GÉRARD LEMAÎTRE, HENRI BONAN, ALAIN BLANCHARD, THIERRY FRAU ET BRUNO OGUEZ, ENTOURÉS DES ÉLÈVES,DÉPOSENT LA GERBE DE FLEURS DU CONSEIL GÉNÉRAL AU MONUMENT INTERNATIONAL DÉDIÉ AUX VICTIMES D’AUSCHWITZ.> L’ Oi<strong>se</strong> en actionLIBÉRATION DES CAMPSUn travail <strong>de</strong>mémoire réussiPhilippe Lobgeoisl’issue <strong>de</strong> cette visite les 2et 3 mai, ont pu discuteravec <strong>de</strong>s historiens etd’anciens déportés. Deriches échanges, qu’ilsont renforcés, avecplusieurs centaines <strong>de</strong>leurs camara<strong>de</strong>s, lors <strong>de</strong> larepré<strong>se</strong>ntation <strong>de</strong> la pièceAuschwitz, et après àCompiègne, quelques joursplus tard. Ce spectacle,écrit par Charlotte Delbo,résistante déportée <strong>de</strong>puisle camp <strong>de</strong> Royallieu(près <strong>de</strong> Compiègne), aprofondément marqué lepublic, qui l’a honorée parune très émouvante minute<strong>de</strong> silence.De toutes ces rencontresles jeunes <strong>se</strong> sont nourris<strong>pour</strong> enrichir les <strong>de</strong>voirsqu’ils ont produits dansle cadre du concoursnational sur la Résistanceet la Déportation. Plus<strong>de</strong> 600 élèves <strong>de</strong> l’Oi<strong>se</strong>y ont participé. Lors<strong>de</strong> la remi<strong>se</strong> <strong>de</strong>s prix leÀ l’occasion du 60 e anniversaire <strong>de</strong> la libération <strong>de</strong>scamps nazis, le Département et <strong>de</strong> nombreux partenaires<strong>se</strong> sont mobilisés <strong>pour</strong> organi<strong>se</strong>r une série d’événements.Retour sur le déroulement d’un anniversaire marquant.“Ilmenacent ça et làest important, faceaux dangers quinotre démocratie,<strong>de</strong> rester vigilant et <strong>de</strong>rappeler à chacun le prix<strong>de</strong> la paix. » Ces proposd’Alain Blanchard, viceprési<strong>de</strong>ntdu Con<strong>se</strong>il<strong>général</strong>, chargé <strong>de</strong>l’éducation, résument laphilosophie <strong>de</strong>s projetslancés dans l’Oi<strong>se</strong> <strong>de</strong>puissix mois, <strong>pour</strong> marquerle 60 e anniversaire <strong>de</strong> lalibération <strong>de</strong>s camps nazis.À l’origine, un forumorganisé au début<strong>de</strong> l’année avec300 associations <strong>de</strong>mémoire a permis<strong>de</strong> définir le <strong>se</strong>ns donnéà l’en<strong>se</strong>mble <strong>de</strong> cesinitiatives. Particulièrement<strong>de</strong>stiné aux jeunes, leprogramme s’est ouvertavec l’exposition « AnneFranck, une histoired’aujourd’hui ». Près <strong>de</strong>1 000 collégiens ont vu cetteexposition, conçue commeun outil pédagogiqueouvrant la perspective surle racisme ordinaire et lerécent génoci<strong>de</strong> rwandais.Et 175 d’entre eux, àDR« Il est <strong>de</strong> notreresponsabilitécitoyenne à tous<strong>de</strong> faire <strong>vivre</strong>cette mémoire et<strong>de</strong> la transmettreaux plus jeunes. »ALAIN BLANCHARD,VICE-PRÉSIDENT DU CONSEIL GÉNÉRAL,CHARGÉ DE L’ÉDUCATION1660 - N°7 - Juin 2005
Ph. LobgeoisINSTANT SOLENNEL. UN À UN,LE 31 MAI, LES 175 COLLÉGIENSISARIENS ONT DÉPOSÉ LEURS BOUGIESSUR LA STÈLE FRANÇAISE DU CAMPD’AUSCHWITZ.28 mai, Yves Rome a faitpart <strong>de</strong> sa « satisfactionface à l’engagement <strong>de</strong>tous ces jeunes qui ontdéployé autant <strong>de</strong> passionet <strong>de</strong> soin autour <strong>de</strong> cesujet si douloureux », etremercié les profes<strong>se</strong>urs,chercheurs, associations,combattants et déportés<strong>pour</strong> leur formidablemobilisation. Avec lesassociations organisatrices,80 lauréats <strong>se</strong> sontrendus dans le <strong>se</strong>ul campd’extermination français,à Natzweiler-Struthoff(près <strong>de</strong> Strasbourg). Et<strong>pour</strong> clore tous les projetsmenés à l’occasion <strong>de</strong>ce 60 e anniversaire, <strong>se</strong>ptclas<strong>se</strong>s <strong>de</strong> collégiens ontfait un voyage d’étu<strong>de</strong> et<strong>de</strong> mémoire à Auschwitzle 31 mai, organisé parle Département. Avec àleurs côtés Yvette Lévy,déportée 18 mois dans cecamp, ils ont bénéficié d’unextraordinaire témoignage.Un travail <strong>de</strong> restitutionest en cours <strong>pour</strong> créerun DVD qui <strong>se</strong>ra diffusédans tous les collèges,s’ajoutant à d’autresproductions telles que le« coffret exposition » réalisépar l’Office national <strong>de</strong>sanciens combattants sur lesystème concentrationnaire.Subventionné par le Con<strong>se</strong>il<strong>général</strong>, il <strong>se</strong>ra distribuéà la rentrée dans tous lescollèges et lycées isariens.P LP LMARIE PAIRETHÉÂTRE IMPÉRIALDE COMPIÈGNE.EN DEUX SOIRÉES, LES8 ET 9 MAI, CE SONT850 PERSONNES,COLLÉGIENS ET ADULTES,QUI ONT ASSISTÉ AUXREPRÉSENTATIONS DE LAPIÈCE « AUSCHWITZ, ETAPRÈS ».BEAUVAIS, LE 28 MAI.YVES ROME REMETLES PRIX DU CONSEILGÉNÉRAL AUX LAURÉATSDU CONCOURS NATIONALSUR LA RÉSISTANCE ETLA DÉPORTATION. À SESCÔTÉS, ALAIN CHEVREL,INSPECTEUR D’ACADÉMIE DEL’ÉDUCATION NATIONALE, ETALAIN BLANCHARD.“Parole <strong>de</strong> déportéPLERNEST BIETTEDéporté à Dachau<strong>de</strong>puis le camp <strong>de</strong>Royallieu, cet habitant<strong>de</strong> Montataire est venupartager <strong>se</strong>s souvenirsavec les collégiens àBeauvais età Compiègne.J’ai été arrêté par la police françai<strong>se</strong> à Creil en octobre 1942et déporté à Dachau en juin 1944 après avoir été incarcéréà Senlis, Amiens puis Eys<strong>se</strong>s. Je travaillais dans l’usine<strong>de</strong> construction <strong>de</strong> locomotives Brissoneau & Lotz. Àl’époque, nous étions nombreux dans le bassin creillois àrésister par <strong>de</strong>s actions <strong>de</strong> sabotage et <strong>de</strong> propagan<strong>de</strong>. Onfaisait ce qu’on pouvait. En Allemagne, on m’a mis dansun kommando qui fabriquait les pièces détachées <strong>pour</strong> leMes<strong>se</strong>rschmitt 262, un avion à réaction qui aurait pu fairebeaucoup <strong>de</strong> dégâts contre les avions américains. J’ai passéun an dans une cave, et nous faisions notre possible <strong>pour</strong>saboter discrètement les pièces. Le 29 avril 1945, l’arméeaméricaine a libéré Dachau.Les collégiens sont très intéressés par les témoignagesdirects, nous ne sommes pas là <strong>pour</strong> faire une leçonmais <strong>pour</strong> raconter les cho<strong>se</strong>s telles qu’elles sont, etils sont très étonnés par nos récits. C’est as<strong>se</strong>z difficileet très important <strong>de</strong> rendre compte <strong>de</strong> l’entrepri<strong>se</strong><strong>de</strong> déshumanisation que fut la déportation, les nazi<strong>se</strong>ssayaient <strong>de</strong> nous faire revenir à la bestialité, en nou<strong>se</strong>ntassant les uns avec les autres sans hygiène et sansnourriture, en nous imposant <strong>de</strong>s rythmes infernaux, <strong>de</strong>spunitions et <strong>de</strong>s sévices – et <strong>pour</strong> les Juifs, l’extermination.Pour ceux qui travaillaient, le <strong>se</strong>ul moyen <strong>de</strong> sur<strong>vivre</strong> étaitd’avoir <strong>de</strong> la discipline <strong>pour</strong> éviter la loi <strong>de</strong> la jungle etd’être solidaires, <strong>de</strong> rester un être humain malgré tout ça.Les jeunes sont stupéfaits et nous interrogent beaucoup,même s’ils ont du mal parfois à po<strong>se</strong>r <strong>de</strong>s questionsdifficiles. C’est important <strong>de</strong> leur expliquer que la liberté estchère, parce qu’on ne s’en rend pas compte quand on l’a,important <strong>de</strong> leur expliquer les bienfaits <strong>de</strong> la démocratie.C’est un peu dur <strong>pour</strong> nous <strong>de</strong> remuer tous ces souvenirs,mais il faut apporter notre connaissance. Je rencontresouvent <strong>de</strong>s collégiens et j’ai reçu beaucoup <strong>de</strong> courriersme remerciant <strong>de</strong> les avoir éclairés.60 - N°7 - Juin 200517