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19
ÉDITO<br />
LE BAZAR DE L’EVEREST<br />
On évoque souvent l’Everest mal à propos. Pour<br />
dénoncer les méfaits des expéditions d’alpinisme,<br />
principalement, avec, au premier chef,<br />
l’emploi des populations sherpas <strong>com</strong>me porteurs<br />
d’altitude (le terme « sherpa » désigne une<br />
ethnie, et non pas un métier, rappelons-le une<br />
énième fois), sans réelle gratification, tout juste<br />
un salaire « au mérite » – indexé sur la réussite<br />
du sommet par les participants plutôt que sur<br />
l’extrême prise de risque que requiert leur effort.<br />
Ou encore l’inacceptable pollution des principales<br />
voies d’ascension, par des bouteilles d’oxygène,<br />
du matériel d’alpinisme abandonné durant la<br />
retraite, lorsqu’il ne s’agit pas des corps des alpinistes<br />
eux-mêmes, qui mettent parfois des<br />
années avant d’être redescendus (lorsqu’ils le<br />
sont ; cherchez « Green Boots » sur Wikipédia, il<br />
y a de quoi être sidéré)…<br />
On pourrait clore le chapitre sur ce grand bazar<br />
du Toit du monde en imputant ces dérives touristiques<br />
à la seule pratique du « huit-millisme »<br />
(qui désigne l’ascension des quatorze plus hauts<br />
sommets du monde, par des alpinistes qui, parfois,<br />
n’en sont même pas) mais il serait malgré<br />
tout bien cavalier de ne pas étendre la question<br />
au tourisme tout entier. On estime à trente-cinq<br />
mille le nombre de personnes qui découvrent<br />
la haute vallée du Khumbu chaque année,<br />
principalement des randonneurs, voire<br />
des touristes classiques. Chacun<br />
savoure – de plus en plus – le plaisir<br />
de la vue, mais également d’une<br />
douche chaude le soir venu,<br />
devant une bière bien <strong>fr</strong>aîche,<br />
avant de se réfugier au coin du poêle pour<br />
déguster une bonne assiette de nouilles sautées.<br />
Sans oublier la mise à jour de son profil<br />
Facebook, car le Wi-Fi (pas donné au demeurant),<br />
irradie désormais tous les lodges du Khumbu.<br />
En étant parfaitement honnête, il y a largement<br />
de quoi se poser des questions sur nos pratiques<br />
de voyageurs dès lors que l’on examine<br />
avec attention les problématiques environnementales<br />
ou sociales qu’elles engendrent. Loin<br />
de moi l’idée de jeter la pierre à quiconque, si<br />
ce n’est à moi-même. Toutes les critiques énoncées<br />
ci-dessus sont parfaitement justifiées, et<br />
personne ne cherchera sérieusement à les nier.<br />
Mais il n’en demeure pas moins qu’un voyage<br />
dans la vallée de l’Everest n’est pas QUE ça.<br />
C’est également – et d’une manière encore plus<br />
péremptoire – une merveilleuse expérience.<br />
Qui mêle avec maestria la beauté du monde<br />
(on ne l’a peut-être pas encore assez dit dans<br />
ce numéro, mais cet itinéraire est réellement<br />
d’une beauté stupéfiante), la sagesse et la douceur<br />
du peuple sherpa, sans oublier que cette<br />
activité économique qu’est le tourisme dans<br />
cette partie du monde, apporte à une population<br />
de montagne, jusqu’à des altitudes déraisonnables,<br />
la possibilité de vivre, d’habiter,<br />
d’envisager leur avenir autrement que dans<br />
les gourbis des grandes villes. Et tout<br />
bien considéré, après vingt ans de<br />
baroude de par le monde, si vraiment<br />
j’avais à choisir un voyage<br />
et un seul… cet Everest ne serait<br />
vraiment pas loin du nirvana…<br />
ANTHONY<br />
NICOLAZZI<br />
Rédacteur en chef<br />
3
EN COUVERTURE<br />
P. 24<br />
EVEREST<br />
OBJECTIF CAMP DE BASE !<br />
Le plus haut sommet du monde, intense objet de fascination pour les alpinistes,<br />
est aussi devenu le théâtre de l’un des treks les plus époustouflants de la planète,<br />
qui mène jusqu’au camp de base, à plus de cinq mille mètres d’altitude. Une véritable<br />
immersion au cœur du pays sherpa, dans le temple absolu de la montagne<br />
sacrée du Toit du monde.<br />
P. 14<br />
P. 44<br />
HAUTE<br />
ROUTE<br />
L’EVEREST<br />
AUGMENTÉ<br />
SAGA<br />
ELLA<br />
MAILLART<br />
Son épopée à travers l’Asie centrale<br />
des années 1930 a inspiré<br />
des générations de voyageurs.<br />
4
SOMMAIRE<br />
LE MAG<br />
P. 62<br />
ZANSKAR<br />
CHADAR,<br />
LE FLEUVE GELÉ<br />
La traversée mythique<br />
par le chemin des glaces<br />
8 ACTU<br />
Népal : une formation<br />
internationale pour<br />
les guides de trek.<br />
L’agenda des festivals<br />
d’automne.<br />
14 SAGA<br />
Ella Maillart<br />
Voyageuse par vocation.<br />
REPORTAGES<br />
24 OBJECTIF<br />
EVEREST !<br />
Les plus beaux sentiers<br />
pour découvrir le Khumbu.<br />
34 EN ROUTE VERS<br />
LE CAMP DE BASE<br />
Toutes les infos pour<br />
réaliser le trek mythique !<br />
44 LA HAUTE ROUTE<br />
L’itinéraire des experts,<br />
par les hauts cols.<br />
54 L’ITINÉRAIRE<br />
HISTORIQUE<br />
Osez l’intégrale depuis Jiri !<br />
62 CHADAR<br />
LE CHEMIN<br />
DES GLACES<br />
L’itinéraire le plus original<br />
de la planète, au cœur du<br />
Zanskar, en plein hiver !<br />
P. 84<br />
HIMALAYA INDIEN<br />
LE SPITI<br />
EN FAMILLE<br />
Qui a dit que le voyage d’aventure<br />
n’était pas un jeu d’enfants ?<br />
84 SPITI<br />
EN FAMILLE<br />
Un voyage découverte<br />
avec des enfants, dans une<br />
vallée de culture tibétaine.<br />
96 ILS PARTENT/<br />
ILS RENTRENT<br />
La liste de mes envies…<br />
5
CONTRIBUTEURS<br />
BRIEUC<br />
COESSENS<br />
Rédacteurphotographe<br />
JOCELYN<br />
CHAVY<br />
Rédacteurphotographe<br />
GILLES<br />
MODICA<br />
Rédacteur<br />
JULIE<br />
LE LOUËR<br />
Directrice artistique<br />
ANTHONY<br />
NICOLAZZI<br />
Rédacteur en chef<br />
FRANCK<br />
CHARTON<br />
Grand reporter<br />
JEAN-MARC<br />
PORTE<br />
Grand reporter<br />
GUILLAUME<br />
NAHRY<br />
Responsable équipement<br />
BÉATRICE<br />
GRELAUD<br />
Rédactrice<br />
6
19
8<br />
Une formation internationale<br />
pour les guides de trek ? L’idée<br />
fait son chemin, et pourrait<br />
changer la donne du côté des<br />
agences de voyages d’aventure.<br />
© Anthony Nicolazzi
LE MAG<br />
UN DIPLÔME POUR LES<br />
GUIDES DE TREK<br />
NÉPALAIS<br />
AUCUN DIPLÔME RECONNU INTERNATIONALEMENT<br />
N’ENCADRAIT LES GUIDES DE TREKKING AU NÉPAL<br />
JUSQU’À PRÉSENT. L’ÉMERGENCE D’UNE FORMATION<br />
QUALIFIANTE SÉRIEUSE POURRAIT POURTANT CHANGER<br />
LA DONNE DURANT LES ANNÉES À VENIR.<br />
PAULO GROBEL<br />
Été <strong>2017</strong>. Une date historique car c’est la première édition officielle d’une<br />
formation qualifiante International Mountain Leader (IML, l’équivalent au<br />
niveau international de notre diplôme d’ac<strong>com</strong>pagnateur en moyenne montagne<br />
AMM), organisée par la NMA (Nepal Mountaineering Association) avec<br />
le soutien de l’UIAA (Union internationale des Associations d’alpinisme). Le<br />
début, donc, d’une nouvelle réalité au Népal mais surtout l’aboutissement<br />
d’une belle histoire.<br />
À l’été 2002, Henri Sigayret mettait en place avec la NMA une formation technique<br />
en <strong>com</strong>plément des stages « basic » et « advanced ». L’année suivante,<br />
il est secondé par Patrick Magnier qui va permettre de pérenniser la formation<br />
avec le soutien de la Fondation Petzl. Sous l’égide de la NMA, le « Petzl<br />
Training » connaîtra un beau succès. Doucement, une réflexion émerge sur la<br />
nécessité d’un diplôme international pour les guides de trek, suivant en cela<br />
l’exemple de la formation de guide de haute montagne UIAGM au Népal. Une<br />
dynamique soutenue par Steve Long, responsable des formations à l’UIAA.<br />
En parallèle, les tour-opérateurs se sont impliqués depuis longtemps dans la<br />
formation des guides de trek népalais avec des actions pilotées par leurs<br />
réceptifs locaux et à destination de leurs personnels respectifs. L’I<strong>fr</strong>emmont<br />
(Institut de formation et de recherche en médecine de montagne) et certains<br />
médecins se sont également impliqués dans ces formations « maison » pour<br />
le contenu médical. Dans les différentes agences, ces ac<strong>com</strong>pagnateurs formés<br />
et <strong>com</strong>pétents (mais non diplômés), ont tous une licence de guide de<br />
trek après une formation d’un mois mise en place par le gouvernement et<br />
indispensable pour être enregistré et en règle au Népal. Ils sont payés entre 50<br />
et 90 €/jour. Pour mémoire, le salaire mensuel moyen à Katmandou est de<br />
15 000 à 20 000 roupies (soit 150 à 200 €) par mois.<br />
Reste à savoir, désormais, <strong>com</strong>ment vont se positionner les agences <strong>fr</strong>ançaises<br />
avec l’émergence de ces nouveaux acteurs diplômés aux standards internationaux.<br />
Et du côté des agences népalaises ou de la foultitude de « guides de<br />
trek » népalais ? Quelle en sera la répercussion sur l’encadrement des treks à<br />
plus long terme ? Cette formation IML va-t-elle s’ancrer définitivement dans<br />
le paysage des professionnels népalais du trek jusqu’à atteindre une taille critique<br />
suffisante pour devenir représentative d’une qualité de formation et de<br />
<strong>com</strong>pétences, attestées par un diplôme international ? À suivre…<br />
9
LE MAG /<br />
12 FESTIVALS<br />
À NE PAS MANQUER<br />
CET AUTOMNE<br />
ON S’APPRÊTE À CÉLÉBRER LE VOYAGE D’AVENTURE UN<br />
PEU PARTOUT EN FRANCE, AVEC DES PROJECTIONS DE<br />
FILMS, CONFÉRENCES, RENCONTRES… LE POINT SUR LES<br />
FESTIVALS À COCHER SUR VOTRE AGENDA DURANT<br />
LES PROCHAINES SEMAINES.<br />
What a trip Festival<br />
28 septembre-1 er octobre<br />
Montpellier (34)<br />
Une première à Montpellier pour ce<br />
tout nouveau « What a trip festival »,<br />
consacré au film de voyage et d’aventure,<br />
qui se déroulera du 28 septembre<br />
au 1 er octobre, en plein cœur de<br />
Montpellier, sur l’esplanade Charles<br />
de Gaulle. 12 films en <strong>com</strong>pétition,<br />
mais aussi une série de concerts, des<br />
expositions et conférences gratuites,<br />
un village intégrant un salon du<br />
voyage, un salon du livre de voyage<br />
ainsi qu’une épicerie du monde.<br />
www.watmontpellier.<strong>fr</strong><br />
Festival des Globe-Trotters<br />
29 septembre au 1 er octobre / Massy (91)<br />
Vingt-neuvième année pour ce<br />
grand rendez-vous des baroudeurs,<br />
consacré cette année à la thématique<br />
« Cultivons nos différences », pour une<br />
édition placée sous le signe du rêve, de<br />
l’évasion, de l’aventure, de rencontres<br />
authentiques entre voyageurs. Avec la<br />
présence exceptionnelle de Marc<br />
Dozier et Mundiya Kepanga,<br />
chef papou, qui nous invite avec<br />
humour et poésie au cœur de sa<br />
forêt menacée, mais aussi la diffusion<br />
d’une quarantaine de films à la découverte<br />
des merveilles du globe, des<br />
conférences animées par de grands<br />
aventuriers, des expositions…<br />
www.festivaldesglobetrotters.<strong>fr</strong><br />
ANTHONY NICOLAZZI<br />
Rendez-vous du<br />
carnet de voyage<br />
17 au 20 novembre / Clermont-Ferrand<br />
Après les « métropoles du monde »<br />
l’an passé, les Rendez-vous du carnet<br />
de voyage de Clermont Ferrand poursuivent<br />
leur exploration des villes en<br />
trois ans (le thème 2018 sera « La ville<br />
dans tous ses éclats » avec une thématique<br />
<strong>2017</strong> dédiée à « La vie dans la<br />
ville ». À pied, à vélo, la ville of<strong>fr</strong>e au<br />
voyageur le ballet de ceux qui y vont<br />
et viennent, passent, se hâtent ou se<br />
posent en terrasse. Une vie plurielle<br />
et bigarrée de marchés, de halls de<br />
gares, de quais de métro, de bistrots<br />
ou de quartiers chauds.<br />
www.rendezvouscarnetdevoyage.<strong>com</strong><br />
Rencontres Cinémontagne<br />
7 au 11 novembre / Grenoble (38)<br />
Le grand rendez-vous des<br />
montagnards, au cœur de la capitale<br />
des Alpes, dans la grande salle du<br />
palais des sports de Grenoble, chaque<br />
soir durant une semaine <strong>com</strong>plète. De<br />
l’alpinisme, bien sûr, mais également<br />
une ouverture à tous les sports de<br />
montagne : trekking, escalade,<br />
parapente, base-jump, ski de rando,<br />
expéditions… Des images à foison,<br />
et des rencontres avec leurs auteurs<br />
et les légendes internationales<br />
de la montagne.<br />
www.grenoblemontagne.<strong>com</strong>/<br />
<strong>10</strong>3319erencontrescinemontagne.htm<br />
Les Écrans de l’Aventure<br />
5 au 8 octobre / Dijon (21)<br />
Ce rendez-vous de l’aventure,<br />
organisé par la Guilde, à Dijon<br />
(cinémas Olympia et Darcy), rassemble<br />
chaque année les meilleures productions<br />
audiovisuelles internationales et<br />
les professionnels de l’image, aventuriers<br />
et voyageurs. Sept prix pour les<br />
films, un prix pour les livres, et une<br />
Toison d’or de l’aventurier de l’année<br />
seront décernées à l’issue de ce festival<br />
par le jury présidé cette année par<br />
la navigatrice Anne Quéméré.<br />
laguilde.org/aventure/festival<br />
Le Grand Bivouac<br />
19 au 22 octobre / Albertville (73)<br />
1<strong>10</strong> rendez-vous, 80 invités et plus de<br />
30 000 entrées pour cet incontournable<br />
de l’agenda des grands voyageurs. Le<br />
thème « Nos nouvelles odyssées » veillera<br />
à mettre en avant la diversité des<br />
voyages, autour des fidèles, Arnaud<br />
Guérin, Louis-Marie Blanchard, Olivier<br />
Weber ou Roland<br />
et Sabrina Michaud, mais aussi tous<br />
les autres voyageurs, qu’ils soient<br />
scientifiques, écrivains, sportifs…<br />
www.grandbivouac.<strong>com</strong><br />
Festival du film<br />
d’aventure de La Rochelle<br />
14 au 19 novembre / La Rochelle (17)<br />
Dix ans après le grand prix du<br />
public décerné à Amazonian Vertigo,<br />
d’Evrard Wendenbaum à La Rochelle,<br />
c’est l’une des héroïnes du film, la<br />
grimpeuse Stéphanie Bodet, qui préside<br />
le jury du 14 e festival du film<br />
d’aventure de la cité portuaire de<br />
Charente-Maritime. 22 films cette<br />
année en <strong>com</strong>pétition officielle,<br />
et 18 hors <strong>com</strong>pétition.<br />
www.festivalfilmaventure.<strong>com</strong><br />
Rencontres de la<br />
cinémathèque montagne<br />
15 au 18 novembre / Gap (05)<br />
Tout en contribuant à collecter, archiver<br />
et diffuser les plus grands films<br />
de montagne (Rébuffat, Afanassieff…),<br />
la Cinémathèque de Gap organise<br />
son festival annuel avec un public de<br />
connaisseurs. Un rendez-vous incontournable<br />
dans les Alpes du Sud.<br />
www.cimalpes.<strong>fr</strong><br />
<strong>10</strong>
Quais du départ<br />
23 au 26 novembre / Lyon (69)<br />
C’est sur les quais de la rive gauche du<br />
Rhône, en plein cœur de Lyon, que se tient<br />
ce festival atypique : une salle de 400 places<br />
pour les projections (la Mutualité), et deux<br />
bateaux (La Plateforme et le Volle Petrol)<br />
amarrés sur le fleuve pour les cafés<br />
voyageurs, rencontres, conférences…<br />
Avec cette 6 e édition, le festival des livres et<br />
films voyageurs s’affirme <strong>com</strong>me le grand<br />
rendez-vous lyonnais des voyageurs.<br />
www.quaisdudepart.<strong>fr</strong><br />
Les Défis de l’aventure<br />
24 au 26 novembre / Le Fontanil (38)<br />
La 3 e édition du « festival international<br />
du film d’aventure vécue », qui se déroule<br />
au Fontanil (agglomération grenobloise),<br />
présente une quinzaine de films en <strong>com</strong>pétition,<br />
et une thématique « les défis au<br />
féminin », qui honore les exploratrices et<br />
aventurières contemporaines. Également<br />
des projections-débat, et un salon de<br />
l’aventure de 700 m 2 sous chapiteau.<br />
www.defisaventure.<strong>com</strong><br />
European Outdoor<br />
Film Tour<br />
27 novembre au 12 décembre<br />
7 dates en France<br />
Deux heures de film outdoor non-stop :<br />
c’est le cocktail qui fait recette un peu partout<br />
en Europe, avec un European Outdoor<br />
Film Tour qui fait étape pour sept dates<br />
programmées en France cet automne :<br />
Paris (27/11), Strasbourg (29/11), Toulouse<br />
(06/12), Marseille (07/12), Grenoble (08/12),<br />
Annecy (<strong>09</strong>/12), Lyon (13/12), mais aussi à<br />
Lausanne, Genève, Bruxelles, Liège…<br />
www.eoft.eu/<strong>fr</strong>/<br />
Festival international<br />
du film de montagne<br />
6 au <strong>10</strong> décembre / Autrans (38)<br />
« Enfin seul(s) ? » une thématique toute<br />
rêvée pour cet opus #34 du festival international<br />
du film de montagne d’Autrans,<br />
dans le Vercors, qui verra converger les<br />
amateurs de belles images de montagne et<br />
les professionnels du documentaire et de<br />
la réalisation. Un thème qui viendra étayer<br />
les soirées de la traditionnelle <strong>com</strong>pétition<br />
de films documentaire, sans oublier la<br />
sélection « premières réalisations », les<br />
longs, les courts, les films d’animation…<br />
www.festivalautrans.<strong>com</strong><br />
11
LE MAG /<br />
PENDANT CE<br />
TEMPS-LÀ<br />
…<br />
QUECHUA<br />
FÊTE SES VINGT ANS<br />
ANTHONY NICOLAZZI<br />
2005 : premier test<br />
grandeur nature de la tente<br />
2 Seconds, en Patagonie.<br />
LANCÉE EN 1997, LA MARQUE MONTAGNE DE DÉCATHLON<br />
S’EXPORTE AVEC SUCCÈS À L’INTERNATIONAL.<br />
1997. Une dizaine de collaborateurs de Décathlon quittent les locaux de Lille<br />
pour s’installer en Haute-Savoie, dans un appartement de 55 m 2 reconverti<br />
en bureau, et créer la marque montagne de l’enseigne : Quechua. Vingt ans<br />
plus tard, forte de ses succès, parmi lesquels l’iconique tente 2 Seconds,<br />
Quechua est présent un peu partout dans le monde, et s’affirme au rang des<br />
plus grandes marques d’équipement outdoor. Depuis 2014, c’est au cœur<br />
des 14 000 m 2 de son Mountain Store de Passy (74), un camp de base rassemblant<br />
à la fois bureaux d’étude et magasin témoin, que sont imaginés,<br />
conçus et prototypés les produits Quechua, avant d’être testés et éprouvés<br />
sur le terrain, par des équipes dédiées. Si, aujourd’hui, Quechua affirme son<br />
expertise sur la randonnée, d’autres marques du groupe ont repris le flambeau<br />
des marchés de niche, tels que le trail (Kalenji), l’alpinisme (Simond)<br />
ou encore le ski (Wed’Ze). www.quechua.<strong>fr</strong><br />
© DR<br />
Voyageurs du<br />
Monde grignote…<br />
Début juillet, Voyageurs du<br />
Monde a acquis KE Adventure<br />
Travel, un spécialiste anglais<br />
du voyage d’aventure. Après<br />
le rachat d’Original Travel,<br />
touropérateur haut de gamme<br />
britannique lui aussi en janvier,<br />
cette acquisition atteste du<br />
développement à l’international<br />
de la holding qui possède,<br />
rappelonsle, une grande partie<br />
des voyagistes d’aventure du<br />
marché <strong>fr</strong>ançais : Terres<br />
d’Aventure, Allibert <strong>Trek</strong>king,<br />
Nomade Aventure, Chamina<br />
Voyages ou encore Grand Nord<br />
Grand Large.<br />
Chemin<br />
du Sud aussi…<br />
Dans un tout autre registre,<br />
six mois après la reprise en SCOP<br />
par ses salariés, la SARL Chemins<br />
du Sud, touropérateur spécialiste<br />
de l’Italie à pied depuis<br />
1987, vient de reprendre la<br />
totalité de la production de<br />
l’agence vosgienne Montagne<br />
Évasion, mise en liquidation<br />
en janvier <strong>2017</strong>.<br />
DIRECTRAVEL<br />
Le voyage en direct s’invite à Paris<br />
Après une première édition sur les quais de Seine, l’an passé, le salon Direc-<br />
Travel, dédié aux agences locales, pose ses valises à la Halle des Blancs<br />
Manteaux dans le Marais (Paris 4 e ), du 22 au 24 septembre. Une centaine<br />
d’agences venues du monde entier seront présentes, à l’instar des membres<br />
du groupement Voyages Réceptifs, qui rassemble une vingtaine d’agences<br />
<strong>fr</strong>ancophones prestataires des agences d’aventure <strong>fr</strong>ançaises. « L’amateur de<br />
voyage sur mesure a besoin de connaître celui qui le reçoit », estime Christophe Sentuc,<br />
fondateur de DirecTravel. Français expatriés ou étrangers <strong>fr</strong>ancophiles,<br />
ces agences engagées dans la « vente en direct » seront à la disposition des<br />
voyageurs. 6 000 visiteurs sont attendus. www.directravel.org<br />
Du trek à l’expé<br />
Dans cet ouvrage paru cet été,<br />
Emmanuel Daigle évoque avec<br />
clarté et pédagogie tous les<br />
ingrédients utiles pour étoffer<br />
ses <strong>com</strong>pétences en haute<br />
altitude : organisation, logistique,<br />
entraînement physique,<br />
équipement, acclimatation,<br />
météo… Complet et sérieux.<br />
Du trek à l’expé,<br />
par Emmanuel Daigle,<br />
éditions Glénat, 192 pages, 25 €.<br />
12
19
Ella Maillart<br />
VOYAGEUSE PAR VOCATION<br />
NÉE SUR LES RIVES DU LAC LÉMAN AU TOURNANT DU XX E SIÈCLE,<br />
ELLA MAILLART FERA PREUVE TOUT AU LONG DE SA VIE D’UNE<br />
INCROYABLE HARDIESSE QUI LA CONDUIRA DES JEUX OLYMPIQUES DE<br />
PARIS, EN 1924, JUSQU’AUX CONTRÉES LES PLUS RECULÉES. DURANT<br />
PLUS DE DIX ANS, DANS LES ANNÉES 1930, ELLE FOULERA SANS<br />
RELÂCHE LES STEPPES INFINIES D’ASIE CENTRALE ET LES MONTAGNES<br />
DU PAMIR, DU KARAKORAM OU DE L’HINDOU KOUCH.<br />
Gilles Modica<br />
Rédacteur<br />
Notre spécialiste de l’histoire<br />
de l’exploration s’est replongé<br />
cet été dans les récits<br />
de voyage d’Ella Maillart à<br />
travers l’Asie centrale.<br />
Kini, pour les proches et les<br />
<strong>com</strong>pagnons de route, de<br />
mer ou du ski club. Physiquement,<br />
la Suissesse des<br />
publicités pour Zermatt ou<br />
Verbier, la monitrice de ski,<br />
blonde, saine, sportive, svelte,<br />
riante à ravir, bon enfant. Née<br />
sur le lac Léman (20 février<br />
1903, à Genève), ses parents<br />
ayant acquis dès 1913, au<br />
Creux, à sept kilomètres<br />
de Genève, une maison au<br />
bord de l’eau, Ella Maillart<br />
s’adonne tous les étés à la<br />
voile, avec son amie Miette,<br />
sur des bateaux prêtés.<br />
À vingt ans, les deux filles<br />
osent acheter un cotre de<br />
sept mètres et de trois tonnes,<br />
La Perlette, un yacht de haute<br />
mer avec une cabine et deux<br />
couchettes. Les deux filles<br />
aménagent leur bateau au<br />
mouillage du Vieux Port, à<br />
Marseille, près d’un navigateur<br />
au long cours qu’elles<br />
voudraient imiter : Alain<br />
Gerbault. Le bateau, les<br />
régates sur le Léman, les<br />
croisières en Méditerranée :<br />
sa première passion. Le ski<br />
passionna également sa jeunesse.<br />
Mais à vingt-cinq ans,<br />
Ella Maillart ne se sent vivre<br />
qu’à moitié dans ces aventures<br />
limitées aux montagnes<br />
suisses ou aux côtes de la<br />
Méditerranée.<br />
La déferlante des steppes<br />
« Ex oriente lux » est un<br />
aphorisme courant à l’époque<br />
dans bien des capitales européennes<br />
après l’hécatombe<br />
de la Grande Guerre. L’Europe<br />
se déchire : révolutions,<br />
guerres civiles. De bons<br />
esprits se tournent vers<br />
les sagesses orientales, ou<br />
cèdent à la démagogie de<br />
l’espoir, de l’avenir radieux.<br />
Instauré en Russie après des<br />
années de guerre civile, le<br />
<strong>com</strong>munisme of<strong>fr</strong>ait une<br />
autre société, une Autre<br />
Europe, titre d’un livre de Luc<br />
Durtain qui emballa la jeune<br />
Suissesse. Ella Maillart part<br />
pour Moscou après une brève<br />
expérience de figurante au<br />
cinéma dans les studios de<br />
Berlin. Un séjour de cinq mois,<br />
matériellement difficile.<br />
Ses amitiés avec de jeunes<br />
Russes, garçons ou filles,<br />
leur beauté, leur foi, leur<br />
enthousiasme, leur esprit<br />
de sacrifice, lui firent oublier<br />
la pénurie et la morosité des<br />
files d’attente. Un voyage<br />
de six semaines au Caucase,<br />
à pied principalement dans<br />
les montagnes, lui dévoile<br />
non pas une autre Europe<br />
mais l’arrière-pays asiatique<br />
de la Russie, la déferlante<br />
des steppes aux confins de<br />
l’Europe et de la mer Noire.<br />
Mordue profondément par<br />
un chien, Ella Maillart<br />
ravale ses craintes de la rage<br />
et se soigne en marchant.<br />
Du haut de ses sommets<br />
plus élevés que le mont<br />
Blanc, le Caucase tombe<br />
sur le premier des trois<br />
plateaux, immenses et<br />
arides, fuyant, de seuil<br />
14
SAGA<br />
Ella Maillart (à gauche)<br />
et son amie Miette<br />
(cicontre) découvrent<br />
la voile dès l’adolescence<br />
sur les bords du lac Léman.<br />
Elles ont vingt ans à peine<br />
lorsqu’elles achètent leur<br />
premier bateau, et Ella<br />
représentera l’équipe<br />
de voile suisse aux Jeux<br />
olympiques de Paris,<br />
en 1924.<br />
À vingt ans, les deux<br />
filles osent acheter La Perlette,<br />
un cotre de sept mètres avec<br />
une cabine et deux couchettes,<br />
qu’elles stationnent au<br />
Vieux Port, à Marseille.<br />
en seuil, vers des altitudes<br />
toujours plus élevées : le<br />
plateau anatolien, le plateau<br />
iranien, le plateau tibétain.<br />
Dans le récit qu’elle publia à<br />
son retour, Parmi la jeunesse<br />
russe, Ella Maillart présentait<br />
le pays et le régime sous un<br />
jour favorable. Kini, la petite<br />
genevoise, essuie d’âpres<br />
critiques. Son propos, au<br />
fond, n’avait pourtant plus<br />
rien de politique. « La réalité<br />
géographique de la terre m’obsède.<br />
Je sens autour de moi la<br />
vie des latitudes, dotée chacune<br />
de sa couleur spéciale. Pas une<br />
de mes pensées qui ne soit en<br />
quelque sorte orientée vers l’un<br />
des points cardinaux. Je suis<br />
prise à jamais dans les lignes<br />
de force de l’aiguille aimantée. »<br />
Deux ans plus tard (juillet 1935),<br />
Ella Maillart ne revient à<br />
Moscou que pour gagner<br />
au plus vite les montagnes<br />
de l’Asie centrale. Ella Maillart<br />
voyage seule dans le Turkestan<br />
soviétique (Karakol, Tachkent,<br />
Samarcande, Boukhara,<br />
15
Khiva, Kazalinsk) avec un<br />
cran et un aplomb qui forcent<br />
l’admiration. Son voyage<br />
s’achève en novembre à dos<br />
de chameau, sur quatre cent<br />
cinquante kilomètres. Un<br />
<strong>fr</strong>oid de canard, des nuits de<br />
quatre heures, des crampes<br />
de novice. Retour à Genève<br />
pour le Nouvel An.<br />
Une âme forte<br />
Redécouverte vers la fin de sa<br />
vie (elle meurt en 1997), mais<br />
toujours lue et admirée, entre<br />
autres, par l’écrivain genevois<br />
Nicolas Bouvier qui s’inspira<br />
de ses récits pour ses itinéraires,<br />
Ella Maillart fut une<br />
âme forte, <strong>com</strong>me on disait<br />
jadis, une voyageuse hors<br />
pair. « Kini peut manger n’importe<br />
quoi et dormir n’importe<br />
où », écrit son <strong>com</strong>pagnon<br />
de voyage à travers le<br />
Taklamakan, l’Anglais Peter<br />
Fleming. Une femme bien<br />
armée face aux hommes, par<br />
son sens de l’à-propos et une<br />
autorité naturelle. La voile,<br />
école du caractère, lui avait<br />
En 1939, Ella Maillart est<br />
déjà célèbre, pour ses voyages<br />
à travers l’Union soviétique<br />
de l’entredeuxguerres et<br />
l’Asie centrale. Alors que<br />
la Seconde Guerre mondiale<br />
s’apprête à ravager l’Europe<br />
et le monde, elle profite de<br />
la neutralité suisse pour partir<br />
à la découverte de l’Iran et de<br />
l’Afghanistan, en <strong>com</strong>pagnie<br />
d’Annemarie Schwarzenbach.<br />
16
SAGA<br />
Genève et aux Alpes, ceux<br />
qui expliqueraient ma destinée.<br />
Mais ce genre de biographie,<br />
où les héros savent si bien à<br />
l’avance quelle sera l’orientation<br />
de leur vie, ne donne jamais<br />
l’impression de la vérité. Dans<br />
la réalité, les choses n’obéissent<br />
pas à une telle logique : on<br />
se dirige à tâtons, <strong>com</strong>me des<br />
aveugles, vers l’inconnu et on<br />
sent son énergie minée par la<br />
torture de l’indécision. » Cette<br />
femme, aux allures décidées,<br />
plutôt jolie et sûre de ses<br />
avantages, championne de<br />
voile et de ski, journaliste,<br />
parlant <strong>fr</strong>ançais, anglais,<br />
allemand, russe, se débattait,<br />
<strong>com</strong>me le premier et le dernier<br />
des hommes, dans le<br />
labyrinthe de ses choix.<br />
Annemarie Schwarzenbach<br />
(à gauche) et Ella Maillart<br />
(à droite) prennent la route<br />
le 6 juin 1939, pour rallier<br />
Genève à Kaboul. Deux livres<br />
en naîtront, celui d’Ella, La Voie<br />
cruelle, et celui d’Annemarie,<br />
Où est la terre des promesses ?<br />
Deux femmes, en voiture,<br />
à travers l’Iran des années 1940…<br />
Quatre-vingts ans plus tard,<br />
le récit demeure surréaliste…<br />
également enseigné le<br />
fatalisme nécessaire aux<br />
marches dans l’inconnu. Le<br />
seul défaut de sa cuirasse,<br />
note de façon amusante Peter<br />
Fleming, c’était la finesse de<br />
son odorat. Attention : dire<br />
qu’elle avait la vocation du<br />
voyage, qu’elle y était prédestinée,<br />
c’est une façon de<br />
méconnaître ses mérites<br />
et la tension de ses années<br />
d’incertitude. Comme chacun<br />
d’entre nous, Ella Maillart<br />
traversait les mirages de<br />
l’existence sans savoir où<br />
elle allait, dans l’ignorance<br />
totale de son destin. Il faut<br />
se méfier de l’après-coup,<br />
du regard rétrospectif et des<br />
bilans qui présupposent ce<br />
qu’on ne pouvait qu’ignorer.<br />
Dans son autobiographie,<br />
Croisières et caravanes (1951),<br />
écrite à 2 000 mètres d’altitude,<br />
au village de Chandolin<br />
(Valais), Ella Maillart indique,<br />
dès les premières lignes, le<br />
défaut courant des biographies<br />
ou des autobiographies.<br />
« Quand une moitié de notre<br />
vie est écoulée, il est facile d’en<br />
faire un récit logique – et artificiel.<br />
Je pourrais, pour ma part,<br />
choisir parmi ses souvenirs<br />
d’enfance, tous liés au lac de<br />
En Asie centrale<br />
L’ère des caravanes a disparu<br />
en moins d’un demi-siècle<br />
sur la route de la Soie. Le<br />
moteur a changé la physionomie<br />
du monde, durablement,<br />
plus durablement que les<br />
armées d’Alexandre ou que<br />
les massacres de Tamerlan.<br />
Ella Maillart ne fut pas une<br />
exploratrice de l’Asie centrale<br />
<strong>com</strong>me le Suédois Sven<br />
Hedin, ou le Russe Nicolaï<br />
Prjevalski : elle arrivait trop<br />
tard et n’ajouta rien à la<br />
connaissance des grandes<br />
régions de l’Asie centrale.<br />
Son bonheur, ce fut de bourlinguer<br />
et d’enquêter (elle<br />
se voulait ethnographe),<br />
en Haute-Asie avant l’ère<br />
atomique, avant les convois<br />
de camions et les bases<br />
aériennes bâties au bulldozer<br />
en un mois, à quelques encablures<br />
des yourtes d’un<br />
campement de nomades.<br />
Ces années de l’entre-deux-<br />
17
À Bâmiyân, rencontre avec<br />
la délégation archéologique<br />
<strong>fr</strong>ançaise, qui travaille à<br />
la préservation du site<br />
et des deux bouddhas géants<br />
sculptés dans la falaise.<br />
Ceuxci seront détruits en<br />
mars 2001 par les Talibans.<br />
guerres accélérèrent la<br />
marche de l’histoire et des<br />
techniques. Chance insigne,<br />
Ella Maillart put voyager<br />
<strong>com</strong>me Abraham, Noé ou les<br />
Rois mages, <strong>com</strong>me on voyageait<br />
depuis le fond des âges<br />
sur la route de la Soie et des<br />
grandes religions, à dos de<br />
cheval, ou de chameau, ou<br />
d’âne, ou à pied, derrière des<br />
animaux dont on interroge<br />
<strong>fr</strong>aternellement le regard,<br />
le soir, à l’étape quand on<br />
n’a pas un cœur de pierre<br />
ou d’automate.<br />
La voie cruelle<br />
Ella Maillart continua de<br />
voyager, principalement en<br />
Asie, après la Seconde Guerre<br />
mondiale mais les voyages<br />
les plus significatifs de cette<br />
femme, pour elle <strong>com</strong>me<br />
pour nous, ses humbles lecteurs,<br />
se placent entre 1930<br />
et 1935. Périple de la mer<br />
Noire (Trabzon) aux berges<br />
de l’Indus, La Voie cruelle (1939)<br />
est un voyage automobile,<br />
d’autant plus moderne qu’il<br />
s’agit de deux femmes,<br />
Ella Maillart et Annemarie<br />
Schwarzenbach, au volant<br />
d’une Ford décapotable, aménagée<br />
par le meilleur garage<br />
de Zurich, avec deux jerricans<br />
d’essence de quinze litres<br />
pour les mauvaises surprises,<br />
et des suspensions renforcées.<br />
Les pistes de La Voie cruelle<br />
Deux ans plus tard, c’est<br />
par télégramme qu’Ella<br />
apprend la mort de son amie.<br />
La Voie cruelle lui est dédiée<br />
cahotent sur des milliers de<br />
kilomètres. Ce voyage entre<br />
femmes et sur le siège d’une<br />
Ford est un voyage à part<br />
dans la vie d’Ella Maillart à<br />
cause de cette amie qui risquait<br />
de sombrer. Issue d’une<br />
riche famille de Zurich, dilettante<br />
de la photographie et<br />
de l’écriture, rescapée d’une<br />
tentative de suicide en 1935,<br />
incurable de la mélancolie,<br />
Annemarie Schwarzenbach<br />
s’était trop souvent injecté<br />
de la morphine. Sa détresse<br />
de toxi<strong>com</strong>ane, son drame,<br />
se lisent entre les lignes de<br />
La Voie cruelle. Santé <strong>fr</strong>agile,<br />
Annemarie Schwarzenbach<br />
meurt trois ans plus tard, en<br />
Suisse, des suites d’un accident<br />
de vélo (15 novembre 1942).<br />
Oasis interdites<br />
Son voyage le plus long et<br />
le plus risqué, Ella Maillart le<br />
fit à trente-deux ans (1935),<br />
non pas seule mais avec un<br />
homme de vingt-sept ans,<br />
chroniqueur au Times,<br />
18
De tous les voyages réalisés<br />
par Ella Maillart, c’est sans aucun<br />
doute les périples à travers l’Asie<br />
centrale qui demeurent les plus<br />
audacieux. Cicontre, avec le<br />
journaliste anglais Peter Fleming,<br />
à leur arrivée au Cachemire.<br />
SAGA
ELLA<br />
MAILLART<br />
une vie d’aventure<br />
1903<br />
Naissance d’Ella Maillart, le<br />
20 février, à Genève. En 1913,<br />
la famille s’installe sur les bords<br />
du Léman, et Ella (surnommée<br />
« Kini ») rencontre Hermine<br />
de Saussure, alias « Miette ».<br />
1916-1923<br />
Sportive, Ella pratique le ski et<br />
participe à des régates sur le lac<br />
avec Miette, tout en dévorant<br />
des livres et en rêvant de voyage.<br />
En 1922, Miette achète la Perlette,<br />
un cotre de sept mètres de long,<br />
au constructeur d’avions Louis<br />
Breguet, et toutes deux se lancent<br />
dans une traversée pour la Corse.<br />
Ella barrera pour la Suisse aux<br />
Jeux olympiques de Paris en 1924.<br />
1930-1934<br />
En 1930, Ella Maillart part à Moscou,<br />
et découvre le Caucase, la mer Noire,<br />
la Crimée. En 1932, elle part pour<br />
le Turkestan russe, gagne les Tian<br />
Shan (monts Célestes), et gravit<br />
une montagne de 5 000 m. Au<br />
retour, elle publie Des monts<br />
Célestes aux sables rouges.<br />
1934-1935<br />
« Kini » part pour Pékin, où elle<br />
rencontre le journaliste Peter<br />
Fleming, le Père Teilhard de Chardin,<br />
et Sven Hedin, qui lui conseille, pour<br />
rejoindre l’Inde, de passer par le<br />
Nord du Tibet. En février 1935,<br />
Ella et Peter quittent Pékin ; ils<br />
mettront sept mois à atteindre<br />
Srinagar, au Cachemire indien.<br />
1939<br />
Désormais reconnue, Ella part pour<br />
un voyage vers l’Afghanistan en <strong>com</strong> <br />
pagnie d’Annemarie Schwarzenbach,<br />
qu’elle tentera en vain de libérer de<br />
la morphine. De cette épopée naîtra<br />
le livre La Voie cruelle.<br />
1946<br />
Après avoir passé la période de la guerre en Inde, Ella<br />
s’établit à Chandolin, dans le val d’Anniviers, qui demeurera<br />
son camp de base jusqu’à sa mort. Elle effectue son<br />
premier voyage au Népal avant même l’ouverture du<br />
pays, en 1951, et durant trente ans (19571987), elle<br />
organisera des voyages culturels, avec de petits<br />
groupes de touristes, dans de nombreux pays d’Asie.<br />
1997<br />
Ella Maillart s’éteint à Chandolin,<br />
le 27 mars 1997, à l’âge de 94 ans.<br />
Les fonds photographiques d’Ella<br />
Maillart sont conservés au musée<br />
de l’Élysée, à Lausanne. Une<br />
exposition permanente lui<br />
est consacrée à Chandolin.<br />
20
SAGA<br />
À gauche : La mosquée<br />
fortifiée de Doğubayazıt,<br />
sur les flancs du mont<br />
Ararat, non loin de la<br />
<strong>fr</strong>ontière avec l’Iran.<br />
Cidessus : Ella Maillart<br />
et Peter Fleming, à leur<br />
arrivée à Gilgit (au nord du<br />
Pakistan actuel), en 1935.<br />
écrivain renommé en<br />
Angleterre depuis un récit<br />
de voyage au Brésil. Le dernier<br />
livre de Peter Fleming<br />
s’intitulait : En <strong>com</strong>pagnie de<br />
soi-même. Dans sa version<br />
anglaise, le dernier récit<br />
d’Ella Maillart revendiquait<br />
lui aussi sa solitude : Turkestan<br />
solo (traduit par Des monts<br />
Célestes aux sables rouges, en<br />
<strong>fr</strong>ançais). Les deux individualistes<br />
firent bon ménage<br />
pendant cinq mois sous une<br />
même petite tente malgré<br />
leur agacement réciproque<br />
devant les manières de<br />
l’autre. Les hommes et les<br />
De leur voyage entre Pékin<br />
et les Indes, Ella Maillart et<br />
Peter Fleming livreront deux<br />
récits radicalement différents…<br />
femmes sont devenus bêtement<br />
soupçonneux. Dans<br />
un demi-siècle, les lecteurs<br />
d’Ella Maillart se demanderont<br />
s’ils avaient couché<br />
ensemble. En 1935, province<br />
lointaine d’un pays où flambaient<br />
déjà la guerre civile<br />
(entre Nationalistes et<br />
Communistes) et l’invasion<br />
japonaise, le Turkestan chinois<br />
(Xinjiang ou Sin-Kiang)<br />
sortait à peine d’une insurrection<br />
des musulmans de<br />
la province, les Tounganes.<br />
Depuis plus de huit ans,<br />
aucun voyageur allant de<br />
Pékin aux Indes n’avait osé<br />
21
SAGA<br />
Bibliographie<br />
Parmi la jeunesse russe <br />
De Moscou au Caucase (1932)<br />
Éditions Payot & Rivages, 2003.<br />
Le premier grand voyage d’Ella,<br />
<strong>com</strong>me journaliste.<br />
Des monts Célestes aux<br />
sables rouges (1934)<br />
Éditions Payot & Rivages, 2001.<br />
Son périple à travers le Pamir<br />
et les Tian Shan.<br />
« Ne vous inquiétez pas si<br />
dans un an vous n’avez toujours<br />
pas de nouvelles de nous…»<br />
Lettre d’Ella à ses parents<br />
traverser cette province aux<br />
rumeurs, souvent documentées,<br />
de brigandage et de<br />
massacre. Le couple qui<br />
n’est pas un couple parie sur<br />
l’apaisement des cœurs et<br />
des déserts après tant d’années.<br />
Terminus du train à<br />
Xian dans le Shaanxi. Kini :<br />
« Je me demande où nous<br />
verrons notre prochaine gare. »<br />
La prochaine gare, ce fut<br />
Lahore dans le Pendjab.<br />
De Xian à Lahore, les deux<br />
voyageurs utilisent toutes<br />
sortes de montures (âne,<br />
mulet, cheval, poney, chameau).<br />
Leurs <strong>com</strong>pagnons,<br />
un couple de Russes blancs,<br />
les Smigunov, parlant chinois<br />
couramment, futurs ambassadeurs<br />
chez des Russes<br />
blancs du Sin-Kiang, sont<br />
arrêtés à Lanchow (Lanzhou)<br />
par les autorités chinoises et<br />
reconduits à Pékin. Un long<br />
voyage, diablement engagé,<br />
bien que Fleming dans son<br />
récit (Courrier de Tartarie)<br />
ait parlé d’une escapade et<br />
non d’une expédition. Six<br />
semaines après son départ<br />
de Pékin, à un jour de marche<br />
de Sining, dans le village<br />
de Tangar, à 2 600 mètres<br />
d’altitude, où réside un<br />
missionnaire suisse avec<br />
sa femme, Kini poste sa<br />
dernière lettre à ses parents :<br />
« Si tout va bien, ma prochaine<br />
lettre sera datée des Indes dans<br />
six mois d’ici ; mais il ne faudra<br />
pas vous inquiéter si dans un an<br />
vous n’avez pas de nouvelles de<br />
nous. Nous allons nous joindre à<br />
la caravane d’un prince mongol<br />
et voyager avec lui pendant dixsept<br />
jours. Ensuite nous ne<br />
savons pas. » Ella Maillart<br />
enfourche son poney qu’elle<br />
a baptisé Slalom. Trois mois<br />
de vivres dans les bagages<br />
de la petite caravane. Selon<br />
le missionnaire, personne<br />
n’a <strong>fr</strong>anchi le Tsaidam<br />
depuis deux ans.<br />
« Le potier d’Istalif émaille<br />
ses faïences turquoise. »<br />
Illustration et légende<br />
tirée de La Voie cruelle,<br />
paru chez Jeheber, en 1952.<br />
Oasis interdites De Pékin<br />
au Cachemire (1937)<br />
Éditions Payot & Rivages,<br />
préface de Nicolas Bouvier,<br />
2002. La traversée entre<br />
Pékin et le Cachemire, par<br />
la route Sud du Takla Makan,<br />
avec Peter Fleming.<br />
La vagabonde des mers (1942)<br />
Éditions Payot & Rivages, 2002.<br />
Retour sur ses années de<br />
voileuse…<br />
La Voie cruelle (1947)<br />
Éditions Payot & Rivages, 2001.<br />
De Genève à Kaboul, avec<br />
Annemarie Schwarzenbach.<br />
Croisières et caravanes,<br />
autobiographie (1951)<br />
Éditions Payot & Rivages, 2001.<br />
Ella Maillart, vue par ellemême.<br />
TiPuss, ou l’Inde<br />
avec ma chatte (1951)<br />
Éditions Payot & Rivages, 2002.<br />
Le récit de ses cinq années en<br />
Inde, durant la guerre.<br />
Au pays des Sherpas<br />
Éditions Zoé, Genève, <strong>2017</strong><br />
Le Népal s’ouvre au monde et<br />
à Ella Maillart, en 1951.<br />
22
19
Après une semaine sur<br />
les sentiers du Khumbu,<br />
c’est le souffle court que l’on<br />
parvient jusqu’au belvédère<br />
du Kala Pattar (5 550 m), pour<br />
savourer l’ultime ré<strong>com</strong>pense<br />
du trek : le coucher de soleil<br />
sur la pyramide noire de<br />
l’Everest (8 850 m, à gauche)<br />
et l’aiguille acérée du Nuptse<br />
(7 861 m, à droite).<br />
24
EVEREST<br />
L’INVENTION<br />
D’UN MYTHE<br />
LE PLUS HAUT SOMMET DU MONDE, OBJET DE FASCINATION<br />
POUR LES ALPINISTES, EST AUSSI DEVENU LE THÉÂTRE DE L’UN<br />
DES TREKS LES PLUS CÉLÈBRES DE LA PLANÈTE, QUI MÈNE<br />
JUSQU’AU CAMP DE BASE, À PLUS DE CINQ MILLE MÈTRES<br />
D’ALTITUDE. UNE VÉRITABLE IMMERSION AU CŒUR DU PAYS<br />
SHERPA, DANS LE TEMPLE ABSOLU DE LA MONTAGNE SACRÉE.<br />
BÉATRICE GRELAUD<br />
JOCELYN CHAVY (SAUF MENTION)
JOCELYN<br />
CHAVY<br />
Alpiniste et randonneur,<br />
mais également journaliste<br />
et photographe, absolument<br />
incollable sur les itinéraires<br />
de haute montagne,<br />
Jocelyn Chavy a parcouru<br />
pour nous les sentiers<br />
les plus exigeants de<br />
la vallée de l’Everest.<br />
BÉATRICE<br />
GRELAUD<br />
« Je pars pour vingt jours de trek jusqu’au<br />
camp de base de l’Everest », annoncé-je à<br />
mon directeur le matin même de mon<br />
départ, sac au dos, habillement de rando<br />
oblige. Dans son imaginaire, je partais gravir<br />
des sommets glacés aussi hostiles les uns<br />
que les autres, à des altitudes invivables,<br />
sans croiser personne ni me laver pendant<br />
vingt jours. Il se voyait presque devoir<br />
bientôt me remplacer… On en revient, pourtant,<br />
de ce trek le plus connu du monde.<br />
Généralement enchanté, mais pas que. On<br />
y va pour « voir le Toit du monde » et l’on<br />
se rend <strong>com</strong>pte une fois sur place que les<br />
découvertes porteront bien au-delà de cette<br />
rencontre avec la montagne aux trois noms.<br />
L’EVEREST, LE SACRÉ GRAAL<br />
DES ALPINISTES<br />
Le Toit du monde doit son nom au géomètre<br />
anglais Georges Everest, missionné aux Indes,<br />
qui détermina le premier son altitude en<br />
1841, l’officialisant ainsi « plus haute montagne<br />
du globe ». Il devint alors l’objet d’une<br />
lutte engagée entre les puissances occidentales,<br />
toutes déterminées à gagner le défi<br />
de la première ascension. Les tentatives se<br />
sont multipliées dans la première moitié<br />
du XX e siècle et ce sont finalement les<br />
Britanniques qui l’ont atteint les premiers,<br />
le 29 mai 1953 (voir encadré page 31). Depuis,<br />
atteindre le sommet de l’Everest représente<br />
toujours un rêve pour beaucoup, réalisable<br />
moyennant une extrême motivation, une<br />
excellente forme physique, du temps… et<br />
quelques (dizaines de) milliers d’euros.<br />
L’EVEREST POUR TOUS<br />
Plus modestement, le plus haut sommet du<br />
monde attire également d’autres montagnards,<br />
souvent de simples randonneurs,<br />
parfois même pas (les backpackers l’ont à<br />
demeure sur leur Must Do List). Le fameux<br />
« trek du camp de base de l’Everest », point<br />
ultime accessible au (presque) <strong>com</strong>mun des<br />
mortels, nécessite une douzaine de jours<br />
aller-retour rien que pour la partie « trek ».<br />
L’idéal étant d’y passer deux semaines – ou<br />
plus – en sachant qu’il s’agit d’un itinéraire<br />
en aller-retour, pas en boucle, il est possible<br />
de ne garder que trois ou quatre jours pour<br />
le retour si l’on est bien acclimaté.<br />
Située au nord-est de Katmandou, la région<br />
du Khumbu est accessible soit à pied (en<br />
suivant la route historique de l’Everest), soit<br />
en avion (ce qui fait économiser six à huit<br />
jours de marche). Les habitants, des populations<br />
d’ethnie Sherpa (leur nom a fini par<br />
désigner de manière erronée les porteurs<br />
népalais), y vivent aujourd’hui essentiellement<br />
du tourisme, notamment au-delà du<br />
village de Namche Bazar, qui marque la véritable<br />
porte d’entrée des différents itinéraires<br />
vers l’Everest. Randonneurs venus approcher<br />
les plus hautes montagnes du globe,<br />
backpackers, alpinistes et marathoniens<br />
Montagnarde dans l’âme,<br />
fine connaisseuse des<br />
sentiers alpins, Béatrice<br />
ne pouvait pas manquer<br />
le rendezvous avec le Toit<br />
du monde, qu’elle a découvert<br />
en famille, avec une petite<br />
équipe locale népalaise.<br />
L’ÉNIGME MALLORY-IRVINE<br />
Les premières explorations autour du sommet de l’Everest débutent en 1913, par l’ouverture de la<br />
voie d’approche tibétaine, au nord. En 1921, George Mallory et Guy Bullock atteignent 6 990 m et<br />
un an plus tard, Mallory et une autre équipe britannique atteignent 8 230 m avant de se replier<br />
suite à la mort de 7 sherpas emportés par une avalanche, premières victimes connues de l’Everest.<br />
En 1924, Norton monte à 8 572 m, qui devient la plus haute altitude atteinte sur ces pentes jusque<br />
1952. Deux jours plus tard, tentant à leur tour l’ascension, Mallory et Irvine disparaissent après<br />
avoir été aperçus le long de la dernière arête nord. Ces « fantômes de l’Everest » ontils atteint le<br />
sommet avant de périr à la descente ? Le corps de Mallory a été retrouvé en 1999, à 8 290 m<br />
d’altitude ; trop bas, selon les spécialistes, pour avoir pu fouler le sommet. Seul son appareil<br />
photo, toujours introuvable, pourrait apporter la réponse à cette énigme.<br />
26
Découvrir la vallée de l’Everest nous fait<br />
toucher du doigt les géants du globe,<br />
et leur incroyable perfection esthétique<br />
La canine de l’Ama Dablam<br />
(6 812 m) domine le sentier à<br />
partir de Namche. Grandiose ?<br />
L’Everest toise ce « petit<br />
poucet » de plus de<br />
2 000 mètres…<br />
même, y côtoient des millionnaires américains<br />
ou japonais s’of<strong>fr</strong>ant le luxe de<br />
séjourner, après un trajet en hélicoptère,<br />
deux jours dans un des « Everest view hotel »<br />
construits dans les années 2000 pour élargir<br />
le potentiel touristique de la région.<br />
LE KHUMBU DU SOURIRE<br />
Paradoxalement, cette dynamique de modernisation,<br />
qui tend parfois au tourisme de<br />
masse, ne la rend pas moins attirante.<br />
L’ambiance globale demeure éminemment<br />
sympathique, cordiale, souriante, et les paysages<br />
sont d’une telle beauté qu’ils vous<br />
feront largement oublier votre voisin de table<br />
(occupé tout <strong>com</strong>me vous à photographier<br />
le coucher de soleil sur l’Ama Dablam).<br />
D’autant que les options pour parcourir le<br />
Khumbu sont multiples, avec désormais un<br />
certain confort, une ambiance vivante sur<br />
les sentiers <strong>com</strong>me dans les villages, où se<br />
mêlent paysages époustouflants, efforts grisants,<br />
rencontres enrichissantes et immersion<br />
dans une culture en pleine mutation.<br />
Pendant longtemps, la « longue marche »<br />
vers le Khumbu démarrait très loin du Toit<br />
du Monde, dans les vallées lointaines qui<br />
marquaient le bout de la route, à Jiri, dans<br />
les piémonts himalayens du Solu. Depuis<br />
sa construction en 1964, mais plus encore<br />
depuis qu’il a été asphalté en 2001, l’aérodrome<br />
de Lukla constitue un accès <strong>com</strong>mode<br />
et la plupart des trekkeurs l’utilisent<br />
<strong>com</strong>me point de départ et d’arrivée, économisant<br />
huit jours de trek à l’aller <strong>com</strong>me<br />
au retour. L’expérience est saisissante, avec<br />
COMMENT Y ALLER ?<br />
Les vols sur le Népal depuis<br />
l’Europe (<strong>com</strong>pter de 600 à<br />
1 000 € suivant la saison) font<br />
nécessairement une escale<br />
dans la péninsule arabique<br />
(Qatar Airways, Oman Air ou<br />
Emirates), à Dehli (Air India)<br />
ou à Istanbul (Turkish Airlines).<br />
À l’aéroport de Katmandou<br />
(Tribhuvan), vous n’aurez<br />
aucun souci pour rejoindre<br />
votre point de chute, les<br />
chauffeurs de taxi vous assaillent<br />
littéralement à la sortie du<br />
bâtiment. Comptez 800 NPR<br />
pour rejoindre Thamel.<br />
Change possible à l’aéroport<br />
ou dans Thamel en arrivant.<br />
27
LA VALLÉE<br />
DE L’EVEREST<br />
Cho Oyu<br />
(8 201 m)<br />
Gyachung Kang<br />
(7 952 m)<br />
TIBET<br />
Constituée de trois vallées qui<br />
convergent au niveau de Namche<br />
Bazar, la région du HautKhumbu<br />
of<strong>fr</strong>e de magnifiques itinéraires<br />
jalonnés de lodges, jusqu’au camp<br />
de base de l’Everest.<br />
Gokyo Ri<br />
(5 357 m)<br />
Cho La<br />
(5 420 m)<br />
GOKYO<br />
Renjo La<br />
(5 360 m)<br />
MACHHERMO<br />
LUNGDEN<br />
→<br />
vers Rolwaling<br />
THAME<br />
Tashi Labsta<br />
(5 760 m)<br />
<strong>Trek</strong> du camp de base (12 jours)<br />
Haute route de l’Everest (21 jours)<br />
Autres sentiers<br />
Sites remarquables
Everest<br />
(8 850 m)<br />
Lhotse<br />
(8 516 m)<br />
Makalu<br />
(8 485 m)<br />
Kala Pattar<br />
(5 550 m)<br />
GORAK SHEP<br />
Camp de base<br />
de l’Everest<br />
Nuptse<br />
(7 861 m)<br />
Chukhung Ri<br />
(5 560 m)<br />
Island Peak<br />
(6 189 m)<br />
Baruntse<br />
(7 152 m)<br />
Cholatse<br />
(6 440 m)<br />
LOBUCHE<br />
Taboche<br />
(6 542 m)<br />
Kongma La<br />
(5 535 m)<br />
PHERICHE<br />
DINGBOCHE<br />
CHHUKHUNG<br />
Ama Dablam<br />
(6 812 m)<br />
Lac Imja<br />
Amphu Lapcha<br />
(5 845 m)<br />
Ama Dablam BC<br />
(4 600 m)<br />
→<br />
vers Makalu<br />
(Trois cols)<br />
PANGBOCHE<br />
Kangtega<br />
(6 783 m)<br />
PHORTSE<br />
TENGBOCHE<br />
Thamserku<br />
(6 623 m)<br />
KHUMJUNG<br />
KHUNDE<br />
NAMCHE<br />
BAZAR<br />
KONGDE<br />
MONJO<br />
NÉPAL<br />
PHAKDING<br />
N<br />
LUKLA<br />
vers Jiri<br />
(page 54)<br />
→<br />
1km<br />
© Google Earth<br />
29
Étagée dans une <strong>com</strong>be<br />
en fer à cheval, sous la cime<br />
du Thamserku (6 623 m),<br />
Namche Bazar, située à<br />
3 400 m d’altitude, est la<br />
principale bourgade de la<br />
haute vallée du Khumbu.<br />
© Anthony Nicolazzi<br />
VISA<br />
Pour se rendre au Népal, il<br />
suffit d’un passeport en cours<br />
de validité encore 6 mois après<br />
la date de retour, et d’un visa<br />
touristique, délivré à l’aéroport<br />
de Katmandou, moyennant une<br />
photo d’identité (en prévoir<br />
deux). 25 € pour 15 jours, 40 €<br />
pour 30 jours, <strong>10</strong>0 € pour<br />
90 jours, payable en euros.<br />
PERMIS DE TREK<br />
Vous aurez besoin de la carte<br />
de « <strong>Trek</strong>kers’ Information<br />
Management System » (TIMS),<br />
délivrée par le Nepal Tourism<br />
Board, qui se trouve sur Exhibition<br />
Road, à l’est de Thundikhel :<br />
2 000 roupies (NPR, soit 17 €)<br />
via une agence, 4 000 NPR<br />
(34 €) pour les individuels.<br />
Nécessite deux photos (cabine<br />
gratuite dans les bureaux pour<br />
les étourdis). Si votre trek est<br />
organisé par une agence, elle<br />
s’occupera de ces formalités.<br />
PERMIS PARC<br />
NATIONAL<br />
un droit d’entrée (3 500 NPR,<br />
30 €) est requis à l’entrée du<br />
Sagarmartha National Parc, au<br />
checkpoint de Monjo, (35 €).<br />
C’est au terme d’une incroyable journée,<br />
entre les caravanes de yacks, que l’on<br />
rejoint Namche Bazar, la capitale sherpa<br />
une piste de cinq cents mètres de long et<br />
une inclinaison de vingt pour cent (soit la<br />
montée finale de la Planche-des-Belles-Filles<br />
pour les connaisseurs). À Lukla, ne peuvent<br />
donc se poser que des appareils à décollage<br />
et atterrissage court, tels que le DeHavilland<br />
DHC-6 Twin Otter ou le Dornier Do 228.<br />
Ajoutez à ces minuscules coucous les conditions<br />
météos « himalayennes », et vous <strong>com</strong>prendrez<br />
que Lukla soit souvent classé dans<br />
la liste des « dix aéroports les plus dangereux<br />
au monde » (cf. encadré page 32).<br />
LE MYTHE DES SHERPAS<br />
Chaque matin, pourtant, tandis que les<br />
bimoteurs se posent à la queue leu leu,<br />
débarquant les passagers ahuris au milieu<br />
d’une cohorte de porteurs en quête de travail,<br />
une petite file joyeuse se met en place<br />
sur le chemin pavé qui s’élance, en amont<br />
vers Namche Bazar. Bientôt, les murs à mani,<br />
moulins à prière, rivières tumultueuses, passerelles<br />
himalayennes… vous plongent dans<br />
l’ambiance, (irrémé)diablement. Tout le<br />
monde se croise ou se côtoie avec le sourire,<br />
à grand renfort de « Namasté » (bonjour).<br />
Les uns en groupe, encadrés par des<br />
agences internationales, les autres en individuels,<br />
simples routards chargés <strong>com</strong>me<br />
des yacks ou randonneurs avertis, suffisamment<br />
en tout cas pour gérer euxmêmes<br />
itinéraire et logistique.<br />
Pour les populations sherpas, installées<br />
dans la région bien avant l’arrivée des<br />
30
LA PREMIÈRE…<br />
La première ascension est attribuée au duo<br />
Tensing Norgay et Edmund Hillary, en 1953.<br />
Une expédition Suisse étant montée, un an<br />
avant, à 255 m du sommet, les Britanniques,<br />
attachés à réussir la conquête du toit du monde,<br />
réunissent une expédition digne d’une campagne<br />
militaire. Elle part le <strong>10</strong> mars, par le Khumbu,<br />
direction la face sud. Le 29 mai 1953, l’alpiniste<br />
néozélandais et le Sherpa partent du camp<br />
établi à 8 500 m, dans les traces de Bourdillon<br />
et Evans, parvenus à 90 m du sommet, trois jours<br />
plus tôt. Ils <strong>fr</strong>anchissent le dernier obstacle, un<br />
ressaut de 12 m, appelé depuis ressaut Hillary<br />
et parviennent au sommet à 11 h 30.<br />
premiers explorateurs occidentaux, le « Toit<br />
du monde » représente avant tout une montagne<br />
sacrée, dont la tête touche le ciel, ainsi<br />
nommée « Sagarmatha ». Son ascension,<br />
inenvisageable car sacrilège, a <strong>com</strong>mencé<br />
à devenir possible aux yeux de certains<br />
Sherpas avec la venue des premières expéditions<br />
d’alpinistes. Les Sherpas, avec leur<br />
31
La piste de Lukla, longue de<br />
460 mètres, avec une pente<br />
finale à 20 %, n’est accessible<br />
qu’aux petits bimoteurs.<br />
Chaque matin, si le temps<br />
le permet, leur ballet aérien<br />
ininterrompu dépose les<br />
trekkeurs au pied du Khumbu.<br />
© Anthony Nicolazzi<br />
REJOINDRE L’EVEREST<br />
→ En avion : l’aérodrome de<br />
Lukla représente le moyen le<br />
plus rapide pour accéder aux<br />
sentiers de l’Everest. Compter<br />
150 € l’allerretour, au départ<br />
de l’aéroport domestique de<br />
Katmandou, dont il faut partir<br />
à l’aube pour bénéficier d’une<br />
météo clémente. Plusieurs <strong>com</strong> <br />
pagnies aériennes desservent<br />
Lukla et vous pourrez réserver<br />
vos vols dans une de leurs<br />
agences à Thamel.<br />
→ En bus : si vous optez pour<br />
la route, deux options s’of<strong>fr</strong>ent<br />
à vous : Jiri (une journée de<br />
voyage, environ 1 500 NPR,<br />
soit 13 €) si vous envisagez l’itinéraire<br />
historique intégral (voir<br />
page 54), d’où vous atteindrez<br />
Lukla, en 8 à 9 jours de marche ;<br />
ou, depuis peu, Phaplu, désormais<br />
accessible en bus, et à 3<br />
jours de Lukla à pied.<br />
COMBIEN ÇA COÛTE ?<br />
Avec une agence <strong>fr</strong>ançaise, au<br />
départ de Paris, <strong>com</strong>ptez entre<br />
2 500 et 4 000 € selon l’itinéraire<br />
(camp de base AR ou<br />
haute route) et la durée (de 15<br />
ou 21 jours). Avec une agence<br />
locale, en direct, il faut prévoir<br />
entre 35 et 45 € par personne et<br />
par jour, pour 20 jours de trek,<br />
guide, porteurs, hébergement,<br />
nourriture, transfert et permis<br />
inclus. Avec un budget « au plus<br />
juste », autrement dit sans<br />
guide ni porteur, <strong>com</strong>ptez de<br />
1215 €/jour pour la nourriture<br />
et l’hébergement en lodge en<br />
dessous de Namche, et autour<br />
de 2025 €/jour et par personne<br />
audelà. À cela, il faudra bien<br />
évidemment ajouter les permis<br />
(voir page 30), et évidemment<br />
les vols internationaux, domestiques<br />
et/ou bus locaux pour<br />
l’approche.<br />
FAUT-IL PRENDRE LES VOLS INTÉRIEURS ?<br />
En mars 2016, une dizaine d’agences <strong>fr</strong>ançaises prend la décision de ne plus utiliser les vols<br />
intérieurs dans le pays, suite à deux crashes successifs, pour « ne plus exposer leurs clients<br />
à ce type de risque ». En réalité, c’est l’anticipation d’un contentieux assurantiel qui dicte ces<br />
décisions, toutes les <strong>com</strong>pagnies népalaises étant sur la liste noire des autorités aériennes<br />
européennes. Cet abandon des vols KatmandouLukla aura, économiquement, des conséquences<br />
lourdes, car il rend impossible les voyages de 15 jours, les treks démarrant alors de Phaplu avec<br />
8 jours de marche supplémentaires. Pour plus de sécurité ? Pas si sûr… car les routes népalaises<br />
demeurent tout aussi dangereuses que l’avion (de 1 800 à 5 500 morts par an pour 12 000 km de<br />
routes, contre 165 victimes en <strong>10</strong> ans pour l’aérien). Depuis, les agences ont fait machine arrière,<br />
rappelant une évidence : le risque zéro n’existera jamais. Au Népal encore plus qu’ailleurs.<br />
connaissance des lieux et de la montagne<br />
et leur physiologie adaptée aux efforts en<br />
altitude, représentaient des atouts indispensables<br />
à ces conquérants – qui ont<br />
malgré tout parfois du mal à les considérer<br />
<strong>com</strong>me des alpinistes à part entière.<br />
Aujourd’hui, même si les sherpas continuent<br />
de constituer une bonne part des<br />
équipes locales, plus particulièrement pour<br />
les expéditions d’alpinismes, c’est également<br />
avec des porteurs tamangs, rai, bhote,<br />
gurung… que l’on partagera ses journées.<br />
Comme toutes les populations des hautes<br />
vallées népalaises, les sherpas sont essentiellement<br />
bouddhistes, et cette culture<br />
colorée fait partie intégrante de la découverte<br />
du pays de l’Everest, les habitants ayant<br />
à cœur de la montrer : chaque jour vous<br />
trouverez sur votre chemin des pierres<br />
peintes en sanskri (les manis), des moulins<br />
à prières de toute taille et finement décorés,<br />
tous plus ingénieux les uns que les autres<br />
(de ceux qui nécessitent l’intervention hu -<br />
maine à ceux qui utilisent le courant de la<br />
rivière), des constructions à la forme typique<br />
(les stupas) et monastère. Respectez-les en<br />
abordant toujours les monuments religieux<br />
par la gauche et en tournant autour dans le<br />
sens des aiguilles d’une montre. Prévoyez<br />
un peu de temps pour visiter les monastères<br />
de Tengboche, Phortse ou Khunde, leur décor<br />
intérieur, mélange d’ancien et de moderne,<br />
vaut le détour. Et ramenez pour vos proches<br />
des rouleaux de drapeaux à prière, souvenir<br />
typique léger, pas cher et très en vogue chez<br />
les Occidentaux.<br />
32
n°425 Les plus beaux voyages n°426 Itinéraires d’exception<br />
n°427 Iran<br />
Il vous manque un numéro…<br />
Complétez votre collection de<br />
Grands Reportages<br />
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CAMP DE BASE DE L’EVEREST<br />
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Mais audelà du prix final,<br />
si vous choisissez de voyager<br />
seul, sachez qu’en cas de souci<br />
(accident, indisposition, annulation<br />
des vols entre Lukla et<br />
Katmandou…), vous serez livrés<br />
à vousmêmes et qu’étrangement,<br />
dans ces momentslà, les tarifs<br />
(secours, billet d’hélicoptère<br />
lorsque les avions ne volent<br />
plus…) deviennent tout à coup<br />
prohibitifs. Dans le même cas<br />
de figure, avec une bonne<br />
agence <strong>fr</strong>ançaise, vous n’aurez<br />
rien à gérer, et tout aussi étrangement,<br />
vous embarquerez<br />
dans le premier avion, éventuellement<br />
af<strong>fr</strong>été pour l’occasion,<br />
sans avoir à payer un centime<br />
de plus (expérience vécue). Le<br />
choix appartient à chacun, en<br />
fonction de son budget, de son<br />
expérience, de ses éventuelles<br />
appréhensions, du temps<br />
disponible, etc.<br />
Lukla, sept heures du matin. Sans transition,<br />
en moins d’une heure, on est littéralement<br />
catapulté de la chaude vallée de<br />
Katmandou à quelques kilomètres de<br />
l’Everest à vol d’oiseau – autant dire rien,<br />
<strong>com</strong>paré au trajet qu’effectua l’expédition<br />
de reconnaissance de Bill Tilman en 1950.<br />
La civilisation est là, malgré tout : agglomération<br />
de lodges et de magasins aussi<br />
achalandés qu’à Katmandou, Lukla est une<br />
fourmilière dédiée au business du tourisme.<br />
Différence de taille, l’absence totale de véhicules<br />
rend l’air bien plus respirable.<br />
Après une arrivée au petit matin, il faut<br />
<strong>com</strong>pter deux heures de marche, après le<br />
passage de la porte dédiée à Pasang Lamu,<br />
première Népalaise au sommet de l’Everest,<br />
pour atteindre Phakding, première étape<br />
possible après une descente vers les berges<br />
chaotiques de la Dudh Kosi. Les plus en forme<br />
pourront poursuivre jusqu’à Monjo, moyennant<br />
1 h 30 de marche supplémentaire.<br />
LA PORTE D’ENTRÉE DU KHUMBU<br />
Le chemin agréablement pavé grouille de<br />
porteurs et de convois de bêtes de somme<br />
qui « alimentent » le haut Khumbu en absolument<br />
tout : denrées alimentaires, pour<br />
certaines encore vivantes, matériaux de<br />
construction, bouteilles de gaz, équipement<br />
de la maison… Attention aux passages de<br />
pont : face au pouvoir de réflexion somme<br />
toute limité d’un yack, l’humain n’est jamais<br />
prioritaire. Pour éviter tout incident ; lorsque<br />
vous croisez une caravane de yacks ou de<br />
chevaux en chemin, montez sur le bord<br />
supérieur du sentier, versant amont (et surtout<br />
pas côté aval où vous risqueriez de<br />
OÙ DORMENT LES PORTEURS ?<br />
Parmi les évolutions observées au Khumbu durant cette dernière décennie, la « disparition »<br />
des porteurs en fin d’étape, regrettée par beaucoup, mérite explication. Dans la majorité des<br />
villages entre Namche et Lobuche, ont été construites des maisons destinées à loger et nourrir<br />
les porteurs embauchés par les expéditions. Le tourisme ayant fait exploser les prix des prestations<br />
de restauration et d’hébergement, il était devenu difficile, pour les porteurs, de se nourrir<br />
et même de se loger, l’accès aux chambres des lodges leur étant souvent interdit. Si cela leur<br />
« facilite » la vie, ils s’en trouvent néanmoins systématiquement isolés du groupe pour lequel<br />
ils travaillent. Un mal pour un bien ?<br />
34
Emblématique du trek<br />
vers le camp de base,<br />
l’Ama Dablam (6 812 m)<br />
est omniprésent durant<br />
la montée, avant l’arrivée<br />
sur le glacier du Khumbu.<br />
35
Au fil du sentier, entre<br />
sommets étincelants et<br />
chörtens couverts de<br />
drapeaux à prière.<br />
Cidessous : visite<br />
obligatoire à la gompa de<br />
Khumjung, qui abrite le<br />
fameux « scalp » du yeti.<br />
36
Des cieux azur où resplendissent les<br />
glaciers aux drapeaux colorés des gompas,<br />
on renoue avec la pureté des origines<br />
chuter en cas de bousculade impromptue).<br />
Monjo marque le point d’entrée dans le<br />
haut Khumbu, celui tout du moins où l’on<br />
paie l’indispensable permis d’entrée dans<br />
le Sagarmatha National Park. Après une<br />
courte montée, on atteint le Larja Bridge, le<br />
pont le plus spectaculaire de tout le<br />
Khumbu, immortalisé dans le film Everest,<br />
adaptation du récit Tragédie à l’Everest de<br />
Jon Krakauer, en 2015. Cette vertigineuse<br />
passerelle permet de <strong>fr</strong>anchir la Dudh Kosi<br />
une nouvelle fois pour atteindre, quelque<br />
six cents mètres plus haut, et au prix de<br />
nombreux lacets, la capitale du Khumbu :<br />
Namche Bazar.<br />
NAMCHE BAZAR, CAPITALE SHERPA<br />
Namche est le village emblématique du<br />
Khumbu, identifiable entre mille par ses<br />
maisons aux toits bleu et vert, disposés en<br />
fer à cheval dans un cirque naturel face à<br />
l’Ama Dablam (6 812 m) et le Thamserku<br />
(6 623 m). On ne manquera pas son marché,<br />
et c’est assurément un bon endroit pour<br />
passer au moins deux nuits d’acclimatation,<br />
en occupant ses journées à découvrir<br />
les villages de Khunde et Khumjung, situés<br />
sur un large plateau en amont de Namche.<br />
C’est à Khumjung, dans un petit monastère,<br />
que l’on peut « admirer » le célèbre<br />
« scalp » du yeti. Ce que l’on ne pourra s’empêcher<br />
de faire, quand bien même l’ADN<br />
dudit scalp a révélé depuis longtemps qu’il<br />
ne s’agissait en réalité… que d’une vulgaire<br />
peau de bique…<br />
LE MONASTÈRE DE TENGBOCHE<br />
Une fois quitté Namche, une longue traversée<br />
à flanc of<strong>fr</strong>e des vues époustouflantes sur<br />
l’Ama Dablam et, dès les premières plateformes<br />
aménagées le long du sentier, où<br />
trônent des stupas d’un blanc éclatant, sur<br />
l’Everest tant attendu, et la muraille impressionnante<br />
du Lhotse, quatrième sommet du<br />
globe (8 516 m) et pourtant éclipsé par la fascination<br />
exercée par son illustre voisin. Depuis<br />
Sanasa, le sentier principal descend abruptement<br />
jusqu’à la Dudh Kosi, qu’il <strong>fr</strong>anchit<br />
en un lieu nommé Phunki Tenga (3 250 m),<br />
où il fait bon boire un thé avant la pénible<br />
remontée jusqu’à Tengboche (3 860 m).<br />
Une demi-journée de marche suffit ainsi<br />
pour atteindre le monastère le plus important<br />
du Khumbu, qui accueille en quasipermanence<br />
une cinquantaine de lamas. Si<br />
vous choisissez de ne pas passer la nuit à<br />
Tengboche, mieux vaut vous arrêter à<br />
Pangboche (3 990 m) pour s’assurer une parfaite<br />
acclimatation – d’autant que ce charmant<br />
village face à l’Ama Dablam mérite<br />
d’y passer deux à trois heures à flâner au<br />
milieu des habitations. Dans tous les cas,<br />
le sentier principal du Khumbu traverse de<br />
nombreux villages, à quatre-vingts pour<br />
PRENEZ DE LA MARGE !<br />
Gardez en tête que les aléas<br />
climatiques peuvent bloquer les<br />
vols sur Lukla pendant plusieurs<br />
jours, obligeant parfois les<br />
trekkeurs sur le retour à marcher<br />
de Lukla à Phaplu pour emprunter<br />
la route (environ 23 jours).<br />
Au moment de réserver ses vols<br />
AR internationaux, pensez à<br />
prévoir 4 jours de marge entre<br />
la fin prévue du trek et le<br />
départ de Katmandou, pour<br />
s’éviter bien des moments de<br />
stress, susceptibles de gâcher<br />
quelque peu la fin du voyage…<br />
TÉLÉPHONE MAISON ?<br />
Au Khumbu, le portable (et<br />
les SMS) passe très bien jusqu’à<br />
Namche pour les opérateurs<br />
Orange et Bouygues Télé<strong>com</strong>.<br />
Peu de GSM dans le HautKhumbu,<br />
mais du WiFi en revanche<br />
dans quasiment tous les<br />
lodges (moyennant <strong>10</strong>0<br />
à 500 NPR, soit 1 à 5 €,<br />
la demiheure).<br />
PRÉVOYEZ<br />
DU LIQUIDE !<br />
Prévoyez suffisamment<br />
d’argent liquide pour le<br />
Khumbu car les retraits y sont<br />
<strong>com</strong>pliqués (un distributeur à<br />
Namche, lorsqu’il fonctionne…).<br />
Le change, en revanche, est<br />
facile partout. On trouve des<br />
distributeurs automatiques de<br />
billets à Katmandou (à l’entrée<br />
dans Thamel, notamment).<br />
LE LAC IMJA<br />
La rivière Imja, longée par le sentier d’accès au camp de base de l’Island Peak, l’un des plus<br />
accessible « 6 000 » de la planète, est naturellement barrée par une moraine née de la fonte<br />
accélérée des glaciers qui ont façonné la vallée. La magnificence de cette étendue laiteuse au<br />
pied des falaises glacées des « ice flutes » trompe le trekkeur : cette moraine menace de céder<br />
à mesure que le lac gagne en volume. Ses eaux menaçant toute la vallée du HautKhumbu, des<br />
travaux de drainage ont été entrepris pour en abaisser le niveau. Chantier titanesque rendu<br />
possible par l’implication des autorités locales sur influence de la <strong>com</strong>munauté montagnarde.<br />
37
Nuages d’aprèsmidi.<br />
Un dévoilement.<br />
Ici, les montagnes sont<br />
audessus des cieux.<br />
38
Convoités pour leur esthétique pure<br />
ou leurs arêtes vertigineuses, les sommets<br />
sont l’incarnation d’une essence divine<br />
39
Cidessus : un petit lodge<br />
traditionnel, à Namche Bazar.<br />
Le peuple sherpa, installé<br />
dans les vallées du Khumbu,<br />
est pratiquant du<br />
bouddhisme tibétain.<br />
Après une journée sur le sentier, on<br />
s’abandonne devant une tasse de thé,<br />
dans la douce chaleur du lodge<br />
Page de droite en haut :<br />
Sur le chemin qui mène<br />
à la gompa de Tengboche,<br />
peu après Namche Bazar,<br />
apparaît soudain l’Everest,<br />
salué par les chörtens qui<br />
longent ce chemin vers<br />
le ciel. © Anthony Nicolazzi<br />
CHARGER<br />
SES BATTERIES ?<br />
Il est possible de recharger ses<br />
batteries d’appareil photo et de<br />
téléphone portable dans tous<br />
les lodges, pour un tarif qui<br />
s’élève avec l’altitude. Comptez<br />
200 NPR (soit environ 2 €)<br />
au niveau de Lukla, et jusqu’à<br />
1 000 NPR (soit <strong>10</strong> €) dans<br />
les lodges d’altitude.<br />
cent constitués de lodges, ce qui permet<br />
d’adapter les étapes à votre acclimatation<br />
et à vos envies. On marche rarement plus<br />
d’une heure sans rencontrer un lodge, pour<br />
boire un thé, une bière (une Everest, forcément)<br />
ou y passer la nuit.<br />
GLACIER GÉANT<br />
Depuis Pangboche, le sentier monte tranquillement<br />
jusqu’à Pheriche en longeant<br />
l’impressionnante et très esthétique falaise<br />
du Taboche (6 542 m). C’est au niveau de<br />
Pheriche que l’on laisse, à main droite, la<br />
vallée de l’Imja Khola, la face sud du Lhotse,<br />
le lac Imja et le Baruntse (variante re<strong>com</strong>mandée)<br />
pour se glisser, le long de la<br />
Lobuche Khola, dans l’ultime vallée de ce<br />
trek vers le camp de base. En amont de<br />
Pheriche, le sentier monte doucement vers<br />
Dughla (ou Thokla, 4 620 m), avant de s’attaquer<br />
à la moraine <strong>fr</strong>ontale du glacier du<br />
Khumbu, porte d’entrée d’un univers de<br />
très haute montagne.<br />
Au sommet de la moraine, alors qu’on ne<br />
distingue encore de la langue du glacier<br />
géant qu’un enchevêtrement chaotique de<br />
pierraille d’où émergent çà et là quelques<br />
lacs d’une eau laiteuse, on découvre le<br />
mémorial érigé à la mémoire des victimes<br />
de l’Everest, encore à bout de souffle, et soudain<br />
con<strong>fr</strong>onté à « l’envers du décor » du<br />
mythe Everest. Dans un lieu d’une intense<br />
beauté, entre la pyramide parfaite du Pumori<br />
(7 161 m), dans le fond, et l’impressionnant<br />
Nuptse (7 861 m) à droite, on est soudain<br />
rattrapé par la puissance des lieux, incarnée<br />
par les cairns, stupas, plaques <strong>com</strong>mémoratives<br />
qui égrènent à l’infini les patronymes,<br />
40
connus ou anonymes, de ceux dont le<br />
chemin s’est arrêté ici.<br />
On rattrape, en rive droite du glacier, le<br />
chemin qui provient du Cho La (voir page 47)<br />
et qui longe la moraine jusqu’à Lobuche<br />
(4 930 m). Dormir ici vous permet d’explorer<br />
les environs du hameau en grimpant sur la<br />
moraine qui le domine, pour admirer le<br />
panorama grandiose et l’immense langue<br />
glaciaire venue tout droit du sommet de<br />
l’Everest dont les séracs bleus semblent<br />
presque accessibles. Déjà, en amont, on<br />
devine Gorak Shep (5 150 m), coin de gazon<br />
contrastant avec cet univers glaciaire de<br />
haute montagne, et la « taupinière » du Kala<br />
Pattar, en arrière-plan.<br />
LA CASCADE DE GLACE<br />
Gorak Shep, point habité le plus haut du<br />
Népal, est en effet le point de départ vers<br />
la « colline noire » du Kala Pattar, qui of<strong>fr</strong>e<br />
le plus beau point de vue sur le massif de<br />
l’Everest et les séracs gargantuesques de sa<br />
fameuse Ice Fall, dont l’ampleur modifie<br />
considérablement les référentiels. Le panorama<br />
embrasse les sommets du Khumbu,<br />
Omniprésents au Khumbu, les yacks assurent le ravitaillement<br />
de tous les villages de la vallée, inaccessible aux véhicules.<br />
41
TROUVER DES<br />
PORTEURS ?<br />
Si vous décidez d’organiser<br />
vousmême votre trek sans<br />
pour autant tout porter, vous<br />
avez la possibilité d’embaucher<br />
un ou plusieurs porteurs pour<br />
vous ac<strong>com</strong>pagner. Soit en<br />
passant par une agence locale<br />
parmi les centaines de Thamel,<br />
soit directement à l’arrivée à<br />
Lukla ou Phaplu, où les porteurs<br />
proposent leur service à<br />
la descente de l’avion. Les<br />
guides mandatés par les<br />
agences locales choisissent<br />
d’ailleurs souvent leur<br />
équipe à ce momentlà.<br />
DES LODGES PARTOUT !<br />
Le potentiel touristique<br />
du Khumbu en fait la région<br />
du Népal la plus équipée en<br />
lodges et services en tout<br />
genre. Aucune difficulté, donc,<br />
pour trouver un lit en dur dans<br />
chacun des villages traversés.<br />
Ils sont même désormais quasiment<br />
tous équipés de couvertures.<br />
Attention cependant aux<br />
hautes saisons (octobre et mai),<br />
où les places peuvent s’avérer<br />
plus chères. Camper reste<br />
possible, à condition de<br />
pouvoir porter (ou faire porter)<br />
sa tente. Sauf programme<br />
spécifique, aucune agence<br />
n’organise plus de treks au<br />
Khumbu sous tente, ou alors<br />
uniquement dans celles prévues<br />
par les lodges pour faire face<br />
à l’affluence.<br />
du Pumori à l’Ama Dablam. Bien que sa base<br />
soit masquée par le Nuptse, la face sudouest<br />
de l’Everest est bien visible, de même<br />
que le col Sud, emplacement du dernier<br />
camp de la voie d’ascension népalaise. Le<br />
col Sud sépare l’Everest (à gauche) de la crête<br />
de rochers sombres du Lhotse, à droite. Si,<br />
chaque matin, une ribambelle de lampes<br />
<strong>fr</strong>ontales s’étire en direction du Kala Pattar,<br />
l’idéal est d’y monter dans le courant de<br />
l’après-midi, si le temps le permet, pour<br />
assister au coucher du soleil là-haut (prévoir<br />
alors la <strong>fr</strong>ontale pour redescendre). Pour<br />
la plupart des candidats à l’Everest Base<br />
Camp, le voyage s’achève au Kala Pattar. Le<br />
camp de base proprement dit, à quatre ou<br />
cinq heures aller-retour de Gorak Shep, n’est<br />
pas <strong>fr</strong>anchement inoubliable, sauf peut-être<br />
au printemps, quand les lieux se transforment<br />
en village de tentes.<br />
POURQUOI REDESCENDRE ?<br />
Une fois acclimaté, la descente vers Namche<br />
Bazar et Lukla, par le même chemin s’apparente<br />
à une longue dégringolade avalée<br />
en quatre jours pour les plus vaillants. Mais<br />
pour tout randonneur normalement<br />
constitué, un aller-retour a toujours un<br />
arrière-goût de <strong>fr</strong>ustration. Pourquoi redescendre<br />
? Et pourquoi, surtout, redescendre si<br />
vite ? Les variantes et extensions possibles<br />
(Chhukhung, Island Peak, Gokyo, haute<br />
route…) <strong>com</strong>posent en effet un Khumbu « à<br />
tiroir » dont, avec un minimum de forme<br />
physique et d’exigence, on aura intérêt à<br />
profiter sans retenue. Si, pour le <strong>com</strong>mun<br />
des mortels, aller jusqu’au camp de base de<br />
l’Everest s’apparente à un aboutissement,<br />
ce trek d’exception, pour ceux qui ont eu la<br />
chance de la parcourir, est bien souvent…<br />
le début d’une très longue histoire.<br />
Nang, Tibétain de Tingri,<br />
rencontré à Namche. Les<br />
liens avec le Tibet demeurent<br />
toujours très forts, malgré la<br />
surveillance du col du Nangpa<br />
La par les autorités chinoises.<br />
KALA PATTAR OU CAMP DE BASE ?<br />
Pour le trekkeur en partance vers l’Everest, atteindre son mythique camp de base représente<br />
sans doute l’objectif final. Pourtant, mis à part d’immenses séracs et éventuellement une<br />
foultitude de tentes (au printemps seulement), vous n’y apercevrez qu’une infime partie<br />
des montagnes alentour et en aucun cas le sommet. Dès lors, la plupart des trekkeurs optent<br />
plutôt pour l’ascension du Kala Pattar (5 550 m), dominant toute la vallée et dispensant une<br />
vue époustouflante sur toute la chaîne. Le sommet du Toit du monde y apparaît presque<br />
secondaire tant l’ensemble est grandiose. Des regrets ? Montez au Kala Pattar pour le<br />
coucher du soleil, et réservez le matin suivant pour le camp de base, avant de redescendre.<br />
42
NOTRE ITINÉRAIRE - 12 JOURS<br />
LE CAMP DE BASE DE L’EVEREST<br />
Réalisable au départ de l’aérodrome de Lukla,<br />
en 1112 jours environ en <strong>com</strong>ptant les journées<br />
d’acclimatation à l’altitude (deux jours<br />
environ), le trek vers le camp de base de<br />
l’Everest est l’un des itinéraires les plus grandioses<br />
de la planète.<br />
ÉTAPE 1 / LUKLA – MONJO<br />
4 h 30 / +150 m / 300 m<br />
Depuis Lukla (2 840 m), le sentier très aménagé<br />
descend doucement jusqu’à la rivière, la<br />
Dudh Khosi, que l’on <strong>fr</strong>anchit au niveau de<br />
Phakding (2 8<strong>10</strong> m) village qui peut également<br />
servir d’étape. La route vers Monjo (2 840 m)<br />
monte ensuite doucement.<br />
ÉTAPE 2 / MONJO – NAMCHE BAZAR<br />
4 h / +700 m / 150 m<br />
Juste après Monjo (2 840 m), une portion assez<br />
raide dans la forêt permet d’apercevoir le<br />
sommet de l’Everest. Au milieu du trajet, le<br />
sentier <strong>fr</strong>anchit de nouveau la rivière sur une<br />
haute passerelle toute neuve, avant de poursuivre<br />
en lacets, sa montée jusqu’à Namche<br />
(3 440 m).<br />
ÉTAPE 3 / NAMCHE – TENGBOCHE<br />
4 h 30 / +600 m / 400 m<br />
Après une première journée d’acclimatation,<br />
en général effectuée à Manche, on repart en<br />
balcon jusqu’à Sanasa, puis descente raide<br />
jusqu’à Phunki Tenga (3 250 m), remontée en<br />
lacets jusqu’à Tengboche (3 860 m). Visite du<br />
monastère.<br />
ÉTAPE 4 / TENGBOCHE – PHERICHE<br />
6 h / +550 m / 150 m<br />
Courte descente pour traverser une passerelle<br />
métallique sur l’Imja Khola, avant de remonter<br />
sur Pangboche (3 990 m) en rive droite, et d’atteindre<br />
Pheriche (4 240 m) ou Dingboche<br />
(4 300 m) si l’on envisage la variante de<br />
Chhukhung ou le passage du Kongma La<br />
(5 535 m). Une journée en allerretour jusque<br />
Chhunkhung le lendemain est d’ailleurs une<br />
excellente idée pour favoriser l’acclimatation.<br />
ÉTAPE 5 / PHERICHE – LOBUCHE<br />
5 h 30 / +530 m<br />
En quittant le village, le sentier monte le long<br />
de la crête pour conduire à Dughla (4 620 m)<br />
au pied de la moraine du glacier du Khumbu.<br />
Gravir cette moraine pour atteindre l’émouvant<br />
mémorial de Chukpi Lhara, dédié aux<br />
(innombrables) grimpeurs morts sur le Toit du<br />
monde, puis, une heure plus tard, le hameau<br />
de Lobuche (4 9<strong>10</strong> m).<br />
ÉTAPE 6 / LOBUCHE – GORAK SHEP<br />
(+ ASCENSION DU KALA PATTAR)<br />
1 h 30 / +250 m<br />
(3 h AR / +500 m / 500 m pour le Kala Pattar)<br />
Sentier d’abord facile puis pénible au milieu<br />
des éboulis morainiques du Khangri Glacier.<br />
Arrivée à Gorak Shep (5 160 m), puis montée<br />
au Kala Pattar (5 643 m) dans l’aprèsmidi.<br />
ÉTAPE 7 / GORAK SHEP – DINGBOCHE<br />
4 h / 750 m<br />
Avant le retour sur Dingboche, possibilité<br />
d’effectuer l’allerretour jusqu’au camp de base<br />
(4 h AR / +200 m / 200 m). Descente classique<br />
jusqu’à Dughla, avant de bifurquer vers la<br />
gauche, pour suivre le plateau herbeux qui<br />
mène sur les hauteurs de Dingboche (4 440 m).<br />
ÉTAPE 8 À <strong>10</strong><br />
Retour vers Namche Bazar et Lukla par le<br />
chemin suivi à l’aller.<br />
VARIANTE 1<br />
L’OPTION « RIVE DROITE » PAR PHORTSE<br />
Au retour, en arrivant sur Pangboche, plutôt<br />
qu’un retour par le chemin suivi à l’aller par<br />
le monastère de Tengboche, vous pouvez opter<br />
pour l’option « rive droite » qui vous conduira<br />
dans le village « oublié du tourisme » de<br />
Phortse (3 8<strong>10</strong> m, 2 h 30, +150 m, 250 m,<br />
étape possible). Le lendemain, on rentrera sur<br />
Namche (4 h 30, +200 m, 550 m) en traversant<br />
la Dudh Koshi avant de remonter jusqu’au<br />
col du Mong La (3 985 m), pour rattraper le<br />
sentier principal au niveau de Sanasa.<br />
VARIANTE 2<br />
LE TREK DU CAMP DE BASE EN BOUCLE,<br />
PAR LES LACS DE GOKYO<br />
Sans opter pour l’itinéraire de la haute route<br />
intégrale, la variante de Gokyo vous permet<br />
de sortir de l’itinéraire classique et de réaliser<br />
une boucle, plutôt qu’un allerretour. Dans le<br />
sens de la montée, <strong>com</strong>pter 3 jours depuis<br />
Namche Bazar pour rejoindre Gokyo, en faisant<br />
étape à Dhole (4 <strong>10</strong>0 m, 6 h, +1 200 m,<br />
700 m), et éventuellement à Machhermo<br />
(3 h, +400 m, 50 m). Le troisième jour, on<br />
rejoint Gokyo (4 800 m, 2 h, +350 m) et on<br />
profite de l’aprèsmidi pour monter au point<br />
de vue du Gokyo Ri (5 450 m, 3 h AR, +650 m,<br />
650 m) pour y contempler le coucher du soleil.<br />
Depuis Gokyo, on rejoint l’itinéraire classique<br />
du camp de base en empruntant le Cho La<br />
(5 420 m), par l’itinéraire de la haute route<br />
(voir page 44).<br />
EXTENSION<br />
CHHUKHUNG ET LE CAMP DE BASE<br />
DE L’ISLAND PEAK<br />
Depuis Dingboche, au retour ou à la montée<br />
pour favoriser votre acclimatation, vous pouvez<br />
prévoir de passer deux ou trois jours dans la<br />
vallée de l’Imja khola, vers Chhukhung (2 h,<br />
+350 m) et l’Island Peak.<br />
→ Chhukhung Ri (5 560 m)<br />
4 h AR / +800 m / 800 m<br />
Un point de vue exceptionnel sur le Makalu,<br />
le Baruntse, le Lhotse Char et l’Ama Dablam.<br />
Sentier évident en amont des refuges. À faire<br />
au coucher du soleil ; la redescente à la <strong>fr</strong>ontale<br />
se fait facilement.<br />
→ Lac Imja et camp de base<br />
de l’Island Peak (5 050 m)<br />
5 h / + 400 m / 400 m<br />
Le sentier pour monter au lac Imja (voir<br />
page 37) traverse les moraines naturelles qui<br />
bloquent le cours d’eau. Arrivé au niveau du<br />
camp de base de l’Island Peak, en rive droite<br />
du lac, la vue est imprenable sur les ice flutes<br />
dominant le lac aux eaux turquoise.<br />
43
HAUTE ROUTE DU KHUMBU<br />
L’EVEREST AUGMENTÉ<br />
SOUS L’APPELLATION « HAUTE ROUTE », PARFOIS « HAUTS COLS », SE<br />
CACHE SANS AMBIGUÏTÉ LA PLUS BELLE BOUCLE QUE L’ON PUISSE RÉALISER<br />
DANS LES VALLÉES DU KHUMBU. AVEC DES PASSAGES PANORAMIQUES PAR<br />
DES COLS DE HAUTE ALTITUDE ET DES POINTS DE VUE INÉDITS SUR LES<br />
GÉANTS HIMALAYENS OU LES LACS AZUR DU TOIT DU MONDE.<br />
BÉATRICE GRELAUD & JOCELYN CHAVY<br />
JOCELYN CHAVY<br />
Page de droite : le Gyanchung<br />
Kang, un « presque 8 000 »,<br />
avec 7 952 m, situé dans<br />
la haute vallée de Gokyo,<br />
rarement parcourue.<br />
ATTENTION AU<br />
MAL DES MONTAGNES !<br />
Sans en faire une obsession,<br />
ni une anxiété permanente,<br />
le mal aigu des montagnes<br />
(MAM) est le principal danger<br />
pour le trekkeur, et nécessite<br />
d’être appréhendé en parfaite<br />
connaissance de cause (et<br />
d’effets) pour mieux le gérer.<br />
Le MAM, lié à une mauvaise<br />
acclimatation à l’altitude,<br />
apparaît généralement audessus<br />
de 3 500 m, parfois<br />
à des altitudes inférieures,<br />
et peut causer la mort en<br />
quelques heures. N’hésitez<br />
pas à vous référer à notre<br />
dossier <strong>com</strong>plet, disponible<br />
à tout instant en ligne :<br />
bit.ly/malaigumontagnes<br />
La haute route de l’Everest est une boucle.<br />
En <strong>com</strong>paraison avec le « bête » aller-retour<br />
de l’itinéraire classique vers le camp de<br />
base, l’information a de quoi faire dresser<br />
l’oreille, rien n’étant plus désagréable que<br />
de revenir sur ses pas (sensation en partie<br />
psychologique car on redécouvre souvent les<br />
lieux avec un regard différent). La haute route<br />
est une boucle donc, qui passe, elle aussi, par<br />
le camp de base de l’Everest, mais qui « augmente<br />
» l’itinéraire principal par deux, voire<br />
trois cols à plus de 5 000 mètres d’altitude.<br />
Un challenge sportif supplémentaire par<br />
conséquent, mais également un gage de vues<br />
époustouflantes sur les sommets les plus<br />
emblématiques de l’Himalaya. Le tout en une<br />
vingtaine de jours, soit une semaine de plus<br />
que l’itinéraire classique environ.<br />
TOURISME<br />
L’EMPREINTE DE SONAM SHERPA<br />
PANORAMIQUE…<br />
Ce trek des « hauts cols du Khumbu », tel<br />
qu’on l’intitule parfois, débute par le trek<br />
classique vers le Kala Pattar avant un<br />
enchaînement de cols qui nous mènera,<br />
d’est en ouest, de vallée en vallée : le Cho<br />
La (5 420 m), tout d’abord, pour atteindre la<br />
vallée de Gokyo, le Renjo La (5 360 m),<br />
ensuite, pour basculer dans la vallée de la<br />
Bhote Khosi et revenir par Thame. À ces<br />
deux passages d’altitude, on ajoute parfois<br />
un troisième, en début de parcours, le<br />
Kongma La (5 535 m), qui relie Chhukhung<br />
et Lobuche. Aucune règle ne régit le sens<br />
de l’itinéraire, si ce n’est éventuellement<br />
une logique d’acclimatation. Cette haute<br />
route sera ici décrite dans le sens inverse<br />
des aiguilles d’une montre, la période<br />
Directeur de l’agence Thamserku, la plus importante du Népal, Sonam Sherpa est un personnage<br />
influent du tourisme d’aventure au Khumbu et dans le pays. Son expérience, mais également<br />
ses multiples voyages à l’étranger, lui confèrent un regard précurseur sur l’évolution du<br />
tourisme dans la région. Alors qu’au Népal prédominent les hébergements rustiques à des tarifs<br />
modiques, Sonam Sherpa voit davantage l’avenir dans les modèles occidentaux ou de l’A<strong>fr</strong>ique<br />
de l’Est, avec des hébergements haut de gamme, à l’instar de ceux qu’il développe au Népal<br />
avec les Yeti Mountain Home. Celui qui avait prédit avant tout le monde l’obsolescence des<br />
treks sous tente au Khumbu table aujourd’hui sur le développement des hébergements confortables<br />
dans le pays. La fin annoncée d’un Népal à <strong>10</strong> € par jour ?<br />
44
45
Sur les rives du lac émeraude<br />
de Goyko, lors de la montée<br />
au point de vue du Gokyo Ri<br />
(5 357 m). Dès le lendemain,<br />
il faudra <strong>fr</strong>anchir le Renjo La<br />
(5 360 m, au fond), l’ultime<br />
col de la haute route.<br />
Plus encore que sur l’itinéraire principal,<br />
la haute route collectionne vallées sauvages<br />
et panoramas d’envergure<br />
ACHETER SON<br />
MATÉRIEL SUR PLACE ?<br />
Si, dans le quartier de Thamel<br />
à Katmandou <strong>com</strong>me à Namche<br />
Bazar, de nombreuses échoppes<br />
proposent du matériel de<br />
randonnée et de montagne à<br />
des prix défiant toute concurrence,<br />
il s’agit essentiellement<br />
de contrefaçons de qualité<br />
médiocre (sauf quelques<br />
magasins officiels et quelques<br />
articles d’occasion). À n’acquérir<br />
qu’en dépannage, donc, sauf<br />
pour les fourrures polaires,<br />
les teeshirts (tous en cotons),<br />
foulards type Buff, chapeaux<br />
et autres petits accessoires<br />
« couleur locale ».<br />
d’acclimatation étant plus simple à gérer<br />
en attaquant par l’est, avec des possibilités<br />
de variantes plus larges favorisant une<br />
montée en altitude et une acclimatation<br />
raisonnables.<br />
Le tour <strong>com</strong>mence par l’itinéraire classique<br />
jusque Dingboche où ceux qui auront choisi<br />
de <strong>fr</strong>anchir le premier col, le Kongma La,<br />
délaisseront temporairement la vallée de<br />
l’Everest proprement dite, pour se diriger,<br />
plein est, vers le hameau excentré de<br />
Chhukhung. Comparé à l’agitation qui règne<br />
dans les villages depuis Lukla, Chhukhung<br />
est d’un calme olympien. Situé sous la<br />
monumentale face sud du Lhotse, c’est un<br />
endroit idéal pour s’acclimater, avec des<br />
balades à la journée magnifiques, du lac<br />
Imja au Chhukhung Ri (voir encadrés).<br />
LE KONGMA LA<br />
La montée au Kongma La (5 535 m) est rude.<br />
À cette altitude, s’élever de huit cents mètres<br />
n’a rien d’anodin, et c’est généralement à<br />
la <strong>fr</strong>ontale que l’on entame cette longue<br />
déambulation entre pierriers et alpages<br />
pour arriver, en milieu de matinée, en vue<br />
du splendide lac glaciaire qui annonce le<br />
col. La vue époustouflante sur les impressionnants<br />
Taboche et Cholatse Peak ré<strong>com</strong>pense<br />
largement l’effort douloureusement<br />
fourni. Pour rejoindre Lobuche, se dresse<br />
un ultime écueil, de taille : le glacier du<br />
Khumbu. Le traverser n’est pas une mince<br />
affaire après la longue journée. Sur ce « sentier<br />
» en mouvement permanent, on suivra<br />
tant bien que mal les cairns mis en place<br />
par les équipes précédentes, louvoyant sur<br />
46
la moraine qui recouvre la glace, entre les<br />
lacs qui émaillent le monstre.<br />
LE CHO LA ET LES LACS DE GOKYO<br />
À Lobuche, on retrouve le gros des troupes,<br />
et l’itinéraire principal. L’aller-retour vers<br />
Gorak Shep et le Kala Pattar (voir « camp<br />
de base de l’Everest », page 34) est une<br />
quasi-formalité après l’épreuve du Kongma<br />
La. Au retour, au niveau de Dughla, on abandonne<br />
à nouveau le sentier qui file vers<br />
Namche, pour bifurquer sur la droite en<br />
direction des lacs de Gokyo. Le sentier<br />
s’élève doucement sous les faces nord et<br />
est du Taboche et du Cholatse dont les austères<br />
pentes de glace contrastent avec les<br />
paisibles alpages de Dzonglha (4 800 m).<br />
Entre moraines et falaises, on atteint un<br />
premier col avant de prendre pied sur le<br />
glacier, dont la traversée mène au Cho La<br />
(5 420 m). Une première descente raide dans<br />
un pierrier instable conduit à un replat herbeux<br />
puis une seconde plus douce suit un<br />
vallon ombragé jusqu’à la vallée de Gokyo.<br />
Au terme de cette étape, longue, avec<br />
quelques passages qui nécessitent un<br />
Cidessus, l’Everest (à gauche) et le Lhotse<br />
(à droite), respectivement premier et quatrième<br />
sommets du globe, ici vus depuis Kongde.<br />
En haut, la gompa de Thame, village « oublié »<br />
des trekkeurs, à la conclusion de la haute route.<br />
47
Depuis le point de vue<br />
du Gokyo Ri, la vue s’étend<br />
sur le lac de Gokyo, joyau<br />
du haut Khumbu, et la<br />
silhouette immanquable<br />
du Cholatse (6 440 m).<br />
48
On découvre le lodge, aux marges du glacier,<br />
avant d’aller savourer les lumières du soir<br />
sur les eaux turquoise du lac<br />
49
50
Des monastères jusqu’aux hauts cols,<br />
le vent des montagnes porte la litanie<br />
des mantras au plus près des dieux,<br />
vers les hautes sphères du Toit du monde<br />
minimum de vigilance (on l’évitera d’ailleurs<br />
en cas de mauvaise visibilité ou de<br />
neige), il est prudent de passer la nuit à<br />
Dragnak (4 700 m), afin de récupérer de l’effort<br />
et de <strong>fr</strong>anchir le glacier de Ngozumpa<br />
à la <strong>fr</strong>aîche, le lendemain matin. Cela permettra<br />
en outre de monter au point de vue<br />
du Gokyo Ri (5 357 m) en début d’après-midi<br />
pour y profiter du coucher du soleil. Le<br />
brouillard peut parfois investir les lieux,<br />
vigilance de mise, que ce soit pour <strong>fr</strong>anchir<br />
les débris glaciaires ou pour descendre du<br />
belvédère. Avec une ou deux journées supplémentaires,<br />
ne pas hésiter à explorer la<br />
magnifique vallée de Ngozumpa et marcher<br />
jusqu’au cinquième lac, le Ngozumpa Tso,<br />
pur joyau aux eaux bleues, cerné par un<br />
fantastique ensemble de très hautes montagnes.<br />
Depuis la moraine, la vue sur<br />
l’Everest est l’une des meilleures du<br />
Khumbu. On distingue ainsi l’arête nord de<br />
la tentative d’ascension historique (peutêtre<br />
réussie) des Anglais Mallory et Irvine,<br />
en 1924 et le col Sud, le plus haut « camp »<br />
du monde, qui sépare l’Everest du Lhotse.<br />
RENJO LA, LE DERNIER COL<br />
En cas de coup de fatigue, il sera toujours<br />
possible de redescendre directement dans<br />
la vallée, et de rejoindre Namche. Mais<br />
l’acclimatation, désormais parfaite, aura tôt<br />
fait de vous convaincre de poursuivre en<br />
direction de l’ultime col du périple, le Renjo<br />
La (5 360 m), qui conduit dans la dernière<br />
grande vallée du Khumbu, celle de la Bhote<br />
Koshi. Troisième passage clé de cette haute<br />
route de l’Everest, le Renjo La nécessite lui<br />
aussi de bonnes conditions climatiques (pas<br />
de chutes de neige récentes) pour être<br />
<strong>fr</strong>anchi sans en<strong>com</strong>bre. Laissant le dôme<br />
herbeux du Gokyo Ri à droite, le sentier du<br />
Renjo La mène dans un vallon suspendu<br />
sous le col haut perché. Trop exposée, l’ancienne<br />
sente qui remontait directement au<br />
col a été abandonnée au profit d’un long<br />
détour au milieu de dalles de rochers<br />
(cairns). Le panorama qui se dévoile depuis<br />
le col vaut tous les efforts : de gauche à<br />
droite on distingue le Gyachung Kang, le<br />
Pumori, l’Everest, le Nuptse, le Lhotse, et le<br />
Makalu. Sans oublier le Cholatse au premier<br />
plan. L’Everest paraît d’ici vraiment<br />
dominer tous les autres. Le sentier qui descend<br />
vers la vallée de la rivière Bhote a été<br />
réaménagé, avec de belles marches de<br />
pierre. La longue, très longue descente s’en<br />
trouve considérablement sécurisée, jusqu’à<br />
déboucher sur les murets de Lungden où<br />
sont situés quelques lodges bienvenus. Une<br />
fois rejoint le fond de la vallée, Marulung<br />
L’HÉRITAGE HILLARY<br />
Le vainqueur de l’Everest, audelà de sa passion pour l’alpinisme, est resté toute sa vie très<br />
attaché au pays des Sherpas. Il monta plusieurs projets humanitaires destinés essentiellement<br />
au développement des soins et de l’éducation. La première école du village de Khumjung, audessus<br />
de Namche Bazar, porte son nom. Il a également participé à la construction de l’hôpital<br />
de Khunde et de l’aéroport de Lukla, nécessaire à l’acheminement des matériaux nécessaires à<br />
ses projets. Défenseur de l’environnement, il a encouragé le gouvernement du Népal à créer la<br />
zone protégée du Sagarmatha National Park, et a participé à son reboisement.<br />
En haut, les drapeaux<br />
à prières claquent au vent<br />
lors du passage du Cho La<br />
(5 420 m), sur l’itinéraire<br />
menant vers Gokyo.<br />
En bas, les gardiens<br />
du temple, à l’entrée du<br />
monastère de Tengboche,<br />
sur l’itinéraire de montée<br />
vers le camp de base.<br />
À LIRE<br />
GUIDES<br />
→ <strong>Trek</strong>king around Everest, par<br />
Bob Gibbons and Siân Pritchard<br />
Jones, Himalayan Map House,<br />
2014. Une valeur sûre, dans une<br />
excellente collection devenue<br />
une référence. En anglais.<br />
→ <strong>Trek</strong>king in the Everest<br />
Region, par Jamie McGuinness,<br />
Trailblazer Editions, 5 e édition<br />
20<strong>09</strong> (en anglais). Très bon<br />
également, mais mériterait<br />
d’être mis à jour.<br />
CARTES<br />
Everest Base Camp & Gokyo,<br />
Three Passes : la carte au<br />
1:50 000 éditée par Himalayan<br />
Map House. Ou les nombreuses<br />
autres cartes népalaises, désormais<br />
fiables, que l’on trouve<br />
partout dans les boutiques de<br />
Thamel à Katmandou. Vérifiez<br />
les dates de dernière mise à<br />
jour, car les choses évoluent<br />
constamment.<br />
LITTÉRATURE<br />
→ Tragédie à l’Everest (Into<br />
Thin Air), de Jon Krakauer : pour<br />
tenter de <strong>com</strong>prendre quelque<br />
chose à la folie de l’Everest, et<br />
au drame de 1996 où périrent<br />
de nombreux « huitmillistes ».<br />
Adapté au cinéma en 2015<br />
(Everest, de Baltasar Kormákur).<br />
→ Tenzing, Sur le toit du<br />
monde avec Edmund Hillary,<br />
par Christian Clot : en bande<br />
dessinée, un autre point de<br />
vue sur la relation entre<br />
Occidentaux et Sherpas. Glénat.<br />
→ Le Sommet des Dieux, de<br />
Jirō Taniguchi : cet incontournable<br />
manga en cinq tomes<br />
relate les aventures d’un<br />
photographe japonais en<br />
Himalaya avec un souci du<br />
détail qui <strong>fr</strong>ise la perfection.<br />
Un must have, surtout si vous<br />
n’aim(i)ez pas les mangas.<br />
51
ÉQUIPEMENT :<br />
ATTENTION AU FROID !<br />
Qu’on se le tienne pour dit :<br />
il fait (très) <strong>fr</strong>oid dans la vallée<br />
de l’Everest ! Bien plus, à titre<br />
de <strong>com</strong>paraison, que dans les<br />
Annapurna, ou qu’au Ladakh à<br />
altitude équivalente. On veillera<br />
donc à être parfaitement équipé,<br />
à <strong>com</strong>mencer par un sac de<br />
couchage autour de <strong>10</strong> °C<br />
confort, idéalement (même<br />
si on dort en lodge, sans chauffage).<br />
Emportez également une<br />
grosse doudoune, appréciable<br />
le soir et les matins lors des<br />
départs à la <strong>fr</strong>ontale, ainsi que<br />
des gants chauds, un bonnet,<br />
et l’équipement classique des<br />
randonnées en (haute) montagne.<br />
À noter : autant que possible,<br />
prenez ce matériel en bagage<br />
à main dans l’avion, pour éviter<br />
qu’une perte de bagage ne<br />
<strong>com</strong>promette votre trek. Pour<br />
<strong>com</strong>poser votre paquetage,<br />
aidezvous de notre checklist :<br />
bit.ly/checklisttrek<br />
Dans le village de Thame, un<br />
marchand tibétain, venu de la<br />
région de Tingri, par le col de<br />
Nangpa La, tout proche.<br />
TREKKING PEAKS<br />
GRAVIR UN SOMMET ?<br />
Outre l’ascension de l’Island Peak (voir cicontre), d’autres sommets sont envisageables<br />
pour les alpinistes expérimentés et/ou les trekkeurs encadrés. Dans l’ordre de difficulté :<br />
→ Mera Peak (6 476 m) : l’autre « classique » du secteur, peu difficile, mais avec une altitude<br />
élevée et une situation excentrée, dans une vallée à l’est de Lukla. Permis d’ascension obligatoire.<br />
→ Pokalde (5 806 m) : un très beau belvédère, audessus du Kongma La. Possibilité<br />
de bivouaquer au bord du lac la nuit précédant l’ascension. Pas de permis requis.<br />
→ Lobuche East (6 120 m) : le « false summit » souvent gravi est un peu moins<br />
élevé que le sommet principal. Camp de base audessus de Dzonglha.<br />
→ Machhermo, antécime (5 559 m) : plus facile que le sommet principal, qui culmine à 6 237 m,<br />
cette antécime surplombe le village de Machhermo, une demiétape environ avant Gokyo. Départ<br />
du Namgyal Lodge de Machhermo (réputé être l’un des plus accueillants de tout le Khumbu).<br />
→ Pachermo (6 273 m) : souvent gravi à l’occasion de la difficile traversée du<br />
Tashi Lapsa, col permettant de quitter le Khumbu pour basculer dans la Rolwaling.<br />
apparaît et il reste encore quelques heures<br />
de marche avant Thame, loin, tout au bout<br />
de la vallée (et rive droite de celle-ci), après<br />
un grand stupa qui marque l’entrée – et la<br />
sortie – de la Bhote Valley proprement dite.<br />
LA PORTE DU TIBET<br />
Même si Thame rappelle par ses lodges sa<br />
voisine Namche, les habitants de Thame ont<br />
toujours été mal considérés par les autres<br />
habitants du Khumbu (le terme Bhote, qui<br />
désigne les ethnies Bhotia, et par extension<br />
les populations montagnardes reculées, a<br />
d’ailleurs, dans la bouche du Népalais<br />
moyen, une connotation parfois péjorative<br />
assez proche de nos « péquenauds »).<br />
Dédaignée jusqu’à peu de temps en arrière<br />
par le business du trekking, Thame a pourtant<br />
longtemps été une étape essentielle sur<br />
la route de <strong>com</strong>merce avec le Tibet. Porte de<br />
la Bhote Khosi et du col du Nangpa La, point<br />
de passage historique avec le Tibet, Thame<br />
voit à nouveau passer des caravanes de<br />
yacks chargés de marchandises chinoises,<br />
vendues par des Tibétains sur le marché<br />
de Namche. Discussion d’un soir avec des<br />
Tibétains rencontrés sur le marché de<br />
Namche deux semaines plus tôt : ils se ravitaillent<br />
en nourriture avant de rentrer au<br />
Tibet et négocient âprement plusieurs<br />
dizaines d’œufs à une famille de Thame.<br />
Plus étonnant, ils transportent encore<br />
quelques charges destinées aux monastères<br />
du Khumbu : plusieurs centaines de livres<br />
de prières – bouddhistes – imprimés à bas<br />
coût… en Chine ! Le village de Thame est<br />
quant à lui dominé par un magnifique<br />
monastère bouddhiste, blotti contre une<br />
falaise ornée de drapeaux de prière, dont<br />
la quiétude paraît bien plus propice à la<br />
méditation que celui de Tengboche… À<br />
deux ou trois heures de là, à peine, se profile<br />
déjà l’agitation perpétuelle de Namche,<br />
le confort des lodges locaux et la fin d’un<br />
beau voyage en altitude.<br />
52
NOTRE ITINÉRAIRE - 21 JOURS<br />
LA HAUTE ROUTE DE L’EVEREST<br />
Avec trois cols d’altitude pour basculer de<br />
vallée en vallée, la « haute route » of<strong>fr</strong>e un<br />
panorama <strong>com</strong>plet du HautKhumbu. L’iti <br />
néraire décrit ici ne <strong>com</strong>porte pas les étapes<br />
<strong>com</strong>munes avec celles du camp de base, ni les<br />
journées de repos ou d’acclimatation.<br />
ÉTAPE 1 /<br />
CHHUKHUNG – LOBUCHE par le Kongma La<br />
<strong>10</strong> h / +950 m / 750 m<br />
La montée au départ de Bibre, un peu en dessous<br />
de Chhukhung. Assez raide, le sentier suit<br />
les <strong>com</strong>bes pour arriver au col. Ne pas tarder<br />
à redescendre sur la vallée et se garder du<br />
temps pour la traversée du glacier du Khumbu.<br />
ÉTAPE 2 / LOBUCHE – DZONGLHA<br />
2 h / 200 m / +150 m<br />
Une courte étape de transition, à peine plus<br />
longue pour ceux qui auront dormi à Gorak<br />
Shep après l’allerretour vers le Kala Pattar. Il<br />
est conseillé d’arriver de bonne heure à<br />
Dzonglha, les lodges étant souvent bondés.<br />
ÉTAPE 3 /<br />
DZONGLHA – DRAGNAK par le Cho La<br />
6 à 8 h / +650 m / 800 m<br />
Après les derniers alpages, le sentier remonte<br />
une croupe raide puis traverse un couloir<br />
rocheux (cairns) qui permet de monter à droite<br />
jusqu’à un « faux » col (5 250 m). De là suivre<br />
(à gauche) la rive droite du glacier jusqu’au<br />
« vrai » col, le Cho La (5 420 m). Descente dans<br />
les éboulis, traversée ascendante puis longue<br />
descente menant à Dragnak (4 700 m).<br />
ÉTAPE 4 / DRAGNAK – GOKYO<br />
2 h / +400 m / 300 m<br />
Le sentier se <strong>fr</strong>aye un chemin entre séracs et<br />
éboulis morainiques pour <strong>fr</strong>anchir la langue<br />
glaciaire. Paysage fantasmagorique et vigilance<br />
de mise. À Gokyo (4 750 m), on <strong>com</strong>plétera<br />
cette courte journée par l’indispensable allerretour<br />
au Gokyo Ri (5 357 m, 3 h, +700 m,<br />
700 m). Possibilité de rester un jour de plus<br />
à Gokyo pour explorer la haute vallée.<br />
ÉTAPE 5 /<br />
GOKYO – LUNGDEN par le Renjo La<br />
6 à 8 h / +700 m / 1 000 m<br />
Une fois contourné le lac, remonter un ressaut<br />
raide (lacets, éboulis) pour déboucher sur le<br />
plateau. Le « bon » col est bien à droite. La<br />
longue descente du Renjo La (5 360 m) s’effectue<br />
par des escaliers (neige, verglas <strong>fr</strong>équent) par<br />
trois lacs successifs (Angladumpa, Relama, Renjo<br />
Tso), avant d’atteindre Lungden (4 380 m).<br />
ÉTAPE 6 / LUNGDEN – THAME<br />
5 h 30 / 1 000 m<br />
Descente tranquille en matinée le long de la<br />
Bhote Koshi, jusqu’au village de Thame.<br />
Possibilité de visiter la gompa, audessus du<br />
village. Nombreux lodges, et étape possible à<br />
Thame. C’est ici que part, en direction de la<br />
Thame Khola, le sentier de l’exigeant Tashi<br />
Lapsa (5 753 m). Poursuite vers Namche (2 à<br />
3 h) dans l’aprèsmidi ou le lendemain.<br />
TREKKING PEAK<br />
L’ASCENSION DE L’ISLAND PEAK (6 189 M)<br />
11 h / +1 <strong>10</strong>0 m / 1 400 m<br />
L’Imja Tse (6 189 m), plus connu sous le nom<br />
d’Island Peak tel que l’avait baptisé l’équipe<br />
d’Eric Shipton lors de sa reconnaissance à<br />
l’Everest en 1951, est le <strong>Trek</strong>king Peak le plus<br />
populaire de tout le Népal. Son ascension<br />
nécessite un permis spécial « climbing permit »<br />
(cher : environ 750 €) délivré par la NMA<br />
(Nepal Mountaineering Association). Depuis<br />
Chhukhung, il faut une demijournée pour<br />
atteindre le camp de base, à 5 050 m. De là,<br />
on démarre l’ascension vers 2 h du matin, pour<br />
parvenir sur le glacier au lever du jour, et<br />
atteindre le sommet aux alentours de 8 h. La<br />
partie finale, une pente de 150 m aux alentours<br />
de 40°, est équipée à demeure de cordes<br />
fixes. Retour à Chhukhung en fin de journée.<br />
VARIANTE<br />
LUKLA PAR KONGDE<br />
2 jours / +1 000 m / 2 <strong>10</strong>0 m<br />
Au retour de la haute route, il vous est possible<br />
de rentrer sur Lukla par un itinéraire qui vous<br />
évitera la foule du chemin classique. Depuis<br />
Thame, descendre en rive droite jusqu’à Pare<br />
(3 500 m), puis remonter à flanc à main droite,<br />
de manière régulière pour aller <strong>fr</strong>anchir, vers<br />
4 <strong>10</strong>0 m, la gorge de la Sartema Khola. Un<br />
sentier aérien mène aux lodges de Kongde<br />
(4 250 m, +800 m, 400 m, 6 à 7 h 30 depuis<br />
Thame). Bivouacs possibles aux alentours. Le<br />
lendemain, la descente est directe (1 650 m,<br />
5 h) sur Toktok (2 600 m), d’où l’on rejoint le<br />
sentier principal, pour remonter à Lukla.<br />
EXTENSION 1<br />
CAMP DE BASE DE L’AMA DABLAM<br />
4 h / +700 m / 700 m<br />
Il est possible, depuis Pangboche, entre les<br />
jours 7 et 8 et pour favoriser l’acclimatation,<br />
de monter en allerretour au camp de base<br />
(4 600 m) de l’Ama Dablam (6 812 m), sommet<br />
emblématique de la vallée. On descend vers<br />
la rivière (<strong>10</strong> mn) pour remonter sur la croupe<br />
herbeuse de la rive gauche. Le sentier suit<br />
ensuite le profond talweg <strong>fr</strong>iable dessiné par<br />
la rivière Chhulungche Khola. Aux alentours<br />
de 4 600 m, on débouche, au pied des moraines<br />
qui permettent l’accès (!) à la mythique dent<br />
blanche, sur les aménagements du camp de<br />
base, invisibles jusqu’alors. Quelques lodges<br />
ont été construits à 2 km au sud, au lieudit<br />
Mingbo, et permettent de déjeuner.<br />
EXTENSION 2<br />
LES TROIS COLS<br />
Même si l’itinéraire décrit dans cette partie<br />
passe par trois cols, il ne doit pas être confondu<br />
avec l’itinéraire dit des « Trois cols », qui part<br />
du Khumbu pour rejoindre le camp de base<br />
du Makalu. Deux itinéraires sont possibles. Le<br />
premier <strong>fr</strong>anchit le Mera La (ascension possible<br />
du Mera Peak au passage) puis rejoint<br />
la vallée de la Honggu Khola pour enchaîner<br />
avec le West Col (6 143 m), puis le Sherpani<br />
Col (6 146 m), avant de descendre sur les vallées<br />
de Braun et de l’Arun. Le second emprunte<br />
l’itinéraire classique vers le camp de base de<br />
l’Everest, avant de bifurquer vers l’Amphu<br />
Lapcha (5 845 m), pour rejoindre la vallée de<br />
la Honggu Khola. Ces itinéraires tiennent autant<br />
de l’alpinisme que du trekking en raison de<br />
l’altitude et des passages sur glaciers. Ils<br />
demeurent techniquement accessibles, avec<br />
un guide expérimenté et avec une bonne condition<br />
physique.<br />
53
JIRI-LUKLA<br />
LE CHEMIN HISTORIQUE<br />
JUSQU’AUX ANNÉES 1980, LE TREK DU CAMP DE BASE DE L’EVEREST<br />
DÉBUTAIT DANS LES BASSES VALLÉES DU SOLU, AU NIVEAU DE JIRI. DEPUIS<br />
L’OUVERTURE, À MI-PARCOURS, DE L’AÉRODROME DE LUKLA, L’ITINÉRAIRE<br />
ORIGINEL EST TOMBÉ EN DÉSUÉTUDE, MAIS DEMEURE PRISÉ PAR LES<br />
VOYAGEURS DÉSIREUX D’ACCÉDER AU TOIT DU MONDE EN PARCOURANT<br />
UN NÉPAL PRÉSERVÉ DE LA FRÉNÉSIE TOURISTIQUE DU HAUT KHUMBU.<br />
BRIEUC COESSENS<br />
BRIEUC<br />
COESSENS<br />
Notre reporter a parcouru<br />
l’intégralité du sentier vers le<br />
camp de base, au départ de Jiri,<br />
quelques mois à peine après les<br />
séismes de 2015. De ce périple<br />
est né un documentaire,<br />
Splendeurs et tremblements,<br />
sur les chemins de l’Everest.<br />
youtu.be/PqiMDwYmY6s<br />
Si l’on a parcouru les sentiers de l’Everest<br />
depuis Lukla (trek classique ou haute<br />
route) vers le camp de base tant convoité<br />
sans connaissance préalable du Népal, on<br />
retiendra à jamais cette expérience unique<br />
d’une longue marche où la lenteur se met<br />
au service de l’émerveillement de tous les<br />
sens : les yeux, bien sûr, mais aussi l’ouïe,<br />
le goût et, plus subtilement, l’odorat ! Nul,<br />
sans doute, ne pourra oublier cette expérience<br />
touristique unique et si particulière<br />
– avant dosage de dépaysement, de rupture,<br />
d’accueil, d’aventure et d’imprévus – qui<br />
fait de cet « Everest Base Camp <strong>Trek</strong> » un<br />
must indiscutable.<br />
VOUS AVEZ DIT AUTHENTIQUE ?<br />
Mais en revenir pose forcément la question<br />
suivante : tout cela est-il encore « authentique<br />
», lorsque l’on sait que le sentier de<br />
l’Everest est <strong>fr</strong>équenté chaque année par<br />
près de trente-cinq mille marcheurs ? Poster<br />
un selfie sur Facebook depuis Gorak Shep<br />
(5 160 m) lors de l’ultime étape menant au<br />
camp de base reflète-t-il vraiment la réalité<br />
du Népal et, plus précisément, celle du<br />
peuple sherpa ? Si l’authentique évolue,<br />
alors il faut admettre que oui. Nourris par<br />
l’Everest depuis plus de soixante ans, les<br />
Sherpas se sont adaptés à la demande en<br />
proposant un accueil de pointe tout en préservant<br />
leurs coutumes, techniques et traditions.<br />
Un équilibre subtil qui est la clé de<br />
voûte du système touristique du Haut-<br />
Khumbu.<br />
Mais si ce modernisme, les avions de Lukla<br />
et les hélicos de Namche Bazar, les cybercafés,<br />
les smartphones, les processions de<br />
touristes, les « reggae bar » et « Irish pub »<br />
bordant le sentier dans ses premières<br />
étapes, vous laissent ce sentiment de<br />
n’avoir pas tout <strong>com</strong>pris, appliquez à la<br />
lettre le slogan du Népal « Once is not<br />
enough » (une fois ne suffit pas) et revenezy.<br />
Revenez-y par ailleurs et revenez-y<br />
autrement !<br />
ITINÉRAIRE HISTORIQUE<br />
Ailleurs, c’est à Jiri, pour <strong>com</strong>mencer.<br />
Autrement, c’est en bus, puis en huit jours<br />
de marche supplémentaires, seul ou presque,<br />
sans connexion Wi-Fi, sans réseau mobile,<br />
sans boutique à chaque détour de <strong>com</strong>be.<br />
Autrement, c’est aussi plus durement,<br />
54
À Shivalaya, au premier<br />
réveil, vue sur le massif du<br />
Gaurishankar et le Numbur.<br />
En bas : vers Jubing, on<br />
ramène le bois pour la<br />
cuisine. Plus haut dans le<br />
Khumbu, on verra les<br />
porteurs transporter<br />
des bouteilles de gaz.<br />
55
56
Moins de 5 % des randonneurs en route<br />
vers l’Everest se lancent aujourd’hui sur<br />
ce sentier historique, emprunté en 1953<br />
par Tenzing Norgay et Edmund Hillary<br />
moralement, physiquement… Plus éprouvant,<br />
plus accidenté, plus long, plus espacé,<br />
plus sauvage ! Que du bonus ! Ou presque…<br />
Car il y a aussi du « moins ». Moins de<br />
confort, certainement ! Moins d’ambiance,<br />
peut-être aussi ; ou une autre, indéniablement.<br />
Bref, revenez-y, mais différemment.<br />
N’en attendez pas autre chose. Le trek Jiri –<br />
Lukla – Camp de base de l’Everest, autrement<br />
dit le tracé historique vers l’Everest<br />
emprunté par l’expédition Tenzing-Hillary<br />
et désormais dénommé Tenzing-Hillary <strong>Trek</strong>,<br />
n’a rien à voir ni à envier au classique<br />
Everest Base Camp <strong>Trek</strong> ! Par ailleurs, il se<br />
suffit largement à lui-même pour découvrir<br />
un Népal profond, isolé du tourisme et préservé<br />
de ses travers, en plus d’être un voyage<br />
à part entière. En effet, moins de cinq pour<br />
cent des candidats au camp de base<br />
empruntent désormais ce circuit. Dès le<br />
départ de Jiri, on se sent dans une campagne<br />
sauvage et peu peuplée, parfois même hostile<br />
lorsque l’on se retrouve pour la première<br />
fois, de nuit, à traverser des villages encore<br />
meurtris par les séismes de 2015. Comme<br />
toujours, il va falloir s’habituer…<br />
VOYAGE EN MODE DÉTOX<br />
Mais dès le premier matin, le réveil à<br />
Shivalaya – carrefour de vallées et point<br />
d’entrée de la zone de conservation du<br />
Gaurishankar – redonne du baume au cœur<br />
par son animation et son paysage de carte<br />
postale. On traverse des champs verdoyants<br />
et des forêts luxuriantes au fil d’un sentier<br />
souvent bordé de cabanons qui, tous, font<br />
salon de thé et épicerie. On vous y accueille<br />
avec un sourire intéressé, parfois d’un regard<br />
interrogateur. Il faut négocier la photo, peutêtre<br />
la monnayer. Le touriste ici, est un<br />
animal rare. Alors, peut-être vous aussi<br />
hésiterez-vous à vous approcher de trop près<br />
des paysans, portant tous fièrement à la<br />
ceinture le fameux khukuri, le poignard traditionnel<br />
du Népal. Mais en plus de vous<br />
habituer aux cabanons, à la rupture de vos<br />
connexions diverses, vous vous habituerez<br />
aussi à cette profonde ruralité, et apprendrez<br />
vite que votre voyage s’enrichira grandement<br />
d’aller au contact, sans fausse<br />
pudeur et sans timidité. Respectez, soyez<br />
poli, intéressez-vous et prenez le temps. Le<br />
Tenzing-Hillary <strong>Trek</strong> ne se consomme pas,<br />
COMMENT Y ALLER ?<br />
Par la route uniquement !<br />
Environ 8 h de trajet depuis<br />
Katmandou, sur des chemins<br />
tortueux et chaotiques. Liaisons<br />
quotidiennes depuis Katmandou<br />
au départ de la gare routière de<br />
Ratna Park. Compter 750 NPR<br />
(6,20 €). Acheter son billet sur<br />
place la veille. Pauses régulières<br />
et « lunch stop ». On peut aussi<br />
recourir à un véhicule privé avec<br />
chauffeur, pour 25 000 NPR<br />
environ (200 €). Retour à<br />
Katmandou par le même<br />
itinéraire, ou en avion<br />
depuis Lukla (150 €).<br />
QUELS PERMIS ?<br />
Pour ac<strong>com</strong>plir le Tenzing<br />
Hillary <strong>Trek</strong> dans son intégralité,<br />
vous devrez vous acquitter<br />
de multiples taxes : l’inévitable<br />
carte TIMS (voir page 30),<br />
le permis d’entrée dans le<br />
parc national de Sagarmatha<br />
à Jorsale (30 €) mais aussi<br />
le permis d’entrée dans la<br />
zone de conservation du<br />
Gaurishankar à Shivalaya,<br />
que vous ne traverserez que<br />
durant 3 h !!! Étonnant, mais<br />
inévitable ! Ajoutez 20 € !<br />
L’APRÈS SÉISME<br />
Localisées dans le district de Dolakha, siège de l’épicentre du séisme du 12 mai 2015 (magnitude<br />
7,2), les premières étapes du TenzingHillary <strong>Trek</strong> traversent certains des secteurs les plus meurtris<br />
du pays. Six mois après la catastrophe, on pouvait constater que les habitants touchés avaient<br />
déjà entrepris de reconstruire, à la main, sans attendre l’arrivée d’une hypothétique aide financière.<br />
Une fois sorti de Jiri et ce jusqu’au Lamjura La, il n’existait plus la moindre auberge en dur pour<br />
accueillir les touristes. L’hébergement se fait donc dans des lodges « provisoires », cabanes en bois<br />
qui servent également d’habitations principales aux hôtes. Au vu de l’ampleur du travail de reconstruction,<br />
on peut penser que cette situation perdurera au moins encore quelques années même si,<br />
d’ores et déjà, tous les villages sont en mesure d’héberger les randonneurs en route vers l’Everest.<br />
À gauche, en haut : l’un des<br />
nombreux villages traversés<br />
durant les 8 heures de route<br />
entre Katmandou et Jiri.<br />
En bas : en descendant<br />
de Bandhar vers le fond<br />
de vallée de la Likhu Khola.<br />
57
Cidessus : entre Jiri et<br />
Lukla, le labourage des<br />
champs en terrasses,<br />
s’effectue généralement<br />
à l’aide de dzos, issus<br />
du croisement de<br />
vaches et de yacks.<br />
Le chemin procure le sentiment grisant de<br />
découvrir une région sauvage et préservée,<br />
sur laquelle le temps n’a aucun cours<br />
OÙ DORMIR ?<br />
Même peu <strong>fr</strong>équentées par les<br />
touristes, et fortement impactées<br />
par les séismes, les étapes du<br />
Tenzing Hillary <strong>Trek</strong> disposent<br />
de toutes les <strong>com</strong>modités<br />
nécessaires : lodges sommaires<br />
(cabanes « provisoires ») entre<br />
Jiri et Jumbesi et nombreuses<br />
tea houses en bordure du<br />
chemin. Compter <strong>10</strong>0 NPR/nuit,<br />
50 NPR la bouteille d’eau,<br />
300 NPR le dal bhat… On s’en<br />
sort largement à moins de<br />
1 500 NPR/jour (12 €) jusqu’à<br />
Lukla, où les prix montent en<br />
flèche.<br />
il se déguste avec sagesse et c’est de cette<br />
façon qu’il est le meilleur !<br />
Passés ces premières constatations, on<br />
entame un voyage intérieur, renforcé par<br />
l’absence de touristes et la proximité immédiate<br />
avec les habitants du secteur – Sherpas,<br />
mais aussi Raïs, Tamangs, Newars… Chaque<br />
jour, vous serez surpris de la disponibilité<br />
des gens, même de ceux qui auraient tout<br />
perdu dans les séismes ! Chaque jour, vous<br />
regarderez devant vous le paysage en appréhendant<br />
les milliers de mètres de dénivelées<br />
à avaler, mais vous vous habituerez<br />
aussi, <strong>com</strong>prenant vite qu’ici, marcher est un<br />
mode de vie, une nécessité, et que, <strong>com</strong>me<br />
tous ceux qui vivent là, vous n’en avez pas<br />
le choix. Vous trouverez votre rythme, posé,<br />
et vous oublierez de vous presser…<br />
UN NÉPAL TRADITIONNEL<br />
Chaque hameau, chaque terrasse de champ<br />
est l’occasion de s’arrêter, d’observer, de<br />
respirer ! De contempler, aussi, une infinité<br />
de montagnes et des paysages chaque jour<br />
renouvelés ! De s’imprégner d’un mode de<br />
vie rural traditionnel et de techniques séculaires,<br />
aux accents préindustriels. À part le<br />
ballet matinal des rotations aériennes entre<br />
Katmandou et Lukla, ou un rare tracteur<br />
parfois croisé, le chemin entre Jiri et Lukla<br />
procure le sentiment grisant de découvrir<br />
une région méconnue, sauvage, préservée,<br />
sur laquelle le temps n’a aucun cours.<br />
On y dort dans de minuscules auberges à<br />
peine dotées de trois lits, de douze volts<br />
d’électricité et d’un unique foyer de terre<br />
sèche. On finit par se sentir non plus seul,<br />
58
Famille regroupée autour<br />
du foyer dans un lodge au<br />
Lamjura La (3 530 m).<br />
En bas : Solitude et<br />
recueillement dans la<br />
gompa de Taksindu.<br />
59
La longue descente vers<br />
Jumbing et le fond de vallée<br />
de la Dudh Khosi, dernière<br />
en date avant la lente<br />
ascension vers Lukla.<br />
Un caractère initiatique nécessaire, à l’heure<br />
où le trek de l’Everest se consomme en<br />
moins de deux semaines de congés payés<br />
UN PLAN B ?<br />
Cet itinéraire peut être<br />
une alternative au retour<br />
à Katmandou par avion depuis<br />
Lukla, notamment en cas<br />
d’interruption des liaisons<br />
aériennes LuklaKatmandou.<br />
Un bon moyen de rencontrer<br />
une part de l’âme du Népal<br />
et de plonger dans l’intimité<br />
du quotidien de son peuple<br />
avant de retrouver la capitale.<br />
mais unique, et l’on prend conscience de<br />
vivre des moments rares, privilégiés.<br />
« Authentiques » ? Certainement !<br />
On peut visiter les monastères de Taksindu,<br />
de Jumbesi, de Kharikhola sans autre<br />
Occidental à proximité, et même être invité<br />
à prendre part à une puja, une cérémonie<br />
bouddhiste. Discrètement et sans fard. Ici,<br />
les hommes sont pauvres et l’on n’affiche<br />
pas sa foi avec autant de luxure et d’ostentation<br />
qu’au pied de l’Everest. Expérience<br />
intérieure, toujours…<br />
L’EVEREST INITIATIQUE<br />
Expérience évolutive aussi. Sur le plan social,<br />
d’abord, car plus on avance, plus on sent<br />
poindre l’influence de l’Everest Business :<br />
des lodges et des maisons de plus en plus<br />
cossus, des groupes de porteurs, des caravanes<br />
de mules, des touristes de plus en plus<br />
nombreux… Expérience physique, enfin. Car<br />
avec près de 8 000 mètres de dénivelée positive<br />
et autant à descendre, on a mal ; mais plus<br />
on avance, moins les courbatures se font sen -<br />
tir. Même, on s’acclimate lentement, avec un<br />
passage à 3 600 mètres d’altitude notamment.<br />
Par sa diversité et sa difficulté, si le trek historique<br />
de l’Everest au départ de Jiri peut<br />
parfois paraître long, il n’en revêt pas moins<br />
un caractère initiatique, nécessaire pour<br />
aborder le Haut-Khumbu dans une logique<br />
de découverte, de curiosité et d’ouverture,<br />
logique de plus en plus rare à l’heure où<br />
l’EBC <strong>Trek</strong> se consomme en moins de deux<br />
semaines de congés payés, aller-retour<br />
Paris-Lukla <strong>com</strong>pris !<br />
60
LA ROUTE HISTORIQUE - 8 JOURS<br />
JIRI – LUKLA<br />
Très peu <strong>fr</strong>équentée depuis que l’aérodrome<br />
de Lukla a permis de raccourcir l’itinéraire vers<br />
le camp de base de l’Everest de deux semaines,<br />
la portion entre Jiri et Lukla demeure l’approche<br />
privilégiée des puristes.<br />
ÉTAPE 1 / JIRI – SHIVALAYA<br />
3 h 30 / +450 m / 600 m<br />
Première courte journée de mise en jambes pour<br />
rejoindre Shivalaya, de l’autre côté de la Khimti<br />
Khola, en <strong>fr</strong>anchissant un premier (petit) col.<br />
ÉTAPE 2 / SHIVALAYA – BANDHAR<br />
5 h / + 900 m / 500 m<br />
Ça grimpe ! En direction de Deurali, perché à<br />
2 700 m d’altitude sur la crête d’où l’on redescend<br />
sur Bandhar, étape du soir.<br />
ÉTAPE 3 / BANDHAR – KINJA<br />
4 h / +<strong>10</strong>0 m/ 700 m<br />
Descente facile vers les rives de la Likhu Khola,<br />
que l’on remonte pour aller passer la nuit à<br />
Kinja ou à Sete, un peu plus haut si l’on veut<br />
s’économiser la grosse montée du lendemain,<br />
ou gagner un jour sur l’itinéraire global.<br />
ÉTAPE 4 / KINJA – GOYAM<br />
6 h / +1 600 m<br />
Une grosse étape de montée (1 600 m), que<br />
l’on avalera à son rythme, aucune descente<br />
n’étant au programme. Nuit à 3 200 m.<br />
ÉTAPE 5 / GOYAM – RINGMO<br />
7 h / + 600 m / 850 m<br />
On <strong>fr</strong>anchit le Lamjura La (3 530 m) pour redescendre<br />
sur Junbesi, vers les sentiers de plus<br />
en plus <strong>fr</strong>équentés du Solu Khumbu. Descente<br />
possible vers Phaplu / Salleri, aérodrome,<br />
liaison vers Katmandou. Dans l’aprèsmidi,<br />
poursuite vers Ringmo (2 700 m).<br />
ÉTAPE 6 / RINGMO - KARIKHOLA<br />
7 h / +800 m / 1 500 m<br />
Au petit matin, on <strong>fr</strong>anchit le Taksindu La (3 070 m),<br />
où le ballet des bimoteurs annonce l’entrée<br />
dans la vallée de l’Everest. On redescend pour<br />
<strong>fr</strong>anchir la Dudh Khosi (1 500 m) et passer la<br />
nuit à Kharikhola (2 000 m), en rive gauche.<br />
ÉTAPE 7 / KARIKHOLA – POYAN<br />
4 h / +1 000 m / 250 m<br />
On remonte sur Bupsa pour <strong>fr</strong>anchir le Kari<br />
La (2 820 m) et rejoindre Poyan, où l’on peut<br />
faire étape si l’on n’a pas le cœur à « tracer »<br />
sur Lukla directement.<br />
ÉTAPE 8 / POYAN – LUKLA<br />
2 h 30 / +750 m / 750 m<br />
Première partie en « nepali flat » (le plat<br />
népalais qui ne fait que monter et descendre)<br />
jusqu’au Chutok La (2 770 m), avant de plonger<br />
vers Surke (2 300 m), puis de remonter sur<br />
Lukla (2 800 m).<br />
61
Un fleuve (gelé) qui abrite<br />
un itinéraire unique dans<br />
l’hiver himalayen. Le Chadar<br />
demeure l’un des itinéraires<br />
le plus étonnants qui soit<br />
dans le panthéon du trek…<br />
ZANSKAR<br />
L’ESPRIT<br />
CHADAR<br />
JEAN-MARC PORTE<br />
MAGISTRALEMENT DÉVOILÉS DANS LES ANNÉES 1980, LES<br />
MONDES SINGULIERS DU LADAKH ET DU ZANSKAR EN HIVER<br />
ONT RÉVÉLÉ L’UN DES ITINÉRAIRES LES PLUS ATYPIQUES DE<br />
L’HIMALAYA : LE FLEUVE GELÉ, CONNU LOCALEMENT SOUS<br />
L’APPELLATION CHADAR. RETOUR SUR UN ITINÉRAIRE<br />
D’EXCEPTION, ET PETIT EXERCICE DE PROSPECTIVE SUR<br />
SES ALTERNATIVES POSSIBLES, EN RÉCIT ET EN CARTES.<br />
62
63
JEAN-MARC<br />
PORTE<br />
Après un premier<br />
périple sur le fleuve gelé<br />
au début des années 2000,<br />
JeanMarc est reparti au<br />
Zanskar en plein hiver,<br />
utilisant à nouveau les<br />
glaces <strong>com</strong>me voie de<br />
passage entre le Changtang<br />
et la rivière Zanskar.<br />
1983. Coup de tonnerre dans l’univers du<br />
voyage, mais pas seulement : avec la publication<br />
de Deux hivers au Zanskar. Le talent du photographe<br />
<strong>fr</strong>anco-suisse Olivier Föllmi entrouvre<br />
les portes de l’une des régions des plus isolées<br />
de la planète Himalaya. Révélation majeure :<br />
en séjournant à plusieurs reprises dans l’hiver<br />
des monastères et des villages de cet ancien<br />
royaume bouddhiste, enserré autour de sa haute<br />
plaine centrale par un chaos tectonique le séparant<br />
rigoureusement de la vallée de l’Indus et<br />
du Ladakh, Olivier, en solo, puis avec sa <strong>com</strong>pagne<br />
Danielle, va non seulement tomber profondément<br />
amoureux du mode de vie isolé et<br />
de la sagesse des Zanskaris. Mais apprendre, parfois<br />
au bord de la survie que la malédiction hivernale<br />
des cols d’altitude bloqués par la neige, ici,<br />
possède pour les habitants eux-mêmes une<br />
unique et extraordinaire alternative : les gorges<br />
de la puissante rivière Zanskar.<br />
LA RÉVÉLATION DU CHADAR<br />
Un itinéraire incroyable autant qu’éphémère. Un<br />
court-circuit d’ombre et de glace à la fois évident<br />
et engagé. Durant quelques courtes semaines,<br />
entre janvier et février, les eaux tumultueuses de<br />
la Zanskar se figent provisoirement à l’ombre des<br />
défilés. Pour les Zanskaris, c’est le temps du<br />
Chadar. Une fenêtre temporaire pour un allerretour<br />
possible de quelque cent dix kilomètres au<br />
cœur de l’hiver et du <strong>fr</strong>oid, rompant, de grottes<br />
en villages, pour les marchandises <strong>com</strong>me pour<br />
les hommes, l’étau de l’isolement. En 1989, Olivier<br />
va emprunter cet axe pour conduire, jusqu’à<br />
l’école de Leh, Motup et Diskit, deux enfants<br />
confiés par un couple de paysans zanskaris. Le<br />
livre relatant ce Chadar peu banal, Le Fleuve gelé,<br />
sera salué par Life Magazine <strong>com</strong>me de l’une des<br />
« plus belles aventure humaines du XX e siècle ». Et<br />
sera ré<strong>com</strong>pensé par un World Press Photo.<br />
Pour les grands voyageurs ? Cette révélation des<br />
univers du fleuve gelé devient vite une réelle<br />
tentation. Et dès l’hiver 2000, des agences <strong>fr</strong>ançaises<br />
(Allibert et Terres d’Aventure) proposent<br />
l’itinéraire dans leur catalogue. Une « aventure »<br />
aussi exclusive que difficile à cerner, versant<br />
mode d’emploi, pour les premiers élus. L’appren -<br />
tissage du Chadar et de ses mondes <strong>com</strong>mence.<br />
À quoi ressemble la formidable barrière<br />
himalayenne en hiver ? Et l’isolement de Leh,<br />
64
COMMENT<br />
Y ALLER ?<br />
Les routes rejoignant<br />
Leh et la haute vallée<br />
de l’Indus depuis Manali,<br />
Srinagar et Kargil sont<br />
fermées pendant l’hiver<br />
durant une période de<br />
six à huit mois selon<br />
les années. Accès aérien<br />
uniquement. Vols réguliers<br />
DelhiLeh sur plusieurs<br />
<strong>com</strong>pagnies, dont<br />
Air India et Jet Airways.<br />
De 200 à 500 €.<br />
FORMALITÉS<br />
Visa tourisme indien<br />
(90 jours) + passeport<br />
valable 6 mois après la<br />
date d’entrée. 140 € et<br />
une heure de saisie pour<br />
remplir le formulaire<br />
électronique. Attention :<br />
photos format « indien »<br />
5x5 uniquement. Autre<br />
élément à ne pas oublier :<br />
les formules iVisas indiens<br />
(préenregistrement<br />
sur le net et délivrance<br />
à Delhi) ne sont pas<br />
valables pour la région<br />
du Jammu & Kashmir.<br />
CARTES<br />
ET GUIDES<br />
→ Deux cartes « solides »<br />
et précises (GPS Grid) :<br />
les séries Olizane<strong>Trek</strong>king<br />
Map LadakhZanskar au<br />
1:150 000. Feuilles Centre<br />
+ Sud. www.olizane.ch<br />
→ Peu d’infos sur le<br />
Chadar dans les guides de<br />
voyages. Quelques pages<br />
dans le <strong>Trek</strong>s au Ladakh<br />
Zanskar d’Élodie et<br />
Rambert Jamen<br />
(Éditions Glénat).<br />
Page de gauche : les<br />
atmosphères de bivouac<br />
font partie des grands<br />
moments du Chadar.<br />
Page de droite : dans<br />
les sections centrales du<br />
Chadar, les échappatoires<br />
n’existent pas. En cas de<br />
mauvaise météo (neige)<br />
ou de fonte des glaces,<br />
l’itinéraire peut devenir…<br />
problématique.<br />
65
Attention et entraide :<br />
les passages délicats se<br />
négocient… à plusieurs.<br />
Mettre un pied dans<br />
l’eau ? Désagréable, mais<br />
gérable. Passer à l’eau ?<br />
La figure est interdite,<br />
par moins 20 °C…
Les chörtens du col de<br />
Yar La (5 000 m), le point<br />
haut de la liaison hivernale<br />
ancestrale entre le<br />
Changtang indien<br />
(lac Tso Kar) et la Khurna<br />
Chu (ou Karnak Chu).<br />
UNE FRÉQUENTATION EN BAISSE ?<br />
Après une hausse exponentielle et très internationale (Amérique et Europe…) de sa <strong>fr</strong>équentation,<br />
le nombre total de marcheurs empruntant l’intégralité de l’itinéraire a baissé ces cinq dernières<br />
années. Le dernier « phénomène » Chadar concerne majoritairement le tourisme… indien. Chadar<br />
« express » ? Les groupes de nationaux, en forte hausse, ne s’engagent que pour deux ou trois<br />
nuits, en un bref allerretour sur la partie aval de l’itinéraire.<br />
accessible uniquement en avion. Aux questions<br />
sur l’équipement (crampons ? bâtons ?) et le <strong>fr</strong>oid<br />
(-<strong>10</strong> °C ? -20 °C ? -30 °C ?) s’ajoutent celles sur les<br />
bivouacs (grottes ou tentes ?), les incertitudes<br />
sur l’état de la rivière (est-ce que la glace sera<br />
là ?), la météo (que se passe-t-il en cas de fortes<br />
chutes de neige ?)…<br />
UNE AVENTURE MAJUSCULE<br />
L’équation délicate de ces premières, sur un itinéraire<br />
pourtant familier aux Zanskaris, se termine<br />
dans l’enthousiasme. Le cocktail Chadar<br />
est réellement unique. La progression sur la glace.<br />
Les « paysages » fermés, d’une fixité et d’une<br />
minéralité magnifiée par l’hiver. Les mouvances<br />
et les sons de l’eau sous la « surface ». Les pièges<br />
potentiels et les glissades assurées du « chemin ».<br />
L’isolement réel de certaines sections des gorges.<br />
Les passages un peu délicats sur des portions de<br />
falaises, lorsque la rivière elle-même n’est pas<br />
suffisamment gelée. Tout est neuf. Inattendu.<br />
Unique. La gestion du <strong>fr</strong>oid. Le son des lourds<br />
bâtons qui sondent la glace avec chaque pas. Des<br />
rencontres avec les groupes de Zanskaris engagés<br />
sur leur Chadar jusqu’aux énormes bûchers<br />
qu’enflamment les équipes de porteurs à la<br />
tombée de la nuit (le bois flotté et sec, qui<br />
s’amoncelle sur certains coudes des rives, est<br />
pour beaucoup la bénédiction inattendue des<br />
nuits passées dans les gorges), les petites<br />
angoisses du départ sont balayées.<br />
Mais par-dessus tout, bien au-delà des soucis<br />
« techniques », de Lingshed à Karsha, les heures<br />
et les nuits passées dans les villages zanskaris<br />
of<strong>fr</strong>ent aux voyageurs quelques <strong>fr</strong>agments précieux<br />
de la vie quotidienne en hiver des habitants<br />
et des moines. Pour beaucoup, la vaste<br />
plaine de Padum recouverte par la neige dans<br />
un écrin de sommets devient l’image même de<br />
l’Himalaya hivernal. Le Chadar, seul itinéraire<br />
LE POINT MÉTÉO<br />
On considère généralement,<br />
indépendamment des aléas<br />
sur la rivière proprement<br />
dite (le trajet peut passer<br />
de « bon » à « mauvais »<br />
en quelques jours et inversement…)<br />
que l’itinéraire<br />
est praticable au mieux<br />
deux mois, chaque année,<br />
entre janvier et février.<br />
Moyenne des températures<br />
à Leh sur cette<br />
période : 2 °C. L’Ouest<br />
himalayen bénéficie en<br />
hiver d’une météo calme<br />
(hautes pressions sur de<br />
longues périodes, mêlées<br />
de flux de sudsudouest,<br />
généralement par périodes<br />
de 3 à 4 jours, avec passages<br />
nuageux entraînant des<br />
chutes de neige souvent<br />
mineures (pas toujours)<br />
très inégalement réparties<br />
selon les versants). Les<br />
hauteurs de neige, en<br />
altitude, sont généralement<br />
très inférieures<br />
à nos repères alpins.<br />
LE LADAKH<br />
EN HIVER ?<br />
La <strong>fr</strong>équentation de Leh<br />
en hiver n’a rien à voir avec<br />
son rythme estival. L’accès<br />
terrestre est impossible.<br />
Tout (ou presque) est<br />
fermé. Seuls quelques<br />
guesthouses ou cybercafés<br />
demeurent ouverts.<br />
Les Occidentaux présents<br />
sont en général sur place<br />
pour réaliser une Chadar,<br />
visiter les nombreux<br />
monastères de la vallée<br />
(Hemis, Shey, Alchi…) ou<br />
assister aux festivals des<br />
monastères tout proches<br />
de Stock ou Matho.<br />
www.reachladakh.<strong>com</strong>/<br />
festival_dates.htm<br />
67
ZANSKAR<br />
LES FLEUVES GELÉS<br />
CHILING<br />
Les rivières gelées de la Zanskar et de la Khurna Chu<br />
constituent des itinéraires époustouflants pour découvrir<br />
l’ambiance sauvage des vallées du Zanskar en hiver.<br />
Guru Do<br />
Tilat Sumdo<br />
SKIU<br />
LE CHADAR<br />
12 À 14 JOURS<br />
<strong>10</strong>5 KM X 2 (AR)<br />
Nierak<br />
Comptez un peu moins de<br />
deux semaines pour l’allerretour<br />
entre Chilling et Padum.<br />
DÉPART / ARRIVÉE<br />
Route jusque la jonction<br />
ZanskarIndus, à 25 km de Leh,<br />
puis piste jusqu’à Tilat Sumdo,<br />
peu après le village de Chilling.<br />
ITINÉRAIRE<br />
Il suffit de remonter la rivière.<br />
Les camps et bivouacs, ainsi que<br />
les affluents et villages se répartissent<br />
ainsi depuis Chilling :<br />
Tilat Sumdo (départ), grottes<br />
de Dar, Padar Chomo, Tip<br />
Yokma (camp 2), Zang Bochi,<br />
Nierak (village), Lingshed Do,<br />
Amlung, grottes de Nigra,<br />
Tsarak Do, Killema, Hamonil<br />
(village), Pichu (village),<br />
Karsha (village), Padum.<br />
PIDMO<br />
PICHU<br />
ZANGLA<br />
Charchar La<br />
(4 900 m)<br />
Khurna Sumdo<br />
Tilit Sumdo<br />
Lalung Tokpo<br />
JOUR PAR JOUR<br />
→ Jour 1 : Tilat Tsumdo <br />
Shingra Yokma (4 à 5 h).<br />
→ Jour 2 : Shingra Yokma <br />
Tip Yokma (6 à 7 h).<br />
→ Jour 3 : Tip Yokma <br />
Nierak Pulu (6 à 7 h).<br />
→ Jour 4 : Nierak Pulu <br />
Lingshed (5 h).<br />
→ Jour 5 : Lingshed <br />
Tsarak Do (6 à 7 h).<br />
→ Jour 6 : Tsarak Do <br />
Pichu (6 à 7 h).<br />
→ Jours 7 et 8 : Pichu Karsha<br />
ou Padum (3 600 m) (5 à 4 h).<br />
→ Jour 9 : Retour de Karsha<br />
à Pichu (5 h).<br />
→ Jour <strong>10</strong> : Pichu <br />
Changdo (5 à 6 h).<br />
→ Jour 11 : Changdo <br />
Nierak Pulu (5 à 6 h).<br />
→ Jour 12 : Nierak Pulu /<br />
Padar Chomo (5 à 6 h).<br />
→ Jour 13 : Padar Chomo /<br />
Chilling (2 à 3 h + retour<br />
sur Leh).<br />
KARSHA<br />
PADUM<br />
Route<br />
Fleuve gelé<br />
Sentier<br />
Shapodak La<br />
(4 900 m)<br />
68
LEH<br />
SHEY<br />
LA TRAVERSÉE<br />
TSO KAR<br />
ZANSKAR<br />
22 JOURS / 220 KM<br />
MARKHA<br />
Rabrang La<br />
(4 900 m)<br />
Stok Kangri<br />
(6 153 m)<br />
Zalung Karpo La<br />
(5<strong>10</strong>0 m)<br />
Dat<br />
Tantse<br />
Kang Yatse<br />
(6 394 m)<br />
MATHO<br />
HEMIS<br />
RUMTSE<br />
UPSHI<br />
DÉPART / ARRIVÉE<br />
Départ du lac Tso Kar<br />
(4 600 m), accessible en jeep<br />
depuis Leh. Arrivée à Guru Do,<br />
à la confluence de la Markha et<br />
de la rivière Zanskar (3 300 m).<br />
ITINÉRAIRE<br />
Cet itinéraire engagé nécessite<br />
de solides connaissances en<br />
termes de montagne, d’orientation,<br />
de gestion ou de logistique.<br />
Et une équipe locale sérieuse.<br />
Compter 15 jours environ pour<br />
la traversée proprement dite,<br />
trois à quatre semaines en<br />
intégrant l’acclimatation<br />
et le préacheminement.<br />
JOUR PAR JOUR<br />
→ Jour 1 : Tso Kar vallée<br />
de la Zara, en direction<br />
de Yakang (4 500 m).<br />
→ Jour 2 : Yagang. Repos<br />
dans le village.<br />
→ Jour 3 : Yagang Lungmoche<br />
(6 h). Nuit dans les bergeries.<br />
→ Jour 4 : Passage du col du<br />
Yar La (4 940 m, 7 h).<br />
Nuits en bivouac.<br />
→ Jour 5 à 7 : village de Dat<br />
(4 400 m), avec les nomades.<br />
→ Jour 8 : Début de la descente<br />
des gorges de la Khurna Chu :<br />
Dat Tanze Sumdo (5 h).<br />
→ Jour 9<strong>10</strong> : Descentes des<br />
gorges (6 h/j). Bivouacs.<br />
→ Jour 11 : Campement à<br />
Lalung Tokpo. Allerretour<br />
en direction des cols du<br />
Shapodakh La et/ou Lar La.<br />
→ Jour 12 : Lalung Tokpo <br />
Khurna Sumdo (4 <strong>10</strong>0 m 7 h).<br />
→ Jour 13 : Repos et/ou<br />
allerretour vers le Rabrang<br />
La (vallée de la Markha).<br />
→ Jour 14 : Repos et/ou<br />
allerretour au CharChar La<br />
(grottes d’Anchu Chengmo).<br />
Camp dans les grottes (8 h).<br />
→ Jour 1516 : Jonction vers<br />
Tilat Sumdo (rivière Zanskar)<br />
puis Guru Do (confluence<br />
Markha/Zanskar) (7 h + 9 h).<br />
Retour le lendemain sur Leh.<br />
Yar La<br />
(4 940 m)<br />
Lac Tso Kar<br />
69
Sur la Khurna Chu<br />
(ou Karnak Chu),<br />
l’un des autres fleuves<br />
gelés de la zone,<br />
affluent de la Zanskar.<br />
À LIRE<br />
→ Les ouvrages d’Olivier<br />
Föllmi restent la plus<br />
magnifique introduction<br />
aux mondes de l’Himalaya<br />
en hiver. Entre autres,<br />
Deux hivers au Zanskar<br />
pour la partie Jumlam ; ou<br />
pour le Chadar, Le fleuve<br />
gelé, éditions de la Martinière,<br />
1990 et rééditions.<br />
→ Plus pointu ? Pour<br />
approcher l’esprit et la<br />
culture des nomades du<br />
Chang Tang, l’ouvrage en<br />
anglais de Rinpoche<br />
Namkhai Norbu, Journey<br />
Among the Tibetan Nomads,<br />
est une somme sensible<br />
et érudite. Écrit sur des<br />
terres très différentes<br />
(région de Sertha/Kham),<br />
l’ensemble reste parfaitement<br />
valable pour saisir<br />
l’essence de ces mondes.<br />
Journey among the Tibetan<br />
Nomads, An Account of<br />
a Remote Civilisation,<br />
Library of Tibetan Works<br />
& Archives, 1997.<br />
70<br />
hivernal « facilement accessible » en Himalaya,<br />
accède de facto au statut de trek… exceptionnel.<br />
FENÊTRE MÉTÉO<br />
Le Chadar va prendre son rythme de croisière<br />
dans les années 2000. Un véritable mythe en passe<br />
de devenir un itinéraire rodé et « facile » ? Voire.<br />
En plusieurs épisodes, les conditions météo vont<br />
se rappeler au bon souvenir de quelques individuels<br />
et groupes d’agences. En 2005, fortes chutes<br />
de neige. Plus question de circuler dans les gorges<br />
dominées par d’impressionnantes pentes : le<br />
risque objectif d’avalanche fige net des dizaines<br />
de voyageurs à Padum. Évacuation en hélico pour<br />
certains. Vols retours retardés de quelques jours,<br />
le temps que les pentes se purgent, pour d’autres.<br />
Le scénario inverse, côté température, existe :<br />
réchauffement climatique ou simple épisode local<br />
de relatif redoux, en 2011, les conditions d’englacement<br />
du Chadar furent suffisamment mauvaises<br />
pour dissuader plusieurs groupes de<br />
s’engager au-delà de Guru Do. Plutôt facile techniquement<br />
(dénivelée ridicule, et « pas glissé »<br />
économe), l’extraordinaire Chadar demeure bien,<br />
quoi qu’on en dise, un itinéraire potentiellement<br />
engagé : les contes et légendes zanskaris font<br />
suffisamment la part belle aux voyageurs piégés<br />
dans les gorges par l’absence de glace (et toujours<br />
miraculeusement sauvés par le retour du <strong>fr</strong>oid,<br />
« les dieux sont vainqueurs ! ») pour oublier que<br />
le chemin est par nature… éphémère.<br />
LA FIN D’UN MYTHE ?<br />
Cette dernière décennie, une tout autre menace<br />
pèse sourdement, sur l’existence même du<br />
Chadar : la construction d’une route reliant<br />
Shilling à Padum. Le chantier de cette « all season<br />
paved road » est engagé depuis 2007. Le Zanskar<br />
n’est accessible – l’été – que par une unique route<br />
(depuis Kargil) : à l’image d’autres projets locaux<br />
(route et tunnel du Rothang La, depuis Manali)<br />
visant au désenclavement « stratégique » du<br />
Zanskar, le tracé grignote très lentement les rives<br />
des points de départ (au-dessus de Shilling) et<br />
d’arrivée (en aval de Zangla). Le Chadar est passé<br />
en mode obsolescence programmée ? Si la fin<br />
de l’isolement absolu des gorges n’est pas pour<br />
demain, et si l’on peut même douter de l’ouverture<br />
de cette route en hiver, l’ombre de ce<br />
chantier a modifié pour beaucoup (cf. encadré<br />
« Une <strong>fr</strong>équentation en baisse ») l’aura du lieu,<br />
écorné également par la concentration de
prétendants sur un itinéraire aux points de<br />
bivouacs (grottes notamment) limités. La « problématique<br />
» de la route est à la fois une malédiction<br />
pour les marcheurs (rarement pour les<br />
populations) et, à l’image du Népal, une excellente<br />
occasion d’aller voir plus loin.<br />
VALLÉES SECONDAIRES<br />
Un œil sur les cartes. Et une oreille aux savoirs<br />
des Zanskaris suffit : les vallées secondaires de<br />
la Zanskar possèdent bien évidemment toutes<br />
leurs propres « fleuves gelés ». Des itinéraires<br />
moins connus. Moins <strong>fr</strong>équentés, y <strong>com</strong>pris par<br />
les Zanskaris eux-mêmes. Mais d’un isolement<br />
quasi absolu. Parmi les exemples les plus évidents<br />
: la branche de la Kargyag, qui remonte vers<br />
le Shingo La, la Tsarap, la Doda, la Lungnak ou<br />
la haute vallée de la Marka et de la Jumlam<br />
demeurent de vastes réservoirs à « l’esprit<br />
Chadar ». Tout autant que les bordures nord (secteurs<br />
entre Lamayuru et Photoskar) du royaume,<br />
sans oublier, au nord de l’Indus même, les vallées<br />
de la Nubra ou de la Shyok. Dans ce vaste<br />
répertoire de possibles, une solide piste existe<br />
déjà : la « vieille » jonction depuis les hauts plateaux<br />
du Changtang (lac Tso Moriri) vers la<br />
Zanskar, via la vallée de la Zara, le col de Yar La<br />
(4 940 m…) et la Khurna Chu a été parcourue en<br />
2008. Vingt-et-un jours de marche pour traverser<br />
les solitudes des mondes nomades des hauts<br />
plateaux et s’engager dans les dédales d’autres<br />
fleuves gelés. Possible ? Il suffit de regarder les<br />
cartes : à partir de Leh, sous les immensités silencieuses<br />
de l’hiver himalayen, des dizaines de<br />
Chadar potentiels sommeillent encore…<br />
Les troupeaux et les<br />
bergères du clan de<br />
Karnak rejoignent<br />
leur campement<br />
temporaire dans<br />
le village de Dat.<br />
71
IL ÉTAIT UNE FOIS…<br />
LE CHADAR<br />
« JULAY ! » ET SOURIRES. GLISSADES PAR -20 °C ET COR-<br />
RIDORS DE GEL. VILLAGES ET MONASTÈRES. AU FIL D’UN<br />
CHADAR, L’ÉCRIN TITANESQUE DE L’HIVER HIMALAYEN<br />
CHANGE DE MASQUE, LE TEMPS D’UN ITINÉRAIRE<br />
D’EXCEPTION, AUSSI ÉPHÉMÈRE QU’EMPLI DE VIE…<br />
EST-CE<br />
DIFFICILE ?<br />
Une fois passé quelques<br />
jours à Leh (3 700 m),<br />
le Chadar ne pose aucun<br />
problème d’acclimatation :<br />
les dénivelées quotidiennes<br />
n’excèdent pas 50 à <strong>10</strong>0 m<br />
sur un parcours « plat »,<br />
étagé entre 3 200 et<br />
3 700 m… sur une semaine.<br />
C’est tout simplement<br />
l’itinéraire de montagne…<br />
le plus plat du monde !<br />
Il est 17 heures passées. L’ombre qui nous<br />
ac<strong>com</strong>pagne depuis des heures semble se renforcer<br />
avec la tombée de la nuit et la venue d’un<br />
autre <strong>fr</strong>oid. Fin de journée sur le fleuve gelé. Assis<br />
sur un rocher poli, au bord de la langue de sable<br />
clair, regarder les hautes falaises, les volutes de<br />
synclinaux <strong>fr</strong>acturés. Là-haut, à cinq cents mètres<br />
au-dessus du niveau de la rivière, tout est encore<br />
au soleil. Rêve d’entomologiste ? Se sentir épinglé<br />
au fond d’un décor titanesque, arasé de lumière<br />
claire dont aucune chaleur pourtant ne parviendra<br />
jusqu’à nous… Voyage au pays des<br />
ombres ? Un genévrier qui se découpe au bord<br />
des couleurs d’une crête lointaine. Le jeu des<br />
strates suspendues dans l’air. Le croissant de la<br />
lune pâle a disparu des quelques minces degrés<br />
de ciel « ouvert » au-dessus de notre étrange<br />
monde de falaises et de glace : cette nuit, une<br />
nouvelle année tibétaine <strong>com</strong>mence.<br />
UN HIVER EN HIMALAYA<br />
Se raccrocher à l’altitude ; 3 370 mètres qui ne<br />
veulent rien dire au fil horizontal du fleuve… Et<br />
au nom du lieu : Tasrak Do. Tasrak Do ? Le « coin<br />
où l’on file vite ». Pour les Zanskaris, la réputation<br />
de ce campement n’est plus à faire, toute<br />
d’histoires de gelures subites, doigts et oreilles<br />
confondus. Bref : le coin le plus <strong>fr</strong>igo du Chadar.<br />
Nous avons de la chance, ce soir, il fait bon. À<br />
vue de nez, un petit -20 °C… En regardant les<br />
lueurs des feux s’élever des abris de roche sous<br />
les falaises, chercher vainement à retrouver les<br />
images « d’avant ». La réalité, ou peut-être plus<br />
justement encore l’irréalité <strong>com</strong>plète de la rivière<br />
gelée a subverti tout imaginaire. Même le mot<br />
de « trek » ne convient plus : le Chadar est un<br />
monde en soi, qui finit par ne plus se signifier<br />
que de lui-même…<br />
Mémoires de cette défaite magnifique ? Un vol<br />
72
Grande ambiance : chutes<br />
(légères) de neige et ciel pâle,<br />
à la sortie de l’itinéraire,<br />
en amont de Tsarak Do.<br />
L’ouverture de la grande<br />
plaine de Padum est à une<br />
journée de marche encore…<br />
73
sur Leh, en hiver. Par le hublot, regarder naître<br />
des plaines brumeuses du Pendjab les contreforts<br />
de l’Himalaya. Les Nun-Kun. Rêver de reconnaître<br />
les géants de l’est, K2 ou Nanga Parbat.<br />
L’infini des reliefs qui s’installe, finissant par<br />
excaver de lumière jusqu’à la courbure du globe.<br />
Ce jour-là, le Boeing a fait demi-tour à la verticale<br />
de la vallée de l’Indus. La piste de Leh n’était<br />
pas en condition. Choc encore, passé cet allerretour<br />
improbable : l’hiver de Leh. La lumière<br />
d’or le soir dans le bazar. Les échoppes de souvenirs<br />
et les hôtels fermés. Plus tard, sous les<br />
arches de roche du monastère d’Hemis, transfiguré<br />
d’hiver, des enfants, sur le ruisseau gelé,<br />
glissent accroupis sur de petits traîneaux de bois.<br />
Me demander si bientôt, nous serons aussi<br />
habiles à maîtriser nos propres glissades…<br />
LE CHEMIN DES GLACES<br />
Un 28 janvier. Nous sommes à Chilling. Chilling<br />
<strong>com</strong>me point de départ du Chadar ? Sur ce linceul<br />
gelé, que nous sommes allés toucher du<br />
bout de nos bottes si timidement tout à l’heure,<br />
je regarde progresser un homme. Chargé d’un<br />
fagot, il passe, légère silhouette, semblant<br />
presque danser, exactement là où je n’imaginerais<br />
même pas mettre les pieds… Je me souviens<br />
que la rivière, ce soir-là, était tout entière dans<br />
mon esprit une appréhension d’inconnu…<br />
30 janvier. Sensations nouvelles. Les heures de<br />
marche entre l’ombre <strong>fr</strong>oide, magnifique, des<br />
falaises. L’apprentissage du « laisser-aller » très<br />
attentif des pas sur la glace. Les silhouettes<br />
rapides des porteurs. Les éclats de blanc et<br />
d’émeraude du fleuve. Au kaléidoscope des<br />
lumières et des contrastes, des ombres et des<br />
formes, répondent sans cesse de folles harmonies<br />
sonores, toutes jouées de glace et d’eau.<br />
Bruits de torrents et de rapides, de lents ressacs<br />
aussi, jusqu’à <strong>fr</strong>ôler, parfois, des semblants<br />
de bord de mer. Résonance des pas et de nos<br />
bâtons de rose sauvage, du simple glissement<br />
aux sourdes résonances pas très amicales.<br />
Parfois, c’est la « banquise » elle-même qui rugit,<br />
dans une brève et invisible convulsion, rehaussée<br />
d’autres silences. Rire avec les porteurs, de nos<br />
magistrales pertes d’équilibre, de nos chutes et<br />
de nos figures libres. Ne pas trop rire, encore,<br />
de certains passages au bord des rives. La langue<br />
de glace qui se faufile contre le rocher. Parfois<br />
guère plus d’un mètre. Attention maximale, souvent,<br />
lorsque la surface, <strong>fr</strong>acturée à force de passages,<br />
se gorge d’eau. Regarder sans y croire<br />
certains porteurs se déchausser et traverser pieds<br />
nus. Ne pas trop rire non plus de certaines sentes,<br />
qui remontent parfois au détour de barres<br />
rocheuses, au-dessus de la rivière… Et ne surtout<br />
pas imaginer lorsque la débâcle interdit<br />
d’utiliser le linceul du fleuve, à quoi peut ressembler<br />
un « mauvais » Chadar…<br />
UN THÉ AU MONASTÈRE<br />
Lundi 3 février. Village de Lingshed. Une matinée<br />
de marche à l’écart de la Zanskar, à remonter<br />
dans les gorges étroites, hier. Des arbres (!). La<br />
neige si cristalline. Les enfants en file indienne<br />
sur le chemin. Corvée de bois, sourires amusés.<br />
Nanouche est remplie d’émotion : visiter ce village<br />
en hiver, après tant d’étés de « passages »,<br />
est au cœur même de son Chadar. Le thé au<br />
monastère. Sa fierté de nous faire visiter la nouvelle<br />
nonnerie qu’elle a financée. La grande<br />
maison où nous nous sommes installés. Dans le<br />
paysage, depuis la terrasse surchargée de<br />
réserves de bois : la silhouette d’un cavalier rentrant<br />
chez lui. Le tissage des sentiers entre les<br />
fermes. Penser longtemps, dans la cuisine<br />
sombre où nous préparons le repas du soir (boudins<br />
grillés, à base de sang de chèvre et de<br />
tsampa…) à l’invraisemblable « permanence » de<br />
APPRENDRE À MARCHER SUR LA GLACE…<br />
Tenté par le Chadar ? Alors il va vous falloir… apprendre à marcher ! Et à maîtriser le fameux « pas Chadar »,<br />
un « glisséretenu » alternatif, assez déconcertant (<strong>com</strong>me avec les patins sur le parquet de bellemaman, les<br />
pieds ne quittent presque jamais le contact au sol), ac<strong>com</strong>pagné au choix d’appuis sur bâtons télescopiques<br />
ou, mieux encore, sur un solide bâton de bois… qui servent également de sonde (sonore) permettant<br />
d’apprécier la solidité de la glace.<br />
Page de gauche :<br />
à 3 500 m d’altitude,<br />
la gompa (monastère)<br />
de Karsha est entourée<br />
d’une cascade de cellules<br />
monastiques accrochées<br />
à la montagne, face à<br />
Padum. En hiver, l’activité<br />
monastique ne désarme<br />
pas : près de 300 moines<br />
y résident…<br />
EST-CE<br />
DANGEREUX ?<br />
On ne risque rien sur<br />
les glaces du Chadar, en<br />
faisant un peu attention.<br />
Tous les incidents (<strong>fr</strong>acture<br />
de la couche de glace) se<br />
passent aux abords des<br />
rives, particulièrement<br />
près des blocs rocheux<br />
affleurants. Indice évident<br />
de ces zones <strong>fr</strong>agiles :<br />
une glace non translucide,<br />
cassante en surface <strong>com</strong>me<br />
des assiettes, et qui semble<br />
<strong>com</strong>posée de milliers<br />
de cristaux en « dents<br />
de requin ». Les passages<br />
les plus « engagés » sont<br />
souvent des passages sur<br />
berges, où des sentes<br />
raides peuvent passer<br />
parfois 20 à 30 m audessus<br />
de l’eau, dans des ressauts<br />
rocheux ou des dalles<br />
recouvertes de neige.<br />
QUEL<br />
ÉQUIPEMENT ?<br />
Duvet 20 °C minimum,<br />
système trois couches,<br />
veste en duvet, gants,<br />
bonnets, etc. Il ne fait pas<br />
« toujours » 30 °C, loin<br />
de là, mais s’arrêter une<br />
heure à l’ombre, poser<br />
un camp ou marcher tôt<br />
le matin sont des moments<br />
parfois cinglants en termes<br />
de <strong>fr</strong>oid. Crampons ?<br />
Marcher « rigide » sur<br />
cet itinéraire (en rupture<br />
évidente avec l’esprit<br />
des lieux…) est à la fois<br />
possible et… <strong>fr</strong>ustrant.<br />
75
DES BOTTES ?<br />
Dans les gorges, les<br />
chaussures en cuir sont à<br />
proscrire, que ce soit en<br />
raison des passages à gué<br />
ou des « faux pas » pos <br />
sibles à travers la glace. À<br />
notre modeste avis, il existe<br />
plus efficace que les bottes<br />
« canadiennes » (Sorel ou<br />
Kamik). Soit sur le marché<br />
local, les bottes blanches<br />
de l’armée indienne. Soit<br />
des bottes d’alpinisme,<br />
type Davai (voire Everest)<br />
de chez Millet.<br />
DANS LE SAC…<br />
Singularité du Chadar : il<br />
est très sage de transporter<br />
dans son sac le nécessaire<br />
pour se changer (intégralement)<br />
en cas de passage<br />
à l’eau, toujours possible…<br />
Mais aussi pour avoir de<br />
quoi rester confortablement<br />
« posé » pour manger<br />
un morceau et boire un<br />
thé au beurre par 20 °C<br />
à l’ombre, avec un petit<br />
vent <strong>fr</strong>ais en prime…<br />
la vie si loin de nos propres mondes. S’ancrer<br />
jour après jour dans ce qui pour nous est nulle<br />
part ? Et regarder ces mondes de l’hiver himalayen<br />
vivre, <strong>com</strong>me un luxe sans nom du voyage.<br />
Quelques jours plus tard. Quitter Lingshed pour<br />
retrouver le fleuve, en croisant les doigts derrière<br />
les porteurs qui foncent par crainte des avalanches.<br />
Transfiguration du paysage : il a (un peu)<br />
neigé. La rivière est immobile, monochrome.<br />
Deux jours encore dans ce décor si étrangement<br />
apaisé, avant de sortir, petit à petit, de l’univers<br />
si particulier des gorges.<br />
UNE CARAVANE EN HIVER<br />
La plaine vers Padum qui s’ouvre lentement. Les<br />
fermes silencieuses d’Anomil. Des stupas dans<br />
l’immensité, sous l’horizon des hautes montagnes.<br />
Après Pichu, le voyage finit par prendre<br />
des allures de véritable caravane. Chevaux dans<br />
la lumière. Vertige d’espace libre. Regarder de très<br />
loin avancer les silhouettes de notre équipe dans<br />
ce fantastique silence. Vendredi 7. Karsha. L’appel<br />
de la trompe au monastère. La puja des moines.<br />
En brûlant des bouses de yacks dans un poêle à<br />
kérosène, écouter la rumeur des rues de gel, assis<br />
sur une terrasse. Les cris des enfants. Des animaux.<br />
De ces heures d’étrange dé<strong>com</strong>pression<br />
après le « tunnel » du fleuve, tout le monde, dans<br />
notre petit groupe, mesurer la puissance des jours<br />
passées à <strong>fr</strong>ôler la vie forte et simple des<br />
Zanskaris, entre nos étonnements et la « normalité<br />
» (pour eux) de ce chemin de glace. Paysans<br />
allant vendre le beurre à Leh. Familles entières<br />
ou groupes de villageois. Nos mémoires étaient<br />
peuplées de furtifs et joyeux échanges. Du goût<br />
mêlé du <strong>fr</strong>oid et du thé au beurre de yack. De<br />
« julay » sonores lancés en avant de toutes ces<br />
improbables rencontres sur le fleuve gelé…<br />
AVEC QUI PARTIR ?<br />
En France, les agences<br />
Tamera et Allibert <strong>Trek</strong>king<br />
sont aujourd’hui les seules<br />
à proposer l’itinéraire du<br />
Chadar, sur 21 à 24 jours,<br />
au départ de Paris. Un<br />
contact ? David Ducoin,<br />
aujourd’hui chez Tamera,<br />
qui a parcouru cet itinéraire<br />
à plusieurs reprises<br />
et qui saura vous conseiller<br />
efficacement.<br />
bit.ly/chadartamera<br />
Passages les plus délicats ?<br />
Les bords de falaises, les<br />
lignes de jonction rocherglace.<br />
Sur certains secteurs,<br />
il est même parfois<br />
nécessaire de quitter<br />
le lit de gel proprement<br />
dit, pour remonter sur<br />
le flanc des gorges…<br />
LIRE LA GLACE<br />
Les qualités d’englacement varient du poli parfait, translucide et plan, aux crevasses, zones enneigées,<br />
<strong>fr</strong>acturées, voire recouvertes d’eau… Deux niveaux se mêlent toujours : une lecture visuelle et sonore.<br />
Plus ça sonne mat, plus la glace est épaisse. À l’inverse, les « bong » creux de certains secteurs incitent à la<br />
rapidité… voire au demitour ! Parfois, des couches d’eau emprisonnées entre deux niveaux de glace fissurent<br />
la surface. Ça craque un peu partout autour de vous, on accélère alors le pas, et ça passe (très bien) !<br />
76
Étape possible sur<br />
l’itinéraire : le village<br />
de Lingshed, à une petite<br />
journée en marche en<br />
rive gauche, permet de<br />
(re)prendre pied avec<br />
la vie hivernale des<br />
Zanskaris. Ici, dans la<br />
nonnerie du village.<br />
77
L’AUTRE TRAVERSÉE<br />
DES GLACES<br />
TRAVERSER LES PLATEAUX DU CHANGTANG EN HIVER.<br />
PUIS REJOINDRE LE ZANSKAR PAR LES GORGES DE LA<br />
KHURNA CHU. TROIS SEMAINES DE PROGRESSION, ENTRE<br />
SOLITUDE ET RENCONTRES NOMADES. UN ITINÉRAIRE<br />
D’AMPLEUR ISOLÉ ET EXIGEANT, QUE LES ANCIENS<br />
CHANGPAS CONNAISSENT POURTANT TOUJOURS…<br />
C’EST OÙ ?<br />
Cette traversée se déroule<br />
au sud de Leh (Himalaya<br />
indien), dans la chaîne<br />
du Zanskar. Elle démarre<br />
au niveau du lac Tso Kar,<br />
pour aboutir à la sortie<br />
des gorges de la rivière<br />
Zanskar, tous deux accessibles<br />
en jeep depuis Leh.<br />
Les routes vers le Ladakh<br />
étant fermées l’hiver, on<br />
atteindra Leh uniquement<br />
par avion.<br />
Leh, 24 janvier. Nous sommes venus discuter<br />
une dernière fois dans la maison de Meme<br />
Tchunik, un nomade « retraité » de la vallée de<br />
Korzok, aux marges du Changtang et du Rupshu.<br />
« Mais bien sûr ! Il arrivait, en cas de trop fortes chutes<br />
de neige, que nous quittions les hauts plateaux pour<br />
rejoindre le Zanskar ! Nous marchions soit sur Phuktal,<br />
puis Kharsha, en suivant la Tsarap… Soit sur Chilling,<br />
en empruntant les glaces de la Karnak Chu [ou Khurna<br />
Chu, ndlr]. Mais c’était il y a tellement longtemps<br />
maintenant… Plus personne n’a fait ça depuis des<br />
années et des années… » Reprendre à nouveau ces<br />
itinéraires. Côtoyer nomades et troupeaux<br />
changpas dans l’hiver immense de l’altitude, vers<br />
le lac Tso Kar. S’engager en grand vers le <strong>fr</strong>oid et<br />
les solitudes, dans les traces quasi oubliées des<br />
clans de Khorzok ou de Karnak. Relier des <strong>fr</strong>agments<br />
de mondes, entre les routes tibétaines du<br />
Ngari et celles du Ladakh, en un exercice aussi<br />
imaginaire désormais qu’immense et libre…<br />
Pourquoi pas ?<br />
DU GIVRE DANS LES LUNETTES<br />
26 janvier. Allongé sur la surface de glace sans<br />
fin, bras en croix, laisser le regard glisser à l’envers<br />
sur les horizons bleus du ciel et du lac Tso<br />
Kar désormais réunis. Étoiles de givre dans les<br />
lunettes. Magie sauvage des troupeaux de kiangs,<br />
à peine dérangés par notre présence. Mais entre<br />
le <strong>fr</strong>oid (-30 °C) et l’altitude (4 500 m), notre petite<br />
balade d’acclimatation finit par devenir une<br />
bavante à elle toute seule. Le passage du col, hier,<br />
à pousser les jeeps indiennes dans la neige, était<br />
vraiment limite. Un regret ? La brièveté des rencontres<br />
avec les nomades, à Puga. Les fumerolles<br />
des sources chaudes. Les chevaux. Les thés sous<br />
les tentes de laine, à discuter de la rigueur de<br />
cet hiver, des droits de pâturages ancestraux, des<br />
liens avec le Tibet et la poche de Tchi Mur, l’ancien<br />
axe d’entrée des caravanes tibétaines vers<br />
l’Indus, désormais reconvertie en zone de contrebande<br />
et de passage pour les réfugiés…<br />
30 janvier. Trois jours pour rejoindre le hameau<br />
de Yagang, en suivant l’axe de la Zara Chu. À vue :<br />
l’horizon de hautes falaises marquant les reliefs<br />
à venir du Zanskar. En été, Yagang est le quartier<br />
général des nomades de Khurna. Mais en ce<br />
moment, il n’y a strictement… personne. Derrière<br />
nous : suffisamment d’espace vide et de gel pour<br />
ne pas ressentir – presque – une ombre d’angoisse.<br />
Les sacs à pleine charge. La neige plus<br />
profonde que ce que nous attendions. La fatigue<br />
et le lent cisaillement du <strong>fr</strong>oid. Nous avançons<br />
<strong>com</strong>me des fourmis épinglées sur l’immensité<br />
de ces déserts blancs, vides, bluffant de beauté.<br />
Palme de l’étrangeté : la traversée de la route de<br />
78
Un itinéraire hivernal<br />
atypique. Exigeant. Mais<br />
si vous aimez les grandes<br />
solitudes… vous n’avez<br />
quasiment aucune chance<br />
de rencontrer âme qui vive<br />
sur 5 à 6 jours, à partir de<br />
l’entrée dans la Khurna Chu<br />
(ou Karnak Chu) depuis<br />
Dat jusqu’à la Zanskar.<br />
79
Manali. Comme des gamins, nous galopons tous<br />
sur les cinq cents mètres du ruban d’asphalte<br />
dégagé par le vent, histoire de ne pas manquer<br />
ce bout de route inutile, noyé d’un hiver qui ne<br />
mène plus nulle part…<br />
LE VIEUX CHANGPA<br />
Palme de l’improbable : ce matin, nous avons<br />
croisé Meme. Avec son chien et sa besace, le vieux<br />
Changpa arpente les solitudes en éclaireur, pour<br />
les zones de pâturages. Ce soir, il rentre droit sur<br />
Dat, où il est attendu. « Vous allez là-bas aussi ?<br />
Le clan y est installé, mais nous partons bientôt. Il<br />
faut que nous montions plus haut, sur Tandse Sumdo.<br />
Le col du Yar La ? Pas de soucis… ! Vous verrez. Il faut<br />
juste suivre le mur ! » Le mur ? Sans trop bien <strong>com</strong>prendre,<br />
nous finissons dans la soirée, entre thés<br />
brûlants et énormes bols de thukpa, par abandonner<br />
notre option « gorges de la Tsarap », pour<br />
effectivement nous diriger vers Dat. Nous tournons<br />
le dos à six jours minimum en aller-retour,<br />
sans trop de regret : dans trois jours, si tout va<br />
pour le mieux, nous rejoindrons… la vie des<br />
hommes.<br />
1 er février. Le (sublime) col du Yar La (4 900 m) est<br />
<strong>fr</strong>anchi en fin de matinée. Ce point haut était un<br />
réel enjeu pour nous. Il ne nous reste désormais<br />
plus… qu’à descendre. Les tentes sont posées face<br />
à la déferlante immense qui monte désormais<br />
devant nous, mélange d’aiguilles de Chamonix,<br />
de tours du Paine et de canyons américains. Notre<br />
dernière nuit dans les bergeries de Lungmoche<br />
est presque (déjà) oubliée. Par un petit -40 °C,<br />
jamais nous n’aurons eu si <strong>fr</strong>oid. Progression neige<br />
jusqu’aux genoux. Et puis nous avons suivi le mur.<br />
Un fabuleux cadeau de pierre d’un mètre par un<br />
mètre, rasant la surface des neiges, serpentant<br />
de part et d’autre du col. Cet ouvrage génial,<br />
auto-nettoyé par les vents, date de quelque trente<br />
ans. Et garantit aux troupeaux <strong>com</strong>me aux<br />
hommes, en cas de chutes de neige, de pouvoir<br />
quitter la nasse immaculée des plateaux.<br />
AVEC LES NOMADES<br />
5 février. La scène ne va durer que quelques<br />
minutes. Elle marquera l’un de nos plus forts souvenirs<br />
de ces semaines. Depuis trois jours, nous<br />
vivons à l’heure de Dat. Une trentaine de familles,<br />
toutes générations confondues. Les troupeaux<br />
de chèvres et de yacks, les chevaux. Les grands<br />
mouvements du cheptel qui s’égaillent chaque<br />
matin dans les vallées alentour. Les chants des<br />
bergères qui reviennent avec l’ombre du soir. Les<br />
deux jeunes moines-gardiens du monastère où<br />
nous dormons. Le dédale des maisons de pierre<br />
et des enclos où nous finissons par avoir nos<br />
repères, nos haltes. Le programme très simple,<br />
plein de chaleur : invitations, thés, rires, <strong>fr</strong>omages<br />
et pains ronds, photos, viandes séchées, farniente<br />
et récupération. Mais ce matin est un grand jour<br />
pour nos hôtes. Il est 5 h 30 du matin. Partout, on<br />
s’active dans la nuit. Chevaux et yacks bâtés en<br />
une poignée de minutes : avec les premières<br />
lueurs de l’aube, c’est le village entier qui se met<br />
en route sous nos yeux. Grands « dju dju»heureux,<br />
noyés d’ombres bleues, mêlés aux crissements<br />
des sabots sur la neige gelée. Grands aux<br />
revoirs de la main. Sur un yack, un môme qui<br />
ne doit pas avoir deux ans, émerge à peine des<br />
couvertures. Il doit faire un bon -20 °C. La scène<br />
va durer cinq minutes, jusqu’à ce que la caravane<br />
entière disparaisse au premier coude de la<br />
vallée. Le silence qui revient d’un trait. En retournant<br />
vers le village totalement déserté, nous partageons<br />
quelques mots maladroits sur<br />
l’impensable « liberté » des peuples nomades…<br />
UN RÉEL ENGAGEMENT<br />
Hormis le (redoutable) duo <strong>fr</strong>oidaltitude, l’itinéraire ne présente pas de difficultés particulières en termes<br />
de marche. L’enneigement sur les hauts plateaux ne nécessite pas l’emploi de raquettes… Quant aux<br />
dénivelées, elles sont très raisonnables, voire quasi nulles sur les sections gelées. Reste que : les conditions<br />
de glace sur la partie basse de l’itinéraire, les possibilités de mauvais temps sur les plateaux d’altitude (vent,<br />
notamment), ou encore les risques d’avalanches en cas de fortes chutes de neige dans les gorges englobent<br />
ce vaste itinéraire d’une aura spécifique : contrairement au Chadar, ici, l’isolement et l’autonomie sont<br />
absolus sur 95 % de l’itinéraire.<br />
Nomade du clan de<br />
Karnak, Meme Tsundup<br />
est l’un des patriarches<br />
qui guide les familles<br />
et les troupeaux vers<br />
les maigres pâturages<br />
dispersés sur les<br />
plateaux d’altitude…<br />
S’ACCLIMATER<br />
La première partie de<br />
l’itinéraire est nichée à plus<br />
de 4 500 m, soit 1 500 m<br />
plus haut que « le fleuve<br />
gelé », qui n’est déjà pas<br />
une simple balade estivale.<br />
L’altitude de ce point de<br />
départ nécessite donc<br />
réellement un début<br />
d’acclimatation d’une<br />
poignée de jours à Leh<br />
ou dans ses environs.<br />
NB : envisager cet itinéraire<br />
« à l’envers », dans<br />
le sens ZanskarChangtang<br />
est possible. Mais le trek,<br />
dans ce sens, perdrait –<br />
à notre avis – l’essentiel<br />
de sa magie…<br />
ATTENTION À<br />
L’ÉQUIPEMENT !<br />
Difficile de se contenter<br />
d’àpeuprès sur ce<br />
chapitre. Équipement<br />
trois couches type expé,<br />
grosses polaires et/ou<br />
doudounes, masques et<br />
gants d’altitude, duvets<br />
grands <strong>fr</strong>oids (30 °C à<br />
40 °C) indispensables.<br />
Variante au GoreTex ?<br />
Une grosse chuba (le<br />
manteau traditionnel<br />
ladakhi), de très bonne<br />
qualité, convient parfaitement<br />
aux conditions rencontrées…<br />
Pour les chaussures,<br />
les remarques<br />
sont les mêmes que<br />
pour le Chadar.<br />
81
Fiers <strong>com</strong>me des<br />
gamins ? Nos porteurs<br />
zanskaris étaient aux<br />
anges de renouer avec<br />
un très ancien itinéraire<br />
hivernal, délaissé depuis<br />
de nombreuses<br />
décennies…<br />
QUELLES<br />
TEMPÉRATURES ?<br />
Attention au <strong>fr</strong>oid intense,<br />
lié à un passage de col à<br />
près de 5 000 m et aux hauts<br />
plateaux du Changtang du<br />
début de l’itinéraire.<br />
Lorsque nous avons<br />
effectué ce trek entre la<br />
fin janvier et la mifévrier,<br />
les températures les plus<br />
basses (de nuit) descendaient<br />
sous les 40 °C, au<br />
niveau des bergeries de<br />
Lungmoche.<br />
BIVOUACS<br />
Contrairement encore<br />
au Chadar, les bivouacs en<br />
grottes sont quasi absents.<br />
Tout se passe sous tente,<br />
sauf quelques nuits dans<br />
des bergeries ou villages.<br />
À partir des gorges proprement<br />
dites, les stocks de<br />
bois flotté sur les rives<br />
permettent d’établir de<br />
très confortables feux<br />
à chaque campement.<br />
LE DÉSERT ABSOLU<br />
9 février. Jours de « relâche » à Khurna Sumdo.<br />
Nous sommes depuis six jours pleins les otages<br />
des gorges proprement dites. Encerclés. Enfermés.<br />
Débordés. Écrasés. De cataractes de falaises, de<br />
plissements, d’aiguilles, d’arches et de dalles suspendues<br />
au-dessus de nos têtes… Et sur cette<br />
dernière section de notre petite balade, pourquoi<br />
ne pas l’écrire, nous pétons les plombs de bonheur.<br />
Cette partie de l’itinéraire du Jumlam (traversée<br />
Zanskar-Indus par les cols) a débuté avec<br />
une météo douteuse. Mais la crainte lancinante<br />
des grosses chutes de neige et des avalanches<br />
est derrière nous : après le jour blanc et les<br />
ambiances monochromes, le grand bleu est<br />
revenu. Les strates orange-ocre-jaune explosent<br />
vers le ciel. Certains saules, dans les bosquets,<br />
bourgeonnent… Un peu partout, des traces de<br />
léopard des neiges. De loups. Des troupeaux de<br />
bharals perchés sur les arêtes.<br />
À part cela : l’isolement est absolu. Depuis des<br />
jours, nous n’avons croisé aucune présence ni<br />
trace de quoi que ce soit d’humain. Image ? Nous<br />
fonçons vers les vacances, sur une autoroute<br />
déserte, qui semble n’être là rien que pour nous.<br />
Et la mer n’est pas loin. La preuve ? Il ne fait plus<br />
-35 °C, mais un doux -<strong>10</strong> °C. Les sacs, réserves de<br />
nourriture quasi épuisées, semblent ultra-légers.<br />
Nous sommes passés d’une concentration plutôt<br />
« tendue » à une dolce vita hors catégorie. La progression<br />
sur les zones gelées est plus facile que<br />
sur la Zanskar. Il y a moins de débit, et la glace<br />
occupe parfois l’intégralité du fond des gorges…<br />
Pieds mouillés ? Pas grave ! Les chaussettes trempées<br />
(puantes) et les chaussons de feutre finissent<br />
toujours par fumer, piqués sur des bâtons audessus<br />
de foyers parfumés au genévrier.<br />
RENTRÉE DANS L’ATMOSPHÈRE<br />
Fin de la pression ? Nous profitons de chaque<br />
embranchement pour remonter les affluents…<br />
Une journée vers le col de Shapodak, en direction<br />
du Lar La. Une journée vers le Charchar La, qui<br />
redescend sur Zangla, Pishu, Karsha et Padum. Ou<br />
vers le Rabrang La, qui repart sur la Markha…<br />
Après l’engagement et les incertitudes des<br />
semaines passées, ces dernières longueurs dans<br />
l’hiver du Zanskar sont d’une immense liberté.<br />
Tous les porteurs ne pensent plus qu’à la manière<br />
dont ils vont, eux, raconter « leur » traversée.<br />
Histoire de marquer le coup, sur notre carte, Targye<br />
a même baptisé, très modestement, le dernier<br />
bivouac à son nom : « Targye Lungpa » !<br />
13 février. Une rentrée dans l’atmosphère ? Assis<br />
sur un rocher, regarder sans trop savoir quoi dire<br />
le flot vert émeraude de la Zanskar, face aux porteurs<br />
rayonnants. Pour eux, peut-être plus que<br />
pour nous encore, le retour de ce long voyage<br />
était empreint d’une vraie fierté. La virée était<br />
longue. Aventureuse dans le meilleur sens du<br />
terme. Et pouce levé, le plus vieux d’entre eux<br />
s’est fendu d’un immense sourire. Et, hilare, a<br />
posé en anglais son avis final sur notre histoire :<br />
« Fucking beautiful trip »…<br />
82
Solitudes par 30 °C ?<br />
Troupeau de kiangs, les<br />
ânes sauvages du Tibet,<br />
sur le lac Tso Kar, point<br />
d’entrée de l’itinéraire,<br />
à 4 500 m d’altitude.<br />
83
LE SPITI<br />
EN FAMILLE<br />
IMPENSABLE DE VOYAGER EN HIMALAYA AVEC DES<br />
ENFANTS EN BAS ÂGE ? INSTALLÉS DANS LE SUD<br />
DE L’INDE DEPUIS 2015, RINA ET NICK ONT PARCOURU<br />
LA VALLÉE DU SPITI AVEC SALEM, DEUX ANS, ET NIL,<br />
CINQ ANS. UNE APPROCHE EN FAMILLE DES HAUTES<br />
MONTAGNES, DES GRANDS ESPACES DÉSERTS ET DES<br />
MONASTÈRES BOUDDHISTES DE CULTURE TIBÉTAINE.<br />
RINA<br />
NICK<br />
84
INDE<br />
Randonnée jusqu’aux<br />
lacs de Dashair et<br />
Dhankar. Deux ans<br />
dans la fournaise des<br />
plaines indiennes nous<br />
avaient fait oublier<br />
jusqu’à l’existence de<br />
la sensation de <strong>fr</strong>oid…<br />
85
En bas à gauche :<br />
bénédiction et procession<br />
ac<strong>com</strong>pagnant le lama<br />
Govind, ermite des<br />
montagnes du Kinnaur.<br />
Au centre : Nil fait<br />
connaissance avec un<br />
petit veau ; l’une des joies<br />
élémentaires du voyage pour<br />
un enfant de cinq ans.<br />
À droite : un mani,<br />
une pierre gravée<br />
de mantras tibétains,<br />
déposé en of<strong>fr</strong>ande<br />
au monastère de Tabo.<br />
86
INDE<br />
La rivière Spiti depuis<br />
le toit du monastère de<br />
Tashi Choling, à Dhakar.<br />
Salem, deux ans, et<br />
autres bambins de<br />
Dankhar, en bordure<br />
d’un enclos abritant<br />
des animaux.<br />
87
INDE<br />
Nous pensions<br />
rejoindre le Spiti<br />
par le nord,<br />
COMMENT<br />
Y ALLER ?<br />
Vols internationaux pour<br />
New Delhi avec la plupart des<br />
<strong>com</strong>pagnies internationales.<br />
Vols domestiques pour Kullu,<br />
à 40 km de Manali, avec<br />
Air India, un vol quotidien<br />
du lundi au vendredi.<br />
REJOINDRE<br />
LE SPITI<br />
→ Depuis Manali et le Lahaul,<br />
par les cols du Rohtang La<br />
et Kunzum La, une grosse<br />
journée de route jusqu’à<br />
Kaza. La route est fermée<br />
huit mois de l’année, les auto <br />
rités indiennes garantissent<br />
l’ouverture du col entre<br />
juillet et fin septembre.<br />
→ Depuis Shimla, par<br />
l’HindustanTibet Highroad<br />
qui longe la rivière Sutlej,<br />
trois jours de route. La<br />
route est ouverte de mars<br />
à décembre, avec souvent<br />
de longs détours dus aux<br />
glissements de terrain,<br />
accidents ou fortes neiges.<br />
Si vous souhaitez explorer<br />
la région du Kinnaur, le<br />
guide Frommer’s India<br />
invite à diverses visites<br />
et écarts de la route.<br />
via les cols du Rohtang La (3 978 m) et Kunzum<br />
La (4 590 m). Mais d’abondantes neiges les maintiennent<br />
fermés et ce sont trois jours de voiture<br />
par la vallée de la Sutlej et la région du Kinnaur<br />
qui nous conduiront au Spiti. La route, découpée<br />
à flanc de montagne, est impressionnante. Elle<br />
est à l’image de l’emprise que l’homme exerce<br />
sur ces hautes montagnes. Les cours d’eau sont<br />
détenus par de colossaux barrages, tel le<br />
« 1 000 mégawatts » et son slogan scandé tout au<br />
long de la route « no dream too big » (aucun rêve<br />
trop grand). Des villes entières ont été bâties pour<br />
loger les travailleurs des centrales recluses, on y<br />
trouve école, hôpital, hauts immeubles pour les<br />
ouvriers et villas avec jardinets pour les cadres.<br />
CAHOTS ET CHAOS<br />
Dans les hautes vallées agricoles, les enseignes<br />
des <strong>com</strong>merces indiquent « seeds and pesticides ».<br />
Des panneaux signalent l’arrêt de la circulation<br />
à horaires fixes, trois fois par jour, pour le dynamitage<br />
de la roche. En bord de route des ma -<br />
chines réduisent la pierre en gravier. Une cascade<br />
est exploitée en lave-auto ! La route nécessite<br />
un constant entretien. Les montagnes assaillies<br />
se rebellent, les glissements de terrain arrachent<br />
des pans de route, d’énormes rochers écrasent<br />
les engins de chantier : aplatis <strong>com</strong>me des crêpes,<br />
ils sont abandonnés sur les bas-côtés… Chique -<br />
naudes de la montagne à l’opiniâtre domination<br />
humaine. Des torrents d’eau dévalent la pente.<br />
Des visions époustouflantes se succèdent.<br />
La région, <strong>fr</strong>ontalière de la Chine (ancien Tibet),<br />
est classée Restricted area : camps militaires et<br />
checkpoints ponctuent la route. Nous faisons<br />
halte à Rekhong Peo (2 500 m) pour y faire établir<br />
notre permis de circuler. Cahots et chaos<br />
nous rendent malades… Cœurs et estomacs<br />
balancent… Mais les habitants du Kinnaur ont<br />
belle et fière allure. Ils portent l’habit traditionnel.<br />
Nombreux sont les ateliers de tisserands filant<br />
Sur les bords de la<br />
rivière Spiti dans la<br />
campagne de Tabo,<br />
dans la partie aval<br />
de la vallée.<br />
88
la laine, de couturiers taillant sur mesure vestes<br />
et toques, de brodeurs et d’artisans bijoutiers.<br />
Nous manquons ostensiblement d’élégance à<br />
leurs côtés !<br />
EN TERRE BOUDDHISTE<br />
La circulation s’interrompt. Un lama retiré dans<br />
les montagnes voisines, est descendu bénir la<br />
population, son cortège bloque la route et un rituel<br />
s’organise. Nous nous arrêtons à Nako (3 600 m),<br />
sur les contreforts du Reo Purgyil (6 816 m) ; nous<br />
prenons de la hauteur ! Le village n’abrite que<br />
deux guest-houses et la vie paysanne y est<br />
conservée. Aux petites maisons sont accolés les<br />
enclos des animaux. Nil et Salem caressent les<br />
ânes, veaux et chèvres. De petites parcelles de<br />
culture sont irriguées par un réseau de canaux.<br />
Et tout autour les montagnes et le ciel sont majestueux.<br />
Nous nous rendons au monastère et y<br />
retrouvons le lama ermite ! Les chants des villageois<br />
l’accueillent, des jeunes filles parées lui<br />
servent le thé et font brûler des feuilles résineuses<br />
de cyprès. Au milieu de cette cérémonie, nous<br />
recevons la bénédiction du lama.<br />
Royaume minéral et porte céleste, la rivière Spiti<br />
annonce l’entrée dans le territoire du même<br />
nom. Nous passons une semaine à Tabo<br />
(3 280 m) : heureux d’être arrivés ! La toute petite<br />
ville <strong>com</strong>porte une école primaire et son pensionnat<br />
logeant les enfants des villages isolés,<br />
ainsi qu’un dispensaire médical. Au Spiti, la<br />
densité de population n’est que de deux habitants<br />
par kilomètre carré, contre trois cent<br />
quatre-vingt-deux pour l’ensemble de l’Inde. Le<br />
lieu est célèbre pour son ancien monastère<br />
bouddhiste. Construction de terre datant de<br />
l’an 996 dont l’intérieur est peint de magnifiques<br />
<strong>fr</strong>esques. Le site attend d’être classé au<br />
patrimoine mondial par l’Unesco, ce qui permettra<br />
d’effectuer des travaux de restauration<br />
et assurera sa conservation. Le lieu est animé<br />
par les rituels quotidiens des cinquante moines<br />
y résidant. Le Dalaï-Lama s’y rend à l’occasion<br />
de célébrations. Les possibilités d’hébergement<br />
sont nombreuses et il y a même un hôtel de<br />
luxe sur la route principale, il est destiné aux<br />
quelques riches Indiens qui, en une petite<br />
semaine, atteignent les sommets de l’Himalaya<br />
depuis Delhi au volant de gros véhicules performants,<br />
puis… font demi-tour !<br />
Situé à 4 <strong>10</strong>0 m<br />
d’altitude, sur les<br />
hauteurs d’une colline<br />
surplombant la rivière,<br />
le monastère de Key<br />
est le plus important<br />
de la vallée.<br />
CARTES<br />
ET GUIDES<br />
En anglais (an opportunity<br />
to practise before leaving !) :<br />
Frommer’s India, The Rough<br />
guide to India, Lonely Planet<br />
walking guide : <strong>Trek</strong>king in<br />
the Indian Himalayas.<br />
89
LOSAR<br />
HANSA<br />
KIATO<br />
Kunzum La<br />
(4 590 m)<br />
PANGMO<br />
KIBBER<br />
MORANG<br />
KEY<br />
KEY<br />
N<br />
→ Monastère : le plus grand du<br />
Spiti, abris de reliques et ruche<br />
de lamas, accueillant pèlerins<br />
mais aussi étrangers pour une<br />
simple visite, une méditation<br />
collective et un thé au beurre<br />
salé, ou pour une plus longue<br />
retraite et un ac<strong>com</strong>pagnement<br />
dans sa quête spirituelle.<br />
→ Le festival Burning of<br />
the demon, danses cham<br />
(costumes, masques et instruments<br />
traditionnels), procession<br />
et embrasement d’une<br />
immense sculpture de beurre,<br />
a lieu fin juindébut juillet.<br />
Parvati Parvat<br />
(6 633 m)<br />
KAZA<br />
→ Le village : New and Old<br />
Kaza s’étendent de part et<br />
d’autre de la rivière Spiti.<br />
Artisanat himalayen, bijoux,<br />
gemmes, fossiles…<br />
→ Le monastère de Tangyud.<br />
→ Balades : agences de trek<br />
et particuliers proposent des<br />
services de guides, porteurs,<br />
muletiers, location de matériel<br />
de camping, randonnées<br />
équestres au dos de Chhumurti<br />
(cheval indigène). Randonnées<br />
pour les villages de Komic, de<br />
Kibber et le monastère de Key.<br />
→ Collecte de fossiles au<br />
village de Langza.<br />
KAZA<br />
SANGNAM<br />
5km<br />
© Fonds Open Street Map<br />
Vallée de Pin
KIBBER<br />
→ Kibber wildlife sanctuary,<br />
entre 3 600 et 6 700 m d’altitude,<br />
réserve de faune et de<br />
flore depuis 1992.<br />
→ Randonnées pour le lac de<br />
Chandra Taal et les gorges de<br />
Gramphu.<br />
→ Possibilité de rejoindre<br />
le Rupshu (Tso Moriri) et le<br />
Ladakh à pied, via le col du<br />
Parang La (5 580 m, 15 jours,<br />
niveau difficile), dans les<br />
pas des caravaniers qui se<br />
rendaient au bazar de Leh.<br />
À VOIR, À FAIRE AU SPITI<br />
Longue d’une centaine de kilomètres, la vallée du Spiti dévoile une<br />
culture tibétaine typique, dans un cadre naturel vivifiant.<br />
TABO<br />
LARA<br />
DEMUL<br />
LALUNG<br />
DHANKAR<br />
→ Monastère de Tashi Choling :<br />
un défi à la gravité, avec un<br />
petit musée, un conservatoire<br />
de manuscrits et enluminures<br />
bouddhistes, des <strong>fr</strong>esques du<br />
XVII e siècle décrivant la vie du<br />
Bouddha.<br />
→ Les ruelles du village fortifié<br />
à la rencontre des habitants.<br />
→ Randonnées au lac de<br />
Dashair et Dhankar, au gompa<br />
de Sherkhang et ses superbes<br />
sculptures, poursuivre jusqu’au<br />
village de Demul.<br />
→ Le monastère millénaire :<br />
son <strong>com</strong>plexe de temples de<br />
terre, ses moulins de prières<br />
patinés, ses amoncellements<br />
de magnifiques manis (pierres<br />
sculptées de mantras tibétains),<br />
et enfin ses superbes <strong>fr</strong>esques<br />
colorées, dont les artistes itinérants,<br />
sous l’égide de Rinchen<br />
Zangpo, sont les mêmes qui<br />
peignirent les gompas d’Alchi<br />
(Ladakh), Toling et Tsaparang<br />
(Tibet), leur œuvre est reconnue<br />
trésor de l’art bouddhiste.<br />
Le visiteur est attendu pour la<br />
puja quotidienne à 6 h 30 !<br />
→ Les grottes de méditation<br />
surplombant le village.<br />
→ Autour du village : on peut<br />
se balader sur les berges de la<br />
rivière Spiti et sillonner entre<br />
canaux, parcelles de cultures<br />
et stupas.<br />
DHANKAR<br />
TABO<br />
LARI<br />
POH<br />
91
Un digne et souriant<br />
représentant de la région<br />
du Kinnaur, en surplomb<br />
de la rivière Sutlej, durant<br />
l’approche du Spiti par<br />
la route d’accès sud.<br />
92
INDE<br />
DANS LA VALLÉE DU SPITI<br />
Influence de la vie monacale, chacun égraine<br />
d’une main un chapelet et tient de l’autre main<br />
un téléphone portable. Tranquillité, sobriété,<br />
invitent à l’amitié. En ces lieux reculés, ne subsiste<br />
plus d’agriculture vivrière. Un gros camion<br />
approvisionne le village en sacs de farine de blé<br />
(les chapatis remplacent la tsampa d’orge cultivé<br />
localement), briques de lait pasteurisé (autrefois<br />
lait cru de yack), plaques d’œufs de batteries et<br />
légumes issus de l’agriculture intensive. Sur les<br />
rayons de l’épicier, emballages et sachets colorés.<br />
Tabo a conservé deux cultures : celles du petit<br />
pois et de la pomme. Produits rares et prisés qui<br />
ne peuvent pousser dans la chaleur des plaines<br />
indiennes, on les appelle cash crops ; leur <strong>com</strong>mercialisation<br />
rapporte. Ici aussi, engrais synthétiques<br />
et pesticides sont d’usage. Il y a peu<br />
de bétail, quelques rares vaches. La rivière Spiti<br />
gronde de grands remous, le vent s’engouf<strong>fr</strong>e dans<br />
la vallée. Sur la plage de sable noir et fin, quelques<br />
petits saules ramassés poussent resserrés en bosquets,<br />
leur feuillage d’un vert lumineux contraste<br />
avec le paysage minéral. Nil gambade dans les<br />
éboulis, joue la chèvre des montagnes, bâtit avec<br />
les pierres son monde imaginaire.<br />
ACCUEILLIS À LA LAMASERIE<br />
Notre voisin du moment s’appelle Hari, c’est<br />
un retraité originaire de Jaipur qui passe chaque<br />
été au <strong>fr</strong>ais des montagnes (au même moment<br />
l’Inde subit une terrible canicule), il a travaillé<br />
en A<strong>fr</strong>ique de l’Ouest, vécu au Canada, et parle<br />
couramment l’anglais, ce qui n’est pas le cas des<br />
locaux. Nous lui confions vouloir consulter un<br />
devin. Nous sommes reçus par le head lama, le<br />
directeur du monastère. C’est une chance et un<br />
honneur. L’homme transmet une belle énergie<br />
de paix et de simplicité. L’ambiance du monastère<br />
est sereine et <strong>fr</strong>aternelle, la hiérarchie n’exprime<br />
pas de supériorité, les lamas sont joyeux<br />
et joueurs, les enfants jouent avec les adultes,<br />
ils ont improvisé une partie de cricket avec un<br />
tuyau en guise de batte !<br />
Le head lama est tibétain, parle l’hindi mais très<br />
peu l’anglais, nous nous dépatouillons entre<br />
english et bodish, la langue locale, proche du tibétain.<br />
Nous <strong>com</strong>muniquons néanmoins. Le lama<br />
précise, qu’oracle ou pas, c’est à nous qu’appartiendront<br />
nos choix ! Ce soir, il méditera et<br />
LA VALLÉE DE PIN<br />
Le parc national de Pin Valley s’étend du sudest de Dankhar où les rivières Pin et Spiti se rejoignent, jusqu’à<br />
la <strong>fr</strong>ontière tibétaine. Protégé depuis 1987, le lieu est enneigé huit mois de l’année, avec une altitude variant<br />
de 3 500 à 6 000 m et un climat <strong>fr</strong>oid (jusqu’à 35 °C) et particulièrement venteux. Peu explorée, la vallée<br />
of<strong>fr</strong>e un habitat naturel pour des espèces faunistiques et floristiques menacées d’extinction : le léopard des<br />
neiges et sa proie le bouquetin de Sibérie, des oiseaux rares, le tétraogalle de l’Himalaya, la perdrix choukar,<br />
le lerva des neiges, des plantes médicinales, aconits, arnebia, ephedra… Clairsemée de pinèdes de cèdres de<br />
l’Himalaya, bordée de sommets enneigés, la vallée en été se constelle de fleurs. Depuis le village de Mud<br />
(3 770 m), s’organisent le très réputé PinParvati <strong>Trek</strong> (8<strong>10</strong> jours), ou le plus modeste Bhaba <strong>Trek</strong> (4 jours).<br />
Au départ de Kaza ou Reckong Peo également.<br />
Dans le village de<br />
Dankhar, une ânesse<br />
et son ânon rentrent<br />
au bercail.<br />
PERMIS<br />
KINNAUR / SPITI<br />
Un permis (Inner Line Permit)<br />
est nécessaire pour les zones<br />
<strong>fr</strong>ontalières de la Chine.<br />
Il peut être délivré à Kaza<br />
et Reckong Peo (dernières<br />
haltes avant checkpoints),<br />
mais aussi dans les principaux<br />
bureaux gouvernementaux<br />
de l’Himachal Pradesh<br />
(Manali, Shimla). Il s’établit<br />
sur la journée, dépôt le<br />
matin, retrait l’aprèsmidi.<br />
Fournir passeport, photos<br />
d’identité, copie des<br />
passeports et visa.<br />
93
INDE<br />
SE DÉPLACER<br />
Depuis Kaza, un bus<br />
quotidien dessert Manali et<br />
Shimla, deux bus quotidiens<br />
pour Tabo et Key, deux bus<br />
quotidiens pour Mud (Pin<br />
Valley) et Kibber. Taxis et<br />
location de véhicules avec<br />
chauffeur à la gare routière<br />
de Kaza. Chemins pédestres<br />
de village à village.<br />
OÙ DORMIR ?<br />
→ À Kaza et Tabo : de<br />
nombreuses possibilités<br />
d’hébergement, tout budget,<br />
idem pour la restauration :<br />
tsampa (bouillie d’orge) au<br />
petit déjeuner, thali (repas<br />
végétarien) au déjeuner,<br />
dal (lentilles et chapatis)<br />
au dîner, également des<br />
restaurants à la carte…<br />
→ À Dhankar, Kibber, Key :<br />
chambres et tables d’hôtes,<br />
quelques guesthouses<br />
dont nous re<strong>com</strong>mandons<br />
celles des monastères,<br />
un ou deux restaurants,<br />
une petite épicerie.<br />
→ Dans les réserves,<br />
le bivouac n’est autorisé<br />
qu’ac<strong>com</strong>pagné de guides,<br />
des emplacements sont<br />
alloués en fonction des<br />
mesures de protection.<br />
Sur le chemin menant<br />
au monastère de<br />
Dhankar, construit sur<br />
un éperon rocheux face<br />
à la confluence entre<br />
les rivières Pin et Spiti.<br />
utilisera des techniques divinatoires qui nous<br />
resteront inconnues. Le lendemain, nous recevons<br />
du lama un verdict tranché qui, ma foi, se<br />
révélera conforme à nos résolutions…<br />
GOMPA SECRÈTE<br />
Destination Lari Cave, petit monastère perdu<br />
dans les montagnes, il n’est accessible qu’à pied.<br />
C’est aujourd’hui par la route traversant la vallée<br />
qu’hommes et marchandises circulent. Aussi,<br />
les chemins escarpés supportés par des murs de<br />
soutènement ne sont plus entretenus et s’effondrent.<br />
Deux sentiers mènent au monastère,<br />
le premier que nous empruntons se termine par<br />
un à-pic, nous rebroussons chemin après deux<br />
heures de grimpette ! Vertige de beauté, la subtilité<br />
des teintes et la variété des formations<br />
rocheuses sont infinies. Salem charge son sac<br />
de portage de « cailloux beaux » à emporter !<br />
Le lieu semble abandonné, les bâtisses effondrées<br />
; seul un lama de quatre-vingt-cinq ans vit<br />
ici, retiré. Trois petites dames sont à ses côtés,<br />
venues du village en contrebas servir le vieil<br />
homme. Nous amenons <strong>com</strong>me on nous l’a<br />
conseillé des produits <strong>fr</strong>ais : des tomates et des<br />
bananes. On nous of<strong>fr</strong>e le chai et des biscuits,<br />
des sourires et du bon accueil. Le petit papi nous<br />
fait visiter les lieux, la construction est accolée<br />
à une grotte où sont conservés de splendides<br />
objets de culte en argent et en cuivre. Sur le trajet<br />
retour nous avons la chance de rencontrer des<br />
urials, bouquetins célestes, qui broutent les<br />
parois verticales. Nil est fatigué, une fois redescendus<br />
sur la route goudronnée, nous faisons<br />
du stop et une petite voiture citadine de locaux<br />
nous ramène à Tabo.<br />
VILLAGES PERCHÉS<br />
Nous remontons la vallée pour le village de<br />
Dhankar (3 894 m). Cet ancien fort perché sur un<br />
piton rocheux fut la capitale du Spiti. La vue y<br />
est époustouflante, sommets glacés brillants et<br />
halos de lumière. De là, la rivière déferlante d’eau<br />
de la fonte des neiges est un immobile miroitement.<br />
L’altitude est grisante, sensation d’envol<br />
et de légèreté. Suis-je vraiment là les pieds sur<br />
terre ou bien ne suis-je qu’un courant d’air ? Le<br />
tambour de méditation des moines résonne dans<br />
la vallée. Le soir, les troupeaux de moutons et<br />
de chèvres descendent des estives, grande diversité<br />
d’espèces ovines, dont nous contemplons<br />
avec ravissement le défilé. Les villageoises se sont<br />
regroupées pour préparer des petits pains ; elles<br />
nous en of<strong>fr</strong>ent, délices chauds et croquants !<br />
Nous randonnons jusqu’aux lacs de Dashair et<br />
Dhankar, en amont du village. Au détour du<br />
94
chemin, nous recevons l’accueil sublime d’un<br />
groupe de chevaux. Le vert diaphane et le turquoise<br />
du lac, les étincelles de lumière à la surface<br />
de l’eau, les cercles d’or des touffes de genêts<br />
sur la rocaille, les ruisselets d’argent serpentant<br />
des sommets, la ronde des monts enneigés et<br />
partout le ciel bleu intense. Le profond silence<br />
est percé parfois par un bourdonnement d’insecte,<br />
un chant d’oiseau, un hennissement. Nil<br />
et Salem ne le troubleront pas.<br />
LE PLATEAU DE KIBBER<br />
Nous séjournons à Kibber (4 270 m). Depuis ce plateau<br />
d’altitude sont possibles de nombreuses<br />
balades dans le Kibber Wildlife Sanctuary, célèbre<br />
pour abriter le léopard des neiges. Au petit matin<br />
de notre première nuit, une neige exceptionnelle<br />
pour la saison a recouvert les montagnes et les<br />
prés, Nil euphorique réveille notre chambrée ! Les<br />
enfants sont très heureux de voir pour la première<br />
fois des yacks. Autrefois garants de l’économie<br />
des lieux, leur élevage tend aujourd’hui à se perdre.<br />
Nil se régale de collecter : pierre, os, sabot, dent,<br />
fer à cheval, laine… Sa grande motivation : trouver<br />
des fossiles et il ramènera du fond des âges un<br />
coquillage ! La journée, les femmes du village<br />
travaillent aux champs, les enfants <strong>fr</strong>équentent<br />
l’école au-dessus de laquelle nous logeons, les<br />
vieux jouent aux cartes leurs tout-petits dans les<br />
pattes, les hommes sont partis faire du business.<br />
Et les différentes générations cohabitent dans de<br />
grandes maisons. Quand rentre le soir le grand<br />
troupeau d’ânes, de moutons et de vaches, le<br />
village s’anime ! Nous visitons le monastère de<br />
Key, le plus grand de la vallée du Spiti. Forteresse<br />
de la sagesse, bâtie sur un éperon rocheux à<br />
4 <strong>10</strong>0 mètres. Deux cent cinquante enfants y<br />
vivent et y étudient la philosophie bouddhiste<br />
durant le long hiver. Ils rejoignent en été leurs<br />
familles qu’ils aident durant la saison agricole.<br />
ÉMERVEILLEMENT ET GRATITUDE<br />
Fin du voyage à Kaza, ville principale et centre<br />
administratif du Spiti, peuplée de trois mille habitants.<br />
Les <strong>com</strong>merces et <strong>com</strong>modités y sont nombreux.<br />
Le lit de la rivière fait office de décharge<br />
géante. Commentaire de Nil : « Les hommes se facilitent<br />
la vie et en même temps ils détruisent la vie. »<br />
Les enfants… une invite à l’étonnement. Un mois<br />
après, les cols sont toujours fermés, ceux qui<br />
attendent un revenu du tourisme piaffent et s’inquiètent.<br />
Nous nous en retournons via Shimla,<br />
route, avion… et l’enchantement durera.
ILS PARTENT<br />
ILS RENTRENT<br />
La liste de mes envies<br />
J’ai pour habitude de noter mes rêves sous forme de liste depuis que je suis assez jeune. J’aime<br />
constater que cette liste ne s’arrête jamais, tandis que je coche <strong>com</strong>me « fait » certains rêves,<br />
d’autres <strong>com</strong>me « à refaire », d’autres « à poursuivre »… Parmi eux, se trouvent des « voir un carnaval<br />
au Brésil », « naviguer », « marcher au Dolpo <strong>com</strong>me dans Himalaya, l’enfance d’un chef » (mon premier<br />
film au cinéma), « passer une nuit sous les étoiles du désert d’Atacama »… En jetant un œil sur cette<br />
liste devenue carnet, je prends conscience qu’il va falloir que je quitte un peu le pays si je veux réaliser<br />
tout ça ! Je ne sais rien de ce monde, des trésors de chaque partie du globe ; je ne veux pas les<br />
voir, je veux les vivre ! Typhaine, architecte d’intérieur et moi-même, Aurélie, ac<strong>com</strong>pagnatrice en<br />
montagne et aide-gardienne de refuge, nous sommes rencontrées lors d’une randonnée en Ariège.<br />
Je ne saurais dire entièrement pourquoi, ni <strong>com</strong>ment, mais nous partons un an. Nous marcherons,<br />
car c’est l’essence même de l’être humain, le rythme qui permet tout. Quand à votre magazine, je<br />
l’ai rencontré dans un aéroport, ayant passé six mois au Pérou. J’ai été attirée par votre couverture<br />
évoquant « le chemin de l’Inca », et je l’ai attrapé machinalement. Je l’ouvre à la page « Saison 1<br />
Dolpo », dont je venais de parler à mon amie Typhaine, pour la convaincre d’y aller pendant notre<br />
voyage… Depuis j’ai <strong>com</strong>mandé les numéros de tous les pays où nous irons. Il nous manquait ces<br />
informations. La vie fait bien les choses et encore une fois m’of<strong>fr</strong>e ce que je veux. Aurélie Delcol<br />
Nous <strong>com</strong>mençons<br />
par le Népal et avons<br />
nos billets pour arriver<br />
le 3 novembre. Nous<br />
avons craqué pour<br />
la vallée de Tsum<br />
(notre photo, ndlr),<br />
et pour les balcons des<br />
Annapurna. Ensuite,<br />
nous aimerions passer<br />
la <strong>fr</strong>ontière avec le<br />
Sikkim, puis poursuivre<br />
par la Birmanie, la<br />
Thaïlande, le Cambodge,<br />
le Laos. Avant, bien<br />
plus tard, la cordillère<br />
des Andes.<br />
© Anthony Nicolazzi<br />
96
PROCHAINEMENT<br />
…<br />
Abonnements : 33 (0)1 84 18 <strong>10</strong> 52<br />
Du lundi au vendredi de 9 h à 12 h et de 13 h à 17 h.<br />
INDEX et <strong>com</strong>mande d’anciens numéros sur :<br />
www.niveales.<strong>com</strong><br />
À paraître en novembre<br />
LE GRAND GUIDE DU<br />
KILIMANDJARO<br />
Toutes les voies,<br />
tous les itinéraires<br />
98<br />
À paraître en octobre<br />
BIRMANIE<br />
VIETNAM<br />
CAMBODGE<br />
LAOS…<br />
Le meilleur de<br />
l’Asie du Sud-Est<br />
© wallixx © Marc Dozier<br />
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Rédacteur en chef : Anthony Nicolazzi<br />
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ce numero : Pierre Bigorgne<br />
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Directrice artistique : Julie Le Louër<br />
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Grandreporter : Franck Charton<br />
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Reporterchef de rubrique : Marc Dozier<br />
doziermarc@<strong>fr</strong>ee.<strong>fr</strong><br />
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Correction : Aurélie Lherminier<br />
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Dépôt légal : août <strong>2017</strong>
#ÉQUIPEMENT #TESTS #ASTUCES<br />
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LE LABO<br />
NOUVEAUTÉS 2018<br />
P. <strong>10</strong>1<br />
TEXTILE<br />
P. <strong>10</strong>4<br />
SACS À DOS<br />
P. <strong>10</strong>6<br />
CHAUSSURES<br />
P. 1<strong>10</strong><br />
BIVOUAC
© Messe Friedrichshafen<br />
ÉQUIPEMENT<br />
LES GRANDES<br />
NOUVEAUTÉS<br />
POUR 2018<br />
LA GRAND-MESSE ANNUELLE DES FABRICANTS DE MATÉRIEL<br />
OUTDOOR SE DÉROULAIT EN CE DÉBUT D’ÉTÉ SUR LES BORDS DU<br />
LAC DE CONSTANCE, EN ALLEMAGNE. RETOUR SUR LES GRANDES<br />
TENDANCES DE CET OUTDOOR SHOW DE FRIEDRICHSHAFEN, ET<br />
SUR LES FUTURS MODÈLES À RETROUVER EN BOUTIQUE DÈS LA<br />
SAISON PROCHAINE.<br />
PAR GUILLAUME NAHRY<br />
<strong>10</strong>0
NOUVEAUTÉS 2018<br />
QUOI DE NEUF<br />
CÔTÉ TEXTILE ?<br />
VESTES, PANTALONS, SHORTS…<br />
Les fabricants poursuivent leurs efforts écolos sans<br />
pour autant oublier la technicité et la polyvalence.<br />
Fjällräven<br />
Retour aux sources<br />
Cinquante ans après la création de la Greenland Jacket par Åke Nordin,<br />
fondateur de la marque, Fjällräven lui rend hommage par une réédition<br />
au travers de deux produits. L’esthétique traditionnelle demeure<br />
mais la veste se voit optimisée par un choix de matériaux durables,<br />
tels que le G<strong>10</strong>00 Eco et l'EcoShell sans PFCs. Munie d’une capuche<br />
confortable et de finitions extrêmement soignées, la Greenland Half<br />
Century Jacket confectionnée en G<strong>10</strong>00 Eco et dont la coupe et les<br />
coutures thermosoudées procurent une belle sensation de liberté,<br />
de légèreté et de douceur, fera face sans souci à tout type de conditions.<br />
Quant à la Greenland EcoShell Jacket, elle est confectionnée<br />
dans le nouvel EcoShell un peu plus lourd et dont le toucher n’est<br />
pas sans faire penser à la toile cirée originelle si chère à Åke Nordin.<br />
Sa coupe ample permet de porter plusieurs couches en dessous<br />
tout en restant à l’aise, les grandes poches à rabat contribuant à<br />
la géométrie de la veste. Le style à la ville <strong>com</strong>me au grand air.<br />
Eider - Tout d’une grande !<br />
La marque <strong>fr</strong>ançaise segmente son of<strong>fr</strong>e textile en<br />
deux collections avec d’un côté la série Crossover<br />
proposant des produits orientés lifestyle outdoor,<br />
et de l’autre la série Wide Angle avec des produits<br />
plus techniques, légers et ultrarespirants pour une<br />
pratique active de la montagne, <strong>com</strong>me en témoigne<br />
cette Bright Net Jacket W dédiée à la gent féminine.<br />
Dotée d’une coupe cintrée et légèrement allongée<br />
de manière à bien couvrir le bas du dos, cette veste<br />
2 couches a été développée autour de la technologie<br />
Defender® High Air Exchange affichant un joli 30000 /<br />
30000 d’imperrespirabilité, l’action respirante de la<br />
membrane étant soutenue par la doublure filet<br />
intégralement aérée et deux zips de ventilation<br />
placés sous les bras. On retrouve également tous<br />
les attributs d’une veste de montagne avec des<br />
coutures étanches thermosoudées, une capuche<br />
autoajustable avec élastiques de maintien, des<br />
poches zippées et autres poignets élastiqués.<br />
On pourrait donc craindre un tarif prohibitif,<br />
mais on reste dans le raisonnable, à savoir 179,95 €.<br />
The North Face<br />
Encore plus léger !<br />
Le géant américain avait présenté l’an<br />
passé une nouvelle veste, l’Apex Flex Gtx,<br />
développée sur la base d’un GoreTex®<br />
trois couches, et dont l’objectif était de<br />
conjuguer liberté de mouvement, effet<br />
coupevent, imperméabilité, le tout avec<br />
un niveau de confort proche de celui d’un<br />
sweat à capuche. Désireuse de pousser le<br />
concept encore plus loin, The North Face<br />
nous propose cette année la version 2.0<br />
avec un allégement de 40 g et la promesse<br />
d’une respirabilité accrue de près de 12 %.<br />
<strong>10</strong>1
Salewa<br />
La Pedroc tombe<br />
les manches<br />
La marque à l’aigle continue de développer sa ligne<br />
Pedroc destinée à l’évolution rapide en montagne<br />
avec notamment la Pedroc Alpha Convertible Jkt<br />
bénéficiant d’un système de fermeture éclair innovant<br />
qui permet très rapidement de transformer la veste en<br />
gilet. Développée selon le concept de « Body mapping »,<br />
elle alterne zones à isolation active Polartec® Alpha®<br />
(torse et manches) et zones ultrarespirantes en<br />
bambou Durastretch (panneau arrière central,<br />
flancs, sous les manches). Elle bénéficie de plus d’un<br />
traitement déperlant éco<strong>fr</strong>iendly sans PFCs qui lui<br />
permettra de supporter de légères ondées. Fine, elle<br />
s’intégrera à merveille dans un système trois couches.<br />
Columbia<br />
La gamme OutDry Ex<br />
s’étoffe encore<br />
À chaque salon une évolution de la technologie<br />
OutDry Ex consistant, rappelonsle, à<br />
placer la membrane sur l’extérieur du vêtement.<br />
Elle nous est donc proposée cette<br />
année dans une version « Lightweight »,<br />
c'estàdire ultralégère. Si la version initiale<br />
affichait un poids de 490 g, cette nouvelle<br />
version passe à 199 g (176 g chez la femme).<br />
Autres changements, une grande fluidité<br />
du tissu et une belle <strong>com</strong>pactabilité venant<br />
répondre à certaines critiques qui pointaient<br />
du doigt un certain manque de souplesse et<br />
un en<strong>com</strong>brement un peu trop important<br />
en fond de sac. Autre nouveauté présentée<br />
cette année, l’OutDry Extreme ECO Charcoal<br />
qui n’est autre que l’OutDry Extreme ECO<br />
présentée l’an passé mais dans un nouveau<br />
coloris gris obtenu grâce à un colorant<br />
naturel à base de bambou.<br />
Gore-Tex<br />
Le Shakedry<br />
dans la bataille<br />
Si la technologie Shakedry n’est pas<br />
une nouveauté à proprement parler<br />
(puisqu’elle avait été présentée en<br />
2015), GoreTex vient d’annoncer<br />
l’élargissement du nombre de marque<br />
partenaires. Rappelons le principe de<br />
cette technologie : l’absence de tissu<br />
extérieur, uniquement une membrane<br />
et une doublure. L’intérêt est triple avec<br />
une plus grande respirabilité (aucune<br />
absorption d’eau de la part du tissu),<br />
un poids allégé (entre <strong>10</strong>0 et 130 g selon<br />
le vêtement) et un séchage ultrarapide.<br />
Ce Shakedry n’est pas sans rappeler<br />
l’Outdry Extreme de Columbia, notamment<br />
depuis l’annonce de sa version<br />
« Lightweight » : la bataille est lancée.<br />
Black Diamond<br />
Enfin une veste BD.dry !<br />
Black Diamond étoffe son of<strong>fr</strong>e textile développée<br />
autour de la technologie BD.dry.<br />
Déjà utilisée par la marque sur ses gants,<br />
cette membrane propriétaire est désormais<br />
intégrée dans un système 2,5 couches.<br />
Exemple parmi les 4 vestes et pantalons, la<br />
FineLine Stretch Rain Shell Jacket étanche à<br />
l’eau (<strong>10</strong>K), coupevent, et respirante. Elle se<br />
range directement dans sa poche et s’accroche<br />
au sac grâce à un mousqueton pour la garder<br />
à portée de main en cas d’averse. Quant au<br />
prix, il est annoncé à moins de 150 €.<br />
<strong>10</strong>2
NOUVEAUTÉS 2018<br />
Primaloft<br />
Gold Eco pour tous<br />
Présentée l’an passé et jusqu’à présent disponible en exclusivité sur la<br />
doudoune Nano Puff de Patagonia, l’isolation PrimaLoft® Gold Insulation<br />
Eco est désormais exploitable par l’ensemble des fabricants. Dotée d’un<br />
important rapport chaleur/légèreté doublé d’une véritable conscience<br />
écologique puisque <strong>com</strong>posée à 55 % de fibres recyclées après usage,<br />
elle conserve jusqu’à 98 % de la chaleur corporelle en milieu humide<br />
grâce à son importance déperlance. Notons que cette version Eco<br />
remplacera purement et simplement la version première Primaloft Gold.<br />
Polartec - Une innovation de plus, une…<br />
Salomon - La révolution du short ?<br />
Car la vie au grand air ne se limite pas uniquement au trek et à<br />
la randonnée, ce W Outdoor Speed Short est tout indiqué pour<br />
les toucheàtout amatrices d’escalade ou encore de VTT grâce<br />
à sa longueur d’entrejambe et à sa matière à tissage double<br />
résistante et déperlante. Grâce à sa conception sans système<br />
de fermeture, ce short se met et s’enlève facilement. Autre<br />
grand intérêt, sa grande rapidité de séchage, particulièrement<br />
appréciable lors du <strong>fr</strong>anchissement d’un cours d’eau ou plus<br />
largement à la moindre occasion de baignade.<br />
Polartec <strong>com</strong>plète son of<strong>fr</strong>e en termes d’isolation synthétique. Après<br />
la technologie respirante et thermorégulatrice Alpha, voici venue la<br />
technologie Power Fill conçue pour les conditions les plus <strong>fr</strong>oides.<br />
Disponible en 4 grammages (60, 80, <strong>10</strong>0 et 135 g/m²), elle repose sur<br />
une construction exclusive de fibres creuses qui est plus douce et plus<br />
durable, formant des milliers de petites poches d’air qui capturent et<br />
retiennent la chaleur du corps en continu, assurant une barrière<br />
thermique résistante entre le <strong>fr</strong>oid externe et la chaleur interne. De plus,<br />
les propriétés hydrophobes des fibres polyester permettent au Polartec®<br />
Power Fill de résister à l’absorption de l’humidité et de sécher rapidement,<br />
tout en maintenant un ratio poids/chaleur élevé. À noter enfin<br />
la réduction de l’empreinte écologique, avec une <strong>com</strong>position à 80 %<br />
de matériaux recyclés postconsommation.<br />
Arc’Teryx<br />
Micro-doudoune, ultra-légère<br />
Nouvelle venue dans la collection Essentials d’Arc’Teryx, la<br />
Cerium SL Hoody (SL pour superlight) joue à fond la carte de<br />
la légèreté avec un poids de 215 g, et de la <strong>com</strong>pressibilité<br />
pour ne générer qu’un très faible en<strong>com</strong>brement en fond de<br />
sac lorsqu’elle n’est pas utilisée. Pour y parvenir, la marque<br />
canadienne s’appuie d’une part sur une enveloppe en nylon<br />
superléger enduit d’un fini DWR, et sur un duvet d’oie grise au<br />
fort pouvoir gonflant (850 Cuin) d’autre part. Côté garnissage, le<br />
duvet alterne avec un isolant synthétique Coreloft stratégiquement<br />
réparti selon le procédé Down Mapping Composite sur<br />
les zones où l’humidité peut s’accumuler plus facilement. Côté<br />
accessoirisation, une capuche ajustable, des poignets élastiques,<br />
deux poches zippées et un sac de <strong>com</strong>pression de 1,5 litre.<br />
À noter qu’une version sans manches, la Cerium SL Vest,<br />
sera également disponible dans la collection.<br />
<strong>10</strong>3
NOUVEAUTÉS 2018<br />
SACS À DOS<br />
Du rétro, de la polyvalence, de<br />
l’étanchéité, des petits et grands<br />
volumes : on trouve de tout en 2018.<br />
Millet<br />
Une série Gokyo,<br />
<strong>com</strong>pacte et polyvalente<br />
Nouvelle gamme de sac à dos venant enrichir l’of<strong>fr</strong>e portage<br />
chez Millet, la série Gokyo fait la liaison entre voyages et aventures<br />
outdoor dans son acceptation la plus large. Pour preuve, la version<br />
40 litres (30 litres version femme) qui s’avère être la solution idéale<br />
pour l’itinérance avec assistance sur une semaine grâce à sa <strong>com</strong>partimentation<br />
dédiée, sa poignée <strong>fr</strong>ontale, sa ceinture amovible, son<br />
ouverture valise et son format cabine, ainsi que son système de<br />
portage confortable. Et pour qui souhaiterait partir plus longtemps,<br />
un volume plus conséquent de 55 litres rehaussable de 15<br />
(50+15 pour la femme) est également proposé.<br />
Lafuma<br />
Bienvenue au sac<br />
à dos néo-vintage<br />
Lafuma revisite ses sacs iconiques.<br />
En témoigne ce bel Altiplano 45 dont<br />
les deux grandes poches latérales<br />
au look rétro feront sans nul doute<br />
battre le cœur des plus nostalgiques<br />
d’entre nous. Mais si l’allure générale<br />
affiche un look vintage, la fabrication,<br />
elle, est actuelle. Bénéficiant d’une<br />
accessoirisation <strong>com</strong>plète avec de<br />
nombreuses poches et solutions<br />
de portage, un dos mousse, des<br />
bretelles et une ceinture matelassées,<br />
le tout pour 1 200 g.<br />
Seal Line<br />
Une housse étanche<br />
et sous vide<br />
Réputée pour ses solutions étanches,<br />
Seal Line s’attaque aux housses <strong>com</strong>pressibles<br />
avec ce BlockerLite Compression<br />
Dry Sack <strong>10</strong>l dont l’intérêt est de générer<br />
un en<strong>com</strong>brement minimal dans un sac<br />
à dos plus grand. L’action de <strong>com</strong>pression<br />
se fait à un double niveau. D’un côté<br />
grâce à la valve étanche PurgeAir pour<br />
vider l’air, et de l’autre grâce à 4 sangles<br />
de <strong>com</strong>pression. Ces dernières minimisent<br />
l’effort imposé aux coutures, améliorant<br />
la longévité du produit. Enfin, une attention<br />
toute particulière a été apportée au<br />
design du fond ovale qui confère au sac<br />
une meilleure stabilité.<br />
Osprey<br />
L’ultra-léger, c’est du lourd !<br />
Le fabricant américain de sac à dos vient indéniablement<br />
de <strong>fr</strong>apper un grand coup dans la guerre à la<br />
légèreté, et ce pour le plus grand bonheur de nos amis<br />
M.U.L. (marcheurs ultralégers). Jugez par vousmême<br />
: disponible dans deux volumes de 45 et 60<br />
litres, le Levity (car c’est ainsi qu’il se nomme) atteint<br />
un poids de 8<strong>10</strong> et 850 grammes. Son secret ? Principalement<br />
le matériau principal NanoFly, ainsi que le<br />
dos filet suspendu AirSpeed. La largeur des sangles<br />
a, elle aussi, été adaptée en conséquence. Mais cette<br />
quête de la légèreté ne se fait cependant pas au détriment<br />
total de l’accessoirisation et de la qualité, en<br />
témoignent la fiche technique avec de nombreuses<br />
poches pour la plupart doublées, un <strong>com</strong>partiment<br />
dédié à une poche à eau, et différentes solutions<br />
de portage. Votre dos vous remerciera.<br />
<strong>10</strong>4
Gregory<br />
Le Baltoro nouveau<br />
est arrivé<br />
Conçus pour les randonnées exigeantes,<br />
le Baltoro et son alter ego féminin le Deva<br />
bénéficient d’une transformation en profondeur<br />
pour encore plus de technicité et de<br />
confort. Pour ce faire, de nouveaux matériaux<br />
conjuguant robustesse et légèreté. Ils reçoivent<br />
un nouveau dos <strong>com</strong>posé d’un dos respirant<br />
Matrix monté sur un cadre suspendu et articulé<br />
Response A3, une <strong>com</strong>binaison faisant également<br />
monter le confort en flèche, ce nouveau<br />
dos s’adaptant au moindre mouvement<br />
du corps pour un équilibre maximal.<br />
Lowe Alpine<br />
La respirabilité<br />
au rendez-vous<br />
Nouvelle gamme de sac à dos petit<br />
litrage, la série Aeon vient remplacer<br />
la série Eclipse. Lowe Alpine joue à fond<br />
la carte de la respirabilité et du confort<br />
avec un dos ultrarespirant en mousse<br />
perforée avec filet, une ceinture extensible<br />
et des bretelles néoprène aérées.<br />
La liste d’accessoires est bien <strong>com</strong>plète.<br />
Pour le choix des matériaux, la marque<br />
américaine opte pour un tissu TriShell<br />
light dont la résistance garantira<br />
une belle longévité au produit.<br />
Déclinés en version homme et<br />
femme (série ND), les Aeon sont<br />
proposés dans 4 litrages avec<br />
ouvertures zippées (18L, 27L,<br />
ND16L, ND25L) et chapeau<br />
(22L, 35L, ND20L, ND33L).<br />
Ferrino<br />
Dry Hike, un nouveau<br />
sac étanche<br />
Mountain Hardwear avait l’an passé marqué<br />
les esprits avec son sac étanche Ozonic à<br />
membrane Outdry (propriété du groupe<br />
Columbia auquel appartient également<br />
Mountain Hardwear). C’est au tour de Ferrino<br />
d’utiliser la technologie Outdry sur une<br />
gamme dédiée à la randonnée, la marque<br />
italienne proposant déjà un sac étanche<br />
d’alpinisme et un de trail. Décliné en deux<br />
tailles (32 et 48+5 litres), le Dry Hike permet<br />
donc de pouvoir se passer d’une<br />
housse de pluie grâce à sa membrane,<br />
qui n’engendre de plus aucune prise de<br />
poids. Côté équipement, <strong>com</strong>me d’habitude<br />
chez Ferrino, rien ne manque, avec<br />
notamment une ouverture <strong>fr</strong>ontale XXL<br />
sur la version 48+5. Vivement la pluie !
CHAUSSURES<br />
Vos pieds sont importants, les fabricants<br />
le savent. Entre nouveautés et mises à jour,<br />
que des bonnes nouvelles pour 2018.<br />
La Sportiva<br />
Confort, stabilité, rapidité<br />
Nouveauté 2018, cette Blade Gtx présentée <strong>com</strong>me<br />
« le trait d’union entre mountain running et trekking,<br />
pour se déplacer rapidement à la montagne dans un<br />
confort total ». Au menu une tige mesh résistante à<br />
l’abrasion et à l’eau avec des renforts en microfibre<br />
thermoadhésive légère pour plus de stabilité. Des<br />
solutions telles que le système de laçage remonté pour<br />
un meilleur chaussant et une plus grande flexibilité en<br />
pointe, un laçage rehaussé of<strong>fr</strong>ant une plus grande flexibilité<br />
en pointe, un intercalaire en EVA à injection amortissante,<br />
des inserts TPU stabilisants et une pointe antichoc<br />
en TPU. La Sportiva nous livre donc ici un modèle de confort<br />
et de technicité pour se sentir en confiance autant en<br />
pleine randonnée qu’à la ville entre deux étapes de trek.<br />
Mammut<br />
Une mid tout<br />
en confort<br />
Destinée à un large public,<br />
l’Alnasca Pro Mid GTX promet<br />
stabilité, sécurité et confort<br />
grâce à sa semelle exclusive<br />
Michelin® Rock Tech pour une<br />
accroche optimale, son intercalaire<br />
DualDensity avec un<br />
insert EVA au talon pour le<br />
confort et une cale de<br />
semelle intermédiaire<br />
PORO <strong>com</strong>primée extrêmement<br />
flexible et élastique,<br />
et son chaussant Base Fit®<br />
Technology pour un fit et<br />
un confort parfaits.<br />
Asolo<br />
La gamme Radiant se réinvente<br />
Destinée à la randonnée régulière avec charge moyenne,<br />
la gamme Radiant prend le nom de Radiant Evo, avec trois<br />
innovations majeures. La semelle d’usure Vibram Megagrip<br />
associée au relief Radical of<strong>fr</strong>e une accroche, un <strong>fr</strong>einage<br />
et une relance horspair. La semelle intermédiaire gagne en<br />
soutien et en amorti en passant d’une simple à une double<br />
densité d’EVA. Enfin, de nouveaux œillets aluminium montés<br />
sur pivot permettent un laçage homogène. On retrouve trois<br />
grandes nouveautés : la Patrol GV (voir photo) dont la tige<br />
mixte intègre un collier souple en lycra thermosoudé pour un<br />
maximum de confort, la Greenwood GV dotée d’une tige tout<br />
cuir Perwanger®, et la Nilas ML au design alpin avec un laçage<br />
traditionnel, et une tige<br />
légèrement rabaissée.<br />
Garmont<br />
L’approche au<br />
service du trek<br />
Positionnée <strong>com</strong>me l’un des<br />
leaders du marché de la chaussure<br />
d’approche grâce à sa mythique<br />
Dragontail, Garmont étoffe son of<strong>fr</strong>e<br />
avec la Sticky déclinée à différentes<br />
sauces avec une version mesh ultra<br />
respirante (Sticky Cloud), une version<br />
cuir plus résistante (Sticky Stone) et<br />
une version cuir membranée GoreTex®<br />
(Sticky Stone Gtx, voir photo). Bien<br />
plus polyvalente que son illustre<br />
aînée, elle mise sur le confort et la<br />
légèreté, permettant une utilisation<br />
axée randonnée. Le chaussant reste<br />
néanmoins étroit pour garder un<br />
maximum de précision : on ne trahit<br />
pas ses origines aussi facilement.<br />
<strong>10</strong>6
NOUVEAUTÉS 2018<br />
Merrell<br />
Une nouvelle mue<br />
pour la Chameleon<br />
Modèle phare et quasiment<br />
historique du catalogue Merrel,<br />
la Chameleon septième du nom<br />
joue à fond la carte de la polyvalence<br />
avec une importante<br />
capacité d’adaptation. Tirant le<br />
meilleur des avancées technologiques<br />
de la marque américaine<br />
en termes de matériaux, elle puise<br />
son inspiration de la course en<br />
montagne tout en veillant à garantir<br />
toute la stabilité et la protection<br />
nécessaires aux randonnées les<br />
plus longues. La résistance à la<br />
torsion se fait progressive grâce<br />
à la technologie FlexPlate, le pas<br />
est léger et fluide grâce à la semelle<br />
fine, flexible et de faible densité,<br />
tandis que la semelle extérieure en<br />
Vibram® TC5+ Vibram® à crampons<br />
ovales multidirectionnels apportera<br />
toute l’adhérence nécessaire<br />
sur terrain sec ou mouillé.<br />
Meindl<br />
Tige haute tout terrain<br />
La marque bavaroise agrandit sa gamme Island MFS et<br />
propose pour 2018 cette Island MFS Active Rock, une<br />
chaussure tige haute à fort degré de technicité et destinée<br />
à la randonnée alpine technique et l’alpinisme léger,<br />
la semelle pouvant facilement recevoir des crampons<br />
légers à lanière. Le confort d’accueil est bon, le chaussant<br />
avec mousse à mémoire de forme s’adaptant aux<br />
différentes formes de pied grâce à la chaleur du corps<br />
pour un ajustement parfait. Côté bloc semelle, l’intercalaire<br />
Frame Technology of<strong>fr</strong>e rigidité et stabilité tandis<br />
que la semelle d’usure à caoutchouc bidensité fournit<br />
l’accroche et l’adhérence nécessaire pour évoluer en<br />
sécurité sur tout type de terrain.<br />
Kayland<br />
Une classique<br />
qui annonce<br />
la couleur<br />
Dégageant une grande<br />
sensation de confiance et de<br />
solidité, et arborant un look<br />
classique et des couleurs<br />
vives caractéristiques d’un<br />
certain nombre de modèles<br />
de la marque, cette nouvelle<br />
XM Lite GTX se pose <strong>com</strong>me<br />
une chaussure de trekking<br />
légère, confortable et très<br />
précise. Ce modèle « cross<br />
over » conviendra parfaitement<br />
à une utilisation trois<br />
saisons sur des terrains<br />
techniques <strong>com</strong>me sur<br />
des chemins roulants, et<br />
ce même avec une charge<br />
conséquente sur le dos.<br />
Lowa<br />
Une belle polyvalence<br />
Pas toujours facile de trouver une chaussure<br />
suffisamment polyvalente pour of<strong>fr</strong>ir une<br />
sécurité maximale sur terrain technique tout<br />
en garantissant une belle fluidité sur des<br />
portions roulantes (et inversement). C’est<br />
pourtant la promesse de cette nouvelle Irox<br />
Gtx. Confortable, polyvalente et flexible, et<br />
développée autour d’une tige innovante et<br />
respirante en textile résistant et doublée Gore<br />
Tex®, elle est la preuve que stabilité et confort<br />
peuvent aller de pair. Elle se décline également<br />
dans une version femme au collier légèrement<br />
rabaissé sous le nom de Lyxa Gtx® Mid Ws.<br />
<strong>10</strong>7
NOUVEAUTÉS 2018<br />
Hanwag<br />
Tatra nouvelle version<br />
Largement plébiscitée par le public, la Tatra aura droit pour le<br />
printemps 2018 à un lifting total. Elle conserve la même construction<br />
légère mais robuste et son niveau de confort élevé à laquelle<br />
vient s’ajouter un crochet à la cheville pour un laçage à deux<br />
zones, ainsi qu’un logo Hanwag brodé au talon pour la<br />
coquetterie. Une nouvelle semelle intérieure<br />
of<strong>fr</strong>e quant à elle une bonne gestion de<br />
l'humidité et un amorti salutaire pour<br />
des distances moyennes à longues. À<br />
noter que cette Tatra II sera disponible<br />
en version cuir, doublée GoreTex®<br />
ou non, en versions Wide (large),<br />
Narrow (étroite) et Bunion pour les<br />
personnes souf<strong>fr</strong>ant d’hallux valgus.<br />
La Sportiva<br />
De l’approche<br />
au trek<br />
Nouvelle venue dans la gamme<br />
TX initialement dédiée à l’approche,<br />
la TX5 GTX reprend<br />
exactement la base de la TX4<br />
(déjà sur le marché) en y ajoutant<br />
une généreuse tige haute,<br />
élargissant ainsi son utilisation<br />
à la randonnée backpacking.<br />
Of<strong>fr</strong>ant stabilité et protection,<br />
imperméabilité, sa tige haute<br />
préserve de l’intrusion de pierres<br />
ou boue alors que la jonction de<br />
la cheville 3D Flex System permet<br />
une précision maximale en appui<br />
et une liberté de mouvement<br />
en toute sécurité. Sous le pied,<br />
un intercalaire stabilisant et une<br />
semelle Vibram MegaGrip avec<br />
tasseaux de différentes épaisseurs<br />
Impact Brake System, pour un<br />
amorti ultérieur et une tenue<br />
sur tout type de terrain.<br />
Mammut<br />
Technicité et polyvalence<br />
Seconde nouveauté plus technique et polyvalente<br />
chez l’équipementier suisse, la Kento High GTX.<br />
Elle se destine aux terrains techniques ou mixtes,<br />
que ce soit en grande randonnée, en alpinisme<br />
léger ou même en via ferrata, grâce notamment<br />
à son chaussant souple (Soft Flex Area) et à<br />
mémoire de forme (3D Memo Foam), ainsi qu’à<br />
sa semelle Michelin semicramponnable et son<br />
poids tout à fait contenu de 624 g par pied.<br />
Columbia<br />
Signe extérieur<br />
d’imperméabilité<br />
On pouvait s’y attendre (ou pas),<br />
Columbia décide d’élargir le champ<br />
d’application de sa membrane Outdry<br />
Ex. La marque américaine nous propose<br />
donc cette Conspiracy Titanium Outdry<br />
Ex Eco <strong>10</strong>00. Et c’est plus précisément<br />
la version Eco sans perfluorocarbures<br />
(PFC) de cette technologie qui nous sera<br />
proposée. Pour ceux ayant loupé un<br />
épisode, l’intérêt de placer la membrane<br />
sur l’extérieur est multiple. En l’absence<br />
de tissu externe on gagne en respirabilité.<br />
De plus, inutile de réactiver la<br />
déperlance du tissu pour en préserver<br />
l’étanchéité. Enfin, l’entretien est extrêmement<br />
simple, un coup de chiffon<br />
humide et le tour est joué, un<br />
« détail » ayant toute son<br />
importance le cas présent.<br />
Et si l’on a pour l’instant<br />
uniquement droit qu’à<br />
une tige basse, il y a fort à<br />
parier qu’une tige haute<br />
est déjà à l’étude.<br />
<strong>10</strong>8
NOUVEAUTÉS 2018<br />
BIVOUAC<br />
Du léger, du <strong>com</strong>pact, du pratique,<br />
les fabricants font tout pour alléger<br />
la charge et vous simplifier la vie…<br />
Nemo - Nouveautés tout-terrain<br />
De nouveaux sacs de couchage chez Nemo avec du synthétique et<br />
du duvet traité pour une meilleure efficacité en conditions humides.<br />
Ramsey/Cleo, disponible en température limite de confort de 1 °C<br />
(Ramsey 30 et Cleo 30) ou 9 °C ( Ramsey 15 et Cleo 15), cette gamme<br />
adopte un garnissage en duvet traité Nikwax contre l’humidité,<br />
ainsi que les multiples finitions soignées Nemo pour assurer un<br />
haut niveau de confort et d’isolation.<br />
Forte/Viola, la forme spoon shape exclusive à Nemo of<strong>fr</strong>ant une<br />
liberté de mouvement maximale est désormais disponible en<br />
version synthétique. On les trouve en température limite de<br />
confort : 7 °C (Forte 20 et Viola 20) et + 2 °C (Forte 35 et Viola 35).<br />
Hydro Flask - À votre santé !<br />
Primus - À table<br />
S’adressant aux trekkeurs en recherche de<br />
performance, le PrimeTech Stove Set 1,3 l est un<br />
kit <strong>com</strong>posé d’un réchaud à gaz avec parevent,<br />
2 casseroles of<strong>fr</strong>ant une contenance de 1,3 l<br />
dont 1 avec revêtement céramique antiadhérent<br />
et d’un répartiteur de chaleur permettant de<br />
diviser par deux la consommation d’énergie par<br />
rapport à un équipement classique. On retrouve<br />
également une poignée amovible, un couvercle<br />
avec passoire intégrée et un allumefeu piezzo.<br />
Une valve de régulation permet quant à elle une<br />
puissance constante même en cas de cartouche<br />
presque vide ou de températures négatives.<br />
Qui ne s’est jamais pris à rêver le soir au bivouac à un bon verre de vin<br />
pour ac<strong>com</strong>pagner un délicieux repas préparé avec amour ? C’est dans cette<br />
optique qu’Hydro Flask a développé une nouvelle bouteille (75 cl) dont la<br />
construction TempShield en acier inoxydable 18/8 et le bouchon étanche<br />
permettra de maintenir votre breuvage préféré à la température souhaitée<br />
tout en en conservant toutes les saveurs. La technologie antigouttes Pure<br />
Pour permet d’ouvrir la bouteille et d’effectuer le service proprement,<br />
tandis que la base en silicone permet de transporter les bouteilles sans<br />
claquement et de maintenir la bouteille en place sur les surfaces glissantes.<br />
Petzl<br />
Lumière format<br />
de poche<br />
Ultra<strong>com</strong>pacte et légère, la nouvelle<br />
Petzl Bindi s’imposera très vite <strong>com</strong>me<br />
votre meilleure amie dans toutes vos<br />
aventures en trek ou dans la vie quotidienne,<br />
à pied ou à vélo, dans votre sac<br />
à dos ou dans la boîte à gants de votre<br />
véhicule. Ne pesant qu’à peine 35 g et<br />
délivrant une puissance de 200 lumens,<br />
elle se fixe sur la tête grâce à un bandeau<br />
élastique ultrafin permettant<br />
également de la porter aisément autour<br />
du cou sans créer la moindre gêne,<br />
et ne générant aucun en<strong>com</strong>brement<br />
lorsqu’on la range au fond d’un sac.<br />
Alimentée par une batterie 680 mAh<br />
rechargeable en USB, elle propose une<br />
position de verrouillage contre les allumages<br />
intempestifs et s’avère étanche<br />
jusqu’à 1 m pendant 30 mn (IP X7).<br />
1<strong>10</strong>
Nordisk<br />
Chéri j’ai rétréci la tente !<br />
La course à la légèreté semble ne pas être finie, en témoigne<br />
cette Lofoten 1 ULW développée par les Danois de chez<br />
Nordisk. Cette tente individuelle est en effet annoncée à<br />
un poids de 490 grammes pour des dimensions une fois<br />
<strong>com</strong>pactée de 11 x 22 cm, un des secrets résidant dans<br />
la petite taille des brins <strong>com</strong>posant les arceaux.<br />
À noter la possibilité de la transformer en<br />
tente 2 places en changeant la chambre.<br />
Exped<br />
Matelas nouvelle génération<br />
C’est une toute nouvelle approche du matelas gonflable que nous propose<br />
Exped. Conçu pour un usage 4 saisons, le Downmat TT 9 a été développé selon<br />
un concept totalement innovant, à savoir une enveloppe contenant des tubes<br />
d’air indépendants garnis d’un isolant naturel (duvet) ou synthétique. Les<br />
intérêts d’une telle technologie sont multiples. Premièrement, la coque<br />
extérieure réduit les contraintes sur les tubes et par là même les risques de<br />
crevaison. Ensuite, en cas de crevaison, seul un tube individuel est affecté et<br />
peut être réparé facilement ou remplacé par un nouveau. Enfin, la possibilité<br />
de retirer l’un des tubes permet de réduire la largeur du matelas pour s’adapter<br />
par exemple à une tente trop étroite. Du côté du gonflage et du dégonflage,<br />
l’adaptateur Octopus rend les opérations simples et rapides.
NOUVEAUTÉS 2018<br />
Therm-A-Rest<br />
La famille SV<br />
s’agrandit<br />
ThermARest croit dur <strong>com</strong>me fer à sa technologie<br />
de gonflage ultrarapide « Speed Valve » et adapte le<br />
concept à deux références existantes à son catalogue<br />
depuis plusieurs saisons, à savoir le NeoAir® XTherm<br />
et le NeoAir® Xlite® qui deviennent respectivement le<br />
NeoAir® XTherm Max SV et le NeoAir® XLite® Max SV.<br />
Ces deux matelas of<strong>fr</strong>ent un rapport chaleurpoids extrêmement<br />
bon grâce à la technologie thermoréfléchissante<br />
ThermaCapture et la structure Triangular CoreMatrix qui<br />
minimise les pertes de chaleur par convection. Affichant tous<br />
deux une belle épaisseur d’un peu plus de 6 cm, ils se différencient<br />
néanmoins par leurs poids, le NeoAir XTherm affichant<br />
presque <strong>10</strong>0 grammes de plus du fait de matériaux encore plus<br />
robustes (70 deniers contre 30).<br />
Deuter<br />
L’Orbit nouveau<br />
est arrivé<br />
Produits emblématiques du catalogue de la<br />
marque allemande, les sacs de couchage<br />
Orbit font peau neuve en 2018. Tout se passe<br />
sur l’enveloppe externe puisque l’absence de<br />
couture confère au sac une meilleure résistance<br />
à l’humidité et une meilleure isolation<br />
thermique. Le tissu bénéficie également<br />
d’une imprégnation garantie sans PFCs contre<br />
l’eau et la poussière. Du côté du garnissage,<br />
on est sur du synthétique avec 3 grammages<br />
différents pour des conforts de +5 °C, 0 °C et<br />
5 °C. Enfin, le zip intégral permet de convertir<br />
le sac de couchage en couverture. À noter<br />
l’existence d’une version féminine avec des<br />
inserts doux au niveau des reins et des pieds<br />
pour encore plus de douceur et de chaleur.<br />
Lifestraw<br />
Filtre universel<br />
Les gourdes à filtre intégré sont une solution<br />
particulièrement adaptée à la randonnée,<br />
mais elles nécessitent d’investir dans une<br />
nouvelle gourde. Plus la peine désormais<br />
grâce au filtre LifeStraw Universal adaptable à<br />
la plupart des gourdes du marché (Hydroflask,<br />
Klean Kanteen, Camelbak…), et se <strong>com</strong>posant<br />
d’un système de filtration à 2 niveaux pour<br />
éliminer les bactéries et les protozoaires tout<br />
en réduisant également le mauvais goût ainsi<br />
que le chlore.<br />
Stanley - Isolation maximale<br />
La marque américaine propose avec la Master Series sa vision de l’isolation<br />
haut de gamme. Fabriqués en acier épais et inoxydable 1.0 mm 18/8<br />
sur l’ensemble de la bouteille et son capuchon avec une zone d’air isolante<br />
supplémentaire, les produits la <strong>com</strong>posant permettent de garder<br />
les boissons au chaud jusqu’à 40 heures, et au <strong>fr</strong>ais jusqu’à 35 heures.<br />
Un gros travail a également été fourni sur la robustesse des poignées,<br />
ces dernières étant également dotées de silicone souple pour un meilleur<br />
confort de portage. Des performances de haut vol et des matériaux<br />
de grande qualité qui impliquent cependant un poids assez élevé.<br />
Leatherman<br />
Compacts et utiles<br />
Deux nouvelles références viennent étoffer<br />
la ligne Juice aux couleurs vives proposant<br />
des produits <strong>com</strong>pacts et légers. Les Juice B2<br />
et CS3 s’inscrivent donc parfaitement dans<br />
cette démarche minimaliste, proposant une<br />
lame crantée et une lame à bord droit pour<br />
le premier, et des ciseaux, un ouvreboîtes,<br />
un décapsuleur et un tirebouchon avec<br />
levier pour le second.<br />
112
NOUVELLE<br />
FORMULE<br />
n° 165 Grands treks n° 167 Spécial Népal<br />
n° 168 Europe en liberté<br />
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TREK MAGAZINE<br />
n° 169 Guide du <strong>Trek</strong>keur n° 170 Spécial Corse<br />
n° 171 Toit du monde n° 172 Les plus beaux <strong>Trek</strong>s<br />
n° 173 Parcs Américains<br />
n° 174 Chemin de l’Inca n° 175 Islande<br />
n° 176 Guide du <strong>Trek</strong>keur<br />
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NOUVEAUTÉS 2018<br />
MSR - Trail Base<br />
Solution tout-en-un<br />
MSR propose avec cet ensemble Trail Base la solution<br />
parfaite pour l’autonomie, un kit microfiltre basé sur des<br />
<strong>com</strong>posants modulaires lui permettant d’être utilisé <strong>com</strong>me<br />
un système de filtration par gravité au camp de base, <strong>com</strong>me<br />
un filtre format de poche en phase active pour boire directement<br />
à la source (pompe TrailShot Microfilter que l’on tient<br />
directement dans la paume de sa main et capable de délivrer<br />
un litre d’eau par minute), ou <strong>com</strong>me simple poche à eau<br />
pour disposer d’eau potable. Chaque élément étant<br />
indépendant des autres, vous pourrez en laisser une<br />
partie à la maison selon vos projets et besoins.<br />
Katadyn<br />
Format famille nombreuse<br />
Nous vous présentions l’an passé la BeFree par Katadyn,<br />
une gourde souple à filtre intégré dont l’intérêt majeur<br />
était de ne générer quasi aucun en<strong>com</strong>brement, et de<br />
tenir même dans une poche de pantalon. La filtration se<br />
fait quant à elle lorsque l’eau passe au travers des fibres<br />
creuses de 0.1 microns qui bloquent bactéries et autres<br />
protozoaires. La famille s’agrandit puisque l’on pourra<br />
trouver aux côtés de la version 0,6 litre actuelle une<br />
version 1 litre et une autre de 3 litres. Cette dernière<br />
reste extrêmement légère (<strong>10</strong>0 g) et permettra grâce à<br />
son généreux volume de répondre aux besoins d’un<br />
groupe de quatre à cinq personnes. Une anse a également<br />
été prévue pour d’une part en faciliter la manipulation,<br />
et permettre de la suspendre le soir au bivouac,<br />
à un arbre par exemple, d’autre part.<br />
<strong>Trek</strong>’n Eat<br />
Ravalement de façade<br />
Pas de nouvelles recettes du côté des<br />
lyophilisés <strong>Trek</strong>’n Eat mais un nouvel emballage<br />
au design épuré pour une meilleure<br />
lisibilité pour le consommateur, ainsi<br />
qu’une utilisation simplifiée. Un système de<br />
pictogrammes indique la nature du repas, à<br />
savoir petitsdéjeuners, plats végétariens,<br />
repas à base de viande ou de poisson et<br />
desserts, mais également la valeur nutritionnelle<br />
et la présence éventuelle d’allergènes.<br />
La préparation est quant à elle<br />
facilitée par une graduation pour le niveau<br />
d’eau, tandis qu’une nouvelle ligne de<br />
découpe laser permet de déchirer le<br />
sachet à mihauteur pour éviter de perdre<br />
sa fourchette ou cuillère au fond du plat.<br />
RAB - Toujours plus léger<br />
RAB propose avec ce Mythic 600 le meilleur rapport poidschaleur de son<br />
catalogue avec une température de confort de 5 °C (limite : 12 °C / extrême :<br />
32 °C) pour un poids de 885 grammes. Pour cela, un garnissage naturel duvet<br />
d’oie européen 900 FP contenu dans une housse en tissu Pertex® Quantum 7D.<br />
Et pour prolonger le plaisir par conditions humides, le duvet bénéficie d’un<br />
traitement hydrophobe Nikwax. On retrouve pour le reste tous les éléments<br />
classiques propres aux sacs de couchage hivernaux avec une capuche avec<br />
collerette, une footbox spécialement aménagement pour un confort et une<br />
chaleur maximale au niveau des pieds, une isolation supplémentaire au<br />
niveau du zip, et bien d’autres. Également disponible en version 200 et 400.<br />
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