Campus - Le Monde
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Formation Dossier<br />
La nouvelle carte de l’excellence<br />
<strong>Le</strong>s facultés et les écoles d’Aquitaine<br />
se mettent en ménage<br />
Un grand établissement unique pourrait naître en 2014, issu de la fusion des quatre universités<br />
de Bordeaux et de trois écoles publiques locales, déjà associées au sein d’un pôle de recherche<br />
et d’enseignement supérieur. Une condition pour peser à l’international, non sans risques.<br />
Plantée entre l’Ecole nationale supérieure<br />
d'arts et métiers (Ensam) et le CNRS, la<br />
future crèche inter-universitaire prend<br />
forme petit à petit. En 2012, date de son ouverture,<br />
elle accueillera 47 enfants. C’est une première<br />
sur le campus bordelais. Une goutte d’eau<br />
àl’échelle des 5700 employés (enseignants et<br />
personnels administratifs) et 63 000 étudiants,<br />
mais tout un symbole : elle sera la première réalisation<br />
de l’opération «<strong>Campus</strong> », même si elle<br />
n’y est pas inscrite officiellement.<br />
Derrière le rideau de cette appellation, se trouve<br />
le théâtre d’une révolution bordelaise : au printemps<br />
2008, les quatre universités de Bordeaux,<br />
associées à trois écoles publiques (lire encadré) ont<br />
été retenues dans le cadre d’un appel national à<br />
projets lancé par le ministère de l’enseignement<br />
supérieur et de la recherche. Sur 46 dossiers, six<br />
ont été acceptés, dont celui de Bordeaux.<br />
Un an plus tôt, en mars 2007, les sept établissements<br />
s’étaient réunis en un pôle de recherche et<br />
d’enseignement supérieur (PRES), un établissement<br />
public de coopération scientifique baptisé<br />
Université de Bordeaux. «<strong>Le</strong>PRES a été un accélérateur<br />
de particules universitaires », souligne<br />
Patrick Brun, l’actuel président de Bordeaux-<br />
III (lettres, philo, etc.). Plusieurs fois par mois, présidents<br />
et directeurs d’école se retrouvent pour<br />
parler de leurs problèmes mais aussi de leur avenir<br />
propre et commun.<br />
Malgré une présidence tournante annuelle, les<br />
projets et les ambitions se sont structurés et les<br />
coopérations interuniversitaires multipliées.<br />
«Acoups de réunions, des gens qui ne se parlaient<br />
pas et ne se connaissaient plus ont renoué du lien<br />
social, intellectuel », explique un universitaire<br />
connaisseur des rouages de l’institution.<br />
De cette maïeutique est né un «nouveau modèle<br />
d’université »:élaborer de nouvelles approches<br />
pédagogiques centrées sur le parcours de l’étudiant,<br />
restructurer l’offre d’enseignement et de<br />
recherche pluridisciplinaire autour de trois départements<br />
pour être plus visible à l’international,<br />
créer des collèges regroupant masters, formations<br />
d’ingénieurs et doctorats, construire des pôles<br />
d’excellence. <strong>Le</strong> PRES prévoit aussi un volet immobilier,<br />
commerce et qualité du cadre de vie. Ce projet<br />
global a séduit le ministère : dans le cadre de<br />
l’opération «<strong>Campus</strong> », le PRES va bénéficier<br />
d’une dotation en capital de 475 millions d’euros<br />
de l’Agence nationale de la recherche (ANR). La partie<br />
immobilier doit générer un loyer de 19,15 millions<br />
d’euros par an. «Ce loyer doit garantir 50 %<br />
des investissements et la totalité de la maintenance<br />
sur vingt-cinq ans », précise Jérôme Goze, directeur<br />
du projet aménagement et immobilier du<br />
campus au PRES. <strong>Le</strong> conseil régional d’Aquitaine<br />
s’est engagé à verser, lui, l’autre moitié des investissements<br />
matériels, soit 200 millions d’euros.<br />
De quoi faire rêver enseignants et présidents<br />
d’université.<br />
Après le «contenant »de l’opération «<strong>Campus</strong> »,<br />
le PRES a permis de faire évoluer le contenu et les<br />
moyens des universités bordelaises : il a été le<br />
maître d’ouvrage des «investissements d’avenir<br />
», traduction universitaire du grand emprunt,<br />
L’Université de<br />
Bordeaux en chiffres<br />
<strong>Le</strong> campus de Bordeaux regroupe quatre<br />
sites universitaires qui accueillent<br />
110 unités de recherche, 62 000 étudiants,<br />
3000 doctorants, 3100 enseignants et<br />
enseignants-chercheurs, 2600 personnels<br />
techniques et administratifs. Il s’étend<br />
sur 260 hectares, en majorité à Talence,<br />
Pessac et Gradignan, dont 550 000 mètres<br />
carrés de surfaces bâties et 279 000 mètres<br />
carrés d’installations sportives. <strong>Le</strong>s<br />
membres fondateurs du pôle de recherche<br />
et d’enseignement supérieur sont :les universités<br />
Bordeaux-I, II, III, IV ; Sciences Po<br />
Bordeaux ; l’Institut polytechnique de<br />
Bordeaux et l’Ecole nationale d’ingénieurs<br />
des travaux agricoles de Bordeaux. La participation<br />
de l’université de Pau et des pays<br />
de l’Adour est en cours de discussion.<br />
une initiative gouvernementale qui fait suite au<br />
rapport des anciens premiers ministres Alain<br />
Juppé et Michel Rocard.<br />
Au total, une quarantaine de projets bordelais ont<br />
été déposés à l’ANR. Déjà, en janvier 2011, cinq projets<br />
d’équipements d’excellence et un projet<br />
d’étude épidémiologique à grande échelle ont été<br />
retenus par un jury international. <strong>Le</strong>s prochains<br />
résultats étaient attendus en mars. «<strong>Le</strong>s investissements<br />
d’avenir ne sont pas une réponse d’opportunité,<br />
assure Manuel Tunon de Lara, président<br />
du PRES et de l’université Bordeaux-II<br />
(médecine, sociologie, ethnologie). Nous étions<br />
prêts grâce au PRES et à l’opération «<strong>Campus</strong> »<br />
qui nous ont projetés vers une nouvelle organisation<br />
universitaire, l’idée de pôles d’excellence et de<br />
collèges. C’est cette réflexion initiale du site et de<br />
ses enseignements qui a insufflé cette dynamique<br />
», assure le docteur en médecine.<br />
Parmi les appels à projets, des laboratoires de Bordeaux-II<br />
et Bordeaux-IV se sont associés à<br />
Sciences Po Bordeaux pour un projet de laboratoire<br />
d’excellence (Labex). L’Institut Ausonius,<br />
une unité mixte de recherche (UMR) CNRS-Bordeaux-III<br />
spécialisée dans la recherche sur l’archéologie<br />
et coutumière de travaux pluridisciplinaires,<br />
a proposé un Labex sur les sciences<br />
archéologiques. «ABordeaux, on ne part pas de<br />
rien », résume Alain Boudou, président de Bordeaux-I<br />
(sciences), un des ex-présidents du PRES.<br />
<strong>Le</strong>s relations interuniversitaires fonctionnent<br />
bien parce que «chaque université est assez sectorisée,<br />
sans recouvrement de matières les unes<br />
par rapport aux autres, explique Manuel Tunon<br />
de Lara. Nous n’avons pas d’universités pluridisciplinaires<br />
qui se marchent sur les pieds. On fonctionne<br />
plus en complémentarité ».<br />
Désormais, les protagonistes du PRES se projettent<br />
vers un autre mode de fonctionnement, fondé sur<br />
la création d’un établissement unique, avec une<br />
seule entité juridique de gestion. Un «grand établissement<br />
»au statut dérogatoire. Valérie Pécresse,<br />
ministre de l’enseignement supérieur et de la<br />
recherche, y est favorable. <strong>Le</strong>s conseils d’administration<br />
de Bordeaux-I, II et IV et les trois écoles ont<br />
12 / <strong>Le</strong> <strong>Monde</strong> <strong>Campus</strong> mardi 29 mars 2011