syndicom magazine N° 6 ¦ Le gratuit n'est pas gratuit
oublier les domaines de la culture et du divertissement. Il entretient le dialogue au travers des médias sociaux et informe sur les prestations, événements et offres de formation du syndicat et de ses organisations affiliées.
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<strong>syndicom</strong><br />
N o 6 juillet-août 2018<br />
<strong>magazine</strong><br />
<strong>Le</strong> <strong>gratuit</strong><br />
n’est <strong>pas</strong><br />
<strong>gratuit</strong>
Annonce<br />
La date du<br />
22 septembre doit donc<br />
être marquée<br />
en rouge et en gras<br />
dans ton agenda!<br />
Participe toi aussi à la manifestation nationale<br />
du 22 Septembre 2018 à Berne<br />
Des salaires justes pour tous –<br />
pour l’égalité salariale et contre<br />
les discriminations!<br />
Une alliance composée de <strong>syndicom</strong>, des autres syndicats et<br />
d’organisations de femmes convie au rassemblement national à Berne.<br />
Mettons la pression pour que les choses bougent enfin.<br />
13h30 Rassemblement à la Schützenmatte à Berne<br />
15h00 Manifestation sur la Place Fédérale<br />
<strong>Le</strong>s membres de <strong>syndicom</strong> voyagent <strong>gratuit</strong>ement.<br />
Inscription en ligne et plus d’informations:<br />
my.<strong>syndicom</strong>.ch ∕ manif18
Sommaire<br />
4 Une fine équipe<br />
5 Brèves<br />
6 Du côté des employeurs<br />
7 L’invité<br />
8 Dossier : <strong>gratuit</strong><br />
16 Au cœur de nos métiers<br />
17 Fin du Giornale<br />
22 Service public digital<br />
25 Quels sont mes droits ?<br />
26 Suggestions<br />
27 1000 mots<br />
28 Evènements<br />
30 Tranches de vie<br />
31 Mots croisés<br />
32 <strong>syndicom</strong> social<br />
Chères lectrices, chers lecteurs,<br />
<strong>Le</strong> recours aux technologies numériques permet<br />
aux entreprises de forcer leurs clients<br />
à prendre en charge de plus en plus de tâches.<br />
D’autres prestations, laborieuses, ne sont plus<br />
fournies. Cette stratégie rapporte d’énormes<br />
gains de productivité aux entreprises. <strong>Le</strong>s<br />
exemples ne manquent <strong>pas</strong>. PostFinance veut<br />
devenir le leader de la banque numérique, une<br />
véritable digitale Powerhouse ( quel nom pour<br />
caractériser de simples externalisations ! ). De<br />
son côté, Swisscom offre déjà une assistance<br />
personnalisée par chat à ses clients. Et ta<br />
caisse-maladie propose peut-être des consultations<br />
de télémédecine.<br />
Ces processus, qui s’accélèrent actuellement,<br />
détruisent le travail et rapportent aux entreprises<br />
des bénéfices colossaux. Ces bénéfices,<br />
dus au travail <strong>gratuit</strong> caché, disparaissent dans<br />
les poches des actionnaires. Et ce jusqu’à la<br />
transformation de l’entreprise en une plateforme<br />
numérique, où toute responsabilité sociale<br />
disparaît et où le risque entrepreneurial<br />
est reporté sur les travailleurs. La résidence<br />
fiscale est choisie de sorte à éviter, si possible,<br />
de payer des impôts.<br />
Contre un monde numérique où l’entreprise<br />
reste à l’écart de la société, nous proposons<br />
notre modèle d’une digitalisation meilleure,<br />
sociale. Il nous appartient de veiller à imposer<br />
la répartition des bénéfices de production et de<br />
nouveaux investissements dans un service<br />
public bien développé. À l’ère numérique, il sera<br />
au cœur de la société – et il doit être <strong>gratuit</strong> !<br />
4<br />
8<br />
23<br />
Daniel Münger, président de <strong>syndicom</strong>
4<br />
Une fine équipe<br />
S’unir vaut la peine<br />
Dominic Steinmann (30 ans)<br />
Il a <strong>pas</strong>sé son enfance à Ried-Brig (VS).<br />
Depuis mars 2017, il travaille à Zurich<br />
et en Valais comme photographe indépendant.<br />
Il a étudié le photojournalisme<br />
en Angleterre. Auparavant bénévole<br />
chez KEYSTONE et à la NZZ. Depuis<br />
septembre 2017, il est membre de <strong>syndicom</strong>.<br />
www.dominicsteinmann.com<br />
Markus Forte (40 ans)<br />
Il a fréquenté la filière Photographie de<br />
presse à l’Ecole suisse de journalisme<br />
à Lucerne. Depuis 2005, il travaille en<br />
tant que photographe indépendant<br />
dans le secteur Médias et Corporate<br />
Publishing. Domicilié à Zurich, il est<br />
membre de <strong>syndicom</strong> depuis 2004.<br />
www.markusforte.com<br />
Miriam Künzli (41 ans)<br />
Elle a étudié la photographie à Munich<br />
et Lucerne et travaille en free-lance<br />
pour différents mandats en Allemagne<br />
et en Suisse. Elle habite à Zurich avec<br />
sa famille. Depuis 2008, elle est affiliée<br />
à <strong>syndicom</strong> et membre de la commission<br />
des Indépendant-e-s.<br />
www.miriamkuenzli.com<br />
Texte : Nina Scheu<br />
Photo : Tom Kawara<br />
« Une amélioration<br />
sensible des contrats<br />
a été obtenue. »<br />
« En octobre 2017, nous étions sous<br />
le choc : nous apprenions que Ringier<br />
Axel Springer (RASCH) envoyait<br />
aux photographes indépendants de<br />
nouveaux contrats pour exiger un<br />
full buyout, soit la renonciation totale<br />
aux droits d’auteurs. Cela signifie<br />
ni plus ni moins que nos photos<br />
peuvent non seulement être utilisées<br />
sans restriction dans toutes les publications<br />
des éditeurs, mais aussi<br />
revendues à d’autres clients – <strong>gratuit</strong>ement<br />
et sans nous en demander<br />
l’autorisation. Pire encore : nous<br />
perdrions le droit de réutiliser nos<br />
photos. Or le tarif de presse est très<br />
bas, car les photos ne sont fournies<br />
que pour une seule utilisation.<br />
Chaque réutilisation doit être rétribuée.<br />
Avec le concours des syndicats<br />
et des associations photographiques,<br />
un groupe assez important de photographes<br />
s’est réuni autour d’une<br />
« table ronde » au secrétariat régional<br />
de <strong>syndicom</strong>. Nous avons obtenu une<br />
assistance juridique et de l’aide pour<br />
formuler une contre-proposition que<br />
nous voulions négocier avec RASCH.<br />
Un groupe Facebook nous a apporté<br />
son soutien pour la mise en réseau et<br />
nous avons ainsi pu lancer une pétition<br />
qui a récolté plus de 800 signatures.<br />
<strong>Le</strong> groupe a envoyé de très<br />
nombreuses lettres. Pour notre part,<br />
nous avons également contacté nos<br />
collègues par téléphone et leur avons<br />
conseillé de renvoyer notre contreproposition<br />
au lieu des nouveaux<br />
contrats – en signe de protestation.<br />
Mais certains ont eu peur de perdre<br />
des mandats. Malgré tout, la pression<br />
exercée sur la direction a été si<br />
forte que nous avons été invités à une<br />
discussion. En février, nous avons<br />
finalement obtenu une amélioration<br />
sensible des contrats et nous<br />
sommes parvenus à empêcher le full<br />
buyout. Nous n’avons toutefois pu<br />
imposer notre contre-proposition<br />
que partiellement. Notre intervention<br />
a représenté un grand travail.<br />
Mais ces efforts nous ont montré que<br />
nous pouvons aboutir ensemble à<br />
des résultats – et qu’ils auraient été<br />
meilleurs encore si tous avaient tiré à<br />
la même corde. Dans notre quotidien<br />
professionnel, nous sommes (trop)<br />
souvent des combattants solitaires.<br />
<strong>Le</strong>s liens tissés marquent un début<br />
pour remédier à cette situation. »
Brèves<br />
Recours contre les décisions de la Commission fédérale de<br />
la poste \ Centenaire de la grève générale \ Propositions pour le<br />
congrès de l’USS \ Décisions du Congrès <strong>syndicom</strong> publiées \<br />
Trois alternatives pour <strong>Le</strong> Matin \ Cours <strong>gratuit</strong>s \<br />
5<br />
Fermeture d’offices de poste :<br />
entendre la voix de tous<br />
<strong>Le</strong> Conseil des États a estimé le 28 mai<br />
dernier que la population devait avoir<br />
voix au chapitre lors de la fermeture<br />
d’offices postaux. Par 23 voix contre 14,<br />
il a accepté une initiative cantonale jurassienne<br />
exigeant que la Commission<br />
fédérale de la poste traite désormais<br />
les réclamations soumises en prenant<br />
une décision formelle sujette à recours.<br />
<strong>syndicom</strong> juge aussi nécessaire l’amélioration<br />
de la formation et des conditions<br />
de travail des personnes qui<br />
travaillent dans des agences postales<br />
exigée par l’initiative.<br />
<strong>Le</strong>s 100 ans de la grève générale<br />
à Olten le 10 novembre<br />
Un siècle s’est écoulé depuis la grève<br />
générale du 12 novembre 1918. Cet événement<br />
historique sera célébré le samedi<br />
10 novembre prochain aux anciens<br />
ateliers principaux des CFF de la gare<br />
d’Olten. <strong>syndicom</strong> participera à cette<br />
commémoration avec l’USS, le Parti<br />
socialiste et la Société Robert Grimm,<br />
dès 14 h. Dans ce lieu symbolique, il est<br />
prévu que la conseillère fédérale Simonetta<br />
Sommaruga prenne la parole, tout<br />
comme président de l’USS Paul Rechsteiner.<br />
On peut s’inscrire à l’adresse<br />
http://inscription.grevegenerale.ch.<br />
Plus d’informations sur la plateforme du<br />
centenaire de la grève générale http://<br />
generalstreik.ch/?lang=fr<br />
Propositions<br />
pour le congrès de l’USS 2018<br />
Du 30 novembre au 1er décembre<br />
prochain, les délégués de l’Union syndicale<br />
suisse se réuniront lors de leur<br />
56e congrès. <strong>Le</strong>s propositions qui devront<br />
y être discutées doivent être soumises<br />
au minimum trois mois à l’avance<br />
à la direction de l’USS. Pour des questions<br />
d’organisation, il est souhaitable<br />
de déposer les propositions jusqu’au<br />
15 août. <strong>Le</strong> délai d’ordre (délai ultime)<br />
pour le dépôt des propositions reste le<br />
30 août 2018. Des questions peuvent<br />
être posées à l’adresse kommunikation@<strong>syndicom</strong>.ch<br />
Suite du congrès <strong>syndicom</strong><br />
Parce que les propositions n’ont <strong>pas</strong> pu<br />
être toutes traitées lors du congrès de<br />
novembre 2017, la suite de ce congrès a<br />
eu lieu le 9 juin 2018. Cette foisci,<br />
tout a bien été traité conformément à<br />
l’ordre du jour. La publication des décisions<br />
est désormais effective et peut<br />
être consultée à l’adresse <strong>syndicom</strong>.<br />
ch/congressuite<br />
<strong>Le</strong> Matin: les alternatives<br />
de la délégation du personnel<br />
La délégation du personnel a communiqué<br />
à la direction de Tamedia trois<br />
alternatives permettant d’éviter la<br />
disparition du titre sur papier et/ou de<br />
réduire très notablement le nombre de<br />
personnes touchées.<br />
Il s’agit 1) du maintien de la version<br />
papier du Matin sans suppression<br />
d’emplois, avec des aménagements de<br />
politique commerciale et de nouvelles<br />
recettes notamment. 2) de la reprise<br />
du titre par la rédaction du Matin avec<br />
de nouveaux investisseurs 3) d’un site<br />
matin.ch beaucoup plus développé et<br />
doté de moyens nettement plus importants.<br />
Une prolongation du délai<br />
de consultation au 2 juillet a aussi été<br />
demandée.<br />
Cours de français <strong>gratuit</strong>s<br />
dans les parcs<br />
Hablo francés<br />
Eu falo francês<br />
travail et intégration<br />
I speak French<br />
Unë flas frangjishtë<br />
COURS GRATUITS<br />
DE FRANÇAIS<br />
DU MARDI 10 JUILLET<br />
AU JEUDI 16 AOÛT 2018<br />
Parc des Grand-Places, Fribourg<br />
Mardis-mercredis-jeudis : 17h à 18h30<br />
Inscription sur place dès 16h30<br />
OUVERT À TOUS<br />
Niveau débutant<br />
Encadrement pour les enfants<br />
de 2 à 8 ans<br />
Cours annulé en cas de pluie<br />
Pas d’obligation de suivre<br />
plusieurs cours<br />
Informations :<br />
www.oseo-fr.ch<br />
026 347 15 77<br />
Avec le soutien de : En collaboration avec :<br />
Ané Azareb faransi<br />
Ich spreche Französisch<br />
Je parle français<br />
L’Œuvre suisse d’entraide ouvrière de<br />
Fribourg offre des cours de français<br />
<strong>gratuit</strong>s en plein air au parc du Cabalet<br />
à Bulle et aux GrandPlaces à Fribourg.<br />
Ils auront lieu du 10 juillet au 16 août et<br />
seront dispensés les mardis, mercredis<br />
et jeudis de 17 h. à 18 h. 30. Ils s’adressent<br />
à toute personne désirant acquérir<br />
des connaissances de base et pratiquer<br />
le français. Inscriptions sur place<br />
chaque jour à partir de 16 h 30.<br />
Agenda<br />
Juillet<br />
19 21<br />
Swing in the Wind<br />
Festival de jazz actuel<br />
EstavayerleLac<br />
Scott Hamilton, Tony Match,<br />
Max Jendly Jazz Big Band…<br />
Août<br />
2426<br />
Fête du Livre<br />
SaintPierredeClages<br />
L’Abbaye de SaintMaurice, invité<br />
d’honneur : exposition, conférences…<br />
Jordi Gabioud présentera le « Marque<br />
Page » : capsules vidéo de présentation<br />
de livres. <strong>Le</strong> Studio Restauro Wick de<br />
Florence : démonstration de reliure,<br />
dorure à chaud…<br />
152.9<br />
Jardins musicaux 2018<br />
à Evologia, Cernier<br />
Grange aux Concerts et bal(l)ades<br />
musicales dans divers lieux des parcs<br />
Chasseral et Doubs ou de la Saline<br />
royale d'ArcetSenans<br />
Jusqu’au 2 septembre<br />
Exposition Boris Vian<br />
En avant la musique<br />
Fondation Jan Michalski, Montricher<br />
Maven 14 h à 18 h · Sadi 9 h à 18 h<br />
De la Java des bombes atomiques au<br />
Tango des joyeux bouchers, les chansons<br />
de l'étoile filante à la trompinette<br />
résonnent encore. De nombreux documents<br />
d’archives, photographies,<br />
enregistrements, manuscrits et éditions<br />
originales retracent le parcours<br />
de l'homme de jazz, auteur et poète.<br />
Jusqu’au 23 septembre<br />
Jean Dubuffet<br />
Jacques Henri Lartigue<br />
Musée de l'Élysée, Lausanne<br />
Madi 11 h à 18 h<br />
Première étude du fonds photographique<br />
conservé à la Fondation<br />
Dubuffet<br />
La vie en couleurs révèle un Lartigue<br />
inconnu.<br />
<strong>syndicom</strong>.ch/agenda
6 Du côté des<br />
Hans-Jürg Schürch<br />
employeurs<br />
est diplômé en gestion d’entreprise et a un Master en ressources<br />
humaines. Il travaille chez T-Systems depuis 2007.<br />
Depuis cette année, il est responsable HR chez T-Systems<br />
Suisse et Autriche et membre des deux comités directeurs.<br />
1<br />
Quelle est la situation du marché<br />
dans votre branche ?<br />
Plus nos clients misent sur la technologie<br />
dans leur commerce, plus ils<br />
nécessitent une assistance informatique.<br />
<strong>Le</strong>s services d’externalisation<br />
classiques n’ont plus le vent en<br />
poupe. La clientèle recourt aux applications<br />
et services du cloud. La demande<br />
en hausse entraîne un changement<br />
des modèles tarifaires.<br />
Aujourd’hui, on trouve des modèles<br />
de prix fixes, des modèles de prix où<br />
seule l’utilisation effective est facturée<br />
ou une combinaison des deux.<br />
2<br />
Comment jugez-vous les activités<br />
d’investissement de vos clients dans<br />
les IT ?<br />
Aujourd’hui, aucune entreprise ne<br />
peut se <strong>pas</strong>ser d’investissements<br />
dans la numérisation. Mais la nouveauté,<br />
c’est que la division IT ne<br />
prend plus à elle seule les décisions<br />
concernant de nouvelles acquisitions.<br />
<strong>Le</strong>s départements spécialisés,<br />
tels que le Marketing, les RH, les Finances<br />
ou la Vente, sont fortement<br />
associés. <strong>Le</strong>ur implication permet de<br />
simplifier les processus et de couvrir<br />
les besoins des clients.<br />
3<br />
Quelle importance revêt la numérisation<br />
pour vous ?<br />
Selon moi, la numérisation va beaucoup<br />
plus loin que l’informatique et<br />
la technologie. C’est une nouvelle<br />
approche fondamentale qui vise à<br />
concevoir de manière plus fluide les<br />
besoins de la clientèle et les processus,<br />
et à les développer de manière<br />
plus innovatrice au moyen de la technologie<br />
– tout en veillant à une utilisation<br />
plus confortable, extérieurement,<br />
et intérieurement plus efficace.<br />
L’automatisation joue ici un rôle<br />
essentiel.<br />
4<br />
Offrez-vous des services dans le<br />
domaine de l’intelligence artificielle ?<br />
<strong>Le</strong>s algorithmes autoapprenants, l’Internet<br />
des choses ou le cloud sont importants<br />
pour la compétitivité. Notre<br />
portfolio contient aussi des services<br />
d’intelligence artificielle (IA), car<br />
nous menons des recherches dans le<br />
domaine de la voiture connectée et de<br />
l’e-santé, ainsi que pour créer villes et<br />
usines intelligentes. Nous sommes<br />
toutefois conscients des risques.<br />
C’est pourquoi Deutsche Telekom<br />
s’est imposé récemment un code<br />
d’éthique en matière d’IA.<br />
5<br />
Quels sont les défis de la branche ?<br />
En raison du nombre croissant de<br />
données à collecter, évaluer et traiter,<br />
les exigences relatives à la protection<br />
des données et à leur sécurité, et, généralement,<br />
à la conscience du risque<br />
face aux dangers de l’Internet ont<br />
augmenté. <strong>Le</strong>s services de cybersecurity<br />
doivent rester ultramodernes et<br />
couvrir l’ensemble de la chaîne de<br />
création de valeurs. Car la moindre<br />
fuite peut entraîner des préjudices<br />
financiers, mais aussi un gros dégât<br />
d’image.<br />
6<br />
Comment évaluez-vous le niveau<br />
salarial de votre branche ? Et de votre<br />
entreprise ?<br />
Notre branche n’est <strong>pas</strong> la branche<br />
classique des hauts salaires, comme<br />
devrait le laisser supposer la pénurie<br />
croissante de main-d’œuvre spécialisée.<br />
La fourchette des salaires est très<br />
large. Une activité intéressante, une<br />
bonne culture d’entreprise ou la participation<br />
à des cours peuvent augmenter<br />
l’attractivité d’une branche<br />
ou d’un employeur. Et à cet égard,<br />
T-Systems est très bien positionné<br />
par rapport aux autres..<br />
Texte : Sina Bühler<br />
Photo : Yoshiko Kusano
L’invité<br />
Il y a cinq ans, j’ai fait un constat :<br />
celui qui cherche à s’améliorer dans l’écriture<br />
n’a quasiment aucune possibilité de le faire. Il<br />
n’existait en effet aucune structure de critiques<br />
littéraires en Suisse romande (et au-delà non<br />
plus). J’ai créé L’Épître, revue littéraire <strong>gratuit</strong>e<br />
en ligne (www.lepitre.ch) et sur papier, dans le<br />
but d’offrir, à tous ceux qui veulent progresser,<br />
un regard critique fort et neutre.<br />
Pour éviter toute subjectivité, j’ai monté une<br />
équipe d’une dizaine de critiques compétents.<br />
Ainsi, chaque texte reçu est lu par au moins<br />
quatre personnes formées en littérature. C’est<br />
une masse de travail énorme et notre succès<br />
tend à ralentir notre efficacité. De plus, il est<br />
nécessaire de participer aux salons, d’organiser<br />
des rencontres, d’harponner presse, institutions<br />
et particuliers. Cela prend du temps et le<br />
secteur de la littérature génère, en Suisse, très<br />
peu d’argent ; le constat est sans appel : combien<br />
d’auteurs suisses vivants avez-vous lus<br />
cette année ?<br />
<strong>Le</strong> modèle totalement <strong>gratuit</strong> n’est plus tenable.<br />
Un financement participatif (à l’été 2018) et<br />
des subventions servent à payer modestement<br />
nos critiques. Ils n’ont <strong>pas</strong> attendu un salaire<br />
pour livrer un travail professionnel d’excellence :<br />
mais avec plus de temps, ils peuvent reproduire<br />
leur effort plus souvent. Notre visibilité et notre<br />
légitimité permettent aujourd’hui la reconnaissance<br />
– concrète – de leur qualité.<br />
Nous ne changeons <strong>pas</strong> de philosophie : les<br />
auteurs continueront de recevoir <strong>gratuit</strong>ement<br />
un retour pour les textes envoyés sur le site –<br />
c’est un espace d’expérimentation. Ils percevront<br />
des droits d’auteur pour la publication<br />
papier – c’est un espace d’excellence.<br />
L’Épître a dû attendre cinq ans avant d’atteindre<br />
un modèle semi-professionnel. <strong>Le</strong> bénévolat<br />
provisoire en littérature, le prix à payer ?<br />
Un prix à payer<br />
pour la critique<br />
Matthieu Corpataux est diplômé de l’uni<br />
de Fribourg en littérature française.<br />
En 2013, il lance L’Épître, qui a publié<br />
en cinq ans 250 auteurs et organise<br />
lectures et ateliers. En 2014, il crée<br />
avec Lucas Giossi la maison d’édition<br />
des Presses Littéraires de Fribourg, qu’il<br />
dirige. Il est critique pour le <strong>magazine</strong><br />
Sept info et pour la revue La Cinquième<br />
Saison.<br />
7
Guide pratique de l’économie numérique<br />
Travailleurs online et vol de données<br />
Facebook faussement <strong>gratuit</strong> et autres règles secrètes<br />
Comment le journalisme <strong>gratuit</strong> a miné la presse écrite<br />
Dossier 9<br />
<strong>Le</strong> vrai<br />
prix du<br />
<strong>gratuit</strong>
10 Dossier<br />
<strong>Le</strong> <strong>gratuit</strong> n’est <strong>pas</strong> <strong>gratuit</strong> : comment<br />
fonctionne l’économie à l’ère numérique.<br />
Nous raffolons de l’Internet et des réseaux<br />
sociaux tels que Facebook, car ils sont<br />
<strong>gratuit</strong>s (la plupart du temps). Mais ils dissimulent<br />
la transformation brutale de la société<br />
par les multinationales californiennes.<br />
Texte : Oliver Fahrni<br />
Photo : Alexander Egger<br />
Bizarre. L’appel vidéo que je <strong>pas</strong>se avec le fils d’une amie<br />
à Tokyo est <strong>gratuit</strong>. La recherche que je lance sur Trump<br />
(et la situation aux États-Unis) – pour 2 867 894 textes, photos<br />
et films, livrés en une seconde – ne me coûte rien. Ni le<br />
concert de piano de Khatia Buniatishvili à Toulouse<br />
(Grieg), ni ma playlist de musique underground sud-africaine.<br />
J’utilise – <strong>gratuit</strong>ement – GPS, la technologie de<br />
cryptage, la technique par satellite et examine, d’en haut<br />
et sous tous ses angles, le bungalow que je compte louer<br />
bon marché, peut-être cet hiver en Sicile.<br />
Ce n’est <strong>pas</strong> un spot publicitaire pour Google, mais<br />
une question : comment est-ce possible ? Comment toutes<br />
ces informations et outils peuvent-ils être <strong>gratuit</strong>s ? Car<br />
leur production coûte des sommes exorbitantes. Pas<br />
moins de 60 000 personnes travaillent chez Google. Elles<br />
exploitent 900 000 serveurs qui consomment autant<br />
d’énergie qu’une mégalopole. L’Internet est le troisième<br />
dévoreur d’énergie après la Chine et les États-Unis. Et bien<br />
que Google ne débite jamais ma carte de crédit, l’entreprise<br />
suit une courbe exponentielle. L’année dernière, elle<br />
réalisait 110 milliards de dollars de chiffre d’affaires (le<br />
budget de l’État suisse est de 70 milliards env.) et 15 milliards<br />
de bénéfice. Google/Alphabet s’est fixé pour objectif<br />
« d’organiser l’information mondiale ». <strong>Le</strong> groupe pourrait<br />
bientôt valoir 1 billion de dollars en Bourse. <strong>Le</strong>s<br />
multinationales de la chimie et du pétrole, et même les<br />
banques, sont des poids plumes en comparaison.<br />
Qu’arrive-t-il au capitalisme ? Rien n’est <strong>gratuit</strong> dans<br />
ce système économique et social. Tout se marchande, tout<br />
se vend, tout a son prix. Même les émotions et les sentiments.<br />
La destruction de l’environnement se prête elle<br />
aussi à la spéculation (certificats CO 2<br />
) et même les pannes<br />
de système sont négociables sous forme de « produits<br />
structurés ». La financiarisation de tout et n’importe quoi<br />
est devenue la quintessence du capitalisme.<br />
Nous nous en doutons : rien n’est <strong>gratuit</strong>. C’est tout au<br />
plus une illusion d’optique. <strong>Le</strong>s propriétaires de Google<br />
ne cèdent jamais des connaissances et du savoir-faire précieux<br />
sans rétribution. Pourquoi Facebook ne ferait-il <strong>pas</strong><br />
circuler des milliards de communiqués, photos, films et<br />
news sans en retirer lui aussi de juteux profits ? Au premier<br />
trimestre, le groupe dégageait <strong>pas</strong> moins de 5,5 milliards<br />
de dollars de bénéfices.<br />
Et comment comprendre Twitter, le réseau social des<br />
brefs messages <strong>gratuit</strong>s ? <strong>Le</strong> président américain Donald<br />
Trump, suivi par 13 millions de personnes, utilise son<br />
compte Twitter pour faire de la politique mondiale, mais<br />
l’entreprise ne gagnera probablement jamais un seul<br />
cent. En fait, elle est en faillite constante. Ses actionnaires<br />
ne s’en plaignent toutefois <strong>pas</strong>, car ils sont devenus très<br />
riches : Twitter pèse actuellement quelque 33 milliards de<br />
dollars en Bourse.<br />
Absurde ? Non, nous avons une nouvelle logique : l’économie<br />
basée sur l’Internet fonctionne manifestement différemment<br />
des industries traditionnelles. En tant que<br />
syndicalistes, nous devons la comprendre. Aujourd’hui,<br />
c’est bien connu, quand quelque chose est <strong>gratuit</strong>, tu es la<br />
marchandise.<br />
2,2 milliards de personnes travaillent pour Facebook<br />
<strong>Le</strong> chercheur canadien Dallas Smythe l’écrivait déjà au<br />
siècle dernier : « <strong>Le</strong>s médias utilisent le public comme une<br />
marchandise. » Surtout, les médias sociaux. Pour cette<br />
économie, les données que nous dévoilons en continu sur<br />
Facebook sont de la matière première. <strong>Le</strong>s algorithmes,<br />
leurs moyens de production. Et l’information, leur marchandise.<br />
Il n’y a donc rien de <strong>gratuit</strong>. Nous payons déjà en fournissant<br />
aux entreprises leur matière première. Elles ne<br />
doivent <strong>pas</strong> l’extraire péniblement, comme des métaux.<br />
Il leur suffit de recueillir nos données sur le Web. Dans le<br />
jargon de la branche, on parle aussi d’exploration de<br />
données (« data mining »).<br />
<strong>Le</strong>s algorithmes trient des montagnes de données, de<br />
sorte à rendre utilisables d’un point de vue économique<br />
nos habitudes et préférences, notre revenu, notre consommation<br />
et notre solvabilité, mais aussi nos maladies et névroses<br />
secrètes. Google ne vend <strong>pas</strong> seulement des emplacements<br />
publicitaires sur des centaines de milliers de<br />
pages Internet. Cet « or » est aussi marchandé à prix fort.<br />
Sur toute la planète. C’est pourquoi Facebook a investi en<br />
2014 20 milliards de dollars dans le service de messagerie<br />
WhatsApp, particulièrement apprécié par les jeunes.<br />
Pour certains, cela peut paraître anodin. « Ce n’est que<br />
de la publicité ciblée », déclare un collègue, toutefois irrité<br />
qu’Amazon connaisse les achats que nous effectuerons<br />
dans les heures à venir ou ces prochains jours, bien avant<br />
de le savoir nous-mêmes.<br />
Cela évoque encore aujourd’hui le bon vieux monde<br />
dominé par le capitalisme et les marchandises. Car<br />
l’argent destiné à la publicité provient de la production<br />
classique, donc de la plus-value soustraite par les actionnaires<br />
au travail de leurs employés.<br />
Nous payons<br />
les services<br />
<strong>gratuit</strong>s en<br />
diffusant<br />
nos données<br />
sur la Toile.
Toutefois, les stratèges des géants du Web (GAFA =<br />
Google, Amazon, Facebook, Apple) et Cie nourrissent une<br />
ambition plus grande. Ils ont pour objectif d’influencer le<br />
comportement des internautes. Au niveau de la consommation<br />
et bien au-delà. Ils sont du reste sur la bonne voie,<br />
comme l’a révélé le scandale autour de Facebook-Cambridge<br />
Analytica et de l’élection de Trump. <strong>Le</strong>s données<br />
Facebook préparées à cette fin pour les faiseurs d’opinion<br />
n’ont <strong>pas</strong> atterri par hasard entre leurs mains. Ce n’était<br />
<strong>pas</strong> une fuite. Récemment, des fenêtres de propagande ciblées<br />
(dark advertising) sont apparues brièvement sur des<br />
pages Internet ordinaires à l’occasion de diverses campagnes<br />
électorales (la dernière fois en Irlande). Il faut être<br />
bien naïfs pour diffuser nos données aux quatre coins de<br />
la Toile et croire à la promesse de <strong>gratuit</strong>é des entreprises,<br />
alors qu’elles nous les dérobent.<br />
Pourtant, nous en faisons encore bien plus. Nous<br />
payons pour des services soi-disant <strong>gratuit</strong>s en travaillant<br />
assidûment pour les GAFA et Cie. Jour après jour, sans salaire<br />
et souvent à notre insu. Nous produisons les contenus<br />
de Facebook. Peu importe qu’ils soient pertinents ou<br />
<strong>pas</strong>. L’essentiel, c’est de fournir du matériel. De produire<br />
de la valeur. Dans le cadre de processus infinis de retour<br />
d’information, nous entraînons les algorithmes et leur intelligence<br />
artificielle. Nous apprenons à parler aux assistants<br />
vocaux des call-centers. Quiconque <strong>pas</strong>se ses commandes<br />
auprès de commerçants en ligne s’occupe à la fois<br />
de la comptabilité, de la gestion des marchandises, du<br />
design, des tâches de marketing, etc. Nous aidons les<br />
machines à fonctionner.<br />
Nous prolongeons la chaîne de valeur des entreprises<br />
Comme l’explique l’analyste allemand Timo Daum dans<br />
son livre Das Kapital sind wir (le capital c’est nous), nous<br />
sommes « enrôlés au service des producteurs de soft wares<br />
et prolongeons leur chaîne de valeur ». On reconnaît ici à<br />
ses contours la nouvelle logique de l’économie numérique.<br />
Partager, ce serait<br />
bien. Mais l’économie<br />
du partage fait le<br />
contraire.<br />
Si vous prêtez attention à la façon dont vous utilisez<br />
votre temps libre, vous aurez remarqué que surfer sur<br />
Internet nous en vole de plus en plus. Pourtant, nous<br />
sommes nombreux à nous consacrer au « clickworking »,<br />
car les géants du Web (GAFA) sont parvenus à insuffler un<br />
nouvel esprit dans les réseaux sociaux, qui nous donne<br />
une illusion de liberté. « Collecte des instants, <strong>pas</strong> des objets<br />
» prône un fameux slogan publicitaire pour les « millenials<br />
» de ce monde. La propriété est <strong>pas</strong>sée de mode, le<br />
partage est en vogue. L’essentiel, c’est d’être connecté.<br />
« Sharing is caring » (partager, c’est s’entraider), tel est le<br />
nouveau credo des divisions de marketing.<br />
Très bien. Pourquoi ne devrions-nous <strong>pas</strong> voyager par<br />
covoiturage ? Ou mettre notre appartement à disposition<br />
pendant nos vacances ? Ou aider notre voisin à réparer<br />
une canalisation rompue ? <strong>Le</strong>s ressources sont ainsi<br />
mieux utilisées. De plus, le partage permet de se soustraire<br />
à la logique de l’exploitation, où tout est payant.<br />
Rien à redire.<br />
Seule ombre au tableau : la réalité brutale. <strong>Le</strong>s plateformes<br />
d’utilité publique sont peu à peu évincées. Airbnb,<br />
Ebay et d’autres entreprises émergentes spéculent sur<br />
notre volonté de partage pour réaliser des chiffres d’affaires<br />
astronomiques. Elles ont commercialisé l’utilité<br />
publique et l’ont transformée en capital. <strong>Le</strong>s juges californiens<br />
– les premiers à avoir réglementé rigoureusement<br />
Uber – ont non seulement condamné l’exploitation
12<br />
Dossier<br />
abusive de la belle idée du carsharing, mais ils ont aussi<br />
interrogé la légitimité de l’ubérisation en tant que modèle<br />
économique.<br />
Car le partage des transports bon marché proposés<br />
<strong>gratuit</strong>ement sur une plateforme (comme c’est cool !) dissimule<br />
une fracture sociale : la valeur du travail provient<br />
de travailleurs précaires sans sécurité sociale. Ils travaillent<br />
sur appel, ont des horaires illimités et ne sont <strong>pas</strong><br />
assurés. Ils doivent cumuler plusieurs emplois pour assurer<br />
leur subsistance et travaillent souvent aussi comme<br />
coursiers, plombiers ou multiprestataires.<br />
Voilà le cœur du modèle de la nouvelle économie que<br />
simulent le « playlabour », les « microentreprises », la planification<br />
libre du temps et d’autres styles de vie. Presque<br />
tous les domaines sont ubérisés. La plupart des entreprises<br />
recourent aux appels d’offres des plateformes pour<br />
se faire livrer leurs idées de production, pièces, logiciels,<br />
plans de construction, design, etc. de n’importe où au<br />
monde. Pourvu que ce soit bon marché.<br />
<strong>Le</strong> monde, un terrain d’exploration pour les entreprises<br />
Cette transformation radicale n’est <strong>pas</strong> dictée par la technique,<br />
mais suit des intérêts économiques. Elle pousse à<br />
l’extrême la répartition du travail et comprime son prix<br />
(seul le travail crée de la valeur). Elle fait disparaître les<br />
frontières temporelles du travail et permet de diminuer<br />
les coûts de production via l’externalisation et le télétravail.<br />
Elle abolit la sécurité sociale et occasionne encore<br />
davantage de travail forcé à bas prix. Et elle facilite la<br />
concentration du capital. Uber asphyxie le commerce des<br />
taxis jusqu’aux confins de la planète et s’attaque partout<br />
aux secteurs de la location de voitures, du transport et de<br />
la logistique. Amazon propose presque tout ce qui peut se<br />
vendre et tue ainsi le commerce de détail. Facebook,<br />
Ni Facebook ni Google<br />
ne sont vraiment<br />
<strong>gratuit</strong>s. Seul notre<br />
travail doit être <strong>gratuit</strong><br />
ou le meilleur marché<br />
possible.<br />
Google et quelques autres grignotent des parts croissantes<br />
de la production d’actualités, de savoir et culturelle.<br />
<strong>Le</strong>s grandes entreprises rachètent et transforment<br />
de plus en plus d’espaces et de services publics en sites<br />
commerciaux privés.<br />
Dans leurs interviews et leurs écrits, les dirigeants des<br />
GAFA et le fondateur de Facebook Mark Zuckerberg ne<br />
s’en cachent <strong>pas</strong>. Ils considèrent qu’ils poursuivent la<br />
révolution néolibérale des années quatre-vingt, mais de<br />
manière plus radicale.<br />
Ce qu’ils nous offrent n’est <strong>pas</strong> <strong>gratuit</strong>. C’est notre travail<br />
qui doit être <strong>gratuit</strong> ou le meilleur marché possible.<br />
Timo Daum : Das Kapital sind wir. En savoir plus : edition-nautilus.de
Dossier<br />
La destruction de la presse par le<br />
<strong>gratuit</strong>. Une agonie sans fin ?<br />
13<br />
<strong>Le</strong> Matin, qui cesse de paraître dans sa version<br />
papier le 22 juillet prochain, est la dernière<br />
victime. En 20 ans, le tirage des journaux<br />
payants a diminué de 1,15 million d’unités en<br />
Suisse.<br />
Texte : <strong>syndicom</strong><br />
Photo : Alexander Egger<br />
La situation actuelle doit beaucoup au choix des éditeurs<br />
de lancer et maintenir des quotidiens <strong>gratuit</strong>s, parmi lesquels<br />
20 Minutes qui, avec plus de 2,7 millions de lecteurs<br />
en allemand, français et italien, est de loin le plus lu des<br />
journaux suisses. Plus d’un million de lecteurs en<br />
consultent la version en ligne. Il faut y ajouter, en Suisse<br />
alémanique, les quelque 534 000 lecteurs du Blick am<br />
Abend, qui compte encore 119 000 lecteurs sur le Web.<br />
Résultat : la génération actuelle ne voit plus l’intérêt de<br />
payer plus de 500 francs par an un quotidien alors que de<br />
l’information est offerte <strong>gratuit</strong>ement (et peu importe<br />
qu’il s’agisse de pages photos des barbecues réalisés par<br />
ses lecteurs). <strong>Le</strong> <strong>gratuit</strong>, « c’est la platitude absolue. La<br />
futilité érigée en système », relève le célèbre créateur de<br />
journaux romands Jacques Pilet sur le site d’information<br />
Bon pour la tête. « Pas d’enquêtes, <strong>pas</strong> d’idées, <strong>pas</strong> d’émotions<br />
fortes non plus, ni coups de gueule ni coups de cœur.<br />
Un magma de nouvelles d’agences et de potins, un choix<br />
de faits divers minuscules et <strong>pas</strong>teurisés. À noter : les trois<br />
quarts des infos ‹ people › sont nord-américaines, fournies<br />
précuites par les agences », condamne-t-il.<br />
Seuls 12 % paient en ligne<br />
Mais le lecteur en a pris l’habitude. C’est d’autant plus vrai<br />
que la Suisse se caractérise par le bas taux de personnes<br />
payant pour accéder aux nouvelles en ligne : seules 12 % le<br />
font, ce qui est plus bas que dans nombre des 36 pays ayant<br />
participé au Reuters Institute Digital News Report 2018, relève<br />
Linards Udris du Forschungsinstitut Öffentlichkeit<br />
und Gesellschaft de l’Université de Zurich, l’un des auteurs<br />
du rapport sur notre pays. « La Suisse se distingue en<br />
mettant les <strong>gratuit</strong>s à la première place de l’audience de<br />
presse, alors qu’ailleurs dans le monde, certains ont disparu.<br />
Plus de 50 % des sondés consultent chaque semaine les<br />
éditions de 20 Minutes », constate ce chercheur.<br />
La presse payante ne peut régater avec une telle audience.<br />
<strong>Le</strong> Matin touchait 218 000 lecteurs, mais enregistrait,<br />
prétend Tamedia, l’année dernière, un résultat<br />
négatif de 6,3 millions de francs, soit près de 34 millions<br />
en dix ans. Disparu début 2017, l’Hebdo accumulait aussi<br />
les pertes depuis 15 ans, selon son éditeur Ringier Axel<br />
Springer Suisse, entraînant la suppression de 37 postes<br />
dans une restructuration qui touchait aussi la rédaction<br />
du Temps. Et même les journaux de qualité souffrent,<br />
comme la NZZ qui a perdu près de 30 000 lecteurs sur papier<br />
en un an, en gagnant 16 000 lecteurs en ligne.<br />
<strong>Le</strong> lecteur n’est <strong>pas</strong> seul à blâmer. <strong>Le</strong>s éditeurs ont<br />
affaibli la qualité des journaux, en diminuant le nombre<br />
de correspondants à l’étranger et de rédacteurs spécialisés,<br />
en coupant dans les budgets rédactionnels au profit<br />
du marketing, en se retirant de la CCT pour pouvoir baisser<br />
les salaires, en concentrant et uniformisant les rédactions,<br />
et donc les sujets traités.<br />
<strong>Le</strong>s <strong>gratuit</strong>s sont en concurrence avec les titres payants sur<br />
le marché de la publicité presse, qui n’atteint plus actuellement<br />
que 1,117 milliard de francs, soit 11,7 % de moins<br />
qu’en 2016. Parallèlement, la publicité en ligne explose et<br />
ses recettes atteignent désormais 2,1 milliards, en hausse<br />
de 5,9 %, sans compter la publicité affichée par les moteurs<br />
de recherche.<br />
La COMCO agit enfin<br />
La concentration des titres entre Tamedia et Ringier, qui<br />
représentent 80 % du tirage en Suisse, et le fait que le<br />
premier constituait le plus gros actionnaire de l’Agence<br />
<strong>Le</strong> modèle choisi<br />
exigera des lecteurs<br />
prêts à payer pour un<br />
contenu original.
14<br />
Dossier<br />
télégraphique suisse (ATS) ont pesé lourd sur les exigences<br />
de rentabilité fixées à l’agence par son actionnaire<br />
principal APA (depuis la fusion avec Keystone). Avec<br />
36 postes supprimés jusqu’en 2019, l’ATS est une autre<br />
victime de la crise de ce début d’année. Il est d’ailleurs<br />
étonnant que cette concentration, accrue avec la mainmise<br />
de Tamedia sur la Basler Zeitung, tout comme l’acquisition,<br />
par Christoph Blocher, de cinq titres supplémentaires<br />
portant à 30 le nombre de ses journaux <strong>gratuit</strong>s,<br />
n’ait <strong>pas</strong> plus ému la Commission de la concurrence<br />
(COMCO). Ce n’est que début mai qu’elle a consenti un<br />
examen approfondi d’une éventuelle position dominante<br />
dans le cas du rachat de Goldbach (médias électroniques<br />
et espaces publicitaires) par Tamedia.<br />
Journalistes syndiqués en diminution<br />
<strong>Le</strong> nombre de journalistes syndiqués prêts à se battre face<br />
à la disparition de tant de places de travail est malheureusement,<br />
lui aussi, en diminution. Cette évolution, relève<br />
Stephanie Vonarburg, responsable du secteur à <strong>syndicom</strong>,<br />
« est due à la diminution du nombre de personnes<br />
exerçant ce métier et au taux de syndicalisation qui s’est<br />
réduit de 70 % à environ 50 % en 20 ans. Mais la branche<br />
commence à s’engager dans les luttes syndicales, comme<br />
l’ont montré la grève de l’ATS et le mouvement dans les rédactions<br />
de Tamedia », relève-t-elle.<br />
La réduction du nombre de journaux imprimés entraîne<br />
aussi une diminution des emplois dans le secteur<br />
de l’imprimerie, qui a perdu en 20 ans – de 1995 à 2015<br />
selon l’Office fédéral de la statistique – les deux tiers des<br />
emplois de la branche (de 34 987 en 1995 à 13 097 en 2015).<br />
<strong>Le</strong> nombre d’imprimeries en Suisse, qui était encore de<br />
2537 en 1995, n’était plus que de 1060 en 2015.<br />
Dès le 23 juillet prochain, <strong>Le</strong> Matin deviendra donc le<br />
premier quotidien suisse entièrement numérique. Pourra-t-il<br />
proposer un contenu de qualité avec une rédaction<br />
limitée à 15 personnes, même si elle collaborera avec le<br />
Sport-Center et le Newsexpress de Tamedia, ainsi que le<br />
réseau de 20 minutes ? « En général, une rédaction réduite<br />
pose problème s’agissant de médias imprimés, reconnaît<br />
Linards Udris. La rédaction de 20 Minutes est plus petite<br />
que celle de 20 Minuten, et livre moins d’analyses ou de<br />
textes originaux lors des votations. Sa qualité est donc<br />
plus faible. Il en va différemment des radio et TV régionales,<br />
où Léman bleu, par exemple, bien que plus petit,<br />
fournit un meilleur travail que Tele M1. L’important est la<br />
stratégie éditoriale et, axé sur la presse de boulevard, <strong>Le</strong><br />
Matin ne peut guère échanger de contenus qu’avec 20 Minutes<br />
», juge-t-il. Si <strong>Le</strong> Matin renonce à son point fort, les<br />
informations sportives exclusives, en reprenant des dépêches,<br />
on peut douter de sa survie.<br />
Sites des journaux moins recherchés<br />
En Suisse, l’étude Annales Qualité des médias 2017 du fög<br />
relève que quelque 40 % des lecteurs de 18 à 24 ans s’informent<br />
en recherchant un thème sur les moteurs de recherche<br />
ou en recevant l’information par les médias sociaux,<br />
les sites des journaux étant toujours moins<br />
directement recherchés. La majorité des revenus publicitaires<br />
vont aux intermédiaires technologiques mondiaux,<br />
affaiblissant le financement déjà précaire des médias<br />
suisses. <strong>Le</strong> financement de la presse est à réinventer.<br />
<strong>Le</strong> projet de loi<br />
présenté ne résout<br />
<strong>pas</strong> les difficultés de<br />
la presse écrite<br />
A Montréal, La Presse, titre numérique, devenu en mai un<br />
organisme à but non lucratif, sollicite l’aide du gouvernement,<br />
de grandes entreprises, de fondations et de particuliers.<br />
En Suisse, le Conseil fédéral prévoit de protéger la<br />
presse dans le cadre de la nouvelle loi sur les médias, en<br />
versant une part de la redevance aux médias en ligne remplissant<br />
un mandat de prestations. Mais le projet présenté,<br />
qui prévoit une partie de la redevance aux offres audio<br />
et vidéo en ligne, une autre pour les agences de presse, ne<br />
compense <strong>pas</strong> les ressources perdues par la presse écrite.<br />
Quel que soit le modèle choisi, il exigera des lecteurs prêts<br />
à payer pour obtenir un contenu original, des enquêtes<br />
qui se font sur le terrain, un travail différent de ce que<br />
fournissent les agences et les rédactions regroupées en<br />
« pools ». Car qu’on se le dise une fois pour toutes : les bons<br />
articles ne sont jamais <strong>gratuit</strong>s.<br />
https://bit.ly/2t9aene<br />
Photos<br />
La photo en couverture a été prise à Derborence par le photographe<br />
bernois Alexander Egger. Il a aussi pris, à Berne, les<br />
photos en pages 8 à 14 et la petite photo qui figure sous le<br />
sommaire. Il a imaginé un reportage sur le thème « vie et<br />
mort d’un journal <strong>gratuit</strong> », une presse distribuée largement,<br />
que l’on jette aussitôt lue et qui fait partie des déchets qui<br />
jonchent l’espace public.<br />
Alexander Egger mène une recherche intéressante sur le<br />
mouvement, le reflet et le travail de la couleur dans ses<br />
photos de la nature. Pour en savoir plus, rendezvous sur<br />
son site à l’adresse https://www.alexanderegger.ch
15<br />
Gratuit, c’est cher<br />
Chiffre d’affaires 2017* en milliards de dollars<br />
2,5 41<br />
110<br />
Sources: données des entreprises * Chiffre d’affaires Twitter 2016<br />
Gratuit, c’est spéculatif<br />
Perte en milliards de dollars<br />
–2,53<br />
Twitter<br />
(2016)<br />
Valeur boursière<br />
33 milliards de dollars<br />
–3,44<br />
Snapchat<br />
(2017)<br />
Valeur boursière<br />
27 milliards de dollars<br />
Valeurs marchandes en milliards de dollars<br />
Google<br />
Facebook<br />
ExxonMobil<br />
la multinationale pétrolière<br />
la plus chère<br />
JP Morgan Chase<br />
la banque la plus chère<br />
340<br />
314<br />
528<br />
739<br />
Sources: données des entreprises, bourses<br />
Gratuit, c’est polluant<br />
<strong>Le</strong> web a utilisé<br />
près de 8% de<br />
l’électricité mondiale<br />
en 2017.<br />
1,5 x<br />
L’industrie Internet émet<br />
aujourd’hui une fois et<br />
demi plus de gaz à effet<br />
de serre que le trafic<br />
aérien mondial.<br />
Gratuit, c‘est toi la marchandise<br />
Etat 2017, en dollars<br />
Chaque membre de<br />
LinkedIn vaut 550 dollars<br />
Chaque membre de<br />
Facebook vaut 280 dollars<br />
550<br />
280<br />
Sources: Planetoscope, Greenpeace France, Climatecare<br />
Source: calcul effectué à partir des données d’entreprises<br />
Online, c’est juteux<br />
Recettes publicitaires nettes en Suisse en 2013 et 2017<br />
En millions de francs<br />
Chiffre d’affaires<br />
de la publicité<br />
Presse<br />
TV<br />
Radio<br />
Online<br />
749<br />
774<br />
157<br />
151<br />
1117<br />
845<br />
1615<br />
2100<br />
Source: Fondation statistique suisse en publicité<br />
Imprimeries<br />
– 31%<br />
4157<br />
+149%<br />
6839<br />
Disparition d’emplois dans la branche de l’imprimerie<br />
Nombre d’emplois et d’imprimeries en Suisse<br />
35000<br />
30000<br />
25000<br />
20000<br />
15000<br />
3500<br />
3000<br />
2500<br />
2000<br />
1500<br />
Trucs de croissance de l’économie numérique<br />
Peu de personnes badineraient sur Facebook si elles devaient<br />
payer pour cela. D’autant qu’elles diffusent déjà<br />
généreusement leurs données et créent les contenus de<br />
Facebook avec leurs entrées, clips et photos. La première<br />
règle de l’économie numérique est simple : pour s’imposer,<br />
il faut disposer d’une masse. <strong>Le</strong> levier pour se l’approprier<br />
est <strong>gratuit</strong>. Dans le cas de Facebook, cette masse est<br />
constituée aujourd’hui de 2,2 milliards d’usagers. Mais<br />
cette règle vaut pour toutes les entreprises Internet similaires.<br />
Facebook et Cie sont tout sauf <strong>gratuit</strong>s. Nous les payons<br />
avec nos données et contenus (c.-à-d. avec notre<br />
clickwork). Ce qu’il en advient, nous l’ignorons. Nous stockons<br />
nos données dans une boîte noire. <strong>Le</strong> manque de<br />
transparence est la deuxième règle d’or des sociétés<br />
numériques. Notre vie est régie et organisée peu à peu via<br />
le big data par leurs logarithmes, mais nous ignorons<br />
comment ils sont conçus et ce qu’ils manigancent. Si nous<br />
voulons apprivoiser les géants du Web avant qu’ils ne nous<br />
dominent, il faut comprendre trois choses essentielles :<br />
les logarithmes doivent être transparents. <strong>Le</strong> contrôle des<br />
données doit être restitué aux usagers. Et les métadonnées<br />
anonymes doivent être mises à disposition du grand<br />
public.<br />
10000<br />
Employés<br />
5000<br />
0<br />
1996<br />
1998<br />
2000<br />
2002<br />
Source: OFS, recensement des entreprises<br />
2004<br />
2006<br />
2008<br />
2010<br />
2012<br />
2014<br />
1000<br />
500<br />
0<br />
La troisième règle élémentaire de l’économie numérique<br />
est l’éviction et la destruction. <strong>Le</strong>s entreprises Internet<br />
créent elles aussi de la valeur, mais dans les faits, il en est<br />
tout autrement. Elles redistribuent la valeur déjà existante<br />
en leur faveur. Pour ce faire, elles font éclater les<br />
structures économiques établies et brisent les acquis<br />
sociaux arrachés de haute lutte.
16<br />
Au cœur de<br />
nos métiers<br />
L’union fait la force –<br />
aussi entre rédactions !<br />
Tamedia force sans merci la concentration<br />
des médias. Son attitude envers<br />
les employé·e·s est aussi impitoyable.<br />
Ne nous laissons <strong>pas</strong> berner<br />
par ses relations publiques. Pour<br />
contourner juridiquement la réalité<br />
des licenciements collectifs, Tamedia<br />
fait miroiter des indemnités de départ<br />
aux employés, trop peu nombreux à<br />
démissionner de leur plein gré. Éviter<br />
un plan social à tout prix ! Ce processus<br />
est à la limite des pratiques de<br />
bonne conduite. Mais les limites ne<br />
posent aucun problème à Tamedia.<br />
Sa stratégie de concentration médiatique<br />
se joue des frontières. Elle<br />
s’accommode des pertes d’emploi, de<br />
l’affaiblissement de la qualité journalis<br />
tique et de l’uniformisation des<br />
médias. D’un point de vue syndical, il<br />
n’existe qu’une réponse possible : la<br />
résistance dans les rédactions doit<br />
s’organiser audelà de leurs frontières.<br />
Toutes les rédactions Tamedia mènent<br />
le même combat pour sauvegarder des<br />
médias de qualité et maintenir de<br />
bonnes conditions de travail. <strong>Le</strong>s rédactions<br />
doivent être solidaires les<br />
unes avec les autres face aux éditeurs<br />
qui cherchent à diviser pour mieux<br />
régner.<br />
Christian Capacoel<br />
La résistance doit aussi permettre aux rédactions de s’unir, comme ce fut le cas en 2014 à Lausanne.<br />
(© Yves Sancey) https://bit.ly/2I3bbSp<br />
Service public<br />
numérique<br />
<strong>Le</strong> nouveau règlement général sur la<br />
protection des données (RGPD) de<br />
l’Union européenne est en vigueur depuis<br />
le 25 mai 2018. Seules les données<br />
pour lesquelles le consentement<br />
des personnes concernées a été obtenu<br />
pourront être utilisées à l’avenir,<br />
comme le prévoit la Charte des droits<br />
fondamentaux de l’UE. Par sa portée<br />
extraterritoriale, le RGPD peut aussi<br />
s’appliquer à des entreprises et autorités<br />
en Suisse.<br />
À l’avenir, les entreprises devront<br />
garantir le respect de ses principes, en<br />
particulier la limitation de la finalité<br />
et de la légitimité du traitement des<br />
données, mais aussi leur minimisation.<br />
Sinon, elles risquent de devoir<br />
payer des amendes pouvant s’élever<br />
jusqu’à 20 millions d’euros.<br />
<strong>Le</strong> scandale de Facebook, qui a mis<br />
la main sur les données de plus de<br />
100 millions de personnes à leur insu,<br />
a inquiété le public. Pour que la transformation<br />
numérique rencontre l’acceptation<br />
de la société, il est essentiel<br />
d’empêcher l’utilisation abusive des<br />
données. <strong>Le</strong> développement du service<br />
public numérique devrait aussi<br />
prendre en considération cet aspect.<br />
Giorgio Pardini, responsable du secteur TIC<br />
et membre du comité directeur
Si l’Eglise agit comme une holding en faisant endosser<br />
à l’Etat les coûts de la faillite, ce dernier doit venir à l’aide<br />
17<br />
<strong>Le</strong>s curieux contrats des exemployés<br />
du Giornale del Popolo<br />
La mort du Giornale del Popolo était annoncée, mais il reste<br />
des zones d’ombre pour la trentaine d’employés au chômage.<br />
<strong>Le</strong> Giornale del Popolo (GdP) est enterré.<br />
<strong>Le</strong> 5 juin, la Préture de Lugano a<br />
officialisé la faillite de la Nouvelle<br />
Société du Giornale del Popolo SA, détenue<br />
par la Curie de Lugano.<br />
Après 92 ans d’existence s’achève<br />
ainsi l’histoire du dernier quotidien<br />
catholique suisse. La crise de la presse<br />
et de l’information en général n’est<br />
certainement <strong>pas</strong> une nouveauté (il<br />
suffit de lire ce qui se <strong>pas</strong>se en Suisse<br />
romande à la page 13).<br />
L’écroulement du marché publicitaire,<br />
la diminution des abonnements<br />
et l’avidité des éditeurs ont entraîné la<br />
disparition de plusieurs titres. Au<br />
Tessin, les dimensions du marché<br />
(360 000 habitants) ne justifient <strong>pas</strong> la<br />
présence de trois quotidiens. Si le sort<br />
du GdP semblait une mort annoncée,<br />
de nombreuses zones d’ombre planent<br />
encore sur l’affaire.<br />
Temps difficiles<br />
<strong>Le</strong> 17 mai, la Curie annonçait la fermeture<br />
du GdP dans un communiqué :<br />
« Suite aux aléas de la régie d’annonces<br />
Publicitas SA, la situation du GdP, soutenu<br />
dans une large mesure par les<br />
recettes publicitaires récoltées par ladite<br />
Publicitas et qui viennent désormais<br />
à manquer, a placé l’éditeur face<br />
à la nécessité de déposer le bilan<br />
auprès de la Préture de Lugano.<br />
Ladite mesure implique la cession de<br />
la publication du quotidien à partir du<br />
samedi 19 mai 2018 ». La décision a<br />
surgi brusquement : on s’attendait à<br />
l’annonce d’une restructuration d’ici<br />
la fin de l’année (en calculant aussi<br />
que le budget des premiers mois de<br />
2018 devrait être garanti par les 7000<br />
abonnements). Cela aurait permis de<br />
trouver des solutions pour le futur<br />
(format tabloïd, périodicité hebdomadaire,<br />
recherche d’investisseurs) et<br />
pour le personnel (plan social).<br />
Modalités à l’étude<br />
Depuis des années, le journal de la<br />
Curie réalisait des pertes. La fin de la<br />
collaboration avec le Corriere del Ticino<br />
avait soulevé de nombreuses questions.<br />
En juillet 2017 déjà, <strong>syndicom</strong><br />
avait exprimé ses inquiétudes et demandé<br />
un projet éditorial à long terme<br />
qui permette de sauvegarder les emplois.<br />
La faillite de Publicitas n’a <strong>pas</strong> seulement<br />
été la goutte d’eau qui a fait déborder<br />
le vase (de dettes), mais aussi<br />
une « excuse » pour réduire les responsabilités<br />
de la Curie envers le personnel.<br />
« En ces moments difficiles –<br />
continuait le communiqué – l’évêque<br />
désire témoigner sa profonde gratitude<br />
à tous les collaborateurs et collaboratrices<br />
en situation difficile qui<br />
ont fait preuve d’un engagement indéfectible<br />
et consenti de gros efforts ces<br />
dernières années. Des modalités sont<br />
à l’étude pour atténuer les conséquences<br />
de cette fermeture forcée. »<br />
Néanmoins, en déposant le bilan<br />
auprès de la Préture, la Curie a de facto<br />
empêché l’instauration de tout plan<br />
social. On s’attendait à mieux de la<br />
part d’un employeur qui devrait, par sa<br />
nature, être « responsable », « éthique »<br />
et « social ».<br />
Ouverture d’un fond de solidarité<br />
Il est toutefois certain que si l’Église,<br />
agissant comme une holding, déclare<br />
la faillite d’une de ses sociétés et en<br />
fait endosser les coûts à l’État, alors ce<br />
dernier devrait venir à la rescousse.<br />
Il est exclu de rendre la collectivité<br />
responsable des choix de la direction<br />
(qui « au nom de la crise » réduit les effectifs<br />
de personnel). Il faudrait des<br />
lois pour que les entreprises assument<br />
leurs responsabilités. Dans le cas du<br />
Giornale del Popolo, un fond de solidarité<br />
a été ouvert pour la trentaine d’employés<br />
au chômage depuis le 1 er juin.<br />
Situations contractuelles peu claires<br />
<strong>Le</strong>s calculs effectués pour définir la répartition<br />
de ce fond ont révélé des situations<br />
contractuelles peu claires<br />
(disparités de traitement ; retraités<br />
avec fiche de paie mais avec des salaires<br />
de misère ; rétributions bien inférieures<br />
au minimum de l’ancien<br />
CCT de 2004) nécessitant plus que jamais<br />
un contrat collectif, qui manque<br />
depuis 14 ans dans le secteur.<br />
Et demain ?<br />
Une CCT pour la presse n’aurait peutêtre<br />
<strong>pas</strong> permis de sauver le GdP, mais<br />
une réglementation aurait limité les<br />
disparités et certainement amélioré le<br />
dialogue entre la direction et l’éditeur.<br />
Et il aurait eu le mérite de générer une<br />
culture syndicale au sein de l’entreprise.<br />
<strong>syndicom</strong> a demandé à l’Office des<br />
poursuites et des faillites de prendre<br />
en considération la banque de données<br />
des 7000 abonnés dans la masse<br />
de la faillite. Depuis peu, deux anciens<br />
rédacteurs du GdP désormais à la retraite<br />
ont annoncé la naissance d’un<br />
journal en ligne. <strong>Le</strong> 20 juin dernier,<br />
une imprimerie a confirmé sa disponibilité<br />
à éditer un hebdomadaire catholique.<br />
En revanche, la Curie veut réfléchir<br />
à comment faire entendre sa voix.<br />
Aussi en se <strong>pas</strong>sant d’une revue papier.<br />
Giovanni Valerio<br />
La rédaction telle qu’elle figurait dans l’ultime édition en ligne. (© Ruben Rossello)<br />
https://bit.ly/2JNPVC0
18<br />
<strong>Le</strong> monde<br />
du travail<br />
« Il faut mesurer la prospérité sans oublier la contribution<br />
des femmes. » Margrit V. Zinggeler<br />
<strong>Le</strong>s services <strong>gratuit</strong>s,<br />
prétexte aux<br />
externalisations<br />
<strong>Le</strong>s services <strong>gratuit</strong>s sont la porte<br />
d’entrée d’autres services payants. Une<br />
fois la demande et une accoutumance<br />
créées, on peut/doit recourir à des services<br />
supplémentaires payants pour<br />
augmenter les marges de bénéfice. La<br />
structure logistique est donc toujours<br />
davantage mise sous pression. En tant<br />
que syndicat, nous nous intéressons<br />
depuis longtemps déjà aux conséquences<br />
des prestations <strong>gratuit</strong>es sur<br />
les conditions de travail. Dans les envois<br />
<strong>gratuit</strong>s aux clients (p. ex. modèle<br />
Zalando), la logistique structurelle des<br />
retours de marchandises (des millions<br />
de colis en Suisse) est un phénomène<br />
qui doit rester sous surveillance, car il<br />
nécessite beaucoup de travail manuel<br />
dont les coûts sont très élevés. Cette<br />
logistique doit donc être réglementée.<br />
La pression exercée par les services<br />
<strong>gratuit</strong>s sur les marges de bénéfice est<br />
le moteur de l’externalisation de services<br />
et du transfert de mandats à des<br />
soustraitants ou soussoustraitants.<br />
<strong>Le</strong>s produits moins rentables sont<br />
confiés à des tiers et la chaîne logistique<br />
est toujours plus fragmentée. <strong>Le</strong>s<br />
CCT restent donc une priorité pour les<br />
services confrontés à la multiplication<br />
exponentielle de concurrents sur un<br />
marché toujours plus concurrentiel.<br />
Au travers de la convention collective<br />
de travail des coursiers, <strong>syndicom</strong> entend<br />
donner un signal fort au secteur :<br />
oui, ensemble, nous le pouvons !<br />
Matteo Antonini, responsable du secteur<br />
Logistique et membre du comité directeur<br />
Swiss Maid : l’histoire non écrite<br />
du miracle économique suisse<br />
Sans le travail des femmes et leur engagement pour la collectivité,<br />
la réussite économique du pays n’aurait pu être possible.<br />
« Swiss Made » ou « Swiss Maid » ? La<br />
différence n’est <strong>pas</strong> audible et nous<br />
échappe facilement à la lecture. Maid<br />
signifie en anglais « servante » et aussi<br />
« jeune fille ».<br />
Ce jeu de mots a inspiré la professeur<br />
Margrit V. Zinggeler pour le titre<br />
de son dernier livre, dans lequel elle<br />
démontre que le miracle économique<br />
suisse n’aurait <strong>pas</strong> été possible sans le<br />
travail des femmes, ni sans leur engagement<br />
pour la collectivité.<br />
Seuls quelques incorrigibles<br />
contesteront sérieusement la contribution<br />
importante des femmes à la<br />
réussite économique de la Suisse.<br />
Mais pourquoi Margrit V. Zinggeler a<br />
telle donc sacrifié son congé sabbatique<br />
à réaffirmer cette évidence dans<br />
les 300 pages de son livre?<br />
Pas qu’une histoire écrite<br />
par des hommes pour les hommes<br />
Selon elle, l’analyse historique de la<br />
réussite économique de la Suisse est<br />
très sélective : « J’ai été irritée que cette<br />
histoire soit écrite par des hommes<br />
pour des hommes et qu’elle relate surtout<br />
des batailles, des guerres et des<br />
alliances », explique la professeur<br />
suisse – aujourd’hui titulaire d’une<br />
chaire d’allemand à l’Université d’Eastern<br />
Michigan. Une rectification s’imposait.<br />
« <strong>Le</strong>s femmes s’activent<br />
et les hommes gagnent »<br />
A la lecture des douze chapitres du<br />
livre, on constate que <strong>pas</strong> grandchose<br />
n’a changé malgré l’industrialisation,<br />
le mouvement de Mai 68 et MeToo.<br />
Aujourd’hui encore, ce sont surtout<br />
les professions de service qui sont<br />
ouvertes aux femmes. Ces professions<br />
peu reconnues par la société ont en<br />
conséquence un niveau de salaire<br />
moins élevé. Or, selon Zinggeler, ces<br />
activités contribuent à elles seules<br />
tout autant au succès économique de<br />
notre pays. Et pourtant, elles sont insuffisamment<br />
identifiées comme<br />
telles dans la mesure de la prospérité<br />
et par le produit national brut.<br />
C’est pourquoi Zinggeler plaide<br />
pour une mesure alternative de la<br />
prospérité, qui tienne compte de la<br />
contribution des femmes à la valeur<br />
brute ajoutée. Il s’agit souvent d’une<br />
contribution non payée du secteur informel,<br />
comme les soins donnés aux<br />
enfants ou aux parents, qui n’apparaît<br />
donc <strong>pas</strong> dans les statistiques officielles<br />
ou seulement de façon indirecte.<br />
Christian Capacoel<br />
Zinggeler, Margrit V., 2017: Swiss<br />
Maid. The Untold Story of Women’s<br />
Contributions to Switzerland’s Success.<br />
Peter Lang, New York. Actuellement<br />
seulement en anglais, une traduction<br />
allemande est prévue.<br />
Margrit V. Zinggeler rappelle que les femmes suisses ne votaient <strong>pas</strong> avant 1971. (© Christian Capacoel)<br />
https://www.margritzinggeler.com/
« La numérisation ne doit <strong>pas</strong> être utilisée comme<br />
un instrument d’exploitation. » David Roth<br />
19<br />
CFF et CarPostal – liaisons<br />
dangereuses stoppées<br />
L’année dernière, les CFF et CarPostal ont cherché à instaurer<br />
une collaboration avec Uber. <strong>Le</strong>s syndicats l’ont empêchée.<br />
Il y a un an, Syndicom, Unia et SEV exigeaient l’arrêt de cette collaboration. (© Manu Friederich)<br />
Des services Uber auraient été proposés<br />
dans l’application Internet des<br />
transports publics, à titre d’alternative<br />
ou de correspondances complémentaires<br />
aux transports publics.<br />
Alarmés par l’intervention énergique<br />
des syndicats, les CFF et CarPostal ont<br />
toutefois depuis mis un terme à cette<br />
collaboration.<br />
L’abandon de cette collaboration<br />
lance un signal clair : la numérisation<br />
ne doit <strong>pas</strong> être utilisée comme un instrument<br />
d’exploitation. A l’ère numérique,<br />
il est plus facile de coordonner<br />
de gros mandats fractionnés en une<br />
multitude de petits jobs. <strong>Le</strong>s plateformes<br />
utilisent cet avantage pour dissoudre<br />
les rapports de travail contractuels<br />
et traiter les salariées comme<br />
des travailleurs et travailleuses indépendants.<br />
Il faut payer jusqu’au papier de<br />
toilette<br />
<strong>Le</strong>s conséquences sont souvent désastreuses<br />
: aux EtatsUnis, des chauffeurs<br />
routiers sont contraints de payer<br />
pour l’utilisation et l’entretien de leur<br />
camion, et même pour le papier hygiénique<br />
sur les aires de repos. <strong>Le</strong>ur rémunération<br />
n’est <strong>pas</strong> calculée en fonction<br />
des heures de travail accomplies,<br />
mais selon le volume de marchandise<br />
transporté. La situation est devenue<br />
telle que certains chauffeurs, même<br />
après une semaine de travail de<br />
100 heures, doivent payer davantage<br />
qu’ils ne gagnent.<br />
<strong>Le</strong>s charges pleines font fondre<br />
les salaires<br />
Dans le modèle ubérisé, les coûts d’assurances<br />
sociales, d’administration,<br />
de locaux, de véhicules, de vacances et<br />
de frais de travail sont exclusivement à<br />
la charge des pseudoindépendants.<br />
Par conséquent, les salaires, c’estàdire<br />
les honoraires versés aux travailleurs<br />
indépendants, devraient aussi<br />
être presque doublés. Mais les entreprises<br />
mandataires n’y songent <strong>pas</strong><br />
une seconde.<br />
Premières réglementations cantonales<br />
Ces entreprises contournent en outre<br />
très habilement les lois et les taxes<br />
fiscales des pays où elles sont établies.<br />
A Genève, la nouvelle réglementation<br />
cantonale (voir lien) permet de rectifier<br />
le tir : ces entreprises doivent avoir<br />
leur siège en Suisse pour obtenir une<br />
licence. C’est ce qu’exigent aujourd’hui<br />
aussi les chauffeurs de taxis<br />
lausannois. Toutefois, les législations<br />
cantonales ne peuvent <strong>pas</strong> se substituer<br />
aux réglementations nationales.<br />
L’année dernière, le Conseil fédéral<br />
a célébré la Journée de la numérisation<br />
en chantant les louanges du nouveau<br />
monde numérique si prometteur.<br />
Mais il a oublié de faire ses devoirs. Si<br />
la Suisse entend saisir les chances de<br />
la digitalisation, elle doit aussi se doter<br />
de lois modernes, adaptées à notre<br />
époque. Sinon, la sousenchère salariale<br />
et les luttes qui en découleront<br />
seront inévitables. David Roth<br />
ge.ch/legislation/rsg/f/rsg_h1_31.html<br />
La <strong>gratuit</strong>é n’existe <strong>pas</strong><br />
<strong>Le</strong> modèle commercial des médias<br />
imprimés suisses s’essouffle. Longtemps,<br />
les journaux, véritables poules<br />
aux œufs d’or, finançaient le journalisme<br />
à travers les annonces publicitaires,<br />
et les recettes des éditeurs<br />
explosaient. Mais le vent a tourné. Aujourd’hui,<br />
seuls deux groupes gagnent<br />
encore beaucoup d’argent à travers la<br />
publicité, Tamedia et Ringier. <strong>Le</strong>s<br />
géants du Net, Google, Facebook, Youtube,<br />
Amazon & Cie, en gagnent à la<br />
pelle.<br />
Nous contribuons tous à ces fabuleuses<br />
recettes en nous ruant sur les<br />
journaux <strong>gratuit</strong>s dans le train, ou en<br />
dévoilant quasiment tout de nous sur<br />
les moteurs de recherche et les réseaux<br />
sociaux. Nos centres d’intérêt,<br />
nos achats en ligne, nos lectures et les<br />
produits que nous consommons. Que<br />
recevonsnous en contrepartie? Encore<br />
plus de publicité.<br />
Or nous le savons bien : rien n’est<br />
<strong>gratuit</strong>, car le travail de qualité coûte –<br />
partout.<br />
Etre informés de façon précise, approfondie<br />
et honnête n’est possible<br />
que si nous accordons les moyens<br />
nécessaires aux médias pour effectuer<br />
un travail soigné d’investigation, de<br />
rédaction et d’impression. C’est pourquoi<br />
notre syndicat s’engage pour de<br />
nouveaux modèles de financement<br />
destinés à financer des médias de qualité<br />
indépendants.<br />
Stephanie Vonarburg, responsable du secteur<br />
Presse et médias électroniques et membre du CD
20<br />
<strong>Le</strong> monde<br />
du travail<br />
« La direction de Tamedia ne cesse de s’enrichir<br />
alors que nos salaires stagnent. » Un employé<br />
Industrie graphique, le<br />
salaire médian baisse<br />
Bien que le nombre d’apprenti·e·s<br />
reste relativement constant (env. 2000<br />
personnes), notre secteur n’attire <strong>pas</strong><br />
foule de candidats. <strong>Le</strong>s jeunes qui s’y<br />
intéressent et achèvent leur forma <br />
tion s’orientent ensuite souvent vers<br />
d’autres secteurs, comme c’est le cas<br />
des polygraphes. Ce n’est <strong>pas</strong> un hasard<br />
si la catégorie d’âge des plus de<br />
50 ans est fortement représentée dans<br />
notre secteur. On constate en outre<br />
que les personnes qui perdent leur travail<br />
cherchent toujours plus souvent<br />
un nouvel emploi dans un autre secteur.<br />
Enfin, l’Office fédéral de la statistique,<br />
qui a publié en mai les salaires<br />
médians des différents secteurs, révèle<br />
que le salaire médian dans l’industrie<br />
graphique (sans fonction de<br />
cadre) n’a <strong>pas</strong> seulement stagné, mais<br />
diminué de 5,1 % de 2010 à 2016.<br />
La délégation de <strong>syndicom</strong> et Syna se<br />
rendra à la table des négociations avec<br />
la mission d’empêcher une détérioration<br />
de l’actuel CCT, mais aussi avec<br />
l’objectif de rendre les conditions de<br />
travail attrayantes et de garantir le<br />
futur de la branche – du point de vue<br />
économique, mais <strong>pas</strong> seulement. <strong>Le</strong><br />
second tour des négociations débutera<br />
le 20 septembre prochain.<br />
Angelo Zanetti<br />
https://bit.ly/2JfDW34<br />
Sans CCT, <strong>pas</strong> de sécurité<br />
<strong>Le</strong>s employés des centres d’impression de Tamedia à Berne,<br />
Bussigny et Zurich veulent réintégrer la convention collective.<br />
Il est 23 h 00, les employés de l’équipe<br />
de nuit des centres d’impression de<br />
Tamedia s’installent aux machines à<br />
Berne, Bussigny et Zurich. Un premier<br />
collègue du groupe d’action se lève et<br />
distribue à tous une casquette rouge et<br />
des autocollants sur lesquels on peut<br />
lire « Sans CCT, <strong>pas</strong> de sécurité ».<br />
<strong>Le</strong>s collègues coiffent la casquette.<br />
Plus de 90 % des employés travailleront<br />
avec durant 32 heures, dans les<br />
deux centres d’impression et le centre<br />
prépresse alémaniques. À Bussigny,<br />
l’action s’est déroulée du 30 au 31 mai,<br />
aussi la journée. Elle lance ainsi un signal<br />
fort. <strong>Le</strong>s employés sont mécontents.<br />
Ils veulent réintégrer le CCT.<br />
Fin 2015, Tamedia a quitté l’association<br />
patronale viscom et s’est retiré<br />
du CCT de l’industrie graphique. La<br />
direction de l’entreprise s’efforce de<br />
dissimuler les véritables motivations<br />
de cette décision : la détérioration progressive<br />
des conditions de travail.<br />
Pour commencer, la durée du travail<br />
dans les trois centres d’impression<br />
de Bussigny, Berne et Zurich a été<br />
Fondée par viscom, la nouvelle association<br />
swiss print & communication<br />
permet aux employeurs de<br />
suivre l’exemple de Tamedia. Avec<br />
des conséquences désastreuses<br />
pour les salariés. Y compris au<br />
centre d’impression de billets de<br />
banques d’Orell Füssli, où le personnel<br />
se bat aussi contre la sortie<br />
de l’entreprise du CCT. La lutte<br />
s’est déjà traduite par un débrayage<br />
de protestation. Mais la direction<br />
s’entête – et le personnel continue<br />
à lutter. Jusqu’alors, Ringier/Swissprinters<br />
ne s’est <strong>pas</strong> montré prêt à<br />
entrer en matière sur une soumission<br />
à la CCT. Parmi les entreprises<br />
qui ont quitté viscom jusqu’au<br />
terme de 2018, seule Stämpfli s’est<br />
montrée prête à entrer en négociation<br />
avec <strong>syndicom</strong> au sujet d’une<br />
convention d’entreprise. <strong>Le</strong>s discussions<br />
ont commencé en juin. Il<br />
importe que cette CCT d’entreprise<br />
soit au moins aussi avantageuse<br />
que la CCT de branche, et qu’elle<br />
soit conclue avec le syndicat.<br />
augmentée de deux heures, respectivement<br />
une heure et quart, et les indemnités<br />
de re<strong>pas</strong> ont été partiellement<br />
supprimées. <strong>Le</strong>s employés des<br />
centres d’impression qui travaillent<br />
aussi en équipe de nuit doivent être à<br />
pied d’œuvre également le samedi<br />
dans l’équipe du matin. <strong>Le</strong>s employés<br />
qui travaillent en équipe n’ont donc<br />
plus que le dimanche pour entreprendre<br />
des activités en famille. Or ces<br />
weekends raccourcis ne font l’objet<br />
d’aucune indemnisation. On estime<br />
que chaque employé·e fait ainsi cadeau<br />
à Tamedia de 2700 francs par année<br />
au minimum, cette somme étant<br />
calculée sur un salaire bas. « La direction<br />
de Tamedia ne cesse de s’enrichir,<br />
alors que nos salaires stagnent »,<br />
déplore un employé.<br />
La direction de Tamedia voit aussi<br />
d’un mauvais œil les suppléments prévus<br />
pour le travail en équipe.<br />
Pour faire pièce à cette offensive,<br />
les employé·e·s des trois centres d’impression<br />
ont lancé en avril dernier une<br />
pétition qui exige que Tamedia réintègre<br />
l’association patronale viscom,<br />
reconnaissant ainsi le CCT de l’industrie<br />
graphique. La représentation du<br />
personnel a recueilli 280 signatures en<br />
quelques semaines. En contrepartie<br />
de son travail, fiable et de grande qualité,<br />
le personnel des centres d’impression<br />
exige une garantie pour le<br />
maintien des conditions de travail actuelles.<br />
Mais la direction refuse.<br />
Trentedeux heures plus tard : il est<br />
5 h 30 du matin, la dernière équipe est<br />
toujours coiffée de rouge. « Nous montrons<br />
que nous sommes solidaires et<br />
défendons ensemble ces revendications<br />
», déclare un employé du centre<br />
d’impression de Zurich. « Et ce n’est<br />
qu’un début ! »<br />
Miriam Berger<br />
<strong>Le</strong>s employé·e·s mécontents ont travaillé avec une casquette rouge durant 32 heures. (© DR)<br />
<strong>syndicom</strong>.ch/aktuell/artikel/ohnigavlupftseusdehuet/
« La Poste a un avenir si elle renoue avec un service public<br />
présent dans tout le pays. » David Roth<br />
21<br />
Soigner nos proches<br />
nous concerne tous !<br />
Travail d’aide non rémunéré : le grand<br />
public associe les professions soignantes<br />
au travail de care. En Suisse,<br />
des femmes mal payées en provenance<br />
d’Europe de l’Est ou d’Asie s’occupent<br />
souvent de nos proches. <strong>Le</strong> SSP et Unia<br />
s’engagent pour la protection de ces<br />
femmes. <strong>Le</strong> travail de care non payé<br />
est, en revanche, moins présent à<br />
l’esprit des gens. Par exemple, lorsque<br />
nous soignons nos parents ou notre<br />
partenaire à domicile.<br />
<strong>Le</strong>s femmes assument la grande<br />
partie de ce travail non payé. Afin que<br />
cette tâche exigeante ne leur fasse <strong>pas</strong><br />
atteindre leurs limites, qu’elles détectent<br />
les premiers signaux d’alerte<br />
et puissent échanger avec d’autres<br />
personnes, <strong>syndicom</strong> propose le cours<br />
« Travailler tout en soignant ses<br />
proches – comment faire ? ». La plupart<br />
du temps, les femmes actives sont<br />
confrontées, à plus de 50 ans, à un<br />
nouveau problème de conciliation<br />
entre vie professionnelle et prise en<br />
charge de proches à domicile. Des réglementations<br />
en matière de droit du<br />
travail – présentes aussi dans la CCT<br />
Poste et Swisscom – ainsi que différentes<br />
offres destinées à les soulager<br />
seront présentées. <strong>Le</strong> cours se déroulera<br />
à Zurich le 1er septembre en collaboration<br />
avec le SSP. Dans un premier<br />
temps, il sera donné uniquement en<br />
allemand. (https://bit.ly/2sndivp)<br />
Patrizia Mordini, responsable Égalité<br />
et membre du comité directeur<br />
La chasse au profit fait trébucher<br />
La Poste. Il faut y mettre fin.<br />
Susanne Ruoff est partie avec toute la direction de CarPostal.<br />
La Poste doit s’engager pour un service public digne de ce nom.<br />
<strong>Le</strong> scandale de CarPostal a porté un<br />
coup fatal à la cheffe de La Poste,<br />
Susanne Ruoff. Dans sa chute, elle entraîne<br />
toute la direction de CarPostal<br />
et le viceprésident du conseil d’administration<br />
de La Poste, Adriano Vassali,<br />
qui a annoncé sa démission. La<br />
culbute ne semble <strong>pas</strong> terminée. Ueli<br />
Hurni, qui a commencé sa longue<br />
carrière chez PostFinance, devient<br />
CEO ad interim de La Poste.<br />
Recherche exagérée de profit<br />
Des irrégularités dues à la recherche<br />
exagérée de profit chez CarPostal<br />
sont à l’origine du scandale. <strong>Le</strong> Conseil<br />
fédéral et le Parlement, qui attendent<br />
des bénéfices de La Poste, n’y sont <strong>pas</strong><br />
étrangers. D’un côté, le service public<br />
doit être garanti. De l’autre, la maximisation<br />
des gains est le crédo de la direction<br />
du groupe.<br />
Ce jeu d’équilibrisme intenable<br />
détériore les conditions de travail et<br />
compromet le service universel. <strong>Le</strong><br />
modèle de management visant à renforcer<br />
uniquement les centres conduit<br />
à des licenciements, des fermetures<br />
d’offices de poste, des externalisations,<br />
des contournements de CCT et<br />
des coupes dans le service de distribution.<br />
Cette politique ne peut se faire<br />
qu’au détriment des intérêts de la<br />
population.<br />
Des indemnités astronomiques ont amorti<br />
la chute de Susanne Ruoff. (© Keystone)<br />
Susanne Ruoff tombe en douceur –<br />
contrairement à d’autres<br />
Susanne Ruoff, qui a touché des indemnités<br />
astronomiques durant des<br />
années à la tête du groupe, tombe en<br />
douceur. Quant à elle La Poste – depuis<br />
longtemps entraînée dans un<br />
tourbillon – ne cesse de démanteler<br />
ses prestations. Même dans la filiale<br />
exemplaire de PostFinance. Mille personnes<br />
craignent d’y perdre leur emploi.<br />
Dans le cadre du projet de démantèlement<br />
« Victoria 2020 », la<br />
direction compte biffer 500 postes à<br />
plein temps, notamment dans le domaine<br />
des conseils à la clientèle commerciale.<br />
À l’avenir, seuls 20 % des<br />
clients recevront encore des conseils<br />
personnalisés, tous les autres devront<br />
se rabattre sur les centres d’appel et<br />
les services de messagerie saturés. Par<br />
ailleurs, de très nombreux employés<br />
des centres d’opération redoutent la<br />
disparition de leur poste.<br />
<strong>syndicom</strong> intervient<br />
PostFinance a une dette envers les personnes<br />
qui ont travaillé parfois des décennies<br />
pour cette entreprise. <strong>syndicom</strong><br />
s’engagera pour le maintien du<br />
plus grand nombre possible d’emplois<br />
et pour que les personnes licenciées<br />
retrouvent du travail. Pour ce<br />
faire, un soutien financier plus élevé<br />
que celui prévu dans le plan social doit<br />
leur être accordé.<br />
La direction de PostFinance se lamente<br />
volontiers sur les circonstances<br />
extérieures, notamment sur la restriction<br />
imposée sur les activités hypothécaires.<br />
Mais c’est une condition<br />
connue, car les cantons ne souhaitent<br />
<strong>pas</strong> que leurs banques soient concurrencées<br />
à ce niveaulà. Bonne ou mauvaise,<br />
il faut accepter cette réalité.<br />
La classe politique doit mettre un<br />
terme à la stratégie visant à favoriser la<br />
maximisation du profit à La Poste. <strong>Le</strong><br />
géant jaune a un avenir, à condition<br />
d’obtenir un mandat clair. Celui de renouer<br />
avec un service public présent<br />
dans tout le pays.<br />
David Roth<br />
https://bit.ly/2tg1g6J
22 Politique<br />
Service public 2.0 : apprivoiser<br />
la numérisation<br />
Nous tirons la sonnette<br />
d’alarme. Si les pouvoirs<br />
publics renoncent à réglementer<br />
la transformation<br />
numérique et à développer<br />
rapidement un service public<br />
digital, la Suisse perdra sa<br />
souveraineté au profit de<br />
multinationales impérialistes<br />
telles que Facebook.<br />
Et la paix sociale s’érodera.<br />
La solution <strong>pas</strong>se par la<br />
maîtrise des données.<br />
Texte : Giorgio Pardini,<br />
responsable du secteur TIC<br />
Photo : alphaspirit<br />
La démocratie et la paix sociale se<br />
désagrègent quand on démantèle le<br />
service public. Car il garantit à tous<br />
la fourniture de prestations et d’infrastructures<br />
élémentaires. Il donne<br />
accès à la formation, à la sécurité<br />
physique, à des perspectives de vie<br />
et à la sécurité sociale. Et surtout, il<br />
constitue un contrepoids au capital<br />
et au marché, une amorce d’égalité<br />
des chances dans une société de<br />
plus en plus injuste.<br />
<strong>Le</strong> service public doit s’adapter<br />
<strong>Le</strong> service public doit s’adapter lui<br />
aussi aux nouveaux besoins de notre<br />
pays. Il n’y a <strong>pas</strong> si longtemps encore,<br />
l’installation de cabines téléphoniques<br />
s’imposait un peu partout.<br />
Aujourd’hui, il faut construire<br />
des réseaux de téléphonie mobile et<br />
des points d’accès Wi-Fi. Toutefois,<br />
pour remplir son rôle, le service<br />
public doit faire bien davantage.<br />
De nouveaux modèles commerciaux,<br />
tels que l’économie de plateformes,<br />
voient le jour sous l’impulsion<br />
de la transformation<br />
numé rique. En moins de 20 ans, de<br />
gigantesques multinationales sont<br />
nées : Google, Amazon, Facebook,<br />
Apple (GAFA) et d’autres. Elles<br />
suivent toutes le même principe<br />
commercial : contrôler l’empreinte<br />
numérique de leurs clients virtuels.<br />
À toute heure du jour et de la nuit,<br />
des milliards de données sont recueillies<br />
(Big Data), rassemblées,<br />
structurées par des algorithmes<br />
toujours plus sophistiqués et commercialisées<br />
à des fins économiques<br />
et politiques – avec de graves conséquences<br />
pour la politique et la<br />
société.
Politique<br />
Pour remplir son rôle, le service public doit faire bien davantage que des réseaux de télé phonie<br />
mobile et des points d’accès Wi-Fi. Seul l’Etat peut veiller à ce que les données restent en<br />
possession des usagers ou qu’elles leur reviennent. Un service public numérique réglementé<br />
n’aurait actuellement aucune chance au Parlement. D’où l’idée d’une initiative populaire.<br />
23<br />
<strong>Le</strong>s GAFA prennent les commandes<br />
Au premier trimestre 2018, Facebook<br />
comptait près de 2,2 milliards<br />
d’usagers actifs. En 2017, il réalisait<br />
un chiffre d’affaires frôlant les<br />
41 milliards de dollars et encaissait<br />
des milliards de bénéfices. Comme<br />
les multinationales dominent le<br />
marché mondial, elles disposent<br />
d’un capital plus élevé que la plupart<br />
des États. Elles prennent les<br />
commandes dans les domaines de la<br />
sécurité, du contrôle, de la formation<br />
de l’opinion, de l’égalité des<br />
chances. Tout cela se base sur l’utilisation<br />
du Big Data. Nous avons vu ce<br />
qu’il peut advenir de nos données<br />
personnelles lors des dernières élections<br />
aux États-Unis. <strong>Le</strong> traitement<br />
et l’utilisation de près de 87 millions<br />
de profils Facebook ont permis<br />
d’influencer le comportement<br />
électoral en faveur de Donald<br />
Trump.<br />
<strong>Le</strong>s GAFA, de véritables oligopoles<br />
qui exercent à l’échelle planétaire<br />
leur influence sur les États et<br />
les institutions, échappent à tout<br />
contrôle et s’engagent uniquement<br />
pour leurs actionnaires. Cette logique<br />
n’encourage ni la cohésion<br />
sociale, ni un engagement en faveur<br />
de l’intérêt public. Contrairement<br />
au service public, qui met ses prestations<br />
à disposition des citoyens et<br />
citoyennes, qui est sujet au contrôle<br />
démocratique et redevable d’éventuels<br />
bénéfices à la collectivité.<br />
Comme pour tout développement<br />
technologique qui comporte<br />
des risques élevés, l’État doit fixer<br />
des règles et des garde-fous dans<br />
l’intérêt de la collectivité. Il s’agit ici<br />
de savoir qui détient la mainmise<br />
sur les données. Seul l’État peut<br />
veiller à ce qu’elles restent en possession<br />
des usagers ou qu’elles leur<br />
reviennent. C’est pourquoi nous devons<br />
réfléchir à des solutions pour<br />
étendre le mandat du service public<br />
au monde numérique. C’est indispensable<br />
pour éviter que la transformation<br />
numérique ne conduise à<br />
des distorsions sociales.<br />
Toutefois, même la meilleure<br />
réglementation reste lettre morte si<br />
les pouvoirs publics ne développent<br />
Une initiative<br />
populaire pourrait<br />
ouvrir la voie<br />
<strong>pas</strong> un service public digital. Il faut y<br />
remédier très rapidement, pour empêcher<br />
que les multinationales dérobent<br />
à l’État sa souveraineté et sa<br />
capacité d’action ces prochaines années<br />
déjà.<br />
Possibilités des pouvoirs publics<br />
Des entreprises publiques telles que<br />
Swisscom ou La Poste peuvent fournir<br />
de manière commode des tâches<br />
centrales du service public digital.<br />
Pour ce faire, il faut leur octroyer<br />
très rapidement un mandat contraignant<br />
et leur donner une marge de<br />
manœuvre et des moyens pour réaliser<br />
les investissements nécessaires.<br />
C’est pourquoi la privatisation rampante<br />
de ces entreprises doit être<br />
stoppée. <strong>Le</strong>s entreprises publiques<br />
doivent rester la propriété de la<br />
collectivité pour la simple et bonne<br />
raison que la numérisation déréglemente<br />
les conditions de travail et<br />
de vie.<br />
Il ne fait aucun doute que des<br />
lobbies puissants mettront tout en<br />
œuvre pour empêcher un service<br />
public numérique réglementé. Bien<br />
qu’il soit d’un grand intérêt pour<br />
nous tous, il n’aurait actuellement<br />
aucune chance d’obtenir une majorité<br />
au Parlement. Pour l’établir,<br />
nous devrons activer les instruments<br />
de la démocratie directe.<br />
Une initiative populaire pourrait<br />
ouvrir la voie vers une solution.<br />
https://bit.ly/2M1zuTs<br />
Renforcer le<br />
service public<br />
<strong>Le</strong>s délégués de l’USS<br />
adoptent une résolution.<br />
Fin mai, les délégué(e)s de l’Union<br />
syndicale suisse (USS) ont adopté<br />
une résolution visant à renforcer<br />
le service public, qui doit saisir<br />
l’opportunité de la numérisation.<br />
La politique fiscale doit<br />
s’orienter sur les besoins du service<br />
public. Au lieu de baisses<br />
d’impôts dévastatrices, il faut une<br />
imposition minimale afin d’éviter<br />
la concurrence fiscale à laquelle<br />
se livrent les cantons. L’USS refuse<br />
les mesures d’austérité qui<br />
touchent le personnel des pouvoirs<br />
publics, de la Confédération,<br />
des cantons et des communes,<br />
tout comme la logique de marché<br />
qui détruit le service public : non à<br />
une politique des transports qui<br />
entraîne des prix et des salaires de<br />
dumping, non à la levée de l’interdiction<br />
du cabotage, non à la libéralisation<br />
du transport national<br />
et international de voyageurs et<br />
voyageuses !<br />
La numérisation est une opportunité<br />
pour le service public, si<br />
les entreprises donnent une formation<br />
de base et continue à leur<br />
personnel. Dans la numérisation<br />
des prestations de service, il faut<br />
développer, <strong>pas</strong> démanteler. Vu la<br />
pression sur les salaires existant<br />
dans les transports, à La Poste et<br />
dans les activités de courrier ainsi<br />
que la violente dégradation de la<br />
situation dans la branche des médias<br />
et la santé, les délégué·e·s de<br />
l’USS demandent que toutes les<br />
personnes occupées dans le service<br />
public soient soumises à des<br />
conventions collectives de travail<br />
exemplaires. Dans des entreprises<br />
publiques comme les CFF, Swisscom<br />
et La Poste, les salaires des<br />
cadres ne doivent <strong>pas</strong> être supérieurs<br />
à 500 000 francs. (com.)
24 Politique<br />
L’ Union syndicale suisse s’élève contre le projet de révision de la loi sur le<br />
contrat d’assurance (LCA), lequel entend donner plus de pouvoir aux assurances<br />
pour agir à leur guise.<br />
Une LCA sur<br />
mesure pour<br />
les assurances<br />
L’assureur pourrait changer<br />
unilatéralement le contrat.<br />
<strong>Le</strong> Conseil fédéral prévoit une révision<br />
de la loi sur le contrat d’assurance<br />
(LCA) qui représenterait une<br />
nette dégradation de la situation<br />
pour les assuré·e·s en Suisse vis-àvis<br />
des compagnies d’assurances.<br />
C’est pourquoi l’Union syndicale<br />
suisse (USS) rejette ce projet.<br />
<strong>Le</strong> projet du Conseil fédéral entraînera<br />
des dégradations et donnera<br />
plus de puissance aux assurances<br />
pour agir à leur guise.<br />
• Un des principaux points négatifs<br />
est la possibilité pour l’assureur<br />
de modifier unilatéralement le<br />
contrat. Cela permettrait aux assurances<br />
d’adapter d’un jour à l’autre<br />
les conditions du contrat, sans l’accord<br />
de l’assuré·e) !<br />
• <strong>Le</strong>s travailleurs et travailleuses<br />
âgés pourraient être exclus de l’assurance<br />
d’indemnités journalières<br />
en cas de maladie.<br />
• Suite à un licenciement ou si le<br />
contrat de l’assurance d’indemnités<br />
journalières en cas de maladie est<br />
dénoncé, les assurances auraient à<br />
l’avenir le droit de supprimer ou de<br />
suspendre après coup des prestations<br />
prévues pour des sinistres survenus.<br />
En Suisse, les travailleurs sont<br />
mal protégés en cas de maladie. Il<br />
n’existe <strong>pas</strong> d’assurance obligatoire<br />
protégeant contre une perte de gain<br />
qui n’entraîne <strong>pas</strong> une invalidité,<br />
mais seulement une assurance facultative,<br />
souvent soumise à la LCA.<br />
Il serait pourtant urgent que le<br />
législateur résolve des problèmes<br />
liés au calcul des primes, opaque et<br />
incompréhensible pour l’assuré·e.<br />
<strong>Le</strong> preneur d’assurance (employeur)<br />
et la compagnie d’assurance peuvent<br />
convenir que les prestations<br />
sont suspendues quand le rapport<br />
de travail prend fin. <strong>Le</strong> malade licencié<br />
perd ainsi son droit à un salaire<br />
de remplacement. Ce scandaleux<br />
projet crée de nouveaux<br />
problèmes sans régler la situation.<br />
Luca Cirigliano, secrétaire central<br />
http://www.uss.ch/publications/articles/<br />
Annonce<br />
Avec l’argent Reka, les<br />
membres de <strong>syndicom</strong><br />
boostent leur budget.<br />
En tant que membre, vous obtenez de l’argent<br />
Reka avec un rabais de 7 % chez <strong>syndicom</strong>.<br />
Plus de 9’000 points de vente dans toute la<br />
Suisse acceptent l’argent Reka. rekaguide.ch<br />
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de rabais !<br />
Reka, pour encore plus.
Droit au but !<br />
25<br />
Questions au service juridique de <strong>syndicom</strong><br />
J’ai achevé ma formation professionnelle l’automne dernier<br />
et n’ai trouvé aucun poste à ce jour. <strong>Le</strong>s refus faisaient état<br />
de mon manque d’expérience. Je viens de recevoir aujourd’hui<br />
une offre pour un stage non payé d’une année.<br />
Je sais que d’autres collègues diplômés en même temps<br />
que moi ont accepté. Si je refuse, quelqu’un d’autre sera<br />
pris. Que me recommandez-vous ?<br />
Je serais disposé à accomplir un stage non payé, mais une<br />
année sans salaire ni vacances, c’est trop long pour moi.<br />
Après ma formation, je n’ai plus un sou et devrais maintenant<br />
gagner de l’argent. En outre, j’ai acquis un solide<br />
bagage durant ma formation. Dois-je vraiment travailler<br />
si longtemps <strong>gratuit</strong>ement ?<br />
Si j’accepte ce stage non payé d’une année et n’obtiens<br />
ensuite <strong>pas</strong> d’engagement fixe, est-ce que j’ai droit malgré<br />
tout à des indemnités de chômage ? Comme je devrais avoir<br />
cotisé au moins douze mois, je serais sinon doublement<br />
pénalisé.<br />
Réponses<br />
<strong>Le</strong> stage n’est <strong>pas</strong> expressément régi<br />
par la loi. Il est important de signer<br />
un contrat de stage. Il devrait comporter<br />
la durée, le but visé, une réglementation<br />
en cas de maladie, ainsi<br />
que le salaire (y c. cotisations AVS, AC<br />
et LAA). Un engagement à durée déterminée<br />
à l’issue du stage peut aussi<br />
être convenu à ce moment-là. <strong>Le</strong><br />
stage a pour but d’approfondir par la<br />
pratique les connaissances théoriques<br />
acquises sous accompagnement<br />
professionnel, afin de faciliter<br />
l’entrée dans la vie professionnelle.<br />
Si vous accomplissez pendant votre<br />
stage les mêmes tâches que les employés<br />
fixes sans être encadré, il<br />
s’agit de facto d’un rapport de travail<br />
à durée déterminée. Dans ce cas, vous<br />
avez droit à un salaire régulier.<br />
Un stage ne devrait <strong>pas</strong> durer plus<br />
d’une année. En outre, vous avez<br />
aussi droit à quatre semaines au<br />
moins de vacances. Pour les stages de<br />
plus courte durée, les vacances<br />
doivent être accordées pro rata. <strong>Le</strong>s<br />
stages non payés ne devraient <strong>pas</strong> excéder<br />
un mois. <strong>Le</strong>s stages d’essai en<br />
sont l’exemple typique : ils ne durent<br />
en général que quelques jours ou une<br />
à deux semaines. Si le stage dure plus<br />
longtemps, un salaire doit être versé,<br />
même s’il est inférieur à celui d’un<br />
engagement fixe. Enfin, plusieurs<br />
stages successifs, même de courte<br />
durée, ne sont <strong>pas</strong> autorisés chez le<br />
même employeur et dans le même<br />
domaine professionnel.<br />
Dans un tel cas, la caisse de chômage<br />
vérifie si un stage est exigé pour le diplôme<br />
professionnel et s’il fait partie<br />
ou non de la formation. Dans l’affirmative,<br />
vous n’avez <strong>pas</strong> de cotisations<br />
à payer et avez droit à 90 indemnités<br />
journalières. C’est pourquoi il est important<br />
que vous appreniez quelque<br />
chose lors d’un stage et ne vous<br />
contentiez <strong>pas</strong> de travailler <strong>gratuit</strong>ement.<br />
<strong>syndicom</strong>.ch/fr/service-des-membres/<br />
<strong>magazine</strong>/
26 Loisirs<br />
Suggestions<br />
Trilogie d’une étoile filante<br />
© DR<br />
Comprendre les enjeux<br />
politiques et l’ubérisation<br />
« De toute façon on n’y peut rien,<br />
alors à quoi bon ? » Avis aux aquoibonistes<br />
: même si les rapports de<br />
force actuels ne sont <strong>pas</strong> franchement<br />
favorables aux salariés, saisir<br />
dans ses grandes lignes le fonctionnement<br />
de notre système politique<br />
peut les aider à se défendre !<br />
<strong>Le</strong> cours des 6 et 7 septembre<br />
intitulé « Qui gouverne en Suisse ?<br />
Comprendre les enjeux politiques »<br />
explique les possibilités d’agir au<br />
niveau politique. Intervenant : Jean<br />
Christophe Schwaab.<br />
Un peu perdu dans le grand bazar<br />
toutnumérique appelé « révolution<br />
industrielle 4.0 », on se demande à<br />
quelle sauce on sera mangé, et aussi<br />
quel métier exercer pour manger.<br />
<strong>Le</strong> 11 septembre, Luca Cirigliano<br />
et ClaudeAlain Frund interviendront<br />
sur le thème des enjeux de<br />
l’« ubérisation » et ses conséquences<br />
sur le monde du travail. Voilà qui<br />
peut aider les participants à identifier<br />
des réponses syndicales.<br />
« La situation économique nous<br />
contraint à vous licencier. » Qui peut<br />
imaginer ne jamais entendre cette<br />
antienne ? Après avoir « encaissé »,<br />
on demande à voir les chiffres. Encore<br />
fautil les comprendre.<br />
<strong>Le</strong> cours des 18 et 19 octobre<br />
« Economie d’entreprise, lecture des<br />
comptes d’entreprises » requiert de<br />
bonnes connaissances de base de la<br />
comptabilité, mais s’accrocher en<br />
vaut la peine. Pour les membres<br />
de commissions d’entreprise, être<br />
capable de saisir ce qui se cache derrière<br />
les chiffres peut se révéler crucial.<br />
Avec Samuel Bendahan.<br />
Pour ces trois cours Movendo : lien<br />
cidessous.<br />
La presse satirique romande<br />
s’expose à la BCU<br />
© DR<br />
<strong>Le</strong> site de la Riponne de la Bibliothèque<br />
cantonale et universitaire, à<br />
Lausanne, rend hommage au rôle<br />
central que cette ville a joué en accueillant<br />
le premier journal satirique<br />
suisse, <strong>Le</strong> nouveau charivari<br />
politique vaudois, en 1839. Mais<br />
c’est plus largement toute la Suisse<br />
romande qui, jusqu’à nos jours, a<br />
fait preuve d’un dynamisme certain<br />
dans ce domaine, que l’on pense à<br />
Géa Augsbourg, Urs, André Paul ou<br />
dans un style plus grinçant à Martial<br />
<strong>Le</strong>iter en <strong>pas</strong>sant par le génie<br />
modeste d’un Raymond Burki, de<br />
Mix & Remix ou d’un Chappatte.<br />
N’oublions <strong>pas</strong> le talent de Thierry<br />
Barrigue, cofondateur de l’hebdomadaire<br />
satirique romand Vigousse,<br />
qui contribue à découvrir de nouveaux<br />
talents.<br />
La donation, en 2010, par le collectionneur<br />
Bernard Schira d’un<br />
ensemble important de revues<br />
et journaux satiriques des XIXe et<br />
XXe siècles permet de découvrir les<br />
liens étroits que la presse satirique<br />
romande entretient, des débuts<br />
à mai 68, voire audelà, avec ses modèles<br />
parisiens.<br />
L’exposition a été réalisée en collaboration<br />
avec la section d’histoire<br />
de l’art de l’Université de Lausanne,<br />
avec la participation d’étudiants en<br />
bachelor. <strong>Le</strong> professeur bien connu<br />
Philippe Kaenel en est le commissaire,<br />
avec le concours de Silvio<br />
Corsini, conservateur de la réserve<br />
précieuse de la BCU. Un site internet<br />
(voir cidessous) complète l’exposition<br />
avec des extraits d’archives,<br />
des vidéos et des témoignages.<br />
<strong>Le</strong> 15 septembre 2018 à 11 h à la<br />
salle du Sénat du Palais de Rumine,<br />
débat public avec des dessinateurs<br />
et dessinatrices. Exposition à voir<br />
jusqu’au 24 novembre 2018.<br />
Albertine Sarrazin naît en 1937 à<br />
Alger. De parents inconnus, elle est<br />
adoptée par un couple âgé. En 1947<br />
à AixenProvence, elle subit l’éducation<br />
stricte d’un milieu bourgeois<br />
rance. En 1952, son père adoptif la<br />
fait incarcérer au BonPasteur.<br />
Un an plus tard, elle s’enfuit à<br />
Paris, où elle retrouve une amie du<br />
BonPasteur. Lors d’une tentative de<br />
holdup à main armée, son amie<br />
blesse accidentellement une vendeuse.<br />
Albertine prend sept ans. Transférée<br />
dans une forteresse qui sert de<br />
prisonécole, elle en fait le mur<br />
(haut de 10 mètres) en 1957, se brisant<br />
l’astragale. Julien Sarrazin, son<br />
futur mari qu’elle épousera en prison,<br />
la recueille sur la route, la<br />
soigne et la planque chez des amis.<br />
C’est cette errance, et la douleur,<br />
que raconte L’astragale.<br />
Avec des mots d’argot savoureux,<br />
Albertine Sarrazin croque admirablement<br />
dans La cavale « mâme<br />
chef », les « bavards », Nicole aux<br />
blanches dents qui copine avec la<br />
solitude, les codétenues « betteraves<br />
». Et les échanges de « biftons »<br />
avec Julien dans le panier à salade.<br />
Fatima « benne basculante », Algérienne<br />
débrouillarde et au grand<br />
cœur, qui cantine des poivrons et<br />
renaude parce qu’Albertine lui a<br />
dessiné sur une lettre un « morpignon<br />
» (pour dire papillon) au lieu<br />
d’un cœur percé d’une flèche. C’est<br />
l’écriture, c’est l’idée de cavale et<br />
toutes les cavales imaginées, rêvées,<br />
qui la maintiennent en vie. Elle ne<br />
capitule jamais.<br />
Dans La traversière, Albertine<br />
doit trouver un endroit où attendre<br />
Julien, encore « touriste au pays<br />
froid » pour un an. Elle retrace son<br />
séjour en foyer d’accueil, ses tribulations.<br />
Alors qu’elle peut enfin se poser<br />
avec Julien, qu’elle ne boite presque<br />
plus, Albertine Sarrazin meurt à<br />
29 ans d’une anesthésie bâclée.<br />
<strong>syndicom</strong>.ch/fr/servicedesmembres/<br />
offresdeformation<br />
http://wp.unil.ch/pressesatiriqueromande/<br />
galerie/<br />
L’astragale, La cavale et La traversière sont<br />
disponibles en livre de poche.
1000 mots<br />
Ruedi Widmer<br />
27
28 Evènements En juin 2018, <strong>syndicom</strong> s’engage :<br />
pour un retour sous la protection de la CCT de l’industrie graphique ; lors de la<br />
journée nationale des femmes le 14 juin ; aux côtés des cheminots des CFF pour<br />
protester contre les mesures d’économies.<br />
2<br />
1<br />
3<br />
4<br />
5
1, 2 En portant une casquette rouge durant leur travail, les employé·e·s de l’industrie graphique exigent d’être à nouveau soumis au CCT<br />
(ici les centres d’impression de Bussigny et Zurich). (© DR)<br />
3 À Berne, comme dans d’autres villes suisses, les cheminots ont protesté le 18 juin contre les mesures d’économies prévues aux CFF. (© DR)<br />
4, 5 Sous le slogan « Mettons la pression », la bière de l’égalité a pu être dégustée au cours des manifestations du 14 juin pour l’égalité salariale.<br />
À Bellinzone, un apéro de l’égalité a eu lieu à la Casa del Popolo. (© Dominik Fitze et Lorena Gianolli)<br />
6, 7, 8, 9 À Berne, le 9 juin 2018, a eu lieu la suite du congrès <strong>syndicom</strong> de novembre 2017 qui n’avait <strong>pas</strong> permis de traiter toutes les propositions.<br />
Désormais, les décisions sont prises (<strong>syndicom</strong>.ch/kongress17). (© Sam Buchli)<br />
10 <strong>Le</strong> Congrès a appuyé le combat des chauffeurs de CarPostal contre le travail <strong>gratuit</strong>. (© Sam Buchli)<br />
11 <strong>Le</strong> groupe d’intérêt Migration a fêté les 40 ans d’activité de notre membre Gerda Kern. (© Sam Buchli)<br />
29<br />
6<br />
8<br />
7<br />
9<br />
10 11
30<br />
Tranches<br />
de vie<br />
Lionel Beuret<br />
<strong>Le</strong> temps payé ne suffit <strong>pas</strong> à tout faire<br />
Né en 1966, Lionel Beuret a grandi aux<br />
Breuleux (JU). Il a appris sur le tas le<br />
métier de mécanicien, puis il est parti<br />
travailler en Valais sur les pistes de ski.<br />
Quand il se marie en 1988, il commence<br />
à travailler au garage postal comme<br />
ouvrier spécialisé et magasinier.<br />
Dix ans plus tard, à la faveur d’une<br />
restructuration et d’une fermeture, il<br />
saisit l’occasion de devenir chauffeur<br />
et il accomplit les formations de<br />
chauffeur de camion et de chauffeur<br />
de car. Au terme de cette réorientation<br />
professionnelle, il poursuit cette activité<br />
à la régie du Locle.<br />
Depuis 30 ans, il est affilié au syndicat,<br />
tout d’abord à l’Union PTT, puis à <strong>syndicom</strong>.<br />
Depuis le 1er janvier 2018, il préside<br />
la commission d’entreprise de<br />
CarPostal.<br />
Texte : Sylvie Fischer<br />
Photo : Yves <strong>Le</strong>resche<br />
J’aime mon métier,<br />
alors je fais le nécessaire<br />
dans tous les cas<br />
De tout temps, les tâches à accomplir<br />
lors de l’entrée en service en tant que<br />
chauffeur de car ont été nombreuses,<br />
et le temps prévu pour les réaliser<br />
ne suffit <strong>pas</strong> toujours. Il y a 20 ans,<br />
il y avait encore des employés au<br />
garage qui pouvaient nous aider au<br />
contrôle des véhicules, entre collègues,<br />
on se donnait des coups de<br />
main. Aujourd’hui, on est le plus<br />
souvent seul.<br />
Tout comme plus de 1300 personnes,<br />
j’ai soutenu la pétition « Pas<br />
de travail <strong>gratuit</strong> chez CarPostal »,<br />
qui exige que tous les travaux accomplis<br />
(y compris ceux qui ne figurent<br />
<strong>pas</strong> dans le plan de service) soient<br />
enregistrés comme temps de travail<br />
et ne puissent être effectués durant<br />
le temps libre. Nous revendiquons<br />
aussi que les prestations de travail<br />
soient inscrites de manière transparente<br />
dans le décompte des heures<br />
travaillées. La bonne nouvelle, c’est<br />
que CarPostal entre en matière pour<br />
négocier sur ces points délicats.<br />
Nous avons de plus en plus de<br />
matériel électronique qu’il faut<br />
installer au début du service. <strong>Le</strong>s<br />
instructions de service nous parviennent<br />
sur tablette. <strong>Le</strong>s nouvelles<br />
caisses ISA pour la vente de billets<br />
électroniques doivent être mises en<br />
route, tout comme le PA 700, pour<br />
scanner les titres de transport, le tachygraphe<br />
numérique exigé par la<br />
Loi sur la circulation routière (LCR).<br />
Il sert à contrôler la vitesse, le temps<br />
de travail et fournit les données nécessaires<br />
en cas d’accident. Puis il<br />
faut vérifier l’eau, l’huile, le contrôle<br />
technique du véhicule, à l’intérieur<br />
comme à l’extérieur.<br />
<strong>Le</strong> temps est trop juste pour<br />
effectuer toutes ces tâches, ce qui<br />
nous oblige à venir en avance pour y<br />
arriver. Si mon chef de service est<br />
conscient de ces difficultés, il y a des<br />
différences régionales choquantes<br />
dans le temps compté pour réaliser<br />
ces tâches.<br />
À la fin du service, il faut faire le<br />
plein, ajouter l’additif, balayer son<br />
car, débrancher tous les systèmes<br />
électroniques, nettoyer pare-brise et<br />
carrosserie, ranger la caisse. Là aussi,<br />
le temps est parfois trop juste et<br />
on prend sur son temps libre.<br />
Ce qui n’est <strong>pas</strong> compté, c’est le<br />
temps de faire la comptabilité de fin<br />
de mois et les versements que nous<br />
faisons à CarPostal. Je le fais sur mes<br />
pauses. J’aime mon métier, donc je<br />
prends sur moi, par conscience professionnelle,<br />
de faire le nécessaire<br />
dans tous les cas.<br />
Il est clair que nous sommes parfois<br />
pris dans des bouchons qui nous<br />
font prendre du retard, ou bloqués<br />
par la neige, et nous ne pouvons rejoindre<br />
immédiatement le garage.<br />
Je ne fais une fiche de travail pour le<br />
signaler que si cela dé<strong>pas</strong>se 15 minutes,<br />
si c’est moins, je laisse tomber<br />
: cela prendrait trop de temps.<br />
Pour moi, CarPostal n’est <strong>pas</strong><br />
une entreprise comme les autres.<br />
On y tient comme aux souvenirs de<br />
course d’école qui y sont liés. J’espère<br />
que les négociations aboutiront.<br />
https://bit.ly/2HH6eP9
18<br />
Impressum<br />
Rédaction : Sylvie Fischer, Giovanni Valerio,<br />
Marc Rezzonico, Marie Chevalley<br />
Courriel : redaction@<strong>syndicom</strong>.ch<br />
Traductions : Alexandrine Bieri, Laurence Strasser<br />
Illustrations, dessins de portrait : Katja <strong>Le</strong>udolph<br />
Images sans © : mises à disposition<br />
Layout, correction, Mot mystère imprimerie : : Stämpfli AG,<br />
Wölflistrasse 1, 3001 Berne<br />
Mots-croisés Syndicom juillet 2018<br />
I<br />
II<br />
III<br />
IV<br />
V<br />
VI<br />
VII<br />
VIII<br />
IX<br />
Changements d’adresse : <strong>syndicom</strong>, gestion<br />
des adresses, Monbijoustrasse 33, case postale,<br />
3001 Berne. Tél. 058 817 18 18, fax 058 817 18 17<br />
Annonces : priska.zuercher@<strong>syndicom</strong>.ch<br />
Commande d’abonnements : info@<strong>syndicom</strong>.ch<br />
<strong>Le</strong> prix de l’abonnement est inclus dans la cotisation<br />
de membre. Non-membres : Fr. 50.– (Suisse),<br />
Fr. 70.– (étranger)<br />
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11<br />
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15<br />
5<br />
2 1<br />
Mots-croisés X Syndicom juillet 2018<br />
15 II<br />
VI<br />
3<br />
VII<br />
6 7 8 9 10 11<br />
9 10 11 12 13 14 15<br />
I<br />
III<br />
IV<br />
V<br />
VIII<br />
IX<br />
X<br />
Mot mystère :<br />
4<br />
DÉFINITIONS<br />
Horizontalement : I. Caquelon<br />
5<br />
fédéral. II Sortie de sa réserve. Dans<br />
un périmètre. III. Identique.<br />
Désabusée. IV. Bélier contre bélier.<br />
Øre noire. Maxi 45, 1 ou presque. V.<br />
Tirs aux buts. Deux. Matière. Plein.<br />
VI. Tricot. Quinter. VII. Souillonnes.<br />
Familier. Exclu. VIII. Ne pensent <strong>pas</strong><br />
à moi. Vides. IX. Au féminin.<br />
Condition. 7 Plantons. X. Approuvez.<br />
Ne fait <strong>pas</strong> le poids.<br />
Verticalement : 1. Ragoûts. 2.<br />
Descente d'aliments. 3. Cœur de<br />
temple. Sujet. 4. Divinité du jeu.<br />
Maison de Brassens. 5. Abîmée.<br />
Amarrage. 6. Cœur de néon. Prenait<br />
une pinte de bon sang. 7. 6 Pas une<br />
Annonce<br />
science. Données. 8. Note clé. Outils<br />
du hasard. 9. Optique ou musculaire.<br />
Réflexif. 10. Pue peu ou prou.<br />
Certains n'en manquent <strong>pas</strong>. 11. À<br />
durée déterminée. Partie. 12.<br />
Bouchait un trou. 13. Mal. Corrigé.<br />
Œil de Washington. 14. Mâtèrent. 15.<br />
Zone commerciale. Que je crève.<br />
3<br />
DÉFINITIONS<br />
4<br />
7<br />
Horizontalement : I. Caquelon<br />
fédéral. II Sortie de sa réserve. Dans<br />
un périmètre. III. Identique.<br />
Désabusée. IV. Bélier contre bélier.<br />
Øre noire. Maxi 45, ou presque. V.<br />
Tirs aux buts. Deux. Matière. 6 Plein.<br />
VI. Tricot. Quinter. VII. Souillonnes.<br />
Familier. Exclu. VIII. Ne pensent <strong>pas</strong><br />
à moi. Vides. IX. Au féminin.<br />
Condition. Plantons. X. Approuvez.<br />
Ne fait <strong>pas</strong> le poids.<br />
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11<br />
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15<br />
3<br />
2 1<br />
3<br />
Verticalement : 1. Ragoûts. 2.<br />
Descente d'aliments. 3. Cœur de<br />
temple. Sujet. 4. Divinité du jeu.<br />
4<br />
Maison de Brassens. 5. Abîmée.<br />
Amarrage. 6. Cœur de néon. Prenait<br />
3<br />
une pinte de bon sang. 7. Pas une<br />
science. Données. 8. Note clé. Outils<br />
du hasard. 9. Optique ou musculaire.<br />
Réflexif. 10. Pue peu ou prou.<br />
Certains n'en manquent <strong>pas</strong>. 11. À<br />
durée déterminée. Partie. 12.<br />
Bouchait un trou. 13. Mal. Corrigé.<br />
Œil de Washington. 14. Mâtèrent. 15.<br />
7<br />
Zone commerciale. Que je crève.<br />
6<br />
3<br />
DÉFINITIONS<br />
Editeur : <strong>syndicom</strong> – syndicat des médias<br />
et de la communication, Monbijoustr. 33,<br />
case postale, 3001 Berne<br />
<strong>Le</strong> <strong>magazine</strong> <strong>syndicom</strong> paraît six fois par an.<br />
<strong>Le</strong> numéro 7 paraîtra le 7 septembre 2018.<br />
Délai rédactionnel pour le prochain numéro :<br />
DÉFINITIONS<br />
le 30 juillet 2018.<br />
Horizontalement : I. Caquelon<br />
fédéral. II Sortie de sa réserve. Dans<br />
un périmètre. III. Identique.<br />
Désabusée. IV. Bélier contre bélier.<br />
Øre noire. Maxi 45, ou presque. V.<br />
Tirs aux buts. Deux. Matière. Plein.<br />
VI. Tricot. Quinter. VII. Souillonnes.<br />
Familier. Exclu. VIII. Ne pensent <strong>pas</strong><br />
à moi. Vides. IX. Au féminin.<br />
Condition. Plantons. X. Approuvez.<br />
Ne fait <strong>pas</strong> le poids.<br />
Verticalement : 1. Ragoûts. 2.<br />
Descente d'aliments. 3. Cœur de<br />
temple. Sujet. 4. Divinité du jeu.<br />
Maison de Brassens. 5. Abîmée.<br />
Amarrage. 6. Cœur de néon. Prenait<br />
une pinte de bon sang. 7. Pas une<br />
science. Données. 8. Note clé. Outils<br />
du hasard. 9. Optique ou musculaire.<br />
Réflexif. 10. Pue peu ou prou.<br />
Certains n'en manquent <strong>pas</strong>. 11. À<br />
durée déterminée. Partie. 12.<br />
Bouchait un trou. 13. Mal. Corrigé.<br />
Œil de Washington. 14. Mâtèrent. 15.<br />
Zone commerciale. Que je crève.<br />
31<br />
<strong>Le</strong>s mots croisés<br />
<strong>Le</strong>·la gagnant·e, dont le nom paraîtra<br />
dans le prochain <strong>magazine</strong>, recevra une<br />
carte cadeau de 40 francs, offerte par<br />
notre partenaire Coop. Prière d’envoyer<br />
votre solution (le mot-mystère seulement)<br />
jusqu’au 14 août à Rédaction<br />
<strong>syndicom</strong>, Monbijoustrasse 33,<br />
case postale, 3001 Berne.<br />
Horizontalement : I. Caquelon<br />
fédéral. II Sortie de sa réserve. Dans<br />
un périmètre. III. Identique.<br />
Désabusée. IV. Bélier contre bélier.<br />
Øre noire. Maxi 45, ou presque. V.<br />
Tirs aux buts. Deux. Matière. Plein.<br />
VI. Tricot. Quinter. VII. Souillonnes.<br />
Familier. Exclu. VIII. Ne pensent <strong>pas</strong><br />
à moi. Vides. IX. Au féminin.<br />
Condition. Plantons. X. Approuvez.<br />
Ne fait <strong>pas</strong> le poids.<br />
<strong>Le</strong> gagnant du dernier mots croisés<br />
La solution du mots croisés du<br />
<strong>magazine</strong> <strong>syndicom</strong> 5/2018 était<br />
« GRATUIT ».<br />
<strong>Le</strong> gagnant est Monsieur<br />
Jean-François Gasser, de Romanel.<br />
Il recevra un chèque REKA d’une valeur<br />
de 50 francs.<br />
Chaleureuses félicitations !<br />
Verticalement : 1. Ragoûts. 2.<br />
Descente d'aliments. 3. Cœur de<br />
temple. Sujet. 4. Divinité du jeu.<br />
Maison de Brassens. 5. Abîmée.<br />
Amarrage. 6. Cœur de néon. Prenait<br />
une pinte de bon sang. 7. Pas une<br />
science. Données. 8. Note clé. Outils<br />
du hasard. 9. Optique ou musculaire.<br />
Réflexif. 10. Pue peu ou prou.<br />
Certains n'en manquent <strong>pas</strong>. 11. À<br />
durée déterminée. Partie. 12.<br />
Bouchait un trou. 13. Mal. Corrigé.<br />
Œil de Washington. 14. Mâtèrent. 15.<br />
Zone commerciale. Que je crève.
32 Interactifs<br />
<strong>syndicom</strong> social<br />
<strong>Le</strong> Matin <strong>pas</strong>se en numérique.<br />
Signe des temps ? 7.6.2018<br />
La parution du quotidien orange, dans sa<br />
version papier, prendra fin le 22 juillet<br />
2018. À la clé, une quarantaine de licenciements,<br />
dont 24 journalistes. Justifiée<br />
comme un signe des temps, cette décision<br />
de Tamedia s’explique en réalité uniquement<br />
par la perte de 6,3 mio de francs<br />
du titre en 2017.<br />
UNI Global Union 10.6.2018<br />
Inside SDA/ATS @inside_sda 10.6.2018<br />
Quelques exemples : le personnel diminue, mais il y a<br />
désormais un responsable des ressources humaines,<br />
un secrétaire général et un Head Executive Sales à l’ATS.<br />
#ENOUGH 18 13.6.2018<br />
Réserve déjà la date du 22 septembre 2018. Ce jour-là,<br />
grande manifestation à Berne pour revendiquer la tant<br />
attendue parité salariale ! Nous serons à tes côtés et si<br />
tu es membre, les transports publics te seront offerts !<br />
<strong>Le</strong> nouveau rapport d’UNI Global<br />
Union, rédigé par Christina<br />
Colclough, se concentre sur les<br />
plateformes de talents en ligne et<br />
les intermédiaires du marché du<br />
travail.<br />
Il est disponible en français et anglais<br />
sur http://www.thefutureworldofwork.org.<br />
<strong>syndicom</strong> se prépare aux<br />
nouveaux défis de notre époque 9.6.2018<br />
<strong>Le</strong>s défis de la transformation numérique<br />
et la meilleure manière d’y faire face en<br />
tant que syndicat ont été au centre de<br />
la poursuite du congrès.<br />
La CCT Swisscom 2018<br />
est signée ! 4.6.2018<br />
L’accord contient d’importantes améliorations<br />
pour faire face à la transformation<br />
numérique. Entre autres, le droit à<br />
ne <strong>pas</strong> être joignable pendant son temps<br />
libre, cinq jours de perfectionnement<br />
payés par année et la protection des<br />
données sur le lieu de travail.<br />
Adèle Thorens @adelethorens 7.6.2018<br />
@<strong>Le</strong>matinch va disparaître, le journal que tout le monde<br />
lisait au bistrot.<br />
Mais, pour le Conseil fédéral, répondant à ma question<br />
de la semaine <strong>pas</strong>sée, il n’y a (presque) rien à faire pour<br />
préserver la diversité de l’information.<br />
La Poste – calculateur de salaire 2018 19.06.2018<br />
Depuis que notre calculateur de salaire à La Poste en 2018<br />
a été mis en ligne, vous avez été bien 17 000 à l’essayer<br />
sur notre site web ! Merci de votre confiance !<br />
<strong>Le</strong>s emojis végans débarquent 6.6.2018<br />
Un petit détail dans les emojis de votre clavier vient de<br />
changer. L’avez-vous vue ? La salade ? Il n’y a plus d’œuf<br />
depuis début juin ! Ceci parce que Google se préoccupe du<br />
respect de toutes les sensibilités, dont le véganisme.<br />
La numérisation s’accélère<br />
500 postes menacés à Vevey 29.5.2018<br />
Nestlé a annoncé la restructuration de<br />
son service des technologies informatiques<br />
et la délocalisation sur son hub<br />
technologique en Espagne. Environ<br />
500 emplois pourront <strong>pas</strong>ser à la<br />
trappe. La Suisse manquerait-elle de<br />
personnel qualifié adéquat ? Ou n’estce<br />
qu’une question de gros sous ?<br />
L’Intelligence artificielle et<br />
le Mondial 13.6.2018<br />
Un clin d’œil à la Coupe du monde de foot ne<br />
pouvait manquer ! Goldman Sachs a utilisé<br />
l’intelligence artificielle, renforcée par<br />
Machine <strong>Le</strong>arning, pour prédire qui gagnera<br />
la Coupe du monde 2018. <strong>Le</strong> vainqueur –<br />
spoiler alert – sera le… Brésil !