National Geographic 08/17

| édito
Un MUsée de l’HoMMe sUr la lUne
Un jour où vous vous promenez sur la Lune – le tourisme lunaire serait pour demain –,
vous apercevez sur le sol une photo jaunie par le temps, une photo de famille d’un
couple souriant avec ses deux enfants. Ne la ramassez pas, n’y touchez pas, elle est
là depuis 1972 : c’est un vestige témoignant des temps héroïques de la première
course à la Lune. L’astronaute Charles Duke a laissé cette trace de ceux qu’il aime
lors de la mission Apollo 16. Continuant votre balade, vous tomberez peut-être sur
les deux balles de golf jouées par Alan Shepard, l’astronaute sportif, ou bien sur un
marteau avec, tout à côté, une plume : les deux objets ont permis d’illustrer qu’en
l’absence de résistance de l’air, ils tombaient au sol exactement à la même vitesse.
Plus loin, vous distinguez une urne : elle contient les cendres d’Eugene Shoemaker,
un géologue qui consacra sa vie à la Lune et qui est donc le premier homme à y être
enterré – ou devrait-on dire « enluné » ? On peut dresser avec ce que les hommes ont
laissé là-haut un inventaire à la Prévert : des rovers, des modules, des bottes, des
seaux, des épuisettes… Au total, il y en aurait pour 180 t de ce qu’on peut nommer
au choix des détritus ou… de précieux éléments du patrimoine humain. Alors que
s’engage aujourd’hui une nouvelle course à la Lune dans le monde entier (lire notre
article pp. 68 à 99), des voix s’élèvent aux États-Unis pour que soient préservés
les sites d’alunissage et tout ce qui s’y trouve afin de conserver pour l’Histoire les
traces des pionniers de la conquête spatiale (lire notre article pp. 100 à 105). Jusqu’à
maintenant, seulement douze hommes ont foulé le sol lunaire : c’était entre 1969
et 1972. Qu’on envisage la création d’un musée de l’Homme sur la Lune est un signe
qui ne trompe pas : la Terre est à la veille de prendre possession de son satellite.
Jean-Pierre Vrignaud, rédacteur en chef
photo : nasa