La rubrique - Conseil Général de Savoie
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<strong>La</strong> <strong>rubrique</strong>DES PATRIMOINES <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>Conservation Départementale du PatrimoineN U M É R O V I N G T ■ D É C E M B R E 2 0 0 7
Le programme <strong>de</strong> valorisationdu Château <strong>de</strong>s Ducs <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>ACTUALITÉSl’élaboration <strong>de</strong> ce programme estl’objet <strong>de</strong> l’installation du <strong>Conseil</strong> <strong>de</strong>valorisation, le 6 novembre 2003, par le Prési<strong>de</strong>ntdu <strong>Conseil</strong> général, sous l’autorité <strong>de</strong> Jean-Olivier Viout, historien <strong>de</strong> Chambéry et actuellementprocureur général près la Cour d’appel<strong>de</strong> Lyon. Le projet s’est développé en <strong>de</strong>ux voletscomplémentaires.Priorité donnée à l’accueil du publicCette priorité s’est traduite par la mise en placeen premier lieu d’une politique d’animationculturelle, avec la reprise <strong>de</strong>s expositions dansla tour <strong>de</strong>mi-ron<strong>de</strong> et les Estivales du Châteaudès 2003 ; c’est aussi :– un concours d’idées pour l’aménagementpaysager du Château,– un programme <strong>de</strong> libération progressive <strong>de</strong>l’espace dans l’aile médiévale (Chambre <strong>de</strong>scomptes, bâtiment du Gouvernement, bâtiment<strong>de</strong> l’Intendance),– le projet <strong>de</strong> rénovation <strong>de</strong> la Sainte Chapelleainsi que l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s accès aux salles bassesvoisines <strong>de</strong> la tour Trésorerie,– le projet <strong>de</strong> rétablissement du passage publicavec l’ouverture <strong>de</strong> la porte Saint-Dominiquepermettant la liaison Ville haute-Ville basse,– une réflexion à engager sur le <strong>de</strong>venir duMuséum d’histoire naturelle.Ce projet s’inscrit naturellement dans la volontédu Plan tourisme départemental, plus précisémentdans la thématique patrimoine du voletdiversification touristique, au titre <strong>de</strong>s grandssites <strong>de</strong> référence retenus par le <strong>Conseil</strong> général :la Grange batelière <strong>de</strong> l’abbaye d’Hautecombe,les forts <strong>de</strong> l’Esseillon, le Petit-Saint-Bernardauxquels pourrait s’ajouter le château <strong>de</strong> Miolans.Restructuration <strong>de</strong>s espaces dédiésau <strong>Conseil</strong> général et à la PréfectureCes travaux ont commencé par une remise enétat <strong>de</strong>s réseaux sous la Cour d’honneur, avantle traitement <strong>de</strong> la Cour elle-même (dallage ouautre). Le programme pour se développer doitdésormais intégrer plusieurs facteurs :– une réflexion sur les parkings, <strong>de</strong> manière àlibérer la Cour d’honneur <strong>de</strong>s voitures, en tenantcompte <strong>de</strong>s difficultés rencontrées par le projetinitial d’une extension du parking public duChâteau,– une expertise conduite par le ministère <strong>de</strong> l’Intérieurpour mesurer la compatibilité entre lesexigences <strong>de</strong> sécurité du site et l’accessibilité dupublic,– les exigences <strong>de</strong> la loi du 11 février 2005 surl’accessibilité <strong>de</strong>s bâtiments publics auxpersonnes handicapées ou à mobilité réduite.Ces réflexions conduisent à envisager l’aménagement<strong>de</strong> nouveaux espaces sous les terrassescôté Sud, <strong>de</strong>rrière l’Orangerie.Le projet <strong>de</strong> valorisation du Château <strong>de</strong>s Ducs<strong>de</strong> <strong>Savoie</strong> est désormais engagé dans une phasedécisive.Il appartient au Comité <strong>de</strong> valorisation sous laprési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> Jean-Olivier Viout <strong>de</strong> proposer lesorientations qui permettront <strong>de</strong> donner toute saplace à la partie médiévale pour que le Château<strong>de</strong>s Ducs <strong>de</strong>vienne un espace majeur <strong>de</strong> présentation,pour le public, <strong>de</strong> la culture et <strong>de</strong> l’histoire<strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>.Il importe <strong>de</strong> conforter la vocation administrativedu Château <strong>de</strong>s Ducs, consacrée par 800 ans<strong>de</strong> présence au cœur <strong>de</strong> la capitale historique<strong>de</strong> la <strong>Savoie</strong>. Cette fonction implique, comme à<strong>de</strong> nombreuses reprises dans le passé, <strong>de</strong>s adaptationset mo<strong>de</strong>rnisations <strong>de</strong> bâtiments pourrépondre au mieux aux questions <strong>de</strong> sécurité etaux besoins <strong>de</strong> la Préfecture et du <strong>Conseil</strong>général.Le respect du Monument historique est notreresponsabilité collective pour la transmission <strong>de</strong>ce patrimoine exceptionnel. Cette conditionimpérative, vécue comme une chance danstoutes les dimensions du projet et non commeune contrainte, impose <strong>de</strong>s priorités <strong>de</strong> rénovationet d’entretien ainsi que le recours auxmeilleurs corps <strong>de</strong> métiers pour garantir unehaute qualité <strong>de</strong> résultat.<strong>La</strong> volonté d’accueil du plus large public auChâteau <strong>de</strong>s Ducs <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong> sera engagée grâceà l’étendue <strong>de</strong>s espaces rendus accessibles, ainsique la qualité et la diversité <strong>de</strong> l’offre culturelleet éducative : dans le domaine <strong>de</strong> l’Histoire <strong>de</strong>la <strong>Savoie</strong> jusqu’à l’époque contemporaine bienentendu, mais aussi dans la variété <strong>de</strong>s spectacleset <strong>de</strong>s présentations ou <strong>de</strong>s créations artistiques.En engageant ce programme <strong>de</strong> valorisation, le<strong>Conseil</strong> général <strong>de</strong> la <strong>Savoie</strong> a choisi <strong>de</strong> porterun projet ambitieux, celui <strong>de</strong> renforcer la placeprivilégiée du Château <strong>de</strong>s Ducs parmi les sites<strong>de</strong> référence aux yeux <strong>de</strong>s touristes que noussouhaitons accueillir plus nombreux.Débat d’orientations budgétaires 2008Extrait du rapport du Prési<strong>de</strong>nt au <strong>Conseil</strong> généralPATRIMOINESLe public au ren<strong>de</strong>z-vous,Journées européennesdu Patrimoine,15 et 16 septembre 2007,Château <strong>de</strong>s Ducs<strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>.3
ACTUALITÉSPATRIMOINESLes récents travauxd’aménagement<strong>de</strong> la Grange d’eau<strong>de</strong> l’Abbaye d’HautecombeDétail <strong>de</strong> la nouvellecoursive.Fragment statuairemédiéval enchâssédans la maçonnerieintérieure <strong>de</strong> la grangebatelière.la Grange Batelière, ou grange d’eau, estl’élément le plus représentatif <strong>de</strong>sorigines cisterciennes <strong>de</strong> l’abbaye d’Hautecombe,classée Monument Historique sur la liste <strong>de</strong> 1875et premier édifice protégé <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>, quinze ansseulement après son rattachement à la France.Les bâtiments <strong>de</strong> l’abbaye elle-même, reconstruitsou réaménagés en gran<strong>de</strong> partie au XVIII eet au début du XIX e siècle, caractéristiques <strong>de</strong>l’architecture classique et du retour en vogue <strong>de</strong>l’architecture gothique, sont le reflet <strong>de</strong> l’histoire<strong>de</strong> la dynastie <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>. <strong>La</strong> grange, bâtimentsimplement utilitaire, évoque avec rigueur etsimplicité les activités agricoles, industrielles etcommerciales d’une communauté monastiquedont le rayonnement spirituel et matériel dépassaitau Moyen Âge largement le cadre du <strong>La</strong>c duBourget.Construite à fleur d’eau dans un écrin naturelexceptionnellement préservé à l’écart <strong>de</strong>s autresbâtiments, elle voit son rôle <strong>de</strong> lieu d’échangespérennisé par l’accueil <strong>de</strong>s visiteurs et <strong>de</strong>s pèlerinsqui débarquent à ses pieds.Le <strong>Conseil</strong> général <strong>de</strong> la <strong>Savoie</strong>, la Communautédu chemin neuf, affectataire et la Fondationd’Hautecombe, propriétaire, ont souhaité améliorerles conditions d’accueil <strong>de</strong> ce haut lieuavec l’ai<strong>de</strong> du Ministère <strong>de</strong> la Culture, et c’estManuelle Veran-Héry, Architecte du Patrimoine,qui a été chargée en 2002 d’une étu<strong>de</strong> préalableà l’aménagement intérieur <strong>de</strong> la grange.Vue <strong>de</strong>puis l’embarcadère : faça<strong>de</strong> et nouvelle coursive.Les conclusions <strong>de</strong> cette étu<strong>de</strong> approuvée parla Conservation Régionale <strong>de</strong>s Monuments Historiques<strong>de</strong> la Direction Régionale <strong>de</strong>s AffairesCulturelles Rhône-Alpes, ont engendré <strong>de</strong>uxtranches <strong>de</strong> travaux commencés en 2005 quiviennent <strong>de</strong> s’achever sous la maîtrise d’œuvreconjointe <strong>de</strong> Manuelle Veran-Héry et <strong>de</strong> monéquipe représentée par Jean-Pascal Duméril,Directeur <strong>de</strong> projet.Les accès <strong>de</strong> la grange batelièreet détail <strong>de</strong>s claustras.4
Les travaux d’aménagement intérieur ont eu <strong>de</strong>srépercutions sur l’extérieur du monument en<strong>de</strong>ux points et pour <strong>de</strong>ux raisons :– du point <strong>de</strong> vue du confort thermique, lacouverture a été refaite pour permettre l’intégrationd’un isolant.– du point <strong>de</strong> vue du respect <strong>de</strong>s règles <strong>de</strong> sécurité,une coursive extérieure a été créée pourpermettre une évacuation complémentaire <strong>de</strong>strois cents personnes qui peuvent trouver placeà l’intérieur.Les faça<strong>de</strong>s n’ont fait l’objet d’aucune autre interventionen raison <strong>de</strong> leur bonne conservationet <strong>de</strong> la patine laissée par les siècles sur les différentespierres qui les constituent.Si l’aspect <strong>de</strong> la couverture, dont une partie <strong>de</strong>stuiles a pu être conservée et reposée, n’a été enrien modifié, la faça<strong>de</strong> sur le lac s’est vue discrètementtransformée par la nouvelle coursive <strong>de</strong>sécurité.Mais cette coursive n’est « nouvelle » que par sontraitement contemporain <strong>de</strong> métal et <strong>de</strong> bois quis’inscrit exactement dans les traces évi<strong>de</strong>ntesqu’avait laissées une galerie primitive. Cette galeriepermettait le chargement et le déchargement <strong>de</strong>s<strong>de</strong>nrées à partir <strong>de</strong>s bateaux qui pouvaient àl’époque accoster au pied <strong>de</strong> la grange.Les travaux ont permis qu’une étu<strong>de</strong> historiqueet archéologique très fine soit menée par ChristianCorvisier, étu<strong>de</strong> appuyée par une analyse<strong>de</strong>ndrochronologique <strong>de</strong>s éléments <strong>de</strong> soutienen bois conservés jusqu’à nos jours dans leurslogements <strong>de</strong> pierre. Cette étu<strong>de</strong> a permis d’affinerla datation <strong>de</strong> la grange, construite sansdoute au XIII e siècle et modifiée à plusieursreprises, la galerie pouvant remonter à 1390-1393(données Archéolabs).En ce qui concerne l’intérieur, aucune modificationdu gros-œuvre n’a été réalisée, et seulsquelques éléments contemporains réversibles,en particulier un sas d’entrée abritant diverséléments techniques nouveaux, ont été apportéspour permettre un chauffage et un éclairageindispensables au déroulement <strong>de</strong>s manifestationsprincipalement culturelles dont la grangepourra <strong>de</strong>venir l’écrin.Enfin, à la fois pour <strong>de</strong>s raisons <strong>de</strong> vraisemblancehistorique et d’occultation, l’ambiance lumineuse<strong>de</strong> cette magnifique salle a été modifiée par leremplacement <strong>de</strong>s vitraux dits, un peu abusivement,« cisterciens » qui ornaient les baies, par<strong>de</strong>s claustras <strong>de</strong> chêne plus conformes à l’usageancien du lieu.Jean-François Grange-Chavanis<strong>La</strong> coursive : restitution contemporaine <strong>de</strong> l’ancienne galerie en bois.ACTUALITÉSPATRIMOINESL’intérieur rénové <strong>de</strong> la grange batelière : ancien entrepôt et grenette.Ci-<strong>de</strong>ssus, faça<strong>de</strong> en petit appareil patinée par le temps et couverture restaurée.À gauche, canal d’entrée <strong>de</strong> la remise à bateaux.5
ACTUALITÉSRedoute Marie-Thérèse, AvrieuxOuverture du Centre d’Interprétationdu Patrimoine FortifiéPATRIMOINESTarifs• Adultes 4,50 e• Enfants 7-16 ans , 3 eMoins <strong>de</strong> 7 ans gratuitGroupes (à partir<strong>de</strong> 10 personnes)• Adultes 3 e• Enfants 2,50 e• Ticket famille (2 adultes+ 2 enfants) 12 eContact• Vanessa DemangeResponsable• Marion KernChargée <strong>de</strong> mission• Mairie d’Avrieux154, rue <strong>de</strong> l’église73500 AvrieuxTél.0479203316Fax.0479203930info@avrieux.comOuverture au public• Du 15 décembreà mars, jeudi etvendredi 13h-17h• D’avril à juin,vendredi, samedi,dimanche, 13h-18h• De juillet au15 octobre, tous lesjours 10h-12h/14h-19hFermeture annuelle• Du 15 octobreau 15 décembreLes Forts <strong>de</strong> l’Esseillon etleurs toitures restauréesvus <strong>de</strong>puis le pont duNant.Au cœur <strong>de</strong> la Maurienne, à 106 km <strong>de</strong> Chambéry, la commune d’Avrieuxse niche au pied d’un verrou rocheux couronné à l’est par les forts sar<strong>de</strong>s <strong>de</strong>l’Esseillon. Propriétaire <strong>de</strong>puis 1977 <strong>de</strong> la Redoute Marie-Thérèse, un <strong>de</strong>s cinqouvrages constitutifs <strong>de</strong> cette barrière, la municipalité a inauguré à l’issued’un vaste chantier <strong>de</strong> restauration, un Centre d’Interprétation du PatrimoineFortifié en octobre <strong>de</strong>rnier.Un site à l’histoire exceptionnelleÀ l’issue <strong>de</strong>s guerres napoléoniennes, les Étatscoalisés organisent un réseau <strong>de</strong> fortificationspour se protéger <strong>de</strong> toute nouvelle menace française.C’est dans ce contexte que la Place militaire<strong>de</strong> l’Esseillon est édifiée entre 1817 et 1833par la Maison royale <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>. Sa mission principaleest <strong>de</strong> verrouiller la route du Mont-Cenis,principal itinéraire transalpin. <strong>La</strong> <strong>Savoie</strong> fait alorspartie du royaume <strong>de</strong> Piémont-Sardaigne. Lescontraintes du relief alpin et <strong>de</strong> la guerre enmontagne influencent le choix du site escarpé<strong>de</strong> l’Esseillon et la mise en place <strong>de</strong> « fortificationsperpendiculaires » inspirées <strong>de</strong>s théoriesdu marquis <strong>de</strong> Montalembert. Ce site, <strong>de</strong>venufrançais en 1860, est aujourd’hui le seul exemplecomplet d’une fortification <strong>de</strong> ce type en Franceavec le célèbre Fort Boyard.<strong>La</strong> genèse du projet<strong>La</strong> question <strong>de</strong> la réutilisation <strong>de</strong>s forts est souventproblématique. Une architecture complexe, unpassé militaire, un environnement montagnardhostile ren<strong>de</strong>nt la réflexion difficile. Quel avenirs’ils n’acquièrent pas un statut patrimonial?En 1977, la commune d’Avrieux achète à l’arméecette redoute et la sauvegar<strong>de</strong> grâce à l’intervention<strong>de</strong> chantiers <strong>de</strong> bénévoles REMPART.Commence ensuite une longue réflexion autour<strong>de</strong> sa reconversion. Mais <strong>de</strong>vant l’ampleur <strong>de</strong>sréalisations et <strong>de</strong>s budgets nécessaires, aucunprojet ne se concrétise. <strong>La</strong> priorité sera la sauvegar<strong>de</strong><strong>de</strong> la redoute par sa mise hors d’eau dansle cadre du vaste chantier <strong>de</strong> réfection <strong>de</strong>stoitures à l’i<strong>de</strong>ntique <strong>de</strong>s forts <strong>de</strong> l’Esseillonconduit <strong>de</strong> 1994 à 2001 grâce à un partenariatentre les communes d’Aussois et d’Avrieux, l’État,le <strong>Conseil</strong> général <strong>de</strong> la <strong>Savoie</strong>. Un projet <strong>de</strong>centre d’hébergement du Club Alpin Français estenvisagé, puis abandonné pour <strong>de</strong>s raisonséconomiques et architecturales. Restait donc àconcrétiser l’implantation d’un Centre d’interprétationdu patrimoine fortifié. <strong>La</strong> FACIM engageen 2001 une étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> valorisation dans le cadredu contrat global <strong>de</strong> développement <strong>de</strong> la Maurienneavec l’ai<strong>de</strong> du <strong>Conseil</strong> régional Rhône-Alpes. <strong>La</strong> décennie 90 a été riche en réalisationsqui ont donné à ce grand site son visage et sondynamisme actuels: réunification <strong>de</strong>s rives droiteet gauche <strong>de</strong> l’Arc par la nouvelle passerelle duPont du Diable, aménagement <strong>de</strong> via ferrata,création <strong>de</strong> sentiers thématiques… Et cette année,une étape importante: l’ouverture simultanée d’unparc aventure (le Parc du Diable) et du CIPF. Lesite possè<strong>de</strong> maintenant tous les atouts pourimpulser une dynamique au développementculturel, touristique, sportif et économique local.Le Centre d’Interprétationdu Patrimoine FortifiéLe CIPF a ouvert ses portes le 4 juillet 2007 et aété inauguré officiellement le 6 octobre enprésence <strong>de</strong> nombreuses autorités savoyar<strong>de</strong>s et<strong>de</strong> SAR le prince Serge <strong>de</strong> Yougoslavie, invitéd’honneur, représentant la Maison <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>.L’objectif <strong>de</strong> ce centre ouvert au grand publicest la vulgarisation <strong>de</strong> l’histoire <strong>de</strong> l’art <strong>de</strong> la fortification,<strong>de</strong> son adaptation à la montagne et ladécouverte d’une histoire originale, complexe etméconnue, celle <strong>de</strong> la <strong>Savoie</strong> et <strong>de</strong> la frontièrealpine au cœur <strong>de</strong> l’Europe. C’est dans cet espritqu’a été conçu l’espace muséographique permanentbilingue (français-italien). Ce projet inciteraà une réflexion citoyenne sur le sens <strong>de</strong> l’Histoire,dans le cadre <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong>s nations et,aujourd’hui, <strong>de</strong> la Communauté européenneconciliant <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> mémoire, ouverture d’espritet démocratie.Un partenariat actif entre l’Europe, l’État, le<strong>Conseil</strong> régional, le <strong>Conseil</strong> général et la communea rendu possible le projet. Coût total <strong>de</strong>l’opération: 2,6 millions d’euros, dont plus <strong>de</strong> lamoitié en autofinancement.Le CIPF est un lieu vivant qui s’attache à rendrela thématique accessible et attrayante. <strong>La</strong> valorisation<strong>de</strong> ce patrimoine a été confiée à MmeVéran Héry, architecte du patrimoine, pour lamaîtrise d’œuvre architecturale et au cabinetMédiéval pour la maîtrise d’œuvre muséographiqueconçue en collaboration avec la Conser-6
ACTUALITÉSLe camaïeu <strong>de</strong>gris <strong>de</strong>s enduitsmuraux.PATRIMOINESRefichage <strong>de</strong>s jointsdu parementd’escarpe et mise enœuvre <strong>de</strong> gouttièrespendantes.Entreprisesresponsables<strong>de</strong>s travaux<strong>de</strong> restaurationintérieure• Lot 1 , maçonneriepierre<strong>de</strong> tailleEntreprise Jacquet• Lot 2, couvertureEntreprise Eurotoiture• Lot 3 ,menuiserie-vitrerieEntreprise Art’bois• Lot 4, serrurerieEntreprise Fontbonne& Fils• Lot 5 ,plâtrerie-PeintureEntreprise Rochietti• Lot 6 ,plomberie-SanitaireEntreprise Renaud• Lot 7,électricité-ChauffageEntreprise Cachard<strong>La</strong> salle <strong>de</strong> l’Esseillonet sa maquette.Chaque casemate conserva sa volumétrie,chaque détail architectural fut rétabli en reproduisantà l’i<strong>de</strong>ntique chaque objet-type, commeles volets blindés en bois sertis dans leurs ossaturesau droit <strong>de</strong>s meurtrières, ou, les écarts <strong>de</strong>feu au pied <strong>de</strong>s foyers <strong>de</strong> cheminée…Le travail s’orienta essentiellement sur la restitutionpropre <strong>de</strong>s éléments constituant ces espaces:<strong>de</strong>s dallages en pierre jusqu’aux enduits réalisésau mortier <strong>de</strong> chaux lissé et teinté dans la massesur les murs et les voûtes, <strong>de</strong>s menuiseries àpetits bois sur la cour aux portes à double épaisseur<strong>de</strong> lames <strong>de</strong> bois dans les passages entreles casemates, <strong>de</strong>s gar<strong>de</strong>-corps métalliques auxgrilles <strong>de</strong> défense…Pour répondre aux besoins muséographiquestant qu’architecturaux, un soin particulier futapporté au traitement <strong>de</strong> l’éclairage intérieur :<strong>de</strong>s câbles rythmés <strong>de</strong> giro-spots furent tendusdans l’axe rayonnant <strong>de</strong>s casemates, apportantainsi une petite note contemporaine dans cetenvironnement fort en histoire… Parallèlementà cet apport mo<strong>de</strong>rne, les anciens planchersdégradés furent remplacés par un sol en bétonciré teinté dans la masse, évitant ainsi un entretienconséquent et répondant aussi à unefréquence <strong>de</strong> passage plus élevée, tout enpermettant également d’apporter le confort thermiquesuffisant par un chauffage électriqueintégré dans la dalle.En <strong>de</strong>rnier lieu, l’harmonie <strong>de</strong>s espaces futpoussée et étudiée jusqu’au choix <strong>de</strong>s teintesmises en œuvre: teintes toute en douceur à based’un camaïeu <strong>de</strong> gris, simple rappel <strong>de</strong> l’ambianceaustère d’autrefois. Sur le gris anthracitedu sol ou le gris clair <strong>de</strong>s murs et <strong>de</strong>s dallagesen pierre, se <strong>de</strong>ssinent les maquettes majestueuseset les panneaux didactiques du Centred’interprétation du patrimoine fortifié…Quant à la cour intérieure, sa mise en valeurpermit le rétablissement <strong>de</strong> l’ancienne cala<strong>de</strong> engalets dont le tracé géométrique souligne l’axe<strong>de</strong>s caniveaux récupérant les eaux pluviales.Cet aménagement fut complété par <strong>de</strong>s arrêts <strong>de</strong>neige, implantés en périphérie intérieure <strong>de</strong>stoitures <strong>de</strong> la cour pour éviter <strong>de</strong>s risques <strong>de</strong>chute <strong>de</strong> blocs à pied d’œuvre.Après plus d’un an <strong>de</strong> travaux, la Redoute Marie-Thérèse a retrouvé vie en ce milieu d’année2007, malgré quelques difficultés rencontrées audétour du chantier, comme <strong>de</strong>s infiltrations d’eauimportantes à travers les maçonneries <strong>de</strong> plusd’un mètre d’épaisseur… infiltrations d’eau qu’ilfallut rapi<strong>de</strong>ment réduire par un refichage <strong>de</strong>joints en faça<strong>de</strong>s extérieures et une mise enœuvre <strong>de</strong> gouttières pendantes en pied <strong>de</strong>versant <strong>de</strong> toitures.Bien sûr, l’effort mené durant ces <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rnièresannées est essentiel, il reste cependant minimalface à l’échelle imposante <strong>de</strong> ce monument dansson site, mais s’est voulu exemplaire!Les combles, la gran<strong>de</strong> salle du premier étage,les caponnières est et ouest comme le corps <strong>de</strong>gar<strong>de</strong> sont autant d’espaces en attente… qu’unréel potentiel à préserver!Manuelle Véran-HérySalle <strong>de</strong> la vie quotidienne : les témoignages sonores.8
Les collections départementalesBientôt 150 ans <strong>de</strong> patrimoine !D O S S I E RAlors que le 150 e anniversaire <strong>de</strong> l’Annexion <strong>de</strong> la <strong>Savoie</strong> à la France se profileà l’horizon, les collections départementales fêteront, quant à elles, leurs 150 ansen 2014. En effet, le <strong>Conseil</strong> général <strong>de</strong> la <strong>Savoie</strong> a commencé à constituer <strong>de</strong>scollections patrimoniales peu <strong>de</strong> temps après 1860. Cet anniversaire invite à unregard rétrospectif sur l’évolution <strong>de</strong>s enjeux <strong>de</strong> la constitution <strong>de</strong> collectionspatrimoniales <strong>de</strong> la fin du XIX e siècle au début du XXI e siècle.Un nouveau département françaisdénommé la <strong>Savoie</strong> , la collectecomme travail <strong>de</strong> mémoirePeu après son Rattachement à la France en 1860,la <strong>Savoie</strong> se fond rapi<strong>de</strong>ment dans le giron français,mais cherche néanmoins à se doter d’unmusée pour préserver sa particularité historiqueet culturelle.En 1864, le marquis Pantaléon Costa <strong>de</strong> Beauregardprésente, en tant que prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> l’Académie<strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>, au <strong>Conseil</strong> général dont il estégalement le Prési<strong>de</strong>nt, un « Projet d’un muséehistorique et archéologique national ». Depuisune dizaine d’années, <strong>de</strong>s « pêcheries archéologiques» dans les grands lacs alpins ont exhumé<strong>de</strong>s objets en nombre. Le marquis veut alorscréer « un Musée Historique dont l’Archéologiesera la base, puisque l’archéologie est le flambeau<strong>de</strong> l’histoire… ». Axée sur la recherche <strong>de</strong>sorigines, l’archéologie participe alors fortementd’un travail <strong>de</strong> production <strong>de</strong>s i<strong>de</strong>ntités collectivesnationales en Europe.En 1867, le « Musée départemental » ouvre sesportes au public au <strong>de</strong>uxième étage du Palais<strong>de</strong> justice <strong>de</strong> Chambéry. Il s’enrichit <strong>de</strong> donationset du produit <strong>de</strong>s fouilles lacustres quiconstituent progressivement une remarquablecollection archéologique. Les pièces présentéesdans les salles du musée révèlent divers visages<strong>de</strong> la <strong>Savoie</strong> : <strong>de</strong>s objets préhistoriques, <strong>de</strong>s « palaffites» du lac du Bourget, <strong>de</strong>s antiquités galloromaines,<strong>de</strong>s ivoires, <strong>de</strong>s statues, <strong>de</strong>s faïences,<strong>de</strong>s costumes savoyards, une collection <strong>de</strong> cartes<strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>, un médaillier.Entre cabinet <strong>de</strong> curiosité et musée <strong>de</strong> la « petitepatrie », le Musée doit conserver ainsi les « monuments» <strong>de</strong> l’Histoire et la mémoire <strong>de</strong> l’ancienne<strong>Savoie</strong>. Ce projet initial voulait que « la <strong>Savoie</strong>cesse <strong>de</strong> se laisser dépouiller avec une funesteindifférence d’une foule d’objets précieux quichaque jour vont enrichir <strong>de</strong>s spéculateurs ou<strong>de</strong>s collections étrangères » en « cré[ant] un dépôtoù soient rassemblés les souvenirs <strong>de</strong> sonhistoire et les monuments <strong>de</strong> son passé. » (Costa<strong>de</strong> Beauregard, 1864, XCIV). <strong>La</strong> <strong>Savoie</strong> s’inscritdans un mouvement européen qui voit fleurirles musées régionaux.Alors que la construction <strong>de</strong>s i<strong>de</strong>ntités nationaleset que l’industrialisation changent les mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong>vie et la structure <strong>de</strong> la société, les musées régionauxoffrent un espace <strong>de</strong> mémoire pour <strong>de</strong>si<strong>de</strong>ntités régionales en mutations tant politiques,qu’économiques et sociales. En France, lespremiers musées régionaux comme le Muséebreton à Quimper (1846), le Musée lorrain àNancy (1850) ou le Museon arlaten à Arles(1899) font le <strong>de</strong>uil d’un passé révolu.Le <strong>Conseil</strong> général <strong>de</strong> la <strong>Savoie</strong> poursuit sesacquisitions pour le Musée départemental quecomplètent les dépôts <strong>de</strong> la Société savoisienned’histoire et d’archéologie à partir <strong>de</strong> 1879.En 1888, la Ville <strong>de</strong> Chambéry rénove et agranditla Grenette pour abriter le nouveau Muséebibliothèquemunicipal. Les villes sont, à la findu XIX e siècle et au début du XX e siècle, le fer<strong>de</strong> lance <strong>de</strong> ce qu’on nomme aujourd’hui « l’offreculturelle ». Elles proposent notamment, pourl’instruction <strong>de</strong>s artistes et l’éducation <strong>de</strong>s populations,<strong>de</strong>s musées <strong>de</strong>s Beaux-Arts ou muséesd’art et d’histoire. En accord avec la Municipalité,le <strong>Conseil</strong> général déci<strong>de</strong>, après délibérations,d’y installer ses collections. Un premierinventaire du « Musée archéologique municipalet départemental » est dressé par le conservateurJules Daisay en 1896. Les collections sont transférées,entre 1912 et 1913, au nouveau Muséesavoisien, un ancien couvent franciscain, puispalais épiscopal, propriété <strong>de</strong> la Ville <strong>de</strong> Chambéry(1905), classé Monument historique en 1911qui sera inauguré le 18 novembre 1913.L’intégration <strong>de</strong> la <strong>Savoie</strong>, petite patrie« comme les autres », dans la France« mosaïque merveilleuse »Dans les années 1920, <strong>de</strong>s expositions temporairesconsacrées à <strong>de</strong>s thèmes régionaux sesuccè<strong>de</strong>nt au Musée savoisien : en 1922 le mobiliersavoyard, en 1924 la céramique régionale,et en 1926 les costumes savoyards. Cesexpositions se font l’écho <strong>de</strong> quatregran<strong>de</strong>s problématiques sociétales etpolitiques du moment :les mutations du mon<strong>de</strong> rural,l’essor <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s folkloriquesà but cognitif, le développementdu tourisme et la célébration<strong>de</strong>s petites patriesdans une visée nationaliste.Pantaléon Costa <strong>de</strong>Beauregard (1806-1864),premier prési<strong>de</strong>nt du <strong>Conseil</strong>général <strong>de</strong> la <strong>Savoie</strong>, prési<strong>de</strong>nt<strong>de</strong> l’Académie <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>,initiateur du Muséedépartemental.<strong>La</strong>urent Rabut (1825-1890), conservateur duMusée départemental(1879-1889).Jules Daisay,conservateur du Muséed’Archéologie municipalet départemental.Auteur du catalogue<strong>de</strong> 1896.9
D O S S I E RPlanche extraite<strong>de</strong> l’ouvrage <strong>de</strong> MissEstella Canziani,« Costumes Mœurs etLégen<strong>de</strong>s <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong> »,adapté <strong>de</strong> l’anglaispar A. Van Gennep.Chambéry, 1920(collectionsdépartementales).À droite, anciennesprésentationsmuséographiques auMusée savoisien, aumilieu du XX e siècle :une perceptionfolklorique aujourd’huirévolue.Ci-<strong>de</strong>ssous, documentationd’une nouvelleacquisition ethnographiquedans les années1970 : enquête dans unatelier <strong>de</strong> charron.Avec l’essor <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s folkloriques, la <strong>Savoie</strong><strong>de</strong>vient un terrain propice à la patrimonialisation<strong>de</strong> la culture populaire. Régions pauvresencore peu industrialisées, la <strong>Savoie</strong>, le Valaisou encore la Vallée d’Aoste sont perçus commel’observatoire privilégié <strong>de</strong> « communautés »« préservées » <strong>de</strong> la mo<strong>de</strong>rnité. Écrivains, ethnologueset folkloristes, collectionneurs, peintres,graveurs et photographes les investissent. En<strong>Savoie</strong>, après l’étu<strong>de</strong> pionnière d’E. Goldstern,(1913-14) sur Bessans, E. Canziani (1905-1920),F.Coppier, (1931), A.Van Gennep (1916-1939),A. Jacques (1905-1958), décrivent sur le papierou fixent sur la toile ou la pellicule, la vie <strong>de</strong>populations « à part ». Ce regard ethnographiquecaractérise les populations alpines et leurs objetsquotidiens où dominent l’isolement, la pureté,l’authenticité, l’immuabilité. Il évacue la pauvretéet les bouleversements du Progrès, les conflits,l’émigration vers les villes. L’art populaire estvoulu anonyme, pérenne et proche <strong>de</strong> la Nature.<strong>La</strong> folklorisation du patrimoine montagnard estaccentuée par les premiers « professionnels dutourisme », hôteliers, commerçants, photographes,ven<strong>de</strong>urs <strong>de</strong> cartes postales et <strong>de</strong> souvenirs.Les populations « isolées » se mettent ellesmêmesen scène, les folkloristes leur ayant faitprendre conscience <strong>de</strong> l’intérêt « exotique » <strong>de</strong>leur typicité pour l’économie touristique.<strong>La</strong> patrimonialisation <strong>de</strong> la culture populairerépond également à d’autres préoccupations pluspolitiques. Il s’agit pour les Etats-nations européensd’affirmer leur i<strong>de</strong>ntité nationale en intégrantles i<strong>de</strong>ntités locales. En France, <strong>de</strong>puis laRévolution, les concepts d’unité, d’indivisibilitéet d’égalité caractérisent la Nation qui va seconstruire par <strong>de</strong>s processus <strong>de</strong> nationalisationpar unification <strong>de</strong> la langue, du territoire, <strong>de</strong> laculture et <strong>de</strong> l’histoire nationale. Cette fabrication<strong>de</strong> la Nation se traduit également par la désignation<strong>de</strong> ses Monuments historiques présentéscomme les témoins <strong>de</strong> son génie, dans une perspectived’universalité <strong>de</strong> la culture française. Maisil s’agit aussi d’intégrer les « petites patries » dansla gran<strong>de</strong> et d’assurer l’articulation entre i<strong>de</strong>ntiténationale et i<strong>de</strong>ntités locales. Suite à la défaite<strong>de</strong> 1870, la Troisième République théorise unearticulation entre le tout (la Nation) et les parties(les régions ou provinces) en produisant undiscours sur les « petites patries », consacréescomme éléments gigognes <strong>de</strong> la France « mosaïquemerveilleuse » comme le rappelle l’historienneAnne-Marie Thiesse dans son ouvrage Ilsapprenaient la France : l’exaltation <strong>de</strong>s régionsdans le discours patriotique (1997).Avec son Musée savoisien qui expose mobilier,céramique ou costumes « régionaux », la <strong>Savoie</strong>s’auto-célèbre comme une petite patrie, élémentd’une France unie, dans un imaginaire profondémentmarqué par les stéréotypes historiques,folkloriques et touristiques.Les années 1970ou la planification d’une gran<strong>de</strong> collected’objets ethnographiquesA partir <strong>de</strong>s années 1960, Jacques Manoury,conservateur <strong>de</strong>s Musées d’art et d’histoire <strong>de</strong>Chambéry, promeut la constitution <strong>de</strong> collectionsd’ethnographie rurale avec le soutien du préfetJean-Pierre Ha<strong>de</strong>ngue (1968-1973) et du <strong>Conseil</strong>général. C’est un élève <strong>de</strong> Georges-Henri Rivière,directeur du Musée National <strong>de</strong>s Arts et TraditionsPopulaires, acteur du maillage « ATP »<strong>de</strong>laFrance pour rendre compte <strong>de</strong>s richesses <strong>de</strong>s« provinces ».10
Alors que la mo<strong>de</strong>rnisation <strong>de</strong> l’habitat et dugenre <strong>de</strong> vie ont primé dans les années 1950 surtoute vision patrimoniale, les conservateurs <strong>de</strong>sATP pressentent la nécessité <strong>de</strong> sauvegar<strong>de</strong>r lamémoire d’une société marquée par l’exo<strong>de</strong> ruralet le déclin <strong>de</strong>s industries traditionnelles. Trèspeu d’associations locales se fixent alors le but<strong>de</strong> collecter et <strong>de</strong> valoriser les « vieilles affaires ».Pour répondre à la disparition <strong>de</strong> la culturepaysanne montagnar<strong>de</strong> et à la dispersion <strong>de</strong> sonpatrimoine dans <strong>de</strong>s circuits marchands, le<strong>Conseil</strong> général lance en 1970 une très importantecampagne d’acquisition d’objets, considérantque « pour l’instant, il reste encore danscertains villages, notamment <strong>de</strong>s hautes vallées,<strong>de</strong> beaux objets et <strong>de</strong>s « ensembles » ayant unevaleur artistique, folklorique et ethnographiqueassez exceptionnelle. Avec l’accélération <strong>de</strong>sprocessus d’équipement et d’urbanisation, il estcertain que d’ici quelques années, tout cela auradisparu » (Délibérations du <strong>Conseil</strong> général, 1969,Vol. II, 2 e Session, p. 362). Les collections acquisessont alors déposées au Musée savoisien.Cette action s’accompagne du recrutement d’ethnologuesqui renforcent l’équipe du MuséeSavoisien et <strong>de</strong> la création d’un service départementald’expositions itinérantes, pionnier enFrance, le Muséobus qui circule dans les vallées<strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>, concourant à l’animation <strong>de</strong> la vielocale et à l’éveil <strong>de</strong>s populations à leur patrimoine.Ce service préfigura une décentralisation<strong>de</strong> l’activité culturelle.L’ancien archevêché abritant le Musée savoisienbénéficie d’une restauration par la Ville <strong>de</strong> Chambéryet les Monuments historiques <strong>de</strong> 1976 à 1982,confortant la vocation régionale du musée. L’équipescientifique pluridisciplinaire du Musée savoisienconçoit dans les années 1970-1990 la présentationpermanente <strong>de</strong>s collections municipales et départementaleset propose également <strong>de</strong>s expositionstemporaires thématiques. Suite aux campagnesd’acquisition et <strong>de</strong> collecte, une salle d’ethnographieintitulée « Introduction à une ethnographie <strong>de</strong>la <strong>Savoie</strong> » est ouverte au public en 1983. Elle inviteles visiteurs à découvrir la <strong>Savoie</strong> « traditionnelle »à travers sa culture matérielle.L’archéologie connaît, dans les années 1970, unregain d’intérêt dans le département avec la création<strong>de</strong> nombreuses associations. Le Servicedépartemental d’archéologie du Musée savoisien(1976) mène <strong>de</strong>s actions <strong>de</strong> recherche sur lescollections et ouvre, au musée, la salle permanented’Archéologie du Bourget en 1979, puisen 1985 une salle consacrée à la <strong>Savoie</strong> galloromaineet réalise <strong>de</strong>s expositions temporaires.Le travail sur les collections est complété par <strong>de</strong>stravaux <strong>de</strong> recherche et <strong>de</strong>s chantiers <strong>de</strong> fouillesen Préhistoire récente et sur l’Art rupestre, enArchéologie sub-aquatique, en Archéologieromaine et médiévale.Le Musée rassemble un important fonds d’estampeshistoriques et le médaillier <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong> feral’objet d’une exposition permanente (1993).Collections et patrimoine aujourd’huiDans les années 1990, une décentralisation <strong>de</strong>scollections ethnographiques départementales,non présentées au Musée savoisien, est engagéepar le <strong>Conseil</strong> général pour les valoriser.L’opportunité <strong>de</strong>s Jeux Olympiques d’hiver <strong>de</strong>1992 est saisie par l’équipe du Musée pourproposer un projet <strong>de</strong> valorisation du patrimoinereligieux baroque <strong>de</strong>s hautes vallées afin <strong>de</strong>diversifier l’offre touristique <strong>de</strong> la <strong>Savoie</strong>. Les «Chemins du baroque » seront confiés en 1992 àla FACIM qui portera l’animation du Pays d’art etd’histoire <strong>de</strong> Maurienne-Tarentaise (<strong>de</strong>s Hautesvallées <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong> <strong>de</strong>puis 2006).Les collections muséales constituent <strong>de</strong> précieuxtémoins <strong>de</strong> l’histoire et <strong>de</strong> la culture savoyar<strong>de</strong>s.Le Département – outre la constitution <strong>de</strong> sespropres collections – a soutenu et soutient,<strong>de</strong>puis la création du service <strong>de</strong> la Conservationdépartementale du patrimoine <strong>de</strong> la <strong>Savoie</strong> en1995, <strong>de</strong>s projets muséaux <strong>de</strong> collectivités territoriales: musées, maisons thématiques, centresd’interprétation du patrimoine et sites patrimoniaux,dont récemment le centre d’interprétationdu patrimoine fortifié <strong>de</strong> l’Esseillon à Avrieux etl’Espace Alu, musée <strong>de</strong> l’aluminium à Saint-Michel-<strong>de</strong>-Maurienne.Les musées conservent œuvres et objets originaux.Ce sont <strong>de</strong>s outils d’apprentissage et d’appropriationterritoriale, <strong>de</strong>s lieux d’enrichissementculturel et <strong>de</strong> convivialité pour les visiteurscurieux <strong>de</strong> découvrir et <strong>de</strong> comprendre unerégion caractérisée par sa diversité culturelle etson histoire singulière.Le patrimoine permet à la collectivité <strong>de</strong> sedéfinir dans le Temps et dans l’Espace, pourmieux se projeter dans l’avenir. Il s’avère unélément <strong>de</strong> cohésion sociale, en produisant unlien essentiel entre générations, mais aussi entrenouveaux et anciens Savoyards, autour d’uneculture et d’un territoire partagés et à partagerdans un esprit d’accueil et d’ouverture.Dans la perspective du développement durable,les musées sont <strong>de</strong>s atouts pour l’économielocale. Ils participent en effet <strong>de</strong>séléments <strong>de</strong> l’attractivité territorialemotivant l’installation <strong>de</strong> nouvellesactivités. <strong>La</strong> <strong>Savoie</strong> a tous lesmoyens <strong>de</strong> séduire touristes, habitantset entrepreneurs par l’originalité<strong>de</strong> sa culture alpine, transfrontalièreet européenne.Renforcer la sensibilisation aupatrimoine culturel se présente,aujourd’hui, en <strong>Savoie</strong>, commeun moyen <strong>de</strong> valoriser uneaménité fondamentale du territoirepour participer au renouvellement<strong>de</strong> l’image du départementet le porter aussicomme territoire <strong>de</strong> culture etd’histoire.Marie-Anne GuérinDiable <strong>de</strong> Bessans,un objet ethnographique,objet <strong>de</strong> collection(collections départementalesdéposées au Muséesavoisien).D O S S I E REn stage à laConservationdépartementaledu patrimoineMarie-Anne Guérinethno-politologue,élève-conservateur àl’Institut National duPatrimoine, stagiaire <strong>de</strong>juin à novembre 2007,a été missionnée sur lapréfiguration d’unProjet Scientifique etCulturel répondant auxgrands axes <strong>de</strong> l’actionpatrimoniale du <strong>Conseil</strong>général <strong>de</strong> la <strong>Savoie</strong>.11
D O S S I E RTrois portraits du XVII e siècleenrichissent les collectionsdépartementales« Des robes etmanteaux <strong>de</strong> para<strong>de</strong><strong>de</strong> Messieurs <strong>de</strong> laChambre »« …<strong>de</strong>puis quelquestemps on les fait <strong>de</strong> satinnoir avec les parements<strong>de</strong> velours. Les robbes<strong>de</strong>s Presi<strong>de</strong>ns graduez& ordinaires, qui ont labaguette & le coussin,sont garnies sur l’épaulegauche <strong>de</strong> la manche,fourrée d’hermine,& les manteaux <strong>de</strong> tousles autres Presi<strong>de</strong>ns, &<strong>de</strong>s Maistres forts longs,n’y ayant que lesPatrimoniaux graduez,qui portent la robbe.Les bonnets sontpareillement <strong>de</strong> veloursnoir plissés en rond,comme ceux que l’onuse dans le Bureau. »(F. Capré, Traité historique<strong>de</strong> la Chambre <strong>de</strong>s comptes <strong>de</strong>Savoye.- Lyon: chez G. Barbier,1672, chap. XIII, p 387-388.)Portrait <strong>de</strong> Clau<strong>de</strong>Carron, baron <strong>de</strong>Cessens, maîtreauditeur <strong>de</strong> la Chambre<strong>de</strong>s comptes <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>,huile sur toile,H94cmxL75cmsignée au dos:« G el . Dufour. Px-t 1673 »collections départementales,inv. 2006-7-1.Ces trois peintures attachées au souvenir<strong>de</strong>s barons puis comtes <strong>de</strong> Cessens et <strong>de</strong>Grésy témoignent du goût pour les galeries <strong>de</strong>portraits qui se développa parmi les nouvelles élitesprovinciales à la fin du XVII e siècle. Outre leurqualité picturale, leur intérêt pour l’Histoire régionaletient aujourd’hui à leur rareté et à leur attributionà la production profane, plutôt méconnue, <strong>de</strong>speintres Dufour. Ces trois portraits historiquesproviennent d’un fonds qui avait été dispersé. Ils ontpu être réunis <strong>de</strong> nouveau grâce à leur acquisition,en 2006 par le <strong>Conseil</strong> général <strong>de</strong> la <strong>Savoie</strong> et viennentenrichir les collections départementales aprèsconservation et restauration engagées en 2007.L’i<strong>de</strong>ntification <strong>de</strong>s portraits interroge l’histoire <strong>de</strong>scomman<strong>de</strong>s familiales liées à l’anoblissement <strong>de</strong>sélites <strong>de</strong> robe qui s’accrut aux XVI e et XVII e sièclesen <strong>Savoie</strong> grâce aux achats <strong>de</strong> terres seigneuriales,aux inféodations <strong>de</strong> titres et <strong>de</strong> charges, auxalliances matrimoniales. Ce mouvement caractérisebien l’importance croissante <strong>de</strong> la bourgeoisiepromue aux plus hautes fonctions administrativeset judiciaires ducales. Les trois portraits illustrentainsi l’ascension <strong>de</strong> la famille Carron par l’acquisition<strong>de</strong>s terres seigneuriales <strong>de</strong> Grésy et <strong>de</strong> Cessensau cours <strong>de</strong>s années 1670 et nous offrent un aperçuinédit <strong>de</strong> l’importante production profane <strong>de</strong>speintres Dufour marquée par l’influence <strong>de</strong>smodèles diffusés à la cour <strong>de</strong> Turin. Hélas, sur plusd’une centaine <strong>de</strong> portraits attestés par les sourcesd’archives, rares sont leurs œuvres qui ont puparvenir jusqu’à nous.L’origine noble <strong>de</strong> la famille Carron <strong>de</strong> la branche<strong>de</strong> Cessens reste confuse malgré les recherchesgénéalogiques, héraldiques et historiques menéesau XIX ème siècle par les comtes Jules Mouxy <strong>de</strong>Loche et Amédée <strong>de</strong> Foras. L’anoblissement d’unevieille famille Carron d’origine bugiste est attestépar lettres patentes ducales du 22 mars 1521. Deuxversions assez proches <strong>de</strong>s armoiries portées parles Carron reflètent la mobilité <strong>de</strong>s meubles héraldiquesà l’Époque mo<strong>de</strong>rne: D’azur à trois carronsd’argent couchés <strong>de</strong>ux et un ou De gueules à troiscarrons d’or posés en losange <strong>de</strong>ux et un.Clau<strong>de</strong> Carron, fils d’Aynard Carron (seigneur <strong>de</strong> laBiguerne, bourgeois <strong>de</strong> Chambéry, conseiller d’État,contrôleur général <strong>de</strong>s finances, le 28 août 1635,maître-auditeur <strong>de</strong> la Chambre <strong>de</strong>s comptes <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>,mort en 1682) et <strong>de</strong> Marguerite Vélat, s’éleva dans lamagistrature aux plus hautes charges à l’exemplepaternel: nommé avocat au Sénat <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong> le 10 août1661, maître auditeur puis doyen <strong>de</strong>s maîtres auditeursen la Souveraine Chambre <strong>de</strong>s comptes <strong>de</strong><strong>Savoie</strong>, il se vit octroyé par lettres patentes du ducCharles-Emmanuel II, datées du 4 septembre 1663, lacharge <strong>de</strong> contrôleur général <strong>de</strong>s finances Deçà-lesmonts.En 1669, il réalisa avec François Capré l’inventaire<strong>de</strong>s archives <strong>de</strong> la Chambre <strong>de</strong>s comptes <strong>de</strong>Genevois lors <strong>de</strong> la réduction du duché <strong>de</strong> Genevoisapanagé jusqu’en 1659 aux <strong>Savoie</strong>-Nemours. Le ducCharles-Emmanuel II le nomma par la suite conseillerd’État, avant 1675.<strong>La</strong> liquidation <strong>de</strong>s terres seigneuriales <strong>de</strong> Cessenset <strong>de</strong> Grésy, situées dans une enclave du duché <strong>de</strong>Genevois, offrit à Clau<strong>de</strong> Carron l’opportunité <strong>de</strong>les réunir et d’accé<strong>de</strong>r à la baronnie lors d’unéchange, entre les terres <strong>de</strong> Cessens et le châteauet terre <strong>de</strong> Saint-Hilaire, qu’il passa, par acte du 28novembre 1677, avec Marie-Charlotte <strong>de</strong> Gellaz,épouse <strong>de</strong> François-Clau<strong>de</strong> <strong>de</strong> Bech, seigneur <strong>de</strong>la Motte, <strong>de</strong>rnière héritière <strong>de</strong> Jeanne <strong>de</strong> Gellaz,baronne <strong>de</strong> Bagnols, morte en 1672 qui avait tenuCessens, Épersy et Mognard. Par lettres patentes du11 février 1678, la régente <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>, Marie-Jeanne-Baptiste <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>-Nemours, érigeait la terre <strong>de</strong>Cessens en baronnie dont les appellations <strong>de</strong> justiceressortirent du Sénat <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>. Le 18 mars 1678,Clau<strong>de</strong> Carron fit l’acquisition <strong>de</strong>s droits seigneuriaux<strong>de</strong> Sigismond <strong>de</strong> Millioz sur la terre <strong>de</strong> Grésyen liquidation <strong>de</strong> créances, complétés le 15 avril1678 par l’achat d’autres propriétés à Grésy.Après avoir épousé en premières noces Ma<strong>de</strong>leineFariod, fille <strong>de</strong> Jean-Baptiste Fariod, seigneur <strong>de</strong>Saint-Hilaire, écuyer, maître d’hôtel du roi <strong>de</strong>Navarre et capitaine du guet <strong>de</strong> la ville <strong>de</strong> Lyon parcontrat du 28 novembre 1667, Clau<strong>de</strong> Carronépousa en secon<strong>de</strong>s noces, le 5 janvier 1678, Françoise<strong>de</strong> Pobel, fille <strong>de</strong> Clau<strong>de</strong>-François <strong>de</strong> Pobel,comte <strong>de</strong> Saint-Alban, baptisée le 1 er septembre1643 et morte le 24 février 1715, veuve enpremières noces du chevalier <strong>de</strong> Gantelet-Vectier,après contrat daté du 21 décembre 1677. Il eutplusieurs enfants <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux lits.Portait <strong>de</strong> Clau<strong>de</strong> Carron, 1673C’est aux années 1673-1678 qu’il faut rattacher lacomman<strong>de</strong> <strong>de</strong> Clau<strong>de</strong> Carron à l’atelier <strong>de</strong>s frèresDufour pour peindre son portrait en maître auditeur<strong>de</strong> la Chambre <strong>de</strong>s comptes <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>, contrôleurgénéral <strong>de</strong>s finances Deçà-<strong>de</strong>s-monts etconseiller d’État. Le tableau est signé au dos « G el .12
Dufour. Px-t 1673 » (Gabriel Dufour, 29 juin 1640-1721), ce qui peut intriguer au regard <strong>de</strong> la chronologie<strong>de</strong>s événements familiaux et du blasontiercé en pal, peint en haut à gauche du tableau,surmonté d’une couronne et posé sur une clef:– D’azur à trois larmes d’argent posées <strong>de</strong>ux et un(à <strong>de</strong>xtre)– D’azur à trois carrons d’argent posés en losange<strong>de</strong>ux et un– D’azur à la ban<strong>de</strong> d’or chargée <strong>de</strong> trois coquilles<strong>de</strong> sable (à senestre)Ces armes peuvent en effet être lues : Fariod <strong>de</strong>Saint-Hilaire, Carron, Pobel <strong>de</strong> Saint-Alban. Couronneet clef sont allusives et évoquent le nouveautitre et la charge.Gabriel recourait au talent <strong>de</strong> son frère, PierreDufour le Jeune (vers 1629-1702), pour les travauxles plus délicats <strong>de</strong> physionomie et la finesse duportrait se démarque nettement d’autres portraitspeints par Gabriel Dufour entre 1676 et 1694, d’unemain indéniablement plus laborieuse (collectionsparticulières). Grâce à leur talent <strong>de</strong> portraitistes,<strong>de</strong> peintres d’histoire et <strong>de</strong> miniaturistes, Pierre et<strong>La</strong>urent Dufour, installés à Turin avant 1663,s’étaient intégrés à la vie artistique <strong>de</strong> la capitaleducale en <strong>de</strong>venant prieurs <strong>de</strong> la très réputéeAcadémie <strong>de</strong> Saint-Luc en 1665 et 1672 avant d’entrerau service du duc Charles-Emmanuel II en 1672comme peintres ordinaires <strong>de</strong> S.A.R. Plusieursdizaines <strong>de</strong> comman<strong>de</strong>s furent alors passées par laduchesse Marie-Jeanne-Baptiste <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>-Nemours,régente en 1675, et les princes Eugène-Maurice etEmmanuel-Philibert <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>-Carignan. Il est sûrque leur réputation <strong>de</strong> peintres <strong>de</strong> cour favorisaune certaine émulation en <strong>Savoie</strong> entre commanditaires<strong>de</strong> fraîche noblesse très attachés à fairevaloir leur nouveau rang.Par la suite, le duc Victor-Amédée II érigea parlettres patentes du 22 janvier 1682 la terre <strong>de</strong>Cessens en comté. D’autres échanges <strong>de</strong> terres et<strong>de</strong> droits eurent lieu, par acte du 9 mars 1683, entreJoseph-Emmanuel <strong>de</strong> Mouxy, seigneur <strong>de</strong> Loche etClau<strong>de</strong> Carron, <strong>de</strong>venu comte <strong>de</strong> Cessens. <strong>La</strong>seigneurie <strong>de</strong> Loche fut alors érigée en comté parpatentes ducales du 28 avril 1683.Par lettres patentes du 20 avril 1683, Clau<strong>de</strong> Carronreçut du duc Victor-Amédée II le droit d’établir unjuge pour son fief <strong>de</strong> Grésy au prix <strong>de</strong> 300 ducatons<strong>de</strong> 7 florins pièce en paiement <strong>de</strong>s Ustensiles<strong>de</strong> nouvelles troupes ducales. Le 22 janvier 1684,il reconnut tenir en arrière-fief ses <strong>de</strong>ux terres <strong>de</strong>Grésy et <strong>de</strong> Cessens (rente <strong>de</strong> 4000 florins) puis fitinstaller <strong>de</strong>s fourches patibulaires à Cessens en1685. Le 16 novembre 1689, il acheta une maison<strong>de</strong> ville sous le château <strong>de</strong> Chambéry à son parentJoseph Carron. Il procéda à la rénovation <strong>de</strong> sesterriers entre 1686 et 1702 avant <strong>de</strong> tester le 24juillet 1710. Il mourut le 14 février 1714. <strong>La</strong> familleCarron s’éteindra au début du XVIII e siècle pour labranche <strong>de</strong>s seigneurs <strong>de</strong> la Biguerne et dans lepremier tiers du XIX e siècle pour la branche <strong>de</strong>Grésy <strong>de</strong>s comtes <strong>de</strong> Cessens.Portrait en pied d’une jeune filleau chapeau portant une bannièreCe charmant portrait anonyme, malheureusementaltéré, non signé et non daté – <strong>de</strong>rnier tiers duXVII e siècle –, serait attribuable à l’atelier Dufour.Une anecdote locale publiée en 1890 le rapporteraità la légen<strong>de</strong> d’une certaine Au<strong>de</strong>berte <strong>de</strong> Grésy,fille <strong>de</strong> Rodolphe III <strong>de</strong> Grésy (1259-1285) qui, âgéed’une quinzaine d’années, aurait défendu le châteaupaternel contre le seigneur <strong>de</strong> Saint-Innocent maisaucune source archivistique ne permet <strong>de</strong> renseignercette attribution.Portrait d’un jeune chasseur, 1673Ce portrait signé et daté « Dufour pix~. 1673 » estattribué à Pierre Dufour le Jeune compte tenu <strong>de</strong>la signature au recto et <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> la facturemaniérée, caractéristique du style <strong>de</strong> cour. Il fautle replacer dans le contexte <strong>de</strong>s comman<strong>de</strong>s <strong>de</strong> laMaison <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>, peut-être l’Hôtel <strong>de</strong> Soissons, et<strong>de</strong>s portraits offerts comme présents aux princesou à leur proche entourage.Selon l’ordre généalogique, la date du tableau etl’âge du sujet, soit environ 16 ans, ce jeune chasseurserait Thomas-Louis <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>-Carignan, fils d’Eugène-Maurice<strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>-Carignan, comte <strong>de</strong> Soissonset d’Olympe Mancini, né le 15 décembre 1657à Paris à l’Hôtel <strong>de</strong> Soissons, comte <strong>de</strong> Soissons en1673, chevalier <strong>de</strong> l’Annoncia<strong>de</strong> le 24 mars 1678,maréchal <strong>de</strong>s camps et <strong>de</strong>s armées du roi <strong>de</strong> France.Il épousa secrètement le 12 octobre 1680 à la Folie-Herbault puis le 28 février 1683 Uranie <strong>de</strong> la Cropte,fille <strong>de</strong> François <strong>de</strong> la Cropte et <strong>de</strong> Charlotte Martel<strong>de</strong> Beauvais. Il mourut <strong>de</strong>s suites d’une amputationd’un bras brisé par une balle <strong>de</strong> mousquet au siège<strong>de</strong> <strong>La</strong>ndau le 14 août 1702.Des comman<strong>de</strong>s – avérées par les sources d’archives– <strong>de</strong> plusieurs portraits familiaux par les princesEugène-Maurice et Emmanuel-Philibert <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>-Carignan à Pierre le Jeune et <strong>La</strong>urent Dufour entre1675 et 1692, appuyent cette hypothèse. Certainsfurent offerts à <strong>de</strong>s parents, vassaux ou alliés. Depuisau moins 1632, <strong>de</strong>s liens unissaient la famille <strong>de</strong>Mouxy <strong>de</strong> Loche – seigneurie voisine <strong>de</strong> Grésy – aux<strong>Savoie</strong>-Carignan-Soissons, notamment Jean, gentilhomme<strong>de</strong> la chambre <strong>de</strong> S.A le prince Thomas <strong>de</strong><strong>Savoie</strong>-Carignan (mort en 1666) et son fils Joseph-Emmanuel <strong>de</strong> Mouxy <strong>de</strong> Loche (1630-1697), filleuldu prince Joseph-Emmanuel <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>-Carignan. Letableau serait ainsi à rapprocher <strong>de</strong>s échanges <strong>de</strong>1683 entre Joseph-Emmanuel <strong>de</strong> Mouxy, seigneur <strong>de</strong>Loche et Clau<strong>de</strong> Carron, comte <strong>de</strong> Cessens. Il fit trèsprobablement parti <strong>de</strong> la succession <strong>de</strong> Jeanne-FrançoiseCarron (1762-1841) <strong>de</strong>rnière <strong>de</strong>scendante <strong>de</strong> lafamille Carron <strong>de</strong> Grésy dont l’héritier fut le comteJoseph-Frédéric <strong>de</strong> Mouxy (1806-1877), capitaine àla Briga<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong> <strong>de</strong> la branche Mouxy <strong>de</strong> Grésy.Philippe RaffaelliD O S S I E RPortrait anonymedit d’Au<strong>de</strong>berte <strong>de</strong>Grésy, huile sur toile,H125cmxL97cmattribuable à l’atelierDufour, vers 1678-1682,collectionsdépartementales,inv. 2006-8-1.Bibliographie• Anonyme, environsd’Aix-les-Bains, <strong>La</strong> touret le château <strong>de</strong> GrésyDescription-Histoire-Légen<strong>de</strong> ». – Chambéry:Imprimerie savoisienne,1890.• Armorial <strong>de</strong> Foras,tome 1, p 310-311.• De Mouxy <strong>de</strong> LocheJules, Histoire <strong>de</strong> Grésysur-Aix.– Chambéry:Bottero, 1874.• Mercorelli Alexia,Les peintres Dufour,maîtrise d’histoire <strong>de</strong>l’art, Université <strong>de</strong> LyonII, septembre 1997(sous la dir. <strong>de</strong> GillesChomer).• Sche<strong>de</strong> Vesme,Dufour (I). –Torino:SPABA, 1966, vol.Secondo, p 421-435.Portrait d’unjeune chasseur,H 142,7 cm x L 99,4 cm(huile sur toileH 112,6 cm x L 86,7 cmavec cadre), signé etdaté en bas à gauche« Dufour pix~. 1673 »collectionsdépartementales,inv. 2006-9-1.13
D O S S I E RLe « trésor » <strong>de</strong> Sainte-ReineNouvelle acquisition archéologique pourles collections départementalesAversReversLes collections départementales se sontaccrues, cette année, d’un lot d’objetsgaulois tout à fait exceptionnel. Il s’agit <strong>de</strong> « disquesà gravures monétiformes », dénomination quiindique d’emblée une incertitu<strong>de</strong> sur la fonctionexacte <strong>de</strong> ces artefacts métalliques et par là-mêmeen souligne l’originalité et l’intérêt.C’est en 1995 qu’était signalée la trouvaille d’un lot<strong>de</strong> quinze objets archéologiques, mis au jour dans lemassif <strong>de</strong>s Bauges, sur le territoire <strong>de</strong> la commune<strong>de</strong> Sainte-Reine, par Monsieur Jean-Pierre Berthet.Dans les années qui suivirent la découverte, plusieursexpertises eurent lieu afin d’authentifier ces curieuxobjets et comprendre leur fonction. En 1996, MichelDhénin, conservateur en chef au Cabinet <strong>de</strong>sMédailles <strong>de</strong> la Bibliothèque nationale <strong>de</strong> France,expert désigné par le Ministère <strong>de</strong> la culture, enréalise l’inventaire précis, authentifie le lot et le date<strong>de</strong> la pério<strong>de</strong> gauloise: sept disques présentent unegravure <strong>de</strong> type monétaire au cheval galopant attribuéaux Cavares, peuples <strong>de</strong> la vallée du Rhône, datable<strong>de</strong>s années 70 avant J.-C., <strong>de</strong>ux sont attribués auxLingones, peuples situés sur un vaste territoire autour<strong>de</strong> <strong>La</strong>ngres, au type datable <strong>de</strong>s années 80 à 58avant J.-C., un disque avec un décor en relief <strong>de</strong> typenon monétaire et le reste non déterminable ou fragments<strong>de</strong> disques sans traces <strong>de</strong> travail.Il précise qu’il ne s’agit ni <strong>de</strong> coins monétaires ni<strong>de</strong> moules car le métal dont ils sont constitués peutfondre à basse température. Il pense, car il n’existepas d’objets similaires qui puissent leur êtrecomparés, qu’il pourrait s’agir <strong>de</strong> modèles ou d’exercices<strong>de</strong> graveurs.François Planet, responsable du médaillier du musée<strong>de</strong>s Beaux-Arts <strong>de</strong> Lyon, consulté en 2000, arriveaux mêmes conclusions sur leur authenticité et posele problème <strong>de</strong> leur utilisation en évoquant l’hypothèsed’une étape dans la fabrication <strong>de</strong>s coinsmonétaires.Le lot d’objets est ensuite confié, à la fin <strong>de</strong> l’année2000, à Jean-Noël Barrandon, directeur <strong>de</strong> rechercheau CNRS et directeur du Centre Ernest-Babelon àOrléans, pour effectuer leur étu<strong>de</strong> métallographique.L’analyse par activation avec <strong>de</strong>s neutrons rapi<strong>de</strong>s<strong>de</strong> cyclotron, métho<strong>de</strong> globale et non <strong>de</strong>structive,a montré que la composition <strong>de</strong>s objets va <strong>de</strong> l’étainpratiquement pur (99,7 %) à un alliage <strong>de</strong> plombétain.Il a pu mettre ainsi trois groupes en évi<strong>de</strong>nce:– premier groupe : en étain pratiquement pur,rassemble la majorité <strong>de</strong>s gravures du type monétaireau cheval galopant attribuées au peuple gaulois<strong>de</strong>s Cavares.– <strong>de</strong>uxième groupe : en alliage plomb-étain avec<strong>de</strong>s teneurs variables en plomb, regroupe un typemonétaire du cheval galopant attribué égalementaux Cavares, un autre <strong>de</strong> la vallée du Rhône et unfragment illisible– troisième groupe: en alliage plomb-étain avec <strong>de</strong>steneurs variables en étain, concerne les <strong>de</strong>uxgravures du type monétaire attribué au peuple <strong>de</strong>sLingones, <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> type incertain, une gravure dutype monétaire au cheval galopant attribué auxCavares et un fragment sans trace. Il conclut à unebonne corrélation entre alliages et types monétaires,mais précise cependant que, si ce type d’alliage estbien ancien, il n’est pas utilisé en numismatique.Enfin, l’ensemble est étudié, en 2003, par GérardAubin, conservateur général du Patrimoine, experten numismatique antique. Il indique que l’avancement<strong>de</strong> la recherche, entre 1996 et 2003, permetd’attribuer plutôt au peuple gaulois <strong>de</strong>s Allobrogesles séries au cheval galopant ainsi que les typesmonétaires dits au cavalier <strong>de</strong> la Vallée du Rhône.Il signale que certains disques montrent <strong>de</strong>s gravures<strong>de</strong> droit, les plus grands, d’autres <strong>de</strong>s gravures <strong>de</strong>revers, que les représentations monétaires concernent<strong>de</strong>s monnayages en argent et propose, avecpru<strong>de</strong>nce, une datation entre 80 et 50 avant J.-C.Il termine son rapport par une hypothèse d’interprétation<strong>de</strong> ces disques, sans aucun doute liés à lafabrication <strong>de</strong>s monnaies. Après avoir souligné que<strong>de</strong>ux éléments importants doivent être pris encompte: la gravure en creux et inversée <strong>de</strong>s typesmonétaires et le support mou, donc facile à gravermais inutilisable comme coin monétaire ou moule ;après avoir mis <strong>de</strong> côté l’hypothèse d’exercices d’unapprenti graveur, car les représentations montrentune parfaite maîtrise <strong>de</strong> la gravure, et celle d’ébauchescar il n’y a pas <strong>de</strong> raison <strong>de</strong> les conserver,Gérard Aubin avance l’idée que ces objets pourraientêtre <strong>de</strong>s modèles, <strong>de</strong>s « patrons » ainsi qu’illes qualifie dans son expertise.Il constate, d’après l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s monnaies gauloises,que les coins étaient utilisés au maximum <strong>de</strong> leurspossibilités,etconclut:«…Cetteprolongation <strong>de</strong>la durée <strong>de</strong> vie <strong>de</strong>s coins traduit sans doute unedifficulté à se procurer <strong>de</strong> nouveaux coins, que cesoit pour <strong>de</strong>s raisons économiques ou techniques.On conçoit donc le soin apporté à leur fabricationet le souci <strong>de</strong> ne pas gâcher par une erreur un coinen cours <strong>de</strong> gravure. Un brouillon ou un modèleétait donc précieux. En effet, il était plus facile etplus sûr <strong>de</strong> reproduire exactement un modèle déjàen creux et inversé que <strong>de</strong> partir d’un positif (unemonnaie) et <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r mentalement à une doublecorrection (relief-creux ; orientation). En développantcette idée, on peut aussi penser au travail d’unmaître graveur qui fournit à un tâcheron un modèleà reproduire sur le coin définitif. Dans cette hypothèse,faut-il penser à du matériel issu d’un atelier<strong>de</strong> frappe ou bien à celui d’un graveur itinéranttransportant avec lui les outils <strong>de</strong> son art?… »Il s’agit là <strong>de</strong> premiers regards dans le cadre <strong>de</strong>rapports d’expertise. L’évolution <strong>de</strong> la recherche etpeut-être d’autres découvertes <strong>de</strong> ce type apporteront,souhaitons-le, <strong>de</strong> nouvelles précisions sur lesobjets du « trésor » <strong>de</strong> Sainte-Reine.Françoise Ballet14
Une nouvelle toileau musée FaureD O S S I E RLe musée Faure a récemment enrichi ses collections, puisque le 4 juin<strong>de</strong>rnier, à la faveur d’une vente aux enchères chez Maître Jacques<strong>La</strong>faury à Chambéry, il s’est porté acquéreur d’une belle toiled’inspiration romantique, œuvre du peintre suisse Johann-Jacobus Ulrich(1798-1877), « <strong>La</strong> Casca<strong>de</strong> <strong>de</strong> Grézy », sans doute exécutée vers 1850.né à An<strong>de</strong>lfingen dans le canton <strong>de</strong>Zurich, le jeune Ulrich était <strong>de</strong>stinéà une carrière commerciale, mais abandonna viteses étu<strong>de</strong>s pour <strong>de</strong>venir peintre. Il vint souventen France, et fut l’élève <strong>de</strong> Jean-Victor Bertin(1775-1842), l’un <strong>de</strong>s grands paysagistes dudébut du XIX e siècle dont le musée Faurepossè<strong>de</strong> une aquarelle, d’inspiration très britannique.Car c’est dans la peinture <strong>de</strong> paysagequ’Ulrich va se spécialiser, notamment dans <strong>de</strong>sreprésentations <strong>de</strong> sites montagneux <strong>de</strong> sonpays. Il vint aussi en Normandie pour y peindre<strong>de</strong>s paysages aux côtés <strong>de</strong>s Frères Leprince.« <strong>La</strong> Casca<strong>de</strong> <strong>de</strong> Grézy » est dans le même espritque certains paysages qu’il a peints aux alentoursd’Annecy, tout à fait représentatifs <strong>de</strong>l’école romantique. Ce tableau met en relief unsite cher au cœur <strong>de</strong>s vieux aixois, mais aujourd’huitombé en désuétu<strong>de</strong>, les gorges du Sierroz,en aval <strong>de</strong> Grésy-sur-Aix, qui fut jusque vers1900 un élément touristique incontournable pourles visiteurs <strong>de</strong> la Ville d’eaux. Lieu aussi d’untragique événement, puisque c’est là qu’en 1813,Mme <strong>de</strong> Broc, l’une <strong>de</strong>s suivantes <strong>de</strong> la reineHortense (Hortense <strong>de</strong> Beauharnais, alors reine<strong>de</strong> Hollan<strong>de</strong>), se noya sous les yeux <strong>de</strong> sa maîtresse.C’est en commémoration <strong>de</strong> cet acci<strong>de</strong>ntqu’une stèle fut élevée au pied <strong>de</strong> la casca<strong>de</strong>.On aperçoit d’ailleurs le monument sur le côtédroit du tableau. De fort belle facture, celui-ciest parfaitement équilibré, dans une palette trèsdélicate où dominent les verts et les bleus,rendant une ambiance très psychodramatique.Comme tout paysage romantique, quelquespersonnages, touristes <strong>de</strong> passage, viennentanimer la scène sur fond <strong>de</strong> ciel magnifique.L’œuvre est bien sûr un témoignage importantquant à l’aspect du site au milieu du XIX e siècle,alors que le moulin, au sommet <strong>de</strong> la casca<strong>de</strong>,était en pleine activité. Plus tard, un petit bateauà vapeur permit aux visiteurs <strong>de</strong> venir jusquesous la casca<strong>de</strong> en remontant les gorges. Les plusillustres personnages en villégiature à Aix, lareine Victoria en tête, vinrent visiter ce lieu.Aujourd’hui rattrapé par l’urbanisation galopante,le site est envahi par la végétation et n’offre plusguère d’intérêt. C’est pourquoi cette évocationpeinte est si importante pour la mémoire collectiveaixoise.André Liatard15
D O S S I E RHenri Deville,Diane, la 3 e héroïne duMont-Blanc, aquarelle.1. Effectué par AlainBexon, que nous remercions<strong>de</strong> nous autoriserà diffuser ses premiersrésultats.Henri Deville,Sir et <strong>La</strong>dy Cullum auBois <strong>de</strong>s Pèlerins,lavis <strong>de</strong> sépia.Vingt <strong>de</strong>ssinsrelatant l’ascensiond’Henriette d’Angevilleau Mont-BlancLe <strong>Conseil</strong> <strong>Général</strong> <strong>de</strong> la Haute-<strong>Savoie</strong> vientd’acheter pour les Collections départementalesune partie <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ssins liés à l’ascensiond’Henriette d’Angeville au Mont-Blanc en 1838 etcommandés par elle. Dix-huit feuilles au formatà peu près i<strong>de</strong>ntique (28,4 x 38 cm), travailléesau crayon graphite, au lavis <strong>de</strong> sépia ou à l’aquarelle.Très bien conservés, les <strong>de</strong>ssins illustrent lesdifférentes étapes <strong>de</strong> son ascension. À cela s’ajoutent<strong>de</strong>ux portraits, l’un <strong>de</strong> Jeanette Garin, lafemme <strong>de</strong> chambre d’Henriette, et l’autre d’HenrietteRath, amie <strong>de</strong> notre montagnar<strong>de</strong>.Il s’agit d’une opportunité rare, les <strong>de</strong>ssins <strong>de</strong>l’album d’Henriette d’Angeville ayant été dispersés.Henriette d’Angeville (1794 -1871), la<strong>de</strong>uxième femme ayant gravi le Mont-Blanc, aconsigné son expérience dans un album <strong>de</strong>voyage écrit en 1839 et illustré à son retour par<strong>de</strong>s artistes contemporains à partir <strong>de</strong> ses esquissesou <strong>de</strong> ses indications (Hébert, Deville et Sain).Henriette d’Angeville n’a jamais pu faire éditerson manuscrit. Une photocopie du texte <strong>de</strong> celuici,actuellement localisée chez les <strong>de</strong>scendants,documente cet ensemble. Un premier travail <strong>de</strong>recherche et <strong>de</strong> localisation1 a permis <strong>de</strong> pisterplusieurs lots passés en vente publique à l’automne2006, et <strong>de</strong> les rassembler.L’ascension, l’album et le Carnet vertL’histoire d’Henriette d’Angeville est bien connue<strong>de</strong>s collectionneurs et passionnés d’histoire <strong>de</strong>la montagne: <strong>de</strong>uxième femme a avoir gravi leMont Blanc, en 1838, elle est la première à avoirorganisé cette ascension <strong>de</strong> sa propre initiative.Marie Paradis, la première, avait en effet plutôtété « entraînée » par ses amis.Henriette d’Angeville a consigné sur un journalconnu sous le nom <strong>de</strong> « Carnet vert » les détails<strong>de</strong> son aventure; <strong>de</strong> septembre 1838 à avril 1839,elle rédige ses notes et comman<strong>de</strong> <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ssinsà quelques illustrateurs célèbres <strong>de</strong> l’époque. Entout une quarantaine d’illustrations complètentle texte. Elle semble avoir eu <strong>de</strong>s difficultés à sefaire éditer, car pas davantage que pour sonascension, elle ne trouva d’encouragement pourson projet d’édition. L’époque était pourtant<strong>de</strong>venue frian<strong>de</strong> du genre, <strong>de</strong>puis l’ascension <strong>de</strong>Saussure et plusieurs autres, dont la plupart sontconservés dans la collection Payot (Atkins,Auldjo, etc.). Dans son introduction elleannonce : « Dans tous les cas je vais toujoursécrire la relation du voyage et faire faire <strong>de</strong>s<strong>de</strong>ssins et portraits ; ou ce manuscrit resteraunique entre mes mains et pour ma famille aprèsmoi, ou il sera traduit et vendu à bon prix. »Finalement, ce manuscrit ne sera pas publié. Lesinformations qu’on en connaît proviennent <strong>de</strong>témoignages anciens recueillis auprès <strong>de</strong>s<strong>de</strong>scendants d’Henriette. Par exemple, MaryPaillon, auteur d’un article dans la revue du CAFqui a recopié le manuscrit recueilli par la nièced’Henriette d’Angeville. Ou encore, le commandantGaillard en 1946, qui évalue la doubleprouesse que représentent, à l’époque, l’ascensiondu sommet par une femme et sa retranscriptionsous forme littéraire et artistique.« Mlle d’Angeville mit quatre mois pour faireexécuter à Genève toutes les illustrations <strong>de</strong> sonalbum. On admire le tour <strong>de</strong> force… pour lequelil ne lui fallut pas moins <strong>de</strong> ténacité que pour sonascension, en faisant faire ces cinquante-quatreillustrations en aussi peu <strong>de</strong> temps, par huitartistes différents. On imagine les allées et venues,les démarches répétées, les ren<strong>de</strong>z-vous pris etmanqués, les séances sans fin et innombrableschez les peintres et <strong>de</strong>ssinateurs pour faire passerdans leur vision et par le truchement <strong>de</strong> la sienne,les paysages et les scènes qu’elle seule avait vus ».Exploité en partie par un chercheur <strong>de</strong> la régionAlain Bexon, le manuscrit encore en collectionparticulière a permis <strong>de</strong> documenter les <strong>de</strong>ssins.Les vingt <strong>de</strong>ssins acquisLes <strong>de</strong>ssins acquis, sont principalement l’œuvre<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux artistes Jules Hébert et Henri Deville.Jules Hébert, peintre <strong>de</strong> genre au don d’observationextraordinaire, excelle à représentercomme <strong>de</strong>s scènes <strong>de</strong> genre le progrès <strong>de</strong> lacaravane et les différentes situations auxquelleselle se confronte. Dans une technique simple etefficace (lavis et crayon graphite), il témoigneavec fidélité <strong>de</strong>s procédés et équipements <strong>de</strong>l’époque (l’escalier <strong>de</strong> glace, les grands bâtons16
D O S S I E Rancêtres <strong>de</strong> nos piolets, les techniques d’assurance,les échelles pour franchir les crevasses…).Tout cela en rendant sur ces petits formats laperspective <strong>de</strong> paysages grandioses aux reliefsimpressionnants.Le rapprochement du manuscrit avec l’albumrend compte <strong>de</strong>s infortunes et <strong>de</strong>s bonheurs <strong>de</strong>l’ascension, tant <strong>de</strong>s sentiments personnelsd’exaltation, par exemple le plaisir <strong>de</strong> la« ramasse » – une technique particulière <strong>de</strong><strong>de</strong>scente –, que <strong>de</strong>s peurs d’Henriette d’Angevillequi selon ses propres mots, font d’elle une« véritable agonisante ».Cette vision historique, quasi ethnologique estcomplétée par celle d’Henri Deville, qui aimmortalisé le portrait d’Henriette dans sa célèbrerobe à carreaux et son chapeau aux larges bords.Il décrit <strong>de</strong>s scènes plus humaines, voire sentimentalesdans le goût naturaliste <strong>de</strong> l’époque :la chienne d’Henriette d’Angeville, le pauvre <strong>de</strong>Mr <strong>de</strong> Saussure <strong>de</strong>mandant l’aumône. Ou plusromantique, plus apprêté, une rencontre avecun couple d’anglais élégants.À cette série centrée sur la prouesse d’Henrietted’Angeville s’ajoute un portrait <strong>de</strong> son amie « trèschère », Henriette Rath. Celle-ci nous intéresse parun <strong>de</strong>stin féminin aussi remarquable que celui <strong>de</strong>son amie montagnar<strong>de</strong>. Douée pour le <strong>de</strong>ssin, elle<strong>de</strong>vint l’élève d’Isabey et créa avec <strong>de</strong>ux autresfemmes une académie d’art pour les jeunes filles.Exclue comme femme <strong>de</strong> la société <strong>de</strong>s Arts elleréussit néanmoins à se faire nommer « associéehonoraire » et contribua à réaliser le vœu <strong>de</strong> sonfrère, la création du futur musée Rath à Genève.Au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> la qualité artistique <strong>de</strong> ces feuillesinédites, c’est leur valeur historique et ethnographiquequi s’impose : tant pour l’histoire <strong>de</strong>la conquête <strong>de</strong>s cimes que pour celle <strong>de</strong> l’émancipationféminine par l’écriture et le sport.En acquérant ce lot <strong>de</strong> <strong>de</strong>ssins remarquables etsi importants pour l’histoire <strong>de</strong> la montagne, leDépartement <strong>de</strong> la Haute-<strong>Savoie</strong> poursuit l’œuvre<strong>de</strong> Paul Payot en l’enrichissant. <strong>La</strong> documentationet le travail <strong>de</strong> recherche qui continuent <strong>de</strong>se faire autour <strong>de</strong> cet album et du manuscritd’Henriette, aboutiront peut-être un jour à sapublication posthume.Corinne ChorierJules Hébert, <strong>de</strong> haut en bas, Glacier <strong>de</strong>s Bossons,passage d’une gran<strong>de</strong> crevasse – Pause <strong>de</strong>vant laPierre <strong>de</strong> l’Échelle – Un attelage particulier – Aprèsle Grand Plateau, crayon graphite.Alpiniste française,Henriette d’Angeville(1794-1871) estsurnommée la « fiancéedu Mont-Blanc ». En1838, elle <strong>de</strong>vient la<strong>de</strong>uxième femme àatteindre le sommet duMont-Blanc, après MarieParadis qui <strong>de</strong> sonpropre aveu avait étélittéralement traînéejusqu’à la cime en 1808.Insensible à toutes lesmises en gar<strong>de</strong>, elleprépare soigneusementson expédition,<strong>de</strong>ssinantelle-même son costumed’ascensionniste etchoisissant ses gui<strong>de</strong>s.Malgré un coup <strong>de</strong>fatigue durantl’ascension (elle avait<strong>de</strong>mandé à ses gui<strong>de</strong>s<strong>de</strong> l’ensevelir ausommet si elle venait àmourir en route), Mlled’Angeville arrive à lacime, s’y attar<strong>de</strong>, et sefait même hisser sur lesépaules <strong>de</strong> son gui<strong>de</strong>Couttet afin d’être sansconteste la femme laplus haute du mon<strong>de</strong> !Elle s’installe ensuite à<strong>La</strong>usanne et fréquenteles montagnes jusqu’àun âge avancé.Elle gravit ainsi encore21 sommets, dont le<strong>de</strong>rnier est l’Ol<strong>de</strong>nhorn(3122 m), dans lesAlpes bernoises, en1863.17
ARCHITECTUREVers le patrimoine<strong>de</strong> <strong>de</strong>mainle patrimoine est déterminé par soncontexte culturel. L’analyse <strong>de</strong>s élémentsconsidérés comme patrimoniaux renvoie systématiquementau contexte sociétal, aux préoccupationset à la culture d’une société donnéeau moment où elle traduit ses propres productionsen patrimoine.On retrouve ainsi parmi les éléments classés autitre <strong>de</strong>s Monuments historiques, aussi bien <strong>de</strong>sfortifications datant <strong>de</strong> la pério<strong>de</strong> féodale que <strong>de</strong>sbâtiments plus récents, emblématiques <strong>de</strong> savoirfaire,<strong>de</strong> tendances architecturales… qui révèlentla conception évolutive du patrimoine <strong>de</strong> notresociété. Ainsi ce n’est pas un hasard si, en <strong>Savoie</strong>,le château <strong>de</strong> Miolans à Saint-Pierre-d’Albigny quirappelle le passé féodal et l’histoire militaire, estclassé par arrêté du 16 mai 1944 à la fin <strong>de</strong> laSecon<strong>de</strong> Guerre mondiale alors que le chalet <strong>de</strong>la Gran<strong>de</strong> Ourse, construit en 1937 à Val-d’Isère,qui présente plutôt les débuts <strong>de</strong> l’aventure <strong>de</strong>sstations <strong>de</strong> sport d’hiver, est inscrit à l’Inventairesupplémentaire <strong>de</strong>s Monuments historiques en1994 (arrêté du 11 janvier 1994: salle à mangeret son décor), <strong>de</strong>ux ans après les Jeux Olympiquesd’hiver d’Albertville.Aujourd’hui, le contexte culturel se modifie. Lesdébats sur le changement climatique global ontdébuté dans les années 1980. Depuis, le thèmea pris une place <strong>de</strong> plus en plus prégnante dansles champs d’intérêt <strong>de</strong> la vie associative, <strong>de</strong>sintellectuels et <strong>de</strong>s dirigeants politiques. Cettemontée en puissance se retrouve à travers lanotion <strong>de</strong> « développement durable » définie en1987 par la commission mondiale <strong>de</strong> l’environnementet du développement, la déclaration <strong>de</strong>Rio sur l’environnement et le développement dumois <strong>de</strong> juin 1992, celle <strong>de</strong> Kyoto sur le développementdurable en 1993 et plus récemmentl’attribution du prix Nobel <strong>de</strong> la Paix à l’ancienVice-prési<strong>de</strong>nt Al Gore et aux membres <strong>de</strong>l’équipe du GIEC. Relayées par les médias, cespréoccupations ont inci<strong>de</strong>mment un impact surles visions du Mon<strong>de</strong> développées par lessociétés… et donc sur la culture.Ainsi, en matière d’architecture et d’urbanismeet à <strong>de</strong>s échelons plus locaux, <strong>de</strong>s initiatives <strong>de</strong>développement durable et <strong>de</strong> respect <strong>de</strong> l’environnement<strong>de</strong>viennent l’objet d’un intérêtcroissant. C’est le cas par exemple du quartierVauban à Freiburg Im Breisgau (<strong>La</strong>nd du Ba<strong>de</strong>-Wurtemeberg) en Allemagne. Ce quartier, dontl’origine est au confluent <strong>de</strong> plusieurs événements– événement nucléaire <strong>de</strong> Tchernobyl,cession <strong>de</strong> la caserne <strong>de</strong> Vauban par la Franceà l’Allemagne, développement d’un pôle solairepar la ville <strong>de</strong> Freiburg – se veut particulièrementexemplaire au regard <strong>de</strong> cette culturenaissante qui prône la performance énergétique<strong>de</strong>s bâtiments, l’économie d’espace, la mise enavant <strong>de</strong>s déplacements doux, l’utilisationd’énergie renouvelable… Pour <strong>de</strong>s raisons enpartie i<strong>de</strong>ntiques, le <strong>La</strong>nd du Vorarlberg enAutriche présente lui aussi <strong>de</strong>s réalisations similairesmais appliquées à un contexte plus alpinet moins urbain.<strong>La</strong> mise en œuvre <strong>de</strong> ces principes génère <strong>de</strong>sensembles urbanistiques spécifiques et <strong>de</strong>s architecturesparticulières qui participent <strong>de</strong> cetteculture naissante. Aujourd’hui, ils sont reconnuset visités par un public <strong>de</strong> plus en plus nombreuxet constituent les prémices du patrimoine <strong>de</strong><strong>de</strong>main.Bâtiment d’activitéet habitations, quartierVauban, Freiburg ImBreisgaü, Allemagne,Rolf Dish architecte.18
Fenêtres et panneaux solaires, Lycée Monge,Chambéry, Coopérim architecte.Albertville, école maternelle,Emmanuel Ritz Architecte.En la matière, la <strong>Savoie</strong> n’est pas en reste.Équipée dès 1978 d’un <strong>Conseil</strong> en Architecture,Urbanisme et Environnement, CAUE, elle disposeégalement <strong>de</strong> structures telle l’ASDER dont lamission est <strong>de</strong> promouvoir les énergies renouvelables,l’INES qui innove dans le solaire et lestockage <strong>de</strong> l’énergie qui peut en être extraite,l’Agence Écomobilité qui œuvre pour les déplacementsdoux et <strong>de</strong> nombreuses associations quientraînent la société savoyar<strong>de</strong> vers une mutationculturelle et comportementale. Et la prise<strong>de</strong> conscience <strong>de</strong>s enjeux concernant l’urbanismeet l’habitat <strong>de</strong> <strong>de</strong>main par la population s’accélèreet s’amplifie aujourd’hui.Dans le domaine <strong>de</strong> l’architecture et <strong>de</strong> l’urbanisme,le lancement <strong>de</strong> l’appel à projets: « Habitatdurable en <strong>Savoie</strong> » qui s’inscrit dans le cadre <strong>de</strong>la démarche « <strong>Savoie</strong> 2020 », impulsée par le<strong>Conseil</strong> général, et en continuité avec lespremières rencontres « Vers un nouvel habitat en<strong>Savoie</strong> » affiche clairement une volonté <strong>de</strong>repérer et <strong>de</strong> promouvoir les initiatives pertinenteset novatrices améliorant la qualité urbaineet environnementale <strong>de</strong> l’habitat. Le CAUE conforteet relaye ainsi les initiatives <strong>de</strong> particuliers et <strong>de</strong>collectivités qui fleurissent sur l’ensemble duterritoire départemental: maisons en KLH à Bellecombe-en-Baugeset à Montagnole, maisons enpaille basse consommation à Lescheraines et àVillard-d’Héry, lotissements bioclimatiques àChalles-les-Eaux, équipements solaires du lycéeMonge à Chambéry, mise en place d’une chaufferiebois à Saint-Alban-<strong>de</strong>s-Villars…Pour autant, l’élaboration <strong>de</strong> ce nouveau patrimoinearchitectural se confronte aux patrimoinesexistants. Même si certains documents d’urbanismesont incitatifs en la matière, tel celui <strong>de</strong>Montmélian, ils restent souvent restrictifs et <strong>de</strong>nombreux articles 11 <strong>de</strong>s POS ou PLU bloquentsouvent l’innovation et la conception d’écohabitat.Ces <strong>de</strong>ux aspects, d’un côté une volonté <strong>de</strong>répondre aux préoccupations contemporaineset <strong>de</strong> l’autre l’inadéquation <strong>de</strong>s règles encore envigueur, font <strong>de</strong> ces bâtiments <strong>de</strong>s précurseurs<strong>de</strong> la nouvelle culture environnementale qui se<strong>de</strong>ssine et à ce titre, peut-être les éléments dupatrimoine savoyard <strong>de</strong> <strong>de</strong>main.Cédrik ValetGIEC. Groupe d’expertsintergouvernementalsur l’évolution duclimat.ASDER. AssociationSavoyar<strong>de</strong> pour leDéveloppement <strong>de</strong>sÉnergies Renouvelables.INES. Institut National<strong>de</strong> l’Énergie Solaire.KLH. Panneauxstructuraux <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>sdimensions constitués<strong>de</strong> planches en boismassif, empilées encouches croisées à 90°et collées entre ellessur toute leur surface.Ces panneaux sont<strong>de</strong>stinés à la réalisation<strong>de</strong> planchers, mursporteurs, contreventements,supports <strong>de</strong>couverture… (définitiondu CSTB). Le KLH a étéinventé en Autriche.POS. Plan d’Occupation<strong>de</strong>s Sols.PLU. Plan Locald’Urbanisme.L’appel à projet Habitatdurable en <strong>Savoie</strong>,lancé par le <strong>Conseil</strong>général <strong>de</strong> la <strong>Savoie</strong>au mois <strong>de</strong> mai 2007prévoit entre autres <strong>de</strong>lever les obstacles quiempêchent généralementla réalisation<strong>de</strong>s opérationsinnovantes en matière<strong>de</strong> qualité urbaine et19<strong>La</strong>nslevillard, au secondplan, pont autoporté,Barbeyer & DupuisArchitecte – Au premierplan piscine, Chambre& Vibert architecte.environnementale<strong>de</strong> l’habitat. Il prévoitégalement unesélection <strong>de</strong> lauréats,une remise <strong>de</strong> prix etune publication <strong>de</strong>sprojets pour la fin <strong>de</strong>l’année 2007 et lecourant <strong>de</strong> l’année2008.
ANTIQUITÉS& OBJETS D’ARTVal d’Isère ,la redécouverte d’un patrimoineUn travail <strong>de</strong> recensement et <strong>de</strong> recherche a été effectué sur le patrimoine<strong>de</strong> Val d’Isère pendant le mois d’août 2007, révélant un certain nombred’objets mobiliers non protégés, à la fois œuvres d’art mais aussi témoinsdu passé <strong>de</strong> la commune.Bibliographie• Brigitte Alzieuet Éveline Alzieu-Martin,Val d’Isère, jadis etnaguère, <strong>La</strong> Fontaine <strong>de</strong>Siloé, coll. <strong>La</strong> chronique<strong>de</strong> l’Autrefois, 2002.• Marcel Charvin,Val d’Isère, Tignes,Albertville, En TarentaiseOlympique, 1988.• Marcel Charvin,Histoires… <strong>de</strong> Vald’Isère, Lyon, Éditionsdu CNRS, 1979.• F. Gex, Val d’Isère etla Haute-Tarentaise.Val d’Isère,Hôtel Parisien, 1922.Réputée surtout pour ses skieurs célèbreset sa station <strong>de</strong> sports d’hiver, hautlieu <strong>de</strong>s Jeux Olympiques <strong>de</strong> 1992, Val d’Isèrepossè<strong>de</strong> également une forte i<strong>de</strong>ntité transmisepar son histoire et offre un patrimoine méconnudont les vestiges, essentiellement <strong>de</strong>s édifices et<strong>de</strong>s objets religieux, restaient à redécouvrir.Commanditée par la commune <strong>de</strong> Val d’Isère etsuivie par la Conservation départementale <strong>de</strong>sAntiquités et Objets d’Art, cette mission <strong>de</strong> recensementavait pour objectif <strong>de</strong> dresser un « état<strong>de</strong>s lieux » du patrimoine avalin. Une inspectionrigoureuse <strong>de</strong>s édifices, ainsi que <strong>de</strong>s recherchesmenées aux archives communales et départementales,et auprès <strong>de</strong> la population, ont permisd’établir un inventaire précis du patrimoine <strong>de</strong>Val d’Isère et <strong>de</strong> constituer un fonds documentaire.Cette mission a révélé une trentaine d’objetsnon protégés, ainsi que <strong>de</strong>s bâtiments vernaculaires,chapelles, oratoires, croix, significatifs<strong>de</strong> l’histoire <strong>de</strong> la communauté avaline ettoujours présents malgré <strong>de</strong>s contraintes <strong>de</strong>conservation liées à la montagne.Cette commune <strong>de</strong> la Haute vallée <strong>de</strong> Tarentaise,très éclatée géographiquement, possè<strong>de</strong> <strong>de</strong>multiples hameaux et lieux-dits, qui, parfois àl’abandon aujourd’hui, étaient autrefois trèspeuplés et possédaient quasiment tous un lieu<strong>de</strong> culte. Leurs chapelles ont peu à peu disparu,emportées par les avalanches ou les inondationstorrentielles, ou bien ont périclité faute <strong>de</strong>revenus. Des objets provenant <strong>de</strong> ces édificesdisparus ont subsisté, répartis principalementdans l’église et dans quatre <strong>de</strong>s huit chapellesrestantes. Ces édifices ont régulièrement étérestaurés par les Avalins, protégeant au fil dutemps les objets qu’ils contenaient mais perdantpeu à peu leur intérêt cultuel. Ils sont aujourd’huil’objet d’un intérêt patrimonial.Le centre du village comprend l’église Saint-Bernard-<strong>de</strong>-Menthon, « témoin » <strong>de</strong> l’indépendanceparoissiale <strong>de</strong> la commune vis-à-vis <strong>de</strong>Tignes: en 1634, par décision pontificale, « <strong>La</strong>val<strong>de</strong>-Tignes» <strong>de</strong>vient en effet une paroisse indépendante.L’ancienne chapelle du XI e siècle estagrandie <strong>de</strong> 1635 à 1664, date <strong>de</strong> la constructiondu clocher, et transformée en église paroissiale.<strong>La</strong> majeure partie <strong>de</strong>s objets actuellementprotégés au titre <strong>de</strong>s Monuments historiques sontconservés ici, avec notamment le magnifiqueretable du chœur. Le recensement a notammentmis au jour une vieille cloche datée <strong>de</strong> « 16IX »,qui provient d’un édifice <strong>de</strong> culte non i<strong>de</strong>ntifié,ainsi qu’une dizaine d’objets, non encoreprotégés, présents dans la sacristie.<strong>La</strong> chapelle Saint-Roch ou chapelle <strong>de</strong>s Morts,construite au XVII e siècle, abrite un ensemblehétérogène <strong>de</strong> statues en bois polychrome etdoré <strong>de</strong>s XVII e , XVIII e et XIX e siècles, protégéesau titre <strong>de</strong>s Monuments historiques ou portéesau Répertoire départemental <strong>de</strong>puis 2004. Cesœuvres proviennent <strong>de</strong> différentes chapelles, etCi-<strong>de</strong>ssus, saint Jean,détail du tableau <strong>de</strong> lachapelle Saint-Jean-<strong>de</strong>s-Prés,sur le front <strong>de</strong>neige.À droite, chapelleNotre-Dame-<strong>de</strong>s-Neigesau Joseray.20
le travail <strong>de</strong> recherche documentaire effectué apermis <strong>de</strong> retrouver le lieu d’origine d’unedizaine d'entre elles. Deux statues ont pu êtreattribuées aux sculpteurs Clappier <strong>de</strong> Bessans etdatées <strong>de</strong> 1631 grâce à une inscription. Leurpolychromie d’origine se dissimule probablementsous le repeint apparent plus récent(secon<strong>de</strong> moitié du XVIII e ou début duXIX e siècle). Cette chapelle conserve également<strong>de</strong>s tableaux, protégés eux aussi <strong>de</strong>puis 2004,qui proviennent <strong>de</strong>s anciennes chapelles <strong>de</strong> lacommune.Située plus en amont <strong>de</strong> l’église, la chapelleSaint-Jean-<strong>de</strong>s-Prés, sur le front <strong>de</strong> neige actuel,contient un tableau <strong>de</strong> retable non protégé,représentant l’Enfant Jésus, saint Joseph (tenantune fleur <strong>de</strong> lys) et saint Jean (avec la coupe auserpent). Cette œuvre est d’un format carré <strong>de</strong>plus d’un mètre cinquante <strong>de</strong> côté. On peut ladater entre la secon<strong>de</strong> moitié du XVIII e siècle etle début du XIX e siècle.<strong>La</strong> chapelle Notre-Dame-<strong>de</strong>s-Neiges, située auhameau du Joseray, domine la vallée du Manchetqui part en direction du col <strong>de</strong> la Rocheure. Cetédifice relativement spacieux présente unelongue nef avec une voûte en berceau, terminéepar une absi<strong>de</strong> qui ne comporte aucune décoration,mettant ainsi en évi<strong>de</strong>nce le grand tableaudu chœur, une Descente <strong>de</strong> Croix. Cette peinture,non signée et non datée, est d’une factureinspirée <strong>de</strong>s caravagesques, avec une certainemaîtrise du clair-obscur et une composition inhabituellepour ce genre <strong>de</strong> représentation, cettebelle peinture, probablement du XVIII e siècle,présente un intérêt artistique certain. Le cadreest également très travaillé, on retrouve ainsi <strong>de</strong>straces <strong>de</strong> polychromie jaune et bleu, ainsi que<strong>de</strong>s motifs végétaux (palmettes…) en relief. Lesoubassement du tableau, composé <strong>de</strong> 3 gradinsen bois traités comme le cadre laissent penserqu’il s’agit du tableau central d’un ancien retable<strong>de</strong> chapelle qui <strong>de</strong>vait comprendre un autel.Posés <strong>de</strong> part et d’autre du tableau, <strong>de</strong>ux chan<strong>de</strong>lierssculptés en bois avec <strong>de</strong>s traces <strong>de</strong> bleuet d’or, d’une trentaine <strong>de</strong> centimètres <strong>de</strong> haut,sont également <strong>de</strong>s objets intéressants <strong>de</strong> la findu XVII e ou du XVIII e siècle. Ils présentent uncertain travail <strong>de</strong> menuserie, avec une base entrépied et une inscription au centre. <strong>La</strong> chapelleSainte-Ma<strong>de</strong>leine au Fornet, le hameau le plusà l’est du village, conserve quelques objets dontun reliquaire dédié à saint Joseph <strong>de</strong> Léonessa(1556-1612), un capucin béatifié en 1737 puiscanonisé en 1746, une pièce intéressante par sonrareté. Cet édifice, détruit et reconstruit à quatrereprises dans le hameau, est très bien documentépar les livres <strong>de</strong> l’abbé Charvin, véritablemémoire du village, décédé il y a quelquesannées.Ce recensement a permis la prise en compted’un patrimoine vernaculaire constitutif <strong>de</strong> l’histoire<strong>de</strong> la commune <strong>de</strong> Val d’Isère. Son intérêtdocumentaire permettra d’enrichir la mémoirecollective et d’offrir un premier niveau <strong>de</strong> protectionà ces objets dans la perspective d’un projet<strong>de</strong> valorisation patrimoniale.Manuel <strong>La</strong>snierDescente <strong>de</strong> Croix, chapelleNotre-Dame-<strong>de</strong>s-Neiges au Joseray.ANTIQUITÉS& OBJETS D’ARTCloche du début duXVII e siècle, chœur <strong>de</strong>l’église Saint-Bernard<strong>de</strong>-Menthon.Chan<strong>de</strong>liers en boismonochrome bleu etdorure, chapelleNotre-Dame-<strong>de</strong>s-Neigesau Joseray.21
ANTIQUITÉS& OBJETS D’ARTGabriel Dufouret saint François <strong>de</strong> Salesen MaurienneUn artiste au service d’un culte1. Béatifié par le papeAlexandre VII le 28décembre 1661,canonisé le 19 avril1665, il est nommédocteur <strong>de</strong> l’Églisele 16 novembre 1877.2. Quelques œuvrespeintes, à l’église <strong>de</strong>Passy, <strong>de</strong> Collongessous-Salèveet <strong>de</strong>Bessans par exemple,associent l’image <strong>de</strong>saint François <strong>de</strong> Salesà ce bienheureux.Il est vrai que François<strong>de</strong> Sales a beaucoupœuvré pour sa canonisationmais en vain.3. Cf. Travaux <strong>de</strong> laSociété d’Histoire <strong>de</strong>Maurienne, <strong>de</strong>uxièmesérie, Tome VI –<strong>de</strong>uxième partie,pp. 32 à 39.4. Pignol : saint François<strong>de</strong> Sales, saint Étienne,Saint Antoine Abbé àSaint Jean <strong>de</strong> Belleville.Jean-Baptiste Jomard :Vierge, saint François<strong>de</strong> Sales et saint Gratà <strong>La</strong> Chambre, 1682.Augustin Bertrand :Notre Dame, saintFrançois <strong>de</strong> Sales, saintSébastien, saint Rochet saint Dominique àMontpascal, 1749.5. Un portrait donnépar Gabriel Rossillon<strong>de</strong> Bernex (1657-1734)à l’église Saint-Maurice,membre d’une <strong>de</strong>sfamilles les plusinfluentes <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>,évêque <strong>de</strong> Genève en1697.la dynastie <strong>de</strong>s peintres Dufour a faitl’objet <strong>de</strong> plusieurs communications.Gabriel (1640-1721) est celui qui a laissé le plusgrand nombre d’œuvres dans les églises et chapelles<strong>de</strong> Maurienne. Parmi celles-ci, quatre mettenten scène saint François <strong>de</strong> Sales (1567-1622),originaire <strong>de</strong> Thorens. Prince-évêque <strong>de</strong> Genève,fondateur avec Jeanne <strong>de</strong> Chantal <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong>la Visitation Sainte Marie en 1610, écrivain réputépour son Introduction à la vie dévote en 1608 etson Traité <strong>de</strong> l’Amour <strong>de</strong> Dieu paru en 1616,c’est, sans nul doute, le saint le plus connu enHaute-<strong>Savoie</strong> 1 . Quel est le fil conducteur entrel’évêque <strong>de</strong> la Réforme catholique et le peintrebaroque, parangon artistique <strong>de</strong> la Maurienne?Reçu bourgeois <strong>de</strong> la ville d’Annecy, le 2 octobre1627 en échange d’un « pourtrait tout au longdu bienheureux François <strong>de</strong> Sales, vivant en ceterrestre mon<strong>de</strong>, évesque et prince <strong>de</strong> Genève,pour mettre dans l’hostel <strong>de</strong> ville », le père <strong>de</strong>Gabriel, Pierre, dit l’Ancien, est contemporain<strong>de</strong> François <strong>de</strong> Sales. C’est en revenant vivre enMaurienne que son fils, Gabriel, peint quatretableaux pour les églises <strong>de</strong> Maurienne.Le plus ancien et le plus intéressant, le SaintSuaire, se situe dans l’église <strong>de</strong> Saint-Michel-<strong>de</strong>-Maurienne. Peint en 1668 d’après la signature aubas du tableau « G. Dufour pingebat 2 M […],1668 », ce tableau (ci-<strong>de</strong>ssous) résume l’ensemble<strong>de</strong>s thèmes tri<strong>de</strong>ntins et dénote unerecherche <strong>de</strong> reconnaissance spirituelle <strong>de</strong> la part<strong>de</strong> la Maison <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>. En effet, à défaut d’onctionsacrée comme la plupart <strong>de</strong>s dynastiesroyales, les ducs ont trouvé d’autres symboles:le patronage <strong>de</strong> l’abbaye <strong>de</strong> Saint-Mauriced’Agaune,comme continuité régalienne entre leroyaume <strong>de</strong> Bourgogne et le comte <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>,Hautecombe avec le comte Aimon le Pacifique,fondateur <strong>de</strong> la Chapelle <strong>de</strong>s princes, instigateurd’un véritable programme architectural et artistiqueautour <strong>de</strong> l’ossuaire-nécropole qui, par lasuite, jouera un grand rôle historiographique surfond <strong>de</strong> légitimité politique. L’acquisition <strong>de</strong> larelique du Saint-Suaire est le <strong>de</strong>rnier acte <strong>de</strong> cettequête. Privée et ambulante à l’origine, suivant lacour dans ses pérégrinations, elle est déposée àplusieurs reprises dans la chapelle du château<strong>de</strong>s ducs <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>. <strong>La</strong> bulle papale <strong>de</strong> 1466mentionne pour la première fois la Sainte-Chapelle du Saint-Suaire et un important pèlerinagese développe alors avec ostentationspubliques. Après l’errance <strong>de</strong> 1536-1559 entreNice et Verceil puis le transfert <strong>de</strong> la capitaleducale <strong>de</strong> Chambéry à Turin en 1563, la reliquerejoint définitivement Turin en 1578. Dès cemoment, elle <strong>de</strong>vient un sujet <strong>de</strong> prédilectionpour d’autres peintres tel Gaspard Balduino en1660 dans une composition similaire pour lachapelle <strong>de</strong>s Pénitents à Nice.Par réaction aux thèses hérétiques, le concile <strong>de</strong>Trente met en exergue le culte marial et celui<strong>de</strong>s saints. <strong>La</strong> composition <strong>de</strong> cette toile met enscène ces <strong>de</strong>ux thèmes. Le registre inférieurregroupe six saints parmi les plus célèbres : àgauche, saint Pierre et saint Sébastien. Le plussouvent dévêtu dans un traitement sculptural àl’antique, celui-ci est représenté ici dans la tenue<strong>de</strong> centurion romain. Ce choix pictural n’est pasanodin: fini l’exaltation <strong>de</strong>s beautés du corps, lanudité n’est plus la bienvenue. Les canons esthétiquesten<strong>de</strong>nt à revêtir les personnages <strong>de</strong>costumes <strong>de</strong> couleurs et <strong>de</strong> tissus somptueuxpour donner une image plus belle et plus riche<strong>de</strong> l’homme fait par Dieu. En face <strong>de</strong> lui, saintFrançois <strong>de</strong> Sales, auréolé du nimbe <strong>de</strong> sa canonisationtoute récente (1665) est en contemplation,bras croisés. <strong>La</strong> tête, inclinée dans unraccourci, <strong>de</strong>vient une position habituelle queGabriel Dufour utilise pour ce saint dans tousses tableaux. Elle fait référence à certaines têtesdu peintre El Greco notamment dans son Enterrementdu Comte d’Orgaz. Près <strong>de</strong> lui, saintAntoine porteur du Tau, prie dans une attitu<strong>de</strong>inspirée du Saint François <strong>de</strong> Paule en prières<strong>de</strong> Simon Vouet gravé par Karl Audran d’aprèsCharles Mellin vers 1637. Le linceul laissant bienvoir les plaies, le torse et le dos du Christ délimitela partie supérieure. De gauche à droite, leBienheureux Amédée IX (1435-1472) 2 .Acôté<strong>de</strong> lui, sainte Anne et sainte Agathe, invoquées22
contre les incendies encadrent la Vierge. À l’extrêmedroite, un moine à la fleur <strong>de</strong> lys faitpenser à saint Antoine <strong>de</strong> Padoue.On rencontre un autre tableau <strong>de</strong> 1682, venantprobablement d’une chapelle, dans l’église <strong>de</strong>Chateauneuf. Il représente une Vierge à l’Enfantentourée <strong>de</strong> saints: saint François <strong>de</strong> Sales, saintAntoine <strong>de</strong> Padoue, saint Louis et saint Antoine(détails en vignettes). À partir du XVI e siècle,une évolution picturale donnant <strong>de</strong> nouvellescompositions pyramidales, souligne bien la placeprivilégiée <strong>de</strong> la Vierge au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> tous lessaints.À Valloire, un troisième tableau figure saint Pierreet saint François <strong>de</strong> Sales en adoration <strong>de</strong>vant uneVierge couronnée (ci-contre, à droite). Le donateur,Pierre Rapin regardant ostensiblement lespectateur, s’est fait représenté dans le coin inférieurdroit. Une inscription atteste cette volonté:« R d M e Clau<strong>de</strong> Piere Rapine Fondateur a fait fairece tableau l’an 1682 ». Une récente restaurationpar Isabelle Rollet en 2004 fait apparaître, en basà droite, une secon<strong>de</strong> signature « Dufour 1684 ».Enfin, la chapelle <strong>de</strong> Beaurevers à Montaimontabrite une Pietà avec saint François <strong>de</strong> Sales etsaint Jean Baptiste datée 1683 (ci-<strong>de</strong>ssus).Que peut-on retenir <strong>de</strong> cette série? Tout d’abordl’importance <strong>de</strong>s représentations <strong>de</strong> saint François<strong>de</strong> Sales en Maurienne. Il est le seul saint<strong>de</strong> la pério<strong>de</strong> mo<strong>de</strong>rne avec saint CharlesBorromée et sainte Thérèse d’Avila à occupercette place <strong>de</strong> prédilection dans les œuvrespicturales. Néanmoins, ce n’est pas l’écrivain oule fondateur d’ordre comme dans tant <strong>de</strong> représentationsen Haute-<strong>Savoie</strong> que les commanditairesont souhaité. Il faut donc trouver ailleurssa notoriété. François <strong>de</strong> Sales connaît bien cettevallée, couloir d’accès au Piémont. Il la traverseà plusieurs reprises : en 1588, lorsqu’il termineses étu<strong>de</strong>s à Padoue, puis en 1598, lors <strong>de</strong> sonvoyage à Rome après sa mission victorieuse dansle Chablais, encore en 1613, lors d’un pèlerinagesur le tombeau <strong>de</strong> saint Charles Borromée etenfin en 1622, se rendant à Pignerol pourprési<strong>de</strong>r un Chapitre <strong>de</strong>s Feuillants. Mais sa réputation<strong>de</strong> sainteté gagne cette population <strong>de</strong>montagne grâce à un <strong>de</strong> ses miracles : la résurrection<strong>de</strong> Jérôme Genin <strong>de</strong> Sainte-Hélène-du-<strong>La</strong>c, le 29 avril 1623. Ce miraculé <strong>de</strong>vient curé<strong>de</strong> <strong>La</strong> Rochette et répand son culte dès la canonisation<strong>de</strong> François 3 . Au même titre que ceuxqui l’entourent, le saint, thaumaturge et protecteur,invoqué habituellement pour les dangersen montagne, est bien l’objet <strong>de</strong> la comman<strong>de</strong>passée à Gabriel Dufour.À défaut <strong>de</strong> créativité plastique, la qualité <strong>de</strong> sesœuvres montre le talent <strong>de</strong> copiste <strong>de</strong> cet artisteà partir <strong>de</strong> modèles fournis par ses frères,peintres à la cour <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong> ou <strong>de</strong> gravuresvendues par les colporteurs. <strong>La</strong> dévotion <strong>de</strong> cetartiste-artisan, probablement bon catholique,s’inscrit dans le <strong>de</strong>ssin <strong>de</strong>s mains. Selon les saints,elles représentent toutes les manières <strong>de</strong> prier.Celles <strong>de</strong> saint François <strong>de</strong> Sales, longues etfines, semblent inspirées <strong>de</strong> la Ma<strong>de</strong>leine pénitente<strong>de</strong> Philippe <strong>de</strong> Champaigne. Gabrielcontribue ainsi au culte <strong>de</strong> saint François <strong>de</strong> Salesen Maurienne et influence les artistes contemporainsdans leur représentation <strong>de</strong> ce saint 4 .Cetravail <strong>de</strong> recherche iconographique met en reliefune manière picturale permettant, vraisemblablement,l’attribution à cet artiste d’œuvres nonsignées, et l’élargissement du champ d’influence<strong>de</strong>s Dufour 5 .Josette CurtilANTIQUITÉS& OBJETS D’ARTMémoire et patrimoine :les représentations <strong>de</strong> saintFrançois <strong>de</strong> Sales dans lesPays <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>, XVII e -XIX esiècle, thèse, CRIPHA,Université Pierre Mendès-France, Grenoble.23
PATRIMOINEINDUSTRIELCi-<strong>de</strong>ssous, vue <strong>de</strong>l’usine d’aluminium<strong>de</strong> Saint-Jean-<strong>de</strong>-Maurienne dans sonenvironnement :la conduite forcéeamenait la ressourcemotrice sur le lieu<strong>de</strong> production.Début du XX e siècle.ADS 2Fi 5276.Regards industriel et thermalVers une connaissancepatrimoniale <strong>de</strong> l’eau<strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux <strong>Savoie</strong>Conscients <strong>de</strong>s enjeux <strong>de</strong> la gestion <strong>de</strong> l’eau dans leurs territoires montagnards,zones essentielles en terme <strong>de</strong> ressource, les départements <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong> et <strong>de</strong> Haute-<strong>Savoie</strong> œuvrent <strong>de</strong>puis plusieurs décennies et en partenariat avec d’autresstructures pour assurer à tous une eau <strong>de</strong> qualité et <strong>de</strong> quantité appréciables etappréciées, pour tous les usages et en travaillant à leur restitution aux milieuxnaturels. Ces utilisations diverses se combinent avec une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> croissante<strong>de</strong>s usagers et avec une population en constante augmentation. Ces enjeuxsocio-économiques entrent en confrontation avec ceux <strong>de</strong>s milieux naturelsdont l’équilibre est à préserver. Fort <strong>de</strong> ce constat, les Directions <strong>de</strong>s AffairesCulturelles <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux départements ont souhaité réaliser une étu<strong>de</strong> prévisionnelledont l’objectif serait d’analyser dans une perspective historique les captages àusages thermaux et industriels <strong>de</strong> l’eau. Élodie Kohler1. Barbier (V),« <strong>La</strong> <strong>Savoie</strong> industrielle »,in Mémoires <strong>de</strong> l’Académie<strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>, t.Iet t.II, Chambéry, 1875.2. Source DRIRE Rhône-Alpes.À droite, usine Carpanoet Pons à Cluses avec sonaménagement, au fil <strong>de</strong>l’eau, sur l’Arve. <strong>La</strong> prised’eau comprend uneretenue avec <strong>de</strong>s écluses.Début du XX e siècle.ADHS 8Fi CLUSES 06.24le patrimoine lié à l’eau dispose d’uneimage idéalisée, un moulin avec sa rouesitué sur le bord d’une rivière, image pittoresquemais néanmoins réelle pour les <strong>de</strong>ux <strong>Savoie</strong>.Toutefois, l’exploitation <strong>de</strong> la ressource « eau » aété largement structurée <strong>de</strong>puis le début duXIX e siècle par l’industrie, et dans une moindremesure, par le thermalisme. L’eau a toujours tenuune place prépondérante dans le développementéconomique <strong>de</strong>s Alpes 1 . À titre indicatif, à cejour, un quart <strong>de</strong> l’eau est exploité pour l’industrie2 .Les conseils généraux <strong>de</strong> la <strong>Savoie</strong> et <strong>de</strong> laHaute-<strong>Savoie</strong>, sous l’égi<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’Assemblée <strong>de</strong>sPays <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>, ont lancé une étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> programmationd’un inventaire sur les prises d’eau àusage thermal et industriel. Cette ouverturethématique s’insère dans la mouvance d’i<strong>de</strong>ntification,<strong>de</strong> connaissance du patrimoine industrielet d’une volonté <strong>de</strong> réflexion sur l’utilisationd’une ressource périssable.Une notion patrimoniale contemporaineLe terme « prise d’eau » peut paraître scientifiqueet difficilement i<strong>de</strong>ntifiable. Il comprend tous leséléments permettant <strong>de</strong> capter et <strong>de</strong> canaliser <strong>de</strong>l’eau par <strong>de</strong>s moyens simples ou complexes telsque <strong>de</strong>s biefs, <strong>de</strong>s barrages, etc.L’étu<strong>de</strong> s’oriente sur les sources et les rivières,du point d’émergence jusqu’à l’utilisation. Unaménagement hydroélectrique illustre parfaitementce focus. Ainsi, le champ d’étu<strong>de</strong> couvrele captage <strong>de</strong> la rivière ou <strong>de</strong> la source, avec sonstockage en retenue ou non, puis l’i<strong>de</strong>ntification<strong>de</strong> son transport, en conduite forcée ou non,jusqu’à son utilisation comme force motrice dansune turbine.Une méthodologie <strong>de</strong> travail à construireLe premier axe <strong>de</strong> cette étu<strong>de</strong> est <strong>de</strong> définir et<strong>de</strong> quantifier les ressources documentaires surle sujet (Archives départementales, <strong>de</strong>s servicesadministratifs publics, privés, ouvrages spécialisés,etc). En parallèle, le travail <strong>de</strong> fond définitle niveau d’exigence <strong>de</strong>s données à collecter lors<strong>de</strong> l’inventaire. Ensuite, la fiche d’inventaire seconstruit autour <strong>de</strong> termes techniques et <strong>de</strong>scriptifs,parallèlement à l’i<strong>de</strong>ntification <strong>de</strong>s sites àinventorier. Par ailleurs, le calendrier <strong>de</strong> travailet le prévisionnel humain et financier sontélaborés. Enfin, le <strong>de</strong>rnier point <strong>de</strong> réflexion s’estorienté sur la restitution <strong>de</strong>s données collectées,partie visible <strong>de</strong> l’inventaire.
Un inventaire , un outil <strong>de</strong> travail interactifLe travail <strong>de</strong> recensement du patrimoine hydraulique<strong>de</strong>vrait enrichir l’étu<strong>de</strong> thématique. L’enjeu<strong>de</strong> cet exercice, croisant documentation et terrain,serait d’ouvrir le cercle <strong>de</strong>s spécialistes. En ce sens,une base <strong>de</strong> données, complétée par un Systèmed’Information Géographique (SIG), serait créée.Ainsi, chaque acteur du domaine <strong>de</strong> l’eau ou unparticulier pourrait trouver <strong>de</strong>s informations techniqueset historiques afin <strong>de</strong> connaître l’état <strong>de</strong> laressource « eau » dans les <strong>de</strong>ux <strong>Savoie</strong>. Cettevolonté d’interaction entre professionnels etnéophytes amorcerait une dynamique sur lepartage <strong>de</strong>s informations et lancerait la réflexion.En complément <strong>de</strong> cette approche, une séried’étu<strong>de</strong>s ciblées serait réalisée pour mieuxcomprendre les territoires, les bassins versants oules typologies d’implantations industrielles. Cetravail, prolongement <strong>de</strong> l’inventaire proprementdit, permettrait <strong>de</strong> répondre à <strong>de</strong>s besoins ponctuels<strong>de</strong> collectivités territoriales ou d’acteurs dupatrimoine (associations <strong>de</strong> sauvegar<strong>de</strong> et <strong>de</strong> valorisation,musées, centres d’interprétation, maisonsdu patrimoine). Ce <strong>de</strong>rnier point montre bienl’étendue que peut recouvrir un inventaire dupatrimoine: savoir historique, aménagement duterritoire, valorisation du patrimoine, développementdurable…Cette étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> préfiguration a ainsi pour objectif<strong>de</strong> faire émerger la viabilité et l’intérêt d’un telinventaire et <strong>de</strong> définir les potentialités d’exploitation<strong>de</strong>s données, dans un contexte économiqueen mouvement et dans une perspectivepatrimoniale <strong>de</strong> connaissance et <strong>de</strong> valorisation.Yannick MilleretPATRIMOINEINDUSTRIEL<strong>La</strong> carte propose undécoupage schématique<strong>de</strong>s bassins versants<strong>de</strong> <strong>Savoie</strong> et <strong>de</strong> Haute-<strong>Savoie</strong>. Elle illustre ladualité entre lesdécoupages administratifset la logiquegéographique. Deuxexemples sont présentssur cette carte, lesbassins du « Léman »et du « Rhône et petitsaffluents » sont chacunscindé en trois espaces.Ce constat confirmel’intérêt d’une démarched’inventaire sur les <strong>de</strong>uxterritoires savoyards.Établissementthermal <strong>de</strong> laBauche-les-Bains.ADS 2Fi 7379.<strong>La</strong> conduite autoportante <strong>de</strong> l’usine d’aluminium<strong>de</strong> Saint-Jean-<strong>de</strong>-Maurienne. ADS 2Fi 5275.Établissement thermal<strong>de</strong> Saint-Gervais-les-Bains au premier planet l’hôtel au second,photographie <strong>de</strong>puisle Bon Nant.Début du XX e siècle.ADHS 8Fi STGERVAIS 064.25
PATRIMOINEINDUSTRIELFemme papillon, aluminiummoulé et ciselé,style Art nouveau(1895-1905), sculpteurHenryk Kosso wsky leJeune (1855-1921).Collection Jean Plateau–IHA – © photopassion.Ouverture <strong>de</strong> l’Espace Aluà Saint-Michel-<strong>de</strong>-Mauriennepremier musée au mon<strong>de</strong> entièrement dédié à l’AluminiumSitué au cœur <strong>de</strong> la vallée <strong>de</strong> l’Aluminium qui a vu naître à la fin duXIX e siècle l’industrialisation <strong>de</strong> ce métal, l’Espace Alu après plusieursannées <strong>de</strong> mobilisation, d’engagement et <strong>de</strong> travail a ouvert ses portesle 29 octobre <strong>de</strong>rnier.HistoriqueEn 1992, <strong>de</strong>s passionnés d’histoire locale fon<strong>de</strong>ntl’AMMA (Association du Musée Mauriennais <strong>de</strong>l’Aluminium) dans le but <strong>de</strong> sauvegar<strong>de</strong>r la mémoireindustrielle <strong>de</strong> la vallée en réalisant uncentre d’interprétation. Pendant plusieurs années,l’association récupère divers objets et documentsavant <strong>de</strong> chercher un porteur <strong>de</strong> projets. <strong>La</strong> quêteest longue, ce n’est qu’en 1999, après diversrefus, que la commune <strong>de</strong> Saint-Michel-<strong>de</strong>-Mauriennerelève le défi.Escalier <strong>de</strong>saccumulations.ContactEspace AluPlace <strong>de</strong> l’Église73140 Saint-Michel-<strong>de</strong>-Mauriennetél.04 79 56 69 59OuvertureEn pério<strong>de</strong> scolaire:mercredi, vendredi etsamedi <strong>de</strong> 14h à 18hPendant les vacancesscolaires, zones A, B, C(Toussaint, Noël, hiver,Pâques) : du lundi auvendredi <strong>de</strong> 14h à 18hJuillet / août: tous lesjours <strong>de</strong> 10h à 12h30et <strong>de</strong> 14h à 18h30Fermeture annuelleDe mi-novembre àmi-décembre (sauf cetteannée), les 1 er janvier,1 er mai et 25 décembre.Groupes et scolaires:tous les jours surréservationTarifsAdulte 5 eRéduit 4 eJeune 3 eEnfant – 7 ans: gratuit<strong>La</strong> commune<strong>de</strong> Saint-Michel-<strong>de</strong>-Maurienneprend la maîtrise d’ouvrageEn 2002, la mairie constitue un comité scientifique.Elle est rejointe par le Conservatoire National<strong>de</strong>s Arts et Métiers, l’Institut pour l’Histoire<strong>de</strong> l’Aluminium, la Conservation Départementaledu Patrimoine, le CCSTI <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>, l’UsineAlcan <strong>de</strong> Saint-Jean-<strong>de</strong>-Maurienne, l’AssociationSolid’Art, l’AMMA et une médiatrice scientifique(Florence Hachez-Leroy). Une étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> faisabilitéest réalisée par un cabinet <strong>de</strong> programmation(Abaque), le bâtiment <strong>de</strong> l’ancien presbytèreprès <strong>de</strong> l’église est retenu. En juin 2003, afin<strong>de</strong> suivre le projet, <strong>de</strong> chercher <strong>de</strong>s subventionset <strong>de</strong> préparer la collection du futur musée unechargée <strong>de</strong> mission est recrutée. En 2004, uncabinet d’architecture (Bechetoille) et un scénographe(Pig Images) sont retenus et les travauxsont engagés en avril 2006.Le temps <strong>de</strong>s objets.Espace Alu, Musée <strong>de</strong> l’Aluminium,place <strong>de</strong> l’Église à Saint-Michel-<strong>de</strong>-Mauriennemuseealu.stmichel<strong>de</strong>maurienne@wanadoo.fr600 m 2 d’explications et d’expositionsLe 29 octobre <strong>de</strong>rnier les premiers visiteurs ontpu découvrir le site. Du point <strong>de</strong> vue architectural,le bâtiment visuellement marquant s’intègreharmonieusement avec l’environnement extérieur.<strong>La</strong> faça<strong>de</strong> est recouverte d’un enduit couleurbauxite et le <strong>de</strong>rnier niveau surélevé d’un mètreest recouvert <strong>de</strong> vantelles en aluminium.L’intérieur est en lumière contrôlée, les fenêtressont obstruées pour permettre <strong>de</strong>s effets d’éclairages.L’espace d’exposition se répartit sur 3niveaux <strong>de</strong> 200 m 2 chacun, agencés tout enron<strong>de</strong>urs et courbes. Beaucoup <strong>de</strong> soins ont étéapportés à la scénographie et au contenu per -mettant une immersion totale dans le mon<strong>de</strong>industriel explicité par différents niveaux <strong>de</strong>lectures s’adaptant aux visiteurs. Ce centre d’interprétationludique et interactif retraçe l’aventuremondiale et locale <strong>de</strong> l’aluminium sous tousses aspects (scientifique, économique, industriel,culturel et social) et intègre également une bellecollection d’objets et d’outils.Un trait d’unionentre l’industrie et le tourismeLes objectifs <strong>de</strong> l’Espace Alu sont multiples:• conserver la mémoire du patrimoine industrielet i<strong>de</strong>ntitaire <strong>de</strong> la Maurienne.• mettre en valeur une collection <strong>de</strong> 3000 photos,900 objets <strong>de</strong> fabrication, 1500 objets du quotidienainsi que <strong>de</strong>s témoignages oraux pour <strong>de</strong> -venir à long terme un centre documentaire <strong>de</strong>référence.• être une « locomotive » <strong>de</strong> valorisation touristiquedu canton.• donner une image mo<strong>de</strong>rne et dynamique <strong>de</strong>la ville <strong>de</strong> Saint-Michel-<strong>de</strong>-Maurienne en espérantquelques retombées commerciales.Carine Bunel26
Notes <strong>de</strong> lectureL I V R E SSeigneurie, Féodalité etNoblesse en Mauriennedu XI e au XVIII e siècle,Philippe Demario, Sociétéd’Histoire et d’Archéologie<strong>de</strong> Maurienne, 2006, 24 eA l’occasion <strong>de</strong> ses 150ans, la SHAM publie unimportant travail <strong>de</strong>synthèse sur la féodalité etles familles nobles <strong>de</strong>Maurienne du moyen-âgeau XVIII e siècle. Unouvrage qui fait écho auxrecherches passées <strong>de</strong> laSHAM tout en leur ouvrant<strong>de</strong> nouvelles pistes commel’explique Pierre Dompnieren début <strong>de</strong> volume. Aprèsun rapi<strong>de</strong> tour d’horizon<strong>de</strong>s origines <strong>de</strong> la féodalitéau haut moyen-âge, lapremière partie <strong>de</strong> ce livreanalyse les droits féodaux,la noblesse et ses pouvoirsdans un contexte <strong>de</strong>rivalité entre les grandsseigneurs <strong>de</strong> Maurienneque sont le comte <strong>de</strong><strong>Savoie</strong>, l’évêque et lesabbayes <strong>de</strong> <strong>La</strong> Novalaise etSaint-Michel-<strong>de</strong>-la-Cluse.Du début <strong>de</strong> l’ère féodaleau XI e siècle, à sondélitement au XVIII e siècle,tous les aspects du pouvoirseigneurial sont abordés.Une secon<strong>de</strong> partiepropose une approchesérielle <strong>de</strong>s familles nobleset <strong>de</strong>s seigneuriesecclésiastiquesmauriennaises.Histoire <strong>de</strong>l’enseignementsecondaire à Chambéry1564-2006, FrancisStefanini,2007,17 eFrancis Stefanini, membre<strong>de</strong> l’Académie <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>,a déjà livré un ouvrageintitulé <strong>La</strong> naissance <strong>de</strong>sécoles primaires àChambéry 1860-1914.Lui faisant suite, il publieaujourd’hui une Histoire <strong>de</strong>l’enseignement secondaire<strong>de</strong> Chambéry – 1564-2000.Il s’agit d’un ouvrage <strong>de</strong>référence qui compile <strong>de</strong>ssources documentairesimportantes, il en est pourpreuve l’importantebibliographie mentionnée.Au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> l’histoire <strong>de</strong>chaque établissementsecondaire <strong>de</strong> Chambéry,l’auteur replace son proposdans les contextesparticuliers <strong>de</strong> l’histoiregénérale <strong>de</strong> l’enseignementen duché <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong> etroyaume <strong>de</strong> Sardaigne,puis <strong>de</strong> l’enseignement enFrance impériale à partir<strong>de</strong> 1860 ou républicaineaprès 1870. Il parvientainsi à brosser une histoiresynthétique <strong>de</strong>l’enseignement général et<strong>de</strong>s établissementssecondaires <strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>. Sontainsi traités successivementl’enseignement secondairemasculin, l’enseignementsecondaire féminin,l’enseignement secondairetechnique et professionnel,l’enseignement agricole,l’institution <strong>de</strong>s sourds <strong>de</strong>Cognin, et pour clorel’étu<strong>de</strong>, l’enseignementsecondaire privé.Les fortificationsfrançaises du Mont-Cenis1890-1945, Turra, Mont-Froid, Sollières, Revetset Arcellins,<strong>La</strong>urent Demouzon,2007, 34 eCet ouvrage richementdocumenté présente lesystème défensif françaismis en place <strong>de</strong> 1890 à1940 autour du col duMont-Cenis pour protégerce passage clef <strong>de</strong> laMaurienne. Il s’agit d’unehistoire profondémenthumaine et vivante dans lamesure où le récit s’appuiesur les témoignages« d’anciens ». L’épopée <strong>de</strong>la construction <strong>de</strong> lacaserne Napoléon <strong>de</strong><strong>La</strong>nslebourg, <strong>de</strong>sbaraquements d’altitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>la Turra, puis du fort dumême nom, <strong>de</strong>s abris duPas <strong>de</strong> la Beccia et duposte <strong>de</strong> Sollières prennentvie à cette évocation.L’auteur s’appuie sur <strong>de</strong>nombreux documentshistoriques dont 221photographies anciennesqui nous permettent <strong>de</strong>relier le vécu et l’écrit àl’image. <strong>La</strong> vie quotidienne<strong>de</strong> l’Armée <strong>de</strong>s Alpes,ru<strong>de</strong>, sans être austère estici relatée en détail. Desanecdotes sont racontéesdont celle du fameux chienFlambeau, mascotte <strong>de</strong>stroupes alpines dans lesannées trente. Les combatsacharnés <strong>de</strong> la <strong>de</strong>rnièreguerre mondiale sontretracés avec précision etillustrés par uneiconographique inédite.En conclusion, uneréflexion sur la fin <strong>de</strong>sfortifications et leurvalorisation patrimonialeest proposée au lecteur.Colette Richarme, uneartiste, une vie, uneœuvre,ouvrage collectif, Muséed’Art et d’Histoired’Albertville, 2007, 25eCet ouvrage, sorti àl’occasion <strong>de</strong> l’expositiondu musée d’art et d’histoired’Albertville : <strong>La</strong>issez-vousconter Colette Richarme,est bien plus qu’uncatalogue. Il se veut à lafois biographie <strong>de</strong> l’artiste -née à Canton, ColetteRicharme (1904-1991) estrestée très attachée àAlbertville dont sa familleest originaire - analyse <strong>de</strong>sa technique et <strong>de</strong> sonstyle <strong>de</strong> peinture entreabstraction et figuration, <strong>de</strong>ses interrogations <strong>de</strong>créateur et <strong>de</strong> son œuvremettant en exergue sesprincipales expositions àParis et à Montpellier. Unelarge place est d’ailleurslaissée à l’expression <strong>de</strong> sapensée, qu’elle amatérialisée par différentsécrits. On découvre uneartiste mo<strong>de</strong>rne attachante,sensible et méticuleuse, àla réflexion artistiquenourrie par une volontéd’apprendre <strong>de</strong>s techniquesdifférentes. Sa recherchesur les couleurs,notamment, revêtait uneimportance touteparticulière. Pour ceux qui,ayant visité l’exposition,voudrait aller plus avant,un chapitre analyse lesœuvres présentées.Entre Genève et Mont-Blanc au XIV e siècle,Enquête et contreenquêtedans le Faucigny<strong>de</strong>lphinal <strong>de</strong> 1339,Nicolas Carrier et Matthieu<strong>de</strong> la Corbière, Sociétéd’Histoire et d’Archéologie<strong>de</strong> Genève, 2005, 38 eNicolas Carrier et Matthieu<strong>de</strong> la Corbière ont entrepris<strong>de</strong> transcrire partiellementles <strong>de</strong>ux enquêtes réaliséesen 1339 lors du projet <strong>de</strong>vente <strong>de</strong>s terres dudauphin Humbert II aupape Benoît XII, en selimitant toutefois à ce quiétait alors le diocèse <strong>de</strong>Genève et la seigneurie <strong>de</strong>Faucigny. Ces documentsfurent réalisés à l’occasion<strong>de</strong>s tractations avortées quiauraient pu amener lepape Benoît XII à acquérirla suzeraineté d’une partie<strong>de</strong> la principautédauphinoise. Leur intérêtprovient <strong>de</strong> ce qu’ellesproposent un doubleregard, celui du ven<strong>de</strong>ur, ledauphin, et celui <strong>de</strong>l’acheteur potentiel, lepape, sur les terres enquestion. Elles délivrent<strong>de</strong>s informations à la foispolitiques, sociales,économiques etarchitecturales sur lasociété d’alors.Outre les documentsoriginaux, traduits etannotés par les auteurs, lelecteur trouvera égalementune histoire contextuelleavec généalogie <strong>de</strong>s sires<strong>de</strong> Faucigny.Carnet <strong>de</strong> montagne <strong>de</strong>Charlotte Perriand,sélection <strong>de</strong> textes et imagespar Roger Aujame etPernette Perriand-Barsac,Maison <strong>de</strong>s jeuxOlympiques d’hiver,Albertville, 2007, 21 eCe carnet <strong>de</strong> montagne aété conçu et réalisé par laMaison <strong>de</strong>s Jeuxolympiques d’hiver àl’occasion <strong>de</strong> l’exposition« Charlotte Perriand et lamontagne ». Il résulte <strong>de</strong>l’inventaire d’archives, <strong>de</strong>cartes et revues portant surla montagne, ayantappartenues à CharlottePerriand. De nombreusesphotos retrouvées par safille Pernette Perriand-Barsac accompagnent cesdocuments qui révèlentune montagnar<strong>de</strong> aguerrie,dont les sorties n’avaientrien à envier aux meilleursalpinistes. Ils sontl’occasion d’évoquersuccessivement son lienprivilégié avec lamontagne, duquel découleune création architecturaleoriginale, inspirée et avantgardiste,adaptée au milieualpin. Ses projets, sesréalisations en tantqu’architecte à Méribel etsurtout aux Arcs sedécouvrent au fil <strong>de</strong> lalecture et prennent viegrâce aux nombreuxdocumentsiconographiques associés.Vinciane Néel27
Actualitéspatrimoinesp.3à8Dossiercollectionsp.9à17Architecturep. 18 & 19Antiquités& objets d’artp. 20 à 23Patrimoineindustrielp. 24 à 26Livresp. 27