Serge Viau : : : Chien d'écrivain
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−−− <strong>Chien</strong> d’écrivain −−−<br />
refus de cette vérité. La passion est une<br />
prodigieuse prétention, une formidable<br />
entreprise de refus braquée contre la simple<br />
vérité, contre la réalité, contre l’existence<br />
elle-même, en fait. L’homme n’est pas un<br />
être vertical mais un être horizontal, comme<br />
le monde essentiellement matériel dans lequel<br />
il vit. Prétendre le contraire, ce n’est<br />
jamais que croire à une forme ou à une<br />
autre de l’ « âme » humaine, ce qui revient à<br />
croire en Dieu ; c’est se placer au-dessus de<br />
tout ce qui vit, c’est, en somme, se prendre<br />
soi-même pour un dieu, alors que l’homme<br />
n’est qu’une petite chose fragile et sans<br />
plus d’importance qu’un asticot dans l’univers<br />
infini. La croyance en une supposée<br />
verticalité de l’être est une folie qui peut<br />
s’avérer particulièrement pernicieuse. Une<br />
idée grandiose et fausse n’est pas grandiose<br />
mais fausse, et par conséquent dangereuse,<br />
puisqu’elle ne correspond à aucune réalité.<br />
Je crois que, dans ses manifestations ultimes,<br />
la passion, le désir d’une plongée en<br />
apnée dans les profondeurs de l’être, le<br />
besoin d’une verticalité vertigineuse mais<br />
qui n’existe pas, est une pulsion de mort<br />
ignorant son nom. Renoncer, comme je l’ai<br />
fait à vingt ans, aux illusions de la passion,<br />
c’était sans doute, pour cette raison, renoncer<br />
à mourir.<br />
H. V. : Cette renonciation aux illusions<br />
de la passion était aussi une disqualification<br />
de la vision, jugée idéaliste, que vous<br />
aviez non seulement de l’homme mais également<br />
de l’écriture.<br />
L. J. : De l’écriture et de l’ « écrivain »<br />
lui-même, oui. Quand on apprend à écrire,<br />
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