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cheval de guerre

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-<br />

p. OERUZEZ<br />

CHEVAL DE GUERRE<br />

OcT.&lIC<br />

BERGER-LEVRAULT ET C", ÉDITEDRS<br />

PARIS I NANCY<br />

5, Rue (les Beaux-Arts, 5 1 18, Rue <strong>de</strong>s Glacis, 18<br />

1897


LE<br />

CHEVAL DE GUERRE


DU MÊME AUTEUR<br />

A pied, à <strong>cheval</strong> et en voiture. 1 vol. in-I2, iilustré.<br />

(Galmann Levy, éditeur.)<br />

CouìommÌGrs. — Imp. PAÜI. BliODARD. — 761-0/.


p. GERUZEZ<br />

LE<br />

CHEVAL DE GUERRE<br />

BERGER-LEVRAULÏ ET C'% ÉDITEÛRS<br />

PARIS I NANCY<br />

R, Rue <strong>de</strong>s Beaux-Arts, 5 | 18, Rue <strong>de</strong>s Glacis, 18<br />

1897


CHEVAL DE GUERRE<br />

De prime abord il semble bizarre que tout le<br />

mon<strong>de</strong> ne soit pas d'accord sur celle question. Il<br />

n'est pas conleslé que la France ail une armée, que<br />

par conséquent elle a besoin <strong>de</strong> chevaux; il est également<br />

indéniable que sa population <strong>cheval</strong>ine est<br />

assez nombreuse pour qu'on puisse y prélever facilement<br />

la quantité nécessaire à la remonte <strong>de</strong> sa<br />

cavalerie.<br />

Il est également établi que la remonte n'y trouve<br />

pas ce nombre, et que les achats insuffisants qu'elle<br />

fait portent sur <strong>de</strong>s animaux généralement impropres<br />

au service <strong>de</strong> la selle, et que la plus gran<strong>de</strong> partie<br />

<strong>de</strong>s chevaux achetés à trois ans ne seraient plus<br />

acceptés à cinq, époque où leur modèle est définitivement<br />

formulé.<br />

Toutes les combinaisons pratiquées, ou simplement<br />

proposées viennent échouer <strong>de</strong>vant ce fait<br />

économique que rien ne peut détruire. L'agriculteur


6 LE CHEVAL DE GUERRE.<br />

ne produira jamais que le <strong>cheval</strong> <strong>de</strong>mandé par le<br />

commerce; et ce <strong>cheval</strong> il le produit toujours avec<br />

une docilité et une facilité surprenantes. La Normandie<br />

produisait encore en abondance en 1830 les<br />

carrossiers au nez busqué, ensuite elle a fait les<br />

grands chevaux près du sang et les anciens irlandais<br />

distingués; aujourd'hui elle fait <strong>de</strong>s trotteurs.<br />

Dans les pays d'élevage du gros trait, le <strong>cheval</strong> <strong>de</strong><br />

tramway a remplacé le percheron postier aujourd'hui<br />

disparu. La production tient compte <strong>de</strong>s exigences<br />

et <strong>de</strong>s indications <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> commerciale,<br />

et aucune autre influence ne peut agir contre<br />

elle. L'État seul <strong>de</strong>man<strong>de</strong> le <strong>cheval</strong> <strong>de</strong> selle, il est la<br />

minorité dans la clientèle, il a peu d'argent dans sa<br />

poche, il ne sera jamais servi; il est forcé <strong>de</strong><br />

s'adresser à l'étranger ou <strong>de</strong> se contenter du rebut<br />

du commerce, ce qu'il a fait.<br />

La question est-elle inso luble non certes; mais<br />

jusqu'à présent tous ceux qui ont disposé d'une<br />

tribune pour y discuter ont été empêchés <strong>de</strong> dire<br />

la vérité; la plupart à cause <strong>de</strong> leur ignorance du<br />

sujet, les autres pour ménager leur intérêt personnel,<br />

ou celui qu'ils représentaient; et une troisième<br />

catégorie empêchée par l'ignorance et l'intérêt<br />

réunis ; ce sont les plus nombreux.<br />

De tout temps et en tout pays le critérium infaillible<br />

pour désigner le reproducteur le plus capable


LE CHEVAL DE GUERRE. 7<br />

a été la course; l'époque où M. Prudhomme applaudissait<br />

les ignorants qui la combattaient avec passion,<br />

est passée <strong>de</strong>puis longtemps.<br />

Aujourd'hui la course est encouragée, favorisée,<br />

non pas à cause du <strong>cheval</strong> dont tout le mon<strong>de</strong> se<br />

moque comme un poisson d'une pomme, mais à cause<br />

du jeu qui s'est installé à côté d'elle. On cherche les<br />

prélcxtes à paris, on parie au galop, on parie au Irot,<br />

on pariera incessamment au pas, à qui ira le plus<br />

doucement, l'important est <strong>de</strong> parier (le <strong>cheval</strong> <strong>de</strong><br />

course, il n'y en a plus pour le public, il n'existe que<br />

le <strong>cheval</strong> <strong>de</strong> jeu)... 11 s'est formé une pléia<strong>de</strong> do journaux<br />

et d'écrivains spéciaux dont le grand mérite<br />

consiste à débiner ou à surfaire les chevaux, pour leur<br />

donner la cote qu'ils désirent; à pointer les courses<br />

gagnées ou perdues ; comparer les poids, les distances<br />

et en tirer <strong>de</strong>s pronostics que tout le mon<strong>de</strong> peut faire.<br />

Toute cette boursicolerie équestre n'a aucun rapport<br />

avec le <strong>cheval</strong> et il est complètement inutile <strong>de</strong> l'avoir<br />

étudiée et pratiquée pour l'exercer, aussi je ne discuterai<br />

aucune <strong>de</strong>s théories ayant.celte origine. 11 en<br />

est autrement <strong>de</strong> celle é manant <strong>de</strong>s fonctionnaires<br />

<strong>de</strong> l'État cl <strong>de</strong>s personnalités militaires qui ont<br />

figuré dans le débat, el qui possè<strong>de</strong>nt le bagage<br />

scientifique joint à la pratique qui seuls justifient<br />

leur immixtion dans la discussion.<br />

La politique a été le grand cl presque l'unique


8 LE CHEVAL DE GUERRE.<br />

moteur qui a guidé les hippologues, cl leur a fait<br />

oublier ou écarter à <strong>de</strong>ssein la vérité. A l'heure<br />

actuelle toutes les questions trouvent leur solution<br />

dans la salisfaclion <strong>de</strong> l'électeur; tous les intérêts<br />

les plus sacrés disparaissent <strong>de</strong>vant lui, le f^ouvernement<br />

dit : S'il n'est pas content il nommera <strong>de</strong>s<br />

opposants; le député dit : Il nommera mon concurrent;<br />

le fonctionnaire dit : ^lon chef a peur <strong>de</strong> lui,<br />

et je lui serai toujours sacrifié; le journaliste : Si je<br />

le contrarie il se désabonnera; ce qui équivaut en<br />

matière <strong>cheval</strong>ine à dire : encourager le gouvernement<br />

à prendre <strong>de</strong>s mesures protectrices pour le<br />

<strong>cheval</strong> <strong>de</strong> <strong>guerre</strong>, dont l'élevage est onéreux pour<br />

l'électeur, et combattre la production du trotteur qui<br />

lui rapporte. Jamais.<br />

Les journalistes, les politiciens et les joueurs l'ont<br />

leurs petits et môme très petits métiers, ils ont le<br />

droit <strong>de</strong> ne rien savoir, ils en abusent, et celui <strong>de</strong> ne<br />

rien dire <strong>de</strong> ce qu'ils savent, ils en usent.<br />

Mais les fonctionnaires et les membres du gouvernement<br />

spécialement chargés <strong>de</strong> la direction et <strong>de</strong>s<br />

intérêts <strong>de</strong> l'élevage du <strong>cheval</strong>, ont le <strong>de</strong>voir <strong>de</strong><br />

possé<strong>de</strong>r sur la zoologie <strong>de</strong> certaines connaissances<br />

et n'ont pas le droit <strong>de</strong>les passer sous silence; ils<br />

savent très bien et ils doivent crier très haut : que<br />

les lois qui prési<strong>de</strong>nt à la conformation normale <strong>de</strong><br />

la mécanique animale peuvent être modifiées par


LE CHEVAL DE GUERRE. 9<br />

<strong>de</strong>ux facteurs qui sont la sélection et la gymnastique<br />

fonctionnelle; tout le mon<strong>de</strong> sait que l'effort continu<br />

et prédominant d'un organe le modifie. La combinaison<br />

<strong>de</strong> cette modification et <strong>de</strong> la sélection a pour résultat<br />

le changement <strong>de</strong>s dispositions <strong>de</strong> la mécanique<br />

normale. La constatation <strong>de</strong> ces faits, qui ne sont<br />

pas certes une découverte mo<strong>de</strong>rne, est fournie<br />

dans l'espèce <strong>cheval</strong> par la production du trotteur<br />

dont l'équilibre naturel est complètement change,<br />

comme nous le voyons dans les trotteurs russes et<br />

les américains, qui ont une construction qui les<br />

empêche <strong>de</strong> porter et <strong>de</strong> traîner un poids sérieux et<br />

les rend uniquement propres à la course et surtout<br />

au jeu ; ce sont <strong>de</strong>s cartes à quatre pattes.<br />

Ce n'est pas le trot qui déforme le <strong>cheval</strong>, c'est la<br />

vitesse au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> celle prévue par la nature; le<br />

trot absolument régulier que la mécanique normale<br />

peut fournir n'a rien <strong>de</strong> nuisible, au contraire;<br />

quand l'animal désire on est forcé d'obtenir une<br />

vitesse supérieure à celle-là, il prend le galop,<br />

allure dans laquelle il peut impunément produire le<br />

maximum <strong>de</strong> l'effort que son organisme peut, supporter,<br />

si ce maximum d'effort est produit en imposant<br />

en môme temps l'allure du trot. L'équilibre est<br />

modifié et remplacé par un autre anormal, imprévu<br />

par la nature, douloureux, et duquel le malheureux<br />

animal a l'idée fixe <strong>de</strong> sortir, et dans lequel il est


10 LE CHEVAL DE GUERRE.<br />

maintenu grâce aux monstrueuses tortures que vous<br />

connaissez. Quand le trotteur est dressé, c'est-à-dire<br />

quand la gymnastique a familiarisé par la continuité<br />

<strong>de</strong> Teffort spécial les muscles <strong>de</strong>s parties particulièrement<br />

employées dans le trot, la douleur et la<br />

courbature disparaissent et le mouvement s'exécute<br />

sans résistance, il on est ainsi pour tous les elïorls,<br />

après un entraînement suffisant; exemple les gymnastes,<br />

les acrobates et les mouvements spéciaux à<br />

certaines professions, forgeron, charpentier, scieur<br />

<strong>de</strong> long, etc. 11 ne faut pas croire que l'exécution<br />

d'un mouvement anormal, <strong>de</strong>venu facile par la pratique<br />

prolongée, soit sans action sur l'organisme.<br />

Quand le trotteur donne son maximum d'impulsion,<br />

sans douleur et sans résistance, la désorganition<br />

<strong>de</strong> sa machine ne continue pas moins, <strong>de</strong> même<br />

que celle <strong>de</strong> l'acrobate qui marche sur les mains.<br />

Il est reconnu par tous les hippologues que le<br />

maximum <strong>de</strong> l'effort employé à l'allure <strong>de</strong> trot met<br />

la machine animale dans <strong>de</strong>s conditions anormales<br />

qui modifient sa construction et qui la remplacent<br />

par une autre. Ce phénomène est surabondamment<br />

démontré par la construction <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux seules races<br />

<strong>de</strong> trotteurs ayant une existence déjà ancienne, les<br />

russes et les américains.<br />

Malgré la date récente <strong>de</strong> sa formation et la diversité<br />

<strong>de</strong>s races dans lesquelles on a pris ses repro-


LE CHEVAL DE GUEHliE. 1 1<br />

duclcurs, la famille <strong>de</strong>s IroUeurs français a déjà une<br />

construction générale très accusée, à laquelle quelques<br />

rares individus échappent grâce à <strong>de</strong>s rappels<br />

<strong>de</strong> race qui peuvent égarer quelques ignorants,<br />

mais qui ne modifient en rien l'ensemble du modèle<br />

<strong>de</strong> nos trotteurs, modèle qui est loin d'être arrivé<br />

à son maximum <strong>de</strong> spécialisation, comme chez le<br />

russe et l'américain, mais qui est déjà assez caractérisé<br />

pour le rendre absolument impropre à la selle<br />

et très médiocre dans la traction.<br />

Je ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pas la suppression <strong>de</strong>s courses<br />

an iroL; si <strong>de</strong>s Sociétés veulent faire <strong>de</strong>s chevaux<br />

pour servir à tous les sales trafics qui se pratiquent<br />

sur les hippodromes, laissons-les faire puisqu'il est<br />

impossible <strong>de</strong> s'y opposer, mais ce que l'on peut<br />

faire, ce que la masse <strong>de</strong>s électeurs a le droit do<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r et le <strong>de</strong>voir d'imposer, c'est d'empêcher<br />

que l'État protège et encourage la production <strong>de</strong> ce<br />

<strong>cheval</strong> néfaste; aujourd'hui tousles chevaux achetés<br />

par les Haras ont du sang trotteur, tous les reproducteurs<br />

<strong>de</strong>mi-sang mâles et femelles ont du sang<br />

trotteur.<br />

Les haras ont rendu <strong>de</strong> grands services : on leur<br />

doit la considérable dose <strong>de</strong> sang qui se trouve<br />

aujourd'hui même dans les races les plus communes,<br />

les encolures se sont allongées, les épaules sont plus<br />

longues, plus obliques, le dos moins long, la queue


12 LE CHEVAL DE GUERRE.<br />

mieux plantée, nous serions aujourd'hui bien près<br />

<strong>de</strong> la perfection, si l'administration avait continué<br />

dans cette voie, la vulgarisation du sang et du modèle ;<br />

malheureusement, on a <strong>de</strong>puis une trentaine d'années<br />

<strong>de</strong>mandé à l'étalon <strong>de</strong>mi-sang d'avoir une<br />

origine <strong>de</strong> trotteur. Aujourd'hui le trotteur a une<br />

dose <strong>de</strong> sang considérable, il a une gran<strong>de</strong> vitalité,<br />

l'énergie, l'endurance et la qualité intime <strong>de</strong> l'animal<br />

ayant été exercées et alimentées dans le jeune âge,<br />

il a tout ce qu'il faut pour être le premier <strong>cheval</strong> du<br />

mon<strong>de</strong>, il ne lui manque qu'une chose : le modèle.<br />

Ce n'est pas le trot, c'est l'excès <strong>de</strong> vitesse dans le<br />

trot qui le lui a retiré, ren<strong>de</strong>z-lui le modèle du bon<br />

<strong>cheval</strong>. Il sera d'abord beau, il sera <strong>cheval</strong> <strong>de</strong> selle,<br />

carrossier, artilleur, trait léger, tout ce que vous<br />

voudrez ; continuez à le faire trotter dans les mômes<br />

conditions, il <strong>de</strong>viendra <strong>de</strong>main, comme ses confrères<br />

russes et américains, impropre à tout usage pratique.<br />

Si le personnel <strong>de</strong>s haras russes n'employait comme<br />

étalons que <strong>de</strong>s Orloffs et que l'empire un beau jour<br />

no soit rempli que <strong>de</strong> trotteurs, incapables <strong>de</strong> porter<br />

un soldat, <strong>de</strong> traîner un fourgon, une pièce d'artillerie,<br />

labourer un champ, je crois que ledit personnel<br />

aurait <strong>de</strong>s chances d'aller manger sa pension<br />

<strong>de</strong> retraite en Sibérie. Et les Américains, les voyezvous<br />

d'ici ayant remplacé leurs nombreuses races<br />

par l'unique trotteur! Ils sont trop pratiques pour


LE CHEVAL DE GUERRE. 13<br />

faire une pareille bévue : c'est cependanL c e que<br />

nous faisons en France dans ce momenl. Dans peu<br />

d'années, du train où vont les choses, la France sera<br />

couverte <strong>de</strong> chevaux sans aptitu<strong>de</strong>, et comme ceux<br />

<strong>de</strong> Ca<strong>de</strong>t Roussel ne pourront ni tirer, ni porter<br />

selle.<br />

C'est une gran<strong>de</strong> erreur <strong>de</strong> croire qu'il faut pour<br />

l'armée un <strong>cheval</strong> spécial : il lui faut simplement le<br />

<strong>cheval</strong> bien fait ayant assez <strong>de</strong> sang pour supporter<br />

facilement les allures vives tel que le <strong>de</strong>mi-sang bien<br />

conformé, avec l'encolure longue, la poitrine bien<br />

<strong>de</strong>scendue, l'épaule longue et inclinée, le garrot sorti,<br />

le dos et le rein courts, les hanches longues, la<br />

queue bien plantée, les aplombs réguliers, les rayons<br />

supérieurs <strong>de</strong>s membres longs, les inférieurs courts,<br />

l'avant-main plus élevée que l'arrière-main. L'animal<br />

ainsi construit, quel que soit son volume, sera toujours<br />

un <strong>cheval</strong> capable d'être monté et <strong>de</strong> <strong>de</strong>venir<br />

<strong>cheval</strong> <strong>de</strong> selle, c'est-à-dire d'être facilement mobilisé<br />

sur les quatre faces, à droite, à gauche, en avant<br />

et en arrière, et cela parle premier cavalier venu. Ce<br />

n'est pas ici la place <strong>de</strong> faire un cours d'équitation,<br />

mais tous les hommes compétents savent qu'un<br />

<strong>cheval</strong> construit en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s conditions normales<br />

que je viens d'énumérer ne peut <strong>de</strong>venir un <strong>cheval</strong><br />

<strong>de</strong> selle qu'à la suite d'un dressage ramenant l'équilibre<br />

naturel par une position que l'écuyer excep-


i4<br />

LE CHEVAL DE GUERRE.<br />

tionnel peut seul obtenir et maintenir, et par conséquent<br />

inappliquable pour la masse. La construction<br />

que nous indiquons est celle du <strong>cheval</strong> <strong>de</strong> pur-sang.<br />

Elle permet également les <strong>de</strong>ux actions <strong>de</strong> porter et<br />

<strong>de</strong> traîner; c'est la conformation du galopeur <strong>de</strong><br />

l'allure commune et possible à tous les chevaux<br />

sans la perturbation <strong>de</strong> leur constitution. C'est cette<br />

construction qu'il faut vulgariser. Une fois commune<br />

à toutes les races, la question du <strong>cheval</strong> <strong>de</strong><br />

selle et du <strong>cheval</strong> <strong>de</strong> <strong>guerre</strong> est tranchée. La<br />

remonte n'a plus qu'à choisir la taille et le <strong>de</strong>gré <strong>de</strong><br />

volume et <strong>de</strong> substance nécessaire au besoin <strong>de</strong>s<br />

différents services <strong>de</strong> l'armée. Le champ <strong>de</strong> notre<br />

production est assez nombreux pour qu'on y trouve<br />

facilement la quantité nécessaire à notre remonte.<br />

Le <strong>cheval</strong> bien fait ne coûte pas plus cher à élever<br />

que le <strong>cheval</strong> mal fait. Les courses au galop peuvent<br />

seules ramener le bon modèle que nous possédions<br />

presque au moment où le trot est venu le détruire.<br />

Le moyen d'enrayer le mal qui se propage si rapi<strong>de</strong>ment<br />

n'est pas d'empêcher brusquement l'élevage<br />

du trotteur, ce qui est impossible; tout ce qu'on<br />

peut faire c'est <strong>de</strong> le rendre inutile au joueur en lui<br />

fournissant un autre moyen <strong>de</strong> satisfaire sa passion.<br />

Organiser et encourager la course au galop pour le<br />

<strong>de</strong>mi-sang, il <strong>de</strong>viendra lui aussi une carte à<br />

quatre pattes, un engin <strong>de</strong> jeu, comme le trotteur.


LE CHEVAL DE GUERRE.<br />

1Ö<br />

dont l'élevage sera producliC et auquel lo cultivateur<br />

se livrera spoiilanément et d'autant plus volontiers<br />

que le temps est proche où il va s'apercevoir que le<br />

produit construit en trotteur n'ayant plus d'aptitu<strong>de</strong><br />

pratique sera absolument sans valeur.<br />

Les errements suivis actuellement par l'administration<br />

<strong>de</strong>s haras, lesquels consistent à couvrir la<br />

France d'étalons dont la construction, pour les raisons<br />

que nous venons <strong>de</strong> donner, conduit inévitablement<br />

au <strong>cheval</strong> inutile et par conséquent invendable,<br />

amènera la ruine <strong>de</strong> notre industrie <strong>cheval</strong>ine<br />

et rendra notre armée absolument tributaire do<br />

l'étranger. Tous ceux qui ignorent ces choses,<br />

et c'est le très petit nombre, ne sont pas à leur place<br />

dans les situations où se pratique la direction <strong>de</strong><br />

notre élevage. Il faut les déplacer et les utiliser dans<br />

les services <strong>de</strong> l'assistance publique, ou <strong>de</strong> l'inspection<br />

<strong>de</strong>s nourrices. Il y a ceux qui savent et qui se<br />

taisent, c'est le grand nombre; ils ont conscience<br />

<strong>de</strong>s résultats vers lesquels on marche, du sinistre<br />

qui attend noire élevage an bout du chemin qu'on<br />

lui fait parcourir si vite. Si on pouvait les soustraire<br />

à la dépendance morale où les maintiennent le<br />

député, le préfet, les journaux et les électeurs; si on<br />

les plaçait sur un terrain où leur sécurité serait<br />

absolue, leur dignité et leur autorité seraient ce<br />

qu'elles doivent être, et alors ils crieraient bien haut


16 LE CHEVAL DE GUERRE.<br />

ce que j'ai eiiLcndu dire bien bas par plusieurs d'entre<br />

eux : « le trolleur mène à la <strong>de</strong>struction du <strong>cheval</strong><br />

français ».<br />

Le milieu où l'administration <strong>de</strong>s haras aurait la<br />

liberté <strong>de</strong> pratiquer les mesures nécessaires à la<br />

vulgarisation du modèle du <strong>cheval</strong> <strong>de</strong> selle et à utiliser<br />

au profit du pays la science pratique qu'elle<br />

possè<strong>de</strong>, quoi qu'on en dise, est le ministère <strong>de</strong> la<br />

<strong>guerre</strong> ; là est sa place. Elle y serait inaccessible aux<br />

humiliantes influences qu'elle subit et son indépendance<br />

lui permettrait <strong>de</strong> rendre à l'armée et au pays<br />

les grands services dont ils ont tant besoin.<br />

Dans l'état actuel <strong>de</strong> la production <strong>cheval</strong>ine, les<br />

haras doivent être une institution militaire, c'est<br />

leur seule raison d'être.<br />

La production du pur-sang s'est créée et se maintient<br />

au point où elle est sans le secours <strong>de</strong> l'État el<br />

les sommes qu'il lui consacre sont un pur gaspillage.<br />

Il peut absolument s'en désintéresser et le<br />

nombre nécessaire d'étalons <strong>de</strong> croisement sera<br />

toujours facile à trouver, en ce moment l'industrie<br />

du pur-sang est assez prospère pour n'avoir besoin<br />

<strong>de</strong> personne. Il en est <strong>de</strong> même pour les races <strong>de</strong><br />

gros trait, elles se sont maintenues <strong>de</strong> tout temps<br />

avec leur qualité. Leur élevage est productif et<br />

comme les mâles travaillent en restant entiers,<br />

l'étalon est toujours à la portée <strong>de</strong> l'éleveur; Tin-


LE CHEVAL DE GUERRE. 17<br />

clustrie privée, au fond, n'a aucun besoin <strong>de</strong> l'Élal,<br />

elle se suffit à elle-même pour le <strong>cheval</strong> <strong>de</strong> pur-sang<br />

et do gros trait; il reste le <strong>cheval</strong> <strong>de</strong> <strong>de</strong>mi-sang; pour<br />

celui-là, le problème se modifie, l'élevage n'est pas<br />

rémunérateur, la protection <strong>de</strong> l'État est indispensable,<br />

c'est lui seul qui peut donner l'étalon améliorateur,<br />

l'industrie privée ne peut pas en faire les<br />

frais, c'est sur lui seul que toutes les ressources<br />

dont dispose l'administration doivent se concentrer.<br />

En résumé, sur les trois gran<strong>de</strong>s divisions <strong>de</strong> la<br />

population <strong>cheval</strong>ine pur-sang, gros trait, <strong>de</strong>misang,<br />

l'action <strong>de</strong>s haras est inutile pour les <strong>de</strong>ux<br />

premières et nuisible pour la troisième, le but à<br />

atteindre est donc <strong>de</strong> retirer complètement <strong>de</strong> leurs<br />

attributions le pur-sang et le gros trait et <strong>de</strong> l'empêcher<br />

<strong>de</strong> nuire au <strong>de</strong>mi-sang en les mettant au contraire<br />

dans <strong>de</strong>s conditions où ils pourraient lui<br />

servir.<br />

Le transfert dos haras au ministère <strong>de</strong> la <strong>guerre</strong><br />

est une simple question <strong>de</strong> déménagement, le personnel<br />

actuel au complet continuerait le service et<br />

ne serait en rien changé, il serait renouvelé par<br />

extinction dans l'élément militaire, où seraient<br />

exclusivement recrutés les élèves <strong>de</strong> l'école <strong>de</strong>s<br />

haras.<br />

Dans l'administration actuelle il y a <strong>de</strong>s personnalités<br />

d'une gran<strong>de</strong> valeur, <strong>de</strong>s hommes <strong>de</strong> <strong>cheval</strong>


18 LE CHEVAL DE GUERRE.<br />

d'une compétence indiscutable et auxquels tout le<br />

mon<strong>de</strong> se plaît à rendre hommage, mais à côté<br />

d'eux, il y en a qui sont simplement d'excellents<br />

bureaucrales; ce résultat est inévitable avec la<br />

manière dont se fait la remonte <strong>de</strong> l'école.<br />

On n'apprend pas le métier d'homme <strong>de</strong> <strong>cheval</strong>,<br />

le sentiment, la compréhension instinctive <strong>de</strong> sa<br />

construction est un don naturel qui ne s'acquiert<br />

pas : quand l'élève d e l'école <strong>de</strong>s haras le possè<strong>de</strong>,<br />

tant mieux; mais quand il lui l'ait défaut, il s'en<br />

passe jusqu'à sa retraite, époque à laquelle il couronne<br />

sa carrière en achetant pour son usage familial<br />

une rosse <strong>de</strong> choix.<br />

L'armée, dans l'ensemble <strong>de</strong> ses officiers, <strong>de</strong> ses<br />

vétérinaires, possè<strong>de</strong> au complet le bagage scientifique<br />

mo<strong>de</strong>rne do l'hippologue; elle a la théorie et<br />

<strong>de</strong> plus la pratique en fait <strong>de</strong> chevaux ; l'armée sait<br />

tout. Elle est en matière d'alimentation, d'hygiène<br />

et <strong>de</strong> remonte <strong>de</strong>vant <strong>de</strong>s difficultés pratiques et<br />

surtout économiques qu'elle subit et si, parfois, elle<br />

est obligée <strong>de</strong> faire ce qu'il ne faudrait pas, elle sait<br />

toujours ce qu'il faudrait éviter. Il y a donc dans<br />

l'armée un champ inépuisable <strong>de</strong> jeunes gens ayant<br />

passé par Saumur qui ont la pratique du manège,<br />

<strong>de</strong> la route, du long voyage, <strong>de</strong> la course, <strong>de</strong> l'obstacle,<br />

<strong>de</strong> la chasse, <strong>de</strong>s manœuvres, <strong>de</strong> l'hygiène,<br />

<strong>de</strong> l'écurie, etc., dans ce milieu on trouverait <strong>de</strong>s


LE CHEVAL DE GUERRE. 19<br />

candidats offrant la certitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>de</strong>venir <strong>de</strong>s officiers<br />

<strong>de</strong> haras <strong>de</strong> premier ordre et incomparablement<br />

supérieurs à la moyenne <strong>de</strong> ceux d'aujourd'hui,<br />

leur qualité <strong>de</strong> militaire leur imposerait le <strong>de</strong>voir<br />

étroit <strong>de</strong> combattre tous les agissements contraires<br />

au <strong>cheval</strong> <strong>de</strong> <strong>guerre</strong>, qui est, comme nous l'avons dit<br />

et comme (oui le mon<strong>de</strong> le sait, le clieval <strong>de</strong> tout le<br />

mon<strong>de</strong>; leur autorité résultant <strong>de</strong> la pratique leur<br />

permettrait <strong>de</strong> détruire rapi<strong>de</strong>ment cette ridicule<br />

légen<strong>de</strong> que le <strong>cheval</strong> <strong>de</strong> selle et le carrossier sont<br />

nécessairement <strong>de</strong>ux animaux différents.<br />

Je ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pas la suppression brusque et radicale<br />

<strong>de</strong>s courses au trot, uniquement parce que je<br />

sais que cela serait inutile; le jeu est un <strong>de</strong>s plus<br />

anciens vices <strong>de</strong> l'humanité et je n'ai pas la prétention<br />

<strong>de</strong> l'en guérir, je me borne à <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r que le trotteur<br />

ne soit plus employé comme étalon et, pour<br />

obtenir ce résultat, je considère avec tous les gens<br />

compétents et <strong>de</strong> bonne foi que le meilleur et môme<br />

le seul moyen est <strong>de</strong> rendre le trotteur inutile au<br />

joueur en lui créant un concurrent, le <strong>cheval</strong>-<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong>mi-sang galopeur; <strong>de</strong> mémo que le ti'olteur il aurait<br />

les soins et l'alimentation substantielle dans la jeunesse,<br />

l'entraìnemcnt et le travail précoce sans<br />

lequel on ne fait que <strong>de</strong>s rosses, il aura comme lui<br />

le sang et la qualité <strong>de</strong>s tissus, ce sera le même<br />

moins le modèle, il sera bon pour tous les services


20 LE CHEVAL DE GUERRE.<br />

sans oxccplion; <strong>de</strong>venu propre aux paris, l'éleveur<br />

le vendra plus cher et sur l'hippodrome il pourra se<br />

lirer comme les autres, tout le mon<strong>de</strong> sera content.<br />

La seule objection sérieuse contre la course au<br />

galop est la difficulté d'empêcher la qualification <strong>de</strong><br />

<strong>de</strong>mi-sang d'être donnée frauduleusement à <strong>de</strong>s purssangs.<br />

Il y a <strong>de</strong> nombreux moyens d'apporter <strong>de</strong><br />

sérieuses difflcultés à celte frau<strong>de</strong>, qui serait certainement<br />

tentée étant donnée la Iris le moralité du<br />

mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s courses, mais le seul obstacle absolu<br />

que l'on puisse y apporter est <strong>de</strong> n'accor<strong>de</strong>r la qualification<br />

permettant <strong>de</strong> courir les épreuves <strong>de</strong> <strong>de</strong>misang<br />

qu'à <strong>de</strong>s animaux posant un poids minimum,<br />

sensiblement supérieur à celui d'un pur-sang, poids<br />

facile à fixer en prenant sur les champs <strong>de</strong> course<br />

celui <strong>de</strong>s chevaux amenés au pesage pendant quelque<br />

temps.<br />

La seule frau<strong>de</strong> possible à ce système serait<br />

l'emploi <strong>de</strong> certaines familles <strong>de</strong> pur-sang atteignant<br />

une gran<strong>de</strong> taille et un volume proportionné qui se<br />

trouvent en Angleterre, elle n'est pas à redouter<br />

puisque le but désiré est la production d'un <strong>cheval</strong><br />

ayant beaucoup <strong>de</strong> sang avec un volume et <strong>de</strong> la<br />

substance.<br />

En supposant les haras dans les mains <strong>de</strong> l'armée<br />

et toutes les ressources do l'État concentrées sur le<br />

<strong>de</strong>mi-sang galopeur, en très peu <strong>de</strong> temps les choses


LE CHEVAL DE GUElUtE. 21<br />

seraient remises en état, l'État économiserait l'argent<br />

donné au pur-sang et au trotteur.<br />

Le modèle du bon <strong>cheval</strong> équilibré d'après les lois<br />

<strong>de</strong> la mécanique animale reprendrait sa place, et<br />

celui que le jeu lui a substitué au préjudice <strong>de</strong> tous<br />

les intérêts pratiques, les seuls respectal<strong>de</strong>s, disparaîtrait.<br />

Ce jour-là le <strong>cheval</strong> <strong>de</strong> <strong>guerre</strong> sera partout<br />

et l'armée n'aura que l'embarras du choix.<br />

Dans l'état actuel <strong>de</strong> la conformation générale du<br />

<strong>de</strong>mi-sang, il est encore possible en supprimant <strong>de</strong><br />

suite l'étalon trotteur <strong>de</strong> reconstituer le modèle du<br />

galopeur, mais le temps presse el, si l'on tient<br />

compte <strong>de</strong> la rapidité avec laquelle le mal s'est produit,<br />

on voit combien est proche le jour où la France<br />

sera couverte d'animaux uniquement propres à voler<br />

l'argent du voisin en Iraquenardant <strong>de</strong>vant un sulky.<br />

La conclusion <strong>de</strong> tout ceci est que la production<br />

du <strong>cheval</strong> <strong>de</strong> <strong>guerre</strong> est facile, à la condition que la<br />

direction <strong>de</strong> l'élevage national soit soustraite à l'influence<br />

du jeu et <strong>de</strong> la politique et qu'elle dépen<strong>de</strong><br />

exclusivement d'une autorité compétente et indépendante<br />

qui ne peut se trouver que dans l'armée.<br />

Quand le soldat fera son <strong>cheval</strong> lui-même on dépit<br />

<strong>de</strong> toutes les sottises qui ont été débitées sur ce<br />

sujet, il se préparera pour le jour <strong>de</strong> la bataille un<br />

<strong>cheval</strong> pouvant galoper et il laissera au rond-<strong>de</strong>-cuir<br />

le trotteur pour se sauver.


22 LE CHEVAL DE GUERRE.<br />

Les ennemis ou plutôt les adversaires <strong>de</strong>s <strong>de</strong>misang<br />

galopeurs, car il n'a pas d'ennemis, mais<br />

<strong>de</strong> simples concurrents politiques et commerciaux,<br />

comme nous l'avons démontre plus haut, simplifient<br />

la question en disant que le trotteur galope, et<br />

d'autres y ajoutent cet argument humoristique que<br />

la cavalerie va toujours au pas ou au petit trot en<br />

campagne.<br />

Le trotteur conformé en trotteur ne galope pas et<br />

comme étalon ne produit pas <strong>de</strong> <strong>cheval</strong> <strong>de</strong> galop.<br />

Comme je l'ai déjà dit, les seuls cavaliers peuvent<br />

Juger la question.<br />

Il est vrai que l'existence <strong>de</strong> la cavalerie n'est<br />

pas un galop perpétuel et que les allures modérées<br />

sont les plus fréquentes, mais il n'en est pas moins<br />

évi<strong>de</strong>nt que la vitesse étant, à un moment donné,<br />

indispensable dans la vie militaire, le <strong>cheval</strong> doit la<br />

possé<strong>de</strong>r à son <strong>de</strong>gré maximum.<br />

Je lis dans la /ieviie da cavalerie, un excellent travail<br />

sur le <strong>cheval</strong> <strong>de</strong> <strong>guerre</strong> fait par un <strong>de</strong> nos plus<br />

brillants cavaliers militaires <strong>de</strong> ce temps-ci, les<br />

paroles suivantes :<br />

« Le galop ordinaire, quoi qu'on en puisse dire,<br />

est une allure normale; il n'y a pas <strong>de</strong> manœuvres<br />

possibles si on n'en fait pas le plus large emploi; les<br />

escadrons doivent y être rompus à fond, car si les<br />

chevaux n'ont pas <strong>de</strong> sang, si ce ne sont pas <strong>de</strong>s


LE CHEVAL DE GUERRE.<br />

galopeui's, ils ne pouiTonl pas supporter longtemps<br />

le travail au galop, surtout quand ils seront chargés;<br />

leurs cavaliers <strong>de</strong>vront les porter; les efl'orts <strong>de</strong><br />

tendons, les chutes se multiplieront. C'est ce qui se<br />

produit aujourd'hui dans trop <strong>de</strong> régiments, où on<br />

en arrive, par crainte légitime <strong>de</strong> la casse, à ne plus<br />

oser faire <strong>de</strong>s exercices au galop un peu prolongés ;<br />

quant au galop allongé, on est amené à le considérer<br />

comme une allure fantastique qu'on prend <strong>de</strong>ux<br />

fois par an, les jours où on y est forcé. »<br />

Mais sortons <strong>de</strong>s théories générales et envisageons<br />

quelques cas particuliers (missions individuelles).<br />

La reconnaissance d'officiers a atteint son but : il<br />

faut maintenant faire parvenir au général un renseignement<br />

<strong>de</strong> la plus haute importance : une estafette<br />

est envoyée vers lui, il faut qu'elle arrive au<br />

galop; mon garçon, crève ton <strong>cheval</strong> s'il le faut,<br />

mais arrive !<br />

La division marche au combat, autour d'elle bourdonnent<br />

les patrouilles <strong>de</strong> combat. Soudain l'une<br />

d'elles aperçoit l'ennemi : il faut que ce renseignement<br />

soit porté au général à toute bri<strong>de</strong>, pour lui<br />

permettre <strong>de</strong> prendre ses dispositions en temps<br />

utile.<br />

Une estafette porte une dépêche signalée à une<br />

patrouille ennemie, elle voit celle-ci lui donner la<br />

chasse ; si son <strong>cheval</strong> n'est pas construit en gaio-


24 LE CHEVAL DE GUERRE.<br />

peur, et que ceux qui la poursuivent au contraire<br />

soient bien conformés, elle sera prise au bout <strong>de</strong><br />

cinq à six minutes.<br />

Des isolés passons aux escadrons : le principe<br />

sera le même.<br />

Voilà un escadron qui est soutien do l'artillorie<br />

à <strong>cheval</strong> <strong>de</strong> sa division : celle-ci reçoit l'ordre d'aller<br />

rapi<strong>de</strong>ment prendre position à 1 500 on 2000 mètres<br />

et part au galop. L'escadron, qui se trouve sur le<br />

liane extérieur, qui doit parcourir une ligne enveloppante,<br />

et <strong>de</strong> plus gagner du terrain en avant<br />

pour assurer la sûreté <strong>de</strong>s batteries; va faire 2 à<br />

3 kilomètres à un galop très allongé;<br />

Tel autre escadron est chargé d'aller occuper un<br />

pont en attendant l'arrivée <strong>de</strong> l'infanterie. Il y a<br />

urgence, il faut coûte que coûte barrer la route à<br />

l'ennemi. C'est 2 à 3 kilomètres à couvrir aussi vite<br />

que possible, <strong>de</strong> quelques minutes peuvent dépendre<br />

les résultats les plus importants.<br />

Arrivons au combat. Dans le combat <strong>de</strong> cavalerie<br />

contre cavalerie, là <strong>de</strong>uxième ou troisième ligne<br />

auront à faire face à <strong>de</strong>s attaques inopinées sur<br />

les flancs : l'effet né sera produit que si, grâce<br />

à la rapidité <strong>de</strong> l'allure, la para<strong>de</strong> est absolument<br />

instantanée, inversement tout mouvement offensif<br />

<strong>de</strong> la première nécessitera une marche au galop<br />

allongé.


LE CHEVAL DE GUEIUIE. 2i><br />

Dans le combat contre rarlillerie, les fourragcurs<br />

<strong>de</strong>vront fondre sur les pièces à toute allure, sinon<br />

ils succomberont sous les coups répétés <strong>de</strong>s canons<br />

tirant à mitraille.<br />

Chargerons-nous encore contre l'infanterie Beaucoup<br />

le nient; nous, cavaliers, nous y croyons<br />

encore, parce qu'il y aura toujours à la <strong>guerre</strong> <strong>de</strong>s<br />

moments critiques où on nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ra ce glorieux<br />

sacrifice, parce qu'il y aura toujours <strong>de</strong>s circonstances<br />

<strong>de</strong> temps, <strong>de</strong> lieu, d'atmosphère qui rendront<br />

une surprise possible, parce que, enfin, si on<br />

admet que l'infanterie, malgré les balles mo<strong>de</strong>rnes,<br />

peut encore monter à l'assaut, il n'y a pas <strong>de</strong> raison<br />

que nos chevaux, qui vont plus vite, ne nous mènent<br />

pas encore à la charge (cet argument est sans<br />

réplique). Mais cette charge n'aura (juelque c hance<br />

<strong>de</strong> succès que si elle est conduite à une allure vertigineuse;<br />

plus on ira vite, moins on essuiera <strong>de</strong> salves :<br />

on même temps l'effet mor al produit sur l'ennemi<br />

sera augmenté, ce sera le procella équestre, la tempête<br />

équestre qui renversera tout... sinon ce ne sera<br />

que la chevauchée <strong>de</strong> la mort, glorieuse mais<br />

inutile.<br />

Nous terminons ce travail en disant la môme<br />

chose qu'en le commençant : ceux qui combattent<br />

les encouragements <strong>de</strong>mandés pour le <strong>de</strong>mi-sang<br />

galopeur sont ou <strong>de</strong>s ignorants dont l'opinion est


26 LE CHEVAL DE GUERRE.<br />

négligeable, ou <strong>de</strong>s gens qui sacrifienL à leur intérêt<br />

personnel ou à celui <strong>de</strong> ceux qu'ils représentent,<br />

celui <strong>de</strong>s éleveurs, et à la sécurité du pays, en couvrant<br />

la France d'un <strong>cheval</strong> bientôt sans aptitu<strong>de</strong>s<br />

et sans valeur.<br />

Coulommiers. — Imp. P. BRODAllD. — IGi-O T.


1<br />

- ».<br />

ill


COÜLOMMIEUS<br />

Imprimerie PAUL BRODARD.<br />

' -5.

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