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Magazine 360° numéro 199

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Pratiques

synthétiques

Santé communautaire

Chemsex & addictions

Militantisme

Défis du féminisme

Genre

Au-delà de la loi

360° novembre 2020 - N°199



Edito

Au revoir

Je suis venu vous dire que je m’en vais. Bientôt 10 ans

que je suis au service de cet incroyable objet qu’est le

magazine 360°. Le temps pour moi de passer la main et

d’embrasser de nouvelles perspectives. Près de 10 ans que

j’ai l’immense honneur de porter et d’incarner, les luttes

LGBTIQ+ à l’échelle suisse et francophone. Je n’ai pas assez

de mots pour décrire la fierté que cela a été pour moi.

Bien que je connaisse ma force de caractère et de travail,

je ne suis pas sûr que si on m’avait dit, alors que je

revenais du Québec en 2001, que je serai un jour en position

de participer directement à la reconnaissance du droit

de toutes·x et tous·x à la différence, je l’aurais cru. Merci

à celles et ceux qui m’ont fait confiance. Je vous aime. Ce

magazine m’a permis d’être qui je suis aujourd’hui : un

homme collectivement fier et intimement convaincu que

la convergence des luttes est un puissant moteur de changements

socio-économiques nécessaires, bien au-delà de

l’acronyme qui nous rassemble.

360° est composée de personnes fabuleuses animées

uniquement par la volonté de faire exister des thématiques

qui étaient encore invisibles au moment de la création

du mag en 1998. Ce fut pour moi un privilège d’être leur

rédacteur en chef. Je suis heureux d’avoir pu être le relais

rédactionnel d’importantes victoires sur le VIH avec l’arrivée

des nouveaux traitements et la possibilité pour celles et

ceux qui sont touché·e·s de vivre leur vie sans peur de faire

du mal aux personnes qu’ils et elles aiment. Je suis comblé

d’avoir pu accompagner le long processus qui devrait nous

amener bientôt au mariage égalitaire et d’avoir permis de

mettre en lumière des réalités qui ont cours dans des régions

du monde moins privilégiées que la nôtre. La liste des

moments de bonheur est longue mais il faut rester intellectuellement

honnête et être bien conscient·e·x, notamment

pour nos frères et nos soeurs trans* et intersexe, du chemin

qu’il nous reste à parcourir. Nous oublions parfois la chance

que l’on a d’avoir un support de contenu indépendant, de

qualité et gratuit dans un bassin de population aussi restreint

que le nôtre. C’est un vecteur indispensable pour que

nous puissions avancer ensemble. Chérissez ce magazine !

Soutenez-le par tous les moyens utiles ! La presse va mal et

la survie du titre n’est pas acquise.

Par ces quelques lignes, j’aimerais enfin vous remercier

du plus profond de mon cœur chères lectrices et chers lecteurs.

Nous formons une famille. Comme dans toutes les

familles nous ne sommes pas toujours d’accord mais nous

devons, autant que possible, nous aimer, nous protéger les

un·e·s·x les autres. Afin que nous restions en contact, je vous

invite à me rejoindre sur twitter et instagram (vous trouverez

mes liens adossés à ma signature). Merci pour ce que vous

m’avez apporté durant toutes ces années. Merci de m’avoir

permis de construire ma vie en adéquation avec mon cœur

et mes convictions. Sans vouloir me donner trop d’importance,

je vous le promets, nous nous retrouverons.

Guillaume Renevey, rédacteur en chef

Twitter: @g_renevey, Instagram: @kidiomatik

Rédaction en chef

Guillaume Renevey

(guillaume@magazine360.ch)

Rédaction textes

Edmée Cuttat, Greta Gratos, Alexandre

Lanz, Guillaume Renevey, Antoine Bal,

Johanna Schopfer, Antoine Gessling,

Lana Cueto, Katja Baud-Lavigne,

Annabelle Georgen, Yann Hakam

Corrections

Zelda Chauvet, Zino Davidoff

Rédaction image

Ester Paredes

Graphisme

Marion Bareil (Tourmaline studio)

Stéphane Hernandez

Publicité

Philippe Scandolera (pub@360.ch)

Jérémy Uberto (marketing@360.ch)

Stéphanie Siggen

(stephanie.siggen@360.ch)

Christina Kipshoven

(christina@mannschaft.com)

Abonnement

Rolan Delorme (abo@360.ch)

Expédition

Alain, André, Claude, Erdal, Jacques,

Laurentiù, Otto, Giovanni, Jérôme

Editeur

Association Presse 360

Impression

Appi, Gland

360°

36, rue de la Navigation

CP 2217 – CH-1211 Genève 2

Tél. 022 741 00 70

Toute reproduction est strictement

interdite pour tous les pays, sauf

autorisation écrite de 360°.

Vignette édito © Patrick Mettraux

Couverture © Victor de Castro

Des exemplaires vous sont offerts

dans tous les lieux partenaires

LGBTIQ+ et friendly de Suisse

romande. 360° est un magazine

indépendant dont le contenu

rédactionnel ne reflète pas

nécessairement les positions de

l’Association 360. Retrouvez toutes

les infos sur 360.ch

360° novembre 2020 - N°199 1



Sommaire

P25 P37

P4

Culture

festival

Ce n’est pas que du cinéma

Culture

P35

mode

Vivienne Westwood, green

queen

Gaymap

P19

Sortez couvert·e·s de

cinéma

couleurs

Actu

De l’ambition et du piment

P37

internationale

au GIFF

Infos Partenaires

Homoparents russes P25

P42-43

contraints à l’exil

musique

Chants nocturnes de Greta

P4

Musique pour toutes·x

Gratos

Le Royaume-Uni va compter P27

P44

sa population LGBT quotient queer

P5

Alliée de cœur à 100%

Bref, le monde...

P28

P5

danse

Allemagne

Louve y es-tu ?

Berlin perd un de ses squats P30

historiques

théâtre

P6

Vu d’en-haut

société

P31

Amoureux du produit conte

P8

Féérie tous publics

militante

P32

Lutter pour toutes les livres

femmes

Récits de vie

P12

P33

genre

Transdessinée

Au-delà de la loi – partie II P33

P15

La démocratisation du chemsex est concomitante de

l’avènement des applications de rencontres, qui facilitent

l'accès aux sexparties et aux produits.

À lire en page 8

twitter@magazine_360

facebook.com/magazine360lgbt

L’actualité est

sur 360.ch

360° novembre 2020 - N°199 3


Actu internationale

Homoparents

russes

contraints

à l’exil

© DR

Depuis dix ans, de nombreux Russes sont devenus pères légalement grâce à

la GPA. Ils craignent aujourd’hui des poursuites pénales et, surtout, qu’on leur

retire leurs enfants.

Par Antoine Gessling

«Bien sûr que j’aimerais rentrer,

ramener mon enfant dans

un endroit qu’il connaît, où sa

grand-mère et son grand-père sont

là. » Alexander (prénom d’emprunt)

a fui son pays quand on l’a prévenu

que des enquêtes allaient être lancées

contre les pères célibataires

ayant eu recours à une gestation

pour autrui (GPA). Dans le collimateur

des autorités : les personnes

« d’orientation sexuelle non traditionnelle

», selon l’euphémisme en

vigueur en Russie, au prétexte que

l’accès aux méthodes de fécondation

in vitro leur serait interdite.

Secteur florissant

Pourtant, la Russie fait partie des rares

pays où la GPA est légale, y compris

pour des pères célibataires, reconnus

par une jurisprudence de 2010. Il s’agit

même d’un secteur relativement florissant

pour les agences spécialisées

qui mettent en rapport futurs parents,

gestatrices, cliniques et juristes. Ces

services font face à une offensive des

politiciens conservateurs et de l’Église

orthodoxe, rapporte « The Guardian ».

L’été dernier, quatre médecins spécialistes

de santé reproductive ont été

arrêtés pour « trafic d’enfants » après

le scandale provoqué par le décès

inexpliqué d’un nourrisson dans un

appartement de Moscou transformé

en nurserie.

Plongée dans l'inconnu

Alexander a été alerté par la clinique

où le bébé est venu au monde. On

lui a dit qu’il était possible qu’il « ait

des problèmes », des policiers ayant

consulté son dossier. « J’ai senti que

la réalité m’échappait », témoigne le

papa de 40 ans. Pas question pour lui

de risquer de se voir retirer son fils de

6 mois. Comme lui, plusieurs pères

célibataires auraient quitté le pays

depuis l’apparition de ces informations

dans la presse. « Pour eux, c’est

une catastrophe. Ils ont leur job, leur

maison, leurs entreprises, ils ont fait

leur vie en Russie. Mais maintenant

qu’ils ont décidé de devenir parents,

ils doivent prendre leur enfant, tout

laisser et plonger dans l’inconnu »,

explique Konstantin Svitnev. Cet

avocat spécialiste des droits en matière

de procréation est lui-même

mis en cause dans l’affaire du « trafic

d’enfant ». Il a quitté la Russie pour

la République tchèque, où ses enfants

l’ont rejoint. Pour Svitnev, tout

cela ressemble à une machination.

« Le marché de la GPA représente

des milliards de dollars en Russie.

Il est possible que quelqu’un avec

des liens avec les autorités ait dans

l’idée de placer cette industrie sous

son contrôle », déclare-t-il à Meduza.

L’affaire du « trafic d’enfants »,

accompagnée d’insinuations de pédophilie

distillées par les tabloïds locaux,

coïncide avec un nouveau tour

de vis contre la communauté LGBT

russe. Au cours des derniers mois, les

autorités ont renforcé la surveillance

de la « propagande homosexuelle »

sur les réseaux sociaux, bétonné

le mariage comme une institution

exclusivement hétérosexuelle et

entrepris de restreindre l’accès des

personnes trans au changement

d’état civil.

4 360° novembre 2020 - N°199


Le Royaume-Uni

va compter sa

population LGBT

Pour la première fois, un recensement national

intégrera l’orientation sexuelle et l’identité de

genre. Une mesure a priori bien accueillie.

© DR

Bref, le

monde...

L’actualité internationale

en 30 secondes.

NOUVELLE-ZÉLANDE – Les législatives

du 18 octobre ont été un joli

succès pour la Première ministre

travailliste Jacinda Ardern. Le vote

a en outre donné naissance au Parlement

le plus divers de l’histoire

du pays : record d’élu·e·s femmes,

non-blanch·e·s et LGBT. Ces derniers

occupent près de 10% des 120

sièges de la Chambre. AG

«Quelle est votre orientation

sexuelle et votre identité de

genre ? » L’Office national des

statistiques britannique, l’ONS, s’apprête

à poser, pour la première fois,

ces questions lors du recensement en

Angleterre et au Pays de Galles l’an

prochain, ainsi qu’en Écosse l’année

suivante. Elles seront adressées aux

personnes de plus de 16 ans et facultatives.

L’objectif, pour les autorités,

est de disposer, au niveau des territoires,

d’une photographie précise de

la population LGBT. « Sans données

robustes sur sa taille aux niveau national

et local, les décideurs opèrent

dans le vide, sans connaître l’ampleur

et la nature des désavantages

que les personnes subissent en terme

de santé, d’éducation, d'emploi et

de logement », explique Iain Bell, de

l’ONS, à « The Observer ».

2% de la population ?

Obligatoire, le recensement britannique

est effectué tous les dix

ans. Il recoupe des données socioéconomiques

comme le revenu, le

logement, l’emploi, mais aussi l’identité

ethnique des résidents. Quant à

l’orientation sexuelle, elle fait l’objet

d’enquêtes de l’ONS depuis plusieurs

années. Sur la base d’un échantillon

large de plusieurs centaines de milliers

de ménages, la population gay,

lesbienne ou bisexuelle du pays a ainsi

été estimée en 2018 à un peu plus de

2% – un pourcentage inférieur à celui

produit par des instituts de sondages

comme YouGov (environ 7%).

Loin de susciter des craintes sur

la protection de la vie privée, l’intégration

de l’orientation sexuelle et

de l’identité de genre dans le recensement

officiel est bien accueillie

par l’ONG Stonewall. Pour cette

organisation de défense des droits

LGBTQ+, elle permettra de combler

le « manque de visibilité » de cette

population. « Recueillir des données

sur les communautés LGBT au

Royaume-Uni est une étape vitale vers

la construction d’une société où ces

personnes sont vraiment acceptées,

partout et par tout le monde », estime

Nancy Kelley, directrice exécutive. AG

Jacinda Ardern© DR

FRANCE – Le gouvernement a présenté

un ambitieux programme de

150 mesures pour renforcer les droits

des LGBT français. Il comprend le

renforcement de la lutte contre les

discriminations dans les écoles, la

création d’un observatoires des violences

ou encore la facilitation de

l’emploi du nom d’usage pour les

personnes trans. Quant à l’interdiction

des « thérapies de conversion »,

elle pourrait être intégrée à la future

loi contre les « séparatismes ». AG

ALGÉRIE – Selon des ONG, 35

hommes et neuf femmes ont été

condamnés après un supposé « mariage

gay » dans une maison de la

province de Constantine, en juillet.

Ils étaient poursuivis pour « relations

homosexuelles », « outrage public » et

violations des mesures sanitaires liées

à la Covid. Deux d’entre eux ont écopé

de la prison ferme. AG

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Actu Allemagne

Berlin perd

un de ses

squats

historiques

Le mois dernier, un squat queer-féministe historique, la

Liebig34, a été évacué à Berlin par la police allemande.

À l'heure où Berlin est de plus en plus défigurée par la

gentrification, cette nouvelle disparition d'un lieu alternatif a

causé l'émoi des Berlinois·es et de la communauté LGBT*

Par Annabelle Georgen

La Liebig34 était squattée depuis 30 ans © Annabelle Georgen

9

octobre 2020, cinq heures du

matin. La façade recouverte de

graffiti de la Liebig34 se découpe

dans un ciel d'encre, sous les feux

des projecteurs. On croirait presque

être face à un décor de cinéma, s'il

n'y avait pas des dizaines de policiers

casqués alignés au pied du vieil immeuble.

L'expulsion de ce squat emblématique

de Berlin est prévue deux

heures plus tard. Le quartier berlinois

de Friedrichshain ressemble à une

zone de guerre. Craignant que l'expulsion

ne tourne à l'émeute générale,

la police allemande a entièrement

bouclé le secteur. 1500 policiers ont

été dépêchés de toute l'Allemagne,

en pleine pandémie. Des snipers sont

postés sur les toits, un hélicoptère

vrombit dans la nuit.

Berlin va perdre aujourd'hui un

de ses derniers bastions alternatifs.

Cette expulsion est un nouveau

drame pour la communauté queer

et la mouvance d'extrême gauche

de Berlin. La création de la Liebig34

remonte à il y a 30 ans, à l'époque

où Berlin comptait plus d'une centaines

de squats, qui l'ont rendue

célèbre dans le monde entier pour

sa culture alternative aux accents

punks et techno. Ce squat anarchiste

qui, comme tous les autres de la

ville, avait fini par être légalisé 1 , était

devenu à partir de la fin des années

1990 un lieu uniquement habité par

des femmes, majoritairement lesbiennes,

avant de s'ouvrir au fil des

ans à un public plus queer et de choisir

pour formule : « sans hommes

cis, mais toutes autres identités de

genres sont les bienvenues ».

Bataille juridique

Il y a encore quelques années, la Liebig34

comptait une quarantaine d'habitantes.

Mais depuis que le contrat

de bail avec le groupe immobilier

Padovicz, propriétaire de l'immeuble,

avait expiré fin 2018 et à mesure que

la bataille juridique dans laquelle

s'était lancée le collectif pour pouvoir

continuer à vivre sur place paraissait

sans espoir, le squat s'était peu à peu

vidé de ses habitantes. La présence

accrue de la police dans le quartier, qui

compte encore quelques places fortes

de la scène alternative de gauche berlinoise,

avait également poussé certaines

à partir. Mais la Liebig34 continuait

malgré tout à organiser concerts,

soirées queer, ateliers et même une

« Küfa » 2 hebdomadaire : une sorte

de cantine végan aux prix solidaires,

ouverte à tou·te·s. Le bar situé au rezde-chaussée

du squat restait un lieu

de rencontre important pour la communauté

queer alternative.

Le jour de l'expulsion, des

centaines de manifestant·e·s sont

massé·e·s depuis le milieu de la nuit

autour des barrières érigées par la

6 360° novembre 2020 - N°199


Pour exprimer leur colère, les manifestant·e·s ont fait

le plus possible de bruit © Annabelle Georgen

Tintamarre en guise de protestation © Annabelle Georgen

Plusieurs centaines de manifestant·e·s étaient rassemblé·e·s depuis des

heures pour soutenir les habitantes de la Liebig34 © Annabelle Georgen

Des feux d'artifice, une autre manière de protester © Annabelle Georgen

police pour crier leur colère. Des feux

d'artifice illuminent la rue, quelques

bouteilles de bière visant les policiers

volent au-dessus de la foule. Sur certains

balcons, des voisin·e·s solidaires

font tinter des casseroles sans relâche.

Parmi la foule, Steffi, lesbienne, 50

ans, jette un air triste sur la façade

bariolée de l'immeuble : « Toute cette

sous-culture de gauche est en train

de disparaître, et avec elle une partie

de l'histoire de Berlin », déplore-telle.

Elle a elle-même a vécu à cette

adresse à la fin des années 90.

Peu avant l'expulsion, les habitantes

de la Liebig34 avaient prévenu

: « Nous ne rendrons pas cet

immeuble volontairement, mais

nous défendrons chaque morceau de

béton de notre utopie. » Elles se sont

barricadées avec leurs soutiens à l'intérieur

de l'immeuble, ont tapissé les

fenêtres avec des poutres de bois et

des plaques métalliques, dressé des

portes blindées dans la cage d'escalier.

Tous les moyens sont bons pour

ralentir la progression des forces de

l'ordre et tenter par là même d'empêcher

l'expulsion.

Baroud d'honneur

L'assaut est donné peu après sept

heures. L'expulsion durera plus de

quatre heures, le temps d'évacuer

les 57 personnes rassemblées dans

l'immeuble. Au cours de l'opération,

une silhouette cagoulée et armée

d'un canon à confettis apparaît brièvement

sur un des balcons. Une pluie

de paillettes, baroud d'honneur des

habitantes de la Liebig34, scintille

sous les premiers rayons du soleil

et les applaudissements de la foule

réunie pour les soutenir. La chanson

« Der Traum ist aus » (« C'est la fin du

rêve »), hymne légendaire du groupe

de rock berlinois Ton Steine Scherben,

s'échappe d'un autre balcon.

Même si les habitantes du squat

n'ont désormais plus de toit, elles

entendent continuer à exister en

tant que collectif. « L'idée politique

de la Liebig34 dépasse l'immeuble

en tant que tel », estime Frida, une

des habitantes expulsées ce jourlà.

« Le lieu est devenu un symbole

dans le monde entier et je crois que

ce symbole continuera d'exister. » La

Küfa de la Liebig34 a d'ores et déjà

été relocalisée au Fischladen, un bar

du voisinage.

1. ce qui signifie que les habitant·e·s de ces

immeubles payent un loyer à leurs propriétaires

2. abréviation de « Küche für alle », cuisine pour

tou·te·s

Plus d’infos :

liebig34.blogsport.de

defendliebig34.noblogs.org

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Actu société

Amoureux

du produit

Décuplés à l’ère des

apps, les plaisirs du

chemsex ne sont pas

sans dangers pour

la santé des usagers.

De partouzes en

illusions synthétiques,

de solitude en

dépendances, des

chemsexeurs romands

racontent aussi les

possibles d’une réponse

communautaire.

Portraits croisés.

Par Antoine Bal

© Victor de Castro

«J’enfilais mon jockstrap rouge,

ma casquette rouge, mes chaussettes

rouges. C’est ce qui me

rendait le plus dingue. J’allumais

mon ordinateur. Je me faisais mon

rail de 3M, et là, j’entrais dans mon

petit théâtre sexuel. Ma petite scène

d’exhibition. Je me sentais maître du

sort de mon corps, un peu comme un

superhéros. » Armand, la quarantaine,

tombe amoureux en 2015. Pas du partenaire

avec qui il s’initie au chemsex

pendant un an, mais de la 3MMC,

drogue de synthèse de la famille des

cathinones, puissamment addictive

et facile à obtenir sur internet. « Elle

reliait nos désinhibitions. » Les fins

de semaine d’Armand sont des marathons

sexuels de quarante-huit à septante-deux

heures. Puis c’est l’histoire

de lundis devenus insoutenables.

Chimie sexuelle

« Chemsex », un raccourci pour

« chemical + sexe ». Une étude sociologique

de l’Observatoire français

des drogues et toxicomanies (OFDT)

fait remonter à une dizaine d’années

le renouvellement des usages sexualisés

de substances psychoactives

parmi les HSH. Cette consommation

de drogues de synthèse, dont

la 3MMC, le GHB ou la « Tina » (méthamphétamine),

parfois injectées

(« slamées »), se distingue d’autres

formes d’usages récréatifs de produits

en ce qu’elle est mise au service

de sexe prévu pour durer. Ajoutez un

peu de Viagra pour performer, souvent

avec de nombreux partenaires.

Les fonctionnalités physiologiques

sont chimiquement organisées.

La démocratisation du chemsex

est concomitante de l’avènement

des applications de rencontres, qui

facilitent les contacts pour relier les

usagers dans des sexparties et l’accès

aux produits. Encore assez peu

documentées, malgré le développement

de dispositifs de prévention et

de prise en charge par une coalition

grandissante de soignants, d’usagers

et d’acteurs associatifs, les pratiques

de chemsex font l’objet d’inquiétudes

voire d’alertes sanitaires, notamment

pour les usagers sujets aux

dépendances ou encore les personnes

8 360° novembre 2020 - N°199


© Victor de Castro

exposées à de la demande, comme

les travailleur·e·s·x du sexe. Car elles

exposent à des conduites à risques,

tant en terme sexuel que de consommation

et d’addictions. Contre les

préjugés stigmatisants, l’étude insiste

sur l’hétérogénéité des parcours de

chemsexeurs, de l’initiation à la progression

dans ces pratiques. Quoique

encore fragiles, des stratégies collectives

et individuelles de réduction des

risques et de safer use existent.

Hyperréalité, super pouvoirs

Armand n’est « pas fidèle à la relation,

mais à la dope ». À ce nouveau

rapport à sa sexualité. Il fréquente

autant les partouzes que les chats

virtuels. Il trouve son audience, une

réalité augmentée où il réalise ses fantasmes

d’hypermasculinité. « Dans ce

théâtre, je ressentais de l’euphorie. Je

me sentais rebelle et dark. Je me sentais

kinky et libre. Au-delà des sensations

de surpuissance, je me sentais

parfois faire un grand doigt d’honneur

à la société, une sorte d’acte

politique depuis ma petite bulle. En

tout cas, j’en avais l’illusion. »

Pour s’expliciter intimement, Armand

invoque les résidus de honte, les

béances de vulnérabilités qui hantent

les trajectoires homosexuelles. « Le

monde n’est pas à nous. » L’étude de

l’OFDT le confirme : « Le chemsex a

l’épaisseur d’une expérience de vie

libératrice dans un environnement

encore hostile à l’homosexualité. »

Andrea, peu ou prou la même quarantaine,

déploie un appétit de performance.

Il cumule les mecs à la pelle

pendant plusieurs années, après la fin

d’une relation stable. C’est dans l’amitié

et le voyage qu’il s’est attaché au

chemsex. Avec ses amis – généralement

bien lotis socialement et financièrement

– ils organisaient des plans

de 10 à 50 mecs parfois, dans des villas,

d’une grande capitale à une autre.

Beaucoup de temps libre. L’excitation

de toujours plus, partout, tout le

temps. L’internationale du chemsex.

Super descentes

Armand voit dans sa quête de limites

une forme de furie, de revanche

contre ce à quoi il n’arrive pas à vraiment

faire face dans sa vie. Mais il

décrira plusieurs fois « une grande

illusion » synthétique. Or les conséquences,

elles, sont bien réelles sur

le reste de sa vie. Les descentes sont

violentes. Il est mort de fatigue et ses

week-ends chimiques grignotent sa

vie professionnelle. Ils creusent un

isolement social progressif.

« On se retrouve toujours tout seul

après, constate Armand. Il y a un anonymat

fou dans cette sexualité là, dans

la virtualité de nos vies. Ces applications

font qu’on brûle trop d’étapes

réelles. On vit dans des images. » Il se

souvient quand même d’instants suspendus,

fasciné devant « ces nouvelles

constructions sociales » de groupe,

avec ses règles tacites. Mais les règles

n’empêchent ni les G-holes (malaises

produits par le GHB), ni les overdoses.

« Dans certaines touzes je faisais l’infirmière.

Certains tombaient comme

des mouches, et moi j’étais le seul à me

dire qu’il fallait faire quelque chose »,

explique Armand. « Pour moi, quand

on fait du chemsex, on ne peut compter

que sur la chance, parce qu’au

fond, on ne sait pas exactement ce

qu’on prend. Le risque d’en mourir

existe. » Régulièrement, ces dernières

années, des récits d’accidents et de décès

chez les chemsexeurs sont rapportés

dans la communauté. Sans parler

de viols et d’abus divers. Car « question

consentement, on repassera », soupire

Loïc, 28 ans, infirmier et ancien chemsexeur,

quand tout le monde se trouve

dans des états aussi malléables.

Pas pareil pour les dépendants

Bien au fait des enjeux d’addictologie

tant comme pratiquant que soignant,

Loïc décrit la puissance des

cravings, des besoins irrépressibles

d’y retourner, de reprendre, qu’il

n’arrive à calmer qu’en consommant

de nouveau. Quand il s’y frotte, à 23

ans, il sait déjà qu’il va s’égarer dans

le chemsex. La 3MMC est aussi son

produit de choix. Rétrospectivement,

360° novembre 2020 - N°199 9


10 360° novembre 2020 - N°199


« Je suis persuadé qu’il

n’y pas mieux placé

qu’un dépendant qui se

rétablit pour comprendre

un dépendant qui souffre

encore », Loïc, 28 ans

il se souvient avoir toujours consommé

plus que les autres, adolescent.

« Je crois que j’étais malade bien

avant et que la conso de produits est

l’aboutissement de ma dépendance.

Le chemsex, dans mon cas, c’est la

manière par laquelle ma dépendance

se traduit. » L’argument sexuel du

chemsex devient pour lui la légitimation

d’une toxicomanie qu’il ne

s’avoue pas encore à l’époque.

Très vite, Loïc slame, s’injecte,

et perd la maîtrise de sa consommation.

« C’est toujours le même rituel.

Je suis en boucle sur les applications

de rencontre. Je chasse des mecs, avec

même aucun plaisir de les faire venir.

Juste ce truc insatiable de consommer

les drogues comme les hommes. J’ai

une dépendance au produit, une dépendance

au sexe, une dépendance

affective. C’est une maladie qui joue

sur tous les domaines de ma vie. »

Armand le nomme aussi aujourd’hui.

Il accepte qu’il est dépendant, qu’il y

a une inégalité devant le manque

et la vulnérabilité. « Je ne veux faire

aucun jugement, ni plaquer aucune

morale débile. Mais pour moi, le seul

chemin vers lequel tout ça m’a mené,

ce sont des recoins très négatifs, à me

demander où j’étais pendant cinq ou

dix ans. Je me faisais du mal, j’étais le

bourreau de moi-même. »

Une sexualité de produits

Sans être une généralité, l’association

systématisée de la chimie et

du sexe peut faire disparaître l’intérêt

pour la sexualité sans produits.

« Le sexe devenait secondaire, voire

inexistant, constate Armand. Et je

trouve ça super dangereux pour des

mecs plus jeunes qui se lancent sur

ce terrain de jeu très glissant, sans

avoir vécu d’autres choses avant. »

Pour Loïc, l’injonction à la performance

dans le milieu gay est forte.

Le chemsex lui permet au départ

d’assumer une sexualité pénétrative

qu’il n’arrivait pas à vivre sans produits.

Elle devient mécanique.

Mais les parcours restent distincts.

Andrea se retrouve souvent

en position contradictoire dans les

sexparties, conscient de n’arriver

à jouir véritablement qu’à deux.

« Parfois je prenais du recul, j’observais

ces scènes et je me disais, « c’est

quand même un drôle de cirque…

On est tous là pour plus de sexe et

en même temps personne ne bande.

Il y a quelque chose d’absurde. » Sa

régularité dans ces scènes n’a pas

d’impact direct sur son goût pour

le sexe sans produits. Entre deux

cafés, Andrea glisse qu’il consulte en

revanche pour comprendre et gérer

autrement son addiction aux applis

de rencontre. Aujourd’hui, il aspire à

autre chose, mais ne veut pas couper

pour autant avec son cercle amical.

Sauf qu’eux pratiquent encore…

Se rétablir

« Quand j’ai compris que le chemsex

était une construction de ma maladie,

je me suis dit que je ne devais pas

seulement faire attention à revenir à

une sexualité sans drogue, mais à

une vie sans drogues. » Armand

se rééduque, travaille au jour le

jour pour prioriser son rétablissement.

Cela passe par l’abstinence,

non seulement du chemsex en soi,

mais de tout lien affectivo-sexuel

qui pourrait le faire glisser vers une

rechute. C’est une phase restructurante

– mais toujours fragile – de la

méthode qu’il applique grâce à un

groupe de pairs qu’il a rejoint. C’est

Loïc qui, au déconfinement, a créé

cette consultation de santé sexuelle

à Checkpoint Genève financée par

Dialogai. L’objectif est d’atteindre

les personnes en questionnement

sur leur consommation de produits.

Loïc est passé par là, ça a marché

pour lui. Une sexualité déliée du produit

se reconstruit doucement. Alors,

il a décidé d’en faire profiter d’autres

chemsexeurs, dans un contexte où

peu de ressources communautaires

existaient localement. « Si tu proposes

un espace, tu as déjà gagné. »

Tout commence par l’activation

d’un processus d’identification. Des

groupes de paroles ont donc lieu

les premier et troisième vendredis

de chaque mois. « Par mon propre

rétablissement, je suis persuadé

qu’il n’y a pas mieux placé qu’un

dépendant qui se rétablit pour

comprendre un dépendant qui

souffre encore. Pour moi, ce pouvoir

thérapeutique est sans égal. »

Un réseau de santé communautaire

se développe. Le 3e Forum

européen sur le chemsex se tenait à

Paris il y a tout juste un an, « rassemblant

plus de 200 activistes du monde

entier pour élaborer des solutions aux

problèmes posés par des pratiques

au-delà des drogues, du sexe…et des

seuls gays ! », rapportait Tim Madesclaire

pour le magazine Komitid.

Ici, des espaces de conversations

romandes émergent. Et dans leurs

duels entre ténacité et rechutes, les

voix de quelques super-héros déchus

alimentent déjà les récits humains

d’une estime de soi en travail, avec

une lucidité impressionnante. Une

fureur de vivre.

*certains prénoms ont été modifiés

pour respecter l'anonymat des

personnes interrogées

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Actu militante

Lutter pour

toutes les femmes

Geneva Pride 2019 © Laurent Guiraud

Double invisibilisation, « mixité choisie » ou accueil des personnes trans* :

le mouvement féministe et lesbien est confronté à de nombreux défis.

Tour d’horizon avec trois militantes genevoises.

Par Yann Hakam

Même si elles n’ont pas eu lieu

comme prévu en avril dernier,

les marches de la visibilité

lesbienne ont gagné en force

ces dernières années. Les femmes

qui aiment les femmes reprennent

la parole, redescendent dans la rue

et revendiquent leur histoire pour

elles-mêmes. À commencer par celle

de Stonewall, émeute fondatrice des

droits LGBTIQ+ à New York, le 28 juin

1969. « Elle a été principalement portée

par des femmes comme Stormé

DeLarverie. Ce soir-là, Stormé a été

prise pour un homme par la police et

ils ont voulu l’arrêter. Elle a refusé et

le tout a fini en bagarre », rappellent

Yolanda Martinez et Christiane

Parth, respectivement présidente et

coordinatrice de Lestime.

Pour elles, il est bon que l’on associe

à Stonewall les personnalités

transgenres que sont Sylvia Rivera et

Marsha P. Johnson, une reconnaissance

récente. Mais ce sont surtout

les hommes cis gay qui ont récupéré

cet héritage. « Ils ont simplement pris

une place qui leur était déjà attribuée.

Les femmes ont moins d’expérience

à occuper l’espace public et à

prendre la parole. C’est toujours les

mêmes rengaines qui reviennent et

c’est difficile à avaler. »

Nouvelle génération

En Suisse et dans le monde, le mouvement

lesbien continue de subir une

double invisibilisation: en tant que

femmes et en tant que lesbiennes. « Si

les lesbiennes ont beaucoup soutenu

les combats féministes dès mai 68,

les femmes hétéro ne les ont pas souvent

soutenues en retour. Il y a toujours

eu ce clivage, mais aujourd’hui

on le sent moins. La nouvelle génération

est naturellement féministe,

autant les femmes que les hommes,

et ça donne beaucoup d’espoir pour

la suite », estiment Yolanda et Christiane.

Elles prennent pour exemple

la mobilisation autour du « T-shirt

de la honte » qui a fait parler de lui

récemment dans certains établissements

scolaires romands : « Ces

jeunes femmes veulent revendiquer

une liberté vestimentaire alors que

le patriarcat, retranché dans ses derniers

bastions, veut garder l’emprise

dessus. Nous sommes très fières de

voir la résistance de ces élèves. »

Parmi les sujets qui suscitent la

polémique, la « mixité choisie ». Lestime,

comme d’autres associations,

l’utilise de longue date comme un

outil d’empowerment. Se passer de

la présence d’un groupe dominant

– les hommes cisgenres dans ce

cas-là – permet de mieux discuter

et de créer une culture commune

en dehors du cadre sociétal. « On

reçoit souvent des appels d’hommes

cis qui se plaignent de ne pas pouvoir

venir à certains événements »,

racontent Yolanda et Christiane. « Ils

se sentent complètement démunis

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« Les femmes ont moins

d’expérience à occuper

l’espace public et à

prendre la parole.

C’est toujours les mêmes

rengaines difficiles à

avaler. »

Yolanda et Christiane

© Chloe S./Unsplash

et il faut qu’on justifie le fait qu’on

souhaite passer des soirées sans

hommes cis, alors qu’on a juste envie

d’être entre nous. »

Les TERF en embuscade

Dans les pays anglo-saxons, mais

aussi en France, le mouvement

féministe et lesbien est secoué par

la question de l’accueil des femmes

trans*, illustrée avec fracas par les

prises de positions de l’auteure J.K.

Rowling. Ce courant est désigné par

l’acronyme TERF, pour « féminisme

radical excluant les trans* », apparu

pour la première fois aux États-Unis

en 2008. « C’est un courant essentialiste

et biologiste qui part du principe

que toutes les femmes doivent avoir

une vulve et des règles. Les femmes

trans* ne sont donc pas des femmes

à leurs yeux, mais des mâles déguisés

», explique Alexandra, du groupe

Trans* de l’association 360. « Les TERF

craignent que les personnes trans*

essayent de s’infiltrer dans les mouvements

féministes pour renforcer le

patriarcat, comme une sorte de cheval

de Troie », ajoute-elle.

Amalgames

Alexandra voit dans cette exclusion

« la peur de l’infiltration et l’incompréhension

des vécus trans* », un

rejet différent de la discrimination

historique endurée par les personnes

trans* de la part de « certains

mouvements LGB qui croient que

les femmes trans* peuvent nuire à

leur image. » Pour comprendre ces

raisons, il faut analyser l’histoire du

mouvement LGBTIQ+ en passant par

les événements marquants de 1969 à

New York ; la situation historique des

personnes trans* et l’image sociale qui

leur a été imposée. En effet, comme le

mentionne Karine Espineira dans son

article intitulé La sexualité des sujets

transgenres et transexuels saisie par les

médias, les personnes trans* ont très

vite été assimilées à la prostitution.

« La femme transgenre est sursexualisée

par association aux représentations

de la pornographie et assimilée

à la prostitution », remarque-t-elle.

Véhiculée par les médias, cette assimilation

a causé du tort à toute la

communauté trans* jusqu’au sein du

mouvement LGBTIQ+.

À Lestime, Yolanda et Christiane

admettent qu’il peut exister des tensions.

« Il y a des personnes dans notre

communauté qui sont moins tolérantes

concernant les femmes trans*

mais, assurent-elles, le but de Lestime

c’est de représenter toutes les femmes

et de défendre leurs droits. »

Les personnes trans* amènent

un autre regard, précieux, à la cause

féministe, souligne Alexandra. « Une

scission entre ces deux mouvements

est contre-productive, ces luttes

sont étroitement liées. Les transféministes

s’alignent avec les idées de

la troisième vague du féminisme qui

intègre d’autres enjeux parfois en rupture

avec la génération précédente. Il

est important que ces mouvements

restes soudés, notre but commun

est le même: l’égalité et la reconnaissance

de nos droits. »

En savoir plus sur lestime.ch et

association360.ch

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Chronique genre

Au-delà

de la loi –

partie II

Portrait de Lana Cueto © Pauline Humbert

Après avoir abordé la question de la cisnormativité,

notre chroniqueuse interroge, pour mieux la

déconstruire, cette autre loi qu’est l’hétéronormativité.

Par Lana Cueto

Pour introduire cette nouvelle chronique, j’aimerais

d’emblée souligner le glissement de terrain qui s’est

opéré avec ma transition au niveau de ma sexualité.

Lorsque j’étais un homme, j‘entretenais des relations

aussi bien avec des femmes hétérosexuelles qu’avec

des hommes homosexuels. Depuis ma transition, les

règles se sont inversées : désormais, ce sont des femmes

homosexuelles et des hommes hétérosexuels qui me

courtisent. Dédicace au passage à mes partenaires bi- et

pansexuel·le·x·s pour leur fidélité ! Dans ce glissement,

j’observe un phénomène social dont je souhaite me faire

le témoin. C’est par expérience que je vous le dis, rares en

effet sont les hommes hétérosexuels qui assumeraient au

grand jour notre relation, comme si je n’étais qu’un jardin

qu’il serait préférable de cultiver en secret. C’est là

un fait autant qu’une opinion : ces hommes vivent dans

la crainte, celle de perdre le privilège d’être considéré

comme hétérosexuel aux yeux de la société. Ne faudraitil

pas plutôt voir en leur sexualité la confirmation de mon

identité de femme ? Probablement, oui. Et pourtant !

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Lorsque je m’adonne aux plaisirs de la chair avec un

homme, je ne saurais y voir un acte hétérosexuel. De

même, je ne considère pas l’orientation de mes partenaires

comme l’instance qui me définit en tant que femme, dans

le sens que mon identité est autonome de ma sexualité et

n’a nullement besoin d’être confirmée par autrui. Désolée

pour vous les gars, ce n’est pas une question personnelle

mais politique, dont les enjeux transcendent les jeux

auxquels nous nous adonnons ! Parce qu’à mes yeux,

l’hétérosexualité n’est pas juste une orientation sexuelle ;

c’est aussi et surtout un régime politique qui postule le

paradigme selon lequel l’humanité serait par nature hétérosexuelle.

Ce paradigme est une loi, elle porte un nom,

celui d’hétéronormativité, laquelle présuppose, pour régir

notre matrice sociétale - et ainsi assurer sa viabilité -, cette

autre loi dont il était question dans ma chronique précédente

: la cisnormativité.

Une aspiration inclusive et collective

Par ce qui précède, je ne cherche pas à affirmer que mes

partenaires masculins ne seraient pas hétérosexuels (cette

question les concerne), ni qu’il existerait une bisexualité

universelle, car la pluralité de nos orientations, qu’elles

portent sur le genre et/ou le sexe, est réelle et attestée par

les faits de la nature. C’est au contraire une attitude philosophique

que j’adopte ici et qui se nourrit de la pensée

queer, celle-ci même qui vise à dénaturaliser ce schéma

hétéro-cis-normé aussi aliénant qu’arbitraire pour les personnes

qui, comme moi, ne trouvent pas leur place dans

ce schéma. Dans cet édifice de déconstruction, mon genre

s’inscrit au-delà de mon sexe, de même pour ma sexualité.

Plus précisément, mon sexe n’est pas la substance qui met

en forme mon genre et ma sexualité, mais une des qualités

de mon être qui est autonome de ces derniers. C’est la raison

pour laquelle il existe des hommes avec des attributs

sexuels masculins et d’autres avec des attributs féminins,

tout comme il existe des femmes avec des attributs féminins

et d’autres avec des attributs masculins. La pensée

queer se donne pour finalité de renverser cette logique du

miroir immanente au schéma hétéro-cis-normé afin de

célébrer la diversité dans sa totalité. Il est crucial de noter

que cette lutte n’est pas exclusive aux personnes LGBT+.

Je connais d’ailleurs des personnes cis et hétéro qui sont

bien plus queer que certaines personnes trans ou homo.

Cette lutte doit être une aspiration aussi inclusive que

collective, car c’est seulement ensemble que nous ébranlerons

cette binarité stricte qui restreint notre puissance,

que nous briserons ce miroir pour qu’à même sa surface

fissurée se révèle la multiplicité de nos reflets intérieurs,

et qu’enfin nous construirons un monde où notre sexe ne

présupposera ni notre identité ni notre sexualité, et encore

moins celles de nos partenaires.

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Vivienne Westwood © Guy Marineau

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Devanture de la boutique SEX, reconstituée pour l'exposition. Scénographie de Pierre Verrier © DR

Culture mode

Vivienne Westwood,

green queen

Le mouvement punk tirait son slogan « No future »

de la chanson God Save the Queen des Sex Pistols

en 1977. En 2020, le Musée des tissus de Lyon

rend hommage à la reine incontestée de la mode

« aristopunk », Dame Vivienne Westwood.

Par Alexandre Lanz

«Mon devoir est de comprendre

le monde, en échange de la

chance d’être en vie. De nos

ancêtres, nous avons le privilège de

redécouvrir différentes visions de

notre histoire à travers l’art. Telle est

la vraie définition de la culture. En

comparaison, imaginons un monde

meilleur que celui que nous avons

gâché. Changeons notre avenir. Cela

commence maintenant et par soimême

: en changeant notre propre

existence, on peut ensuite changer le

monde » : dans la préface de son autobiographie

sortie en 2014, Vivienne

Westwood annonce la couleur de son

combat vert. A 79 ans, l’icône de la

mode punk « Made in Britain » se bat

pour l’environnement, l’écologie, la

durabilité. Ironie du sort pour celle

qui incarnait le manifeste punk « No

future » dans sa boutique SEX située

au 430 Kings Road à Londres dans les

années 1970, elle met aujourd’hui son

énergie au service d’un monde meilleur.

Cohérente depuis ses débuts,

la mission de déconstruction du

capitalisme qu’elle s’est appropriée

s’exprime aussi dans sa mode. Subversive.

Punk toujours, sa première col-

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« Il n’y a rien de plus

insignifiant que la mode

pour la mode. Elle est

d’une vacuité absolue

en tant que telle, mais

devient intéressante

lorsqu’elle raconte son

époque, son passé et

tente de deviner le

futur. »

Vivienne Westwood

Souliers © DR

lection s’inspirait des Merveilleuses

et des Incroyables sous le Directoire,

au lendemain de la Révolution française.

En plus de cinq décennies, son

empreinte est colossale.

Chiffons, faux-culs, tartans et

épingles de nourrice

Pour la première fois en France, Le

Musée des tissus à Lyon rend hommage

à l’immense talent de la créatrice

avec l’exposition « Vivienne

Westwood. Art, mode et subversion

». Les visiteurs y découvrent la

riche collection de Lee Price, collectionneur

anglais installé à Lyon

et ex-collaborateur des boutiques

Vivienne Westwood. Plus de 200

pièces textiles, costumes, accessoires,

chaussures, objets d’art, tableaux et

dessins dialoguent avec les œuvres

du musée en faisant le grand écart

entre la fascination de la styliste pour

les costumes des XVIII e et XIX e siècles

et sa croisade écologiste. En réalité,

la mode, Vivienne s’en fout. Comme

l’explique l’ex-enseignante dans une

école primaire au début des années

70 dans le documentaire « Westwood :

Punk, Icon, Activist » réalisé par Lorna

Tucker en 2018 : « Il n’y a rien de plus

insignifiant que la mode pour la

mode. Elle est d’une vacuité absolue

en tant que telle, mais devient intéressante

lorsqu’elle raconte son époque,

son passé et tente de deviner le futur.

La mode ne m’intéresse que dans un

contexte historique et sociologique.

Sinon, elle m’ennuie profondément. »

Une alliée d’honneur

Rebelle dans l’âme depuis son enfance,

Vivienne Westwood ne s’est jamais

souciée du regard que les autres

posent sur elle. À propos de sa puberté,

elle révélait dans une interview au

ELLE british en 2015 : « Je n’en n’ai

jamais parlé avant, mais quand j’étais

adolescente, je pensais que j’étais en

train de me transformer en garçon et

l’idée ne me dérangeait absolument

pas ». Brouillant volontairement

les pistes dans ses créations qu’elle

estime non-genrées, elle explore les

facettes infinies de la féminité et de

la masculinité. Sans compromis dans

son engagement pour les problèmes

environnementaux, mais tout en

étant consciente que le sexe vend plus

que l’écologie, elle a l’idée de génie

d’engager la star du porno gay américain

Colby Keller pour une de ses

campagnes en 2016. Errant à moitié

à poil dans une Venise fantomatique

et délabrée, moulé dans des minislips

et juché dans des cuissardes rouges,

l’acteur offre sa plastique sculpturale

au photographe Juergen Teller pour

délivrer le message alarmiste et clair

comme de l’eau de roche de notre

monde qui se noie.

Infos pratiques :

« Vivienne Westwood. Art, mode

et subversion », Musée des Tissus,

34, rue de la Charité, Lyon.

Jusqu’au 17 janvier 2021.

www.museedestissus.fr

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Communiqué

Des

compliments

contre

le stress

Pas assez beau, pas assez viril et

musclé, pas assez performant … Pas

assez belle, pas assez féminine et

sexy… De nombreux hommes gays et

personnes trans* ou non binaires ont

un problème avec leur estime de soi.

Et la communauté n’est pas toujours

en mesure de l’atténuer, tant s’en

faut : il existe en effet au sein de la

sous-culture communautaire en particulier

gay une obsession pour l’apparence,

le statut social et la performance

qui a des effets destructeurs.

La SUPER campagne de l’Aide Suisse

contre le Sida entend s’y opposer.

Florian Vock, chef de programme

à l’Aide Suisse contre le Sida

L

’estime de soi est influencée par

l’apparence et par la manière dont

une personne pense être perçue

par les autres. Si par ailleurs cette

personne ne correspond pas à l’idéal

social, son sentiment d’inadéquation

s’en trouve exacerbé – et la stigmatisation

active est une réalité. Ces défis

pour l’estime de soi, tant individuels

que sociaux, convergent chez les personnes

LGBTQ+ qui, de ce fait, font

partie du groupe le plus exposé aux

troubles anxieux, à la dépression et

à l’abus de substances. Aujourd’hui,

les personnes LGBTQ+ ne sont (heureusement)

plus considérées comme

« malades » en soi, mais le lien a été

établi entre santé psychique et stigmatisation

ou discrimination.

Une minorité stressée

Se sentir « à part », voilà qui engendre

du stress. Les personnes LGBTQ+ sont

menacées de stress parce qu’elles

doivent sans cesse se battre pour

avoir une place dans la société : la

plupart d’entre elles cherchent effectivement

à en faire partie et luttent

contre l’exclusion sociale. Les expériences

dénigrantes liées à l’identité ou

l’expression de genre ainsi qu’à l’orientation

affective et sexuelle nuisent à la

santé psychique. En tant que personne

LGBTQ+, je n’ai pas besoin d’être directement

impliquée : il me suffit de lire un

article dans la presse ou de voir une

vidéo sur les réseaux sociaux évoquant

une agression dans une ville lointaine

pour en subir les effets. Le seul fait de

savoir que des normes sociales telles

que le refus de la violence ne sont pas

respectées « quand ça concerne juste

des homos et des trans » peut avoir de

graves conséquences.

Les effets de cette victimisation

indirecte ou collective sont souvent

sous-estimés lorsqu’il s’agit de la santé

psychique des personnes LGBTQ+. Le

phénomène est pourtant bien connu

dans la recherche sur le racisme. Il n’est

pas nécessaire que je sois touché·x·e

directement et personnellement pour

être affecté·x·e. Si, en tant qu’ado, j’entends

parler de coming out qui tournent

mal, cela peut engendrer un sentiment

d’insécurité et me blesser – me faire

sentir que je fais partie d’un groupe en

danger à cause de la motivation du rejet

et des agressions. Si l’on y ajoute la relativisation

publique des actes de violence

vécus (« Les parents/jeunes sont comme

ça »), le dénigrement politiquement voulu

des relations amoureuses entre personnes

de même sexe (« Seul le mariage

hétérosexuel compte véritablement ») et

l’inaction institutionnelle s’agissant des

soins de santé notamment psychique

destinés aux personnes LGBTQ+, voilà

qui n’est pas sans conséquences pour

la santé individuelle.

Fierté et honte d’être soi

De telles blessures peuvent laisser des

traces. Toutes les personnes LGBTQ+ ne

sont pas toujours capables de mobiliser

les compétences intellectuelles et les

ressources émotionnelles nécessaires

pour transformer la force destructrice

de l’homo-transnégativité et la stigmatisation

sociale en énergie productive.

L’expérience de la discrimination n’est

pas toujours surmontée par l’activisme

politique ou les groupes d’entraide :

la fierté d’être soi peut tout aussi bien

virer à la honte de soi-même.

Le Professeur Udo Rauchfleisch,

psychologue clinicien et psychothérapeute,

parle à juste titre de « l’ennemi

de l’intérieur ». L’homo-transnégativité

peut être intériorisée et se révéler

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Communiqué

destructrice – contre soi-même, mais

aussi contre les autres membres du

groupe social. Elle engendre sur le plan

individuel une mauvaise estime de soi,

la honte vis-à-vis de ses propres désirs

ou le dénigrement d’autres personnes

LGBTQ+ – ce qui crée une contradiction

interne : je dénigre précisément

ce que je suis. On ne compte plus les

personnes qui ont le milieu communautaire

en horreur, qui se retirent après

avoir vécu un rejet et qui s’isolent.

Auteur·x·e et cible à la fois

La recherche se concentre aujourd’hui

de plus en plus sur un autre phénomène

: le fait que le stress provient

aussi de la communauté elle-même.

L’histoire de la famille petite-bourgeoise

toxique et du port d’attache que

représente le bar gay n’a jamais été

rien d’autre qu’une légende – même

si la communauté offre, aujourd’hui

encore, l’occasion de s’émanciper. Mais

certaines personnes peuvent trouver

l’injonction à la performance sexuelle,

la course au statut social, la compétition

économique et l’exclusion de la

sous-culture très pénibles à supporter.

Réunis autour de John E. Pachankis

dans une étude parue en 2020, les

chercheur·x·e·s qualifient de stress intra-minoritaire

(« intra-minority stress »)

ce stress psychique occasionné par

des facteurs liés au statut au sein de la

communauté LGBTQ+ (Journal of Personality

and Social Psychology, 119(3),

713–740).

Les résultats de la recherche

ne surprendront guère les hommes

fréquentant le milieu gay. Les gays

peuvent être très durs entre eux.

L’idéal du jeune homme blanc musclé

règne toujours en maître – incarnation

de la beauté masculine, de la force,

de l’endurance et de la santé. Nous

admirons les corps qui correspondent

à cette image, dans la pornographie,

dans la publicité ou durant les soirées.

Nous sommes éblouis par les abdos en

tablettes de chocolat et acclamons la

fontaine de jouvence. La sous-culture

gay est prompte à porter aux nues tout

ce qui se rapproche de cet « Adonis

grec ». Toutefois, le racisme, le sexisme,

le classisme et les autres discriminations

ne s’arrêtent pas aux portes des

espaces communautaires. L’étude met

en lumière un aspect important pour la

prévention : on observe une corrélation

entre les hommes touchés par le stress

intra-minoritaire et ceux qui ont des

rapports sexuels sans protection (préservatif

et/ou PrEP).

Des compliments pour lutter

contre l’épidémie de solitude

Sur un point toutefois, l’étude susmentionnée

contredit les clichés : les

hommes gays sont en fait de bons

amis. Les amitiés peuvent fonctionner,

et la confiance entre amis ainsi que le

renforcement des relations amicales

offrent une manière de lutter efficacement

contre le stress intra-minoritaire.

C’est cet aspect positif que veut souligner

la SUPER campagne de Dr Gay

en renforçant les liens grâce aux compliments.

Avec ce concept qui peut

paraître un peu vieillot, les personnes

LGBTQ+ sont invitées à briser le stress

en disant à leurs ami·x·e·s et connaissances

ce qu’elles apprécient tout

particulièrement chez eux·elles·elleux.

Juste un compliment, tout simplement.

Les informations et visuels

de la campagne sont

disponibles sur drgay.ch/super.

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Culture cinéma

De l’ambition

et du piment

au GIFF

Le festival genevois propose 132

œuvres, dont plusieurs à thématiques

LGBTIQ+. On y croisera plein de personnalités,

comme Stephan Eicher qui

fera revivre le Plaza, et le protéiforme

Woodkid.

Par Edmée Cuttat

Siena Kelly dans Adult Material © DR

Le Geneva International Film Festival (GIFF) propose

du 6 au 15 novembre une 26 e édition en présentiel.

L’accueil a été entièrement repensé, avec un protocole

sanitaire strict. « Nous nous sommes concentrés

sur le plus important, les œuvres », a déclaré le directeur

Emmanuel Cuénod. Entre l’ouverture (True Mothers de

Naomi Kawase) et la clôture (The Good Lord, mini-série

événement), le GIFF présentera 132 œuvres, films, séries

ou créations numériques majoritairement inédites en

Suisse. De nombreuses personnalités sont attendues :

Mads Mikkelsen (récompensé du Geneva Award 2020),

Sara Forestier, Abel Ferrara, Emilie Dequenne, André

Dussolier. On y verra aussi Stephan Eicher qui, avec

le festival, fera revivre le mythique cinéma Plaza le 7

novembre. Carte blanche sera donnée le 12 novembre

à Yoann Lemoine, alias Woodkid. Lauréat du Film &

Beyond Award, l’artiste, musicien, illustrateur et graphiste

lyonnais vient de sortir S16, album magistral.

Une touche de sexe, de porno et de scandale viendra

épicer le programme, sur fond de thématiques

LGBTIQ+. Parmi les longs métrages, une curiosité :

Ex, de George Markakis, qui investit les toilettes d’un

légendaire club gay berlinois. Une folle nuit dans ce

singulier confessionnal d’un nouveau genre, où l’intimité

se crée avant tout avec des mots. On relâche la

pression en parlant du quotidien, on se réconcilie, on

discute avec des inconnus, on fait des rencontres qui

changeront peut-être une vie.

Gero von Boehm propose, lui, Helmut Newton : The

Bad and the Beautiful. Il offre, au-delà de la polémique,

un portrait intimiste de l’un des photographes les plus

sulfureux du XX e siècle et présente des entretiens avec

Grace Jones, Charlotte Rampling, Isabella Rossellini, ou

encore June, sa veuve.

À ne pas manquer également, Équation à un inconnu,

porno gay sorti en 1980. Cet unique film de Dietrich

de Velsa (alias Francis Savel/Frantz Salieri), mystérieux

personnage au passé glorieux de peintre et de scénographe,

finalement déchu puis oublié, met en scène une

succession de fantasmes au masculin. « L’acmé du porno

mélancolique », selon le cinéaste Yann Gonzalez, qui a

sauvé le film et le présentera en personne.

Dans les affres du X

On plongera un peu plus profondément dans l’industrie

du X pour découvrir, côtés séries, Adult Material de Lucy

Kirkwood. L’auteure brosse le portrait magnifique d’une

star du genre, par ailleurs mère de famille. Personnage

fort, elle refuse de se soumettre aux ukases du porno et

à la censure de l’establishment britannique. Autre série

très attendue, celle de Luca Guadagnino, We Are Who We

Are, qui explore l’amitié, le premier amour, l’identité. À

conseiller enfin, un court métrage en réalité virtuelle de

l’artiste Enrique Agudo, The Pantheon Of Queer Mythology.

Dans une traversée onirique des imaginaires issus

de la culture queer, on rencontre quatre excentriques

divinités, reflétant nos complexités.

Maison des arts du Grütli, Genève, du 6 au 15 novembre.

Plus d’infos sur giff.ch

360° novembre 2020 - N°199 25


26 360° novembre 2020 - N°199


Culture musique

Musique pour

toutes·x

Helvetiarockt lance un répertoire

inclusif pour les artistes féminines.

Danitsa, 2019 © DR

Visibiliser toutes.x les femmes actives dans la musique en Suisse.

Voici le pari ambitieux que se fixe la plateforme Music Directory de

Helvetiarockt. Cette banque de données permet aux femmes, aux personnes

trans*, non binaires et intersexe de profiter d’un outil de communication

et de résautage performant. Cet annuaire a également pour vocation

de répertorier les techniciennes·x, les organisatrices·x d'évènements ou

encore les journalistes musicales·x, pour ne citer que quelques professions.

Une campagne de promotion se déroule jusqu’au 20 novembre 2020

et vise un double objectif: encourager les femmes et les personnes intersexuées,

trans* ou non binaires actives dans la branche musicale à s'inscrire

sur Music directory mais aussi, évidemment, promouvoir la plateforme en

tant qu'outil de travail. Objectif : 1000 profils enregistrés le 20 novembre. GR

Toutes les infos sur helvetiarockt.ch et musicdirectory.ch.

360° novembre 2020 - N°199 27


Quotient queer

Alliée de cœur à

100%

Andréa Martel et sa bande sont de retour

pour la quatrième et ultime saison de Dix

pour cent. À l’heure du bilan, calculons

le Quotient Queer de Camille Cottin,

l’actrice qui l’incarne à l’écran.

Par Alexandre Lanz

On l’avait découverte dans

La Connasse, une série de

courts sketches tournés en

caméra cachée dans lesquels elle

sublimait les traits de caractères

insupportables qu’on attribue aux

Parisiennes. Craquante, tout simplement.

Après l’adaptation plutôt

réussie au cinéma, la comédienne

de 41 ans sevrait ses fans en campant

l’agent artistique Andréa Martel

dans Dix pour cent. Toujours un

peu connasse, la lesbienne féroce

et fabuleuse est une invétérée ensorceleuse

des coups d’un soir la

nuit, pendant qu’elle gère le jour la

vie trépidante des stars de cinéma.

De la série aussitôt culte, dans les

discussions entre ami·e·s, tout le

monde s’accorde à noter que « c’est

vachement bien pour une série

française ». Alors Camille Cottin,

alliée ou opportuniste ?

Lesbienne à l’écran – 10 sur 10

Dans la série, Camille Cottin incarne

un personnage carriériste à la personnalité

complexe. Tiraillée en permanence

entre son job et sa vie privée

désastreuse avant qu’elle ne rencontre

sa compagne Colette, la comédienne

donne à son personnage une

dimension terriblement humaine.

D’aucun·e pourrait prétendre qu’il

n’est pas correct d’attribuer un rôle

de lesbienne à une actrice qui ne l’est

pas dans la vie réelle, Camille Cottin

explique ce choix avec une justesse

rare aux médias qui lui posent la

question. Invitée à la cérémonie des

OUT d’or en juin 2018, elle déclare :

« J’ai été très honorée d’interpréter

le personnage d’Andréa. Je crois que

c’est la première lesbienne du PAF à

20h30 en chaîne hertzienne qui n’est

ni droguée, ni folle, ni maléfique, ni

bipolaire, ni zoophile. »

La polémique autour d’Andréa

et Hicham – 8 sur 10

Lesbienne totalement assumée dans

la série, Andréa couche avec son boss

Hicham un soir de fête dans la saison

2. Et tombe enceinte. Un écart de

conduite qui ne passe pas auprès de

la communauté LGBTQI+. Prenant

son rôle à cœur, Camille Cottin s’en

explique dans une interview accordée

à AlloCiné en novembre 2018 :

« L’homosexualité d’Andréa n’est

absolument pas remise en question,

même si le fait qu’elle ait un rapport

sexuel avec un homme semble avoir

brouillé un discours qui était entier.

J’entends cela. C’est le problème

quand on nuance quelque chose, ça

peut desservir un propos qui a besoin

d’être ferme pour faire avancer

les mentalités. Mais je pense qu’il n’y

avait aucune ambiguïté chez Fanny

Herrero, l’auteure de la série. La saison

3 permet d’aller au bout d’une

nuance, et d’être très transparent sur

l’homosexualité d’Andréa et celle de

Colette. On ne va pas non plus ranger

l’homosexualité dans une case. »

Le poids de la visibilité – 10

sur 10

Ne faisant pas l’économie des déclarations

au nom de la visibilisation

28 360° novembre 2020 - N°199


CLASSIFICATION

DU QUOTIENT QUEER

1 = Hostile

2 = Méprisante

3 = Indifférente

4 = Opportuniste

5 = Amicale

6 = Défenseuse

7 = Alliée

8 = Engagée

9 = Très engagée

10 = Militante

Camille Cottin et Ophélia Kolb, dans

Dix pour cent © DR

de l’homosexualité pour « faire

avancer les choses » concernant

les droits LGBTQI+, Camille Cottin

déclare, toujours dans les colonnes

d’AlloCiné en 2018 : « J’étais très

heureuse d’apprendre les commentaires

d’enfants entre 10 et 11 ans

dans les cours d’école. Ils disaient:

« On espère vraiment qu’Andréa va

rester avec Colette, parce qu’Hicham,

on ne l’aime vraiment pas et

Colette, elle est tellement gentille. »

Ces enfants ne font absolument

pas cas de l’orientation sexuelle,

ils se fondent exclusivement sur les

personnalités des personnages. En

ce sens oui, ça peut faire avancer,

et notamment la PMA (procréation

médicalement assistée). »

« Du Coca sans poppers, si vous

en avez ! » – 10 sur 10

Lorsqu’elle se rend dans un bar gay

parisien pour y déverser son lot de petites

phrases perfides que l’on connaît

malheureusement trop bien, « la

connasse » réussit un tour de force :

en quelques minutes à peine, elle tord

le cou aux clichés du genre dans une

savoureuse logorrhée digne des plus

infectes propos homophobes. Morceaux

choisis : « Ah, t’es coiffeur ? »,

« Je voulais savoir, qui c’est qui fait

la femme ? Parce que ça saute pas

aux yeux là », « T’es pédé, t’en es sûr ?

Parce que t’es tellement beau. Tout

n’est pas perdu, ça se soigne ». Le tout

en mode caméra cachée, l’errance de

ses propos bêtes et méchants se solde

par une brillante démonstration de

l’humour en guise d’armure d’une

communauté toute entière mise à

rude épreuve dès le plus jeune âge.

Quand on n'a que l’amour – 10

sur 10

Lorsque les vedettes du showbiz se

mobilisent pour une bonne cause

en France, on tombe vite dans la

soupe populaire. Pourtant, au-delà

de ces considérations et sans snobisme

aucun, 70 personnalités se

réunissent en décembre 2018 sous

l’égide de l’association Urgence Homophobie

pour chanter ensemble

De l’Amour. Parmi ces dernières,

on retrouve Camille Cottin et toute

l’équipe de Dix pour cent. Un hymne

à l’amour dénonçant les violences

homophobes, en hausse de 15% en

France cette année-là.

Résultat – 9,6

Elle milite pour nous, Camille Cottin,

et c’est aussi pour ça qu’on l’aime

bien. Avec une moyenne avoisinant

les 10 sur 10, elle caracole en tête des

personnalités qui ne craignent pas

d’utiliser leur voix pour amplifier

celles de la communauté LGBTQI+.

Dans son cas, il semblerait même que

le fait de ne pas être lesbienne dans la

réalité lui permette de dire tout haut

ce que d’autres pensent tout bas. Un

peu comme si, ainsi dédouané de

l’aspect personnel et privé, le message

activiste s’en retrouvait significativement

augmenté. Honnête jusqu’au

bout. Ça c’est sûr, quand on a des

ami·e·s et des allié·e·s comme elle, on

ne craint plus nos ennemis.

360° novembre 2020 - N°199 29


Culture danse

Louve

y es-tu ?

La danseuse et

chorégraphe genevoise

Melissa Cascarino

présente « LUPAE »,

en collaboration avec

l’écrivaine et historienne

Francesca Prescendi.

Un solo vibrant.

Par Katja Baud-Lavigne

Lupae © DR

Melissa Cascarino est une

femme aux multiples facettes.

Pianiste, danseuse et

chorégraphe, elle fonde en 2011 la

compagnie Velvet Blues à Genève,

dont elle est la directrice artistique.

Après une enfance parisienne, elle

part pour Bruxelles, Marseille, Rome

et la Côte Basque, diversifiant au

maximum les expériences.

Boulimique de travail, elle publie

un recueil de poèmes en italien, travaille

à l’écriture d’un road trip poétique

en français, performe dans la

rue ou ailleurs et ne néglige jamais

son engagement politique. Peu à

peu se dessine le projet d’un solo,

mettant en scène l’égalité homme/

femme, mais également le côté futile

et vain de vouloir à tout prix genrer

les choses et les personnes. « J’ai

envie de partager un féminin-masculin

comme un corps à deux têtes

et deux faces d’un même corps,

explique-t-elle dans sa note d’intention.

Je pense que cette posture

est aussi déterminée par la fonction

de danseuse, qui unit dans un corps

androgyne parfois des facultés égales

des deux côtés : la danseuse révèle sa

part du masculin, le danseur révèle

sa part du féminin. Les corps sont au

service d’autre chose qui les dépasse,

au service de l’œuvre et du monde. »

Originaire de Naples et très liée à la

ville de Rome, la chorégraphe trouve

son inspiration dans le mythe fondateur

de la Cité antique. « En tant que

danseuse, en tant que femme, en

tant que mère, j’ai souvent entendu

à mon propos, tu es très louve en fait,

poursuit-elle. Ce qui m’intéresse très

profondément dans ce mythe, c’est

cette figure qui – dans la conjonction

de toutes les versions et interprétations

au fil des siècles – concentre

finalement en un seul corps une

démultiplication de figures qui se

complètent et ne s’opposent pas. »

Au fil des rencontres, la chorégraphe

demande à l’écrivaine

Francesca Prescendi – spécialiste

de mythologie, religion romaine et

figures de la Louve en particulier –

de collaborer à sa nouvelle création.

Lupae – qui signifie à la fois Louve

et prostituée en latin – bénéficie

donc d’un apport théorique, mais

surtout du regard précieux d’une

femme de lettres, intellectuelle et

historienne. « La femme est particulièrement

aliénée à l’idée d’une

sorte de fragmentation fonctionnelle,

un morcellement identitaire,

martelle Melissa Cascarino. On

est soit libérée sexuellement, soit

une bonne mère, soit une artiste

accomplie, soit une bonne épouse,

soit chanteuse de rock, soit pianiste

classique, soit on allaite, soit on

baise, soit on est bonne cuisinière,

soit, soit, soit, soit et ainsi n’en soitil

pas ainsi ! » Un plaidoyer exalté et

exaltant ô combien nécessaire par

les temps qui courent…

« Lupae » de et avec Melissa

Cascarino, au Grütli, du 17

au 21 novembre.

Plus d’infos sur: grutli.ch

30 360° novembre 2020 - N°199


© DR

Culture théâtre

Vu d’en-haut

Et si la différence de l’autre n’était que la nôtre vis-àvis

de lui ? Avec « Le roi des nuages », le metteur en

scène Yoann Pencole nous rappelle que dans la vie,

tout est question de point de vue.

Hélios a 8 ans. Il ne ressemble guère aux petits garçons de son âge. Le bruit,

les mots, les autres l’effraient et le perturbent. Il se rassure en tournant sur luimême,

en regardant le ciel. Là-haut vivent les nuages qu’il aime tant. En particulier

le roi cumulonimbus. Niché au creux de ce monde imaginaire, où règnent

calme, ordre et rituels, il est heureux. Pourtant, une petite fille et un nuage hors

du commun vont bouleverser cette mécanique bien huilée. Pour le meilleur ?

Avec Le roi des nuages, Yoann Pencole aborde le thème de l’autisme avec

beaucoup de sensibilité. Aidé de ses marionnettes articulées en mousse, il

souhaite traiter du sujet sous un angle différent : « Au cours de nos recherches,

nous avons constaté que la maladie est souvent, voire toujours, évoquée du

point de vue des parents, explique le metteur en scène. Ici, nous souhaitions

au contraire nous positionner du point de vue du petit garçon. La seule

marionnette proportionnée et complète est donc celle d’Hélios. » Les autres

personnages sont ainsi représentés plus ou moins partiellement, en fonction

de la place qu’ils occupent dans le monde du petit héros. Pour certains, trop

éloignés de lui, leur présence n’est matérialisée que par la voix.

Un parti pris qui pousse le spectateur à envisager la différence de l’autre sous

un jour nouveau. Selon l’adage de Tahar Ben Jelloun « On est toujours l’étranger

de quelqu’un », Yoann Pencole interroge les codes qui régissent notre

société. Des propos qui encouragent à prendre de la hauteur et changer de

perspective, quelle que soit la différence à laquelle on est confronté. KBL

« Le roi des nuages » de Yoann Pencole, au TMG, Genève, du 13 au 22 novembre.

Toutes les informations sur www.marionnettes.ch.

360° novembre 2020 - N°199 31


Culture conte

Féérie tous

publics

Une drag queen enchantera

la Nuit du conte, le 13 novembre

à Vevey.

Des contes pour les petit·e·s lus

par une drag queen. Voilà un

espace de liberté pailletée qui

cartonne depuis un certain temps

déjà, de San Francisco à Montréal

ou Paris. Car si les codes genrés

cavalent sur les enfants avant même

leur naissance, les contes s’en font le

relais en structurant des visions du

monde souvent rigides, quand elles

ne sont pas sexistes. Alors pourquoi

ne pas bousculer ces récits d’un

coup de flamboyance et d’ouverture,

en comptant sur celle avérée

des esprits en pleine formation ?

Pour ce faire, l’audacieuse

Bibliothèque municipale de Vevey

réinvite la drag fée Tralala Lita.

Elle racontera ses histoires aux

enfants le 13 novembre en début

de soirée, dans le cadre de la Nuit

du conte. Avant cela, l’artiste Anne-

Lise Tacheron proposera un atelier

de transformation de jouets pour

réfléchir à l’identité tout en dévissant

la tête de Ken ou Barbie…et

inventer, qui sait, d’autres merveilleuses

créatures ? AB

Atelier Chimère, suivi de la Nuit

du conte avec une drag queen,

le 13 novembre dès 16h, Bibliothèque

municipale, quai Perdonnet 33,

Vevey. Dès 5 ans

(accompagné·e·s d’un·e adulte)

32 360° novembre 2020 - N°199


Culture livres

Récits de vie

Fatima Daas

La petite dernière

éditions Notabilia

Si il y a un incontournable

de cette rentrée

littéraire, c’est

bien ce livre-là ! Propulsé

dès sa parution par les

louanges de Virginie Despentes,

ce récit touche

les cœurs et fait parler de

lui ! Il y a de quoi car cette

nouvelle voix de la littérature

a de quoi surprendre :

à tout juste 25 ans Fatima

Daas propose un récit où

elle confie ce que c’est

d’être une jeune fille lesbienne,

musulmane et

issue des banlieues. Les

mots claquent et le verbe

est puissant pour raconter

ses états d’âme et son

combat. Un livre important,

engagé et intelligent.

Foncez, lisez-le !

Deborah Levy

Ce que je ne veux pas savoir

& Le coût de la vie

éditions Sous-Sol

Dans les deux premiers

volets de son

autobiographie,

Deborah Levy nous parle

de son parcours comme

une leçon poétique sur

la vie. Avec un humour

grinçant et un esprit pétillant

elle nous confie son

enfance dans l’Afrique du

Sud ségrégationniste puis

plus tard son émancipation

face aux rôles traditionnels

de l’épouse et de la mère,

rompant avec le modèle patriarcal.

Devenue écrivaine

en lisant Virginia Woolf ou

Marguerite Duras, elle les

convoque tout au long de

son récit pour raconter son

combat féministe et nous

en dire plus sur l’écriture.

Deux petits livres qui se

savourent et n’attendent

que le troisième !

Transdessinée

360° novembre 2020 - N°199 33


Annulé, plus

d'infos sur

queersicht.ch


Culture festival

Ce n’est pas

que du cinéma

Le festival Filmar raconte

ses histoires queer.

Du 20 au 29 novembre 2020, le cinéma et les cultures

latino-américaines sont à l’honneur à Genève avec

la 22 e édition du festival FILMAR en América Latina.

Une myriade de films représentant les réalités sociales et

politiques du continent sud-américain sera proposée au

public. Dans cette constellation sera également présentée

une section intitulée « Historias Queer », qui met en

lumière la diversité des trajectoires de vie LGBTIQ+ . Cette

édition 2020 abordera la question – parfois problématique

- de la représentation des transidentités à travers l’objectif

– si subjectif – de l’œil cinématographique. En parallèle à

une sélection regroupant longs- et courts-métrages, une

table ronde discutera de la question du rôle de l’image

animée et de l’art en général pour faire exister des identités

encore trop sujettes aux discriminations, et sur la manière

dont le cinéma peut devenir un vecteur d’identification

positif et émancipateur. GR

© DR

Retrouvez tout le programme sur www.filmaramlat.ch

360° novembre 2020 - N°199 35


36 360° novembre 2020 - N°199


Sortez

couvert·e·s de

couleurs

Vos têtes n’ont qu’à bien se tenir alors que l’hiver est

à nos portes. L’équipe des boutiques Monsieur Alain

s’associe avec Yann Popper (fondateur des restaurants

The Hamburger Foundation) et son partenaire David

Jusu pour l’ouverture d’un popup shop.

Beanie*Beanie, ce sont des bonnets en laine (75 %

laine, 25 % angora) fabriqués en Ecosse, disponibles dans

plus de 40 couleurs. Le popup shop est ouvert jusqu’au

31 mars et l’équipe nous réserve bien des surprises pour

2021. GR

Beanie*Beanie, 3 rue des Corps-Saints à deux pas de Manor

dans le quartier de Saint-Gervais à Genève.

Shop online sur beaniebeanie.ch et à suivre sur instagram.

com/beaniebeanie.ch

360° novembre 2020 - N°199 37


Gaymap plans

Genève

Servette

Les Grottes

Pâquis

St-Jean

L'agenda LGBTQ+ demeure plus que jamais

incertain en raison de la dégradation des

conditions sanitaires liées à la Covid-19. À l'heure

de mettre sous presse, certains cantons ont

fermé leurs clubs et bars, d'autres ont limité

la capacité des événements publics ou imposent

l'achat préalable de billets en ligne. Dans tous

les cas, renseignez-vous sur les sites des

établissements, ainsi que sur 360.ch/gaymap

Jonction

Centre

Plainpalais

Eaux-Vives

Champel

Acacias

Carouge

Bars & Cafés

Purple Bar 25, rue de Monthoux

Le Déclic ★ 28, bd. du Pont-d’Arve

Le Phare ★ 3, rue Lissignol

Livresse ★ 5, rue Vignier

Nathan ★ 34, route de Frontenex

La Bretelle 17, rue des Etuves

La Ferblanterie

8, rue de l’Ecole de Médecine

La Petite Reine

15, place de Montbrillant

Clubbing

Chez Jean-Luc ★

Rue de la Cité 9

La Garçonnière

4-8, rue de la Rôtisserie

La Gravière

9, ch. de la Gravière

Restaurants

Le Bzoo 20, rue Voltaire

Café du Marché

16, av. Henri Dunant

Café Gallay

42, bd. de Saint-Georges

Kampai 25, rue de Monthoux

Le Boteco 12, rue Micheli-du-Crest

Le Cheval Blanc 15, place de l’Octroi

Pâtisseries & Tea Rooms

Chez Quartier 24, rue Voltaire

Dubois 4, Carrefour Villereuse

Dubois 49, bd. Carl-Vogt

Saunas & Sex Clubs

Bains de l’Est ★ 3, rue de l’Est

Cruising Canyon ★ 15, rue Dr.

Alfred-Vincent

Sauna des Avanchets ★

av. Baptista, Vernier

Substation ★ 14, rue de Neuchâtel

King Sauna ★ 39, rue Jean-Jaurès -

Ambilly (F)

Octopus Sauna 15, rue de Narvick,

Annecy (F)

Shopping & Services

Case à Max (2nd hand)

19, rue de la Navigation

Fazio & Cie (menuiserie &

agencement) 26, rue des Vollandes

Le Bal des Créateurs (multistore)

25, rue de l’Arquebuse

Monsieur Alain (fashion)

63, bd. Saint-Georges

Vue des Bains (optique)

8, av. du Mail

OZ Wellness (sport-santé)

10, rue d’Italie

Etienne&Etienne (ag. com.)

30, rue St-Joseph, Carouge

Cumulus (BD) 5, rue des Etuves

Garçon Manquée (fashion)

31, rue St-Joseph

Livresse (librairie) 5, rue Vignier

Ciné 17 (cinéma)

17, rue de la Corraterie

Cinérama Empire,

72-74, rue de Carouge

Substation ★(Sex-shop)

14, rue de Neuchâtel

Coiffure, Beauté & Tattoo

Le Bal des Créateurs (multistore)

25, rue de l’Arquebuse

Trajectoire 9 (coiffure & beauty)

13, rue de la Filature

XXL barbier 5, rue de Genève

Annemasse (F)

XXL Coiffure 5, rue Adrien Ligué,

Annemasse (F)

Yashka 5, rue des Etuves (tattoo)

Santé

Checkpoint Genève ★ (hiv & sti

testing) 9, rue du Grand-Pré

Groupe Sida Genève (hiv support)

9, rue du Grand-Pré

AIDES Annemasse (hiv & sti testing)

11 Rue Paul Bert, Annemasse (F)

AIDES Ferney-Voltaire

(hiv & sti testing) 11, rue de Genève,

Ferney-Voltaire (F)

Pharmacie de l’Ecole-de-

Médecine 3, rue de l’E.-de-Médecine

Associations

Association 360 ★

36, rue de la Navigation

Dialogai ★ 5, rue du Levant

Lestime ★ 5, rue de l’Industrie

PVA (hiv support) 35, rue des Pâquis

Think Out ★ facebook.com/

ThinkOutThinkDifferent

Totem ★ federationlgbt-geneve.ch

Le Refuge ★

13, rue de la Navigation

Antenne LGBTI (LAB) ★

31, Avenue du Mail

Asile LGBT ★

36, rue de la Navigation

Parents d’Homos ★ gpeh.org

Epicène ★ epicene.ch

★ = Lieux et institutions LGBT

38 360° novembre 2020 - N°199


Gaymap plans

Lausanne

Beaulieu

Flon

Centre

Gare

Sous-Gare

Ouchy

Bars

Le Saxo ★ 3, rue de la Grotte

GT’s ★ 5, avenue de Tivoli

Le Bar-Tabac 7, rue Beau-Séjour

Pin Up Bar 31, rue Marterey

La Couronne d’Or

13, rue des Deux-Marchés

Bourg 51, rue de Bourg

D3 9, place du Tunnel

Clubbing

GameBoy ★ c/o MAD

23, rue de Genève

GT’s ★ 5, avenue de Tivoli

Les Docks 34, av. de Sévelin

Restaurants

Auberge de Beaulieu

15, av.des Bergières

Café de Grancy

1, av. du Rond-Point

La Tonnelle 16, av. Mon-Loisir

Lausanne-Moudon

20, rue du Tunnel

Le Raisin Les Cullayes

Metropolis

20-22, rue Louis-de-Savoie, Morges

Hotels

Rainbow Inn ★ (guesthouse)

22, av. de Tivoli

Saunas & Sex Clubs

Pink Beach ★(sauna)

9, av. de Tivoli

Trafick ★(sex club)

22A, av. de Tivoli

Club Isis (Club libertin pour

femmes bis et couples)

clubisis.ch

Shopping & Services

7 e Ciel (sensual store) Galerie de

Bourg, 2 e sous-sol. 11, rue de Bourg

Contact auto moto (Driving)

57, rue de la Borde

Monsieur Alain (men’s fashion)

35, rue du Simplon

Pompes Funèbres (shoes)

8, place de l’Europe

Scorpion 18, rue de la Madeleine

Maniak (fashion)

4, rue du Port-Franc

Globus Voyages 26, rue de Bourg

Lemassage.ch Tazio Minotti,

1, rue Mauborget

Noémie Forlano (réflexologie)

2, place Bel-Air

Pierre Pantillon (massages-épilation),

c/o Sexopraxis,

7, Route de la Clochatte

Des Mélèzes (paysagiste)

18, ch. de la Foule, Croy

Un style de Vie (beauté)

9, av. Samson-Reymondin, Pully

Trafick ★ (sex shop)

22A, av. de Tivoli

Coiffure & Beauté

ABR ★ Rosina Fleury

7, ch. des Charmettes

Yookoso ★ Hair Design

74, rue Marterey

Casting 43B, av. de la Gare

Orange Hair 6, rue de la Barre

Tattoo & Piercing

Drop-In 7, rue du Maupas

Sam’s Piercing 8, Mauborget

Weirdiefox Tattoo ★

5, rue de la Plaine, Yverdon-les-Bains

Santé

Checkpoint Vaud ★

(hiv & sti testing) 22, rue du Pont

SID’Action (hiv support)

12, rue Etraz

Les klamydia’s ★ (santé femme)

klamydias.ch

Associations

Lilith ★ 60, av. Aloys-Fauquez

VoGay ★ 1, rue Pépinet

PlanQueer ★ planqueer.ch

Fondation Agnodice ★agnodice.ch

360° novembre 2020 - N°199 39


Gaymap plans

Berne

Länggasse

Lorraine

L'agenda LGBTQ+ demeure plus que jamais

incertain en raison de la dégradation des

conditions sanitaires liées à la Covid-19. À l'heure

de mettre sous presse, certains cantons ont

fermé leurs clubs et bars, d'autres ont limité

la capacité des événements publics ou imposent

l'achat préalable de billets en ligne. Dans tous

les cas, renseignez-vous sur les sites des

établissements, ainsi que sur 360.ch/gaymap

Mattenhof

Centre

Kirchenfeld

Bars & Restaurants

Blue Cat (café)

Gerechtigkeitsgasse 75

Comeback (bar) Rathausgasse 42

Du Nord (resto) Lorrainestrasse 2

Prima Luna (lounge)

Effingerstrasse 92

Lorraine (brasserie)

Quartiergasse 11

Marcel’s Marcili (restaurant)

Marzilistrasse 35

Adriano’s (bar) Theaterplatz 2

3gang (resto) Villa Stucki,

Seftigenstr. 11

Du Théâtre (Lounge Bar)

Hotelgasse 10

Werkstad Lorraine,

Lorrainestrasse 20

Saunas & Sex Clubs

Aqualis ★ Brunnmattstrasse 21

Sun Deck ★ Länggassstr. 65

Publicité

Shopping & Services

Pink Alpine (voyages)

Laubeggstrasse 54

Augenwerk (optic) Marktgasse 52

Créafloristique (fleurs)

Seftigenstrasse 68

Loveland (sex shop)

Gerechtigkeitsgasse 39-41

Planet Love (erotic)

Gerberngasse 36

Coiff your Success (coiffure)

Marktgasse 35 De Angelis (coiffure)

Marktgasse 56

Opera (coiffure) Gotenstrasse 4

Raaflaubs Family

Fashion (coiffure) Kornhausplatz 7

Uncut (Cinéma) C/o Kino Rex,

Schanengasse 9

QueerBooks, (librairie)

Herrengasse 30

Pigdreams.ch ★ (erotic)

Buchserstrasse 34, Aarau

Santé

Checkpoint ★ (hiv & sti testing)

Schwarztorstrasse 11

Associations

HAB ★ (organisation) Villa Bernau,

Seftigenstrasse 243

Pink Cross ★ (organisation)

Monbijoustrasse 73

LOS ★ (organisation)

Monbijoustrasse 73

Parties-Soirées

Frauenraum (Club)

c/o Reitschule, Neubrückstr. 8

ISC (Club) Neubrückstrasse 10

Kapitel (Club) Bollwerk 41, Bern

Du Théâtre (Club) Hotelgasse 10

Hôtels

Allegro Kornhausstrasse 3

Belle Epoque Gerechtigkeitsg. 18

★ = Lieux et institutions LGBT

40 360° novembre 2020 - N°199


Gaymap plans

Et aussi !

Tous les lieux

sympas de votre

Canton auprès de

votre association et

sur 360.ch/gaymap

Fribourg

Associations

Sarigai ★ (organisation) sarigai.ch

LAGO ★ (group) student.unifr.ch/

lago/fr

Santé

Empreinte ★

(hiv support + hiv & sti testing)

57, bd. de Pérolles

Jura

Associations

Juragai ★ (group)

16, rue de l’Eglise, Delémont,

juragai.ch

Santé

Groupe Sida Jura (hiv support)

6, route de Porrentruy, Delémont

Centre de santé sexuelle

(hiv & sti testing)

13, rue Molière, Delémont

Centre de santé sexuelle

(hiv & sti testing) 5, rue des Tanneurs

(Centre le Phénix), Porrentruy

Neuchâtel

Associations

Togayther ★ (group)

48, rue des Sablons, togayther.ch

Asile LGBTI+ ★

facebook.com/asilelgbtneuch

Arc-en-ciel ★

arcenciel-ne.ch

Santé

Générations Sexualités

Neuchâtel (hiv & sti testing)

18, Grand-Rue, Peseux

Valais

Associations

Alpagai ★ (group) 33, av du Ritz,

Sion, alpagai.ch

Santé

Antenne Sida du Valais romand,

8, rue de la Porte-Neuve, Sion

(hiv support)

SIPE Valais Monthey, Martigny, Sion,

Sierre & Susten (hiv & sti testing) www.

sipe-vs.ch

Hôtel

Les Mazots de la Source, Vercorin

La Grande Maison,

route du Sanetsch 13,

Chandolin-près-Savièse

Vevey-Riviera

Aebi Fleurs (fleurs)

1, rue de Lausanne

Chez moi (decoration)

5, rue du Centre

Evasion (boutique) 20, rue du Lac

Mario’s Piercing

& Tattoo Experience(body art)

23, rue du Conseil, Vevey

Le Goût du Voyage 18, rue du Lac,

Vevey (voyages-café bio)

B72 (coiffure) 3 rue du Léman

La Tour-de-Peilz

ilB@The Boat

(croisières sur le Léman), baretto.ch

360° novembre 2020 - N°199 41


42 360° novembre 2020 - N°199



La télévision n’est pas

le reflet de ceux qui la

font, mais de ceux qui

la regardent.

Françoise Giroud

Chants nocturnes

Watching ?

ParGreta Gratos

J

’entends ça et là et ça n’est pas

nouveau, même si la crise que

nous traversons en décuple la

fréquence jusqu’à l’obsession, que

regarder la télévision rend l’Humanité

stupide, nous formate, appauvrit

notre pensée, nous ôte tout esprit

critique. Serions-nous à ce point

dénué-e-x-s de personnalité qu’une

action extérieure quelle qu’elle soit

puisse nous influencer à ce point

qu’elle force contre notre gré notre

intime posture ? La source en seraitelle

la cause ? Ou notre attitude de

spectateur-trice-x-s à son égard ?

Oui, la démultiplication des chaînes

n’offre pas la diversité à laquelle on

aurait pu s’attendre ; tout comme

les informations distillées qui, à

quelques teintes près, portent le

même uniforme. Mais si ce tube aux

origines cathodiques ne répond que

trop rarement à nos doutes et questionnements,

ce qui nous est proposé

par son truchement – au même

titre que par toute autre source –

n’est ni plus ni moins qu’une page

ouverte sur le Monde dans lequel

nous vivons. Dès notre plus jeune

âge, nous sommes confronté-e-x-s

à des informations extérieures qui

demandent un positionnement.

Dans le cercle parental, puis au sein

des structures éducatives comme

dans les rencontres que nous faisons

aux hasards de l’existence.

Notre parcours terrestre est balisé

par les choix que nous faisons,

nous semblent les plus adéquats ;

jour après jour notre esprit se développe,

se transforme, change parfois

même d’orientation. Je me refuse à

croire à la Stupidité : ce serait trop

facile, nous dédouanerait de toute

responsabilité quant à nos actes et

pensées. Pour moi, n’est manipulable

que celui-celle-x qui a besoin

d’être conforté-e-x, rassuré-e-x

quant à sa propre pensée vacillante.

J’avoue par ailleurs et sans honte

aucune que je me distrais parfois

en contemplant cette lucarne, me

délecte de certains documentaires

et même de certaines de ses informations.

Cela me rendrait-il moins

critique pour autant ?

Autoportrait d’après Max Kurzweil - Dame en jaune

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46 360° novembre 2020 - N°199

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