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EDITO
PAR MARTINA CAPPUCCIO
L’urgence climatique:
vers une véritable prise de conscience?
La lecture de l’actualité climatique est devenue source d’angoisse
et de remise en question constante: les Etats-Unis ont officialisé
il y a quelques semaines leur retrait des accords de la COP21; la
Chine, premier pollueur mondial, a annoncé qu’elle n’atteindrait
son pic de rejet de CO 2
qu’en 2030, au plus tard; 55,3 gigatonnes de
CO 2
ont été produites en 2018, établissant ainsi un nouveau record
de pollution. L’éco-anxiété provoquée par le rappel constant des
conséquences du réchauffement et par le sentiment d’incapacité à
agir concrètement pour les atténuer prend doucement de l’ampleur.
Alors que le Royaume-Uni, la France et l’Autriche avaient déjà
décrété l’urgence climatique, ce n’est que le 28 novembre dernier
que le parlement européen a pris cette résolution à son tour. Sans
être lié à des contraintes légales fortes, le vote a surtout réaffirmé
symboliquement l’ambition européenne de limiter le réchauffement
planétaire à 1,5 degré depuis l’ère pré-industrielle. Ces objectifs sont
par ailleurs intégrés au plan d’investissement InvestEU prévoyant le
financement d’infrastructures durables et de projets de recherche et
innovation de 2021 à 2027. Ce vote intervient à l’aube de l’entrée en
fonction d’une nouvelle commission d’une part et du lancement de
la COP25 à Madrid de l’autre. Un peu à la traine comparativement à
ses Etats-membres, la décision fait toutefois de l’Europe le premier
continent à reconnaitre l’urgence climatique.
Mais les ambitions européennes sont-elles suffisantes? Suite aux
retards accumulés mondialement dans la réduction des émissions
de CO 2
, le Programme des Nations unies pour l’environnement
(PNUE) indique dans son dernier rapport qu’il faudrait réduire
les émissions de gaz à effet de serre globales de 7,6% par an
jusqu’en 2030 pour espérer atteindre un objectif de réchauffement
maximum de 1,5 degré. Le Programme souligne également qu’une
procrastination au-delà de l’année 2020 rendrait cet objectif tout
simplement inatteignable. Face à ces chiffres, les engagements
pris par les Etats lors de la COP21 apparaissent donc insuffisants.
Déjà à l’époque, l’accord avait anticipé cette insuffisance puisqu’il
prévoyait une révision de ces obligations d’ici 2020. Or, à l’heure
actuelle, seuls 68 pays ont promis de revoir leurs engagements à la
hausse. Le hic? ils ne représentent que 8% des émissions mondiales.
L’Etat luxembourgeois s’est quant à lui engagé à réduire ses émissions
de 50 à 55% d’ici 2030, objectif parfaitement aligné aux nécessités
rappelées par l’ONU. Toutefois, le 29 novembre dernier, alors que
le Black Friday faisait s’amasser les foules aux caisses des grands
magasins dans un élan effréné de consumérisme, 80 manifestants
de Youth for Climate se sont mobilisés devant la Chambre pour
réclamer des éclaircissements sur les moyens qui seront mis en place
par le gouvernement pour y parvenir.
Le même jour, on observait des marches pour le climat et
mouvements anti Black Friday grandir dans de nombreux pays
d’Europe. En France par exemple, où cette pratique commerciale
pourrait devenir illégale car jugée agressive, antisociale et
antiécologique, les partisans du Block Friday ont manifesté dans les
rues et bloqué l’accès de grandes enseignes. Le mouvement Green
Friday a quant à lui été rejoint par de nombreux magasins cherchant
à mieux valoriser les ressources et revenir à une consommation plus
sociale et durable.
Alors que les émissions de gaz à effet de serre ne cessent d’augmenter,
l’ONU envoie un message alarmant, clairement exprimé dans
l’intitulé de sa nouvelle Conférence des Parties: «Time for
action». La fenêtre d’action climatique permettant de préserver
ce qu’il reste de la biodiversité se referme en effet doucement. Les
politiques mondiales parviendront-elles à répondre aux attentes
d’une population dont les actions citoyennes concrètes prouvent
l’attachement à la cause? Le coup d’envoi de la COP25 est donné. n