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Lire le Fenêtres sur cours n°375 (Spécial Université d ... - SNUipp

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« Mettre en intrigue la matièrehistorique »12 eUNIVERSITÉd’automnedu <strong>SNUipp</strong>L’enseignement de l’histoirene va, selon vous, pas desoi ?A P. Quand on observe certainespratiques en classe, l’Histoireapparaît quelquefois commeune succession d’événementsqu’il suffirait de posséder, uneapproche qu’on pourrait résumerpar « l’Histoire ça se transmetet ça s’apprend ». Lesenseignants sont porteurs decette représentation comme <strong>le</strong>reste de la population. Or, non,l’Histoire, ça ne va pas de soi. Lamaitrise du vaste matériau historiqueest comp<strong>le</strong>xe. Si onobserve <strong>le</strong>s élèves, on se rendcompte que l’apprentissage del’histoire soulève des besoinsd’apprentissage d’ordres cognitif,psycho-affectif et culturel.Le récit, pratique courante,pose-t-il des difficultésparticulières ?A P. La question du récit mesemb<strong>le</strong> emblématique. Il estconsidéré comme une constanteanthropologique ; il apparaîtnaturel de raconter des histoiresen Histoire. Cette « naturalité »du récit peut s’avérer un piègepour nombre d’élèves ne maîtrisantpas <strong>le</strong>s compétences attachéesà l’usage du récit.Compétences liées à la constructiondu temps, à la maîtrise de lalangue et des concepts sousjacentsà l’Histoire, ou liéesencore aux opérations cognitivesqui décou<strong>le</strong>nt des deuxcompétences majeures composant<strong>le</strong> récit que sont « raconter »et « expliquer ». Les élèveséprouvent parfois des difficultésdans l’organisation logique etconceptuel<strong>le</strong> de ce qu’ilsracontent.«articu<strong>le</strong>r ces récitsà des concepts »A<strong>le</strong>xandre PloyéA<strong>le</strong>xandre Ployé a été treize ans professeur d’histoire-géographie dansplusieurs collèges de Région parisienne. Puis, formé à la prise en chargedes élèves handicapés, il a enseigné l’histoire à des élèves d’UPI (ULIS).Cette expérience lui a permis de réfléchir aux difficultés propres àl’apprentissage de l’histoire et à cel<strong>le</strong>s de son enseignement. Devenuensuite formateur d’enseignants spécialisés, notamment de SEGPA,avec <strong>le</strong>squels il expérimente des dispositifs d’enseignement de l’histoireauprès d’élèves en grande difficulté, il est actuel<strong>le</strong>ment responsab<strong>le</strong> desformations ASH pour l’IUFM de l’académie de Créteil (UPEC). Il est parail<strong>le</strong>urs doctorant en sciences de l’éducation à Paris VIII, l’éco<strong>le</strong> inclusiveconstituant son champ de recherche. Enfin, il co-dirige actuel<strong>le</strong>mentl’écriture de manuels scolaires en histoire.Qu’en est-il des difficultéspsycho-affectives etculturel<strong>le</strong>s ?A P. Mon intérêt se portant <strong>sur</strong> <strong>le</strong>sélèves à besoins spécifiques,re<strong>le</strong>vant du handicap mental, j’aipu constater chez eux des difficultésqu’on pourrait croire singu l i è re s : n é g ation o uécrasement du passé, dilatationdu présent, confusion entre fiction(voire fantaisie) et réalité,etc. Or ces constats meparaissent avoir une va<strong>le</strong>ur heuristiquepour penser <strong>le</strong>s difficultésde certains élèves ordinairesà construire <strong>le</strong> temps historique.Il n’est pas rare de rencontrerencore au collège des élèvesincapab<strong>le</strong>s de penser l’histoireen dehors de <strong>le</strong>ur expériencepropre. Ils n’ont pas construit dereprésentation chronologiquede l’histoire et ne relient pas <strong>le</strong>sévénements entre eux. Lesenjeux mémoriels de l’enseignementde l’Histoire, analysant <strong>le</strong>passé à l’aune des va<strong>le</strong>urs duprésent peuvent aggraver cesdifficultés. L’histoire que l’onenseigne révè<strong>le</strong> <strong>le</strong> point de vuedu pays où el<strong>le</strong> s’enseigne. Or,beaucoup de nos élèves portentdes visions de l’histoire différentesqui peuvent créer un chocentre des visions du monde différentes.Ce n’est pas nouveau,et l’éco<strong>le</strong> laïque a connu des tensionsentre la République etl’Eglise au début du 20 e . Mais cerapport à la matière historiquedoit être pris en compte car l’histoiren’est pas neutre.Quel<strong>le</strong>s pratiques <strong>le</strong>senseignants peuvent-ilsmettre en place pour aider<strong>le</strong>s élèves ?A P. La démarche que je travail<strong>le</strong>notamment avec <strong>le</strong>s enseignantsde SEGPA vise à mettre enintrigue la matière historique par<strong>le</strong> récit et à articu<strong>le</strong>r ces récits àdes concepts. Par exemp<strong>le</strong>, il estdiffici<strong>le</strong> de travail<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s 18 et 19esièc<strong>le</strong>s en visant à l’exhaustivité.Si on enseigne une période sansindiquer quels concepts l’organisent,on risque de créer desarchipels de savoirs que <strong>le</strong>sélèves ne seront pas capab<strong>le</strong>s derelier entre eux. Ils serontcapab<strong>le</strong>s de citer Louis XIV,monarque absolu, et <strong>le</strong> 14 juil<strong>le</strong>t1789 mais ils ne verront pas quece qui définit <strong>le</strong> passage de l’unà l’autre, c’est <strong>le</strong> renversement del’idée de souveraineté. L’usageproblématisé du récit par l’enseignanten lien avec des conceptsuniversels me semb<strong>le</strong> importantpour <strong>le</strong>s élèves. Cela lui offre éga<strong>le</strong>mentla possibilité « d’ordonner» <strong>le</strong>s programmes.Les programmes nedevraient-ils pas guider <strong>le</strong>senseignants en ce sens ?A P. Les programmes proposentune vision spiralaire des périodeshistoriques, ils mettent en avant<strong>le</strong> récit voire font allusion à desconcepts. Mais ils ne sont pasexplicites en termes dedémarches didactiques etlaissent <strong>le</strong>s enseignants démunis.De même la formation ne travail<strong>le</strong>pas suffisamment la didactiquede l’histoire. Le manque detemps contraint parfois <strong>le</strong>s formateursà se focaliser <strong>sur</strong> laremise à niveau en termes decontenus, quitte à perdre de vue<strong>le</strong>s autres aspects.Propos recueillis par Lydie Buguet39APP-RENTIS-SAGES

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