HS_AFRIQUE-MAI 2018-Tablette

MAI 2018 | N°67 — CAHIER
SPÉCIAL AFRIQUE
L’AVENIR
AU FEMININ
WWW.CBNEWS.FR

1 ÈRE
CHAÎNE
DE FRANCE
SUR LES ENFANTS*
*Source : Médiamétrie / Médiamat audience consolidée
en 6-20h avec 20,1% de PdA sur les 4-10 ans - record historique en mars 2018.
en 3-27h avec 16,9% de PdA sur les 4-10 ans - record pour un mois de mars sur les 4-10 ans en 3h-27h depuis 2014.

PRÉSENTE
DANS PLUS DE
60 PAYS

Édito
L'AFRIQUE N'EST
PAS CELLE QU'ON CROIT
Si vous feuilletez ces pages en ce tout
début mai sous le soleil de Marrakech,
il est fort à parier que vous
faites partie des heureux participants
de la 4 e édition de l’African
Cristal, où ce numéro spécial est diffusé
en avant-première. Une édition
qui sera aussi lue – on l’espère –les jours suivants
dans sa version numérique, aussi bien à Abidjan,
Bamako ou Kinshasa. Deuxième exercice du
genre pour la rédaction de « CB News », ce numéro
fait la part belle à celles qui sont plus que
le principal atout du continent. Non pour leur
rendre un hommage facile, mais pour mettre en
lumière le rôle moteur des femmes africaines
et les enjeux que cela implique. En ce domaine,
comme dans de nombreux autres, l’Afrique n’est
pas ce que l’on croit. Avec une représentation
des femmes dans le pouvoir politique largement
supérieure à celle de nombreux pays du Nord,
dont la France. Preuve, s’il en était encore besoin
que nous avons beaucoup à apprendre de ce
continent. Une partie du monde où se concentre
une formidable énergie qui attire naturellement
les investisseurs économiques occidentaux. Une
bonne nouvelle mais aussi un défi pour les Africains
qui consiste à prendre en main leur propre
destin économique.
Comme le rappelle Bruno Mettling, dans la
Grande Interview, à quoi bon avoir une licorne
locale, Jumia, que d’aucuns qualifient d’Amazon
africain, si elle n’offre pas de débouché
réel pour les artisans du continent. Si la ques-
tion de la collaboration sud-sud est cruciale
à l’instar de l’accord instaurant une zone de
libre-échange continentale signé en mars par
l’Union africaine, il en va également de la responsabilité
des entreprises qui investissent le
continent de privilégier les coproductions et de
miser sur les talents locaux. Reste un plafond
de verre (un autre) : l’accès des Africains aux
instances dirigeantes. Ainsi, à titre d’exemple,
très peu siègent au comité exécutif d’entreprise
du CAC 40 ayant une activité significative sur le
continent. Orange y est, semble-t-il, la 2 e entreprise,
après Total, à nommer un Africain, en
l’occurrence le sénégalais Alioune Ndiaye, au
Comex. Autant dire que le chemin est encore
long même si des efforts sont faits.
FOUZIA KAMAL et
FRÉDÉRIC ROY
CB NEWS . 4 . MAI 2018

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International Managing Director Sales & Marketing
pauline.decardes-wertheimer@francetvpub.fr
tél. : +33 1 56 22 64 20
Source : KANTAR TNS Africascope 2017 (janvier-décembre 2017) – 8 pays d’Afrique francophone : Côte d’Ivoire, Sénégal, Cameroun, RDC, Gabon, Mali, Burkina Faso,
Congo Brazzaville. Audience digitale : base internautes. Population urbaine 15+, audience hebdomadaire. Extrapolation réalisée à partir des dernières études Kantar
TNS Africascope et d’études ad hoc récentes.

Sommaire
MAI 2018 / SPÉCIAL Afrique
26
Les jeunes femmes de “ Ouaga Girls ”, le film de Theresa Traore Dahlberg (2018).
10/ LES NEWS DE CB
Des ondes version locale,
la com' de la présidence du
Sénégal, des terrains de foot.
12/ TRIBUNES
« On dit quoi ? » Par Adrien
Cusinberche, de Blue Lions.
Miroir des sociétés. Par
Laurent Vaneson de France
Télévisions Publicité.
LA GRANDE
INTERVIEW
20
BRUNO METTLING,
président d'Orange Middle
East and Africa, précise la
nouvelle approche du groupe.
LA COVER
STORY
26
ÉCONOMIE
AFRICAINE,
L'ATOUT FEMMES
Elles représentent la moitié de
la population du continent et
produisent 62 % de ses biens
économiques. Rien ne se fera
sans elles.
30/ ENTREPRENARIAT FÉMININ,
LE 1 ER CONTINENT…
au monde. Opportunités,
potentiel, et… manque
de fonds.
20
Bruno Mettling, le président d'Orange Middle East and Africa.
16/ LA TWITTERVIEW
Par Yves Bigot de TV5Monde.
18/ PROFIL CB
Olivier Laouchez, de Trace TV.
34/ REPRÉSENTATIVITÉ
DES FEMMES, LE TOP 20 EN
POLITIQUE
Moyenne mondiale des
femmes dans les parlements :
22 %, Sénégal : 42,7 %.
36/ VIVATECH S'OUVRE
À L'AFRIQUE
L'Afric@Tech, start-up et
accélérateurs…
CB NEWS . 6 . MAI 2018

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Sommaire
MAI 2018 / SPÉCIAL Afrique
Caroline
Cochaux,
présidente
de Gulli,
et Vincent
Montocchio,
dg de l'agence
mauricienne
Circus.
44
ENQUÊTE
MÉDIA
38
TV, L'AFRIQUE EST
À L'ANTENNE
Des chaînes se créent, la
production audiovisuelle
se développe.
42 / MATURITÉ PANAFRICAINE
Des nouvelles de « Jeune
Afrique ».
44 / LA GRILLE EST ADAPTÉE AUX
MODES DE VIE LOCAUX
Interview de Caroline
Cochaux de Gulli Africa.
BUSINESS
45 INFOGRAPHIE
L'afroptimisme
publicitaire en
chiffres…
LES GRANDS MOTS,
46 l'agence africaine des
Gros Mots à Rabbat.
47 PARTENAIRES
L'African Cristal
Festival, du 2 au 5 mai
à Marrakech.
48
50
48
UN PAYS FERTILE
EN PUB
L'agence Circus
rayonne de l'Île
Maurice.
PROFIL MOBILE
L'app. préférée de
Romain Grandjean et
Philippe Perdrix de
l'agence 35° Nord.
4 bis, rue de la Pyramide.
92643 Boulogne-
Billancourt Cedex.
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CB News est édité par
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SAS au capital de
300 000 €
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(51 01). Directrice
artistique : Aida de
Miguel. Conception
graphique : Mediamania
(Claude Maggiori et Anne
Maggiori). Responsable
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Bertemont (51 17).
Chef de
projet événements :
Émilie Lagarde (55 43)
Ont collaboré à ce
numéro : Éric Legouhy
Anne-Lise Carlo, René Saal,
rédacteurs.
PUBLICITÉ :
Directrice Régie :
Virginie Paradol (50 61).
Directrice du pôle Média :
Mélina Lorentz (55 48).
Responsable du pôle
Digital : Alexandre Hiriart
(50 62). Responsable du
pôle Agences : Barbara
Dalbouse (50 09).
Pour nous joindre : 01 55
38 suivi du N° de poste, ou
prénom.nom@cbnews.fr
ISSN : 2116-9519
CPPAP : 1022 T 84391
Dépôt légal :
mai-juin 2018
Imprimerie Lesaffre SA.
19, rue de la Borgnette.
B 7500 Tournai, Belgique.
N° National :
BE 0421 148 066
Tél. : +32 69 888 777
Service abonnements :
9 numéros, print et digital
+ l’Album by Shortlist :
179 € TTC (France).
Tarif étudiant (France) :
9 numéros print seul.
59 € TTC.
SAMEBOX
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de CB News
Tél. : 06 64 80 93 08
3, rue Pont de l’Arche
37 550 Saint-Avertin.
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Cet encart est un cahier
Spécial Afrique du n°67, de
mai 2018.
Ne peut être vendu.
Couverture :
© Getty Images
CB NEWS . 8 . MAI 2018

Les News
de CB
Version locale
NOUVELLES ONDES
Le paysage radiophonique marocain a accueilli un
nouvel acteur en février : NRJ, née d’un partenariat
entre NRJ Group et Radio Planet. Sur les 16 pays où
la marque est présente, le Maroc est le premier pays
d’Afrique où NRJ diffusera des programmes en version locale.
NRJ Maroc, disponible via son site internet et appli
mobile, se positionne sur le segment du divertissement digital,
d’autant que la marque déploie son activité événe-
mentielle sur le territoire depuis mars 2017, et organise le
« NRJ Music Tour » à Casablanca.
Experts indépendants
PAS SI SMALL
Co-fondée fin 2014 par Nicolas
Czorny et Brian Tenoudji, deux
anciens de l’agence Kassius, Small Is
Bigger est parvenue depuis Paris à se
tailler un joli portefeuille de clients en
Afrique francophone. D’autant que
l’agence capitalise sur une approche
très spécifique : l’activation et le
pilotage d’experts indépendants, aux
talents de “ chefs d’orchestre ”, et
ce sur l’ensemble des compétences
et problématiques digitales.
Chargée de la communication de la
présidence du Sénégal depuis
3 ans (site web et contenus),
l’agence accompagne également
Waw, nouvel entrant sur le marché
de l’internet au Sénégal. “ Notre
modèle permet de mettre face aux
besoins de ces clients les expertises
opérationnelles les plus adéquates ”,
explique Nicolas Czorny qui étudie
la possibilité d’ouverture d’un bureau
sur le continent.
84
TERRAINS DE FOOT
C’est ce que représente la
plus grande centrale solaire
d’Afrique de l’Ouest, basée à
Zagtouli au Burkina Faso. Soit
129 600 panneaux solaires sur
une superficie de 60 hectares,
inaugurés en novembre.
Le site web de
Waw au Sénégal,
un des clients de
Small is Bigger.
PHOTOS : © NRJ. DR.
CB NEWS . 10 . MAI 2018

LES VOIX DU MONDE
Plébiscitée en Afrique francophone
• 1 ère radio écoutée à Abidjan, Brazzaville, Libreville et Nouakchott
• 34,6 M d’auditeurs hebdomadaires en Afrique subsaharienne
• 4,4 M de visites mensuelles sur rfi.fr
• 15,9 M de fans Facebook dans le monde
Sources : Kantar - TNS - Africascope 2016 - 2017
Digital analytix, comScore, communauté Facebook
CONTACTS RÉGIE
@RFI
Claude Erepmoc
Directrice commerciale Europe, Amériques, Asie
claude.erepmoc@francemm.com
Tél. : +33 1 84 22 76 42
Gregor Germain
Directeur commercial Afrique, Océan Indien
gregor.germain@francemm.com
Tél. : +33 1 84 22 83 06
Kenza Merzoug
Directrice commerciale Afrique du Nord, Moyen Orient
kenza.merzoug@francemm.com
Tél. : +33 1 84 22 83 04

Tribune
CONTENUS
“ ON DIT
QUOI ? ” *
CONTENUS LOCAUX ET SPÉCIFIQUES…
VOILÀ LES CLÉS POUR SE FAIRE
REMARQUER SUR LE CONTINENT
AFRICAIN.
ADRIEN
CUSINBERCHE
est cofondateur
de Blue Lions,
agence digitale
spécialisée dans
l'accompagnement
de
marques globales
sur les marchés
africains. Ses
bureaux sont
au Maroc, Côte
d’Ivoire, Afrique
du Sud, EAU
(Dubai), Kenya,
Ghana, à Paris et
à Lyon.
C
omme tous les jours Malick va passer
une heure coincé dans les embouteillages
d’Abidjan, un peu serré dans le
baka (taxi collectif) qui l’emmène à
son bureau. Comme tous les jours, en
se rendant à son travail, il a le nez rivé
sur son smartphone. Le problème de Malick, et
des 300 millions de possesseurs de smartphones
sur le continent africain, est de trouver de quoi
se divertir. Ils passent en moyenne 3 heures par
jour devant leur écran, à consulter en priorité Facebook
et YouTube, bien que l’offre de contenus
qui leur est dédiée soit très pauvre en comparaison
à d’autres régions du monde.
Le problème de Malick est devenu une opportunité
pour les annonceurs. La bataille du
contenu, qui fait rage partout dans le monde,
est plus facile à gagner par les annonceurs sur
ce continent. Ces derniers ont la possibilité de
se positionner sur ces marchés très ouverts
où l’attention des consommateurs n’est que
très peu mobilisée par les médias traditionnels.
Toutefois, là où ceux-ci ont la capacité
de produire du contenu localement, beaucoup
d’annonceurs en sont encore à copier-coller
des contenus d’autres régions en imaginant
que cela fonctionnera. À titre de comparaison,
pourrait-on imaginer, en France, de diffuser
du contenu initialement produit pour le Kazakhstan
? C’est pourtant ce qu’il se passe sur
le continent africain, où, trop souvent, les particularités
nationales sont gommées au profit
d’une création de contenu trop universelle et
donc inadaptée.
C’est d’autant plus dommageable que les contenus
créés spécifiquement pour des pays, ou
des régions, sur le continent africain sont très
bien accueillis et bénéficient de taux d'engagement
8 à 10 fois supérieurs à ceux que l'on
peut rencontrer en Europe. Plusieurs annonceurs
ont compris ce potentiel et ont construit
des campagnes autour de contenus spécifiques
avec des résultats dépassant toutes les espérances
: l’Oréal, pour sa marque Dark & Lovely,
a ainsi produit et diffusé des tutoriels beauté,
avec des influenceurs locaux, dans six pays du
continent, comblant ainsi la quasi-absence de
contenu dédié sur le sujet. Ces vidéos, diffusées
sur YouTube et Facebook, ont permis de générer
près d’un million de vues organiques.
Dans des pays où le taux de pénétration d’Internet
évolue de plus de 12 % par an et où les
générations Y et Z sont les plus nombreuses, la
capacité des annonceurs à adresser des messages
spécifiques au travers de stratégies de
contenus adaptées est un élément déterminant
pour créer la préférence de marque, et travailler
la présence à l’esprit auprès de ces nouveaux
consommateurs.
* : Expression en nouchi , un dialecte ivoirien, qui signifie :
que se passe-t-il, quelles sont les nouvelles ?
PHOTO : DR.
CB NEWS . 12 . MAI 2018

© YASUYOSHI CHIBA / AFP
• 1 ère chaîne d’information internationale en Afrique francophone*
• 29 M de téléspectateurs hebdomadaires en Afrique subsaharienne
et 12,2 M au Maghreb
• 5,3 M de visites mensuelles sur france24.com
• 22 M de fans Facebook dans le monde
CONTACT RÉGIE
francetvpublicité international
Pauline de Cardes-Wertheimer
* Abidjan, Bamako, Dakar, Douala, Kinshasa, Libreville, Ouagadougou, Yaoundé,
Brazzaville, Lomé et N’Djamena
Directrice commerciale international
pauline.decardes@francetvpub.fr
Tél. : +33 1 56 22 64 20
Sources : Gallup - Ipsos - Kantar - TNS - Africascope 2017
Digital analytix, comScore, communautés Facebook
@FRANCE 24

Tribune
LIBRE-ÉCHANGE
MIROIR
DES
SOCIÉTÉS
QUELLES SONT LES PERSPECTIVES POUR
LES MÉDIAS PANAFRICAINS DANS UN
PAYSAGE RÉVOLUTIONNÉ PAR LA TNT ?
LAURENT
VANESON
est directeur
délégué
de France
Télévisions
Publicité. Il
est chargé de
l'international et
de l'Outre-Mer.
L
e déploiement de la TNT entraîne la
création de nombreuses chaînes pour
la plupart nationales. Les médias
panafricains ne sont pas menacés
par cette transformation : ils accompagnent
l’intégration des économies
africaines, ils resteront puissants à condition
de s’adapter encore mieux aux publics africains
et ils profiteront comme les chaînes nationales
de la croissance du marché publicitaire si les
outils de mesure se développent.
Le 21 mars, 44 pays ont signé un accord instaurant
une zone de libre-échange continentale
(Zecla). Elle sera la plus vaste au monde
en termes de nombre de pays membres. Sa
création permettra aux exportations intraafricaines
de concurrencer d’avantage les exportations
d’autres régions du monde. Actuellement
seuls 18 % des échanges commerciaux
africains ont lieu au sein du continent contre
70 % pour l’Europe. Ce qui est consommé en
Afrique sera d’avantage produit en Afrique ce
qui permettra la création d’emplois.
La Zecla accélérera un mouvement en cours :
en 2016 les 30 premières entreprises africaines
étaient actives en moyenne dans 16 pays
d’Afrique contre 8 en 2008.
Les médias panafricains permettent à des
marques qui ne sont pas distribuées partout
mais qui veulent s’exporter en Afrique de
développer leur notoriété dans leurs futurs
marchés. Ils resteront puissants malgré la
multiplication des médias nationaux car ils
bénéficieront eux aussi de fréquences, comme
France 24 qui vient d’annoncer son lancement
sur la TNT gratuite au Kenya.
Les médias panafricains non-africains continueront
à peser dans le paysage audiovisuel, à
condition d’inspirer confiance en évitant tout
parti pris, d’être le miroir des sociétés africaines
et de prouver leur utilité sociale. C’est
ce que fait TV5 en consacrant 3 millions € au financement
de séries et de magazines africains
et en doublant la durée de son JT Afrique. Le
contraste avec des chaînes qui diffusent à longueur
de journée des séries sud-américaines
est frappant.
Le développement du marché publicitaire est
freiné par une offre d’outils de mesure incomplète
: l’audience doit être mesurée par un tiers
de confiance – au contraire des Gafa qui communiquent
leurs propres données – dans un
plus grand nombre de pays et plus fréquemment.
La pige publicitaire devrait être plus systématique
afin de rassurer les annonceurs. L’arrivée
de nouveaux entrants permettra-t-elle de
financer ces investissements indispensables ?
PHOTO : © CORINNE VACHON.
CB NEWS . 14 . MAI 2018

AFRICASCOPE 2017 (JANVIER-DÉCEMBRE) – KANTAR TNS
SUBSAHARIENNE
FRANCOPHONE

Twitterview
11 question à
YVES
BIGOT
LES MEILLEURES RÉPONSES
SONT LES PLUS COURTES.
140 SIGNES PAS PLUS *.
COMME SUR TWITTER.
Le poids de l'Afrique dans TV5 Monde ?
50 millions de foyers, 30 millions de
téléspectateurs, 44 % de CA pub, 3 chaînes
dédiées.
La francophonie fera-t-elle de TV5 Monde la
1 re chaîne mondiale ?
Ce serait génial mais tout succès créé sa
concurrence, être dans le top 5 c'est déjà bien.
La Coupe du Monde 2026 au Maroc, on y croit ?
Oui bien sûr, un grand pays de football.
Afrique, continent du XXI e siècle ?
Évidemment, avec l'Asie qui sera leader grâce à
l'Inde et à la Chine.
La refonte de l'audiovisuel public initiée par
Emmanuel Macron...
…est essentielle pour se donner une force de
frappe, mais doit englober aussi le privé.
La data en Afrique, trop tôt ?
Il faut cesser de dire que l'Afrique doit attendre.
Jumia ou Amazon ?
Libraires, disquaires, marchands de journaux...
Le retour du vinyl ?
Tout le reste fait mal aux oreilles et ne respecte
pas la musique.
Peut-on encore vivre de sa musique ?
La manière dont le streaming vole les artistes
est un scandale.
Spotify ou Deezer ?
Non du bon son.
Et toi twittes-tu ?
@yvesbigot.
Recueilli par
FOUZIA KAMAL
* Twitter a décidé depuis le 7 novembre 2017 de passer ses
tweets à 280 signes max. Nous respectons cette décision,
mais, nous, dans notre “ Twitterview ”, restons à 140 signes.
C'est bien plus challengeant.
YVES BIGOT,
journaliste,
producteur,
directeur de
programmes,
il est aujourd'hui
DG de
TV5Monde.
PHOTO : © CH. LARTIGE/CL2P/TV5.
CB NEWS . 16 . MAI 2018

Nous pensons que les meilleures communications sont créées par ceux qui
ont un clown dans la tête et de l’amour dans le cœur. Ces valeurs ont fait de nous
l’une des agences africaines les plus récompensées. Nous sommes Mauriciens et
portons ainsi naturellement en nous les cultures de quatre continents. Cette capacité
d’adaptation aux cultures du monde nous permet aujourd’hui de servir des clients
venus de tous horizons. www.circusads.com
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Profil
CB
OLIVIER
LAOUCHEZ
LE P-DG DE TRACE TV A
COFONDÉ EN 2003 CETTE
CHAÎNE MUSICALE LEADER
EN AFRIQUE, DANS 140
PAYS. CE QUI EXPLIQUE SON
PROFIL VOYAGEUR.
Les amis dont je ne pourrais pas me passer
pendant plus de 48 h
J'ai peu, mais de très bons amis et beaucoup
de connaissances dans le monde
entier. Ma femme et mes 3 enfants sont au
centre de ma vie non professionnelle, et
quand j'ai la chance de pouvoir me poser
quelques jours, je suis en priorité avec eux.
Mon meilleur ennemi
Moi-même. Même si je travaille à me
contrôler. J'arrive enfin à canaliser mon
insatisfaction permanente en appliquant
cette philosophie : donner le meilleur
de soi-même dans les situations que l'on
contrôle et accepter avec beaucoup de
« zénitude » les situations que l'on ne
contrôle pas.
Je circule en…
Uber X dans les grandes villes et en
Porsche Cayenne sur les immenses trajets
qui nous mènent avec ma famille aux
quatre coins de l'Afrique du Sud. C'est l'un
des plus beaux pays du monde.
J’habite…
Je voyage 70 % de mon temps dans le
monde entier. J'ai récemment reçu la
carte Ultimate Platinum donnée aux 300
meilleurs clients d'Air France... Délicate
attention, mais je préfèrerais passer plus
de temps dans ma maison de Johannesburg
avec ma famille.
Ma devise au boulot
J’en ai deux : « On n’a jamais deux fois
l’occasion de faire une première bonne
impression. ». « Do not compete if you do
not have a competitive advantage. »
Ma plus grosse bâche professionnelle
La non-attribution de la fréquence TV
TNT pour l'Île-de-France que nous avions
sollicitée auprès du CSA.
Nous avions le meilleur dossier. Mais
PHOTOS : © JEFFREY SALES. DR.
CB NEWS . 18 . MAI 2018

Les amis qui ont été
déterminants dans
mon parcours …
Les coiffures
extravagantes
des joueurs de
foot par BETC.
Ci-dessous, la
série sud-africaine
“ Yizo Yizo ”.
JEAN-MANUEL
RICHIER
J'ai rencontré Jean-
Manuel à l'ESCP.
Nous partageons des
passions communes.
Il m'a accompagné de
ses conseils avisés et
de ses investissements
dès le lancement de
Trace. Je ne pense
pas que Goldman
Sachs New York, notre
premier actionnaire,
nous aurait soutenus
si Jean-Manuel ne les
avait pas rassurés sur
ma personne.
JEAN-MARC
LAOUCHEZ
Plus qu'un ami, mon
frère. Le contraire de
ma personnalité. En
plus calme et pondéré.
Ses qualités humaines
et son sens de la
réflexion stratégique
sont toujours à mon
service quand j'en ai
besoin. Super rassurant
de l'avoir à mes côtés.
le CSA d'alors en a décidé autrement.
Dommage. Notre projet aurait contribué
à un meilleur vivre-ensemble pour les
Franciliens de toutes origines. Après cette
déconvenue, j'ai décidé que le futur de
Trace ne serait pas qu'en France.
Ma plus grande fierté professionnelle
La mobilisation de Trace et des artistes
pour venir en soutien aux victimes du
tremblement de terre en Haïti en 2010.
Nous avons produit en 3 jours une
chanson et un clip « Un Geste pour Haïti »
qui ont permis d'aider des milliers de
personnes dans une souffrance extrême.
Mon voyage le plus fou
Je me suis retrouvé sur une pirogue pendant
une semaine à remonter le fleuve
Saint-Laurent en Guyane. Cela m’a permis
de découvrir un pays et des peuples
comme les Boni, descendants directs des
esclaves qui avaient fui leur servitude. La
France a besoin de mieux connaître son
histoire et d’accepter sa diversité.
Ma cantine préférée
Le Sébillon Porte Maillot à Paris est gravé
dans ma mémoire pour sa cuisine et des
souvenirs très forts. À Abidjan, Chez
Ambroise propose le meilleur poisson
braisé du monde.
Mon programme TV (africain) préféré
La série sud-africaine Yizo Yizo dans les
années 2000 m’a fait découvrir la réalité
des ghettos sud-africains et de leur jeunesse.
Un vrai coup de poing culturel. Un
réalisme incroyable. Chaque scène lance
un débat encore brûlant d’actualité.
Ma pub (africaine) préférée…
Le spot créé par BETC pour Canal+ Afrique
autour des coiffures extravagantes des
joueurs de foot. Hilarant et tellement vrai.
Mon plat favori…
Gratin de banane jaune avec une fricassée
de poulet au gingembre suivi d’un flanc
au coco. Mes origines martiniquaises
y sont certainement pour quelque chose.
Mon cocktail favori…
Je suis un fan de piña colada. La recette
magique : lait de coco « Coco Lopez », du
jus d’ananas frais, rhum Neisson de la
Martinique, des glaçons et un super mixer.
Je garde pour moi les proportions…
Facebook et moi
Ce n’est pas vraiment une histoire
d’amour. Je l’utilise très peu. Je rencontre
dans la vraie vie des centaines
de personnes toute l’année. Pas trop le
temps de musarder sur les réseaux et
j’adore garder une certaine discrétion
sur ma vie privée.
Recueilli par
FOUZIA KAMAL
CB NEWS . 19 . MAI 2018

La grande
INTERVIEW
NOUS NE COMPTONS
QUE 50 EXPATRIÉS
POUR 12 000
collaborateur
BRUNO METTLING, LE PRÉSIDENT
D'ORANGE MIDDLE EAST AND
AFRICA PRÉCISE LA NOUVELLE
STRATÉGIE DE L'OPÉRATEUR
DANS LE CONTINENT AFRICAIN :
L'APPROCHE MULTISERVICES,
LES ENJEUX DE LA DATA, LES
PARTENARIATS AVEC LES GRANDES
ÉCOLES… LA NOMINATION D'UN
SÉNÉGALAIS À LA DIRECTION
GÉNÉRALE. PLUS QU'UN SYMBOLE.
cbn _ Quelle place tient aujourd’hui l’Afrique
dans la stratégie internationale du groupe
Orange ?
bruno mettling_ Contrairement à d’autres dont
l’intérêt est tangible depuis 2 ou 3 ans, nous
avons décidé de nous développer en Afrique
voilà maintenant 20 ans. Sans tomber dans un
afro-optimisme béat, tout converge pour faire
de ce continent un acteur incontournable du
21 e siècle. Notre activité s’y est accélérée ces
dix dernières années, donnant une place assez
centrale à l’Afrique dans le dispositif d’Orange.
Nous y sommes passés de 28 millions de clients
sous marque Orange en 2010, à 130 millions
aujourd’hui. L’Afrique pèse aujourd’hui pour
13 % de nos revenus, avec plus de 5Mds de CA.
La profitabilité y est supérieure à la moyenne du
groupe. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de difficultés,
mais à l'intérieur du modèle d'Orange,
CB NEWS . 20 . MAI 2018

l’Afrique est un territoire de développement et de
croissance. De même que le continent porte un
deuxième enjeu essentiel : notre capacité à développer
des modèles différents en partant des
spécificités locales à l’instar d’Orange Money. À
titre d’exemple, la place des Gafa n'est pas celle
qu'ils ont en Europe. Ils y rencontrent des difficultés
à développer les modèles qui ont fait leur
succès. À l'inverse, l'Afrique offre pour les opérateurs
des opportunités tout à fait particulières,
notamment en matière de services.
cbn _ C’est ainsi que vous passez d’une logique
d'opérateur téléphonique à une logique
d'opérateur de services...
bruno mettling_ Tout à fait. Nous avons d’abord
été apporteur de connectivité et cela reste, aujourd’hui
encore, notre premier rendez-vous
avec l’Afrique. L’Afrique, qui avait un retard, a
basculé, de manière certes décalée avec l'Europe
mais en accéléré : si l’Europe a mis 10 ans
pour passer de la 3G à la 4G, l’Afrique aura réalisé
ce saut en moins de quatre ans. Les attentes
en connectivité restent très fortes, notamment
en matière de 4G, de très haut débit, voire même
de fibre dans les très grandes agglomérations.
Une nouvelle donne qui ouvre la voie à un
nombre de services considérables dont l'impact
est bien plus important que ce que l'on peut observer
en Europe.
cbn _ Parmi ces services, le mobile banking ?
bruno mettling_ C'est même là qu’a démarré
notre approche multiservices, avec le lancement
d’Orange Money, lancée il y a maintenant
10 ans et forte de plus de 37 millions de
clients aujourd'hui. Une partie conséquente de
la population qui n'avait pas accès à l'inclusion
…
CB NEWS . 21 . MAI 2018

La grande
INTERVIEW
“ PLUS DE 60 000
AGRICULTEURS
UTILISENT NOS
APPLICATIONS :
MÉTÉO, COURS
DES MATIÈRES
PREMIÈRES… ”
financière, a pu déposer, retirer ou transférer
de l'argent. Nous sommes aujourd’hui attendus
sur beaucoup d’autres problématiques où le mobile
peut jouer un rôle déterminant.
C’est ainsi qu’en matière
d’accès à l’énergie, nous
distribuons des kits solaires
sur abonnement, qui font la
preuve que, en particulier dans
les zones rurales, des solutions
qui couplent numérique et
technologies solaires ont toute
leur place à des tarifs tout à fait
abordables. Côté agriculture,
plus de 600 000 agriculteurs,
entre le Mali et la Côte d'Ivoire,
utilisent aujourd’hui des applications que nous
avons développées avec des partenaires, pour les
conseiller tant en météorologie que sur le cours
des matières premières. Nous disposons par ailleurs
d’un réseau de proximité qui est sans équivalent
– Orange fait travailler plus de 900 000
revendeurs dans les pays où nous sommes présents
– et est perçue dans tous ces pays, et notamment
en Afrique de l’Ouest comme une marque
de confiance.
cbn _ Que donne cette nouvelle stratégie
en chiffres ?
bruno mettling_ Aujourd'hui, d'ores et déjà, par
rapport aux métiers traditionnels de la voix, la
data mobile et Orange Money représentent 20
% de nos revenus en Afrique. Et je suis absolument
convaincu qu’à l'horizon 2040 – 2050, ils
pèseront au moins pour moitié.
cbn _ De manière très pragmatique, à quelles
difficultés êtes-vous toutefois confrontés ?
bruno mettling_ Nous avons un avantage
en Afrique qui nous permet d'éviter nombre
d’écueils : nous avons créé des sociétés de plein
exercice avec des responsables et des équipes
locales. Nous sommes inscrits dans la durée, et
dans une proximité avec la société dans laquelle
nous opérons. Pour le reste, je pense qu'il y a
deux grandes difficultés structurelles au développement
de notre société. La première réside
dans l'instabilité des règles de régulation et de
fiscalité : ce n’est certes pas le cas partout mais
nous sommes parfois encore confrontés à des
attitudes basées sur des logiques de court terme.
Nous investissons 1milliard d'euros par an en
Afrique, cela suppose un minimum de visibilité.
La deuxième grande difficulté est celle de la disponibilité
de talents en quantité suffisante. Un
accord entre Polytechnique, l’Institut national
polytechnique Félix Houphouët-Boigny (INPHB)
de Yamoussoukro et l’École nationale supérieure
de statistiques et d’économie appliquée (Ensea)
d’Abidjan va nous permettre de faire émerger la
première promotion de data scientists en Afrique
de l’Ouest. Mais c’est par centaines de milliers
que l'Afrique doit former des codeurs, et par milliers
qu'elle doit se doter d'analystes de la donnée.
Tout le monde doit se mobiliser, notamment
CB NEWS . 22 . MAI 2018

La grande
INTERVIEW
Stéphane Richard sur ma proposition a nommé à
la direction générale l’un de nos dirigeants issus
des pays. Alioune Ndiaye a donc pris la direction
de la filiale Omea et intègre également le Comex.
Il a avant cela très largement contribué à développer
notre activité en qualité de CEO d’Orange
Mali puis de la Sonatel. Plus globalement, nous
souhaitons qu'un tiers du comité de direction
d'Orange Afrique et Moyen-Orient soit originaire
des pays dans lesquels nous opérons avant la fin
de ce semestre. Orange Middle East Africa veut
devenir la filiale africaine et Moyen-Orient d’un
groupe international, et non plus la filiale d'un
groupe international qui développe des activités
en Afrique et au Moyen-Orient.
Les
photographies
d'Olivier Roller
font partie d'un
travail global sur
les figures du
pouvoir, mené
avec « CB News »
depuis le n°1
de la nouvelle
formule.
www.olivierroller.
com.
les bailleurs de fonds, si l’on veut que les datas
centers et autres plateformes de supervision des
réseaux ne soient pas basés qu’au nord.
cbn _ La nomination d'Alioune Ndiaye à la
direction générale d’Orange Afrique est un
signal fort ?
bruno mettling_ Elle s'inscrit dans un mouvement
de fond. C’est dans les pays même que se
joue tous les jours la bataille, et nous avons des
équipes de grande qualité sur place. Nous ne
comptons que 50 expatriés pour 12 000 collaborateurs.
Cette diversité n’était pourtant pas perceptible
au sein des instances dirigeantes, une
sorte de deuxième plafond de verre.
cbn _ Où en est-on, en Afrique, sur le front de
la data ?
bruno mettling_ Il y a une prise en compte de
ses enjeux. Le Nigeria, l’Afrique du Sud et le Kenya
ont engagé un certain nombre de réflexions
sur des utilisations de la data, et structuré un
peu les choses en se dotant de réglementations
sur l'utilisation des données personnelles. Tout
notre enjeu est que cette prise de conscience
s'organise dans l'ensemble des pays où nous
sommes présents. Nous saisissons les opportunités,
les rendons accessibles, investissons dans des
infrastructures de qualité – notamment des datacenters
– tout en étant bien attentifs à la sécurité
des données, à la pédagogie sur leur utilisation...
c’est, j’en suis convaincu, un vrai sujet d’avenir,
notamment en matière de pilotage des grandes
politiques : transport, gestion des déchets, gestion
de l'eau, prévention et santé... les enjeux
sont colossaux. Mais, là encore, il faut raison
gardée. Cela ne viendra pas d'un claquement de
doigts, il faudra faire cela de manière organisée
et progressive en « adressant » par ailleurs les
risques et les enjeux de propriété et de protection
des données individuelles. D’autant que nous
sommes nous-mêmes, chez Orange, un des plus
importants créateurs de données du continent.
cbn _ Vous avez développé un dispositif
d’accompagnement des start-up assez
complet, un autre moyen de nourrir votre
stratégie dans les services ?
bruno mettling_ Nous avons une place particulière
dans l'écosystème des start-up. Nous y
disposons de nombreux fab lab, incubateurs,
accélérateurs... et nous sommes présents sur
…
CB NEWS . 23 . MAI 2018

La grande
INTERVIEW
“
LE MOBILE PEUT
JOUER UN RÔLE
MAJEUR POUR
IDENTIFIER,
LOCALISER
ET ASSURER
LA LIVRAISON. ”
toute la chaîne de la vie d'une
startup. Par ailleurs, nous
nous sommes dotés d'un
fonds de 50M€ – Orange Digital
Venture Africa, un des plus
grands privés d'Afrique – pour
investir dans le développement
des success story africaines.
L’Afrique a ses licornes
dont Jumia fait partie et dans
laquelle nous avons fortement
investi parce qu'elle rejoint
notre logique de services et est très corrélée
à l’usage d’Orange Money. S'il est bien un lieu
où le e-commerce est appelé à avoir un avenir
important, c'est en Afrique. En matière de distribution
et le fameux « dernier miles », le mobile
peut, avec plus de fiabilité que les adresses
physiques traditionnelles, jouer un rôle majeur
pour identifier, localiser et assurer la livraison.
Afin que ce challenge soit totalement remporté,
il ne s’agit pas seulement de faciliter l'acquisition
de biens à l'autre bout du monde dans des
conditions incroyables, mais aussi de permettre
à des marchés africains, à l'instar de l'artisanat,
de monter à bord, et de vendre.
cbn _ Il s’agit de ne pas construire l’Afrique
sans les Africains. C'est, en clair, “ rendre ”
l’Afrique aux Africains ?
bruno mettling_ Oui c’est cela. Nous plaidons
avec le Medef International pour un système de
coproduction fort systématisant les partenariats.
Il y a beaucoup de talents issus du continent qui
ressortent dans les meilleurs parcours internationaux.
C’est pourquoi nous menons une politique
de détection des talents issus de la diversité très
forte, en proposant aux jeunes diplômés africains
sortant de grandes formations à l’instar de HEC,
Polytechnique ou d’autres qui le souhaitent, de
se réinvestir dans leurs pays d’origine avec un
contrat de travail qui traduit bien l'investissement
qui est le leur, et des niveaux de rémunérations
appropriés évidemment. Il est essentiel
que les sociétés qui investissent le continent africain
identifient ces talents-là, les fassent grandir
en toute sécurité juridique. Les entreprises françaises
et étrangères ont fait beaucoup de progrès
en ce sens et doivent continuer.
Propos recueillis par
FOUZIA KAMAL
PHOTOS :© OLIVIER ROLLER.
CB NEWS . 24 . MAI 2018

La photo
de l'affiche
de “ Ouaga
Girls ” premier
long métrage
documentaire
réalisé par
Theresa Traore
Dahlberg, sorti
en mars 2018.
“ Aucun métier
ne devrait être
interdit aux
femmes. ”
ELLES REPRÉSENTENT LA MOITIÉ DE LA POPULATION
AFRICAINE ET PRODUISENT 62% DE SES BIENS
ÉCONOMIQUES. L’URBANISATION ET LA DIGITALISATION
ONT RENFORCÉ LA VISIBILITÉ DES FEMMES DANS
L’ESPACE PUBLIC. RIEN NE SE FERA SANS ELLES.
CB NEWS . 26 . MAI 2018

Cover
STORY
ÉCONOMIE
AFRICAINE,
L'ATOUT
femme
Dossier réalisé par
ANNE-LISE CARLO
PHOTO : DR.
B
ien décidées à devenir mécaniciennes,
Bintou, Chantal, Dina et
les autres apprennent leur métier
à Ouagadougou (capitale du Burkina
Faso) depuis quatre ans. Au
programme ? Étincelles sous le
capot, mains dans le cambouis
et, surtout, bouleversements joyeux des préjugés
: « aucun métier ne devrait être interdit aux
femmes ! », préviennent ces jeunes filles au garçon
circonspect qui s’inquiète auprès d’elles du
fait que « ce travail réclame de la force ». « Nous
aussi on a de la force !», lui rétorquent-elles aus-
sitôt. Le ton du film est ainsi donné par la réalisatrice
Theresa Traore Dahlberg, auteure de ce
récent documentaire intitulé « Ouaga Girls ». À
35 ans, cette jeune femme aux origines burkinabées
et suédoises confie ainsi sa fatigue de « voir
des films africains toujours liés à la pauvreté,
la guerre ou la maladie. Je voulais plus de chaleur
et d’humour, de vie quotidienne de jeunes
femmes dont on n’entend jamais parler ».
Au Burkina Faso, la précarité des jeunes filles
restant forte (plus de 53 % des jeunes sont ainsi
au chômage), des formations aux métiers non
traditionnels et non genrés ont vu le jour pour
…
CB NEWS . 27 . MAI 2018

Cover
STORY
LES AFRICAINES
EFFECTUENT LES
2/3 DES ACTIVITÉS
AGRICOLES, REPRÉ-
SENTENT 65 % DES
FONCTIONNAIRES…
ÉTUDE IPSOS AFRICAP, 2017
faciliter leur réinsertion socio-économique.
C’est le cas du Centre féminin d’initiation
et d’apprentissage aux
métiers (CFIAM) que filme
ainsi Theresa Traore Dahlberg.
« Ces futures mécaniciennes
ne sont pas, pour
autant, des féministes engagées.
Elles s’accrochent
surtout pour finir leur
dernière année d’école de
mécanique la tête haute »,
résume le producteur du
documentaire David Herdies
(Momento Films).
Canal + Afrique a diffusé « Ouaga girls » il
y a plusieurs mois déjà. « Nous aimions bien
le message véhiculé par ce documentaire,
évitant de parler de l’Afrique d’une manière
négative. Ce qui est encore trop souvent le
cas », explique Frédéric Dezert journaliste et
responsable des magazines de Canal + International
(6,5 millions d’abonnés dont 3,3 en
Afrique). Séduit par le dynamisme économique
qu’il percevait en Afrique, ce dernier
a notamment créé le magazine économique
« Réussite » qui met en valeur le parcours des
talents africains. « Nous y recevons de plus en
plus de femmes entrepreneures ou à des postes
décisionnaires. Une de nos dernières invitées
était ainsi Binta Touré Ndoye, directrice générale
d’Oragroup, holding du groupe bancaire
panafricain Orabank présent dans douze pays
de l'Afrique de l'Ouest et du Centre », ajoute-t-il.
Des femmes engagées et indépendantes, protagonistes
d’un continent en mutation. De plus
en plus d’experts et de médias dressent ainsi le
portrait de ces Africaines, jouant désormais un
rôle indispensable
au fonctionnement
CHANGEMENTS
74 %
DES FEMMES
AFRICAINES
considèrent que la
condition des femmes
s'est améliorée au
cours des 5 dernières
années dans leur pays.
(Source : Ipsos Africap)
de l’économie. Une
vision trop optimiste
? Il y a pourtant
un bon potentiel
de départ : selon
une étude du bureau
d’études Ipsos Africap
sortie en 2017,
les femmes effectuent
les deux tiers
des activités agricoles,
détiennent un
tiers de l’ensemble
des entreprises des
THERESA
TRAORE
DAHLBERG,
la réalisatrice
du film
“ Ouaga Girls ”.
sept pays interrogés (1), et représentent parfois
jusqu’à 65 % des fonctionnaires et 70 % des
employés du pays. « Les femmes africaines interviennent
de manière plus active dans la création
de richesse que partout dans les pays émergents.
C’est l’une des caractéristiques de l’Afrique subsaharienne
que cette place forte qu’occupent les
femmes, que leur visibilité dans l’espace public »,
estime Florence de Bigault, directrice d’Ipsos
Afrique Francophone.
Au-delà de leurs activités génératrices de revenus,
elles épargnent et décident des achats
dans leur ménage dans plus de 7 cas sur 10. Investies
dans les associations pour 45 % d’entre
elles, elles font de l’indépendance financière
leur principale préoccupation (72 %), devant
la lutte contre les inégalités hommes - femmes
(66 %) et l’éducation des filles (59 %), confirme
l’étude Ipsos. Si 41 % des dépenses personnelles
des femmes africaines sont consacrées
à la consommation alimentaire, les produits
et services beauté représentent 13 % de leur
budget.
Moteur dans l’économie africaine, les femmes
sont de plus en plus ciblées par les marques opérant
dans le continent, car celles-ci visent à la
fois les consommatrices, décisionnaires d’achat,
éducatrices et initiatrices qu’elles sont devenues.
CB NEWS . 28 . MAI 2018

Cover
STORY
LES FEMMES
AFRICAINES
ÉPARGNENT ET
DÉCIDENT DES
ACHATS DANS LEUR
MÉNAGE DANS PLUS
DE 7 CAS SUR 10.
PHOTOS : © MICKYWISWEDEL/iSTOCK. DR.
Et ce, d’autant plus que 55 % des femmes africaines
déclarent passer plus de 2 heures par
jour devant la télévision. Outil d’émancipation,
le digital marque également les tendances de
consommation des femmes en Afrique. Parmi
les internautes régulières, 41 % déclarent passer
plus de 2 heures par jour à surfer (principalement
sur les réseaux sociaux et les blogs), leur
accès se faisant souvent via le smartphone.
De fait, l’impact du numérique sur la consommation
est bien réel : 19 % des femmes vivant en
zone urbaine affirment avoir déjà effectué un
achat ou une opération sur internet, et 48 % des
internautes africaines déclarent être influencées
dans leurs décisions d’achat par des informations
ou avis qu’elles lisent sur le web.
Malgré ces évolutions, de nombreuses injustices,
discriminations et maltraitances subsistent, au
nombre desquels les mariages précoces, les
inégalités dans l’accès à l’éducation, à la santé,
au travail, ou encore les violences physiques
et psychologiques. À ce titre, le roman « Photo
de groupe au bord du fleuve » (2) de l’écrivain
congolais Emmanuel Dongala est inoubliable :
le combat de Méréana et de ses collègues « casseuses
de cailloux » dans une carrière au bord
d'un fleuve africain pour augmenter le prix de
vente de leur gravier raconte en toile de fond
des vies marquées par la pauvreté, la guerre,
les violences sexuelles et domestiques
et l'oppression au travail. Emmanuel
Dongala décrit ainsi mieux que tous
les épais rapports une situation que
connaissent encore beaucoup de femmes sur le
continent.
Autre ombre au tableau, l’illettrisme. Dans de
nombreux pays situés en Afrique du Nord et
en Afrique subsaharienne, les jeunes femmes
âgées de 15 à 24 ans sont moins susceptibles
de posséder les compétences fondamentales en
lecture et en écriture que les jeunes hommes,
selon l’Unesco. Des défis persistants continuent
de freiner les filles. Mais doucement, les lignes
bougent. C’est ce qu’affirment au final 74 %
des femmes africaines interrogées par Ipsos
Africap qui considèrent que la condition des
femmes s’est améliorée au cours des cinq dernières
années dans leur pays. « Malgré le poids
de traditions profondément misogynes qui
rongent l’Afrique, notamment le monde rural,
les femmes ont pris les chemins des écoles, des
universités, des bureaux, des usines et des parlements,
estime Florence de Bigault. Le chemin
vers l’égalité et l’autonomisation des femmes en
Afrique est long mais il fait partie des grands
changements en cours sur ce continent. »
1 : Afrique du Sud, Cameroun, Côte d’Ivoire, Kenya, Nigeria,
Ouganda et Sénégal. 2 : Aux éditions Actes Sud, 2010.
Le livre
d'Emmanuel
Dongala,“ Photo
de groupe au
bord du fleuve ”,
raconte la révolte
de femmes
“ casseuses de
cailloux ” contre
leurs vendeurs
et les violences
de toutes sortes
dont elles sont les
victimes.
CB NEWS . 29 . MAI 2018

Cover
STORY
Entreprenariat
féminin
LE PREMIER
CONTINENT
L’AFRIQUE EST DEVENUE LE PREMIER CONTINENT DE
L’ENTREPRENARIAT FÉMININ AU MONDE. CETTE ÉCONOMIE EN
PLEIN DÉVELOPPEMENT OFFRE BEAUCOUP D’OPPORTUNITÉS
POUR CES FEMMES, MAIS A UN GRAND BESOIN DE FONDS POUR
RÉALISER TOUT SON POTENTIEL.
Du plus loin qu’elles se souviennent, les
femmes du continent aiment à dire
que la culture de l’entreprenariat a
toujours été là en Afrique. Dans l’imagerie,
il y a ce souvenir des « Mama
Benz » du Bénin ou « Nana Benz » du
Togo : ces femmes mûres à la forte personnalité,
parfois illettrées, mais qui ont développé un
sens des affaires rares, réussissant à bâtir des
fortunes dans les années 80 au volant de grosses
Mercedes. « Chaque femme est de fait une entrepreneure
en Afrique. Parce qu’il lui faut nourrir
ses enfants, améliorer les revenus du ménage ou
qu’elle se retrouve seule avec un mari très vite
parti. Ce sont des situations qui créent la nécessité
d’une micro-économie : elles vont vendre
des pagnes, des oranges et, en même temps aussi
des cartes pour téléphone mobiles », explique
la franco-ivoirienne Anna-Alix Koffi, fondatrice
des revues artistiques « Off the Wall » et « Something
we Africans got ».
Mais depuis quelques années, cette culture
micro-entreprenariale, précaire et de première
nécessité, est entrée dans un mouvement plus
large qui fait que l’Afrique est devenue le premier
continent de l’entreprenariat féminin.
Aujourd'hui, 27 % des femmes y créent une
entreprise, soit le taux le plus important à
l'échelle mondiale selon le rapport Gem Women
Entrepreneurship 2017. Plutôt que d’attendre
de décrocher un poste, beaucoup de femmes se
créent leur propre emploi. En 2017, le pourcentage
d’entreprises détenues par des femmes en
Afrique variait entre 15 % (Maroc) et 51 % (Cameroun).
Et il y a des exemples particulièrement
forts comme au Sénégal, avec le cas d’Anna Ba,
dirigeante de la société immobilière Sipres – un
secteur traditionnellement peu féminin – qui a
même réussi l’exploit que 65 % des salariés de
son entreprise soient des femmes.
Et ces nouvelles business women se révèlent
dans tous les secteurs, de l’agriculture à la santé
en passant par l’éducation, le développement
durable ou encore la technologie. Diane Audrey
Ngako, 27 ans, s’inscrit à plein dans cette nouvelle
génération d’« empowerement » au fémi-
CB NEWS . 30 . MAI 2018

Cover
STORY
La couverture
du numéro 1
de la revue
“ Off The Wall ”.
EN AFRIQUE, 27 % DES
FEMMES CRÉENT UNE
ENTREPRISE. LE TAUX
LE PLUS IMPORTANT À
L'ÉCHELLE MONDIALE.
GEM WOMEN
ENTREPRENEUR SHIP 2017
DIANE
AUDREY
NGAKO,
fondatrice de
l'agence de com'
Omenkart : “ les
mentalités masculines
ont du
mal à évoluer ” .
PHOTOS : © SERGEI PAVLOV. DR.
ANNA-ALIX
KOFFI est la
fondatrice de
revues africaines,
dont “ OffThe
Wall ” ci-dessus.
Les situations
de nombreuses
femmes
africaines “ créent
la nécessité d'une
micro-économie ”.
nin. Dès 2016, le magazine « Forbes », la classe
parmi les 30 jeunes de moins de 30 ans les plus
influents du continent africain.
Après cinq années passées dans le milieu des
médias en France dont « Le Monde Afrique »
et TV5, Diane Audrey Ngako décide de rentrer
au Cameroun, son pays d’origine. En 2017, elle
ouvre son agence de communication Omenkart
qui accompagne des entreprises telles que
Pernod Ricard, Maison Castel ou la Société
Générale pour développer leur image sur le
continent. « Comme beaucoup de filles de ma
génération, je suis influencée et portée par des
modèles internationaux de réussites féminines,
indépendantes et leaders. Il y a encore beaucoup
de chemin à faire pour trouver notre voie en tant
qu’entrepreneures. Ici, ce n’est pas un chemin
facile entre les mentalités masculines qui ont
du mal à évoluer et certaines pesanteurs du système
familial qui perdurent », confie-t-elle.
Édith Brou, 33 ans, incarne, elle aussi, cette
nouvelle génération qui a pris son envol grâce à
l’entreprenariat. Cette blogueuse et influenceuse
ivoirienne est devenue une personnalité incontournable
de la scène « tech » de son pays, jusquelà
masculine et intervient dans des émissions sur
internet. « Elle incarne une grande liberté et une
soif d’indépendance qui forcent l’admiration, qui
plus est pour une maman célibataire avec deux
enfants… », estime Diane Audrey Ngako qui collabore
régulièrement avec elle.
Autre réussite, celle de la Marocaine Rania Belk-
…
CB NEWS . 31 . MAI 2018

Cover
STORY
haia, 28 ans diplômée d’HEC, qui a lancé Afrimarket,
une plateforme de e-commerce dédiée
au continent africain. Le principe est simple :
une marketplace de biens de consommation
courante tels que sacs de riz, bidons d’huiles,
médicaments ou électroménager que les marchands
mettent en vente sur la plateforme. La
mise en ligne et la livraison sont assurées par
Afrimarket qui récupère un pourcentage sur
chaque vente. Cette version africaine d’Amazon
crée ainsi un lien inédit entre la diaspora
et leurs proches restés sur le continent africain.
Xavier Niel, Jacques-Antoine Granjon ou
encore Orange figurent parmi ses investisseurs.
Après les « Nanas Benz », ces « Nanas Tech » qui
œuvrent dans les nouvelles technologies via
les applications mobiles, le commerce en ligne
ou encore le mobile-banking très développé
en Afrique, sont en train de
se faire une place inédite
jusque-là.
Pour soutenir ce mouvement
de l’entreprenariat féminin,
les pays améliorent petit à petit
leurs dispositifs d’aides. Ainsi,
le Burundi, la Côte d’Ivoire et
le Rwanda sont parmi les dix
pays d’Afrique ayant récem-
CYNTHIA
MEME a créé
« Inspire Africa »
un programme
de coaching
intense à destination
des jeunes
entrepreneurs.
LA PLATEFORME
JIGGEN TECH AIDE
LES FEMMES QUI
CONCOIVENT LEUR
ENTREPRISE COMME
UN RÉEL PROJET SUR
LE LONG TERME.
ment le plus amélioré la réglementation des
affaires. Des initiatives privées dédiées aux
femmes entrepreneuses voient aussi le jour.
Ainsi, « Women in Africa », une plateforme mondiale
d’accompagnement des femmes africaines
leaders et à haut potentiel, consacrait, le 12 avril
à Dakar, son premier sommet régional d’Afrique
de l’Ouest sur le thème « Entreprenariat des
femmes africaines : comment faire levier ? ».
Des nouveaux fonds internationaux spécifiquement
orientés vers l’entreprenariat féminin et
initiés par des acteurs tels que la Banque Mondiale
ou la Banque Africaine de Développement
voient peu à peu le jour. Mais les financements
restent difficiles à trouver pour ces sociétés naissantes.
La Banque Africaine de Développement
estime justement que les femmes africaines auraient,
à elles seules, besoin de 42 milliards de
dollars pour réaliser leur potentiel. Obtenir un
crédit bancaire pour créer ou faire tourner une
entreprise reste un parcours de combattante
sur le continent. Ainsi, le premier défi de ces
jeunes entrepreneures africaines s’avère être la
fragilité de leur entreprise : 80 % des nouvelles
entreprises africaines mourraient à ce jour dans
sa première année d’existence…
PHOTOS : © REYOH PHOTOGRAPHY. DR.
CB NEWS . 32 . MAI 2018

Cover
STORY
Between Wells
Groundwaters,
Afrique 2017,
Oli Bonzanigo,
exposition au
18, à Marrakech.
LA CULTURE,
UN SECTEUR À DÉCOUVRIR
uand on parle entrepreneuriat en Afrique, le secteur
Q technologique vient toujours en tête. “ Mais dans le secteur de
la culture, il y a aussi beaucoup à faire en Afrique ”, souligne l’éditrice
Anna-Alix Koffi. Et dans ce secteur, les femmes ont certainement
un rôle-clé à jouer. Un avis partagé au Cameroun par Diane Audrey
Ngako : “ Je suis convaincue que c’est par la culture que le continent
va se structurer. C’est dans ce but que j’ai créé « Visiter l’Afrique »,
une plateforme interactive et collaborative, dédiée au tourisme et qui
tend à montrer un continent africain encore méconnu ”, explique celle
qui viendra défendre l’énorme potentiel de la pop culture africaine
le temps d’une conférence au salon Viva Technology fin mai. De
même, la photographe marocaine Laila Hida a, elle, passé le cap
de l’entrepreneuriat pour créer il y a cinq ans un lieu culturel inédit,
“ le 18 ”, à Marrakech. “ J’imaginais un endroit où on s’interroge sur
l’héritage culturel et sociétal, sur l’évolution de nos mentalités via l’art
contemporain. Je crois que je n’aurais pas pu le faire ailleurs que dans
la medina ”, assure-t-elle. A.-L.C.
Pour essayer de capitaliser sur ce qui reste un
mouvement de fond, des femmes, souvent
diplômées et entrepreneures elles-mêmes, ont
mis en place des programmes de mentoring :
souvent à but non lucratif, elles offrent ainsi des
services de coaching aux jeunes start-uppeuses.
Le but : les aider à développer leur leadership,
leur réseau et accéder plus facilement aux différents
prêts et subventions. Ainsi, après deux
projets d’entreprises sociales à succès au Nigéria,
Cynthia Meme a imaginé un programme
de coaching intense « Inspire Africa » à destination
des jeunes entrepreneurs. Murielle Diaco,
spécialisée au départ en ingénierie financière,
a bifurqué vers le développement durable et
créé la plateforme Djouman afin d’accélérer le
développement des start-up situées en Afrique
de l'Ouest et francophone. Et dans l’agro-alimentaire,
il y a beaucoup d’urgences : « il y a une
agriculture industrielle en Afrique mais celle-ci
est destinée à l’exportation, en ce sens qu’elle ne
nourrit pas le continent. Il faut donc trouver les
moyens de moderniser l’agriculture familiale
pour obtenir des produits de qualité destinés
aux marchés locaux et faire en sorte que les
femmes y soient particulièrement impliquées »,
explique-t-elle.
Même confirmation au Sénégal de l’intérêt pour
l’agribusiness chez les femmes entrepreneures
du côté de la plateforme Jiggen Tech, dont sont
DYNAMISME MAIS
FRAGILITÉ : 80 %
DES ENTREPRISES
AFRICAINES
MEURENT DANS
LEUR 1 RE ANNÉE
D'EXISTENCE.
issues un bon nombre des entreprises
soutenues. Premier
pôle technologique d’Afrique
de l’Ouest géré par et pour des
femmes, Jiggen Tech dispense
des formations en technologie
et en leadership à des centaines de femmes
depuis 2012. « Les fonds et les programmes
de mentoring aident celles qui ne voient pas
leur entreprise comme une seule opportunité
d’emploi mais comme un réel projet à développer
sur le long terme », explique une de ses cofondatrices
Binta Coundy Dé. L’entreprenariat
ne pourra pas, à lui seul, sauver le destin des
femmes africaines mais il peut grandement y
contribuer.
A.-L. C
La plateforme
Djouman,
spécialisée
dans le
développement
durable, créée
par Murielle
Daco.
CB NEWS . 33 . MAI 2018

Cover
STORY
Représentativité
de femme
DANS LE TOP 20
EN POLITIQUE
LA FÉMINISATION DE L’AFRIQUE EST EN MARCHE. GRÂCE AUX
QUOTAS, LEUR PRÉSENCE S’EST ACCRUE DANS PLUSIEURS
PARLEMENTS DU CONTINENT. PAS ENCORE DANS LA SOCIÉTÉ.
ANAÏS
ANGELO est
chercheuse : “ la
politique des
quotas ne suffit
pas à modifier
profondément le
jeu de pratiques
politiques
traditionnelles ”.
I
l est des chiffres qui marquent : la représentativité
des femmes au parlement
rwandais atteint aujourd’hui les 63,8 %,
selon le rapport « Women Matter Africa »
2016 du cabinet McKinsey. Et derrière
le pays est-africain, suivent de près le
Sénégal (42,7 %), l’Afrique du Sud (42 %), la
Namibie (41,3 %), le Mozambique (39,6 %) et
l’Ethiopie (38,8 %), tous dans le top 20. Pour
McKinsey, la moyenne mondiale n’est en effet
que de 22 % partout ailleurs. Dans cette comparaison
mondiale, la France ne se classe, elle,
qu’au 62 e rang (26,2 %) et les États-Unis au 99 e
rang (19,2 %). Résultat, en 2015, le continent
africain était la deuxième région du monde où
la représentativité des femmes au parlement
s'est le plus améliorée sur ces quinze dernières
années, selon le rapport McKinsey.
Le cas du Rwanda interpelle tout particulièrement.
Le 8 mars, sur Planète, la comédienne et
ancienne Miss France Sonia Rolland est revenue
– dans son documentaire « Femmes du Rwanda »
(SoMad Productions et Upside Télévision) – sur
la cruelle ironie de son pays qui a permis d’arriver
à cette situation : « le génocide des Tutsis a
imposé le retour de la femme au premier plan
de la société. Des veuves par centaines de milliers
se sont retrouvées seules pour reconstruire
leur pays », explique celle qui a dû fuir son pays
enfant. Sur le terrain politique, des lois inédites
ont dû être mises en place : depuis 1994,
date de la fin du génocide, la parité est inscrite
dans la Constitution du pays et depuis 2003, la
loi impose que 30 % des postes dans les hautes
instances de l’État soient réservés aux femmes.
C’est notamment une femme qui préside la
chambre des députés, Donatille Mukabalisa.
Mais si les hommes sont désormais minoritaires
dans ce lieu de pouvoir, le combat pour le droit
des femmes reste plus que jamais un enjeu quotidien
dans l’ensemble de la société qui possède
à sa tête le dirigeant Paul Kagamé enserrant son
pays d’une main autocratique.
En Afrique subsaharienne, la croissance de la
représentation féminine dans les institutions
d’État reste l’une des plus rapides au monde.
Elle est le résultat de l’introduction de quotas
paritaires dans de nombreux pays. Et la représentation
politique des femmes sur le continent
possède aussi ses icônes. Même si celle-ci vient
juste de passer la main après douze ans à la tête
du Liberia, Ellen Johnson Sirleaf fait partie de
CB NEWS . 34 . MAI 2018

Cover
STORY
EN 2015, L'AFRIQUE
EST LA 2 E RÉGION
DU MONDE OÙ LA
REPRÉSENTATIVITÉ
DES FEMMES AU
PARLEMENT S'EST LE
PLUS AMÉLIORÉE.
PHOTO : © RAPID EYE/iSTOCK. DR.
La représentativité
des femmes
au parlement :
moyenne
mondiale 22 %,
France 26,2 %,
Sénégal : 42,7 %.
celles-là. Économiste, première femme élue à la
tête d’un État africain et prix Nobel de la Paix
en 2011, sa réputation est devenue mondiale.
Mais récemment, des féministes libériennes
lui ont reproché publiquement de ne pas avoir
suffisamment œuvré en matière de droit des
femmes, et notamment justement en termes de
parité politique.
Ainsi, l’ascension des femmes à des hauts postes
politiques en Afrique subsaharienne reste complexe
et précaire. « Il n’y a jamais eu de politique
féministe africaine, véritablement enracinée au
sein d’un programme politique ou tout simplement
au sein de la société. L’ascension politique
des femmes se fait dans un contexte qui est peu
ouvert aux questions de genres », estime pour sa
part la chercheuse Anaïs Angelo. « Si la politique
des quotas est essentielle pour tenter de corriger
des inégalités historiques, structurelles et culturelles,
elle ne suffit pas à modifier profondément
le jeu de pratiques politiques traditionnelles et
d’institutions souvent fragiles », ajoute-t-elle.
Une situation dans son ensemble complexe sur
le continent car assujettie à de grandes variations
selon les pays et que les seuls chiffres ou
statistiques ne résument pas : « ce que l’on ne
peut pas mesurer ce sont l’évolution de la dynamique
des relations hommes-femmes dans la
société », poursuit-elle.
Les élections politiques de 2017 au Kenya en
sont une preuve inquiétante. Ainsi, les femmes
candidates à ces échéances politiques ont subi
harcèlements, injures et violences tout le long
de leur campagne. Si le Kenya ne compte que
19,5 % de députées à l’Assemblée nationale, et
ce grâce aux quotas, s’y greffe de plus un « système
patriarcal qui prend en tenaille les affaires
politiques du pays dénoncée notamment par
l’écrivaine et analyste politique Nanjala Nyabola.
L’auteure kenyane suggère que l’absence
des femmes dans la sphère publique s’explique
par le refus de l’élite masculine de lâcher leurs
privilèges à de potentielles compétitrices… »,
explique Anaïs Angelo. Et la chercheuse de
rappeler pourtant ses professeures et activistes
féministes africaines qui, dès la fin des années
80, avaient questionné la définition même de
« genre » de manière révolutionnaire, telle que
l’essayiste nigériane Ifi Amadiume dans son
livre « Male Daugthers, Female Husbands ».
« Ces femmes ont marqué le champ des études
africaines en ravivant le débat sur les origines
“ importées ”, européennes ou coloniales, du
concept même de genre en Afrique » et d'une
vision dichotomique de la différence sexuelle.
A.-L. C.
CB NEWS . 35 . MAI 2018

Partenaires
VIVATECH
S'OUVRE À
L'AFRIQUE
L’Afrique sera particulièrement à l’honneur
lors de la 3 e édition de Viva Technology (du
24 au 26 mai à Paris. Afric@Tech en 2018,
c’est au total plus de 100 start-up africaines qui
viendront rencontrer des partenaires du monde
entier. Ce sont aussi des pavillons pays qui
accueilleront une cinquantaine de start-up du
Maroc, de la Tunisie, d'Afrique du Sud et aussi
de Côte d'Ivoire et du Sénégal. C’est également
un thème de conférences, pendant la matinée
du jeudi 24 mai, dédiée aux grands enjeux du
continent en matière d'innovation, de structure
d'accompagnement et de financement de ce
tissu jeune et innovant. Avec « Africa rocks the
world » ; « The powerful startups that shaped
Africa » ; « African Innovations to Inspire the Rest
of the World » . Ce sont ainsi des grands groupes
comme Orange, BNP Paribas, Accorhotels, Airbus,
Engie, etc. qui invitent des startups du continent
à venir les rencontrer en vue d'entamer des
collaborations. C'est enfin un Lab de 400 m 2 , le
Lab Afric@Tech sur lequel L’Agence française
de développement, Sanofi, Total et Vinci Energies
vont accueillir les start-up qu’ils ont sélectionnées
et présenter les enjeux majeurs de leur
écosystème d'innovation africain : MedTech, Fintech,
Eductech, accès à l’énergie, etc.
JULIE RANTY
ET MAXIME
BAFFERT,
directeurs
généraux de
VivaTechnology.
LA RÉVOLUTION NUMÉRIQUE
PASSE PAR L'AFRIQUE
La progression du numérique en Afrique est
fulgurante. Certes, avec 388 millions d’internautes,
le taux de pénétration d’Internet – 32 %
de la population – est encore plus faible que
sur d’autres continents, mais nulle part ailleurs
la progression n’est aussi rapide. Cette
progression des connexions Internet s’est accompagnée
de l’émergence d’un écosystème
de start-up et d’investisseurs dynamiques.
Ainsi, d’après Partech Ventures, les montants
levés par les start-up africaines ont été multipliés
par 8,7 depuis 2012 pour atteindre
déjà 366 millions de dollars en 2016 pour
77 start-up financées.
L’Afrique connaît un « grand bond en avant »
technologique et passe de la quasi-absence de
connexion à la 4G et l’adoption de services innovants
en matière de banque et de paiement
mobile. Ainsi, par exemple, selon la Banque
mondiale, 80 % des Kenyans utilisent leur smartphone
pour leurs transactions financières.
La révolution numérique sur le continent africain
n’en est qu’à ses débuts. C’est le concept d’innovation
frugale qui conduit les start-up africaines
à développer de nouveaux business models qui
pourraient bien demain conquérir les pays occidentaux.
De nombreuses entreprises telles que
Jumia, Afrimarket ou encore M-Kopa sont des
premiers exemples de success stories africaines
et font figure de pionnières pour une nouvelle
génération d’entrepreneurs africains.
C’est pour toutes ces raisons que l’Afrique sera
particulièrement à l’honneur lors de la prochaine
édition de Viva Technology (du 24 au 26 mai
2018 à Paris) avec notamment plus d’une centaine
de start-up africaines présentes.
JULIE RANTY et MAXIME BAFFERT
https://vivatechnology.com/africatech/
PHOTOS : DR.

Partenaires
ZOOMS SUR
2 START-UP…
BISA (GHANA)
Jeune pousse « healtech », Bisa est née au Ghana
et permet à partir d’une application mobile
d’interagir avec du personnel médical sans avoir
besoin d’être physiquement présent à l’hôpital.
C’est un avantage considérable pour le continent
africain et pour toutes les personnes qui nécessitent
un avis ou une aide médicale mais qui ont
des difficultés à pouvoir se rendre dans des lieux
de soins, en particulier en matière d’infections
sexuellement transmissibles (IST). Bisa sera sur
le Lab AfricaTech avec Sanofi.
TOUFOULA KIDS (TUNISIE)
Toufoula Kids est une plateforme ludo-éducative
multi-langue – arabe, français, anglais – pour les
enfants de 4 à 10 ans. Ce produit est la réponse
au manque de contenu digital en langue arabe,
estimé à 3 % quand la demande en la matière
atteint 60 % dans les régions MENA (Middle East
and North Africa). L’application mobile est liée,
notamment par le biais de la réalité augmentée,
à un smart magazine papier pour répondre au
contexte de réduction de l’addiction des enfants
aux écrans. Toufoula Kids sera sur le Lab Orange.
QUELQUES SPEAKERS
INCONTOURNABLES
SUR AFRIC@TECH
Tomi Davies, président d'Aban.
Nigeria. Un réseau très puissant de
business angels.
Aaron Fu, Managing Director
de Mest. Ghana. Le plus grand
incubateur africain.
Viola Llewelly, CEO d'Ovamba.
Cameroun. La plateforme de
financement des PME africaines.
Temie Giwa-Tubosun,
de LifeBank. Nigeria.
Sara Menker, CEO de Gro
Intelligence. USA – Éthiopie.
Aaron Fu
Viola Llewelly
…ET DES ACCÉLÉRATEURS
MEST AFRICA
(GHANA, NIGERIA ET AFRIQUE DU SUD)
Lancé en 2008 par l’entrepreneur Jorn Lyseggen,
Meltwaters Entrepreneurial School of Technology
(MEST) est un programme entrepreneurial,
un seed fund et un incubateur. Les premiers
locaux ont ouvert à Accra (Ghana) et depuis son
ouverture, MEST a investi près de 20 millions de
dollars dans des start-up du continent. Ce programme
s’est implanté à Cape Town (Afrique du
Sud) et Lagos (Nigeria) afin d’aller plus loin dans
cette dimension panafricaine. Parmi les success
stories issues de ce programme d’incubation :
Asoriba, MeQasa, Tress et Kudobuzz.
Aaron Fu, managing director de MEST Africa,
sera présent à VivaTech.
VC4A (PAN-AFRIQUE)
Venture Capital For Africa (VC4A) est une plateforme
africaine de financement de start-up.
Créée en 2007 elle a pour mission première de
construire une communauté de start-up africaines.
VC4A permet aux entrepreneurs d’avoir
accès à des outils en ligne gratuits, du mentoring
et la possibilité de se financer. Et leur offre la possibilité
de découvrir des start-up prometteuses,
rechercher des opportunités et de communiquer
avec les fondateurs directement.
KLAB (RWANDA)
Ouverte en 2012, cette pépinière de start-up a
accueilli près de 50 000 personnes. L’objectif est
de mettre à disposition un open space ouvert
24 h/24 avec une connexion internet et des
salles de réunion afin d’y créer une atmosphère
propice à la création et l’innovation. 200 entreprises
sont passées par KLab, 60 ont atteint le
stade de maturité, 4 sont des leaders dans leur
secteur et 2 se sont développées à l’international.
Exemples de success story : GiralCT ou
SafeMotos.
Aphrodice Mutangana, general manager de
KLab, sera l’un des speakers de VivaTech 2018.
CB NEWS . 37 . MAI 2018

Enquête
MÉDIA
TÉLÉVISIONS :
L'AFRIQUE EST
À L'ANTENNE
LA PRODUCTION AUDIOVISUELLE AFRICAINE SE
DÉVELOPPE DE PLUS EN PLUS AU RYTHME DE CRÉATIONS
DE CHAÎNES INDÉPENDANTES ET CONCURRENTES.
CROISSANCE ÉCONOMIQUE À L'HORIZON.
TFM, L'UNE DES
CHAÎNES LES PLUS
REGARDÉES
22 %
de PDA au Sénégal.
(Étude Africascope 2017)
Connaissez-vous OBS TV, la nouvelle
chaine lancée fin 2017 au Sénégal ?
CMR7 qui a fait son apparition au Cameroun
en janvier 2018 ? et Label TV ?
Ces trois nouvelles venues font partie
de la quinzaine de chaînes lancées ou
annoncées en Afrique francophone subsaharienne
ces 12 derniers mois. Chaînes d’informations
ou généralistes, musicales, de sport ou de
télé-novelas, le nouveau genre à succès, chaînes
nationales ou panafricaines, tous les domaines
de la télévision et tous les pays sont concernés.
Ces créations ne sont pas seulement le fait de
groupes audiovisuels nationaux ou panafricains
: elles ont également été mises en œuvre
sous l’impulsion d’initiatives individuelles de
professionnels de la télévision.
Mactar Sylla, professionnel reconnu et ancien
patron de la Radio télévision sénégalaise, déclarait
à l’occasion du lancement de Label TV à
Libreville au Gabon : « Nous, professionnels, devons
prendre nos responsabilités et montrer une
Afrique qui bouge !... L’Afrique audiovisuelle est
à construire avec optimisme pour accompagner
l’émergence du continent, refléter son image
plurielle et œuvrer à un développement durable
aux effets ressentis et partagés par tous ». Cette
volonté de participer activement au développement
de l’Afrique est partagée par Théodore
Ndanga, l’ancien directeur du service marketing
et commercial de
Canal2 International
qui dirige CMR7
la nouvelle chaîne
citoyenne camerounaise
: « Nous nous
sommes en effet
rendu compte que
la plupart des entrepreneurs
camerounais
qui innovent
ont tendance à quit-
CB NEWS . 38 . MAI 2018

ENTRE 85 ET 90 %
DES PERSONNES
EN AFRIQUE
FRANCOPHONE
SUB-SAHARIENNE
REGARDENT LA
TÉLÉVISION.
PHOTO : © PEETERV-iSTOCK.
ter le pays. Nous ne savons pas apprécier les initiatives
quelles qu’elles soient et nous ne savons
pas les récompenser. C’est pour cela que nous
avons choisi d’orienter nos programmes vers de
la proximité positive. »
Au Sénégal, cette Afrique qui bouge est représentée
par Youssou Ndour, président du groupe
Futurs Media, qui dispose avec TFM d’une des
chaînes les plus regardées du continent (22 %
de PDA au Sénégal selon la dernière étude
Africascope 2017) et qui poursuit son développement
: l’OBS TV, sa dernière-née, est le fruit
d’un partenariat exclusif entre le Groupe Futurs
Media et Africanews, la chaîne d’actualité du
groupe Euronews. Développements citoyens
ou simples opportunités de business, partout en
Afrique les initiatives se sont succédé en 2017 :
Karmelle Biyot, associée au chef franco-ivoirien
Loic Dablé, a fondé Tchouaa TV, première
chaîne de cuisine panafricaine dédiée au continent
africain et à ses diasporas. Trace Kitoko a
été créée par le groupe Trace pour mettre en
avant la très riche scène musicale congolaise
en RDC. Notons aussi Passions TV consacrée
aux programmes romantiques et Savanah TV
composée à 100 % de programmes africains,
lancée à l’initiative de Sonia Resseguier du
groupe Alshana. Le groupe Canal+ a également
participé à ce feu d’artifice avec le lancement
de Nollywood Epic une chaîne entièrement
consacrée aux films africains traditionnels, et
d’A+ Sport entièrement consacrée au sport. On
peut citer également Melody d’Afrique, déclinaison
africaine de la chaîne Melody, et Iroko Music
chaîne panafricaine diffusée sur les bouquets
Canal+ consacrée à la musique et au divertissement
nigérian.
À l’heure où partout dans le monde les initiatives
digitales supplantent la télévision traditionnelle,
comment expliquer une telle vitalité de la télévision
en Afrique ? Chaque jour, entre 85 et 90 %
des personnes résidant en Afrique francophone
sub-saharienne regardent la télévision. Chaque
vague d’enquête de Médiamétrie ou de Kantar
Une tendance,
selon Théodore
Ndanga,
de CMR7
(Cameroun), est
“ d'orienter (les)
programmes vers
de la proximité
positive ”.
…
CB NEWS . 39 . MAI 2018

Enquête
MÉDIAS
TNS le démontre de manière récurrente : la
télévision fait partie intégrante de la vie quotidienne
d’une population qui n’a pas encore
beaucoup d’autres sources de distraction. Par
ailleurs même si le développement d’internet
est rapide en Afrique il reste à un niveau faible
: seulement 30 % des Africains vivant dans les
grandes villes se connectent à internet chaque
mois. Les coûts des data sont encore prohibitifs
pour la plupart des Africains. La
fenêtre de tir pour développer des chaînes
ou des offres de télévision va donc rester ouverte
encore de nombreuses années.
Même s’il n’est pas très riche, l’audiovisuel en
Afrique francophone est loin d'être figé ni monolithique
: TV publiques, chaînes nationales
privées et groupes de télévision panafricains se
côtoient et se concurrencent souvent depuis des
années dans des paysages audiovisuels extrêmement
divers. Si au Mali ou
au Burkina Faso la chaîne la
plus regardée est publique,
en RDC c’est Mirador TV une
chaîne privée qui prend la tête
du classement. Au Cameroun,
au Gabon ou en Côte d’Ivoire
c’est une chaîne panafricaine :
Novelas TV qui domine, tandis
qu'au Congo, c’est TV5 Monde
la chaîne panafricaine publique
qui occupe la première
place. Au Sénégal, on compte
aujourd’hui une demi-douzaine de groupes audiovisuels
privés dont certains occupent le haut
du classement des audiences comme en RDC.
Face à ces acteurs locaux privés ou publics, le
groupe Canal+ a déployé depuis plus de 10
ans, des offres de TV payante par satellite – et
depuis peu par la TNT – qui lui permettent de
couvrir la totalité des 15 pays francophones
de l’Afrique de l’Ouest et de l’Afrique centrale.
En situation de quasi-monopole dans la partie
francophone de l’Afrique, Canal+ qui a franchi
la barre symbolique des 3 millions d’abonnés
fin décembre, est concurrencé depuis peu par
le groupe chinois Startimes qui développe des
offres commerciales par satellite et qui comptait
environ 150 000 abonnés à la fin 2017
(dont les trois quarts en Côte d’Ivoire). Dans
ce contexte foisonnant, la Côte d’Ivoire dont
le paysage national n’est à ce jour constitué
que des 2 chaînes publiques, RTI1 et RTI2, fait
figure d’exception. Cette situation atypique
prendra néanmoins bientôt fin, puisque le
EN SITUATION DE
MONOPOLE EN
AFRIQUE FRANCO-
PHONE, CANAL+ EST
CONCURRENCÉ PAR
LE GROUPE CHINOIS
STARTIMES.
gouvernement ivoirien a décidé d’attribuer des
fréquences TNT à 4 nouvelles chaînes privées.
Dans le même temps Startimes et Canal+ pourront
se livrer un duel à armes égales, les deux
groupes ayant obtenu un multiplex TNT payant
sur lequel pourront prendre place jusqu’à 10
chaînes chacun. Les préparatifs techniques
ont pris un peu de retard mais tout devrait être
terminé pour la fin de cette année 2018.
Cette révolution arrive dans un contexte économique
particulièrement positif : selon la dernière
étude Ipsos/Adweknow, la Côte d’Ivoire
connaîtra la croissance du marché publicitaire la
plus forte d’Afrique francophone en 2018. Avec
un paysage audiovisuel enrichi, cette croissance
devrait s’accélérer encore en 2019 et justifier, si
besoin est, la décision des dirigeants du groupe
M6 qui déclaraient au moment de l’annonce de
leur association avec Life TV : « À travers cette
prise de participation, le groupe fait son entrée
en Afrique, sur un marché ivoirien à fort potentiel
de croissance ».
Au Cameroun,
au Gabon, en
Côte d’Ivoire,
c’est une chaîne
panafricaine qui
domine, tout
comme au
Congo.
CB NEWS . 40 . MAI 2018

Enquête
MÉDIAS
PHOTOS DR.
Ci-dessus,
Jean-Philippe
Kaboré,
le promoteur
de TV7.
LES ACTEURS EN PRÉSENCE
Quatre nouvelles chaînes privées… mais il faudra
compter avec le service public qui attend
sereinement 2019. En effet pour Ahamadou Bakayoko,
le directeur général de la RTI, la « Côte
d’Ivoire a une telle diversité culturelle qu’il est
important qu’elle dispose de plusieurs chaînes
qui puissent exprimer cette vitalité culturelle
ivoirienne de différentes manières. En tant
que service public, nous avons une sensibilité,
un mandat, un cadre et il est essentiel pour la
société ivoirienne qu’existent à côté de nous un
certain nombre d’autres canaux. » Face à un service
public installé de longue date, bénéficiaire
lui aussi d’au moins une nouvelle chaîne gratuite
supplémentaire sur la TNT et déjà prêt à en
découdre, les 4 nouveaux entrants vont devoir
souffler un vent de fraîcheur et de nouveauté
pour réussir leur pari.
Cheick Yvhane, le directeur de Radio Nostalgie,
en charge du projet éditorial de NCI, la Nouvelle
Chaîne Ivoirienne, est très clair sur ce point : la
réussite passera par la proximité : « … pour l’ensemble
de la grille, nous tablons idéalement sur
un ratio de 70 % dédié aux productions locales.
“
NOTRE VOLONTÉ
EST DE CONTRIBUER
À L'ÉMERGENCE
D'UNE INDUSTRIE
AUDIOVISUELLE EN
CÔTE D'IVOIRE. ”
JEAN-PHILIPPE KABORÉ, TV7
Nous produirons et coproduirons
les différents programmes (talkshows,
soap-operas…) en interne et,
ou, avec des producteurs locaux et africains et
des partenaires internationaux avec lesquels
nous sommes en relation. » Il en sera de même
pour la chaîne d’information TV7 qui sera aussi
constituée de programmes produits localement
car, comme l’affirme Jean Philippe Kaboré son
promoteur, « … notre volonté est de contribuer
à l’émergence d’une véritable industrie audiovisuelle
en Côte d’Ivoire, source de savoir-faire,
de création d’emplois, de rayonnement culturel
pour le pays. »
Damiano Malchiodi le directeur d’A+ et patron
de la future A+ Côte d’Ivoire qui produit déjà
beaucoup de fictions et d’émissions avec des producteurs
africains, voit lui aussi dans ces nouvelles
chaînes une opportunité unique pour développer,
structurer et professionnaliser toute la
filière audiovisuelle en Côte d’Ivoire. Proximité,
développement d’une production audiovisuelle
locale, croissance économique, développement
mesuré, même s’il est inéluctable, du digital,
tous les indicateurs sont au vert pour que la Côte
d’Ivoire rejoigne voire dépasse rapidement les
pays les plus avancés. Gageons que les acteurs
de cette révolution sauront relever le défi.
RENÉ SAAL
Ci-dessus,
Cheick Yvhane,
le directeur de
Radio Nostalgie :
“ nous tablons
idéalement
sur un ratio de
70 % dédié aux
productions
locales”.
CB NEWS . 41 . MAI 2018

Enquête
MÉDIAS
MATURITÉ
PANAFRICAINE
L’HEBDO HISTORIQUE EN AFRIQUE LANCE UNE NOUVELLE FORMULE
AVEC COMME VOLONTÉ DE… RESTER LA “ MARQUE MÉDIA AFRICAINE
DE RÉFÉRENCE ”.
En haut, à droite,
Romain Lucchini
(DC des Barbus),
et Djony Fah
Agbogbe (DA
des Barbus
Dakar), à l'origine
du nouveau
look de “ Jeune
Afrique ”.
F
in janvier 2018, « Jeune Afrique » se
donne un coup de jeune pour ses 58 ans
d’existence. Le magazine créé à Tunis
par Béchir Ben Yahmed, ancien ministre
de la Communication tunisien,
sous le nom d’« Afrique Action » (il est
devenu « Jeune Afrique » un an
plus tard), a accompagné et couvert
toute l’histoire moderne du
continent. De la décolonisation
à la démocratisation, l’hebdomadaire
panafricain est resté la
référence de l’information sur
cette région en perpétuelle mutation.
Une longue et turbulente
histoire qui mène aujourd’hui
le titre à renouveler son offre
en commençant par le papier
avant de faire également évoluer
sites et applis. Une relance
en profondeur qui passe par une
nouvelle formule et un nouveau
logo pour mettre en valeur la
modernité de l’offre.
Compte tenu de son audience internationale,
un tel mouvement supposait une campagne de
publicité qui a été confiée à l’agence Les Barbus,
installée à Paris et à Dakar. Intitulée « Des lignes
pour faire bouger les lignes », elle est construite
autour de la nouvelle signature « Bien s’informer,
mieux décider », cette campagne de communication
multicanal (TV, affichage, presse, display
digital et activation social média) a ainsi été
déployée en France, au Maghreb et en Afrique
subsaharienne. « Jeune Afrique est un titre qui a
une longue histoire mais qui a aussi un positionnement
fort dans le continent », explique Romain
Lucchini, le directeur de la création des Barbus.
« C’est un journal qui s’adresse
aux CSP + et aux décideurs à
qui il délivre une information
exclusive », poursuit-il. L’époque
a changé et le temps des luttes
pour l’indépendance est passé.
Si « Jeune Afrique » a toujours
un regard acéré sur la politique
du continent, il est aussi un témoin
de l’évolution économique
et sociale de ces pays. « Cette
évolution d’envergure doit nous
permettre de rester la marque média africaine de
référence dans le monde », estime Amir Ben Yahmed,
directeur général de Jeune Afrique Media
Group. Avec 5 millions de followers cumulés sur
ses réseaux sociaux et 200 000 abonnés à ses
newsletters quotidiennes, « Jeune Afrique » est
toujours écouté même si, à l’instar de nombreux
titres d’information, la situation du papier est
plus difficile avec une diffusion totale de 45 000
exemplaires (dont 10 000 en France) en 2017,
soit une chute de 7,91 % par rapport à 2016, selon
les chiffres de l’ACPM.
FRÉDÉRIC ROY
PHOTOS : © DAMIR ASSAD. DR.
CB NEWS . 42 . MAI 2018

Oui notre Afrique est spéciale, étonnante, passionnante,
enthousiasmante.
C’est un territoire d’expression formidable pour les
communicants. Chez 6 ème sens, nous vivons au rythme de
ses mutations formidables.
Ce QR code
vous conduira sur
top100africa.com.
Bon voyage !
Notre affiliation au réseau MC Saatchi nous permet de
suivre ce mouvement perpétuel de Lagos à Nairobi, et
d’Accra à Johannesburg.
Nous avons rassemblé notre veille continentale sur un
site compilant 100 faits 100% vrais sur l’Afrique
d’aujourd’hui et de demain : top100africa.com.

Interview
INTERNATIONAL
“ LA GRILLE EST ADAPTÉE AUX
MODES DE VIE LOCAUX. ”
GULLI AFRICA A TROUVÉ SA PLACE DANS LE CONTINENT,
SON PUBLIC ET PROMET MÊME DES ŒUVRES ORIGINALES
QUI POURRAIENT S'EXPORTER.
nous avons diffusé 21 licences africaines, soit
plus de 1 000 heures de programmes locaux
sur notre antenne. Nous poursuivons cette
stratégie sur 2018.
cbn _ Quelle sont les spécificités du marché
TV africain pour une chaîne comme la vôtre ?
caroline cochaux_ Comme tout marché
émergent, le nôtre est très compétitif. Sur
le marché de la télévision francophone en
Afrique, le nombre d’acteurs a explosé en
quelques années, notamment en Pay TV. Gulli
Africa a réussi à trouver sa place et son public.
Elle ne ressemble à aucune autre chaîne, sa
grille est adaptée aux horaires et aux modes de
vie locaux.
CAROLINE
COCHAUX
est directrice
déléguée du pôle
TV de Lagardère
Active France
et international,
présidente
de Gulli.
cbn _ Où en est le développement de Gulli
en Afrique ?
caroline cochaux_ Lancée il y a maintenant
3 ans et distribuée en exclusivité dans le
bouquet CanalSat et à travers 22 pays de
l’Afrique francophone, Gulli Africa compte
aujourd’hui plus de 2,4 millions d’abonnés.
Cette chaîne a été conçue sur mesure pour
le territoire. Selon l’étude Africascope Kids
réalisée en 2017 au Sénégal, en Côte d’Ivoire
et au Cameroun, 86 % des enfants interrogés
estiment apprendre des choses en regardant la
chaîne, ils sont autant à penser que la chaîne
propose les meilleurs dessins animés. En 2017,
cbn _ Y-a-t-il quelque chose à apprendre ou
qui soit “ répliquable ” en France des usages
TV africains ?
caroline cochaux_ Nous sommes très attentifs
aux nombreux nouveaux talents que nous
voyons émerger en Afrique. De nouvelles sociétés
de production d’animation se développent,
nous souhaitons les soutenir et les accompagner.
La chaîne développe sa création avec des œuvres
originales qui peuvent s’exporter. C’est le cas de
la série d’animation « Junior, idées en or », coproduite
par Made In PM et Alshana Prod Côte
d’Ivoire. Lancée sur Gulli Africa en mai 2017,
elle sera très prochainement diffusée à la télévision
française. Nous développons également des
programmes de flux avec notamment le spin off
de « Safari Go ! », « Safari Quest » produit pour
l’Afrique et animé par Moussier Tombola.
Propos recueillis par
THIERRY WOJCIAK
PHOTO : © JEROME PREBOIS.
CB NEWS . 44 . MAI 2018

Infographie
AFROPTIMISME PUBLICITAIRE
Marché publicitaire en Afrique francophone subsaharienne.
VISION DU MARCHÉ
Évolution et perspectives du marché.
2017 2018
28 % 18 %
52 % 51 %
En hausse ou en baisse ?
“ Comment a évolué le
marché publicitaire en
2017 par rapport à 2016 ? ”
“ Comment le marché
publicitaire va-t-il
évoluer en 2018 par
rapport à 2017 ? ”
PAR PAYS **
Sénégal
Côte d'Ivoire
Cameroun
+4 %
Moyenne panafricaine
+6 % +8 % +5 % 33 %
ADWESEARCH est une étude
réalisée par Ipsos à la demande
d’Adweknow pour fournir le
“ premier baromètre du marché
publicitaire d’Afrique francophone
subsaharienne ”. Cette enquête
a été effectuée auprès de 64
professionnels travaillant en agence,
dans les médias (58 %) ou chez
les annonceurs (42 %). L’étude se
concentre sur les médias traditionnels
et la communication digitale : la
presse nationale et panafricaine, la
radio nationale et panafricaine, la
télévision nationale et panafricaine,
l’affichage, internet et les réseaux
sociaux et le hors média.
FRÉDÉRIC ROY
61 %
Réseaux sociaux
Télévision
Internet
Radio
30 % 52 %
MÉDIAS LES PLUS UTILISÉS
Afchage
Presse
28 % 27 %
CB NEWS . 45 . MAI 2018

Agence
JALONS
AUX GRANDS MOTS
LES GRANDS MOYENS
PREMIÈRE FILIALE ÉTRANGÈRE DE L'AGENCE PARISIENNE, LES GRANDS
MOTS, CHARGÉS D'EXPÉRIENCES, S'INSTALLENT À RABAT ET VOIENT GROS.
Laurent Fauroux,
à gauche, et
Othman
Mouizina,
respectivement
futur viceprésident
des
Gros Mots, et
jeune directeur
de l'agence à
Rabat les Grands
Mots.
C
ela fait 3 ans que j’ai
commencé à y penser
sérieusement,
en étant convaincu
que c’est le pays et
le continent de l’avenir. » Othman
Mouizina a fini par sauter
le pas et s’installer au Maroc,
son pays d’origine, il y a un
peu moins d’un an, refermant
une longue parenthèse hexagonale
où, après des études
supérieures, il œuvra pendant
plus d’une dizaine d’années
dans les agences de com' parisiennes,
avec, dernière en
date, Vaudoo du groupe Herezie.
D’autant que l’aventure
qui lui est alors proposée en
Royaume chérifien inscrit son
parcours dans une cohérence
certaine : y créer et diriger la
première filiale à l’étranger de
l’agence parisienne Les Gros
Mots. Basée à Rabat, la nouvelle
entité est nommée Les
Grands Mots, et se veut être
la première pierre d’un édifice
panafricain dont l’intéressé
sera le Monsieur Afrique. Il
sera prochainement amené
à reporter au futur vice-président
des Gros Mots, Laurent
Fauroux, transfuge de Publicis,
dont la nomination est attendue
sous peu. « Ce continent
est celui qui présente le plus
de potentiel, et pourtant c’est
celui qui est le plus maltraité
par les agences, notamment
les filiales de grands groupes,
relégué au second rang face
à des places comme l’Asie.
Avant d’être une filiale, Les
Grands Mots est une agence,
à part entière, avec une vraie
ambition notamment incarnée
par une forte volonté de coconstruction
avec les clients »,
explique Laurent Fauroux qui
a déjà eu auparavant l’occasion
Parmi les
premiers clients
des Grands Mots,
Maroc Telecoms.
de plancher pour des clients du
continent : Office national du
tourisme tunisien et Tunis Air
pendant 6 ans, Office national
marocain de tourisme pendant
3 ans, le gouvernement
de la Côte d’Ivoire… L’agence
de Rabat emploie actuellement
quatre personnes et est
promise à grossir en fonction
des appels d’offres auxquels
l’agence participe de manière
intense depuis son ouverture
en novembre. Ses deux maîtres
d’œuvres voient grand en annonçant
des jalons pour des ouvertures
prochaines à Abidjan
et Libreville, en capitalisant sur
les collaborations déjà initiées :
Maroc Telecom (campagne
dans 9 pays africains), Moov
(Côte d’Ivoire, Niger, Bénin,
Centrafrique et Togo), Gabon
Telecom (Gabon), Onatel (Burkina
Faso), Malitel (Mali)…
FOUZIA KAMAL
PHOTOS : DR.
CB NEWS . 46 . MAI 2018

Partenaires
« LES PAYS ONT LA PAROLE »
À L’AFRICAN CRISTAL
DU 2 AU 5 MAI À MARRAKECH, LE POINT SUR LA PUB ET LA COM'.
L’African Cristal, congrès dédié à la Communication
et aux Médias, se tiendra à Marrakech
du 2 au 5 mai, et propose un programme
ambitieux à ses participants. Entre sessions de
learning sur le Sports Marketing ou encore sur
la Data et le programmatique, la manifestation
offre également la possibilité aux participants de
venir pitcher sur scène selon différents thèmes.
Une première session, dédiée au mobile, permettra
aux créateurs de contenus sur mobile de présenter
leurs dernières innovations face aux annonceurs,
médias, régies et opérateurs mobiles.
La deuxième session intitulée « Audace, Création
et Innovation : les Pays ont la parole », donnera
l’opportunité aux agences africaines de se présenter
ainsi que leurs coups de cœur créatifs de
l’année sur leur marché. C’est une réelle valeur
ajoutée proposée par l’African Cristal Festival,
qui met ainsi en valeur la richesse des cultures
africaines à travers le discours des membres de
la communauté Cristal.
Plus de quinze pays africains (l’Égypte, le Nigeria,
le Cameroun, le Gabon, le Mali, le Congo, le
Rwanda…) seront mis en avant lors de cette session,
l’occasion pour les participants présents à
l’African Cristal de mieux comprendre les enjeux
liés à la communication et à la publicité.
ILS PRENDRONT LA PAROLE :
ÎLE MAURICE
Felipe Helder, président de
Redhouse McCann et directeur
général de l’Association des agences de
communication (ACA) de l’Île Maurice,
sera présent lors de l’African Cristal, le
temps d’une présentation de dix minutes
sur les tendances locales.
ALGÉRIE
Riad Aït Aoudia, directeur général
de MédiaAlgériA, exposera les
changements de paradigmes liés à
l’écosystème médiatique en Algérie.
KENYA
Lenny Nganga, CEO East Africa chez
Saracen Media, sera le porte-parole
pour la région du Kenya (considéré
comme le hub de l’Afrique de l’Est), en
prouvant le dynamisme de ce dernier et
comment la publicité y contribue.
Mais aussi...
CÔTE D’IVOIRE
Yasmine Ajami est directrice générale chez Vitamines
et présidente de l’Association des agences conseil en
Côte d’Ivoire. Elle présentera ses campagnes favorites
sur le marché ivoirien.
TUNISIE
Ahmed Mahjoub, managing director chez JWT Tunis
et président de la Sapa (Chambre syndicale nationale
des Agences de communication publicitaires), fera
l’état des lieux des défis liés à la communication sur le
territoire tunisien.
SÉNÉGAL
Emmanuelle Keinde, CEO chez McCann Dakar,
représentera le Sénégal et expliquera en quoi la culture
sénégalaise peut influencer la créativité locale.
BÉNIN
Didier Aplogan, CEO chez AG Partners, mais
également président de la Fédération béninoise de
volley-ball, sera l’émissaire du Bénin et mettra l’accent
sur le sport comme vecteur de croissance.
CB NEWS . 47 . MAI 2018

Agence
ÉCHANGES
POSITION
STRATÉGIQUE
LA SITUATION DE L'ÎLE MAURICE PERMET À L'AGENCE CIRCUS UN
RAYONNEMENT À L'EST ET EN AFRIQUE. IDENTITÉ REVENDIQUÉE.
VINCENT
MONTOCCHIO,
dg de Circus :
“ Nous avons
l’avantage d’être
extérieurs au
continent tout en
étant africains. ”
V
incent Montocchio,
le directeur général
de l’agence Circus
Advertising ne
manque pas de le
préciser en préambule : l’île
Maurice est un pays et non un
département français. Cette
petite île indépendante compte
1,2 million d’habitants dont
800 000 sont connectés – la
quasi-totalité utilisant Facebook
quotidiennement. Ce petit
pays au large de l’Afrique de
Exemples de
campagnes
signées
Circus : un
rebranding pour
Telkom Kenya, et
une campagne
print de Camel
Nuts...
l’Est est une terre publicitaire
des plus fertiles. D’ailleurs, la
plupart des grands groupes
publicitaires mondiaux y ont
des implantations et Vincent
Montocchio, en plus de la
direction de son agence, est
Executive Creative Director
de Publicis Groupe Africa. Au
large de l’Afrique, sur la route
des Indes, cette petite île est
un lieu d’échange entre les
continents, ce qui lui donne
une position unique. Ce qui
permet à l’agence de travailler
non seulement sur des budgets
locaux mais aussi à Singapour,
à la Réunion, à Madagascar ou
au Kenya.
C’est d’ailleurs dans ce dernier
pays que Circus a entrepris
l’une de ces plus importantes
réalisations. « Nous avons
gagné le budget Telkom pour
l’intégralité du rebranding de
l’ex-opérateur téléphonique
national. Nous avons créé la
marque de A à Z, qu’il s’agisse
du design, du packaging,
de l’identité graphique et de
l’activation de la campagne »,
explique Vincent Montocchio.
Un résumé des savoir-faire de
cette agence, fondée en 1995
par Thierry Montocchio, le
frère de Vincent, disparu en
2011, l’agence a dès le départ
intégré tous les métiers, le design,
le graphisme et le digital.
Le succès de Telkom fait encore
grandir les ambitions de Circus
qui se positionne de plus en
plus sur l’Afrique de l’Est avec
l’appui du groupe Publicis.
« Nous avons l’avantage d’être
extérieurs au continent tout en
étant africains », estime Vincent
Montocchio. Un mouvement
poussé par un vent de créativité
africaine dans la publicité. « Il
y a une identité publicitaire
forte qui est en train de s’imposer
dans la région » observe le
patron de Circus. Un courant
qui se caractérise par « l’énergie,
la sincérité, la vérité », remarque
Vincent Montocchio.
Un courant qui n’est pas près
de se tarir.
FRÉDÉRIC ROY
PHOTOS : DR.
CB NEWS . 48 . MAI 2018

Profil
MOBILE
Les apps de
ROMAIN
ET
PHILIPPE
DIS-MOI QUELLES SONT
LES APPLIS DANS TON
SMARTPHONE, JE TE DIRAI
QUI TU ES. PAR LES ASSOCIÉS
ET FONDATEURS DE
L’AGENCE 35°NORD.
1
Le premier des
réseaux sociaux
« Avec plus de 100 millions
d’appels vocaux par jour *,
WhatsApp est de loin le premier
des réseaux sociaux sur le continent.
Trois raisons à ce succès :
la gratuité de son utilisation,
une faible consommation en
données et une relative sécurité
des communications. Et que
l’on sache écrire ou non, “ on se
WhatsApp ” désormais autour
d’un réseau conçu pour réussir
en Afrique. »
* source : WhatsApp 2016
NUMÉRO 1
Romain Grandjean et Philippe Perdrix sont associés
et fondateurs de l’agence 35°Nord, agence de
communication stratégique spécialisée sur l’Afrique.
Leur choix d'applications va en priorité vers
2Un levier d’affaires
« Pour contourner les
difficultés logistiques ou
le manque d’infrastructures
sur le continent, WhatsApp
est également devenu un outil
de gestion de projet, de vente
directe ou même de levée de
fonds. L’application a d’ailleurs
lancé un WhatsApp Business
dédié aux pays émergents qui
permet de gérer l’information
au sein de l’entreprise. »
WhatsApp. Cette messagerie instantanée
trouve en Afrique un terrain de développement
particulièrement propice. Elle est devenue l’outil de
communication numéro un du Cap au Caire.
3Le premier vecteur
de l’information
« Diffuser des informations
confidentielles, privées ou
personnelles, relayer un journal
ou un magazine, un rapport
de McKinsey ou de la Banque
africaine de développement,
propager une vidéo ou un
document sonore, partager un
sketch humoristique… L’information
circule à toute vitesse sur
WhatsApp. Elle est par essence
non filtrée, et c’est le groupe qui
la propage qui va lui conférer sa
crédibilité. »
4
Le premier parti
politique continental
« Faut-il des tracts ? Des
affiches ? Des focus groups ?
Certes… mais animer plusieurs
dizaines de groupes WhatsApp
de 256 personnes est bien plus
efficace. Sur le continent, les
partis politiques l’ont bien
compris : WhatsApp est un outil
de propagande et de campagne
à part entière. Les mouvements
de la société civile utilisent également
massivement WhatsApp
comme vigie pour suivre et
couvrir des manifestations ou
des scrutins... Un vrai contrepouvoir
tech en quelque sorte. »
Romain
Grandjean, à
gauche,
et Philippe
Perdrix.
PHOTOS : DR.
CB NEWS . 50 . MAI 2018

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MAY 2/5 2018
PULLMAN MARRAKESH
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