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ARTS MAGAZINE<br />
ARTS MAGAZINE<br />
MAI 2012 / N° 65 / 6,90 €<br />
DOM, BELGIQUE, LUXEMBOURG : 7,80 € / SUISSE : 10,50 CHF / CANADA : 11,75 $CAN<br />
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NOUVELLE<br />
FORMULE<br />
+ RICHE + ACTUEL + COMPLET<br />
<br />
M 02151 - 65 - F: 6,90 E<br />
3:HIKMLF=VU[^U]:?k@a@g@f@k;<br />
GRAND PALAIS<br />
BUREN<br />
CE QUI SE CACHE SOUS SES RAYURES<br />
DOSSIER<br />
15 VOYAGES<br />
ARTISTIQUES<br />
INATTENDUS<br />
SPÉCIAL RENNES<br />
L’ART SE RÉVEILLE<br />
EN BRETAGNE<br />
EXPOSITION<br />
LES MAÎTRES<br />
DU DÉSORDRE :<br />
SORCELLERIE<br />
AU QUAI BRANLY
Lita Cabellut, The spring of Marilyn<br />
356 rue Saint-Honor¥<br />
75001 Paris<br />
T. 01 42 96 39 00<br />
paris@operagallery.com<br />
Lundi - samedi 10h - 19h<br />
Dimanche 11h30 - 19h
mai 2012 ¬ artS maGaZiNE ¬ PaGE 3<br />
éDito<br />
Comme chaque mois, deux couvertures au choix pour le même magazine.<br />
Qui mieux que l’acrobatique<br />
Philippe Ramette, qu’on<br />
a vu arpenter les fonds marins,<br />
grimper aux palmiers ou ici<br />
admirer le panorama sur<br />
un Socle à réflexion, pouvait<br />
illustrer le dossier consacré<br />
aux voyages artistiques<br />
décalés, que nous détaillons,<br />
de la page 44 à la page 67<br />
erratum<br />
prendre l’air<br />
rédacteur en chef<br />
Adrien Guilleminot<br />
Alors qu’on va découvrir ce que<br />
Daniel Buren a concocté pour la nef<br />
du Grand Palais, cette photographie<br />
s’est imposée pour la couverture.<br />
D’abord parce qu’on y voit ses<br />
emblématiques rayures, sa signature<br />
visuelle. Mais aussi parce que cette<br />
installation, au musée Guggenheim,<br />
en 1971, s’est soldée par un<br />
scandale. Le portrait de Buren en<br />
éternel rebelle : c’est page 70<br />
Dans le numéro 64 d’Arts Magazine, deux erreurs se sont glissées<br />
dans le texte concernant la galerie Almine Rech (p. 57).<br />
Une première dans l’orthographe du Joseph Kosuth (et non Kossuth).<br />
Et une seconde concernant l’artiste Liu Wei : ce n’est pas lui,<br />
mais son presque homonyme Li Wei qui expose en ce moment au parc de<br />
la Villette. Toutes nos excuses aux intéressés, et à nos lecteurs.<br />
Enfin, une précision à apporter dans l’article concernant la création<br />
du fonds Hélène & Édouard Leclerc pour la culture (p. 19).<br />
S’il porte le nom de ses parents, le fonds sera présidé par l’actuel<br />
dirigeant du groupement E. Leclerc, Michel-Édouard.<br />
à ma gauche, Rineke Dijkstra. Une photographe et<br />
vidéaste néerlandaise, dont la carrière sera couronnée<br />
cet été par une rétrospective au musée Guggenheim<br />
de New York. à ma droite, Loft Story. Inventée<br />
par la société néerlandaise Endemol, le Loft fut la<br />
première émission de téléréalité diffusée en France,<br />
il y a un peu plus de dix ans. Et le couronnement de<br />
la « carrière » d’une poignée de jeunes gens retournés<br />
dans l’ombre aussi vite qu’ils en étaient sortis.<br />
Le rapport ? Au milieu des années 1990, Dijkstra<br />
filme en plan fixe les clients d’une boîte de nuit de<br />
Liverpool ; d’une façon qui évoque le « confessionnal<br />
» des émissions de téléréalité qui verront le jour<br />
plusieurs années plus tard, nous raconte Julien<br />
Blanpied dans sa chronique (p. 20). Pour illustrer la<br />
comparaison, il faut, c’est logique, publier une image<br />
de chacun des protagonistes. Et donc en demander<br />
l’autorisation. Naïvement, on pourrait croire qu’il<br />
est facile de l’obtenir de la joyeuse bande de célibataires<br />
désœuvrés du Loft. Raté : Rineke Dijkstra<br />
a donné son accord sans difficulté, mais la communication<br />
du Loft, elle, est verrouillée à double tour.<br />
Interdiction formelle d’utiliser la moindre photographie<br />
de Loana et compagnie. On ne plaisante pas<br />
avec le respect du droit à l’image de candidats qui ont<br />
justement participé à cette émission pour devenir<br />
des personnages publics… C’était notre rubrique :<br />
il y a plus important que l’art, dans la vie.<br />
Mais, puisque dans ces pages, nous y accordons tout<br />
de même un petit peu d’importance, quittons là<br />
l’étouffant Loft, et sortons prendre l’air. De Bogotà<br />
(p. 53), où le peintre Fernando Botero a ouvert un<br />
musée riche de dizaines de toiles de Monet, Picasso<br />
ou Bonnard, à Tel-Aviv (p. 60), où l’art jaillit à chaque<br />
coin de rue. En passant par Lanzarote (p. 46), une île<br />
des Canaries où un artiste du nom de César Mantique<br />
a bâti, sculpté, planté d’invraisemblables édifices entre<br />
art, tourisme et nature… Arts Magazine vous entraîne<br />
ce mois-ci à la découverte de destinations méconnues<br />
et insolites, entre design, architecture, peinture et<br />
jardins fantastiques. Dépaysement garanti !
PAGE 4 ¬ ARTS MAGAZINE ¬ MAI 2012<br />
sommAire<br />
p 44 p 70<br />
p 44<br />
Quinze voyages<br />
insolites<br />
De Lanzarote à Bogotá<br />
en passant par Ljubljana :<br />
l’art où on ne l’attend pas<br />
p 70<br />
Buren, au-delà<br />
des rayures<br />
Cabanes, jeux de lumière,<br />
esprit de contradiction :<br />
portrait du célèbre artiste<br />
Ce numéro comporte un encart<br />
d’abonnement Arts Magazine<br />
broché sur la partie kiosque France,<br />
ainsi qu’une planche d’autocollants<br />
posée sur une partie des exemplaires<br />
destinés aux abonnés France<br />
ActuAlité p 6<br />
La Nuit des musées, Claude Lévêque de retour<br />
à l’école, deux nouveaux Klimt à Vienne et<br />
huit millions d’Ai Weiwei à Londres… Les hauts<br />
faits et les anecdotes : toute l’actualité du monde<br />
de l’art décryptée sur plus de 30 pages<br />
Le « mort-vivant » p 10<br />
La chronique de Stéphane Corréard<br />
Visite d’ atelier p 14<br />
Xavier Antin, par François Quintin<br />
Collusion p 20<br />
Rineka (Dijkstra) vs Endemol, par Julien Blanpied<br />
L’Encyclopédie des guerres p 32<br />
Par Jean-Yves Jouannais<br />
Carte Blanche p 42<br />
Tous les mois, Hakima El Djoudi invite un artiste<br />
dans nos pages, pour vous offrir une œuvre d’art<br />
sur papier glacé. Dans ce numéro, place au rappeurdessinateur<br />
Maurice Greene<br />
dossier spéciAl voyAges p 44<br />
L’art, quel meilleur prétexte pour voyager ?<br />
Arts Magazine vous embarque vers des destinations<br />
artistiques inattendues<br />
Lanzarote p 46<br />
Dans les Canaries, un artiste a remodelé « son île »<br />
Vicence p 50<br />
L’invraisemblable mariage des meilleurs designers<br />
avec des mosaïques de piscine<br />
Bogotá p 53<br />
Dans les Andes, un fabuleux musée empli de Monet,<br />
de Bonnard, de Picasso…<br />
Ljubljana p 54<br />
Comme Gaudí à Barcelone, maître Pečnik a rebâti<br />
la capitale slovène<br />
Europe p 57<br />
Du Portugal à l’Angleterre, découverte de jardins<br />
délirants<br />
Tel-Aviv p 60<br />
La nouvelle place forte de l’art contemporain<br />
Floride p 64<br />
En face des flots bleus du golfe du Mexique,<br />
un spectaculaire musée Dalí<br />
Paris p 67<br />
Redécouvrir la Ville lumière autrement
MAI 2012 ¬ ARTS MAGAZINE ¬ PAGE 5<br />
sommAire<br />
p 82 p 88 p 108<br />
mAgAzine p 68<br />
Daniel Buren, le hussard sous la verrière p 70<br />
Depuis cinquante ans, l’homme aux rayures<br />
est en lutte contre toutes les conventions. Portrait,<br />
à l’occasion de son installation au Grand Palais<br />
Anri Sala monte le son p 75<br />
Le jeune artiste représentera la France à la prochaine<br />
Biennale de Venise. Pour mieux connaître<br />
notre « champion », découverte de son exposition<br />
au centre Pompidou<br />
Alain Passard, trois étoiles au jardin p 78<br />
Chef « végétophile », producteur de ses propres légumes,<br />
il est cette année président du jury du Festival des jardins<br />
de Chaumont. Interview<br />
Cécile Beau, la fée physicienne p 80<br />
Elle a conçu, au cœur du palais de Tokyo,<br />
une caverne remplie d’étranges phénomènes…<br />
Rencontre avec une jeune magicienne<br />
Chaos et sorcellerie au Quai Branly p 82<br />
Picasso et les Inuits, Basquiat vaudouisé… Au musée<br />
du quai Branly, les artistes rencontrent les chamans<br />
L’art en questions : Animalomaniap 88<br />
Deux grandes expositions d’art animalier : mais pourquoi<br />
les artistes se sont-ils toujours entichés de bestioles ?<br />
Une œuvre au scanner p 96<br />
La peinture sur éventail du peintre chinois Wen Boren<br />
cache bien des surprises…<br />
Portfolio : les enluminures p 100<br />
Les minutieux parchemins peints et les miniatures<br />
flamandes du Moyen Âge en géant<br />
Portrait de ville : Rennes p 108<br />
Un nouveau Frac, une biennale… traditionnellement<br />
discrète, la capitale bretonne se remet à briller<br />
Le coin des enfants p 118<br />
Chagall volète autour de sa belle… Comment fait-il ?<br />
AgendA p 122<br />
De Rome à Vendôme, de Gand à Caen, plus de<br />
100 expos choisies et décryptées par nos correspondants<br />
Paris/Ile-de-France p 124<br />
Ouest p 128<br />
Nord p 131<br />
Est p 134<br />
Sud-Est p 137<br />
Sud-Ouest p 140<br />
relecture, par Jochen gerner p 146<br />
Le dessinateur Jochen Gerner s’amuse à déceler des<br />
traits d’union entre BD et arts plastiques. Dans ce<br />
numéro, La Grande Menace de Jacques Martin lui<br />
évoque les installations « climatiques » d’Olafur<br />
Eliasson comme les petits fétiches d’Annette Messager<br />
p 82<br />
chamanisme au musée<br />
De Bali à Haïti, de Jérôme<br />
Bosch à Basquiat : choc<br />
des cultures au Quai Branly<br />
p 88<br />
Animalomania<br />
Géricault, fou de chevaux,<br />
Dürer et son rhino… l’animal<br />
obsède les artistes<br />
p 108<br />
rennes, l’ex-discrète<br />
Avec l’ouverture du<br />
Frac Bretagne, la ville<br />
affiche désormais ses<br />
ambitions artistiques<br />
retrouvez-nous sur<br />
www.facebook.com/<br />
pages/Arts-Magazine/<br />
269572889780404
actualité<br />
8<br />
événement<br />
que faire pendant<br />
la nuit des musées ?<br />
24<br />
exposition<br />
coup de projecteur<br />
sur l’archéologie<br />
au musée du louvre<br />
30<br />
livres et DVD<br />
notre sélection<br />
36<br />
art contemporain<br />
claude lévêque<br />
retourne à l’école<br />
Chroniques<br />
par stéphane<br />
corréard (p. 10),<br />
François Quintin<br />
(p. 14) et Julien<br />
Blanpied (p. 20)<br />
l’encyclopédie<br />
des guerres par<br />
jean-yves jouannais<br />
(p. 34)<br />
Tetzuka, un ballet manga<br />
à voir à Paris, à la Villette, p.22
PAGE 12 ¬ ARTS MAGAZINE ¬ MAI 2012<br />
actualité<br />
Architecture<br />
AléSiA, la nouvelle folie<br />
de Bernard tschumi<br />
on lui doit les « folies » du parc de la villette à Paris, le musée de l’acropole d’athènes…<br />
l’architecte suisse Bernard tschumi revient aujourd’hui en Bourgogne, sur le site d’alésia.<br />
et nous raconte dans quel esprit il a conçu ce bâtiment pas comme les autres.<br />
émilie Formoso interview<br />
Le premier des deux bâtiments que l’architecte<br />
va ériger sur le site d’Alésia<br />
Des salles de concert, des centres culturels,<br />
des musées… Bernard Tschumi, 68 ans, est<br />
l’un des grands spécialistes de l’architecture<br />
de lieux « culturels ». L’occasion d’appliquer<br />
des recettes à succès ? Non : chaque bâtiment<br />
est au contraire différent, comme il l’explique<br />
à propos de son dernier-né, le centre d’interprétation<br />
du muséoparc d’Alesia, là où Jules<br />
César mit au pas Vercingétorix.<br />
ARTS MAGAZINE • Quelle place tient ce projet<br />
dans votre œuvre ?<br />
BeRnARd TSchumi: Lorsque j’ai terminé le musée<br />
de l’Acropole il y a deux ans, je considérais que<br />
les deux travaux les plus importants que j’avais<br />
réalisés étaient ce musée et le parc de la<br />
Villette. Et que si je devais refaire quelque<br />
chose d’important, il fallait que cela se situe<br />
Notes<br />
1 Op pidum : ensemble fortifié le plus souvent<br />
situé sur une colline ou un plateau,<br />
et caractéristique de la civilisation celtique.<br />
2 Murus gallicus : technique de construction<br />
gauloise des remparts, utilisant un entrecroisement<br />
horizontal de poutres et de pierres sèches. Cette<br />
technique a été précisément décrite par Jules César<br />
dans son ouvrage « La Guerre des Gaules ».<br />
dans une autre problématique. J’ai donc été<br />
très content de la manière dont nous avons<br />
été capables de traduire le concept et les<br />
contraintes en un matériau.<br />
c’est-à-dire?<br />
Il fallait parler de la bataille d’Alésia comme<br />
d’un moment qui influençait toute une civilisation.<br />
C’est une rencontre entre deux cultures,<br />
celle des Gaulois et celle des Romains, qui a<br />
donné naissance à la civilisation gallo-romaine.<br />
C’est un affrontement et aussi un dialogue.<br />
Une idée qui se traduit dans l’architecture. Le<br />
centre d’interprétation est situé dans la plaine,<br />
à l’endroit où Jules César avait massé la plus<br />
grosse partie de ses troupes. Mais il y a aussi<br />
le musée (ouverture prévue en 2015) qui sera<br />
engoncé dans l’oppidum (1) où se trouvaient<br />
les troupes de Vercingétorix. L’idée est donc<br />
d’établir à la fois une dualité et une égalité<br />
entre l’assiégeant et l’assiégé. Ces bâtiments<br />
ont comme dénominateur commun d’être circulaires.<br />
Ce thème de la circularité se prolonge<br />
dans l’idée de mouvement. Le centre d’interprétation<br />
possède de grandes rampes-escaliers<br />
et des colonnes. Cela donne une impression de<br />
dynamisme, qui montre que la bataille a été en<br />
fin de compte une chose positive.<br />
Pourquoi avoir choisi ce style très<br />
discret ?<br />
Concernant l’extérieur, il y avait une demande<br />
très claire de la part des archéologues, puisqu’il<br />
fallait à la fois célébrer la bataille et ne pas<br />
déranger le paysage, magnifique et presque<br />
inchangé depuis 2000 ans. J’ai voulu montrer<br />
le cirque de collines comme une promenade à<br />
360° lorsqu’on est dans le bâtiment. J’ai donc<br />
créé cette résille en bois qui n’a pas la dureté<br />
d’une façade de béton ou de verre, mais qui<br />
possède une certaine porosité avec laquelle la<br />
lumière joue, et qui s’intègre totalement au paysage.<br />
Cette intégration est renforcée par le toit<br />
terrasse planté d’arbres. Et je me suis aperçu<br />
que j’utilisais intuitivement le même matériau<br />
que celui de Jules César pour ses fortifications.<br />
et qu’en sera-t-il du second bâtiment,<br />
destiné au musée ?<br />
Le second bâtiment sera situé sur l’oppidum,<br />
mais son enveloppe sera cette fois réalisée en<br />
pierre. Nous utiliserons les pierres dégagées<br />
du trou creusé pour les fondations, ce qui est<br />
finalement très écologique ! Et cette enveloppe<br />
en pierre sera proche du murus gallicus (2) ,<br />
même si nous ne voulons pas faire tout à fait<br />
la même chose.
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CIVIC,<br />
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PAGE 16 ¬ ARTS MAGAZINE ¬ MAI 2012<br />
actualité<br />
THÉÂTRE<br />
MIss PEGGy,<br />
mécène en scène<br />
Des lunettes extravagantes, des amants et des petits chiens à foison‚ la vie de Peggy<br />
Guggenheim ne se résume pas à ces quelques clichés. à 14 ans, Marguerite, surnommée<br />
Peggy par son coureur de jupons de père, se trouve à la tête d’une fortune inestimable…<br />
Quelques années plus tard, le nez refait et les yeux gonflés d’impressionnisme,<br />
elle débarque à Paris. Y rencontre Laurence Vail, alias le « roi de la bohème »,<br />
un peintre-poète d’origine américaine, l’épouse et s’installe à Montparnasse, alors<br />
terre d’accueil des artistes les plus démunis. Dans les bras de Samuel Beckett, « cet<br />
intellectuel desséché », elle découvre l’art moderne. Man Ray, Duchamp, Modigliani,<br />
Brancusi, Pollock, Giacometti, Dalí, Calder… offrant sans compter son argent et<br />
son corps. Yves Tanguy lui propose le mariage, elle lui préfère Max Ernst qu’elle<br />
sauve du camp de concentration… Les détails croustillants de cette vie chaotique,<br />
Stéphanie Bataille les raconte avec gouaille, seule en scène durant une heure. Elle<br />
déroule les souvenirs tragicomiques de cette pasionaria désormais isolée dans son<br />
palais vénitien au bord du Grand Canal. Ou au cours de l’année 1967, elle n’a qu’un<br />
souci : que faire de ses « bébés », ces 200 œuvres accumulées qui forment la plus<br />
importante collection privée de tous les temps ?<br />
S. Sil.<br />
Stéphanie Bataille incarne la plus déjantée des collectionneuses<br />
Théâtre du Petit Montparnasse. 31, rue de la Gaîté, Paris 14 e . Jusqu’au 31 mai.<br />
Tél. : 01 43 22 77 74. w ww.theatremontparnasse.com<br />
BD<br />
MoEbIus<br />
revient…<br />
en couleurs<br />
Le 10 mars dernier, la bande dessinée perdait<br />
l’une de ses figures les plus visionnaires et les<br />
plus complexes. Dessinateur aux identités<br />
multiples, Moebius, alias Jean Giraud ou Gir,<br />
était le papa de Blueberry, cow-boy solitaire de<br />
l’Ouest sauvage américain… et de « L’ Incal »,<br />
série majeure de la BD de science-fiction.<br />
à l’annonce de sa mort à l’âge de 73 ans, les<br />
hommages se sont multipliés, venant de tous<br />
horizons dans le monde des bulles, preuve de<br />
son influence sur des générations de bédéastes.<br />
Le site des Humanoïdes associés (www.<br />
humano.com), l’un de ses éditeurs historiques,<br />
regroupe quelques dizaines de dessins réalisés<br />
spontanément. Cette maison, justement,<br />
mène une politique de réédition ambitieuse<br />
d’une grande partie du catalogue de l’artiste<br />
depuis plus d’un an. Chaque album, vendu<br />
pour la modique somme de 18 euros environ,<br />
est accompagné d’un texte d’introduction signé<br />
Moebius. Certains, repris des versions colorisées<br />
publiées par l’éditeur américain Marvel,<br />
permettent même de revisiter des classiques<br />
(Le Garage hermétique, Les Vacances du major)<br />
originellement en noir et blanc. Si vous cherchiez<br />
une excuse pour réécouter la voix et<br />
admirer à nouveau le trait de plume de l’artiste,<br />
la voilà… Et si vous ne connaissez pas, c’est le<br />
moment de vous plonger dans cet univers, en<br />
commençant peut-être par l’hilarante histoire<br />
du Bandard fou ! L. P.<br />
Les raretés de Moebius ressortent en couleur
MAI 2012 ¬ ARTS MAGAZINE ¬ PAGE 17<br />
actualité<br />
PHILIPPE KATERINE<br />
De La Banane à l’ananas<br />
le chanteur a momentanément coupé le son… pour s’aventurer du coté des Galeries<br />
lafayette y monter sa première exposition « comme un ananas ». rencontre loufoque<br />
avec un véritable électron libre devenu un homme à la tête d’ananas.<br />
Sabrina Silamo interview<br />
à voiR<br />
La Galerie<br />
des galeries.<br />
Galeries Lafayette,<br />
40, bd Haussmann,<br />
Paris 9 e<br />
jusqu’au 2 juin. gratuit<br />
à liRe<br />
Comme<br />
un ananas,<br />
de Philippe Katerine,<br />
éd. Denoël, 84 p., 15 €<br />
Aquarelles, dessins, collages…<br />
Katerine touche à tout<br />
Mais que va donc faire le chanteur 100% VIP<br />
de Louxor, j’adore dans une galerie ? Avis à<br />
destination des sceptiques : Philippe Katerine,<br />
ex-étudiant en arts plastiques, musarde<br />
depuis toujours entre musiciens et plasticiens<br />
tels le vidéaste Pierrick Sorin, ou Mrzyk et<br />
Jean-François Moriceau, le duo qui signe la<br />
pochette de 8 e Ciel. Le Vendéen iconoclaste,<br />
désormais performer imprévisible, ne se<br />
refuse jamais rien : ni danser avec Mathilde<br />
Monnier ni faire l’acteur pour Joan Sfar.<br />
ARTS MAGAZINE • comment avez-vous conçu<br />
cette première exposition ?<br />
PhiliPPe KATeRine : Comme une expérience<br />
sensorielle. C’est un parcours imaginé comme<br />
un intestin, aller-retour, replié sur lui-même.<br />
Sont d’abord exposés 18 diptyques de format<br />
A4 : sur le premier volet, j’ai dessiné des<br />
hommes et des femmes politiques avec leurs<br />
accessoires – par exemple, Rachida Dati avec<br />
un perroquet, Villepin au téléphone tournant<br />
le dos au Cri de Munch –, et sur le deuxième,<br />
il ne reste que les accessoires. Sur la cloison,<br />
face à eux, des yeux les observent. Puis, on<br />
traverse un sas entièrement noir avant de<br />
déboucher sur une sculpture monumentale,<br />
qu’on pourrait appeler Le Totem de<br />
l’émancipation, et qui mesure 2,50 mètres de<br />
haut sur 2,50 mètres de large. Elle représente<br />
une fontaine avec en son centre un rappeur de<br />
droite, Kanye West, dans le rôle du visionnaire,<br />
entouré de toutes les personnalités politiques<br />
qui sont réapparues. La sculpture est exposée<br />
dans une salle bleu clair où on entend la<br />
chanson Comme un ananas, écrite par Julien<br />
Baer. Viennent ensuite la série des Post-it<br />
directement collés au mur, et les aquarelles que<br />
j’ai peintes dans mon nouveau quartier, celui<br />
de Giscard, le XVI e arrondissement de Paris.<br />
Et le parcours se termine sur un miroir qui<br />
chante quand tu le regardes.<br />
c’est donc cette chanson qui donne son<br />
titre à cette exposition ?<br />
Oui, Julien Baer me l’a jouée un soir en<br />
improvisant les paroles. Ces mots, qu’il inventait<br />
devant moi, m’ont excessivement touché :<br />
« Comme un ananas, j’ai passé ma vie à moitié<br />
en tranches, à moitié entier ». Ils tombaient à<br />
pic pour une exposition découpée en tranches.<br />
Ou en étapes comme le Tour de France.<br />
Pourquoi un tel intérêt pour le thème<br />
de la disparition ?<br />
La disparition, le trou… c’est plus qu’une notion<br />
pour moi, c’est une religion. Georges Perrec,<br />
dans son livre La Disparition, s’est amusé à<br />
écrire sans utiliser la lettre e. Moi, je me suis<br />
amusé à dessiner des hommes politiques et à<br />
les faire disparaître. Parce qu’ils s’imposaient<br />
à moi comme des présences fantômes et que<br />
je devais m’en débarrasser. De Dominique de<br />
Villepin au téléphone tournant le dos au Cri<br />
de Munch, il ne reste que le Cri. Prémonitoire ?<br />
Mais tout ça relève du hasard… Le hasard et<br />
le rêve sont mes deux mamelles.<br />
verra-t-on aussi des extraits du journal<br />
graphique Doublez votre mémoire ?<br />
Même si tout est toujours lié, les chansons, les<br />
films, les dessins ou la côte de taureau que j’ai<br />
mangé ce midi, l’exposition se rapproche plutôt<br />
de l’album sorti en 2010, où je suis photographié<br />
avec mes parents. Je recherche avant tout<br />
à exprimer mes émotions, et je me sens privilégié<br />
de pouvoir explorer toutes ces directions.<br />
J’ai l’impression d’être dans un grand magasin :<br />
j’essaie des bijoux, des chapeaux, des robes…
PAGE 18 ¬ ARTS MAGAZINE ¬ MAI 2012<br />
actualité<br />
AuTRIc HE<br />
Deux nouvelles toiles<br />
Pour fêter « l’année Klimt »<br />
Le Belvedere de Vienne assoit sa position<br />
de premier musée au monde pour l’œuvre<br />
de Gustav Klimt. Deux nouvelles peintures,<br />
Tournesol (1907) et Famille (1909-1910), viennent<br />
de rejoindre les 22 autres toiles du leader<br />
de la Sécession déjà conservées dans l’ancien<br />
palais princier viennois, dont le célèbre Baiser.<br />
Ces deux pièces majeures ont été léguées par<br />
le collectionneur Peter Parzer, récemment<br />
décédé, parmi des dizaines d’autres œuvres<br />
d’artistes autrichiens moins connus. Le peintre<br />
y apparaît sous deux visages bien distincts :<br />
Tournesol, qu’on suppose être un portrait en<br />
fleur de sa compagne Emilie Flöge, évoque<br />
le Klimt lumineux des paysages et du Cycle<br />
d’or ; Famille est une vue plus sombre d’une<br />
mère et de ses enfants endormis, proche des<br />
compositions ultérieures d’Egon Schiele,<br />
le jeune artiste torturé, protégé de Klimt.<br />
Ce cadeau à plusieurs dizaines de millions<br />
d’euros est une aubaine pour le musée, qui<br />
s’était plutôt habitué ces derniers temps à voir<br />
partir ses Klimt : plusieurs d’entre eux, issus de spoliations<br />
nazies, avaient été restitués dans les années<br />
2000 à leurs propriétaires légitimes. Il tombe à point<br />
pour les festivités de « Klimt 2012 », qui célèbrent<br />
à Vienne les 150 ans de la naissance de l’artiste.<br />
Les deux toiles seront d’ailleurs visibles, du 12 juillet<br />
au 6 janvier 2013, au Belvedere dans l’exposition<br />
« Les 150 ans de Gustav Klimt ». V. S.<br />
Ces deux peintures<br />
de Klimt viennent de<br />
rejoindre les collections<br />
du Belvedere<br />
I NTERNET<br />
Des inéDits De Keith haring<br />
Dessins maladroits, collages, poèmes… Les journaux intimes d’un jeune<br />
Américain ont été mis en ligne sur Internet. Mais pas n’importe quel Américain :<br />
Keith Haring (1958-1990), devenu célèbre pour ses graffitis bondissants et<br />
colorés. à l’occasion d’une exposition au Brooklyn Museum, aux états-Unis,<br />
une nouvelle page est mise en ligne jusqu’à la fin de l’événement, le 8 juillet.<br />
Où l’on découvre d’autres facettes de l’artiste underground : très croyant et préoccupé<br />
par les questions environnementales. L. P.<br />
Plus d’info: http://keithharing.tumblr.com
© MUSÉE DES ANNÉES TRENTE BOULOGNE-BILLANCOURT CONCEPTION GRAPHIQUE TAUROS/IBACH 2012 REMBRANDT BUGATTI KANGOUROU VERS 1906 VERNON–MUSÉE ALPHONSE-GEORGES-POULAIN PIERRE DANDELOT LYNX 1936 BRUNOY–MUSÉE ROBERT-DUBOIS-CORNEAU<br />
JACQUES NAM CHIMPANZÉ MARCHANT 1922-1930 ROUBAIX–LA PISCINE, MUSÉE D’ART ET D’INDUSTRIE ANDRÉ-DILIGENT ALBERTO GIACOMETTI LE CHAT 1951 PARIS–FONDATION ALBERTO ET ANNETTE GIACOMETTI © ADAGP PARIS 2012<br />
E N P A R T E N A R I A T M É D I A S A V E C
PAGE 22 ¬ ARTS MAGAZINE ¬ MAI 2012<br />
actualité<br />
Danse<br />
Grand écart<br />
Avec ASTRo Boy<br />
Le petit robot aux grands yeux et aux cheveux taillés en<br />
pointe s’est fait adopter, le temps de dix représentations<br />
exceptionnelles, par Sidi Larbi Cherkaoui. Le chorégraphe<br />
mi-Marocain mi-Flamand s’est emparé de la créature vedette<br />
d’Osamu Tezuka, artiste considéré au Japon comme le dieu<br />
du manga, pour imaginer un nouveau spectacle simplement<br />
intitulé TeZukA. Mais comment traduire en mouvement<br />
« de l’encre et du papier » ? Réponse du danseur, auréolé de<br />
multiples récompenses dont le Prix Nijinski en 2002 : en<br />
mariant des experts en arts martiaux à des musiciens indiens<br />
tel Nitin Sawhney, un des pionniers de la scène underground<br />
asiatique, dans des décors habités de bande dessinée ou de<br />
rouleaux de kanjis (idéogrammes d’origine chinoise). Le tout<br />
balance entre danse et calligraphie, entre lyrisme et énergie, à<br />
l’image de l’intrépide Astro Boy.<br />
S. Sil.<br />
Grande Halle de la Villette. Du 9 au 19 mai. Tél. : 01 40 03 75 75.<br />
www.villette.com<br />
Un personnage<br />
de manga devient<br />
le héros d’un<br />
spectacle de danse<br />
Design<br />
STARck<br />
entre chine<br />
et cuisine<br />
Première brique posée par le designer Philippe Starck sur son nouveau<br />
terrain d’expression : les marchés Paul Bert et Serpette de Saint-Ouen.<br />
Pour les puces, il conçoit une de ces cantines chics dont il a le secret.<br />
En compagnie de Philippe Amzalak, son complice du restaurant Bon<br />
et commanditaire de ce nouveau lieu, le voilà prêt à aménager un espace<br />
qui accueillera 250 couverts midi et soir, tous les jours de la semaine à<br />
partir du mois de septembre. L’esprit des lieux selon le maître ? Un esprit<br />
loft, du bois, de la brique rouge et du zinc, décalé et insolite. « Un esprit<br />
puces » résume-t-il. à interpréter « dans une totale liberté », ajoute son<br />
comparse. Un point de branchitude gagné d’avance pour le plus grand<br />
marché d’antiquités du monde… F. D.<br />
Aux puces, Starck<br />
met du design<br />
dans votre assiette
HENRI LANDIER<br />
Le cycle des métamorphoses<br />
Réalisation axe concept © DR Atelier d’Art Lepic<br />
Exposition rétrospective<br />
du 10 mai au 30 juin 2012<br />
du mardi au dimanche 14h à 19h<br />
Galerie d’Art Lepic 1, rue Tourlaque 75018 Paris<br />
Tél. : 01 46 06 90 74<br />
www.artlepic.org
PAGE 24 ¬ ARTS MAGAZINE ¬ MAI 2012<br />
actualité<br />
Dans les eaux<br />
du Rhône…<br />
un trésor, dont<br />
ce buste de César<br />
et ce Gaulois captif<br />
Exposition<br />
Au LouvRe, plongée dans les secrets<br />
de l’archéologie<br />
les trésors antiques retrouvés au fond du rhône font l’objet d’une exposition au louvre très<br />
réussie. pourquoi ? parce que le musée réussit à rendre vivante cette aventure archéologique,<br />
et à faire comprendre comment cherchent, trouvent… et doutent les archéologues.<br />
émilie Formoso texte<br />
Comment date-t-on une œuvre ? Que sait-on de sa fabrication ? Que<br />
nous apprend son iconographie ? La nouvelle exposition du Louvre<br />
prend un air d’enquête policière… Et réalise un tour de force : à la fois<br />
mettre en valeur la beauté de cette cinquantaine d’œuvres, mais surtout<br />
éclairer la face cachée de la démarche archéologique. L’objet de cette<br />
attention ? Les fouilles subaquatiques que l’équipe de Luc Long a réalisées<br />
au cours des vingt dernières années dans le Rhône, aux environs<br />
d’Arles. De leur découverte par une équipe d’archéologues-plongeurs,<br />
à leur présentation au musée, en passant par les analyses qui ont été<br />
pratiquées sur eux, ces objets ont beaucoup à nous apprendre.<br />
À commencer par une superbe Victoire en bronze, dont la couverte<br />
d’or miraculeusement conservée a permis d’étudier le procédé de la<br />
dorure antique. Même sort pour l’exceptionnel Gaulois captif exposé<br />
non loin de là, dont la technique de fonte à la cire perdue fait l’objet<br />
d’une longue explication. Le Rhône a également livré des objets<br />
rarissimes, tels ce casque de légionnaire et un glaive encore pris dans<br />
son fourreau. D’autres, plus inattendus, laissent présager de futures<br />
découvertes architecturales, comme un chapiteau corinthien provenant<br />
d’un monument encore inconnu.<br />
Reste la pièce maîtresse de l’exposition : le portrait présumé de Jules<br />
César. Un parfait exemple de la manière dont les archéologues identifient<br />
une œuvre. En effet, aucune source antique ne donne de description<br />
physique précise du dictateur romain. En l’absence d’une<br />
mention explicite de son nom sur un socle, que faire ? Trouver des<br />
indices concordants ! Le caractère exceptionnel de la commande, tout<br />
d’abord, qui exigeait les réseaux et l’argent suffisants pour importer un<br />
bloc de marbre depuis la Grèce de l’Est ; certains détails techniques<br />
et stylistiques, ensuite, comme l’apparence réaliste et la recherche de<br />
mouvement, qui datent le portrait du I er siècle av. J.-C. Bien sûr, ces<br />
indices ne sont pas des preuves, et le mystère demeure. Mais comme le<br />
dit Jean-Luc Martinez, commissaire de l’exposition, « en archéologie, les<br />
questions sont souvent plus passionnantes que les réponses… »<br />
Jusqu’au 25 juin. Tél. : 01 40205317. www.louvre.fr
AIX-EN-PROVENCE<br />
PARC JOURDAN<br />
du 3 au 7 MAI<br />
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PHOTOGRAPHES<br />
VIDEASTES<br />
GALERISTES<br />
7 e SALON MEDITERRANEEN D’ART CONTEMPORAIN
PAGE 40 ¬ ARTS MAGAZINE ¬ MAI 2012<br />
actualité<br />
à deux pas de<br />
la Cité interdite,<br />
un nouveau<br />
lieu d’échanges<br />
franco-chinois<br />
Chine<br />
Une « Villa Médicis »... à Pékin<br />
Des hommes politiques ( Jean-Pierre Raffarin), des critiques d’art (Michel Nuridsany), des mécènes (Philippe<br />
Couvrecelle, dirigeant du groupe Edmond de Rothschild Asset Management)… Elles sont nombreuses les bonnes<br />
fées qui se sont penchées sur le berceau d’Yishu 8. Yishu 8 ? Un lieu de rencontre, de création, d’exposition, une sorte<br />
de Villa Médicis financée par des fonds privés qui a nouvellement élu domicile, tout près de la Cité interdite, dans<br />
l’ancienne université franco-chinoise de Pékin, un bâtiment hybride entre architecture chinoise et église romane !<br />
à l’initiative du projet, Christine Cayol, directrice d’un cabinet de conseil et ancienne chroniqueuse à Arts Magazine,<br />
qui a suivi, en 2004, son compagnon en Chine. « Je n’étais pas spécialement attirée par le pays », confie-t-elle. Mais<br />
elle apprend le mandarin et s’immerge dans la culture asiatique, suffisamment pour aboutir à un triste constat : « Les<br />
Chinois s’intéressent à l’art occidental mais le connaissent mal, de même que nous sommes bourrés de préjugés sur leur<br />
culture ». Convaincue que « l’art sert à comprendre et à se comprendre », elle crée ce lieu pour favoriser le dialogue et<br />
invite depuis deux ans de jeunes talents en résidence. « Il y a beaucoup d’artistes chinois en France… Aujourd’hui, c’est à<br />
nous de nous déplacer, de sortir de notre ethnocentrisme. » Jusqu’au 5 mai, une exposition sur le dialogue franco-chinois<br />
de 1912 à 2012 se tiendra dans les nouveaux locaux d’Yishu 8. L. P.<br />
Angleterre<br />
la grande sœur<br />
de la TaTe Modern à vendre<br />
La centrale électrique de Battersea, son imposante masse de briques et ses quatre immenses cheminées blanches, est un<br />
peu la tour Eiffel de Londres : un monument emblématique de l’architecture moderne, et un repère urbain immédiatement<br />
reconnaissable. Ce joyau du patrimoine industriel britannique est pourtant à vendre ! Cette ancienne centrale<br />
électrique à charbon, à l’intérieur art déco, qui se délite depuis sa mise à l’arrêt en 1983, devrait changer de mains au<br />
cours de ces prochains mois. Parcs, hôtels ou résidences luxueuses, pour 300 à 400 millions de livres, les projets d’aménagement<br />
ne manquent pas. Ceux qui envisagent sa destruction pure et simple non plus… Pourquoi ne pas, à l’image de<br />
sa célèbre petite sœur, conçue par le même architecte et devenue depuis la Tate Modern, réhabiliter le site, s’insurge une<br />
association de quartier ? Un appel restait sans réponse auprès des pouvoirs publics. L. G.
MAI 2012 ¬ ARTS MAGAZINE ¬ PAGE 41<br />
actualité<br />
ArChéologie<br />
saint-gerMain : Plus de Place<br />
poUr les GaUlois<br />
C’est la plus importante collection du monde en la matière, mais elle était jusqu’ici assez<br />
mal mise en valeur. Le musée d’Archéologie nationale de Saint-Germain-en-Laye possède,<br />
en effet, plus de 1 300 objets (épées, bijoux, vaisselles, ou encore équipement militaire, tel<br />
ce superbe casque en bronze du III e siècle av. J.-C.) relatifs aux Gaulois. Faute de place, un<br />
tiers d’entre eux n’ont tout simplement jamais été exposés… jusqu’à présent. Car le musée a<br />
ouvert, depuis le 8 mars dernier, cinq salles totalement rénovées, consacrées à ce peuple qui<br />
vécut sur notre territoire entre le V e et le I er siècle av. J.-C. L’occasion de mieux connaître l’art,<br />
le quotidien et les traditions de « nos ancêtres les Gaulois ». E. F.<br />
En doublE pAgE SuivAnTE :<br />
carte blanche d’hakiMa el djoudi à<br />
Maurice greene,<br />
aka M. Sayyid de Antipop Consortium<br />
J’ai commencé à faire des images avec des photocopies vers la fin des années 1980, en utilisant BMX. J’étais un<br />
adolescent dans la banlieue de New York. à cette époque, Andy Jenkins, directeur artistique et rédacteur en chef de<br />
Fresylin Magazine de Los Angeles, m’a pris sous son aile. Il m’a fait travailler avec un collectif d’artistes, The Basement,<br />
qui n’a pas duré longtemps mais qui a mis le pied à l’étrier à des gens comme Spike Jonze, pour n’en citer qu’un. On a<br />
organisé une exposition dans une petite galerie du centre de la Californie.<br />
Pour que mon travail devienne crédible, il fallait que je fasse des études d’art. à ce moment-là, j’habitais Cleveland<br />
(Ohio). J’ai prétendu que j’étais étudiant au Cleveland Institute of Art, et j’ai commencé à lire tout ce que je pouvais à<br />
la bibliothèque, de Faith Ringgold à Michel Foucault. Et je peignais tout le temps. Ensuite, j’ai déménagé dans la région<br />
de Bay Area, et j’aidais à accrocher les toiles à la Asake Bomani Gallery de San Francisco. C’était l’époque, vers 1991-<br />
1992, où mes œuvres s’inspiraient de Dubuffet, de Basquiat et de Schnabel. Au cours de l’hiver 1993, je suis rentré à<br />
New York. Ma peinture avait beaucoup mûri.<br />
En 1995-1996, j’ai commencé à être totalement obsédé par le pouvoir expérimental de la musique hip-hop sur le monde<br />
de l’art. En 1997, j’ai rejoint le groupe de rap expérimental Antipop Consortium sous le pseudonyme de M. Sayyid.<br />
Neuf ans plus tard, j’ai commencé à apprendre à me servir de Flash et à faire des animations en 3D. L’œuvre digitale<br />
aussi a mûri. « Infinity and the last laugh » est une série de dessins qui utilise un moteur 3D, avec un software 2D.<br />
C’est un essai pour redéfinir la façon de faire des traces. Il y a quatorze tirages dont les formats varient. Nous savons<br />
tous ce qu’« avoir le dernier mot » veut dire. Je voulais créer la réponse émotionnelle à un sentiment universel : alors j’ai<br />
utilisé Samuel Jackson, acteur culte, et le personnage de BD Snagglepuss dans un décor Outer Space.<br />
« Si vous voulez sortir de l’histoire du dessin », vous devez trouver les outils et les procédés qui vous permettent de<br />
réaliser quelque chose de différent de ce que vous avez fait jusqu’alors ».<br />
Extrait d’une conversation avec Richard Serra, au Metropolitan Museum of Art, le 13 avril 2011.<br />
Extrait de la série « Infinity and the Last Laugh »<br />
Plus d’infos : http://electricarmz.com
15 voyages<br />
artistiques<br />
insolites<br />
un incroyable musée où les designers<br />
s’amusent avec la mosaïque, une île<br />
des Canaries réaménagée par un artiste,<br />
des jardins fous… De Bogotá à tel-aviv<br />
en passant par ljubljana, quinze idées<br />
de voyages artistiques inédits.
46<br />
Lanzarote<br />
l'ile remodelée<br />
par son artiste<br />
50<br />
dossier<br />
vénétie<br />
petits carreaux,<br />
grands designers<br />
53<br />
bogotÁ<br />
Renoir et degas,<br />
au bout des andes<br />
54<br />
ljubljana<br />
le terrain de jeu<br />
d'un gaudí slovène<br />
57<br />
europe<br />
petites folies et<br />
jardins secrets<br />
60<br />
tel-aviv<br />
l'art en<br />
effervescence<br />
64<br />
saint petersburg<br />
En floride, 2000 dalí<br />
les pieds dans l'eau<br />
67<br />
ile-de-france<br />
pas vu, paris<br />
Dans la banlieue de<br />
Vicenze, design et mosaïque<br />
font bon ménage, p. 50
mai 2012 ¬ ARTS maGaZiNE ¬ PaGE 51<br />
Voyages insolites • dossier<br />
VÉNÉTIE<br />
Petits carreaux,<br />
grands designers<br />
À quelques encablures de Vicence, les plus grands designers<br />
de la planète se sont amusés à créer les œuvres les plus<br />
délirantes qui soient avec un matériau normalement utilisé…<br />
dans les salles de bains ou les piscines : la mosaïque de verre.<br />
éva Bensard texte<br />
Un Pinocchio géant, une théière digne de Gulliver, un<br />
fauteuil baroque, une voiture décapotable… Le point<br />
commun entre ces objets ? Ils sont tous réunis dans les<br />
salles de la fondation Bisazza, dans la banlieue de Vicence<br />
en Vénétie. Et ont tous été réalisés (oui, même la simili<br />
Ford Mustang) en carreaux de mosaïque. Longtemps<br />
confinée aux piscines de Miami ou aux coupoles des<br />
mosquées, la petite tesselle de verre démontre ici qu’elle<br />
peut servir de support aux créations les plus folles.<br />
L’idée ? Elle émane de Rossella et Piero Bisazza, qui<br />
depuis vingt ans ont repris les rênes de la société<br />
familiale, Bisazza. Leader dans la mosaïque de décoration,<br />
Bisazza s’est en effet lancée dans un mécénat<br />
aussi inattendu qu’audacieux, mettant ses fours et son<br />
savoir-faire à la disposition de designers superstars.<br />
L’Italien Alessandro Mendini, l’Espagnol Jaime Hayon,<br />
la Française Andrée Putman et, tout récemment, l’Anglais<br />
John Pawson ont ainsi vu leurs rêves les plus<br />
extravagants se transformer en sculptures miroitantes.<br />
Et à partir du 8 juin, ce sont les visiteurs qui vont pouvoir<br />
en profiter. Les créations XXL des s vedettes du<br />
design sont visibles dans les entrepôts historiques de<br />
l’entreprise, transformés en fondation. Sur 6 000 m 2 ,<br />
sols, murs, espaces d’accueil et toilettes sont tapissés de<br />
mosaïque, en décors muraux chamarrés ou en statues<br />
scintillantes. Le petit carré de verre ondoie et se plisse<br />
avec une souplesse déconcertante, se métamorphosant<br />
au gré des envies en vague géante (Fabio Novembre), en<br />
paravent (Patricia Urquiola), voire en… jet privé ( Jaime<br />
Hayon). Un véritable antidote à la morosité !<br />
2
mai 2012 ¬ aRtS maGaZiNE ¬ PaGE 61<br />
voyages insolites • dossier<br />
l’art en effervescence<br />
Une nouvelle aile pour le musée, des galeries à chaque coin de rue, une<br />
communauté artistique cosmopolite … tel-aviv la délurée est devenue<br />
en quelques années une place forte de l’art contemporain. visite<br />
d’une cité où l’on passe de la plage au musée sans complexe.<br />
texte et photos<br />
Ludovic Bischoff<br />
tel-aviv<br />
1. le musée d’art<br />
Déjà très riche en art<br />
moderne (Van Gogh,<br />
Mondrian, Matisse…),<br />
le musée vient d’ouvrir<br />
une aile contemporaine<br />
à l’architecture<br />
impressionnante.<br />
2. la fontaine Fire Water<br />
La sculpture de Yaacov<br />
Agam est l’un des points<br />
de rendez-vous de Tel-Aviv.<br />
L’artiste a aussi conçu<br />
la façade de l’hôtel Dan,<br />
en bord de mer.<br />
Des musées exposant les artistes les plus renommés du<br />
monde côtoient des galeries dénichant les talents de<br />
demain. Des sculptures conceptuelles, œuvre des créateurs<br />
pointus, sont disséminées dans les rues où n’importe<br />
quel anonyme appose ses graffitis sur les murs.<br />
Des tours de verre high-tech jouxtent de vieilles maisons<br />
en ruines. Les ultra-orthodoxes vivent au milieu<br />
de la communauté gay la plus exubérante au monde.<br />
On circule facilement à vélo dans cette ville toute plate,<br />
mais les embouteillages sont parmi les pires de la planète…<br />
Bienvenue à Tel-Aviv, l’endroit où le balagan est<br />
un art de vivre ! Balagan ? Un mot hébreu utilisé par les<br />
chauffeurs de taxi pour désigner, avec tendresse, le chaos<br />
qui règne dans les rues de cette cité poussée trop vite<br />
sur le sable. Véritable melting-pot de toutes les cultures<br />
déversées sur ces rivages méditerranéens au rythme des<br />
diasporas (Europe de l’Est, Maghreb, Russie…), Tel-<br />
Aviv dégage une énergie créative qui attire une population<br />
jeune, bohème, intellectuelle, revendicative et possède<br />
cette foi dans le lendemain propre aux pionniers.<br />
Après New York ou Berlin, la capitale économique<br />
d’Israël s’impose donc comme un terreau fertile pour<br />
l’art, du plus convenu au plus inattendu.<br />
Mue spectaculaire au musée<br />
Premier arrêt, incontournable : le musée. Ouvert en<br />
1971, il propose une riche collection d’art moderne : de<br />
Monet à Modigliani, de Van Gogh, à Mondrian, sans<br />
compter Matisse ou Klimt… Le volet contemporain<br />
mérite aussi qu’on s’y attarde, à cause du Pavillon Helena<br />
Rubinstein (qui propose des expositions temporaires à<br />
la pointe), mais surtout pour la nouvelle aile qui vient<br />
2<br />
d’être inaugurée. Fruit du travail de l’architecte américain<br />
Preston Scott Cohen, cette structure ultramoderne<br />
tranche avec les salles plus classiques du bâtiment originel.<br />
Anguleux, rappelant parfois le patrimoine Bauhaus<br />
très présent à Tel-Aviv, le nouvel édifice permet d’échapper<br />
à la chaleur pour contempler la plus vaste collection<br />
d’artistes israéliens au monde. Bref, prévoyez un long<br />
moment pour faire le tour de ce lieu richissime.<br />
En sortant, faites un crochet par la place Diezengoff<br />
pour admirer la fontaine colorée (Fire Water) de<br />
Yaacov Agam. Cette figure de l’art cinétique, qui a étudié<br />
– comme la majeure partie des artistes israéliens –<br />
dans la réputée école d’art Bezalel de Jérusalem, a laissé<br />
son empreinte sur cette place située au cœur d’un quartier<br />
commerçant. Admirée ou détestée, sa fontaine
PaGE 62 ¬ aRtS maGaZiNE ¬ mai 2012<br />
dossier • voyages insolites<br />
3<br />
4 5<br />
3. L’Oranger suspendu<br />
Ran Morin a voulu symboliser<br />
le déracinement du peuple juif<br />
avec cette sculpture, installée<br />
dans Jaffa, représentant un<br />
oranger qui pousse dans une<br />
coque en terre cuite, hors sol.<br />
4. street art<br />
Cette co mmunauté,<br />
où toutes les sensibilités sont<br />
représentées (des graffeurs<br />
aux peintres de rue), est très<br />
active. Le hot spot se situe<br />
dans le quartier de Florentine.<br />
5. la Maison rokach<br />
La petite-fille du fondateur de<br />
Tel-Aviv a empli la demeure<br />
familiale de ses créations.<br />
est l’un des symboles arty de la ville. Récemment,<br />
un projet de déplacement a été évoqué, provoquant<br />
d’incroyables débats entre amateurs et détracteurs.<br />
Selon les dernières informations, la fontaine va être<br />
restaurée, mais demeura en place ! Cette issue n’est<br />
peut-être que temporaire, car les habitants de Tel-<br />
Aviv, toujours avides de nouveautés, ont un rapport<br />
très décomplexé avec l’art. « Ici, rien n’est jamais gravé<br />
dans le marbre. Si un bâtiment ou une œuvre ne plaît plus,<br />
elle sera détruite ou déplacée. C’est une approche qui peut<br />
choquer en Europe où l’on a un rapport très respectueux et<br />
conservateur avec l’art », confie l’artiste contemporaine<br />
Sigalit Landau, qui a installé son atelier dans le quartier<br />
des friches artistiques de Florentine, après avoir<br />
vécu et travaillé à Londres. Pour découvrir d’autres<br />
œuvres dans les rues, promenez-vous le long du boulevard<br />
Rothschild, les « Champs-Élysées » de Tel-Aviv.<br />
Ici et là, vous tomberez sur des sculptures, comme<br />
celle de Buky Schwartz, située juste devant l’échoppe<br />
du célèbre chocolatier Max Brenner. L’occasion d’une<br />
pause bien méritée…<br />
neve tzedek, le « Marais » de tel-aviv<br />
Cap maintenant au sud. En descendant le boulevard<br />
Rothschild, vous ne tarderez pas à atteindre le quartier<br />
de Neve Tzedek, sorte de « Marais » de la ville.<br />
Autrefois habité par les artistes qui avaient investi de<br />
vieilles maisons en ruine, c’est aujourd’hui le repaire de<br />
riches « bourgeois bohèmes » qui adorent les petites<br />
rues ombragées et l’atmosphère villageoise du lieu. Sans<br />
compter quelques musées intéressants, comme celui de<br />
Nahum Gutman, un peintre, illustrateur, écrivain et<br />
sculpteur israélien très célèbre ici. Débarqué d’Odessa<br />
à l’âge de 7 ans, il n’aura de cesse, de retranscrire la<br />
lumière, les couleurs et les charmes de l’Orient que ce<br />
jeune juif polonais découvrait pour la première fois.<br />
Tel-Aviv, cApiTAle mondiAle du BAuhAus<br />
Le Bauhaus ? LE style moderne en architecture<br />
et en design. Une philosophie sobre, fonctionnelle<br />
et géométrique, née en Allemagne dans les années<br />
1920… mais c’est à Tel- Aviv qu’on en trouve le plus<br />
d’exemples. On dénombre près de 4 000 immeubles<br />
Bauhaus, dont un millier classé par l’Unesco.<br />
Construits à l’origine pour apporter aux ouvriers et aux<br />
classes moyennes un fonctionnalisme améliorant la vie<br />
quotidienne, ces immeubles n’étaient pas à la mode<br />
lorsqu’ils ont été érigés. Beaucoup ont donc été laissés<br />
à l’abandon. Mais aujourd’hui, résider dans un immeuble<br />
Bauhaus réhabilité est du plus grand chic.
mai 2012 ¬ aRtS maGaZiNE ¬ PaGE 63<br />
voyages insolites • dossier<br />
Visiter son musée constitue une bonne introduction<br />
artistique au bouleversement qu’a provoqué l’arrivée,<br />
au début du XX e siècle, des immigrants juifs d’Europe.<br />
À quelques pas de là, voici la Maison Rokach, du nom<br />
d’un des fondateurs de Tel-Aviv. Le lien avec l’art ? Son<br />
arrière-petite-fille ! Céramiste, Lea Majaro-Mintz a<br />
restauré la demeure familiale pour y habiter et y exposer<br />
sa prolifique œuvre. On arpente aujourd’hui les<br />
différentes pièces qui sont remplies de poteries et de<br />
sculptures toutes plus originales les unes que les autres.<br />
Avec un peu de chance, vous croiserez lors de votre<br />
visite cette vieille dame, féministe avant l’heure.<br />
l’ancienne casbah s’est assagie<br />
Après Neve Tzedek, changement d’ambiance : vous<br />
voici à Jaffa. L’ancienne casbah arabe, ancêtre de la<br />
moderne Tel-Aviv, est devenue un lieu de promenade<br />
pour explorer de nombreuses galeries. Hier terrain<br />
alternatif, Jaffa est aujourd’hui bien sage et les vraies<br />
galeries sont souvent remplacées par des « boutiques<br />
d’art », même s’il en reste quelques-unes de la qualité,<br />
comme la Horace Richter Gallery. Mais les meilleures,<br />
telle la Stern Gallery sur Gordon Street, ont migré partout<br />
ailleurs dans la cité. Souvent en sous-sol, en retrait<br />
de la rue, elles se visitent sans formalisme. À Jaffa,<br />
après avoir admiré L’Oranger suspendu de Ran Morin,<br />
dirigez-vous vers le musée-maison d’Ilana Goor. Elle<br />
y expose sa propre collection d’objets et d’œuvres du<br />
monde entier, mais aussi ses créations. Véritable touche-à-tout<br />
autodidacte, Ilana Goor forge le métal<br />
pour en faire du mobilier ou des sculptures, elle peint,<br />
arrange et adapte différentes pièces pour réaliser des<br />
tableaux vivants. Indescriptible et surprenant.<br />
Dernière étape de ce marathon : direction les quais, en<br />
descendant la colline de Jaffa. Là, alors que les pêcheurs<br />
rentrent au port, vous découvrirez un espace encore<br />
brut et alternatif. Le Jaffa Salon of Art est le seul lieu<br />
de la ville qui expose dans un hangar sans fioritures des<br />
artistes palestiniens et israéliens. Un peu partout des<br />
graffitis, des dessins ou des collages ornent les murs.<br />
La scène street art est, elle aussi, très active, preuve<br />
supplémentaire de l’effervescence artistique de la ville.<br />
Les meilleurs spots ? Ils sont majoritairement regroupés<br />
dans le quartier de Florentine. Situé au sud, comme à<br />
New York, c’est une sorte de Soho en friche, constitué<br />
d’entrepôts au cœur desquels les jeunes se regroupent.<br />
Pour combien de temps encore ? Difficile à estimer,<br />
la fièvre immobilière qui règne à Tel-Aviv repoussant les<br />
artistes toujours plus loin au sud. Ce qui n’est peut-être<br />
pas une mauvaise chose car plus bas, se trouve Gaza.<br />
Le jour où les jeunes peintres et plasticiens israéliens<br />
s’installeront dans la « bande », alors une nouvelle page<br />
de l’histoire de ce pays s’écrira…<br />
6. la fresque de<br />
david Tartakover<br />
Artiste phare de la scène<br />
israélienne, il a composé ces<br />
céramiques qui racontent<br />
l’histoire du quartier de Neve<br />
Tzedek. à voir près<br />
du Centre Susan Dellal<br />
pour la danse et le théâtre.<br />
7. Plage et<br />
architecture moderne<br />
Symbole d’une ville<br />
où l’on passe de la détente<br />
à la culture, la plage<br />
est bordée de fleurons de<br />
l’architecture moderne,<br />
comme l’hôtel Dan et ses<br />
travées colorées.<br />
PRatique<br />
S’y rendre<br />
El Al et Air France<br />
desservent Tel-Aviv en vols<br />
directs (4 heures).<br />
Un hôtel<br />
Artplus hôtel est idéal pour<br />
découvrir le travail d’artistes<br />
contemporains israéliens (Zadok<br />
Ben David, Sigalit Landau…).<br />
35 Ben Yehuda street.<br />
www.atlas.co.il<br />
Deux restaurants<br />
Pour découvrir la gastronomie<br />
juive tripolitaine, aventurez-vous<br />
dans cette institution qu’est<br />
Docteur Shakshuka, à Jaffa.<br />
Goûteux, généreux… et bruyant !<br />
3 Beit Eshel street.<br />
Tél. : 03 518 65 60.<br />
Le Vicky-Cristina est un<br />
restaurant d’influence espagnole,<br />
situé dans une ancienne gare,<br />
maintenant investie par des<br />
boutiques et des restaurants.<br />
Complexe Hatachana.<br />
Tél. : 03 736 72 72.<br />
Deux visites guidées<br />
Tel-Aviv « street art ». Graffiti<br />
free guided tour, à 16 heures le<br />
vendredi. Rendez-vous 23 Elifelet<br />
street (devant le bar Norma Jean).<br />
Tel Aviv Bauhaus. Visite guidée<br />
gratuite, à 11 heures le samedi.<br />
Rendez-vous 45 boulevard<br />
Rothschild (devant le chocolatier<br />
Max Brenner).<br />
Un événément<br />
2012, c’est la Tel-Aviv Art Year,<br />
ouverture de la nouvelle aile du<br />
musée oblige !<br />
Du 15 au 19 mai : Fresh Paint Art<br />
Fair, la foire d’art contemporain qui<br />
révèle les jeunes talents israéliens.<br />
Plus d’infos : www. artyear.co.il<br />
6 7
PAGE 64 ¬ artS MAGAZINE ¬ MAI 2012<br />
dossier • Voyages insoliTes<br />
FLORIDE<br />
Saint PeterSburg<br />
en floride, 2 000 dalí<br />
les pieds dans l’eau<br />
Hors d’europe, la plus importante collection d’œuvres du<br />
génial moustachu se trouve… en floride. plus précisément<br />
à « saint pete », dans la lumineuse baie de Tampa. Visite<br />
guidée entre palmiers, marina et montres molles.<br />
texte et photos<br />
Alain Ammar<br />
à deux heures de route, Orlando et son Disney World.<br />
à perte de vue, les eaux bleues du Golfe du Mexique,<br />
sur lesquelles oscillent des centaines de yachts blancs.<br />
Bienvenue à Saint Petersburg, dans la baie de Tampa,<br />
sur la côte ouest de la Floride. Un cauchemar ensoleillé<br />
pour les amateurs de culture ? Pas si vite… Entre Mickey<br />
et palmiers, presque les pieds dans l’eau, se dresse au<br />
moins une bonne raison de s’attarder : le musée Dalí,<br />
son architecture spectaculaire et les 2 100 œuvres (dont<br />
96 peintures) de la plus fameuse moustache de l’histoire<br />
de l’art, sa plus importante collection de tableaux<br />
hors d’Europe. Une cohabitation vraiment surréaliste…<br />
Mais pas autant que l’histoire qui raconte comment ces<br />
centaines de Dalí se sont retrouvées ici.<br />
Car comment « The Dali », comme on l’appelle ici, a-t-il<br />
bien pu atterrir à « Saint Pete » ? Pas parce que le peintre<br />
aurait eu un quelconque lien avec la Floride : il n’y<br />
a jamais mis les pieds. La réponse est beaucoup plus<br />
romantique. En 1943, durant leur voyage de noces en<br />
Europe, un couple d’Américains, Reynolds et Eleanor<br />
Morse, acquiert sur un coup de cœur un tableau du<br />
maître. C’est le début de ce qui allait devenir une véritable<br />
passion. Le couple de Cleveland, qui a fait fortune<br />
dans l’industrie du plastique, va continuer d’acheter des<br />
œuvres de Salvador Dalí pendant les quatre décennies
MAI 2012 ¬ artS MAGAZINE ¬ PAGE 65<br />
Voyages insoliTes • dossier<br />
suivantes. Et nouer une véritable amitié avec le peintre<br />
et sa compagne, Gala. Les deux couples se rencontrent<br />
en 1944 à New York, car Dalí s’y est installé<br />
pour échapper au conflit qui ravage l’Europe. Ils vont<br />
se voir régulièrement pendant toute leur vie. Ce lien<br />
privilégié a permis aux Morse de constituer l’une des<br />
plus belles collections du XX e siècle.<br />
Bye bye ohio !<br />
Les œuvres de Dalí sont d’abord exposées dans la maison<br />
du couple à Cleveland, mais au fil des acquisitions, l’espace<br />
vient à manquer. Salvador Dalí encourage ses amis<br />
à ouvrir un musée à New York. En vain : les conjoints<br />
préfèrent leur bastion de l’Ohio. Un musée est enfin<br />
inauguré par le peintre en 1971 dans cet État du nordest<br />
des États-Unis. Le succès est retentissant, et le bâtiment<br />
devient vite trop petit pour les 1 400 œuvres que<br />
compte alors leur collection… et les foules qu’il draine.<br />
Le couple décide donc d’offrir « son trésor » au musée<br />
qui acceptera de le conserver dans son intégralité.<br />
L’affaire passionne l’Amérique, des dizaines de journaux<br />
en parlent. En lisant un article du Wall Street Journal,<br />
un avocat de Saint Petersburg mobilise les autorités de<br />
1. un géant dur et mou<br />
20000 mètres carrés,<br />
pour un coût de 36 millions<br />
de dollars. Le Dali Museum<br />
de Saint Petersburg,<br />
inauguré il y a un an,<br />
est reconnaissable à<br />
l’alternance de façades<br />
en béton brut et de<br />
boursouflures de verre.<br />
L’alliance du dur et<br />
du mou, comme dans<br />
une toile de Dalí.<br />
2. une vis sans fin<br />
L’escalier en spirale<br />
qui dessert tous les<br />
étages semble s’élancer<br />
sans fin vers le ciel.<br />
Surréaliste, non ?<br />
3. petits et grands<br />
chefs-d’œuvre<br />
De la monumentale<br />
Découverte de l’Amérique<br />
par Christophe Colomb<br />
(plus de 4 mètres de haut),<br />
aux œuvres les plus intimes,<br />
des toiles des débuts<br />
à celles des dernières<br />
années : les 2 000 œuvres<br />
du musée offrent une<br />
vision complète de l’univers<br />
de l’artiste catalan.<br />
cette petite ville de Floride. Coup de chance : aux yeux<br />
des Morse, la baie de la ville évoque celle de Cadaquès,<br />
le fief catalan de Dalí. Saint Pete emporte le morceau en<br />
1982. Fin de l’histoire ? Non, ça se complique !<br />
Situé au bord de l’eau, le musée Dalí est vulnérable.<br />
Chaque fois qu’un ouragan est annoncé – souvent ! –, il<br />
faut déménager les peintures dans un endroit sûr. Après<br />
des années d’études, un nouveau lieu est inauguré en janvier<br />
2011. Avec une adresse qui aurait enchanté notre<br />
mégalomane génie : 1 Dali Boulevard !<br />
une spectaculaire vague de verre<br />
Rien que l’architecture vaut le coup d’œil. Déjà, elle remplit<br />
son premier office : protéger l’inestimable collection<br />
des éléments. La structure aux allures de forteresse est<br />
conçue pour résister aux charges d’un vent d’une puissance<br />
de plus de 165 kilomètres/heure. Le toit fait 8 centimètres<br />
d’épaisseur, les murs en béton armé 18 centimètres…<br />
Les œuvres d’art sont situées au troisième étage,<br />
au-dessus de la zone inondable, ce qui les protège des<br />
lames de 10 mètres de haut. Surtout, ce nouveau Dali<br />
Museum de Saint Petersburg est l’œuvre d’un architecte<br />
qui en connaît un rayon côté musée : Yann Weymouth.<br />
1 2 3
PAGE 66 ¬ artS MAGAZINE ¬ MAI 2012<br />
dossier • Voyages insoliTes<br />
Membre d’une agence qui en a bâti quatre aux États-Unis<br />
ces six dernières années, Weymouth fut surtout l’assistant<br />
et le chef de projet d’I.M. Pei lors de la construction<br />
de la fameuse Pyramide du Louvre. à Saint Pete, il s’est<br />
déchaîné. L’édifice propose une sorte de symbiose entre<br />
deux éléments contradictoires : de hauts murs de béton<br />
brut, à angles droits, seulement colorés par la chaude<br />
lumière de Floride ; et enchâssée comme une excroissance<br />
dans ce cube, une vague ondulante de 1 062 triangles de<br />
verre. Combinaison du dur et du mou, du classicisme<br />
et de la fantaisie : une dualité qu’on retrouve souvent<br />
dans les œuvres du maître des lieux.<br />
Spectaculaire à l’extérieur, le musée l’est aussi à l’intérieur.<br />
D’abord par son atrium baigné de lumière, organisé<br />
autour d’un escalier en spirale qui semble tournoyer<br />
sans fin jusqu’aux cieux. Mais surtout pour ses<br />
collections : beaucoup de Dalí, et de toutes les époques.<br />
Essentiel pour comprendre le travail de ce caméléon qui<br />
évolua de ses premières huiles sur toile à Cadaquès aux<br />
grands tableaux de facture classique des années 1960-<br />
1970, en passant par ses périodes cubistes, impressionnistes<br />
et les débuts du surréalisme. On s’attarde devant<br />
d’immenses peintures telle La Découverte de l’Amérique<br />
par Christophe Colomb, on s’enchante que certains<br />
chefs-d’œuvre reproduits à peu près sur tous les supports<br />
soient ici. Comme Enfant géopolitique regardant la<br />
naissance de l’homme nouveau, représentant un homme<br />
s’extrayant d’un globe terrestre ovoïde. Montres molles,<br />
4<br />
œufs au plat et révérences aux maîtres anciens qui l’ont<br />
obsédé sa vie durant (avec la série de gravures inspirées<br />
des Caprices de Goya) : tout Dalí est là. Jusqu’à ces travaux<br />
plus intimes, à l’instar de ce sublime portrait en<br />
pied de Gala réalisé par Dalí en 1932 sur un minuscule<br />
carré de bois. Émouvant et romantique, il justifie à lui<br />
seul la visite de cet étonnant musée.<br />
4. dalí partout<br />
Situé sur le Dali Boulevard,<br />
le musée joue à fond la<br />
carte du génial Catalan.<br />
Même les bancs publics<br />
alentour ont un air familier…<br />
5. ambiance marine<br />
La baie de Tampa, aux yeux<br />
des donateurs du musée,<br />
rappelle celle de Cadaquès<br />
où Dalí a longtemps<br />
vécu. Mais l’atmosphère<br />
et l’ambiance, elles, sont<br />
clairement floridiennes.<br />
5<br />
Pratique<br />
S’y rendre<br />
Aucune compagnie ne dessert<br />
Tampa en direct de Charlesde-Gaulle.<br />
Escale obligatoire<br />
à Charlotte ou à Philadelphie,<br />
grâce aux lignes d’US Airways<br />
(la plus performante avec<br />
plusieurs connexions possibles).<br />
Tél. : 0810 63 22 22.<br />
www.usairways.fr<br />
Se renseigner<br />
www.visitstpeteclearwater.com<br />
Le musée<br />
1, Dali Boulevard. 10h-19h.<br />
10h-20h le jeu. 11h-19h le dim.<br />
7 $/21 $. Tél. : 00 1 727 823<br />
3767. http://thedali.org<br />
Un hôtel<br />
Le Renaissance Vinoy, un<br />
golf-resort 5 étoiles, a gardé<br />
sa patine des années 1920 et<br />
un décor moderne que n’aurait<br />
pas renié Philippe Starck.<br />
Jolies chambres avec balcon<br />
qui donnent sur le port de<br />
plaisance… Seul hic ?<br />
Le service n’est pas à la hauteur.<br />
501 5th Avenue NE.<br />
Tél. : 00 1 888 303 44 30.<br />
www.marriott.fr<br />
Un restaurant<br />
Le seul digne de ce nom : Le<br />
Cassis American Brasserie. Tenu<br />
par un Français, Philippe, il offre<br />
une carte éclectique et des plats<br />
« américains » avec la touche<br />
française. Bon rapport qualitéprix<br />
et service au point.<br />
170 Beach Drive NE.<br />
Tél. : 00 1 727 827 2927.<br />
www.cassisab.com<br />
À voir en plus<br />
Le Museum of Fine Arts<br />
possède une très jolie collection<br />
de peinture européenne des<br />
XIX e et XX e siècles, dont des<br />
impressionnistes (Monet, Corot,<br />
Renoir…), quelques Flamands<br />
et des salles consacrées à l’art<br />
précolombien, chinois et africain.<br />
255 Beach Drive NE.<br />
Tél. : 00 1 727 896-2667.<br />
http://fine-arts.org<br />
La Chihuly Collection. Centrée<br />
sur le travail de Dale Chihuly,<br />
un maître verrier natif de Seattle<br />
et qui s’est formé à Murano.<br />
Vases, lustres… D’une originalité<br />
à couper le souffle.<br />
719 Central avenue.<br />
Tél. : 00 1 727 822 7872.<br />
www.moreanartscenter.org
mai 2012 ¬ arTS maGaZiNE ¬ PaGE 67<br />
voyages insoLiTes • dossier<br />
Pas vu, Paris<br />
Du musée de Cluny au palais de Tokyo, vous pensez tout connaître de la<br />
capitale ? voici quelques gourmandises et un désert réservés aux initiés.<br />
Léo Pajon texte<br />
ile-de-france<br />
Des fresques de Delacroix de l’Assemblée aux<br />
graffitis de rue, des mondes cachés à explorer.<br />
L’assembLée naTionaLe<br />
Mais où peut-on voir, sans être bousculé, les plus grandes fresques<br />
d’Eugène Delacroix ? Dans la bibliothèque de l’Assemblée nationale,<br />
pardi ! Ces allégories et scènes historiques grandioses prirent huit<br />
ans de travail au peintre romantique. à quelques mètres de l’entrée :<br />
la rotonde Alechinsky, peinte par l’artiste belge, où se mélangent,<br />
dans un tourbillon de couleur, l’air, la terre, l’eau et le feu. à ne pas<br />
rater non plus, des trognes en terre cuite signées par Daumier au<br />
XIX e siècle… qui rappellent des hommes politiques d’aujourd’hui !<br />
S’y rendre: La visite est ouverte uniquement aux groupes invités<br />
par un député, ou à l’initiative d’associations ayant sollicité la présidence.<br />
La PeTiTe CeinTure<br />
L’accès à cette ancienne ligne de chemin de fer qui faisait le tour de<br />
Paris est illégal… vous voilà prévenus. Reste que l’on peut y rencontrer<br />
des promeneurs mais surtout des taggueurs et des graffeurs. Très<br />
fréquentée à la fin des années 1980 par les street artists, la Petite<br />
Ceinture change régulièrement de visage. Et l’on peut y retrouver les<br />
traces de peintres désormais reconnus (comme Jérôme Mesnager).<br />
S’y rendre: En longeant les grillages qui protègent les chemins de fer,<br />
vous ne tarderez pas à remarquer des passages improvisés…<br />
Le DéserT De reTz<br />
Longtemps invisible, puis vandalisé, ce parc créé au XVIII e siècle par<br />
François Racine de Monville, esprit des Lumières et architecte, abrite<br />
des pavillons tous plus étonnants les uns que les autres : pyramide, temple<br />
antique, maison chinoise… Ce lieu magique a été restauré en 2010.<br />
S’y rendre: Le désert se situe en forêt de Chambourcy. Les visites se font<br />
uniquement sur réservation les 2 e et 4 e samedis du mois. Tél.: 0139223137.
portrait<br />
daniel <strong>buren</strong>,<br />
le hussard sous<br />
la verrière<br />
75<br />
portrait<br />
anri sala<br />
monte le son<br />
80<br />
portrait<br />
cécile beau<br />
82<br />
exposition<br />
les maîtres<br />
du désordre<br />
88<br />
art en questions<br />
beauté animale<br />
au grand palais<br />
96<br />
anatomie<br />
peinture chinoise<br />
100<br />
portfolio<br />
les enluminures<br />
magazine70<br />
108<br />
portrait de ville<br />
rennes<br />
118<br />
enfants<br />
marc chagall<br />
Rayures, cabanes…<br />
À l’occasion de Monumenta<br />
au Grand Palais, Grand<br />
Portrait de Daniel Buren,<br />
page 70.
PAGE 70 ¬ arTS MAGAZINE ¬ MAI 2012<br />
portrait • daniel <strong>buren</strong><br />
Daniel Buren<br />
le hussard<br />
sous la verrière<br />
contre le marché de l’art, qui lui ouvre les bras.<br />
contre les musées du monde entier, qui l’exposent<br />
à haute dose. et même contre le public, qui va se<br />
presser au grand palais. depuis un bon demi-siècle,<br />
daniel <strong>buren</strong> est en conflit permanent avec les<br />
conventions du milieu artistique. et ça lui réussit…<br />
Alexia Guggémos texte<br />
Ne jamais rien faire comme tout le monde ? Avec<br />
Daniel Buren, ça commence dès l’entrée. Pour accéder<br />
à l’œuvre immersive qu’il a conçue pour Monumenta,<br />
la carte blanche offerte chaque printemps par le Grand<br />
Palais à un grand artiste contemporain, inutile d’essayer<br />
la porte principale. C’est par une entrée secondaire, sur<br />
le flanc nord du bâtiment, qu’on y pénètre. « Est-ce que<br />
vous rentreriez dans une cathédrale par le chœur ?»: première<br />
explication, rationnelle, à ce choix inhabituel. La<br />
seconde est plus féroce. « Je déteste cette entrée “pompier”,<br />
avec cette lourde colonnade et ses affreux angelots. »<br />
Froide logique et chaude aversion : avec Excentrique(s) :<br />
travail in situ (c’est le titre de son installation au<br />
Grand Palais), c’est à la fois tout le travail et toutes<br />
les contradictions de Daniel Buren qui sont concentrés.<br />
Inventeur de l’art in situ, sa démarche consiste<br />
à « révéler » l’espace dans lequel il installe son œuvre,<br />
spécifiquement pensée pour, et seulement pour ce<br />
lieu. Surtout, Buren goûte l’ironie d’être invité à exposer<br />
dans ce palais « consacré par la République à la gloire<br />
de l’art français », comme l’indique l’un de ses frontons.<br />
Contre l’art officiel, contre les conventions qui<br />
régissent le bon goût, et contre le marché de l’art et<br />
ses institutions : la carrière de Daniel Buren est une<br />
succession de combats. À la hussarde.<br />
Première escarmouche dès sa sortie de l’École nationale<br />
des métiers d’art à Paris, en 1960. L’adversaire ?<br />
La grande peinture, qu’il juge limitée et « monofocale ».<br />
Loin des hauts lieux du monde de l’art, c’est… dans un<br />
complexe hôtelier des îles Vierges (États-Unis) qu’il<br />
le tissu du scandale<br />
12 février 1971, au musée<br />
Guggenheim de New York,<br />
Daniel Buren place un tissu<br />
rayé de 20 mètres de haut<br />
dans le trou central.<br />
Les œuvres des autres<br />
artistes disparaissent<br />
derrière ce mur visuel,<br />
ce qui provoque leur colère<br />
et crée le scandale.<br />
docteur ès espace<br />
Le fil conducteur de<br />
l’œuvre que constitue<br />
depuis cinquante ans<br />
Daniel Buren ? Sa<br />
science de l’espace,<br />
disent ses admirateurs.
MAI 2012 ¬ arTS MAGAZINE ¬ PAGE 71<br />
daniel <strong>buren</strong> • portrait<br />
invente l’« in situ », ce travail en rapport avec le lieu<br />
où il s’expose. L’occasion d’un grand balayage ! « À<br />
20 ans, je me suis débarrassé de toutes les influences qui<br />
me constituaient en les évacuant par la pratique : une véritable<br />
catharsis !», confie-t-il. En neuf mois, il rejette les<br />
maîtres, s’affranchissant des « muralistes » mexicains<br />
et des génies de la figuration, Picasso, Matisse, Léger,<br />
Gauguin… L’utilisation des rayures de 8,7 centimètres<br />
de large naîtra, elle, quelques années plus tard, d’un<br />
déclic. Cet « outil visuel », tel qu’il le nomme, se fait<br />
d’abord draps de lit colorés, les bandes étant utilisées<br />
comme « cache » pour créer des réserves.<br />
Mais en se rendant au marché Saint-Pierre à Paris,<br />
en 1967, Buren remarque les tissus rayés des toiles de<br />
stores. Il a trouvé son mètre étalon. Une intuition qui<br />
suscite même l’admiration de « vrais » peintres, comme<br />
le Franco-Haïtien Hervé Télémaque : « À partir d’un<br />
postulat en apparence si stupide, et en se privant de la<br />
sensualité de la peinture, cet architecte-décorateur génial<br />
a inventé une science de l’espace ! » Une science que l’artiste,<br />
sûr de ses choix, n’a eu de cesse d’imposer avec<br />
insolence. « Buren, Mosset, Parmentier, Toroni vous<br />
conseillent de devenir intelligents ! », proclame-t-il ainsi
PAGE 72 ¬ arTS MAGAZINE ¬ MAI 2012<br />
portrait • daniel <strong>buren</strong><br />
lors du salon de la Jeune Peinture en 1967 où les quatre<br />
artistes, réunis sous le collectif BMPT, produisent chacun<br />
des toiles aux motifs répétitifs. Leur point commun<br />
: l’absence d’émotion. La critique est acerbe. « Une<br />
peinture aussi réduite n’est ni le tout ni le rien », peut-on<br />
lire dans la presse.<br />
en 1971, il est décroché du guggenheim<br />
L’inimitié du milieu artistique ? Non seulement Buren<br />
n’en a cure, mais il n’hésite à la provoquer. En 1969,<br />
la Kunsthalle de Berne organise une exposition devenue<br />
depuis culte : « Quand les attitudes deviennent<br />
forme ». Elle convoque le ban et l’arrière-ban des<br />
avant-gardes les plus révolutionnaires de l’époque…<br />
Mais pas Daniel Buren. Qu’à cela ne tienne ! La veille<br />
du vernissage, il colle des papiers à bandes rayées blanches<br />
et roses sur la plupart des panneaux publicitaires<br />
de la ville. De retour chez lui, il est brutalement réveillé<br />
par des coups de pied dans la porte. Deux policiers<br />
l’embarquent au poste de police pour dégradation d’espace<br />
public. « Où est la liberté de créer ? », lance-t-il.<br />
Son intervention défraye la chronique. Deux ans plus<br />
tard, c’est avec le musée Guggenheim de New York<br />
qu’il croise le fer. Invité à dialoguer avec l’architecture<br />
particulière du site, il utilise la célèbre hélice du hall<br />
d’entrée imaginée par Franck Lloyd Wright pour créer<br />
caissons lumineux<br />
En 1999, il s’intéresse<br />
à la lumière diffusée par<br />
les caissons et fait évoluer<br />
ses « Cabanes » éclatées,<br />
dont les premières datent<br />
de 1975. L’œuvre devient<br />
alors son propre site,<br />
en même temps que<br />
le lieu du mouvement<br />
et de la déambulation.<br />
colonnes<br />
Contrecarrer et inverser<br />
visuellement la courbure de<br />
la cour d’honneur du Palais<br />
Royal, à Paris : tel était<br />
l’effet souhaité par Buren,<br />
avec Les Deux Plateaux et<br />
son subtil jeu de polygones.<br />
quadrilatère éclaté<br />
Buren s’en prend à la forme<br />
carrée et la métamorphose<br />
en d’autres formes<br />
élémentaires. En octobre<br />
2010, il présente « Quand<br />
les carrés font des cercles<br />
et des triangles : Hautsreliefs<br />
situés », à la galerie<br />
Kamel Mennour.
MAI 2012 ¬ arTS MAGAZINE ¬ PAGE 73<br />
daniel <strong>buren</strong> • portrait<br />
arrêt sur image<br />
Ce cliché du travail in<br />
situ produit dans le cadre<br />
d’ArtBasel Miami Beach<br />
en 2006 est une photosouvenir.<br />
Daniel Buren<br />
nomme ainsi ces arrêts sur<br />
image de ses œuvres.<br />
Un point de vue qui<br />
n’a de but que celui<br />
de se remémorer.<br />
« Peinture/Sculpture », une toile rayée de 20 mètres<br />
de haut sur 10 mètres de large, qui coupe l’espace en<br />
deux. La dénonciation qu’il y fait de la centralisation<br />
du pouvoir ne plaît pas. Au point que l’institution<br />
fait décrocher l’installation avant le vernissage. Cette<br />
exclusion résonne comme une victoire pour celui que<br />
l’artiste minimaliste américain Donald Judd qualifiait<br />
alors avec mépris de « poseur de papier peint ».<br />
rebelle… mais courtisé<br />
Ses coups d’éclat répétés contre les musées n’ont pas<br />
empêché Daniel Buren d’exposer un peu partout dans<br />
le monde. Et le constat vaut également pour le marché<br />
de l’art. Un marché qu’il agace, et dont il refuse les<br />
codes. Comme celui de signer ses œuvres. « Une œuvre<br />
signée de moi ? ça ne peut être qu’un faux !», confie-t-il<br />
un jour au peintre Gérard Fromanger. Paradoxe : il<br />
est pourtant exposé dans 70 galeries de par le monde,<br />
et il produit une quinzaine d’œuvres par an, refusant<br />
de parler d’expositions. Depuis sept ans, c’est avec le<br />
galeriste Kamel Mennour, 47 ans, qu’il s’est associé.<br />
Un poids lourd parisien qui est tombé sous le charme<br />
de son incontrôlable artiste : « C’est un fin tacticien<br />
et un grand magicien. »<br />
Alors, à qui s’attaquer lorsque musées et galeries<br />
vous ouvrent grand les bras malgré vos provocations<br />
? Pourquoi pas au public… C’est chose faite en<br />
1986, lorsque Daniel Buren livre Les Deux Plateaux,<br />
son œuvre la plus connue. Réalisée au Palais Royal à<br />
Paris pour révéler l’espace magnifié de la cour d’honneur<br />
débarrassée de ses voitures, l’œuvre rapidement<br />
rebaptisée « les colonnes de Buren » par le grand<br />
public a suscité une polémique comme il y en a peu<br />
lorsqu’il s’agit d’art. Quand le président François<br />
Mitterrand retient le projet, un long combat s’engage<br />
contre les éléments et les hommes, un combat comme<br />
les apprécie l’artiste qui n’est jamais aussi heureux<br />
que lorsqu’il se confronte à l’adversité. « Vivement<br />
l’attentat ! » pouvait-on lire sur les palissades qui<br />
encerclaient le chantier. Mais la polémique occulte<br />
le propos de Buren, qui s’interroge sur les relations<br />
passants-espace public. Quelles places les attirent ?<br />
Quels lieux les repoussent ? En plaçant les colonnes les
PaGE 78 ¬ ArTs maGaZiNE ¬ mai 2012<br />
pOrTraiT<br />
ALAiN pAssArD<br />
un TrOis éTOiLes au Jardin<br />
100 % végétal. avec trois étoiles au Michelin obtenues avec une carte<br />
exclusivement légumière, alain passard fait office de pionnier<br />
de la gastronomie française. Chef, cultivateur, mais aussi plasticien<br />
à ses heures : rencontre avec un passionné de création.<br />
Isabelle Giovacchini INTERVIEW<br />
Les couleurs du colleur<br />
Véritables outils<br />
de composition culinaire,<br />
les collages de Passard<br />
traduisent sa passion<br />
du geste juste.<br />
un chef à la main verte<br />
Alain Passard est<br />
le seul chef à cuisiner les<br />
légumes de son jardin.<br />
Il en possède trois, choisis<br />
en fonction de leur terroir.<br />
Du potager à l’assiette, en passant par les collages qu’il<br />
a exposés récemment au musée Nissim de Camondo<br />
à Paris et à la chapelle Saint-Yves de Rennes, Alain<br />
Passard est un amoureux du légume. Il était donc<br />
logique qu’il préside le jury de la prochaine édition du<br />
Festival des jardins de Chaumont-sur-Loire. Et qu’on<br />
l’interroge sur son goût prononcé pour les jardins et la<br />
création en général.<br />
ArTs maGaZiNE • d’où vient ce profond intérêt pour les<br />
jardins ?<br />
ALAIN PASSARD • Dans les années 1990, L’Arpège, dont<br />
j’étais déjà le chef, était une rôtisserie qui a obtenu<br />
ses trois étoiles avec le tissu animal. En 1999, je me<br />
suis rendu compte que la cuisine animale ne me procurait<br />
plus d’émotion. J’ai alors décidé de changer<br />
tous les plats de la carte. Je ne savais pas encore que<br />
le légume allait rentrer dans ma vie de cuisinier. Avec<br />
lui, j’ai voulu mettre de la couleur dans la cuisine. Au<br />
même moment, une amie m’a demandé de reprendre
mai 2012 ¬ ArTs maGaZiNE ¬ PaGE 79<br />
aLain CéCiLe passard Beau • portrait<br />
à Chaumont-sur-Loire,<br />
un mariage de passion<br />
Entre le cuisinier cultivateur<br />
et fameux festival de jardins,<br />
l’union allait de soi.<br />
son domaine potager situé dans la Sarthe. J’ai tout de<br />
suite accepté. J’ai donc trouvé un jardinier sur place,<br />
Sylvain. Ensemble, nous avons recréé un écosystème<br />
de dix hectares. Depuis, j’ai créé deux autres potagers.<br />
Vous êtes cette année le président du jury du<br />
Festival des jardins de Chaumont-sur-Loire.<br />
Quel a été votre rôle ?<br />
Je pense que la directrice du domaine de Chaumont,<br />
Chantal Colleu-Dumont, a été sensible à mon aventure<br />
légumière, à ma démarche associée aux saisons<br />
et à ma créativité qui est directement liée à ce que<br />
l’on peut trouver dans les jardins. Personnellement, je<br />
cultive une réelle passion pour ces espaces, même si les<br />
miens ne sont pas floraux mais exclusivement potagers.<br />
Ce festival est un bel événement et je suis très<br />
heureux que la cuisine française y soit représentée à<br />
travers moi. En tant que président, j’ai donné le tempo.<br />
Cette année, la thématique proposée était « Jardin des<br />
délices, jardin des délires ». Il fallait donc que les projets<br />
soient gourmands. J’avais envie que les saisons<br />
soient respectées, que tous les sens soient sollicités.<br />
Je tenais aussi à ce que la main, la beauté du geste, soit<br />
présente dans chaque espace.<br />
Comment avez-vous abordé cette thématique ?<br />
Par la gourmandise ! Chantal Colleu-Dumond voulait<br />
absolument mettre en avant excès et jubilation. On a<br />
toujours tendance à freiner sur la créativité au jardin,<br />
alors que c’est justement un lieu où il ne doit pas y<br />
avoir d’interdit. La nature est d’elle-même luxuriante<br />
et délirante, je suis persuadé qu’elle a tout écrit. Il<br />
suffit de la respecter, de l’écouter pour être aussi<br />
gourmand qu’elle. Personnellement, je me suis aperçu<br />
que depuis que je respecte les saisons, je n’ai plus<br />
besoin de me soucier de ma créativité.<br />
Vous privilégiez une cuisine élaborée exclusivement<br />
à partir de produits de vos jardins. Cela<br />
a-t-il influencé votre rôle au sein de ce festival ?<br />
Oui. J’ai été ravi de mettre en avant le légume, mais<br />
aussi le métier de jardinier. Ce dernier est un artiste<br />
oublié, dont on parle trop peu. Mon objectif est que,<br />
d’ici une dizaine d’années, l’on évoque ces hommes<br />
comme des créateurs à part entière.<br />
à l’inverse, est-ce que votre présence a orienté<br />
les projets des candidats ?<br />
Curieusement, aucun d’entre eux n’a proposé de<br />
jardins légumiers. Par contre, le jury a réalisé son<br />
propre jardin, qui lui sera potager, en forme d’assiette<br />
contenant une recette.<br />
Vous avez aussi une production artistique, notamment<br />
de collage. Comment vous est venue<br />
cette envie d’art ?<br />
Avec un grand-père sculpteur, un père musicien, une<br />
mère passionnée de couture et une grand-mère cuisinière,<br />
j’ai grandi avec la création. Le geste était partout.<br />
Très tôt j’ai eu envie de me servir moi aussi de mes<br />
doigts. J’ai réalisé mes collages par hasard, avant même<br />
de savoir que j’en ferai Collages & recettes, un livre de<br />
cuisine (éd. Alternatives, 2010). Ils sont inspirés des<br />
recettes que j’ai créées. Souvent, je construis mes recettes<br />
autour d’une couleur, d’une tonalité, comme mon<br />
plat Émotion pourpre, un assemblage de mûres et de<br />
betteraves. On trouve au sein de la nature des familles<br />
colorées, je tente de les respecter pour en faire des collages<br />
visuels et gustatifs.<br />
Vous exposez ces collages dans l’exposition<br />
itinérante « Le Beau Geste ». Quelle est votre<br />
définition du beau geste ?<br />
C’est une jolie main, une danse, la grâce. Un geste peut<br />
être très baroque, appuyé, ou très épuré, éthéré. C’est<br />
ce dernier qui m’inspire le plus. Il y a dix ans, je faisais<br />
certains plats avec dix ou douze gestes. Aujourd’hui,<br />
deux gestes très précis suffisent.<br />
repères<br />
1956<br />
Naissance à<br />
La Guerche-de-Bretagne<br />
1980<br />
Début de sa carrière de chef<br />
au Duc d’Enghien, où il obtient<br />
une, puis deux étoiles<br />
1996<br />
Obtient trois étoiles au Michelin<br />
pour L’Arpège (Paris 7 e ),<br />
ouvert dix ans plus tôt<br />
2001<br />
Début de son aventure légumière<br />
2010<br />
Parution de Collage & recettes,<br />
et montage de l’exposition<br />
« Le Beau Geste »<br />
À voir<br />
Festival international des jardins,<br />
Chaumont-sur-Loire.<br />
Jusqu’au 21 octobre.<br />
www.domaine-chaumont.fr<br />
Pus d’infos : p. 129
Masque de Ranga<br />
1900-1950, Bali<br />
Masque Tomanik<br />
XIX e siècle, Alaska
mai 2012 ¬ ARTS maGaZiNE ¬ PaGE 83<br />
les maîtres du désordre • exposition<br />
chAoS eT SoRcelleRie<br />
au quai branly<br />
Maladie, guerre, famine… pour guérir les désordres du monde,<br />
on fait appel au chaman, le seul à même de négocier avec les<br />
forces occultes pour rétablir l’ordre. exotisme ? pas seulement.<br />
Comme le démontre la nouvelle exposition du musée du quai<br />
branly, les artistes de notre temps ont des pratiques similaires…<br />
Adrien Guilleminot texte<br />
Thomas Hirschhorn<br />
Outgrowth, 2005<br />
centre pompidou, Paris<br />
Ben Vautier<br />
Pas d’art sans désordre<br />
1991, coll. part.<br />
Derrière les DésorDres Du MonDe,<br />
Des puissanCes perturbatriCes<br />
Guerres, accidents, attentats… Dans Outgrowght (ci-dessus), l’artiste suisse Thomas Hirschhorn expose<br />
« une collection de désastres », selon le commissaire de l’exposition du Quai Branly, Jean de Loisy. Sur les globes<br />
terrestres alignés, des concrétions qui font songer à des tumeurs : le monde est malade, en désordre. Les responsables<br />
? Des puissances nommées Rangda, reine des sorcières de Bali (à gauche), ou Tomanik, le faiseur de<br />
ces vents glaciaux qui empêchent d’aller chassez chez les Inuits. Ces êtres supérieurs ne sont pas toujours maléfiques.<br />
Si Rangda est effectivement associée au chaos et à la maladie, Tomanik n’est que la manifestation d’un dieu<br />
courroucé par les infractions que les hommes ont commises. Et pour l’apaiser, il faut faire appel à un homme capable<br />
d’aller parler aux dieux, comprendre la source du problème, et éventuellement négocier, le chaman. Le désordre<br />
n’est pas le mal : il peut même être source de créativité, comme le rappelle avec humour l’incontournable Ben.
PaGE 86 ¬ ARTS maGaZiNE ¬ mai 2012<br />
exposition • les maîtres du désordre<br />
Masque d’exorcisme<br />
pour protéger<br />
les femmes enceintes<br />
XIX e siècle, bois et peinture,<br />
ethnie Matara, Sri Lanka<br />
Annette Messager<br />
Anatomie et En Balance,<br />
1998, coll. part.<br />
des femmes,<br />
CoMMe un rêve De pierre<br />
Expulser le mal, guérir la maladie : même combat. Une lutte qui prend, partout<br />
dans le monde, la forme d’un exorcisme. En Occident avec saint Michel terrassant<br />
le démon, au Sri Lanka avec le masque ci-dessous représentant 18 démons que<br />
l’exorciste invoque pour guérir les maladies de l’âme et du corps. Exorcisme encore<br />
avec cet effrayant masque sri lankais servant à protéger les femmes enceintes.<br />
Exorcisme toujours avec Annette Messager : dans Anatomie et En Balance, elle<br />
représente une sorte de réseau de veines et d’artères reliant des dessins d’organes.<br />
Une manière, pour l’artiste française, de s’approprier l’intérieur du corps qui,<br />
de son propre aveu, la terrifie.<br />
Josse Lieferinxe,<br />
Saint Mi chel<br />
terrassant le démon,<br />
fin XV e - début XVI e siècle,<br />
peinture sur bois<br />
Grand masque du démon<br />
Mana-Kola Sanniya<br />
avant 18 99,<br />
bois, pigments, poils,<br />
Pitt Rivers Museum, Oxford<br />
à voiR<br />
Les maîtres<br />
du désordre<br />
Jusqu’au 29 juillet<br />
Une fascinante rencontre<br />
entre les arts occidentaux,<br />
du Moyen Âge à nos jours,<br />
et les arts premiers. Où l’on<br />
découvre l’univers mystérieux<br />
des chamans, des fous, des<br />
guérisseurs de tous horizons,<br />
tout en prenant conscience des<br />
résonances que ces pratiques<br />
trouvent chez les artistes actuels.<br />
muSée du quAi bRAnly<br />
Informations : lire p. 125<br />
à liRe<br />
Les maîtres<br />
du désordre<br />
coéd. musée du quai branly-rmn<br />
ouvrage collectif sous<br />
la direction de Jean de Loisy,<br />
456 p., 50 €
mai 2012 ¬ ARTS maGaZiNE ¬ PaGE 87<br />
les maîtres du désordre • exposition<br />
un MonDe sens Dessus Dessous<br />
Cinq siècles et 10 000 kilomètres séparent cette peinture du<br />
Hollandais Jérôme Bosch et ce masque de carnaval bolivien. Ce qui<br />
les rapproche ? Une même inspiration fantasmagorique, et un thème<br />
commun : le carnaval. La toile de Bosch s’inspire de la Nef des Fous,<br />
du poète allemand Sébastian Brant, qui y décrit un bateau descendant<br />
le Rhin chargé de malades, de fous… En Allemagne et en Flandres,<br />
cette nef devint rapidement un élément central des carnavals, des<br />
festivités populaires qui se caractérisent par le défoulement et l’inversion<br />
des valeurs. Les humbles moquent les puissants, les fous et les<br />
clowns deviennent respectables… Un joyeux désordre encadré pour<br />
que l’ordre renaisse. Typique de cette inversion des valeurs, le masque<br />
de China Supay : un personnage à l’origine associé au diable, mais<br />
qui joue dans les carnavals de Bolivie un rôle éminemment positif.<br />
Jérôme Bosch, Le Concert dans l’œuf, 1561, huile sur bois<br />
Masque de China Supay, début du XX e siècle, plâtre polychrome, Bolivie
PAGE 108 ¬ ARTS MAGAZINE ¬ MAI 2012<br />
portrait de ville
MAI 2012 ¬ ARTS MAGAZINE ¬ PAGE 109<br />
portrait de ville<br />
RenneS<br />
de l’ombre<br />
à la lumière<br />
deux grands événements animeront la rennes<br />
des arts plastiques en 2012 : l’ouverture de son<br />
nouveau Frac, en juillet, et la troisième édition<br />
de sa biennale, à l’automne. de quoi mettre<br />
en lumière une ville qui a plutôt l’habitude<br />
de cultiver ses atouts dans la discrétion ?<br />
Volker Saux texte<br />
Sur ce dessin d’architecte,<br />
une vue du Frac<br />
qui ouvrira ses portes à l’été.
PAGE 112 ¬ ARTS MAGAZINE ¬ MAI 2012<br />
portrait de ville • rennes<br />
les lieux phares<br />
de la petite galerie étudiante au Frac<br />
flambant neuf, la scène artistique rennaise<br />
est aussi riche que disparate. une sélection<br />
de lieux à arpenter pour la défricher.<br />
a. la Criée<br />
Ce centre d’art installé dans les halles centrales<br />
montre des expositions d’artistes français et internationaux,<br />
comme en mai le photographe Allan<br />
Sekula, puis en été Romain Louvel. Il a aussi<br />
une face moins visible : soutien à la production,<br />
actions dans des écoles ou des hôpitaux, coopérations<br />
avec d’autres lieux à Rennes et en Europe…<br />
Place Honoré-Commeurec.<br />
Tél. : 02 23 62 25 10. www.criee.org<br />
b. les Champs libres<br />
Cet étonnant bâtiment signé Christian de<br />
Portzamparc offre, entre autres, un beau musée<br />
de Bretagne et des expositions temporaires :<br />
les photos de Pierre de Vallombreuse, jusqu’en<br />
septembre, et « Reflet de Bretagne : 160 ans de<br />
photographie », de juin à janvier.<br />
10, cours des Alliés.<br />
Tél. : 02 23 40 66 00. www.leschampslibres.fr<br />
D<br />
C. le musée des beaux-arts<br />
Son austère façade cache quelques trésors de<br />
Rubens, de La Tour, Picasso… Côté expositions,<br />
cet été : les dessins de la collection Adrien (du<br />
XVI e au XVII e siècle) et « Nostalgie du Soleil<br />
levant », un choix de kimonos et d’estampes du<br />
Japon. Ainsi que le nouveau cabinet de curiosités<br />
du marquis de Robien (1698-1756), le collectionneur<br />
auquel le musée doit ses richesses.<br />
20, quai Émile-Zola.<br />
Tél. : 02 23 62 17 45. www.mbar.org<br />
d. 40mcube<br />
Cet espace d’art contemporain défriche la scène<br />
émergente, invitant des artistes à réaliser un projet<br />
d’exposition dans ses 170 m 2 sous verrière.<br />
Jusqu’au 23 juin, on y verra un projet du duo
MAI 2012 ¬ ARTS MAGAZINE ¬ PAGE 113<br />
rennes • portrait de ville<br />
parisien Naïs Calmettes et Rémi Dupeyrat.<br />
48, avenue Sergent-Maginot.<br />
Tél. : 02 90 09 64 11. www.40mcube.org<br />
e. dma galerie<br />
Une galerie alternative fondée il y a quatre ans<br />
comme vitrine pour les acteurs bretons du design.<br />
Elle accueille aussi art contemporain, graphisme,<br />
création numérique, scène rennaise de l’art urbain<br />
(Frères Ripoulain, Mardinoir, Poch, etc.)…<br />
23, rue de Châteaudun.<br />
Tél. : 02 99 87 20 10. www.dmagalerie.com<br />
F. la galerie oniris<br />
Elle défend notamment les figures de l’art abstrait<br />
français, comme Geneviève Asse (qui y expose<br />
jusqu’au 26 mai) et François Morellet (de juin à<br />
septembre). Non loin, au 22, rue Hoche, on remarque<br />
aussi la nouvelle galerie Clouard, avec une<br />
dizaine d’artistes dont Rancillac, Honegger…<br />
38, rue d’Antrain.<br />
Tél. : 02 99 36 46 06. www.galerie-oniris.fr<br />
g. standards expositions<br />
Ce petit lieu, ouvert en 2011, est géré par des étudiants<br />
de l’École d’art de Bretagne, qui le soutient,<br />
mais aussi de l’université Rennes-2.<br />
2, rue des Portes-Mordelaises.<br />
www.standards-expositions.com<br />
h. l’université rennes-2<br />
Sa galerie Art & Essai montre jusqu’à début juin<br />
les déroutantes images de camouflage urbain de la<br />
Néerlandaise Desiree Palmen. D’autres lieux du<br />
campus sont dédiés aux arts : la Chambre claire<br />
pour la photo, le Cabinet du livre d’artiste…<br />
Place du recteur Henri-Le-Moal.<br />
Tél. : 02 99 14 11 42. www.univ-rennes2.fr<br />
I<br />
H<br />
Université<br />
Rennes 2<br />
VILLEJEAN<br />
CLEUNAY<br />
Bd St-Jean-Baptiste de la Salle<br />
J<br />
Rue de St-Brieuc<br />
Boulevard Voltaire<br />
C.H.U.<br />
DINAN-<br />
ST-MALO<br />
Ille<br />
Boulevard de Verdun<br />
RENNES<br />
Mail F. Mitterrand<br />
COLOMBIER<br />
A<br />
C<br />
Boulevard de Chézy<br />
Rue Saint-Martin<br />
A<br />
F<br />
Palais<br />
du Parlement<br />
VIEUX<br />
RENNES<br />
G<br />
Mairie<br />
Quai Duquay-<br />
Trouin<br />
Place de<br />
Bretagne<br />
Boulevard de la Tour d’’Auvergne<br />
Rue du Colombier<br />
Quai<br />
Châteaubriand<br />
Bd de la Liberté<br />
K<br />
Rue d’Antrain<br />
Rue Gambetta<br />
C<br />
B<br />
Quai<br />
de Richemont<br />
Av. Jean Janvier<br />
G<br />
Gare<br />
Bd de Sévigné<br />
Boulevard de la Duchesse<br />
Parc<br />
du Thabor<br />
Rue de Paris<br />
Rue St-Hélier<br />
Boulevard Solférino<br />
Rue de Fougères<br />
i. le nouveau Frac bretagne<br />
Inauguré le 6 juillet, les 1 000 m 2 du nouveau<br />
« phare de l’art contemporain » accueilleront cet<br />
été une exposition basée sur la collection du Frac,<br />
et à l’automne une partie de la biennale.<br />
Avenue André-Mussat.<br />
Tél. : 02 99 37 37 93. www.fracbretagne.fr<br />
J. la galerie mica<br />
Au beau milieu des magasins de la « route du<br />
meuble », elle mêle design et art contemporain,<br />
artistes confirmés (la designer Matali Crasset cet<br />
hiver) et jeunes pousses.<br />
Route du meuble « La Brosse », Saint-Grégoire.<br />
Tél. : 09 79 09 17 31. www.espace-mica.com<br />
k. le Carré d’art<br />
En périphérie de Rennes, une galerie municipale<br />
qui se distingue par son orientation 100 % photo.<br />
1, rue de la Conterie, Chartres-de-Bretagne.<br />
Tél. : 02 99 77 13 27. www.galerielecarredart.fr<br />
B<br />
THABOR-PARIS<br />
ST-HÉLIER<br />
Anne<br />
E<br />
Bd R. Laennec<br />
D<br />
Bd<br />
Volney<br />
250 m<br />
Rue de Paris<br />
Vilaine<br />
Boulevard de Metz<br />
Av. Aristide Briand<br />
Av. du Sergent Maginot<br />
Boulevard de Strasbourg
agenda<br />
124<br />
ile-de-France<br />
128<br />
ouest<br />
131<br />
nord<br />
134<br />
Est<br />
137<br />
Sud-Est<br />
140<br />
Sud-Ouest<br />
Nos correspondants<br />
Ile-de-France :<br />
émilie Formoso<br />
emilie.formoso@artsmag.fr<br />
Nord : Gaëtane Deljurie<br />
gaetane.deljurie@artsmag.fr<br />
Ouest : Lénaïc Gravis<br />
lenaic.gravis@artsmag.fr<br />
Est : Volker Saux<br />
volker.saux@artsmag.fr<br />
Sud-Est : Éva Bensard<br />
eva.bensard@artsmag.fr<br />
Sud-Ouest : Saskia Leblon<br />
saskia.leblon@artsmag.fr<br />
Pour voir ces Ménines<br />
peintes par Louis Cane,<br />
rendez-vous à Nice, p.138
PAGE 124 ¬ ARTS MAGAZINE ¬ MAI 2012<br />
aGenda<br />
iLe-de-france<br />
Auvers-sur-Oise<br />
Pontoise<br />
Mantes-la-Jolie<br />
Rambouillet<br />
10 km<br />
Clamart<br />
Versailles<br />
Sceaux<br />
Limours<br />
Étampes<br />
Paris 1 er<br />
Livre/Louvre. Jean-<br />
Philippe Toussaint<br />
InstallatIon, photo XXI e<br />
Jusqu’au 11 JuIn<br />
Après Le Clézio, le musée<br />
du Louvre donne la parole<br />
à Jean-Philippe Toussaint.<br />
L’occasion pour l’écrivain,<br />
cinéaste et artiste, de rendre<br />
« un hommage visuel aux<br />
livres », le temps d’une expo.<br />
La littérature constitue en<br />
effet le fil rouge qui relie<br />
installations et photos, dont<br />
deux compositions monumentales,<br />
conçues spécialement<br />
par Toussaint. Pour<br />
leur faire écho, la présentation<br />
de deux ouvrages exceptionnels<br />
: La Divine Comédie<br />
de Dante et le manuscrit original<br />
d’En attendant Godot,<br />
de Samuel Beckett.<br />
Musée du Louvre. 9h-18h (sf mar.).<br />
9h-21h45 les mer. et ven. 10 €.<br />
tél. : 01 40 20 53 17. www.louvre.fr<br />
Arpajon<br />
un peu de terre<br />
sur la peau<br />
BIJouX XXI e<br />
Jusqu’au 19 août<br />
La céramique révolutionne<br />
le bijou ! C’est le constat qu’a<br />
fait le musée des Arts décoratifs,<br />
avec la collaboration<br />
de la fondation d’entreprise<br />
Bernardaud, en confiant à<br />
18 jeunes créateurs la réalisation<br />
de bijoux utilisant ce<br />
matériau a priori surprenant.<br />
Saint-Denis Saint-Denis<br />
Paris<br />
Ivry-sur-Seine<br />
Créteil<br />
Évry<br />
Bobigny<br />
Meaux<br />
Fontainebleau<br />
Melun<br />
Boucles d’oreille, colliers,<br />
bagues… témoignent Nemours de<br />
l’inventivité dont ces artistes<br />
contemporains ont fait<br />
preuve pour se réapproprier<br />
la céramique. Une réflexion<br />
qui dépasse le simple cadre<br />
des arts décoratifs, comme le<br />
montre La Dot, une installation<br />
de Marie Pendariès.<br />
Musée des arTs décoraTifs.<br />
107, rue de rIvolI. 11h-18h (sf lun).<br />
11h-21h le Jeu. 8 €/9,50 €.<br />
tél. : 01 4455 57 50.<br />
www.lesartsdecoratIfs.fr<br />
Paris 2 e<br />
Joel-Peter Witkin.<br />
enfer ou ciel,<br />
qu’importe ?<br />
photo XX e -XXI e<br />
Jusqu’au 1 er JuIllet<br />
Chez l’Américain Joel-Peter<br />
Witkin (né en 1939), le<br />
corps est dénudé, abîmé,<br />
Coulommiers<br />
torturé. L’artiste photographie<br />
ce que la La chair Ferté- a de<br />
plus sombre et Gaucher<br />
troublant,<br />
de l’hermaphrodisme à la<br />
mort, de la mutilation à la<br />
sexualité extrême, mais sans<br />
voyeurisme. Car Witkin<br />
Provins<br />
travaille ses photographies<br />
comme des bijoux où rien<br />
n’est laissé au hasard, du<br />
choix de la pose du modèle<br />
au traitement du négatif,<br />
qu’il gratte, découpe ou<br />
repeint. De cette œuvre<br />
singulière, la BnF expose<br />
85 tirages, auxquels font<br />
écho 45 gravures de la<br />
Renaissance au XX e siècle,<br />
en hommage à la passion du<br />
photographe pour les arts<br />
classique et moderne.<br />
Bnf richeLieu. galerIe mansart,<br />
5, rue vIvIenne. 10h-19h (sf lun.).<br />
12h-19h le dIm. 5 €/7 €.<br />
tél. : 01 53 79 59 59. www.Bnf.fr<br />
Paris 3 e<br />
dan Miller.<br />
Graphein<br />
dessIn XXI e Le Cateau<br />
Jusqu’au 19 maI<br />
« Graphein » signifie, en grec<br />
ancien, à la fois écrire et dessiner.<br />
Un mot qui entre donc<br />
en parfaite résonance avec<br />
l’œuvre de Dan Miller. Cet<br />
artiste, souffrant d’autisme<br />
profond, réalise en effet de<br />
manière obsessionnelle des<br />
compositions où les mots se<br />
superposent jusqu’à l’illisibilité.<br />
Utilisant le feutre, le pinceau,<br />
le stylo ou le crayon, il<br />
donne corps à des créations<br />
graphiques où l’écriture joue<br />
paradoxalement sur le cryptage<br />
et produit une accumulation<br />
de strates très denses.<br />
GaLerie chrisTian BersT.<br />
3-5, passage des gravIllIers.<br />
14h-19h (sf dIm. et lun.). gratuIt.<br />
tél. : 01 53 33 01 70.<br />
www.chrIstIanBerst.com<br />
sequentially<br />
Yours. elliott erwitt<br />
photo XX e<br />
Jusqu’au 19 maI<br />
Chaque photo d’Elliott<br />
Erwitt est un subtil mélange<br />
d’humour et de poésie.<br />
Il a l’art de saisir dans leur<br />
Amiens<br />
Manche<br />
fugacité des détails singuliers,<br />
des télescopages<br />
curieux, des attitudes burlesques.<br />
Avec cette exposition,<br />
la galerie Polka propose<br />
une nouvelle approche<br />
du travail du photographe.<br />
Démultipliant l’instant sous<br />
forme de séquences temporelles,<br />
les clichés de l’artiste<br />
donnent à voir l’avant et<br />
l’après de moments parfois<br />
célèbres, comme la robe de<br />
Marilyn Monroe se soulevant<br />
sur une bouche de<br />
métro, dans une sorte de<br />
clin d’œil taquin au mythe.<br />
GaLerie PoLka. 12, rue saIntgIlles.<br />
11h-19h30 (sf dIm. et lun.).<br />
gratuIt. tél. : 01 42 71 95 79.<br />
www.polkagalerIe.com<br />
eugène atget,<br />
Paris<br />
photo XIX e -XX e<br />
Jusqu’au 22 JuIllet<br />
De vieilles affiches tapissent<br />
les façades de guingois<br />
et les pavés suintent sous<br />
le brouillard humide et<br />
silencieux. Nous sommes à<br />
Paris, en 1898, dans la rue<br />
Hautefeuille photographiée<br />
par Eugène Atget (1857-<br />
1927). Cet artiste a réalisé<br />
au tournant du siècle un<br />
Paris 16 e<br />
Triennale<br />
InstallatIons XXI e<br />
du 20 avrIl au 26 août<br />
Le coup d’envoi du palais de Tokyo<br />
À l’heure de la mondialisation, où se fait l’art contemporain ?<br />
Quelle définition donner aujourd’hui d’un foyer créatif ? Les<br />
frontières artistiques ont-elles encore un sens ? Et quel portrait<br />
pourrait-on dresser de la scène « française » actuelle ?<br />
Autant de questions que se sont posées les commissaires<br />
de cette nouvelle Triennale, sous la houlette internationale<br />
du Nigérien Okwui Enwezor, organisateur de nombreuses<br />
manifestations internationales. L’opération, intitulée<br />
« Intense proximité », marque la réouverture du palais de<br />
Tokyo et propose, à cette occasion, de faire un état des lieux<br />
de la création contemporaine, examinée sous l’angle mouvant<br />
de la territorialité. Six autres institutions sont aussi associées<br />
au projet, et présenteront un programme d’expositions, de<br />
concerts et de rencontres en lien avec le thème central de<br />
la Triennale : Bétonsalon, le musée Galliera, le musée du<br />
Louvre, le Crédac d’Ivry, les Laboratoires d’Aubervilliers et<br />
« Instants chavirés » à Montreuil.<br />
PaLais de TokYo. 13, avenue du présIdent-wIlson. tél. : 01 47 23 54 01.<br />
www.palaIsdetokyo.com et www.latrIennale.org<br />
Belle idée pour un week-end Mérite le détour Si vous n’êtes pas loin Emmenez les enfants
MAI 2012 ¬ ARTS MAGAZINE ¬ PAGE 125<br />
aGenda • ile de france<br />
travail documentaire fondamental<br />
pour l’histoire<br />
des rues, des monuments et<br />
des petits métiers de la capitale.<br />
Le musée Carnavalet a<br />
sélectionné dans son fonds<br />
propre 183 clichés du photographe,<br />
exposés à côté<br />
d’un album de 43 tirages<br />
collectionnés par Man Ray,<br />
qui fit connaître son œuvre<br />
aux surréalistes.<br />
Musée carnavaLeT. 23, rue<br />
de sévIgné. 10h-18h (sf lun.).<br />
3,50 €/7 €. tél. : 01 44 59 58 58.<br />
www.carnavalet.parIs.fr<br />
Paris 4 e<br />
Barry X Ball<br />
sculpture XXI e<br />
Jusqu’au 16 maI<br />
Dans la lignée des portraits<br />
taillés dans la pierre qu’il<br />
réalise depuis une dizaine<br />
d’années, Barry X Ball présente<br />
à la galerie Obadia une<br />
nouvelle installation, née de<br />
sa collaboration avec l’artiste<br />
Matthew Barney. Empalés<br />
sur des barres métalliques<br />
comme des têtes-trophées,<br />
les portraits-Janus des deux<br />
hommes se font face, l’un en<br />
marbre noir, l’autre en marbre<br />
jaune. L’artiste joue sur<br />
l’écart entre l’impassibilité<br />
des visages qui se regardent<br />
et le grotesque de l’expression<br />
de ceux tournés vers l’extérieur.<br />
Il réinterprète ainsi, à<br />
sa manière à la fois brutale et<br />
ornementale, la longue tradition<br />
des portraits en marbre.<br />
GaLerie naThaLie oBadia. 3, rue<br />
du cloître saInt-merrI. 11h-19h<br />
(sf dIm). gratuIt. tél. : 01 4274 67 68.<br />
www.galerIe-oBadIa.com<br />
Paris 5 e<br />
Le corps<br />
découvert<br />
peInture, photo XIX e -XXI e<br />
Jusqu’au 15 JuIllet<br />
Le corps, et notamment le<br />
nu, n’est pas un thème que<br />
l’on associe spontanément<br />
aux arts du monde arabe.<br />
Pourtant, cette exposition<br />
montre que certains artistes<br />
se sont penchés sur sa représentation<br />
dès le XIX e siècle.<br />
En effet, un dialogue s’entame<br />
à cette époque avec les<br />
arts occidentaux, dont le nu<br />
est un sujet majeur. Autour<br />
de regroupements thématiques<br />
(la beauté, le corps<br />
souffrant…), l’exposition<br />
explore donc différentes<br />
facettes de cette création<br />
méconnue, à travers l’œuvre<br />
de nombreux artistes arabes<br />
d’hier et d’aujourd’hui.<br />
insTiTuT du Monde araBe. 1, rue<br />
des fossés-saInt-Bernard, place<br />
mohammed-v. 10h-18h (sf lun.).<br />
10h-19h les sam. et dIm. 6 €/8 €.<br />
tél. : 01 40 51 38 38.<br />
www.ImaraBe.org<br />
Paris 6 e<br />
Piero<br />
crommelynck graveur<br />
gravure XX e<br />
Jusqu’au 2 JuIn<br />
Attention, un artiste peut<br />
en cacher un autre ! Derrière<br />
les œuvres gravées de<br />
Picasso, Alechinsky, Viallat<br />
ou Masson, se cache l’exceptionnel<br />
talent de Piero<br />
Crommelynck (1934-2001).<br />
Son atelier, fondé en 1956,<br />
vit défiler la fine fleur artistique<br />
de l’époque et ne tarda<br />
pas à acquérir une renommée<br />
internationale. En<br />
hommage à ce maestro de<br />
la gravure, la galerie a choisi<br />
de présenter de nombreuses<br />
œuvres issues de sa collaboration<br />
fructueuse avec les<br />
plus grands artistes.<br />
GaLerie caTherine-houard.<br />
15, rue saInt-Benoît.<br />
11h-19h (sf dIm. et lun.).<br />
gratuIt. tél. : 0 9 54 20 21 49.<br />
www.catherInehouard.com<br />
Paris 7 e<br />
Les maîtres<br />
du désordre<br />
sculpture, oBJets,<br />
dessIn, photo,<br />
1000 av. J.-c.-XXI e<br />
Jusqu’au 29 JuIllet<br />
C’est le chaos au Quai<br />
Branly ! Le musée nous<br />
entraîne au beau milieu de<br />
la bataille qui oppose l’ordre<br />
et le désordre avec, comme<br />
guide, le « maître du désordre<br />
». Cet être marginal, qui<br />
a le pouvoir de communiquer<br />
avec les forces obscures<br />
et dangereuses, a pour mission<br />
de rétablir un équilibre<br />
perturbé (des moissons, de<br />
la société…). Les 340 objets<br />
exposés illustrent les mille et<br />
une facettes de ce désordre<br />
tantôt dévastateur, tantôt<br />
libératoire. Des œuvres auxquelles<br />
font écho les vidéos,<br />
installations, dessins et photographies<br />
d’artistes comme<br />
Picasso, Beuys, Basquiat ou<br />
Thomas Hirschhorn.<br />
Musée du quai BranLY. 37, quaI<br />
Branly. 11h-19h. 11h-21h du Jeu.<br />
au sam. 5 €/7 €. tél. : 01 56 61 70 00.<br />
www.quaIBranly.fr<br />
Paris 8 e<br />
salon du livre<br />
ancien<br />
lIvre, dessIn, estampe<br />
Xv e -XX e<br />
du 27 au 29 avrIl<br />
Rendez-vous des amateurs et<br />
des collectionneurs du monde<br />
entier, le Salon international<br />
du livre ancien, de l’estampe<br />
et du dessin occupe à nouveau<br />
la verrière du Grand<br />
Palais. Pour sa 24 e édition,<br />
150 exposants présenteront<br />
des œuvres et des ouvrages<br />
allant de la fin du Moyen Âge<br />
à nos jours. L’invité d’honneur<br />
est cette année la bibliothèque<br />
du barreau de Paris,<br />
dont les collections s’ouvrent<br />
exceptionnellement au public<br />
le temps du Salon. La BnF<br />
exposera, quant à elle, une<br />
sélection d’estampes rares<br />
ou insolites sur le thème des<br />
arts de la table, dont le célèbre<br />
Pantagruel de Gustave Doré<br />
(1832-1883).<br />
Paris 1 er<br />
Les Belles heures du duc de Berry<br />
enlumInures Xv e<br />
Jusqu’au 25 JuIn<br />
Chef-d’œuvre enluminé des frères de Limbourg<br />
Les frères de Limbourg ont enchanté la création d’enluminures<br />
du début du XV e siècle. C’est l’une de leurs plus<br />
belles réalisations, le manuscrit des Belles Heures du duc de<br />
Berry, qui est aujourd’hui offerte par le Louvre à la curiosité<br />
du visiteur. Commandés par le duc, frère du roi de France<br />
Charles V et bibliophile passionné, les 47 folios exposés ont<br />
été peints entre 1404 et 1408-1409. Ils illustrent principalement<br />
les Saintes Écritures et témoignent de la qualité esthétique<br />
et de la cohérence narrative atteintes alors par les trois<br />
artistes. Pour illustrer son contexte de production, le musée<br />
entoure ce manuscrit d’œuvres tout aussi exceptionnelles,<br />
comme le Parement de Narbonne, de Jean d’Orléans. Une<br />
exposition à ne pas rater, puisque le manuscrit retournera<br />
dans la Cloisters Collection de New York après sa présentation<br />
parisienne (lire p. 100).<br />
Musée du Louvre. 9h-18h (sf. mar.), 9h-21h45 les mer. et ven.<br />
10 €. tél. : 01 40 20 53 17. www.louvre.fr<br />
nef du Grand PaLais.<br />
avenue wInston-churchIll.<br />
11h-20h. 8 €. tél. : 01 441317 30.<br />
www.grandpalaIs.fr<br />
Le crépuscule<br />
des pharaons<br />
sculpture,<br />
oBJets XX e -III e av. J.-c.<br />
Jusqu’au 23 JuIllet<br />
Elle fut tour à tour sous<br />
domination libyenne,<br />
nubienne, perse, grecque<br />
puis romaine. Au cours<br />
de son dernier millénaire,<br />
l’Égypte pharaonique a<br />
connu de nombreux soubresauts<br />
politiques qui n’ont pas<br />
empêché l’art de s’épanouir<br />
avec vigueur et originalité.<br />
Cette production d’une<br />
grande qualité est au cœur<br />
de la nouvelle exposition du<br />
musée Jacquemart-André.<br />
Illustrant successivement la
PAGE 146 ¬ ARTS MAGAZINE ¬ MAI 2012<br />
releCture par JoChen Gerner<br />
Chaque mois, JoChen Gerner* déniChe dans les Cases d’un album de bd des œuvres de toutes époques.<br />
obJeCtif : dévoiler les « liens invisibles » qui relient la bande dessinée aux autres formes d’art.<br />
* Né en 1970 à Nancy, Jochen Gerner est dessinateur et auteur de bande dessinée. Son dernier livre, Abstraction (1941-1968),<br />
a été édité par L’Association en 2011. Il est représenté par la galerie Anne Barrault, à Paris. Pour en savoir plus : www.jochengerner.com
Du 19 octobre 2011 au 27 mai 2012
Caran d’Ache présente sa gamme inédite de pastels secs : les PASTEL PENCILS & CUBES.<br />
Avec ce lancement, la Maison crée le plus large nuancier de pastels secs déclinés dans<br />
deux médiums complémentaires ; 84 crayons et 84 cubes de couleurs identiques.<br />
Fabriquée dans ses ateliers genevois, cette nouvelle génération de pastels a été<br />
développée en étroite collaboration avec des Maîtres pastellistes internationaux.<br />
Caran d’Ache. Les Couleurs fabriquées à Genève depuis 1915.<br />
carandache.com