Livret-Mozart-Levin-Poulet-La-Goillotte-Le-Palais-des-D%C3%A9gusteurs
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avec ce passage absolument capital pour la<br />
compréhension <strong>des</strong> buts artistiques de <strong>Mozart</strong> :<br />
« Je ne puis écrire un poème : je ne suis pas<br />
poète. Je ne puis disposer mes phrases d’une<br />
façon tellement artiste qu’elles diffusent tour<br />
à tour de l’ombre ou de la lumière. De la même<br />
manière, je ne puis exprimer par <strong>des</strong> gestes et <strong>des</strong><br />
pantomimes, mes pensées<br />
et mes sentiments : je ne<br />
suis pas danseur. Mais je<br />
le puis par les sons : je suis<br />
musicien. » Quelques jours<br />
plus tard, il rencontre Rose,<br />
une toute jeune fille, qu’il<br />
décrit ainsi : « [Elle] est une<br />
très belle et très gentille<br />
jeune fille. Elle est très<br />
mûre et très posée pour<br />
son âge, elle est sérieuse,<br />
ne parle pas beaucoup, et<br />
quand elle parle… c’est<br />
toujours avec beaucoup de grâce et de gentillesse. »<br />
Il compose aussitôt, pour elle, une sonate pour<br />
piano, en précisant : « Je veux l’écrire tout à fait<br />
d’après le caractère de Mlle Rose. » On voit, à travers<br />
tous ces exemples, comme <strong>Mozart</strong> nourrit son art<br />
de ce qu’il ressent <strong>des</strong> gens qu’il rencontre.<br />
Début 1778, ils sont en France. Dès son arrivée,<br />
il écrit à son père une lettre qui nous montre,<br />
une fois encore, à quel point il se sent avant tout<br />
compositeur. Il évoque l’enseignement : « Je<br />
laisse cela aux gens qui ne savent rien d’autre que<br />
jouer du piano. Je suis un compositeur, né pour<br />
être Kapellmeister ; je ne dois ni ne puis enterrer<br />
ainsi le talent de compositeur que Dieu m’a donné<br />
dans sa bienveillance (je<br />
le dis sans présomption,<br />
car j’en suis plus que<br />
jamais conscient) ; c’est<br />
pourtant ce qui arriverait<br />
si j’avais de nombreux<br />
élèves. C’est un métier qui<br />
me dérange beaucoup ; et<br />
je préfèrerais (manière de<br />
parler) négliger le piano<br />
que la composition ;<br />
car le piano n’est qu’un<br />
accessoire pour moi – un<br />
accessoire d’ailleurs très<br />
important, Dieu merci ! » Quelques mois plus<br />
tard, dans une autre lettre à son père, il parle à<br />
nouveau de l’enseignement : « Donner <strong>des</strong> leçons<br />
ici n’est pas une plaisanterie. Vous n’oseriez croire<br />
que ce soit par paresse. Non, mais parce que<br />
c’est contraire à mon génie, contraire à ma façon<br />
de vivre. Vous savez que je suis pour ainsi dire<br />
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