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Les Jésuites en Portugal de 1834 à 1910 : contribution à l ... - Libr@rsi

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COUR PERMANENTE D'ARBITRAGE DE LA HAYE<br />

Tribunal consliloé <strong>en</strong> verlu du romproniis d'arbitrage signé <strong>à</strong> Lisbonne le 31 Juillet 1913<br />

AFFAIRES DITES «DES BIENS CONTESTÉS EN PORTUGAL-<br />

LES JÉSUfTES EN PORTUGAL OE <strong>1834</strong> A<br />

PAR L£<br />

Prof.<br />

EMM. BORGES GRAÏNHA<br />

Contribution <strong>à</strong> l'étu<strong>de</strong><br />

et <strong>à</strong> l'interprétation <strong>de</strong>s lois du 8 Octobre et 31 Décembre <strong>1910</strong><br />

Observations générales — Annexe n° 4<br />

LISBONIS i ;<br />

IMPRIMERIE NATIONALE<br />

IM5


^<br />

COUR PERMANENTE D'ARBITRAGE DE LA HAYE<br />

Tribunal constitué <strong>en</strong> vertu do compromis d'arbitrage signé <strong>à</strong> Lisbonne le 31 Juillet 1013<br />

AFFAIRES DITES «DES BIENS CONTESTES EN PORTUGAL<br />

LES JÉSUITES EN<br />

PORTUGAL OE <strong>1834</strong> il<br />

PAR<br />

LE<br />

Prof.<br />

EMM. BORGES GRAINHA<br />

Contribution <strong>à</strong> l'étu<strong>de</strong><br />

et <strong>à</strong> l'interprétation <strong>de</strong>s lois du 8 Octobre et 31 Décembre <strong>1910</strong><br />

Observations générales — Annexe n° 4<br />

LISBONNE<br />

IMPRIMERIE NATIONALE<br />

1915


TROISIÈME ÉPOQUE<br />

1857-<strong>1910</strong><br />

Règnes <strong>de</strong> Marie II (<strong>1834</strong>-1853) —Pierre V (1853-1861) — Louis I er (1861-1889)<br />

Charles I er (1889-1908) — Emmanuel II (1908-<strong>1910</strong>)<br />

CHAPITRE PREMIER<br />

Reutri-e<br />

clan<strong>de</strong>stine <strong>de</strong>s jésnites <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong><br />

P<strong>en</strong>dant cette troisième époque les jésuites fur<strong>en</strong>t introduits <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> par le<br />

Père Charles Jean Ra<strong>de</strong>maker, fils <strong>de</strong> Joseph Basile Ra<strong>de</strong>maker et <strong>de</strong> Charlotte Jean<br />

Verdier *. Le nom <strong>de</strong> Ra<strong>de</strong>maker lui v<strong>en</strong>ait <strong>de</strong> son bisaïeul paternel d'origine hollandaise<br />

2 .<br />

Il était né le 1 er juin 1828. Son père étant parti le 14 juillet 1829 pour Turin,<br />

comme représ<strong>en</strong>tant du Gouvernem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l'usurpateur Michel près <strong>de</strong> la cour du Piémont,<br />

le petit Charles se r<strong>en</strong>dit dans cette ville avec toute sa famille.<br />

Le gouvernem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l'usurpateur ayant, comme nous l'avons vu, terminé <strong>en</strong> <strong>1834</strong>,<br />

Joseph Basile perdit sa place, mais il resta <strong>à</strong> Turin <strong>à</strong> cause <strong>de</strong> l'éducation <strong>de</strong> ses <strong>en</strong>fants.<br />

Charles fut élevé au collège <strong>de</strong>s jésuites et, le 28 octobre 1846, il <strong>en</strong>tra au noviciat <strong>de</strong><br />

la Compagnie <strong>de</strong> Jésus <strong>à</strong> Chieri, ville voisine.<br />

En mars 1848 une révolution éclata au Piémont et un <strong>de</strong>s premiers gestes <strong>de</strong>s<br />

révolutionnaires fut <strong>de</strong> bannir les jésuites. C'est pourquoi le novice Ra<strong>de</strong>maker, qui n'avait<br />

pas <strong>en</strong>core prononcé les vœux religieux, s'<strong>en</strong> alla chez son père avec qui il revint <strong>à</strong> Lisbonne<br />

<strong>en</strong> août <strong>de</strong> la même année. Ici il fut attaché au secrétariat <strong>de</strong> la nonciature le 2<br />

octobre ; et, décidé <strong>à</strong> se consacrer <strong>à</strong> l'état ecclésiastique, il se mit <strong>à</strong> étudier la théologie,<br />

<strong>en</strong>tra dans les ordres le 20 octobre 1851 et chanta sa première messe le 28 du même<br />

mois dans l'église du séminaire <strong>de</strong>s Apôtres S' Pierre et S' Paul où <strong>de</strong>s jeunes g<strong>en</strong>s v<strong>en</strong>us<br />

d'Angleterre se prépar<strong>en</strong>t au sacerdoce, c'est pourquoi cette église est appelée <strong>de</strong>s<br />

Inglezinhos (petits anglais).<br />

Prêtre séculier, il voulut se consacrer <strong>à</strong> l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t religieux <strong>de</strong>s étudiants <strong>de</strong>s<br />

collèges <strong>de</strong> Lisbonne, et, comme il fréqu<strong>en</strong>tait beaucoup les prêtres anglais, il comm<strong>en</strong>ça<br />

<strong>à</strong> ai<strong>de</strong>r le recteur <strong>de</strong> leur séminaire, Joseph Ilsley, dans l'Institut <strong>de</strong> Charité que<br />

celui-ci avait fondé <strong>en</strong> 1849 pour les <strong>en</strong>fants abandonnés <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux sexes. Comme on<br />

reconnut <strong>en</strong> 1853 qu'il conv<strong>en</strong>ait <strong>de</strong> séparer les sexes, les jeunes filles restèr<strong>en</strong>t dans<br />

l'anci<strong>en</strong>ne maison et le Père Ra<strong>de</strong>maker passa avec les garçons dans une maison du<br />

Largo da Pâscoa.<br />

» Dans ce chapitre je suis la biographie du Père Charles Ra<strong>de</strong>maker publiée dans le M<strong>en</strong>sageiro<br />

do Coraç<strong>à</strong>o <strong>de</strong> Jésus, 1ÏX)1-1!X« (Messager du Cœur .le Jésus) et dans VHistoire du Collège <strong>de</strong><br />

Campoli<strong>de</strong> et <strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s <strong>Jésuites</strong> <strong>à</strong> Lisbonne, texte latin écrit par les Pères <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux maisons<br />

accompagné <strong>de</strong> la traduction française, avec un.' préface par le prof. Enun. Borges Graïnha.<br />

2 M<strong>en</strong>sageiro do Coraç<strong>à</strong>o <strong>de</strong> Jésus, 1898, p- 21.


Le choléra ayant <strong>en</strong>vahi Lisbonne <strong>en</strong> 1856, le père <strong>de</strong> Charles fut une <strong>de</strong>s victimes.<br />

P<strong>en</strong>dant tout ce temps-l<strong>à</strong>, <strong>de</strong> 1848 <strong>à</strong> 1856, quelques jésuites vinr<strong>en</strong>t incognito <strong>à</strong><br />

Lisbonne: le Père Joseph Vigitello, itali<strong>en</strong>, passa quelque temps chez le Marquis <strong>de</strong> Lavradio<br />

', et les Pères François Ramon Cabré et Joseph Clos, espagnols, <strong>de</strong>meurèr<strong>en</strong>t<br />

<strong>de</strong>ux mois au collège du Largo da Pdscoa-. Charles Ra<strong>de</strong>maker <strong>en</strong>tretint <strong>de</strong>s relations<br />

avec eux; et, après la mort <strong>de</strong> son père, qui s'était opposé <strong>à</strong> ce qu'il r<strong>en</strong>trât chez les<br />

jésuites, se voyant délivré <strong>de</strong>s instances paternelles, il obtint du Général <strong>de</strong> l'Ordre sa<br />

réadmission. Dans ce but il alla terminer son noviciat <strong>à</strong> Loyola, y prononçant ce qu'on<br />

appelle les vœux simples <strong>de</strong> l'Ordre, le 17 juillet 1857. Déj<strong>à</strong> jésuite et soumis, dans toutes<br />

ses actions, aux ordres <strong>de</strong>s supérieurs, il fut r<strong>en</strong>voyé <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> pour y rétablir la<br />

Compagnie <strong>de</strong> Jésus. Arrivé <strong>à</strong> Lisbonne, il se délia <strong>de</strong> l'abbé Ilsley dans la direction <strong>de</strong><br />

l'Institut <strong>de</strong> Charité, qui se trouvait déj<strong>à</strong> alors installé Rue <strong>de</strong> Bu<strong>en</strong>os Ayres, et le prit<br />

complètem<strong>en</strong>t <strong>à</strong> sa charge. Celui-ci fut donc le premier collège <strong>de</strong> jésuites <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong><br />

p<strong>en</strong>dant cette troisième pério<strong>de</strong>. Mécont<strong>en</strong>t <strong>de</strong> cette maison, il <strong>en</strong> chercha une autre<br />

dans <strong>de</strong> meilleures conditions et il la trouva <strong>à</strong> Campoli<strong>de</strong>, aux <strong>en</strong>virons <strong>de</strong> Lisbonne 3 . La<br />

maison appart<strong>en</strong>ait au poète Jean <strong>de</strong> Lemos <strong>à</strong> qui il l'acheta <strong>en</strong> 1858 pour quatre<br />

contos (4.000 écus) i . Ra<strong>de</strong>maker <strong>de</strong>manda au Général <strong>de</strong> lui <strong>en</strong>voyer quelques Pères<br />

pour l'ai<strong>de</strong>r <strong>à</strong> former le nouveau Collège et plus tard pour fon<strong>de</strong>r un noviciat <strong>de</strong> l'Ordre<br />

<strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>. Le Général, d'accord avec les idées <strong>de</strong> Ra<strong>de</strong>maker, lui <strong>en</strong>voya successivem<strong>en</strong>t<br />

plusieurs jésuites, coadjuteurs et prêtres. Le premier fut le coadjuteur Martinho<br />

(Martin) Rodriguès, qui était <strong>en</strong>tré au noviciat <strong>de</strong> l'Ordre <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> <strong>en</strong> 1833, au temps<br />

<strong>de</strong> l'usurpateur Michel, lorsque les jésuites avai<strong>en</strong>t leur noviciat <strong>à</strong> Santo Antao o Velho<br />

(S' Antoine-Abbé le Vieux) 8 . Plus tard vint aussi le Père Buckacinscki, un autre<br />

jésuite qui avait été <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> <strong>de</strong> 1830 <strong>à</strong> <strong>1834</strong>, plus connu sous le nom <strong>de</strong> Chevalier 6 .<br />

que le<br />

Ce fut surtout <strong>en</strong>tre les jésuites itali<strong>en</strong>s, qui avai<strong>en</strong>t été bannis <strong>de</strong> l'Italie <strong>en</strong> 1848,<br />

Général choisit les Pères pour le <strong>Portugal</strong>. <strong>Les</strong> plus célèbres fur<strong>en</strong>t: le Père François<br />

Xavier Fulconis, premier supérieur <strong>de</strong> la Mission ;<br />

le Père Vinc<strong>en</strong>t Ficarelli, <strong>de</strong>uxième<br />

supérieur <strong>de</strong> la Mission et plus tard, <strong>en</strong> 1880, premier Provincial; le Père Louis<br />

Prosperi, qui p<strong>en</strong>dant <strong>de</strong> longues années parcourut le<br />

pays <strong>en</strong> faisant <strong>de</strong>s missions et <strong>en</strong><br />

y introduisant l'Apostolat <strong>de</strong> la Prière, dont il fut directeur général jusqu'<strong>à</strong> sa mort <strong>en</strong><br />

1887; le Père François Sturzo. qui durant 18 années fut directeur du Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong><br />

; le Père Jean Baptiste Meli, fondateur <strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> Braga, ville très catholique<br />

du Nord du pays avec un séminaire <strong>de</strong>s plus fréqu<strong>en</strong>tés où il<br />

<strong>de</strong>vint très influ<strong>en</strong>t;<br />

le Père Jean Baptiste <strong>de</strong> Antoni, supérieur du Collège <strong>de</strong> S<strong>à</strong>o Fiel (St. Fidèle) <strong>de</strong> 1871<br />

<strong>à</strong> 1887 ;<br />

et le Père Dominique Moscatelli, qui fut maître <strong>de</strong> novieesau Barro <strong>de</strong> 1869<br />

<strong>à</strong> 1881. (Voir les Catalogues <strong>de</strong>s Provinces Castillane et Portugaise).<br />

Un noviciat étant fondé au Barro <strong>en</strong> 1860 les novices comm<strong>en</strong>cèr<strong>en</strong>t <strong>à</strong> y affluer;<br />

leur nombre jusqu'<strong>à</strong> <strong>1910</strong>, cinquante ans après, s'était élevé <strong>à</strong> 754. Plus d'un tiers (287)<br />

cep<strong>en</strong>dant avait quitté l'Ordre, comme le prouv<strong>en</strong>t le livre publié par le P. Cor<strong>de</strong>iro <strong>en</strong> <strong>1910</strong><br />

sous le titre <strong>de</strong> Jubileu do Colégio do Barro (Jubilé du Collège du Barro) et le Cata-<br />

1<br />

M<strong>en</strong>sageiro do Coraçâo <strong>de</strong> Jésus, 1902, p. 607.<br />

2 Ibi<strong>de</strong>m, 1903, p. 32.<br />

3<br />

Histoire da CoU'cge <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> et <strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s <strong>Jésuites</strong> <strong>à</strong> Lisbonne, pp. 9 et 10.<br />

4<br />

Dans cette histoire, l'écu (scutatum dans les chroniques latines <strong>de</strong>s jésuites) vaut 5 francs.<br />

'<br />

Histoire Coll. Camp, et Rés. TAxb., pp. 9-10. — Carayon, Docum<strong>en</strong>ts Inédits concernant<br />

Compagnie <strong>de</strong> Jésus, X, pp. 65, 83 et 8t. — Delvaux, Lettres, p. 448.<br />

la<br />

c<br />

Histoire Coll. Camp, et Rés. Lisb., p. 101. — Carayon, pp. 82 <strong>à</strong> 81. — M<strong>en</strong>sageiro do Coraçâo<strong>de</strong><br />

Jésus, 1903, p. 32.


logus Domus Probationis Barr<strong>en</strong>sis, manuscrit qui se trouve aux Archives Congréganistes.<br />

(Voir p. 35 <strong>de</strong> cette Histoire).<br />

A mesure que les portugais, qui étai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>trés au Noviciat du Barro, avançai<strong>en</strong>t <strong>en</strong><br />

âge et <strong>en</strong> aptitu<strong>de</strong>s jésuitiques,<br />

on remplaçait les itali<strong>en</strong>s par <strong>de</strong>s portugais dans la direction<br />

<strong>de</strong>s maisons, <strong>en</strong> sorte qu'<strong>en</strong> 1894 on ne les voyait plus dans la direction <strong>de</strong>s maisons<br />

et on ne les voyait presque plus dans le pays, soit qu'ils fuss<strong>en</strong>t morts, soit qu'ils<br />

fuss<strong>en</strong>t retournés dans leurs anci<strong>en</strong>nes Provinces '.<br />

Au comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l'année <strong>1910</strong> il y avait dans la Province Portugaise 360<br />

jésuites répandus dans les onze maisons du <strong>Portugal</strong> et dans les trois missions <strong>de</strong>s colonies.<br />

<strong>Les</strong> onze maisons <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> consistai<strong>en</strong>t <strong>en</strong> <strong>de</strong>ux Collèges (Campoli<strong>de</strong> et St.<br />

FidMe), un Noviciat et<br />

Scolasticat <strong>de</strong> rhétorique au Barro, une Ecole Apostolique <strong>à</strong> Guimarïes,<br />

et sept Résid<strong>en</strong>ces (Lisbonne, CovilM, Porto, Braga, Setûbal, Viana do Castelo<br />

et Pévoa <strong>de</strong> Varzim). <strong>Les</strong> trois Missions dans les colonies étai<strong>en</strong>t: celle <strong>de</strong> Goa avec<br />

trois maisons, celle <strong>de</strong> Macao avec <strong>de</strong>ux et celle <strong>de</strong> la Zambézie-inférieure avec six 2 .<br />

CHAPITRE DEUXIÈME<br />

<strong>Les</strong> jésuites <strong>en</strong>trèr<strong>en</strong>t <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> et y vécur<strong>en</strong>t <strong>en</strong> méprisant consciemm<strong>en</strong>t et <strong>à</strong> <strong>de</strong>ssein<br />

les lois<br />

<strong>de</strong> Pombal, Aguiar et Hintze<br />

Dans les <strong>de</strong>ux époques antérieures, initiées <strong>en</strong> 1540 et <strong>en</strong> 1829, les jésuites <strong>en</strong>trèr<strong>en</strong>t<br />

appelés par le gouvernem<strong>en</strong>t même du pays: <strong>en</strong> 1540 par Jean III, roi légitime et<br />

absolu, qui représ<strong>en</strong>tait par conséqu<strong>en</strong>t le pouvoir, et <strong>en</strong> 1829 par^un roi intrus, l'usurpateur<br />

Michel, mais qui cep<strong>en</strong>dant représ<strong>en</strong>tait un pouvoir révolutionnaire quoique illégitime.<br />

Mais <strong>en</strong> 1857 Ra<strong>de</strong>maker ne fut pas appelé ni autorisé par le pouvoir civil. Il<br />

savait, comme ses successeurs, que l'exist<strong>en</strong>ce et la propagan<strong>de</strong> <strong>de</strong>s jésuites <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong><br />

était déf<strong>en</strong>due par les lois <strong>de</strong> Pombal et Aguiar, comme ils l'avou<strong>en</strong>t souv<strong>en</strong>t dans leurs<br />

écrits mêmes 3 . C'est pourquoi ils cherchai<strong>en</strong>t <strong>à</strong> cacher le plus possible, surtout au comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t,<br />

le fait qu'ils étai<strong>en</strong>t membres <strong>de</strong> la Compagnie <strong>de</strong> Jésus, et cela <strong>de</strong> toutes les<br />

manières <strong>de</strong>puis les extérieurs artificiels et les légères dissimulations, jusqu'<strong>à</strong> la négation<br />

et au m<strong>en</strong>songe le plus positif et le plus impud<strong>en</strong>t. <strong>Les</strong> livres mêmes qu'ils ont publiés et<br />

certains rapports écrits par <strong>de</strong>s autorités civiles chargées <strong>de</strong>s <strong>en</strong>quêtes <strong>à</strong> leurs maisons,<br />

donn<strong>en</strong>t un témoignage complet <strong>de</strong> ces faits. Dans l'Histoire du Cottage <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong><br />

et <strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> Lisbonne (p. 19) on raconte que dans la maison du Barro on avait<br />

placé, avec le Noviciat, un petit asile d'<strong>en</strong>fants pauvres, pour mieux cacher celui-l<strong>à</strong>.<br />

Plusieurs fois les autorités civiles se méfièr<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la prés<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s jésuites dans<br />

certaines maisons, surtout lorsque l'esprit public réclamait avec plus d'insistance l'exécution<br />

<strong>de</strong>s lois anti-jésuitiques, et elles ordonnèr<strong>en</strong>t que <strong>de</strong>s <strong>en</strong>quêtes fuss<strong>en</strong>t faites.<br />

Mais celles-ci ne produisir<strong>en</strong>t pas d'effet, soit que les fonctionnaires eux-mêmes se<br />

fuss<strong>en</strong>t laissés <strong>en</strong>traîner par <strong>de</strong>s affections personnelles, soit que les jésuites euss<strong>en</strong>t déclaré<br />

formellem<strong>en</strong>t qu'ils n'appart<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t pas <strong>à</strong> la Compagnie <strong>de</strong> Jésus.<br />

Dans l'Histoire du Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> et <strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> Lisbonne, (p. 30),<br />

on raconte que dans les premiers temps du Collège, <strong>en</strong> 18G1, le Commissaire <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s<br />

et recteur du Lycée National do Lisbonne, Joseph Lacerda, chanoine <strong>de</strong> la Cathé-<br />

* Catatoyut Provinciae Lusitanae Societatis Jesu ineunte anno MhCCCXClV.<br />

* Cataloyus Provinciae Lusitanae Societati* Jem ineunte anno 1010, p. 45.<br />

* Hitt. Coll. Camp, et Rés. Litb. ; pp.<br />

t, 17, 1!), 2G, 150, 59, 153, 161, 171 ef 178, etc.


drale, poussé par l'amitié particulière qui le liait <strong>à</strong> Ra<strong>de</strong>maker, évita l'exécution <strong>de</strong><br />

l'<strong>en</strong>quûte dont il avait été chargé par arrêté ministériel du 10 octobre 1861.<br />

Le 16 novembre 1880 Joseph Luci<strong>en</strong>, alors Présid<strong>en</strong>t du Conseil et Ministre <strong>de</strong><br />

l'Intérieur, <strong>en</strong>voya un arrêté ministériel <strong>à</strong> tous les Préfets qui <strong>de</strong>vrai<strong>en</strong>t chercher <strong>à</strong><br />

savoir: 1.° si dans leurs districts il y avait <strong>de</strong>s collèges ou établissem<strong>en</strong>ts appart<strong>en</strong>ant <strong>à</strong><br />

<strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> congrégations religieuses étrangères ou dirigés par eux; 2° si dans les<br />

mêmes collèges ou établissem<strong>en</strong>ts il y avait <strong>de</strong>s professeurs faisant partie <strong>de</strong>s dites congrégations<br />

*, <strong>Les</strong> fonctionnaires chargés <strong>de</strong> ces recherches <strong>en</strong>voyèr<strong>en</strong>t leurs rapports au<br />

Ministère <strong>de</strong> l'Intérieur.<br />

Ce qui y est rapporté au sujet <strong>de</strong>s affirmations <strong>de</strong>s jésuites interrogés, peut être<br />

déduit d'un <strong>de</strong> ces rapports, écrit par le Dr. Sousa Refoios, professeur très remarquable<br />

<strong>de</strong> l'Université <strong>de</strong> Coïmbre, qui fut l'<strong>en</strong>quêteur du Collège <strong>de</strong> St. Fidèle <strong>en</strong> décembre<br />

1880 et qui publia ce rapport dans la presse <strong>en</strong> 1683 pour faire voir jusqu'où pouvai<strong>en</strong>t<br />

aller les dissimulations et les faussetés <strong>de</strong>s jésuites. «Ils déclarèr<strong>en</strong>t (écrit-il) tous una<br />

voce qu'ils n'appart<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t <strong>à</strong> aucune congrégation religieuse» 2 . Et pourtant on les trouve .<br />

tous comme jésuites dans le Catalogue Provinciae. Lusitanae Societatis Jésus in. an. 1881<br />

(p. 12). Mais au comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ce catalogue on trouve cette note <strong>en</strong> latin: tEnixe<br />

rogantur Nostri ne in externi cujusvis manus hune catalogum inci<strong>de</strong>re sinants. (Nous<br />

prions instamm<strong>en</strong>t les Nôtres <strong>de</strong> ne pas laisser passer ce catalogue <strong>à</strong> <strong>de</strong>s personnes<br />

étrangères <strong>à</strong> la Société).<br />

En 1901 on t<strong>en</strong>ta d'<strong>en</strong>lever et emm<strong>en</strong>er dans un couv<strong>en</strong>t la tille <strong>de</strong> Mr. Calmon,<br />

consul du Brésil <strong>à</strong> Porto. En ayant connaisance <strong>de</strong> ce fait, <strong>à</strong> Lisbonne et <strong>à</strong> Porto, le<br />

public se révolta contre l'exist<strong>en</strong>ce déguisée et illégale <strong>de</strong>s congréganistes <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong><br />

et exigea, <strong>en</strong> <strong>de</strong> bruyants comices, que fuss<strong>en</strong>t exécutées les lois non révoquées <strong>de</strong> 1759<br />

et <strong>1834</strong> 3 .<br />

Hintze Ribeiro, alors présid<strong>en</strong>t du Gouvernem<strong>en</strong>t, <strong>en</strong> partie dominé par l'aristocratie<br />

et la reine Amélie très attachées aux congréganistes, et <strong>en</strong> partie poussé par les réclamations<br />

du pays, publia le fameux décret du 18 avril 1901 pour mystifier le peuple.<br />

Dans ce décret il feignait ignorer que les individus, contre lesquels le public réclamait,<br />

étai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s congréganistes, car les lois <strong>de</strong> 1759 et <strong>1834</strong> n'avai<strong>en</strong>t pas été révoquées.<br />

C'est pourquoi il établissait que ces individus pouvai<strong>en</strong>t vivre réunis dans <strong>de</strong>s<br />

maisons, <strong>en</strong> se consacrant <strong>à</strong> la bi<strong>en</strong>faisance, <strong>à</strong> l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t et aux missions dans les<br />

colonies, sous condition expresse (alinéa c) <strong>de</strong> l'art. 1 er : «qu'il n'y eût pas, dans l'association,<br />

<strong>de</strong> pratiques <strong>de</strong> noviciat, ni <strong>de</strong> professions ou <strong>de</strong> vœux, non permis par la loi.»<br />

Or les jésuites, comme les autres congréganistes, restèr<strong>en</strong>t dans leurs maisons, mais<br />

n'exécutèr<strong>en</strong>t pas intégralem<strong>en</strong>t ce décret. Ils s'<strong>en</strong> jouèr<strong>en</strong>t plutôt comme ils se jouai<strong>en</strong>t<br />

<strong>de</strong>s lois <strong>de</strong> 1759 et <strong>1834</strong>.<br />

Car ils continuèr<strong>en</strong>t leurs noviciats, leurs professions et leurs vœux, comme on le<br />

voit par leurs catalogues, imprimés mais cachés aux séculiers, et d'autres livres et manuscrits<br />

trouvés dans leurs maisons, <strong>de</strong>squels nous avons déj<strong>à</strong> fait<br />

m<strong>en</strong>tion et dont quelques<br />

uns sont déj<strong>à</strong> publiés dans la<br />

presse.<br />

Cep<strong>en</strong>dant les jésuites continuèr<strong>en</strong>t <strong>à</strong> dire, avec la dissimulation qui leur est habi-<br />

1<br />

Jubilé du Collège du Barro, p. 194.<br />

2 Le Collège <strong>de</strong> St. Fidèle, etc. Rapport du dr. Joachim Auguste «le Sousa Refoios, professeur<br />

<strong>de</strong> mé<strong>de</strong>cine <strong>à</strong> l'Université <strong>de</strong> Coïmbre, pp. 8 et 18. Coïmbre, 1883.<br />

3<br />

Voir dans l'Ilist. Coll. Camp, et Résid. Lisbonne, p. 178, ce qui eut lieu dans la Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong><br />

Rue du Quclhas, <strong>à</strong> cause <strong>de</strong> ces événem<strong>en</strong>ts.


tuelle, qu'ils n'avai<strong>en</strong>t ni noviciat ni professions religieuses. L<strong>à</strong> <strong>de</strong>ssus le fait le plus<br />

curieux et le<br />

plus digne d'être marqué dans l'histoire est la déclaration, publiée par le Provincial<br />

<strong>de</strong>s jésuites, Louis Cabrai, dans le journal catholique <strong>Portugal</strong>, le 4 octobre. <strong>1910</strong>,<br />

veille <strong>de</strong> la proclamation <strong>de</strong> la République qui les a bannis du <strong>Portugal</strong>, si on la compare<br />

<strong>à</strong> une autre, qui se trouve dans le livre Proscritos (Proscrits) publié par l'ordre du même<br />

Provincial Louis Cabrai. Dans le numéro cité du <strong>Portugal</strong> (p. 1, col. 4 et 5) on lit. «La<br />

vérité est qu'au Barro il n'y a pas <strong>de</strong> noviciat monastique, qu'on n'y trouve pas les pratiques<br />

monacales caractéristiques, telles que le chœur, le chapitre, l'habit, etc. etc. qui<br />

n'y exist<strong>en</strong>t pas et n'ont jamais existé dans une seule <strong>de</strong>s maisons <strong>de</strong> l'association Fé e<br />

Pâtria (Foi et Patrie), pas même avant que le décret <strong>de</strong> Hintze les eût fixés dans cette<br />

sorte d'exist<strong>en</strong>ce légale. Si cep<strong>en</strong>dant le anoviciat» est pris étvinologiquem<strong>en</strong>t, dans le<br />

s<strong>en</strong>s <strong>de</strong> formation <strong>de</strong>s novices dans une association religieuse, ou comme appr<strong>en</strong>tissage<br />

pour la vie <strong>de</strong>s missions, dans ce cas il y a au Barro le noviciat, il faut même qu'il<br />

existe, par expresse exig<strong>en</strong>ce légale, puisque dans le Diârio do Govêrno (journal officiel)<br />

dans les Statuts <strong>de</strong> l'Association Foi et Patrie, article 7, on lit ces mots: «l'éducation<br />

compr<strong>en</strong>dra, <strong>en</strong> plus <strong>de</strong> l'instruction littéraire appropriée, une formation morale et religieuse<br />

qui soit une garantie <strong>de</strong> conduite exemplaire dans la vie <strong>de</strong>s missions». Cette éducation<br />

est reçue au Barro par ceux que l'Association élève avec un soin particulier et elle<br />

constitue un vrai cours pratique d'abnégation, dévouem<strong>en</strong>t et adaptation aux mille exercices<br />

auxquels le missionnaire se voit forcé d'appliquer son activité.»<br />

Qu'on lise maint<strong>en</strong>ant la déclaration claire et parfaitem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> opposition avec<br />

l'antérieure qui se trouve dans Proscritos {Proscrits), vol. I, p. 117 et 119:<br />

«Comme le lecteur naturellem<strong>en</strong>t le sait déj<strong>à</strong>, au Barro, <strong>à</strong> moins d'une lieue <strong>de</strong> Tôrres<br />

Vedras, il y avait <strong>de</strong>puis cinquante ans un noviciat <strong>de</strong> la Compagnie <strong>de</strong> Jésus,<br />

avec pratiques pour formation religieuse et les vœux correspondants. En face <strong>de</strong> la loi<br />

c'était le collège <strong>de</strong> Nossa S<strong>en</strong>hora dos Anjos (Notre Dame <strong>de</strong>s Anges) approuvé sous<br />

la dictature <strong>de</strong> Hintze Ribeiro, comme établissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> formation pour les missionnaires.<br />

« . . . Je suppose que le lecteur n'est pas <strong>de</strong> ceux que les pratiques du noviciat ou les<br />

vœux que l'on prononçait au Barro pourrai<strong>en</strong>t scandaliser et qu'il ne voudra pas me citer<br />

<strong>à</strong> propos les décrets <strong>de</strong> Joachim Aguiar et <strong>de</strong> Pombal. 11 y a <strong>de</strong>s choses qui sont par<br />

leur nature au <strong>de</strong>ssus ou <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> toute loi humaine, comme le sont l'air, la lumière<br />

du soleil et les rapports <strong>de</strong>s âmes avec Dieu.<br />

«<strong>Les</strong> lois qui restreign<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s droits inaliénables ne sont pas <strong>de</strong>s lois, c'est pourquoi<br />

on ne leur doit pas d'obéissance, mais un complet oubli.<br />

«C'est ce que faisai<strong>en</strong>t les jésuites aux<br />

décrets <strong>de</strong> Pombal et d'Aguiar» '.<br />

Comme on le voit par la transcription précéd<strong>en</strong>te les jésuites dans les Proscrits ne<br />

ni<strong>en</strong>t plus leur qualité <strong>de</strong> jésuites, qu'ils niai<strong>en</strong>t autrefois lors qu'ils étai<strong>en</strong>t interrogés<br />

officiellem<strong>en</strong>t, et ils déclar<strong>en</strong>t <strong>de</strong> plus qu'ils vou<strong>en</strong>t le plus profond mépris aux lois portugaises<br />

<strong>de</strong> 17ô9 et <strong>de</strong> <strong>1834</strong>. Et dans la Civilt<strong>à</strong> Cattolica du 6 juin 1914, p. 586, se<br />

rapportant <strong>à</strong> une <strong>de</strong> mes publications, l'Histoire du Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong>, publiée <strong>en</strong> 1913,<br />

ils insult<strong>en</strong>t même les personnes qui les blâm<strong>en</strong>t pour leurs m<strong>en</strong>songes officiels*.<br />

• L. Gonzague Azevedo, S. J. Proscritos. Notices détaillées <strong>de</strong> ce qu'ont souffert les religieux ris<br />

la Compagnie <strong>de</strong> Jésus p<strong>en</strong>dant la révolution portugaise <strong>en</strong> 11)10. Avec une préface parle R. P. Gonzag<br />

Cabral,uc S. J. — Première partie, Florêncio île Lara, éditeur, Vatladolid, septembre 1911, p. 119.<br />

* Comme' confirmation complète <strong>de</strong> ce chapitre je veux laisser ici la déclaration <strong>de</strong> la Civilt<strong>à</strong><br />

Cattolica, quoique on m'y adresse <strong>de</strong>s insinuations insultantes dont je ris : «La condotta <strong>de</strong>i Gesuiti<br />

nel dissimulare offîcialm<strong>en</strong>te la loro condizione di religiosi é un altru eapo di accusa-— l'accusa<br />

sciocca <strong>de</strong>lP «ipocrisia gesuitica» — u cui m<strong>en</strong>a gran<strong>de</strong> scandalu il nostro Grainha. Ma il suo è davvero<br />

uno scandalo farisaico, e peggio, è un tratto di mala feda per creare odiosit<strong>à</strong> aile vittime, che<br />

hanno tanto b<strong>en</strong>eficato lui e la sua patria. Egli sa b<strong>en</strong>issimo che il governo stesso conosceva la con


8<br />

Ce point est si<br />

intéressant et ess<strong>en</strong>tiel dans l'Histoire <strong>de</strong>s jésuites <strong>à</strong> cette époque <strong>en</strong><br />

<strong>Portugal</strong>, que je dois placer ici quelques docum<strong>en</strong>ts précieux, gardés aux Archives Congréganistes,<br />

prouvant qu'ils se savai<strong>en</strong>t hors la loi et comm<strong>en</strong>t ils cherchai<strong>en</strong>t <strong>à</strong> la<br />

eophismer. Ce sont trois circulaires du Provincial, <strong>en</strong> 1901, qui était alors le P. Louis<br />

Campo Santo : <strong>de</strong>ux, dirigées aux consulteurs et <strong>à</strong> d'autres Pères <strong>de</strong> la Province, conti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t<br />

<strong>de</strong>s lettres du Général sur<br />

les Statuts <strong>de</strong> l'Association Foi et Patrie, qui était un<br />

déguisem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la Compagnie <strong>de</strong> Jésus, et l'autre, dirigée aux Supérieurs <strong>de</strong>s maisons,<br />

donne le modèle <strong>de</strong>s lettres officielles que l'on <strong>de</strong>vait <strong>en</strong>voyer au Gouvernem<strong>en</strong>t, avec<br />

les notes explicatives pour le tromper <strong>en</strong> faussant les hases fondam<strong>en</strong>tales <strong>de</strong> cette Association.<br />

Il y a aussi une lettre du Provincial sur les Résid<strong>en</strong>ces qu'il déclare hors<br />

la<br />

loi.<br />

Première circulaire dirigée aux Consulteurs et <strong>à</strong> d'autres Pères <strong>de</strong> la Province<br />

suivante :<br />

«R. Père <strong>en</strong> Christ. P. X.— Je vi<strong>en</strong>s <strong>de</strong> recevoir du R. P. Ludovico M. la lettre<br />

«Val<strong>de</strong> placet quod V. R. a opportuno<br />

tempore confici<strong>en</strong>da et mitt<strong>en</strong>da mini curaverit<br />

Statuta quae excogitata sunt ut nostrae<br />

domus, ad civilis kgis normam constitutae,<br />

sub ejus tutela conservari possint.<br />

«Qua mer<strong>en</strong>tur att<strong>en</strong>tione, illa perlegi, et<br />

nescio an hîc singula b<strong>en</strong>e intelligamus,<br />

legem rec<strong>en</strong>ter latam parum cognosc<strong>en</strong>tes<br />

et multa temporum adjuncta ignorantes;<br />

sed timor subit, ne per ista Statuta plura,<br />

quam necesse sit impedim<strong>en</strong>ta nobis opponamus,<br />

et vinculis nos constringamus, quae<br />

necessariam religiosae gubernationis libertatem<br />

tollant. Quin etiam, acci<strong>de</strong>re potest,<br />

ut, dum securitatis studio tôt nobis régulas<br />

praescribimus, ansam inimicorum accusationibus<br />

et vexationibus <strong>de</strong>mus, si forte<br />

«J'ai été très cont<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ce que V. R e ,<br />

<strong>en</strong> temps opportun ait eu le soin <strong>de</strong> faire<br />

rédiger et <strong>de</strong> m'<strong>en</strong>voyer les Statuts que l'on<br />

a imaginés pour que nos maisons, établies<br />

d'après la loi civile, puss<strong>en</strong>t rester sous la<br />

tutelle <strong>de</strong> cette loi.<br />

Je les ai lus avec l'att<strong>en</strong>tion qu'ils mérit<strong>en</strong>t<br />

et je ne sais pas si nous les compr<strong>en</strong>ons<br />

bi<strong>en</strong> ici, vu que nous connaissons<br />

peu la loi promulguée récemm<strong>en</strong>t et que<br />

nous ignorons beaucoup <strong>de</strong> circonstances<br />

du mom<strong>en</strong>t ;<br />

mais il me vi<strong>en</strong>t la crainte<br />

<strong>de</strong> ce que, par ces Statuts, nous nous imposions<br />

plus d'empêchem<strong>en</strong>ts qu'il ne faut,<br />

et ne pr<strong>en</strong>ions <strong>de</strong>s li<strong>en</strong>s qui vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t paralyser<br />

la liberté nécessaire du gouvernem<strong>en</strong>t<br />

religieux. Il peut <strong>en</strong>core arriver<br />

qu'<strong>en</strong> ordonnant, dans un désir <strong>de</strong> sécurité,<br />

tant <strong>de</strong> règles auxquelles nous <strong>de</strong>vrons<br />

nous soumettre, nous fournissions un prétexte<br />

aux accusations et aux vexations <strong>de</strong><br />

dizionc loro di «Gesuiti», ma non voleva chc apparisse officialmcnto ;<br />

e cio per timoré appunto di<br />

quei massoni che allora si celaVano hell' ombra cospirando, ed ora spadroneggiano tiranneggiando<br />

più che qualsiasi monarchia la più assoluta. Anzi vi fu occasione in cui il governo stesso di Lisbona<br />

costretto da soeialisti e massoni ad una délie solite «inchieste» contro le case religiose, si lodô <strong>de</strong>i<br />

gesuiti, perché non ost<strong>en</strong>tavano questaloro condizionc, laddove al tri religiosi, daudosi per tali di fronte<br />

alla legge, mettevano in gran<strong>de</strong> impacCio il governo, chc non poteva o non voleva riconoscerli. Un simile<br />

stato di cose non è certo invidiabile ;<br />

ma è qUello <strong>de</strong>i primi cristiani costretti a nascon<strong>de</strong>rsi<br />

nelle catacombc. Il farne colpa aile vittime, non ai persecutori, è il colmo <strong>de</strong>ll' insipi<strong>en</strong>za, è la<br />

brutalit<strong>à</strong> <strong>de</strong>i carnefice, chu aggiunge al colpo il sarcasmo, alla morte <strong>de</strong>ll' Innoc<strong>en</strong>te il disonorea.


illas accurate observare non liceat. Cum, nos <strong>en</strong>nemis, si par hasard nous ne pou-<br />

..^ .. , . .<br />

j i. .<br />

,<br />

vons pas les observer exactem<strong>en</strong>t. C'est<br />

îgitur. res s t a<strong>de</strong>o gravis et <strong>de</strong>hcata, volo r<br />

, «. .<br />

pourquoi, comme 1 affaire est si grave et<br />

ut haec Statuta non solum a PP. consulgi<br />

délicate< j<br />

e veux que ces Statuts soi<strong>en</strong>t<br />

toribus Provinciae sed etiam ab aliis e gra-<br />

...... ,<br />

examinés avec att<strong>en</strong>tion, non seulem<strong>en</strong>t par<br />

vioribus PP. dilig<strong>en</strong>ti consi<strong>de</strong>ratione reles<br />

Pères consulteurs <strong>de</strong> la Province mais<br />

<strong>en</strong>core par d'autres Pères graves et qu'<strong>en</strong>cognoscantur,<br />

et <strong>de</strong>in<strong>de</strong> singuli suas ad me<br />

,<br />

s<strong>en</strong>t<strong>en</strong>tias prescribant».<br />

., ... ...<br />

suite chacun d eux m écrive son opinion a<br />

ce j<br />

égard».<br />

«Je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> donc, qu'avec la plus gran<strong>de</strong> urg<strong>en</strong>ce vous vouliez bi<strong>en</strong> exposer <strong>à</strong><br />

S. Paternité ce que vous p<strong>en</strong>sez sur ce cas, <strong>en</strong> remarquant seulem<strong>en</strong>t que les Statuts<br />

<strong>de</strong> Foi et Patrie ont été faits <strong>à</strong> la lettre d'après les lois <strong>en</strong> vigueur.<br />

«Je me recomman<strong>de</strong> dans les SS. SS.— De V. R.— Serviteur <strong>en</strong> J. Christ, Aloisius.<br />

«Lisbonne, 17 juillet 1901».<br />

Le Général a reçu les lettres <strong>de</strong>s PP. Consulteurs, et, n'ayant pas été bi<strong>en</strong> r<strong>en</strong>seigné<br />

sur le sujet, il <strong>de</strong>manda <strong>en</strong>core <strong>de</strong>s explications, comme il ressort <strong>de</strong> cette <strong>de</strong>uxième circulaire<br />

du Provincial, très intéressante car elle fait connaître l'esprit <strong>de</strong>s jésuites <strong>en</strong><br />

face <strong>de</strong>s lois portugaises :<br />

Deuxième circulaire dirigée aux Consulteurs et <strong>à</strong> d'autres Pérès <strong>de</strong> la Province<br />

- «Subsecreto.— Le 26 août 1901.— Rév.' 1 P. <strong>en</strong> Christ.— P. C— J'ai reçu aujourd'hui<br />

une lettre du Rév. P. Ludovico où il disait que: «vu la diversité d'informations<br />

parties d'ici, lesquelles s'accordai<strong>en</strong>t toutes ;\ voir du danger dans la prés<strong>en</strong>tation<br />

<strong>de</strong>s Statuts <strong>de</strong> Fé e P


10<br />

«2.° Si V. R. ce connaît une autre solution, et laquelle, pour sauver l'intégrité Mairis<br />

nostrae.<br />

Comm<strong>en</strong>do me SS. SS.<br />

«Serviteur <strong>en</strong> Christ,<br />

Aloisius».<br />

Circulaire dirigée aux Supérieurs <strong>de</strong>s maisons<br />

«Voici la formule <strong>de</strong> la réponse combinée avec le R. P. V. Pr. dans le cas d'une<br />

<strong>en</strong>quête <strong>à</strong> cette maison. Si on <strong>en</strong>voie une feuille imprimée avec cases <strong>à</strong> remplir, que l'on<br />

applique, <strong>en</strong> remplissant ces cases, les réponses données dans ce formulaire. Que. tout le<br />

mon<strong>de</strong> sache bi<strong>en</strong> la position qui apparti<strong>en</strong>t <strong>à</strong> chacun, <strong>à</strong> savoir : s'il est associé ou s'il est<br />

au service <strong>de</strong> l'Association. Tous les Pères et Scolastiqu.es, qui ne sont pas associés, sont<br />

<strong>de</strong>s employés supérieurs, lors môme que ce soit le Recteur, les Frères Coadjuteurs sont <strong>de</strong>s<br />

employés inférieurs. Il faut remarquer que l'on ne compte pas les étudiants <strong>de</strong> Setubal<br />

et du.Barro ', ni les Novices, car ceux-l<strong>à</strong> compt<strong>en</strong>t comme élèves, ceux <strong>de</strong> Setubal sous le<br />

nom <strong>de</strong> pratici<strong>en</strong>s, ceux du Barro sous celui d'appr<strong>en</strong>tis. 11 n'est pas nécessaire <strong>de</strong> m<strong>en</strong>tionner<br />

ceux-l<strong>à</strong>, <strong>à</strong> moins que ce r<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t soit explicitem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>mandé, car par le<br />

mot personnel on ne compr<strong>en</strong>d pas les élèves, si ce n'est pas expressém<strong>en</strong>t déclaré.<br />

«Monsieur. — En réponse <strong>à</strong> votre lettre officielle <strong>de</strong> ... <strong>de</strong> ..., j'ai l'honneur <strong>de</strong><br />

porter <strong>à</strong> votre connaissance que cet établissem<strong>en</strong>t est nommé (nom du Collège ou Institut<br />

d'après les Statuts approuvés), est <strong>à</strong> (localité, rue, numéro, *tc) et apparti<strong>en</strong>t <strong>à</strong> l'Association<br />

«Foi et Patrie» approuvée par le Gouvernem<strong>en</strong>t, dont le siège est Travessa <strong>de</strong><br />

Estêvâo Pinto, n.° 23, Lisbonne.<br />

«Le personnel est formé par (nombre) associés, <strong>à</strong> savoir: noms . . ., ...<br />

«<strong>Les</strong> autres qui dans cet établissem<strong>en</strong>t sont au service <strong>de</strong> la dite Association, sont:<br />

(nombre), ce sont les Pères et les Scolastiques non associésj employés supérieurs, (nombre)<br />

(coadjuteurs non associés) employés inférieurs et (nombre) domestiques. Quant <strong>à</strong> l'âge,<br />

ils sont tous majeurs et quant <strong>à</strong> la nationalité, ils sont tous portugais, excepté (nombre)<br />

. . . qui se consacr<strong>en</strong>t <strong>à</strong> l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s langues étrangères.<br />

«D'après l'indication donnée ci-<strong>de</strong>ssus (nombre) seulem<strong>en</strong>t apparti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t, dans celte<br />

maison, <strong>à</strong> l'Association Foi et Patrie, les autres sont au service <strong>de</strong> l'Association, sans'<br />

être associés.<br />

«Je crois avoir répondu ainsi <strong>à</strong> vos <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s; dans le cas où vous désireriez quelque<br />

autre r<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t ultérieur, veuillez vous adresser au siège <strong>de</strong> l'Association,<br />

Travessa <strong>de</strong> Estevâo Pinto, 23, Lisbonne».<br />

«Dieu Gar<strong>de</strong>, etc.».<br />

Lettre du Provincial sur les Résid<strong>en</strong>ces<br />

Quant aux Résid<strong>en</strong>ces, le Provincial Louis Campo Santo avouait clairem<strong>en</strong>t qu'elles<br />

étai<strong>en</strong>t <strong>en</strong> contrav<strong>en</strong>tion avec le décret <strong>de</strong> Hintze :<br />

«Rév. et Très Cher P. Castelo.— P. C.— Dans la précipitation <strong>de</strong> l'autre jour je<br />

vous ai <strong>en</strong>voyé la transcription du P. Socius sur ce que V. R. ce savait déj<strong>à</strong> au sujet <strong>de</strong>s<br />

exemptions, mais je n'ai pas répondu <strong>à</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> concrète <strong>de</strong> V. R. ce A mon avis,<br />

les Résid<strong>en</strong>ces <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> sont hors la loi, par conséqu<strong>en</strong>t elles doiv<strong>en</strong>t être considérées<br />

comme étant légalem<strong>en</strong>t dispersées; elles sont toujours sub persecutione et comme<br />

si elles vivai<strong>en</strong>t dans les catacombes».<br />

1<br />

Los jésuites scolastiques portugais étudiai<strong>en</strong>t alors la philosophie <strong>à</strong> Setubal et les humanités<br />

au Barro d'après le Catalogus Provinciae Lusitanac Soc. Jes. ineunte anno 1901, pp. 7 et 10.


11<br />

CHAPITRE TROISIEME<br />

<strong>Les</strong> jésuites, sachant que l<strong>en</strong>r sôjonr <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> était contraire aux lois du pays,<br />

plaçai<strong>en</strong>t leurs maisons sous le nom <strong>de</strong> jésuites étrangers<br />

Comme nous l'avons vu au chapitre précéd<strong>en</strong>t, les jésuites savai<strong>en</strong>t que les lois portugaises<br />

du temps <strong>de</strong> Joseph I er et <strong>de</strong> Pierre IV, non <strong>en</strong>core révoquées, s'opposai<strong>en</strong>t formellem<strong>en</strong>t<br />

<strong>à</strong> leur exist<strong>en</strong>ce légale et juridique <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>, donc <strong>à</strong> la<br />

possession <strong>de</strong> propriétés.<br />

Pour élu<strong>de</strong>r ces lois ils niai<strong>en</strong>t officiellem<strong>en</strong>t leur qualité <strong>de</strong> jésuites, ainsi que,<br />

pour maint<strong>en</strong>ir la possession <strong>de</strong>s propriétés qu'ils achetai<strong>en</strong>t, ils faisai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s contrats<br />

d'achat et <strong>de</strong> v<strong>en</strong>te au nom d'étrangers, lesquels étrangers n'étai<strong>en</strong>t autres que <strong>de</strong>s<br />

membres <strong>de</strong> la même Compagnie, naturels d'autres pays. Cette astuce ou manigance fut<br />

initiée par le Père Vinc<strong>en</strong>t Ficarelli, itali<strong>en</strong> réservé mais très rusé, qui <strong>en</strong>tra dans le<br />

gouvernem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s jésuites portugais vers la fin <strong>de</strong> 1806 et n'<strong>en</strong> sortit qu'<strong>en</strong> 1886.<br />

<strong>de</strong>s lois.<br />

Voyons quelques docum<strong>en</strong>ts <strong>de</strong>s dissimulations <strong>de</strong>s jésuites et <strong>de</strong> leur mépris<br />

La Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s jésuites <strong>à</strong> Lisbonne, Rue du Quelhas n.° 6, fut achetée par le<br />

Père Fulconis em 1865 aux anci<strong>en</strong>nes religieuses augustines anglaises par contrat verbal,<br />

valable p<strong>en</strong>dant quatre ans, fait <strong>de</strong>vant le procureur <strong>de</strong> celles ci, l'abbé Pierre Baines,<br />

sous promesse d'arg<strong>en</strong>t offert par M. e"° Marie d'Assomption <strong>de</strong> Saldanha e Castro,<br />

fille du Comte <strong>de</strong> P<strong>en</strong>amacor, comme il est dit dans l'Histoire <strong>de</strong> cette Résid<strong>en</strong>ce l et<br />

dans la Vie <strong>de</strong> Paola Frassinetti par le Cardinal Alphonse Capecelatro i . Mais <strong>en</strong> 1869,<br />

au bout <strong>de</strong>s quatre années indiquées au dit contrat verbal, quand il fallut faire le contrat<br />

officiel, le Père Ficarelli (alors déj<strong>à</strong> supérieur <strong>de</strong>s jésuites portugais) voulut qu'il fût<br />

fait au nom <strong>de</strong> trois jésuites anglais, les Pères George Lambert et Ignace Scoles et le<br />

frère coadjuteur H<strong>en</strong>ry Foley, résidant alors <strong>à</strong> Londres. Le prix d'achat fut <strong>de</strong><br />

2:800fJ0OO réis (14.000 frs.) et le contrat fut fait chez le notaire Jean Baptiste Ferreira<br />

le 3 mars 1869.<br />

1<br />

Histoire Col. Camp, et Résid. Lisb., p. 157.<br />

' Vita délia Serua <strong>de</strong> Dio Paola Fraisinetti, pp. 200 et 270.—aNondim<strong>en</strong>o il monastero e l'annessa<br />

ptùesa Ji Santa Brigida restarono propriet<strong>à</strong> délie Agostiniane inglcsi, aministrata per le Suore dal<br />

Padre don Pietro Baines, présid<strong>en</strong>te <strong>de</strong>l Collegio <strong>de</strong>i Santi Pietro e Paolo <strong>de</strong>i missionari inglesi. Se<br />

non che, ess<strong>en</strong>do il monastero assai vasto, per manteuerlo in piedi occorrevano molti danari ; on<strong>de</strong> il<br />

Padre Baines, a cui pareva inutile quella spcsa, fece divisamcnto di v<strong>en</strong><strong>de</strong>rc il eonv<strong>en</strong>to pel prezzo di<br />

ita mile lire. Il Ge.suita (P. Fulconis) ci mise l'occhio sopra; tanto piu che il monastero sarebbe<br />

stato adattatissimo per un ampio Collegio t<strong>en</strong>uto dalle Dorotee, e<br />

la chiesa ulTiziata <strong>de</strong>i pochi Gesuiti<br />

clic erano a Lisbona, sarebbe riuscita un c<strong>en</strong>tre di piet<strong>à</strong> e di opère buone. Si accinse quindi coraggiosam<strong>en</strong>te<br />

a trovaro le sessauta mila lire ;<br />

e la Provid<strong>en</strong>za gli v<strong>en</strong>ue in aiuto per tal modo. Viveva in<br />

Lûbona assai piam<strong>en</strong>te o con <strong>de</strong>si<strong>de</strong>rio di consacrarsi a Dio in vita religiosa una nobilo donzella, Dona<br />

-Maria <strong>de</strong>lT AsMinzione di Saldanha e Castro, ligliuola <strong>de</strong>l conte di P<strong>en</strong>amacor. Era costei ricca di<br />

averi e anche più ricca di cuore; on<strong>de</strong> il fare <strong>de</strong>l b<strong>en</strong>e col suo danaro le riusciva ili gran<strong>de</strong> allegrezza.<br />

Aliéna, como fu sempre, dal pr<strong>en</strong><strong>de</strong>r marito, ed ess<strong>en</strong>do ancora in et<strong>à</strong> minore, chiese al tu tore<br />

(che dUgraziatam<strong>en</strong>te aviva perduto e padre e madré) una parte <strong>de</strong>llo sessantamila lire. Ott<strong>en</strong>uto il<br />

danaro, lo die<strong>de</strong> al Padre Fulconis per la compra <strong>de</strong>l monastero, e promise il reste app<strong>en</strong>a che fosse<br />

raagiore. Il monastère fu comperato dal Fulconis; e la giovine donatrice voile ehe la chiesa e una<br />

piccola parti- di esso monastero fossero ad<strong>de</strong>tte ad use <strong>de</strong>i Gesuiti. Il reste délia casa, al tutto separata<br />

con opposite mura, -i darebbe aile Suore. Il Padre con i suoi Cumpagni, riattata alla meglio la<br />

parte <strong>de</strong>l monastero loro <strong>de</strong>stinata, vi passarauo tutti e in poeo tempo, cou il <strong>de</strong>coroso spl<strong>en</strong>dore <strong>de</strong>l<br />

culto e cou lo eonfessioni e h- prediche, attirarouo molta g<strong>en</strong>te nella chiesa di santa Brigida b<strong>en</strong>chè


12<br />

On peut lire ceci même dans l'Histoire <strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> Lisbonne, comme il suit:<br />

«Au comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l'année 1869 le jardin, la petite maison sise vers le sud <strong>de</strong><br />

l'église, l'église elle-même, consacrée <strong>à</strong> Sainte Brigitte veuve, et une partie du monastère<br />

y att<strong>en</strong>ant, <strong>de</strong>vinr<strong>en</strong>t la propriété <strong>de</strong> la Compagnie <strong>de</strong> Jésus, moy<strong>en</strong>nant un contrat<br />

par <strong>de</strong>vant notaire, contre remise du prix conv<strong>en</strong>u. Mais pour <strong>de</strong>s raisons justifiées<br />

le contrat fut fait au nom <strong>de</strong> trois Pères <strong>de</strong> la Province Anglaise. L'arg<strong>en</strong>t pour<br />

l'achat <strong>de</strong> l'église et une partie du monastère y att<strong>en</strong>ant nous a été fourni par la pieuse<br />

libéralité <strong>de</strong> Marie <strong>de</strong> l'Assomption <strong>de</strong> Saldanha e Castro, <strong>de</strong>moiselle <strong>de</strong> la noblesse qui<br />

<strong>en</strong>tra dans la Congrégation <strong>de</strong>s Sœurs du Sacré Cœur <strong>de</strong> Jésus» l .<br />

La propriété du Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> fut achetée <strong>en</strong> 1858 pour 4.000 écus (20.000<br />

francs) par le jésuite portugais Charles Ra<strong>de</strong>maker, avec l'arg<strong>en</strong>t <strong>de</strong> son patrimoine et<br />

sous l'autorisation <strong>de</strong> ses supérieurs ainsi que l'exig<strong>en</strong>t les règles <strong>de</strong> l'Ordre -.<br />

En 1861 et <strong>en</strong> 1865, <strong>en</strong>core avec l'arg<strong>en</strong>t <strong>de</strong> Ra<strong>de</strong>maker et l'autorisation du Provincial,<br />

on ajouta quelques bâtim<strong>en</strong>ts <strong>à</strong> la maison primitive, comme on le voit dans<br />

l'Histoire <strong>de</strong> ce Collège 3 .<br />

Mais <strong>en</strong> 1873, déj<strong>à</strong> sous le<br />

gouvernem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> Ficarelli, cette propriété <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong><br />

fut passée aux noms <strong>de</strong>s trois mêmes jésuites anglais, les Pères George Lambert et<br />

Ignace Scoles et le coadjuteur H<strong>en</strong>ry Foley, lesquels, d'après un contrat fictif fait par<br />

leur procureur, le jésuite portugais P. Monteiro, chez le notaire Cardoso <strong>à</strong> Lisbonne,<br />

le 21 mars 1873, feignir<strong>en</strong>t acheter la propriété primitive avec les nouveaux bâtim<strong>en</strong>ts<br />

pour 5.500 écus (27.500 frs).<br />

Et les jésuites n'eur<strong>en</strong>t pas honte d'ajouter <strong>à</strong> ce sophisme <strong>de</strong> la loi leur note caractéristique<br />

<strong>de</strong> manque <strong>de</strong> patriotisme, car après cet achat fictif ils faisai<strong>en</strong>t flotter le<br />

drapeau anglais sur cette propriété achetée avec <strong>de</strong> l'arg<strong>en</strong>t portugais. Voici comm<strong>en</strong>t<br />

ils racont<strong>en</strong>t ce fait dans Y Histoire du Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong>, p. 67 :<br />

t Et, afin que la possession <strong>de</strong> la propriété pût se maint<strong>en</strong>ir intacte pour le collège,<br />

contre n'importe quelle invasion <strong>de</strong> ses <strong>en</strong>nemis actuels, celle-ci a été transférée <strong>à</strong> une<br />

société <strong>de</strong> catholiques anglais, par un traité <strong>de</strong> v<strong>en</strong>te faite d'accord avec les lois <strong>en</strong><br />

vigueur et pour cette raison les jours <strong>de</strong> fête on voU l>. drapeau anglais flotter <strong>à</strong> la faça<strong>de</strong><br />

du collège» 4 .<br />

En comparant maint<strong>en</strong>ant ce rapport <strong>de</strong> l'Histoire du Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> avec<br />

l'autre analogue <strong>de</strong> l'Histoire <strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> Lisbonne, cité plus -haut, on voit que<br />

celui du Collège est plus jésuitiquem<strong>en</strong>t<br />

hypocrite que celui <strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce, parce que<br />

dans celui-l<strong>à</strong> on dit que la propriété a été transférée <strong>à</strong> une société <strong>de</strong> catholiques anglais<br />

et dans celui ci qu'elle a passé au nom <strong>de</strong> trois Pères <strong>de</strong> la Province Anglaise<br />

;<br />

quand,<br />

après tout, ces catholiques anglais n'étai<strong>en</strong>t autres que les trois mêmes jésuites <strong>de</strong> la<br />

1<br />

«Anno 18G9 inito rite contractu et apud Tabellionem firmato, pretioque persoluto, hortua cum<br />

parva domo, quae ad miridiem Ecclesiae sita est, ipsaque Ecelesia Divae Bergittae viduae dicata<br />

cum parte adjuncti mouasterii in proprietatem Societatis eessit. Contractus tam<strong>en</strong> justas ob causas<br />

initus est nomine trium Patrum Angliae Provinciae. Ad comparandam Ecclesiam cum parte<br />

adjuncti<br />

monasterii, pecuniam pro sua ]iietate ac liberalitatc suppeditavit D. Maria <strong>de</strong> Assumptionc <strong>de</strong> Saldanha<br />

et Castro, nobilis virgo, quae nom<strong>en</strong> dédit congregationi Monialium S."" Cordis Jesu». Hist.<br />

Col. Camp, et Résid. Lisb., pp. 1G3 et ICI.<br />

2 Hist. Col. Camp, et Rés. Lisb., pp. 10, 16.<br />

:i<br />

Hist. Coll. Camp, et liés. Lisb., pp. 31 et 53.<br />

i<br />

«At autein contra quameumque mo<strong>de</strong>rnorum propvietatis osorum invasionetn ut incolumia servaretur<br />

Collegio possessio, in quamdam Catholicorum<br />

Anglorum societatem v<strong>en</strong>dîtionia contractu' ad<br />

le^es vig<strong>en</strong>tes exacto translata est, et hae <strong>de</strong> causa singulis diebus festis Angliae vexilluni supra<br />

Collegii vestibulum ab omnibus fluctuari vi<strong>de</strong>tur». Hist. Coll. Camp, et Rés. Lisb., p. 67.


13<br />

Province Anglaise. Dans l'Histoire <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> on dit <strong>en</strong>core que cela s'est fait parce<br />

qu'on craignait une invasion <strong>de</strong>s <strong>en</strong>nemis actuels <strong>de</strong> la propriété, quand ce que l'on<br />

craignait <strong>en</strong> effet était l'exécution probable <strong>de</strong>s lois anti jésuitiques <strong>de</strong> Pombal et d'Aguiar,<br />

non <strong>en</strong>core révoquées. On doit cep<strong>en</strong>dant se rappeler que Pombal fit arrêter et bannir<br />

non seulem<strong>en</strong>t les jésuites portugais, mais aussi ceux <strong>de</strong>s autres pays, comme ils le<br />

dis<strong>en</strong>t eux-mêmes dans le Catalogus Provinciœ Lusitanœ S. J. ineunte anno 1892, auquel<br />

est annexé le plan <strong>de</strong> la Tour <strong>de</strong> St. Juli<strong>en</strong>, avec le nom <strong>de</strong>s jésuites que le<br />

Marquis <strong>de</strong> Pombal y avait fait <strong>en</strong>fermer.<br />

Le Collège <strong>de</strong> St. Fidèle avait été construit par le Père Augustin <strong>de</strong> l'Annonciation,<br />

religieux franciscain, qui était sorti du couv<strong>en</strong>t <strong>à</strong> cause <strong>de</strong> la loi <strong>de</strong> <strong>1834</strong>. Ce collège<br />

fut fondé pour servir <strong>de</strong> séminaire <strong>à</strong> <strong>de</strong>s orpbelins pauvres ou abandonnés; c'est<br />

pourquoi, pour la construction et l'<strong>en</strong>treti<strong>en</strong> <strong>de</strong> la maison. Frère Augustin chercha <strong>à</strong><br />

obt<strong>en</strong>ir, <strong>en</strong> plus <strong>de</strong> son patrimoine, <strong>de</strong>s aumônes et <strong>de</strong>s dons <strong>de</strong> plusieurs personnes <strong>de</strong><br />

sa connaissance ou naturellem<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong>faisantes, et il y réussit.<br />

L'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t fut d'abord donné dans ce collège par quelques prêtres séculiers,<br />

et<br />

<strong>de</strong> 1860 <strong>à</strong> 1802 par <strong>de</strong>s lazaristes; mais, ceux-ci ayant été bannis cette année-l<strong>à</strong>, Frère<br />

Augustin ne pouvant obt<strong>en</strong>ir pour son collège les Frères <strong>de</strong> St. Joseph <strong>de</strong> Calazans,<br />

comme il le désirait, le confia <strong>en</strong> 1803 <strong>à</strong> la direction <strong>de</strong>s jésuites. Cep<strong>en</strong>dant la propriété<br />

<strong>de</strong> ce collège garda le nom <strong>de</strong> son fondateur Frère Augustin. Mais le 13 novembre<br />

1873 un contrat <strong>de</strong> v<strong>en</strong>te fut fait <strong>en</strong> l'étu<strong>de</strong> du notaire Joaehira Barreiros Cardoso,<br />

par lequel Frère Augustin v<strong>en</strong>dait fictivem<strong>en</strong>t la maison avec le terrain, pour 2 contos<br />

(10.000 francs), aux trois mêmes jésuites anglais George Lambert, Ignace Scoles et<br />

H<strong>en</strong>ry Foley. Frère Augustin mourut l'année suivante, le 4 mar* 1874 l .<br />

La Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s jésuites <strong>à</strong> Covilh<strong>à</strong> qui était la propriété <strong>de</strong> Marie Joseph <strong>de</strong><br />

Sousa Tavares, propriétaire aussi d'un collège qu'elle avait fondé près <strong>de</strong> cette résid<strong>en</strong>ce<br />

et qu'elle avait donné aux Sœurs Dorothées, passa <strong>en</strong> 1875, par contrat <strong>de</strong> v<strong>en</strong>te,<br />

au nom <strong>de</strong>s trois mêmes jésuites anglais George Lambert, Ignace Scoles et H<strong>en</strong>ry Foley.<br />

Plus tard un nouveau bâtim<strong>en</strong>t, fait par l'ordre du Supérieur P. Miranda. passa<br />

au nom d'un autre jésuite espagnol, le I*. Nicolas Rodriguez "-. Cette Marie Joseph Tavares<br />

mourut l'année suivante, 1876 3 peu <strong>de</strong> mois après la réalisation du<br />

,<br />

contrat <strong>de</strong><br />

v<strong>en</strong>te, comme cela était arrivé <strong>à</strong> Frère Augustin <strong>de</strong> l'Annonciation.<br />

C'était l'œuvre constante <strong>de</strong> Ficarelli, cherchant <strong>à</strong> sophistiquer les lois portugaises.<br />

Mais cette œuvre était non seulem<strong>en</strong>t une mystification pour les lois portugaises,<br />

mais aussi une mystification pour les constitutions mêmes <strong>de</strong> la Compagnie <strong>de</strong> Jésus,<br />

car les jésuites, après les vœux simples, ne peuv<strong>en</strong>t pas avoir l'usage direct ni l'administration<br />

<strong>de</strong> leurs bi<strong>en</strong>s, et après les <strong>de</strong>rniers vœux ils perd<strong>en</strong>t même le droit <strong>à</strong> la<br />

propriété.<br />

C'est ce qu'on lit dans le comm<strong>en</strong>taire fait par le jésuite anglais Auguste Oswald,<br />

1<br />

Ce qui est écrit ici an sujet ilu Collège rie St. Fidèle est extrait iln Rapport du Dr. Refoios,<br />

fin Rapport • 1 1 1 Dr. Ramos Pre.to, do la Réponse au Rapport 'lu Dr. Ramos Prcto par le P. Candi<strong>de</strong><br />

M<strong>en</strong><strong>de</strong>s S. J., <strong>de</strong> VHist. Coll. Camp., pp. 13 et 11 et dp* Catalogues <strong>de</strong>s Provinces dp Castille et <strong>Portugal</strong>.<br />

2 Rapport du Dr. Refoios, pp. 13 et 11. Histoire manuscrite <strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> Covilh<strong>à</strong> aux<br />

Archives Congréganistes.<br />

3<br />

Capecelatro Vita di Paola Frassinetti, pp. 35G et 351.


'<br />

14<br />

sur<br />

ce point <strong>de</strong>s Constitutions <strong>de</strong> la Compagnie <strong>de</strong> Jésus, publié avec l'approbation <strong>de</strong>s<br />

supérieurs *.<br />

En terminant cette<br />

exposition par laquelle nous avons vu eomm<strong>en</strong>t les jésuites ont<br />

fait passer, <strong>en</strong> <strong>de</strong>s noms étrangers, leurs maisons qui primitivem<strong>en</strong>t étai<strong>en</strong>t au nom <strong>de</strong><br />

portugais, nous <strong>de</strong>vons faire remarquer non seulem<strong>en</strong>t leur int<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> sophismer les<br />

lois portugaises, mais aussi le manque <strong>de</strong> patriotisme qu'ils ont montré <strong>en</strong> faisant interv<strong>en</strong>ir<br />

<strong>de</strong>s étrangers dans <strong>de</strong>s propriétés portugaises, construites et augm<strong>en</strong>tées avec <strong>de</strong><br />

l'arg<strong>en</strong>t portugais et par <strong>de</strong>s portugais. Ils choisir<strong>en</strong>t surtout la nation anglaise comme<br />

pour effrayer le gouvernem<strong>en</strong>t portugais, par la m<strong>en</strong>ace <strong>de</strong>s cuirassés anglais. Pour faire<br />

para<strong>de</strong> <strong>de</strong> leur anti-patriotisme, ils faisai<strong>en</strong>t flotter au v<strong>en</strong>t, les jours <strong>de</strong> fête, le drapeau<br />

anglais sur la faça<strong>de</strong> du Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong>, propriété que tout le mon<strong>de</strong> savait portugaise<br />

<strong>de</strong> fait, et, lorsque les <strong>en</strong>quêteurs officiels allai<strong>en</strong>t examiner leurs autres maisons,<br />

ils prés<strong>en</strong>tai<strong>en</strong>t aussitôt les contrats <strong>de</strong> v<strong>en</strong>te fictive aux jésuites étrangers, comme ils<br />

fir<strong>en</strong>t pour le Collège <strong>de</strong> St. Fidèle et pour la Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> Covilhâ, ainsi que le déclare<br />

l'<strong>en</strong>quêteur officiel le Dr. Refoios, dans le Rapport prés<strong>en</strong>té au Gouvernem<strong>en</strong>t, vers<br />

la fin <strong>de</strong> décembre 1880 2 . Et<br />

pour montrer que ce manque <strong>de</strong> patriotisme est la note<br />

caractéristique <strong>de</strong>s jésuites, ils voulur<strong>en</strong>t fixer cette idée sur une photographie <strong>de</strong>s recteurs<br />

<strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong>, dont on voit la gravure p. 11 <strong>de</strong> V Album Commémoratif du 50 e<br />

Anniversaire <strong>de</strong> la Fondation du Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> <strong>en</strong> 1908, que nous avons reproduite<br />

<strong>de</strong>vant la page 150 <strong>de</strong> l'Histoire du Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> et <strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s jésuites<br />

<strong>à</strong> Lisbonne, où on lit, au milieu, cette phrase portugaise : A pâtria do Sâbio é todo<br />

o Mundo; ce qui <strong>en</strong> français veut dire: La patrie du Savant est le Mon<strong>de</strong> <strong>en</strong>tier.<br />

1<br />

Comm<strong>en</strong>tarius in <strong>de</strong>cem partes Constitutionum Societatis Jetu. Opus manuscriptum: composui<br />

Augustinus Oswald, Soc. Jesu sacerdos.<br />

Ex typis societatis Sancti Augustini. Desclee, De Brouwer et Socii.— Insulis— Anno Domini<br />

MDCCCXCII.— (Superiorum permisnu). Ex domo tertiae Probalionis Portico (near Prescot, Lancashire,<br />

England), pp. 548 <strong>à</strong> 558.<br />

Abdicatio Bonorum.— 411— De paupertate singularum classium.'— Supra jam explanatum est îti<br />

variis religionibus etiam paupertatis obligationem variam esse, cnm salvis principiis g<strong>en</strong>eralibus<br />

maxime p<strong>en</strong><strong>de</strong>at ab ipsis religionibus, quae particularia secundum proprium religiouis finem in hac<br />

materia statuantur. In Societate Jesu porro praeter banc differ<strong>en</strong>tiam ab aliis ordinibus, differt<br />

paupertas etiam in variis ejus<strong>de</strong>m Societatis classibus, prout varia sunt eorum vota variasque etiam<br />

Constitutiones circa variorum votorum materiam et obligationem. Necesse proin est, singularum classium<br />

paupertatem distincte proponere.<br />

415— Primis votis simplicibus, finito bi<strong>en</strong>nio novitiatus emissis, retin<strong>en</strong>t quidam Nostri dominium<br />

(lirectum in bona sua, sive jus possid<strong>en</strong>di ea; promiftunt tam<strong>en</strong> in ipso voto etiam horum bonorum<br />

abdicationem facere, iisque se prorsus exuere, quamlo Superior juxta Constitutiones id jubeat.<br />

Dominio autem indirecto, seu jure dispon<strong>en</strong>di <strong>de</strong> rébus suis, privantur saltem, quoad liceitatem.<br />

418—2 — Itaque abdicatio bonorum in Societate Jesu est jus et simul obligatio, jure ordinario<br />

419-a. — Regulariter débet fieri bonorum abdicatio intra quadri<strong>en</strong>nium ab ingressu in<br />

Societatem,<br />

vel potius in fine ejus.<br />

423— Bonorum abdicatio débet esse absoluta et perpétua.<br />

et in certa dop<strong>en</strong><strong>de</strong>utia a Superiore exu<strong>en</strong>di se pl<strong>en</strong>e et définitive omnibus bonis, quae possi<strong>de</strong>t religiosus,<br />

omnisbusque juribus possid<strong>en</strong>di vel acquir<strong>en</strong>di, ita ut perfecto s<strong>en</strong>su <strong>de</strong>sinat esse proprietarius.<br />

425 — -Requiritur <strong>de</strong>in, ut abdicatio sit universalis, compreh<strong>en</strong>datque omnia bona et jura, p<strong>en</strong>siones,<br />

c<strong>en</strong>sus, vitalitia, in quantum fiere<br />

2 Dr. Refoios, Papport, pp. 19 et 43.<br />

potest.


15<br />

CHAPITRE QUATRIÈME<br />

Difficultés que les jésuites ont trouvées dans le système<br />

<strong>de</strong> v<strong>en</strong>tes fictives <strong>de</strong> leurs maisons<br />

<strong>à</strong> <strong>de</strong>s jésuites étrangers et ruses dont ils se sont servis pour les résoudre<br />

Le procureur <strong>de</strong> la Mission, plus tard Province Portugaise, le Père Bernardin Monteiro,<br />

compr<strong>en</strong>ait bi<strong>en</strong> les idées du Supérieur, le Père Ficarelli, et, parfaitem<strong>en</strong>t convaincu<br />

du besoin <strong>de</strong> maint<strong>en</strong>ir le sophisme <strong>de</strong>s lois portugaises, il écrivit sur la première<br />

feuille d'un <strong>de</strong> ses livres <strong>de</strong> notes et <strong>de</strong> comptes, comm<strong>en</strong>cé <strong>en</strong> 1871, qui se trouve aux<br />

Archives Congréganistes, ce qui suit:<br />

«Avis confid<strong>en</strong>tiels an Procureur<br />

«1.° On doit savoir que la Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s Ingleziihas ' <strong>de</strong> la Rue du Quelhas <strong>en</strong> partie<br />

achetée avec l'arg<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la Mission et <strong>en</strong> partie avec celui <strong>de</strong>s Bi<strong>en</strong>faiteurs, le fut<br />

surtout au nom d'une compagnie anglaise; dont les noms sont George Lambert, Prêtre,<br />

Ignace Cory Scoles, Prêtre, et H<strong>en</strong>ri Foley: tous <strong>de</strong> notre Compagnie. Le motif <strong>de</strong> cette<br />

manière d'agir est évid<strong>en</strong>t.<br />

«Le Procureur, ou un autre quelconque, doit donc avoir soin que le nombre trois,<br />

qui forme la compagnie, soit complet, s'<strong>en</strong>quérant du Procureur <strong>de</strong> la Province d'Angleterre<br />

et le priant, dans le cas où l'un d'eux manquerait, d'<strong>en</strong> nommer un autre qui<br />

le remplace (mais le faisant légalem<strong>en</strong>t).<br />

«L'achat a été fait par une procuration, qui donne au procureur le pouvoir d'acheter<br />

plus <strong>de</strong> bi<strong>en</strong>s au nom <strong>de</strong> la dite compagnie et <strong>de</strong> les administrer. Elle donne aussi<br />

le pouvoir <strong>de</strong> subroger».<br />

<strong>Les</strong> premiers Procureurs portugais que les jésuites étrangers nommèr<strong>en</strong>t comme<br />

leurs représ<strong>en</strong>tants <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> dans les divers contrats d'achat, comme on le voit par<br />

les contrats respectifs, fur<strong>en</strong>t le Père Bernardin Monteiro, Procureur <strong>de</strong> la Mission et<br />

plus tard, <strong>de</strong> la Province, et le frère coadjuteur François <strong>de</strong> Campos, ai<strong>de</strong> du Procureur<br />

<strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong>. Plus tard on voit aussi comme procureurs <strong>de</strong>s acheteurs et v<strong>en</strong><strong>de</strong>urs les<br />

frères coadjuteurs Joseph Barroso et Jean Trocado, ai<strong>de</strong>s du Procureur <strong>de</strong> la Province.<br />

Ces procureurs étai<strong>en</strong>t donc aussi jésuites comme le prouv<strong>en</strong>t les Catalogues imprimés<br />

das Provinces Castillane et Portugaise et l'Histoire du Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> et <strong>de</strong><br />

la Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s <strong>Jésuites</strong> <strong>à</strong> Lisbonne où on peut voir leurs portraits respectivem<strong>en</strong>t <strong>en</strong><br />

regard <strong>de</strong>s pages 93 et 135.<br />

Par les avis confid<strong>en</strong>tiels ci-<strong>de</strong>ssus transcrits on voit parfaitem<strong>en</strong>t la frau<strong>de</strong> et la<br />

fiction <strong>de</strong> l'achat, puisqu'on y dit que c'est le Procureur <strong>de</strong> la Province d'Angleterre qui <strong>de</strong>vra<br />

nommer un autre 'propriétaire, pour remplacer celui qui vi<strong>en</strong>drait <strong>à</strong> manquer.<br />

Mais ces avis confid<strong>en</strong>tiels tombèr<strong>en</strong>t <strong>en</strong> oubli, dans le cours <strong>de</strong>s temps, ou même<br />

ont été mis <strong>de</strong> côté, comme inutiles, par les Provinciaux portugais après le Père Ficarelli,<br />

qui laissa le gouvernem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la Province <strong>en</strong> 188G. Ainsi, par exemple, <strong>en</strong> 1894<br />

le jésuite portugais, procureur <strong>de</strong>s trois jésuites anglais, passa la propriété du Collège<br />

<strong>de</strong> S. Fidèle, d'après l'ordre du Provincial, au nom <strong>de</strong> cinq jésuites portugais. Mais ces<br />

Provinciaux, tout <strong>en</strong> comptant déj<strong>à</strong> trop sur leur stabilité <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>, n'oublièr<strong>en</strong>t<br />

i Cette maison fut p<strong>en</strong>dant longtemps appelée


16<br />

cep<strong>en</strong>dant pas tout <strong>à</strong> fait le système <strong>de</strong> Ficarelli et <strong>en</strong> <strong>de</strong>s contrats postérieurs <strong>de</strong> v<strong>en</strong>te<br />

ils eur<strong>en</strong>t soin <strong>de</strong> mettre aussi <strong>de</strong>s noms <strong>de</strong> jésuites étrangers, mais <strong>de</strong> ceux qui appart<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t<br />

<strong>à</strong> la Province Portugaise, où étai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>trés quelques jeunes g<strong>en</strong>s v<strong>en</strong>us <strong>de</strong>s<br />

Ecoles Apostoliques <strong>de</strong> France et <strong>de</strong> Belgique.<br />

Mais comme dans ces contrats d'achat et <strong>de</strong> v<strong>en</strong>te tout était fictif, les pseudo -propriétaires<br />

ne savai<strong>en</strong>t ri<strong>en</strong> et ne se souciai<strong>en</strong>t guère <strong>de</strong> leurs pseudo-propriétés, puisque,<br />

ainsi que l'ordonne leur Institut, ils font tout d'après l'ordre du Provincial. C'est aussi<br />

d'après l'ordre <strong>de</strong> celui-ci qu'ils passai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s procurations très amples <strong>à</strong> d'autres jésuites,<br />

généralem<strong>en</strong>t les frères coadjuteurs ai<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s Procureurs <strong>de</strong> la Province, qu'on<br />

chargeait <strong>de</strong> tout travail.<br />

Souv<strong>en</strong>t, <strong>de</strong>s cas très comiques se produisir<strong>en</strong>t et les Supérieurs se vir<strong>en</strong>t <strong>en</strong> grand<br />

embarras pour parv<strong>en</strong>ir <strong>à</strong> les résoudre. Parfois quelques pseudo-propriétaires auxquels<br />

on <strong>de</strong>mandait <strong>à</strong> qui ils avai<strong>en</strong>t acheté ou v<strong>en</strong>du, l'ignorai<strong>en</strong>t complètem<strong>en</strong>t, ainsi qu'ils<br />

ignorai<strong>en</strong>t aussi quels étai<strong>en</strong>t leurs héritiers ou <strong>de</strong> qui ils avai<strong>en</strong>t hérité, car, lorsqu'on<br />

dressait les contrats <strong>de</strong> v<strong>en</strong>te, les Supérieurs faisai<strong>en</strong>t aussitôt nommer d'autres jésuites<br />

comme héritiers <strong>de</strong>s acheteurs. Nous allons examiner quelques uns <strong>de</strong> ces cas et la manière<br />

dont ils sont prés<strong>en</strong>tés par les jésuites eux-mêmes, dans <strong>de</strong>s lettres aujourd'hui<br />

conservées aux Archives Congréganistes.<br />

Comme nous l'avons vu au chapitre précéd<strong>en</strong>t, la propriété du Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong><br />

avait passé <strong>en</strong> 1873 du nom du jésuite portugais le Père Ra<strong>de</strong>maker, au nom <strong>de</strong><br />

trois jésuites anglais Lambert, Scoles et Foley. Mais ces étrangers mourur<strong>en</strong>t sans que<br />

l'on p<strong>en</strong>sât <strong>à</strong> exécuter les Avis Confid<strong>en</strong>tiels au Procureur cités plus haut. George Lambert<br />

mourut le 3 septembre 1882, H<strong>en</strong>ry Foley le 19 novembre 1891 ' et le <strong>de</strong>rnier,<br />

Ignace Scoles, le 15 juillet 1896, sans que, <strong>à</strong> la mort <strong>de</strong> celui-ci, personne se prés<strong>en</strong>tât<br />

comme son héritier. Ainsi <strong>de</strong>puis du 15 juillet 1896 le Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong><br />

n'avait pas <strong>de</strong> propriétaire. Le cas était comique ! une propriété énorme sans maître ! ! !<br />

Que fit le Provincial <strong>de</strong>s jésuites portugais, alors le Père Joachim Campo Santo, qui avait<br />

appris la mort du <strong>de</strong>rnier pseudo-propriétaire par le Catalogua <strong>de</strong> la Province Anglaise<br />

qui lui était <strong>en</strong>voyé chaque année? 2 Il ne fut pas préoccupé du fait, vu que tout se passait<br />

<strong>en</strong> famille <strong>en</strong>tre frères <strong>de</strong> la même Compagnie. Il appela l'anci<strong>en</strong> procureur <strong>de</strong>s<br />

anglais, le frère coadjuteur, son sujet, François <strong>de</strong> Campos, qui treize ans auparavant<br />

avait reçu d'eux une procuration avec pleins pouvoirs pour acheter et v<strong>en</strong>dre, et lui<br />

ordonna <strong>de</strong> v<strong>en</strong>dre la propriété du Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> <strong>à</strong> un autre frère coadjuteur<br />

Joseph Barroso, comme procureur <strong>de</strong> quatre Pères jésuites <strong>de</strong> la Province Portugaise,<br />

Antoine da Costa Cor<strong>de</strong>iro, Joseph Bramley, Joseph Joachim <strong>de</strong> Magalhâes et Joseph<br />

Dias Silvares. Un <strong>de</strong> ces quatres Pères, Joseph Bramley, était anglais, mais avait été<br />

admis comme novice scolastique <strong>de</strong> la Province Portugaise le 7 septembre 1882, ayant<br />

<strong>à</strong> peine dix neuf ans, puisqu'il était né le 20 novembre 1862, ceci d'après le Catalogue<br />

<strong>de</strong> la Province Portugaise 3 .<br />

Comme on le voit le Supérieur n'oublia pas d'introduire un anglais <strong>en</strong>tre les pseudopropriétaires<br />

<strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong>, quoique dès sa jeunesse il appartînt <strong>à</strong> la Province Portugaise<br />

<strong>de</strong> la Compagnie <strong>de</strong> Jésus.<br />

Cette pseudo-v<strong>en</strong>te fut faite <strong>en</strong> l'étu<strong>de</strong> du notaire Grilo <strong>de</strong> la ville <strong>de</strong> Lisbonne, le<br />

• Vita Functi in Societate Jesu (1811-1891), pp. 405 et 538.<br />

2<br />

On a trouvé beaucoup <strong>de</strong> Catalogues <strong>de</strong> la Province Anglaise au siège du Provincial, <strong>en</strong> <strong>1910</strong>,<br />

<strong>à</strong> la date <strong>de</strong> la proclamation do la République Portugaise.<br />

3<br />

Catalogus Provinciae Lusitanae Soc. Jesu ineunte ano 1883,


17<br />

3 mai 1897, c'est-<strong>à</strong>-dire presque une année après la mort du <strong>de</strong>rnier pseudo-propriétaire<br />

anglais.<br />

D où il résulte que ces nouveaux pseudo-propriétaires <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> ont acheté la<br />

propriété <strong>à</strong> <strong>de</strong>s personnes mortes!<br />

La propriété- <strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce jésuitique <strong>de</strong> Covilh<strong>à</strong> fût aussi v<strong>en</strong>due primitivem<strong>en</strong>t<br />

aux trois déj<strong>à</strong> fameux jésuites anglais Lambert, Scoles et Foley, par l'achat fictif <strong>de</strong><br />

1875. Plus tard cette propriété, par une nouvelle v<strong>en</strong>te fictive, passa au nom <strong>de</strong> jésuites<br />

portugais. Mais <strong>en</strong> 1908 le Supérieur <strong>de</strong> cette Résid<strong>en</strong>ce, le, P. Joseph da Cruz eut<br />

<strong>de</strong>s doutes sur la propriété nominale d'une certaine partie <strong>de</strong> l'édifice. Je vais transcrire<br />

quelques uns <strong>de</strong> ses doutes ;<br />

ils sont très intéressants pour l'étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la psychologie <strong>de</strong>s<br />

jésuites portugais <strong>de</strong> cette époque et mérit<strong>en</strong>t pour cela d'être consignés dans cette histoire<br />

:<br />

tCovilhâ le .31 août 1909.— Mon très cher Père.— J'ai <strong>en</strong>voyé hier par main propre<br />

et adressé au P. Ferreira, pour qu'il le remette <strong>à</strong> V. R ce , le contrat se rapportant<br />

<strong>à</strong> la propriété <strong>de</strong> cette Résid<strong>en</strong>ce. On voit par l<strong>à</strong> que les trois propriétaires anglais ont<br />

acquis par <strong>de</strong>ux fois la propriété <strong>de</strong> tout ce que nous avons ici et que, <strong>en</strong> transmettant<br />

cette propriété aux propriétaires actuels, on n'a fait m<strong>en</strong>tion dans Je contrat que <strong>de</strong> ce<br />

qui avait été l'objet du <strong>de</strong>uxième contrat, l'église restant donc, <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors., Ce n'était pas<br />

l'int<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> celui qui avait m<strong>en</strong>é cette affaire, mais il est évid<strong>en</strong>t que nous ne pouvons<br />

nous dire légalem<strong>en</strong>t les maîtres <strong>de</strong> l'église.<br />

t <strong>Les</strong> anglais sont déj<strong>à</strong> morts. Par la mort du premier restai<strong>en</strong>t héritiers les <strong>de</strong>ux autres,<br />

qui avai<strong>en</strong>t reçu légalem<strong>en</strong>t l'habilité. Le <strong>de</strong>uxième est mort il y a plusieurs années.<br />

Du troisième je ne suis pas sûr, mais il est possible qu'il soit déj<strong>à</strong> mort. Quid faci<strong>en</strong>duml<br />

«Lors même que celui-ci fût vivant et voulût recevoir l'habilité, il y aurait une complication,<br />

que'je ne veux pas indiquer maint<strong>en</strong>ant, parce que je ne crois pas nécessaire<br />

<strong>de</strong> le confier <strong>à</strong> la poste.<br />

«Sera-t-il possible d'introduire dans les contrats <strong>de</strong> v<strong>en</strong>te futurs, ce que, par distraction,<br />

on a omis dans le<br />

<strong>de</strong>rnier?<br />

«Enfin je ne vois pas la solution que la difficulté pourrait avoir et il serait inutile<br />

d'indiquer ce qui me vi<strong>en</strong>t <strong>à</strong> la tête et peut être une absurdité.<br />

qui,<br />

«Je recomman<strong>de</strong> ceci h V. R re et j'espère que vous trouverez le remè<strong>de</strong> <strong>à</strong> un mal<br />

au premier abord, me semble sans remè<strong>de</strong>.<br />

«De V. R ce Serviteur <strong>en</strong> J. C. — J. Cruz, S. J.».<br />

«Covilha le 6 décembre 1909.— Mon très cher Père Recteur.— P. C.— J'ai fait<br />

savoir comm<strong>en</strong>t étai<strong>en</strong>t décrites dans le registre cette maison et l'église et je vous <strong>en</strong>voie<br />

la copie <strong>de</strong> la <strong>de</strong>scription, d'où l'on voit que l'église aussi est au nom <strong>de</strong>s trois.<br />

«En vue <strong>de</strong> cela on pourra payer aux finances les droits <strong>de</strong> transmission <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux<br />

choses et <strong>de</strong> ce côté on <strong>de</strong>vra faire le contrat.<br />

«Je ne sais pas si on fera <strong>de</strong>s difficultés pour <strong>en</strong>registrer car je ne connais pas<br />

les cours <strong>de</strong> cet <strong>en</strong>registrem<strong>en</strong>t et je ne sais pas quels sont les docum<strong>en</strong>ts qu'il faut prés<strong>en</strong>ter.<br />

S'il n'est pas nécessaire <strong>de</strong> prés<strong>en</strong>ter les titres par lesquels le v<strong>en</strong><strong>de</strong>ur prouve sa<br />

propriété, il n'y aura pas <strong>de</strong> difficulté. Ne pourra-ton pas faire l'<strong>en</strong>registrem<strong>en</strong>t sans<br />

cela?<br />

«Enfin je parle <strong>de</strong> choses que je ne connais pas; mais je dis ce» choses p<strong>en</strong>sant<br />

qu'elles peuv<strong>en</strong>t être<br />

utiles.<br />

«En tout cas on peut bi<strong>en</strong> dire, <strong>en</strong> toute vérité, <strong>à</strong> Grilo (car on me dit qu'il va être<br />

consulté) que l'int<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> ceux qui ont v<strong>en</strong>du et <strong>de</strong> ceux qui ont acheté était, <strong>en</strong> dres-<br />

2


—<br />

18<br />

sant le <strong>de</strong>rnier contrat, <strong>de</strong> faire <strong>en</strong>trer tout—maison et église— et que s'il y eût erreur<br />

dans la <strong>de</strong>scription, ce fut par distraction <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> celui qui a fourni <strong>à</strong> J. Oampos<br />

les r<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>ts. N'ayant <strong>en</strong> vue que le contrat d'achat <strong>de</strong> la maison il a oublié celui<br />

<strong>de</strong> l'église.<br />

a J'avais<br />

dit que je trouvais conv<strong>en</strong>able que ma part ne fût pas v<strong>en</strong>due tant que je<br />

serais ici, pour pouvoir toujours figurer comme propriétaire; mais si <strong>en</strong> vue <strong>de</strong> cette<br />

confusion, il fallait tout remédier par un nouveau contrat, au nom <strong>de</strong> nouveaux propriétaires,<br />

il vaudrait peut être la peine <strong>de</strong> faire ici ce qu'on va faire <strong>à</strong> St. Fidèle. Je me<br />

soumets <strong>à</strong> tout.<br />

,<br />

«Je rae recomman<strong>de</strong> dans vos SS. SS. et je suis.<br />

«De V. R. ce Serviteur <strong>en</strong> J. C. J. da Cruz, S. J.».<br />

«P. S. Après cette lettre écrite le P. Emmanuel Rodrigues a reçu comme part <strong>de</strong> sa<br />

réserve la somme <strong>de</strong> 17;>000 réis l qu'il a donnée <strong>à</strong> la Compagnie. Je crédite ici <strong>à</strong> cette<br />

ville, que V. R. ce veuille bi<strong>en</strong> la débiter <strong>à</strong> cette Résid<strong>en</strong>ce. — P. Cruz.<br />

«Covilh<strong>à</strong> 11 décembre 1909. — Mon très cher Père.— P. C. — Je vous ai écrit bier<br />

<strong>de</strong> St. Fidèle très <strong>à</strong> la hâte, et maint<strong>en</strong>ant je ne peux pas vous écrire longuem<strong>en</strong>t, car<br />

je dois sortir bi<strong>en</strong>tôt.<br />

«Le P. George m'a fait une très mauvaise impression et j'ai dit au P. Tavares <strong>de</strong><br />

me prév<strong>en</strong>ir s'il empirait. Dans ce cas sans att<strong>en</strong>dre davantage je fais la v<strong>en</strong>te <strong>de</strong> sa<br />

part au P. Antoine d'Azevedo, quoiqu'il ne soit pas tout <strong>à</strong> f*it celui qui convi<strong>en</strong>drait,<br />

puisqu'il<br />

ne promet pas longue vie ayant déj<strong>à</strong> près <strong>de</strong> cinquante ans (quarante huit ans<br />

accomplis) t-t étant si faible<br />

«Je comm<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>main soir les exercices ; mais je ne crois pas pouvoir att<strong>en</strong>dre qu'ils<br />

soi<strong>en</strong>t terminés pour régler cette affaire, qui est tellem<strong>en</strong>t urg<strong>en</strong>te.<br />

«Je me recomman<strong>de</strong> dans vos SS. SS. et je suis.<br />

«De V. R. ce le Serviteur <strong>en</strong> J. C— J. da Cruz, S. J.».<br />

«Covilha le<br />

5 mai <strong>1910</strong>. — Très cher Frère Trocado, P. C. — J'ai reçu votre lettre<br />

d'hier; et si je vous dis qu'elle m'a contrarié, je ne dirai que la vérité.<br />

«Ce n'est pas cela que j'avais besoin <strong>de</strong> savoir <strong>de</strong> suite: c'est <strong>à</strong> qui apparti<strong>en</strong>t la<br />

part du Père Louis da Silva Nascim<strong>en</strong>to. <strong>Les</strong> docum<strong>en</strong>ts qui se trouv<strong>en</strong>t dans cette<br />

maison indiqu<strong>en</strong>t seulem<strong>en</strong>t (ceci d'après les comptes) que l'on a payé les droits<br />

<strong>de</strong> transmission.<br />

Le Père Castelo dit qu'il ne sait pas quels ont été les héritiers, parce que cette<br />

affaire a été réglée par l'Int<strong>en</strong>dance <strong>de</strong> la Province et il n'a jamais été mis au courant <strong>de</strong><br />

ce qui s'est passé. A St. Fidèle où le Père Silva est mort on ne sait ri<strong>en</strong> ; et si <strong>de</strong>main<br />

l'autorité voulait me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r quels sont les propriétaires <strong>de</strong> la terre et <strong>de</strong> l'édifice je<br />

ne saurais- que répondre.<br />

«De plus, la part du Père Emmanuel Pinto, puisqu'il est mort sans testam<strong>en</strong>t, apparti<strong>en</strong>t<br />

<strong>à</strong> tous ses frères et il faut la passer seulem<strong>en</strong>t au rom du Père Antoine; d'autant plus<br />

qu'une <strong>de</strong>s sœurs est mourante et si elle meurt sans que l'on ait fait cette transmission,<br />

il faudra payer <strong>de</strong> nouveau les droits <strong>de</strong> transmission pour les payer <strong>en</strong>core plus tard.<br />

«Je vous prie donc <strong>de</strong> parler au Père Castelo et <strong>de</strong> voir avec lui où et comm<strong>en</strong>t a<br />

été faite la liquidation <strong>de</strong> cet héritage, ou s'il a v<strong>en</strong>du p<strong>en</strong>dant sa vie et <strong>à</strong> qui et où l'on<br />

a fait le contrat.<br />

«Dans les notes que je vous ai <strong>en</strong>voyées il y a quelque temps, j'ai dit ce que je<br />

p<strong>en</strong>sais alors <strong>à</strong> cet égard; mais j'ai<br />

vu <strong>de</strong>puis que je m'étais trompé.<br />

85 francs.


19<br />

«Ne vous <strong>en</strong>dormez pas sur cette affaire, qui est importante, et qui, d'après ce que<br />

me dit le Père Castelo a passé par vos mains, si ce n'est pas <strong>en</strong>core Barroso qui s'est<br />

occupé <strong>de</strong> cela.<br />

«Le Pèr^ Monteiro se le rappelle peut-être <strong>en</strong>core, mais je ne lui écris pas, pour ne<br />

pas compliquer <strong>en</strong>core plus les choses.<br />

«Comme <strong>de</strong>rnière ressource je dois avoir recours au Bureau <strong>de</strong>s Finances <strong>de</strong> Castelo<br />

Branco; mais je trouve cela dangereux.<br />

«Je me recomman<strong>de</strong> dans vos prières. —Votre serviteur <strong>en</strong> J. C, P. Joseph da<br />

Cruz Tavares, S. J.»<br />

Voyons ce que l'on a fait <strong>à</strong> l'égard <strong>de</strong> la propriété du Collège <strong>de</strong> St. Fidèle où<br />

nous irons trouver <strong>de</strong> nouvelles et plus curieuses fourberies ou astuces <strong>de</strong>s jésuites.<br />

Comme nous l'avons vu, <strong>en</strong> 1873 cette propriété avait passé du nom <strong>de</strong> Frère Augustin,<br />

franciscain, <strong>à</strong> ceux <strong>de</strong>s trois fameux jésuites anglais Lambert, Foley et Scoles :<br />

mais <strong>en</strong> 1894 (les <strong>de</strong>ux premiers étant déj<strong>à</strong> morts et l'autre vivant <strong>en</strong> Amérique) elle<br />

fut passée au nom <strong>de</strong>s pères jésuites portugais, Jean Raposo (qui institua comme héritier<br />

un autre père jésuite Antoine Coutinho), Joseph George, François Borges et<br />

Joseph da<br />

Cruz. Cep<strong>en</strong>dant <strong>en</strong> 1909 il parut conv<strong>en</strong>able au Provincial, alors déj<strong>à</strong> le Père Louis<br />

Cabrai, d'établir <strong>de</strong> nouveaux propriétaires. C'est pourquoi le 20 mai 1909 il écrivait<br />

au Frère Trocado, ai<strong>de</strong> procureur <strong>de</strong> la Province, dans une lettre, ce qui suit :<br />


.<br />

—<br />

20<br />

<strong>Les</strong> quatre Pères, du testam<strong>en</strong>t <strong>de</strong>squels il est question dans la lettre précéd<strong>en</strong>te,<br />

étai<strong>en</strong>t les anci<strong>en</strong>s propriétaires nominaux du Collège, et leurs testam<strong>en</strong>ts qu'ils avai<strong>en</strong>t<br />

fait <strong>en</strong>tre eux, étai<strong>en</strong>t périmés, parce que les nouveaux pseudo-propriétaires <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t<br />

faire <strong>de</strong>s testam<strong>en</strong>ts id<strong>en</strong>tiques <strong>en</strong>tre eux, comme l'avait recommandé le Recteur même,<br />

par la lettre suivante :<br />

«2 décembre 1909. — Mon cher F. Trocado. — Je vous prie <strong>de</strong> vouloir bi<strong>en</strong> obt<strong>en</strong>ir<br />

que le P. Arnaldo Magalh<strong>à</strong>es et son frère fass<strong>en</strong>t leur testam<strong>en</strong>t au profit l'un <strong>de</strong> l'autre<br />

et qu'un troisième soit nommé pour le cas <strong>de</strong> décès <strong>de</strong> l'un d'eux, s'ils v<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t <strong>à</strong><br />

mourir le même jour. Ainsi : Je nomme mon héritier universel mon frère et dans le cas<br />

où il mourrait avant moi je nomme mon héritier X. . .<br />

«Celui qui fera le<br />

testam<strong>en</strong>t s'exprimera comme.il le jugera conv<strong>en</strong>able. Je suppose<br />

que pour faire le testam<strong>en</strong>t on n'a pas besoin du contrat d'achat <strong>de</strong> ce collège et <strong>de</strong> ce<br />

qui lui apparti<strong>en</strong>t dans la paroisse <strong>de</strong> Louriçal. —Votre dévoué.— P. J. S. Tavares».<br />

Il parait que dans ce passage <strong>de</strong> la propriété du Collège <strong>de</strong> St. Fidèle aux P. Magalh<strong>à</strong>es<br />

on ne s'était pas attaché <strong>à</strong> l'idée <strong>de</strong> chercher <strong>de</strong>s étrangers pour les maisons:<br />

idée que le P. Louis Cabrai, <strong>en</strong> se chargeant du Provincialat. indiquait dans une lettre<br />

<strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> le 2 septembre 1908, où il dit:<br />

«Ici tout est très agité. Il y a bi<strong>en</strong> <strong>de</strong>s g<strong>en</strong>s qui p<strong>en</strong>s<strong>en</strong>t que l'on prépare une nouvelle<br />

chasse aux prêtres, pour distraire l'att<strong>en</strong>tion du régici<strong>de</strong> et choses pareilles . . .<br />

«Le Frère Trocado cherche <strong>de</strong>s étrangers pour les maisons, etc.; nous verrons».<br />

C'est pourquoi lorsque les choses semblai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>core plus agitées, <strong>en</strong> septembre^<br />

<strong>1910</strong>, vu que le Présid<strong>en</strong>t du Conseil <strong>de</strong>s Ministres d'alors, Teixeira <strong>de</strong> Sousa, avait<br />

ordonné <strong>de</strong> nouvelles <strong>en</strong>quêtes aux maisons religieuses et que déj<strong>à</strong> on press<strong>en</strong>tait la révolution<br />

du 5 octobre, le Recteur <strong>de</strong> St. Fidèle, évi<strong>de</strong>mm<strong>en</strong>t embarrassé et troublé, écrivait<br />

la lettre suivante:<br />

«22 septembre <strong>1910</strong>. — Mon cher Frère, P. C. — J'ai besoin que vous répondiez <strong>à</strong><br />

ce qui suit :<br />

«1) Le P. Arnaldo est-il auxiliaire ou associé? Il est né au Brésil. Est-il <strong>en</strong>core<br />

brésili<strong>en</strong> ou naturalisé portugais?<br />

«2) Son frère ne pourrait-il pas être naturalisé anglais? Si c'était possible et qu'il le<br />

voulût, ce serait le moy<strong>en</strong> d'assurer ce qu'il possè<strong>de</strong>. On s'occuperait <strong>de</strong>s choses avec<br />

le consul et nous pourrions arborer le drapeau anglais. R<strong>en</strong>seignez-vous bi<strong>en</strong> l<strong>à</strong> <strong>de</strong>ssus.<br />

Il serait utile que Zimmermann prévînt le consul respectif <strong>de</strong> ce qu'il possè<strong>de</strong> <strong>à</strong> Castello<br />

Branco, afin <strong>de</strong> le t<strong>en</strong>ir <strong>en</strong> sûreté.<br />

«Ici il n'y a ri<strong>en</strong> <strong>de</strong> nouveau. Je parle aujourd'hui au troubadour <strong>de</strong> Guarda.<br />

Votre Frère du cœur.— Joachimi><br />

«Il me semble que les <strong>de</strong>rnières nouvelles particulières, plus pessimistes, quoique<br />

d'ailleurs réelles, doiv<strong>en</strong>t être aussi basées sur quelque truc. Vous compr<strong>en</strong>ez?»<br />

A l'égard <strong>de</strong> certaines maisons que les jésuites possédai<strong>en</strong>t dans la ville <strong>de</strong> Castello<br />

Branco, servant <strong>de</strong> Résid<strong>en</strong>ce <strong>à</strong> un ou <strong>de</strong>ux Pères et surtout pour y loger les élèves <strong>de</strong><br />

St. Fidèle <strong>à</strong> l'époque <strong>de</strong>s exam<strong>en</strong>s officiels, qu'ils <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t passer au lycée <strong>de</strong> cette ville,<br />

il y eut aussi <strong>de</strong>s cas curieux, que je crois utile <strong>de</strong> noter.<br />

Le 10 janvier 1909 le P. Joachim Moura y mourut ( . Il avait été p<strong>en</strong>dant bi<strong>en</strong> <strong>de</strong>s<br />

années le Supérieur <strong>de</strong> cette Résid<strong>en</strong>ce.<br />

La mort <strong>de</strong> ce Père causa <strong>de</strong> grands embarras, quoique peu <strong>de</strong> temps auparavant<br />

euss<strong>en</strong>t été nommés propriétaires <strong>de</strong> cette maison les PP. jésuites, Zimmermann, alle-<br />

1<br />

Catalogua Prov. Lus. S- J- Année <strong>1910</strong>, p. 43.


.<br />

—<br />

21<br />

mand, et Joseph Marie Alves y Taboas, espagnol (<strong>de</strong>s étrangers, pour chercher <strong>à</strong> sophismer<br />

les lois : étrangers <strong>de</strong> naissance, mais qui très jeunes étai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>trés dans la Province<br />

Portugaise au noviciat du Barro).<br />

Voyons quelques lettres par lesquelles nous pourrons connaître les embarras où ils<br />

se trouvai<strong>en</strong>t, parce qu'ils sophismaiei^t constamm<strong>en</strong>t les lois.<br />

«R. P. Recteur. — Comme V. R. ce est le Procureur <strong>de</strong> la Province l je vi<strong>en</strong>s vous<br />

dire que les héritiers du P. Moura <strong>de</strong>vront, jusqu'au 10 février, faire part, au Bureau<br />

<strong>de</strong>s Finances <strong>de</strong> Castèlo Branco, du décès du P. Moura. On payerait une gran<strong>de</strong> am<strong>en</strong><strong>de</strong><br />

dans le cas où ils ne le ferai<strong>en</strong>t pas jusqu'au 10 février.<br />

tLe P. Alves qui est <strong>à</strong> S 1 Fidèle l'a comuniqué au greffier <strong>de</strong>s Finances, mais ce<br />

n'est pas lui comme héritier <strong>de</strong> cette maison qui <strong>de</strong>vrait le faire, mais bi<strong>en</strong> les héritiers<br />

du P. Moura. Notre greffier a fait la minute, j'<strong>en</strong>voie ci-inclus le brouillon <strong>à</strong> V. R ce . Il<br />

faut m'<strong>en</strong>voyer <strong>de</strong>ux copies, l'une pour prés<strong>en</strong>ter au greffier et l'autre pour gar<strong>de</strong>r ici,<br />

signée par le<br />

greffier <strong>de</strong>s Finances.<br />

Dans les SS. SS. et les PP. <strong>de</strong> Y. R. ce je me recomman<strong>de</strong> vivem<strong>en</strong>t. De V. R. cc ,<br />

très humble serviteur <strong>en</strong> J. Ch. — P. Jord<strong>à</strong>o Falcâo, S. J.»<br />

En suite le pseudo-propriétaire le P. J. M. Alves est chargé plusieurs fois par le<br />

Recteur du Collège <strong>de</strong> s'occuper <strong>de</strong> cette affaire avec le Procureur <strong>de</strong> la Province et<br />

avec le Fr. Trocado, ai<strong>de</strong>-procureur.<br />

t Collège <strong>de</strong> S' Fidèle le 20 janvier 1909.<br />

• Mon R. P. Recteur. — Le R. P. R. m'ordonne d'écrire <strong>à</strong> V. R. cc et <strong>de</strong> vous dire<br />

qu'il a reçu la lettre du 19 et la liste <strong>de</strong> ce que possédait le défunt P. Moura. Le testam<strong>en</strong>t<br />

a déj<strong>à</strong> été déposé <strong>à</strong> l'administration <strong>de</strong> Castelo Branco.<br />

c Quant au reste le même P. Recteur ira <strong>de</strong>main <strong>à</strong> Castelo Branco et s'<strong>en</strong> occupera.<br />

iDe V. R. cc , très humble serviteur <strong>en</strong> Dieu — J. M. Alves, S. J.»<br />

Deux jours après il écrit <strong>de</strong> nouveau au même :<br />

«Mon Rév. P. Recteur — P. C.— Notre Kév. P. Recteur me charge <strong>en</strong>core une fois<br />

d'écrire <strong>à</strong> V. R ce au sujet <strong>de</strong>s affaires <strong>de</strong> Castelo Branco.<br />

«En troisième lieu ne comptez pas sur le P. Falcâo pour participer au reste. Il ne<br />

sait rieu <strong>de</strong> cela. Le P. Recteur lui-même sait peu ou ri<strong>en</strong> et est très <strong>en</strong>nuyé <strong>de</strong> tout<br />

cela. Il dit qu'il n'est pas né pour ces choses-l<strong>à</strong> et qu'il décline dès <strong>à</strong> prés<strong>en</strong>t toute responsabilité<br />

pouvant lui adv<strong>en</strong>ir, par manque <strong>de</strong> connaissance et <strong>de</strong> pratique <strong>de</strong> telles<br />

affaires . .<br />

tLe Rév. P. Recteur dit aussi qu'il<br />

a lu le testam<strong>en</strong>t et qu'il lui semble y avoir vu<br />

<strong>de</strong>s noms différ<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> ceux <strong>de</strong>s héritiers que V. R ce a indiqués dans la liste <strong>en</strong>voyée.<br />

Veuillez <strong>en</strong>core vérifier bi<strong>en</strong> ce point et communiquer définitivem<strong>en</strong>t, afin qu'il n'y ait<br />

pas <strong>de</strong> confusion.<br />

«De V. R. ce , très humble serviteur <strong>en</strong> Dieu.<br />

«S 1 Fidèle le 22 janvier 1909».<br />

J. M. Alves, S. J.<br />

Carte postale <strong>à</strong> Trocado :<br />

«Mon ami.— J'ai reçu votre lettre et je vous remercie. Soyez tranquille, il n'y aura<br />

pas <strong>de</strong> néglig<strong>en</strong>ce dans les affaires <strong>de</strong> Castelo Branco. Quant au testam<strong>en</strong>t, je ne connaissais<br />

pas les formalités auxquelles vous faisiez allusion dans votre lettre. Il vaudrait<br />

mieux peut-être att<strong>en</strong>dre les vacances et <strong>en</strong> passant, pour nous r<strong>en</strong>dre <strong>à</strong> la plage, nous<br />

1<br />

Le P. Alexandre Barros, Recteur du Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong>, était alors aussi Procureur <strong>de</strong> la<br />

Province, d'après le Catulogus l J rov. Lus. Soc. Jeu. ineunle ano 1909, p. 12.


22<br />

arrangerons tout. Voulez-vous? J'espère <strong>en</strong> Dieu que nous ne mourrons pas jusque<br />

l<strong>à</strong>.<br />

«S 1 Fidèle le 2 juin 1909.— J. M. Alves, S. J.»<br />

A propos <strong>en</strong>core du testam<strong>en</strong>t et écrivant le 8 septembre 1909 au Frère Pires <strong>à</strong><br />

Campoli<strong>de</strong> il lui dit:<br />

«Au comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t d'octobre faites <strong>en</strong> sorte que le Frère Trocado m'écrive <strong>à</strong><br />

S 1 Fidèle, insistant pour que j'aille <strong>à</strong> Lisbonne chercher les élèves, pour faire <strong>à</strong> cette<br />

occasion mon testam<strong>en</strong>t <strong>de</strong> Castelo Branco. Je crois que vous le savez que je suis propriétaire<br />

<strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce avec le P. Zimmermann. Il l'a déj<strong>à</strong> fait <strong>à</strong> Porto, mais moi<br />

pas <strong>en</strong>core. Et comme le testam<strong>en</strong>t a plusieurs formalités que Trocado seul connait,<br />

etc., etc., il me convi<strong>en</strong>drait <strong>de</strong> le faire <strong>à</strong> Lisbonne».<br />

Le P. Silva do Nascim<strong>en</strong>to, qui avait été un <strong>de</strong>s pseudo-propriétaires <strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce<br />

<strong>de</strong> Castelo Branco, étant mort <strong>en</strong> février <strong>1910</strong>, <strong>de</strong> nouvelles difficultés surgiss<strong>en</strong>t,<br />

et le Recteur fait écrire au P. Cruz :<br />

«Le R. P. Recteur m'a chargé <strong>de</strong> répondre <strong>à</strong> la lettre <strong>de</strong> V. R. ce qu'il ne sait ri<strong>en</strong><br />

<strong>de</strong> cela, le P. Moreira non plus, que le Frère Soares dit que lorsque le P. Silva est<br />

mort il avait déj<strong>à</strong> tout v<strong>en</strong>du. <strong>Les</strong> possesseurs actuels le P. Alves (Joseph) et le P.<br />

Zimmermann dis<strong>en</strong>t avoir acheté au P. Osôrio et ne connaiss<strong>en</strong>t pas l'autre. Le P. Cor<strong>de</strong>iro<br />

pourra donner d'autres r<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>ts ou peut-être mieux le Frère Trocado».<br />

Voici quels étai<strong>en</strong>t les pseudo-propriétaires <strong>de</strong>s maisons jésuitiques du <strong>Portugal</strong>,<br />

leur manière curieuse <strong>de</strong> sophismer les lois portugaises anti-congréganistes, et leur<br />

psychologie trouble et sans caractère, que toutes ces manuuvres révèl<strong>en</strong>t.<br />

CHAPITRE CINQUIEME<br />

<strong>Les</strong> jésuites, dans les v<strong>en</strong>tes fictives <strong>de</strong> leurs maisons <strong>à</strong> <strong>de</strong>s jésuites étrangers,<br />

volai<strong>en</strong>t les Finances Publiques<br />

et insultai<strong>en</strong>t les fonctionnaires qui faisai<strong>en</strong>t leur <strong>de</strong>voir<br />

Pour agir <strong>en</strong> tout contre les lois portugaises les ji'suites méprisai<strong>en</strong>t même les lois<br />

sur les <strong>contribution</strong>s.<br />

D'après les' lois portugaises quand on fait l'achat d'une propriété ou quand on reçoit<br />

un héritage, on doit payer <strong>à</strong> l'Etat un tant pour c<strong>en</strong>t sur la valeur réelle <strong>de</strong> la propriété<br />

achetée ou héritée. Afin que ce pourc<strong>en</strong>tage <strong>de</strong> l'impôt fût le plus peti^ possible pour<br />

l'État, les jésuites portugais donnai<strong>en</strong>t <strong>à</strong> leurs maisons dans les contrats respectifs, une<br />

valeur très inférieure <strong>à</strong> la valeur réelle. Ainsi, par exemple, le Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong><br />

avait été acheté <strong>en</strong> 1858 par le P. Ra<strong>de</strong>maker pour 4.000 écus; <strong>en</strong> 1865 on y ajouta<br />

un nouveau bâtim<strong>en</strong>t vers l'ori<strong>en</strong>t, qui coûta 6.000 écus, et déj<strong>à</strong> auparavant <strong>en</strong> 1861<br />

on avait ajouté un autre bâtim<strong>en</strong>t tourné vers le couchant '. Eh bi<strong>en</strong>, <strong>en</strong> 1873 tout cela<br />

est v<strong>en</strong>du nominalem<strong>en</strong>t aux trois fameux jésuites anglais Lambert, Scoles et Foley pour<br />

5.500 écus.<br />

Quelquefois les fonctionnaires <strong>de</strong>s finances n'étai<strong>en</strong>t pas d'accord sur la valeur indiquée<br />

par les jésuites pour leurs maisons, valeur qui était évi<strong>de</strong>mm<strong>en</strong>t très inférieure <strong>à</strong><br />

1<br />

Hitt. Col. Camp, et Rés. Lisbon, pp. 10, 31, ṛ >3 et 54.


Ramos<br />

23<br />

la valeur réelle comme les jésuites eux-mêmes l'avouai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tre eux. Dans ce cas les<br />

fonctionnaires justes et zélés étai<strong>en</strong>t traités <strong>de</strong> vauri<strong>en</strong>s, coquins et canailles.<br />

Voyons-<strong>en</strong> les preuves dans les lettres suivantes :<br />

«Castelo Branco le 17 avril 1908 — R. P. R.— P. C. — Vous avez dû recevoir ma<br />

lettre d'hier, jeudi, et mon télégramme d'aujourd'hui.<br />

«Quand le P. Silva est mort il avait payé la transmission -pour les valeurs d'<strong>en</strong>registrem<strong>en</strong>t<br />

<strong>de</strong>s maisons qu'il avait <strong>à</strong> Castelo Branco, ainsi que <strong>de</strong> celles qu'il avait <strong>à</strong> Covilhâ;<br />

et le greffier n'avait pas fait la moindre difficulté. Cette maison qui appart<strong>en</strong>ait au<br />

P. Silva est inscrite pour un conto <strong>de</strong> réis (5.000 frs,) mais sa valeur réelle est <strong>de</strong> quatre<br />

contos (20.000 frs.).<br />

«A la mort <strong>de</strong> Pierre Pina, les héritiers Jérôme Fernan<strong>de</strong>s et Guiterres ont déclaré<br />

une valeur <strong>de</strong> près <strong>de</strong> dix-neuf contos (95.000 frs.) ont payé <strong>de</strong> transmission près <strong>de</strong><br />

2.7000000 réis (13.000 frs.) Cep<strong>en</strong>dant l'héritage ne valait pas dix-neuf contos (95.000<br />

frs.) mais tr<strong>en</strong>te contos (150.000 frs.) et quelques. On voit qu'il y a mauvaise volonté du<br />

greffier contre le collège; et comme il a la loi (qui ordonne d'évaluer <strong>à</strong> la juste valeur)<br />

<strong>en</strong> sa faveur, il fait ce qu'il veut, et il n'est pas facile d'échapper <strong>de</strong> ses griffes, <strong>à</strong> moins<br />

qu'il n'y eût <strong>de</strong>s experts <strong>de</strong> confiance au lieu <strong>de</strong> coquins.<br />

«Pour aujourd'hui c'est tout. Priez pour moi.<br />

«A vous <strong>en</strong> J. C. — P. Joachim Moura*.<br />

Lorsque les fonctionnaires <strong>de</strong>s Finances donnai<strong>en</strong>t aux propriétés leur vraie valeur,<br />

non seulem<strong>en</strong>t ils les insultai<strong>en</strong>t comme ils faisai<strong>en</strong>t valoir contre eux <strong>de</strong>s protections<br />

politiques, v<strong>en</strong>ant <strong>de</strong> leurs propres chefs hiérarchiques. Ceci est clairem<strong>en</strong>t indiqué dans<br />

la lettre suivante, écrite par le Recteur d'alors du Collège <strong>de</strong> S. Fidèle, le P. Antoine<br />

Cor<strong>de</strong>iro, adressée au Provincial.<br />

«Mon R. P. Provincial. P. C. — Ce vauri<strong>en</strong> <strong>de</strong> greffier <strong>de</strong>s Finances, un Mr. Antoine<br />

Mello Borges, nous l'a faite belle, malgré toutes lf s recommandations du Vicomte<br />

<strong>de</strong> Mangual<strong>de</strong>, <strong>à</strong> qui Mr. Auguste <strong>de</strong> Caatilho a prés<strong>en</strong>té ma <strong>de</strong>man<strong>de</strong>.<br />

«V. K. M ferait bi<strong>en</strong> d'informer ce Ministre, car on peut <strong>en</strong>core y remédier, comme<br />

je vais le démontrer <strong>à</strong> V. R. re Figurez vous le grand service r<strong>en</strong>du par ce vauri<strong>en</strong>: dans<br />

l'expertise son influ<strong>en</strong>ce sur l'esprit <strong>de</strong>s experts lit établir que le Collège et ses annexes,<br />

qui étai<strong>en</strong>t inscrits pour 4.800;>000 réis (24.000 frs.) <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t être évalués <strong>en</strong> 29.158;>(>00<br />

réis (145.790 frs.) près <strong>de</strong> 30 contos (150.000 frs.) c'est-<strong>à</strong>-dire plus <strong>de</strong> six fois la valeur<br />

<strong>de</strong> l'<strong>en</strong>registrem<strong>en</strong>t ! !<br />

«J'ai donc eu une déception ainsi que tous les amis <strong>à</strong> qui les experts avai<strong>en</strong>t promis<br />

que l'expertise ne dépasserait pas 10 contos (50.000 frs.). Pour y porter remè<strong>de</strong> on va<br />

prés<strong>en</strong>ter une pétition au Procureur du Roi (qui lui sera prés<strong>en</strong>tée <strong>de</strong>main) pour solliciter<br />

une nouvelle évaluation, la première étant reconnue injuste, non basée sur les raisons<br />

que j'ai exposées <strong>à</strong> Mr. Castilho dans mon mémoire. La pétition a été faite dans<br />

les termes conv<strong>en</strong>ables par un avocat ( Preto), vue et approuvée par notre grand<br />

ami le Dr. Crespo qui a ajouté <strong>en</strong>core <strong>de</strong>ux énoncés que Ramos indiquera <strong>en</strong> termes<br />

généraux. Tavares Pro<strong>en</strong>ça, personnage influ<strong>en</strong>t dans la politique du pays, s'intéresse<br />

<strong>à</strong> ce que l'expertise ne dépasse pas 10 contos maximum, <strong>de</strong> même le Gouverneur Civil<br />

actuel (Préfet), officier qui a été au Cuamato avec le ilajor lîoçadas. Ce Monsieur a appelé<br />

au Govêrno Civil (Préfecture <strong>de</strong> Police) notre P. Falcâo et lui a dit qu'il désirait<br />

visiter le Collège et aussi voir le fils du Major Roçadas et lui parler.<br />

«F.n vue <strong>de</strong> ce désir et comme je désirais aussi aller parler <strong>à</strong> Tavares Pro<strong>en</strong>ça je<br />

suis allé dans notre Victoria coucher â notre Résid<strong>en</strong>ce et le l<strong>en</strong><strong>de</strong>main nous sommes


24<br />

v<strong>en</strong>us dans la même, le Préfet et moi, au Collège où ce Monsieur a été reçu au son <strong>de</strong><br />

la musique et <strong>de</strong>s fusées et salué par les vivats <strong>de</strong>s élèves qui formai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s haies sur<br />

son passage. Il vit tout cela et fut cont<strong>en</strong>t et moi j'allai <strong>à</strong> l'hôtel du Collège dîner<br />

avec lui et l'accompagnai le soir <strong>à</strong> la gare <strong>de</strong> Castelo Novo, lui offrant <strong>à</strong> cette occasion<br />

un exemplaire <strong>de</strong> la Broteria, qu'il avait exprimé le désir <strong>de</strong> voir et un exemplaire<br />

complet <strong>de</strong>s cartes postales illustrées du Collège. Plus d'une fois il m'a promis sa bonne<br />

interv<strong>en</strong>tion auprès du Procureur du Roi dans notre affaire. Nous verrons et que Dieu<br />

y accor<strong>de</strong> Sa Grâce.<br />

«Cep<strong>en</strong>dant que V. R. ne cesse pas d'insister auprès <strong>de</strong> Mr. Castilho si c'est possible.<br />

«Quant <strong>à</strong> l'affaire <strong>de</strong> Coïmbre je n'ai maint<strong>en</strong>ant ni la tête, ni le temps d'y p<strong>en</strong>ser ;<br />

après je proposerai <strong>à</strong> V. -R. un plan que j'ai conçu lorsque j'ai appris que le Dr. Chorâo<br />

s'était<br />

20 et plus.<br />

«Je finis<br />

procuré 13 contos et <strong>de</strong>mi pour acheter une propriété qui aujourd'hui <strong>en</strong> vaut<br />

<strong>en</strong> souhaitant <strong>à</strong> V. R. <strong>de</strong>s fêtes <strong>de</strong> Pâques très heureuses et <strong>en</strong> <strong>de</strong>mandant<br />

<strong>de</strong> ferv<strong>en</strong>tes prières pour me. voir délivré <strong>de</strong>s griffes<br />

«Je me recomman<strong>de</strong> aux SS. SS. et PP. <strong>de</strong> V. R.<br />

du fisc.<br />

De V. R.<br />

«Le 17 avril 1908. Serviteur <strong>en</strong> J. < '.<br />

P. Cor<strong>de</strong>iro S. J.»<br />

Le l<strong>en</strong><strong>de</strong>main il écrit <strong>de</strong> nouveau au Recteur <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> sur le même sujet et<br />

appelle le même greffier <strong>de</strong>s Finances juif, lâche et canaille.<br />

Eh bi<strong>en</strong>! Le collège que les jésuites ne voulai<strong>en</strong>t évaluer qu'<strong>à</strong> 10 contos (50.000 frs.i<br />

cont<strong>en</strong>ait alors plus <strong>de</strong> 300 élèves internes et beaucoup <strong>de</strong> professeurs et <strong>de</strong> domestiques.<br />

Il était <strong>en</strong>touré d'un grand lot <strong>de</strong> terrain où il y avait la vigne, le potager et le<br />

verger. En 1881 le dr. Refoios avait écrit dans son Rapport (p. 16) que l'édifice avait<br />

déj<strong>à</strong> coûté 80 contos (400.000 frs.)<br />

CHAPITRE SIXIÈME<br />

Comm<strong>en</strong>t les jésuites obt<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l'arg<strong>en</strong>t pour acheter leurs maisons<br />

et pour les augm<strong>en</strong>tations qu'ils y faisai<strong>en</strong>t<br />

L'arg<strong>en</strong>t avec lequel les jésuites achetai<strong>en</strong>t et augm<strong>en</strong>tai<strong>en</strong>t les maisons et les propriétés<br />

qu'ils possédai<strong>en</strong>t <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>, avait plusieurs prov<strong>en</strong>ances.<br />

Quelques uns <strong>de</strong>s individus <strong>en</strong>trés dans la Compagnie <strong>de</strong> Jésus possédai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s<br />

bi<strong>en</strong>s que par la règle du R<strong>en</strong>oncem<strong>en</strong>t ' ils remir<strong>en</strong>t <strong>à</strong> leurs supérieurs. <strong>Les</strong> plus importants<br />

d'<strong>en</strong>tre eux fur<strong>en</strong>t le P. Charles lîa<strong>de</strong>maker 2 ,<br />

le P. Joseph Nunes 3 le<br />

,<br />

P.<br />

Jordan FalcSo et le P. Louis Cabrai, dont les fortunes remises <strong>à</strong> la Compagnie s'élevai<strong>en</strong>t<br />

<strong>à</strong> plusieurs milliers <strong>à</strong>'écus, ce que l'on peut voir par les livres qui se trouv<strong>en</strong>t<br />

aux Archives Congréganistes. Mais pour la plupart ils étai<strong>en</strong>t pauvres.<br />

Il y eut aussi quelques personnes dévouées <strong>à</strong> la Compagnie qui dans leurs testam<strong>en</strong>ts<br />

leur laissèr<strong>en</strong>t <strong>de</strong> bons héritages, comme Pierre Pina, sa sœur Marie <strong>de</strong> la Nati-<br />

1<br />

Voir au chapitre antécéd<strong>en</strong>t, p. 14.<br />

2 Hist. Coll. Camp, et Bés. Lisb. pp. 10, 53, 54.<br />

3 Hist. Coll. Camp, et liés. Lisb. p. 93.


25<br />

vite 1 ,<br />

l'Infante Isabelle Marie 2 , Joséphine Bertrand 3 , Marie <strong>de</strong> l'Assomption Saldanha<br />

e Castro 1<br />

et d'autres.<br />

<strong>Les</strong> personnes qui donnai<strong>en</strong>t constamm<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l'arg<strong>en</strong>t aux jésuites étai<strong>en</strong>t innombrables<br />

; et pour <strong>en</strong> avoir une preuve il suffit <strong>de</strong> lire l'Histoire <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> et celle <strong>de</strong><br />

la Résid<strong>en</strong>ce du Quelhas 5 . Il <strong>en</strong> arrivait <strong>de</strong> même pour les autres maisons.<br />

L'église du ollège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> a été construite et installée uniquem<strong>en</strong>t avec <strong>de</strong><br />

l'arg<strong>en</strong>t prov<strong>en</strong>ant d'aumOne?., comme on le voit dans les docum<strong>en</strong>ts qui exist<strong>en</strong>t aux<br />

Archives Congréganistes.<br />

<strong>Les</strong> messes <strong>de</strong>mandées aux Pères par les dévots étai<strong>en</strong>t une source inépuisable<br />

d'arg<strong>en</strong>t, comme on le voit par leurs livres <strong>de</strong> comptes et <strong>de</strong> notes.<br />

Un autre moy<strong>en</strong> dont les jésuites se servai<strong>en</strong>t pour acquérir <strong>de</strong> l'arg<strong>en</strong>t, était la<br />

v<strong>en</strong>te <strong>de</strong> petits livres religieux et <strong>de</strong> revues <strong>de</strong> la même espèce, dont la propagan<strong>de</strong> était<br />

faite <strong>en</strong> chaire, au confessionnal, dans les conversations et dans les journaux. Dans la<br />

Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> la Rue du Quelhas ils avai<strong>en</strong>t un grand fonds <strong>de</strong> ces livres. L'Histoire <strong>de</strong><br />

cette Résid<strong>en</strong>ce avoue que dans leurs premiers temps ils ont équilibré leurs finances avec<br />

le produit <strong>de</strong>s livres écrits par !e P. Meli ,; et on y<br />

lit aussi que le produit du Marisageiro<br />

do Coraç<strong>à</strong>o <strong>de</strong> Jésus (Messager du Cœur <strong>de</strong> Jésus) a servi a faire construire, <strong>en</strong><br />

1901, une gran<strong>de</strong> salle sur toute l'église ainsi que la haute tour qui y est jointe '. Du<br />

rev<strong>en</strong>u <strong>de</strong> cette même Revue certaines sommes <strong>en</strong>trai<strong>en</strong>t annuellem<strong>en</strong>t dans le coffre <strong>de</strong><br />

la Résid<strong>en</strong>ce, ainsi qu'on peut le voir dans les livres <strong>de</strong> comptes.<br />

<strong>Les</strong> médailles, images bénites, petits rubans et gravures diverses qu'ils v<strong>en</strong>dai<strong>en</strong>t<br />

largem<strong>en</strong>t étai<strong>en</strong>t un autre élém<strong>en</strong>t, par lequel ils obt<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l'arg<strong>en</strong>t, comme on<br />

peut facilem<strong>en</strong>t le démontrer par les comptes da Procureur <strong>de</strong> la Province.<br />

Cep<strong>en</strong>dant on doit remarquer que <strong>de</strong> toutes les petites dévotions largem<strong>en</strong>t répandues<br />

par l'Eglise catholique les jésuites avai<strong>en</strong>t les leurs propres, qui leur rapportai<strong>en</strong>t<br />

beaucoup, et ils évitai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> divulguer toutes celles qui v<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t d'autres congrégations.<br />

Ceci fut dès le comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t recommandé par le P. Ficarelli <strong>à</strong> ses sujets <strong>en</strong> une lettre<br />

datée <strong>de</strong> Lisbonne le 23-1-18IÏ8, dans laquelle il dit ce qui suit :<br />

tUne circulaire du P. Roothaan, r<strong>en</strong>ouvelée par le P. Beckx, nous recomman<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

ne pas nous mettre <strong>à</strong> répandre <strong>de</strong>s dévotions qui n'apparti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t pas <strong>à</strong> la Compagnie.<br />

On a aussi parlé <strong>de</strong> cela a la <strong>de</strong>rnière Congrégation Générale. Il n'est pas bon, non<br />

plus, que les personnes dévotes se charg<strong>en</strong>t <strong>de</strong> tant <strong>de</strong> dévotion? différ<strong>en</strong>tes!).<br />

Lorsque les médailles et autres objets lucratifs <strong>de</strong>s dévotions jésuitiques avai<strong>en</strong>t<br />

baissé <strong>de</strong> prix, ou quand ils rapportai<strong>en</strong>t peu, parce qu'ils étai<strong>en</strong>t v<strong>en</strong>dus par <strong>de</strong>s étrangers,<br />

on <strong>en</strong> changeait les empreintes, ce qui leur rapportait plus <strong>de</strong> profit, mais quelquefois<br />

aussi le blâme <strong>de</strong>s libraires catholiques, comme on <strong>en</strong> conclut par ces <strong>de</strong>ux lettres<br />

qui se trouv<strong>en</strong>t aux Archives Congréganistes. Le Frère Sarm<strong>en</strong>to (coadjuteur aux<br />

ordres du P. B<strong>en</strong>oit Rodriguès, directeur <strong>de</strong> l'Apostolat <strong>de</strong> la Prière) a écrit <strong>à</strong> Joachim<br />

Antoine Pacheco, propriétaire d'une anci<strong>en</strong>ne Librairie<br />

qui suit:<br />

Catholique <strong>de</strong> Lisbonne, ce<br />

1<br />

Voyez Rapports du Dr. Refoios et du Dr. Ramoa Preto.<br />

* Lettre aux Archives Congréganistes.<br />

3 Hist. Coll. Camp, et Rés. Litb. pp. 112 et 113.<br />

« Ibi<strong>de</strong>m, pp. 157 158, 164.<br />

* Hist. Coll. Camp, et Rés. Lisb., pp. 51, 52, 58, 60, 62, 69, 72, 78, 79, 85, 86, 89, 96, 99, 100, 103,<br />

106, 113, 120, 122, 13;î, 139, 158, 159, 160, 161, 102, 165, 167 168, 170, 171, 178.<br />

8 Hist. Coll. Camp, et Rés. Lisb., p. 159.<br />

7 Hist. Coll. Camp, et Rés. Lisb., pp. 179-180.


—<br />

26<br />

«Guiraar<strong>à</strong>es, le 7 septembre) 1896. — Monsieur. — Une contrefaçon <strong>de</strong> la médaille<br />

<strong>de</strong> l'Apostolat n.° 1 s'étant répandue dans le pays, j'<strong>en</strong> ai fait refaire le coin, m'<strong>en</strong> réservant<br />

toute la fabrication. Mr. P<strong>en</strong>in ne peut donc pas exécuter la comman<strong>de</strong> qne<br />

vous lui avez faite <strong>de</strong>rnièrem<strong>en</strong>t. Cep<strong>en</strong>dant <strong>à</strong> partir du comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t d'octobre, il<br />

y<br />

aura <strong>à</strong> Lisbonne (rue du Quelbas) un dépôt <strong>de</strong>s dites médailles, <strong>à</strong> <strong>de</strong>s prix modérés,<br />

car je ne veux pas <strong>de</strong> gains, mais seulem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> surveiller la diffusion<br />

<strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>.<br />

«Recevez le témoignage <strong>de</strong> ma parfaite considération. Par le R. P. B<strong>en</strong>oît Rodriguès<br />

= «7. Sarm<strong>en</strong>to».<br />

Le fameux libraire catholique répliqua <strong>en</strong> ces termes assez aigres:<br />

«Librairie Catholique, Calçada do Carmo, 6, %<br />

1.° —Lisbonne, 10 septembre 1896.<br />

Monsieur J.<br />

Sarm<strong>en</strong>to — Guimarâes.<br />

«J'accuse avec regret la réception <strong>de</strong> votre lettre.<br />

«En vérité, après avoir combiné avec moi la v<strong>en</strong>te unique <strong>de</strong>s Croix-Médailles et<br />

<strong>de</strong>s Médailles pour les membres <strong>de</strong> Y Apostolat, dans <strong>de</strong>s conditions qui, <strong>à</strong> cette époque,<br />

étai<strong>en</strong>t <strong>à</strong> mon préjudice, mais que j'acceptai <strong>à</strong> la seule idée que d'autres comman<strong>de</strong>s<br />

vi<strong>en</strong>drai<strong>en</strong>t avec celle<br />

<strong>de</strong>s médailles, vous v<strong>en</strong>ez <strong>à</strong> prés<strong>en</strong>t non seulem<strong>en</strong>t me retirer la<br />

v<strong>en</strong>te <strong>de</strong>s Croix-Médailles, mais <strong>en</strong>core déf<strong>en</strong>dre <strong>à</strong> MM. P<strong>en</strong>in & Poncet <strong>de</strong> me v<strong>en</strong>dre les<br />

médailles ! ! !<br />

«Votre manière d'agir est extraordinaire et croyez que, si ce n'étai<strong>en</strong>t mes s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>ts<br />

<strong>de</strong> catholique et l'amour que je ress<strong>en</strong>s et que, grâce <strong>à</strong> Dieu, je ress<strong>en</strong>tirai toujours<br />

pour la Compagnie, je procé<strong>de</strong>rais avec tant d'énergie et tant <strong>de</strong> vérité que vous<br />

vous trouveriez dans <strong>de</strong> mauvais draps.<br />

«Que vous ayez fait faire un nouveau coin <strong>de</strong>s médailles, que vous <strong>en</strong> ayez déf<strong>en</strong>du<br />

la v<strong>en</strong>te <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>, je l'admets et c'est raisonnable. Mais déf<strong>en</strong>dre la v<strong>en</strong>te <strong>de</strong>s anci<strong>en</strong>nes<br />

médailles au fabricant et <strong>à</strong> moi, qui suis votre cli<strong>en</strong>t <strong>de</strong>puis quelques années et<br />

qui n'ai pas v<strong>en</strong>du ces médailles falsifiées, cette manière d'agir est <strong>en</strong> vérité extraordinaire<br />

et mérite le ress<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t et le blâme. D'ailleurs que gagnez-vous <strong>à</strong> cette<br />

déf<strong>en</strong>se? Vous croyez que je ue pourrai pas faire un coin pareil au vôtre <strong>en</strong> Italie,<br />

<strong>en</strong> France, <strong>en</strong> Espagne, <strong>en</strong> Suisse, etc., et v<strong>en</strong>dre ici les médailles 20 °/o moins cher<br />

que vous?<br />

«Ne vaudrait-il pas mieux que vous fissiez un accord <strong>à</strong> cet égard et que d'après<br />

vos ordres les<br />

médailles que vous avez fait graver ne fuss<strong>en</strong>t fournies qu'<strong>à</strong> nous, pour éviter<br />

la guerre <strong>à</strong> la guerre, comme dis<strong>en</strong>t les Français?<br />

«Car, croyez-le, je suis très disposé, malgré mon affection pour la Compagnie,<br />

<strong>à</strong> faire bonne propagan<strong>de</strong> <strong>de</strong> l'Apostolat, <strong>en</strong> annonçant et <strong>en</strong> v<strong>en</strong>dant les médailles, les<br />

images bénites et les croix-médailles — 20 °/o<br />

moins cher que vous.<br />

«Je suis sûr que Mr. le Directeur Général me fera <strong>de</strong>s éloges <strong>à</strong> cet égard et que<br />

je serai loué dans son Rapport <strong>de</strong> l'Apostolat.<br />

«Recevez le<br />

témoignage <strong>de</strong> ma parfaite considération<br />

«Votre ami très respectueux, Joachim Antoine Pacheco».<br />

Pour obt<strong>en</strong>ir l'arg<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s dévots ils inv<strong>en</strong>tei<strong>en</strong>t constamm<strong>en</strong>t <strong>de</strong> nouveaux procédés,<br />

chargeant parfois Dieu et les saints <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s dons pour leurs églises.<br />

Voici un modèle <strong>de</strong> ce g<strong>en</strong>re ;<br />

— c'est une circulaire imprimée répandue par les jésuites<br />

<strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> Covilhâ:<br />

«Je suis le cœur <strong>de</strong> Jésus qui habite dans l'église <strong>de</strong> S. Thiago (Saint Jacques) et je<br />

vi<strong>en</strong>s pour la première fois éprouver la sincérité avec laquelle vous vous êtes consacrés<br />

<strong>à</strong> moi le 9 novembre <strong>de</strong> l'année <strong>de</strong>rnière. Vous pouvez le faire <strong>en</strong> contribuant <strong>à</strong> la


Voir<br />

27<br />

sol<strong>en</strong>nité <strong>de</strong> la fête terminant le mois <strong>de</strong> juin, qui sera célébrée dimanche 12 juillet, dans<br />

l'église que j'habite.<br />

iCovilh<strong>à</strong>, juin 1874.<br />

«Le Directeur, P. François Xavier <strong>de</strong> Miranda = Le Trésorier, Louis Antoine<br />

<strong>de</strong> Carvalho =Le Secrétaire, Antoine <strong>de</strong> Almeida Moreira= Pour les zélateurs et zélatrices,<br />

P. Nicolas Podriguès» l .<br />

. CHAPITRE<br />

SEPTIÈME<br />

Collèges pour les pauvres transformés <strong>en</strong> collèges<br />

pour les<br />

riches. — <strong>Les</strong> jésuites ne veul<strong>en</strong>t pas dép<strong>en</strong>ser <strong>de</strong> l'arg<strong>en</strong>t<br />

pour l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants pauvres<br />

L'œuvre <strong>de</strong>s. jésuites <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> <strong>à</strong> cette époque est caractérisée par un fait typique.<br />

Ils n'ont ni fondé ni <strong>en</strong>tret<strong>en</strong>u un seul collège pour l'éducation <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants pauvres;<br />

au contraire, <strong>de</strong>ux collèges <strong>de</strong> cette sorte dont ils avai<strong>en</strong>t pris la direction lors <strong>de</strong><br />

leur <strong>en</strong>trée <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>, se sont transformés, quelques années après, <strong>en</strong> collèges pour<br />

les riches.<br />

Ceci est arrivé pour les <strong>de</strong>ux collèges <strong>de</strong> Campolido et <strong>de</strong> S' Fidèle.<br />

Voyons comm<strong>en</strong>t le fait s'est produit pour chacun d'eux.<br />

Comm<strong>en</strong>çons par Campoli<strong>de</strong>.<br />

m<br />

-<br />

Le P. IUley, Recteur du Séminaire <strong>de</strong>s Inglezinhos avait fondé <strong>en</strong> 1849 un asile,<br />

dans la Rue Cardais <strong>de</strong> Jésus (aujourd'hui R. Kdu<strong>à</strong>rdo Coelho), pour les <strong>en</strong>fants pauvres<br />

et abandonnés, <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux sexes, sous le titre <strong>de</strong> Institut <strong>de</strong> Charité. En 1852 le P. Ra<strong>de</strong>maker<br />

comm<strong>en</strong>ça <strong>à</strong> l'ai<strong>de</strong>r dans cette œuvre et <strong>en</strong> 1853, jugeant conv<strong>en</strong>able <strong>de</strong> séparer<br />

les sexes, il se chargea <strong>de</strong>s garçons et les emm<strong>en</strong>a dans une maison qu'il avait<br />

louée, L'irgo da Piiscoa, les transportant <strong>en</strong> 1857 lîue<strong>de</strong> Bu<strong>en</strong>os Ayres. ( chap. l. er ).<br />

En 1858 il acheta une maison <strong>à</strong> Campoli<strong>de</strong> et il y mit ses élèves pauvres.<br />

Mais étant déj<strong>à</strong> jésuite alors, il voulut faire <strong>de</strong> cette maison un grand collège pour<br />

les <strong>en</strong>fants <strong>de</strong> l'aristocratie et <strong>de</strong> la bourgeoisie 2 .<br />

Ne voulant cep<strong>en</strong>dant pas abandonner ses élèves pauvres, il les <strong>en</strong>voya <strong>en</strong> juillet<br />

1860 <strong>à</strong> la maison du Barro, où il fonda aussi un noviciat <strong>de</strong> l'Ordre qui était couvert par<br />

ces collégi<strong>en</strong>s 3 .<br />

Mais le P. Ra<strong>de</strong>maker fut retiré du gouvernem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> 1862 et remplacé par <strong>de</strong>s '<br />

jésuites itali<strong>en</strong>s. Ce,ux-ci <strong>en</strong> 1865 supprimèr<strong>en</strong>t l'asile <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants pauvres du Barro et<br />

n'y laissèr<strong>en</strong>t que le Noviciat et le Scolasticat <strong>de</strong> l'Ordre.<br />

A l'honneur <strong>de</strong> Ra<strong>de</strong>maker il faut fixer ici ce que dit le jésuite P. Antoine Cor<strong>de</strong>iro<br />

dans le Jubilé du Collège du Barro, où il raconte que «lorsque Ra<strong>de</strong>maker était<br />

supérieur, il ne voulut jamais r<strong>en</strong>voyer les orphelins, comme le lui conseillai<strong>en</strong>t souv<strong>en</strong>t<br />

les Pères itali<strong>en</strong>s <strong>en</strong> vue du manque <strong>de</strong> ressources pour leur <strong>en</strong>treti<strong>en</strong> et leur éducation.<br />

Jamais le P. Charles ne put se déci<strong>de</strong>r <strong>à</strong> abandonner une œuvre <strong>de</strong> charité si sympathique<br />

au public <strong>en</strong> général et â son cœur t<strong>en</strong>dre et paternel et qui avait toujours été la<br />

1<br />

Emm. Bornes Graïnha, <strong>Portugal</strong> Jetuita — (Le <strong>Portugal</strong> Jésuite) — Lisbonne, 1803, p. 494<br />

2<br />

M<strong>en</strong>tageiro do Coraçâo <strong>de</strong> Jésus, 1903. pp. 407.<br />

3 lli$t. Coll. Camp, et Ré*. LUb., 19.


28<br />

prunelle <strong>de</strong> ses yeux. . . Il ne faut donc pas s'étonner <strong>de</strong> ce que plus tard, lorsque les supérieurs,<br />

par manque <strong>de</strong> moy<strong>en</strong>s et <strong>de</strong> personnel, crur<strong>en</strong>t <strong>de</strong>voir fermer le collège <strong>de</strong>s<br />

orphelins, notre Père Charles le regrettât si vivem<strong>en</strong>t» '.<br />

Le Collège <strong>de</strong> S. 1 Fidèle fut fondé pour l'éducation <strong>de</strong>s orphelins et <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants pauvres<br />

<strong>en</strong> 1852, par Frère Augustin <strong>de</strong> l'Annonciation,<br />

ex-franciscain. P<strong>en</strong>dant la nuit du<br />

24 au 25 août 1858 un viol<strong>en</strong>t inc<strong>en</strong>die dévora la maison, et, <strong>de</strong>s quatre-vingts orphelins<br />

qui y étai<strong>en</strong>t élevés alors, beaucoup r<strong>en</strong>trèr<strong>en</strong>t dans leurs familles et <strong>à</strong> peu près<br />

douze fur<strong>en</strong>t recueillis au Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> 2 .<br />

La maison fut rebâtie au moy<strong>en</strong> d'aumônes et <strong>en</strong> 1863 Fr. Augustin remit la direction<br />

du collège aux jésuites 3 .<br />

Il continua cep<strong>en</strong>dant <strong>à</strong> servir d'asile aux orphelins et parut inscrit au Catalogue<br />

<strong>de</strong> la Province Castillane <strong>de</strong> cette année lective sous le titre <strong>de</strong> In Collegio Orphanorum.<br />

Depuis, les jésuites ont admis plusieurs élèves p<strong>en</strong>sionnaires avec les orphelins, et<br />

l'admission <strong>de</strong> ceux-ci alla <strong>en</strong> diminuant tandis que celle<br />

<strong>de</strong> ceux-l<strong>à</strong> allait <strong>en</strong> augm<strong>en</strong>tant,<br />

<strong>en</strong> sorte que, <strong>en</strong> 1873 (quand les jésuites <strong>de</strong>vinr<strong>en</strong>t maîtres <strong>de</strong> la maison par un contrat<br />

<strong>de</strong> v<strong>en</strong>te fictive fait par Fr. Augustin aux trois fameux jésuites anglais Lambert, Seules<br />

et Foley), l'admission d'orphelins avait presque disparu, comme on le voit facilem<strong>en</strong>t<br />

<strong>en</strong> lisant att<strong>en</strong>tivem<strong>en</strong>t le Catalogue général <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants du séminaire <strong>de</strong> S 1 Fidile<br />

<strong>de</strong>puis l'année 1852, livre manuscrit se trouvant aux Archives Congréganistes.<br />

En possession- <strong>de</strong> la maison, les jésuites convertir<strong>en</strong>t l'anci<strong>en</strong> collège pour orphelins<br />

<strong>en</strong> collège pour <strong>de</strong>s riches, et on vit disparaître <strong>de</strong> leurs catalogues le titre <strong>de</strong> Collegium<br />

orphanorum, qui <strong>de</strong>vint Collegium et convictus i . Si on continua <strong>à</strong> admettre quelques rares<br />

orphelins ce fut pour obéir aux exig<strong>en</strong>ces du Fondateur, le Fr. Augustin, qui avait<br />

laissé <strong>de</strong> l'arg<strong>en</strong>t pour cela (fonds hérités, dit le jésuite Candi<strong>de</strong> M<strong>en</strong>dès, page 49 <strong>de</strong> sa<br />

Réponse au Rapport du Dr. Ramos Preto).<br />

Dans le Status Temporalis du Collège <strong>de</strong> S. Fidèle <strong>de</strong> 1877 <strong>à</strong> 1899 5 on trouve <strong>à</strong><br />

chaque année l'indication d'une somme dép<strong>en</strong>sée «pour l'éducation <strong>de</strong> huit orphelins,<br />

d'après le<br />

désir du Fondateur».<br />

De 1877 <strong>à</strong> 1891, selon le même Status, les orphelins élevés annuellem<strong>en</strong>t <strong>à</strong> S 1 Fidèle<br />

fur<strong>en</strong>t au nombre <strong>de</strong> douze, mais <strong>de</strong> 1892 <strong>à</strong> 1909 nous ne voyons que le nombre<br />

<strong>de</strong> huit. Cep<strong>en</strong>dant le nombre <strong>de</strong>s p<strong>en</strong>sionnaires augm<strong>en</strong>tait et s'élevait <strong>à</strong> 330 <strong>en</strong> 1906.<br />

Cette année-l<strong>à</strong> les p<strong>en</strong>sions rapportèr<strong>en</strong>t 53.252 écus (soit 266.2f>0 francs i, tandis qu'<strong>à</strong><br />

cette époque on ne voit au Status Temporalis que huit orphelins dont l'éducation était<br />

payée avec l'arg<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s fonds hérités, <strong>de</strong>stinés <strong>à</strong> cela par le Fondateur; <strong>en</strong> sorte que<br />

les jésuites ne dép<strong>en</strong>sai<strong>en</strong>t ri<strong>en</strong> pour ces orphelins et gagnai<strong>en</strong>t au contraire, comme<br />

nous allons le prouver.<br />

Parce qu'il faut remarquer que parmi ceux que l'on appelait orphelins élevés par<br />

les jésuites, comme élèves gratuits, il y <strong>en</strong> avait beaucoup qui n'étai<strong>en</strong>t pas orphelins,<br />

comme on le prouve par ies docum<strong>en</strong>ts qui se trouv<strong>en</strong>t aux Archives Congréganistes<br />

et comme le P. Candi<strong>de</strong> M<strong>en</strong>dès l'avoue p. 49 <strong>de</strong> sa Réponse au Rapport du Dr. Pamos<br />

Preto. <strong>Les</strong> uns étai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants que les jésuites élevai<strong>en</strong>t gratuitem<strong>en</strong>t dans le but<br />

<strong>de</strong> les incorporer dans leur noviciat où ils <strong>en</strong>trèr<strong>en</strong>t <strong>en</strong> grand nombre 6 . D'autres<br />

1<br />

Jubilé du Collège du Barro, p. 12-13.<br />

2 Hist. Coll. Camp, et Rés. Lisb, pp. 13-14.— Rapports <strong>de</strong>s Drs. Refoios e Ramos Preto.<br />

3 Hist. Coll. Camp, et Rés Lisb, pp. 41-42-<br />

4 Catalogus Provinciae Castellanae S. J., 1863, p. 60 et 1876, p. 57.<br />

5<br />

Livre manuscrit se trouvant aux Archives Congréganistes.<br />

6<br />

Voir le Catalogue général <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants du Séminaire <strong>de</strong> St. Hdèle <strong>de</strong>puis 1852.


}<br />

29<br />

étai<strong>en</strong>t admis <strong>à</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> personnes pouvant ai<strong>de</strong>r la Compagnie par leur influ<strong>en</strong>ce<br />

politique, sociale ou pécuniaire, comme on le prouve par <strong>de</strong>s docum<strong>en</strong>ts et <strong>de</strong>s<br />

lettres déposés aux Archives Congréganistes, parmi lesquels je citerai ce petit billet du<br />

jésuite<br />

<strong>de</strong> S*<br />

P. Jules Ferreira, <strong>de</strong>meurant Rue du Quelhas, G, adressé au Recteur du Collège<br />

Fidèle.<br />

«R. P. Recteur — Le P. Jules Ferreira salue et <strong>en</strong>voie la lettre ci-incluse du<br />

Dr. Gaivâo, commissaire <strong>de</strong> la Police secrète d'Emigration. Que V. R. ce croie bi<strong>en</strong> que<br />

le Collège ne perdra ri<strong>en</strong>, mais au contraire gagnera beaucoup si l'on reçoit le petit<br />

gratis. Ce Monsieur par sa position et son influ<strong>en</strong>ce, généreux et reconnaissant comme<br />

il est, ne restera pas <strong>en</strong> <strong>de</strong>tte <strong>en</strong>vers !e Collège. V. R. ce trouvera toujours chez lui une<br />

porte ouverte pour parv<strong>en</strong>ir où elle voudra. Ainsi le p<strong>en</strong>se tout le mon<strong>de</strong> ici».<br />

Cep<strong>en</strong>dant nous <strong>de</strong>vons faire remarquer ici la différ<strong>en</strong>ce qui existe <strong>en</strong>tre les hommes<br />

:<br />

Fr. Augustin avait <strong>en</strong> 1858 dans son Séminaire quatre vingts orphelins gratuits, et<br />

pas un p<strong>en</strong>sionnaire. <strong>Les</strong> jésuites, comme nous le voyons dans le (States cité, avai<strong>en</strong>t<br />

<strong>en</strong> 190G trois c<strong>en</strong>t tr<strong>en</strong>te p<strong>en</strong>sionnaires, dont les p<strong>en</strong>sions rapportai<strong>en</strong>t 53.252 écus et<br />

seulem<strong>en</strong>t huit orphelins, dont l'<strong>en</strong>treti<strong>en</strong> prov<strong>en</strong>ait <strong>de</strong> fonds hérités et <strong>de</strong>stinés <strong>à</strong> cela<br />

par le<br />

Fondateur.<br />

A Guimarîes les jésuites avai<strong>en</strong>t, <strong>de</strong>puis 1892, une Ecole Apostolique, dont l'admission<br />

était gratuite, d'après les programmes. FJIe avait été d'abord fondée au Barro dans<br />

le but d'attirer et <strong>de</strong> préparer <strong>de</strong>s novices pour la Compagnie <strong>de</strong> Jésus, car ils ne v<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t<br />

plus, comme autrefois, <strong>de</strong> leurs collèges et d'ailleurs, comme on le voit dans les<br />

Notes sur l'Ecole Apostolique qui se trouv<strong>en</strong>t aux Archives Congréganistes. (Voir p. 33<br />

Eh bi<strong>en</strong>, quoique cette Ecole Apostolique ne fût qu'une pépinière <strong>de</strong> futurs jésuites,<br />

ils ne voulai<strong>en</strong>t pas dép<strong>en</strong>ser pour elle l'arg<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l'Ordre, cherchant <strong>à</strong> l'obt<strong>en</strong>ir <strong>de</strong> personnes<br />

dévotes, leurs amies, comme le dis<strong>en</strong>t les Notes citées :<br />

«Pour l'achat, le mobilier et la transformation <strong>de</strong> l'édifice, où on dép<strong>en</strong>sa quelques<br />

milliers d'écus, on obtint les fonds <strong>de</strong>- la charité généreuse <strong>de</strong> plusieurs personnes bi<strong>en</strong><br />

connues. Pour l'<strong>en</strong>treti<strong>en</strong> <strong>de</strong>s Apostoliques a beaucoup contribué la quête due au zèle<br />

et <strong>à</strong> l'activité<br />

Apostolique».<br />

industrieuse du Frère coadjuteur Sarm<strong>en</strong>to, bi<strong>en</strong>faiteur insigne <strong>de</strong> l'Ecole<br />

Mais le P. B<strong>en</strong>oît Rodriguès ne comptant pas trop sur la constante générosité <strong>de</strong>s<br />

fidèles, trouva qu'il fallait y monter un collège d'élèves externes, afin <strong>de</strong> pouvoir avec<br />

ses rev<strong>en</strong>us et <strong>à</strong> son ombre <strong>en</strong>tret<strong>en</strong>ir les Apostoliques. Ainsi il disait dans une lettre au<br />

Provincial, datée <strong>de</strong> Guimar<strong>à</strong>es, le 23 avril 1894:<br />

• Notre chère Province ne peut se développer, elle ira plutôt eu diminuant, si les<br />

vocations ne se multipli<strong>en</strong>t pas. Il n'y aura pas <strong>de</strong> vocations sans Ecole Apostolique<br />

ni d'Ecole Apostolique sans moy<strong>en</strong>s <strong>de</strong> l'<strong>en</strong>tret<strong>en</strong>ir, si ce n'est <strong>à</strong> l'ombre d'un collège».<br />

Mais ce collège, qui <strong>de</strong> fait fut fondé, ne donna pas les résultats espérés, pour<br />

les motifs qui seront indiqués plus loin, et on dut le fermer. Mais avant que l'on eût<br />

pris cette résolution le P. Avelino Miranda, Préfet <strong>de</strong>s Apostoliques, écrivait, le 11 janvier<br />

1895 au P. Provincial, ce qui suit:<br />

«A la <strong>de</strong>rnière consultation le R. P. Supérieur a expojé le désir manifesté par<br />

V. R. ce pour que l'on ne continuât pas les classes externes. Et il a ajouté avec assez <strong>de</strong><br />

regret qu'il ne savait plus où trouver les moy<strong>en</strong>s pour <strong>en</strong>tret<strong>en</strong>ir les Apostoliques; car<br />

les<br />

aumônes comm<strong>en</strong>çai<strong>en</strong>t <strong>à</strong> manquer et maint<strong>en</strong>ant cette source <strong>de</strong> rev<strong>en</strong>us, qui semblait<br />

la plus sûre, allait manquer aussi».<br />

En 1901 ils t<strong>en</strong>tèr<strong>en</strong>t dans la même ville la fondation d'un collège pour élèves internes<br />

et externes, mais il ne réussit pas et ils dur<strong>en</strong>t le fermer <strong>en</strong> 1906.<br />

Cep<strong>en</strong>dant les jésuites tout <strong>en</strong> fermant le collège continuèr<strong>en</strong>t toujours l'École


30<br />

Apostolique, <strong>en</strong> cherchant <strong>à</strong> ce que l'arg<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s étrangers leur épargnât un plus grand<br />

débours <strong>de</strong> l'arg<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l'Ordre. Ainsi ils voulai<strong>en</strong>t que les familles qui leur confiai<strong>en</strong>t<br />

<strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants pour leur noviciat leur donnass<strong>en</strong>t, quoique pauvres, <strong>de</strong>s secours matériels<br />

pour leur <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>. C'est ce que l'on déduit du troisième article du programme imprimé<br />

<strong>de</strong> cette école,<br />

que nous avons <strong>de</strong>vant nous, ainsi jésuitiquem<strong>en</strong>t écrit:<br />

«III. Conditions d'admission. — L'admission est gratuite. Mais p<strong>en</strong>dant les premières<br />

années les<br />

familles <strong>de</strong>vront, dans la mesure <strong>de</strong> leurs moy<strong>en</strong>s, ai<strong>de</strong>r l'École Apostolique<br />

par <strong>de</strong>s dons <strong>en</strong> arg<strong>en</strong>t ou par l'offre <strong>de</strong> d<strong>en</strong>rées alim<strong>en</strong>taires. Ce qu'elles feront<br />

<strong>de</strong> bon gré, non seulem<strong>en</strong>t parce qu'elles contribueront <strong>à</strong> une œuvre éminemm<strong>en</strong>t religieuse<br />

et patriotique vivant d'aumônes, mais aussi parce que si l'élève ne peut pas con<br />

tinuer les étu<strong>de</strong>s, toute dép<strong>en</strong>se déj<strong>à</strong> faite sera bi<strong>en</strong> comp<strong>en</strong>sée par l'instruction qu'il<br />

aura acquise».<br />

En examinant un livre <strong>de</strong> l'Int<strong>en</strong>d<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> la<br />

Province Portugaise <strong>de</strong> la Compagnie<br />

<strong>de</strong> Jésus j'ai trouvé qu'elle versait <strong>à</strong> cette école une somme <strong>de</strong> 40 écus (200 frs.) par<br />

mois ;<br />

or dans les Notes citées on voit que le nombre <strong>de</strong>s Apostoliques s'élevait, parfois<br />

<strong>à</strong> plus <strong>de</strong> cinquante et ainsi cette somme n'atteignait pas 5 francs par élève apostolique.<br />

Donc l'œuvre <strong>de</strong>s jésuites <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> <strong>à</strong> cette époque se résume <strong>en</strong> ceci:<br />

— pas<br />

<strong>de</strong> dép<strong>en</strong>ses pour l'instruction <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants pauvres, et, lors même que ces <strong>en</strong>fants<br />

puiss<strong>en</strong>t <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir <strong>de</strong> futurs jésuites, chercher <strong>à</strong> ce que d'autres personnes donn<strong>en</strong>t l'arg<strong>en</strong>t<br />

pour leur <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>.<br />

CHAPITRE HUITIÈME<br />

Comm<strong>en</strong>t les jésuites recrutai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s novices pour leur Ordre<br />

<strong>Les</strong> premiers novices portugais qui <strong>en</strong>trèr<strong>en</strong>t dans la Compagnie dur<strong>en</strong>t aller faire<br />

leur noviciat <strong>à</strong> l'étranger, vu qu'il n'y avait pas <strong>en</strong>core ici <strong>de</strong> place pour eux. Mais le<br />

15 août 1860, Ra<strong>de</strong>maker fonda, avec l'autorisation du Général, un noviciat au Barro,<br />

<strong>à</strong> une lieue du bourg <strong>de</strong> Tôrres Vedras. Cette, maison était un anci<strong>en</strong> couv<strong>en</strong>t <strong>de</strong> capucins<br />

d'Arrabida, qui, par l'extinction <strong>de</strong>s couv<strong>en</strong>t» <strong>en</strong> <strong>1834</strong>, était resté <strong>en</strong> possession<br />

<strong>de</strong> l'État. Il avait été v<strong>en</strong>du aux <strong>en</strong>chères et acheté <strong>en</strong> 1857 par le Marquis <strong>de</strong><br />

Valada, qui plus tard, <strong>à</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> du P. Ra<strong>de</strong>maker, l'avait donné <strong>à</strong> la Compagnie<br />

<strong>de</strong> Jésus pour qu'on y établît le noviciat du <strong>Portugal</strong> '.<br />

La maison était petite et se trouvait dans un lieu isolé, éloigné <strong>de</strong> Lisbonne <strong>de</strong><br />

68 kilomètres <strong>en</strong>viron. Le local avait été choisi dans ces conditions par l'ordre du Général,<br />

qui <strong>en</strong> décembre 1859 avait écrit au P. Ra<strong>de</strong>maker lui disant: «que la maison du<br />

noviciat ne <strong>de</strong>vait pas être très rapprochée <strong>de</strong> la Capitale du Royaume, afin <strong>de</strong> ne pas<br />

être troublée par les ruses <strong>de</strong>s malveillants ou par les diss<strong>en</strong>sions civiles; elle ne <strong>de</strong>vait<br />

pas non plus <strong>en</strong> être trop éloignée, pour pouvoir <strong>en</strong> temps opportun v<strong>en</strong>ir <strong>en</strong> ai<strong>de</strong> au<br />

collège» 2 .<br />

Ra<strong>de</strong>maker y plaça, avec le noviciat, les étudiants pauvres gratuits qui étai<strong>en</strong>t <strong>à</strong><br />

Campoli<strong>de</strong>, dans le double but <strong>de</strong> consacrer ce collège aux <strong>en</strong>fants pauvres et <strong>de</strong> couvrir<br />

par un asile d'orphelins le noviciat <strong>de</strong> jésuites que la loi portugaise déf<strong>en</strong>dait 3 .<br />

i<br />

Jubilé du Collège du Barro, pp. 4 et 5.— Hist. Coll. Camp, et Iiét. LU'oon. pp. 17 et 19.<br />

2 Jubilé du Collège du Barro, p. 6 «Non nimium vicina urbi regui principi esse débet, m forte<br />

malevolorum cavilationibus aut civilibus dissidiis perturbetur, née etiam nimium ab illa disaita sit<br />

ut possit facilius suo tempore collegio auxilium subministrare».<br />

3<br />

Jubilé duCotlhje du Barro, p. 6: «Ceci était utile, pour <strong>de</strong>ux motifs très importants: permettre<br />

<strong>de</strong> recevoir les élèves pauvres <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong>, dont le nombre augm<strong>en</strong>tait et faire <strong>en</strong> sorte que le<br />

noviciat put continuer plus mo<strong>de</strong>stem<strong>en</strong>t, couvert par les <strong>en</strong>fants orphelins qui y serai<strong>en</strong>t élevés».


—<br />

31<br />

liais le 7 juillet 1861 on fit passer les novices du Barro dans le Séminaire <strong>de</strong> Sernache<br />

<strong>de</strong> Bomjardim, par l'influ<strong>en</strong>ce<br />

<strong>de</strong> Charles Joseph Cal<strong>de</strong>ira, frère naturel du ministre<br />

Casai Ribeiro. Ce Sémiaaire resta <strong>en</strong> appar<strong>en</strong>ce, pour les affaires bureaucratiques,<br />

sous la direction du novice portugais P. Antoine Barroso, mais, <strong>de</strong> fait, le supérieur <strong>de</strong><br />

tout était le Père itali<strong>en</strong> Meloni, maître <strong>de</strong>s novices, lesquels dans ce Séminaire officiel<br />

<strong>de</strong>s Missions d'Outremer passai<strong>en</strong>t pour <strong>de</strong> simples individus se préparant pour les<br />

Missions, trompant ainsi les lois anti-jésuitiques portugaises'.<br />

Mais <strong>à</strong> peine trois ans après, <strong>en</strong> juillet 1864, les novices revinr<strong>en</strong>t au Barro pour<br />

plusieurs raisons, • <strong>en</strong>tre lesquelles dominait, comme le dit le jésuite Cor<strong>de</strong>iro, sans<br />

doute le manque d'indép<strong>en</strong>dance et <strong>de</strong> liberté, que l'on <strong>de</strong>vait forcém<strong>en</strong>t s<strong>en</strong>tir, dans un<br />

établissem<strong>en</strong>t comme celui-l<strong>à</strong>, dép<strong>en</strong>dant et sous la haute inspection du Gouvernem<strong>en</strong>t<br />

et <strong>de</strong> l'Evêque»-.<br />

Depuis lors, le noviciat <strong>de</strong>s jésuites continua toujours au Barro jusqu'<strong>à</strong> leur bannissem<strong>en</strong>t<br />

le 8 octobre <strong>1910</strong>.<br />

Ayant fait connaître la maison où avait lieu le noviciat jésuitique <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>,<br />

nous allons nous occuper <strong>de</strong> la manière dont on <strong>en</strong> recrutait les novices.<br />

<strong>Les</strong> jésuites se servir<strong>en</strong>t <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> <strong>de</strong> trois<br />

moy<strong>en</strong>s principaux pour recruter <strong>de</strong>s<br />

novices pour l'Ordre: les missions u'est-<strong>à</strong>-dire <strong>de</strong>s prédications faites durant <strong>de</strong>s jours<br />

consécutifs dans la même localité), leurs Collèges, et l'Ecole Apostolique. Mais comme<br />

auxiliaires précieux <strong>de</strong> ces trois élém<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> recrutem<strong>en</strong>t, ils eur<strong>en</strong>t <strong>à</strong> leur côté la puissante<br />

influ<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> certains prêtres séculiers et celle <strong>de</strong> familles extrêmem<strong>en</strong>t dévotes.<br />

<strong>Les</strong> premiers novices qui <strong>en</strong>trèr<strong>en</strong>t dans l'Ordre fur<strong>en</strong>t influ<strong>en</strong>cés par le nom, les<br />

sermons et les conseils du P. Ra<strong>de</strong>maker 3 .<br />

Mais <strong>de</strong>puis, jusqu'<strong>à</strong> 1880 ce fur<strong>en</strong>t surtout leurs <strong>de</strong>ux collèges <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> et<br />

<strong>de</strong> S' Fidèle qui donnèr<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s novices pour la Compagnie. Campoli<strong>de</strong>, cep<strong>en</strong>dant, fut très<br />

peu fécond <strong>en</strong> vocations, car il cessa bi<strong>en</strong>tôt d'avoir <strong>de</strong>s élèves pauvres et gratuits,<br />

comme nous l'avons vu au chapitre précéd<strong>en</strong>t, et c'était principalem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tre les élèves<br />

pauvres que l'on faisait le recrutem<strong>en</strong>t jésuitique.<br />

Mais le Collège <strong>de</strong> St. Fidèle qui jusqu'<strong>en</strong> 1870 n'avait eu, pour ainsi dire, que<br />

<strong>de</strong>s élèves pauvres et gratuits et avait continué <strong>à</strong> <strong>en</strong> admettre quelques uns, <strong>à</strong> cause<br />

<strong>de</strong> l'arg<strong>en</strong>t laissé <strong>à</strong> cet effet par le fondateur, fut p<strong>en</strong>dant longtemps une pépinière du<br />

noviciat du Barro. Dans le Catalogue, général <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants du séminaire <strong>de</strong> St.. Fidèle <strong>de</strong>puis<br />

Vannée 1852, on trouve jusqu'<strong>à</strong> l'élève inscrit au numéro 260 l'indication du lieu<br />

où étai<strong>en</strong>t allés tous ces élèves, <strong>en</strong> sortant du Collège, et <strong>de</strong> ces 260 élèves on voit que<br />

35 <strong>en</strong>trèr<strong>en</strong>t au Barro, où était le noviciat <strong>de</strong> l'Ordre, 4 allèr<strong>en</strong>t aux Lazaristes, d'autres<br />

dans différ<strong>en</strong>ts séminaires. Cep<strong>en</strong>dant <strong>à</strong> partir <strong>de</strong> 1880 les vocations émanant <strong>de</strong><br />

ces <strong>de</strong>ux collèges comm<strong>en</strong>cèr<strong>en</strong>t <strong>à</strong> <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir plus rares, parce que l'un et l'autre s'étai<strong>en</strong>t<br />

transformés <strong>de</strong> collèges pour les pauvres <strong>en</strong> collèges pour les riches. Et <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> très<br />

peu <strong>de</strong> garçons <strong>de</strong>s familles riches ou <strong>de</strong> la classe moy<strong>en</strong>ne <strong>en</strong>trai<strong>en</strong>t dans les Ordres<br />

Religieux.<br />

En vue <strong>de</strong> cette rareté <strong>de</strong> vocations, les jésuites portugais s'occupèr<strong>en</strong>t <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>r<br />

une École Apostolique, comme on le faisait <strong>en</strong> France et dans d'autres pays. L'Ecole<br />

Apostolique est un établissem<strong>en</strong>t où l'on reçoit <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants pauvres et ignorants, recrutés<br />

dans les villages et les petits bourgs, par les missionnaires et leurs a<strong>de</strong>ptes. On y<br />

1<br />

Iliêt. Coll. Camp, et Hé». Lisbon. pp. 25 et 26. — Jubilé du Collège du Barro. pp. 14 et 39.<br />

2 Jubilé du Collège du Barro, p. 39.<br />

J Hist. Coll. Camp, et Rés. Lisbon., pp. 11, 12 et 18.<br />

Juliilé du Collège du Barro, pp. 10<br />

et 205.


.<br />

32<br />

donne une éducation si réactionnaire que les esprits faibles <strong>de</strong> ces <strong>en</strong>fants sont facilem<strong>en</strong>t<br />

portés <strong>à</strong> vouloir s'<strong>en</strong>rôler dans les noviciats congréganistes.<br />

<strong>Les</strong> missions et le confessionnal servai<strong>en</strong>t <strong>à</strong> merveille <strong>à</strong> préparer la vocation chez<br />

quelques <strong>en</strong>fants et <strong>à</strong> stimuler chez les familles du peuple le désir <strong>de</strong> voir leurs fils suivre<br />

la vie <strong>de</strong>s missionnaires. Ils <strong>en</strong>trai<strong>en</strong>t donc, dès leur <strong>en</strong>fance, <strong>à</strong> l'École Apostolique,<br />

où il était facile <strong>de</strong> tromper l'esprit <strong>en</strong>fantin <strong>de</strong> ces pauvres garçons.<br />

Pour compr<strong>en</strong>dre ce procédé on lira avec intérêt le passage d'une lettre du jésuite<br />

P. Armand Lochu, <strong>en</strong> mission <strong>à</strong> Pôvoa <strong>de</strong> Varzim <strong>en</strong> <strong>1910</strong>, où il cite un cas pareil, <strong>de</strong><br />

la<br />

manière qui suit:<br />

•'Aujourd'hui une mère <strong>de</strong> famille est v<strong>en</strong>ue me trouver avec ses <strong>de</strong>ux <strong>en</strong>fants,<br />

l'un <strong>de</strong> huit, l'autre <strong>de</strong> dix ans, <strong>en</strong> disant que les <strong>en</strong>fants avai<strong>en</strong>t la vocation ( ! ! ) et<br />

qu'elle désirait les faire admettre <strong>à</strong> l'Ecole Apostolique <strong>de</strong> Guimar<strong>à</strong>es. Cette vocation<br />

v<strong>en</strong>ait <strong>de</strong> ce que les petits avai<strong>en</strong>t assisté <strong>à</strong> mes sermons et <strong>en</strong> r<strong>en</strong>trant chez eux ils<br />

avai<strong>en</strong>t dit <strong>à</strong> leur mère qu'ils voulai<strong>en</strong>t être comme ce prêtre, pour prêcher comme lui !<br />

Et puis, qui sait?. . . Notre Seigneur se sert parfois <strong>de</strong> telles choses. . . J'ai promis <strong>de</strong><br />

voir ce qu'on pourrait faire pour ces petits prédicateurs <strong>en</strong> herbe 1 ».<br />

A l'égard <strong>de</strong> l'École Apostolique <strong>de</strong>s jésuites portugais, j'ai <strong>de</strong>vant moi <strong>de</strong>s<br />

Notes manuscrites datées du 23 mars 1908, trouvées parmi les papiers <strong>de</strong> la Province<br />

Portugaise <strong>de</strong> la Compagnie <strong>de</strong> Jésus. Elles sont si complètes et si intéressantes sur la<br />

fondation, la vie et les résultats <strong>de</strong> cette École Apostolique, que je vais <strong>en</strong> transcrire<br />

quelques passages. ,<br />

«I. la fondation — a) Au Barro<br />

«Vers l'année<br />

1880 on remarquait la. rareté <strong>de</strong>s vocations pour la Compagnie, vu le<br />

petit nombre <strong>de</strong> jeunes g<strong>en</strong>s, soit <strong>de</strong> nos collèges, soit d'autres côtés, <strong>de</strong>mandant <strong>à</strong> être<br />

admis. Quelques uns se prés<strong>en</strong>tai<strong>en</strong>t cep<strong>en</strong>dant montrant le désir <strong>de</strong> suivre la vie <strong>de</strong><br />

religieuse, mais ils avai<strong>en</strong>t peu d'étu<strong>de</strong>s et ne savai<strong>en</strong>t pas du tout le latin. De l<strong>à</strong> l'idée<br />

l'École Apostolique comme pépinière du Noviciat.<br />

«Elle comm<strong>en</strong>ça au Barro ayant pour supérieur le maître <strong>de</strong>s novices, le regretté<br />

P. Dominique Moscatelli. Dans les premiers temps il n'y avait <strong>de</strong> place que pour sept<br />

ou huit élèves, qui, p<strong>en</strong>dant une année, y recevai<strong>en</strong>t quelques notions <strong>de</strong> portugais et <strong>de</strong><br />

latin et qui, d'après les aptitu<strong>de</strong>s qu'ils avai<strong>en</strong>t montrées, <strong>en</strong>trai<strong>en</strong>t au noviciat ou étai<strong>en</strong>t<br />

r<strong>en</strong>voyés. Ainsi lorsqu'<strong>en</strong> décembre 1881 le P. B<strong>en</strong>oît Rodriguès fut <strong>en</strong>voyé au Barro,<br />

pour remplacer le P. Moscatelli, il trouva parmi les novices les premiers élèves <strong>de</strong><br />

l'École Apostolique et dans celle-ci déj<strong>à</strong> d'autres occupant la place <strong>de</strong> ceux-l<strong>à</strong>.<br />

«En sorte que <strong>de</strong>s sept ou huit apostoliques, admis annuellem<strong>en</strong>t dans l'École Apostolique,<br />

au moins cinq ou six étai<strong>en</strong>t choisis pour le noviciat et on faisait le passage <strong>de</strong><br />

celle-l<strong>à</strong> <strong>à</strong> celui-ci avec une certaine sol<strong>en</strong>nité, qui produisait très bon effet sur les élus<br />

ainsi que sur ceux qui restai<strong>en</strong>t <strong>à</strong> l'essai.<br />

«Un <strong>de</strong>s premiers soins du P. Rodriguès fut <strong>de</strong> voir comm<strong>en</strong>t on pourrait augm<strong>en</strong>ter<br />

le nombre <strong>de</strong>s Apostoliques, et <strong>de</strong> faire <strong>en</strong> sorte que leur séjour <strong>à</strong> l'École durât au<br />

moins <strong>de</strong>ux ans. .<br />

«C'est <strong>en</strong> l'année 1883 que la XXII e Congrégation Générale eut lieu et c'est après<br />

cela que le Père Provincial écrivait au P. Rodriguès <strong>en</strong> disant qu'on avait pris la résolution<br />

<strong>de</strong> maint<strong>en</strong>ir le Noviciat où il se trouvait. Mais que pour cela il fallait augm<strong>en</strong>ter<br />

le bâtim<strong>en</strong>t. <strong>Les</strong> travaux comm<strong>en</strong>cèr<strong>en</strong>t donc pour agrandir le noviciat et par consé-<br />

Jubilè du Collège du Barro, pp. 174 et 175.


33<br />

qu<strong>en</strong>t aussi le local <strong>de</strong>s Apostoliques. On obtint la permission d'admettre jusqu'<strong>à</strong> douze,<br />

puis jusqu'<strong>à</strong> vingt élèves ou davantage, si la Provid<strong>en</strong>ce fournissait les moy<strong>en</strong>s <strong>de</strong> les<br />

<strong>en</strong>tret<strong>en</strong>ir.<br />

t Grâce <strong>à</strong> Dieu tout fut obt<strong>en</strong>u.<br />

«En octobre 1887 l'obéissance établit que le P. Rodriguès quitterait le Noviciat te<br />

l'École Apostolique, pour se consacrer aux missions remplaçant l'infatigable Apôtre le<br />

P. Louis Prosperi, qui était mort la même année <strong>à</strong> Moncorvo.<br />

«Le P. Rodriguès, au milieu <strong>de</strong> ses travaux apostoliques n'oubliait pas sa chère<br />

école, <strong>à</strong> laquelle il <strong>en</strong>voyait quelques jeunes garçons, plusieurs <strong>de</strong>squels sont aujourd'hu<br />

<strong>de</strong> dignes fils <strong>de</strong> la Compagnie.<br />

In<br />

A Guimarâes<br />

«En 1892 on p<strong>en</strong>sa <strong>à</strong> séparer du noviciat l'Ecole Apostolique, <strong>en</strong> la passant ailleurs.<br />

«Le P. Rodriguès, qui déj<strong>à</strong> alcrs résidait <strong>à</strong> Guimarâes, n'approuvait pas cette idée,<br />

pour <strong>de</strong>s motifs qu'on exposera plus loin, mais il fut consulté par le P. Provincial au<br />

sujet du local <strong>à</strong> choisir pour ce changem<strong>en</strong>t.<br />

«Entre autres il indiqua Guimarâes qui plut et on décida d'exécuter sans délai ce<br />

déplacem<strong>en</strong>t.<br />

«On s'occupa <strong>de</strong> trouver une maison d'abord louée et bi<strong>en</strong>tôt achetée. Lorsque<br />

celle-ci fut suffisamm<strong>en</strong>t meublée, au mois <strong>de</strong> novembre, un <strong>de</strong>s premiers amis <strong>de</strong><br />

l'Ecole Apostolique, son directeur actuel le P. Avellino Miranda, s'y prés<strong>en</strong>ta avec vingt<strong>de</strong>ux<br />

élèves, v<strong>en</strong>us du Barro, auxquels vinr<strong>en</strong>t se réunir six autres récemm<strong>en</strong>t admis.<br />

On sait comm<strong>en</strong>t, après la transformation <strong>de</strong> la maison, le nombre <strong>de</strong>s Apostoliques<br />

s'éleva <strong>à</strong> cinquante. Pour l'achat, le mobilier et la transformation du bâtim<strong>en</strong>t, où l'on<br />

dép<strong>en</strong>sa <strong>de</strong> grosses sommes, la charité généreuse <strong>de</strong> plusieurs personnes bi<strong>en</strong> connues<br />

contribua largem<strong>en</strong>t; et<br />

pour l'<strong>en</strong>treti<strong>en</strong> <strong>de</strong>s élèves on trouva une partie <strong>de</strong>s fonds nécessaires<br />

dans la quête obt<strong>en</strong>ue par le zèle et l'activité industrieuse du frère coadjuteur<br />

Sarm<strong>en</strong>to, bi<strong>en</strong>faiteur insigne<br />

<strong>de</strong> l'Ecole Apostolique.<br />

«II. <strong>Les</strong> fruits<br />

«Je mettrai ici un extrait <strong>de</strong> la statistique faite <strong>en</strong> 1905, que j'ai sous les yeux.<br />

Elle démontre que p<strong>en</strong>dant les vingt-quatre années écoulées, <strong>de</strong> 1880 jusqu'au comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t<br />

<strong>de</strong> 1905, <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t déj<strong>à</strong> leur vocation <strong>à</strong> l'Ecole Apostolique quatre-vingt-<strong>de</strong>ux membres<br />

<strong>de</strong> cette petite Province, dont tr<strong>en</strong>te étai<strong>en</strong>t piètres et cinquante-<strong>de</strong>ux scolastiques,<br />

ceci sans compter ceux qui sont déj<strong>à</strong> morts saintem<strong>en</strong>t dans le Seigneur. En sorte que<br />

<strong>de</strong>s c<strong>en</strong>t-tr<strong>en</strong>te-cinq prêtres qu'il y avait <strong>en</strong> 1906, tr<strong>en</strong>te avai<strong>en</strong>t été Apostoliques et <strong>de</strong>s<br />

quatre-vingt-dix-sept scolastiques, cinquante- <strong>de</strong>ux avai<strong>en</strong>t été élevés <strong>à</strong> l'Ecole Apostolique.<br />

«On voit d'ici <strong>à</strong> quel état serait réduite cette petite Province si ce n'était le conting<strong>en</strong>t<br />

donné par l'Ecole Apostolique. Malheureusem<strong>en</strong>t qui est-ce qui ne voit pas, p<strong>en</strong>dant<br />

ces <strong>de</strong>rniers temps, les vocations <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir toujours plus rares? Quelques uns qui<br />

sont v<strong>en</strong>us s'<strong>en</strong>rôler dans nos rangs, sont presque tous du Séminaire <strong>de</strong> Macao et <strong>de</strong>s<br />

Ecoles Apostoliques <strong>de</strong> France. Que l'on ferme donc l'Ecole Apostolique et je suis persuadé<br />

que ce jour même il faudrait fermer le noviciat. Actuellem<strong>en</strong>t (1908) le noviciat<br />

a quinze novices dont onze fur<strong>en</strong>t Apostoliques. On peut <strong>en</strong> dire autant, avec phi3 ou<br />

moins <strong>de</strong> vérité,<br />

<strong>de</strong>s autres années<br />

«C'est un fait que le pourc<strong>en</strong>tage <strong>de</strong>s Apostoliques, choisis pour le noviciat fut plus


34<br />

élevé au Barro qu'<strong>à</strong> Guimarâes. Mon avis est que l'Ecole Apostolique près du noviciat<br />

était un milieu plus approprié pour faire éclore et se développer le germe <strong>de</strong> la vocation.<br />

Cette atmosphère assainie <strong>de</strong>s miasmes mondains, cette chaleur bi<strong>en</strong>faisante, v<strong>en</strong>ant<br />

du bon exemple <strong>de</strong>s novices, si mo<strong>de</strong>stes et si gais! Non seulem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre parler<br />

du noviciat, mais aussi voir <strong>de</strong> ses propres yeux les nDvices, les futurs missionnaires qui,<br />

<strong>en</strong> sortant <strong>de</strong> l'école pour <strong>en</strong>trer au noviciat, cessai<strong>en</strong>t d'être <strong>de</strong>s étrangers pour <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir<br />

<strong>de</strong>s familiers, etc., etc., tout cela causait sur ces jeunes esprits, ouverts aux influ<strong>en</strong>ces<br />

<strong>de</strong> la grâce, une impression très agréable et gran<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t efficace pour que la vocation<br />

se développât et se manifestât.<br />

«III. Son état actuel<br />

«Comme dans la<br />

Province manquai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> jour <strong>en</strong> jour les professeurs aptes <strong>à</strong> <strong>en</strong>seigner<br />

dans nos collèges et que l'on ne voyait pas d'autre moy<strong>en</strong> pour faire acquérir aux<br />

nôtres les diplômes exigés par le Gouvernem<strong>en</strong>t, on décida que les Apostoliques comm<strong>en</strong>cerai<strong>en</strong>t<br />

ici,<br />

<strong>à</strong> Guimarâes, <strong>à</strong> fréqu<strong>en</strong>ter les classes du séminaire lycée. Ceci se passait<br />

<strong>en</strong> 1898. Mais malheureusem<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong>tôt on remarqua que le nombre <strong>de</strong>s Apostoliques aptes<br />

pour le noviciat diminuait s<strong>en</strong>siblem<strong>en</strong>t. Leur nombre qui, avant <strong>de</strong> fréqu<strong>en</strong>ter les classes<br />

du lycée était <strong>de</strong> 30 pour c<strong>en</strong>t, <strong>de</strong>sc<strong>en</strong>dit après <strong>à</strong> 16 et <strong>à</strong> 17 pour c<strong>en</strong>t. En voyant<br />

les mauvais résultats <strong>de</strong> cette idée, on y r<strong>en</strong>onça et les élèves cessèr<strong>en</strong>t <strong>de</strong> fréqu<strong>en</strong>ter le<br />

lycée. À mon avis ils étai<strong>en</strong>t éloignés du chemin tracé (avec l'expéri<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> quatre années<br />

j'<strong>en</strong> suis <strong>de</strong> plus <strong>en</strong> plus persuadé), non seulem<strong>en</strong>t par la sci<strong>en</strong>ce qu'ils crovai<strong>en</strong>t déj<strong>à</strong><br />

possé<strong>de</strong>r — aucun <strong>de</strong> ceux qui sont sortis n'a, paraît-il, continué son cours — mais aussi<br />

par le milieu où ils vivai<strong>en</strong>t, qui les mettait <strong>en</strong> communication avec les élèves du collège et<br />

du lycée, et qui <strong>de</strong>vait surtout <strong>de</strong>sserrer les li<strong>en</strong>s qui les attachai<strong>en</strong>t <strong>à</strong> l'École Apostolique.<br />

C'est pourquoi le nouveau g<strong>en</strong>re <strong>de</strong> vie les éloignait du milieu spirituel qui autrefois<br />

contribuait tant <strong>à</strong> leur vie d'abnégation et <strong>de</strong> piété. Ceci est si vrai que l'état où se trouve<br />

actuellem<strong>en</strong>t cette école n'est pas plus mauvais, je crois, que lorsqu'elle était plus florissante.<br />

«IV. Espérances pour l'av<strong>en</strong>ir<br />

«Après cela nous pouvons placer, si je ne me trompe pas, les espérances les plus<br />

flatteuses sur l'École Apostolique, pour l'av<strong>en</strong>ir. C'est exclusivem<strong>en</strong>t sur la formation<br />

spirituelle que s'appni<strong>en</strong>t nos motifs; car <strong>en</strong>fin, sans celle-ci, comm<strong>en</strong>t la Compagnie<br />

pourra-t-elle donner <strong>de</strong> bons novices?<br />

«Personne ne doute que l'éducation appropriée <strong>à</strong> ces <strong>en</strong>fants n'est pas celle que l'on<br />

donne dans un collège ou dans un séminaire quelconque, <strong>à</strong> <strong>de</strong>s collégi<strong>en</strong>s ou <strong>à</strong> <strong>de</strong>s séminaristes.<br />

Que ne faut-il pas faire pour obt<strong>en</strong>ir que <strong>de</strong>s garçons pauvres et <strong>de</strong>s rues, pour<br />

la plupart, <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t <strong>de</strong> futurs novices et <strong>de</strong>s novices comme les veut notre Institut?<br />

«Guimarâes, 23-3-1908».<br />

Pour terminer la transcription <strong>de</strong> ce qu'il y a d'utile dans les docum<strong>en</strong>ts sur l'École<br />

Apostolique, je parlerai <strong>de</strong> la publication <strong>de</strong> ce petit prospectus imprimé qui a pour titre<br />

École Apostolique <strong>de</strong> la Très Sainte Trinité pour i' éducation <strong>de</strong>s garçons qui se <strong>de</strong>stin<strong>en</strong>t<br />

<strong>à</strong> la vie Apostolique — 96, Rue <strong>de</strong> Sainte Lucie — Guimarâes. Dans ce prospectus il y a<br />

les qualités et les conditions d'admission <strong>de</strong>s élèves. De toutes ces indications je ferai<br />

remarquer la note indiquant «que l'âge réglem<strong>en</strong>taire est <strong>de</strong> dix <strong>à</strong> treize ans, avec l'exam<strong>en</strong><br />

d'instruction primaire, 2 e <strong>de</strong>gré. Dans quelques cas l'<strong>en</strong>fant pourra être admis sans


35<br />

exam<strong>en</strong>, jusqu'<strong>à</strong> douze ans, si on prouve qu'il sait lire, écrire et compter avec facilité».<br />

Au sujet du nombre <strong>de</strong> novices <strong>en</strong>trés dans l'Ordre <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>, <strong>de</strong> 1859 <strong>à</strong> 1909,<br />

on trouve dans le Jubilé du Collège du Borro, <strong>à</strong> la tin du <strong>de</strong>uxième app<strong>en</strong>dice, <strong>de</strong>ux<br />

tableaux très importants qui indiqu<strong>en</strong>t le nombre annuel <strong>de</strong> ceux qui sont <strong>en</strong>trés et <strong>de</strong><br />

ceux qui n'ont pas persévéré, ainsi que les provinces portugaises ou les pays étrangers<br />

d'où ils v<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t.<br />

Ils sont si intéressants pour l'histoire <strong>de</strong>s jésuites <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> <strong>à</strong> cette époque, que<br />

je<br />

veux les reproduire ici.<br />

«I er SCHÉMA<br />

«Indication numérique et comparative <strong>de</strong> ceux qui sont <strong>en</strong>trés et ont prcsévéré, par rapport<br />

<strong>à</strong> chacune <strong>de</strong>s 50 années qui se sont écoulées <strong>de</strong> lHâ'ù <strong>à</strong> 1909<br />

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36<br />

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37<br />

CHAPITRE NEUVIÈME<br />

Comm<strong>en</strong>t on faisait le<br />

noviciat<br />

Comme nous l'avons vu au chapitre précéd<strong>en</strong>t, la plupart <strong>de</strong>s individus qui <strong>en</strong>trai<strong>en</strong>t<br />

au noviciat étai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants <strong>de</strong> 15 ans <strong>à</strong> peu près, presque tous pauvres ou orphelins,<br />

élevés dans leurs <strong>de</strong>ux collèges <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> et <strong>de</strong> S. 1 Fidèle, lorsque c'étai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>core<br />

<strong>de</strong>s collèges pour les pauvres, et, après 1880, sortis <strong>de</strong> l'École Apostolique où les <strong>en</strong><br />

fants pauvres et <strong>de</strong>s rues étai<strong>en</strong>t <strong>en</strong> grand nombre, comme le dit le chroniqueur <strong>de</strong><br />

cette École Apostolique cité au chapitre précéd<strong>en</strong>t, p. 34.<br />

Dans cette École, <strong>en</strong>core d'après le récit du même chroniqueur, on cherchait <strong>à</strong> empêcher<br />

les <strong>en</strong>fants, <strong>en</strong>trés vers la dixième année, <strong>de</strong> communiquer avec le mon<strong>de</strong> et c'est<br />

pourquoi on cessa <strong>de</strong> les <strong>en</strong>voyer au Séminaire-lycée, quoique l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t y fût fait<br />

exclusivem<strong>en</strong>t par <strong>de</strong>s prêtres, parce que p<strong>en</strong>dant les années <strong>de</strong> cette fréqu<strong>en</strong>tation le<br />

pourc<strong>en</strong>tage <strong>de</strong>s Apostoliques, passant <strong>de</strong> l'école au noviciat, <strong>de</strong>sc<strong>en</strong>dit aussitôt <strong>de</strong> 30 <strong>à</strong><br />

16 pour c<strong>en</strong>t, <strong>à</strong> cause <strong>de</strong>s rapports plus fréqu<strong>en</strong>ts avec les élèves du collège et du lycée,<br />

et parce que le g<strong>en</strong>re <strong>de</strong> vie les t<strong>en</strong>ait plus éloignés <strong>de</strong>s milieux spirituels. Et les<br />

jésuites trouvai<strong>en</strong>t que ce qui conv<strong>en</strong>ait le plus aux élèves <strong>de</strong> cette Ecole c'était le rapprochem<strong>en</strong>t<br />

du noviciat comme milieu plus approprié pour faire épanouir et développer le<br />

germe <strong>de</strong> la vocation.<br />

On déduit <strong>de</strong> tout ceci que les jésuites portugais faisai<strong>en</strong>t surtout <strong>en</strong>trer au noviciat<br />

<strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants, absolum<strong>en</strong>t aveuglés et illusionnés, leur ayant ôté tout moy<strong>en</strong> <strong>de</strong> communiquer<br />

avec le mon<strong>de</strong> afin qu'ils ne puss<strong>en</strong>t perdre cette illusion.<br />

Une fois <strong>en</strong>trés au noviciat avec cette illusion et cette séduction d'esprit, la séparation<br />

du mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ait <strong>en</strong>core plus gran<strong>de</strong> et<br />

plus rigoureuse.<br />

Le noviciat durait <strong>de</strong>ux années, p<strong>en</strong>dant lesquelles les jeunes g<strong>en</strong>s étai<strong>en</strong>t complètem<strong>en</strong>t<br />

détournés <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s littéraires et sci<strong>en</strong>tifiques, la lecture <strong>de</strong> cette sorte <strong>de</strong> livres<br />

ne leur étant pas permise. Au contraire, les seuls livres permis étai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s livres mystiques;<br />

et ceux-l<strong>à</strong> mêmes <strong>en</strong> petit nombre et choisis; c'était presque uniquem<strong>en</strong>t les<br />

Méditations du P. La Pu<strong>en</strong>te. les Exercices <strong>de</strong> Perfection du P. Alphonse Rodriguez,<br />

les Règles <strong>de</strong> la Compagnie <strong>de</strong> Jésus, les Vies <strong>de</strong>s Saints et surtout celles <strong>de</strong> jésuites célèbres.<br />

P<strong>en</strong>dant ces <strong>de</strong>ux années les novices avai<strong>en</strong>t une heure <strong>de</strong> méditation le matin et<br />

une <strong>de</strong>mi-heure le soir. En outre ils avai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>ux confér<strong>en</strong>ces chaque jour, dont l'une<br />

sur l'explication <strong>de</strong>s règles <strong>de</strong> l'Ordre, l'autre sur <strong>de</strong>s sujets pieux et disciplinaires. P<strong>en</strong>dant<br />

le reste <strong>de</strong> la journée ils <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t lire les Exercices <strong>de</strong> Perfection <strong>de</strong> Rodriguez et<br />

d'autres livres pieux <strong>à</strong> <strong>de</strong>s heures marquées '. Le novice était surtout élevé dans le but<br />

1<br />

Comme preuve <strong>de</strong> ce que nous v<strong>en</strong>ons <strong>de</strong> dire, on pourra consulter l'emploi du temps <strong>de</strong>s<br />

novices d'après les papiers trouvés ao Noviciat du Barro.<br />

Le matin<br />

Jours ordinaires<br />

Le soir<br />

5 — Lever. 2 Stations et travaux manuels,<br />

f» ' 2 — Méditation. 3 — Points et méditation.<br />

6'/i<br />

— Réflexion (sur la manière, dont on a 3<br />

3<br />

/4<br />

— Confér<strong>en</strong>ce,<br />

fait la méditation). 4 1/4<br />

— Temps libre.<br />

6 — 3 Toilette<br />

/4 et temps libre. 4 >/j— Extraordinaire (lecture d'un livre <strong>de</strong><br />

7 — Messe. piété).


1<br />

.<br />

38<br />

<strong>de</strong> <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir un instrum<strong>en</strong>t presque aveugle <strong>en</strong>tre les<br />

mains <strong>de</strong>s supérieurs comme l'exige<br />

la règle 36 du Sommaire <strong>de</strong>s Constitutions, qui est la base fondam<strong>en</strong>tale <strong>de</strong> toute l'éducation<br />

et discipline <strong>de</strong>s jésuites et qui prescrit: «Que chacun se figure que ceux qui<br />

viv<strong>en</strong>t dans l'obéissance doiv<strong>en</strong>t se laisser m<strong>en</strong>er et diriger par la Divine Provid<strong>en</strong>ce au<br />

moy<strong>en</strong> <strong>de</strong> leur Supérieur, comme s'ils étai<strong>en</strong>t un corps mort qui se laisse emporter<br />

n'importe où et dont on fait ce que l'on veut, ou comme le bâton d'un vieillard, servant<br />

où l'i.n voudra et pour tout ce que celui qui le ti<strong>en</strong>t <strong>à</strong> la main voudra <strong>en</strong> faire».<br />

Pour que ce corps mort ou ce bâton <strong>de</strong> vieillard soit bi<strong>en</strong> connu du Supérieur, «il<br />

r<strong>en</strong>dra (comme l'ordonne la règle 40) <strong>en</strong>tièrem<strong>en</strong>t compte <strong>de</strong> toute sa vie passée, ou, au<br />

moins, <strong>de</strong>s choses les plus remarquables, au Supérieur actuel <strong>de</strong> la Compagnie, ou <strong>à</strong><br />

quelqu'un <strong>de</strong>s Préposés ou autres inférieurs qu'il indiquera comme il trouvera plus<br />

conv<strong>en</strong>able; et ainsi <strong>de</strong> six <strong>en</strong> six mois il r<strong>en</strong>dra compte <strong>de</strong> lui-même <strong>à</strong> partir <strong>de</strong> la <strong>de</strong>rnière<br />

fois».<br />

Et pour qu'il n'y ait aucun doute sur l'exactitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> cet exam<strong>en</strong> <strong>de</strong> consci<strong>en</strong>ce, la<br />

règle 9 ordonne que: a pour profiter davantage <strong>en</strong> esprit et surtout pour qu'il y ait pins<br />

<strong>de</strong> soumission et d'humilité propre, chacun doit être cont<strong>en</strong>t que toutes ses fautes et<br />

défauts, ainsi que tout ce que l'on remarquera et reconnaîtra chez lui, soit manifesté<br />

<strong>à</strong> ses supérieurs par toute personne qui les saurait <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> la confession». Et ce<br />

ne sont pas seulem<strong>en</strong>t les défauts que les compagnons doiv<strong>en</strong>t dénoncer, mais aussi toutes<br />

les idées ou les t<strong>en</strong>tations, comme le prescriv<strong>en</strong>t les règles communes, au n° 20 :<br />

«Celui qui connaîtra une t<strong>en</strong>tation grave <strong>de</strong> quelqu'un <strong>en</strong> prévi<strong>en</strong>dra le Supérieur, afin<br />

que, par son soin paternel et les précautions qu'il a pour les si<strong>en</strong>s, il puisse y remédier<br />

conv<strong>en</strong>ablem<strong>en</strong>t»<br />

Pour ce corps mort ou bâton <strong>de</strong> vieillard il n'y a plus <strong>de</strong> famille, comme l'ordonne la<br />

Règle 8: «Chacun <strong>de</strong> ceux qui <strong>en</strong>tr<strong>en</strong>t dans la Compagnie, suivant le conseil du Christ,<br />

Notre Seigneur: Celai qui quittera son père, etc., p<strong>en</strong>se <strong>à</strong> quitter père, mère, frères et<br />

sœurs et tout ce qu'il a an mon<strong>de</strong> : qu'il ti<strong>en</strong>ne pour lui ces paroles : Celui qui ne hait<br />

pas son père, sa mère et sa propre vie, ne peut pas être mon disciple. Ainsi il doit chercher<br />

<strong>à</strong> se défaire <strong>de</strong> toute affection<br />

charnelle <strong>en</strong>vers les par<strong>en</strong>ts, la convertissant <strong>en</strong> affection<br />

spirituelle, les aimant seulem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l'amour que <strong>de</strong>man<strong>de</strong> une charité bi<strong>en</strong> ordonnée,<br />

puisque l'on est mort pour le mon<strong>de</strong> et pour l'amour propre et que l'on vit seulem<strong>en</strong>t<br />

pour le Christ Notre Seigneur, et que c'est lui qui remplace le père, la rr.ère, les<br />

frères et toutes choses».<br />

C'est pourquoi la<br />

correspondance avec la famille ou d'autres personnes dép<strong>en</strong>d absolum<strong>en</strong>t<br />

du Supérieur, comme l'ordonne la Règle 39 : «Si l'un <strong>de</strong> ceux qui sont <strong>à</strong> la maison<br />

écrit <strong>à</strong> quelqu'un, qu'il ne le fasse pas sans permission et sans montrer la lettre <strong>à</strong><br />

qui le Supérieur l'ordonnera. S'il vi<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s lettres, on les donnera d'abord <strong>à</strong> celui que<br />

7 !/2 — Déjeuner et travaux d'humilité. 5 — Ecrire l'explication <strong>de</strong>s règles.<br />

gi/<br />

2<br />

— Ordinaire (lecture <strong>de</strong>s Exercices <strong>de</strong> 5 '/2— Faire les lits et temps libre.<br />

Perfection, par Alph. Rodriguez). 5 3 ' 4<br />

-Chapelet, récréation ou prom<strong>en</strong>a<strong>de</strong>.<br />

9 i/ 2— Visite (<strong>à</strong> l'Église) et temps libre. 7— -Visite (<strong>à</strong> l'Église) et temps libre.<br />

9 3/4 — Calligraphie. 7 1/4— Lecture pour la récréation.<br />

10 1/4— Étudier les Règles par cœur. 7 3 /4<br />

— Temps libre.<br />

K) :y 4<br />

._ Temps libre.<br />

11 — Confér<strong>en</strong>ce.<br />

N-<br />

B<br />

P rès cela a v avait le souper, la Tell<br />

•/, -Lecture pour la récréation.<br />

1<br />

3 /4 Exam<strong>en</strong> (<strong>de</strong> consci<strong>en</strong>ce).<br />

- A<br />

création, l'exam<strong>en</strong> <strong>de</strong> consci<strong>en</strong>ce et le coucher.<br />

N. B. Après cela suivai<strong>en</strong>t le dîner et la récréation.


39<br />

le Supérieur' aura désigné pour cette charge, lequel, après les avoir lues, les donnera<br />

ou non <strong>à</strong> celui <strong>à</strong> qui elles sont adressées, comme il le jugera conv<strong>en</strong>able, dans le Seigneur,<br />

pour le plus grand bi<strong>en</strong> et la gloire <strong>de</strong> Dieu».<br />

L'amour <strong>de</strong> la Patrie doit aussi disparaître <strong>de</strong> l'esprit du jésuite, ainsi que l'indique la<br />

Règle 43 : cQu'il n'y ait pas dans la Compagnie <strong>de</strong> p<strong>en</strong>chant pour l'une ou l'autre partie<br />

du conflit, si par hasard il y <strong>en</strong> a un <strong>en</strong>tre <strong>de</strong>s princes ou <strong>de</strong>s seigneurs chréti<strong>en</strong>s;<br />

qu'il y ait plutôt un amour universel qui embrasse dans le Seigneur toutes les parties,<br />

même lorsqu'elles sont contraires».<br />

Voici l'éducation que le maître <strong>de</strong>s novices doit donner p<strong>en</strong>dant <strong>de</strong>ux ans <strong>à</strong> ces <strong>en</strong>fants<br />

<strong>de</strong> 15 <strong>à</strong> 17 ans, <strong>de</strong> manière <strong>à</strong> les r<strong>en</strong>dre <strong>de</strong>s automates complets <strong>en</strong>tre les mains<br />

<strong>de</strong>s Supérieurs <strong>de</strong> l'Ordre. Et afin qu'il n'y ait pas le moindre écart dans cette ligne <strong>de</strong><br />

discipline m<strong>en</strong>tale, les Règles Communes ordonn<strong>en</strong>t au n.° 27: «que personne ne parle <strong>à</strong><br />

ceux qui sont dans la première probation, si ce n'est ceux qui ont été chargés par le supérieur».<br />

La manière pratique dont on agissait au noviciat du Barro, pour la formation <strong>de</strong><br />

oes novices automates, est décrite minutieusem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> <strong>de</strong> petits livres manuscrits, parfaitem<strong>en</strong>t<br />

pareils, et copiés par divers novices, trouvés dans le même noviciat. De ces<br />

brochures je vais reproduire seulem<strong>en</strong>t quelques chapitres qui montr<strong>en</strong>t jusqu'<strong>à</strong> quel<br />

point on cherchait <strong>à</strong> former l'automatisme m<strong>en</strong>tal <strong>de</strong> ces <strong>en</strong>fants.<br />

«CHAPITRE III — Comm<strong>en</strong>t on doit faire la méditation<br />

«Dans la méditation tu observeras les additions et la métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> la Compagnie.<br />

Le premier quart d'heure et le colloque doiv<strong>en</strong>t être faits <strong>à</strong> g<strong>en</strong>oux et le reste du temps<br />

on pourra se t<strong>en</strong>ir <strong>de</strong>bout ou s'asseoir, si on <strong>en</strong> a besoin. Tu seras éloigné <strong>de</strong> la table<br />

d'un pas, <strong>à</strong> peu près, et p<strong>en</strong>dant tout le temps <strong>de</strong> la méditation tu gar<strong>de</strong>ras un mainti<strong>en</strong><br />

grave, sans cracher et sans soupirer, mais tu seras recueilli et tu ne causeras pas <strong>de</strong><br />

distraction <strong>à</strong> tes voisins. Tu observeras aussi ces avis p<strong>en</strong>dant le temps <strong>de</strong> la méditation<br />

du soir et <strong>de</strong>s exam<strong>en</strong>s. Il y a cinq additions <strong>de</strong> l'oraison que tu <strong>de</strong>vras observer<br />

ponctuellem<strong>en</strong>t, si tu veux obt<strong>en</strong>ir la grâce divine p<strong>en</strong>dant le temps <strong>de</strong> la méditation.<br />

«l' r '<br />

Addition.<br />

Aussitôt que tu r<strong>en</strong>treras pour te coucher, tu p<strong>en</strong>seras rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t <strong>à</strong><br />

l'heure <strong>de</strong> ton lever et aux points que tu <strong>de</strong>vras méditer.<br />

«2" En t'éveillant, tu éloigneras <strong>de</strong> toi toute p<strong>en</strong>sée qui pourrait te distraire et tu<br />

t'appliqueras seulem<strong>en</strong>t <strong>à</strong> ce que tu <strong>de</strong>vras méditer, te disposant promptem<strong>en</strong>t <strong>à</strong> parler<br />

<strong>à</strong> Dieu.<br />

«3 e Etant déj<strong>à</strong> placé pour faire la méditation, tu feras le signe <strong>de</strong> la croix et, restant<br />

<strong>de</strong>bout et te recueillant complètem<strong>en</strong>t, tu élèveras ton esprit vers Dieu et tu p<strong>en</strong>seras<br />

p<strong>en</strong>dant l'espace d'un Credo <strong>à</strong> ce que tu es et <strong>à</strong> qui tu vas parler, que c'est <strong>à</strong> ton Dieu<br />

et Seigneur et qu'il voit et observe ce que tu fais.<br />

«4 e Faisant un ou <strong>de</strong>ux pas <strong>en</strong> avant, tu t'ag<strong>en</strong>ouilleras, tu feras ainsi l'oraison préparatoire<br />

et les prélu<strong>de</strong>s et tu comm<strong>en</strong>ceras la méditation. Tu ne passeras pas d'un<br />

point <strong>à</strong> l'autre, tant que tu trouveras matière <strong>à</strong> profit et consolation pour ton âme.<br />

«:/' L'oraison terminée, tu examineras comm<strong>en</strong>t tu l'as faite et, si tu l'as bi<strong>en</strong> faite,<br />

tu r<strong>en</strong>dras grâce <strong>à</strong> Dieu. Mais, si tu l'as mal faite, tu <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ras pardon <strong>à</strong> Dieu et,<br />

cherchant les causes <strong>de</strong> cette manière d'agir, tu proposeras <strong>de</strong> te corriger, <strong>en</strong> faisant<br />

ferme propos pour l'av<strong>en</strong>ir».<br />

«CHAPITRE XVIII — Ce que l'on doit observer p<strong>en</strong>dant la récréation et la prom<strong>en</strong>a<strong>de</strong><br />

«P<strong>en</strong>dant le temps <strong>de</strong> la récréation tu ne parleras que <strong>de</strong> choses saintes, comme le<br />

propose le I'. Aquaviva dans la 13 e instruction (Voyez les Règles, p. 143); et comme<br />

p<strong>en</strong>dant la récréation on peut facilem<strong>en</strong>t perdre la grâce, le recueillem<strong>en</strong>t et la vraie


40<br />

joie spirituelle, tu <strong>de</strong>vras te préserver avec un soin particulier contre certains défauts<br />

;<br />

tu observeras surtout ce qui suit: 1° Tu ne critiqueras pas les livres, le3 auteurs, les<br />

prédicateurs et <strong>en</strong>core moins les personnes connues. 2° Tu ne parleras ni <strong>en</strong> bi<strong>en</strong>, ni<br />

<strong>en</strong> mal <strong>de</strong>s personnes <strong>de</strong> la maison. 3° Ne parle pas <strong>de</strong> toi, ni <strong>de</strong> tes affaires, <strong>de</strong> ta vie<br />

mondaine, <strong>de</strong> tes par<strong>en</strong>ts et amis, etc. 4° Il est inconv<strong>en</strong>ant <strong>de</strong> raconter <strong>à</strong> la récréation<br />

ce qui s'est passé <strong>en</strong>tre toi et une autre personne quelconque, surtout si c'est <strong>en</strong>tre toi<br />

et le Père Maître et le Père Spirituel, etc.»<br />

On peut se figurer par l<strong>à</strong> ce que <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t être les récréations <strong>de</strong>s novices : si elles<br />

servai<strong>en</strong>t <strong>à</strong> les distraire ou <strong>à</strong> les r<strong>en</strong>dre plus aveuglés et plus imbéciles.<br />

Le chapitre XXIII, Comm<strong>en</strong>t on doit r<strong>en</strong>dre compte <strong>de</strong> la consci<strong>en</strong>ce^ après avoir<br />

exposé minutieusem<strong>en</strong>t toutes les choses intimes que le novice doit dire au P. Maître,<br />

ajoute ce qui suit. «Puis tu prés<strong>en</strong>teras quatre petits papiers, dans le premier <strong>de</strong>squels<br />

tu indiqueras tes fautes ;<br />

dans le 2 e tes vertus ; dans le 3 e les fautes <strong>de</strong>s frères et dans<br />

le 4 e leurs vertus, mettant sur le 1 er petit papier «quelques fautes <strong>de</strong> X. X.», écrivant<br />

ton nom et ton nom <strong>de</strong> famille; au comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t du 2 e «quelques vertus <strong>de</strong> X. N.»j<br />

au comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t du 3 e «quelques fautes <strong>de</strong>s F. F.»; et au comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t du 4 e quelques<br />

vertus <strong>de</strong>s F. F.»<br />

D'ici on conclut que la délation était <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ue chez les jésuites une habitu<strong>de</strong> presque<br />

machinale, produisant un bouleversem<strong>en</strong>t complet dans le caractère <strong>de</strong> ces individus,<br />

<strong>en</strong>tre lesquels cessait d'exister l'idée <strong>de</strong> confiance, <strong>de</strong> secret et d'amitié. Ils <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t<br />

tous, nécessairem<strong>en</strong>t, d'une manière fatale et réglem<strong>en</strong>tée, délateurs, accusateurs<br />

et c<strong>en</strong>seurs les uns <strong>de</strong>s autres.<br />

Pour donner aux cerveaux <strong>de</strong>s novices la <strong>de</strong>rnière et la plus forte compression<br />

m<strong>en</strong>tale p<strong>en</strong>dant le noviciat, on les obligeait <strong>à</strong> faire p<strong>en</strong>dant tout un mois les Exercices<br />

Spirituels et p<strong>en</strong>dant ce temps ils <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t gar<strong>de</strong>r un sil<strong>en</strong>ce absolu, ne pouvant<br />

parler ni <strong>en</strong>tre eux ni <strong>à</strong> aucune autre personne, si ce n'est au Maître <strong>de</strong>s Xovices ou<br />

au Père Spirituel. Ils <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t aussi rester dans leurs cellules, les f<strong>en</strong>êtres fermées, et<br />

faire quatre heures <strong>de</strong> méditation p<strong>en</strong>dant la journée, sur <strong>de</strong>s points qui leur étai<strong>en</strong>t<br />

exposés par le Père chargé <strong>de</strong> cette tâche. Tout cela <strong>de</strong>vait être fait d'après la métho<strong>de</strong><br />

établie par Ignace <strong>de</strong> Loyola pour ces exercices qui form<strong>en</strong>t une partie <strong>de</strong> l'Institut<br />

<strong>de</strong> la Compagnie <strong>de</strong> Jésus où l'on peut les lire.<br />

La pression cérébrale <strong>de</strong> ce mois <strong>de</strong> sil<strong>en</strong>ce, <strong>de</strong> ténèbres et <strong>de</strong> méditation était si<br />

profon<strong>de</strong> et si véhém<strong>en</strong>te chez <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants <strong>de</strong> quinze <strong>à</strong> dix-sept ans que quelques uns<br />

d'<strong>en</strong>tre eux tombai<strong>en</strong>t mala<strong>de</strong>s et d'autres ress<strong>en</strong>tai<strong>en</strong>t les premiers symptômes <strong>de</strong> la<br />

folie m<strong>en</strong>tale. Beaucoup <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t complètem<strong>en</strong>t aveuglés et soumis, ayant perdu<br />

toute initiative <strong>de</strong> liberté ou d'audace.<br />

C'était après cela que ces <strong>en</strong>fants ainsi m<strong>en</strong>talem<strong>en</strong>t subjugués, prononçai<strong>en</strong>t, <strong>en</strong> terminant<br />

leur 2 e année <strong>de</strong> noviciat, les vœux dits simples, <strong>de</strong> pauvreté, <strong>de</strong> chasteté et<br />

d'obéissance, restant ainsi <strong>à</strong> perpétuité liés <strong>à</strong> l'Ordre, si par hasard ils ne recouvrai<strong>en</strong>t<br />

pas leur force cérébrale plus tard, <strong>en</strong> reconnaissant le s<strong>en</strong>tier idiot et faux où on les<br />

avait fait <strong>en</strong>trer et d'où quelques uns parv<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t <strong>à</strong> sortir alors, <strong>en</strong> abandonnant la<br />

Compagnie, ainsi que le fir<strong>en</strong>t <strong>en</strong> effet plus <strong>de</strong> 30 °/o <strong>de</strong> ceux qui y étai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>trés, comme<br />

on le prouve par la statistique jésuitique elle-même, transcrite <strong>à</strong> la fin du chapitre précéd<strong>en</strong>t.<br />

CHAPITRE DIXIÈME<br />

Comm<strong>en</strong>t ils<br />

faisai<strong>en</strong>t leur scolasticat<br />

La Ratio studiorum a été jusqu'<strong>à</strong> nos jours le modèle sacré que la Compagnie se<br />

vante d'avoir adopté pour la formation littéraire et sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong> ses scolastiques.<br />

Le moindre écart <strong>à</strong> cette règle était considéré (par les chefs <strong>de</strong> l'Ordre) comme un att<strong>en</strong>-


41<br />

tat néfaste contre les lois et les traditions <strong>de</strong> leurs grands hommes, une sorte <strong>de</strong> capitulation<br />

<strong>de</strong>vant le progrès mo<strong>de</strong>rne, qui est généralem<strong>en</strong>t regardé <strong>de</strong> travers par les jésuites.<br />

Cette Ratio gtudi'orum fut établie par le Général Aquaviva, qui l'élabora pour développer<br />

la Quatrième Partie <strong>de</strong>s Constitutions écrite par Ignace <strong>de</strong> Loyola '.<br />

Le cours <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s que l'on y prescrit se divise <strong>en</strong> trois pério<strong>de</strong>s ou catégories, dont<br />

la première est constituée par les Humanités, qui sont composées ess<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t <strong>de</strong><br />

l'étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la grammaire latine et <strong>de</strong> la rhétorique ;<br />

la <strong>de</strong>uxième, appelée Philosophie, compr<strong>en</strong>d<br />

l'étu<strong>de</strong> élém<strong>en</strong>taire <strong>de</strong>s mathématiques et <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>ces naturelles, correspondant <strong>à</strong><br />

nos lycées, et l'étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la philosophie scolastique, qui a un caractère <strong>de</strong> cours supérieur;<br />

la troisième est la Théologie, qui compr<strong>en</strong>d l'étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la Dogmatique, <strong>de</strong> la Morale,<br />

<strong>de</strong>s Ecritures, <strong>de</strong> l'Histoire Ecclésiastique, du Droit Canonique et <strong>de</strong> la langue hébraïque.<br />

<strong>Les</strong> individus considérés dans l'Ordre comme les plus intellig<strong>en</strong>ts <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t faire<br />

p<strong>en</strong>dant trois ans l'étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s humanités, trois ans celle <strong>de</strong> la philosophie et quatre celle<br />

<strong>de</strong> la théologie.<br />

Récemm<strong>en</strong>t les jésuites, non par suite d'un mouvem<strong>en</strong>t spontané, mais <strong>à</strong> cause <strong>de</strong>s<br />

exig<strong>en</strong>ces du milieu, ont été obligés <strong>de</strong> s'écarter plus ou moins, par plusieurs points,<br />

<strong>de</strong> leur Patio studiorum, surtout <strong>en</strong> ce qui regar<strong>de</strong> l'étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s humanités et <strong>de</strong> la philosophie.<br />

En effet, ils se sont trouvés <strong>en</strong> face do ce dilemme: ou abandonner l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t<br />

collégial<br />

ou donner <strong>à</strong> leurs scolastiques une formation intellectuelle plus <strong>en</strong> rapport<br />

avec le progrès actuel et qui les mît <strong>à</strong> même <strong>de</strong> pouvoir <strong>en</strong>seigner dans leurs collèges<br />

les différ<strong>en</strong>tes branches d'étu<strong>de</strong>s que les programmes <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s secondaires exig<strong>en</strong>t<br />

aujourd'hui.<br />

<strong>Les</strong> jésuites n'<strong>en</strong>tr<strong>en</strong>t généralem<strong>en</strong>t dans les ordres que vers leur tr<strong>en</strong>te-troisième<br />

année; pour cela — dans l'intervalle <strong>de</strong> l'étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la philosophie qui finit <strong>à</strong> vingt-<strong>de</strong>ux<br />

ou vingt-trois ans et l'étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la théologie qui comm<strong>en</strong>ce ordinairem<strong>en</strong>t <strong>à</strong> tr<strong>en</strong>te ans <strong>en</strong>viron—<br />

il y a un espace <strong>de</strong> quelques années, p<strong>en</strong>dant lesquelles les scolastiques donn<strong>en</strong>t<br />

<strong>de</strong>s leçons, dans les collèges, aux étudiants séculiers.<br />

L'esprit qui domine les étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s scolastiques jésuites est parfaitem<strong>en</strong>t dépeint<br />

dans les règles que la Ratio studiorum établit pour les divers individus <strong>de</strong>vant exercer<br />

une influ<strong>en</strong>ce sur ces étu<strong>de</strong>s. Ainsi la Règle 16 du Provincial dit que les professeurs <strong>de</strong><br />

philosophie doiv<strong>en</strong>t déj<strong>à</strong> avoir le cours <strong>de</strong> théologie «pour que leur <strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t soit<br />

plus sûr et serve mieux la théologie et que l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t doit indubitablem<strong>en</strong>t être retiré<br />

aux professeurs dont l'esprit est plus libre et porté aux innovations 2 ». La Règle l ère<br />

du professeur <strong>de</strong> philosophie indique que «les arts et les sci<strong>en</strong>ces naturelles dispos<strong>en</strong>t<br />

les esprits <strong>à</strong> la théologie et que le professeur doit y chercher l'honneur et la gloire <strong>de</strong><br />

Dieu <strong>de</strong> manière <strong>à</strong> préparer seB élèves pour la théologie et la connaissance <strong>de</strong> leur Créateur»<br />

3 . <strong>Les</strong> Règles 3 et 4 leur ordonn<strong>en</strong>t d'éviter que leurs élèves s'attach<strong>en</strong>t <strong>à</strong> <strong>de</strong>s<br />

1 Institutum Societatis Jesu, vol. i, p. 46, vol. h, p. 167 (lioinae 1870).— Epitome Historiœ Societatiê<br />

Jésus, auctore Josepho Juv<strong>en</strong>cio, tom. ni, pp. 68, 69, (18">9).— Comm<strong>en</strong>tarius in <strong>de</strong>cem partes<br />

constitutionum, Soc. Jesu, par Augustinus 0»\vald, p. 172 (1892).<br />

2 «Philosophiae professores (nisi gravissima nécessitas aliud exigat) oportet non modo oursum<br />

theologise absolvisse, sed eam bi<strong>en</strong>nio repetiisse ut corum doetrina tntior esse possit, magisque théologie<br />

<strong>de</strong>serviat. Si autem fucrint ad novitates proni et ing<strong>en</strong>ii nimis liberi, hi a doe<strong>en</strong>di mnnore<br />

sine dubio remov<strong>en</strong>di». Institutum Soc. Jesu, vol. n, pp. 470, 471.<br />

3<br />

«Quoniam artes, vol sei<strong>en</strong>tias naturales ingénia dispommt ad theologiam, ... in omnibus sincère<br />

honorem etgloriam l)ei quser<strong>en</strong>do ita tractet ut auditores snos ad theologiam prseparét, maximeque ad<br />

cognitionem excitet soi creatoris». Ibiil. p. 501.


42<br />

écrivains non méritants <strong>de</strong> la doctrine • hréti<strong>en</strong>ne et que s'ils y trouv<strong>en</strong>t quelque chose<br />

qui soit digne d'être citée, qu'ils ne le fass<strong>en</strong>t pas avec éloge et, si c'est possible, qu'ils<br />

montr<strong>en</strong>t que cela a été tiré d'autres auteurs l .<br />

Le seul but que les scolastiques doiv<strong>en</strong>t avoir dans leurs étu<strong>de</strong>s (Règle P' re <strong>de</strong>s scolastiques)<br />

est la gloire divine et le fruit <strong>de</strong>s âmes 2 ;<br />

et ils ne doiv<strong>en</strong>t p?s (Règle 3) étudier<br />

d'autres sujets, ni <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre d'autres professeurs, ni suivre d'autre règle ou métho<strong>de</strong>,<br />

ni lire d'autres livres, que ce qui sera ordonné par le préfet <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s 3 .<br />

La langue latine est celle que les scolastiques doiv<strong>en</strong>t employer dans les classes<br />

(Règle 9)-*.<br />

Cette sorte <strong>de</strong> scolasticat est celle que l'on suit dans toute la Compagnie <strong>de</strong> Jésus,<br />

dans toutes ses Provinces, et elle est évi<strong>de</strong>mm<strong>en</strong>t tout <strong>à</strong> fait t<strong>en</strong>dancielle.<br />

ses trois<br />

Voyons maint<strong>en</strong>ant comm<strong>en</strong>t fonctionnait <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> le scolasticat jésuitique <strong>en</strong><br />

catégories.<br />

Ce que j'écris dans ce chapitre est basé rigoureusem<strong>en</strong>t, non seulem<strong>en</strong>t sur les livres<br />

mêmes dont se servai<strong>en</strong>t les scolastiques, livres choisis dans leurs collèges et dûm<strong>en</strong>t<br />

archivés, mais aussi sur les Diarium du Scolasticat, <strong>de</strong> 1866 <strong>à</strong> <strong>1910</strong>, qui se trouv<strong>en</strong>t<br />

aux Archives Congréganistes, ainsi que sur le témoignage d'un grand nombre d'individus<br />

sortis <strong>de</strong> l'Ordre et qui <strong>à</strong> différ<strong>en</strong>tes époques y avai<strong>en</strong>t suivi les étu<strong>de</strong>s et que<br />

pour cette raison j'ai voulu <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre.<br />

Cours <strong>de</strong>s humanités<br />

<strong>Les</strong> <strong>de</strong>ux années <strong>de</strong> noviciat terminées, généralem<strong>en</strong>t vers dix sept ans, et après<br />

avoir prononcé les voeux simples, les nouveaux jésuites, les juniores, comme on les appelle<br />

dans l'Ordre, comm<strong>en</strong>c<strong>en</strong>t l'étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s Humanités, qui dure habituellem<strong>en</strong>t trois ans<br />

et a pour base ess<strong>en</strong>tielle le latin et l'étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la rhétorique appliquée surtout <strong>à</strong> l'éloqu<strong>en</strong>ce<br />

sacrée. En <strong>Portugal</strong> les juniores fir<strong>en</strong>t presque toujours leurs Humanités dans la<br />

maison du Barro, auprès du Noviciat, excepté <strong>de</strong> 1878 <strong>à</strong> 1892 où ce cours fut fait <strong>à</strong> Setubal,<br />

loin du Noviciat, d'après les Catalogues <strong>de</strong> la Province Portugaise.<br />

Ce cours eut <strong>de</strong>ux phases chez les jésuites portugais : la première <strong>de</strong>puis le début<br />

jusqu'<strong>en</strong> 1893 et la secon<strong>de</strong> <strong>de</strong>puis lors jusqu'<strong>en</strong> <strong>1910</strong>. P<strong>en</strong>dant la première phase on<br />

suivait a la lettre la Ratio Stadiorum; dans les classes on n'<strong>en</strong>seignait que le latin, la<br />

rhétorique, la langue portugaise et quelques élém<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> langue grecque. On n'étudiait<br />

ni les langues étrangères, ni l'histoire, ni la géographie, qui sont absolum<strong>en</strong>t nécessaires<br />

<strong>à</strong> ceux qui veul<strong>en</strong>t se consacrer <strong>à</strong> l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t littéraire dans les collèges.<br />

<strong>Les</strong> jésuites portugais comm<strong>en</strong>cèr<strong>en</strong>t <strong>à</strong> remarquer ce défaut <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> leurs juniores<br />

après 1880 où, comme nous l'avons vu plus haut, les vocations religieuses <strong>de</strong>s<br />

élèves <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> et <strong>de</strong> S. Fidèle comm<strong>en</strong>cèr<strong>en</strong>t <strong>à</strong> <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir plus rares et qu'ils dur<strong>en</strong>t<br />

aller les chercher parmi les <strong>en</strong>fants les plus pauvres attirés dans leur École Apostolique.<br />

i<br />

Régula 3. « AristoteJis interprètes maie <strong>de</strong> ehristiana religionc meritos non sine magno <strong>de</strong>lectu<br />

aut légat aut in scholam proférât, eaveatque ne erga illos affieiantur discijmli».<br />

Régula 4. « . . si quid boni ex ipso prot'er<strong>en</strong>dum sit, sine lau<strong>de</strong> proférât; et, ,-i fieri potest, id.<br />

eum aliun<strong>de</strong> sumpsisse <strong>de</strong>monstret». Ibid.<br />

-'<br />

«... ii i li 1 1 aliud in lus nisi divinam gloriam et animarum fructum quœr<strong>en</strong>tes». Ibid. p. 535.<br />

3 «lis facultalibus singuli operan) dabunt, eosque audi<strong>en</strong>t praeceptores, quos superior assignait:<br />

praagcriptam vero a prœfeeto vel a magistro divisionem temporis ac rationem stud<strong>en</strong>di serv<strong>en</strong>t<br />

dilig<strong>en</strong>ter univtrù: nec aliis, quam ab eo<strong>de</strong>m prœfeeto sibi traditis, utantur libris». Ibid. p. 535.<br />

4<br />

«Omnes qui<strong>de</strong>m, sed prœcipue humaniorum litterarum studiosi, latine loquantur». Ibid. p. 356.


43<br />

Ceci ayant été remarqué, <strong>en</strong> 1893, lorsque le P. Joachim Campo Santo était Provincial,<br />

il fut établi que l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l'Histoire, <strong>de</strong> la Géographie et <strong>de</strong> l'Arithmétique<br />

<strong>en</strong>trerai<strong>en</strong>t dans le cours <strong>de</strong>s Humanités, <strong>en</strong> donnant une forme définie <strong>à</strong> ce qui<br />

était <strong>en</strong>trepris <strong>de</strong>puis 1886 au moy<strong>en</strong> <strong>de</strong> petites confér<strong>en</strong>ces (Aca<strong>de</strong>miae d'après Y 1nstitutum<br />

S. J.) sur les matières <strong>de</strong> ces étu<strong>de</strong>s, certains jours fériés.<br />

A cette modification au cours <strong>de</strong>s Humanités <strong>de</strong>s juniores on <strong>en</strong> ajouta une autre<br />

aux étu<strong>de</strong>s dans l'Ecole Apostolique, déj<strong>à</strong> alors <strong>à</strong> Guimarâes, par laquelle il fut établi<br />

que les <strong>en</strong>fants <strong>en</strong>trant <strong>de</strong> dix <strong>à</strong> douze ans, quelquefois même sans l'exam<strong>en</strong> d'instruction<br />

primaire, suivrai<strong>en</strong>t un cours <strong>de</strong> quatre années où ils étudierai<strong>en</strong>t les matières <strong>de</strong>s<br />

quatre ou cinq premières classes du lycée. Et ainsi, lorsque plus tard ces Apostoliques,<br />

déj<strong>à</strong> jésuites juniores, <strong>en</strong>trai<strong>en</strong>t au cours d'Humanités, ils<br />

appr<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t plus facilem<strong>en</strong>t le<br />

latin ou augm<strong>en</strong>tai<strong>en</strong>t leurs connaissances <strong>de</strong> l'Histoire, <strong>de</strong> la Géographie et <strong>de</strong> l'Arithmétique.<br />

Mais ces étu<strong>de</strong>s étai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>core considérées comme accessoires et seulem<strong>en</strong>t<br />

la culture littéraire comme ess<strong>en</strong>tielle.<br />

Ainsi le dit le Provincial 1'. Cabrai lui-même dans une brochure, publiée <strong>à</strong> Bruxelles<br />

<strong>en</strong> 1911, où on lit: «Obéissant <strong>à</strong> ces principes et accompagnant le mouvem<strong>en</strong>t<br />

initié avec succès dans le même s<strong>en</strong>s chez d'autres Provinces <strong>de</strong> la Compagnie,<br />

le cours tri<strong>en</strong>nal <strong>de</strong> notre Province compr<strong>en</strong>d l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t ess<strong>en</strong>tiel et l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t<br />

accessoire: Le premier embrasse la culture directem<strong>en</strong>t littéraire, le second les classes<br />

<strong>de</strong> Mathématiques, Histoire et Géographie» '.<br />

Ceci a été fait pour empêcher les scolastiquos portugais <strong>de</strong> rester dans l'infériorité<br />

littéraire que les élèves <strong>de</strong> leurs collèges montrai<strong>en</strong>t, lorsqu'ils se prés<strong>en</strong>tai<strong>en</strong>t aux exam<strong>en</strong>s<br />

<strong>de</strong>vant le jury officiel. C'est le Provincial Louis Cabrai iui-même qui le dit dans la<br />

même brochure :<br />

«Si les étu<strong>de</strong>s littéraires n'étai<strong>en</strong>t pas organisées pour nos scolastiques dans une ori<strong>en</strong>cation<br />

supérieure, compatible avec leur préparation et leur développem<strong>en</strong>t, il <strong>en</strong> résulterait<br />

pour nous une infériorité dans les lettres, qui ne pourrait être corrigée que par un<br />

choix très restreint fait par les supérieurs ou qui serait dû <strong>à</strong> l'initiative particulière».<br />

Mais, malgré toutes ces t<strong>en</strong>tatives <strong>de</strong>s Provinciaux et surtout <strong>de</strong> Cabrai, l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t<br />

<strong>de</strong>s Humanités chez les jésuites portugais n'avait ri<strong>en</strong> <strong>de</strong> supérieur, il était au<br />

contraire très inférieur. Et ceci est prouvé jusqu'<strong>à</strong> l'évid<strong>en</strong>ce, non seulem<strong>en</strong>t par le peu<br />

<strong>de</strong> supériorité que leurs élèves montrai<strong>en</strong>t aux exam<strong>en</strong>s officiels, mais aussi parles livres<br />

<strong>de</strong> leurs bibliothèques et par leurs docum<strong>en</strong>ts qui se trouv<strong>en</strong>t aujourd'hui aux Archives<br />

Congréganistes. Ainsi dans l'étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> l'arithmétique et <strong>de</strong> la géographie ils n'allai<strong>en</strong>t pas<br />

au <strong>de</strong>l<strong>à</strong> <strong>de</strong>s précis <strong>de</strong> J.<br />

< 'unha et Serrasqueiro et <strong>de</strong> Kaposo Botelho, suivis par les<br />

élèves <strong>de</strong> nos lycées. Mais pour l'Histoire, ils no suivai<strong>en</strong>t même pas un précis du lycée ;<br />

ils étudiai<strong>en</strong>t dans un petit livre d'Histoire Universelle, écrit par un Mons. Daniel,<br />

Evêque <strong>de</strong> ( 'oiitanees et Avrauches, traduit <strong>en</strong> portugais, <strong>en</strong> <strong>de</strong>ux petits volumes, et qui<br />

n'est pas bi<strong>en</strong> un livre d'Histoire, mais une apologie du christianisme et une suite<br />

<strong>de</strong> lég<strong>en</strong><strong>de</strong>s.<br />

Pour lui l'histoire primitive véritable se trouve dans la Bible, et c'est la G<strong>en</strong>èse<br />

qui nous la r<strong>en</strong>seigne avec certitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>puis lo comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t du mon<strong>de</strong>, p. 11. A la<br />

page 13 on trouve l'histoire <strong>de</strong> l'Arbre du Bi<strong>en</strong> et du Mal et d'Eve t<strong>en</strong>tée par le serp<strong>en</strong>t.<br />

A la page 203 il nous dit qu'tune étoile miraculeuse, qui se montra <strong>à</strong> l'Ori<strong>en</strong>t, conduisit<br />

près <strong>de</strong> la Crèche <strong>de</strong> l'<strong>en</strong>fant Jésus les mages, rois ou princes, v<strong>en</strong>us <strong>de</strong> Perse ou<br />

d'Arabie». Quelle idée <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t se faire les juniores <strong>de</strong>s étoiles et <strong>de</strong> leur mouvem<strong>en</strong>t?!<br />

1<br />

He<br />

Nova Cursus Literarii In-titutione in Provincia I.usitana S. .1. (Experim<strong>en</strong>ti causa) 1911.<br />

E. Daem imprimeur — Editeur — Chaussée <strong>de</strong> Haecht, 110. Bruxelles, p. 4.


44<br />

Puis, <strong>de</strong> siècle <strong>en</strong> siècle il nous donne un résumé <strong>de</strong> l'Histoire <strong>de</strong> l'Église Catholique,<br />

dont il parle toujours avec louange. Luther y est flétri comme rebelle (p. 49-50,<br />

vol. Il);<br />

et au sujet <strong>de</strong> l'Inquisition ce même auteur nous dit d'un air sérieux qu'on a voulu<br />

accuser faussem<strong>en</strong>t l'Église <strong>de</strong> ses rigueurs, p. 77, vol. II.<br />

Quant <strong>à</strong> l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la littérature portugaise, leur bibliothèque était d'une<br />

pauvreté honteuse. On l'a conservée intacte et on y remarque l'abs<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> beaucoup<br />

d'auteurs classiques portugais anci<strong>en</strong>s, ainsi que <strong>de</strong>s auteurs mo<strong>de</strong>rnes qui se sont distingués<br />

dans l'Histoire, le Roman et la Poésie. Herculano, Garrett, Eça <strong>de</strong> Queiroz,<br />

Guerra Junqueiro et beaucoup d'autres ne s'y trouv<strong>en</strong>t pas. Camôes, le grand poète<br />

national, y a sa place, mais pour connaître quelque chose <strong>de</strong>s Lusia<strong>de</strong>s ils n'avai<strong>en</strong>t<br />

qu'une mutilation <strong>de</strong> cette œuvre faite par un réactionnaire, Joseph Viale. A côté <strong>de</strong> la<br />

Bibliothèque <strong>de</strong>s juniores il y avait dans le cubîculum une autre petite Bibliothèque, <strong>de</strong>stinée<br />

aux professeurs <strong>de</strong> ces scolastiques, laquelle n'était pas <strong>de</strong> beaucoup supérieure<br />

<strong>à</strong> l'autre. On y trouve quelques auteurs mo<strong>de</strong>rnes, dont les professeurs lisai<strong>en</strong>t quelques<br />

passages <strong>à</strong> leurs élèves p<strong>en</strong>dant les<br />

classes.<br />

Tout ceci avait pour but d'empêcher les juniores d'acquérir dans l'Histoire <strong>de</strong>s connaissances<br />

pouvant les détromper <strong>de</strong>s erreurs introduites par la lecture <strong>de</strong> Mons. Daniel,<br />

et <strong>de</strong> trouver dans l'art littéraire les formes plus humaines et plus réalistes que<br />

l'on voit dans les livres mo<strong>de</strong>rnes. Même <strong>en</strong> ce qui regar<strong>de</strong> le latin, qui était la base<br />

ess<strong>en</strong>tielle <strong>de</strong> l'étu<strong>de</strong>, ils n'acquérai<strong>en</strong>t pas <strong>de</strong> connaissances profon<strong>de</strong>s, ni l'érudition<br />

philologique que l'on trouve dans les grammaires mo<strong>de</strong>rnes. Ils suivai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>core <strong>à</strong> prés<strong>en</strong>t<br />

le P. Emmanuel Alvares du XVI e siècle.<br />

Ce défaut <strong>de</strong> l'étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s juniores était remarqué aux exam<strong>en</strong>s <strong>de</strong>s élèves, lorsqu'ils<br />

se prés<strong>en</strong>tai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>vant le jury officiel <strong>de</strong>s lycées. Ils le reconnaissai<strong>en</strong>t eux-mêmes, comme<br />

on le voit par la lettre que nous publions au douzième chapitre, p. 52-53.<br />

Toutes ces étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s juniores étai<strong>en</strong>t évi<strong>de</strong>mm<strong>en</strong>t dirigées vers une éducation<br />

ess<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t religieuse, plutôt que vers une érudition véritable et pratique.<br />

Dans ce but il y avait aussi toute une série <strong>de</strong> prières et <strong>de</strong> pratiques religieuses,<br />

qui accompagnai<strong>en</strong>t, dans le<br />

cours <strong>de</strong> la journée, tous leurs mouvem<strong>en</strong>ts, comme on peut<br />

le voir par les horaires reproduits dans bi<strong>en</strong> <strong>de</strong>s pages <strong>de</strong> leur Diarium J .<br />

1<br />

Horaire <strong>de</strong>s jours <strong>de</strong> classe<br />

Le matin<br />

Le soir<br />

5 — Lever. 1 1/2— Repos.<br />

5 t/a— Méditation. 2 — Lecture spirituelle.<br />

6 V2 — Messe. 2 i/ 2<br />

— Étu<strong>de</strong>.<br />

7 — Déjeuner, appr<strong>en</strong>dre par cœur. 3 '/j — Récréation et chapelet.<br />

7 3 /4 — Etu<strong>de</strong>. 41/î — Visite au S 1 . Sacrem<strong>en</strong>t, étu<strong>de</strong>.<br />

9-— <strong>Les</strong> classes (Tes Humanités et <strong>de</strong> la Gram- 5 — <strong>Les</strong> classes <strong>de</strong>s Humanités et <strong>de</strong> la Grammaire.<br />

_ maire.<br />

9 2— >/ Classe <strong>de</strong> Rhétorique. 5 /2— l Classe <strong>de</strong> Rhétorique.<br />

11— Temps libre. • 7 — Temps libre.<br />

11 V4<br />

— Étu<strong>de</strong>. On lit les classiques latins ou 7 1/4 — Étu<strong>de</strong>,<br />

portugais et on peut aller consulter les profes- 7% — Litanies.<br />

seurs.<br />

8 — Souper et récréation.<br />

11 3 /l<br />

— Exam<strong>en</strong> <strong>de</strong> consci<strong>en</strong>ce. 9 '/ 2 -— Lecture spirituelle et exam<strong>en</strong> <strong>de</strong> cons-<br />

12 — Dîner et récréation. ei<strong>en</strong>ce.<br />

10— Coucher.<br />

Obs— Récemm<strong>en</strong>t on avait changé un peu les heures <strong>de</strong> repas pour les mettre d'accord avec<br />

l'horaire <strong>de</strong> leurs collèges.


45<br />

P<strong>en</strong>dant les <strong>de</strong>rnières années les juniores eux-mêmes avai<strong>en</strong>t été <strong>en</strong>traînés dans la<br />

politique, comme on le voit par certaines nouvelles que nous trouvons dans leur Diarium.<br />

Ainsi le 6 mai 1908 le Diarium nous dit que «c'était jour férié <strong>en</strong> l'honneur d'Emmanuel<br />

II qui,<br />

<strong>à</strong> la gran<strong>de</strong> joie <strong>de</strong> tout le royaume du <strong>Portugal</strong>, avait été sol<strong>en</strong>nellem<strong>en</strong>t<br />

acclamé notre roi». Et le 15 novembre <strong>de</strong> la même année on lit dans le même Diarium<br />

ce qui suit : «Jour anniversaire d'Emmanuel roi. Au premier étage nous avons orné <strong>de</strong><br />

fleurs et <strong>de</strong> drapeaux l'image du roi Emmanuel. Et comme il se trouvait alors dans la<br />

ville <strong>de</strong> Porto, nous lui avons <strong>en</strong>voyé un télégramme dont on a reçu la réponse le l<strong>en</strong><strong>de</strong>main.<br />

Voici le<br />

cont<strong>en</strong>u <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux télégrammes.<br />

«Porto, Emmanuel II Roi. — Recteur, élèves, collège du Barro, Torres Vedras,<br />

<strong>en</strong>voi<strong>en</strong>t Votre Majesté respectueuses, sincères félicitations, <strong>de</strong>mand<strong>en</strong>t <strong>à</strong> Dieu accor<strong>de</strong><br />

Votre Magesté règne long, heureux. Alves, recteur ».<br />

«Recteur, collège du Barro, Torres Vedras. Porto, 16, 11 1 ', m.— Palais Carrancaa.—<br />

Sa Majesté remercie recteur et élèves <strong>de</strong> leurs félicitations. Marquis <strong>de</strong> Lavradio<br />

*».<br />

Cours <strong>de</strong><br />

Philosophie<br />

<strong>Les</strong> jésuites scolastiques portugais fir<strong>en</strong>t jusqu'<strong>en</strong> 1886 leur cours <strong>de</strong> Philosophie,<br />

dans les scolasticats d^utres Provinces <strong>de</strong> la Compagnie. Comme jusqu'<strong>à</strong> 1880 la Mission<br />

portugaise était soumise au Provincial <strong>de</strong> Castille, c'était celui-ci qui indiquait la<br />

maison où ces étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t être faites. En feuilletant les catalogues <strong>de</strong> cette Province,<br />

ainsi que ceux <strong>de</strong> la Province Portugaise, que j'ai <strong>de</strong>vant moi, <strong>de</strong> 1863 <strong>à</strong> <strong>1910</strong>, on voit<br />

que les scolasticats que les étudiants portugais fréqu<strong>en</strong>tai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> préfér<strong>en</strong>ce étai<strong>en</strong>t Laval<br />

et Poyanne <strong>en</strong> France, Carrion, Ofia et Uclés <strong>en</strong> Espagne. De 1886 <strong>à</strong> 1893 le<br />

cours <strong>de</strong> Philosophie est fait <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> au Collège <strong>de</strong> S. François, <strong>à</strong> Setubal ;<br />

<strong>de</strong> 1894<br />

<strong>à</strong> 1898 il est fait au collège <strong>de</strong> Saint Fidèle; et <strong>de</strong> 1899 <strong>à</strong> 1908 il retourne <strong>à</strong> Setubal.<br />

Après 1908 ce cours cesse <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> et les scolastiques portugais vont fréqu<strong>en</strong>ter<br />

les scolasticats étrangers <strong>de</strong>s Provinces Belge, Française, Germanique, Romaine, Castillane,<br />

etc. Ces changem<strong>en</strong>ts du Cours <strong>de</strong> Philosophie fur<strong>en</strong>t surtout dus <strong>à</strong> <strong>de</strong>s causes<br />

pécuniaires, comme nous le voyons par les livres <strong>de</strong> comptes <strong>de</strong> l'Int<strong>en</strong>dance <strong>de</strong> la Province<br />

et par plusieurs budgets manuscrits, que nous avons <strong>de</strong>vant nous. Dans le Budget<br />

<strong>de</strong> Recette et Dép<strong>en</strong>se du Collège <strong>de</strong> Setubal potir l'année 1V09, il y a une note finale<br />

<strong>de</strong> la t<strong>en</strong>eur suivante: «Observations. Lors même que ce budget pût suffire <strong>à</strong> toutes<br />

les dép<strong>en</strong>ses, le séjour <strong>de</strong>s étudiants <strong>de</strong> philosophie <strong>à</strong> l'étranger représ<strong>en</strong>tait pour le séminaire<br />

une économie <strong>de</strong> 2:982?$500 (14.912 frs.) ;<br />

mais il me semble que les sommes<br />

<strong>de</strong>stinées aux p<strong>en</strong>sions <strong>de</strong>s élèves <strong>en</strong> Philosophie ne suffis<strong>en</strong>t pas, surtout maint<strong>en</strong>ant<br />

avec le change actuel. Comme on le voit par ce budget, le subsi<strong>de</strong> donné par la caisse<br />

du séminaire est <strong>de</strong> 1:800)5000 (9.000 frs.) et celui que l'on donnait tous les ans était<br />

<strong>de</strong> 4:882^500 (24.414 frs.)»<br />

•15.— Sol. d. — Dics Xatalis Eromanuelis II Régis. Omissi toni, 8<br />

3<br />

/4 P<br />

ilr - Acad., 9 l /z Acad.,<br />

10'/2-tl',2 rclaxatio cum l'atre Modcratore transacta. In intima nostra contignatione Emmanuelis<br />

Régis imaginem floribus et signis ornavimus. Ad ipsum autem regem qui in urbe Portucal<strong>en</strong>si ea<br />

tempestate erat, missum est tclegramma, ab coque responsio scqu<strong>en</strong>ti die accepta. En utriusque telegrammati<br />

verba :<br />

Porto. — I). Manuel II. Rei.— Rnitor e alunos Colégio do Barro, Torres Vedras, <strong>en</strong>viam a<br />

V. Magesta<strong>de</strong> respeitosos, sinceros parabcns, pedcra a Deus concéda V. Magesta<strong>de</strong> longo, v<strong>en</strong>turoso<br />

reinado.— Alves, Reitor.<br />

Reitor do Colégio do Barro.— Torres Vedras.— Porto, 16, 11\ m.— Paço Carrancas.— Sua Magesta<strong>de</strong><br />

agra<strong>de</strong>cc ao Reitor e alunos seus parab<strong>en</strong>s. —Marques do Lavradio.


46<br />

Au cours <strong>de</strong> Philosophie on étudie ce qu'on appelle la Philosophie Scolastique, les<br />

Mathématiques et les Sci<strong>en</strong>ces Naturelles élém<strong>en</strong>taires, et p<strong>en</strong>dant la troisième année<br />

chacun se consacre, d'une manière particulière, <strong>à</strong> la spécialité pour laquelle les Supérieurs<br />

lui reconnaîtront plus <strong>de</strong> vocation. Aux cours <strong>de</strong> Philosophie dans l'étranger, ainsi<br />

que dans le<br />

<strong>Portugal</strong>, on faisait assez d'étu<strong>de</strong>s pratiques <strong>de</strong>s Sci<strong>en</strong>ces Physiques. Chimiques<br />

et Naturelles.<br />

La métho<strong>de</strong> suivie partout <strong>en</strong> Philosophie Scolastique est la syllogistique avec les<br />

prémisses, majeure et mineure, et la conclusion. C'est une gymnastique <strong>de</strong> mots latins où<br />

abond<strong>en</strong>t les adverbes fundam<strong>en</strong>taliter, a parte re.i, <strong>en</strong>titative, cuthegorice, etc.<br />

Le précis adopté <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> était le Pratlec'ionum Phil. Sch. Brevis Consrpectus<br />

<strong>de</strong> J. Van <strong>de</strong>r Aa, S. J., et les auteurs les plus cités par les professeurs et consultés<br />

par les élèves étai<strong>en</strong>t Suarez, S. Thomas, Urrâburu, M<strong>en</strong>dive, Delmas, Liberatore,<br />

Palmieri, Rosseti, Tongiorgi, Pesch, Frick, Hontein et Mercier.<br />

Ces auteurs on les trouve <strong>en</strong> abondance dans les bibliothèques <strong>de</strong>s scolasticats jésuites,<br />

mais <strong>en</strong> les lisant on doit regretter le temps perdu, quelquefois <strong>de</strong>s semaines <strong>en</strong>tières,<br />

sur <strong>de</strong>s questions abstruses, comme par exemple le Eus ut sic, lexist<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s<br />

trois certitu<strong>de</strong>s, le célèbre continu, la matière et la forme, l'effet formel <strong>de</strong> quantité,<br />

etc., etc. La seule chose pratique que l'on <strong>en</strong> retirait était la perte d'un temps précieux<br />

et une certaine démoralisation <strong>de</strong> l'esprit <strong>de</strong>s élèves les plus intellig<strong>en</strong>ts, qui ne pouvai<strong>en</strong>t<br />

laisser <strong>de</strong> reconnaître l'inanité <strong>de</strong> toutes ces pièces du mécanisme scolastique, dont<br />

l'étu<strong>de</strong> ou plutôt le déchiffrem<strong>en</strong>t inutile absorbe l'énergie qui leur est si nécessaire pour<br />

d'autres étu<strong>de</strong>s plus palpables et beaucoup plus utiles.<br />

Dans l'étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la philosophie les Cercles étai<strong>en</strong>t dignes <strong>de</strong> remarque. Il y <strong>en</strong> avait<br />

trois par semaine. Dans ces Cercles un élève <strong>de</strong>vait exposer et sout<strong>en</strong>ir une ou <strong>de</strong>ux<br />

thèses, antérieurem<strong>en</strong>t inscrites sur un tableau. Deux <strong>de</strong> ses condisciples, quelquefois<br />

trois, <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t successivem<strong>en</strong>t les réfuter.<br />

Quant <strong>à</strong> l'ori<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> l'étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la Philosophie, elle était subordonnée <strong>à</strong> la Théologie<br />

;<br />

c'est pourquoi les professeurs disai<strong>en</strong>t qu'elle était Serva Theulogiae 1 . On voit par<br />

ceci que, dans <strong>de</strong> pareilles conditions, un tel <strong>en</strong>-eignem<strong>en</strong>t ne pouvait être que nuisible.<br />

1<br />

Voila quelques exemples extraits du Praetectionum Philosophiae Scholasticae Brevis Conspectus,.autore<br />

J. Van <strong>de</strong>r Aa. S. J., Lovanii, 1888.<br />

Sub la Trinité.— Objic. 4.° In SS. Trinitate una natura existit in tribus personis.— R. distinguo,<br />

una numéro, sed singularis natura concedo; una numéro et universalis, nego. Objic. 5." Adam et Eva<br />

suam naturam posteris communicarunt.— R. distinguo, suam speeie eam<strong>de</strong>m, concedo : suam numéro<br />

eam<strong>de</strong>in nego.— N. B. In sola g<strong>en</strong>eratione aeterna Dei, Pater communicat filio suam propriam numéro<br />

eam<strong>de</strong>m naturam. (Vol. 1, p. .^5).<br />

Sub la cbéation.— Objic. 3." Ex nihilû nihil fit.— R. distinguo ex nihilo ut materia praesupposita<br />

(ut ex causa materiali), concedo; ex nihilo, ut termino a quo, subdistinguo loqu<strong>en</strong>do <strong>de</strong> causis secundis<br />

concedo; <strong>de</strong> causa prima, nego (haec causât sub ratione ess<strong>en</strong>di, ut sic). (Vol. n, p. 71).<br />

Sua l'ame <strong>de</strong>s hommes et <strong>de</strong>s animaux.— Pbopositio 106. Anima humana in quovis homine immé-<br />

118).— Pbopositio 63. Animae beluinae non crean-<br />

diate a Deo per creationem producitur. (Vol. m, p.<br />

tur, sed g<strong>en</strong>eratione producuntur. (Vol. n, p. 226).<br />

Sun l'euchabistie.— Scimus ex revelatione S. Eucharistiae haberi <strong>de</strong> facto (exist<strong>en</strong>tiam accid<strong>en</strong>torum<br />

absolutorum physicorum seorsim a substantia). Vol, i, p. 191).<br />

Quelle philosophie si ridicule que la scolastique <strong>de</strong>s jésuites ! Quand je l'ai étudiée, mon esprit<br />

ne pouvait la pr<strong>en</strong>dre au sérieux. Elle m'amusait, ainsi que tous ses argum<strong>en</strong>ts, dont la base n'est<br />

qu'un artificieux jeu <strong>de</strong> mots, qui ne peut être admis et aprecié que par <strong>de</strong>s esprits faioles, facilem<strong>en</strong>t<br />

adaptés <strong>à</strong> la soumission d'intellig<strong>en</strong>ce et <strong>de</strong> volonté prescrite par les Règles. Ce dédain même<br />

explique ce que dis<strong>en</strong>t les Pères <strong>de</strong> la Civilta CaUôlica dans le numéro <strong>de</strong> cette Revue, <strong>de</strong> 6 juin<br />

1914, p. 584 sub fine.


—<br />

47<br />

En ce qui regar<strong>de</strong> l'étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s Sci<strong>en</strong>ces <strong>à</strong> laquelle j'ai fait allusion plus haut, les<br />

auteurs adoptés récemm<strong>en</strong>t au scolasticat <strong>de</strong>s jésuites portugais étai<strong>en</strong>t presque les mêmes<br />

que ceux <strong>de</strong> nos lycées.<br />

<strong>Les</strong> étu<strong>de</strong>s étai<strong>en</strong>t partagées <strong>en</strong> trois années, <strong>de</strong> la manière suivante :<br />

l ère<br />

année:<br />

a) Partie philosophique — Logique et Ontologie ;<br />

b) Partie mathématique — Géométrie plane. Géométrie dans l'espace, Algèbre,<br />

Trigonométrie et Cosmographie.<br />

2* année:<br />

a) Partie philosophique — Cosmologie, Organologie et Psychologie<br />

;<br />

b) Partie sci<strong>en</strong>tifique — -Physique, Chimie, Notions <strong>de</strong> Botanique, <strong>de</strong> Zoologie<br />

et<br />

<strong>de</strong> Biologie.<br />

3 e année :<br />

«) Partie philosophique — Théodicée, Philosophie Morale, Notions d'Economie<br />

Politique<br />

;<br />

b) Partie sci<strong>en</strong>tifique<br />

-On répétait les points les plus importants <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux<br />

années précéd<strong>en</strong>tes.<br />

La 3 e année, les classes fermai<strong>en</strong>t un mois avant l'exam<strong>en</strong> final intitulé «De Universa»,<br />

afin que les scolastiques puss<strong>en</strong>t revoir conv<strong>en</strong>ablem<strong>en</strong>t les leçons <strong>de</strong>s trois années<br />

<strong>de</strong> toute la philosophie seolastique.<br />

Cours <strong>de</strong> Théologie<br />

<strong>Les</strong> jésuites n'eur<strong>en</strong>t pas, dans cette pério<strong>de</strong>, <strong>de</strong> cours <strong>de</strong> Théologie <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>,<br />

et, <strong>en</strong> exceptant quelques scolastiques qui, pour cause <strong>de</strong> maladie, <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t faire leurs<br />

étu<strong>de</strong>s dans le pays, ils allai<strong>en</strong>t tous faire leur cours <strong>de</strong> théologie chez les Scolasticats<br />

<strong>de</strong>s autres Provinces <strong>de</strong> la Compagnie, dont les principaux ont déj<strong>à</strong> été cités pour la<br />

Philosophie. Comme conséqu<strong>en</strong>ce, presque tous les scolastiques portugais recevai<strong>en</strong>t les<br />

ordres sacrés du sacerdoce <strong>à</strong> l'étranger, par <strong>de</strong>s évoques étrangers, <strong>à</strong> la fin <strong>de</strong> la troisième<br />

année théologique, comme on le fait habituellem<strong>en</strong>t <strong>à</strong> la Compagnie.<br />

Chez les jésuites la Théologie se trouve partagée <strong>en</strong> <strong>de</strong>ux cours : le cours <strong>de</strong> Théologie<br />

seolastique et le cours <strong>de</strong> Théologie abrégée, qui est plus facile que celui-l<strong>à</strong> et<br />

généralem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>stiné aux élèves dont la santé est plus ou moins précaire et <strong>à</strong> ceux qui<br />

<strong>en</strong> philosophie ont montré un esprit moins porté aux finesses <strong>de</strong> la Seolastique.<br />

<strong>Les</strong> étu<strong>de</strong>s qui font partie du programme <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s théologiques sont la Dogmatique,<br />

la Morale. l'Histoire Ecclésiastique, l'Exégèse Biblique, le Droit Canonique, et<br />

l'Hébreu.<br />

Division d'étu<strong>de</strong>s. — Ces étu<strong>de</strong>s se trouv<strong>en</strong>t divisées <strong>de</strong> la manière suivante :<br />

l.' re année — Dogme, Morale, Hébreu, Histoire Ecclésiastique.<br />

2 e année Dogme, Morale, Histoire Ecclésiastique, Ecriture, Droit Canonique.<br />

3 e année — Dogme, Histoire Ecclésiastique, Écriture, Droit Canonique.<br />

4 e année — Dogme, Histoire Ecclésiastique, Écriture.


48<br />

<strong>Les</strong> classes <strong>de</strong> quatrième année ferm<strong>en</strong>t <strong>en</strong> mars ou avril et les mois restants sont<br />

consacrés <strong>à</strong> une révision générale <strong>de</strong> toute la théologie, que l'étudiant doit faire seul, avant<br />

<strong>de</strong> se prés<strong>en</strong>ter <strong>à</strong> l'exam<strong>en</strong> final, intitulé «Ad gradum», parce que c'est <strong>de</strong> lui que dép<strong>en</strong>d<br />

le <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> Profès ou <strong>de</strong> Coadjuteur Spirituel, par lequel le scolastique sera définitivem<strong>en</strong>t<br />

incorporé dans la<br />

ComDagnie.<br />

Livres —<strong>Les</strong> livres généralem<strong>en</strong>t adoptés pour l'étu<strong>de</strong> du Dogme sont la<br />

Theologia Wicerburg<strong>en</strong>sis<br />

et les Praelectiones Dogmaticae <strong>de</strong> Chr. Pesch S. J., et les auteurs les plus<br />

consultés parmi les<br />

théologi<strong>en</strong>s anci<strong>en</strong>s sont S'. Thomas, Suarez et Belarmin et parmi les<br />

mo<strong>de</strong>rnes Palmieri, Mazzela, Franzelin, De San, Perrone, Lahousse et M<strong>en</strong>dive. Quant<br />

<strong>à</strong> la Morale les auteurs généralem<strong>en</strong>t adoptés sont G<strong>en</strong>icot et Lemkul, les plus consultés<br />

sont S'. Alphonse, Ojeti, Ballerini, Palmieri, Bucceroni, Lugo, Gury et Noldin. En<br />

ce qui concerne les autres étu<strong>de</strong>s, il y a une gran<strong>de</strong> diverg<strong>en</strong>ce dans les Précis adoptés<br />

par les divers Scolasticsts.<br />

En ce qui regar<strong>de</strong> l'étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> ces matières, on doit reconnaître qu'elle est bi<strong>en</strong> organisée<br />

d'après la norme catholique.<br />

La théologie catholico-jésuitique t<strong>en</strong>d <strong>à</strong> réduire l'homme <strong>à</strong> un anéantissem<strong>en</strong>t absolu.<br />

Dans ce but elle veut nous prés<strong>en</strong>ter l'homme comme un criminel né, dès le mom<strong>en</strong>t<br />

où il a été conçu (Voyez Pesch. Chr. Praelationes Dogmaticae, vol. III n.° 236 et suivants).<br />

Voyez ce petit <strong>en</strong>fant qui vi<strong>en</strong>t <strong>à</strong> peine <strong>de</strong> pousser le<br />

premier vagissem<strong>en</strong>t dans les<br />

bras <strong>de</strong> sa mère. Pour le théologi<strong>en</strong> cet être, innoc<strong>en</strong>t, est déj<strong>à</strong> un criminel qui mérite<br />

les peines éternelles, un objet d'horreur pour Dieu !<br />

Ceci ne suffit pas. Pour avilir <strong>en</strong>core la nature humaine, le théologi<strong>en</strong> nous dit que<br />

l'homme ne peut ri<strong>en</strong> faire <strong>de</strong> bon par lui-même, qu'il ne peut même pas avoir une<br />

bonne p<strong>en</strong>sée, (Voy. G. Lahousse, Universa Theologia Scholastica, p. 305j, que sans la<br />

révélation il ne pourrait acquérir la connaissance d'un grand nombre <strong>de</strong> vérités d'ordre<br />

naturel et moral, que sans l'ai<strong>de</strong> très particulière <strong>de</strong> la grâce surnaturelle il ne peut<br />

observer les préceptes <strong>de</strong> l'honnêteté <strong>de</strong> la Loi Naturelle] (Voy. Pesch vol. V, n.° 147,<br />

et suivants; — Lahousse, p. 263, 265).<br />

Ici une objection surgit naturellem<strong>en</strong>t: Si Dieu a placé l'homme dans <strong>de</strong>s situations<br />

où il lui est impossible d'observer les préceptes <strong>de</strong> la Loi Nx:urelle, il s'<strong>en</strong>suit que<br />

l'homme n'est pas coupable d'une telle infraction. A ceci on nous répond que dans la<br />

provid<strong>en</strong>ce où Dieu nous a créés,<br />

moralem<strong>en</strong>t impossible.<br />

cette observance nous est physiquem<strong>en</strong>t possible, mais<br />

Belle réponse ! Que m'importe la possibilité physique ou mille possibilités physiques,<br />

si je n'ai pas la possibilité morale? Questions <strong>de</strong> mots dépourvus <strong>de</strong> s<strong>en</strong>s, comme<br />

tant d'autres dont la théologie est<br />

saturée.<br />

Et le théologi<strong>en</strong> n'est pas <strong>en</strong>core satisfait.<br />

Non cont<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l'abîme d'abjection où il a précipité le pauvre être humain, il lui<br />

a imposé sans pitié <strong>de</strong>s préceptes répugnants, que les Saintes Écritures elles-mêmes ne<br />

peuv<strong>en</strong>t justifier complètem<strong>en</strong>t, comme la confession, etc., et il a peuplé son exist<strong>en</strong>ce<br />

<strong>de</strong> mystères absur<strong>de</strong>s, l'obligeant <strong>à</strong> les<br />

accepter sans une discussion sérieuse.<br />

Mais ce n'est pas seulem<strong>en</strong>t l'homme comme individu particulier, que la théologie<br />

<strong>en</strong>seignée dans ces écoles veut anéantir: elle suit le même système <strong>à</strong> l'égard <strong>de</strong> la société<br />

qu'elle voudrait bi<strong>en</strong> réduire <strong>à</strong> un simple troupeau d'esclaves <strong>de</strong> Rome.<br />

Dans ce but on a formulé la définition <strong>de</strong> l'Infaillibilité du Pape, due <strong>en</strong> gran<strong>de</strong><br />

partie aux jésuites, déf<strong>en</strong>seurs nés <strong>de</strong>s prét<strong>en</strong>tions <strong>de</strong>s Papes (Voy. Theologia Wicerburg<strong>en</strong>sis,<br />

vol. i, p. 348, etc.; et Chr. Pesch vol. i).


49<br />

<strong>Les</strong> thèses que quelques jésuites ont déf<strong>en</strong>dues et qui t<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t <strong>à</strong> établir que la juridiction<br />

épiscopale dérive immédiatem<strong>en</strong>t du Pape et non du Christ sont <strong>en</strong>core un autre<br />

coup porté <strong>à</strong> la dignité épiscopale.<br />

Enfin on souti<strong>en</strong>t que le Pape a le droit d'interv<strong>en</strong>ir dans toutes les questions civiles,<br />

se rapportant directem<strong>en</strong>t ou indirectem<strong>en</strong>t aux intérêts ecclésiastiques, rapport que lui<br />

seul peut juger <strong>en</strong>* <strong>de</strong>rnière instance. Si un jour ces thèses étai<strong>en</strong>t mises <strong>en</strong> pratique,<br />

la société serait réduite <strong>à</strong> une simple sacristie. ( Voy. Hurter, Theologia G<strong>en</strong>eralis, vol. I,<br />

p. 260, 324, 371, 413, etc. — Pesch. Vol. i, n.° 287 et suivants.— Theologia Wicerburg<strong>en</strong>sis,<br />

p. 329).<br />

Il est aussi <strong>à</strong> regretter que dans les écoles <strong>de</strong> théologie on per<strong>de</strong> un temps si précieux,<br />

pour discuter <strong>de</strong>s bagatelles ridicules, telles que celles-ci : quelle est la nature <strong>de</strong>s<br />

anges, sont-ils ou non tous <strong>de</strong> la même espèce (Voy. Pesch. Vol. ni n. n 361, etc.); où<br />

est l'Enfer, le Purgatoire et le Ciel (Pesch, vol. ix, n.° 671 et suivants)<br />

;<br />

quel fut le<br />

péché <strong>de</strong> Lucifer (Pesch. Vol. ni, n.° 397, etc.), fut-ce un péché <strong>de</strong> vanité ou un péché<br />

d'orgueil et où ce péché a-t-il été commis (cf. Suarez — De Angelis); si les bi<strong>en</strong>heureux<br />

voi<strong>en</strong>t Dieu <strong>de</strong> la même manière (Pesch. Vol. n, n.° 45, etc. et vol m n.° 449 etc.);<br />

si le corps du Christ était <strong>en</strong> chair et <strong>en</strong> os ou non (Pesch, Vol. iv, n.° 233, etc.) ; si<br />

la douleur <strong>de</strong>s péchés est un acte <strong>de</strong> la volonté ou <strong>de</strong> l'intellig<strong>en</strong>ce, etc., etc. (Voy.<br />

Theologia Wicerburg<strong>en</strong>sis, vol. IV, p. 3 et suivantes;.<br />

CHAPITRE ONZIEME<br />

Leurs Collèges pour élèves séculiers<br />

P<strong>en</strong>dant les cinquante-<strong>de</strong>ux années du <strong>de</strong>rnier séjour <strong>de</strong>s jésuites <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> ils<br />

essayèr<strong>en</strong>t <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>r et d'<strong>en</strong>tret<strong>en</strong>ir plusieurs collèges dans certaines parties du pays ;<br />

mais ne parvinr<strong>en</strong>t <strong>à</strong> maint<strong>en</strong>ir jusqu'<strong>à</strong> la fin que les <strong>de</strong>ux qu'ils avai<strong>en</strong>t trouvés déj<strong>à</strong><br />

fondés au mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> leur <strong>en</strong>trée: celui <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> et celui <strong>de</strong> S'. Fidèle.<br />

Il est intéressant, pour l'histoire <strong>de</strong>s jésuites <strong>de</strong> cette époque, <strong>de</strong> parler <strong>de</strong>s autres<br />

collèges qu'ils avai<strong>en</strong>t essayé d'établir, d'après leurs Catalogues et d'autres docum<strong>en</strong>ts.<br />

Nous avons déj<strong>à</strong> vu au chapitre VIT que le collège-asile, transféré, par le P. Ra<strong>de</strong>maker,<br />

<strong>de</strong> Lisbonne au Barro <strong>en</strong> 1860, n'avait duré que cinq années, puisqu'il termina <strong>en</strong><br />

1865, vu que les Supérieurs itali<strong>en</strong>s ne voulur<strong>en</strong>t ri<strong>en</strong> dép<strong>en</strong>ser pour l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s<br />

<strong>en</strong>fants pauvres.<br />

En 1878 les jésuites désirant profiter <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Setubal, dont ils avai<strong>en</strong>t fait<br />

un Scolasticat. pour un externat d'où ils puss<strong>en</strong>t tirer profit, y comm<strong>en</strong>cèr<strong>en</strong>t l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t<br />

<strong>de</strong> quelques étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s lycées ;<br />

mais ils ne réussir<strong>en</strong>t pas, car les élèves séculiers<br />

ne vinr<strong>en</strong>t qu'<strong>en</strong> très petit nombre et ils dur<strong>en</strong>t le fermer cinq années après, <strong>en</strong> 1883.<br />

En 189)1 ils fondèr<strong>en</strong>t aussi <strong>à</strong> Cuimarâes un externat qui pût leur rapporter assez<br />

d'arg<strong>en</strong>t pour <strong>en</strong>tret<strong>en</strong>ir l'Ecole Apostolique, pépinière du noviciat. Mais il n'y réussit pas,<br />

comme nous l'avons vu.<br />

En 1901, ils fir<strong>en</strong>t une nouvelle t<strong>en</strong>tative dans cette ville, afin d'y établir un internat.<br />

Mais cette t<strong>en</strong>tative échoua aussi et ils dur<strong>en</strong>t le fermer <strong>en</strong> 11)06, p<strong>en</strong>sant <strong>à</strong> le transférer<br />

ailleurs. (Voir le chapitre VII).<br />

En effet <strong>en</strong> 1906 ils comm<strong>en</strong>cèr<strong>en</strong>t <strong>à</strong> Porto l'établissem<strong>en</strong>t d'un collège qui représ<strong>en</strong>tait<br />

celui <strong>de</strong> Guimar<strong>à</strong>es comme le dit l'Histoire <strong>de</strong> ce collège, écrite <strong>en</strong> latin par les<br />

jésuites mêmes : cEt ainsi le Collège <strong>de</strong> la Sainte Trinité <strong>de</strong> Guimar<strong>à</strong>es, qui ne répondait<br />

4


50<br />

pas aux espérances conçues, fut transféré <strong>à</strong> Porto et installé sous le haut patronage <strong>de</strong><br />

S 1 . Joseph *». Mais ce collège eut une durée éphémère, ayant fermé <strong>en</strong> 1909.<br />

À Covilhâ, comme ils avai<strong>en</strong>t hérité <strong>de</strong> Marie Joseph Tavares un terrain très ét<strong>en</strong>du<br />

aux <strong>en</strong>virons <strong>de</strong> la ville, que l'on appelait le Serrado, ils y construisir<strong>en</strong>t un édifice<br />

assez vaste, dans l'int<strong>en</strong>tion d'y établir un collège, surtout <strong>de</strong>stiné, parait-il, <strong>à</strong> l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t<br />

<strong>de</strong>s Arts et<br />

Métiers, vu que la population <strong>de</strong> cette ville s'occupe principalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong><br />

la fabrication <strong>de</strong>s lainages. Il parait aussi que ce qui poussa surtout les jésuites <strong>à</strong> fon<strong>de</strong>r<br />

ce collège ce fut <strong>de</strong> savoir que les<br />

Franciscains p<strong>en</strong>sai<strong>en</strong>t <strong>à</strong> établir <strong>à</strong> Covilhâ un collège<br />

<strong>à</strong> eux, ce qui ferait baisser le nombre <strong>de</strong>s élèves du Collège <strong>de</strong> S.' Fidèle, situé <strong>à</strong> six<br />

lieues <strong>de</strong> cette ville, et vi<strong>en</strong>drait aussi diminuer l'influ<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s jésuites, ainsi que les rev<strong>en</strong>us<br />

qu'ils retirai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ce pays où ils s'étai<strong>en</strong>t fixés <strong>de</strong>puis 1871. Ces r<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>ts<br />

m'ont été fournis par <strong>de</strong>s personnes très liées avec les Religieux <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux Ordres.<br />

Ce qui est certain cep<strong>en</strong>dant, c'est que l'édifice fut construit, mais le collège ne fut<br />

jamais fondé. Ceux qui me fournir<strong>en</strong>t ces r<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>ts me dir<strong>en</strong>t aussi que les jésuites<br />

ne p<strong>en</strong>sèr<strong>en</strong>t plus <strong>à</strong> y ouvrir un collège, lorsqu'ils vir<strong>en</strong>t que les Franciscains r<strong>en</strong>onçai<strong>en</strong>t<br />

<strong>à</strong> leur premier projet dans cette ville. Ceux-ci allèr<strong>en</strong>t le fon<strong>de</strong>r <strong>à</strong> Leiria où,<br />

au mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la Proclamation <strong>de</strong> la République, le 5 octobre <strong>1910</strong>, ils avai<strong>en</strong>t un édifice<br />

presque terminé pour le collège qui était déj<strong>à</strong> installé.<br />

Et voil<strong>à</strong> tout ce que les jésuites ont pu obt<strong>en</strong>ir avec leurs t<strong>en</strong>tatives <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>r <strong>de</strong><br />

nouveaux collèges <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>! Ils<br />

échouèr<strong>en</strong>t <strong>à</strong> Barro, <strong>à</strong> Setubal, <strong>à</strong> Guimar<strong>à</strong>es, <strong>à</strong> Porto,<br />

<strong>à</strong> Covilhil, partout! <strong>Les</strong> causes <strong>de</strong> cette mauvaise chance nous les verrons dans les chapitres<br />

suivants.<br />

CHAPITRE DOUZIEME<br />

Comm<strong>en</strong>t ils <strong>en</strong>seignai<strong>en</strong>t dans leurs collèges les élèves séculiers<br />

Par ce que nous avons vu aux chapitres ix et x nous savons quelle était la psychologie<br />

<strong>de</strong>s professeurs jésuites et la culture m<strong>en</strong>tale qu'ils avai<strong>en</strong>t acquise aux cours <strong>de</strong>s<br />

Humanités et <strong>de</strong> Philosophie, quand ils v<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>seigner dans leurs collèges d'élèves<br />

séculiers. Leurs étu<strong>de</strong>s littéraires laissai<strong>en</strong>t beaucoup <strong>à</strong> désirer. Leur éducation philosophique<br />

était celle <strong>de</strong> la vieille scolastique, verbeuse et plutôt faite pour servir <strong>à</strong> la théologie<br />

et <strong>à</strong> la gloire <strong>de</strong> Dieu, ainsi qu'ils l'avouai<strong>en</strong>t eux-mêmes dans leurs Règles, qu'<strong>à</strong> la<br />

vraie sci<strong>en</strong>ce.<br />

C'est dans les sci<strong>en</strong>ces physico-naturelles qu'ils avai<strong>en</strong>t acquis <strong>de</strong>s connaissances<br />

pratiques et d'une certaine valeur.<br />

Mais <strong>en</strong> pédagogie ils n'avai<strong>en</strong>t ni connaissances ni pratique. Par conséqu<strong>en</strong>t leur<br />

<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t se ress<strong>en</strong>t <strong>de</strong> leurs étu<strong>de</strong>s et les faits le confirm<strong>en</strong>t complètem<strong>en</strong>t. J'ai<br />

<strong>de</strong>vant moi beaucoup <strong>de</strong> docum<strong>en</strong>ts officiels et particuliers qui éclaireront le lecteur <strong>à</strong><br />

cet égard; c'est pourquoi je vais <strong>en</strong> reproduire quelques uns, <strong>en</strong> supprimant toute rhétorique<br />

inutile. J'ai sous les yeux un grand nombre <strong>de</strong> catalogues et d'annuaires <strong>de</strong> leurs<br />

collèges, cont<strong>en</strong>ant le nom et l'âge <strong>de</strong>s élèves, les classes qu'ils fréqu<strong>en</strong>tai<strong>en</strong>t, leurs divisions<br />

par classes, les listes <strong>de</strong>s noms <strong>de</strong>s élèves récomp<strong>en</strong>sés et les prix respectifs; ce<br />

que cep<strong>en</strong>dant ces catalogues ne publiai<strong>en</strong>t pas, c'était la liste <strong>de</strong>s élèves reçus et <strong>de</strong>s<br />

élèves refusés dans les lycées officiels. Ceci prouve le peu <strong>de</strong> confiance que les jésuites<br />

1<br />

«Itaque Collegiura Sanctissimao Trinitatis Yimaran<strong>en</strong>se, quod praeconceptam spem non iniplebat,<br />

l'ortucaliam translatum est, ac sub magno divi Joseph Patrociqio collocatum». Historia Collegii <strong>Portugal</strong><strong>en</strong>sis<br />

ab ineunte octobri 1906 ad exceuntem septembre»! 1907, dans les Archives Congréganistes.


51<br />

avai<strong>en</strong>t dans le résultat <strong>de</strong> ces exam<strong>en</strong>s ; et ceci leur a été plusieurs fois reproché par<br />

<strong>de</strong>s personnages officiels.<br />

Qu'on lise l'appréciation <strong>de</strong> l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t au Collège <strong>de</strong> St. Fidèle, faite par le<br />

professeur <strong>de</strong> Mé<strong>de</strong>cine <strong>à</strong> l'Université <strong>de</strong> Coïmbre, le Dr. Sousa Refoios, dans un rapport<br />

sur l'<strong>en</strong>quête officielle qu'il y avait faite <strong>en</strong> 1880. Voici ce qu'il dit:<br />

«D'après l'affirmation du directeur et <strong>de</strong>s professeurs on suit pour l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t<br />

les programmes officiels: sans aucun doute l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s langues est assez bi<strong>en</strong><br />

fait '. On <strong>à</strong> joint <strong>à</strong> ce rapport une liste <strong>de</strong>s élèves du Collège ayant été reçus aux exam<strong>en</strong>s<br />

<strong>de</strong> l'année <strong>de</strong>rnière au Lycée <strong>de</strong> Coïmbre et<br />

<strong>à</strong> celui <strong>de</strong> Castello Branco.<br />

« La Commission ne put savoir combi<strong>en</strong> <strong>de</strong> temps il avait fallu <strong>à</strong> chacun <strong>de</strong> ces élèves<br />

pour se préparer <strong>à</strong> l'exam<strong>en</strong>; parce qu'ils<br />

directeur déclara ne ri<strong>en</strong> savoir <strong>à</strong> cet égard.<br />

n'y a pas <strong>de</strong> livre d'inscription au Collège et le<br />

« Il est <strong>à</strong> regretter qu'<strong>à</strong> côté du nombre <strong>de</strong>s élèves reçus on n'ait pas fait figurer celui<br />

<strong>de</strong>s élèves refusés, car c'est une base importante pour apprécier le résultat <strong>de</strong> l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t.<br />

«L'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la philosophie et surtout celui <strong>de</strong> l'histoire sont vicieux, avec une<br />

direction profondém<strong>en</strong>t réactionnaire.<br />

«La Commission fit appeler les élèves qui avai<strong>en</strong>t fait l'exam<strong>en</strong> d'histoire <strong>en</strong> été et<br />

leur dit d'apprécier la<br />

Révolution Française, comme on le leur avait appris. Un élève <strong>de</strong>s<br />

premiers classifiés fut le seul qui voulut bi<strong>en</strong> répondre, stimulé par le blâme fait <strong>à</strong> un<br />

autre élève — <strong>de</strong>s premiers aussi— qui avait dit l'avoir oublié.<br />

«L'appréciation <strong>de</strong> tout le mouvem<strong>en</strong>t révolutionnaire <strong>de</strong> 1793 <strong>en</strong> France fut celle-ci:<br />

que la Révolution avait été un grand mal, car elle<br />

<strong>de</strong> liberté, qui <strong>de</strong>puis lors s'étai<strong>en</strong>t répandues par toute l'Europe.<br />

avait donné naissance <strong>à</strong> toutes les idées<br />

«Cette appréciation ressemble fort <strong>à</strong> celle que les élèves du Collège fir<strong>en</strong>t <strong>en</strong> 1875<br />

au Lycée <strong>de</strong> Castello Branco <strong>de</strong>vant les commissions d'exam<strong>en</strong>s, nommées par le Gouvernem<strong>en</strong>t.<br />

Le 1 er jour d'exam<strong>en</strong>s les élèves dir<strong>en</strong>t que la Révolution Française avait<br />

causé plus <strong>de</strong> maux que la liberté <strong>de</strong> la presse. Le présid<strong>en</strong>t du jury fut étonné <strong>de</strong> ce<br />

que cette appréciation leur eût été prés<strong>en</strong>tée par leurs professeurs. Le l<strong>en</strong><strong>de</strong>main les élèves<br />

du collège fir<strong>en</strong>t <strong>à</strong> l'exam<strong>en</strong> les plus grands éloges <strong>de</strong> la Révolution Française.<br />

«D'où l'on voit d'un côté la direction et la nature réactionnaire <strong>de</strong> l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t et<br />

<strong>de</strong> l'autre l'hypocrisie qui du jour au l<strong>en</strong><strong>de</strong>main a été recommandée aux nouveaux élèves<br />

examinés, hypocrisie, oui, car l'appréciation <strong>en</strong>seignée aujourd'hui est celle du premier<br />

jour <strong>de</strong>s exam<strong>en</strong>s.<br />

«Le même élève du Collège, interrogé par la Commission sur les formes <strong>de</strong> gouvernem<strong>en</strong>t,<br />

trouva la<br />

monarchie absolue remarquablem<strong>en</strong>t supérieure <strong>à</strong> la monarchie constitutionnelle.<br />

«La Commission voulut savoir si cette opinion était celle <strong>de</strong> l'élève ou si elle était le<br />

résultat <strong>de</strong> l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> classe: l'élève fut bi<strong>en</strong> explicite dans sa réponse et les<br />

autres dir<strong>en</strong>t qu'ils ne connaissai<strong>en</strong>t que cette appréciation.<br />

«La Commission ne pouvait apprécier facilem<strong>en</strong>t le résultat <strong>de</strong> l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t p<strong>en</strong>dant<br />

la prés<strong>en</strong>te année, parce qu'elle vi<strong>en</strong>t <strong>de</strong> comm<strong>en</strong>cer: elle visita les classes qui<br />

étai<strong>en</strong>t ouvertes l'après-midi et elle remarqua que dans toutes ces classes le professeur<br />

portait la calotte, tutoyait les élèves et ceux-ci pouvai<strong>en</strong>t se moquer <strong>de</strong>s autres tant qu'ils<br />

1<br />

Pour l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s langues étrangères ils avai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s professeurs élevés <strong>à</strong> l'étranger ;<br />

Auguste Castrilho, séculier élevé <strong>à</strong> Paris, était un excell<strong>en</strong>t professeur <strong>de</strong> la langue française. (Note<br />

<strong>de</strong> l'auteur qui a connu parfaitem<strong>en</strong>t ce professeur).


52<br />

voulai<strong>en</strong>t. Dans la classe <strong>de</strong> philosophie elle trouva le professeur (dont l'esprit se montrait<br />

assez troublé) donnant une démonstration <strong>de</strong> l'exist<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> Dieu, tellem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors<br />

<strong>de</strong> tout ce qui sert pour la prouver, que je veux la prés<strong>en</strong>ter: — «Dieu est un être toutpuissant;<br />

donc il doit être une réalité et non une simple possibilité; s'il n'était qu'une<br />

possibilité, il ne pourrait avoir <strong>de</strong>s qualités et ne pourrait être tout puissant; donc il est<br />

une réalité, donc il existe».<br />

«Tous les élèves du collège étudi<strong>en</strong>t <strong>à</strong> la fois dans une seule salle d'étu<strong>de</strong>s. Il est <strong>à</strong><br />

remarquer que sur les rayons <strong>de</strong>s élèves on voit beaucoup <strong>de</strong> petits tableaux <strong>de</strong> saints<br />

dans <strong>de</strong>s attitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> profon<strong>de</strong> extase : <strong>en</strong> sorte que même p<strong>en</strong>dant l'étu<strong>de</strong> l'esprit <strong>de</strong>s<br />

élèves est<br />

détourné et dirigé vers un certain point.<br />

«Ceci ne dém<strong>en</strong>t pas le<br />

règlem<strong>en</strong>t pour les externes, lequel se trouve dans un tableau<br />

<strong>à</strong> l'<strong>en</strong>trée du Collège. Après avoir établi que ne sera pas admis <strong>à</strong> la classe l'élève qui<br />

n'ira pas tous les jours <strong>à</strong> la messe, qui n'assistera pas <strong>à</strong> <strong>de</strong> certaines pratiques religieuses<br />

et n'aura pas un nombre voulu <strong>de</strong> confessions, le règlem<strong>en</strong>t, <strong>à</strong> l'article 9, dit <strong>à</strong> peu<br />

près ce qui suit :<br />

«Rappelez-vous que dans ce Collège on donne plus d'importance <strong>à</strong> l'éducation religieuse<br />

qu'<strong>à</strong> l'éducation sci<strong>en</strong>tifique et littéraire» *.<br />

Quant aux résultats officiels <strong>de</strong> l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t au Collège <strong>de</strong> St. Fidèle, nous<br />

avons, parmi beaucoup <strong>de</strong> docum<strong>en</strong>ts, une lettre <strong>de</strong> son recteur, le P. Joachim<br />

Tavares, datée du 11 juillet 1903 et do Coïmbre, où les élèves <strong>de</strong> St. Fidèle allai<strong>en</strong>t<br />

passer leurs <strong>de</strong>rniers exam<strong>en</strong>s du cours du lycée. Dans cette lettre il avoue que : «<strong>Les</strong><br />

classifications <strong>de</strong> nos élèves ont été inférieures dans presque toutes les matières. Nous<br />

verrons si c'est mieux pour la partie orale. V. R. ce sait, <strong>en</strong> tous cas, que notre cours<br />

n'est pas fait<br />

pour <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s <strong>en</strong>volées».<br />

Quant au Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong>, dans l'histoire, écrite <strong>en</strong> latin par les Pères <strong>de</strong> ce<br />

collège et publiée par moi récemm<strong>en</strong>t, on parle plus d'une fois avec éloges du résultat<br />

<strong>de</strong>s exam<strong>en</strong>s officiels passés par les élèves, p<strong>en</strong>dant les premières années, <strong>de</strong>vant les<br />

professeurs du Lycée National <strong>de</strong> Lisbonne -. Mais il est certain aussi que très souv<strong>en</strong>t<br />

ces résultats leur fur<strong>en</strong>t défavorables, comme ils l'avou<strong>en</strong>t eux-mêmes, non seulem<strong>en</strong>t<br />

dans cette même Histoire 3 ,<br />

mais aussi dans les Lettres annuelles et dans d'autres docum<strong>en</strong>ts.<br />

Ainsi, dans la Lettre annuelle <strong>de</strong> 1867, on dit que quelques élèves que l'on<br />

croyait bi<strong>en</strong> préparés pour l'exam<strong>en</strong> ont été refusés au lycée et que cet insuccès doit<br />

être t<strong>en</strong>u secret 4 . En ce qui se rapporte au tri<strong>en</strong>nat <strong>de</strong> 1868 <strong>à</strong> 1871 elle avoue que les<br />

résultats <strong>de</strong> ces exam<strong>en</strong>s pour la philosophie et les mathématiques donnèr<strong>en</strong>t <strong>à</strong> celles-ci<br />

une supériorité sur les étu<strong>de</strong>s littéraires 5 et cette supériorité s'acc<strong>en</strong>tua <strong>en</strong>core plus tard.<br />

Dans une lettre du P. Le Thiec, professeur <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong>, adressée au Recteur <strong>de</strong> St.<br />

Fidèle, le 23 septembre 1901, on lit: «Nous avons les exam<strong>en</strong>s et le résultat n'est pas<br />

flatteur; la crise que nous traversons est terrible pour le Collège». Le P. Balazeiro<br />

écrivait <strong>de</strong> Lisbonne le 4 août <strong>1910</strong> au P. Azevedo qui <strong>de</strong>meurait alors au Barro, ce<br />

qui suit: «On a remarqué aux exam<strong>en</strong>s que les élèves <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> étai<strong>en</strong>t très bi<strong>en</strong><br />

1<br />

Rapport du Dr. Refoios, 1883, Imprimerie <strong>de</strong> l'Université, Coimbre, pp. 28 et 30.<br />

- Ilist. Coll. Camp, et Rétid. Lisbon, pp. 39 et 61, an. 1862-1863, 1871-1872.<br />

s<br />

Hist. Coll. Camp, et Bèsid. Lisbonne, p. 131, années 1899 <strong>à</strong> 1902.<br />

4 «Nonnulli ox alumnis in ludo litterario apud nos exereiti et probati, ii<strong>de</strong>m in R. Lycaeo Ulisipon<strong>en</strong>si<br />

a professoribus exeussi et ut ita dicam vexati, démuni, ut vulgo dicitur, reprobati. numéro<br />

sutïragiorum ad promotionem défici<strong>en</strong>te, eam<strong>de</strong>m repetere classem in proximum annum coaeti fuerunt.<br />


53<br />

préparés dans certaines étu<strong>de</strong>s, mais que pour d'autres ils laissai<strong>en</strong>t assez <strong>à</strong> désirer et<br />

les examinateurs se plaignai<strong>en</strong>t surtout <strong>de</strong> ce que, Campoli<strong>de</strong> étant un Collège ecclésiastique,<br />

les élèves fuss<strong>en</strong>t si faibles <strong>en</strong> latin. Comme on le voit, ceci s'accor<strong>de</strong> parfaitem<strong>en</strong>t<br />

avec ce que V. R. ce nous avait dit».<br />

Le P. Avellino <strong>de</strong> Miranda, écrivant du Collège <strong>de</strong> Guimarâes au Provincial, le 9<br />

août 1894, lui disait: «<strong>Les</strong> exam<strong>en</strong>s sont l'étalon dont se serv<strong>en</strong>t les séculiers, et ceux<br />

<strong>de</strong> cette année ne promett<strong>en</strong>t pas beaucoup. Le premier qui s'est prés<strong>en</strong>té <strong>à</strong> Braga a été<br />

refusé et les autres ajournés. Mais le P. Pinto qui les a examinés pour la distribution<br />

<strong>de</strong>s prix, qui aura lieu dimanche, a dit qu'ils étai<strong>en</strong>t très faibles». Le résultat <strong>de</strong>s exam<strong>en</strong>s<br />

<strong>de</strong> ces élèves ajournés *st rapporté par le P. B<strong>en</strong>oît Rodriguès dans une lettre,<br />

comme il suit: «Nos élèves d'instruction secondaire se réservèr<strong>en</strong>t pour la <strong>de</strong>uxième<br />

époque, afin d'être plus sûrs d'eux-mêmes; mais, soit que les exam<strong>en</strong>s fuss<strong>en</strong>t trop difficiles,<br />

soit que les élèves fuss<strong>en</strong>t trop faibles, sur huit exam<strong>en</strong>s il y eut six refusés.»<br />

Comme on le voit, ici le pourc<strong>en</strong>tage <strong>de</strong>s refusés fut <strong>de</strong> 75 °/o.<br />

A l'égard du Collège <strong>de</strong> Porto qui, comme nous l'avons vu, fut la suite <strong>de</strong> celui <strong>de</strong><br />

Guimarâes et ne dura que trois ans, nous savons aussi par <strong>de</strong>s lettres <strong>de</strong> professeurs <strong>de</strong><br />

ce collège que l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t y laissait beaucoup <strong>à</strong> désirer. Ainsi dans un billet du<br />

P. Louis Alves Correia, préfet <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> ce collège, écrit au comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t <strong>de</strong><br />

l'année scolaire 1908, on lit: «Puisque V. R. ce a mis les affaires <strong>de</strong> l'Instruction Primaire<br />

<strong>en</strong>tre les mains du nouveau préfet <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s, le P. Louis il. Alves Correia Sequeira<br />

S. J. dit qu'il vaut mieux fermer le collège ou r<strong>en</strong>voyer les élèves <strong>de</strong>s I e et 2 e<br />

classes, afin <strong>de</strong> ne pas tromper les familles. Elles croi<strong>en</strong>t que nous instruisons leurs<br />

<strong>en</strong>fants et nous ne faisons que manger leur arg<strong>en</strong>t <strong>en</strong> feignant <strong>de</strong> les instruire, car nous<br />

continuons et nous continuerons <strong>à</strong> ne point avoir <strong>de</strong> professeur, tant que l'on<br />

n'aura pas<br />

fait v<strong>en</strong>ir le Fr. Pires, comme on l'avait dit d'abord, ou un autre qui vaille autant que<br />

lui. Nous ne savons pas faire <strong>de</strong> miracles : le Provincial doit avoir les moy<strong>en</strong>s et la<br />

pouvoir <strong>de</strong> régler cette affaire.»<br />

Le 20 octobre <strong>de</strong> cette même année le P. Jules do Rozario, qui remplaçait le Recteur<br />

<strong>de</strong> ce Collège, écrivait au P. Provincial ce qui suit:<br />

«Quant au Frère Simas, l'essai<br />

avait déj<strong>à</strong> été fait l'année <strong>de</strong>rnière : il ne sert même pas pour les comm<strong>en</strong>çants : il s'acquitte<br />

bi<strong>en</strong> <strong>de</strong> son métier d'ai<strong>de</strong> du procureur et du secrétaire, voil<strong>à</strong> tout. Je <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />

donc <strong>de</strong> nouveau <strong>à</strong> V. R/' <strong>de</strong> faciliter la v<strong>en</strong>ue du Frère Pires, qui d'après ce que me<br />

dit le P. Alves, serait cont<strong>en</strong>t <strong>de</strong> v<strong>en</strong>ir; il y aurait ainsi <strong>de</strong>ux coadjuteurs très aptes.<br />

Le P. Pacheco est v<strong>en</strong>u aussitôt <strong>de</strong> Guimarâes et s'occupe <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants, inutilem<strong>en</strong>t, il<br />

me semble: les élèves qui sont v<strong>en</strong>us <strong>de</strong> S.' Fidèle ont déj<strong>à</strong> dit <strong>à</strong> leurs camara<strong>de</strong>s qu'il<br />

ne servait <strong>à</strong> ri<strong>en</strong>. J'espère que V. R. c '<br />

ne<br />

m'<strong>en</strong> voudra pas <strong>de</strong> ce que je dis, car j'y suis<br />

poussé par mon grand désir <strong>de</strong> voir progresser le collège».<br />

Le peu <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s professeurs jésuites <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> avait <strong>de</strong>ux causes : l'une<br />

dép<strong>en</strong>dait <strong>de</strong> leur recrutem<strong>en</strong>t et <strong>de</strong> la faiblesse <strong>de</strong> leurs étu<strong>de</strong>s dans ce pays et l'autre<br />

était due <strong>à</strong> l'organisation même <strong>de</strong> la Compagnie.<br />

Pour la première cause,<br />

nous avons déj<strong>à</strong> vu aux chapitres précéd<strong>en</strong>ts que les professeurs<br />

jésuites portugais étai<strong>en</strong>t presque tous recrutés parmi les garçons pauvres et<br />

vagabonds, v<strong>en</strong>ant <strong>de</strong>s familleB pauvres et incultes <strong>de</strong>s petits villages <strong>de</strong> la Beira,<br />

du Minho et <strong>de</strong> Tras-os-Montes, emm<strong>en</strong>és par les<br />

missionnaires <strong>à</strong> l'Ecole Apostolique <strong>de</strong><br />

Guimarâes vers 10 <strong>à</strong> 12 ans, quelques uns sachant <strong>à</strong> peine lire. De l<strong>à</strong> ils passai<strong>en</strong>t au<br />

noviciat du Barro, où ils recevai<strong>en</strong>t une éducation qui comprimait terriblem<strong>en</strong>t l'esprit.<br />

Puis ils suivai<strong>en</strong>t p<strong>en</strong>dant six ans (les plus intellig<strong>en</strong>ts) l'étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s Humanités et celle<br />

<strong>de</strong> la Philosophie, qui, comme nous l'avons vu, correspondai<strong>en</strong>t <strong>à</strong> peine aux étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s<br />

sept années <strong>de</strong>s élèves <strong>de</strong>s lycées, sans les cours supérieurs ni l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t et la pratique<br />

pédagogique, obligatoires <strong>de</strong>puis quelques années pour nos professeurs <strong>de</strong>s lycées.


.<br />

54<br />

On compr<strong>en</strong>d ainsi facilem<strong>en</strong>t pourquoi p<strong>en</strong>dant les premières années, <strong>de</strong> 1864 â 1880,<br />

les élèves <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> se soi<strong>en</strong>t prés<strong>en</strong>tés aux exam<strong>en</strong>s <strong>de</strong>s mathématiques et <strong>de</strong>s<br />

sci<strong>en</strong>ces physico-chimiques du Lycée <strong>de</strong> Lisbonne, avec une préparation pratique,<br />

supérieure<br />

peut-être <strong>à</strong> celle <strong>de</strong>s élèves du Lycée, car <strong>à</strong> cette époque la pratique <strong>de</strong>s laboratoires<br />

manquait <strong>à</strong> nos lycées très dépourvus d'instrum<strong>en</strong>ts, et certains professeurs avai<strong>en</strong>t<br />

^té très mal choisis et sans concours. Mais par les lois <strong>de</strong> 1886, 1895 et 1905 sur l'instruction<br />

le professorat <strong>de</strong>s Lycées, composé <strong>de</strong>puis lors d'individus ayant un cours supérieur<br />

et pédagogique, trouvait dans les lycées <strong>de</strong>s bibliothèques et <strong>de</strong>s laboratoires supérieurem<strong>en</strong>t<br />

monlés et largem<strong>en</strong>t fournis <strong>de</strong>s appareils nécessaires. Il <strong>de</strong>vint donc supé<br />

rieur au professorat jésuite et les élèves <strong>de</strong>s lycées se prés<strong>en</strong>tèr<strong>en</strong>t aux exam<strong>en</strong>s avec<br />

<strong>de</strong>s aptitu<strong>de</strong>s au <strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> celles <strong>de</strong>s élèves <strong>de</strong>s jésuites.<br />

La <strong>de</strong>uxième cause <strong>de</strong> la défectuosité du professorat jésuite était le changem<strong>en</strong>t<br />

constant qui se produisait chaque année chez le personnel <strong>en</strong>seignant <strong>de</strong> leurs collèges,<br />

comme on le voit <strong>à</strong> travers l'Histoire du Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> et les Catalogues <strong>de</strong> la<br />

Province Portugaise <strong>de</strong> la Compagnie <strong>de</strong> Jésus. Il y avait <strong>de</strong>s années, où tous les professeurs<br />

d'un collège étai<strong>en</strong>t remplacés.<br />

Le motif <strong>de</strong> ce changem<strong>en</strong>t se trouve dans la vie organique <strong>de</strong>s jésuites, qui, après<br />

le noviciat et les cours d'humanités et <strong>de</strong> philosophie finissant généralem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tre vingt<strong>de</strong>ux<br />

et vingt-trois ans, comm<strong>en</strong>c<strong>en</strong>t <strong>à</strong> se charger <strong>de</strong> l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t secondaire dans les<br />

collèges et n'y rest<strong>en</strong>t que cinq ou six ans.<br />

Lorsqu'ils sont déj<strong>à</strong> habitués <strong>à</strong> cet <strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t,<br />

ils le quitt<strong>en</strong>t pour aller étudier la théologie et sont ordonnés prêtres vers l'âge <strong>de</strong><br />

tr<strong>en</strong>te trois<br />

ans. Puis on leur donne les charges <strong>de</strong> l'administration et du gouvernem<strong>en</strong>t <strong>de</strong><br />

l'Ordre ou bi<strong>en</strong> ils exerc<strong>en</strong>t la prédication et la confession dans les Résid<strong>en</strong>ces ou dans<br />

les Missions. Quelques uns d'<strong>en</strong>tre eux seulem<strong>en</strong>t revi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t au professorat, où ils sont<br />

fréquemm<strong>en</strong>t <strong>en</strong>voyés d'un collège <strong>à</strong> l'autre.<br />

Leur personnel <strong>en</strong>seignant <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> étant d'une prov<strong>en</strong>ance si inférieure, si inculte<br />

et si mobile, il n'est pas étonnant que les élèves <strong>de</strong>s collèges <strong>de</strong>s jésuites n'ai<strong>en</strong>t<br />

pu facilem<strong>en</strong>t être reçus par les professeurs <strong>de</strong>s Lycées, qui <strong>de</strong>puis 1888 ont beaucoup<br />

progressé, surtout <strong>en</strong> pédagogie.<br />

Une lettre du P. Avellino <strong>de</strong> Miranda au P. Provincial, datée <strong>de</strong> Guimar<strong>à</strong>es le 9<br />

août 1894, confirme ce que je vi<strong>en</strong>s <strong>de</strong> dire: «Il me semble qu'il ne convi<strong>en</strong>drait peutêtre<br />

pas que les professeurs <strong>de</strong> ces classes-ci fuss<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s frères sans expéri<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t<br />

dans les collèges. Le pauvre Frère Lucas s'est vu bi<strong>en</strong> embarrassé, il n'avait<br />

jamais <strong>en</strong>seigné ni vu <strong>en</strong>seigner, il ne sait pas ce qu'il doit exiger <strong>de</strong>s élèves ni comm<strong>en</strong>t<br />

les ori<strong>en</strong>ter et il est seul. Dans les collèges les jeunes appr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t avec leurs aînés;<br />

et. quoique faiblem<strong>en</strong>t, ceux-ci aid<strong>en</strong>t leurs camara<strong>de</strong>s. Ici Lucas est tout le collège . .<br />

Et si celui ou ceux que nous verrons <strong>en</strong>trer ici au prochain cours sont aussi <strong>de</strong> ceux<br />

qui vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la philosophie, ne verrons-nous pas augm<strong>en</strong>ter les difficultés? »<br />

CHAPITRE TREIZIEME<br />

Comm<strong>en</strong>t ils<br />

élevai<strong>en</strong>t dans leurs collèges<br />

Ayant examiné la valeur <strong>de</strong> l'instruction que les jésuites donnai<strong>en</strong>t <strong>à</strong> leurs élèves,<br />

voyons quelle était l'éducation par laquelle ils préparai<strong>en</strong>t leur esprit pour la vie sociale.<br />

<strong>Les</strong> nombreux docum<strong>en</strong>ts que nous avons <strong>de</strong>vant nous le démontr<strong>en</strong>t clairem<strong>en</strong>t. <strong>Les</strong><br />

règlem<strong>en</strong>ts mêmes <strong>de</strong> leurs collèges nous donn<strong>en</strong>t une idée <strong>de</strong> cette éducation. Ainsi<br />

dans le Règlem<strong>en</strong>t du Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> (Lisbonne, 1906) nous trouvons l'article 2<br />

qui dit :


55<br />

«P<strong>en</strong>sez mes <strong>en</strong>fants que la première <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>ces et leur principe <strong>à</strong> toutes est la<br />

sainte crainte <strong>de</strong> Dieu et que si vous n'accomplissez par vos <strong>de</strong>voirs religieux, vous ne<br />

serez jamais vraim<strong>en</strong>t savants, honnêtes et heureux, malgré toutes vos connaissances,<br />

toute votre honnêteté et toutes vos prospérités».<br />

C'est étonnant ! Ni savants, ni honnêtes, ni heureux, sans l'accomplissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s<br />

<strong>de</strong>voirs religieux ! Et quels sont ces <strong>de</strong>voirs religieux imposés aux élèves <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong>?<br />

Ils sont indiqués dans d'autres articles du même règlem<strong>en</strong>t, et sont, <strong>en</strong>tre autres,<br />

la confession tous les mois (art. 7), la messe et le chapelet tous les jours, et une retraite<br />

d'exercices spirituels, p<strong>en</strong>dant trois jours, chaque année (art. 6). Comme on le voit ces<br />

<strong>de</strong>voirs religieux imposés aux élèves <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> sont plus nombreux et<br />

plus rigoureux<br />

que ceux que l'Eglise catholique elle-même exige <strong>de</strong> ses tidèles et ne servai<strong>en</strong>t qu'i<br />

imprimer sur l'esprit <strong>de</strong> ces élèves un fanatisme religieux très marqué, auquel contribuai<strong>en</strong>t<br />

aussi beaucoup los congrégations <strong>de</strong>s élèves sous l'invocation <strong>de</strong> la Sainte Vierge,<br />

<strong>de</strong> St. Joseph, <strong>de</strong> l'Enfant Jésus, <strong>de</strong>s Anges, <strong>de</strong> St. Louis <strong>de</strong> Gonzague, <strong>de</strong> St. Stanislas<br />

Kostka et <strong>de</strong> St. Jean Perchmans, dont nous avons d'innombrables docum<strong>en</strong>ts dans les<br />

Archives Congréganistes.<br />

<strong>Les</strong> élèves étai<strong>en</strong>t admis <strong>à</strong> ces congrégations d'après leur âge et<br />

leur fanatisme. Et c'est aussi d'après celui-ci que leur conduite était appréciée. C'est pourquoi<br />

ceux qui étai<strong>en</strong>t considérés comme modèles n'étai<strong>en</strong>t pas les plus forts, les plus<br />

énergiques et les plus altruistes, mais les plus soumis, les plus humbles, les plus fanatisés<br />

et débiles, sur la vie <strong>de</strong>squels on composait <strong>de</strong>s livres comme la Fleur <strong>de</strong> Mai, qui<br />

est la biographie <strong>de</strong> Louis Mimoso <strong>de</strong> Albuquerque, <strong>en</strong>fant faible et mala<strong>de</strong>, mort au<br />

Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong>, <strong>à</strong> quinze ans, le 15 mai 1905. Ces élèves étai<strong>en</strong>t prés<strong>en</strong>tés <strong>à</strong><br />

l'imitation <strong>de</strong>s autres et leurs biographies leur étai<strong>en</strong>t v<strong>en</strong>dues par les Pères, qui obt<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t<br />

ainsi l'arg<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s élèves et la soumission <strong>de</strong> leurs esprits. Dans les Lettres Edifiantes<br />

<strong>de</strong> la Province <strong>de</strong> <strong>Portugal</strong> «S. J. -l: n Année- 100!), on lit dans un article sur<br />

YAnnée Jubilaire <strong>de</strong> CampoH<strong>de</strong>, pages 7


56<br />

démontre que l'on n'ori<strong>en</strong>tait pas l'élève vers les étu<strong>de</strong>s par amour propre, utilité et<br />

dignité personnelles, mais pour honorer sa Mère Céleste. L'auteur <strong>de</strong> l'article termine<br />

par cette conclusion inepte et stupi<strong>de</strong> : «Je ne veux pas terminer sans communiquer <strong>à</strong><br />

V. R. ce la grâce par laquelle la Très Sainte Vierge a daigné nous bénir <strong>à</strong> la fin <strong>de</strong> l'année<br />

scolaire, pour couronner les très nombreuses grâces qu'elle nous a accordées p<strong>en</strong>dant<br />

l'année jubilaire, c'est le résultat extraordinairem<strong>en</strong>t bon <strong>de</strong>s exam<strong>en</strong>s <strong>de</strong> nos élèves,<br />

résultat qui est le meilleur que nous ayons eu après la réforme <strong>de</strong> l'instruction secondaire».<br />

Cette même idée que c'est <strong>à</strong> la dévotion <strong>de</strong>s élèves que l'on doit, comme récomp<strong>en</strong>se<br />

du Ciel, le bon résultat <strong>de</strong>s exam<strong>en</strong>s, se reproduit aussi dans l'Histoire du Collège<br />

<strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong>, dans laquelle l'écrivain nous dit <strong>à</strong> l'égard <strong>de</strong> l'année 1898, ce qui suit:<br />

«C'est â cette dévotion pour le très aimant Jésus, qu'on doit attribuer principalem<strong>en</strong>t,<br />

si la piété <strong>de</strong> mon esprit ne me trompe pas, le magnifique succès <strong>de</strong>s exam<strong>en</strong>s passés<br />

cette année <strong>de</strong>vant le jury officiel,<br />

huit<br />

exam<strong>en</strong>s beaucoup plus brillants que ceux passés ces<br />

ou dix <strong>de</strong>rnières années» '.<br />

Au sujet <strong>de</strong> la guérison <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux élèves gravem<strong>en</strong>t mala<strong>de</strong>s <strong>en</strong> 1899, le même<br />

écrivain nous dit que:<br />

«Relativem<strong>en</strong>t aux élèves il n'y a ri<strong>en</strong> digne <strong>de</strong> remarque, si ce n'est que <strong>de</strong>ux<br />

d'<strong>en</strong>tre eux, gravem<strong>en</strong>t mala<strong>de</strong>s, échappèr<strong>en</strong>t heureusem<strong>en</strong>t au danger, grâce <strong>à</strong> l'ai<strong>de</strong><br />

divine. L'un d'eux, attaqué d'une pneumonie, fut sauvé <strong>de</strong> la mort avec l'ai<strong>de</strong> du Cœur<br />

<strong>de</strong> Jésus, auquel on fit une neuvaine. L'autre, consumé par la phtisie, avait été abandonné<br />

par les mé<strong>de</strong>cins, mais <strong>à</strong> ce mom<strong>en</strong>t parut un autre mé<strong>de</strong>cin qui le r<strong>en</strong>dit <strong>à</strong> la<br />

vie, par le système électro-homéopathique!<br />

«S'il ne faut ri<strong>en</strong> nier <strong>de</strong> la sci<strong>en</strong>ce médicale, on doit cep<strong>en</strong>dant confesser qu'elle<br />

a été fortem<strong>en</strong>t aidée par la clém<strong>en</strong>ce du Cœur <strong>de</strong> Jésus et <strong>de</strong> la Vierge Immaculée, <strong>à</strong><br />

qui l'on<br />

doit principalem<strong>en</strong>t attribuer l'heureux résultat médical. Tout <strong>en</strong> omettant d'autres<br />

choses, le R. P. Recteur promit une fête sol<strong>en</strong>nelle <strong>à</strong> la Sainte Vierge. A cette fête<br />

assistèr<strong>en</strong>t les Nôtres, les élèves et le garçon lui-même avec sa famille, laquelle par<br />

une gran<strong>de</strong> aumône comp<strong>en</strong>sa largem<strong>en</strong>t toutes les dép<strong>en</strong>ses -».<br />

On faisait lire aux élèves les plus dévots, que d'après la piété <strong>de</strong> leurs familles on<br />

t<br />

p<strong>en</strong>sait pouvoir attirer au noviciat, une brochure <strong>de</strong> 120 pages, qui était la traduction<br />

portugaise <strong>de</strong> la publication du P. Jacques Terri<strong>en</strong>, <strong>de</strong> la Compagnie <strong>de</strong> Jésus, intitulée<br />

Que la Mort dans la Compagnie <strong>de</strong> Jésus est un gage certain <strong>de</strong> pré<strong>de</strong>stination.<br />

Nous connaissons plusieurs élèves <strong>de</strong> leurs collèges qui ont lu cette brochure, dont on<br />

a <strong>en</strong>core trouvé un grand nombre d'exemplaires dans la Résid<strong>en</strong>ce du Quelhas, après<br />

le départ <strong>de</strong>s jésuites. La brochure est un <strong>en</strong>tassem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s soi disant prophéties <strong>de</strong> plusieurs<br />

jésuites et d'autres individus, d'après lesquelles ceux qui meur<strong>en</strong>t dans la Compagnie<br />

vont tout droit au Ciel. Au chapitre VII on parle du fameux Fr. coadjuteur Pierre <strong>de</strong><br />

Basto, portugais, dont les prophéties au sujet <strong>de</strong> la politique du <strong>Portugal</strong> ont déj<strong>à</strong> été<br />

citées par nous dans la l. è époque <strong>de</strong> cette Histoire. Dans son livre le P. Terri<strong>en</strong> a<br />

suivi le même système <strong>de</strong> prophéties supposées, que nous avons trouvé plusieurs fois<br />

dans l'Histoire <strong>de</strong>s <strong>Jésuites</strong> <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>, prophéties faites pour tromper le faible<br />

cerveau<br />

<strong>de</strong>s g<strong>en</strong>s sans culture, du peuple et <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants. Et, <strong>en</strong> effet, <strong>en</strong> lisant maint<strong>en</strong>ant quelques<br />

unes d'<strong>en</strong>tre elles, on voit qu'elles sont d'une ineptie extraordinaire.<br />

Tandis que les jésuites donnai<strong>en</strong>t par la parole cette éducation fanatique et réactionnaire<br />

<strong>à</strong> leurs élèves, ils leur <strong>en</strong> donnai<strong>en</strong>t par l'exemple une autre égalem<strong>en</strong>t pernicieuse,<br />

car les jésuites, sachant que les lois du pays leur déf<strong>en</strong>dai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> rési<strong>de</strong>r et<br />

1<br />

Hist. Col. Comp. et JRésid, Lisb n p. 127.<br />

2 Ibi<strong>de</strong>m, p. 129.


57<br />

<strong>de</strong> faire la propagan<strong>de</strong> <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> et dans ses colonies, et leurs élèves et amis le sachant<br />

aussi, ils leur donnai<strong>en</strong>t l'exemple du mépris <strong>de</strong> cette loi et l'exemple <strong>de</strong> la<br />

dissimulation et du m<strong>en</strong>songe, lorsqu'ils étai<strong>en</strong>t officiellem<strong>en</strong>t interrogés <strong>à</strong> cet égard,<br />

ce que leurs élèves savai<strong>en</strong>t très bi<strong>en</strong>. A ce sujet les jésuites ne craignai<strong>en</strong>t pas d'<strong>en</strong>seigner<br />

<strong>à</strong> leurs élèves les idées exposées par eux dans le livre Proscrits (p. 119): «Il y a<br />

<strong>de</strong>s choses qui sont par nature au-<strong>de</strong>ssus ou eu <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> toute loi humaine, comme<br />

l'air, la lumière du soleil et les rapports <strong>de</strong>s âmes avec Dieu. <strong>Les</strong> lois qui restreign<strong>en</strong>t<br />

<strong>de</strong>s droits inaliénables ne sont pas <strong>de</strong>s lois et on ne leur doit donc pas obéissance, mais<br />

plutôt un complet oubli. C'est ce que faisai<strong>en</strong>t les jésuites aux décrets <strong>de</strong> Pombal et<br />

d'Aguiar».<br />

<strong>Les</strong> lois <strong>de</strong> la Suisse déf<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t aussi aux jésuite's <strong>de</strong> rési<strong>de</strong>r dans ce pays et d'y<br />

faire la propagan<strong>de</strong> ; donc on ne doit pas obéissance <strong>à</strong> ces lois, mais un complet oubli,<br />

d'après l'éducation <strong>de</strong>s jésuites. Il est utile que les Suisses et les peuples <strong>de</strong>s autres<br />

pays libéraux, comme la Suisse, sach<strong>en</strong>t cela!<br />

<strong>Les</strong> jésuites, suivant<br />

dans leurs collèges leur système bi<strong>en</strong> connu <strong>de</strong>s congrégations<br />

<strong>de</strong>s élèves, déj<strong>à</strong> initié avant l'extinction <strong>de</strong> la Compagnie, établir<strong>en</strong>t dans leurs<br />

<strong>de</strong>ux collèges, <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> et <strong>de</strong> St. Fidèle, la congrégation <strong>de</strong> la Sainte Vierge, poulies<br />

plus avancés, ainsi que d'autres, celles <strong>de</strong> St. Louis <strong>de</strong> Gonzague, <strong>de</strong> St. Stanislas,<br />

etc., pour les plus jeunes. Ils faisai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>trer dans ces congrégations les jeunes garçons<br />

<strong>de</strong>s familles les plus dévotes ou naturellem<strong>en</strong>t plus faciles <strong>à</strong> fanatiser, puis ils <strong>en</strong> recrutai<strong>en</strong>t,<br />

surtout les premiers temps, les futurs novices <strong>de</strong> leur Ordre et toujours leurs<br />

futurs amis, qui faisai<strong>en</strong>t au <strong>de</strong>hors la propagan<strong>de</strong> <strong>de</strong> leurs idées religieuses et même<br />

<strong>de</strong> leurs idées politiques, les <strong>de</strong>rniers temps.<br />

Car les jésuites, suivant danB les collèges le plan qu'ils exécutai<strong>en</strong>t au <strong>de</strong>hors,<br />

étai<strong>en</strong>t parv<strong>en</strong>us <strong>à</strong> faire <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants <strong>de</strong> 15 <strong>à</strong> 17 ans <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rniers cours <strong>de</strong>s Lycées, <strong>de</strong><br />

vrais politici<strong>en</strong>s, vu que pour ces <strong>en</strong>fants ils avai<strong>en</strong>t établi un c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> propagan<strong>de</strong><br />

royaliste, dont les statuts que j'ai <strong>de</strong>vant les yeux ont pour titre: Estatutos do C<strong>en</strong>tro<br />

da Propaganda Monârquica e Acçâo Social, fundada pur alunos do colégio <strong>de</strong> Maria<br />

Santissima Imaculada, cm Campoli<strong>de</strong>, em Marco <strong>de</strong> 1900 (Statuts du C<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> Propagan<strong>de</strong><br />

Koyaliste et Action Sociale, fondé par <strong>de</strong>s élèves du Collège <strong>de</strong> la Vierge Immaculée,<br />

<strong>à</strong> Campoli<strong>de</strong>, <strong>en</strong> mars 1909). La couverture est bleue et blanche, couleurs <strong>de</strong><br />

la monarchie portugaise déposée, et les armes du PDrtugal y sont liées <strong>à</strong> celles du<br />

Pape.<br />

Le but <strong>de</strong> cette Association était <strong>de</strong> «faire pénétrer dans le cœur <strong>de</strong> ses membres,<br />

propager et répandre parmi le peuple, l'amour <strong>de</strong> la religion, <strong>de</strong> la Patrie et du Roi»<br />

(art. 2). <strong>Les</strong> membres <strong>de</strong> l'Association étai<strong>en</strong>t d'anci<strong>en</strong>s et <strong>de</strong> nouveaux élèves d'une foi<br />

religieuse et royaliste reconnue, s'<strong>en</strong>gageant <strong>à</strong> obéir aux statuts <strong>de</strong> l'Association (art. 5).<br />

La direction <strong>de</strong> l'Association était composée <strong>de</strong> six membres effectifs du cours complém<strong>en</strong>taire<br />

' (art. 11), et il y avait un bureau <strong>à</strong> présid<strong>en</strong>ce honoraire, dont faisai<strong>en</strong>t partie<br />

le Directeur et le Sous-Directeur du Collège (art. 12).<br />

Voici le résultat <strong>de</strong> l'éducation jésuitique p<strong>en</strong>dant les <strong>de</strong>rnières années <strong>de</strong> la monarchie:<br />

— fon<strong>de</strong>r chez les <strong>en</strong>fants <strong>de</strong> quinze <strong>à</strong> seize ans une Association politique <strong>de</strong><br />

propagan<strong>de</strong> royaliste et religieuse, les supérieurs du collège, bi<strong>en</strong> <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du, t<strong>en</strong>ant toujours<br />

la queue <strong>de</strong> la poêle. Ils initiai<strong>en</strong>t ainsi les <strong>en</strong>fants dès le Collège <strong>à</strong> la politique<br />

qu'ils développai<strong>en</strong>t au <strong>de</strong>hors chez les adultes, ainsi que nous le verrons au chapitre<br />

suivant.<br />

1<br />

Ce cours compr<strong>en</strong>ait les <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rnières années <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>? <strong>de</strong>s Lycées.


—<br />

CHAPITRE QUATORZIEME<br />

Comm<strong>en</strong>t ils exerçai<strong>en</strong>t leur influ<strong>en</strong>ce sur les étudiants<br />

<strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> leurs collèges<br />

La pratique apprit aux jésuites que la plupart <strong>de</strong>s élèves, sortis <strong>de</strong> leurs collèges,<br />

surtout ceux qui allai<strong>en</strong>t fréqu<strong>en</strong>ter les cours supérieurs, perdai<strong>en</strong>t facilem<strong>en</strong>t les illusions<br />

<strong>de</strong> l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t religieux qu'ils avai<strong>en</strong>t reçu, <strong>en</strong> ayant reconnu la fausseté.<br />

<strong>Les</strong> Pères vir<strong>en</strong>t donc qu'il fallait continuer <strong>à</strong> exercer leur influ<strong>en</strong>ce sur l'esprit<br />

<strong>de</strong>s élèves,<br />

même après leur départ du collège.<br />

Ils se servir<strong>en</strong>t <strong>à</strong> cet effet <strong>de</strong>s élèves les plus dévots <strong>de</strong> leurs collèges, qui faisai<strong>en</strong>t<br />

partie <strong>de</strong>s Congrégations <strong>de</strong> la Sainte Vierge, <strong>de</strong> St. Louis, etc., et ceux-ci parvinr<strong>en</strong>t<br />

<strong>à</strong> établir <strong>de</strong>s congrégations id<strong>en</strong>tiques parmi les élèves <strong>de</strong>s cours supérieurs. Ceci se fit<br />

<strong>à</strong> Lisbonne et <strong>à</strong> Cohnbre, d'abord avec une certaine timidité, qui se dissipa peu <strong>à</strong> peu<br />

et se changea <strong>à</strong> la fin <strong>en</strong> une vraie hardiesse <strong>de</strong> manèges politiques.<br />

Le Père Ra<strong>de</strong>maker avait fondé d'abord <strong>à</strong> Lisbonne, <strong>en</strong> 1852, une Congrégation<br />

<strong>de</strong> la Sainte Vierge sous le titre <strong>de</strong> Légion Sacrée, composée d'élèves internes, d'élèves<br />

externes et môme d'élèves <strong>de</strong> différ<strong>en</strong>ts collèges '.<br />

Plus tard, <strong>en</strong> 1873, le Père Franco Sturzo établit <strong>à</strong> Corapoli<strong>de</strong> la séparation, <strong>en</strong> fondant<br />

une congrégation <strong>de</strong> la Sainte Vierge exclusivem<strong>en</strong>t pour les élèves externes 2 .<br />

Cette congrégation passa <strong>en</strong> 1897 <strong>à</strong> la Résid<strong>en</strong>ce du Quelhas, que l'on trouva plus<br />

c<strong>en</strong>trale. Nous avons l<strong>à</strong>-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong>s docum<strong>en</strong>ts très importants, tels que photographies,<br />

diplômes, livres <strong>de</strong> procès-verbaux, livres <strong>de</strong> consultations scolaires, beaucoup <strong>de</strong> lettres,<br />

etc.<br />

Afin que cette congrégation pût avoir un local spacieux pour réunions, confér<strong>en</strong>ces,<br />

etc., le Provincial, Louis Campo Santo. fit construire, au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> l'église <strong>de</strong> la résid<strong>en</strong>ce<br />

du Quelhas, une gran<strong>de</strong> salle<br />

dans toute sa longueur, ayant une tour très élevée,<br />

qui leur coûta 8.715^24, comme on le voit par le Résumé <strong>de</strong>s comptes <strong>de</strong> cette Résid<strong>en</strong>ce,<br />

<strong>de</strong> l'année -1900, somme prov<strong>en</strong>ant <strong>de</strong>s rev<strong>en</strong>us du M<strong>en</strong>sageiro do Coraç<strong>à</strong>o <strong>de</strong> Jésus<br />

(Messager du Cœur <strong>de</strong> Jésus), comme le dit l'Histoire <strong>de</strong> cette même résid<strong>en</strong>ce 4 et<br />

comme le confirme le. livre <strong>de</strong> Comptes <strong>de</strong> l'Int<strong>en</strong>dance <strong>de</strong> la Province avec le Messager.<br />

Le but <strong>de</strong> ces congrégations était <strong>de</strong> conserver l'amitié <strong>de</strong>s anci<strong>en</strong>s élèves <strong>de</strong> leurs<br />

collèges et <strong>de</strong> les t<strong>en</strong>ir sous leur dép<strong>en</strong>dance. Ceci est prouvé par plusieurs lettres <strong>de</strong>s<br />

Pères, se trouvant aux Archives Congréganistes, dont je transcrirai ici quelques passages.<br />

Le P. Le Thiec s ,<br />

directeur <strong>de</strong> cette Congrégation, écrivait:<br />

Quelhas : <strong>en</strong><br />

«Je suis très cont<strong>en</strong>t <strong>de</strong> Vasco Calvet; il a fait très sérieusem<strong>en</strong>t les exercices au<br />

disant du bi<strong>en</strong> <strong>de</strong> lui, je ne fais que payer ce qu'il fait pour moi. Si nous<br />

avions beaucoup d'anci<strong>en</strong>s élèves comme Vasco ! Je sais bi<strong>en</strong> qu'ils nous donn<strong>en</strong>t beaucoup<br />

<strong>de</strong> peine dans nos collèges, mais après ils sont nos vrais amis. . .<br />

«La Congrégation va <strong>de</strong> mieux <strong>en</strong> mieux, grâce <strong>à</strong> Dieu. Ils fréqu<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t beaucoup<br />

les Sacrem<strong>en</strong>ts et ils aim<strong>en</strong>t tous beaucoup le R. P. Provincial. Celui-ci dit même —<br />

car il les aime beaucoup aussi — que le 28 du mois <strong>de</strong>rnier avait été pour lui le plus<br />

1<br />

llist. Coll. Camp, et Ris. Lisb., p. 5 Legion<strong>à</strong>rio <strong>de</strong> Maria, revue m<strong>en</strong>suelle, année 1904, p. 51.<br />

2<br />

Leijionùiio <strong>de</strong> Maria, anné.e 1904, p. 93.<br />

3 Ibid, p. 91.<br />

llist. Coll. Camp, et Rés. Lisb. pp. 176 et 179.<br />

llist. Coll. Camp, et Rés. Lisb. p. 176.


59<br />

heureux jour <strong>de</strong> l'année. <strong>Les</strong> congréganistes ont fêté son anniversaire avec simplicité,<br />

mais <strong>de</strong> tout leur cœur, le matin au Quelhas et le soir chez les Petites Sœurs<br />

<strong>de</strong>s Pauvres».<br />

Le P. Joachim dos Santos Abranches. qui plus tard fut directeur <strong>de</strong> cette congrégation,<br />

écrivait quelques années après au P. Louis Cabrai, alors Recteur <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong>,<br />

le billet suivant: «Mon très cher et R. P. Recteur.— Ne me dites pas non. Le 17 courant<br />

nous <strong>de</strong>vons avoir <strong>de</strong> nouvelles confér<strong>en</strong>ces dans la gran<strong>de</strong> salle. Je crains que<br />

beaucoup <strong>de</strong> mon<strong>de</strong> ne manque <strong>à</strong> cause <strong>de</strong> Mr. Lages, qui a trompé l'att<strong>en</strong>te <strong>de</strong>s invités,<br />

auxquels j'avais annoncé <strong>de</strong>ux bons orateurs. Il a très mal agi. Maint<strong>en</strong>ant je veux<br />

annoncer dans l'invitation une confér<strong>en</strong>ce du R. P. Cabrai, Recteur <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong>. Ne me<br />

dites pas non, v<strong>en</strong>ez la faire, mais <strong>à</strong> condition (posée par le R. P. Provincial) <strong>de</strong> ne pas<br />

faire la moindre allusion <strong>à</strong> la matière dont s'est occupé le P. Fernan<strong>de</strong>s, afin que nous<br />

ne donnions pas <strong>à</strong> <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre qu'il y a <strong>de</strong>s mésintellig<strong>en</strong>ces et qu'il y a manque <strong>de</strong> charité.<br />

Le P. Fernan<strong>de</strong>s vi<strong>en</strong>dra assister. Sauvez-moi cette œuvre <strong>de</strong>s confér<strong>en</strong>ces, qui est bonne.<br />

Demain j'irai <strong>à</strong> Coïmbre: si ce n'était cela, je serais aujourd'hui près <strong>de</strong> vous pour faire<br />

la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> personnellem<strong>en</strong>t.= 1'. Joacl/im dos Santos Abranches m.<br />

La congrégation <strong>de</strong> la S. ,e Vierge pour les étudiants <strong>de</strong> l'Université s'est établie <strong>à</strong><br />

Coïmbre <strong>en</strong> mars 1871). Comme une loi portugaise <strong>de</strong> 1877 ordonnait aux étudiants qui finissai<strong>en</strong>t<br />

leur cours secondaire <strong>de</strong> faire leurs <strong>de</strong>rniers exam<strong>en</strong>s dans certains Lycées dénommés<br />

C<strong>en</strong>traux, les étudiants du Collège <strong>de</strong> St. Fidèle étai<strong>en</strong>t obligés d'aller passer leurs<br />

<strong>de</strong>rniers exam<strong>en</strong>s <strong>à</strong> Coïmbre où ils étai<strong>en</strong>t accompagnés <strong>de</strong> leurs professeurs. Ceux-ci<br />

y<br />

trouvèr<strong>en</strong>t d'anci<strong>en</strong>s Congréganistes <strong>de</strong> leurs Collèges et un professeur <strong>de</strong> Théologie,<br />

le Dr. Antoine S. Val<strong>en</strong>te, qui leur était très dévoué et qui fut plus tard archevêque <strong>de</strong><br />

Goa. Avec ces élém<strong>en</strong>ts il leur fut facile d'y établir une Congrégation <strong>de</strong> la S. t0 Vierge<br />

parmi les étudiants <strong>de</strong> l'Université. Des Pères y allai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> temps <strong>en</strong> temps, <strong>à</strong> l'occasion<br />

<strong>de</strong> fêtes religieuses, pour augm<strong>en</strong>ter la ferveur <strong>de</strong>s congréganistes '.<br />

En 188'i nous appr<strong>en</strong>ons que le Père Meli s'y r<strong>en</strong>dait. Plus tard les Instructeurs<br />

<strong>de</strong>s congréganistes fur<strong>en</strong>t les Pères Louis Cabrai, Antoine <strong>de</strong> M<strong>en</strong>oses, anci<strong>en</strong> étudiant<br />

<strong>de</strong> l'Université, et J. Abranches, anci<strong>en</strong> chanoine du siège épiscopal <strong>de</strong> cette ville. Avec<br />

les instructions <strong>de</strong> ces Pères, les congréganistes non seulem<strong>en</strong>t augm<strong>en</strong>tèr<strong>en</strong>t <strong>en</strong> nombre,<br />

mais <strong>en</strong>core ils prir<strong>en</strong>t ouvertem<strong>en</strong>t part <strong>à</strong> la politique du parti Nationaliste, et établir<strong>en</strong>t<br />

un c<strong>en</strong>tre politique sous le nom <strong>de</strong> «Association Académique <strong>de</strong> Démocratie Chréti<strong>en</strong>ne»,<br />

dont le Père Louis Cabrai, alors déj<strong>à</strong> Provincial <strong>de</strong> l'Ordre, fut élu membre honoraire,<br />

comme on peut le vérifier par le diplôme qui se trouve aux Archives Congréganistes.<br />

et dont la t<strong>en</strong>eur est la suivante:<br />

«C<strong>en</strong>tre Académique <strong>de</strong> Démocratie Chréti<strong>en</strong>ne <strong>de</strong> Coïmbre. — Le C<strong>en</strong>tre Académique<br />

<strong>de</strong> Démocratie Chréti<strong>en</strong>ne a résolu d'admettre comme membre honoraire le<br />

Rév. Père Louis Gonzague do Vale Coelho Pereira Cabrai et par suite lui a fait passer<br />

le prés<strong>en</strong>t diplôme <strong>en</strong> harmonie avec les statuts.<br />

Coïmbre, le 12 décembre 1909. = Le Présid<strong>en</strong>t, D. Joseph <strong>de</strong> Ltncastre= Le secrétaire,<br />

Ferdinand Emmanuel da Mota Cardoso».<br />

<strong>Les</strong> jésuites se servai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>core d'un autre moy<strong>en</strong> pour maint<strong>en</strong>ir leur influ<strong>en</strong>ce<br />

sur leurs anci<strong>en</strong>s élèves, c'étai<strong>en</strong>t les fêtes annueles appellées Fêtes <strong>de</strong>s anci<strong>en</strong>s élèves,<br />

1<br />

Ltgionârio <strong>de</strong> Maria, p. 284, 342 et 349.


60<br />

initiées le 8 décembre 1903, au Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong>, par le Recteur d'alors, le P. Louis<br />

Cabrai, anci<strong>en</strong> élève <strong>de</strong> ce collège. 11 fonda même <strong>à</strong> cet effet une Association <strong>de</strong>s anci<strong>en</strong>s<br />

élèves <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> avec les Statuts respectifs, dont le premier article dit que l'un<br />

<strong>de</strong>s buts <strong>de</strong> cette association est «d'affirmer hardim<strong>en</strong>t les principes <strong>de</strong> la saine éducacation<br />

qu'ils y avai<strong>en</strong>t reçue». Pour réaliser cette fête, on élisait chaque année une commission<br />

d'anci<strong>en</strong>s élèves, qui invitait les autres (parmi lesquels il y avait déj<strong>à</strong> quelques<br />

jésuites) <strong>à</strong> assister un certain jour, généralem<strong>en</strong>t le dimanche <strong>de</strong> Quasimodo, <strong>à</strong> une messe<br />

sol<strong>en</strong>nelle, qui <strong>de</strong>vait être suivie d'un dîner copieux payé par ces élèves <strong>à</strong> 1?>50 (7,50 fr.)<br />

par tête. On visitait, ce jour l<strong>à</strong>,<br />

les différ<strong>en</strong>tes dép<strong>en</strong>dances du collège, les élèves causai<strong>en</strong>t<br />

<strong>en</strong>tre eux et aux toasts, p<strong>en</strong>dant le dîner, ils manifestai<strong>en</strong>t leurs s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>ts jésuitiques.<br />

Après la fête on publiait chaque année un rapport dans la Revue annuelle Notre Collège,<br />

qui fut fondée <strong>à</strong> cet effet. On y faisait aussi une gran<strong>de</strong> propagan<strong>de</strong> du Collège et<br />

du jésuitisme, <strong>en</strong> publiant <strong>de</strong>s articles<br />

<strong>de</strong> quelques anci<strong>en</strong>s élèves, décrivant <strong>de</strong>s épiso<strong>de</strong>s<br />

<strong>de</strong> collégi<strong>en</strong>s avec l'éloge <strong>de</strong>s anci<strong>en</strong>s professeurs. On sait que c'étai<strong>en</strong>t les jésuites qui<br />

dirigeai<strong>en</strong>t ces réunions d'anci<strong>en</strong>s élèves, comme le prouve un grand nombre <strong>de</strong> docum<strong>en</strong>ts,<br />

parmi lesquels je transcrirai un passage d'une lettre adressée <strong>en</strong> mars <strong>1910</strong> par le Recteur<br />

<strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong>, le P. A. Barros, au Provincial le P. Louis Cabrai: «La réunion a eu<br />

lieu dans la salle, tout <strong>à</strong> fait <strong>en</strong> famille, et le P. Castello et moi nous avons dit ce que<br />

nous avions <strong>à</strong> dire, <strong>à</strong> savoir: remercier l'assistance d'être v<strong>en</strong>ue, lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r d'am<strong>en</strong>er<br />

beaucoup <strong>de</strong> mon<strong>de</strong> le 3 et <strong>de</strong> faire <strong>en</strong> sorte que d'autres sign<strong>en</strong>t <strong>de</strong> suite et non au <strong>de</strong>rnier<br />

mom<strong>en</strong>t; j'ai ajouté ce que V. R. oe dit dans sa lettre, <strong>en</strong> lisant le passage <strong>à</strong> l'égard<br />

<strong>de</strong>s anci<strong>en</strong>s qui <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t montrer leur amitié, etc., dans un mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> persécution comme<br />

celui-ci, etc.»<br />

<strong>Les</strong> jésuites cherchai<strong>en</strong>t toujours, quand ils le pouvai<strong>en</strong>t, <strong>à</strong> exercer leur influ<strong>en</strong>ce<br />

sur d'autres étudiants, <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> leurs anci<strong>en</strong>s élèves. Ils fondèr<strong>en</strong>t donc <strong>à</strong> cet effet,<br />

p<strong>en</strong>dant les<br />

<strong>de</strong>rnières années, <strong>de</strong>s congrégations <strong>de</strong> Notrj Dame, <strong>de</strong> St. Louis et St. Jean<br />

Berchmans, <strong>en</strong>tre les étudiants <strong>de</strong>s lycées <strong>de</strong> Braga et <strong>de</strong> Viana do Castelo, villes <strong>de</strong><br />

la Province du Minho, qui est la plus réactionnaire, et celle où les jésuites avai<strong>en</strong>t<br />

obt<strong>en</strong>u une plus gran<strong>de</strong> prépondérance. ' D'après ce que l'on vi<strong>en</strong>t <strong>de</strong> voir, on peut<br />

compr<strong>en</strong>dre quels étai<strong>en</strong>t les procédés dont se servai<strong>en</strong>t les jésuites pour dominer leurs<br />

anci<strong>en</strong>s élèves et les étudiants d'autres instituts, <strong>en</strong> cherchant <strong>à</strong> les maint<strong>en</strong>ir dans leurs<br />

idées religieuses, sociales et politiques.<br />

CHAPITRE QUINZIÈME<br />

Comm<strong>en</strong>t ils exerçai<strong>en</strong>t leur influ<strong>en</strong>ce sur le Clergé<br />

Lorsque Ra<strong>de</strong>maker vint <strong>de</strong> Turin <strong>en</strong> 1848, forcé par la révolution du Piémont <strong>à</strong><br />

sortir du noviciat <strong>de</strong> Chieri, il fut attaché au Bureau du Nonce <strong>à</strong> Lisbonne. En cette<br />

qualité il comm<strong>en</strong>ça <strong>à</strong> se consacrer <strong>à</strong> l'étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la théologie pour recevoir la prêtrise,<br />

comme nous l'avons vu au premier chapitre, et chanta sa première messe le 29 octobre 1851<br />

dans l'église <strong>de</strong>s Inglezinhos, <strong>de</strong>vant une gran<strong>de</strong> assistance aristocratique et <strong>en</strong> prés<strong>en</strong>oe<br />

du Nonce, Camille <strong>de</strong> Pietro, et <strong>de</strong> l'archevêque <strong>de</strong> Mytilène, plus tard Cardinal<br />

Patriarche <strong>de</strong> Lisbonne, Emmanuel B<strong>en</strong>oît Rodriguès. Depuis lors, Ra<strong>de</strong>maker eut<br />

toujours <strong>de</strong> son côté l'ai<strong>de</strong> <strong>de</strong>s Nonces et <strong>de</strong>s Patriarches <strong>de</strong> Lisbonne. 11 <strong>en</strong> arriva <strong>de</strong><br />

même <strong>à</strong> ses successeurs, comme on le voit par l'Histoire du Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> et <strong>de</strong><br />

1<br />

Catalogus Provinciae Luzitanae. Soc. Jesu, année <strong>1910</strong>, pp. 21 et 28.


Gl<br />

la Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> Lisbonne, Rue du Quelhas n.° 6, et par le Diârio (Journal) <strong>de</strong> la<br />

même Résid<strong>en</strong>ce, dans lequel on parle <strong>de</strong>s fréqu<strong>en</strong>tes visites <strong>de</strong>s Nonces, qui p<strong>en</strong>dant bi<strong>en</strong><br />

<strong>de</strong>s années <strong>de</strong>meurèr<strong>en</strong>t dans la même Rue du Quelhas au numéro 36. Ce Journal nous<br />

dit que certains Nonces avai<strong>en</strong>t même pour confesseurs <strong>de</strong>s Pères jésuites. Par l'influ<strong>en</strong>ce<br />

<strong>de</strong>s Nonces et <strong>de</strong>s Patriarches <strong>de</strong> Lisbonne il fut facile aux jésuites <strong>de</strong> s'attirer la<br />

bi<strong>en</strong>veillance <strong>de</strong>s Evoques portugais. D'abord ils <strong>en</strong> trouvèr<strong>en</strong>t quelques uns qui ne leur<br />

fur<strong>en</strong>t pas attachés, comme par exemple l'Evêque <strong>de</strong> Guarda, celui <strong>de</strong> Viseu et d'autres.<br />

Mais ils s'adoucir<strong>en</strong>t peu <strong>à</strong> peu, et ceux qui mourai<strong>en</strong>t étai<strong>en</strong>t remplacés par <strong>de</strong>s amis<br />

<strong>de</strong> la Compagnie. <strong>Les</strong> jésuites<br />

eux-mêmes donnai<strong>en</strong>t les r<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>ts nécessaires pour<br />

l'asc<strong>en</strong>sion <strong>à</strong> l'Episcopat, comme le prouv<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s copies <strong>de</strong> ces r<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>ts et plusieurs<br />

lettres se rapportant <strong>à</strong> ce sujet, trouvées dans les papiers <strong>de</strong>s jésuites.<br />

Ayant pour eux les Évêques il leur fut facile d'exercer leur influ<strong>en</strong>ce sur le Clergé<br />

séculier. Ils comm<strong>en</strong>cèr<strong>en</strong>t par donner les exercices spirituels <strong>à</strong> quelques prêtres, au<br />

Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong>. Il y a <strong>de</strong>s docum<strong>en</strong>ts qui attest<strong>en</strong>t que ce fait se produisit <strong>à</strong> partir<br />

<strong>de</strong> l'année 1869. Mais <strong>de</strong>puis 1888 nous avons la liste complète <strong>de</strong>s prêtres séculiers<br />

qui faisai<strong>en</strong>t annuellem<strong>en</strong>t les exercices spirituels dans ce collège et on a même gardé<br />

quelques groupes photographiques <strong>de</strong> ces prêtres, parmi lesquels<br />

on voit <strong>de</strong>s chanoines,<br />

<strong>de</strong>s recteurs <strong>de</strong> séminaires et même <strong>de</strong>s Evêques. On alla jusqu'<strong>à</strong> fon<strong>de</strong>r V Association<br />

<strong>de</strong>s Exercices Spirituels du Clergé avec Statuts approuvés et recommandés par lettres<br />

épiscopales, dans l'une <strong>de</strong>squelles on lit :<br />

«Mais nous voulons <strong>en</strong>core vous rappeler que nous avons toujours pris <strong>en</strong> gran<strong>de</strong><br />

considération les prét<strong>en</strong>tions <strong>de</strong>s membres qui ont fait les exercices. . . » (Statuts <strong>de</strong> Lisbonne,<br />

p. 8).<br />

Et dans une Provision du Patriarche <strong>de</strong> Lisbonne <strong>en</strong> 1906, il ordonne <strong>à</strong> tous les<br />

prêtres <strong>de</strong> faire annuellem<strong>en</strong>t les exercices spirituels et dit:<br />

«... qu'il ne peut pas approuver la conduite <strong>de</strong> ceux qui cherch<strong>en</strong>t <strong>à</strong> s'esquiver <strong>à</strong><br />

cet ordre» (p. 4).<br />

Par ces paroles <strong>de</strong>s lettres <strong>de</strong>s Évêques on compr<strong>en</strong>d que les prêtres séculiers qui<br />

ne fréqu<strong>en</strong>tai<strong>en</strong>t pas ces exercices et par conséqu<strong>en</strong>t ne se montrai<strong>en</strong>t pas attachés aux<br />

jésuites, ne pouvai<strong>en</strong>t trouver <strong>de</strong> bi<strong>en</strong>veillance épiscopale pour leurs prét<strong>en</strong>tions. De l<strong>à</strong> le<br />

besoin qu'ils ress<strong>en</strong>tai<strong>en</strong>t tous <strong>de</strong> se montrer attachés aux jésuites. Ceux-ci étai<strong>en</strong>t même<br />

<strong>de</strong>v<strong>en</strong>us, <strong>de</strong>puis un certain temps, les confesseurs et les Pères Spirituels <strong>de</strong>s Séminaires;<br />

et on peut dire que les <strong>de</strong>rniers temps ils l'étai<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> toutes ces maisons, <strong>à</strong> <strong>en</strong><br />

juger par la lecture <strong>de</strong> leurs catalogues annuels et <strong>de</strong> l'Histoire <strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce du Quelhas 4 .<br />

Comme les jésuites <strong>de</strong>puis 1901 étai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>trés ouvertem<strong>en</strong>t dans la politique <strong>de</strong>s<br />

partis, <strong>en</strong>courageant et inspirant le parti politique appelé Nationaliste, ils cherchèr<strong>en</strong>t<br />

aussi dans leurs confér<strong>en</strong>ces et exercices spirituels <strong>à</strong> r<strong>en</strong>dre le Clergé sectaire <strong>de</strong> ce<br />

parti: on sait par un grand nombre <strong>de</strong> lettres qu'ils y réussir<strong>en</strong>t. Ces lettres se trouv<strong>en</strong>t<br />

aux Archives Congréganistes et nous ne reproduirons ici qu'un passage <strong>de</strong> l'une d'elles,<br />

adressée par le P. Balazeiro au P. Azevedo, tous <strong>de</strong>ux jésuites, et datée du Quelhas, le<br />

4 août <strong>1910</strong>:<br />

«L'après-midi (le 3) le P. Abranches arriva et raconta <strong>de</strong>s choses intéressantes. Il<br />

v<strong>en</strong>ait <strong>de</strong> Lamego. où il avait donné les exercices. . .<br />

«Le <strong>de</strong>rnier jour d'exercices Monseigneur l'Evêque porta un toast: puis un prêtre<br />

qui, parait-il, Ht quelques déclarations politiques, lesquelles ne plur<strong>en</strong>t pas <strong>à</strong> ses confrères,<br />

ïmsuite le prieur <strong>de</strong> Poiares (Nationaliste) se leva et dit : maint<strong>en</strong>ant que nous sommes<br />

<strong>en</strong>flammés <strong>de</strong> l'amour <strong>de</strong> Dieu et <strong>de</strong>s âmes, qu'allons-nous faire? Nous allons faire<br />

i<br />

Hitt. Coll. Camp, et lié*. Lisb., p. 177.


62<br />

<strong>de</strong> la politique, oui la politique du Pater Noster. «Que votre nom soit sanctifié» est le<br />

<strong>de</strong>rnier but et l'ess<strong>en</strong>tiel; que votre règne arrive est le but direct et secondaire. Continuant<br />

ainsi il dit. mais ces hommes qui nous gouvern<strong>en</strong>t ne veul<strong>en</strong>t pas que Jésus-<br />

Christ règne sur nous: ils le chass<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s écoles, <strong>de</strong>s lois, <strong>de</strong>s cimetières. . . le prêtre n'a<br />

personne pour le déf<strong>en</strong>dre. . . Il faut faire aller au Parlem<strong>en</strong>t beaucoup <strong>de</strong> Pinheiros Torres<br />

4 (applaudissem<strong>en</strong>ts prolongés . . .). Il y a un parti dont le drapeau est sans tache. . .<br />

approuvé par <strong>de</strong>ux Pontifes. . . par notre Prélat (j'approuve tout ce qui est bon, dit, <strong>en</strong><br />

aparté, Son Excell<strong>en</strong>ce, d'un air contrarié. . .) Ce parti est le parti Nationaliste (applaudissem<strong>en</strong>ts<br />

frénétiques...). Notre Évêque l'interrompt <strong>en</strong> disant: «C'est bi<strong>en</strong>, assez».<br />

Et il se lève <strong>en</strong> déclarant que le souper est terminé».<br />

CHAPITRE SEIZIEME<br />

Comm<strong>en</strong>t ils exerçai<strong>en</strong>t leur influ<strong>en</strong>ce sur les femmes<br />

Antérieurem<strong>en</strong>t <strong>à</strong> l'époque où le P. Ra<strong>de</strong>maker rétablit <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> la Compagnie<br />

<strong>de</strong> Jésus il y avait au Couv<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s Salési<strong>en</strong>nes une Congrégation composée <strong>de</strong> dames<br />

et <strong>de</strong> jeunes filles et qui avait pour titre Chœurs <strong>de</strong>s Anges et c'était dans ce couv<strong>en</strong>t que<br />

l'on élevait les jeunes filles <strong>de</strong> l'aristocratie religieuse.<br />

Aussitôt que Ra<strong>de</strong>maker eut initié la restauration <strong>de</strong> la Compagnie <strong>de</strong> Jésus il<br />

p<strong>en</strong>sa <strong>à</strong> se servir <strong>de</strong> ces dames pour parv<strong>en</strong>ir <strong>à</strong> son but. Ainsi <strong>en</strong> 1864 il était déj<strong>à</strong><br />

Directeur <strong>de</strong> cette Association érigée dans le Couv<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la Visitation 2 . Par le Journal<br />

<strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce du Quelhas nous voyons qu'<strong>à</strong> partir <strong>de</strong> 1865 le P. Fulconis, Supérieur<br />

<strong>de</strong> cette Résid<strong>en</strong>ce et le P. Ra<strong>de</strong>maker qui l'habitait aussi, y avai<strong>en</strong>t établi <strong>de</strong>ux<br />

congrégations <strong>de</strong> dames. Celle que le P. Fulconis dirigeait, se composait surtout <strong>de</strong><br />

dames <strong>de</strong> l'aristocratie, dont le but était d'obt<strong>en</strong>ir <strong>de</strong>s ornem<strong>en</strong>ts pour les églises ; celle<br />

qui était dirigée par le P. Ra<strong>de</strong>maker compr<strong>en</strong>ait principalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s dames <strong>de</strong> la bourgeoisie<br />

se consacrant surtout <strong>à</strong> faciliter l'<strong>en</strong>trée <strong>de</strong>s jeunes filles pauvres dans les écoles<br />

congréganistes ou religieuses, qui comm<strong>en</strong>çai<strong>en</strong>t alors <strong>à</strong> se développer 3 . D'après ce que<br />

nous dit le même Journal, le P. Bernardin Monteiro, aussi <strong>de</strong> la même Résid<strong>en</strong>ce, était<br />

l'instructeur d'une autre congrégation <strong>de</strong> dames, qui se réunissai<strong>en</strong>t dans une chapelle<br />

<strong>de</strong> la Rue do Passadiço. Plus tard d'autres congrégations <strong>de</strong> dames fur<strong>en</strong>t fondées par<br />

les jésuites, surtout dans les collèges <strong>de</strong>s Sœurs Dorothées 1 . De 1900 <strong>à</strong> 1906 on fonda<br />

72 <strong>de</strong> ces congrégations féminines î; . Nous possédons <strong>de</strong>s prospectus <strong>de</strong> ces congrégations<br />

ainsi que <strong>de</strong>s livres cont<strong>en</strong>ant les procès-verbaux <strong>de</strong> leurs séances.<br />

<strong>Les</strong> femmes du peuple étai<strong>en</strong>t surtout attirées, par les jésuites, au moy<strong>en</strong> <strong>de</strong> missions,<br />

dont la propagan<strong>de</strong> <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> e3t due <strong>en</strong> gran<strong>de</strong> partie au P. Louis Prosperi<br />

qui fit connaître dans tout le pays l'Apostolat <strong>de</strong> la Prière, ce que nous démontrerons<br />

au chapitre suivant.<br />

Toutes ces congrégations féminines ainsi que les zélatrices <strong>de</strong> l'Apostolat <strong>de</strong> la<br />

Prière avai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s rubans <strong>de</strong> différ<strong>en</strong>tes dim<strong>en</strong>sions et <strong>de</strong> différ<strong>en</strong>tes couleurs, <strong>de</strong>s ornem<strong>en</strong>ts<br />

et <strong>de</strong>s insignes que les membres portai<strong>en</strong>t d'après leur dignité et leur gra<strong>de</strong>.<br />

Tout cela flattait la vanité <strong>de</strong> ces dames et stimulait leur zèle pour la propagan<strong>de</strong> jésui-<br />

1<br />

Mr. Plnheiro Torres était alors député du parti Nationaliste au Parlem<strong>en</strong>t portugais.<br />

2 Hist. Coll. Camp, et Rés. Litb., pp. 48 et 154.<br />

3<br />

M<strong>en</strong>sayeiro <strong>de</strong> Maria (Messager <strong>de</strong> Marie), <strong>1910</strong>, pp. 154, 204 et 343.<br />

4<br />

Legionârio <strong>de</strong> Maria, 1904, pp. 289, 291 et 325.<br />

5<br />

Manual das Congreçjaçôes das Filhas <strong>de</strong> Maria, 1907, p. 45.


63<br />

tique. <strong>Les</strong> docum<strong>en</strong>ts gardés aux Archives Congréganistes prouv<strong>en</strong>t d'une<br />

manière évid<strong>en</strong>te<br />

que l'élém<strong>en</strong>t féminin fut l'instrum<strong>en</strong>t dont les jésuites se servir<strong>en</strong>t pour obt<strong>en</strong>ir<br />

<strong>de</strong> l'arg<strong>en</strong>t et pour s'introduire dans certains milieux. 'L'Histoire du Collège <strong>de</strong> Campo-<br />

U<strong>de</strong> et <strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> Lisbonne <strong>en</strong> est une preuve exubérante *. Dans le Journal<br />

<strong>de</strong> cette Résid<strong>en</strong>ce on trouve une note <strong>de</strong>s fréqu<strong>en</strong>tes visites que plusieurs dames,<br />

les <strong>de</strong>rniers temps même les dames <strong>de</strong> la Cour, faisai<strong>en</strong>t <strong>à</strong> cette maison, où le Provincial<br />

résida jusqu'<strong>en</strong> 1908. C'est l<strong>à</strong> aussi que se trouvait la rédaction du Messager du<br />

Cœur <strong>de</strong> Jésus, inspirateur politique du parti Nationaliste.<br />

Quelques Pères jésuites <strong>de</strong> ceux qui se sont le plus distingués dans la propagan<strong>de</strong><br />

politique, jugèr<strong>en</strong>t très important <strong>de</strong> se trouver <strong>en</strong> rapports constants avec les dames,<br />

<strong>en</strong> longues confessions, conversations fréqu<strong>en</strong>tes et prolongées et correspondance épistolaire<br />

très minutieuse et s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>tale. L'un d'eux était le P. Santos Abranches, Directeur<br />

<strong>de</strong> plusieurs congrégations et qui dans le Messager soutint que l'on était par <strong>de</strong>voir <strong>de</strong><br />

consci<strong>en</strong>ce obligé d'<strong>en</strong>trer dans le parti Nationaliste-. Voici ce qu'écrivit <strong>à</strong> son égard le<br />

P. Antoine M. Guerra, Supérieur <strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> Porto au P. Joachirn Campo<br />

Santo, qui, <strong>à</strong> cette époque, était l'Instructeur <strong>de</strong>s Pères <strong>de</strong> la Troisième Probation au<br />

Barro, parmi lesquels se trouvait alors ce Père Abranches :<br />

«Rév. Père <strong>en</strong> C.— Confid<strong>en</strong>tiel.— En écrivant celle-ci la plume tremble dans la<br />

main et cep<strong>en</strong>dant je ne sais quelle force m'oblige <strong>à</strong> l'écrire. Je comm<strong>en</strong>ce par <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r<br />

pardon <strong>de</strong> ma hardiesse <strong>à</strong> Votre R. ce dans l'assurance que cela ne me sera pas<br />

refusé, vu l'int<strong>en</strong>tion pure et même le sacrifice qui la dict<strong>en</strong>t. Notre Seigneur a visiblem<strong>en</strong>t<br />

choisi V. R. e " pour instructeur <strong>de</strong> la 3 e année et c'est comme tel que je m'adresse<br />

<strong>à</strong> V. ,R. ce pour lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r une grâce (ceci est mon mérite). On remarque chez les<br />

nôtres un p<strong>en</strong>chant marqué pour donner trop <strong>de</strong> liberté<br />

aux femmes (vulgairem<strong>en</strong>t dites<br />

bigotes). Ce sont lettres sur lettres aux petites saintes, et si elles n'écriv<strong>en</strong>t pas autant<br />

qu'ils le désir<strong>en</strong>t ils cherch<strong>en</strong>t (<strong>en</strong>core par troisièmes personnes) d'autres bigotes afin <strong>de</strong> savoir<br />

pourquoi elles n'écriv<strong>en</strong>t pas et s'<strong>en</strong> plaign<strong>en</strong>t! Mais quelles lettres, mon Dieu! quelles<br />

bagatelles! quelles phrases maniérées! quelles s<strong>en</strong>sibleries — réciproquem<strong>en</strong>t. Ce sont<br />

!<br />

visites au salon, visites chaque jour et visites éternelles. Si le Supérieur veut imposer<br />

la modération c'est un méfiant, un insupportable, etc. Ce sont je ne sais combi<strong>en</strong> <strong>de</strong><br />

confessions par semaine pour leurs petites saintes, et <strong>de</strong>s confessions interminables ! Et<br />

<strong>à</strong> peine sorties du confessionnal, voil<strong>à</strong> qu'elles y retourn<strong>en</strong>t <strong>en</strong>core et <strong>en</strong>core!<br />

Et tout ceci<br />

(visites et confessions) avec assez <strong>de</strong> scandale! Puis — V. R. ce sait ce que sont les femmes,<br />

si l'une reste une heure, l'autre veut rester <strong>de</strong>ux heures, si l'une vi<strong>en</strong>t trois fois au<br />

salon, l'autre veut y v<strong>en</strong>ir six fois, si l'une est chérie, l'autre veut être petite chérie —<br />

<strong>en</strong>fin — une calamité! Et ceci n'est pas l'un ou l'autre, c'est une misère assez commune.<br />

Il y a peu <strong>de</strong> temps <strong>en</strong>core un Père très sérieux et très distingué m'a découvert ses s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>ts<br />

et raconté <strong>de</strong>s cas très ridicules (pour ne pas dire autre chose) qui se produis<strong>en</strong>t<br />

<strong>en</strong> maint <strong>en</strong>droit; on les change (déj<strong>à</strong> tard et trop tard!) mais qu'importe, si eux,<br />

ils ne chang<strong>en</strong>t pas ! Et cela se voit même chez <strong>de</strong>s Pères très sérieux et très dignes ;<br />

j'indique, par exemple, <strong>à</strong> V. R. ce le Père Abranches — (et c'est <strong>de</strong> le savoir l<strong>à</strong> que je<br />

me suis décidé <strong>à</strong> écrire cette lettre; — comme V. R. ce le sait c'est un Père très sérieux,<br />

très digne, très vertueux, mais dans cette question <strong>de</strong> confessions, lettres et visites<br />

c'est un désastre comme tant d'autres. Il a été ici une année, on m'avait dit qu'il<br />

était<br />

bon, mais très adonné aux fuîmes. Je n'<strong>en</strong> ai ri<strong>en</strong> cru, mais l'expéri<strong>en</strong>ce m'a appris<br />

qu'il n'y avait pas d'exagération. Il se trouvait ici p<strong>en</strong>dant le <strong>de</strong>rnier Carême, les lettres<br />

1<br />

Hitt. Coll. Camp, et liés. Liai-, p. 9.<br />

2 Mtnaaijexro do Coraç<strong>à</strong>o <strong>de</strong> Jesut, 1909, pp. 307 <strong>à</strong> 312:


64<br />

v<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t et je les lui remettais, — puis il <strong>en</strong> est arrivée une remplie <strong>de</strong> banalités: que<br />

la retraite avait été faite par les P. P. . . et que ce n'étai<strong>en</strong>t que <strong>de</strong>s niaiseries... quelle<br />

différ<strong>en</strong>ce avec celle <strong>de</strong> l'année précéd<strong>en</strong>te (faite par lui). . . etc., etc., et qu'elle était<br />

allée <strong>à</strong> l'Opéra (St. Charles), (p<strong>en</strong>dant le Carême, une fille <strong>de</strong> Marie!) et tout cela dilué<br />

<strong>en</strong> <strong>de</strong> longues pages. J'étais écœuré, je l'ai déchirée <strong>en</strong> mille morceaux et je l'ai jetée<br />

au panier ', mais quelques jours après on <strong>en</strong> recevait une autre do la même, mais recommandée<br />

—• disant qu'elle avait su par une telle . . . (voici <strong>à</strong> quoi serv<strong>en</strong>t les troisièmes<br />

personnes bigotes) qu'il s'était plaint (ou quelque chose dans ce g<strong>en</strong>re) <strong>de</strong> n'avoir pas<br />

reçu <strong>de</strong> ses nouvelles, mais qu'elle lui avait écrit lui disant, etc., etc., etc., et se montrant<br />

très affligée (avec raison) <strong>de</strong> ce que la lettre se fut égarée, etc., etc., etc.).<br />

«C'est toujours cela: si elles n'écriv<strong>en</strong>t pas, on insiste pour qu'elles écriv<strong>en</strong>t, et,<br />

pour que les supérieurs l'ignor<strong>en</strong>t, on se sert <strong>de</strong> troisièmes personnes.<br />

«Pour le travail il <strong>en</strong> est <strong>de</strong> même: ce sont les p<strong>en</strong>sionnats <strong>de</strong> jeunes filles riches<br />

qui les intéress<strong>en</strong>t (ils ne veul<strong>en</strong>t pas s'occuper <strong>de</strong>s pauvres et <strong>de</strong>s humbles, c'est un<br />

travail sans fruit et sans portée, dis<strong>en</strong>t-ils,— ceci je l'ai <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du). A une instruction ou<br />

sermon on dit: Je vi<strong>en</strong>drais volontiers. . . je ferais. . . je serais prêt. . . puis — c'est évid<strong>en</strong>t<br />

— la Supérieure <strong>de</strong>man<strong>de</strong> ; si le Supérieur accor<strong>de</strong>, tout est dit, sinon, voil<strong>à</strong> les<br />

contradictions et l'odieux sur le Supérieur. Combi<strong>en</strong> <strong>de</strong> cas comme celui-ci. Je crois que<br />

si au lieu d'une lettre je pouvais dans un <strong>en</strong>treti<strong>en</strong> parler <strong>à</strong> cœur ouvert avec V. R. ce ,<br />

je dirais bi<strong>en</strong> <strong>de</strong>s choses. Et même par lettre, si je <strong>de</strong>sc<strong>en</strong>ds <strong>à</strong> citer <strong>de</strong>s personnes et <strong>de</strong>s<br />

choses c'est parce que j'espère <strong>en</strong>voyer celle-ci par main propre. Que votre R. ce ne croie<br />

pas que j'aie du ress<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t contre le P. Abranches, non, je l'estime et j'apprécie beaucoup<br />

ses vertus et ses belles qualités, mais si V. R. ce pouvait lui <strong>en</strong>lever son p<strong>en</strong>chant<br />

pour les femmes, il vaudrait le double».<br />

Au moy<strong>en</strong> <strong>de</strong> ces confessions et <strong>de</strong> ces visites- prolongées les jésuites connaissai<strong>en</strong>t<br />

non seulem<strong>en</strong>t la vie et les péchés <strong>de</strong> leurs pénit<strong>en</strong>tes, mais aussi ceux <strong>de</strong> leurs par<strong>en</strong>ts,<br />

amis et connaissances. <strong>Les</strong> femmes ignorantes et oisives aimant <strong>à</strong> parler <strong>de</strong>s faits et<br />

gestes d'autrui, les Pères qu'elles fréqu<strong>en</strong>tai<strong>en</strong>t cherchai<strong>en</strong>t <strong>à</strong> obt<strong>en</strong>ir d'elles <strong>de</strong>s détails<br />

dont ils pourrai<strong>en</strong>t profiter. Il y a bi<strong>en</strong> <strong>de</strong>s docum<strong>en</strong>ts pour prouver cette assertion.<br />

Dans le Jubilé du Collège du Barro on lit la lettre d'un Père qui <strong>à</strong> propos <strong>de</strong> la confession<br />

d'une vieille femme dit : «j'étais pressé mais il paraît qu'elle ne l'était pas du tout,<br />

car elle se mit <strong>à</strong> me raconter sa vie et. . . celle <strong>de</strong>s autres» *. Parmi les papiers <strong>de</strong>s<br />

jésuites on trouva <strong>de</strong>ux récits manuscrits, gardés par un Père confesseur, l'un écrit par<br />

une élève d'une institution <strong>de</strong> religieuses, l'autre par une religieuse. L'une et l'autre font<br />

leur confession par écrit. L'élève, <strong>à</strong> propos <strong>de</strong> sa confession, raconte la vie <strong>de</strong> son père<br />

et <strong>de</strong> sa mère, et par l<strong>à</strong> elle appr<strong>en</strong>d <strong>à</strong> son confesseur qu'elle est la fille naturelle d'un<br />

homme qui avait acheté son haut titre <strong>de</strong> noblesse et que sa mère, femme <strong>de</strong> basse condition,<br />

était fort méprisée par son orgueilleux père. Nous ne savons pas ce que nous<br />

<strong>de</strong>vons blâmer davantage chez les jésuites: <strong>de</strong> cons<strong>en</strong>tir ou <strong>de</strong> provoquer <strong>de</strong> pareilles<br />

confessions écrites, ou <strong>de</strong> les gar<strong>de</strong>r pour <strong>de</strong> prochaines lectures.<br />

Par le Journal <strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce du Quelhas et par d'autres docum<strong>en</strong>ts nous savons<br />

que les jésuites avai<strong>en</strong>t beaucoup <strong>de</strong> pénit<strong>en</strong>tes parmi les dames <strong>de</strong> l'aiistocratie et<br />

même <strong>de</strong> la Cour.<br />

1<br />

Le Supérieur a agi dans ee cas d'après la Règle 39 du Sommaire <strong>de</strong>s Constitutions qui établit<br />

que le Supérieur pourra remettre ou non les lettres adressées <strong>à</strong> ses sujets selon ce qu'il p<strong>en</strong>sera<br />

dans le Seigneur: «qui eas (lifteras) lectas red<strong>de</strong>t, aut non red<strong>de</strong>t illi, ad quem sunt <strong>de</strong>stinatae<br />

prout in Domino expedire ad majus ipsius bonum et Dei gloriam existimabit».<br />

? Jubilé du Collège, du Barro, \>. 174.


G5<br />

C'est au moy<strong>en</strong> <strong>de</strong> ces dames que la réaction avait <strong>en</strong>vahi le Palais Royal, comme<br />

l'a avoué publiquem<strong>en</strong>t au Parlem<strong>en</strong>t Mr. Ferreira do Amaral, alors Présid<strong>en</strong>t du Ministère<br />

du <strong>de</strong>rnier Roi portugais. <strong>Les</strong> lettres que noua possédons et qui prouv<strong>en</strong>t ce fait<br />

sont très nombreuses. J'<strong>en</strong> transcrirai quelques passages plus intéressants. A propos <strong>de</strong><br />

la statue que l'on doit élever au Marquis <strong>de</strong> Pombal <strong>à</strong> Lisbonne, <strong>à</strong> la Roton<strong>de</strong> <strong>de</strong> l'Av<strong>en</strong>ue<br />

<strong>de</strong> la Liberté, le P. Antoine Vaz, <strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce du Quelhas, écrivait le 5 mai 1905<br />

au jésuite P. Louis d'Almeida, <strong>de</strong> la famille <strong>de</strong>s Comtes <strong>de</strong> Lavradio, ce qui suit: «Comme<br />

votre R. ce le sait, les francs-maçons veul<strong>en</strong>t inaugurer ou ouvrir le 8 courant la souscription<br />

pour le monum<strong>en</strong>t au Marquis <strong>de</strong> Pombal. Ils voulai<strong>en</strong>t que Leurs Majestés<br />

fuss<strong>en</strong>t les premiers souscripteurs; mais heureusem<strong>en</strong>t quelques filles <strong>de</strong> Marie — Dames<br />

du Palais — ont déj<strong>à</strong> prév<strong>en</strong>u les Reines et les Princes. Quelques unes <strong>de</strong> ces dames ont<br />

p<strong>en</strong>sé que le moy<strong>en</strong> le plus efficace pour inutiliser les efforts <strong>de</strong>s francs-maçons serait<br />

une protestation publique <strong>de</strong> la famille Pombal contre l'usurpation d'un <strong>de</strong> leurs asc<strong>en</strong>dants<br />

comme bannière contre la religion et comme contre-protestation au monum<strong>en</strong>t <strong>de</strong><br />

l'Immaculée<br />

Conception.<br />

«Quelques dames sont même choquées du sil<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> la famille Pombal, et certaine<br />

dame <strong>de</strong>s plus nobles alla même jusqu'<strong>à</strong> dire : «.Si cela se passait avec un membre <strong>de</strong><br />

ma famille, moi et les mi<strong>en</strong>s nous serions les premiers <strong>à</strong> protester et <strong>à</strong> répudier ces<br />

manifestations<br />

maçonniques.»<br />

«Sa protestation <strong>de</strong>vait paraître le S dans les journaux du matin et <strong>de</strong>vait être<br />

signée par toute la famille, <strong>à</strong> comm<strong>en</strong>cer par le Marquis actuel, mécont<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s plans<br />

maçonniques. Il n'y a cep<strong>en</strong>dant personne qui lui suggère cette idée <strong>de</strong> protestation.<br />

V. R. ee ne pourrait-elle pas la prés<strong>en</strong>ter <strong>en</strong> écrivant <strong>à</strong> la famille Asseea, qui irait parler<br />

au<br />

Marquis?<br />

«Voici l'idée, si V. R. ce peut quelque chose qu'elle ne per<strong>de</strong> pas cette occasion <strong>de</strong><br />

faire un grand bi<strong>en</strong> <strong>à</strong> la Religion et <strong>de</strong> préserver Notre Dame d'un affront <strong>de</strong> la Franc-<br />

Maçonnerie».<br />

De mars <strong>1910</strong> nous avons une lettre du P. M<strong>en</strong>eses, Socius du Provincial,<br />

adressée <strong>à</strong> celui-ci, par laquelle nous savons que les <strong>de</strong>ux dames, qui fur<strong>en</strong>t les gouvernantes<br />

du <strong>de</strong>rnier roi portugais Emmanuel II, étai<strong>en</strong>t absolum<strong>en</strong>t sous la dép<strong>en</strong>dance<br />

religieuse <strong>de</strong>s jésuites et étai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>trées dans une Congrégation spéciale, appelée<br />

<strong>de</strong>s oblates, composée <strong>de</strong> dames séculières


66<br />

Révolution, qu'un mois avant la Révolution Républicaine du 5 octobre, le Gouvernem<strong>en</strong>t<br />

avait déj<strong>à</strong> «l'impression nette que toute la politique portugaise était prise dans le réseau<br />

réactionnaire. . . et que la réaction ne r<strong>en</strong>onçait pas <strong>à</strong> ses <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> faire suivre<br />

au Roi un chemin moins libéral, et <strong>de</strong> le mettre <strong>en</strong> conflit constitutionnel aves le Gouvernem<strong>en</strong>t,<br />

parce que le Roi non seulem<strong>en</strong>t s'était déclaré <strong>à</strong> Mafra le protecteur <strong>de</strong> la<br />

Confrérie du Très Saint Sacrem<strong>en</strong>t, lui accordant le titre <strong>de</strong> roi/aie sans consulter le<br />

Gouvernem<strong>en</strong>t, mais aussi avait refusé <strong>de</strong> signer un décret prés<strong>en</strong>té par le Ministère,<br />

par lequel on supprimait l'Association Foi et Patrie, qui, d'après l'<strong>en</strong>quête récemm<strong>en</strong>t<br />

faite, se trouvait être la Compagnie <strong>de</strong> Jésus elle-même» l .<br />

Mr. Teixeira <strong>de</strong> Sousa dit <strong>en</strong>core qu'il ne savait pas «qui avait pesé sur l'esprit<br />

du Souverain pour qu'il prit une si singulière attitu<strong>de</strong>» -.<br />

Cep<strong>en</strong>dant, par les lettres trouvées parmi les papiers <strong>de</strong>s jésuites, ce secret est<br />

facilem<strong>en</strong>t dévoilé. Le mé<strong>de</strong>cin <strong>de</strong> la Cour, le Dr. Melo Breyner, anci<strong>en</strong> élève <strong>de</strong><br />

Campoli<strong>de</strong> et qui comme tel assistait toujours aux Fêtes <strong>de</strong>s anci<strong>en</strong>s élevés et se trouve<br />

dans les groupes photographiques <strong>de</strong> ces fêtes, écrivant au jésuite P. Alexandre Castelo,<br />

aussi anci<strong>en</strong> élève <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong>, lui déclare que c'est lui qui a suggéré au Roi<br />

l'idée <strong>de</strong> se faire le protecteur <strong>de</strong> la Confrérie du Saint Sacrem<strong>en</strong>t. Il lui promet d'aller<br />

parler au Roi et <strong>à</strong> la Reine Amélie pour que le dit décret contre la Foi et .Patrie<br />

n'ait pas <strong>de</strong> suite car il trouve que fermer Campoli<strong>de</strong> ce serait une gran<strong>de</strong> stupidité, sans<br />

compter le reste 3 .<br />

Voici comm<strong>en</strong>t, au moy<strong>en</strong> <strong>de</strong>s Congrégations <strong>de</strong> Dames et <strong>de</strong>s anci<strong>en</strong>s élèves, l'influ<strong>en</strong>ce<br />

<strong>de</strong>s jésuites était <strong>en</strong>trée au Palais et avait <strong>en</strong>lacé le Roi et les Ministres. Ils aurai<strong>en</strong>t<br />

probablem<strong>en</strong>t porté au pouvoir leur parti Nationaliste, si la République n'avait<br />

mis fin <strong>à</strong> la Royauté.<br />

CHAPITRE DIX-SEPTIÈME<br />

Comm<strong>en</strong>t ils exerçai<strong>en</strong>t leur influ<strong>en</strong>ce sur les g<strong>en</strong>s du peuple et sur la classe ouvrière<br />

Le3 jésuites exerçai<strong>en</strong>t leur influ<strong>en</strong>ce sur les g<strong>en</strong>s du peuple, et <strong>en</strong> particulier sur<br />

les g<strong>en</strong>s <strong>de</strong>s campagnes et <strong>de</strong>s villages, au moy<strong>en</strong> surtout <strong>de</strong> ce qu'ils appelai<strong>en</strong>t les<br />

missions.<br />

<strong>Les</strong> missions compr<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t une série <strong>de</strong> sermons qui se suivai<strong>en</strong>t p<strong>en</strong>dant quelques<br />

jours. Généralem<strong>en</strong>t il y avait <strong>de</strong>ux sermons par jour, l'un le matin avant le lever du<br />

soleil et l'autre le soir après les travaux <strong>de</strong>s champs et <strong>de</strong>s ateliers. Dans ces missions<br />

ils cherchai<strong>en</strong>t surtout <strong>à</strong> effrayer le peuple, <strong>en</strong> lui parlant <strong>de</strong>s peines <strong>de</strong> l'<strong>en</strong>fer, l'attirant<br />

ainsi <strong>à</strong> la confession, <strong>à</strong> la soumission et <strong>à</strong> la domination sacerdotale. Ils ne lui parlai<strong>en</strong>t<br />

pas <strong>de</strong> la manière <strong>de</strong> se procurer une vie meilleure <strong>en</strong> ce mon<strong>de</strong> et ne s'occupai<strong>en</strong>t<br />

pas <strong>de</strong>s questions sociales.<br />

Ils leur parlai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l'autre mon<strong>de</strong>, d'un mon<strong>de</strong> inconnu et énigmatique, sur lequel<br />

ils disai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> telles choses, qu'ils effrayai<strong>en</strong>t terriblem<strong>en</strong>t les pauvres g<strong>en</strong>s <strong>de</strong>s campagnes<br />

et surtout les femmes, facilem<strong>en</strong>t impressionnables. Nous avons sous les yeux<br />

keiucoup <strong>de</strong> livres où ils ont exprimé leurs idées <strong>à</strong> cet égard.<br />

<strong>Les</strong> principaux jésuites <strong>de</strong>stinés par les<br />

supérieurs au ministère <strong>de</strong>s missions fur<strong>en</strong>t<br />

le P. Louis Prosperi, le P. B<strong>en</strong>oît Rodriguès, le P. Vilela et le P. Vitale.<br />

1 Teixeira <strong>de</strong> Sousa, Pour l'Histoire <strong>de</strong> la Révolvtion, vol. n, p. 60-65.<br />

2 Teixeira <strong>de</strong> Sousa, Pour F Histoire <strong>de</strong> la Révolution, vol. n, p. 63.<br />

3<br />

Voir cinq lettres <strong>de</strong> Thomas Melo Breyner, conservées aux Archives Congréganistes.


67<br />

Ces Pères étai<strong>en</strong>t grossiers dans leurs sermons, employant une éloqu<strong>en</strong>ce ru<strong>de</strong>,<br />

pleine <strong>de</strong> bruit et d'habiletés pour tromper le peuple. Ils jetai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> grands cris, frappai<strong>en</strong>t<br />

avec force sur la chaire et contai<strong>en</strong>t, au sujet <strong>de</strong>s vérités éternelles, <strong>de</strong> curieuses<br />

et terribles histoires, qui impressionnai<strong>en</strong>t beaucoup le peuple, comme on peut le voir<br />

dans le P<strong>en</strong>sez-y- Bi<strong>en</strong>, dans la Mission Abrégée et autres livres <strong>de</strong> la spécialité.<br />

Du P. Prosperi, qui fut le plus important <strong>de</strong> ces missionnaires, son chroniqueur, le<br />

jésuite Cor<strong>de</strong>iro, raconte qu'il a débuté ainsi: «Il monte <strong>en</strong> chaire et comm<strong>en</strong>ce <strong>en</strong> parlant<br />

du Saint Esprit avec beaucoup <strong>de</strong> chaleur et <strong>de</strong> feu oratoire, le sermon du Saint<br />

Esprit méritait bi<strong>en</strong> cela, et <strong>de</strong> temps <strong>en</strong> temps il frappait un grand coup sur le bord<br />

<strong>de</strong> la chaire, surtout lorsque son inspiration se refroidissait ou que la mémoire lui faisait<br />

défaut» '.<br />

Le P. Vitale prêchant un jour sur le feu <strong>de</strong> l'<strong>en</strong>fer prit un cierge qu'il plaça <strong>en</strong>tre<br />

le pouce et l'in<strong>de</strong>x et dirigea la lumière du cierge sur sa propre main, comme pour la<br />

brûler et conseilla aux fidèles <strong>de</strong> faire <strong>de</strong> même chez eux pour apprécier le feu <strong>de</strong><br />

l'<strong>en</strong>fer.<br />

Naturellem<strong>en</strong>t le peuple voyant la main du prêtre <strong>en</strong> danger d'être brûlée, se mit<br />

<strong>à</strong> pleurer et <strong>à</strong> le prier <strong>de</strong> retirer le cierge, pour ne pas se brûler. Après cela on l'appela<br />

toujours le père au cierge. Ces missionnaires étai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> vrais acteurs <strong>de</strong> la Comédie<br />

Sacrée et. comme tels, ils profitai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> tous les élém<strong>en</strong>ts nécessaires pour attirer le<br />

peuple.<br />

Dans le Jubilé du Collège du Barro le P. Cor<strong>de</strong>iro décrit tout le cérémonial <strong>de</strong><br />

ces missions, extrêmem<strong>en</strong>t mouvem<strong>en</strong>té et rempli <strong>de</strong> détails pour impressionner la ru<strong>de</strong><br />

s<strong>en</strong>sibilité <strong>de</strong> la masse populaire. On cherchait d'abord <strong>à</strong> faire du bruit pour que <strong>de</strong>s<br />

localités voisines on fût attiré <strong>à</strong> la mission. Dans ce but, dit le P. Cor<strong>de</strong>iro: «L'habitu<strong>de</strong><br />

est d'ouvrir la mission avec la plus gran<strong>de</strong> sol<strong>en</strong>nité possible, aiin d <strong>en</strong> répandre<br />

au loin la nouvelle et la connaissance, et d'attirer ainsi <strong>de</strong>s localités voisines le plus <strong>de</strong><br />

peuple possible. Puis les missionnaires sont reçus <strong>à</strong> P<strong>en</strong>trt-e du village par le peuple <strong>en</strong><br />

masse, curé <strong>en</strong> tête, revêtu <strong>de</strong>s habits sacerdotaux, pour donner <strong>à</strong> l'acte plus <strong>de</strong> sol<strong>en</strong>nité,<br />

et aussitôt ils se dirig<strong>en</strong>t tous professionnellem<strong>en</strong>t vers l'église, portant l'ét<strong>en</strong>dard<br />

ou drapeau <strong>de</strong> la Mission. Arrivés <strong>à</strong> l'église,<br />

le missionnaire asperge le peuple d'eau<br />

bénite et prononce le sermon d'introduction, par lequel comm<strong>en</strong>ce la mission» -.<br />

.Mais les missionnaires se servai<strong>en</strong>t surtout <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants pour leur propagan<strong>de</strong>. Ils<br />

connaissai<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong> la psychologie populaire et ils savai<strong>en</strong>t combi<strong>en</strong> les par<strong>en</strong>ts sont<br />

heureux <strong>de</strong> voir leurs <strong>en</strong>fants revêtus <strong>de</strong> beaux habits aux vives couleurs,<br />

cantiques et<br />

portant <strong>de</strong>s ban<strong>de</strong>roles, <strong>de</strong>s rubans et <strong>de</strong>s couronnes <strong>de</strong> ileurs.<br />

chantant <strong>de</strong>s<br />

Ils profitai<strong>en</strong>t donc <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants <strong>de</strong> toutes manières. Ils comm<strong>en</strong>çai<strong>en</strong>t par leur <strong>en</strong>seigner<br />

divers cantiques, puis ils choisissai<strong>en</strong>t ceux qui avai<strong>en</strong>t les plus jolies voix et<br />

leur faisai<strong>en</strong>t parcourir le village <strong>en</strong> invitant par <strong>de</strong>s chants leurs par<strong>en</strong>ts et les autres<br />

fidèles <strong>à</strong> pr<strong>en</strong>dre part <strong>à</strong> la mission et <strong>à</strong> s'occuper du salut <strong>de</strong> leurs âmes :; .<br />

Le P. Cor<strong>de</strong>iro ajoute que cette coutume produisait «un grand effet». Comme clôture<br />

<strong>de</strong> la mission on célébrait toujours la première communion <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants, avec gran<strong>de</strong><br />

sol<strong>en</strong>nité, pour <strong>en</strong> retirer les résultats désiré'3. Ils formai<strong>en</strong>t une longue procession où<br />

l'on voyait flotter beaucoup <strong>de</strong> bannières, garçons et filles vêtus <strong>de</strong> blanc, ceux-l<strong>à</strong> portant<br />

Notre Dame et celles-ci l'Enfant Jésus. C'est un fait curieux que l'imaee d'une<br />

femme fût portée par les garçons et celle d'un <strong>en</strong>fant par les jeunes filles! Dans l'église<br />

1<br />

Jubilé du Collhje du Barro, p. 74.<br />

2 Jubilé du Collège du Barro, p. 64.<br />

3<br />

I<strong>de</strong>m, p. 67.


68<br />

le missionnaire leur faisait plusieurs discours, les m<strong>en</strong>ait près <strong>de</strong>s fonts baptismaux et<br />

avant la communion «un <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants <strong>de</strong>mandait, <strong>en</strong> leur nom <strong>à</strong> tous, pardon aux par<strong>en</strong>ts<br />

et <strong>à</strong> tous les assistants, acte extrêmem<strong>en</strong>t émouvant, qui faisait verser <strong>de</strong>s larmes<br />

et souv<strong>en</strong>t adoucissait <strong>de</strong>s cœurs <strong>de</strong> bronze» '.<br />

Le mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la communion arrivé, «<strong>de</strong>ux <strong>en</strong>fants représ<strong>en</strong>tant <strong>de</strong>s anges mettai<strong>en</strong>t<br />

sur leurs têtes <strong>de</strong>s couronnes <strong>de</strong> fleurs» 2 .<br />

A la fin <strong>de</strong> la mission on procédait avec pompe <strong>à</strong> la bénédiction <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants et on<br />

les obligeait <strong>à</strong> faire <strong>de</strong>s vœux sur <strong>de</strong>s sujets religieux qu'ils pouvai<strong>en</strong>t <strong>à</strong> peine compr<strong>en</strong>dre.<br />

On profitait <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants pour tout et comme ceci eut pu sembler excessif, le P. Cor<strong>de</strong>iro<br />

comm<strong>en</strong>te: «Ces manœuvres avec les<br />

<strong>en</strong>fants pourront paraître peu avisées <strong>à</strong> quelques<br />

personnes, mais l'expéri<strong>en</strong>ce montre <strong>à</strong> chaque pas que Dieu se sert <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants<br />

pour convertir les pécheurs les plus <strong>en</strong>durcis et c'est <strong>à</strong> quoi t<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t ces cérémonies où<br />

l'on fait <strong>en</strong>trer ces innoc<strong>en</strong>ts» 3 .<br />

Et le fait est que les jésuites réussissai<strong>en</strong>t, par ces manœuvres <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants, <strong>à</strong> atteindre<br />

leur but, qui était surtout d'attirer le peuple <strong>à</strong> la confession 4 .<br />

Or la confession est la soumission la plus complète .au prêtre qui, comme ils le disai<strong>en</strong>t,<br />

y représ<strong>en</strong>te Dieu lui-même. 11 absout ou condamne et peut connaître ainsi la vie,<br />

non seulem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> celui qui se confesse, mais aussi <strong>de</strong> beaucoup d'autres personnes.<br />

Pour que les effets <strong>de</strong>s missions fuss<strong>en</strong>t plus durables ils n'oubliai<strong>en</strong>t pas <strong>de</strong> répandre<br />

chez le peuple diverses confréries, telles que celle <strong>de</strong> la Bonne Mort, celle <strong>de</strong><br />

St. Joseph et surtout celle <strong>de</strong> Y Apostolat <strong>de</strong> la Prière, avec trois <strong>de</strong>grés, le <strong>de</strong>rnier<br />

<strong>de</strong>squels établissait l'habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la confession et <strong>de</strong> la communion m<strong>en</strong>suelle ou hebdomadaire.<br />

Cet Apostolat <strong>de</strong> la Prière, hors son but moral, avait aussi un but matériel,<br />

car il<br />

rapportait aux jésuites beaucoup d'arg<strong>en</strong>t, prov<strong>en</strong>ant <strong>de</strong> la v<strong>en</strong>te d'un grand nombre<br />

<strong>de</strong> médailles, <strong>de</strong> croix, d'images, <strong>de</strong> cartes-images, <strong>de</strong> scapulaires, <strong>de</strong> manuels et<br />

autres petits livres qui composai<strong>en</strong>t le fonds <strong>de</strong> la bibliothèque du Messager du Cœur<br />

<strong>de</strong> Jésus. Le Manuel <strong>de</strong> VApostolat avait déj<strong>à</strong> dix éditions <strong>en</strong> 1905 et le P<strong>en</strong>sez-y<br />

Bi<strong>en</strong> <strong>en</strong> avait douze <strong>en</strong> 1909. Le Messager du Cœur <strong>de</strong> Jésus était une mine, comme<br />

nous l'avons déj<strong>à</strong> vu p. 25.<br />

L' Apostolat <strong>de</strong> la Prière avait, d'après les calculs faits par les jésuites dans le<br />

Rapport annuel publié <strong>en</strong> 1909, <strong>à</strong> peu près <strong>de</strong>ux millions <strong>de</strong> membres et il avait 34:800<br />

zélateurs et zélatrices.<br />

Il faut cep<strong>en</strong>dant remarquer que c'était surtout les g<strong>en</strong>s <strong>de</strong>s campagnes qui se laissai<strong>en</strong>t<br />

séduire par les jésuites. Le peuple <strong>de</strong>s villes et <strong>en</strong> particulier la classe ouvrière<br />

ne se<br />

laissait plus facilem<strong>en</strong>t tromper par eux.<br />

Comme preuve <strong>de</strong> ce fait il y a une lettre fort intéressante, écrite <strong>en</strong> 1901 par le<br />

Supérieur <strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> Covilhâ, qui est une ville ess<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t ouvrière vu que<br />

la plus gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong> sa population se consacre <strong>à</strong> la fabrication <strong>de</strong>s lainages.<br />

Et ce que l'on dit dans ceite lettre est d'autant plus étonnant que vers 1870 cette<br />

ville était regardée comme l'une <strong>de</strong>s plus pieuses <strong>de</strong> ce pays.<br />

Voici la traduction <strong>de</strong> cette lettre, qui est déposée aux Archives Congréganistes :<br />

«Mon Rév. ami.— V. R. ce dit très bi<strong>en</strong> qu'il faudrait surtout s'occuper <strong>de</strong>s ouvriers,<br />

mais quelle <strong>en</strong> est la manière pratique?<br />

«Le P. Pinto et ses frères ont initié ici avec gran<strong>de</strong> ferveur l'association <strong>de</strong>s<br />

1<br />

Jubilé du Collège du Barro, p. 66.<br />

2 Jubilé du Collège du Barro, p. 66.<br />

3<br />

I<strong>de</strong>m, p. 67.<br />

4 I<strong>de</strong>m, p. 174.


69<br />

ouvriers et bi<strong>en</strong>tôt elle est tombée. Lorsque je me suis trouvé mala<strong>de</strong> ici, et même<br />

lorsque je suis v<strong>en</strong>u <strong>de</strong> St. Fidèle faire <strong>de</strong>s confér<strong>en</strong>ces, non seulem<strong>en</strong>t religieuses, mais<br />

sci<strong>en</strong>tifiques, d'abord il y eut beaucoup <strong>de</strong> mon<strong>de</strong>, <strong>à</strong> la fin il ne v<strong>en</strong>ait que cinq <strong>à</strong> dix<br />

personnes, <strong>en</strong> comptant les directeurs. Le P. Magalh<strong>à</strong>es est v<strong>en</strong>u, il a comm<strong>en</strong>cé et n'a<br />

ri<strong>en</strong> fait, il a tout quitté et m'a remis dans le catalogue avec la charge ad honorem. Le<br />

P. Pereira est v<strong>en</strong>u et ce fut la première chose que j'<strong>en</strong>trepris auprès <strong>de</strong> lui. On l'y<br />

appela <strong>de</strong>ux fois et on ne voulut pas continuer. Le P. Raposo vint, on me parla <strong>de</strong> lui,<br />

je l'y <strong>en</strong>voyai aussitôt, il alla une fois et ce fut tout. J'essayai d'un autre côté. Je parlai<br />

au maire, mettant <strong>à</strong> sa disposition la salle du Collège <strong>en</strong> lui offrant nos services.<br />

Le maire convoqua les curés, les prêtres et les principaux catholiques d'ici. On fit<br />

<strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s propositions, etc. Il y a déj<strong>à</strong> six bons mois et ri<strong>en</strong>! L'idée est très belle;<br />

personne ne désire plus que moi la voir mise <strong>en</strong> pratique, mais aucun <strong>de</strong>s moy<strong>en</strong>s employés<br />

n'a réussi. Le P. Provincial m'a promis un Père capable d'attirer les ouvriers, il<br />

y a <strong>de</strong>ux ans et le Père n'a jamais paru. Que faire? Je ne regar<strong>de</strong>rais pas <strong>à</strong> la dép<strong>en</strong>se,<br />

si le Père capable d'instruire et d'attirer se prés<strong>en</strong>tait. Je p<strong>en</strong>se que le P. M<strong>en</strong>eses<br />

pourrait au moins p<strong>en</strong>dant quelque temps les cont<strong>en</strong>ter, si V. R. ce<br />

voulait le laisser v<strong>en</strong>ir<br />

une ou <strong>de</strong>ux fois. Je payerais le voyage avec grand plaisir. V. R. ce voit donc qu'il ne<br />

dép<strong>en</strong>d pas <strong>de</strong> moi <strong>de</strong> réaliser une idée qui m'est si sympathique. Plus tard au Collège,<br />

t<br />

avec <strong>de</strong> la musique, <strong>de</strong>â jeux, etc., on pourra peut-être obt<strong>en</strong>ir quelque chose. J'ai<br />

écrit <strong>à</strong> l'ami Louii sur Pinto et George, nous verrons ce qu'il dit.— 6-V-901.— De<br />

V. R. S. <strong>en</strong> J. C— F. S. B.»<br />

CHAPITRE DIX-HUITIÈME<br />

Comm<strong>en</strong>t les <strong>Jésuites</strong> exerçai<strong>en</strong>t leur influ<strong>en</strong>ce sur la presse<br />

P<strong>en</strong>dant les premières années <strong>de</strong> cette troisième pério<strong>de</strong> les jésuites écrivir<strong>en</strong>t très<br />

peu dans la presse.<br />

Il n'y avait que le P. Joseph <strong>de</strong> Matos qui écrivait <strong>de</strong> temps <strong>à</strong> autre un article<br />

dans quelques journaux catholiques <strong>de</strong> ce temps-l<strong>à</strong> ', et qui <strong>en</strong> 1881 fut chargé <strong>de</strong> diriger<br />

le M<strong>en</strong>sageiro do Coraçâo <strong>de</strong> Jésus, fondé ;'t Porto <strong>en</strong> 1874 sous la direction du P. Joseph<br />

Rodrigues Cosgava-, mais qui alors tomba <strong>en</strong>tre les mains <strong>de</strong>s jésuites <strong>de</strong> la Rue<br />

du Quelhas, <strong>à</strong> Lisbonne.<br />

Le P. Matos, dans cette revue, attaquait <strong>en</strong> termes grossiers les hommes qui dans<br />

les livres ou les journaux exposai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s idées contraires <strong>à</strong> l'orthodoxie catholique, mais<br />

il ne se mêlait pas <strong>de</strong> la politique <strong>de</strong>s partis. Sur ce point il suivait les vers qu'on lit <strong>à</strong><br />

la p. 10 du premier numéro <strong>de</strong> sa revue :<br />

Tu n'es point politici<strong>en</strong> émissaire,<br />

Tu vi<strong>en</strong>s du champ du Calvaire.<br />

Mais <strong>à</strong> partir <strong>de</strong> 1901 (lorsque le P. Matos était déj<strong>à</strong> décédé, car il mourut le 7<br />

septembre IsOlij, le M<strong>en</strong>sageiro se mit <strong>à</strong> déf<strong>en</strong>dre la cause du Parti Nationaliste et plus<br />

tard il <strong>de</strong>vint le plus ard<strong>en</strong>t organe <strong>de</strong> ce parti, qui était le parti <strong>de</strong>s jésuites. C'est l<strong>à</strong><br />

que fut publié le fameux article du P. Abranches établissant que l'<strong>en</strong>trée dans ce parti<br />

était un <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> consci<strong>en</strong>ce pour les catholiques portugais 3 .<br />

1<br />

M<strong>en</strong>sageiro do Coraçâo <strong>de</strong> Jesut, 1893, p. 637.<br />

* Ibid., 1881, p. 7.<br />

J Ibid., 1909, Juillet, pp. 407-409.


70<br />

<strong>Les</strong> jésuites cep<strong>en</strong>dant ne se cont<strong>en</strong>tai<strong>en</strong>t pas <strong>de</strong> divulguer leurs idées politiques<br />

au moy<strong>en</strong> d"une revue m<strong>en</strong>suelle ;<br />

ils se mir<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong>tôt <strong>à</strong> les répandre dans beaucoup<br />

d'autres journaux, tels que: Palavra, Correio National, Opini<strong>à</strong>o, <strong>Portugal</strong>, Bem Pûhlico,<br />

Democracia Cristâ, A Guarda, Sul da Beira, Petardo, Ecos <strong>de</strong> Roma, Eco» <strong>de</strong><br />

Africa, Ecos do Lis, Monarquia Nova, etc., etc.<br />

Il est facile <strong>de</strong> prouver ce fait au moy<strong>en</strong> <strong>de</strong>s docum<strong>en</strong>ts que j'ai sous les yeux.<br />

Je me cont<strong>en</strong>terai, cep<strong>en</strong>dant, <strong>de</strong> transcrire quelques indications, <strong>à</strong> ce sujet, cont<strong>en</strong>ues<br />

dans un manuscrit trouvé <strong>à</strong> Campoli<strong>de</strong> et conservé aux Archives Congréganistes. Il<br />

est écrit <strong>en</strong> latin et a pour titre In<strong>de</strong>x auctorum et librorum in Provincia Lusitana editorum<br />

ah ineunte anno 1906 ad exeuntem 1909 (In<strong>de</strong>x <strong>de</strong>s auteurs et <strong>de</strong>s livres publiés<br />

dans la Province Portugaise <strong>de</strong>puis le comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> 1906 jusqu'<strong>à</strong> la fin <strong>de</strong> 1909).<br />

Cet In<strong>de</strong>x conti<strong>en</strong>t la liste (par ordre alphabétique <strong>de</strong> noms d'auteurs) <strong>de</strong>s livres<br />

publiés par les jésuites et<br />

<strong>de</strong>s articles qu'ils ont écrits dans les journaux et même la m<strong>en</strong>tion<br />

<strong>de</strong>s titres <strong>de</strong> beaucoup <strong>de</strong> ces articles et les noms <strong>de</strong>s journaux qui les publièr<strong>en</strong>t.<br />

Par cet In<strong>de</strong>x on voit qu'un grand nombre <strong>de</strong> ces articles n'étai<strong>en</strong>t point<br />

signés et<br />

que d'autres avai<strong>en</strong>t comme signature <strong>de</strong>s pseudonymes ou simplem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s initiales.<br />

Ainsi, le P. Fernan<strong>de</strong>s Santana écrivait quelquefois sous le pseudonyme <strong>de</strong> Martini<br />

Moniz ou seulem<strong>en</strong>t un M. ; le P. Antoine M<strong>en</strong>ezes sous celui <strong>de</strong> Aharo <strong>de</strong> Melo;<br />

le P. Eram. Martins sous celui <strong>de</strong> Pantaleâo da Btira; le P. Joseph da Cruz signe ses<br />

articles <strong>de</strong>s initiales X. Y.; le P. Louis Alves signe A. G. da S.; le P. Rodolphe Chorâo<br />

signe I. K. et A. B.<br />

<strong>Les</strong> Pères qui s'occuppai<strong>en</strong>t le plus <strong>de</strong> politique dans la presse étai<strong>en</strong>t Fernan<strong>de</strong>s<br />

Santana, Antoine Azevedo, Antoine M<strong>en</strong>eses et<br />

Joachim Abranclies.<br />

Santana et Azevedo fur<strong>en</strong>t, durant quelque temps, les dirigeants absolus du journal<br />

<strong>Portugal</strong>: Santana y écrivit quelques articles sur' la Religion et la Politique, et<br />

Azevedo y publia d'autres sur la Propagan<strong>de</strong> Nationaliste. Le P. M<strong>en</strong>eses y écrivit<br />

aussi sur les Elections. Le P. Abranches écrivait dans le M<strong>en</strong>sag


ils<br />

71<br />

De tout ceci on conclut que l'influ<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s jésuites dans la presse leur fut nuisible<br />

ainsi qu'<strong>à</strong> la Monarchie elle-même, qu'ils voulai<strong>en</strong>t déf<strong>en</strong>dre, comme l'a déclaré Alvaro<br />

Pinheiro Chagas. secrétaire <strong>de</strong> Jean Franco, le <strong>de</strong>rnier Présid<strong>en</strong>t du Conseil du Roi<br />

Charles '.<br />

Leur influ<strong>en</strong>ce fut même néfaste <strong>à</strong> l'Église Catholique <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>, car elle excita<br />

profondém<strong>en</strong>t l'opinion publique contre le clergé séculier que les jésuites avai<strong>en</strong>t inféodé<br />

<strong>à</strong> leur souveraineté.<br />

Ce n'est-peut-être qu'au Parti Républicain que la presse jésuitique ait vraim<strong>en</strong>t<br />

profité, car celui-ci faisait valoir admirablem<strong>en</strong>t les inepties du <strong>Portugal</strong> et les effets <strong>de</strong><br />

la lutte politique <strong>en</strong>tre jésuites et franciscains, <strong>en</strong>tre le Messager du Cœur <strong>de</strong> Jésus et<br />

la<br />

Voix <strong>de</strong> Saint Antoine.<br />

Ils n'ont donc pas <strong>à</strong> se plaindre <strong>de</strong>s républicains, mais d'eux-mêmes et surtout <strong>de</strong><br />

leurs supérieurs, qui se sont montrés si peu habiles. Ce qui est certain c'est que le provincial<br />

Louis Cabrai fut remplacé au provincialat par le P. Antoine Pinto, avant d'avoir<br />

terminé les six années <strong>de</strong> son gouvernem<strong>en</strong>t.<br />

CHAPITRE DIX-NEUVIEME<br />

Comm<strong>en</strong>t ils exerçai<strong>en</strong>t leur influ<strong>en</strong>ce sur la politique du pays<br />

Nous avons vu que, durant la première pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> leur résid<strong>en</strong>ce <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>,<br />

1540-1759, les jésuites exercèr<strong>en</strong>t toujours une gran<strong>de</strong> influ<strong>en</strong>ce sur la Cour et sur la<br />

politique du pays. P<strong>en</strong>dant la <strong>de</strong>uxième pério<strong>de</strong>, 1829-<strong>1834</strong>, <strong>à</strong> l'époque du roi usurpateur<br />

Michel, ils fur<strong>en</strong>t les favoris du roi et <strong>de</strong>s principaux courtisans ;<br />

et quoique leur<br />

influ<strong>en</strong>ce politique fut moins gran<strong>de</strong> <strong>à</strong> cette époque île règne <strong>de</strong> l'usurpateur ayant été<br />

<strong>de</strong> courte durée), Pierre IV reconnut qu'elle s'était fait B<strong>en</strong>tir, c'est pourquoi il se hâta<br />

<strong>de</strong> les<br />

bannir.<br />

P<strong>en</strong>dant cette troisième époque,<br />

1857-<strong>1910</strong>, les jésuites t<strong>en</strong>tèr<strong>en</strong>t, comme toujours,<br />

<strong>de</strong> s'introduire dans le domaine politique; mais cette fois, comme ils savai<strong>en</strong>t qu'ils<br />

étai<strong>en</strong>t ici contrairem<strong>en</strong>t aux lois du pays, ils agir<strong>en</strong>t avec la plus gran<strong>de</strong> précaution,<br />

dans les premiers temps, sous le supérieur P. Ficarelli, itali<strong>en</strong> ;<br />

ce fut seulem<strong>en</strong>t p'us<br />

tard qu'ils laissèr<strong>en</strong>t voir leur jeu, principalem<strong>en</strong>t sous le gouvernem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s trois <strong>de</strong>rniers<br />

Provinciaux portugais, Louis Campo Santo, Joseph Magalh<strong>à</strong>es et Louis Cabrai.<br />

Nous nous sommes déj<strong>à</strong> occupés <strong>de</strong> l'influ<strong>en</strong>ce politique <strong>de</strong>s jésuites aux chapitres<br />

antérieurs, <strong>à</strong> propos <strong>de</strong> chacune <strong>de</strong>s classes sociales y étudiées; mais nous allons traiter<br />

ce sujet ici dans son <strong>en</strong>semble.<br />

Kfgne du roi l.onis I" (1861-1888)<br />

Dans les premiers temps (1861-1888 i<br />

trouvèr<strong>en</strong>t sur le trône le roi Louis, qui<br />

était anti-clérical -; une <strong>de</strong>s premières mesures <strong>de</strong> son gouvernem<strong>en</strong>t fut le bannissem<strong>en</strong>t<br />

<strong>de</strong>s Sœurs <strong>de</strong> Charité et <strong>de</strong>s Pères Lazaristes, <strong>en</strong> 1862.<br />

Louis épousa Marie Pie <strong>de</strong> Savoie, fille <strong>de</strong> Victor Emmanuel II qui avait écrasé le<br />

pouvoir <strong>de</strong> Rome.<br />

1<br />

O Mocim<strong>en</strong>to Mon<strong>à</strong>rquico («Le Mouvem<strong>en</strong>t Monarchiste»), i, p. 10.<br />

* Voir Carlos I", Intime, par le Comte <strong>de</strong> Colleville<br />

;<br />

p. 24.


•<br />

Comte<br />

—<br />

72<br />

Le P. Ra<strong>de</strong>maker, initiateur <strong>de</strong> cette époque, se montra au début habile et astucieux<br />

<strong>en</strong> matière politique, car il sut se maint<strong>en</strong>ir neutre dans la lutte <strong>en</strong>core ard<strong>en</strong>te<br />

<strong>en</strong>tre les catholiques, «michélistes» 4 et constitutionnels.<br />

Il adopta une politique d'opportunisme qui lui sembla être, et qui fut <strong>en</strong> effet, la<br />

plus avantageuse pour la j<br />

sécurité et le progrès <strong>de</strong> son <strong>en</strong>treprise jésuitique. Quoique<br />

fils d'un michéliste, il n'hésita pas <strong>à</strong> prêcher aux obsèques <strong>de</strong> Mr. Charles Mascar<strong>en</strong>has,<br />

<strong>de</strong> la famille] du Marquis <strong>de</strong> Fronteira, général <strong>de</strong> l'armée constitutionnelle <strong>de</strong><br />

Pierre IV -. Quelques journaux catholiques <strong>de</strong> l'époque le blâmai<strong>en</strong>t, parce qu'il ne suivait<br />

pas ies traditions michélistes <strong>de</strong> sa famille 3 , mais il poursuivait son chemin se<br />

liant aux personnalités remarquables du régime constitutionnel, qui alors était vainqueur<br />

et fort, <strong>en</strong> sorte que ces personnalités puss<strong>en</strong>t l'ai<strong>de</strong>r dans son œuvre.<br />

L'itali<strong>en</strong> P. Ficarelli, qui fut]le Supérieur <strong>de</strong>s jésuites <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> <strong>de</strong> 1866 <strong>à</strong> 1886:<br />

vingt ans! — 4 appart<strong>en</strong>ait <strong>à</strong> la Province Romaine <strong>de</strong> la Compagnie <strong>de</strong> Jésus, ayant donc<br />

été élevé dans ce milieu <strong>de</strong> conv<strong>en</strong>tions diplomatiques. Ce fut lui que choisir<strong>en</strong>t le Général<br />

et le Pape, <strong>à</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> la fondatrice <strong>de</strong>s Dorothées, Paola Frassinetti, pour<br />

v<strong>en</strong>ir ai<strong>de</strong>r au développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> cette congrégation féminine <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> 5 .<br />

Ficarelli était [très sûr <strong>de</strong> lui <strong>en</strong>tres astucieux; il savait bi<strong>en</strong> que les lois du pays<br />

déf<strong>en</strong>dai<strong>en</strong>t l'exist<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s jésuites*<strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>. C'est pour cela qu'il trouvait que ceux-ci<br />

ne <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t point se j<br />

mettre <strong>en</strong> évid<strong>en</strong>ce, mais bi<strong>en</strong> au contraire se dissimuler le plus<br />

possible.<br />

C'est obéissant <strong>à</strong> ce principe, "qu'il avait transféré la propriété <strong>de</strong> leurs maisons aux<br />

noms <strong>de</strong> trois jésuites anglais. Il était aussi d'opinion que les jésuites vivant <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong><br />

<strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t astucieusem<strong>en</strong>t se t<strong>en</strong>ir <strong>à</strong> l'écart <strong>de</strong> la vie politique du pays. Il réussit <strong>à</strong><br />

inculquer ces idées dans l'esprit <strong>de</strong>s Supérieurs <strong>de</strong> leurs collèges, les Pères, égalem<strong>en</strong>t<br />

itali<strong>en</strong>s, Sturzo, <strong>de</strong> ^Campoli<strong>de</strong>, De Antoni, <strong>de</strong> Saint Fidèle, et Moscatelli, du Barro.<br />

Ces Pères suivir<strong>en</strong>t habilem<strong>en</strong>t les conseils <strong>de</strong> Ficarelli. Ainsi, au sujet du Collège <strong>de</strong><br />

Campoli<strong>de</strong>, on lit dans l'Histoire <strong>de</strong> ce Collège <strong>de</strong> l'année 1871 que tpar la prud<strong>en</strong>ce<br />

avec laquelle les Nôtres agiss<strong>en</strong>t, il arrive que les impie3 eux-mêmes n'os<strong>en</strong>t dire dans<br />

leurs journaux quoi que ce soit contre le collège». 6 Et le P. Sturzo écrivit officiellem<strong>en</strong>t<br />

<strong>à</strong> la Préfecture <strong>de</strong> Police (Govêrno Civil), s'intitulant directeur d'un collège appart<strong>en</strong>ant<br />

<strong>à</strong> <strong>de</strong>s Anglais.<br />

Ri'gne <strong>de</strong> Charles I. ir (1888-1908)<br />

À la mort du roi Louis, le 19 octobre 1888, son fils Charles monta sur le trône.<br />

En 1886 il avait épousé Amélie d'Orléans, fille du Comte <strong>de</strong> Paris. Cette princesse avait<br />

été élevée par sa mère, qui était profondém<strong>en</strong>t pieuse 7 et qui la r<strong>en</strong>dit extrêmem<strong>en</strong>t dévote<br />

et réactionnaire. La nouvelle reine <strong>de</strong>vint ouvertem<strong>en</strong>t la protectrice <strong>de</strong>s congrégations<br />

religieuses, qui jusque l<strong>à</strong> n'avai<strong>en</strong>t pas eu <strong>à</strong> la cour un aussi grand et puissant<br />

auxiliaire. Louis n'était pas clérical et sa femme, Marie Pie, quoique catholique, ne manifesta<br />

jamais, du vivant <strong>de</strong> son mari, <strong>de</strong> sympathie pour les congrégations religieuses.<br />

Charles aussi ne p<strong>en</strong>chait pas pour le cléricalisme. Amélie cep<strong>en</strong>dant était non seulei<br />

Partisans <strong>de</strong> Michel, l'Usurpateur.<br />

2 Hist. du Col. Camp, et Résiâ. Lisb., p. 24.<br />

3 M<strong>en</strong>sageiro do Cor. <strong>de</strong> Jésus, (1903). pp. 225, 539.<br />

* Histoire Col. Camp, et liésid. Lisb., pp.- 51, 93, 161 et 172.<br />

5 Alphonse Capecelatro, Vita di Paola Frassinetti, cliap. xv, p. 278.<br />

Histoire du Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> et <strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> Lisbonne, p. 59.<br />

île Colleville, Carlos I e ' intime, p. 105.


considérées<br />

«Notre<br />

73<br />

m<strong>en</strong>t cléricale et franchem<strong>en</strong>t protectrice <strong>de</strong>s religieux et <strong>de</strong>s religieuses, mais réussit <strong>à</strong><br />

r<strong>en</strong>dre les dames <strong>de</strong> la Cour presque aussi bigotes qu'elle ;<br />

et elle obtint même que ilarie<br />

Pie <strong>de</strong>vînt protectrice <strong>de</strong>s sœurs Dorothées, l'indiquant pour présid<strong>en</strong>te <strong>de</strong> l'Œuvre<br />

<strong>de</strong> Sainte Dorothée, institution dont faisai<strong>en</strong>t partie quelques dames <strong>de</strong> la noblesse qui<br />

se chargeai<strong>en</strong>t d'<strong>en</strong>seigner le catéchisme aux <strong>en</strong>fants dans les églises <strong>de</strong> Lisbonne 1 .<br />

Charles<br />

même <strong>de</strong>vint pe^it <strong>à</strong> petit moins anti-clérical.<br />

<strong>Les</strong> jésuites, voyant les dispositions favorables <strong>de</strong>s hautes régions du pouvoir, se<br />

mir<strong>en</strong>t <strong>à</strong> ét<strong>en</strong>dre leurs visées politiques et cherchèr<strong>en</strong>t <strong>à</strong> obt<strong>en</strong>ir que la Royauté leur<br />

accordât <strong>de</strong>s marques <strong>de</strong> considération et d'estime <strong>de</strong>vant le public ;<br />

ils aspirai<strong>en</strong>t ainsi <strong>à</strong><br />

ce que plus tard la Compagnie <strong>de</strong> Jésus fût nouvellem<strong>en</strong>t légalisée <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>. En<br />

1904, le 29 juin, les jésuites organisèr<strong>en</strong>t une gran<strong>de</strong> procession pour commémorer<br />

le 50" anniversaire <strong>de</strong> l'Apostolat <strong>de</strong> la Prière. < 'ette procession sortit <strong>de</strong> la cathédrale<br />

<strong>de</strong> Lisbonne, parcourut les rues <strong>de</strong> la ville et l'Av<strong>en</strong>ue <strong>de</strong> la Liberté, * allant terminer<br />

<strong>à</strong> la Basilique du Cœur <strong>de</strong> Jésus (au Largo da Estrela;; <strong>à</strong> la porte <strong>de</strong> cette église, qui<br />

était pleine <strong>de</strong> mon<strong>de</strong>, on donna la bénédiction papale, <strong>en</strong> prés<strong>en</strong>ce du Roi et <strong>de</strong> la Famille<br />

Royale 3 .<br />

En 1905 les jésuites obtinr<strong>en</strong>t que le Prince Royal Louis Philippe et l'Infant Emmanuel,<br />

qui <strong>de</strong>vint plus tard le <strong>de</strong>rnier roi portugais, allass<strong>en</strong>t au Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong><br />

prési<strong>de</strong>r n une séance sol<strong>en</strong>nelle <strong>de</strong> physique, le 14 mars. <strong>Les</strong> Princes arrivèr<strong>en</strong>t au<br />

Collège vers 3 heures <strong>de</strong> l'après-midi; les Pères avec leurs élèves vinr<strong>en</strong>t jusqu'<strong>à</strong> la<br />

porte les recevoir, témoignant la vénération la plus profon<strong>de</strong>, une gran<strong>de</strong> humilité et une<br />

soumission presque honteuse, comme le<br />

eux dans leur revue Nosso Colégio :<br />

prouve une photographie instantanée publiée par<br />

Collège») *, où l'on voit <strong>de</strong> vieux professeurs<br />

qui bais<strong>en</strong>t servilem<strong>en</strong>t, presque <strong>à</strong> g<strong>en</strong>oux, les mains <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux jeunes garçons,<br />

dont l'aîné n'avait que 17 ans, seulem<strong>en</strong>t parce qu'ils étai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la famille royale.<br />

En 1901, <strong>à</strong> fcause <strong>de</strong> l'affaire Calmon, c'est-<strong>à</strong>-dire, <strong>à</strong> cause <strong>de</strong> la t<strong>en</strong>tative <strong>de</strong> rapt<br />

<strong>de</strong> la fille <strong>de</strong> Calmon, consul du Brésil <strong>à</strong> Porto, rapt que l'on prét<strong>en</strong>dait pratiquer pour<br />

faire <strong>en</strong>trer cette <strong>de</strong>moiselle dans un couv<strong>en</strong>t, les lihéraux se levèr<strong>en</strong>t <strong>en</strong> masse contre<br />

les congrégations religieuses.<br />

Une gran<strong>de</strong> commission alla <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r au Koi l'exécution <strong>de</strong>s lois anti-congréganistes<br />

<strong>de</strong> Pombal et d'Aguiar. Le Roi et le Couvernem<strong>en</strong>t fir<strong>en</strong>t <strong>de</strong> bonnes promesses<br />

<strong>à</strong> cette commission. Mais le résultat <strong>en</strong> fut le célèbre décret du 18 avril 1901. ot'i il<br />

était déclaré qu'on maint<strong>en</strong>ait <strong>en</strong>core comme lois du pays les lois promulguées par Pombal<br />

et Aguiar; mais ce décret ne reconnaissait pas comme appart<strong>en</strong>ant <strong>à</strong> <strong>de</strong>s Ordres Religieux<br />

les personnes <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux sexes .<br />

comme telles par le public<br />

;<br />

pour ces<br />

personnes le décret instituait, sous différ<strong>en</strong>ts noms, <strong>de</strong>s associations sujettes <strong>à</strong> <strong>de</strong>s statuts<br />

sanctionnés par le Gouvernem<strong>en</strong>t; mais il leur était formellem<strong>en</strong>t déf<strong>en</strong>du d'avoir le noviciat<br />

et <strong>de</strong> fairé_ <strong>de</strong>s vœux religieux; et si ces conditions étai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>freintes, ces associations<br />

serai<strong>en</strong>t immédiatem<strong>en</strong>t supprimées et leurs membres bannis.<br />

<strong>Les</strong> jésuites et les<br />

autres congrégations religieuses eur<strong>en</strong>t d'abord quelque dirliculté<br />

<strong>à</strong> se soumettre <strong>à</strong> ces statuts sous <strong>de</strong> pareilles conditions, comme le prouv<strong>en</strong>t les docum<strong>en</strong>ts<br />

déj<strong>à</strong> cités ', parce que d'une part ils ne voyai<strong>en</strong>t point dans ce décret la légalisation<br />

<strong>de</strong>s congrégations religieuses, comme ils le désirai<strong>en</strong>t, d'autre part ils craignai<strong>en</strong>t<br />

1<br />

Voir les Catalogues <strong>de</strong> l'Oeuvre <strong>de</strong> Saint Derothée, aux Archives Congrégani>tes.<br />

2 La principale et la plus belle prom<strong>en</strong>a<strong>de</strong> <strong>de</strong> Lisbonne.<br />

3<br />

M<strong>en</strong>sayeiro do Coraçâo <strong>de</strong> .T<strong>en</strong>us, 1894, pp. 4^8, 495.<br />

* Nosso Colégio, numéro 1", année <strong>de</strong> 1901 <strong>à</strong> 1905, p. 90.<br />

5<br />

Voir le chapitre <strong>de</strong>uxième <strong>de</strong> cet ouvrage.


74<br />

que les statuts <strong>de</strong>s nouvelles associations, auxquels ils étai<strong>en</strong>t sujets, les empêchass<strong>en</strong>t<br />

d'élu<strong>de</strong>r les lois comme ils l'avai<strong>en</strong>t fait jusqu'alors. Mais ils finir<strong>en</strong>t par accepter, car ils<br />

comprir<strong>en</strong>t aisém<strong>en</strong>t qu'il leur serait toujours facile d'élu<strong>de</strong>r ce décret d'Hintze Ribeiro,<br />

comme ils avai<strong>en</strong>t éludé ceux d'Aguiar et <strong>de</strong> Pombal. Ils reconnur<strong>en</strong>t d'ailleurs que, n'ayant<br />

pas été bannis et pouvant, au contraire, continuer comme auparavant <strong>à</strong> se dissimuler astucieusem<strong>en</strong>t<br />

au moy<strong>en</strong> <strong>de</strong> noms <strong>de</strong> fausses associations, ils le <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t surtout <strong>à</strong> l'influ<strong>en</strong>ce<br />

<strong>de</strong> la Reine Amélie et <strong>de</strong>s dames <strong>de</strong> la Cour, et grâce <strong>à</strong> l'appui que leurs collèges<br />

masculins et féminins avai<strong>en</strong>t obt<strong>en</strong>u auprès <strong>de</strong>s familles <strong>de</strong> l'aristocratie et <strong>de</strong> la<br />

haute bourgeoisie, compr<strong>en</strong>ant les élém<strong>en</strong>ts conservateurs et réactionnaires du pays.<br />

A cette époque la reine Amélie avait déj<strong>à</strong> introduit les sœurs dominicaines dans les<br />

Disp<strong>en</strong>saires et Hôpitaux qu'elle dirigeait avec certaines dames <strong>de</strong> la noblesse. La duchesse<br />

<strong>de</strong> Palmela, qui était la première dame <strong>de</strong> la Cour, avait mis les soeurs Franciscaines<br />

dans la direction <strong>de</strong>s Cuisines Economiques l . Elle contribuait pour cette institution<br />

avec <strong>de</strong> grosses sommes d'arg<strong>en</strong>t. <strong>Les</strong> confesseurs <strong>de</strong> la Reine et <strong>de</strong>s Princes<br />

étai<strong>en</strong>t maint<strong>en</strong>ant recrutés parmi les congréganistes; le <strong>de</strong>rnier <strong>à</strong> occuper cette place<br />

fut le P. Fragues, un Lazariste. Au temps du roi Louis, tous les ans, p<strong>en</strong>dant la semaine<br />

sainte,<br />

on mandait au Palais un évoque portugais pour confesser la fam<strong>de</strong> royale,<br />

ce qui était r<strong>en</strong>du public par les journaux. A l'avènem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> Charles, sa femme Amélie<br />

d'Orléans fit<br />

disparaître cette coutume.<br />

Examinant tous ces faits, <strong>à</strong> la suite du décret du 18 avril 1901, les jésuites p<strong>en</strong>sèr<strong>en</strong>t<br />

qu'il fallait donner <strong>de</strong> la force <strong>à</strong> un parti catholique, <strong>en</strong> formation <strong>de</strong>puis quelques<br />

années <strong>à</strong> l'intérieur même <strong>de</strong>s partis libéraux; ils essayèr<strong>en</strong>t alors d'<strong>en</strong>gager ceux<br />

<strong>de</strong>s politici<strong>en</strong>s qui étai<strong>en</strong>t leurs amis <strong>à</strong> s'éloigner <strong>de</strong> ces partis pour constituer un nouveau<br />

parti autonome sous le nom <strong>de</strong> Nationalisme. Dans les Archivés Congréganistes<br />

nous possédons une foule <strong>de</strong> lettres <strong>de</strong> différ<strong>en</strong>tes années, qui projett<strong>en</strong>t une gran<strong>de</strong> lumière<br />

sur ce mouvem<strong>en</strong>t politique <strong>de</strong>s jésuites. J'<strong>en</strong> transcrirai <strong>à</strong> peine quelques une?,<br />

bi<strong>en</strong> peu, pour ne pas grossir irop cet ouvrage; mais elles suffiront pour que l'on <strong>en</strong><br />

déduise, d'une manière décisive, qu'<strong>à</strong> cette 3 e époque les jésuites faisai<strong>en</strong>t tout leur possible<br />

pour influer sur la politique du pays, comme ils l'avai<strong>en</strong>t fait p<strong>en</strong>dant les <strong>de</strong>ux pério<strong>de</strong>s<br />

précéd<strong>en</strong>tes.<br />

Le P. Antoine Vaz, qui durant plusieurs années (1900-1908) fut le Socius <strong>de</strong>s<br />

Provinciaux, écrivit <strong>de</strong> ce parti l'histoire suivante, sur une feuille manuscrite que j'ai<br />

sous les yeux :<br />

«Différ<strong>en</strong>tes t<strong>en</strong>tatives avai<strong>en</strong>t été faites, <strong>de</strong>puis 25 ans, par <strong>de</strong>s personnalités <strong>de</strong><br />

la plus haute position politique (Barros Gomes, Jérôme Pim<strong>en</strong>tel, Ferreira Lobo, Comte<br />

<strong>de</strong> Casai Ribeiro, etc.) pour s'organiser et multiplier leurs énergies <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> la Religion<br />

et <strong>de</strong> la Patrie, mais chacun se maint<strong>en</strong>ait dans son parti politique plus ou moins<br />

<strong>en</strong>taché <strong>de</strong>s principes libéraux; et comme l'expéri<strong>en</strong>ce a prouvé que <strong>de</strong> pareilles t<strong>en</strong>tatives<br />

ne réussiss<strong>en</strong>t point, car, pour que l'attaque et la déf<strong>en</strong>se soi<strong>en</strong>t efficaces, il faut <strong>de</strong><br />

l'unité <strong>de</strong> plan et <strong>de</strong> tactique, ce qui était nécessairem<strong>en</strong>t affaibli par les susceptibilités<br />

politiques <strong>de</strong>s combattants, il se forma un groupe d'hommes <strong>de</strong> bonne volonté, amis<br />

sincères <strong>de</strong> l'Église, ou sortis <strong>de</strong>s factions politiques libérales ou indép<strong>en</strong>dants, qui décida<br />

<strong>en</strong> 1001, au mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la persécution religieuse et peur la déf<strong>en</strong>se <strong>de</strong> l'Église, <strong>de</strong> former<br />

un parti politique autonome sous les institutions <strong>en</strong> vigueur et avec la <strong>de</strong>vise «Dieu<br />

et Patrie», et le nom <strong>de</strong> «Nationalisme», avec un programme où il est non seulem<strong>en</strong>t<br />

question du respect dû <strong>à</strong> la Religion Catholique, Apostc lique et Romaine, qui est la<br />

Religion <strong>de</strong> l'État, mais aussi<br />

du rejet absolu <strong>de</strong>s erreurs libérales. En outre, on y déve-<br />

Restaurants ;i tri's bas prix, pour li^s ouvriers.


75<br />

loppe un programme politique incontestablem<strong>en</strong>t supérieur <strong>à</strong> ceux <strong>de</strong>s partis libéraux<br />

dans les questions administratives, financières, morales et sociales et offrant la garantie<br />

<strong>de</strong> plus grands avantages populaires bi<strong>en</strong> compris, comme tout le mon<strong>de</strong> l'avoue, adhér<strong>en</strong>ts<br />

et étrangers.<br />

«Et ce parti ayant déj<strong>à</strong> réalisé cinq congrès dans les principales villes du pays,<br />

où il déf<strong>en</strong>dit et répandit, avec l'approbation universelle, sa doctrine complètem<strong>en</strong>t<br />

orthodoxe dans la partie religieuse et jamais contredite dans la partie politique,— ayant<br />

déj<strong>à</strong> plus <strong>de</strong> soixante-dix mille membres inscrits qui votèr<strong>en</strong>t aux <strong>de</strong>rnières élections.<br />

il y a trois ans, et comptant sur la pleine adhésion <strong>de</strong> la presse catholique du pays et<br />

l'appui <strong>de</strong> tous les catholiques qui ont rejeté les maximes pernicieuses du libéralisme<br />

condamné par l'Eglise.<br />

«Il arrive que la revue religieuse Voz <strong>de</strong> Santo Antonio (Voix <strong>de</strong> S.' Antoine),<br />

dirigée et rédigée par <strong>de</strong>s moines du premier Ordre <strong>de</strong> Saint François, résidant au Collège<br />

<strong>de</strong> Montariol, <strong>à</strong> Braga, est la seule exception au chour unanime <strong>de</strong> la presse catholique.<br />

Imaginant qu'elle ori<strong>en</strong>te bi<strong>en</strong> les catholiques du pays, cette revue <strong>en</strong>seigne que:<br />

«1.° Le but primordial <strong>de</strong> ia société est <strong>de</strong> procurer <strong>à</strong> ses membres la plus gran<strong>de</strong><br />

somme <strong>de</strong> bi<strong>en</strong>s matériels.<br />

«2." La gran<strong>de</strong> majorité <strong>de</strong>s catholiques <strong>de</strong>vrait fuir l'urne électorale, qui est tout<br />

<strong>à</strong> fait inconsci<strong>en</strong>te.<br />

«o.° Le vote est un acte ess<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t politique et oblige forcém<strong>en</strong>t l'électeur <strong>à</strong> ne<br />

le donner qu'<strong>à</strong> celui qui déf<strong>en</strong>d ses idées politiques.<br />

«4.° La Voz <strong>de</strong> Santo Antonio avertit toujours les catholiques qu'<strong>en</strong> vertu d'unr<br />

déclaration <strong>de</strong> Sa Sainteté ils peuv<strong>en</strong>t rester dans les partis actuels (et ceux qui exist<strong>en</strong>t<br />

<strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>, sous les institutions <strong>en</strong> vigueur, sont tous libéraux, hormis le Nationalisme).<br />

«5.° Et elle ajoute que non seulem<strong>en</strong>t ils peuv<strong>en</strong>t, mais qu'ils doiv<strong>en</strong>t même y rester<br />

<strong>à</strong> cause <strong>de</strong> leurs idées politiques, s'il s'y trouve quelque catholique.<br />

«6° Et pour cela, <strong>à</strong> tout catholique qui p<strong>en</strong>serait sortir d'un parti libéral pour <strong>en</strong>trer<br />

dans le Nationalisme, parce que sa consci<strong>en</strong>ce l'y aurait décidé, la Voz lui signifie<br />

<strong>de</strong> rester où il<br />

est.<br />

«7° La même Revue proclame que les catholiques doiv<strong>en</strong>t élargir davantage les<br />

domaines <strong>de</strong> leur tolérance jusqu'au point <strong>de</strong> s'unir aux conservateurs (libéraux) <strong>en</strong> un<br />

parti qui n'ait pas l'étiquette ost<strong>en</strong>sible <strong>de</strong> catholique, dans lequel on ne prés<strong>en</strong>te pas,<br />

comme but principal <strong>de</strong> son action politique, <strong>de</strong>s réclamations <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> l'Eglise,<br />

mais où tous soi<strong>en</strong>t tacitem<strong>en</strong>t d'accord sur la nécessité <strong>de</strong> son exist<strong>en</strong>ce.<br />

«8° Pour l'élection <strong>de</strong>s Députés, la dite Revue proclame qu'il ne sera point fait <strong>de</strong><br />

différ<strong>en</strong>ce <strong>en</strong>tre les catholiques militants et les non militants.<br />

«9° Finalem<strong>en</strong>t, la Voz, sout<strong>en</strong>ant que tout citoy<strong>en</strong> doit travailler pour le bi<strong>en</strong> commun<br />

du pays selon ses convictions, et comme la presse catholique affirme que la proposition<br />

est vraie lorsque les convictions du citoy<strong>en</strong> sont bi<strong>en</strong> fondées et le concept qu'il a<br />

du bi<strong>en</strong> commun est bi<strong>en</strong> formé, la Voz s'insurge contre la distinction <strong>en</strong>tre catholiques<br />

militants et non militants, <strong>en</strong> la considérant superflue, parce que — dit elle — l'individu<br />

qui est dans l'erreur est toujours obligé do suivre sa consci<strong>en</strong>ce, car il ne lui est pas<br />

possible <strong>de</strong> se convaincre du contraire. Ceci équivaut <strong>à</strong> rétablir le subjectivisme comme<br />

critérium.<br />

«En vue <strong>de</strong> ceci et pour mettre un terme au trouble et <strong>à</strong> la discor<strong>de</strong> que <strong>de</strong> pareilles<br />

opinions ont semé parmi les catholiques, nous <strong>de</strong>mandons :<br />

«1° La Voz <strong>de</strong> Santo Antonio ori<strong>en</strong>te-t-elle bi<strong>en</strong> ou mal les catholiques portugais?<br />

«2° La Voz <strong>de</strong> Santo Antonio est-elle, pour ce motif, digne d'éloge ou <strong>de</strong> blâme?»


76<br />

Par la notice ci-<strong>de</strong>ssus nous pr<strong>en</strong>ons connaissance, d'une manière résumée, <strong>de</strong> l'histoire<br />

progressive au Parti Nationaliste et du but principal <strong>de</strong> ce parti, savoir: le rétablissem<strong>en</strong>t<br />

légal <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> <strong>de</strong>s congrégations religieuses et principalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la Compagnie<br />

<strong>de</strong> Jésus. Une longue série <strong>de</strong> lettres ^<strong>de</strong> Emmanuel Frutuoso da Fouseca, rédacteur<br />

principal du journal catholique <strong>de</strong> Porto, A Palavra (La Parole), adressées au P. Séraphin<br />

Gomes, résidant au Quelhas et membre <strong>de</strong> la rédaction du M<strong>en</strong>sageiro do Coraçâo<br />

<strong>de</strong> Jésus <strong>de</strong>puis 1899 jusqu'<strong>à</strong> 1908, nous retrace assez minutieusem<strong>en</strong>t la marche asc<strong>en</strong>tionnelle<br />

<strong>de</strong> ce parti. Parmi toutes ces lettres j'<strong>en</strong> citerai <strong>à</strong> peine quelques passages qui<br />

marqu<strong>en</strong>t nettem<strong>en</strong>t les diverses étapes du parti :<br />

1901 — Le 29 décembre.— «Le mouvem<strong>en</strong>t catholique est un «fiasco» <strong>de</strong> plus par la<br />

faute <strong>de</strong> messieurs les dirigeants qui trouv<strong>en</strong>t que la victoire sera gagnée sans lutte et<br />

sans compromis avec les politici<strong>en</strong>s. En petit nombre, désunis et nous attaquant mutuellem<strong>en</strong>t,<br />

que pouvons-nous faire?. . . Le chanoine Anaquim est v<strong>en</strong>u me saluer. Je lui <strong>en</strong><br />

ai dit <strong>de</strong> belles sur le Cercle et la honte d'avoir diminué le format du Correio * <strong>à</strong> cette<br />

occasion où il se disait l'organe officiel du Cercle».<br />

1902 — Le 18 uin. — «Réunion du Cercle pour créer un c<strong>en</strong>tre électoral. <strong>Les</strong> statuts<br />

son déj<strong>à</strong> faits ;<br />

ils ont été fournis par le Comte <strong>de</strong> Samodâes et affichés par Mr. Pestana.<br />

Le Nationalisme suit son chemin, mais comme un petit <strong>en</strong>fant qui comm<strong>en</strong>ce <strong>à</strong> se<br />

t<strong>en</strong>ir <strong>de</strong>bout. Exception faite du P. Abreu et <strong>de</strong> Mr. Pestana qui pr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t la chose sérieusem<strong>en</strong>t,<br />

le reste est nul dans le Nationalisme ou se prépare <strong>à</strong> <strong>en</strong>trer, quand le terrain<br />

aura été défriché. L'excursion <strong>à</strong> Guimarâes a très bi<strong>en</strong> réussi et a fait quelque bi<strong>en</strong>,<br />

quand ce ne serait<br />

que <strong>de</strong> pousser <strong>de</strong>s vivats aux congrégations religieuses et aux jésuites.<br />

Ces geus-l<strong>à</strong> ont été étonnés <strong>de</strong> ce qu'il n'y ait pas eu le plus léger incid<strong>en</strong>t».<br />

1903 — Le 10 juin.— «À propos du Congrès Catholique, si vous avez déj<strong>à</strong> lu la<br />

gazette, vous savez déj<strong>à</strong> ce qui s'est passé. Passons outre. . . Ceux <strong>de</strong> la Commission <strong>de</strong><br />

Lisbonne sont partis <strong>en</strong>chantés. Bertiandos était gai comme un pinson; Jacinto nageait<br />

dans la joie; M<strong>en</strong><strong>de</strong>s Lages s'applaudissait <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong>ur du Congrès; le Dr. Pulido<br />

Garcia mangeait même sa moustache <strong>à</strong> force <strong>de</strong> se pourlécher ;<br />

le Comte <strong>de</strong> Samodâes a<br />

donné 20$000 réis (100 frs.) pour la quête; Mr. Pestana débordait <strong>de</strong> joie et le P. Abreu,<br />

s'il n'est pas mort <strong>de</strong> joie, c'est qu'il s'est souv<strong>en</strong>u qu'il est <strong>en</strong>core nécessaire ici pour continuer<br />

<strong>à</strong> <strong>en</strong>voyer <strong>de</strong>s lettres partout, etc.» 2 .<br />

Le Nationalisme, ayant déj<strong>à</strong> quelques c<strong>en</strong>tres et <strong>de</strong>s voix électorales, comm<strong>en</strong>ça <strong>à</strong><br />

être recherché par le Parti Libéral Conservateur (Régénérateur) pour accords électoraux.<br />

1905 — Le 25 août.— «Un groupe <strong>de</strong> Nationalistes maniaques étudie la proposition<br />

faite par Vargas <strong>à</strong> Jacinto et qui consiste <strong>en</strong> ce que les Nationalistes form<strong>en</strong>t l'extrême<br />

1<br />

II s'agit du Correio Xacional, organe officiel du Parti Nationaliste, dont le directeur principal<br />

était le Dr. Anaquim, chanoine <strong>de</strong> la Cathédrale <strong>de</strong> Lisbonne.<br />

- <strong>Les</strong> personnes auxquelles cette lettre fait allusion étai<strong>en</strong>t -celles dont les jésuites se servai<strong>en</strong>t<br />

surtout pour leur mouvem<strong>en</strong>t Nationaliste. M<strong>en</strong><strong>de</strong>s Lages <strong>de</strong>vint veuf <strong>en</strong> 1908 et <strong>en</strong>tra dans la Compagnie<br />

<strong>de</strong> Jésus. L'auteur <strong>de</strong> la lettre caricaturise ces figures, <strong>en</strong> leur donnant la forme qui les caractérise<br />

parfaitem<strong>en</strong>t : c'étai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s créatures très réactionnaires, très ridicules et d'une basse<br />

m<strong>en</strong>talité.


droite du Parti Régénérateur; nous aurions pour chef suprême le Prince <strong>de</strong>s Séraphins,<br />

puis, le<br />

beau et blond Jacinto» '.<br />

1906 — Le 27 juillet.— «Pour le mom<strong>en</strong>t il n'y a <strong>en</strong>core aucune <strong>en</strong>t<strong>en</strong>te avec les<br />

Nationalistes. Il y a <strong>de</strong>s négociations <strong>en</strong>tre Jacinto et Hintze ; celui-l<strong>à</strong> exige que les Régénérateurs<br />

donn<strong>en</strong>t aux Nationalistes autant <strong>de</strong> Députés qu'aux Dissid<strong>en</strong>ts».<br />

était<br />

<strong>Les</strong> Dissid<strong>en</strong>ts, dont il est question dans cette lettre, c'était lo parti dont le chef<br />

l'ex-Ministre Alpoim, qui s'était séparé du Parti Progressiste dirigé par Joseph Luci<strong>en</strong><br />

<strong>de</strong> Castro. Le Parti Régénérateur avait aussi subi, auparavant, une dissid<strong>en</strong>ce :<br />

Jean Franco et ses amis politiques s'étai<strong>en</strong>t séparés <strong>de</strong> leur chef Hintze Ribeiro. <strong>Les</strong><br />

jésuites avec les Nationalistes cherchèr<strong>en</strong>t alors <strong>à</strong> acquérir <strong>de</strong> l'importance politique,<br />

mettant <strong>à</strong> profit la faiblesse <strong>de</strong>s partis rotatifs du Gouvernem<strong>en</strong>t, faiblesse qui prov<strong>en</strong>ait<br />

<strong>de</strong> ces dissid<strong>en</strong>ces. <strong>Les</strong> Nationalistes suivir<strong>en</strong>t alors le chemin <strong>de</strong>s <strong>en</strong>t<strong>en</strong>tes ou accords<br />

politiques<br />

pour obt<strong>en</strong>ir <strong>de</strong>s Députés <strong>à</strong> eux au Parlem<strong>en</strong>t.<br />

Comme nous l'avons vu par la lettre précéd<strong>en</strong>te, l'accord se faisait <strong>en</strong> 1906 avec<br />

Hintze, qui gouvernait; <strong>en</strong> 1907 Jean Franco montait au pouvoir et c'est avec lui<br />

que traitèr<strong>en</strong>t quelques uns <strong>de</strong>s chefs Nationalistes, quoique plusieurs d'<strong>en</strong>tre eux fuss<strong>en</strong>t<br />

<strong>en</strong> désaccord avec ce chef <strong>de</strong> parti.<br />

Le Gouvernem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> Jean Franco, pr<strong>en</strong>ant rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t le chemin <strong>de</strong> la dictature,<br />

irrita tous les vrais libéraux et surtout le Parti Républicain qui alors avait déj<strong>à</strong> acquis<br />

une gran<strong>de</strong> force dans le pays. Ce fut <strong>à</strong> cette occasion que les jésuites décidèr<strong>en</strong>t <strong>de</strong><br />

pr<strong>en</strong>dre part, effrontém<strong>en</strong>t, <strong>à</strong> la politique : ils se chargèr<strong>en</strong>t du journal intitulé <strong>Portugal</strong>,<br />

obt<strong>en</strong>ant <strong>de</strong> la Comtesse <strong>de</strong> Sarm<strong>en</strong>to quelques milliers <strong>de</strong> francs pour relever l'<strong>en</strong>treprise<br />

du journal qui avait fait faillite -.<br />

Ce fait'n'a point passé inaperçu dans la presse catholique. Ainsi, le rédacteur <strong>de</strong><br />

A Palarra, Emmanuel Frutuoso da Fonseca, déj<strong>à</strong> cité, écrit <strong>à</strong> son ami le P. Séraphin<br />

Gomes :<br />

«Ici on dit que la Compagnie a dép<strong>en</strong>sé une grosse somme pour payer les <strong>de</strong>ttes<br />

du journal <strong>Portugal</strong>».<br />

Le P. Santanna était le principal rédacteur du <strong>Portugal</strong>, mais ses articles ne plaisai<strong>en</strong>t<br />

pas beaucoup <strong>à</strong> certains catholiques, comme au précité rédacteur <strong>de</strong> A Palavra<br />

qui, le 27 janvier 1908, écrivait <strong>à</strong> son ami :<br />

«... Il me semble que Santanna ne fait pas bi<strong>en</strong> <strong>de</strong> se mêler <strong>de</strong>s affaires <strong>de</strong><br />

l'administration. Et, <strong>en</strong>tre nous, ses articles sont excell<strong>en</strong>ts, mais je les trouve inopportuns.<br />

Ce n'est point avec du vinaigre que l'on attrape <strong>de</strong>s mouches. <strong>Les</strong> temps ne sont<br />

pas <strong>en</strong>core propices pour <strong>de</strong>s articles <strong>de</strong> cet ordre, qui indign<strong>en</strong>t les <strong>en</strong>nemis et déplais<strong>en</strong>t<br />

<strong>à</strong> un grand nombre d'amis. Nous traversons une pério<strong>de</strong> d'agitation et il faut être<br />

prud<strong>en</strong>t, parce que les journaux attaqu<strong>en</strong>t déj<strong>à</strong> les jésuites et le Quelhas et il peut se<br />

1<br />

Prince <strong>de</strong>s Séraphins c'était le nom qu'on donnait <strong>à</strong> Hint/.c Ribeiro. parce qu'il avait reçu<br />

une décoration étrangère avec ce titre. Hintze Ribeiro était le chef du Parti Régénérateur, le parti<br />

le plus conservateur <strong>de</strong> la politique gouvernem<strong>en</strong>tale d'alors. Varga> ér ai r on <strong>de</strong>s Ministres d'Etat<br />

Le beau et blond Jacinto c'était Jacir.to Candi<strong>de</strong>, chef Nationaliste, dont le type blond et efféminé sa<br />

prêtait aux plaisanteries <strong>de</strong> l'époque.<br />

2 Ce fut le l'ère Santanna qui obtint cet arg<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la Comtesse <strong>de</strong> Sarm<strong>en</strong>to, comme j'<strong>en</strong> conclus<br />

d'une lettre <strong>de</strong> Joseph Antoine Bano~o qui. p<strong>en</strong>dant <strong>de</strong> longue, années, fut l'ai<strong>de</strong> du procureur<br />

<strong>de</strong>s jésuites et aussi l'administrateur <strong>de</strong>s journaux catholiques <strong>à</strong> ori<strong>en</strong>tation jésuitique. Dans les livres<br />

<strong>de</strong> comptes <strong>de</strong>s jésuites on voit la somme <strong>de</strong> 17 contas |8ô:0OO francos) dép<strong>en</strong>sés par les jésuites<br />

pour leur journal <strong>Portugal</strong>. La Comtesse <strong>de</strong> Sarm<strong>en</strong>to était une dame très riche et très dévote; elle<br />

avait pour confesseur le Père Santanna, comme on le voit par le Journal <strong>de</strong> la<br />

qui se trouve aux Archives Congréganistes.<br />

m<br />

Résid<strong>en</strong>ce du Quelhas,


78<br />

produire quelque chose <strong>de</strong> désagréable. Mais que ceci soit dit seulem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tre nous, car<br />

le Quartier Général est <strong>à</strong> Lisbonne et voit mieux ce qu'on fait que moi ce que je dis».<br />

Cep<strong>en</strong>dant Santanna <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ait chaque fois plus agressif dans la politique et excitait<br />

contre les jésuites la haine <strong>de</strong> tous les libéraux et surtout <strong>de</strong>s républicains qui, s<strong>en</strong>tant<br />

que l'opinion et la volonté du pays étai<strong>en</strong>t chaque fois plus <strong>de</strong> leur côté, préparèr<strong>en</strong>t une<br />

révolution pour le 28 janvier 1908, qui ne s'est pas réalisée, parce que les chefs <strong>de</strong> la<br />

conspiration fur<strong>en</strong>t découverts et arrêtés par les ordres <strong>de</strong> Jean Franco, chef du Gouvernem<strong>en</strong>t.<br />

Ces arrestation*, eur<strong>en</strong>t pour ce Ministre <strong>de</strong>s conséqu<strong>en</strong>ces funestes, comme nous le<br />

verrons.<br />

Le rédacteur <strong>de</strong> A Palavra continuait cep<strong>en</strong>dant <strong>à</strong> désapprouver les articles politiques<br />

que le P. Sautanna publiait dans le journal <strong>Portugal</strong>; ainsi il écrit presque prophétiquem<strong>en</strong>t<br />

<strong>à</strong> son ami, le 1 er février 1908:<br />

«Je trouve que le <strong>Portugal</strong> n'est pas bi<strong>en</strong> <strong>en</strong>tre les mains du Quelhas, parce que<br />

au <strong>de</strong>hors on le sait, et les haines retomb<strong>en</strong>t sur la Compagnie. Comme tu le sais, je<br />

Iîb tous les journaux et je constate qu'ils attaqu<strong>en</strong>t davantage la Compagnie, <strong>de</strong>puis que<br />

le <strong>Portugal</strong> lui est confié. C'est un danger. Je sais bi<strong>en</strong> que <strong>de</strong> toutes façons ils haïss<strong>en</strong>t<br />

la Compagnie, mais, si elle cesse d'être <strong>en</strong> évid<strong>en</strong>ce, ils l'oublieront un peu. Si la révolution<br />

avait réussi, les maisons <strong>de</strong> Quelhas et <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> <strong>en</strong> aurai<strong>en</strong>t souffert, et cela<br />

peut-être pareeque le P. Santanna écrit dans le <strong>Portugal</strong>. Ils le sav<strong>en</strong>t tous et l'ont dit<br />

dans leurs journaux».<br />

La révolution du 28 n'avait pas pris et Jean Franco réussit<br />

<strong>à</strong> mettre <strong>en</strong> prison les<br />

principaux républicains, <strong>de</strong>s journalistes et députés, comme Franya Borges, directeur <strong>de</strong><br />

Mundo (Le Mon<strong>de</strong>), et les docteurs Antoine Joseph <strong>de</strong> Almeida et Alphonse Costa, députés<br />

très aimés dans tout le pays; et il fit signer par le Roi Charles un décret terrible<br />

<strong>de</strong> bannissem<strong>en</strong>t perpétuel <strong>de</strong> ces prisonniers dans <strong>de</strong>s<br />

régions insalubres. Ce décret fut<br />

publié dans le journal officiel iD'iârio do Govêrno), le 30 janvier 1908. Mais ce fut un<br />

décret <strong>de</strong> peine <strong>de</strong> mort pour le Roi qui le signa: car le 2 février suivant, comme il<br />

rev<strong>en</strong>ait <strong>de</strong> Vila Vieosa, arrivant <strong>à</strong> Lisbonne vers 4 heures <strong>de</strong> l'après-midi, <strong>en</strong> traversant<br />

la Place du Commerce <strong>en</strong> voiture vers la Rue <strong>de</strong> l'Ars<strong>en</strong>al, il fut tué <strong>à</strong> coups <strong>de</strong> fusil,<br />

ainsi que le Prince Royal, par quelques conjurés. Par suite <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux morts, le second<br />

fils du Roi, le Prince Emmanuel, monta sur le trône. P<strong>en</strong>dant son règne très court, qui<br />

ne dura quun peu plus <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux années, les jésuites continuèr<strong>en</strong>t <strong>de</strong> plus <strong>en</strong> plus <strong>à</strong><br />

s'immiscer dans les<br />

luttes politiques.<br />

Règne <strong>de</strong> Emmanuel II (1908-<strong>1910</strong>)<br />

<strong>Les</strong> jésuites et les catholiques nationalistes ne sur<strong>en</strong>t pas voir les conséqu<strong>en</strong>ces <strong>de</strong><br />

la mort <strong>de</strong> Charles I er et <strong>de</strong> son fils; ils ne voulur<strong>en</strong>t pas compr<strong>en</strong>dre que le pays détestait<br />

les idées jésuitiques et rétrogra<strong>de</strong>s, parce que le pays voulait avancer. Au contraire,<br />

comme ils voyai<strong>en</strong>t maint<strong>en</strong>ant sur le trône un roi très jeune (<strong>de</strong> dix-sept ans <strong>à</strong> peine),<br />

dont le confesseur était un prêtre congréganiste (le Lazariste Fragues) et qui avait pour<br />

conseillère et dirigeante presque' absolue sa mère, la réactionnaire Reine Amélie, qui se<br />

confessait au même Lazariste — les cléricaux trouvèr<strong>en</strong>t que l'occasion était opportune<br />

pour miner au Palais.<br />

Ainsi l'avoue le rédacteur <strong>de</strong> A Palavra <strong>à</strong> son ami jésuite, le 5 <strong>de</strong><br />

ce même mois <strong>de</strong> février, trois jours seulem<strong>en</strong>t après la mort du Roi Charles:<br />

«Au Palais nous <strong>de</strong>vons maint<strong>en</strong>ant avoir plus d'affection sincère.<br />

«La Reine mère doit être <strong>à</strong> nous; le Roi, élevé comme il l'a été, doit s<strong>en</strong>tir <strong>de</strong> la syui-


patbie pour nous. Comme les <strong>de</strong>sseins <strong>de</strong> Dieu sont insondables, qui sait si d'un grand<br />

malheur et d'un manque d'humanité il ne résultera pas un grand bi<strong>en</strong>?<br />

«Dieu veuille que la Direction du journal le <strong>Portugal</strong> soit confiée, au moins apparemm<strong>en</strong>t,<br />

<strong>à</strong> quelqu'un qui puisse faire face au jacobinisme, car si l'on continue <strong>à</strong> dire<br />

que c'est le Quelhas qui y<br />

gouverne, il peut se produire quelque chose <strong>de</strong> désagréable,<br />

surtout maint<strong>en</strong>ant que les rotatifs lèv<strong>en</strong>t la tête. Jules <strong>de</strong> Vilh<strong>en</strong>a est un homme ins<strong>en</strong>sible,<br />

qui me fait peur. En outre, la Compagnie et ses collèges doiv<strong>en</strong>t filer doux, autrem<strong>en</strong>t<br />

ils seront battus. D'autre part, si un membre <strong>de</strong> la direction du parti nationaliste<br />

n'est pas d'accord avec l'ori<strong>en</strong>tation du journal <strong>Portugal</strong>, cette mauvaise volonté peut<br />

se manifester, et produire une certaine hostilité contre la Compagnie, <strong>de</strong> la part <strong>de</strong><br />

quelques Nationalistes plus révolutionnaires».<br />

En effet les jésuites ont apparemm<strong>en</strong>t confié la direction <strong>de</strong> leur journal <strong>Portugal</strong><br />

<strong>à</strong> une société <strong>de</strong> prêtres dénommée Veritas. A partir <strong>de</strong> ce mom<strong>en</strong>t le rédacteur<br />

principal fut un certain prêtre, Matos, qui avait été rédacteur du journal libéral progressiste<br />

Correio ila Noife (Courrier du Soir. Mais cd réalité les jésuites continuèr<strong>en</strong>t<br />

<strong>à</strong> exercer leur influ<strong>en</strong>ce dans la politique du journal <strong>Portugal</strong> et du Parti Nationaliste,<br />

comme on le déduit du Didrio


80<br />

vraie doctrine, mais plutôt .le manque <strong>de</strong> courage et surtout la lâcheté dont tant <strong>de</strong> g<strong>en</strong>s<br />

souffr<strong>en</strong>t <strong>à</strong> cette<br />

époque.»<br />

Le 25 du même mois, le<br />

P. Antoine Vaz, membre <strong>de</strong> la même Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> Braga,<br />

écrivait au Supérieur Louis Campo Santo, qui était alors <strong>en</strong> mission <strong>à</strong> Ponte da<br />

Barca :<br />

«Il est absolum<strong>en</strong>t nécessaire et urg<strong>en</strong>t que le P. Joachim publie, dans <strong>de</strong>s articles<br />

au journal <strong>Portugal</strong>, ce qu'il a écrit pour la Lettre du M<strong>en</strong>sageiro . . . Monsieur le Vice-<br />

Recteur, ainsi que tous les prêtres du Séminaire, est indigné contre la Voz et les Vozeadores,<br />

' et j'ai déj<strong>à</strong> <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du quelqu'un dire que c'était aux jésuites <strong>de</strong> déf<strong>en</strong>dre la vérité».<br />

Le 6 juin, le P. Louis insistait auprès <strong>de</strong> son frère Joachim <strong>de</strong> cette manière :<br />

«Il me plaît beaucoup que la Lettre soit publiée, au milieu <strong>de</strong> ces ténèbres que les<br />

petits moines s'efforc<strong>en</strong>t <strong>de</strong> répandre. On dirait que l'âme religieuse est affolée <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>.<br />

Avez-vous vu Abûndio dans la Liberda<strong>de</strong> et Germano dans le Bem Ptiblico?'* Ils<br />

sont tous fous! 11 faut que la Compagnie s'empresse <strong>de</strong> déf<strong>en</strong>dre l'Église, quoi qu'il arrive.<br />

C'est pour cela qu'elle est née, qu'elle est morte et est ressuscitée. J'ai été informé<br />

<strong>de</strong> ce qu'un autre numéro <strong>de</strong> la Voz a déj<strong>à</strong> paru hier et qu'il insiste, citant le Siglo<br />

Futuro 3 <strong>en</strong> sa faveur...<br />

« Je vous prie <strong>de</strong> ne pas leur épargner le sel et le poivre, car les fautes ne sont point<br />

commises par ignorance. Ils<br />

font para<strong>de</strong> <strong>de</strong> leurs nouveautés, et quoad mores et t<strong>en</strong>ue extérieure,<br />

ils err<strong>en</strong>t au hasard,<br />

sans s'inquiéter les uns <strong>de</strong>s autres, faisant ainsi songer aux<br />

vieux couv<strong>en</strong>ts relâchés. L'année <strong>de</strong>rnière il est v<strong>en</strong>u ici un prêtre espagnol gradué dans<br />

son Ordre et portant le titre d'Inspecteur. On dit qu'il s'<strong>en</strong> est retourné fatigué <strong>de</strong> les<br />

répriman<strong>de</strong>r <strong>à</strong> cause <strong>de</strong> leurs idées mo<strong>de</strong>rnistes . . . mais il n'y a point réussi».<br />

Cette question fut même très débattue <strong>en</strong>tre les jésuites. Ceux <strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong><br />

Braga, les PP. Louis Campo Santo, Antoine Vaz, JeanArraiano et aussi le P. M<strong>en</strong>ezes,<br />

Socius du P. Provincial, étai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> farouches déf<strong>en</strong>seurs du <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> consci<strong>en</strong>ce qui<br />

ordonnait aux catholiques <strong>de</strong> s'inscrire au Parti Nationaliste, tandis que le P. Joachim<br />

Campo Santo, rédacteur du M<strong>en</strong>sageiro do C. <strong>de</strong> Jésus, le Provincial Louis Cabrai et aussi le<br />

Nonce Apostolique Tonti n'étai<strong>en</strong>t point <strong>de</strong> la même opinion. Sur ce point nous avons <strong>de</strong>ux<br />

lettres,<br />

adressées au rédacteur du M<strong>en</strong>sageiro do C. <strong>de</strong> Jésus, rapportant une très vive discussion<br />

qui eut lieu dans la Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> Braga. Une <strong>de</strong> ces lettres est du P. Louis<br />

Campo Santo et l'autre du P. Jean Ar'-aiano. De celle <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier nous transcrirons<br />

les passages suivants (elle est datée du 4 août 1909) :<br />

«Le P. Provincial (qui a passé par ici <strong>en</strong> allant au Gérez et a subi une vraie sabbatine,<br />

car durant plus d'une heure nous avons tous argum<strong>en</strong>té contre lui) est d'opinion<br />

qu'il n'y a pas le <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> consci<strong>en</strong>ce ;<br />

mais le P. Socius, qui est égalem<strong>en</strong>t v<strong>en</strong>u, est<br />

<strong>de</strong> notre opinion. Je p<strong>en</strong>se que cette manière <strong>de</strong> voir du R. P. Provincial est due <strong>à</strong> l'influ<strong>en</strong>ce<br />

du milieu où il vit: <strong>à</strong> Lisbonne il n'y a pas <strong>de</strong> mouvem<strong>en</strong>t nationaliste. C'est<br />

comme si ce parti n'existait pas. Il nous a dit que M. le Nonce p<strong>en</strong>se aussi <strong>de</strong> même;<br />

ce n'est pas étonnant, il est diplomate : il ne veut point d'obstacles et ignore la vie du<br />

Nationalisme. S'il n'existait pas <strong>de</strong> parti Nationaliste, nous aussi nous n'aurions aucune<br />

raison d'imposer le <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> quitter les partis monarchistes dans lesquels chacun militerait.<br />

Mais du mom<strong>en</strong>t qu'il s'est formé un parti politique, vraim<strong>en</strong>t catholique, <strong>à</strong> l'occa-~<br />

1 <strong>Les</strong> partisans <strong>de</strong> la « Voz».<br />

- Abûndio da Silva et Germano dos Santos étai<strong>en</strong>t rédacteurs, respectivem<strong>en</strong>t, <strong>de</strong>s journaux<br />

catholiques <strong>de</strong> Lisbonne Liberda<strong>de</strong> (Liberté) et Bem Pùhlico (Bi<strong>en</strong> Publie), qui eur<strong>en</strong>t peu <strong>de</strong> lecteurs<br />

et fur<strong>en</strong>t <strong>de</strong> courte durée.<br />

3<br />

Le Siglo Futuro était un journal catholique espagnol.


81<br />

sion <strong>de</strong> la<br />

persécution religieuse <strong>de</strong> 1901 au prix <strong>de</strong> tant <strong>de</strong> sacrifices, d'afflictions et <strong>de</strong><br />

vies, et le voyant se développer <strong>à</strong> travers tout ce pays, au point <strong>de</strong> former un parti qui<br />

pourra faire face au courant ruineux <strong>de</strong>s autres partis, n'avons-nous pas le grave <strong>de</strong>voir<br />

d'y adhérer? Ou les<br />

existe.<br />

déductions légitimes du droit naturel sont sans valeur, ou ce <strong>de</strong>voir<br />

<strong>Les</strong> argum<strong>en</strong>ts allégués <strong>en</strong> faveur du contraire ne peuv<strong>en</strong>t <strong>en</strong> aucune façon infirmer<br />

cette thèse. Et le<br />

P. Antoine d'Azevedo n'était exagéré que sur la manière. Le premier<br />

article (que nous avons lu avec gran<strong>de</strong> anxiété et curiosité), quoique insipi<strong>de</strong> par<br />

sa trop gran<strong>de</strong> douceur <strong>en</strong>vers les adversaires, nous a laissé cette seule impression : que<br />

V. R. ce ne voulait pas se manifester sur le <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> consci<strong>en</strong>ce; et lorsque nous avons<br />

vu la Voz interpréter ainsi V. R. ce ,<br />

nous nous sommes tous insurgés contre elle ;<br />

et c'est<br />

l<strong>à</strong>-<strong>de</strong>ssus — si je ne me trompe — que le R. P. Supérieur vous a écrit d'ici. =<br />

Jean Arraiano, S. J.».<br />

En effet le P. Louis Campo Santo, Supérieur <strong>de</strong>,la Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> Braga, avait écrit,<br />

le 3 août, <strong>à</strong> son frère, rédacteur du M<strong>en</strong>sageiro, la lettre suivante:<br />

«Mon cher Joachim.— Vous avez été très heureux clans tout ce travail contre la<br />

Voz, excepté sur un point: c'est quand vous avez déclaré ne pas croire que ce fût un<br />

<strong>de</strong>voir <strong>de</strong> consci<strong>en</strong>ce d'adhérer <strong>à</strong> un parti catholique déj<strong>à</strong> formé et avec un programme si<br />

glorieux, comme c'est le cas <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>. Vous avez <strong>de</strong> la sorte brisé la cruche <strong>à</strong> l'<strong>en</strong>trée<br />

<strong>de</strong> la porte, <strong>en</strong> rev<strong>en</strong>ant <strong>de</strong> la fontaine. C'est un vrai désastre qui ne peut ôtre<br />

bi<strong>en</strong> apprécié qu'ici dans le Nord. Que d'hésitants sont restés, avec armes et bagages,<br />

dans les partis libéraux, où leur consci<strong>en</strong>ce les persécutait, et se préparai<strong>en</strong>t déj<strong>à</strong> pour<br />

une émigration salutaire? Mais ainsi l'honneur et le profit sont chez eux, ainsi que la<br />

consci<strong>en</strong>ce et l'arg<strong>en</strong>t, et bi<strong>en</strong> fou et utopiste est celui qui sacrifie ses intérêts matériels<br />

<strong>à</strong> <strong>de</strong>s balivernes d'idéaux politiques. Je dis cela, parce que hier est arrivé ici, <strong>en</strong> passant<br />

pour aller au Gérez, le R. P. Provincial avec son Socius le P. M<strong>en</strong>ezes, et les Pères<br />

d'ici déplorai<strong>en</strong>t una voce le malheur <strong>de</strong> cette déclaration, Ce fut une vraie sabbatine<br />

où le R. P. Cabrai — qui n'a point étudié cette question et qui habite le Midi où le<br />

Nationalisme n'est <strong>en</strong>core qu'un cas rationis ratiocinantis— est resté interdit sans savoir<br />

que répondre. J'ai compris qu'il croyait que nous disions que celui qui n'est pas dans<br />

le<br />

Nationalisme tombe, ipso facto, <strong>en</strong> péché mortel — et ce n'est pas du tout cela. Il faut<br />

que ce soit fait par évolution et par l'éducation, <strong>en</strong> formant bi<strong>en</strong> les consci<strong>en</strong>ces avec<br />

les précautions <strong>de</strong> l'admonestation prescrites par la morale, sans former <strong>de</strong>s consci<strong>en</strong>ces<br />

faussées, mais aussi sans les laisser s'<strong>en</strong>dormir dans une stérile tranquillité. C'est<br />

le P. M<strong>en</strong>ezes, Socius, qui s'est fait remarquer davantage dans la sabbatine — <strong>en</strong> sout<strong>en</strong>ant<br />

le <strong>de</strong>voir très grave d'adhérer au parti catholique, comme il l'a déj<strong>à</strong> affirmé dans<br />

la presse <strong>en</strong> <strong>de</strong> successifs articles qu'il est prêt <strong>à</strong> rééditer. Il a mérité que le R. P. Cabrai<br />

lui dise aussitôt, et publiquem<strong>en</strong>t dans le réfectoire, <strong>de</strong>vant nous tous: «Vous aviez<br />

le <strong>de</strong>voir d'être franc <strong>en</strong>vers moi et <strong>de</strong> ne pas me cacher votre manière <strong>de</strong> voir sur<br />

cette question». A ce mom<strong>en</strong>t j'ai dit au R. P. Provincial qu'il y avait bi<strong>en</strong> <strong>de</strong>ux mois<br />

je lui suggérais que ce serait un grand avantage <strong>de</strong> réunir quelques Pères, connaisseurs<br />

<strong>de</strong>s questions morales, afin d'uniformiser la doctrine sur ce point qui est capital <strong>à</strong> notre<br />

époque pour Yi<strong>de</strong>m sapiamu», i<strong>de</strong>m dicamns omnesn.<br />

Cinq jours plus tard, le même P. Louis Campo Santo écrit au P. Joachim, son<br />

frère, «ouvrant* son intérieur», comme il disait:<br />

«Maint<strong>en</strong>ant je vais ouvrir mon intérieur sur le cas. J'ai été Nationaliste <strong>de</strong>s premiers,<br />

je trouve le programme excell<strong>en</strong>t ;<br />

mais j'ai été découragé <strong>en</strong> voyant les chefs,<br />

et si Dieu n'<strong>en</strong>voie pas un homme, c'est parce qu'il ne veut pas guérir le paralytique<br />

dans la piscine. Je me suis ranimé <strong>à</strong> prés<strong>en</strong>t, non que nous ayons un homme (quoique<br />

j'aie assez <strong>de</strong> confiance <strong>en</strong> Pinheiro Torres). mais mon âme s'est révoltée, <strong>en</strong> voyant <strong>de</strong>s<br />

moines démolir <strong>à</strong> coups <strong>de</strong> pioche un peu <strong>de</strong> bi<strong>en</strong> que l'on avait élevé. Je ne peux


82<br />

pas voir le spectacle <strong>de</strong> la guerre faite <strong>à</strong> un drapeau, qui a déj<strong>à</strong> assisté <strong>à</strong> beaucoup <strong>de</strong><br />

sacrifices, <strong>à</strong> beaucoup <strong>de</strong> dévoûm<strong>en</strong>ts et qui ne peut couvrir que <strong>de</strong>s hommes dévoués<br />

<strong>à</strong> la cause <strong>de</strong> Dieu et <strong>de</strong> la Patrie, sans aucune préoccupation d'intérêts. Depuis le<br />

comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t j'aurais voulu que cette question fût <strong>en</strong>visagée sous ce point <strong>de</strong> vue.<br />

«C'est alors que les moines aurai<strong>en</strong>t reçu <strong>en</strong> plein les douches qui serai<strong>en</strong>t v<strong>en</strong>ues<br />

calmer leurs nerfs, leurs velléités <strong>de</strong> passer pour intellectuels. Ils se serai<strong>en</strong>t gardés<br />

d'aller interroger le Saint Siège, si leur habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> se moquer du bi<strong>en</strong> était licite ou<br />

illicite. Enfin je vous r<strong>en</strong>ds justice, <strong>en</strong> supposant que vous craignez justem<strong>en</strong>t une interrogation<br />

importune, mal formée sur le point <strong>de</strong> doctrine: est-ce un péché <strong>de</strong> ne pas<br />

<strong>en</strong>trer dans le Nationalisme tel qu'il est <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> ? Un quaeritur simple et naturel<br />

<strong>en</strong>voyé <strong>à</strong> Rome, surtout si Monseigneur le Nonce le marque du cordon <strong>de</strong> St. François,<br />

se retournerait certainem<strong>en</strong>t contre nous et nous <strong>en</strong> sortirions peu dignem<strong>en</strong>t.'<br />

Le P. Antonie Vaz, un autre jésuite <strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> Braga, critiquait dans une<br />

lettre du 11 août 1909 le ton peu agressif du P. Joachim Campo Santo dans les Lettres<br />

du Messager, par ces mots: «Dans cetts question vous insistez plutôt (il me semble) sur<br />

l'union <strong>de</strong>s catholiques pour le bi<strong>en</strong> du <strong>Portugal</strong>, que sur l'union pour la déf<strong>en</strong>se et Je<br />

bi<strong>en</strong> <strong>de</strong> l'Eglise. Et il me semble que c'est cette déf<strong>en</strong>se et ce bi<strong>en</strong> <strong>de</strong> l'Église qui impos<strong>en</strong>t<br />

le plus aux catholiques, et surtout aux prêtres, le grave <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> ne pas se liguer<br />

avec les partis libéraux, <strong>en</strong>nemis déclarés ou hypocrites, mais implacables <strong>de</strong> la<br />

même Eglise notre Mère.»<br />

Le P. Joachim Campo Santo, forcé par ces Pères, écrivit dans la revue m<strong>en</strong>suelle<br />

M<strong>en</strong>sageiro do Coraçâo <strong>de</strong> Jésus, parue au comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> septembre 1909 :<br />

«Mais le <strong>de</strong>voir existe, comme je le dis, et me reportant <strong>à</strong> l'Int<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> juillet, j'embrasse<br />

l'opinion <strong>de</strong> S. A. (le P. Santos Abranches), <strong>à</strong> l'égard du <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> voter, du<br />

<strong>de</strong>voir <strong>de</strong> l'union électorale catholique pour l'efficacité du vote et <strong>de</strong> l'union politique pour<br />

l'efficacité <strong>de</strong> l'union électorale» *. Cet article fut le <strong>de</strong>rnier que le P. Joachim Campo<br />

Santo écrivit dans le M<strong>en</strong>sageiro, puisqu'il mourut le 29 <strong>de</strong> ce même mois.<br />

Le P. Louis Campo Santo voulait même que les franciscains fuss<strong>en</strong>t bannis du <strong>Portugal</strong>,<br />

car dans une lettre du 11 août 1909 il avait écrit <strong>à</strong> son frère le P. Joachim: «Ils<br />

ont besoin d'être fouettés, parce que l<strong>à</strong> il n'y a pas d'esprit et vous les chatouillez tout<br />

simplem<strong>en</strong>t. Donnez-leur une correction, car ils sont grossiers, comme on le voit par<br />

leur style. Ici tous les bons prêtres séculiers désir<strong>en</strong>t et <strong>de</strong>mand<strong>en</strong>t au Seigneur que<br />

cette race <strong>de</strong> moinillons disparaisse <strong>de</strong> Braga et du <strong>Portugal</strong>, parce qu'ils<br />

désuniss<strong>en</strong>t au<br />

lieu d'unir, ils m<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t comme les disciples <strong>de</strong> Voltaire et le mal qu'ils font ici au Nord,<br />

même quoad mores, est incalculable.»<br />

Ne pouvant bannir les Franciscains <strong>de</strong> Braga et du <strong>Portugal</strong> au moy<strong>en</strong> du pouvoir<br />

civil, ils voulur<strong>en</strong>t les bannir <strong>de</strong> la presse, <strong>en</strong> faisant supprimer la Voix <strong>de</strong> Saint Antoine,<br />

au moy<strong>en</strong> du pouvoir ecclésiastique et <strong>de</strong> la voix du Pape. Ils se servir<strong>en</strong>t <strong>à</strong> cet<br />

effet du Nonce et <strong>de</strong> leurs amis <strong>de</strong> Rome. C'est ce que l'on déduit clairem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> quelques<br />

lettres <strong>de</strong>s jésuites que j'ai <strong>de</strong>vant moi. Je vais <strong>en</strong> choisir <strong>de</strong>ux pour les transcrire.<br />

La première est du P. A. Barros, Recteur du Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong>, adressée le 4 juillet<br />

1909 au P. Provincial, dans laquelle il lui dit: «Monseigneur le Nonce <strong>de</strong>man<strong>de</strong> une<br />

liste <strong>de</strong>s erreurs <strong>de</strong>s g<strong>en</strong>s <strong>de</strong> la Voix <strong>de</strong> Saint Antoine, et que quelqu'un veuille les réfuter<br />

dans un journal ou dans une revue catholique. Dimanche, comme il vi<strong>en</strong>t <strong>à</strong> la première<br />

communion, je lui remettrai un travail du P. Azevedo où se trouv<strong>en</strong>t les erreurs<br />

du <strong>de</strong>rnier article et <strong>de</strong>s textes <strong>de</strong> l'<strong>en</strong>cyclique <strong>de</strong> Léon XIII <strong>en</strong> opposition claire <strong>à</strong> la<br />

M<strong>en</strong>sageiro do Coraçâo <strong>de</strong> Jésus, Septembre 1909, n.° 342, p. 409.


83<br />

doctrine <strong>de</strong>s franciscains ;<br />

mais il <strong>de</strong>man<strong>de</strong> les erreurs mo<strong>de</strong>rnistes, etc., <strong>de</strong>s articles précéd<strong>en</strong>ts.<br />

Vous ne les avez pas ?»<br />

La question fut portée <strong>à</strong> Rome, toujours adressée par les jésuites, mais par plusieurs<br />

voies. Hors l'interv<strong>en</strong>tion du Nonce, connue par la lettre précéd<strong>en</strong>te, nous avons<br />

maint<strong>en</strong>ant l'interv<strong>en</strong>tion directe du P. Socius du Provincial, indiquée dans la lettre<br />

suivante, datée du premier février <strong>1910</strong>, écrite au même P. Socius, par le jésuite<br />

Louis Gonzague da Fonseca, qui était alors étudiant <strong>en</strong> théologie <strong>à</strong> Rome: «Rd. Père <strong>en</strong><br />

Ch l . — J'ai reçu la vôtre, <strong>en</strong> réponse <strong>à</strong> laquelle voici ce que je peux dire: j'ai comm<strong>en</strong>cé<br />

<strong>à</strong> m'occuper <strong>de</strong> l'affaire ; mais vous savez que les choses ici <strong>à</strong> Rome ne vont pas si<br />

rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t. Puis je suis sûr que, si on prés<strong>en</strong>te ces <strong>de</strong>ux papiers ou ri<strong>en</strong>, c'est presque<br />

la même chose. La plupart <strong>de</strong>s propositions sont ambiguës et peuv<strong>en</strong>t souffrir une interprétation<br />

bénigne: il est donc très difficile que la S. Congr. se prononce sur elles:<br />

c'est aussi l'avis du Rév. P. Recteur d'ici, et <strong>de</strong> la personne <strong>à</strong> laquelle je me suis<br />

adressé pour les prés<strong>en</strong>ter. Ils dis<strong>en</strong>t tous qu'ils veul<strong>en</strong>t le contexte. D'ailleurs la dite<br />

personne qui s'est occupée <strong>de</strong> la question<br />

' avec le Secrétaire du Saint Père et avec le<br />

vice-présid<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la Congr. me dit qu'au Vatican on s'intéresse beaucoup <strong>à</strong> la question<br />

et que l'on a souv<strong>en</strong>t <strong>de</strong>mandé <strong>de</strong>s docum<strong>en</strong>ts pour pr<strong>en</strong>dre une décision. On veut cep<strong>en</strong>dant<br />

agir avec prud<strong>en</strong>ce, surtout <strong>à</strong> prés<strong>en</strong>t, après une question où le Général <strong>de</strong><br />

l'Ordre a reçu un miramur, mais où ils semblai<strong>en</strong>t avoir un peu raison. Par conséqu<strong>en</strong>t<br />

la dite personne m'a conseillé <strong>de</strong> faire v<strong>en</strong>ir les numéros <strong>de</strong> la Revue ou, mieux <strong>en</strong>core,<br />

la collection <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rnières années : il serait utile <strong>de</strong> souligner les propositions suspectes<br />

ou au moins <strong>de</strong> noter les articles qui les conti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t. Ainsi la moitié <strong>de</strong> la besogne<br />

serait faite, car, quoiqu'il y<br />

ait au Vatican <strong>de</strong>s personnes qui compr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong> le<br />

portugais, on verrait mieux les choses, si elles étai<strong>en</strong>t indiquées. On voudrait aussi la<br />

collection <strong>de</strong>s journaux catholiques qui ont réfuté ou combattu les doctrines dont il s'agit.<br />

Il serait <strong>à</strong> dési.er que toutes ces choses vinss<strong>en</strong>t <strong>en</strong> double, car une copie irait <strong>à</strong> la<br />

Congr., l'autre au chargé <strong>de</strong>s affaires extraordinaires au Vatican. Il est clair que<br />

ceci sera traité secrètem<strong>en</strong>t ici, sans que l'on dise d'où sont v<strong>en</strong>us les docum<strong>en</strong>ts qui<br />

form<strong>en</strong>t le<br />

corps <strong>de</strong> délit.<br />

cVoici ce que je peux vous dire aujourd'hui. Si vous êtes d'accord, la réponse<br />

ne <strong>de</strong>vra pas se faire att<strong>en</strong>dre. Dieu sait combi<strong>en</strong> <strong>de</strong> temps cela s'attar<strong>de</strong>ra ici, dans<br />

la Rome éternelle. Si cep<strong>en</strong>dant vous avez d'autres int<strong>en</strong>tions, veuillez vous expliquer.<br />

Je n'ai pas dit d'où v<strong>en</strong>ait le papier: j'ai dit qu'il v<strong>en</strong>ait par l'<strong>en</strong>tremise d'un <strong>de</strong>s<br />

Nôtres qui désirait le plus grand secret et que je n'<strong>en</strong> connaissais pas la source.— Je<br />

trouve que j'ai dit la vérité. . . J'att<strong>en</strong>ds votre réponse et je vous prie <strong>de</strong> ne pas m'oublier<br />

dans vos prières.— Rome, le 14-2-910.— Louis G. da Fonseca, S. J.»<br />

On voit par cette lettre combi<strong>en</strong> était fausse l'affirmation faite par le P. M<strong>en</strong>ezes<br />

dans le M<strong>en</strong>sageiro <strong>de</strong>s n. os <strong>de</strong> janvier, <strong>de</strong> février et <strong>de</strong> juin <strong>de</strong> cette même année,<br />

pages 57, 118 et 351, où il disait au nom <strong>de</strong>s rédacteurs du M<strong>en</strong>sageiro et <strong>de</strong> l'Association<br />

<strong>à</strong> laquelle ils appart<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t, que Rome n'avait pas été consultée par eux, ni directem<strong>en</strong>t,<br />

ni indirectem<strong>en</strong>t sur le <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> consci<strong>en</strong>ce.<br />

Le fait est que Rome décida <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s jésuites et le Saint Père <strong>en</strong>voya une<br />

sommation <strong>à</strong> l'Archevêque <strong>de</strong> Braga pour faire supprimer la Voix <strong>de</strong> Saint Antoine,<br />

qui fut <strong>en</strong> effet supprimée. <strong>Les</strong> Franciscains <strong>de</strong> Montariol obéir<strong>en</strong>t et la Voix cessa <strong>de</strong><br />

paraître.<br />

1<br />

«Cela veut dire qui d'autres fois s'est occupée, avec ces personnes, <strong>de</strong> la question <strong>de</strong>s Doctrine»<br />

<strong>de</strong>l<strong>à</strong> Revue (la Voix <strong>de</strong> Saint Antoine) et du mal qu'elles caus<strong>en</strong>t <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>. Il est clair que l'on<br />

n'a pas <strong>en</strong>core eu le temps <strong>de</strong> s'occuper <strong>de</strong>s papiers qui sont v<strong>en</strong>us maint<strong>en</strong>ant».


84<br />

<strong>Les</strong> jésuites célébrèr<strong>en</strong>t le cas avec la plus gran<strong>de</strong> joie, comme on le voit par la<br />

lettre suivante du P. Antunes Vieira, datée <strong>de</strong> 12 mai <strong>1910</strong>: «Ici on n'a pas parlé<br />

d'autre chose, hier et aujourd'hui, que <strong>de</strong> la fameuse sommation du Saint Père <strong>à</strong> Monseigneur<br />

l'Archevêque <strong>de</strong> Braga au sujet <strong>de</strong>s bons Pères Franciscains. Us ne l'ont pas<br />

volé. Comme les voil<strong>à</strong> aplatis, s'écrie le P. Jean, maint<strong>en</strong>ant ils ne chanteront plus si<br />

fort. Et le très savant Cardinal Neto? Enfin il est prouvé une fois <strong>de</strong> plus, comme lé<br />

disait Monseigneur le Nonce, que ce Pape n'est pas fort sur le protocole».<br />

Cep<strong>en</strong>dant la politique portugaise était très mouvem<strong>en</strong>tée : plusieurs ministères <strong>de</strong><br />

peu <strong>de</strong> durée étai<strong>en</strong>t successivem<strong>en</strong>t tombés et Teixeira <strong>de</strong> Sousa, monté au pouvoir,<br />

s'était lié avec les alpoïnistas, ' les plus avancés parmi les royalistes, et essayait<br />

<strong>de</strong> faire do la politique libérale. Il eut contre lui les partis monarchistes les plus<br />

arriérés, ainsi que le parti nationaliste dirigé par les jésuites, et ceux-ci se jetèr<strong>en</strong>t<br />

effrontém<strong>en</strong>t dans la lute électorale contre le ministère Teixeira <strong>de</strong> Sousa qui, peu <strong>de</strong><br />

temps auparavant, avait été appelé par le Roi aux conseils <strong>de</strong> la Couronne. Ils votèr<strong>en</strong>t<br />

et cherchèr<strong>en</strong>t <strong>à</strong> faire voter tout le mon<strong>de</strong> pour le parti conservateur, <strong>en</strong> opposition avec<br />

le ministère. Nous avons plusieurs lettres qui nous éclair<strong>en</strong>t l<strong>à</strong>-<strong>de</strong>ssus: j'<strong>en</strong> transcrirai<br />

seulem<strong>en</strong>t quelques unes.<br />

Comm<strong>en</strong>çons par celle du Provincial <strong>à</strong> un consulteur <strong>de</strong> la Province, qui est bi<strong>en</strong><br />

explicite :<br />

«R. P. <strong>en</strong> C. — 1 Il y a bi<strong>en</strong> <strong>de</strong>s g<strong>en</strong>s ici qui dis<strong>en</strong>t que les Nôtres, qui sont<br />

rec<strong>en</strong>sés, doiv<strong>en</strong>t aller voter le cinq août, et que c'est un <strong>de</strong>voir rigoureux, surtout <strong>en</strong> ce<br />

mom<strong>en</strong>t où il ne s'agit pas <strong>de</strong> voter pour un parti, mais pour la monarchie. J'<strong>en</strong> suis<br />

assez angoissé. Je ne voudrais pas réunir <strong>de</strong> nouveau la consulte pour cela, c'est pourquoi<br />

j'ai pris la résolution <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>à</strong> chaque consulteur son opinion. Je l'att<strong>en</strong>ds et<br />

je compte toujours sur les prières <strong>de</strong> V. R.— L. G. Cabrai— S.


85<br />

raisons que nous avions pour aller, il a vu que la question était plus grave, et <strong>en</strong> raison<br />

<strong>de</strong> cela il n'a pas donné une décision. Le soir se sont rassemblés <strong>en</strong> consulte, avec le<br />

11, P. Prov., les Pères Cruz, Castelo, Nazaré et moi et on a pris la décision d'aller voter,<br />

comme le Père Provincial était d'opinion d'aller voter lui-<br />

comme on avait déj<strong>à</strong> résolu, et,<br />

même pour ne pas faire du scandale, nous avons été d'avis qu'il ne <strong>de</strong>vait pas aller<br />

donner sa voix.<br />

«Aujourd'hui tous les Pères ont dit la messe <strong>en</strong> l' re int<strong>en</strong>tion, pour le bon résultat<br />

<strong>de</strong>s élections et pour que N. S. écarte <strong>de</strong> nous les dangers qui pourrai<strong>en</strong>t adv<strong>en</strong>ir<br />

<strong>de</strong> la part que nous pr<strong>en</strong>ons aux élections. A 9'', 30 on a exposé le Saint Sacrem<strong>en</strong>t dans<br />

la Chapelle pour le même motif, avec adoration jusqu'aux litanies. Le R. P. Provincial<br />

est très préoccupé. Que Notre Seigneur lui donne la force <strong>de</strong> supporter ce far<strong>de</strong>au et ce<br />

chagrin. Je fais <strong>de</strong>s vœux <strong>à</strong> N. S. pour que votre santé ne se ress<strong>en</strong>te pas <strong>de</strong>s épreuves<br />

auxquelles N. S. vous soumet. Ici il n'y a ri<strong>en</strong> <strong>de</strong> nouveau, si ce n'est ce que l'on dit<br />

du Barro et <strong>de</strong> St. Fidèle, mais dont on ignore <strong>en</strong>core le fon<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t. 28-8-910. — Je<br />

suis <strong>en</strong> union <strong>de</strong> prières et SS. De V. K. ce S. <strong>en</strong> C<br />

l<br />

Ilh<strong>à</strong>o».<br />

Cette nouvelle est complète, il n'y manque pas la partie comique du tailleur imbécile.<br />

Mais, malgré tout, les jésuites ont perdu l'élection, et <strong>de</strong> Braga, où ils avai<strong>en</strong>t aussi<br />

lutté <strong>à</strong> outrance, le P. F. Pereira, S. J. écrivait le 30-8-910: «Ici il y a eu gran<strong>de</strong> joie<br />

et espoir <strong>de</strong> vaincre dans la lutte <strong>en</strong>gagée et terminée hier ; mais aujour d'hui ceux qui<br />

allai<strong>en</strong>t chanter victoire se sont vus mystifiés par le plus grand fourbe politici<strong>en</strong> du <strong>Portugal</strong>.<br />

Le très cher P. Ilhâo le connait bi<strong>en</strong>, qu'il le dise <strong>à</strong> V. R. oe ».<br />

A Rome les jésuites débattir<strong>en</strong>t aussi la question électorale et il y avait <strong>de</strong>s opinions<br />

pour et contre, comme le dit dans une letre le P. Louis G. da Fonseca qui y faisait<br />

son cours <strong>de</strong> théologie: «Dans quinze jours il y aura <strong>de</strong>s élections <strong>de</strong> députés.<br />

Ceux <strong>de</strong>s nôtres qui pouvai<strong>en</strong>t voter se sont tous fait inscrire et il parait que le désir<br />

du P. Provincial serait <strong>de</strong> les voir voter tous, puisque le Saint Père le permet. Je ne<br />

sais cep<strong>en</strong>dant pas ce qu'ils feront, car les vieux Pères qui sont contraires ne manqu<strong>en</strong>t<br />

pas; c'est, je crois, parce que dans leur temps cela ne se faisait pas.» — (Rome, 21-2_<br />

1909).<br />

L'opinion <strong>de</strong> ces vieux Pères était la seule s<strong>en</strong>sée, non seulem<strong>en</strong>t <strong>à</strong> Rome, mais <strong>en</strong>core<br />

plus <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>, car l'interv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong>s jésuites dans la politique portugaise p<strong>en</strong>dant<br />

les <strong>de</strong>rnières années <strong>de</strong> la monarchie, se servant <strong>de</strong> la presse, <strong>de</strong> la chaire, du confessionnal<br />

et <strong>de</strong> tous les autres moy<strong>en</strong>s <strong>de</strong> combat électoral, fut une <strong>de</strong>s choses qui irritèr<strong>en</strong>t<br />

le plus le peuple contre eux et contre les autres ordres religieux <strong>en</strong>trainés par<br />

eux. En sorte que la' République étant proclamée le 5 octobre <strong>1910</strong>, Campoli<strong>de</strong> et Que-<br />

Ihas fur<strong>en</strong>t aussitôt attaqués, comme l'avait prédit le Rédacteur <strong>de</strong> A Palavra, Emmanuel<br />

Frutuoso da Fonseca, et un <strong>de</strong>s actes que ce peuple exigea immédiatem<strong>en</strong>t du<br />

Gouvernem<strong>en</strong>t Provisoire fut le décret qui bannissait les jésuites et supprimait toutes les<br />

congrégations, lequel ne se fit pas att<strong>en</strong>dre, puisqu'il parut, trois jours après la proclamation<br />

<strong>de</strong> la République, le 8 octobre.<br />

CHAPITRE VINGTIÈME<br />

L'œuvre <strong>de</strong>s jésuites portugais dans les<br />

missions d'outremer<br />

Ce n'est qu'<strong>en</strong> 1890, tr<strong>en</strong>te-<strong>de</strong>ux ans après leur retour <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>, que les jésuites<br />

portugais établir<strong>en</strong>t définitivem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s missions dans les colonies portugaises. Leur<br />

œuvre dans ces missions fut peu utile a la civilisation mo<strong>de</strong>rne, moins utile <strong>à</strong> la nationalité<br />

portugaise cl remplie <strong>de</strong> leurs faussetés et <strong>de</strong> leurs mystifications officielles reconnues.


86<br />

En lisant leurs catalogues, nous voyons qu'<strong>en</strong> 1890 ils initiai<strong>en</strong>t trois missions :<br />

<strong>de</strong> Macao, celle <strong>de</strong> Goa et celle <strong>de</strong> la Zambézie l , et le personnel jésuitique <strong>de</strong> ces missions<br />

alla <strong>en</strong> augm<strong>en</strong>tant jusqu'<strong>en</strong> <strong>1910</strong>.<br />

Voyons ce que les docum<strong>en</strong>ts officiels que nous avous parcourus dis<strong>en</strong>t au sujet <strong>de</strong><br />

chacune <strong>de</strong> ces missions.<br />

Mission <strong>de</strong> Macao<br />

celle<br />

Comm<strong>en</strong>çons par celle <strong>de</strong> Macao. Cette mission ne fut pour les jésuites portugais<br />

qu'une mystification pour élu<strong>de</strong>r les lois du pays, mystification appuyée par les Évèques<br />

<strong>de</strong> Macao, successivem<strong>en</strong>t Me<strong>de</strong>iros et Jean Paulino, parce qu'ils<br />

se bornai<strong>en</strong>t <strong>à</strong> <strong>en</strong>voyer<br />

<strong>de</strong>s jésuites (Pères, Scolastiques et Coadjuteurs) au Séminaire <strong>de</strong> Saint Joseph <strong>de</strong> Macao,<br />

contre les lois portugaises.<br />

<strong>Les</strong> lois portugaises établissai<strong>en</strong>t que les professeurs <strong>de</strong> ce Séminaire <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t<br />

être <strong>de</strong>s prêtres séculiers v<strong>en</strong>us du Séminaire <strong>de</strong>s Missions <strong>de</strong> Sernache <strong>de</strong> Bomjardim ou<br />

<strong>de</strong> tout autre Séminaire portugais, <strong>à</strong> défaut <strong>de</strong> celui-l<strong>à</strong>, comme le prescriv<strong>en</strong>t le<br />

décret du<br />

3 décembre 1884, qui a approuvé les Statuts du Collège <strong>de</strong>s Missions, et celui du 6 décembre<br />

1886, qui accordait aux autres séminaristes le soin <strong>de</strong>s missions, <strong>à</strong> défaut <strong>de</strong><br />

ceux-l<strong>à</strong>:<br />

on appelait cette concession commission rot/aie.<br />

L'État payait <strong>à</strong> ces missionnaires les voyages et un rev<strong>en</strong>u annuel, et les Bi<strong>en</strong>s <strong>de</strong>s<br />

Missions <strong>de</strong> Chine ï contribuai<strong>en</strong>t aussi aux dép<strong>en</strong>ses. Évi<strong>de</strong>mm<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s individus auxquels<br />

il était déf<strong>en</strong>du par les lois <strong>de</strong> rési<strong>de</strong>r <strong>en</strong> territoire portugais, ne pouvai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>trer<br />

comme professeurs au Séminaire <strong>de</strong> Macao, séminaire <strong>de</strong> l'État,<br />

<strong>en</strong> territoire portugais.<br />

Donc les Évêques qui proposai<strong>en</strong>t ces jésuites <strong>à</strong> l'État, pour qu'il payât les frais <strong>de</strong> leur<br />

voyage vers cette colonie, ainsi que les jésuites qui s'y r<strong>en</strong>dai<strong>en</strong>t, éludai<strong>en</strong>t clairem<strong>en</strong>t<br />

les lois portugaises.<br />

On trouve la preuve <strong>de</strong> ce que^ cette doctrine est la seule légale dans la lettre officielle,<br />

datée du 11 décembre 1908, adressée par le Ministre <strong>de</strong>s Colonies <strong>à</strong> l'Évêque <strong>de</strong><br />

Macao. Je crois <strong>de</strong>voir la transcrire ici, parce qu'elle est très catégorique <strong>à</strong> cet égard.<br />

En voici la t<strong>en</strong>eur:<br />

«Monsieur l'Évêque du Diocèse <strong>de</strong> Macao.— En réponse <strong>à</strong> la lettre officielle <strong>de</strong><br />

V. E ce ,<br />

du 25 septembre <strong>de</strong>rnier, Mr. le Ministre <strong>de</strong> la Marine me charge <strong>de</strong> dire <strong>à</strong><br />

V. E ce que les missionnaires Jean Joseph <strong>de</strong> Moura et Antoine Marie Alves ont été nommés<br />

par arrêté ministériel du 8 du dit mois et <strong>de</strong> prier V. E ce <strong>de</strong> vouloir bi<strong>en</strong> savoir si<br />

les prêtres Jean Pereira et Antoine Barreto qui, dans la dite lettre officielle, sont<br />

désignés pour la commission royale, apparti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t ou non <strong>à</strong> une congrégation religieuse<br />

2 ».<br />

L'Évêque <strong>de</strong> Macao répondit <strong>à</strong> cette lettre officielle par une autre, celle du 12 janvier<br />

1909, dans laquelle il<br />

«J'ignore si les <strong>de</strong>ux prêtres apparti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t ou non <strong>à</strong> une congrégation religieuse<br />

3 ».<br />

disait:<br />

Or cette ignorance <strong>de</strong> l'Évêque est absolum<strong>en</strong>t fausse. Depuis 1890 il y avait<br />

accord parfait <strong>en</strong>tre l'autorité ecclésiastique <strong>de</strong> Macao et les jésuites <strong>de</strong> son Séminaire,<br />

comme on le voit clairem<strong>en</strong>t par les lettres <strong>de</strong> quelques uns d'<strong>en</strong>tre eux, qui se trouv<strong>en</strong>t<br />

aux Archives Congréganistes, et comme ils<br />

l'avou<strong>en</strong>t eux-mêmes*.<br />

1<br />

Gataloijus Provinciae Lusitanae, S. J., année 1901, pp. 20, 21, 22 et 23.<br />

2<br />

Rapport et projet prés<strong>en</strong>té <strong>à</strong> la Commission du Patronat Portugais <strong>en</strong> Ori<strong>en</strong>t, par Joseph <strong>de</strong><br />

Almada. — Proscritos, vol. h, p. 112.<br />

3<br />

Ces <strong>de</strong>ux lettres officielles se trouv<strong>en</strong>t au Bureau <strong>de</strong>s Colonies, 3 e section.<br />

4 Proscritos, vol. ix, p. 111-114.


87<br />

L'Evêque Jean Pauline» savait très bi<strong>en</strong> que le Père Jean Pereira était jésuite,<br />

comme il savait aussi que l'étai<strong>en</strong>t les Pères Jean Joseph <strong>de</strong> Moura et Antoine Marie Alves,<br />

dont la dite lettre officielle fait m<strong>en</strong>tion.<br />

Il le savait, mais il lui conv<strong>en</strong>ait <strong>de</strong> dissimuler et <strong>de</strong> manquer <strong>à</strong> la vérité, pour ne<br />

pas avoir <strong>à</strong> agir, comme avait agi <strong>en</strong> 1871 un <strong>de</strong> ses prédécesseurs dans cet Evêché,<br />

Son Ex. e Antoine Louis Carvalho, qui <strong>en</strong> fit sortir d'autres jésuites, se trouvant dans ce<br />

Séminaire <strong>de</strong>puis 1861 et contre lesquels il avait protesté, lorsqu'il était recteur 1 .<br />

L'Evêque savait très bi<strong>en</strong> que la plupart <strong>de</strong>s professeurs du Séminaire étai<strong>en</strong>t jésuites,<br />

<strong>à</strong> comm<strong>en</strong>cer par le recteur, et il <strong>de</strong>vait savoir aussi que beaucoup d'étudiants sortai<strong>en</strong>t<br />

<strong>de</strong> son Séminaire pour <strong>en</strong>trer au noviciat <strong>de</strong> la Compagnie <strong>de</strong> Jésus, <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>,<br />

comme nous l'avons déj<strong>à</strong> vu au chap. vm, p. 33. Le nombre <strong>de</strong> ces candidats au noviciat<br />

était tel, que' le P. William Arkwright comm<strong>en</strong>çait ainsi une lettre <strong>à</strong> son Provincial<br />

:<br />

tll me semble que le Séminaire <strong>de</strong> St. Joseph va <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir le Noviciat <strong>de</strong> St. Joseph*.<br />

Et le P. Jean Gonçalves, recteur <strong>de</strong> ce Séminaire, écrivait aussi au Provincial:<br />

tSi on doit admettre tous ces candidats, ne vaudrait-il pas la peine <strong>de</strong> faire v<strong>en</strong>ir<br />

un maître <strong>de</strong> novices ?**<br />

Ajoutons <strong>à</strong> cela que le Séminaire <strong>de</strong> St. Joseph <strong>de</strong> Macao, par décret du 22 décembre<br />

1881, était <strong>à</strong> la fois séminaire et lycée 3 ,<br />

c'est-<strong>à</strong>-dire c'était un collège <strong>de</strong> futurs<br />

prêtres et <strong>de</strong> futurs magistrats, mé<strong>de</strong>cins et militaires. <strong>Les</strong> exam<strong>en</strong>s y avai<strong>en</strong>t une valeur<br />

officielle, et tout cela, <strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t et exam<strong>en</strong>s, était <strong>en</strong>tre les mains <strong>de</strong>s jésuites,<br />

qui s'<strong>en</strong> servai<strong>en</strong>t pour obt<strong>en</strong>ir <strong>de</strong>s novices pour l'Ordre.<br />

En <strong>1910</strong>, au mom<strong>en</strong>t où la République fut proclamée, treize jésuites s'y trouvai<strong>en</strong>t:<br />

huit Pères, <strong>de</strong>ux scolastiques et trois coadjuteurs*, tous payés par le Gouvernem<strong>en</strong>t<br />

portugais, quand les lois portugaises ne leur permettai<strong>en</strong>t même pas <strong>de</strong> rési<strong>de</strong>r <strong>en</strong> territoire<br />

national !<br />

En 1899 ils avai<strong>en</strong>t aussi <strong>en</strong>voyé <strong>de</strong>ux Pères <strong>à</strong> la Mission <strong>de</strong> Soibada, <strong>à</strong> Timor,<br />

<strong>à</strong> la quelle l'Evêque donna la surint<strong>en</strong>dance sur les autres prêtres séculiers <strong>en</strong> mission<br />

dans la même île 5 .<br />

Mission <strong>de</strong> Goa<br />

Cette mission était, comme celle <strong>de</strong> Macao, l'œuvre <strong>de</strong>s Évêques. C'est l'Archevêque<br />

<strong>de</strong> Goa, Antoine Val<strong>en</strong>te, <strong>de</strong>puis longtemps l'ami intime <strong>de</strong>sjésuites, qui les avait appelés<br />

dans son diocèse, lequel par le concordat <strong>de</strong> 1886 s'ét<strong>en</strong>dait <strong>à</strong> travers le territoire britannique<br />

<strong>de</strong>s In<strong>de</strong>s. C'était lui qui les <strong>en</strong>voyait précisém<strong>en</strong>t dans ce territoire, <strong>en</strong> les proposant<br />

au Gouvernem<strong>en</strong>t portugais comme missionnaires légaux, afin qu'ils puss<strong>en</strong>t recevoir<br />

<strong>de</strong> ce même Gouvernem<strong>en</strong>t l'arg<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s voyages et <strong>de</strong>s rev<strong>en</strong>us annuels. Mais<br />

voici <strong>en</strong> quoi consistait la mission <strong>de</strong> ces jésuites: être chapelains <strong>de</strong> quelques régim<strong>en</strong>ts<br />

anglais, curés <strong>de</strong>s catholiques et professeurs dans <strong>de</strong>s séminaires catholiques, <strong>à</strong> Belgaum,<br />

Cochim et Allepey, dans l'In<strong>de</strong> Anglaise.<br />

1<br />

Bulletin du Gouvernem<strong>en</strong>t Ecclésiastique <strong>de</strong> Macao, 1001, p. 33. Extraits du rapport sur le Séminaire<br />

<strong>de</strong> St. Joseph.<br />

1<br />

Ces lettres se trouv<strong>en</strong>t aux Archives Congréganistes.<br />

J<br />

Notes pour VHistoire <strong>de</strong> Macao, par Gabriel K. Fernan<strong>de</strong>s, Lisbonne, 1883, p. 25.<br />

4 Cataltxjus Provincice Lusitanas, S. .T., p. 31 et 32.<br />

Proscritos, II, p, 111 — Lettres édifiantes <strong>de</strong> la Province <strong>de</strong> <strong>Portugal</strong>, S. J., 1909, p. 14.


88<br />

On peut parfaitem<strong>en</strong>t appliquer <strong>à</strong> cette mission <strong>de</strong>s jésuites aux In<strong>de</strong>s ce qu'on<br />

lit dans le rapport <strong>de</strong> Mr. Joseph <strong>de</strong> Almada sur le Patronat Portugais <strong>en</strong> Ori<strong>en</strong>t:<br />

«Que le <strong>Portugal</strong> se donne le luxe <strong>de</strong> payer <strong>de</strong>s chapelains aux régim<strong>en</strong>ts anglais et d'<strong>en</strong>tret<strong>en</strong>ir<br />

<strong>de</strong>s églises et <strong>de</strong>s processions <strong>en</strong> territoire anglais, c'est une vraie anomalie, un<br />

anachronisme qu'un intérêt historique peut seul justifier.<br />

Mais combi<strong>en</strong> d'oeuvres et combi<strong>en</strong><br />

<strong>de</strong> monum<strong>en</strong>ts historiques sont <strong>en</strong> ruines ici même <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>, combi<strong>en</strong> sont voués<br />

<strong>à</strong> l'abandon et <strong>à</strong> la <strong>de</strong>struction du temps, parce qu'il n'y a pas au budget <strong>de</strong> sommes <strong>à</strong><br />

cet effet » !<br />

Il y avait dans cette mission, <strong>en</strong> <strong>1910</strong>, douze jésuites, neuf Pères et trois frères<br />

coadjuteurs, lesquels étai<strong>en</strong>t tous <strong>en</strong> territoire anglais *.<br />

Mission <strong>de</strong> la Zambézie Inférieure<br />

Le Général <strong>de</strong>s <strong>Jésuites</strong> divisa <strong>en</strong> 1889 la région <strong>de</strong> la Zambézie <strong>en</strong> <strong>de</strong>ux missions:<br />

inférieure et supérieure: la Zambézie Inférieure (Bas Zambèze), sur le territoire<br />

portugais, fut confiée <strong>à</strong> la Province Portugaise, et la Zambézie Supérieure, sur le territoire<br />

anglais, il la confia <strong>à</strong> la Province Anglaise s . C'est pourquoi nous voyons <strong>de</strong>puis<br />

1890 dans les Catalogues <strong>de</strong> la Province Portugaise que quelques jésuites portugais,<br />

mais <strong>en</strong> très petit nombre, fur<strong>en</strong>t <strong>en</strong>voyés dans cette mission du Bas Zambèze 3 .<br />

Avant 1889 quelques jésuites autrichi<strong>en</strong>s y étai<strong>en</strong>t allés et, même lorsque cette<br />

mission fut donnée aux Portugais, ces étrangers y restèr<strong>en</strong>t et les Provinciaux Portugais<br />

continuèr<strong>en</strong>t <strong>à</strong> y <strong>en</strong>voyer <strong>de</strong>s jésuites étrangers, surtout ceux qui leur v<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s Ecoles<br />

Apostoliques étrangères.<br />

Ces étrangers n'étai<strong>en</strong>t pas <strong>de</strong> simples missionnaires, ils étai<strong>en</strong>t, presque tous, les<br />

supérieurs <strong>de</strong>s postes <strong>de</strong> la mission. Dans le Catalogue <strong>de</strong> <strong>1910</strong> on voit que dans les<br />

postes qui se trouv<strong>en</strong>t près du Zambèze tous les supérieurs étai<strong>en</strong>t étrangers : -au<br />

Chipango le P. Loubière (français), <strong>à</strong> Boroma le P. Witz (suisse), au Zumbo le P.<br />

Baeeher (autrichi<strong>en</strong>) et <strong>à</strong> Angonia, près du Lac Nyassa, le P. Hiller (autrichi<strong>en</strong>!. Ce<br />

n'est que dans les <strong>de</strong>ux maisons les plus rapprochées du littoral qu'il y avait <strong>de</strong>s supérieurs<br />

portugais: dans celle <strong>de</strong> Coalane le P. Antoine Arraiano et dans celle <strong>de</strong> Quiiimane<br />

le P. Jean Gonçalves, qui était aussi le Supérieur Général <strong>de</strong> la mission <strong>de</strong> la<br />

Zambézie. Mais ce qui est certain c'est que les<br />

les uns <strong>de</strong>s autres et il<br />

postes <strong>de</strong> la mission étai<strong>en</strong>t très éloignés<br />

fallait <strong>en</strong>trepr<strong>en</strong>dre <strong>de</strong>s voyages <strong>de</strong> plusieursjours pour s'y r<strong>en</strong>dre,<br />

donc le gouvernem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> était <strong>en</strong>tre les mains <strong>de</strong>s étrangers.<br />

Quant aux étrangers, quoique la Compagnie <strong>de</strong> Jésus soit internationale et place<br />

l'amour <strong>de</strong> la Patrie sur un plan très inférieur dans le cœur <strong>de</strong>s si<strong>en</strong>s, on doit remarquer<br />

que chez certains individus il n'est pas facile d'arracher cet amour. Ainsi nous<br />

lisons dans la Vie d'un <strong>de</strong>s missionnaires <strong>de</strong> la Zambézie, le P. Delmas, une lettre<br />

écrite par lui, où il dit: «Me voici novice <strong>de</strong> la Compagnie <strong>de</strong> Jésus <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>: <strong>de</strong>v<strong>en</strong>u<br />

Portugais, je reste catholique et Français toujours par le cœur» 4 .<br />

<strong>Les</strong> Provinciaux du <strong>Portugal</strong> <strong>en</strong>voyai<strong>en</strong>t très peu <strong>de</strong> jésuites portugais <strong>à</strong> la Mission<br />

<strong>de</strong> la Zambézie, pour <strong>de</strong>ux motifs. Le premier c'est que très peu d'<strong>en</strong>tre eux désirai<strong>en</strong>t<br />

1<br />

Cataloyus Provinciœ Lusitanœ, S. J., <strong>1910</strong>, p. 29 et 30.<br />

2 Proscritos, II, p. 133 et 139.<br />

3 En 1881 on avait <strong>en</strong>voyé dans cette région le P. François Autunes et le coadjuteur Antoine<br />

Ferreira; celui-ci se retira plus tût, mais le P. Antuncs y resta jusqu'<strong>en</strong> 1890 d'où il vint mourir <strong>à</strong><br />

Campoli<strong>de</strong>.<br />

* Elle Delmas <strong>de</strong> la Compagnie <strong>de</strong> Jésus, mort missionnaire au Zambèze. Petit Séminaire Colonial'<br />

3 rue du Mouiln, Bor<strong>de</strong>aux, 1903, p. 12.


89<br />

y aller et généralem<strong>en</strong>t les Provinciaux ne voulai<strong>en</strong>t pas les <strong>en</strong>voyer contre leur volonté.<br />

Ce fait est démontré par plusieurs docum<strong>en</strong>ts que nous avons <strong>de</strong>vant les yeux, comme, par<br />

exemple, une lettre du Provincial Louis Campo Santo au P. Alexandre Castelo, où il<br />

dit: «Je suis cont<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ce que vous ayez parlé du cas Chico-Zambèze, car je p<strong>en</strong>sais<br />

que dans une lettre il me disait que je pouvais y <strong>en</strong>voyer un autre Père et que je<br />

lui<br />

l'<strong>en</strong>verrais<br />

au Zambèze et aussi parce que je n'<strong>en</strong>voie habituellem<strong>en</strong>t que ceux qui le désir<strong>en</strong>t et le<br />

<strong>de</strong>mand<strong>en</strong>t. C'est pourquoi j'avais les yeux sur lui, mais maint<strong>en</strong>ant je suis détrompé».<br />

Le second motif est qu'ils voulai<strong>en</strong>t profiter du peu <strong>de</strong> mon<strong>de</strong> qu'ils avai<strong>en</strong>t, <strong>en</strong> <strong>de</strong>s<br />

<strong>en</strong>droits où ils croyai<strong>en</strong>t acquérir plus facilem<strong>en</strong>t l'influ<strong>en</strong>ce morale et gagner plus<br />

d'a<strong>de</strong>ptes et plus d'arg<strong>en</strong>t. C'est pour cette raison qu'ils ne voulur<strong>en</strong>t pas <strong>en</strong>voyer <strong>en</strong><br />

Afrique les tr<strong>en</strong>te-et-un individus que <strong>de</strong>puis 1890 ils avai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>voyés <strong>à</strong> Macao et aux<br />

In<strong>de</strong>s, car pour eux il était plus <strong>en</strong>nuyeux et moins avantageux do civiliser le nègre que<br />

d'<strong>en</strong>seigner le jeune homme <strong>de</strong> Macao ou <strong>de</strong> confesser le catholique <strong>de</strong> l'In<strong>de</strong> anglaise.<br />

Mais la vérité est que l'œuvre <strong>de</strong>s jésuites dans la<br />

Zambézie portugaise ne fut pas<br />

très profitable et reste bi<strong>en</strong> au <strong>de</strong>ssous <strong>de</strong> ce qu'avai<strong>en</strong>t fait les missionnaires protestants<br />

<strong>en</strong> Afrique. Ceci est avoué dans <strong>de</strong>s rapports officiels, même ceux écrits par <strong>de</strong>s fonctionnaires<br />

qui désirai<strong>en</strong>t être agréables aux jésuites. Dans un rapport du Dr. Joseph <strong>de</strong> Almada,<br />

fonctionnaire supérieur du Ministère <strong>de</strong>s Colonies, rapport retiré <strong>de</strong> celui <strong>de</strong> Freire<br />

<strong>de</strong> Andra<strong>de</strong>, on lit: «<strong>Les</strong> missions <strong>de</strong> la Zambézie sont remises aux jésuites; chez les<br />

missionnaires <strong>de</strong> cet Ordre on trouve ici, dans la colonie, d'une manière générale, plus<br />

<strong>de</strong> dévoûm<strong>en</strong>t et d'énergie que chez quelques uns <strong>de</strong>s autres missionnaires. La mission<br />

<strong>de</strong> Borona est peut-être la meilleure <strong>de</strong> la Province et, vu la difficulté du travail <strong>de</strong>s<br />

missions, l<strong>à</strong> il n'a pas été improductif. Cep<strong>en</strong>dant, si nous considérons le subsi<strong>de</strong> élevé<br />

du Gouvernem<strong>en</strong>t qui, pour les missions et les prêtres <strong>de</strong> Tête est <strong>de</strong> 10:9O0#000,<br />

ainsi que le fait que les ^missions sont locataires <strong>de</strong>s domaines <strong>de</strong> Boroma et Nhahondué<br />

et sous-locataires <strong>de</strong>s domaines <strong>de</strong> Massombué et Kecuo, pour les sommes <strong>de</strong><br />

• il 4 >335 et 270)5890 réis, les dits domaines pouvant rapporter (i:00O>00O réis annuels,<br />

je crois pouvoir dire, sans crainte d'exagérer, que les missions <strong>de</strong> Tête aurai<strong>en</strong>t pu faire<br />

mieux dans le s<strong>en</strong>s <strong>de</strong> l'instruction, <strong>de</strong> l'agriculture et <strong>de</strong>s arts et métiers, surtout parce que<br />

l'indigène <strong>de</strong> la Zambézie est très habile et habitué au travail <strong>de</strong>puis longtemps.<br />

Quoique les<br />

missions <strong>de</strong> Boroma soi<strong>en</strong>t <strong>de</strong>puis vingt-cinq ans installées dans la Zambézie, on ne trouve<br />

dans cette région ni ouvriers ni artisans y ayant été élevés, quoique ces missions doiv<strong>en</strong>t<br />

donner aux indigènes une éducation professionnelle; les missionnaires eux-mêmes confirm<strong>en</strong>t<br />

le fait, <strong>en</strong> disant que les ouvriers qu'ils y élèv<strong>en</strong>t sont employés dans leurs domaines ou<br />

fermes S.<br />

A cOté <strong>de</strong>s missions catholiques, <strong>à</strong> Angola et Moçambique, il y avait aussi <strong>de</strong>s missions<br />

protestantes suisses, et celles-ci, comme le déclare le même rapport, étai<strong>en</strong>t phiB<br />

profitables, e.t les sommes dép<strong>en</strong>sées pour celles-l<strong>à</strong> ne se trouvai<strong>en</strong>t pas représ<strong>en</strong>tées par<br />

<strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong> civilisation pouvant être comparées <strong>à</strong> celles <strong>de</strong>s protestants suisses 2 . Et<br />

il ajoute: «On déduit <strong>de</strong>s rapports prés<strong>en</strong>tés <strong>en</strong> 1907-1908 par les missions catholiques,<br />

que les missions protestantes, hors leur influ<strong>en</strong>ce politique, prépar<strong>en</strong>t mieux leurs missionnaires<br />

pour la lutte»<br />

'. «<strong>Les</strong> missionnaires protestants, qui habituellem<strong>en</strong>t emmèn<strong>en</strong>t<br />

leur famille <strong>en</strong> Afrique, donn<strong>en</strong>t au nègre l'exemple d'une famille civilisée et sont plus<br />

complets, sous le point <strong>de</strong> vue civilisateur, que les catholiques» 4 .<br />

1<br />

Transcrit par le Dr. Joseph do Almada du Rapport sur Mozambique <strong>de</strong> Mr. Freire <strong>de</strong> Andra<strong>de</strong>,<br />

vol. v, p. 312. (Rapport <strong>de</strong> Mr. Almada, p. 10).<br />

* Ibid., p. 19.<br />

J<br />

Ibid, p. 17.<br />

• Ibid., p. 7.


90<br />

. C'est pour cela que dans les congrès coloniaux allemands <strong>de</strong> 1902 <strong>à</strong> 1906 on est<br />

v<strong>en</strong>u <strong>à</strong> cette conclusion: a<strong>Les</strong> missions évangéliques sont préférables aux catholiques,<br />

parce qu'elles s'occup<strong>en</strong>t davantage <strong>de</strong> la pédagogie du nègre» *.<br />

Le missionnaire jésuite s'occupe plutôt <strong>de</strong> l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t du catéchisme catholique,<br />

<strong>de</strong> l'Histoire sainte et d'attirer le nègre <strong>à</strong> la messe, <strong>à</strong> la confession, <strong>à</strong> la communion et<br />

<strong>à</strong> d'autres actes religieux, qu'<strong>à</strong> le préparer pour la vie matérielle et pratique <strong>de</strong> la civilisation<br />

mo<strong>de</strong>rne. Ils l'avou<strong>en</strong>t eux-mêmes, quand ils parl<strong>en</strong>t <strong>de</strong> leurs missionnaires. Du<br />

P. Hiller, doy<strong>en</strong> <strong>de</strong>s Missionnaires <strong>de</strong> la Zambézie Inférieure, le jésuite Gonzague Azevedo<br />

écrit, comme s'il faisait le plus grand éloge: iLa passion qui dominait l'énergie <strong>de</strong><br />

son âme était celle du salut <strong>de</strong>s âmes» 2 .<br />

<strong>Les</strong> compagnons souffrai<strong>en</strong>t naturellem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la même passion ; c'est pourquoi <strong>en</strong><br />

vingt-trois années <strong>de</strong> Mission <strong>à</strong> Boroma ils ne pur<strong>en</strong>t jamais préparer un seul élève, pas<br />

même pour l'exam<strong>en</strong> du 1 er <strong>de</strong>gré d'instruction primaire, comme l'avoue le même P.<br />

Hiller <strong>en</strong> 1909, dans une lettre officielle au gouverneur <strong>de</strong> la Province, ainsi qu'on peut<br />

le lire dans le Rapport écrit par l'Évêque <strong>de</strong> Si<strong>en</strong>ne, Prélat <strong>de</strong> Moçambique, Mr. François<br />

Ferreira da Silva 3 .<br />

On voit cette même passion du salut <strong>de</strong>s âmes et non <strong>de</strong> la civilisation du nègre<br />

dans les livres que ces missionnaires ont écrits <strong>en</strong> langue indigène, car ces livres sont<br />

<strong>de</strong>s catéchismes catholiques, l'histoire sainte, <strong>de</strong>s livres <strong>de</strong> dévotions diverses et non <strong>de</strong>s<br />

livres sur l'histoire <strong>de</strong> <strong>Portugal</strong>, sur l'agriculture et les industries diverses *,<br />

CHAPITRE VINGT-ET-UNIÈME<br />

Le Bannissem<strong>en</strong>t et après<br />

P<strong>en</strong>dant les <strong>de</strong>rniers mois qui précédèr<strong>en</strong>t la proclamation <strong>de</strong> la République le 5<br />

Octobre <strong>1910</strong>, le Gouvernem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la Monarchie, présidé par Mr. Teixeira <strong>de</strong> Sousa,<br />

avait déj<strong>à</strong> vu qu'il fallait bannir les jésuites, ainsi que les autres Congrégations religieuses<br />

abolies par les lois du pays. A cette époque il avait déj<strong>à</strong> ordonné <strong>de</strong>s <strong>en</strong>quêtes<br />

<strong>à</strong> certaines maisons religieuses. Le Provincial Louis Cabrai trouva que pour écarter ce<br />

danger il n'y avait ri<strong>en</strong> <strong>de</strong> mieux que «d'implorer l'assistance divine par <strong>de</strong>s prières spéciales»<br />

et dans ce but il <strong>en</strong>voya le 8 septembre <strong>à</strong> toutes les maisons <strong>de</strong> la Province une<br />

circulaire ordonnant <strong>de</strong>s prières p<strong>en</strong>dant trois jours dans leurs chapelles, avec exposition<br />

du Saint Sacrem<strong>en</strong>t 5 . Mais le Saint Sacrem<strong>en</strong>t ne les écouta pas et il parait qu'ils<br />

ne comptai<strong>en</strong>t pas beaucoup sur sa protection, car le 4 octobre, au mom<strong>en</strong>t où la révolution<br />

éclatait, les jésuites <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> s'<strong>en</strong>fuir<strong>en</strong>t, ceux qui pur<strong>en</strong>t le faire, y compris<br />

le Provincial Louis Cabrai, et seuls restèr<strong>en</strong>t ceux <strong>à</strong> qui la fuite fut impossible.<br />

Et pourtant ce fur<strong>en</strong>t ceux qui s'<strong>en</strong>fuir<strong>en</strong>t qui souffrir<strong>en</strong>t davantage, car ceux qui<br />

restèr<strong>en</strong>t fur<strong>en</strong>t immédiatem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tourés <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>s par le Gouvernem<strong>en</strong>t Provisoire<br />

et placés dans les casernes, dans les forteresses ou <strong>en</strong> les <strong>en</strong>droits où la population ne<br />

pût les maltraiter 6 . Même avant la Révolution les chefs révolutionnaires avai<strong>en</strong>t donné<br />

<strong>de</strong>s ordres, pour que la vie <strong>de</strong>s prêtres fût respectée 7 . On sait que toutes ces mesures<br />

1 Ibid., p. 8. -,<br />

2 Proscrites, p. 135.<br />

/<br />

3<br />

Rapport. Œuvre <strong>de</strong>s Missions. Porto 1911, p. 328-329.<br />

4 Proscritos n, p. 141.<br />

6<br />

Proscritos i, p. 2-3.<br />

« Proscritos i, pp. 103, 137, 143.<br />

1<br />

Rapport do Machado Santos (A Revoluçâo Portuguesa), pag. 93.


91<br />

réussir<strong>en</strong>t, car le Provincial Louis Cabrai lui-même avoue que «pas un seul <strong>de</strong> ses trois<br />

o<strong>en</strong>t cinquante religieux ne périt <strong>de</strong> mort viol<strong>en</strong>te»<br />

<strong>Les</strong> Pères expliqu<strong>en</strong>t le fait <strong>de</strong> leur fuite, <strong>en</strong> disant qu'ils craignai<strong>en</strong>t une attaque,<br />

«parce qu'ils savai<strong>en</strong>t la part qu'ils avai<strong>en</strong>t prise <strong>à</strong> l'action catholique du pays». 2<br />

Ils aurai<strong>en</strong>t été plus exacts, <strong>en</strong> disant «qu'ils savai<strong>en</strong>t la part qu'ils avai<strong>en</strong>t prise <strong>à</strong> l'action<br />

politique du pays». Le présid<strong>en</strong>t du Ministère du <strong>de</strong>rnier roi portugais «fut indigné contre<br />

les Pères <strong>à</strong> cause <strong>de</strong>s élections»», comme l'écrivit le roi lui-même <strong>à</strong> un <strong>de</strong> ses amis 3 .<br />

Quelques catholiques, comme le rédacteur <strong>de</strong> A Palavra (La Parole), avai<strong>en</strong>t déj<strong>à</strong> fait<br />

voir aux jésuites le chemin dangereux qu'ils suivai<strong>en</strong>t, <strong>en</strong> se livrant si ouvertem<strong>en</strong>t <strong>à</strong> la<br />

politique, s'attirant ainsi la haine <strong>de</strong>s libéraux 4 . C'est <strong>à</strong> cause <strong>de</strong> cette excitation populaire,<br />

qu'ils avai<strong>en</strong>t provoquée, que le Gouvernem<strong>en</strong>t Provisoire dut, dès les premiers<br />

jours après la Révolution, faire exécuter les décrets <strong>de</strong> Pombal et d'Aguiar, jamais révoqués,<br />

<strong>en</strong> publiant le décret du 8 octobre <strong>1910</strong>, qui n'est'que la reproduction <strong>de</strong>s décrets<br />

<strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux ministres, l'un du temps <strong>de</strong> la monarchie absolue, l'autre du temps<br />

<strong>de</strong> la monarchie constitutionnelle.<br />

En vertu <strong>de</strong> ce décret, les jésuites fur<strong>en</strong>t obligés <strong>de</strong> sortir du pays, les uns par<br />

terre et les autres par mer.<br />

Maint<strong>en</strong>ant il est utile <strong>de</strong> remarquer les positions qu'ils prir<strong>en</strong>t <strong>à</strong> l'étranger et<br />

dans quel but ils les prir<strong>en</strong>t, car ils ne perdir<strong>en</strong>t pas <strong>de</strong> vue le <strong>Portugal</strong>, guettant toujours<br />

le mom<strong>en</strong>t propice pour pouvoir y r<strong>en</strong>trer. Ce sont eux qui le dis<strong>en</strong>t dans le tome il<br />

<strong>de</strong>s Proscritos : «Or les jésuites portugais avai<strong>en</strong>t un intérêt particulier <strong>à</strong> possé<strong>de</strong>r <strong>en</strong><br />

Espagne le noviciat et d'autres maisons, car les voyages serai<strong>en</strong>t incomparablem<strong>en</strong>t<br />

moins chers, le climat plus doux et semblable <strong>à</strong> celui <strong>de</strong> la patrie, vers laquelle ils ne<br />

pouvai<strong>en</strong>t s'empêcher da tourner leurs regards, et <strong>de</strong> laquelle ils espérai<strong>en</strong>t recevoir, non<br />

seulem<strong>en</strong>t quelques ressources, mais surtout les vocations <strong>de</strong>stinées par Dieu <strong>à</strong> donner<br />

la perpétuité <strong>à</strong> leur œuvre <strong>à</strong> peine initiée <strong>de</strong> régénération et <strong>de</strong> propagan<strong>de</strong> religieuse» 5 .<br />

Mais Mr. Joseph Canalejas, alors Présid<strong>en</strong>t du Ministère Espagnol, <strong>à</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> du<br />

Gouvernem<strong>en</strong>t Portugais, ne permit pas aux jésuites bannis <strong>de</strong> rester dans ce pays et<br />

ils dur<strong>en</strong>t aller aillears chercher un abri 6 .<br />

Ainsi les novices et les étudiants d'humanités, c'est-<strong>à</strong>-dire, la communauté du Barro,<br />

allèr<strong>en</strong>t <strong>à</strong> Exat<strong>en</strong> <strong>en</strong> Hollan<strong>de</strong>, dans le Limbourg confinant avec la frontière alleman<strong>de</strong>.<br />

C'est dans cette maison que les jésuites allemands ont aussi leur noviciat, vu<br />

qu'<strong>à</strong> l'intérieur <strong>de</strong> l'Allemagne il n'était pas permis <strong>à</strong> la Compagnie <strong>de</strong> Jésus d'avoir <strong>de</strong>s<br />

noviciats ni <strong>de</strong>s collèges 7 . Mais les novices et les humanistes portugais n'y restèr<strong>en</strong>t<br />

que <strong>de</strong>puis novembre <strong>1910</strong> jusqu'<strong>en</strong> août 1911, passant <strong>à</strong> cette époque <strong>à</strong> Alsemberg<br />

<strong>en</strong> Belgique, dans le voisinage <strong>de</strong> Bruxelles 8 .<br />

<strong>Les</strong> scolastiques portugais qui étudiai<strong>en</strong>t la philosophie ou la théologie continuèr<strong>en</strong>t<br />

<strong>à</strong> suivre ces cours dans les scolasticats étrangers d'autres Provinces <strong>de</strong> l'Ordre.<br />

«Quant aux jésuites déj<strong>à</strong> formés et jugés <strong>en</strong> état <strong>de</strong> faire un long voyage, on les <strong>en</strong>voya<br />

vers <strong>de</strong>s pays lointains d'Outromer, où il y a <strong>de</strong>s portugais, afin d'y exercer avec<br />

'.<br />

1<br />

Proscrites i, p. vin.<br />

* Proêcritos, i, p. 13.<br />

' Docum<strong>en</strong>ts politiques trouvés dans les palais royaux après la Révolution Républicaine du 5<br />

Oetobre, Lisbonne 1915, p. 123.<br />

* Voir p. 78.<br />

5 Proscrito», n p. 178.<br />

6 Proscrites, u, p. 174-179.<br />

» Proscrites, n, p. 178-228-231.<br />

* Proscrites, u, p. 232.


92<br />

eux le ministère du salut <strong>de</strong>s âmes. Sans délai et même avant la tin d'octobre <strong>1910</strong>,<br />

<strong>de</strong>s paquebots quittèr<strong>en</strong>t l'Espagne emm<strong>en</strong>ant <strong>de</strong>s jésuites, les uns vers l'Amérique du<br />

Nord, les autres vers le Brésil, d'autres vers l'In<strong>de</strong> et d'autres <strong>en</strong>core plus tard vers les<br />

côtes <strong>de</strong> Chine» l .<br />

Mais les jésuites allèr<strong>en</strong>t <strong>en</strong> plus grand nombre^au Brésil, où ils établir<strong>en</strong>t une<br />

mission, dont le P. Antoine M<strong>en</strong>ezes fut nommé supérieur -. Au Brésil ils dur<strong>en</strong>t aller<br />

vers le Nord, parce que le Général <strong>de</strong> la Compagnie a divisé le Brésil <strong>en</strong> trois parties<br />

pour les travaux <strong>de</strong> ses suiets. Le suJ est resté pour lee jésuites allemands, qui<br />

avai<strong>en</strong>t déj<strong>à</strong> <strong>de</strong>s maisons dans l'État <strong>de</strong> Rio Gran<strong>de</strong> do Sul ;<br />

le c<strong>en</strong>tre pour les itali<strong>en</strong>s<br />

qui avai<strong>en</strong>t déj<strong>à</strong> <strong>de</strong>s maisons dans les États <strong>de</strong> Rio <strong>de</strong> Janeiro, Santa Catarina, S. Paulo<br />

et Minas Gérais; le nord, qui est la plus mauvaise partie, parce qu'elle est la plus chau<strong>de</strong>,<br />

est resté pour les jésuites portugais qui arrivai<strong>en</strong>t. Le premier pays où ils s'installèr<strong>en</strong>t<br />

et ouvrir<strong>en</strong>t leur collège fut'Bahia 3 .<br />

Toutes ces nouvelles sur la direction que prir<strong>en</strong>t les jésuites portugais bannis ont<br />

été puisées dans le il volume <strong>de</strong> Proscritos.<br />

Mais on ne trouve pas dans ce volume, qui est <strong>de</strong> 1914, quelques nouvelles très<br />

intéressantes sur d'autres jésuites restés près du <strong>Portugal</strong> et dont l'auteur du livre n'a<br />

pas voulu parler, peut-être polir dépister les libéraux.<br />

Mais par le témoignage <strong>de</strong> personnes <strong>de</strong> notre connaissance, qui se sont trouvées<br />

<strong>en</strong> Espagne, nous savons que l'École Apostolique, qui était <strong>à</strong> Guimar<strong>à</strong>es, a été transférée<br />

<strong>à</strong> Salamanque et que les dévotes et les prêtres portugais leurs amis y <strong>en</strong>voi<strong>en</strong>t,<br />

surtout <strong>de</strong> Minho et <strong>de</strong> Beira, ces <strong>en</strong>fants «pauvres et <strong>de</strong> la rue pour la plupart» qui<br />

autrefois étai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>voyés dans cette ville<br />

Nous savons même que les<br />

portugaise.<br />

étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> cette École Apostolique se sont ét<strong>en</strong>dues davantage<br />

et qu'on leur a donné une pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> cinq années, afin que les futurs jésuites<br />

puiss<strong>en</strong>t se préparer plus facilem<strong>en</strong>t <strong>à</strong> leur scolasticat, pour v<strong>en</strong>ir faire leurs exam<strong>en</strong>s<br />

dans les lycées portugais, comme le faisai<strong>en</strong>t les jésuites français, lorsqu'ils fur<strong>en</strong>t bannis<br />

<strong>de</strong> France.<br />

Nous savons aussi que la guerre actuelle a obligé les jésuites <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong>, dont<br />

le collège était établi <strong>à</strong> Jette, près <strong>de</strong> Bruxelles, <strong>à</strong> se retirer <strong>en</strong> Espagne, où ils se trouv<strong>en</strong>t<br />

<strong>à</strong><br />

prés<strong>en</strong>t <strong>en</strong> Galice.<br />

Après leur bannissem<strong>en</strong>t les jésuites portugais publièr<strong>en</strong>t <strong>à</strong> l'étranger quelques brochures<br />

et livres, dans le but <strong>de</strong> se déf<strong>en</strong>dre <strong>de</strong>s accusations qui leur avai<strong>en</strong>t été faites<br />

dans la presse portugaise.<br />

Le Provincial Louis Cabrai publia le 5 novembre <strong>1910</strong>, <strong>à</strong> Madrid, une brochure<br />

ayant pour titre; A mon Pays, Protestation justificative au sujet du bannissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong><br />

mes religieux. Plus tard, le 8 juillet 1911, étant déj<strong>à</strong> <strong>en</strong> Hollan<strong>de</strong>, il fit paraître une<br />

autre brochure : <strong>Les</strong> jésuites et la contre-révolution • Le P. Candi<strong>de</strong> M<strong>en</strong>dès S. J. fit imprimer<br />

<strong>à</strong> Madrid <strong>en</strong> 1911 un livre intitulé: Le Collège <strong>de</strong> St. Fidèle, Réponse au Rapport<br />

<strong>de</strong> l'avocat Joseph Ramos Preto. Le P. L. Gonzague Azevedo S. J. a écrit, <strong>en</strong><br />

<strong>de</strong>ux volumes, Le jésuite, imprimé <strong>à</strong> Bruxelles <strong>en</strong> 1913, se rapportant dans le second<br />

volume aux <strong>de</strong>rnières années du séjour <strong>de</strong>s jésuites <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> 5 .<br />

Nous allons résumer ci-<strong>de</strong>ssous les points que le Provincial Louis Cabrai considère<br />

1<br />

Proscritos, h, p. 179.<br />

2 Proscritos, h, p. 249.<br />

3 Proscritos, u, p. 249 et 253.<br />

''<br />

Proscritos, vol i. Prologue du Provincial, p. xiii.<br />

5<br />

Le môme P. Azevedo est aussi l'auteur îles Proscritos <strong>en</strong> <strong>de</strong>ux volumes, le premier <strong>de</strong>squels<br />

fut imprimé <strong>en</strong> Espagne (Valladolid) on 1911, et le second <strong>en</strong> Belgique (Bruxelles) <strong>en</strong> 1914.


93<br />

nomme <strong>de</strong>vant motiver les accusations dont il prét<strong>en</strong>d se déf<strong>en</strong>dre *, et qui sont <strong>à</strong> peu<br />

près celles auxquelles se rapport<strong>en</strong>t les livres <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux autres Pères :<br />

1° Armem<strong>en</strong>ts et souterrains.<br />

2° Richesses et obt<strong>en</strong>tion d'héritages.<br />

3° Séduction <strong>de</strong> vocations.<br />

4° Organisation secrète.<br />

5° Esprit politique et contraire <strong>à</strong> la République.<br />

6° Influ<strong>en</strong>ce réactionnaire.<br />

Voyons la valeur <strong>de</strong> ces accusations et <strong>de</strong> la déf<strong>en</strong>se qu'<strong>en</strong> font les jésuites.<br />

1° Armem<strong>en</strong>ts et souterrains. Aussitôt après la révolution du 5 octobre, les journaux<br />

portugais annoncèr<strong>en</strong>t que dans le<br />

Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> et dans la Résid<strong>en</strong>ce du Quelhas<br />

il y avait <strong>de</strong>s armem<strong>en</strong>ts et <strong>de</strong>s souterrains. Ces nouvelles étai<strong>en</strong>t sans aucun doute<br />

exagérées et prov<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t certainem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ce que dans la ferme du Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong><br />

il y avait <strong>de</strong>s souterrains, <strong>de</strong>stinés <strong>à</strong> la recherche, conduite et réserve <strong>de</strong>s eaux.<br />

Naturellem<strong>en</strong>t le peuple portugais, se méfiant toujours <strong>de</strong>s jésuites, dont le séjour <strong>en</strong><br />

<strong>Portugal</strong> était contraire aux lois, s'est mépris et il n'est pas étonnant qu'il ait atribué<br />

<strong>à</strong> ces souterrains un but tout autre que celui auquel ils étai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>stinés. D'ailleurs les<br />

jésuites eux mêmes causèr<strong>en</strong>t cette confusion et cette méfiance du peuple, car parmi les<br />

premiers papiers trouvés dans ces maisons se trouvai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s lettres où il était question<br />

<strong>de</strong> cachettes et d'armem<strong>en</strong>ts. Ainsi dans une lettre adressée par le recteur <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong>,<br />

le P. Alexandre Barros, au Provincial, datée du 15 mai 19Q9, on lit:<br />

«Cette nuit on a travaillé <strong>à</strong> la cachette: Pereira Paz, Trocado, etc. C'est fini.»<br />

Quant aux armem<strong>en</strong>ts et aux coups <strong>de</strong> fusil tirés <strong>de</strong>s f<strong>en</strong>êtres <strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce du<br />

Quelhas, s'il est certain que les jésuites n'y étai<strong>en</strong>t plus, quand cela eut lieu, il est<br />

certain aussi que le peuple ne savait pas qu'ils étai<strong>en</strong>t déj<strong>à</strong> partis et il ne savait pas<br />

non plus qui tirait ces coups <strong>de</strong> fusil, si c'étai<strong>en</strong>t les amis ou les <strong>en</strong>nemis <strong>de</strong>s Pères.<br />

D'ailleurs les papiers trouvés parlai<strong>en</strong>t d'achats d'armes et <strong>de</strong> déf<strong>en</strong>se <strong>à</strong> main armée<br />

faite par <strong>de</strong>s jésuites. Ainsi dans une autre lettre du recteur <strong>de</strong> ( 'ampoli<strong>de</strong>, alors aux<br />

thermes, adressée au Provincial et datée du 7 août 1909, on lit:<br />

«Il n'y a pas <strong>de</strong> doute que les Nôtres se sont déf<strong>en</strong>dus <strong>à</strong> P.arcelone 2 <strong>à</strong> coups <strong>de</strong><br />

fusil et ils s'<strong>en</strong> sont bi<strong>en</strong> trouvés. De ( 'ampoli<strong>de</strong> on écrit qu'il faut sans retard acheter<br />

quelques fusils pour <strong>de</strong> pareils événem<strong>en</strong>ts et on me <strong>de</strong>man<strong>de</strong> d'<strong>en</strong> acheter, car le<br />

jour n'est pas éloigné où<br />

Je le crois: cet exemple a été mauvais.»<br />

Lisbonne <strong>de</strong>vra assister <strong>à</strong> <strong>de</strong> telles prouesses révolutionnaires.<br />

Dans une autre lettre d'un jésuite, Morais Pequito, du 28 septembre 1909, datée<br />

d'Oha, scolasticat d'Espagne où il résidait alors, on lit ces phrases:<br />

«Il parait que l'on prépare la Barcelona<strong>de</strong> <strong>à</strong> Lisbonne. Que ne puis-je y être pour<br />

donner quelques dragées <strong>à</strong> ceux qui ti<strong>en</strong>drai<strong>en</strong>t. Il n'y a pas un autre moy<strong>en</strong>. A Man-.<br />

resa on n'approcha même pas <strong>à</strong> cause d'une <strong>de</strong>mi douzaine <strong>de</strong> fusils<br />

qui s'y trouvai<strong>en</strong>t!<br />

Et <strong>à</strong> lîarcelone ceux qui .se déf<strong>en</strong>dai<strong>en</strong>t étai<strong>en</strong>t presque <strong>en</strong> sûreté. <strong>Les</strong> Nôtres <strong>de</strong> Barcelone<br />

vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t <strong>de</strong> dép<strong>en</strong>ser plus <strong>de</strong> 3 contos (15.000 francs), ri<strong>en</strong> que pour donner <strong>à</strong><br />

la maison une certaine déf<strong>en</strong>se facile et sûre. Donc on le sait déj<strong>à</strong>. . . »<br />

' .1 Mon Pays. Madrid, <strong>1910</strong>, p. 9.<br />

* Allusion ans événem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> Barcelone p<strong>en</strong>dant les <strong>de</strong>rnières journées <strong>de</strong> juillet <strong>de</strong> 1909 e<<br />

qui causèr<strong>en</strong>t la mort <strong>de</strong> Ferrer au château <strong>de</strong> Monjuich.


94<br />

Quelques unes <strong>de</strong> ces lettres fur<strong>en</strong>t aussitôt publiées dans les journaux ;<br />

<strong>de</strong> l<strong>à</strong> l'exagération<br />

<strong>de</strong>s premières nouvelles, dont cep<strong>en</strong>dant on ne doit pas être étonné, après la<br />

lecture <strong>de</strong> pareilles lettres.<br />

2" Richesses et obt<strong>en</strong>tion d'héritages.— Il n'y a pas <strong>de</strong> doute que les jésuites obtinr<strong>en</strong>t<br />

beaucoup d'arg<strong>en</strong>t <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> <strong>de</strong> diverses manières, comme nous l'ayons vu au<br />

chapitre VI. <strong>Les</strong> Collèges <strong>de</strong> Campuli<strong>de</strong> et <strong>de</strong> St. Fidèle <strong>en</strong> sont la preuve 1 :<br />

petits bâtim<strong>en</strong>ts<br />

<strong>à</strong> leur début, ils <strong>de</strong>vinr<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s établissem<strong>en</strong>ts énormes; et quelques unes <strong>de</strong> leurs<br />

Résid<strong>en</strong>ces sont <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ues <strong>de</strong>s maisons <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> valeur, comme celles <strong>de</strong> Guimarâes,<br />

Braga, Covilhâ, Porto et Lisbonne (rue du Quelh<strong>à</strong>s, 6). Pour acquérir cet arg<strong>en</strong>t on se<br />

servait <strong>de</strong>s dévotions, images, scapulaires, rosaires, et livres pieux <strong>de</strong> l'Apostolat <strong>de</strong> la<br />

Prière et d'autres Congrégations dévotes; on <strong>en</strong> voit la preuve dans les livres <strong>de</strong>.comptes<br />

qui se trouv<strong>en</strong>t aujourd'hui aux Archives Congréganistes et dans ['Histoire du Collège <strong>de</strong><br />

Campoli<strong>de</strong> et <strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> Lisbonne, écrites par eux <strong>en</strong> latin et publiées par moi<br />

avec la traduction <strong>en</strong> français. Seulem<strong>en</strong>t pour la construction du salon et <strong>de</strong> la tour <strong>de</strong> la<br />

Résid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> Lisbonne, le M<strong>en</strong>sageiro do Coraçâo<strong>de</strong> Jésus a fourni la somme <strong>de</strong> 8:715)5240<br />

réis (43.576 frs.) 2 . On doit remarquer que cette tour si élevée, que le Provincial Louis<br />

Campo Santo avait fait construire, n'avait aucune utilité; elle ne servait qu'<strong>à</strong> faire s<strong>en</strong>tir<br />

au peuple l'arrogance <strong>de</strong> la Compagnie. C'est pourquoi certains jésuites blâmai<strong>en</strong>t cette<br />

œuvre et p<strong>en</strong>dant les <strong>de</strong>rnières années le Supérieur <strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce p<strong>en</strong>sait <strong>à</strong> la démolir.<br />

D'après un manuscrit gardé aux Archives Congréganistes, le général n'approuva pas<br />

cette dép<strong>en</strong>se, quand'il <strong>en</strong> eut connaissance.<br />

Quant aux héritages, non seulem<strong>en</strong>t ils <strong>en</strong> reçur<strong>en</strong>t beaucoup, les uns plus importants,<br />

et d'autres qui l'étai<strong>en</strong>t moins, comme le dit le P. Cabrai, mais pour quelques uns<br />

d'<strong>en</strong>tre eux, comme celui <strong>de</strong> Mr. Pierre <strong>de</strong> Pina, les jésuites fur<strong>en</strong>t appelés aux tribunaux,<br />

au grand scandale <strong>de</strong>s simples 3 ,<br />

et il est certain aussi que quelques par<strong>en</strong>ts<br />

pauvres <strong>de</strong>s testateurs restèr<strong>en</strong>t dans la misère, pour que les jésuites puss<strong>en</strong>t recevoir<br />

quelques uns <strong>de</strong> ces héritages; j'<strong>en</strong> ai<br />

été un <strong>de</strong>s témoins.<br />

3° Séduction <strong>de</strong> vocations.— Le Provincial Louis Cabrai a beau nier, <strong>en</strong> se servant<br />

<strong>de</strong> subterfuges, que les jésuitas séduisai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants pour les faire <strong>en</strong>trer dans la<br />

Compagnie <strong>de</strong> Jésus : le fait cep<strong>en</strong>dant est absolum<strong>en</strong>t irréfutable, <strong>en</strong> vue <strong>de</strong>s docum<strong>en</strong>ts<br />

jésuitiques cités par moi aux chapitres VIII et XIII. N'était-ce pas pour séduire les esprits<br />

<strong>en</strong>fantins que l'on m<strong>en</strong>ait <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants <strong>de</strong> dix et douze ans <strong>à</strong> l'Ecole Apostolique pour<br />

<strong>en</strong> faire <strong>de</strong>s jésuites, <strong>en</strong> les éloignant d'abord <strong>de</strong> la société <strong>de</strong>s personnes étrangères <strong>à</strong><br />

l'École ? Ils donn<strong>en</strong>t eux-mêmes une preuve irréfutable <strong>de</strong> ce qu'ils prét<strong>en</strong>dai<strong>en</strong>t séduire<br />

ces <strong>en</strong>fants, lorsqu'ils déclar<strong>en</strong>t qu'ils empêchèr<strong>en</strong>t les Apostoliques <strong>de</strong> fréqu<strong>en</strong>ter le Séminaire-Lycée<br />

<strong>de</strong> Guimarâes, parce que le pourc<strong>en</strong>tage <strong>de</strong>s novices était <strong>de</strong>sc<strong>en</strong>du <strong>de</strong> 30<br />

<strong>à</strong> 16 pour c<strong>en</strong>t. S'ils ne voulai<strong>en</strong>t pas les séduire, ils <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t au contraire les porter <strong>à</strong><br />

1<br />

Le P. Candi<strong>de</strong> M<strong>en</strong>dôs critique beaucoup une erreur <strong>de</strong> Mr. Ramos Preto dans son Rapport,<br />

au sujet du Status Temporulis <strong>de</strong> St. Fidèle, qui se trouve aujourd'hui aux Archives Congréganistes.<br />

Mais le P. Candi<strong>de</strong> M<strong>en</strong>dôs s'est trompé aussi <strong>à</strong> la p. 12 <strong>de</strong> sa Réponse, car le sol<strong>de</strong> <strong>de</strong> 1909 n'était pas<br />

seulem<strong>en</strong>t ll:847;gO()0 réis, c'était cela et <strong>en</strong>core tous les nouveaux bâtim<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> la maison qui avait<br />

subi un grand changem<strong>en</strong>t et qui, avec les différ<strong>en</strong>tes acquisitions <strong>de</strong> terrain, valait beaucoup <strong>de</strong><br />

milliers <strong>de</strong> francs.<br />

- Comptes <strong>de</strong> l'Int<strong>en</strong>dance <strong>de</strong> la Province avec le M<strong>en</strong>sageiro-— Résumé <strong>de</strong>s Comptes <strong>de</strong> la Résid<strong>en</strong>ce —<br />

Hist. Coll. Camp, et Résid., Lisboa, p. 179. —Voir pp. 25 et 58.<br />

3<br />

Rapport du Dr. Sousa Refoios sur le Collège <strong>de</strong> St. Fidèle, p. 49.


95<br />

fréqu<strong>en</strong>ter ce Séminaire-Lycée, car on verrait ainsi quels étai<strong>en</strong>t ceux qui, vraim<strong>en</strong>t<br />

instruits et consci<strong>en</strong>ts, voudrai<strong>en</strong>t, <strong>de</strong> leur plein gré, embrasser l'Ordre. Qu'était-ce sinon<br />

séduire <strong>de</strong>B <strong>en</strong>fants, que <strong>de</strong> mettre <strong>en</strong>tre les mains <strong>de</strong> leurs collégi<strong>en</strong>s la brochure du<br />

P. Jacques Terri<strong>en</strong>, La mort dans la Compagnie <strong>de</strong> Jésus est un gage certain <strong>de</strong> pré<strong>de</strong>stination,<br />

après leur avoir mis dans la tête mille terreurs <strong>de</strong> l'<strong>en</strong>fer et <strong>de</strong>s charmants<br />

récit» du ciel? Le P. Cabrai et les autres déf<strong>en</strong>seurs <strong>de</strong>s jésuites pourront dire ce<br />

qu'ils voudront <strong>à</strong> cet égard, les<br />

notes sur l'École Apostolique écrites aussi par <strong>de</strong>s jésuites,<br />

et les faits qui les confirm<strong>en</strong>t, dém<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t complètem<strong>en</strong>t tous leurs argum<strong>en</strong>ts fictifs.<br />

4. Organisation secrète. Le P. Louis Cabrai lui-même ne peut pas nier l'organisation<br />

secrète da la Compagnie <strong>de</strong> Jésus <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>. Il manque seulem<strong>en</strong>t <strong>à</strong> la vérité, <strong>en</strong><br />

disant que la forme secrète <strong>de</strong> la Compagnie <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> lui avait été imposée par les<br />

Gouvernem<strong>en</strong>ts. Ceci n'est pas vrai. Ils avai<strong>en</strong>t pris dès le début cette organisation secrète,<br />

parce qu'ils savai<strong>en</strong>t que les lois portugaises leur déf<strong>en</strong>dai<strong>en</strong>t formellem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> rési<strong>de</strong>r<br />

<strong>en</strong>.<strong>Portugal</strong>, <strong>de</strong> faire la propagan<strong>de</strong> et <strong>de</strong> <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir les maîtres d'une propriété quelconque.<br />

<strong>Les</strong> jésuites ne pouvai<strong>en</strong>t être <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> <strong>de</strong>s personnes juridiques <strong>de</strong>vant les<br />

lois. C'est pourquoi, lorsque les autorités les interrogeai<strong>en</strong>t sur ce point, ils niai<strong>en</strong>t tous,<br />

una voce, leur qualité <strong>de</strong> jésuites, tandis que leurs cataloguas imprimés prouvai<strong>en</strong>t exactem<strong>en</strong>t<br />

le contraire. (Voir p. 6).<br />

Non seulem<strong>en</strong>t ils manquai<strong>en</strong>t <strong>à</strong> la vérité et usai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> subterfuges pour se cacher<br />

aux autorités, quand ils étai<strong>en</strong>t <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>, mais <strong>en</strong>core <strong>à</strong> prés<strong>en</strong>t <strong>en</strong> exil ils agiss<strong>en</strong>t<br />

<strong>de</strong> même, car le P. Candi<strong>de</strong> M<strong>en</strong>dès, p. 46 <strong>de</strong> sa Réponse, affirme que le Décret du<br />

18 avril 1901 n'exigeait pas que les corporations religieuses <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> cessass<strong>en</strong>t réellem<strong>en</strong>t<br />

d'être ce quelles étai<strong>en</strong>t; ce qui est faux, car l'art. 1, alinéa c, a déf<strong>en</strong>du <strong>à</strong> ces<br />

corporations les pratiques du noviciat, les vamx et les profession*, et cep<strong>en</strong>dant ces corporations<br />

religieuses, les jésuites <strong>en</strong> tête, ont continué <strong>à</strong> faire tout cela, comme on le<br />

voit par leurs catalogues et leur livres imprimés. A cette même page ce Père dit que<br />

si un jésuite était interrogé sur sa qualité, il ne l'était pas officiellem<strong>en</strong>t, et un délégué<br />

du gouvernem<strong>en</strong>t ne pouvait exiger <strong>de</strong> lui une déclaration autre que celle <strong>de</strong> sa position<br />

publique ou officielle dans la société. Par ce subterfuge un assassin, un contrebandier,<br />

etc., ne doiv<strong>en</strong>t pas non plus avouer qu'ils le sont, parce que telle n'est pas leur position<br />

officielle dans la société, vu que cette position ne peut exister officiellem<strong>en</strong>t.<br />

Malgré toutes ces faussetés et ces<br />

subterfuges employés par les jésuites pour cacher<br />

leur exist<strong>en</strong>ce illégale <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>, ils ne réussissai<strong>en</strong>t pas <strong>à</strong> tromperie peuple. Et les jésuites<br />

eux-mêmes le reconnur<strong>en</strong>t <strong>à</strong> l'époque révolutionnaire du 4 au 5 octobre <strong>1910</strong>, car,<br />

joignant la lâcheté <strong>à</strong> la fausseté, ils s'<strong>en</strong>fuir<strong>en</strong>t <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong>, y compris le Provincial,<br />

qui n'eut pas le courage d'att<strong>en</strong>dre <strong>de</strong> pied ferme ceux qui voudrai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>trer dans<br />

son collège (où d'ailleurs personne ne fut tué ni maltraité), rachetant par un acte d'énergie<br />

tant <strong>de</strong> subterfuges mesquins, <strong>de</strong> faussetés et d'intrigues, dont il s'était servi dans<br />

toute sa vie <strong>de</strong>, supérieur dans la Province Portugaise.<br />

5. Esprit politique contraire <strong>à</strong> la République. Louis Cabrai, ainsi que Candi<strong>de</strong> M<strong>en</strong>h's<br />

et Gonzague Azevedo, font dans leurs livres les plus grands efforts pour chercher<br />

<strong>à</strong> prouver que les jésuites ne se mêlai<strong>en</strong>t pas <strong>de</strong> la potitique, p<strong>en</strong>dant les <strong>de</strong>rnières années<br />

<strong>de</strong> leur séjour <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>. Mais aujourd'hui, au moy<strong>en</strong> <strong>de</strong>s docum<strong>en</strong>ts qui se trouv<strong>en</strong>t<br />

aux Archives Congrcganistes, dont quelques uns déj<strong>à</strong> publiés ici au chap. XIX, il ne<br />

peut plus y avoir le moindre doute qu'ils <strong>en</strong>trai<strong>en</strong>t <strong>à</strong> fond dans la politique, détournant<br />

<strong>de</strong> leurs partis certains hommes politiques pour les attirer vers le parti Nationaliste et<br />

cherchant <strong>à</strong> recruter du mon<strong>de</strong> et <strong>à</strong> fortifier et faire vivre ce parti, par l'arg<strong>en</strong>t, les brochures,<br />

les journaux, les congrégations d'étudiants, les exercices spirituels au clergé et


96<br />

aux dames, se servant même dans ce but <strong>de</strong> la chaire et du confessional. Il n'y a pas<br />

<strong>de</strong> doute non plus que d'autres religieux qui vivai<strong>en</strong>t <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>, les franciscains,<br />

ayant sout<strong>en</strong>u dans leur Revue (La Voix <strong>de</strong> Saint Antoine) <strong>de</strong>s opinions politiques différ<strong>en</strong>tes<br />

<strong>de</strong> celles <strong>de</strong>s jésuites, ceux-ci fir<strong>en</strong>t tant d'intrigues <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> et <strong>à</strong> Rome,<br />

que cette Revue dut cesser <strong>de</strong> paraître, quelques jésuites montrant même le désir <strong>de</strong> la<br />

suppression <strong>de</strong> ces religieux <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> et les accusant aussi quoad mores. <strong>Les</strong> déf<strong>en</strong>seurs<br />

<strong>de</strong>s jésuites ne peuv<strong>en</strong>t nier tout cela <strong>en</strong> face dès-docum<strong>en</strong>ts publiés ici et <strong>en</strong> face<br />

d'autres, <strong>en</strong>core archivés ! Il vaudrait beaucoup mieux qu'ils euss<strong>en</strong>t le courage d'avouer<br />

<strong>à</strong> prés<strong>en</strong>t qu'ils cherchai<strong>en</strong>t <strong>à</strong> suivre les traces <strong>de</strong> leurs ancêtres, <strong>de</strong>puis Jean III jusqu'<strong>à</strong><br />

comme le fur<strong>en</strong>t les Pères Simon Rodriguès,<br />

Jean V, <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ant même ministres <strong>de</strong>s rois,<br />

Louis Gonçalves da Camara, Léon H<strong>en</strong>riques, André Fernan<strong>de</strong>s, Antoine Vieira, et Jean<br />

Baptiste Carboni l .<br />

6. Influ<strong>en</strong>ce réactionnaire. Le P. Cabrai nie que les jésuites ai<strong>en</strong>t exercé une influ<strong>en</strong>ce<br />

réactionaire sur leurs élèves et sur leurs pénit<strong>en</strong>tes. Mais n'est-ce pas une influ<strong>en</strong>ce réactionnaire<br />

que d'élever comme <strong>de</strong>s novices les élèves <strong>de</strong> leurs collèges, comme il<br />

l'avou<strong>en</strong>t eux-mêmes? L'influ<strong>en</strong>ce réactionnaire ne vi<strong>en</strong>t-elle pas <strong>de</strong> ceux qui déclar<strong>en</strong>t<br />

que les élèves qui réussiss<strong>en</strong>t <strong>à</strong> l'exam<strong>en</strong> sont ceux dont la dévotion <strong>en</strong>vers le cœur <strong>de</strong><br />

Jésus est plus gran<strong>de</strong>.<br />

N'est-ce pas aussi par influ<strong>en</strong>ce réactionnaire qu'ils écriv<strong>en</strong>t que leurs élèves sont<br />

plutôt guéris par l'intercession <strong>de</strong> la Vierge Marie que par le traitem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins?<br />

N'est-ce pas l'influ<strong>en</strong>ce réactionnaire qui leur a fait écrire dans les Règlem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> leurs<br />

collèges que ceux qui n'obéiss<strong>en</strong>t pas aux préceptes catholiques ne peuv<strong>en</strong>t être ni vraim<strong>en</strong>t<br />

savants, ni vraim<strong>en</strong>t honnêtes, ni vraim<strong>en</strong>t heureux?- <strong>Les</strong> jésuites ne veul<strong>en</strong>t-ils<br />

pas que l'on appelle leur influ<strong>en</strong>ce réactionnaire et rétrogra<strong>de</strong>? Qu'ils cri<strong>en</strong>t ce qu'ils<br />

voudront, tous les g<strong>en</strong>s instruits et s<strong>en</strong>sés p<strong>en</strong>seront et diront le contraire.<br />

Il y a <strong>en</strong>core une autre sorte <strong>de</strong> Protestation que les jésuites ont jetée contre leur<br />

patrie : une suite <strong>de</strong> réclamations que d'après l'ordres <strong>de</strong>s Supérieurs quelques uns<br />

d'<strong>en</strong>tre eux ont prés<strong>en</strong>tées aux tribunaux portugais, réclamant comme propres, individuellem<strong>en</strong>t,<br />

les immeubles, collèges et résid<strong>en</strong>ces occupés par la Compagnie <strong>de</strong> Jésus<br />

<strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>. <strong>Les</strong> tribunaux portugais <strong>de</strong> l ire instance ont débouté toutes ces réclamations<br />

polir <strong>de</strong>s raisons si claires et si convaincantes, que les réclamants n'ont pas porté leurs<br />

réclamations aux instances supérieures, comme la loi le leur permettait. En effet, dès<br />

que par leurs propres catalogues imprimés on eut reconnu que les réclamants étai<strong>en</strong>t<br />

jésuites, par les lois <strong>de</strong> Pombal et d'Aguiar jamais révoquées on les considéra personnes<br />

sans capacité légale, non seulem<strong>en</strong>t pour avoir <strong>de</strong>s propriétés <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>, mais aussi<br />

pour. y vivre. Le décret <strong>de</strong> Hintze Ribeiro du 18 avril 1901 ne pouvait être invoqué<br />

par eux, car leurs catalogues et d'autres livres prouvant qu'ils avai<strong>en</strong>t «le noviciat religieux,<br />

et prononçai<strong>en</strong>t les vœux et professai<strong>en</strong>t l'Association Foi et patrie, qui les déguisait,<br />

périmait.<br />

Battus aux tribunaux portugais, les supérieurs antipatriotes, profitant <strong>de</strong> ce que quelques<br />

uns <strong>de</strong>s réclamants étai<strong>en</strong>t nés h l'étranger, tout <strong>en</strong> appart<strong>en</strong>ant <strong>de</strong>puis leur jeunesse<br />

<strong>à</strong> la Province Portugaise, où ils avai<strong>en</strong>t fait leur noviciat, professé et résidé contre<br />

les lois portugaises, poussèr<strong>en</strong>t ceux-ci <strong>à</strong> réclamer <strong>de</strong>vant les consuls ou ministres <strong>de</strong>s<br />

1<br />

Voir cette Histoire dans la première époque.— Bibliothèque <strong>de</strong> la Compagnie il* Jésus, par<br />

Somme rvogel S. J., T. II, p. 726.<br />

- Voir les chapitres VIII, XIII, XIV, XV, XVI, XVII et XVIII.


97<br />

pays où ils étai<strong>en</strong>t nés. Au mom<strong>en</strong>t où j'écris ceci, ces réclamations sont <strong>de</strong>stinées au<br />

Tribunal <strong>de</strong> La Haye, c'est<br />

pourquoi je ne dirai ri<strong>en</strong> <strong>à</strong> leur égard '.<br />

Je profiterai seulem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l'opportunité pour montrer <strong>en</strong>core une fois la duplicité<br />

et la fausseté du Provincial Louis Cabrai. Car, tandis qu'il ordonnait, par exemple, au<br />

P. Joseph Bramley, né <strong>en</strong> Angleterre, mais, <strong>de</strong>puis sa jeunesse, jésuite portugais, <strong>de</strong> réclamer<br />

une partie du Collège <strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong>, comme s'il lui appart<strong>en</strong>ait personnellem<strong>en</strong>t,<br />

le P. Cabrai lui-même déclarait dans A mon Pays le contraire <strong>de</strong> cette réclamation, vu<br />

que, p. 11, il dit: «La persécution religieuse <strong>de</strong> 1901 ayant effrayé beaucoup <strong>de</strong> familles,<br />

les élèves <strong>de</strong>vinr<strong>en</strong>t moins nombreurx <strong>à</strong> Campoli<strong>de</strong>; il fallut donc interrompre les<br />

travaux. Plus tard,<br />

lorsque je gouvernais cette maison, je pus faire avancer la construction<br />

<strong>de</strong> l'édifice ;<br />

mais la persécution haineuse <strong>de</strong> la pressse jacobine <strong>de</strong>s trois <strong>de</strong>rnières<br />

années eut le même résultat qu'<strong>en</strong> 1901 ;<br />

les travaux étai<strong>en</strong>t interrompus <strong>de</strong>puis plus <strong>de</strong><br />

trois<br />

ans».<br />

Par cette citation d'une brochure qui a été traduite dans presque toutes les langues<br />

<strong>de</strong> l'Europe et répandue un peu partout, le P. Cabrai déclare <strong>à</strong> son Pays que le Collège<br />

<strong>de</strong> Campoli<strong>de</strong> était bâti avec <strong>de</strong> l'arg<strong>en</strong>t portugais et d'après les ordres <strong>de</strong>s supérieurs<br />

<strong>de</strong> la Province Portugaise, mais d'un autre côté il ordonne <strong>à</strong> son sujet Joseph Bramley<br />

<strong>de</strong> réclamer ce collège <strong>de</strong>vant les tribunaux étrangers comme lui appart<strong>en</strong>ant personnellem<strong>en</strong>t<br />

et comme s'il recevait <strong>de</strong> l'arg<strong>en</strong>t pour la location payée par les Supérieurs<br />

du dit collège !<br />

Le jésuite Cabrai, comme tous ses autres compagnons, ne voudra pas, que nous,<br />

les Portugais qui connaissons parfaitem<strong>en</strong>t leurs procédés, nous les appelions hypocrites,<br />

m<strong>en</strong>teurs et même <strong>en</strong>nemis déclarés <strong>de</strong> leur patrie dont ils mépris<strong>en</strong>t les lois.<br />

Mais cette tache restera sur la mémoire <strong>de</strong>s jésuites portugais p<strong>en</strong>dant cette troisième<br />

époque <strong>de</strong> leur séjour illégal<br />

<strong>en</strong> <strong>Portugal</strong>.<br />

1<br />

Dans la Zambézie Portugaise le jésuite autrichi<strong>en</strong> Jean Hiller a réclamé <strong>de</strong>vant le consul allemand<br />

<strong>de</strong> Lour<strong>en</strong>ço Marques, d'après l'ordre da son Supérieur, comme lui appart<strong>en</strong>ant, la propriété<br />

<strong>de</strong> la Mission <strong>de</strong> Boroma et ses dép<strong>en</strong>dances; mais cette réclamation fut déboutée, Hiller n'obtint<br />

ri<strong>en</strong> ni pour lui ni pour les jésuites, la Mission fut accordée <strong>à</strong> d'autres prêtres qui reçur<strong>en</strong>t l'usufruit<br />

<strong>de</strong>s bi<strong>en</strong>s réclamés par le jésuite Hiller; et ceci fut fait avec l'approbation <strong>de</strong> Berlin, Vi<strong>en</strong>ne et Rome.<br />

C'est le jésuite Gonzague Azevedo qui l'avoue dans la <strong>de</strong>uxième partie <strong>de</strong>s Proscrites pp. 157,<br />

158 et 159. Voici <strong>en</strong> quels termes :<br />

• La protestation du P. Hiller <strong>de</strong>vait être prévue par les hommes que la révolution d'octobre<br />

<strong>1910</strong> avait mis <strong>à</strong> la tête <strong>de</strong>s <strong>de</strong>stinées du <strong>Portugal</strong>.<br />

«Pour le P. Hiller, comme pour le P. Jean Baptiste Gonçalves (Supérieur <strong>de</strong> la Mission), conserver<br />

la Mission c'était y persévérer jusqu'<strong>à</strong> la mort. Ils espérai<strong>en</strong>t que les gouvernem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> Berlin<br />

et <strong>de</strong> Vi<strong>en</strong>ne écouterai<strong>en</strong>t plutôt les procès-verbaux <strong>de</strong> Bruxelles que leur propre intérêt; or voici ce<br />

qui arriva contre toutes les prévisions. <strong>Les</strong> gouvernem<strong>en</strong>ts allemand et autrichi<strong>en</strong> proposèr<strong>en</strong>t<br />

alors <strong>à</strong> celui <strong>de</strong> Lisbonne <strong>de</strong> remplacer les jésuites <strong>de</strong> la Province Portugaise, d'abord par les missionaires,<br />

nommés oblats, et <strong>en</strong>suite par ceux <strong>de</strong> la Congrégation du Verbe Divin. Et la proposition<br />

fut acceptée.<br />

«Comme on <strong>de</strong>vait s'y att<strong>en</strong>dre, lorsque la Capitale <strong>de</strong> la Chréti<strong>en</strong>té apprit cette nouvelle, il<br />

y<br />

eut une gran<strong>de</strong> joie . . . aussitôt que l'on apprit <strong>à</strong> Rome ce que je vi<strong>en</strong>s <strong>de</strong> rapporter, le bannissem<strong>en</strong>t<br />

<strong>de</strong>s jésuites décrété par le gouvernem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la République portugaise fut accepté».


TABLE DES MATIÈRES<br />

Troisième Époque<br />

1857-<strong>1910</strong><br />

Règnes <strong>de</strong> Marie II (1831-1853) — Pierre V (1853-1861) — Louis I<br />

er (1861-1889)<br />

Charles 1 er (1889-1908) — Emmanuel II (1908-<strong>1910</strong>)<br />

Chapitre Premier. — R<strong>en</strong>trée clan<strong>de</strong>stine <strong>de</strong>s jésuites <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> 3<br />

Chapitre Deuxième. — <strong>Les</strong> jésuites <strong>en</strong>trèr<strong>en</strong>t <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> et y vécur<strong>en</strong>t <strong>en</strong> méprisant consci<strong>en</strong>in<strong>en</strong>t<br />

et <strong>à</strong> <strong>de</strong>ssein les lois <strong>de</strong> Pombal, Aguiar et Hintzc 5<br />

Chapitre Troisième. — <strong>Les</strong> jésuites sachant que leur séjour <strong>en</strong> <strong>Portugal</strong> était contraire aux<br />

lois du pays, plaçai<strong>en</strong>t leur maisons sous le nom <strong>de</strong> jésuites étrangers 11<br />

Chapitre Quatrième. — Difficultés que les jésuites ont trouvées dans le système <strong>de</strong> v<strong>en</strong>tes fictives<br />

<strong>de</strong> leurs maisons <strong>à</strong> <strong>de</strong>s jésuites étrangers et ruses dont ils se sont servi pour les résoudre<br />

15<br />

Chapitre Cinquième. — <strong>Les</strong> jésuites dans les v<strong>en</strong><strong>de</strong>s fictives <strong>de</strong> leurs maisons <strong>à</strong> <strong>de</strong>s jésuites<br />

étrangers volai<strong>en</strong>t les Finances Publiques et insultai<strong>en</strong>t les fonctionnaires qui faisai<strong>en</strong>t<br />

leur <strong>de</strong>voir 22<br />

Chapitre Sixième. — Comm<strong>en</strong>t les jésuites obt<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l'arg<strong>en</strong>t pour acheter leurs maisons et<br />

pour les augm<strong>en</strong>tations qu'ils y faisai<strong>en</strong>t 24<br />

Chapitre Septième. — Collèges pour les pauvres transformés <strong>en</strong> collège pour les riches. — <strong>Les</strong><br />

jésuites ne veul<strong>en</strong>t pas dép<strong>en</strong>ser <strong>de</strong> l'arg<strong>en</strong>t pour les <strong>en</strong>fants pauvres 27<br />

Chapitre Huitième. — Comm<strong>en</strong>t les jésuites recrutai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s novices pour leur Ordre 30<br />

Chapitre Neuvième. — Comm<strong>en</strong>t on faisait le noviciat 37<br />

Chapitre Dixième. — Comm<strong>en</strong>t ils faisai<strong>en</strong>t leur scolasticat 40<br />

Chapitre Onzième. — Leurs collèges pour élèves séculiers 49<br />

Chapitre Douzième. — Comm<strong>en</strong>t ils <strong>en</strong>seignai<strong>en</strong>t dans leurs collèges les élèves séculiers. ... 50<br />

Chapitre Treizième. — Comm<strong>en</strong>t ils élevai<strong>en</strong>t dans leurs collèges 54<br />

Chapitre Quatorzième. — Comm<strong>en</strong>t ils exerçai<strong>en</strong>t leur influ<strong>en</strong>ce sur les étudiants <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong><br />

leurs collèges 58<br />

Chapitre Quinzième. — Comm<strong>en</strong>t ils exerçai<strong>en</strong>t leur influ<strong>en</strong>ce sur le Clergé 60<br />

Chapitre Seizième. — Comm<strong>en</strong>t ils exerçai<strong>en</strong>t leur influ<strong>en</strong>ce sur les femmes 62<br />

Chapitre Dix-septième. — Comm<strong>en</strong>t ils exerçai<strong>en</strong>t leur influ<strong>en</strong>ce sur les g<strong>en</strong>s du peuple et sur<br />

la classe ouvrière 66<br />

Chapitre Dix-huitième. — Comm<strong>en</strong>t les jésuites exerçai<strong>en</strong>t leur influ<strong>en</strong>ce sur la presse .... 69<br />

Chapitre Dix-neuvième. — Comm<strong>en</strong>t ils exerçai<strong>en</strong>t leur influ<strong>en</strong>ce sur la politique du pays ... 71<br />

Chapitre Vingtième. — L'œuvre <strong>de</strong>s jésuites portugais dans les missions d'Outremer 85<br />

Chapitre Vingt-et-uniéme. — Le Bannissem<strong>en</strong>t et après 90


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