Piotr KLEMENSIEWICZ « nuance » - Galerie Mons

Piotr KLEMENSIEWICZ « nuance »
Accrocher les oeuvres de Piotr Klemensiewicz aux cimaises d’un musée
c’est, paradoxalement, faire entrer la Peinture par la grande porte de
l’inspiration et de la poésie.
Voir et revoir son oeuvre dans nos musées marque notre fidélité et notre
tendresse pour cet artiste et cette mystérieuse «nuance».
Bruno Ely
conservateur en chef du patrimoine
directeur du Musée des Tapisseries
et du Pavillon de Vendôme
Exposition du 31 mars au 25 juin 2007
Aix-en-Provence
Pavillon de Vendôme
En collaboration avec Carole CAMPBELL
13. rue de la Molle // 32. rue Célony // 04 42 21 05 78
Musée des Tapisseries
Place des Martyrs-de-la-Résistance // 04 42 23 09 91
1

Notre reconnaissance s’adresse tout particulièrement à l’artiste, Piotr
Klemensiewicz, pour son investissement dans cette aventure.
Nous remercions vivement Madame le Maire, président de la communauté
du Pays d’Aix pour son soutien à ce projet porté par la ville d’Aix-en-Provence.
Madame Le Conseiller Municipal, déléguée aux musées, pour son
soutien, sa confiance et l’intérêt constant qu’elle nous témoigne. Les
musées d’Aix doivent beaucoup à son implication et à son engagement.
Merci à la Direction du Patrimoine et des Musées, d’avoir facilité la mise en
œuvre de cette exposition.
Des remerciements appuyés à l’association des Amis du Musée des
Tapisseries et du Pavillon de Vendôme pour leur soutien, leur dynamisme
et leur investissement. Des remerciements particuliers et amicaux à notre
présidente Isabel Calonder ainsi qu’aux membres du conseil d’administration
: Jean-Louis Medvedowsky, vice président ; Joëlle Latil, trésorière ; Soizic
Szersnovisz, secrétaire ; Philippe Aupècle ; Aude Barlatier ; Billy Barbot ;
Chantal de Cenival ; Sylvie de Chaunac ; Dominique David ; Bruno
Dion-Maumont ; Anne-Marie Giard ; Catherine Grangé ; Sylvie Hours ;
Jacqueline Klein ; Stanis Le Ménestrel ; André Martini ; Elisabeth Pesseguier ;
Charles de la Roncière.
Nous tenons enfin à remercier l’ensemble du personnel du Musée des
Tapisseries et du Pavillon de Vendôme pour leur aide et leur travail quotidien
Pour le personnel d’accueil : Danièle Angeli, Nabil Attia, Annie Cruvelier,
Manuel Del Giudice, Corinne Martinez, Christian Messidoro, Dominique
Neel, Christophe Patelou, Joëlle Roche.
Pour le service technique : Yacine Ben Romdhane
Pour le service pédagogique : Anne Deirmandjian, Véronique Redon,
Marjolaine Sichi-Tabarant.
Pour la conservation : Michèle Deleuil, Salhéa Moulin, Myriam Waeles.
L’artiste, avec sincérité, tient à remercier Bruno Ely et Christel Roy.
Brice Matthieussent.
Marc Sautereau et l’équipe de Archibook.
Ge Feng pour sa générosité et son talent.
La Galerie Baudoin Lebon - Paris
La Galerie Sandrine Mons - Nice
Alexandre Curtet de Loft Design - Nice
Christian Carassou-Maillan et Vacances Bleues
Eric Chaveau et la Société Pébéo
Michel Enrici, Dominique Angel, Bernard Briançon, Yolande Obadia, Esra
Joo, Lili Heller, Anne Charlotte Depincé, Tristan Villers.
« nuance »

Vues de l’exposition « Encombrements » // Discreet Logic // Montréal // 2000

Vues de l’exposition « Encombrements » // Chapelle du Méjan // Arles // 2005
1

Vues de l’exposition « TotemtaboO 1» // Galerie des Ponchettes // Nice // 2006

Le Musée des Tapisseries et le Pavillon de Vendôme, depuis maintenant
plus de quinze ans jouent la carte du temps présent. Les
expositions consacrées à l’art moderne et contemporain ont été
nombreuses et avec des partenaires divers qui prouvent l’attachement
de ces établissements à une politique d’ouverture des
musées à la société et au monde actuels.
La liaison passé/présent dans une ville aussi marquée par le prestige
des siècles révolus doit être une évidence martelée avec
constance. Cette continuité plutôt que rupture, dans le temps et
dans l’espace de la création, doit être déclinée à Aix, peut-être plus
qu’ailleurs, en affinités électives avec son passé remarquable et la
jeunesse, le dynamisme de son présent.
La démarche de nos musées a voulu s’inscrire dans la durée et
la globalité d’une action en direction du plus large public. Avec
rigueur a été menée une politique d’ouverture et de pédagogie,
de valorisation de la création contemporaine dans tous ses états.
Valerio Adami, Georges Baselitz, Vincent Bioulès, Pierre Buraglio, Joan
Fontcuberta, François Mezzapelle, Gérard Traquandi, Jean-Jacques
Surian, pour n’en citer que quelques uns, sont les témoins de la
richesse de la création d’aujourd’hui qui constitue le patrimoine de
demain.
For now more than fifteen years, the Musée des Tapisseries and the
Pavillon de Vendôme play the card of the present tense. The exhibitions
about modern or contemporary art have been numerous and
organized with several partners, which prove that these structures
are deeply involved in a policy of the opening of museums to the
society and the world of today.
In a city as marked by the prestige of many centuries, the link
between past and present must be an evidence relentlessly underlined.
This continuity rather than rupture, in the time and space
of creation, must be stressed maybe more in Aix-en-Provence than
elsewhere via elective affinities with its remarquable past and the
youthful dynamism of its present.
The choice made by our museums has always been to act globally
and in the long course towards a very large audience. A policy of
openness and of pedagogy, of encouragement of contemporary
creation in all its various forms, has been undertaken with willfulness
and determination. Valerio Adami, Georges Baselitz, Vincent Bioulès,
Pierre Buraglio, Joan Fontcuberta, François Mezzapelle, Gérard
Traquandi, Jean-Jacques Surian, just to mention a few artists, are
witnesses of the diversity of the contemporary creation which is the
patrimony of tomorrow

Vue de l’exposition « Nuance » // Pavillon de Vendôme // Aix-en-Provence // 2007 MT+ PV = P.K.
MT + PV = P.K.
C’est avec un réel plaisir que nous ouvrons nos deux musées à Piotr
Klemensiewicz, dont nous suivons le travail depuis plusieurs années,
pour enfin présenter son travail récent en une exposition en deux
volets, au Musée des Tapisseries et au Pavillon de Vendôme.
Dans la galerie du Musée des Tapisseries sont présentées des toiles
de grand format, que Piotr Klemensiewicz a réalisées pour cette
exposition, poursuivant la série des « Evetemada » et des diptyques
amorçant un nouveau travail orienté vers une peinture évoquant
ce que l’on pourrait désigner par une « matérialité immatérielle »,
minérale, aquatique, terrestre.
Le Pavillon de Vendôme, « la plus séduisante des folies héritées du
Grand Siècle », construit en 1652 au milieu d’un jardin à la française,
sert d’écrin à un tout autre travail de l’artiste. S’appropriant ce lieu
difficile, chargé historiquement et plastiquement chaque salon a
été investit par une mise couleur jouant sur un jeu de révélation
et de correspondance des œuvres et du lieu, dans un aller-retour
passé/présent. Cette nouvelle série intitulée « TotemtaboO », travail
à quatre mains, où les photographies de paysages réalisées par
la photographe Carole Campbell, sur lesquelles Piotr Klemensiewicz
intervient avec de l’acrylique révèle un désir d’interpénétration de
la couleur et du motif se révélant ou disparaissant. Frontière entre
figuration et abstraction.
« A corps poétiques »
Piotr Klemensiewicz est un révélateur de couleurs, un
alchimiste du pigment, qui nous fait découvrir la matérialité
même de la couleur dans tous ses états, harmonie, transparence,
recouvrement, superposition, juxtaposition, ombre,
lumière, opacité, apparition, disparition, tension, fond/forme.
« C’est une peinture habitée par la peinture elle-même […] La vision
qu’elle appelle nécessite dès lors un jeu de circulation, de mouvement
traversant, créant, sur la surface de la toile comme à la surface
de la vision, un champ composé, riche de couches superposées
d’images, de couleurs, de types de représentation, d’histoires.
La peinture n’est pas le résultat d’une « vision » ou d’un état, mais
un composé, un feuilletage de domaines spécifiques, artistiques et
intellectuels, historiques et poétiques. Une peinture feuilletée. » 1
Devant la peinture de Piotr, nous ne pouvons rester insensibles, nous
sommes attirés, aimantés, dans une relation de corps à corps,
dans cette étrange union du fond et de la forme révélée par la
peinture même. Que regardons-nous, que voyons-nous réellement,
que croyons-nous voir ? Nous nous approchons, nous reculons, vision
de près, vision d’ensemble, le corps en mouvement face à une peinture
qui circule à l’intérieur de la toile et qui jaillit hors les bords pour
venir nous happer. Quelle troublante relation physique face à ses
œuvres qui suggèrent le corps mais ne le montrent jamais. « L’œuvre
est ainsi habitée par des motifs qui délimitent un territoire proprement
humain puisqu’ils représentent des objets plus ou moins usuels et nécessaires
et qui signalent à la fois la présence et l’absence de l’homme,
ou sa présence par son absence. » 2 Chaises, échelles, maisons,
le titre n’est pas le sujet : c’est la peinture elle-même.
Relation également sensuelle à la couleur, dans sa volupté, sa
respiration, ses harmonies, ses accords, ses tonalités, ses dissonances,
son opacité, sa matière.
Des touches de couleurs apposées comme des mots révélant une
musicalité et une poésie intérieure.
« A corps poétiques… »
Christel Roy
Musée des Tapisseries
Pavillon de Vendôme
1 et 2 Sally BONN, « L’espace du temps suspendu », in Klemensiewicz
Encombrements, Editions Actes Sud, 2005, p. 133 et 134.
It is with a real pleasure that we open our two museums to Piotr Klemensiewicz,
whose work we’ve been attentive to for several years, in
order to present his recent creations in a double exhibition, at the
Musée des Tapisseries and at the Pavillon de Vendôme.
In the gallery of the Musée des Tapisseries large paintings are exhibited,
especially realized by Piotr Klemensiewicz for this show, where he
goes on with the Evetemada series, and new diptychs beginning a
new work which could be described as « an immaterial materiality »,
at the same time mineral, aquatic and earthbound.
The Pavillon de Vendôme, « the most seductive folly » inherited from
the Great Century, built in 1652 in a garden à la Française, is the setting
for a completely different body of works by the artist. Appropriating
this difficult, historically and esthetically charged architecture,
all the salons have been the theater of a work on colour playing on
a set of revelations and correspondances between the place and
the works, underlining the relationships between past and present.
This new series, untitled « TotemtaboO », is a four-hands enterprise,
where the landscape photographs by Carole Campbell are modified
by the acrylic paint of Piotr Klemensiewicz, to manifest a desire of
interpenetration of colour and motif, appearing and disappearing.
Border between figuration and abstraction.
Poetic Bodies
Piotr Klemensiewicz is a sublime colorist, an alchemist of pigments,
who allows us to discover the materiality itself of the colour in all
its states, harmonies, transparencies, overlappings, superpositions,
confrontations, shades, light, opacity, appearances, disappearances,
ground / form tensions. « It’s a painting inhabited by painting
itself […]. The vision it thus convokes implies a game of circulations,
of movements which go through and create on the surface of the
canvas as well as on the surface of vision, a composed field, a richness
of overlapping images, colours, types of representation, stories.
The painting is not the result of a ‘vision’ or of a specific state, but a
mixing, a palimpsest of different fields, artistic and intellectual, historical
and poetic. Painting as palimpsest. »
In front of Piotr’s painting, we cannot stand without reacting, we are
pulled to it as by a magnet, in a very bodily relation, towards this
strange union of the ground and of the form revealed by painting
itself. What are we looking at ? What do we really see ? What do we
believe we see ? We go near, we take a step back, close vision, large
vision, the body in movement in front of a painting which circulates
inside the canvas and which goes out of its limits to take us inside.
What a troubling physical relation in front of these works which suggest
the body but never show it… « The work is thus inhabited by
motifs which enclose a typically human territory, since they represent
more or less casual and necessary objects, which manifest at
the same time man’s absence and presence, or his presence by his
absence. » Chairs, ladders, houses, the title is not the subject : it is
painting itself.
Equally sensitive relation to colour, in its voluptuousness, breathing,
harmonies, reverberations, tonalities, dissonances, opacity, its matter.
Colour touches set side by side as words revealing a musicality and
an inner poetry.
Poetic chords
Christel Roy
Musée des Tapisseries
Pavillon de Vendôme

Vues de l’exposition « Nuance » // Pavillon de Vendôme // Aix-en-Provence // 2007

Vues de l’exposition « Nuance » // Pavillon de Vendôme // Aix-en-Provence // 2007

Vue de l’exposition « Nuance » // Pavillon de Vendôme // Aix-en-Provence // 2007

« d’aprés G. Stubbs » // 2007// acrylique sur toile 200x200 cm

Combats
à propos de la peinture de Piotr Klemensiewicz
Brice Matthieussent
« L’art ne représente pas le visible, il rend visible » Paul Klee
La notion picturale de paysage, prise au sens le plus large, me
paraît être une clef d’accès majeure à l’œuvre de Piotr
Klemensiewicz. Depuis ses premières maisons, qui sont des maisons
de peinture, jusqu’aux planisphères et aux mappemondes,
en passant par les nuages et les tas qui évoquent des montagnes
archétypales, sans oublier bien sûr les récents paysages photographiques
peints, court un fil rouge qui s’affirme depuis une vingtaine
d’années comme un ensemble complexe et rigoureux de points de
suture posés entre divers espaces.
Il y a d’abord l’espace, démesuré, du monde et celui, clos et
solitaire, de l’atelier du peintre. Qui dit point de suture, dit hiatus,
béance préalable. Or le paysage, en tant que genre pictural
classique, définit l’éloignement maximal entre l’atelier du peintre
et son motif. À l’inverse, les autres référents de la peinture, ainsi la
nature morte ou le portrait, s’intègrent aisément à l’atelier pour instituer
des genres qu’on pourrait dire « de proximité ». Il n’en va pas de
même pour le paysage. Historiquement, le fait d’aller peindre « sur
le motif », loin d’être le seul apanage des peintres impressionnistes
français, remonte au dix-huitième siècle et caractérise l’attitude de
plusieurs artistes anglais – ainsi, Alexander Cozens ou Francis Towne
–, désireux de représenter les paysages sublimes de la Suisse ou de
l’Italie. Ces premiers peintres de plein air quittent l’atelier pour partir
à l’étranger, voyager et aller à la rencontre d’un extérieur. D’ailleurs,
la « sortie » de ces paysagistes anglais signale comme une anticipation
de la photographie : ils décident d’abandonner l’atelier, le lieu
traditionnel de la peinture, où cette dernière accomplit sa liberté
essentielle de plus grande distance possible par rapport au motif
proposé, pour se rapprocher du référent et le dépeindre avec un
souci d’exactitude proprement photographique.
Non qu’à ma connaissance Piotr Klemensiewicz soit jamais allé
peindre sur le motif, et de ce point de vue, sa pratique évoque
davantage celle d’un Caspar David Friedrich, dont tous les paysages
furent peints en atelier, et qui théorisa dans ses écrits cette
conception du « paysage issu de l’œil de l’esprit ». Mais sans le
rappel historique de ces peintres anglais du dix-huitième siècle, on
risque de ne pas saisir toute la portée de la dernière série d’œuvres
créées par l’artiste : il s’agit de grandes photographies en couleurs
de paysages, expressément réalisées par Carole Campbell pour
accueillir les interventions picturales du peintre ; au centre de ces
images, Klemensiewicz ajoute des bandes juxtaposées de peinture
raclées du haut vers le bas. Cet ajout a bien sûr lieu dans l’atelier.
Il ne se limite pas à une seule « passe », car l’opération est répétée
plusieurs fois, superposant ainsi les couches de peinture acrylique.
Comme pour d’autres séries de tableaux, le titre de celle-ci, qui
revient pleinement à la photographe Carole Campbell, intrigue et
déroute : TotemtaboO. Avec une lettre majuscule aux deux extrémités
du mot, comme pour suggérer une sorte de réversibilité possible,
une inversion du sens de la lecture. Le totem est-il celui de la peinture,
à la fois figure tutélaire – la Peinture avec un grand « P » – et ici
forme verticale, presque sculpturale, dressée tel un bloc massif au
centre du tirage photographique ? Le tabou renvoie-t-il à l’opération
soi-disant hérétique consistant à peindre sur un tirage photographique
? De fait, peu d’artistes se sont risqués à cette confrontation
violente de traces visibles dont les modes d’apparition ou les
régimes de production semblent radicalement incompatibles.
Néanmoins, un exemple récent de cette gageure nous éclairera.
Au début des années quatre-vingt, Bertrand Lavier créa, ou
plutôt fit produire, une série d’œuvres mixtes, intitulées Landscape
Painting and Beyond (« Peinture de paysage et au-delà »), pour
lesquelles il demanda à un artisan-peintre de recouvrir le plus
fidèlement possible la moitié droite d’une image photographique
de paysage rappelant un grand poster tel qu’on en trouve dans les
Fights
about the Painting of Piotr Klemensiewicz
Brice Matthieussent
« Art does not represent the visible, it makes visible » Paul Klee
The pictural notion of landscape, taken in its largest meaning, seems
in my opinion to be a major key to the work of Piotr Klemensiewicz.
From his first houses, which are houses of painting, to his planispheres
and his maps of the world, his clouds, his piles which look like archetypal
mountains, without forgetting of course the recent painted
photographic landscapes, a thread runs for about twenty years, like
a complex and rigorous set of stitches binding different spaces.
First, there are the very large space of the world and the closed and
solitary one of the painter’s studio. Who talks about stitches, talks
about a hiatus, a wide opening. And the landscape, as a classical
pictural genre, implies the greatest distance between the painter’s
studio and his motif. On the contrary, the other referents of painting,
such as the still life or the portrait, get easily into the studio to
create genres which could be called « of proximity ». This is not true
of the landscape. Historically, the act of going outside to paint « on
the motif », far from being the only prerogative of the French impressionistic
painters, gets back to the 18th Century and typifies the
attitude of several English artists – for instance, Alexander Cozens or
Francis Towne – who wanted to represent the sublime landscapes
of Switzerland or Italy. These first « outdoor » painters leave the studio
to go abroad, to travel and meet a kind of outside. By the way,
the «outing» of these English painters marks a sort of anticipation of
photography : they decide to leave the studio behind them, to
abandon this traditional setting of painting, where it fulfils its essential
freedom : the largest possible distance from the proposed motif,
in order to get closer to the referent and to paint it with a scrupulousness
which evokes photography.
Not that to my knowledge Piotr Klemensiewicz has ever painted on
the motif, and from this point of view, his practice is closer to that of a
Caspar David Friedrich, whose landscapes were always created in
the studio, and who theorized in his writings this conception of « the
landscape coming out of the mind’s eye ». But, without the historical
quote of these English painters from the 18th Century, we risk not to
fully understand the last series of works created by the artist : they
are large colour photographies of landscapes, specially realized for
him by Carole Campbell to welcome the pictural interventions of
the painter ; in the center of these images, Klemensiewicz adds juxtaposed
strips of paint scraped from top to bottom. Of course, this
addition takes place in the studio. He doesn’t limit himself to one
pass, for this operation is repeated many times, and the result is an
overlapping of several layers of acrylic paint. As for other series of
paintings, the title of this one, wich is the creation of the photographer
Carole Campbell, intrigues and puzzles : TotemtaboO. With a
capital letter at both ends of the word, maybe to suggest a kind of
reversibility, a possible inversion of the reading direction. Does the totem
refer to the act of painting, at the same time tutelary figure – the
Painting with a big « P » - and here a vertical form, nearly a sculpture,
standing like a massive rock in the center of the photographic
image ? Does the taboo connote the so-called heretical operation,
which is to paint on a photographic picture ? Anyway, few artists
took the risk of this violent confrontation of visible traces which seem
absolutely incompatible in their modes of appearance and their
systems of production.
However, a recent example of this wager will be useful. At the beginning
of the nineteen eighties, the French artist Bertrand Lavier
created, or rather had it created for himself, a series of mixed works,
untitled Landscape Painting and Beyond, for which he asked a
craftsman painter to cover as truthfully as possible the right half of
the photographic image of a landscape reminding a big poster
of nature such as those one can find in a supermarket ; then, the
craftsman painter was to extend it, on the right side and on the wall,
thus imagining a possible development of the landscape. So, the

supermarchés ; l’artisan-peintre devait ensuite la prolonger à droite
sur le mur en imaginant une extension possible du paysage. L’œuvre
finale se compose donc de trois parties : à gauche, un rectangle
paysager purement photographique ; au milieu, une photo entièrement
repeinte le plus exactement possible ; à droite, une peinture
exécutée à la fresque, au-delà du cadre de la photo initiale. Est-ce
à dire que, pour Lavier, la photographie et la peinture seraient identiques
? Certes pas : dans la différence rendue à peine visible, et
pourtant bien réelle, dans le hiatus somme toute inframince, entre
les deux médiums, gît la démonstration, que d’aucuns trouveront
subtile ou un peu raide.
Les « paysages peints » de Piotr Klemensiewicz, loin de jouer une
telle in-différence duchampienne, sont au contraire le lieu d’un
affrontement, d’un combat ou d’un duel amoureux, clairement
annoncé comme tel : dans un paysage intriqué de branches et de
feuillages, - sous-bois touffu, forêt calcinée, lit de rivière à sec, entrelacs
fourmillant de lignes brisées et d’éclats de lumière –, les bandes
raclées de la peinture acrylique viennent oblitérer verticalement, du
haut vers le bas, toute la partie centrale du tirage photographique.
Comment procède l’artiste ? Il compose d’abord sa palette d’après
une évaluation colorimétrique de l’image photographique ;
ensuite, il aligne en haut de cette dernière plusieurs masses, ou
« tas », de peinture résultant de cette évaluation empirique, après
quoi il racle vers le bas de l’image ces amas de pigments en utilisant
une grande règle en bois et plexiglas. L’opération est répétée
un certain nombre de fois, chaque nouvelle bande raclée
recouvrant et masquant presque entièrement la précédente.
Voilà pourquoi la matière picturale semble la plus dense en haut
de l’image, et pourquoi le totem de la peinture, loin d’avoir la base
solidement ancrée dans le paysage, paraît de plus en plus éthéré,
morcelé, fondu dans les feuillages ou la terre à mesure que le
regard le parcourt vers le bas. Contrairement aux césures brutales des
Landscape Painting and Beyond de Lavier, on assiste ici à une assimilation
progressive de la peinture et de la photographie, peutêtre
à une cannibalisation de celle-ci par celle-là, ce thème de
l’anthropophagie étant souligné par l’allusion du titre à l’œuvre
de Freud intitulée Totem et tabou, où le fondateur de la psychanalyse
nous explique l’origine de l’humanité par le meurtre du père,
assassiné par ses fils jaloux qui dévorèrent ensuite son corps. Dans les
TotemtaboO, où se lit l’amalgame de deux mots anglais, la dévoration
est à double sens : on ne sait trop si c’est la peinture qui finit
par se diluer dans la photographie ou si, pour reprendre une distinction
de Jean-Marie Schaeffer , ce sont les signes d’existence de la
photographie qui disparaissent derrière le signe d’essence élémentaire
tracé avec les pigments par le peintre. Que le titre soit anglais
insiste, par ailleurs, sur la collaboration entre la photographe et le
peintre, et l’on pourrait aisément penser que l’affrontement, le duel,
le recouvrement puis la fusion, la verticalité première de la peinture
analytique et son effritement progressif au sein du fourmillement végétal
de la photographie ont la dimension flagrante d’un combat
amoureux habilement transposé dans l’espace de l’œuvre.
J’ai parlé de recouvrements, de couches de peinture qui viennent
se superposer et masquer leur support photographique. Il faudrait,
aussi bien, parler ici d’inversion. Car loin de s’élever vers un
ciel presque toujours absent des images photographiques, en un
mouvement ascensionnel qui rappellerait l’esthétique du Baroque,
ses torsades et ses jaillissements, sa dynamique et ses plis, les bandes
peintes par Klemensiewicz descendent inexorablement vers
leur assise friable et décomposée dans le paysage, en excluant
ainsi toute référence à l’architecture. Cette inversion haut / bas ne
nous ramène pourtant pas à la peinture classique ni à celle de la
Renaissance. Un exemple suffira à le prouver : lorsqu’en 1425 Masaccio
peint Adam et Ève chassés du paradis, il figure un homme
et une femme solidement campés sur leurs deux pieds, rivés à la
terre, créant ainsi l’image première d’une peinture enracinée dans
ce monde par le dogme de l’Incarnation. Rien de tel dans la série
des TotemtaboO ni dans aucune autre de Klemensiewicz : partout
ou presque, les sols s’absentent, parfois escamotés de manière révélatrice
par une mince bande de damier coloré ou par le discret
rappel d’une espèce de charte de couleurs, parallèle au plan du
tableau, suggérant ainsi que le sol de la peinture, ce par quoi elle
« tient », c’est à la fois la couleur et la géométrie. Mieux, lorsque la
resulting work is composed of three parts : on the left, a rectangle of
pure photographic landscape ; in the middle, an entirely and scrupulously
repainted photography ; on the right, an al fresco painting,
beyond the frame of the original photography. Does this mean that,
for Lavier, photography and painting are identical ? Of course not :
in the close to invisible, but very real, difference, in this infrathin hiatus
between the two mediums, is the demonstration, which we can find
subtle or a little stiff.
Far from illustrating this kind of Duchampian in-difference, the « painted
landscapes » of Piotr Klemensiewicz are on the contrary the
place of a confrontation, of a fighting or an amorous duel, clearly
announced as such : in a complex surrounding of branches and
foliage – dense underwood, burnt forest, dry riverbed, interlacing of
zigzaging lines and of spots of light –, the scraped strips of acrylic
paint hide vertically, from top to bottom, the whole central part
of the photographic image. How does the artist do that ? First he
composes his palette with a colour evaluation of the photographic
image ; then, in the upper part of the latter he puts down a line of
several masses, or « heaps » of paint, which result from this empirical
evaluation ; and at last, he scrapes toward the bottom these heaps
of pigments with a big ruler made of wood and plexiglass. The same
operation is repeated a certain number of times, each new scraped
strip overlapping and almost entirely dissimulating the previous one.
That is why the pictural matter seems to be more dense in the upper
part of the picture, and why the totem of the painting, far from being
sturdily anchored in the landscape, seems more and more ethereal,
fragmented, melt into the foliage or into the earth, as the eye goes
down the resulting image. Contrary to the clear caesuras of the
Landscape Painting and Beyond by Lavier, there is here a progressive
assimilation of painting and photography, maybe a cannibalism
of the latter by the former, this theme of anthropophagy being
underlined by the allusion of the title to the work of Freud, Totem and
Taboo, in which the founder of psychoanalysis explains the origin of
mankind by the murder of the father, killed by his jealous sons who
then devoured his corpse. In the TotemtaboO series, where we can
read the blend of two English words, the devouring has a double
meaning : we don’t know if it is the paint which gets diluted in the
photography, or, to quote a distinction made by Jean-Marie Schaeffer
, if it is the signs of existence of photography which disappear
behind the elementary sign of essence drawn by the painter with
his pigments. By the way, the English nature of the title insists on the
collaboration between the photographer and the painter, and one
could easily think that the confrontation, the duel, the overlapping
and then the melting, the initial verticality of the analytical painting
and its progressive fragmentation in the vegetal swarming of the
photography have the evident dimension of a love fight skillfully
transposed in the space of the work.
I have spoken of overlappings, of layers of paint which superpose
and mask their photographic support. Of course, I should as well
talk about inversions. For, far from rising toward a heaven which is
nearly always absent in the photographic images, in an upward
movement which would remind us of the esthetics of the Baroque,
its coils and its gushes, its dynamics and its folds, the strips painted
by Klemensiewicz inexorably go down to their brittle and split up
foundation in the landscape, so excluding all references to architecture.
This inversion high / low doesn’t however take us back to
the classical painting or to the Renaissance. One example will be
enough to prove it : in 1425, when Masaccio paints Adam and Eve
Expelled from Paradise, he represents a man an a woman solidly
planted on their feet, stuck to the earth, so creating the first image
of a painting firmly rooted in this world by the dogma of Incarnation.
There is no such thing in the TotemtaboO series, nor in any other one
created by Klemensiewicz : nearly everywhere, the ground is absent,
sometimes hidden revealingly by a thin stripe of coloured squares or
by the discreet reminder of a colour chart, parallel to the painting
plan, thus suggesting that the ground of the painting, that by which
it « stands » is at the same time the colour and the geometry. Better,
when the photography shows a ground, for instance in the burnt
forests of TotemtaboO n°11 or n°12, the intervention of the painter
is very spectacular : far from yielding to the temptation of planting
his totem into the earth, of anchoring it like a stone fetish, he obliges
his colours to dissolve into an illusory space which could be situa-
« Neuf maisons » // 2004 // acrylique sur toile 195x195 cm

« Neuf maisons (II) » // 2004 // acrylique sur toile 195x195 cm
photographie montre un sol, par exemple dans les forêts calcinées
des TotemtaboO n°11 ou n°12, l’intervention du peintre n’en est que
plus spectaculaire : loin de céder à la tentation de ficher son totem
en terre, de l’y ancrer comme un fétiche de pierre, il contraint ses
couleurs à d’évanouir dans un espace illusionniste qu’on pourrait
situer au-dessus du sol, faisant ainsi flotter cet objet pictural élémentaire,
ce « signe d’essence », dans un espace qui interdit toute interprétation
sculpturale ou réaliste des bandes raclées… La peinture
de Klemensiewicz échappe au sol, elle fuit le socle, pour travailler
les dimensions fondamentales du recouvrement, de l’inversion, du
renversement.
Et puis tous les éléments de son vocabulaire pictural – échelles,
réservoirs, maisons, encriers, arrosoirs, fragments de remparts, damiers
de marelle, mappemondes, etc. – loin de s’appuyer sur un
quelconque sol, un plancher ou un plan horizontal, sont situés
dans un espace où ne règne aucune gravité, l’espace essentiel
d’un « fond » sur lequel je reviendrai.
Exaltation de la couleur, prépondérance de la géométrie : on voit,
et ce depuis le début de son travail de peintre, que Piotr Klemensiewicz
a bien regardé à la fois Paul Klee et Vassili Kandinsky, à qui il
emprunte parfois quelques éléments picturaux, mais surtout l’idée
fondatrice du paysage abstrait, cette conviction que le tableau est
définitivement lié à l’évocation d’un espace mental transposé sur
la toile.
Mais puisqu’il a déjà été question d’Adam et Ève, il est temps de
remonter aux origines, même mythiques, comme Freud le fit pour
l’humanité dans son essai Totem et tabou, ou encore Courbet pour
le monde dans son célèbre tableau dévêtu. C’est donc d’une scène
primitive qu’il s’agit : alors qu’il emménageait dans un nouvel
atelier à Marseille, Piotr Klemensiewicz a trouvé dans la rue une diapositive
d’un tableau de Lucas Cranach représentant Adam et Ève,
leurs mains jointes autour de la pomme, et eux, séparés par l’arbre
de la connaissance. L’artiste ajoute : « J’ai reproduit leur silhouette
sur une toile assez grande et j’ai recouvert la partie supérieure
(épaules et visages) par un grand nuage-mensonge. J’ai titré : Le
Mensonge originel. (…) Dans les petits formats, l’image des corps et
de l’arbre a été remplacée par les bandes raclées de couleur. »
Certes, le corps humain n’est nulle part visible sur les tableaux de
Klemensiewicz. Mais il est aussi partout suggéré, avec une insistance
qui peut seulement surprendre : les chaises sont vides, mais n’ontelles
pas été occupées l’instant d’avant ? Les échelles sont désertées,
les maisons aussi, les arrosoirs semblent attendre, les marelles
s’ennuient, et ainsi de suite. Le spectateur se trouve ainsi renvoyé à
la matérialité physique de son propre corps placé debout devant
le tableau, en une posture qui répète la situation antérieure de l’artiste
face à sa toile, dans l’atelier. Aucun corps ni fragment de corps
n’est visible, même si les allusions et les traces de gestes fourmillent
dans les choses peintes et dans les fonds ; mais c’est en quelque
sorte le corps du spectateur qui se trouve ainsi désigné et, comme
en un miroir temporel, celui du peintre.
La première série des bandes de couleurs raclées, qui se détachent
sur un fond préalablement peint, renvoie donc au tableau de
Cranach figurant Adam et Ève à l’instant décisif du péché originel.
Tous les éléments « réalistes », reconnaissables, du tableau lui aussi
originel ont été remplacés, ou plutôt recouverts, effacés, camouflés,
par les bandes raclées. Le titre de cette première série ? EvetemadA,
c’est-à-dire en inversant l’ordre des lettres Adam et Ève. Le spectateur
attentif remarquera par ailleurs la présence fréquente de deux
ou trois bandes raclées nettement plus sombres que les autres dans
les séries EvetemadA ou TotemtaboO : j’y vois volontiers un reste
abstrait, allusif et stylisé, des deux corps verticaux et de l’arbre peints
par Lucas Cranach. Qu’un corps ou un arbre se voient ainsi transformés
en une simple bande noire verticale, cela évoque les photographies
bouleversantes, prises après l’explosion de la bombe
atomique d’Hiroshima, où l’on discerne l’ombre d’un corps brûlé
par la chaleur, projetée sur le mur d’une rue, ou encore, image tout
aussi marquante pour Klemensiewicz, l’ombre fidèle d’une échelle
désormais disparue, elle aussi volatilisée.
Mais qu’est-ce qu’un nuage-mensonge ? Pour l’expliquer,
Klemensiewicz aime citer Philostrate, le penseur grec : dans un de
ses textes, « le philosophe décrit la forme des nuages en mouve-
ted above ground, so letting this elemental pictural object float, this
enigmatic « sign of essence » in a space which forbids any sculptural
or realistic interpretation of the scraped strips… Klemensiewicz’s
painting escapes the ground, it flees the socle, to work within the
fundamental dimensions of overlapping, inversion and reversal.
And all the elements of his pictural vocabulary – ladders, reservoirs,
houses, inkpots, watering cans, fragments of ramparts, hopscotches,
maps of the world, and so on – never lie on any ground, any
floor or horizontal plan, but are situated in a space where no gravity
rules, the essential space of a « background » about which I’ll talk
soon.
Exaltation of colour, supremacy of geometry : we see, from the beginning
of his work as a painter, that Piotr Klemensiewicz has well looked
at both Paul Klee and Vassili Kandinsky, to whom he sometimes
borrows some pictural elements, but mostly the founding idea of
the abstract landscape, this conviction that the painting is definitely
linked to the evocation of a mental space transposed on canvas.
And since I have already spoken about Adam and Eve, the time
has come to go back to the origins, even mythical, as Freud did
for mankind in his essay Totem and Taboo, or Courbet for the
world in his famous nude painting. So, it will be a kind of primitive
scene : while he was moving into a new studio in Marseilles, Piotr
Klemensiewicz found in the street a slide of a painting by Lucas
Cranach figuring Adam and Eve, joining hands around the apple,
and separated by the Tree of Knowledge. The artist adds : « I have
reproduced their outline on a rather large canvas and I have covered
the upper part (shoulders and faces) with a big cloud-lie. I
have untitled Le Mensonge originel (« The Original Lie »). (…) In the
small formats, the images of the bodies and of the tree have been
replaced by the scraped strips of colour. »
Of course, the human body is nowhere visible on the paintings by
Klemensiewicz. But it is also suggested everywhere, with an insistence
which can only surprise : the chairs are empty, but weren’t they
occupied the moment before ? The ladders are deserted, as the
houses, the watering cans seem to wait, the hopscotches get bored,
and so forth. The spectator must then consider the materiality
of his own body, standing in front of the painting, thus repeating the
prior situation of the artist in front of his canvas in the studio. No body
or fragment of a body is visible, even if the allusions and the traces
of gestures abound in the painted things and in the backgrounds ;
but it is in a way the body of the spectator which is thus pointed at
and, as in a temporal mirror, the body of the painter.
The first series of scraped strips, which show over a painted background,
refers to the painting by Cranach where we see Adam
and Eve at the critical moment of the original sin. All the « realistic
» elements, which we could recognize, of this famous painting
have been replaced, or rather, covered, erased, camouflaged, by
the scraped strips. The title of this first series ? EvetemadA, that is to
say, when we inverse the order of the letters, Adam et Ève. The attentive
spectator will notice the frequent presence of two or three
vertical scraped strips much darker than the other ones in the series
EvetemadA or TotemtaboO : I like to see in them an abstract, allusive
and stylized remnant of the two vertical bodies and of the tree
painted by Lucas Cranach. That a body or a tree could thus be
transformed into a simple vertical strip, that evokes the very upsetting
photographs, taken after the explosion of the atomic bomb at
Hiroshima, where we see the shadow of a human body burnt by the
heat, projected on a street wall, or, an image also very troubling for
Klemensiewicz, the faithfull shadow of an absent ladder, burnt too.
But what is a cloud-lie ? To explain it, Klemensiewicz likes to quote
Philostratus, the Greek thinker : in one of his texts, « the philosopher
describes the shape of the moving clouds and all the numerous
representations he thinks he sees in them. Most of the time, he used
to glimpse animals and to meditate on this phenomenon with the
help of philosophical commentaries or reflections about the divinities
of heaven. A whole bestiary, as rich and colourful as his mind.
Philostratus glimpes a horse, he runs and calls someone to tell him
about his vision. The horse disappears and the philosopher is taken
as a lier. »
The clouds painted by Klemensiewicz, far from figuring animals, are
neatly cut spaces, without any sfumato, with a geometrical border,

« Grand Tas » // 2003 // acrylique sur toile 140x140 cm
« Grand Tas » // 2003 // acrylique sur toile 140x140 cm

« Hams-Ladder » // 2004 // acrylique sur toile 195x130 cm
ment et toutes les nombreuses représentations qu’il croit y voir. La
plupart du temps, il discernait des animaux et méditait sur ce phénomène
en y projetant des commentaires philosophiques ou des
réflexions sur des divinités célestes. Tout un bestiaire aussi riche et
imagé que pouvait être son esprit. Philostrate aperçoit un cheval, il
court et appelle quelqu’un pour le prévenir de cette vision. Le cheval
disparaît et le philosophe est traité de menteur. »
Les nuages peints par Klemensiewicz, loin de figurer des animaux,
sont des espaces nettement découpés, sans le moindre sfumato,
à la lisière géométrique parfois cernée de noir, qui évoquent la
pièce isolée d’un puzzle compliqué, la silhouette double, parfois
bicéphale, d’une créature monstrueuse, une carte de géographie,
une trouée dans le fond du tableau ou, à l’inverse, une forme qui
se détache par devant. Après tout, mensonge n’est pas si éloigné
de mon songe…
Les épaules et le visage d’Adam et Ève deviennent le mensonge
originel ; leurs corps et l’arbre se métamorphosent en bandes verticales
sombres de peinture raclée. La peinture serait alors un art
de la transposition ou du camouflage, une superposition de glacis,
une stratégie de l’effacement et de la disparition, tout un savant palimpseste
suggéré par exemple dans la série des Encombrements
et, aussi bien, dans celle des TotemtaboO.
Le monde vient dans l’atelier sous d’autres formes encore. Par exemple,
première rencontre avec la photographie, ces planchettes trouvées
en 1995 dans un ancien atelier, qui avait précédemment été
une agence de voyage. Sur ces supports en bois étaient marouflées
de vieilles photographies touristiques, paquebots ou paysages
exotiques. L’une de ces images montrait un paysage photographique
des îles Canaries en noir et blanc – la campagne au premier
plan, puis la ville, puis la mer, enfin le ciel, soit l’archétype même de
ce que peut être le paysage. Le peintre, ravi de ce heureux hasard
qui lui livre à domicile des « images du monde » et assimile ainsi son
atelier à une « agence de voyages imaginaires », le peintre donc a
basculé la photo de quatre-vingt-dix degrés, transformant ainsi les
éléments du paysage en bandes verticales, puis peint en haut et
au centre un disque uniformément bleu qui oblitère partiellement
l’image. D’autres supports photographiques de même provenance
sont presque entièrement repeints, Klemensiewicz se contentant de
laisser une mince bande de photo visible, comme une trace repérable
du support initial. Ce sont là des interventions élémentaires, mais
qui me semblent à la fois définir l’atelier de l’artiste dans son rapport
au monde, faire confiance aux suggestions du hasard et inaugurer
un rapport très spécifique de la peinture à la photographie.
Autre appropriation concrète du monde, les planches maculées,
ces « tables de peinture » que Klemensiewicz récupère chez des
amis peintres. En un geste qui est à la fois celui de l’amitié, de l’hommage
et le résultat du hasard, l’artiste fait entrer dans son atelier et
intègre à son travail un objet issu du monde extérieur qui a ceci de
particulier qu’il provient d’un autre atelier de peintre : d’un atelier
à l’autre, c’est la circularité de la peinture, et son obsession, qui se
lisent dans ce tour ou cette figure de l’emprunt. Ainsi qu’une prédilection
pour le reste, le rebut, les entours du tableau et de l’atelier
: comme la diapositive du tableau de Cranach trouvée dans la
rue devant le nouvel atelier, la table de peinture est un déchet, le
rebut du tableau, son préalable et son reste dépourvu de valeur et
de sens, in-signifiant. Dans les deux cas, Klemensiewicz relève ces
objets trouvés pour leur accorder la verticalité et la dignité du mur.
Ces tables maculées de peinture, couvertes de taches résultant du
hasard, sont aussi des cartes géographiques, les traces de visites
amicales, peut-être des « cartes de visite », des souvenirs de voyages
au pays de la peinture.
Nouveau rebut, photographique celui-ci, approprié par l’artiste :
les papiers noirs qui enveloppent les tests de polaroïd, laissés par
le photographe attitré du peintre lorsqu’il vient dans l’atelier de ce
dernier pour une séance de prises de vues des tableaux. Nouvelle
« carte de visite » offerte par le monde extérieur, nouvel élément du
paysage du monde, celui-ci livré directement au peintre, sans coup
férir, sans même qu’il ait eu besoin de se déplacer au-dehors. C’est
la photographie qui rend visite à la peinture, et la peinture qui ramasse
– encore une fois – le reste inutile de l’autre : d’ordinaire, ces
papiers noirs vont directement à la poubelle, comme on jette une
sometimes underlined in black, and they evoke the isolated piece
of a complicated jigsaw puzzle, the double silhouette – sometimes
with two heads – of a monstruous creature, a geographical map,
a hole in the background of the picture or, on the contrary, a form
emerging in front of the painting. After all, in French mensonge (lie)
is not far from mon songe (my dream)…
The shoulders and the faces of Adam and Eve become the original
lie ; their bodies and the tree transform themselves into dark vertical
strips of scraped paint. Thus, painting would be an art of transposition
or camouflage, a superposition of glazes, a strategy of erasing
and disappearance, all of a complex palimpsest which we could
see in the series of the Encombrements (Congestions) and, as well,
in the series of TotemtaboO.
The world comes into the studio in yet other forms. For instance, the
first meeting with photography, these small wooden planks found
by the artist in 1995 in an old studio, which had previously been a
travel agency. On these supports were glued old tourist photographs,
liners or exotic landscapes. On one of these images, you could
see a photographic landscape of the Canary Islands in black and
white – the country in the foreground, then the city, then the sea, at
last the sky, that is to say all the possible elements of the archetypal
landscape. The painter, very glad of this unpredictable chance that
brings to him these « images of the world » and thus metamorphoses
his studio into an « imaginary travel agency », the painter has
rotated the picture ninety degrees, thus transforming the stratums
of the landscape into vertical strips, then painted in the upper part
and mid-center a uniformly blue disk which partly masks the image.
Other photographic supports coming from the same place and of
the same nature are painted nearly all over, Klemensiewicz letting
only a small stripe of photography visible, like a trace of the original
support. These are elementary interventions, but to me they seem at
the same time to define the artist’s studio within his relations with the
world, to welcome the suggestions of chance, and to inaugurate a
very specific relationship between painting and photography.
Another material appropriation of the world are the stained boards,
these « tables of painting » that Klemensiewicz salvages from painter
friends. With a gesture which is at the same time one of friendship, of
tribute and the result of chance, the artist brings back into his studio
and into his work an object from the outside world which has this
particularity that it comes from the studio of another painter : from
one studio to another, it is the circularity of painting, and its obsession,
that we can read in this practice or this figure of borrowing. As
well as a predilection for the rest, the refuse, the wherabouts of the
painting and of the studio : like the slide of the Cranach painting
found in the street in front of the new studio, the table of painting is
a residue, the rest of the painting, its preliminary and its aftermath,
without any value or meaning. In both cases, Klemensiewicz picks
up these found objects and makes them stand to give them the
verticality and the dignity of the wall. These paint-stained tables, covered
with the traces of chance, are also geographical maps, the
reminders of friendly visits, maybe « visiting cards », souvenirs from
voyages in the country of painting.
New refuse, this time photographic, appropriated by the artist : the
black papers which envelop the Polaroid tests, left behind him by
the appointed photographer of the artist, when he comes into the
studio to make pictures of the paintings. New « visiting card » offered
by the outside world, new element of the landscape of the world,
this time directly delivered to the painter, without any effort on his
part, without his moving outside. It is photography which visits painting,
and painting which picks up – once again – the useless rest of
the other : usually, these black papers go directly to the bin, as one
discards a slide one doesn’t need anymore, as one destroys a table
of painting when the work is finished…
This black support of small size, always identical, where you can recognize
the shape of a house lying on its side, Klemensiewicz paints
on it : « I paint objects, abstract and geometrical forms, I make collages
with old Ektachromes or photos of my works, and sometimes I
write words. In the spirit of miniatures or cooking recipes. Often, while
I paint on them, I have the feeling that the motif is already inscribed
on it. However, there are no relationships between all these motifs,
nor any particular progression. » The Polaroid envelopes so painted

diapositive dont on n’a plus besoin, comme on détruit une table de
peinture quand le tableau est achevé…
Ce support noir, de petite taille, toujours identique, où l’on peut distinguer
la silhouette d’une maison couchée, Klemensiewicz peint
dessus : « Je peins des objets, des formes abstraites, géométriques,
je réalise des collages avec d’anciens ektachromes ou des photographies
de travaux, j’écris quelquefois des mots. Cela dans l’esprit
de la miniature et de la fiche de cuisine. J’ai souvent en les peignant
la sensation que le motif y est déjà inscrit. Cependant, il n’y a pas de
relations voulues entre tous ces motifs, ni de progression particulière. »
Les enveloppes polaroïd ainsi peintes sont ensuite assemblées par
groupes de trois, neuf ou douze, comme une succession d’images,
une sorte de rébus visuel au sens scellé, où je verrais volontiers un
morceau de planche-contact juxtaposant les instantanés d’un
monde qui parlerait du nôtre sans être vraiment le nôtre.
Une œuvre du peintre Francis Picabia, dont on sait l’intérêt qu’il
a toujours manifesté pour la photographie, éclairera le rapport
durable, complexe et varié qui existe chez Klemensiewicz entre peinture
et photographie. Il s’agit d’une « toile » datée de 1921, intitulée
La Veuve joyeuse, « huile, photographie et papier collés sur toile ».
Cette « toile » donc, sur laquelle sont collés un papier et une photographie,
inverse, en son principe matériel, le mode de réalisation
des TotemtaboO de Klemensiewicz, où c’est la peinture qui vient
recouvrir la photo. Ici, dans l’œuvre de Picabia, c’est la photo qui
recouvre, partiellement, la toile. Que voit-on ? Au centre de l’œuvre,
deux images placées l’une au-dessus de l’autre. Celle du haut
est un portrait photographique de Picabia au volant de sa voiture,
réalisé par son ami Man Ray. En légende, un papier collé où on lit :
« Photographie ». En dessous, un dessin fort maladroit où Picabia a
essayé de rendre par ce médium le portrait photographique. En
légende, un seul mot : « Dessin ». Au-dessus de l’ensemble, en haut
de la « toile », le titre de l’œuvre : « La Veuve joyeuse ». Qui est donc
cette veuve joyeuse ? La maladresse volontaire du dessin prouve
l’incapacité de celui-ci à atteindre la précision de la photographie.
À cette dernière incombe désormais la mission consistant à représenter
le réel. Dès lors, la peinture, enfin affranchie de ce labeur par
le décès de son époux, peut pour son plus grand bonheur explorer
son propre territoire. Cette œuvre en forme de manifeste, d’une
clairvoyance imparable, presque prémonitoire, fut néanmoins refusée
au Salon des Indépendants…
Si Madame la Peinture est enfin libérée de ses obligations maritales
envers son époux Monsieur le Réel grâce à l’intervention létale
de la photographie, la veuve joyeuse a désormais toute latitude
pour arpenter des paysages et des représentations qui ne sont plus
ceux du réel. Dans le cas de Piotr Klemensiewicz – et de ce point de
vue, les peintures réalisées sur enveloppes de polaroïd sont exemplaires
–, les motifs de la peinture sont soit abstraits, diagrammes,
damiers, cercles, découpes géométriques, etc., soit «reconnaissables»
comme sont reconnaissables des pictogrammes, des blasons
ou des emblèmes : la chaise, l’échelle, la main, le réservoir, l’arrosoir,
le mur, le nuage, la carte, le tas. Ces motifs sont à vocation universelle,
ils sont identifiables en n’importe quel lieu de la planète, indépendamment
de l’origine, de la culture ou de la classe sociale du
spectateur. Il s’agit là d’une autre constante du travail de peintre de
Klemensiewicz, qui tient beaucoup à cet universalisme des motifs.
À l’évidence, le travail avec les enveloppes de polaroïd nous dit que
la surface sensible du polaroïd a enregistré le réel (même si, dans
le cas présent, ce réel est le tableau photographié dans l’atelier
!), et que le reste, l’enveloppe du support photographique, est ensuite
devenu support de peinture. Une fois débarrassé du monde
réel, pris en charge par les émules innombrables de Niepce et
Daguerre, le peintre dispose ses motifs sur fond noir : il n’écrit pas avec la
lumière, mais au contraire il fait surgir de la nuit quelques formes
qu’on dirait archétypales. Ici, dans la série des polaroïds peints,
comme ailleurs, ce sont les images d’une pensée, que nous découvrons
; malgré leur taille relativement modeste, ces apparitions sur
fond noir évoquent bien sûr un ciel nocturne où évolueraient quelques
objets en apesanteur, un ciel où se découpe parfois un aplat
de couleur qui fait vaciller le regard : cet objet existe-t-il sur fond
de ciel noir ou s’agit-il d’une trouée dans la matière du ciel ? C’est
donc le statut même de ces images ou de ces formes qui est posé
comme une question insistante, inlassablement répétée : qu’est-ce
are then assembled in groups of three, nine or twelve, like a succession
of images, a kind of visual rebus, where I’d like to see a piece
of contact print, putting together the snapshots of a world which
would talk about ours without being really ours.
A work by the French painter Francis Picabia, who – as we know
– has always been interested by photography, will allow us to understand
the long-lasting, complex and diverse relation which exists
in Klemensiewicz’ work between photography and painting. It is a
« canvas », dated 1921, and untitled La Veuve joyeuse (The Merry
Widow), « oil, photography and paper glued on canvas ». This « canvas
», on which are glued a paper and a photography, inverses, in
its materiality, the making of Klemensiewicz’ TotemtaboO, where it is
the paint which partially covers the photo. Here, in Picabia’s work, it
is the photo which partially covers the canvas. What do we see ? In
the middle of the piece, two images, one above the other. The top
one is a photographic portrait of Picabia driving his car, created
by his friend Man Ray. The caption, a paper glued on the canvas,
reads : « Photographie ». Below, a badly executed drawing, where
Picabia tried to copy with this medium the photographic portrait.
The caption only reads : « Dessin » (Drawing). Above the two images,
in the upper part of the « canvas », the title of the work : « La Veuve
joyeuse ». So, who is this merry widow ? The deliberate awkwardness
of the drawing shows its incapacity to manifest the precision of photography.
The latter must now represent the real. Then, painting, at
last freed from this toil by the death of her husband, can for her
greatest pleasure explore its own territory. This work in the form of
a manifest, a statement of an incredible clear-mindedness, almost
premonitory, was nonetheless refused at the Salon des Indépendants…
If Mrs Painting is at last released from her obligations towards her
husband Mr Real, due to the murderous intervention of photography,
the merry widow has now all latitude to explore landscapes
and representations which are no more those of the real. In the case
of Piotr Klemensiewicz – and from this point of view the paintings
created on the Polaroid envelopes are exemplary –, the motifs of the
painting are either abstract, diagrams, hopscotches, circles, geometrical
cuts, etc, or « recognizable » as pictograms, coats of arms,
or emblems : the chair, the ladder, the hand, the reservoir, the watering
can, the wall, the cloud, the map, the heap. These motifs are
universal, they can be identified in any place of the globe, notwithstanding
the origin, the culture or the social class of the spectator.
Here we have another constant of the work of Klemensiewicz, who
absolutely wants his motifs to be universal.
Evidently, the work with the Polaroid envelopes tells us that the sensitive
surface of the Polaroid has registered the real (even if, in the
present case, this real is the painting photographed in the studio !),
and that the rest, the envelope of the photographic support, has
then become a support for painting. Once he’s got rid of the real
world, taken in charge by the numerous imitators of Niepce and
Daguerre, the painter puts his motifs on a black background : he
doesn’t write with the light, but on the contrary he takes some archetypal
forms out of the night. Here, in the series of the painted Polaroids,
as elsewhere, we discover images of thought ; despite their
relatively modest size, these appearences on a black background
suggest of course a night sky where some objects would move without
any gravity, a sky where a flat coloured cut-out makes our eye
hesitate : does this object exist on the background of a black sky, or
is it a hole in the matter of the sky ? Thus, it is the status itself of these
images or of these forms which is searched as an insistant question,
repeated over and over : what is an image ? must the image be
immediately clear ? what portion of the world does it refer to ? what
relationship does it have with its background, its context, and all the
other images of the world ?
In these series of mental landscapes – by mental I mean that Magritte’s
painting, for example, is a mental painting –, I’d like to investigate
now the ones untitled Tas (« Heap ») (2000-03). Out of very different
backgrounds from one painting to another, but where the colours
blue or purple are the more frequent, we see in the bottom part
emerge a kind of « heap » more or less geometrical, while the upper
part of the canvas is occupied by a cloud-lie which has different
contours and thickness. The heap, or the big heap, is of course and
before anything else a « heap of paint », which looks like it has been
« Neuf maisons » // 2003 // acrylique sur toile 195x195 cm

« Encombrement gris » // 2004 // acrylique sur toile 248x142 cm
qu’une image ? faut-il qu’elle soit aussitôt lisible ? quelle portion du
monde désigne-t-elle ? quels rapports entretient-elle avec son fond,
son contexte, et les autres images ?
Dans ces séries de paysages mentaux – au sens où la peinture de
Magritte, par exemple, est une peinture mentale – j’aimerais maintenant
m’attacher à celle intitulée les « Tas » (2000-03). Sur des fonds
très variables d’un tableau à l’autre, mais où domine le bleu ou le
violet, on voit se dresser dans la moitié inférieure la masse informe
d’une sorte de « tas » plus ou moins géométrique, tandis que la
moitié supérieure de la toile est occupée par un nuage-mensonge,
aux contours, à l’étirement, à la texture variables. Le tas, ou le grand
tas, c’est bien sûr et avant tout un « tas de peinture », qu’on dirait
peint à la manière d’un Philip Guston, avec un mépris hautain pour
la « belle peinture » et le style « léché ». C’est, si l’on veut, la présence
manifeste, concrète, brute et brutale, de la matérialité de la peinture.
C’est ce tas qui encombrait les tables de peinture récupérées
par Klemensiewicz, ce tas originel à partir duquel le peintre va créer
ses lignes ou ses surfaces sur la toile ; et puis on ne peut s’empêcher
de penser à ces autres tas de peinture alignés en haut des
TotemtaboO avant que l’artiste ne prenne sa règle et n’en fasse
des bandes raclées, arasant ainsi les reliefs, étalant la matière picturale
en longs rectangles approximatifs. Mais dans la série dite des
« Tas », c’est aussi, et en même temps, une sorte de montagne sur
fond de ciel, une montagne sans cesse reprise, dans ses variations,
et le paysage de la Sainte-Victoire peint par Cézanne se profile
assez vite à l’horizon imaginaire du tableau, d’autant plus que Piotr
Klemensiewicz a passé plusieurs années entre ce haut lieu de la peinture
moderne et les cheminées verticales des usines de Gardanne.
Au-dessus du pesant tas de peinture flotte un nuage cerné de
noir, qui est peut-être la vue en coupe d’un objet indéfini ou bien,
je l’ai dit, une carte, un monstre. À ces possibilités, j’ajouterai une
autre interprétation, suggérée par la série antérieure intitulée
« Planévations », dont le titre inclut un plan et une élévation d’architecture
: ce qui dans la série des « tas » apparaît comme un
nuage pourrait être le plan au sol du tas inférieur, une hypothèse
renforcée par le fait que la largeur du « nuage » supérieur est toujours
à peu près identique à celle du tas inférieur. Comme pour les
« Planévations », on aurait donc deux vues du même objet et le
tableau proposerait dans son espace propre et suturé deux représentations
selon des plans perpendiculaires : en bas le tas comme
paysage, en haut le tas comme plan.
Néanmoins, cette forme cernée de noir est avant tout un nuagemensonge¸
c’est-à-dire une idée, ou plutôt l’image d’une idée : le
nuage est un animal pour Philostrate, mais il est redevenu un simple
nuage pour le badaud convoqué par le philosophe ; pour nous il
contient le fantôme d’Adam et celui de Eve ; pour le peintre il est
l’image de « mon songe », l’image de « mon idée » et, in fine, l’image
picturale exemplaire de l’idée, l’image incarnée de la peinture
comme idée, cosa mentale selon Léonard de Vinci. Alors, le sens
ultime du tableau est à chercher du côté de la confrontation violente
entre ces deux éléments incompatibles et pourtant réunis ici : en
bas, la matière informe, excrémentielle, de la peinture brute ; en
haut, l’entité aérienne, tantôt une trouée, une percée, tantôt un
objet vaporeux, idéel, placé devant le fond d’un ciel parfois strié de
coulures qui masquent un autre fond, lui-même incluant peut-être des
images recouvertes… La profondeur est à la fois métaphysique
– et l’on peut considérer tout l’œuvre peint de Piotr Klemensiewicz
comme le déploiement de tels conflits sur une scène théâtrale
proprement métaphysique – et très physique, matérielle, car elle
s’inscrit dans le processus pictural d’effacements successifs, de
disparitions programmées, où le fond, captant soudain l’attention
plus que le motif, laisse entrevoir un double, voire un triple fond qui
entraîne le regard vers une ou plusieurs dimensions cachées du
tableau. À cet égard, l’artiste m’a confié s’être longtemps intéressé
aux Annonciations de la Renaissance, et surtout à leur partie centrale,
située entre l’ange Gabriel et la vierge Marie, cet espace intermédiaire
désinvesti du rapport entre le messager divin et la mortelle
élue, ce lieu du fond par excellence, ce no man’s land insidieusement
investi par la pure peinture pour y manifester en douce et en
toute clandestinité sa magnificence et son règne.
Les Encombrements jouent d’inversions et de recouvrements
similaires. Les motifs, abstraits ou reconnaissables, en général frag-
painted in the manner of Philip Guston, with a haughty despise of
the « beautiful painting » and of the great style. It is, in a way, the manifest
presence, the brutal evidence of the materiality of painting. It
is this heap which congested the tables of painting salvaged by Klemensiewicz,
this original heap on the palette from which the painter
is going to create his lines or his surfaces on the canvas ; and one
cannot stop thinking of these other heaps of paint which form a line
on the upper part of the TotemtaboO before the artist takes his ruler
and transforms them into scraped strips, levelling the reliefs, spreading
the pictural matter into long approximative rectangles. Even
in the series called the « Heaps », it is also and at the same time, a
kind of mountain on a background of sky, repeated over and over
with different variations, and the landscape of the Montagne Sainte-Victoire
painted by Cézanne comes quickly to the mind, all the
more so when you learn that Piotr Klemensiewicz has spent several
years between this landmark of modern painting and the vertical
chimneys of the Gardanne factories. Over this heavy heap of paint
hovers a black-lined cloud, which could be the cross section of an
indefinite object or, as I have said, a map, a monster. To these possibilities,
I’d like to add another interpretation, suggested by a prior
series untitled « Planévations », a title which alludes to a plan and an
architectural elevation : that which in the « Heap » series appears as
a cloud could be the blueprint of the inferior heap, this hypothesis
being reinforced by the fact that the width of the upper « cloud » is
always approximately the same as that of the bottom heap. As for
the « Planévations », we would then have two views of the same object
and the painting would propose in its own reconciliated space
two representations of perpendicular plans : in the bottom the heap
as landscape, in the upper part the heap as plan.
However, this black-lined form is before all a cloud-lie, that is to say
an idea, or rather, the image of an idea : the cloud is an animal for
Philostratus, but it has become again a simple cloud for the ordinary
man summoned by the philosopher ; and for us, it welcomes
the ghosts of Adam and of Eve ; for the painter, it is the image of «
mon songe » (my dream), the image of « my idea » and, in fine, the
pictural image of the Idea, the incarnate image of painting as Idea,
cosa mentale according to Leonardo da Vinci. Then the ultimate
meaning of the painting must be sought in the violent confrontation
between these two incompatible but here reunited elements :
in the bottom, the informal matter, the excrement of brute paint ; in
the upper part, the airy entity, now a hole, a breakthrough, then a
vaporous object, an ideal, placed in front of a sky sometimes streaked
with drippings that dissimulate another background, which itself
contains maybe other overlapped images… The deepness is at the
same time metaphysical - and all the painted work of Klemensiewicz
can be viewed as the display of such conflicts on a theatrical scene
which is also metaphysical –, and very physical, material, since it occurs
in the pictural process of successive erasings, of programmed
disappearances, where the background, suddenly getting much
more attention than the motif, allows the perception of a second
or of a third background, which leads the eye towards one or several
hidden dimensions of the painting. On this matter, the artist
has told me that for a long time he’s been interested in the Renaissance
Annunciations, and mostly in their central part, between the
angel Gabriel and the virgin Mary, this intermediary surface which
seemingly has no importance in the fundamental religious relation
between the godly messenger and the chosen woman, this elective
place of the background, this no man’s land stealthily stolen by
pure painting, where it can manifest and smuggle its munificence
and its reign.
The Encombrements show similar inversions and overlappings. The
motifs, abstract or recognizable, generally fragmentary, are cast
on the periphery of the painting, which gets paradoxically « disencumbered
». The central zone is then occupied by an absence, an
emptiness, where the painting probably gives its full scale, where it
vibrates most, and where it reveals itself absolutely as painting. The
background becomes the raison d’être of the painting, in its interaction
with all these centrifugal objects which disencumber it and
flee towards the margins in order to offer it to the onlooker – the
truncated K, a piece of a house, many fragments of small paintings
in the painting, a few geometrical structures reminding us of the
wood pieces of a stretcher, sometimes at the bottom of the can-

« Planévation n°1 » // 1992 // huile sur toile 195x130 cm
mentaires, sont rejetés vers la périphérie du tableau, lequel s’en trouve
paradoxalement « désencombré ». La région centrale est alors
occupée par une absence, un vide, qui est sans doute le lieu où
la peinture joue « à plein », où elle vibre le plus fortement, où elle se
révèle tout à fait comme peinture. Le fond devient la raison d’être
du tableau, dans son interaction avec tous ces objets centrifuges
qui le dégagent et fuient vers les marges pour l’offrir au regard – la
lettre K tronquée, un bout de maison, plusieurs fragments de petits
tableaux dans le tableau, quelques structures assemblées rappelant
les bois d’un châssis, parfois en bas de la toile une chaise vide
fait face à cet autre vide qui est un plein de peinture ; et puis souvent
une partie d’échelle apparaît, posée ailleurs, dans un autre
espace, ou bien nulle part. Cette échelle fait fréquemment partie
des objets qui « encombrent », mais aussi souvent elle est prise dans
le fond du tableau, comme on dit d’un bateau qu’il est pris dans
les glaces ; cette échelle, elle est figée dans la masse de la peinture
translucide, tel un insecte noyé dans le bloc d’ambre qui l’enferme
comme un cercueil tout en lui assurant un semblant d’immortalité.
Échelle fantôme, ombre d’échelle : l’objet disparaît dans la peinture,
le motif frôle l’invisibilité, le fond absorbe l’image qui s’y engloutit et
« désencombre » ainsi le tableau. C’est ce genre de lutte, toujours
indécise et sans cesse rejouée, qui donne aux tableaux de Piotr
Klemensiewicz leur dynamisme et leur envergure : sa peinture est
l’arène de tels combats, le lieu de disputes physiques et de solutions
de compromis, le théâtre d’attaques surprises et de cessez-le-feu
provisoires. Entre le fond et le motif, ainsi qu’on le constate dans
toutes les séries de l’artiste, mais aussi entre le devant et le derrière,
le centre et la périphérie, l’atelier et le monde, l’espace mental et
celui du tableau, la photographie et la peinture, le rebut et l’œuvre,
le sol et le mur. Par conséquent, ces combats ne se limitent pas
au seul champ clos de la peinture et de ses outils, ils ne renvoient
pas seulement à l’auto-référentialité du médium et au modernisme
comme attitude esthétique ; ils incluent l’ouverture au monde, une
physique des objets et une métaphysique de la pensée, une volonté
d’universalisme affichée en tant que telle, le désir de parler de soi
et des autres, de l’extérieur situable des paysages photographiques
et de l’intérieur méditatif de ce que j’appellerais volontiers les paysages
métaphysiques. Il y a là une vision du monde qui s’articule à
travers la peinture, non pas au sens désormais ancien de représentation
du monde par le biais du tableau, mais dans une pensée de
l’émergence de l’image, de son apparition et de son effacement.
On l’a dit, les éléments du vocabulaire pictural de Klemensiewicz
sont volontairement peu nombreux, mais leur combinatoire et leurs
variations quasiment illimitées. Il n’est qu’à regarder ses chaises ou
ses maisons, en apparence toutes identiques, en réalité chaque
fois différentes, pour se convaincre du désir de l’artiste de proposer
encore une fois la scène de la peinture comme lieu d’une énigme
sans réponse définitive et d’un corps à corps sans fin.
Marseille, 2007
vas an empty chair faces this other emptiness which is a fullness
of painting ; and frequently a part of a ladder appears, installed
elsewhere, in another space, or nowhere. This ladder is often one of
the objects which « congest », but as frequently it is absorbed by the
background of the painting, as a boat which is blocked in the ice ;
this ladder is stuck in the mass of the translucent paint, like an insect
drowned in the amber block which imprisons it as in a coffin while
giving it a sort of immortality.
Ghost ladder, shadow of a ladder : the object erases itself into the
paint, the motif is close to invisible, the background absorbs the
image which disappears into it and, so, disencumbers the canvas.
It is this kind of fight, always indecisive, and staged again and
again, which gives to Piotr Klemensiewicz’s painting its dynamic and
its span : his painting is the arena of such combats, the place of
physical quarrels and of provisional solutions, the theater of surprise
attacks and temporary truces. Between the background and the
motif, as we can see in all the artist series, but also between the front
and the rear, the center and the periphery, the studio and the world
at large, the mental space and that of the painting, photography
and painting, the refuse and the work of art, the ground and the
wall. Thus, these fights do not limit themselves to the closed territory
of painting and of its tools ; in other words, they do not consider
painting as the only possible subject of painting and modernism
as the only aesthetic horizon of art ; resolutely post-modern, they
include an opening on the world, a physics of the objects and a
metaphysics of the thought, a very strong will of universalism, the
desire to talk about oneself and the others, of the located outside of
photographic landscapes and, on the other hand, of the meditative
interior of what I would call the metaphysical landscapes. There
is in this painting a vision of the world, not in the now obsolete meaning
of a realistic representation of the world inside the painting,
but in a thought of the emergence of the image, its appearance
and its erasing. I have said it, the elements of Klemensiewicz pictural
vocabulary may be willingly limited, but their combinations and
their variations are nearly infinite. We just have to look at his chairs
or his houses, all apparently identical, in reality each different from
the other ones, to be convinced of the desire of the artist to propose
once again the stage of painting as the place of an enigma without
a definitive answer and of an endless clinch.
translated from the French by Brice Matthieussent

« ciel » // 1995 // acrylique sur photo anonyme 39x29 cm

« Encombrement K » // 1998 // acrylique sur toile 195x130 cm // collection particulière « Encombrement 2 maisons » // 2004 // acrylique sur toile 195x114 cm // collection de l’artiste

« Chaise n°1, n°2, n°3, n°4,» // 2000 à 2001 // acrylique sur toile 100x81 cm

« Chaise n°5, n°6, n°7, n°8» // 2004 // acrylique sur toile 100x81 cm

« Chaise n°9, n°10, n°11, n°12» // 2004 à 2006 // acrylique sur toile 100x81 cm

« Chaise n°13, n°14, n°15, n°16» // 2006 // acrylique sur toile 100x81 cm

« EvetemadA 07.3» // 2007 // acrylique sur toile 195x130 cm

« EvetemadA 07.5» // 2007 // acrylique sur toile 195x130 cm

« EvetemadA 07.4» // 2007 // acrylique sur toile 195x130 cm

« EvetemadA 07.2» // 2007 // acrylique sur toile 195x130 cm
« EvetemadA 07.6» // 2007 // acrylique sur toile 195x130 cm

« EvetemadA 07.1» // 2007 // acrylique sur toile 195x130 cm

« Source 6» // 2007 // acrylique sur toile 195x130 cm
« Source 7 » // 2007 // acrylique sur toile 195x130 cm

« Nuance 1 » // 2007 // acrylique sur toile en diptyque 162x221 cm

« Nuance 2 » // 2007 // acrylique sur toile en diptyque 162x244 cm

« Nuance 3 » // 2007 // acrylique sur toile en diptyque 162x244 cm

CAROLE CAMPBELL + PIOTR KLEMENSIEWICZ
photographie peinture
« TotemtaboO » : These are painted photographs of nature.
La couleur des bandes provient des couleurs existantes dans la photographie.
Les couleurs présentes dans les photographies existent dans la
nature. Ce sont des photographies de nature. Il ne s’agit pas de recouvrement
par la peinture, mais de la mise en boucle de la vision des différentes
couleurs qui sortent du tableau et y retournent. La photographie n’est pas
le fond et la peinture n’est pas la forme. Des deux, simultanément, apparaît
et disparaît ce que le regard tente de découvrir.
The colours of the bands evolve from the colours that exist in the photography
and the colours of the photographs exist in the nature. The
paint does not mask the photographs, rather it completes our gaze as
different colours are revealed and then returned to the work. The photograph
is not the background, nor are the streams of colour the foreground,
they simultaneously appear and disappear as the eyesearches
to establish a stable image.
« TotemtaboO Toscane 29 » // 2006 // acrylique sur photo numérique 146x110 cm

« TotemtaboO 26 » // 2006 // acrylique sur photo numérique 127x95 cm

« TotemtaboO 21 » // 2006 // acrylique sur photo numérique 127x95 cm

« TotemtaboO 20 » // 2006 // acrylique sur photo numérique 127x95 cm
« TotemtaboO 28 » // 2006 // acrylique sur photo numérique 127x95 cm

« TotemtaboO 22 » // 2006 // acrylique sur photo numérique 127x95 cm
« TotemtaboO 17 » // 2006 // acrylique sur photo numérique 127x95 cm

« TotemtaboO 18 » // 2006 // acrylique sur photo numérique 127x95 cm

« TotemtaboO 25 » // 2006 // acrylique sur photo numérique 127x95 cm

« TotemtaboO 30 » // 2007 // acrylique sur photo numérique 72x57 cm

« TotemtaboO 14 » // 2006 // acrylique sur photo numérique 72x57 cm

« TotemtaboO Forêt Brulée 52 » // 2007 // acrylique sur photo numérique 72x54 cm
« TotemtaboO Forêt Brulée 53 » // 2007 // acrylique sur photo numérique 72x54 cm

« TotemtaboO Suisse 44 » // 2007 // acrylique sur photo numérique 70x47 cm
« TotemtaboO Suisse 43 » // 2007 // acrylique sur photo numérique 70x47 cm

« ...ance » // 2007 // acrylique sur toile 200x200 cm

Piotr Klemensiewicz
Né en 1956
Expositions individuelles
2007
Nuance, Pavillon Vendôme (en collaboration avec Carole Campbell) et Musée
des Tapisseries, Aix-en-Provence
2006
TotemtaboO 1,(en collaboration avec Carole Campbell), Galerie des Ponchettes,
Nice
TotemtaboO 2,(en collaboration avec Carole Campbell), Galerie Sandrine Mons,
Nice
TotemtaboO 3,(en collaboration avec Carole Campbell), Loft Design, Nice
Chimères, Galerie Pfriem, Savannah College Art Design, Lacoste
2005
Encombrements, chapelle Saint-Martin du Méjan, Arles
5ème Nuit des Galeries, Loft design, Nice
Galerie 13 Sévigné-Baudoin Lebon, Paris
Société PEBEO, Gèmenos
2003
This is not a coquelicot, galerie Sintitulo, Mougins
2002
Galerie Le Pont-Neuf, Paris
2001
7 Peintres Français, Muséum de l’université de Chosun, Kwangju, Corée-du-Sud
2000
Discreet Logic Company, Montréal, Québec
1999
Encombrements, avec la collaboration de Monique Regimbald-Zeider, galerie de
l’UQAM, Montréal, Québec
Galerie de Tableau, Marseille
1998
Palais des Évèques, Saint-Lizier
Coutts Bank, Monaco
Vacances Bleues Mécénat, Marseille
Galerie Montenay-Giroux, Paris
1997
Galerie Park Ryu Sook, Séoul, Corée-du-Sud
1995
Ambassade de France, services culturels, New York, Etats-Unis
Peintures, Espace 13, art contemporain, Aix-en-Provence
1994
Galerie Montenay, Paris
1993
Galerie de l’école des Beaux-Arts, Metz
Musée des Beaux-Arts et centre d’art contemporain, Montbéliard (25)
FRAC CORSE, Corte
1992
Artothèque Antonin Artaud, Marseille
FRAC Basse-Normandie, Hérouville-Saint-Clair
1991
Galerie de Marseille, Marseille -Galerie Alain-Gutharc, Paris
1990
Galerie Art concept, Olivier Antoine, Nice
Musée de Toulon, Toulon
1989
Galerie des Rambles, Marseille
Galerie Gutharc-Ballin, Paris
Centre d’art contemporain, abbaye Saint-André, Meymac
1988
Centre d’arts plastiques, Saint-Fons
Musée des Beaux-Arts, Carcassonne
1986
ARCA, Centre d’art contemporain, Marseille
Abbaye de Tournus, musée Greuze, Tournus
Galerie Gutharc-Ballin, Paris
1985
Galerie Saluces, Avignon
Galerie Gabrielle-Bryers, New York, Etats-Unis

Expositions collectives
2007
Gulf Art Fair (en collaboration avec Carole Campbell), Galerie Baudoin
Lebon, Dubaï
Séoul Art Fair(en collaboration avec Carole Campbell), Galerie Baudoin Lebon,
Séoul
Art Paris (en collaboration avec Carole Campbell), Galerie Baudoin Lebon, Paris
2006
Galerie Esra Joo, EspaceSol, Séoul
Sur table, Centre Design, Marseille
Présences Contemporaines, Collection FRAC PACA, Université Sophia
Antipolis
Il était une fois la couleur, Collection FRAC PACA, Espace Culturel Prairial, Vitrolles
Autour de Cézanne, Atelier des Eyguesiers, Aix-en-Provence
2005
La Peau du chat, musée de l’abbaye Sainte-Croix, les Sables d’Olonne
La peau du chat, Hommage à Carlotta, 13 Sévigné, galerie Baudoin
Lebon, Paris
Cash and Carry, 13 Sévigné, Baudoin Lebon, Paris
Art Paris, Galerie Baudoin Lebon, Paris
1ère Biennale d’ Allauch
2004
La Peau du chat, centre d’art de l’Yonne, château de Tanlay et artothèque de
Caen
Cabanes, Arborescence 04, 200RD10 (en collaboration avec Carole Campbell),
Vauvenargues
FIAC, Galerie Baudoin Lebon, Paris
2003
Eau douce, eau salée, Atelier des Eyguesiers, Aix en Provence
FIAC , Galerie Baudoin Lebon, Paris
Des paysages, chapelle des pénitents, FRAC Paca, Lurs
Ré-invention de la collection, FRAC Corse, couvent de Morsiglia, Morsiglia Propos
d’Europe II, fondation Hippocrène, agence Mallet-Stevens, Paris
Le Pari de l’art contemporain, une culture d’entreprise, musée des Tapisseries, Aixen
Provence
2002
7 Peintres Français, Galerie Sagan, Séoul, Corée-du-Sud
Points de vues, séléction FRAC PACA, château des Villeneuves-Tourettes
L’Ame des objets, l’esprit des choses, château Borely, Marseille
Art et entreprise, avec Olivier Bernex et Alain Puech,UPE 13, Marseille
2001
Voisins Artistes, galerie Où, Marseille
Galerie Dortindeguey, avec Ingrid Mourreau et E. Pasquiou, Arles
Artistes d’Architectes 1 (select. Pierre Garnier), ARCA et galerie Roger
Pailhas, Marseille
2000
Provence terre de mécénat, château Borely, Marseille
Un Cabinet de dessins, galerie des Grands Bains-Douches de Marseille, Marseille
Séquences 2, ARCA et galerie Roger-Pailhas, Marseille
1999
Papier choisis, galerie Montenay-Giroux, Paris
Extraits d’une collection, Vacances Bleues, château Borely, Marseille
Orient, Orient, avec Bernard Boyer et Ange Leccia, chapelle Saint-Etienne, Beaune
1998
Art in Business, fondation Vasarely, Aix-en Provence
Aqua nostra, château Borely, Marseille
Galerie Athanor, Marseille
FIAC, galerie Montenay-Giroux, Paris
Tableau d’une histoire, Villa Arson, Nice
Dessins 2, Bains-Douches
Art Cade, Marseille
1997
Galerie Athanor, Marseille
Entre mémoire et histoire, sélection du FRAC PACA, Le Capitole, Arles
Vitam, impendere amori, musée de l’Hôtel-Dieu, Mantes-la-Jolie
Vitam, impendere amori, château des Ducs de Wurtemberg, Montbéliard Jeux de
genres, galerie Electra, Collection Ville de Paris
1996
Flash-Back, Atelier de Lorette, Marseille
Peintres de la Méditerranée, sélection du FRAC PACA, Saint-Raphaël
Les Années 80, Art et Solidarité, Le radeau, Marseille
Dépôt FNAC, Mac, Marseille
Galerie Athanor, Marseille
Salon de Montrouge, Montrouge
Vitam, impendere amori, Institut français de Tanger, Maroc ; musée Fresh, Ajaccio
Foire de Turin, Galerie Cargo, Italie
Institut français de Copenhague, Galerie Cargo, Danemark
Foire de Gand, Galerie Cargo, Belgique
1995
Faits libres, avec Yannick Gonzales, Michele Sylvander, Théâtre Coemedia, Aubagne
Luminy dans le FNAC, galerie de lécole supérieure des beaux-arts de Marseille,
Marseille
1994
J’aurais voulu être un artiste, sélection du FRAC PACA, CRDP, Marseille Mémoires,
musée des Tapisseries, Aix-en-Provence
Retour à l’œil et au-delà, galerie Raph-Debarn, Nice
Autres et même triangles, centre culturel de Casablanca, Maroc
Galerie Montenay, FIAC, Paris
1992
Le Tondo aujourd’hui, exposition itinérante en France, Suisse, Allemagne, Espagne
Autour du construit, FRAC PACA, Marseille
Galerie de Marseille, Foire de Cologne, Allemagne
1991
Réserves de mémoire, FRAC PACA, Marseille
Carnets comparés, galerie Lattitude, Nice
Fragments d’une collection, centre d’art contemporain, Hérouville-Saint-Clair
Galerie Gutharc-Ballin, FIAC et Salon de Mars, Paris
Collection du Fnac, CNAP, Paris
CIAC, Centre international d’art contemporain, Montréal, Québec
Acquisitions ville de Paris, hôtel d’Albret, Paris
1990
Galerie Gille-Favre, foire de Francfort, Allemagne
Galerie Gutharc-Ballin, FIAC et Salon de Mars, Paris
1989
Facteur d’art, musée de la Poste, Paris -Galerie Gille-Favre, avec Bernard Boyer,
Lyon
Galerie Gutharc-Ballin, FIAC et Salon de Mars, Paris
1988
L’Evidence absurde, avec Gérard Traquandi et Jean-Claude Ruggirello, Hall K3,
Hambourg, Allemagne
La collection du musée Cantini, La Vieille-Charité, Marseille
Galerie Gutharc-Ballin, FIAC, Paris
1987
Marseille-Nice, musée de Toulon, Toulon
Nouvelles acquisitions, musée Cantini, Marseille
Galerie Gabrielle-Byers, Foire de Bâle, Suisse
Galerie Gutharc-Ballin, FIAC, Paris
1986
Galerie Gutharc-Ballin, Art-Fair, Stockholm, Suède
Identité-Marseille, La Vieille-Charité, Marseille
Galerie Roger Pailhas, FIAC, Paris
XIXe Festival de la peinture, musée Grimaldi, Cagnes
1985
Galerie Laurens-Daane avec Bernard Boyer et Guy Ibanez, Amsterdam
FRAC PACA, fondation Maeght, Saint-Paul-de-Vence
32,5 de moyenne, Nouvelle biennale de Paris, Créteil
Salon de Montrouge, Montrouge
1984
FRAC PACA, musée Cantini, Marseille
1983
CAC, Centre d’action culturelle, avec François Bouillon et Vladimir Skoda, Mâcon
Galerie Saluces, Avignon
Octopus, ARCA, Marseille
1982
Galerie B., Nîmes -Lieux d’artistes, Atelier de Lorette, Marseille
Action-Création 82, ARCA, Marseille
La Jeune Sculpture, Port d’Austerlitz, Paris
Marseille-Alger, La Vieille-Charité, Marseille
1981
Midi et demi, église des Céléstins, festival d’Avignon, Avignon
1980
Communication Art Région, maison André Malraux, Créteil

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2 ème trimestre 2007
Impression :
Achevé d’imprimer en Union Européenne.
Coordonnées des instituions partenaires
© Piotr Klemensiewicz pour les oeuvres reproduites, 2007
© Klemensiewicz-Campbell pour les oeuvres reproduites, 2007
© Brice Matthieussent pour les textes, 2007
© Yves Gallois pour les photos, 2007
© Musée des Tapisseries, Pavillon Vendôme, ville d’Aix-en-Provence, Aix-en-Provence, 2007
© Archibook + Sautereau éditeur, Paris, 2007