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Craponne<br />
L’ INVITÉE DU MOIS<br />
À l’époque, ils sont seulement deux opticiens sur la commune. Aujourd’hui,<br />
ils sont sept. “Le marché est saturé. Beaucoup d’écoles pour former au métier<br />
ont ouvert. C’est vrai qu’un nombre grandissant de personnes a besoin<br />
de lunettes. Néanmoins, cela ne suffit pas à contenter tous les acteurs du<br />
secteur”. Pour preuve, Sophie a dû se séparer à contrecœur de deux collaborateurs.<br />
Aujourd’hui, elle travaille avec Claude-Fabien, diplômé comme<br />
elle. “Il n’y a pas de numerus clausus. Cependant, l’installation est onéreuse”.<br />
C’est qu’il y a un atelier à financer… Car, on l’oublie trop souvent,<br />
être opticien c’est être artisan commerçant, c’est être à la fois au registre<br />
de la Chambre de Commerce et à celle des Métiers. “Il faut commander les<br />
verres à un verrier (Nikon ou Seiko), vérifier leur puissance, les centrer en<br />
fonction de l’écart pupillaire, les tailler, etc. ”. Le métier ne s’improvise pas.<br />
D’autant plus que depuis quelques années, les opticiens ont de nouvelles<br />
prérogatives. “Une ordonnance est valable trois ans. L’opticien contrôle l’ordonnance<br />
et la vue ; il peut faire une notification à l’ophtalmologiste pour<br />
prescrire une nouvelle correction. Nous ne faisons pas d’examens portant<br />
sur les pathologies. Pour autant, nous savons déceler certains problèmes et<br />
orienter le patient vers le médecin”.<br />
LA RECONNAISSANCE D’UN SAVOIR-FAIRE<br />
Auteur<br />
Lionel Meneghin<br />
Philosophe de formation, passionné par les sciences<br />
humaines, les sciences sociales et par l’économie, il est<br />
convaincu que ce sont d’abord les entreprises de proximité<br />
qui font la richesse de nos territoires.<br />
Rédacteur en chef du magazine “Dirigeant”<br />
La concurrence sur le<br />
marché de l’optique ne<br />
cesse d’être plus vive.<br />
Internet, la prolifération<br />
de nouveaux magasins…<br />
Tout cela concourt à la difficulté<br />
du métier. Pourtant,<br />
certains tirent encore leur<br />
épingle du jeu, privilégiant<br />
avant tout la relation client<br />
et l’expertise technique.<br />
Portrait d’une passionnée<br />
de son métier, Sophie<br />
Lamy.<br />
COMMERÇANT<br />
MAIS AUSSI ET<br />
SURTOUT ARTISAN<br />
Opticien, plus qu’un métier, une vocation pour Sophie Lamy, propriétaire<br />
du magasin éponyme à Craponne, au 124, Place Andrée Marie Perrin. Sa<br />
mère, elle-même opticienne, voyait en elle la future repreneuse du magasin<br />
familial à Argelès-sur-Mer. Goût du contact et pour le travail manuel,<br />
sens du commerce, le destin de Sophie semblait tout tracé. Mais c’est finalement<br />
dans le Rhône que Sophie décide de faire sa vie. Tant pis pour<br />
le magasin familial. En 1995, après avoir travaillé comme salariée dans un<br />
magasin d’optique à Oullins pour le compte d’une grande enseigne, Sophie<br />
ouvre sa propre affaire à Craponne.<br />
UN MÉTIER QUI NE S’IMPROVISE PAS<br />
La concurrence vient également d’Internet. “Internet fait du mal au petit<br />
commerce. Internet, c’est beaucoup de poudre aux yeux”. Si sur les lunettes<br />
solaires, les acteurs sur Internet prennent des parts de marché, le phénomène<br />
reste marginal concernant les lunettes de vue. “Sur Internet, c’est le<br />
client lui-même qui doit mesurer son écart pupillaire. Et ça il ne peut pas le<br />
faire tout seul face à son miroir”. Autre difficulté du métier : la part administrative<br />
qui va en s’accroissant. “Nous gérons désormais le tiers payant.<br />
Pour certaines grosses structures, cela nécessite de recruter une personne.<br />
Nous arrivons à un système de santé caractérisé par un fort assistanat. Les<br />
gens ne savent plus combien ils ont dépensé”. Pourtant, malgré les difficultés<br />
du métier, Sophie Lamy ne ferait rien d’autre. “La relation avec les<br />
clients est extraordinaire. Notre clientèle sait reconnaître notre savoir-faire.<br />
Nous prenons beaucoup de temps avec nos clients. Nous sommes avec eux<br />
pour les essais de monture. Nous leur dispensons nos conseils, notamment<br />
concernant les aspects liés au visagisme. Ils ont également le temps de réfléchir.<br />
Notre métier ne consiste pas à vendre quelque chose à tout prix à nos<br />
clients. La satisfaction, nous la tirons quand les clients reviennent ou quand<br />
ils parlent de nous, font notre publicité… ”.<br />
MOTIVATION INTACTE<br />
L’avenir ? “Se concentrer sur notre travail”. De nombreuses enseignes d’optique<br />
se diversifient et vont sur le marché de l’audition. Sophie, quant à<br />
elle, ne souhaite pas faire de même. “Ce n’est pas notre métier”. Sa valeur<br />
ajoutée, Sophie va la chercher ailleurs. À la recherche de nouvelles collections,<br />
de nouvelles technologies, de nouveaux matériaux (montures<br />
en bois, en titane, découpe laser…). Il en faut pour tous les prix, tous les<br />
goûts, toutes les couleurs, tout le monde. “Nous avons énormément de<br />
stock pour avoir du choix et pour répondre immédiatement à la demande de<br />
nos clients”. Ce qui est passionnant pour Sophie, c’est de se pencher sur<br />
l’évolution du métier ces vingt dernières années et de voir à quel point les<br />
produits ont changé. Les produits ont peut-être changé mais la motivation<br />
de Sophie est restée intacte.<br />
06 Ici & Aujourd’hui n°17 - Février 2017