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Pour un libéralisme<br />
responsab<strong>le</strong><br />
Repenser<br />
<strong>le</strong> contrat de travail<br />
P.04<br />
Entretien<br />
Joël de Rosnay<br />
Nouvel<strong>le</strong>s technologies :<br />
<strong>le</strong>s maîtriser ou <strong>le</strong>s subir?<br />
P.06<br />
Ils entreprennent<br />
Éric Scaon<br />
La subti<strong>le</strong> alchimie<br />
des groupements<br />
d’employeurs<br />
P.12<br />
Dirigeant<br />
Un <strong>au</strong>tre regard sur l’entreprise<br />
DOSSIER<br />
NOVEMBRE 2007 N ° 7 6<br />
“ PAYEZ VOTRE PERSONNEL<br />
LE MOINS POSSIBLE et c’est<br />
ce que vous obtiendrez d’eux. ”<br />
Malcom Forbes<br />
RECRUTEMENT<br />
ET FIDÉLISATION :<br />
QUELS SONT LES ATOUTS<br />
DES PME FACE AUX<br />
GRANDS GROUPES ?
sommairewww.cjd.net<br />
04<br />
Pour un libéralisme<br />
responsab<strong>le</strong><br />
Repenser<br />
LE CONTRAT DE TRAVAIL<br />
05<br />
Le point de vue de<br />
Thomas Ch<strong>au</strong>dron<br />
Faire preuve<br />
D’IMAGINATION<br />
06<br />
Entretien<br />
JOËL DE ROSNAY<br />
Nouvel<strong>le</strong>s technologies :<br />
LES MAÎTRISER<br />
OU LES SUBIR?<br />
08<br />
D’accord/Pas d’accord<br />
ALLEZ-VOUS PLUS UTILISER<br />
LE CRÉDIT IMPÔT<br />
RECHERCHE ?<br />
Dirigeant UN AUTRE REGARD SUR L’ENTREPRISE<br />
10<br />
Ils bougent<br />
12<br />
Ils entreprennent<br />
Éric Scaon<br />
LA SUBTILE ALCHIMIE<br />
DES GROUPEMENTS<br />
D’EMPLOYEURS<br />
14<br />
Ils innovent<br />
16<br />
Le DD en pratique<br />
28<br />
Ça s’est pensé<br />
<strong>au</strong> XX e sièc<strong>le</strong><br />
Naissance d’un<br />
MOUVEMENT<br />
Jonathan Hall<br />
LETTRE DE<br />
CHINE<br />
Entreprises<br />
COMMUNICANTES<br />
ET RESPONSABLES<br />
Comment mesurer votre<br />
EMPREINTE ÉCOLOGIQUE ?<br />
QUESTIONS : P.19<br />
Innover pour mieux recruter<br />
MÉTHODE P.20<br />
Grands groupes : des<br />
avantages à tous <strong>le</strong>s étages<br />
STRATÉGIE P.22<br />
PME : comment<br />
attirer <strong>le</strong>s meil<strong>le</strong>urs ?<br />
TERRAIN P.24<br />
Pour séduire,<br />
cultiver ses différences<br />
CONCLUSION : P.27<br />
Une batail<strong>le</strong> des<br />
compétences ?<br />
29<br />
Futurs<br />
18<br />
19, avenue George V 75 008 Paris. Tél. : 01 53 23 92 50. Fax : 01 40 70 15 66. DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : Sylvain Breuzard. RÉDACTEUR EN CHEF : Bruno Tilliette.<br />
COMITÉ DE RÉDACTION : Michè<strong>le</strong> Buinet, Nathalie Crouzet, Louise Guerre, Emmanuel<strong>le</strong> Peres. DOCUMENTATION : Isabel<strong>le</strong> Poulain. ILLUSTRATIONS : Pierre Nenny.<br />
CRÉDIT PHOTOS : Masterfi<strong>le</strong> (couverture et p. 14). CREATION ET RÉALISATION : A CONSEIL Paris www.aconseil.fr . RÉGIE PUBLICITAIRE : EDC Régie - L<strong>au</strong>rence Ang<strong>le</strong>ys,<br />
Tél. : 01 41 49 66 77. Fax : 01 41 49 66 79. Magazine bimestriel <strong>au</strong> prix unitaire de 9 €. Abonnement France 1 an : 54 €, 2 ans : 99 €, étranger 1 an : 61 €, 2 ans : 110 €. Abonnements<br />
multip<strong>le</strong>s France 1 an : 37,35 € pour <strong>le</strong> 2 e abonnement, 26,68 € pour <strong>le</strong> 3 e et <strong>le</strong>s suivants. COMMISSION PARITAIRE : 0310 T 82880. ISSN : 02948241. IMPRIMERIE : MONTLIGEON,<br />
61 400 La Chapel<strong>le</strong>-Montligeon. DÉPÔT LÉGAL : 4 e trimestre 2007.<br />
ANNONCEURS : RÉUNICA (page 2), ANACT (page 9), LA POSTE (page 11), FONDACT (page 17), NOVALIS (page 31), GROUPE MORNAY (page 32).<br />
• LOW COST MAIS HIGH TECH<br />
• LES FEMMES, agents de<br />
trans<strong>format</strong>ion<br />
30<br />
Le journal de<br />
Cl<strong>au</strong>de-Jean<br />
Desvignes<br />
L’ENTREPRISE<br />
EN SOUFFRANCE<br />
Dossier<br />
RECRUTEMENT<br />
ET FIDÉLISATION :<br />
QUELS SONT LES ATOUTS<br />
DES PME FACE AUX GRANDS<br />
GROUPES ?
Pour un libéralisme<br />
responsab<strong>le</strong><br />
Repenser<br />
LE CONTRAT DE TRAVAIL<br />
Sait-on que, jusqu’à une loi de<br />
1973, <strong>le</strong> salarié pouvait signer un<br />
contrat de « louage de services », <strong>au</strong>ssi<br />
bien qu’un contrat de travail ? Sait-on<br />
que <strong>le</strong> contrat de louage de service,<br />
selon <strong>le</strong> Code civil de 1804, était<br />
« passé sans détermination de durée »<br />
et pouvait « toujours cesser par la<br />
volonté de l'une des parties contractantes<br />
» ? On pensait que l’employeur<br />
n’avait pas d’obligation particulière,<br />
puisque <strong>le</strong> salarié était libre de partir<br />
s’il n’était pas content des conditions<br />
qui lui étaient faites.<br />
Sait-on encore qu’<strong>au</strong> XIXe sièc<strong>le</strong> <strong>le</strong><br />
législateur se méfiait de la notion de<br />
« durée indéterminée », car il y voyait<br />
<strong>le</strong> risque d’un retour à la vassalité et à<br />
l’esclavage? Et que ce sont <strong>le</strong>s patrons<br />
de l’époque qui ont poussé à la mise<br />
en place de CDI pour pouvoir fidéliser<br />
(retenir ?) des salariés qui avaient tendance<br />
à repartir faire <strong>le</strong>s moissons dans<br />
<strong>le</strong>ur village, l’été venu. Sait-on enfin que<br />
<strong>le</strong> CDI n’est devenu vraiment la règ<strong>le</strong><br />
que dans <strong>le</strong>s années 1980 en France<br />
et en 1999 sur <strong>le</strong> plan européen ? 1<br />
INVERSION DES NORMES<br />
Ce petit rappel historique a pour seul<br />
but de souligner deux choses. D’une<br />
part, ce que nous croyons souvent être<br />
une norme imprescriptib<strong>le</strong> n’est parfois<br />
qu’une pratique contingente.<br />
D’<strong>au</strong>tre part, la perception de cette<br />
norme change avec l’évolution de la<br />
société. Par rapport <strong>au</strong> contrat de travail,<br />
el<strong>le</strong> s’est même inversée en un<br />
sièc<strong>le</strong>, puisque c’est <strong>le</strong> salarié qui<br />
réclame un CDI et l’employeur qui préférerait<br />
des CDD. C’est qu’entre-temps<br />
s’est construit notre système de protection<br />
socia<strong>le</strong> qui focalise l’attention<br />
sur la sécurité de l’emploi plutôt que<br />
sur la liberté du travail. C’est incontes-<br />
04<br />
D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />
tab<strong>le</strong>ment un progrès et nul ne songerait<br />
à revenir <strong>au</strong> louage de services tel<br />
qu’il était pratiqué <strong>au</strong> XIX e sièc<strong>le</strong>. Mais<br />
justement, la société n’est plus la<br />
même <strong>au</strong> XXI e . On peut se demander,<br />
sans remettre en c<strong>au</strong>se la sécurité de<br />
l’emploi dans son principe, si <strong>le</strong> contrat<br />
de travail ne devrait pas retrouver une<br />
certaine dimension de liberté correspondant<br />
mieux <strong>au</strong>x aspirations contemporaines<br />
à l’<strong>au</strong>tonomie et à la responsabilité.<br />
SUBORDINATION<br />
ET IRRESPONSABILITÉ<br />
Le système actuel – <strong>le</strong> CDI comme<br />
norme – génère quelques paradoxes.<br />
PAR LA RÉDACTION<br />
Le salarié, par exemp<strong>le</strong>, reste libre de<br />
partir de sa propre volonté, sans obligations<br />
particulières, si ce n’est un<br />
préavis qu’il accomplit rarement.<br />
Mais pour se séparer d’un employé,<br />
l’employeur est contraint à de lourdes<br />
procédures et de coûteuses indemnités<br />
qui sont presque toujours aggravées<br />
s’il y a passage devant <strong>le</strong>s<br />
prud’hommes. Cette différence de traitement<br />
ne se justifie que par <strong>le</strong> lien de<br />
subordination institué par <strong>le</strong> contrat de<br />
travail. Le chef d’entreprise suzerain<br />
doit protection à son salarié vassal.<br />
C’est justement ce type de rapport que<br />
craignaient d’inst<strong>au</strong>rer <strong>le</strong>s juristes du<br />
XIX e , qui savaient ce qu’était la monar-
chie. Mais <strong>le</strong> vassal actuel ne l’est que<br />
partiel<strong>le</strong>ment puisqu’il a loisir de quitter<br />
sa tutel<strong>le</strong> quand il <strong>le</strong> veut (même<br />
s’il ne <strong>le</strong> peut pas toujours pour des<br />
raisons matériel<strong>le</strong>s). Fina<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong><br />
subordonné est plus libre que son chef.<br />
Et il a envers lui une responsabilité très<br />
limitée. Il ne peut guère être attaqué<br />
même si son départ met en péril<br />
l’entreprise, ce qui arrive parfois. Ne<br />
f<strong>au</strong>drait-il pas réinterroger ce lien fina<strong>le</strong>ment<br />
très infantilisant pour <strong>le</strong> salarié,<br />
puisqu’il est maintenu dans la<br />
subordination et l’irresponsabilité, et<br />
très « paternisant » pour <strong>le</strong> chef<br />
d’entreprise à qui l’on fait supporter<br />
toutes <strong>le</strong>s responsabilités et <strong>le</strong>s<br />
dépenses qui vont avec ? N’est-ce pas<br />
ce lien qui fait perdurer des organisations<br />
très hiérarchiques dont on prétend<br />
pourtant vouloir sortir depuis des<br />
années ? Ne pourrait-on pas inventer<br />
des relations plus adultes, plus équilibrées<br />
<strong>au</strong> sein des entreprises, fondées<br />
sur des responsabilités mutuel<strong>le</strong>s et<br />
une certaine liberté d’association ?<br />
HYPOCRITE CDI<br />
On a <strong>le</strong> sentiment que <strong>le</strong>s négociations<br />
qui se sont ouvertes entre patronat et<br />
syndicats sur la simplification du<br />
contrat de travail portent déjà sur un<br />
débat dépassé <strong>au</strong> regard des réalités<br />
économiques actuel<strong>le</strong>s et futures, mais<br />
<strong>au</strong>ssi de l’évolution des mentalités.<br />
Certes, il f<strong>au</strong>t bien parvenir à s’accorder<br />
sur des propositions concrètes, mais<br />
cel<strong>le</strong>s-ci semb<strong>le</strong>nt reposer sur une<br />
vision très classique, très XX e sièc<strong>le</strong>,<br />
de l’entreprise et du travail. Les uns<br />
cherchent à assouplir un CDI trop rigide<br />
en l’amendant de périodes d’essai plus<br />
longues, <strong>le</strong>s <strong>au</strong>tres entonnent <strong>le</strong> refrain<br />
de la précarité.<br />
Mais <strong>le</strong> CDI n’est-il pas une fiction ?<br />
A-t-il encore un sens ? Une entreprise<br />
qui emb<strong>au</strong>che en CDI est nécessairement<br />
hypocrite puisqu’el<strong>le</strong> n’a <strong>au</strong>cun<br />
moyen de garantir un emploi à vie à<br />
celui qu’el<strong>le</strong> recrute. Sera-t-el<strong>le</strong> encore<br />
en vie, el<strong>le</strong>-même, dans 5 ans ? De<br />
l’<strong>au</strong>tre côté, 6 millions de salariés changent<br />
chaque année d’entreprise<br />
(30 000 par jour ouvrab<strong>le</strong>, un tiers des<br />
employés du privé), certains parce<br />
qu’ils y sont obligés, d’<strong>au</strong>tres par choix.<br />
Mais la réalité est bien que <strong>le</strong> CDI ne<br />
<strong>le</strong>ur a pas apporté la sécurité qu’on lui<br />
prête. S’est-on demandé <strong>au</strong>ssi si ce<br />
type de lien durab<strong>le</strong> convenait <strong>au</strong>x plus<br />
jeunes qui ont une vision plus utilitariste<br />
du travail que <strong>le</strong>s anciens ? Plus de la<br />
moitié d’entre eux, qui ont pourtant<br />
« galéré » pour trouver <strong>le</strong>ur premier<br />
emploi, <strong>le</strong> quitte avant même la fin<br />
de <strong>le</strong>ur CDD chèrement acquis.<br />
L’entreprise, el<strong>le</strong>-même, continuera-tel<strong>le</strong><br />
longtemps d’exister sous la forme<br />
qu’on lui connaît, juridiquement et physiquement<br />
? Internet n’est-il pas en train<br />
de susciter des formes d’association<br />
et de production immatériel<strong>le</strong> différentes<br />
? Les modes d’organisation de<br />
l’entreprise ne vont-ils pas se diversifier<br />
à l’infini ? Le temps et la présence<br />
en un lieu doivent-ils toujours être la<br />
mesure du travail ? Et surtout, nous<br />
tous, n’avons-nous pas envie d’inventer<br />
d’<strong>au</strong>tres manières de travail<strong>le</strong>r, plus<br />
libres, plus créatives, loin de la société<br />
d’obéissance que nous rappel<strong>le</strong> <strong>le</strong> lien<br />
de subordination ?<br />
TRAVAILLER<br />
POUR QUOI FAIRE ?<br />
Ne serait-il pas uti<strong>le</strong> de se poser toutes<br />
ces questions pour réfléchir à ce que<br />
pourrait être <strong>le</strong> contrat de travail dans<br />
la société du XXI e sièc<strong>le</strong> ? Le CDI n’est<br />
un problème que parce qu’il fonctionne<br />
comme un mythe et bouche l’horizon<br />
de la pensée. Son aménagement n’est<br />
pas la solution, tout juste une manière<br />
de l’accompagner vers sa fin. Les<br />
enjeux sont ail<strong>le</strong>urs et se résument<br />
en une dernière question : comment<br />
voulons-nous désormais travail<strong>le</strong>r<br />
ensemb<strong>le</strong> et pour quoi faire ?<br />
1 Source : Encyclopédia Universalis<br />
et Wikipédia.<br />
Le point de vue de<br />
Thomas Ch<strong>au</strong>dron,<br />
Président national du <strong>CJD</strong><br />
FAIRE PREUVE<br />
D’IMAGINATION<br />
Il est curieux, <strong>au</strong> moment où <strong>le</strong>s partenaires<br />
soci<strong>au</strong>x négocient sur une réforme du contrat de<br />
travail, de commencer par proposer de réfléchir sur<br />
<strong>le</strong>s conditions de sa rupture « simplifiée ». La signature<br />
d’un contrat de travail est plutôt une bonne nouvel<strong>le</strong>,<br />
tant pour l’entreprise que pour <strong>le</strong> salarié, puisqu’il<br />
est issu de la volonté des deux parties. Par<strong>le</strong>r<br />
d’emblée du divorce n’est pas très engageant.<br />
Il n’en demeure pas moins que <strong>le</strong> contrat de travail,<br />
comme <strong>le</strong> mariage, repose encore implicitement sur<br />
l’idée d’une union pour la vie, alors que nous savons<br />
tous que cela n’a plus de sens (voir ci-contre). Il f<strong>au</strong>t<br />
donc, vraisemblab<strong>le</strong>ment, arrêter de lier la sécurité<br />
du salarié à la seu<strong>le</strong> durée de l’engagement dans<br />
l’entreprise ou <strong>au</strong> type de contrat proposé.<br />
Le système actuel conduit, notamment, à une sorte<br />
de discrimination face à l’obtention d’un crédit ou<br />
d’un logement, lorsqu’on est en CDD ou en intérim.<br />
N’y a-t-il pas là une sorte d’injustice qui est en même<br />
temps une entrave à la mobilité (be<strong>au</strong>coup restent<br />
pour atteindre des seuils de droits…)?<br />
On <strong>le</strong> dit assez, chacun sera amené à changer<br />
régulièrement d’emploi tout <strong>au</strong> long de sa vie:<br />
<strong>le</strong> Code du travail doit prendre en compte cette réalité<br />
nouvel<strong>le</strong> en attachant <strong>le</strong>s droits soci<strong>au</strong>x <strong>au</strong> parcours de<br />
la personne et non à sa présence dans tel<strong>le</strong> ou tel<strong>le</strong><br />
entreprise. Cette « transférabilité » serait d’ail<strong>le</strong>urs un<br />
moyen de réduire <strong>le</strong>s écarts entre <strong>le</strong>s avantages que<br />
peuvent accorder <strong>le</strong>s grandes entreprises et <strong>le</strong>s PME<br />
et faciliterait <strong>le</strong> passage des salariés des unes <strong>au</strong>x<br />
<strong>au</strong>tres (sur ce problème, voir <strong>le</strong> dossier de ce <strong>numéro</strong>).<br />
À partir de là, toutes <strong>le</strong>s durées d’engagement sont<br />
possib<strong>le</strong>s, du « bail » renouvelab<strong>le</strong> en 3,6,9, <strong>au</strong> contrat<br />
de projet lié à une mission spécifique dans l’entreprise<br />
et qui s’achève avec cel<strong>le</strong>-ci, jusqu’<strong>au</strong> CDI, bien sûr,<br />
si chacun y trouve son compte… Mais, en contrepartie,<br />
<strong>le</strong> contrat offert par l’entreprise doit s’enrichir<br />
d’obligations de moyen claires et vérifiab<strong>le</strong>s comme<br />
cel<strong>le</strong>s de tout mettre en œuvre pour former <strong>le</strong> salarié<br />
et pour assurer son employabilité <strong>au</strong> moment où<br />
il partira, de lui donner un temps de recherche<br />
d’un nouvel emploi à la fin du contrat, de lui assurer<br />
un bilan de compétences, etc. Si ces conditions<br />
n’étaient pas tenues, <strong>le</strong> salarié serait alors en droit<br />
de réclamer des indemnités.<br />
Bien entendu, ce ne sont ici que des pistes dont il<br />
reste à évaluer la faisabilité et la pertinence. Mais une<br />
chose est sûre, il nous f<strong>au</strong>t sortir des ornières actuel<strong>le</strong>s<br />
et faire preuve d’imagination.<br />
D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />
05
Entretien<br />
Nouvel<strong>le</strong>s technologies :<br />
LES MAÎTRISER<br />
OU LES SUBIR ?<br />
Bio, nano, info, éco… <strong>au</strong>tant de préfixes qui, associés <strong>au</strong>x<br />
technologies, modifieront tota<strong>le</strong>ment notre environnement quotidien.<br />
Dans 2020 : Les scénarios du futur, Joël de Rosnay passe en revue<br />
<strong>le</strong>s progrès scientifiques et techniques qui verront l’avènement des<br />
« pronétaires ». 2020 ? C’est déjà demain !<br />
À consulter :<br />
www.derosnay.com<br />
www.pronetaire.com<br />
www.scenarios2020.com<br />
(livre téléchargeab<strong>le</strong><br />
gratuitement depuis<br />
<strong>le</strong> 15 octobre)<br />
www.unevieenplus.com<br />
www.Agoravox.fr<br />
(journal en ligne)<br />
2020 : Les scénarios<br />
du futur,<br />
Joël de Rosnay,<br />
Des Idées et des<br />
Hommes, 2007, 21€<br />
06<br />
ENTRETIEN AVEC JOËL DE ROSNAY,<br />
Conseil<strong>le</strong>r du président de la Cité des sciences et de l’industrie,<br />
Joël de Rosnay, docteur ès sciences, est président exécutif<br />
de Biotics International.<br />
Dirigeant: En quoi <strong>le</strong>s nouvel<strong>le</strong>s technologies<br />
dont <strong>le</strong>s applications verront<br />
<strong>le</strong> jour en 2020 bou<strong>le</strong>verseront-el<strong>le</strong>s<br />
notre vie quotidienne ?<br />
Joël de Rosnay : Davantage que <strong>le</strong>s<br />
technologies el<strong>le</strong>s-mêmes, l’usage<br />
qu’en feront <strong>le</strong>s hommes bou<strong>le</strong>versera<br />
notre vie quotidienne. Quatre grands<br />
groupes de techniques <strong>au</strong>ront un<br />
impact considérab<strong>le</strong> sur notre vie personnel<strong>le</strong><br />
et professionnel<strong>le</strong> et modifieront<br />
la médecine, <strong>le</strong>s transports,<br />
l’énergie ou <strong>le</strong>s communications. Je<br />
<strong>le</strong>s appel<strong>le</strong> <strong>le</strong>s infotechnologies, <strong>le</strong>s biotechnologies,<br />
<strong>le</strong>s écotechnologies et<br />
<strong>le</strong>s nanotechnologies. Ces quatre préfixes<br />
– info, bio, éco et nano – symbolisent<br />
<strong>le</strong>s convergences entre des secteurs<br />
<strong>au</strong>paravant séparés, et président<br />
à des innovations dans des laboratoires<br />
du monde entier. Ces convergences<br />
et innovations se matérialisent déjà<br />
dans <strong>le</strong>s rése<strong>au</strong>x de communication,<br />
<strong>le</strong>s téléphones cellulaires, <strong>le</strong>s nouve<strong>au</strong>x<br />
médicaments, <strong>le</strong>s nouvel<strong>le</strong>s formes<br />
d’énergie renouvelab<strong>le</strong>; ou encore dans<br />
<strong>le</strong>s nouve<strong>au</strong>x outils (biopuces, nanoimplants)<br />
permettant l’assemblage de<br />
microstructures de h<strong>au</strong>te comp<strong>le</strong>xité<br />
D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />
à partir de composants de base. Si ces<br />
progrès présentent des avantages, <strong>le</strong>s<br />
risques ne sont pas exclus.<br />
D. : En quoi <strong>le</strong> mariage de ces technologies<br />
peut-il s’avérer menaçant ?<br />
J. de R.: Prenons l’exemp<strong>le</strong> du mariage<br />
de la biologie et de l’in<strong>format</strong>ique, ou<br />
« biotique ». Si la fusion des puces<br />
é<strong>le</strong>ctroniques et des cellu<strong>le</strong>s du cerve<strong>au</strong><br />
permet de transférer directement<br />
des in<strong>format</strong>ions du cerve<strong>au</strong> vers <strong>le</strong>s<br />
machines, des environnements intelligents<br />
ou des rése<strong>au</strong>x, l’inverse est<br />
possib<strong>le</strong>. Transférer <strong>le</strong>s in<strong>format</strong>ions<br />
de l’extérieur vers un individu et donc<br />
modifier son comportement à son insu,<br />
voilà des manipulations plus inquiétantes<br />
que l’avènement de Big Brother,<br />
car il ne s’agit pas seu<strong>le</strong>ment d’écouter,<br />
mais d’influencer.<br />
D. : 2020, c’est quasiment demain !<br />
Le grand public est-il informé ?<br />
J. de R. : Les treize ans qui nous séparent<br />
de 2020 ne sont pas comparab<strong>le</strong>s<br />
<strong>au</strong>x treize ans qui nous séparent de<br />
1994. La mondialisation des communications<br />
s’accélère ; <strong>le</strong>s laboratoires<br />
PAR MARLEN SAUVAGE<br />
communiquent de plus en plus entre<br />
eux; <strong>le</strong>s découvertes et <strong>le</strong>s brevets sont<br />
accessib<strong>le</strong>s d’un bout à l’<strong>au</strong>tre de la<br />
planète. Le public est mal informé<br />
parce qu’il reçoit une in<strong>format</strong>ion par<br />
discipline : astrophysique, conquête<br />
spatia<strong>le</strong>, réch<strong>au</strong>ffement planétaire, clonage…<br />
Sa vision de l’évolution et de<br />
l’impact de ces technologies sur la<br />
société est encore analytique, linéaire,<br />
séquentiel<strong>le</strong>, alors qu’il est essentiel<br />
d’adopter une vision systémique, c’està-dire<br />
qui tient compte des convergences<br />
– technologique, numérique,<br />
biologique – mais <strong>au</strong>ssi du contexte<br />
dans <strong>le</strong>quel ces convergences évoluent,<br />
de manière à intégrer la réaction<br />
socia<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s problèmes philosophiques<br />
et éthiques.<br />
Il ne f<strong>au</strong>t pas négliger l’impact sur la<br />
société, et en particulier l’impact<br />
industriel qui se manifeste be<strong>au</strong>coup<br />
plus vite qu’on ne <strong>le</strong> pense. Les percées<br />
technologiques favorisées par<br />
<strong>le</strong>s industriels, qui cherchent à créer<br />
de nouve<strong>au</strong>x marchés, conduisent <strong>au</strong><br />
risque d’une gadgétisation technologique,<br />
c’est-à-dire un engouement<br />
pour de nouvel<strong>le</strong>s techniques et de<br />
nouve<strong>au</strong>x outils <strong>au</strong> détriment d’une<br />
réf<strong>le</strong>xion sur <strong>le</strong>s véritab<strong>le</strong>s usages<br />
sociét<strong>au</strong>x que devraient engager <strong>le</strong>s<br />
industriels, <strong>le</strong>s politiques et <strong>le</strong> grand<br />
public.
D. : Quel<strong>le</strong>s incidences ces bou<strong>le</strong>versements<br />
<strong>au</strong>ront-ils sur l’économie ?<br />
J. de R.: L’impact est déjà visib<strong>le</strong>, notamment<br />
dans <strong>le</strong>s communications et <strong>le</strong>s<br />
médias avec la diminution des ventes<br />
des CD en raison de l’Internet, et<br />
dans l’imprimerie et l’édition avec<br />
l’émergence des journ<strong>au</strong>x citoyens. Il<br />
y a deux ans, avec Carlo Revelli, nous<br />
avons créé Agora Vox, un journal<br />
citoyen qui propose gratuitement une<br />
édition par jour. Aujourd’hui, nous<br />
comptons un million et demi de <strong>le</strong>cteurs,<br />
et dix mil<strong>le</strong> blogueurs participent<br />
à la rédaction du journal. Si on ne peut<br />
pas par<strong>le</strong>r réel<strong>le</strong>ment de concurrence,<br />
ceci a un impact sur la presse, car il<br />
s’agit d’une nouvel<strong>le</strong> forme de journalisme,<br />
complémentaire et collaborative.<br />
Je pense que l’impact sur la télévision<br />
sera encore plus considérab<strong>le</strong> à partir<br />
du moment où <strong>le</strong>s « pronétaires » –<br />
ceux qui sont pour et sur <strong>le</strong> net, c’està-dire<br />
des citoyens internation<strong>au</strong>x, dotés<br />
de nouve<strong>au</strong>x pouvoirs grâce à de nouve<strong>au</strong>x<br />
outils – créeront des chaînes de<br />
télévision. Au cours des vingt prochaines<br />
années, cet impact se poursuivra<br />
dans quatre domaines qui paraissent<br />
pourtant intouchab<strong>le</strong>s parce que<br />
tenus par de très grandes entreprises :<br />
ce sont la banque, l’assurance, <strong>le</strong><br />
consulting et l’éducation.<br />
D. : On devine tous <strong>le</strong>s dérapages liés<br />
à cette nouvel<strong>le</strong> façon d’évoluer dans<br />
notre société, en termes de traçabilité,<br />
de virus, de désin<strong>format</strong>ion… Comment<br />
se protéger de cela ?<br />
J. de R.: Demain sera pire qu’<strong>au</strong>jourd’hui,<br />
il y <strong>au</strong>ra encore plus de traçabilité, de<br />
virus, de spams, de pirates… La vie<br />
privée sera une denrée négociab<strong>le</strong>: on<br />
choisira d’être affiché sur Internet parce<br />
que cela présentera certains avantages.<br />
Cette « transparence » engendrera de<br />
nouvel<strong>le</strong>s relations. Il f<strong>au</strong>dra donc se<br />
protéger et pour cela utiliser des<br />
moyens numériques de manière à<br />
assurer la confidentialité des in<strong>format</strong>ions.<br />
Ceci s’apprend, <strong>le</strong>s solutions<br />
sont même très fiab<strong>le</strong>s, sachant qu’<strong>au</strong><br />
fur et à mesure que <strong>le</strong>s privés et <strong>le</strong>s<br />
entreprises se protégeront, <strong>le</strong>s pirates,<br />
<strong>le</strong>s spammeurs, <strong>le</strong>s « hackers », <strong>le</strong>s<br />
craqueurs trouveront <strong>le</strong> moyen de <strong>le</strong>s<br />
détourner.<br />
D.: Quels garde-fous éthiques, notamment,<br />
f<strong>au</strong>dra-t-il mettre en place et<br />
comment ?<br />
J. de R. : La bioéthique, domaine dans<br />
<strong>le</strong>quel la France a été pionnière sur la<br />
scène internationa<strong>le</strong>, contribue déjà à<br />
dessiner <strong>le</strong>s limites des pouvoirs que<br />
nous accordent la génomique (étude<br />
du séquençage des chromosomes) et<br />
la transgenèse (intégration stab<strong>le</strong> d’un<br />
gène étranger dans un génome hôte).<br />
L’infoéthique est la nécessité de réfléchir<br />
sur <strong>le</strong> plan philosophique et moral<br />
à ce que l’on fait de l’in<strong>format</strong>ion<br />
des <strong>au</strong>tres, el<strong>le</strong> doit nous guider<br />
dans la protection de la vie privée,<br />
l’épanouissement de la personnalité.<br />
L’écoéthique pourra nous aider à léguer<br />
à nos enfants une planète digne d’eux,<br />
sans la détruire ou mettre en c<strong>au</strong>se <strong>le</strong>s<br />
grands cyc<strong>le</strong>s écologiques. Cette<br />
réf<strong>le</strong>xion est engagée dans des groupes<br />
qui partagent <strong>le</strong>s mêmes va<strong>le</strong>urs. C’est<br />
une réponse citoyenne, et même une<br />
corégulation citoyenne, car je pense<br />
que la régulation ne peut pas se faire<br />
toujours du h<strong>au</strong>t vers <strong>le</strong> bas, mais <strong>au</strong>ssi<br />
remonter de la base vers <strong>le</strong> h<strong>au</strong>t. Entre<br />
<strong>le</strong>s règ<strong>le</strong>s de conduite édictées par <strong>le</strong>s<br />
gouvernants et l’<strong>au</strong>torégulation des individus<br />
eux-mêmes, responsab<strong>le</strong>s et solidaires<br />
(ce qu’ils ne sont pas encore…),<br />
on peut imaginer une régulation<br />
citoyenne participative où <strong>le</strong>s individus<br />
FLUX + BUZZ = BIZ<br />
conscients des règ<strong>le</strong>s de conduite pourraient<br />
régu<strong>le</strong>r progressivement <strong>le</strong> système.<br />
Pour cela, il f<strong>au</strong>t dispenser une<br />
in<strong>format</strong>ion de base, c’est <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> de la<br />
presse et de la Cité des sciences. Mais<br />
il f<strong>au</strong>t <strong>au</strong>ssi engager une réf<strong>le</strong>xion plus<br />
profonde, de nature sociologique, philosophique<br />
et éthique.<br />
ZOOM<br />
Cette formu<strong>le</strong>, développée par Joël de Rosnay,<br />
illustre un des principes de la « nouvel<strong>le</strong> nouvel<strong>le</strong><br />
économie » qui émerge avec l’apparition des<br />
médias des masses et des créateurs de contenus<br />
sur Internet.<br />
« Reposant sur <strong>le</strong> principe des flux massifs<br />
d’usagers et la diversification des propositions,<br />
la personnalisation de l’offre <strong>au</strong>x consommateurs<br />
à faib<strong>le</strong> coût est possib<strong>le</strong>. Le succès de ces<br />
services à va<strong>le</strong>ur ajoutée est garanti par <strong>le</strong><br />
bouche à oreil<strong>le</strong> ou buzz. (…) Mieux v<strong>au</strong>t gagner<br />
0,10 €sur dix millions de personnes avec 90 %<br />
de marge grâce <strong>au</strong> Web 2.0 que 100 €sur dix<br />
mil<strong>le</strong> personnes avec 30 % de marge suivant <strong>le</strong><br />
modè<strong>le</strong> économique classique : <strong>le</strong>s dépenses en<br />
marketing et en publicité s’avérant dans <strong>le</strong><br />
second cas be<strong>au</strong>coup plus importantes, <strong>le</strong><br />
bénéfice final ne représente que trente mil<strong>le</strong><br />
euros ! Le buzz n’est <strong>au</strong>tre qu’un formidab<strong>le</strong> outil<br />
marketing gratuit et amplificateur, qui sera la<br />
source de nouvel<strong>le</strong>s affaires. »<br />
Extrait de 2020 : Les scénarios du futur<br />
D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />
07
D’accord / Pas d’accord<br />
PAS D’ACCORD<br />
Je dirige un bure<strong>au</strong> d’études<br />
spécialisé dans <strong>le</strong> traitement<br />
de l’e<strong>au</strong>. Nous travaillons pour<br />
des industriels pour améliorer<br />
<strong>le</strong> cyc<strong>le</strong> de l’e<strong>au</strong> : économies<br />
d’e<strong>au</strong>, retraitement… Comme<br />
nous faisons pas mal de<br />
recherches, que nous travaillons<br />
avec des étudiants,<br />
sans que cela soit bien<br />
évidemment rapidement<br />
rentab<strong>le</strong>, un ami m’a conseillé<br />
il y a deux ans de déposer un<br />
dossier de crédit d’impôt.<br />
C’est un peu compliqué, donc<br />
j’ai dû faire appel à un cabinet<br />
de conseil pour monter <strong>le</strong> dossier.<br />
En 2005, j’ai ainsi obtenu<br />
un Crédit Impôt Recherche<br />
de 15 000 euros et en 2006,<br />
comme j’avais entre-temps<br />
RÉSUMÉ<br />
Inst<strong>au</strong>ré en 1982, <strong>le</strong> Crédit Impôt Recherche permet <strong>au</strong>x<br />
sociétés qui investissent dans <strong>le</strong> développement de nouve<strong>au</strong>x produits<br />
et de procédés industriels à contenu technologique, de réduire <strong>le</strong>ur<br />
imposition. Annoncée par Christine Lagarde fin août, la réduction d’impôt<br />
accordée <strong>au</strong>x entreprises <strong>au</strong> titre du Crédit Impôt Recherche sera portée<br />
de 10 % à 30 % des investissements en recherche et développement.<br />
L’évolution du Crédit Impôt Recherche est-il susceptib<strong>le</strong> d’engendrer<br />
davantage de projets de recherches dans <strong>le</strong>s entreprises du <strong>CJD</strong>?<br />
ALLEZ-VOUS PLUS UTILISER<br />
LE CRÉDIT IMPÔT RECHERCHE ?<br />
08<br />
MATHIAS<br />
WELSCHBILLIG<br />
(<strong>CJD</strong> Vannes)<br />
EAU & INDUSTRIE,<br />
14 personnes<br />
« Je n’ai toujours<br />
pas reçu <strong>le</strong>s crédits<br />
d’impôts attendus !»<br />
D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />
obtenu <strong>le</strong> statut de Jeune<br />
entreprise innovante, j’ai<br />
bénéficié de 78 000 euros<br />
de crédit d’impôt.<br />
Cela nous a aidés à nous<br />
consacrer à la recherche<br />
sans arrière-pensées pendant<br />
quelque temps et cela porte<br />
ses fruits <strong>au</strong>jourd’hui.<br />
Cette année, je n’ai pas<br />
représenté de dossier,<br />
d’abord parce que maintenant<br />
il me f<strong>au</strong>t développer<br />
et piloter <strong>le</strong>s projets<br />
en cours. Ensuite parce<br />
que j’ai bien reçu<br />
la facture du cabinet<br />
conseil qui m’a aidé<br />
à monter <strong>le</strong> dossier,<br />
mais toujours pas<br />
<strong>le</strong>s crédits d’impôts<br />
en question !<br />
D’ACCORD<br />
We<strong>le</strong>da est un laboratoire<br />
pharmaceutique<br />
qui fabrique et distribue<br />
des produits<br />
pharmaceutiques et<br />
cosmétiques naturels<br />
(médicaments homéopathiques,<br />
hui<strong>le</strong>s de<br />
massage, crèmes de<br />
soin…). L’entreprise<br />
connaît un très fort<br />
développement puisque<br />
nous avons doublé,<br />
en deux ans, <strong>le</strong> chiffre<br />
d’affaires de l’activité<br />
cosmétique. Nous avons<br />
en projet de gros investissements,<br />
notamment la<br />
construction de deux bâtiments,<br />
l’un dédié à la production<br />
pharmaceutique et à<br />
la logistique de distribution,<br />
l’<strong>au</strong>tre à la production de<br />
cosmétiques.<br />
Nous faisons deux types<br />
de recherches : l’une fondamenta<strong>le</strong><br />
sur <strong>le</strong>s principes<br />
actifs, par exemp<strong>le</strong><br />
sur <strong>le</strong>s effets<br />
d’un médicament<br />
homéopathique<br />
indiqué dans <strong>le</strong>s<br />
troub<strong>le</strong>s du sommeil<br />
; l’<strong>au</strong>tre plus<br />
appliquée sur<br />
l’amélioration ou<br />
PAR MICHÈLE BUINET<br />
la diversification de médicaments<br />
galéniques (basés sur<br />
<strong>le</strong>s végét<strong>au</strong>x). Cela représente<br />
des sommes colossa<strong>le</strong>s.<br />
Depuis 2002, <strong>le</strong> Crédit Impôt<br />
Recherche a représenté entre<br />
150 000 et 200 000 euros.<br />
Il nous a <strong>au</strong>ssi permis de<br />
be<strong>au</strong>coup mieux identifier<br />
ce qui re<strong>le</strong>vait de la recherche<br />
et que nous sous-évaluions<br />
(veil<strong>le</strong>, séminaires…).<br />
J’espère donc que <strong>le</strong>s dernières<br />
mesures annoncées<br />
par <strong>le</strong> gouvernement rentreront<br />
en œuvre dès cette<br />
année. El<strong>le</strong>s permettent<br />
en effet de valoriser l’effort<br />
annuel de recherche et<br />
d’en <strong>au</strong>gmenter <strong>le</strong> volume.<br />
Un bémol, cependant,<br />
la démarche est comp<strong>le</strong>xe.<br />
C’est extrêmement technique<br />
et j’ai dû me former une<br />
journée à Paris pour pouvoir<br />
remplir <strong>le</strong> dossier.<br />
STÉPHANE<br />
GUILLEMOT<br />
(<strong>CJD</strong> Mulhouse)<br />
WELEDA,<br />
340 personnes<br />
« Cette démarche permet<br />
de valoriser l’effort annuel<br />
de recherche et d’en<br />
<strong>au</strong>gmenter <strong>le</strong> volume. »
Ils bougent<br />
D’origine britannique, Jonathan Hall a créé<br />
son entreprise en France et adhéré <strong>au</strong> <strong>CJD</strong><br />
il y a quelques années. Ancien membre<br />
du Bure<strong>au</strong> national sous la présidence de<br />
Françoise Cocuel<strong>le</strong>, il a eu l’opportunité de<br />
s’expatrier en Chine. Une expérience qu’il ne<br />
regrette pas comme en témoigne cette <strong>le</strong>ttre. 1<br />
Lettre de CHINE<br />
1 Lettre rédigée<br />
à partir d’une<br />
conversation<br />
téléphonique<br />
10<br />
CHERS AMIS,<br />
I<br />
l y a une vie après <strong>le</strong> Bure<strong>au</strong> national,<br />
une vie <strong>au</strong>-delà de la France<br />
et de l’Europe, et l’on gagne toujours à<br />
prendre <strong>le</strong> risque d’al<strong>le</strong>r voir ce qui se<br />
passe ail<strong>le</strong>urs. C’est <strong>le</strong> sentiment qui<br />
m’habite depuis que j’ai quitté<br />
l’Hexagone, il y a un an, pour suivre<br />
mon épouse en Chine, où el<strong>le</strong> était<br />
nommée à la tête de la filia<strong>le</strong> d’une<br />
grande entreprise européenne.<br />
OUI, C’EST LE MARI qui a suivi la<br />
femme et c’est moi qui me suis be<strong>au</strong>coup<br />
occupé de nos deux enfants<br />
quand nous sommes arrivés à Pékin, ou<br />
plutôt à Beijing, comme on l’écrit maintenant.<br />
On peut dire que ce dépaysement<br />
est tombé pour moi <strong>au</strong> bon<br />
moment puisqu’il coïncidait avec la fin<br />
de mon mandat <strong>au</strong> Bure<strong>au</strong> national<br />
et donc de mon engagement quasi<br />
à temps p<strong>le</strong>in <strong>au</strong> <strong>CJD</strong>. Après tant<br />
d’années d’une vie à 200 à l’heure, je<br />
vous l’avoue, je redoutais be<strong>au</strong>coup de<br />
me retrouver devant un grand vide. Plus<br />
on progresse dans <strong>le</strong> mouvement, plus<br />
on jong<strong>le</strong> entre <strong>le</strong>s réunions, l’entreprise<br />
et la vie de famil<strong>le</strong>, plus on a tendance<br />
à se sentir performant, à se croire indispensab<strong>le</strong>,<br />
et plus il semb<strong>le</strong> diffici<strong>le</strong> de<br />
se réadapter à la vie « norma<strong>le</strong> » d’un<br />
simp<strong>le</strong> chef d’entreprise.<br />
Chacun sa solution. La mienne a été,<br />
sans que j’en aie vraiment conscience<br />
<strong>au</strong> début, de partir à 12 000 kilomètres.<br />
Il y en a peut-être des plus sim-<br />
D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />
p<strong>le</strong>s, mais croyez-moi, cel<strong>le</strong>-ci a été<br />
efficace. Dans un environnement où<br />
tout est nouve<strong>au</strong>, différent, dans cette<br />
Chine en p<strong>le</strong>ine effervescence, je n’ai<br />
pas eu <strong>le</strong> temps de m’ennuyer, de<br />
penser <strong>au</strong> vide. Et nous partageons<br />
l’impression, avec <strong>le</strong>s nombreux expatriés<br />
qui vivent ici, que l’Empire du<br />
milieu est bien devenu <strong>le</strong> centre du<br />
monde et va l’être plus encore avec <strong>le</strong>s<br />
Jeux Olympiques en 2008, dont <strong>le</strong>s<br />
Chinois veu<strong>le</strong>nt faire un grand succès.<br />
TOUTES LES GRANDES ENTREPRISES<br />
mondia<strong>le</strong>s sont présentes ici. Moi, plus<br />
modestement, je suis en train de créer<br />
une filia<strong>le</strong> de la mienne, Accelonix,<br />
dans l’é<strong>le</strong>ctronique. Nous sommes<br />
<strong>au</strong>jourd’hui quatre et commençons nos<br />
premières ventes.<br />
Mais à ce propos <strong>au</strong>ssi, j’ai reçu une<br />
bel<strong>le</strong> <strong>le</strong>çon. Je suis un des deux fondateurs<br />
d’Accelonix en France, évidemment<br />
très impliqué dans mon entreprise.<br />
Quand j’ai su que j’allais partir,<br />
j’ai préparé ce départ qui a été bien<br />
accueilli : tout <strong>le</strong> monde a vu l’intérêt<br />
d’al<strong>le</strong>r s’implanter en Chine et nous<br />
nous sommes réorganisés pour pallier<br />
mon absence en France. Mais <strong>le</strong> plus<br />
drô<strong>le</strong> de l’histoire, c’est que, depuis<br />
que je ne suis plus présent tous <strong>le</strong>s<br />
jours, <strong>le</strong>s résultats sont bien meil<strong>le</strong>urs…<br />
Certes, la conjoncture économique est<br />
très favorab<strong>le</strong> dans <strong>le</strong> secteur, mais je<br />
crois surtout que mon départ a permis<br />
à certains d’évoluer et de prendre des<br />
PAR BRUNO TILLIETTE<br />
Jonathan Hall et sa famil<strong>le</strong> dans<br />
<strong>le</strong>ur maison de Pékin<br />
responsabilités. Là encore, il est bien<br />
que <strong>le</strong> dirigeant cesse de se croire<br />
indispensab<strong>le</strong> et laisse un peu de place<br />
<strong>au</strong>x <strong>au</strong>tres. L’entreprise est be<strong>au</strong>coup<br />
plus capab<strong>le</strong> de s’adapter à des circonstances<br />
nouvel<strong>le</strong>s qu’on ne <strong>le</strong> croit.<br />
C’est d’ail<strong>le</strong>urs ce que nous apprenions<br />
dans l’un des modu<strong>le</strong>s de <strong>format</strong>ion<br />
Copernic, délivré par notre mouvement.<br />
UNE DERNIÈRE CHOSE qui vous surprendra<br />
sans doute, vous qui êtes restés<br />
là-bas. Comme vous, j’avais tendance<br />
à pester contre <strong>le</strong>s méfaits de<br />
l’administration, ses <strong>le</strong>nteurs, ses lourdeurs.<br />
À ma grande surprise, j’ai découvert<br />
en Chine des « services publics »<br />
français très compétents, aimab<strong>le</strong>s et<br />
performants. La mission économique,<br />
la chambre de commerce, Ubifrance,<br />
la Coface ont fait preuve de be<strong>au</strong>coup<br />
d’efficacité et m’ont bien soutenu pour<br />
monter mon entreprise. J’invite ceux<br />
qui hésitent encore à se développer à<br />
l’étranger à en profiter…<br />
On dit parfois que partir, c’est mourir<br />
un peu. Pour moi, vous voyez que cela<br />
a été une occasion simp<strong>le</strong>ment de<br />
prendre de la distance et de renaître<br />
d’une <strong>au</strong>tre façon, de s<strong>au</strong>ter sans dommage<br />
<strong>au</strong>-dessus du vide.<br />
À bientôt, chers amis JD, à Paris ou à<br />
Beijing, si l’aventure vous tente.<br />
Best regards,<br />
Jonathan Hall
12<br />
Ils entreprennent<br />
D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />
Le <strong>CJD</strong> se fait depuis longtemps <strong>le</strong> chantre des<br />
groupements d’employeurs, ces structures associatives<br />
qui mettent à disposition de <strong>le</strong>urs membres des salariés<br />
en temps partagé, emb<strong>au</strong>chés à p<strong>le</strong>in-temps et liés<br />
par un contrat de travail <strong>au</strong> groupement. Éric Scaon<br />
est un pionnier des groupements d’employeurs.<br />
cultés à fidéliser et à former des salariés<br />
qu’il ne peut emb<strong>au</strong>cher à temps comp<strong>le</strong>t.<br />
Ainsi naît <strong>le</strong> Groupe Frigo, spécialisé<br />
dans la chaîne du froid, qui permet<br />
à des salariés de travail<strong>le</strong>r toute l’année<br />
mais pour des entreprises différentes.<br />
Créé en 1993 pour quatre entreprises,<br />
ce groupement compte <strong>au</strong>jourd’hui 55<br />
salariés, forme tous <strong>le</strong>s ans entre 10 et<br />
14 apprentis, et dispose désormais de 40<br />
agences sur la France entière.<br />
Enfin, plus récemment, Éric a développé<br />
<strong>le</strong> Groupe Évolutys, qui regroupe des<br />
cadres et non cadres en ressources<br />
humaines, qualité, in<strong>format</strong>ique, comptabilité,<br />
infographie, sécurité… que se<br />
partagent des PME angevines.<br />
Un <strong>au</strong>tre groupement d’employeurs est<br />
actuel<strong>le</strong>ment en création sur Cho<strong>le</strong>t.<br />
DÉFINITION<br />
Une association d’entreprises loi 1901 à but non lucratif dont<br />
l’objectif est de mettre à disposition de ses adhérents des<br />
salariés. Le groupement d’employeurs assure <strong>le</strong> recrutement,<br />
l’emb<strong>au</strong>che et la <strong>format</strong>ion de ses salariés.<br />
PAR MICHÈLE BUINET<br />
Éric Scaon<br />
LA SUBTILE ALCHIMIE DES<br />
GROUPEMENTS D’EMPLOYEURS<br />
E n<br />
1993, Éric Scaon termine son<br />
troisième cyc<strong>le</strong> de management<br />
dans <strong>le</strong> Groupe Anjou, un groupement<br />
d’employeurs qui emploie, pour des<br />
coopératives arborico<strong>le</strong>s et des entreprises<br />
hortico<strong>le</strong>s, des salariés saisonniers.<br />
L’avantage du système, connu<br />
depuis longtemps dans <strong>le</strong> secteur agrico<strong>le</strong>,<br />
est de disposer de manière régulière<br />
de collaborateurs fidélisés et formés<br />
tout en permettant à ces personnes<br />
d’avoir un emploi stab<strong>le</strong> et à temps p<strong>le</strong>in<br />
en travaillant pour plusieurs employeurs.<br />
Séduit par l’innovation que représentent<br />
<strong>le</strong>s groupements d’employeurs (<strong>au</strong>torisés<br />
depuis 1992 pour tout type<br />
d’entreprise), Éric Scaon vend <strong>le</strong> concept<br />
à un chef d’entreprise qui, à la tête de<br />
quatre entreprises, rencontre des diffi-<br />
QU’EST-CE QU’UN GROUPEMENT D’EMPLOYEURS ?<br />
Pour en<br />
savoir plus<br />
• Les groupements<br />
d’employeurs : pour<br />
créer des emplois et<br />
développer <strong>le</strong>s PME,<br />
<strong>CJD</strong>, juin 2004<br />
• www.ffge.fr<br />
UNE EXTENSION DES RH<br />
DE CHAQUE ENTREPRISE<br />
Les avantages de la formu<strong>le</strong> sont nombreux:<br />
f<strong>le</strong>xibilité, <strong>format</strong>ion, création de<br />
richesse à plusieurs, accès à des profils<br />
à forte va<strong>le</strong>ur ajoutée recherchés par <strong>le</strong>s<br />
entreprises, emploi stab<strong>le</strong>, variété, adaptabilité<br />
pour <strong>le</strong> salarié.<br />
Mais pour que ça marche, <strong>le</strong>s entreprises<br />
doivent s’engager dans la durée,<br />
sur plusieurs années. Chez Groupe Évolutys,<br />
<strong>le</strong>s salariés travail<strong>le</strong>nt un ou deux<br />
jours par semaine dans deux ou trois<br />
entreprises différentes ; chez Groupe<br />
Frigo, <strong>le</strong>s missions sont <strong>au</strong> mois; pour<br />
Groupe Anjou, à la saison, mais toujours<br />
sur plusieurs années. « Cela suppose<br />
que <strong>le</strong> chef d’entreprise ait une certaine<br />
vision stratégique de son entreprise<br />
à trois ans », explique Éric Scaon.<br />
Côté entreprises clientes, cela nécessite<br />
donc une stratégie mais <strong>au</strong>ssi une même<br />
approche des ressources humaines :<br />
« Nous ne faisons pas entrer dans<br />
<strong>le</strong> groupement des dirigeants qui<br />
n’ont pas de considération pour <strong>le</strong>urs<br />
salariés, car notre philosophie<br />
consiste à voir <strong>le</strong>s RH comme un<br />
centre de profit et non comme un<br />
centre de coût », poursuit Éric Scaon.<br />
Le groupement d’employeurs fina<strong>le</strong>ment
LES AVANTAGES POUR LE SALARIÉ<br />
Exercer son métier <strong>au</strong> sein d’un groupement d’employeurs garantit à un salarié des<br />
avantages en termes de :<br />
• sécurité, puisqu’il dispose d’un contrat à durée indéterminée et qu’il est lié à un groupe<br />
d’entreprises moins fragi<strong>le</strong> que chacune de ses composantes prise isolément ;<br />
• rémunération, puisque c’est <strong>au</strong>ssi un volume de travail qui lui est garanti ;<br />
• disponibilité, puisque <strong>le</strong>s plannings individuels sont stab<strong>le</strong>s ; l’emploi du temps<br />
professionnel typique du salarié de groupements d’employeurs est organisé sur<br />
l’année ou la semaine entre deux ou trois entreprises, qui se sont concertées <strong>au</strong> sein<br />
du groupement : la personne peut organiser son temps privé (personnel, familial,<br />
social...) avec sérénité.<br />
LES AVANTAGES POUR L’ENTREPRISE<br />
Pour l’employeur qui en est membre, <strong>le</strong> GE présente plusieurs avantages :<br />
• la productivité grâce à un personnel non permanent opérationnel et fidélisé ;<br />
• disposer de compétences fidélisées et à temps partiel ;<br />
• disposer de cadres ou de techniciens qualifiés en proportion de ses besoins ;<br />
• accroître la motivation et la polyva<strong>le</strong>nce des salariés non permanents ;<br />
• maîtriser <strong>le</strong>s coûts des personnels non permanents.<br />
est une extension des ressources<br />
humaines de chaque entreprise. Groupe<br />
Frigo dépense chaque année 8 à 10 %<br />
de sa masse salaria<strong>le</strong> en <strong>format</strong>ion sur<br />
<strong>le</strong> savoir-faire, mais <strong>au</strong>ssi <strong>le</strong> savoir-être et<br />
la capacité à travail<strong>le</strong>r pour plusieurs<br />
entreprises et à s’intégrer dans des entreprises<br />
et équipes différentes.<br />
UNE PHILOSOPHIE<br />
DE PARTAGE ET<br />
DE RESPONSABILITÉ<br />
Le groupement d’employeurs repose<br />
sur une philosophie de partage et de<br />
responsabilité. Il est créé et dirigé par<br />
des chefs d’entreprise qui mutualisent<br />
<strong>le</strong>urs ressources et sont solidairement<br />
responsab<strong>le</strong>s des dettes socia<strong>le</strong>s et salaria<strong>le</strong>s<br />
du groupement. « L’implication<br />
des chefs d’entreprise est fondamenta<strong>le</strong>,<br />
c’est la clé de voûte du système<br />
pour rester dans un esprit de coopération<br />
et éviter celui de la prestation<br />
de services que l’on achète »,<br />
explique Éric Scaon.<br />
Si une entreprise lâche un salarié, <strong>le</strong><br />
groupement doit pouvoir lui fournir <strong>le</strong>s<br />
heures du travail qui lui manquent ;<br />
sinon, il est obligé de <strong>le</strong> licencier, ce qui<br />
pénalise <strong>le</strong>s <strong>au</strong>tres entreprises à qui il<br />
apportait son savoir-faire. Un règ<strong>le</strong>-<br />
ment intérieur établi par <strong>le</strong> conseil<br />
d’administration, propre à chaque groupement,<br />
définit <strong>le</strong>s règ<strong>le</strong>s ; il fixe, par<br />
exemp<strong>le</strong>, un délai de prévenance de<br />
trois mois pour mettre fin à un contrat.<br />
« Le groupement d’employeurs<br />
apporte be<strong>au</strong>coup de soup<strong>le</strong>sse,<br />
mais <strong>le</strong> contrat moral est très fort,<br />
explique Éric Scaon. Nous ne sommes<br />
pas dans une relation client-fournisseur,<br />
mais dans une relation de partenariat<br />
et de mutualisation des ressources<br />
humaines. C’est pourquoi<br />
la formu<strong>le</strong> ne s’adresse pas à tous<br />
<strong>le</strong>s salariés, ni à toutes <strong>le</strong>s entreprises.<br />
Il f<strong>au</strong>t des personnes <strong>au</strong>tonomes,<br />
capab<strong>le</strong>s de s’adapter, et<br />
intéressées pour développer des<br />
compétences diversifiées. Il f<strong>au</strong>t<br />
<strong>au</strong>ssi des dirigeants capab<strong>le</strong>s de<br />
travail<strong>le</strong>r ensemb<strong>le</strong>, de s’investir dans<br />
une relation gagnant-gagnant et de<br />
comprendre qu’on gagne plus souvent<br />
avec <strong>le</strong>s <strong>au</strong>tres que contre. »<br />
Pas étonnant que <strong>le</strong> <strong>CJD</strong> soit un terre<strong>au</strong><br />
favorab<strong>le</strong> à l’éclosion des groupements<br />
d’employeurs…<br />
ZOOM<br />
Groupe Frigo, spécialisé dans la<br />
chaîne du froid, permet à des salariés<br />
de travail<strong>le</strong>r toute l’année, mais pour<br />
des entreprises différentes.<br />
« L’implication<br />
du chef d’entreprise<br />
est indispensab<strong>le</strong>»<br />
D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />
13
14<br />
Ils innovent<br />
ENTREPRISES<br />
COMMUNICANTES<br />
ET RESPONSABLES<br />
ÉCOMMUNICATION<br />
« Lorsque j’ai repris ICOM, en 1993,<br />
j’avais à l’esprit de valoriser l’<strong>au</strong>tonomie,<br />
la participation, <strong>le</strong> respect des<br />
hommes, la responsabilité. C’étaient<br />
déjà mes va<strong>le</strong>urs, mais ce n’était pas<br />
structuré. En 2001, la SARL est devenue<br />
une SA avec participation des<br />
salariés <strong>au</strong> capital, et dans <strong>le</strong> même<br />
temps, j’adhérais <strong>au</strong> <strong>CJD</strong>. Je suis<br />
entré dans la démarche de Performance<br />
globa<strong>le</strong> et j’ai lancé notre premier<br />
projet d’entreprise en faisant participer<br />
l’ensemb<strong>le</strong> des salariés à son<br />
élaboration. Dans la foulée, nous<br />
avons formalisé notre système de<br />
va<strong>le</strong>urs, opté pour l’intéressement<br />
égalitaire des collaborateurs (30 % du<br />
résultat net avant impôt à l’époque),<br />
anticipé <strong>le</strong>s 35 heures sans baisse de<br />
salaire, choisi la transparence de<br />
l’in<strong>format</strong>ion économique pour tous…<br />
Le deuxième projet d’entreprise,<br />
Convergence 2010, a été l’occasion<br />
en 2005 d’engager définitivement<br />
l’entreprise dans une politique globa<strong>le</strong><br />
de responsabilité socia<strong>le</strong>, sociéta<strong>le</strong><br />
et environnementa<strong>le</strong>.<br />
L’entreprise, qui avait redémarré en<br />
1993 avec cinq ou six salariés, s’est<br />
D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />
développée, et la nécessité d’investir<br />
dans de nouve<strong>au</strong>x loc<strong>au</strong>x s’est fait<br />
sentir en 2005. En cohérence avec <strong>le</strong><br />
projet de l’entreprise, <strong>le</strong> choix a été fait<br />
de construire un écolieu selon la<br />
démarche HQE (H<strong>au</strong>te Qualité Environnementa<strong>le</strong>),<br />
en intégrant tout<br />
<strong>au</strong>tant <strong>le</strong> souci de maîtriser l’impact<br />
sur l’environnement que <strong>le</strong> confort de<br />
travail et <strong>le</strong> bien-être des salariés.<br />
Entièrement construit en bois, ce bâtiment<br />
est ch<strong>au</strong>ffé par géothermie.<br />
Ouate de cellulose, chanvre et vide<br />
sanitaire permettent l’isolation et une<br />
ventilation naturel<strong>le</strong>. La lumière naturel<strong>le</strong><br />
est privilégiée, tout comme <strong>le</strong>s<br />
éclairages basse consommation.<br />
ARCHIDURABLE ®<br />
Mais surtout, <strong>le</strong> bâtiment est imaginé<br />
pour mettre l’homme <strong>au</strong> cœur de<br />
l’entreprise. Sources d’inspiration,<br />
l’homme de Vitruve de Léonard de<br />
Vinci, ou <strong>le</strong> Nombre d’Or. Comme<br />
pour <strong>le</strong> Parthénon, <strong>le</strong>s cathédra<strong>le</strong>s ou<br />
<strong>le</strong> Modulor conçu par Le Corbusier, la<br />
« divine proportion » a guidé <strong>le</strong>s tracés<br />
architectur<strong>au</strong>x. Nous avons fait appel<br />
<strong>au</strong>ssi à la technique chinoise du<br />
Feng Shui pour agencer des espaces<br />
PAR NATHALIE CROUZET<br />
À contre-courant du communicant sty<strong>le</strong> 99 F de Frédéric Beigbeder, ces jeunes agences<br />
n’ont pas fait du développement durab<strong>le</strong> des slogans, mais un état d’esprit. Une vision de<br />
<strong>le</strong>ur métier qu’el<strong>le</strong>s n’hésitent pas à décliner sur tous <strong>le</strong>s modes. Leurs points communs ?<br />
Des va<strong>le</strong>urs fondatrices qui contenaient déjà <strong>le</strong>s germes de <strong>le</strong>urs engagements, une<br />
cohérence dans <strong>le</strong>urs relations avec toutes <strong>le</strong>urs parties prenantes et une volonté forte<br />
de <strong>le</strong>ur dirigeant d’irradier tous <strong>le</strong>urs partenaires par <strong>le</strong>ur exemplarité. Communiquer,<br />
c’est bien. Communiquer responsab<strong>le</strong>, c’est mieux.<br />
DANIEL LUCIANI<br />
• Icom, communication<br />
plurimédia, conseil,<br />
création, <strong>format</strong>ion<br />
• 28 salariés à Toulouse<br />
harmonieux en fonction des flux<br />
d’énergie. Physiquement <strong>au</strong> centre<br />
des bure<strong>au</strong>x, <strong>le</strong> créative center est<br />
une zone symbolique où salariés<br />
et clients se retrouvent pour travail<strong>le</strong>r<br />
et co-créer.<br />
Cette idée de construction H<strong>au</strong>te<br />
Qualité Humaine et Environnementa<strong>le</strong>,<br />
nous l’avons déposée sous <strong>le</strong><br />
concept Archidurab<strong>le</strong>®. Parce que<br />
pour développer notre entreprise et<br />
réaliser nos projets nous devons<br />
séduire des partenaires en valorisant
AGENCE DURABLE ET ENGAGÉE<br />
Investie depuis 2004 dans une démarche de<br />
Performance globa<strong>le</strong>, la tribu Inoxia décline ses<br />
engagements à partir des va<strong>le</strong>urs de l’entreprise.<br />
« CRÉACTIVITÉ »<br />
L’esprit pionnier est un<br />
des fondament<strong>au</strong>x de<br />
notre entreprise. Nous<br />
sommes une agence<br />
d’art appliqué qui se<br />
doit d’être productive<br />
et toujours à l’affût des<br />
innovations, nouvel<strong>le</strong>s<br />
tendances et technologies…<br />
CONVIVIALITÉ<br />
Fondatrice éga<strong>le</strong>ment,<br />
pour que chacun résiste<br />
<strong>au</strong> stress. Nous sommes<br />
une tribu, cultivons cet<br />
esprit et favorisons<br />
l’engagement de tous<br />
dans un progrès global,<br />
de la professionnalisation<br />
et la montée en<br />
compétence jusqu’à des<br />
déclinaisons possib<strong>le</strong>s<br />
dans <strong>le</strong>s postures per-<br />
nos actions, nous avons créé un blog<br />
qui nous permet <strong>au</strong>ssi de faire de la<br />
pédagogie <strong>au</strong>tour de cette démarche.<br />
Nous sommes « archi-fiers » de cette<br />
démarche de développement durab<strong>le</strong>,<br />
car el<strong>le</strong> vient d’être récompensée<br />
par un prix lors des Trophées de la<br />
Communication de Midi-Pyrénées.<br />
Notre modè<strong>le</strong> de développement économiquement<br />
responsab<strong>le</strong> a porté<br />
ses fruits : plus 56 % de chiffre<br />
d’affaires entre 2005 et 2006, plus<br />
10 % de résultat net avant intéressement<br />
et impôt. Nos clients sont<br />
séduits par la démarche et y trouvent<br />
une cohérence avec <strong>le</strong>s va<strong>le</strong>urs<br />
qu’eux-mêmes souhaitent promouvoir.<br />
»<br />
Pour al<strong>le</strong>r plus loin<br />
Le blog www.archidurab<strong>le</strong>.com/blog/<br />
sonnel<strong>le</strong>s. Nous avons<br />
choisi des loc<strong>au</strong>x<br />
proches du tram, mettons<br />
des vélos à disposition<br />
de nos collaborateurs.<br />
Nous <strong>le</strong>ur faisons<br />
livrer des paniers bio<br />
une fois par semaine,<br />
organisons des campagnes<br />
de vaccination<br />
contre la grippe ou de<br />
don du sang…<br />
ACCOMPAGNEMENT<br />
De nos clients et fournisseurs<br />
d’abord, avec<br />
qui nous développons<br />
des relations partenaria<strong>le</strong>s.<br />
Nous avons en<br />
projet d’offrir un<br />
package Bilan Carbone<br />
Communication + Campagne<br />
pour en compenser<br />
l’empreinte écologique.<br />
De la profession<br />
<strong>au</strong>ssi, pour faire bouger<br />
notre métier en cohé-<br />
rence avec <strong>le</strong>s enjeux<br />
d’<strong>au</strong>jourd’hui. D’où mon<br />
engagement dans <strong>le</strong> col<strong>le</strong>ctif<br />
Communication<br />
Avenir avec l’Ademe, <strong>le</strong><br />
Conseil régional, notre<br />
association professionnel<strong>le</strong>,<br />
<strong>le</strong> BVP…<br />
ÉTHIQUE<br />
Être acteurs dans la<br />
construction d’une<br />
société responsab<strong>le</strong>.<br />
Consommation raisonnée,<br />
achats responsab<strong>le</strong>s,<br />
éco-conception,<br />
relations avec <strong>le</strong>s<br />
éco<strong>le</strong>s, mécénat sportif,<br />
artistique et humanitaire…<br />
Nos actions<br />
internes comme<br />
externes sont toujours<br />
envisagées avec professionnalisme<br />
et la cohérence<br />
avec nos principes<br />
nous permet<br />
d’arbitrer sur <strong>le</strong> choix<br />
des projets.<br />
COMMUNIQUER<br />
GRÂCE AU TROC<br />
PHILIPPE BARRE<br />
• Inoxia, conseil en<br />
communication, multimédia,<br />
création graphique et<br />
éco-conception<br />
• 38 salariés à Borde<strong>au</strong>x<br />
Il est important de donner<br />
en permanence du<br />
souff<strong>le</strong> et du rythme, de<br />
rappe<strong>le</strong>r <strong>le</strong> sens de nos<br />
actions et l’effet <strong>le</strong>vier<br />
qu’el<strong>le</strong>s ont sur nos<br />
clients. Nous venons<br />
d’emb<strong>au</strong>cher un responsab<strong>le</strong><br />
Développement<br />
Durab<strong>le</strong> qui <strong>au</strong>ra pour<br />
mission de suivre <strong>au</strong><br />
quotidien nos projets<br />
et de <strong>le</strong>s faire rayonner.<br />
INNOVATION<br />
Démocratiser l’accès à la communication, tel est l’objectif de<br />
Nolwen Yven et Cédric Bescond qui ont lancé depuis quelques<br />
mois la scop Pop Korn. Cette agence de communication<br />
alternative à Brest propose toutes <strong>le</strong>s prestations plurimédias<br />
classiques dans un esprit solidaire et équitab<strong>le</strong>.<br />
Principa<strong>le</strong> innovation de <strong>le</strong>ur concept : <strong>le</strong> Crédit « Pop ». C'est une monnaie interne qui<br />
permet <strong>au</strong>x structures ayant peu de moyens de rég<strong>le</strong>r une partie de la prestation (jusqu'à<br />
50 %) par un échange de ressources (images, textes, matériels…). Ce système permet<br />
de valoriser <strong>le</strong>s ressources loca<strong>le</strong>s et de créer du lien entre ses différents acteurs.<br />
Pop-Korn est éga<strong>le</strong>ment à l’initiative du Label de Communication équitab<strong>le</strong> qui valorise des<br />
campagnes de pub respectant des critères écologiques et l’utilisation de ressources loca<strong>le</strong>s.<br />
Le client peut éga<strong>le</strong>ment s’engager à verser 2 % supplémentaires sur <strong>le</strong> prix de sa campagne,<br />
qui seront reversés à une association solidaire. Ce label est géré par l’association Synapses.<br />
Pop-Korn vient de recevoir la Mention spécia<strong>le</strong> du Jury Économie socia<strong>le</strong> du Concours Ta<strong>le</strong>nts.<br />
D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />
15
Le DD en pratique<br />
Pour al<strong>le</strong>r<br />
plus loin :<br />
• Etienne Ruth,<br />
tél. : 01 39 56 70 77<br />
eruth@nature-et-decouvertes.com<br />
• En octobre<br />
paraîtra la deuxième<br />
news<strong>le</strong>tter trimestriel<strong>le</strong><br />
Empreinte écologique<br />
du WWF. Contact :<br />
thierry.thouvenot@free.fr<br />
Il s'agit d'un indicateur<br />
exprimé en hectares par<br />
an et par personne identifiant<br />
l'impact humain sur<br />
l'environnement. Il évalue<br />
la surface tota<strong>le</strong> requise<br />
pour produire <strong>le</strong>s ressources<br />
et l’énergie que<br />
nous utilisons, et pour<br />
fournir l’espace néces-<br />
L e<br />
concept d'empreinte écologique<br />
(voir encadré) a été créé il y a quinze<br />
ans par <strong>le</strong> Suisse Al<strong>le</strong>mand Mathis<br />
Wackernagel et <strong>le</strong> Canadien William<br />
Rees. En 2003, Mathis Wackernagel,<br />
qui travail<strong>le</strong> alors avec WWF France,<br />
parvient à convaincre sans trop de difficultés<br />
François Lemarchand, <strong>le</strong> PDGfondateur<br />
de Nature & Découvertes, de<br />
servir d' « entreprise cobaye ». En 2004,<br />
Nature & Découvertes se lance dans<br />
l'aventure, avec l'aide d'Angenius, <strong>le</strong><br />
cabinet de conseil spécialisé dans<br />
l'empreinte écologique. « Notre métier<br />
est de proposer des produits et des<br />
activités de découvertes de la nature<br />
en lien avec des associations loca<strong>le</strong>s.<br />
C'est pourquoi il nous semblait intéressant<br />
de mesurer la pression que<br />
nous exercions sur la biosphère »,<br />
explique Etienne Ruth, <strong>le</strong> Responsab<strong>le</strong><br />
Développement durab<strong>le</strong> de l'enseigne<br />
française. Nature & Découvertes définit<br />
alors trois scenarii: <strong>le</strong> premier propose<br />
d'analyser <strong>le</strong> transport des marchandises,<br />
depuis <strong>le</strong>urs lieux de fabrication<br />
jusqu'<strong>au</strong>x lieux de vente et <strong>le</strong> fonction-<br />
QU’EST-CE QUE L’EMPREINTE ÉCOLOGIQUE ?<br />
16<br />
saire à nos infrastructures.<br />
Un Français a ainsi<br />
besoin d’un peu plus de<br />
5 hectares, un Chinois<br />
1,5 et un Américain près<br />
de 10 hectares. Pour<br />
que tout <strong>le</strong> monde vive<br />
comme nous, Français,<br />
<strong>au</strong>jourd’hui, il nous<br />
f<strong>au</strong>drait trois planètes…<br />
D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />
Comment<br />
mesurer votre<br />
EMPREINTE<br />
ECOLOGIQUE ?<br />
nement des magasins (é<strong>le</strong>ctricité, climatisation,<br />
maintenance, déplacement<br />
des salariés, etc.). Le second intègre <strong>le</strong><br />
premier scénario plus la rénovation des<br />
magasins. Le troisième, enfin, intègre<br />
<strong>le</strong>s deux scénarii plus l'analyse des ressources<br />
naturel<strong>le</strong>s utilisées pour <strong>le</strong>s<br />
produits vendus. Mais ces in<strong>format</strong>ions<br />
s'avèrent très vite impossib<strong>le</strong>s à obtenir,<br />
soit en raison du secret industriel,<br />
soit en raison des commerci<strong>au</strong>x, qui<br />
redoutent de perdre <strong>le</strong>ur travail. C'est<br />
ici même que se situe la limite de<br />
l'empreinte écologique d'une entreprise:<br />
pour qu'el<strong>le</strong> soit tota<strong>le</strong>, il f<strong>au</strong>t que<br />
tous <strong>le</strong>s sous-traitants veuil<strong>le</strong>nt bien<br />
y participer !<br />
PAR FLORENCE LERAY<br />
Les entreprises doivent-el<strong>le</strong>s calcu<strong>le</strong>r <strong>le</strong>ur empreinte écologique ?<br />
Si oui, pourquoi et comment ? La réponse à travers l'exemp<strong>le</strong> de<br />
Nature & Découvertes, la première entreprise française à s'être<br />
lancée dans une tel<strong>le</strong> démarche.<br />
COMMENT RÉALISER<br />
UNE BONNE EMPREINTE ÉCOLOGIQUE ?<br />
Nature & Découvertes opte donc pour<br />
<strong>le</strong> second scénario. Résultat : <strong>le</strong> transport<br />
des marchandises est responsab<strong>le</strong><br />
de 60 % de l'impact environnemental.<br />
Le reste se partage entre <strong>le</strong><br />
transport du personnel et des clients<br />
(30 %) et la construction et la rénovation<br />
des magasins (10 %). Fort de ces<br />
indications, Nature & Découvertes<br />
met alors en place toute une série<br />
d'actions visant à réduire son<br />
empreinte écologique, divisant notamment<br />
par deux ses émissions de gaz<br />
à effet de serre. Aujourd'hui, el<strong>le</strong><br />
est la seu<strong>le</strong> enseigne française de<br />
commerce à être certifiée Iso 14 001<br />
sur l'ensemb<strong>le</strong> de ses sites.<br />
ZOOM<br />
1/ Ne pas s'engager dans une tel<strong>le</strong> démarche si cel<strong>le</strong>-ci n'est<br />
pas suivie de réel<strong>le</strong>s décisions de changement.<br />
2/ Ne pas faire faire tout <strong>le</strong> travail par un cabinet extérieur.<br />
L'entreprise doit participer à l'aventure.<br />
3/ Ne pas commencer par des calculs comp<strong>le</strong>xes, mais simp<strong>le</strong>s.<br />
4/ Ne pas considérer <strong>le</strong>s résultats obtenus comme immuab<strong>le</strong>s,<br />
mais toujours <strong>le</strong>s réévaluer à l'<strong>au</strong>ne d'<strong>au</strong>tres empreintes<br />
écologiques du même secteur.<br />
5/ Penser « volonté de service » et non « rentabilité ». L'empreinte<br />
écologique doit être considérée par l'entreprise comme une<br />
démarche profitab<strong>le</strong> à la planète ET à sa propre durabilité.<br />
6/ L'empreinte écologique ne remplace ni <strong>le</strong> Bilan Carbone,<br />
ni l'Analyse du Cyc<strong>le</strong> de vie. El<strong>le</strong> est complémentaire.<br />
Avec Angenius - ee.angenius.net
18<br />
Dossier<br />
D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />
« Payez votre personnel<br />
<strong>le</strong> moins possib<strong>le</strong> et c'est ce que<br />
vous obtiendrez d'eux.»<br />
Malcom Forbes<br />
RECRUTEMENT ET FIDÉLISATION :<br />
QUELS SONT LES ATOUTS DES PME<br />
FACE AUX GRANDS GROUPES ?<br />
LA PERSISTANCE STATISTIQUE DU CHÔMAGE CACHE UNE RÉALITÉ QUE VIVENT BEAUCOUP DE PME :<br />
une pénurie de compétences dans des secteurs de plus en plus nombreux, qui entrave <strong>le</strong>ur développement.<br />
Face <strong>au</strong>x grands groupes qui se mobilisent pour attirer <strong>le</strong>s meil<strong>le</strong>urs en <strong>le</strong>ur offrant une panoplie d’avantages<br />
divers, el<strong>le</strong>s se sentent souvent désarmées. Pourtant, el<strong>le</strong>s ont des atouts à faire valoir. Ce qui <strong>le</strong>ur manque,<br />
<strong>le</strong> plus souvent, c’est une véritab<strong>le</strong> politique de ressources humaines.
QUESTIONS<br />
Innover pour<br />
MIEUX RECRUTER<br />
de ce dossier, c’est vous, <strong>le</strong>cteurs<br />
Jeunes Dirigeants, qui nous l’avez<br />
directement inspirée. Lorsque vous êtes<br />
réunis pour une occasion ou une <strong>au</strong>tre<br />
L’idée<br />
et que vous discutez ensemb<strong>le</strong>, <strong>le</strong> premier<br />
sujet de conversation de la plupart d’entre vous,<br />
c’est <strong>le</strong> manque de personnel. « On voudrait bien<br />
développer nos PME, dites-vous en substance, on a<br />
l’opportunité de <strong>le</strong> faire, mais on ne trouve personne,<br />
on n’arrive pas à recruter <strong>le</strong>s gens dont on a besoin. »<br />
Pour qui se contente de consulter <strong>le</strong>s statistiques,<br />
cela paraît étonnant. Le chômage est en baisse,<br />
certes, mais il est encore très é<strong>le</strong>vé et ne diminue<br />
que très <strong>le</strong>ntement. Mais si on vous écoute de plus<br />
près, comme nous l’avons fait pour ce dossier, on<br />
comprend mieux ce qui se passe sur <strong>le</strong> terrain.<br />
UNE FORTE CONCURRENCE<br />
Plusieurs facteurs, selon vous, expliquent <strong>le</strong>s difficultés<br />
que vous rencontrez pour emb<strong>au</strong>cher et fidéliser<br />
des salariés. D’abord un système de <strong>format</strong>ion<br />
initia<strong>le</strong> qui a du mal à s’adapter à vos besoins réels.<br />
Ça ne date pas d’hier, mais ça ne s’arrange toujours<br />
pas. Dans certaines filières qui sont pourtant très<br />
dynamiques dans notre pays, comme, par exemp<strong>le</strong>,<br />
l’agroalimentaire, rien n’est fait pour séduire <strong>le</strong>s<br />
jeunes, pour <strong>le</strong>ur « vendre » <strong>le</strong> métier. Résultat, de<br />
moins en moins d’élèves sortent de ces éco<strong>le</strong>s professionnel<strong>le</strong>s.<br />
Ensuite, conséquence du point précédent, on constate<br />
une désaffection pour certains métiers considérés<br />
comme « salissants » ou trop durs, trop fatigants,<br />
même s’ils sont souvent mieux payés que des emplois<br />
« propres », c’est-à-dire des emplois de bure<strong>au</strong>.<br />
Quant <strong>au</strong>x métiers réputés plus intéressants, vous<br />
rentrez de p<strong>le</strong>in fouet en concurrence avec <strong>le</strong>s grandes<br />
entreprises qui proposent <strong>au</strong>x candidats une batterie<br />
d’avantages divers pour <strong>le</strong>s attirer avant vous ou,<br />
mieux encore, pour <strong>le</strong>s récupérer chez vous, une fois<br />
formés. Vous êtes, en effet, souvent victimes d’un<br />
phénomène bien connu dans l’édition. Les petits éditeurs<br />
prennent des risques, dénichent de nouve<strong>au</strong>x<br />
<strong>au</strong>teurs de ta<strong>le</strong>nt et, dès que ceux-ci commencent à<br />
acquérir une certaine notoriété et à vendre des livres,<br />
ils sont rachetés par <strong>le</strong>s grandes maisons qui peuvent<br />
<strong>le</strong>ur offrir des à-valoir dix ou quinze fois plus é<strong>le</strong>vés<br />
que <strong>le</strong>s petites.<br />
UNE NÉCESSITÉ DE RÉAGIR<br />
Pourtant, il f<strong>au</strong>t <strong>le</strong> reconnaître, <strong>le</strong>s PME sont <strong>au</strong>ssi<br />
directement responsab<strong>le</strong>s de cette situation. Souvent<br />
trop fermées sur el<strong>le</strong>s-mêmes, el<strong>le</strong>s ne prennent<br />
pas <strong>le</strong> temps, ni <strong>le</strong>s moyens de se faire connaître<br />
de <strong>le</strong>ur environnement, de donner d’el<strong>le</strong>s une<br />
image attractive. Surtout, la plupart des PME n’ont<br />
pas mis en place de véritab<strong>le</strong> stratégie de ressources<br />
humaines: el<strong>le</strong>s envisagent <strong>le</strong>ur recrutement <strong>au</strong> jour<br />
<strong>le</strong> jour, n’ont pas de politique salaria<strong>le</strong> claire et pensent<br />
qu’une poignée de main ou une tape sur l’ép<strong>au</strong><strong>le</strong><br />
constitue un avantage en nature suffisant… De toute<br />
façon, disent-el<strong>le</strong>s, ça coûte trop cher et on n’a pas<br />
<strong>le</strong>s ressources des grands groupes.<br />
Mais, comme plusieurs d’entre vous en témoignent<br />
dans ce dossier, c’est moins une question de moyens<br />
financiers qu’une affaire de priorité. Et il y a danger.<br />
Pour ne pas voir <strong>le</strong>s meil<strong>le</strong>urs partir ail<strong>le</strong>urs, <strong>le</strong>s PME<br />
doivent réagir.<br />
D’abord en allant voir ce qui se passe du côté des<br />
grandes entreprises : que proposent-el<strong>le</strong>s à <strong>le</strong>urs<br />
salariés en matière de rémunération, d’intéressement,<br />
de services et d’avantages soci<strong>au</strong>x ? C’est l’objet de<br />
notre première enquête.<br />
Puis en se demandant, d’une part, comment transposer<br />
ces pratiques à <strong>le</strong>ur réalité de PME, et, d’<strong>au</strong>tre<br />
part, comment valoriser <strong>le</strong>urs atouts spécifiques :<br />
une proximité entre <strong>le</strong>s collaborateurs, une hiérarchie<br />
moins rigide, une <strong>au</strong>tonomie plus grande. C’est<br />
<strong>le</strong> deuxième sujet de ce dossier.<br />
Enfin, en cherchant <strong>au</strong>ssi à innover tous <strong>le</strong>s jours en<br />
matière de ressources humaines. À cet égard, <strong>le</strong>s<br />
jeunes dirigeants interrogés dans la troisième partie<br />
du dossier montrent qu’ils ne manquent pas<br />
d’imagination. Et <strong>le</strong>s solutions qu’ils trouvent sont<br />
souvent plus ingénieuses qu’onéreuses. Il suffit parfois<br />
seu<strong>le</strong>ment de changer <strong>le</strong> regard qu’on porte sur<br />
sa propre entreprise et ceux qui y travail<strong>le</strong>nt.<br />
PAR BRUNO TILLIETTE<br />
« Rien<br />
n’est fait<br />
pour séduire<br />
<strong>le</strong>s jeunes»<br />
D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />
19
20<br />
Dossier<br />
MÉTHODES<br />
Grands groupes:<br />
DES AVANTAGES<br />
À TOUS LES ÉTAGES<br />
Les grands groupes internation<strong>au</strong>x peuvent offrir toute une panoplie d'avantages<br />
pour recruter et fidéliser <strong>le</strong>s salariés : des possibilités d'évolution de carrière,<br />
des avantages financiers, mais <strong>au</strong>ssi des incitations sociéta<strong>le</strong>s fortes.<br />
D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />
plus d'un groupe<br />
comme Bouygues, c'est<br />
d'offrir des perspectives<br />
d'évolution très diverses “Le<br />
dans des activités <strong>au</strong>ssi<br />
différentes que la construction, la route,<br />
l'immobilier, <strong>le</strong>s télécoms et <strong>le</strong>s médias<br />
(TF1) », explique Gérard Lemarié, <strong>le</strong><br />
directeur central du développement<br />
social chez Bouygues SA. Un argument<br />
de poids pour attirer et fidéliser <strong>le</strong>s jeunes générations<br />
qui recherchent avant tout la mobilité et <strong>le</strong> développement<br />
de <strong>le</strong>urs compétences.<br />
Le groupe Bouygues totalise 133 000 salariés répartis<br />
à 50 % en France et 50 % à l'international. Les<br />
départs en retraite conjugués à l'accroissement de<br />
l'activité construction (BTP, Routes) ont obligé à<br />
recruter massivement : 10 000 salariés en 2006,<br />
<strong>au</strong>tant en 2007, et <strong>le</strong> doub<strong>le</strong> prévu pour 2008, moitié<br />
en France et moitié à l'international. « Les collaborateurs<br />
peuvent capitaliser sur des expériences<br />
successives tout en restant à l’intérieur du Groupe.<br />
Ils sont suivis <strong>au</strong> travers d'entretiens d'évaluations.<br />
Leur parcours est pris en compte <strong>au</strong> nive<strong>au</strong> du<br />
Groupe », ajoute Gérard Lemarié. En 25 ans de carrière,<br />
il est passé lui-même de la construction <strong>au</strong>x<br />
télécoms, avant de revenir <strong>au</strong> siège pour animer la<br />
politique socia<strong>le</strong> du groupe (protection, prévoyance,<br />
retraite). Si <strong>le</strong>s salaires correspondent <strong>au</strong>x prix du<br />
marché, <strong>le</strong> Groupe fait valoir « des périphériques<br />
à la rémunération, tels que la participation,<br />
l’intéressement 1 Gérard Lemarié<br />
et l'actionnariat salarié. Les sala-<br />
PAR THÉRÈSE BOUVERET<br />
riés détiennent 14 % du capital à travers diverses<br />
opérations d'<strong>au</strong>gmentation du capital qui <strong>le</strong>ur sont<br />
destinées », poursuit-il.<br />
LA MOTIVATION REJAILLIT SUR LE CLIENT<br />
Le sourire est exigé chez Accor. Il est d'<strong>au</strong>tant plus<br />
naturel « qu’il est <strong>le</strong> fruit d’un bon management qui<br />
permet de créer et d’entretenir la motivation des<br />
salariés », résume Philippe Liger, <strong>le</strong> directeur Marketing<br />
RH d'Accor. Ce groupe international (170 000<br />
salariés dans 100 pays, 3 800 hôtels) recrute be<strong>au</strong>coup,<br />
compte tenu d'un CA de 7 607 millions d'euros<br />
en 2006. « Le processus “Bienvenue chez Accor” permet<br />
<strong>au</strong> nouve<strong>au</strong> salarié de traverser plusieurs étapes<br />
d’intégration avant de prendre un poste. La fidélisation<br />
commence là et se poursuit par des entretiens<br />
individuels d'évaluation, par la reconnaissance <strong>au</strong><br />
quotidien dans une myriade d'hôtels où <strong>le</strong> directeur<br />
est proche de ses équipes, et enfin, grâce à un programme<br />
de management participatif faisant appel<br />
notamment <strong>au</strong> site intitulé Innov@ccor, qui permet<br />
à tous <strong>le</strong>s collaborateurs de<br />
proposer des points de progrès<br />
récompensés lorsqu'ils<br />
sont efficaces. »<br />
« Dans <strong>le</strong>s métiers de service,<br />
tout repose sur <strong>le</strong>s<br />
prestations des hommes.<br />
Le professionnalisme est<br />
essentiel », insiste Philippe<br />
Liger. « Nous <strong>le</strong> faisons<br />
Philippe Liger<br />
évoluer grâce à la politique
<strong>format</strong>ion du Groupe qui dispose d'un rése<strong>au</strong> mondial<br />
de 14 Académies Accor. Nous nous assignons<br />
l'objectif d'un stage par salarié par an : en 2006,<br />
169 700 salariés en ont suivi un (en sal<strong>le</strong>, sur <strong>le</strong> terrain<br />
ou par e-<strong>le</strong>arning). Si 90 % des managers ont été<br />
formés en interne, c'est parce que nous sommes une<br />
organisation apprenante ». L'une des pionnières en<br />
France, l'académie d'Évry 2 , fondée en 1985, renforce<br />
avant tout <strong>le</strong>s fonctions techniques et managéria<strong>le</strong>s.<br />
Au cours des années 1990, <strong>le</strong>s universités<br />
d'entreprises ont d’ail<strong>le</strong>urs connu un fort développement<br />
pour faire face <strong>au</strong>x besoins de <strong>format</strong>ion spécifiques,<br />
notamment dans <strong>le</strong>s cas de fusions-acquisitions.<br />
L'université Areva a été lancée en 2002, six<br />
mois après la création du groupe<br />
éponyme, expert mondial dans<br />
<strong>le</strong>s métiers de l’énergie (62 000<br />
salariés) El<strong>le</strong> représente<br />
<strong>au</strong>jourd’hui plus de 10 % de<br />
l'activité <strong>format</strong>ion du Groupe,<br />
destinée à ses cadres et ingénieurs<br />
: 72 programmes différents<br />
pour 4 000 participants<br />
par an. « El<strong>le</strong> est avant tout un<br />
Marc Gomes<br />
lieu d’ouverture, d’échange et<br />
d’amélioration des savoirs. C'est <strong>au</strong>ssi un outil pour<br />
faire converger <strong>le</strong>s cultures des différentes divisions<br />
du groupe, mais <strong>au</strong>ssi pour enrichir et développer<br />
<strong>le</strong>s potentiels de nos managers », explique Marc<br />
Gomes, <strong>le</strong> directeur de cette université, située dans<br />
la tour Areva à la Défense.<br />
HARMONISER VIE PERSONNELLE<br />
ET VIE PROFESSIONNELLE<br />
À l'étage <strong>au</strong>-dessous est implantée la crèche d'Areva.<br />
« Deux mamans que je connais y déposent chaque<br />
matin <strong>le</strong>urs enfants. Cette crèche, <strong>au</strong> sein même de<br />
<strong>le</strong>ur lieu de travail, <strong>le</strong>ur a radica<strong>le</strong>ment changé la vie<br />
et <strong>le</strong>s a rendues plus disponib<strong>le</strong>s. El<strong>le</strong>s ne sont plus<br />
obligées de courir pour al<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s chercher chez la nounou<br />
», témoigne-t-il. Les horaires sont plus f<strong>le</strong>xib<strong>le</strong>s<br />
que dans une crèche norma<strong>le</strong> (7 h à 21 h). C'est une<br />
volonté forte d'Anne L<strong>au</strong>vergeon, <strong>le</strong> PDG d'Areva,<br />
de créer des crèches pour harmoniser vie personnel<strong>le</strong><br />
et vie professionnel<strong>le</strong>. Et un atout déterminant<br />
dans un processus de recrutement ou pour fidéliser<br />
<strong>le</strong> personnel. Il en existe une à Lyon et une <strong>au</strong>tre<br />
ouvre en octobre <strong>au</strong> siège à Paris.<br />
À La Défense toujours, <strong>au</strong> 23 e étage de la tour<br />
Ernst &Young, une « conciergerie » propose de<br />
multip<strong>le</strong>s services : pressing payant, distributeurs<br />
de bil<strong>le</strong>ts et de cartes orange, service photo, centra<strong>le</strong><br />
d'achat, etc. Un médecin et une infirmière sont<br />
présents en permanence dans la tour. Une sal<strong>le</strong> de<br />
sport <strong>au</strong> rez-de-ch<strong>au</strong>ssée permet de suivre des cours<br />
de gym avec un coach à l'heure du déjeuner. Dans ce<br />
LA CULTURE GOOGLE<br />
Le Goog<strong>le</strong>p<strong>le</strong>x, siège<br />
international de Goog<strong>le</strong>,<br />
situé à Mountain View,<br />
en Californie, non loin<br />
de la Silicon Val<strong>le</strong>y,<br />
accueil<strong>le</strong> <strong>le</strong>s meil<strong>le</strong>urs<br />
in<strong>format</strong>iciens du<br />
monde. Situé en altitude<br />
tout près du parc National<br />
de Shore line et de<br />
terrains de golf, ce<br />
centre à l'architecture<br />
moderne est équipé de<br />
sal<strong>le</strong>s de sports, de deux<br />
piscines, de salons de<br />
massage et de coiffure,<br />
de jeux vidéos variés.<br />
Tout est fait pour<br />
apporter <strong>le</strong> maximum de<br />
confort et de détente <strong>au</strong>x<br />
« goog<strong>le</strong>rs ». L'ambiance<br />
est décontractée, on peut<br />
amener son chien, des<br />
espaces jeux sont prévus<br />
pour <strong>le</strong>s enfants, des parties<br />
de hockey sur rol<strong>le</strong>r<br />
sont organisées deux fois<br />
par semaine. Les repas<br />
gratuits sont servis trois<br />
fois par jour <strong>au</strong> Charlie's<br />
Café. Les boissons <strong>au</strong>ssi<br />
sont gratuites à toute<br />
heure. Pour stimu<strong>le</strong>r la<br />
QUELQUES-UNS DES PLUS<br />
OFFERTS PAR LES GRANDS GROUPES<br />
cabinet spécialisé en <strong>au</strong>dit, droit et finances, qui<br />
rassemb<strong>le</strong> 5 000 experts dans <strong>le</strong> monde, <strong>le</strong>s jeunes<br />
femmes qui rejoignent <strong>le</strong> groupe se doivent d'être,<br />
comme l'annonçait la dernière campagne publicitaire,<br />
« riganouies » (rigoureuses et épanouies). Leur<br />
professionnalisme est <strong>au</strong> prix de ce bien-être.<br />
1 Obligatoires dès que l'entreprise a plus de 50 salariés,<br />
plus de 3 ans d'existence et un bénéfice supérieur à 5 %<br />
des fonds de l'entreprise. Bloqués de 3 à 5 ans s<strong>au</strong>f<br />
exception, ils sont dispensés d'impôts.<br />
2 El<strong>le</strong> bénéficie d'un budget de 15 millions d'euros pour<br />
15 000 entrants en 2006.<br />
créativité de ses ingénieurs,<br />
Goog<strong>le</strong> <strong>le</strong>ur permet<br />
de consacrer 20 %<br />
de <strong>le</strong>ur temps à des projets<br />
personnels, ne rentrant<br />
pas dans <strong>le</strong> cadre<br />
de <strong>le</strong>ur mission initia<strong>le</strong>.<br />
Quant <strong>au</strong>x rémunérations<br />
des plus de 13 000<br />
goog<strong>le</strong>rs dans <strong>le</strong> monde,<br />
el<strong>le</strong>s comprennent des<br />
stocks options pour tous<br />
<strong>le</strong>s salariés qui intègrent<br />
l’entreprise depuis la<br />
création en 1998.<br />
Rémunérations : salaires plus é<strong>le</strong>vés, stock-options ou actions,<br />
participation, intéressements, Plan d'Épargne Groupe.<br />
Possibilité d'évolution professionnel<strong>le</strong> : plan de carrière, métiers<br />
variés, mobilité géographique, <strong>format</strong>ions.<br />
Avantages en nature : Comité d'Entreprise puissant offrant<br />
des chèques (emploi services, rest<strong>au</strong>rants, vacances), des<br />
subventions <strong>au</strong>x activités culturel<strong>le</strong>s ou sportives, des séjours<br />
ou week-ends, etc.<br />
Avantages soci<strong>au</strong>x : mutuel<strong>le</strong>s groupe, retraite, service logement<br />
(1 % patronal).<br />
D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />
ZOOM<br />
21
22<br />
Dossier<br />
1 Olivier Torrès est<br />
notamment l’<strong>au</strong>teur de<br />
La recherche académique<br />
en PME, rapport<br />
prochainement<br />
accessib<strong>le</strong> sur <strong>le</strong> site<br />
www.oseo.fr<br />
2 Franck Delalande est<br />
co-<strong>au</strong>teur avec Louis Buannic<br />
de Groupements<br />
d’employeurs : mode<br />
d’emploi, paru chez Eyrol<strong>le</strong>s<br />
3 Il est cependant possib<strong>le</strong><br />
d’offrir <strong>au</strong>x salariés<br />
de PME <strong>le</strong>s avantages<br />
d’un CE. Voir<br />
www.novalto.net<br />
Les PME représentent 99 %<br />
des entreprises françaises et<br />
concentrent <strong>le</strong>s 2/3 du marché<br />
de l’emploi. Ceux qui osent la<br />
petite entreprise sont rarement<br />
déçus. Be<strong>au</strong>coup vantent un environnement<br />
de travail motivant, de plus<br />
grandes responsabilités, une ambiance<br />
agréab<strong>le</strong> et une plus grande proximité<br />
avec <strong>le</strong>ur hiérarchie et <strong>le</strong>ur équipe. Pour<br />
<strong>au</strong>tant, pour <strong>le</strong>s petites entreprises, <strong>le</strong> recrutement<br />
est un exercice péril<strong>le</strong>ux. Certains secteurs sont en<br />
manque de candidats, d’<strong>au</strong>tres en manque de notoriété,<br />
d’<strong>au</strong>tres encore peinent à séduire puis à conserver<br />
<strong>le</strong>ur personnel très qualifié. « Pour un chef<br />
d’entreprise, explique Olivier Torrès 1 , professeur<br />
associé à l’EM Lyon, l’emb<strong>au</strong>che d’un collaborateur<br />
est un investissement personnel : s’il commet une<br />
erreur, <strong>le</strong>s incidences sont plus importantes que dans<br />
un groupe de 3 000 personnes. C’est pourquoi <strong>le</strong><br />
recrutement dans <strong>le</strong>s PME se fait moins par Internet<br />
que par rése<strong>au</strong>, cooptation, cabinet ou plus classiquement<br />
par annonce. »<br />
Pourtant, ces méthodes ne suffisent pas toujours pour<br />
recruter efficacement. Afin d’être sûres de trouver <strong>le</strong>s<br />
bons éléments et de <strong>le</strong>s garder, un nombre croissant<br />
d’entreprises participent ou organisent el<strong>le</strong>s-mêmes<br />
des événements. Objectif: se bâtir une image dynamique<br />
tout en rencontrant de futurs candidats à<br />
l’emb<strong>au</strong>che. Une communication événementiel<strong>le</strong> dans<br />
laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong>s PME ont <strong>le</strong>ur carte à jouer. « El<strong>le</strong>s ont tout<br />
intérêt à communiquer efficacement pour construire<br />
<strong>le</strong>ur image <strong>au</strong>près des organismes de <strong>format</strong>ion, des<br />
Universités, des bure<strong>au</strong>x des élèves…, poursuit Gérald<br />
Naro professeur des Universités à Montpellier I. Les<br />
PME peuvent <strong>au</strong> travers d’un événement avoir sur un<br />
temps très court une vision globa<strong>le</strong> du marché des<br />
compétences et rencontrer des personnels promet-<br />
D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />
STRATÉGIES<br />
PAR ISABELLE CHATAIN<br />
PME : COMMENT ATTIRER<br />
LES MEILLEURS ?<br />
Attirer dans sa PME de bons collaborateurs est une chose, <strong>le</strong>s garder en est une <strong>au</strong>tre… Régulièrement<br />
sollicités, ceux-ci peuvent accéder en quelques clics à des dizaines d’offres d’emplois, toutes<br />
plus attractives <strong>le</strong>s unes que <strong>le</strong>s <strong>au</strong>tres. Pourquoi alors oser la petite entreprise, et surtout y rester ?<br />
Oliver Torrès<br />
teurs qu’el<strong>le</strong>s n’<strong>au</strong>raient pas touchés par <strong>le</strong> biais<br />
d’annonces classiques. Les petites entreprises manquent<br />
souvent de dynamisme dans <strong>le</strong>ur politique<br />
de recrutement et la multiplication des initiatives sur<br />
<strong>le</strong> terrain contribue à séduire <strong>le</strong>s candidats. »<br />
LE GE, UNE PISTE POSSIBLE<br />
Encore peu connu <strong>le</strong> GE, groupement d’employeurs,<br />
permet à plusieurs entreprises réunies en association<br />
de mutualiser <strong>le</strong>s compétences d’un collaborateur.<br />
Ce dispositif se développe surtout<br />
dans <strong>le</strong>s régions où <strong>le</strong>s<br />
rése<strong>au</strong>x de PME sont <strong>le</strong>s plus<br />
vivaces : en Bretagne, Poitou-<br />
Charentes, dans <strong>le</strong> Nord et <strong>le</strong><br />
Sud-Ouest et concerne essentiel<strong>le</strong>ment<br />
<strong>le</strong>s fonctions transversa<strong>le</strong>s<br />
: RH, communication,<br />
comptabilité et finance… « Le<br />
Franck Delalande GE, explique Franck Delalande,
membre du <strong>CJD</strong> et directeur de Vénétis 2 , groupement<br />
d’employeurs de 150 PME de la région de<br />
Vannes, permet à des entreprises qui n’ont pas <strong>le</strong>s<br />
moyens de s’offrir un poste à temps p<strong>le</strong>in, de bénéficier<br />
de compétences pointues deux ou trois jours par<br />
semaine. Une mutualisation des moyens qui peut<br />
al<strong>le</strong>r jusqu’<strong>au</strong> partage de certains investissements.<br />
Le GE maintient de l’activité, développe et structure<br />
des entreprises, et <strong>le</strong>s ancre sur un territoire. » Un<br />
ancrage essentiel, pour l’universitaire Olivier Torrès,<br />
qui passe notamment par l’investissement du chef<br />
d’entreprise et de ses collaborateurs dans <strong>le</strong> tissu<br />
local. « La PME doit être assise sur son territoire<br />
tout en gardant <strong>le</strong>s yeux ouverts sur <strong>le</strong> monde. C’est<br />
pour cela que <strong>le</strong> concept même du groupement<br />
d’entreprises est intéressant, car il pousse <strong>le</strong> chef<br />
d’entreprise à s’ouvrir, à regarder <strong>au</strong>-delà de ses<br />
murs. »<br />
RECRUTER MAIS ENSUITE ?<br />
Pour garder <strong>le</strong>urs collaborateurs <strong>le</strong>s plus qualifiés, <strong>le</strong>s<br />
dirigeants de petites entreprises n’ont pas d’<strong>au</strong>tre<br />
choix que de jouer la carte de la séduction sans pour<br />
<strong>au</strong>tant oublier que pour la plupart des gens,<br />
l’essentiel tient à l’accomplissement d’un travail stimulant,<br />
qui a du sens et qui contribue de manière<br />
tangib<strong>le</strong> <strong>au</strong> résultat final. À cela, il f<strong>au</strong>t ajouter une<br />
bonne ambiance de travail et une rémunération<br />
« attractive ». Sur ce dernier point, une PME peinera<br />
toujours à s’aligner sur <strong>le</strong>s offres des grands groupes.<br />
De plus, <strong>le</strong>s « périphériques », <strong>au</strong>trement dit <strong>le</strong>s<br />
avantages soci<strong>au</strong>x, seront bien moindres 3 . La PME<br />
doit donc faire preuve d’innovation et de soup<strong>le</strong>sse<br />
en offrant par exemp<strong>le</strong> une part variab<strong>le</strong> et conséquente<br />
du salaire sur des critères quantitatifs et qualitatifs.<br />
De même, <strong>le</strong> dirigeant de PME doit savoir proposer<br />
<strong>au</strong> bon moment certains avantages en nature:<br />
téléphone, ordinateur portab<strong>le</strong>, voiture… Autre piste<br />
de séduction et de fidélisation qui prend toute sa<br />
mesure dans une PME: la possibilité pour <strong>le</strong>s salariés<br />
de devenir actionnaire de l’entreprise. «Àces aspects<br />
matériels et financiers s’ajoutent, pour Gérald Naro,<br />
deux jokers, l’<strong>au</strong>tonomie et <strong>le</strong>s responsabilités.<br />
Le collaborateur d’une PME a une relation one to one<br />
avec son employeur, ce qui est très valorisant.<br />
Il participe à la stratégie de l’entreprise et n’est pas<br />
uniquement un opérationnel qui applique. Il est donc<br />
essentiel de lui montrer qu’il existe de réel<strong>le</strong>s opportunités<br />
d’évolution en bâtissant son parcours professionnel.<br />
Selon moi, trop de PME pâtissent de<br />
l’absence de compétences en ressources humaines. »<br />
La petite entreprise dispose donc de réels atouts<br />
LES 10 CONSEILS<br />
POUR RESTER ATTRACTIF<br />
• Veil<strong>le</strong>z à ce que votre entreprise ait une bonne image tant à l’extérieur<br />
(journées portes ouvertes, campagnes de communication,<br />
interventions dans <strong>le</strong>s lycées, universités, éco<strong>le</strong>s …) qu’à l’intérieur.<br />
• Élaborez des parcours d’accompagnement et de suivi sur plusieurs<br />
mois pour tout nouvel emb<strong>au</strong>ché : c’est <strong>le</strong> gage de réussite de son<br />
intégration.<br />
• Créez un esprit d’entraide et formez de véritab<strong>le</strong>s équipes.<br />
• Essayez de maîtriser <strong>le</strong> nive<strong>au</strong> de stress existant dans l’entreprise.<br />
• Offrez à vos collaborateurs des salaires de base compétitifs et un<br />
éventail de possibilités <strong>le</strong>ur permettant d’améliorer l’équilibre vie<br />
professionnel<strong>le</strong>/vie privée.<br />
• Montrez que vous reconnaissez <strong>le</strong> travail de chacun.<br />
• Veil<strong>le</strong>z à offrir des possibilités d’évolution. L’entreprise doit bâtir avec<br />
ses salariés des parcours professionnels et développer <strong>le</strong>urs<br />
compétences.<br />
• Analysez <strong>le</strong> rou<strong>le</strong>ment du personnel : qui part et pourquoi ?<br />
• Prenez <strong>le</strong> temps de discuter avec ceux qui vous quittent pour en tirer<br />
<strong>le</strong>s <strong>le</strong>çons.<br />
• Calcu<strong>le</strong>z combien <strong>le</strong> départ et <strong>le</strong> remplacement d’un collaborateur<br />
coûtent à l’entreprise.<br />
D’après Reginald de Lannoy (Ernst & Young Human Resources)<br />
CE QUI FAIT QUE LE SMALL<br />
RESTE BEAUTIFUL<br />
pour garder ses collaborateurs pour peu que <strong>le</strong> chef<br />
d’entreprise se demande ce qu’il a à offrir en tant<br />
qu’employeur et quel<strong>le</strong>s sont <strong>le</strong>s vraies priorités de<br />
ses salariés. Cela demande de l’attention, de la cohésion<br />
socia<strong>le</strong> et be<strong>au</strong>coup de communication !<br />
D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />
ZOOM<br />
ZOOM<br />
1. Une solide interaction socia<strong>le</strong>, un rése<strong>au</strong> relationnel clairement défini.<br />
2. Un processus décisionnel plus rapide grâce à un nombre restreint<br />
d’étapes formel<strong>le</strong>s intermédiaires, et une réponse <strong>au</strong>x besoins plus soup<strong>le</strong>.<br />
3. Une accessibilité loca<strong>le</strong> (importance de la notion de territoire).<br />
4. Une meil<strong>le</strong>ure vue tant sur l’ensemb<strong>le</strong> de l’activité que sur <strong>le</strong>s différents<br />
processus sous-jacents.<br />
5. Une plus grande possibilité de contribuer de manière tangib<strong>le</strong><br />
et significative <strong>au</strong> résultat final.<br />
23
24<br />
Dossier<br />
T<br />
<strong>au</strong>pier, mécanicien de précision, hôtelier,<br />
charcutier: quels sont <strong>le</strong>s points communs<br />
entre ces différents métiers? On y<br />
manque cruel<strong>le</strong>ment de main-d’œuvre<br />
alors que ce sont des métiers accessib<strong>le</strong>s<br />
à tous et promis à un bel avenir. Leur seul déf<strong>au</strong>t:<br />
ils n’ont pas une très bonne image et n’attirent pas<br />
<strong>le</strong>s candidats. Et <strong>le</strong>s petites entreprises<br />
de ces secteurs ont du mal à se développer<br />
alors qu’el<strong>le</strong>s <strong>au</strong>raient <strong>le</strong>s débouchés<br />
pour <strong>le</strong> faire.<br />
Prenons un cas extrême. Gil<strong>le</strong>s Poussier,<br />
jeune dirigeant de Nantes, a eu l’idée de<br />
créer SOS T<strong>au</strong>pes, une petite entreprise<br />
qui capture1 ces drô<strong>le</strong>s de mammifères<br />
myopes et fouisseurs qui vous retour-<br />
nent un jardin ou un terrain de football<br />
Gil<strong>le</strong>s Poussier<br />
en quelques jours. Les demandes<br />
d’intervention affluent de différents coins de France,<br />
mais Gil<strong>le</strong>s ne peut pas suivre, f<strong>au</strong>te de trouver des<br />
t<strong>au</strong>piers sur place. Il <strong>le</strong>ur propose pourtant de <strong>le</strong>s former<br />
et de <strong>le</strong>s équiper et ce métier de p<strong>le</strong>in air est plutôt<br />
agréab<strong>le</strong>. Seul inconvénient, ce n’est pas une activité<br />
à temps p<strong>le</strong>in qui ne peut constituer qu’un<br />
complément de salaire, sur la base d’une fois et demie<br />
<strong>le</strong> Smic. Gil<strong>le</strong>s recherche d’urgence trois ou quatre<br />
personnes qu’il ne trouve pas. Mais il reconnaît qu’il<br />
n’a peut-être pas travaillé dans la bonne direction, car<br />
c’est un concept nouve<strong>au</strong> et il f<strong>au</strong>t tout inventer. Peutêtre<br />
va-t-il tenter sa chance du côté des retraités…<br />
D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />
TERRAIN<br />
Pour séduire,<br />
CULTIVER<br />
SES DIFFÉRENCES<br />
Pour emb<strong>au</strong>cher et garder <strong>le</strong>urs salariés, <strong>le</strong>s PME n’ont sans doute<br />
pas intérêt à se positionner en concurrence directe avec <strong>le</strong>s grands<br />
groupes mais plutôt à rechercher des profils différents. Enquête<br />
<strong>au</strong>près d’entrepreneurs JD qui cherchent des solutions innovantes.<br />
PAR RAPHAËL D’ACHERY<br />
Magali Bernard<br />
LÂCHER DU LEST<br />
Pour la charcuterie ou la mécanique, <strong>le</strong>s dirigeants<br />
se tournent plutôt vers <strong>le</strong>s jeunes. « Malheureusement,<br />
constate Magali Bernard qui dirige une PME<br />
de charcuterie d’une dizaine de personnes, Le cochon<br />
de TY-Neuden, ce métier ne <strong>le</strong>s attire pas. Cette<br />
année, il n’y a pas un seul sortant dans la filière boucherie-charcuterie<br />
des lycées professionnels du Finistère,<br />
où je suis installée. Les conditions de travail<br />
font un peu peur : on se lève tôt, on travail<strong>le</strong> dans <strong>le</strong><br />
froid, on se salit. Et <strong>le</strong>s jeunes en ont d’<strong>au</strong>tant moins<br />
envie que l’enseignement qu’on <strong>le</strong>ur propose est<br />
décalé des réalités de l’entreprise. C’est un problème<br />
récurrent depuis trente ans qu’on n’arrive pas à résoudre.<br />
Mais il est vrai <strong>au</strong>ssi que <strong>le</strong>s entreprises ne proposent<br />
pas assez de stages pour <strong>le</strong>s attirer. Récemment,<br />
un jeune avait frappé à trente-deux portes<br />
avant d’arriver chez moi ! Les entreprises doivent<br />
s’engager plus. »<br />
Florence L<strong>au</strong>ff, jeune dirigeante<br />
des H<strong>au</strong>ts-de-Seine, partage<br />
cette analyse. Consultante<br />
en ressources humaines,<br />
el<strong>le</strong> a été DRH en contrat<br />
d’externalisation pour une<br />
société de mécanique de précision<br />
de 180 personnes : « La<br />
productique (tournage, fraisage,<br />
ajustage) est un métier<br />
Florence L<strong>au</strong>ff<br />
ancien, mais qui a encore
L’équipe de Gil<strong>le</strong>s Cibert<br />
de bel<strong>le</strong>s possibilités de développement dans<br />
l’aéron<strong>au</strong>tique ou l’<strong>au</strong>tomobi<strong>le</strong>. Il demande des profils<br />
extrêmement techniques. Mais <strong>le</strong> cursus de <strong>format</strong>ion<br />
n’est pas adapté. On oriente dans ces filières<br />
ceux qui ne réussissent pas ail<strong>le</strong>urs. Et on ne <strong>le</strong>ur<br />
vend pas l’intérêt de cette activité qui, du coup, est<br />
en voie de disparition. »<br />
Second problème, <strong>le</strong> turn-over. « Les charcutiers ont<br />
la bougeotte. Ils restent rarement plus d’un an,<br />
déplore Magali Bernard. Même s’ils ne sont pas si<br />
mal payés, 1 600 euros mensuels nets en moyenne,<br />
ils partent vers <strong>le</strong>s grandes surfaces, où la convention<br />
col<strong>le</strong>ctive est plus favorab<strong>le</strong> que dans la branche<br />
boucherie-charcuterie. » « C’est vrai que <strong>le</strong>s jeunes<br />
sont attirés par <strong>le</strong>s grands groupes, reconnaît Florence<br />
L<strong>au</strong>ff. Dans <strong>le</strong> secteur de la mécanique, outre<br />
des salaires plus é<strong>le</strong>vés et des avantages divers, ils<br />
y trouvent des conditions de travail bien meil<strong>le</strong>ures.<br />
S’ils veu<strong>le</strong>nt s’en sortir, <strong>le</strong>s dirigeants des PMI doivent<br />
<strong>au</strong>ssi lâcher un peu de <strong>le</strong>st en termes de rémunération<br />
et de confort. Certains ne regardent <strong>le</strong>urs<br />
ouvriers que sous l’ang<strong>le</strong> de la productivité. En visitant<br />
des ateliers, j’ai parfois eu l’impression de me<br />
retrouver chez Zola. Il n’y a pas de politique RH.<br />
La première chose est de prendre en compte l’humain.<br />
Proposer des fontaines à e<strong>au</strong> quand il fait ch<strong>au</strong>d,<br />
ça ne coûte pas cher, ou organiser des moments<br />
de convivialité, faire des entretiens d’évaluation.<br />
Mais <strong>au</strong>ssi moderniser <strong>le</strong>s ateliers, clarifier <strong>le</strong>s rémunérations,<br />
<strong>au</strong> lieu de jouer sur des primes aléatoires.<br />
Ça me semb<strong>le</strong> <strong>le</strong> minimum. »<br />
VALORISER CHACUN<br />
Gil<strong>le</strong>s Cibert, éga<strong>le</strong>ment membre du <strong>CJD</strong> de Nantes,<br />
l’a bien compris. Il a fait d’une bonne gestion des ressources<br />
humaines <strong>le</strong> « préambu<strong>le</strong> à tout <strong>le</strong> reste ».<br />
Directeur d’un hôtel indépendant d’une quinzaine<br />
d’employés, il est pourtant constamment confronté à<br />
« LE CANDIDAT<br />
EST UN CLIENT »<br />
Christophe Collignon dirige IMA technologies,<br />
un centre d’appel de 270 personnes spécialisé<br />
notamment dans <strong>le</strong> renseignement juridique et<br />
l’assistance technique <strong>au</strong>tomobi<strong>le</strong>. Témoignage.<br />
« Même si 90 % des salariés sont en CDI,<br />
je dois recruter une centaine de personnes par an, en particulier des<br />
saisonniers, l’été et à Noël. Des nive<strong>au</strong>x bac +2 pour <strong>le</strong>s réponses<br />
commercia<strong>le</strong>s, des BTS, si possib<strong>le</strong> bilingues, pour l’assistance<br />
technique <strong>au</strong>tomobi<strong>le</strong> et des maîtrises ou DESS de droit pour <strong>le</strong><br />
renseignement juridique. Et malgré tous ces “handicaps” – la réputation<br />
des centres d’appels, <strong>le</strong> besoin de diplômés –, je n’ai pas de difficultés<br />
de recrutement. Cela tient, je crois à trois choses : une bonne image<br />
sur la région, un respect des candidats et une vraie stratégie RH.<br />
L’image : nous sommes très présents sur notre bassin d’emploi,<br />
en Loire-Atlantique. Nous travaillons avec <strong>le</strong>s éco<strong>le</strong>s professionnel<strong>le</strong>s<br />
et la faculté de droit, nous allons dans tous <strong>le</strong>s salons, nous prenons<br />
parfois toute une promo de techniciens <strong>au</strong>to en stage. Mais nous<br />
sommes <strong>au</strong>ssi très actifs <strong>au</strong>près de l’ANPE et sur Internet où nous<br />
assurons un flux continu d’annonces. Nous communiquons éga<strong>le</strong>ment<br />
be<strong>au</strong>coup avec la presse loca<strong>le</strong> sur ce que nous faisons. Si bien que<br />
<strong>le</strong>s gens nous connaissent et savent qui nous sommes.<br />
Deuxième point, nous considérons tous <strong>le</strong>s candidats comme des<br />
clients. Nous <strong>le</strong>s accueillons agréab<strong>le</strong>ment avec un café, des journ<strong>au</strong>x,<br />
nous essayons de ne pas <strong>le</strong>s faire attendre, nous <strong>le</strong>ur réservons des<br />
places de parking. Nous <strong>le</strong>ur faisons visiter systématiquement nos<br />
loc<strong>au</strong>x. Même si <strong>le</strong> recrutement ne se fait pas, ils gardent un bon<br />
souvenir de nous et en par<strong>le</strong>nt à <strong>le</strong>urs amis.<br />
Enfin, notre métier repose sur <strong>le</strong>s hommes. Nous tenons donc à<br />
ce qu’ils se trouvent bien chez nous, pour <strong>le</strong> temps qu’ils y passent.<br />
Cela veut dire que nous acceptons une grande soup<strong>le</strong>sse dans<br />
l’organisation et que nous ne refusons rien par principe, seu<strong>le</strong>ment ce<br />
que nous ne sommes pas capab<strong>le</strong>s de gérer. Par exemp<strong>le</strong>, plusieurs<br />
des femmes qui sont <strong>au</strong> Comité de direction ont demandé à travail<strong>le</strong>r<br />
à 80 %. Ça n’a pas posé de problème. Cette attention <strong>au</strong>x besoins de<br />
chacun est essentiel<strong>le</strong> et el<strong>le</strong> ne coûte pas très cher. Mais la politique<br />
rémunération est éga<strong>le</strong>ment une priorité : <strong>le</strong>s salaires et charges<br />
représentent 70 % des frais. Le nive<strong>au</strong> des salaires est évidemment<br />
celui du marché et un tiers des bénéfices sont redistribués en<br />
intéressement. 7 % du temps est consacré à la <strong>format</strong>ion. Nous<br />
pouvons <strong>le</strong> faire parce que nous avons choisi des marchés « h<strong>au</strong>ts<br />
de gamme » qui sont moins concurrentiels que <strong>le</strong>s hot lines des<br />
fournisseurs d’accès Internet ou <strong>le</strong> télémarketing. Cela nous permet<br />
de ne pas délocaliser et de jouer notre jeu face à des grands groupes<br />
comme Téléperformance qui compte 75 000 salariés. »<br />
la pénurie de main-d’œuvre puisqu’il manque en<br />
moyenne 70000 personnes dans <strong>le</strong> secteur touristique,<br />
toujours en expansion. Mais il a trouvé des solutions.<br />
D’abord, recruter plus sur <strong>le</strong> comportement du candidat<br />
que sur ses compétences – cel<strong>le</strong>s-ci peuvent<br />
s’acquérir rapidement par la suite – et vérifier que<br />
la personne a <strong>au</strong>ssi un intérêt personnel à accepter<br />
TÉMOIGNAGE<br />
D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7 25
26<br />
Dossier<br />
<strong>le</strong> poste. Ensuite, veil<strong>le</strong>r à son intégration dans<br />
l’équipe: un document de bienvenue donne quelques<br />
règ<strong>le</strong>s de base, <strong>le</strong>s premiers jours sont consacrés à<br />
une <strong>format</strong>ion avec une check-list de tout ce qui est<br />
à voir et à comprendre dans <strong>le</strong> fonctionnement de<br />
l’hôtel, <strong>le</strong>s rapports avec <strong>le</strong>s collègues. Enfin, être<br />
présent, attentif <strong>au</strong>x problèmes que peuvent rencontrer<br />
<strong>le</strong>s salariés. « Le métier de femmes de chambre<br />
est dur, explique Gil<strong>le</strong>s Cibert. Pour <strong>le</strong>s garder, nous<br />
faisons preuve de soup<strong>le</strong>sse en adaptant <strong>le</strong>s horaires<br />
<strong>au</strong>tant que possib<strong>le</strong> <strong>au</strong>x contraintes des unes et des<br />
<strong>au</strong>tres. J’ai <strong>au</strong>ssi fait des démarches pour faciliter la<br />
garde de <strong>le</strong>urs enfants en crèche ou à domici<strong>le</strong>. »<br />
Le directeur de l’hôtel La Pérouse insiste sur la nécessité<br />
de valoriser chacun : « Dernière démarche en<br />
date, j’ai fait intervenir un coach en image qui a revu<br />
entièrement l’habil<strong>le</strong>ment professionnel des salariés<br />
en tenant compte de <strong>le</strong>ur morphologie. Ainsi, je <strong>le</strong>ur<br />
ai fait plaisir avec des vêtements issus de grands<br />
magasins et où ils se sentent mieux que dans un<br />
uniforme acheté sur catalogue. Je crois qu’on<br />
n’accueil<strong>le</strong> bien <strong>le</strong>s clients que si on se sent soi-même<br />
à l’aise et reconnu. » Enfin, Gil<strong>le</strong>s Cibert a institué un<br />
système de prime en fonction des performances individuel<strong>le</strong>s<br />
: prime pour <strong>le</strong>s gestes en faveur du déve-<br />
D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />
PROFESSIONNALISER LA FONCTION RH<br />
Trois questions à Ghislaine<br />
Celdran, membre du bure<strong>au</strong><br />
national du <strong>CJD</strong> et responsab<strong>le</strong><br />
de la commission EMC2, « Évolution<br />
des métiers des compétences<br />
et des comportements. »<br />
Pourquoi cette commission<br />
EMC2 ?<br />
Paradoxa<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong> <strong>CJD</strong>, qui met<br />
l’homme <strong>au</strong> centre de l’entreprise,<br />
n’a jamais travaillé directement<br />
sur la fonction Ressources<br />
humaines. Un des moyens de faire<br />
grandir <strong>le</strong> dirigeant et son entreprise,<br />
comme y incite <strong>le</strong> thème du<br />
mandat de Thomas Ch<strong>au</strong>dron,<br />
« L’esprit de conquête », c’est de<br />
professionnaliser cette fonction<br />
RH qui n’est pas toujours assez<br />
prise en compte dans nos PME.<br />
Le premier travail de la commission<br />
a ainsi été d’élaborer un<br />
guide d’<strong>au</strong>todiagnostic qui per-<br />
TERRAIN<br />
mettra à chaque JD de faire <strong>le</strong><br />
point sur sa politique RH.<br />
S’agit-il <strong>au</strong>ssi de professionnaliser<br />
<strong>le</strong> recrutement ?<br />
Bien entendu. Il s’agit d’anticiper<br />
<strong>le</strong>s besoins dans un contexte de<br />
pénurie de main-d’œuvre et de<br />
concurrence européenne qui va<br />
être de plus en plus diffici<strong>le</strong>.<br />
Chaque PME, quel<strong>le</strong> que soit sa<br />
tail<strong>le</strong>, doit se doter d’une gestion<br />
prévisionnel<strong>le</strong> des emplois : par<br />
rapport à tel ou tel poste à pourvoir,<br />
f<strong>au</strong>t-il faire évoluer un salarié<br />
en interne, recruter quelqu’un ou<br />
encore externaliser la fonction ?<br />
Cela conduit notamment à regarder<br />
<strong>le</strong> recrutement sous l’ang<strong>le</strong><br />
de notre responsabilité sociéta<strong>le</strong>:<br />
quels sont <strong>le</strong>s liens que <strong>le</strong> dirigeant<br />
a su tisser avec son bassin<br />
d’emploi, <strong>le</strong>s éco<strong>le</strong>s, <strong>le</strong>s centres<br />
de <strong>format</strong>ion, <strong>le</strong>s instances pari-<br />
PAR RAPHAËL D’ACHERY<br />
INTERVIEW<br />
taires, <strong>le</strong>s associations ? Quel<strong>le</strong><br />
image a l’entreprise dans son<br />
environnement qui va lui permettre<br />
d’attirer des candidats ?<br />
Mais toutes <strong>le</strong>s entreprises ne<br />
peuvent pas se payer un poste<br />
de DRH ?<br />
Prendre conscience de la<br />
dimension stratégique des RH<br />
n’implique pas d’avoir une personne<br />
à temps p<strong>le</strong>in, mais simp<strong>le</strong>ment<br />
que quelqu’un doive s’en<br />
soucier et la formaliser. Ce peut<br />
être une mission d’un salarié de<br />
l’entreprise, mais la fonction peut<br />
<strong>au</strong>ssi être externalisée <strong>au</strong> travers<br />
d’un groupement d’employeurs,<br />
du portage salarial ou d’un cadre<br />
à temps partagé. L’important est<br />
que soit mis en œuvre un plan<br />
d’action RH clair pour <strong>le</strong> salarié<br />
qui traduise concrètement <strong>le</strong>s<br />
va<strong>le</strong>urs de l’entreprise.<br />
loppement durab<strong>le</strong>, prime de gestion de la casse.<br />
Une partie des économies réalisées est redistribuée<br />
<strong>au</strong>x salariés.<br />
NE PAS SE TROMPER DE PROFILS<br />
Pour garder ses charcutiers, Magali Bernard a <strong>au</strong>ssi<br />
fait <strong>le</strong> choix de privilégier <strong>le</strong>s comportements : « Je<br />
choisis des personnes dynamiques, qui ont envie de<br />
s’investir dans l’entreprise. Ceux qui restent sont<br />
ceux qui ne connaissaient rien <strong>au</strong> métier et que j’ai<br />
formés sur place. J’essaie <strong>au</strong>ssi de <strong>le</strong>s intéresser en<br />
<strong>le</strong>ur faisant fabriquer des produits innovants. »<br />
« Attention, conclut Florence L<strong>au</strong>ff, <strong>le</strong>s PME ne doivent<br />
pas obligatoirement rechercher <strong>le</strong>s mêmes profils<br />
que <strong>le</strong>s grands groupes. Les personnes qui veu<strong>le</strong>nt<br />
la sécurité et <strong>le</strong> confort ne sont pas pour el<strong>le</strong>s.<br />
Au contraire, <strong>le</strong>s PME doivent al<strong>le</strong>r vers <strong>le</strong>s gens qui<br />
aiment <strong>le</strong>s chal<strong>le</strong>nges, <strong>le</strong>s relations directes, qui ont<br />
envie de progresser rapidement et de faire progresser<br />
l’entreprise. Ce sont deux cultures différentes et<br />
<strong>le</strong>s PME doivent se vendre pour ce qu’el<strong>le</strong>s sont. »<br />
1 Et <strong>le</strong>s relâche en forêt, pour préserver la biodiversité.<br />
Voir <strong>le</strong> site www.sos-t<strong>au</strong>pes.fr.
Dossier<br />
Une batail<strong>le</strong><br />
DES COMPÉTENCES?<br />
Le paradoxe n’est pas nouve<strong>au</strong>. Malgré un<br />
t<strong>au</strong>x de chômage encore très é<strong>le</strong>vé, cela fait<br />
déjà plusieurs années que <strong>le</strong>s entreprises<br />
sont confrontées à des difficultés de recrutement,<br />
en particulier dans certains secteurs<br />
comme l’in<strong>format</strong>ique, la santé, <strong>le</strong> bâtiment ou<br />
la rest<strong>au</strong>ration. Et <strong>le</strong> paradoxe n’est qu’apparent. Le<br />
marché de l’emploi ne fonctionne pas de manière<br />
mathématique. Nous ne manquons effectivement<br />
pas de main-d'œuvre, mais de certaines compétences<br />
dont nous n’avons pas été capab<strong>le</strong>s de prévoir <strong>le</strong><br />
déficit. Cette situation de pénurie, qui a <strong>au</strong>ssi pour<br />
effet d’<strong>au</strong>gmenter dangereusement <strong>le</strong>s masses salaria<strong>le</strong>s,<br />
risque de perdurer, voire de s’accentuer et de<br />
s’élargir à tous <strong>le</strong>s secteurs <strong>au</strong>-delà de 2010.<br />
LES ÉCARTS SE CREUSENT<br />
De fait, s’est ouverte une sorte de « batail<strong>le</strong> des compétences<br />
» dont <strong>le</strong>s plus petites entreprises ne sont<br />
pas assurées de sortir gagnantes – c’est un euphémisme!<br />
Une observation attentive de ce qui se trame<br />
dans <strong>le</strong>s grandes entreprises montre qu’en matière<br />
d’attractivité, <strong>le</strong>s écarts se creusent avec <strong>le</strong>s PME.<br />
Prenons quelques exemp<strong>le</strong>s symptomatiques de ce<br />
phénomène (à la suite de ceux déjà évoqués dans ce<br />
dossier). Après quelques années de disette, <strong>le</strong>s régies<br />
publicitaires des médias ont retrouvé <strong>le</strong> sourire: <strong>le</strong>s<br />
grands groupes consacrent à nouve<strong>au</strong> de gros budgets<br />
à une communication destinée à séduire <strong>le</strong>s candidats.<br />
Leur volonté est tel<strong>le</strong> que certains d'entre eux<br />
s’affichent dans <strong>le</strong> monde virtuel, sur <strong>le</strong> jeu « Second<br />
life », avec l'espoir de véhicu<strong>le</strong>r une image qui plaira<br />
<strong>au</strong>x jeunes <strong>le</strong>s plus dynamiques, créatifs, entreprenants.<br />
Ils n'hésitent pas non plus, dans <strong>le</strong> monde réel,<br />
à inviter <strong>le</strong>urs salariés à des soirées « très convivia<strong>le</strong>s »<br />
avec pour seu<strong>le</strong> consigne de venir avec des amis potentiel<strong>le</strong>ment<br />
« recrutab<strong>le</strong>s ». Mais c’est surtout sur <strong>le</strong><br />
plan social que <strong>le</strong>s PME ont du mal à suivre. Participation<br />
et intéressement, correspondant parfois à plusieurs<br />
mois de salaire (grâce, souvent, à de bons résultats<br />
acquis hors de France), universités et crèches<br />
d’entreprise, services divers <strong>au</strong>x salariés : <strong>au</strong>tant<br />
d’avantages qu’une petite entreprise seu<strong>le</strong> n’a pas <strong>le</strong>s<br />
moyens de proposer à ses employés.<br />
UN ENJEU STRATÉGIQUE<br />
Il f<strong>au</strong>t être clair: <strong>le</strong> recrutement est devenu un enjeu<br />
CONCLUSION<br />
stratégique et <strong>le</strong>s PME ne peuvent plus se contenter<br />
d’un certain « amateurisme ». Identifier des candidats<br />
dans son entourage immédiat et parvenir à <strong>le</strong>s<br />
recruter ne suffit plus. Il f<strong>au</strong>t éga<strong>le</strong>ment réussir à attirer<br />
<strong>le</strong>s bons potentiels. S'ils se dirigent tous vers <strong>le</strong>s<br />
grands groupes, il en résultera, inévitab<strong>le</strong>ment, à<br />
terme, une différence de performance qui pénalisera<br />
<strong>le</strong> développement de nos PME. Et cela d'<strong>au</strong>tant plus<br />
que notre économie délaisse la production et exige<br />
de plus en plus de qualifications, tandis que <strong>le</strong> t<strong>au</strong>x<br />
de chômage des cadres est passé sous la barre des<br />
5 %. C’est donc bien en termes stratégiques, c’est-àdire<br />
très en amont, qu’il f<strong>au</strong>t penser <strong>le</strong> recrutement<br />
et non plus comme une tâche secondaire dont on<br />
s’acquitterait en fonction des besoins. Cela nécessite<br />
de se réinterroger sur <strong>le</strong> fonctionnement même de son<br />
entreprise et ses chances de retenir <strong>le</strong>s bons candidats:<br />
Ai-je une stratégie définie sur trois à cinq ans, exprimée<br />
de manière suffisamment claire pour permettre<br />
<strong>au</strong>x candidats de se projeter <strong>au</strong>-delà de <strong>le</strong>ur première<br />
mission? En quoi mon entreprise est-el<strong>le</strong> différente<br />
des <strong>au</strong>tres ? Quels sont ses facteurs spécifiques<br />
d’attractivité? Comment <strong>le</strong>s mettre en évidence? Avec<br />
quel<strong>le</strong> communication? Mon site Internet est-il adapté?<br />
Ne dois-je pas mieux maîtriser et utiliser toutes <strong>le</strong>s<br />
nouvel<strong>le</strong>s démarches de recrutement liées <strong>au</strong> web?<br />
Comment faire pour éviter ou limiter la surenchère<br />
salaria<strong>le</strong>? Ne f<strong>au</strong>t-il pas que j'investisse davantage <strong>au</strong><br />
nive<strong>au</strong> RH? Quel « package », à l’instar de ceux utilisés<br />
par certains grands groupes, ai-je à proposer à<br />
un candidat? Comment démontrer à un candidat qu'il<br />
valorisera mieux son CV dans mon entreprise que<br />
dans une plus grande ou une concurrente?<br />
DES IDÉES NEUVES<br />
Pour répondre efficacement à ces questions, il me<br />
semb<strong>le</strong> nécessaire de faire du recrutement un projet<br />
pour l'entreprise, avec quelques pré-requis: implication<br />
de différents profils (ressources humaines, si el<strong>le</strong>s<br />
existent, mais <strong>au</strong>ssi managers, commerci<strong>au</strong>x, salariés<br />
et, bien sûr, <strong>le</strong> dirigeant), planification par étape, pilotage<br />
en comité de direction… pour aboutir à de véritab<strong>le</strong>s<br />
innovations. Ce n’est qu’en ayant des idées<br />
neuves, en défrichant des territoires nouve<strong>au</strong>x, en<br />
s’associant entre el<strong>le</strong>s que <strong>le</strong>s PME garderont quelques<br />
avantages concurrentiels sur <strong>le</strong> marché de l’emploi.<br />
PAR SYLVAIN BREUZARD<br />
D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7 27
28<br />
Ça s’est pensé<br />
<strong>au</strong> XX e sièc<strong>le</strong><br />
Le <strong>CJD</strong> va fêter ses 70 ans en 2008. À cette occasion Dirigeant ouvre une rubrique « historique »<br />
qui reprendra <strong>le</strong>s grands textes fondateurs ou visionnaires publiés dans <strong>le</strong>s différentes revues<br />
du mouvement. À tout seigneur, tout honneur, nous débutons par <strong>le</strong> premier édito de<br />
Jean Mersch, fondateur du mouvement, paru dans <strong>le</strong>s années 1940 dans <strong>le</strong> premier <strong>numéro</strong><br />
des Cahiers Jeune Patron. Extraits.<br />
Naissance<br />
D’UN MOUVEMENT<br />
Tout mouvement vraiment neuf et profond<br />
naît d’une « inquiétude » et d’un<br />
« engagement ». (…)<br />
Le mouvement « jeune patron » n’a pas<br />
échappé à cette règ<strong>le</strong>. À son origine<br />
furent une inquiétude et un engagement.<br />
Cette inquiétude, ce fut cel<strong>le</strong> des chefs<br />
d’entreprise français de 1936 <strong>au</strong>xquels<br />
<strong>le</strong>s événements soci<strong>au</strong>x vinrent poser<br />
ces deux questions bruta<strong>le</strong>s : « Mais,<br />
<strong>au</strong> fond, pourquoi travail<strong>le</strong>s-tu? Au nom<br />
de qui tu es <strong>le</strong> chef? » A ces deux questions<br />
que sous-entendaient grèves et<br />
revendications, be<strong>au</strong>coup de patrons,<br />
même ceux qui se vantaient publiquement<br />
de <strong>le</strong>urs œuvres socia<strong>le</strong>s et<br />
croyaient en <strong>le</strong>ur va<strong>le</strong>ur, ne surent que<br />
répondre. (…)<br />
Quelques jeunes patrons ressentirent<br />
profondément la honte de<br />
cette attitude. Cette <strong>au</strong>torité qu’ils<br />
D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />
détenaient en étaient-ils dignes ?<br />
En avaient-ils compris la portée ? (…)<br />
C’est de cette inquiétude que naquit<br />
l’engagement. Il fut pris en mai 1938<br />
par une centaine de jeunes patrons<br />
réunis en une journée de rencontre<br />
qui aboutit à la création du Centre<br />
d’Études et d’In<strong>format</strong>ion des Jeunes<br />
Patrons (CJP). Le but était de faire naître,<br />
chez <strong>le</strong>s chefs d’entreprise, un<br />
nouvel esprit. (…)<br />
Cet esprit, quel est-il ?<br />
Il est d’abord jeune, c’est-à-dire<br />
dynamique et créateur. Il n’aime pas<br />
<strong>le</strong>s lamentations sur un passé qui<br />
s’estompe. Il est tendu tout entier vers<br />
un avenir qui s’élabore chaque jour. (…)<br />
Autour du jeune patron tout est vie, évolution,<br />
devenir. L’essentiel est d’être un<br />
créateur, de ne pas se laisser porter par<br />
ce mouvement comme un poids mort,<br />
LECTURE PAR SERGE GUÉRIN, professeur à l’ESG<br />
Nouve<strong>au</strong> Regard sur<br />
la société française<br />
Michel Crozier<br />
et Bruno Tilliette<br />
Éditions Odi<strong>le</strong> Jacob,<br />
septembre 2007,<br />
22,50 euros<br />
LES VALEURS D’UN SOCIOLOGUE<br />
Il y a quelque chose d’émouvant<br />
et de profondément <strong>format</strong>eur à lire<br />
<strong>le</strong> dernier ouvrage du sociologue<br />
Michel Crozier, qui a fondé l’un des<br />
princip<strong>au</strong>x courants de la sociologie<br />
française de la seconde moitié du<br />
XXe sièc<strong>le</strong>. Cet ouvrage d’entretiens<br />
avec Bruno Tilliette permet à Michel<br />
Crozier de s’arrêter sur quelques<br />
éléments essentiels de son parcours<br />
personnel et professionnel et d’en<br />
rappe<strong>le</strong>r quelques idées-forces.<br />
En refermant ce livre fort bien écrit<br />
et d’accès très faci<strong>le</strong> en dépit de la<br />
puissance des sujets abordés, deux<br />
idées se dégagent et font <strong>le</strong>ur<br />
chemin. Tout d'abord, Michel Crozier<br />
revient sur la notion de liberté. Pour<br />
lui, il n’y a pas de liberté sans prise<br />
en compte de l’<strong>au</strong>tre. C’est pourquoi<br />
il par<strong>le</strong> de liberté sous contrainte.<br />
D'une certaine façon, il renverse <strong>le</strong><br />
célèbre paradigme sartrien comme<br />
quoi l’enfer c’est <strong>le</strong>s <strong>au</strong>tres. Pour<br />
Crozier, la liberté n’existe que si je<br />
prends conscience de l’<strong>au</strong>tre, de<br />
ses droits et de ses différences.<br />
L’<strong>au</strong>tre grande <strong>le</strong>çon de cet ouvrage<br />
tient en peu de mots et peut<br />
apparaître comme très bana<strong>le</strong> :<br />
l’importance de l’écoute. Michel<br />
Crozier exprime un véritab<strong>le</strong> éloge<br />
de l’écoute de l’<strong>au</strong>tre, de l’écoute<br />
TEXTES HISTORIQUES DU <strong>CJD</strong><br />
de ne pas s’attacher à des formu<strong>le</strong>s<br />
périmées, mais <strong>au</strong> contraire d’être à<br />
l’extrême pointe de cette évolution, d’en<br />
pressentir <strong>le</strong> cours et de l’entraîner<br />
quand il <strong>le</strong> f<strong>au</strong>t. Le jeune patron est naturel<strong>le</strong>ment<br />
révolutionnaire. Nul doute que<br />
ce rô<strong>le</strong> nécessite une grande richesse<br />
spirituel<strong>le</strong>. El<strong>le</strong> est à notre avis à la base<br />
de la fonction patrona<strong>le</strong>. (…)<br />
Le jeune patron… est très profondément<br />
social, d’une manière nouvel<strong>le</strong><br />
et qui n’a rien de commun avec <strong>le</strong><br />
paternalisme d’<strong>au</strong>trefois. L’argent pour<br />
lui n’est plus un but, mais un moyen.<br />
La production ne tire sa va<strong>le</strong>ur que du<br />
bien-être qu’el<strong>le</strong> apporte à la société.<br />
Le bénéfice n’est plus idéal sordide,<br />
mais l’expression comptab<strong>le</strong> d’une<br />
réussite, fruit de la collaboration de<br />
tous et dont chacun doit avoir la part<br />
qu’il mérite. (…)<br />
des courants de la société. Dans<br />
une époque où <strong>le</strong>s moyens de<br />
communication sont rois, il est bon<br />
de rappe<strong>le</strong>r qu’ils ne sont rien s’il n’y<br />
a pas un minimum d’empathie, de<br />
désir d’écouter <strong>le</strong>s <strong>au</strong>tres dans <strong>le</strong>urs<br />
diversités. Toute action est vouée<br />
à l’échec si el<strong>le</strong> ne prend pas en<br />
compte la réalité des attentes et des<br />
comportements. Cette <strong>le</strong>çon de vie<br />
intéresse <strong>au</strong>tant l’individu dans son<br />
existence personnel<strong>le</strong> que dans<br />
l’exercice de ses responsabilités<br />
managéria<strong>le</strong>s et commercia<strong>le</strong>s.<br />
Au moins deux bonnes raisons<br />
pour lire cet ouvrage vitaminé !
Futurs<br />
La France ne compte<br />
que 7 % de femmes<br />
membres de conseils<br />
d'administration des entreprises<br />
du CAC 40. El<strong>le</strong> se<br />
situe <strong>au</strong> 17 e rang européen<br />
pour la place des<br />
femmes à l'Assemblée<br />
Nationa<strong>le</strong>. Et dans notre<br />
be<strong>au</strong> 21 e sièc<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s musiciens<br />
solistes passent<br />
encore <strong>le</strong>urs concours<br />
derrière des paravents<br />
pour que <strong>le</strong> jury ne soit<br />
pas influencé par <strong>le</strong> sexe.<br />
Alors, comment aborder <strong>le</strong><br />
sujet des femmes et de la<br />
PAR NATHALIE CROUZET, LOUISE GUERRE ET ANDRÉ-YVES PORTNOFF<br />
EN PARTENARIAT AVEC<br />
portes à 1 800 euros. La<br />
c<strong>le</strong>f du secret pour arriver<br />
à des prix si bas n’est pas,<br />
contrairement à ce que<br />
l’on pourrait croire, dans<br />
<strong>le</strong>s bas salaires et des<br />
prestations médiocres,<br />
mais dans l’innovation.<br />
L’évolution des téléphones<br />
portab<strong>le</strong>s <strong>le</strong> démontre.<br />
En 2011, un portab<strong>le</strong><br />
sur quatre sera vendu<br />
en dessous de 20 dollars.<br />
Les low cost exploiteront<br />
pour l’essentiel <strong>le</strong>s mêmes<br />
composants é<strong>le</strong>ctroniques<br />
que des modè<strong>le</strong>s plus<br />
h<strong>au</strong>t de gamme : cela<br />
coûte moins cher de<br />
brider des composants que<br />
de multiplier <strong>le</strong>s modè<strong>le</strong>s,<br />
donc <strong>le</strong>s frais de concep-<br />
vie économique, sans<br />
sombrer dans la méfiance<br />
ou déborder d'espoir ?<br />
Peut-être en admettant<br />
que si <strong>le</strong>s femmes se révè<strong>le</strong>nt<br />
porteuses de changement<br />
pour <strong>le</strong> futur, ce<br />
n'est <strong>au</strong>cunement dû à la<br />
biologie, mais simp<strong>le</strong>ment<br />
parce qu'el<strong>le</strong>s ont exercé<br />
d'<strong>au</strong>tres responsabilités,<br />
engrangé d'<strong>au</strong>tres expériences,<br />
subi d'<strong>au</strong>tres<br />
conditionnements et<br />
développé une culture<br />
différente de cel<strong>le</strong> des<br />
hommes. Amartya Sen,<br />
www.futurib<strong>le</strong>s.com<br />
LOW COST MAIS HIGH TECH<br />
Le succès de la Logan, qui<br />
dépasse largement la cib<strong>le</strong><br />
initia<strong>le</strong> de pays relativement<br />
p<strong>au</strong>vres, donne à<br />
réfléchir. Nissan prépare<br />
une voiture encore moins<br />
chère et l’Indien Tata<br />
Motors produirait à la fin<br />
de l’année une quatre<br />
LES FEMMES,<br />
agents de trans<strong>format</strong>ion<br />
tion et <strong>le</strong>s lignes de<br />
production. C’est en<br />
accroissant l’intégration<br />
des composants que l’on<br />
réduit <strong>le</strong>ur coût de revient.<br />
De plus, même <strong>le</strong>s pays<br />
émergents réclament des<br />
portab<strong>le</strong>s multifonctions.<br />
On peut penser que <strong>le</strong>s<br />
consommateurs des marchés<br />
riches n’accepteront<br />
pas longtemps de payer<br />
be<strong>au</strong>coup plus cher <strong>le</strong>s<br />
mêmes téléphones que<br />
Chinois ou Indiens. Pas<br />
plus qu’ils ne resteront<br />
indifférents si des ordinateurs<br />
à moins de 200<br />
dollars se répandent<br />
dans <strong>le</strong>s éco<strong>le</strong>s des pays<br />
émergents, alors que l’on<br />
nous vend des machines<br />
ancien prix Nobel<br />
d'économie, est convaincu<br />
que <strong>le</strong>s femmes sont porteuses<br />
« d'un nouve<strong>au</strong><br />
modè<strong>le</strong> économique »,<br />
basé sur <strong>le</strong> partage des<br />
pouvoirs et des ressources,<br />
durab<strong>le</strong>, solidaire<br />
et respectueux des équilibres<br />
naturels. Selon Alain<br />
Touraine, qui a interviewé<br />
des centaines de femmes,<br />
cel<strong>le</strong>s-ci ne cherchent pas<br />
à détruire la domination<br />
masculine. Leur but est<br />
la construction de soi,<br />
« animé par <strong>le</strong> désir de<br />
compliquées dont une<br />
bonne part de la coûteuse<br />
et fragi<strong>le</strong> puissance ne<br />
nous sert à rien. Cette<br />
vague du low cost incite<br />
justement à retrouver<br />
des méthodes comme<br />
l’analyse de la va<strong>le</strong>ur pour<br />
concevoir des produits<br />
qui ne gâchent pas de<br />
ressources pour donner<br />
<strong>au</strong> client ce qu’il ne<br />
souhaite pas.<br />
Système de veil<strong>le</strong><br />
Vigie-Futurib<strong>le</strong><br />
vivre une existence transformée<br />
par el<strong>le</strong>s-mêmes,<br />
et de recomposer<br />
la société, alors que<br />
<strong>le</strong>s hommes ont conquis<br />
<strong>le</strong> monde en concentrant<br />
<strong>le</strong>s pouvoirs entre <strong>le</strong>s<br />
mains de quelques-uns<br />
d'entre eux ».<br />
Futurib<strong>le</strong>s, octobre 2007<br />
ÉTIQUETTE CARBONE<br />
Savez-vous qu’un fi<strong>le</strong>t de<br />
cabill<strong>au</strong>d peut parcourir<br />
27 000 km avant d’arriver<br />
dans votre assiette ?<br />
Après Tesco, <strong>le</strong> distributeur<br />
britannique et ses 70 000<br />
références, c’est <strong>au</strong> tour de<br />
Casino de se lancer dans<br />
l’étiquetage environnemental.<br />
Les émissions de CO 2<br />
induites tout <strong>le</strong>ur cyc<strong>le</strong> de<br />
vie par chacun des 3 000<br />
produits proposés vont être<br />
mesurées et indiquées sur<br />
<strong>le</strong>s étiquettes en équiva<strong>le</strong>nt<br />
en tonnes de carbone.<br />
Comment cela influencerat-il<br />
<strong>le</strong>s décisions de<br />
consommateurs qui se<br />
déclarent très sensib<strong>le</strong>s<br />
<strong>au</strong>x problèmes<br />
d’environnement ?<br />
95 %<br />
des maisons neuves suédoises<br />
équipées de pompes à cha<strong>le</strong>ur !<br />
Ces installations de ch<strong>au</strong>ffage qui<br />
puisent la cha<strong>le</strong>ur dans l’air ou l’e<strong>au</strong><br />
devraient se développer en France<br />
grâce <strong>au</strong> crédit d’impôt.<br />
El<strong>le</strong>s n’équipent pour l’instant<br />
que 10 % des constructions<br />
individuel<strong>le</strong>s.<br />
STOCKAGE VIRAL<br />
OU GÉNÉTIQUE ?<br />
Vous avez peur des OGM ?<br />
Vous n'avez encore rien vu,<br />
<strong>le</strong>s virus génétiquement<br />
modifiés vont révolutionner<br />
<strong>le</strong>s batteries. Fini <strong>le</strong> rechargement<br />
des téléphones<br />
portab<strong>le</strong>s tous <strong>le</strong>s deux<br />
jours, grâce <strong>au</strong> stockage<br />
de l'énergie sur des virus,<br />
heureusement morts.<br />
Encore plus fort, des chercheurs<br />
japonais affirment<br />
pouvoir réussir à stocker<br />
d'importantes quantités de<br />
données sur des décennies,<br />
grâce à l'encryptage sur<br />
<strong>le</strong>s gènes d'un organisme<br />
vivant, qui <strong>au</strong> fur et à<br />
mesure de sa reproduction,<br />
reproduira éga<strong>le</strong>ment<br />
toutes <strong>le</strong>s données,<br />
pendant des générations<br />
et des générations…<br />
Il suffisait d'y penser !…<br />
D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />
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LE JOURNAL DE<br />
30 D I R I G E A N T N ° 7 6 • N O V E M B R E 2 0 0 7<br />
CLAUDE-JEAN DESVIGNES<br />
L’entreprise en souffrance<br />
JEUDI 4 OCTOBRE 2007<br />
Je me suis endormi<br />
hier tardivement et<br />
un peu furieux. Pour<br />
me détendre, vers<br />
11 heures du soir,<br />
après une journée norma<strong>le</strong> de<br />
travail, c’est-à-dire une journée<br />
passée à rég<strong>le</strong>r 72 problèmes<br />
<strong>le</strong>s plus divers, j’ai<br />
allumé la télé, un peu zappé<br />
et je suis tombé sur une émission<br />
de France 3 qui s’appel<strong>le</strong>,<br />
je crois, Ce soir (ou jamais),<br />
une émission de débat. Le<br />
thème m’a évidemment tout<br />
de suite accroché et plus<br />
encore irrité: « Le travail, une<br />
souffrance ? ». Il y avait bien<br />
un point d’interrogation pour<br />
nuancer, mais <strong>le</strong> dossier était<br />
globa<strong>le</strong>ment à charge. Le plate<strong>au</strong><br />
réunissait d’abord <strong>le</strong>s<br />
habitués de la souffrance <strong>au</strong><br />
travail et du harcè<strong>le</strong>ment moral<br />
(enfin, eux ne semb<strong>le</strong>nt pas tel<strong>le</strong>ment<br />
souffrir de ce qu’ils font,<br />
ça a même plutôt l’air de <strong>le</strong>s<br />
intéresser, comme quoi, il y en<br />
a quand même qui souffrent<br />
moins que d’<strong>au</strong>tres en allant<br />
<strong>au</strong> boulot): comme ils ont fait<br />
métier de s’occuper de ces<br />
sujets, ils étaient dans <strong>le</strong>ur rô<strong>le</strong>.<br />
Les médecins sont là pour par<strong>le</strong>r<br />
de la maladie et <strong>le</strong>s garagistes<br />
de panne de moteur.<br />
Mais l’animateur avait éga<strong>le</strong>ment<br />
trouvé bon d’inviter un<br />
cinéaste, Nicolas Klotz, <strong>au</strong>teur<br />
de La Question humaine.<br />
Personnage un peu bizarre<br />
et méprisant, accusant de<br />
paresse intel<strong>le</strong>ctuel<strong>le</strong> <strong>le</strong>s<br />
<strong>au</strong>tres intervenants qui<br />
n’avaient pas compris son film<br />
comme il <strong>au</strong>rait voulu qu’on <strong>le</strong><br />
comprenne (l’idée ne lui est<br />
pas venue à l’esprit que son<br />
message n’était peut-être pas<br />
clair). Moi, je n’ai pas très bien<br />
saisi non plus ce qu’il voulait<br />
dire (mais je n’ai pas vu <strong>le</strong> film<br />
et je ne suis pas un intel<strong>le</strong>ctuel)<br />
: en gros, il a fait un film<br />
qui se passe dans une entreprise,<br />
ou <strong>le</strong> DRH qui licencie<br />
cyniquement tout <strong>le</strong> monde<br />
est <strong>le</strong> fils d’un nazi et s’inspire<br />
des méthodes d’extermination<br />
de ce parti monstrueux, mais<br />
ça n’a rien à voir avec l’entreprise,<br />
c’était juste pour faire<br />
moderne, ça va bien <strong>au</strong>-delà,<br />
puisque ça pose la question<br />
humaine… Au fait, c’est quoi<br />
la question ?<br />
De cette confusion des esprits,<br />
il ressortait quand même qu’il<br />
ne faisait pas bon vivre<br />
dans l’entreprise. Le seul qui<br />
essayait de plaider à décharge,<br />
Philippe Korda, un consultant<br />
<strong>au</strong>teur de L’entreprise réconciliée,<br />
avait la tâche diffici<strong>le</strong>.<br />
Il se faisait sans cesse rembarrer<br />
par l’inénarrab<strong>le</strong> acteur de<br />
la série Caméra café, Bruno<br />
Solo, qui ne connaît du monde<br />
du travail que <strong>le</strong>s clichés dont<br />
il fait rire <strong>le</strong>s téléspectateurs<br />
et pour qui l’entreprise, c’est a<br />
priori l’horreur.<br />
Bref, je bouillais et j’<strong>au</strong>rais eu<br />
du mal à me contenir si j’avais<br />
été sur <strong>le</strong> plate<strong>au</strong> : quoi !<br />
chaque jour 23 millions de salariés<br />
acceptent, sans se révolter,<br />
de se rendre <strong>au</strong> goulag et<br />
de se soumettre <strong>au</strong> joug de<br />
petits chefs tortionnaires! Et<br />
moi, dans ma PME, je règne en<br />
despote sur 60 misérab<strong>le</strong>s<br />
esclaves! Ras-<strong>le</strong>-bol d’entendre<br />
ce genre de discours. Il me<br />
semb<strong>le</strong> que <strong>le</strong>s salariés de<br />
Pakéo ne sont pas si malheureux,<br />
ou alors, ils cachent bien<br />
<strong>le</strong>ur dou<strong>le</strong>ur. Mais enfin, je <strong>le</strong>s<br />
vois rigo<strong>le</strong>r, s’enthousiasmer,<br />
être fiers de sortir de nouve<strong>au</strong>x<br />
produits. On a parfois des<br />
moments de tension où c’est<br />
un peu plus dur, mais quand<br />
on a surmonté l’obstac<strong>le</strong><br />
ensemb<strong>le</strong>, on est tous contents.<br />
La souffrance existe, mais arrêtons<br />
de généraliser et donner<br />
perpétuel<strong>le</strong>ment cette image<br />
négative de l’entreprise.<br />
Et puis voilà que je me réveil<strong>le</strong><br />
et que je regarde <strong>le</strong>s titres des<br />
journ<strong>au</strong>x : « 350 000 euros<br />
retrouvés en liquide <strong>au</strong> siège<br />
de l’UIMM, 10 millions détournés<br />
entre 2000 et 2007 »,<br />
« Soupçon d’un vaste délit<br />
d’initiés chez EADS ». La<br />
chose n’étant pas jugée, ne<br />
condamnons pas d’avance.<br />
Mais q uand même : la<br />
branche maîtresse du plus<br />
grand syndicat patronal qui<br />
brico<strong>le</strong> avec de l’argent liquide,<br />
et pas des petites sommes, ce<br />
n’est pas très faci<strong>le</strong> à justifier.<br />
Et surtout EADS ! Après <strong>le</strong><br />
scanda<strong>le</strong> du patron parti avec<br />
des indemnités pharamineuses<br />
pour solde de toute<br />
son incompétence, voici <strong>au</strong>ssi<br />
qu’il <strong>au</strong>rait triché, avec<br />
d’<strong>au</strong>tres, pour vendre ses<br />
actions <strong>au</strong> bon moment sur <strong>le</strong><br />
dos de l’entreprise dont il avait<br />
la responsabilité. Ils étaient<br />
trop occupés à finaliser <strong>le</strong>ur<br />
plan Power Fric pour s’apercevoir<br />
que l’A380 était monté<br />
de travers. Et après, c’est <strong>au</strong>x<br />
employés de payer la facture<br />
avec <strong>le</strong> plan Power 8. Comment<br />
peuvent-ils comprendre,<br />
même si ce plan a sans doute,<br />
économiquement, sa raison<br />
d’être? Écœurant. Indéfendab<strong>le</strong>.<br />
Voilà comment se brouil<strong>le</strong><br />
l’image de l’entreprise. Voilà<br />
qui crédibilise l’idée de souffrance<br />
généralisée sous la<br />
pression du profit. Que répondre,<br />
si on m’interpel<strong>le</strong> à ce<br />
sujet ? Qu’il ne s’agit que de<br />
quelques malhonnêtes parmi<br />
deux millions de patrons honnêtes<br />
? Mais ce sont <strong>le</strong>s plus<br />
emblématiques, dirigeants de<br />
grandes entreprises, f<strong>le</strong>urons<br />
de notre économie. Symboliquement,<br />
<strong>le</strong> mal est fait.