville. Il nous importait <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r ces<br />

précieuses dépouilles, nul nʹa porté, parmi nous, plus loin le zèle et le dévouement pour<br />

les pauvres et les ouvriers, nul nʹa pratiqué plus généreusement les vertus religieuses, nul<br />

enfin nʹa professé un si tendre attachement pour notre petite famille. Il fallait donc quʹil<br />

restât au milieu <strong>de</strong> nous après sa mort, cʹétait là le lieu choisi pour son repos. Chacun <strong>de</strong><br />

nous célèbre trois messes à son intention; je vous prie, ainsi que notre cher abbé Baumert,<br />

dʹacquitter envers lui ce <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> sainte fraternité. Mais en priant, ayons confiance; il<br />

semble bien quʹune vie si cordialement donnée à Dieu trouvera grâce <strong>de</strong>vant lui et que<br />

cette chère âme, arrivée dans la paix, obtiendra pour ses frères, restés dans le travail et la<br />

lutte, <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s assistances <strong>de</strong> la grâce.<br />

Assurez tous nos ff., nos chers convalescents surtout, M. Nominé, M. Allard, <strong>de</strong><br />

tous nos sentiments <strong>de</strong> sympathie et <strong>de</strong> tendre affection, et croyez vous‐même, mon bien<br />

cher ami, à tous mes sentiments les plus dévoués en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1641 à M. Baumert<br />

Etre un instrument docile aux mains du Seigneur. Peu importe où nous travaillons. Il y a partout <strong>de</strong>s âmes à<br />

évangéliser. Joindre le frère Emes pour quʹil gagne Metz.<br />

Chaville, 2 juin 1871<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> plaisir que vous êtes arrivé à bon port à Metz. Je vous sais bien bon<br />

gré <strong>de</strong> votre empressement à suivre, à cet égard, la direction que je vous avais donnée. Si<br />

1571


jʹavais vu à Londres une position un peu nette, qui se <strong>de</strong>ssinât assez pour que nous y vis‐<br />

sions un indice <strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce, je vous y eusse laissé assurément, car nous <strong>de</strong>vons tous<br />

être <strong>de</strong>s instruments dociles aux mains du Seigneur et nous porter indifféremment partout<br />

où Il nous veut. Mais ce poste, que se disputaient plusieurs compétiteurs, ne me semblait<br />

pas préparer pour vous ni pour nous une voie bien ouverte et une situation assise.<br />

Pour vous, mon cher ami, il importe guère où vous serez; nous trouverons partout<br />

<strong>de</strong>s ouvriers et <strong>de</strong>s pauvres; le champ est bien vaste et les tristes événements que nous ve‐<br />

nons <strong>de</strong> traverser nous montrent assez combien il est urgent <strong>de</strong> le cultiver. Employez donc<br />

bravement à cette belle tâche tous les dons <strong>de</strong> zèle et <strong>de</strong> charitable ar<strong>de</strong>ur que le Seigneur<br />

vous a donnés; suivez les conseils <strong>de</strong> notre excellent abbé Risse, dont lʹexpérience et la<br />

sage maturité régleront en sage mesure vos mouvements.<br />

Je crois quʹil serait bien que vous écrivissiez quelques lignes à notre cher f. Emes<br />

pour hâter son arrivée à Metz. Je crains que ma <strong>de</strong>rnière lettre, adressée à Greffrath, ne lui<br />

soit pas parvenue. Il mʹavait parlé dʹun voyage quʹil projetait à Cologne; mais je ne sais<br />

quelle serait, en cette ville, son adresse. Peut‐être la connaîtriez‐vous mieux. En ce cas,<br />

pour plus <strong>de</strong> sûreté, lui écrire en lʹune et lʹautre ville serait le mieux.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, vous ne doutez pas <strong>de</strong> la joie que nous aurons <strong>de</strong><br />

vous revoir, si quelque circonstance vous rapproche plus tard <strong>de</strong> nous; en attendant, rece‐<br />

vez toutes nos affections, <strong>avec</strong> la bénédiction <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1642 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Souhaits pour la retraite spirituelle que fait le Vicaire général. Le corps du père Planchat dans la chapelle <strong>de</strong> ND.<br />

<strong>de</strong> la Salette. Situation à Amiens. Mouvement <strong>de</strong> personnel.<br />

Chaville, 6 juin 1871<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Par la pensée et <strong>de</strong>vant Dieu, je vous suis dans votre retraite, priant le divin Sei‐<br />

gneur et sa Ste Mère <strong>de</strong> vous assister, <strong>de</strong> répandre en vous <strong>de</strong>s grâces <strong>de</strong> lumière, <strong>de</strong> force<br />

et <strong>de</strong> charité, pour que vous emportiez <strong>de</strong> vos pieux exercices dʹamples provisions, afin <strong>de</strong><br />

diriger la barque <strong>de</strong> notre petite Congrégation <strong>avec</strong> le souffle divin dans les voiles. Nous<br />

serons aux rames <strong>de</strong> notre côté et nous soutiendrons le mouvement.<br />

Le corps <strong>de</strong> notre cher abbé Planchat nous a été rendu; on prépare, dans la chapelle<br />

<strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette, un petit caveau où il sera déposé, permission écrite ayant été obte‐<br />

nue du Maréchal Mac‐Mahon.<br />

Nous compterons, ainsi que vous le proposez, que les trois messes à dire pour le<br />

jeune soldat mort seront acquittées par vous.<br />

Je vous remercie <strong>de</strong>s renseignements précis que vous mʹavez envoyés concernant la<br />

situation dʹAmiens; il reste à savoir quels sont en réalité les fonds appartenant à la famille.<br />

Il serait aussi bien essentiel <strong>de</strong> faire préciser, par déclaration écrite <strong>de</strong> la famille <strong>de</strong> Luppel,<br />

quelle est la <strong>de</strong>stination spéciale du legs ou don qui a été fait au décès <strong>de</strong> Mlle <strong>de</strong> Luppel. Si<br />

vous pouviez, durant votre séjour à Amiens, arriver à ce résultat, ce serait un grand pas <strong>de</strong><br />

fait pour régler nettement les affaires.<br />

1572


Jʹécris un mot à M. Trousseau pour lui dire que je reprendrai sans difficulté ici M.<br />

Streicher, si M. Bouquet lui est définitivement nécessaire; M. Bouquet est loin dʹavoir fini<br />

les travaux qui sont ici commencés, mais je tiens compte <strong>de</strong> la circonstance notée par vous<br />

<strong>de</strong> la confession chez les rr. pp. Capucins, et je crois plus sage <strong>de</strong> ne pas différer le retour<br />

ici <strong>de</strong> M. Streicher.<br />

Adieu, mon bien cher ami, donnez‐nous déjà quelque part en vos grâces <strong>de</strong> retraite,<br />

en attendant que votre présence au milieu <strong>de</strong> nous nous en fasse pleinement sentir les pré‐<br />

cieux fruits.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1642 bis à Sa Sainteté Pie IX<br />

Deman<strong>de</strong> dʹagrément pour la nomination du Vicaire général, le père <strong>de</strong> Varax (la réponse affirmative arrivera<br />

le 16 juin). Vœux pour le 25 e anniversaire <strong>de</strong> son pontificat.<br />

7 juin 1871<br />

Beatissime Pater,<br />

Joannes Le <strong>Prevost</strong>, presbyter, Superior Generalis Congregationis Fratrum S ti Vin‐<br />

centii a Paulo, Lutetiae in Galliis suam habentis se<strong>de</strong>m praecipuam, ad pe<strong>de</strong>s Sanctitatis<br />

Vestrae humiliter provolutus ea quae sequentur repræsentat:<br />

Ex praefatae Congregationis Constitutionibus (cap.3, art.3, n° 10) quibus primam<br />

approbationem nonis maii 1869 Vestra Sanctitas irrogare dignata est, ejus<strong>de</strong>m Congrega‐<br />

tionis Superior Generalis, obstante aetatis <strong>de</strong>bilitate provectae, vel aliqua permanente in‐<br />

firmitate, quin munus suum exsaequatur, facultatem habet excipiendi vicarium genera‐<br />

lem, per quem rerum familiae regimini recte provi<strong>de</strong>atur. Hujus Vicarii <strong>de</strong>lectus Congre‐<br />

gationis Concilio committi <strong>de</strong>bet, ac <strong>de</strong>inceps a Sancta Se<strong>de</strong> comprobari.<br />

Atqui, ita se habens, praefatus Superior Le <strong>Prevost</strong> petiit ut sibi suppeditetur com‐<br />

modum provisae facultatis et Concilium, ei libenter annuens, Bernardum <strong>de</strong> Varax, pre‐<br />

sbyterum praedictae Congregationis, elegit nominavitque ad Vicarii Generalis partes e‐<br />

xplendas Officii.<br />

I<strong>de</strong>o Joannes Le <strong>Prevost</strong> Vestrae Sanctitatis submisse tra<strong>de</strong>ns judicio et propositum<br />

et electionem <strong>de</strong> quibus habitus est sermo, expostulat ut auctoritatis Vestrae atque appro‐<br />

bationis signo ea<strong>de</strong>m obfirmentur.<br />

His precibus adjungitur exemplar instrumenti sessionem Concilii, in qua res jam<br />

ante expositae fuerunt actae, referentis cum autographo collatum omniumque partium<br />

chirographo munitum, eo tamem excepto Henrici Planchat, presbyteri, qui nuperrime, bel‐<br />

lo civili Gallias lacerante, hostibus infensissimis Religionis Patriaeque Lutetiae occubuit.<br />

Et nunc huc addat Sanctitas Vestra, quod oratorem, gaudium quo ipse ipsiusque to‐<br />

ta familia val<strong>de</strong> et suaviter exsultant propter vigesimum quintum annum Regni gloriosi<br />

jamjam plene absolvendum, non recuset audire promentem. Qua singulari gratia, post<br />

Beatum Petrum adusque hanc diem inaudita, exaltationem Sanctae Matris Ecclesiae ejus<br />

Doctoris et Capitis ab Immaculata Conceptione et Infallibilitate duplici orbe radiati trium‐<br />

phum eis vi<strong>de</strong>ntur insigni modo praenuntiare Jesus Christus et B. Virgo Maria. Senectute<br />

et infirmitatibus impeditus orator alacri cor<strong>de</strong>, ante pe<strong>de</strong>s Vestros amanter projectus, vota<br />

sua ipsiusque familiae offert maxima cum observantia atque veri filii affectu. Quod Deus<br />

1573


7 juin 1871<br />

Très Saint Père,<br />

<strong>Jean</strong> Le <strong>Prevost</strong>, prêtre, Supérieur Général <strong>de</strong> la Congrégation <strong>de</strong>s Frères <strong>de</strong> St ‐<br />

Vincent <strong>de</strong> Paul, ayant sa Maison‐Mère à Paris, en France, humblement prosterné aux<br />

pieds <strong>de</strong> Votre Sainteté, expose ce qui suit:<br />

Dʹaprès les Constitutions <strong>de</strong> ladite Congrégation (Ch.III, art. 3, n ° 10), auxquelles<br />

Votre Sainteté a daigné accor<strong>de</strong>r la première approbation le 7 mai 1869, le Supérieur Géné‐<br />

ral <strong>de</strong> cette Congrégation, au cas où la faiblesse dʹun âge avancé ou quelque infirmité<br />

permanente sont un obstacle à lʹaccomplissement <strong>de</strong> sa charge, a la faculté <strong>de</strong> prendre un<br />

Vicaire Général pour pourvoir au bon gouvernement <strong>de</strong>s affaires <strong>de</strong> la famille. Le choix <strong>de</strong><br />

ce Vicaire doit être commis au Conseil <strong>de</strong> la Congrégation et puis être approuvé par le<br />

Saint Siège.<br />

Or, ledit Supérieur Le <strong>Prevost</strong>, se voyant dans cet état, a <strong>de</strong>mandé quʹon lui procu‐<br />

rât lʹallègement conforme à la faculté susdite, et le Conseil, lui donnant volontiers son as‐<br />

sentiment, a élu Bernard <strong>de</strong> Varax, prêtre <strong>de</strong> ladite Congrégation, et lʹa désigné pour rem‐<br />

plir les fonctions <strong>de</strong> Vicaire Général.<br />

En conséquence, <strong>Jean</strong> Le <strong>Prevost</strong>, soumettant respectueusement au jugement <strong>de</strong> Vo‐<br />

tre Sainteté la résolution et lʹélection dont il a été question, <strong>de</strong>man<strong>de</strong> quʹelles soient<br />

confirmées par Votre autorité et Votre approbation.<br />

A cette supplique est jointe une copie du Procès‐verbal <strong>de</strong> la séance du Conseil où<br />

se sont accomplis les faits ci‐<strong>de</strong>ssus exposés, collationnée sur lʹoriginal et munie <strong>de</strong> la si‐<br />

gnature <strong>de</strong> tous les Conseillers, à lʹexception <strong>de</strong> celle du prêtre Henri Planchat qui, tout<br />

<strong>de</strong>rnièrement, dans la guerre civile qui déchirait la France, a été tué à Paris par les ennemis<br />

acharnés <strong>de</strong> la Religion et <strong>de</strong> la Patrie.<br />

Et maintenant, que Votre Sainteté ajoute encore à sa bienveillance en ne refusant<br />

pas dʹécouter le suppliant proclamer la joie dont lui‐même et toute sa famille exultent vi‐<br />

vement et suavement, à la veille <strong>de</strong> lʹéchéance <strong>de</strong> la vingt‐cinquième année du règne glo‐<br />

rieux <strong>de</strong> Pie IX. Grâce singulière, inouïe <strong>de</strong>puis St Pierre jusquʹà ce jour, par laquelle Jésus‐<br />

Christ et la Bienheureuse Vierge Marie leur semblent annoncer dʹune manière éclatante<br />

lʹexaltation <strong>de</strong> notre Sainte Mère lʹEglise et le triomphe <strong>de</strong> son Docteur et son Chef, dou‐<br />

blement auréolé par lʹImmaculée Conception et lʹInfaillibilité. Empêché par la vieillesse et<br />

ses infirmités, le suppliant se prosterne <strong>de</strong> grand cœur, <strong>avec</strong> amour, aux pieds <strong>de</strong> Votre<br />

Sainteté et lui offre ses vœux et ceux <strong>de</strong> sa famille <strong>avec</strong> le plus grand respect et lʹaffection<br />

dʹun vrai fils.<br />

Que Dieu…<br />

1643 à M. Trousseau<br />

Sur la mort glorieuse du père Planchat.<br />

Chaville, 7 juin 1871<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

M. <strong>de</strong> Varax vous a appris la mort <strong>de</strong> M. Planchat. Pendant quelques jours, nous<br />

avions conservé quelque espoir quʹil aurait pu échapper à la fureur <strong>de</strong>s ennemis <strong>de</strong> la reli‐<br />

gion et <strong>de</strong> notre chère France. Mais aujourdʹhui, il est bien certain que notre excellent frère<br />

1574


a subi son martyre <strong>avec</strong> bon nombre <strong>de</strong> ses compagnons <strong>de</strong> captivité. Son corps, découvert<br />

par nos ff. <strong>de</strong> Paris dans une fosse commune au Père Lachaise, a été embaumé et sera dé‐<br />

posé dans un caveau sous la chapelle <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette, à Vaugirard.<br />

Nous sommes consolés dans notre affliction par la pensée que notre famille a donné<br />

à Dieu, à lʹEglise et à la France un martyr. Car cʹest bien en haine <strong>de</strong> la foi catholique que<br />

lui et les autres victimes ont été immolés, et ils sont regardés généralement comme tels.<br />

Rendons donc grâces à Dieu <strong>de</strong> nous avoir jugés dignes <strong>de</strong> lui offrir notre frère le plus gé‐<br />

néreux dans la pratique <strong>de</strong>s vertus religieuses, le plus ar<strong>de</strong>nt, le plus oublieux <strong>de</strong> lui‐<br />

même dans lʹamour et le service <strong>de</strong>s pauvres.<br />

Vous avez déjà, sans doute, beaucoup prié et fait prier pour lui. Continuez, bien<br />

cher enfant, en nʹoubliant pas spécialement les trois messes que chaque prêtre <strong>de</strong> la<br />

Congrégation célèbre pour chacun <strong>de</strong> nos ff. défunts. Nous espérons bien quʹil a déjà<br />

trouvé la paix dans le sein <strong>de</strong> Dieu. Mais, comme il y a toujours à craindre en face <strong>de</strong> la<br />

justice et <strong>de</strong> la sainteté divines, ne le privons pas <strong>de</strong> nos suffrages qui, sʹils ne lui profitent<br />

pas, seront utiles à dʹautres.<br />

Recevez, bien cher enfant, lʹexpression <strong>de</strong> mes sentiments les plus paternels et les<br />

plus dévoués.<br />

Votre ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Jʹécris un mot à M. Streicher pour le rappeler ici, si vous trouvez son retour dé‐<br />

finitivement désirable. Aussitôt quʹil sera arrivé ici, je vous enverrai M. Bouquet.<br />

1644 à M. Trousseau<br />

Encouragements à prodiguer à un postulant. Générosité dans lʹépreuve.<br />

Chaville, 18 juin 1871<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je sympathise bien à la sollicitu<strong>de</strong> que cause à M. Helluin son état présent <strong>de</strong> santé;<br />

je crois quʹil ne doit pas sʹétonner <strong>de</strong> souffrir plus que <strong>de</strong> coutume, à raison du temps ora‐<br />

geux et <strong>de</strong> la température si variable que nous subissons. Beaucoup <strong>de</strong> tempéraments, les<br />

nerveux particulièrement, en sont fort éprouvés; encouragez‐le cordialement, quʹil se<br />

confie en Dieu qui veut se servir <strong>de</strong> lui pour le bien <strong>de</strong>s âmes, et quʹil compte aussi sur no‐<br />

tre bon vouloir pour pourvoir, autant que nous le pourrons, à lui donner soulagement. Je<br />

crois quʹil trouverait ici, à Chaville, le repos et les soins que sa santé <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, en même<br />

temps quʹun accueil affectueux. Nous nʹy sommes pas nombreux; il y trouverait M. Frézet,<br />

peu fort comme lui et qui pourrait lui faire société; il ferait aussi plus ample connaissance<br />

<strong>avec</strong> moi qui lʹai vu trop peu <strong>de</strong> temps, et qui serais heureux <strong>de</strong> lui témoigner quʹil est bien<br />

du nombre <strong>de</strong> mes enfants.<br />

Toutefois si, malgré ces assurances, sa volonté le portait <strong>avec</strong> persistance à se rendre<br />

vers lʹecclésiastique dont vous me parlez, je ne refuserai pas <strong>de</strong> lʹy autoriser, sachant que<br />

les mala<strong>de</strong>s ont besoin <strong>de</strong> con<strong>de</strong>scendance et quʹil faut souvent incliner à leur donner sa‐<br />

tisfaction.<br />

Nous comptons ramener, à la fin <strong>de</strong> juillet je crois, nos chers étudiants <strong>de</strong> Tournay.<br />

Ce serait <strong>avec</strong> eux que M. Helluin <strong>de</strong>vrait suivre désormais son cours pour se préparer au<br />

sacerdoce.<br />

1575


Répétez‐lui bien quʹil ne faut pas aisément renoncer à une si sainte et si privilégiée<br />

vocation, que Dieu se plaît très ordinairement à éprouver ceux quʹIl a choisis, et quʹIl mène<br />

à bonne fin ceux qui supportent généreusement lʹépreuve.<br />

Adieu, mon bien cher ami; je nʹai pas besoin <strong>de</strong> vous dire que nous avons eu entière<br />

satisfaction <strong>de</strong>s actes <strong>de</strong> M. Bouquet; embrassez‐le pour moi ainsi que le mala<strong>de</strong>, M. Hel‐<br />

luin; que ne sais‐je faire <strong>de</strong>s miracles! je voudrais que cet embrassement le guérît.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. M. <strong>de</strong> Varax part aujourdʹhui pour son voyage <strong>de</strong>s eaux; il passe par Angers; il<br />

sera 5 peut‐être 6 semaines absent; cʹest bien long.<br />

1644‐1 à M. J. Faÿ<br />

Une paix relative régnant dans la capitale, M. Faÿ peut rendre visite à ses frères.<br />

Chaville, 19 juin 1871<br />

Bien cher fils en N.S.,<br />

M. et Mme Decaux ont bien voulu mʹenvoyer le paquet <strong>de</strong> lettres et dʹimprimés que<br />

vous avez eu lʹattention <strong>de</strong> mʹadresser. Tous ces bons souvenirs me sont agréables et en‐<br />

tretiennent entre nous ces relations fréquentes dont notre affection réciproque a besoin;<br />

mais se voir vaut encore mieux que sʹécrire; puisque donc une sorte <strong>de</strong> paix nous est ren‐<br />

due et quʹon ne court plus risque dʹêtre grillé tout vivant à Paris, vous pourriez hasar<strong>de</strong>r<br />

dʹy faire une apparition.<br />

Je ne dis pas que vous serez bien accueilli: après une si longue absence, tout le<br />

mon<strong>de</strong> vous tend les bras dʹavance pour vous serrer bien fort. Je ne vous détermine point<br />

le jour <strong>de</strong> votre départ, vous le réglerez selon lʹexigence <strong>de</strong> vos affaires. Pour nous, le plus<br />

tôt sera le mieux.<br />

Je vous prie <strong>de</strong> rapporter, comme nous en sommes convenus, les titres que vous<br />

avez pris en quittant Paris.<br />

Assurez tous nos ff. <strong>de</strong> notre constant souvenir et <strong>de</strong> notre bien vive affection.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1645 à M. Trousseau<br />

Une Commission à organiser sans craindre les difficultés. Prochaine retraite annuelle.<br />

Chaville, 26 juin 1871<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong>s détails que vous mʹavez donnés au sujet <strong>de</strong> notre cher abbé<br />

Helluin. Vous avez fait à son égard ce que la charité <strong>de</strong>mandait; prions pour lui et laissons<br />

au divin Seigneur le soin <strong>de</strong> disposer, selon sa sagesse, <strong>de</strong> lʹavenir <strong>de</strong> ce jeune homme.<br />

M. <strong>de</strong> Varax pense, et je pense aussi, quʹil ne faut pas vous décourager au sujet <strong>de</strong> la<br />

Commission et quʹil faut profiter <strong>de</strong> la bonne volonté <strong>de</strong> votre entourage pour lʹorganiser.<br />

Si, eu égard à lʹépoque avancée <strong>de</strong> la saison, elle ne peut réunir immédiatement <strong>de</strong> gran‐<br />

1576


<strong>de</strong>s ressources, elle sera posée et se trouvera en mesure dʹagir plus efficacement quand le<br />

moment favorable sera venu. Ayez confiance, et Dieu vous ai<strong>de</strong>ra.<br />

Quant à vos petits chan<strong>de</strong>liers en bronze, M. Charrin les recevra, si vous le voulez,<br />

comme dépôt et cherchera lʹoccasion <strong>de</strong> les vendre, sans répondre du succès, le temps<br />

étant peu favorable pour la vente présentement.<br />

MM. Faÿ et dʹArbois sont en ce moment près <strong>de</strong> nous pour quelques jours. Mais M.<br />

<strong>de</strong> Varax nous fait défaut, comme vous le savez; nous essayons <strong>de</strong> recomposer un peu nos<br />

œuvres que lʹorage avait dévastées; les choses reprennent successivement leur marche ac‐<br />

coutumée. Nous sentons déjà que la bénédiction <strong>de</strong> Dieu ne sʹest pas retirée <strong>de</strong> nous.<br />

Soyez assuré, cher ami, quʹelle sera aussi <strong>avec</strong> vous, dans toutes vos œuvres; remettez‐<br />

vous filialement aux mains <strong>de</strong> notre Père qui est au Ciel.<br />

Nous avons eu la pensée <strong>de</strong> faire venir ici, en ce moment, ceux <strong>de</strong> nos ff. qui ne<br />

pourront probablement pas assister à la retraite prochaine; mais, réflexion faite, il nous<br />

semble mieux <strong>de</strong> ne pas les déplacer en ce temps <strong>de</strong> lʹannée où ils sont fort occupés; il sera<br />

préférable quʹils fassent quelques jours <strong>de</strong> retraite, soit en chaque maison, soit ici en parti‐<br />

culier, sʹils viennent tour à tour prendre quelques jours <strong>de</strong> repos, comme il arrive souvent<br />

au mois dʹaoût ou septembre.<br />

Adieu, bien cher ami, recevez pour vous et tous vos ff. mes sentiments affectueux en N.S.<br />

Votre ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1646 à M. Trousseau<br />

Règlement dʹune Commission. Nouvelles <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax, en route vers Allevard.<br />

Chaville, 28 juin 1871<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai trouvé fondées les observations que vous me soumettez par votre lettre du 24 <strong>de</strong><br />

ce mois, relatives aux modifications apportées à quelques articles du règlement <strong>de</strong> votre<br />

future Commission. Je consens donc que vous vous en teniez aux termes que vous proposez.<br />

Jʹai <strong>de</strong> bonnes nouvelles <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax; après un séjour <strong>de</strong> quelques jours à An‐<br />

gers, il est allé faire une apparition à Nevers. De là, il va, je pense, gagner sans retard Alle‐<br />

vard. Espérons quʹil nous reviendra <strong>avec</strong> une abondante provision <strong>de</strong> forces. Prions Dieu<br />

pour cela.<br />

Je le prie aussi pour vous et lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> quʹIl vous assiste, ce quʹIl fera si vous vous<br />

abandonnez filialement au Cœur <strong>de</strong> ce bon Père.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, recevez lʹexpression <strong>de</strong> mes sentiments les plus affec‐<br />

tueux en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1647 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Récit <strong>de</strong>s épreuves <strong>de</strong> la Congrégation pendant la guerre et la Commune.<br />

Vaugirard, 1er juillet 1871<br />

Madame la Marquise,<br />

Votre bonne et tant désirée lettre mʹa causé une gran<strong>de</strong> consolation. En même<br />

temps que vous aviez la bonté <strong>de</strong> vous enquérir <strong>de</strong> nous et <strong>de</strong> nos œuvres, je faisais <strong>de</strong><br />

1577


mon côté <strong>de</strong>s recherches pour découvrir où vous vous trouviez <strong>avec</strong> votre chère famille. A<br />

travers les diverses interruptions quʹont subies les communications <strong>de</strong> Paris <strong>avec</strong> la pro‐<br />

vince et même <strong>avec</strong> les bâtiments qui lʹavoisinent, jʹai fait <strong>de</strong>s démarches pour savoir le<br />

lieu où vous résidiez: rue S t Florentin, on répond que vous étiez à Rome, mais quʹon igno‐<br />

rait votre adresse. Jʹécrivis ensuite en Belgique, espérant que, par M. <strong>de</strong> Caulaincourt, jʹau‐<br />

rais quelques renseignements plus précis; je ne fus pas plus heureux; enfin, je commençais<br />

à faire une autre lettre que jʹallais confier à la poste <strong>avec</strong> la note: Faire suivre, quand votre<br />

chère épître me tire enfin <strong>de</strong> peine.<br />

Lorsque vous voulûtes bien mʹécrire pour la <strong>de</strong>rnière fois <strong>de</strong> Normandie, vous étiez<br />

en grands soucis pour tout votre entourage; votre bonne mère partageait vos inquiétu<strong>de</strong>s<br />

et votre cher Richard tant aimé, improvisé capitaine <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>s nationaux, avait aussi assu‐<br />

rément ses embarras; cʹest à ce moment que la séparation sʹest faite si douloureusement et<br />

si longuement pour tant dʹaffections privées <strong>de</strong> tout épanchement et même <strong>de</strong> tout signe<br />

<strong>de</strong> vie. Quʹêtes‐vous <strong>de</strong>venues, chères Mesdames, <strong>avec</strong> votre bien‐aimé fils? Vous en avez<br />

été quittes pour la peur, dit votre lettre, mais les dangers ont‐ils été grands? Avez‐vous<br />

trouvé dans les gens du pays un peu <strong>de</strong> fidélité et <strong>de</strong> cœur, et votre voyage à Rome nʹa‐t‐il<br />

pas été bien troublé par les mouvements révolutionnaires qui agitent ce lieu saint, consa‐<br />

cré au Dieu <strong>de</strong> charité et <strong>de</strong> paix, et que les hommes <strong>de</strong> haine et <strong>de</strong> sang pervertissent si<br />

lamentablement? Nʹavez‐vous enfin, à votre retour, eu aucun ressentiment <strong>de</strong>s catastro‐<br />

phes <strong>de</strong> Paris, et votre <strong>de</strong>meure rue S t ‐Florentin a‐t‐elle été épargnée? De tous côtés, à la<br />

campagne comme à la ville, pouvait se trouver le danger. Jʹy ai pensé souvent <strong>de</strong>vant<br />

Dieu, me souvenant que Lui seul pouvait nous protéger efficacement en <strong>de</strong> si terribles<br />

épreuves.<br />

Pour nous, Madame, nous avons essuyé toutes les privations et les dangers du<br />

siège, toutes les douleurs et les inquiétu<strong>de</strong>s résultant <strong>de</strong>s révoltes et <strong>de</strong>s crimes <strong>de</strong> la<br />

Commune; nous avons dû abandonner au corps militaire, dʹabord les bâtiments <strong>de</strong> notre<br />

orphelinat, et plus tard les insurgés sʹen sont violemment emparés; les dommages, assez<br />

considérables, ont été <strong>de</strong>puis à peu près réparés par nous, le mobilier a particulièrement<br />

souffert; à Chaville, notre maison, habitée durant sept mois par 160 Prussiens, a été beau‐<br />

coup plus dévastée; les bâtiments saccagés, dépouillés <strong>de</strong> toutes les boiseries, étaient donc<br />

sur leur plus gran<strong>de</strong> étendue absolument inhabitables; les meubles ont été brûlés ou dis‐<br />

persés, 400 pieds dʹarbres coupés; nous avons pu restaurer à peu près quelques parties, le<br />

reste <strong>de</strong>meurera longtemps sans pouvoir être occupé. Mais la plus gran<strong>de</strong> affliction nous<br />

est venue du côté <strong>de</strong> notre personnel. Lʹun <strong>de</strong> nos prêtres, lʹabbé Planchat, le plus dévoué,<br />

le plus zélé pour le bien <strong>de</strong>s ouvriers et <strong>de</strong>s pauvres, a été du nombre <strong>de</strong>s otages; il a été<br />

fusillé <strong>avec</strong> le r.p. Olivaint et les autres religieux qui avaient été arrêtés en même temps<br />

que lui. La consolation dʹavoir donné à lʹEglise un martyr adoucit la peine dʹun si doulou‐<br />

reux sacrifice. Son corps, dont nous avons pu rentrer en possession, est déposé dans un<br />

petit caveau établi en notre chapelle <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Salette; je suis persuadé, Madame, que<br />

vous prierez <strong>avec</strong> consolation sur cette humble tombe.<br />

Je suis resté personnellement à Vaugirard durant tout le siège jusquʹà la fin <strong>de</strong> mars,<br />

quand les violences <strong>de</strong> la Commune allaient prendre tous nos laïcs et prêtres, pour les<br />

mettre forcément dans leurs rangs, et je me suis retiré à temps à Chaville, où tous ceux<br />

dʹentre nous qui étaient menacés ont pu, sous divers déguisements, me rejoindre. Nous y<br />

1578


avons eu, comme en toutes nos maisons, une<br />

ambulance où nous soignons encore 25 bles‐<br />

sés.<br />

Jʹabrège cet exposé déjà trop long et je<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> à Dieu, en union <strong>avec</strong> vous, Ma‐<br />

dame la Marquise, et <strong>avec</strong> toute votre<br />

excellente famille, quʹIl daigne mettre fin à <strong>de</strong> si terribles épreuves en rendant à notre<br />

France la foi si oubliée et cette sagesse dont elle semble encore trop éloignée; nos prières,<br />

espérons‐le, obtiendront cette conversion qui sera un miracle sans doute, mais que le Père<br />

tout‐puissant et tout bon accor<strong>de</strong>ra aux vœux <strong>de</strong> ses enfants.<br />

Votre respectueux serviteur et ami en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1648 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Le père <strong>de</strong> Varax nommé Vicaire Général: encouragements <strong>de</strong> lʹEvêque <strong>de</strong> Bayeux. M. Faÿ est à Chaville; <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong> dʹun père jésuite pour fon<strong>de</strong>r le Noviciat. Mort du frère <strong>Jean</strong>‐Marie Tourniquet.<br />

Chaville, 4 juillet 1871<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> vos <strong>de</strong>ux bonnes lettres <strong>de</strong>s 26 juin et 1 er juillet. Si je nʹai pas ré‐<br />

pondu à la première, cʹest que, outre le manque <strong>de</strong> choses intéressantes à vous communi‐<br />

quer, je craignais que ma réponse ne vous trouvât plus à Nevers. Je comptais sur votre<br />

prompte arrivée à Allevard, et jʹai appris <strong>avec</strong> satisfaction que vous y étiez installé et en<br />

cours <strong>de</strong> traitement.<br />

Le bref <strong>de</strong> votre nomination comme Vicaire Général est déjà entre mes mains. Le p.<br />

Brichet a mis à lʹobtenir un empressement dont nous ne saurions trop lui savoir gré. Je bé‐<br />

nis Dieu <strong>de</strong> tout mon cœur <strong>de</strong> ce résultat. Cʹest lui seul qui lʹa préparé et amené; nous<br />

avons donc tout lieu dʹattendre en pleine confiance quʹIl achèvera son œuvre en vous ac‐<br />

cordant abondamment ses grâces et son assistance. Remercions‐le dʹavoir ainsi prévenu le<br />

fléchissement quʹaurait éprouvé la direction <strong>de</strong> notre famille par suite <strong>de</strong> lʹaffaiblissement<br />

<strong>de</strong> mes forces.<br />

La lettre <strong>de</strong> M gr <strong>de</strong> Bayeux [M gr Hugonin] ne me semble pas répondre vaguement à<br />

nos projets. Ces paroles: ʺVotre œuvre est lʹune <strong>de</strong>s plus importantes <strong>de</strong> notre époque. Les<br />

prêtres ordinaires ne suffisent plus. Il nous faut <strong>de</strong>s apôtres. Votre œuvre nous en donne‐<br />

1579


a, etc...ʺ expriment un sentiment déjà, à diverses reprises, recueilli <strong>de</strong> la bouche du p. Oli‐<br />

vaint et dʹautres <strong>de</strong> nos amis, justes appréciateurs <strong>de</strong>s besoins du temps et <strong>de</strong> notre but. El‐<br />

les viennent donc nous confirmer encore dans la voie où nous nous appliquons à entrer,<br />

<strong>de</strong> développer et former plus puissamment que par le passé notre personnel. Dʹautre part,<br />

elles nous donnent bon espoir quʹau moment opportun, nous trouverions dans ce bon pré‐<br />

lat un secours efficace pour lʹexécution <strong>de</strong> nos plans.<br />

M. dʹArbois est à Chaville. Vous vous êtes croisés en route. Il regrette aussi vive‐<br />

ment dʹavoir été privé <strong>de</strong> vous recevoir et voir à Angers. Ses dispositions et ses sentiments<br />

se mettent bien en harmonie <strong>avec</strong> les vôtres. Il est sur le point <strong>de</strong> repartir. Il est arrivé ici<br />

exténué, et il me paraît emporter <strong>de</strong> ce court repos une bien petite provision <strong>de</strong> forces.<br />

M. Faÿ est également <strong>de</strong>s nôtres. Son séjour à Chaville ne lui sera pas inutile au<br />

point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> sa santé. Il est encore en possession dʹun rhume négligé datant <strong>de</strong> lʹannée<br />

passée. Il nous a rapporté les pièces et titres quʹil avait transportés <strong>avec</strong> lui à Tournay, afin<br />

<strong>de</strong> les mettre en sûreté.<br />

Le Conseil sʹoccupe <strong>de</strong>s mesures à prendre pour lʹœuvre <strong>de</strong>s noviciats. Espérons en<br />

lʹai<strong>de</strong> du divin Seigneur pour leur issue favorable, aussi bien que pour celle <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />

dʹun p. Jésuite dont votre lettre me donne <strong>de</strong>s nouvelles satisfaisantes. Je ne me rappelle<br />

pas avoir modifié en rien mes première instructions au sujet <strong>de</strong> lʹécoulement successif <strong>de</strong>s<br />

enfants <strong>de</strong> lʹorphelinat dʹAmiens.<br />

Adieu, mon bien cher ami et fils en N.S.; nous prions tous les jours le bon Maître<br />

pour que votre voyage ait tous les bons résultats que nous en attendons au profit <strong>de</strong> votre<br />

santé.<br />

Votre ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. 9 juillet. ‐ Je ne mʹexplique pas comment cette lettre nʹest pas partie et comment<br />

elle me revient après plusieurs jours <strong>de</strong> sa date; je lʹenvoie un peu confus. Jʹai, du reste, à y<br />

ajouter un fait grave et triste: hier, jʹai reçu une dépêche mʹannonçant que notre f. <strong>Jean</strong>‐<br />

Marie [Tourniquet], atteint dʹun mal <strong>de</strong> gorge dʹabord peu inquiétant, sʹest trouvé tout à<br />

coup beaucoup plus mala<strong>de</strong>, une petite vérole rentrée sʹétant déclarée, et quʹenfin, après<br />

dʹassez vives souffrances, il a rendu son âme à Dieu vendredi, à 4h. 1/2 <strong>de</strong> lʹaprès‐midi.<br />

M. Faÿ, à ce moment en route pour rentrer à Tournay, ne sera pas arrivé à temps<br />

pour lui fermer les yeux. Il a pu recevoir, heureusement, les <strong>de</strong>rniers sacrements. Je nʹai<br />

pas besoin dʹajouter que cette nouvelle nous a frappés au cœur. Aujourdʹhui, nos ff. ecclé‐<br />

siastiques ainsi que moi avons tous offert le S t Sacrifice à son intention. Quelle consolation<br />

dʹavoir une telle puissance pour assister les âmes qui nous sont chères et pour calmer no‐<br />

tre douleur quand nous en sommes séparés!<br />

Votre dévoué ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Tous vous offrent respect et dévouement.<br />

1649 à M. Desclée<br />

Brouillon <strong>de</strong> lettre à M. Henri Desclée. Réponse à sa <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> voir lʹInstitut sʹinstaller à Tournay. Remer‐<br />

ciements pour les services rendus pendant la guerre.<br />

Chaville, 6 juillet 1871<br />

Monsieur,<br />

Jʹai reçu la lettre que vous mʹavez fait lʹhonneur <strong>de</strong> mʹécrire le 23 du mois <strong>de</strong>rnier, et<br />

par laquelle vous mʹexprimez le désir quʹun ecclésiastique <strong>de</strong> notre Congrégation, <strong>avec</strong> 4<br />

1580


<strong>de</strong> nos ff. laïcs, puissent donner leurs soins à diverses œuvres <strong>de</strong> votre ville [Tournay], sa‐<br />

voir: le patronage <strong>de</strong>s apprentis, <strong>de</strong>ux autres patronages pour les ouvriers <strong>avec</strong> une classe<br />

du soir, un quatrième pour les militaires, enfin une œuvre <strong>de</strong> propagan<strong>de</strong> pour les bonnes<br />

publications sʹétendant à la Belgique et au Nord <strong>de</strong> la France et donnant concours aux<br />

œuvres pontificales, selon les besoins du moment.<br />

M. <strong>de</strong> Nédonchel, que nous avons eu la satisfaction <strong>de</strong> voir à Paris, a joint <strong>de</strong> son<br />

côté sa <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à la vôtre.<br />

Nous serons heureux, Monsieur, et honorés tout ensemble <strong>de</strong> pouvoir concourir<br />

aux efforts <strong>de</strong> votre zèle pour le bien <strong>de</strong>s classes ouvrières dans votre pays; les événements<br />

si tristes dont le nôtre vient dʹêtre le théâtre, et les ferments mauvais qui se décèlent en<br />

tant dʹautres lieux disent assez haut combien ces œuvres dʹenseignement et <strong>de</strong> moralisa‐<br />

tion sont plus que jamais opportunes et nécessaires; vous pouvez donc compter, Mon‐<br />

sieur, que nos ff. sʹy emploieront <strong>avec</strong> vous autant bien quʹils le pourront.<br />

Les dispositions énoncées dans votre lettre pour lʹétablissement <strong>de</strong> nos ff. à Tour‐<br />

nay, et dont vous préparez la réalisation <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> vos charitables associés, nous pa‐<br />

raissant telles quʹon les pouvait souhaiter, nous y donnons notre plein assentiment.<br />

Veuillez agréer ici, Monsieur, pour vous et pour votre généreux entourage, nos sen‐<br />

timents <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> sincère dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1650 à M. Decaux<br />

Pour lui annoncer la mort du frère Tourniquet.<br />

Chaville, 8 juillet 1871<br />

Mon bien cher ami,<br />

Une dépêche que je reçois <strong>de</strong> Tournay mʹannonce une douloureuse nouvelle. M.<br />

<strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet], après avoir souffert dʹun mal <strong>de</strong> gorge qui a précédé une petite<br />

vérole rentrée, est tombé vite en très grand danger et a rendu son âme à Dieu hier vendre‐<br />

di, à 4h. 1/2 du soir; M. Faÿ, en route pour rentrer à Tournay, nʹa pas dû arriver à temps<br />

pour recevoir son <strong>de</strong>rnier soupir. Priez, <strong>avec</strong> Mme Decaux, pour ce vieux et dévoué servi‐<br />

teur <strong>de</strong> nos œuvres; je sais bien que sa perte vous affligera autant que nous.<br />

Votre dévoué ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1651 à M. dʹArbois<br />

Récit <strong>de</strong> la mort du frère Tourniquet. Prières pour ce ʺserviteur <strong>de</strong>s pauvresʺ.<br />

Chaville, 9 juillet 1871<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Le divin Sauveur vient <strong>de</strong> nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r un second sacrifice bien douloureux. M.<br />

<strong>Jean</strong>‐Marie, [Tourniquet] il y a quelques jours, était pris dʹune <strong>de</strong> ces affections à la gorge<br />

qui lui étaient si fréquentes. Tout à coup, une petite vérole rentrée sʹest déclarée et ven‐<br />

dredi <strong>de</strong>rnier, à 4h. 1/2 du soir, il succombait après <strong>de</strong> très vives souffrances. Il a pu recevoir<br />

1581


les <strong>de</strong>rnières consolations <strong>de</strong> la religion. Sa sainte vie, cʹest notre espoir, le mettait en assu‐<br />

rance <strong>de</strong>vant Dieu.<br />

Vous apprécierez comme nous lʹétendue <strong>de</strong> cette perte. Nous adorerons ensemble<br />

les <strong>de</strong>sseins du Dieu <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong>, et ensemble aussi nous le prierons pour ce bien‐aimé<br />

frère. Chacun <strong>de</strong> nos ecclésiastiques célébrera trois messes à son intention, et nos ff. laïcs<br />

sʹy associeront afin <strong>de</strong> hâter le plus possible le bonheur éternel <strong>de</strong> ce serviteur <strong>de</strong>s pau‐<br />

vres.<br />

Recevez, bien cher ami et frère, mes sentiments les plus affectueux en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1652 à M. Risse<br />

Mort du frère Tourniquet à Tournay. Eloge du défunt.<br />

Chaville, 9 juillet 1871<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Une nouvelle affliction vient dʹatteindre notre famille religieuse. Après nous avoir<br />

pris notre f. lʹabbé Planchat, Dieu vient dʹappeler à Lui celui qui, parmi nos ff. laïcs, avait<br />

le plus <strong>de</strong> ressemblance <strong>avec</strong> lui dans lʹexercice du zèle et <strong>de</strong> la charité, M. <strong>Jean</strong>‐Marie<br />

[Tourniquet], qui, comme vous le savez, faisait partie <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Tournay. Une lettre<br />

<strong>de</strong> M. Caron mʹavait dʹabord appris quʹil souffrait dʹune affection à la gorge; ce mal pa‐<br />

raissait sans gravité. Puis, subitement, sʹest déclaré ce quʹon appelle une petite vérole ren‐<br />

trée qui lʹa emmené en peu dʹheures, après <strong>de</strong> très vives souffrances; il est mort vendredi<br />

<strong>de</strong>rnier, à 4h. 1/2 du soir, muni <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rniers secours religieux. M. Faÿ, parti ce même jour <strong>de</strong><br />

Paris pour gagner Tournay après un court repos à Chaville, nʹa pu arriver assez tôt pour<br />

lui fermer les yeux. Vous ressentirez, comme moi, une vive douleur <strong>de</strong> cette nouvelle sé‐<br />

paration. M. <strong>Jean</strong>‐Marie avait gagné lʹaffection <strong>de</strong> nous tous par une simplicité <strong>de</strong>s plus<br />

aimables, par une charité sans borne, par un dévouement ne reculant <strong>de</strong>vant aucun sacri‐<br />

fice. Il était aussi un appui précieux pour les pauvres. Nous penserons que ce coup est<br />

frappé par Dieu et que sa main ne sʹabaisse jamais sur nous que pour exercer sa miséri‐<br />

cor<strong>de</strong>; nous lui offrirons ce nouveau sacrifice et nous prierons pour celui quʹIl nous a pris.<br />

Ses vertus et ses longs travaux nous donnent bon espoir quʹil ne sera que pour peu <strong>de</strong><br />

temps privé <strong>de</strong> la société <strong>de</strong> son divin Maître; mais cʹest un <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> charité et <strong>de</strong> justice<br />

dʹabréger encore ce temps. Nos ff. diront, selon nos usages, chacun trois messes à son in‐<br />

tention. Vous vous acquitterez <strong>avec</strong> consolation <strong>de</strong> ces mêmes suffrages auxquels sʹasso‐<br />

cieront, dans un pareil sentiment, nos autres ff. <strong>de</strong> Metz.<br />

Agréez, mon bien cher ami et fils, mes sentiments les plus affectueux en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1653 à M. J. Faÿ<br />

Mort du frère Tourniquet. MLP. le compare au père Planchat.<br />

Chaville, 10 juillet 1871<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Cʹest un besoin pour mon cœur <strong>de</strong> venir en quelque sorte au milieu <strong>de</strong> nos bien‐<br />

aimés ff. <strong>de</strong> Tournay, et <strong>de</strong> pleurer <strong>avec</strong> eux le saint ami que le bon Dieu vient <strong>de</strong> prendre<br />

1582


pour lui. Vous ne doutez pas <strong>de</strong> ma profon<strong>de</strong> affection, pas plus que je ne doute <strong>de</strong> la vô‐<br />

tre. Mais nʹest‐ce pas accomplir mon <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> Père que <strong>de</strong> vous montrer que je porte <strong>avec</strong><br />

vous le poids <strong>de</strong> cette épreuve, que <strong>de</strong> vous dire que je comprends combien a dû être<br />

gran<strong>de</strong> la peine <strong>de</strong> nos f. isolés à Tournai, privés du soutien <strong>de</strong> votre présence? Je mets<br />

donc en même temps aux pieds du divin Sauveur, et la mort <strong>de</strong> ce bien cher f. <strong>Jean</strong>‐Marie<br />

[Tourniquet], et toutes ses conséquences douloureuses pour vous. Offrons‐Lui‐le tout en‐<br />

semble en disant: Que sa sainte et adorable volonté soit bénie! Il nous lʹavait donné, Il<br />

lʹavait orné <strong>de</strong>s vertus si aimables que nous admirions en lui; Il nous lʹa enlevé. Il en était<br />

le maître. Il saura bien nous le rendre et le rendre aux pauvres.<br />

Prions pour lui, en lʹunissant dans nos souvenirs à notre f. Planchat <strong>avec</strong> lequel on a<br />

remarqué quʹil avait tant <strong>de</strong> traits <strong>de</strong> ressemblance. Espérons quʹil ne sera pas oublié non<br />

plus par tous les amis dont il sʹétait acquis, dans les œuvres, lʹaffection et la vénération.<br />

Toutes ces instances obtiendront <strong>de</strong>s Cœurs <strong>de</strong> J. et <strong>de</strong> M., ayons‐en la consolante persua‐<br />

sion, quʹil soit bientôt admis au nombre <strong>de</strong>s habitants du Ciel.<br />

Adieu, bien cher ami et fils, croyez bien, ainsi que tous vos ff. <strong>de</strong> Tournai, à tous<br />

mes sentiments les plus affectueux.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Peut‐être trouverez‐vous le moment dʹécrire une petite notice sur M. <strong>Jean</strong>‐<br />

Marie. Vous lʹavez suivi longtemps à S t ‐Charles. MM. Georges [<strong>de</strong> Lauriston], Emile<br />

[Beauvais] et Chaverot vous fourniraient <strong>de</strong>s détails sur ses travaux à Rome; tous nos ff. le<br />

désirent vivement.<br />

Comment allez‐vous faire pour le remplacer? M. Marcaire, aidé par vous, peut‐il y<br />

subvenir, au moins provisoirement?<br />

Avez‐vous quelque bon portrait photographié dʹaprès lui quʹon pût reproduire?<br />

1654 à M. Trousseau<br />

Pour lui annoncer la douloureuse nouvelle <strong>de</strong> la mort du frère Tourniquet.<br />

Chaville, 10 juillet 1871<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Un nouveau coup vient <strong>de</strong> nous frapper: notre f. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet], atteint<br />

dʹune petite vérole rentrée, a succombé vendredi <strong>de</strong>rnier à ce mal, à 4h. 1/2 <strong>de</strong> lʹaprès‐midi;<br />

il a reçu les <strong>de</strong>rniers sacrements. M. Faÿ, qui revenait à Tournay ce même jour, nʹest arrivé<br />

que pour les funérailles.<br />

Priez pour lui, vous et vos ff.; offrez, vous et M. Pattinote, le St Sacrifice à cette in‐<br />

tention.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Concertez‐vous <strong>avec</strong> M. Caille pour que la famille, dont jʹignore lʹadresse, soit<br />

informée <strong>de</strong> cette triste nouvelle.<br />

1583


1655 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Embarras causé par la mort du frère Tourniquet. Projet dʹinstallation du père <strong>de</strong> Varax à Vaugirard. Etablisse‐<br />

ment du petit et grand Noviciat. Lʹamour maternel.<br />

Chaville, 12 juillet 1871<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai bien reçu vos <strong>de</strong>ux lettres <strong>de</strong>s 6 et 10 juillet. Je pensais bien que, comme nous,<br />

vous éprouveriez une profon<strong>de</strong> affliction <strong>de</strong> la mort <strong>de</strong> notre bien‐aimé f. <strong>Jean</strong>‐Marie<br />

[Tourniquet], et que, comme nous aussi, vous seriez frappé <strong>de</strong> ses conséquences relative‐<br />

ment aux plans dont le Conseil étudiait <strong>avec</strong> vous lʹexécution.<br />

En effet, M. Derny ne pourra guère aisément être retiré <strong>de</strong> Ste ‐Anne, Dieu venant <strong>de</strong><br />

nous prendre celui que nous <strong>de</strong>stinions pour la Direction <strong>de</strong> cette maison. Dʹautre part, M.<br />

Faÿ croit que M. Coquerel est absolument nécessaire à Tournay; M. Risse parle <strong>de</strong> même<br />

<strong>de</strong> M. Baumert pour Metz; il <strong>de</strong>vient par là même nécessaire <strong>de</strong> rappeler M. Faÿ. Que veut<br />

nous indiquer la Provi<strong>de</strong>nce en nous ôtant ainsi la libre disposition <strong>de</strong> nos instruments?<br />

Ayant dans votre solitu<strong>de</strong> plus <strong>de</strong> calme pour prier, réfléchir et combiner, peut‐être<br />

trouverez‐vous une issue à cette impasse? Ne sera‐t‐il pas difficile, dans lʹétat actuel <strong>de</strong> nos<br />

affaires et <strong>avec</strong> lʹamoindrissement <strong>de</strong> notre personnel, dʹétablir <strong>de</strong>ux Noviciats en <strong>de</strong>ux<br />

lieux séparés? Ne vaudrait‐il pas mieux employer toutes nos ressources pécuniaires et<br />

concentrer tout notre personnel disponible dans un seul Noviciat, au moins pour cette an‐<br />

née, soit à Vaugirard, soit à Chaville où lʹinstallation <strong>de</strong>s logements serait fort simplifiée et<br />

qui, dans le cas contraire, <strong>de</strong>meurerait sans <strong>de</strong>stination utile et <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s charges encore as‐<br />

sez lour<strong>de</strong>s?<br />

Sans nette vue précise et à titre dʹétu<strong>de</strong> seulement, je vous signale ces points qui<br />

méritent notre attention. Pour cet examen, la liste <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> la Congrégation peut<br />

vous être utile; je vous lʹenvoie pour le cas où vous ne lʹauriez pas. Lʹayant sous les yeux,<br />

vous ferez mieux les diverses combinaisons possibles pour le classement <strong>de</strong>s frères en<br />

chaque maison.<br />

La préparation <strong>de</strong>s logements paraîtrait <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r que lʹon sʹarrêtât sans trop tar‐<br />

<strong>de</strong>r à un parti quelconque. Dans le cas, en effet, où vous croiriez que Vaugirard dût être<br />

préféré comme Noviciat et Maison‐Mère, vous auriez à vous déci<strong>de</strong>r sur les conditions <strong>de</strong><br />

votre installation, soit dans le logement que jʹoccupe présentement, augmenté <strong>de</strong> la pièce<br />

<strong>de</strong> lʹéconomat qui serait affectée à votre secrétaire, soit en tel autre endroit que vous juge‐<br />

riez plus convenable. Dans le premier cas, M. Audrin établirait son bureau dans une partie<br />

du parloir (près du concierge), dont le reste gar<strong>de</strong>rait son usage actuel.<br />

Dʹaprès lʹavis <strong>de</strong> MM. Myionnet et Audrin, mon propre logement serait alors trans‐<br />

féré dans la salle dʹétu<strong>de</strong>, et la pièce <strong>de</strong> la menuiserie, en face <strong>de</strong> la bibliothèque, <strong>de</strong>vien‐<br />

drait salle dʹétu<strong>de</strong>.<br />

Il semblerait désirable que la disposition, quelle quʹelle fût, qui serait adoptée fût<br />

réalisée au plus tôt; autrement, les travaux à faire seraient pour vous, à votre retour, un<br />

notable dérangement et ajourneraient fâcheusement lʹétablissement <strong>de</strong>s services et lʹétat<br />

régulier qui a été déjà bien différé.<br />

Je le répète, mon bien cher ami, je ne précise rien, je soumets simplement ces ques‐<br />

tions à votre examen; si vous pensez que mieux vaut ne rien arrêter présentement, nous<br />

attendrons votre retour, mais y penser à lʹavance ne serait pas au moins sans avantages.<br />

1584


Quant aux difficultés relatives aux affaires dʹAmiens, je nʹy réponds pas aujour‐<br />

dʹhui, M. Caille et M. Trousseau <strong>de</strong>vant venir vendredi pour sʹentendre <strong>avec</strong> nous et régler<br />

les choses pour le mieux. Deman<strong>de</strong>z à Dieu que nous atteignions ce but. La publicité à<br />

donner dans la Revue <strong>de</strong>s Associations Catholiques à la création <strong>de</strong> la Commission est subor‐<br />

donnée aux résultats <strong>de</strong> cette entrevue.<br />

Jʹai reçu hier le timbre humi<strong>de</strong> que vous aviez commandé à Arras. Jʹen accuserai ré‐<br />

ception au graveur et paierai les 30f quʹil réclame, dès que vous aurez donné votre appro‐<br />

bation ou vos observations. Je ferai votre commission près <strong>de</strong> M. Maignen pour les lettres<br />

dʹobédience. Je partage votre avis sur le moment à choisir pour notifier aux ff. votre exalta‐<br />

tion. Lʹimportance <strong>de</strong> la chose sera ainsi mieux sentie. Nous suivons <strong>avec</strong> le plus vif intérêt<br />

les détails que vous nous donnez sur votre santé; puissiez‐vous nous la rapporter vigou‐<br />

reuse, soli<strong>de</strong>, afin que nous en puissions tirer tout le parti possible.<br />

Veuillez offrir à M me <strong>de</strong> Varax nos plus respectueux souvenirs. Ce nʹest pas sans at‐<br />

tendrissement que je vois <strong>de</strong> loin cette vénérée Mère copiant patiemment vos grimoires. Je<br />

mʹenfonce <strong>de</strong> plus en plus dans mon admiration pour lʹamour <strong>de</strong>s mères; comme je vous<br />

lʹai dit, cʹest le <strong>de</strong>rnier refuge <strong>de</strong> mes complaisances, en ce qui est <strong>de</strong> la terre.<br />

Adieu, mon bien cher ami et fils en N.S.; tous nos ff. vous aiment et vous atten<strong>de</strong>nt,<br />

et vous feront au retour le plus cordial accueil.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1656 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Préparatifs dʹinstallation du Vicaire Général.<br />

Chaville, 17 juillet 1871<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu vos <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rnières lettres. Celle qui concerne les brefs obtenus pour la cé‐<br />

lébration <strong>de</strong> la fête <strong>de</strong> St Vincent <strong>de</strong> Paul nous permettra <strong>de</strong> faire célébrer la messe <strong>de</strong><br />

Communion le 19 par un <strong>de</strong> nos prêtres, qui sera M. Lantiez. Je réponds aux divers points<br />

dont vous mʹentretenez dans lʹautre.<br />

Je transmets vos observations au graveur qui a exécuté le timbre. Je vous transmet‐<br />

trai ensuite ce quʹil y répondra. Le paiement <strong>de</strong>meure suspendu.<br />

Je me conformerai à vos désirs relativement à votre lettre dʹobédience.<br />

Ce que vous me dites au sujet <strong>de</strong> votre installation me paraît sage. Nous la prépare‐<br />

rons en Conseil sur les bases que vous indiquez dʹune manière générale. Notamment, je<br />

lʹinviterai à déterminer les marques extérieures <strong>de</strong> déférence dont il leur paraîtra convena‐<br />

ble <strong>de</strong> soutenir lʹautorité <strong>de</strong> votre administration.<br />

Quant aux vues que vous émettez au sujet <strong>de</strong>s Noviciats et <strong>de</strong>s logements, jʹen ferai<br />

également part au Conseil dont je vous enverrai ensuite lʹavis.<br />

Je prierai M. Lantiez <strong>de</strong> vous tracer un petit plan conforme aux dispositions proje‐<br />

tées dans le parloir actuel <strong>de</strong> lʹorphelinat, près du concierge, et que vous attendiez déjà. Il<br />

nous mettra à même <strong>de</strong> juger <strong>de</strong> la convenance <strong>de</strong> lʹexécution. Lʹespace paraît bien res‐<br />

treint. Mon logement est beaucoup plus spacieux et vous offrirait, il semble, beaucoup<br />

plus dʹavantages, à la condition <strong>de</strong> remédier, ce qui serait facile, à la sonorité.<br />

1585


Je pense que vous ferez bien en passant, comme M me votre mère vous le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>,<br />

par Montcoy. Je mʹassocierai à vos prières au lieu sanctifié par la naissance <strong>de</strong> votre pa‐<br />

tron, et jʹespère bien quʹil aura ce jour‐là pour vous et pour toute notre Congrégation <strong>de</strong>s<br />

grâces abondantes et spéciales.<br />

M. Boulanger et M. Derny sont arrivés aujourdʹhui à Chaville pour y prendre quel‐<br />

que repos.<br />

Je pars ce soir pour Vaugirard, et <strong>de</strong>main nous y fêterons en toute simplicité notre<br />

patron. M. Decaux est le seul qui ait été invité à y venir prendre part.<br />

Jʹai vu la semaine passée M. Caille, et lundi M. Trousseau; à la suite <strong>de</strong> ces entre‐<br />

vues, je crois quʹil sera bien difficile que ce <strong>de</strong>rnier puisse être maintenu à Amiens. Il paraît<br />

être lui‐même bien découragé.<br />

Adieu, mon bien cher ami et fils en N.S. Offrez nos respectueux hommages à M me<br />

<strong>de</strong> Varax. Nous serons très heureux <strong>de</strong> vous revoir. Quel est, selon vos prévisions, le mo‐<br />

ment <strong>de</strong> votre retour?<br />

Votre tout dévoué et affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1657 à M. Decaux<br />

La St‐Vincent <strong>de</strong> Paul après la Commune.<br />

Chaville, 17 juillet 1871<br />

Mon bien cher ami,<br />

Les malheurs publics et privés dont nous avons été atteints ne nous sont pas une<br />

raison pour négliger la fête <strong>de</strong> notre Saint Patron; nous la solenniserons donc au moins re‐<br />

ligieusement, mais <strong>avec</strong> une entière simplicité et tout à fait en famille. Jʹai hésité dʹabord à<br />

vous en faire part, croyant presque abuser <strong>de</strong> votre con<strong>de</strong>scendante affection; mais, au<br />

<strong>de</strong>rnier moment, je crois que, si vous nʹêtes pas là, vous le plus dévoué <strong>de</strong>s fils <strong>de</strong> St Vin‐<br />

cent <strong>de</strong> Paul, ce bon et vénéré Père ne sera pas vraiment fêté.<br />

Jʹécris donc ici lʹordre <strong>de</strong> la journée, espérant que vous nous accor<strong>de</strong>rez telle part <strong>de</strong><br />

votre temps que vous pourrez dérober à vos travaux.<br />

Mercredi 19.<br />

à 7 h. Messe <strong>de</strong> communion<br />

9 h. Grandʹmesse<br />

10 h. 1/2 Déjeuner<br />

3 h. Vêpres, petit panégyrique par lʹabbé Hello<br />

5 h. 1/2 Dîner<br />

Cʹest à Vaugirard que nous ferons la fête pour moins dʹapparat et <strong>de</strong> dérangement.<br />

Votre tout dévoué ami et frère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1658 à M. J. Faÿ<br />

Concession dʹun terrain au cimetière <strong>de</strong> Tournay; charité <strong>de</strong>s Conférences <strong>de</strong> la ville et <strong>de</strong> Monsieur Desclée<br />

pour lʹInstitut. Fête <strong>de</strong> St‐Vincent <strong>de</strong> Paul à Vaugirard.<br />

1586


Chaville, 18 juillet 1871<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu votre bonne lettre du 14 <strong>de</strong> ce mois. Votre liste <strong>de</strong>s lettres <strong>de</strong> faire‐part du<br />

décès <strong>de</strong> notre bien‐aimé f. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] nous servira à éviter les doubles em‐<br />

plois dans lʹenvoi <strong>de</strong> celles que nous adresserons nous‐mêmes.<br />

Veuillez remercier, en toute cordialité et reconnaissance, ces MM. <strong>de</strong>s Conférences<br />

<strong>de</strong> la sympathie quʹils ont témoignée, et à M. <strong>Jean</strong>‐Marie, et à nous, à lʹoccasion <strong>de</strong> cette<br />

mort. Ils ne pouvaient nous en donner <strong>de</strong>s marques plus vraies et plus précieuses que cel‐<br />

les dont ils ont puisé lʹinspiration dans leur foi; jʹespère que notre f. <strong>Jean</strong>‐Marie les paiera<br />

<strong>de</strong> retour.<br />

Vos dispositions pour remplacer M. <strong>Jean</strong>‐Marie me paraissent sages. Jʹapprouve le<br />

parti que vous adoptez pour M. Dufour.<br />

Toutefois, en ce qui concerne M. Marcaire, M. Caille le réclame <strong>avec</strong> insistance pour<br />

Amiens. Quand M. Charrin aura terminé la liquidation <strong>de</strong> lʹatelier <strong>de</strong> Vaugirard, ou du<br />

moins dès quʹelle sera assez avancée pour quʹil soit disponible, nous pourrions vous lʹen‐<br />

voyer, afin que M. Marcaire revienne à Amiens.<br />

Comme vous, je trouve plus avantageuse la concession que vous avez obtenue dʹun<br />

terrain dʹinhumation à perpétuité. Dieu veuille y faire germer <strong>de</strong> nouveaux ff. sur les cen‐<br />

dres du premier occupant et leur communiquer son esprit <strong>de</strong> sacrifice et dʹoubli <strong>de</strong> soi‐<br />

même!<br />

Je me réjouis <strong>de</strong>s dispositions que prend M. Desclée pour votre installation provi‐<br />

soire rue <strong>de</strong>s Sœurs Noires, et pour une installation définitive. Jʹen exprime à ce cher et<br />

vénéré Confrère, ainsi quʹà ses charitables coopérateurs, toute ma gratitu<strong>de</strong>.<br />

Demain, nous fêterons en famille, à Vaugirard, <strong>avec</strong> la plus gran<strong>de</strong> simplicité, St Vincent <strong>de</strong> Paul. Jʹespère que tous nos cœurs, <strong>de</strong> tous les points, iront sʹunir bien étroite‐<br />

ment dans celui <strong>de</strong> notre Père et Patron, et en recevront <strong>de</strong> lui une abondante participation<br />

à son esprit dʹhumilité et <strong>de</strong> charité.<br />

Recevez, bien cher fils et ami, lʹexpression <strong>de</strong> mes sentiments les plus dévoués en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1659 à M. Trousseau<br />

Examen dʹune offre <strong>de</strong> fondation à Amiens. Deman<strong>de</strong> <strong>de</strong> délai. Patience, confiance.<br />

Chaville, 20 juillet 1871<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Votre <strong>de</strong>rnière lettre contient une proposition qui mérite <strong>de</strong> notre part reconnais‐<br />

sance envers Monseigneur [Boudinet] dont la sympathie pour vous ne se dément jamais,<br />

mais qui aussi <strong>de</strong>man<strong>de</strong> une sérieuse considération.<br />

En principe, cette offre qui nous est faite <strong>de</strong> nous charger dʹun nouvel orphelinat où<br />

seraient recueillis les enfants <strong>de</strong>s victimes <strong>de</strong> la guerre, sous le patronage immédiat <strong>de</strong> Mgr ,<br />

me paraît bien pouvoir être une occasion opportune, suscitée par la Provi<strong>de</strong>nce, <strong>de</strong> tour‐<br />

ner quelques‐unes <strong>de</strong> nos difficultés et <strong>de</strong> servir le Premier Pasteur du diocèse dans lʹexé‐<br />

cution dʹune œuvre digne <strong>de</strong> tout intérêt. Mais encore faut‐il en avoir les moyens. Jʹaurais,<br />

en conséquence, besoin <strong>de</strong> quelques indications sur les conditions dʹétablissement <strong>de</strong> cette<br />

1587


maison, et spécialement sur le lieu où elle sera installée. Sera‐ce à Amiens même ou dans<br />

les environs? Dans le second cas, si la distance était quelque peu notable, les rapports et la<br />

surveillance du personnel <strong>de</strong>s ff. chargés <strong>de</strong>s diverses œuvres à Amiens et au <strong>de</strong>hors se‐<br />

raient rendus plus difficiles. De plus, même en supposant toutes les conditions parfaite‐<br />

ment acceptables, il y a lieu dʹexaminer si nous avons un personnel suffisant et qui nous<br />

permette dʹassumer <strong>de</strong> nouvelles charges.<br />

Je ne puis donc vous envoyer <strong>de</strong> suite une réponse, comme vous me le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z;<br />

ce nʹest quʹaprès que jʹaurai reçu le renseignement dont je viens <strong>de</strong> vous parler sur le lieu<br />

<strong>de</strong> lʹorphelinat projeté et que jʹaurai consulté le Conseil que je serai à même <strong>de</strong> vous ré‐<br />

pondre dʹune manière précise.<br />

M. Helluin mʹa écrit quʹil ne voulait plus faire partie <strong>de</strong> la Congrégation. Pensez‐<br />

vous quʹil faille attendre et lui donner le temps dʹune réflexion plus calme avant <strong>de</strong> consi‐<br />

dérer cette décision comme définitive, ou le regar<strong>de</strong>r dès maintenant comme nʹétant plus<br />

<strong>de</strong>s nôtres? Si sa sortie <strong>de</strong> chez nous était arrêtée, nous nʹaurions plus à lʹentretenir.<br />

Je vous prie <strong>de</strong> faire agréer à M gr mes remerciements pour lʹintérêt qui le porte à<br />

vouloir nous associer à ses travaux, et en même temps le délai qui mʹest nécessaire pour<br />

mʹéclairer sur le parti à prendre relativement à sa proposition.<br />

Quant à vous, bien cher enfant, patience en vos épreuves et confiance en N.S. Ces<br />

<strong>de</strong>ux dispositions, accompagnées <strong>de</strong> ferventes prières, sont bien puissantes sur le Cœur du<br />

bon Maître pour en obtenir les solutions <strong>de</strong>s questions les plus embrouillées.<br />

Recevez lʹassurance <strong>de</strong> mes sentiments les plus dévoués en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1660 à M gr Delaplace<br />

MLP. écrit à Mgr Delaplace, vicaire apostolique <strong>de</strong> Pékin, évêque Lazariste, (alors présent rue <strong>de</strong> Sèvres), à pro‐<br />

pos <strong>de</strong> la notice sur le père Planchat. Espoir <strong>de</strong> le revoir au nom dʹune ancienne amitié.<br />

Chaville, 21 juillet 1871<br />

Cher Monseigneur,<br />

Je vous adresse ci‐joint la réponse à la lettre <strong>de</strong> la sœur <strong>de</strong> notre frère, lʹabbé Plan‐<br />

chat, que vous mʹavez envoyée le 10 <strong>de</strong> ce mois. Je me contente <strong>de</strong> lui donner quelques dé‐<br />

tails propres à la consoler. Un <strong>de</strong> nos ff. prépare en ce moment une notice <strong>de</strong> quelque<br />

étendue sur ce bien cher abbé. Dès quʹelle sera imprimée, Je vous en offrirai <strong>de</strong>ux exem‐<br />

plaires, un pour vous, lʹautre pour sa digne sœur qui y trouvera une réponse en rapport<br />

<strong>avec</strong> ses désirs et son affection.<br />

Je vous sais bien gré <strong>de</strong> vos bons souvenirs et <strong>de</strong> votre promesse <strong>de</strong> visite. Je vous<br />

reverrai <strong>avec</strong> bonheur, car les liens, déjà si anciens, que Dieu a établis entre nous nʹont fait<br />

que se resserrer davantage, malgré nos séparations lointaines et prolongées. En effet,<br />

quoique à un <strong>de</strong>gré moindre, il est vrai, jʹai eu, comme vous, le précieux privilège <strong>de</strong> <strong>de</strong>‐<br />

venir enfant <strong>de</strong> S t Vincent <strong>de</strong> Paul.<br />

Je vous prie <strong>de</strong> mʹexcuser si, prenant moi‐même les <strong>de</strong>vants, je ne préviens pas vo‐<br />

tre visite, mes mauvaises jambes en sont cause. Il ne mʹest possible <strong>de</strong> prendre part aux ré‐<br />

créations <strong>de</strong> nos ff., dans les allées <strong>de</strong> la clôture, quʹ<strong>avec</strong> le secours dʹune petite voiture, ou<br />

tout au moins <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux bâtons qui me servent <strong>de</strong> soutien.<br />

1588


Je vous prie <strong>de</strong> recevoir lʹassurance <strong>de</strong> mes sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> bien cordial<br />

dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je crois <strong>de</strong>voir vous prévenir, pour vous épargner un dérangement qui ne me<br />

donnerait pas la consolation <strong>de</strong> vous voir, que présentement, et pour un temps indétermi‐<br />

né, je <strong>de</strong>meure habituellement à Chaville.<br />

Je ne suis guère à notre orphelinat <strong>de</strong> Vaugirard que le samedi.<br />

1661 à M. Helluin<br />

A un postulant qui offre son ai<strong>de</strong> au patronage dʹAmiens. Prendre conseil avant <strong>de</strong> se déterminer à quitter lʹIns‐<br />

titut.<br />

Chaville, 22 juillet [1871]<br />

Cher Monsieur,<br />

Je nʹai reçu quʹaujourdʹhui la petite lettre par laquelle vous me proposez obligeam‐<br />

ment <strong>de</strong> prêter votre concours à lʹœuvre du patronage [dʹAmiens] <strong>de</strong>main dimanche, les<br />

exercices <strong>de</strong> ce jour <strong>de</strong>vant être plus chargés que <strong>de</strong> coutume, à cause <strong>de</strong> la fête <strong>de</strong> St Vin‐<br />

cent <strong>de</strong> Paul quʹon doit célébrer.<br />

Je mʹen rapporte sur ce point à ce que vous déci<strong>de</strong>rez <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> nos ff. qui,<br />

mieux que moi, aviseront à ce que les besoins <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ront.<br />

Quant à lʹintention où vous êtes, cher Monsieur, <strong>de</strong> vous retirer du milieu <strong>de</strong> nous,<br />

je vous invite à consulter quelque prêtre éclairé vous inspirant confiance et à vous<br />

conformer à lʹavis que vous aurez reçu <strong>de</strong> lui.<br />

Recevez lʹassurance <strong>de</strong> mes sentiments dévoués en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong>, Sup.<br />

1662 à M. J. Faÿ<br />

Etablissement définitif <strong>de</strong> la Congrégation à Tournay. Biographie du frère Tourniquet.<br />

Chaville, 24 juillet 1871<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je partage bien la consolation dont vous me faites part dans votre lettre du 19 juillet,<br />

et qui a pour motif votre admission officielle par Mgr [Labis] <strong>de</strong> Tournay au nombre <strong>de</strong> ses<br />

enfants et <strong>de</strong> ses diocésains. Jʹécris à ce sujet à Mgr quelques mots <strong>de</strong> remerciement.<br />

Je sais gré aux Confrères <strong>de</strong>s Conférences <strong>de</strong> votre ville <strong>de</strong> leur fidélité à prier <strong>avec</strong><br />

persévérance pour lʹâme <strong>de</strong> notre f. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet], et à vous, bien cher ami,<br />

dʹaccepter le petit travail <strong>de</strong>stiné à recueillir et conserver les exemples <strong>de</strong> vertus quʹil nous<br />

a laissés, et à faire connaître ses travaux pour la gloire <strong>de</strong> Dieu, les intérêts <strong>de</strong> lʹEglise et le<br />

salut <strong>de</strong>s âmes. Plusieurs <strong>de</strong> nos ff. sʹoccupent ici <strong>de</strong> recueillir quelques notes pour vous<br />

ai<strong>de</strong>r à lʹexécuter. M. Vasseur, entre autres, réunit <strong>de</strong>s documents sur notre cher défunt et<br />

vous les enverra dès quʹils seront prêts.<br />

Je penserai aux photographies que vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z, et je transmettrai à M. Au‐<br />

drin les commissions qui le concernent.<br />

1589


M. Chaverot recherchera <strong>de</strong> nouveau les pièces <strong>de</strong> M. [Félix] Vincent. Je remercie ce<br />

<strong>de</strong>rnier <strong>de</strong> son bon souvenir et vous prie <strong>de</strong> lʹassurer que, <strong>de</strong> mon côté, je lui conserve af‐<br />

fection <strong>de</strong>vant le Seigneur.<br />

Je bénis Dieu qui conserve les forces <strong>de</strong> nos ff. et dispose toutes choses à reprendre<br />

leur cours régulier. M. Jouin, <strong>de</strong> son côté, est en progrès. Il est faible, à cause <strong>de</strong> son régime<br />

qui est celui <strong>de</strong> la diète modérée, mais son état est meilleur que lors <strong>de</strong> son arrivée. Il vous<br />

salue tendrement dans le Seigneur.<br />

Adieu, mon bien cher ami et fils en N.S. Jʹembrasse et bénis vous et vos ff. du plus<br />

profond <strong>de</strong> mon cœur.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Veuillez mettre sous enveloppe la lettre que jʹécris à M gr et qui est ci‐incluse, et<br />

la lui faire remettre.<br />

1663 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

A propos du mariage <strong>de</strong> son fils. Relations <strong>avec</strong> les familles <strong>de</strong> St‐Maur, Benoît dʹAzy et Cochin.<br />

Chaville, 24 juillet 1871<br />

Madame la Marquise,<br />

Jʹattendais la lettre que vous voulez bien mʹécrire et jʹétais très empressé <strong>de</strong> connaî‐<br />

tre le résultat du voyage que vous avez fait dans le Nivernais, pour régler lʹaffaire si grave<br />

qui intéresse lʹavenir <strong>de</strong> votre cher fils. Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> dire que je prie gran<strong>de</strong>ment<br />

pour lui et pour vous, Madame, et pour tous les vôtres au S t Sacrifice <strong>de</strong> la Messe, dans<br />

une circonstance <strong>de</strong> telle importance; je lʹeusse fait <strong>de</strong> moi‐même si vos instances mater‐<br />

nelles ne mʹy eussent pas porté; je vais, en particulier, faire <strong>avec</strong> ceux qui mʹentourent une<br />

neuvaine à cette intention.<br />

Il me paraît, comme à vous, que les choses se présentent <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s signes provi<strong>de</strong>n‐<br />

tiels et lʹon peut justement espérer quʹelles se détermineront dans le meilleur sens possible,<br />

car vous nʹavez entrepris rien sans <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r lumière et secours dʹen haut, ne voulant que<br />

la volonté du Père Céleste à lʹégard <strong>de</strong> votre cher enfant et désirant avant tout le poser<br />

dans une bonne et chrétienne famille.<br />

Jʹai toute assurance que, sous ce rapport, le choix quʹil sʹagirait <strong>de</strong> faire ici remplirait<br />

bien vos vues. Jʹai beaucoup connu, dans les œuvres charitables, les <strong>de</strong>ux MM. <strong>de</strong> S t Maur,<br />

le futur beau‐père <strong>de</strong> votre cher fils et son frère. Leurs habitu<strong>de</strong>s chrétiennes dignes et dis‐<br />

tinguées faisaient dʹeux <strong>de</strong>s jeunes gens (jeunes en ce temps‐là) qui étaient fort remarqués<br />

et particulièrement estimés. Leur alliance <strong>avec</strong> la famille Benoît dʹAzy, dont je connais<br />

aussi quelques membres, et <strong>avec</strong> laquelle plusieurs <strong>de</strong> ceux qui mʹentourent ont <strong>de</strong>s rela‐<br />

tions, mʹa été aussi une occasion <strong>de</strong> les suivre dans leur carrière. Enfin, je connais intime‐<br />

ment M. Cochin, dont les circonstances mʹont <strong>de</strong>puis longtemps habituellement rappro‐<br />

ché, sa bienveillance pour nos œuvres nous ayant été dʹun constant appui. Hier, précisé‐<br />

ment, il nous est venu voir ici, à Chaville, <strong>avec</strong> ses trois fils, à propos dʹune <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />

concernant notre maison, fort maltraitée par lʹoccupation prussienne. A mon grand regret,<br />

je nʹavais pas encore votre lettre, autrement jʹaurais pris les <strong>de</strong>vants et lʹeusse entretenu<br />

<strong>de</strong>s détails quʹelle contient. Je suis bien persuadé que toute cette famille désire lʹalliance<br />

projetée, plus même que la vôtre, et que toute intervention est superflue; néanmoins, si<br />

vous désirez, Madame, que jʹaie occasion dʹen parler <strong>avec</strong> M. Cochin ou <strong>de</strong> lui écrire, il me<br />

serait facile <strong>de</strong> la trouver.<br />

1590


Je suis heureux <strong>de</strong> vous savoir près <strong>de</strong> votre cher oncle, qui est <strong>de</strong> si bon conseil et<br />

qui vous est si gran<strong>de</strong>ment attaché. Veuillez, Madame, lui offrir mes bons souvenirs ainsi<br />

quʹà sa famille, pour laquelle jʹéprouve une respectueuse sympathie; mille respects aussi à<br />

Madame votre mère, et enfin tous mes vœux les meilleurs pour le cher M. Richard; je suis<br />

persuadé que le bon p. Olivaint, qui lʹaimait particulièrement, veillera sur lui et le bénira<br />

du haut du Ciel où il triomphe aujourdʹhui parmi les légions <strong>de</strong>s martyrs.<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, tous mes sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> dé‐<br />

vouement sincère en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je recomman<strong>de</strong> lʹorphelinat <strong>de</strong> Putanges en toute occasion, je lʹai fait encore ces<br />

jours passés. Je nʹoublie pas la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> sujets pour Lille; Tournay, en suite <strong>de</strong>s événe‐<br />

ments qui nous y ont poussés, va en retenir 5; nous venons <strong>de</strong> perdre, par une petite vé‐<br />

role, un <strong>de</strong> ceux qui y travaillaient le plus activement, le f. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet],<br />

homme dʹun grand cœur et dʹune ar<strong>de</strong>nte charité.<br />

1664 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Préparation <strong>de</strong> lʹinstallation du père <strong>de</strong> Varax le 11 août, lors <strong>de</strong> la retraite mensuelle.<br />

Chaville, 25 juillet 1871<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je nʹai pu répondu plus tôt à vos <strong>de</strong>rnières lettres du 19 et 21 courant. Jʹavais besoin,<br />

pour le faire, dʹavoir pris lʹavis du Conseil sur plusieurs affaires, en particulier sur celles<br />

dʹAmiens, et le Conseil ne sʹest réuni quʹhier soir à Chaville; dʹautre part, je nʹai eu quʹhier<br />

soir les pièces que vous mʹaviez <strong>de</strong>mandées.<br />

Vous trouverez ci‐joint:<br />

1° ‐ Une lettre arrivée pour vous <strong>de</strong> Belgique.<br />

2° ‐ Le petit plan donnant les dimensions du parloir actuel <strong>de</strong>s enfants <strong>de</strong> lʹorpheli‐<br />

nat.<br />

3° ‐ Votre lettre dʹobédience.<br />

4° ‐ Deux lettres <strong>de</strong> M. Trousseau <strong>de</strong>stinées à vous mettre au courant dʹune nouvelle<br />

proposition qui nous est faite par Mgr lʹEvêque dʹAmiens [Mgr Boudinet].<br />

Jʹai été satisfait, en ensemble, du résultat <strong>de</strong> votre visite à Mgr Mermillod; à votre ar‐<br />

rivée, jʹen apprendrai <strong>avec</strong> intérêt les détails, et nous en causerons.<br />

Il me semble quʹil y a également bonnes espérances du côté <strong>de</strong> Rouen [Card. <strong>de</strong><br />

Bonnechose], et jʹen rends grâces au bon Sauveur.<br />

Rien nʹest arrêté encore relativement à votre logement. Ce retard vous permettra <strong>de</strong><br />

surveiller vous‐même votre installation et <strong>de</strong> la diriger à votre convenance. Le relevé <strong>de</strong>s<br />

dimensions du parloir a confirmé le Conseil dans la pensée que cette pièce est bien insuffi‐<br />

sante, à cause <strong>de</strong> lʹexiguïté <strong>de</strong> son étendue, pour vous et un secrétaire, et se prêtera peu à<br />

une disposition commo<strong>de</strong>. Il conviendrait, tant pour la chose en elle‐même quʹau point <strong>de</strong><br />

vue <strong>de</strong> votre santé, que quelquʹun couchât près <strong>de</strong> vous; ce local ne sʹy prêtera pas facile‐<br />

ment.<br />

Votre idée dʹétablir un calorifère est bonne. Elle est à étudier.<br />

1591


Comme vous le verrez par les lettres <strong>de</strong> M. Trousseau, M gr , <strong>avec</strong> quelque intention<br />

<strong>de</strong> nous ai<strong>de</strong>r à nous tirer dʹembarras vis‐à‐vis <strong>de</strong> M. Caille, nous offre <strong>de</strong> nous charger<br />

dʹun orphelinat qui doit être établi à Amiens. Le Conseil nʹa pas pu se prononcer dʹune<br />

manière définitive, ne voyant pas encore si nous serons à même <strong>de</strong> fournir le personnel<br />

nécessaire. Quant au fond, on incline à accepter et à laisser, selon les désirs <strong>de</strong> M. Caille,<br />

M. Pattinote chargé <strong>avec</strong> lui (et sans le concours <strong>de</strong> M. Trousseau à qui serait confié le<br />

nouvel établissement <strong>de</strong> M gr ) <strong>de</strong>s œuvres actuelles.<br />

Nous avons pensé que votre installation comme Vicaire Général trouverait bien sa<br />

place un jour <strong>de</strong> retraite du mois à Vaugirard. En renvoyant celle du mois dʹaoût au 2 e<br />

vendredi (le 11), il y aurait temps suffisant pour sʹentendre <strong>avec</strong> vous‐même, après votre<br />

arrivée. Tous les ff. <strong>de</strong> Paris et <strong>de</strong> Chaville y seraient convoqués. Quant aux observances à<br />

établir vis‐à‐vis <strong>de</strong> vous, voici celles qui paraîtraient en rapport <strong>avec</strong> votre caractère <strong>de</strong> Vi‐<br />

caire Général: 1° ‐ quʹon vous donnât le nom <strong>de</strong> Père; 2° ‐ quʹon se levât quand vous arri‐<br />

verez au milieu dʹun exercice; 3° ‐ que vous occupiez la première place quand vous prési‐<br />

<strong>de</strong>rez seul; 4° ‐ que vous soyez assis à droite du Supérieur Général, quand il sera présent.<br />

La somme que je vous ai remise à votre départ sʹélève juste à 500f.<br />

Puisque vous <strong>de</strong>vez avoir Vaugirard comme votre centre dʹaction, je crois que vous<br />

ferez bien dʹy <strong>de</strong>scendre en arrivant, particulièrement pour aviser à votre gré aux installa‐<br />

tions matérielles. Vos autres dispositions pour le retour sont sages. Le séjour que vous fe‐<br />

rez à Dijon et à Montcoy vous permettra <strong>de</strong> réfléchir sur les diverses questions pendantes<br />

présentement et <strong>de</strong> nous apporter peut‐être les solutions. Elles sont dans le Cœur du divin<br />

Maître; <strong>de</strong>mandons‐les <strong>avec</strong> instance et confiance.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, que votre bon ange vous ramène sain et sauf et nous<br />

fasse attendre le moins possible la douce joie <strong>de</strong> vous revoir.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹoffre mes hommages respectueux à M me <strong>de</strong> Varax. Veuillez bien me servir dʹinter‐<br />

prète pour les lui faire agréer.<br />

1665 à M. Trousseau<br />

Nouveau délai avant dʹaccepter une fondation à Amiens.<br />

Chaville, 25 juillet 1871<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je viens vous engager à patienter encore au sujet <strong>de</strong> la réponse que vous attendiez<br />

sur la proposition faite par Mgr [Boudinet] <strong>de</strong> nous charger <strong>de</strong> son orphelinat. Je ne suis<br />

pas encore en mesure <strong>de</strong> vous la donner. Jʹai pensé quʹil serait bon dʹavoir lʹavis <strong>de</strong> M. <strong>de</strong><br />

Varax qui est bien au courant <strong>de</strong> toutes les affaires dʹAmiens, et ce nʹest quʹaujourdʹhui<br />

que je puis lui envoyer vos lettres qui lʹinstruiront du projet en question et <strong>de</strong> son but, au<br />

point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> la situation générale.<br />

Il nʹy a, du reste, pas <strong>de</strong> péril en la <strong>de</strong>meure; quelques jours <strong>de</strong> délai ne semblent<br />

rien compromettre. Cette œuvre nʹest, sans doute, pas encore prête à être installée. Vous<br />

pouvez donc sans inconvénient gar<strong>de</strong>r la position que vous avez prise et continuer dʹétu‐<br />

dier les conditions <strong>de</strong> lʹétablissement, ses ressources et ses moyens dʹétablissement.<br />

1592


Adieu, bien cher ami et fils en N.S., je vous souhaite la paix et la force <strong>de</strong> ce bon<br />

Maître.<br />

Votre ami et Père tendrement dévoué<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1665‐1 à M gr Labis<br />

A lʹévêque <strong>de</strong> Tournay, qui autorise la fondation dʹune Œuvre <strong>de</strong> lʹInstitut.<br />

Chaville, 25 juillet 1871<br />

Monseigneur,<br />

Monsieur lʹabbé Faÿ me donne avis, par une lettre du 20 <strong>de</strong> ce mois, que votre<br />

Gran<strong>de</strong>ur a bien voulu lʹadmettre, <strong>avec</strong> un autre <strong>de</strong> nos frères, à lui faire part <strong>de</strong>s condi‐<br />

tions <strong>de</strong> notre établissement à Tournay, et y donner son adhésion. Il ajoute que vous avez<br />

daigné le bénir <strong>avec</strong> ses frères et le recevoir au nombre <strong>de</strong> vos enfants.<br />

Cette sanction, accordée <strong>avec</strong> tant <strong>de</strong> bienveillance, achève véritablement <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>r<br />

cette œuvre et me donne une gran<strong>de</strong> consolation. Jʹespère quʹelle sera pour nous le gage<br />

<strong>de</strong> précieuses bénédictions dʹen haut, et jʹai la confiance que nos frères répondront à votre<br />

bonté par le plus entier dévouement.<br />

Veuillez me croire, Monseigneur,<br />

<strong>de</strong> Votre Gran<strong>de</strong>ur<br />

le très humble et très obéissant serviteur Le <strong>Prevost</strong><br />

1666 à M. Trousseau<br />

Conduite à tenir dans un Conseil où lʹon discutera <strong>de</strong> budgets.<br />

Chaville, 26 juillet 1871<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je réponds <strong>de</strong> suite à votre lettre dʹhier. Je crois que le mieux est dʹassister à la<br />

séance <strong>de</strong> la Commission où doit être discutée la question du budget <strong>de</strong>s maisons <strong>de</strong> N.D.<br />

<strong>de</strong> Bon Secours et <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong>s Victoires. Vous y proposerez et défendrez le parti qui vous<br />

semblera le mieux se concilier <strong>avec</strong> les intérêts <strong>de</strong> votre œuvre et les exigences <strong>de</strong> la situa‐<br />

tion générale; mais vous tâcherez <strong>de</strong> le faire en esprit <strong>de</strong> modération et <strong>de</strong> douceur,<br />

comme il convient aux serviteurs du bon Maître; cet esprit nʹexclut pas la fermeté, et vous<br />

pourrez user <strong>de</strong> toute celle que vous jugerez nécessaire pour appuyer votre sentiment.<br />

Vous vous préparerez par la prière, et vous ne vous rendrez à la séance <strong>de</strong> jeudi quʹaprès<br />

vous être mis <strong>de</strong>vant Dieu et lui avoir <strong>de</strong>mandé ses lumières, sa mansuétu<strong>de</strong> et sa force.<br />

Vous nous ferez ensuite part <strong>de</strong> la décision <strong>de</strong> la Commission et, si son arrêt pré‐<br />

sente <strong>de</strong>s inconvénients, le Conseil sʹefforcera dʹagir auprès <strong>de</strong> M. Caille pour lui faire ac‐<br />

cepter les modifications convenables.<br />

Faire autrement et sʹabstenir <strong>de</strong> prendre part à cette séance serait paraître, dʹune<br />

manière fâcheuse, vouloir rompre tout à fait, et refuser toute tentative dʹentente et <strong>de</strong> bon<br />

accord.<br />

Adieu, mon bien cher enfant, je vous embrasse cordialement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1593


1667 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Ultimes dispositions à prendre pour son installation dans sa charge <strong>de</strong> Vicaire Général.<br />

Chaville, 30 juillet 1871<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je reçois à lʹinstant votre lettre du 30, et je réponds en quelques mots à vos observa‐<br />

tions sur votre installation comme Vicaire Général le vendredi 11, en présence <strong>de</strong>s frères<br />

réunis à Vaugirard à lʹoccasion <strong>de</strong> la retraite du mois.<br />

Cette manière <strong>de</strong> faire me semble toujours la plus digne et la plus propre à donner à<br />

nos ff. une idée vraie <strong>de</strong> lʹimportance <strong>de</strong> cette mesure. Ce que je dirai, vous présent, aura<br />

trait surtout aux raisons <strong>de</strong> santé qui ont amené votre participation au gouvernement <strong>de</strong> la<br />

Congrégation. Sʹil sʹy mêle quelque chose qui vous mette mal à lʹaise, vous avez la res‐<br />

source, qui range toutes choses, <strong>de</strong> lʹoffrir à N.S.; mais, au moins, lʹexercice <strong>de</strong> votre autori‐<br />

té aura un point <strong>de</strong> départ bien nettement et bien franchement établi. Du reste, je pourrai<br />

préparer à lʹavance nos ff. à cette cérémonie. Au commencement <strong>de</strong> la semaine prochaine,<br />

jʹenverrai quelques lignes dʹavis aux maisons <strong>de</strong> Paris et <strong>de</strong> la Province pour leur annoncer<br />

la décision du Conseil, autorisée par le Saint Siège, et le mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> votre installation. Tous<br />

seront invités à remercier Dieu et à prier, et les ff. <strong>de</strong> Paris seront convoqués pour le 11,<br />

vendredi, à Vaugirard. La retraite du mois en sera le motif principal; votre installation sera<br />

un <strong>de</strong>s actes qui y auront place. Ce jour‐là, après les quelques paroles que jʹaurai à dire<br />

pour vous poser définitivement dans lʹexercice <strong>de</strong> votre charge, nous irons à la chapelle,<br />

<strong>de</strong>vant le Saint Sacrement, clore ce cérémonial très simple et familier par le chant du Veni<br />

Creator et du Magnificat.<br />

Vous profiteriez ensuite <strong>de</strong>s premiers jours suivants pour adresser aux maisons <strong>de</strong><br />

Paris et <strong>de</strong> la Province votre circulaire.<br />

A votre arrivée, nous causerons <strong>de</strong>s autres affaires. Laissons‐les se préparer dans le<br />

Cœur du bon Maître, nous tâcherons ensuite <strong>de</strong> les éclaircir et régler pour le moins mal.<br />

Je vous prie <strong>de</strong> présenter mes hommages à Mme <strong>de</strong> Varax.<br />

Recevez, bien cher ami et fils en N.S., lʹexpression <strong>de</strong> mes sentiments les plus ten‐<br />

drement dévoués.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

1668 à M. dʹArbois<br />

Un ancien employé <strong>de</strong> nos maisons <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à entrer dans la Congrégation.<br />

Chaville, 31 juillet 1871<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu votre lettre du 28 courant contenant la nouvelle <strong>de</strong> la bonne visite <strong>de</strong> M gr<br />

[Labis] à votre œuvre, et une lettre <strong>de</strong> notre ancien domestique Samson sollicitant sa ren‐<br />

trée chez nous.<br />

Jʹattends, pour répondre à ce <strong>de</strong>rnier, lʹarrivée <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax pour la fin <strong>de</strong> cette<br />

semaine. Je ne sais sʹil jugera utile dʹaccepter ses offres <strong>de</strong> services; dans tous les cas, ce ne<br />

pourra être aux conditions quʹil pose dans sa lettre. Lʹessai que nous avons déjà fait <strong>de</strong> lui<br />

ne nous a quʹà <strong>de</strong>mi satisfaits; le parti que nous en espérerions tirer et les difficultés pré‐<br />

sentes <strong>de</strong> notre situation ne nous permettraient pas <strong>de</strong> lui faire dʹautres conditions que cel‐<br />

les que nous lui avions faites précé<strong>de</strong>mment.<br />

1594


Ci‐joint une lettre et un compte adressés à Chaville pour M. Ginet. Il faudra quʹil en<br />

accuse promptement réception.<br />

Recevez, bien cher ami et fils en N.S., lʹexpression <strong>de</strong> mes sentiments les plus affec‐<br />

tueux.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Le f. <strong>de</strong> M. [Ad.] Lainé sʹafflige <strong>de</strong> nʹen pas recevoir quelques mots <strong>de</strong> fraternel<br />

souvenir.<br />

1669 à M. Trousseau<br />

Ne pas engager lʹInstitut dans <strong>de</strong>s démarches <strong>avec</strong> le clergé dʹAmiens.<br />

Chaville, 31 juillet 1871<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je réponds <strong>de</strong> suite, et en quelques lignes, à votre question relative aux visites que<br />

vous pensez être utile <strong>de</strong> faire à Mgr [Boudinet] et à M. le Curé <strong>de</strong> St ‐Jacques.<br />

Il me semble que le plus pru<strong>de</strong>nt est <strong>de</strong> commencer par voir Mgr . Après lʹavoir en‐<br />

tretenu <strong>de</strong> lʹorphelinat, toujours à lʹétat <strong>de</strong> projet, vous verrez mieux lʹopportunité dʹune<br />

visite à M. le Curé <strong>de</strong> St ‐Jacques et <strong>de</strong> la mesure que vous avez à gar<strong>de</strong>r dans vos commu‐<br />

nications au sujet <strong>de</strong> lʹétablissement dʹun orphelinat sur sa paroisse. Je crois que Mgr <strong>de</strong>‐<br />

vrait être instruit, sʹil ne lʹest déjà, <strong>de</strong>s ressources quʹoffrent les dispositions personnelles<br />

<strong>de</strong> M. le Curé et lʹexistence sur sa paroisse dʹun local convenable. Cela éviterait la concur‐<br />

rence entre <strong>de</strong>ux projets et réunirait le concours <strong>de</strong> tous les moyens avantageusement au<br />

profit dʹun seul.<br />

Dans votre visite à Mgr , vous pourriez lui dire quelques mots au sujet <strong>de</strong> lʹancienne<br />

Commission, en lui faisant espérer quʹ<strong>avec</strong> la nouvelle, les choses se mettront peu à peu<br />

sur un pied satisfaisant; lui faire entendre en même temps quʹil y aura quelques ménage‐<br />

ments <strong>de</strong>mandés par lʹesprit <strong>de</strong> paix et <strong>de</strong> conciliation à gar<strong>de</strong>r, et quʹainsi tout ira bien.<br />

Jʹespère que N.S. pourvoira au départ <strong>de</strong> M. Helluin; si, plus tard, nous avons quel‐<br />

quʹun à vous donner, nous vous le donnerons. En attendant, redoublons <strong>de</strong> confiance et <strong>de</strong><br />

prières.<br />

Vous avez répondu sagement à votre mère; une absence sʹaccor<strong>de</strong>rait peu <strong>avec</strong> les<br />

embarras présents.<br />

Adieu, mon bien cher ami et fils en N.S., recevez lʹexpression <strong>de</strong> mes sentiments les<br />

plus dévoués et les plus paternels.<br />

Votre ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1670 au Supérieur Général <strong>de</strong>s Chartreux<br />

Deman<strong>de</strong> dʹagrégation <strong>de</strong> lʹInstitut à lʹOrdre <strong>de</strong>s Chartreux (copie non utilisée).<br />

[juillet‐août 1871]<br />

Mon Révérend Père,<br />

Pénétré <strong>de</strong> la toute puissance <strong>de</strong> la prière et <strong>de</strong> sa nécessité dans les travaux entre‐<br />

pris pour la gloire <strong>de</strong> Dieu et le salut <strong>de</strong>s âmes; désirant, par conséquent, multiplier son<br />

1595


secours et son appui pour notre petite famille religieuse, jʹai lʹhonneur <strong>de</strong> vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r<br />

<strong>de</strong> vouloir bien lui accor<strong>de</strong>r une agrégation ou association spéciale aux prières <strong>de</strong>s Reli‐<br />

gieux <strong>de</strong> votre Ordre, dont tout le temps est consacré à ce saint exercice.<br />

Le Siège principal <strong>de</strong> la congrégation dont Dieu mʹa établi le Père est à Paris. Elle a<br />

été approuvée par un bref laudatif dans le courant du mois <strong>de</strong> mai 1869.<br />

Sa mission est dʹévangéliser les pauvres, principalement les jeunes apprentis et ou‐<br />

vriers <strong>de</strong> nos villes manufacturières. Loin <strong>de</strong> trouver dans leurs familles et leurs patrons<br />

un abri et <strong>de</strong>s soins, leur foi et leurs mœurs y sont en lutte <strong>avec</strong> toutes les séductions et les<br />

persécutions <strong>de</strong> lʹimpiété et <strong>de</strong> lʹimmoralité. Nous essayons <strong>de</strong> les défendre, <strong>de</strong> les proté‐<br />

ger, <strong>de</strong> les instruire, mais lʹœuvre est laborieuse; nous en attendons le succès avant tout <strong>de</strong><br />

la prière. Elle est lʹagent essentiel <strong>de</strong> toute œuvre <strong>de</strong> sanctification et du triomphe <strong>de</strong> la<br />

grâce dans les âmes.<br />

Notre faiblesse personnelle, les intérêts éternels <strong>de</strong>s pauvres me font espérer que<br />

vous ne nous refuserez pas une participation directe aux fruits <strong>de</strong>s prières <strong>de</strong> votre Ordre.<br />

Je la sollicite <strong>de</strong> votre charité, au nom du bon Maître qui nous a recommandé lʹunion dans<br />

la prière. Nous répondrons à cette faveur précieuse par une gran<strong>de</strong> reconnaissance et lʹof‐<br />

fran<strong>de</strong> <strong>de</strong> nos propres prières et <strong>de</strong> nos petits travaux pour les Bienfaiteurs <strong>de</strong>s pauvres.<br />

Veuillez, mon Très Révérend Père, agréer lʹassurance <strong>de</strong> mon profond respect et <strong>de</strong><br />

mon dévouement.<br />

[Le <strong>Prevost</strong>]<br />

Supérieur Général <strong>de</strong>s Frères<br />

<strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul<br />

Orphelinat <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul<br />

1, Chemin du Moulin<br />

Paris — Vaugirard<br />

1671 à M. Maignen<br />

Avis sollicité sur le projet <strong>de</strong> circulaire du père <strong>de</strong> Varax. Date du Conseil.<br />

[3 août 1871]<br />

Mon cher ami et fils en N.S.,<br />

M. <strong>de</strong> Varax qui, je pense, arrivera <strong>de</strong>main ou samedi, me communique le projet ci‐<br />

joint dʹune circulaire quʹil veut adresser à toutes nos maisons.<br />

Ne la trouvez‐vous pas un peu trop solennelle? Renvoyez‐la moi par le porteur.<br />

Nous aurons Conseil lundi à 1h. 1/2 , sauf contre‐ordre. Avertissez‐en MM. Lantiez et<br />

Paillé.<br />

Je suis mal en train et souffrant.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1672 à M. <strong>de</strong> Montrond<br />

Réponse à une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> recommandation. Evocation du père Planchat. Faiblesse <strong>de</strong>s jambes <strong>de</strong> MLP; il célèbre<br />

la messe difficilement.<br />

Mon bien cher ami,<br />

1596<br />

Chaville, 4 août 1871


Je ne connais pas M. Henri Vrignault, je ne crois pas lʹavoir jamais rencontré; cʹest<br />

son frère, Paul Vrignault, <strong>de</strong>s Affaires Etrangères, qui est <strong>de</strong> nos amis; je ne sais si ce <strong>de</strong>r‐<br />

nier a beaucoup dʹinfluence sur lʹautre; mais, comme il peut en être ainsi, jʹenvoie une note<br />

qui le mettra à même <strong>de</strong> parler utilement à son frère <strong>de</strong> vous et <strong>de</strong> vos travaux littéraires.<br />

Jʹai appris <strong>avec</strong> joie que vous et tous les vôtres aviez traversé sans atteinte notable<br />

les douloureuses épreuves que nous venons <strong>de</strong> subir; jʹen bénis Dieu qui protège si sensi‐<br />

blement votre chère famille.<br />

Vous aurez appris quʹun <strong>de</strong>s prêtres <strong>de</strong> notre famille religieuse, lʹabbé Planchat, a<br />

été lʹun <strong>de</strong>s otages sacrifiés dans les fusilla<strong>de</strong>s <strong>de</strong> la Commune; cʹest pour nous un grand<br />

<strong>de</strong>uil, car il était <strong>de</strong>s plus zélés et dʹun dévouement sans bornes pour les classes ouvrières;<br />

mais cʹest aussi une bénédiction, puisque le sang <strong>de</strong>s martyrs est précieux <strong>de</strong>vant Dieu et<br />

fécond sur la terre; ses restes ont été déposés dans un caveau en notre chapelle <strong>de</strong> la Sa‐<br />

lette.<br />

Adieu, mon bien cher ami, je vous reverrai <strong>avec</strong> plaisir et je vous remercie <strong>de</strong> votre<br />

bonne et fidèle amitié.<br />

Votre dévoué et affectionné ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je marche <strong>de</strong> plus en plus difficilement, et ce nʹest pas sans quelque peine que<br />

je puis offrir le St Sacrifice.<br />

1672‐1 à tous les Frères<br />

Notification du choix fait par MLP. et son Conseil du P. <strong>de</strong> Varax comme Vicaire Général <strong>de</strong> la Congrégation.<br />

Chaville, 8 août 1871<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Les graves circonstances où nous nous trouvons, jointes à lʹaffaiblissement <strong>de</strong> ma<br />

santé et <strong>de</strong> mes forces, me rendant <strong>de</strong> plus en plus difficile lʹentier accomplissement <strong>de</strong> ma<br />

charge comme chef <strong>de</strong> notre chère Famille religieuse, jʹai senti le besoin dʹen remettre le<br />

poids le plus lourd à quelquʹun <strong>de</strong> nos frères plus jeune et plus fort, dont lʹaction se fît<br />

mieux sentir et imprimât à la Congrégation une marche plus ferme et mieux soutenue.<br />

Jʹai <strong>de</strong>mandé, à cet effet, au Conseil <strong>de</strong> suppléer à mon insuffisance en me désignant<br />

un Vicaire général, conformément à lʹarticle 3e (n° 10) du 3e chapitre <strong>de</strong> nos Constitutions.<br />

Le Conseil, se rendant à mes vœux, a fait choix pour cette charge <strong>de</strong> M. lʹabbé <strong>de</strong><br />

Varax, par décision du 23 mars <strong>de</strong>rnier, laquelle, soumise au Saint‐Siège, aux termes du<br />

Bref approbatif <strong>de</strong> notre Institut, a reçu son agrément par un rescrit en date du 16 juin<br />

<strong>de</strong>rnier.<br />

Lʹaffection et le respect que M. <strong>de</strong> Varax sʹest conciliés <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> tous dans la<br />

famille, me sont <strong>de</strong> sûrs garants <strong>de</strong> la cordiale correspondance que ses intentions généreu‐<br />

ses et dévouées trouveront parmi nous. Je me borne donc, mon cher ami et fils en N.S., à<br />

notifier à vous et à vos frères les actes que je viens <strong>de</strong> mentionner, en priant Dieu <strong>de</strong> vous<br />

bénir et <strong>de</strong> répandre <strong>de</strong> plus en plus abondamment en vous, en votre maison, et dans<br />

toute notre Corporation, son Esprit <strong>de</strong> paix, <strong>de</strong> dévouement et dʹamour.<br />

Croyez, bien cher ami et fils, à mes sentiments accoutumés dʹaffectueux dévoue‐<br />

ment en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1597


1673 à M. dʹArbois<br />

Des documents emportés pendant le siège <strong>de</strong> Paris sont à rapporter. Maîtrise dʹAngers.<br />

Chaville, 15 août 1871<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous serais reconnaissant <strong>de</strong> mʹenvoyer les titres et pièces que vous aviez empor‐<br />

tés durant le siège.<br />

Avez‐vous réussi à nous assurer la location <strong>de</strong> la Maîtrise?<br />

Votre ami et Père affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Souvenir à M. [Ad.] Lainé; on se plaint, son frère surtout, quʹil donne trop rarement<br />

signe <strong>de</strong> vie; on ne lʹoublie pas ici.<br />

1674 à M. J. Faÿ<br />

Les persévérants à Chaville. Accueil fait au nouveau Vicaire Général.<br />

Chaville, 16 août 1871<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je viens <strong>de</strong> recevoir vos <strong>de</strong>ux lettres, dont une pour moi, lʹautre pour M. Chaverot.<br />

Nous recevrons <strong>avec</strong> joie lʹaimable et jeune ban<strong>de</strong> <strong>de</strong>s persévérants. Ils trouveront à<br />

leur arrivée <strong>de</strong> quoi se restaurer. Chaville étant presque vi<strong>de</strong> cette année, ils en pourront<br />

jouir à leur aise pour sʹy livrer au repos <strong>de</strong>s vacances. M. Chaverot sera leur compagnon<br />

et, tout en partageant leurs loisirs et en en surveillant lʹemploi, leur donnera quelques oc‐<br />

cupations en rapport <strong>avec</strong> un temps consacré aux délassements. Toutefois, il ne pourra<br />

commencer à se bien occuper dʹeux quʹà la fin <strong>de</strong> la semaine prochaine, car il est chargé <strong>de</strong><br />

prêcher la retraite <strong>de</strong> première communion aux enfants <strong>de</strong> Vaugirard, et elle commence<br />

dimanche prochain. Priez bien pour ces bons enfants et <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z le concours <strong>de</strong> tous les<br />

gens <strong>de</strong> prière dont vous êtes entouré.<br />

Nous veillerons particulièrement sur la santé <strong>de</strong> notre petit Pialot.<br />

Si M. Chaverot vous a <strong>de</strong>mandé par <strong>de</strong>ux fois le compte <strong>de</strong>s frais relatifs à M. <strong>Jean</strong>‐<br />

Marie [Tourniquet] cʹest que, lors <strong>de</strong> sa secon<strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, il nʹavait pas eu connaissance<br />

<strong>de</strong> la lettre qui le contenait.<br />

Jʹespère bien, en effet, que cʹest la bonne Provi<strong>de</strong>nce qui mʹa ménagé lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> M. <strong>de</strong><br />

Varax. Nos ff., ici, sont heureux <strong>de</strong> ce choix; ils annoncent, par leurs excellentes disposi‐<br />

tions <strong>de</strong> respect, dʹaffection et dʹobéissance, quʹils lui rendront facile et légère une charge<br />

bien difficile et bien lour<strong>de</strong>, non seulement en elle‐même, mais en outre à raison <strong>de</strong>s cir‐<br />

constances présentes; mais N.S. nʹest‐il pas toujours là? Lui qui ne nous a jamais fait défaut<br />

et nous a portés dans son Cœur <strong>avec</strong> infiniment plus dʹamour et dʹattention que nous ne le<br />

méritions.<br />

Recevez, bien cher ami et fils en N.S., lʹexpression <strong>de</strong> mes sentiments les plus dé‐<br />

voués et les plus affectueux.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1598


1674‐1 à M. J. Faÿ<br />

Indications pour permettre à un postulant belge <strong>de</strong> se rendre à Chaville.<br />

Chaville, 18 août 1871<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Un jeune Belge nommé <strong>Jean</strong>‐Baptiste Istace <strong>de</strong>vait ces jours‐ci quitter Liège et venir<br />

à Chaville commencer son postulat. Pour cela il comptait sur quelques ressources pécu‐<br />

niaires qui lui font défaut malgré <strong>de</strong> ru<strong>de</strong>s sacrifices quʹil sʹest imposés: pour gagner les<br />

frais <strong>de</strong> son voyage, tout instituteur quʹil est, il a accepté une place <strong>de</strong> sous‐cuisinier dans<br />

un collège <strong>de</strong> Liège. Il vient donc <strong>de</strong> mʹécrire quʹil ne serait en mesure <strong>de</strong> partir que vers la<br />

fin <strong>de</strong> septembre. Il mʹa semblé quʹil avait donné <strong>de</strong>s preuves suffisantes dʹune volonté<br />

sincère et ferme <strong>de</strong> se donner à Dieu pour que nous ne nous exposions pas en venant à son<br />

ai<strong>de</strong>.<br />

En conséquence, je lui réponds aujourdʹhui même et lui conseille <strong>de</strong> ne pas retar<strong>de</strong>r<br />

plus longtemps la réalisation <strong>de</strong> ses désirs. Je lui dis <strong>de</strong> se rendre à Tournay auprès <strong>de</strong><br />

vous le plus tôt quʹil lui sera possible après le 26 août. Vous voudrez donc bien le recevoir<br />

comme lʹun <strong>de</strong>s nôtres, lui procurer un passeport à prix réduit comme vous lʹavez fait<br />

pour nos jeunes séminaristes et enfin, si ses ressources pécuniaires sont insuffisantes pour<br />

son voyage jusquʹà Chaville, je vous prie <strong>de</strong> lui donner ce qui sera nécessaire pour les<br />

compléter. Je pense que les 500f que je vous envoie sous ce pli pour vous couvrir <strong>de</strong>s frais<br />

funéraires <strong>de</strong> M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet], et <strong>de</strong>s dépenses <strong>de</strong> voyages <strong>de</strong>s séminaristes,<br />

vous permettront <strong>de</strong> lui donner ce secours sans en éprouver trop <strong>de</strong> gêne.<br />

Vous déterminerez pour le plus tôt possible lʹépoque <strong>de</strong> son départ pour Chaville;<br />

vous lui indiquerez la voie à suivre, comment il doit se transporter à la gare <strong>de</strong> Versailles<br />

et quel train il a à prendre. Je serais bien aise dʹêtre averti, <strong>de</strong> mon côté, du jour et <strong>de</strong><br />

lʹheure où il <strong>de</strong>scendra à la gare <strong>de</strong> Chaville, afin que quelquʹun puisse aller le recevoir.<br />

Nos bons petits séminaristes sont arrivés exactement et heureusement. Ils sʹinstal‐<br />

lent. Nous tâcherons <strong>de</strong> leur procurer le plus <strong>de</strong> repos quʹil se pourra et <strong>de</strong> les refaire pour<br />

la carrière quʹils ont à fournir.<br />

Je vous renouvelle, bien cher ami et fils en N.S., lʹexpression <strong>de</strong> mes sentiments les<br />

plus dévoués et les plus affectueux.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1675 à M. dʹArbois<br />

Prière et fidélité fécon<strong>de</strong>nt les Œuvres. Première communion à Vaugirard. Congrès <strong>de</strong>s directeurs dʹŒuvres Ca‐<br />

tholiques à Nevers (prévu pour septembre 1871).<br />

Chaville, 20 août 1871<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je me réjouis <strong>de</strong>s bons résultats que vous avez obtenus le jour <strong>de</strong> lʹAssomption et<br />

<strong>de</strong>s espérances favorables que fait concevoir la reprise <strong>de</strong> votre recrutement. Bénissons‐en<br />

Dieu et efforçons‐nous <strong>de</strong> fécon<strong>de</strong>r nos œuvres par notre esprit <strong>de</strong> prière et une gran<strong>de</strong> fi‐<br />

délité.<br />

Veuillez prier et faire prier pour la retraite <strong>de</strong>s enfants <strong>de</strong> Vaugirard. Elle sʹouvre ce<br />

soir. Jeudi aura lieu la première communion par M gr Verrolles.<br />

1599


Je crois quʹil nʹest à propos dʹenvoyer les titres ni par la poste, ni par M. Guichard.<br />

Je préfère que vous attendiez que vous ou M. Lainé vous rendiez au futur Congrès <strong>de</strong> Ne‐<br />

vers; lʹun ou lʹautre sʹen chargera et me les remettra en passant.<br />

Recevez, bien cher ami et fils, lʹexpression <strong>de</strong> mes sentiments les plus affectueux et<br />

les plus dévoués en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1676 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Contretemps qui retar<strong>de</strong> le mariage <strong>de</strong> son fils. Abandon et confiance en Dieu.<br />

Chaville, 22 août 1871<br />

Madame la Marquise,<br />

La gran<strong>de</strong> affaire qui vous occupe incessamment est dʹun si haut intérêt pour vous<br />

et pour votre cher fils que je ne saurais moi‐même manquer dʹen suivre la marche <strong>avec</strong><br />

sollicitu<strong>de</strong>. Jʹavais hâte <strong>de</strong> savoir le résultat <strong>de</strong>s nouvelles entrevues, et jʹosais presque<br />

trouver que votre lettre promise tardait beaucoup à venir. Je ne prévoyais guère que lʹac‐<br />

ci<strong>de</strong>nt grave survenu dans la famille <strong>de</strong> St Maur dʹune façon si imprévue allait exiger une<br />

nouvelle attente, en même temps quʹune plus gran<strong>de</strong> incertitu<strong>de</strong> sur lʹissue définitive <strong>de</strong><br />

lʹentreprise. Il me semble que lʹinci<strong>de</strong>nt, sʹil <strong>de</strong>venait une cause <strong>de</strong> complication, pourrait<br />

être pris comme un fait visible <strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce et vous consoler beaucoup, Madame,<br />

dʹune apparente déception; quelque vifs que soient nos vœux pour le succès dʹune affaire,<br />

il ne nous est guère possible, en effet, <strong>de</strong> regretter beaucoup leur insuccès quand il semble<br />

bien indiquer que la Sagesse divine intervient pour nous conduire en autre sens. Aussi,<br />

comme jʹai vu <strong>avec</strong> joie dans votre lettre les dispositions <strong>de</strong> calme et <strong>de</strong> soumission où ce<br />

grave acci<strong>de</strong>nt vous avait mise; puisse le Seigneur vous y maintenir pour votre propre re‐<br />

pos et pour que cette chrétienne résignation dispose <strong>de</strong> plus en plus le bon Maître à pren‐<br />

dre lui‐même, je dirai presque lui seul, vos affaires en main. Oh! quʹIl les conduira bien et<br />

comme Il vous préparera <strong>de</strong>s heures consolantes! Le saint abandon, la confiance filiale en<br />

la bonté et la toute science <strong>de</strong> ce divin Père, quʹelle est sage et comme elle mène tout à cette<br />

fin! En voyant, dans votre chère visite à Chaville, vos troubles sur les causes tout imagi‐<br />

naires dʹun refroidissement supposé et non réel, comme une nouvelle entrevue lʹa prouvé,<br />

je songeais que peut‐être il y aurait avantage, en définitive, à ce quʹun projet dʹétablisse‐<br />

ment pour votre cher fils fût ajourné dʹune année ou <strong>de</strong>ux qui, employées en voyages ou<br />

autrement, ajouteraient à ses aimables qualités une expérience plus avancée <strong>de</strong>s hommes<br />

et <strong>de</strong>s choses, et le poseraient encore plus fermement dans lʹétat où il sʹagit pour lui dʹen‐<br />

trer présentement. Si telles étaient les vues dʹEn‐haut, faudrait‐il sʹen désoler? Je ne saurais<br />

le croire. Mais, en un sens comme dans un autre, je reviens à la disposition où vous êtes,<br />

Madame, <strong>de</strong> prier et <strong>de</strong> remettre le tout aux mains <strong>de</strong> Dieu, en suivant les indices marqués<br />

quʹIl daignera certainement vous donner; là est la voie sûre, Il a daigné vous y mettre, quʹIl<br />

en soit béni! Il vous a montré ainsi sa toute paternelle prédilection. Cʹest le lieu <strong>de</strong> repos<br />

où Il place lui‐même les âmes les mieux aimées.<br />

Veuillez offrir à votre cher entourage mes respects et tout mon dévouement et<br />

agréer aussi, Madame, mes sentiments <strong>de</strong> vive et profon<strong>de</strong> sympathie en N.S.<br />

Votre humble serviteur et ami Le <strong>Prevost</strong><br />

1600


1677 à M. Paillé<br />

Sollicitu<strong>de</strong> paternelle pour la santé du frère Paillé. Installation du père <strong>de</strong> Varax. Demeurer dans lʹabandon et la<br />

confiance ʺdans lʹamoureuse bonté <strong>de</strong> Dieuʺ, car ʺà brebis tondue, Dieu mesure le ventʺ.<br />

Chaville, 23 août 1871<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous attendions <strong>de</strong> vos nouvelles <strong>avec</strong> quelque impatience; je désirais vivement, en<br />

particulier, savoir si les bains <strong>de</strong> mer semblaient <strong>de</strong>voir vous réussir; vous nʹavez pu, en<br />

mʹécrivant, rien préciser encore à ce sujet; mais toutes les présomptions sont favorables,<br />

puisque vous avez pu les supporter sans que la toux, dont vous étiez souvent incommodé,<br />

ait reparu, tout laisse espérer que vous serez fortifié par lʹaction si vivifiante <strong>de</strong> la mer.<br />

Nous pouvons penser surtout que Celui qui est le Maître souverain <strong>de</strong> la mer et <strong>de</strong> tous<br />

les éléments la rendra bienfaisante pour vous, puisquʹIl vous a conduit sur ses bords, choi‐<br />

sissant comme à plaisir une plage unie et sûre, afin que votre pied ne heurte pas contre les<br />

pierres. Cʹest ainsi que le bon Seigneur ménage ses humbles serviteurs quand ils sont las‐<br />

sés par le travail ou affaiblis par la maladie; à brebis tondue, Dieu mesure le vent, disent<br />

les bonnes gens qui ont gardé la confiance et la foi.<br />

Jʹespère que vous trouvez encore <strong>de</strong>s traces bien marquées <strong>de</strong> ces vertus dans notre<br />

cher pays <strong>de</strong> Normandie; hélas! il en est bien aujourdʹhui où on les trouverait misérable‐<br />

ment effacées. Ainsi, une inquiétu<strong>de</strong> générale gagne tous les esprits sains sur lʹavenir qui<br />

se prépare; ce ne sont plus seulement à lʹhorizon <strong>de</strong>s points noirs, mais <strong>de</strong>s nuages mena‐<br />

çants qui peuvent recouvrir la foudre. Daigne le Seigneur épargner son peuple et lui inspi‐<br />

rer un salutaire repentir!<br />

Nos enfants <strong>de</strong> Vaugirard vont <strong>de</strong>main jeudi faire leur première communion; vous<br />

ne les oublierez pas, je lʹespère, et si, contre mon attente, ce souvenir vous avait échappé,<br />

vous prierez après, si ce nʹest au moment même; le Seigneur, qui sait la préparation <strong>de</strong> nos<br />

âmes, aura lu dans votre cœur la volonté <strong>de</strong> vous unir à nous dans cette si intéressante so‐<br />

lennité.<br />

Je ne vois guère <strong>de</strong> faits <strong>de</strong> quelque importance qui méritent <strong>de</strong> vous être dits; M.<br />

<strong>de</strong> Varax a été posé régulièrement comme Vicaire Général le vendredi 11, à notre retraite<br />

du mois où tous les ff. avaient été convoqués; tout sʹest passé convenablement à la satisfac‐<br />

tion générale; jʹavais averti les maisons <strong>de</strong> Province, par une circulaire, <strong>de</strong> la décision prise<br />

par le Conseil et, <strong>de</strong>puis, M. <strong>de</strong> Varax a lui‐même adressé à nos établissements une lettre à<br />

lʹoccasion <strong>de</strong> sa prise <strong>de</strong> possession <strong>de</strong> son office.<br />

Les affaires dʹAmiens sont encore en suspens, bien que MM. <strong>de</strong> Varax et Myionnet<br />

y aient fait un voyage; Dieu seul peut asseoir là les œuvres en ordre soli<strong>de</strong>; il faut le prier<br />

pour cet objet et pour tant dʹautres.<br />

Notre p. Beaussier a été fort souffrant dʹune dysenterie, assez inquiétante durant un<br />

moment; il va mieux heureusement.<br />

Demeurez, cher ami, en cette voie où Dieu vous attire, dʹun grand abandon à sa vo‐<br />

lonté divine, dʹune entière confiance en son amoureuse bonté; cʹest le chemin <strong>de</strong>s âmes<br />

quʹil se réserve, il leur ôte presque le libre arbitre, tant il les conduit sensiblement, tant el‐<br />

les résistent peu à ses paternelles directions; quand on est bien établi en cette habitu<strong>de</strong>, on<br />

1601


y trouve un grand repos dʹesprit et un doux contentement <strong>de</strong> cœur: optimam partem elegit<br />

quae non auferetur ab eo 453 .<br />

Je suis jusquʹici toujours à Chaville, sauf les vendredis et samedis. Je ne sais si ces<br />

dispositions dureront et si lʹon maintiendra cette maison durant lʹhiver; moi aussi, je tâche<br />

<strong>de</strong> me maintenir en ce renoncement dans la volonté qui me laisse tout disponible dans la<br />

main du Seigneur; <strong>de</strong> cette sorte, il me trouvera tout dégagé quand il daignera mʹappeler à<br />

lui; sans hésiter ni tar<strong>de</strong>r, je répondrai: Adsum, me voici, Seigneur.<br />

Adieu, mon bon et vieil ami; comme il est vrai <strong>de</strong> dire <strong>de</strong>s vieux amis comme <strong>de</strong>s<br />

vieux vins: ils réchauffent et raniment.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Bons souvenirs dʹamitié à M. Dupaigne et respects à sa famille; je suis heureux<br />

que vous ayez cette société amie et chrétienne.<br />

1677‐1 à M. Keller<br />

MLP. <strong>de</strong>man<strong>de</strong> au député Emile Keller dʹintervenir en faveur <strong>de</strong> son neveu, accusé dʹêtre partisan <strong>de</strong> la Com‐<br />

mune. (Brouillon <strong>de</strong> MLP. écrit par M. Chaverot).<br />

août 1871<br />

Mon bien cher ami,<br />

Mon neveu, Emile Salva, lors <strong>de</strong> la prise <strong>de</strong> Paris, à la fin du mois <strong>de</strong> mai <strong>de</strong>rnier, a<br />

été arrêté comme partisan <strong>de</strong> la Commune. Il est détenu <strong>de</strong>puis sur le navire <strong>de</strong> lʹEtat Le<br />

Tourville, à Cherbourg. Il est parfaitement innocent <strong>de</strong> toute complicité et participation<br />

dans les actes qui ont attristé notre pauvre France. Je puis lʹattester en toute assurance.<br />

Aussi ai‐je fait en ce sens une note <strong>de</strong>stinée à éclairer ses juges.<br />

Je viens vous prier <strong>de</strong> vouloir bien la faire parvenir, soit au général Appert, soit à<br />

tout autre chef militaire à la compétence duquel appartiennent les causes <strong>de</strong> ces prison‐<br />

niers, et <strong>de</strong> lʹappuyer en même temps <strong>de</strong> votre recommandation fondée sur lʹassurance<br />

positive que jʹai <strong>de</strong> la non‐culpabilité <strong>de</strong> mon neveu.<br />

Je compte sur votre bienveillante amitié pour me rendre ce bon office qui sera en<br />

même temps un acte <strong>de</strong> justice.<br />

Permettez‐moi <strong>de</strong> profiter <strong>de</strong> cette circonstance pour vous féliciter <strong>de</strong> votre coura‐<br />

geuse entremise en faveur du Saint Père. Je bénis Dieu qui lui conserve <strong>de</strong>s serviteurs si<br />

fermes et si dévoués.<br />

Je vous prie...<br />

M. Emile SALVA, né à Duclair, Seine‐Inférieure, âgé <strong>de</strong> 42 ans, sous‐lieutenant dʹun<br />

régiment <strong>de</strong> marche, a été arrêté à la fin du mois <strong>de</strong> mai à Paris, comme partisan <strong>de</strong> la<br />

Commune et <strong>de</strong>puis, transféré à Cherbourg où il est encore détenu présentement sur le<br />

navire <strong>de</strong> lʹEtat le Tourville.<br />

Avant la guerre étrangère, M. Salva appartenait à une administration civile. Il y<br />

remplissait son emploi <strong>avec</strong> exactitu<strong>de</strong>; ses habitu<strong>de</strong>s étaient celles dʹun homme ami <strong>de</strong><br />

lʹordre; nul nʹétait plus éloigné que lui <strong>de</strong>s détestables excès <strong>de</strong> la Commune.<br />

453 Lc 10, 42.<br />

1602


Quand la guerre fut engagée <strong>avec</strong> la Prusse, appelé à défendre son pays dans les<br />

rangs <strong>de</strong> la gar<strong>de</strong> nationale, il remplit courageusement pendant toute la campagne les<br />

obligations que lui imposait son gra<strong>de</strong> <strong>de</strong> sous‐lieutenant.<br />

Dès que la guerre civile succéda à lʹinvasion prussienne, il résolut <strong>de</strong> se soustraire à<br />

la pression exercée sur la gar<strong>de</strong> nationale et ne songea dès lors quʹà fuir Paris. Il nʹy put<br />

réussir mais, jusquʹau <strong>de</strong>rnier moment, il en eut la pensée comme le témoignèrent ses ré‐<br />

clamations réitérées et comme lʹatteste aussi lʹhabit civil dont il était revêtu lors <strong>de</strong> son ar‐<br />

restation.<br />

Le soussigné, Supérieur <strong>de</strong> lʹOrphelinat <strong>de</strong> S t ‐Vincent <strong>de</strong> Paul à Vaugirard, oncle <strong>de</strong><br />

M. Emile Salva, peut affirmer sur sa conscience la parfaite exactitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> ce qui précè<strong>de</strong> et<br />

déclare que son neveu, par ses convictions et ses actes, est resté en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> toute partici‐<br />

pation aux désordres <strong>de</strong>s factieux, quʹil les réprouve au contraire <strong>avec</strong> tous les hommes <strong>de</strong><br />

principes et dʹhonneur. Depuis trois mois néanmoins, il subit une détention sévère et il est<br />

confondu <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s criminels.<br />

Le soussigné espère que, tenant compte <strong>de</strong>s renseignements produits par lui et dont<br />

<strong>de</strong> nombreux témoins pourront constater lʹexactitu<strong>de</strong>, lʹadministration militaire voudra<br />

bien examiner la cause <strong>de</strong> M. Salva et ordonner sa mise en liberté.<br />

[Le <strong>Prevost</strong>]<br />

[Prêtre]<br />

1677‐2 à M. J. Faÿ<br />

Vacances <strong>de</strong>s séminaristes. Installation à Tournay. ʺdʹun intérêt sérieux pour la Congrégation: nous nʹen<br />

avons pas fini <strong>avec</strong> la Révolutionʺ. MLP. sʹinquiète <strong>de</strong> la santé <strong>de</strong> M. Faÿ. Scolasticat et Noviciat sʹinstallent<br />

à Vaugirard.<br />

Chaville, 29 août 1871<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Vos chers étudiants sont en pleine jouissance <strong>de</strong> leurs vacances; elles les remettront,<br />

je lʹespère, <strong>de</strong>s fatigues <strong>de</strong> lʹannée quʹils viennent <strong>de</strong> traverser et les prépareront à en par‐<br />

courir une autre <strong>avec</strong> la même bonne volonté et la même application au travail. Ils savent<br />

quʹils ne retourneront pas au séminaire à lʹextérieur; cette décision a paru les surprendre et<br />

un peu les déconcerter; mais les avantages et les joies <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> famille leur feront ou‐<br />

blier, nous le pensons, le séminaire où, <strong>avec</strong> les moyens <strong>de</strong> se former à la science et à la<br />

sainteté, ils ne rencontraient pas ceux dʹacquérir lʹesprit <strong>de</strong>s vertus religieuses. La plus<br />

grosse part <strong>de</strong> leur temps est consacrée aux promena<strong>de</strong>s ou récréations; le reste est partagé<br />

entre un peu dʹétu<strong>de</strong>s, un peu <strong>de</strong> lecture, un peu <strong>de</strong> travail manuel.<br />

M. Vialloux mʹa <strong>de</strong>mandé <strong>de</strong> recevoir la tonsure à la reprise <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s. Veuillez me<br />

dire votre avis. Pour moi, il me paraît bien disposé et sérieusement appliqué à répondre<br />

aux grâces du bon Dieu; je ne verrais donc pas <strong>de</strong> raison <strong>de</strong> lui refuser cette satisfaction.<br />

Le Conseil se préoccupe <strong>de</strong> lʹinstallation matérielle <strong>de</strong> votre communauté à Tour‐<br />

nay. Cette installation peut être dʹun intérêt sérieux pour la Congrégation: nous nʹen avons<br />

pas fini <strong>avec</strong> la Révolution; quoique, à cette heure, rien ne nous le fasse encore craindre<br />

absolument, toutefois ce qui est déjà arrivé pourrait dʹun moment à lʹautre se renouveler et<br />

il nʹy aurait rien dʹétonnant si les difficultés <strong>de</strong> notre politique intérieure, qui vont toujours<br />

grandissantes, amenaient une secon<strong>de</strong> fois la nécessité <strong>de</strong> sʹexpatrier. Un établissement <strong>de</strong><br />

1603


quelque importance et commo<strong>de</strong>, sur le sol neutre et étranger <strong>de</strong> la Belgique, nous offrirait<br />

dans ce cas, un abri très précieux. Aussi sommes‐nous bien désireux que ce provisoire au‐<br />

quel vous allez être soumis en attendant la construction dʹun local définitif, soit <strong>de</strong> courte<br />

durée. Nous vous prions donc <strong>de</strong> suivre doucement la marche <strong>de</strong> cette affaire auprès <strong>de</strong><br />

M. Desclée en nous informant <strong>de</strong> ses plans, <strong>de</strong>s dispositions quʹil a en vue et du terme<br />

dans lequel il compte les avoir réalisés. Nous serions bien aises, quand le moment serait<br />

venu, quʹils nous fussent soumis et que lʹun <strong>de</strong>s membres du Conseil, M. Lantiez par<br />

exemple, puisse aller à Tournay y donner son avis afin que le résultat répondît à nos<br />

convenances. Voyez ce que, pru<strong>de</strong>mment et <strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> Dieu, vous pourriez obtenir<br />

dans ce sens.<br />

Enfin, bien cher fils, un autre point occupe notre sollicitu<strong>de</strong>. Tous ici nous conce‐<br />

vons <strong>de</strong>s inquiétu<strong>de</strong>s sur votre santé et <strong>avec</strong> moi, tout particulièrement votre f. Auguste et<br />

les étudiants qui vous ont quitté tout récemment. Votre état dʹépuisement réclame beau‐<br />

coup <strong>de</strong> soins et un régime fortifiant. Je vous prie donc au nom <strong>de</strong> notre affection, au nom<br />

<strong>de</strong>s intérêts <strong>de</strong> N.S. auxquels est nécessaire votre santé, <strong>de</strong> travailler à vous rétablir avant<br />

lʹhiver et <strong>de</strong> vous soumettre à tout ce quʹil faudra pour cela. Faites‐vous donner par votre<br />

mé<strong>de</strong>cin les prescriptions convenables, et veuillez ensuite les suivre pour la plus gran<strong>de</strong><br />

gloire <strong>de</strong> N.S.<br />

Je compte sur votre haute raison et, sʹil le fallait, sur votre obéissance pour ne rien<br />

négliger afin <strong>de</strong> nous donner satisfaction sur ce point.<br />

Notre séminaire paraît <strong>de</strong>voir être définitivement établi à Vaugirard; on espère<br />

quʹun p. Jésuite en aura la haute direction et prési<strong>de</strong>ra aussi les exercices <strong>de</strong> noviciat; priez<br />

bien pour que ces dispositions aient bon succès. Le pauvre Chaville sera ainsi, je le crains,<br />

bien abandonné; Dieu y pourvoira.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

Affections dévouées à nos ff.<br />

1678 à M. Maignen<br />

Vives instances pour hâter la publication dʹune notice sur le père Planchat.<br />

Chaville, 31 août 1871<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous transmets ci‐joint <strong>de</strong> nouveaux documents sur notre cher abbé Planchat,<br />

fournis par le p. Sosthène Duval qui, après lʹavoir aidé dans lʹœuvre <strong>de</strong> S te ‐Anne, a partagé<br />

sa détention à la Roquette.<br />

Je profite <strong>de</strong> cette circonstance pour vous presser <strong>de</strong> nouveau <strong>de</strong> publier votre no‐<br />

tice. Le retard que subit cette publication me peine vivement. Elle étonne et attriste aussi<br />

tous nos ff. et les personnes que lʹaffection pour notre bien‐aimé défunt y intéresse ou qui<br />

ont fourni <strong>de</strong>s documents sur lui. Ils la réclament <strong>avec</strong> instance, tant à cause <strong>de</strong>s bonnes<br />

impressions quʹils sʹen promettent pour eux‐mêmes que pour ne pas voir se perdre lʹop‐<br />

portunité <strong>de</strong> cet ouvrage, opportunité qui diminue à mesure que nous nous éloignons <strong>de</strong>s<br />

événements au milieu <strong>de</strong>squels notre f. à été fusillé.<br />

Je vous prie donc, bien cher ami, <strong>de</strong> faire tout votre possible pour ne pas retar<strong>de</strong>r<br />

davantage une œuvre qui nous est à tous tant à cœur, et dont les longueurs me causent un<br />

bien sensible déplaisir.<br />

1604


Recevez, bien cher ami et fils en N.S., lʹexpression <strong>de</strong> mon dévouement et <strong>de</strong> mon<br />

affection toute paternelle en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1679 à M. Paillé<br />

Invitation à venir se fixer à Chaville. Un père Jésuite promis pour le Noviciat.<br />

Chaville, 31 août 1871<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous avons appris <strong>avec</strong> une joie sincère que lʹeffet <strong>de</strong>s bains se montrait <strong>de</strong> plus en<br />

plus décisif pour votre santé; tout nous laisse espérer que, jusquʹau 11 septembre, époque<br />

indiquée par vous pour votre retour, vous aurez suffisamment fait usage <strong>de</strong> cette médica‐<br />

tion naturelle et que la mer aura remis dans vos membres lassés un peu <strong>de</strong> jeunesse et<br />

beaucoup <strong>de</strong> vigueur; rappelez‐vous dʹailleurs que ce nʹest pas instantanément quʹon sent<br />

lʹaction <strong>de</strong>s bains, mais dans le cours <strong>de</strong> la saison qui vient après; enfin, vous joignez fidè‐<br />

lement la prière au remè<strong>de</strong>, cʹest le moyen assuré dʹobtenir un résultat toujours heureux<br />

puisque, dût‐on revenir moins soli<strong>de</strong> quʹon nʹétait parti, on a beaucoup gagné si, au re‐<br />

tour, on est plus uni à Dieu et plus soumis à sa très sainte, très sage et très douce volonté.<br />

En parlant ces jours‐ci <strong>de</strong> votre retour <strong>avec</strong> M. <strong>de</strong> Varax, il me disait que ce serait, à<br />

son gré, une bonne disposition pour vous que vous prissiez <strong>avec</strong> moi rési<strong>de</strong>nce à Chaville;<br />

vieux compagnons, un peu lassés lʹun et lʹautre <strong>de</strong> la course à travers la vie, nous nous se‐<br />

rions réciproquement une édification et un appui consolant. Jʹappuyais fort la pensée qui<br />

me souriait assurément, mais jʹentrevoyais comme objection votre prévention, peu fondée<br />

à mon sens, sur le climat <strong>de</strong> Chaville pendant lʹhiver. Pour moi, qui en ai fait lʹépreuve <strong>de</strong>‐<br />

puis plusieurs années, jʹen juge tout autrement; mais il va sans dire, mon bien cher ami,<br />

que je serai bien loin dʹémettre aucun sentiment qui sʹéloigne du vôtre et que jʹabon<strong>de</strong>rai,<br />

au contraire, dans votre sens en mʹabstenant <strong>de</strong> toute objection, quelle quʹelle soit. Ici,<br />

vous ne seriez guère loin <strong>de</strong> Nazareth, où vous gar<strong>de</strong>riez une chambre pour venir, une<br />

fois ou <strong>de</strong>ux chaque semaine, visiter les vieillards et vous occuper <strong>de</strong> leurs intérêts.<br />

Vaugirard, 1er septembre.‐ Je suis ici à Vaugirard aujourdʹhui, pour la retraite du<br />

mois; vous nous manquerez, mais nous vous attendons et bientôt vous serez réuni à nous,<br />

les absences mesurées à quelques jours sont bien supportables. La prière, dʹailleurs, peut<br />

nous rapprocher bien <strong>de</strong>s fois chaque jour; les âmes qui sont en présence <strong>de</strong> Dieu ne sont<br />

pas séparées, puisquʹelles se rencontrent en son Cœur divin; puissions‐nous nous y réunir<br />

souvent et commencer déjà ici‐bas la vie <strong>de</strong> lumière et dʹamour qui sera notre partage au<br />

Ciel.<br />

Adieu, mon bien cher ami, à bientôt; croyez à ma vieille et fidèle affection en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Tous nos ff. vous envoient leurs bons souvenirs. Nazareth va bien, le patronage a<br />

repris son allure ordinaire, le cercle se remonte. A Vaugirard, travaux et mouvement par‐<br />

tout pour les installations.<br />

Le p. Jésuite est promis positivement par le r.p. <strong>de</strong> Ponlevoy. M. Beaussier va<br />

mieux.<br />

1605


1680 à M. Paillé<br />

Dernière maladie du père Beaussier.<br />

Chaville, 5 septembre 1871<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Depuis que je vous ai écrit, je suis allé voir notre bon p. Beaussier <strong>avec</strong> M. Myion‐<br />

net; nous lʹavons trouvé très épuisé, ne parlant plus que par signes, mais ayant encore<br />

quelque apparence <strong>de</strong> vie qui nous laissait quelque espoir; hier lundi, M. Chaverot est allé<br />

pour avoir <strong>de</strong> ses nouvelles; il nʹa pu le voir, on lui a dit quʹil allait plus mal encore et<br />

quʹon perdait lʹespoir <strong>de</strong> le sauver; ce sera pour bien <strong>de</strong>s âmes une gran<strong>de</strong> perte et une<br />

vraie douleur <strong>de</strong> cœur; vous la sentirez particulièrement, vous, mon cher ami, qui lʹaimez<br />

et le vénérez comme il mérite <strong>de</strong> lʹêtre.<br />

Je ne sais, si le triste événement vient nous surprendre, ce que nous allons avoir à<br />

faire; je trouve, dans les papiers que vous mʹavez laissés, soit <strong>de</strong>rnièrement, soit ancien‐<br />

nement (je ne sais à quel moment), <strong>de</strong>ux exemplaires dʹun même testament <strong>de</strong> notre p.<br />

Beaussier, en date <strong>de</strong> 1852, quand nous étions encore rue <strong>de</strong> lʹArbalète, à Paris; en a‐t‐il fait<br />

quelque autre plus récent? Je nʹen ai nulle connaissance. Aurions‐nous à faire poser les<br />

scellés? Jʹignore absolument quelle est notre position à lʹégard <strong>de</strong> la succession <strong>de</strong> notre p.<br />

Beaussier, si elle vient tout à coup à sʹouvrir, comme son état <strong>de</strong> santé lʹannonce. Dites‐moi<br />

ce que vous en savez et ce qui serait à faire; le cas <strong>de</strong>vient pressant.<br />

Nous prions, comme vous, constamment pour ce vénéré ami, si fidèle, si dévoué<br />

pour nous.<br />

Votre affectionné ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

N.B. Joindre désormais pour les lettres un timbre <strong>de</strong> 5 centimes <strong>avec</strong> le timbre bleu<br />

<strong>de</strong> 20 centimes.‐<br />

Ci‐joint 2 timbres <strong>de</strong> 5 centimes.<br />

1681 à M. J. Faÿ<br />

Arrivée du postulant belge. Mort du père Beaussier. Détails <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> lʹInstitut.<br />

Chaville, 8 septembre 1871<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Vos <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rnières lettres <strong>de</strong>s 31 août et 1er septembre mʹont été à gran<strong>de</strong> consola‐<br />

tion.<br />

Je suis heureux, tout dʹabord, <strong>de</strong> vos dispositions et <strong>de</strong> vos soins à lʹégard <strong>de</strong> votre<br />

santé. Jʹespère que Dieu les bénira et leur fera rapporter cent pour un au profit <strong>de</strong> votre<br />

sanctification et du salut <strong>de</strong>s âmes. Toutefois, je ne serai parfaitement tranquille que lors‐<br />

que jʹapprendrai votre rétablissement. Jusque‐là, ma sollicitu<strong>de</strong> et mon affection me don‐<br />

neront une bonne part dans votre mal.<br />

Je vous sais gré <strong>de</strong> lʹenvoi <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux livres. Je remettrai à M. Maignen lʹexemplaire<br />

qui lui est <strong>de</strong>stiné.<br />

M. Istace est arrivé dimanche soir, mais par la rive droite. Nous ne comptions sur<br />

lui que pour le len<strong>de</strong>main ou le surlen<strong>de</strong>main, car Nicolais lʹavait attendu vainement à<br />

7h. 1/2 . Il a fait ensuite son entrée à 9h. à la <strong>de</strong>scente du train qui lʹavait amené à St ‐Lazare,<br />

1606


comme il nʹavait pas compris nettement vos indications, nʹayant pu se faire transporter as‐<br />

sez tôt à la gare Montparnasse, il a été réduit à prendre lʹautre voie. Mais quʹimporte à<br />

présent? Il est déjà occupé régulièrement et habitué. Ce <strong>de</strong>rnier point lui a été facile, à<br />

cause dʹun certain sans‐gêne qui est, sans doute, chez lui la suite du manque dʹéducation.<br />

Vos appréciations me paraissent justes: il y a <strong>de</strong> la bonne volonté, cʹest‐à‐dire le principal.<br />

Jʹaugure donc bien <strong>de</strong> son avenir religieux.<br />

M. <strong>de</strong> Varax est absent. Il reviendra lundi prochain du Congrès <strong>de</strong> Nevers, et vous<br />

écrira sans doute aussitôt.<br />

Vous pouvez répondre à M. Desclée que nous nous contenterons <strong>de</strong> ce que ces<br />

Messieurs <strong>de</strong> Tournay ont lʹintention <strong>de</strong> faire pour lʹétablissement <strong>de</strong>s ff. présentement<br />

employés au service <strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong> cette ville. Nous ne pouvons actuellement contribuer à<br />

aucune dépense <strong>de</strong> constructions. Nous attendrons que lʹavenir nous manifeste les inten‐<br />

tions <strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce.<br />

Notre p. Beaussier est mort mercredi soir, à 4h., dans la paix du Seigneur. Cʹest en‐<br />

core une séparation douloureuse et une perte considérable pour notre famille. Le bon Maî‐<br />

tre veut nous donner <strong>de</strong>s appuis plus soli<strong>de</strong>s que ceux qui sont à notre portée sur cette<br />

terre, Il travaille à fortifier notre confiance, tout en rapprochant <strong>de</strong> lui et en rendant plus<br />

influents ceux qui sʹintéressent à nous. Que sa très sainte volonté sʹaccomplisse! Aujour‐<br />

dʹhui, à 11h. auront lieu les obsèques <strong>de</strong> ce saint ami et bien‐aimé Père. Je pars dans un<br />

instant pour mʹy rendre. Je le recomman<strong>de</strong> à vos prières; nous lʹavons toujours considéré<br />

comme <strong>de</strong> la famille. Je compte donc que vous voudrez bien dire trois messes pour le re‐<br />

pos <strong>de</strong> son âme.<br />

Je mʹassocie du fond du cœur à vos neuvaines à notre f. Planchat. M. Emile [Beau‐<br />

vais] a eu la même inspiration que vous. Il lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong>puis plusieurs semaines la gué‐<br />

rison <strong>de</strong> sa surdité.<br />

Nous espérons que lʹordination <strong>de</strong> M. Magnien aura lieu à Paris, aux Quatre‐Temps<br />

<strong>de</strong> septembre, cʹest‐à‐dire le 23. Priez pour lui et pour notre retraite générale qui sera don‐<br />

née, ou la <strong>de</strong>rnière semaine <strong>de</strong> septembre, ou la première dʹoctobre.<br />

Je vous rappelle la notice <strong>de</strong> M. <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet] et la fête <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong> la Sa‐<br />

lette.<br />

Tout le mon<strong>de</strong> à Chaville vous salue tendrement. Plusieurs <strong>de</strong>s étudiants sont pré‐<br />

sentement à Grenelle pour lʹadoration perpétuelle. Mercredi prochain, sʹil plaît à Dieu, ils<br />

iront en pèlerinage à N.D. <strong>de</strong> Longpont.<br />

Croyez, bien cher ami et fils, aux sentiments les plus affectueux et dévoués <strong>de</strong><br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1682 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Mariage <strong>de</strong> son fils. Retour à St‐Laurent. Désir du ciel. Désintéressement.<br />

Chaville, 26 septembre 1871<br />

Madame la Marquise,<br />

Jʹai vu <strong>avec</strong> plaisir, par la lettre que vous mʹavez fait lʹhonneur <strong>de</strong> mʹécrire le 17 <strong>de</strong><br />

ce mois, que la gran<strong>de</strong> et intéressante affaire qui vous occupe en ce moment était toujours<br />

1607


en examen et paraissait lʹobjet dʹune sérieuse attention <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> la famille qui projette<br />

<strong>de</strong> sʹunir à la vôtre. Si je ne me trompe, tout lui agrée, et lʹhésitation, si tant est quʹil y en<br />

ait, pourrait venir seulement <strong>de</strong> ce que votre cher fils, bien jeune encore, aurait lʹair plus<br />

réservé et moins confiant en lui‐même que ne sont la plupart <strong>de</strong>s jeunes gens du jour. A<br />

mes yeux, cʹest un mérite et non une imperfection; votre cher fils est, je crois, dans le vrai<br />

et dans la convenance, il serait moins bien et moins aimable sʹil était autrement; la fleur<br />

précè<strong>de</strong> le fruit et le fait pressentir. Du reste, cʹest ici simple conjecture <strong>de</strong> ma part, comme<br />

je ne vois aucune raison dʹhésiter, jʹen imagine; ce peut‐être dʹailleurs simple pru<strong>de</strong>nce et<br />

pour rendre la décision aussi bien éclairée que possible.<br />

M. Cochin mʹa parlé <strong>de</strong> lʹaffaire; jʹai pu lui dire tout ce que jʹen pensais et vous <strong>de</strong>‐<br />

vinez, Madame, en quels termes jʹai dû le faire. Je conçois bien la joie que vous avez<br />

éprouvée, ainsi que Madame dʹHurbal et votre cher fils lui‐même, en rentrant à S t ‐Laurent.<br />

Après une longue absence, il y a tant <strong>de</strong> souvenirs, tant dʹimpressions profon<strong>de</strong>s attachés<br />

à la <strong>de</strong>meure quʹon a longtemps partagée <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s êtres aimés et dont quelques‐uns, pour<br />

lʹordinaire, sont déjà loin ou bien nous atten<strong>de</strong>nt dans un mon<strong>de</strong> meilleur. Oh! dans cette<br />

<strong>de</strong>rnière <strong>de</strong>meure du royaume céleste, on nʹaura plus le regret du départ ni la joie du re‐<br />

tour, car le séjour y sera permanent, nul autre ne pouvant jamais être désiré; S t Pierre pres‐<br />

sentait cette joie sans terme ni changement quand il disait à Notre‐Seigneur sur le Thabor:<br />

Nous sommes bien ici, faisons‐y, sʹil vous plaît, trois tentes. Jʹespère bien, chère Madame,<br />

que vous y trouverez un jour trois tentes aussi: une pour votre excellente mère, une pour<br />

vous et lʹautre pour votre fils, tout près, cela va sans dire, <strong>de</strong> la tente où repose déjà dans<br />

la paix votre bien‐aimé mari.<br />

Je vous prie, Madame, ne vous préoccupez point dʹargent <strong>de</strong> mon côté, dans un<br />

moment où vos propres affaires le ren<strong>de</strong>nt fort nécessaire en vue <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> affaire pro‐<br />

jetée. Vos dons arriveront à temps plus tard, et me seront plus précieux sʹils ont été sans<br />

nul préjudice <strong>de</strong> besoins plus urgents.<br />

Jʹapprendrai <strong>avec</strong> plaisir que tout est à votre gré dans votre paroisse et que lʹesprit<br />

<strong>de</strong> vos populations nʹest pas trop gâté par les mauvais souffles <strong>de</strong> notre temps. Oh! quʹon<br />

aurait hâte <strong>de</strong> respirer un air plus large et plus pur; puisse le Seigneur redonner la sérénité<br />

à notre Ciel!<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, et partager <strong>avec</strong> votre cher entourage, tous<br />

mes sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> bien profond dévouement en N.S.<br />

Votre humble serviteur et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1683 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

MLP. est éprouvé dans sa santé. Notices sur le Père Planchat.<br />

3 octobre [1871]<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je suis retenu ici par un affaiblissement et <strong>de</strong>s douleurs telles dans les jambes que je<br />

ne puis reposer ni jour ni nuit; je ne tiens <strong>de</strong>bout quʹappuyé sur <strong>de</strong>ux bâtons; jʹai le regret<br />

<strong>de</strong> ne pas célébrer la Ste Messe <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux jours, jʹai pu néanmoins communier à la messe<br />

<strong>de</strong> M. Chéron.<br />

1608


Jʹaurais été heureux dʹassister aux exercices <strong>de</strong> la retraite, et jʹespérais y être un peu<br />

utile en y donnant aux ff. quelques directions; si jʹai quelque amélioration <strong>de</strong>main ou<br />

après, je mʹempresserai <strong>de</strong> venir, fût‐ce <strong>avec</strong> mes <strong>de</strong>ux bâtons.<br />

Il serait bien désirable que nos ff. disent quelques messes pour le bon p. Beaussier,<br />

surtout durant ces jours où jʹen suis empêché moi‐même.<br />

Il semble difficile que je puisse <strong>de</strong> sitôt voir M me Casenave; peut‐être M. Chaverot<br />

ou quelque autre pourraient‐ils y aller <strong>avec</strong> une lettre <strong>de</strong> moi; vous en jugerez.<br />

Je me recomman<strong>de</strong> à vos prières; le malaise que jʹendure mʹéprouve un peu, sans<br />

atteinte, je lʹespère, <strong>de</strong> la soumission due au divin Seigneur.<br />

Votre tout affectionné ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je crois quʹon ne <strong>de</strong>vrait pas tar<strong>de</strong>r à envoyer <strong>de</strong>s notices à M me Planchat. Ses <strong>de</strong>ux<br />

filles, lʹune à Constantinople, lʹautre à Moulins, mʹont écrit <strong>de</strong> leur côté pour en <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r;<br />

celle <strong>de</strong> Constantinople désire quʹon lui envoie en même temps (par MM. <strong>de</strong> S t ‐Lazare)<br />

<strong>de</strong>ux ou trois livres du r.p. Perny; elle fera parvenir en retour une offran<strong>de</strong>; les <strong>de</strong>ux sœurs<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt quelque part <strong>de</strong> la soutane <strong>de</strong> leur frère ou quelque objet lui ayant appartenu.<br />

1684 à M. Maignen<br />

A propos <strong>de</strong> la notice sur le père Planchat. Détails <strong>de</strong> santé.<br />

Chaville, 3 octobre 1871<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Je pense que vous aurez déjà envoyé quelques notices à Mme Planchat. Les <strong>de</strong>ux<br />

sœurs du martyr, lʹune <strong>de</strong> Constantinople, lʹautre <strong>de</strong> Moulins, mʹont écrit pour mʹen <strong>de</strong>‐<br />

man<strong>de</strong>r <strong>de</strong> leur côté. La première désire quʹon y joigne <strong>de</strong>ux ou trois livres du r.p. Perny;<br />

elle enverra, en retour, une offran<strong>de</strong> par MM. les Lazaristes qui lui feront parvenir la no‐<br />

tice et les livres.<br />

La notice plaît à tout le mon<strong>de</strong>; je crois quʹen la complétant <strong>avec</strong> les nouveaux do‐<br />

cuments que vous avez reçus, vous en ferez un écrit édifiant.<br />

Priez un peu pour moi; je ne sais si je pourrai venir à Vaugirard avant la fin <strong>de</strong> la re‐<br />

traite; <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux jours, jʹai <strong>de</strong> telles douleurs dans les jambes que je ne repose bien ni<br />

jour ni nuit; je ne tiens <strong>de</strong>bout que sur <strong>de</strong>ux bâtons et je suis privé <strong>de</strong> la consolation dʹoffrir<br />

le St Sacrifice. Si jʹai un peu <strong>de</strong> mieux, je ferai effort pour venir au moins les <strong>de</strong>rniers jours;<br />

je pense que lʹhumidité et la transition <strong>de</strong> la saison occasionnent pour moi ce redouble‐<br />

ment <strong>de</strong> faiblesse; il en adviendra comme il plaira à Dieu.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Jʹavertis M. <strong>de</strong> Varax <strong>de</strong>s <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s faites par les sœurs <strong>de</strong> M. Planchat, afin quʹil<br />

puisse sʹentendre <strong>avec</strong> vous pour les envois; je nʹai, pour moi, quʹun seul exemplaire <strong>de</strong> la<br />

notice; je crois que, si on envoyait à toutes les connaissances <strong>de</strong> notre cher abbé cette no‐<br />

tice, on aurait dʹeux <strong>de</strong>s offran<strong>de</strong>s.<br />

1609


1685 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Mariage <strong>de</strong> son fils; espérance dʹun foyer chrétien et <strong>de</strong> véritable noblesse. Remerciements pour un don.<br />

Chaville, 9 octobre 1871<br />

Madame la Marquise,<br />

Je partage bien votre joie maternelle au sujet <strong>de</strong> lʹheureuse issue <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> affaire<br />

qui doit préparer lʹavenir <strong>de</strong> votre cher fils. Je vois, ainsi que vous, Madame, <strong>de</strong> véritables<br />

avantages dans lʹunion projetée et décidée, non seulement à raison <strong>de</strong>s convenances <strong>de</strong><br />

fortune et <strong>de</strong> position, mais surtout à cause du bon entourage dans lequel se trouve placé<br />

votre bien‐aimé fils; tout ce quʹil y a <strong>de</strong> bon et <strong>de</strong> bien disposé en lui aura là encourage‐<br />

ment, soutien et développement. Cʹest là surtout quʹest bien visible la prédilection <strong>de</strong> la<br />

Provi<strong>de</strong>nce pour vous et pour lʹobjet <strong>de</strong> vos sollicitu<strong>de</strong>s; on peut espérer, dans les condi‐<br />

tions qui se préparent, la réalisation <strong>de</strong> tous vos vœux pour lʹavenir chrétien et digne <strong>de</strong><br />

votre cher Richard; sans avoir suivi <strong>de</strong> très près les habitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s familles <strong>de</strong> St Maur et<br />

Cochin, lʹon peut juger quʹelles sont telles quʹun jeune ménage trouvera les exemples et les<br />

influences propices pour se poser dans les principes et la conduite qui caractérisent la véri‐<br />

table noblesse et distinguent lʹélite <strong>de</strong> la société; cʹest ce que vous vouliez avant tout et ce<br />

que vous <strong>de</strong>mandiez à Dieu, béni soit‐il <strong>de</strong> vous avoir exaucée!<br />

Jʹespère que le malaise <strong>de</strong> santé <strong>de</strong> Madame votre mère, et particulièrement sa fai‐<br />

blesse dʹestomac, ne sont quʹun résultat <strong>de</strong> la saison trop humi<strong>de</strong>, dont un grand nombre<br />

<strong>de</strong> personnes ont en ce moment à souffrir; une température un peu plus ferme va sans<br />

doute y remédier et rendre ses forces accoutumées à votre chère mala<strong>de</strong>; je ne manque pas<br />

<strong>de</strong> la recomman<strong>de</strong>r à Dieu, en la comprenant dans les intentions que je mets fidèlement à<br />

ses pieds, suivant votre pieux désir.<br />

Jʹai reçu aujourdʹhui <strong>de</strong> Bruyère les 400f que, <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> Madame dʹHurbal,<br />

vous avez bien voulu appliquer aux honoraires <strong>de</strong> messes. Je vous suis, Madame, bien re‐<br />

connaissant <strong>de</strong> cet envoi; jʹen ferai un usage autant bon que je pourrai, afin que quelque<br />

part du mérite, sʹil y en a, retourne encore à vous et à votre cher entourage.<br />

Jʹaccuse réception à M. Boscher, aujourdʹhui même, <strong>de</strong> lʹenvoi quʹil mʹa fait <strong>de</strong> cette<br />

somme, sur lʹordre <strong>de</strong> Madame dʹHurbal.<br />

Je recueille <strong>avec</strong> gran<strong>de</strong> joie lʹespoir que les dispositions concernant le mariage<br />

pouvant vous conduire prochainement à Paris, ce serait une heureuse occasion pour moi<br />

<strong>de</strong> vous voir quelques instants, en attendant que la saison dʹhiver vous ramène définiti‐<br />

vement à Paris.<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, et partager <strong>avec</strong> ceux qui vous sont si chers,<br />

tous mes sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> profond dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1686 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Jours <strong>de</strong> visite possibles.<br />

Chaville, 17 octobre 1871<br />

Madame la Marquise,<br />

Avec un joyeux empressement, jʹai lʹhonneur <strong>de</strong> vous répondre que <strong>de</strong>main mer‐<br />

credi je serai, et jeudi également, toute la journée à Chaville; vendredi, je serai à Vaugirard<br />

1610


dans lʹaprès‐midi, mais bien moins sûr <strong>de</strong> nʹêtre point dérangé. Jʹoffrirais volontiers <strong>de</strong><br />

vous épargner la peine <strong>de</strong> venir en allant moi‐même vers vous, si la multiplicité <strong>de</strong> vos af‐<br />

faires en ce moment ne vous obligeait à <strong>de</strong>meurer presque toujours hors <strong>de</strong> chez vous.<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, tous mes sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> dé‐<br />

vouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1687 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Nouvelles concernant la famille <strong>de</strong> Varax. Conseils <strong>de</strong> conduite. Mauvaise santé du père Faÿ. Le père Pittar à<br />

Chaville.<br />

Vaugirard, 21 octobre 1871<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous écris seulement quelques mots en hâte, espérant quʹils vous arriveront en‐<br />

core à temps.<br />

1° ‐ Mme votre mère vous écrit pour vous informer que Mme Lughienne [<strong>de</strong> Varax]<br />

(votre belle‐sœur) est à Lille, très gravement mala<strong>de</strong>, et elle vous invite à la voir en pas‐<br />

sant.<br />

2° ‐ Pour ce qui regar<strong>de</strong> la visite à la famille <strong>de</strong> La Loyère, je vous invite à ne pas y<br />

aller, si elle <strong>de</strong>vait vous empêcher dʹêtre <strong>de</strong> retour lundi, à moins toutefois que vous<br />

nʹayez écrit au p. Pittar <strong>de</strong> faire lʹouverture du Noviciat et <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s malgré votre ab‐<br />

sence, <strong>de</strong> plus longs délais ne me paraissant guère admissibles.<br />

3° ‐ M. Chaverot écrit dans le sens que vous indiquez au<br />

jeune abbé Molleau. Nous prions pour notre cher f. Faÿ; que<br />

Dieu daigne ne pas nous le reprendre encore.<br />

Tout va ici assez bien; nous avons été charmés du séjour<br />

du p. Pittar à Chaville. Cʹest à mon insu quʹil lʹa quitté. Si je<br />

lʹavais prévu, jʹaurais insisté pour quʹil <strong>de</strong>meurât parmi nous.<br />

Adieu, mon bien cher ami; nous serons bien heureux <strong>de</strong><br />

vous revoir, nos affaires, vous le savez, ne peuvent plus<br />

marcher sans vous. Votre présence nous est chère à tous.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1688 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Le père <strong>de</strong> Varax peut prolonger son séjour chez <strong>de</strong>s bienfaiteurs. Le père Pittar, <strong>avec</strong> le père Chaverot, ouvre les<br />

exercices du Noviciat et du Scolasticat.<br />

Vaugirard, 21 octobre 1871<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Au moment où je vous écrivais, il y a un quart dʹheure, je nʹavais pas encore<br />

connaissance <strong>de</strong> ce que vous aviez écrit au p. Pittar. Il vient à lʹinstant <strong>de</strong> me le communi‐<br />

quer. Son contenu change ma réponse à ce que vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z au sujet <strong>de</strong> la visite à la<br />

famille <strong>de</strong> La Loyère. Vous pouvez prolonger votre séjour dans la mesure qui vous para‐<br />

1611


îtra indispensable. Le r.p. Pittar, <strong>de</strong> concert <strong>avec</strong> M. Chaverot, ouvrira les exercices du No‐<br />

viciat et du Scolasticat lundi prochain.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1689 à M. Manque<br />

Accueil dʹun frère qui a persévéré dans sa vocation.<br />

Chaville, 23 octobre 1871<br />

Mon cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous sommes touchés <strong>de</strong> la fidélité que vous montrez pour répondre à lʹappel inté‐<br />

rieur <strong>de</strong> Dieu, et nous serons heureux <strong>de</strong> vous voir revenir parmi nous après une si longue<br />

absence. Nous accueillerons aussi volontiers le jeune postulant [Joseph Schmidt] qui désire<br />

vous accompagner; le bien que vous nous avez dit <strong>de</strong> lui et le témoignage favorable que<br />

lui rend M. le curé <strong>de</strong> Villers nous laissent penser quʹil sera, comme vous, un serviteur dé‐<br />

voué <strong>de</strong> la maison du Seigneur.<br />

Vous pourriez indifféremment arriver, soit à Vaugirard, soit à Chaville; cependant,<br />

comme M. <strong>de</strong> Varax est momentanément absent et quʹil nʹest pas bien certain quʹil soit <strong>de</strong><br />

retour au moment où vous viendrez, il sera mieux que vous <strong>de</strong>scendiez directement à<br />

Chaville, où nous aurons gran<strong>de</strong> joie à vous recevoir.<br />

A bientôt, mon bien cher ami; offrez notre respect à votre bon père et à M. le Curé,<br />

et croyez bien vous‐même à tous nos sentiments dʹaffectueux dévouement en N.S.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1690 à M. Risse<br />

Accepter la croix <strong>de</strong> la Légion dʹHonneur, mais ne la porter que rarement et dans certaines circonstances. Bon‐<br />

nes nouvelles du Noviciat. Eloge du père Beaussier.<br />

Chaville, 26 octobre 1871<br />

Mon cher ami et fils en N.S.,<br />

Je réponds brièvement à votre affectueuse lettre, ayant différé plus que je ne voulais<br />

à le faire en suite <strong>de</strong> quelques dérangements qui me sont survenus.<br />

Je ne sais pas, jusquʹici lʹépoque précise <strong>de</strong> la retraite projetée pour ceux <strong>de</strong> nos ff.<br />

qui nʹont point eu part à la <strong>de</strong>rnière. Je pense quʹelle aura lieu dans le courant <strong>de</strong> novem‐<br />

bre; on ne manquera pas <strong>de</strong> vous avertir en temps utile. Je ne vois pas, quant à présent,<br />

dʹindice marqué pour un rappel tout prochain <strong>de</strong> notre cher M. Emes; les questions <strong>de</strong><br />

personnel ont, du reste, été suspendues en lʹabsence <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax; on lʹattendait hier à<br />

Vaugirard; je pense que je lʹy trouverai <strong>de</strong>main.<br />

Jʹai écrit à notre f. Manque pour lui dire que nous lʹaccueillerions <strong>avec</strong> empresse‐<br />

ment. Nous avions, <strong>de</strong> notre côté, reçu lʹavis <strong>de</strong> son arrivée pour la fête <strong>de</strong> la Toussaint. Je<br />

nʹavais rien appris touchant la faveur qui paraît vous avoir été accordée; je suppose, bien<br />

que votre lettre ne le dise pas, quʹil sʹagit <strong>de</strong> la croix <strong>de</strong> la Légion dʹHonneur; vos travaux<br />

lʹont certainement méritée; il me paraîtrait difficile, dans la circonstance présente, que<br />

1612


vous la refusiez et dʹailleurs le sacerdoce reçoit assez <strong>de</strong> mépris pour quʹil convienne peut‐<br />

être <strong>de</strong> montrer quʹil est encore honoré en certains lieux; mais comme pour nous, prêtres et<br />

religieux, la plus noble décoration est la Croix du Seigneur Jésus, vous jugerez sʹil ne serait<br />

pas bien <strong>de</strong> la porter rarement, et presque seulement dans les circonstances et rapports of‐<br />

ficiels. Jʹexprime ici mon sentiment propre, nʹayant pas le temps, sous peine <strong>de</strong> retard, <strong>de</strong><br />

consulter les anciens ff.; mais je les sais tous fort désintéressés personnellement <strong>de</strong> ces sor‐<br />

tes <strong>de</strong> distinctions.<br />

Le Noviciat prend bien et promet dʹheureux résultats, pour la formation religieuse<br />

comme pour les étu<strong>de</strong>s; vous en bénirez Dieu <strong>avec</strong> nous. Tous, ici et autour <strong>de</strong> nous, ont<br />

pris part aux détails satisfaisants contenus dans votre lettre; tous vous assurent <strong>avec</strong> moi<br />

<strong>de</strong> nos vives sympathies pour vous, pour nos ff. <strong>de</strong> Metz et pour vos excellentes œuvres;<br />

tous enfin nous <strong>de</strong>meurons <strong>avec</strong> vous en union <strong>de</strong> prières et par la plus cordiale charité.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je recomman<strong>de</strong> à vos prières et sacrifices notre vénéré ami, M. Beaussier, que<br />

Dieu a rappelé à Lui; il a eu la mort <strong>de</strong>s saints; il a, pendant 25 ans, rendu à la Congréga‐<br />

tion les services les plus signalés.<br />

Bon souvenir particulier à M. Baumert; M. Magnien va bien.<br />

1691 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

MLP. nʹa pu la rencontrer. Assurance <strong>de</strong> ses prières pour les jeunes mariés.<br />

Chaville, 22 novembre 1871<br />

Madame la Marquise,<br />

Je suis allé hier à Vaugirard dans lʹintention <strong>de</strong> vous présenter mes respects, ainsi<br />

quʹà Madame votre mère, si jʹavais lʹheureuse chance <strong>de</strong> vous rencontrer; mais, pris dès<br />

mon arrivée, jʹai été tellement dérangé quʹil mʹa été impossible <strong>de</strong> mʹéchapper, et force mʹa<br />

été <strong>de</strong> revenir le soir <strong>avec</strong> le regret <strong>de</strong> ne vous avoir pas vues; je serai plus heureux, je lʹes‐<br />

père, lors <strong>de</strong> votre retour du Nivernais. Je vous y suivrai assurément par la pensée et dans<br />

une bien vive sympathie pour toutes les impressions que votre cœur <strong>de</strong> mère et <strong>de</strong> chré‐<br />

tienne ressentira en cette si intéressante solennité. Le 28, et jusque là bien <strong>de</strong>s fois, le St Sa‐<br />

crifice sera offert par nous pour le cher ménage; ne doutons pas, dans lʹesprit <strong>de</strong> foi, quʹun<br />

trésor <strong>de</strong> grâces ne soit ainsi amassé pour vos chers enfants, et aussi pour vous qui leur<br />

avez, <strong>avec</strong> tant <strong>de</strong> sollicitu<strong>de</strong>, ménagé ce secours spirituel.<br />

Je vous quitte, ainsi que Madame votre mère, voulant que ce mot vous soit porté à<br />

Paris et vous arrive encore avant votre départ; je tenais seulement à vous assurer que mon<br />

attention et mes affections restent unies aux vôtres dans les circonstances dont je sais la<br />

haute et lʹémouvante gravité pour vous et pour tout ce qui vous est cher.<br />

Je suis, Madame la Marquise, <strong>avec</strong> un profond respect.<br />

Votre humble serviteur et dévoué ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Chaville, 24 novembre. Ces quelques mots nʹont pu, comme je le désirais, vous arri‐<br />

ver à Paris, le porteur les ayant gardés soigneusement dans son portefeuille les y a retrou‐<br />

vés le soir; je vous les adresse néanmoins puisquʹils témoignent <strong>de</strong> la part que je prends à<br />

1613


la joie <strong>de</strong> votre chère famille. Lʹintervention <strong>de</strong> M gr <strong>de</strong> Nevers [M gr Forca<strong>de</strong>] sera une cir‐<br />

constance bien heureuse, puisque sa bénédiction sera une faveur spirituelle précieuse pour<br />

les jeunes époux. Je nʹai jamais rencontré ce Prélat, mais lʹun <strong>de</strong> nos MM., M. <strong>de</strong> Varax, qui<br />

a lʹhonneur <strong>de</strong> le connaître particulièrement, loue beaucoup sa bienveillance et son amabi‐<br />

lité. Que dʹindices en tout cela <strong>de</strong> la grâce dʹen haut, quʹil fait bon croire, prier, aimer;<br />

prions donc toujours <strong>avec</strong> foi; <strong>de</strong>mandons, nous recevrons; frappons au Cœur du divin<br />

Seigneur, et ce Cœur généreux épanchera sur nous les trésors <strong>de</strong> son ineffable charité. En<br />

Lui bien sincèrement.<br />

1692 à M. J. Faÿ<br />

M. Faÿ est parti se reposer dans le Midi. Sollicitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> MLP. Quelques nouvelles.<br />

Chaville, 15 décembre 1871<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Les nouvelles que nous avons reçues jusquʹici touchant votre voyage et votre arri‐<br />

vée à Hyères nous donnent satisfaction et nous laissent espérer que vous éprouverez les<br />

influences salutaires du climat du Midi, bien que la température nʹy soit pas en ce mo‐<br />

ment, nous dit M. Tulasne, aussi tiè<strong>de</strong> et douce quʹelle y est ordinairement; elle reste<br />

néanmoins bien autrement supportable que lʹair glacial qui est ici notre partage. Nous<br />

avons eu, ces jours <strong>de</strong>rniers, 21 <strong>de</strong>grés <strong>de</strong> froid et une neige épaisse couvre constamment<br />

la terre. On traverse la Seine à pied sec et, en revanche, les rues sont impraticables dès que<br />

la neige fond un peu. Combien <strong>de</strong> fois, en songeant à lʹà‐propos si parfait <strong>de</strong> votre départ<br />

qui vous soustrait à cette ru<strong>de</strong> épreuve, nʹavons‐nous pas répété le mot si vrai: à brebis<br />

tondue, Dieu mesure le vent. Cʹest vous, cher ami, qui êtes présentement cette brebis ai‐<br />

mée que le Seigneur garantit contre la froidure et la bise. Ayons donc bon courage; Il veille<br />

sur vous <strong>avec</strong> une tendre sollicitu<strong>de</strong>, Il vous protégera encore, se souvenant que vous Lui<br />

appartenez, que vous faites partie du troupeau choisi quʹIl conduit <strong>avec</strong> prédilection.<br />

Nous continuons à prier bien fidèlement pour vous et pour votre compagnon <strong>de</strong> voyage<br />

[Auguste Faÿ son frère]; tous les soirs, aux recommandations, vos noms sont toujours<br />

prononcés, <strong>avec</strong> un souvenir aussi pour les amis dévoués dont Dieu fait, à votre égard, les<br />

instruments <strong>de</strong> sa bonté paternelle.<br />

Tout marche à peu près comme <strong>de</strong> coutume dans notre petite famille; les nouvelles<br />

<strong>de</strong> Tournay sont satisfaisantes, en particulier les œuvres se soutiennent. M. Boulanger a<br />

fait une petite brochure sur lʹAvent, simple et populaire comme votre petit mois <strong>de</strong> St Jo‐<br />

seph. Si vous nʹen avez pas reçu un exemplaire, dites‐le moi, je veillerai à ce quʹon vous<br />

lʹenvoie.<br />

Jʹai communiqué à votre chère sœur [Mme Bachotet], que nous avons vue <strong>de</strong>ux ou<br />

trois fois <strong>de</strong>puis votre départ, tout ce que nous savons concernant votre voyage et votre<br />

état <strong>de</strong> santé. Le f. Auguste lui avait donné déjà, en ensemble, les mêmes détails. Hier, elle<br />

apporta, pour chacun <strong>de</strong> vous, 131f, reliquat <strong>de</strong> la succession <strong>de</strong> votre bonne mère. Nous<br />

serons donc en mesure, soit pour vos frais <strong>de</strong> retour, soit pour les besoins que vous auriez<br />

jusque là.<br />

Ne manquez pas <strong>de</strong> nous faire donner, par votre frère, <strong>de</strong>s nouvelles fréquentes et<br />

bien détaillées, soit ici, soit à Vaugirard; nos correspondances sont mises en commun<br />

1614


comme nos sentiments. M me Restou se claquemure jusquʹici dans sa maison, mais, si le<br />

froid dure, il lʹen fera sortir. Elle sʹenquiert toujours affectueusement <strong>de</strong> ce qui regar<strong>de</strong> vo‐<br />

tre santé. Nous lui communiquons tout ce qui nous arrive <strong>de</strong> votre part. Cʹest par son en‐<br />

tremise, paraît‐il, que M. lʹabbé Arnaud vous apportera le précieux secours <strong>de</strong>s visites du<br />

divin Seigneur dans la S te Eucharistie. Votre âme ainsi aura, dans sa solitu<strong>de</strong>, la plus douce<br />

consolation qui se puisse recevoir ici‐bas.<br />

Adieu, mon bien cher ami, partagez <strong>avec</strong> votre frère tous mes sentiments <strong>de</strong> tendre<br />

affection et me croyez comme toujours en N.S.<br />

Votre bien dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1693 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Prières aux intentions du jeune ménage. Conseils pour une maison <strong>de</strong> retraite. Et pour un séjour à Hyères, se<br />

mettre en rapport <strong>avec</strong> les <strong>de</strong>ux frères Tulasne.<br />

Chaville, 15 décembre 1871<br />

Madame la Marquise,<br />

Je ne saurais dire combien les détails attachants <strong>de</strong> votre lettre concernant le ma‐<br />

riage <strong>de</strong> votre cher fils mʹont vivement intéressé, il me semblait presque assister à la céré‐<br />

monie et à tous les actes <strong>de</strong> cet événement dʹune si haute gravité pour vous et pour toute<br />

votre famille; jʹespère <strong>avec</strong> vous que Madame <strong>de</strong> S t Maur, si utile à ses chers enfants, ne<br />

leur sera pas ravie. Je vais prier bien instamment à cette intention, afin que cet appui <strong>de</strong>‐<br />

meure au jeune ménage, et aussi afin quʹaprès tant <strong>de</strong> travaux et <strong>de</strong> préoccupations, vous<br />

ayez quelque peu <strong>de</strong> calme et <strong>de</strong> repos.<br />

Je répondrai, si vous lʹagréez, brièvement à votre si intéressante épître, afin <strong>de</strong> vous<br />

soumettre sans retard quelques indications concernant lʹasile <strong>de</strong> paix que vous désireriez<br />

trouver, <strong>avec</strong> Madame votre mère, pour quelques mois dʹhiver. A Paris, je ne sais aucune<br />

maison particulière ou hôtel que je puisse signaler à votre examen; il est plusieurs Com‐<br />

munautés qui reçoivent, ou en pension, ou en séjour temporaire, les dames chrétiennes:<br />

lʹAbbaye‐aux‐Bois, S t ‐Thomas <strong>de</strong> Villeneuve, et particulièrement les Dames <strong>de</strong> la Retraite,<br />

rue du Regard; les personnes les mieux posées y prennent volontiers <strong>de</strong>meure plus ou<br />

moins longue. Une autre serait aussi bien convenable, et elle a spécialement cette <strong>de</strong>stina‐<br />

tion, cʹest lʹétablissement <strong>de</strong>s Dames Augustines, mais je ne la cite pas à cause <strong>de</strong> son éloi‐<br />

gnement, rue <strong>de</strong> la Santé, près <strong>de</strong> la rue S t ‐Jacques. On peut le regretter dʹailleurs, la mai‐<br />

son est magnifique, le jardin immense, la chapelle très riche, la composition personnelle<br />

choisie.<br />

Dans le Midi, jʹai peu <strong>de</strong> relations, excepté à Hyères. A Cannes, où jʹai passé un hi‐<br />

ver, je nʹai connu que <strong>de</strong>s personnes en séjour passager comme jʹy étais moi‐même; peut‐<br />

être y ai‐je encore un vieil ami, connu <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Caulaincourt (M. <strong>de</strong> Malartic), mais il était<br />

<strong>de</strong> santé frêle et, <strong>de</strong>puis longtemps, je nʹai plus entendu parler <strong>de</strong> lui.<br />

A Hyères, où je me suis trouvé autrefois <strong>avec</strong> M me <strong>de</strong> Rugg et sa chère fille, jʹai <strong>de</strong>ux<br />

vieux amis (50 ans), bien connus aussi <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Caulaincourt; ils ont, près <strong>de</strong> la ville, une<br />

assez belle propriété où ils passent les hivers; lʹété, ils rési<strong>de</strong>nt à Chaville; ce sont <strong>de</strong>ux<br />

chrétiens fervents (MM. Tulasne), voyant peu le mon<strong>de</strong>, fort simples, distingués cepen‐<br />

dant; lʹun est membre <strong>de</strong> lʹInstitut, lʹautre mé<strong>de</strong>cin, mais mé<strong>de</strong>cin <strong>de</strong>s pauvres seulement,<br />

1615


leur état <strong>de</strong> fortune leur permettant <strong>de</strong> se livrer aux bonnes œuvres. La tendre amitié qui<br />

unit ces <strong>de</strong>ux frères, célibataires lʹun et lʹautre, est une chose rare et touchante. Vous pour‐<br />

riez trouver en eux toutes les indications et obligeances qui vous paraîtraient nécessaires,<br />

ils sont bons et serviables à un <strong>de</strong>gré peu commun. Ils sont partis <strong>de</strong> Chaville, il y a quinze<br />

jours à peine; ils ont emmené <strong>avec</strong> eux lʹun <strong>de</strong> nos prêtres les plus dévoués, lʹabbé Faÿ,<br />

dont la poitrine est assez gravement atteinte pour nous donner <strong>de</strong> bien sérieuses inquiétu‐<br />

<strong>de</strong>s; ils vont prendre soin <strong>de</strong> lui comme sʹil était pour eux un troisième frère.<br />

Ils nʹont pas chez eux <strong>de</strong> logements disponibles, mais ils pourraient vous en retenir<br />

un provisoirement dans un hôtel, afin que vous puissiez librement choisir vous‐mêmes les<br />

conditions <strong>de</strong> <strong>de</strong>meure ou autres dans lesquelles il vous conviendrait <strong>de</strong> vous poser. On<br />

trouve à Hyères toutes facilités pour vivre selon son gré. Le pays est charmant; il a <strong>de</strong>ux<br />

églises, dont une fort belle, et plusieurs chapelles <strong>avec</strong> un clergé dʹélite. Si vous le désiriez,<br />

jʹécrirais à mes <strong>de</strong>ux amis afin quʹils sʹassurent si, en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s hôtels, il y a <strong>de</strong>s loge‐<br />

ments simples et convenables libres en ce moment, et quelles facilités on a pour le service.<br />

Lorsque jʹai séjourné en cette ville, on nʹavait sous ce rapport, comme pour le reste, aucun<br />

embarras à craindre. Jʹattendrai votre réponse, Madame la Marquise, pour suivre en un<br />

sens ou en un autre les vues auxquelles vous croiriez <strong>de</strong>voir vous arrêter; si je ne consul‐<br />

tais que mon propre attrait, jʹinclinerais fort pour Paris qui me rapprocherait quelquefois<br />

<strong>de</strong> vous, mais est‐il sûr quʹon y sera tranquille, lʹhiver nʹy sera‐t‐il pas bien rigoureux?<br />

Double incertitu<strong>de</strong>. Je ne connais personne à Pau. Je suis resté six semaines à Grasse, très<br />

beau pays ainsi que Cannes, mais je nʹy ai non plus aucune connaissance.<br />

Veuillez agréer, ainsi que Madame dʹHurbal, mes respects et dévouements.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1694 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Séjour chez les Dames <strong>de</strong> la Retraite, rue du Regard. Avantages spirituels à retirer <strong>de</strong> ce séjour à Paris.<br />

Vaugirard, 28 décembre 1871<br />

Madame la Marquise,<br />

Je mʹempresse <strong>de</strong> vous souhaiter, ainsi quʹà Madame votre mère, la bienvenue dans<br />

ce Paris, si véritablement mauvais et vers lequel on revient pourtant, car il nʹest pas tout<br />

entier perverti. La maison que vous avez prise pour <strong>de</strong>meure vous le fera voir dʹailleurs<br />

du bon côté; je me réjouis bien, pour ma part, du choix que vous avez fait; je désire beau‐<br />

coup que vous y soyez à votre gré. Il ne mʹa pas été encore donné jusquʹici <strong>de</strong> me trouver<br />

si près <strong>de</strong> vous, et <strong>avec</strong> tant <strong>de</strong> facilité pour rencontrer et vous, Madame, et Madame<br />

dʹHurbal.<br />

En quelques minutes, en effet, si vous voulez bien disposer <strong>de</strong> quelque loisir pour<br />

respirer lʹair <strong>de</strong> la campagne, la gare du chemin <strong>de</strong> fer, presque à votre porte, vous en<br />

donnera la plus parfaite commodité. Sʹil arrive aussi que je puisse vous être <strong>de</strong> quelque<br />

utilité, jʹarriverai sans peine et promptement vers vous, le chemin <strong>de</strong> la gare à la rue du<br />

Regard [Dames <strong>de</strong> la Retraite] nʹétant pas trop long pour mes forces. Lʹomnibus qui va à<br />

Vaugirard est également (rue <strong>de</strong> Sèvres) tout près <strong>de</strong> vous; je nʹaurai pas toutefois à en<br />

faire aussi souvent usage, je ne viens à Vaugirard que le vendredi dans la matinée pour<br />

repartir samedi dans lʹaprès‐midi. Je suis retenu vendredi à la maison, afin quʹon puisse<br />

1616


un jour me rencontrer; je ne reçois, à vrai dire, personne, nʹayant plus <strong>de</strong> relations, mais à<br />

tout hasard réservant au moins cette latitu<strong>de</strong>, si parfois quelquʹun <strong>de</strong>vait en user.<br />

Jʹai la confiance que vous allez, Madame, trouver un peu <strong>de</strong> calme et <strong>de</strong> repos dans<br />

votre faubourg S t ‐Germain, après tant dʹémotions et <strong>de</strong> préoccupations. Elles ne vous lais‐<br />

sent pas néanmoins absolument tranquille puisque, rassurée sur lʹavenir <strong>de</strong> votre cher fils,<br />

vous <strong>de</strong>meurez en sollicitu<strong>de</strong> sur la secon<strong>de</strong> mère qui doit désormais partager à son égard<br />

vos affections et vos soins. Mais lʹâge si peu avancé <strong>de</strong> Madame <strong>de</strong> S t Maur laisse encore<br />

bien <strong>de</strong> lʹespérance, bien <strong>de</strong>s âmes pieuses et dévouées prient pour que le Seigneur la<br />

laisse à leur attachement; gardons donc bonne espérance, et ne doublons pas la peine par<br />

<strong>de</strong> tristes prévisions.<br />

Que <strong>de</strong> secours spirituels nʹallez‐vous pas trouver, et dans les précieuses ressources<br />

<strong>de</strong> votre maison, et dans la belle et si chrétienne paroisse <strong>de</strong> St‐Sulpice, et dans les mille<br />

chapelles et pieux sanctuaires qui vous entourent. Combien est visible ici le soin si tendre<br />

<strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce; ce nʹétait pas tant <strong>de</strong> repos physique que vous aviez besoin, mais dʹun<br />

peu <strong>de</strong> vie spirituelle pour refaire vos âmes lassées et brisées <strong>de</strong> trop <strong>de</strong> fatigue morale et<br />

<strong>de</strong> dure contention. Notre‐Seigneur vous dit, comme à ses apôtres après leurs courses<br />

apostoliques: Venez ici à lʹécart et reposez‐vous un peu. Il vous mène dans la solitu<strong>de</strong> et Il<br />

vous parlera au fond du cœur; cʹest cette parole qui échauffe, refait et console; puissiez‐<br />

vous, Madame, <strong>avec</strong> votre bien‐aimée mère, en sentir les bienfaisants effets et puiser ainsi<br />

force nécessaire pour poursuivre votre carrière <strong>avec</strong> les appuis nouveaux que la grâce<br />

vous aura préparés.<br />

Je vais le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r bien instamment au Seigneur; Il daignera, je lʹespère, accueillir<br />

mes humbles instances.<br />

Veuillez agréer, Madame, et partager <strong>avec</strong> Madame dʹHurbal, tous mes sentiments<br />

<strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> dévouement en N.S.<br />

Votre humble serviteur et ami Le <strong>Prevost</strong><br />

1695 à M. A. Faÿ<br />

Sur le décès <strong>de</strong> son frère, le père Justin Faÿ. Eloge du défunt par MLP.<br />

Chaville, 2 janvier 1872<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous avons lu, M. <strong>de</strong> Varax et moi, <strong>avec</strong> le plus émouvant intérêt, les détails que<br />

vous nous avez donnés sur la mort <strong>de</strong> notre bien‐aimé frère, lʹabbé Faÿ, doublement frère<br />

pour vous, mais si intimement uni à nous tous dans lʹordre <strong>de</strong> la grâce quʹil semblait que<br />

les liens du sang nʹy pussent rien ajouter. Ce nʹest pas sans quelques larmes que jʹai assisté,<br />

par votre écrit, aux <strong>de</strong>rniers instants, aux aspirations et suprêmes prières <strong>de</strong> cette âme si<br />

ar<strong>de</strong>nte pour le bien, si généreuse dans son dévouement, si cordiale et si fidèle dans ses af‐<br />

fections. La perte <strong>de</strong> ce vaillant associé <strong>de</strong> nos plus ru<strong>de</strong>s travaux, jointe à celle <strong>de</strong> plu‐<br />

sieurs autres non moins courageux, aussi rappelés à Dieu en cette même année, mʹa été<br />

particulièrement douloureuse, moins pour moi qui ne saurais beaucoup tar<strong>de</strong>r à le rejoin‐<br />

dre, que pour notre famille spirituelle ainsi amoindrie et contristée. Mais, comme vous ne<br />

manquez pas <strong>de</strong> le faire vous‐même, en tournant les yeux au Ciel, je retrouve la confiance<br />

et la paix. Dieu nous les avait donnés. Il nous les a repris, que son saint nom soit béni!<br />

1617


Ce nous sera une consolation <strong>de</strong> vous revoir bientôt au milieu <strong>de</strong> nous; comptez<br />

bien, mon cher enfant, que tous, et moi en particulier, nous ferons en sorte <strong>de</strong> vous rendre,<br />

par un redoublement <strong>de</strong> cordial attachement, la douce et puissante assistance que vous<br />

trouviez dans votre union <strong>avec</strong> votre frère; lʹar<strong>de</strong>nte charité qui remplissait son cœur <strong>de</strong>‐<br />

meurera au milieu <strong>de</strong> nous, et vous en sentirez lʹinfluence dans tous vos rapports <strong>avec</strong><br />

cette famille spirituelle que la charité divine vous a suscitée.<br />

Adieu, mon bien cher ami et fils en N.S., nous vous ferons parvenir sans retard ce<br />

qui vous sera nécessaire pour votre retour.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

1696 à M. lʹabbé Braun<br />

Un mot sur les Servantes du Sacré‐Cœur. Raisons qui ne permettent pas, actuellement, <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>r en Angleterre.<br />

Chaville, 2 janvier 1872<br />

Mon bien bon abbé et fils en N.S.,<br />

Nous sommes bien sensibles au témoignage dʹaffection que vous conservez pour la<br />

petite famille, que les distances ne vous laissent pas oublier.<br />

Nous nous intéressons toujours à vos Sœurs et à leurs succès dans les œuvres <strong>de</strong><br />

Dieu. Celles que nous avons sous les yeux à Vaugirard vont très bien. Jʹai eu occasion <strong>de</strong><br />

les voir et <strong>de</strong> mʹentretenir <strong>avec</strong> chacune dʹelles à la fin du trimestre, et jʹai pu constater<br />

leurs bonnes dispositions. La Supérieure me disait elle‐même quʹelles étaient contentes, et<br />

que tout allait bien. Nous voyons <strong>avec</strong> plaisir que cette petite Société, pour laquelle vous<br />

avez été lʹinstrument <strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce, se répand <strong>de</strong> plus en plus pour la gloire <strong>de</strong> Dieu.<br />

Pour les propositions que vous nous faites, nous ne voyons pas bien que le moment<br />

soit venu dʹy donner suite. Nous irions volontiers, sous le bon plaisir <strong>de</strong> Mgr Manning,<br />

prendre part au bien qui se fait et travailler à la régénération qui se prépare en Angleterre,<br />

mais vous savez combien nous sommes pauvres en sujets en ce moment. Puis, nous<br />

nʹavons pas <strong>de</strong> frères qui sachent lʹanglais. Le temps dʹen former pour cette œuvre serait<br />

bien long et peut‐être serait‐il préférable que, dʹaprès les vocations que vous faites espérer<br />

parmi les Irlandais, on dirigeât vers notre Maison‐Mère quelques sujets ayant quelques<br />

notions suffisantes du français pour vivre en commerce habituel <strong>avec</strong> nous et se former à<br />

notre genre <strong>de</strong> vie. Après un temps suffisant <strong>de</strong> formation, ces sujets pourraient retourner<br />

en Angleterre, <strong>avec</strong> un ou <strong>de</strong>ux sujets français, et travailler alors aux œuvres que leur<br />

confierait la bienveillance <strong>de</strong> Mgr Manning. Jusque là, vraiment il nous paraît difficile dʹen‐<br />

treprendre quoi que ce soit <strong>de</strong> ce côté.<br />

Tous nos ff. vous envoient leur souvenir affectueux et prient pour vos œuvres.<br />

Adieu, mon bien cher frère, croyez en mon affection cordiale et bien dévouée en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong> ptre .<br />

1697 à M. Levassor<br />

Regret dʹune entrevue manquée <strong>avec</strong> son vieil ami.<br />

Chaville, le 2 janvier 1872<br />

Mon bien cher ami,<br />

Jʹai regretté bien vivement <strong>de</strong> ne mʹêtre pas trouvé à la maison quand vous avez pris la<br />

peine <strong>de</strong> faire un si grand trajet pour retrouver un vieil ami dʹau moins 30 ans, il est vrai.<br />

1618


Jʹaurais été si heureux <strong>de</strong> vous voir et <strong>de</strong> mʹentretenir <strong>avec</strong> vous <strong>de</strong> vos œuvres <strong>de</strong> Char‐<br />

tres! Jʹespère néanmoins que lʹinfirmité <strong>de</strong> mes jambes, qui me refusent si habituellement<br />

leur usage, ne me privera pas longtemps <strong>de</strong> la joie <strong>de</strong> vous revoir dans quelquʹune <strong>de</strong> nos<br />

maisons, pour y montrer à nos enfants et jeunes gens tout ce que votre cœur renferme <strong>de</strong><br />

charité et <strong>de</strong> tendresse.<br />

En attendant cette heureuse circonstance, recevez, bien cher ami, lʹassurance <strong>de</strong><br />

mon constant et bien affectueux dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong> p tre<br />

1698 à M. Baumert<br />

Souhaits pour la nouvelle année. Prières pour que Dieu bénisse son zèle apostolique.<br />

Chaville, ce 7 janvier 1872<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong>s bons sentiments que vous mʹexprimez dans votre petite lettre.<br />

Je prie, <strong>de</strong> mon côté, N.S. <strong>de</strong> bénir vos efforts pour le bien <strong>de</strong>s œuvres. Jʹespère que, joi‐<br />

gnant à votre zèle pour le prochain cette aménité qui rend semblable au divin Sauveur et<br />

gagne déjà les cœurs, la tâche <strong>de</strong> conquérir les âmes vous <strong>de</strong>viendra aussi plus facile.<br />

Je compte aussi que le profond respect et lʹaffection sincère que vous mʹavez témoi‐<br />

gné éprouver pour M. Risse se soutiendront constamment et rendront toujours heureux<br />

vos rapports <strong>avec</strong> lui.<br />

Croyez, bien cher enfant, à ma sincère affection en N.S.<br />

Votre ami et Père tout dévoué Le <strong>Prevost</strong><br />

1699 à M. dʹArbois<br />

La prière <strong>de</strong> MLP. pour ses fils. Signes dʹun retour à la foi. Quelques nouvelles.<br />

Chaville, 8 janvier 1872<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> vos bons souhaits pour la nouvelle année et à lʹoccasion <strong>de</strong> la<br />

fête <strong>de</strong> S t <strong>Jean</strong>; jʹespère que, grâce à vos prières et à celles <strong>de</strong> nos ff., jʹemploierai le moins<br />

mal possible les quelques jours qui me sont laissés pour préparer le compte que jʹaurai à<br />

rendre bientôt à Dieu. En attendant, jʹacquitte fidèlement ma <strong>de</strong>tte envers mes bien‐aimés<br />

ff., en appelant sur eux, chaque jour, les bénédictions célestes; je nʹai plus guère dʹautre<br />

puissance pour leur être un peu utile. Jʹai la confiance que celle‐là doublera dʹefficacité à<br />

mesure que les autres ressources me font <strong>de</strong> plus en plus défaut.<br />

Je suis <strong>avec</strong> le plus vif intérêt le mouvement <strong>de</strong> vos œuvres et je constate <strong>avec</strong> joie<br />

quʹà Angers, comme ailleurs, les éléments du bien se reforment et que les âmes honnêtes<br />

sentent, comme précé<strong>de</strong>mment, le besoin <strong>de</strong> chercher appui près <strong>de</strong> leurs véritables amis,<br />

les serviteurs <strong>de</strong> Dieu; tendons‐leur la main toujours; si un trop petit nombre se sauvent,<br />

celles qui arriveront au port auront assez <strong>de</strong> bonheur pour que nos travaux et nos peines<br />

soient amplement payés.<br />

Je nʹai pas à faire ici un long entretien <strong>avec</strong> vous, puisque lʹespoir mʹest donné <strong>de</strong><br />

vous voir bien prochainement; je me borne à vous assurer <strong>de</strong> nouveau <strong>de</strong> ma constante<br />

1619


sollicitu<strong>de</strong> pour tout ce qui vous touche, et <strong>de</strong> mes vœux sincères pour quʹun avancement<br />

continu dans lʹamour <strong>de</strong> Dieu vous obtienne une effusion <strong>de</strong> plus en plus abondante <strong>de</strong><br />

ses grâces.<br />

Assurez notre cher ami, M. [Ad.] Lainé, <strong>de</strong> ma tendre affection; quelques mots <strong>de</strong><br />

lui eussent complété lʹensemble <strong>de</strong>s bons souvenirs que tous mes chers fils mʹont envoyés;<br />

mais il est, je le sais, un peu avare <strong>de</strong> ses écrits; son frère [Edouard], qui est maintenant<br />

près <strong>de</strong> moi à Chaville, en gémit <strong>de</strong> son côté.<br />

Jʹai toujours, je ne sais pourquoi, <strong>de</strong>s actions <strong>de</strong> Suez appartenant à M lle votre sœur;<br />

M. Paillé, à qui jʹen ai parlé plusieurs fois, mʹassure quʹelles ne touchent rien encore; je lʹat‐<br />

tends et vais le prier <strong>de</strong> sʹen assurer une fois <strong>de</strong> plus.<br />

M. <strong>de</strong> Madre nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> si nous avons fait imprimer notre acte <strong>de</strong> Société; je lui<br />

réponds que nous attendons votre arrivée pour aviser à ce qui sera utile sur ce point.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Offrez, je vous prie, mes respects à ceux <strong>de</strong> ces Messieurs <strong>de</strong> lʹEvêché qui ne mʹau‐<br />

raient pas absolument oublié, et mes sentiments dʹaffection à nos amis Pavie, etc.<br />

1700 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Renseignements concernant une pension, rue du Cherche‐Midi.<br />

Chaville, 10 janvier 1872<br />

Madame la Marquise,<br />

Jʹai lʹhonneur <strong>de</strong> vous adresser ci‐joint quelques renseignements qui ont été pris par<br />

un <strong>de</strong> nos MM. concernant la pension <strong>de</strong> la rue du Cherche‐Midi, 13. Je ne sais si, <strong>de</strong> votre<br />

côté, Madame dʹHurbal et vous, en aurez recueilli <strong>de</strong> plus complets.<br />

Un point me paraît ne regar<strong>de</strong>r que les jeunes personnes sans leur mère, cʹest celui<br />

où il est dit que les pensionnaires peuvent recevoir toutes les visites <strong>de</strong>s personnes du sexe<br />

quʹil convient <strong>de</strong> voir; évi<strong>de</strong>mment, cet article ne saurait vous concerner, non plus que les<br />

dames en pareille condition.<br />

Je serais heureux, Madame la Marquise, dʹapprendre que votre santé est bien re‐<br />

mise, que Madame votre mère est aussi exempte <strong>de</strong> toute souffrance et que les nouvelles<br />

du Nivernais sont plus rassurantes.<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, et partager <strong>avec</strong> votre très aimée mère, mes<br />

sentiments <strong>de</strong> respectueux dévouement.<br />

Votre humble serviteur Le <strong>Prevost</strong><br />

1701 à M. lʹabbé Braun<br />

Projet <strong>de</strong> notice sur lʹInstitut, <strong>de</strong>stiné à le faire connaître en Angleterre.<br />

Chaville, le 22 janvier 1872<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je suis bien touché <strong>de</strong> la sympathie que vous nous témoignez dans lʹépreuve que<br />

nous venons <strong>de</strong> subir par la perte <strong>de</strong> notre cher abbé Faÿ, et <strong>de</strong> lʹaffection que vous témoi‐<br />

gnez toujours pour la petite famille.<br />

1620


Jʹai parlé à M. <strong>de</strong> Varax <strong>de</strong>s espérances que lʹon pourrait fon<strong>de</strong>r, pour les vocations<br />

en Angleterre et en Irlan<strong>de</strong>, sur une notice concernant notre Institut et nos œuvres. M. <strong>de</strong><br />

Varax, partant en voyage, nʹa pu faire quelque chose en ce sens, mais il se propose <strong>de</strong> sʹen<br />

occuper dès son retour. Si, à lʹépoque où vous reviendrez ici, il nʹétait point encore <strong>de</strong> re‐<br />

tour, nous pourrions alors adresser ces quelques notes sur les indications que vous nous<br />

donneriez; si, au contraire, M. <strong>de</strong> Varax revient avant votre départ dʹAngleterre, il se hâte‐<br />

ra, jʹen suis sûr, <strong>de</strong> profiter <strong>de</strong> votre présence là‐bas pour se servir <strong>de</strong> vos indications.<br />

Je continue à prier pour vous et vos chères Sœurs. Celles <strong>de</strong> Vaugirard vont tou‐<br />

jours bien, et jʹentends également dire du bien <strong>de</strong>s autres.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1702 à M. Maignen<br />

Démarches pour un terrain convoité.<br />

Vaugirard, 26 janvier [1872]<br />

Mon cher enfant,<br />

En y réfléchissant, je trouve que le terrain Petit qui convient le mieux, je crois, ne<br />

doit pas valoir plus <strong>de</strong> 120 ou 125.000f. Sol bas, étouffé par <strong>de</strong> hauts murs, assez humi<strong>de</strong>,<br />

mal disposé, bâtiments mal conçus, pas un escalier, pas une pièce <strong>de</strong> hauteur suffisante.<br />

Tout cela nʹest pas loué certainement plus <strong>de</strong> 4 ou 5.000f au grand maximum.<br />

Il faut entrer directement en relation <strong>avec</strong> le propriétaire. Pour cela, prier un <strong>de</strong> vos<br />

amis, sergent <strong>de</strong> ville, dʹaller brusquement <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r le propriétaire; si on le mène à M.<br />

Petit, lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r nettement sʹil est propriétaire; il dira locataire, cʹest affaire regardant le<br />

propriétaire; où <strong>de</strong>meure‐t‐il? Si M. Petit questionne, vaguement répondre: les disposi‐<br />

tions projetées pour lʹabaissement du boulevard vont <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r que lʹAdministration sʹen‐<br />

ten<strong>de</strong> <strong>avec</strong> les propriétaires. Rien <strong>de</strong> plus réel. Les choses, après, iraient sans intermédiaire<br />

intéressé.<br />

1703 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Petite chronique <strong>de</strong> Chaville. Influence du père Pittar. Humilité. Embarras financiers. Désir dʹapostolat: il serait<br />

doux à MLP. <strong>de</strong> finir sa vie au milieu <strong>de</strong>s pauvres.<br />

Chaville, 30 janvier 1872<br />

Mon cher ami et fils en N.S.,<br />

Je voulais répondre promptement à votre amicale lettre, un malaise <strong>de</strong> santé<br />

dʹabord, et hier la fête <strong>de</strong> S t François <strong>de</strong> Sales mʹont obligé à quelque retard.<br />

Les détails dans lesquels vous voulez bien entrer concernant nos maisons dʹAmiens<br />

et <strong>de</strong> Tournay sont plus rassurants et <strong>de</strong> meilleur augure que je nʹosais lʹespérer; cʹest un<br />

témoignage <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> la bonté divine qui supplée partout à nos insuffisances en voyant,<br />

je suppose, que nous avons la sagesse <strong>de</strong> les reconnaître et <strong>de</strong> nous en humilier.<br />

La maison <strong>de</strong> Chaville, en gran<strong>de</strong> partie, sʹest rendue hier, dès le matin, à Vaugirard<br />

pour la fête qui sʹest très bien passée. M. Lantiez a parlé à la messe très convenablement, et<br />

M. Hello fort aimablement aux vêpres. Jʹai dû mʹabsenter une partie du jour pour me traî‐<br />

1621


ner, tant bien que mal, près <strong>de</strong> M. Guillemin, Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la Conférence St‐Sulpice, fort<br />

gravement atteint par une sorte dʹabcès au cou, à peu près <strong>de</strong> la même façon que le p. Gra‐<br />

try, retenu en Suisse par un mal pareil. Jʹai trouvé ce vieil ami (il a 80 ans passés) fort<br />

changé et abattu; il se recomman<strong>de</strong> à nos prières. Il a abandonné les mé<strong>de</strong>cins pour se<br />

mettre aux mains dʹun guérisseur dont le traitement par les simples lui réussit mieux, as‐<br />

sure‐t‐il. A Vaugirard, la journée a été agréable dans son ensemble. MM. Hello et Mai‐<br />

gnen, invités à manger au Noviciat, ont été fort satisfaits <strong>de</strong> lʹordre <strong>de</strong> lʹexercice et <strong>de</strong> la<br />

bonne tenue <strong>de</strong>s frères. Ils en conçoivent les meilleures espérances pour lʹheureuse in‐<br />

fluence quʹexercera chez nous la présence du r.p. Pittar; enfin commencent à poindre cette<br />

mo<strong>de</strong>stie et cette composition religieuse qui nous manquaient et dont nous souhaitions<br />

tant la venue; le pas en avant, à faire par cette pauvre petite Congrégation, se fait donc, la<br />

voilà en marche; daigne le Seigneur la soutenir durant la route! Le soir, le bon Père a égayé<br />

la soirée en chantant, et aussi en lisant un dialogue quʹon a trouvé très plaisant. Jʹavais dû,<br />

pour moi, me retirer à la tombée du jour, ma petite voiture ne marchant pas sûrement<br />

dans lʹobscurité.<br />

En faisant mon examen le jour <strong>de</strong> S t François <strong>de</strong> Sales, jʹai trouvé que, <strong>de</strong>ux ou trois<br />

fois, au Conseil, jʹai donné mon avis dʹune façon tranchante et pas assez calme; cʹest lʹeffet<br />

dʹune impressionnabilité qui cè<strong>de</strong> au premier mouvement et <strong>de</strong>vance la réflexion; je crois<br />

quʹil serait mieux, si vous nʹy voyez pas dʹobstacle, que jʹénonçasse mon sentiment après<br />

nos autres frères; du reste, averti par cette surprise, je me tiendrai sur mes gar<strong>de</strong>s afin<br />

dʹéviter quelque rechute; je nʹoublierai pas, je lʹespère, que mon rôle presque unique est<br />

désormais <strong>de</strong> prier pour tous et <strong>de</strong> concourir à lʹunion cordiale entre tous; jʹy tendrai <strong>de</strong><br />

tout mon bon vouloir.<br />

M. <strong>de</strong> Lambel est venu samedi nous rendre visite; il a <strong>de</strong>mandé particulièrement à<br />

vous voir; il fait une absence dʹune dizaine <strong>de</strong> jours, je suppose quʹà son retour vous le re‐<br />

verrez à Vaugirard.<br />

Hier, un jeune postulant, condisciple <strong>de</strong> M. Vialloux, a vu M. Lantiez et moi, et M.<br />

Chaverot aussi; il aurait désiré une prompte réponse, ayant déjà visité à Nazareth, il y a<br />

quelques jours, M. Lantiez; jʹai été satisfait du premier aperçu, en me bornant à recevoir sa<br />

visite. M. Lantiez, qui a pu mieux lʹexaminer, va vous en écrire.<br />

M. Audrin paraît fort préoccupé <strong>de</strong> ses paiements <strong>de</strong> fin <strong>de</strong> mois; je crois que je<br />

pourrais lui remettre 500f. M. <strong>de</strong> Caulaincourt, sachant par sa sœur (M me dʹHurbal) que<br />

Chaville a été fort dévasté par les Prussiens, mʹa accordé ce secours. Bien que nous ne<br />

soyons pas au large, les coupons du semestre venant <strong>de</strong> nous être payés, nous sommes<br />

provisoirement hors <strong>de</strong> presse; cet ai<strong>de</strong> ne serait dʹailleurs quʹun retour, car le reste <strong>de</strong> la<br />

somme que vous mʹaviez confiée a été absorbé, aux premiers jours <strong>de</strong> janvier, par quel‐<br />

ques anciens mémoires attardés <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s temps plus ou moins longs. Vous jugeriez sʹil<br />

faut joindre à ces 500f, 270f. revenant aux ff. Faÿ, comme reliquat <strong>de</strong> succession; ils ont été<br />

remis entre mes mains au moment où mourait notre cher abbé, et je les regardais comme<br />

<strong>de</strong>stinés aux frais <strong>de</strong> sa sépulture; bien que provenant dʹun capital, ils pourraient, sans<br />

doute, vu leur minime importance, être appliqués aux dépenses courantes; vous en déci‐<br />

<strong>de</strong>rez. Jʹai tenu note <strong>de</strong> lʹemploi <strong>de</strong>s fonds que vous mʹaviez confiés, je vous en rendrai<br />

compte.<br />

La situation nouvelle où je me trouve me laissant un peu <strong>de</strong> vi<strong>de</strong> du côté <strong>de</strong> lʹex‐<br />

pansion, jʹavais pensé quʹil me serait salutaire <strong>de</strong> prendre part aux confessions <strong>de</strong>s pauvres<br />

1622


et <strong>de</strong>s ouvriers dans quelque Sainte‐Famille; à la réflexion, je trouve bien <strong>de</strong>s objections à<br />

ce mouvement extérieur, mais jʹy aurais <strong>de</strong> lʹattrait; il me serait doux, ayant commencé<br />

parmi les pauvres, <strong>de</strong> finir aussi au milieu dʹeux; je vous exposerai, à votre retour, le pour<br />

et contre et vous mʹen direz votre avis.<br />

Adieu, mon cher ami, nous vous assistons <strong>de</strong> notre mieux <strong>de</strong>vant Dieu, et nous<br />

nʹoublions pas les fatigues et les travaux inévitables <strong>de</strong> votre excursion. Croyez à tous mes<br />

sentiments affectueux et dévoués en N.S.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

1704 454<br />

1705 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Espoir dʹune prochaine visite. Avantages spirituels <strong>de</strong>s livres <strong>de</strong> méditation conseillés par MLP.<br />

Chaville, 5 février 1872<br />

Madame la Marquise,<br />

Jʹétais bien assuré dʹavance que <strong>de</strong>s motifs sérieux avaient empêché la visite que<br />

Madame votre mère et vous aviez résolu <strong>de</strong> faire vendredi en notre chapelle <strong>de</strong> Vaugirard;<br />

jʹaccueille <strong>avec</strong> joie lʹespoir que vendredi prochain aucun autre obstacle ne se présentera et<br />

quʹil me sera donné <strong>de</strong> vous voir.<br />

Combien je suis heureux que mes petits livres vous conviennent; je pensais bien<br />

quʹil en serait ainsi. Chaque méditation, malgré sa brièveté, contient quelques considéra‐<br />

tions bien pieuses et <strong>de</strong>s conseils pratiques dont on peut tirer profit; je crois que, si vous<br />

trouvez possible <strong>de</strong> faire chaque jour fidèlement et <strong>avec</strong> une intention intime cette petite<br />

lecture, vous y recueillerez force spirituelle et consolation; il est si bon <strong>de</strong> se sentir, quel‐<br />

ques instants au moins chaque jour, tout près <strong>de</strong> Dieu!<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, et partager <strong>avec</strong> Madame votre mère, tous<br />

mes sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1706 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Mérites <strong>de</strong>s courses <strong>de</strong> quêteur. Dieu est au milieu <strong>de</strong> la petite famille.<br />

Chaville, 15 février 1872<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je ne vous écris ni souvent ni longuement, non pour épargner les missives, mais par<br />

ménagement <strong>de</strong> votre temps, si absorbé déjà par vos courses et démarches <strong>de</strong> quêteur. Je<br />

sens bien tout ce quʹune pareille tâche doit vous coûter, non seulement <strong>de</strong> fatigues et <strong>de</strong><br />

peines, mais dʹennuis aussi et surtout <strong>de</strong> froissements. Consolez‐vous, cʹest lʹinitiation la<br />

plus intime aux humiliations <strong>de</strong> la pauvreté; on nʹest pas tout à fait le pauvre <strong>de</strong> J.C.<br />

quand on nʹa été jusque là, mais quel mérite <strong>de</strong>vant lui! Sʹil se revêt du manteau <strong>de</strong> St Mar‐<br />

454 Suppléée par la lettre 1734 bis.<br />

1623


tin, bienfaiteur généreux du pauvre, il donnera sa propre couronne à celui qui quête pour<br />

les petits orphelins et pour les futurs ministres <strong>de</strong> son autel!<br />

Les choses, ayant été bien assises par vous avant votre départ, se soutiennent et<br />

marchent dans lʹordre établi; je ne crois pas quʹau retour vous trouviez rien en souffrance,<br />

le Bon Dieu est visiblement au milieu <strong>de</strong> la petite famille, cette assurance doit vous conso‐<br />

ler <strong>de</strong> bien <strong>de</strong>s peines; si Dieu est <strong>avec</strong> nous, qui prévaudra contre nous?<br />

Nous continuons à prier chaque jour pour vous, afin que vous fassiez bonne mois‐<br />

son <strong>de</strong> ressources et <strong>de</strong> sujets, récoltant déjà les premiers et jetant la semence pour une<br />

plus ample moisson.<br />

Adieu, mon bien cher ami; comptez sur les sentiments sympathiques et dévoués <strong>de</strong><br />

Votre affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je nʹai pas encore vu M. Lantiez concernant le Bureau Central.<br />

1707 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

MLP. se réjouit du dénouement heureux dʹune affaire <strong>de</strong> famille. Projet <strong>de</strong> visite.<br />

Chaville, 25 mars 1872<br />

Madame la Marquise,<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> joie la marche satisfaisante que suivent les affaires dont vous étiez,<br />

à juste titre, préoccupée; jʹai la confiance quʹ<strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> St Joseph, protecteur <strong>de</strong> votre<br />

chère famille, tout sera réglé sagement et sans préjudice aucun <strong>de</strong> la paix, le plus précieux<br />

<strong>de</strong>s biens.<br />

Je ne pouvais guère espérer que, durant un si court séjour, mon bien cher ami, M.<br />

<strong>de</strong> Caulaincourt, pût venir ici hors <strong>de</strong> Paris; il était mieux quʹil sʹoccupât uniquement <strong>de</strong>s<br />

intérêts intimes et graves qui avaient motivé son voyage; quelque autre occasion me don‐<br />

nera la satisfaction <strong>de</strong> le voir.<br />

Je pourrai, je lʹespère, aller rue du Cherche‐Midi jeudi, un peu avant 2h.; ce me sera<br />

une vraie joie si jʹy rencontre vous, Madame, et Madame votre si bonne mère.<br />

Veuillez lui faire agréer mon respect et croire aussi, Madame la Marquise, à tous les<br />

sentiments <strong>de</strong> respectueux dévouement <strong>avec</strong> lesquels je suis.<br />

Votre bien humble serviteur en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1708 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Essai dʹorganisation pour dégager le frère Maignen <strong>de</strong> la direction du Cercle Montparnasse et lui permettre<br />

dʹassumer celle <strong>de</strong>s Cercles <strong>de</strong> Paris.<br />

Chaville, jeudi 2 mai 1872<br />

Mon cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai pu hier seulement retenir quelques moments M. Lécrivain pour mʹentretenir<br />

<strong>avec</strong> lui <strong>de</strong>s Cercles. Il se refuse formellement à prendre, comme Directeur en chef, la di‐<br />

rection <strong>de</strong> celui <strong>de</strong> Montparnasse, alléguant: 1° lʹinsuffisance <strong>de</strong> temps et son état habituel<br />

1624


<strong>de</strong> fatigue après ses travaux du jour; 2° une impuissance avérée, irrémédiable chez lui,<br />

pour prési<strong>de</strong>r aucune assemblée, donner <strong>de</strong>s avis, fût‐ce à quelques jeunes gens réunis; en‐<br />

fin, imprimer une impulsion quelconque à ceux qui lʹentourent; sa pensée est, sur ce point,<br />

fermement arrêtée, on ne lʹen fera pas revenir.<br />

Il consentirait, quoique à regret, à quitter Nazareth pour le Cercle, à la condition <strong>de</strong><br />

nʹêtre posé quʹen second.<br />

Jʹai proposé que M. Maignen restât Directeur en titre; M. Lécrivain est convaincu<br />

que ce moyen serait insuffisant; à son avis, le Cercle souffre déjà <strong>de</strong> la préoccupation et<br />

<strong>de</strong>s soins multipliés que prend ailleurs M. Maignen, sa coopération au Cercle Montpar‐<br />

nasse serait insuffisante pour soutenir la vie <strong>de</strong> lʹŒuvre.<br />

M. Vrignault, dont jʹai parlé aussi, pourrait convenir sans doute, mais, promît‐il son<br />

ai<strong>de</strong> régulier et habituel, on nʹobtiendrait pas <strong>de</strong> lui quʹil prît la charge sérieusement, quʹil<br />

renonçât à <strong>de</strong>s relations multipliées qui le retiennent tous les soirs <strong>de</strong>hors et absorbent tout<br />

le temps dont il dispose. M. Lécrivain ne voit aucun autre parti à proposer. Il nous avertit<br />

que la vie présente <strong>de</strong> M. Maignen nʹest pas tenable, quʹil sʹexténue <strong>de</strong> courses durant le<br />

jour et passe une partie <strong>de</strong>s nuits à écrire et à préparer ses travaux du len<strong>de</strong>main ou faire<br />

en hâte ceux quʹil a omis la veille; cette existence ne saurait se prolonger.<br />

Peut‐être jugerez‐vous à propos, mon cher ami, <strong>de</strong> vous concerter aujourdʹhui ou<br />

<strong>de</strong>main matin <strong>avec</strong> M. Maignen, afin dʹêtre en mesure <strong>de</strong> donner une réponse à MM. <strong>de</strong> la<br />

Commission <strong>de</strong>s Cercles 455 lorsquʹils viendront dans lʹaprès‐midi à Vaugirard. Il se peut<br />

quʹen conversant <strong>avec</strong> M. Maignen, vous trouviez quelque combinaison qui répondît aux<br />

exigences <strong>de</strong> la situation.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1709 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Conseils <strong>de</strong> patience et <strong>de</strong> piété. Attitu<strong>de</strong> envers le personnel domestique. Condoléances.<br />

Chaville, 29 mai 1872<br />

Madame la Marquise,<br />

Votre long silence ne me laissait pas sans inquiétu<strong>de</strong>; jʹavais <strong>de</strong>mandé plusieurs fois<br />

<strong>de</strong> vos nouvelles à votre cher oncle, je pressentais que vous nʹétiez pas exempte dʹépreu‐<br />

ves, bien que vous fussiez délivrée <strong>de</strong> plusieurs sollicitu<strong>de</strong>s. La vie est donc ainsi faite<br />

quʹaprès une peine vient une autre peine. Hélas! oui, notre existence ici‐bas est tissée <strong>de</strong><br />

luttes et <strong>de</strong> tristesses. Je prends bien part assurément aux divers ennuis que vous retrou‐<br />

vez à la campagne comme à la ville, et je prie Dieu <strong>de</strong> vous accor<strong>de</strong>r quelque relâche dans<br />

sa miséricor<strong>de</strong>; je Le prie surtout dʹaccroître ses grâces <strong>de</strong> lumière, <strong>de</strong> force et <strong>de</strong> constance<br />

pour que vous puisiez en Lui tout le secours dont vous avez besoin. Je ne vois guère, en<br />

effet, que <strong>de</strong> ce côté un remè<strong>de</strong> sûr et efficace aux difficultés multipliées quʹil vous faut<br />

subir journellement, soit pour le bien <strong>de</strong> vos chers enfants quʹen mère chrétienne vous<br />

voulez voir grandir en perfection, soit pour le repos <strong>de</strong> votre bonne mère que vous désirez<br />

entourer <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> confiance, soit enfin du côté <strong>de</strong>s gens <strong>de</strong> votre maison que lʹesprit<br />

du siècle gâte et rend si peu chrétiens et si peu maniables. Tout cet ensemble constitue une<br />

455 Le Comité <strong>de</strong> l'Œuvre <strong>de</strong>s Cercles Catholiques d'Ouvriers voulait confier au frère Maignen la direction générale <strong>de</strong> tous les cercles<br />

qui se fondaient alors dans divers quartiers <strong>de</strong> Paris. C'est pour parer à la surcharge qu'elle aurait causée au frère que MLP. étudiait<br />

différentes combinaisons. Aucune solution n'ayant été trouvée, le père <strong>de</strong> Varax donna au Comité une réponse négative.<br />

1625


gran<strong>de</strong> tâche et, à certains égards, une lour<strong>de</strong> tâche. Il nʹest que Dieu qui ait pu dire <strong>avec</strong><br />

vérité: Venez à moi, vous tous qui êtes chargés et qui êtes las, je vous soulagerai, je referai<br />

vos forces. Cʹest donc vers Lui, chère Madame, quʹil faut vous tourner fidèlement; Il vous<br />

donnera, <strong>avec</strong> la patience, le conseil, la persistance, en un mot ce secours divin quʹIl tient<br />

en réserve pour tous nos besoins comme pour toutes nos misères; hors <strong>de</strong> Lui, tous les se‐<br />

cours sont inefficaces ou insuffisants. Jʹose donc vous inviter à ne vous relâcher dans au‐<br />

cun <strong>de</strong> vos pieux exercices, quoi quʹil puisse parfois vous en coûter quelques sacrifices, à<br />

communier souvent, à vous garantir <strong>de</strong> lʹesprit du mon<strong>de</strong> qui vous envahit partout et qui<br />

est aujourdʹhui plus subtil, plus absorbant que jamais. En ce qui concerne la conduite <strong>de</strong><br />

vos gens, je sais que vous joignez la fermeté à la bonté, que vous veillez non seulement à<br />

leur bien‐être, mais surtout à leur foi et à leurs mœurs; il faut vous résigner, en outre, à<br />

beaucoup endurer <strong>de</strong> leur part car, presque sans exception, leur classe tout entière est en<br />

<strong>de</strong>hors <strong>de</strong> sa voie; on dit que beaucoup <strong>de</strong> maîtres y ont gran<strong>de</strong>ment contribué; il est en‐<br />

core pourtant <strong>de</strong> bons et <strong>de</strong> fidèles serviteurs; comme les maîtres éclairés et chrétiens sont<br />

déjà dans votre maison, jʹespère que <strong>de</strong> dignes serviteurs se trouveront enfin pour vous;<br />

jʹavoue quʹils sont rares, mais on peut améliorer quelques‐uns <strong>de</strong> ceux qui ne sont pas ab‐<br />

solument incorrigibles et en former aussi quelques‐uns pris aux bonnes sources dans <strong>de</strong>s<br />

familles chrétiennes ou dans quelques Congrégations qui ont <strong>de</strong>s associations <strong>de</strong> servantes<br />

chrétiennes. A Paris, rue Duguay‐Trouin, les Petites Sœurs Servantes <strong>de</strong> Marie ont une as‐<br />

sociation <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> mille servantes restées chrétiennes, quʹelles surveillent, placent, reçoi‐<br />

vent durant leurs chômages et soignent chez elles dans leurs maladies; elles leur font sui‐<br />

vre aussi, à certains temps, <strong>de</strong>s retraites spéciales.<br />

Jʹai la confiance que lʹacte dʹautorité effectué à lʹégard du cocher insolent et déso‐<br />

béissant sera dʹun bon effet pour les autres.<br />

Je ne mʹexcuse pas <strong>de</strong> la liberté <strong>avec</strong> laquelle je vous écris, Madame la Marquise;<br />

vous mʹavez <strong>de</strong>mandé mon sentiment et mes avis, je les exprime franchement et en sim‐<br />

plicité chrétienne; je crois pouvoir présumer quʹils seront pris en bonne part.<br />

Je pensais bien que la mort <strong>de</strong> votre chère tante, Madame la Comtesse <strong>de</strong> Caulain‐<br />

court, vous serait une gran<strong>de</strong> peine, et parce quʹelle manquera à toute la famille, et surtout<br />

parce quʹelle laisse un grand vi<strong>de</strong> pour mon excellent ami, M. <strong>de</strong> Caulaincourt; jʹai eu la<br />

consolation <strong>de</strong> me trouver près <strong>de</strong> lui dans cette douloureuse épreuve et un <strong>de</strong> nos prêtres<br />

[M. Trousseau] a accompagné au Jardin les restes <strong>de</strong> celle que Dieu a rappelée à lui. Votre<br />

cher oncle a été bien navré, mais aussi bien résigné chrétiennement; Dieu lui a inspiré la<br />

pensée <strong>de</strong> faire une retraite dès son retour en Normandie; jʹespère quʹil aura trouvé un<br />

grand apaisement. Je lui ai écrit ces jours‐ci, jʹattends <strong>de</strong> ses nouvelles.<br />

Je fais <strong>de</strong>s vœux pour le rétablissement <strong>de</strong> Madame <strong>de</strong> S t Maur. Dieu bénira les<br />

soins que vous lui ren<strong>de</strong>z et Il vous en récompensera par le bonheur <strong>de</strong> vos enfants; Il<br />

donnera aussi à vous‐même et à votre bonne mère le calme et la tranquillité que vos santés<br />

réclament. En ce moment, toutes les intentions <strong>de</strong> mes S ts Sacrifices, sauf une seule, sont<br />

chaque semaine consacrées à votre famille, par moi si respectée, trois pour votre chère<br />

tante, trois autres pour votre propre maison.<br />

Je serai heureux si je peux ainsi vous témoigner tous mes sentiments <strong>de</strong> respect et<br />

<strong>de</strong> dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1626


1710 à M me et M lle Salva<br />

Détail <strong>de</strong> cuisine pour la Saint‐Vincent <strong>de</strong> Paul.<br />

Vaugirard, 13 juillet 1872<br />

Chères amies,<br />

Notre fête <strong>de</strong> St Vincent <strong>de</strong> Paul tombe un vendredi 19; le maigre est mal commo<strong>de</strong>,<br />

le poisson cher, on fera pauvre chère. En compensation: le cuisinier veut faire un gâteau<br />

<strong>de</strong> riz. Dites‐moi, je vous prie, les proportions: riz, lait, sucre, œufs, caramel. Pardonnez‐<br />

moi ce détail <strong>de</strong> cuisine.<br />

Votre affectionné frère et oncle Le <strong>Prevost</strong><br />

Répon<strong>de</strong>z‐moi, s.v.p., à Chaville.<br />

1711 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Etat <strong>de</strong> santé <strong>de</strong> MLP. Lʹépreuve nʹépargne personne et nous suit partout. Le secret <strong>de</strong> la paix.<br />

Chaville, 30 juillet 1872<br />

Madame la Marquise,<br />

Jʹai bien tardé à répondre à la lettre, pourtant si intime et si intéressante, que vous<br />

mʹavez fait lʹhonneur <strong>de</strong> mʹécrire, il y a près <strong>de</strong> trois semaines; je suis honteux <strong>de</strong> le dire et<br />

confus surtout <strong>de</strong> cette apparente négligence, je ne suis pas toutefois sans excuse; les<br />

gran<strong>de</strong>s chaleurs <strong>de</strong>s temps <strong>de</strong>rniers dépassant mes forces, mʹont causé un tremblement<br />

nerveux qui mʹempêcherait <strong>de</strong> tenir la plume, et aussi une contention <strong>de</strong> tête fort pénible;<br />

<strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux jours seulement, on commence à respirer un peu, Paris, et même ses environs,<br />

semblaient manquer dʹair vital; le voisinage <strong>de</strong> la mer vous aura assurément, Madame,<br />

préservée <strong>avec</strong> votre cher mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> ces incommodités; je mʹen réjouis dʹautant plus<br />

quʹaprès un long séjour ici, votre santé réclamait un repos prolongé et cette paix que les<br />

grands centres du mouvement et du bruit ne sauraient jamais donner.<br />

Mais est‐il bien vrai que la campagne vous ait donné pleinement ces précieux avan‐<br />

tages? Il nʹen serait pas ainsi, si jʹen crois les détails que contient votre lettre. Nʹa‐t‐on pas<br />

raison <strong>de</strong> dire que Dieu réserve <strong>de</strong>s épreuves et <strong>de</strong>s soucis cuisants pour toutes les condi‐<br />

tions <strong>de</strong> ce mon<strong>de</strong>? Quel état en apparence plus heureux que le vôtre, Madame? Dons <strong>de</strong><br />

fortune, charmante rési<strong>de</strong>nce, famille dʹélite, entourage à souhait, culture <strong>de</strong> lʹesprit, dons<br />

du cœur plus précieux encore, rien ne vous a été refusé, et pourtant un grand gémisse‐<br />

ment sʹéchappe <strong>de</strong> votre poitrine comme pour lui donner soulagement; pauvre âme hu‐<br />

maine, que te faut‐il donc pour avoir contentement? Es‐tu donc insatiable, ou bien as‐tu<br />

<strong>de</strong>s aspirations que rien ici‐bas ne satisfait? Oui, là est le secret <strong>de</strong> tant <strong>de</strong> souffrances, <strong>de</strong><br />

tant <strong>de</strong> plaintes et <strong>de</strong> découragement. Les biens <strong>de</strong> ce mon<strong>de</strong>, si grands quʹils soient, ont<br />

<strong>de</strong>s points défectueux qui trompent notre attente et amènent le dégoût. Aujourdʹhui, ce<br />

matin même, je lisais ce singulier commentaire fait par le p. Olivaint, <strong>de</strong> sainte mémoire,<br />

sur ces paroles du Seigneur au bon larron crucifié <strong>avec</strong> lui: aujourdʹhui, tu seras <strong>avec</strong> moi<br />

dans le Paradis.<br />

ʺOui, aujourdʹhui même, ce sera la liberté, la paix, la joie du Paradis dans mon<br />

cœur, si aujourdʹhui je livre mon cœur, tout mon cœur à Jésus crucifiéʺ.<br />

1627


Qui nous donnera cette science <strong>de</strong>s Saints, cette merveilleuse patience qui change<br />

les amertumes en douceurs, qui tourne tout en profit et, comme vous le dites si aimable‐<br />

ment, Madame, fait argent <strong>de</strong> tout pour le Ciel? La grâce <strong>de</strong> Dieu, si nous nous humilions<br />

<strong>de</strong>vant lui dans notre faiblesse, si nous <strong>de</strong>mandons <strong>avec</strong> constance sa miséricor<strong>de</strong> et son<br />

appui. Je nʹai pas à vous apprendre ces choses, Madame, et je nʹy prétends pas; votre lettre<br />

les exprime et votre cœur les sent vivement dans sa foi; jʹai donc bonne confiance que la<br />

prière fidèle et lʹunion sainte <strong>avec</strong> le Sauveur au banquet sacré vous donneront puissance<br />

et vouloir pour répondre à tout. Je prie bien toujours <strong>avec</strong> vous à cette intention; lʹheure<br />

viendra où vous aurez cette paix tant attendue, cʹest Jésus qui lʹa apportée sur la terre: je<br />

vous donne la paix, je vous laisse ma paix, mais non comme le mon<strong>de</strong> la donne 456 . Ne la<br />

<strong>de</strong>mandons donc pas au mon<strong>de</strong>, mais au Dieu Sauveur puisquʹelle est en Lui seul. Le mot<br />

du p. Olivaint nʹest quʹun écho <strong>de</strong> cette parole du divin Maître; cʹest presque la <strong>de</strong>rnière<br />

quʹIl ait prononcée ici‐bas.<br />

Pardonnez‐moi, je vous prie, Madame la Marquise, ces citations plus ou moins op‐<br />

portunes, mais le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> Chaville a bien peu <strong>de</strong> faits mémorables, je nʹen trouve aucun<br />

qui mérite votre attention; le Paris bien circonscrit où je vais chaque semaine ne me fournit<br />

non plus rien dʹintéressant.<br />

Je pense que votre cher oncle est près <strong>de</strong> vous présentement; il mʹannonçait ces<br />

jours <strong>de</strong>rniers quʹil allait vous rendre visite et vous enlever pour quelque temps Madame<br />

dʹHurbal qui charmera et consolera sa solitu<strong>de</strong> au Jardin; vos chers enfants vous resteront,<br />

vous serez bien riche encore; que Dieu soit béni <strong>de</strong> vous avoir tant aimée!<br />

Je serai bien heureux, Madame, si vous avez la bonté <strong>de</strong> me rappeler au souvenir <strong>de</strong><br />

M. Richard et dʹoffrir aussi mes hommages respectueux à Madame votre belle‐fille comme<br />

au reste <strong>de</strong> votre cher entourage. Veuillez aussi agréer, Madame la Marquise, tous mes<br />

sentiments <strong>de</strong> bien respectueux dévouement.<br />

Votre humble serviteur en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1712 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

On prie bien <strong>de</strong>vant les grands spectacles <strong>de</strong> la nature. Oubli <strong>de</strong> soi et délicatesse charitable <strong>de</strong> MLP.; vacances<br />

<strong>de</strong>s novices à Chaville. Le père Hello est fatigué; son amour <strong>de</strong>s âmes. MLP. entre dans sa 70 e année.<br />

Chaville, 7 août 1872<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous avons reçu <strong>avec</strong> joie votre lettre, et nous sommes heureux <strong>de</strong> voir que déjà<br />

vous avez ressenti le bon effet <strong>de</strong>s bains, <strong>de</strong> lʹair <strong>de</strong> la mer et <strong>de</strong> ce calme que le grand es‐<br />

pace donne à toutes nos facultés, lassées par le contact quotidien <strong>avec</strong> ce centre démesuré<br />

quʹon appelle Capitale: mieux vaudrait, nʹest‐il pas vrai, une moins grosse tête, le corps en<br />

serait en meilleure santé.<br />

Je pense bien que votre attrait pour la prière et le recueillement aura trouvé aussi<br />

son compte à votre vie paisible et pleinement dégagée <strong>de</strong> toute préoccupation. On prie<br />

bien en présence <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s œuvres du mon<strong>de</strong> créé, on sent plus près <strong>de</strong> soi Celui dont<br />

la puissance les a faites, et on se sent attiré à abriter sa faiblesse sous sa force, quʹaccompa‐<br />

gne partout sa bonté; Dieu bon, Dieu fort, ayez pitié <strong>de</strong> vos faibles enfants! Quʹon est bien<br />

sous votre abri!<br />

456 Jn 14, 27.<br />

1628


Si vous lʹaviez voulu, mon cher ami, jʹaurais partagé ce repos <strong>avec</strong> vous; mais je nʹai<br />

pas insisté, entrevoyant que vous préfériez être seul; vous mʹavez laissé entrevoir que vo‐<br />

tre bonne sœur serait <strong>avec</strong> vous, je ne vous en sais pas mauvais gré; vous avez pensé, non<br />

sans quelque raison, que je ne serais pas pour vous un bon compagnon; mon état <strong>de</strong> fai‐<br />

blesse et dʹinfirmité mʹont, <strong>de</strong>puis bien <strong>de</strong>s années, accoutumé en effet à recevoir lʹappui et<br />

le secours <strong>de</strong>s autres plutôt quʹà les leur donner moi‐même; or, quʹeût fait ma débilité ac‐<br />

cotée à la vôtre, sinon peut‐être rendre votre séjour aux bains moins libre et moins repo‐<br />

sant. Je lʹai compris, mon cher ami, et, je le répète, je nʹen ai éprouvé ni surprise ni contra‐<br />

riété; jʹen aurais dʹautant moins le droit que mes jambes, un peu plus libres durant les<br />

<strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rniers mois, sont, <strong>de</strong>puis votre départ, re<strong>de</strong>venues débiles en suite <strong>de</strong>s orages dont<br />

mon estomac a notablement souffert.<br />

Aucun fait notable ne sʹest passé parmi nous <strong>de</strong>puis votre départ; le Noviciat entier,<br />

<strong>avec</strong> son chef M. Chaverot, est installé à Chaville et y <strong>de</strong>meurera encore jusquʹau milieu <strong>de</strong><br />

la semaine prochaine; nos jeunes gens, installés séparément, en <strong>de</strong>hors presque entière‐<br />

ment du bâtiment que nous occupons, ne nous causent pas dʹincommodité bien sensible;<br />

ils sont attentifs et désireux <strong>de</strong> se rendre aimables, leur esprit est celui qui convient à leur<br />

condition. Nous avons aussi parmi nous, <strong>de</strong>puis une dizaine <strong>de</strong> jours, notre cher abbé Hel‐<br />

lo, que quelques malaises et surtout une fatigue extrême ont contraint <strong>de</strong> prendre un repos<br />

un peu prolongé. Il éprouve un mieux sensible.<br />

10 août. Obligé dʹaller <strong>de</strong>ux fois cette semaine à Vaugirard, à cause <strong>de</strong> la distribu‐<br />

tion <strong>de</strong>s prix, jʹai dû laisser cette lettre inachevée; je me hâte <strong>de</strong> vous lʹenvoyer, regrettant<br />

dʹavoir tant tardé à vous répondre.<br />

M. Hello est retourné à Nazareth, pas encore assez reposé, mais attiré invincible‐<br />

ment par le besoin <strong>de</strong> retrouver ses enfants; comme Dieu est bon dʹinspirer un si grand<br />

amour <strong>de</strong>s âmes à ceux quʹIl choisit pour les soutenir durant la route qui mène à Lui! No‐<br />

tre p. Beaussier, notre p. Planchat et tant dʹautres autour <strong>de</strong> nous, et tant dʹautres partout<br />

et à travers tous les âges du mon<strong>de</strong> chrétien.<br />

La distribution <strong>de</strong> Vaugirard sʹest bien faite; celle <strong>de</strong> Nazareth a été remarquable‐<br />

ment conduite et ordonnée; la bénédiction divine est toujours sur nos humbles travaux.<br />

Les pluies sont incessantes; jʹespère quʹà raison <strong>de</strong> la douceur <strong>de</strong> la température, el‐<br />

les ne contrarient pas trop vos bains.<br />

Adieu, mon bien cher ami; écrivez‐moi bientôt pour me dire si le mieux <strong>de</strong> votre<br />

santé continue. Aujourdʹhui, 10 août, je commence ma 70 e année; priez Dieu <strong>avec</strong> moi pour<br />

que ces jours <strong>de</strong> grâce, qui dépassent si fort mon attente, ne soient pas perdus pour mon<br />

amen<strong>de</strong>ment et ma préparation au <strong>de</strong>rnier compte qui me sera bientôt <strong>de</strong>mandé.<br />

Votre ami et Père affectionné en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1713 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

A propos dʹun postulant. L’abbé Risse au 5 e Congrès <strong>de</strong>s Œuvres, organisé à Poitiers à lʹinstigation <strong>de</strong> M gr Pie.<br />

Nouvelles satisfaisantes <strong>de</strong>s communautés.<br />

Chaville, 21 août 1872<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous attendons <strong>de</strong> vos nouvelles, et nous apprendrons <strong>avec</strong> joie quʹaprès un bon<br />

voyage, vous trouvez à Angers un peu <strong>de</strong> repos, un air nouveau et un commencement <strong>de</strong><br />

réfection; nous sentions tous que cʹétait pour vous un impérieux besoin.<br />

1629


Lʹhomme, ancien f. <strong>de</strong> la Miséricor<strong>de</strong>, dont je vous ai entretenu avant votre départ,<br />

est ici près <strong>de</strong> nous, en attente dʹun asile qui le reçoive définitivement. Les renseignements<br />

que mʹa transmis à son sujet M. le Chanoine Lainey sont conformes à ses propres déclara‐<br />

tions; on nʹa eu aucun reproche à lui faire, sauf le fait quʹil avait accusé et dont il a, dit M.<br />

Lainey, montré un si profond repentir quʹon pourrait sans témérité lui frayer la voie vers<br />

une Congrégation non consacrée à lʹéducation.<br />

Je vous prie donc, mon cher ami, dʹécrire sans retard aux pp.<strong>de</strong> S t ‐Camille, en invi‐<br />

tant le p. Supérieur à mʹadresser sa réponse ici, aussi promptement quʹil sera possible. Ce<br />

f. se nomme Campain, dʹune famille dʹhonnêtes laboureurs, il a 47 ans, mais il est vigou‐<br />

reux et peut‐être aisément employé, il semble être laborieux; il a quelque culture dʹesprit,<br />

sʹexprime très convenablement; je crois quʹil a <strong>de</strong> la droiture et <strong>de</strong> la simplicité.<br />

M me Charrin mʹécrit en hâte pour me dire quʹinformée tardivement du jour où va se<br />

faire la profession religieuse <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> ses filles, elle ne peut accompagner son fils Eu‐<br />

gène au pèlerinage <strong>de</strong> la Salette; elle <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>avec</strong> une vive instance quʹon lui accor<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong>ux ou trois jours <strong>de</strong> congé, en plus <strong>de</strong> ce qui lui a été concédé, afin quʹil puisse assister à<br />

la profession <strong>de</strong> ses <strong>de</strong>ux sœurs qui sont en <strong>de</strong>s Congrégations différentes. Le temps me<br />

manquant pour la renvoyer utilement à vous, je lui réponds que les mouvements du per‐<br />

sonnel vous regar<strong>de</strong>nt présentement, mais que, présumant votre sentiment, je pense<br />

quʹelle peut gar<strong>de</strong>r près dʹelle son fils quelques jours <strong>de</strong> plus, en prenant soin quʹil re‐<br />

vienne immédiatement après quʹil aura satisfait à ce <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> famille.<br />

Une lettre <strong>de</strong> M. Risse, arrivée ce matin, mʹannonce quʹil quittera Metz jeudi matin,<br />

22, <strong>avec</strong> M. Fonlupt, et se rendra à Chaville afin <strong>de</strong> sʹy reposer quelques instants avant <strong>de</strong><br />

se rendre à Poitiers; après le Congrès, il se propose <strong>de</strong> prendre encore quelque temps <strong>de</strong><br />

délassement à Chaville, en ménageant toutefois le loisir nécessaire pour un voyage <strong>de</strong><br />

quête en Picardie; ces dispositions paraissent avoir été réglées <strong>avec</strong> vous. Il me dit quel‐<br />

ques mots <strong>de</strong> M. Baumert, chargé en son absence <strong>de</strong> le remplacer, mais il ne semble pas<br />

avoir soupçon que cet ai<strong>de</strong> doive lui faire bientôt défaut.<br />

Nous avons en ce moment plusieurs ff. <strong>de</strong> Vaugirard ici, plus M. Guillot souffrant;<br />

hors lui, tous vont bien; les nouvelles <strong>de</strong> Paris et <strong>de</strong> Vaugirard sont aussi satisfaisantes. Je<br />

souhaite que nos ff. Angevins et vous‐même soyez également en état prospère; en pré‐<br />

sence <strong>de</strong> la tâche laborieuse dont la perspective sʹoffre à vous pour cette année, il est bien<br />

essentiel que vos forces se refassent proportionnellement; Dieu seul ayant les sources <strong>de</strong><br />

cette réfection, nous le prions tous les jours <strong>de</strong> les faire couler abondamment sur vous; je<br />

suis heureux, pour ma part, dʹavoir, pour y concourir, la puissance du S t Sacrifice; soyez<br />

bien assuré, mon cher ami, que je nʹoublie pas dʹen user.<br />

Croyez aussi à tous mes sentiments <strong>de</strong> bien affectueux dévouement.<br />

Votre ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1714 457<br />

1715 458<br />

457<br />

Suppléée par la lettre 1618 bis.<br />

458<br />

Suppléée par la lettre 1718 bis.<br />

1630


1716 <strong>de</strong> M. Chéron à M. Trousseau<br />

P. S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

La lettre <strong>de</strong> M. Trousseau lui a causé une douce consolation. Le Congrès <strong>de</strong> Poitiers.<br />

Chaville, 31 août 1872<br />

Mon bien cher Père,<br />

Jʹai lu à nos chers enfants votre aimable lettre que jʹai reçue hier. Nous avons été bien tou‐<br />

chés, soyez‐en certains, <strong>de</strong> vos bons souvenirs. Que cʹest une chose consolante que la Communion<br />

<strong>de</strong>s Saints! Mercredi, en Belgique, vous faisiez en communauté le pèlerinage <strong>de</strong> Bon‐Secours; vous<br />

pensiez à votre petit Noviciat aux pieds <strong>de</strong> la Ste Vierge. Le len<strong>de</strong>main jeudi, nous faisions <strong>de</strong> notre<br />

côté le pèlerinage <strong>de</strong> Longpont, et toute cette petite famille pour laquelle vous imploriez la veille la<br />

protection <strong>de</strong> Marie se trouvait elle‐même prosternée <strong>avec</strong> amour aux pieds <strong>de</strong> notre bonne Mère,<br />

dans un autre <strong>de</strong> ses plus vénérés sanctuaires<br />

Promena<strong>de</strong> charmante, favorisée dʹun temps à souhait, petit extraordinaire à la copieuse<br />

collation; en un mot, journée pleine <strong>de</strong> bons souvenirs pour les âmes, les cœurs, comme pour les<br />

corps. Maintenant que je me trouve installé à Chaville au milieu <strong>de</strong> ces bons enfants, je commence<br />

à ne plus désirer autant qu’auparavant aller le dimanche dans les œuvres; il me semble que je me<br />

verrais maintenant sans peine dispensé dʹaller à Ste ‐Anne.<br />

Je <strong>de</strong>vrais vous en dire bien plus long; permettez‐moi aujourdʹhui, mon bien cher Père,<br />

dʹabréger car hélas! je nʹai pas lʹactivité et la facilité <strong>de</strong> travail dont jʹaurais tant besoin; dès aujour‐<br />

dʹhui même, vos commissions seront faites, les petites brochures seront portées <strong>de</strong>main.<br />

Dans quelques instants, nous allons avoir un Conseil chez le P. Supérieur, ce bon Père dési‐<br />

rant voir nos enfants se remettre à quelques travaux intellectuels.<br />

Daignez agréer, mon bien cher Père, lʹassurance du sincère dévouement <strong>avec</strong> lequel je suis<br />

pour lʹamour <strong>de</strong> N.S.<br />

Votre tout obéissant serviteur G. Chéron<br />

P. S. Je ne trouve pas le cahier que vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z sur lʹexplication <strong>de</strong>s divers exercices<br />

<strong>de</strong> communauté, mais je le rechercherai promptement. Le bon Père Supérieur accepte volontiers<br />

lʹenvoi <strong>de</strong> la Semaine Religieuse <strong>de</strong> Tournay.<br />

Je nʹai pas encore eu un moment, mon bien cher enfant, pour vous écrire, pour ré‐<br />

pondre à votre chère lettre si cordiale, si affectueuse; elle mʹa causé une douce consolation,<br />

tout en me faisant mieux sentir combien vous alliez me manquer. Je vous écrirai cette se‐<br />

maine. Jusquʹici, tout va à peu près comme <strong>de</strong> coutume, je mʹattache à ne rien changer, sa‐<br />

chant que tout était bien réglé.<br />

Je ne sais encore rien en détail du Congrès; je crois quʹon a été content: assemblée <strong>de</strong><br />

360 personnes.<br />

Adieu, à bientôt; affection à nos ff. et tendre dévouement pour vous.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

1717 à M. Trousseau<br />

Fatigue <strong>de</strong> M.<strong>de</strong> Varax. Nouvelles <strong>de</strong>s frères. Plusieurs postulants.<br />

Chaville, 7 septembre 1872<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

M. <strong>de</strong> Varax, sans être mala<strong>de</strong>, sʹest vu si fatigué quʹil a dû suspendre momentané‐<br />

ment toute correspondance; nous sommes tous restés dix jours sans nul signe <strong>de</strong> vie <strong>de</strong> sa<br />

1631


part, et je venais hier dʹécrire à M me <strong>de</strong> Varax pour avoir <strong>de</strong> ses nouvelles quand le jeune<br />

Pialot est arrivé, nous apportant quelques courtes dépêches <strong>de</strong> lui. Dans les quelques mots<br />

quʹil mʹécrit, il me dit quʹil a <strong>de</strong>vant lui 15 lettres pressées auxquelles il faut quʹil répon<strong>de</strong><br />

avant le soir. Je pense bien que les vôtres étaient <strong>de</strong> ce nombre et quʹà lʹheure présente,<br />

vous aurez eu satisfaction sur ce point.<br />

M. Boulangé mʹayant fait part, il y a quelques jours, <strong>de</strong> ses dispositions <strong>de</strong> retraite,<br />

je me suis empressé dʹinsister, en lui écrivant, pour quʹil atten<strong>de</strong> une lettre <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax<br />

et se gar<strong>de</strong> bien <strong>de</strong> quitter son poste sans avoir pris son avis; jʹespère quʹil tiendra compte<br />

<strong>de</strong> mes observations.<br />

Prenez confiance, cher ami, vos difficultés sʹaplaniront et la situation <strong>de</strong>viendra<br />

meilleure en tous sens; si vous avez les épreuves dès lʹabord, il est sûr que vous aurez en‐<br />

suite les consolations.<br />

Je vous envoie, comme vous le désirez, 20 messes dont je joins ici les honoraires.<br />

Je ne vois rien <strong>de</strong> notable à vous dire; <strong>de</strong>ux sujets <strong>de</strong> médiocre apparence [Piot et<br />

Danthon] sont entrés au postulat à Vaugirard; on en attend encore un autre, qui est me‐<br />

nuisier, je crois. Le cousin <strong>de</strong> M. Faÿ, M. Bercé, a réglé ses affaires et va se trouver libre; ce<br />

sera, je crois, un sujet soli<strong>de</strong> et dévoué.<br />

Nos enfants, ici, ne vont pas mal; il va sans dire quʹà cause du silence <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Va‐<br />

rax, nous ne savons rien concernant les nouveaux; Hulot, qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>avec</strong> instance sa<br />

rentrée, sera sans doute un dʹentre eux. Les vôtres sont loin <strong>de</strong> vous oublier, ils parlent <strong>de</strong><br />

vous et prient pour vous; si leurs désirs avaient quelque crédit, vous seriez bientôt <strong>de</strong> re‐<br />

tour au milieu dʹeux.<br />

Adieu, mon bien cher ami, croyez bien à tous mes<br />

sentiments <strong>de</strong> tendre affection en N.S.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

Le frère Augustin Bercé<br />

1718 à M. Maignen<br />

Témoignages trop abondants sur le père Planchat. MLP. espère que le Congrès <strong>de</strong> Poitiers portera du fruit:<br />

continuer par les actes <strong>de</strong> dévouement à confirmer les discours.<br />

Chaville, 9 septembre 1872<br />

Je pense comme vous, mon bien cher ami, quʹil y aurait lieu <strong>de</strong> diminuer <strong>de</strong> moitié<br />

les aimables, mais trop minutieux racontages <strong>de</strong> la sœur Planchat, un peu aussi <strong>de</strong> M lle<br />

Payen, un peu encore ceux <strong>de</strong> M. Halluin; on écrit tant <strong>de</strong> notre temps que rien nʹest plus<br />

neuf et tout paraît redite; la brièveté est mieux reçue et trouve plus dʹattention et <strong>de</strong><br />

confiance<br />

Je vous remercie <strong>de</strong>s quelques mots <strong>de</strong> votre billet sur le Congrès; ce sont les seuls<br />

que jʹaie reçus. Espérons que ce grand mouvement aura quelques bons résultats et conti‐<br />

nuons par le dévouement à confirmer les discours insuffisants sans les actes.<br />

Votre tout affectionné Père et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1632


1718 bis à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Félicitations pour la naissance <strong>de</strong> sa petite‐fille Marie, le jour <strong>de</strong> la Nativité <strong>de</strong> la Vierge Marie.<br />

Chaville, 11 septembre 1872<br />

Madame la Marquise,<br />

Depuis le commencement du mois, jʹétais en attente et <strong>avec</strong> vous et <strong>avec</strong> votre cher<br />

entourage, je comptais les jours, lʹarrivée du petit ange paraissant être un peu retardée;<br />

mais je comprends maintenant, la chère âme ne voulait apparaître en ce mon<strong>de</strong> que dans<br />

un jour heureux, et en est‐il <strong>de</strong> plus beau, <strong>de</strong> meilleur présage, <strong>de</strong> plus rempli dʹespérance<br />

et <strong>de</strong> saintes allégresses que celui <strong>de</strong> la Nativité <strong>de</strong> Marie qui apporte le salut à lʹunivers<br />

entier. Comme je sens bien votre joie, Madame, celle <strong>de</strong> votre bonne mère, <strong>de</strong> vos chers en‐<br />

fants et <strong>de</strong> tous les vôtres à la ron<strong>de</strong>, dont cet événement tant souhaité remplit les vœux!<br />

Vous avez voulu, Madame, que nos enfants orphelins et nos pauvres sʹen réjouis‐<br />

sent aussi et vous <strong>de</strong>stinez pour eux une aumône généreuse, afin quʹils aient quelque part<br />

à votre bonheur; cette pensée est bien digne <strong>de</strong> votre charité et <strong>de</strong> votre foi; puisse le Sei‐<br />

gneur, qui a mis en vous cette inspiration, récompenser par <strong>de</strong> nouvelles grâces votre fidé‐<br />

lité à suivre toutes les suggestions que son Esprit vous donne.<br />

Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> dire <strong>avec</strong> quel empressement je vais offrir <strong>de</strong>main le St Sacrifice<br />

en actions <strong>de</strong> grâces; et comme il ne suffit pas dʹune heureuse naissance, mais quʹil faut,<br />

pour chaque jour <strong>de</strong> la vie, <strong>de</strong> nouveaux appuis et <strong>de</strong> nouvelles bénédictions dʹen haut,<br />

jʹaurai bien soin souvent, très souvent, dʹoffrir la chère petite Marie au Seigneur et aussi à<br />

sa sainte patronne qui va veiller dès ce moment sur elle; oh! la bonne gardienne! comme<br />

elle soutiendra bien les tendres soins <strong>de</strong> la mère, les vigilances <strong>de</strong> lʹheureux père, sans<br />

compter quʹelle modérera les gâteries <strong>de</strong> la grandʹmère et <strong>de</strong> lʹaïeule. Avec tant <strong>de</strong> garan‐<br />

ties, lʹavenir sourit à la chère nouvelle‐née et son berceau est plein <strong>de</strong> bonnes promesses; je<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>rai fidèlement à Dieu <strong>avec</strong> vous, Madame, quʹelles aient une pleine réalisation.<br />

Il me semble déjà quʹelle va être lʹange béni <strong>de</strong> la famille, resserrant encore les liens<br />

dʹune douce affection entre tous les membres unis par un commun intérêt, par un com‐<br />

mun amour <strong>de</strong> plus. La famille est bien lʹœuvre divine par excellence! lʹEglise elle‐même,<br />

et toutes ses sociétés saintes en ce mon<strong>de</strong> tirent leur mérite suprême <strong>de</strong> ce point quʹelles<br />

sont aussi <strong>de</strong>s familles.<br />

Ce mʹest une douce pensée, veuillez le croire, Madame, que celle <strong>de</strong> me trouver en<br />

ce sens <strong>avec</strong> vous et <strong>avec</strong> tous les vôtres une sorte <strong>de</strong> parenté, dʹautant plus précieuse<br />

quʹelle mʹassure quelque part à vos mérites comme à vos sympathies bienveillantes.<br />

Daignez agréer, en retour, les sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> dévouement <strong>avec</strong> lesquels<br />

je suis en N.S.<br />

Votre humble serviteur et ami Le <strong>Prevost</strong><br />

1719 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Reconnaissance pour sa générosité envers les Œuvres <strong>de</strong> la Congrégation.<br />

Vaugirard, 24 septembre 1872<br />

Madame la Marquise,<br />

Nous sommes en retraite <strong>de</strong>puis dimanche soir; je nʹai pu, dans les <strong>de</strong>ux premiers<br />

jours, trouver un moment pour vous remercier du don <strong>de</strong> joyeux avènement que votre<br />

1633


chère petite fille a fait à nos œuvres, ou plutôt que ses <strong>de</strong>ux mères, gran<strong>de</strong> et petite, leur<br />

ont fait en son nom; notre reconnaissance et aussi, jʹen ai la confiance, la bénédiction <strong>de</strong><br />

Dieu tomberont sur les trois fronts réunis; puissiez‐vous toutes ensemble, Madame, en<br />

sentir lʹheureuse influence; puisse, en particulier, la petite Marie croître en force et en san‐<br />

té, en attendant quʹelle croisse en mérites et en vertus. Je baise sa petite main et vous prie,<br />

Madame la Marquise, dʹagréer, <strong>avec</strong> Madame la Vicomtesse dʹHurbal et vos chers enfants,<br />

tous mes sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> dévouement en N.S.<br />

Votre humble serviteur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1720 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Promesses <strong>de</strong> prières; une famille qui sʹagrandit voit se mêler les épreuves et les joies.<br />

Chaville, 2 octobre 1872<br />

Madame la Marquise,<br />

Jʹai répondu à votre appel, comme je veux toujours le faire, et jʹai prié <strong>de</strong> mon<br />

mieux pour votre chère fille et pour sa petite Marie; je les ai aussi recommandées quoti‐<br />

diennement à ceux qui mʹentourent au moment du jour où, réunis tous ensemble à la cha‐<br />

pelle, nous mettons nos intentions diverses aux pieds <strong>de</strong> Dieu. Jʹespère quʹIl aura daigné<br />

nous entendre et donner <strong>de</strong> nouvelles forces aux objets <strong>de</strong> vos maternelles sollicitu<strong>de</strong>s.<br />

Jʹattendrai <strong>de</strong> votre bonté quelques mots qui me rassurent en mʹapprenant que<br />

toute inquiétu<strong>de</strong> a cessé et que votre esprit est rentré dans la paix. Lʹaccroissement <strong>de</strong> la<br />

famille est une grâce précieuse, mais, en augmentant les joies, il nous rend aussi accessi‐<br />

bles à <strong>de</strong>s inquiétu<strong>de</strong>s et à <strong>de</strong>s peines nouvelles; heureusement, le besoin dʹaimer nous fait<br />

accepter cette chance et ces incertitu<strong>de</strong>s, une sage Provi<strong>de</strong>nce lʹa réglé ainsi. Elle a voulu<br />

également que la prière et les œuvres saintes inclinassent selon nos vœux ses adorables<br />

volontés; cʹest pourquoi, Madame, jʹespère que vos pieux désirs sont montés là‐haut et au‐<br />

ront obtenu la double faveur que vous avez sollicitée.<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, les nouvelles assurances <strong>de</strong> mon respectueux<br />

dévouement pour vous et pour tout ce qui vous est cher.<br />

Votre très humble serviteur et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1721 à M. Trousseau<br />

Mouvement <strong>de</strong> personnel. M. Chéron nécessaire à Chaville, pour lʹenseignement.<br />

Vaugirard, 5 octobre 1872<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous réponds seulement un mot, nʹayant que quelques minutes avant <strong>de</strong> repartir<br />

pour Chaville.<br />

Je ne vois aucune chance, présentement au moins, pour lʹenvoi <strong>de</strong> M. Chéron à<br />

Tournay; il sera nécessaire à Chaville pour lʹenseignement, M. Boiry étant au moment <strong>de</strong><br />

sʹéloigner définitivement; nous serons très insuffisants pour notre tâche; nous nʹavons que<br />

12 persévérants [latinistes: Imhoff, Juvigny, J. Nansot, Chrétien, Degesne, Lasfargues, Or<br />

1634


isier; français: Hodiesne, H. Nansot, Foucaut, Duroy, Hirbec], mais 4 divisions, sans<br />

compter M. Edouard [Lainé] et M. Bouquet, formant <strong>de</strong>ux sortes <strong>de</strong> divisions à leur ma‐<br />

nière. Du côté <strong>de</strong> Metz, le rappel à Paris <strong>de</strong> M. Baumert est tout à fait décidé. Prenez donc<br />

patience, la visite <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Varax permettra <strong>de</strong> voir <strong>de</strong> près vos besoins; sʹil a un moyen<br />

quelconque <strong>de</strong> vous ai<strong>de</strong>r, il ne le négligera point.<br />

Je ne vous dis rien <strong>de</strong> plus; <strong>de</strong> vive voix, il vous dira tout ce qui peut vous intéres‐<br />

ser. Nos enfants <strong>de</strong> Chaville et tous nos ff. se rappellent à votre bon souvenir et vous assu‐<br />

rent <strong>avec</strong> moi <strong>de</strong> leurs plus cordiales affections.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

Le frère Hodiesne<br />

Le Père Lasfargues<br />

Le Père Desgesne<br />

1722 à M. Chaverot<br />

Toute la communauté <strong>de</strong> Chaville pour fêter la St‐Clément à Vaugirard.<br />

Dimanche, 17 novembre [1872]<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Nous irons tous pour la fête <strong>de</strong> la Présentation à Vaugirard, nos persévérants eux‐<br />

mêmes sʹy rendront et feront ainsi, paraît‐il, la clôture <strong>de</strong> leur retraite. Si jʹai paru incertain<br />

hier relativement à la présence <strong>de</strong> lʹensemble <strong>de</strong> la communauté <strong>de</strong> Chaville, cʹest quʹà ce<br />

moment jʹoubliais que la St ‐Clément <strong>de</strong>vait être réunie à la Présentation. Toute notre mai‐<br />

son, grands et petits, veut souhaiter bonne fête à M. Myionnet.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Dire, s.v.p., à M. Arsène [Briscul] à quelle heure sera dite la grandʹmesse?<br />

1723 à M. Trousseau<br />

A la recherche <strong>de</strong> bienfaiteurs. Encouragement au zèle pour le bien <strong>de</strong>s âmes. Sollicitu<strong>de</strong> pour la santé du père<br />

Trousseau, qui souffre du climat pluvieux et humi<strong>de</strong>.<br />

[novembre 1872]<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Cʹest chose assez délicate peut‐être dʹaller quêter chez le bon M. Desrousseaux, <strong>avec</strong><br />

lequel nous nʹavons aucune intimité; si vous alliez à Cambrai, vous pourriez lui rendre vi‐<br />

1635


site et le consulter sur la possibilité <strong>de</strong> recueillir quelques aumônes dans la ville; ce serait<br />

un moyen moins direct <strong>de</strong> lui faire connaître les besoins <strong>de</strong> vos œuvres. M. Lantiez a une<br />

partie <strong>de</strong> sa famille à Cambrai; peut‐être consentirait‐il, sur votre <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, à vous re‐<br />

comman<strong>de</strong>r à quelques‐uns <strong>de</strong> ses parents.<br />

Je bénis le bon Dieu qui vous fournit quelques occasions dʹexercer votre zèle pour le<br />

bien <strong>de</strong>s âmes, cʹest là notre vocation; soyez bien assuré quʹen vous mettant tout entier aux<br />

mains <strong>de</strong> ce bon Seigneur, Il saura vous employer comme un instrument docile en ses <strong>de</strong>s‐<br />

seins <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong>.<br />

Soignez bien vos rhumatismes; enveloppez‐vous <strong>de</strong> flanelle et dʹouate; ménagez<br />

lʹenveloppe <strong>de</strong> votre âme, afin quʹelle la serve plus vaillamment. Ayez confiance dʹailleurs,<br />

vos yeux et tous vos membres reprendront leur vigueur dès que ces temps humi<strong>de</strong>s et<br />

pluvieux, dont nous sentons la mauvaise influence, seront remplacés par une température<br />

plus saine.<br />

M. Chéron accepte vos 5 intentions premières et les 20 offertes en second lieu.<br />

Merci <strong>de</strong> vos petits livres pour nos chers enfants; continuez à leur écrire quelque‐<br />

fois, vos petites lettres entretiennent la bonne influence que vous exerciez sur eux. Nous<br />

serons heureux aussi, <strong>de</strong> notre côté, dʹavoir <strong>de</strong> vos nouvelles, afin <strong>de</strong> maintenir la cordiale<br />

entente qui existe entre Tournay et Chaville.<br />

Je vous embrasse bien affectueusement.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1724 <strong>de</strong> M. Boiry à M. <strong>de</strong> Varax<br />

P. S. <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Vocation <strong>de</strong> M. Boiry. MLP. ne sʹoppose pas à une ultime mise à lʹépreuve.<br />

Chaville, 30 novembre [1872]<br />

Mon Révérend Père,<br />

Je ne suis pas seul à craindre que la forme, peut‐être trop réservée, <strong>de</strong> ma lettre précé<strong>de</strong>nte<br />

nʹait amené quelque obscurité sur la nature réelle <strong>de</strong> mes dispositions intérieures. Avec plaisir, je<br />

suis le conseil dʹoser y apporter une explication.<br />

Il est très vrai que, sans une invitation extérieure à revenir sur la résolution que jʹavais ma‐<br />

nifestée <strong>de</strong> quitter la Congrégation, je nʹaurais point pris sur moi <strong>de</strong> faire à nouveau un premier<br />

pas dans cette direction. Je mʹen étais refusé le droit, tout en regrettant <strong>de</strong> ne lʹavoir pas.<br />

Les années écoulées ne me laissaient en mains aucune garantie positive à vous offrir <strong>de</strong><br />

moi‐même. Jʹétais, <strong>de</strong> mon côté, sans motifs sérieux pour continuer à marcher dans une voie où la<br />

Provi<strong>de</strong>nce mʹavait fait entrer, ou plutôt ceux qui me restaient nʹétaient que <strong>de</strong>s possibilités, <strong>de</strong>s<br />

espérances, un avenir incertain, sinon tout à fait désespéré.<br />

La droiture et la sincérité me faisaient un <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> ne mʹen contenter pas pour répondre à<br />

lʹattente <strong>de</strong> la Congrégation sur moi. Ces raisons ne me paraissaient suffire quʹamenées et accep‐<br />

tées <strong>de</strong> son unique et propre initiative.<br />

Aussi, dès que ces motifs me furent présentés, jʹy accédais volontiers; ce nʹétait pas dire as‐<br />

sez que je consentais à tout ce qui paraîtrait possible dans le sens <strong>de</strong> la vie religieuse, jʹaurais dû<br />

écrire que je le désirais.<br />

Assurément, je ne puis rien préjuger sur les résultats <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier essai, <strong>de</strong> cette épreuve<br />

suprême. Mais ce serait pour mon âme une gran<strong>de</strong> consolation <strong>de</strong> chercher à y mettre tout lʹeffort<br />

<strong>de</strong> ma volonté, à lʹâge où elle a, dans chaque individu, le plus dʹénergie. Si Dieu nʹa pas marqué<br />

ma place dans la Congrégation, avant la moitié <strong>de</strong> lʹannée jʹaurai succombé dans la lutte; mais, au<br />

moins, je pourrai me rendre témoignage <strong>de</strong> nʹavoir rien omis pour accomplir lʹordre divin; et mon<br />

1636


avenir, en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> la Congrégation, sera plein dʹespérance, sinon au temporel, du moins au spi‐<br />

rituel.<br />

Cette grâce, que lʹon mʹautorise à solliciter, je vous la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>avec</strong> instance et en toute<br />

humilité.<br />

Recevez, mon Révérend Père, lʹassurance <strong>de</strong> mon plus profond respect.<br />

Votre très humble et très obéissant serviteur<br />

E. Boiry<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹajoute <strong>de</strong>ux mots à cette missive, dʹaprès le désir que mʹen témoigne M. Boiry.<br />

Il a été vivement contristé <strong>de</strong> votre réponse, qui a trompé son attente. Il avait une<br />

sincère volonté <strong>de</strong> <strong>de</strong>meurer dans la Congrégation et il a écrit pour lʹexprimer, mais sa<br />

pensée, quʹil nʹénonce pas toujours simplement et nettement, sʹest, paraît‐il, trouvée mal<br />

rendue. Lʹentretien que jʹai eu <strong>avec</strong> lui me laisse bien convaincu que tel est réellement son<br />

vœu; les observations <strong>de</strong> M. Lantiez nʹont fait que le confirmer. Son état dʹâme habituel me<br />

semble être un mélange singulier dʹorgueil et <strong>de</strong> défiance <strong>de</strong> lui‐même.<br />

Jʹai <strong>de</strong>mandé hier au r.p. Pittar son avis, afin <strong>de</strong> vous le dire; il inclinait à la sortie <strong>de</strong><br />

M. Boiry, en supposant sa volonté hésitante et mal assurée, mais il croit quʹon peut le<br />

maintenir si elle est cordiale et spontanée; elle me paraît être vraiment telle, la droiture et<br />

la sincérité sont en M. Boiry <strong>de</strong>s qualités éprouvées. Il reconnaît quʹil serait dans le mon<strong>de</strong><br />

isolé et entouré <strong>de</strong> dangers; la pensée quʹil nʹétait, parmi nous, ni estimé, ni compris, me<br />

semble lʹavoir porté au découragement sur sa vocation; sʹil était soutenu et un peu affec‐<br />

tionné, je pense quʹil marcherait bien et rendrait <strong>de</strong>s services réels. Il est décidé, si on le<br />

met au Noviciat, à en suivre exactement tous les exercices et à remplir tels emplois quʹon<br />

lui donnera. Le r.p. Pittar pense quʹil trouverait ainsi lʹoccasion <strong>de</strong> prendre sur la vie reli‐<br />

gieuse <strong>de</strong>s vues nettes et précises, mieux quʹil nʹa jamais pu le faire jusquʹici. A mon avis,<br />

on pourrait faire avantageusement cet essai, M. Boiry, par ses sentiments et son intelli‐<br />

gence, nʹétant pas <strong>de</strong>s moindres parmi nous et nʹayant dans le caractère rien qui le ren<strong>de</strong><br />

incommo<strong>de</strong> à ceux qui lʹentourent.<br />

Jʹécris <strong>avec</strong> une peine extrême, sans ordre ni arrangement, ma tête étant noyée dans<br />

les vapeurs humi<strong>de</strong>s qui semblent envahir décidément notre pays; que Dieu nous gar<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong>s inondations et du débor<strong>de</strong>ment bien plus triste qui semble menacer aussi le mon<strong>de</strong><br />

moral.<br />

Tout va ici passablement; M. Poudroux est mala<strong>de</strong> <strong>de</strong>puis quelques jours, je pense<br />

que cʹest acci<strong>de</strong>ntel; pour le reste, M. Chaverot vous tient au courant.<br />

Votre tout affectionné ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

Bons souvenirs à nos ff. et aux amis.<br />

1725 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Difficultés pour choisir la communauté qui <strong>de</strong>vra accueillir M. Boiry.<br />

Chaville, 3 décembre 1872<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je remercie Dieu <strong>de</strong> la miséricor<strong>de</strong> quʹIl vous inspire pour M. Boiry; je ne crains pas<br />

<strong>de</strong> vous dire ces mots contenus dans votre lettre car, ayant eu à souffrir <strong>de</strong> son indécision,<br />

vous eussiez pu, sans dureté, vous montrer plus rigoureux à son endroit.<br />

1637


Je ne suis pas bien sûr quʹil y aurait convenance et avantage à le séparer temporai‐<br />

rement <strong>de</strong> la Congrégation par un séjour momentané au Cercle. Autant que je le puis<br />

croire, on nʹa connaissance, hors <strong>de</strong> Chaville, que dʹune hésitation <strong>de</strong> sa part; ici même,<br />

son maintien si prolongé parmi nous a laissé pour tous un doute persistant sur le parti qui<br />

serait pris, tant du côté <strong>de</strong> la Congrégation que du sien propre. Ne serait‐il pas dʹun effet<br />

moins fâcheux <strong>de</strong> laisser cette impression vague dans les esprits que dʹy porter le senti‐<br />

ment pénible dʹune sortie et, après, le <strong>de</strong>mi scandale dʹune rentrée? Ce point accepté, la si‐<br />

tuation serait simple: il semblera, à Vaugirard, faire une sorte <strong>de</strong> noviciat <strong>de</strong> 7 e an ou<br />

mieux, suppléer à lʹinsuffisance <strong>de</strong> sa primitive formation. Je crois quʹil acceptera toute<br />

condition, mais son âme est facile à contrister; jʹaimerais mieux quʹil entrât à Vaugirard<br />

<strong>avec</strong> espoir et confiance quʹ<strong>avec</strong> serrement <strong>de</strong> cœur.<br />

Je vous abandonne cette vue; je me bornerai à lui dire que vous lui répondrez jeudi.<br />

Je suis heureux <strong>de</strong> tous les bons indices que vous avez trouvés à Angers et ailleurs; Dieu<br />

nous ai<strong>de</strong> sensiblement à travers les temps mauvais, espérons que le Ciel re<strong>de</strong>viendra se‐<br />

rein.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1726 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Recherche dʹune pension à Paris. Difficultés <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> famille. Nouvel élan <strong>de</strong> la France chrétienne en 1872.<br />

Protection <strong>de</strong> Dieu sur nos Œuvres.<br />

Chaville, 4 décembre 1872<br />

Madame la Marquise,<br />

Jʹai bien mauvaise grâce en laissant plusieurs jours non répondue la bonne et<br />

confiante lettre que vous mʹavez fait lʹhonneur <strong>de</strong> mʹécrire à la fin du mois <strong>de</strong>rnier (je ne<br />

veux pas chercher la date, <strong>de</strong> peur <strong>de</strong> confusion pour moi). Ce nʹest pas que le bon désir<br />

dʹêtre empressé mʹait manqué, mais on a la marche si lente à mon âge quʹon est souvent en<br />

retard; je me confie en votre indulgence, Madame, toujours si aimable à mon égard.<br />

Jʹaccueille <strong>avec</strong> gran<strong>de</strong> joie lʹespérance <strong>de</strong> vous revoir cet hiver à Paris, ainsi que<br />

Madame votre mère et vos trois enfants; je désire spécialement être présenté à Ma<strong>de</strong>moi‐<br />

selle Marie <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot, je serai très flatté si jʹobtiens quelquʹun <strong>de</strong> ses gracieux sourires.<br />

Jʹai déjà cherché en divers sens quelque <strong>de</strong>meure digne où vous puissiez trouver du<br />

repos et, en même temps, un peu <strong>de</strong> société acceptable. La chose ne me paraît pas sans dif‐<br />

ficulté, au point <strong>de</strong> vue surtout <strong>de</strong> lʹentourage, bien rarement choisi à souhait dans une<br />

maison plus ou moins accessible à chacun. Les maisons religieuses sont les plus dignes et<br />

les plus convenables, mais elles sont, ou éloignées du centre <strong>de</strong>s relations, ou réservées<br />

aux dames qui y prennent une rési<strong>de</strong>nce constante comme pensionnaires ou locataires.<br />

Toutefois, Paris a tant <strong>de</strong> ressources en tout genre quʹon a toujours chance dʹy trouver ce<br />

quʹon désire; je continuerai mes recherches. La solitu<strong>de</strong> où vous laisse lʹabsence <strong>de</strong> vos<br />

chers enfants et lʹéloignement <strong>de</strong> Madame <strong>de</strong> S t Maur serait un peu sévère et monotone, si<br />

elle se prolongeait beaucoup; la campagne nʹest guère aimable lʹhiver sans un entourage<br />

<strong>de</strong> famille un peu nombreux; encore faut‐il quʹil soit intime et sympathique, dès quʹil y a<br />

contrainte, réserve, cérémonie, lʹaisance et lʹépanchement cessent, la société <strong>de</strong>vient une<br />

gêne, un vrai far<strong>de</strong>au. Le savoir‐vivre, lʹhabitu<strong>de</strong> du mon<strong>de</strong>, le respect humain donnent<br />

1638


force pour se contraindre, mais ce nʹest pas sans souffrance et sans gémissement. Il serait<br />

mieux, sans doute, <strong>de</strong> prendre son appui dans un sentiment purement chrétien: patience,<br />

soumission, pénitence, charité; lʹâme y trouverait douceur et consolation en même temps<br />

quʹamertume, et cette <strong>de</strong>rnière <strong>de</strong>viendrait peu sensible; mais une vertu si haute ne sʹac‐<br />

quiert pas en un jour, nous ne <strong>de</strong>vons donc pas nous étonner ni nous décourager quand<br />

nous ne sommes pas encore au sommet; tendons‐y seulement, comprenant que le beau, le<br />

parfait est là et, à lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> la grâce, nous y viendrons enfin; confiance, persévérance,<br />

prière, on obtient tout par là.<br />

Jʹai comme vous, Madame, bonne espérance; en voyant que notre France se reprend<br />

à prier, à prier en gran<strong>de</strong>s assemblées, comme il convient dans les calamités publiques.<br />

Quand tous ont péché, il faut que tout le mon<strong>de</strong> expie et sʹhumilie et, puisque le scandale<br />

a été général, la réparation doit aussi se faire à ciel ouvert. Cʹest le mérite et le sens <strong>de</strong>s pè‐<br />

lerinages; aussi, dʹinstinct, ou plutôt par inspiration <strong>de</strong> grâce et appel <strong>de</strong> la S te Vierge, les<br />

populations émues se sont mises en marche vers les sanctuaires bénis <strong>de</strong> Dieu pour chan‐<br />

ter ses louanges, professer hautement leur foi et <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r miséricor<strong>de</strong>; la miséricor<strong>de</strong> ré‐<br />

pondra, nous souffrirons encore peut‐être, mais, après lʹépreuve, la consolation viendra.<br />

Je vous rends grâce <strong>de</strong> votre bienveillant souvenir pour nos œuvres; Dieu daigne<br />

les bénir toujours, elles se sont soutenues à travers les difficultés et ten<strong>de</strong>nt à sʹaccroître au<br />

lieu <strong>de</strong> sʹamoindrir; il y a, dans tous les temps, <strong>de</strong>s misères à soulager, <strong>de</strong>s faiblesses à ap‐<br />

puyer, <strong>de</strong>s ignorances à éclairer; Dieu fournit toujours <strong>de</strong>s moyens, <strong>de</strong>s ressources pour<br />

ces besoins, Il les confie à son Eglise qui, sous <strong>de</strong>s formes diverses, les applique en son<br />

nom. Ces secours ne tariront jamais, tant quʹil y aura <strong>de</strong>s chrétiens qui crieront vers le Ciel:<br />

Notre Père qui êtes aux Cieux. Pourquoi ne comprend‐on pas toujours cette puissance <strong>de</strong><br />

la prière pour tout obtenir, la force <strong>de</strong> la foi pour unir les âmes, la douceur <strong>de</strong> la charité<br />

qui adoucit les maux et redonne la confiance! Je bénis Dieu <strong>avec</strong> vous, Madame, qui a<br />

donné abondamment ces biens précieux à vous, à votre bien bonne mère, presque à tous<br />

les autres; je prie <strong>avec</strong> vous fidèlement pour ceux qui sont moins avancés; leur heure<br />

viendra, espérons‐le, puisque, en eux, le cœur est déjà du bon côté.<br />

Veuillez, Madame la Marquise, agréer <strong>avec</strong> Madame votre mère tous mes senti‐<br />

ments <strong>de</strong> profond respect et <strong>de</strong> dévouement en Notre‐Seigneur.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1727 à M. Risse<br />

Attachement aux frères les plus anciens. Espoir en la conservation <strong>de</strong> lʹŒuvre <strong>de</strong> Metz.<br />

Chaville, 9 décembre 1872<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je suis bien touché <strong>de</strong> votre bon et fidèle souvenir; entre tous, vous restez dévoué<br />

aux vieilles affections qui ont cimenté, dans le Cœur du divin Seigneur, les premiers élé‐<br />

ments <strong>de</strong> notre famille religieuse; je réponds bien, <strong>de</strong> mon côté, à ces sentiments et je gar<strong>de</strong><br />

à tous les anciens <strong>de</strong> notre Congrégation le plus cordial et le plus tendre attachement; cʹest<br />

dire que je suis tout particulièrement uni à vous, mon bien cher ami, qui, <strong>de</strong>s premiers,<br />

parmi les fondateurs dʹœuvres en province, avez voulu faire alliance <strong>avec</strong> les Frères <strong>de</strong> St ‐<br />

1639


Vincent <strong>de</strong> Paul. Les années ont passé, le temps nʹa fait quʹaccroître notre dévouement ré‐<br />

ciproque qui passera, espérons‐le, à ceux qui nous succé<strong>de</strong>ront.<br />

Soyez assuré que je prendrai soin <strong>de</strong> voir, comme M. <strong>de</strong> Varax, votre journal men‐<br />

suel si fidèlement tenu, afin <strong>de</strong> suivre dʹesprit comme <strong>de</strong> cœur tous vos mouvements et<br />

ceux <strong>de</strong> vos œuvres.<br />

M. Baumert mʹavait dit déjà que tout semblait assez rassurant sur les rapports <strong>de</strong><br />

votre maison <strong>avec</strong> les autorités du lieu; la nature populaire et inoffensive <strong>de</strong> lʹœuvre la<br />

préservera, Dieu aidant, <strong>de</strong> tout choc, les bons anges la gar<strong>de</strong>ront comme une défense pré‐<br />

cieuse pour les jeunes âmes quʹils ont charge <strong>de</strong> préserver.<br />

Je suis heureux, et pas surpris, dʹapprendre que notre cher abbé Cauroy vous donne<br />

satisfaction; il avait fait son apprentissage près <strong>de</strong> vous [premières étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> latin <strong>avec</strong> M.<br />

Gauffriau] et semblait comme pré<strong>de</strong>stiné pour la maison <strong>de</strong> Metz; elle reste ainsi en bon<br />

esprit <strong>de</strong> famille, cʹest bien celui qui convient à nos Communautés; le Seigneur lui‐même<br />

nous en a donné le modèle dans sa vie intime <strong>avec</strong> Marie et Joseph à Nazareth, et, chose<br />

remarquable, notre principale maison dʹœuvres nʹa‐t‐elle pas reçu ce nom!<br />

Je vous remercie pour la notice et pour la charmante image <strong>de</strong> lʹImmaculée Concep‐<br />

tion arrivée tout à point, à lʹoccasion <strong>de</strong> sa fête; cʹest une aimable pensée que jʹai bien ap‐<br />

préciée.<br />

Adieu, mon bien bon ami, mille souvenirs à nos ff. et cordiale affection pour tous en<br />

J. et M.<br />

Votre ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

1728 à M. Maignen<br />

Témoignage dʹaffection. A la recherche dʹune pension pour M me <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot et sa mère.<br />

Chaville, 15 décembre 1872<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

M. Streicher mʹavait déjà parlé, <strong>de</strong> lui‐même, <strong>de</strong> la fête du r.p. Foinel, et il était<br />

convenu entre nous quʹil irait lui offrir son respect et ses vœux; je ne suis pas sûr quʹil<br />

puisse passer au Cercle le jour entier, car notre personnel est tellement réduit que diffici‐<br />

lement nous admettons <strong>de</strong>s absences prolongées; il fera tout ce que lʹordre du jour rendra<br />

possible.<br />

Ne croyez pas, mon bien cher enfant, que je me montre susceptible à votre endroit;<br />

jʹavais remarqué quʹà la fête <strong>de</strong> M. Myionnet et à celle <strong>de</strong> lʹImmaculée Conception, vous<br />

nʹétiez pas venu me voir; me sentant maintenant un peu plus délaissé que précé<strong>de</strong>mment,<br />

je craignais que cette nécessité <strong>de</strong> position ne sʹétendît jusquʹà vous; je ne me sentais pas<br />

fort pour ce <strong>de</strong>rnier sacrifice; jʹespère que Dieu lʹajournera pour moi jusquʹà ce moment où<br />

la <strong>de</strong>rnière fibre du cœur sera tranchée <strong>avec</strong> celle qui tient la vie; cette affection a été for‐<br />

mée <strong>avec</strong> Lui et pour Lui, elle ne prend rien <strong>de</strong> ce qui Lui est dû; votre si filiale lettre mʹas‐<br />

sure que vous voyez bien les choses ainsi, elle mʹa donné un profond contentement dont je<br />

vous remercie.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1640


P. S. Connaissez‐vous quelque maison ou pension digne, où <strong>de</strong>ux dames <strong>de</strong> haute<br />

position [M mes <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot et dʹHurbal] pourraient prendre asile pour quelques mois<br />

dʹhiver? Une communauté leur paraît un peu sévère, bien quʹelles soient fort chrétiennes,<br />

parce quʹelles désireraient un peu <strong>de</strong> société le soir; mais elles sont difficiles pour le choix<br />

<strong>de</strong> cet entourage. Je crains que ces conditions réunies <strong>de</strong> convenance et dʹagrément ne<br />

soient presque introuvables; si vous connaissez quelque chose qui en approche, dites‐le<br />

moi, je vous prie. Adieu, ami.<br />

1729 à M. A. Lainé<br />

Epanchement paternel; encouragements à marcher dʹun cœur vaillant aux œuvres <strong>de</strong> Dieu.<br />

Chaville, 16 décembre 1872<br />

Mon bien cher fils en N.S.,<br />

Jʹai reçu en son temps votre bonne petite lettre qui mʹa été un aimable souvenir; je<br />

voulais y répondre bien vite, mais on a la marche lour<strong>de</strong> et lente quand on a sur les épau‐<br />

les une pesante charge dʹannées; ce nʹest pas une simple figure, le temps pèse bien réelle‐<br />

ment: sont‐ce les fautes? sont‐ce les fatigues accumulées? on ne saurait le dire, mais <strong>de</strong> fait<br />

le pas se ralentit; serait‐ce donc quʹon craint dʹarriver trop vite au but? Je ne le pense pas.<br />

Pour vous, bien cher ami, jeune, robuste et plein dʹavenir, marchez aux œuvres saintes que<br />

Dieu attend <strong>de</strong> vous; un cœur vaillant sʹanime et sent lʹar<strong>de</strong>ur à la vue <strong>de</strong> la tâche préparée<br />

pour lui. Elle est gran<strong>de</strong> aujourdʹhui <strong>de</strong>vant tous les serviteurs du Père <strong>de</strong> famille, car<br />

lʹhomme ennemi sème tant <strong>de</strong> mauvais grain que le bon, clairsemé, semble presque étouf‐<br />

fé; mettez bien la main à lʹouvrage, sans beaucoup regar<strong>de</strong>r aux obstacles. Ils sont inévita‐<br />

bles, passez <strong>de</strong>ssus à pieds joints comme vous le faisiez si bien à la gymnastique; vous ne<br />

regardiez guère à quelque écorchure ou égratignure, quʹimporte, il faut se remuer. Faites<br />

ainsi moralement: une contrariété, une blessure dʹamour‐propre, un bon vouloir mal com‐<br />

pris, autant en emporte le vent!<br />

Voilà, cher enfant, je voulais seulement répondre à vos paroles affectueuses et la<br />

plume, sans mon avis, tourne aux morales et aux conseils. Cʹest encore lʹeffet <strong>de</strong> lʹâge,<br />

mais, bien cher ami, cʹest aussi lʹinspiration du tendre intérêt que je vous porte; vous sa‐<br />

chant aimant, impressionnable, sujet à vous ombrager à tout choc du cœur, jʹai, comme<br />

instinctivement, porté la main <strong>de</strong> ce côté, voulant y mettre la force et la résolution; nʹest‐ce<br />

pas vous dire combien je souhaite pour vous la paix, ce don par excellence du divin Sei‐<br />

gneur? Puisse‐t‐Il lʹentretenir par sa grâce dans votre cœur, afin que, libre et dispos, vous<br />

fassiez votre salut et celui dʹune gran<strong>de</strong> multitu<strong>de</strong> dʹâmes avant dʹarriver au but final; si<br />

près dʹy toucher, je regrette dʹavoir si peu fait pour mériter la récompense promise!<br />

Bon souvenir à tous nos frères, partagez <strong>avec</strong> eux mes tendres dévouements.<br />

Votre ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1729‐1 à un Ingénieur <strong>de</strong>s Chemins <strong>de</strong> Fer<br />

Pour éviter que la propriété <strong>de</strong> Chaville ne subisse dʹirréparables dommages (brouillon <strong>de</strong> lettre dʹune date très<br />

incertaine).<br />

1641


[1872]<br />

Monsieur,<br />

Vous mʹavez fait lʹhonneur <strong>de</strong> mʹinformer, par votre lettre du 19 <strong>de</strong> ce mois, que<br />

lʹadministration du Chemin <strong>de</strong> Fer <strong>de</strong> lʹOuest, route <strong>de</strong> Versailles, aurait lʹintention <strong>de</strong><br />

faire couper les plantations qui bornent la ligne sur les talus <strong>de</strong> manière à ce quʹelles ne<br />

dépassent pas la hauteur dʹun mètre au‐<strong>de</strong>ssus du rail.<br />

Cette mesure qui atteindrait notre propriété <strong>de</strong> Chaville (14 rue <strong>de</strong> lʹEglise) dans<br />

toute sa longueur causerait un dommage tel que lʹimmeuble y perdrait un tiers <strong>de</strong> sa va‐<br />

leur, nous laisserait absolument à découvert contre les vues dominantes <strong>de</strong>s trains circu‐<br />

lant incessamment sur la hauteur et retirerait à lʹimmeuble le seul agrément quʹil ait réel‐<br />

lement: la solitu<strong>de</strong> et lʹabri quʹon y peut trouver, à part encore les <strong>de</strong>structions dʹun aspect<br />

absolument défiguré... De lʹavis <strong>de</strong> tous, lʹimmeuble y perdrait une moitié, si ce nʹest plus,<br />

<strong>de</strong> sa valeur.<br />

Cette considération avait été comprise dans lʹorigine, quand la propriété fut coupée<br />

en <strong>de</strong>ux par lʹétablissement <strong>de</strong> la voie et, outre lʹin<strong>de</strong>mnité qui fut accordée à M. X... , pro‐<br />

priétaire alors dudit immeuble, lʹautorisation lui fut concédée <strong>de</strong> planter le talus afin <strong>de</strong><br />

lʹabriter contre les vues trop gênantes sur ce point.<br />

Lʹadministration bienveillante et dʹailleurs intéressée à ce que les propriétés qui<br />

longent sa ligne soient moins fréquentées, a constamment <strong>de</strong>puis 30 ans (si je ne me<br />

trompe) maintenu ce privilège.<br />

Jʹose donc espérer, Monsieur, quʹelle ne nous imposera pas dʹobligation si désas‐<br />

treuse dont il est question.<br />

Les Prussiens, qui ont occupé 6 mois notre <strong>de</strong>meure, y ont causé dʹirréparables dé‐<br />

vastations (dont nous nʹavons eu jusquʹici nulle in<strong>de</strong>mnité). Si le détriment nouveau qui<br />

nous menace nous atteignait, il mettrait le comble à sa ruine.<br />

1730 à M. Trousseau<br />

Lʹusage <strong>de</strong> se souhaiter la bonne année nʹest pas une formalité vaine. En quoi consiste le trésor <strong>de</strong> la parfaite do‐<br />

nation à Dieu. La messe <strong>de</strong> minuit à Chaville; malentendu <strong>avec</strong> la paroisse.<br />

Chaville, 30 décembre 1872<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vous remercie, ainsi que nos frères belges, <strong>de</strong> vos bons souhaits <strong>de</strong> fête et du<br />

nouvel an; ce souvenir aimable <strong>de</strong> votre part à tous mʹa été bien doux; quoique on en dise<br />

parfois, cet usage <strong>de</strong>s vœux, chaque année répétés, nʹest vi<strong>de</strong> ni <strong>de</strong> sens ni <strong>de</strong> sentiment<br />

vrai; sa persistance le prouve bien dʹailleurs, <strong>de</strong>puis longtemps il serait prescrit, sʹil nʹétait<br />

la satisfaction dʹun instinct et dʹun besoin réels.<br />

Jʹapprends <strong>avec</strong> une vive satisfaction que vous prenez successivement possession<br />

<strong>de</strong>s ministères spirituels, sans lesquels le prêtre nʹa pas la plénitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> son action et la<br />

consolation que le divin Seigneur y a attachée; en y joignant le contentement intérieur que<br />

la vie religieuse, la règle, les pieux exercices comportent <strong>de</strong> leur côté, vous aurez tous les<br />

biens quʹune consécration entière à Dieu peut procurer; ne perdons rien <strong>de</strong> ces précieux<br />

avantages, car, dans les vues <strong>de</strong> la Sagesse éternelle, ils ne sont pas pour nous seuls et doi‐<br />

vent aussi concourir au salut <strong>de</strong> plusieurs, par les fruits <strong>de</strong> nos œuvres et sacrifices.<br />

1642


Tout va passablement ici et dans lʹensemble <strong>de</strong> la Congrégation. Un nouveau f. ec‐<br />

clésiastique doit arriver <strong>de</strong> Bretagne à la fin <strong>de</strong> janvier; il est venu passer quelques jours à<br />

Vaugirard, je crois quʹil nous conviendra.<br />

M. Boiry est au Noviciat à Vaugirard et paraît être bien disposé. Le personnel <strong>de</strong><br />

Chaville est ainsi encore amoindri.<br />

La fête <strong>de</strong> Noël sʹest bien passée pour nous. M. Baumert est venu chanter la messe<br />

<strong>de</strong> minuit; malheureusement, par suite <strong>de</strong> circonstances non concertées, tout ce qui, à<br />

Chaville, assiste à la messe <strong>de</strong> minuit sʹest porté vers notre chapelle qui avait 60 personnes,<br />

tandis quʹà la paroisse <strong>de</strong>ux femmes et trois enfants sʹy sont trouvés seuls, les Sœurs ayant,<br />

<strong>de</strong> leur côté, un prêtre pour elles seules, sans quʹon en eût rien annoncé; M. le Curé [abbé<br />

Metcalfe] a été fort contrarié <strong>de</strong> son isolement et sʹest trouvé presque menaçant envers ses<br />

paroissiens à la messe du jour; mais je pense quʹil se tranquillisera en voyant clairement<br />

que personne nʹa voulu lui causer aucune peine.<br />

La fête <strong>de</strong> S t ‐<strong>Jean</strong> a été aimable, beaucoup dʹinvités réunis, beaux offices, tout le<br />

mon<strong>de</strong> satisfait.<br />

Adieu, mon bien cher ami, tenez‐moi au courant, au moins in globo, <strong>de</strong> tout ce qui<br />

intéresse vous, vos frères et vos œuvres; mon cœur ne vieillit point et vous gar<strong>de</strong> à tous la<br />

plus tendre affection. Je vous envoie <strong>de</strong> loin la bénédiction que jʹeusse été si heureux <strong>de</strong><br />

vous donner ici. Le divin Seigneur la fera parvenir jusquʹà vous.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1731 à M. Chaverot<br />

MLP. répare un malentendu vis‐à‐vis du personnel domestique; ilcherche du vin qui lui convienne.<br />

30 décembre 1872<br />

Mon cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Chéron, mal informé, a cru que quelques restes du <strong>de</strong>ssert <strong>de</strong> la St‐<strong>Jean</strong>, envoyés<br />

par vous à M me Mahélin [cuisinière] étaient <strong>de</strong>stinés aux persévérants; il a, en mon ab‐<br />

sence, repris ces objets à la pauvre femme qui les avait déjà reçus et qui a été peinée du<br />

procédé.<br />

Je pourrais réparer un peu ce malentendu au moyen <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux oranges que vous<br />

mʹavez remises pour Nicolais et le p. Louis [domestiques]. M.Streicher, en effet, mʹassure<br />

que lʹun et lʹautre ont pris amplement part à la fête, ayant déjeuné copieusement <strong>avec</strong> les<br />

persévérants et dîné ensuite <strong>avec</strong> Marie et Auguste, qui leur ont tout donné à souhait. Je<br />

pourrais donc, sans injustice, les considérer comme ayant été ainsi suffisamment gratifiés.<br />

Je désirerais, pour moi personnellement, que vous puissiez mʹenvoyer par Nicolais<br />

une bouteille du vin <strong>de</strong> Bor<strong>de</strong>aux qui était pour tous sur la table dʹhonneur (<strong>avec</strong> cachet<br />

rouge) à la fête <strong>de</strong> S t ‐<strong>Jean</strong>, au souper. Je cherche, non sans difficulté en ce moment, à trou‐<br />

ver ce qui peut me convenir en fait <strong>de</strong> vin; il serait bon que je puisse faire lʹessai <strong>de</strong> celui‐là<br />

avant dʹen <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à M. Dublaix qui lʹa vendu. Après mʹen être procuré quelque petite<br />

provision <strong>de</strong> sorte ou dʹautre chez lui, je ne manquerai pas <strong>de</strong> compenser <strong>avec</strong> la Maison‐<br />

Mère le prêt quʹelle mʹaura fait.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1643


P. S. Pardon pour ces minimes détails; il suffirait dʹavertir M. Audrin qui remettrait<br />

à Nicolais ce que je <strong>de</strong>man<strong>de</strong>.<br />

1731‐1 à M. Leclerc<br />

Vœux <strong>de</strong> nouvel an.<br />

Chaville, 30 décembre 1872<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Votre bonne et aimable lettre mʹa causé une douce joie; un souvenir <strong>de</strong> ceux quʹon<br />

aime est précieux en tout temps, il lʹest en particulier au commencement dʹune nouvelle<br />

année. A ce moment en effet, on fait comme une revue <strong>de</strong> ses affections pour donner quel‐<br />

que marque <strong>de</strong> sympathie à celles quʹon trouve vivantes et persistantes en soi; on semble<br />

alors dire à chacune: le temps nʹa pas usé mes sentiments, je suis toujours vôtre, ils sont<br />

vrais et profonds, lʹannée qui commence ne les verra pas finir.<br />

Jʹespère, bien cher ami, quʹil en sera ainsi pour nous; je ne répondrai pas, quant à<br />

moi, <strong>de</strong> durer toute lʹannée en ce mon<strong>de</strong> mais en passant dans un autre, quel que soit le<br />

moment, je ne laisserai <strong>de</strong>rrière moi que le bagage matériel sans rien négliger du spirituel<br />

ni <strong>de</strong>s choses du cœur; vous pouvez donc compter, quʹen tout cas, vous nʹy serez pas ou‐<br />

blié. Je ne sépare pas <strong>de</strong> vous, en ce sens, vos chers frères, M. [Ad.] Lainé, bien quʹil semble<br />

oublier tous ceux qui lui sont dévoués, et mon fils <strong>Léon</strong> Bérard dont je viens <strong>de</strong> recevoir<br />

une bonne petite épître. Assurez‐les tous <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> ma cordiale affection et recevez ensem‐<br />

ble mes vœux pour vous, pour vos œuvres, <strong>avec</strong> la bénédiction que, du plus profond <strong>de</strong><br />

mon cœur, je vous donne <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> notre Père qui est au cieux.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1732 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

A propos <strong>de</strong> son prochain voyage à Paris. Les recherches <strong>de</strong> MLP. pour une pension nʹont pas abouti.<br />

Chaville, 1 er janvier 1873<br />

Madame la Marquise,<br />

Jʹai été heureux <strong>de</strong> recevoir <strong>de</strong> vos nouvelles par la bonne et aimable lettre que vous<br />

avez bien voulu mʹécrire, heureux surtout <strong>de</strong> vous savoir, ainsi que Madame votre mère,<br />

en santé meilleure, heureux enfin dʹapprendre que votre retour à Paris est très prochain;<br />

dans 15 jours, vous serez rapprochée <strong>de</strong> nous et ceux qui vous sont dévoués pourront jouir<br />

<strong>de</strong> votre présence; personne toutefois ne sait encore présentement (je le présume du<br />

moins) où il <strong>de</strong>vrait aller pour se donner cette satisfaction. Votre lettre mʹinforme, en effet,<br />

que vous nʹavez encore pris aucune détermination sur la rési<strong>de</strong>nce que vous choisirez. Jʹai<br />

bien cherché quelque parti qui pourrait vous être proposé, je nʹen ai trouvé aucun qui me<br />

paraisse réunir les diverses conditions que vous désireriez rencontrer. La maison qui, plus<br />

que dʹautres, me semblerait présenter les plus essentielles serait celle <strong>de</strong>s Dames Bénédic‐<br />

tines [Augustines] <strong>de</strong> la rue <strong>de</strong> la Santé, quartier S t ‐Jacques. Lʹétablissement est parfait,<br />

<strong>avec</strong> une belle chapelle, un grand jardin, dames pensionnaires <strong>de</strong> société choisie. Lʹéloi‐<br />

gnement serait, à mon sens, la seule objection, car les prix <strong>de</strong> pension nʹont rien dʹexagéré<br />

et les appartements sont fort convenables.<br />

1644


La difficulté <strong>de</strong> lʹéloignement est dʹailleurs fort amoindrie par la fréquence <strong>de</strong>s<br />

moyens <strong>de</strong> communication par omnibus et voitures en toutes directions; <strong>de</strong>s personnes<br />

fort connues <strong>de</strong> moi ont séjourné longuement dans cette maison <strong>avec</strong> une entière satisfac‐<br />

tion. Si, faute <strong>de</strong> trouver un lieu plus à votre convenance, Madame la Marquise, vous vous<br />

arrêtiez à la pensée dʹessayer <strong>de</strong> celui dont il sʹagit, jʹaviserais à prendre quelques rensei‐<br />

gnements sur les logements dont lʹétablissement pourrait présentement disposer.<br />

Il se peut quʹil existe dʹautres maisons en quartier plus central, qui offrissent <strong>de</strong>s<br />

avantages pareils, mais elles ne me sont pas connues et toutes mes enquêtes nʹont abouti à<br />

aucun résultat; cʹest lʹinutilité <strong>de</strong> ces recherches qui mʹa empêché, Madame la Marquise, <strong>de</strong><br />

vous entretenir plus tôt dʹun sujet que je savais intéresser Madame dʹHurbal et vous éga‐<br />

lement.<br />

Je suis mille fois touché <strong>de</strong> vos vœux pour nous et nos humbles travaux; vos prières<br />

obtiendront, jʹen ai la confiance, que Dieu continue à nous accor<strong>de</strong>r son appui.<br />

Pour notre part, nous sommes fidèles à vous comprendre, ainsi que votre chère fa‐<br />

mille, parmi les âmes généreuses et dévouées qui ont droit à nos souvenirs <strong>de</strong>vant le Sei‐<br />

gneur. En ce qui me touche personnellement, je ne manque jamais dʹoffrir chaque semaine<br />

le S t Sacrifice aux jours qui vous sont réservés. Je pense que vos trois chers enfants vont se<br />

rapprocher <strong>de</strong> vous, si déjà ils ne sont <strong>de</strong> retour à S t ‐Laurent; veuillez les assurer (M lle Ma‐<br />

rie ne comprendra guère) que leur souvenir mʹest présent aux heures les mieux choisies;<br />

pour Madame dʹHurbal, votre mère, elle vous est tellement unie que je ne la sépare jamais<br />

<strong>de</strong> vous.<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, les nouvelles assurances du profond respect<br />

<strong>avec</strong> lequel je suis<br />

Votre humble et dévoué serviteur Le <strong>Prevost</strong><br />

1733 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Souhaits <strong>de</strong> bienvenue à Paris.<br />

Chaville, 27 janvier 1873<br />

Madame la Marquise,<br />

Je salue <strong>avec</strong> joie votre arrivée et celle <strong>de</strong> Madame votre mère; je vous souhaite une<br />

toute heureuse bienvenue et jʹai confiance que les quelques difficultés <strong>de</strong> votre première<br />

installation vont faire place à une série <strong>de</strong> jours paisibles et bien reposants; il est très ordi‐<br />

naire que Dieu éprouve quelque peu ses serviteurs avant <strong>de</strong> les établir dans le calme, afin<br />

quʹils en sentent mieux le bienfait.<br />

Le choix que vous avez fait pour votre <strong>de</strong>meure <strong>de</strong> lʹhôtel du Bon La Fontaine me<br />

donne aussi confiance, cette maison, où je suis allé quelquefois, a très bon renom; NN. SS.<br />

les Evêques y <strong>de</strong>scen<strong>de</strong>nt volontiers, ainsi que bon nombre <strong>de</strong> familles distinguées, il se<br />

pourrait faire que vous en rencontrassiez quelquʹune qui vous soit connue et que vous<br />

eussiez ainsi un peu <strong>de</strong> société; le quartier est dʹailleurs fort central et très accessible, les<br />

voitures <strong>de</strong> toutes sortes y aboutissant.<br />

Je vais, par la pensée, passer à pieds joints sur les jours qui nous séparent <strong>de</strong> ven‐<br />

dredi, afin <strong>de</strong> jouir par avance <strong>de</strong> votre chère visite; je nʹai jamais cru, et pour <strong>de</strong> très bon‐<br />

nes raisons, que ce fût là un jour <strong>de</strong> malheur, mais désormais il me sera particulièrement<br />

aimable et <strong>de</strong> bonne espérance.<br />

1645


Veuillez agréer, Madame la Marquise, et partager <strong>avec</strong> Madame la Vicomtesse<br />

dʹHurbal, les sentiments <strong>de</strong> respectueux dévouement <strong>avec</strong> lesquels je suis<br />

Votre humble et dévoué serviteur et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1734 à M. Maignen<br />

Travailler en tenant compte du fort et du faible <strong>de</strong> ses frères. MLP. regrette <strong>de</strong> le voir peu souvent, mais il le ver‐<br />

ra à loisir au Ciel.<br />

Chaville, 3 février 1873<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Merci <strong>de</strong> votre bonne lettre du 1er <strong>de</strong> ce mois, et merci aussi <strong>de</strong>s dispositions que<br />

vous réglez pour que M. Guillot et M. Streicher prennent bien possession <strong>de</strong> leurs emplois<br />

respectifs.<br />

Je profiterai <strong>de</strong> mon mieux <strong>de</strong> vos renseignements sur le fort et le faible <strong>de</strong> chacun;<br />

en ce qui regar<strong>de</strong> M. Streicher, je nʹai rien à vous apprendre, vous savez ses qualités<br />

comme les points sur lesquels il a besoin que la surveillance le soutienne; sʹil peut <strong>de</strong>meu‐<br />

rer à Nazareth et se mettre sous la conduite spirituelle <strong>de</strong> M. Lantiez, si vous ne le per<strong>de</strong>z<br />

pas trop <strong>de</strong> vue surtout, je crois que son intelligente activité vous rendra <strong>de</strong> grands services.<br />

Adieu, mon cher enfant, je vous vois trop rarement, mais comme je vous verrai à<br />

loisir au Ciel, si Dieu daigne nous y mettre lʹun et lʹautre!<br />

Votre ami et Père affectionné Le <strong>Prevost</strong><br />

1734 bis à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Rapatriement du corps du père Faÿ. MM. Streicher et Guillot à Nazareth.<br />

Chaville, 3 février 1873<br />

Mon cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai oublié <strong>de</strong> vous dire samedi que M. Chéron, ayant vu <strong>de</strong> ma part Mme Restou, a<br />

rapporté cette réponse au sujet du retour <strong>de</strong>s restes <strong>de</strong> notre f. Faÿ; elle ne prévoit pas<br />

quʹelle puisse trouver, pour concourir aux frais du transport, plus <strong>de</strong> 50f quʹelle espère re‐<br />

cevoir dʹune dame qui connaissait un peu lʹabbé Faÿ; ce serait un ai<strong>de</strong> bien insuffisant.<br />

M. Streicher et M. Guillot vont, dans les premiers jours <strong>de</strong> cette semaine, se concer‐<br />

ter pour la prise <strong>de</strong> possession <strong>de</strong> leur nouvel emploi; jʹespère que lʹun et lʹautre sʹy met‐<br />

tront cordialement.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1735 à Mme la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Sympathie à lʹoccasion dʹune épreuve <strong>de</strong> santé. MLP. projette <strong>de</strong> lui rendre visite.<br />

Vaugirard, 8 février 1873<br />

Madame la Marquise,<br />

Je prends une bien vive part à la nouvelle épreuve que vous apporte votre santé fa‐<br />

tiguée; mais tout laisse penser, ou du moins espérer, quʹil sʹagit seulement dʹune indisposi‐<br />

tion quʹun peu <strong>de</strong> repos va faire disparaître; je nʹeusse pas manqué toutefois dʹaller vous<br />

1646


offrir, dès hier, mon respect, ainsi quʹà Madame votre mère, si je nʹétais retenu ces <strong>de</strong>ux<br />

jours à Vaugirard; <strong>de</strong>main, dimanche et lundi, je suis seul à Chaville et ne pourrai mʹéloi‐<br />

gner; ce ne sera donc que mardi que jʹaurai quelques instants libres, ils seront tous pour<br />

vous et pour Madame dʹHurbal, si vous me le permettez; jʹespère que, dʹici là, la neige qui<br />

sʹamoncelle va fondre et ne me fermera pas le passage, elle ne semble pas consistante, jʹau‐<br />

rai ferme volonté et je vaincrai les résistances; ce grand courage nʹest‐il pas héroïque<br />

contre un peu <strong>de</strong> neige quʹun souffle fait fondre? Cʹest assez pourtant pour arrêter souvent<br />

les grands <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong>s hommes. Bossuet avait bien raison <strong>de</strong> dire: Dieu seul est grand,<br />

mes frères, etc. Cʹest ainsi, Madame, que vous étiez pleine dʹar<strong>de</strong>ur, vous alliez suivre, en<br />

sens divers, sermons, assemblées, pieux exercices; une souffrance subite vous arrête et<br />

vous cloue au logis! Mais, là encore, Dieu se retrouve, Il vous tiendra lieu <strong>de</strong> tout et, sʹIl<br />

parle à votre cœur et le trouve attentif, Il vous fera tout oublier, même les ennuis et la<br />

souffrance, car Il est le consolateur et la joie <strong>de</strong> nos âmes. Puisse‐t‐Il, Madame, vous en<br />

donner les témoignages!<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, et partager <strong>avec</strong> Madame votre mère, tous<br />

mes sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1736 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Examen dʹune vocation à la vie religieuse.<br />

Chaville, 16 février 1873<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai vu le jeune Ménard, que vous mʹavez adressé hier, et je me suis assez longue‐<br />

ment entretenu <strong>avec</strong> lui; jʹai été content du résultat <strong>de</strong> cet examen; jʹai trouvé en lui (Mé‐<br />

nard) <strong>de</strong> la simplicité et <strong>de</strong> la droiture; il parle mo<strong>de</strong>stement <strong>de</strong> lui, le caractère paraît être<br />

aussi satisfaisant. Quand je lui ai <strong>de</strong>mandé ce quʹil désirerait gagner, sʹil était pris comme<br />

garçon <strong>de</strong> service: ʺAh! à cela, mʹa‐t‐il répondu, je nʹy regar<strong>de</strong> pas, ce que vous voudrez se‐<br />

ra bien, je ne désire quʹune chose: être dans une maison religieuse, autrement je ne resterai<br />

pas à Paris.ʺ Interrogé pourquoi il nʹétait pas resté à St‐<strong>Jean</strong> <strong>de</strong> Dieu: ʺJʹy étais entré <strong>de</strong><br />

grand cœur et touché du dévouement <strong>de</strong>s ff. pour leurs mala<strong>de</strong>s; mais je suis jeune, encore<br />

un peu, <strong>de</strong> caractère, le défaut <strong>de</strong> vie commune et, pour tout avouer, aussi <strong>de</strong> récréation<br />

(les ff. étant constamment retenus par leurs emplois) mʹa jeté dans le découragement et<br />

dans lʹennui; jʹai pris tout en dégoût et jʹai désiré me retirer.ʺ Comme je lui conseillais,<br />

avant <strong>de</strong> se mettre en lʹétat <strong>de</strong> domesticité, dʹessayer <strong>de</strong> quelque autre Congrégation, afin<br />

<strong>de</strong> ne pas se fermer le retour à sa primitive vocation qui semblait avoir été sincère: ʺJe nʹai<br />

aucune répugnance à ces <strong>de</strong>voirs ou pratiques <strong>de</strong> lʹétat religieux, mais je me défie <strong>de</strong> moi,<br />

nʹayant pas su persévérer chez les ff. <strong>de</strong> S t ‐<strong>Jean</strong> <strong>de</strong> Dieuʺ.<br />

Je lʹai fait dîner à Chaville et lʹy ai retenu assez longtemps pour que M. Paillé ait pu,<br />

<strong>de</strong> ma part, aller consulter les ff. <strong>de</strong> S t ‐<strong>Jean</strong> <strong>de</strong> Dieu; ils en pensent beaucoup <strong>de</strong> bien; il est<br />

peu formé encore aux œuvres, mais est fort docile; il ne manque pas dʹintelligence et ferait<br />

bien, sʹil acquérait quelque expérience. Les ff. pensent sincèrement tout ce quʹils ont écrit<br />

dʹavantageux sur son compte; les enfants lʹont beaucoup regretté.<br />

Je me suis hasardé à lui dire quelques mots <strong>de</strong>s travaux et œuvres qui sont dans no‐<br />

tre vocation; il mʹa répondu quʹil regar<strong>de</strong>rait comme une grâce <strong>de</strong> Dieu quʹil lui fût permis<br />

<strong>de</strong> faire un essai chez nous comme aspirant.<br />

1647


Vous verrez si vous nʹauriez pas <strong>de</strong> répugnance à tenter cette épreuve et, en cas af‐<br />

firmatif, où vous trouveriez bien quʹil fît cette probation; vous voudriez bien alors lui dire<br />

où il doit apporter ses effets qui sont restés, je crois, à S t ‐<strong>Jean</strong> <strong>de</strong> Dieu.<br />

Il est assez bon cordonnier; si vous <strong>de</strong>viez lui faire passer quelque temps à Chaville,<br />

il y aurait <strong>de</strong> lʹoccupation; je ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong> rien en ce sens toutefois et nʹajoute cette observa‐<br />

tion quʹà titre <strong>de</strong> renseignement.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

Je doute un peu que ce jeune Ménard soit bien propre aux gros travaux et quʹil fût<br />

précisément un remplaçant pour Nicolais. Ce <strong>de</strong>rnier mʹa <strong>de</strong>mandé hier quʹon détermine<br />

une somme qui servirait à son entretien; ce serait une occasion <strong>de</strong> lʹinviter à se caser ail‐<br />

leurs, mais il nʹy pourra parvenir seul et nous ne <strong>de</strong>vrions pas, chrétiennement, le laisser<br />

en peine; pourriez‐vous lʹai<strong>de</strong>r à trouver quelque condition <strong>de</strong> vie?<br />

1737 à M. Trousseau<br />

Partage <strong>de</strong>s offran<strong>de</strong>s; intentions <strong>de</strong> messes. Postulants et petits novices.<br />

Chaville, 16 février 1873<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Une dame [Mme <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot)] pour laquelle je dis souvent <strong>de</strong>s messes mʹayant fait<br />

une petite offran<strong>de</strong> charitable, je la partage <strong>avec</strong> vous, ayant su, par quelques paroles <strong>de</strong><br />

M. <strong>de</strong> Varax, que vous êtes plus pauvres encore que nous, ce qui doit être assez pénible. Si<br />

vous voulez dire une messe à lʹintention du petit Noviciat <strong>de</strong> Chaville dont tous les mem‐<br />

bres, petits et grands, vous restent très dévoués, nous serons encore vos débiteurs, car une<br />

prière à la Ste Messe est sans prix et lʹoffran<strong>de</strong> <strong>de</strong> 50f est dʹailleurs bien mince.<br />

Les comptes <strong>de</strong> la Guirlan<strong>de</strong> sont réglés <strong>avec</strong> Mlle Bréchot. Les abonnés trouvent le<br />

recueil très peu intéressant; ne pourrait‐on pas lui donner un peu plus <strong>de</strong> valeur?<br />

Tous nos ff. et enfants vous assurent <strong>de</strong> leur affection; nous comprenons dans ce<br />

témoignage cordial tous nos ff. <strong>de</strong> Tournay.<br />

Je cherche, sans rien trouver, les nouvelles <strong>de</strong> quelque intérêt que je pourrais ajouter<br />

ici. On attend à Vaugirard un postulant <strong>de</strong> quelque valeur; il nʹest pas là encore, il a quel‐<br />

ques difficultés par sa famille, tout est donc incertain: à mettre dans le Cœur <strong>de</strong> Dieu.<br />

On nous annonce, <strong>de</strong> Nazareth, <strong>de</strong>ux sujets [Schuh et Trébuchet] pour le petit No‐<br />

viciat; ils ne dépareraient pas la réunion, nous les connaissons déjà.<br />

Adieu, mon bien cher ami, croyez bien à mon tendre dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1738 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

MLP. attend sa visite à Chaville.<br />

Chaville, lundi 17 février 1873<br />

Madame la Marquise,<br />

Si vous ne <strong>de</strong>viez pas sortir aujourdʹhui toute la journée, je serais allé vous trouver<br />

rue <strong>de</strong> Grenelle, et si je pouvais penser que <strong>de</strong>main mardi il vous fût plus commo<strong>de</strong> <strong>de</strong> me<br />

rencontrer à la maison <strong>de</strong> Nazareth, je mʹy rendrais assurément, mais jʹai peur <strong>de</strong> nʹavoir<br />

1648


pas à temps votre réponse. Je préfère mʹen tenir à ce que vous avez réglé et attendre <strong>de</strong>‐<br />

main lʹhonneur <strong>de</strong> votre visite à Chaville, où je serai tout le jour. Jʹespère que ces nouveaux<br />

ennuis que vous prévoyez seront détournés, sinon que Dieu, plus sage, plus puissant que<br />

nous, les fera tourner à votre avantage.<br />

Veuillez agréer, Madame, la nouvelle assurance <strong>de</strong> mon bien respectueux dévoue‐<br />

ment pour vous, pour votre vénérée mère et pour tout ce qui vous est cher.<br />

Votre humble et respectueux serviteur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1739 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

MLP. explique à son Vicaire la démarche concernant le jeune Ménard. (cf. L. 1736).<br />

Chaville, 20 février 1873<br />

Mon cher ami et fils en N.S.,<br />

Il mʹest bien facile <strong>de</strong> vous tranquilliser sur la démarche que M. Paillé a faite, <strong>de</strong> ma<br />

part, près <strong>de</strong>s ff. <strong>de</strong> St ‐<strong>Jean</strong> <strong>de</strong> Dieu.<br />

Le jeune Ménard mʹayant dit que les ff. <strong>de</strong> St ‐<strong>Jean</strong> <strong>de</strong> Dieu lui avaient conseillé <strong>de</strong><br />

sʹadresser à moi pour trouver un emploi, rien nʹétait plus naturel quʹils fussent consultés<br />

par moi touchant les aptitu<strong>de</strong>s et qualités <strong>de</strong> ce jeune homme. Ils sont accoutumés dʹail‐<br />

leurs à cette façon dʹagir <strong>de</strong> ma part; ils mʹont présenté souvent <strong>de</strong>s gens <strong>de</strong> diverses sortes<br />

en me priant <strong>de</strong> les ai<strong>de</strong>r à se caser, je nʹai jamais manqué dʹenvoyer chez eux aux rensei‐<br />

gnements, toutes les fois surtout quʹil sʹagissait dʹemplois <strong>de</strong> confiance; cʹétait le cas ici, le<br />

jeune Ménard était proposé comme employé à Chaville.<br />

Pour plus <strong>de</strong> précision, jʹavais recommandé à M. Paillé, à <strong>de</strong>ux reprises et formel‐<br />

lement, <strong>de</strong> se tenir strictement à ces termes exprès: ʺVous nous proposez le jeune Ménard<br />

pour son emploi; est‐il <strong>de</strong> bonne santé? (son visage blême mʹavait laissé quelque inquié‐<br />

tu<strong>de</strong>) est‐il laborieux? a‐t‐il un bon caractère?ʺ Rien <strong>de</strong> plus dans la mission <strong>de</strong> M. Paillé. Je<br />

crois quʹainsi comprise, elle vous paraîtra sans préjudice pour lʹhonneur <strong>de</strong> la Congrégation.<br />

Jʹai tardé un peu à prendre le sentiment <strong>de</strong> M. Chevalier sur son avancement dans<br />

la Congrégation à cause <strong>de</strong> la peine quʹil avait à se poser à Chaville; hier, quand je lui en ai<br />

parlé, il mʹa répondu quʹil vous avait écrit, en sʹen remettant à votre sentiment. Il paraît<br />

maintenant prendre bien son assiette et sa santé est meilleure.<br />

A <strong>de</strong>main, je vous prie <strong>de</strong> rappeler à M. Chaverot que je serai à Ouest‐Ceinture à<br />

lʹheure accoutumée.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1740 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

MLP. <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à être déchargé <strong>de</strong> la conduite <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Chaville.<br />

Chaville, 24 février 1873<br />

Mon cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai pensé, <strong>de</strong>puis un certain temps déjà, que le Carême auquel nous touchons me<br />

serait un moment propice pour faire une retraite, sinon absolue, au moins <strong>de</strong> recueille‐<br />

ment habituel et continu. Mais il serait nécessaire, à cet effet, que je fusse dégagé <strong>de</strong> lʹad‐<br />

1649


ministration <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Chaville. Lʹaffaiblissement graduel <strong>de</strong> mes forces et quelques<br />

indices <strong>de</strong> nouvelles infirmités sont dʹailleurs pour moi le signal dʹun désistement encore<br />

plus complet <strong>de</strong> toute participation aux œuvres qui nous occupent.<br />

Je vais donc vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r, mon cher ami, dʹaviser au moyen <strong>de</strong> me décharger <strong>de</strong><br />

ma tâche à Chaville; elle sera légère pour <strong>de</strong> jeunes épaules, les miennes, trop vieillies<br />

courraient risque <strong>de</strong> laisser choir le far<strong>de</strong>au. Si vos mesures en ce sens pouvaient être un<br />

peu promptes, je serais à même <strong>de</strong> réaliser immédiatement mon projet <strong>de</strong> retraite; autre‐<br />

ment, et eu égard à la venue si prochaine <strong>de</strong> la première semaine <strong>de</strong> Carême, je me rési‐<br />

gnerais à lʹajourner jusquʹà Pâques en vous conjurant <strong>de</strong> me rendre, au moins pour cette<br />

époque, lʹentière liberté dont je sens le besoin.<br />

Le trop peu dʹapplication dʹesprit dont je dispose présentement mʹassure que je fe‐<br />

rais mal le sujet <strong>de</strong> méditation pour la fête <strong>de</strong> S t Joseph; je vous prie donc <strong>de</strong> confier ce soin<br />

à quelque autre <strong>de</strong> nos frères.<br />

Jʹai la confiance quʹ<strong>avec</strong> une liberté plus gran<strong>de</strong>, jʹobtiendrai quelque accroissement<br />

<strong>de</strong> lʹesprit <strong>de</strong> prière et quʹainsi jʹaurai la consolation <strong>de</strong> rendre au centuple à notre chère<br />

famille le mince concours dont je me désisterai par ailleurs.<br />

Croyez bien, mon cher ami, à tous mes sentiments <strong>de</strong> cordiale affection en N.S.<br />

Votre dévoué ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

1741 à M me et M lle Salva<br />

A propos dʹun créancier <strong>de</strong> son neveu Emile Salva. MLP. ʺvieillit beaucoupʺ.<br />

Chaville, 28 février 1873<br />

Chères amies,<br />

Je vous envoie la lettre ci‐jointe que je viens <strong>de</strong> recevoir <strong>de</strong> M. Michou<strong>de</strong>t; elle para‐<br />

ît bien digne dʹattention assurément, mais pourrez‐vous y faire droit? Je ne saurais le dire,<br />

aussi me suis‐je borné à lui dire que vous aviez déjà dʹautres charges, que toutefois je vous<br />

transmettrais sa <strong>de</strong>man<strong>de</strong>; si vous jugiez à propos dʹaccor<strong>de</strong>r quelque accompte, je pour‐<br />

rais y ajouter 15f, nʹayant pas envoyé dʹétrennes à Emile [Salva] dans lʹincertitu<strong>de</strong> où jʹétais<br />

sur ses besoins réels.<br />

Jʹai regretté que ma chère Maria ne mʹait pas accusé réception <strong>de</strong>s 250f <strong>de</strong> Grenelle;<br />

les envois dʹargent veulent, en ce temps surtout, les formalités <strong>de</strong> sécurité quʹon prend<br />

dʹailleurs toujours en pareil cas.<br />

Je recevrai <strong>avec</strong> plaisir <strong>de</strong> vos nouvelles; jʹai été un peu souffrant ces jours <strong>de</strong>rniers,<br />

je vieillis beaucoup et mʹétonne quʹen <strong>de</strong>scendant toujours, on ne soit que si lentement au<br />

bas <strong>de</strong> la montagne.<br />

Votre frère et oncle affectionné. Le <strong>Prevost</strong><br />

1742 à M. Maignen<br />

Souscription à la chapelle du Cercle Montparnasse.<br />

Mercredi 12 mars 1873<br />

Mon bien cher enfant en N.S.,<br />

Il se trouve que je puis disposer <strong>de</strong> la pièce ci‐jointe, qui mʹa été donnée <strong>avec</strong> liberté<br />

dʹen user à mon gré; jʹen ferai, si vous le voulez, une pierre, hélas! bien petite, pour votre cha‐<br />

1650


pelle; que nʹest‐elle grosse autant que mon désir!<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1743 à M. Maignen<br />

Offran<strong>de</strong> pour un ciboire. Humilité <strong>de</strong> MLP.<br />

Vaugirard, 15 mars 1873<br />

Mon bien cher fils en N.S.,<br />

Je trouve très bien votre combinaison pour le St Ciboire, mais je nʹai pas le droit <strong>de</strong><br />

mettre mon nom sur le pied, quelque honneur quʹil y eût pour moi à rester là comme le<br />

chien fidèle aux pieds <strong>de</strong> son Maître; mon offran<strong>de</strong> ne couvrira quʹun tiers <strong>de</strong> la dépense,<br />

il convient mieux que je <strong>de</strong>meure au banc <strong>de</strong>s pauvres, cʹest‐à‐dire dans lʹombre, cʹest là<br />

ma véritable place.<br />

Votre ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1744 pour M. Nicolais<br />

Certificat <strong>de</strong> travail pour un ancien persévérant, employé à Chaville.<br />

Je certifie que René Nicolais, appartenant à une honnête famille <strong>de</strong> Bretagne, a fait<br />

son éducation dans une maison placée sous notre conduite (Vaugirard) et quʹil a été en‐<br />

suite employé chez nous (Chaville) jusquʹà ce jour à divers travaux, selon ses aptitu<strong>de</strong>s,<br />

qui ne le rendaient pas propre à lʹétu<strong>de</strong>; il sait un peu le jardinage et pourrait aussi être<br />

chargé <strong>de</strong> soins domestiques. Nous nʹavons aucun renseignement défavorable à donner à<br />

son sujet; nous croyons quʹon serait content <strong>de</strong> ses services; il nous quitte <strong>de</strong> son plein gré,<br />

désirant trouver une position plus lucrative quʹil ne pouvait la rencontrer parmi nous.<br />

Chaville, 22 mars 1873<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

p rtre . Directeur<br />

1745 à M. Decaux<br />

Invitation à venir visiter Chaville. Précieuses statistiques pour 1872.<br />

[25 mars 1873]<br />

Mon bien cher ami,<br />

Combien je regrette <strong>de</strong> ne pas mʹêtre trouvé à la maison quand vous y êtes venu<br />

dimanche, ainsi que M me Decaux! Vous savez lʹun et lʹautre combien les occasions <strong>de</strong> vous<br />

voir, si rares hélas! me sont précieuses; jʹai besoin <strong>de</strong> songer que nous sommes en Carême<br />

pour accepter patiemment une si fâcheuse occurrence; laissez‐moi espérer quʹau premier<br />

beau soleil, si vous avez quelques instants <strong>de</strong> loisir, vous reviendrez à Chaville; <strong>avec</strong> ma<br />

petite voiture, M me Decaux pourra faire une promena<strong>de</strong> sans fatigue; si vous amenez aussi<br />

vos chères nièces, nous ferons une vraie réunion <strong>de</strong> famille!<br />

Je vous remercie <strong>de</strong> votre excellent résumé <strong>de</strong>s statistiques <strong>de</strong> 1872; je lʹai lu <strong>avec</strong><br />

une gran<strong>de</strong> attention. Il témoigne quʹ<strong>avec</strong> <strong>de</strong>s soins persistants et dévoués, nos œuvres<br />

1651


peuvent produire <strong>de</strong> bons fruits; nous continuerons donc, <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parts, à les soutenir; je<br />

puis vous attester quʹen ce qui nous regar<strong>de</strong>, nous ne ménageons ni peines ni sacrifices;<br />

daigne le Seigneur y donner sa bénédiction.<br />

Jʹai distribué à nos ff., réunis hier en Conseil ici, les exemplaires du résumé; tous y<br />

trouveront dʹutiles renseignements.<br />

Offrez, je vous prie, mon cher ami, tous mes sentiments <strong>de</strong> respect et dʹaffection à<br />

M me Decaux, et croyez à mon tendre dévouement en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1746 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Projet <strong>de</strong> visite.<br />

Chaville, 25 mars 1873<br />

Madame la Marquise,<br />

Je me propose <strong>de</strong> vous rendre, ainsi quʹà Madame votre mère, une petite visite jeudi<br />

vers 2h., si rien ne vous empêche <strong>de</strong> me recevoir. Jʹajoute néanmoins la prière <strong>de</strong> ne dé‐<br />

ranger aucune disposition que vous auriez prise et que pourrait contrarier ma venue.<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, et partager <strong>avec</strong> Madame la Vicomtesse<br />

dʹHurbal, le profond respect <strong>avec</strong> lequel je suis<br />

Votre humble serviteur et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1747 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Projet <strong>de</strong> visite.<br />

Chaville, 13 avril 1873<br />

Madame la Marquise,<br />

Je serai heureux dʹapprendre que le Carême a eu, pour Madame votre mère et pour<br />

vous, beaucoup <strong>de</strong> grâces et <strong>de</strong> consolations; cʹest pourquoi jʹirai mercredi prochain, 16 <strong>de</strong><br />

ce mois, vers 1h. 1/2 , vous rendre visite, si vous me le permettez.<br />

Je vous prie dʹagréer par avance les assurances du respectueux dévouement <strong>avec</strong><br />

lequel je suis, Madame la Marquise,<br />

Votre humble serviteur en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1748 à M me et M lle Salva<br />

Epreuves <strong>de</strong> santé. Désir <strong>de</strong> leur rendre visite. Difficultés et épreuves <strong>de</strong> lʹInstitut.<br />

Chaville, 13 avril 1873<br />

Bien chères amies,<br />

Je vous envoie ci‐joint les 225f du trimestre à échoir, le 15 du courant, <strong>de</strong>s intérêts<br />

<strong>de</strong> la somme prêtée à Grenelle. Les 25f qui manquent ont été donnés, vous le savez, à M.<br />

Michou<strong>de</strong>t.<br />

1652


Voilà le Carême fini et lʹhiver, qui résiste encore, va aussi prendre fin; jʹespère bien<br />

que vos santés vont <strong>de</strong>venir florissantes. Je ne perds pas le désir <strong>de</strong> vous rendre une petite<br />

visite dans le cours <strong>de</strong> la saison douce, si mes forces ne défaillent point; je serai heureux si,<br />

à ce moment, je vous trouve <strong>de</strong> bons visages épanouis et une vigueur toute renouvelée.<br />

Je suis, pour moi, toujours faible, et pourtant marchant aussi toujours, puissé‐je<br />

nʹêtre, dans la route, jamais loin <strong>de</strong> Dieu.<br />

Nos travaux sont les mêmes; nos difficultés, nos progrès se succè<strong>de</strong>nt, <strong>avec</strong> quelque<br />

avancement, à travers tout. Lʹavenir ne semble pas rassurant pour les choses religieuses,<br />

humainement parlant, mais lʹhomme sʹagite et Dieu le mène; espérons que toutes choses<br />

seront, par Lui, ramenées à bonne fin.<br />

Mille affections <strong>de</strong> votre frère et oncle. Le <strong>Prevost</strong><br />

Respects et amitiés autour <strong>de</strong> vous en mon nom.<br />

1749 à M. Chaverot<br />

Envoyer sans tar<strong>de</strong>r un organiste pour les Vêpres. Brèves nouvelles.<br />

Chaville, dimanche 20 avril [1873]<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je me trouve en grand embarras pour nos vêpres ce soir: M. Maignen mʹécrit à lʹim‐<br />

proviste quʹil est absolument nécessaire que M. Edouard [Lainé] aille toute lʹaprès‐midi au<br />

Cercle pour accompagner les chants à une petite séance dramatique qui se donne aujour‐<br />

dʹhui tout exprès au profit du Noviciat (minor) <strong>de</strong> Chaville, pour les frais <strong>de</strong> classes; etc.<br />

Comme nous sommes dʹailleurs tout à fait dépourvus <strong>de</strong> voix pour le chant, les vêpres,<br />

annoncées et affichées, vont se trouver impossibles si vous ne mʹenvoyez, pour 3h., un or‐<br />

ganiste qui puisse nous tirer <strong>de</strong> peine. Un certain nombre <strong>de</strong> personnes, quelques‐uns <strong>de</strong><br />

nos amis en promena<strong>de</strong>, etc., comptent sur cet office et seraient fort contrariés, ainsi que<br />

notre propre personnel, si nous restions au dépourvu; je compte donc sur votre charité<br />

pour lever cette difficulté.<br />

Croyez bien à nos sentiments reconnaissants pour lʹeffort que vous ferez en cette<br />

occasion.<br />

Votre dévoué ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

M. Chéron étant absent cette semaine, jʹaurais à examiner <strong>avec</strong> vous si, vendredi,<br />

pour le salut <strong>de</strong> S t Marc, et samedi, pour la messe du matin, jʹaurai à rester ici, nʹallant que<br />

tard dans la matinée <strong>de</strong> samedi à Vaugirard, ou bien si quelquʹun <strong>de</strong> vos prêtres pourra<br />

donner la messe ici. Je crois que ce <strong>de</strong>rnier parti serait <strong>de</strong> beaucoup le meilleur. Jʹai eu la<br />

joie hier <strong>de</strong> voir M. et M me Chaverot, qui ont été pour moi aussi aimables et bons que pos‐<br />

sible. Je crois que la séance du Cercle, qui doit être charmante, les intéresserait beaucoup,<br />

surtout si vous pouviez les y accompagner. Elle aura lieu à 2h. aujourdʹhui.<br />

1750 à Mme la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

MLP. voudrait saluer sa bienfaitrice avant quʹelle ne quitte Paris.<br />

Vaugirard, 25 avril 1873<br />

Madame la Marquise,<br />

Ce serait pour moi un véritable regret sʹil ne mʹétait pas possible <strong>de</strong> voir une fois au<br />

moins encore Madame votre mère et vous avant votre départ.<br />

1653


Ce qui me donne à ce sujet quelque inquiétu<strong>de</strong>, cʹest que, toute la semaine qui va<br />

sʹouvrir, je serai retenu à Vaugirard pour ai<strong>de</strong>r un peu aux exercices <strong>de</strong> la retraite que vont<br />

faire une partie <strong>de</strong> nos sujets ou frères. Ne faisant pas ma retraite moi‐même à ce moment,<br />

je ne manquerais pas <strong>de</strong> liberté pour vous voir, surtout si jʹétais prévenu du jour où vous<br />

me feriez lʹhonneur <strong>de</strong> venir ici, mais il me serait plus difficile <strong>de</strong> mʹabsenter. Toutefois, si<br />

vous <strong>de</strong>viez, ainsi, que Madame dʹHurbal, quitter définitivement Paris avant le commen‐<br />

cement <strong>de</strong> mai, je me ferais passage à travers tout pour vous présenter encore tous mes<br />

sentiments dévoués et le profond respect <strong>avec</strong> lequel je suis,<br />

Madame la Marquise,<br />

Votre très humble serviteur en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1751 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

MLP. lui propose un jour <strong>de</strong> visite pour aller la saluer avant son départ.<br />

Chaville, 27 avril 1873<br />

Madame la Marquise,<br />

Je vous rends grâces <strong>de</strong> la bonté que vous avez <strong>de</strong> me promettre une petite visite<br />

pour le commencement <strong>de</strong> cette semaine; ce me sera une vraie consolation <strong>de</strong> vous voir<br />

encore une fois avant votre départ; je pense que mardi sera mieux que mercredi, jour où<br />

vous recevez les adieux <strong>de</strong> vos amis et ferez vos apprêts <strong>de</strong> voyage; si, contre mon attente,<br />

je pouvais disposer <strong>de</strong> quelques instants pour présenter mes hommages à Madame votre<br />

mère, je les saisirais <strong>avec</strong> empressement; cʹest <strong>avec</strong> une peine sincère que je vous vois vous<br />

éloigner lʹune et lʹautre, sans espoir <strong>de</strong> retour avant plusieurs et bien longs mois; je comp‐<br />

terai sur vos lettres promises pour me dire tout ce qui intéressera vous, Madame, et votre<br />

chère famille; lʹaimable confiance que vous voulez bien mʹaccor<strong>de</strong>r me rendra ces relations<br />

épistolaires bien douces et comme nécessaires; je pense quʹen Dieu aussi elles me seront<br />

profitables.<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, pour Madame votre mère et pour vous, tous<br />

les sentiments <strong>de</strong> respect <strong>avec</strong> lesquels je suis<br />

Votre humble et dévoué serviteur Le <strong>Prevost</strong><br />

1752 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Un livre pour les gens du mon<strong>de</strong>, recommandé autrefois par lʹabbé <strong>de</strong> Malet. Il faut porter la croix <strong>de</strong>s épreuves<br />

quotidiennes.<br />

Vaugirard, 23 mai 1873<br />

Madame la Marquise,<br />

Jʹai été bien touché <strong>de</strong> lʹaimable exactitu<strong>de</strong> <strong>avec</strong> laquelle vous avez bien voulu ac‐<br />

complir la promesse <strong>de</strong> me donner <strong>de</strong> vos nouvelles et <strong>de</strong> celles <strong>de</strong> Madame votre mère,<br />

quinze jours au plus après votre départ; jʹai été doublement heureux, car vos chers enfants<br />

étaient aussi arrivés à St ‐Laurent. Jʹai appris tout ensemble que vous, Madame, et ceux qui<br />

composent le cercle intime <strong>de</strong> votre plus chère famille, maintenant réunis autour <strong>de</strong> vous,<br />

jouissez tous dʹune santé satisfaisante et que vous entrevoyez, après vos longues fatigues,<br />

1654


quelques jours <strong>de</strong> paix et <strong>de</strong> joie <strong>de</strong> cœur. Que Dieu en soit béni et puisse‐t‐Il les prolonger<br />

dans une durée indéfinie!<br />

Je nʹose dire que je mʹempresse <strong>de</strong> répondre à votre chère missive puisquʹelle mʹest<br />

déjà parvenue <strong>de</strong>puis une semaine, mais jʹattendais ces quelques mots quʹelle mʹannonçait<br />

touchant la solution <strong>de</strong>s offres pour la location <strong>de</strong> la ferme; je comprends que cette affaire,<br />

en quelque sens quʹelle tourne, est fort importante dans le temps particulièrement critique<br />

où nous nous trouvons. Je serai bien satisfait dʹapprendre que tout souci est enlevé sur ce<br />

point à vous, Madame la Marquise, et aux vôtres; je compte toujours que vous voudrez<br />

bien mʹenvoyez les quelques lignes promises spécialement pour cet intéressant sujet.<br />

Jʹai recherché attentivement, dans notre bibliothèque <strong>de</strong> Vaugirard, le livre dont je<br />

vous avais parlé: Conseils (je crois) à une dame vivant dans le mon<strong>de</strong>: toutes mes perquisitions<br />

ont été sans résultat; mais, à défaut <strong>de</strong>s renseignements quʹil mʹeût fournis sur lʹadresse <strong>de</strong><br />

lʹéditeur, jʹarriverai, je lʹespère, à le trouver autrement; je serai bien satisfait <strong>de</strong> vous lʹen‐<br />

voyer; jʹen ai gardé, à travers la distance <strong>de</strong> plusieurs années, un très bon souvenir; il<br />

mʹavait dʹailleurs été indiqué par lʹabbé Comte <strong>de</strong> Malet, homme aussi pieux quʹéclairé,<br />

dont le jugement était dʹun fort grand poids. Ce nʹest pas, Madame, que jʹoublie lʹexpé‐<br />

rience propre qui vous est déjà acquise, mais, même <strong>avec</strong> une gran<strong>de</strong> connaissance du<br />

mon<strong>de</strong> et un esprit très judicieux, on peut, en bien <strong>de</strong>s cas, être incertain sur les moyens <strong>de</strong><br />

concilier <strong>avec</strong> lʹesprit chrétien les exigences <strong>de</strong> la position, les concessions à faire aux affec‐<br />

tions, le support <strong>de</strong>s abus quʹon hésite à réprimer; un conseil autorisé peut alors être bien<br />

secourable; il semble que le livre en question peut y subvenir, cʹest pourquoi je serai heu‐<br />

reux si je puis le ressaisir.<br />

Vous avez dû retrouver <strong>avec</strong> joie votre chère rési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> S t ‐Laurent qui doit, en ce<br />

moment, être resplendissante <strong>de</strong> toutes les merveilles du printemps. Madame dʹHurbal,<br />

en particulier, qui surveille les parterres, doit y admirer les premières fleurs, <strong>avec</strong> les pro‐<br />

messes plus belles encore <strong>de</strong> la saison dʹété. Il est vrai que, dans les plus aimables <strong>de</strong>meu‐<br />

res et dans les plus satisfaisantes conditions, on nʹest pas exempt <strong>de</strong> peines et dʹépreuves;<br />

mais, outre que lʹannée ne semble pas se présenter pour vous, Madame la Marquise, sous<br />

<strong>de</strong>s aspects inquiétants, votre cœur chrétien sait bien tout le parti quʹon peut tirer spiri‐<br />

tuellement <strong>de</strong> ces épreuves quotidiennes; elles se changent pour nous, elles nous font<br />

comme une glorieuse couronne par lʹunion <strong>avec</strong> celle du Sauveur et la sainte conformité à<br />

la volonté <strong>de</strong> notre Père Céleste. Tout me laisse penser que, <strong>de</strong> plus en plus, vous accepte‐<br />

rez tout dans cet esprit <strong>de</strong> perfection. M. <strong>de</strong> Caulaincourt est ici <strong>de</strong>puis quelques jours,<br />

comme représentant <strong>de</strong> Lille dans <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s assemblées charitables. Il mʹest venu voir à<br />

Chaville le jour anniversaire <strong>de</strong> la mort <strong>de</strong> Madame <strong>de</strong> Caulaincourt, voulant parler dʹelle<br />

<strong>avec</strong> quelquʹun qui lʹeût aimée et appréciée.<br />

Prière, si vous le voulez bien, Madame la Marquise, <strong>de</strong> mʹadresser vos lettres à<br />

Chaville; en mon absence, à Vaugirard, elles courraient risque dʹêtre ouvertes, parce que<br />

jʹen ai donné lʹautorisation pour celles quʹon soupçonne dʹêtre lettres dʹaffaires.<br />

Veuillez agréer, pour Madame dʹHurbal et pour vous‐même, Madame, les senti‐<br />

ments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> dévouements <strong>de</strong><br />

Votre humble et tout attaché serviteur en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1655


1753 à M me et M lle Salva<br />

Toujours les <strong>de</strong>ttes <strong>de</strong> son neveu Emile. Mort subite <strong>de</strong> Félix His.<br />

Chaville, 4 juin 1873<br />

Chère amies,<br />

Encore une lettre pour les affaires Michou<strong>de</strong>t; je vois dʹici un peu dʹimpatience sur<br />

votre visage, mais je crois que le malheur <strong>de</strong> cette famille vous touchera. M. Michou<strong>de</strong>t,<br />

nʹayant plus assez dʹouvrage comme horloger, en suite <strong>de</strong>s tristes résultats <strong>de</strong> la guerre et<br />

<strong>de</strong> la Commune, a été contraint dʹabandonner son état; il a essayé dʹétablir une crémerie et,<br />

ne réussissant quʹinsuffisamment, il est mort à la peine; sa femme, restée seule <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s af‐<br />

faires embarrassées, tombe dans la misère, et cʹest presque comme une aumône quʹelle sol‐<br />

licite un acompte sur la <strong>de</strong>tte dʹEmile. Assurément, cette charge <strong>de</strong>vient bien onéreuse<br />

pour vous et surtout, en donnant encore, vous courrez risque dʹavoir, un peu plus tard,<br />

quelque nouvelle instance. Seulement, on peut espérer quʹayant alors trouvé quelque em‐<br />

ploi, cette pauvre dame pourra attendre moins difficilement le retour dʹEmile; en tout cas,<br />

vous auriez poussé jusquʹau bout la bonne volonté pour soulager sa peine.<br />

Je vous envoie sa lettre, à laquelle je nʹai point répondu, voulant vous en laisser le<br />

soin, afin quʹelle n’ait désormais plus <strong>de</strong> difficulté en recourant à vous dans votre éloi‐<br />

gnement. Je ne vous conseille rien, mais si, par compassion, vous vouliez lui remettre en‐<br />

core quelque chose (comme 25f par exemple), jʹen fournirai volontiers la moitié. Gar<strong>de</strong>z sa<br />

lettre, parce quʹelle porte accusé <strong>de</strong> réception <strong>de</strong>s 90f déjà donnés par vous.<br />

Mme His me prie <strong>de</strong> vous dire quʹelle a eu le chagrin <strong>de</strong> perdre, il y a quinze jours,<br />

son fils aîné Félix, marié à Lyon <strong>de</strong>puis un an. Nʹayant pas trouvé dʹemploi, il a cherché<br />

une ressource dans son talent <strong>de</strong> musique, dans les soirées ou théâtres; en sortant le soir,<br />

ayant chaud, il a gagné un refroidissement dont il est mort. Il a fini bien chrétiennement,<br />

étant entouré <strong>de</strong> personnes auxquelles nous lʹavions recommandé. Il ne laisse pas dʹenfant.<br />

Sa mère a dû secourir lui et sa femme et payer lʹenterrement; quelques cents francs y ont<br />

encore passé; la pauvre mère sʹépuise pour ses enfants; elle a le cœur haut et dévoué.<br />

Le mauvais temps mʹa fatigué, je suis peu fort et, <strong>de</strong>puis quelques jours, je souffre<br />

<strong>de</strong>s reins. On nʹest pas vieux impunément. Ecrivez‐moi. Adieu.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1754 à M me et M lle Salva<br />

Leur générosité pour payer la <strong>de</strong>tte dʹEmile. MLP. annonce son prochain voyage.<br />

Chaville, 11 juin 1873<br />

Bien chères amies,<br />

Je crois que vous faites une bonne action en envoyant 25f à Mme Michou<strong>de</strong>t; ces ver‐<br />

sements successifs ne laissent pas que <strong>de</strong> vous être onéreux, mais Dieu vous en tiendra<br />

compte, car cʹest bien réellement un acte <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong> puisque, ayant déjà pris dʹautres<br />

charges pour Emile, vous pouviez vous en tenir aux sacrifices déjà accomplis.<br />

Je suis bien sensible au bon souvenir <strong>de</strong> vos amis; je serai heureux, si je puis vous<br />

aller voir, comme je lʹespère, <strong>de</strong> les en remercier moi‐même. Je ne sais pas encore au juste à<br />

quel moment je serai libre et en état (comme santé) <strong>de</strong> faire le voyage.<br />

1656


Si le beau temps continuant me donne un peu <strong>de</strong> force et dʹagilité, jʹen profiterais,<br />

dans la <strong>de</strong>rnière semaine <strong>de</strong> ce mois, vers le 22, pour me mettre en route. Toutefois, je ne<br />

saurais encore bien préciser la chose; je ne manquerai pas <strong>de</strong> vous écrire <strong>de</strong> nouveau dès<br />

que je la verrai plus nettement.<br />

On entreprend <strong>de</strong> tous côtés <strong>de</strong>s pèlerinages; jʹavais quelque espérance quʹon en fe‐<br />

rait un à N.D. <strong>de</strong> Bon‐Secours, à Rouen, mais je ne vois pas jusquʹici quʹon sʹen occupe sé‐<br />

rieusement; peut‐être y avisera‐t‐on si, comme on lʹa dit, on doit généraliser plus encore<br />

ces actes <strong>de</strong> piété. Paray‐le‐Monial est, en ce moment, celui qui est le plus goûté.<br />

Adieu, bien chères amies, en attendant que je puisse vous saluer par le Bon jour, si<br />

Dieu me donne vie et force suffisante.<br />

Votre tout dévoué frère et oncle<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Respects et affections autour <strong>de</strong> vous.<br />

1755 à M me et M lle Salva<br />

Projet <strong>de</strong> villégiature. Détails sur la vie à Chaville. Faiblesse <strong>de</strong> santé. Sur le mouvement renaissant <strong>de</strong>s pèleri‐<br />

nages en France.<br />

Chaville, 23 juin 1873<br />

Bien chères amies,<br />

Jʹavais pensé que mon petit voyage à Duclair pourrait sʹeffectuer vers le 22 <strong>de</strong> ce<br />

mois, mais divers obstacles, provenant <strong>de</strong> nos travaux ou affaires ordinaires, sont surve‐<br />

nus qui me retiendront ici jusquʹaux premiers jours <strong>de</strong> juillet. Dʹune autre part, la chaleur<br />

excessive qui sʹest tout à coup manifestée mʹa causé quelques malaises <strong>de</strong> santé qui mʹeus‐<br />

sent rendu bien difficile la fatigue <strong>de</strong> la route; je vais et agis encore un peu, malgré ma fai‐<br />

blesse habituelle et mes vieilles années, mais à la condition <strong>de</strong> choisir le temps et les jours<br />

favorables. Si, pour cette raison ou pour quelque autre dʹautre genre, je nʹavais pas dʹem‐<br />

pêchement, je me proposerais <strong>de</strong> partir le 7 juillet (lundi) pour rester près <strong>de</strong> vous jusquʹau<br />

jeudi 17; ce serait un jour <strong>de</strong> moins que lʹan <strong>de</strong>rnier, mais la fête <strong>de</strong> St Vincent <strong>de</strong> Paul, qui<br />

se fait pour tout notre mon<strong>de</strong> le samedi 19 et qui réunit à Chaville 300 personnes (y com‐<br />

pris nos 200 enfants), ne me permettrait pas <strong>de</strong> différer davantage mon retour; mon ab‐<br />

sence à cette époque (jusquʹau 17) ne serait même pas sans notable inconvénient, car, pour<br />

préparer une réunion si nombreuse et qui dure tout le jour, pour mettre en bon ordre la<br />

maison et ses dépendances, il y a dʹautant plus à faire que notre personnel ici est fort in‐<br />

suffisant. Peut‐être serait‐il mieux dʹajourner mon départ jusquʹà la fin <strong>de</strong> juillet, encore sa<br />

réalisation serait‐elle à ce moment toute dépendante <strong>de</strong> mon état <strong>de</strong> santé, si les gran<strong>de</strong>s<br />

chaleurs venaient à continuer. Soyez bien assurées, chères amies, quʹil nʹy a nulle hésita‐<br />

tion dans ma volonté <strong>de</strong> vous rendre visite, mes mouvements sont seulement gênés,<br />

comme vous le voyez, par diverses circonstances comme par lʹinsuffisance <strong>de</strong> mes forces.<br />

Ce <strong>de</strong>rnier point sera surtout décisif et me fera choisir <strong>de</strong> préférence le moment où je serai<br />

le moins mal dispos. Si je puis vous prévenir un peu à lʹavance, je le ferai certainement.<br />

Aujourdʹhui, encore sous lʹinfluence du malaise que les orages mʹont causé, je reste sans<br />

vue nette touchant la date précise <strong>de</strong> mon voyage. Vous le verrez, du reste, par ces lon‐<br />

gues explications, à la fin <strong>de</strong>squelles ni vous ni moi ne sommes, après, mieux éclairés<br />

1657


quʹavant; espérons que quelques jours <strong>de</strong> délai nous donneront plus <strong>de</strong> lumière. Vous<br />

pourriez, <strong>de</strong> votre côté, y contribuer en me disant à quel moment mon voyage vous<br />

conviendrait le mieux, car il importe beaucoup quʹil sʹarrange <strong>avec</strong> vos propres disposi‐<br />

tions.<br />

Je ne vois guère <strong>de</strong> faits notables à vous communiquer, nos travaux et actes sont à<br />

peu près les mêmes; les lois <strong>de</strong> conscription <strong>de</strong>viennent menaçantes pour quelques‐uns <strong>de</strong><br />

nos jeunes gens; on vient <strong>de</strong> nous en enlever violemment un qui ne se croyait pas obligé à<br />

partir et quʹon a puni pour avoir trop différé [f. Briscul]. Le bien ne se fait pas, <strong>de</strong> nos<br />

jours, sans <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s difficultés; mais, plus le chemin est ru<strong>de</strong>, plus le repos sera doux à<br />

la fin du voyage.<br />

Notre Normandie, peu inflammable naturellement, entre‐t‐elle un peu dans lʹen‐<br />

traînement <strong>de</strong>s pèlerinages? Avez‐vous, dans vos alentours, quelques personnes qui sʹy<br />

soient portées? On attend <strong>de</strong> bons résultats <strong>de</strong> lʹar<strong>de</strong>ur religieuse quʹils ont réveillée; cʹétait<br />

la conviction <strong>de</strong> tous les chrétiens quʹon ne sortirait pas <strong>de</strong>s crises douloureuses où la<br />

France sʹest trouvée sans recours aux moyens <strong>de</strong> foi; espérons, puisquʹon a beaucoup et<br />

ar<strong>de</strong>mment prié. Le Gouvernement actuel semble aussi plus disposé que le précé<strong>de</strong>nt à<br />

maintenir lʹordre et à favoriser le bien.<br />

Adieu, bien chères amies, croyez quʹà travers tous les changements divers une<br />

chose <strong>de</strong>meure invariable, cʹest ma constante et vive affection pour vous.<br />

Votre tout dévoué frère et oncle<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1756 à M me et M lle Salva<br />

Première communion <strong>de</strong>s orphelins. MLP. annonce la date <strong>de</strong> son départ pour Duclair.<br />

Vaugirard, 26 juin 1873<br />

Chères amies,<br />

Je suis aujourdʹhui à Vaugirard pour la première communion <strong>de</strong> nos orphelins; la<br />

matinée, qui finit, sʹest très bien passée; jʹespère que lʹaprès‐midi, moins intéressante,<br />

quoique bien touchante aussi, se passera également à notre satisfaction; vous en remercie‐<br />

rez Dieu <strong>avec</strong> nous, car vous savez combien cʹest là une œuvre <strong>de</strong> haute gravité pour nos<br />

enfants et pour nous.<br />

Je me trouve aujourdʹhui un peu moins fatigué et moins souffrant que ces jours<br />

<strong>de</strong>rniers; jʹai la pensée dʹen profiter et <strong>de</strong> partir lundi 30 pour Duclair; autrement, il faut<br />

résolument ajourner à la fin <strong>de</strong> juillet, <strong>avec</strong> chance <strong>de</strong> nouveaux empêchements; jʹai pu,<br />

non sans peine, me dégager dʹune obligation qui <strong>de</strong>vait me retenir ici pour le 6 juillet; cet<br />

obstacle levé et force à peu près suffisante me restant, partir me semble être le plus pru‐<br />

<strong>de</strong>nt. Si vous ne mʹen détournez pas et que Dieu me prête appui, je me mettrai en route.<br />

A bientôt donc, je lʹespère, je vous embrasse par avance et jʹoffre à vos amis mes<br />

respects et dévouement.<br />

Votre frère et oncle affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1658


1757 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

A propos dʹun livre <strong>de</strong> lʹabbé Bautain.<br />

Chaville, 29 juin 1873<br />

Madame la Marquise,<br />

Je suis bien confus dʹavoir tant tardé à vous envoyer lʹouvrage dont je vous avais<br />

parlé dans les <strong>de</strong>rniers temps <strong>de</strong> votre séjour à Paris; les recherches que jʹai faites chez<br />

nous ont été inutiles, et je nʹai pu non plus le trouver au <strong>de</strong>hors, faute dʹavoir un souvenir<br />

précis du titre et du nom <strong>de</strong> lʹauteur. Jʹai pensé que le livre composé par M. Bautain, an‐<br />

cien Directeur <strong>de</strong> Juilly et Vicaire Général <strong>de</strong> Paris, pourrait remplacer avantageusement<br />

celui qui me faisait défaut, et jʹai pris la confiance <strong>de</strong> vous lʹenvoyer; jʹavoue que je ne lʹai<br />

pas lu, mais cʹest un écrit fort estimé; lʹauteur, que jʹai beaucoup connu, était un homme <strong>de</strong><br />

grand talent, moraliste <strong>de</strong> premier rang; je serais<br />

heureux si son livre vous agréait et vous était un peu<br />

utile. Je crois bien que Madame votre mère, et aussi<br />

Madame votre belle‐fille, le liraient <strong>avec</strong> intérêt; les<br />

jours <strong>de</strong> pluie, à la campagne, on fait volontiers<br />

quelque lecture. Voilà déjà longtemps que je nʹai reçu<br />

<strong>de</strong> vos nouvelles, Madame la Marquise; jʹaimerais bien<br />

savoir si votre santé se soutient, si Madame la<br />

Vicomtesse dʹHurbal et tout votre entourage, y compris<br />

la petite Marie, vont bien, si la gran<strong>de</strong> ferme est louée<br />

et bien dʹautres choses encore. Pardonnez‐moi, je vous<br />

prie, tant <strong>de</strong> curiosité, mais comment faire autrement<br />

quand on sʹintéresse <strong>de</strong> cœur à tous et à toute chose dans un cher mon<strong>de</strong> choisi, vénéré et<br />

aimé?<br />

Jʹespère quʹen témoignage <strong>de</strong> lʹindulgence à moi accordée, je vais recevoir une lettre<br />

un peu longue, je nʹose dire beaucoup, qui me donnera joie et bonne confiance en lʹavenir.<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, et partager <strong>avec</strong> Madame dʹHurbal et tout ce<br />

qui vous est cher, mes sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> dévouement en N.S.<br />

Votre humble et obéissant serviteur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1757‐1 à M gr Dupanloup<br />

Remerciements pour avoir aidé l’Institut à obtenir la reconnaissance légale.<br />

Duclair, 2 juillet 1873<br />

Monseigneur,<br />

Une absence <strong>de</strong> quelques jours que jʹai dû faire mʹempêche <strong>de</strong> me rendre près <strong>de</strong> Vo‐<br />

tre Gran<strong>de</strong>ur pour lui agréer notre vive reconnaissance <strong>de</strong> lʹappui si bienveillant quʹElle a<br />

daigné donner à notre requête touchant la reconnaissance légale <strong>de</strong> notre Institut comme<br />

Société civile consacrée au bien <strong>de</strong>s classes ouvrières. Mais par la pensée et par le cœur, je<br />

franchis la distance et je vous offre au moins ici <strong>de</strong>vant Dieu, Monseigneur, notre pro‐<br />

fon<strong>de</strong> gratitu<strong>de</strong> pour cet insigne bienfait. Il nous est particulièrement doux <strong>de</strong> voir nos<br />

humbles efforts pour lʹinstruction et la moralisation <strong>de</strong>s ouvriers encouragés et soutenus<br />

1659


par le Prélat <strong>de</strong> France qui sʹest dévoué <strong>avec</strong> le plus <strong>de</strong> constance et <strong>de</strong> succès à la gran<strong>de</strong><br />

cause <strong>de</strong> lʹenseignement chrétiennement compris.<br />

Forts <strong>de</strong> vos sympathies, Monseigneur, nous poursuivrons nos travaux, en glorifiant<br />

le Seigneur qui a daigné les bénir par votre main.<br />

Veuillez agréer, Monseigneur, lʹhommage du profond respect <strong>avec</strong> lequel je suis, De<br />

Votre Gran<strong>de</strong>ur,<br />

Le très humble et très dévoué serviteur, Le <strong>Prevost</strong><br />

1758 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Compliments pour la naissance dʹune petite‐fille. Voyage en Normandie. Appréciation sur lʹabbé Bautain.<br />

Conseils sur la vie <strong>de</strong> famille.<br />

Chaville, 27 juillet 1873<br />

Madame la Marquise,<br />

Jʹai appris <strong>avec</strong> joie lʹheureuse naissance <strong>de</strong> votre secon<strong>de</strong> petite‐fille [Thérèse <strong>de</strong><br />

Hou<strong>de</strong>tot]; elle a suivi dʹassez près sa sœur aînée [Vicomtesse <strong>de</strong> Pitray]; il leur sera facile<br />

<strong>de</strong> vivre en accord, leur âge <strong>de</strong>vant les rapprocher naturellement et ménager entre elles<br />

dʹaimables sympathies. Reste maintenant à attendre la venue du petit frère, on peut bien<br />

espérer quʹil nʹest pas très loin. Quand les trois auront un peu grandi, il y aura déjà un ai‐<br />

mable et bruyant petit cercle autour <strong>de</strong> la grandʹmère et <strong>de</strong> la vénérable aïeule, qui seront<br />

consolées et heureuses, se voyant renaître et fleurir <strong>de</strong> nouveau en ces chers enfants. Je<br />

suis assuré, Madame, que vous voyez déjà en esprit ce charmant tableau. Dieu le réalisera,<br />

on peut y compter.<br />

Jʹai bien lʹespérance que votre petit voyage à Vendôme va fortifier vos santés; une<br />

diversion rompt la monotonie <strong>de</strong> la vie quotidienne et la rend, après meilleure quand on y<br />

revient. Comme cette excursion vous laisserait dʹailleurs dʹaimables souvenirs si elle obte‐<br />

nait les résultats spirituels que vous souhaitez! [conversion du Général dʹHurbal]. Que<br />

Dieu veuille exaucer les vœux si ar<strong>de</strong>nts pour les âmes qui vous sont chères, ne nous las‐<br />

sons pas <strong>de</strong> prier; je dis nous, car je le fais <strong>avec</strong> vous bien fidèlement; la persévérance ob‐<br />

tiendra enfin un acte insigne <strong>de</strong> divine miséricor<strong>de</strong>.<br />

31 juillet. Jʹadresse cette lettre à S t ‐Laurent, dans la pensée que Madame dʹHurbal et<br />

vous, Madame, y êtes <strong>de</strong> retour; jʹavais bien résolu <strong>de</strong> vous lʹenvoyer partout où vous se‐<br />

riez, mais, au moment où jʹapprenais que vous alliez partir, je me mettais moi‐même en<br />

route pour revenir <strong>de</strong> Normandie où jʹai passé huit jours; je me suis rapproché à petite dis‐<br />

tance <strong>de</strong> vous, car je suis allé rendre visite au curé dʹYvetot, mais il semble quʹun concours<br />

<strong>de</strong> circonstances se mettait méchamment entre moi et votre chère <strong>de</strong>meure, car, à cet ins‐<br />

tant même, vous arrêtiez votre départ pour Vendôme. Je ne saurais dire combien vos si<br />

aimables instances pour mʹoffrir lʹhospitalité sous votre toit béni me touchent et me ren‐<br />

<strong>de</strong>nt reconnaissant; elles redoublent mon regret <strong>de</strong> ne pouvoir y répondre; les emplois que<br />

je remplis encore exigent <strong>de</strong> la continuité et ne me laisseraient pas libre cette année <strong>de</strong><br />

mʹabsenter <strong>de</strong> nouveau; peut‐être serai‐je moins empêché pour une autre saison.<br />

Je serais heureux, comme dédommagement, dʹavoir bientôt <strong>de</strong> vos nouvelles, <strong>de</strong><br />

celles aussi <strong>de</strong> Madame votre mère et <strong>de</strong> vos chers enfants.<br />

Jʹai cherché attentivement et inutilement dans votre <strong>de</strong>rnière lettre, Madame la<br />

Marquise, sʹil nʹétait pas fait quelque mention <strong>de</strong> la location <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> ferme; faut‐il en<br />

1660


conclure quʹelle est enfin louée conformément à vos désirs? Jʹincline à le croire, car cette<br />

gran<strong>de</strong> affaire vous préoccupait à juste titre; soyez assez bonne pour me mettre hors <strong>de</strong><br />

toute incertitu<strong>de</strong>.<br />

Combien je suis satisfait que le livre <strong>de</strong> M. Bautain vous convienne! Il doit être à la<br />

fois soli<strong>de</strong> et aimable, car lʹauteur, penseur sérieux, avait aussi un grand talent comme ora‐<br />

teur et comme écrivain.<br />

Nʹayant que peu dʹoccasions et surtout peu <strong>de</strong> puissance pour être utile à votre<br />

chère âme, je serai mieux en paix si je puis au moins vous enseigner quelques bonnes lec‐<br />

tures qui lui servent <strong>de</strong> pâture, en même temps que la communion portera la consolation<br />

et la force à lʹintime <strong>de</strong> votre cœur. Jʹose aussi vous recomman<strong>de</strong>r le petit livre <strong>de</strong> Médita‐<br />

tions bien court, mais pieux, et non sans valeur spirituelle.<br />

Je nʹaurais pas tant tardé, Madame la Marquise, à vous écrire, si je ne mʹétais trouvé<br />

un peu souffrant par suite <strong>de</strong> chaleurs extrêmes et <strong>de</strong> quelque fatigue; je vous prie <strong>de</strong><br />

mʹexcuser et <strong>de</strong> nʹattribuer ce délai à aucune négligence ni défaut dʹempressement.<br />

Veuillez aussi agréer, <strong>avec</strong> Madame la Vicomtesse dʹHurbal, tous les sentiments <strong>de</strong><br />

respect et <strong>de</strong> dévouement dans lesquels je suis<br />

Votre humble serviteur et ami en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1758 bis à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Le livre <strong>de</strong> méditations dont il est question dans la lettre précé<strong>de</strong>nte est intitulé: ʺMéditations sur lʹEvangile du<br />

dimanche pour tous les jours <strong>de</strong> lʹannée et pour les principales fêtesʺ, par lʹabbé A. Arnaud (Brignoles, imprime‐<br />

rie A. Vian). Il porte cette dédicace, écrite <strong>de</strong> la main <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong>: (cf. lettre 1705, pour la date?).<br />

ʺLe royaume <strong>de</strong> Dieu est au fond <strong>de</strong> nos âmes; par la méditation, on le trouve et par<br />

lʹoraison, on y entre ... Frappez à la porte, on vous ouvriraʺ.<br />

29 mars 1872 Le <strong>Prevost</strong><br />

1759 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Vie <strong>de</strong> famille. Les <strong>de</strong>voirs dʹétat avant tout. Conversions à obtenir.<br />

Chaville, le 3 août 1873<br />

Madame la Marquise,<br />

Je ne pense pas que ce soit par ma faute si ma réponse à votre avant‐<strong>de</strong>rnière lettre<br />

vous est parvenue bien tardivement; une multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> circonstances se sont jetées à la tra‐<br />

verse. Quoi quʹil en soit, je réponds quʹil était bien loin <strong>de</strong> moi <strong>de</strong> rester indifférent à ces<br />

faits que vous vouliez bien me communiquer; ils avaient en eux‐mêmes trop dʹintérêt pour<br />

ne pas attirer toute mon attention. Jʹai béni <strong>de</strong> loin la chère petite Thérèse, dont jʹignorais<br />

encore le nom; jʹai prié Dieu <strong>de</strong> lui faire une bonne part en ce mon<strong>de</strong> et <strong>de</strong> la mettre parmi<br />

les âmes favorisées <strong>de</strong> ses précieuses prédilections. Les détails <strong>de</strong> naissance me semblent<br />

dʹheureux augure. La divine Provi<strong>de</strong>nce veillait évi<strong>de</strong>mment sur elle, et lʹange gardien<br />

lʹassistait à son arrivée en ce mon<strong>de</strong>; aussi, tout ne sʹest‐il pas merveilleusement passé!<br />

Puisse la divine intervention la suivre aussi dans toute sa voie, elle nʹaura rien à envier<br />

aux créatures les mieux partagées!<br />

Je savais déjà, au moment où votre <strong>de</strong>rnière missive mʹen disait la gravité, la mala‐<br />

die inquiétante <strong>de</strong> Madame <strong>de</strong> S t Maur; la nature et le caractère du mal ne semblent guère<br />

1661


promettre une guérison véritable; mais elle est aimée, entourée dʹâmes pieuses qui obtien‐<br />

dront pour elle, ou une amélioration dans son état, ou ce repos bien plus désirable où les<br />

souffrances et les peines ne peuvent plus nous atteindre. Je joins <strong>de</strong> tout mon cœur mes<br />

instances aux vôtres et à celles <strong>de</strong> Madame votre mère pour que Dieu, selon sa sagesse et<br />

sa miséricor<strong>de</strong>, console elle et les siens.<br />

Combien je suis contristé <strong>de</strong> ne pouvoir me rendre à vos si aimables instances pour<br />

une visite à S t Laurent! Mais comment faire? Je suis retenu ici par <strong>de</strong>s <strong>de</strong>voirs réels; les in‐<br />

terrompre sans une absolue et évi<strong>de</strong>nte nécessité me semblerait mal faire; si quelque be‐<br />

soin dʹordre majeur pour vous ou les vôtres, spirituellement surtout, réclamait cette dé‐<br />

marche, je nʹhésiterais pas, la volonté <strong>de</strong> Dieu semblerait manifeste; mais, dans les condi‐<br />

tions présentes, il nʹy aurait quʹune joie pour moi et à peine une légère et courte consola‐<br />

tion pour vous, Madame, qui avez lʹindulgence dʹenvisager ainsi les choses. Demeurer<br />

dans mes obligations dʹétat, nʹest‐ce pas ce que <strong>de</strong>man<strong>de</strong> la raison? Je suis bien assuré que<br />

votre sentiment ne sera guère autre que le mien.<br />

Je prends une vive part à vos préoccupations touchant lʹétat dʹâme <strong>de</strong> vos chers on‐<br />

cles [Général dʹHurbal, frère <strong>de</strong> son père; M. <strong>de</strong> Bailleul, frère <strong>de</strong> sa belle‐mère] <strong>de</strong> celui <strong>de</strong><br />

Vendôme surtout, que jʹai vu, qui me semble dʹun esprit si élevé, si bien fait pour se nour‐<br />

rir <strong>de</strong> la vérité et <strong>de</strong>s biens réels <strong>de</strong> la vie spirituelle. Mais jʹai bonne confiance que les faits<br />

qui se sont passés durant votre séjour près <strong>de</strong> lui auront laissé en lui une vive impression;<br />

il se rapprochera plus souvent <strong>de</strong> son Curé, capable, pa‐raît‐il, <strong>de</strong> le comprendre et <strong>de</strong> trai‐<br />

ter <strong>avec</strong> lui. Voilà <strong>de</strong> bons indices et <strong>de</strong> réelles espérances; prions constamment, offrons<br />

quelques petits sacrifices et bonnes œuvres, le Cœur du Seigneur se laissera gagner. Je se‐<br />

rai, en tout cela pour une faible et indigne part, heureux, Madame, <strong>de</strong> vous témoigner ain‐<br />

si mes sentiments <strong>de</strong> profon<strong>de</strong> sympathie et <strong>de</strong> bien respectueux dévouement. Je prie aus‐<br />

si Madame votre mère dʹen accepter <strong>avec</strong> vous lʹassurance et dʹagréer, toujours en com‐<br />

mun, lʹhommage <strong>de</strong> mon inaltérable attachement en N.S.<br />

Votre humble et dévoué serviteur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1760 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Condoléances. Regret dʹune visite manquée. Beautés <strong>de</strong> la Normandie.<br />

Chaville, 16 août 1873<br />

Madame la Marquise,<br />

Je prends une part sincère et vive à lʹaffliction qui vient <strong>de</strong> frapper votre famille par<br />

la mort <strong>de</strong> Madame <strong>de</strong> St Maur. Depuis la réception <strong>de</strong> votre <strong>de</strong>rnière lettre, je pressentais<br />

ce triste événement, sans avoir pu mʹassurer sʹil sʹétait réalisé. Lʹétat habituel <strong>de</strong> souffrance<br />

où se trouvait cette excellente dame a dû rendre pour elle le sacrifice <strong>de</strong> sa vie moins péni‐<br />

ble, mais la perte est réelle pour ses chers enfants, qui sentiront douloureusement la priva‐<br />

tion dʹune mère tant aimée et dont lʹexpérience et lʹesprit éclairé pouvaient diriger leur<br />

marche à travers la vie; votre propre tâche, Madame la Marquise, sʹen accroîtra dʹautant,<br />

Dieu donnera à Madame dʹHurbal et à vous double grâce afin que, par vos affections et<br />

tendres dévouements, le vi<strong>de</strong> soit, autant quʹil se pourra, amoindri, sinon comblé.<br />

1662


Combien je suis touché <strong>de</strong> lʹaimable regret que vous daignez, <strong>avec</strong> Madame votre<br />

mère, mʹexprimer au sujet <strong>de</strong> mon voyage non réalisé à S t ‐Laurent; il serait trop long <strong>de</strong><br />

vous expliquer les diverses circonstances qui rendraient ce mouvement comme impossible<br />

cette année; je tiens toutefois à vous assurer, Madame, quʹil eût été pour moi une vraie<br />

consolation et quʹil me laisse un regret bien sincère, maintenant que je suis encore plus re‐<br />

tenu ici que <strong>de</strong>vant, à cause <strong>de</strong> lʹabsence forcée <strong>de</strong> plusieurs <strong>de</strong> nos Messieurs. Depuis une<br />

dizaine <strong>de</strong> jours, je suis assez souffrant, par suite dʹune inflammation amenée par les<br />

gran<strong>de</strong>s chaleurs; jʹai dû renoncer à me rendre même à Paris, mes forces étant comme<br />

épuisées. Ma santé est, du reste, constamment si frêle que je courrais risque, en voulant vi‐<br />

siter quelque personne indulgente et bonne comme vous, Madame, dʹapporter, au lieu<br />

dʹune conversation aimable, un embarras, un poids, un véritable ennui. Cʹest cette pers‐<br />

pective inquiétante qui me rend timi<strong>de</strong> pour toute excursion; même lorsque je me rends, à<br />

<strong>de</strong> rares intervalles, chez ma sœur, je ne puis jamais lui préciser le moment <strong>de</strong> mon arri‐<br />

vée, qui est subordonné aux instabilités dʹune constitution usée et débile.<br />

Pardonnez‐moi, je vous prie, ces fastidieux détails; je les énonce seulement parmi<br />

plusieurs autres, pour témoigner que ce nʹest pas le défaut dʹempressement, mais une dif‐<br />

ficulté réelle qui mʹa fait renoncer à la satisfaction <strong>de</strong> voir S t ‐Laurent et ses aimés et véné‐<br />

rés habitants. En compensation, jʹy vais bien souvent, très souvent, par la pensée, à la pe‐<br />

tite chapelle, dans le parc, au bord <strong>de</strong> la mer, à la Délivran<strong>de</strong> et en toutes sortes <strong>de</strong> beaux<br />

sites <strong>de</strong>s environs; dans mon <strong>de</strong>rnier voyage, jʹai trouvé notre Normandie plus riche, plus<br />

belle que je ne lʹavais vue; le trajet <strong>de</strong> Duclair à Yvetot est dʹune splen<strong>de</strong>ur, dʹune puis‐<br />

sance merveilleuse, la fécondité <strong>de</strong>s champs, la vigueur <strong>de</strong>s arbres, la variété <strong>de</strong>s aspects,<br />

tantôt immenses, tantôt coupés par les acci<strong>de</strong>nts du sol, font <strong>de</strong> cette excursion une admi‐<br />

rable et délicieuse promena<strong>de</strong>. Jʹeusse trouvé tout cela assurément à S t ‐Laurent et, par‐<br />

<strong>de</strong>ssus tout, la joie dʹune douce intimité que Madame dʹHurbal et vous, Madame, aviez la<br />

con<strong>de</strong>scendance <strong>de</strong> me promettre; je ne suis pas assez avancé en mortification pour mʹêtre<br />

privé volontairement <strong>de</strong> si pures et si précieuses joies! Cʹest beaucoup déjà <strong>de</strong> les offrir en<br />

sacrifice à Celui qui a voulu me les imposer.<br />

Je prie fidèlement pour les conversions, pour les mères, les enfants et les petits‐<br />

enfants; je prie pour la gran<strong>de</strong> ferme, enfin pour tous vos intérêts spirituels et <strong>de</strong> cœur et<br />

dʹordre temporel. Dieu, notre Père, veillera à tout cela et daignera se rendre à nos vœux.<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, et partager <strong>avec</strong> Madame dʹHurbal, tous les<br />

sentiments <strong>de</strong> respect <strong>avec</strong> lesquels je suis en N.S.,<br />

Votre humble et dévoué serviteur Le <strong>Prevost</strong><br />

1761 à M. Chaverot<br />

Dispositions à prendre envers un postulant.<br />

Chaville, dimanche 24 août 1873<br />

Bien cher ami et fils en N.S.,<br />

La gran<strong>de</strong> sécheresse rendant nos jardinages presque nuls, nous aurions peu dʹoc‐<br />

cupation à donner à notre jeune soldat [Pételat] que je crois très bon garçon, et que M.<br />

Lantiez a vu durant plusieurs mois quand ce jeune homme, blessé, était à lʹambulance; M.<br />

Ed. Lainé le connaît aussi assez particulièrement.<br />

1663


Je crois quʹil vaut mieux quʹil prenne tout <strong>de</strong> suite rési<strong>de</strong>nce à Vaugirard où il fera,<br />

sans doute, son postulat; je lʹinvite à se rendre près <strong>de</strong> vous <strong>de</strong>main, dès quʹil aura sa<br />

feuille <strong>de</strong> libération.<br />

Il me semble quʹil serait bien <strong>de</strong> le faire manger à part, et non <strong>avec</strong> les domestiques.<br />

Cette <strong>de</strong>rnière disposition, si elle était prise, serait une difficulté pour son admission,<br />

même comme frère du rosaire.<br />

Votre tout dévoué ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1761‐1 à M. Briscul459 Sollicitu<strong>de</strong> pour un frère qui purge une peine <strong>de</strong> prison militaire. (Après la signature <strong>de</strong> MLP.: Bouquet, secré‐<br />

taire malhabile).<br />

Chaville, 1er septembre 1873<br />

Mon cher Arsène,<br />

Nous avons appris indirectement votre transfert à Aire‐sur‐la‐Lys; cette mutation<br />

nous a dʹabord inquiétés dans lʹappréhension où nous étions quʹil y eût en cela quelque<br />

nouvelle incommodité pour vous. On nous a rassurés en nous disant que ce changement<br />

nʹa, en lui‐même, dʹautre fin quʹune répartition plus juste du personnel <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux maisons<br />

<strong>de</strong> détention; cependant comme bien <strong>de</strong>s circonstances peuvent influer particulièrement,<br />

pour chacun <strong>de</strong>s détenus, en bien ou en mal, nous serions bien aises [sic] dʹapprendre par<br />

vous‐même que votre état nʹa pas été empiré par ce transfert.<br />

Donnez‐nous donc <strong>de</strong> vos nouvelles, dites‐nous quels sont vos travaux, sʹils ont un<br />

peu <strong>de</strong> relâche, si votre nourriture est suffisante, si vous nʹavez, en aucun sens, nul besoin<br />

pour lequel nous puissions vous donner quelque secours.<br />

Vous <strong>de</strong>vez bien penser, mon cher enfant, que nous sommes bien loin <strong>de</strong> vous ou‐<br />

blier; écrivez‐nous donc bientôt afin <strong>de</strong> nous tirer dʹincertitu<strong>de</strong>.<br />

Vous <strong>de</strong>vez bien penser, mon cher enfant, que nous sommes bien loin <strong>de</strong> vous ou‐<br />

blier; écrivez‐nous donc bientôt afin <strong>de</strong> nous tirer dʹincertitu<strong>de</strong>.<br />

La maison ici est présentement à peu près comme vous lʹavez laissée, quant au per‐<br />

sonnel; le nombre <strong>de</strong> nos jeunes gens ne sera pas beaucoup augmenté à la fin <strong>de</strong>s vacances.<br />

Quand, enfin rendu à la liberté, vous pourrez nous revenir comme nous lʹespérons,<br />

vous trouverez les choses à peu près en même état que <strong>de</strong>vant, et surtout vous ne verrez<br />

rien <strong>de</strong> changé dans la cordiale affection que tous vous gar<strong>de</strong>nt fidèlement.<br />

Recevez les vœux <strong>de</strong> tous pour que vous gardiez la paix à travers les tristesses iné‐<br />

vitables <strong>de</strong> votre position; cʹest le meilleur moyen <strong>de</strong> vous la rendre tolérable.<br />

Votre dévoué et affectueux ami et Père en Notre Seigneur.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1762 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Vie retirée à Chaville. Allusion aux pèlerinages. Prières qui font ʺviolence au Cœur <strong>de</strong> Dieuʺ.<br />

459 Cf. lettre 1755. Le frère a été emmené « violemment » <strong>de</strong> Chaville purger à Lille et à Aire 5 mois <strong>de</strong> prison militaire comme exgar<strong>de</strong><br />

mobile <strong>de</strong> la Somme insoumis à la loi du recrutement pour avoir trop retardé son départ. Né à Amiens, le 10 mars 1849, il<br />

fréquente l’Œuvre <strong>de</strong> M. Caille et fait ses premiers vœux comme frère le 7 mai 1870. Toute sa vie, qui fut longue (il mourra le 2<br />

octobre 1940 dans sa 92 e année et la 71 e <strong>de</strong> vie religieuse), il se montra profondément religieux et très édifiant. Dernier témoin <strong>de</strong>s<br />

débuts <strong>de</strong> l’Institut, il <strong>de</strong>meure longtemps le seul survivant ayant bien connu nos trois fondateurs.<br />

1664


Chaville, 18 septembre 1873<br />

Madame la Marquise,<br />

Je commence à concevoir quelques inquiétu<strong>de</strong>s, ne recevant pas le plus petit mot du<br />

côté <strong>de</strong> St ‐Laurent, cher pays que je nʹai pas vu, mais que jʹaime pourtant et qui me revient<br />

souvent en mémoire. Je viens donc solliciter <strong>de</strong> vous, Madame la Marquise, quelques li‐<br />

gnes qui me mettent en tranquillité sur vous, sur Madame votre mère et sur vos chers<br />

grands et petits enfants. Je ne vais pas penser toutefois que vous soyez souffrante, ni vous,<br />

ni aucun <strong>de</strong>s vôtres, Madame dʹHurbal, à défaut <strong>de</strong> vous‐même, mʹen aurait averti chari‐<br />

tablement. Peut‐être aurez‐vous fait quelque voyage ou excursion dʹaffaire ou <strong>de</strong> délasse‐<br />

ment? Pardonnez‐moi, je vous prie, Madame, cette sorte dʹinquisition mentale; ce nʹest as‐<br />

surément pas la curiosité qui met ainsi mon esprit en campagne, mais bien lʹintérêt plein<br />

<strong>de</strong> respect et dʹattachement que, dès longtemps, jʹai voué à toute votre chère famille. Jʹose<br />

compter sur votre bonté tout éprouvée pour obtenir bientôt quelques lignes <strong>de</strong> votre chère main.<br />

Je voudrais beaucoup vous donner ici, en retour, quelques nouvelles tant soit peu<br />

dignes <strong>de</strong> votre attention, mais, confiné et retenu ici par mes occupations habituelles, un<br />

peu plus solitaire encore que <strong>de</strong> coutume, à cause <strong>de</strong> ma santé éprouvée par les gran<strong>de</strong>s<br />

chaleurs et restée fort avariée <strong>de</strong>puis six semaines, je suis bien un correspondant le plus<br />

mal informé qui se puisse voir. Aussi, Madame la Marquise, je vous écris seulement pour<br />

vous écrire, pour vous redire tous mes sentiments dévoués, pour mʹattirer quelque signe<br />

<strong>de</strong> souvenir <strong>de</strong> votre côté; cela fait, jʹavais besoin <strong>de</strong> le dire, votre aimable bienveillance le<br />

comprendra.<br />

Jʹai vu, par les journaux, quʹon a fait en Normandie plusieurs pèlerinages en sens<br />

divers, mais encore assez loin <strong>de</strong> vous; jʹespère bien que vous nʹy aurez pu prendre part,<br />

votre santé, toujours imparfaitement remise, ne supporte guère les foules et tous les ma‐<br />

lencontres460 dʹun voyage acci<strong>de</strong>nté; mais on doit bien prier dans votre petite chapelle et<br />

même à lʹéglise <strong>de</strong> St ‐Laurent; <strong>de</strong> là, vos vœux auront monté, <strong>avec</strong> tant <strong>de</strong> mille autres, et<br />

contribueront à faire violence au Cœur <strong>de</strong> Dieu. Il faut bien compter sur sa grâce, car les<br />

esprits restent bien divisés; puisse sa divine charité les réchauffer et les réunir dans la foi<br />

et dans la paix.<br />

Veuillez, Madame la Marquise, agréer pour vous, pour Madame votre mère et pour<br />

tout votre cher entourage, les sentiments <strong>de</strong> respectueux dévouement <strong>avec</strong> lesquels je suis<br />

en N.S.,<br />

Votre humble serviteur et ami Le <strong>Prevost</strong><br />

1763 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Les épreuves provi<strong>de</strong>ntielles <strong>de</strong> la vie. Le pèlerinage au Mont‐Saint‐Michel et le réveil <strong>de</strong> la foi.<br />

Chaville, 7 octobre 1873<br />

Madame la Marquise,<br />

En lisant votre aimable et honorée lettre, je remarquai une fois <strong>de</strong> plus combien vo‐<br />

tre vie ici‐bas est pleine <strong>de</strong> vicissitu<strong>de</strong>s et dʹacci<strong>de</strong>nts; en bien peu <strong>de</strong> temps, je compte, par<br />

le récit que vous avez bien voulu me faire, tout un ensemble <strong>de</strong> faits qui font date dans<br />

une existence, <strong>de</strong>s départs nombreux pour ce mon<strong>de</strong> que nul ne connaît et vers lequel<br />

458 Vieux français. Aujourd’hui archaïque, tant au sens <strong>de</strong> « mauvaises rencontres » qu’à celui <strong>de</strong> « malheur, contretemps, acci<strong>de</strong>nt ».<br />

1665


nous marchons tous; bienheureux ceux dont la foi éclaire les pas! Madame <strong>de</strong> S t Maur,<br />

Madame <strong>de</strong> Mirville, vos bons parents ou voisins sont <strong>de</strong> ceux‐là. Combien dʹautres sont<br />

mal ou point préparés! Dieu nous gar<strong>de</strong> dʹun tel malheur! Puis, votre chère belle‐sœur<br />

[Mme <strong>de</strong> la Bouteresse] si bonne, aux portes <strong>de</strong> la mort; quelques inquiétu<strong>de</strong>s (exagérées,<br />

sans doute, jʹose en répondre) sur la santé <strong>de</strong> votre bien cher fils; enfin, douleurs spirituel‐<br />

les du côté <strong>de</strong> Vendôme où, jusquʹici, prières et tentatives <strong>de</strong> tant <strong>de</strong> sortes <strong>de</strong>meurent sans<br />

résultat apparent; voilà bien <strong>de</strong>s causes dʹémotions et <strong>de</strong> peines, sans compter les soucis<br />

prolongés pour un grand intérêt temporel. Pourquoi donc tant dʹépreuves, tant <strong>de</strong> secous‐<br />

ses brisantes? La raison nʹy verrait que douleurs, tristesses décourageantes; mais, comme à<br />

la lumière dʹen haut tout sʹillumine en sens meilleur! Faut‐il pleurer amèrement ceux à qui<br />

lʹâge ou <strong>de</strong>s infirmités graves rendaient la vie bien lour<strong>de</strong>, ou dʹautres plus jeunes qui<br />

échappent ainsi peut‐être à beaucoup dʹafflictions? Ils vont trouver le repos et cette paix en<br />

Dieu qui surpasse tout sentiment. Les mala<strong>de</strong>s guéris seront plus fervents, plus détachés<br />

quʹils nʹétaient jusque là; enfin, si la conversion du pauvre impénitent est lente à venir, on<br />

lʹobtiendra enfin, plus éclatante et plus sûre, par la persévérance <strong>de</strong>s prières et <strong>de</strong>s bonnes<br />

œuvres; double gloire pour Dieu dans le retour généreux du pauvre égaré et dans la fer‐<br />

vente charité <strong>de</strong>s âmes zélées qui lʹauront obtenu. A tout cela, je nʹoublie pas dʹajouter,<br />

pour en bénir le Seigneur, ce peu <strong>de</strong> calme et <strong>de</strong> paix spirituelle dont vous recommencez à<br />

jouir, Madame, et dont vous sentez dʹautant mieux le prix que la privation en avait été pé‐<br />

niblement éprouvée par vous. Cʹest le soleil après le temps sombre; comme il éclaire et<br />

comme il échauffe! mais les nuages reviendront encore, par ces alternatives qui nʹauront<br />

<strong>de</strong> fin quʹau Ciel. Quʹil vienne donc ce Ciel; marchons courageusement pour lʹatteindre, et<br />

quʹimporte un peu <strong>de</strong> souffrance, sʹil la faut subir, pour y arriver.<br />

Je regrette bien <strong>avec</strong> vous, Madame la Marquise, que vous nʹayez pu prendre part<br />

au pèlerinage du Mont S t ‐Michel; quelques personnes <strong>de</strong> mon entourage qui sʹy trouvaient<br />

en ont été très édifiées. La beauté admirable du site ajoute, disent‐elles, aux pieuses émo‐<br />

tions <strong>de</strong>s cérémonies religieuses. Le sentiment unanime qui remplit toutes les âmes, dans<br />

ces foules innombrables <strong>de</strong> chrétiens fervents, est dʹailleurs dʹun effet irrésistible; cʹest<br />

lʹEsprit <strong>de</strong> Dieu qui souffle et qui les ébranle jusquʹen leurs fon<strong>de</strong>ments.<br />

Je vais attendre une prochaine lettre <strong>de</strong> vous, Madame, si vous me le permettez,<br />

afin dʹavoir <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> Madame votre mère, que vous me dites être un peu souf‐<br />

frante; je ne la sépare jamais <strong>de</strong> vous dans mes pensées, dans mes prières surtout; jʹai be‐<br />

soin <strong>de</strong> vous savoir lʹune et lʹautre en bonne santé <strong>de</strong> corps, en paix pour lʹesprit, en tendre<br />

union <strong>avec</strong> Dieu pour lʹâme. Je vais lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r que cette lettre vous trouve en cet heu‐<br />

reux état, et quʹil le fasse durer autant que je le désire.<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, les nouvelles assurances du respectueux at‐<br />

tachement <strong>avec</strong> lequel je suis<br />

Votre humble serviteur et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je joins ici la lettre que vous avez bien voulue me communiquer, je comprends la<br />

peine qu’elle vous a causée.<br />

1764 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Difficultés <strong>avec</strong> M. Caille sur lʹavenir <strong>de</strong> lʹŒuvre dʹAmiens. Con<strong>de</strong>scendance extrême <strong>de</strong> MLP.<br />

1666


Lundi soir 13 octobre 1873<br />

Mon cher ami et fils en N.S.,<br />

M. Caille, momentanément à Paris pour ses affaires, mʹest venu voir aujourdʹhui<br />

(lundi). Je ne saurais bien dire en quelles dispositions il se trouve. Il désirerait quʹon réunît<br />

encore les principaux membres du Conseil pour essayer sʹil nʹest pas possible <strong>de</strong> sʹentendre.<br />

Il revient toujours sur les détriments que lʹœuvre dʹAmiens a soufferts, en suite <strong>de</strong>s<br />

changements multipliés <strong>de</strong>s Directeurs ou aumôniers, <strong>de</strong> lʹinsuffisance <strong>de</strong> plusieurs dʹen‐<br />

tre eux, <strong>de</strong> la sorte dʹexclusion où il a été tenu, durant un temps, <strong>de</strong> toute part à la direc‐<br />

tion <strong>de</strong>s mouvements <strong>de</strong> lʹœuvre, etc, etc. Après ces ru<strong>de</strong>s épreuves, inquiétantes pour<br />

lʹavenir, il ne croit pas sage dʹabandonner ses fondations à lʹabsolue discrétion <strong>de</strong> la<br />

Congrégation, lorsquʹil ne sera plus là; il a donc en vue, par la constitution dʹune adminis‐<br />

tration légale, <strong>de</strong> prévenir les malgestions ou libertés trop étendues <strong>de</strong> nos actes dans les<br />

œuvres en question. Je doute beaucoup quʹil soit disposé à renoncer à ses vues; je croirais<br />

plutôt quʹil espère nous amener à son sentiment; je nʹai néanmoins rien vu <strong>de</strong> précis à ce<br />

sujet.<br />

Peut‐être a‐t‐il fait quelques ouvertures à quelque Congrégation pour le maintien<br />

<strong>de</strong> ses œuvres et veut‐il une <strong>de</strong>rnière fois, avant <strong>de</strong> rien conclure, éprouver si la résistance<br />

<strong>de</strong> la Congrégation à ses projets est absolue et définitive.<br />

Je me suis, sur tous les points, tenu dans une gran<strong>de</strong> réserve, me référant à la déci‐<br />

sion du Conseil et lʹinvitant, quant à lui, à <strong>de</strong>meurer fidèle jusquʹà la fin aux graves enga‐<br />

gements que, <strong>de</strong>vant Dieu, il a contractés <strong>avec</strong> nous. Il se propose dʹaller vous voir, cʹest<br />

pourquoi jʹai cru <strong>de</strong>voir vous donner les quelques détails ci‐<strong>de</strong>ssus.<br />

Jʹai vu ce matin, dans lʹUnivers, que M. <strong>de</strong> Resbecq est nommé sous‐Directeur <strong>de</strong><br />

lʹEnseignement Primaire, et M. Gréard déconfit (homme dangereux, dit lʹUnivers).<br />

M. Thonin [professeur au Petit Noviciat] est fort au gré <strong>de</strong> nos ff., ceux qui lʹentou‐<br />

rent principalement; sa science leur donne confiance; il est bon musicien, paraît‐il; il sem‐<br />

ble être dʹhumeur douce et fort sociable.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. M. dʹArbois me disait ces jours‐ci quʹon avait à avertir M. Charrin père <strong>de</strong> sa<br />

prochaine arrivée; je le rappelle, inutilement sans doute, car vous y aurez pensé avant<br />

nous.<br />

Ne pourrait‐on imaginer une sorte <strong>de</strong> <strong>de</strong>mi‐dépendance <strong>de</strong> lʹŒuvre dʹAmiens à<br />

lʹégard <strong>de</strong> lʹEvêché, afin <strong>de</strong> donner satisfaction à M. Caille?<br />

1765 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Consolations mêlées aux épreuves. Généreuses aumônes; prières pour la France.<br />

Chaville, 28 octobre 1873<br />

Madame la Marquise,<br />

Jʹai pris une vive part à votre affliction à lʹoccasion <strong>de</strong> la mort <strong>de</strong> Madame [<strong>de</strong> la<br />

Bouteresse] votre belle‐sœur; elle était la sœur <strong>de</strong> votre cher mari, premier titre à votre af‐<br />

fection, que ses précieuses qualités et son vrai dévouement pour vous avaient gran<strong>de</strong>ment<br />

accrue; <strong>de</strong> telles pertes ne se réparent pas ici‐bas, mais Dieu les compensera amplement au<br />

Ciel; Il ne veut pas non plus que, même en ce mon<strong>de</strong>, nous restions sans consolation; ainsi,<br />

cette privation douloureuse est déjà adoucie par les circonstances <strong>de</strong> la mort <strong>de</strong> Madame<br />

1667


votre belle‐sœur, délivrée <strong>de</strong> longues souffrances, et si bien préparée dʹailleurs à paraître<br />

<strong>de</strong>vant le Seigneur quʹon peut tenir pour assurée la part qui lui est faite dans le repos et le<br />

bonheur célestes; en y pensant bien, nous nʹosons pas la plaindre ni trop gémir nous‐<br />

mêmes sur un événement qui la rend heureuse; <strong>de</strong>mandons plutôt quʹun sort pareil nous<br />

soit réservé. Comment pourrions‐nous, Madame la Marquise, être en sollicitu<strong>de</strong> sur la<br />

continuation <strong>de</strong> la race <strong>de</strong>s Hou<strong>de</strong>tot? Elle vit en votre cher fils, qui ne paraît pas disposé à<br />

la voir sʹéteindre; voilà déjà <strong>de</strong>ux belles et grosses jeunes filles pleines <strong>de</strong> vigueur, et si<br />

pressées dʹarriver que la secon<strong>de</strong> suivait presque à un pas la première; <strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> pa‐<br />

tience, et frères et sœurs encore viendront à leur tour; votre entourage sera nombreux, la<br />

maison sera pleine, vous serez grandʹmère et même aïeule dʹune vraie génération qui se<br />

perpétuera jusque dans la nuit <strong>de</strong>s temps; Dieu aime les familles chrétiennes, Il les bénit et<br />

les rend fécon<strong>de</strong>s, afin quʹelles continuent à lʹhonorer et à le faire aimer. Cʹest dans cette<br />

pensée, Madame, que vous tâchez <strong>de</strong> Lʹadorer et <strong>de</strong> Le servir vous‐même; les vôtres, tout<br />

lʹannonce, ne feront pas autrement. Ayons bonne confiance, ne gâtons pas le bel horizon<br />

que lʹavenir met <strong>de</strong>vant nous.<br />

Jʹespère que la santé <strong>de</strong> Madame dʹHurbal est tout à fait remise et quʹelle sera forte<br />

pour venir faire sa saison dʹhiver à Paris; cʹest là quʹelle trouvera, à son choix, toutes sortes<br />

<strong>de</strong> joies chrétiennes, instructions et pieuses solennités; à la campagne, cʹest surtout en<br />

contemplant les gran<strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong> Dieu dans lʹordre naturel que lʹâme sʹédifie, mais,<br />

dans les gran<strong>de</strong>s villes, elle est vivifiée par les pompes <strong>de</strong> notre culte et par les effusions<br />

<strong>de</strong> la parole divine; heureux sont ceux qui, tout à tour, peuvent jouir <strong>de</strong> ce double bienfait!<br />

Je vous remercie par avance, Madame, <strong>de</strong> la charitable aumône que vous <strong>de</strong>stinez à<br />

nos œuvres; je ne saurais la refuser puisquʹelle sera pour vous un mérite <strong>de</strong>vant Dieu et un<br />

secours pour ceux que nous désirons assister, mais je me permets dʹinsister pour que vous<br />

la proportionniez, non à vos aspirations généreuses, mais aux charges nombreuses aux‐<br />

quelles vous avez à subvenir.<br />

Je ne passe pas un jour sans <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r instamment, au S t Sacrifice surtout, que vos<br />

vœux pour tout ce qui vous est cher et pour vous aient leur accomplissement; je crois que<br />

Dieu le veut et me le comman<strong>de</strong>, puisquʹil a tourné vers mon indignité votre confiance<br />

quʹà tant <strong>de</strong> titres beaucoup dʹautres mériteraient infiniment mieux; je ne mʹen reconnais<br />

dʹautres, pour moi, que les sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> profond dévouement <strong>avec</strong> lesquels<br />

je suis<br />

Votre humble et obéissant serviteur et ami Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Toutes les âmes chrétiennes se disposent à prier <strong>avec</strong> ar<strong>de</strong>ur pour que lʹordre<br />

et la paix soient rendus à lʹEglise et à la France; je joins ici <strong>de</strong>ux petites feuilles indiquant<br />

les exercices quʹon a résolu <strong>de</strong> faire; si vous en désirez un certain nombre, je mʹempresse‐<br />

rai <strong>de</strong> vous les envoyer.<br />

1766 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Remerciements pour une généreuse offran<strong>de</strong>. Ne pas sʹalarmer inutilement. Allusion aux <strong>de</strong>rniers évènements<br />

politiques.<br />

Chaville, 6 novembre 1873<br />

Madame la Marquise,<br />

Jʹai reçu votre lettre, bonne comme toutes celles que vous voulez bien mʹécrire,<br />

lʹaumône généreuse que votre charité a <strong>de</strong>stinée aux diverses œuvres dont la Provi<strong>de</strong>nce<br />

1668


nous a remis le soin; cette aumône que vous trouvez trop petite à votre gré, même bien<br />

minime, elle est, à mon sens, excessive, eu égard surtout aux exigences nombreuses <strong>de</strong> vo‐<br />

tre position et à lʹincertitu<strong>de</strong> où les événements politiques laissent tous les esprits. Dieu<br />

bénira votre confiance et votre charité et vous rendra en temps utile le bien que vous faites<br />

pour le soulagement <strong>de</strong>s petits et <strong>de</strong>s faibles; leur nombre, vous le voyez aussi autour <strong>de</strong><br />

vous, est loin <strong>de</strong> diminuer en ce moment. Merci mille fois, Madame la Marquise, <strong>de</strong> votre<br />

aimable assistance; tous ceux qui en sentent le bienfait sʹen souviendront dans leurs prières.<br />

Jʹai bien la confiance que votre prochaine lettre nʹaura rien que <strong>de</strong> consolant tou‐<br />

chant la santé <strong>de</strong> votre cher fils; un peu <strong>de</strong> lassitu<strong>de</strong> ou <strong>de</strong> langueur momentanée nʹa rien<br />

<strong>de</strong> surprenant, dans cette saison <strong>de</strong>s chasses particulièrement; à son âge, la nature a <strong>de</strong> si<br />

puissantes ressources quʹon est bientôt refait et fortifié; il est, en général, <strong>de</strong> bonne consti‐<br />

tution et nʹa rien <strong>de</strong> maladif, chassez donc, chère Madame, <strong>de</strong>s soucis mal fondés et jouis‐<br />

sez en paix du contentement que toute votre famille, en ce moment réunie, doit vous pro‐<br />

curer; laissez votre cœur, trop souvent serré, prendre un peu <strong>de</strong> respiration et dʹépanouis‐<br />

sement; faire autrement serait méconnaître les bienfaits <strong>de</strong> Dieu.<br />

Ayons aussi bonne confiance pour les <strong>de</strong>ux oncles; le Seigneur aura son heure, si<br />

nous ne nous lassons pas <strong>de</strong> prier ar<strong>de</strong>mment, humblement, mais aussi <strong>avec</strong> une fervente<br />

espérance.<br />

Priez aussi pour notre chère France, hélas! trompée présentement dans son at‐<br />

tente 461 ; rien nʹest perdu toutefois, si nous gardons la foi et si nous comptons sur le secours<br />

dʹen haut. Au 24 mai, on ne voyait plus <strong>de</strong> moyen <strong>de</strong> salut, le Ciel sʹest éclairci tout à coup<br />

comme miraculeusement, le secours est venu dʹen haut; attendons‐le encore fidèlement, il<br />

viendra en temps opportun.<br />

Veuillez, Madame la Marquise, offrir mes hommages à Madame votre mère et aussi<br />

mes souvenirs dévoués à vos chers enfants, en agréant vous‐même mes sentiments <strong>de</strong> bien<br />

cordial respect.<br />

Votre humble serviteur en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1767 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Humbles excuses pour lʹavoir appelé ʺMonsieurʺ.<br />

Chaville, 13 novembre 1873<br />

Mon cher ami et fils en N.S.,<br />

Je regrette bien sincèrement <strong>de</strong> vous avoir causé quelque contrariété, en usant <strong>de</strong><br />

lʹappellation <strong>de</strong> Monsieur qui ne vous agrée point; lʹhabitu<strong>de</strong> en est si ancienne pour moi,<br />

à votre égard comme à lʹégard <strong>de</strong> nos autres ff. ecclésiastiques, quʹelle disparaît lentement;<br />

mais soyez assuré que je vais y veiller bien attentivement, afin que les rechutes soient aus‐<br />

si rares quʹil se pourra; vous cherchez constamment à mʹépargner tout ennui, ce serait mal<br />

reconnaître votre bon et cordial vouloir que <strong>de</strong> ne pas tenir compte dʹune observation,<br />

dʹailleurs bien motivée.<br />

Croyez bien à tous mes sentiments <strong>de</strong> sincère affection en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

461 L’intransigeance du comte <strong>de</strong> Chambord venait <strong>de</strong> faire échouer, le 27 octobre, la tentative <strong>de</strong> restauration monarchique. Après la<br />

démission <strong>de</strong> Thiers le 24 mai, le maréchal <strong>de</strong> Mac-Mahon avait été nommé prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la République. La loi du septennat sera<br />

votée le 20 novembre 1873.<br />

1669


1767‐1 à M. Pavie<br />

Condoléances à leur ami Cosnier qui vient <strong>de</strong> perdre son épouse. Rayonnement <strong>de</strong> la famille Pavie. Eloge <strong>de</strong><br />

MM. <strong>de</strong> Varax et Myionnet.<br />

Vaugirard, 15 novembre 1873<br />

Mon bien cher ami,<br />

Exprimez je vous prie à notre ami M. Cosnier nos vives sympathies, nous prenons<br />

la plus sincère part à son affliction, MM. Myionnet, <strong>de</strong> Varax et moi, apprécions lʹétendue<br />

du sacrifice que la volonté divine lui impose. Ce que vous nous dites <strong>de</strong> la fin touchante et<br />

si chrétienne <strong>de</strong> lʹépouse, <strong>de</strong> la résignation profondément soumise <strong>de</strong> lʹépoux qui survit à<br />

regret, nous émeut sans nous étonner; nous connaissons le cœur qui subit lʹépreuve et<br />

nous savons que la main <strong>de</strong> Dieu avait mesuré le coup avant <strong>de</strong> le frapper; ayons<br />

confiance, cette douce main se posera sur la plaie vive pour y répandre lʹhuile et le vin, la<br />

force et la consolation, les pensées hautes <strong>de</strong> la foi, les saintes espérances <strong>de</strong> lʹavenir éter‐<br />

nel; là les liens <strong>de</strong>s pures affections se reformeront et ne seront plus jamais brisés; patien‐<br />

tons quelques instants dans lʹexil, bientôt nous retrouverons la patrie.<br />

Combien je vous sais gré <strong>de</strong>s intéressants détails que vous me donnez sur le cercle<br />

intime dont la bonté <strong>de</strong> Dieu vous a entouré; vous avez bien raison <strong>de</strong> vous montrer re‐<br />

connaissant. La part qui vous a été faite est bien choisie, tous les vôtres ont du cœur et les<br />

dons <strong>de</strong> lʹintelligence par surcroît, ils sont chrétiens à votre manière non pas à <strong>de</strong>mi mais<br />

en plénitu<strong>de</strong>. Il ne vous fallait pas moins pour vous faire une atmosphère respirable, le<br />

Seigneur lʹa faite selon votre besoin, quʹil est bon <strong>de</strong> se donner à Lui et quʹon sent bien tou‐<br />

jours plus, à mesure quʹon avance, quʹil nʹy a <strong>de</strong> vérité et <strong>de</strong> paix quʹen Lui seul. Puisse‐t‐Il<br />

nous gar<strong>de</strong>r ce trésor en lʹaccroissant tous les jours!<br />

Je nʹai que peu <strong>de</strong> faits à vous communiquer sur notre famille religieuse qui est, en<br />

Dieu et en sa charité, aussi la vôtre. Nous nous soutenons <strong>avec</strong> sa grâce, progressant len‐<br />

tement, mais dʹun pas régulier, nous posant mieux tout en avançant. M. <strong>de</strong> Varax joint<br />

lʹactivité à la pru<strong>de</strong>nce et sʹappuie plus sur le surnaturel que sur ses moyens propres quel‐<br />

quʹheureux quʹils soient. Notre f. Myionnet, immuable dans son abnégation et son dé‐<br />

vouement, vieillit sans fléchir; le <strong>de</strong>rnier jour le trouvera encore sur la brèche; son exemple<br />

est pour nous cette prédication muette dont vous parlez, qui persua<strong>de</strong> et console, et nous<br />

porte à bénir Dieu.<br />

Adieu, mon bien cher ami; offrez nos affectueux respects à Mme Pavie, nos senti‐<br />

ments dévoués à vos chers enfants, et pour vous, prenez <strong>de</strong> tout à même, car nous sentons<br />

tout ce que la plus cordiale amitié peut inspirer.<br />

Votre ami et frère en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. A lʹoccasion, souvenir au frère Théodore qui se cache trop mais quʹon nʹoublie<br />

pas malgré tout.<br />

1768 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Conseils dans les difficultés <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> famille.<br />

Chaville, 26 novembre 1873<br />

Madame la Marquise,<br />

Je remarque bien <strong>avec</strong> vous que les épreuves et contrariétés se succè<strong>de</strong>nt en ce<br />

mon<strong>de</strong> et que, pour vous en particulier, elles sont loin <strong>de</strong> vous épargner et souvent,<br />

1670


comme aujourdʹhui, dans les objets qui vous sont les plus chers, les plus intimement unis,<br />

vos bien‐aimés enfants. Mais je pense que, dans la circonstance qui vous occupe et vous<br />

peine présentement, il nʹy a souffrance et malentendus que dʹune manière acci<strong>de</strong>ntelle; la<br />

conviction étant bien acquise, pour votre bonne mère et pour vous, Madame, que votre<br />

jeune ménage désire sʹoccuper exclusivement <strong>de</strong> lʹéducation <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux petites enfants et ne<br />

goûte ni les avis, ni les observations, vous retrouverez assurément <strong>de</strong> ce côté le calme et la<br />

paix, en vous abstenant et en laissant au temps et à lʹexpérience le soin dʹapporter leurs<br />

utiles conseils; ceux‐là sont les plus efficaces et les mieux reçus, ils sont parfois tardifs et<br />

coûtent un peu cher, mais ils sont encore précieux quand on en profite; le bon esprit <strong>de</strong><br />

vos chers enfants vous assure quʹil en sera ainsi pour eux. Le difficile sera, pour Madame<br />

dʹHurbal et pour vous, <strong>de</strong> dominer ce premier mouvement qui nous porte à procurer le<br />

bien ou a prévenir le mal qui semble à craindre, mais vous y parviendrez, la résolution<br />

étant une fois bien prise; toute influence salutaire ne vous sera pas interdite, même en ce<br />

cas, vos chers enfants, laissés à leur pleine liberté, recourront dʹeux‐mêmes quelquefois à<br />

votre ai<strong>de</strong> quʹils seront heureux <strong>de</strong> retrouver. La jeunesse est ainsi faite, disposée à la<br />

confiance en elle‐même, et fort avi<strong>de</strong> <strong>de</strong> liberté; mais, chez les âmes bien faites comme il se<br />

voit ici, lʹabus sérieux nʹest pas à craindre. En tout cas, une résistance ouverte nʹaboutirait<br />

quʹà <strong>de</strong> tristes dissensions et à une séparation qui serait regrettable pour les <strong>de</strong>ux parties.<br />

Vos chers enfants, dans une <strong>de</strong>meure séparée, seraient un peu seuls et ne retrouveraient<br />

pas sans dépense notable le bel apanage du château S t ‐Laurent; <strong>de</strong> votre côté, Madame vo‐<br />

tre mère et vous nʹauriez plus <strong>de</strong> société intime et habituelle; le mieux est donc <strong>de</strong> vivre<br />

ensemble en faisant beaucoup <strong>de</strong> concessions; elles ne seront pas égales, peut‐être, mais la<br />

bonté si ordinaire ici dans les <strong>de</strong>ux mères et leur chrétienne con<strong>de</strong>scendance rétabliront<br />

lʹéquilibre; je suis bien persuadé que cʹest là le meilleur parti, en tout état <strong>de</strong> cause, une dé‐<br />

cision contraire ne saurait être prise sans <strong>de</strong>s essais prolongés et <strong>de</strong> mûres réflexions.<br />

Vous me pardonnerez, Madame la Marquise, <strong>de</strong> dire si précisément et si longue‐<br />

ment mon avis, mais vous mʹy avez encouragé, jʹai pris la permission à la lettre. Pour aller<br />

jusquʹau bout, jʹajouterai que le divin Seigneur, en vous éprouvant <strong>avec</strong> tant <strong>de</strong> persis‐<br />

tance, témoigne assez combien Il vous veut toute à Lui; Il vous détache <strong>de</strong>s choses <strong>de</strong> la<br />

terre pour préparer en vous un plus grand amour <strong>de</strong>s biens spirituels; la lutte est ru<strong>de</strong> et<br />

pénible à la nature, mais la victoire sera bien méritoire et aura <strong>de</strong> douces consolations.<br />

Dieu est si bon et nous aime si fort que, si nous nʹavons pas le courage <strong>de</strong> nous donner, Il<br />

veut bien nous prendre lui‐même; laissons‐le faire seulement et consentons à sa paternelle<br />

action.<br />

Je nʹoublie pas les bons oncles; leur âge veut quʹon ne les per<strong>de</strong> pas <strong>de</strong> vue <strong>de</strong>vant le<br />

Seigneur et puisquʹils sont, il semble, commis par lui à votre gar<strong>de</strong>, veillons et prions; je<br />

me mets humblement <strong>avec</strong> vous, Madame, pour cette sainte œuvre à laquelle vous avez<br />

bien voulu me donner part; jʹaurai à cœur dʹy concourir <strong>de</strong> mon mieux. 462<br />

Jʹoffre à Madame dʹHurbal mes profonds hommages et vous prie, Madame la Mar‐<br />

quise, dʹagréer aussi mes plus respectueux sentiments en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

462 Première grâce attribuée à MLP. La Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot écrira le 30 juin 1876 (20 mois après son décès) que MLP. a obtenu la<br />

grâce <strong>de</strong> la conversion du Général d’Hurbal. (Positio, p. 725).<br />

1671


1769 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Conseils et réconfort à sa bienfaitrice qui se retrouve seule, après le départ <strong>de</strong> ses enfants.<br />

Chaville, 13 décembre 1873<br />

Madame la Marquise,<br />

Vos chers enfants en ce moment vous ont déjà quittée, sans doute, et cette lettre va<br />

vous trouver seule à S t ‐Laurent <strong>avec</strong> votre bonne mère. Je comprends bien que cette sépa‐<br />

ration si prompte, sur laquelle vous nʹaviez pas dû compter, vous aura été particulière‐<br />

ment pénible, dʹautant que lʹétat <strong>de</strong> malaise et <strong>de</strong> fatigue où se trouve Monsieur votre fils<br />

nous laisse quelque inquiétu<strong>de</strong>. Le grand et efficace remè<strong>de</strong> à cette nouvelle atteinte sera<br />

pour vous, Madame, dans le recours au Père <strong>de</strong>s miséricor<strong>de</strong>s; son Cœur aura <strong>de</strong>s adou‐<br />

cissements pour votre affliction et saura aussi la guérir. Quelque lassitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> santé, pro‐<br />

venant dʹar<strong>de</strong>ur excessive pour la chasse et peut‐être dʹautres joies que sa condition rend<br />

légitimes, nʹest pas un mal vraiment inquiétant en soi, mais une âme tendre et maternelle<br />

met aisément les choses au pire. Dieu le permet, sans doute, pour nous rappeler combien<br />

nos biens les plus chers sont fragiles et combien il est sage <strong>de</strong> les aimer en Lui qui, même<br />

en nous les retirant, serait puissant pour nous les rendre. Je vais, comme toujours, unir<br />

mes prières aux vôtres; tous les premiers jours <strong>de</strong> chaque semaine sont ceux que jʹai parti‐<br />

culièrement réservés, dans la S te Messe surtout, à vous, Madame et à tout ce qui vous est<br />

cher; mais il nʹen est point où je nʹoffre à Dieu quelque souvenir spécial aux mêmes inten‐<br />

tions.<br />

Je lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rai <strong>de</strong> vous visiter dans votre solitu<strong>de</strong>, afin <strong>de</strong> vous la rendre non<br />

seulement supportable, mais douce et pleine <strong>de</strong> consolation; nʹa‐t‐Il pas dit, parlant <strong>de</strong><br />

lʹâme fidèle: Je la conduirai dans la solitu<strong>de</strong> et je lui parlerai au fond du cœur Vous répon‐<br />

drez, jʹen ai lʹassurance: Parlez, Seigneur, votre servante écoute. Si cette parole divine ar‐<br />

rive à lʹintime <strong>de</strong> votre âme, elle la remplira <strong>de</strong> joie et <strong>de</strong> confiance et répandra en vous<br />

comme une plénitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> vie; cʹest un avant‐goût du Ciel dont vous avez joui plus dʹune<br />

fois et quʹun cœur pieux comme lʹest le vôtre ne saurait oublier. Les lectures un peu forti‐<br />

fiantes vous seront aussi dʹun grand secours; sʹil en était quelquʹune pour laquelle vous<br />

vous sentissiez <strong>de</strong> lʹattrait, je mʹempresserais certainement, sur un mot dʹavis <strong>de</strong> votre part<br />

ou <strong>de</strong> celle <strong>de</strong> Madame dʹHurbal, <strong>de</strong> vous faire parvenir lʹouvrage que vous mʹauriez in‐<br />

diqué. Je crois, pardonnez‐moi, Madame, encore ce mot, quʹune sorte <strong>de</strong> petit règlement<br />

ou ordonnance <strong>de</strong>s heures <strong>de</strong> la journée vous rendrait ces temps dʹisolement plus accepta‐<br />

bles et peut‐être aimables. Enfin et <strong>avec</strong> tout cela, la santé <strong>de</strong> votre cher enfant va se forti‐<br />

fier; vous le retrouverez à Paris, où peut‐être vous arriverez moins tard que lʹan <strong>de</strong>rnier.<br />

Jʹai bien peur dʹavoir pensé à moi, en ce point particulier, entrevoyant quʹil me serait don‐<br />

né <strong>de</strong> vous rendre plus tôt que je ne lʹavais espéré quelques visites, ainsi quʹà votre très<br />

bonne mère, tant il est vrai que nous nous mêlons à tout et partout. Pardonnez‐le, Ma‐<br />

dame, au sincère et affectueux dévouement dont je suis animé pour lʹune et lʹautre <strong>de</strong><br />

vous.<br />

M. <strong>de</strong> Caulaincourt, présentement à Paris, est venu à Vaugirard, mais sans que je<br />

mʹy sois trouvé; il a vu M. <strong>de</strong> Varax, en laissant espérer que jʹaurai la satisfaction <strong>de</strong> le<br />

voir.<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, les nouvelles assurances du profond respect<br />

<strong>avec</strong> lequel je suis<br />

Votre humble serviteur et ami en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1672


1770 à M. Maignen<br />

Conseils et encouragements à propos du Moniteur <strong>de</strong>s Jeunes Ouvriers, rédigé par M. Maignen. MLP. déve‐<br />

loppe ses vues sur ʺla philosophie <strong>de</strong> lʹouvrierʺ.<br />

15 décembre 1873<br />

Mon cher ami et fils en N.S.,<br />

Il ne me semble pas quʹil y ait aucun reproche à faire au Moniteur <strong>de</strong> l’Ouvrier; il est<br />

convenablement composé et aussi bien rédigé. Vous avez raison <strong>de</strong> vouloir lui donner son<br />

utilité et sa couleur propres, raison aussi <strong>de</strong> tenir au genre qui est à vous et aux moyens<br />

que Dieu a mis en vous; cʹest par là que vous vaudrez et produirez le bien; abon<strong>de</strong>z en ce<br />

sens franchement et résolument, bien sûr que vous serez dans le vrai, dans la seule voie<br />

quʹil vous convient <strong>de</strong> prendre.<br />

Je ne sais pas si vous avez à vous plaindre <strong>de</strong> nʹavoir pas assez <strong>de</strong> lecteurs et <strong>de</strong> ne<br />

pas trouvez assez <strong>de</strong> sympathie; sʹil en était ainsi, il faudrait, pour votre travail, comme<br />

pour tant dʹautres écrits <strong>de</strong> valeur réelle, sʹen prendre à la multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> plus en plus exu‐<br />

bérante <strong>de</strong>s publications dont on est inondé, envahi <strong>de</strong> toutes parts et qui produisent à la<br />

longue le blasement, lʹindifférence dans les esprits, <strong>avec</strong> un amoindrissement bien plus<br />

triste encore du sens <strong>de</strong> la vérité, du goût du bien et <strong>de</strong> la puissance <strong>de</strong> la volonté. Ce sont<br />

là <strong>de</strong> bien grands mots à propos du mo<strong>de</strong>ste et sage Moniteur <strong>de</strong> lʹOuvrier, mais le déver‐<br />

gondage <strong>de</strong> la pensée, <strong>de</strong> la parole, <strong>de</strong> la presse me semble être le fléau <strong>de</strong> notre époque, il<br />

débor<strong>de</strong> sur tout, grand et petit, et menace <strong>de</strong> tout engloutir; il est, en particulier, lʹennemi<br />

<strong>de</strong> votre feuille.<br />

Il ne sʹensuit pas pour moi quʹil faille se taire et sʹabstenir du bien, mais réprimer en<br />

tout lʹexcès, favoriser sagement ce qui est bon et bâillonner absolument ce qui est perni‐<br />

cieux. (le tout, ici, pour vous consoler, si vous nʹavez pas autant <strong>de</strong> succès que vous auriez<br />

droit dʹen attendre.)<br />

Je crois que vous prêterez beaucoup dʹintérêt à la lecture du Moniteur toutes les fois<br />

que vous pourrez mettre en action les conseils et enseignements moraux que vous voulez<br />

donner à vos jeunes gens. Vous avez le talent propre aux tableaux <strong>de</strong> genre; les étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />

mœurs, les scènes <strong>de</strong> famille vous conviennent, vous saisissez bien ce quʹil y a dʹaimable,<br />

<strong>de</strong> touchant, ou <strong>de</strong> comique et dʹamusant dans les faits, dans les caractères; cʹest là un pré‐<br />

cieux don qui vient du cœur et <strong>de</strong> lʹesprit ensemble, vous en avez souvent tiré un très bon<br />

parti; développez‐le <strong>de</strong> plus en plus, cʹest une veine bien riche qui peut servir beaucoup<br />

pour attirer au bien et inspirer lʹhorreur du mal; nʹest‐ce pas là tout votre but? Vous pou‐<br />

vez ainsi montrer lʹouvrier sous toutes les faces, à tous les âges, dans toutes les luttes, dans<br />

toutes les victoires. Je voudrais (vous le voulez aussi) que vous saisissiez lʹouvrier comme<br />

votre tâche, votre étu<strong>de</strong>, votre œuvre unique; que la vie <strong>de</strong> lʹouvrier, sa carrière, ses <strong>de</strong>‐<br />

voirs, ses peines, ses joies fussent comme une gran<strong>de</strong> épopée dont vous vous empariez<br />

pour la relever, lʹéclairer, la vivifier, lʹennoblir. Le cadre est large, mais, <strong>avec</strong> un plan bien<br />

conçu, suivi <strong>avec</strong> persévérance, tantôt sous une forme, tantôt sous une autre, on peut faire<br />

un travail beau, utile, salutaire. Lʹœuvre, dans son ensemble, <strong>de</strong>vrait être: La philosophie<br />

<strong>de</strong> lʹouvrier. Elle tendrait à populariser, à répandre dans les esprits, parmi les classes ou‐<br />

vrières, à lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong> fictions attachantes et bien touchées, les gran<strong>de</strong>s vues <strong>de</strong>s Lacordaire,<br />

<strong>de</strong>s Mermillod, Félix, Matignon, etc, etc. Quelques essais en ce genre ont été faits: Emile<br />

Souvestre (que je nʹai pas lu), le premier ouvrage <strong>de</strong> M. Lamothe (jʹen oublie le nom): un<br />

condamné qui, par le travail, se relève et se réhabilite, Le Maçon, <strong>de</strong> M. Maçon (je crois) et<br />

1673


dʹautres: H. Conscience, Bourdon. Mais la mine est à peine ouverte, il reste à lʹexploiter<br />

plus largement, plus à fond surtout).<br />

On répète sans cesse que les idées gouvernent le mon<strong>de</strong>; rien <strong>de</strong> plus vrai, mais les<br />

idées nʹentrent dans lʹesprit du peuple quʹautant quʹelles ont une forme accessible pour<br />

lui, quʹelles frappent son âme, son imagination, ses passions. Cʹest par là que le prennent,<br />

dans le plus mauvais sens, tant dʹauteurs qui lʹégarent; servons‐nous <strong>de</strong> ces moyens pour<br />

le bien.<br />

Peut‐être quʹentreprendre seul cette tâche vous semblerait téméraire; pourquoi<br />

alors ne tenteriez‐vous pas dʹassocier à cette pensée quelques écrivains <strong>de</strong> bon esprit et <strong>de</strong><br />

talent, comme on le fait pour toute publication qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> suite et forces réunies? Si<br />

vous vous présentiez <strong>avec</strong> un plan, un programme bien conçu, vous trouveriez, je crois,<br />

réponse à votre appel.<br />

En tout cas, si, goûtant peu ce projet <strong>de</strong> Société, vous vouliez vous en tenir à vos<br />

seuls moyens, malheureusement très restreints à cause du peu <strong>de</strong> temps, <strong>de</strong> calme, et <strong>de</strong><br />

liberté dont vous jouissez, je nʹinsisterais pas moins pour que vous tentiez, <strong>avec</strong> réflexion<br />

et plan prémédité, <strong>de</strong> populariser, dans <strong>de</strong>s compositions attrayantes, les vues, les vérités<br />

qui peuvent et doivent entrer dans lʹesprit du peuple ouvrier. Si vous pouviez groupez au‐<br />

tour <strong>de</strong> vous quelques hommes capables et pratiques, ne fût‐ce que <strong>de</strong>ux ou trois, pour<br />

vous assister, vous arriveriez aussi à former un Cercle, une Association dʹindustriels et<br />

commerçants chrétiens qui vous seraient pour vos jeunes gens dʹun grand appui et qui<br />

doubleraient lʹimportance <strong>de</strong> votre œuvre. Votre isolement, joint à vos charges trop lour‐<br />

<strong>de</strong>s, paralyse votre action. Recourons beaucoup et persévéramment à Dieu, son secours<br />

viendra enfin; cʹest toujours à ce moyen suprême quʹil en faut revenir.<br />

Adieu, mon cher enfant en N.S.; que ne suis‐je jeune, vali<strong>de</strong> et <strong>de</strong> valeur sérieuse!<br />

Comme il me serait doux <strong>de</strong> travailler <strong>avec</strong> vous qui mʹavez donné vos plus belles années<br />

et toute la fleur <strong>de</strong> votre âme; hélas! dans vos besoins aujourdʹhui, je nʹai à vous offrir que<br />

<strong>de</strong>s conseils, inutiles peut‐être, et <strong>de</strong>s vœux, je ne dirai pas stériles, car je les mettrai ar‐<br />

<strong>de</strong>mment au plus intime du Cœur divin du Seigneur notre Dieu!<br />

Votre ami et Père en J. et M.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Il va sans dire quʹen toute hypothèse, Le Moniteur gar<strong>de</strong>rait ses notes, avertisse‐<br />

ments, communications qui établissent lʹunion entre les œuvres qui lʹont choisi comme<br />

point central <strong>de</strong> leurs relations.<br />

Le r.p. Matignon traite, je crois, cette année à Notre‐Dame: Des rapports <strong>de</strong> lʹouvrier<br />

<strong>avec</strong> le patron. Jʹen ai aperçu quelque extrait; il me fait penser que Le Moniteur lui emprun‐<br />

terait peut‐être quelques bonnes vues.<br />

Peut‐être représenterait‐on utilement et justement lʹétat actuel <strong>de</strong> notre société par<br />

lʹintérieur dʹune famille où tout est en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> lʹordre. Le père <strong>de</strong> famille, dont lʹautorité<br />

est méconnue, comme celle <strong>de</strong> Dieu lui‐même, sʹest retiré et <strong>de</strong>meure à distance; la mère<br />

gémit, intervient en vain; les fils en désaccord, se chamaillent, se disputent pour la prédo‐<br />

minance et pour les débris dʹune fortune en désarroi; une jeune sœur, victime involontaire<br />

<strong>de</strong> ces discor<strong>de</strong>s, souffre et prie.<br />

Enfin, un rayon dʹen haut tombe sur ce foyer <strong>de</strong> divisions et dʹanarchie; il éclaire<br />

peu à peu les esprits et réchauffe les cœurs, la lumière se fait, lʹordre reparaît, la famille re‐<br />

trouve, <strong>avec</strong> la foi et le <strong>de</strong>voir, lʹaccord, la paix, le bonheur. Alleluia!<br />

1674


1771 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Simple note accompagnant une réponse à M. Caille, qui projette <strong>de</strong> quitter lʹInstitut.<br />

22 décembre 1873<br />

Jʹai répondu en ami plutôt quʹen Supérieur, lʹinvitant à peser <strong>de</strong>vant Dieu la gravité<br />

dʹune pareille résolution, mais je crains bien quʹelle ne soit définitivement prise.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1772 à M. Trousseau<br />

Au supérieur <strong>de</strong> Tournay, MLP. prodigue conseils et encouragements.<br />

Chaville, 30 décembre 1873<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je vois <strong>avec</strong> plaisir que vous nʹavez pas mis en oubli notre maison <strong>de</strong> Chaville, où<br />

vous avez si utilement exercé votre zèle durant un temps que nous regrettons <strong>avec</strong> vous.<br />

Nous sommes tous très reconnaissants <strong>de</strong> vos bons souvenirs; en retour, nous vous<br />

exprimons tout lʹintérêt que nous prenons à vos travaux. Nous suivons <strong>avec</strong> sympathie<br />

vos épreuves, vos efforts et ces tribulations inévitables dans toute fondation. Soyez assuré,<br />

mon bien cher ami, que tout cela est compté <strong>de</strong>vant Dieu et quʹIl saura, au temps marqué<br />

dans sa sagesse, vous en donner sa riche et gran<strong>de</strong> récompense. magna nimis.<br />

Ne manquez pas <strong>de</strong> faire part à nos chers ff. Jouin, Manque, Hubert et Fournier <strong>de</strong><br />

mes sentiments <strong>de</strong> vive et constante affection.<br />

Nos enfants vous sont toujours reconnaissants et dévoués; les anciens apprennent<br />

aux nouveaux votre nom et tous vos bons soins pour eux; la tradition en restera, et la pe‐<br />

tite œuvre <strong>de</strong>meurera toujours vôtre dans la charité du divin Seigneur.<br />

Adieu, mon bien cher ami; nous serons heureux si quelque bonne occasion vous<br />

amenant à Paris nous procure la satisfaction <strong>de</strong> vous revoir.<br />

Votre affectionné ami et Père Le <strong>Prevost</strong><br />

1773 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Vœux <strong>de</strong> nouvel an. Projets <strong>de</strong> voyage à Paris.<br />

Chaville, 2 janvier 1874<br />

Madame la Marquise,<br />

Votre aimable bonté me prend en défaut; je ne suis pas arrivé à temps pour vous<br />

prévenir en vous offrant, ainsi quʹà Madame votre mère, mes hommages, vœux et respects<br />

à lʹoccasion du nouvel an. Mais, comme cʹest bien au moins du plus profond <strong>de</strong> mon cœur<br />

et <strong>avec</strong> un désir sincère que je souhaite à vous et à tout ce qui vous est cher la paix tant dé‐<br />

sirée, sûrement obtenue, la santé et tous les autres biens, les spirituels par‐<strong>de</strong>ssus tout!<br />

Daigne le Seigneur écouter les humbles prières que jʹoffre chaque jour à cette intention. Jʹy<br />

intéresse aussi ceux qui mʹentourent, me défiant justement <strong>de</strong> mon insuffisance, et tous les<br />

soirs, aux recommandations que nous sommes dans lʹusage <strong>de</strong> faire, aux <strong>de</strong>rniers mo‐<br />

ments que nous passons à la chapelle, je ne manque pas, vous désignant intérieurement à<br />

la bénédiction dʹen haut, <strong>de</strong> comprendre vous et les vôtres dans cette <strong>de</strong>rnière supplica‐<br />

tion.<br />

1675


Jʹai commencé cette lettre le 2 janvier, sans quʹil mʹait été possible <strong>de</strong> la continuer<br />

<strong>de</strong>puis, tant il est vrai que, même un peu à distance <strong>de</strong> Paris, on nʹéchappe pas absolument<br />

à son activité, que redouble le mouvement <strong>de</strong>s premiers jours <strong>de</strong> lʹannée. Je me console un<br />

peu, du reste, <strong>de</strong> ne mʹentretenir que brièvement <strong>avec</strong> vous, Madame, pour cette fois,<br />

puisque lʹespoir mʹest donné <strong>de</strong> la faire bientôt amplement et dʹune façon bien plus douce<br />

lorsque Madame votre mère et vous nous serez rendues. Du 15 au 20 <strong>de</strong> ce mois, je lʹai lu<br />

et relu <strong>avec</strong> une vraie joie, vous partez pour Paris; dʹavance, au nom <strong>de</strong> tous ceux qui vous<br />

sont dévoués et dont je présume aisément les sentiments, je souhaite pour vous un heu‐<br />

reux voyage et vous assure que, pour chacun, votre vénérée mère et vous serez les bien‐<br />

venues.<br />

Je crois que votre pensée <strong>de</strong> <strong>de</strong>scendre tout dʹabord à lʹhôtel est la plus sûre. Il eût<br />

été bien difficile <strong>de</strong> trouver présentement, en votre absence, le logement qui peut vous<br />

convenir; chacun a, sur ce point, ses vues et ses convenances propres auxquelles les autres<br />

ne peuvent répondre quʹimparfaitement. On mʹassure quʹil y a <strong>de</strong>s agendas qui indiquent<br />

les logements en location; peut‐être pourra‐t‐on, <strong>de</strong> ce côté, avoir quelques renseignements<br />

utiles. Paris, en ce moment, ne doit pas être encore au complet; on se plaint généralement<br />

quʹil est peu animé et que les affaires y sont languissantes; le mouvement <strong>de</strong>viendra meil‐<br />

leur, sans doute, à mesure que la saison sʹavancera.<br />

Je persiste à espérer que lʹaltération <strong>de</strong> la santé <strong>de</strong> M. votre fils est plus apparente<br />

que réelle et nʹaura point <strong>de</strong> durée. Je vais le recomman<strong>de</strong>r vivement, instamment aux<br />

tendres bontés du Seigneur, et <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r en même temps pour vous, Madame, et pour<br />

Madame dʹHurbal, quelques jours <strong>de</strong> bon repos qui remettent vos forces, donnent la paix<br />

à votre âme, la consolation à vos cœurs.<br />

Je suis, dans lʹattente <strong>de</strong> votre bien prochaine arrivée, <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s sentiments respec‐<br />

tueux et dévoués,<br />

Votre humble serviteur et ami en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1774 à M. Leclerc<br />

Souhaits <strong>de</strong> nouvel an. Témoignage dʹaffection à tous ses frères dʹAngers.<br />

14 janvier 1874<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Voilà que nous sommes au 14 janvier, et je nʹai pas encore répondu à votre petite<br />

lettre <strong>de</strong> St ‐<strong>Jean</strong> et <strong>de</strong> Jour <strong>de</strong> lʹAn; elle méritait plus dʹempressement, par les sentiments<br />

tout aimables quʹelle exprimait. Je nʹai pas besoin <strong>de</strong> vous dire mes excuses, vous les voyez<br />

déjà: mes vieilles années, mes infirmités, la torpeur que donne lʹhiver; cʹen est bien assez<br />

pour alanguir un vieux serviteur <strong>de</strong> Dieu, enseveli dans les brouillards <strong>de</strong> Chaville, en at‐<br />

tendant quʹun pas <strong>de</strong> plus lʹenveloppe mieux encore dans lʹombre et dans lʹoubli.<br />

Tout nʹest pas mort pourtant en moi: les vieilles affections se réveillent aisément,<br />

toutes les fois surtout quʹil sʹagit <strong>de</strong> mes plus chers enfants, <strong>de</strong> ceux que jʹai vus sous mes<br />

yeux grandir en âge, en sagesse et en grâce, ceux‐là me trouveront toujours prêt à leur té‐<br />

moigner ma plus tendre affection; cʹest <strong>de</strong> celle‐là que je vous renouvelle, cher ami, la bien<br />

vive expression, en vous chargeant dʹen distribuer quelque part à nos chers ff. dʹAngers,<br />

notamment à notre f. Vernay qui mʹa écrit <strong>de</strong>s premiers et auquel je ne renonce pas à faire<br />

1676


une réponse particulière; assurez‐le, en attendant, que je prie tous les jours pour que Dieu<br />

bénisse son ministère dans votre œuvre <strong>de</strong> N.D. <strong>de</strong>s Champs.<br />

Bon souvenir aussi au f. Bérard, et enfin au f. Faÿ [Auguste], pour lequel je joins ici<br />

un mot relatif à quelque affaire quʹil mʹavait recommandée.<br />

Je vous embrasse tous bien cordialement en Notre Seigneur, et je Le conjure <strong>de</strong> vous<br />

bénir.<br />

Votre dévoué ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Le T.R.P. Général, auquel je sers en ce moment <strong>de</strong> secrétaire, me permet dʹajouter<br />

quelques lignes pour que je puisse moi‐même souhaiter une bonne année; vous savez assez mon<br />

amitié, mon affection, mon respect pour vous pour comprendre <strong>avec</strong> quelle sincérité je fais <strong>de</strong>s<br />

vœux tendant à ce que votre ministère soit tout particulièrement béni <strong>de</strong> N.S., et quʹainsi nombre<br />

dʹâmes se sauvent et se sanctifient, aidées <strong>de</strong> vos conseils. Priez un peu pour mes étu<strong>de</strong>s, pour ma<br />

pauvre âme; ayez un petit souvenir à lʹautel pour nos chers petits novices et je vous serai bien re‐<br />

connaissant. Bonne année à tous nos frères. Adieu, bénissez‐moi et croyez‐moi bien toujours en<br />

N.S.<br />

Votre dévoué ami et frère Edouard [Lainé]<br />

1775 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Prochaine arrivée à Paris.<br />

Chaville, 20 janvier 1874<br />

Madame la Marquise,<br />

Jʹaccueille <strong>avec</strong> une joie bien cordiale lʹannonce assurée que me donne votre lettre<br />

du 18 <strong>de</strong> votre toute prochaine arrivée à Paris. Cette satisfaction est bien mêlée <strong>de</strong> quelque<br />

regret par lʹéloignement où va se trouver votre <strong>de</strong>meure du quartier St ‐Germain, le plus<br />

accessible pour moi; mais ce sentiment nʹest pas sans un peu dʹégoïsme et je me hâte <strong>de</strong><br />

lʹétouffer, voulant me complaire <strong>de</strong> préférence dans la pensée <strong>de</strong> la convenance quʹaura<br />

pour vous et pour Madame votre mère la rési<strong>de</strong>nce que vous avez choisie, tout près <strong>de</strong> la<br />

Ma<strong>de</strong>leine, au centre <strong>de</strong> vos relations et du plus grand nombre <strong>de</strong> vos connaissances.<br />

Bien que mes forces aient encore sensiblement diminué cette année, jʹen trouverai<br />

assez certainement pour me rendre près <strong>de</strong> vous; le cœur passera dans les jambes, et le dé‐<br />

sir <strong>de</strong> revoir Madame votre mère et vous, Madame la Marquise, <strong>de</strong>puis bien longtemps<br />

déjà absentes, me rendra quelque peu <strong>de</strong> mon ancienne, très ancienne agilité.<br />

Je ne veux pas risquer dʹêtre importun en venant trop vite; il faut bien vous laisser<br />

le temps nécessaire à votre installation; mais, si la visite que votre con<strong>de</strong>scendance veut<br />

bien me promettre pour le 30 <strong>de</strong> ce mois ne pouvait se réaliser, je ne manquerais pas dʹac‐<br />

courir, oui accourir rue Richepanse dès le commencement <strong>de</strong> février.<br />

Veuillez, Madame la Marquise, faire agréer à Madame la Vicomtesse dʹHurbal mes<br />

humbles hommages; que nʹai‐je su <strong>de</strong>viner quʹelle était à Paris il y a quelques jours, et aus‐<br />

si où jʹaurais pu la rencontrer; la tentation eût été gran<strong>de</strong> <strong>de</strong> mʹaller assurer auprès dʹelle<br />

<strong>de</strong> lʹétat <strong>de</strong> vos santés! Je vais prier Dieu pour que la vôtre, en particulier, Madame, soit<br />

forte pour le voyage. Je suis, <strong>avec</strong> les sentiments accoutumés <strong>de</strong> respectueux dévouement,<br />

Votre humble serviteur et ami<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1677


1776 <strong>de</strong> M. le Comte <strong>de</strong> Caulaincourt à M. Le <strong>Prevost</strong><br />

Note <strong>de</strong> M. Le <strong>Prevost</strong> à M. <strong>de</strong> Varax<br />

A propos dʹune offran<strong>de</strong> à affecter aux Œuvres <strong>de</strong> la Congrégation.<br />

20 janvier 1874<br />

Mon cher et respectable ami,<br />

Nous vieillissons; je voudrais vous proposer un arrangement qui mettrait un sceau <strong>de</strong> plus<br />

à notre vieille amitié.<br />

Je viens <strong>de</strong> faire un petit héritage sur lequel je ne comptais pas et que je voudrais employer<br />

en partie en bonnes œuvres; il y en a déjà dʹengagé, mais lorsque les affaires seront arrangées et<br />

que jʹy verrai clair, je voudrais contribuer dʹune manière un peu efficace à votre nouveau bâtiment,<br />

par exemple pour 5.000f au moins et jʹespère davantage. Ce nʹest pas une promesse, mais une in‐<br />

tention et une espérance sur laquelle, comme acompte, je réclame vos prières pour ma chère cou‐<br />

sine, que ma mère aimait bien et dont je vous envoie le souvenir.<br />

Dʹun autre côté, je crois que le moment est tout à fait favorable pour vous établir à Lille. Le<br />

p. Trousseau sʹy est fait aimer, il est au courant <strong>de</strong>s œuvres; il est en termes délicats <strong>avec</strong> M. Des‐<br />

clée à Tournay. Cela rend le bien très difficile et le bon père gagnerait, comme action et comme<br />

santé, à traverser la frontière; tout le mon<strong>de</strong> en serait content: lui je pense, Tournay et Lille.<br />

En nous le donnant <strong>avec</strong> <strong>de</strong>ux frères, vous mettrez une pierre dʹattente qui serait immédia‐<br />

tement utilisée et qui vous mettrait le pied dans un centre dʹœuvres très important, où vous trou‐<br />

verez <strong>de</strong>s ressources et du recrutement. Je recomman<strong>de</strong> cette solution à toute votre sollicitu<strong>de</strong>. Ce‐<br />

la nʹexige, ni grands déplacements, ni grands efforts, et il me paraît que cʹest le moment. Les<br />

grands payeurs <strong>de</strong>s œuvres, MM. Vrau et Féron, le désirent beaucoup.<br />

Enfin, pour mon orphelinat, qui a la gran<strong>de</strong> bienveillance <strong>de</strong> lʹEvêque [<strong>de</strong> Putanges (Orne)],<br />

établi sur une propriété <strong>de</strong> 80 hectares, objet <strong>de</strong> nombreuses sympathies et dirigé par un homme<br />

aussi dévoué quʹexpérimenté, nous avions réclamé un <strong>de</strong>uxième prêtre qui quittait volontiers une<br />

bonne cure pour se sacrifier. Il nous aurait procuré <strong>de</strong>s ressources pour bâtir et aurait complété le<br />

premier. Mgr était tout disposé, mais autour <strong>de</strong> lui <strong>de</strong> mesquines idées se sont fait jour et nous<br />

sommes à la veille dʹêtre refusés. On nous dit <strong>de</strong> prendre une Communauté; nous en viendrons<br />

sans doute là, mais, dans une pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> fondation, cʹest‐à‐dire dʹincertitu<strong>de</strong> et <strong>de</strong> sacrifices, il faut<br />

le feu sacré que tout le mon<strong>de</strong> nʹa pas. De plus, <strong>de</strong>vant les populations, lʹorganisation actuelle ex‐<br />

cite mieux les sympathies. Ce refus peut porter un coup mortel à lʹœuvre, parce quʹil faudrait bâtir,<br />

constituer une Société Civile pour donner un caractère général à lʹœuvre. Nous nous trouvons<br />

dans une impasse: pas <strong>de</strong> constructions, pas <strong>de</strong> développement, les sympathies se refroidissent.<br />

Dans le cas où nous serions pris <strong>de</strong> très court, pourriez‐vous nous prêter momentanément <strong>de</strong>ux<br />

frères sous la direction <strong>de</strong> notre excellent Directeur? Je ne parle pas <strong>de</strong> donner lʹœuvre aux Frères<br />

<strong>de</strong> St ‐Vincent <strong>de</strong> Paul, parce que cela nʹentre pas dans vos vues, je crois; vous ne voulez vous oc‐<br />

cuper que <strong>de</strong>s villes, et pourtant je suis convaincu que notre Directeur sʹadjoindrait à vous volon‐<br />

tiers, et ce serait une excellente acquisition. Mais, sans aller si loin, je vous pose aujourdʹhui sim‐<br />

plement un point dʹinterrogation pour les frères: cela pourrait nous tirer dʹun grand embarras en<br />

nous permettant dʹattendre et <strong>de</strong> ne pas prendre précipitamment un parti que nous regretterions<br />

plus tard.<br />

Dans tous les cas, occupons‐nous <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux premiers objets <strong>de</strong> ma lettre.<br />

Veuillez, bien cher abbé, agréer lʹexpression <strong>de</strong> mon très affectueux dévouement.<br />

Est‐il besoin dʹajouter que je vous offre tous mes vœux?<br />

1678<br />

Comte <strong>de</strong> Caulaincourt


23 janvier [1874]<br />

Jʹai informé M. <strong>de</strong> Caulaincourt, en réponse à sa lettre, que vous étiez à Tournay et<br />

quʹil lui serait ainsi facile <strong>de</strong> sʹentretenir <strong>avec</strong> vous.<br />

Tous ici vont bien, les prières et les vœux <strong>de</strong> tous sont <strong>avec</strong> vous.<br />

Votre dévoué Père et ami Le <strong>Prevost</strong><br />

1777 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

MLP. propose un jour pour aller lui rendre visite.<br />

Chaville, 4 février 1874<br />

Madame la Marquise,<br />

Jʹai eu lʹhonneur <strong>de</strong> vous écrire quelques mots pour vous exprimer le désir que<br />

jʹavais <strong>de</strong> vous rendre visite, ou mercredi 4, ou jeudi 5, selon que lʹun ou lʹautre jour serait<br />

mieux à votre convenance. Malheureusement, la lettre, confiée par moi à un <strong>de</strong> nos MM.<br />

qui se rendait à Paris et qui <strong>de</strong>vait vous la faire parvenir, a été oubliée dans son carnet et<br />

mʹest revenue le soir sans avoir atteint sa <strong>de</strong>stination.<br />

Force me sera donc, tout incertain si le jour nʹest pas mal choisi, dʹaller frapper jeudi<br />

à votre porte; jʹose compter que vous, Madame, et Madame votre mère, nʹauriez gar<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

défaire quelque projet ou arrangement, si vous en aviez quelquʹun en vue pour le jour que<br />

je prends la liberté dʹindiquer.<br />

Veuillez, Madame la Marquise, agréer, <strong>avec</strong> Madame votre mère, les biens respec‐<br />

tueux hommages <strong>de</strong><br />

Votre humble et dévoué serviteur Le <strong>Prevost</strong><br />

1778 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

MLP. annonce sa visite pour le len<strong>de</strong>main.<br />

Jeudi 5 février 1874<br />

Madame la Marquise,<br />

Jʹai lʹhonneur dʹoffrir mes humbles hommages à Madame la vicomtesse dʹHurbal et<br />

à Madame la Marquise dʹHou<strong>de</strong>tot. Jʹespère me présenter chez elles vendredi 6 février; je<br />

serai bien heureux si rien ne les empêche <strong>de</strong> me recevoir; je les prie, en cas contraire, <strong>de</strong> ne<br />

pas hésiter à se rendre aux affaires qui les appelleraient ailleurs.<br />

Leur respectueux et dévoué serviteur et ami en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1779 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Réponse négative à une offre <strong>de</strong> voyage à Rome.<br />

Chaville, 12 février 1874<br />

Mon cher ami et fils en N.S.,<br />

Jʹai un peu souri à votre offre réitérée pour le voyage <strong>de</strong> Rome; il est bien évi<strong>de</strong>m‐<br />

ment dʹune réelle et positive impossibilité pour moi.<br />

1679


Jʹirai <strong>de</strong>main pour 10h. 1/4 à Nazareth, cʹest la limite extrême <strong>de</strong>s voyages que je puis<br />

entreprendre.<br />

A <strong>de</strong>main donc, mon cher ami, je suis toujours votre tout dévoué en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

Je suis aujourdʹhui en même état que jʹétais hier.<br />

1780 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

MLP. la recomman<strong>de</strong> à <strong>de</strong>s prêtres amis.<br />

Chaville, 14 février 1874<br />

Madame la Marquise,<br />

Jʹai lʹhonneur <strong>de</strong> vous adresser ci‐joint la lettre pour le r.p. Foinel, <strong>de</strong> lʹOratoire; il<br />

fera certainement à Madame votre mère et à vous un parfait accueil.<br />

Dans le cas où, contre toute attente, il ne serait pas libre <strong>de</strong> vous donner <strong>de</strong>s soins<br />

spirituels, vous pourriez vous adresser aussi <strong>avec</strong> confiance à M. lʹabbé Rivié, du clergé <strong>de</strong><br />

St ‐Thomas dʹAquin, prêtre pieux et très aimable qui est également <strong>de</strong> nos amis.<br />

Je joins ici le reçu <strong>de</strong>s 20f pour les <strong>de</strong>ux chan<strong>de</strong>liers qui ont été fournis par lʹatelier<br />

<strong>de</strong>s bronzes.<br />

Je renouvelle à vous, Madame la Marquise, et à votre si bonne mère, tous mes sen‐<br />

timents reconnaissants et vous prie dʹagréer aussi le respectueux dévouement <strong>avec</strong> lequel<br />

je suis<br />

Votre humble serviteur et ami Le <strong>Prevost</strong><br />

1781 à un vicaire <strong>de</strong> l’église <strong>de</strong> la Ma<strong>de</strong>leine<br />

Pour lui confier M mes dʹHurbal et <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot.<br />

Paris, 26 février 1874<br />

Cher Monsieur lʹabbé,<br />

Deux âmes que jʹai lʹhonneur <strong>de</strong> connaître particulièrement, et qui ont pris leur ré‐<br />

si<strong>de</strong>nce sur votre belle paroisse, me prient <strong>de</strong> les recomman<strong>de</strong>r à vos bons soins pour leur<br />

direction spirituelle. Ce sont Madame la Vicomtesse dʹHurbal et sa fille, Madame la Mar‐<br />

quise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot, <strong>de</strong>meurant rue Richepanse, n° 13. Elles sont sœur et nièce dʹun homme<br />

<strong>de</strong> bonnes œuvres, M. le Comte <strong>de</strong> Caulaincourt, dont le nom, et je crois aussi la personne<br />

vous sont connus; elles sont elles‐mêmes fort pieuses et fort charitables; je serais bien satis‐<br />

fait si elles pouvaient trouver près <strong>de</strong> vous le secours spirituel que leur foi <strong>de</strong>man<strong>de</strong>.<br />

Je profite <strong>de</strong> cette occasion, cher Monsieur lʹabbé, pour renouveler à vous et à votre<br />

vénéré Pasteur [M. Le Rebours] les assurances <strong>de</strong> mon bien respectueux dévouement en<br />

N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1680


1681<br />

1782 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

Adieux au Vicaire Général qui part solliciter à Rome la<br />

<strong>de</strong>uxième approbation <strong>de</strong>s Constitutions.<br />

Chaville, 1 er mars 1874<br />

Mon cher ami et fils en N.S.,<br />

Si je suivais mon attrait, cʹest <strong>de</strong><br />

grand cœur que jʹirais vous faire encore<br />

une fois mes adieux; mais je suis<br />

physiquement si mal disposé, dʹune si<br />

gran<strong>de</strong> lour<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> tête, si impression‐<br />

nable au froid, que tout mouvement mʹest<br />

une difficulté; le p. Chéron nous<br />

représentera près <strong>de</strong> vous; il vous dira nos<br />

vœux pour le succès <strong>de</strong> votre voyage,<br />

notre résolution <strong>de</strong> le recomman<strong>de</strong>r tout<br />

le mois à S t Joseph et à nos saints patrons;<br />

je vous porterai, pour moi, tous les jours à<br />

lʹautel, afin que Dieu vous donne force<br />

contre les fatigues et grâce abondante<br />

pour obtenir du Siège apostolique cette<br />

bénédiction suprême qui consommera


lʹœuvre commencée par nous <strong>de</strong>puis bien <strong>de</strong>s années déjà. Jʹaurais voulu vous accompa‐<br />

gner, lʹépuisement absolu <strong>de</strong> tout ressort en moi mʹindique assez que telle nʹest pas la vo‐<br />

lonté divine.<br />

Adieu <strong>de</strong> loin corporellement, et <strong>de</strong> très près <strong>de</strong> cœur et dʹâme.<br />

Votre dévoué et affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je ne suppose pas que vous ayez à présenter <strong>de</strong> nouveau le texte <strong>de</strong> nos Cons‐<br />

titutions; à tout hasard, je vous envoie un exemplaire proprement cartonné. Il eût été bien,<br />

si on le produit, <strong>de</strong> supprimer le chapitre VIII e qui ne fait pas réellement partie <strong>de</strong>s Consti‐<br />

tutions. Quelques corrections <strong>de</strong> détail eussent été aussi à effectuer; vous verrez si la chose<br />

est praticable.<br />

1783 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Projet <strong>de</strong> visite.<br />

Chaville, 4 mars 1874<br />

Madame la Marquise,<br />

Jʹespère rendre visite à Madame votre mère et à vous <strong>de</strong>main jeudi, 5, à 1h.; je serais<br />

bien contrarié si ma venue <strong>de</strong>vait déranger quelquʹun <strong>de</strong> vos projets pour la disposition <strong>de</strong><br />

votre journée; je compte donc que vous tiendrez comme non avenu le présent avis, si vous<br />

préférez me recevoir un autre jour.<br />

Veuillez, Madame la Marquise, agréer, pour Madame la Vicomtesse dʹHurbal et<br />

pour vous, tous mes sentiments <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> bien profond dévouement.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1784 à M. Chaverot<br />

Mauvais état <strong>de</strong> santé <strong>de</strong> MLP.<br />

Mercredi 6h. [18 mars 1874]<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Cʹest du meilleur cœur du mon<strong>de</strong> que je prendrais part à notre fête <strong>de</strong> St Joseph,<br />

mais, <strong>de</strong>puis lundi, mes maladies ont été tellement grandissant quʹactuellement je suis ab‐<br />

solument abattu, ne pouvant soutenir la nourriture, <strong>avec</strong> un besoin <strong>de</strong> vomir qui menace<br />

<strong>de</strong> se manifester au <strong>de</strong>hors, à chaque instant; je fais prévenir le mé<strong>de</strong>cin pour <strong>de</strong>main ma‐<br />

tin; que Dieu soit loué dans la maladie comme dans la santé!<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1785 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

La santé <strong>de</strong> MLP. se dégra<strong>de</strong>. Son abandon entre les mains du Seigneur.<br />

Chaville, 30 mars 1874<br />

Madame la Marquise,<br />

Combien je suis touché <strong>de</strong> lʹintérêt que vous voulez bien accor<strong>de</strong>r à ma santé! Je<br />

songe, <strong>de</strong> mon côté, à celle <strong>de</strong> Madame votre mère qui fait, en suite <strong>de</strong> sa chute, un dur<br />

1682


Carême. Je fais <strong>de</strong>s vœux pour quʹelle puisse prendre quelque part aux grands exercices<br />

<strong>de</strong> votre belle paroisse et quʹelle chante, en actions <strong>de</strong> grâces, un joyeux Alleluia <strong>avec</strong> vous<br />

au beau jour <strong>de</strong> Pâques.<br />

Je ne suis pas sûr dʹêtre parmi ceux à qui ces pieuses consolations seront réservées.<br />

Je reste fort languissant, sans appétit et sans aucune application dʹesprit possible. Je prie,<br />

le moins mal quʹil mʹest donné <strong>de</strong> le faire, pour être bien soumis à la volonté <strong>de</strong> Dieu et<br />

pour appeler sa bénédiction sur ceux dont il a tourné vers mon indignité la bienveillance<br />

et les aimables sympathies.<br />

Jʹai pu jusquʹici célébrer la S te Messe, bien quʹ<strong>avec</strong> un peu <strong>de</strong> peine; jʹy réserve, aux<br />

jours accoutumés, vos intentions et celles <strong>de</strong> Madame la Vicomtesse dʹHurbal, et, les au‐<br />

tres fois, je gar<strong>de</strong> encore un souvenir fidèle pour tout ce qui touche vous et toute votre<br />

chère famille.<br />

Veuillez agréer, et faire agréer aussi à Madame votre mère, mes sentiments bien<br />

respectueux et bien dévoués en N.S.<br />

Votre très humble serviteur Le <strong>Prevost</strong><br />

1786 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Malgré sa mauvaise santé, MLP. se rendra à Vaugirard pour la rencontrer.<br />

Chaville, 9 avril 1874<br />

Madame la Marquise,<br />

Votre si persévérante bonté me touche profondément; je compte bien quʹelle grossi‐<br />

ra <strong>de</strong>vant Dieu la somme <strong>de</strong> vos œuvres saintes, particulièrement la visite que vous vou‐<br />

lez bien me promettre pour <strong>de</strong>main vendredi à Vaugirard. Jʹy serai, malgré lʹétat <strong>de</strong> ma‐<br />

laise où je suis encore; je me proposais <strong>de</strong> mʹy rendre, mais je nʹaurai plus aucune hésita‐<br />

tion maintenant que je puis espérer que jʹaurai la consolation <strong>de</strong> vous y rencontrer.<br />

Je suis heureux dʹapprendre que Madame votre mère, enfin remise après sa chute, a<br />

pu entreprendre le voyage <strong>de</strong> Normandie; elle aura, pendant cette absence, son petit‐fils<br />

pour elle seule; en fait dʹaffections, on aime bien un peu dʹexclusion. Je préviendrais cer‐<br />

tainement votre chère visite si je nʹétais en défiance <strong>de</strong> mes forces, bien amoindries <strong>de</strong>puis<br />

quelques semaines.<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, <strong>avec</strong> mes respectueux hommages, tous mes<br />

sentiments <strong>de</strong> bien vive reconnaissance.<br />

Votre humble serviteur et ami en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1787 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Dispositions proposées par MLP. pour prévenir un malentendu.<br />

Vaugirard, 11 avril 1874<br />

Madame la Marquise,<br />

A peine mʹaviez vous quitté hier quʹaussitôt je me suis représenté les difficultés que<br />

vous auriez lundi [14] matin à faire, à pareille distance, lʹenvoi que votre trop aimable sol‐<br />

licitu<strong>de</strong> voulait me <strong>de</strong>stiner; un remords mʹest venu dʹêtre pour vous la cause <strong>de</strong> tant<br />

dʹembarras; il est à craindre dʹailleurs que le domestique venu <strong>de</strong> Chaville, entraîné par<br />

1683


dʹautres courses, ne puisse être à Vaugirard en temps opportun; il semble donc mieux <strong>de</strong><br />

ne pas courir la chance <strong>de</strong> quelque malentendu.<br />

Mais, pour tenir compte <strong>de</strong> vos bons <strong>de</strong>sseins et me montrer docile à vos affectueux<br />

avis, je viens, à lʹheure même, <strong>de</strong> prendre <strong>de</strong>s mesures pour quʹils soient exécutés à Cha‐<br />

ville même; le bien que votre charité méditait aura donc sa réalisation.<br />

Jʹai vu une fois <strong>de</strong> plus tout ce quʹon peut attendre <strong>de</strong> votre cœur si délicat, si géné‐<br />

reux; jʹen bénis Dieu qui lʹinspire et je vous en exprime ma plus vive reconnaissance.<br />

Veuillez en agréer, bien bonne Madame, la sincère expression, <strong>avec</strong> les assurances<br />

<strong>de</strong> mon profond respect.<br />

Votre humble et dévoué serviteur et ami Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Pardonnez‐moi ce refus apparent dʹune gracieuse attention <strong>de</strong> votre part, la<br />

difficulté <strong>de</strong> lʹexécution en eût fait un véritable embarras pour vous et autour <strong>de</strong> vous.<br />

1788 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Gratitu<strong>de</strong> pour sa générosité.<br />

Vaugirard, 18 avril 1874<br />

Madame la Marquise,<br />

Je suis venu hier à Vaugirard, bien que ma santé ne fût pas meilleure que la se‐<br />

maine <strong>de</strong>rnière; je nʹai pas cédé à la pensée qui mʹest venue plusieurs fois <strong>de</strong> vous écrire,<br />

dans la crainte <strong>de</strong> provoquer <strong>de</strong> votre part une visite, bien précieuse pour moi, mais fati‐<br />

gante pour votre santé qui a grand besoin <strong>de</strong> ménagement.<br />

Jʹen suis là <strong>de</strong> ce griffonnage illisible quand mʹarrive votre petite lettre partie dʹhier!<br />

Il faut obéir, votre volonté est plus forte que la mienne; peut‐être serais‐je plus énergique<br />

si je nʹétais énervé par la maladie; jʹabuse <strong>de</strong> votre bonté pour moi, mais cʹest en protestant<br />

tout ensemble <strong>de</strong> mon regret pour les peines que je vous cause et <strong>de</strong> ma vive et profon<strong>de</strong><br />

reconnaissance.<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, et partager <strong>avec</strong> Madame votre mère, tous<br />

mes sentiments <strong>de</strong> respect et dʹabsolu dévouement.<br />

Votre humble serviteur ami Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Mon commissionnaire est un jeune jardinier, peu accoutumé aux missions<br />

dans les beaux quartiers <strong>de</strong> Paris. Il faudra donc faire encore acte dʹobéissance pour les six<br />

bouteilles!<br />

1789 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Remerciements. Santé <strong>de</strong> MLP.<br />

Chaville, 21 avril 1874<br />

Madame la Marquise,<br />

Je mets autant dʹempressement à accepter vos dons que vous mettez dʹaimable bon‐<br />

té à me les offrir; pour me justifier à mes propres yeux, je mʹappuie sur la parole <strong>de</strong> lʹEcri‐<br />

ture qui dit: Celui qui donne (<strong>avec</strong> un cœur généreux et bienveillant) est plus heureux que<br />

1684


celui qui reçoit. Un cœur pareil agissant ici, jʹespère quʹil trouvera en lui‐même sa récom‐<br />

pense et daignera agréer en surcroît ma bien vive et bien sincère gratitu<strong>de</strong>.<br />

Je serai vendredi, et aussi le samedi dans la matinée, à Vaugirard; le désir <strong>de</strong> vous y<br />

rencontrer mʹy eût attiré, à défaut <strong>de</strong> toute autre raison; je vais bien me gar<strong>de</strong>r <strong>de</strong> tout ma‐<br />

laise nouveau qui pourrait me faire obstacle; je ne pense pas quʹil en survienne aucun, le<br />

soleil et dʹautres causes encore, sans doute, ne sauraient manquer <strong>de</strong> me redonner un peu<br />

<strong>de</strong> forces; sʹil en arrivait ainsi, comme je reprendrais vite la route qui mène rue Richepanse<br />

mʹassurer que Madame dʹHurbal marche tout à fait bien et que vous même, Madame, avez<br />

raffermi pleinement votre santé.<br />

Veuillez, Madame la Marquise, agréer tous les sentiments respectueux <strong>de</strong><br />

Votre humble et dévoué serviteur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1790 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Assurances <strong>de</strong> prières aux intentions <strong>de</strong> sa famille. Mois <strong>de</strong> Marie. Les Rogations.<br />

Vaugirard, 9 mai 1874<br />

Madame la Marquise,<br />

Combien je suis touché du bon souvenir que vous voulez bien mʹaccor<strong>de</strong>r, et com‐<br />

bien votre âme est charitable <strong>de</strong> songer à ma santé quand la vôtre, si fatiguée, réclame vi‐<br />

siblement <strong>de</strong>s soins. Veuillez être assurée que je ne suis pas ingrat; je prie Dieu <strong>avec</strong> une<br />

vive instance <strong>de</strong> vous donner, <strong>avec</strong> <strong>de</strong> nouvelles forces, toutes sortes <strong>de</strong> bénédictions pour<br />

vous, pour votre bonne mère et pour vos chers enfants, sans oublier les oncles que la di‐<br />

vine Miséricor<strong>de</strong> saura trouver quand lʹheure <strong>de</strong> grâce sera venue. Le mois <strong>de</strong> Marie est<br />

un temps propice, et les prières <strong>de</strong>s Rogations monteront aussi aux pieds du Seigneur; jʹai<br />

la confiance que vous en ressentirez les précieux effets.<br />

Merci mille fois, Madame, <strong>de</strong> la visite que vous voulez bien me promettre; elle<br />

contribuera certainement à me réconforter par la douce joie quʹelle me causera; je ne man‐<br />

querai pas <strong>de</strong> vous la rendre <strong>avec</strong> empressement pour peu quʹun reste <strong>de</strong> vigueur me soit<br />

rendu.<br />

Veuillez agréer, Madame la Marquise, pour Madame votre mère et pour vous, tous<br />

mes sentiments respectueux et bien dévoués.<br />

Votre humble serviteur en N.S. Le <strong>Prevost</strong><br />

1790‐1 à M. Caille<br />

Avis <strong>de</strong> MLP. sur sa <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> dispense <strong>de</strong> vœux. Chercher la volonté <strong>de</strong> Dieu.<br />

[mai 1874]<br />

Bien cher Frère en N.S.,<br />

Jʹai conféré longuement <strong>avec</strong> notre Conseil <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> que vous mʹadressez, en<br />

date du 27 avril <strong>de</strong>rnier, pour obtenir la dispense <strong>de</strong>s vœux qui vous lient à la Congréga‐<br />

tion; je dois aujourdʹhui vous faire connaître mon sentiment sur cette <strong>de</strong>man<strong>de</strong>.<br />

Je crains que les motifs nʹen soient pas surnaturels et que vous ne vous fassiez illu‐<br />

sion sur les profits que vous retireriez <strong>de</strong> la liberté que vous réclamez.<br />

1685


Si elle voulait oublier tout à fait lʹintérêt <strong>de</strong> votre âme et celui <strong>de</strong> lʹœuvre, la<br />

Congrégation pourrait sans doute accepter une situation quʹelle‐même nʹa pas faite ni<br />

provoquée, ce qui, à certains égards, lʹaffranchirait <strong>de</strong> beaucoup dʹinquiétu<strong>de</strong>s. Mais vrai‐<br />

ment, il nous répugnerait <strong>de</strong> traiter aussi légèrement ce que nous regardons, nous, lʹintérêt<br />

le plus sacré dʹun <strong>de</strong> nos ff., et <strong>de</strong> compromettre, du même coup, lʹavenir dʹune œuvre<br />

dans laquelle nous avons travaillé près <strong>de</strong> 20 ans.<br />

Je vous prie <strong>de</strong> considérer que pour nous associer, nous‐mêmes, comme vous le<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>z, à la démarche qui vous préoccupe, nous <strong>de</strong>vons, et notre honneur exige que<br />

nous fassions <strong>de</strong> concert, à la lumière dʹen‐haut, lʹexamen dʹune question si grave. Cet<br />

examen ne peut se faire convenablement que dans une retraite <strong>de</strong> quelques jours.<br />

Je ne vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rais pas même <strong>de</strong> faire les exercices pour peu que vous y ayez<br />

répugnance, mais il suffirait que vous la fissiez dans telle maison religieuse que nous choi‐<br />

sirions dʹun commun accord.<br />

Si après cet examen, fait <strong>avec</strong> un soin religieux, vous avez lieu <strong>de</strong> croire que la Pro‐<br />

vi<strong>de</strong>nce approuve votre <strong>de</strong>ssein, je surmonterai alors ma peine pour étudier <strong>avec</strong> vous,<br />

soit ici, soit à Amiens, les moyens que nous pourrions employer pour réaliser vos projets.<br />

Je ne dis pas cela sans gran<strong>de</strong> douleur parce que je vois bien ce quʹun pareil acte en‐<br />

traînera <strong>de</strong> conséquences après lui, mais je ne veux connaître ici quʹune seule chose, à sa‐<br />

voir: si votre volonté arrêtée est bien réellement, ou nʹest pas, conforme au vouloir <strong>de</strong><br />

Dieu. Devant cette volonté divine constatée, nous nʹhésiterions pas un instant pour nʹim‐<br />

porte quel sacrifice.<br />

Recevez, mon cher frère, lʹassurance <strong>de</strong>s sentiments dévoués <strong>de</strong> votre bien humble<br />

père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1791 à M me et M lle Salva<br />

A propos dʹun Conseil <strong>de</strong> famille auquel MLP. ne peut se rendre. Nouvelles <strong>de</strong> son neveu Emile.<br />

Chaville, 31 mai 1874<br />

Chères amies,<br />

M. Le Métayer mʹécrit en mʹenvoyant un modèle <strong>de</strong> procuration pour la personne<br />

qui doit me remplacer au Conseil <strong>de</strong> famille <strong>de</strong> notre cousine, Mlle Quinel. Sa lettre est du<br />

12 mai <strong>de</strong>rnier, et lʹassemblée du Conseil ne semblerait pas bien urgente; puisquʹelle a<br />

pour fin principale <strong>de</strong> renouveler les pouvoirs <strong>de</strong> M. Le Métayer comme Administrateur,<br />

lesquels expirent seulement le 15 juillet. Je remarque aussi quʹil rési<strong>de</strong> maintenant à<br />

Rouen, rue St‐Maur, 50. A cette occasion, jʹobserve quʹil serait bien désirable que nous fus‐<br />

sions restés moins étrangers aux affaires <strong>de</strong> M. Le Métayer. Maria ne pourrait‐elle<br />

sʹéchapper pour prendre discrètement, à Cau<strong>de</strong>bec, quelque information à ce sujet?<br />

Nʹavez‐vous aucune personne <strong>de</strong> connaissance quʹelle puisse interroger sur ce point, en<br />

lui recommandant le secret? A défaut dʹautre moyen, il nʹy aurait pas dʹinconvénient,<br />

peut‐être, à voir M. le Juge <strong>de</strong> Paix, sous prétexte que jʹai oublié, ce qui est vrai, quel est le<br />

nom du mandataire qui me doit remplacer à la prochaine réunion du Conseil et que je<br />

vous ai chargées <strong>de</strong> le lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r. La lettre <strong>de</strong> M. Le Métayer porte seulement votre<br />

mandataire habituel. Quel est‐il? Ce ne doit être ni un parent, ni un ami, puisquʹà ma<br />

1686


connaissance nous nʹen avons plus à Cau<strong>de</strong>bec. Si ce petit voyage se faisait, ce <strong>de</strong>vrait être<br />

très promptement, car M. Le Métayer me presse <strong>de</strong> lui envoyer la procuration.<br />

Je vais, comme <strong>de</strong> coutume, pas fort, et <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s mains si tremblantes que je vous<br />

fais écrire par une main plus sûre. Ne manquez pas <strong>de</strong> me dire si, <strong>de</strong> votre côté, vos santés<br />

se trouvent bien <strong>de</strong> la belle saison.<br />

Adieu, chères amies, respect et affection à vos amis.<br />

Votre dévoué et affectionné frère et oncle<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Jʹai reçu une lettre dʹEmile; il va maintenant étudier lʹallemand, maniant assez<br />

bien, dit‐il, la langue anglaise.<br />

1792 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Conseils pour la vie <strong>de</strong> famille. Le feu <strong>de</strong> lʹâme : <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à Dieu <strong>de</strong> ʺlʹaccroître et <strong>de</strong> le transformer en vraie et<br />

douce charitéʺ. Epreuves <strong>de</strong> santé.<br />

Chaville, 29 juin 1874<br />

Madame la Marquise,<br />

Si je nʹétais accoutumé à votre si aimable indulgence, je nʹoserais vous écrire, car la<br />

débilité <strong>de</strong> mes mains tremblantes ne me permet pas <strong>de</strong> conduire ma plume, elle se traîne<br />

à son caprice sur le papier sans que je puisse lui donner une direction; jʹemprunte une<br />

main étrangère pour écrire aux indifférents, mais un pareil moyen, comment lʹemployer<br />

pour converser <strong>avec</strong> vous? Mieux vaut éprouver votre patience par un griffonnage illisi‐<br />

ble; la bienveillance <strong>de</strong> votre part suppléera à lʹimperfection <strong>de</strong> mes signes et <strong>de</strong>vinera<br />

quand elle ne pourra plus voir.<br />

De mon côté, jʹai bien compris, même avant dʹavoir reçu votre chère épître, que les<br />

embarras nʹavaient pas dû vous manquer à lʹarrivée pour votre réinstallation à St ‐Laurent<br />

et pour la réception <strong>de</strong>s hôtes et parents que votre présence attire dès quʹon vous sait à la<br />

campagne; vous pourriez, sans doute, rendre ces soins moins nombreux si votre accueil<br />

était moins cordial et moins aimable, mais la chaleur du cœur attire comme celle du <strong>de</strong>‐<br />

hors en hiver; chacun veut se chauffer là où lʹon sait que le feu pétille et brille; et ce feu <strong>de</strong><br />

lʹâme, comment lʹéteindre? Nʹest‐ce pas Dieu qui lʹallume? Loin <strong>de</strong> là, il faut Le prier <strong>de</strong><br />

lʹentretenir et <strong>de</strong> lʹaccroître, <strong>de</strong> lʹépurer, <strong>de</strong> le transformer en vraie et douce charité. Que<br />

dʹoccasions en ce mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> sʹen servir! Dans la famille en particulier, vous lʹéprouvez bien<br />

en ce moment, Madame; il vous faut veiller sur la santé <strong>de</strong> M. votre fils, encore mal réta‐<br />

blie, sur celle <strong>de</strong> votre très bonne mère que sa blessure <strong>de</strong> jambe éprouve péniblement <strong>de</strong>‐<br />

puis bien <strong>de</strong>s semaines, et les chères petites filles, et les vénérables oncles, plus que tous<br />

les autres ceux‐là puisque le temps est pour eux plus incertain. Que dʹobjets <strong>de</strong> sollicitu‐<br />

<strong>de</strong>s, que <strong>de</strong> sujets pour exercer votre affectueuse charité! Ce nʹest pas trop, puisquʹelle sait<br />

encore sʹétendre à dʹautres qui en reçoivent gratuitement et sans nul titre le bienfait. Ici,<br />

ma main refuse son service et mʹoblige à mʹarrêter...<br />

30 juin. Jʹessaie <strong>de</strong> continuer. Jʹespérais un peu, faiblement, lors <strong>de</strong> votre départ, que<br />

mes forces pourraient se raffermir; il en a été autrement, elles ont diminué au contraire<br />

sensiblement, au point <strong>de</strong> me rendre presque incapable <strong>de</strong> mouvement; je gar<strong>de</strong> la cham‐<br />

bre tout le jour, gagnant seulement la chapelle le matin pour ma messe que jʹai la consola‐<br />

1687


tion <strong>de</strong> célébrer jusquʹà présent; je gar<strong>de</strong> conséquemment les pieuses intentions que Ma‐<br />

dame votre mère et vous‐même, Madame, mʹavez recommandées; il mʹest bien doux assu‐<br />

rément <strong>de</strong> mʹen acquitter, je nʹose présentement regar<strong>de</strong>r que <strong>de</strong> loin, et par la pensée, la<br />

chère chapelle <strong>de</strong> S t ‐Laurent où jʹavais, grâce à votre aimable invitation, la perspective <strong>de</strong><br />

prier pour toute votre maison, mais mon état <strong>de</strong> santé nʹest peut‐être pas sans remè<strong>de</strong> et,<br />

<strong>avec</strong> quelque retour <strong>de</strong> forces, un voyage cesserait <strong>de</strong> mʹêtre impossible; cette attente<br />

mʹai<strong>de</strong>ra à souhaiter <strong>de</strong> vivre encore un peu pour revoir la Normandie, respirer lʹair natal<br />

et, par <strong>de</strong>ssus tout, <strong>de</strong> jouir <strong>de</strong> vos chères présences. Autrement, veuillez être assurée que,<br />

par le souvenir et <strong>de</strong>vant Dieu, je mʹunirai fidèlement à vous et à tout ce qui vous est cher.<br />

Votre humble et bien respectueux serviteur<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1793 à M. Trousseau<br />

Portraits <strong>de</strong> MM. Faÿ et Tourniquet. Saint Vincent <strong>de</strong> Paul leur modèle. Nouvelles <strong>de</strong> sa santé.<br />

[18 juillet 1874]<br />

Mon bien cher ami et fils en N.S.,<br />

Je reçois, <strong>avec</strong> un à‐propos qui en accroît le mérite, votre envoi <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux portraits<br />

[Justin] Faÿ et <strong>Jean</strong>‐Marie [Tourniquet], <strong>de</strong>ux vrais enfants <strong>de</strong> St ‐Vincent <strong>de</strong> Paul; ils sont<br />

dʹune parfaite ressemblance, le bon abbé surtout, tout ensemble grave et doux, comme la<br />

grâce et lʹeffort quotidiens lʹavaient fait. Le cher <strong>Jean</strong>‐Marie, un peu moins ressemblant<br />

peut‐être, est néanmoins tel que nous lʹavons connu, souriant, plein <strong>de</strong> cœur et <strong>de</strong> bonho‐<br />

mie. Sans être connaisseur en photographie, on reconnaît aisément que ce travail est lʹœu‐<br />

vre <strong>de</strong> mains habiles; mais ce qui me flatte par‐<strong>de</strong>ssus tout, cʹest lʹaimable sentiment qui<br />

vous a inspiré <strong>de</strong> nous faire cet envoi, à la veille <strong>de</strong>s fêtes <strong>de</strong> notre Saint Patron, dont lʹes‐<br />

prit vivait éminemment dans le cœur <strong>de</strong> ses <strong>de</strong>ux enfants. Vous ne le cé<strong>de</strong>z vous‐même à<br />

personne en amour pour ce vénéré Père. Jʹai la confiance que vous réaliserez les paroles <strong>de</strong><br />

lʹoraison: Ea<strong>de</strong>m tibi caritate et humilitate placeamus. Daigne le Seigneur exaucer ce vœu que<br />

je forme pour vous, en même temps que pour notre petite famille.<br />

Nous suivons <strong>avec</strong> un vif intérêt tout ce qui regar<strong>de</strong> votre santé, encore souvent<br />

éprouvée, vos œuvres, votre petit palais463 et tout ce qui sʹy accomplira <strong>de</strong> saint et <strong>de</strong> bon,<br />

<strong>avec</strong> la grâce <strong>de</strong> Dieu.<br />

Jʹespère <strong>avec</strong> vous que sa bonté pourra un jour vous rapprocher <strong>de</strong> nous; mais il<br />

faudra, quant à ce qui me concerne, que cette réunion ne tar<strong>de</strong> guère, car ma santé décline<br />

très sensiblement et ne mʹannonce guère une longue durée. Heureusement, après les<br />

courts instants <strong>de</strong>s jours <strong>de</strong> la terre, viendront les jours sans fin <strong>de</strong> lʹéternité. Prions réci‐<br />

proquement que la divine Miséricor<strong>de</strong> daigne nous les accor<strong>de</strong>r.<br />

Assurez tous nos ff. <strong>de</strong> Tournay <strong>de</strong> mes bons souvenirs, et croyez à ma bien vive af‐<br />

fection en Jésus, Marie et St Vincent.<br />

Votre ami et Père<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Vos vœux pour le Petit Noviciat ont leur réalisation; nos enfants sont seule‐<br />

ment au nombre <strong>de</strong> 16 [latinistes: Imhoff, J. Nansot, J. Chrétien, Degesne, Lasfargues,<br />

463 L’Orphelinat Saint-Philippe, en construction boulevard Léopold, à Tournay.<br />

1688


Rouillaud, Schuh, Croisier, Hamel, Stumpf; français: Duron, Hirbec, Trébuchet, Gaucher,<br />

Leguay, Ronal], Juvigny nʹétant plus <strong>de</strong>s nôtres et Cestari [lʹItalien] ne paraissant pas <strong>de</strong>‐<br />

voir persévérer.<br />

1794 à M. <strong>de</strong> Varax<br />

MLP. ne peut plus confesser les enfants <strong>de</strong> Chaville. Il propose le père Hello pour le remplacer. Dernière lettre au<br />

père <strong>de</strong> Varax. Signature toute tremblée. Le père Chaverot ajoute au crayon: ʺsur le conseil du père Lantiez, je<br />

suis allé confesser les juvénistes, samedi soir [25 juillet].<br />

Chaville, 25 juillet 1874<br />

Mon cher ami et fils en N.S.,<br />

Le moment me semble venu <strong>de</strong> régler les confessions dans la maison <strong>de</strong> Chaville;<br />

même aujourdʹhui, je ne pourrais faire celles <strong>de</strong> nos enfants. Vous mʹavez dit que, peut‐<br />

être, vous en chargeriez M. Hello. Le p. Chéron agréerait mieux le p. Chaverot. Si vous<br />

choisissiez le p. Hello, il serait désirable quʹil fût averti immédiatement, car il ne pourrait<br />

venir que le samedi dans la matinée. Jʹai confessé la moitié <strong>de</strong>s ff., et je puis en faire <strong>de</strong><br />

même pour les autres, aujourdʹhui. Vous jugeriez sʹil conviendrait, pour lʹavenir, dʹen<br />

charger le p. Lantiez. Quelques personnes <strong>de</strong> Chaville montrent la disposition <strong>de</strong> sʹadres‐<br />

ser au p. Chéron.<br />

Je ne me recomman<strong>de</strong> point à vos prières. Vous savez quel besoin jʹen ai.<br />

Votre tout affectionné ami et Père en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1795 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Comment supporter les épreuves <strong>de</strong> la vie. Etat <strong>de</strong> faiblesse <strong>de</strong> MLP.<br />

Chaville, 2 août 1874<br />

Madame la Marquise,<br />

Vous permettez que, pour vous écrire, jʹuse dʹune main étrangère; fort à regret, je<br />

recours à ce moyen, lʹinfirmité <strong>de</strong> mes propres mains rendant mes lettres absolument illi‐<br />

sibles; mais lʹaffaiblissement toujours croissant <strong>de</strong> ma santé nʹinflue en rien sur mes senti‐<br />

ments dévoués à lʹégard <strong>de</strong> vous et <strong>de</strong>s vôtres, tout particulièrement à lʹégard <strong>de</strong> Madame<br />

votre mère et <strong>de</strong> vos chers enfants. Je conçois bien la situation pénible que vous me dépei‐<br />

gnez, la tendre affection qui unit votre famille nʹempêche point ces quelques dissentiments<br />

qui, sans atteindre le cœur, exercent les caractères, nuisent à la paix <strong>de</strong>s âmes; on peut<br />

souffrir beaucoup, surtout si lʹon est impressionnable et sensible; vous lʹéprouvez dure‐<br />

ment quelquefois, je le vois, Madame, mais que faire? et quel remè<strong>de</strong> y apporter? je nʹen<br />

sais guère. Prendre sur soi, se dominer, cʹest facile à dire, mais quels efforts ne faut‐il pas<br />

faire pour y parvenir! Comment <strong>de</strong>meurer calme et ne pas souffrir en présence <strong>de</strong> faits qui<br />

semblent contraires à la raison et froissent tous nos sentiments? Un regard vers le Ciel, un<br />

recours intérieur vers le Dieu <strong>de</strong> toute sagesse, Dieu patient, indulgent et miséricordieux;<br />

voilà la seule voie qui ramène le calme dans notre esprit, en nous rappelant que patienter<br />

est notre lot sur la terre et notre plus sûr mérite <strong>de</strong>vant le Seigneur. Soyez assurée, Ma‐<br />

1689


dame, que je prie <strong>avec</strong> vous, afin quʹinspiration et force vous soient données pour rempor‐<br />

ter cette généreuse victoire.<br />

Ces épreuves ne sont pas les seules qui vous sont imposées: lʹétat <strong>de</strong> santé moral et<br />

physique <strong>de</strong> vos chers oncles vous cause <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s sollicitu<strong>de</strong>s [M. <strong>de</strong> Bailleul et le Géné‐<br />

ral dʹHurbal], pour celui qui est près <strong>de</strong> vous particulièrement; mais ne nous lassons pas<br />

dʹespérer et <strong>de</strong> prier, rappelons‐nous ces paroles adressées à S te Monique: Le sujet <strong>de</strong> tant<br />

dʹinstances et <strong>de</strong> larmes ne saurait périr.<br />

Combien je suis touché <strong>de</strong> vos aimables invitations pour le voyage en Normandie et<br />

la visite aux chers châtelains <strong>de</strong> S t ‐Laurent; cette douce satisfaction ne me sera, selon toute<br />

apparence, pas accordée présentement; ma faiblesse, déjà gran<strong>de</strong> lors <strong>de</strong> votre départ, sʹest<br />

singulièrement accrue <strong>de</strong>puis, à tel point que marcher, agir quelque peu activement, mʹest<br />

<strong>de</strong>venu impossible; le sommeil, lʹappétit me font défaut; il semble que ma vie sʹéteint et ne<br />

peut plus guère durer; mais, sʹil en est ainsi, je gar<strong>de</strong>rai à ceux qui ont été pour moi dʹune<br />

si aimable bonté une vive et profon<strong>de</strong> reconnaissance, usant à leur égard <strong>de</strong> cette force que<br />

gar<strong>de</strong> la prière, même après quʹon a franchi la limite qui sépare notre mon<strong>de</strong> du mon<strong>de</strong><br />

meilleur.<br />

Votre cher oncle, M. <strong>de</strong> Caulaincourt, mʹest venu voir à Chaville ces jours <strong>de</strong>rniers,<br />

il pourra vous dire à lʹoccasion que je serais bien insuffisant pour le moindre voyage; puis‐<br />

sé‐je, au moins, si Dieu daignait mʹappeler, bien accomplir celui qui mène à Lui.<br />

Merci mille fois, Madame la Marquise, <strong>de</strong> vos offres si bienveillantes pour le vin; ce‐<br />

lui que vous mʹavez donné nʹest pas encore à sa fin, jʹen bois seulement un peu à la fin du<br />

repas; la richesse <strong>de</strong> ses qualités mʹest précieuse, elle le rend en ce moment trop puissant<br />

pour que jʹen fasse un usage constant.<br />

Vous aurez appris que M. <strong>de</strong> Loisy, un moment assez gravement mala<strong>de</strong> à Paris, a<br />

pu retourner chez lui presque complètement remis.<br />

Veuillez, Madame la Marquise, faire agréer mes respectueux souvenirs à Madame<br />

votre mère, et recevoir vous‐même mes profonds hommages <strong>de</strong> respect et <strong>de</strong> dévouement<br />

en N.S.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

P. S. Je parle bas, mon secrétaire nʹa pu mʹentendre parfaitement.<br />

1795‐1 à M. Pavie<br />

Une <strong>de</strong>s joies <strong>de</strong> sa vie: lʹamitié <strong>de</strong> Victor Pavie.<br />

8 août 1874<br />

Mon cher Victor,<br />

Votre bonne lettre, et la brochure, dont lʹenvoi lʹavait précédée, mʹont vivement<br />

touché. Elles mʹont rappelé bien <strong>de</strong>s faits, bien <strong>de</strong>s impressions toutes consolantes, résul‐<br />

tant pour moi <strong>de</strong>s bontés <strong>de</strong> votre affection fidèle et dévouée; jʹen ressens vivement le prix,<br />

en ce moment surtout une fois encore, ou plutôt jʹen remercie Dieu qui a voulu en faire<br />

une <strong>de</strong>s joies <strong>de</strong> ma vie. Je vous remercie en particulier <strong>de</strong> mʹavoir assez initié à lʹintimité<br />

<strong>de</strong> votre vie <strong>de</strong> famille pour me faire jouir <strong>avec</strong> vous <strong>de</strong> tous les trésors <strong>de</strong> douce union et<br />

dʹédifiants exemples quʹelle mʹa donnés jusquʹà la fin. Jʹentre dans toutes vos sympathies à<br />

son sujet, je prie le Seigneur <strong>de</strong> la bénir, <strong>de</strong> la maintenir ainsi que vous, dans ces senti‐<br />

1690


ments <strong>de</strong> foi vive qui la rendront heureuse en ce mon<strong>de</strong> et prépareront encore sa félicité<br />

pour lʹautre.<br />

Adieu, mon cher Victor, offrez mes respectueux souvenirs à votre chère femme et<br />

soyez assuré que je ne vous oublierai pas tant quʹil plaira à Dieu <strong>de</strong> me laisser quelque<br />

puissance <strong>de</strong> penser et dʹaimer.<br />

Je vous embrasse cordialement en Notre Seigneur.<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1796 à M me et M lle Salva<br />

Les douleurs physiques augmentent; néanmoins, MLP. est encore <strong>de</strong>bout.<br />

Chaville, 18 août 1874<br />

Chères amies,<br />

Il me semble bien que je nʹai rien <strong>de</strong> nouveau à vous écrire au sujet <strong>de</strong> ma santé, si‐<br />

non que tous les acci<strong>de</strong>nts dont je souffre sʹaccroissent <strong>de</strong> jour en jour; et cependant, je<br />

<strong>de</strong>meure <strong>de</strong>bout et je reste levé presque autant que <strong>de</strong> coutume, le lit ne me donnant guère<br />

<strong>de</strong> soulagement ni <strong>de</strong> repos. Si les soins pouvaient me guérir, je les ai abondamment; je<br />

compte sur vos prières pour acquitter ma <strong>de</strong>tte envers ceux qui me traitent si charitable‐<br />

ment.<br />

Adieu, chères amies, je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à Dieu quʹIl vous gar<strong>de</strong> le don précieux <strong>de</strong> la santé.<br />

Votre frère et oncle affectionné<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1797 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Progrès <strong>de</strong> la <strong>de</strong>rnière maladie. MLP. ne peut plus célébrer le St‐Sacrifice <strong>de</strong> la messe.<br />

Chaville, 29 août 1874<br />

Madame la Marquise,<br />

Je me résigne à vous adresser quelques mots en forme <strong>de</strong> bulletin <strong>de</strong> santé, puisque<br />

votre extrême bienveillance mʹy autorise; je nʹeusse pas attendu si longtemps à vous écrire<br />

si je ne fusse <strong>de</strong>venu tout à fait incapable <strong>de</strong> le faire personnellement. Ma faiblesse est, en<br />

effet, très gran<strong>de</strong> et accompagnée <strong>de</strong> suffocations fréquentes qui mʹôtent à chaque instant<br />

la respiration; mes nuits sont fort mauvaises. Jʹose réclamer lʹassistance <strong>de</strong> vos prières et<br />

<strong>de</strong> celles <strong>de</strong> Madame votre mère. Vous pouvez bien présumer, Madame, dans ces condi‐<br />

tions, que jʹai été contraint dʹinterrompre lʹoffran<strong>de</strong> du St ‐Sacrifice; mais, pour ne pas lais‐<br />

ser en souffrance les intentions que jʹaccomplissais pour vous, jʹai pris arrangement <strong>avec</strong><br />

M. <strong>de</strong> Varax et un autre <strong>de</strong> nos MM. qui y satisferont à ma place. Il en sera ainsi tant que je<br />

resterai dans la même impuissance. Le salut <strong>de</strong>s âmes dont votre charité sʹoccupe est trop<br />

grave pour que je puisse un seul instant le négliger.<br />

Mes malaises, à vrai dire continuels, ne sont pas au préjudice <strong>de</strong>s sentiments pro‐<br />

fonds <strong>de</strong> reconnaissance et <strong>de</strong> dévouement que je vous ai voués. Je vous prie donc, Ma‐<br />

dame la Marquise, dʹen agréer lʹassurance, ainsi que Madame la Vicomtesse dʹHurbal, et<br />

<strong>de</strong> me croire toujours<br />

Votre humble et respectueux serviteur Le <strong>Prevost</strong><br />

1691


1798 à M me et M lle Salva<br />

Son état <strong>de</strong> santé va en sʹaggravant. Deman<strong>de</strong> <strong>de</strong> prières; ʺle mérite <strong>de</strong> la croixʺ.<br />

Chaville, 6 septembre 1874<br />

Chères amies,<br />

Si jʹai laissé sʹécouler la semaine <strong>de</strong>rnière sans vous écrire, cʹest que, dans les mala‐<br />

dies telles que celle dont je suis atteint, il ne se présente pas dʹinci<strong>de</strong>nts qui méritent dʹêtre<br />

notés, si ce nʹest rarement. La faiblesse <strong>de</strong> mon estomac, qui se manifestait autrefois par<br />

<strong>de</strong>s vomissements, le fait maintenant par une gran<strong>de</strong> incapacité <strong>de</strong> prendre <strong>de</strong> la nourri‐<br />

ture soli<strong>de</strong>, incapacité produite par le dégoût <strong>de</strong>s aliments. En somme, je ne suis pas<br />

mieux, je suis toujours oppressé par les suffocations. Je compte toujours sur vos bonnes<br />

prières pour ne pas perdre le mérite <strong>de</strong> la croix quʹil a plu au bon Dieu <strong>de</strong> mʹenvoyer; <strong>de</strong><br />

mon côté, soyez bien persuadées que je ne vous oublie pas <strong>de</strong>vant ce bon Père, et jʹai la<br />

confiance quʹIl ne dédaignera pas les vœux que je fais pour votre vrai bonheur.<br />

Croyez, chères amies, à la sincère et constante affection <strong>de</strong><br />

Votre tout dévoué frère et oncle Le <strong>Prevost</strong><br />

1799 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Gratitu<strong>de</strong>. Résignation chrétienne <strong>de</strong>vant lʹépreuve.<br />

Chaville, 6 septembre 1874<br />

Madame la Marquise,<br />

Le r.p. Le <strong>Prevost</strong> a reçu <strong>avec</strong> reconnaissance le <strong>de</strong>rnier envoi que vous lui avez fait<br />

lʹhonneur <strong>de</strong> lui adresser le 3 septembre. Il est profondément sensible aux marques <strong>de</strong> vo‐<br />

tre si chrétienne affection; <strong>de</strong> son côté, il gar<strong>de</strong> un grand souvenir <strong>de</strong>vant Dieu <strong>de</strong> si pré‐<br />

cieux avantages; il y répond, comme un mala<strong>de</strong>, en partageant <strong>avec</strong> tous ceux qui lʹaiment<br />

le mérite <strong>de</strong>s souffrances quʹil sʹefforce dʹaccepter <strong>avec</strong> patience et résignation; il nʹose as‐<br />

surer quʹil y réussisse toujours aussi bien quʹil le voudrait. Il est vrai <strong>de</strong> dire que les suffo‐<br />

cations, en particulier, sont souvent fort pénibles. Il se conformera aux intentions que vous<br />

voulez bien lui exprimer, et tout particulièrement il veillera à ce que celles relatives aux<br />

messes et prières soient continuées en tout cas, et quelque chose quʹil plaise à Dieu <strong>de</strong> ré‐<br />

gler pour lui‐même.<br />

Il vous prie <strong>de</strong> lʹexcuser sʹil nʹajoute rien à ces quelques lignes, sinon les nouvelles<br />

assurances <strong>de</strong> son profond et inviolable attachement pour vous même, Madame la Mar‐<br />

quise, pour Madame votre mère et vos chers enfants.<br />

M. le Comte <strong>de</strong> Caulaincourt, qui a traversé Paris ces jours <strong>de</strong>rniers, est venu faire<br />

ici une petite visite. Le <strong>Prevost</strong><br />

1800 à M me et M lle Salva<br />

Etat dʹépuisement définitif. Résignation et prière.<br />

Chères amies,<br />

1692<br />

Chaville, 19 septembre 1874


Je ne vous ai rien écrit cette semaine, mais que dire sur une situation qui reste tou‐<br />

jours la même? La maladie dont je suis atteint est un épuisement définitif <strong>de</strong>s organes, la<br />

respiration, lʹestomac ne leur laissent plus quʹun tout petit ressort et un petit reste <strong>de</strong> vie.<br />

On languit, on nʹa quʹun <strong>de</strong>mi‐sentiment <strong>de</strong> lʹexistence. Je suis incapable <strong>de</strong> tout: vouloir,<br />

agir, marcher me sont impossibles; les soins <strong>de</strong> ceux qui mʹentourent me sont indispensa‐<br />

bles pour tout.<br />

Je puis encore un peu prier, mais bien imparfaitement; on mʹassure quʹil faut <strong>de</strong>‐<br />

meurer en paix dans un pareil état. Soyez bien persuadées que vous avez une part bien<br />

certaine dans tout ce que je puis offrir à Dieu.<br />

Respect et affection à vos amis.<br />

Votre dévoué frère et oncle Le <strong>Prevost</strong><br />

1801 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Secours et consolations spirituelles dans sa maladie. Patience et résignation.<br />

Chaville, 27 septembre 1874<br />

Madame la Marquise,<br />

Je ne veux pas, malgré le peu dʹintérêt que peut avoir une lettre dʹun mala<strong>de</strong>, rester<br />

trop longtemps sans vous écrire. Si je voulais, un à un, vous énumérer les phases et les ac‐<br />

ci<strong>de</strong>nts dʹune longue maladie, il y aurait beaucoup à dire; mais nʹest‐il pas plus sage et<br />

plus séant <strong>de</strong> vous les épargner? Jʹaime mieux prendre les choses dʹun côté plus consolant<br />

et vous montrer combien Dieu est bon et miséricordieux pour ceux quʹIl éprouve; ainsi au‐<br />

cune <strong>de</strong>s consolations qui peuvent mʹêtre données, à travers les ennuis et les souffrances,<br />

ne me sont épargnées.<br />

En premier lieu, une messe est dite plusieurs fois par semaine, et tout exprès, dans<br />

une chambre attenant à la mienne; la Sainte Communion mʹest apportée quatre fois en via‐<br />

tique. De plus, tous les soirs je puis faire une petite revue <strong>de</strong> la journée <strong>avec</strong> un <strong>de</strong> nos<br />

Messieurs ecclésiastiques, afin dʹêtre en mesure <strong>de</strong> paraître <strong>de</strong>vant Dieu sʹil lui plaisait <strong>de</strong><br />

mʹappeler à Lui. Enfin, une lecture <strong>de</strong> piété mʹest faite chaque jour par lʹun <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux jeu‐<br />

nes frères [Bouquet et Pételat] qui ont été chargés <strong>de</strong> me donner leurs soins. La bonté <strong>de</strong><br />

ces chers jeunes gens est parfaite; jour et nuit, ils prennent pour moi les soins <strong>de</strong> toutes<br />

sortes que ma faiblesse absolue exige, particulièrement ils veillent à tour <strong>de</strong> rôle pour<br />

mʹassister, car, <strong>de</strong>puis un mois, je ne puis, à cause <strong>de</strong>s suffocations, <strong>de</strong>meurer dans un lit<br />

et je couche dans un fauteuil.<br />

Je serais bien coupable et bien ingrat envers la bonté <strong>de</strong> Dieu si je ne profitais <strong>de</strong><br />

tant <strong>de</strong> bienfaits par lʹexercice <strong>de</strong> la patience et <strong>de</strong> la soumission à sa volonté sainte; vous<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>rez, Madame, ainsi que votre bonne mère, la grâce pour moi dʹen user mainte‐<br />

nant. De votre côté, soyez bien assurées que je vous recomman<strong>de</strong> souvent, lʹune et lʹautre,<br />

au bon Dieu, ainsi que toute votre chère famille.<br />

Veuillez agréer, Madame, ainsi que la Vicomtesse dʹHurbal, les sentiments <strong>de</strong> mon<br />

profond et respectueux attachement en N.S.<br />

Pour M. Le <strong>Prevost</strong>: E. Bouquet<br />

1693


1802 à M me et M elle Salva<br />

Bulletin <strong>de</strong> santé. MLP. leur partage sa reconnaissance à Dieu.<br />

Chaville, 29 septembre 1874<br />

Chères amies,<br />

Je reste fidèle à notre correspondance, quoique je nʹaie rien <strong>de</strong> nouveau à vous dire.<br />

Les jours se suivent, <strong>avec</strong> <strong>de</strong>s alternatives dʹun peu mieux ou <strong>de</strong> plus mal, mais, en défini‐<br />

tive, sans avancer vers une fin bien indiquée.<br />

Je ne suis point éprouvé par les vomissements en ce moment, mais par la faiblesse<br />

et lʹimpuissance <strong>de</strong> lʹestomac qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> la nourriture sans pouvoir en tirer parti. Je<br />

suis aussi tourmenté par le retour partiel <strong>de</strong>s suffocations, qui mʹavaient laissé momenta‐<br />

nément quelque repos.<br />

Dieu, qui me visite ainsi dans lʹépreuve, ne me laisse point sans consolations. Je ne<br />

manque <strong>de</strong> soins, ni spirituels, ni temporels. Bénissons‐Le donc, et abandonnons‐nous à sa<br />

paternelle protection.<br />

Mes bons souvenirs à tous vos amis.<br />

Adieu, bien chères amies, je pense souvent à vous dans mes prières, priez aussi<br />

pour moi.<br />

Votre dévoué ami, frère et oncle<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1803 à M me et M lle Salva<br />

On a pu le coucher dans son lit. MLP. abandonné entre les mains <strong>de</strong> Dieu. Il a confiance dans les prières <strong>de</strong> ceux<br />

qui lui sont chers. (signature fort tremblée).<br />

17 octobre 1874<br />

Chères amies,<br />

Jʹai été bien souffrant <strong>de</strong>puis que je nʹai pu vous faire écrire; sans être mieux au‐<br />

jourdʹhui, jʹéprouve un grand soulagement; <strong>avec</strong> lʹai<strong>de</strong> <strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins et force oreillers, on<br />

est parvenu à me faire coucher dans mon lit, ce qui ne mʹétait pas arrivé <strong>de</strong>puis la fête <strong>de</strong><br />

lʹAssomption. Cʹétait, en effet, dans la privation du lit que consistait un <strong>de</strong>s points les plus<br />

pénibles <strong>de</strong> ma maladie, à cause <strong>de</strong> la privation <strong>de</strong> vrai repos. Je suis donc au lit aujour‐<br />

dʹhui, <strong>avec</strong> <strong>de</strong>ux jambes ouvertes que lʹon panse soigneusement.<br />

Le fond <strong>de</strong> ma maladie consiste, je crois, en une sorte <strong>de</strong> catarrhe dont le mé<strong>de</strong>cin<br />

nʹa pas pu beaucoup sʹoccuper encore jusquʹici.<br />

Au milieu <strong>de</strong> tout cela, je ne vous ai pas oubliées, je prie pour vous; jʹespère que, <strong>de</strong><br />

votre côté, vous ne mʹoubliez pas, cʹest là la vraie mé<strong>de</strong>cine qui me convient; pour le reste,<br />

je me remets entre les mains du bon Dieu<br />

Votre affectionné et dévoué frère et oncle<br />

Signé dans mon lit<br />

Le <strong>Prevost</strong><br />

1694


1804 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Un mieux sensible. Se confier au bon vouloir du Père céleste.<br />

Chaville, mercredi 21 octobre 1874<br />

Madame la Marquise,<br />

Je mʹempresse <strong>de</strong> répondre à votre vive et respectueuse sollicitu<strong>de</strong> touchant la santé <strong>de</strong> no‐<br />

tre très vénéré Père Le <strong>Prevost</strong>. Je compte donc, pour me conformer à vos pieux désirs et à votre<br />

dévouement qui mʹest assez connu, vous faire parvenir <strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> notre bien‐aimé Père tou‐<br />

tes les semaines, aussi longtemps que la divine Provi<strong>de</strong>nce me permettra <strong>de</strong> le faire ou quʹil sera à<br />

propos.<br />

Depuis quelque temps déjà, notre bien‐aimé Père ne souffre plus les douleurs aiguës et in‐<br />

tolérables que lui occasionnaient les suffocations. Un écoulement qui sʹest manifesté aux jambes,<br />

dont, ce me semble, vous connaissiez lʹétat, a beaucoup désenflé et soulagé celles‐ci. Ensuite, ce<br />

soulagement, que Dieu dans sa bonté a envoyé à notre bien cher Père, lui a permis <strong>de</strong> prendre,<br />

mais <strong>de</strong>puis quatre jours seulement, du repos dans son lit, bienfait quʹil nʹavait pas goûté <strong>de</strong>puis la<br />

fête <strong>de</strong> lʹAssomption.<br />

En somme, notre bon Père éprouve en ce moment un mieux sensible et goûte un repos bien<br />

consolant; quant à lʹavenir, Dieu seul le connaît, confions‐nous en sa bonté; mais, quoi quʹil puisse<br />

arriver, je ne vois rien <strong>de</strong> mieux que <strong>de</strong> nous conformer en tout, comme vous faites, Madame la<br />

Marquise, au bon vouloir <strong>de</strong> notre Père céleste.<br />

Veuillez agréer, Madame, lʹexpression du profond respect <strong>de</strong><br />

Votre très humble serviteur<br />

E. Bouquet<br />

1805 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Les <strong>de</strong>rniers instants.<br />

Chaville, 28 octobre 1874<br />

Madame la Marquise,<br />

Le bon Dieu, qui paraissait <strong>de</strong>voir accor<strong>de</strong>r aux prières <strong>de</strong>s âmes pieuses et dévouées, et<br />

particulièrement aux vôtres, Madame, un prolongement <strong>de</strong> vie assez étendu à notre bien‐aimé<br />

Père Le <strong>Prevost</strong>, semble aujourdʹhui bien près dʹappeler ce bon Père à Lui. Fiat. La peine qui doit<br />

nous incomber <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>uil imminent ne nous sera pas moins sensible quʹà vous, Madame la Mar‐<br />

quise, et nous la pressentons bien vivement; mais que pouvons‐nous faire, sinon <strong>de</strong> nous aban‐<br />

donner à Dieu qui, sachant quʹil nʹest pas <strong>de</strong> vrai bonheur ici‐bas, appelle lʹun après lʹautre ses en‐<br />

fants autour <strong>de</strong> Lui, pour jouir tous ensemble <strong>de</strong>s félicités <strong>de</strong> la céleste patrie. Cʹest là que nous <strong>de</strong>‐<br />

vons porter notre espérance, cʹest là que nous nous reverrons tous.<br />

Notre R. Père reçoit abondamment tous les secours corporels et spirituels que réclame son<br />

état. Il ne souffre pas beaucoup au physique, mais ses facultés mentales faiblissent sensiblement,<br />

ainsi que le fonctionnement <strong>de</strong>s sens.<br />

Je connais trop votre dévouement pour que jʹaie besoin <strong>de</strong> recomman<strong>de</strong>r notre cher mala<strong>de</strong><br />

à vos bonnes prières.<br />

Veuillez recevoir, Madame la Marquise, lʹassurance du profond respect <strong>de</strong><br />

Votre très humble serviteur<br />

E. Bouquet<br />

1695


1806 à M me la Marquise <strong>de</strong> Hou<strong>de</strong>tot<br />

Annonce <strong>de</strong> la mort <strong>de</strong> MLP. Ses funérailles sont prévues pour le lundi 2 novembre.<br />

Chaville, le vendredi soir 30 octobre 1874<br />

Madame la Marquise,<br />

Notre bon Père Général, M. Le <strong>Prevost</strong>, nous a quittés aujourdʹhui à 2h., et sa fin nous a<br />

laissés tous remplis <strong>de</strong>s consolations que la mort <strong>de</strong>s saints laisse après elle. Il a béni ses nombreux<br />

enfants spirituels, réunis autour <strong>de</strong> son lit. Vous savez bien, Madame, que son cœur si plein <strong>de</strong><br />

charité bénissait aussi bien ceux qui lui <strong>de</strong>meuraient attachés. Nous le saurions au besoin, en ce<br />

qui vous concerne, par les paroles quʹil a dites plusieurs fois aux frères qui le servaient. Si je ne me<br />

trompe, une image bénite par lui a été mise à part, sur son ordre, à vos intentions... Que Dieu nous<br />

donne à tous une mort aussi sainte!<br />

Nous ferons le service lundi à 11h., à Chaville même; vous vous unirez sans doute <strong>de</strong> loin<br />

aux prières solennelles que lʹEglise mettra ce jour‐là sur nos lèvres. Cʹest dans ces pieuses inten‐<br />

tions que nos cœurs seront tous unis.<br />

Nous aurons certainement lʹhonneur <strong>de</strong> vous écrire encore ou <strong>de</strong> vous revoir à Paris.<br />

En attendant cette occasion, jʹose vous prier dʹagréer, pour vous et toute votre famille, les<br />

sentiments <strong>de</strong> religieux respect dans lesquels je <strong>de</strong>meure,<br />

Madame la Marquise<br />

Votre humble et obéissant serviteur en N.S.<br />

<strong>de</strong> Varax pr. ff. S.V.P.<br />

Chambre où est mort M. Le <strong>Prevost</strong><br />

1696


La chapelle <strong>de</strong> Chaville (aujourd’hui disparue), <strong>avec</strong> au centre, la pierre tombale du Père Le <strong>Prevost</strong><br />

1697

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