YHWPl
52% de renouvelable d’ici 2030 : le Maroc vise encore plus haut
Janvier-Février 2016
6 #
World Efficiency : 13 solutions
pour un développement propre
AREI : 300 GW de renouvelables
pour sortir l’Afrique de l’obscurité
SEYNI NAFO
« Nous sommes très bons pour
négocier un accord, mais dans
le suivi, nous nous relâchons »
EDITORIAL
Par Thierno Bocar TALL,
PDG de La Société Africaine de Biocarburants
et des Énergies Renouvelables (SABER)
Maintenant, la balle
est dans le camp
des Africains
L’Afrique n’a pas obtenu tout ce qu’elle aurait voulu dans le cadre de
la COP 21, mais elle a remporté de grandes victoires concernant les
objectifs de limitation du réchauffement, les garanties de financements
ou la reconnaissance de ses besoins spécifiques en matière d’adaptation
aux changements climatiques.
Toutefois, si cette conférence a permis un accord politique planétaire
qui peut, globalement, satisfaire l’Afrique, le plus difficile pour nous
reste à faire : il nous faut maintenant réunir toutes les conditions pour
développer nous-mêmes notre propre secteur énergétique. Cela signifie
renforcer nos compétences, gagner en compétitivité et adopter des
standards de gestion et de gouvernance irréprochables. Les capitaux
sont disponibles et les technologies sont mûres, maintenant l’essentiel
dépend de nous.
Dans ce numéro d’Energies Africaines, Seyni Nafo, le président du
groupe des négociateurs africains, nous avertit : « Nous sommes très bons
pour négocier un accord, mais dans le suivi, nous nous relâchons, ce qui est
paradoxal car le plus gros travail commence maintenant. (…) Si nous ne
nous préparons pas, si nous ne proposons pas des contenus, des soumissions
qui soient de très haute qualité, ce ne seront pas les pays développés qui
viendront nous dire : voici comment renforcer vos capacités ».
C’est précisément ce pourquoi se bat la SABER, qui a été pionnière
en Afrique dans le secteur des énergies renouvelables. C’est pourquoi
également notre institution a contribué aussi activement au lancement
de ce magazine dont la vocation est de porter la parole de tous les acteurs
africains du secteur.
Une gigantesque opportunité se présente à nous. Cette fois, donnons-nous
les moyens de la saisir pleinement et d’en tirer le plus grand
profit pour notre continent et pour ses populations. y
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 3
SOMMAIRE
Energies Africaines
Numéro 06
Janvier-Février 2016
Editeur
ENERGIES AFRICAINES
est édité par :
Media Management & Participations Ltd
Opérateur
Médiamania Sàrl
Rue du Lémam 6
1201 Genève
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Rédaction
Rédactrice en chef :
Gwladys JOHNSON
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Création
Jérémie FLAUX
Relecture et corrections
Xavier MICHEL
Nils COUTURIER
Impression
Rotimpres,Aiguaviva, Espagne.
© Reproduction interdite sans
l’accord écrit de l’éditeur
PROJETS ET
RÉALISATIONS
7 M-Kopa lève 19 millions $ et
poursuit son expansion
9 Générale du Solaire et
Arborescence Capital
visent 300 MW de solaire
au Cameroun
11 La BAD et la Chine à la
rescousse du secteur
énergétique sud-africain
13 Le Kenya cherche des
partenaires pour développer
ses centrales géothermiques
15 Une étude de l’université
de Twente diagnostique
l’inefficacité du secteur
africain des EnR
DOSSIER : LA COP 21
ET SES CONSÉQUENCES
24 COP 21 : le sursaut salutaire
en faveur du climat
30 Seyni Nafo : « Nous avons
écrit une nouvelle page de
l’histoire du monde avec
l’Afrique aux premières
loges »
35 L’IAA, là où commence
la prise en main par
l’Afrique de ses problèmes
climatiques
36 La communauté
internationale casse la
tirelire pour le financement
du climat
38 L’Afrique, le cordonnier mal
chaussé de l’énergie
40 L’AREI, 500 milliards de
dollars et 300 GW de
renouvelables pour sortir
l’Afrique de l’obscurité
43 Fabrice Le Saché : « COP 21
a sanctuarisé le rôle du
marché carbone dans
l’atteinte des objectifs
climatiques »
46 La Galerie by World
Efficiency : 500 solutions
pour un développement
propre
4 x ENERGIES AFRICAINES Janvier-Février 2016 4 N°6
POLITIQUES PUBLIQUES
16 Le Maroc met la barre
encore plus haut en matière
d’énergies renouvelables
20 Le déficit énergétique place
l’économie zambienne au
bord du gouffre
51 Libéria : 150 000 personnes
auront accès à l’énergie
avec l’appui de la Banque
mondiale
53 Le Nigeria veut développer
13 GW de centrales solaires
off-grid
55 Zimbabwe : la ZESA n’a tenu
que deux semaines sans
pratiquer de délestages
56 AFD : « Par exemple, si un
entrepreneur veut un crédit
pour changer sa chaudière,
la banque peut lui proposer
les crédits Sunref »
TECHNOLOGIES
58 Grand Renaissance : en cas
d’échec des négociations,
l’Egypte pourrait faire appel
au Conseil de sécurité
61 Le Masdar Institute
développe un dispositif qui
vise à doubler l’efficacité des
panneaux solaires
INTERNATIONAL
63 Un réchauffement à
moins de 2°C requiert
12 100 milliards $ et 12,5 TW
d’énergies vertes d’ici 2040
64 La Chine, championne
mondiale du
développement des
énergies renouvelables
LEADER DU MOIS
66 Tony Elumelu encourage
le Congrès des Etats-Unis à
considérer l’adoption de la
loi Electrify Africa
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 5
PROJETS ET REALISATIONS
Guinée-Conakry : les travaux
de construction de la centrale
hydroélectrique de Souapiti
sont lancés
Le secteur de l’énergie a capté
40% des financements de start-up
africaines en 2015
Selon un récent rapport publié par Disrupt Africa,
une plateforme d’informations spécialisée sur
les start-up africaines, ces dernières ont mobilisé
un total de 185,7 millions $ de financement en
2015. 125 entreprises sont concernées par ces
financements, ce qui a eu un effet de dilution sur
la moyenne par entreprise. Par secteur, c’est celui
de l’énergie qui a raflé la plus grosse mise, captant
39,7% des investissements. Une performance
tirée par les 19 millions $ de l’entreprise kényane
M-Kopa, qui offre des services de consommation
d’énergie solaire à la demande. De même qu’Off
Grid Electric, basée en Tanzanie, qui a mobilisé
près de 25 millions $.
Le rapport indique aussi qu’avec 24,5%, les entreprises
de technologie financière ont occupé le deuxième
rang de mobilisation de ces financements.
Avec 45 entreprises et 36% des capitaux captés,
l’Afrique du Sud se taille la part du lion, suivie du
Nigeria (24%) et du Kenya (14,4%). Les autres
pays bénéficiaires ont été l’Égypte, la Tanzanie et
le Ghana. y
Le président guinéen Alpha Condé a procédé,
ce 22 décembre, au lancement des travaux de
construction de la centrale hydroélectrique de
Souapiti. L’infrastructure, d’une capacité de
515 MW et composée de cinq turbines, sera
implantée sur le fleuve Konkouré, situé dans la
préfecture de Dubréka. Elle sera construite par la
compagnie chinoise CWE et les travaux dureront
58 mois, soit environ cinq ans. Son coût de réalisation
est estimé à 1,5 milliard $, montant mobilisé
grâce au concours de l’Exim Bank de Chine, de
la Banque mondiale, du Fonds arabe d’Abu Dhabi
et de la Banque africaine de développement.
La mise en service de ce barrage portera la capacité
énergétique du pays à 830 MW. Selon un
responsable du Département de l’énergie, 525 MW
devraient, à ce stade de développement, être suffisants
pour électrifier l’ensemble du pays avec un
réseau de transport électrique adéquat. y
Djibouti : l’Allemand Green Enesys
annonce une centrale solaire
de 300 MW
La société allemande Green Enesys annonce la
mise en place d’une centrale solaire de 300 MW
à Djibouti. L’infrastructure sera située dans la
plaine du Grand Bara, au sud du pays. D’un coût
d’environ 360 millions d’euros, cette centrale sera
construite en six phases de 50 MW de capacité
chacune. Elle créera 150 à 200 emplois directs et
indirects lors de sa construction et 60 emplois à
temps plein lors de son exploitation. Le développement
de cette centrale est un pas de plus vers
l’atteinte de l’objectif national qui consiste à faire
de Djibouti le premier pays africain à utiliser
100% d’énergies renouvelables. Pour y parvenir,
il envisage de s’appuyer, entre autres, sur son
potentiel géothermique qui est estimé à 1000 MW.
65% de la consommation actuelle du pays, qui
s’élève seulement à 120 MW, sont produits par des
centrales hydroélectriques. y
6 x ENERGIES AFRICAINES
Janvier-Février 2016 4 N°6
PROJETS ET RÉALISATIONS
M-Kopa lève 19 millions $ et
poursuit son expansion
Le fournisseur de solutions solaires M-Kopa a achevé
un tour de table qui lui a permis de mobiliser
19 millions $ pour étendre son marché et diversifier
ses offres.
Menée par la Generation Investment
Management, la levée de fonds 19 millions
$ permettra à M-Kopa d’atteindre
son prochain objectif qui est
d’électrifier un million de ménages
africains d’ici 2017. « Nous démontrons
que le solaire peut transformer la vie des
populations non connectées aux réseaux
électriques, être une solution pour les
problèmes de la planète, et générer
du profit pour les investisseurs qui s’y
intéressent. En trois ans, nous avons déjà
atteint 25 000 ménages répartis dans
3 pays, et ceci n’est qu’un début. » a déclaré
Jesse Moore, le PDG et co-fondateur
de M-Kopa.
« Avec 1,3 milliard de personnes
qui n’ont pas accès à l’électricité, le
modèle innovant de M-Kopa prouve
que les solutions solaires peuvent
être rendues accessibles, créant ainsi
un énorme marché. En plus de la
rentabilité financière à long terme, ce
modèle représentent une solution aussi
bien pour les ménages à faible revenu
que pour l’environnement. » a déclaré
Colin le Duc, associé à Generation
Investment Management.
Diversifier les produits
Le développeur de solutions solaires
propose également de nouveaux
produits à sa clientèle. Les ménages
qui ont achevé le paiement de leurs
kits de systèmes solaires domestiques
peuvent désormais se procurer des
lampes supplémentaires, des foyers
améliorés, des smartphones ou encore
des tanks à eau.
Barack Obama avait visité M-Kopa lors de son dernier passage à Nairobi, l’été 2015.
Ce développement entre dans la
volonté de la compagnie d’améliorer
progressivement et de façon continue
la vie de ses clients. « Il est bon que
les clients qui ont prouvé leur solvabilité
puissent avoir accès à d’autres produits
qui leur permettront de faire un pas de
plus vers de meilleures conditions de
vie. », a déclaré Jesse Moore, directeur
exécutif et co-fondateur de M-Kopa.
Les nouveaux produits se paieront
de manière échelonnée et via mobile
comme les kits de systèmes solaires
domestiques. Les modalités de paiement
varieront selon la valeur des
produits choisis. Les foyers améliorés
sont les articles les plus populaires auprès
des clients.
Ces derniers apprécient aussi particulièrement
les smartphones qui
étaient jusque-là hors de leur portée.
« La plupart des ménages clients de notre
entreprise ont un revenu quotidien de
moins de 200 shillings kényans (environ
1,95 $). Il leur est donc très difficile
d’économiser ou d’accéder aux prêts
pour s’acheter des biens d’équipement
tels que les foyers. Mais avec une bonne
cote de solvabilité à M-Kopa, ils ont
accès à ces produits. », déclare-t-il en
expliquant les modalités de paiement
utilisées. y
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 7
PROJETS ET REALISATIONS
Le Sénégalais Senergy installera une centrale
photovoltaïque de 29,5 MW à Méouane
Senergy PV SA, une jeune société sénégalaise au capital de 10 millions
FCFA, construira une centrale solaire photovoltaïque dans la
commune de Méouane, au Sénégal. L’infrastructure, d’une capacité
de 29,5 MW, coûtera 27 milliards FCFA (environ 44,8 millions $).
L’énergie produite sera acheminée vers le réseau électrique national
et les premiers kilowattheures devraient être générés en 2017. « Le
fonctionnement normal de la centrale permettra de mieux satisfaire les
besoins en énergie en forte croissance. Le Sénégal, qui dépend à 53%
des combustibles fossiles pour la satisfaction de ses besoins, voit sa
demande d’électricité s’accroître de 6,2% par an », a déclaré Mathieu
Peller, le directeur général de Senergy. La Senelec, la société nationale
en charge de la fourniture de l’électricité, a augmenté sa capacité
de production de 26% au cours des trois dernières années. y
Angola : le deuxième barrage électrique de
Cambambe entrera en service en juin 2016
Le barrage de Cambambe pourra fournir au réseau électrique angolais
960 MW d’énergie dès juin 2016. C’est ce qu’a annoncé João
Baptista Borges, le ministre angolais de l’Energie et de l’Eau. D’une
capacité initiale de 180 MW, l’infrastructure située dans la province
de Cuanza Norte fait l’objet d’une surélévation qui lui permettra de
produire 80 MW supplémentaires. En outre, une deuxième centrale
de Cambambe de 700 MW de capacité est en construction. La facture
de l’ensemble des travaux s’élève à 734 millions $. Une ligne de
transmission en cours de construction permettra l’acheminement de
l’énergie générée vers les villes de Luanda, Gabela et Benguela.
Le ministre a également annoncé que la centrale de Lauca de
2060 MW, qui est actuellement en cours d’installation dans la province
de Cuanza, est achevée à 65%. Ses premières turbines devraient
commencer leur production d’ici la moitié de l’année 2017. Le pays
envisage de faire passer sa capacité électrique à 5 GW d’ici 2020. y
En Algérie, l’unité de
production de panneaux
solaires Aurès Solaire
sera fonctionnelle
en février
Aurès Solaire, une unité privée
de production de panneaux
solaires, entrera d’ici à février
dans sa phase d’activité selon
Hocine Nouacer, son PDG.
D’une capacité annuelle de
30 MW, constituée par 125 000
panneaux photovoltaïques
pouvant alimenter environ
30 000 ménages, elle est située
à Batna, dans la zone d’activité
de la commune d’Ain Yagout.
La construction de cette usine
entre dans le cadre d’un projet
de 10 millions $ démarré en
2013. L’infrastructure produira
des anneaux solaires à cellules
biface qui seront commercialisés
aussi bien en Algérie que
sur le marché international. Elle
emploiera dans une première
phase 50 employés directs qui
interviendront pour la plupart
dans l’ingénierie, le montage
et l’entretien des panneaux.
Des installations de production
robotisées sont actuellement
mises en place, ce qui accélérera
l’accroissement de la capacité de
production, qui devrait bientôt
atteindre les 300 000 panneaux
par an. y
8 x ENERGIES AFRICAINES
Janvier-Février 2016 4 N°6
PROJETS ET RÉALISATIONS
Générale du Solaire et
Arborescence Capital visent
300 MW de solaire
au Cameroun
Le Cameroun lance un programme de centrales
solaires dans cinq régions, pour une puissance
totale de 300 MW. La première étape passera par la
région de l’Adamaoua.
Le ministre camerounais de l’Energie,
Basile Atangana Kouna, et des
responsables de la société française
Générale du solaire et du fonds d’investissement
Arborescence Capital,
ont signé, le 6 janvier 2016 à Yaoundé,
un protocole d’accord portant sur le
financement, la construction et l’exploitation
de centrales solaires dans
les régions de l’Adamaoua, du Nord,
de l’Extrême-Nord, du Centre et du
Sud-Ouest, pour une puissance globale
de 300 MW.
Première étape
La première centrale photovoltaïque
de ce programme d’investissements
sera construite dans la région
de l’Adamaoua, dans le septentrion
camerounais, partie du pays dans
laquelle le niveau d’insolation est le
plus élevé (5,8 kWh/m 2 /jour, contre
4 kWh/m 2 /jour seulement pour la
partie Sud, selon le régulateur du
secteur de l’électricité). D’une capacité
de production de 20 MW, cette
infrastructure énergétique coûtera 18
milliards FCFA et créera 50 emplois
directs. L’infrastructure annoncée
« permettra de produire 32 GWh d’électricité
par an sans la moindre émission
de CO 2 , correspondant à la consommation
de plus de 100 000 foyers camerounais.
Sa production sera parfaitement
complémentaire de celle du barrage de
Lagdo, qui assure aujourd’hui l’essentiel
de la fourniture électrique de la région.
Le pic de production solaire coïncide
en effet précisément avec les périodes de
faible disponibilité de la ressource hydroélectrique
», apprend-on dans un
communiqué officiel.
Avec Eneo
A en croire nos sources, Générale
du Solaire et Arborescence Capital
devraient démarrer les travaux de
construction, qui dureront six mois
après la signature du contrat de vente
de l’électricité avec Eneo, le concessionnaire
du service public de l’électricité
au Cameroun, qui a affirmé
l’année dernière son intérêt pour le
solaire.
L’infrastructure annoncée
« permettra de produire 32 GWh
d’électricité par an sans la moindre
émission de CO 2 , correspondant
à la consommation de plus de
100 000 foyers camerounais ».
Pour rappel, ce projet, le tout premier
de cette envergure dans le pays
en matière de solaire, est l’une des
retombées concrètes du Forum Ema
Invest, dont la 9 ème édition a été organisée
à Genève, en Suisse, au mois
d’octobre 2013. Le Cameroun en
était l’hôte d’honneur. y
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 9
PROJETS ET REALISATIONS
Kenya : SkyPower distribuera 2 millions de
kits solaires à travers le pays
Le gouvernement kényan a conclu avec le développeur de
solutions solaires SkyPower un partenariat de distribution
de 2 millions de solutions solaires domestiques. Ces équipements
seront distribués à des ménages, des écoles et des
centres de santé situés dans les zones non électrifiées du
pays. « Le Kenya est très fier de travailler avec SkyPower et
ses partenaires afin d’assurer une distribution ponctuelle et
efficace de ces 2 millions de kits solaires, une première mondiale
», a déclaré Uhuru Kenyatta, le président kényan.
Chaque kit contient un panneau solaire, des lampes LEF,
des chargeurs USB ainsi qu’une radio solaire conçue pour
fonctionner dans des conditions extrêmes, le tout pourvu
d’une solide garantie. SkyPower collaborera dans ce cadre
avec l’ONG Plan International afin de mettre en place un
système qui leur permettra de s’assurer que les systèmes
énergétiques parviennent effectivement aux bénéficiaires désignés.
La distribution se fera par le biais des écoles de base
des communautés sélectionnées.
Ce programme, l’un des plus importants au monde, entre
dans le cadre de l’accord conclu entre le Kenya et SkyPower
relatif à la mise en place et à l’exploitation de 2000 MW de
centrales solaires à travers le pays. y
Sénégal : Nadji.Bi lance sa deuxième
génération de mini-kits solaires
La société panafricaine Nadji.Bi Group, installée au Sénégal,
a lancé une deuxième génération de mini-kits solaires
dénommée Nadji.BI ZEbu v.1 F. « Avec ce produit et grâce à
notre pôle R&D local, nous entendons continuer à impacter
positivement l’économie panafricaine en créant un maximum
d’emplois et de valeur ajoutée locale, en plus du bien-être et
des économies que nos produits apportent à leurs utilisateurs
», a déclaré Ismaël Mohamadou Djida, le président du
groupe, lors du lancement.
Cette nouvelle génération de kits comprend un panneau
solaire, une batterie, des lampes et des prises pour charger
les téléphones ainsi que les petits appareils électroménagers.
Ses nouveaux composants lui permettent de diviser le temps
de charge des téléphones portables par quatre. Elle donne
en outre une autonomie d’éclairage de 9 h à trois ampoules,
15 heures à deux ampoules et 28 h à une ampoule unique.
Le kit est également doté d’une garantie d’un an. Les différentes
pièces qui la composent sont disponibles en détails
chez les distributeurs, ce qui permet aux utilisateurs de les
remplacer en cas de besoin. y
Burkina Faso : la BID alloue
12 millions $ à l’électrification
de 41 localités rurales
Le projet d’électrification rurale décentralisée
par système photovoltaïque du
Burkina Faso a reçu un financement de
12 millions $ de la Banque islamique de
développement (BID). Ces fonds permettront
au pays de donner accès à l’électricité
à 41 localités situées dans six régions.
La mise en œuvre du projet comprendra
l’installation d’infrastructures hybrides
générant de l’énergie grâce au solaire et
au diesel, ainsi que la mise en place de
réseaux électriques basse et moyenne tension
pour l’acheminement de l’électricité
produite. Les capacités du personnel du
Fonds de développement de l’électrification
(FDE) seront également renforcées.
Le Burkina Faso a un taux d’électrification
d’environ 20%. Il compte faire passer
ce chiffre à 70% d’ici 2025. y
10 x ENERGIES AFRICAINES
Janvier-Février 2016 4 N°6
PROJETS ET RÉALISATIONS
La BAD et la Chine à la
rescousse du secteur
énergétique sud-africain
Un milliard de dollars de la Banque africaine de
développement et 690 millions de dollars de la
Banque industrielle et commerciale de Chine :
l’Afrique du Sud frappe à toutes les portes pour
tenter de combler son déficit énergétique qui
pénalise l’économie.
La Banque africaine de développement
(BAD) a octroyé 1,125 milliard
$ pour le développement du
secteur énergétique sud-africain. Ce
montant sera mis à la disposition du
pays sous forme d’un prêt d’entreprise
de premier rang, d’une valeur
de 375 millions $, auquel s’ajoutera
un prêt syndiqué de 750 millions $.
Le prêt d’entreprise sera financé par
le guichet “secteur privé” de la BAD.
La banque compte s’associer aux
banques commerciales opérant sur
le continent pour la mobilisation des
fonds du prêt syndiqué.
Les prêts financeront l’exécution
du Programme d’expansion de capacité
(CEP) implémenté par l’Eskom,
la société publique en charge
de l’électricité. Le CEP s’étendra sur
la période 2015-2020. Il permettra
la maintenance et la réhabilitation de
centrales électriques d’une capacité
totale de 8000 MW et la construction
de nouvelles centrales d’une capacité
globale de 10 986 MW.
Un réseau de transport de l’électricité
d’une longueur de 9756 km sera
également mis en place. Il transportera
aussi bien l’énergie produite par
l’Eskom que celle générée par les producteurs
indépendants.
Depuis 2008, la Banque africaine
de développement a octroyé environ
2,725 milliards $ au secteur énergétique
sud-africain.
La banque chinoise ICBC
10 milliards de rands, soit plus de
690 millions $, tel est le montant que
la Banque industrielle et commerciale
de Chine (ICBC) mobilisera
pour soutenir le secteur énergétique
sud-africain. L’octroi de ce financement
qui entre dans le cadre d’une
coopération avec la Standard Bank,
permettra de soutenir la mise en place
de nouvelles centrales électriques sur
les cinq prochaines années. Les deux
institutions financières, confiantes
dans la croissance économique que
connaîtra le pays durant les prochaines
années, notamment dans
le secteur énergétique, désirent y
participer.
Le secteur énergétique ne sera
pas le seul à bénéficier de l’appui
de ces banques sur le continent.
Ces dernières envisagent en effet
de soutenir la mise en place d’une
centaine d’infrastructures dans
les domaines de l’énergie, du
transport, des télécommunications
et de l’industrie. « Dans la banque de
détail, nous travaillons ensemble afin
Depuis 2008, la Banque africaine
de développement a octroyé
environ 2,725 milliards $ au secteur
énergétique sud-africain.
d’introduire de nouvelles solutions pour
faciliter les transactions entre l’Afrique
du Sud et la Chine. Les paiements entre
personnes et entre entreprises seront
traités par des équipes spécialisées, ce
qui permettra d’accroître leur facilité et
de réduire leur coût », a déclaré Sim
Tshabalala, le directeur exécutif de la
Standard Bank Group. y
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 11
PROJETS ET REALISATIONS
L’Ethiopie pourrait produire jusqu’à 10 GW d’énergie géothermique
Le potentiel de l’Ethiopie en matière d’énergie
géothermique s’élève à 10 GW. C’est ce que révèle
une étude menée par la Geological Survey of
Ethiopia (GSE) sur une superficie de 150 000 km 2
dans la vallée du rift. Cette étude vient doubler
le potentiel géothermique du pays, qui avait été
estimé à 5000 MW. La GSE a annoncé qu’elle
collaborerait avec la société publique en charge
de l’électricité pour identifier les potentiels sites
d’installation des centrales géothermiques. Cette
identification permettra aux différents investisseurs
qui ont déjà exprimé leur intérêt pour le
secteur de faire leur entrée sur le marché.
La découverte de ce nouveau potentiel vient
s’ajouter aux 45 GW que le pays peut produire
avec ses ressources hydrauliques et à son fort taux
d’ensoleillement. Le pays compte bien exploiter
ces potentiels afin de mettre en œuvre sa stratégie
de développement durable. L’Ethiopie, qui envisage
d’atteindre un bilan carbone neutre d’ici 2025
en misant sur les énergies renouvelables, a, entre
autres, décidé de s’appuyer sur l’expérience japonaise
pour y arriver. y
La Suède et le Royaume-Uni
allouent 110 millions $
à l’électrification rurale
en Tanzanie
La Suède et le Royaume-Uni ont levé
110 millions $ pour soutenir l’électrification
des communautés rurales de la
Tanzanie. La Suède apportera, par le
biais de son agence internationale pour le
développement, 66 millions $, tandis que
le Département britannique de développement
international fournira 44 millions $.
Ces fonds participeront à l’électrification
des zones rurales à travers la mise à disposition
de mini-réseaux électriques et de
solutions solaires autonomes. Le financement
sera mis à la disposition du Fonds
tanzanien d’énergie rurale (REF) sur une
période de cinq ans.
La Tanzanie a actuellement un taux
d’électrification rurale de 21%. Le pays,
qui enregistre un déficit énergétique de
1000 MW, a pour ambition de porter sa
capacité énergétique, de 1400 MW présentement,
à 10 000 MW d’ici 2025. y
Cameroun : un prêt chinois
de 182 milliards FCFA pour construire
un barrage de 75 MW à Warak
L’International and Commercial Bank of China (ICBC) vient
d’accorder un prêt d’un montant de 182 milliards FCFA au
gouvernement camerounais afin de financer le projet de
construction d’un barrage hydroélectrique d’une capacité
de production de 75 MW sur le fleuve Bini, à Warak, situé
dans la région de l’Adamaoua, dans la partie septentrionale
du pays, a-t-on appris de sources officielles. Selon les détails
communiqués par le Ministère de l’énergie, en plus du
barrage lui-même, ce projet intègre également la construction
de lignes d’évacuation d’énergie (70 km en 225 kV) et
d’électrification rurale (30 kV), ainsi que la réhabilitation et
la construction de voies d’accès au site.
Les travaux seront réalisés par la société chinoise Sinohydro,
avec laquelle le gouvernement camerounais a signé un
mémorandum d’entente (MoU). La mise en service de cette
infrastructure énergétique, précise le gouvernement, est
prévue pour « le quatrième trimestre 2018 ». y
12 x ENERGIES AFRICAINES
Janvier-Février 2016 4 N°6
PROJETS ET RÉALISATIONS
Le Kenya cherche des
partenaires pour développer
ses centrales géothermiques
Le Kenya veut accroître sa capacité de production
énergétique via la construction de centrales
géothermiques. L’objectif est de mobiliser plus de
8 milliards de dollars. 76 MILLIONS $
DEMANDÉS À LA
BEI POUR 70 MW
Le Kenya Electricity Generating
(KenGen) désire établir des partenariats
pour construire de nouvelles
centrales géothermiques. Pour y parvenir,
la compagnie prospecte du côté
des USA, de la Chine, du Japon et de
l’Inde, mais elle est également disposée
à collaborer avec tous les pays ou
organisations désireuses d’établir un
partenariat technique ou financier. Au
nombre des infrastructures à mettre
en place, une centrale de 180 MW
dont le coût de réalisation s’élève à
650 millions $.
50% de la demande nationale
La société envisage de construire
assez de centrales pour satisfaire au
moins la moitié de la demande énergétique
nationale. Cet objectif, qui
devrait se réaliser d’ici 2025, nécessitera
environ 8,1 milliards $. Pour
cela, elle a mis en place un nouvel instrument
financier. « Nous pourrions
prendre jusqu’à 49% de participations
dans ces centrales. Si cette nouvelle
formule marche, nous l’appliquerons
aux futurs projets », a révélé John
Mudany, directeur financier à la
KenGen. La société envisage également
de s’associer avec la Geothermal
Developement Co, la compagnie nationale
en charge de l’exploitation des
ressources géothermales.
Un cadre pour les PPP
Le Kenya a procédé à une libéralisation
du secteur énergétique qui
permet de construire la majorité des
centrales par le biais d’un partenariat
Le Kenya
Electricity
Generating
(KenGen) désire
établir des
partenariats
pour construire
de nouvelles
centrales
géothermiques.
privé-public (PPP). Dans les contrats
de ce type, les développeurs privés
conçoivent, développent et exploitent
les centrales électriques. L’énergie
générée par les infrastructures est
ensuite cédée à l’Etat à un coût
prédéterminé. y
SUPPLÉMENTAIRES
À OLKARIA
Le Kenya a sollicité auprès de la
Banque européenne d’investissement,
un financement de 76
millions $ pour le forage d’un
puits supplémentaire sur le site
géothermique d’Olkaria. La
nouvelle installation devrait avoir
une capacité de production de
70 MW.
Le financement servira à l’installation
d’une nouvelle turbine,
d’un collecteur de vapeur et d’infrastructures
d’interconnexion.
L’ensemble de ces travaux devrait
permettre une réduction du coût
de l’énergie produite dans la centrale
géothermique. La réduction
du coût de l’énergie est l’un des
principaux objectifs du gouvernement
qui entend faire du Kenya
un pays industrialisé. En confirmant
la réception de la demande,
la BEI a déclaré qu’une étude sur
l’impact environnemental était
en cours et qu’elle rendrait une
décision après la réception de ses
résultats. En cas d’un avis favorable,
ce nouveau puits porterait
la capacité de la centrale d’Olkaria
à 210 MW. y
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 13
PROJETS ET REALISATIONS
Meridiam et le Fonds
souverain sénégalais
investiront 41,1 millions € dans
une centrale solaire
La société d’investissement spécialisée
dans les fonds d’infrastructures publiques
Meridiam et le Fonds souverain sénégalais
des investissements stratégiques (Fonsis)
ont signé, le 14 janvier, une convention
de partenariat portant sur la construction
d’une centrale solaire pour un investissement
de 27 milliards FCFA (41,1 millions
d’euros). La centrale, qui sera implantée
dans la localité de Méouane, dans la région
de Thiès, aura une capacité de production
de 30 MW. L’électricité produite sera vendue
à la Société Nationale d’Electricité du
Sénégal (Senelec) à 65 francs le kilowatt/
heure.
« Le projet consiste à construire et opérer
une centrale électrique solaire de 30 mégawatts
pour un coût global incluant le
raccordement au réseau de la Senelec », a
détaillé le directeur général du Fonsis lors
de la cérémonie de signature de la convention
de partenariat. Présent à la cérémonie,
le Premier ministre sénégalais, Mahammed
Boun Abdallah Dionne (photo), a précisé
que le financement du projet a déjà été
bouclé. « Le financement bancaire nécessaire,
d’un montant de 22 milliards FCFA,
a été mobilisé auprès de Proparco, et le reliquat
a été apporté par les actionnaires », a-til
assuré, indiquant que ce projet « apportera
une contribution au renforcement du mix
énergétique et à la réduction de la pollution,
en ligne avec les conclusions de la Cop 21 ».
Les travaux de construction de la centrale
solaire devraient durer dix mois. y
Rwanda : Ignite Power électrifiera 250 000
ménages grâce au solaire
L’entreprise mauricienne Ignite Power Ltd a signé avec le
Rwanda un contrat relatif à l’électrification de 250 000 ménages
ruraux grâce à des dispositifs solaires. Ce processus
d’accès à l’électricité, qui s’étendra sur cinq ans, coûtera plus
de 50 millions $. Son financement sera entièrement assuré
par Ignite. « La distribution de ces kits solaires permettra
au Rwanda de dépasser les limites imposées par son réseau
électrique en ayant recours aux solutions off-grid pour apporter
plus rapidement une énergie moins chère à ses citoyens. Nous
sommes par conséquent fiers de participer à cet effort d’électrification
à grande échelle », a déclaré Yariv Cohen (photo), le
directeur d’Ignite Power. Les ménages qui bénéficieront de
ces solutions solaires pourront les payer sur une échéance de
deux ans.
Ce contrat permettra, selon Germaine Kamayirese, la ministre
rwandaise de l’Energie, de faire passer la part des
solutions off-grid dans le mix énergétique du 1% actuel à 10%
d’ici 2018. Le projet entre dans le cadre de la stratégie nationale
qui envisage d’atteindre un taux d’électrification de 70%
d’ici 2018. 22% de cette population seront touchés grâce aux
solutions énergétiques hors réseau. Cela implique qu’environ
530 000 ménages devront être équipés de ce type de dispositifs
d’ici là. y
14 x ENERGIES AFRICAINES
Janvier-Février 2016 4 N°6
PROJETS ET RÉALISATIONS
Une étude de l’université
de Twente diagnostique
l’inefficacité du secteur
africain des EnR
Etudiant et chercheur à l’université de Twente,
aux Pays-Bas, Eugene Ikejemba et Peter Schuur
ont réalisé une étude sur le secteur africain des
énergies renouvelables. Le constat est sévère.
« De nombreux projets solaires
échouent en Afrique, parce que la plupart
du temps, les gens pensent qu’il
suffit de trouver un terrain libre et d’y
implémenter le projet. Plus important,
très peu pensent au management du
projet après sa mise en place. » C’est
en ces mots qu’Eugene Ikejemba résume
l’étude qu’il a réalisée avec Peter
Schuur sur le manque d’efficacité
des projets solaires en Afrique en général,
et au Nigeria et au Ghana en
particulier.
Des facteurs ignorés
Les deux chercheurs ont établi que
les projets d’énergie solaire ne sont pas
assez efficaces parce que les entités devant
les mettre en place ne déterminent
pas avec précision certains facteurs.
Le nombre de personnes à atteindre,
l’adéquation de l’emplacement des
sites par rapport aux cibles ou encore
l’acheminement de l’énergie produite
vers ces personnes, sont quelques éléments
dont l’imprécision contribue au
manque d’efficacité des projets.
Cette étude a été motivée par l’incapacité
du Nigeria et du Ghana
à fournir une énergie abordable et
fiable à leurs populations en dépit de
leur croissance économique, de leur
Le nombre de personnes à atteindre, l’adéquation de l’emplacement des sites par rapport
aux cibles ou encore l’acheminement de l’énergie produite vers ces personnes, sont quelques
éléments dont l’imprécision contribue au manque d’efficacité des projets.
potentiel en énergie solaire et des projets
initiés dans le secteur.
Les solutions de proximité
Les auteurs suggèrent aux autorités
de tenir compte des facteurs démographiques
et géographiques lors de
la réalisation des projets de centrales
solaires. Ils proposent en outre aux
différentes organisations de privilégier
les solutions de proximité telles
que l’installation des panneaux solaires
sur les toits des constructions à
électrifier. y
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 15
POLITIQUES PUBLIQUES
Le Maroc met
la barre encore
plus haut en
matière d’énergies
renouvelables
Le Maroc, qui s’était déjà distingué par une
politique énergétique audacieuse, a encore relevé
ses objectifs en visant un mix énergétique à 52% de
renouvelable d’ici 2030.
Le royaume chérifien, qui accueillera
la COP 22 l’an prochain, multiplie
les performances dans le secteur des
énergies renouvelables. Il vise désormais
10 000 MW de renouvelables
supplémentaires entre 2016 et 2030.
C’est ce qu’a annoncé Abdelkader
Amara, le ministre de l’Energie, des
Mines et de l’Eau lors de la 4 ème conférence
Inde-Afrique sur les hydrocarbures.
« Pour atteindre cet objectif, le
Maroc aura à développer, entre 2016
et 2030, une capacité additionnelle
de production d’électricité de sources
renouvelables de plus de 10 000 MW
réparties entre le solaire 4500 MW,
l’éolien 4200 MW et l’hydroélectricité
1300 MW », a-t-il déclaré.
L’énergie éolienne la moins chère
du monde
L’annonce a été faite par
Abderrahim El Hafidi, le secrétaire
général du Ministère marocain de
l’énergie, lors de la conférence internationale
sur l’énergie renouvelable
d’Abu Dhabi : une énergie très compétitive
sera fournie par le parc éolien
de 850 MW de capacité qui sera mis
en place par Nareva. Elle coûtera entre
30 $ et 25 $ le mégawattheure, soit
moins de 30 centimes de dollars que
la moyenne. Au Maroc, le prix moyen
de l’énergie produite avec les techniques
traditionnelles est de 90 centimes
le kilowattheure. « Maintenant,
nous avons des projets éoliens moins
chers que le charbon. C’est fantastique
que nous puissions avoir confiance dans
l’énergie renouvelable pour l’avenir
de notre énergie et l’avenir de la
planète », se réjouissait M. El Hafidi.
Adnan Amin, le directeur exécutif de
l’Agence internationale de l’énergie
renouvelable, a déclaré, pour sa part,
qu’il s’agissait d’un changement remarquable
dans le coût des énergies
renouvelables.
Cette baisse du prix de l’énergie est
la dernière d’une série de réductions
de coûts de l’énergie renouvelable
par le royaume chérifien. En 2015,
Acwa Power avait réussi à ramener
à 58,40 $ le prix de l’énergie solaire
produite dans l’un de ses parcs.
Une usine de fabrication de pales
d’éoliennes à Tanger
Le groupe allemand Siemens implantera
une usine de construction
de pales d’éoliennes à Tanger.
L’infrastructure aura une capacité
annuelle de 600 pales et emploiera
16 x ENERGIES AFRICAINES Janvier-Février 2016 4 N°6
POLITIQUES PUBLIQUES
A terme, le projet solaire Noor devrait réunir plusieurs centrales solaires d’une capacité d’environ 2000 MW.
670 travailleurs locaux. Sa construction
débutera en mars 2016 et elle
devrait démarrer sa production en
février 2017. La construction de
cette usine est l’une des clauses d’un
contrat remporté par Siemens au
sein d’un consortium formé avec le
Marocain Nareva et l’Italien Enel.
L’ensemble a obtenu la réalisation
de cinq centrales éoliennes d’une
capacité totale de 850 MW et d’un
coût de 1,2 milliard d’euros. Les
centrales seront localisées à Midelt,
Tiskrad, Tanger, Jbel Lahdid et
Boujdour. Elles auront chacune une
capacité comprise entre 100 MW et
300 MW. La production de l’usine
de Tanger fournira ces centrales,
mais sera également exportée vers
l’Allemagne, la Suède, l’Italie et
l’Afrique du Sud.
Selon Omar Chraïbi le directeur
du Centre régional d’investissement
(CRI) de Tanger Tétouan, la mise en
place de cette usine est importante
« non seulement en termes de volume
d’investissement et de création d’emplois,
mais aussi en termes d’acquisition de
savoir-faire dans le domaine des énergies
renouvelables ».
400 MW de centrales solaires
L’Agence marocaine de l’énergie solaire
(Masen) a lancé un appel d’offres
relatif à la mise en place de la première
phase du projet solaire de Noor
Midelt. Cette première étape permettra
le développement d’une ou de plusieurs
centrales solaires d’une capacité
totale de 400 MW. Le site identifié
pour abriter ce complexe est la ville de
Ouarzazate, située aux portes du désert
marocain. La technologie utilisée
sera mixte et combinera le CSP (solaire
thermodynamique à concentration)
et le PV (solaire photovoltaïque).
...
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 17
POLITIQUES PUBLIQUES
Une énergie
très compétitive
sera fournie
par le parc
éolien de 850
MW de capacité
qui sera mis
en place par
Nareva. Elle
coûtera entre
30 $ et 25 $
le MW/h.
...
TAQA MOROCCO IMPLANTERA UNE CENTRALE
ÉOLIENNE DE 140 MW À TANGER
Taqa Morocco, développeur privé
d’énergie, installera dans la ville de
Tanger une centrale éolienne d’une
capacité de 140 MW. Le parc, qui
se situera aux alentours de la zone
franche de Melloussa, devrait produire
60 MW d’électricité au début
de cette année.
L’infrastructure aura un coût total
d’environ 152 millions $ dont 30%
seront fournis sur fonds propres
par la Taqa. Les 70% restants
seront levés auprès des établissements
bancaires.
L’entreprise procède actuellement
à la levée des fonds nécessaires
La réception des offres des entreprises
désireuses de prendre part à
cet appel d’offres international est
ouverte jusqu’au 1 er février 2016. Les
développeurs de projets solaires seront
sélectionnés lors d’un processus en
plusieurs étapes ayant pour objets
la conception, le financement, la
construction, l’exploitation et la
maintenance des centrales. La Masen
espère que la mobilisation des fonds
pourra s’achever en 2017, afin que les
travaux de construction démarrent à
la fin de la même année.
A terme, le projet solaire Noor devrait
réunir plusieurs centrales solaires
d’une capacité d’environ 2000 MW.
Il entre dans le cadre de la politique
énergétique marocaine qui ambitionne
de produire environ 52% de
son électricité à partir du renouvelable
d’ici 2030. Le royaume chérifien
compte atteindre cet objectif grâce à
la construction de centrales solaires,
éoliennes et hydrauliques dans un
schéma de producteurs indépendants
d’énergie.
Dans cette optique, il a mis en
place un système réglementaire spécialement
consacré aux énergies renouvelables.
A la fin de l’année 2015,
le Parlement marocain a adopté la
Loi 58-15 qui vient compléter les
textes régissant le secteur. Modifiant
et complétant la Loi 13-09, elle fixe
avec précision la capacité des centrales
qui pourront être connectées aux réseaux
haute tension ou basse tension.
pour la réalisation du projet. Elle
attend également les autorisations
administratives requises pour
démarrer la phase de construction.
La Taqa détiendra 60% des parts
du parc.
Ses différents partenaires, les
entités qui ont signé avec elle
des contrats d’achat d’électricité,
posséderont les 40% restants.
Cette centrale est le premier projet
d’énergie renouvelable que met en
place au Maroc la société, qui réalise
environ 40% de la production
énergétique nationale. y
Elle limite à 20% de l’énergie produite
annuellement, la quantité que
les producteurs indépendants pourront
céder hors du réseau électrique
national. Les termes exacts de cette
cession seront précisés ultérieurement
par un autre texte. y
18 x ENERGIES AFRICAINES Janvier-Février 2016 4 N°6
La chronique quotidienne
de l’électrification africaine,
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énergies renouvelables
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POLITIQUES PUBLIQUES
Le déficit énergétique place
l’économie zambienne au
bord du gouffre
La Zambie, qui
dépend à 95%
de ses barrages
hydroélectriques,
connaît actuellement
une sévère crise
énergétique en raison
de la diminution des
réserves d’eau. Toute
l’économie zambienne
retient son souffle.
Les réserves d’eau du barrage hydroélectrique
de Kariba ont atteint
un niveau dangereusement bas, selon
Dora Siliya, la ministre zambienne
de l’Energie. « La situation est désastreuse.
Nous prions pour que le niveau
de l’eau ne baisse pas plus, à défaut
de quoi, nous serions dans l’obligation
d’arrêter totalement le fonctionnement
du barrage », a-t-elle déclaré à l’agence
Bloomberg.
Cette situation est due à la baisse
de la pluviosité en Zambie et au
Zimbabwe, les deux pays qui se partagent
le barrage. Le 28 décembre dernier,
le réservoir du barrage était rempli
à 14% contre 51% à la même époque,
une année plus tôt. Cette situation a
déjà provoqué une réduction de moitié
de la production d’électricité.
Le déficit énergétique s’est traduit
par des délestages pouvant s’étendre à
quatorze heures par jour.
Des mesures de secours trop
tardives
Selon Mme Siliya, le gouvernement
zambien est prêt à faire face
à un éventuel arrêt total du barrage
électrique de Kariba. Une centrale
thermique de secours de 250 MW et
une centrale à charbon de 300 MW
seront mises en service respectivement
en mars et en juin 2016. Une
centrale flottante, ancrée au large
du Mozambique, fournira environ
200 MW. « L’impératif pour nous
est de nous assurer que, même en cas
d’arrêt du barrage, nous puissions
continuer à avoir de l’électricité. Que
Dieu nous garde d’avoir à en arriver
là, parce que le niveau de l’eau est en
dessous du minimum recommandé »,
espère la ministre.
Un millier d’emplois menacés dans
le secteur minier
En Zambie, la First Quantum
Minerals Ltd, premier investisseur
étranger dans le secteur minier, a annoncé
au gouvernement qu’elle envisageait
de licencier environ 1090 employés.
Ces suppressions de postes
sont dues au déficit énergétique qui
empêche la société de fonctionner
normalement.
360 de ces postes seront supprimés
dans la mine de cuivre de Sentinelle,
située à Kalumbila. Le site, qui peut
produire jusqu’à 300 000 tonnes de
20 x ENERGIES AFRICAINES Janvier-Février 2016 4 N°6
POLITIQUES PUBLIQUES
« L’impératif pour nous est de nous assurer que, même en cas d’arrêt du barrage, nous puissions continuer à avoir de l’électricité. Que Dieu
nous garde d’avoir à en arriver là. »
métal par an, ne fonctionne qu’à la
moitié de ses capacités de production
parce qu’elle ne reçoit que 70 MW
d’électricité sur les 150 MW prévus.
Le reste de l’énergie aurait dû
être acheminé grâce à une ligne de
transmission qui n’a toujours pas été
mise en service. « Nous demandons
l’Union des mineurs de la Zambie au
média ZNBC.
En août dernier, la First Quantum
avait prévenu qu’elle supprimerait
1500 emplois après que la Zesco, le
fournisseur national d’électricité aurait
rationné la quantité d’énergie
qu’elle lui fournissait. Cette annonce
de diminuer sa consommation de
30% afin d’éviter un arrêt total de ses
activités.
Selon les prévisions du gouvernement,
cette situation de pénurie
devrait prendre fin au cours de ce
trimestre. Toute une batterie d’initiatives
a été lancée. En espérant qu’elle
soit mise en place à temps.
Le site, qui peut produire jusqu’à
300 000 tonnes de métal par
an, ne fonctionne qu’à la moitié
de ses capacités de production
parce qu’elle ne reçoit que 70 MW
d’électricité sur les 150 MW prévus.
au gouvernement de vite mettre en
service la ligne qui acheminera l’énergie
de Lusaka jusqu’à Kalumbila. Nous
pouvons éviter les pertes d’emplois qui
ont été annoncées », a déclaré Joseph
Chewe, le secrétaire général de
a été suivie de la régularisation de
la situation au cours de la semaine
même.
En août dernier, le secteur minier
qui absorbe 50% de la consommation
énergétique nationale a été tenu
1 GW de centrales solaires
Ce début d’année 2016, des investisseurs
britanniques et américains ont
manifesté, séparément, le désir d’installer
des centrales solaires d’une capacité
totale de 1000 MW. La requête
s’est faite auprès de la Commission
nationale de la conservation de l’héritage
(NHCC). Richard Mbewe, le
cadre de la NHCC qui a révélé l’information,
n’a pas dévoilé l’identité
des différents investisseurs.
Les Américains envisagent, avec
leurs partenaires basés en Zambie, de
construire une centrale de 700 MW
à Kasiya. « Les promoteurs du projet
sont des Américains qui possèdent
déjà une centrale solaire à Limpopo en
...
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 21
POLITIQUES PUBLIQUES
L’utilisation de ces lampes permettra au pays d’économiser environ 200 MW d’énergie.
...
Afrique du Sud. Ils désirent produire
700 MW de solaire, ce qui est possible
grâce au fort taux d’ensoleillement de
Livingstone », a déclaré M. Mbewe.
Les investisseurs britanniques, quant
à eux, désirent construire une centrale
de 300 MW à Mukuni.
Les sites devant abriter les deux
centrales ont déjà été identifiés.
« Nous sommes très excités à la NHCC
à propos de ces projets qui permettront
de réduire la quantité d’eau détournée
de la Zambezi River pour la production
électrique », a-t-il conclu.
La construction de ces centrales
pourrait jouer un rôle décisif dans la
résolution de la crise énergétique à laquelle
fait face le pays depuis des mois.
Le deuxième producteur de cuivre
du continent a en effet un déficit
énergétique de plus de 1000 MW qui
handicape grandement son secteur minier
et, par conséquent, son économie.
Cap sur l’efficacité énergétique
La Zesco a annoncé avoir distribué
480 000 lampes économiques
sur 1 million prévu. Les provinces du
Nord-Ouest, du Centre et de Lusaka
ont été les principaux bénéficiaires
de cette opération. Henry Kapata,
le porte-parole de la société a révélé
qu’elle envisageait de se procurer
650 000 lampes supplémentaires
qui seront mises à la disposition des
populations.
L’utilisation de ces lampes permettra
au pays d’économiser environ
200 MW d’énergie. Une performance
en vertu de laquelle la Zesco envisage
d’instaurer l’utilisation exclusive de
telles lampes.
En plus de réduire la facture d’énergie
de leurs propriétaires, elles ont
UN DÉLESTAGE QUASI NATIONAL
aussi l’avantage d’avoir une durée de
vie de trois à cinq ans, soit six fois
plus que les lampes ordinaires.
Cette économie d’énergie est la
bienvenue dans le pays qui enregistre
actuellement un déficit énergétique
d’environ 1000 MW, en raison de la
baisse du niveau de l’eau alimentant
les barrages. La Zambie dépend en
effet, à 95%, de ses centrales hydroélectriques
pour la satisfaction de ses
besoins énergétiques. y
La sous-station de Leopards Hill, située à Lusaka, est à la base du blackout
quasi national qu’a connu la Zambie le 22 décembre dernier. C’est ce
qu’a révélé Bessie Banda la porte-parole de la Zesco, la compagnie zambienne
en charge de la fourniture d’électricité. Les causes de cette panne
technique sont pour le moment inconnues.
Ce jour-là, tout le pays, à l’exception des provinces du Sud et de l’Ouest, a
été plongé dans le noir. Le délestage a perturbé l’ensemble des services du
pays, notamment les réseaux de télécommunication. L’industrie du plus
grand producteur de cuivre du continent n’a pu fonctionner durant ces
cinq heures de délestages que grâce au Congo, qui lui a fourni un supplément
d’énergie.
Un autre délestage sur presque tout le territoire zambien s’était déjà produit
deux semaines plus tôt, cette fois à cause d’une panne technique au niveau
de la fourniture d’électricité qui n’avait été rétablie que le lendemain. y
22 x ENERGIES AFRICAINES Janvier-Février 2016 4 N°6
DOSSIER : LA COP 21 ET SES CONSÉQUENCES
COP 21 : le sursaut
salutaire en faveur
du climat
Du 30 novembre au 11 décembre 2015, s’est tenue
à Paris la 21 ème édition de la Conférence de Paris
qui a abouti à un accord historique sur le climat.
Au bout de deux semaines de négociations
ardues, les pays se sont en effet entendus pour
réduire le réchauffement climatique par rapport à
l’ère préindustrielle, non pas des 2 °C initialement
annoncés, mais de 1,5 °C. Retour sur ces assises où
s’est écrite une page d’histoire.
Une participation massive et un
engagement réel
La COP 21 est sans aucun doute la
conférence sur le climat qui a mobilisé
le plus de chefs d’Etats. Annoncés le
24 novembre pour être 147, ils étaient
finalement pas moins de 150 dirigeants
présents à l’ouverture de la
conférence, déterminés à tout mettre
en œuvre pour l’obtention d’un accord
satisfaisant. « Jamais un enjeu international
n’a été aussi élevé que celui
de la COP 21. Le plus grand danger, ce
n’est pas que notre but soit trop élevé et
que nous le manquions. C’est qu’il soit
trop bas et que nous l’atteignions », a déclaré
François Hollande, le président
français, ouvrant le bal des vibrantes
déclarations des dirigeants présents.
« Aujourd’hui à Paris, nous devons tenir
les promesses que nous avions faites
à Copenhague », a affirmé une Angela
Merkel plus pragmatique que jamais.
« Les Etats-Unis reconnaissent leur rôle
dans la genèse du problème et assument
leur responsabilité pour le régler. Nous
avons prouvé qu’il n’y a plus de conflits
entre croissance économique forte et
protection de l’environnement », a déclaré
pour sa part le président des
Etats-Unis, Barack Obama, rassurant
sur les questions de la responsabilité
et du financement. « C’est maintenant
ou jamais ! Nous sommes au bord d’un
suicide », a averti le Pape François. Et
à Ban Ki Moon, le secrétaire général
de l’ONU, de surenchérir : « Vous ne
pouvez pas vous permettre d’être indécis,
de prendre des demi-mesures. » Habitué
aux dérobades diplomatiques, le dirigeant
a poursuivi en indiquant à l’assemblée
: « L’histoire vous interpelle, je
vous exhorte à répondre avec courage et
vision » Une exhortation bien à propos,
compte tenu des réticences déjà
affichées, en ce premier jour, par des
pays tels que l’Inde dont le premier
ministre, estimant qu’il ne fallait pas
exiger la fin de l’utilisation des énergies
fossiles a déclaré : « La justice climatique
demande qu’on laisse suffisamment
de place pour la croissance des pays
en développement. »
Après avoir conféré aux négociations
tout le poids politique nécessaire,
la majorité des chefs d’Etats s’est
retirée, laissant place aux négociateurs
pour la finalisation de projet d’accord
qui devait durer une semaine.
Une Afrique forte, unie et confiante
La COP 21 a connu la participation
d’un continent africain uni et
exigeant. Rassemblés derrière leurs
quelques centaines de négociateurs
et d’experts, les pays de l’Union afri-
24 x ENERGIES AFRICAINES Janvier-Février 2016 4 N°6
RUBRIQUE
caine étaient très précis quant à leurs
attentes. « L’Afrique n’est pas venue à
Paris pour demander de l’argent ou de
l’aide, mais pour susciter l’engagement
de toutes les parties concernées vis-àvis
des besoins de l’Afrique en matière
d’adaptation climatique », a déclaré
Boni Yayi, le président béninois.
Ils voulaient, pour commencer, une
limitation non pas à 2 °C mais à au
moins 1,5 °C. « Si l’on dit une limitation
de l’augmentation des températures
à deux degrés au niveau mondial,
ça veut dire trois degrés pour l’Afrique,
d’où la raison d’avoir une limitation
de 1,5 degré voire même le plus
bas possible », a déclaré Seyni Nafo,
le porte-parole du groupe Afrique.
Cette exigence se justifiait par le fait
qu’en raison de certains facteurs dont
sa situation géographique, le continent
enregistre 50% de réchauffement
de plus que le niveau global. Le
continent désirait également que les
principes de responsabilité et de différenciation
soient établis et éclaircis.
Cela impliquait au niveau des pays
industrialisés la fourniture d’efforts
plus importants pour la lutte contre
le réchauffement, dont ils sont historiquement
responsables. Les pays
pauvres et ceux en développement
devaient quant à eux bénéficier d’une
plus grande souplesse pour faire face
au défi de développement qui sont les
leurs. Le financement a été une autre
préoccupation majeure des pays africains
qui ont d’emblée affirmé qu’ils
ne souscriraient à l’accord que si les
mesures étaient prises pour l’obtention
d’un plan de financement viable
et équitable.
En se rendant à la COP 21,
l’Afrique avait déjà un début de solution
à son problème qui passait
en grande partie par une fourniture
suffisante en énergie propre. « Nous
avons estimé qu’un fond sur l’électrification
du continent géré par les
Africain doit sortir de cette COP 21.
Cela nous permettra la réussite de
cette transition énergétique. Avec les
transferts de technologie, avec l’apport
financier, nous pourrons, en cinq ans,
réduire totalement le gap de l’électricité
en Afrique », a déclaré Macky Sall,
le président sénégalais. Les 54 pays
ont dans ce cadre lancé l’Initiative
africaine pour les énergies renouvelables
dont l’objectif est de mettre
en place 300 GW d’énergies renouvelables
d’ici 2030 sur l’ensemble du
continent. Elle a, en outre, prévu un
programme exclusivement consacré
à l’adaptation aux nouvelles conditions
climatiques. ...
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 25
DOSSIER : LA COP 21 ET SES CONSÉQUENCES
L’accord sur le climat a littéralement sonné le glas des énergies polluantes. Les jours suivant la conclusion de l’accord, les actifs des énergies
fossiles ont vu leurs valeurs chuter tandis que ceux des énergies renouvelables ont connu une belle envolée.
...
Cette attitude d’un continent réaliste
et déterminé a commencé à porter
ses fruits dès les premiers jours des
négociations. Les pays développés ont
en effet mobilisé 10 milliards d’euros
de financements publics pour soutenir
l’Initiative africaine sur les énergies
renouvelables. Ce montant pourra
permettre l’installation de 10 GW
de centrales électriques et, par conséquent,
l’atteinte des objectifs fixés par
l’initiative pour les cinq premières années
de sa mise en œuvre. La France
s’est en outre engagée à mettre à disposition
2 milliards € pour la lutte
« Pendant longtemps, l’Arabie
saoudite n’a pas été en première
ligne dans ces négociations, mais,
là, ils bloquent à peu près sur tous
les sujets », a déclaré quelques
jours plus tard Pascal Canfin
en qualité d’expert du World
Resources Institute.
contre le réchauffement sur le climat.
La Banque mondiale, quant à elle, a
révélé un plan ambitieux de 16 milliards
$ pour la mise en place des stratégies
climatiques sur le continent.
De longues et éreintantes
négociations
Après le départ des différents chefs
d’Etats, les centaines de négociateurs
ont entamé les discussions devant
aboutir à la proposition qui devait
être finalisée par les ministres durant
la deuxième semaine des négociations.
« Nous disposons d’une nouvelle
base de négociations acceptée par tous. Il
s’agit d’écrire la suite », a déclaré la négociatrice
française Laurence Tubiana
à la fin de la première semaine de négociation.
Mais en vérité, cette proposition
faisait l’unanimité parce qu’elle
n’éclaircissait encore aucun des points
sensibles tels que le caractère contraignant
ou non de l’accord, les ambitions
climatiques qu’il contiendrait,
les diverses responsabilités et bien sûr
la délicate question du financement.
C’est avec un texte contenant une
centaine d’options (points de mésentente)
à lever que les ministres
ont rejoint les négociations le lundi
7 décembre. Conscient de l’importance
de la tâche à abattre, Laurent
Fabius le président de la conférence
avait conseillé aux négociateurs d’ac-
26 x ENERGIES AFRICAINES Janvier-Février 2016 4 N°6
DOSSIER : LA COP 21 ET SES CONSÉQUENCES
une nuit longue, mais il y a toujours un
ou deux sujets très difficiles sur lesquels
nous travaillons », avait expliqué John
Kerry, le secrétaire d’Etat américain.
« La nuit a été rude. Chaque pays s’est
retranché derrière ses positions », a reporté
Matthieu Orphelin, porte-parole
de la fondation Nicolas Hulot.
La différenciation des responsabilités
et les différents mécanismes de réduction
étaient les points de résistance
qu’il restait encore régler. Mais
et équilibré, selon lui. « Le temps est
venu de nous concentrer, non plus sur les
lignes rouges, mais sur les lignes vertes
d’un compromis universel. Cet accord
est le meilleur équilibre possible, à la
fois puissant et délicat, qui permettra
à chaque délégation de rentrer chez soi
la tête haute et avec des acquis importants
», a-t-il déclaré exhortant l’ensemble
des participations à y adhérer.
Quelques heures après cette présentation,
l’accord était adopté par
« Je ne vois pas d’objection dans la salle, je déclare l’accord de Paris pour le climat adopté », a déclaré Laurent Fabius.
célérer les débats. « Notre temps est très
limité », avait-il déclaré. Suivant son
conseil, les négociateurs se sont résolus
à aborder les questions épineuses,
butant par la même occasion sur les
premières résistances. « Pendant longtemps,
l’Arabie saoudite n’a pas été en
première ligne dans ces négociations,
mais, là, ils bloquent à peu près sur tous
les sujets », a déclaré quelques jours plus
tard Pascal Canfin en qualité d’expert
du World Resources Institute, à propos
du comportement de ce pays, et
des producteurs du pétrole en général
qui se montraient de moins en
moins conciliants. Cette attitude des
producteurs de pétrole n’était qu’un
signe précurseur de la radicalisation
des positions des pays, qui s’est généralisée
à mesure que l’échéance de
l’adoption, fixée au 11, se rapprochait
et que la durée des nuits des négociateurs
se raccourcissait.
C’est donc un Laurent Fabius fatigué
et stressé qui a annoncé que
l’accord ne serait pas conclu avant le
samedi. « Nous avons fait beaucoup
de progrès. Des progrès faits cette nuit,
Laurent Fabius, le maître de cérémonies
tenait à rassurer : « Les choses vont
dans le bon sens. Nous sommes presque
au bout du chemin », affirmait-il, promettant
: « A l’issue des consultations
que je vais avoir, je serai en mesure,
demain matin 9 heures, de présenter
à l’ensemble des parties un texte qui,
j’en suis sûr sera approuvé et sera un
grand pas en avant pour l’ensemble de
l’humanité. »
Le ministre français des Affaires
étrangères a donc alterné les rencontres
avec les différentes délégations,
à l’issue desquelles il a soumis
le samedi un accord juste, durable,
dynamique, contraignant, ambitieux
consensus par les 195 pays représentés.
« Je ne vois pas d’objection dans la
salle, je déclare l’accord de Paris pour
le climat adopté », a déclaré Laurent
Fabius, très ému. S’en sont suivis de
longues minutes d’ovations et de félicitations
mutuelles. « C’est énorme :
presque tous les pays du monde viennent
juste de signer l’accord de Paris sur le
changement climatique », a déclaré sur
Twitter Barack Obama, le président
américain. « Pour la première fois,
tous les pays du monde se sont engagés
à réduire les émissions de gaz à effet de
serre, à renforcer la résilience commune
et à joindre la cause commune de lutte
contre le réchauffement. Ce qui était
...
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 27
DOSSIER : LA COP 21 ET SES CONSÉQUENCES
« Avec les transferts de technologie, avec l’apport financier, nous pourrons, en cinq ans, réduire totalement le gap de l’électricité en Afrique »,
a déclaré Macky Sall, le président sénégalais.
...
autrefois impensable est devenu irrépressible
», s’est félicité Ban Ki Moon,
le secrétaire général de l’ONU.
Le contenu de l’accord
En substance, les 195 pays se sont
engagés à limiter le réchauffement
climatique nettement en dessous de
2 °C et à poursuivre les efforts pour
atteindre une limitation à 1,5 °C. Le
pic mondial d’émission de gaz à effet
de serre devra être atteint le plus
rapidement possible et devra par la
suite décroître « de façon à parvenir à
un équilibre entre les émissions anthropiques
par les sources et les absorptions
anthropiques par les puits de gaz à effet
de serre au cours de la seconde moitié
du siècle ».
Le texte prévoit en outre que cet
objectif sera atteint « conformément
à l’équité et au principe des responsabilités
communes mais différenciées, et
des capacités respectives, eu égard aux
contextes nationaux différents ». Il fait
obligation aux pays développés d’apporter
les ressources financières publiques
et privées afin de soutenir les
mesures d’atténuation et d’adaptation
des pays en voie de développement.
Ils devront également fournir des « informations
à caractère indicatif » sur
la quantité et la nature des financements
disponibles, afin de permettre
la prédictibilité, la transparence et la
cohérence des financements publics.
Les pays en développement peuvent
en outre participer volontairement à
l’effort de financement du climat.
L’accord de Paris prévoit la fixation
d’un nouvel objectif financier applicable
à partir de 2025. Ce dernier qui
devra être supérieur au plancher de
100 milliards $ annuels que les pays
développés ont décidé de mettre à disposition
des pays en voie de développement
à partir de 2020. Il devrait en
outre « viser à parvenir à un équilibre
entre l’adaptation et l’atténuation, en
tenant compte des stratégies impulsées
par les pays, et des priorités et besoins des
pays en développement, notamment de
ceux qui sont particulièrement vulnérables
». Ce mécanisme financier sera
doté de procédures d’approbations
simplifiées qui permettront un accès
effectif aux ressources financières.
L’adaptation, qui jusque-là était reléguée
au rang d’enjeu local, a obtenu
la consécration d’un objectif global
incluant le renforcement des capacités
d’adaptation, de la résilience et de réduction
de la vulnérabilité. Si l’accord
reconnaît les pertes et dommages subis
à cause des effets du changement
climatique, il précise cependant que
ces préjudices ne peuvent donner lieu
ni servir de fondement à aucune responsabilité,
ni indemnisation.
En déclarant que l’accord de Paris
était « un tournant qui relègue les énergies
fossiles du mauvais côté de l’histoire
», Greenpeace ne pensait pas
si bien dire. L’accord sur le climat a
littéralement sonné le glas des énergies
polluantes. Les jours suivant la
conclusion de l’accord, les actifs des
énergies fossiles ont vu leurs valeurs
chuter tandis que ceux des énergies
renouvelables ont connu une belle
envolée. Un mouvement qui, selon
les experts, devrait se généraliser dans
les prochains mois.
Il revient donc aux différents Etats,
surtout les plus vulnérables, de se
pencher avec autant d’application
que lors des négociations sur les dif-
28 x ENERGIES AFRICAINES Janvier-Février 2016 4 N°6
DOSSIER : LA COP 21 ET SES CONSÉQUENCES
férentes mesures de mise en œuvre de
l’accord. Ces dernières devraient être
en grande partie définies et adoptées
lors de la COP 22 qui se tiendra en
2016 au Maroc.
Un engagement du secteur privé
bien au-delà des espérances
Parallèlement à la tenue des négociations,
on a assisté à une mobilisation
sans précédent et inespérée
des investisseurs du monde entier
en faveur du climat. 27 milliardaires
dont Bill Gates, Mark Zuckerberg,
Richard Branson, Jack Ma ou encore
Ratan Tata se sont regroupés
au sein d’une initiative dénommée
Breaktrough Energy. Ensemble, ils se
sont engagés à « investir dans les entreprises
émergentes qui ont le potentiel
de créer un avenir énergétique à émission
de carbone quasi nulle apportant
une énergie fiable et abordable à tout
un chacun », déterminés à appuyer les
investissements publics trop bas pour
eux pour relever les défis climatiques
auxquels ils sont confrontés.
L’initiative RE100, quant à elle,
regroupe 53 entreprises réunissant
1% de la consommation industrielle
mondiale en matière d’énergie. Les
adhérents à cette initiative, parmi lesquels
comptent Coca Cola, BMW,
Goldman Sachs ou encore Walmart,
se sont engagés à satisfaire leurs besoins
énergétiques à partir des énergies
renouvelables. Ils sont secondés
par environ 700 entreprises, des dizaines
d’institutions financières, des
collectivités locales et des pays qui
se sont engagés à mener des actions
concrètes en faveur des énergies renouvelables
et de l’efficacité énergétique
au sein de leurs organisations.
114 entreprises ayant réalisé un
chiffre global de 932 milliards $ en
2014 se sont engagées au sein de
l’initiative Science Based Targets, à
réduire leurs émissions de gaz à effet
de serre, conformément aux recommandations
faites par les scientifiques.
Dix d’entre elles, à savoir
Coca-Cola Enterprises Inc, Dell Inc,
General Mills Company, Procter &
Gamble, Sony, Thalys, Enel, Kellogg
Company, NRG Energy et Pfizer ont
déjà, dans ce cadre, fourni une proposition
qui a reçu l’approbation de
l’initiative.
Les institutions et entités publiques
n’ont pas été en reste. 36 pays et
26 institutions se sont regroupés au
sein de la Global Géothermal Alliance
(GGA) pour augmenter de 500% la
capacité d’énergie géothermique générée,
et ce d’ici à 2030. Exploitable
dans plus de 90 pays, la géothermie
ne participe actuellement que de
12 GW au mix énergétique mondial.
L’Africa Renewable Energy
Initiative, quant à elle, veut augmenter
la capacité énergétique du continent de
300 GW d’ici 2030. Le Substainable
Energy for All met à la disposition
des pays africains l’apport financier et
technique des pays développés pour la
mise en place de programmes et politiques
qui ont pour but de rendre leur
environnement économique propice à
la mise en œuvre des projets d’énergies
renouvelables.
L’Alliance solaire internationale vise
à soutenir la centaine de pays à travers
le monde ayant le potentiel nécessaire
pour produire de l’énergie solaire. Elle
atteindra son objectif en facilitant la
collaboration entre les pays industrialisés
maîtrisant les technologies
de développement de cette énergie et
disposant des ressources matérielles,
et les pays en voie de développement.
Mission innovation, quant à elle,
réunit une vingtaine de pays industrialisés
qui se sont engagés à doubler
en cinq ans, leur financement climat.
Ces fonds supplémentaires seront
dédiés à la recherche et au développement
des technologies bas carbone
afin de rendre possible leur financement
à grande échelle.
« Deux degrés au niveau mondial, ça veut dire trois degrés pour l’Afrique, d’où la raison
d’avoir une limitation de 1,5 degré voire même le plus bas possible », a déclaré Seyni Nafo.
Autant d’initiatives qui devraient
accélérer le développement des énergies
vertes. Selon une étude effectuée
par Bloomberg New Energy Finance
et Ceres, il faudrait installer environ
12 500 GW de solaire d’éolien, de
géothermique et de biomasse d’ici
2040 pour maintenir le réchauffement
climatique en dessous des 2 °C,
ce qui nécessitera environ 12 100 milliards
d’investissement. y
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 29
DOSSIER : LA COP 21 ET SES CONSÉQUENCES
Seyni Nafo : « Nous avons
écrit une nouvelle page
de l’histoire du monde
avec l’Afrique aux
premières loges »
A la COP 21, Seyni Nafo était le porte-parole
du groupe des négociateurs africains et le
coordonnateur de la thématique ambition pré-
2020, regroupant les actions de lutte contre le
réchauffement devant être menées avant 2020.
Aujourd’hui, président du groupe des négociateurs
africains (le plus jeune depuis la création du poste),
il nous raconte la COP 21 et ses implications d’un
point de vue purement africain.
n Energies Africaines : Quel était
la composition de la représentation
africaine aux négociations de la
COP 21 ?
Seyni Nafo : La délégation africaine
était composée des 54 représentants
des pays africains appelés points focaux.
Chaque pays a un point focal
qui est généralement un directeur à
l’environnement, un cadre technique,
un secrétaire général d’un ministère
ou même un cadre des affaires étrangères
ou un haut fonctionnaire.
Il y avait ensuite une vingtaine de
coordinateurs thématiques qui était
chargés, chacun à son niveau, de suivre
une question spécifique (agriculture,
foresterie, transfert de technologie, finance),
de développer des positions, de
les proposer au groupe pour une adoption
plénière. Ils devaient également
faire le suivi de cette question. Les
coordonnateurs sont choisis au sein
des 54 ou des équipes nationales, car
chaque représentant est lui-même chef
d’une équipe nationale. Il y avait des
équipes nationales composées de deux
ou trois personnes comme l’équipe
du Mali, mais également d’autres plus
importantes. L’équipe de l’Afrique du
Sud, par exemple, était composée de
54 personnes. Donc en tout et pour
tout on a peut-être 200 ou 300 experts.
Un vivier dans lequel on peut
puiser pour les différentes questions.
Nous avions aussi un porte-parole,
dont le rôle fondamental était d’être
l’interface non seulement avec la
presse, mais également pour tout ce
qui est question de lobbying. Il y a
enfin le président qui se consacre spécifiquement
au suivi des négociations.
n EA : Quels étaient vos objectifs en
vous rendant à cette conférence ?
SN : En se rendant à la COP 21,
l’Afrique avait des objectifs très clairs
relatifs aux cinq points que sont
l’adaptation, l’ambition, la différenciation,
la flexibilité et les finances.
En matière d’adaptation, les chefs
d’Etat ont demandé, premièrement,
la parité entre l’adaptation et la limitation.
L’adaptation qui est la priorité,
l’urgence aujourd’hui pour l’Afrique,
ne devait pas être minimisée dans
l’accord. Deuxièmement, ils ont tenu
à ce que l’on quantifie les besoins des
pays vulnérables et les moyens qui
existent pour leur venir en aide et que
l’on mette en place si nécessaire, un
processus qui permet de mobiliser des
ressources additionnelles. Troisième
point, pour l’adaptation, il fallait lier
30 x ENERGIES AFRICAINES Janvier-Février 2016 4 N°6
DOSSIER : LA COP 21 ET SES CONSÉQUENCES
« Nous avons eu de grandes victoires. Le texte prévoit un objectif bien en dessous des 2 °C et tendant vers le 1,5 °C, c’est que nous voulions. »
l’objectif de température à un certain
niveau de réduction des émissions
que l’on déterminerait de manière
scientifique. Il fallait également déterminer
l’impact de cette température
dans les pays.
Sur la question de l’ambition,
l’Afrique voulait une réduction à
1,5 °C et non à 2 °C parce que le
continent connait une augmentation
de température 50% plus élevée
que la moyenne. Un réchauffement
qui dépasse 1,5 °C aurait donc des
conséquences catastrophiques. Nous
voulions que l’on fasse mention de ce
1,5 °C dans le texte, et que soit lancé
un travail d’experts pour comprendre
quelles seront les implications sur
l’Afrique.
Pour la différenciation, nous voulions
que les responsabilités des pays
soient différenciées. Les pays développés
ont la responsabilité historique du
dérèglement climatique donc il leur
est demandé de faire plus d’efforts, de
contribuer financièrement au soutien
des pays vulnérables et d’effectuer des
transferts en matière de compétence
et de technologie vers les pays vulnérables.
Pour les pays en développement,
il fallait que cette différenciation
soit respectée. C’est-à-dire que
les pays développés ne rejettent pas
cette responsabilité sur les pays en
développement.
« Cependant, nous avons une grande
déception dans le domaine du
financement pour l’adaptation. La
proportion attribuée à ce volet dans
le financement est de 16%. »
Le quatrième point est la flexibilité
pour l’Afrique. Nous sommes
les moins responsables. Nous avons
le moins de capacité, nous faisons
face à des défis en matière de lutte
contre la pauvreté et de développement,
mais nous allons payer le plus
lourd tribut. Il faut donc qu’en matière
de réduction d’émission, nous
ayons beaucoup de flexibilité et il est
important qu’en termes de finance-
...
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 31
DOSSIER : LA COP 21 ET SES CONSÉQUENCES
« Et c’est là où malheureusement le bât blesse. Nous sommes très bons pour négocier un accord, mais dans le suivi, nous nous relâchons, ce qui
est paradoxal car le plus gros travail commence maintenant. »
...
ment de la lutte contre le changement
climatique, nous soyons priorisés.
C’est-à-dire qu’on ne mette pas de
contraintes additionnelles alors que le
changement climatique est déjà une
contrainte pour nous, et qu’en termes
d’accès au financement, nous soyons
priorisés au même titre que les petits
états insulaires.
Pour la question du financement,
nous avions deux objectifs. Le premier
est un objectif de transparence.
On a promis 100 milliards de dollars,
mais il n’a pas de méthodologie internationale
qui soit adoptée pour suivre
cette mobilisation. Donc, chaque
pays développé décide de ce qu’il
peut considérer comme financement
climat, ce qui entretient un certain
flou. Les chefs d’Etat africains ont demandé
qu’il y ait des règles de transparence,
des règles de comptabilité
commune. Deuxièmement, tout le
monde sait que les 100 milliards sont
un chiffre politique. Ils n’ont pas été
décidés suite à une évaluation scientifique
des besoins. Nous voulions
donc que cette évaluation soit faite et
que soit mis en place un groupe de
travail qui détermine comment mobiliser
les ressources en adéquation avec
le problème.
n EA : Estimez-vous que ces objectifs
ont été atteints ?
SN : Nous avons eu de grandes victoires.
Le texte prévoit un objectif bien
en dessous des 2 °C et tendant vers le
1,5 °C, c’est ce que nous voulions. Il a
32 x ENERGIES AFRICAINES Janvier-Février 2016 4 N°6
DOSSIER : LA COP 21 ET SES CONSÉQUENCES
aussi été demandé au GIEC (Groupe
d’experts intergouvernemental sur
l’évolution du climat) de produire un
rapport spécial sur les implications
d’un réchauffement à 1,5 °C. Le rapport
sera publié en 2018.
La question de la sécurité alimentaire
qui nous tenait à cœur a également
été prise en compte puisque
l’accord déclare reconnaître « la priorité
fondamentale consistant à protéger
la sécurité alimentaire et à venir
à bout de la faim, et la vulnérabilité
particulière des systèmes de production
alimentaire aux effets du changement
climatique ». Cette victoire
a été possible en particulier grâce à
Adamou Chaiffou, le ministre nigérien
de l’Environnement, qui a fait
remarquer, lors d’une rencontre avec
Laurent Fabius, le 11 décembre,
qu’avec le réchauffement climatique,
nous risquons d’être dans une insécurité
alimentaire chronique et
structurelle et que nous ne pouvions
donc pas envisager un accord sur le
climat sans une mention explicite relative
à cette question.
Une autre partie du traité fait part
de « la nécessité de promouvoir l’accès
universel à l’énergie durable dans les
pays en développement, en particulier en
Afrique ». C’est la seule mention dans
tout ce texte où il est fait référence à
une seule région. Généralement on se
contente de dire dans les pays en développement,
ce qui inclut l’Afrique.
C’est une autre de nos victoires qui
a été possible grâce à l’implication de
nombreux ministres africains mais
aussi de Jean-Louis Borloo qui a été
très impliqué. Et cela, c’est le ministre
de l’Enseignement supérieur de la
Guinée, Telliwel Diallo, qui a précisé
que l’accès à l’électricité était une
question urgente qui ne pouvait pas
attendre 2020.
Cependant, nous avons une grande
déception dans le domaine du financement
pour l’adaptation. La proportion
attribuée à ce volet dans le financement
est de 16%. Selon un rapport
de l’OCDE, les pays développés ont
mobilisé 62 milliards sur les 100 milliards
promis en allant à Paris et seulement
8 milliards de dollars étaient
réservés à l’adaptation. En partant à
Paris, on avait pour objectif de multiplier
ce chiffre par deux ou même
par trois. En passant de 16% à 32%,
on arriverait à une multiplication par
trois en termes de valeur absolue. Il
y a eu énormément d’engagements
financiers, mais nous ne sommes pas
arrivés à obtenir cette décision spécifique.
Nous avons obtenu une décision
relative à l’augmentation des
financements. Comme les Etats-Unis
ont décidé de multiplier par deux
leur financement sous forme de dons
pour les pays vulnérables. C’est exactement
ce que nous voulions, mais au
lieu de ne l’avoir que pour les Etats-
Unis et que pour le financement par
dons, nous le voulions de tous les
pays développés et pour tous les instruments
financiers.
A part les ambitions sur l’adaptation,
nous sommes assez satisfaits.
Dans une négociation, il faut être
capable de séquencer ses demandes
sur plusieurs périodes. Il y a des
programmes de travail qui vont être
lancés. A travers les résultats, nous allons
poursuivre les négociations dans
beaucoup de domaines.
n EA : La COP 22 sera consacrée
à la détermination des instruments
de mise en œuvre des décisions de la
COP 21. Quels seront selon vous les
« Si nous ne nous préparons pas,
si nous ne proposons pas des
contenus, des soumissions qui
soient de très haute qualité, ce ne
seront pas les pays développés qui
viendront nous dire : voici comment
renforcer nos capacités. »
meilleurs instruments pour l’Afrique
et que doit-elle faire pour les voir
adoptés ?
SN : Ce qu’il faut mettre dans ces
instruments, c’est d’abord le suivi
et pour y parvenir, il faut mieux se
préparer. Par exemple, il y a un programme
de travail qui doit être adopté
à Marrakech : qu’est-ce que les Etats
peuvent faire pour communiquer des
statistiques plus fiables ? Le renforcement
des capacités. Quel est le programme
pour renforcer les capacités ?
C’est le contenu que l’on doit mettre
dans ces deux instruments de travail.
Si l’Afrique se prépare bien, on aura
un résultat qui sera peut-être satisfaisant.
Mais si nous ne nous préparons
pas, si nous ne proposons pas des
contenus, des soumissions qui soient
de très haute qualité, ce ne seront pas
les pays développés qui viendront
nous dire : voici comment renforcer
nos capacités. La meilleure manière de
rendre tous ces instruments efficaces,
c’est notre propre sérieux. Notre suivi.
Un suivi rapproché pour donner des
contenus techniquement et géographiquement
pertinents car les besoins
ne sont pas les mêmes d’un pays à un
autre. Et c’est là où malheureusement
le bât blesse. Nous sommes très bons
pour négocier un accord, mais dans le
suivi, nous nous relâchons, ce qui est
paradoxal car le plus gros travail commence
maintenant. Il y a 32 décisions
qui ont été adoptées à Paris. Sur les
...
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 33
DOSSIER : LA COP 21 ET SES CONSÉQUENCES
« La meilleure manière de rendre tous ces instruments efficaces, c’est notre propre sérieux. »
...
32, il y a peut-être deux à trois fois
plus de programmes très techniques
qui seront lancés pour régler le problème
sur le terrain. Il s’agit maintenant,
pour nous, de faire des propositions
concrètes pour ces programmes.
n EA : Le continent a-t-il conscience
de ce besoin d’effort soutenu ?
SN : Moi je peux te dire qu’au niveau
de la quinzaine des négociateurs
en chefs que compte l’Afrique, nous
sommes conscients de cette nécessité
de poursuivre les efforts. Nous savons
que la seule manière d’obtenir
des concessions aux négociations est
d’être très efficace dans nos propositions
parce que nous négocions avec
des pays extrêmement bien préparés.
Au cours des quatre dernières années,
nous sommes arrivés à négocier à un
niveau très élevé. Nous sommes dans
des négociations pour avoir des experts
africains additionnels dans de
nombreux domaines (agriculture, foresterie
finances) afin que cela continue.
Nous avons demandé à chacun
des négociateurs de faire une évaluation
des acquis dans son domaine et
d’établir une feuille de route pour les
prochaines années. Nous mettons en
place une équipe avec les économistes
de la BEAC, et de la BCEAO pour réfléchir
à de nouveaux instruments financiers
pour être toujours une force
de proposition parce que ce n’est que
comme cela que nous allons y arriver.
n EA : Un financement de plus de
100 milliards $ sera mis en place d’ici
2020. Que devra faire le continent
pour bénéficier de ces financements ?
SN : Il y a plusieurs choses à faire
au niveau de nos Etats et au niveau
des institutions financières. Avec les
institutions financières, nous devrons
œuvrer pour que les modalités d’accès
soient plus flexibles, les coûts de
transaction plus bas et les procédures
entre différents fonds harmonisées.
En même temps, il faut renforcer
les capacités institutionnelles.
Aujourd’hui en Afrique, il y a des
institutions qui ont les compétences,
les normes et les standards fiduciaires
de niveau international. Mais elles ne
sont pas toujours priorisées. Les Etats
ont de nombreux problèmes de gouvernance.
Donc malheureusement,
on ne pourra pas faire l’économie de
ce travail. Cependant, les Etats sont
logés à différentes enseignes. Les pays
comme le Rwanda ou l’Ethiopie tirent
leurs épingles du jeu. L’Afrique du
sud, c’est un mastodonte qui fait de
la compétition sur la scène internationale
au même titre que beaucoup de
pays développés. Malheureusement,
quand on représente 54 pays, une
grande partie de ces pays a les difficultés
que nous connaissons. D’où
ces initiatives pour accélérer le renforcement
des capacités institutionnelles.
Si ce n’est au niveau de tout
l’Etat, qu’au moins une, deux ou trois
institutions soient renforcées pour
avoir la capacité accès aux ressources,
pour pouvoir les mobiliser, mettre en
œuvre les projets et programmes et
faire un suivi et évaluation qui soit
acceptable en terme de standard des
institutions internationales. Donc
c’est un travail à deux niveaux et les
deux vont de pair. y
34 x ENERGIES AFRICAINES Janvier-Février 2016 4 N°6
DOSSIER : LA COP 21 ET SES CONSÉQUENCES
L’IAA, là où commence
la prise en main par
l’Afrique de ses problèmes
climatiques
En matière d’action pour le climat, l’Afrique n’a qu’un rôle marginal
à jouer pour la réduction des gaz à effet de serre, puisqu’elle
n’émet que 2,3% du volume mondial et en absorbe beaucoup
plus. La principale préoccupation du continent face à cette crise
climatique est l’adaptation au réchauffement dont elle ressent
plus rapidement et plus intensément les effets. C’est pour cette
raison qu’elle a également mis en place, l’Initiative africaine pour
l’adaptation pour répondre à ce problème qui lui est spécifique.
Des objectifs clairs pour répondre à
un besoin précis
L’Initiative de l’Afrique pour l’adaptation
a été lancée lors de la COP 21.
Elle a pour objectif d’accélérer de développement
et de coordonner la mise en
œuvre d’actions relatives à l’adaptation
au réchauffement climatique et aux
pertes et dommages subis par le continent
à cause du phénomène. Sa mise
en place répond au besoin ressenti par
les chefs d’Etat de recenser et de coordonner
les diverses actions en faveur de
l’adaptation et de la prise en charge des
pertes et dommages et de fournir aux
organisations le soutien dont elles ont
besoin, notamment sur l’évaluation
des besoins et à l’accès aux ressources
technologiques et financières.
La coordination des actions des
différents gouvernements sera assurée
par l’Unité continentale de
soutien à l’adaptation (UCSA) qui
servira également d’interface avec les
centres régionaux et les partenaires au
développement.
Le coût de l’adaptation au réchauffement
qui se chiffre à des dizaines
de milliards de dollars par
an pour le continent, pourrait atteindre
les 100 milliards, d’ici 2050.
Paradoxalement, elle est très négligée
par les pays en développement.
Pour exemple, ces derniers ne lui
consacrent que 15% des financements
du climat, montant largement
insuffisant dont le continent ne reçoit
qu’une infime partie.
Un rôle d’accompagnateur général
L’IAA atteindra ses objectifs en
agissant sur quatre piliers que sont
l’information climatique, le cadre
institutionnel et politique, les actions
concrètes sur le terrain et la question
du financement.
Sur le plan de l’information climatique,
l’IAA s’assurera que les pays
aient accès à des mécanismes d’observations
adéquates du changement
climatique, tels que les stations météorologiques
et les instruments hydrologiques.
L’initiative envisage de
faciliter la mise en place de 30 000
de ces mécanismes d’observation
d’ici 2030.
Au niveau de la politique globale,
il s’agira de créer ou de renforcer les
cadres institutionnels et politiques à
tous les niveaux, afin de permettre à
tous les pays de posséder d’ici 2020
un plan d’adaptation viable ou un
processus de mise en place de ces
plans.
L’IAA permettra le développement
massif et la coordination des mesures
d’adaptation et de limitations des
pertes et dommages dans les secteurs
importants tels que l’agriculture,
l’eau, l’énergie et la gestion des ressources
naturelles pour ne citer que
celles-là. Pour cela, elle soutiendra
la mise à disposition des ressources
techniques.
Elle œuvra également pour la mobilisation
des ressources et des financements
nécessaires à la mise en œuvre
des différentes actions identifiées. y
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 35
DOSSIER : LA COP 21 ET SES CONSÉQUENCES
La communauté
internationale casse la
tirelire pour le financement
du climat
Le financement a été l’un des enjeux majeurs
de la réussite de la COP21. Au départ, les pays
vulnérables avaient été clairs : sans un engagement
financier des pays développés responsables de la
situation climatique, il n’y aurait pas d’accord. Leur
appel a été entendu puisque plus d’une vingtaine
de pays et plusieurs institutions financières se sont
engagés financièrement de manière plus précise
et plus importante pour soutenir la lutte contre le
réchauffement climatique.
Les engagements des pays, de
l’Union européenne et des régions
En matière de promesses de financements,
tous les regards étaient braqués
sur les superpuissances comme
les USA et le Royaume-Uni. Mais
c’est la France qui a créé l’effet de surprise
en promettant de tripler son financement
pour l’adaptation, qui atteindra
1 milliard d’euros d’ici 2020,
et de presque doubler, à la même
date, son financement annuel pour
le climat, qui passera de 3 milliards
d’euros à plus de 5 milliards d’euros.
Washington et Londres n’ont pas
non plus déçu les attentes. Le premier
s’est engagé à doubler les investissements
sous forme de dons, les
portant à 800 millions de dollars par
an à partir de 2020. Le second, quant
à lui, a promis d’accroître son financement
pour le climat d’au moins
50%, fournissant ainsi 5,8 milliards
de livres entre 2016 et 2021. La moitié
de cet argent servira au financement
de l’adaptation.
De son côté, l’Allemagne a annoncé
que, d’ici 2020, son financement climatique
aura doublé par rapport à celui
de 2014. L’Espagne fera de même,
portant sa contribution financière à
la lutte contre le réchauffement climatique
à 900 millions d’euros d’ici
2020. La Commission européenne
aussi a participé au mouvement
d’augmentation de 100% du financement
climat. Elle apportera donc,
jusqu’en 2020, 2 milliards d’euros en
moyenne chaque année.
En ce qui concerne le Canada, le pays
prévoit un investissement de 2,65 milliards
de dollars canadiens d’ici 2020,
tandis que l’Italie promet 4 milliards
de dollars sur la même période. Le
Japon a annoncé qu’il débourserait,
d’ici 2020, 1,3 milliard de yens.
Encouragées par l’exemple des
grandes puissances, les autres nations
n’ont pas tardé à leur emboîter le pas.
Ainsi, l’Autriche fournira au moins un
demi-milliard d’euros entre 2015 et
2020, tandis que la Belgique, qui met
déjà 51,6 millions d’euros dans le fonds
vert pour le climat, dégagera chaque
année 50 millions d’euros jusqu’en
2020. Les trois régions ont suivi
l’exemple du pouvoir central, promettant
conjointement 11 millions d’euros.
Du côté des pays scandinaves, on
notera un effort de la Finlande qui a
annoncé qu’elle orienterait une partie
importante des 500 millions d’euros
supplémentaires, qu’elle compte consacrer,
d’ici 2020, à de nouveaux fonds
d’investissements vers les initiatives
en faveur du changement climatique.
Quant à la Norvège, l’un des bons
élèves de cette région, elle maintiendra
son financement annuel d’environ
400 millions de dollars à la REDD+.
Les Pays-Bas ont promis un financement
de 550 millions d’euros à partir
36 x ENERGIES AFRICAINES Janvier-Février 2016 4 N°6
DOSSIER : LA COP 21 ET SES CONSÉQUENCES
Les pays développés ont déclaré vouloir investir 10,1 milliards de dollars dans le Fonds vert pour le climat.
de 2016, tandis que le Luxembourg a
annoncé que sa contribution cumulée
sur la période 2014-2020 atteindrait
365 millions d’euros.
Le Danemark, la Nouvelle-Zélande,
l’Irlande, l’Islande, la Pologne, l’Estonie,
la République tchèque, la Hongrie,
la Slovénie et la Suède ont également
tenu à participer à l’effort collectif,
promettant des soutiens financiers
variant entre 35 millions d’euros et
100 000 euros. Les institutions financières
se sont tenues aux côtés des pays
et des organisations régionales dans
cette quête pour le climat.
Les engagements des banques
de développement
La Banque européenne d’Investissement
(BEI) a annoncé la mise à disposition
de 20 milliards de dollars chaque
année d’ici à 2020, soit 100 milliards
de dollars pour la lutte contre le changement
climatique. Ce montant représente
25% de ses prévisions de prêt
sur la période. Toujours pour appuyer
cet effort, l’institution consacrera, en
outre, 35% de son volume de prêt à
des projets relatifs au climat.
C’est la France qui a créé l’effet de surprise,
en promettant de tripler son financement
pour l’adaptation qui atteindra 1 milliard
d’euros d’ici 2020, et de presque doubler,
à la même date, son financement annuel
pour le climat qui passera de 3 milliards
d’euros à plus de 5 milliards d’euros.
La Banque européenne pour la reconstruction
et le développement a
prévu d’appliquer une augmentation
de 25 à 40% à la part qu’elle consacrait
au climat. Elle injectera en définitive
dans le secteur, 20 milliards au
cours des cinq prochaines années, soit
deux fois plus de fonds qu’au cours
des dix dernières années.
La Banque mondiale a, pour sa
part, promis d’augmenter d’un tiers
son financement du climat. Elle débloquera
donc 16 milliards de dollars
par an pour la cause. Elle mettra aussi
en œuvre une optimisation de son
cofinancement des projets relatifs au
climat, ce qui pourrait constituer une
cagnotte annuelle supplémentaire de
13 milliards.
La Banque asiatique de développement
portera son financement climatique
à 6 milliards de dollars, ce
qui représente une augmentation de
100% par rapport au niveau actuel.
La Banque africaine de développement
triplera ses investissements dans
le climat, atteignant un montant de
5 milliards de dollars.
La Banque interaméricaine de développement
compte, quant à elle,
doubler son financement climatique
d’ici 2020.
Différents fonds sur le climat
ont également tenu à apporter leur
contribution.
La contribution des fonds
multilatéraux sur le climat
Les pays développés ont déclaré
vouloir investir 10,1 milliards de dollars
dans le Fonds vert pour le climat.
Onze pays développés ont promis de
doter le Fonds pour l’environnement
mondial de 248 millions de dollars.
Le fonds d’adaptation, quant à lui,
devrait recevoir 75 millions de l’Allemagne,
de la Suède, de l’Italie, et de la
Wallonie en Belgique. y
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 37
DOSSIER : LA COP 21 ET SES CONSÉQUENCES
L’Afrique, le cordonnier
mal chaussé de l’énergie
Malgré sa croissance économique continue et son
impressionnant potentiel en matière énergétique,
l’Afrique demeure en proie à une crise énergétique
qui non seulement se prolonge, mais pis, s’aggrave.
Cependant, elle a depuis peu pris conscience de
sa situation et a entamé ce qui est, espérons-le, son
envolée vers un accès universel à l’énergie.
Un secteur énergétique très mal
en point
La croissance économique
constante de l’Afrique au cours des
quinze dernières années s’est paradoxalement
accompagnée d’un déficit
énergétique croissant. Le continent
ne produit en effet que 160 GW
d’électricité (la même quantité que
le Japon), dont 90 GW seulement
dans la partie subsaharienne, dont
la moitié est concentrée dans un
seul pays, l’Afrique du Sud. Au total,
640 millions de personnes, soit 68%
de la population, n’ont pas accès à
l’électricité. Celles qui y ont accès
consommaient 30% de la consommation
de l’Asie du Sud dans les années
2000 et n’en consomment plus
que 24% actuellement. La consommation
d’électricité par habitant et
par an est d’environ 162 KWh, exception
faite de l’Afrique du Sud, et
ceci pour une moyenne mondiale de
7000 KWh, soit 43 fois plus. Cette
situation ne dépend pas du niveau
de développement des différents
pays puisque le Nigeria, la première
puissance du continent, a encore 93
millions d’habitants dans l’obscurité.
L’Angola a un taux d’électrification
de 35%, alors que le Bengladesh,
qui a un revenu moyen par habitant
cinq fois moins élevé, a déjà raccordé
55% de sa population.
Paradoxalement, cette énergie est
aussi la plus chère. Les foyers africains
paient leur électricité jusqu’à 80
à 90 fois plus cher que les habitants
des autres régions. Les personnes qui
n’ont pas accès à l’énergie, quant à
elles, doivent dépenser 20 fois plus
que celles qui sont raccordées au réseau
pour s’approvisionner à partir
de produits énergétiques polluants et
dangereux. Cette situation fait perdre
à l’Afrique subsaharienne 2% à 4%
de son PIB chaque année. La rareté
et l’insuffisance de l’énergie poussent
les entreprises à produire leur propre
énergie, ce qui leur coûte très cher.
Des causes connues et des
solutions à portée de main
La crise énergétique constante que
traverse l’Afrique est en grande partie
due à la mauvaise politique énergétique
mise en œuvre par les gouvernements.
Pour commencer, la part des
investissements consacrée au secteur
énergétique correspond à 0,4% du
PIB global, soit environ 8 milliards,
alors qu’il faudrait 8,5 fois plus d’investissement
pour répondre à la demande.
Dans certains pays, le manque
d’investissement est tel qu’aucune capacité
de production n’a été installée
depuis une cinquantaine d’années,
et que les infrastructures existantes
L’Angola a un taux d’électrification de 35%,
alors que le Bengladesh, qui a un revenu
moyen par habitant cinq fois moins élevé,
a déjà raccordé 55% de sa population.
n’ont pas été entretenues. En outre,
les actions qui sont menées en faveur
de l’énergie sont en proie à des problèmes
de mauvaise gouvernance tels
que la corruption et le favoritisme qui
entravent leur mise en œuvre.
Bien que les problèmes rencontrés
par le secteur énergétique africain
semblent incommensurables, les solutions
existent, parfois d’une simplicité
stupéfiante. Le déficit de financement
par exemple pourrait être
comblé de moitié avec une augmentation
de 1% des impôts prélevés sur
le PIB. Le contrôle des dépenses exagérées
des différentes institutions pu-
38 x ENERGIES AFRICAINES Janvier-Février 2016 4 N°6
DOSSIER : LA COP 21 ET SES CONSÉQUENCES
bliques pourrait permettre de dégager
des fonds supplémentaires, l’aide internationale
pourrait être utilisée, et
le reste pourrait être mobilisé sur les
marchés financiers.
Les énergies renouvelables offrent
la possibilité à la région de combler
rapidement son déficit énergétique.
Elles peuvent en effet être rapidement
installées, et surtout loin des réseaux
de transmission, ce qui résout le problème
de l’installation coûteuse de ces
infrastructures de transport. En outre,
les énergies renouvelables ne constituent
plus, depuis longtemps, un frein
au développement économique. Elles
coûtent en effet de moins en moins
cher en raison de l’évolution rapide de
leurs technologies, le solaire et l’éolien
menant la danse dans cette catégorie.
Par ailleurs, l’Afrique est l’une des
régions les plus riches en matière de
ressources renouvelables et gagnerait
à limiter l’utilisation de sources énergétiques
plus polluantes, en raison de
son extrême vulnérabilité aux effets
du réchauffement climatique. Elle
pourrait même, avec quelques efforts,
produire 50% de son énergie à partir
de sources renouvelables d’ici 2030.
Consciente de cela, elle a déjà entamé
son processus d’éveil.
Une prise de conscience
généralisée
Il faut reconnaître que depuis
quelques années, les pays africains
prennent leur défi énergétique à brasle-corps.
A partir des années 2000, la
production d’énergie, dans plus de la
moitié des pays du continent, a augmenté
de 4% et la plupart des pays
prévoient de doubler leurs capacités
dans les cinq prochaines années. Cet
élan est en partie dû à la participation
des producteurs indépendants d’énergie,
qui facilitent grandement les mécanismes
de financement et de mise
en place des infrastructures.
Le continent compte actuellement
environ 130 producteurs indépendants
d’énergie, qui ont investi, de
2010 à 2013, environ 1,2 milliard de
dollars. Ce phénomène s’amplifiera
Le continent ne produit en effet que 160 GW d’électricité (la même quantité que le Japon),
dont 90 GW seulement dans la partie subsaharienne, dont la moitié est concentrée dans un
seul pays, l’Afrique du Sud.
dans les prochaines années, induit par
la libéralisation progressive du secteur
énergétique qui s’opère. Du côté étatique,
le financement effectué dans le
secteur énergétique est également en
hausse. De nombreux projets portés
par des partenaires internationaux
participent également à l’élan de développement
énergétique observé. Le
président américain, Barack Obama
a, par exemple, lancé l’initiative
« Power Africa », qui prévoit d’injecter
7 milliards de dollars dans le secteur
énergétique africain.
L’exploitation des ressources renouvelables
de la région a également
été entamée avec des pays plus déterminés
que jamais. L’Afrique du
Sud, le Maroc, l’Algérie, l’Ethiopie,
le Kenya, le Ghana et le Nigeria,
par exemple, mettent en place d’importantes
centrales solaires, éoliennes,
géothermiques, à biomasse et
hydroélectriques.
A la base, les développeurs de solutions
énergétiques, solaires principalement,
donnent accès à l’électricité
aux populations grâce à des
kits domestiques et communautaires
qu’elles leur permettent d’acquérir
progressivement.
Encore un long chemin
Malgré ces avancées très encourageantes,
les gouvernements doivent
prendre certaines mesures fortes pour
pérenniser et amplifier ce sursaut.
Pour commencer, ils doivent revoir
à la hausse leurs ambitions et leurs
stratégies en matière énergétique. Ils
doivent en effet multiplier leur production
d’énergie non pas par deux,
mais par dix au cours des 25 prochaines
années, et poser les bases
d’une économie bas carbone.
La part du PIB consacrée au secteur
énergétique devra passer à 3% voire
4%. Les Etats devront également créer
des conditions réglementaires et environnementales
propices au développement
du partenariat entre le public et
le privé dans le secteur énergétique.
L’Afrique devra, en outre, tirer
parti de ses faibles émissions de gaz
à effet de serre en prenant pleinement
part au marché de carbone qui
lui permettra de mobiliser les fonds
initiaux pour les différents projets
énergétiques. Il lui faudra également
mettre en place des systèmes
énergétiques efficaces et équitables,
afin d’atteindre un accès universel à
l’énergie, qui, par ricochet, dynamisera
son secteur économique.
Les réformes devront également
être faites au niveau de la gouvernance
du secteur énergétique avec
une gestion plus responsable et axée
sur les résultats. y
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 39
DOSSIER : LA COP 21 ET SES CONSÉQUENCES
L’AREI, 500 milliards de
dollars et 300 GW de
renouvelables pour sortir
l’Afrique de l’obscurité
Implanter, d’ici 2030, 300 GW de centrales
d’énergies renouvelables en Afrique. Tel est
d’objectif de l’Initiative africaine des énergies
renouvelables (AREI), lancée en décembre 2015
par les 54 pays du continent, rassemblés au sein
de l’Union africaine en association avec plusieurs
institutions financières, dont la Banque africaine
de développement (BAD). Une participation
consistante à l’électrification dans cette région qui
est la seule au monde où le nombre de personnes
n’ayant pas accès à l’électricité pourrait augmenter
au lieu de diminuer.
Un objectif ambitieux
Lors de la 21 ème édition de la
Conférence des parties (COP 21) qui
s’est tenue à Paris, l’Union africaine
a annoncé la création de l’Initiative
africaine des énergies renouvelables.
Le programme, qui sera abrité par la
Banque africaine de développement,
à Abidjan en Côte d’Ivoire, a pour
objectif la mise en place de 10 GW
d’énergies renouvelables d’ici 2020, et
300 GW d’ici 2030.
Il s’agit, dans un premier temps,
d’œuvrer pour le développement
durable, l’amélioration du bien-être
et le développement économique du
continent à travers l’accès universel
à une énergie propre, fiable et accessible
en quantité suffisante. Le second
objectif est de soutenir les pays africains
dans le développement de systèmes
d’énergies renouvelables en les
accompagnant dans la conception et
dans la mise en œuvre de stratégies
de développement à faible émission
de carbone. Cet objectif intègre également
l’amélioration de la sécurité
économique et énergétique.
Les pays du continent, rassemblés
au sein de l’Union africaine, comptent
atteindre ces objectifs avec la collaboration
d’institutions telles que le
NEPAD, la BAD, le groupe des négociateurs
africains sur le changement
climatique, le PNUE et l’Agence internationale
de l’énergie renouvelable
(IRENA) pour ne citer que ceux-là.
Impératif pour le développement
Cette initiative vient principalement
répondre à des problèmes
économiques. Le manque d’accès à
l’énergie fait perdre au continent 4%
de son PIB chaque année. « L’Afrique
est simplement fatiguée d’être dans
l’obscurité », s’est insurgé Akinwumi
Adesina, le président de la BAD lors
du lancement de l’initiative.
En effet, 640 millions d’Africains,
soit 68% de la population actuelle,
n’ont pas accès à l’électricité. Cette
proportion passera aux trois quarts de
la population d’ici 2030, si de nouvelles
installations énergétiques ne
sont pas très rapidement implantées.
Avec sa capacité de production de
160 GW du Caire au Cap, l’Afrique
produit, pour comparaison, la moitié
de l’énergie générée par le Japon
dont les habitants ne représentent ce-
40 x ENERGIES AFRICAINES Janvier-Février 2016 4 N°6
DOSSIER : LA COP 21 ET SES CONSÉQUENCES
« L’Afrique est simplement fatiguée d’être dans l’obscurité », s’est insurgé Akinwumi Adesina.
pendant que le dixième de la population
africaine. Seulement 35 GW de
cette capacité sont générés à partir de
sources renouvelables, dans cet environnement
dominé par les énergies
fossiles. En outre, le continent est la
région où l’énergie est la plus chère
au monde (environ 80 fois plus chère
que la moyenne des pays développés).
Le recours aux sources renouvelables
pour la production de ces 300 GW
supplémentaires est un choix à la fois
économique et environnemental. En
effet, le continent a un potentiel impressionnant
en matière de génération
de l’énergie qu’elle soit solaire,
hydraulique, géothermique, éolienne
ou de biomasse. En outre, l’exploitation
de ces ressources devient au fil du
temps moins onéreuse avec le développement
des technologies des énergies
renouvelables. Enfin, ces nouvelles
sources permettent au continent de
faire face au défi environnemental qui
est le sien. Bien qu’elle n’émette que
2,3% des émissions globales et qu’elle
soit l’un des puits de carbone les plus
importants, le continent est le plus
touché en matière de réchauffement
climatique. « L’Afrique souffre plus des
élévations de température que les autres
régions du monde. Les périodes de sécheresse
sont maintenant plus fréquentes et
atteignent une intensité jamais observée
jusqu’à présent », a affirmé le directeur
de la BAD. En effet, les températures
sur le continent ont connu, au cours
des dernières années, des augmentations
deux fois plus importantes
que la moyenne mondiale et le phénomène
est prévu pour perdurer. La
réduction du réchauffement à 1,5 °C
par rapport à l’ère préindustrielle sera
de l’ordre de 2 °C voire 3 °C sur le
continent si les objectifs de l’accord
sur le climat sont tenus.
Heureusement pour les organismes
en charge de la mise en œuvre de
...
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 41
DOSSIER : LA COP 21 ET SES CONSÉQUENCES
...
l’AREI, il n’y a aucun doute quant
au réalisme de cet objectif puisque la
Chine, à elle seule, a installé environ
380 GW de centrales éoliennes et
hydroélectriques.
Grâce à l’impressionnant potentiel
du continent…
L’atteinte des objectifs fixés par
l’AREI passera par l’implantation de
milliers de minicentrales qui seront
installées hors des réseaux électriques
nationaux, levant ainsi l’obstacle de la
mise en place de réseaux nationaux de
transmission qui reviennent assez cher.
Ces centrales fonctionneront grâce à
toutes les sources d’énergie renouvelable
disponibles et accessibles sur le
continent. « Notre soleil doit faire plus
que nourrir nos cultures. Il doit éclairer
nos maisons », a déclaré à ce propos
Akinwumi Adesina, et de poursuivre :
« Nos ressources hydrauliques massives
peuvent servir à autre chose que l’irrigation
de nos champs. Elles doivent
alimenter nos centrales électriques ». Il
a été appuyé par Judi Wakhungu, le
ministre de l’Environnement kényan,
qui a affirmé la complète adhésion
de son pays au programme en ces
termes : « Nous sommes prêts à engager
une production massive d’énergie solaire
et éolienne pour électrifier la totalité
de nos populations ». Les plans stratégiques
nationaux de mise en œuvre de
cette initiative seront mis en place au
cours des cinq prochaines années.
« Le programme qui sera abrité
par la Banque africaine de
développement, à Abidjan, en
Côte d’Ivoire, a pour objectif la
mise en place de 10 GW d’énergies
renouvelables d’ici 2020 et 300 GW
d’ici 2030. »
… et à des investissements massifs
La mise en œuvre de l’AREI coûtera,
au bas mot, 500 milliards de dollars
au cours des quinze prochaines
années, un effort d’investissement
sans précédent qui n’inquiète cependant
pas le président de la BAD :
« Nous ne devons pas avoir de petites
ambitions pour notre continent. Nous
pouvons atteindre cet objectif et même
le dépasser », a-t-il affirmé, confiant.
Son institution s’est déjà engagée
à investir environ 12 milliards de
dollars dans des projets d’énergies
renouvelables au cours des cinq prochaines
années. Elle pourra en outre
obtenir du secteur privé un engagement
de 40 milliards de dollars à 50
milliards de dollars sur la même période.
Cependant, la banque a averti
que l’obtention de ce financement
privé était subordonné à la mise en
place, par les différents pays, d’un
environnement propice à l’investissement,
surtout en matière de cadre
juridique. « Les investisseurs privés
sont toujours intéressés par le marché
africain, mais nous devons, pour y accéder,
mettre en place une politique et
des réglementations correctes », a-t-elle
conseillé. La banque collaborera également
avec les pays africains pour
porter la part de leur PIB consacrée
au secteur énergétique de 0,9% actuellement
à 3,5%.
Cet effort pourrait ajouter 50 milliards
de dollars supplémentaires à
« La banque
collaborera
également
avec les pays
africains pour
porter la part
de leur PIB
consacrée
au secteur
énergétique du
0,9 % actuel
à 3,5%. »
la mobilisation des fonds nécessaires
à la mise en place de cette initiative.
Des réformes fondamentales devront
également être faites dans les
secteurs énergétiques au niveau des
installations et du prix de cession de
l’électricité.
Le directeur de la BAD a en outre
suggéré que les pays occidentaux apportent
leur soutien en vertu de la
responsabilité morale qu’ils ont dans
le réchauffement climatique dont
l’Afrique est l’une des premières victimes.
Le continent compte donc en
grande partie sur les 100 milliards de
dollars promis par les pays développés
pour la lutte contre les effets du réchauffement
climatique.
L’initiative pourrait en outre profiter
des nombreux engagements financiers
faits en faveur du continent par
les pays développés et certaines institutions
financières. Ainsi, la Banque
mondiale a promis 16 milliards de
dollars au continent, tandis que la
France a annoncé la mise à disposition
de 10 milliards de dollars. y
42 x ENERGIES AFRICAINES Janvier-Février 2016 4 N°6
DOSSIER : LA COP 21 ET SES CONSÉQUENCES
Fabrice Le Saché :
« COP 21 a sanctuarisé
le rôle du marché carbone
dans l’atteinte des objectifs
climatiques »
Fabrice Le Saché, PDG d’Ecosur Afrique, le leader
africain du marché carbone nous entretient de
sa participation à la COP 21 ainsi que des acquis
obtenus par son secteur.
n Energies Africaines : Vous avez participé
à la COP 21 en tant qu’entreprise
du secteur privé. Qu’y avez-vous
défendu ?
Fabrice Le Saché : Notre objectif
pour la COP 21 était assez simple.
Nous voulions faire reconnaitre le
rôle des marchés carbones dans les
politiques de réduction des émissions
de gaz à effet de serre, mais également
faire reconnaitre le rôle de l’Afrique
dans ces marchés. Ce que nous souhaitons,
c’est que l’action de réduire
l’émission de CO 2 en Afrique soit
rémunérée, pour une raison extrêmement
simple. Si on donne une valeur
économique à la réduction de l’émission
de CO 2 sur le continent africain,
on contribue à stimuler la dissémination
des technologies vertes, basses
carbones qui permettront aux personnes
les utilisant d’avoir une rémunération,
un complément de revenu
qui sera généré par la commercialisation
de crédit carbone.
Nous y sommes parvenus partiellement.
En tant qu’entreprise privée,
leader de la finance carbone en
Afrique, notre but était d’interpeller
les décideurs, c’est-à-dire les Etats.
On y est un peu parvenu parce que
la COP 21 a sanctuarisé après 2020,
le rôle des marchés, des échanges de
réduction d’émission et des échanges
de crédit carbone dans l’atteinte des
objectifs climatiques. C’était extrêmement
important parce que, pour le
moment, on n’avait pas de visibilité
au-delà de cette date sur le système de
marché des crédits carbone.
n EA : Comment cet acquis sera-t-il
mis en œuvre ?
FLS : Concrètement, pour réduire
les émissions, il a été décidé qu’après
2020 le rôle et la place des marchés
seraient essentiels et qu’il fallait que
ses mécanismes soient préservés. Ils
seront donc renforcés pour la période
2020-2030. Cela représente le
premier point. Le 2 ème point, c’est que
les objectifs qui ont été arrêtés, à savoir
limiter le réchauffement à 1,5 degré,
permettent de créer une politique
stricte de plafonnement de l’émission.
Le plafonnement des émissions
implique une ratification de ces dernières
et donc une contrainte dans les
niveaux d’émission. Cette contrainte
va créer de la valeur du côté des personnes
qui réduisent effectivement
l’émission. Cet objectif de 1,5 degré
devient alors une technique de stimulation
des projets bas carbone.
Par ailleurs, il faut retenir que
la COP 21 est comme une loi.
Maintenant, il y a tous les décrets
d’application, les arrêtés qui lui donneront
force de vie, parce qu’une loi
sans décrets d’application n’est rien.
Il faut maintenant être extrêmement
vigilants car les décrets d’application
vont être pris entre maintenant et
2020. Ce processus débutera lors de
la COP-22, qui se tiendra en Afrique,
dans un pays francophone. Elle sera
déterminante, car elle sera la COP de
la mise en œuvre, de l’exécution.
n EA : Quel sera donc votre objectif
pour cette COP 22 ?
FLS : Notre combat va désormais
s’orienter vers des actions très
concrètes. Notre demande de prix
...
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 43
DOSSIER : LA COP 21 ET SES CONSÉQUENCES
...
« Il faut que le fonds vert contribue à cela en payant aux résultats de la réduction d’émission,
ce qui est différent de financer les projets en amont. »
minimum pour les crédits carbone
africains doit être prise en compte
pour la COP 22, comme notre demande
de rachat d’un nombre minimum
des crédits carbone africains
par la communauté internationale.
Il y a également notre requête d’utilisation
de la langue française dans les
marchés de crédits carbone qui doit
être portée lors de la prochaine conférence,
parce que c’est l’espace francophone
qui a le moins bénéficié de la
finance carbone à ce jour. Le fait que
ces mécanismes ne soient disponibles
qu’en langues étrangères constitue
une barrière à leur appropriation.
Donc c’est une facilité pour accéder
au marché que de permettre que les
textes soient traduits en français et
que les développeurs puissent déposer
leurs projets, s’ils le souhaitent,
en langue française. Nous allons également
demander que le Fonds vert
climatique qui a été établi et qui est
doté maintenant d’un certain nombre
d’engagements financiers, à peu près
6 milliards, ait désormais un lien avec
les marchés carbone africains. Nous
voulons qu’une partie des avoirs de ce
fonds permette de soutenir les projets
africains en achetant leur crédit carbone.
Parce que si vous êtes porteur
de projet en Afrique et que vous êtes
certain que vous pourrez vendre vos
crédits carbones à un organisme international
tel que le fonds vert, vous
allez pouvoir intégrer cette vente dans
le business plan de votre projet. Cela
vous permettra d’avoir un accès facilité
aux investisseurs et aux banques.
Aujourd’hui, l’Afrique que nous
connaissons, l’Afrique qui gagne et
qui innove, n’a pas besoin qu’on l’aide
à construire ses projets, elle sait quels
projets elle veut. Ce dont elle a besoin
c’est qu’on lui paie la juste rémunération
pour la réduction d’émission,
vu qu’elle n’a aucune responsabilité
dans les changements climatiques et
surtout, elle fait des efforts pour aider
la communauté internationale à parvenir
à ses objectifs. Cela lui permettra
également d’avoir une trajectoire
de développement qui ne ressemble
pas à celle des pays développés. Donc
nos clients demandent juste un prix
stable et suffisamment élevé pour
pouvoir investir dans les technologies
propres. Il faut que le fonds vert
contribue à cela en payant aux résultats
de la réduction d’émission, ce qui
est différent de financer les projets en
amont. Ce type de contribution est
d’ailleurs meilleur, parce qu’on ne
prend pas le risque de payer en amont
pour des projets aux performances variables,
on va réellement payer pour
une tonne de CO 2 déjà évitée par un
projet. Et en même temps, on permet
que ces projets se financent.
On trouve étonnant que le fonds
vert fonctionne sans aucune interaction
avec le MDP, alors que le MDP,
c’est finalement un formidable mécanisme
qui mesure la performance
carbone des projets, c’est un mécanisme
universel, onusien, tiers, indépendant,
impartial, logistique, qui a
des registres et qui permet de transformer
les réductions d’émission en
crédit carbone. Ces crédits carbones
devraient être payés par le fonds vert.
Puisque celui-ci veut aider les projets
africains, qu’il paye le crédit carbone
africain et il paiera des résultats.
n EA : Est-ce que les pays africains
se sentent concernés par cette cause
que vous défendez ?
FLS : Nous avons déjà deux
membres du conseil d’administration
du fonds vert qui soutiennent notre
44 x ENERGIES AFRICAINES Janvier-Février 2016 4 N°6
DOSSIER : LA COP 21 ET SES CONSÉQUENCES
démarche, que ce soit Tosi Mpanu-
Mpanu ou Paolo Gomez. Tosi est
notamment le chef négociateur de
la RDC, il a des positions éminentes
dans le groupe Afrique. Et nous avons
plus d’une quarantaine d’autorités
morales et de chefs d’entreprise
qui soutiennent notre mouvement.
Effectivement, nous avons engagé,
auprès du groupe Afrique, un important
travail de conviction pour dire
qu’il ne faut pas que le fonds vert
soit le nouveau MDP. Il ne faut pas
que l’Afrique rate le virage du fonds
vert et de la finance carbone dans les
dix prochaines années comme elle l’a
raté dans les dix dernières. Donc, aujourd’hui
il ne faut pas créer un nouvel
MDP, mais plutôt créer les différents
outils et les lier entre eux. Et ça,
c’est un discours qui est en train d’être
entendu car il y a des pays africains
qui ont déjà des portefeuilles MDP et
qui veulent bien qu’ils soient rachetés
par le nouvel outil, en l’occurrence le
fonds vert.
n EA : Comment faire pour que
l’Afrique ait accès à ces nouveaux
financements qui seront mis à
disposition ?
FLS : Aujourd’hui l’accès aux ressources
financières est hautement
stratégique. Or on sait que dans
les décennies à venir, tous les programmes
financiers mondiaux auront
pour but de parvenir à une économie
fournissant une neutralité carbone, à
une économie totalement décarbonée.
Si l’Afrique veut avoir un effet
levier sur cette économie, elle doit
accéder à ces ressources. Or pour y
parvenir, c’est simple, il suffit de
suivre les formes prescrites par ces
institutions. Pour le MDP, il suffisait
de déposer des projets selon la procédure
instaurée. Le fonds vert a des
procédures, pour les suivre il faut les
comprendre. C’est d’ailleurs pour ça
que nous plaidons pour l’utilisation
de plusieurs langues. L’anglais crée
un déséquilibre d’accès aux marchés.
On doit pouvoir utiliser le portugais,
le français, l’arabe et d’autres langues.
Et l’Afrique doit déposer des dossiers
de projets si elle veut bénéficier de
ces financements. Il devrait y avoir
dans chaque pays une équipe chargée
de faire remonter les projets susceptibles
de bénéficier de financements
du fonds vert, du MDP, de la banque
mondiale, même de la BAD.
Les Africains devraient se constituer
en fonds pour commercialiser leurs
crédits carbone. Toute institution
désirant les acheter pourrait donc en
bénéficier par le biais de ce véhicule.
C’est d’ailleurs ce que nous faisons
déjà nous, avec plus de 40 projets
dans 17 pays. Ce que nous souhaitons
faire, c’est rassembler les Etats et
institutions africaines, pour créer un
véhicule qui soit sur le terrain et qui
offre des solutions correspondant aux
réalités africaines, comme la possibilité
de prépayer des crédits carbone.
n EA : Aujourd’hui, nous assistons
à une multiplication des marchés carbone.
Cela constitue-t-il un atout ou
un obstacle pour les crédits carbone
africains ?
FLS : Si comme l’Afrique, chaque
puissance crée son propre écosystème
de crédit carbone, c’est vrai
qu’il y a un risque lié à la complexité.
D’abord, il y a très peu de systèmes
qui sont créés qui acceptent les importations
de crédits carbones africains.
L’Union européenne l’accepte,
mais nous connaissons le problème
de l’Union européenne, qui est que la
plupart des industriels ont déjà utilisé
leur quota d’importation. Si nous
observons les systèmes qui sont en
train d’être créés, nous pouvons dire
que c’est une bonne chose car ils permettront
d’aspirer le surplus disponible
sur le marché. Des pays comme
l’Inde et le Brésil, dont les systèmes
sont nouveaux, vont passer d’un pôle
de création de crédit carbone, à un
« Il faut maintenant être
extrêmement vigilants car les
décrets d’application vont être
pris entre maintenant et 2020.
Ce processus débutera lors de la
COP 22, qui se tiendra en Afrique,
dans un pays francophone. Elle
sera déterminante, car elle sera
la COP de la mise en œuvre,
de l’exécution. »
pôle de commande de crédit carbone.
Ils passent du statut de fournisseur
à celui d’acheteur. Ils vont absorber
les crédits carbones créés dans leur
propre système et ainsi diminuer la
concurrence sur le marché mondial.
Mieux, les nouveaux systèmes dans
les pays émergents s’ouvriront à terme
à l’import de crédits carbones africains.
Même si, pour le moment, ces
systèmes achètent leurs propres crédits
carbones. Il faudra que l’Afrique
négocie lors de la COP 22 pour que
ses partenaires ouvrent leurs systèmes
aux crédits carbones africains. y
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 45
DOSSIER : LA COP 21 ET SES CONSÉQUENCES
La Galerie by World
Efficiency : 500 solutions
pour un développement
propre
Si les scientifiques s’accordent à voir dans le réchauffement
climatique un défi majeur pour la planète, ils sont les premiers
aussi à reconnaître que le problème n’est pas sans issue. Mieux,
des centaines d’entités s’attellent à démontrer, avec des résultats
éloquents, qu’il est possible de mieux vivre tout en préservant notre
planète. Plusieurs de ces organisations ont exposé leurs solutions
lors de la Cop 21 dans le cadre de nombreux événements dont
la galerie by Word Efficiency.
500 solutions, 13 000 acteurs
présents
L’exposition, qui s’est déroulée
du 2 au 9 décembre en marge de la
COP 21, a connu la participation
de 200 organisations issues de toutes
les régions du monde. Elle a permis
de présenter environ 500 solutions
au réchauffement climatique dans
tous les domaines. Le bâtiment, les
transports, l’agroalimentaire, l’aménagement
urbain, la production
énergétique et industrielle, la lutte
contre l’érosion, ainsi que les solutions
managériales telles que le type
d’organisation, de financement ou de
marketing sont quelques-uns des secteurs
pour lesquels les solutions ont
été développées. Des plus inattendues
aux plus évidentes et simples à mettre
en place, ces solutions ont attiré plus
de 13 000 acteurs politiques et économiques.
La Galerie a également été
le lieu d’organisation de 90 conférences
et débats qui ont permis aux
participants d’échanger sur les enjeux
climatiques. Voici quelques-unes des
solutions relatives à l’énergie qui ont
été présentées dans cette galerie. y
46 x ENERGIES AFRICAINES Janvier-Février 2016 4 N°6
DOSSIER : LA COP 21 ET SES CONSÉQUENCES
Les solutions hydroélectriques
Comme dans la plupart des domaines, les solutions présentées
à la galerie pour le secteur hydroélectrique ont
pour but d’étendre l’utilisation de cette technologie et de
la rendre plus efficace.
Ainsi, EcoCinetic met au point, depuis 2011, des hydroliennes
au fil de l’eau à axe vertical adaptées aux zones
fluviales et estuaires. Ces petites turbines hydrauliques
occupent peu d’espace, ne modifient pas le profil des
cours d’eau et la conception modulaire dont elles font
l’objet les rendent facilement installables dans les petites
étendues d’eau.
HydroQuest a poussé la performance un peu
plus loin en développant des hydroliennes fluviales
à double axe vertical et à flux transversal.
La société s’est récemment lancée, en collaboration
avec la Construction mécanique de
Normandie (CMN) dans la fabrication d’hydroliennes
marines dont la première ferme devrait
être installée d’ici 2017.
L’équipe d’EEL Energy peaufine le développement
d’un nouveau type d’hydrolienne
s’inspirant des ondulations des anguilles dans
l’eau. Doté d’une membrane ondulante, le
système qui fonctionne grâce à un mécanisme
de biomimétisme récupère l’énergie grâce
à la déformation de sa membrane en latex.
Un convertisseur intégré à l’outil transforme
l’énergie générée tout au long de la membrane.
Le prototype, qui a déjà subi les essais peut
également fonctionner près des côtes. Le
déploiement industriel de cette hydrolienne
devrait débuter en fin 2016.
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 47
DOSSIER : LA COP 21 ET SES CONSÉQUENCES
L’énergie solaire à l’honneur
La société Exosun a mis au point des trackers solaires.
Ces dispositifs mobiles permettent aux panneaux
solaires de suivre la trajectoire du soleil au cours de la
journée. Se déclinant en trakers à un axe ou à deux axes,
ils contribuent à une amélioration sensible du rendement
des installations photovoltaïques (jusqu’à 30% de
performances supplémentaires). L’entreprise qui est déjà
présente aux Etats-Unis et en Afrique propose également
des services d’ingénierie pour l’entretien des centrales
solaires.
De son côté, Heliosite propose depuis 2013 de porter le
rendement des panneaux solaires à 40% grâce à sa solution
de tracking à deux axes qui tourne sur un axe horizontal
et un axe vertical. L’ancrage du dispositif se fait
plus rapidement parce qu’il s’effectue sur des haubans et
non grâce à une fondation en béton.
Helio Pur Technologies a développé une solution qui
repose sur la technologie de purification bio-solaire
pour un traitement énergétiquement plus efficace des
eaux usées. En effet, elle intensifie en système clos des
phénomènes naturels tels que la pénétration des rayons
solaires, l’oxydation des composés organiques ou encore
le transfert des substances nocives sans que les étapes
d’évaporation ou de concentration ne soient nécessaires.
Le système utilise comme réactif le CO 2 , de l’eau et la
biomasse algale. Elle permet d’obtenir à la fin de l’eau
utilisable, de l’oxygène ainsi que du carbone qui est récupéré
pour un autre cycle.
Helioclim a conçu un dispositif de climatisation fonctionnant
avec le solaire. Réversible, le système fonctionne
grâce à une machine absorbant de l’eau et de
l’ammoniac combinée avec un dispositif interne de stockage
de l’énergie. Le tout est alimenté par des capteurs
solaires thermiques à concentration. Ce dispositif peut
être utilisé aussi bien pour l’obtention de températures
basses (climatisation, rafraîchissement, utilisation frigorifique
jusqu’à -60°C) que pour les températures élevées
(chauffage et eaux chaude sanitaire).
Colas a mis au point le premier revêtement routier photovoltaïque
au monde. Constituées de cellules photovoltaïques
enrobées dans un système multicouche de faible
épaisseur, ces dalles supportent le poids de tous les types
de véhicules. Dénommé Wattway, le système se pose
directement sur les chaussés préexistantes, sans que de
lourds travaux civils supplémentaires soient nécessaires.
Sunna design met à disposition des solutions solaires
et intelligentes d’éclairage autonome associées à un
système innovant de stockages par des batteries particulièrement
résistantes aux températures extrêmes.
48 x ENERGIES AFRICAINES Janvier-Février 2016 4 N°6
DOSSIER : LA COP 21 ET SES CONSÉQUENCES
Les solutions éoliennes
Nénuphar Wind a développé des éoliennes contrarotatives
(dotées de deux hélices multipales qui tournent
à vitesses égales, mais en sens opposés) pouvant bénéficier
du vent quelle que soit la direction dans laquelle
il souffle. Elles sont en outre flottantes, ce qui permet
de réduire les coûts d’investissement. Ces éoliennes ont
une production supérieure de 20% à celle des éoliennes
traditionnelles.
Ideol met à la disposition du public la Damping Pool,
une plateforme carrée destinée à accueillir les éoliens
flottants. Dotés d’une sorte de piscine intérieure, elles
offrent une bonne stabilité face à la houle et ont une
grande capacité d’accueil, ce qui permet de réduire le
coût de mise en place des parcs flottants.
Des solutions plus généralisées
Enerbee a inventé une solution de microgénération
d’énergie pouvant ainsi remplacer les piles, qui génère
de l’énergie en utilisant les mouvements. Fonctionnant
grâce aux principes du magnétisme et de la piézoélectricité
(propriété de polarisation électrique sous l’action
d’une contrainte mécanique ou inversement), le
dispositif miniature peut utiliser les mouvements lents
ou rapides d’une amplitude inférieure ou égale à 1 cm,
même s’il est séparé de la source du mouvement par
une cloison. Elle alimente les objets sans fil connectés
tels que les montres, les commandes, les thermostats,
les variateurs de lumière ou encore les détecteurs de
mouvements. L’une de ses premières applications est un
variateur de lumière qui utilise l’énergie produite par la
main de l’utilisateur pour produire l’énergie nécessaire à
son fonctionnement.
Echy a mis en place un système d’éclairage naturel par
fibre optique qui, de jour, capte la lumière naturelle
de l’extérieur pour éclairer l’intérieur. Le captage de la
lumière se fait grâce à des panneaux placés sur des trackers.
Elle est ensuite conduite à l’intérieur des bâtiments
grâce à la fibre optique.
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 49
POLITIQUES PUBLIQUES
La Banque mondiale octroie un
prêt de 95 millions $ au réseau de
transport électrique rwandais
Tanzanie : le gouvernement envisage
de céder 49% de la Tanesco aux
investisseurs privés
Le gouvernement tanzanien vendra, au cours de
cette année, 49% de ses parts dans la Compagnie
Tanzanienne de Fourniture d’Energie (Tanesco).
C’est ce qu’a révélé Sospeter Muhongo, le ministre
de l’Energie et des Mines, au média The EastAfrican.
Les recettes de cette cession seront réinvesties
dans trois unités séparées qui se chargeront
de la production, du transport et de la distribution
de l’électricité. Cette décision fait partie d’une
série de mesures ayant pour but de porter la capacité
électrique du pays, qui s’élève actuellement
à 1400 MW, à 10 000 MW d’ici 2025. Pour cela,
le gouvernement investira 1,2 milliard $ dans la
Tanesco sur cette durée.
Sous la pression du secteur privé, qui a déclaré
que le déficit énergétique entravait ses activités,
le 3ème plus grand producteur africain d’or a
décidé d’ouvrir son secteur de production énergétique
au privé. « Nous invitons tous les investisseurs
locaux capables de générer entre 100 MW
et 5000 MW ou plus à se manifester », a déclaré
M. Muhongo. La réforme stratégique et la feuille
de route de l’industrie tanzanienne de fourniture
d’électricité prévoient qu’une part importante des
investissements soit assurée par le secteur privé.
Le gouvernement espère que cette libéralisation
permettra de combler le déficit énergétique, qui
est actuellement de 1000 MW. y
Le Rwanda a obtenu auprès de la Banque mondiale
un prêt de 95 millions $ qui lui permettra de
relier 72 000 ménages supplémentaires au réseau
électrique national. Le financement servira en
outre à réhabiliter le réseau électrique de 15 kV
desservant la ville de Kigali, et d’améliorer les
différents services opérationnels de la compagnie
nationale d’électricité. Les experts estiment que
le réseau électrique du pays devrait connaître une
refonte complète pour faire face à la demande
croissante engendrée par un développement
économique accéléré. « Un accès accru à l’approvisionnement
électrique fiable permet non seulement
une réduction des coûts et une amélioration de la
rentabilité des entreprises, mais devient également
essentiel afin de permettre la mise en place de nouvelles
entreprises du secteur privé, ce qui stimulera
la croissance du pays et réduira son taux de pauvreté
», a déclaré Thomas O’Brien, le représentant
résident de la Banque mondiale.
Le pays s’est fixé pour objectif d’atteindre un
taux d’électrification de 70% d’ici à 2018, ce qui
nécessitera de porter sa capacité énergétique de
161 MW actuellement à 563 MW. y
50 x ENERGIES AFRICAINES
Janvier-Février 2016 4 N°6
POLITIQUES PUBLIQUES
Libéria : 150 000 personnes
auront accès à l’énergie
avec l’appui de la Banque
mondiale
La Banque mondiale a accordé au Libéria un
financement de 27 millions $, qui permettra à
150 000 personnes d’avoir accès à l’électricité. Cet
objectif sera atteint grâce au projet libérien d’accès
à l’énergie renouvelable (LIRENAP).
Dans le cadre de la mise en œuvre
de ce projet, une minicentrale hydroélectrique
pouvant alimenter environ
50 000 personnes sera construite. Les
ménages, mais également les entreprises
et les institutions publiques,
seront reliés au barrage électrique qui
sera situé dans le comté de Lofa, grâce
à un réseau de transmission qui sera
mis en place.
Dobraja, la responsable de la Banque
mondiale pour le Libéria.
Cap sur les EnR
Au-delà de ce programme, le gouvernement
compte bien poursuivre
son développement grâce aux énergies
renouvelables, et privilégier le
solaire pour alimenter les établissements
publics se trouvant en milieu
34 sites pour des minicentrales
hydroélectriques
Le pays dispose d’un important potentiel
dans le domaine de l’hydroélectricité.
Le Ministère libérien des
terres, des mines et de l’énergie a annoncé,
dans son rapport annuel, la sélection
de 34 sites pouvant éventuellement
accueillir des minicentrales
hydroélectriques. Ces emplacements
se répartissent entre les huit comtés
que sont Grand Gedeh, Grand Kru,
Lofa, Maryland, Nimba, River cess,
River Gee et Sinoe. Les travaux qui
Le solaire off-grid
100 000 autres personnes bénéficieront
de solutions solaires autonomes.
Le LIRENAP sera exécuté
par l’Agence libérienne en charge des
communautés rurales et de l’énergie
renouvelable, en collaboration avec
le Ministère des terres, des mines et
de l’énergie. Ce projet représente l’un
des points essentiels de la politique
de reconstruction nationale mise au
point après l’épidémie d’Ebola. Le
comté de Lofa avait en effet été l’un
des plus touchés. « Ce projet s’inscrit
dans la stratégie nationale de développement
qui envisage une augmentation
de l’accès à une électricité moins chère
et renouvelable, élément essentiel au développement
économique et à la réduction
de la pauvreté », a affirmé Inguna
Le Libéria a une capacité électrique
installée de 23 MW d’énergie, et
seulement 9,8% de sa population a
accès à l’électricité.
rural. Selon le CIA World Factbook,
le Libéria a une capacité électrique
installée de 23 MW d’énergie, et seulement
9,8% de sa population a accès
à l’électricité.
ont permis l’identification de ces
zones ont été financés par la Norvège,
dans le cadre d’un programme de
renforcement des capacités du secteur
énergétique libérien, dont l’un
des objectifs est de faciliter l’accès
des populations rurales à une énergie
fiable, produite à partir de sources
renouvelables. y
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 51
POLITIQUES PUBLIQUES
Le secteur énergétique égyptien
représente une opportunité
d’investissement de 6 milliards $
Le secteur énergétique égyptien représente une
opportunité d’investissement de 6 milliards de
dollars d’ici 2018. C’est du moins ce que pense la
banque d’investissement EFG Hermès.
Face à la croissance de la demande, combinée à la
cherté des combustibles utilisés pour la production,
le pays a décidé de produire plus d’énergies
renouvelables. Il compte d’ailleurs faire passer
leur proportion à 20% du mix énergétique d’ici
2020. Pour y arriver, il construira environ 8 GW
de centrales, répartis en 5,5 GW d’énergie éolienne
et 2,5 GW d’énergie solaire.
EFG Hermès prévoit ainsi l’injection de 6 à 7 milliards
de dollars dans le secteur, d’ici 2018. « Nous
sommes optimistes sur les projets énergétiques
égyptiens à court et moyen terme. Mais la réussite
de la première vague de rachat d’électricité asseoira
plus la confiance en ces actifs. La mise en place d’un
cadre réglementaire adapté est le principal challenge
auquel doit faire face le gouvernement pour rendre
son secteur énergétique attrayant sur le marché
mondial de l’investissement », a déclaré Bakr
Abdel-Wahabb, le directeur exécutif de la branche
« capital investissement » de l’EFG Hermès.
Selon le dirigeant, les investisseurs privés ne seront
pas les seuls acteurs de ces investissements.
Les institutions financières internationales et
multilatérales devraient fournir environ 60% des
fonds nécessaires. Pour sa part, l’EFG envisage
la mise en place d’un fonds d’une valeur de 200
millions de dollars, qui sera consacré au financement
des projets solaires et éoliens de l’Egypte et
du Moyen-Orient de manière plus générale. y
Ghana : 98 millions $ par mois pour
venir à bout de la crise énergétique
Au Ghana, le gouvernement estime qu’un décaissement
mensuel de 98 millions $ sera nécessaire
pour venir à bout du délestage : « Nous avons
besoin de 98 millions $, soit environ 100 millions $
par mois, pour produire assez de combustible pour
les centrales thermiques. Cela fait environ 1,18
milliard $ par an. Nous devons donc redoubler nos
efforts pour atteindre ce but car le barrage hydroélectrique
d’Akosombo ne fonctionne aujourd’hui
qu’à 30% de ses capacités », a déclaré John Abdulai
Jinapor, le vice-ministre de l’Energie lors d’une
conférence de presse.
L’officiel a également révélé que le gouvernement
fera tous les efforts nécessaires pour éviter une
hausse du tarif de l’électricité. Pour mobiliser les
98 millions nécessaires, la société nationale en
charge de la distribution de l’électricité a ordonné
un audit des compteurs afin de contraindre les
consommateurs qui contournent le système de
paiement au règlement de leurs factures : « Nous
sommes décidés à percevoir les redevances des
consommateurs et ce, de manière juste et équitable.
Il n’y aura pas d’exception pour un individu, une
entreprise ou même une institution de la République.
Si vous consommez de l’électricité, vous
devez la payer », a martelé M. Jinapor.
Depuis des mois, le pays est en proie à une crise
énergétique due au faible niveau d’eau dans ses
différents barrages. Les coupures d’électricité devenues
fréquentes durent parfois 48 heures, voire
72 heures. y
52 x ENERGIES AFRICAINES
Janvier-Février 2016 4 N°6
POLITIQUES PUBLIQUES
Le Nigeria veut développer
13 GW de centrales
solaires off-grid
Au Nigeria, le gouvernement fédéral s’est fixé pour
objectif de mettre en place 13 000 MW de centrales
solaires hors-réseau. C’est ce qu’a annoncé
Amina Mohammed, la ministre de l’Energie, dans
un document détaillant les faits marquants de la
conférence climatique qui s’est tenue à Paris, ainsi
que les accords qui en ont découlé.
Abordant la contribution de son
pays à l’atteinte de l’objectif de
maintien du réchauffement à moins
de 2°C par rapport à l’ère préindustrielle,
elle a mentionné : « Nous envisageons
en particulier de développer
environ 13 GW d’énergie solaire offgrid,
afin de permettre aux communautés
les plus défavorisées l’accès à
une énergie fiable, moins chère et plus
verte », a-t-elle déclaré. Et de continuer
: « Nous envisageons également
de mettre en place un secteur pétrolier
et gazier moins polluant et plus efficace
énergétiquement. En mettant fin au
torchage du gaz, en l’utilisant à des fins
commerciales (la génération d’énergie
entre autres), nous pourrions faire des
économies allant jusqu’à 7,5 milliards
de dollars. »
Accroître son PIB
Madame Mohammed a également
révélé que, selon les prévisions de la
Banque mondiale, la réduction de
l’empreinte carbone des différentes
activités boostera l’économie nigériane,
lui permettant d’accroître son
PIB de près de 2% supplémentaires. y
ALTEN AFRICA ET LA SFI SIGNENT POUR UNE
CENTRALE SOLAIRE DE 120 MW DANS L’ETAT
DE KOGI
La Société financière internationale (SFI) a signé avec la société espagnole
de projets Alten’s Middle Band Solar One Ltd, un contrat relatif au
codéveloppement d’une centrale solaire photovoltaïque de 120 MW au
Nigeria. Situé à Lokoja, dans l’Etat de Kogi, ce projet permettra d’alimenter
environ 175 000 personnes.
Selon les termes de l’accord, la SFI apportera une part du financement
nécessaire au développement de la centrale, ainsi qu’un support technique
et commercial. La mise en place de la centrale sera assurée par un consortium
constitué par l’Alten Reneweable Energy Developments Africa, la
BV, Green Continent Partners Holding, et Nemoante Ltd.
La clôture du financement du projet devrait intervenir au premier trimestre
de l’année 2016. « A Alten, nous apporterons notre grande expérience
du design, du développement, du financement, de la construction et
de l’exploitation des centrales photovoltaïques. La participation à ce projet
entre dans le cadre de notre stratégie, qui consiste à permettre l’accès à
l’énergie pour les populations des pays en développement », a déclaré Luis
Castellanos, le directeur exécutif d’Alten Africa. y
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 53
POLITIQUES PUBLIQUES
Algérie : Nourredine Yassaa plaide pour un
développement à petite échelle des énergies
renouvelables
Développer des programmes
d’énergies renouvelables à petite
échelle via l’installation de toits
solaires dans les ménages, les
petites entreprises et les exploitations
agricoles. C’est ce qu’a
suggéré Nourredine Yassaa
(photo) le directeur du Centre de
recherche en énergies renouvelables
(CDER) lors d’une intervention
sur la Chaîne III de la
radio nationale algérienne.
« Il s’agit, en fait, d’opérations
très simples permettant de créer de
petites entreprises d’installation et
de maintenance, avec des impacts
appréciables en matière de création
d’emplois », a-t-il explicité.
M. Yassaa recommande, dans un premier temps, la mise en place
de 100 000 à 1 million de kits solaires, produisant chacun entre 3
et 4 KW d’électricité pour alimenter les entités propriétaires avec
une possibilité de revente du surplus de production pour faciliter le
retour sur investissement.
L’accès au crédit pour la mise en place de telles infrastructures permettra
d’encourager les différents acteurs désireux de faire partie
du programme. La mise à exécution de cette suggestion pourra
booster le taux d’intégration de l’industrie algérienne qui fabrique
ses propres panneaux solaires ainsi que 90% des batteries utilisées
sur son territoire. y
Nigéria : la NERC délivre des licences pour la mise
en place et la distribution de 1650 MW
Huit compagnies pourront mettre en place 1648,5 MW de centrales
électriques au Nigéria, en vertu de licences que vient de délivrer la
Commission nigériane de régulation de l’électricité (NERC). Ces autorisations
incluent également la distribution de l’énergie produite.
Les compagnies qui ont obtenu ces licences sont la Ossiomo
Power & Infrastructure qui installera 55 MW, The Anambra state
Independent Power Generation Company Limited (528 MW), la
Cummins Power Generation Nigeria Limited (3,5 MW), Sinosun
Investment Limited (100 MW), LR-Aaron Power Limited (100 MW),
Lafarge Africa Plc (260 MW), Azikel Power Limited (500 MW) et
Middle Band One Limited (100 MW).
300 MW de cette capacité à installer seront constitués par des centrales
solaires tandis que les 1348 MW restant seront produits par
des centrales à gaz. y
L’Allemagne apporte
18 milliards FCFA aux
énergies renouvelables
du Sénégal
La Coopération financière
allemande a apporté au Sénégal
un concours financier de
18 milliards de francs CFA, soit
environ 30 millions $. Ces fonds
serviront au financement d’un
projet consacré à la promotion
de l’énergie.
Ils permettront de mettre en
place une centrale solaire de 15
MW dans la commune de Diass.
L’énergie produite par cette centrale
alimentera la zone économique
spéciale intégrée (DISEZ)
ainsi que le réseau connecté de
la SENELEC, la société nationale
en charge de la fourniture
d’électricité. Elle devrait entrer
en service en 2017.
Ce financement servira également
à l’installation de systèmes
photovoltaïques hybrides sur les
îles du Saloum et à l’implantation
de centres secondaires de
la SENELEC à Kidira, Goudiry
et Gounass. « Aujourd’hui, dans
la gestion de la crise du secteur
de l’énergie, le Sénégal dispose
des opportunités et des moyens
à la hauteur de ses ambitions,
à l’objectif du mix énergétique
lancé par le président de la
République », a déclaré Marcus
Faschina, le directeur du bureau
de la Coopération financière
allemande lors de la signature
de la convention. y
54 x ENERGIES AFRICAINES Janvier-Février 2016 4 N°6
POLITIQUES PUBLIQUES
Zimbabwe : la ZESA n’a
tenu que deux semaines
sans pratiquer de
délestages
Fin décembre, les Zimbabwéens ont passé, pour la
première fois depuis des années, deux semaines
sans délestages.
« Pendant la période des fêtes, la
fourniture d’électricité s’est significativement
améliorée. Cela est en partie
dû à la fiabilité de certaines centrales
électriques. En outre, dans le mois de
décembre, la majorité des entreprises
ont pris des congés, diminuant ainsi la
demande en électricité. La Zimbabwe
Electricity Supply Authority (ZESA) a
enfin importé 300 MW d’Afrique du
Sud », a expliqué Fullard Gwasira, le
porte-parole de la ZESA.
Sur ce dernier point, il a insisté sur
le caractère prépayé de l’électricité
importée depuis l’Afrique du Sud :
« Si nous ne percevons pas d’argent,
nous ne serons pas capables d’importer
l’énergie », a-t-il expliqué en insistant
sur l’importance du paiement des
factures par les différents consommateurs.
En outre, ces 300 MW ne
seront exportés par l’Afrique du Sud
que dans la mesure de ses capacités,
ses besoins nationaux étant sa priorité.
Cet apport supplémentaire permettra
au Zimbabwe de préserver la
réserve d’eau du barrage de Kariba
au cours de la nuit, afin de pouvoir
fournir plus d’électricité pendant la
journée.
A la rescousse
M. Gwasira a prévenu que le bout
du tunnel était encore loin en ce qui
concerne la fin des délestages. Dès la
reprise d’activité des entreprises, la demande
augmentera à nouveau, ce qui
induira de nouvelles vagues de délestage.
Il a néanmoins assuré que le gouvernement
continuait ses efforts pour
juguler cette crise. Ainsi, une extension
des capacités de la centrale hydroélectrique
de Kariba, et de la centrale thermique
à charbon de Hwange, est prévue.
Les travaux, qui dureront environ
trois ans et demi, permettront d’ajouter
respectivement 300 MW et 600
MW aux capacités des infrastructures.
En attendant leur achèvement, une
centrale électrique de secours sera installée
à Dema, et fournira 200 MW au
réseau. Elle sera appuyée par la centrale
électrique de Mutare, qui viendra à la
rescousse lors des pics de la demande
électrique, et qui devrait être achevée
d’ici un an et demi.
Au total, le pays envisage de porter
sa capacité de production électrique
à plus de 3000 MW au cours des six
prochaines années. Le coût de l’ensemble
de ces travaux s’élève à plus de
5 milliards $, dont une large part sera
financée par la Chine.
Baisse des réserves d’eau
Le Zimbabwe est en proie, depuis
des années, à un déficit énergétique
aigu. Il produit en effet moins de
Le pays envisage de porter sa capacité de
production électrique à plus de 3000 MW au
cours des six prochaines années. Le coût de
l’ensemble de ces travaux s’élève à plus de
5 milliards $, dont une large part sera financée
par la Chine.
1000 MW, pour une demande de
plus de 2000 MW. Ce déséquilibre
est, en grande partie, dû à la baisse
des réserves d’eau dans les centrales
hydroélectriques, ce qui a entraîné
une diminution drastique de la production.
Selon le porte-parole, cette
diminution de la production s’exacerbera
au cours du mois de janvier, si la
pluviosité ne s’améliore pas. y
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 55
POLITIQUES PUBLIQUES
AFD : « Par exemple, si un
entrepreneur veut un crédit
pour changer sa chaudière,
la banque peut lui proposer
les crédits Sunref »
Entretien avec Catherine Bonnaud, la directrice de
l’Agence française de développement au Bénin.
n Energies Africaines : Expliqueznous
brièvement ce que c’est que le
Sunref, ce programme dont la mise en
œuvre vient de débuter au Bénin ?
Catherine Bonnaud : Le Sustainable
Use of Natural Resources and Energy
Financing (Sunref) est un instrument
essentiellement consacré au secteur
privé. A travers ce programme, nous
permettrons aux banques d’accompagner
sur les plans techniques et financiers
les entreprises qui ont besoin de
financement et d’accompagnement
technique, et qui intègrent l’efficacité
énergétique et les énergies renouvelables
dans leurs projets.
Par exemple, si un entrepreneur
veut un crédit Orabank pour changer
sa chaudière, la banque peut lui
proposer les crédits Sunref. Mais cela,
après qu’elle ait contacté un expert qui
propose une solution verte à l’entrepreneur.
Ce dernier bénéficie du crédit
à la seule condition qu’il accepte
cette solution. Mais il faut savoir que
le client ne rencontre jamais d’expert,
ni d’agent de Sunref. Tout se passe
entre le client et la banque d’une part,
et Sunref et la banque d’autre part. Le
client de l’AFD, c’est la banque, pas
les pays, ni les PME. En l’occurrence,
c’est Orabank pour le Benin.
n EA : Pourquoi ne pas vous adresser
directement aux entreprises ?
CB : A partir du moment où nous
cherchons à cibler les entreprises,
nous ne pouvons pas, nous, en direct,
travailler avec les entreprises. L’AFD
a une filiale, la Proparco, qui travaille
spécifiquement avec les entreprises,
mais des entreprises de grande taille
qui nécessitent un financement déjà
important. Lorsque nous voulons aider
les entreprises de tailles moyennes
ou grandes, mais pas suffisamment
pour mobiliser notre filiale secteur
privé, nous avons besoin d’un intermédiaire
qui, dans le cas du Sunref,
est la banque. Par conséquent, nous
n’existons pas au niveau des petites
entreprises qui ont besoin de
financement.
n EA : Agissez-vous en quelque
sorte comme un fonds de garantie ?
CB : Non, ce n’est pas un fonds de
garantie. Le programme accompagne
les banques dans la prise de risque,
dans les prêts qu’ils font au privé,
mais sans apporter de garanties. Nous
apportons principalement un appui
technique. Quand une entreprise au
Bénin veut faire un prêt, la banque,
n’ayant pas d’expertise dans le secteur
de l’énergie renouvelable, doit se faire
aider. Mais c’est compliqué de dépêcher
un expert sur fonds propres.
C’est là que nous intervenons pour
l’accompagner au niveau technique.
n EA : Vous êtes également l’un
des principaux partenaires du secteur
énergétique public. Comment jouezvous
ce rôle ?
CB : Au Bénin, nous appuyons la
SBEE, l’entreprise publique de fourniture
électrique, à travers un appui
institutionnel, des prêts et des subventions
octroyés à l’Etat béninois et
rétrocédés à cette société. Ce projet
cofinancé avec la Banque européenne
d’investissement et l’Union européenne,
dans un mixage prêt/don, va
permettre d’améliorer la distribution
de l’énergie électrique dans le département
de l’Atlantique, en installant
des transformateurs, en faisant des
lignes, en aidant à l’accès au compteur.
Cette extension du réseau impli-
56 x ENERGIES AFRICAINES Janvier-Février 2016 4 N°6
POLITIQUES PUBLIQUES
quera non seulement la mise en place
de nouvelles lignes, mais également
la réhabilitation des lignes déjà existantes
qui causent beaucoup de pertes
en raison de leur état. Elle permettra
d’avoir un réseau plus propre et de limiter
les pertes, tant techniques que
commerciales, de la SBEE. A terme,
le nombre de consommateurs ayant
accès à l’électricité augmentera et la
SBEE réduira ses pertes commerciales
et techniques.
Quand les gens auront accès à
l’énergie et que la société sera mieux
gérée on diminuera, de facto, l’utilisation
de toute source d’énergie plus
polluante, que ce soit le charbon ou
le bois de chauffe, ce qui est une autre
façon d’agir sur le climat.
n EA : Menez-vous également des
actions dans le secteur des énergies
renouvelables ? Et si oui, comment
gérez-vous le manque de cadre
réglementaire ?
CB : Depuis de nombreuses années,
l’agence a mis en place une stratégie
climat. Dans cet engagement, l’AFD
cible l’ensemble des partenaires et
a des partenariats différenciés en
fonction des pays dans lesquels elle
intervient, mais également des partenariats
avec l’ensemble du public.
Nous avons plusieurs schémas et il
revient au gouvernement de prendre
des options.
Pour le hors-réseau, il faut choisir
un modèle parce qu’il s’agit d’une
entité autonome. Le producteur indépendant
d’énergie (IPP) qui intervient
a son propre modèle économique.
Nous pouvons l’aider via les
financements du secteur privé. Nous
pouvons même éventuellement faire
un mixage Proparco-Afd, Proparco
étant la filiale du secteur privé de
l’agence, parce qu’il y a un volet social
non négligeable. Nous apportons de
l’électricité à de petites localités éloignées
du réseau.
Mais il y a également une condition
à cette option. En effet, s’il y a le
réseau qui passe au-dessus du village,
nous n’aiderons pas parce que cette
« Nous permettrons aux banques d’accompagner sur les plans techniques et financiers les
entreprises qui ont besoin de financement et d’accompagnement technique et qui intègrent
l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables dans leurs projets. »
localité pourrait être desservie par le
réseau électrique national. Or, aujourd’hui,
nous n’avons pas une claire
vision des endroits où vont être installées
les minicentrales hors-réseau.
Certaines sont en dessous des lignes,
ou pas loin, ou pas suffisamment loin.
Nous pouvons accompagner les IPP
dont les projets respectent nos standards
techniques parce que nous savons
que cette énergie au coût de sortie
est beaucoup plus chère qui celle
qui est produite par le réseau national.
Si ces centrales sont destinées à être
raccordées au réseau et qu’il se pose
le problème du rachat de l’électricité
par la SBEE, il y a plusieurs façons
d’appuyer le projet. L’Etat peut emprunter
pour construire et signer un
contrat avec un opérateur. Il s’agit là
d’un prêt à l’Etat du Bénin. La seconde
solution est d’accompagner le
privé. Dans ce cas, nous sommes très
pointilleux sur le contrat en ce qui
concerne le mode de financement et
d’opération de l’IPP. Il ne s’agit pas,
en effet, de financer des panneaux et
de s’en aller. Il faut exploiter la centrale,
la maintenir, et revendre son
électricité à la SBEE. A ce niveau, il y
a un problème relatif au prix de rachat
de l’énergie produite par à la SBEE.
Aujourd’hui, il y a un prix arbitraire
de 73 FCFA qui a été proposé mais il
n’est pas encore accepté de tous. D’où
l’importance de la mise en place du
cadre réglementaire.
Nous avons financé, en 2011, la
mise en place de la réglementation,
mais il y a un problème de volonté
politique de mettre en place les cadres
qui conviennent. L’Autorité de régulation
de l’électricité (ARE) a été
créée en 2011, mais elle n’a pas encore
de financement pour fonctionner. y
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 57
TECHNOLOGIES
Grand Renaissance : en cas
d’échec des négociations,
l’Egypte pourrait faire appel
au Conseil de sécurité
Les pays traversés
par le Nil tentent
toujours de s’accorder
sur les conditions
de faisabilité du
mégabarrage
éthiopien de Grand
Renaissance. L’Egypte
pose ses exigences et
pourrait en appeler au
Conseil de sécurité de
l’Onu.
L’Egypte, le Soudan et l’Ethiopie
ont achevé en décembre dernier leur
dixième rencontre de négociation relative
à la mise en place du barrage
de Grand Renaissance, alors que l’infrastructure
concernée est à 50% de
sa réalisation. L’Egypte craint que cet
ouvrage gigantesque affecte le cours
des eaux du Nil qui est sa principale
ressource hydraulique. Au cas où un
consensus tarderait à être trouvé, des
solutions sont déjà proposées afin
de lui permettre de sauvegarder ses
intérêts.
Mode de règlement du litige
La première sera l’abandon de la
déclaration de principe signée avec
l’Ethiopie, le pays constructeur du
barrage, et le Soudan qui réaffirme les
droits de l’Egypte sur le fleuve et établit
les règles d’exploitation de cette
ressource commune. Cet accord prévoit
également le mode de règlement
du litige existant entre l’Ethiopie et
l’Egypte à propos de la construction
du barrage. « Le Parlement pourrait
annuler la déclaration de principe.
Dans ce cas, l’Egypte sera en mesure de
retirer sa reconnaissance du barrage,
conformément au droit international
et à sa Constitution », a déclaré
Nader Noureddine, professeur des
ressources en eau à l’Université du
Caire.
Le recours aux Nations Unies
La seconde option envisagée est
l’arrêt des négociations et le recours
aux Nations Unies et au Conseil de
58 x ENERGIES AFRICAINES Janvier-Février 2016 4 N°6
TECHNOLOGIES
sécurité pour la résolution du problème.
« L’Egypte pourrait en faire un
problème international et demander
aux pays finançant la mise en place du
barrage l’arrêt de ce financement parce
qu’il menace sa sécurité nationale »,
affirme Noureddine, qui soupçonne
l’Ethiopie de faire trainer les négociations
jusqu’à l’achèvement de
l’infrastructure. Et d’expliquer que
le droit international permet aux
pays en amont d’exploiter les eaux
du Nil, mais seulement dans la mesure
où ils ne portent pas préjudice
aux pays situés en aval. L’Ethiopie
aurait dû, à l’en croire, avertir les
autres pays avant de mettre en place
son barrage.
La Cour internationale de justice
La troisième éventualité serait de
poursuivre l’Ethiopie auprès de la
Cour internationale de justice. Cette
option permettra à l’Egypte, selon le
professeur, de disposer d’un moyen
de pression pour obtenir de l’Ethiopie
la signature d’un accord garantissant
la part du Nil revenant à l’Egypte.
« L’Egypte pourrait considérer comme
« L’Egypte pourrait en faire un problème international et demander aux pays finançant la mise
en place du barrage l’arrêt de ce financement parce qu’il menace sa sécurité nationale. »
un acte hostile le fait que l’Ethiopie ne
l’ait pas avertie de la mise en place de
ce barrage. »
Hossam Moghazi, le ministre égyptien
des Eaux a cependant tenu à rassurer
quant à l’évolution des différents
pourparlers. « Nous ne pourront pas résoudre
en une séance un différend qui
perdure depuis quatre à cinq ans. Nous
avons déjà retenu un certain nombre de
solutions et nous continuerons les débats
très prochainement », a-t-il déclaré. y
ARTELIA REMPLACERA DELTARES POUR L’ÉTUDE D’IMPACT
L’Egypte, l’Ethiopie et le Soudan ont signé un accord
désignant les cabinets devant mener les études de
l’impact du barrage Grand Renaissance sur le Nil. Leur
choix s’est porté sur les Français Artelia et BRL qui devront
déterminer si la construction du barrage réduira
l’accès de l’Egypte aux eaux du fleuve.
Ce nouvel accord intervient après le désistement de
Deltares, la firme allemande qui avait été désignée avec
BRL en avril dernier pour effectuer l’étude. Après avoir
manqué les échéances d’août et de septembre 2015
pour présenter ses résultats, Deltares s’est retiré du
contrat. L’entreprise, qui était chargée de la réalisation
de 30% des études d’impact, estimait en effet que les
conditions imposées par le comité, composé des trois
pays, ne lui permettaient pas de mener une étude indépendante
de bonne qualité.
Artelia, qui remplacera donc Deltares, démarrera ses
travaux en février 2016. Moataz Mousa, le ministre
soudanais des Ressources hydrauliques, de l’Irrigation
et de l’Electricité, a indiqué que les études s’étendront
sur une période pouvant aller jusqu’à quinze mois.
La réalisation de ces études d’impact vient en arbitrage
aux différends entre l’Egypte et l’Ethiopie à propos du
barrage. Le Caire craint en effet que l’érection de ce
barrage, en amont du Nil, ne réduise la part des eaux
du fleuve dont elle dépend pour ses besoins hydriques.
L’Ethiopie, quant à elle, assure que la mise en place de
ce barrage de 6000 MW ne portera pas atteinte aux
pays situés en aval, mais qu’elle servira, au contraire, de
locomotive à l’économie régionale.
Entre-temps, le barrage, dont la construction a démarré
en 2011, est déjà bâti à 50% et les travaux se
poursuivent. Les 4,3 milliards de dollars nécessaires à
sa mise en place ont été mobilisés par le gouvernement
et le peuple éthiopien, ce dernier ayant souscrit à des
« obligations barrage ». Ceci inquiète les analystes sur
les mesures qui pourraient être prises au cas où les
résultats des études révéleraient que le barrage affectera
l’approvisionnement de l’Egypte en eau et en
sédiments. y
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 59
TECHNOLOGIES
Rwanda : le réseau MTN
propose à ses abonnés
de l’électricité à crédit
Mali : la Solektra Solar Academy formera chaque
année 200 ouvriers qualifiés
La Solektra Solar Academy, fondée par la Solekta International, née
de l’initiative d’Akon Lighting Africa, a été inaugurée le 16 décembre
à Bamako. Dédiée aux technologies solaires, elle formera annuellement
200 ouvriers qualifiés et a ouvert ses portes ce mois de janvier
2016. Dirigée par Patrice Dangang, l’académie administre une
formation théorique et pratique sur des thèmes tels que les systèmes
d’électrification décentralisée en milieu rural ou la sensibilisation
sur la dynamique du marché solaire. Les cours pratiques sont prodigués
grâce à des équipements de simulation de pointe.
La création de cette institution permettra à l’initiative Akon Lighting
Africa de disposer des ressources humaines nécessaires pour
continuer son projet d’électrification de l’Afrique. A ce jour, elle est
déjà présente dans quinze pays africains, principalement situés
dans l’ouest du continent, et entend étendre ce nombre à vingt-cinq
l’année prochaine, tout en faisant son entrée sur le marché asiatique.
« Il faut une main d’œuvre suffisamment nombreuse et qualifiée
pour endiguer la crise énergétique que traverse l’Afrique depuis
plusieurs années », déclarait d’ailleurs à ce propos Samba Bathily,
co-fondateur avec Thione Niang et le chanteur Akon de la société
Solektra. « Les technologies solaires sont aujourd’hui rentables et
peuvent être déployées massivement pour accompagner le développement
économique de toute l’Afrique. Notre continent aura bientôt les
moyens de tirer la croissance mondiale », a déclaré Akon. y
Grâce à « MTN Rahura », le
réseau de télécommunication
MTN permet à ses utilisateurs
d’acheter leur électricité à crédit.
« Cet emprunt à taux bonifié
permettra aux utilisateurs du
service MTN Mobile Money d’obtenir
un crédit pour acheter les
unités d’électricité et de payer leur
dette ultérieurement », explique
Gunter Engling, le directeur
exécutif de MTN Rwanda.
Le service ainsi mis en place
permettra aux clients dont les
forfaits d’électricité s’achèvent
alors qu’ils n’ont pas de liquidité
de préfinancer leur énergie.
Accessible aux utilisateurs réguliers
de MTN depuis au moins
trois mois, ce service procède au
remboursement de la dette dès
que le compte mobile money de
l’emprunteur est crédité.
Ce nouveau service entre dans
la stratégie de diversification
de la compagnie qui, en cinq
ans, a réussi à avoir environ 3,5
millions d’utilisateurs du mobile
money au Rwanda. « Nous
désirons fournir à nos clients un
niveau de service le plus élevé
possible en leur offrant le plus
de confort possible grâce à nos
solutions de paiement mobile », a
déclaré M. Engling. y
60 x ENERGIES AFRICAINES
Janvier-Février 2016 4 N°6
TECHNOLOGIES
Le Masdar Institute
développe un dispositif
qui vise à doubler l’efficacité
des panneaux solaires
Les chercheurs du Masdar Institute of Science and
Technology (Abu Dhabi) développent actuellement
un appareil qui permettrait de doubler l’efficacité
des panneaux solaires.
Selon le Masdar Institute, grâce à
son système, les panneaux solaires
pourront transformer 40% de l’énergie
solaire en électricité au lieu des
15% à 18% actuellement convertis.
Cette performance est possible
grâce aux composants de l’appareil
qui permettent d’exploiter les longueurs
d’ondes invisibles du spectre
lumineux, ce qui était impossible
jusque-là. « Le nouveau dispositif est
une combinaison d’un prisme qui sépare
les différentes longueurs d’ondes de
la lumière du soleil, et d’une lentille qui
concentre la lumière, permettant une
meilleure utilisation de l’énergie du soleil
», explique Carlo Maragliano, le
responsable de l’étude de recherche,
dans une publication parue dans le
Journal of Optics.
« La prochaine étape sera de fabriquer des cellules solaires photovoltaïques adaptées et de
les tester avec notre composant optique. »
Moins cher et donc plus accessible
Les panneaux photovoltaïques traditionnels
utilisent la silicone pour
transformer l’énergie du soleil en
électricité. Mais ils peuvent seulement
utiliser une partie des longueurs
d’ondes du spectre lumineux visible.
Le spectre lumineux invisible et les
longueurs d’ondes bleues et vertes
par exemple, plus courtes, ne sont pas
exploités. Selon les auteurs de la recherche,
le coût relativement bas du
plastique utilisé pour la fabrication de
l’appareil le rend moins cher et donc
plus accessible.
Encore un défi à relever
Cependant, cette matière est la
source du principal défi auquel fait
actuellement face le dispositif. Pour
Zeineb Abdmouleh, une ingénieure
de l’université du Qatar, le type de
plastique utilisé se déforme après
une exposition prolongée au soleil.
D’après ses dires, « les conditions météorologiques
telles que l’humidité et la
poussière peuvent causer une déviation
de la lumière », ce qui pourrait affaiblir
les performances de l’appareil.
Néanmoins, l’équipe de recherche
ne renonce pas pour autant au matériau
qui lui donnera accès à plus de
marchés, notamment dans les pays
en voie de développement. « La prochaine
étape sera de fabriquer des cellules
solaires photovoltaïques adaptées
et de les tester avec notre composant optique
», a confié Maragliano. y
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 61
INTERNATIONAL
Le développement des énergies renouvelables
boostera l’économie mondiale
Les pays émergents ont
plus investi dans les
énergies renouvelables
que les pays développés
en 2015
Au cours de l’année écoulée, les
pays émergents ont surpassé
les pays développés en matière
d’investissements dans les
énergies renouvelables. C’est ce
que révèle la nouvelle analyse
du Bloomberg New Energy
Finance.
En 2015, les économies émergentes
ont investi 126 milliards
de dollars dans les énergies
renouvelables. Ce montant
représente une augmentation
de 39% par rapport aux investissements
effectués en 2014. La
Chine, avec ses 35 GW de capacité
supplémentaire installée (plus
que les Etats-Unis, la France et
la Grande-Bretagne rassemblés),
arrive en tête de cette course. Le
prochain boom est attendu en
Inde où le gouvernement prévoit
d’installer 175 GW de renouvelables
d’ici 2022.
Cette tendance n’est qu’une
autre manifestation du changement
qui s’opère dans l’économie
mondiale. L’année dernière
a été par exemple la première où
la capacité d’énergies renouvelables
installées a dépassé celle
des énergies fossiles installées. y
Augmenter la part du renouvelable dans le mix énergétique mondial
boostera le PIB mondial et améliorera le niveau de vie global.
C’est ce que révèle une étude effectuée par l’Agence internationale
de l’énergie renouvelable (IRENA). Selon ce rapport, amener la part
des énergies renouvelables à 36% de la production énergétique globale,
augmentera le PIB mondial de 1,1% et l’ensemble des indicateurs
sociaux d’environ 3,7%.
Ces révélations viennent contredire certaines rumeurs, selon lesquelles
un développement accru des énergies renouvelables pourrait
porter atteinte au niveau de vie des populations. « Ces analyses
démontrent que la transition énergétique permettra non seulement de
faire face aux défis climatiques, mais également de stimuler l’économie,
d’améliorer le bien-être des communautés et de développer le
secteur de l’emploi », a déclaré Adnan Amin, le directeur général de
l’IRENA. L’atteinte de l’objectif des 36% portera en effet le nombre
d’emplois fournis par les énergies renouvelables de 9,2 millions
actuellement, à 24 millions d’ici 2030. « La transition énergétique
aura un impact économique, social et environnemental. A présent,
nous avons besoin de développer les technologies liées au renouvelable
pour avoir une énergie fiable à coût abordable. Avec l’accord
de Paris, nous avons déjà un signal politique fort et un engagement
commun. A nous maintenant de mettre en place des stratégies et des
programmes pour attirer l’investissement et renforcer la coopération
internationale nécessaire pour supporter cette transition », a-t-il
exhorté. y
La TCFD révèle l’identité de ses membres
La Task Force on Climate-related Financial Disclosure (TCFD) a
révélé l’identité des 21 membres qui collaboreront avec Michael
Bloomberg, son directeur. La TCFD avait en effet été mise en place,
en décembre dernier, par le Conseil de stabilité financière pour
fournir bénévolement aux entreprises des informations relatives aux
risques climatiques.
Parmi les 21 nouveaux membres de la TCFD, « quatre fantastiques »
ont été choisis comme directeurs adjoints. Il s’agit de Denise Pavarina,
directrice de Bradescon, Graeme Pitkethly, directeur financier
d’Unilever, Christian Thimann, chef de la stratégie à AXA et Yeo
Lian Sim, conseiller spécial à la Bourse de Singapour.
L’équipe aura pour mission de publier des informations financières,
à l’endroit des sociétés, par rapport aux risques financiers,
physiques et transitionnels liés au changement climatique. « Comprendre
l’impact du changement climatique sur les investissements
devient progressivement une priorité pour nos clients. La Task Force
est la prochaine étape dans le processus d’une gestion plus efficace des
risques climatiques et nous sommes ravis d’en faire partie », a déclaré
Jane Ambachtsheer, responsable des investissements à Mercer et
membre de la TCFD. y
62 x ENERGIES AFRICAINES
Janvier-Février 2016 4 N°6
INTERNATIONAL
Un réchauffement à
moins de 2°C requiert
12 100 milliards $ et
12,5 TW d’énergies
vertes d’ici 2040
Selon l’étude « Mapping the gap » réalisée par Bloomberg New
Energy Finance, pour maintenir le réchauffement climatique à
moins de 2 °C, par rapport à l’ère préindustrielle, comme ils s’y
sont engagés, tous les pays du monde devront investir environ
12 100 milliards de dollars dans les énergies vertes d’ici 2040.
Ce montant, qui correspond à une
moyenne d’investissement de 848
milliards par an, permettra la mise en
place de centrales éoliennes, solaires,
géothermiques et à biomasse d’une
capacité globale de 12 500 GW.
Ces investissements augmenteront
graduellement jusqu’en 2025 avant
d’amorcer un mouvement de baisse
mais, dans tous les cas, ils demeureront
supérieurs aux sommes actuellement
investies dans ces énergies.
Baisse des prix
L’atteinte de cet objectif passe également
par des investissements massifs
dans les énergies bas carbone que sont
l’hydroélectricité et, dans une moindre
mesure, le nucléaire. 5874 milliards
devront être injectés dans ces secteurs
sur les 25 prochaines années. Au total,
18 007 milliards $ seront nécessaires
pour le financement des énergies bas
carbone, qu’elles soient anciennes
ou nouvelles. Le rapport prévoit,
dans ce cas, une baisse progressive et
constante du prix de l’énergie qui passera
du 1,74 $ le mégawatt actuel à
1,03 MW d’ici à 2040.
Sinon…
L’étude « Mapping the gap », réalisée
par Bloomberg New Energy
Finance en collaboration avec Ceres,
a également abordé le scénario business
as usual (BaU) qui présente
l’hypothèse où aucune mesure supplémentaire
n’est prise. Dans ce cas,
les investissements dans le solaire,
l’éolien, la géothermie et la biomasse
seront inférieurs de 75% au scénario
de maintenance de la température en
dessous de 2 °C. Ils ne seront alors
que de 6900 milliards d’ici 2040. y
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 63
INTERNATIONAL
La Chine, championne
mondiale du développement
des énergies renouvelables
Comme dans tout ce qu’elle entreprend, la Chine
bat des records dans le domaine des énergies
renouvelables. Elle a en effet installé, au cours de
l’année 2015, 30,5 GW de centrales éoliennes, soit
une progression de 32% par rapport aux 23 GW mis
en place en 2014.
Les nouvelles installations de
2015 portent le parc éolien chinois à
145 GW, loin devant les autres puissances
: 75 GW pour les Etats-Unis
et 43 GW pour l’Allemagne. Dans
le domaine du solaire, elle a installé
16,5 GW en 2015, contre 12,9 GW
en 2013.
« Aucun pays n’a jamais développé ses
capacités de production à partir d’énergies
renouvelables de façon aussi rapide
que la Chine ces dernières années. La
Chine a ainsi pu satisfaire la croissance
de 20% de la demande d’électricité
observée entre 2011 et 2015 avec
des énergies propres, tout en réduisant
l’usage du charbon, ce qui constitue
une prouesse », a commenté Lauri
Myllyvirta de Greenpeace.
Qu’un début…
Ces inscriptions de records en
matière d’installation de capacités
d’énergies renouvelables devraient
continuer, selon l’Institute for Energy
Economics and Financial Analysis
(IEEFA). « La Chine installera, l’an
prochain, 24 GW d’éolien, 16 GW
d’hydroélectricité, 6 GW de nucléaire
et inscrira un nouveau record pour le
solaire, avec 18 à 20 GW de nouvelles
La consommation de charbon par
la Chine a diminué de 5% au cours
de l’année écoulée. Elle devrait
encore baisser selon les prévisions.
capacités. Avec une demande d’électricité
qui ne devrait croître que de 3 à
4%, ces 65 GW de nouvelles capacités
bas carbone seront plus que suffisantes
pour répondre à la hausse de la demande,
si bien que la consommation
de charbon devrait encore diminuer en
2016 », analyse Tim Buckley, le directeur
des études sur le financement
de l’énergie à l’IEEFA.
L’Inde sur le même chemin
Cette performance de la Chine
reflète une évolution généralisée
de l’engagement des pays dans les
énergies renouvelables. « Alors que
la Chine inscrit de nouveaux records,
l’Inde continue de progresser vers son
objectif d’installer 175 GW de capacités
renouvelables à bas coût d’ici
2022 et d’améliorer l’efficacité de son
réseau électrique », a-t-il précisé. Le
pays a en effet établi un nouveau
plancher en termes de coût de
l’énergie solaire. L’énergie générée
par la centrale de 70 MW, qui sera
installée par le Finlandais Fortum
Finnsurya, sera cédée à 0,064 $ le
kilowattheure. L’Allemagne a satisfait
30% de son besoin énergétique
grâce à des ressources renouvelables,
avec une stabilisation de l’énergie
produite à partir des combustibles
fossiles. Les émissions globales de
CO 2 liées aux énergies fossiles ont,
quant à elles, connu une baisse de
3 à 4%, soit l’équivalent des émissions
de la Pologne, tandis que les
investissements dans les énergies re-
64 x ENERGIES AFRICAINES Janvier-Février 2016 4 N°6
INTERNATIONAL
« La Chine installera, l’an prochain, 24 GW d’éolien, 16 GW d’hydroélectricité, 6 GW de nucléaire et inscrira un nouveau record pour le solaire,
avec 18 à 20 GW de nouvelles capacités. »
nouvelables ont augmenté de 4% par
rapport à 2014, s’élevant à 329 milliards
de dollars. Cette tendance devrait
se poursuivre et s’amplifier avec
les répercussions de l’accord de Paris
sur le climat.
En finir avec la dépendance au
charbon
La proportion de l’électricité produite
à base de charbon a diminué
de 4% en 2015 en Chine, selon les
estimations de l’IEEFA. « L’attrait de
la Chine pour le charbon et les niveaux
d’émissions élevés de gaz à effet de serre
s’estompe », a déclaré l’institut. Avec
la baisse des importations de charbon
de la Chine combinée à celle de
l’Inde, « la dernière lueur d’espoir vient
de s’éteindre pour les exportateurs thermiques
», poursuit l’IEEFA.
De façon plus globale, la consommation
de charbon par la Chine a
diminué de 5% au cours de l’année
écoulée. Elle devrait encore baisser selon
les prévisions. Cette baisse consécutive
aux -2,9% observés en 2014
vient confirmer la théorie de l’organisation
qui avait déclaré que le pays
avait atteint son pic de consommation
de charbon en 2013.
Ces événements accroissent les
chances de la Chine d’atteindre son
pic d’émission de gaz à effet de serre en
2020 selon l’agence ; ce qui représente
une avancée significative par rapport
à l’échéance de 2030 annoncée par le
pays en prélude à la COP 21.
L’Administration nationale d’énergie
de la Chine a également révélé
que la croissance de la consommation
d’électricité avait ralenti au
cours de l’année. Elle n’a été que de
0,5%, ce qui représente son niveau le
plus bas depuis 1998. Ce ralentissement
confirme le découplage entre
la consommation énergétique et la
croissance du PIB, qui a été de 7%
en 2015.
Ces améliorations observées dans
l’empire du Milieu ne sont que les
premières manifestations d’un changement
qui devra être plus global.
« Le développement à bas carbone
n’est plus une option, mais une feuille
de route que nous devons mettre en
place. Cela a des implications pour le
« L’Inde continue de progresser
vers son objectif d’installer 175 GW
de capacités renouvelables à bas
coût d’ici 2022. »
secteur énergétique et le charbon comme
les énergies renouvelables les ont déjà
ressenties. Les activités pétrolières et
gazéifères devront probablement aussi
s’adapter », a déclaré Laurent Fabius,
le ministre français des Affaires étrangères
qui a également présidé la conférence
de Paris sur le climat. y
Janvier-Février 2016 4 N°6
ENERGIES AFRICAINES x 65
LEADER DU MOIS
Tony Elumelu encourage
le Congrès des Etats-Unis
à considérer l’adoption de
la loi Electrify Africa
Tony Elumelu (à gauche), à l’hôtel Marriott de Washington, accompagné de Donald Kaberuka, ancien président de la Banque africaine de
développement.
Le 28 janvier, Tony Elumelu, le
président de Heirs Holdings, promoteur
de la Fondation Tony Elumelu et
président du groupe bancaire UBA, a
fait appel au Congrès des Etats-Unis
pour l’adoption de la loi « Électrifier
l’Afrique », soutenant que cette loi apportera
beaucoup de changements en
Afrique. « Quand vous partez d’ici, appelez
vos représentants ainsi que les dirigeants
de la Chambre, et demandez-leur
d’adopter le projet de loi », a exhorté
M. Elumelu à un auditoire rempli.
S’exprimant à l’hôtel Marriott de
Washington DC, lors du sommet
Power Africa, M. Elumelu a loué
les efforts du Président Obama qui
a mobilisé le secteur privé pour investir
43 milliards de dollars dans le
secteur de l’énergie en Afrique, à travers
l’initiative « Power Africa ». Selon
M. Elumelu, l’Afrique doit surmonter
le défi énergétique si elle aspire
à devenir une puissance industrielle
au vingt-et-unième siècle, relevant
que « les coupures d’électricité doivent
être assimilées à des exactions. Le genre
d’exactions qui réveille l’activiste en
chacun de nous ».
Heirs Holding, entreprise d’investissement
privée de Tony Elumelu, a
elle-même promis, à travers la société
Transcorps Power, la somme de 2,5
milliards de dollars pour la fourniture
de 2000 mégawatts d’électricité
dans le cadre de l’initiative « Power
Africa ». Actuellement, Transcorps
Power produit environ 19% des besoins
énergétiques du Nigeria avec le
but d’augmenter la capacité à 25%
dans un futur proche. « L’énergie
touche et a un impact sur la prestation
des soins de santé, la création d’emplois,
l’éducation, l’industrie alimentaire,
la sécurité, la communication et tous
les autres secteurs de l’économie. C’est
inadmissible que 600 millions d’Africains
n’aient pas d’accès à l’énergie au
21 ème siècle », dit M. Elumelu. y
66 x ENERGIES AFRICAINES Janvier-Février 2016 4 N°6