La pandiaphysite au cours de l'ostéomyelite chronique. à ... - sotcot
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Tun Orthop 2008, Vol 1, N° 1INTRODUCTIONL’ostéomyélite <strong>chronique</strong> constitue encore <strong>au</strong>jourd’huiune complication redoutable <strong>de</strong> l’infection ostéo-articulaire,en particulier chez l’enfant.Dans sa forme commune, l’ostéomyélite hématogèneatteint une métaphyse avec extension <strong>de</strong>s lésions à ladiaphyse adjacente dans le cas d’une évolution péjorativevers la chronicité.Quand les lésions gagnent l’ensemble <strong>de</strong> la diaphyse<strong>de</strong>s os longs et atteignent la métaphyse opposée, on setrouve alors en présence d’une forme particulièrementsévère : la <strong>pandiaphysite</strong>.L’étendue <strong>de</strong>s lésions à l’ensemble du segment osseuxtémoigne d’une physiopathologie particulière <strong>de</strong> la propagation<strong>de</strong> l’infection et d’une virulence particulièrementsévère du germe.Le but <strong>de</strong> ce travail est <strong>de</strong> mesurer les conséquencesd’une <strong>pandiaphysite</strong> qui sont <strong>de</strong> trois ordres :- mécanique : par fragilisation importante <strong>de</strong> l’os- fonctionnelle : par l’atteinte <strong>de</strong>s articulations <strong>de</strong> voisinage- troubles <strong>de</strong> la croissance chez l’enfant par atteinte <strong>de</strong>scartilages <strong>de</strong> croissance.Grâce à une étu<strong>de</strong> rétrospective, nous rapportons lesévolutions <strong>de</strong> 16 cas <strong>de</strong> <strong>pandiaphysite</strong> suivis <strong>de</strong> 1980à 2003.Matériels et métho<strong>de</strong>sSeize dossiers <strong>de</strong> sujets présentent une ostéomyélite<strong>chronique</strong> ont été étudiés <strong>de</strong> façon rétrospective.L’étendue <strong>de</strong> l’atteinte sur les clichés radiographiques àl’ensemble <strong>de</strong> la diaphyse est le seul critère d’inclusionavec l’atteinte d’<strong>au</strong> moins une métaphyse.<strong>La</strong> <strong>pandiaphysite</strong> <strong>au</strong> <strong>cours</strong> <strong>de</strong> l’ostéomyelite <strong>chronique</strong><strong>La</strong> série comportait douze garçons et quatre filles.L’âge moyen était <strong>au</strong> début <strong>de</strong> la maladie <strong>de</strong> 9.5 ans avec<strong>de</strong>s extrêmes <strong>de</strong> 4 à 20 ans.la <strong>pandiaphysite</strong> a atteint surtout le membre inférieur :[tibia (9 cas), fémur (6 cas) et humérus (1 cas)].Le délai moyen <strong>de</strong> prise en charge était <strong>de</strong> 45.8 jours.Chez 11 mala<strong>de</strong>s, un abcès collecté a dû être évacué, 5mala<strong>de</strong>s présentant déjà <strong>de</strong>s fistules.Quatre patients (cas 5 - 410 - 14 et 15) ont évolué versl’ostéomyélite <strong>chronique</strong> et une <strong>pandiaphysite</strong> en dépitd’une prise en charge relativement rapi<strong>de</strong> entre le 2 èmejour et le 4 ème jour d’évolution alors que la radiographieinitiale était normale [Table<strong>au</strong> n°1].<strong>La</strong> radiologie a mis en évi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>s lésions étendues àl’ensemble <strong>de</strong> la diaphyse avec atteinte d’<strong>au</strong> moins unemétaphyse sinon les 2 métaphyses (8 cas d’atteinte bimétaphysaire)(Fig 1-3) :- images <strong>de</strong> séquestres étendus avec tentative d’englobementpar le périoste : 6 cas- images <strong>de</strong> lésions scléro-géodiques étendues : 10 cas.Le traitement a été mené sur trois axes :1- l’évacuation <strong>de</strong>s abcès en urgence2- le traitement antibiotique adapté grâce à l’i<strong>de</strong>ntificationdu germe et à l’antibiogramme, a comporté unedouble antibiothérapie avec :- une béta-lactamine : l’Oxacilline à 15 mg/Kg/J parvoie intraveineuse- un aminosi<strong>de</strong> : Gentamycine à 2.5 mg/Kg/J parvoie intramusculaire pendant 10 jours.- Au 25 ème jour, passage à la voie orale <strong>de</strong> l’oxacillinejusqu’à normalisation <strong>de</strong> la VS (minimum 3mois).Table<strong>au</strong> 1CasN°ageDPCjoursAbcèsLocalisationAtteinteArticulaireTraitement :Type <strong>de</strong> StabilisationComplicationsÉvolution1 13 120 Tibia Cheville Ilizarov Rai<strong>de</strong>ur cheville Stabilisé2 9 15 + Fémur droit Hanche IlizarovDestruction hanche ILM3cmStabilisé3 9 90 + Tibia Plâtre Stabilité Stabilisé4 4 30 + Fémur Fixateur ExterneFracture pathologiqueILM 5cmConsolidé fistule5 9 3 + Tibia Plâtre Gitp Fracture ILM3 cmConsolidé calvicieux fistule6 20 40 Fémur Genou rai<strong>de</strong>ur stabilité7 12 210 + Fémur IlizarovHanche rai<strong>de</strong> Fracture.ILM 10cmConsolidé Fistule8 9 15 + Tibia Cheville9 6 30 FémurHancheGenouFixateur ExterneGitpIlizarovPseudarthrose Rai<strong>de</strong>urcheville ILM 4 cmFracture Rai<strong>de</strong>urs hanche,genou ILM 14 cmConsolidéConsolidé10 16 3 Tibia Plâtre ILM 2 cm Stabilisé11 6 52 + Tibia Stabilisé12 12 7 + Tibia Cheville Plâtre Fracture Rai<strong>de</strong>ur cheville Stabilisé Fistule13 12 21 + Humérus Rai<strong>de</strong>ur cou<strong>de</strong> Stabilisé Fistule14 5 2 + Tibia Plâtre Fracture Consolidé15 7 4 + Tibia Plâtre Fracture Recul 3 mois16 5 ? Fémur Hanche Plâtre Rai<strong>de</strong>ur hanche StabiliséDPC : Délai <strong>de</strong> Prise en Charge ILM : Inégalité <strong>de</strong> Longueur <strong>de</strong>s Membres GITP : Greffe Inter-tibio-Péronière.77
Tun Orthop 2008, Vol 1, N° 1<strong>La</strong> <strong>pandiaphysite</strong> <strong>au</strong> <strong>cours</strong> <strong>de</strong> l’ostéomyelite <strong>chronique</strong>établis. On sait que l’infection survient par voie hématogène<strong>au</strong> nive<strong>au</strong> <strong>de</strong>s artères métaphysaires où se créeun embole microbien. L’infection, l’œdème et ensuitel’abcès, décollent le périoste et les artères périostées aggravantainsi la nécrose osseuse [1].Pour réaliser une <strong>pandiaphysite</strong>, l’infection et l’agentmicrobien doivent suivre les voies sanguines anatomiques: artère centrale (pour atteindre l’ensemble <strong>de</strong> ladiaphyse). <strong>La</strong> voie sanguine n’est pas la seule voie <strong>de</strong>la propagation <strong>de</strong> l’infection : la sécrétion <strong>de</strong> toxinescytotoxiques (hémolysines) par un germe telle que staphylococcis<strong>au</strong>reus favorisent la progression <strong>de</strong> l’infectionpar <strong>de</strong>struction osseuse et par effraction <strong>de</strong> la paroi<strong>de</strong>s capillaires libérant <strong>de</strong>s amas bactériens qui vontcontaminer <strong>de</strong> proche en proche d’<strong>au</strong>tres territoires (etce évi<strong>de</strong>mment en inutile en l’absence <strong>de</strong> traitement antibiotiqueprécoce et adapté).Ces phénomènes expliquent <strong>de</strong>s relargages bactériensdans la circulation à partir du foyer primitif à traversune brèche vasculaire. Lima et al [2] ont décrit également<strong>de</strong> véritables métastases septiques à distance responsablesen particulier <strong>de</strong> la contamination secondaire<strong>de</strong> la métaphyse opposée et donc à l’origine d’une atteinte<strong>de</strong> l’ensemble du segment osseux.Atteinte ArticulaireEn <strong>de</strong>hors du nouve<strong>au</strong>-né ou du nourrisson, chez leslesquels on retrouve plus volontiers <strong>de</strong>s ostéoarthritesen raison <strong>de</strong>s anastomoses vasculaires métaphyso-épiphysaires,l’atteinte articulaire est relativement rare dansl’ostéomyélite <strong>chronique</strong> s<strong>au</strong>f en cas <strong>de</strong> <strong>pandiaphysite</strong> :18% pour Martini et al [3], 6 cas dans notre série sur16 <strong>pandiaphysite</strong>s (37%).Les <strong>au</strong>tres séries ne rapportent pas d’atteinte articulairedans l’ostéomyélite <strong>chronique</strong> [4].L’atteinte articulaire et la rai<strong>de</strong>ur qu’elle entraîne constituentun handicap supplémentaire pour le mala<strong>de</strong> etsont également un facteur <strong>de</strong> risque majeur <strong>de</strong> fracturepathologique diaphysaire par l’<strong>au</strong>gmentation du bras<strong>de</strong> levier sur le membre.RadiologieL’étendue <strong>de</strong> l’atteinte osseuse est particulièrement impressionnantesur les clichés radiologiques standard (Fig3). Dans notre série, la radiologie a été la base du suivi<strong>de</strong> l’évolution <strong>de</strong> la maladie sans re<strong>cours</strong>, même chez lesmala<strong>de</strong>s les plus récents à d’<strong>au</strong>tres investigations d’imageriemédicale (scintigraphie, scanner ou IRM), tant les<strong>de</strong>structions ostéo-articulaires étaient évi<strong>de</strong>ntes.ComplicationsLes fractures pathologiques <strong>au</strong> <strong>cours</strong> <strong>de</strong> la <strong>pandiaphysite</strong>sont nettement plus fréquentes : 37% dans notresérie contre 2.9% dans la série <strong>de</strong> Martini [3]. Le risqueest en relation avec l’étendue <strong>de</strong> la fragilité osseusediaphysaire et avec l’épuisement <strong>de</strong>s capacités du périoste,même chez l’enfant, à englober le séquestre.Par ailleurs, les procédés <strong>de</strong> fixation externe préventivesou curatives <strong>de</strong> cette fragilité osseuse obligent à<strong>de</strong>s montages longs (prise <strong>de</strong> crête iliaque, pontage dugenou ou <strong>de</strong> la cheville) et <strong>de</strong> longue durée aggravantles rai<strong>de</strong>urs articulaires secondaires.Les fistules <strong>chronique</strong>s sont également plus fréquentesdans la <strong>pandiaphysite</strong> : 25% dans notre série contre 5%dans la série <strong>de</strong> Martini [3]. Les fistules sont toujoursen rapport avec une ostéite <strong>chronique</strong> ou un séquestre.Si celui-ci n’est pas mis en évi<strong>de</strong>nce par la radiologiestandard, on doit le rechercher par le scanner.Les inégalités <strong>de</strong> longueur représentent <strong>au</strong>ssi une complicationtrès fréquente : 30% dans notre série. Ces inégalitéssont en rapport avec les télescopages et pertes <strong>de</strong>substances <strong>au</strong> <strong>cours</strong> <strong>de</strong>s fractures pathologiques et à l’atteinte<strong>de</strong>s cartilages <strong>de</strong> croissance. Leur prise en chargepar (allongement progressif) est très hasar<strong>de</strong>use sur unos ostéique dont on a obtenue parfois la consolidationavec be<strong>au</strong>coup <strong>de</strong> difficulté.Nous n’avons pas abordé dans ce travail les résultats <strong>de</strong>sprocè<strong>de</strong>s thérapeutiques employés ; ils ont fait l’objetd’un travail antérieur [5].D’<strong>au</strong>tre part <strong>au</strong>cun mala<strong>de</strong> <strong>de</strong> cette série ne peut êtreconsidéré comme guéri ou même voir sa maladie stabiliséeen raison <strong>de</strong> la présence du germe dans le site <strong>de</strong>l’infection-fistules <strong>chronique</strong>s, géo<strong>de</strong>s osseuses, sclérosediffuse et <strong>de</strong> séquelles orthopédiques graves (rai<strong>de</strong>ursarticulaires, inégalités <strong>de</strong> longueur, amyotrophies ettroubles cutanées sévères). Cependant on a pu mettreen évi<strong>de</strong>nce le caractère péjoratif d’une pandiaphisite enraison du risque accru <strong>de</strong> complications qu’elle engendre.Le retard thérapeutique et la virulence particulièredu germe semblent être les c<strong>au</strong>ses les plus importantesà l’origine d’une <strong>pandiaphysite</strong> <strong>au</strong> <strong>cours</strong> d’une ostéomyélite[6].C’est la raison pour laquelle une étu<strong>de</strong> bactériologiquecomplète doit être réalisée sur le germe responsable<strong>de</strong> l’infection et non pas simplement une i<strong>de</strong>ntificationet un antibiogramme : recherche <strong>de</strong> gènes codantles toxines staphylocciques (leucocidine <strong>de</strong> Panton etValentine), recherche d’activité super antigénique partest d’activation lymphocytaire et enfin, vérifier que lessouches ne présentent pas <strong>de</strong> résistance hétérogène àl’oxacilline en i<strong>de</strong>ntifiant le gène «mec A».Une connaissance précise <strong>de</strong> la souche microbiennepermettra peut-être une action thérapeutique plusprécoce, certes mais également plus adaptée.Conclusion<strong>La</strong> <strong>pandiaphysite</strong> est une forme grave <strong>de</strong> l’ostéomyélite<strong>chronique</strong> car elle potentialise les complications et lesséquelles <strong>de</strong> la maladie, en particulier les complicationsmécaniques et les inégalités <strong>de</strong> longueur <strong>de</strong>s membresinférieurs. Une meilleure connaissance <strong>de</strong> la souchemicrobienne associée à une action thérapeutique ultraprécocepermettront certainement d’éviter <strong>de</strong> telles évolutionspéjoratives.79