Plans séquences
La gazette des Reflets du Cinéma
Édition des 13 et 14 mars 2010
N°3
Entretien avec Patrice Leconte
Comment êtes-vous devenu cinéaste ?
Peut-on retracer un peu votre
parcours au début ?
Je vivais à Tours en province.
Mon père était très cinéphile et très
tôt j’avais envie de cinéma. Je suis
monté à Paris où je suis rentré à
l’IDHEC puis j’ai été assistant sur
différents tournages. Déjà durant mon
adolescence je tournais de petits films
amateurs puis des courts métrages, j’en
ai fait une vingtaine en tout et c’était
pour moi le meilleur apprentissage.
Dès le début ce n’était pas un passetemps,
je rêvais de cinéma et j’y
croyais et j’ai tout fait pour que ce
rêve devienne réalité. Mon père
nous emmenait, mon frère et moi,
voir des films dans les ciné-clubs.
C’était assez enquiquinant, car il
fallait se prosterner devant des
chefs-d’oeuvre comme La Dame
de Shanghai de Orson Welles qui
étaient loin de nous. J’ai compris
beaucoup plus tard que ces films
étaient formidables. Puis il y a eu
la Nouvelle Vague et c’était pour
moi un pas énorme, car en voyant
A bout de souffle de Jean-Luc
Godard et les films de François
Truffaut je me suis rendu compte
que mon rêve était possible et
que le cinéma se rapprochait de
moi et qu’on pouvait s’exprimer
librement. La Nouvelle Vague a été
un moment très important pour
moi.
Dans ce festival consacré au
cinéma français nous avons
choisi votre film Le Mari de la
coiffeuse, que pensez-vous de ce
choix ?
C’est un choix très heureux, car
dans ma filmographie c’est un des
films les plus appréciés par le public en
général. On pourrait penser que tout
le monde l’a vu, mais ce n’est en fait
pas le cas. C’est un film que j’aime
beaucoup, car il fonctionne beaucoup
sur des sensations et des émotions.
Comment est né le projet de ce film ?
Au départ, c’est une idée
microscopique composée de bribes
d’un scénario possible : une coiffeuse,
un salon de coiffure, des sentiments,
des odeurs, une histoire d’amour fou.
Je n’avançais pas beaucoup. Puis j’ai
rencontré un producteur de films
publicitaires qui souhaitait produire
des longs métrages et il voulait
impérativement commencer en faisant
un film avec moi. Je m’apprêtais à
Patrice Leconte
tourner Monsieur Hire et je n’avais
rien de particulier à lui proposer.
Devant son insistance je finis par lui
dire que j’ai quelques bribes d’idées
et lui donne quelques éléments. Il me
dit « Formidable ! Je le produis ». Du
coup je m’étais engagé à quelque chose
et j’étais obligé d’écrire un scénario à
partir de ces bribes. S’il n’y avait pas
eu cette rencontre et ce désir d’un
producteur, le film n’aurait peut-être
jamais existé.
Y a-t-il des éléments autobiographiques
dans Le mari de la coiffeuse ?
C’est un film qui ressemble à un
film autobiographique, mais c’est un
faux film autobiographique avec des
éléments autobiographiques : les slips
en laine renvoient à une situation
effectivement vécue dans l’enfance
et nous avons d’ailleurs utilisé au
tournage mes slips, car ils avaient
été conservés. Il y a aussi les
sentiments et les émotions qui sont
pour une part autobiographique,
mais pas les différentes péripéties
du récit. Mais j’aime beaucoup
aller chez le coiffeur et le mien est
une coiffeuse...
Le film raconte une histoire
d’amour fou et propose une idée
du couple qui se suffit à lui-même
et le salon de coiffure fonctionne
un peu comme une île où l’amour
est possible...
Je pense que le cinéma doit
rendre la vie plus belle et nous
entraîner ailleurs. Oui, ce film met
en scène un amour idéal, irréel.
Ce n’est pas réaliste, mais cela fait
rêver. Les femmes m’ont souvent
dit qu’elles aimeraient rencontrer
un homme amoureux d’elle
comme l’est Jean Rochefort dans
le film, et les hommes m’ont dit
qu’ils aimeraient beaucoup aimer
une femme comme Mathilde. Le
film prend le temps de la sensualité
et cela fait rêver. Aujourd’hui nous
sommes pressés et nous ne prenons
pas le temps de l’amour.
Comment avez-vous travaillé avec
Jean Rochefort ?
On s’était engueulé sur mon pre-
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mier film. Puis durant le tournage de
Tandem, nous nous sommes réconciliés
et à partir de là c’est une histoire
d’amour qui commence. Il y a une folie
chez lui que j’aime beaucoup. Le film
avait besoin de cette folie et cela lui
plaisait. Il était dingue des séquences
de danses orientales. Il est incroyable.
Il danse comme dansent
les enfants pendant
les mariages, sans
le moindre complexe et
sans avoir peur du ridicule.
Pour ne pas avoir
de complexes dans la
vie il faut soit être un
enfant, soit être Jean
Rochefort.
Pour conclure, comment
percevez-vous
l’évolution du cinéma
français de vos débuts
à aujourd’hui ?
Il a effectivement beaucoup évolué.
Je n’ai pas envie d’être de ceux qui
disent tout le temps que c’était mieux
avant, mais en même temps je ne peux
pas m’en empêcher, car je trouve que
les producteurs étaient meilleurs, plus
pertinents dans leurs goûts. C’est une
profession qui est devenue très frileuse
et cela génère des films de plus en plus
formatés. Je pense foncièrement que
l’Art est fait pour étonner et qu’il faut
produire des prototypes. Il faudrait
tout le temps être capable des prendre
des risques, être audacieux. Cette évolution
est très liée au partenariat avec
la télévision et c’est insupportable !
D’une manière générale la situation
n’est pas rigolote ni motivante et c’est
beaucoup plus dur qu’avant. Je ne suis
pas loin de penser qu’aujourd’hui je
ne pourrais ni faire Tandem ni faire
Le Mari de la coiffeuse, car on ne me
suivrait pas de tels projets, surtout les
télévisions. Les gens s’étonnent parfois
qu’avec la filmographie que j’ai déjà je
n’arrive pas à faire ce que je veux, mais
c’est vrai et il faut se bagarrer continuellement
contre un système qui veut
nous faire marcher au pas.
Entretien réalisé par Willy Durand
Les salles de cinéma en France
Après vous avoir fait rapport de
l’état de la production cinématographique
dans l’Hexagone, voici maintenant
un autre constat. Celui-ci vous
décrit le parc de projection cinématographique
français. Si la France a pu se
hisser parmi les nations les plus productrices
d’œuvres, c’est aussi parce
que le cinéma a une ampleur particulière
dans les familles et dans notre
culture.
Fréquentation
En effet, depuis des générations, les
Français sont friands de culture, et en
particulier de Cinéma. Même si la fréquentation
des salles obscures a baissé
depuis les années 50, la France est le
pays qui a le moins subi cette chute.
Cela lui permet de se situer aujourd’hui
à la seconde place du pays enregistrant
le plus d’entrées annuelles par habitant,
juste derrière les Etats-Unis, avec plus
de 3 films/habitant en 2008. Ce taux
de fréquentation national est toutefois
bien inférieur à celui en Île de France.
Les Parisiens semblent en effet les plus
gros amateurs des salles obscures avec
plus de 4,7 films vus par habitant en
2008, répartis en 1 600 000 séances.
En ce qui concerne notre région, les
Pays de la Loire se classent
6ème région française au
niveau du taux de fréquentation,
celui-ci s’élève à 2,77.
Les Mayennais semblent légèrement
moins cinéphiles.
En effet, la fréquentation de
notre département est inférieure
à la moyenne régionale
puisque les mayennais
ont vu en moyenne 2,04
films chacun, en plus de
18 000 séances, toujours
en 2008. Bien inférieur à la
Loire-Atlantique (3,84) et
ses 165 000 séances.
Nombre de salles
Si la France dispose d’un tel engouement
pour le cinéma, c’est aussi
grâce à son parc de salles de cinéma.
La France est en effet le pays européen
qui a le plus grand nombre de salles
de cinéma. Elles étaient au nombre de
5422 en 2008. Il existe 300 écrans en
Pays de Loire, ce qui place à nouveau
les Ligériens en 6è position nationale
au nombre de salles. Parmi ces 300,
la Mayenne représente seulement 7%
du total des écrans ligériens avec ses
21 écrans. Toutefois la Mayenne enregistre
610 000 entrées annuelles et
figure dans le top 5 National du département
qui réalise le meilleur pourcentage
d’entrées dans des salles classées
Art et Essai. Une belle performance
pour Atmosphères 53 qui est parvenu
à obtenir un partenariat avec toutes les
salles du département.
Si la Mayenne n’est pas un département
qui enregistre des affluences
record, c’est un département qui référence
une bonne diversité de programmation.
Celle-ci est permise par
la combinaison d’un grand complexe
cinématographique à Laval avec les
autres salles indépendantes du département.
Josué Binet
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Coup de projecteur
sur Anna Karina
Anna Karina (Hanne Karen
Blarke Bayer de son vrai nom), née
en 1940 au Danemark, est une actrice
chanteuse et écrivaine. Elle
commence sa carrière en chantant
dans des cabarets, en travaillant
comme mannequin ou en tournant
dans des publicités. Elle débarque
à Paris à 17 ans. Elle rencontre de
nombreuses personnes comme
Coco Chanel. Elle se marie quatre
fois avec Jean-Luc Godard, Pierre
Fabre, Daniel Duval et Dennis
Berry. Dans sa carrière, elle a tourné
dans plus d’une cinquantaine de
films, quelques courts métrages et
films télévisés, et a aussi participé
à des pièces de théâtres, enregistré
des chansons et écrit des livres. Sa
carrière a été bien menée.
Coup de coeur
Pour le festival des Reflets du
cinéma édition 2010, on la retrouve
dans trois films : Pierrot le fou, réalisé
par Jean-Luc Godard, où elle
interprète Marianne Renoir, une
baby-sitter qui vient garder des enfants
pour un ex-flirt avec lequel
elle se trouve embarqué pour le
sud de la France, dans un grand périple
où se mêleront trafic d’armes,
complots politiques, rencontres incongrues…
Cléo de 5 à 7 réalisé par
Agnès Varda et dans La Religieuse
réalisé par Jacques Rivette.
Laure Moulin
Retrouvez Anna Karina dans :
— Pierrot le fou le lundi 15
mars à Mayenne, mardi 16 mars
à Gorron, mercredi 17 mars à
Château-Gontier et vendredi 19
mars à Évron.
— Cléo de 5 à 7 le mardi 16
mars à Laval et dimanche 21 mars
à Château-Gontier.
— La Religieuse le dimanche
14 mars à Mayenne et lundi 15
mars à Laval.
Liberté
par Tony Gatlif
N’avez-vous jamais rêvé de
partir sur les routes libres ? Vagabonder
comme bon vous semble ?
Vivre avec les personnes qui vous
sont chères, au rythme de la musique
? Vous contenter du strict
minimum ? Et bien voilà comment
vivent les Roms.
Ce film retrace l’histoire d’une
famille tsigane pendant la Seconde
Guerre mondiale, qui malgré les
persécutions qu’elle subit veut rester
libre. Comment vivre face aux
persécutions de la police de Vichy,
de la Gestapo et du mépris des
gens ?
Mais quand on a la chance de
croiser sur son chemin un maire
et une institutrice pas comme les
autres, beaucoup de choses deviennent
réalisables. Théodore
et Mademoiselle Lundi vont tout
mettre en oeuvre pour sauver cette
famille de tsiganes et P’tit Claude,
neuf ans, dont les parents ont disparu
depuis le début
de la guerre.
Tony Gatlif nous
offre par ce film,
un peu de bonheur,
d’amour et de soif
de vie. Les tsiganes
font partis des
grands oubliés de
cette guerre, et quel
plus bel hommage
peut-on leur rendre
que de leur offrir ce
film.
En agrémentant son oeuvre de
musique tsigane (réalisé par Delphine
Mantoulet et Tony Gatlif luimême),
Gatlif arrive à en chasser
le côté parfois triste et grave, pour
laisser place à l’humour et à la poésie.
Mais ce film a aussi une face cachée.
Il met en avant la participation
de la police française à la traque et
à la persécution de ce peuple.
En bref, un film captivant, parfois
triste, mais
qui nous donne
le sourire et nous
ravit les oreilles.
Une envie de liberté
s’empare
alors de nous
« Libre ! Je veux
être libre ! »...
Margaux Lucienne
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Programmation
Laval - Théâtre (Rotonde)
9 h 30 - La diffusion et l’action culturelles
Table ronde proposée par l’OPCAL
Laval - Cinéville
13 h 45 - 800 km de différence
16 h 15 - Liberté
19 h 15 - Ce vieux rève qui bouge
21 h 15 - Les Abysses
Invité : Pierre Rissient
Samedi 13 mars
LAVAL - THÉÂTRE (salle B.Hendricks) :Musique et
cinéma
17 h - Concert : Compositeurs français demusique de
films
Orchestre symphonique de la Haute Mayenne
18 h 15 - Ciné-concert sur des films de GeorgesMéliès
par Marie-Hélène et Lawrence Lehérissey
Dimanche 14 mars
Laval - Cinéville
11 h 15 - Carrément à l’ouest
13 h 45 - Buffet froid
16 h 15 - Courts métrages de Florence Miailhe
18 h - Dernier Maquis
20 h 45 - White Material
Avant-première
Mayenne - Le Vox
14 h 45 - Angel
17 h 15 - Persécution
19 h 30 - La Religieuse
Gorron
15 h - Changement d’adresse
Évron
14 h 30 - La Terre de la folie
Évron
20 h 30 - Lady Chatterley
Renazé
15 h - Liberté
Renazé
20 h 30 - La Cérémonie
Saint-Pierre-Des-Nids
18 h - Le Temps des grâces
Le Bourgneuf-La-Forêt
20 h 30 - Le père de mes enfants
Le Bourgneuf-La-Forêt
15 h - Le Père de mes enfants
Mayenne - Le Vox
15 h - Le Mari de la coiffeuse
19 h - Sans soleil
21 h - La Faute à Voltaire
Gorron
20 h 30 - Un prophète
White Material de Claire Denis
LES TARIFS
- Billet à l’unité : tarifs habituels des salles partenaires du festival
- Abonnement de 3 places non nominatif, valable pour tous les
films des Reflets dans toutes les salles partenaires :
.Tarif normal : 15 €
.Tarif réduit : 12 € (adhérents d’Atmosphères 53, scolaires,
étudiants et chômeurs et association des sourds et
malentendants de la Mayenne)
- Pass Reflets nominatif (avec photo) valable pour tous les films
des Reflets dans toutes les salles partenaires :
.Tarif unique : 50 €
- Pass Culture Sports de la Région
.1 coupon cinéma = 2 entrées
PLANS SÉQUENCES
Gazette des Reflets du Cinéma
Rédacteurs :
Josué Binet, Valentin Delière, Willy Durand, Sébastien Gestière,
Gaël Huet, Merlin Millet, Laure Moulin, Margaux Lucienne,
Johann Pinson, Anne-Maëlle Le Roux
Maquette : Aurélien Zimmermann
Atmosphères 53
12, rue Guimond-des-Riveries
53100 Mayenne
Tél. 02 43 04 20 46
Fax. 02 43 04 96 48
Mail. contact@atmospheres53.org
Site internet. www.atmospheres53.org
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