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Hémoglobinopathies - Laboratoire CERBA

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<strong>Hémoglobinopathies</strong>Les hémoglobinopathies correspondent aux anomaliesqui touchent la partie protéique de l’hémoglobine (Hb).Affections héréditaires, ce sont les maladies monogéniquesles plus répandues dans le monde. On estimeà7%delapopulation mondiale le nombre de sujetsporteurs hétérozygotes. Ces pathologies, endémiquesdans certaines populations, sont de plus en plus fréquemmentobservées en Europe du Nord du fait desmouvements de population.Les sujets hétérozygotes sont généralement asymptomatiques,mais les sujets homozygotes ou hétérozygotescomposites sont exposés àdes complications sévères,voire mortelles. La prévention des hémoglobinopathiespasse par le dépistage des porteurs asymptomatiques.En France, la drépanocytose fait l’objet d’un dépistagesystématique dans les populations àrisque depuis1995.Malgré la très grande diversité des anomalies en causesur le plan moléculaire, le diagnostic est généralementporté sur le seul phénotype. L’utilisation d’une combinaisonde techniques fiables et suffisamment précisespermet d’en faire le diagnostic dans la grande majoritédes cas. L’interprétation des résultats nécessite deconnaître le contexte clinique et transfusionnel éventuel,le contexte biologique (hémogramme, bilan martial,bilan d’hémolyse) ainsi que le contexte ethnique etfamilial du patient.ASPECTS FONDAMENTAUXLes notions fondamentales sur la structure, la synthèseet le fonctionnement de la molécule d’Hb permettentde comprendre la physiopathologie des hémoglobinopathies.Structure de la molécule d’HbLa molécule d’Hb est une protéine tétramérique constituéede 4 sous-unités de globine semblables deux àdeux. Les chaînes de globine appartiennent, pour lesunes, àlafamille α et pour les autres, àlafamille â .Chaque globine a une structure globulaire compacteménageant une poche dans laquelle vient se nicher unemolécule d’hème. Il s’agit d’une protoporphyrine maintenanten son centre un atome de fer sous forme réduite(Fe ++ )qui permet de fixer l’oxygène.La fonction principale de l’Hb est de transporter l’oxygènedes poumons vers les tissus et de faciliter l’éliminationdu CO 2 . La structure de la molécule d’Hb semodifie au cours de la fixation et de la libération del’oxygène grâce àson caractère allostérique :lafixationd’une molécule d’oxygène favorise la fixation de moléculesadditionnelles. Les contacts entre les différentessous-unités de globine sont essentiels pour maintenir lastabilité de la molécule et garantir le caractère coopératifde la fonction oxyphorique.L’affinité pour l’oxygène varie en fonction du pH, de latempérature, de la teneur en CO 2 et d’anions comme le2,3 diphosphoglycérate (2,3-DPG) dont la fixation aucentre de la molécule d’Hb diminue considérablementl’affinité de celle-ci pour l’oxygène.Gènes de l’HbLes chaînes de type α correspondent àdes chaînes polypeptidiquesde 141 résidus dont la synthèse est sous lecontrôle de gènes situés sur le chromosome 16. Leschaînes de type â (auxquelles se rattachent les chaînes ã ,ä et å )comportent 146 résidus et dépendent de gènessitués sur le chromosome 11.L’organisation des familles des gènes α et â -globine estprésentée schématiquement dans la figure 2. Le contrôlede leur expression s’exerce àplusieurs niveaux :• spécificité tissulaire stricte (lignée érythrocytaire) ;• expression, au cours du développement, dans l’ordrede leur position topographique. On observe des commutationssuccessives « switch » qui modifient lacomposition de l’Hb ;• expression coordonnée précisément qui aboutit àunesynthèse équivalente des gènes de la famille α et dela famille â ,tout déséquilibre se traduisant par unsyndrome thalassémique.Différents types Hb humainesDifférentes Hb se succèdent et se chevauchent au coursdes étapes de la vie ; il en existe toujours plusieurssimultanément. Elles se distinguent par la nature deschaînes qui les constituent. La figure 3représente lasuccession de ces diverses sous-unités au cours de l’évolutionontogénique. La proportion relative des diversesHb évolue parallèlement au changement du lieu del’érythropoïèse :sac vitellin chez l’embryon, foie, rateet moelle osseuse chez le fœtus, moelle osseuse chezl’adulte normal.• Pendant les 3premiers mois de la gestation, les globulesrouges contiennent des Hb embryonnaires.• Chez le fœtus, àpartir du 37 e jour, l’Hb fœtale HbF( α 2 ã 2 ) apparaît pour devenir le composant hémoglobiniqueprincipal. Sa proportion atteint 90 %entre la 8 e et la 10 e semaine. L’HbF aune affinitéintrinsèque pour l’oxygène identique à l’HbA del’adulte, mais ses liaisons au 2,3-DPG sont beaucoup


Figure 2.Structure etorganisation schématique des deux familles de gènes globine. Les gènes sont organisésde 5 ′ en 3 ′ selon leur ordre d’expression au cours dudéveloppement5´εG γ A γ δ β3´Chromosome 115´ζα 2α 13´Chromosome 16Figure 3. Expression des gènes deglobine au cours dudéveloppement ontogéniqueSac vitellin Foie Rate Moelle osseuseS y nthèse de globine (%)1008060402010 20 30 40 20 40Semaines de grossesseÂge (semaines)NaissanceD’après :Bain BJ. –Haemoglobinopathy diagnosis. –2 nd edition. –Oxford :Blackwell Publishing, 2006 ;p.2.plus faibles. Ainsi, les hématies fœtales ont une affinitépour l’oxygène sensiblement supérieure àcelledes hématies maternelles, ce qui favorise le transportd’oxygène de la mère vers le fœtus. Peu avant la naissance,entre la 32 e et la 36 e semaine de gestation,l’HbF commence àdécliner au profit de l’HbA ( α 2 â 2 ).Àlanaissance, le pourcentage d’HbA est de 15 à30 %.• Chez l’adulte, le profil caractéristique s’observe àpartirde l’âge de 6mois. Le switch ãâ est effectué à90%à6mois, et à95%à1an. Il est terminé vers 5–6 ans.L’HbA représente plus de 95 %delatotalité des Hb.Il existe un constituant mineur, l’HbA2, dont la synthèsedébute pendant la période néonatale et qui estexprimée àuntaux d’environ 2,5 %. L’HbF ne subsisteplus qu’à l’état de traces (< 1%)etreste limitéeàune population restreinte, les cellules «F».Cesdernières, dont le nombre est génétiquement déterminé,représentent 1à7%del’ensemble des érythrocytes,et correspondraient à des hématies dont ladifférenciation est différente de celles des cellules nesynthétisant que de l’HbA.La figure 4résume sous forme de diagramme la proportionrelative des diverses Hb chez le fœtus et l’enfant.LES HÉMOGLOBINOPATHIESLes hémoglobinopathies se subdivisent en deuxgroupes :• le premier correspond à la présence d’une Hb destructure anormale, entraînant ou non des signesfonctionnels ;• le second àundéfaut de synthèse, partiel ou total, quis’exprime dans le groupe très hétérogène des thalassémies.Ce sont des pathologies différentes dans leur expressionclinique et leur physiopathologie. Néanmoins, il existeen réalité un certain chevauchement entre ces deux


Figure 4.Proportions des différentes Hb chez le fœtus et l’enfant100Hb totale (%)908070605040302010Hb FHb A 2Hb A05 16 28 0 3 6 9semaines de grossesseHbGower 1, Gower 2 andPortland 1naissanceâge (mois)D’après :Bain BJ. –Haemoglobinopathy diagnosis. –2 nd edition. –Oxford :Blackwell Publishing, 2006 ;p.3.groupes, puisque certaines Hb de structure anormale secomportent comme des mutants thalassémiques.Hb anormalesPlus de 1000 variants sont aujourd’hui répertoriés dansla banque de données HbVar accessible sur le Web(http://globin.cse.edu/globin/hbvar/menu.html). Seulsun tiers d’entre eux ont des répercussions cliniques, lamutation intervenant dans une zone critique pour lefonctionnement de la molécule. Trois Hb anormalesoccupent une place prépondérante de par leur fréquenceet leur caractère pathogène :HbS, HbE et HbC.Les Hb anormales peuvent être classées en 4groupes :• les mutants qui sont àl’origine de problèmes de santépublique majeurs. Il s’agit surtout des HbS dans lapopulation africaine et des HbE dans les populationsdu Sud-Est asiatique ;• les variants plus rares, mais présents dans les populationsoù l’HbS aune forte prévalence. C’est le cas desHbC, O-Arab et D-Punjab, qui par elles-mêmes n’ontqu’un effet pathogène minime, mais qui, associées àl’HbS, conduisent àdes syndromes drépanocytairesmajeurs ;• les variants rares, àl’origine de désordres hématologiquesvariés :Hbinstables (qui sont la cause d’anémieshémolytiques chroniques), Hb hyperaffines(responsables de polyglobulies), Hb hypoaffines (responsablesd’anémies avec cyanose), HbM (cause deméthémoglobinémies) ;• les polymorphismes ou les mutations privées, habituellementtotalement silencieux sur le plan clinique.Ils ont été découverts lors d’études systématiques depopulation ou parce qu’ils interfèrent avec le dosagede l’Hb glyquée. Ces mutants doivent être caractériséset rapportés dans les banques de données pour éviterqu’ils ne soient confondus avec des mutants auxconséquences cliniques sévères.—HbSL’HbS est un mutant de la chaîne â ,oùl’acide glutamiqueen position 6est remplacé par une valine.• Répartition géographiqueIl est fréquent chez les sujets originaire d’Afrique noire(jusqu’à 25 %delapopulation dans certaines régions)et également retrouvé aux Antilles (10–12 %), auMaghreb, en Sicile, en Grèce, dans tout le Moyen-Orient et aux Indes. Il définit la drépanocytose, maladiegénétique àtransmission autosomique récessive.• Diagnostic biologiqueL’HbS présente une charge différente de l’HbA ;elle estmise en évidence par des techniques électrophorétiqueset/ou chromatographiques, un seul test n’étant passuffisant pour affirmer son existence. Il peut êtrenécessaire de confirmer sa présence par des tests


fonctionnels. Le dosage précis des différentes fractionsest indispensable pour affiner le diagnostic. Le tauxd’HbA 2 mesuré par chromatographie liquide haute performance(CLHP) peut être légèrement augmenté chezun porteur d’HbS en raison de la présence de dérivés del’HbS pouvant coéluer avec l’HbA 2 .• Forme asymptomatiqueLa forme hétérozygote (HbA/HbS) est habituellementcliniquement muette, l’hémogramme est normal et seulel’étude de l’Hb est capable de la mettre en évidence. Leschaînes α s’associant préférentiellement aux chaînes ânormales, le taux d’HbS chez un sujet A/S se situeautour de 40 %.Une microcytose, en l’absence de carence martiale, doitfaire suspecter l’association avec une α -thalassémie. Eneffet, l’α -thalassémie est fréquente dans les populationsafricaines et se retrouve donc souvent chez les porteursdu gène HbS. Dans ce cas, le taux d’HbS est inférieur àcelui d’un sujet A/S. En cas d’un seul gène α délété, letaux d’HbS se situe entre 30 et 35 %;en cas de deuxgènes α délétés, il tombe à25–30 %.Chez un hétérozygote symptomatique, une étude complémentaireest parfois nécessaire pour mettre en évidenceune mutation supplémentaire sur les gènes â ouα ,en cis ou en trans. L’HbS-Antilles, pour laquelle uneseconde mutation ( â 23 Val→ Ile) sur le gène de l’HbSfavorise la polymérisation, est facilement identifiablepar CLHP.• Syndrome drépanocytaire majeurLe terme de «syndrome drépanocytaire majeur »estutilisé pour désigner les formes cliniques graves et peutcorrespondre àdifférentes formes génétiques :formehomozygote (HbS/HbS) ou hétérozygoties compositesassociant l’HbS à une â -thalassémie ou à une autreHb anormale (HbC le plus souvent en France,Hb-D-Punjab ou Hb-O-Arab). Chez ces patients,l’HbS polymérise, lors de la désoxygénation, en longuesfibres entraînant rigidification et déformation del’hématie à l’origine des deux manifestations principales: l’anémie hémolytique chronique et les accidentsvaso-occlusifs. Ces patients doivent bénéficierd’une prise en charge précoce dans des centres spécialisés.Le taux de mortalité reste élevé en Afriquenoire.Le taux d’HbF est variable et doit être déterminé avecprécision, car il est admis que, dès qu’il dépasse 10 %,il suffit àinhiber partiellement la polymérisation et àretarder la falciformation. La CLHP sur colonne échangeusede cations est la méthode de choix pour quantifierl’HbF.Les patients qui présentent une persistance héréditairede l’HbF (PHHF) associée sont généralement asymptomatiques.L’existence d’une α -thalassémie associée doit égalementêtre recherchée, car elle semble associée à certainescomplications. Elle peut être suspectée sur des argumentsindirects (constantes hématologiques, tauxd’HbS, présence d’Hb Bart’s ou d’HbH) ou recherchéespécifiquement par des techniques de biologie moléculaire.L’étude familiale et génotypique est parfois indispensablepour interpréter le phénotype (par exemplepour différencier les patients S/S des patients S/â °-thalassémiques).Les polymorphismes du locus â -globine définissent5types d’haplotypes majeurs associés àl’HbS. Ils sontliés àdes variations des taux d’Hb et d’HbF et constitueraientune valeur pronostique pour certains.Le tableau 8présente les caractéristiques biologiquesdes principaux syndromes drépanocytaires.—HbCL’HbC est un mutant de la chaîne â où l’acide glutamiqueen position 6est remplacé par une lysine.• Répartition géographiqueC’est un variant caractéristique de l’Afrique de l’Ouest(20 %), présent également aux Antilles (3 %).• Diagnostic biologiqueL’HbC migre avec l’HbE lors de l’électrophorèse suracétate de cellulose àpHalcalin, mais s’en distinguelégèrement par focalisation isoélectrique et très clairementpar CLHP d’échange d’ions.• Tableaux clinique et biologiqueLes sujets hétérozygotes sont cliniquement asymptomatiques.L’hémogramme est normal, parfois discrètementmicrocytaire.Les sujets homozygotes présentent une anémie hémolytiquechronique modérée. Les frottis sanguinsmontrent de nombreuses cellules cibles et parfoisquelques microsphérocytes. C’est la cristallisation del’HbC qui est àl’origine d’une déshydratation cellulaireet d’une moindre déformabilité des hématies. Cettedéshydratation est responsable d’une concentrationcorpusculaire moyenne en hémoglobine (CCMH) élevée(environ 38 g/dl) et d’une microcytose (VGMmoyen de 72 fl).


Tableau 8.Caractéristiques biologiques des syndromes drépanocytairesHb (g/dl) VGM (fl) réticulocytes Morphologie Étude de l’Hbérythrocytaire HbA (%) HbS (%) HbF (%) HbA 2 (%)AS N N* N N 60–65 35–40*


des taux d’HbE anormalement bas et doit fairerechercher une α -thalassémie dans le cadre duconseil génétique ;–l’association HbE/â -thalassémie, fréquente en Thaïlandeet dans tout le Sud-Est asiatique, se présentegénéralement sous forme d’une thalassémie intermédiaire.Elle est suggérée par un taux anormalementélevé d’HbE. En cas d’hétérozygotie compositeHbE/â °-thalassémie, le taux d’HbE varie de 40 à60 %etletaux d’HbF est de l’ordre de 30 à60%.En cas d’hétérozygotie composite HbE/â + -thalassémie,on observe également environ 10 %d’HbA.—HbO-ArabL’HbO-Arab est un mutant de la chaîne â où l’acideglutamique en position 121 est remplacé par unelysine.• Répartition géographiqueOn le retrouve en Europe orientale, mais également enAfrique et dans le Moyen-Orient.• Diagnostic biologiqueIl comigre avec les HbC et Elors de l’électrophorèse suracétate de cellulose àpHalcalin, mais peut facilementen être différencié par électrophorèse sur gel d’agar, enfocalisation isoélectrique ou en CLHP sur échangeur decations.• Tableaux clinique et biologiqueCe variant n’entraîne aucune anomalie chez les hétérozygoteset les homozygotes.C’est l’association HbO-Arab/HbS qui est grave,puisqu’elle conduit à un syndrome drépanocytairemajeur avec anémie hémolytique et crises vasoocclusives.Il est donc important d’en faire le diagnostic,tant dans le cadre du conseil génétique que de la priseen charge précoce des malades.—HbD-PunjabL’HbD-Punjab est un mutant de la chaîne â où l’acideglutamique en position 121 est remplacé par une glutamine.• Répartition géographiqueUbiquitaire, on le retrouve avec une forte prévalencechez les Sikhs du Punjab et dans les populations dunord-ouest des Indes.• Diagnostic biologiqueL’HbD-Punjab se distingue de l’HbS en focalisation isoélectriqueou en CLHP sur échangeur de cations. Néanmoins,elle peut être confondue avec d’autres variantset son identification formelle nécessite l’utilisation detechniques complémentaires.• Tableaux clinique et biologiqueCette Hb est asymptomatique aussi bien àl’état hétérozygotequ’homozygote.C’est l’association HbD-Punjab/HbS qui est grave,puisqu’elle conduit à un syndrome drépanocytairemajeur avec anémie hémolytique et crises vasoocclusives.Il est donc important d’en faire le diagnostic,tant dans le cadre du conseil génétique que de la priseen charge précoce des malades.—HbinstablesQuelque 200 mutants dont la stabilité est diminuée ontété décrits. Seule la moitié d’entre eux est responsabled’anomalies cliniques.La présence d’une Hb instable est souvent suggérée parun tableau clinique et hématologique d’anémie hémolytiquerégénérative. Une grande anisocytose, la présencede ponctuations basophiles, une macrocytosecontrastant avec une CCMH diminuée sont des manifestationscaractéristiques. Selon les cas, l’Hb peut êtremise en évidence par focalisation isoélectrique ouCLHP sur échangeur de cations. Souvent, on observenon pas l’Hb anormale elle-même, mais des produitsqui en dérivent.Les Hb les plus instables sont détruites très rapidementaprès leur synthèse, et conduisent souvent à destableaux d’érythropoïèse inefficace de type thalassémie.La différence essentielle entre ce syndrome et une thalassémieclassique réside dans son mode de transmissionqui est de type dominant, d’où le terme«thalassémies dominantes »souvent utilisé pour lesdésigner. Leur identification nécessite généralementl’utilisation de techniques de biologie moléculaire.—HbhyperaffinesLes mutations responsables n’ont été décrites qu’à l’étathétérozygote, la forme homozygote étant probablementlétale. Les patients présentent une polyglobulie sansaugmentation des leucocytes ou des plaquettes et sanssplénomégalie. Le diagnostic doit éliminer toutes lescauses de polyglobulie primitive ou secondaire. Lesméthodes électrophorétiques sont souvent peu contributives.L’étude de la p50 est essentielle, mais seule


l’étude moléculaire permet de confirmer et d’identifierle mutant.—HbhypoaffinesPeu de variants de ce type ont été décrits. Ils engendrentune cyanose, présente dès la naissance si la mutationporte sur la chaîne α .—HbMLa méthémoglobine (metHb) est une forme oxydéed’Hb, dans laquelle l’atome de fer àl’état oxydé Fe 3+ estincapable de transporter l’oxygène. Son taux est physiologiquementinférieur à1%,untaux supérieur à1%définissant la méthémoglobinémie. Deux types deméthémoglobinémies doivent être distingués :• méthémoglobinémies résultant d’une surproductionacquise ou constitutionnelle de metHb ;• méthémoglobinémies dues àlaprésence d’un variantaux propriétés spectrales particulières désigné sous leterme d’HbM. Ces affections sont rares ;les mutationsen cause portent sur la chaîne α ou â .Les patients porteurs d’une HbM présentent unepseudo-cyanose. L’hémogramme est généralement normalmais la présence d’HbM est suggérée par la couleurbrun chocolat typique du sang. Les techniques séparativesne sont pas toujours contributives. Quand il estvisible, le variant d’Hb auntaux situé entre 10 et 25 %.L’étude du spectre d’absorption de l’hémolysat estcaractéristique et permet de différencier la metHb normalede l’hémoglobine M. Il est important de poser lediagnostic afin d’éviter au patient des explorationscardiovasculaires lourdes et inutiles, particulièrementchez le nouveau-né.ThalassémiesLes thalassémies sont les maladies génétiques les plusrépandues au monde.Normalement, la synthèse des chaînes de type α et detype non α est équilibrée. Dans les thalassémies, ilexiste un déficit partiel ou total de synthèse d’unechaîne. On peut classer les thalassémies selon la chaînede globine touchée et on distingue ainsi :• les α -thalassémies ;• les â -thalassémies ;• les ä -et ã -thalassémies (sans effet clinique) ;• les äâ-thalassémies quand les chaînes ä et â sont touchées.Selon que le défaut de synthèse est total ou partiel, ondifférencie :• les formes qualifiées de « + », où la protéine est synthétiséemais en quantité limitée ;• les formes désignées comme «°», où le gène atteintne permet aucune synthèse.La présentation clinique permet de classer les thalassémiesen formes mineures, majeures ou intermédiaires :• les thalassémies mineures : elles sont égalementappelées « trait thalassémique » et n’ont habituellementaucune traduction clinique. Sur le planmoléculaire, elles correspondent aux â -thalassémies,aux äâ-thalassémies hétérozygotes et aux α -thalassémiesavec délétion d’un ou deux gènes α ;• les thalassémies majeures :elles associent àdes degrésvariables hémolyse sévère, érythropoïèse inefficace etsurcharge en fer, nécessitant des transfusions sanguinesrégulières. Elles correspondent àdes formes oùles deux gènes â sont atteints par une lésion thalassémiquegrave ;• les thalassémies intermédiaires : elles forment ungroupe très hétérogène où sont rassemblés tous lespatients dont l’expression clinique et hématologiqueest plus sévère que celle d’une thalassémie mineure,sans toutefois atteindre celle d’une thalassémiemajeure. Les malades, avec un taux d’Hb entre 6et9g/dl, ne nécessitent que d’exceptionnelles transfusionssanguines. Sur le plan moléculaire, on retrouvedes homozygotes ou hétérozygotes composites pourdiverses anomalies. L’hémoglobinose H, due à ladéfaillance de 3gènes α ,peut également être classéedans cette catégorie.Le dépistage des sujets hétérozygotes est essentiel pourinformer du risque d’avoir un enfant homozygotemalade. Le dépistage doit être proposé devant un hémogrammeévocateur, dans une ethnie à risque, lorsd’enquêtes familiales ou à l’occasion des visites prénuptiales.Le trait thalassémique peut également êtreévoqué devant un taux d’HbS, HbC ou HbE anormalementbas ou anormalement élevé.Le dépistage doit être suivi d’un conseil génétique etéventuellement d’un diagnostic anténatal par des techniquesde biologie moléculaire.— α -thalassémiesLes α -thalassémies s’expriment àtravers une gamme desévérité variable, directement fonction du nombre degènes défaillants. Chaque chromosome 16 portant deuxgènes α ( α 1et α 2), il existe donc quatre gènes α chezle sujet normal. Au total, un, deux, trois ou même quatregènes peuvent être non exprimés.La classification des anomalies est la suivante :


• expression d’un seul gène α sur le chromosome →α + -thalassémie ;• absence d’expression des deux gènes α sur le chromosome→α°-thalassémie.La non-expression d’un ou deux gènes α est cliniquementasymptomatique. La non-expression de troisgènes α définit l’hémoglobinose H, qui est une anémiehémolytique par excès de chaînes â libres. La nonexpressiondes quatre gènes α est létale, avec une anasarquefœtoplacentaire dès la période fœtale, quands’éteint l’expression des gènes embryonnaires.• Thalassémie α + :hétérozygotes, homozygoteset hétérozygotes compositesL’α + -thalassémie est l’anomalie génétique la plus répanduedans le monde.Elle résulte généralement de la délétion totale ou partielledu gène α 2. Environ un quart des individus originairesd’Afrique sont porteurs hétérozygotes et 1à2%,porteurs homozygotes. Elle est également observée dansd’autres populations originaires du Bassin méditerranéen,du Sud-Est asiatique ou d’Inde (où elle touche40 %delapopulation).Plus rarement, elle résulte d’une mutation ponctuellesur un gène α .Ilest probable que certaines mutationsaffectant le gène α 1passent inaperçues et soient àl’originede thalassémies dites silencieuses.Il est ànoter que certains variants de la chaîne α produisentun phénotype d’α + -thalassémie :c’est le cas del’Hb Constant-Spring où l’ARNm du variant α est trèsinstable.α + -thalassémie hétérozygoteElle est cliniquement asymptomatique.Les sujets peuvent avoir un hémogramme normal, parfoisune légère microcytose ou une discrète anémiemicrocytaire hypochrome.Le diagnostic est habituellement évoqué chez un individuporteur d’une microcytose non expliquée par uneâ -ou äâ-thalassémie ou une carence martiale. L’étudede l’Hb est normale, le taux d’HbA 2 est généralementnormal. En période néonatale, il est parfois possible dedétecter 1à2%d’Hb Bart’s.Néanmoins, beaucoup de porteurs ayant un hémogrammenormal, le diagnostic est souvent méconnu endehors des études systématiques de populations ou desenquêtes familiales en cas d’hémoglobinose H.Le diagnostic de certitude nécessite une étude moléculaireet n’est envisagé que dans le cadre du conseil génétique.α + -thalassémie homozygoteElle est également cliniquement asymptomatique. Surle plan biologique, les sujets présentent des anomalieshématologiques plus franches, proches de celles habituellementobservées chez les sujets â -thalassémiqueshétérozygotes. L’étude de l’Hb est normale avec untaux d’HbA 2 normal, parfois diminué. En périodenéonatale, on peut détecter des taux d’Hb Bart’ssupérieurs à2%. Comme chez les hétérozygotes, lediagnostic est évoqué devant une étude de l’Hb normalechez un sujet microcytaire sans carence martiale et lediagnostic de certitude nécessite une étude moléculairequi n’est proposée que dans le cadre du conseil génétique.Hb Constant-SpringElle est cliniquement asymptomatique. Sur le plan biologique,les sujets hétérozygotes ont souvent une anémieplus marquée que les sujets porteurs d’un traitα + -thalassémique. Ce variant peut parfois être détecté àdes taux très faibles (1 %). L’étude moléculaire est souventindispensable pour porter le diagnostic.L’existence d’une α + -thalassémie diminue l’expressionclinique et biologique d’une â -thalassémie associée etréduit également les taux d’HbS, HbC et HbE habituellementobservés chez les sujets hétérozygotes.• Thalassémie α °:hétérozygoteset hétérozygotes compositesL’α °-thalassémie résulte généralement de la délétiondes deux gènes α .Elle est relativement fréquente enChine et dans le Sud-Est asiatique. Elle peut égalementêtre observée sur le pourtour du Bassin méditerranéen.Chez les sujets hétérozygotes, on retrouve une pseudopolyglobuliemicrocytaire hypochrome. Le taux d’Hbpeut être normal ou légèrement diminué. En périodenéonatale, on peut détecter 5 à 10 % d’Hb Bart’s,mais cela n’est pas spécifique de l’α °-thalassémiepuisque des taux similaires sont observés dansl’α + -thalassémie homozygote.Le diagnostic est évoqué chez un sujet dont l’hémogrammesuggère un trait thalassémique et dont l’étudede l’Hb met en évidence des taux d’HbA 2 et HbF normaux.Le diagnostic de certitude nécessite une étudemoléculaire. Ces sujets hétérozygotes doivent êtredépistés dans les populations àrisque (asiatiques) enraison du risque mortel lié àl’ α °-thalassémie homozygote.Comme l’α + -thalassémie, l’α °-thalassémie diminuel’expression clinique et biologique d’une â -thalassémie


associée et diminue les taux de synthèse d’HbS, HbC etHbE habituellement observés chez les sujets hétérozygotes.• Hémoglobinose HLa non-expression de trois gènes α se traduit parl’hémoglobinose H. Dans ce cas, l’anémie microcytairehypochrome devient patente. Les chaînes â (ou ã chezle nouveau-né) sont en excès et s’associent en tétramèresnommés HbH (4 chaînes â ) ou Hb Bart’s(4 chaînes ã ). Ces Hb sont solubles et il n’y adonc pasde destruction intramédullaire ni d’érythropoïèse inefficace.Cependant, elles sont inaptes à la transitionallostérique et donc incapables d’assurer l’oxygénationdes tissus, ce sont des Hb non fonctionnelles. De plus,elles sont instables et précipitent en corps de Heinz dèsqu’elles sont soumises àunstress oxydatif, ce qui est àl’origine d’une anémie hémolytique chronique. Lesindividus présentent une splénomégalie. L’anémie estaggravée par les infections, la grossesse et l’expositionaux agents oxydants. Le tableau clinique peut être desévérité variable, asymptomatique chez certainspatients, nécessitant des transfusions régulières pourd’autres.Sur le plan moléculaire, elle peut correspondre àdifférentesanomalies génétiques dont la plus fréquente estla forme ––/–α ,résultant d’une hétérozygotie compositeα °-thalassémie/α + -thalassémie.Sur le plan biologique, on retrouve une anémie microcytairehypochrome, avec des taux d’Hb compris entre3et10g/dl. En période néonatale, on peut détecter20 à 40 % d’Hb Bart’s. Chez l’adulte, on retrouve1à40 %d’HbH (généralement 8–10 %) et parfoisjusqu’à 5 % d’Hb Bart’s. L’HbA 2 est généralementdiminuée (1 à2%) et parfois, le taux d’HbF est légèrementaugmenté (1 à3%).Le taux d’HbH est diminué en cas d’associationavec un autre variant tel que HbS, HbC et HbE et letaux n’est pas toujours détectable quand il s’agitd’α -thalassémie non délétionnelle.• Thalassémie α °homozygoteLa non-expression des quatre gènes α est létale avec uneanasarque fœtoplacentaire dès la période fœtale, quands’éteint l’expression des gènes embryonnaires.Il est essentiel de prévenir la survenue de telles formespar un conseil génétique et un diagnostic anténatal(tableau 9).— β -thalassémiesDans les â -thalassémies, ce sont les chaînes α qui sonten excès. Contrairement aux chaînes â ,ces chaînes αTableau 9.Principales caractéristiques génétiques, cliniques etbiologiques des α -thalassémiesNombre degènes α Désignation Tableau clinique Tableau biologiqueatteints ( ) Hémogramme Étude de l’Hb1 α + -thalassémie Asymptomatique : Variable :normal ou –1%d’Hb Bart’s àla(–α / αα) thalassémie mineure discrète microcytose naissance–Normale chez l’adulte2 α °-thalassémie hétérozygote Bien tolérée :thalassémie Pseudo-polyglobulie –5à10%d’Hb Bart’s(––/αα) mineure microcytaire hypochrome àlanaissanceα + -thalassémie homozygote(–α /–α )Microcytose ±discrèteanémie–Normale chez l’adulte(HbA 2 parfois diminuée)3 Hémoglobinose H Plus oumoins bien Anémie hémolytique avec –20à40%d’Hb(–α /–– par exemple) tolérée :thalassémie microcytose et Bart’s àlanaissanceintermédiaire hypochromie –1%40d’Hb Hchezl’adulte–HbA 2 diminuée, entre1et2%–HbF parfoisaugmentée, 1à3%4 α °-thalassémie homozygote Mort fœtale in utero dans – Étude moléculaire(––/––) un tableau d’hydrops indispensablefœtalis avec anasarquefœtoplacentaire


libres sont incapables de s’associer entre elles et sontextrêmement instables. Elles sont responsables del’apoptose et de l’érythropoïèse inefficace. Les â -thalassémiessont des maladies dysérythropoïétiques.Les formes hétérozygotes sont asymptomatiques. Lesformes homozygotes ou hétérozygotes compositessont toujours sévères et souvent fatales dès les premièresannées de vie en l’absence de transfusions sanguines.Dans le cas des â -thalassémies, les formes délétionnellessont exceptionnelles. Les anomalies moléculairessont le plus souvent des mutations ou de courtes délétionsou insertions, limitées àquelques nucléotides. Plusde 200 lésions différentes ont été décrites. Les mutationssont classées en deux catégories, â °thal et â + thal.Les â -thalassémies sont très fréquentes dans une largerégion qui englobe le Bassin méditerranéen, l’Afrique,le Moyen-Orient, le sous-continent indien, le Sud-Estasiatique, la Mélanésie et de nombreuses îles du Pacifique.La fréquence de l’anomalie varie de 1à20%dans ces régions. La présence d’un gène thalassémiqueassure un certain degré de protection contre le paludisme,ce qui explique cette large répartition.• â -thalassémies hétérozygotesElles sont cliniquement asymptomatiques. Parfois, lessujets peuvent développer une anémie symptomatiqueau cours d’une hématopoïèse de stress (grossesse,infection).L’hémogramme est variable :ilpeut être normal, montrerune microcytose isolée ou une pseudo-polyglobuliemicrocytaire hypochrome avec parfois une légèreanémie.Le diagnostic repose sur l’augmentation du tauxd’HbA 2 ,généralement de l’ordre de 4à5%.Ils’agitd’une augmentation relative et non pas absolue. Destaux plus élevés (toujours


gène recombinant étant de type ä et l’extrémité 3 ′ detype â .Lechromosome qui porte le gène recombinantne porte ni le gène ä ,nilegène â .Lepromoteur étantde type ä , le gène recombinant est peu exprimé, del’ordre de 10 à15%,etrépond àladéfinition d’ungène â + -thalassémique. En fonction de la région où s’estproduit le crossing-over, ondistingue plusieurs variétésd’Hb Lepore.Les sujets hétérozygotes ont un hémogramme évocateurde â -thalassémie. L’étude de l’Hb retrouve un varianten faible quantité (10 à15%)qui migre près de l’HbSàl’électrophorèse àpHalcalin, près de l’HbA àpHacide et coélue avec l’HbA 2 en CLHP.• Hb Lepore homozygote ou hétérozygote compositeLes homozygotes ou hétérozygotes composites HbLepore/â -thalassémie présentent un tableau de thalassémiemajeure ou intermédiaire. L’étude de l’Hb neretrouve que de l’HbF et de l’Hb Lepore.• â -thalassémies intermédiairesDéfinies sur le plan clinique, elles regroupent tous lespatients dont l’expression clinique et hématologique estplus sévère que celle d’une thalassémie mineure sanstoutefois atteindre celle d’une thalassémie majeure. Lesmalades, avec un taux d’Hb entre 6et9g/dl, ne nécessitentque d’exceptionnelles transfusions sanguines.Sur le plan moléculaire, on retrouve :–des homozygotes ou hétérozygotes composites pourdes thalassémies peu graves (exemple : HbE/â -thalassémie) ;–une thalassémie majeure dont l’expression est atténuéepar une autre anomalie (par exemple, synthèseélevée d’HbF) ;–l’association thalassémie/anomalie de l’Hb aggravantune atteinte hétérozygote (par exemple, triplicationα aggravant une â -thalassémie) ;–l’association thalassémie/Hb instable.Sur le plan biologique, on retrouve constamment uneanémie microcytaire hypochrome plus ou moins biensupportée, avec parfois des érythroblastes circulants.L’étude de l’Hb retrouve des taux d’HbA 2 et d’HbF élevés,variables en fonction du type d’anomalies moléculairesen cause. L’absence d’HbA oriente vers uneâ °-thalassémie, la persistance d’HbA en proportiondiminuée oriente vers une â + -thalassémie. Elle peut égalementmettre en évidence un variant thalassémique telque l’HbE.Le diagnostic repose sur des techniques de biologiemoléculaire qui précisent la nature des anomalies etpermettent de rechercher une α -thalassémie associée.• â -thalassémies majeuresIl n’y apas d’anémie àlanaissance, puisque l’HbF estle principal constituant àcemoment de la vie. C’est aucours des premiers mois que le déficit de synthèse deschaînes â commence às’exprimer. L’anémie apparaîtrapidement. L’érythropoïèse inefficace est le principalmécanisme de l’anémie. Certains érythroblastes, notammentceux qui fabriquent de l’HbF, peuvent donnernaissance à une hématie microcytaire hypochromedéformée, qui aune demi-vie raccourcie et qui rendcompte du deuxième mécanisme de l’anémie :l’hyperhémolyse.L’anémie profonde induit une sécrétiond’érythropoïétine qui provoque une hyperplasie de lalignée érythroblastique, responsable, àlong terme, dedéformations osseuses caractéristiques. Une hépatosplénomégalies’installe progressivement. L’évolutionest fatale dans les premières années de vie en l’absencede transfusions sanguines.Les thalassémies majeures représentent un problèmemajeur de santé publique dans certaines régions.Aujourd’hui, le pronostic est transformé grâce àl’utilisationde programmes transfusionnels adaptés et del’utilisation de chélateurs de fer, limitant la surchargeen fer.Sur le plan biologique, l’anémie est microcytaire hypochrome,souvent inférieure à7g/dl. L’étude de l’Hbmontre un taux d’HbF constamment élevé. Le tauxd’HbA 2 est normal ou augmenté. Un faible taux d’HbApersiste dans les â + -thalassémies.L’information des familles àrisque est essentielle. Ledépistage des hétérozygotes vise à les informer durisque d’avoir un enfant homozygote malade. Le dépistagepeut être fait lors d’enquêtes familiales, dansl’exercice quotidien auprès des ethnies àrisque ou àl’occasion des visites prénuptiales. Il doit être suivi d’unconseil génétique et éventuellement d’un diagnosticanténatal par des techniques de biologie moléculaire.• äâ-thalassémies et persistance héréditaire de l’HbF(PHHF)Les äâ°-thalassémies résultent de la délétion des deuxgènes ä et â .Elles s’observent chez différentes ethniesdu Bassin méditerranéen.La PHHF peut résulter de différents types d’anomaliesmoléculaires. On distingue :• les PHHF délétionnelles, qui résultent de délétionslarges incluant les gènes ä et â ;• les PHHF non délétionnelles, qui forment un groupehétérogène de lésions stimulant la synthèse d’HbF.Les formes délétionnelles de PHHF et les äâthalassémiesont d’abord été considérées comme des


syndromes distincts, mais aujourd’hui, de nombreuxauteurs considèrent qu’il est difficile d’établir une frontièrenette entre ces deux anomalies.Classiquement, on admet que les sujets hétérozygotespour une äâ-thalassémie ont des paramètres hématologiquessimilaires àceux observés dans une â -thalassémieavec un taux d’HbF significativement augmenté,allant de 5à15%,dedistribution hétérocellulaire.Les homozygotes (qui présentent 100 %d’HbF) ou leshétérozygotes composites avec une â -thalassémie présententgénéralement un tableau de thalassémie intermédiaire.L’Hb Lepore peut être considérée comme une forme deäâ°-thalassémie.Àl’inverse, les sujets hétérozygotes pour une PHHF ontdes paramètres hématologiques normaux et un tauxd’HbA 2 le plus souvent normal. Ce qui les distingue estle taux d’HbF élevé, de l’ordre de 15 à30%,avec unedistribution pancellulaire plus homogène. Les sujetshomozygotes sont cliniquement normaux, avec uniquementune pseudopolyglobulie microcytaire hypochrome.Les sujets hétérozygotes composites avec uneâ -thalassémie présentent un syndrome thalassémiquepeu sévère.En pratique, plus le nombre de cas rapporté dans lalittérature augmente, plus on s’aperçoit d’un chevauchementconsidérable des paramètres érythrocytairesautrefois supposés distinguer ces deux syndromes.• åãäâ-thalassémiesDe rares mutations sont responsables d’une délétioncomplète ou d’une inactivation totale du cluster desgènes â .Seuls des sujets hétérozygotes ont été décrits,l’état homozygote étant vraisemblablement létal.Le phénotype est celui d’un trait thalassémique sans élévationdes taux d’HbA 2 et HbF. Le diagnostic passe parl’étude de la synthèse des chaînes ou l’étude moléculaire.• ä -thalassémiesElles n’ont pas de signification clinique. Leur association,en cis ou en trans, avec un gène â -thalassémiquea pour conséquence la non-élévation du tauxd’HbA 2 ,cequi peut faire méconnaître le trait thalassémique.TECHNIQUES D’ÉTUDE DE L’HÉMOGLOBINEGénéralement, 5mldesang sur anticoagulant (EDTAle plus souvent) suffisent pour une étude classique.L’échantillon peut se conserver au maximum 8jours à+4 °C.Dans la majorité des cas, le diagnostic d’une hémoglobinopathierepose sur l’analyse du phénotype.L’étude de l’Hb utilise essentiellement des méthodesséparatives. La pratique d’une seule technique n’est pasrecommandée pour deux raisons principales :• un profil normal, quel que soit le système utilisé, nepermet pas d’éliminer un variant de l’Hb ;• plusieurs variants peuvent se comporter de la mêmefaçon dans un système.L’interprétation des résultats doit tenir compte del’âge du patient, de son origine ethnique, des antécédentsfamiliaux et du contexte clinique de la prescription.Il est recommandé de faire l’analyse àdistanced’une transfusion (3 mois au minimum) et de confronterles résultats à l’hémogramme ainsi qu’au bilanmartial.Électrophorèses—Électrophorèse àpHalcalinsur acétate de celluloseFacile àmettre en œuvre, cette technique alongtempsété la méthode de choix pour le dépistage des Hb anormales.Pour les Hb anormales, la position «D»estcompatible avec les traits : HbS, HbD, HbG,Hb Lepore. La position «C»est compatible avec HbC,HbE et HbO-arab. Elle est mise en défaut chez le nouveau-néoù l’HbF est mal séparée des HbA et HbS. Sonfaible pouvoir discriminant pour des mutants ayantmême différence de charge devrait conduire à sonremplacement par des techniques plus résolutivescomme la focalisation isoélectrique ou la CLHPd’échange d’ions pour le dépistage des Hb anormales.De plus, elle n’est pas suffisamment précise pourquantifier les fractions mineures, HbA 2 et HbF, étapefondamentale dans le diagnostic des formes mineuresde thalassémie.—Électrophorèse sur gel d’agar àpHacideCette technique est appliquée àl’identification des Hbanormales préalablement identifiées par l’électrophorèseàpHalcalin ou la focalisation isoélectrique. Ici,la mobilité de la molécule d’Hb ne dépend pas de sacharge mais des modifications structurales induites parla mutation dans certaines régions de la molécule quiinteragissent avec l’agaropectine du gel. Cette techniqueest très sensible aux conditions expérimentales, ce quirend parfois sa reproductibilité difficile.


—Électrophorèse capillaireCette technique, récemment adaptée àl’étude des Hb,est rapide, automatisée et offre une approche plus résolutiveque celle de l’électrophorèse àpHalcalin.Focalisation isoélectrique sur gel d’agaroseou de polyacrylamideCette technique semi-automatisée, plus longue et pluscomplexe àmettre en œuvre que l’électrophorèse suracétate de cellulose, permet de traiter de grandes sérieset offre une meilleure résolution. Elle utilise la différencede point isoélectrique des Hb et c’est une méthodede choix pour la détection des Hb anormales. Néanmoins,comme la précédente, cette technique présentel’inconvénient de ne pas permettre d’effectuer undosage précis des diverses fractions ni de différencierHbS de HbD, HbG et Hb Lepore, non plus que HbCet HbE de HbO-Arab.Chromatographie liquide haute performance(CLHP) sur colonne échangeuse de cationsCette méthode automatisée et adaptée à de grandesséries est aujourd’hui considérée par de nombreux laboratoirescomme la méthode de choix pour quantifier lesdifférentes fractions d’Hb normales et anormales. C’estdéjà la technique de référence pour le dosage de l’Hbglyquée dans le diabète. Elle pourrait être amenée àremplacer les techniques électrophorétiques dans ledépistage des Hb anormales fréquentes. Calibrée pourles fractions HbA 2 et HbF, elle est d’une excellente précisionpour leur dosage. L’identification présomptivedes variants les plus courants (HbS, HbC) est faite parleur temps d’élution àl’intérieur de «fenêtres »définiespar le constructeur. Néanmoins, d’autres variants pouvantcoéluer avec les Hb anormales les plus courantes,il reste impératif de confronter les résultats àceux obtenuspar une technique électrophorétique.Détection spécifique d’HbS—Test de falciformationLe test d’Itano est encore utilisé de nos jours quand riende plus précis n’est disponible. Il consiste àsceller unegoutte de sang entre lame et lamelle et attendre que lesprocessus oxydatifs induisent une falciformation visibleau microscope. Ce test ne permet pas de différencier unhétérozygote d’un homozygote et n’est pas sensible auxtaux faibles observés chez un nouveau-né.Sa variante, connue sous le nom de test d’Emmel,consiste à utiliser une solution de métabisulfite desodium pour provoquer la falciformation.—Test de solubilitéCe test est hautement spécifique de l’HbS, qui,lorsqu’elle est désoxygénée par de l’hydrosulfite desodium, précipite en milieu salin concentré. La lecturedu trouble est semi-quantitative et ne permet pas defaire la distinction entre les diverses formes génétiquesde drépanocytose. Ce test peut être faussement négatifchez les sujets porteurs d’un taux faible.Quantification d’HbA 2La quantification précise du taux d’HbA 2 est essentielleau dépistage d’un trait thalassémique. La mesure densitométriquedes bandes d’électrophorèse est àproscrire(CV >20%).Deux techniques automatisées et applicables en sériesont utilisables :laCLHP et la chromatographie surmicrocolonne (qui présente l’inconvénient d’être sensibleaux variations de température). L’électrophorèsecapillaire pourrait également être utilisable.Àpartir de l’âge de 6mois et en l’absence de toutehémoglobinopathie, le taux d’HbA 2 mesuré en CLHPvarie de 2à3,2 %.Trois situations sont susceptibles d’augmenter artéfactuellementla fraction d’HbA 2 par contamination :• modifications post-traductionnelles de l’HbA (glycation,carbamylation, désamination…) ;ces fractionsplus acides sont éluées plus rapidement que la fractionmajeure en HPLC ;• fractions mineures d’un mutant lent de l’Hb (HbS,HbD, HbC…). Le taux d’HbA 2 est difficile àinterpréter.Dans ce cas, c’est la mesure précise du taux duvariant d’Hb qui permet de suspecter une éventuellethalassémie associée ;• présence d’HbE qui coélue avec l’HbA 2 :dans ce cas,la mesure est impossible en HPLC. Un taux d’HbA 2supérieur à8%doit faire suspecter un variant (HbE,Hb Lepore…).La présence d’un variant de la chaîne α ou ä diminuele taux d’HbA 2.Quantification d’HbFL’HbF est majoritaire au cours de la vie fœtale et des2 premiers mois de vie. Une légère augmentation(< 3%)peut persister jusqu’à 5ans, en l’absence detoute hémoglobinopathie. Au-delà, le taux est inférieurà1%.Le taux d’HbF doit être déterminé avec précision chezle sujet drépanocytaire. Il est également très utile dansle diagnostic des thalassémies.La CLHP est la technique de choix.


Le chromatogramme doit être examiné avec attentionpour ne pas confondre l’HbF avec l’Hb glyquée, unautre variant coéluant dans cette région (HbJ ou HbN),ou des fractions liées àunéchantillon vieilli.La méthode de Betke de résistance àladénaturationalcaline est également envisageable pour les taux inférieurà15%.Interprétation des résultats—Mise en évidence d’une Hb anormaleLes HbS, HbC et HbE peuvent être aisément identifiablespar une combinaison appropriée de techniquesséparatives. L’interprétation des résultats doit prendreen compte l’origine ethnique des patients. Le taux duvariant doit orienter vers un éventuel syndrome thalassémiqueassocié.Pour les HbS et C, le taux est d’environ 40 %etlepatient d’origine africaine. Un taux inférieur à35%doit faire rechercher une α -thalassémie associée tandisqu’un taux supérieur à55%oriente vers une â -thalassémieassociée.Pour les HbE, le taux est de l’ordre de 30 %, associé àun hémogramme évocateur de thalassémie chez unpatient d’origine asiatique.Un taux inférieur à20%associé àune microcytoseoriente plutôt vers une Hb Lepore dont l’identificationdoit être confiée àunlaboratoire spécialisé.Le diagnostic des homozygoties ne peut être posé sansune étude familiale. En effet, par exemple, le profild’une forme SS ne diffère pas de celle d’une associationHbS/â °thal ou HbS/PHHF.L’identification des autres variants nécessite d’avoirrecours àdes techniques spécialisées.—Absence de fractions anormales• Profil normalUn profil normal, avec des taux d’HbA 2 et HbF normaux,doit être interprété en fonction de l’hémogramme,du bilan martial, de l’origine ethnique, ducontexte clinique, familial et transfusionnel du patient.–Chez une femme enceinte, un profil normal sansmicrocytose ou carence martiale associée ne permetpas d’éliminer formellement l’éventualité d’uneâ -thalassémie hétérozygote. Il est conseillé de faireun hémogramme et une étude de l’Hb chez leconjoint.–Un profil normal avec microcytose associée sanscarence martiale doit faire évoquer une α -thalassémieprobable ou une â -thalassémie dite silencieuse.Dans un contexte de grossesse, il est préconisé defaire un hémogramme et une étude de l’Hb chez leconjoint.–Unprofil normal en présence de carence martialedoit faire l’objet d’un contrôle après correction dela carence si la microcytose persiste.• Augmentation du taux d’HbA 2Dans un contexte de microcytose, ce profil évoqueune â -thalassémie hétérozygote. Dans près de la moitiédes cas, le taux d’HbF est également modérémentaugmenté (généralement < 5 %). Un taux d’HbFsupérieur à5–7 %doit faire discuter une äâ-thalassémie.L’augmentation acquise de l’expression de l’HbA 2 estrare, observée au cours d’hyperthyroïdies non traitées,dans les anémies mégaloblastiques ou chez des patientsporteurs du VIH traités par des antiviraux.• Augmentation du taux d’HbFAprès l’âge de 5ans, on distingue deux types de causesd’augmentation :–les augmentations constitutionnelles :PHHF :taux d’HbF entre 15 et 30 %chez leshétérozygotes, 100 %chez les homozygotes ;äâ-thalassémies : paramètres évoquant un traitthalassémique et taux d’HbF entre 5 et 15 %chez les hétérozygotes, 100 % chez les homozygotes;â -thalassémies hétérozygotes (généralement


turne, chimiothérapies, traitement par érythropoïétineet acide valproïque) ;traitements médicamenteux utilisés dans les syndromesdrépanocytaires majeurs ;au cours du diabète et de l’hyperthyroïdie nontraitée.• Diminution du taux d’HbA 2Après l’âge de 6 mois, une diminution de l’expressionde l’HbA 2 peut être observée dans diverses situations:–cause fréquente :carence martiale profonde.–causes plus rares :anémies inflammatoires ;certaines äâ-thalassémies ;ä -thalassémies ;trait α -thalassémique ;hémoglobinose H;anémies sidéroblastiques congénitales.L’absence complète d’HbA 2 est beaucoup plus rare,liées aux äâ-thalassémies homozygotes ou variants del’HbA 2 àl’état homozygote.Examens spécialisésCe sont des examens de deuxième intention, généralementréalisés pour compléter les tests préalablementdécrits :• test de stabilité àl’isopropanol destinés àmettre enévidence les Hb instables ;• mesure de l’affinité pour l’oxygène (calcul de la P50)et dosage de 2-3 DPG pour compléter l’étude des Hbàaffinité modifiée ;• dosages chromatographiques des chaînes de globineen phase inverse ;• analyse spectrophotométrique pour mettre en évidencela méthémoglobine.Les techniques de biologie moléculaire sont essentiellementutilisées dans le cadre du conseil génétique et dudiagnostic anténatal. Elles sont destinées àidentifier lescouples àrisque et àmesurer le risque éventuel pourl’enfant.Dans le cas de la drépanocytose, l’étude des parentsn’est généralement pas nécessaire.Pour le diagnostic moléculaire de â -thalassémie, la stratégierepose sur la recherche des anomalies les plus fréquemmentobservées dans l’ethnie du patient étudié.Deux techniques dérivées de la PCR sont le plus souventutilisées :• l’hybridation par un oligonucléotide allèle-spécifique( allele specific oligonucleotide [ASO]) ;• l’amorçage allèle-spécifique ( allele specific priming[ASP]).Les grandes délétions peuvent être identifiées par gap-PCR. Quand l’identification de l’anomalie résiste auxtests de première intention, le diagnostic nécessite dedéterminer la séquence nucléotidique du gène et de sesrégions de contrôle.Le diagnostic moléculaire d’α -thalassémie délétionnelleutilise la gap-PCR. Les α -thalassémies non délétionnellessont rares et sont identifiées par une sonde spécifiqueou un séquençage de l’ADN.☞ Drépanocytose, MéthémoglobineBain BJ.Haemoglobinopathy diagnosis. –2 nd edition.Oxford :Blackwell Publishing, 2006 ;313 p.Bardakdjian-Michau J, Dhondt JL, Ducrocq R, Galactéros F, Guyard A,Huchet FX, et al.Bonnes pratiques del’étude de l’hémoglobine.Ann Biol Clin 2003 ;61:401-409.Wajcman H.Hémoglobines ethémoglobinopathies.Disponible sur :http://rbc.gs-im3.fr/DATA/VFHW_CD/VFMenu1.html

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