santé focus L’art contre les addictions Accro à internet, aux jeux vidéo, à la nourriture ? Une étude vient de montrer que pratiquer une activité artistique pourrait mettre un frein à la quête obsessionnelle de plaisir. Par Charlotte Moreau Faire une partie de Candy Crush, plonger la main dans un paquet de gâteaux au chocolat… La quête de ces petits plaisirs immédiats est bien difficile à réprimer. Leur point commun : provoquer dans le cerveau un shoot de dopamine. Et notre cerveau en redemande. Pour le Dr Julia F. Christensen, chercheuse en neurosciences à la City, université de Londres*, cette recherche de plaisir immédiat peut entraîner une addiction, au même titre que l’alcool, le tabac… Car les toxicomanies et les dépendances comportementales s’appuient sur les mêmes réseaux de neurones. « Notre cerveau est surchargé de stimuli en lien avec nos besoins primaires (manger, boire…), explique la chercheuse. Comme nous sommes programmés pour y répondre, cela entraîne une cascade d’effets neuronaux et biologiques. Toute notre attention est alors focalisée sur cette recherche de plaisir immédiat. » Face aux plaisirs immédiats, un bonheur authentique par exem ple, la vue est en éveil pour s’orienter dans l’espace, l’ouïe pour le rythme, etc. Il reste peu de ressources biologiques disponibles pour autre chose. L’art donnant aussi du plaisir, « cela ouvre la voie d’un bonheur plus authentique, privé des envies irrésistibles qui nous assaillent », explique la chercheuse. Utiliser la pratique artistique dans le but de soigner est la définition même de l’art thérapie. « Cette forme de psychothérapie utilise un autre langage que le langage verbal. C’est pourquoi ça fonctionne bien sur les addictions, explique le Dr Anne-Marie Dubois**, psychiatre et responsable de l’unité d’art-thérapie à la clinique L’art-thérapie fonctionne bien dans des pathologies où il est difficile, voire impossible d’exprimer ses émotions. Par exemple, en cancérologie. « Chez les personnes qui souffrent de maladies chroniques, il y a des souffrances indicibles, des maladies mentales et de l’encéphale à l’hôpital Saint-Anne à Paris. Les personnes qui en souffrent sont dans l’évitement. Elles utilisent le langage pour justifier leur comportement avec des rationalisations qui ne sont pas de réelles explications, mais qui sont au service de cette fuite. » Quand la pratique artistique devient un traitement Par le biais de la médiation artistique, des émotions et des souffrances peuvent être extériorisées. Le point commun des addictions : la volonté de ne pas se confronter à ses problèmes, L’art-thérapie, une pratique qui se répand à l’hôpital dans un évitement de soi. Alors que la pratique artistique, quelle qu’elle soit, implique à l’inverse un engagement personnel. Certaines activités artistiques peuvent se révéler très efficaces. C’est le cas de la danse et de la musique, des pratiques où la parole est justement peu présente. Au travers d’improvisations qui mettent en jeu le corps, des choses peuvent s’exprimer que la parole ne dit pas. C’est là que le thérapeute a une place fondamentale. Il fait en sorte que ce qui est dit dans ces pratiques artistiques soit transformé, afin que le patient soit confronté à une partie de lui-même qu’il a tenté de mettre à distance. • explique le Dr Anne-Marie Dubois. L’art-thérapie permet de les apprivoiser. » Les troubles du comportement ali men taire sont aussi une bonne indication, car le langage chez les personnes souffrantes est utilisé pour manipuler et non pour exprimer les affects. Enfin, chez les patients en échec de psychothérapie, les person nalités borderline ou encore en cas de névrose, cette forme de psychothérapie peut aider. Elle introduit un tiers qui facilite la relation. Comment s’y opposer ? Pour la chercheuse, les activités artistiques pourraient stopper cette quête de plaisirs immédiats. Dans la pratique artistique, tous nos sens sont sollicités. Avec la danse Kiosque * Ses travaux sont publiés dans la revue Proceedings B.** Auteure de « Art-thérapie : principes, méthodes et outils pratiques », éd. Elsevier Masson. <strong>Femme</strong> <strong>Actuelle</strong> 38 ISTOCK/GETTY-IMAGES
Association reconnue d’utilité publique enregistrée sous le N° 784 453 250 000 36. EN 40 ANS, NOS ENFANTS ONT PERDU 25 % DE LEURS CAPACITÉS CARDIO- VASCULAIRES. * En bougeant moins qu’auparavant, les enfants exercent moins leur cœur et risquent de développer des maladies cardio-vasculaires. 60 minutes d’activité physique quotidiennes sont recommandées aux enfants pour garder leur cœur en bonne santé. Combattons l’inactivité ! Rendez-vous sur www.fedecardio.org. Kiosque * Publications du Dr Grant Tomkinson, university of south Australia, Adelaide, 2006 et 2013. Études réalisées auprès de 25 millions d’enfants âgés de 9 à 17 ans dans 28 pays entre 1964 et 2013.