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Pour un libéralisme<br />

responsab<strong>le</strong><br />

Repenser<br />

<strong>le</strong> contrat de travail<br />

P.04<br />

Entretien<br />

Joël de Rosnay<br />

Nouvel<strong>le</strong>s technologies :<br />

<strong>le</strong>s maîtriser ou <strong>le</strong>s subir?<br />

P.06<br />

Ils entreprennent<br />

Éric Scaon<br />

La subti<strong>le</strong> alchimie<br />

des groupements<br />

d’employeurs<br />

P.12<br />

Dirigeant<br />

Un <strong>au</strong>tre regard sur l’entreprise<br />

DOSSIER<br />

NOVEMBRE 2007 N ° 7 6<br />

“ PAYEZ VOTRE PERSONNEL<br />

LE MOINS POSSIBLE et c’est<br />

ce que vous obtiendrez d’eux. ”<br />

Malcom Forbes<br />

RECRUTEMENT<br />

ET FIDÉLISATION :<br />

QUELS SONT LES ATOUTS<br />

DES PME FACE AUX<br />

GRANDS GROUPES ?


sommairewww.cjd.net<br />

04<br />

Pour un libéralisme<br />

responsab<strong>le</strong><br />

Repenser<br />

LE CONTRAT DE TRAVAIL<br />

05<br />

Le point de vue de<br />

Thomas Ch<strong>au</strong>dron<br />

Faire preuve<br />

D’IMAGINATION<br />

06<br />

Entretien<br />

JOËL DE ROSNAY<br />

Nouvel<strong>le</strong>s technologies :<br />

LES MAÎTRISER<br />

OU LES SUBIR?<br />

08<br />

D’accord/Pas d’accord<br />

ALLEZ-VOUS PLUS UTILISER<br />

LE CRÉDIT IMPÔT<br />

RECHERCHE ?<br />

Dirigeant UN AUTRE REGARD SUR L’ENTREPRISE<br />

10<br />

Ils bougent<br />

12<br />

Ils entreprennent<br />

Éric Scaon<br />

LA SUBTILE ALCHIMIE<br />

DES GROUPEMENTS<br />

D’EMPLOYEURS<br />

14<br />

Ils innovent<br />

16<br />

Le DD en pratique<br />

28<br />

Ça s’est pensé<br />

<strong>au</strong> XX e sièc<strong>le</strong><br />

Naissance d’un<br />

MOUVEMENT<br />

Jonathan Hall<br />

LETTRE DE<br />

CHINE<br />

Entreprises<br />

COMMUNICANTES<br />

ET RESPONSABLES<br />

Comment mesurer votre<br />

EMPREINTE ÉCOLOGIQUE ?<br />

QUESTIONS : P.19<br />

Innover pour mieux recruter<br />

MÉTHODE P.20<br />

Grands groupes : des<br />

avantages à tous <strong>le</strong>s étages<br />

STRATÉGIE P.22<br />

PME : comment<br />

attirer <strong>le</strong>s meil<strong>le</strong>urs ?<br />

TERRAIN P.24<br />

Pour séduire,<br />

cultiver ses différences<br />

CONCLUSION : P.27<br />

Une batail<strong>le</strong> des<br />

compétences ?<br />

29<br />

Futurs<br />

18<br />

19, avenue George V 75 008 Paris. Tél. : 01 53 23 92 50. Fax : 01 40 70 15 66. DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : Sylvain Breuzard. RÉDACTEUR EN CHEF : Bruno Tilliette.<br />

COMITÉ DE RÉDACTION : Michè<strong>le</strong> Buinet, Nathalie Crouzet, Louise Guerre, Emmanuel<strong>le</strong> Peres. DOCUMENTATION : Isabel<strong>le</strong> Poulain. ILLUSTRATIONS : Pierre Nenny.<br />

CRÉDIT PHOTOS : Masterfi<strong>le</strong> (couverture et p. 14). CREATION ET RÉALISATION : A CONSEIL Paris www.aconseil.fr . RÉGIE PUBLICITAIRE : EDC Régie - L<strong>au</strong>rence Ang<strong>le</strong>ys,<br />

Tél. : 01 41 49 66 77. Fax : 01 41 49 66 79. Magazine bimestriel <strong>au</strong> prix unitaire de 9 €. Abonnement France 1 an : 54 €, 2 ans : 99 €, étranger 1 an : 61 €, 2 ans : 110 €. Abonnements<br />

multip<strong>le</strong>s France 1 an : 37,35 € pour <strong>le</strong> 2 e abonnement, 26,68 € pour <strong>le</strong> 3 e et <strong>le</strong>s suivants. COMMISSION PARITAIRE : 0310 T 82880. ISSN : 02948241. IMPRIMERIE : MONTLIGEON,<br />

61 400 La Chapel<strong>le</strong>-Montligeon. DÉPÔT LÉGAL : 4 e trimestre 2007.<br />

ANNONCEURS : RÉUNICA (page 2), ANACT (page 9), LA POSTE (page 11), FONDACT (page 17), NOVALIS (page 31), GROUPE MORNAY (page 32).<br />

• LOW COST MAIS HIGH TECH<br />

• LES FEMMES, agents de<br />

trans<strong>format</strong>ion<br />

30<br />

Le journal de<br />

Cl<strong>au</strong>de-Jean<br />

Desvignes<br />

L’ENTREPRISE<br />

EN SOUFFRANCE<br />

Dossier<br />

RECRUTEMENT<br />

ET FIDÉLISATION :<br />

QUELS SONT LES ATOUTS<br />

DES PME FACE AUX GRANDS<br />

GROUPES ?


Pour un libéralisme<br />

responsab<strong>le</strong><br />

Repenser<br />

LE CONTRAT DE TRAVAIL<br />

Sait-on que, jusqu’à une loi de<br />

1973, <strong>le</strong> salarié pouvait signer un<br />

contrat de « louage de services », <strong>au</strong>ssi<br />

bien qu’un contrat de travail ? Sait-on<br />

que <strong>le</strong> contrat de louage de service,<br />

selon <strong>le</strong> Code civil de 1804, était<br />

« passé sans détermination de durée »<br />

et pouvait « toujours cesser par la<br />

volonté de l'une des parties contractantes<br />

» ? On pensait que l’employeur<br />

n’avait pas d’obligation particulière,<br />

puisque <strong>le</strong> salarié était libre de partir<br />

s’il n’était pas content des conditions<br />

qui lui étaient faites.<br />

Sait-on encore qu’<strong>au</strong> XIXe sièc<strong>le</strong> <strong>le</strong><br />

législateur se méfiait de la notion de<br />

« durée indéterminée », car il y voyait<br />

<strong>le</strong> risque d’un retour à la vassalité et à<br />

l’esclavage? Et que ce sont <strong>le</strong>s patrons<br />

de l’époque qui ont poussé à la mise<br />

en place de CDI pour pouvoir fidéliser<br />

(retenir ?) des salariés qui avaient tendance<br />

à repartir faire <strong>le</strong>s moissons dans<br />

<strong>le</strong>ur village, l’été venu. Sait-on enfin que<br />

<strong>le</strong> CDI n’est devenu vraiment la règ<strong>le</strong><br />

que dans <strong>le</strong>s années 1980 en France<br />

et en 1999 sur <strong>le</strong> plan européen ? 1<br />

INVERSION DES NORMES<br />

Ce petit rappel historique a pour seul<br />

but de souligner deux choses. D’une<br />

part, ce que nous croyons souvent être<br />

une norme imprescriptib<strong>le</strong> n’est parfois<br />

qu’une pratique contingente.<br />

D’<strong>au</strong>tre part, la perception de cette<br />

norme change avec l’évolution de la<br />

société. Par rapport <strong>au</strong> contrat de travail,<br />

el<strong>le</strong> s’est même inversée en un<br />

sièc<strong>le</strong>, puisque c’est <strong>le</strong> salarié qui<br />

réclame un CDI et l’employeur qui préférerait<br />

des CDD. C’est qu’entre-temps<br />

s’est construit notre système de protection<br />

socia<strong>le</strong> qui focalise l’attention<br />

sur la sécurité de l’emploi plutôt que<br />

sur la liberté du travail. C’est incontes-<br />

04<br />

D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />

tab<strong>le</strong>ment un progrès et nul ne songerait<br />

à revenir <strong>au</strong> louage de services tel<br />

qu’il était pratiqué <strong>au</strong> XIX e sièc<strong>le</strong>. Mais<br />

justement, la société n’est plus la<br />

même <strong>au</strong> XXI e . On peut se demander,<br />

sans remettre en c<strong>au</strong>se la sécurité de<br />

l’emploi dans son principe, si <strong>le</strong> contrat<br />

de travail ne devrait pas retrouver une<br />

certaine dimension de liberté correspondant<br />

mieux <strong>au</strong>x aspirations contemporaines<br />

à l’<strong>au</strong>tonomie et à la responsabilité.<br />

SUBORDINATION<br />

ET IRRESPONSABILITÉ<br />

Le système actuel – <strong>le</strong> CDI comme<br />

norme – génère quelques paradoxes.<br />

PAR LA RÉDACTION<br />

Le salarié, par exemp<strong>le</strong>, reste libre de<br />

partir de sa propre volonté, sans obligations<br />

particulières, si ce n’est un<br />

préavis qu’il accomplit rarement.<br />

Mais pour se séparer d’un employé,<br />

l’employeur est contraint à de lourdes<br />

procédures et de coûteuses indemnités<br />

qui sont presque toujours aggravées<br />

s’il y a passage devant <strong>le</strong>s<br />

prud’hommes. Cette différence de traitement<br />

ne se justifie que par <strong>le</strong> lien de<br />

subordination institué par <strong>le</strong> contrat de<br />

travail. Le chef d’entreprise suzerain<br />

doit protection à son salarié vassal.<br />

C’est justement ce type de rapport que<br />

craignaient d’inst<strong>au</strong>rer <strong>le</strong>s juristes du<br />

XIX e , qui savaient ce qu’était la monar-


chie. Mais <strong>le</strong> vassal actuel ne l’est que<br />

partiel<strong>le</strong>ment puisqu’il a loisir de quitter<br />

sa tutel<strong>le</strong> quand il <strong>le</strong> veut (même<br />

s’il ne <strong>le</strong> peut pas toujours pour des<br />

raisons matériel<strong>le</strong>s). Fina<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong><br />

subordonné est plus libre que son chef.<br />

Et il a envers lui une responsabilité très<br />

limitée. Il ne peut guère être attaqué<br />

même si son départ met en péril<br />

l’entreprise, ce qui arrive parfois. Ne<br />

f<strong>au</strong>drait-il pas réinterroger ce lien fina<strong>le</strong>ment<br />

très infantilisant pour <strong>le</strong> salarié,<br />

puisqu’il est maintenu dans la<br />

subordination et l’irresponsabilité, et<br />

très « paternisant » pour <strong>le</strong> chef<br />

d’entreprise à qui l’on fait supporter<br />

toutes <strong>le</strong>s responsabilités et <strong>le</strong>s<br />

dépenses qui vont avec ? N’est-ce pas<br />

ce lien qui fait perdurer des organisations<br />

très hiérarchiques dont on prétend<br />

pourtant vouloir sortir depuis des<br />

années ? Ne pourrait-on pas inventer<br />

des relations plus adultes, plus équilibrées<br />

<strong>au</strong> sein des entreprises, fondées<br />

sur des responsabilités mutuel<strong>le</strong>s et<br />

une certaine liberté d’association ?<br />

HYPOCRITE CDI<br />

On a <strong>le</strong> sentiment que <strong>le</strong>s négociations<br />

qui se sont ouvertes entre patronat et<br />

syndicats sur la simplification du<br />

contrat de travail portent déjà sur un<br />

débat dépassé <strong>au</strong> regard des réalités<br />

économiques actuel<strong>le</strong>s et futures, mais<br />

<strong>au</strong>ssi de l’évolution des mentalités.<br />

Certes, il f<strong>au</strong>t bien parvenir à s’accorder<br />

sur des propositions concrètes, mais<br />

cel<strong>le</strong>s-ci semb<strong>le</strong>nt reposer sur une<br />

vision très classique, très XX e sièc<strong>le</strong>,<br />

de l’entreprise et du travail. Les uns<br />

cherchent à assouplir un CDI trop rigide<br />

en l’amendant de périodes d’essai plus<br />

longues, <strong>le</strong>s <strong>au</strong>tres entonnent <strong>le</strong> refrain<br />

de la précarité.<br />

Mais <strong>le</strong> CDI n’est-il pas une fiction ?<br />

A-t-il encore un sens ? Une entreprise<br />

qui emb<strong>au</strong>che en CDI est nécessairement<br />

hypocrite puisqu’el<strong>le</strong> n’a <strong>au</strong>cun<br />

moyen de garantir un emploi à vie à<br />

celui qu’el<strong>le</strong> recrute. Sera-t-el<strong>le</strong> encore<br />

en vie, el<strong>le</strong>-même, dans 5 ans ? De<br />

l’<strong>au</strong>tre côté, 6 millions de salariés changent<br />

chaque année d’entreprise<br />

(30 000 par jour ouvrab<strong>le</strong>, un tiers des<br />

employés du privé), certains parce<br />

qu’ils y sont obligés, d’<strong>au</strong>tres par choix.<br />

Mais la réalité est bien que <strong>le</strong> CDI ne<br />

<strong>le</strong>ur a pas apporté la sécurité qu’on lui<br />

prête. S’est-on demandé <strong>au</strong>ssi si ce<br />

type de lien durab<strong>le</strong> convenait <strong>au</strong>x plus<br />

jeunes qui ont une vision plus utilitariste<br />

du travail que <strong>le</strong>s anciens ? Plus de la<br />

moitié d’entre eux, qui ont pourtant<br />

« galéré » pour trouver <strong>le</strong>ur premier<br />

emploi, <strong>le</strong> quitte avant même la fin<br />

de <strong>le</strong>ur CDD chèrement acquis.<br />

L’entreprise, el<strong>le</strong>-même, continuera-tel<strong>le</strong><br />

longtemps d’exister sous la forme<br />

qu’on lui connaît, juridiquement et physiquement<br />

? Internet n’est-il pas en train<br />

de susciter des formes d’association<br />

et de production immatériel<strong>le</strong> différentes<br />

? Les modes d’organisation de<br />

l’entreprise ne vont-ils pas se diversifier<br />

à l’infini ? Le temps et la présence<br />

en un lieu doivent-ils toujours être la<br />

mesure du travail ? Et surtout, nous<br />

tous, n’avons-nous pas envie d’inventer<br />

d’<strong>au</strong>tres manières de travail<strong>le</strong>r, plus<br />

libres, plus créatives, loin de la société<br />

d’obéissance que nous rappel<strong>le</strong> <strong>le</strong> lien<br />

de subordination ?<br />

TRAVAILLER<br />

POUR QUOI FAIRE ?<br />

Ne serait-il pas uti<strong>le</strong> de se poser toutes<br />

ces questions pour réfléchir à ce que<br />

pourrait être <strong>le</strong> contrat de travail dans<br />

la société du XXI e sièc<strong>le</strong> ? Le CDI n’est<br />

un problème que parce qu’il fonctionne<br />

comme un mythe et bouche l’horizon<br />

de la pensée. Son aménagement n’est<br />

pas la solution, tout juste une manière<br />

de l’accompagner vers sa fin. Les<br />

enjeux sont ail<strong>le</strong>urs et se résument<br />

en une dernière question : comment<br />

voulons-nous désormais travail<strong>le</strong>r<br />

ensemb<strong>le</strong> et pour quoi faire ?<br />

1 Source : Encyclopédia Universalis<br />

et Wikipédia.<br />

Le point de vue de<br />

Thomas Ch<strong>au</strong>dron,<br />

Président national du <strong>CJD</strong><br />

FAIRE PREUVE<br />

D’IMAGINATION<br />

Il est curieux, <strong>au</strong> moment où <strong>le</strong>s partenaires<br />

soci<strong>au</strong>x négocient sur une réforme du contrat de<br />

travail, de commencer par proposer de réfléchir sur<br />

<strong>le</strong>s conditions de sa rupture « simplifiée ». La signature<br />

d’un contrat de travail est plutôt une bonne nouvel<strong>le</strong>,<br />

tant pour l’entreprise que pour <strong>le</strong> salarié, puisqu’il<br />

est issu de la volonté des deux parties. Par<strong>le</strong>r<br />

d’emblée du divorce n’est pas très engageant.<br />

Il n’en demeure pas moins que <strong>le</strong> contrat de travail,<br />

comme <strong>le</strong> mariage, repose encore implicitement sur<br />

l’idée d’une union pour la vie, alors que nous savons<br />

tous que cela n’a plus de sens (voir ci-contre). Il f<strong>au</strong>t<br />

donc, vraisemblab<strong>le</strong>ment, arrêter de lier la sécurité<br />

du salarié à la seu<strong>le</strong> durée de l’engagement dans<br />

l’entreprise ou <strong>au</strong> type de contrat proposé.<br />

Le système actuel conduit, notamment, à une sorte<br />

de discrimination face à l’obtention d’un crédit ou<br />

d’un logement, lorsqu’on est en CDD ou en intérim.<br />

N’y a-t-il pas là une sorte d’injustice qui est en même<br />

temps une entrave à la mobilité (be<strong>au</strong>coup restent<br />

pour atteindre des seuils de droits…)?<br />

On <strong>le</strong> dit assez, chacun sera amené à changer<br />

régulièrement d’emploi tout <strong>au</strong> long de sa vie:<br />

<strong>le</strong> Code du travail doit prendre en compte cette réalité<br />

nouvel<strong>le</strong> en attachant <strong>le</strong>s droits soci<strong>au</strong>x <strong>au</strong> parcours de<br />

la personne et non à sa présence dans tel<strong>le</strong> ou tel<strong>le</strong><br />

entreprise. Cette « transférabilité » serait d’ail<strong>le</strong>urs un<br />

moyen de réduire <strong>le</strong>s écarts entre <strong>le</strong>s avantages que<br />

peuvent accorder <strong>le</strong>s grandes entreprises et <strong>le</strong>s PME<br />

et faciliterait <strong>le</strong> passage des salariés des unes <strong>au</strong>x<br />

<strong>au</strong>tres (sur ce problème, voir <strong>le</strong> dossier de ce <strong>numéro</strong>).<br />

À partir de là, toutes <strong>le</strong>s durées d’engagement sont<br />

possib<strong>le</strong>s, du « bail » renouvelab<strong>le</strong> en 3,6,9, <strong>au</strong> contrat<br />

de projet lié à une mission spécifique dans l’entreprise<br />

et qui s’achève avec cel<strong>le</strong>-ci, jusqu’<strong>au</strong> CDI, bien sûr,<br />

si chacun y trouve son compte… Mais, en contrepartie,<br />

<strong>le</strong> contrat offert par l’entreprise doit s’enrichir<br />

d’obligations de moyen claires et vérifiab<strong>le</strong>s comme<br />

cel<strong>le</strong>s de tout mettre en œuvre pour former <strong>le</strong> salarié<br />

et pour assurer son employabilité <strong>au</strong> moment où<br />

il partira, de lui donner un temps de recherche<br />

d’un nouvel emploi à la fin du contrat, de lui assurer<br />

un bilan de compétences, etc. Si ces conditions<br />

n’étaient pas tenues, <strong>le</strong> salarié serait alors en droit<br />

de réclamer des indemnités.<br />

Bien entendu, ce ne sont ici que des pistes dont il<br />

reste à évaluer la faisabilité et la pertinence. Mais une<br />

chose est sûre, il nous f<strong>au</strong>t sortir des ornières actuel<strong>le</strong>s<br />

et faire preuve d’imagination.<br />

D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />

05


Entretien<br />

Nouvel<strong>le</strong>s technologies :<br />

LES MAÎTRISER<br />

OU LES SUBIR ?<br />

Bio, nano, info, éco… <strong>au</strong>tant de préfixes qui, associés <strong>au</strong>x<br />

technologies, modifieront tota<strong>le</strong>ment notre environnement quotidien.<br />

Dans 2020 : Les scénarios du futur, Joël de Rosnay passe en revue<br />

<strong>le</strong>s progrès scientifiques et techniques qui verront l’avènement des<br />

« pronétaires ». 2020 ? C’est déjà demain !<br />

À consulter :<br />

www.derosnay.com<br />

www.pronetaire.com<br />

www.scenarios2020.com<br />

(livre téléchargeab<strong>le</strong><br />

gratuitement depuis<br />

<strong>le</strong> 15 octobre)<br />

www.unevieenplus.com<br />

www.Agoravox.fr<br />

(journal en ligne)<br />

2020 : Les scénarios<br />

du futur,<br />

Joël de Rosnay,<br />

Des Idées et des<br />

Hommes, 2007, 21€<br />

06<br />

ENTRETIEN AVEC JOËL DE ROSNAY,<br />

Conseil<strong>le</strong>r du président de la Cité des sciences et de l’industrie,<br />

Joël de Rosnay, docteur ès sciences, est président exécutif<br />

de Biotics International.<br />

Dirigeant: En quoi <strong>le</strong>s nouvel<strong>le</strong>s technologies<br />

dont <strong>le</strong>s applications verront<br />

<strong>le</strong> jour en 2020 bou<strong>le</strong>verseront-el<strong>le</strong>s<br />

notre vie quotidienne ?<br />

Joël de Rosnay : Davantage que <strong>le</strong>s<br />

technologies el<strong>le</strong>s-mêmes, l’usage<br />

qu’en feront <strong>le</strong>s hommes bou<strong>le</strong>versera<br />

notre vie quotidienne. Quatre grands<br />

groupes de techniques <strong>au</strong>ront un<br />

impact considérab<strong>le</strong> sur notre vie personnel<strong>le</strong><br />

et professionnel<strong>le</strong> et modifieront<br />

la médecine, <strong>le</strong>s transports,<br />

l’énergie ou <strong>le</strong>s communications. Je<br />

<strong>le</strong>s appel<strong>le</strong> <strong>le</strong>s infotechnologies, <strong>le</strong>s biotechnologies,<br />

<strong>le</strong>s écotechnologies et<br />

<strong>le</strong>s nanotechnologies. Ces quatre préfixes<br />

– info, bio, éco et nano – symbolisent<br />

<strong>le</strong>s convergences entre des secteurs<br />

<strong>au</strong>paravant séparés, et président<br />

à des innovations dans des laboratoires<br />

du monde entier. Ces convergences<br />

et innovations se matérialisent déjà<br />

dans <strong>le</strong>s rése<strong>au</strong>x de communication,<br />

<strong>le</strong>s téléphones cellulaires, <strong>le</strong>s nouve<strong>au</strong>x<br />

médicaments, <strong>le</strong>s nouvel<strong>le</strong>s formes<br />

d’énergie renouvelab<strong>le</strong>; ou encore dans<br />

<strong>le</strong>s nouve<strong>au</strong>x outils (biopuces, nanoimplants)<br />

permettant l’assemblage de<br />

microstructures de h<strong>au</strong>te comp<strong>le</strong>xité<br />

D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />

à partir de composants de base. Si ces<br />

progrès présentent des avantages, <strong>le</strong>s<br />

risques ne sont pas exclus.<br />

D. : En quoi <strong>le</strong> mariage de ces technologies<br />

peut-il s’avérer menaçant ?<br />

J. de R.: Prenons l’exemp<strong>le</strong> du mariage<br />

de la biologie et de l’in<strong>format</strong>ique, ou<br />

« biotique ». Si la fusion des puces<br />

é<strong>le</strong>ctroniques et des cellu<strong>le</strong>s du cerve<strong>au</strong><br />

permet de transférer directement<br />

des in<strong>format</strong>ions du cerve<strong>au</strong> vers <strong>le</strong>s<br />

machines, des environnements intelligents<br />

ou des rése<strong>au</strong>x, l’inverse est<br />

possib<strong>le</strong>. Transférer <strong>le</strong>s in<strong>format</strong>ions<br />

de l’extérieur vers un individu et donc<br />

modifier son comportement à son insu,<br />

voilà des manipulations plus inquiétantes<br />

que l’avènement de Big Brother,<br />

car il ne s’agit pas seu<strong>le</strong>ment d’écouter,<br />

mais d’influencer.<br />

D. : 2020, c’est quasiment demain !<br />

Le grand public est-il informé ?<br />

J. de R. : Les treize ans qui nous séparent<br />

de 2020 ne sont pas comparab<strong>le</strong>s<br />

<strong>au</strong>x treize ans qui nous séparent de<br />

1994. La mondialisation des communications<br />

s’accélère ; <strong>le</strong>s laboratoires<br />

PAR MARLEN SAUVAGE<br />

communiquent de plus en plus entre<br />

eux; <strong>le</strong>s découvertes et <strong>le</strong>s brevets sont<br />

accessib<strong>le</strong>s d’un bout à l’<strong>au</strong>tre de la<br />

planète. Le public est mal informé<br />

parce qu’il reçoit une in<strong>format</strong>ion par<br />

discipline : astrophysique, conquête<br />

spatia<strong>le</strong>, réch<strong>au</strong>ffement planétaire, clonage…<br />

Sa vision de l’évolution et de<br />

l’impact de ces technologies sur la<br />

société est encore analytique, linéaire,<br />

séquentiel<strong>le</strong>, alors qu’il est essentiel<br />

d’adopter une vision systémique, c’està-dire<br />

qui tient compte des convergences<br />

– technologique, numérique,<br />

biologique – mais <strong>au</strong>ssi du contexte<br />

dans <strong>le</strong>quel ces convergences évoluent,<br />

de manière à intégrer la réaction<br />

socia<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s problèmes philosophiques<br />

et éthiques.<br />

Il ne f<strong>au</strong>t pas négliger l’impact sur la<br />

société, et en particulier l’impact<br />

industriel qui se manifeste be<strong>au</strong>coup<br />

plus vite qu’on ne <strong>le</strong> pense. Les percées<br />

technologiques favorisées par<br />

<strong>le</strong>s industriels, qui cherchent à créer<br />

de nouve<strong>au</strong>x marchés, conduisent <strong>au</strong><br />

risque d’une gadgétisation technologique,<br />

c’est-à-dire un engouement<br />

pour de nouvel<strong>le</strong>s techniques et de<br />

nouve<strong>au</strong>x outils <strong>au</strong> détriment d’une<br />

réf<strong>le</strong>xion sur <strong>le</strong>s véritab<strong>le</strong>s usages<br />

sociét<strong>au</strong>x que devraient engager <strong>le</strong>s<br />

industriels, <strong>le</strong>s politiques et <strong>le</strong> grand<br />

public.


D. : Quel<strong>le</strong>s incidences ces bou<strong>le</strong>versements<br />

<strong>au</strong>ront-ils sur l’économie ?<br />

J. de R.: L’impact est déjà visib<strong>le</strong>, notamment<br />

dans <strong>le</strong>s communications et <strong>le</strong>s<br />

médias avec la diminution des ventes<br />

des CD en raison de l’Internet, et<br />

dans l’imprimerie et l’édition avec<br />

l’émergence des journ<strong>au</strong>x citoyens. Il<br />

y a deux ans, avec Carlo Revelli, nous<br />

avons créé Agora Vox, un journal<br />

citoyen qui propose gratuitement une<br />

édition par jour. Aujourd’hui, nous<br />

comptons un million et demi de <strong>le</strong>cteurs,<br />

et dix mil<strong>le</strong> blogueurs participent<br />

à la rédaction du journal. Si on ne peut<br />

pas par<strong>le</strong>r réel<strong>le</strong>ment de concurrence,<br />

ceci a un impact sur la presse, car il<br />

s’agit d’une nouvel<strong>le</strong> forme de journalisme,<br />

complémentaire et collaborative.<br />

Je pense que l’impact sur la télévision<br />

sera encore plus considérab<strong>le</strong> à partir<br />

du moment où <strong>le</strong>s « pronétaires » –<br />

ceux qui sont pour et sur <strong>le</strong> net, c’està-dire<br />

des citoyens internation<strong>au</strong>x, dotés<br />

de nouve<strong>au</strong>x pouvoirs grâce à de nouve<strong>au</strong>x<br />

outils – créeront des chaînes de<br />

télévision. Au cours des vingt prochaines<br />

années, cet impact se poursuivra<br />

dans quatre domaines qui paraissent<br />

pourtant intouchab<strong>le</strong>s parce que<br />

tenus par de très grandes entreprises :<br />

ce sont la banque, l’assurance, <strong>le</strong><br />

consulting et l’éducation.<br />

D. : On devine tous <strong>le</strong>s dérapages liés<br />

à cette nouvel<strong>le</strong> façon d’évoluer dans<br />

notre société, en termes de traçabilité,<br />

de virus, de désin<strong>format</strong>ion… Comment<br />

se protéger de cela ?<br />

J. de R.: Demain sera pire qu’<strong>au</strong>jourd’hui,<br />

il y <strong>au</strong>ra encore plus de traçabilité, de<br />

virus, de spams, de pirates… La vie<br />

privée sera une denrée négociab<strong>le</strong>: on<br />

choisira d’être affiché sur Internet parce<br />

que cela présentera certains avantages.<br />

Cette « transparence » engendrera de<br />

nouvel<strong>le</strong>s relations. Il f<strong>au</strong>dra donc se<br />

protéger et pour cela utiliser des<br />

moyens numériques de manière à<br />

assurer la confidentialité des in<strong>format</strong>ions.<br />

Ceci s’apprend, <strong>le</strong>s solutions<br />

sont même très fiab<strong>le</strong>s, sachant qu’<strong>au</strong><br />

fur et à mesure que <strong>le</strong>s privés et <strong>le</strong>s<br />

entreprises se protégeront, <strong>le</strong>s pirates,<br />

<strong>le</strong>s spammeurs, <strong>le</strong>s « hackers », <strong>le</strong>s<br />

craqueurs trouveront <strong>le</strong> moyen de <strong>le</strong>s<br />

détourner.<br />

D.: Quels garde-fous éthiques, notamment,<br />

f<strong>au</strong>dra-t-il mettre en place et<br />

comment ?<br />

J. de R. : La bioéthique, domaine dans<br />

<strong>le</strong>quel la France a été pionnière sur la<br />

scène internationa<strong>le</strong>, contribue déjà à<br />

dessiner <strong>le</strong>s limites des pouvoirs que<br />

nous accordent la génomique (étude<br />

du séquençage des chromosomes) et<br />

la transgenèse (intégration stab<strong>le</strong> d’un<br />

gène étranger dans un génome hôte).<br />

L’infoéthique est la nécessité de réfléchir<br />

sur <strong>le</strong> plan philosophique et moral<br />

à ce que l’on fait de l’in<strong>format</strong>ion<br />

des <strong>au</strong>tres, el<strong>le</strong> doit nous guider<br />

dans la protection de la vie privée,<br />

l’épanouissement de la personnalité.<br />

L’écoéthique pourra nous aider à léguer<br />

à nos enfants une planète digne d’eux,<br />

sans la détruire ou mettre en c<strong>au</strong>se <strong>le</strong>s<br />

grands cyc<strong>le</strong>s écologiques. Cette<br />

réf<strong>le</strong>xion est engagée dans des groupes<br />

qui partagent <strong>le</strong>s mêmes va<strong>le</strong>urs. C’est<br />

une réponse citoyenne, et même une<br />

corégulation citoyenne, car je pense<br />

que la régulation ne peut pas se faire<br />

toujours du h<strong>au</strong>t vers <strong>le</strong> bas, mais <strong>au</strong>ssi<br />

remonter de la base vers <strong>le</strong> h<strong>au</strong>t. Entre<br />

<strong>le</strong>s règ<strong>le</strong>s de conduite édictées par <strong>le</strong>s<br />

gouvernants et l’<strong>au</strong>torégulation des individus<br />

eux-mêmes, responsab<strong>le</strong>s et solidaires<br />

(ce qu’ils ne sont pas encore…),<br />

on peut imaginer une régulation<br />

citoyenne participative où <strong>le</strong>s individus<br />

FLUX + BUZZ = BIZ<br />

conscients des règ<strong>le</strong>s de conduite pourraient<br />

régu<strong>le</strong>r progressivement <strong>le</strong> système.<br />

Pour cela, il f<strong>au</strong>t dispenser une<br />

in<strong>format</strong>ion de base, c’est <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> de la<br />

presse et de la Cité des sciences. Mais<br />

il f<strong>au</strong>t <strong>au</strong>ssi engager une réf<strong>le</strong>xion plus<br />

profonde, de nature sociologique, philosophique<br />

et éthique.<br />

ZOOM<br />

Cette formu<strong>le</strong>, développée par Joël de Rosnay,<br />

illustre un des principes de la « nouvel<strong>le</strong> nouvel<strong>le</strong><br />

économie » qui émerge avec l’apparition des<br />

médias des masses et des créateurs de contenus<br />

sur Internet.<br />

« Reposant sur <strong>le</strong> principe des flux massifs<br />

d’usagers et la diversification des propositions,<br />

la personnalisation de l’offre <strong>au</strong>x consommateurs<br />

à faib<strong>le</strong> coût est possib<strong>le</strong>. Le succès de ces<br />

services à va<strong>le</strong>ur ajoutée est garanti par <strong>le</strong><br />

bouche à oreil<strong>le</strong> ou buzz. (…) Mieux v<strong>au</strong>t gagner<br />

0,10 €sur dix millions de personnes avec 90 %<br />

de marge grâce <strong>au</strong> Web 2.0 que 100 €sur dix<br />

mil<strong>le</strong> personnes avec 30 % de marge suivant <strong>le</strong><br />

modè<strong>le</strong> économique classique : <strong>le</strong>s dépenses en<br />

marketing et en publicité s’avérant dans <strong>le</strong><br />

second cas be<strong>au</strong>coup plus importantes, <strong>le</strong><br />

bénéfice final ne représente que trente mil<strong>le</strong><br />

euros ! Le buzz n’est <strong>au</strong>tre qu’un formidab<strong>le</strong> outil<br />

marketing gratuit et amplificateur, qui sera la<br />

source de nouvel<strong>le</strong>s affaires. »<br />

Extrait de 2020 : Les scénarios du futur<br />

D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />

07


D’accord / Pas d’accord<br />

PAS D’ACCORD<br />

Je dirige un bure<strong>au</strong> d’études<br />

spécialisé dans <strong>le</strong> traitement<br />

de l’e<strong>au</strong>. Nous travaillons pour<br />

des industriels pour améliorer<br />

<strong>le</strong> cyc<strong>le</strong> de l’e<strong>au</strong> : économies<br />

d’e<strong>au</strong>, retraitement… Comme<br />

nous faisons pas mal de<br />

recherches, que nous travaillons<br />

avec des étudiants,<br />

sans que cela soit bien<br />

évidemment rapidement<br />

rentab<strong>le</strong>, un ami m’a conseillé<br />

il y a deux ans de déposer un<br />

dossier de crédit d’impôt.<br />

C’est un peu compliqué, donc<br />

j’ai dû faire appel à un cabinet<br />

de conseil pour monter <strong>le</strong> dossier.<br />

En 2005, j’ai ainsi obtenu<br />

un Crédit Impôt Recherche<br />

de 15 000 euros et en 2006,<br />

comme j’avais entre-temps<br />

RÉSUMÉ<br />

Inst<strong>au</strong>ré en 1982, <strong>le</strong> Crédit Impôt Recherche permet <strong>au</strong>x<br />

sociétés qui investissent dans <strong>le</strong> développement de nouve<strong>au</strong>x produits<br />

et de procédés industriels à contenu technologique, de réduire <strong>le</strong>ur<br />

imposition. Annoncée par Christine Lagarde fin août, la réduction d’impôt<br />

accordée <strong>au</strong>x entreprises <strong>au</strong> titre du Crédit Impôt Recherche sera portée<br />

de 10 % à 30 % des investissements en recherche et développement.<br />

L’évolution du Crédit Impôt Recherche est-il susceptib<strong>le</strong> d’engendrer<br />

davantage de projets de recherches dans <strong>le</strong>s entreprises du <strong>CJD</strong>?<br />

ALLEZ-VOUS PLUS UTILISER<br />

LE CRÉDIT IMPÔT RECHERCHE ?<br />

08<br />

MATHIAS<br />

WELSCHBILLIG<br />

(<strong>CJD</strong> Vannes)<br />

EAU & INDUSTRIE,<br />

14 personnes<br />

« Je n’ai toujours<br />

pas reçu <strong>le</strong>s crédits<br />

d’impôts attendus !»<br />

D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />

obtenu <strong>le</strong> statut de Jeune<br />

entreprise innovante, j’ai<br />

bénéficié de 78 000 euros<br />

de crédit d’impôt.<br />

Cela nous a aidés à nous<br />

consacrer à la recherche<br />

sans arrière-pensées pendant<br />

quelque temps et cela porte<br />

ses fruits <strong>au</strong>jourd’hui.<br />

Cette année, je n’ai pas<br />

représenté de dossier,<br />

d’abord parce que maintenant<br />

il me f<strong>au</strong>t développer<br />

et piloter <strong>le</strong>s projets<br />

en cours. Ensuite parce<br />

que j’ai bien reçu<br />

la facture du cabinet<br />

conseil qui m’a aidé<br />

à monter <strong>le</strong> dossier,<br />

mais toujours pas<br />

<strong>le</strong>s crédits d’impôts<br />

en question !<br />

D’ACCORD<br />

We<strong>le</strong>da est un laboratoire<br />

pharmaceutique<br />

qui fabrique et distribue<br />

des produits<br />

pharmaceutiques et<br />

cosmétiques naturels<br />

(médicaments homéopathiques,<br />

hui<strong>le</strong>s de<br />

massage, crèmes de<br />

soin…). L’entreprise<br />

connaît un très fort<br />

développement puisque<br />

nous avons doublé,<br />

en deux ans, <strong>le</strong> chiffre<br />

d’affaires de l’activité<br />

cosmétique. Nous avons<br />

en projet de gros investissements,<br />

notamment la<br />

construction de deux bâtiments,<br />

l’un dédié à la production<br />

pharmaceutique et à<br />

la logistique de distribution,<br />

l’<strong>au</strong>tre à la production de<br />

cosmétiques.<br />

Nous faisons deux types<br />

de recherches : l’une fondamenta<strong>le</strong><br />

sur <strong>le</strong>s principes<br />

actifs, par exemp<strong>le</strong><br />

sur <strong>le</strong>s effets<br />

d’un médicament<br />

homéopathique<br />

indiqué dans <strong>le</strong>s<br />

troub<strong>le</strong>s du sommeil<br />

; l’<strong>au</strong>tre plus<br />

appliquée sur<br />

l’amélioration ou<br />

PAR MICHÈLE BUINET<br />

la diversification de médicaments<br />

galéniques (basés sur<br />

<strong>le</strong>s végét<strong>au</strong>x). Cela représente<br />

des sommes colossa<strong>le</strong>s.<br />

Depuis 2002, <strong>le</strong> Crédit Impôt<br />

Recherche a représenté entre<br />

150 000 et 200 000 euros.<br />

Il nous a <strong>au</strong>ssi permis de<br />

be<strong>au</strong>coup mieux identifier<br />

ce qui re<strong>le</strong>vait de la recherche<br />

et que nous sous-évaluions<br />

(veil<strong>le</strong>, séminaires…).<br />

J’espère donc que <strong>le</strong>s dernières<br />

mesures annoncées<br />

par <strong>le</strong> gouvernement rentreront<br />

en œuvre dès cette<br />

année. El<strong>le</strong>s permettent<br />

en effet de valoriser l’effort<br />

annuel de recherche et<br />

d’en <strong>au</strong>gmenter <strong>le</strong> volume.<br />

Un bémol, cependant,<br />

la démarche est comp<strong>le</strong>xe.<br />

C’est extrêmement technique<br />

et j’ai dû me former une<br />

journée à Paris pour pouvoir<br />

remplir <strong>le</strong> dossier.<br />

STÉPHANE<br />

GUILLEMOT<br />

(<strong>CJD</strong> Mulhouse)<br />

WELEDA,<br />

340 personnes<br />

« Cette démarche permet<br />

de valoriser l’effort annuel<br />

de recherche et d’en<br />

<strong>au</strong>gmenter <strong>le</strong> volume. »


Ils bougent<br />

D’origine britannique, Jonathan Hall a créé<br />

son entreprise en France et adhéré <strong>au</strong> <strong>CJD</strong><br />

il y a quelques années. Ancien membre<br />

du Bure<strong>au</strong> national sous la présidence de<br />

Françoise Cocuel<strong>le</strong>, il a eu l’opportunité de<br />

s’expatrier en Chine. Une expérience qu’il ne<br />

regrette pas comme en témoigne cette <strong>le</strong>ttre. 1<br />

Lettre de CHINE<br />

1 Lettre rédigée<br />

à partir d’une<br />

conversation<br />

téléphonique<br />

10<br />

CHERS AMIS,<br />

I<br />

l y a une vie après <strong>le</strong> Bure<strong>au</strong> national,<br />

une vie <strong>au</strong>-delà de la France<br />

et de l’Europe, et l’on gagne toujours à<br />

prendre <strong>le</strong> risque d’al<strong>le</strong>r voir ce qui se<br />

passe ail<strong>le</strong>urs. C’est <strong>le</strong> sentiment qui<br />

m’habite depuis que j’ai quitté<br />

l’Hexagone, il y a un an, pour suivre<br />

mon épouse en Chine, où el<strong>le</strong> était<br />

nommée à la tête de la filia<strong>le</strong> d’une<br />

grande entreprise européenne.<br />

OUI, C’EST LE MARI qui a suivi la<br />

femme et c’est moi qui me suis be<strong>au</strong>coup<br />

occupé de nos deux enfants<br />

quand nous sommes arrivés à Pékin, ou<br />

plutôt à Beijing, comme on l’écrit maintenant.<br />

On peut dire que ce dépaysement<br />

est tombé pour moi <strong>au</strong> bon<br />

moment puisqu’il coïncidait avec la fin<br />

de mon mandat <strong>au</strong> Bure<strong>au</strong> national<br />

et donc de mon engagement quasi<br />

à temps p<strong>le</strong>in <strong>au</strong> <strong>CJD</strong>. Après tant<br />

d’années d’une vie à 200 à l’heure, je<br />

vous l’avoue, je redoutais be<strong>au</strong>coup de<br />

me retrouver devant un grand vide. Plus<br />

on progresse dans <strong>le</strong> mouvement, plus<br />

on jong<strong>le</strong> entre <strong>le</strong>s réunions, l’entreprise<br />

et la vie de famil<strong>le</strong>, plus on a tendance<br />

à se sentir performant, à se croire indispensab<strong>le</strong>,<br />

et plus il semb<strong>le</strong> diffici<strong>le</strong> de<br />

se réadapter à la vie « norma<strong>le</strong> » d’un<br />

simp<strong>le</strong> chef d’entreprise.<br />

Chacun sa solution. La mienne a été,<br />

sans que j’en aie vraiment conscience<br />

<strong>au</strong> début, de partir à 12 000 kilomètres.<br />

Il y en a peut-être des plus sim-<br />

D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />

p<strong>le</strong>s, mais croyez-moi, cel<strong>le</strong>-ci a été<br />

efficace. Dans un environnement où<br />

tout est nouve<strong>au</strong>, différent, dans cette<br />

Chine en p<strong>le</strong>ine effervescence, je n’ai<br />

pas eu <strong>le</strong> temps de m’ennuyer, de<br />

penser <strong>au</strong> vide. Et nous partageons<br />

l’impression, avec <strong>le</strong>s nombreux expatriés<br />

qui vivent ici, que l’Empire du<br />

milieu est bien devenu <strong>le</strong> centre du<br />

monde et va l’être plus encore avec <strong>le</strong>s<br />

Jeux Olympiques en 2008, dont <strong>le</strong>s<br />

Chinois veu<strong>le</strong>nt faire un grand succès.<br />

TOUTES LES GRANDES ENTREPRISES<br />

mondia<strong>le</strong>s sont présentes ici. Moi, plus<br />

modestement, je suis en train de créer<br />

une filia<strong>le</strong> de la mienne, Accelonix,<br />

dans l’é<strong>le</strong>ctronique. Nous sommes<br />

<strong>au</strong>jourd’hui quatre et commençons nos<br />

premières ventes.<br />

Mais à ce propos <strong>au</strong>ssi, j’ai reçu une<br />

bel<strong>le</strong> <strong>le</strong>çon. Je suis un des deux fondateurs<br />

d’Accelonix en France, évidemment<br />

très impliqué dans mon entreprise.<br />

Quand j’ai su que j’allais partir,<br />

j’ai préparé ce départ qui a été bien<br />

accueilli : tout <strong>le</strong> monde a vu l’intérêt<br />

d’al<strong>le</strong>r s’implanter en Chine et nous<br />

nous sommes réorganisés pour pallier<br />

mon absence en France. Mais <strong>le</strong> plus<br />

drô<strong>le</strong> de l’histoire, c’est que, depuis<br />

que je ne suis plus présent tous <strong>le</strong>s<br />

jours, <strong>le</strong>s résultats sont bien meil<strong>le</strong>urs…<br />

Certes, la conjoncture économique est<br />

très favorab<strong>le</strong> dans <strong>le</strong> secteur, mais je<br />

crois surtout que mon départ a permis<br />

à certains d’évoluer et de prendre des<br />

PAR BRUNO TILLIETTE<br />

Jonathan Hall et sa famil<strong>le</strong> dans<br />

<strong>le</strong>ur maison de Pékin<br />

responsabilités. Là encore, il est bien<br />

que <strong>le</strong> dirigeant cesse de se croire<br />

indispensab<strong>le</strong> et laisse un peu de place<br />

<strong>au</strong>x <strong>au</strong>tres. L’entreprise est be<strong>au</strong>coup<br />

plus capab<strong>le</strong> de s’adapter à des circonstances<br />

nouvel<strong>le</strong>s qu’on ne <strong>le</strong> croit.<br />

C’est d’ail<strong>le</strong>urs ce que nous apprenions<br />

dans l’un des modu<strong>le</strong>s de <strong>format</strong>ion<br />

Copernic, délivré par notre mouvement.<br />

UNE DERNIÈRE CHOSE qui vous surprendra<br />

sans doute, vous qui êtes restés<br />

là-bas. Comme vous, j’avais tendance<br />

à pester contre <strong>le</strong>s méfaits de<br />

l’administration, ses <strong>le</strong>nteurs, ses lourdeurs.<br />

À ma grande surprise, j’ai découvert<br />

en Chine des « services publics »<br />

français très compétents, aimab<strong>le</strong>s et<br />

performants. La mission économique,<br />

la chambre de commerce, Ubifrance,<br />

la Coface ont fait preuve de be<strong>au</strong>coup<br />

d’efficacité et m’ont bien soutenu pour<br />

monter mon entreprise. J’invite ceux<br />

qui hésitent encore à se développer à<br />

l’étranger à en profiter…<br />

On dit parfois que partir, c’est mourir<br />

un peu. Pour moi, vous voyez que cela<br />

a été une occasion simp<strong>le</strong>ment de<br />

prendre de la distance et de renaître<br />

d’une <strong>au</strong>tre façon, de s<strong>au</strong>ter sans dommage<br />

<strong>au</strong>-dessus du vide.<br />

À bientôt, chers amis JD, à Paris ou à<br />

Beijing, si l’aventure vous tente.<br />

Best regards,<br />

Jonathan Hall


12<br />

Ils entreprennent<br />

D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />

Le <strong>CJD</strong> se fait depuis longtemps <strong>le</strong> chantre des<br />

groupements d’employeurs, ces structures associatives<br />

qui mettent à disposition de <strong>le</strong>urs membres des salariés<br />

en temps partagé, emb<strong>au</strong>chés à p<strong>le</strong>in-temps et liés<br />

par un contrat de travail <strong>au</strong> groupement. Éric Scaon<br />

est un pionnier des groupements d’employeurs.<br />

cultés à fidéliser et à former des salariés<br />

qu’il ne peut emb<strong>au</strong>cher à temps comp<strong>le</strong>t.<br />

Ainsi naît <strong>le</strong> Groupe Frigo, spécialisé<br />

dans la chaîne du froid, qui permet<br />

à des salariés de travail<strong>le</strong>r toute l’année<br />

mais pour des entreprises différentes.<br />

Créé en 1993 pour quatre entreprises,<br />

ce groupement compte <strong>au</strong>jourd’hui 55<br />

salariés, forme tous <strong>le</strong>s ans entre 10 et<br />

14 apprentis, et dispose désormais de 40<br />

agences sur la France entière.<br />

Enfin, plus récemment, Éric a développé<br />

<strong>le</strong> Groupe Évolutys, qui regroupe des<br />

cadres et non cadres en ressources<br />

humaines, qualité, in<strong>format</strong>ique, comptabilité,<br />

infographie, sécurité… que se<br />

partagent des PME angevines.<br />

Un <strong>au</strong>tre groupement d’employeurs est<br />

actuel<strong>le</strong>ment en création sur Cho<strong>le</strong>t.<br />

DÉFINITION<br />

Une association d’entreprises loi 1901 à but non lucratif dont<br />

l’objectif est de mettre à disposition de ses adhérents des<br />

salariés. Le groupement d’employeurs assure <strong>le</strong> recrutement,<br />

l’emb<strong>au</strong>che et la <strong>format</strong>ion de ses salariés.<br />

PAR MICHÈLE BUINET<br />

Éric Scaon<br />

LA SUBTILE ALCHIMIE DES<br />

GROUPEMENTS D’EMPLOYEURS<br />

E n<br />

1993, Éric Scaon termine son<br />

troisième cyc<strong>le</strong> de management<br />

dans <strong>le</strong> Groupe Anjou, un groupement<br />

d’employeurs qui emploie, pour des<br />

coopératives arborico<strong>le</strong>s et des entreprises<br />

hortico<strong>le</strong>s, des salariés saisonniers.<br />

L’avantage du système, connu<br />

depuis longtemps dans <strong>le</strong> secteur agrico<strong>le</strong>,<br />

est de disposer de manière régulière<br />

de collaborateurs fidélisés et formés<br />

tout en permettant à ces personnes<br />

d’avoir un emploi stab<strong>le</strong> et à temps p<strong>le</strong>in<br />

en travaillant pour plusieurs employeurs.<br />

Séduit par l’innovation que représentent<br />

<strong>le</strong>s groupements d’employeurs (<strong>au</strong>torisés<br />

depuis 1992 pour tout type<br />

d’entreprise), Éric Scaon vend <strong>le</strong> concept<br />

à un chef d’entreprise qui, à la tête de<br />

quatre entreprises, rencontre des diffi-<br />

QU’EST-CE QU’UN GROUPEMENT D’EMPLOYEURS ?<br />

Pour en<br />

savoir plus<br />

• Les groupements<br />

d’employeurs : pour<br />

créer des emplois et<br />

développer <strong>le</strong>s PME,<br />

<strong>CJD</strong>, juin 2004<br />

• www.ffge.fr<br />

UNE EXTENSION DES RH<br />

DE CHAQUE ENTREPRISE<br />

Les avantages de la formu<strong>le</strong> sont nombreux:<br />

f<strong>le</strong>xibilité, <strong>format</strong>ion, création de<br />

richesse à plusieurs, accès à des profils<br />

à forte va<strong>le</strong>ur ajoutée recherchés par <strong>le</strong>s<br />

entreprises, emploi stab<strong>le</strong>, variété, adaptabilité<br />

pour <strong>le</strong> salarié.<br />

Mais pour que ça marche, <strong>le</strong>s entreprises<br />

doivent s’engager dans la durée,<br />

sur plusieurs années. Chez Groupe Évolutys,<br />

<strong>le</strong>s salariés travail<strong>le</strong>nt un ou deux<br />

jours par semaine dans deux ou trois<br />

entreprises différentes ; chez Groupe<br />

Frigo, <strong>le</strong>s missions sont <strong>au</strong> mois; pour<br />

Groupe Anjou, à la saison, mais toujours<br />

sur plusieurs années. « Cela suppose<br />

que <strong>le</strong> chef d’entreprise ait une certaine<br />

vision stratégique de son entreprise<br />

à trois ans », explique Éric Scaon.<br />

Côté entreprises clientes, cela nécessite<br />

donc une stratégie mais <strong>au</strong>ssi une même<br />

approche des ressources humaines :<br />

« Nous ne faisons pas entrer dans<br />

<strong>le</strong> groupement des dirigeants qui<br />

n’ont pas de considération pour <strong>le</strong>urs<br />

salariés, car notre philosophie<br />

consiste à voir <strong>le</strong>s RH comme un<br />

centre de profit et non comme un<br />

centre de coût », poursuit Éric Scaon.<br />

Le groupement d’employeurs fina<strong>le</strong>ment


LES AVANTAGES POUR LE SALARIÉ<br />

Exercer son métier <strong>au</strong> sein d’un groupement d’employeurs garantit à un salarié des<br />

avantages en termes de :<br />

• sécurité, puisqu’il dispose d’un contrat à durée indéterminée et qu’il est lié à un groupe<br />

d’entreprises moins fragi<strong>le</strong> que chacune de ses composantes prise isolément ;<br />

• rémunération, puisque c’est <strong>au</strong>ssi un volume de travail qui lui est garanti ;<br />

• disponibilité, puisque <strong>le</strong>s plannings individuels sont stab<strong>le</strong>s ; l’emploi du temps<br />

professionnel typique du salarié de groupements d’employeurs est organisé sur<br />

l’année ou la semaine entre deux ou trois entreprises, qui se sont concertées <strong>au</strong> sein<br />

du groupement : la personne peut organiser son temps privé (personnel, familial,<br />

social...) avec sérénité.<br />

LES AVANTAGES POUR L’ENTREPRISE<br />

Pour l’employeur qui en est membre, <strong>le</strong> GE présente plusieurs avantages :<br />

• la productivité grâce à un personnel non permanent opérationnel et fidélisé ;<br />

• disposer de compétences fidélisées et à temps partiel ;<br />

• disposer de cadres ou de techniciens qualifiés en proportion de ses besoins ;<br />

• accroître la motivation et la polyva<strong>le</strong>nce des salariés non permanents ;<br />

• maîtriser <strong>le</strong>s coûts des personnels non permanents.<br />

est une extension des ressources<br />

humaines de chaque entreprise. Groupe<br />

Frigo dépense chaque année 8 à 10 %<br />

de sa masse salaria<strong>le</strong> en <strong>format</strong>ion sur<br />

<strong>le</strong> savoir-faire, mais <strong>au</strong>ssi <strong>le</strong> savoir-être et<br />

la capacité à travail<strong>le</strong>r pour plusieurs<br />

entreprises et à s’intégrer dans des entreprises<br />

et équipes différentes.<br />

UNE PHILOSOPHIE<br />

DE PARTAGE ET<br />

DE RESPONSABILITÉ<br />

Le groupement d’employeurs repose<br />

sur une philosophie de partage et de<br />

responsabilité. Il est créé et dirigé par<br />

des chefs d’entreprise qui mutualisent<br />

<strong>le</strong>urs ressources et sont solidairement<br />

responsab<strong>le</strong>s des dettes socia<strong>le</strong>s et salaria<strong>le</strong>s<br />

du groupement. « L’implication<br />

des chefs d’entreprise est fondamenta<strong>le</strong>,<br />

c’est la clé de voûte du système<br />

pour rester dans un esprit de coopération<br />

et éviter celui de la prestation<br />

de services que l’on achète »,<br />

explique Éric Scaon.<br />

Si une entreprise lâche un salarié, <strong>le</strong><br />

groupement doit pouvoir lui fournir <strong>le</strong>s<br />

heures du travail qui lui manquent ;<br />

sinon, il est obligé de <strong>le</strong> licencier, ce qui<br />

pénalise <strong>le</strong>s <strong>au</strong>tres entreprises à qui il<br />

apportait son savoir-faire. Un règ<strong>le</strong>-<br />

ment intérieur établi par <strong>le</strong> conseil<br />

d’administration, propre à chaque groupement,<br />

définit <strong>le</strong>s règ<strong>le</strong>s ; il fixe, par<br />

exemp<strong>le</strong>, un délai de prévenance de<br />

trois mois pour mettre fin à un contrat.<br />

« Le groupement d’employeurs<br />

apporte be<strong>au</strong>coup de soup<strong>le</strong>sse,<br />

mais <strong>le</strong> contrat moral est très fort,<br />

explique Éric Scaon. Nous ne sommes<br />

pas dans une relation client-fournisseur,<br />

mais dans une relation de partenariat<br />

et de mutualisation des ressources<br />

humaines. C’est pourquoi<br />

la formu<strong>le</strong> ne s’adresse pas à tous<br />

<strong>le</strong>s salariés, ni à toutes <strong>le</strong>s entreprises.<br />

Il f<strong>au</strong>t des personnes <strong>au</strong>tonomes,<br />

capab<strong>le</strong>s de s’adapter, et<br />

intéressées pour développer des<br />

compétences diversifiées. Il f<strong>au</strong>t<br />

<strong>au</strong>ssi des dirigeants capab<strong>le</strong>s de<br />

travail<strong>le</strong>r ensemb<strong>le</strong>, de s’investir dans<br />

une relation gagnant-gagnant et de<br />

comprendre qu’on gagne plus souvent<br />

avec <strong>le</strong>s <strong>au</strong>tres que contre. »<br />

Pas étonnant que <strong>le</strong> <strong>CJD</strong> soit un terre<strong>au</strong><br />

favorab<strong>le</strong> à l’éclosion des groupements<br />

d’employeurs…<br />

ZOOM<br />

Groupe Frigo, spécialisé dans la<br />

chaîne du froid, permet à des salariés<br />

de travail<strong>le</strong>r toute l’année, mais pour<br />

des entreprises différentes.<br />

« L’implication<br />

du chef d’entreprise<br />

est indispensab<strong>le</strong>»<br />

D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />

13


14<br />

Ils innovent<br />

ENTREPRISES<br />

COMMUNICANTES<br />

ET RESPONSABLES<br />

ÉCOMMUNICATION<br />

« Lorsque j’ai repris ICOM, en 1993,<br />

j’avais à l’esprit de valoriser l’<strong>au</strong>tonomie,<br />

la participation, <strong>le</strong> respect des<br />

hommes, la responsabilité. C’étaient<br />

déjà mes va<strong>le</strong>urs, mais ce n’était pas<br />

structuré. En 2001, la SARL est devenue<br />

une SA avec participation des<br />

salariés <strong>au</strong> capital, et dans <strong>le</strong> même<br />

temps, j’adhérais <strong>au</strong> <strong>CJD</strong>. Je suis<br />

entré dans la démarche de Performance<br />

globa<strong>le</strong> et j’ai lancé notre premier<br />

projet d’entreprise en faisant participer<br />

l’ensemb<strong>le</strong> des salariés à son<br />

élaboration. Dans la foulée, nous<br />

avons formalisé notre système de<br />

va<strong>le</strong>urs, opté pour l’intéressement<br />

égalitaire des collaborateurs (30 % du<br />

résultat net avant impôt à l’époque),<br />

anticipé <strong>le</strong>s 35 heures sans baisse de<br />

salaire, choisi la transparence de<br />

l’in<strong>format</strong>ion économique pour tous…<br />

Le deuxième projet d’entreprise,<br />

Convergence 2010, a été l’occasion<br />

en 2005 d’engager définitivement<br />

l’entreprise dans une politique globa<strong>le</strong><br />

de responsabilité socia<strong>le</strong>, sociéta<strong>le</strong><br />

et environnementa<strong>le</strong>.<br />

L’entreprise, qui avait redémarré en<br />

1993 avec cinq ou six salariés, s’est<br />

D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />

développée, et la nécessité d’investir<br />

dans de nouve<strong>au</strong>x loc<strong>au</strong>x s’est fait<br />

sentir en 2005. En cohérence avec <strong>le</strong><br />

projet de l’entreprise, <strong>le</strong> choix a été fait<br />

de construire un écolieu selon la<br />

démarche HQE (H<strong>au</strong>te Qualité Environnementa<strong>le</strong>),<br />

en intégrant tout<br />

<strong>au</strong>tant <strong>le</strong> souci de maîtriser l’impact<br />

sur l’environnement que <strong>le</strong> confort de<br />

travail et <strong>le</strong> bien-être des salariés.<br />

Entièrement construit en bois, ce bâtiment<br />

est ch<strong>au</strong>ffé par géothermie.<br />

Ouate de cellulose, chanvre et vide<br />

sanitaire permettent l’isolation et une<br />

ventilation naturel<strong>le</strong>. La lumière naturel<strong>le</strong><br />

est privilégiée, tout comme <strong>le</strong>s<br />

éclairages basse consommation.<br />

ARCHIDURABLE ®<br />

Mais surtout, <strong>le</strong> bâtiment est imaginé<br />

pour mettre l’homme <strong>au</strong> cœur de<br />

l’entreprise. Sources d’inspiration,<br />

l’homme de Vitruve de Léonard de<br />

Vinci, ou <strong>le</strong> Nombre d’Or. Comme<br />

pour <strong>le</strong> Parthénon, <strong>le</strong>s cathédra<strong>le</strong>s ou<br />

<strong>le</strong> Modulor conçu par Le Corbusier, la<br />

« divine proportion » a guidé <strong>le</strong>s tracés<br />

architectur<strong>au</strong>x. Nous avons fait appel<br />

<strong>au</strong>ssi à la technique chinoise du<br />

Feng Shui pour agencer des espaces<br />

PAR NATHALIE CROUZET<br />

À contre-courant du communicant sty<strong>le</strong> 99 F de Frédéric Beigbeder, ces jeunes agences<br />

n’ont pas fait du développement durab<strong>le</strong> des slogans, mais un état d’esprit. Une vision de<br />

<strong>le</strong>ur métier qu’el<strong>le</strong>s n’hésitent pas à décliner sur tous <strong>le</strong>s modes. Leurs points communs ?<br />

Des va<strong>le</strong>urs fondatrices qui contenaient déjà <strong>le</strong>s germes de <strong>le</strong>urs engagements, une<br />

cohérence dans <strong>le</strong>urs relations avec toutes <strong>le</strong>urs parties prenantes et une volonté forte<br />

de <strong>le</strong>ur dirigeant d’irradier tous <strong>le</strong>urs partenaires par <strong>le</strong>ur exemplarité. Communiquer,<br />

c’est bien. Communiquer responsab<strong>le</strong>, c’est mieux.<br />

DANIEL LUCIANI<br />

• Icom, communication<br />

plurimédia, conseil,<br />

création, <strong>format</strong>ion<br />

• 28 salariés à Toulouse<br />

harmonieux en fonction des flux<br />

d’énergie. Physiquement <strong>au</strong> centre<br />

des bure<strong>au</strong>x, <strong>le</strong> créative center est<br />

une zone symbolique où salariés<br />

et clients se retrouvent pour travail<strong>le</strong>r<br />

et co-créer.<br />

Cette idée de construction H<strong>au</strong>te<br />

Qualité Humaine et Environnementa<strong>le</strong>,<br />

nous l’avons déposée sous <strong>le</strong><br />

concept Archidurab<strong>le</strong>®. Parce que<br />

pour développer notre entreprise et<br />

réaliser nos projets nous devons<br />

séduire des partenaires en valorisant


AGENCE DURABLE ET ENGAGÉE<br />

Investie depuis 2004 dans une démarche de<br />

Performance globa<strong>le</strong>, la tribu Inoxia décline ses<br />

engagements à partir des va<strong>le</strong>urs de l’entreprise.<br />

« CRÉACTIVITÉ »<br />

L’esprit pionnier est un<br />

des fondament<strong>au</strong>x de<br />

notre entreprise. Nous<br />

sommes une agence<br />

d’art appliqué qui se<br />

doit d’être productive<br />

et toujours à l’affût des<br />

innovations, nouvel<strong>le</strong>s<br />

tendances et technologies…<br />

CONVIVIALITÉ<br />

Fondatrice éga<strong>le</strong>ment,<br />

pour que chacun résiste<br />

<strong>au</strong> stress. Nous sommes<br />

une tribu, cultivons cet<br />

esprit et favorisons<br />

l’engagement de tous<br />

dans un progrès global,<br />

de la professionnalisation<br />

et la montée en<br />

compétence jusqu’à des<br />

déclinaisons possib<strong>le</strong>s<br />

dans <strong>le</strong>s postures per-<br />

nos actions, nous avons créé un blog<br />

qui nous permet <strong>au</strong>ssi de faire de la<br />

pédagogie <strong>au</strong>tour de cette démarche.<br />

Nous sommes « archi-fiers » de cette<br />

démarche de développement durab<strong>le</strong>,<br />

car el<strong>le</strong> vient d’être récompensée<br />

par un prix lors des Trophées de la<br />

Communication de Midi-Pyrénées.<br />

Notre modè<strong>le</strong> de développement économiquement<br />

responsab<strong>le</strong> a porté<br />

ses fruits : plus 56 % de chiffre<br />

d’affaires entre 2005 et 2006, plus<br />

10 % de résultat net avant intéressement<br />

et impôt. Nos clients sont<br />

séduits par la démarche et y trouvent<br />

une cohérence avec <strong>le</strong>s va<strong>le</strong>urs<br />

qu’eux-mêmes souhaitent promouvoir.<br />

»<br />

Pour al<strong>le</strong>r plus loin<br />

Le blog www.archidurab<strong>le</strong>.com/blog/<br />

sonnel<strong>le</strong>s. Nous avons<br />

choisi des loc<strong>au</strong>x<br />

proches du tram, mettons<br />

des vélos à disposition<br />

de nos collaborateurs.<br />

Nous <strong>le</strong>ur faisons<br />

livrer des paniers bio<br />

une fois par semaine,<br />

organisons des campagnes<br />

de vaccination<br />

contre la grippe ou de<br />

don du sang…<br />

ACCOMPAGNEMENT<br />

De nos clients et fournisseurs<br />

d’abord, avec<br />

qui nous développons<br />

des relations partenaria<strong>le</strong>s.<br />

Nous avons en<br />

projet d’offrir un<br />

package Bilan Carbone<br />

Communication + Campagne<br />

pour en compenser<br />

l’empreinte écologique.<br />

De la profession<br />

<strong>au</strong>ssi, pour faire bouger<br />

notre métier en cohé-<br />

rence avec <strong>le</strong>s enjeux<br />

d’<strong>au</strong>jourd’hui. D’où mon<br />

engagement dans <strong>le</strong> col<strong>le</strong>ctif<br />

Communication<br />

Avenir avec l’Ademe, <strong>le</strong><br />

Conseil régional, notre<br />

association professionnel<strong>le</strong>,<br />

<strong>le</strong> BVP…<br />

ÉTHIQUE<br />

Être acteurs dans la<br />

construction d’une<br />

société responsab<strong>le</strong>.<br />

Consommation raisonnée,<br />

achats responsab<strong>le</strong>s,<br />

éco-conception,<br />

relations avec <strong>le</strong>s<br />

éco<strong>le</strong>s, mécénat sportif,<br />

artistique et humanitaire…<br />

Nos actions<br />

internes comme<br />

externes sont toujours<br />

envisagées avec professionnalisme<br />

et la cohérence<br />

avec nos principes<br />

nous permet<br />

d’arbitrer sur <strong>le</strong> choix<br />

des projets.<br />

COMMUNIQUER<br />

GRÂCE AU TROC<br />

PHILIPPE BARRE<br />

• Inoxia, conseil en<br />

communication, multimédia,<br />

création graphique et<br />

éco-conception<br />

• 38 salariés à Borde<strong>au</strong>x<br />

Il est important de donner<br />

en permanence du<br />

souff<strong>le</strong> et du rythme, de<br />

rappe<strong>le</strong>r <strong>le</strong> sens de nos<br />

actions et l’effet <strong>le</strong>vier<br />

qu’el<strong>le</strong>s ont sur nos<br />

clients. Nous venons<br />

d’emb<strong>au</strong>cher un responsab<strong>le</strong><br />

Développement<br />

Durab<strong>le</strong> qui <strong>au</strong>ra pour<br />

mission de suivre <strong>au</strong><br />

quotidien nos projets<br />

et de <strong>le</strong>s faire rayonner.<br />

INNOVATION<br />

Démocratiser l’accès à la communication, tel est l’objectif de<br />

Nolwen Yven et Cédric Bescond qui ont lancé depuis quelques<br />

mois la scop Pop Korn. Cette agence de communication<br />

alternative à Brest propose toutes <strong>le</strong>s prestations plurimédias<br />

classiques dans un esprit solidaire et équitab<strong>le</strong>.<br />

Principa<strong>le</strong> innovation de <strong>le</strong>ur concept : <strong>le</strong> Crédit « Pop ». C'est une monnaie interne qui<br />

permet <strong>au</strong>x structures ayant peu de moyens de rég<strong>le</strong>r une partie de la prestation (jusqu'à<br />

50 %) par un échange de ressources (images, textes, matériels…). Ce système permet<br />

de valoriser <strong>le</strong>s ressources loca<strong>le</strong>s et de créer du lien entre ses différents acteurs.<br />

Pop-Korn est éga<strong>le</strong>ment à l’initiative du Label de Communication équitab<strong>le</strong> qui valorise des<br />

campagnes de pub respectant des critères écologiques et l’utilisation de ressources loca<strong>le</strong>s.<br />

Le client peut éga<strong>le</strong>ment s’engager à verser 2 % supplémentaires sur <strong>le</strong> prix de sa campagne,<br />

qui seront reversés à une association solidaire. Ce label est géré par l’association Synapses.<br />

Pop-Korn vient de recevoir la Mention spécia<strong>le</strong> du Jury Économie socia<strong>le</strong> du Concours Ta<strong>le</strong>nts.<br />

D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />

15


Le DD en pratique<br />

Pour al<strong>le</strong>r<br />

plus loin :<br />

• Etienne Ruth,<br />

tél. : 01 39 56 70 77<br />

eruth@nature-et-decouvertes.com<br />

• En octobre<br />

paraîtra la deuxième<br />

news<strong>le</strong>tter trimestriel<strong>le</strong><br />

Empreinte écologique<br />

du WWF. Contact :<br />

thierry.thouvenot@free.fr<br />

Il s'agit d'un indicateur<br />

exprimé en hectares par<br />

an et par personne identifiant<br />

l'impact humain sur<br />

l'environnement. Il évalue<br />

la surface tota<strong>le</strong> requise<br />

pour produire <strong>le</strong>s ressources<br />

et l’énergie que<br />

nous utilisons, et pour<br />

fournir l’espace néces-<br />

L e<br />

concept d'empreinte écologique<br />

(voir encadré) a été créé il y a quinze<br />

ans par <strong>le</strong> Suisse Al<strong>le</strong>mand Mathis<br />

Wackernagel et <strong>le</strong> Canadien William<br />

Rees. En 2003, Mathis Wackernagel,<br />

qui travail<strong>le</strong> alors avec WWF France,<br />

parvient à convaincre sans trop de difficultés<br />

François Lemarchand, <strong>le</strong> PDGfondateur<br />

de Nature & Découvertes, de<br />

servir d' « entreprise cobaye ». En 2004,<br />

Nature & Découvertes se lance dans<br />

l'aventure, avec l'aide d'Angenius, <strong>le</strong><br />

cabinet de conseil spécialisé dans<br />

l'empreinte écologique. « Notre métier<br />

est de proposer des produits et des<br />

activités de découvertes de la nature<br />

en lien avec des associations loca<strong>le</strong>s.<br />

C'est pourquoi il nous semblait intéressant<br />

de mesurer la pression que<br />

nous exercions sur la biosphère »,<br />

explique Etienne Ruth, <strong>le</strong> Responsab<strong>le</strong><br />

Développement durab<strong>le</strong> de l'enseigne<br />

française. Nature & Découvertes définit<br />

alors trois scenarii: <strong>le</strong> premier propose<br />

d'analyser <strong>le</strong> transport des marchandises,<br />

depuis <strong>le</strong>urs lieux de fabrication<br />

jusqu'<strong>au</strong>x lieux de vente et <strong>le</strong> fonction-<br />

QU’EST-CE QUE L’EMPREINTE ÉCOLOGIQUE ?<br />

16<br />

saire à nos infrastructures.<br />

Un Français a ainsi<br />

besoin d’un peu plus de<br />

5 hectares, un Chinois<br />

1,5 et un Américain près<br />

de 10 hectares. Pour<br />

que tout <strong>le</strong> monde vive<br />

comme nous, Français,<br />

<strong>au</strong>jourd’hui, il nous<br />

f<strong>au</strong>drait trois planètes…<br />

D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />

Comment<br />

mesurer votre<br />

EMPREINTE<br />

ECOLOGIQUE ?<br />

nement des magasins (é<strong>le</strong>ctricité, climatisation,<br />

maintenance, déplacement<br />

des salariés, etc.). Le second intègre <strong>le</strong><br />

premier scénario plus la rénovation des<br />

magasins. Le troisième, enfin, intègre<br />

<strong>le</strong>s deux scénarii plus l'analyse des ressources<br />

naturel<strong>le</strong>s utilisées pour <strong>le</strong>s<br />

produits vendus. Mais ces in<strong>format</strong>ions<br />

s'avèrent très vite impossib<strong>le</strong>s à obtenir,<br />

soit en raison du secret industriel,<br />

soit en raison des commerci<strong>au</strong>x, qui<br />

redoutent de perdre <strong>le</strong>ur travail. C'est<br />

ici même que se situe la limite de<br />

l'empreinte écologique d'une entreprise:<br />

pour qu'el<strong>le</strong> soit tota<strong>le</strong>, il f<strong>au</strong>t que<br />

tous <strong>le</strong>s sous-traitants veuil<strong>le</strong>nt bien<br />

y participer !<br />

PAR FLORENCE LERAY<br />

Les entreprises doivent-el<strong>le</strong>s calcu<strong>le</strong>r <strong>le</strong>ur empreinte écologique ?<br />

Si oui, pourquoi et comment ? La réponse à travers l'exemp<strong>le</strong> de<br />

Nature & Découvertes, la première entreprise française à s'être<br />

lancée dans une tel<strong>le</strong> démarche.<br />

COMMENT RÉALISER<br />

UNE BONNE EMPREINTE ÉCOLOGIQUE ?<br />

Nature & Découvertes opte donc pour<br />

<strong>le</strong> second scénario. Résultat : <strong>le</strong> transport<br />

des marchandises est responsab<strong>le</strong><br />

de 60 % de l'impact environnemental.<br />

Le reste se partage entre <strong>le</strong><br />

transport du personnel et des clients<br />

(30 %) et la construction et la rénovation<br />

des magasins (10 %). Fort de ces<br />

indications, Nature & Découvertes<br />

met alors en place toute une série<br />

d'actions visant à réduire son<br />

empreinte écologique, divisant notamment<br />

par deux ses émissions de gaz<br />

à effet de serre. Aujourd'hui, el<strong>le</strong><br />

est la seu<strong>le</strong> enseigne française de<br />

commerce à être certifiée Iso 14 001<br />

sur l'ensemb<strong>le</strong> de ses sites.<br />

ZOOM<br />

1/ Ne pas s'engager dans une tel<strong>le</strong> démarche si cel<strong>le</strong>-ci n'est<br />

pas suivie de réel<strong>le</strong>s décisions de changement.<br />

2/ Ne pas faire faire tout <strong>le</strong> travail par un cabinet extérieur.<br />

L'entreprise doit participer à l'aventure.<br />

3/ Ne pas commencer par des calculs comp<strong>le</strong>xes, mais simp<strong>le</strong>s.<br />

4/ Ne pas considérer <strong>le</strong>s résultats obtenus comme immuab<strong>le</strong>s,<br />

mais toujours <strong>le</strong>s réévaluer à l'<strong>au</strong>ne d'<strong>au</strong>tres empreintes<br />

écologiques du même secteur.<br />

5/ Penser « volonté de service » et non « rentabilité ». L'empreinte<br />

écologique doit être considérée par l'entreprise comme une<br />

démarche profitab<strong>le</strong> à la planète ET à sa propre durabilité.<br />

6/ L'empreinte écologique ne remplace ni <strong>le</strong> Bilan Carbone,<br />

ni l'Analyse du Cyc<strong>le</strong> de vie. El<strong>le</strong> est complémentaire.<br />

Avec Angenius - ee.angenius.net


18<br />

Dossier<br />

D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />

« Payez votre personnel<br />

<strong>le</strong> moins possib<strong>le</strong> et c'est ce que<br />

vous obtiendrez d'eux.»<br />

Malcom Forbes<br />

RECRUTEMENT ET FIDÉLISATION :<br />

QUELS SONT LES ATOUTS DES PME<br />

FACE AUX GRANDS GROUPES ?<br />

LA PERSISTANCE STATISTIQUE DU CHÔMAGE CACHE UNE RÉALITÉ QUE VIVENT BEAUCOUP DE PME :<br />

une pénurie de compétences dans des secteurs de plus en plus nombreux, qui entrave <strong>le</strong>ur développement.<br />

Face <strong>au</strong>x grands groupes qui se mobilisent pour attirer <strong>le</strong>s meil<strong>le</strong>urs en <strong>le</strong>ur offrant une panoplie d’avantages<br />

divers, el<strong>le</strong>s se sentent souvent désarmées. Pourtant, el<strong>le</strong>s ont des atouts à faire valoir. Ce qui <strong>le</strong>ur manque,<br />

<strong>le</strong> plus souvent, c’est une véritab<strong>le</strong> politique de ressources humaines.


QUESTIONS<br />

Innover pour<br />

MIEUX RECRUTER<br />

de ce dossier, c’est vous, <strong>le</strong>cteurs<br />

Jeunes Dirigeants, qui nous l’avez<br />

directement inspirée. Lorsque vous êtes<br />

réunis pour une occasion ou une <strong>au</strong>tre<br />

L’idée<br />

et que vous discutez ensemb<strong>le</strong>, <strong>le</strong> premier<br />

sujet de conversation de la plupart d’entre vous,<br />

c’est <strong>le</strong> manque de personnel. « On voudrait bien<br />

développer nos PME, dites-vous en substance, on a<br />

l’opportunité de <strong>le</strong> faire, mais on ne trouve personne,<br />

on n’arrive pas à recruter <strong>le</strong>s gens dont on a besoin. »<br />

Pour qui se contente de consulter <strong>le</strong>s statistiques,<br />

cela paraît étonnant. Le chômage est en baisse,<br />

certes, mais il est encore très é<strong>le</strong>vé et ne diminue<br />

que très <strong>le</strong>ntement. Mais si on vous écoute de plus<br />

près, comme nous l’avons fait pour ce dossier, on<br />

comprend mieux ce qui se passe sur <strong>le</strong> terrain.<br />

UNE FORTE CONCURRENCE<br />

Plusieurs facteurs, selon vous, expliquent <strong>le</strong>s difficultés<br />

que vous rencontrez pour emb<strong>au</strong>cher et fidéliser<br />

des salariés. D’abord un système de <strong>format</strong>ion<br />

initia<strong>le</strong> qui a du mal à s’adapter à vos besoins réels.<br />

Ça ne date pas d’hier, mais ça ne s’arrange toujours<br />

pas. Dans certaines filières qui sont pourtant très<br />

dynamiques dans notre pays, comme, par exemp<strong>le</strong>,<br />

l’agroalimentaire, rien n’est fait pour séduire <strong>le</strong>s<br />

jeunes, pour <strong>le</strong>ur « vendre » <strong>le</strong> métier. Résultat, de<br />

moins en moins d’élèves sortent de ces éco<strong>le</strong>s professionnel<strong>le</strong>s.<br />

Ensuite, conséquence du point précédent, on constate<br />

une désaffection pour certains métiers considérés<br />

comme « salissants » ou trop durs, trop fatigants,<br />

même s’ils sont souvent mieux payés que des emplois<br />

« propres », c’est-à-dire des emplois de bure<strong>au</strong>.<br />

Quant <strong>au</strong>x métiers réputés plus intéressants, vous<br />

rentrez de p<strong>le</strong>in fouet en concurrence avec <strong>le</strong>s grandes<br />

entreprises qui proposent <strong>au</strong>x candidats une batterie<br />

d’avantages divers pour <strong>le</strong>s attirer avant vous ou,<br />

mieux encore, pour <strong>le</strong>s récupérer chez vous, une fois<br />

formés. Vous êtes, en effet, souvent victimes d’un<br />

phénomène bien connu dans l’édition. Les petits éditeurs<br />

prennent des risques, dénichent de nouve<strong>au</strong>x<br />

<strong>au</strong>teurs de ta<strong>le</strong>nt et, dès que ceux-ci commencent à<br />

acquérir une certaine notoriété et à vendre des livres,<br />

ils sont rachetés par <strong>le</strong>s grandes maisons qui peuvent<br />

<strong>le</strong>ur offrir des à-valoir dix ou quinze fois plus é<strong>le</strong>vés<br />

que <strong>le</strong>s petites.<br />

UNE NÉCESSITÉ DE RÉAGIR<br />

Pourtant, il f<strong>au</strong>t <strong>le</strong> reconnaître, <strong>le</strong>s PME sont <strong>au</strong>ssi<br />

directement responsab<strong>le</strong>s de cette situation. Souvent<br />

trop fermées sur el<strong>le</strong>s-mêmes, el<strong>le</strong>s ne prennent<br />

pas <strong>le</strong> temps, ni <strong>le</strong>s moyens de se faire connaître<br />

de <strong>le</strong>ur environnement, de donner d’el<strong>le</strong>s une<br />

image attractive. Surtout, la plupart des PME n’ont<br />

pas mis en place de véritab<strong>le</strong> stratégie de ressources<br />

humaines: el<strong>le</strong>s envisagent <strong>le</strong>ur recrutement <strong>au</strong> jour<br />

<strong>le</strong> jour, n’ont pas de politique salaria<strong>le</strong> claire et pensent<br />

qu’une poignée de main ou une tape sur l’ép<strong>au</strong><strong>le</strong><br />

constitue un avantage en nature suffisant… De toute<br />

façon, disent-el<strong>le</strong>s, ça coûte trop cher et on n’a pas<br />

<strong>le</strong>s ressources des grands groupes.<br />

Mais, comme plusieurs d’entre vous en témoignent<br />

dans ce dossier, c’est moins une question de moyens<br />

financiers qu’une affaire de priorité. Et il y a danger.<br />

Pour ne pas voir <strong>le</strong>s meil<strong>le</strong>urs partir ail<strong>le</strong>urs, <strong>le</strong>s PME<br />

doivent réagir.<br />

D’abord en allant voir ce qui se passe du côté des<br />

grandes entreprises : que proposent-el<strong>le</strong>s à <strong>le</strong>urs<br />

salariés en matière de rémunération, d’intéressement,<br />

de services et d’avantages soci<strong>au</strong>x ? C’est l’objet de<br />

notre première enquête.<br />

Puis en se demandant, d’une part, comment transposer<br />

ces pratiques à <strong>le</strong>ur réalité de PME, et, d’<strong>au</strong>tre<br />

part, comment valoriser <strong>le</strong>urs atouts spécifiques :<br />

une proximité entre <strong>le</strong>s collaborateurs, une hiérarchie<br />

moins rigide, une <strong>au</strong>tonomie plus grande. C’est<br />

<strong>le</strong> deuxième sujet de ce dossier.<br />

Enfin, en cherchant <strong>au</strong>ssi à innover tous <strong>le</strong>s jours en<br />

matière de ressources humaines. À cet égard, <strong>le</strong>s<br />

jeunes dirigeants interrogés dans la troisième partie<br />

du dossier montrent qu’ils ne manquent pas<br />

d’imagination. Et <strong>le</strong>s solutions qu’ils trouvent sont<br />

souvent plus ingénieuses qu’onéreuses. Il suffit parfois<br />

seu<strong>le</strong>ment de changer <strong>le</strong> regard qu’on porte sur<br />

sa propre entreprise et ceux qui y travail<strong>le</strong>nt.<br />

PAR BRUNO TILLIETTE<br />

« Rien<br />

n’est fait<br />

pour séduire<br />

<strong>le</strong>s jeunes»<br />

D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />

19


20<br />

Dossier<br />

MÉTHODES<br />

Grands groupes:<br />

DES AVANTAGES<br />

À TOUS LES ÉTAGES<br />

Les grands groupes internation<strong>au</strong>x peuvent offrir toute une panoplie d'avantages<br />

pour recruter et fidéliser <strong>le</strong>s salariés : des possibilités d'évolution de carrière,<br />

des avantages financiers, mais <strong>au</strong>ssi des incitations sociéta<strong>le</strong>s fortes.<br />

D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />

plus d'un groupe<br />

comme Bouygues, c'est<br />

d'offrir des perspectives<br />

d'évolution très diverses “Le<br />

dans des activités <strong>au</strong>ssi<br />

différentes que la construction, la route,<br />

l'immobilier, <strong>le</strong>s télécoms et <strong>le</strong>s médias<br />

(TF1) », explique Gérard Lemarié, <strong>le</strong><br />

directeur central du développement<br />

social chez Bouygues SA. Un argument<br />

de poids pour attirer et fidéliser <strong>le</strong>s jeunes générations<br />

qui recherchent avant tout la mobilité et <strong>le</strong> développement<br />

de <strong>le</strong>urs compétences.<br />

Le groupe Bouygues totalise 133 000 salariés répartis<br />

à 50 % en France et 50 % à l'international. Les<br />

départs en retraite conjugués à l'accroissement de<br />

l'activité construction (BTP, Routes) ont obligé à<br />

recruter massivement : 10 000 salariés en 2006,<br />

<strong>au</strong>tant en 2007, et <strong>le</strong> doub<strong>le</strong> prévu pour 2008, moitié<br />

en France et moitié à l'international. « Les collaborateurs<br />

peuvent capitaliser sur des expériences<br />

successives tout en restant à l’intérieur du Groupe.<br />

Ils sont suivis <strong>au</strong> travers d'entretiens d'évaluations.<br />

Leur parcours est pris en compte <strong>au</strong> nive<strong>au</strong> du<br />

Groupe », ajoute Gérard Lemarié. En 25 ans de carrière,<br />

il est passé lui-même de la construction <strong>au</strong>x<br />

télécoms, avant de revenir <strong>au</strong> siège pour animer la<br />

politique socia<strong>le</strong> du groupe (protection, prévoyance,<br />

retraite). Si <strong>le</strong>s salaires correspondent <strong>au</strong>x prix du<br />

marché, <strong>le</strong> Groupe fait valoir « des périphériques<br />

à la rémunération, tels que la participation,<br />

l’intéressement 1 Gérard Lemarié<br />

et l'actionnariat salarié. Les sala-<br />

PAR THÉRÈSE BOUVERET<br />

riés détiennent 14 % du capital à travers diverses<br />

opérations d'<strong>au</strong>gmentation du capital qui <strong>le</strong>ur sont<br />

destinées », poursuit-il.<br />

LA MOTIVATION REJAILLIT SUR LE CLIENT<br />

Le sourire est exigé chez Accor. Il est d'<strong>au</strong>tant plus<br />

naturel « qu’il est <strong>le</strong> fruit d’un bon management qui<br />

permet de créer et d’entretenir la motivation des<br />

salariés », résume Philippe Liger, <strong>le</strong> directeur Marketing<br />

RH d'Accor. Ce groupe international (170 000<br />

salariés dans 100 pays, 3 800 hôtels) recrute be<strong>au</strong>coup,<br />

compte tenu d'un CA de 7 607 millions d'euros<br />

en 2006. « Le processus “Bienvenue chez Accor” permet<br />

<strong>au</strong> nouve<strong>au</strong> salarié de traverser plusieurs étapes<br />

d’intégration avant de prendre un poste. La fidélisation<br />

commence là et se poursuit par des entretiens<br />

individuels d'évaluation, par la reconnaissance <strong>au</strong><br />

quotidien dans une myriade d'hôtels où <strong>le</strong> directeur<br />

est proche de ses équipes, et enfin, grâce à un programme<br />

de management participatif faisant appel<br />

notamment <strong>au</strong> site intitulé Innov@ccor, qui permet<br />

à tous <strong>le</strong>s collaborateurs de<br />

proposer des points de progrès<br />

récompensés lorsqu'ils<br />

sont efficaces. »<br />

« Dans <strong>le</strong>s métiers de service,<br />

tout repose sur <strong>le</strong>s<br />

prestations des hommes.<br />

Le professionnalisme est<br />

essentiel », insiste Philippe<br />

Liger. « Nous <strong>le</strong> faisons<br />

Philippe Liger<br />

évoluer grâce à la politique


<strong>format</strong>ion du Groupe qui dispose d'un rése<strong>au</strong> mondial<br />

de 14 Académies Accor. Nous nous assignons<br />

l'objectif d'un stage par salarié par an : en 2006,<br />

169 700 salariés en ont suivi un (en sal<strong>le</strong>, sur <strong>le</strong> terrain<br />

ou par e-<strong>le</strong>arning). Si 90 % des managers ont été<br />

formés en interne, c'est parce que nous sommes une<br />

organisation apprenante ». L'une des pionnières en<br />

France, l'académie d'Évry 2 , fondée en 1985, renforce<br />

avant tout <strong>le</strong>s fonctions techniques et managéria<strong>le</strong>s.<br />

Au cours des années 1990, <strong>le</strong>s universités<br />

d'entreprises ont d’ail<strong>le</strong>urs connu un fort développement<br />

pour faire face <strong>au</strong>x besoins de <strong>format</strong>ion spécifiques,<br />

notamment dans <strong>le</strong>s cas de fusions-acquisitions.<br />

L'université Areva a été lancée en 2002, six<br />

mois après la création du groupe<br />

éponyme, expert mondial dans<br />

<strong>le</strong>s métiers de l’énergie (62 000<br />

salariés) El<strong>le</strong> représente<br />

<strong>au</strong>jourd’hui plus de 10 % de<br />

l'activité <strong>format</strong>ion du Groupe,<br />

destinée à ses cadres et ingénieurs<br />

: 72 programmes différents<br />

pour 4 000 participants<br />

par an. « El<strong>le</strong> est avant tout un<br />

Marc Gomes<br />

lieu d’ouverture, d’échange et<br />

d’amélioration des savoirs. C'est <strong>au</strong>ssi un outil pour<br />

faire converger <strong>le</strong>s cultures des différentes divisions<br />

du groupe, mais <strong>au</strong>ssi pour enrichir et développer<br />

<strong>le</strong>s potentiels de nos managers », explique Marc<br />

Gomes, <strong>le</strong> directeur de cette université, située dans<br />

la tour Areva à la Défense.<br />

HARMONISER VIE PERSONNELLE<br />

ET VIE PROFESSIONNELLE<br />

À l'étage <strong>au</strong>-dessous est implantée la crèche d'Areva.<br />

« Deux mamans que je connais y déposent chaque<br />

matin <strong>le</strong>urs enfants. Cette crèche, <strong>au</strong> sein même de<br />

<strong>le</strong>ur lieu de travail, <strong>le</strong>ur a radica<strong>le</strong>ment changé la vie<br />

et <strong>le</strong>s a rendues plus disponib<strong>le</strong>s. El<strong>le</strong>s ne sont plus<br />

obligées de courir pour al<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s chercher chez la nounou<br />

», témoigne-t-il. Les horaires sont plus f<strong>le</strong>xib<strong>le</strong>s<br />

que dans une crèche norma<strong>le</strong> (7 h à 21 h). C'est une<br />

volonté forte d'Anne L<strong>au</strong>vergeon, <strong>le</strong> PDG d'Areva,<br />

de créer des crèches pour harmoniser vie personnel<strong>le</strong><br />

et vie professionnel<strong>le</strong>. Et un atout déterminant<br />

dans un processus de recrutement ou pour fidéliser<br />

<strong>le</strong> personnel. Il en existe une à Lyon et une <strong>au</strong>tre<br />

ouvre en octobre <strong>au</strong> siège à Paris.<br />

À La Défense toujours, <strong>au</strong> 23 e étage de la tour<br />

Ernst &Young, une « conciergerie » propose de<br />

multip<strong>le</strong>s services : pressing payant, distributeurs<br />

de bil<strong>le</strong>ts et de cartes orange, service photo, centra<strong>le</strong><br />

d'achat, etc. Un médecin et une infirmière sont<br />

présents en permanence dans la tour. Une sal<strong>le</strong> de<br />

sport <strong>au</strong> rez-de-ch<strong>au</strong>ssée permet de suivre des cours<br />

de gym avec un coach à l'heure du déjeuner. Dans ce<br />

LA CULTURE GOOGLE<br />

Le Goog<strong>le</strong>p<strong>le</strong>x, siège<br />

international de Goog<strong>le</strong>,<br />

situé à Mountain View,<br />

en Californie, non loin<br />

de la Silicon Val<strong>le</strong>y,<br />

accueil<strong>le</strong> <strong>le</strong>s meil<strong>le</strong>urs<br />

in<strong>format</strong>iciens du<br />

monde. Situé en altitude<br />

tout près du parc National<br />

de Shore line et de<br />

terrains de golf, ce<br />

centre à l'architecture<br />

moderne est équipé de<br />

sal<strong>le</strong>s de sports, de deux<br />

piscines, de salons de<br />

massage et de coiffure,<br />

de jeux vidéos variés.<br />

Tout est fait pour<br />

apporter <strong>le</strong> maximum de<br />

confort et de détente <strong>au</strong>x<br />

« goog<strong>le</strong>rs ». L'ambiance<br />

est décontractée, on peut<br />

amener son chien, des<br />

espaces jeux sont prévus<br />

pour <strong>le</strong>s enfants, des parties<br />

de hockey sur rol<strong>le</strong>r<br />

sont organisées deux fois<br />

par semaine. Les repas<br />

gratuits sont servis trois<br />

fois par jour <strong>au</strong> Charlie's<br />

Café. Les boissons <strong>au</strong>ssi<br />

sont gratuites à toute<br />

heure. Pour stimu<strong>le</strong>r la<br />

QUELQUES-UNS DES PLUS<br />

OFFERTS PAR LES GRANDS GROUPES<br />

cabinet spécialisé en <strong>au</strong>dit, droit et finances, qui<br />

rassemb<strong>le</strong> 5 000 experts dans <strong>le</strong> monde, <strong>le</strong>s jeunes<br />

femmes qui rejoignent <strong>le</strong> groupe se doivent d'être,<br />

comme l'annonçait la dernière campagne publicitaire,<br />

« riganouies » (rigoureuses et épanouies). Leur<br />

professionnalisme est <strong>au</strong> prix de ce bien-être.<br />

1 Obligatoires dès que l'entreprise a plus de 50 salariés,<br />

plus de 3 ans d'existence et un bénéfice supérieur à 5 %<br />

des fonds de l'entreprise. Bloqués de 3 à 5 ans s<strong>au</strong>f<br />

exception, ils sont dispensés d'impôts.<br />

2 El<strong>le</strong> bénéficie d'un budget de 15 millions d'euros pour<br />

15 000 entrants en 2006.<br />

créativité de ses ingénieurs,<br />

Goog<strong>le</strong> <strong>le</strong>ur permet<br />

de consacrer 20 %<br />

de <strong>le</strong>ur temps à des projets<br />

personnels, ne rentrant<br />

pas dans <strong>le</strong> cadre<br />

de <strong>le</strong>ur mission initia<strong>le</strong>.<br />

Quant <strong>au</strong>x rémunérations<br />

des plus de 13 000<br />

goog<strong>le</strong>rs dans <strong>le</strong> monde,<br />

el<strong>le</strong>s comprennent des<br />

stocks options pour tous<br />

<strong>le</strong>s salariés qui intègrent<br />

l’entreprise depuis la<br />

création en 1998.<br />

Rémunérations : salaires plus é<strong>le</strong>vés, stock-options ou actions,<br />

participation, intéressements, Plan d'Épargne Groupe.<br />

Possibilité d'évolution professionnel<strong>le</strong> : plan de carrière, métiers<br />

variés, mobilité géographique, <strong>format</strong>ions.<br />

Avantages en nature : Comité d'Entreprise puissant offrant<br />

des chèques (emploi services, rest<strong>au</strong>rants, vacances), des<br />

subventions <strong>au</strong>x activités culturel<strong>le</strong>s ou sportives, des séjours<br />

ou week-ends, etc.<br />

Avantages soci<strong>au</strong>x : mutuel<strong>le</strong>s groupe, retraite, service logement<br />

(1 % patronal).<br />

D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />

ZOOM<br />

21


22<br />

Dossier<br />

1 Olivier Torrès est<br />

notamment l’<strong>au</strong>teur de<br />

La recherche académique<br />

en PME, rapport<br />

prochainement<br />

accessib<strong>le</strong> sur <strong>le</strong> site<br />

www.oseo.fr<br />

2 Franck Delalande est<br />

co-<strong>au</strong>teur avec Louis Buannic<br />

de Groupements<br />

d’employeurs : mode<br />

d’emploi, paru chez Eyrol<strong>le</strong>s<br />

3 Il est cependant possib<strong>le</strong><br />

d’offrir <strong>au</strong>x salariés<br />

de PME <strong>le</strong>s avantages<br />

d’un CE. Voir<br />

www.novalto.net<br />

Les PME représentent 99 %<br />

des entreprises françaises et<br />

concentrent <strong>le</strong>s 2/3 du marché<br />

de l’emploi. Ceux qui osent la<br />

petite entreprise sont rarement<br />

déçus. Be<strong>au</strong>coup vantent un environnement<br />

de travail motivant, de plus<br />

grandes responsabilités, une ambiance<br />

agréab<strong>le</strong> et une plus grande proximité<br />

avec <strong>le</strong>ur hiérarchie et <strong>le</strong>ur équipe. Pour<br />

<strong>au</strong>tant, pour <strong>le</strong>s petites entreprises, <strong>le</strong> recrutement<br />

est un exercice péril<strong>le</strong>ux. Certains secteurs sont en<br />

manque de candidats, d’<strong>au</strong>tres en manque de notoriété,<br />

d’<strong>au</strong>tres encore peinent à séduire puis à conserver<br />

<strong>le</strong>ur personnel très qualifié. « Pour un chef<br />

d’entreprise, explique Olivier Torrès 1 , professeur<br />

associé à l’EM Lyon, l’emb<strong>au</strong>che d’un collaborateur<br />

est un investissement personnel : s’il commet une<br />

erreur, <strong>le</strong>s incidences sont plus importantes que dans<br />

un groupe de 3 000 personnes. C’est pourquoi <strong>le</strong><br />

recrutement dans <strong>le</strong>s PME se fait moins par Internet<br />

que par rése<strong>au</strong>, cooptation, cabinet ou plus classiquement<br />

par annonce. »<br />

Pourtant, ces méthodes ne suffisent pas toujours pour<br />

recruter efficacement. Afin d’être sûres de trouver <strong>le</strong>s<br />

bons éléments et de <strong>le</strong>s garder, un nombre croissant<br />

d’entreprises participent ou organisent el<strong>le</strong>s-mêmes<br />

des événements. Objectif: se bâtir une image dynamique<br />

tout en rencontrant de futurs candidats à<br />

l’emb<strong>au</strong>che. Une communication événementiel<strong>le</strong> dans<br />

laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong>s PME ont <strong>le</strong>ur carte à jouer. « El<strong>le</strong>s ont tout<br />

intérêt à communiquer efficacement pour construire<br />

<strong>le</strong>ur image <strong>au</strong>près des organismes de <strong>format</strong>ion, des<br />

Universités, des bure<strong>au</strong>x des élèves…, poursuit Gérald<br />

Naro professeur des Universités à Montpellier I. Les<br />

PME peuvent <strong>au</strong> travers d’un événement avoir sur un<br />

temps très court une vision globa<strong>le</strong> du marché des<br />

compétences et rencontrer des personnels promet-<br />

D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />

STRATÉGIES<br />

PAR ISABELLE CHATAIN<br />

PME : COMMENT ATTIRER<br />

LES MEILLEURS ?<br />

Attirer dans sa PME de bons collaborateurs est une chose, <strong>le</strong>s garder en est une <strong>au</strong>tre… Régulièrement<br />

sollicités, ceux-ci peuvent accéder en quelques clics à des dizaines d’offres d’emplois, toutes<br />

plus attractives <strong>le</strong>s unes que <strong>le</strong>s <strong>au</strong>tres. Pourquoi alors oser la petite entreprise, et surtout y rester ?<br />

Oliver Torrès<br />

teurs qu’el<strong>le</strong>s n’<strong>au</strong>raient pas touchés par <strong>le</strong> biais<br />

d’annonces classiques. Les petites entreprises manquent<br />

souvent de dynamisme dans <strong>le</strong>ur politique<br />

de recrutement et la multiplication des initiatives sur<br />

<strong>le</strong> terrain contribue à séduire <strong>le</strong>s candidats. »<br />

LE GE, UNE PISTE POSSIBLE<br />

Encore peu connu <strong>le</strong> GE, groupement d’employeurs,<br />

permet à plusieurs entreprises réunies en association<br />

de mutualiser <strong>le</strong>s compétences d’un collaborateur.<br />

Ce dispositif se développe surtout<br />

dans <strong>le</strong>s régions où <strong>le</strong>s<br />

rése<strong>au</strong>x de PME sont <strong>le</strong>s plus<br />

vivaces : en Bretagne, Poitou-<br />

Charentes, dans <strong>le</strong> Nord et <strong>le</strong><br />

Sud-Ouest et concerne essentiel<strong>le</strong>ment<br />

<strong>le</strong>s fonctions transversa<strong>le</strong>s<br />

: RH, communication,<br />

comptabilité et finance… « Le<br />

Franck Delalande GE, explique Franck Delalande,


membre du <strong>CJD</strong> et directeur de Vénétis 2 , groupement<br />

d’employeurs de 150 PME de la région de<br />

Vannes, permet à des entreprises qui n’ont pas <strong>le</strong>s<br />

moyens de s’offrir un poste à temps p<strong>le</strong>in, de bénéficier<br />

de compétences pointues deux ou trois jours par<br />

semaine. Une mutualisation des moyens qui peut<br />

al<strong>le</strong>r jusqu’<strong>au</strong> partage de certains investissements.<br />

Le GE maintient de l’activité, développe et structure<br />

des entreprises, et <strong>le</strong>s ancre sur un territoire. » Un<br />

ancrage essentiel, pour l’universitaire Olivier Torrès,<br />

qui passe notamment par l’investissement du chef<br />

d’entreprise et de ses collaborateurs dans <strong>le</strong> tissu<br />

local. « La PME doit être assise sur son territoire<br />

tout en gardant <strong>le</strong>s yeux ouverts sur <strong>le</strong> monde. C’est<br />

pour cela que <strong>le</strong> concept même du groupement<br />

d’entreprises est intéressant, car il pousse <strong>le</strong> chef<br />

d’entreprise à s’ouvrir, à regarder <strong>au</strong>-delà de ses<br />

murs. »<br />

RECRUTER MAIS ENSUITE ?<br />

Pour garder <strong>le</strong>urs collaborateurs <strong>le</strong>s plus qualifiés, <strong>le</strong>s<br />

dirigeants de petites entreprises n’ont pas d’<strong>au</strong>tre<br />

choix que de jouer la carte de la séduction sans pour<br />

<strong>au</strong>tant oublier que pour la plupart des gens,<br />

l’essentiel tient à l’accomplissement d’un travail stimulant,<br />

qui a du sens et qui contribue de manière<br />

tangib<strong>le</strong> <strong>au</strong> résultat final. À cela, il f<strong>au</strong>t ajouter une<br />

bonne ambiance de travail et une rémunération<br />

« attractive ». Sur ce dernier point, une PME peinera<br />

toujours à s’aligner sur <strong>le</strong>s offres des grands groupes.<br />

De plus, <strong>le</strong>s « périphériques », <strong>au</strong>trement dit <strong>le</strong>s<br />

avantages soci<strong>au</strong>x, seront bien moindres 3 . La PME<br />

doit donc faire preuve d’innovation et de soup<strong>le</strong>sse<br />

en offrant par exemp<strong>le</strong> une part variab<strong>le</strong> et conséquente<br />

du salaire sur des critères quantitatifs et qualitatifs.<br />

De même, <strong>le</strong> dirigeant de PME doit savoir proposer<br />

<strong>au</strong> bon moment certains avantages en nature:<br />

téléphone, ordinateur portab<strong>le</strong>, voiture… Autre piste<br />

de séduction et de fidélisation qui prend toute sa<br />

mesure dans une PME: la possibilité pour <strong>le</strong>s salariés<br />

de devenir actionnaire de l’entreprise. «Àces aspects<br />

matériels et financiers s’ajoutent, pour Gérald Naro,<br />

deux jokers, l’<strong>au</strong>tonomie et <strong>le</strong>s responsabilités.<br />

Le collaborateur d’une PME a une relation one to one<br />

avec son employeur, ce qui est très valorisant.<br />

Il participe à la stratégie de l’entreprise et n’est pas<br />

uniquement un opérationnel qui applique. Il est donc<br />

essentiel de lui montrer qu’il existe de réel<strong>le</strong>s opportunités<br />

d’évolution en bâtissant son parcours professionnel.<br />

Selon moi, trop de PME pâtissent de<br />

l’absence de compétences en ressources humaines. »<br />

La petite entreprise dispose donc de réels atouts<br />

LES 10 CONSEILS<br />

POUR RESTER ATTRACTIF<br />

• Veil<strong>le</strong>z à ce que votre entreprise ait une bonne image tant à l’extérieur<br />

(journées portes ouvertes, campagnes de communication,<br />

interventions dans <strong>le</strong>s lycées, universités, éco<strong>le</strong>s …) qu’à l’intérieur.<br />

• Élaborez des parcours d’accompagnement et de suivi sur plusieurs<br />

mois pour tout nouvel emb<strong>au</strong>ché : c’est <strong>le</strong> gage de réussite de son<br />

intégration.<br />

• Créez un esprit d’entraide et formez de véritab<strong>le</strong>s équipes.<br />

• Essayez de maîtriser <strong>le</strong> nive<strong>au</strong> de stress existant dans l’entreprise.<br />

• Offrez à vos collaborateurs des salaires de base compétitifs et un<br />

éventail de possibilités <strong>le</strong>ur permettant d’améliorer l’équilibre vie<br />

professionnel<strong>le</strong>/vie privée.<br />

• Montrez que vous reconnaissez <strong>le</strong> travail de chacun.<br />

• Veil<strong>le</strong>z à offrir des possibilités d’évolution. L’entreprise doit bâtir avec<br />

ses salariés des parcours professionnels et développer <strong>le</strong>urs<br />

compétences.<br />

• Analysez <strong>le</strong> rou<strong>le</strong>ment du personnel : qui part et pourquoi ?<br />

• Prenez <strong>le</strong> temps de discuter avec ceux qui vous quittent pour en tirer<br />

<strong>le</strong>s <strong>le</strong>çons.<br />

• Calcu<strong>le</strong>z combien <strong>le</strong> départ et <strong>le</strong> remplacement d’un collaborateur<br />

coûtent à l’entreprise.<br />

D’après Reginald de Lannoy (Ernst & Young Human Resources)<br />

CE QUI FAIT QUE LE SMALL<br />

RESTE BEAUTIFUL<br />

pour garder ses collaborateurs pour peu que <strong>le</strong> chef<br />

d’entreprise se demande ce qu’il a à offrir en tant<br />

qu’employeur et quel<strong>le</strong>s sont <strong>le</strong>s vraies priorités de<br />

ses salariés. Cela demande de l’attention, de la cohésion<br />

socia<strong>le</strong> et be<strong>au</strong>coup de communication !<br />

D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />

ZOOM<br />

ZOOM<br />

1. Une solide interaction socia<strong>le</strong>, un rése<strong>au</strong> relationnel clairement défini.<br />

2. Un processus décisionnel plus rapide grâce à un nombre restreint<br />

d’étapes formel<strong>le</strong>s intermédiaires, et une réponse <strong>au</strong>x besoins plus soup<strong>le</strong>.<br />

3. Une accessibilité loca<strong>le</strong> (importance de la notion de territoire).<br />

4. Une meil<strong>le</strong>ure vue tant sur l’ensemb<strong>le</strong> de l’activité que sur <strong>le</strong>s différents<br />

processus sous-jacents.<br />

5. Une plus grande possibilité de contribuer de manière tangib<strong>le</strong><br />

et significative <strong>au</strong> résultat final.<br />

23


24<br />

Dossier<br />

T<br />

<strong>au</strong>pier, mécanicien de précision, hôtelier,<br />

charcutier: quels sont <strong>le</strong>s points communs<br />

entre ces différents métiers? On y<br />

manque cruel<strong>le</strong>ment de main-d’œuvre<br />

alors que ce sont des métiers accessib<strong>le</strong>s<br />

à tous et promis à un bel avenir. Leur seul déf<strong>au</strong>t:<br />

ils n’ont pas une très bonne image et n’attirent pas<br />

<strong>le</strong>s candidats. Et <strong>le</strong>s petites entreprises<br />

de ces secteurs ont du mal à se développer<br />

alors qu’el<strong>le</strong>s <strong>au</strong>raient <strong>le</strong>s débouchés<br />

pour <strong>le</strong> faire.<br />

Prenons un cas extrême. Gil<strong>le</strong>s Poussier,<br />

jeune dirigeant de Nantes, a eu l’idée de<br />

créer SOS T<strong>au</strong>pes, une petite entreprise<br />

qui capture1 ces drô<strong>le</strong>s de mammifères<br />

myopes et fouisseurs qui vous retour-<br />

nent un jardin ou un terrain de football<br />

Gil<strong>le</strong>s Poussier<br />

en quelques jours. Les demandes<br />

d’intervention affluent de différents coins de France,<br />

mais Gil<strong>le</strong>s ne peut pas suivre, f<strong>au</strong>te de trouver des<br />

t<strong>au</strong>piers sur place. Il <strong>le</strong>ur propose pourtant de <strong>le</strong>s former<br />

et de <strong>le</strong>s équiper et ce métier de p<strong>le</strong>in air est plutôt<br />

agréab<strong>le</strong>. Seul inconvénient, ce n’est pas une activité<br />

à temps p<strong>le</strong>in qui ne peut constituer qu’un<br />

complément de salaire, sur la base d’une fois et demie<br />

<strong>le</strong> Smic. Gil<strong>le</strong>s recherche d’urgence trois ou quatre<br />

personnes qu’il ne trouve pas. Mais il reconnaît qu’il<br />

n’a peut-être pas travaillé dans la bonne direction, car<br />

c’est un concept nouve<strong>au</strong> et il f<strong>au</strong>t tout inventer. Peutêtre<br />

va-t-il tenter sa chance du côté des retraités…<br />

D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />

TERRAIN<br />

Pour séduire,<br />

CULTIVER<br />

SES DIFFÉRENCES<br />

Pour emb<strong>au</strong>cher et garder <strong>le</strong>urs salariés, <strong>le</strong>s PME n’ont sans doute<br />

pas intérêt à se positionner en concurrence directe avec <strong>le</strong>s grands<br />

groupes mais plutôt à rechercher des profils différents. Enquête<br />

<strong>au</strong>près d’entrepreneurs JD qui cherchent des solutions innovantes.<br />

PAR RAPHAËL D’ACHERY<br />

Magali Bernard<br />

LÂCHER DU LEST<br />

Pour la charcuterie ou la mécanique, <strong>le</strong>s dirigeants<br />

se tournent plutôt vers <strong>le</strong>s jeunes. « Malheureusement,<br />

constate Magali Bernard qui dirige une PME<br />

de charcuterie d’une dizaine de personnes, Le cochon<br />

de TY-Neuden, ce métier ne <strong>le</strong>s attire pas. Cette<br />

année, il n’y a pas un seul sortant dans la filière boucherie-charcuterie<br />

des lycées professionnels du Finistère,<br />

où je suis installée. Les conditions de travail<br />

font un peu peur : on se lève tôt, on travail<strong>le</strong> dans <strong>le</strong><br />

froid, on se salit. Et <strong>le</strong>s jeunes en ont d’<strong>au</strong>tant moins<br />

envie que l’enseignement qu’on <strong>le</strong>ur propose est<br />

décalé des réalités de l’entreprise. C’est un problème<br />

récurrent depuis trente ans qu’on n’arrive pas à résoudre.<br />

Mais il est vrai <strong>au</strong>ssi que <strong>le</strong>s entreprises ne proposent<br />

pas assez de stages pour <strong>le</strong>s attirer. Récemment,<br />

un jeune avait frappé à trente-deux portes<br />

avant d’arriver chez moi ! Les entreprises doivent<br />

s’engager plus. »<br />

Florence L<strong>au</strong>ff, jeune dirigeante<br />

des H<strong>au</strong>ts-de-Seine, partage<br />

cette analyse. Consultante<br />

en ressources humaines,<br />

el<strong>le</strong> a été DRH en contrat<br />

d’externalisation pour une<br />

société de mécanique de précision<br />

de 180 personnes : « La<br />

productique (tournage, fraisage,<br />

ajustage) est un métier<br />

Florence L<strong>au</strong>ff<br />

ancien, mais qui a encore


L’équipe de Gil<strong>le</strong>s Cibert<br />

de bel<strong>le</strong>s possibilités de développement dans<br />

l’aéron<strong>au</strong>tique ou l’<strong>au</strong>tomobi<strong>le</strong>. Il demande des profils<br />

extrêmement techniques. Mais <strong>le</strong> cursus de <strong>format</strong>ion<br />

n’est pas adapté. On oriente dans ces filières<br />

ceux qui ne réussissent pas ail<strong>le</strong>urs. Et on ne <strong>le</strong>ur<br />

vend pas l’intérêt de cette activité qui, du coup, est<br />

en voie de disparition. »<br />

Second problème, <strong>le</strong> turn-over. « Les charcutiers ont<br />

la bougeotte. Ils restent rarement plus d’un an,<br />

déplore Magali Bernard. Même s’ils ne sont pas si<br />

mal payés, 1 600 euros mensuels nets en moyenne,<br />

ils partent vers <strong>le</strong>s grandes surfaces, où la convention<br />

col<strong>le</strong>ctive est plus favorab<strong>le</strong> que dans la branche<br />

boucherie-charcuterie. » « C’est vrai que <strong>le</strong>s jeunes<br />

sont attirés par <strong>le</strong>s grands groupes, reconnaît Florence<br />

L<strong>au</strong>ff. Dans <strong>le</strong> secteur de la mécanique, outre<br />

des salaires plus é<strong>le</strong>vés et des avantages divers, ils<br />

y trouvent des conditions de travail bien meil<strong>le</strong>ures.<br />

S’ils veu<strong>le</strong>nt s’en sortir, <strong>le</strong>s dirigeants des PMI doivent<br />

<strong>au</strong>ssi lâcher un peu de <strong>le</strong>st en termes de rémunération<br />

et de confort. Certains ne regardent <strong>le</strong>urs<br />

ouvriers que sous l’ang<strong>le</strong> de la productivité. En visitant<br />

des ateliers, j’ai parfois eu l’impression de me<br />

retrouver chez Zola. Il n’y a pas de politique RH.<br />

La première chose est de prendre en compte l’humain.<br />

Proposer des fontaines à e<strong>au</strong> quand il fait ch<strong>au</strong>d,<br />

ça ne coûte pas cher, ou organiser des moments<br />

de convivialité, faire des entretiens d’évaluation.<br />

Mais <strong>au</strong>ssi moderniser <strong>le</strong>s ateliers, clarifier <strong>le</strong>s rémunérations,<br />

<strong>au</strong> lieu de jouer sur des primes aléatoires.<br />

Ça me semb<strong>le</strong> <strong>le</strong> minimum. »<br />

VALORISER CHACUN<br />

Gil<strong>le</strong>s Cibert, éga<strong>le</strong>ment membre du <strong>CJD</strong> de Nantes,<br />

l’a bien compris. Il a fait d’une bonne gestion des ressources<br />

humaines <strong>le</strong> « préambu<strong>le</strong> à tout <strong>le</strong> reste ».<br />

Directeur d’un hôtel indépendant d’une quinzaine<br />

d’employés, il est pourtant constamment confronté à<br />

« LE CANDIDAT<br />

EST UN CLIENT »<br />

Christophe Collignon dirige IMA technologies,<br />

un centre d’appel de 270 personnes spécialisé<br />

notamment dans <strong>le</strong> renseignement juridique et<br />

l’assistance technique <strong>au</strong>tomobi<strong>le</strong>. Témoignage.<br />

« Même si 90 % des salariés sont en CDI,<br />

je dois recruter une centaine de personnes par an, en particulier des<br />

saisonniers, l’été et à Noël. Des nive<strong>au</strong>x bac +2 pour <strong>le</strong>s réponses<br />

commercia<strong>le</strong>s, des BTS, si possib<strong>le</strong> bilingues, pour l’assistance<br />

technique <strong>au</strong>tomobi<strong>le</strong> et des maîtrises ou DESS de droit pour <strong>le</strong><br />

renseignement juridique. Et malgré tous ces “handicaps” – la réputation<br />

des centres d’appels, <strong>le</strong> besoin de diplômés –, je n’ai pas de difficultés<br />

de recrutement. Cela tient, je crois à trois choses : une bonne image<br />

sur la région, un respect des candidats et une vraie stratégie RH.<br />

L’image : nous sommes très présents sur notre bassin d’emploi,<br />

en Loire-Atlantique. Nous travaillons avec <strong>le</strong>s éco<strong>le</strong>s professionnel<strong>le</strong>s<br />

et la faculté de droit, nous allons dans tous <strong>le</strong>s salons, nous prenons<br />

parfois toute une promo de techniciens <strong>au</strong>to en stage. Mais nous<br />

sommes <strong>au</strong>ssi très actifs <strong>au</strong>près de l’ANPE et sur Internet où nous<br />

assurons un flux continu d’annonces. Nous communiquons éga<strong>le</strong>ment<br />

be<strong>au</strong>coup avec la presse loca<strong>le</strong> sur ce que nous faisons. Si bien que<br />

<strong>le</strong>s gens nous connaissent et savent qui nous sommes.<br />

Deuxième point, nous considérons tous <strong>le</strong>s candidats comme des<br />

clients. Nous <strong>le</strong>s accueillons agréab<strong>le</strong>ment avec un café, des journ<strong>au</strong>x,<br />

nous essayons de ne pas <strong>le</strong>s faire attendre, nous <strong>le</strong>ur réservons des<br />

places de parking. Nous <strong>le</strong>ur faisons visiter systématiquement nos<br />

loc<strong>au</strong>x. Même si <strong>le</strong> recrutement ne se fait pas, ils gardent un bon<br />

souvenir de nous et en par<strong>le</strong>nt à <strong>le</strong>urs amis.<br />

Enfin, notre métier repose sur <strong>le</strong>s hommes. Nous tenons donc à<br />

ce qu’ils se trouvent bien chez nous, pour <strong>le</strong> temps qu’ils y passent.<br />

Cela veut dire que nous acceptons une grande soup<strong>le</strong>sse dans<br />

l’organisation et que nous ne refusons rien par principe, seu<strong>le</strong>ment ce<br />

que nous ne sommes pas capab<strong>le</strong>s de gérer. Par exemp<strong>le</strong>, plusieurs<br />

des femmes qui sont <strong>au</strong> Comité de direction ont demandé à travail<strong>le</strong>r<br />

à 80 %. Ça n’a pas posé de problème. Cette attention <strong>au</strong>x besoins de<br />

chacun est essentiel<strong>le</strong> et el<strong>le</strong> ne coûte pas très cher. Mais la politique<br />

rémunération est éga<strong>le</strong>ment une priorité : <strong>le</strong>s salaires et charges<br />

représentent 70 % des frais. Le nive<strong>au</strong> des salaires est évidemment<br />

celui du marché et un tiers des bénéfices sont redistribués en<br />

intéressement. 7 % du temps est consacré à la <strong>format</strong>ion. Nous<br />

pouvons <strong>le</strong> faire parce que nous avons choisi des marchés « h<strong>au</strong>ts<br />

de gamme » qui sont moins concurrentiels que <strong>le</strong>s hot lines des<br />

fournisseurs d’accès Internet ou <strong>le</strong> télémarketing. Cela nous permet<br />

de ne pas délocaliser et de jouer notre jeu face à des grands groupes<br />

comme Téléperformance qui compte 75 000 salariés. »<br />

la pénurie de main-d’œuvre puisqu’il manque en<br />

moyenne 70000 personnes dans <strong>le</strong> secteur touristique,<br />

toujours en expansion. Mais il a trouvé des solutions.<br />

D’abord, recruter plus sur <strong>le</strong> comportement du candidat<br />

que sur ses compétences – cel<strong>le</strong>s-ci peuvent<br />

s’acquérir rapidement par la suite – et vérifier que<br />

la personne a <strong>au</strong>ssi un intérêt personnel à accepter<br />

TÉMOIGNAGE<br />

D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7 25


26<br />

Dossier<br />

<strong>le</strong> poste. Ensuite, veil<strong>le</strong>r à son intégration dans<br />

l’équipe: un document de bienvenue donne quelques<br />

règ<strong>le</strong>s de base, <strong>le</strong>s premiers jours sont consacrés à<br />

une <strong>format</strong>ion avec une check-list de tout ce qui est<br />

à voir et à comprendre dans <strong>le</strong> fonctionnement de<br />

l’hôtel, <strong>le</strong>s rapports avec <strong>le</strong>s collègues. Enfin, être<br />

présent, attentif <strong>au</strong>x problèmes que peuvent rencontrer<br />

<strong>le</strong>s salariés. « Le métier de femmes de chambre<br />

est dur, explique Gil<strong>le</strong>s Cibert. Pour <strong>le</strong>s garder, nous<br />

faisons preuve de soup<strong>le</strong>sse en adaptant <strong>le</strong>s horaires<br />

<strong>au</strong>tant que possib<strong>le</strong> <strong>au</strong>x contraintes des unes et des<br />

<strong>au</strong>tres. J’ai <strong>au</strong>ssi fait des démarches pour faciliter la<br />

garde de <strong>le</strong>urs enfants en crèche ou à domici<strong>le</strong>. »<br />

Le directeur de l’hôtel La Pérouse insiste sur la nécessité<br />

de valoriser chacun : « Dernière démarche en<br />

date, j’ai fait intervenir un coach en image qui a revu<br />

entièrement l’habil<strong>le</strong>ment professionnel des salariés<br />

en tenant compte de <strong>le</strong>ur morphologie. Ainsi, je <strong>le</strong>ur<br />

ai fait plaisir avec des vêtements issus de grands<br />

magasins et où ils se sentent mieux que dans un<br />

uniforme acheté sur catalogue. Je crois qu’on<br />

n’accueil<strong>le</strong> bien <strong>le</strong>s clients que si on se sent soi-même<br />

à l’aise et reconnu. » Enfin, Gil<strong>le</strong>s Cibert a institué un<br />

système de prime en fonction des performances individuel<strong>le</strong>s<br />

: prime pour <strong>le</strong>s gestes en faveur du déve-<br />

D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />

PROFESSIONNALISER LA FONCTION RH<br />

Trois questions à Ghislaine<br />

Celdran, membre du bure<strong>au</strong><br />

national du <strong>CJD</strong> et responsab<strong>le</strong><br />

de la commission EMC2, « Évolution<br />

des métiers des compétences<br />

et des comportements. »<br />

Pourquoi cette commission<br />

EMC2 ?<br />

Paradoxa<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong> <strong>CJD</strong>, qui met<br />

l’homme <strong>au</strong> centre de l’entreprise,<br />

n’a jamais travaillé directement<br />

sur la fonction Ressources<br />

humaines. Un des moyens de faire<br />

grandir <strong>le</strong> dirigeant et son entreprise,<br />

comme y incite <strong>le</strong> thème du<br />

mandat de Thomas Ch<strong>au</strong>dron,<br />

« L’esprit de conquête », c’est de<br />

professionnaliser cette fonction<br />

RH qui n’est pas toujours assez<br />

prise en compte dans nos PME.<br />

Le premier travail de la commission<br />

a ainsi été d’élaborer un<br />

guide d’<strong>au</strong>todiagnostic qui per-<br />

TERRAIN<br />

mettra à chaque JD de faire <strong>le</strong><br />

point sur sa politique RH.<br />

S’agit-il <strong>au</strong>ssi de professionnaliser<br />

<strong>le</strong> recrutement ?<br />

Bien entendu. Il s’agit d’anticiper<br />

<strong>le</strong>s besoins dans un contexte de<br />

pénurie de main-d’œuvre et de<br />

concurrence européenne qui va<br />

être de plus en plus diffici<strong>le</strong>.<br />

Chaque PME, quel<strong>le</strong> que soit sa<br />

tail<strong>le</strong>, doit se doter d’une gestion<br />

prévisionnel<strong>le</strong> des emplois : par<br />

rapport à tel ou tel poste à pourvoir,<br />

f<strong>au</strong>t-il faire évoluer un salarié<br />

en interne, recruter quelqu’un ou<br />

encore externaliser la fonction ?<br />

Cela conduit notamment à regarder<br />

<strong>le</strong> recrutement sous l’ang<strong>le</strong><br />

de notre responsabilité sociéta<strong>le</strong>:<br />

quels sont <strong>le</strong>s liens que <strong>le</strong> dirigeant<br />

a su tisser avec son bassin<br />

d’emploi, <strong>le</strong>s éco<strong>le</strong>s, <strong>le</strong>s centres<br />

de <strong>format</strong>ion, <strong>le</strong>s instances pari-<br />

PAR RAPHAËL D’ACHERY<br />

INTERVIEW<br />

taires, <strong>le</strong>s associations ? Quel<strong>le</strong><br />

image a l’entreprise dans son<br />

environnement qui va lui permettre<br />

d’attirer des candidats ?<br />

Mais toutes <strong>le</strong>s entreprises ne<br />

peuvent pas se payer un poste<br />

de DRH ?<br />

Prendre conscience de la<br />

dimension stratégique des RH<br />

n’implique pas d’avoir une personne<br />

à temps p<strong>le</strong>in, mais simp<strong>le</strong>ment<br />

que quelqu’un doive s’en<br />

soucier et la formaliser. Ce peut<br />

être une mission d’un salarié de<br />

l’entreprise, mais la fonction peut<br />

<strong>au</strong>ssi être externalisée <strong>au</strong> travers<br />

d’un groupement d’employeurs,<br />

du portage salarial ou d’un cadre<br />

à temps partagé. L’important est<br />

que soit mis en œuvre un plan<br />

d’action RH clair pour <strong>le</strong> salarié<br />

qui traduise concrètement <strong>le</strong>s<br />

va<strong>le</strong>urs de l’entreprise.<br />

loppement durab<strong>le</strong>, prime de gestion de la casse.<br />

Une partie des économies réalisées est redistribuée<br />

<strong>au</strong>x salariés.<br />

NE PAS SE TROMPER DE PROFILS<br />

Pour garder ses charcutiers, Magali Bernard a <strong>au</strong>ssi<br />

fait <strong>le</strong> choix de privilégier <strong>le</strong>s comportements : « Je<br />

choisis des personnes dynamiques, qui ont envie de<br />

s’investir dans l’entreprise. Ceux qui restent sont<br />

ceux qui ne connaissaient rien <strong>au</strong> métier et que j’ai<br />

formés sur place. J’essaie <strong>au</strong>ssi de <strong>le</strong>s intéresser en<br />

<strong>le</strong>ur faisant fabriquer des produits innovants. »<br />

« Attention, conclut Florence L<strong>au</strong>ff, <strong>le</strong>s PME ne doivent<br />

pas obligatoirement rechercher <strong>le</strong>s mêmes profils<br />

que <strong>le</strong>s grands groupes. Les personnes qui veu<strong>le</strong>nt<br />

la sécurité et <strong>le</strong> confort ne sont pas pour el<strong>le</strong>s.<br />

Au contraire, <strong>le</strong>s PME doivent al<strong>le</strong>r vers <strong>le</strong>s gens qui<br />

aiment <strong>le</strong>s chal<strong>le</strong>nges, <strong>le</strong>s relations directes, qui ont<br />

envie de progresser rapidement et de faire progresser<br />

l’entreprise. Ce sont deux cultures différentes et<br />

<strong>le</strong>s PME doivent se vendre pour ce qu’el<strong>le</strong>s sont. »<br />

1 Et <strong>le</strong>s relâche en forêt, pour préserver la biodiversité.<br />

Voir <strong>le</strong> site www.sos-t<strong>au</strong>pes.fr.


Dossier<br />

Une batail<strong>le</strong><br />

DES COMPÉTENCES?<br />

Le paradoxe n’est pas nouve<strong>au</strong>. Malgré un<br />

t<strong>au</strong>x de chômage encore très é<strong>le</strong>vé, cela fait<br />

déjà plusieurs années que <strong>le</strong>s entreprises<br />

sont confrontées à des difficultés de recrutement,<br />

en particulier dans certains secteurs<br />

comme l’in<strong>format</strong>ique, la santé, <strong>le</strong> bâtiment ou<br />

la rest<strong>au</strong>ration. Et <strong>le</strong> paradoxe n’est qu’apparent. Le<br />

marché de l’emploi ne fonctionne pas de manière<br />

mathématique. Nous ne manquons effectivement<br />

pas de main-d'œuvre, mais de certaines compétences<br />

dont nous n’avons pas été capab<strong>le</strong>s de prévoir <strong>le</strong><br />

déficit. Cette situation de pénurie, qui a <strong>au</strong>ssi pour<br />

effet d’<strong>au</strong>gmenter dangereusement <strong>le</strong>s masses salaria<strong>le</strong>s,<br />

risque de perdurer, voire de s’accentuer et de<br />

s’élargir à tous <strong>le</strong>s secteurs <strong>au</strong>-delà de 2010.<br />

LES ÉCARTS SE CREUSENT<br />

De fait, s’est ouverte une sorte de « batail<strong>le</strong> des compétences<br />

» dont <strong>le</strong>s plus petites entreprises ne sont<br />

pas assurées de sortir gagnantes – c’est un euphémisme!<br />

Une observation attentive de ce qui se trame<br />

dans <strong>le</strong>s grandes entreprises montre qu’en matière<br />

d’attractivité, <strong>le</strong>s écarts se creusent avec <strong>le</strong>s PME.<br />

Prenons quelques exemp<strong>le</strong>s symptomatiques de ce<br />

phénomène (à la suite de ceux déjà évoqués dans ce<br />

dossier). Après quelques années de disette, <strong>le</strong>s régies<br />

publicitaires des médias ont retrouvé <strong>le</strong> sourire: <strong>le</strong>s<br />

grands groupes consacrent à nouve<strong>au</strong> de gros budgets<br />

à une communication destinée à séduire <strong>le</strong>s candidats.<br />

Leur volonté est tel<strong>le</strong> que certains d'entre eux<br />

s’affichent dans <strong>le</strong> monde virtuel, sur <strong>le</strong> jeu « Second<br />

life », avec l'espoir de véhicu<strong>le</strong>r une image qui plaira<br />

<strong>au</strong>x jeunes <strong>le</strong>s plus dynamiques, créatifs, entreprenants.<br />

Ils n'hésitent pas non plus, dans <strong>le</strong> monde réel,<br />

à inviter <strong>le</strong>urs salariés à des soirées « très convivia<strong>le</strong>s »<br />

avec pour seu<strong>le</strong> consigne de venir avec des amis potentiel<strong>le</strong>ment<br />

« recrutab<strong>le</strong>s ». Mais c’est surtout sur <strong>le</strong><br />

plan social que <strong>le</strong>s PME ont du mal à suivre. Participation<br />

et intéressement, correspondant parfois à plusieurs<br />

mois de salaire (grâce, souvent, à de bons résultats<br />

acquis hors de France), universités et crèches<br />

d’entreprise, services divers <strong>au</strong>x salariés : <strong>au</strong>tant<br />

d’avantages qu’une petite entreprise seu<strong>le</strong> n’a pas <strong>le</strong>s<br />

moyens de proposer à ses employés.<br />

UN ENJEU STRATÉGIQUE<br />

Il f<strong>au</strong>t être clair: <strong>le</strong> recrutement est devenu un enjeu<br />

CONCLUSION<br />

stratégique et <strong>le</strong>s PME ne peuvent plus se contenter<br />

d’un certain « amateurisme ». Identifier des candidats<br />

dans son entourage immédiat et parvenir à <strong>le</strong>s<br />

recruter ne suffit plus. Il f<strong>au</strong>t éga<strong>le</strong>ment réussir à attirer<br />

<strong>le</strong>s bons potentiels. S'ils se dirigent tous vers <strong>le</strong>s<br />

grands groupes, il en résultera, inévitab<strong>le</strong>ment, à<br />

terme, une différence de performance qui pénalisera<br />

<strong>le</strong> développement de nos PME. Et cela d'<strong>au</strong>tant plus<br />

que notre économie délaisse la production et exige<br />

de plus en plus de qualifications, tandis que <strong>le</strong> t<strong>au</strong>x<br />

de chômage des cadres est passé sous la barre des<br />

5 %. C’est donc bien en termes stratégiques, c’est-àdire<br />

très en amont, qu’il f<strong>au</strong>t penser <strong>le</strong> recrutement<br />

et non plus comme une tâche secondaire dont on<br />

s’acquitterait en fonction des besoins. Cela nécessite<br />

de se réinterroger sur <strong>le</strong> fonctionnement même de son<br />

entreprise et ses chances de retenir <strong>le</strong>s bons candidats:<br />

Ai-je une stratégie définie sur trois à cinq ans, exprimée<br />

de manière suffisamment claire pour permettre<br />

<strong>au</strong>x candidats de se projeter <strong>au</strong>-delà de <strong>le</strong>ur première<br />

mission? En quoi mon entreprise est-el<strong>le</strong> différente<br />

des <strong>au</strong>tres ? Quels sont ses facteurs spécifiques<br />

d’attractivité? Comment <strong>le</strong>s mettre en évidence? Avec<br />

quel<strong>le</strong> communication? Mon site Internet est-il adapté?<br />

Ne dois-je pas mieux maîtriser et utiliser toutes <strong>le</strong>s<br />

nouvel<strong>le</strong>s démarches de recrutement liées <strong>au</strong> web?<br />

Comment faire pour éviter ou limiter la surenchère<br />

salaria<strong>le</strong>? Ne f<strong>au</strong>t-il pas que j'investisse davantage <strong>au</strong><br />

nive<strong>au</strong> RH? Quel « package », à l’instar de ceux utilisés<br />

par certains grands groupes, ai-je à proposer à<br />

un candidat? Comment démontrer à un candidat qu'il<br />

valorisera mieux son CV dans mon entreprise que<br />

dans une plus grande ou une concurrente?<br />

DES IDÉES NEUVES<br />

Pour répondre efficacement à ces questions, il me<br />

semb<strong>le</strong> nécessaire de faire du recrutement un projet<br />

pour l'entreprise, avec quelques pré-requis: implication<br />

de différents profils (ressources humaines, si el<strong>le</strong>s<br />

existent, mais <strong>au</strong>ssi managers, commerci<strong>au</strong>x, salariés<br />

et, bien sûr, <strong>le</strong> dirigeant), planification par étape, pilotage<br />

en comité de direction… pour aboutir à de véritab<strong>le</strong>s<br />

innovations. Ce n’est qu’en ayant des idées<br />

neuves, en défrichant des territoires nouve<strong>au</strong>x, en<br />

s’associant entre el<strong>le</strong>s que <strong>le</strong>s PME garderont quelques<br />

avantages concurrentiels sur <strong>le</strong> marché de l’emploi.<br />

PAR SYLVAIN BREUZARD<br />

D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7 27


28<br />

Ça s’est pensé<br />

<strong>au</strong> XX e sièc<strong>le</strong><br />

Le <strong>CJD</strong> va fêter ses 70 ans en 2008. À cette occasion Dirigeant ouvre une rubrique « historique »<br />

qui reprendra <strong>le</strong>s grands textes fondateurs ou visionnaires publiés dans <strong>le</strong>s différentes revues<br />

du mouvement. À tout seigneur, tout honneur, nous débutons par <strong>le</strong> premier édito de<br />

Jean Mersch, fondateur du mouvement, paru dans <strong>le</strong>s années 1940 dans <strong>le</strong> premier <strong>numéro</strong><br />

des Cahiers Jeune Patron. Extraits.<br />

Naissance<br />

D’UN MOUVEMENT<br />

Tout mouvement vraiment neuf et profond<br />

naît d’une « inquiétude » et d’un<br />

« engagement ». (…)<br />

Le mouvement « jeune patron » n’a pas<br />

échappé à cette règ<strong>le</strong>. À son origine<br />

furent une inquiétude et un engagement.<br />

Cette inquiétude, ce fut cel<strong>le</strong> des chefs<br />

d’entreprise français de 1936 <strong>au</strong>xquels<br />

<strong>le</strong>s événements soci<strong>au</strong>x vinrent poser<br />

ces deux questions bruta<strong>le</strong>s : « Mais,<br />

<strong>au</strong> fond, pourquoi travail<strong>le</strong>s-tu? Au nom<br />

de qui tu es <strong>le</strong> chef? » A ces deux questions<br />

que sous-entendaient grèves et<br />

revendications, be<strong>au</strong>coup de patrons,<br />

même ceux qui se vantaient publiquement<br />

de <strong>le</strong>urs œuvres socia<strong>le</strong>s et<br />

croyaient en <strong>le</strong>ur va<strong>le</strong>ur, ne surent que<br />

répondre. (…)<br />

Quelques jeunes patrons ressentirent<br />

profondément la honte de<br />

cette attitude. Cette <strong>au</strong>torité qu’ils<br />

D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />

détenaient en étaient-ils dignes ?<br />

En avaient-ils compris la portée ? (…)<br />

C’est de cette inquiétude que naquit<br />

l’engagement. Il fut pris en mai 1938<br />

par une centaine de jeunes patrons<br />

réunis en une journée de rencontre<br />

qui aboutit à la création du Centre<br />

d’Études et d’In<strong>format</strong>ion des Jeunes<br />

Patrons (CJP). Le but était de faire naître,<br />

chez <strong>le</strong>s chefs d’entreprise, un<br />

nouvel esprit. (…)<br />

Cet esprit, quel est-il ?<br />

Il est d’abord jeune, c’est-à-dire<br />

dynamique et créateur. Il n’aime pas<br />

<strong>le</strong>s lamentations sur un passé qui<br />

s’estompe. Il est tendu tout entier vers<br />

un avenir qui s’élabore chaque jour. (…)<br />

Autour du jeune patron tout est vie, évolution,<br />

devenir. L’essentiel est d’être un<br />

créateur, de ne pas se laisser porter par<br />

ce mouvement comme un poids mort,<br />

LECTURE PAR SERGE GUÉRIN, professeur à l’ESG<br />

Nouve<strong>au</strong> Regard sur<br />

la société française<br />

Michel Crozier<br />

et Bruno Tilliette<br />

Éditions Odi<strong>le</strong> Jacob,<br />

septembre 2007,<br />

22,50 euros<br />

LES VALEURS D’UN SOCIOLOGUE<br />

Il y a quelque chose d’émouvant<br />

et de profondément <strong>format</strong>eur à lire<br />

<strong>le</strong> dernier ouvrage du sociologue<br />

Michel Crozier, qui a fondé l’un des<br />

princip<strong>au</strong>x courants de la sociologie<br />

française de la seconde moitié du<br />

XXe sièc<strong>le</strong>. Cet ouvrage d’entretiens<br />

avec Bruno Tilliette permet à Michel<br />

Crozier de s’arrêter sur quelques<br />

éléments essentiels de son parcours<br />

personnel et professionnel et d’en<br />

rappe<strong>le</strong>r quelques idées-forces.<br />

En refermant ce livre fort bien écrit<br />

et d’accès très faci<strong>le</strong> en dépit de la<br />

puissance des sujets abordés, deux<br />

idées se dégagent et font <strong>le</strong>ur<br />

chemin. Tout d'abord, Michel Crozier<br />

revient sur la notion de liberté. Pour<br />

lui, il n’y a pas de liberté sans prise<br />

en compte de l’<strong>au</strong>tre. C’est pourquoi<br />

il par<strong>le</strong> de liberté sous contrainte.<br />

D'une certaine façon, il renverse <strong>le</strong><br />

célèbre paradigme sartrien comme<br />

quoi l’enfer c’est <strong>le</strong>s <strong>au</strong>tres. Pour<br />

Crozier, la liberté n’existe que si je<br />

prends conscience de l’<strong>au</strong>tre, de<br />

ses droits et de ses différences.<br />

L’<strong>au</strong>tre grande <strong>le</strong>çon de cet ouvrage<br />

tient en peu de mots et peut<br />

apparaître comme très bana<strong>le</strong> :<br />

l’importance de l’écoute. Michel<br />

Crozier exprime un véritab<strong>le</strong> éloge<br />

de l’écoute de l’<strong>au</strong>tre, de l’écoute<br />

TEXTES HISTORIQUES DU <strong>CJD</strong><br />

de ne pas s’attacher à des formu<strong>le</strong>s<br />

périmées, mais <strong>au</strong> contraire d’être à<br />

l’extrême pointe de cette évolution, d’en<br />

pressentir <strong>le</strong> cours et de l’entraîner<br />

quand il <strong>le</strong> f<strong>au</strong>t. Le jeune patron est naturel<strong>le</strong>ment<br />

révolutionnaire. Nul doute que<br />

ce rô<strong>le</strong> nécessite une grande richesse<br />

spirituel<strong>le</strong>. El<strong>le</strong> est à notre avis à la base<br />

de la fonction patrona<strong>le</strong>. (…)<br />

Le jeune patron… est très profondément<br />

social, d’une manière nouvel<strong>le</strong><br />

et qui n’a rien de commun avec <strong>le</strong><br />

paternalisme d’<strong>au</strong>trefois. L’argent pour<br />

lui n’est plus un but, mais un moyen.<br />

La production ne tire sa va<strong>le</strong>ur que du<br />

bien-être qu’el<strong>le</strong> apporte à la société.<br />

Le bénéfice n’est plus idéal sordide,<br />

mais l’expression comptab<strong>le</strong> d’une<br />

réussite, fruit de la collaboration de<br />

tous et dont chacun doit avoir la part<br />

qu’il mérite. (…)<br />

des courants de la société. Dans<br />

une époque où <strong>le</strong>s moyens de<br />

communication sont rois, il est bon<br />

de rappe<strong>le</strong>r qu’ils ne sont rien s’il n’y<br />

a pas un minimum d’empathie, de<br />

désir d’écouter <strong>le</strong>s <strong>au</strong>tres dans <strong>le</strong>urs<br />

diversités. Toute action est vouée<br />

à l’échec si el<strong>le</strong> ne prend pas en<br />

compte la réalité des attentes et des<br />

comportements. Cette <strong>le</strong>çon de vie<br />

intéresse <strong>au</strong>tant l’individu dans son<br />

existence personnel<strong>le</strong> que dans<br />

l’exercice de ses responsabilités<br />

managéria<strong>le</strong>s et commercia<strong>le</strong>s.<br />

Au moins deux bonnes raisons<br />

pour lire cet ouvrage vitaminé !


Futurs<br />

La France ne compte<br />

que 7 % de femmes<br />

membres de conseils<br />

d'administration des entreprises<br />

du CAC 40. El<strong>le</strong> se<br />

situe <strong>au</strong> 17 e rang européen<br />

pour la place des<br />

femmes à l'Assemblée<br />

Nationa<strong>le</strong>. Et dans notre<br />

be<strong>au</strong> 21 e sièc<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s musiciens<br />

solistes passent<br />

encore <strong>le</strong>urs concours<br />

derrière des paravents<br />

pour que <strong>le</strong> jury ne soit<br />

pas influencé par <strong>le</strong> sexe.<br />

Alors, comment aborder <strong>le</strong><br />

sujet des femmes et de la<br />

PAR NATHALIE CROUZET, LOUISE GUERRE ET ANDRÉ-YVES PORTNOFF<br />

EN PARTENARIAT AVEC<br />

portes à 1 800 euros. La<br />

c<strong>le</strong>f du secret pour arriver<br />

à des prix si bas n’est pas,<br />

contrairement à ce que<br />

l’on pourrait croire, dans<br />

<strong>le</strong>s bas salaires et des<br />

prestations médiocres,<br />

mais dans l’innovation.<br />

L’évolution des téléphones<br />

portab<strong>le</strong>s <strong>le</strong> démontre.<br />

En 2011, un portab<strong>le</strong><br />

sur quatre sera vendu<br />

en dessous de 20 dollars.<br />

Les low cost exploiteront<br />

pour l’essentiel <strong>le</strong>s mêmes<br />

composants é<strong>le</strong>ctroniques<br />

que des modè<strong>le</strong>s plus<br />

h<strong>au</strong>t de gamme : cela<br />

coûte moins cher de<br />

brider des composants que<br />

de multiplier <strong>le</strong>s modè<strong>le</strong>s,<br />

donc <strong>le</strong>s frais de concep-<br />

vie économique, sans<br />

sombrer dans la méfiance<br />

ou déborder d'espoir ?<br />

Peut-être en admettant<br />

que si <strong>le</strong>s femmes se révè<strong>le</strong>nt<br />

porteuses de changement<br />

pour <strong>le</strong> futur, ce<br />

n'est <strong>au</strong>cunement dû à la<br />

biologie, mais simp<strong>le</strong>ment<br />

parce qu'el<strong>le</strong>s ont exercé<br />

d'<strong>au</strong>tres responsabilités,<br />

engrangé d'<strong>au</strong>tres expériences,<br />

subi d'<strong>au</strong>tres<br />

conditionnements et<br />

développé une culture<br />

différente de cel<strong>le</strong> des<br />

hommes. Amartya Sen,<br />

www.futurib<strong>le</strong>s.com<br />

LOW COST MAIS HIGH TECH<br />

Le succès de la Logan, qui<br />

dépasse largement la cib<strong>le</strong><br />

initia<strong>le</strong> de pays relativement<br />

p<strong>au</strong>vres, donne à<br />

réfléchir. Nissan prépare<br />

une voiture encore moins<br />

chère et l’Indien Tata<br />

Motors produirait à la fin<br />

de l’année une quatre<br />

LES FEMMES,<br />

agents de trans<strong>format</strong>ion<br />

tion et <strong>le</strong>s lignes de<br />

production. C’est en<br />

accroissant l’intégration<br />

des composants que l’on<br />

réduit <strong>le</strong>ur coût de revient.<br />

De plus, même <strong>le</strong>s pays<br />

émergents réclament des<br />

portab<strong>le</strong>s multifonctions.<br />

On peut penser que <strong>le</strong>s<br />

consommateurs des marchés<br />

riches n’accepteront<br />

pas longtemps de payer<br />

be<strong>au</strong>coup plus cher <strong>le</strong>s<br />

mêmes téléphones que<br />

Chinois ou Indiens. Pas<br />

plus qu’ils ne resteront<br />

indifférents si des ordinateurs<br />

à moins de 200<br />

dollars se répandent<br />

dans <strong>le</strong>s éco<strong>le</strong>s des pays<br />

émergents, alors que l’on<br />

nous vend des machines<br />

ancien prix Nobel<br />

d'économie, est convaincu<br />

que <strong>le</strong>s femmes sont porteuses<br />

« d'un nouve<strong>au</strong><br />

modè<strong>le</strong> économique »,<br />

basé sur <strong>le</strong> partage des<br />

pouvoirs et des ressources,<br />

durab<strong>le</strong>, solidaire<br />

et respectueux des équilibres<br />

naturels. Selon Alain<br />

Touraine, qui a interviewé<br />

des centaines de femmes,<br />

cel<strong>le</strong>s-ci ne cherchent pas<br />

à détruire la domination<br />

masculine. Leur but est<br />

la construction de soi,<br />

« animé par <strong>le</strong> désir de<br />

compliquées dont une<br />

bonne part de la coûteuse<br />

et fragi<strong>le</strong> puissance ne<br />

nous sert à rien. Cette<br />

vague du low cost incite<br />

justement à retrouver<br />

des méthodes comme<br />

l’analyse de la va<strong>le</strong>ur pour<br />

concevoir des produits<br />

qui ne gâchent pas de<br />

ressources pour donner<br />

<strong>au</strong> client ce qu’il ne<br />

souhaite pas.<br />

Système de veil<strong>le</strong><br />

Vigie-Futurib<strong>le</strong><br />

vivre une existence transformée<br />

par el<strong>le</strong>s-mêmes,<br />

et de recomposer<br />

la société, alors que<br />

<strong>le</strong>s hommes ont conquis<br />

<strong>le</strong> monde en concentrant<br />

<strong>le</strong>s pouvoirs entre <strong>le</strong>s<br />

mains de quelques-uns<br />

d'entre eux ».<br />

Futurib<strong>le</strong>s, octobre 2007<br />

ÉTIQUETTE CARBONE<br />

Savez-vous qu’un fi<strong>le</strong>t de<br />

cabill<strong>au</strong>d peut parcourir<br />

27 000 km avant d’arriver<br />

dans votre assiette ?<br />

Après Tesco, <strong>le</strong> distributeur<br />

britannique et ses 70 000<br />

références, c’est <strong>au</strong> tour de<br />

Casino de se lancer dans<br />

l’étiquetage environnemental.<br />

Les émissions de CO 2<br />

induites tout <strong>le</strong>ur cyc<strong>le</strong> de<br />

vie par chacun des 3 000<br />

produits proposés vont être<br />

mesurées et indiquées sur<br />

<strong>le</strong>s étiquettes en équiva<strong>le</strong>nt<br />

en tonnes de carbone.<br />

Comment cela influencerat-il<br />

<strong>le</strong>s décisions de<br />

consommateurs qui se<br />

déclarent très sensib<strong>le</strong>s<br />

<strong>au</strong>x problèmes<br />

d’environnement ?<br />

95 %<br />

des maisons neuves suédoises<br />

équipées de pompes à cha<strong>le</strong>ur !<br />

Ces installations de ch<strong>au</strong>ffage qui<br />

puisent la cha<strong>le</strong>ur dans l’air ou l’e<strong>au</strong><br />

devraient se développer en France<br />

grâce <strong>au</strong> crédit d’impôt.<br />

El<strong>le</strong>s n’équipent pour l’instant<br />

que 10 % des constructions<br />

individuel<strong>le</strong>s.<br />

STOCKAGE VIRAL<br />

OU GÉNÉTIQUE ?<br />

Vous avez peur des OGM ?<br />

Vous n'avez encore rien vu,<br />

<strong>le</strong>s virus génétiquement<br />

modifiés vont révolutionner<br />

<strong>le</strong>s batteries. Fini <strong>le</strong> rechargement<br />

des téléphones<br />

portab<strong>le</strong>s tous <strong>le</strong>s deux<br />

jours, grâce <strong>au</strong> stockage<br />

de l'énergie sur des virus,<br />

heureusement morts.<br />

Encore plus fort, des chercheurs<br />

japonais affirment<br />

pouvoir réussir à stocker<br />

d'importantes quantités de<br />

données sur des décennies,<br />

grâce à l'encryptage sur<br />

<strong>le</strong>s gènes d'un organisme<br />

vivant, qui <strong>au</strong> fur et à<br />

mesure de sa reproduction,<br />

reproduira éga<strong>le</strong>ment<br />

toutes <strong>le</strong>s données,<br />

pendant des générations<br />

et des générations…<br />

Il suffisait d'y penser !…<br />

D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />

29


LE JOURNAL DE<br />

30 D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />

CLAUDE-JEAN DESVIGNES<br />

L’entreprise en souffrance<br />

JEUDI 4 OCTOBRE 2007<br />

Je me suis endormi<br />

hier tardivement et<br />

un peu furieux. Pour<br />

me détendre, vers<br />

11 heures du soir,<br />

après une journée norma<strong>le</strong> de<br />

travail, c’est-à-dire une journée<br />

passée à rég<strong>le</strong>r 72 problèmes<br />

<strong>le</strong>s plus divers, j’ai<br />

allumé la télé, un peu zappé<br />

et je suis tombé sur une émission<br />

de France 3 qui s’appel<strong>le</strong>,<br />

je crois, Ce soir (ou jamais),<br />

une émission de débat. Le<br />

thème m’a évidemment tout<br />

de suite accroché et plus<br />

encore irrité: « Le travail, une<br />

souffrance ? ». Il y avait bien<br />

un point d’interrogation pour<br />

nuancer, mais <strong>le</strong> dossier était<br />

globa<strong>le</strong>ment à charge. Le plate<strong>au</strong><br />

réunissait d’abord <strong>le</strong>s<br />

habitués de la souffrance <strong>au</strong><br />

travail et du harcè<strong>le</strong>ment moral<br />

(enfin, eux ne semb<strong>le</strong>nt pas tel<strong>le</strong>ment<br />

souffrir de ce qu’ils font,<br />

ça a même plutôt l’air de <strong>le</strong>s<br />

intéresser, comme quoi, il y en<br />

a quand même qui souffrent<br />

moins que d’<strong>au</strong>tres en allant<br />

<strong>au</strong> boulot): comme ils ont fait<br />

métier de s’occuper de ces<br />

sujets, ils étaient dans <strong>le</strong>ur rô<strong>le</strong>.<br />

Les médecins sont là pour par<strong>le</strong>r<br />

de la maladie et <strong>le</strong>s garagistes<br />

de panne de moteur.<br />

Mais l’animateur avait éga<strong>le</strong>ment<br />

trouvé bon d’inviter un<br />

cinéaste, Nicolas Klotz, <strong>au</strong>teur<br />

de La Question humaine.<br />

Personnage un peu bizarre<br />

et méprisant, accusant de<br />

paresse intel<strong>le</strong>ctuel<strong>le</strong> <strong>le</strong>s<br />

<strong>au</strong>tres intervenants qui<br />

n’avaient pas compris son film<br />

comme il <strong>au</strong>rait voulu qu’on <strong>le</strong><br />

comprenne (l’idée ne lui est<br />

pas venue à l’esprit que son<br />

message n’était peut-être pas<br />

clair). Moi, je n’ai pas très bien<br />

saisi non plus ce qu’il voulait<br />

dire (mais je n’ai pas vu <strong>le</strong> film<br />

et je ne suis pas un intel<strong>le</strong>ctuel)<br />

: en gros, il a fait un film<br />

qui se passe dans une entreprise,<br />

ou <strong>le</strong> DRH qui licencie<br />

cyniquement tout <strong>le</strong> monde<br />

est <strong>le</strong> fils d’un nazi et s’inspire<br />

des méthodes d’extermination<br />

de ce parti monstrueux, mais<br />

ça n’a rien à voir avec l’entreprise,<br />

c’était juste pour faire<br />

moderne, ça va bien <strong>au</strong>-delà,<br />

puisque ça pose la question<br />

humaine… Au fait, c’est quoi<br />

la question ?<br />

De cette confusion des esprits,<br />

il ressortait quand même qu’il<br />

ne faisait pas bon vivre<br />

dans l’entreprise. Le seul qui<br />

essayait de plaider à décharge,<br />

Philippe Korda, un consultant<br />

<strong>au</strong>teur de L’entreprise réconciliée,<br />

avait la tâche diffici<strong>le</strong>.<br />

Il se faisait sans cesse rembarrer<br />

par l’inénarrab<strong>le</strong> acteur de<br />

la série Caméra café, Bruno<br />

Solo, qui ne connaît du monde<br />

du travail que <strong>le</strong>s clichés dont<br />

il fait rire <strong>le</strong>s téléspectateurs<br />

et pour qui l’entreprise, c’est a<br />

priori l’horreur.<br />

Bref, je bouillais et j’<strong>au</strong>rais eu<br />

du mal à me contenir si j’avais<br />

été sur <strong>le</strong> plate<strong>au</strong> : quoi !<br />

chaque jour 23 millions de salariés<br />

acceptent, sans se révolter,<br />

de se rendre <strong>au</strong> goulag et<br />

de se soumettre <strong>au</strong> joug de<br />

petits chefs tortionnaires! Et<br />

moi, dans ma PME, je règne en<br />

despote sur 60 misérab<strong>le</strong>s<br />

esclaves! Ras-<strong>le</strong>-bol d’entendre<br />

ce genre de discours. Il me<br />

semb<strong>le</strong> que <strong>le</strong>s salariés de<br />

Pakéo ne sont pas si malheureux,<br />

ou alors, ils cachent bien<br />

<strong>le</strong>ur dou<strong>le</strong>ur. Mais enfin, je <strong>le</strong>s<br />

vois rigo<strong>le</strong>r, s’enthousiasmer,<br />

être fiers de sortir de nouve<strong>au</strong>x<br />

produits. On a parfois des<br />

moments de tension où c’est<br />

un peu plus dur, mais quand<br />

on a surmonté l’obstac<strong>le</strong><br />

ensemb<strong>le</strong>, on est tous contents.<br />

La souffrance existe, mais arrêtons<br />

de généraliser et donner<br />

perpétuel<strong>le</strong>ment cette image<br />

négative de l’entreprise.<br />

Et puis voilà que je me réveil<strong>le</strong><br />

et que je regarde <strong>le</strong>s titres des<br />

journ<strong>au</strong>x : « 350 000 euros<br />

retrouvés en liquide <strong>au</strong> siège<br />

de l’UIMM, 10 millions détournés<br />

entre 2000 et 2007 »,<br />

« Soupçon d’un vaste délit<br />

d’initiés chez EADS ». La<br />

chose n’étant pas jugée, ne<br />

condamnons pas d’avance.<br />

Mais q uand même : la<br />

branche maîtresse du plus<br />

grand syndicat patronal qui<br />

brico<strong>le</strong> avec de l’argent liquide,<br />

et pas des petites sommes, ce<br />

n’est pas très faci<strong>le</strong> à justifier.<br />

Et surtout EADS ! Après <strong>le</strong><br />

scanda<strong>le</strong> du patron parti avec<br />

des indemnités pharamineuses<br />

pour solde de toute<br />

son incompétence, voici <strong>au</strong>ssi<br />

qu’il <strong>au</strong>rait triché, avec<br />

d’<strong>au</strong>tres, pour vendre ses<br />

actions <strong>au</strong> bon moment sur <strong>le</strong><br />

dos de l’entreprise dont il avait<br />

la responsabilité. Ils étaient<br />

trop occupés à finaliser <strong>le</strong>ur<br />

plan Power Fric pour s’apercevoir<br />

que l’A380 était monté<br />

de travers. Et après, c’est <strong>au</strong>x<br />

employés de payer la facture<br />

avec <strong>le</strong> plan Power 8. Comment<br />

peuvent-ils comprendre,<br />

même si ce plan a sans doute,<br />

économiquement, sa raison<br />

d’être? Écœurant. Indéfendab<strong>le</strong>.<br />

Voilà comment se brouil<strong>le</strong><br />

l’image de l’entreprise. Voilà<br />

qui crédibilise l’idée de souffrance<br />

généralisée sous la<br />

pression du profit. Que répondre,<br />

si on m’interpel<strong>le</strong> à ce<br />

sujet ? Qu’il ne s’agit que de<br />

quelques malhonnêtes parmi<br />

deux millions de patrons honnêtes<br />

? Mais ce sont <strong>le</strong>s plus<br />

emblématiques, dirigeants de<br />

grandes entreprises, f<strong>le</strong>urons<br />

de notre économie. Symboliquement,<br />

<strong>le</strong> mal est fait.

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