Exemple et Mise en Œuvre d’Entrepreneuriat Social en Haïti basant sur une Définition de Defourny

En-tête : ENTREPRENEURIAT SOCIAL EN HAÏTI : EXEMPLE ET MISE EN ŒUVRE…

ENTREPRENEURIAT SOCIAL EN HAÏTI : EXEMPLE ET MISE EN ŒUVRE…
Exemple et Mise en Œuvre d’Entrepreneuriat Social en Haïti basant sur une Définition de
Defourny
Rédigé par Michael Christolin
19/12/2018

ENTREPRENEURIAT SOCIAL EN HAÏTI : EXEMPLE ET MISE EN ŒUVRE…
« L’entrepreneuriat social est un processus porté par un individu ou un groupe d’individus,
qui va de la détection des besoins communautaires non satisfaits par les acteurs habituels jusqu’à
l’exécution d’un projet viable en y apportant des solutions, et peut être défini par un certain nombre
de caractéristiques » (Defourny, 2004).
Compte tenu de la définition préalablement citée, cette recherche prendra appui sur un
exemple d’entrepreneuriat social en Haïti et présentera la démarche de sa mise en œuvre.
L’exemple d’entrepreneuriat social en Haïti qui servira de base à cette étude est: « The National
Rural Electric Cooperative Association (NRECA) ». Cette Compagnie distribue de l’électricité au
parc Industriel de Caracol et aux zones environnantes du parc comme Terrier-Rouge, Limonade et
Trou-du-Nord. Selon Belfort (2014), cette association vend de l’électricité à ces zones en raison
du surplus dont elle dispose dans le parc industriel de Caracol.
Entre autres, trois points essentiels constituent la définition susmentionnée : (1) Détection des
besoins communautaires non satisfaits par les acteurs habituels ; (2) exécution d’un projet viable;
et (3) des solutions apportées. Ces trois points justifient le choix de l’exemple de NRECA.
Pour renforcer les données recueillies sur le web, une entrevue a été menée auprès de 7 personnes
qui utilisent les services de NRECA. Selon une hypothèse de Kvale (1996), le but de l’entrevue
visant une recherche qualitative, tente d’obtenir une description la plus précise possible du vécu
de la personne interviewée. De la sorte, les réponses des interviewés viendront valider voire étoffer
les minces informations trouvées sur le Web concernant l’organisation en question. Se basant sur
le conseil de Fortin (2010) on précisera aux participants à une recherche de ce type, que les données
individuelles demeureront strictement confidentielles, assurant ainsi le respect au droit de
confidentialité des participants.

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Les Points constituant la Définition de Defourny (2004)
Point 1 : Détection des besoins communautaires non satisfaits par les acteurs habituels
Une enquête menée par Pierre (2018) montre qu’en 2016, sur 10 Haïtiens, seulement quatre
ont accès à l’énergie électrique contre 8 au Nicaragua. En se fondant sur ce résultat d’enquête, le
besoin de l’électricité est loin d’être satisfait par les acteurs habituels en Haïti –surtout hors de la
zone métropolitaine. Tous les participants déclarent qu’ils n’ont aucun doute sur la satisfaction
apportée par NRECA.
Par exemple, le participant 5 déclare que : « Bien qu’on lui reproche parfois ses bénéfices, il
s’avère que NRECA contribue largement à l’amélioration des conditions de vie et de travail de la
population, tout en répondant aux urgences écologiques du pays et plus globalement de la
planète ». De son coté, le participant 7 pense que : « Par rapport aux services offerts par le réseau
public d’électricité le NRECA fait la différence grâce à sa ponctualité et la qualité de son service
fourni ». Pour le participant 2, « Contrairement aux acteurs habituels gérant l’électricité dans la
zone, le NRECA favorise les investissements et les activités de la communauté se prolongent
jusqu'au soir. Les matériels électroniques prolifèrent dans tous les coins, ce qui change au mieux
le train de vie de la population. »
Le participant 1 déclare clairement ce qui suit : « Les services de NRECA participe beaucoup a
l’amélioration des vies des humains et on chercherait longtemps avant d’identifier quelques
entreprises dignes du nom dans notre chère Haïti ».
Pour l’interviewé 6, sa satisfaction est évidente en faisant cette déclaration : « NRECA détient une
force de grande envergure au près de ses clients, on voit pourquoi on paie. On trouve du service et
on ne peut pas s’en plaindre. Pour une coupure de courant de plus d’une heure, faudrait qu’il y ait
un problème majeur et dans certains cas on est déjà averti ».

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Point 2 : Exécution d’un projet viable
Un dirigeant d’entreprise n’est pas un psychiatre, un psychologue ou un travailleur social.
Toutefois, il a une responsabilité envers les personnes qui sont de bonne foi, qui veulent apprendre
et se développer de façon «durable» (Porcedda et Lapierre, 2008). De la sorte, Pierre (2018) met
l’accent sur le fait que la distribution de lampes, entreprise par l’actuel gouvernement, d’ailleurs
limitée en termes de couverture, ne serait pas une mesure durable, car une fois que les lampes
auront atteint leur vie utile (qui est de courte durée, d’ailleurs) la majorité de la population
reviendra à l’utilisation des lampes de kérosène et du clair de lune. Il s’agit donc là d’une solution
provisoire et non pérenne.
Un taux de 98% des participants avoue que le projet de NRECA favorise la régénérescence de ces
zones bénéficiant de ses services. Pour le participant 5 : « La Cie NRECA est non seulement fiable
pendant qu’elle fournit des services d’électricité, mais elle permet surtout aux gens de gagner de
l’argent par le biais de ses services. En un mot, le NRECA donne vie à ces zones qui bénéficient
de ses services et les bénéficiaires ont la possibilité de créer des petites entreprises; par exemple,
les gens ont la possibilité de vendre des boissons congelés, glaçons, etc. » et le participant 4
déclare fièrement que : « l’arrivée de NRECA rend plus attrayantes ces zones cibles et du coup on
peut voir une sorte de migration des personnes vers ces localités ».
Selon le septième objectif de développement durable (ODD) il faut s’attacher à « garantir l’accès
de tous des services énergétiques fiables, durables et modernes, à un cout abordable » d’ici 2030
La solution proposée par le gouvernement n’apparaissant pas comme suffisante. Donc, il
semblerait que le projet de NRECA soit utile et viable. Une déclaration du participant 6 indexant
les forces de la compagnie en question semble bien confirmer la viabilité : « Quand on regarde le
reste du pays, on peut comprendre la véracité de l’existence de la compagnie NRECA dans les
parages ».
La déclaration suivante de Joachim (2017) détient une vérité incontestable et qui corrobore la
définition de Defourny (2004) cité en introduction : « En créant la richesse, les chefs d’entreprise
accomplissent une part importante de leur mission. Mais la mission de l’entreprise ne s’arrête pas
là. Comme bien souvent on a tendance à le croire chez nous, l’entreprise fait partie de la société,
dans ce cas elle doit intégrer, partager et encourager des valeurs nobles. »

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Point 3 : Solutions apportées
Pour apporter les solutions escomptées, il faut que l’engagement sociétal d’entreprise soit
présent. Cependant, on se demande fort souvent si la notion de responsabilité sociale s’applique
aux entreprises haïtiennes. Selon Joachim (2017), nombreuses sont les entreprises haïtiennes qui
ont largement contribué à la pollution et à l'état de délabrement de l’environnement haïtien.
L'auteur fait remarquer aussi la fréquence des entreprises du pays qui disséminent de manière
sauvage leurs déchets industriels ici et là, sans se soucier des effets nocifs de ces déchets sur la
population. Néanmoins, 100% des interviewés sont unanimes sur le fait que NRECA apporte des
solutions souhaitées par les circonscriptions bénéficiaires de ses services.
Le participant 3 a même déclaré que : «Le pays entièrement reconnait que les zones ne sont plus
dans le noir, et ça c’est grâce aux services de NRECA ». De son côté le participant 7 pense que :
« l’entrepreneuriat social doit très explicitement agir en faveur de la collectivité, la Cie NRECA
s’attaque directement à l’un des besoins importants de la population, et ses services privilégient
l’action sociale ou environnementale ». « …Et surtout, son service est stable et régulier » a déclaré
le participant 2.
Ce besoin des populations, auquel répond la compagnie NRECA est tellement crucial qu’il serait
intéressant de faire un point sur l’avantage économique que pourrait procurer nationalement une
telle initiative. Sur ce, Pierre (2018) supporte l’hypothèse de la croissance, montrant qu’une
augmentation conséquente de la consommation de l’énergie contribue à la croissance de la
production nationale. Se basant sur cette idée, Pierre (2018) pense que l’émergence économique
d’Haïti sans l’optimisation du secteur énergétique/électrique parait difficile.

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Au gré des témoignages concernant l’association NRECA, on peut dire qu’elle est l’une
des entreprises mettant en œuvre l’entrepreneuriat social en Haïti. Si l’on considère le bilan de
Joachim (2017) qui montre que les détritus qui jonchent certaines artères de grandes villes ne sont
pas uniquement les rejets des ménages, mais aussi de nombreuses entreprises dans le pays, choisir
l’association NRECA comme exemple d’entrepreneuriat social est assez judicieux, (et offre des
réponses concrètes a des problématiques tant environnementales que sociétales) .
Certains diraient que le type d’entrepreneuriat qu’elle exerce est loin d’être sociale, aux vues des
profits qu’elle génère. Le participant 1 déclare : « Je pense que le service de NRECA améliore la
vie de la population et je crois beaucoup en sa viabilité, sauf que c’est une entreprise à but
lucratif ». Cependant il est crucial de se rappeler que l’entrepreneur social se définit par son
objectif, qui est d’agir explicitement en faveur de la collectivité. Cet objectif l’emporte sur des
considérations économiques, même si ces dernières entrent étroitement en compte dans la finalité
du projet, car l’entrepreneur social comme tout autre entrepreneur, doit générer des ressources
nouvelles. Toutefois, la volonté d’enrichissement ou de compétitivité, n’en est pas moins présente
puisque la société dans laquelle il est inséré est basée plus ou moins explicitement sur la
concurrence et le profit. Ainsi, il est important de réfléchir sur la subséquente pensée de Joachim
(2017) : « Faire du profit ne doit pas dispenser une entreprise de ses responsabilités sociales. Ainsi,
faire le social n’est pas une option mais une obligation pour toute entreprise digne de ce nom ». Il
est évident que, parce que l’Etat souffre d’une faiblesse institutionnelle quasiment à tous les
niveaux, la participation des secteurs organisés comprenant les entrepreneurs sociaux comme ceux
de la compagnie NRECA s’avère urgemment nécessaire. On peut penser qu’en Haïti, il n’est plus
possible, à l’avenir, de se passer de ce type d’entreprenariat qui vise à pallier les manquements de
l’Etat, qu’ils soient dus à sa déficience de moyens ou à son manque de volonté concernant les
problèmes sociaux et environnementaux qui sont, nous le savons tous, tout à fait prioritaires.

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Questionnaire d’enquête
Cette entrevue a été réalisée en décembre 2018 sur 7 sujets à Limonade et au trou du Nord.
1) Pensez-vous que la Compagnie NRECA applique un modèle d’entrepreneuriat social ?
2) Comment ce type d’entrepreneuriat affecte-t-il les circonscriptions bénéficiaires ?
3) Comment comparez vous les acteurs habituels gérant l'électricité dans la zone avec les
entrepreneurs de NRECA ?
4) Quelles sont, d’après vous, les faiblesses de NRECA ?
5) Quelles sont, d’après vous, les forces de cette compagnie ?

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Références
Belfort, J. (2014) Le Nouvelliste. L’electricité et le calme reviennent à Ouanaminthe, mais…
Boutillier, S. (2008). L’entrepreneur social, un entrepreneur socialisé dans une
sociétéentrepreneuriale ? DOI 10.3917/hume.290.0041
Fortin, M.-F. (2010). Fondements et étapes du processus de recherche : méthodes quantitatives et
qualitatives. Montréal, Québec :ChenelièreÉducation.
Joachim, D. (2017-02-03 |). Le Nouvelliste. La responsabilité sociale des entreprises. Récupéré le
10 Decembre 2018 de : https://lenouvelliste.com/article/168091/la-responsabilite-socialedes-entreprises
Kvale, S. (1996). Interviews: An Introduction to Qualitative Research Interviewing. London :
SAGE.
Pierre, J. H. (2018-06-25). Électricité et croissance économique en Haïti. Le Nouvelliste. EPP
Porcedda, A. L. & Lapierre, L. (2008) Leadership et développement durable. Gestion 2008/3 (Vol.
33), p. 41-44. DOI 10.3917/riges.333.0041
Tremblay, D.-G., Klein. J.-L &Fontan, J.-M. (2015). Initiatives locales et développement
socioterritorial (2emedition).Canada : Biblioteque et Archives nationales du Québec.