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Prototype du kilogramme et constante physique fondamentale : la ...

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DOI: 10.1051/rfm/2010002P. PINOT<strong>Prototype</strong> <strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong> <strong>et</strong> <strong>constante</strong><strong>physique</strong> <strong>fondamentale</strong> : <strong>la</strong> disséminationde l’unité de masse<strong>Prototype</strong> of the kilogram and fundamentalphysical constant: The dissemination of the unitof massPatrick PINOT 1 , Gérard GENEVES 2 <strong>et</strong> Marc HIMBERT 1Laboratoire commun de métrologie LNE-CNAM (LCM)1 Cnam, 61 Rue <strong>du</strong> Landy, 93210 La P<strong>la</strong>ine Saint-Denis, France, patrick.pinot@cnam.fr.2 LNE, 29 Avenue Roger Hennequin, 78197 Trappes Cedex, France.RésuméLe <strong>kilogramme</strong> est encore défini à partir d’un obj<strong>et</strong> matériel, leprototype international <strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong> sanctionné par <strong>la</strong> 1 re CGPM en1889. Il présente trois inconvénients majeurs : disponible en un seullieu, non pérenne en termes de masse <strong>physique</strong> <strong>et</strong> non universel puisquebasé sur un artefact. La définition de l’unité de masse pourrait être changéeau plus tôt en 2011 <strong>et</strong> serait alors basée sur une valeur fixée exactementd’une <strong>constante</strong> <strong>fondamentale</strong> de <strong>la</strong> nature. Ainsi, <strong>la</strong> possibilitéde redéfinir le <strong>kilogramme</strong> en fonction d’une réelle invariance naturelleest en discussion depuis environ 30 ans. Dans ce contexte, <strong>la</strong> métrologiefrançaise a entrepris depuis 2002 <strong>la</strong> réalisation d’une expériencede ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> watt dont l’objectif est de raccorder le <strong>kilogramme</strong> à<strong>la</strong> <strong>constante</strong> de P<strong>la</strong>nck. L’adoption d’une nouvelle définition <strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong>basée sur une <strong>constante</strong> <strong>physique</strong> <strong>fondamentale</strong> ou atomiquedevra prendre en compte sa dissémination en évitant tout bouleversementdans <strong>la</strong> pratique des <strong>la</strong>boratoires accrédités <strong>et</strong> de <strong>la</strong> plupart desutilisateurs. Mais elle aura inévitablement des conséquences sur les étalonsde transfert utilisés par les <strong>la</strong>boratoires nationaux de métrologie.MOTS CLÉS : ÉTALONS, UNITÉS DE MESURE, KILOGRAMME,BALANCE DU WATT, MONOCRISTAL DE SILICIUM, CONS-TANTE DE PLANCK, CONSTANTE D’AVOGADRO, DISSÉMINA-TION.AbstractThe kilogram is still defined in terms of an artefact, namely, thesame prototype sanctioned by the 1st CGPM in 1889. It has three mainlimitations: avai<strong>la</strong>ble in one p<strong>la</strong>ce, not really invariant in terms of physicalmass and not universal as based on an artefact. The definition ofthe mass unit could be revised as early as 2011 by basing it on exactlyfixed value of a fundamental constant of nature. Thus, the possibility ofredefining the kilogram in function of a true natural invariant has beendiscussed for about 30 years. In this context, the French m<strong>et</strong>rology decidedin 2002 to undertake the realisation of a watt ba<strong>la</strong>nce experimentaiming at linking the kilogram to the P<strong>la</strong>nck constant. The adoption ofa new definition of the kilogram based on an atomic or a fundamentalphysical constant has to take its dissemination into account by avoidinggreat change for the accredited institutes and most of users. Of course,this will have consequences for the transfer mass standards used by theNational Institutes of M<strong>et</strong>rology.KEY WORDS: REFERENCES AND STANDARDS, UNITS OF MEA-SUREMENT, KILOGRAM, WATT BALANCE, SILICON SINGLECRYSTAL, PLANCK CONSTANT, AVOGADRO CONSTANT, DISSEM-INATION.1. Intro<strong>du</strong>ctionLa masse est une grandeur <strong>physique</strong> dont l’approcheexpérimentale est non ambiguë, même si, sur le p<strong>la</strong>nthéorique, les débats entre physiciens théoriciens sur <strong>la</strong>nature de c<strong>et</strong>te grandeur ne sont pas clos. La masse intervientdans deux phénomènes conceptuellement différents: l’inertie <strong>et</strong> <strong>la</strong> gravité, unifiées par le principePROTOTYPE DU KILOGRAMME ET CONSTANTE PHYSIQUE FONDAMENTALE ... 3


d’équivalence, qui postule que le rapport de <strong>la</strong> masse inertielleà <strong>la</strong> masse gravitationnelle d’un corps est égal à 1.Pour les métrologues, <strong>la</strong> masse est une grandeur <strong>physique</strong>mesurable, sca<strong>la</strong>ire <strong>et</strong> additive ; <strong>la</strong> définition del’unité associée à <strong>la</strong> masse, le <strong>kilogramme</strong>, fait l’obj<strong>et</strong>d’un intérêt tout particulier, en raison des singu<strong>la</strong>rités dec<strong>et</strong>te définition. En eff<strong>et</strong>, le <strong>kilogramme</strong> est <strong>la</strong> seule dessept unités de base <strong>du</strong> Système international d’unités (SI)qui soit encore directement définie par un étalon matériel: le prototype international <strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong>.C<strong>et</strong> étalon est un cylindre dont le diamètre est égalà sa hauteur (39 mm, ce qui minimise sa surface extérieure).Il est fait de p<strong>la</strong>tine allié à de l’iridium pour10 % de <strong>la</strong> masse. Depuis plus d’un siècle, il est conservédans l’air sous une triple cloche, dans un caveau <strong>du</strong> Bureauinternational des poids <strong>et</strong> mesures (BIPM) à Sèvres(France) ; par définition sa masse vaut un <strong>kilogramme</strong>exactement.Nous allons d’abord rappeler l’origine de <strong>la</strong> définitionactuelle de l’unité de masse qui correspond également àsa « mise en pratique » (Sect. 2), puis décrire <strong>la</strong> structurede <strong>la</strong> chaîne nationale d’étalonnage (Sect. 3), avantd’examiner <strong>la</strong> problématique in<strong>du</strong>ite par c<strong>et</strong>te définition.Ensuite, nous présenterons le principe des deux principalesexpériences (monocristal de silicium <strong>et</strong> ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong>watt) (Sect. 4) dont le but est d’aboutir à une nouvelledéfinition de l’unité de masse par l’établissement d’unere<strong>la</strong>tion entre le <strong>kilogramme</strong> <strong>et</strong> une <strong>constante</strong> <strong>physique</strong><strong>fondamentale</strong>, en l’occurrence <strong>la</strong> <strong>constante</strong> d’Avogadro<strong>et</strong> <strong>la</strong> <strong>constante</strong> de P<strong>la</strong>nck. La métrologie française s’estengagée dans une de ces expériences perm<strong>et</strong>tant de relier<strong>la</strong> <strong>constante</strong> de P<strong>la</strong>nck à l’étalon de masse.Nous décrirons ensuite les préa<strong>la</strong>bles à satisfaireavant d’adopter une nouvelle définition de l’unité demasse basée sur une <strong>constante</strong> <strong>fondamentale</strong>, ainsi queles conséquences d’une telle définition pour <strong>la</strong> « mise enpratique » de l’unité (Sect. 5).Enfin, nous examinerons les implications d’un telchangement de définition pour les futurs étalons de transfert<strong>et</strong> pour <strong>la</strong> traçabilité dans <strong>la</strong> dissémination de l’unitéde masse (Sect. 6).2. Un peu d’histoire2.1. Les prémices de systèmes nationaux d’unitésde « poids » [1]En Europe <strong>et</strong> autour <strong>du</strong> bassin méditerranéen, l’empireromain d’occident intro<strong>du</strong>isit comme unité de« poids » <strong>la</strong> « libra » (livre romaine va<strong>la</strong>nt environ 327 g),appartenant à l’un des premiers systèmes non décimauxd’unités communs à plusieurs peuples. Mais, après l’effondrementde c<strong>et</strong> empire, de multiples systèmes locauxde poids <strong>et</strong> mesures resurgirent <strong>et</strong> per<strong>du</strong>rèrent. Au 9 esiècle, Charlemagne tenta d’unifier par <strong>la</strong> loi tous les systèmesexistant dans l’empire sur lequel il régnait, maiscelle-ci ne fut pas réellement appliquée.Fig. 1. – Une pile de Charlemagne <strong>et</strong> le <strong>kilogramme</strong> en p<strong>la</strong>tinede l’an 7 (1799).C’est avec le développement <strong>du</strong> commerce entre lesgrands royaumes des 15 e <strong>et</strong> 16 e siècles qu’apparurent <strong>la</strong>nécessité <strong>et</strong> une réelle volonté de définir des systèmes depoids <strong>et</strong> mesures utilisables dans une contrée éten<strong>du</strong>e.En France, à <strong>la</strong> fin <strong>du</strong> 15 e siècle, apparut <strong>la</strong> « pile »dite « de Charlemagne » (Fig. 1) (elle aurait été fabriquéeà partir d’étalons remontant à Charlemagne). Elle définissait<strong>la</strong> livre appelée « poids de marc » (environ 490 g)<strong>et</strong> ses sous-multiples non décimaux : <strong>la</strong> livre des poids demarc se subdivisait en 2 marcs, le marc en 8 onces, l’onceen 8 gros, le gros en 3 deniers <strong>et</strong> le denier en 24 grains.En Angl<strong>et</strong>erre, à <strong>la</strong> fin <strong>du</strong> 16 e siècle, <strong>la</strong> reine Elizab<strong>et</strong>h 1 rechoisit comme unité de « poids » <strong>la</strong> livre appelée « averdepois» (nom provenant de l’expression française « avoir<strong>du</strong> poids », environ 453 g), divisée en 16 onces. Ces systèmesroyaux ne furent utilisés que pour le commerce desmatières précieuses, souvent liées aux monnaies.À partir <strong>du</strong> 17 e <strong>et</strong> surtout <strong>du</strong> 18 e siècle, alors qu’ilexistait dans un même pays une multitude d’unités de mesuredifférentes selon le lieu, ou même <strong>la</strong> nature de <strong>la</strong> denréeconsidérée, des savants commencèrent à rechercherun système d’unités plus homogène <strong>et</strong> universel, en raison<strong>du</strong> développement <strong>du</strong> commerce, de l’in<strong>du</strong>strie, maisaussi des sciences.2.2. Naissance <strong>du</strong> système métrique <strong>et</strong> <strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong>C’est en 1791 en France, dans l’é<strong>la</strong>n révolutionnaire,que l’Assemblée nationale vota le principe d’un systèmedécimal de poids <strong>et</strong> mesures basé sur une unité de longueur.On opta rapidement pour lier c<strong>et</strong>te unité à <strong>la</strong> longueur<strong>du</strong> méridien terrestre, plutôt qu’à celle <strong>du</strong> pen<strong>du</strong>lebattant <strong>la</strong> seconde.En 1792, on donna le nom de « mètre » à <strong>la</strong> futureunité de longueur, tandis que De<strong>la</strong>mbre <strong>et</strong> Méchain commençaientles mesures par triangu<strong>la</strong>tion <strong>du</strong> méridien deDunkerque à Barcelone pour déterminer sa valeur. Leurstravaux ne furent achevés qu’en 1798.CNAM4 REVUE FRANÇAISE DE MÉTROLOGIE n o 22, Volume 2010-2


CNAMFig. 2. – Le Kilogramme des Archives.Le décr<strong>et</strong>-loi de <strong>la</strong> Convention nationale <strong>du</strong> 1 er août1793 adopta le mètre comme unité de longueur égaleà <strong>la</strong> dix-millionième partie <strong>du</strong> quart nord <strong>du</strong> méridienterrestre <strong>et</strong> le grave comme unité de « poids » égale au« poids » d’un décimètre cube d’eau à <strong>la</strong> température de<strong>la</strong> g<strong>la</strong>ce fondante. Lavoisier <strong>et</strong> Haüy furent chargés deréaliser c<strong>et</strong>te nouvelle unité de masse. Enfin, <strong>la</strong> loi <strong>du</strong>18 Germinal an III (7 avril 1795) créa le système métriquedécimal <strong>et</strong> ordonna <strong>la</strong> réalisation d’un mètre étalonen p<strong>la</strong>tine.C<strong>et</strong>te même année, pour des raisons pratiques, le« grav<strong>et</strong> » (millième partie <strong>du</strong> « grave ») fut choisi commeunité courante de « poids » <strong>et</strong> prit le nom de « gramme »,mot venant <strong>du</strong> grec « gramma » qui signifie « signe écrit ».Le rapport avec <strong>la</strong> masse proviendrait d’une mauvaise tra<strong>du</strong>ction<strong>du</strong> mot <strong>la</strong>tin « scrupulum », faite par les Grecs àl’époque de l’empire romain (le « scrupulum » étant uneunité divisionnaire romaine de masse correspondant à unpoids d’un vingt-quatrième d’once).En 1799, les travaux <strong>du</strong> français Lefèvre-Gineau <strong>et</strong>de l’italien Fabbroni con<strong>du</strong>isirent à définir l’unité de« poids » égale à <strong>la</strong> masse d’un décimètre cube d’eau distilléeprise, non pas à 0 ◦ C, mais à 4 ◦ C correspondant aumaximum de densité <strong>du</strong> liquide. C<strong>et</strong>te unité (différente <strong>du</strong>« grave » <strong>et</strong> va<strong>la</strong>nt environ 1 000 grav<strong>et</strong>s ou grammes) pritalors le nom de <strong>kilogramme</strong>. C’est donc à c<strong>et</strong>te époquequ’on attribua à l’unité de masse un nom singulier en cesens qu’il comprend un préfixe, normalement destiné àdésigner les multiples de l’unité.La réalisation pratique de ce <strong>kilogramme</strong> n’est passimple. Un étalon matériel de référence fut fabriqué enp<strong>la</strong>tine pur. Il a été déposé aux Archives nationales. Il estconnu sous le nom de « Kilogramme des Archives » [2](Fig. 2).2.3. Le prototype international <strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong>C’est en 1870 que <strong>la</strong> première Commission internationale<strong>du</strong> mètre, réunie à Paris, entreprit des travaux enFig. 3. – Le prototype international <strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong> conservédans l’air sous une triple cloche en verre.vue de réaliser un étalon international <strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong>identique autant que possible au Kilogramme des Archives.Le chimiste Sainte-C<strong>la</strong>ire Deville proposa en 1874d’utiliser un alliage de p<strong>la</strong>tine allié à 10 % d’iridium, quiprésentait une <strong>du</strong>r<strong>et</strong>é suffisamment élevée <strong>et</strong> un coefficientde di<strong>la</strong>tation thermique assez faible. Les métallurgistes<strong>du</strong> Conservatoire des arts <strong>et</strong> métiers é<strong>la</strong>borèrent lespremières coulées de p<strong>la</strong>tine <strong>et</strong> d’iridium en vue de réaliserdes prototypes, mais l’examen de ces coulées révé<strong>la</strong>des défauts potentiels <strong>et</strong> elles ne furent pas r<strong>et</strong>enues. C’est<strong>la</strong> société ang<strong>la</strong>ise Johnson Matthey and Co qui réalisa finalementl’alliage <strong>et</strong> fabriqua en 1878 trois cylindres enp<strong>la</strong>tine iridié de 1 kg identifiés KI, KII <strong>et</strong> KIII.KIII ayant <strong>la</strong> masse <strong>la</strong> plus proche de celle <strong>du</strong> Kilogrammedes Archives, le Comité international des poids<strong>et</strong> mesures (CIPM), créé lors de <strong>la</strong> signature en 1875de <strong>la</strong> Convention <strong>du</strong> mètre, décida en 1883 de choisirKIII comme prototype international <strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong><strong>et</strong> de l’identifier par <strong>la</strong> l<strong>et</strong>tre K. Le prototype est depuisconservé au pavillon de Br<strong>et</strong>euil à Sèvres, siège <strong>du</strong>Bureau international des poids <strong>et</strong> mesures (BIPM) égalementcréé en 1875. On réalisa, à partir de 1884, unequarantaine de copies en p<strong>la</strong>tine iridié <strong>du</strong> prototype international<strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong>.En 1889, <strong>la</strong> première Conférence générale des poids<strong>et</strong> mesures (CGPM), organe délibératif de <strong>la</strong> Convention<strong>du</strong> mètre, sanctionna le prototype <strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong> adoptépar le CIPM <strong>et</strong> attribua par tirage au sort les copies <strong>du</strong>prototype aux pays signataires <strong>du</strong> traité [3]. C’est ainsiBIPMPROTOTYPE DU KILOGRAMME ET CONSTANTE PHYSIQUE FONDAMENTALE ... 5


que <strong>la</strong> France a obtenu l’étalon n ◦ 35 : c’est encore de nosjours <strong>la</strong> référence nationale d’unité de masse [4]. Enfin, <strong>la</strong>3 e CGPM (1901) précisa <strong>la</strong> définition de l’unité de massecomme suit :« Le <strong>kilogramme</strong> est l’unité de masse ; il est égal à <strong>la</strong>masse <strong>du</strong> prototype international <strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong>. »Depuis plus d’un siècle, l’unité de masse est donc définieà partir d’un étalon matériel conservé au BIPM. Ellereste <strong>la</strong> seule des sept unités de base <strong>du</strong> Système internationald’unités (SI) dont <strong>la</strong> définition repose encore aujourd’huisur une réalisation matérielle.Les conditions de <strong>la</strong> dissémination de <strong>la</strong> référence jusqu’auxutilisateurs sont rappelées dans <strong>la</strong> section 3.3. Les étalons de masse3.1. La chaîne nationale d’étalonnage des masses3.1.1. Le prototype national <strong>et</strong> les étalons de transfertBIPM<strong>Prototype</strong> international <strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong>Copies <strong>du</strong> prototype internationalLCM (LNE-CNAM)<strong>Prototype</strong> national <strong>du</strong> kilogramm eKilogrammes de transfertRéférences nationalesde disséminationEtalons de travailLaboratoires accréditésEtalons de référenceEtalons de travailK355000 kg5000 kgAu somm<strong>et</strong> de <strong>la</strong> chaîne nationale d’étalonnage desmasses, <strong>la</strong> France dispose <strong>du</strong> prototype national <strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong>n˚ 35, étalonné en 1889 <strong>et</strong> raccordé tous les cinquanteans environ au prototype international à l’occasiondes vérifications internationales des prototypes nationaux(après 1945 <strong>et</strong> vers 1988–1992) [5, 6]. Le raccordementest effectué par l’intermédiaire de copies <strong>du</strong> prototype internationalexclusivement utilisées à c<strong>et</strong> eff<strong>et</strong>. Les massesmatérialisées par les prototypes nationaux sont obtenuesaprès application d’un n<strong>et</strong>toyage-<strong>la</strong>vage spécifique : ellessont fournies par le BIPM avec une incertitude type del’ordre de 2 μg, soit 2 × 10 −9 en valeur re<strong>la</strong>tive.La garde <strong>et</strong> <strong>la</strong> conservation <strong>du</strong> prototype français <strong>et</strong><strong>la</strong> responsabilité <strong>du</strong> transfert de l’unité de masse aux utilisateursfont partie des missions attribuées, par <strong>la</strong> Métrologiefrançaise, au <strong>la</strong>boratoire commun de métrologieLNE-CNAM (LCM).Le prototype français présente une dérive positivequasi linéaire à long terme de l’ordre de 1 μg par an parrapport au prototype international, dont <strong>la</strong> masse est invariantepar définition. Il suit en fait l’évolution moyennede l’ensemble des prototypes nationaux. Afin de préserverautant que possible sa stabilité (ou à tout le moins <strong>la</strong>stabilité de sa dérive), l’usage <strong>du</strong> prototype national doitêtre strictement limité. En eff<strong>et</strong>, toute utilisation <strong>du</strong> prototypepeut entraîner des variations notables de <strong>la</strong> masse quise répercuteraient sur l’ensemble de <strong>la</strong> chaîne nationaled’étalonnage. C’est pourquoi il est nécessaire de disposerd’un ensemble organisé d’étalons de transfert, raccordésavec une incertitude re<strong>la</strong>tive de l’ordre de 10 −8 . Pendant<strong>la</strong> longue période qui sépare deux vérifications internationalessuccessives, des comparaisons intra- <strong>et</strong> inter<strong>la</strong>boratoiresd’étalons de transfert perm<strong>et</strong>tent de garantir <strong>la</strong>stabilité des références.L’ensemble des raccordements sont effectués dansl’air : il est indispensable à ce degré d’exactitude d’appliquerune correction pour tenir compte de <strong>la</strong> pousséeUtilisateurs(vérificateurs d’instruments de pesage,commerces, in<strong>du</strong>stries, <strong>la</strong>boratoires,…)Masses <strong>et</strong> poids usuelsFig. 4. – Schéma de <strong>la</strong> chaîne française d’étalonnage desmasses.d’Archimède <strong>du</strong>e à l’air [7–10]. Dès que des étalons sontréalisés dans des matériaux de masse volumique différentede celle de l’alliage Pt-Ir, <strong>la</strong> contribution de l’incertitudede c<strong>et</strong>te correction, augmente de manière significative<strong>la</strong> valeur de l’incertitude d’étalonnage. L’article [11],bien qu’un peu obsolète, précise les corrections à prendreen compte <strong>et</strong> l’organisation minimale à m<strong>et</strong>tre en p<strong>la</strong>cepour maintenir les étalons de transfert à leur plus hautniveau d’exactitude.3.1.2. Les étalons de référence <strong>et</strong> de travail (multiples<strong>et</strong> sous-multiples <strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong>)L’établissement compl<strong>et</strong> de <strong>la</strong> chaîne d’étalonnagedes masses fait intervenir une succession d’étalons hiérarchisésen fonction de leur qualité métrologique <strong>et</strong> del’incertitude sur <strong>la</strong> connaissance de leur masse. La responsabilitépratique <strong>du</strong> maintien de c<strong>et</strong>te chaîne est répartieentre plusieurs <strong>la</strong>boratoires ou organismes qui interviennenten fonction <strong>du</strong> niveau d’exactitude exigé.En France, comme le montre schématiquement <strong>la</strong> figure4, le LCM réalise à partir des <strong>kilogramme</strong>s de transfertle raccordement des références nationales de disséminationdans l’éten<strong>du</strong>e 100 μg–5 000 kg. Ces référencesperm<strong>et</strong>tent de raccorder les étalons de référence des <strong>la</strong>boratoiresaccrédités par le Comité français d’accréditation(Cofrac).Pour <strong>la</strong> majorité des utilisateurs (parmi lesquels ontrouve les vérificateurs d’instruments de pesage) les étalonnagessont effectués en « masse conventionnelle ». La6 REVUE FRANÇAISE DE MÉTROLOGIE n o 22, Volume 2010-2


nationale reposent sur l’optimisation des caractéristiquessuivantes :Fig. 5. – Un <strong>kilogramme</strong> en acier inoxydable monobloc <strong>du</strong> typeOIML de c<strong>la</strong>sse E 1 ou E 2 .masse conventionnelle a été intro<strong>du</strong>ite pour les besoinsde <strong>la</strong> métrologie légale [12, 13] : ce concept perm<strong>et</strong> auxutilisateurs d’éviter d’appliquer une « correction de pousséede l’air » spécifique dès que <strong>la</strong> c<strong>la</strong>sse d’exactitudedes étalons de masse (alors appelés « poids » en métrologielégale) utilisés est compatible avec le niveau d’incertituderecherchée. La recommandation internationaleR111 de l’Organisation internationale de métrologie légale(OIML) définit <strong>la</strong> c<strong>la</strong>sse d’exactitude de ces « poids »en fonction de leur tolérance d’ajustage ou « erreur maximal<strong>et</strong>olérée » (EMT).Par exemple, un <strong>la</strong>boratoire accrédité devant étalonnerdes poids de 1 kg dont <strong>la</strong> tolérance d’ajustage est±5 mg (c<strong>la</strong>sse d’exactitude dite F1) doit disposer de poidsde travail dont <strong>la</strong> tolérance d’ajustage est de ±1,6 mg(c<strong>la</strong>sse d’exactitude dite E 2 )[12] raccordés avec une incertitud<strong>et</strong>ype re<strong>la</strong>tive de 2,5 × 10 −7 (mieux que le tiersde l’EMT). Ces poids de travail E 2 sont eux-mêmes raccordésà des poids de référence d’exactitude meilleure(c<strong>la</strong>sse <strong>la</strong> plus élevée E 1 ), pour lesquels (voir Fig. 5)l’erreurmaximale tolérée par rapport à <strong>la</strong> masse nominale de1 kg doit rester dans l’intervalle ±5 × 10 −7 en valeur re<strong>la</strong>tive<strong>et</strong> l’étalonnage doit présenter une incertitude typecomposée re<strong>la</strong>tive inférieure à 8,3×10 −8 . Les <strong>la</strong>boratoiresnationaux de métrologie doivent donc disposer d’étalonsde transfert raccordés avec une incertitude type re<strong>la</strong>tivede l’ordre de 10 −8 ...La stabilité à long terme d’un étalon de masse reposeprincipalement sur les caractéristiques intrinsèques<strong>du</strong> matériau utilisé pour réaliser l’étalon, sur le processusde fabrication de l’étalon, sur <strong>la</strong> méthode de n<strong>et</strong>toyageappliquée <strong>et</strong> sur les conditions de conservation <strong>et</strong> d’utilisationde l’obj<strong>et</strong>.3.2. Critères de choix <strong>du</strong> matériauLes principaux critères de choix d’un matériaupour <strong>la</strong> fabrication d’un étalon de masse de référence– une homogénéité aussi complète que possible (en particulierabsence de porosités, de cavités <strong>et</strong> d’inclusions)afin de ré<strong>du</strong>ire les phénomènes de dégazage <strong>et</strong>d’absorption ;– une résistance élevée aux altérations chimiques (tellesque corrosion, oxydation ou réaction aux principauxsolvants de n<strong>et</strong>toyage) ;– une masse volumique élevée pour ré<strong>du</strong>ire <strong>la</strong> surfaceactive (limitation des échanges superficiels avec l’air<strong>et</strong> les polluants ambiants) <strong>et</strong> ré<strong>du</strong>ire <strong>la</strong> correction différentiellede poussée de l’air ;– une faible susceptibilité magnétique (inférieure à0,01) <strong>et</strong> un moment magnétique négligeable (inférieurà 1 μT) afin d’être peu sensible aux champsmagnétiques environnants <strong>et</strong> à l’influence d’obj<strong>et</strong>s ouinstruments ayant des propriétés magnétiques;– une <strong>du</strong>r<strong>et</strong>é élevée pour obtenir un état de surface avecune très faible rugosité (ré<strong>du</strong>ction de <strong>la</strong> surface active),pour ré<strong>du</strong>ire les risques d’usure mécanique aucours des manipu<strong>la</strong>tions <strong>et</strong> pour faciliter le n<strong>et</strong>toyage ;– un faible coefficient de di<strong>la</strong>tation thermique <strong>et</strong> unebonne con<strong>du</strong>ctivité thermique pour minimiser les eff<strong>et</strong>sliés au contrôle de <strong>la</strong> température (meilleureconnaissance <strong>du</strong> volume de l’étalon <strong>et</strong> donc de <strong>la</strong> correctiondepousséedel’air);– une bonne con<strong>du</strong>ctivité électrique afin d’éviter l’accumu<strong>la</strong>tionde charges électrostatiques (ré<strong>du</strong>ction desforces électrostatiques parasites).La forme r<strong>et</strong>enue pour les étalons de masse au niveaud’exactitude le plus élevé tend à minimiser leur surface.Une sphère parfaite étant difficile à réaliser <strong>et</strong> à manipuler,le choix s’est porté sur une forme cylindrique dont<strong>la</strong> hauteur est égale au diamètre, offrant ainsi une surfaceminimale pour un cylindre droit.Les étalons nationaux de transfert ayant <strong>la</strong> plus faibleincertitude d’étalonnage sont en p<strong>la</strong>tine iridié, comme lesprototypes international <strong>et</strong> national. Mais, <strong>du</strong> fait de <strong>la</strong>faible <strong>du</strong>r<strong>et</strong>é de l’alliage (inférieure à 180 Vickers ouHV), <strong>la</strong> surface de ces étalons peut être facilement altéréelors de leur manipu<strong>la</strong>tion. Des étalons de transfertd’usage courant ont été réalisés à partir d’alliages plus<strong>du</strong>rs. En France, deux superalliages ont été choisis : dansles années 1980 un superalliage à base de cobalt, connusous le nom commercial de A<strong>la</strong>crite XSH [14] ; <strong>et</strong> plusrécemment un superalliage à base de nickel issu des derniersprogrès de <strong>la</strong> métallurgie, ayant pour nom commercialUdim<strong>et</strong> 720 [15,16]. La réalisation des premiers étalonsde dissémination de 1 g à 10 kg en Udim<strong>et</strong> 720 <strong>du</strong>LCM est terminée.Pour les usages en métrologie légale, <strong>la</strong> recommandationR111 de l’OIML spécifie, selon <strong>la</strong> c<strong>la</strong>sse d’exactitudedes poids, les caractéristiques <strong>du</strong> matériau, l’étatde surface, <strong>la</strong> forme, le marquage, <strong>la</strong> tolérance d’ajustagede <strong>la</strong> masse. . . Par exemple, les poids de c<strong>la</strong>sse E 1 ou E 2PROTOTYPE DU KILOGRAMME ET CONSTANTE PHYSIQUE FONDAMENTALE ... 7


doivent être réalisés en utilisant les meilleurs aciers inoxydablesausténitiques présentant une masse volumiqueaussi proche que possible de 8 000 kg·m −3 , valeur r<strong>et</strong>enuepour <strong>la</strong> définition de <strong>la</strong> masse conventionnelle [12, 13].3.3. Stabilité des étalons de masseLa stabilité des étalons de masse dépend fortement deleur état de surface (qui conditionne leur surface active),de leurs conditions de conservation (ils sont conservésdans l’air pour des raisons pratiques), mais aussi de <strong>la</strong>méthode de n<strong>et</strong>toyage utilisée. En eff<strong>et</strong>, les contaminantsd’une surface métallique sont d’origine <strong>et</strong> de nature trèsdiverses. Il est important d’éliminer autant que possibleceux qui provoquent des variations de masse non maîtrisablesou non modélisables.Les principaux phénomènes affectant <strong>la</strong> stabilité desétalons de masse sont les suivants :– <strong>la</strong> contamination de surface <strong>du</strong>e, par exemple, auxpoussières adhérentes ou à l’adsorption <strong>et</strong> à <strong>la</strong> désorptiond’eau ;– les altérations chimiques <strong>du</strong>es, par exemple, à <strong>la</strong> corrosionou à l’oxydation;– l’usure mécanique provoquant, par exemple, desrayures <strong>et</strong> piqûres qui augmentent <strong>la</strong> surface active<strong>et</strong> piègent les contaminants ;– le dégazage des gaz occlus lors <strong>du</strong> processus métallurgique,par exemple, le monoxyde de carbone oul’hydrogène.Il est essentiel pour <strong>la</strong> stabilité d’un étalon de masseque sa surface soit <strong>la</strong> plus lisse possible. On cherche lorsde <strong>la</strong> finition de surface à atteindre un poli « miroir » dont<strong>la</strong> hauteur quadratique moyenne des fluctuations de positionde surface est inférieure à 10 nm pour les étalonsnationaux de transfert.De nombreux travaux ont permis d’optimiser le choixdes matériaux, d’améliorer le processus de finition de surface(technique de polissage [17, 18]) <strong>et</strong> de déterminerl’influence des méthodes de n<strong>et</strong>toyage [19] <strong>et</strong> des conditionsde conservation [20–22].La participation à des comparaisons internationalesd’étalons de masse <strong>et</strong> <strong>la</strong> réalisation régulière de comparaisonsdirectes entre étalons de transfert perm<strong>et</strong>tent enoutre :– de vérifier <strong>la</strong> cohérence interne de <strong>la</strong> valeur d’étalonnagede ces étalons ;– de contrôler <strong>la</strong> stabilité des références nationales ;– de garantir <strong>la</strong> validité <strong>et</strong> <strong>la</strong> traçabilité de l’étalonnagedes références nationales de dissémination des sousmultiples<strong>et</strong> multiples <strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong>.À c<strong>et</strong> égard, <strong>la</strong> proximité géographique <strong>du</strong> BIPMp<strong>la</strong>ce <strong>la</strong> France dans une situation très favorable pour menerà bien les études sur <strong>la</strong> stabilité <strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong>.4. Problématique de l’unité de masse4.1. Disponibilité, pérennité <strong>et</strong> universalitéLe prototype international <strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong> représenteà <strong>la</strong> fois <strong>la</strong> définition <strong>et</strong> <strong>la</strong> réalisation pratique de l’unité demasse ; c<strong>et</strong> état de fait renvoie à une triple problématique :– <strong>la</strong> dissémination est ren<strong>du</strong>e délicate par l’unicité de <strong>la</strong>référence, plus précisément par sa disponibilité en unseul lieu. Pour effectuer les vérifications des quelquessoixante prototypes nationaux répartis dans le monde,il faut rassembler ceux-ci au BIPM pour une <strong>du</strong>réede 2 ou 3 ans, le temps d’effectuer l’ensemble desraccordements. C’est pourquoi une telle vérificationn’est réalisée que tous les 50 ans environ ;– <strong>la</strong> maintenance est complexe : il s’agit de maîtriserles conditions de conservation <strong>du</strong> prototype international<strong>et</strong> de contrôler sa stabilité à long terme. Malgréles précautions prises, on ne peut empêcher <strong>la</strong>contamination de surface, alors que sa masse vaut,par définition, exactement un <strong>kilogramme</strong>. Le prototypeinternational a été n<strong>et</strong>toyé en 1946 pour <strong>la</strong>deuxième vérification des prototypes nationaux <strong>et</strong> en1988 pour <strong>la</strong> troisième vérification [5] en appliquantune méthode de n<strong>et</strong>toyage-<strong>la</strong>vage utilisant des solvants(éther, éthanol <strong>et</strong> eau). La définition <strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong>doit donc être considérée comme étant <strong>la</strong>masse <strong>du</strong> prototype international après applicationd’un n<strong>et</strong>toyage-<strong>la</strong>vage <strong>du</strong> « type BIPM » [23]. Cemême processus de n<strong>et</strong>toyage-<strong>la</strong>vage est appliqué auxprototypes nationaux ;– <strong>la</strong> définition même pose les limites de l’universalitédans l’espace <strong>et</strong> dans le temps de c<strong>et</strong>te unité. Si le prototypeinternational venait à être endommagé ou détruit,on pourrait choisir l’une de ses copies pour redéfinirl’unité de masse, mais ce nouveau <strong>kilogramme</strong>,exact par définition, serait inévitablement différent del’ancien de l’ordre de 10 −7 en valeur re<strong>la</strong>tive dansle meilleur des cas, <strong>et</strong> en outre <strong>la</strong> continuité ne seraitgarantie qu’à l’échelle <strong>du</strong> microgramme. Ce seraitun écart significatif au regard des incertitudes nécessairesà <strong>la</strong> métrologie des masses (c’est à dire 10 −8en valeur re<strong>la</strong>tive). La définition actuelle ne nous perm<strong>et</strong>donc pas de transm<strong>et</strong>tre aux générations futuresles éléments perm<strong>et</strong>tant de repro<strong>du</strong>ire à l’identique <strong>la</strong>même unité de masse.Une des difficultés majeures rencontrées tient à <strong>la</strong> dérivere<strong>la</strong>tive <strong>du</strong> prototype international <strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong>par rapport à un ensemble de prototypes nationaux ou témoinsde même nature. Les valeurs obtenues depuis plusde 100 ans ont mis en évidence une dérive différentiellere<strong>la</strong>tive de 3 × 10 −8 <strong>et</strong> une dispersion des valeurs des prototypesnationaux <strong>et</strong> témoins de l’ordre de 1 × 10 −7 , montrantainsi <strong>la</strong> fragilité de <strong>la</strong> définition actuelle de l’unitéde masse.4.2. Raccordement à une <strong>constante</strong><strong>physique</strong> <strong>fondamentale</strong>Pour pallier ces difficultés, en fait très imbriquées,on peut chercher à raccorder l’unité de masse à une ou8 REVUE FRANÇAISE DE MÉTROLOGIE n o 22, Volume 2010-2


plusieurs <strong>constante</strong>s <strong>physique</strong>s <strong>fondamentale</strong>s ou à des<strong>constante</strong>s de <strong>la</strong> nature, le cas échéant à l’échelle atomique[24, 25]. Le souhait d’universalité de <strong>la</strong> définitiondes unités de mesure n’est pas nouveau : depuis le 18 esiècle, les savants ont préconisé de définir des unités naturelles<strong>et</strong> universelles. En 1870 Maxwell suggérait d’utiliserdes unités définies à partir des propriétés intrinsèquesdes atomes ou molécules [26].Depuis près d’une trentaine d’années les recherchesen ce sens ont connu un regain d’activités. Plusieurs <strong>la</strong>boratoiresnationaux de métrologie de pays très in<strong>du</strong>strialisésont entrepris des études ayant pour objectif deréaliser un tel raccordement avec une incertitude re<strong>la</strong>tivede l’ordre de 10 −8 [24, 27]. Un niveau d’incertitude aussiexigeant peut seul garantir <strong>la</strong> continuité historique pourles utilisateurs d’étalons de masse, en particulier, pourqu’un changement de définition de l’unité de masse n’in<strong>du</strong>isepas d’écart significatif sur <strong>la</strong> valeur des étalons desc<strong>la</strong>sses d’exactitude les plus élevées de <strong>la</strong> métrologie légale.Ces travaux ont été encouragés par les résolutionssuccessives prises par <strong>la</strong> CGPM en 1995, 1999 <strong>et</strong> 2007incitant les <strong>la</strong>boratoires nationaux de métrologie « à entreprendredes études visant à contrôler <strong>la</strong> stabilité desétalons de masse <strong>et</strong> susceptible de déboucher, à terme,sur une nouvelle définition <strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong> ». L’idée estde mesurer, dans un premier temps, une <strong>constante</strong> <strong>physique</strong><strong>fondamentale</strong> ou une <strong>constante</strong> de <strong>la</strong> nature à partird’une masse macroscopique raccordée au prototype international,avec une incertitude re<strong>la</strong>tive de l’ordre de 10 −8 .Plusieurs approches sont envisagées. Les diverses expériencesen cours reposent sur des principes <strong>physique</strong>svariés : utilisation de dispositifs électromécaniques [28],accumu<strong>la</strong>tion d’ions [29], analyse d’un monocristal desilicium [30]... Elles présentent aujourd’hui des performancesassez inégales. Deux méthodes expérimentalestrès prom<strong>et</strong>teuses (analyse d’un monocristal de silicium<strong>et</strong> ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> watt) mobilisent de nombreux chercheurs <strong>et</strong>nécessitent des moyens d’étude importants. L’expériencefrançaise de ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> watt est <strong>la</strong> voie soutenue par <strong>la</strong>métrologie française depuis 2002.4.2.1. Étude d’un monocristal de siliciumC<strong>et</strong>te expérience consiste à mesurer <strong>la</strong> valeur de <strong>la</strong><strong>constante</strong> d’Avogadro N A en déterminant le rapport entrele volume mo<strong>la</strong>ire V m <strong>et</strong> le volume atomique V a d’un cristal.Le volume mo<strong>la</strong>ire est le pro<strong>du</strong>it de <strong>la</strong> masse mo<strong>la</strong>ireM Si <strong>du</strong> silicium <strong>et</strong> <strong>du</strong> volume V <strong>du</strong> cristal, divisé par <strong>la</strong>masse m de celui-ci. Le volume atomique est, dans unmonocristal cubique où l’on note d 220 <strong>la</strong> distance entre lesp<strong>la</strong>ns (220) <strong>du</strong> réseau cristallin, le volume d’une mailledivisé par le nombre d’atomes n par maille. On obtient :N A = V m n · M Si · V=V am · ( √ ) 3(1)8 · d 220Les premiers travaux réellement importants pour <strong>la</strong>détermination de N A à partir d’un monocristal de siliciumont commencé dès les années 1970 avec l’utilisationd’une technique XRCD (X-ray crystal density measurement).Becker a publié en 2001 un article décrivantun historique très compl<strong>et</strong> de <strong>la</strong> détermination de c<strong>et</strong>te<strong>constante</strong> [31].L’une des difficultés majeures est de réaliser un monocristalde masse macroscopique (pour pouvoir effectuerun raccordement de <strong>la</strong> masse de haute exactitude)présentant une structure aussi parfaite que possible. Uneforme sphérique pour l’obj<strong>et</strong> confère de <strong>la</strong> robustesse <strong>et</strong>donne accès au volume avec une incertitude faible. Il fautégalement mesurer <strong>la</strong> masse mo<strong>la</strong>ire de l’élément constitutif,ainsi que <strong>la</strong> masse <strong>et</strong> le volume de c<strong>et</strong> artefact. Ilfaut enfin déterminer le paramètre de maille <strong>et</strong> le nombred’atomes par maille.Le choix <strong>du</strong> silicium résulte <strong>du</strong> niveau de développementtechnologique sans égal effectué par l’in<strong>du</strong>striedes semi-con<strong>du</strong>cteurs pour c<strong>et</strong> élément. Cependant le siliciumnaturel est constitué de trois isotopes, <strong>et</strong> les mesuresde masse mo<strong>la</strong>ire effectuées par spectrométrie demasse sur <strong>du</strong> silicium naturel ont été obtenues avec uneincertitude re<strong>la</strong>tive de 1,4 × 10 −7 ; <strong>la</strong> dispersion observéea montré que des biais non négligeables peuvent se manifester.C’est donc <strong>la</strong> construction d’un monocristal ensilicium enrichi en isotope le plus naturellement abondantqui a été entrepris. Par ailleurs <strong>la</strong> maille <strong>du</strong> siliciumest de type diamant, cubique à faces centrées (CFC) ; enpratique, elle présente des <strong>la</strong>cunes ou contient des impur<strong>et</strong>éssubstitutionnelles ou interstitielles, qui entraînentdes dislocations <strong>du</strong> réseau cristallin dont il faut évaluer <strong>la</strong>proportion, <strong>et</strong> modifient le nombre moyen d’atomes parmaille.Une telle expérience est en cours d’achèvement. Ellerequiert des compétences pluridisciplinaires, des moyenspeu communs pour <strong>la</strong> fabrication de sphères en monocristalde silicium <strong>et</strong> des techniques lourdes de caractérisation.Elle a nécessité le regroupement d’équipes dans lecadre d’un <strong>la</strong>rge consortium international. Elle con<strong>du</strong>iraprochainement à une incertitude re<strong>la</strong>tive proche de 10 −8pour <strong>la</strong> détermination de <strong>la</strong> <strong>constante</strong> d’Avogadro.4.2.2. Ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> wattL’expérience de <strong>la</strong> ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> watt repose sur le principed’une comparaison indirecte de puissances virtuellesmécanique <strong>et</strong> électrique. Elle a été imaginée en 1976 parl’ang<strong>la</strong>is Kibble [32]. L’expérience se déroule en deuxphases, l’une dite statique, l’autre dynamique.Dans <strong>la</strong> phase statique, on compare au moyen d’unfléau de ba<strong>la</strong>nce le poids engendré par une masse m soumiseà l’accélération locale de <strong>la</strong> pesanteur g (une forced’origine mécanique) <strong>et</strong> <strong>la</strong> force de Lap<strong>la</strong>ce exercée surun circuit électrique p<strong>la</strong>cé dans un champ magnétique(<strong>la</strong> composante verticale d’une force d’origine électromagnétique).Dans le cas simple d’un con<strong>du</strong>cteur rectilignede longueur l, parcouru par un courant I, p<strong>la</strong>cé dansun champ d’in<strong>du</strong>ction B constant <strong>et</strong> homogène de tellesorte que <strong>la</strong> force de Lap<strong>la</strong>ce s’exerçant sur celui-ci soitPROTOTYPE DU KILOGRAMME ET CONSTANTE PHYSIQUE FONDAMENTALE ... 9


verticale, l’équilibre de <strong>la</strong> ba<strong>la</strong>nce, moyennant quelqueshypothèses de configuration géométrique parfaite, se tra<strong>du</strong>itpar l’équation :m · g = I · l · B (2)L’exactitude d’une telle comparaison est principalementlimitée par <strong>la</strong> détermination expérimentale de <strong>la</strong>carte <strong>du</strong> champ d’in<strong>du</strong>ction magnétique <strong>et</strong> de <strong>la</strong> géométrie<strong>du</strong> con<strong>du</strong>cteur électrique, c’est à dire <strong>du</strong> pro<strong>du</strong>it Bl.L’idée de Kibble a été de remédier à c<strong>et</strong>te difficulté eneffectuant une mesure complémentaire en phase dynamique.C<strong>et</strong>te deuxième phase requiert seulement l’invariancede l’in<strong>du</strong>ction magnétique <strong>et</strong> de <strong>la</strong> géométrie <strong>du</strong> con<strong>du</strong>cteurpendant le temps de <strong>la</strong> mesure. Elle consiste à dép<strong>la</strong>cerà vitesse <strong>constante</strong> v, suivant une trajectoire verticale,le con<strong>du</strong>cteur en boucle ouverte dans le champ magnétiqueB considéré. Une force électromotrice ε est in<strong>du</strong>itedans le con<strong>du</strong>cteur ; elle peut être mesurée. Dans le casd’une géométrie parfaite, elle est telle que :ε = −v · l · B (3)En combinant (2) <strong>et</strong> (3), on peut éliminer B <strong>et</strong> l <strong>et</strong> onobtient l’égalité virtuelle annoncée :m · g · v = −ε · I (4)C<strong>et</strong>te re<strong>la</strong>tion (4) reste vraie pour des géométries <strong>et</strong>cartes <strong>du</strong> champ présentant des écarts à <strong>la</strong> géométrie parfaiteétudiée ici, dès que ceux-ci sont invariants dans l<strong>et</strong>emps <strong>et</strong> selon l’axe vertical.Pour accéder à I, on p<strong>la</strong>ce en série avec le con<strong>du</strong>cteurune résistance étalon R <strong>et</strong> on mesure <strong>la</strong> différencede potentiel U aux bornes de R. On peut mesurer avecune grande exactitude les tensions ε <strong>et</strong> U <strong>et</strong> <strong>la</strong> résistanceélectrique R par comparaison à des étalons électriquesreposant sur des eff<strong>et</strong>s quantiques macroscopiques (eff<strong>et</strong>Josephson <strong>et</strong> eff<strong>et</strong> Hall quantique, respectivement). Cesétalons perm<strong>et</strong>tent de rattacher les valeurs de ces tensions<strong>et</strong> résistances aux <strong>constante</strong>s de Josephson K J <strong>et</strong>de von Klitzing R K . En utilisant les modèles théoriquesassociés à ces eff<strong>et</strong>s quantiques, ces <strong>constante</strong>s sont ellesmêmesreliées à <strong>la</strong> <strong>constante</strong> de P<strong>la</strong>nck h <strong>et</strong> à <strong>la</strong> charge del’électron e selon :K J = 2eh <strong>et</strong> R K = h (5)e 2En exprimant les tensions <strong>et</strong> <strong>la</strong> résistance par leursvaleurs obtenues à partir de ces <strong>constante</strong>s, <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tion (4)devient :m · g · v = A · h, (6)où A est une quantité qui dépend de grandeurs mesurablesavec une très haute exactitude (en particulier de<strong>la</strong> fréquence d’irradiation des jonctions Josephson <strong>et</strong> desnombres entiers liés à <strong>la</strong> quantification des valeurs de référence).On remarque que seule <strong>la</strong> <strong>constante</strong> de P<strong>la</strong>nck happaraît désormais : l’expérience est donc, au travers de<strong>la</strong> re<strong>la</strong>tion (6), une mesure de <strong>la</strong> <strong>constante</strong> de P<strong>la</strong>nck.La masse m, de l’ordre de 1 kg, peut être raccordée àmieux que 10 −8 en valeur re<strong>la</strong>tive au prototype international<strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong>. Pour conserver une telle exactitude,il est nécessaire de mesurer les autres grandeurs cinématiques(accélération de <strong>la</strong> pesanteur, vitesse <strong>du</strong> circuit...)intervenant dans (6) avec une incertitude re<strong>la</strong>tive au plus<strong>du</strong> même ordre de grandeur, ce qui peut être envisagé.L’une des difficultés de c<strong>et</strong>te expérience tient au faitque chaque grandeur <strong>physique</strong> intervenant dans l’expériencedoit être mesurée avec <strong>la</strong> meilleure incertitudequ’il est actuellement possible d’atteindre <strong>et</strong> que les mesuresde toutes ces grandeurs doivent être effectuées quasimentde manière simultanée. En outre, les eff<strong>et</strong>s desgrandeurs d’influence (vibrations, température, défautsd’alignement...)doiventêtreré<strong>du</strong>itsautantquepossiblepour ne pas affecter l’exactitude de <strong>la</strong> mesure de h.En pratique, pour atteindre le degré d’exactitude recherché,les expériences de ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> watt doivent fonctionnersous vide. C<strong>et</strong>te configuration environnementaleperm<strong>et</strong> en eff<strong>et</strong> d’éliminer :– <strong>la</strong> poussée d’Archimède dont <strong>la</strong> correction intro<strong>du</strong>itune composante d’incertitude non négligeable ;– les dép<strong>la</strong>cements de gaz <strong>et</strong> les échanges thermiquespar convection, néfastes pour <strong>la</strong> stabilité de l’équilibrede <strong>la</strong> ba<strong>la</strong>nce <strong>et</strong> <strong>du</strong> champ magnétique (issu enpratique d’un aimant permanent ou d’un circuit magnétiquesupracon<strong>du</strong>cteur);– <strong>la</strong> correction <strong>du</strong>e à l’indice <strong>du</strong> milieu pour les mesuresnécessairement interférométriques de position<strong>et</strong> de vitesse, qui intro<strong>du</strong>it une composante d’incertitudenon négligeable ;– <strong>la</strong> contamination superficielle de <strong>la</strong> masse, sourced’instabilité, pour peu qu’on maîtrise son raccordementà une référence conservée dans l’air.Le développement d’une expérience de ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong>watt fait donc appel à un <strong>la</strong>rge champ de compétences<strong>et</strong> à une technicité éprouvée dans de nombreux domainesde <strong>la</strong> métrologie. Il exige des investissements lourds de <strong>la</strong>part des pays qui s’y sont engagés.4.2.3. Les principales expériences de ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> wattLe principe de <strong>la</strong> ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> watt ayant été proposépar Kibble, c’est naturellement au National Physical Laboratory(NPL) au Royaume Uni, que <strong>la</strong> réalisation de<strong>la</strong> première expérience a été entreprise en 1977 [33–36].L’expérience a été transférée en 2009 au National ResearchCouncil (NRC) au Canada.Aux États-Unis d’Amérique, le National Institute ofStandards and Technology (NIST, à l’époque NBS) acommencé dès 1980 <strong>la</strong> réalisation d’une expérience deba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> watt, aujourd’hui <strong>la</strong> plus imposante en taille(environ 5 m de haut) [37–40] <strong>et</strong> <strong>la</strong> plus pro<strong>du</strong>ctive enrésultats.L’office fédéral de métrologie suisse (METAS) a développéà partir de 1997 une nouvelle génération de10 REVUE FRANÇAISE DE MÉTROLOGIE n o 22, Volume 2010-2


a<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> watt en cherchant à ré<strong>du</strong>ire <strong>la</strong> taille del’expérience pour mieux maîtriser les grandeurs d’influence[28, 41, 42]. La ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> watt suisse tient dansun volume de l’ordre d’un mètre cube <strong>et</strong> <strong>la</strong> masse d<strong>et</strong>ransfert utilisée n’est que de 100 g.En 2004, le Bureau international des poids <strong>et</strong> mesures(BIPM) s’est engagé dans un tel proj<strong>et</strong> [43–45]. L’unedes particu<strong>la</strong>rités de c<strong>et</strong>te expérience tient au fait que lesphases statique <strong>et</strong> dynamique seront réalisées simultanément: en eff<strong>et</strong>, grâce à l’utilisation d’un circuit électriquesupracon<strong>du</strong>cteur, les eff<strong>et</strong>s électromécaniques intervenantdans les deux étapes de l’expérience sont, dansle cas idéal, découplés.Le Bureau national de métrologie (BNM), puis le Laboratoirenational de métrologie <strong>et</strong> d’essais (LNE), pilotessuccessifs de <strong>la</strong> métrologie française, ont <strong>la</strong>ncé <strong>et</strong>soutenu depuis 2002 <strong>la</strong> réalisation d’une expérience deba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> watt. Bénéficiant de l’expérience de ses prédécesseurs(NPL, NIST <strong>et</strong> METAS), l’expérience proposedes solutions scientifiques <strong>et</strong> technologiques innovantes[46–55]. Les principaux éléments sont réalisés <strong>et</strong>testés ; l’assemb<strong>la</strong>ge est en cours ; l’expérience devraitêtre opérationnelle <strong>et</strong> perm<strong>et</strong>tre d’obtenir une premièrevaleur de h à l’horizon 2011–2012, avec une incertitudequi pourra être améliorée au fil des années.D’autres <strong>la</strong>boratoires nationaux ont maintenant leproj<strong>et</strong> de développer ce type d’expérience, chacun apportantdes variantes dans sa conception. On peut ainsi citerpar exemple les proj<strong>et</strong>s néozé<strong>la</strong>ndais [56] <strong>et</strong> chinois [57].4.3. Les premiers résultatsPour l’instant, seules les expériences ang<strong>la</strong>ises <strong>et</strong>américaines ont permis de réaliser le lien entre l’unitéde masse <strong>et</strong> <strong>la</strong> <strong>constante</strong> de P<strong>la</strong>nck avec une exactitudeproche de celle qui est recherchée. La figure 6 présenteles valeurs expérimentales de <strong>la</strong> <strong>constante</strong> de P<strong>la</strong>nck obtenues<strong>et</strong> publiées depuis 1979 par différentes méthodes.On remarque que <strong>la</strong> dernière valeur ajustée Codata (Comitteeon Data for Science and Technology) de 2006 estpresque identique à <strong>la</strong> valeur obtenue en 2005 par le NISTavec l’expérience de ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> watt. Ce<strong>la</strong> s’expliquepar <strong>la</strong> méthode pondérée d’ajustement de valeur adoptéepar Codata. La valeur <strong>la</strong> plus récente de <strong>la</strong> <strong>constante</strong>de P<strong>la</strong>nck, obtenue par le NPL en 2007 [35] avec c<strong>et</strong>teexpérience, est :h = 6, 626 070 95(44) × 10 −34 J · s,avec une incertitude re<strong>la</strong>tive de 6,6 × 10 −8 .La valeur obtenue dès 1998 par le NIST a été confirméeen 2005 [38] avec une incertitude affinée, soit :h = 6, 626 069 01(34) × 10 −34 J · sL’incertitude re<strong>la</strong>tive publiée en 2005 est 5,2 × 10 −8[38] ; elle a été révisée en 2007 <strong>et</strong> ré<strong>du</strong>ite à 3,6 × 10 −8[39].Fig. 6. – Valeurs expérimentales de <strong>la</strong> <strong>constante</strong> de P<strong>la</strong>nck. Lesdeux lignes verticales correspondent à sa dernière valeur ajustéeCodata 2006. Dans le cadre inférieur gauche, est représentéel’exactitude re<strong>la</strong>tive 2 × 10 −8 énoncée comme nécessaire pourenvisager un changement de <strong>la</strong> définition <strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong> (Extraitde [58]).L’écart re<strong>la</strong>tif entre les valeurs obtenues par le NPL <strong>et</strong>le NIST est supérieur (10 −6 ) aux incertitudes de mesure.La cause de c<strong>et</strong> écart n’a toujours pas pu être mise enévidence à ce jour.La valeur de <strong>la</strong> <strong>constante</strong> d’Avogadro publiée en2003 [59] à partir d’un monocristal de silicium naturelest :N A = 6, 022 135 3(18) × 10 23 mol −1 ,avec une incertitude re<strong>la</strong>tive de 3,2 × 10 −7 .Elle perm<strong>et</strong> de dé<strong>du</strong>ire une valeur de h par <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tion :h = cA r(e)M u α 2(7)2R ∞ N Aoù <strong>la</strong> contribution à l’incertitude de <strong>la</strong> masse atomiquere<strong>la</strong>tive de l’électron A r (e), de <strong>la</strong> <strong>constante</strong> de RydbergR ∞ <strong>et</strong> de <strong>la</strong> <strong>constante</strong> de structure fine α sont meilleuresque 10 −8 ; <strong>la</strong> vitesse de <strong>la</strong> lumière c <strong>et</strong> <strong>la</strong> <strong>constante</strong> demasse mo<strong>la</strong>ire M u étant connues exactement, c’est l’incertitudede N A qui apporte <strong>la</strong> contribution dominante.La valeur de h dé<strong>du</strong>ite de c<strong>et</strong>te mesure de <strong>la</strong> <strong>constante</strong>PROTOTYPE DU KILOGRAMME ET CONSTANTE PHYSIQUE FONDAMENTALE ... 11


d’Avogadro présente un écart re<strong>la</strong>tif significatif avec <strong>la</strong>valeur <strong>du</strong> NIST de l’ordre de 10 −6 [60].Le résultat le plus récent obtenu à partir de deuxsphères en monocristal de silicium enrichi en isotope28 Si [61] donne une valeur moyenne de N A :N A = 6, 022 140 84(18) × 10 23 mol −1 .Avec c<strong>et</strong>te nouvelle détermination, l’incertitude re<strong>la</strong>tiveest de 3,0×10 −8 , elle a donc été améliorée d’un ordrede grandeur. Par rapport à <strong>la</strong> dernière valeur de h obtenueau moyen de <strong>la</strong> ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> watt <strong>du</strong> NIST, c<strong>et</strong>te valeur deN A con<strong>du</strong>it à un écart re<strong>la</strong>tif sur h de 1,5 × 10 −7 .5. Vers un système d’unités basé sur des <strong>constante</strong>s<strong>fondamentale</strong>s de <strong>la</strong> nature5.1. Une nouvelle définition pour l’unité de masseLe principe d’un changement de définition de l’unitéde masse est acquis au sein de <strong>la</strong> communauté des physiciens<strong>et</strong> métrologues : en reliant l’unité à une <strong>constante</strong> de<strong>la</strong> nature, il perm<strong>et</strong>tra de corriger les inconvénients de <strong>la</strong>définition actuelle <strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong>. Mais une <strong>la</strong>rge fractionde <strong>la</strong> communauté scientifique est convaincue quele Système international d’unités doit désormais évoluervers un SI basé sur des <strong>constante</strong>s <strong>physique</strong>s <strong>fondamentale</strong>sou atomiques [62–66]. On peut même envisager unnouveau système ne faisant plus <strong>la</strong> distinction entre lesunités de base <strong>et</strong> les unités dérivées [66].En ce qui concerne <strong>la</strong> masse, les avis sont contrastés: certains estiment qu’il faut procéder très rapidement[66] <strong>et</strong> que dès 2007, <strong>la</strong> Conférence générale des poids<strong>et</strong> mesures (CGPM) aurait pu sanctionner une nouvelledéfinition. Plus certainement, <strong>la</strong> CGPM programmée en2011 pourrait se prononcer sur le principe, <strong>et</strong> reporter<strong>la</strong> mise en œuvre effective après une <strong>la</strong>rge diffusionpréa<strong>la</strong>ble d’informations aux communautés concernées,après l’établissement des recommandations indispensablespour <strong>la</strong> mise en pratique des définitions <strong>et</strong> aprèsle succès des expériences engagées, à partir desquelles leCodata pourra établir des valeurs recommandées pour les<strong>constante</strong>s concernées.D’après <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tion (7), figer <strong>la</strong> valeur numérique de<strong>la</strong> <strong>constante</strong> de P<strong>la</strong>nck ou de <strong>la</strong> <strong>constante</strong> d’Avogadro aobligatoirement une conséquence sur <strong>la</strong> valeur de l’autre<strong>constante</strong> <strong>et</strong> sur l’incertitude associée. Le changementde définition de l’unité de masse aura également desconséquences sur <strong>la</strong> mise en œuvre d’autres unités, liéespar exemple à <strong>la</strong> quantité de matière ou aux grandeursélectriques. Il a donc en eff<strong>et</strong> vocation à provoquer unerefonte <strong>du</strong> Système international d’unités. En figeant <strong>la</strong>valeur numérique d’autres <strong>constante</strong>s telles que <strong>la</strong> chargede l’électron e (évidemment en lieu <strong>et</strong> p<strong>la</strong>ce de <strong>la</strong> perméabilitémagnétique <strong>du</strong> vide) ou <strong>la</strong> <strong>constante</strong> de Boltzmannk B on pourrait é<strong>la</strong>borer un système d’unités très<strong>la</strong>rgement basé sur des <strong>constante</strong>s <strong>physique</strong>s <strong>fondamentale</strong>s[25, 62].L’intérêt de l’expérience de <strong>la</strong> ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> watt est,dans ce contexte, encore renforcé. C<strong>et</strong>te expérience, enconjonction avec <strong>la</strong> détermination de R K , con<strong>du</strong>it à unedétermination locale de K J <strong>et</strong> donc – en supposant exactesles re<strong>la</strong>tions théoriques (5), à ce jour non démenties -de <strong>la</strong> charge de l’électron e. Une valeur de <strong>la</strong> masse del’électron peut par ailleurs être dé<strong>du</strong>ite indirectement de<strong>la</strong> valeur de h, en particulier par <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tion (7). Enfin, <strong>la</strong>comparaison des valeurs des rapports h/m issusde<strong>la</strong>ba<strong>la</strong>nce<strong>du</strong> watt <strong>et</strong> d’expériences de <strong>physique</strong> atomique peutcon<strong>du</strong>ire à une détermination de <strong>la</strong> <strong>constante</strong> d’Avogadroindépendante de l’électrodynamique quantique. La comparaisonde <strong>la</strong> valeur ainsi obtenue de N A avec celle issuede l’expérience de <strong>la</strong> sphère de silicium constitue parailleurs un triangle métrologique dont le but est d’apporterdes informations sur l’exactitude des re<strong>la</strong>tions théoriquesdéfinissant les valeurs de K J <strong>et</strong> R K [67].La ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> watt constitue donc un élément clefpouvant contribuer à une <strong>la</strong>rge évolution <strong>du</strong> SI vers unsystème essentiellement basé sur des <strong>constante</strong>s <strong>physique</strong>s<strong>fondamentale</strong>s ou des propriétés atomiques [68].C<strong>et</strong>te évolution perm<strong>et</strong>trait de leur conférer un caractèreuniversel <strong>et</strong> impérissable, conforme à <strong>la</strong> <strong>physique</strong> actuelle.5.2. Mise en pratique de <strong>la</strong> nouvelle définitionSi tous les métrologues reconnaissent que <strong>la</strong> définitionactuelle <strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong> basée sur un étalon matérieln’est pas satisfaisante <strong>et</strong> doit être changée, <strong>la</strong> plupartd’entre eux estiment que <strong>la</strong> réflexion préa<strong>la</strong>ble doitêtre poursuivie, en particulier pour préciser les conditionsde mise en pratique d’une nouvelle définition. Mais pourcertains, il est inutile d’attendre [66]. En eff<strong>et</strong>, fixer <strong>la</strong> valeurnumérique de h ou de N A ré<strong>du</strong>it de manière automatique<strong>et</strong> significative l’incertitude de nombreuses autres<strong>constante</strong>s <strong>fondamentale</strong>sce qui ouvre de nouvelles pistesbien au-delà <strong>du</strong> champ de <strong>la</strong> métrologie.Bien enten<strong>du</strong> <strong>la</strong> mise en pratique d’une telle nouvelledéfinition requiert plusieurs développements expérimentauxnon encore aboutis. Il apparaîtrait donc nécessairede maintenir provisoirement le prototype international <strong>du</strong><strong>kilogramme</strong> en lui affectant une valeur conventionnelleexacte (apriori1 kg). Une telle décision reviendrait, pourune période assez longue, à créer une échelle pratiqued’unité pour <strong>la</strong> masse, comme il en existe aujourd’huipour les mesures de température <strong>et</strong>, pour partie, en électricité.Coexisteraient alors deux systèmes d’unités :– un système (le SI) basé sur des <strong>constante</strong>s <strong>physique</strong>s<strong>fondamentale</strong>s ou atomiques pour les physiciens ;– un système pratique pour <strong>la</strong> masse <strong>et</strong> ses grandeursdérivées, référencé au prototype international<strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong>, utilisé dans l’in<strong>du</strong>strie ou le commerce<strong>et</strong>, de fait, dans une grande partie de <strong>la</strong> recherchescientifique <strong>et</strong> technique.Ce « <strong>kilogramme</strong> conventionnel » ne résoudrait doncaucune des difficultés rencontrées aujourd’hui. . .12 REVUE FRANÇAISE DE MÉTROLOGIE n o 22, Volume 2010-2


Il faut cependant reconnaître qu’une « mise en pratiquede l’unité » (c’est-à-dire <strong>la</strong> constitution d’un premierétalon matériel caractérisé) basée sur <strong>la</strong> ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong>watt, sur une sphère en monocristal de silicium enrichiou sur toute autre expérience perm<strong>et</strong>tant de raccorder unemasse macroscopique à une <strong>constante</strong> <strong>physique</strong> <strong>fondamentale</strong>ou atomique n’est pas simple. Une étude de <strong>la</strong>stabilité <strong>du</strong> prototype international, effectuée par comparaisonà une réalisation de l’unité de ce type, s’avèreindispensable. Elle a vocation à <strong>du</strong>rer plusieurs années,afin de ne pas rompre l’excellent accord existant actuellemententre les étalons de masse au niveau international. Ilsera certainement nécessaire d’associer au prototype internationald’autres « <strong>kilogramme</strong>s » pour former des lotsd’étalons témoins (tant au niveau international que national)perm<strong>et</strong>tant de garantir, en pratique, <strong>la</strong> transition entrel’ancienne <strong>et</strong> <strong>la</strong> nouvelle définition.Aussi, plusieurs préa<strong>la</strong>bles au changement de <strong>la</strong> définitionsemblent s’imposer :– l’existence d’un consensus international obtenu à partird’un nombre suffisant de résultats redondants fournispar différentes expériences indépendantes avecune incertitude re<strong>la</strong>tive de l’ordre de 10 −8 ;– une méthode <strong>et</strong> des critères d’ajustement consensuelspour figer <strong>la</strong> valeur numérique de <strong>la</strong> <strong>constante</strong> <strong>physique</strong><strong>fondamentale</strong> choisie afin d’éviter toute remiseen cause à court terme ;– une exactitude pour <strong>la</strong> détermination de <strong>la</strong> valeur numériquede <strong>la</strong> <strong>constante</strong> choisie perm<strong>et</strong>tant d’évitertoute conséquence pratique pour les nombreux utilisateurs<strong>et</strong>, en particulier de maintenir les valeursd’ajustage des poids, que ce soit au moment <strong>du</strong> changementde définition ou postérieurement suite à desajustements ou corrections.Pour <strong>la</strong> mise en pratique de <strong>la</strong> future définition del’unité de masse, quelle qu’elle soit, <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tion (7), reliant<strong>la</strong> <strong>constante</strong> d’Avogadro <strong>et</strong> <strong>la</strong> <strong>constante</strong> de P<strong>la</strong>nck,perm<strong>et</strong> d’utiliser aussi bien une sphère monocristallinede silicium enrichi qu’une expérience de ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> watt.Or les avantages <strong>et</strong> inconvénients associés à ces méthodessont différents.Par exemple, utiliser un artefact en silicium enrichiest un moyen simple à m<strong>et</strong>tre en œuvre dès que l’on disposed’un comparateur de masse adapté. Mais, comm<strong>et</strong>out artefact, chaque sphère a ses propres caractéristiques<strong>et</strong> comportement : il sera indispensable de maîtriser saconservation <strong>et</strong> de contrôler sa stabilité dans le temps.L’expérience de ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> watt présente l’avantagede perm<strong>et</strong>tre, sur les montages employés, uneamélioration permanente. En revanche c’est une expériencelourde, exigeant une maintenance rigoureuse <strong>et</strong> desmoyens humains <strong>et</strong> matériels importants.Disposer de deux méthodes, basées sur des principes<strong>physique</strong>s différents, pour concourir au même but, constituedonc un réel atout : l’artefact en silicium pourraêtre validé périodiquement par <strong>la</strong> démarche expérimentalem<strong>et</strong>tant en œuvre <strong>la</strong> ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> watt.6. Les futurs étalons de transfert6.1. La future chaîne d’étalonnageLes conséquences d’une nouvelle définition sur lesétalons nationaux de transfert <strong>et</strong> leurs conditions de raccordementsont inévitables. Mais ces modifications ne devrontpas avoir d’impact sur les méthodes <strong>et</strong> les moyensdéployés par les <strong>la</strong>boratoires accrédités <strong>et</strong> les utilisateurs,ni bouleverser les réglementations ou les normes en vigueur<strong>et</strong> les recommandations de <strong>la</strong> métrologie légale.Certains [65] avancent que <strong>la</strong> contribution de <strong>la</strong> composantesupplémentaire d’incertitude intro<strong>du</strong>ite par <strong>la</strong>nouvelle mise en pratique deviendra rapidement négligeableau fur <strong>et</strong> à mesure des étapes de dissémination<strong>et</strong> n’aura pas de conséquence pour les « poids » faisantl’obj<strong>et</strong> d’un c<strong>la</strong>ssement. D’autres [69] au contraire insistentsur le fait que les incertitudes re<strong>la</strong>tives aux nouvellesréalisations de l’unité de masse doivent être strictementlimitées <strong>et</strong> correctement maîtrisées. Les valeursdes incertitudes de <strong>la</strong> mise en pratique doivent satisfaire àdes conditions exigeantes afin que <strong>la</strong> propagation de cesincertitudes vers les poids de c<strong>la</strong>sse E 1 n’ait pas de conséquencesur l’ajustage de ces derniers.Apriori, seuls les <strong>la</strong>boratoires nationaux de métrologieauront à adapter leurs méthodes <strong>et</strong> leurs moyens pourraccorder des références nationales perm<strong>et</strong>tant d’assurer<strong>la</strong> dissémination dans les mêmes conditions de performancequ’actuellement.Les étalons de transfert des <strong>la</strong>boratoires nationaux devronten eff<strong>et</strong> satisfaire un certain nombre de critères. Ence qui concerne le matériau constituant ces étalons (quidoit bien sûr satisfaire les exigences énoncées dans <strong>la</strong>Sect. 3.2), deux critères supplémentaires sont à considérer:– présenter une susceptibilité magnétique aussi faibleque possible. Ce critère est particulièrement déterminantdans l’expérience de ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> watt où il estnécessaire de créer une in<strong>du</strong>ction magnétique intense(comprise entre 0,1 T <strong>et</strong> 1 T) qui, malgré le confinementdans l’aimant, peut engendrer des gradientsde champ magnétique non négligeables autour de <strong>la</strong>masse de transfert.– présenter un comportement stable <strong>et</strong> maîtrisable dansle vide. La valeur de l’étalon de transfert devra êtredéterminée sous vide avec une incertitude re<strong>la</strong>tive <strong>du</strong>même ordre de grandeur que dans l’air. Il faudra, enparticulier, maîtriser <strong>la</strong> variation de masse <strong>du</strong>e auxphénomènes de sorption lors <strong>du</strong> passage de l’air auvide.Ces deux points ont suscité de nombreuses études, encoreen cours pour <strong>la</strong> plupart, sur les propriétés des matériaux<strong>et</strong> leur comportement de surface lors de leur transfertentre l’air <strong>et</strong> le vide.PROTOTYPE DU KILOGRAMME ET CONSTANTE PHYSIQUE FONDAMENTALE ... 13


6.2. Le choix des matériauxPour les expériences impliquant un monocristal, lesilicium naturel avait été sélectionné à cause de son importanteutilisation dans l’in<strong>du</strong>strie électronique : les propriétés<strong>du</strong> matériau étaient très bien connues <strong>et</strong> les technologiesde fabrication éprouvées [70]. La réalisation desphère en silicium de 1 kg a été mise au point par le <strong>la</strong>boratoireaustralien NMI utilisant une technique de polissageabrasif pour <strong>la</strong> finition [71]. Pour améliorer l’exactitudede <strong>la</strong> détermination de <strong>la</strong> masse mo<strong>la</strong>ire compte tenude <strong>la</strong> présence des trois isotopes naturels, on a été tentéde substituer le germanium au silicium, mais l’avancementmoindre des technologies de fabrication s’est avéréerédhibitoire à ce stade. On a donc cherché à enrichirle silicium de son isotope le plus abondant, par méthodesde centrifugation de SiF 4 gazeux développées dans des<strong>la</strong>boratoires russes. La croissance d’un cristal de 4,8 kgde silicium enrichi à 99,985 % en isotope 28 a finalementété effectuée en 2007 par le <strong>la</strong>boratoire berlinois IKZ.Pour le proj<strong>et</strong> de ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> watt, on s’est orientévers <strong>la</strong> recherche d’alliages métalliques de très faible susceptibilitémagnétique pour <strong>la</strong> réalisation d’une massede transfert de forme cylindrique. Premier choix, l’orpur est un métal noble de susceptibilité magnétiqueégale à −3,4 × 10 −5 compatible avec l’expérience de ba<strong>la</strong>nce<strong>du</strong> watt, bien meilleure que celle <strong>du</strong> p<strong>la</strong>tine iridié(+25 × 10 −5 ). Des artefacts en or pur ont été réalisés,ainsi que quelques pièces en cuivre de haute pur<strong>et</strong>é (présentantaussi une très faible susceptibilité magnétique)recouvert d’un p<strong>la</strong>quage d’or (afin de ré<strong>du</strong>ire l’oxydationsuperficielle de ce matériau dans l’air) [72]. Mais lesexigences en matière de <strong>du</strong>r<strong>et</strong>é, rappelées dans <strong>la</strong> section3.2, se sont avérées rédhibitoires. Des études plus pousséesont été engagées à partir de 2003 sous l’impulsionde <strong>la</strong> métrologie française, dans le cadre d’un proj<strong>et</strong> européenEuram<strong>et</strong> [52], coordonné par le LNE-INM avecune forte implication <strong>du</strong> LNE. Après quelques essais surdes alliages dentaires à base d’or [73], quelques matériauxparmi lesquels un alliage quaternaire à 75 % d’or,un alliage amorphe à base de p<strong>la</strong>tine <strong>et</strong> l’iridium pur ontété sélectionnés à partir de 2007. Bien que le proj<strong>et</strong> européenait pris fin début 2008, le <strong>la</strong>boratoire commun demétrologie LNE-CNAM poursuit ses investigations surces trois matériaux.On peut remarquer que <strong>la</strong> susceptibilité magnétique<strong>du</strong> silicium rend ce matériau compatible avec les exigencesde <strong>la</strong> ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> watt.6.3. Le passage air-videLa réalisation de comparaisons de masse sous videprésente l’avantage d’éliminer les eff<strong>et</strong>s de convection<strong>et</strong> surtout l’eff<strong>et</strong> de <strong>la</strong> poussée de l’air, dont <strong>la</strong> compensationimpose d’appliquer au résultat une correctiondifférentielle qui intro<strong>du</strong>it une composante d’incertitudeimportante sur l’incertitude composée d’étalonnage desétalons de référence <strong>et</strong> de transfert des <strong>la</strong>boratoires nationaux.De plus, dans <strong>la</strong> perspective d’un changement dedéfinition accompagné d’une mise en pratique nécessitantde p<strong>la</strong>cer <strong>la</strong> ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> watt ou le monocristal de siliciumsous vide, il devient indispensable d’étudier le comportementdes étalons de transfert lors <strong>du</strong> passage air-vide. Ilexiste désormais sur le marché des comparateurs de <strong>kilogramme</strong>sde haute performance équipés d’une enceinte àvide.Mais le passage de l’air au vide intro<strong>du</strong>it une variationde <strong>la</strong> masse <strong>physique</strong> de l’artefact considéré, <strong>du</strong>eà <strong>la</strong> modification des couches superficielles adsorbées.L’une des principales molécules impliquées dans ces phénomènesplus ou moins réversibles de sorption est <strong>la</strong>molécule d’eau présente dans l’air ambiant <strong>et</strong>, en pratique,sur toutes les surfaces en contact avec l’air ambiant.Pour évaluer c<strong>et</strong> eff<strong>et</strong>, de nombreux travaux ontété menés, utilisant des techniques d’analyse des couchesde surface (ellipsométrie, spectrométrie de masse...) <strong>et</strong>des techniques gravimétriques, appliquées aussi bien surles matériaux courants de <strong>la</strong> métrologie des masses (p<strong>la</strong>tineiridié <strong>et</strong> acier inoxydable) que sur les matériauxintéressant les expériences pour le raccordement à une<strong>constante</strong> <strong>physique</strong> <strong>fondamentale</strong> (silicium, iridium, alliaged’or...). Les conclusions sont publiées [74–76].L’interprétation des résultats de ces études est d’autantplus complexe que le comportement <strong>du</strong> matériau considérélors <strong>du</strong> passage air-vide dépend aussi de <strong>la</strong> méthodede n<strong>et</strong>toyage initiale appliquée (par exemple thermodésorptionsous vide), des conditions de conservation(par exemple maintien sous gaz neutre) <strong>et</strong> <strong>du</strong> protocolede transfert air-vide lui-même.Le développement des comparaisons sous vide nesupprime aucunement <strong>la</strong> nécessité de mesurer <strong>la</strong> massed’étalons de référence dans l’air ou sous gaz neutre avec<strong>la</strong> meilleure exactitude possible. Il est donc indispensablede ré<strong>du</strong>ire encore <strong>la</strong> contribution à l’incertitude de <strong>la</strong> correctiondifférentielle de poussée de l’air. Une méthodegravimétrique pour déterminer <strong>la</strong> masse volumique del’air a été développée [9, 77, 78] en utilisant des artefactspesés sous vide <strong>et</strong> dans l’air. Elle perm<strong>et</strong> de ré<strong>du</strong>ire significativement<strong>la</strong> composante d’incertitude concernée <strong>et</strong>diminue de plus de 30 % de l’incertitude d’étalonnagedans l’air d’un étalon.7. ConclusionLe <strong>kilogramme</strong> est <strong>la</strong> seule des sept unités de base<strong>du</strong> Système international d’unités (SI) qui soit encoreaujourd’hui définie par un étalon matériel : le prototypeinternational <strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong>. Pour des raisons dedisponibilité, de pérennité <strong>et</strong> d’universalité, il est indispensablede changer <strong>la</strong> définition de l’unité de masse enétablissant une re<strong>la</strong>tion avec une <strong>constante</strong> <strong>physique</strong> <strong>fondamentale</strong>ou atomiquePour redéfinir l’unité de masse, il convient d’abord demesurer avec une incertitude re<strong>la</strong>tive de l’ordre de 10 −8une <strong>constante</strong> <strong>physique</strong> <strong>fondamentale</strong> ou atomique dont<strong>la</strong> dimension fait intervenir <strong>la</strong> masse, par rapport à unemasse macroscopique raccordée au prototype international<strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong>. On peut alors attribuer par convention14 REVUE FRANÇAISE DE MÉTROLOGIE n o 22, Volume 2010-2


une valeur fixée à <strong>la</strong> valeur numérique de <strong>la</strong> <strong>constante</strong>considérée <strong>et</strong> définir (implicitement) l’unité de masse àpartir de celle-ci.L’évolution de l’unité de masse serait alors simi<strong>la</strong>ire àcelle dont à fait l’obj<strong>et</strong> <strong>la</strong> définition <strong>du</strong> mètre en 1983 : ens’appuyant sur l’hypothèse de pérennité <strong>et</strong> d’uniformitéde <strong>la</strong> vitesse de propagation c de <strong>la</strong> lumière dans le vide,<strong>la</strong> CGPM a fixé <strong>la</strong> valeur numérique de c, entraînant<strong>la</strong>définition <strong>du</strong> mètre à partir de celle de <strong>la</strong> seconde.Les deux expériences les plus avancées sont <strong>la</strong> mesurede <strong>la</strong> <strong>constante</strong> d’Avogadro à l’aide d’un monocristal desilicium <strong>et</strong> <strong>la</strong> mesure de <strong>la</strong> <strong>constante</strong> de P<strong>la</strong>nck par l’expériencede <strong>la</strong> ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> watt. L’expérience <strong>du</strong> monocristalde silicium repose sur <strong>la</strong> réalisation d’un artefact ; nécessairepour contribuer à établir <strong>et</strong> matérialiser efficacementune nouvelle définition de l’unité de masse, elle sembleà elle seule ne pas pouvoir servir de base unique à c<strong>et</strong>tenouvelle définition. On s’oriente donc vers une définitionde <strong>la</strong> masse à partir de <strong>la</strong> <strong>constante</strong> de P<strong>la</strong>nck. Le NIST,dans une expérience de ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> watt, a publié <strong>la</strong> valeurde <strong>la</strong> <strong>constante</strong> de P<strong>la</strong>nck de plus faible incertitude actuellement: incertitude re<strong>la</strong>tive 3,6×10 −8 . Mais un désaccordsignificatif persiste avec <strong>la</strong> valeur déterminée par le NPL<strong>et</strong> avec <strong>la</strong> valeur dé<strong>du</strong>ite de celle de <strong>la</strong> <strong>constante</strong> d’Avogadroobtenue à partir d’une sphère en monocristal de siliciumnaturel. Des études sont en cours pour comprendre<strong>et</strong> résoudre ces écarts. Les résultats de l’expérience françaisede ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> watt ou ceux obtenus à partir d’unmonocristal de silicium enrichi sont donc très atten<strong>du</strong>s.La mise en p<strong>la</strong>ce d’une nouvelle définition pour <strong>la</strong>masse requiert un consensus international qui ne peut êtreétabli qu’à partir d’un nombre suffisant de valeurs cohérentesobtenues de façon indépendante. Elle exige unedécision de <strong>la</strong> CGPM dont les deux prochaines réunionsdoivent avoir lieu en 2011 <strong>et</strong> 2015.La poursuite de plusieurs expériences de ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong>watt est donc nécessaire. Ces montages perm<strong>et</strong>tront, unefois <strong>la</strong> définition promulguée, <strong>la</strong> mise en pratique <strong>du</strong> <strong>kilogramme</strong>; elles contribueront aussi à tester l’exactitudedes modèles re<strong>la</strong>tifs aux eff<strong>et</strong>s quantiques intervenant enmétrologie électrique.À ce stade, il est probable que <strong>la</strong> modification del’unité de masse interviendrait dans le cadre d’une refonteglobale <strong>du</strong> système international d’unités, qui pourraitêtre construit autour de <strong>constante</strong>s <strong>physique</strong>s <strong>fondamentale</strong>stelles que <strong>la</strong> vitesse de <strong>la</strong> lumière dans le vide, <strong>la</strong><strong>constante</strong> de P<strong>la</strong>nck, <strong>la</strong> charge de l’électron, <strong>la</strong> <strong>constante</strong>de Boltzmann, <strong>la</strong> <strong>constante</strong> d’Avogadro, d’une <strong>constante</strong>atomique liée à l’écart hyperfin <strong>du</strong> césium dans l’état fondamental,<strong>et</strong> d’une <strong>constante</strong> « naturelle » liée à <strong>la</strong> photométrie.Le principal risque d’une telle refonte est de créerdeux systèmes internationaux d’unités : un système pourles physiciens basé sur des <strong>constante</strong>s <strong>fondamentale</strong>s <strong>et</strong>un système pratique pour quelques grandeurs, comme <strong>la</strong>masse <strong>et</strong> ses grandeurs dérivées, privilégié par l’in<strong>du</strong>strie<strong>et</strong> le commerce dont <strong>la</strong> référence serait toujours matérialiséepar des artefacts. Un travail préa<strong>la</strong>ble de concertation<strong>et</strong> de c<strong>la</strong>rification des méthodes de « mise en pratique »des définitions doit perm<strong>et</strong>tre d’éviter un tel écueil.En eff<strong>et</strong>, les travaux qui visent à redéfinir l’unité demasse à partir d’une <strong>constante</strong> <strong>physique</strong> <strong>fondamentale</strong> ouatomique ne doivent pas con<strong>du</strong>ire à négliger c<strong>et</strong>te miseen pratique : les comparateurs <strong>et</strong> les étalons matériels demeurerontnécessaires à <strong>la</strong> chaîne métrologique, mêmesi des instruments reposant sur des principes <strong>physique</strong>sdifférents pourront, à terme, voir le jour. Les grands <strong>la</strong>boratoiresnationaux de métrologie ont entrepris des étudessur les matériaux qui pourraient être utilisés pour réaliserles étalons de transfert des expériences de ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> wattou <strong>du</strong> monocristal de silicium. Ils étudient également lespropriétés de nouveaux matériaux <strong>et</strong> leur comportementlors <strong>du</strong> passage air-vide. La métrologie française, en particulier,a engagé d’importantes études sur les nouveauxmatériaux destinés à <strong>la</strong> fabrication d’étalons de transfertutilisables à partir de <strong>la</strong> ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> watt dont elle assure ledéveloppement; c<strong>et</strong>te dernière devrait être opérationnelledans quelques années.Avec <strong>la</strong> ba<strong>la</strong>nce <strong>du</strong> watt, après avoir participé auxétudes préa<strong>la</strong>bles au changement de définition, <strong>la</strong> Francerestera un acteur majeur dans <strong>la</strong> maintenance <strong>et</strong> <strong>la</strong> disséminationde l’unité de masse par <strong>la</strong> constitution d’un lotd’étalons témoins, dès que <strong>la</strong> définition aura changé. Elledisposera d’un outil pour améliorer <strong>la</strong> connaissance des<strong>constante</strong>s <strong>fondamentale</strong>s <strong>et</strong> des modèles associés auxphénomènes quantiques macroscopiques mis à profit aujourd’huien métrologie électrique. Elle pourra, si besoin,compléter ses moyens par <strong>la</strong> construction ou l’acquisitiond’une sphère de silicium caractérisée.Enfin, les compétences acquises <strong>et</strong> <strong>la</strong> conception novatricede nombreux éléments de c<strong>et</strong>te expérience ont vocationà être valorisées par des transferts de technologieou de compétence dans des domaines technologiques variés: mesures de dép<strong>la</strong>cement, aimants, commande mécanique...L’ouverture <strong>du</strong> proj<strong>et</strong> à <strong>la</strong> coopération avecdes partenaires français ou étrangers, in<strong>du</strong>striels <strong>et</strong> académiquesassure également le rayonnement de <strong>la</strong> métrologiefrançaise <strong>et</strong> perm<strong>et</strong> de faire connaître <strong>et</strong> reconnaîtreles compétences de ses <strong>la</strong>boratoires nationaux.Références[1] Himbert M., “A brief history of measurement”, Eur.Phys. 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