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Y*,.


INSTALLATION<br />

M POMPÉÏ<br />

EN QUALITÉ DE<br />

PROCUREUR GÉNÉRAL<br />

L'an mil huit cent soixante-dix-neuf, et le jeudi quatre<br />

décembre,<br />

La Cour d'Appel d'Alger, présidée par M. Bazot, Premier<br />

Président, s'est réunie au Palais de Justice, dans la salle<br />

du Conseil, en assemblée générale des Chambres et en<br />

robes rouges, pour procéder à l'installation de M. Pompéï,<br />

nommé Procureur général par décret du Président de la<br />

République, du Ier<br />

novembre 1879.<br />

M. le Gouverneur général civil de l'Algérie, les Autorités<br />

civiles et militaires, les Corps judiciaires,<br />

invités à cette cérémonie au nom de la Cour,<br />

Premier Président.<br />

avaient été<br />

par M. le


M. le Général en chef, Commandant le<br />

d'armée, a été, à son entrée au Palais,<br />

19e<br />

corps<br />

précédé de deux<br />

huissiers et conduit au fauteuil qui lui était destiné.<br />

Dans l'enceinte avaient été placés,<br />

par les soins de<br />

MM. les Conseillers, Maîtres des cérémonies, les Autorités<br />

civiles et militaires, MM. les Consuls généraux et Membres<br />

du Corps consulaire.<br />

Le Tribunal civil et le Tribunal de commerce, MM. les<br />

Juges de Paix, occupaient sur l'estrade, derrière la Cour,<br />

les places qui leur avaient été réservées.<br />

Les Avocats et Défenseurs étaient à la barre.<br />

La Cour est entrée en séance, et aussitôt M. le Premier<br />

Président a prié la députation, composée de M. le Prési<br />

dent Truaut, de MM. les Conseillers Vidal et Levasseur, de<br />

M. l'Avocat général Cammartin et de M. le Substitut de<br />

Vaulx d'Achy, de se rendre auprès de M. le Procureur<br />

général, afin d'introduire ce haut Magistrat à l'audience.<br />

M. le Procureur général Pompéï a été annoncé, et,<br />

entrant en grand costume, il est allé, accompagné de la<br />

Députation, prendre place à un fauteuil placé dans l'en<br />

ceinte en face de la Cour. Il a salué la Compagnie et s'est<br />

assis.<br />

M. le Premier Président a donné alors la parole à<br />

M. Piette, Avocat général, qui, debout, a dit :


- 5<br />

-<br />

Monsieur le Premier Président,<br />

Messieurs,<br />

Il y a quatre ans, nous installions M. Fourcade comme<br />

Procureur général. Il nous arrivait plein d'enthousiasme.<br />

Le rêve de toute ma vie, nous disait-il, vient de se<br />

> réaliser ! Il m'est enfin donné de fouler cette terre<br />

» d'Afrique vers laquelle m'attiraient, depuis tant d'an-<br />

» nées, des aspirations que je ne raisonnais pas, mais au<br />

courant desquelles je me laissais doucement entraîner.<br />

■ puis le dire,<br />

Je viens donc à vous le cœur plein de joie et, je<br />

d'enthousiasme Toutes les choses<br />

» nouvelles qui m'environnent, il y a longtemps que je<br />

vivais avec elles par l'imagination. Ce ciel si pur, ce<br />

soleil éblouissant, cette verdure éternelle,<br />

ces palmiers<br />

» élancés, ces blanches mosquées, tous ces costumes variés<br />

;> et pittoresques, je les ai toujours connus. »<br />

Et,<br />

quand M. le Procureur général Fourcade nous tenait<br />

ce langage, il laissait éclater les véritables sentiments<br />

qui l'animaient. Je n'en veux pour preuve que les quatre<br />

années qu'il a passées parmi nous. C'est un bien long<br />

dévouement de la part d'un magistrat venant de France.<br />

L'Algérie lui en doit quelque reconnaissance. Mais<br />

M. Fourcade n'était pas de ceux qui, sur le pont du navire<br />

qui les emporte pour la première fois vers nos rivages,<br />

tournent leurs regards vers la mère patrie, y cherchant<br />

déjà la position à laquelle les conduiront au plus tôt les<br />

titres qu'ils viennent conquérir en Algérie.<br />

Ces quatre années auront été une période de préparation.<br />

Les idées acceptées aujourd'hui triomphaient peu à peu, et


- 6<br />

—<br />

s'affermissaient chaque jour davantage. M. Fourcade quitte<br />

l'Algérie au moment où il pouvait lui rendre d'importants<br />

services,<br />

grâce à l'expérience acquise. Aussi, son œuvre ne<br />

peut guère être appréciée que par ceux qui sont initiés<br />

aux difficultés incessantes d'une administration toujours<br />

délicate. Des questions étudiées avec lui, le public ne<br />

connaîtra guère que celles qui ont reçu une solution. La<br />

création de plusieurs justices de paix, l'institution d'un<br />

office d'huissier dans chaque canton, l'augmentation du<br />

nombre des suppléants rétribués et la possibilité de les<br />

déléguer dans d'autres cantons que celui de leur résidence,<br />

voilà ce qui, surtout, aura signalé son passage. Mais il<br />

serait injuste de ne pas constater qu'il a fait plus et que<br />

c'est par ses soins, notamment, qu'a été élaboré le décret<br />

qui, nous l'espérons, dotera bientôt l'Algérie de deux nou<br />

veaux tribunaux.<br />

Dans son administration, M. Fourcade mettait en relief<br />

deux qualités qui n'ont pas peu contribué à son succès.<br />

Il apportait dans les affaires difficiles une sage réserve qui<br />

lui évitait bien des obstacles, et il montrait envers tous<br />

une extrême bienveillance. D'un abord aisé et gracieux, il<br />

n'aimait pas à refuser, et le solliciteur le quittait rarement<br />

sans espérance. Ses collaborateurs du Parquet devaient se<br />

ressentir de cette bienveillance naturelle. Les rapports<br />

avec lui étaient excellents et faciles. Ces mérites, qui ne<br />

seront pas oubliés à Alger, seront certainement appréciés<br />

dans le ressort de Nancy.<br />

Monsieur le Procureur général,,<br />

Parmi les diverses impressions que nous avons ressen-


— — ?<br />

ties en apprenant votre nomination, il en est une que je<br />

veux retenir et vous faire connaître. —<br />

Nous<br />

avons su<br />

bientôt quels liens d'ancienne et mutuelle sympathie vous<br />

unissent à notre Premier Président,<br />

et nous nous en som<br />

mes réjouis. Nous y avons vu le gage de cette harmonieuse<br />

entente,<br />

si nécessaire entre les deux chefs d'une grande<br />

compagnie et dont l'absence compromet les intérêts les<br />

plus légitimes d'un ressort. Ces intérêts,<br />

vous les défen<br />

drez avec énergie, Monsieur le Procureur général, et vous<br />

ferez rendre à notre magistrature, si méritante et pour<br />

tant si méconnue, la justice qui lui est due. Du jour où<br />

la mère patrie renoncera à envoyer parmi nous les ma<br />

gistrats qu'elle ne veut plus conserver chez elle, cesse<br />

ront les préventions qui régnent dans les esprits imbus<br />

d'idées fausses sur l'Algérie. Ils sont malheureusement<br />

trop nombreux, et ceux-là sont rares qui ont fait de ce<br />

pays, de ses habitants, de ses institutions et de ses besoins<br />

une étude sérieuse. C'est que le vent de nos déserts, s'il<br />

échauffe parfois de ses brûlantes ardeurs les rivages de<br />

la Provence, n'y<br />

emporte pas sur ses ailes le secret des<br />

questions algériennes. Il ne s'apprend qu'ici, au milieu<br />

de travaux sans cesse variés, sans cesse renaissants : luttes<br />

de l'esprit de progrès et de la civilisation contre des erre<br />

ments vicieux ou coupables et contre un passé que nous<br />

ne devons plus protéger, dans lesquelles on peut trouver,<br />

avec la satisfaction du devoir accompli, l'estime et la<br />

sympathie de ceux qui aiment l'Algérie, mais, souvent<br />

aussi, des déceptions. Pour ne pas y succomber, il faut<br />

s'armer virilement et ne pas se décourager,<br />

arrive.<br />

quoi qu'il<br />

Toutes ces questions, toutes ces luttes seront pour vous<br />

choses nouvelles, Monsieur le Procureur général. Vous


i'y<br />

- 8-<br />

serez initié que par un labeur énergique et par le<br />

temps. Dans ce pays profondément attaché aux idées<br />

républicaines,<br />

le rôle politique du Procureur général est<br />

singulièrement effacé. Mais combien, au contraire, est<br />

grande et utile sa coopération à l'œuvre créatrice et pro<br />

gressive du gouvernement de la Colonie; créatrice, car<br />

il faut sans cesse pourvoir à des besoins imprévus; pro<br />

gressive,<br />

parce qu'il faut chaque jour ajouter au progrès<br />

de la veille un nouveau progrès. Et jamais cette mission<br />

n'aura été plus grande que dans ce moment où un éminent<br />

citoyen se consacre tout entier, avec un inébranlable dé<br />

vouement, à la rénovation de l'Algérie. Appelé à lui<br />

donner votre concours, vous recevez une belle et noble<br />

mission, mais aussi une tâche lourde et difficile. Vous<br />

serez à sa hauteur, nous le savons. L'habileté avec la<br />

quelle vous avez dirigé des parquets importants (1), votre<br />

expérience des affaires, votre amour du travail, le choix<br />

qu'a fait de vous M. le Garde des sceaux,<br />

nous sont ga<br />

rants de votre succès. Vous y serez aidé par la mutuelle<br />

confiance qui va régner entre vous et le savant magistrat,<br />

si justement apprécié, avec lequel vous partagez la direc<br />

tion de notre compagnie. Vous puiserez d'utiles connais<br />

sances dans les Conseils du Gouvernement, où se débattent<br />

les intérêts de l'Algérie. Vous aurez encore, Monsieur le<br />

Procureur général, d'autres moyens de vous initier aux<br />

(1) États de service de M. Pompéï : 1er avril 1854, Substitut à<br />

—<br />

— Chambon. 15 novembre 1854, Substitut à Blois. 19<br />

— 1855. Substitut à Orléans. 20<br />

— Gien. — 15 février 1860, Procureur impérial à Montargis.<br />

vrier 1860, Procureur impérial à Vendôme. —<br />

— Procureur impérial à Montpellier. 14<br />

— 5 — mai 1871, Avocat général à Bastia.<br />

reur de la République à Toulon.<br />

décembre<br />

juillet 1858, Procureur impérial à<br />

20<br />

'29 fé<br />

novembre 1864,<br />

septembre 1870, remplacé.<br />

13<br />

juillet 1876, Procu


— — 9<br />

affaires de ce pays. En est-il un meilleur que de ne pas<br />

rester complètement étranger à nos débats judiciaires,<br />

toujours instructifs et souvent pleins d'intérêt? Vous ne<br />

les redouterez pas, car, partout où vous êtes passé, votre<br />

talent a laissé les plus brillants souvenirs. Le magistrat<br />

qui a su louer en termes excellents l'intervention de l'un<br />

de ses anciens chefs dans de graves affaires et lui en a fait<br />

un juste titre d'honneur,<br />

consentira à s'arracher quelque<br />

fois aux travaux intérieurs de son cabinet pour faire en<br />

tendre dans nos prétoires la parole toujours pleine d'au<br />

torité du Procureur général. Elle sera d'autant plus écoutée<br />

que, depuis dix ans, il ne nous a pas été donné de voir un<br />

de nos chefs intervenir à l'audience. Vous y trouverez en<br />

face de vous, Monsieur le Procureur général, dans le bar<br />

reau Algérien, de dignes adversaires, avec lesquels il ne<br />

déplaît pas de se mesurer, car si la lutte est toujours cour<br />

toise,<br />

Enfin,<br />

le succès n'est pas toujours facile.<br />

vous aurez pour vous aider les membres de votre<br />

Parquet. La bienveillance et la loyauté de votre caractère<br />

suffiraient à vous assurer leur concours le plus complet et<br />

le plus dévoué. Comme leur ancien, j'aurais peut-être le •<br />

droit de ne pas laisser à d'autres le soin de vous faire<br />

connaître ce qu'ils sont et ce qu'ils valent. Permettez-moi<br />

seulement de vous dire que, parmi eux, il n'en est pas un<br />

qui ne place au-dessus de tout le sentiment du devoir.<br />

Ce discours terminé,<br />

M. l'Avocat général a requis qu'il<br />

plût à la Cour ordonner la lecture par le Greffier en chef<br />

du décret du Ier novembre 1879, qui nomme M. Pompéï,<br />

Procureur de la République près le Tribunal de 1"<br />

instance


- 10-<br />

de Toulon, Procureur général près la Cour d'Appel d'Alger,<br />

en remplacement de M. Fourcade, qui a été nommé Pro<br />

cureur général à Nancy.<br />

Faisant droit à ces réquisitions, la Cour a ordonné la<br />

lecture dudit décret, ce qui a été fait immédiatement par<br />

le Greffier en chef.<br />

M. le Premier Président a prononcé ensuite la formule<br />

du serment conçue en ces termes :<br />

« En présence de Dieu et devant les hommes, je jure et<br />

promets, en mon âme et conscience, de bien et fidèlement<br />

remplir mes fonctions, de garder religieusement le secret<br />

des délibérations et de me conduire en tout comme un<br />

digne et loyal Magistrat.<br />

M. Pompéï, debout et la main droite levée, a répondu :<br />

Je le jure.<br />

La Cour a donné acte à M. le Procureur général de la<br />

prestation de son serment,<br />

et M. le Premier Président l'a<br />

invité à prendre rang dans la Cour à la tête de son Parquet.<br />

M. le Premier Président a prononcé ensuite l'alloculion<br />

suivante :<br />

Monsieur le Général en chef,<br />

Messieurs,<br />

Si un visiteur étranger, ne connaissant pas nos mœurs,


— — 11<br />

entrait aujourd'hui dans cette enceinte, et qu'à la vue des<br />

représentants les plus élevés de l'ordre civil et militaire,<br />

de la Magistrature toute entière assemblée, il apprît que<br />

cette réunion imposante a lieu pour l'installation du Pro<br />

cureur général, n'est-il pas vrai qu'en prenant une haute<br />

idée de l'importance de ce fonctionnaire, il demeurerait<br />

surtout frappé de l'honneur qui, chez nous, est rendu à la<br />

Justice ?<br />

11 s'est pourtant rencontré des esprits qui, faisant en<br />

cela preuve de plus de vivacité que de justesse, ont repro<br />

ché à la Magistrature de mettre trop d'apparat dans la ré<br />

ception de ses chefs. C'est, le sourire aux lèvres, qu'ils<br />

ont parlé d'un cérémonial suranné que nos Cours auraient<br />

gardé de l'héritage parlementaire.<br />

Laissons passer, Messieurs, sans nous en émouvoir, cette<br />

critique légère et conservons soigneusement une coutume<br />

traditionnelle. Nos solennités judiciaires ont toutes un sens<br />

élevé, et Dieu merci ! la tradition est encore, pour la Ma<br />

gistrature, un principe.<br />

La tradition...., dont un écrivain libéral a dit excelle-<br />

ment : « Je l'aime, parce qu'elle est la règle vivante ; elle<br />

contient et elle excite ; comme la noblesse, elle oblige ;<br />

» sans elle, les peuples et les individus ont un peu l'air<br />

de parvenus.<br />

M. de Tocqueville, dont la clairvoyance ne sera assuré<br />

ment ici suspecte à personne, avait, lui aussi, prononcé, un<br />

jour, cette grave parole : « Les habitudes judiciaires, sur<br />

» bien des points,<br />

sont devenues des habitudes nationales. »<br />

Je suis sûr, Messieurs, de ne pas m'abuser en ajoutant,<br />

après ces éminents publicistes, que je ne sais rien qui con-


- 12-<br />

vienne mieux à une société démocratique, comme la nôtre,<br />

que le prestige dont elle entoure tout ce qui tient à la jus<br />

tice. N'est-ce pas, en effet, un hommage exclusivement<br />

rendu au culte de la Loi, qui doit être, par-dessus tout, la<br />

vertu républicaine?<br />

Qu'on examine, de plus près, nos harangues officielles et,<br />

au milieu des choses courtoises, qui s'adressent aux per<br />

sonnes et qu'ont dictées l'usage et les bienséances, on y<br />

verra célébrer surtout l'amour du Droit et de la Justice.<br />

C'est à cette inspiration générale que j'obéis encore, en<br />

empruntant à M. Jules Favre l'éloge qu'il faisait de sa<br />

noble profession d'avocat, éloge qui ne paraîtra pas déplacé,<br />

quand je l'appliquerai à la Magistrature.<br />

je l'espère,<br />

« On nous accuse quelquefois, disait le grand orateur,<br />

de prêter à notre profession une feinte grandeur. Com-<br />

» bien nous serions coupables,<br />

si nous la faisions descendre<br />

» au niveau de l'opinion commune ! Sa force est précisé-<br />

» ment dans la hauteur où nous la plaçons, et l'exagération<br />

même qu'on nous reproche n'a d'autres résultats que de<br />

» multiplier et d'épurer nos devoirs. *<br />

Qui donc pourrait s'étonner, après cela, de voir la Cour<br />

déployer aujourd'hui toutes ses solennités, alors qu'il s'agit<br />

de saluer d'un adieu sympathique le Procureur général<br />

qui s'éloigne, et de souhaiter une cordiale bienvenue au<br />

Magistrat qui lui succède ?<br />

Il appartenait au premier des collaborateurs de M. Four<br />

cade, à l'avocat général distingué, Procureur général de de<br />

main,<br />

de rendre hommage à l'ancien chef de ce grand Par<br />

quet. Il l'a fait avec le tact et la mesure qu'il met en<br />

toutes choses.


—<br />

— 13<br />

Je dois, à mon tour, me faire l'interprète des sentiments<br />

de la Cour.<br />

Le 13 décembre 1875, dans une cérémonie analogue,<br />

M. Fourcade montait à ce siège.<br />

« Le rêve de ma vie vient de se réaliser. » Telle était<br />

la première parole, qui tombait des lèvres du Procureur gé<br />

néral, laissant sincèrement éclater sa joie de vous appar<br />

tenir. Vous vous souvenez des accents enthousiastes avec<br />

lesquels il saluait cette terre algérienne, entrevue par son<br />

imagination, et qu'il dépeignait avec une poésie qui, sans<br />

déparer la gravité de l'audience, lui ajoutait comme un<br />

charme de plus.<br />

C'était l'effusion de l'homme : le Magistrat apparaissait<br />

ensuite, simple et modeste,<br />

pénétré du sentiment de ses<br />

grands devoirs, établissant avec sûreté les principes de son<br />

administration,<br />

qu'il résumait lui-même en ces deux mots<br />

que je lui restitue : « Protéger les bons et punir les mé-<br />

» chants.<br />

Vous savez si M. Fourcade a rempli l'honnête programme<br />

qu'il s'était tracé. Dès la première heure, il eut à cœur de<br />

s'initier promptement aux affaires algériennes, si intéres<br />

santes, mais si complexes ;<br />

ne reculant pas devant un<br />

immense labeur, il s'y donna tout entier, et bientôt, grâce<br />

aux efforts d'une volonté persévérante, il put tenir tous les<br />

fils d'une vaste administration. C'est alors que, bien affermi<br />

sur son terrain, il sut faire apprécier partout les ressour<br />

ces d'un esprit juste et exercé : au Conseil de Gouverne<br />

ment, collaborateur actifet dévoué du Gouverneur général;<br />

dans l'ordre judiciaire, dirigeant avec prudence l'action<br />

publique;<br />

donnant à tous cet exemple salutaire d'un chef<br />

serassidu<br />

à sa tâche quotidienne, attentif aux détails du


— 14-<br />

vice, parce qu'il estimait avec raison qu'en pareille matière<br />

rien n'est indigne de l'attention d'un chef; mettant tous<br />

ses soins à la formation d'un personnel qui n'a jamais<br />

connu ses rigueurs, car il avait pour chacun une parole<br />

aimable et une promesse encourageante; s'appliquant enfin,<br />

entre temps, à l'étude des améliorations possibles de notre<br />

organisation judiciaire. C'est ainsi que M. Fourcade, con<br />

tinuant l'œuvre d'éminents prédécesseurs, laissera, lui<br />

aussi, dans ce ressort, la trace de son utile et laborieuse<br />

administration.<br />

Dans cette esquisse rapide, à laquelle je dois me bor<br />

ner, je voudrais, du moins, essayer de fixer les traits princi<br />

paux et signaler, chez notre ancien Procureur général, les<br />

qualités maîtresses. C'étaient bien certainement la modé<br />

ration et la prudente circonscription d'un administrateur,<br />

qualités magistrales entre toutes, et qu'on ne saurait trop<br />

louer. Aussi, M. Fourcade a-t-il dû à ces sages inspiratrices<br />

d'éviter, si vous me permettez cette comparaison,<br />

sur une<br />

mer qui a quelquefois ses orages, des écueils où d'autres<br />

se seraient brisés peut-être ; il a su dénouer les difficultés<br />

qu'un Procureur général rencontre toujours sur sa route,<br />

et il aura passé, parmi nous, exerçant un ministère rigou<br />

reux, sans susciter les récriminations de personne.<br />

N'est-ce pas le meilleur éloge que je puisse faire de l'ad<br />

ministration de M. Fourcade ?<br />

Il ne nous laisse, à vrai dire, qu'un regret,<br />

tagé lui-même,<br />

qu'il a par<br />

c'est qu'il n'ait pu quelquefois s'arra<br />

cher aux travaux d'une administration absorbante, pour<br />

apporter à nos audiences l'éclat d'une parole et la solidité<br />

d'une science, qui avaient fait leurs preuves à la Cour de<br />

Montpellier. La Cour de sera Nancy plus heureuse, car elle<br />

trouvera M. Fourcade certaiallégé,<br />

plus libre, empressé


— — 15<br />

nement à revendiquer ce privilège de sa fonction, qui sied<br />

si bien à un Procureur général, car, en affirmant sa supé<br />

riorité à l'audience, le chefdu Parquet consolide et rehausse<br />

son autorité.<br />

Le nom de M. Fourcade, inscrit dans les annales de la<br />

Cour, n'y<br />

sera point oublié.<br />

Monsieur le Procureur général,<br />

Au moment où je me tourne vers vous, pour vous sou<br />

haiter, au nom de la Cour d'Alger,<br />

la plus cordiale bien<br />

venue, mon émotion égale la vôtre. Elle est telle qu'elle<br />

bannit de mes lèvres ces paroles cérémonieuses et un peu<br />

froides, qui s'échangent, d'ordinaire, entre magistrats dans<br />

notre situation. Cette réserve, en effet, me serait une gêne<br />

pour exprimer le vif sentiment que j'éprouve; car,<br />

instant,<br />

en cet<br />

je me sens entraîné par la puissance d'un souve<br />

nir que votre présence vient de raviver en moi.<br />

H y a plus de vingt années, dans un modeste tribunal du<br />

Loiret, un Magistrat débutait dans la carrière. Il avait, à<br />

cette heure, souvent décisive, des commencements, le bon<br />

heur de rencontrer un chef qui unissait aux dons les plus<br />

brillants de l'esprit toutes les richesses du cœur. Le Pro<br />

cureur d'alors eut toutes les prévenances et toutes les géné<br />

rosités pour son substitut, guidant affectueusement l'inex<br />

périence de celui-ci, l'initiant patiemment à la pratique de<br />

fonctions délicates, s'écartant pour lui faire place, le pous<br />

sant en avant, applaudissant d'une main amie à quelques<br />

succès, faisant valoir tout cela, autour de lui d'abord,<br />

surtout auprès des chefs du ressort, dont il provoquait


- 16<br />

-<br />

avec chaleur la bienveillance. C'est ainsi que son dévoue<br />

ment jetait les premiers fondements d'une carrière qui,<br />

depuis, fut singulièrement heureuse.<br />

Le Procureur si bon, M. le Procureur général, c'était<br />

vous, et le Substitut si favorisé, c'était moi.<br />

En évoquant ce souvenir, qui m'est demeuré bien cher,<br />

je n'ai pas cédé seulement au plaisir qu'il me cause, j'ai<br />

voulu vous peindre, d'un trait, dans ce qu'un Magistrat a<br />

de meilleur : la bonté; et la Cour qui m'écoute, sait main<br />

tenant que le Procureur général qui lui arrive, est un<br />

homme d'un grand cœur.<br />

Je ne lui apprendrai rien qu'elle ne sache déjà, en<br />

ajoutant que, chez vous, le talent est à la hauteur du<br />

caractère.<br />

Votre passé judiciaire est de ceux qui justifient toutes<br />

les élévations. En ce temps de fortunes, souvent trop ra<br />

pides, vous avez, avant d'arriver au faîte,<br />

pris la peine de<br />

gravir tous les échelons, et alors que, mieux qu'un autre,<br />

vous eussiez pu franchir par bonds les intervalles, vous<br />

avez eu la sagesse de n'en supprimer aucun. C'est le secret<br />

des forces durables, et il en est, de ces carrières formées par<br />

le temps,<br />

dont les fruits n'ont que plus de saveur.<br />

comme de ces arbres qui ont crû lentement et<br />

Monsieur l'Avocat général vient de retracer l'état de<br />

vos brillants services et il m'a ainsi dispensé d'entrer dans<br />

les détails. Mais je ne puis passer outre sans considérer,<br />

dans son ensemble, cette carrière que je ne crains pas de<br />

citer comme un modèle.<br />

Vous avez mis 25 années à conquérir ce poste de Procu<br />

reur général, prouvant ainsi que, dans la Magistrature,<br />

les hautes situations ne se donnent pas et qu'il les faut


— — 17<br />

gagner. Vous avez rempli ces belles fonctions du Parquet<br />

devant toutes les juridictions, depuis la plus modeste<br />

jusqu'à la plus élevée, tour à tour homme d'audience et<br />

administrateur, laissant partout la marque de votre supé<br />

riorité.<br />

C'est, à la Cour d'assises de Blois, que s'essayait, dans sa<br />

fougue un peu impétueuse, cette parole chaude et colorée,<br />

qui devait se régler plus tard, en conservant heureusement<br />

ses qualités natives. Elle a paru, dans tout son éclat, à la<br />

Cour de Bastia, dans ces fonctions d'Avocat général, les<br />

plus belles peut-être de la Magistrature, où le Magistrat<br />

tient à l'audience ce grand rôle du Ministère public, libre<br />

des entraves de la clientèle, avocat lui aussi,<br />

mais unique<br />

ment de la loi, à qui certaines qualités sont imposées<br />

comme une convenance professionnelle, mais qui, sous<br />

cette discipline austère, n'éprouve cependant aucune gêne<br />

pour la manifestation de ses facultés oratoires.<br />

Vous y avez excellé, non-seulement dans les jours<br />

ordinaires, mais aussi dans les grands jours de la Cour,<br />

lorsqu'en 1872 vous prononciez, sur le Jury en Corse, un<br />

discours fortement pensé, éloquemment écrit,<br />

qui était à la<br />

fois un acte de raison et de courage, car, en professant les<br />

plus saines doctrines, vous luttiez, dans votre pays même,<br />

contre un préjugé populaire.<br />

Hors de l'audience, dans l'administration des Parquets,<br />

vous avez montré un rare esprit de décision, les ressources<br />

d'une intelligence vive et souple, la connaissance des hom<br />

mes,<br />

surtout la modération et l'amour de la justice. Après<br />

les Parquets de Gien, de Vendôme et de Montpellier, c'est<br />

dans cette grande ville de Toulon que vous teniez, d'une<br />

main ferme et exercée, ce gouvernail si délicat que vous<br />

n'avez jamais laissé dévier.


- 18<br />

—<br />

Vous étiez donc prêt pour les hautes fonctions, aux<br />

quelles vient de vous appeler le choix éclairé de notre<br />

éminent Garde des Sceaux.<br />

Et cependant, Monsieur le Procureur général, me<br />

sera-t-il permis de vous le dire, votre conscience émue,<br />

j'en suis sûr, vous avertit, en ce moment,<br />

qu'un grand<br />

changement s'est produit dans votre situation. Il est un<br />

sentiment nouveau,<br />

que vous n'avez jusqu'ici éprouvé<br />

qu'incomplètement, et qui va désormais devenir la règle de<br />

votre vie magistrale : je veux parler de la responsabilité<br />

qui incombe à un chef de ressort.<br />

Ce sont là des fonctions plus redoutables qu'elles ne<br />

sont enviables. Il faut se couvrir comme d'une armure<br />

plus forte, dont on se servira surtout pour la défense des<br />

autres. Si vaillant qu'ait été jusque là le Magistrat, si<br />

élevé qu'ait été son esprit, si ferme qu'ait été son cœur, il<br />

devra encore hausser l'un et l'autre de plus d'un degré,<br />

pour être à la hauteur des devoirs d'un chef.<br />

Du jour où il a reçu cette charge, celui-ci ne s'appartient<br />

plus et doit s'oublier toujours pour ne songer qu'à sa<br />

fonction. C'est, entre ses mains, que reposent les préro<br />

gatives de sa compagnie, le respect des traditions, le<br />

maintien de la discipline, les intérêts et souvent l'avenir<br />

des Magistrats. C'est tout cela qu'il faut garder comme un<br />

dépôt précieux, quelquefois défendre,<br />

en montrant au<br />

dedans beaucoup de bienveillance unie à beaucoup de<br />

fermeté, un grand esprit de justice surtout, une fierté qui<br />

élève au-dessus des sentiments vulgaires, au dehors une<br />

complète indépendance et une parfaite abnégation.<br />

Et pourtant, quoiqu'il fasse, avec ces qualités mêmes, le<br />

chef échouera sûrement, s'il n'est aidé et soutenu.<br />

Aussi, Monsieur le Procureur général et ami, combien je


- 19<br />

-<br />

suis heureux de partager avec vous une responsabilité que<br />

notre union nous rendra moins lourde. Je mets dans la<br />

vôtre cette main, dont la loyauté vous est connue et je<br />

contracte avec vous une alliance, qui ne peut que profiter<br />

à l'administration de la Justice.<br />

Tous les deux, nous pouvons compter, il le faut, sur<br />

l'appui de la Cour. Si la Cour d'Alger n'a pas encore les<br />

prérogatives de la Magistrature métropolitaine, elle en a<br />

l'esprit et les mœurs. Elle sait aussi que sa force est dans<br />

ce lien énergique, établi entre tous les membres de la com<br />

pagnie, dans cette solidarité étroite et affectueuse qui unit<br />

chacun de nous dans une pensée commune, dans cet esprit<br />

de corps, pour l'appeler de son nom, qui a fait autrefois la<br />

grandeur de nos Parlements, qu'il faut conserver pieuse<br />

ment,<br />

en ayant soin d'éviter ses entraînements et de ne<br />

garder que le sentiment élevé, qui peut servir la Justice.<br />

Vous aurez en plus, Monsieur le Procureur général, le<br />

précieux concours d'un Parquet, dont la Cour a éprouvé<br />

les solides mérites, des Avocats généraux qui allient à une<br />

scienceétendue un remarquable talent d'audience, des Subs<br />

tituts, à qui tous les travaux du Parquet sont familiers<br />

et qui sont prêts, eux aussi, pour les luttes de la parole .<br />

Ils étaient une force pour votre honorable prédécesseur ;<br />

ils seront aussi, pour vous, de fidèles et dévoués collabo<br />

rateurs.<br />

Vous arrivez, Monsieur le Procureur général, à une<br />

heure solennelle, au moment où la France algérienne, ani<br />

mée d'une noble ardeur, est prête à s'élancer dans des voies<br />

nouvelles, sous la conduite de l'éminent Gouverneur géné<br />

ral, dont le patriotisme a accepté de diriger une œuvre<br />

nationale,<br />

qui sera l'honneur de son nom. Déjà il n'est<br />

plus question des antagonismes d'autrefois et partout, au


- 20<br />

-<br />

contraire, éclate une généreuseémulation pourlebien public.<br />

Que cet amour de la patrie est bien fait pour enflammer<br />

tous les cœurs. Oh! gardons-nous de laisser rompre jamais<br />

ce faisceau des forces civilisatrices, qui ont jeté, sur cette<br />

terre algérienne, des semences si fécondes !<br />

Vous en voyez ici les plus hautes personnifications :<br />

autour de M. le Gouverneur général, à la tête de notre<br />

chère et glorieuse armée d'Afrique, un Chef digne d'elle,<br />

Général vaillant et sympathique,<br />

dont l'épée loyale inspire<br />

confiance à tous ; qui, par un privilège de race, joint à<br />

ses grandes qualités militaires le don d'une éloquence mâle<br />

et fière, qui lui a gagné, du premier coup,<br />

ges. —<br />

tous les suffra<br />

Un Secrétaire général, récente conquête de l'Al<br />

gérie et non la moins brillante, venu naguère dans ce pays<br />

pour l'étude de certaines questions, tombé lui aussi sous<br />

le charme, et qui se donne aujourd'hui à cette cause algé<br />

rienne, à laquelle il apporte le puissant renfort de son<br />

intelligence et de son activité.<br />

— Un absent que je ne veux<br />

pas oublier, un vénérable Prélat, entouré de nos respects,<br />

dont la charité infatigable, après avoir couvert l'Algérie<br />

de ses œuvres, fait porter, au loin et jusque par delà les<br />

grands Lacs, le nom et l'image de la France chrétienne,<br />

— tout un cortège, enfin, d'Administrateurs distingués,<br />

dont le concours est acquis à l'œuvre nouvelle.<br />

Nous savons que nous, Magistrats, nous sommes aussi<br />

des ouvriers nécessaires, car les conquêtes, commencées<br />

par les armes, ne s'achèvent et ne s'affermissent que par<br />

les lois. Nous ne marchanderons pas notre dévouement.<br />

La Magistrature algérienne a conscience de la grandeur<br />

de sa tâche. On n'en a pas toujours mesuré l'importance.<br />

L'œuvre de la Justice est difficile partout et, même sur le<br />

sol si bien affermi de notre vieille France, avec l'unifor-


- 21<br />

—<br />

mité de ses Codes, la science de ses Jurisconsultes, la<br />

richesse de sa Jurisprudence, combien encore la mission du<br />

Magistrat est délicate ! La nôtre est plus compliquée : nous<br />

n'avons pas seulement à appliquer la Législation française,<br />

mais encore ce qu'on appelle la Législation algérienne,<br />

rialis indigesta que moles.... Nous avons surtout à faire pé<br />

nétrer, parmi les Indigènes, l'influence civilisatrice de nos<br />

lois, en leur donnant d'abord nos Magistrats et, ensuite,<br />

en accomplissant, peu à peu, avec le secours du temps, avec<br />

beaucoup de ménagements et un grand art, à l'aide d'une<br />

sorte de Jurisprudence prétorienne, une transformation<br />

successive,<br />

nitive.<br />

qui sera vraiment le signe de la conquête défi<br />

Pour cette œuvre si complexe, il faut, je ne crains pas<br />

de le dire, une magistrature d'élite.<br />

C'est à la formation de ce personnel que nous travaille<br />

rons de concert. Monsieur le Procureur général. Nous nous<br />

efforcerons de donner à la République des Magistrats dignes<br />

d'elle, c'est-à-dire honnêtes, laborieux et instruits.<br />

Devons-nous leur demander quelque chose de plus ?<br />

Oui. —<br />

Je<br />

n'hésite pas à le dire, car je hais les équivoques,<br />

il faut, en outre et surtout,<br />

qu'un Magistrat soit un bon<br />

citoyen et il ne saurait l'être qu'à la condition de professer<br />

le respect absolu de nos institutions. C'est la République<br />

elle-même qui, dans un intérêt supérieur, interdit aux<br />

Magistrats d'entrer jamais dans les luttes politiques, afin<br />

qu'ils puissent demeurer,<br />

pour les justiciables de tous les<br />

partis, des Juges impartiaux ; mais elle a le droit, du<br />

moins,<br />

d'exiger de leur probité qu'en donnant une franche<br />

adhésion au Gouvernement au nom duquel ils rendent la<br />

Justice,<br />

ils pratiquent ce que je serais tenté d'appeler : le<br />

Logalisme républicain. Ainsi compris le devoir constitution-


— — 22<br />

nel est aussi un devoir magistral et on peut être sûr que<br />

nous l'observerons religieusement.<br />

Et maintenant, Monsieur le Procureur général,<br />

cède la parole,<br />

tendre.<br />

je vous<br />

car nous sommes impatients de vous en<br />

M. le Procureur général, debout et couvert, s'est ensuite<br />

exprimé en ces termes :<br />

Monsieur le Premier Président,<br />

Messieurs,<br />

L'honorable magistrat que je remplace, vous disait en<br />

prenant possession de ce siège envié entre tous : le rêve<br />

de toute ma vie vient de se réaliser ! Ma propre pensée ne<br />

saurait revêtir une expression plus parfaite et, si j'en<br />

juge par la satisfaction que j'éprouve,<br />

tous les magistrats<br />

auxquels est échu l'honneur de vous appartenir,<br />

tous les<br />

serviteurs de l'État que les hasards d'une heureuse car<br />

rière ont conduits vers les rives algériennes ont dû res<br />

sentir les mêmes impressions.<br />

Chacun ici est en droit de s'enorgueillir de la patrioti<br />

que admiration qu'inspire à la mère patrie ce merveilleux<br />

pays dont l'attraction irrésistible s'exerce jusques sur les<br />

bords opposés de la Méditerranée.<br />

Aussi, à la nouvelle de ma promotion, l'expression de<br />

ces sentiments m'est-elle parvenue des points les plus<br />

divers de la France;<br />

mais les sympathies dont je vous<br />

apporte l'écho affaibli se sont manifestées avec un carac<br />

tère particulier de chaleureuse expansion dans cette fière


23 -<br />

et vaillante cité de Toulon, d'où s'élançaient, il y a près<br />

d'un demi-siècle, la flotte et l'armée qui venaient ravir à<br />

la barbarie une terre désormais française.<br />

L'honneur que je reçois en ce jour fait plus que combler<br />

mes vœux, il dépasse mes espérances les plus hardies !<br />

Rien ne lui manque de ce qui peut en relever le prix ; ni<br />

l'importance d'un ressort dont l'étendue semble défier le<br />

calcul, ni le juste renom d'une cour qui, par la multiplicité<br />

de ses travaux, tient immédiatement le premier rang<br />

après celle de Paris.<br />

Ce n'est donc point un simple devoir de bienséance que<br />

je viens remplir ici, en adressant tout d'abord l'hommage<br />

de ma reconnaissance profonde et de mon loyal dévoue<br />

ment au grand citoyen qui préside aux destinées de la<br />

République et à l'éminent Garde des sceaux qui a daigné<br />

me proposer à son choix .<br />

En<br />

m'<br />

appelant à ce siège élevé, le chef de la magistrature<br />

n'avait point à récompenser en moi l'éclat des services;<br />

des titres plus modestes ont paru suffisants à sa bienveil<br />

lante indulgence; vingt-cinq<br />

années d'une carrière consa<br />

crée à l'accomplissement du devoir judiciaire,<br />

tous les de<br />

grés de la hiérarchie des Parquets gravis un à un, m'ont<br />

valu l'honneur, et permettez-moi d'ajouter le bonheur, de<br />

me trouver au milieu de vous.<br />

Peut-être des considérations d'un autre ordre n'ont-elles<br />

pas été étrangères à la désignation de M. le Garde des<br />

sceaux. Au moment où une assimilation plus complète des<br />

institutions de l'Algérie avec celles qui régissent la France<br />

semble ardemment sollicitée par l'opinion, il a sans doute<br />

comme son illustre devancier, que déplus fréquents<br />

pensé,<br />

échanges doivent resserrer encore les liens qui unissent les<br />

deux magistratures.


— — 24<br />

C'est dans ces conditions que je me présente devant<br />

vous,<br />

prêt à aborder avec une droite et ferme volonté la<br />

tâche immense qui incombe ici au chef du Parquet.<br />

Je vous ai dit, Messieurs, la satisfaction profonde que<br />

j'éprouve à devenir un des vôtres ; ce n'est pas sans re<br />

grets, pourtant, que j'ai quitté ce beau ressort d'Aix, jus<br />

tement fier de sa parure de grandes et nobles cités ; Mar<br />

seille, où s'accumulent les richesses des contrées fécondes<br />

que baigne la Méditerranée; Nice, avec son doux climat<br />

et ses rives enchantées ; Aix, qui garde le culte héréditaire<br />

de la science du droit; Toulon, où se déploie l'imposant<br />

appareil de la puissance maritime de la France.<br />

C'est au Tribunal de Toulon,<br />

je n'aurai garde de l'ou<br />

blier, que je suis redevable de la distinction dont je viens<br />

d'être l'objet. Classée au troisième rang dans la hiérarchie<br />

des tribunaux, cette compagnie a droit à une plus haute<br />

place, en raison du chiffre considérable des affaires dont<br />

elle est surchargée et de l'insuffisance numérique des mem<br />

bres dont elle se compose; insuffisance à laquelle peut seul<br />

suppléer un admirable dévouement au devoir professionnel.<br />

Vous ne m'en voudrez pas, Messieurs, de me montrer<br />

reconnaissant, et vous m'autoriserez à adresser l'expression<br />

d'une affection fidèle aux vaillants collaborateurs de mon<br />

ancien Parquet, dont le dévouement m'a soutenu pendant<br />

trois années d'un écrasant labeur, à mes collègues aimés du<br />

siège, au chef distingué qui est à leur tête et dans lequel<br />

mon amitié prophétique salue un premier président de<br />

l'avenir.<br />

Vous savez désormais, Messieurs, quel est votre nouveau<br />

collègue. Vous me connaissez mieux assurément par le<br />

simple exposé de mes obscurs services que par les appré<br />

ciations, bienveillantes à l'excès, qu'ont inspirées à M. l'A-


— — 25<br />

vocat général une courtoisie généreuse et à M. le Premier<br />

Président une trop indulgente affection.<br />

J'ai longuement travaillé; je vous promets de rester<br />

fidèle ici aux habitudes de toute ma vie et si jamais je réus<br />

sissais à ne pas me montrer trop indigne d'occuper le siège<br />

laissé vide par mon regretté prédécesseur, c'est au travail<br />

seul que je devrais le succès auquel j'ose aspirer.<br />

L'Avocat général distingué qui tient une si haute place<br />

dans l'estime de la Cour et dans les sympathies de la po<br />

pulation algérienne, et après lui M. le Premier Président,<br />

avec l'autorité qui s'attache à sa parole, ont rappelé les<br />

mérites du Procureur général que vous perdez. Uni à<br />

mon honorable prédécesseur par le lien d'une ancienne<br />

confraternité, j'ai qualité pour le louer à mon tour.<br />

Dans le ressort de Montpellier, où nous avons servi tous<br />

deux et où M. Fourcade a fourni la plus grande partie de<br />

sa carrière, chacun a gardé le souvenir de ses qualités à la<br />

fois sérieuses et brillantes.<br />

Soit qu'il dirigeât l'action publique dans l'arrondisse<br />

ment le plus important du département de l'Aude, soit qu'il<br />

siégeât comme avocat général à la première chambre de la<br />

Cour d'appel, il fut constamment égal à lui-même et tou<br />

jours à la hauteur de la mission qu'il avait à remplir.<br />

J'avais quitté le ressort de Montpellier quand M. Four<br />

cade fut investi des fonctions les plus attrayantes et peut-<br />

être les plus difficiles de la magistrature militante; mais<br />

j'ai pu entendre de loin comme un écho de ses remarquables<br />

harangues,<br />

qui préparaient toujours et dictaient souvent<br />

les décisions souveraines de la Cour. J'ajoute que ce n'est<br />

pas seulement dans les travaux de l'audience que M. Four<br />

cade révéla son incontestable supériorité ; chaque fois qu'il<br />

dut aux circonstances l'honneur de diriger provisoirement


- 26<br />

—<br />

le Parquet de la Cour, il apporta dans son administration<br />

une sagesse et une sûreté de vue qui permettaient à tous<br />

de pressentir dans l'intérimaire de Montpellier le futur ti<br />

tulaire du Parquet d'Alger.<br />

Ce qu'il promettait alors, vous savez s'il l'a tenu, et je<br />

n'ai plus à rappeler avec quelle distinction il a dirigé l'ac<br />

tion publique dans ce vaste ressort, je dirais presque dans<br />

cet immense état.<br />

Le souvenir de M. Fourcade et le rapprochement qu'il<br />

suggère,<br />

sont bien faits pour inspirer à son successeur de<br />

légitimes appréhensions !<br />

Je n'ai point le dessein, Messieurs, de tracer ici un pro<br />

gramme d'administration dont les généralités seraient trop<br />

vagues pour n'être pas vaines.<br />

Mon programme ne saurait d'ailleurs différer de celui de<br />

mes devanciers;<br />

il se résume en une simple et brève for<br />

mule : assurer l'impartiale exécution des lois, et le respect<br />

de la constitution du pays, qui ne diffère des autres lois<br />

que parce qu'elle est plus haute et plus auguste encore.<br />

La tâche me sera facile, au milieu de Magistrats fidèles<br />

observateurs du devoir et de populations profondément,<br />

ardemment attachées aux institutions républicaines. Faire<br />

respecter la loi constitutionnelle et le gouvernement de la<br />

République, c'est en même temps défendre les éternels<br />

principes de morale, de vraie liberté et d'ordre public, sur<br />

lesquels reposent les sociétés.<br />

Chez tous les grands peuples cette haute mission appar<br />

tient à la magistrature et si la République des Etats-Unis<br />

a échappé aux envahissements des doctrines subversives,<br />

elle le doit en grande partie à la fermeté et à l'esprit modé<br />

rateur de ses jurisconsultes.<br />

A côté des grands devoirs dont je vous parle se placent


—<br />

— 27<br />

pour le Procureur général des obligations professionnelles<br />

que je n'aurai garde de laisser en oubli.<br />

Je ne saurais mieux faire, Messieurs, que de placer sous<br />

vos yeux le tableau que traçait de ces obligations la main<br />

magistrale d'un de mes chefs les plus regrettés (1).<br />

Assurer le maintien de la sécurité commune en impri-<br />

» mant une ferme impulsion à l'action publique ; déployer<br />

i dans ce ministère redoutable une prudence qui n'a rien<br />

» de commun avec l'arbitraire, une sollicitude vigilante<br />

» sans être inquiète ; exercer sur la marche des instruc-<br />

> tions une surveillance attentive; en bannir les lenteurs<br />

» inutiles qui compromettent l'efficacité de la répression<br />

» qu'elles ajournent; n'imposera la liberté individuelle<br />

» que les sacrifices nécessaires ; ce sont là ses devoirs de<br />

r chaque jour, i<br />

J'estime, Messieurs , que c'est particulièrement dans<br />

l'enceinte des tribunaux criminels que le moraliste et le<br />

magistrat peuvent utilement étudier les mœurs d'un pays<br />

et le caractère de ses habitants. Pendant six années,<br />

j'ai fait attentivement cette étude au Parquet de la<br />

Cour de Bastia, dans un pays où la criminalité atteint<br />

parfois des chiffres redoutables; au milieu de populations<br />

ardentes comme les vôtres, trop promptes à la vengeance,<br />

mais généreuses, énergiques, inébranlables dans leurfidélité<br />

à la mère patrie.<br />

Les débats de la Cour d'assises ont toujours eu pour moi<br />

un puissant intérêt;<br />

ils attireront encore l'ancien Avocat<br />

général de la Corse. J'ai le désir autant que le devoir d'y<br />

prendre une part active et de joindre mes loyaux efforts à<br />

(1)<br />

M. Galles, procureur général à Montpellier.


- 28<br />

—<br />

ceux de mes collègues du Parquet pour obtenir de la sa<br />

gesse clairvoyante du Jury ces fermes verdicts qui doivent<br />

garantir la sécurité publique en faisant reculer le crime.<br />

L'affermissement de cette sécurité si nécessaire au déve<br />

loppement de la colonisation, sera la grande œuvre de la<br />

Justice,<br />

et je ne redoute aucune contradiction en procla<br />

mant avec un légitime orgueil professionnel que c'est d'ici,<br />

de cet asile des lois, que sortira la régénération morale de<br />

l'Algérie.<br />

Déjà la voie a été largement ouverte par nos devanciers,<br />

et je trouvais récemment la trace de leurs généreux et puis<br />

sants efforts, en lisant, avec un intérêt mêlé d'admiration,<br />

les discours prononcés au moment où les divers chefs de<br />

cette compagnie prenaient possession de leurs charges. Cha<br />

cune de ses harangues, où l'éclat de la forme sert de parure<br />

à l'élévation de la pensée, donne l'exacte mesure des pro<br />

grès successivement réalisés dans ce pays depuis la con<br />

quête.<br />

Que de grandes choses accomplies ! Et quelle magnifi<br />

que manifestation du génie de la France ! Alger, autrefois<br />

un repaire d'audacieux forbans, devenue une ville resplen<br />

dissante dont le charme pénétrant laisse d'ineffaçables sou<br />

venirs dans le cœur de tous ceux qui l'ont habitée ; un<br />

réseau de voies ferrées,<br />

s'<br />

élargissant chaque jour pour<br />

porter jusqu'à la mer les produits de ce, sol généreux;<br />

l'Algérie figurant avec honneur dans ce pacifique concours<br />

où l'industrie nationale mesurait naguères ses pi ogres et<br />

déployait sa puissance; les lois équitables et libérales de<br />

la France pénétrant au sein de ses populations indigènes<br />

qui commencent à en éprouver les bienfaits ! Vous êtes en<br />

droit, Messieurs, de revendiquer une large part dans le<br />

succès de cet œuvre considérable.


- 29<br />

-<br />

La tâche cependant est loin d'être achevée et de larges<br />

horizons s'ouvrent encore devant notre activité patrioti<br />

que.<br />

Le représentant le plus élevé et le plus autorisé parmi<br />

nous du gouvernement de la République, M. le Gouver<br />

neur général, traçait récemment, dans le discours de Bône,<br />

et hier encore devant le Conseil supérieur, le sage et libé<br />

ral programme de nouveaux progrès à réaliser. La création<br />

de nombreux et actifs foyers de civilisation par l'établis<br />

sement de communes et d'écoles nouvelles, la constitution<br />

de la propriété individuelle et d'un état civil sérieux chez<br />

les indigènes ; l'agrandissement du territoire civil, qui<br />

amènera l'extension nécessaire du domaine de la Justice;<br />

telle est l'œuvre à laquelle attachera son nom le chef émi-<br />

nent qu'entoure un universel respect et qui consacre au<br />

triomphe de la cause algérienne toute la puissance d'un<br />

esprit ferme et sage.<br />

Les magistrats de tous degrés n'épargneront pas leur<br />

dévouement pour assurer le succès de cette grande entre<br />

prise. N'est-ce pas, en effet, aux magistrats qu'échoit plus<br />

particulièrement la mission de consolider par l'action des<br />

lois la conquête qui a coûté tant de sang aux soldats de<br />

la France?<br />

Et en vous parlant des gloires de l'armée d'Afrique,<br />

souffrez, Messieurs, que jerappelle ici, avec un sentiment de<br />

fierté pieuse, que je compte un des miens parmi les vail<br />

lants soldats qui ont payé de leur vie l'accroissement de la<br />

puissance de la patrie (1).<br />

(1) Le lieutenant de zouaves, H. Sébastiani, tué à la tête de sa<br />

compagnie dans un combat contre les Arabes.


~ 30 -<br />

Monsieur le Premier Président,<br />

Pour la seconde fois, au cours de ma longue carrière, la<br />

fortune me montre une singulière faveur. Il y a plus de<br />

vingt ans, elle plaçait à mes côtés, au Parquet de Gien, un<br />

jeune collaborateur dont je m'enorgueillis d'avoir, un des<br />

premiers,<br />

pressenti le brillant avenir. Vous débutiez dans<br />

la Magistrature, alors que j'en avais déjà franchi les pre<br />

miers degrés. Depuis, le sort équitable cette fois, a mis<br />

les chosesen leurjuste place : vous m'avez bientôt devancé et<br />

votre ancien chefétait heureux d'applaudir au rapide essor<br />

de vos destinées judiciaires.<br />

Un bonheur inespéré me ramène aujourd'hui auprès de<br />

vous, au sein de cette grande compagnie où vous occupez<br />

le premier rang, que rehausse encore l'éclat de votre mé<br />

rite.<br />

Vous savez de quel cœur je m'en suis réjoui! vous con<br />

naissez les sentiments que vous apporte une vieille amitié<br />

qu'aucun nuage n'a jamais obscurcie.<br />

Sans rien sacrifier de notre indépendance mutuelle, nous<br />

marcherons dans un constant accord, j'en ai la ferme con<br />

fiance,<br />

vers le but identique que nous assigne notre devoir :<br />

le triomphe de la Justice, la défense et l'affermissement<br />

des institutions que la libre volonté de la France a défini<br />

tivement consacrées, la sécurité et la prospérité du vaste<br />

ressort confié à notre direction.<br />

La bonne composition du personnel Judiciaire sera un<br />

des principaux objets de notre commune sollicitude : œu<br />

vre délieate-et grave, où toute erreur peut devenir funeste<br />

aux intérêts de la Justice ! Nous rechercherons ensemble les<br />

hommes que la dignité du caractère, les habitudes d'une


— — 31<br />

vie laborieuse et un sûr dévouement à la République ont<br />

préparés aux devoirs de la Magistrature. Notre attention<br />

se fixera particulièrement sur le choix des Juges de<br />

paix, ces modestes mais précieux auxiliaires, qu'on a<br />

excellement appelés dans cette enceinte : les pionniers de<br />

la Justice.<br />

Assuré de votre concours bienveillant, je m'attacherai à<br />

mettre en relief les services des Magistrats de nos Parquets<br />

de lre<br />

instance; je leur donnerai l'exemple de l'assiduité<br />

persévérante et les conseils d'une modération qui a été la<br />

règle de toute ma vie.<br />

Je demanderai beaucoup à leur zèle,<br />

de ne le lasser jamais.<br />

avec la certitude<br />

Le mérite des collaborateurs que j'ai l'heureuse fortune<br />

de trouver auprès de moi m'est déjà connu. Fier d'être<br />

devenu leur chef, j'aurai à cœur de leur montrer que l'in<br />

divisibilité du Ministère public n'est pas une formule<br />

vaine,<br />

et en retour d'une confiance dont je ne leur ména<br />

gerai pas les témoignages, j'ai l'espérance de mériter bien<br />

tôt leur amitié.<br />

La présence à cette solennité de M. le Général en chef<br />

et des Représentants de l'administration et de l'armée est<br />

un gage des sympathies qu'inspire la Magistrature et de<br />

l'heureuse harmonie qui règne ici entre les dépositaires du<br />

pouvoir.<br />

Je serai heureux de contribuer, pour ma part, à entre<br />

tenir cette entente, si nécessaire à la chose publique. Avec<br />

des attributions diverses et indépendantes, nous avons tous<br />

une tâche et une ambition commune : servir la France et<br />

la République.


— — 32<br />

Messieurs les Avocats,<br />

Les liens qu'une communauté d'origine crée entre la<br />

Magistrature et le Barreau deviennent chaque jour plus<br />

étroits; chaque jour, en effet,<br />

les compagnies judiciaires<br />

s'enrichissent par d'heureux emprunts faits à votre ordre,<br />

et ceux-là mêmes dont les intérêts ont à souffrir de ces<br />

soudaines promotions s'en réjouissent pour l'accroissement<br />

de lustre qu'en reçoit la Magistrature.<br />

C'est ainsi qu'au commencement de cette année, les plus<br />

vieux Magistrats des Parquets du ressort d'Aix applaudis<br />

saient au choix qui portait à leur tête un avocat éminent,<br />

que l'éclat du talent autant qu'un vieux renom de libéra<br />

lisme désignait à la confiance du gouvernement.<br />

Je sais, Messieurs, que les nobles traditions qui sont la<br />

gloire du Barreau français sont en honneur parmi vous. Je<br />

sais que la Justice trouve dans vos rangs d'utiles et élo<br />

quents auxiliaires. Les sentiments de sympathie pour votre<br />

ordre, dont je vous apporte ici l'expression,<br />

ne sont pas<br />

nouveaux dans mon cœur, et je puis vous offrir comme<br />

garants de leur sincérité tous vos confrères de ce brillant<br />

Barreau de Toulon, où je m'honore d'avoir laissé des ami<br />

tiés honorables .<br />

Messieurs les Défenseurs,<br />

Votre institution dont l'origine remonte aux premières<br />

années de la conquête, se recommande par l'importance<br />

des services rendus à la Justice et aux intérêts de la Colo-


— — 33<br />

nie. Vous suivez fidèlement les honorables exemples qui<br />

vous ont été légués par vos devanciers; les Magistrats<br />

apprécient votre dévouement,<br />

et je suis heureux de vous<br />

exprimer, en prenant possession de ma charge, les senti<br />

ments d'estime dont vous êtes si complètement dignes.<br />

Ce discours terminé, M. le Premier Président a levé la<br />

séance.<br />

Le présent procès-verbal, fait et dressé en l'audience<br />

solennelle, les jour, mois et an que dessus, a été signé par<br />

M. le Premier Président et par le Greffier en chef.<br />

Étaient présents :<br />

MM. Bazot, chevalier de la Légion d'honneur, officier<br />

d'Académie, grand officier du Nicham Iftikar,<br />

premier président ;<br />

Truaut. chevalier de la Légion d'honneur, pré<br />

sident ;<br />

Jocsseume, chevalier de la Légion d'honneur<br />

conseiller ;<br />

Perinne, chevalier de la Légion d'honneur, con<br />

seiller ;<br />

Vivien, chevalier de la Légion d'honneur, conseiller;<br />

Vidal, chevalier de la Légion d'honneur, conseiller;<br />

Mignot, conseiller ;<br />

Richert, chevalier de la Légion d'honneur, con<br />

seiller ;


MM. Lacth, conseiller;<br />

- 34<br />

-<br />

Pinet de Menteyer, conseiller ;<br />

Geffroy, conseiller ;<br />

Boellay, conseiller;<br />

Doudart de la Grée, conseiller ;<br />

Blanckaert, conseiller ;<br />

Prat, conseiller ;<br />

Loordau, conseiller ;<br />

Zeys, officier de l'Instruction publique, conseiller;<br />

Hugues, conseiller;<br />

Eyssadtier, conseiller;<br />

Pontois, conseiller;<br />

Colonna d'Ornano, conseiller ;<br />

Levassecr, officier d'Académie, conseiller;<br />

Mérot, conseiller ;<br />

Bodkandoura, chevalier de la Légion d'honneur, as<br />

sesseur musulman ;<br />

Kaddoor ben Chérif, assesseur musulman ;<br />

Abmed ben Omar, assesseur kabyle ;<br />

Piette, chevalier de la Légion d'honneur, avocat<br />

général ;<br />

Cammartin, chevalier de la Légion d'honneur, avo<br />

cat général ;<br />

Fad, avocat général ;<br />

de Vaulx, substitut ;


MM. Coniac, substitut;<br />

Modrgues,<br />

fier en chef;<br />

— - 35<br />

chevalier de la Légion d'honneur, gref<br />

Mousnier, commis greffier ;<br />

Nicolas, commis greffier ;<br />

Alemany, commis greffier ;<br />

Lamant, commis greffier.<br />

Le Greffier en chef,<br />

Signé : Modrgues.<br />

Le Premier Président,<br />

Signé ■e" : Bazot.


TYPOGRAPHIE ADOLPHE IOURDAN.

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