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La poussière du temps - dossier de presse - Groupement National ...

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WILLEM DAFOE BRUNO GANZ MICHEL PICCOLI IRÈNE JACOB<br />

LA<br />

POUSSIÈRE<br />

DU<br />

UN FILM DE<br />

THEO ANGELOPOULOS<br />

TEMPS


Sophie Dulac Distribution présente<br />

LA<br />

POUSSIÈRE<br />

DU<br />

UN FILM DE<br />

THEO ANGELOPOULOS<br />

TEMPS<br />

PRESSE<br />

<strong>La</strong>urence Granec et Karine Ménard<br />

5bis, rue Kepler - 75116 Paris<br />

Tél. 01 47 20 36 66<br />

laurence.karine@granecmenard.com<br />

DISTRIBUTION<br />

SOPHIE DULAC<br />

16, rue Christophe Colomb - 75008 Paris<br />

PROMOTION / PROGRAMMATION PARIS<br />

Eric Vicente : 01 44 43 46 05<br />

evicente@sddistribution.fr<br />

PROMOTION<br />

Vincent Marti : 01 44 43 46 03<br />

vmarti@sddistribution.fr<br />

PROGRAMMATION PROVINCE / PÉRIPHÉRIE<br />

Arnaud Tignon : 01 44 43 46 04<br />

atignon@sddistribution.fr<br />

Grèce / 1.82 / 5.1 / DCP / Couleur / VOSTF / 125 min<br />

Michel Zana : 01 44 43 46 00 AU CINÉMA À PARTIR DU 13 FÉVRIER 2013<br />

Dossier <strong>de</strong> <strong>presse</strong> et photos téléchargeables sur www.sddistribution.fr


SYNOPSIS<br />

L’histoire d’un amour à travers le grand royaume <strong>de</strong> l’Histoire, <strong>de</strong>s années 50<br />

jusqu’à nos jours.<br />

Un réalisateur américain d’origine grecque réalise un film sur le <strong>de</strong>stin tragique <strong>de</strong> ses<br />

parents et leurs amours contrariés par l'Histoire au <strong>temps</strong> <strong>de</strong> la guerre froi<strong>de</strong>.<br />

Pour son film, son enquête le mène en Italie, en Allemagne, en Russie, au Canada<br />

et aux Etats-Unis.<br />

Véritable voyage à travers le mon<strong>de</strong> <strong>du</strong> XXème siècle et travail <strong>de</strong> Mémoire sur<br />

l’Histoire, une élégie sur la <strong>de</strong>stinée humaine et l’absolu <strong>de</strong> l’amour...<br />

Que seule vient troubler la Poussière <strong>du</strong> Temps...


MICHEL CIMENT ENTRETIEN AVEC THEO ANGELOPOULOS<br />

Il y avait un couple dans ELENI mais le couple, ici, n’est pas le même.<br />

Au départ, Eleni <strong>de</strong>vait être la première partie d’une trilogie avec la suite <strong>de</strong> la même histoire. Mais cela<br />

m’a paru trop proche d’une série et cela ne me permettait pas <strong>de</strong> développer d’autres sujets que <strong>de</strong>s histoires<br />

différentes auraient facilité. J’ai donc gardé le nom d’Eleni car, d’une certaine façon pour moi, toutes<br />

les femmes s’appellent Eleni comme pour Godard tous les garçons s’appellent Patrick. C’est l’Eleni <strong>du</strong><br />

mythe, l’Eleni <strong>de</strong> tous les mythes qui est revendiquée et qui revendique elle-même l’absolu <strong>de</strong> l’amour. Sans<br />

que cela ait une signification spéciale, on pourrait parler d’une trilogie Eleni. Mais si on essaie <strong>de</strong> trouver<br />

quelque chose <strong>de</strong> commun entre ces <strong>de</strong>ux films et peut-être un troisième à venir, ce serait l’histoire <strong>de</strong> la<br />

<strong>de</strong>uxième partie <strong>du</strong> 20ème siècle. L’Histoire n’est pas sur l’avant-scène mais elle ne cesse d’influencer la<br />

vie <strong>de</strong>s gens. Quelqu’un dans un débat en Pologne m’a <strong>de</strong>mandé si on était sujet ou objet <strong>de</strong> l’Histoire.<br />

Autrefois, dans notre jeunesse, on aurait dit qu’on était sujet <strong>de</strong> l’Histoire, que nous faisions l’Histoire. Après<br />

tout ce qui s’est passé, je ne sais plus. J’ai l’impression qu’on essaie d’être sujet <strong>de</strong> l’Histoire mais que finalement,<br />

on en est l’objet.<br />

Ce qu’il y a <strong>de</strong> commun entre ces <strong>de</strong>ux parties, c’est la diaspora grecque. Au début d’ELENI, les<br />

personnages venaient d’O<strong>de</strong>ssa. Dans LA POUSSIÈRE DU TEMPS, on navigue <strong>de</strong> la Sibérie à New<br />

York, <strong>de</strong> Rome à Berlin ou à Tachkent. Il y a aussi cette petite fille qui s’appelle Eleni.<br />

Ce sont <strong>de</strong>s Grecs mais c’est le mon<strong>de</strong>, parce que <strong>de</strong> plus en plus, je pense que l’Histoire ne se fait pas<br />

dans un seul pays. C’est l’histoire <strong>du</strong> mon<strong>de</strong> qui nous influence tous. On vit dans le mon<strong>de</strong>. <strong>La</strong> chute <strong>du</strong><br />

mur <strong>de</strong> Berlin a eu un effet sur tous et a fait naître un espoir. Je me souviens d’avoir vu pleurer <strong>de</strong>s amis qui<br />

croyaient qu’il y avait là une possibilité d’ouverture incroyable. Ce ne fut pas le cas. On a tous pensé qu’il y<br />

avait éventuellement une voie nouvelle mais cette illusion s’est effondrée dix ans plus tard avec l’écroulement<br />

<strong>du</strong> World Tra<strong>de</strong> Center.<br />

Tout comme dans LE VOYAGE À CYTHÈRE, dont le protagoniste était un metteur en scène, vous<br />

intro<strong>du</strong>isez une fausse piste, en commençant le film à Cinecittà : ce ne sera pas un film sur le cinéma.<br />

Certains ont parlé <strong>de</strong> 8 1/2 mais cela n’a rien à voir. C’est un film sur les frontières. En 1974, en URSS, il y a<br />

eu pour certains groupes -les Juifs, les communistes italiens, grecs ou espagnols- la possibilité <strong>de</strong> sortir <strong>du</strong><br />

pays. Il y eut même, à cette époque, <strong>de</strong>s camps en Italie et en Autriche où ils étaient regroupés avant <strong>de</strong><br />

rejoindre leur <strong>de</strong>stination. Parmi les Juifs, certains voulaient se rendre en Israël et d’autres aux Etats-Unis.<br />

Cet exo<strong>de</strong> m’intéressait particulièrement et, à travers le personnage <strong>de</strong> Jacob (Bruno Ganz), je montre cette<br />

hésitation pour choisir le pays d’accueil. Aller en Israël c’était rejoindre le pays où il rêvait d’aller, aller eṇ ..


Amérique c’était suivre la femme qu’il aimait et qui s’y rendait pour retrouver un autre homme. Il lui a fallu<br />

dire adieu au pays <strong>de</strong> ses ancêtres et à ses rêves politiques. Ce qu’il y a <strong>de</strong> tragique dans ce personnage,<br />

c’est l’amour qu’il éprouve pour cette femme. C’est pour cela que son suici<strong>de</strong> a plusieurs raisons.<br />

Il y a aussi cette petite fille qui veut se suici<strong>de</strong>r et qui fait penser à ALLEMAGNE, ANNÉE ZÉRO. Dans<br />

ces appartements où sont entassés les clochards et les sans-papiers, on croit que les policiers viennent<br />

empêcher le suici<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’enfant alors qu’ils sont là pour les expulser.<br />

C’est l’Allemagne d’aujourd’hui. Cela frappe d’autant plus que c’est un pays hautement organisé, avec un<br />

niveau <strong>de</strong> vie très élevé et qu’il y a un ventre mala<strong>de</strong> avec tous ces laissés pour compte. J’avais réalisé un<br />

film, Paysage dans le brouillard, qui était sur la recherche <strong>du</strong> père. Il y avait un espoir, symbolisé par l’arbre,<br />

un avenir possible. Ce n’est plus le cas. J’ai hésité long<strong>temps</strong> à arrêter le film à la mort. Par hasard, la première<br />

projection que j’ai faite au labo avant-hier a été interrompue à la suite <strong>de</strong> la panne d’un ordinateur.<br />

L’arrêt s’est fait sur le plan très rapproché <strong>de</strong> la main d’Eleni la grand-mère avec les gouttes qui tombent.<br />

Tout le mon<strong>de</strong> a cru que c’était la fin <strong>du</strong> film ! Et c’est vrai que j’y avais pensé. Je me suis dit que j’avais le<br />

droit d’arrêter le mon<strong>de</strong>, <strong>de</strong> dire que le suici<strong>de</strong>, c’est la fin <strong>de</strong> l’histoire. Alors, j’ai pensé à cette petite fille.<br />

À un moment, je l’avais per<strong>du</strong>e. C’était quelque <strong>temps</strong> après L’Éternité et un jour. Elle avait douze ans, elle<br />

était partie et on ne savait pas où elle allait. On l’a cherchée et j’ai abandonné tout pendant un an pour la<br />

suivre. C’était exactement ce que faisait mon personnage. Finalement, je me suis retrouvé <strong>de</strong>vant elle. À<br />

chaque fois, je ne faisais rien, je la regardais simplement. L’histoire s’est terminée maintenant. Et le désespoir<br />

que je lis dans ses écrits est incroyable. C’est là que j’ai trouvé la possibilité <strong>de</strong> son suici<strong>de</strong>. Cette<br />

histoire est très personnelle, elle n’est pas inventée.<br />

Il y a un parallèle entre le suici<strong>de</strong> <strong>de</strong> Jacob et la petite fille qui dit “Je veux mourir”.<br />

C’est son premier amour, un jeune garçon beau comme un ange, un chanteur <strong>de</strong> rock avec <strong>de</strong>s jeunes filles<br />

qui l’entourent. Pour Jacob, c’est son <strong>de</strong>rnier amour.<br />

Il y a aussi une citation <strong>de</strong> la poétesse russe Anna Akhmatova.<br />

Bruno Ganz lit un morceau d’un <strong>de</strong> ses poèmes à Irène Jacob quand ils dansent ensemble à la sortie <strong>de</strong> la<br />

frontière. “Au moment où nous marchons dans le bruit <strong>de</strong> la foule, on a été surpris par le silence <strong>de</strong> l’ange.<br />

Il a baissé ses ailes dans la boue et il a crié : la seule utopie, c’est la troisième aile.” Il le dit en sortant <strong>de</strong><br />

l’Union Soviétique et il le redit encore une fois avant <strong>de</strong> mourir. Jacob a appris qu’Eleni était dans le camp<br />

et il a décidé <strong>de</strong> la rencontrer. Pour ce faire, il a pris l’i<strong>de</strong>ntité d’un autre et il l’a payé. C’est en partie une<br />

vraie histoire. Mais, dans la réalité, c’était une femme qui est allée retrouver un homme qui était là. Le cadre<br />

...


est politique mais le récit est une histoire d’amour. S’il y a une amertume, elle se trouve surtout dans le personnage<br />

<strong>de</strong> Jacob qui a été un vrai communiste et qui a cru en la cause. S’il se suici<strong>de</strong>, ce n’est pas seulement<br />

à cause d’une femme qu’il a aimée et qui est partie mais, aussi, parce qu’il ne reste rien d’un mon<strong>de</strong><br />

qu’il ne reconnaît plus. C’est un personnage que j’ai connu. On le voyait dans les rues d’Athènes, complètement<br />

ivre. C’était un <strong>de</strong>s plus grands intellectuels grecs qui avait été déporté et, quand il a vu que tout<br />

cela s’évanouissait <strong>de</strong> la façon la plus cruelle, il n’a pas pu le supporter. Il a été aussi l’un <strong>de</strong>s plus grands<br />

éditeurs <strong>de</strong> mon pays et estimé <strong>de</strong> tous.<br />

Pourquoi avez-vous décidé <strong>de</strong> faire <strong>de</strong> ce personnage un Juif, comme l’était le personnage <strong>de</strong> Erland<br />

Josephson dans LE REGARD D’ULYSSE ?<br />

Je voulais incorporer, même fugitivement, l’histoire <strong>de</strong> l’Holocauste. Lui aussi a cru à l’URSS. Il est parti<br />

d’Allemagne pour ne pas être arrêté et envoyé dans les camps. Pour le personnage d’Eleni, j’ai trouvé en<br />

Irène Jacob la personne idéale. Elle a une spiritualité, une beauté intérieure, une douceur. C’est quelqu’un<br />

avec qui j’ai eu beaucoup <strong>de</strong> plaisir à travailler. Avec Willem Dafoe, c’est la <strong>de</strong>uxième fois après Harvey<br />

Keitel que j’ai dirigé un acteur américain. C’est un homme très correct, très proche <strong>du</strong> film, très enthousiaste<br />

et prêt à faire n’importe quoi pour la réussite <strong>de</strong> l’ensemble. Comme Keitel, il a une formation théâtrale.<br />

Avec son ex-femme, ils avaient un théâtre d’avant-gar<strong>de</strong> très connu aux Etats-Unis. Bruno Ganz, comme<br />

Piccoli et Irène Jacob, a beaucoup joué sur scène. Il a interprété Faust pendant neuf heures, il y a quatre<br />

ans. Je le connaissais déjà, bien sûr, puisqu’il était le protagoniste <strong>de</strong> L’Éternité et un jour. C’est un acteur<br />

très strict, en particulier par rapport au cadre. C’est un comédien très <strong>de</strong>mandé.<br />

J’ai le sentiment que, dans ce film, vous avez rompu avec certaines <strong>de</strong> vos figures <strong>de</strong> style.<br />

Il est beaucoup plus découpé et, bien qu’il ne <strong>du</strong>re que <strong>de</strong>ux heures, le récit est riche en événements.<br />

J’ai été amené à écrire mon scénario <strong>de</strong> façon un peu différente. Il y a aussi plusieurs approches. Dans la<br />

première partie, comme c’est le passé et qu’il y a beaucoup <strong>de</strong> figurants dans le champ, ce sont <strong>de</strong>s plans<br />

plus larges et, quand on s’approche <strong>de</strong>s personnages, que l’histoire <strong>de</strong>vient plus indivi<strong>du</strong>elle, j’utilise <strong>de</strong>s<br />

gros plans.<br />

Deux phrases m’ont marqué. Celle où A. dit : “De manière inatten<strong>du</strong>e, cela revient comme un rêve.<br />

Rien ne se termine jamais” et l’autre, d’Eleni : “C’est comme si le <strong>temps</strong> s’était arrêté <strong>de</strong>puis que nous<br />

avons dansé ensemble”. Il y a la même idée <strong>de</strong> circularité.<br />

<strong>La</strong> première, prononcée par Willem Dafoe, se trouve dans un monologue et il parle très précisément <strong>de</strong><br />

quelque chose qui tourne dans sa tête et qu’il ne faut pas toucher. Il se sent bien. Avec le <strong>temps</strong>, cela <strong>de</strong>vient<br />

un rêve et il est revenu à cette histoire qui était peut-être sa propre histoire mais il n’osait pas la mettre en<br />

mouvement. <strong>La</strong> phrase d’Irène Jacob tra<strong>du</strong>it simplement son sentiment quand elle revoit cet homme.<br />

<strong>La</strong> musique <strong>de</strong> Eleni Karaindrou, est, cette fois, plus symphonique. C’est le film qui <strong>de</strong>mandait cette<br />

ampleur comme Le Regard d’Ulysse. Pour L’ÉTERNITÉ ET UN JOUR, qui est un film plus intime, une<br />

histoire personnelle, la musique était plus lyrique.<br />

Ici, il y a <strong>de</strong>ux thèmes. Le premier qui <strong>de</strong>scend et qui monte, nous l’appelons le thème <strong>de</strong> la recherche et<br />

<strong>de</strong> l’attente anxieuse. Le second a pour titre «<strong>La</strong> Danse près <strong>de</strong> la rivière». Il y a aussi <strong>La</strong> Symphonie pathétique<br />

<strong>de</strong> Tchaikovski qui sort <strong>de</strong>s haut-parleurs <strong>de</strong> la ville. C’est une musique comme <strong>La</strong> Marche funèbre <strong>de</strong><br />

Chopin qui passait dans toutes les radios <strong>de</strong> l’Union Soviétique au moment <strong>de</strong> la mort <strong>de</strong> Staline. <strong>La</strong> femme<br />

russe <strong>de</strong> Tonino Guerra, qui était élève à l’époque, me disait qu’il y a eu une annonce suivie d’un long silence<br />

dans les écoles et les usines au même moment dans tout le pays malgré les différents fuseaux horaires. J’ai<br />

ajouté la neuvième symphonie <strong>de</strong> Beethoven car pour le nouvel an, chaque année on la joue <strong>de</strong>vant la porte<br />

<strong>de</strong> Bran<strong>de</strong>bourg. Au moment <strong>de</strong> la chute <strong>du</strong> mur, Leonard Bernstein a été appelé pour diriger l’orchestre.<br />

Pour la scène <strong>de</strong> l’orgue, j’ai aussi choisi l’adagio <strong>de</strong> Bach, le cantor <strong>de</strong> Leipzig. J’ai imaginé qu’il ne pouvait<br />

pas y avoir un plus fort contraste entre la statue <strong>de</strong> Staline et cet instrument musical. Bien sûr, toute l’histoire<br />

<strong>du</strong> Prince Orloff qui l’aurait donné avant la révolution est une pure invention. Pour le morceau d’opéra,<br />

j’avais <strong>de</strong>mandé à Eleni Karaindrou une aria chantée par Maria Callas. Elle m’a apporté <strong>de</strong>s morceaux <strong>de</strong><br />

Bellini, <strong>de</strong> Verdi mais j’ai choisi ce morceau d’un musicien italien que je ne connaissais pas et que je trouve<br />

extraordinaire.<br />

Avec qui avez-vous écrit le scénario, cette fois ?<br />

Tout seul. Néanmoins, j’ai indiqué au générique, conseillers au scénario Petros Markaris et Tonino Guerra<br />

parce que je leur ai raconté l’histoire et, <strong>de</strong> <strong>temps</strong> en <strong>temps</strong>, ils m’ont fait <strong>de</strong>s remarques.<br />

<strong>La</strong> scène <strong>du</strong> combat entre les <strong>de</strong>ux hommes en noir qui se battent à mains nues comme <strong>de</strong>s gladiateurs,<br />

a une dimension presque surréaliste.<br />

Ils représentent <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> motards ennemis qui sont en même <strong>temps</strong>, comme dans tous les pays, <strong>de</strong>s<br />

supporters fanatiques d’une équipe <strong>de</strong> football. <strong>La</strong> première fois que je suis allé, pour un repérage, à Berlin,<br />

nous nous sommes arrêtés sur une autoroute à la périphérie <strong>de</strong> la ville pour manger un sandwich. Quelques<br />

minutes après, est arrivée une quarantaine d’hommes, comme une armée, chevauchant <strong>de</strong> grosses motos<br />

et vêtus <strong>de</strong> daim noir. On m’a dit que c’était <strong>de</strong>s membres d’un club sportif et, lorsqu’il y avait conflit avec<br />

un autre club, ils se battaient. Chez nous, en Grèce, il y avait aussi <strong>de</strong>ux associations <strong>de</strong> supporters <strong>de</strong> foot-<br />

...


all, Olympiakos (Le Pirrhée) et Panathinaikos (Athènes) qui résolvaient leur opposition fanatique par <strong>de</strong>s<br />

combats violents où , un jour, un jeune garçon a été poignardé. Pour certains jeunes, le football est <strong>de</strong>venu<br />

une véritable religion. Ils écrivent sur les murs : “Panathinaikos est une idéologie, Panathinaikos, c’est notre<br />

avenir”. Une chose est certaine : ils n’ont aucun système <strong>de</strong> référence et aucune perspective. Avec cette<br />

scène, j’ai voulu montrer la violence <strong>de</strong> notre époque. Cette violence, je l’ai aussi rencontrée quand j’ai<br />

visité <strong>de</strong>s lieux occupés par <strong>de</strong>s squatters. Par exemple, l’école où, enfant, j’ai passé six ans a été investie<br />

par <strong>de</strong>s activistes qui l’ont fermée et ont vécu <strong>de</strong>dans en la couvrant <strong>de</strong> graffitis. Cette réalité grecque,<br />

je l’ai retrouvée en Allemagne où ils sont beaucoup plus organisés et violents. Un jour, j’ai voulu entrer<br />

dans un <strong>de</strong> ces lieux et j’ai compris que j’avais intérêt à reculer.<br />

Il y a une autre séquence intrigante, c’est celle où l’on voit Spyros (Michel Piccoli) nu, projeté sur un<br />

écran pendant un interrogatoire.<br />

Il est grossi aux rayons X. Cette pratique a eu lieu en Angleterre pour certains visiteurs particulièrement<br />

suspects. Bientôt, ce sera probablement généralisé. Quand j’étais à New York, Harvey Keitel m’a apporté<br />

une revue américaine à laquelle une femme avait écrit une lettre pour expliquer que son père, qui avait un<br />

poumon artificiel, avait été dénudé pour cette radio d’inspection. Ce fut une telle humiliation que sa fille<br />

a pleuré et que l’homme a mis <strong>du</strong> <strong>temps</strong> à s’en remettre. Ce que l’on voit dans mon film, ces femmes nues<br />

sur un écran, c’est ce que j’avais découvert dans un journal britannique. Des motards aux rayons X en<br />

passant par les squatters, c’est aussi un film sur la violence d’aujourd’hui.<br />

Cet entretien est le <strong>de</strong>rnier que Theo Angelopoulos ait accordé à Positif. Il a été réalisé à Athènes, le 2 août<br />

2008, peu après l’achèvement <strong>du</strong> film, qui fut présenté hors compétition au Festival <strong>de</strong> Berlin l’année suivante.<br />

L'entretien paraitra en février dans le cadre d'un <strong>dossier</strong> sur le cinéaste grec.


THEO ANGELOPOULOS<br />

Après <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> droit, Théo Angelopoulos suit les<br />

cours <strong>de</strong> l’IDHEC, et <strong>de</strong>vient proche <strong>de</strong> Jean Rouch. De<br />

retour en Grèce, il est embauché comme critique <strong>de</strong><br />

cinéma par le quotidien Allagi, qui est suspen<strong>du</strong> par la<br />

junte militaire. En 1965, il commence à travailler sur un<br />

long métrage, FORMINX STORY, autour d’un groupe<br />

pop. Le film n’a jamais été terminé. En 1968 il tourne<br />

le court métrage BROADCAST (Ekpompbi).<br />

En 1970, il achève le tournage <strong>de</strong> RECONSTITUTION<br />

(Anaparastassi), son premier long métrage. Jean-Loup<br />

Passek écrit : "écrit comme un thriller - un immigrant<br />

<strong>de</strong> retour d’Allemagne est assassiné par son épouse<br />

et l'amant <strong>de</strong> celle-ci - le film, <strong>de</strong> par son style et<br />

l’idéologie qu’il véhicule se situe loin <strong>du</strong> conformisme<br />

<strong>du</strong> cinéma grec <strong>de</strong> cette époque. Le crime en luimême<br />

est bien moins intéressant pour le cinéaste que<br />

les tenants et les aboutissants <strong>de</strong> l'enquête, tout comme<br />

ses répercussions indivi<strong>du</strong>elles et collectives." Le film<br />

remporte un prix au Festival d’Hyères et est remarqué à<br />

Berlin, suscitant l’intérêt <strong>de</strong> la critique mondiale. Les<br />

trois films suivants <strong>du</strong> cinéaste constituent une trilogie<br />

sur l’histoire <strong>de</strong> la Grèce contemporaine. JOURS DE 36<br />

(Meres tou ’36), se situe juste avant l’élection qui voit le<br />

Général Metaxas imposer sa dictature. Le film évoque<br />

la séquestration d’un membre réactionnaire <strong>du</strong> Parlement.<br />

Le gouvernement hésite à plusieurs reprises mais<br />

le preneur d’otage est finalement assassiné et son<br />

meurtre annonce la répression encore plus sévère qui<br />

va suivre. LE VOYAGE DES COMEDIENS (O Thiassos,<br />

1975), présenté à la Quinzaine <strong>de</strong>s Réalisateurs au Festival<br />

<strong>de</strong> Cannes reçoit le Prix <strong>de</strong> la Critique Internationale.<br />

Considéré comme un chef d’oeuvre <strong>du</strong> cinéma<br />

mo<strong>de</strong>rne, le film raconte l’histoire d’une troupe <strong>de</strong> comédiens<br />

dans la Grèce <strong>de</strong>s années 1939 à 1952. Il fonctionne<br />

sur le principe <strong>de</strong> la "mémoire collective", et<br />

ignore délibérément les principes <strong>de</strong> la chronologie, naviguant<br />

à l’envie dans un passé récent et dramatique,<br />

qui comprend la dictature <strong>de</strong> Metaxas, l’occupation<br />

nazie, la résistance grecque et ses tendances diverses,<br />

la victoire <strong>de</strong> la monarchie, la guerre civile, la défaite <strong>de</strong>s<br />

communistes en 1949 et les élections <strong>de</strong> 1952. Les<br />

membres <strong>de</strong> la troupe se racontent à plusieurs niveaux<br />

– tout comme les personnages qu’ils incarnent dans<br />

l’histoire populaire qu’ils tentent d’interpréter – à travers<br />

la psychologie <strong>de</strong> leur personnage ; et au niveau historique,<br />

à travers la relation qu'ils entretiennent avec la<br />

Grèce et son évolution. Ils portent les noms illustres <strong>de</strong>s<br />

Atri<strong>de</strong>s. "Pour la première fois, dans la brève histoire <strong>du</strong><br />

cinéma grec", explique Tassos Gou<strong>de</strong>lis, "un film tente<br />

<strong>de</strong> relater les épreuves que traverse la Grèce contemporaine.<br />

Les allusions aux Atri<strong>de</strong>s donnent <strong>de</strong>s pistes au<br />

spectateur, et l’invitent à passer en revue l’histoire récente<br />

<strong>de</strong> la Grèce - d’un point <strong>de</strong> vue politique et social - à<br />

la lumière d’un <strong>de</strong>stin plus global, qui prend ses racines<br />

dans l'antiquité. <strong>La</strong> dimension tragique <strong>de</strong>s personnages<br />

est explorée à travers le conflit qui les oppose<br />

...


au pouvoir politique dominant." Avec cette fresque <strong>de</strong><br />

quatre heures, puis avec LES CHASSEURS (I Kynighi,<br />

1977) qui commence par la découverte que font six<br />

chasseurs <strong>du</strong> cadavre d’un soldat <strong>de</strong> la résistance (et qui<br />

présente l’histoire politique <strong>de</strong> la Grèce <strong>de</strong> 1949 à<br />

1977), quelques-uns <strong>de</strong>s thèmes et <strong>de</strong>s styles qui sont<br />

<strong>de</strong>s constantes <strong>de</strong> l’oeuvre d’Angelopoulos sont posés<br />

- poids <strong>de</strong> l’histoire, examen clinique <strong>du</strong> pouvoir, théâtralisation<br />

brechtienne où l’indivi<strong>du</strong> n’a pas d’importance<br />

par rapport au groupe, rejet <strong>de</strong> la narration<br />

conventionnelle au bénéfice d’une narration intentionnellement<br />

décousue, dans laquelle une caméra fixe et<br />

<strong>de</strong>s plans séquences créent la notion d'un <strong>temps</strong> alternatif.<br />

Le pouvoir est encore à l’honneur dans ALEXAN-<br />

DRE LE GRAND (Megalexandros, 1980), l’histoire d’un<br />

bandit <strong>de</strong> grand chemin au tournant <strong>du</strong> siècle, qui tente<br />

<strong>de</strong> régner en tyran. Issu <strong>du</strong> peuple, il finira par être détruit<br />

par le peuple. Après la réalisation en 1982 <strong>du</strong> court<br />

métrage ATHENES, RETOUR A L’ACROPOLE, Theo Angelopoulos<br />

collabore pour la première fois avec le scénariste<br />

et poète Tonino Guerra sur VOYAGE À CYTHERE<br />

(Taxidi sta Kithira, 1984). Le film remporte le Prix <strong>de</strong> la<br />

Critique Internationale au Festival <strong>de</strong> Cannes pour son<br />

scénario. Dans ce film, on suit les traces d’un cinéaste qui<br />

veut réaliser un film sur son propre père, et qui retourne<br />

en Union Soviétique après trente ans d’exil, étranger<br />

dans son pays natal. À travers l’histoire <strong>de</strong> cette société<br />

dans laquelle toute spiritualité semble avoir été bannie,<br />

Angelopoulos exprime <strong>de</strong> façon plus générale sa propre<br />

désillusion quant à la Grèce démocratique. Une quête<br />

d’i<strong>de</strong>ntité, clairement marquée par Antonioni, remplace<br />

l’étu<strong>de</strong> <strong>du</strong> groupe. Le voyage, retour chez soi marqué<br />

par le franchissement d’une frontière, <strong>de</strong>vient une caractéristique<br />

<strong>de</strong> l’écriture <strong>du</strong> réalisateur. L’APICULTEUR (O<br />

Melissokomos, 1986), <strong>de</strong>rnier voyage d’un vieil homme<br />

qui a quitté sa famille, puis PAYSAGE DANS LE BROUIL-<br />

LARD (Topio Stin Omichli, 1988), voyage <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux enfants<br />

à la recherche d’un père imaginaire, poursuivent l’étu<strong>de</strong><br />

d’un mon<strong>de</strong> sans âme et sans repère. Dans ce <strong>de</strong>rnier,<br />

qui a remporté le Lion d’Or à la Mostra <strong>de</strong> Venise, Théo<br />

Angelopoulos fait référence au VOYAGE DES COME-<br />

DIENS <strong>de</strong> façon explicite, à travers le personnage<br />

d’Oreste, qui rencontre les <strong>de</strong>ux héros <strong>du</strong> film. LE PAS<br />

SUSPENDU DE LA CIGOGNE (To Meteoro vima tou pelargou,<br />

1991), son film suivant, est situé à la frontière <strong>de</strong><br />

<strong>de</strong>ux pays imaginaires, au coeur d’un village débordant<br />

<strong>de</strong> réfugiés. Un journaliste pense avoir reconnu un politicien<br />

qui avait mystérieusement disparu. Avec ce film,<br />

Angelopoulos commence sa réflexion amère sur la perte<br />

<strong>de</strong>s repères dans le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>puis la chute <strong>du</strong> mur <strong>de</strong><br />

Berlin. En 1994, il commence le tournage <strong>du</strong> REGARD<br />

D’ULYSSE (To vlema tou Odyssea), à travers les Balkans.<br />

Andrew Horton écrit, à propos <strong>du</strong> film, dont Harvey Keitel<br />

interprétait le rôle principal : "LE REGARD D’ULYSSE<br />

est une odyssée triple. Sur un premier plan, c’est une<br />

quête <strong>de</strong>s racines <strong>du</strong> cinéma balkanique, et, <strong>de</strong> fait, <strong>du</strong><br />

cinéma tout court. C’est aussi un voyage à travers l’histoire, qui mène à et qui intègre la tragédie actuelle <strong>de</strong> la<br />

Bosnie. Pour finir, c'est le voyage indivi<strong>du</strong>el d’un homme, à travers le parcours <strong>de</strong> sa vie, <strong>de</strong> ses amours et <strong>de</strong> ses<br />

pertes." LE REGARD D’ULYSSE a remporté le Prix <strong>du</strong> Jury et le Prix <strong>de</strong> la Critique Internationale au Festival <strong>de</strong><br />

Cannes, et il a été qualifié <strong>de</strong> "film européen <strong>de</strong> l’année" par la critique. Avec son film suivant, L’ETERNITE ET UN<br />

JOUR (Mia eoniotita kai mia mera), Theo Angelopoulos remporte la Palme d’Or <strong>du</strong> Festival <strong>de</strong> Cannes, et le film<br />

représente la Grèce à la cérémonie <strong>de</strong>s Oscars. Michael Wilmington a dit <strong>du</strong> film qu’il était "un étu<strong>de</strong> visuellement<br />

envoûtante <strong>du</strong> voyage d’un écrivain vieillissant à travers le présent et le passé". David Stratton (Variety) a écrit<br />

quant à lui "Avec L’ETERNITE ET UN JOUR, Angelopoulos affine encore ses thèmes et son style. A l'instar d’autres<br />

grands cinéastes <strong>du</strong> passé qui ont exploré <strong>de</strong>s thèmes similaires à plusieurs reprises, Angelopoulos nous propose<br />

un <strong>de</strong> ses voyages les plus luci<strong>de</strong>s et les plus forts."<br />

FILMOGRAPHIE<br />

1965<br />

1968<br />

1970<br />

1972<br />

1975<br />

1977<br />

1980<br />

1981<br />

FORMINX STORY, inachevé<br />

BROADCAST (court métrage)<br />

RECONSTITUTION<br />

JOURS DE 36<br />

LE VOYAGE DES COMEDIENS<br />

LES CHASSEURS<br />

ALEXANDRE LE GRAND<br />

UN VILLAGE, UN VILLAGEOIS<br />

documentaire<br />

1983<br />

1983<br />

1986<br />

1988<br />

1991<br />

1995<br />

1998<br />

2003<br />

ATHENES, RETOUR A L'ACROPOLE<br />

documentaire <strong>de</strong> télévision<br />

VOYAGE A CYTHERE<br />

L'APICULTEUR<br />

PAYSAGE DANS LE BROUILLARD<br />

LE PAS SUSPENDU DE LA CIGOGNE<br />

LE REGARD D'ULYSSE<br />

L'ETERNITE ET UN JOUR<br />

TRILOGIE / ELENI


FICHE ARTISTIQUE<br />

Willem Dafoe<br />

Bruno Gan<br />

Michel Piccoli<br />

Irene Jacob<br />

Christiane Paul<br />

A<br />

JACOB<br />

SPYROS<br />

ELENI<br />

HELGA<br />

FICHE TECHNIQUE<br />

SCENARIO-RÉALISATION Theo Angelopoulos<br />

IMAGE Andreas Sinanos a.f.c<br />

MUSIQUE Eleni Karaindrou<br />

MONTAGE Yannis Tsitsopoulos & Giorgos Chelidoni<strong>de</strong>s<br />

SON Marinos Athyanasopoulos & Jerome Aghion<br />

PRODUCTION Theo Angelopoulos Film Pro<strong>du</strong>ctions<br />

COPRODUCTION Greek Film Centre avec le soutien <strong>du</strong> ministère <strong>de</strong> la culture Hellénique, Hellenic Broadcasting, Corporation<br />

ERT S.A, NOVA, Studio 217 ARS (Russia) avec le soutien <strong>du</strong> ministere <strong>de</strong> la culture <strong>de</strong> la fe<strong>de</strong>ration Russe,<br />

Classic SRL avec le soutien <strong>de</strong> REGIONE LAZIO / FI.LA.S S.p.a MiBAC - Ministero per I Beni e le Attivita<br />

Culturali, Lichtmeer Film GMBH & CO KG avec le soutien <strong>de</strong> Filmstiftung Nordrhein-Westfalen, Deutscher<br />

Filmfor<strong>de</strong>rfonds (DFFF), ARD Degeto.<br />

DISTRIBUTION FRANCE Sophie Dulac Distribution<br />

AVEC LE SOUTIEN DE :<br />

EURIMAGES Fund of the Council of Europe<br />

SPONSORS<br />

Greek <strong>National</strong> Tourism Organization, <strong>National</strong> Bank of Greece, Theodoros and Gianna Angelopoulos, Olympic Airlines, General Secretariat of<br />

Attica region, Hellenic Public Real Estate Corporation, Air Astana Airlines.<br />

copyright photos: Theo Angelopoulos Film Pro<strong>du</strong>ctions

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